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Full text of "Archives de parasitologie"

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OF THE 


Museum of Comparative Zoology 


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LIBRARY 


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PARASITOLOGIE 


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Archives de Parasitologie, XI, 1906. FRONTISPICE. 


DEUX AMIS 
Groupe en marbre, par CHARLES PAILLET 


Salon de 1904 (S. A. F.), 2° médaille, 


ARCHIVES 


DE 


PARASITOLOGIE 


PUBLIÉES PAR 


RAPHAËL BLANCHARD 


PROFESSEUR A LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE PARIS 


MEMBRE DE L' ACADÉMIE DE MÉDECINE 


TOME ONZIÈME 


PARIS 
ASSELIN ET HOUZEAU, ÉDITEURS 


PLACE DE L'ÉCOLE DE MÉDECINE 


1906-1907 


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Tome XI, n° 1. 15 DécemBre 1906 


ae ARCHIVES 


DE 


PARASITOLOGIE 


PUBLIÉES PAR 


RAPHAEL BLANCHARD 


PROTESSEUR A LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE PARIS 


MEMBRE DE L ACADÉMIE DE MÉDECINE 


PARIS 


ASSELIN ET HOUZEAU, ÉDITEURS 


PLACE DE L ÉCOLE DE MÉDECINE 


1906 


Les Archives paraissent tous les trois mois. 


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Gagriez Boupin. — Les variations hate du NCEOUE de la tuber- 
culose (avec 14 figures dans le texte) . : . .. . . ù - + © +. 5 
AUVTALOS TECUS. LAN ee ere Na D D DS CN SUR RON 183 


AVIS 


Les Archives de Parasitologie sont publiées 
par MM. ASSELIN et HOUZEAU, -Énrreuns, Place de 
l'École de Médecine, Paris (6°): 


On est prié de s'adresser aux Sn pour tout ce qui 
concerne l’administration abonnements, achat des volu- 
mes antérieurs, etc.). 


Les quatre premiers volumes ne sont plus représentés 
en magasin que par un petit nombre d'exemplaires. Leur 


prix Sera prochainement élevé. 


N. B.— Il est déjà paru quatre fascicules du tome X;, par 
exception, ce même volume comprendra un cinquième et dernier 
fascicule, renfermant la table générale des dix premiers volumes. 
La confection de cette table exigeant un certain temps, nous 
commencons dès maintenant la publication du tome XH, pour ne 
pas infliger trop de retard aux travaux qui attendent leur tour de 
publication. 


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LES VARIATIONS MORPHOLOGIQUES 
DU MICROBE DE LA TUBERCULOSE 


PAR 


Le D' Gabriel BOUDIN 


Le travail que nous présentons est un essai de synthèse des prin- 
cipaux faits expérimentaux produits par les nombreux auteurs 
qui se sont eflorcés, par l'étude de l'agent spécifique de la tuber- 
culose, à déterminer l’étiologie, la pathogénie et l’évolution de 
celle-ci. Il semble bien que cette maladie soit considérée actuelle- 
ment de façons différentes, presque contradictoires. 

Ou bien, dans la théorie de la spécificité des espèces micro- 
biennes, le Bacille tuberculeux, micro-organisme immobile, à 
endospores, Bacterium tuberculosis, représenté comme parasite 
exclusif à virulence sensiblement constante, créant des lésions à 
marche toujours extensive, est le facteur primordial de la tubercu- 
lose. Et ne voyons-nous pas, en effet, la maladie se développer par 
exemple chez des animaux de l'espèce bovine, en bonnes conditions 
d'alimentation et d'aération, et qui ne sont ni des surmenés ni des 
alcoolisés ? 

Ou bien la tuberculose est une maladie sociale. L'Homme ne 
représente pas le milieu favorable au développement de la Bac- 
térie : il faut des facteurs aussi indispensables que le micro-orga- 
nisme lui-même, pour la réalisation de l'infection; alimentation 
défectueuse et insuffisante, air vicié d'une part, activité exagérée 
d'autre part, tels sont les déterminants de l'état dit de prétuber- 
culose. 

Mais précisément, n'est-il pas contradictoire de fixer d'impor- 
tantes conditions d'adaptation à une Bactérie très répandue au 
dehors par l'expectoration de nombreux phtisiques, très résistante 
aux causes de destruction, de virulence constante et parasite 
exclusif. En réalité, et si l'on s’en rapporte aux seuls faits expéri- 
mentaux concernant le Bacille acido-résistant de Koch, on voit 


6 G. BOUDIN 


que ce micro-organisme peut déterminer dans les tissus qu'il en- 
vahit les troubles morbides les plus différents, parce qu'il n’est en 
aucune façon un parasite exclusif et que la forme de Bactérie elle- 
même, sous laquelle on convient de l’envisager, subit en vie para- 
sitaire des variations morphologiques considérables. Le virus tu- 
berculeux répond aux formes suivantes : Bacille cilié et mobile, 
Bactérie immobile, mycélium à filaments ramifiés ; il pourrait 
appartenir au groupe des Moisissures et plus spécialement au genre 
Discomyces. 

Si pratiquement, dans les maladies qui relèvent plus d'une 
intoxication que d'une infection, comme la diphtérie ou le tétanos, 
il peut paraître d'intérêt secondaire d'essayer de systématiser 
l'agent spécifique de la maladie, il n’en est plus de même dans la 
tuberculose. Iei, le micro-organisme, dans son état de virulence 
le plus marqué, ne donne jamais dans les cultures liquides de 
toxalbumines, douées de propriétés diastasiques actives : du moins, 
on n'en a pas obtenu jusqu'à maintenant. Mais expérimentalement, 
tantôt, par inoculation locale, ou intra-veineuse ou intra-artérielle, 
il détermine des lésions nodulaires avec formations rayonnées, 
d'aspect actinomycosique typique; tantôt il détermine des lésions 
de tubercules étant à l’état de Bactérie résistant ou non à l’action 
décolorante des acides, tantôt il crée des bacillémies toxi-infec- 
tieuses à type clinique variable. Cependant il est juste de dire que 
les recherches expérimentales concernant ce dernier processus 
morbide n'ont été encore réalisées que par peu d'auteurs, J. Fer- 
ran, de Barcelone, et le Professeur Arloing, de Lyon. 

Ce n’est donc pas par un vain désir de classification que nous 
avons entrepris ce travail; moins que jamais, « les espèces botani- 
ques ont été créées pour la plus grande joie des botanistes. » Mais 
il nous semble qu'on ne saurait relier les uns aux autres les mul- 
tiples faits touchant la question de l'infection tuberculeuse, la 
biologie de l'agent de la maladie, qu'à la condition expresse de se 
placer au point de vue de la méthode d'observation évolutionniste, 
suivant Ce principe «qui consiste à envisager dans l'être vivant 
une histoire plutôt qu'un état, à le caractériser par un représen- 
tation cinématographique et non par une photographie, par la vie 
et non par la forme figée de son cadavre » (N. Bernard). 

En 1904, alors que nous assistions au cours de Pathologie expé- 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE fl 


rimentale de la Faculté, le Professeur Roger, dans les dernières 
leçons faites à l’École pratique, tint à montrer aux auditeurs 
différentes cultures de Bactéries, entre autres, des cultures du 
Bacille de la tuberculose et de Discomyces bovis ; il insista sur les 
ressemblances des colonies de ces deux micro-organismes et exposa 
rapidement les raisons pour lesquelles on devait plutôt ranger le 
Bacille tuberculeux dans le groupe des Streptothrir. Nous connais- 
sions d'autre part les travaux du D: Ferran, de Barcelone, et du 
Dr Auclair, médecin des hôpitaux de Paris, sur la variété mobile 
du Bacille de Koch. Nous pûmes, pour nous renseigner sur les 
stades supérieurs de pléomorphie, trouver les premières indica- 
tions bibliographiques dans l’article « les maladies infectieuses com- 
munes à l'Homme et aux animaux », de M. le Professeur Roger 
(Traité de Médecine de Bouchard et Brissaud, 2° éd., tome I). 
Le Professeur R. Blanchard eut la très grande obligeance de 
nous donner des renseignements bibliographiques complémentai- 
reset, dans son cours sur les parasites végétaux, du premier semes- 
tre de 1906, nous fit connaître tout particulièrement le polymor- 
phisme des Champignons en général, l'importance et la fréquence 
des mycoses humaines et, à ce propos, des faits multiples de 
pathologie comparée. 

Enfin, au cours de chimie biologique du Professeur A. Gautier, 
et par certaines de ses œuvres, nous pümes comprendre l'impor- 
tance des échanges moléculaires dans les variations des races et 
des espèces. La théorie évolutionniste, qui nous a semblé dans le 
cas de l’Hyphomycète de la tuberculose celle qui actuellement 
coordonne le mieux les faits, nous paraît en plus devoir être de 
grande utilité pour la compréhension des nombreux faits de bac- 
tériologie encore non systématisés jusqu'ici. Cette théorie ne 
s’'appuie-t-elle pas essentiellement sur les lois de la chimie physi- 
que? Et les lois de cette science sont celles que l’on doit appliquer 
à l'étude de ces états biologiques groupés sous les noms de toxines 
solubles, microbes invisibles, agglutinines, ete, ; les sciences expé- 
rimentales s’approprient de plus en plus les phénomènes de la 
vie normale et pathologique. 


8 G. BOUDIN 


PREMIÈRE PARTIE 


I. — Rôle du Bacille de Koch dans les lésions de tuberculose. 
II. — Les caractères biologiques et morphologiques du Bacille acido- 
résistant de la tuberculose; leur valenr en classification. 


CHAPITRE I 


1. Tuberculose expérimentale : par inoculation, Vizzemin (1865); par 
ingestion, CHAUVEAU (1868). 

2. Micro-organismes, agents infectieux de tuberculose, découverts par 
KLegs (1877), ToussaiNT (1880), R. Kocx (1882). 

3. Critiques restrictives de l’action spécifique du Bacille de Koch, agent 
infectieux unique de tiberculose. 


En 1865-1866, Villemin démontre expérimentalement l'inocula- 
bilité de la tuberculose de l'Homme à différents animaux. Ses ex- 
périmentations portèrent sur 96 animaux dont 77 Lapins; le Lapin 
et le Cobaye donnèrent une grande majorité de résultats posi- 
tifs ; le Chien, le Chat, le Mouton, la Chèvre ne furent pas toujours 
contaminés. Un Coq, un Pigeon, dans une première série d'expé- 
riences, inoculés à plusieurs reprises, restèrent réfractaires. Ces ex- 
périences déterminent Villemin à considérer la tuberculose comme 
une maladie contagieuse, due au développement dans les orga- 
nismes d'un agent microbien spécifique. À cause des résultats 
négatifs de l'inoculation chez les Oiseaux, l’auteur considére 
l'existence de la tuberculose chez ces animaux comme incertaine. 

Villemin démontre également l'inoculabilité de la tuberculose 
bovine au Lapin; et dans ce dernier cas, le Lapin accuse des lésions 
plus manifestes encore qu'à la suite de l'inoculation de substance 
tuberculeuse humaine. 

En 1868, Chauveau tuberculise des génisses en les soumettant à 
l'ingestion de substance tuberculeuse provenant de Vache phti- 
sique; il tuberculise des Veaux en leur faisant ingérer de la ma- 
tière tuberculeuse provenant de poumons humains. 

Villemin et Chauveau obtiennent chez les animaux des résultats 
positifs d'infection spécifique, aussi bien avec les produits de gra- 
nulations isolées, qu'avec ceux d'infiltration tuberculeuse, de pneu- 
monie caséeuse. Lebert (Breslau) confirme, en 1866, les expériences 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 9 


de Villemin et démontre également que l’inoculation de substance 
caséeuse détermine une éruption de tubercules disséminés. Mais 
cet expérimentateur neconcluait pas, de l'inoculabilité de la tuber- 
culose par les modes artificiels et peu ménagés de l'infection expé- 
rimentale, à la contagiosité naturelle de la maladie. 

Tous ces faits de contamination par inoculation et par ingestion 
s’augmentent ensuite des résultats positifs d'autres expérimenta- 
teurs. Fallait-il objecter contre « la virulence spécifique et l'inocu- 
labilité de la tuberculose » que l'inoculation de toute poudre inerte 
provoque également des granulations typiques? Dans ce dernier 
cas, les réinoculations en série restent négatives; si bien que celles 
des tuberculoses qui sont capables d'être réinoculées en série 
(H. Martin, 1879-1881) sont désormais les seules à être considérées 
comme l'effet d'un agent microbien spécifique. 

En même temps, on revenait à la doctrine de Laënnec (1819) de 
l'unité de la tuberculose; pneumonie caséeuse, granulation tuber- 
culeuse, considérées d'apres les recherches histologiques (Virchow 
1852, Niemeyer, Robin, Empis 1865) comme maladies différentes 
n'étaient plus, après les recherches de pathologie expérimentale de 
Villemin et de Chauveau, et de nouvelles recherches histologiques 
(Grancher, 1872), que deux lésions développées sous l'influence d'un 
même virus, qu'il s'agissait dès lors de déterminer. 

En 1877, Klebs (Prague) cultive en ballons stérilisés, sur du 
blanc d'œuf recueilli aseptiquement et ensemencé avec de la ma- 
tière caséeuse, des micro-organismes extrêmement ténus, sphé- 
riques, mobiles, d'un diamètre de 2, qu'il appelle Monas tuber- 
culosum; à ces granulations mobiles étaient associées parfois de 
courtes Bactéries. Klebs obtient des lésions nodulaires, par 
inoculation de culture pure de ces Monadines dans le péritoine 
du Chat; il retrouve dans les tubercules le micro-organisme 
inoculé. Reinstadler (1879), puis Schuller (1880) isolent et inoculent 
un microbe agent de la tuberculose qu'ils considérent comme iden 
tique au Monas tuberculosum de Klebs. Deutschmann (1881) pense, 
d’après des expériences personnelles, que la Monade tuberculeuse 
de Klebs n’est pas capable à elle seule de donner la tuberculose. 
Pour le démontrer, il fait une émulsion de pus tuberculeux qui 
se sépare en un dépôt et un liquide plus clair surnageant. Ce li- 
quide clair contient le Monas tuberculosum ; mais inoculé aux ani- 


10 G. BOUDIN 


maux, il ne provoque aucun trouble, tandis que l’inoculation du 
sédiment détermine des lésions de tuberculose. 

En 1880, Toussaint ensemence des ballons de bouillon de Chat, 
de Porc, de Lapin avec du sérum de sang recueilli aseptiquement 
sur la Vache tuberculeuse. Il cultive ainsi des Microcoques, « gra- 
nulations très petites, simples, géminées ou réuniesen petits amas». 
Par inoculation des cultures de ces micro-organismes, il détermine 
chez le Chat une tuberculose expérimentale. En 1881, Toussaint, 
après tuberculisation d'une jeune Truie par ingestion de substance 
tuberculeuse, ensemence avec du sang, avec de la pulpe de gan- 
glions pharyngiens, bronchiques et intestinaux de cetanimal, sept 
ballons de bouillon de Lapin légèrement alcalin. Dès le lendemain, 
il constate le trouble du bouillon de culture dans les 7 ballons. 
Ceux-ci contiennent tous un seul et même Microbe. « Ces cultures 
poussées jusqu'à la dixième ont conservé toute leur pureté. L'ac- 
tivité de la multiplication dure de dix à quinze jours, puis, après 
ce temps, le liquide épuisé s’éclaireit, les microbes tombent au 
fond du vase et forment un dépôt de couleur légèrement jaunâtre. 

«Ce dépôt estexclusivement composé de très petites granulations 
isolées, géminées, réunies par groupes de trois à dix ou en petits 
amas irréguliers. Dans les premiers jours de la culture, on voit 
des flocons blanchâtres assez consistants, qui ressemblent beaucoup 
aux filaments des cultures de bactéridie; lorsqu'on aspire avec un 
tube effilé, la plus grande partie du nuage monte dans le tube ou 
reste suspendue à son extrémité; elle persiste plusieurs jours dans 
le liquide clair sans se diluer : le Microbe est donc entouré à ce mo- 
ment par une atmosphère de matière gluante et assez consistante. 

« Examinés au microscope, les points agglomérés montrent des 
amas extrêmement riches d'un microbe qui paraît alors immobile 
et répandu isolément sur toute la surface de la préparation. Dans 
les parties liquides, on observe, au contraire, dans les granulations 
isolées, géminées ou réunies en plus grand nombre, des mouve- 
ments browniens très prononcés. Plus tard, la couleur blanchâtre 
du liquide devient uniforme et enfin les Microbes tombent au fond 
du liquide. Leur réfringence est beaucoup plus grande à la fin 
qu'au début de la culture, le diamètre a diminué : il est un peu 
inférieur à celui du Microbe du choléra des Poules et n'offre guère 
que OnmH001 à Omm0002 de diamètre. » 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 1 


Par inoculation des premières séries des cultures pures de ce 
Microbe, Toussaint n'obtient aucun résultat. Par inoeulation d’une 
troisième culture, il obtient des tubercules chez un Lapin. « Des 
Chats inoculés dans le péritoine meurent de cachexie après un 
mois de captivité, pendant lequel ils ont été constamment nourris 
avec des viandes très cuites. Le premier Chat qui mourutavait des 
ganglions intestinaux énormes, en certains points même, caséeux ; 
mais à ce moment la tuberculose n'était pas encore généralisée ». 
Toussaint inocule ensuite la pulpe et la sérosité de ces ganglions 
à des Lapins jeunes. « Tous les animaux ainsi traités, au nombre 
de huit, sont devenus tuberculeux. Après deux mois, l'infection 
était devenue générale, le poumon et la rate étaient remplis de 
tubercules gris. Les premiers Lapins tués ont servi à l’inocula- 
tion d’une seconde série de Lapins qui présentent en ce momen 
tous les symptômes de la tuberculose. » 

En 1881, Aufrecht décrit chez des Lapins rendus tuberculeux 
par inoculation de lésions de pommelière, de fins Microcoques, 
isolés ou réunis par deux ou par trois occupant le centre des tuber- 
cules miliaires. À côté des Microcoques, se voient des Bacilles très 
réfringents, se colorant directement par la fuchsine, et dont la 
longueur est double de la largeur. 

Le 24 mars 1882, R. Koch communique à la Société de Physio- 
logie de Berlin une note sur la recherche et la culture du Bacille 
de la tuberculose. Le 10 avril, dans le Berliner klinische Wochen- 
schrift, il publie, sur l’étiologie de la tuberculose, un mémoire 
d'après lequel, le Microbe de la tuberculose serait un Bacille qu'il 
décèle, dans les crachats et les lésions tuberculeuses humaines, 
d'après une méthode spéciale. 

La réaction colorante caractéristique du Bacille de la tubercu- 
lose d’après Koch, consiste en ce que ce micro-organisme ne se 
laisse pas teindre par les couleurs basiques d’aniline, mais par 
une solution de bleu de méthylène alcalinisée par la potasse. En 
conséquence, Koch laisse séjourner pendant 24 heures les prépara- 
tions à examiner dans le liquide tinctorial suivant : 


Solution alcoolique concentrée de bleu 

10 MÉTIER CS, 0 cent. cube 
Solution de AA 400 . es o0r 20 
BaurdiS lé PEAR Sent ne 200 gr. 


12 G. BOUDIN 


Il recouvre la préparation ainsi traitée d'une lamelle sur laquelle 
a été préalablement déposée une goutte de solution aqueuse con- 
centrée de vésuvine filtrée. À l'examen microscopique, les Bacilles 
apparaissent colorés en bleu, tranchant sur le fond jaune brun du 
reste de la préparation; ils paraissent donc particulièrement diffi- 
ciles à colorer; il faut ajouter en effet à la solution de couleur d'’a- 
niline un mordant, ici, une substance alcaline, la potasse; et en 
plus il faut faire agir cette solution colorante un temps plus ou 
moins long sur les produits suspects à colorer. Si l’on veut abréger 
le séjour des préparations dans le liquide colorant, il est néces- 
saire de chauffer celui-ci. 

Presque immédiatement, Ehrlich, élève de Koch, propose une 
autre méthode de teinture plus rapide et plus sûre, basée sur cette 
constatation de la difficulté de décoloration du Bacille tuberculeux 
par les acides. Ehrlich obtient la coloration par un séjour d'une 
demi-heure à froid, ou cinq minutes à chaud, des préparations 
dans la solution suivante, toujours fraîchement préparée et dans 
laquelle l'huile d'aniline remplace la potasse. 


Fautdaniline EE OC tACUDES 
AICO0lR APS PR RP lCeNt- Cube: 
Solution alcoolique concentrée de fuch- 

sine ou de violet de gentiane. . . . 1 cent. cube. 


La coloration obtenue, la préparation, coupe ou lamelle, est lavée 
dans l’eau filtrée, puis soumise à l'action décolorante d’une solu- 
tion aqueuse d'acide azotique au tiers, ou dans une solution alcoo- 
lique d'acide azotique au dixième. — L'acide doit agir pendant 
environ une ou deux minutes, la préparation ne devant plus avoir 
qu'une légère coloration rosée ou bleuâtre, suivant la couleur em- 
ployée. L'examen dela lamelle après la décoloration à l'acide montre 
le Bacille tuberculeux, coloré en rouge ou en violet ; les autres élé- 
ments de la préparation sont décolorés. Les Bacilles ne se détachent 
pas nettement sur le fond clair de la préparation; on teinte alors le 
fond à l’aide d'une solution aqueuse de vésuvine, puis on examine 
à l’aide de l'objectif à immersion homogène et l'éclairage Abbe. 

A l'aide de ces moyens de révélation du virus spécifique, Koch 
formule les propositions suivantes : Le micro-organisme décelé 
par les méthodes de coloration appropriées a une forme invariable en 
bâtonnet. 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 143 


Dans toutes les affections tuberculeuses et exclusivement dans 
celles-ci, se trouvent les Bacilles tuberculeux. 

Ils apparaissent toujours avant le début du processus tubercu- 
leux, qu'ils déterminent. Ils sont alors en grande quantité puis 
deviennent moins nombreux avec l'évolution des lésions, puis 
disparaissent. 

Les Bacilles tuberculeux peuvent être isolés des lésions sur des 
milieux appropriés, en cultures pures. 

Pour réussir à ensemencer les milieux artificiels, il faut se sou- 
mettre à des conditionsspécialesde température (38°), et desubstra- 
tum nutritif. Et même, si l’ensemencement est fait dans ces 
conditions, il peut n'être pas suivi de succès. Les Bacilles de la 
tuberculose apparaissent donc comme des parasites exclusifs. Cul- 
tivés et entretenus dans les milieux artificiels par des ensemen- 
cements en série, ils déterminent expérimentalement chez les 
animaux les lésions spécifiques de la maladie. 

Ces Bacilles sont les seuls agents, cause incontestable, de la tuber- 
culose. C’est la présence des Bacilles tuberculeux, soit mis en évi- 
dence directement dans les lésions ou crachats, par les méthodes de 
coloration appropriées, soit isolés des lésions par les cultures, qui 
donne le droit de faire le diagnostic de tuberculose. 

Enfin Koch, se basant sur l'identité des Bacilles et de leurs réac- 
tions colorantes, mais non sur l'aspect physique des cultures (il 
n'avait pas encore cultivé le Bacille de la tuberculose aviaire) con- 
sidère comme provoquées par un même microbe, les tuberculoses 
de l'Homme, des Mammifères, des Oiseaux. Et, le premier, il fit 
connaître ainsi la tuberculose des Oiseaux, que Villemin avait 
mise en doute à cause des échecs réitérés de ses inoculations sur 
un Coq et un Pigeon ; en effet Koch put découvrir le Bacille acido- 
résistant dans les tumeurs caséo-calcaires du foie et de l'intestin 
des Poules. : £ 

Tel est l'exposé général des découvertes de Koch sur le virus 
tuberculeux. D'une façon plus complète qu'en 1882, il avait exposé 
en 1884 le résultat de ses recherches dans « les Communications 
de l'Office de Santé impérial » dans un mémoire intitulé : l’étio- 
logie de la tuberculose. 

Koch ne modifie guère ensuite sa doctrine quant à la biologie 
générale et les caractères botaniques du micro-organisme spé- 


14 G. BOUDIN 


cifique de la tuberculose qu'il avait isolé et décrit en tant que Ba- 
cille du groupe des Schizophytes. Il soutenait d'ailleurs la théorie 
du développement des maladies sous l'influence prédominante des 
Bactéries sur les Moisissures. 

En novembre 1890, en avril 1897, il expose une méthode de trai- 
tement de la tuberculose par des extraits de bacilles stérilisés par 
la chaleur (tuberculine ancienne), ou tués mécaniquement (tuber- 
culine résiduelle). 

Middendorp fait remarquer qu'à la dernière de ces dates « Koch 
émet sur la présence et le nombre des Bacilles dans les tissus une 
théorie restrictive de son opinion primitive. Il dit d’abord : 
« qu'ordinairement les Bacilles tuberculeux ne s’accroissent qu'en 
nombre restreint et très lentement dans les tissus du corps » et puis 
que « dans la tuberculose aiguë de l'Homme, de même que dans la 
tuberculose expérimentale du Cobaye aurait lieu une invasion subite 
de Bacilles tuberculeux qui, après quelque temps, disparaîtraient. 

« La première assertion est donc bien contraire à son opinion pri- 
mitive, suivant laquelle les Bacilles s'y trouvent ordinairement en 
foule considérable. Elle est de plus tout à fait en contradiction avec 
les résultats de l’autopsie de poumons phtisiques, où ces microbes 
se rencontrent constamment en foule énorme dans chaque caverne 
ouverte. » | 

De plus, Koch, qui avait admis une virulence invariable du Ba- 
cille tuberculeux, le considère à cette date comme un miCcro-0rga- 
nisme à pouvoir toxi-infectieux non constant. 

Et enfin revenant sur son ancienne théorie de l'unicité des tuber- 
culosesanimalesetaviaire l’auteuravaitséparé comme espèces diffé- 
rentes, à caractères distinctifs persistants, le Bacille humain, le 
Bacille bovin, le Bacille des Oiseaux. 

A propos de ce dernier virus, il reconnut, au Congrès international 
de médecine de Berlin de 1890, avoir identifié le Bacille aviaire au 
Bacille humain, sans avoir eu de cultures faites en partant de lésions 
de tuberculose aviaire. Mais ayant obtenu ensuite des cultures de 
cette origine, à cause de leur aspect spécial, il sépare en espèces 
distinctes, les différents Bacilles acido-résistants des tuberculoses 
animales. Il était en cela conforme à sa doctrine générale de l’im- 
portance descaractères physiques des colonies bactériennes, comme 
signes particuliers et distinctifs d'espèce. 


Re 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 15 


Dès leur apparition, les communications de Koch soulevèrent 
des objections. Les arguments des adversaires, s'ils ne contredisent 
pas les faits essentiels de la découverte du bactériologiste allemand, 
tendent à en limiter les conclusions trop rigoureuses. Ces argu- 
ments sont, aujourd hui encore, tout particulièrement valables. 
C'est ainsi que Crämer, Balogh, constatent le premier, dans les ex- 
créments humains, le deuxième dans les liquides en putréfaction, 
des micro-organismes se colorant comme ceux de la tuberculose. 
Lichtheim découvre, dans les selles des tuberculeux, des Microco- 
ques maniiestant la coloration spéciale. Spina, dont les critiques 
en particulier eurent un certain retentissement, tend à montrer 
que le Bacille de Koch, dans sa réaction colorante par la méthode 
d'Ehrlich, ne manifeste pas une propriétéspécifique due à une mem- 
brane impénétrable aux acides, comme le prétendent Koch et Ehr- 
lich en 1882. Le micro-organisme peut se laisser colorer par la 
fuchsine en solution aqueuse, sans addition de phénol ; et dans le 
procédé Ehrlich, la résistance de décoloration aux acides varie 
avec la plus ou moins grande durée d'action de ceux-ci; les Bacilles 
de Koch se laissent pénétrer et décolorer par l'acide azotique. 
Cette résistance toute quantitative aux acides est manifestée par 
des Bactéries de la putréfaction. En plus elle peut s'acquérir 
artificiellement; le contact du tannin ou de substances grasses donne 
à des bactéries mortes l'acido-résistance. En 1887, Spina reviendra 
encore sur cette particularité d'action de l'acide tannique en solu- 
tion, des graisses ajoutées au milieu de culture de différentes 
Bactéries, et conférant à celles-ci le pouvoir de résister plus ou 
moins à l’action des acides. 

Pour Spina, la forme en bâtonnet mince du Bacille de Koch 
n'est pas constante. Il peut se présenter sous l'aspect d'élé- 
ments courts et épais, minces et longs, de filaments scindés en 
articles et placés bout à bout. Le Bacille de Koch n'existe pas que 
dans le mucus des bronches des tuberculeux. D'autre part, Spina 
a étudié un nombre considérable de tubercules du mésentère et 
n'a pas trouvé à leur intérieur de Bactéries décelables par les pro- 
cédés Koch-Ehrlich ;en conséquence, les produits de la tuberculose, 
qui ne sont pas en contact direct avec l'air, ne contiennent pas de 
Bacillescapables de résister à la décoloration parles acides.De toutes 
ses recherches, Spina conclut que si l’on doit accorder une valeur 


16 G. BOUDIN 


au grand nombre de Bactéries, présentant la réaction colorante de 
Koch, trouvées dans les expectorations des tuberculeux, il n’en est 
pas moins vrai que les Bactéries de la tuberculose ont la même 
réaction tinctoriale que certaines Bactéries de la putréfaction. 
Quant aux cultures de Koch, s'il n’est pas douteux qu'elles contien- 
nent des Bacilles spéciaux et déterminant l'apparition de lésions 
nodulaires, des germes infectieux d'apparence différente, obtenus 
en culture, peuvent également produire des nodules semblables. 

Koch répondit à toutes ces critiques dans un travail d'ensemble 
qu'il fit paraître en 1883, dans le n° 10 du Deulsche medic. Wochens- 
chrift. Il y expose à nouveau les faits principaux de sa découverte 
et notamment dit qu'on peut baser le diagnostic de la phtisie 
sur la présence des Bacilles dans les crachats. Quelquefois ils sont 
peu nombreux; mais il est toujours possible de les découvrir 
après des recherches minutieuses. Ceux qui ne trouvent pas le 
Bacille de la tuberculose dans les crachats ne possèdent pas de 
bonnes méthodes de coloration et de recherche de ce micro-orga- 
nisme. Puis à Crämer, à Balogh et à différents autres auteurs, il 
fait cette réponse que si des Bacilles sont très voisins les uns des 
autres par certains caractères, cela ne prouve pas qu'ils soient les 
mêmes. [ls peuvent, quoique presque semblables, posséder des 
propriétés pathogènes différentes. Ainsi, les Bacilles de la lèpre, 
analogues à ceux de la tuberculose par bien des points, ne pro- 
duisent pas en inoculation des nodules tuberculeux; et d’ailleurs, 
il n’a pas dit qu'on ne trouvera jamais de Bactéries semblables à 
celles de la tuberculose. Il à dit seulement qu'on en avait pas 
trouvé jusqu'ici. Quant aux critiques de Spina, Koch pensa qu'au 
total elles étaient basées sur une technique défectueuse et des pro- 
cédés expérimentaux non rigoureux, d'où des arguments sans 
valeur scientifique. 

Devant là valeur indiscutable et le nombre des expériences de 
Koch, malgré les travaux de Klebs, et surtout malgré les recherches 
très complètes de Toussaint, à partir de 1882, on considère le 
Bacille acido-résistant de Koch comme l'unique, le seul vrai agent 
de la tuberculose. Il est à voir dans tous les crachats des phtisiques 
et dans toutes les lésions nodulaires. Bacille de Koch et tubercu- 
lose sont désormais deux termes d’une inséparable association. 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 17 


CHAPITRE II 


1. Travaux de MaLaAssez et ViGNAL sur la tuberculose zoogléique. Raisons 
déterminantes de leurs expériences. Leurs deux hypothèses sur le rapport de 
la Zooglée, comme agent infectieux de tuberculose, avec le Bacille de Koch. 

2. Rapports apparents ou réels de Microbes polymorphes avec le Bacille de 
Koch : travaux de CHANTEMESSE, de GRANCHER 8 LEDoux-LEBARD, de 
LEGRAIN. 


3. Définition du terme pseudo-tuberculeux, par S. ARLOING. 


Dès 1883, la pathologie expérimentale semble vouloir apporter 
des résultats inquiétants pour l'unité de la maladie spécifique, en 
multipliant les germes capables de produire les nodules tubercu- 
leux. En réalité, le problème est considéré dès lors avec plus de 
précision et sous un aspect différent; les conditions de la solution 
vont se restreindre de plus en plus aux seules données de la patho- 
logie expérimentale, vérification faite de la possibilité de réactions 
cellulaires identiques sous l'influence de virus différents. Dans 
une communication faite le 22 avril 1882, au Congrès de Wiesba- 
den, Koch disait avoir toujours constaté, même dans les adénites 
scrofuleuses et les arthrites fongueuses, les Bacilles acido-résis- 
tants : «Il admettait cependant qu'ils puissent faire défaut, leurs 
spores étant invisibles par la coloration » (Malassez et Vignal). En 
1883, ces deux derniers auteurs mettent nettementen évidence la 
disproportion considérable que l’on constate si souvent entre le 
très petit nombre de Bacilles trouvés et l'importance des lésions 
observées ; même dans des lésions composées de granulations con- 
fluentes, il arrive qu'aucun Bacille ne peut être trouvé : « Ces der- 
niers faits sont indéniables, ils ont été reconnus par ceux-là même 
qui étaient les plus aptes, les plus intéressés pourrait-on dire, à 
découvrir le parasite, Koch lui-même et plusieurs de ses parti- 
sans. » En conséquence, Malassez et Vignal cherchent à voir si les 
animaux inoculés avec une lésion tuberculeuse sans Bacilles, 
deviennent tuberculeux. et si l’on trouve dans les lésions d’ino- 
culation le Bacille de Koch ou tout autre micro-organisme para- 
site. Un nodule tuberculeux sous-cutané de l'avant-bras que 
portait un enfant de quatre ans mort de méningite tuberculeuse, 
et la paroi d’un abcès ossifluent que portait au cou-de-pied un en- 
fant de deux ans, furent les deux pièces principales ne contenant 

Archives de Parasitologie, XI, n° 1, 1906. 2 


18 G. BOUDIN 


pas de Bacilles, utilisées pour les expériences de Malassez et Vignal. 
Les résultats principaux de ces expériences sont les suivants : 

1° Ces lésions dépourvues de Bacilles de Koch ont produit 
par inoculation, tantôt une tuberculose zoogléique, tantôt une 
tuberculose bacillaire ordinaire. 

20 Ces tuberculoses zoogléiques se sont transformées en tubercu- 
loses bacillaires après un nombre plus ou moins considérable de 
générations d'inoculation. Les Bacilles existent en plus grand 
nombre chez les animaux inoculés depuis déjà un certain temps. 
Les produits de culture ont déterminé également par inoculation, 
des tuberculoses zoogléiques devenant ensuite bacillaires. (Les cul- 
tures avaient été faites selon la méthode de Koch sur du sérum de 
sang de bœuf stérilisé et gélatiné. Beaucoup de tubes ensemencés 
restèrent stériles. Les colonies qui se développèrent au bout de 
quelques jours eurent un développement en croutelle desséchée, 
prenant un aspect écailleux). 

3° Deux cultures provenant d’une même lésion tuberculeuse 
sans Bacilles de Koch ont donné par inoculation, l'une une tuber- 
culose zoogléique, l’autre une tuberculose d'emblée bacillaire. 

Les Zooglées sont polymorphes et peuvent manifester des formes 
en Microcoques, Diplocoques et en chapelets courts et longs, unis 
par une matière glaireuse. Elles peuvent se résoudre dans les tis- 
sus en très fines granulations à peine perceptibles — ce qui pour- 
rait faire croire à leur disparition. Dans cet état cependant la réino- 
culation est possible, et, dans les lésions nouvelles, la forme z00- 
gléique réapparait avec ses caractères habituels. Dans les tissus 
caséifiés en voie de ramollissement on trouve en plus des Zooglées, 
des Microcoques isolés, sans matière glaireuse, moins allongés 
que les micro-organismes de la forme zoogléique pure, mais pou- 
vant aussi se présenter sous forme de Diplocoques, de chapelets, 
d'amas. Tous ces micro-organismes de la tuberculose zoogléique 
se colorent sensiblement d’une façon analogue par le bleu de mé- 
thylène et l'huile d’'aniline ; on fait agir ensuite sur la préparation 
l’action décolorante de l'alcool et du carbonate de soude. Cette 
méthode ne colore pas le Bacille de Koch. Le procédé Ehrlich ne 
colore pas les Zooglées. (Il y aurait lieu, disent Malassez et Vi- 
gnal, de comparer les formes en Microcoques et Diplocoques de 
notre tuberculose zoogléique avec la Monade tuberculeuse de 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 19 


Klebs, ainsi qu'avec les autres prétendus Microbes de la tubercu- 
lose de Toussaint, Aufrecht et autres. Il y a évidemment entre 
elles toutes de grandes ressemblances, mais y a-t-il similitude ? 
Le fait est possible, mais nous n’oserions pas l’affirmer, n'étant pas 
assez sûrs de ce que les auteurs susdits ont vu en réalité ». On pré- 
tendit, en Allemagne en particulier, que «tout l'échafaudage du 
travail de Malassez et Vignal était vraisemblablement faux. » Ces 
auteurs, tenant compte de tous les faits et sûrs de la complexité de 
ceux-ci, gardèrent dans les conclusions de leur mémoire une très 
grande réserve. Se basant surtout sur le rapport dela généralisation 
extrêmement rapide des lésions tuberculeuses avec la présence des 
Zooglées d’une part, et d'autre part sur l'apparition tardive du 
Bacille de Koch dans les lésions, Malassez et Vignal font deux 
hypothèses. Après avoir émis une première hypothèse à savoir que 
les Zooglées et les Bacilles ne sont que deux formes différentes 
d'un même micro-organisme, ils considèrent une seconde hypo- 
thèse qui paraît rendre compte de tous les faits observés : « Elle 
consiste à admettre que les pièces d’inoculation contenaient à la 
tois le germe de deux tuberculoses. On pourrait dire en effet que 
si dans deux de nos séries d'expériences, les Zooglées se sont 
seules montrées pendant plusieurs générations, c’est que nous 
avions eu affaire à des tuberculoses zoogléiques suraiguës, qui 
emportaient nos animaux avant que la tuberculose bacillaire ait 
eu le temps de se manifester; cette dernière ne serait apparue que 
lorsque l'infection zoogléique, s'étant affaiblie, les animaux ont 
pu résister et vivre plus longtemps. Et si deux cultures provenant 
d'une même pièce ont donné lieu à deux tuberculoses difiérentes, 
c'est que dans chacune d'elles, il s'était développé un seul des deux 
micro-organismes, ou du moins l’un d'eux plus spécialement. Telle 
est l'hypothèse qui nous paraît rendre le meilleur compte de 
l'ensemble des faits actuellement connus, mais nous ne voulons 
pas, nous ne pouvons rien affirmer encore, ce n’est qu'une théorie 
d'attente... la démonstration expérimentale n’en est pas faite. » 

En 1885, Nocard décrit un cas de tuberculose zoogléique obser- 
vée dans le poumon d’une Poule. Eberth décrit deux cas de tuber- 
culose zoogléique, l’un chez le Cobaye, l’autre chez le Lapin. 

En 1887, Chantemesse publie le résultat d’un travail sur la tuber- 
culose zoogléique entrepris dans les circonstances suivantes : 


20 G. BOUDIN 


« En octobre 1885, M. le Dr Terrier nous a remis, dit l'auteur au la- 
boratoire du professeur Cornil, des tubes fermés à la lampe qui con- 
tenaient des fragments d’ouate. Sur cette ouate, M. Terrier avait fait 
passer une centaine de litres d'air puisé dans des salles où des ma- 
lades atteints de tuberculose pulmonaire allaient se soumettre à des 
inhalations médicamenteuses. Les malades étaient nombreux 
et aucune précaution sérieuse n'était prise pour la désinfection 
de la salle. » Chacun des fragments d'ouate fut introduit avec 
toutes les précautions antiseptiques dans le péritoine de Cobayes. 
Les animaux moururent en l’espace d'un mois environ. Les lé- 
sions avaient tellement l'apparence de tubercules ordinaires que 
nous avons cru tout d'abord qu'il s'agissait de cette maladie, aussi 
n'avons-nous pas, par une négligence très regrettable, tenté de 
faire des cultures et des inoculations en série. » Chantemesse 
conclut qu'à la suite de l'observation microscopique il croit avoir 
observé la tuberculose zoogléique telle que l'ont décrite, Malassez 
et Vignal, Nocard, Eberth. 

En 1888, Charrin et Roger observent une pseudo-tuberculose 
bacillaire développée spontanément chez un Cobaye, obtiennent 
des cultures pures d'un micro-organisme polymorphe, mais à in- 
dividus distincts et non réunis en Zooglées. Les granulations déter- 
minées par l'inoculation diffèrent histologiquement de celles de la 
tuberculose vraie (type Koch) et de la tuberculose zoogléique et ne 
présentent pas de dégénérescence centrale des lobules. Dans la 
mêmeannée, Dor décrit une tuberculose à streptobacille développée 
chez un Lapin mortspontanément. Et Roger constate une tubercu- 
lose à streptobacille, spontanée, chez le Cobaye et le Lapin. 

En 1889, Grancher et Ledoux-Lebard présentent un mémoire 
sur la tuberculose zoogléique. Ils ont été amenés à cette étude d'une 
facon tout à fait indirecte : «Au mois d'avril 188$, dansle cours de 
recherchessur le pouvoir de filtration du sol, nous avons, disent-ils, 
observé un cas de tuberculose zoogléique, chez un Cobaye mort 
quatre où cinq jours après une inoculation pratiquée de la manière 
suivante : Trois cultures du Bacille de Koch sur gélose glycérinée 
avaient été répandues à la surface d'une couche de terre de Om15 
de hauteur, contenue dans un cylindre de verre de 010 de dia- 
mètre. La terre provenait du jardin de l'hôpital des enfants. On 
l’arrosait chaque jour avec de l'eau stérilisée tombant goutte à 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 21 


goutte d'un vase de Mariotte, sur ce sol, et s'écoulant, après filtra- 
tion, par un tube placé à la partie inférieure du cylindre. Le 
liquide était recueilli dans un verre stérilisé. C’est avec un eme de 
liquide, le 3° jour après l'installation de l'appareil, que futinoculé, 
dans l'abdomen, le Cobaye dont il est question. Ce Cobaye fut le 
point dedépart d'une courtesérie d’inoculations de Cobaye à Cobaye, 
jusqu'au 4° passage. » [ls n’ont done pas poussé aussi loin que 
Malassez et Vignal leurs inoculations en série; ces deux derniers au- 
teursobservèrent en effet la tuberculose bacillaire à Bacilles de Koch, 
en plus dela tuberculose zoogléique,surlacinquièmesérie d'animaux 
inoculés. Mais comme Malassez et Vignal, Grancher et Ledoux Le- 
bard remarquent que dans les inoculations en série de Cobaye à Co- 
baye ou de Lapin à Lapin, les Zooglées deviennentde plus en plus pe- 
tites et netardent pas à disparaître ; ou bien on n'arrive plus à déceler 
le micro-organisme dans les tissus par les procédés de coloration qui 
jusque-là avaient réussi, ou bien on ne trouve plus dans les organes 
que de courtes chaînettes ou des Bacilles isolés, « comme si la Zoo- 
glée avait diffusé en tronçons épars les longs chapelets qui la cons- 
tituent ». Les organes des animaux des dernières séries d'inocula- 
tion donnent en culture, «non des filaments articulés comme ceux 
de la Zooglée, mais des Bacilles en tout semblables à ceux de la 
pseudo-tuberculose bacillaire de Charrin et Roger. Ces cultures ino- 
culées donnent le tableau anatomo-pathologique de la tuberculose 
zoogléique, mais sans Zooglées dans les tissus. De plus, Gran- 
cher et Ledoux-Lebard passent de la forme bacillaire à la forme 
zoogléique. Sur des cultures de pseudo-tuberculose, en faisant va- 
rier la composition des milieux et surtout la température à laquelle 
se développent les colonies, ils observent les phénomènes suivants : 
les Bacilles isolés s'allongent, se fragmentent et forment de longs 
chapelets en forme de bâtonnets articulés bout à bout. Puis des flo- 
cons blanchâtres se forment dans les cultures liquides, composés 
«d’une touffe de filaments articulés qui rappellent absolument les 
parties périphériques et lâches de la Zooglée, développée dans 
les organes du Cobaye. Les articles sont réunis l’un à l'autre au 
niveau de leurs points de contact, par toute la surface de leurs 
extrémités en regard, à l’aide d'une substance pâle, rétablissant la 
orme cylindrique du filament qui ne présenterait ainsi qu'une 
fausse articulation due à une différenciation de la substance. Les 


129 G. BOUDIN 


parties colorables du protoplasma se disposeraient en chapelet, 
à l'intérieur du filament cylindrique... » En second lieu, des 
Cobayes inoculés dans l'abdomen avec une culture ayant pour ori- 
gine une culture de pseudo-tuberculose de Charrin et Roger, con- 
servée par ensemencements successifs, présentèrent dans le foie des 
Zooglées identiques par leur structure à la Zooglée de Malassez et 
Vignal. Ainsi de même que les Bacilles, isolés d'une culture sur 
agar peptonisé, donnent, dans du bouillon à 38° - 40° de longs cha- 
pelets, de même dans l'organisme de certains animaux, le Bacille 
se développe en filaments et forme des Zooglées. Comme concelu- 
sions, les auteurs : 

1° Identifient la « pseudo-tuberculose » de Charrin et Roger et 
leur tuberculose zoogléique, découverte dans les conditions ci-des- 
sus eXPOsées ; 

20 Ayant recherché le Bacille de Koch dans les différentes lésions 
manifestées par les animaux au cours des inoculations en série, 
ils n'ont pu constater sa présence. Mais, énumérant les nombreux 
caractères de ressemblance que présentent les Zooglées de Malassez 
et Vignal et celles qu'ils ont étudiées, ils affirmeraient leur iden- 
tité, si : («dans les expériences de Malassez et Vignal, l'apparition 
des Bacilles de Koch après un certain nombre de passages et lors- 
que les Zooglées disparaissaient, n'éveillait quelque doute et n’auto- 
risait peut-être d'autres interprétations. » 

En 1891, Legrain décrivit une pseudo-tuberculose produite chez 
le Lapin, par inoculation d’un Bacille trouvé dans les crachats d'un 
phtisique, où il était associé au Bacille de Koch. 

Puis les tuberculoses à Zooglées, à Bacilles isolés, ou à Strep- 
tobacilles, donc différentes par leur agent causal, de la tubercu- 
lose de Koch, se multiplient. Mais les connexions singulières que 
certains de ces micro-organismes montrent avec le Bacille de 
Koch dans certains cas d'observation ou d'expérimentation, leur 
polymorphisme considérable, leur tendance à croître en filaments 
de très grande longueur composés de 15 à 20 éléments bacillaires 
réunis bout à bout par une gaine incolore, leur aptitude à se trans- 
former, à se désintégrer dans les cultures et dans les tissus, à me- 
sure que les lésions évoluent, enfin les parentés étroites que tous 
ces germes semblent avoir entre eux, autorisent à la très pru- 
dente réserve que tinrent Malassez et Vignal, Grancher et Ledoux- 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 23 


Lebard. Toutefois, d'une facon générale, on conclut à l'autonomie 
des Zooglées, ou des Streptobacilles, capables de déterminer des 
lésions nodulaires. Certains auteurs peut-être, par prudence, les 
rangent sous la dénomination générale de pseudo-tuberculoses. 
Arloing s'élève contre cette appellation. Le terme de pseudo-tu- 
berculose, d'aprèslui, doit étreuniquement réservé aux tuberculoses 
développées sous l'influence de particules fines inanimées, et de 
poudres inertes. Ces tuberculoses ne font que simuler les lésions 
infectieuses et ne sont pas réinoculables en série. Et toutes les tu- 
berculoses dues à un germe spécifique, vivant, doivent être dési- 
gnées sous les noms distinctifs de tuberculose à Bacilles de Koch, 
tuberculose streptobacillaire de Courmont, tuberculose à Zooglée. 
Pour cet auteur, en 1892, tous ces virus sont nettement indépen- 
dants : «La Zooglée ne peut être une modification du Bacille de 
Koch, car la transformation serait tellement profonde que cela 
équivaudrait à admettre une espèce distincte. » 

Cependant nous verrons Arloing en 1898, après Jaime Ferran, 
développer chez le Bacille de Koch des modifications d’une impor- 
tance presque aussi considérable etappliquer les cultures modifiées 
au séro-diagnostic de la tuberculose bacillaire de Koch. 


CHAPITRE III 


1. Techniques de coloration du Bacille tuberculeux de Koch; hypothèses 
sur la cause des réactions chromatiques. Découvertes des Bactéries acido- 
résistantes. 

2. Morphologie du Bacille; forme en bâtonnet immobile; formes nai- 
nes (METSHNIKOV, STRAUS); formes d'involution: sens de cette expression. 

3. Revendication de BAUMGARTEN sur la découverte du Bacille tuberculeux. 


L'emploi de la dénomination ( pseudo-tuberculoses micro- 
biennes » caractérise bien la tendance générale qu'il y a à considérer 
le Bacille de Koch comme facteur principal des lésions nodulaires 
et de la phtisie. En réalité il semble bien être l’agent le plus fré- 
quent des tuberculoses; à bon droit, les recherches se sont multi- 
pliées pour le mieux caractériser. Ehrlich avait très rapidement 
perfectionné la technique de coloration et avait émis avec Koch, 
pour expliquer la coloration spécifique du Bacille, l'hypothèse 
qu'il était entouré d'une membrane seulement perméable aux 


24 AS G. BOUDIN 


alcalis et imperméable aux acides. Déjà Spina s'était élevé contre 
cette hypothèse. Ziehl démontre que l’adjonction d'acide phénique, 
comme l'addition de potasse ou d'huile d’aniline permet une bonne 
coloration du Bacille. 

Comme la solution d'Ehrlich est instable, commeelle perd rapi- 
dement ses propriétés colorantes, afin d'éviter les inconvénients 
d'avoir à préparer cette solution pour chaque examen, il y a avan- 
tage à la remplacer par la liqueur de Ziehl qui se conserve long- 
temps sans s’altérer : 


Euchsinecubine PER EEE 1 gramme. 
Alcoolabsolue er re MOIcenttACubes: 
Eau phéniquée à 5 p. 100 . . . . 100 cent. cubes. 


Les procédés classiques employés actuellement restent compa- 
rables à cette dernière technique, dite technique de Ziehl-Neelsen. 
(Neelsen a modifié la solution de Ziehl en ce qu'il prend pour faire 
la solution colorante 1 gramme de fuchsine, au lieu de 0 gr. 25). 
La liqueur colorante est versée sur la préparation, chauftée 
jusqu'à dégagement de vapeurs, retirée alors, puis chauffée à nou- 
veau, lorsque les vapeurs ne se dégagent plus. On chauffe ainsi à 
plusieurs reprises. On lave ensuite à l’eau, puis décolore avec 
quelques’ gouttes d'acide nitrique au tiers et on traite alors la 
préparation par l'alcool absolu. Au contraire de la plupart des 
microbes, le Bacille de la tuberculose reste coloré après action de 
l'acide et alcool. Dans la méthode de Kühne-Borrel, après coloration 
comme précédemment par le liquide de Ziehl et lavage à l'eau, on 
décoloreau moyen d'alcool absolu, après avoir soumis la préparation 
pendant quelques secondes à l’action d'une solution aqueuse à 
2 p.100 de chlorhydrate d’aniline fraichement préparée, agent de 
différenciation qui nuit moins que les acides aux éléments cel- 
lulaires. On fait ensuite la recoloration du fond de la prépara- 
tion. 

La décoloration et la recoloration peuvent se faire simultanément 
dans les procédés de Frænkel et de Gabbet, par des mélanges 
d'alcool, d'acide nitrique, et de couleurs basiques d'aniline. La 
coloration initiale a été effectuée au moyen de la solution d'Ehrlich 
ou du liquide de Ziehl-Neelsen. 

Le Bacille tuberculeux reste coloré par la méthode de Gram. On 
fait agir la solution iodée de Lugol pendant quelques minutes sur 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 25 


la préparation préalablement colorée par un séjour prolongé dans 
une solution anilinée de violet de gentiane. On décolore ensuite 
par l'alcool absolu, complètement. On éclaircit la préparation au 

xylol. « Les Bacilles, dit Straus, sont colorés d’une façon intense, 
en violet presque noir; comme Gram l'avait déjà observé, les 
Bacilles de la tuberculose ainsi colorés se présentent fréquemment 
sous forme de points colorés séparés par des intervalles clairs, de 
façon à simuler une chaînette de très petits Coceus .» 

Dans le procédé de Gram, la décoloration est obtenue au moyen 
de l’acool absolu. Weigert remplace l'alcool par l'huile d’aniline 
qui déshydrate et décolore. 

Tous ces procédés par adjonction aux colorants de potasse, 
d'aniline, d'acide phénique sont assez rapides. En 1883, Lichteim 
de Giacomi, Baumgarten réussissent à colorer les Bacilles tuber- 
culeux par la méthode générale de Weigert, c'est-à-dire par les 
simples solutions aqueuses, faibles ou concentrées, des couleurs 
basiques d'aniline et sans que ces solutions aient été additionnées 
d'un mordant queiconque, potasse, aniline, phénol. Mais le 
Bacille de Koch, contrairement aux autres Bactéries, ne se 
laisse teindre que très lentement par cette méthode; et la 
coloration obtenue, il résiste, comme après teinture par les pro- 
cédés rapides, à l'action des acides minéraux. D'ailleurs, 
l'obligation de constater de plus en plus la variabilité de l’acido- 
résistance fait qu'on remplace fréquemment l'action des acides 
minéraux par l'action plus ménagée des acides organiques, avec 
lesquels la décoloration s'effectue dans l’espace de quelques minutes 
à une demi-heure. On emploi l'acide tartrique, citrique à 5 et 
10 p. 100 en solution aqueuse (procédé de Ziehl-Hauser), acide 
lactique en solution alcoolique à 2 p. 100 (procédé de Ziehl-Cour- 
mont et Lesieur), l'acide acétique concentré (Petri). 

Cette énumération des procédés de coloration du Bacille tuber- 
culeux de Koch met donc en évidence ces 2 caractères, de la 
résistance à l’action des liquides colorants d’une part, et d'autre 
part, la coloration effectuée, de la résistance à la décoloration. Ces 
caractères ne sont pas particuliers au Bacille de Koch. Se com- 
portent d'une façon analogue les spores de nombreux Schizophytes. 
On sensibilise ces spores aux réactifs colorants par la chaleur, par 
les alcalis (Büchner), par la fuchsine anilinée (Hueppe), par la 


26 G. BOUDIN 


fuschine phéniquée chaude (liquide de Ziehl). Les préparations 
traitées ensuite par les acides minéraux dilués, les spores seules 
restent colorées. 

De même, la coloration des filaments mycéliens de diverses Moi- 
sissures par lescouleurs basiques d’aniline présente très souvent des 
difficultés comparables à celles de la coloration du Bacille de Koch. 
C’est ainsi qu'on emploie pour déceler le mycélium de Mucorinées, 
d'Aspergillées, les procédés qu'on peut employer pour le Bacille 
tuberculeux — les solutions aqueuses de potasse plus ou moins 
concentrées. Klissitch, pour colorer des Mucorinées, emploie la 
safranine anilinée agissant à froid pendant 15 à 20 heures ou à 
chaud plus rapidement. L'excès du colorant est éliminé au 
moyen d’une solution aqueuse d'acide acétique à 1-p. 500 que l’on 
fait agir pendant # à 5 secondes. 

Les teintures d’aniline, mélangées de phénol, telles que la fuch- 
sine de Zieh]l très étendue d'eau, la thionine phéniquée servent à 
la coloration de l’Aspergillus fumigatus (Rénon), du Rhizomucor pa- 
rasiticus (Lucet et Costantin). 

Le Bacille de la lèpre se colore plus facilement que le Bacille de 
Koch par le bleu de méthylène alcalin, par les solutions aqueuses 
de couleurs basiques d’aniline, même agissant à froid ; mais d'autre 
part il est plus difficilement décolorable que le Bacille de Koch. 

Le nombre des Bactéries présentant le même mode général de 
coloration que le Bacille de Koch, les spores des Schizophytes, et 
le Bacille de la lèpre, croit d'année en année depuis la découverte 
du Bacille du smegma (1885) par Alvarez et Tavel. En 1896, et dans 
les années qui suivent, des Bacilles qui résistent à la décoloration 
par les acides et alcool, sont découverts dans le sol, sur les céréales, 
sur les herbes, dans le beurre, dans le lait, dans les excréments 
des animaux, en nombre extrêmement considérable. Ils sont grou- 
pés sous la dénomination d’acido-résistants (P. Courmont). Mais 
ici, les types principaux de ces micro-organismes présentent entre 
eux et le Bacille de Koch, en plus des réactions de coloration, des 
caractères de parenté naturelle. Cependant, si certains bactériolo- 
gistes, tendent en se basant sur l’ensemble de ces caractères à con- 
sidérer beaucoup de ces Bactéries comme des espèces voisines, ou 
plutôt des variétés d'une même espèce, transformables pratique- 
ment les unes en les autres, d'autres auteurs se basant seulement 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 27 


sur la faible résistance que beaucoup de ces Bacilles présentent à 
la décoloration par les acides et par l'alcool, sur leur virulence 
peu considérable, sur la non-spécificité des lésions qu'ils peuvent 
provoquer, les considèrent comme des Bacilles pseudo-tubercu- 
leux, paratuberculeux, très différents du Bacille de Koch. 

Colorés, il faut employer pour examiner les Bacilles tuberculeux 
un objectif à immersion homogène, et l'éclairage Abbe (gross. 500 
à 700). C'est un micro-organisme immobile très petit et grêle. Il a, 
de 1 25 à 3 y delongueur (quart ou moitié du diamètre d'un globule 
sanguin). Il peut atteindre parfois 10 y. Son épaisseur est d’envi- 
ron 0 43. Les bâtonnets ne sont pas rectilignes mais fréquemment 
infléchis «quelquefois ils sont comme brisés et formés de segments 
articulés à angle très ouvert » (Straus). Dans les cultures jeunes 
les Bacilles sont très courts et paraissent homogènes dans toute 
leur longueur. Dans les cultures âgées on trouve parfois des formes 
très allongées, en même temps que l'on constate un phénomène 
particulier, que Koch a signalé : le Bacille est segmenté en une 
série régulière de grains ovoïdes, clairs, réfractaires aux matières 
colorantes, d’où la transformation apparente des formes allongées 
en une chaîne de Coccus. Les Bacilles tuberculeux, immobiles, se 
présentent en amas et dans ces amas, leurs dimensions apparaissent 
légèrement variables avec le mode de coloration : € Dans les cul- 
tures, dit Koch, où les Bacilles sont étroitement juxtaposés, ils 
semblent se toucher quand la préparation est faite avec le violet 
de méthyle, tandis que si la préparation est obtenue à l’aide du 
bleu de méthylène, les Bacilles plus minces sont séparés les uns 
des autres par des espaces nettement visibles ». Et c'est sur les faits 
d'abord des difficultés de coloration, mais aussi, de la non-juxta- 
position des Bacilles dans les cultures, et de leur cohésion, que 
Koch établissait son hypothèse d'une membrane imperméable aux 
acides. Du moins, et puisque les procédés de coloration ont fait 
rejeter cette hypothèse d'une membrane, il semble bien y avoir une 
substance unissante, capable elle-même de fixer dans une légère 
mesure les colorants, et cause de la cohésion particulière des colo- 
nies du Bacille tuberculeux. Les micro-organismes en forme de 
bâtonnet sont accolés dans cette substance unissante comme en 
files sensiblement parallèles les unes aux autres. 

L'aspect du Bacille tuberculeux, en bâtonnet étroit, mince, très 


28 G. BOUDIN 


souvent arqué n'est pas constant ; les Bacilles, ainsi que cela a déjà 
été mentionné, peuvent donner l'apparence d'une chaîne de fins 
granules. Souvent dans les crachats des phtisiques, dans les coupes 
des lésions nodulaires, les Bacilles peuvent figurer comme des 
amas de grains colorés appartenant à des bâtonnets parallèles, très 
rapprochés les uns des autres. Les bâtonnets sont alors à peine 
reconnaissables. On reconnaît seulement des grains ronds disposés 
en séries presque parallèles. Ces grains, dit Straus, « représentent 
les détritus du Bacille, mais ayant encore la réaction colorante 
spécifique. Dans les cultures, surtout dans les cultures âgées, et 
surtout dans les cultures aviaires, d’autres formes se manifestent 
très intéressantes, quoique nos notions sur ce point soient encore 
insuffisantes. Il se passe pour le Bacille de la tuberculose quelque 
chose d'analogue à ce que l'on connaît pour le Bacille du charbon : 
on sait que dans le corps des animaux le Bacille du charbon n’ap- 
paraît que sous la forme d'un bâtonnet, simple ou articulé, plus 
ou moins long, mais qui n’afflecte jamais le développement fila- 
menteux que l'on observe dans les cultures. Jamais non plus il ne 
donne de spores dans le corps de l'animal. Il existe donc pour ce 
Bacille, des différences morphologiques considérables, selon qu'il 
se développe en parasite dans le corps des animaux ou qu'il est 
cultivé sur des milieux inertes. Pour le Bacille de la tuberculose, 
les choses se passent dans une certaine mesure de la même façon ». 
Straus rappelle que c'est à Metshnikov (1888) que l'on doit d'avoir 
appelé l'attention sur les formes variables du Bacille de Koch dans 
les cultures : formes très petites en coccus, formes ovoïdes en lan- 
cette, ou au contraire, formes filamenteuses, ramifiées à renflements 
terminaux. Straus lui-même constate que des cultures de tuber- 
culose aviaire «ayant poussé en voile à la surface de bouillon gly- 
cériné à la température de 37°-38°, examinées au bout de trois à 
quatre semaines, étaient constituées presque exclusivement de 
ces formes naines. » Inoculés à des animaux, les micro-orga- 
nismes gardent les mêmes dimensions. Réensemencées, ce n'est 
qu'après un long séjour à l'étuve qu'apparaissaient au milieu des 
formes exiguës primitives, des Bacilles tuberculeux de dimen- 
sions normales. Et Straus donne encore, dans son ouvrage, une 
figure comparable aux figures de Metchnikoff, et représentant des 
formes géantes, ramifiées et renflées d'une culture de tuberculose 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 29 


aviaire en bouillon glycériné, à la température de 37%, âgée de 
deux mois. «Ce sont, dit Straus, les formes que l'on rencontre 
habituellement dans les cultures aviaires ; je ne les ai jamais 
observées dans les cultures du Baeille de l'Homme ou des Mam- 
mifères. » 

Nocard et Roux, en 1888, examinant des préparations d'une cul- 
ture âgée de plusieurs mois, sur gélose glycérinée font les consta- 
tations suivantes et peut-être leurs observations s'appliquent-elles 
encore au virus de la tuberculose aviaire : « Dans les pre- 
miers jours de la culture les Bacilles sont homogènes et se co- 
lorent dans toutes leurs parties. A mesure que la culture 
vieillit, les Bacilles les plus anciens prennent moins fortement 
Ja couleur. Dans une culture vieille de plusieurs mois, nous 
avons rencontré des formes renflées, plus longues qu'à l'ordinaire; 
quelques-unes d’entre elles présentaient comme un bourgeon laté- 
ral, branché presque à angle droit sur le Bacille principal et ter- 
miné quelquefois par un renflement à son extrémité ». Nocard et 
Roux ne formulent aucune conclusion au sujet de ces formes sin- 
gulières. Mais «ils se proposent de traiter dans un autre exposé, 
les modifications que peut subir le Bacille par suite des change- 
ments dans la nature du milieu de culture. » 

Quoi qu'il en soit, d’une façon générale, le virus de la tuberculose 
manifestant le plus souvent dans les crachats, lésions, humeurs des 
organismes la forme bacillaire, cette forme est considérée comme 
la forme normale du parasite, et les autres formes comme des «for- 
mations involutives ». Le nom de « formes d’involution » englobe 
habituellement les formes anormales de croissance des Bactéries. 
Büchner qui a employé pour la première fois cette expression 
l’affecte tantôt à des parties de Bactéries, mortifiées, en voie de dé- 
composition, mais aussi à des Bactéries vivantes de dimensions 
considérables par rapport au type habituel de l'espèce, et ainsi 
exceptionnelles. 

Les auteurs qui se servent de cette expression de formes d'invo- 
lution, pour désigner les formes filamenteuses et ramifiées du 
Bacille de Koch, l'emploient dans le sens de formes de dégénéres- 
cence, dépourvues de toute importance dans la vie normale du pa- 
rasite exclusif qu'est le Bacille de Koch. 

Baumgarten, le 3 avril 1882, 10 jours après la communication de 


30 G. BOUDIN 


Koch à la Société de Physiologie de Berlin, le 24 mars 1882, annon- 
çait dans ure publication, qu'il avait vu depuis quelque temps 
déjà, et montré le 18 mars à plusieurs collègues des amas de 
Bactéries dans des tubercules provoqués chez le Lapin par inocu- 
lation de lésions de pommelière. Le 7 avril, il ajouta qu'il avait 
maintenant réussi à les découvrir dans les tubercules de l'Homme. 
Ces Bactéries ne présentaient aucune réaction aux solutions 
aqueuses de couleur d’aniline; elles ne se coloraient pas, en effet, 
par la méthode de Weigert. Baumgarten avait réussi à voir ces 
Bactéries en traitant les coupes par une solution faible de potasse 
ou de soude, à condition d'examiner des tubercules frais recueillis 
sur des animaux vivants ou venant d'être tués. Il est exact en effet 
qu'on peut déceler les Bacilles de Koch par cette dernière méthode. 
Mais Baumgarten n'avait pas isolé sa bactérie en cultures. Et Mid- 
dendorp fait remarquer que la revendication de priorité de Baum- 
garten, dix jours après le discours de Koch, est assez étrange, 
puisque Baumgarten admit lui-même, « que ses Bactéries tubercu- 
leuses étaient notablement plus grosses et plus courtes que les 
Bacilles tuberculeux de Koch, qu'elles ressemblaient surtout au 
Bactérium termo et qu'elles ne se laissaient pas colorer d'aucune 
manière comme les Bacilles de Koch. » 

Était-ce bien là le Bacille de Koch, ou le virus différent d’une 
autre tuberculose à forme et à réactions colorantes particu- 
lières? Quoi qu’il en soit, lorsque Baumgarten soumit ses prépa- 
rations à Koch, dans une séance de la Société de Médecine de 
Berlin, ce dernier estima que les micro-organismes qu'elles conte- 
naient paraissaient bien être identiques à son Bacille de la tuber- 
culose. 


CHAPITRE IV 


. Culture du PBacille tuberculeux. Difficultés. Phénomènes d'adaptation du 
Microbe aux milieux artificiels. Importance de l'addition de glycérine à 
ces milieux (Nocarp et Roux). Aspects des colonies en milieux solides et 
liquides. 

2. Végétation sur milieux de composition végétale à réaction acide, sur 
milieux minéraux acides. Fermentation alcoolique de la glycose. 
3. Possibilité d'une végétation anaérobie (MARPMANN). 


La culture du Bacilie de Koch est particulièrement difficile. 
Koch avait essayé en vain les milieux usuels et notamment la gé- 


MICROBE DU LA TUBERCULOSE 31 


latine. Il parvint cependant à ensemencer du sérum stérilisé par 
la méthode de Tyndall, et solidifié par la chaleur (650), avec des 
matières tuberculeuses aussi fraiches que possible; il avait soin 
de broyer préalablement celles-ci avec soin, afin que les Bacilles 
tuberculeux fussent délivrés de la gangue de tissu qui les entoure 
et les empêche de prendre contact avec le sol nutritif. Les tubes 
contenant le sérum gélatinisé sont placés dans une étuve chauffée 
à 910-380. Beaucoup de tubes de sérum ensemencés dans ces 
conditions restent stériles; ét si, dès les premiers jours, on 
observe des colonies à la surface du sérum, on peut conclure à la 
contamination des tubes. 

Ce n'est en effet que vers le 10e jour que la multiplication des 
Bactéries se manifeste à l'œil nu par de petits points de couleur 
grise ou jaunâtre. Ces points restent en général isolés; ils sont 
secs, d'aspect écailleux, de consistance ferme, d'autant plus 
écailleux, que le sérum lui-même est plus sec, d'autant plus adhé- 
rents au sol nutritif que le sérum est plus mou, si adhérents dans 
ce dernier cas qu'on entraine des parcelles de sérum en enlevant 
des fragments de culture Au bout de quelques semaines, l’accrois- 
sement des colonies arrive à son maximum et s'arrête. Pour con- 
tinuer la culture et l'activer on fait desensemencements succesifs 
sur des tubes contenant le même milieu nutritif. Straus exprime 
ainsi les caractères de développement du Bacille de Koch dans les 
cultures. « Les débutants doivent être prévenus qu'il faut ense- 
mencer un assez grand nombre de tubes de sérum, et se féliciter 
si quelques-uns donnent des cultures. De même les deuxièmes et 
même les troisièmes cultures sur sérum ne sont pas toutes fé- 
condes; bon nombre de tubes ensemencés ne présentent aucun 
développement, et les tubes fertiles continuent à ne donner que des 
colonies petites et isolées. Dans les nombreux essais de culture aux- 
quels je me suis livré avec Gamaleia, ce n’est qu'à partir de la 
4me ou bien de la 5me génération que la culture s’est effectuée d'une 
façon plus régulière, plus rapide et plus abondante. Il y a là un 
phénomène d’acclimatement sur lequel nous avons beaucoup insisté 
et qui domine toute l'histoire du Bacille de la tuberculose. » 

« Les cultures subséquentes, ainsi obtenues ne se composent pas 
seulement d'écailles isolées, mais de colonies confluentes; toute la 
surface du sérum est recouverte d'une couche mince etsèche, par- 


32 G. BOUDIN 


semée de petites saillies. Comme le fait remarquer Koch, les Ba- 
cilles en se multipliant ne se développent pas en profondeur, mais 
toujours en surface et en faisant en quelque sorte cheminer la 
membrane déjà formée à la surface du sérum. Ce fait est surtout 
remarquable quand la membrane est arrivée au niveau de la cou- 
che liquide amassée au fond du tube ; elle ne pénètre pas dans cette 
couche, mais s'étale à sa surface; habituellement même, elle re- 
monte de quelques millimètres sur la surface opposée du tube de 
verre, sous la forme d'une pellicule blanchâtre » (Straus, p. 182). 

Koch essaya d’autres milieux de culture que le sérum coagulé. 
Déposant à la surface de sérum liquide des parcelles d'une cul- 
ture développée sur le sérum solidifié, il obtint un voile mince, 
blanc grisâtre, très fragile, se développant à la surface de la subs- 
tance nutritive, sans la troubler. Le ballon de culture agité, la pel- 
licule légère se dissocie et gagne le fond, sans que le sérum perde 
de sa clarté. Koch ensemence également dans les mêmes condi- 
tions du bouillon neutralisé; la culture ne réussit pas aussi bien. 
Le liquide nutritif reste clair; un dépôt sableux formé par de 
petits conglomérats de Bacilles se forme au fond du ballon. Les 
essais d'ensemencement sur le blanc d'œuf coagulé restent sans 
résultat. 

De tels caractères de culture font du Bacille de Koch un micro-or- 
ganisme différent des virus isolés par Klebs et Toussaint; et ainsi 
il semble juste de n'attacher aucune importance dans la genèse des 
lésions tuberculeuses, pas plus à la Monadine de Klebs qu'aux Mi- 
crocoques de Toussaint. En eftet Klebs cultivait le Monas tuberculo- 
sum mobile, sur l’albumine d'œuf; le Bacille de Kochest immobile; 
il ne peut croître sur le blanc d'œuf. Le micro-parasite de Tous- 
saint provoquait dès le lendemain de l’ensemencement du bouillon 
alcalanisé réparti en sept flacons, le trouble dans les septflacons ; 
le Bacille de Koch croît à la surface du sérum liquide se déve- 
loppe mal dans le bouillon neutralisé et seulement sous l'aspect 
d'un dépôt sableux. De plus, il ne manifeste qu’une croissance tar- 
dive, qui nese montre qu'au bout d'une dizaine de jours environ. 
Et fait de grande importance, Watson Cheyne et Cornil purent 
déceler sur des coupes d'organes enlevés aux animaux rendus 
tuberculeux par Toussaint, après inoculation des cultures du 
Microcoque, des Bacilles de Koch. On en conclut que  Microco- 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 33 


que de Toussaint s'était développé dans les flacons en agent de con- 
tamination, à côté de Bacilles de Koch. Quant au Monas tuberculosum, 
ilest bien évident qu'il n'est pasle vrai germe infectieux de la tuber- 
culose, puisqu'il n’a aucun rapport avec le Bacille de Koch. Quoi 
qu'il en soit, en 1883, Klebs, qui jusque-là refusait à ce dernier 
micro -organisme le pouvoir de produire la tuberculose, modifie sa 
manière de voir; iladmet, en plus du Bacille de Koch, comme fac- 
teurs de lésions nodulaires, des amas finement granuleux, formés 
de Microcoques existant dansles cultures et à l'intérieur des tuber- 
cules. Pour lui plusieurs microbes étaient donc capables de produire 
la tuberculose. Les découvertes ultérieures des difiérents auteurs 
justifient son opinion, puisque fut créé le groupe des pseudo-tuber- 
culoses microbiennes. Toussaint, dont les expériences, complétées 
parles observations de Waston Cheyne et Cornil, concordent d'une 
manière remarquable avec celles de Malassez et Vignal fut d'avis 
que le Bacille de Koch était un Microbe très polymorphe, dont il 
avait isolé l’une des formes. Il a déjà été mentionné que Malassez, 
Vignal et d'autres auteurs restèrent dans le doute au sujet de l’exis- 
tence des variations morphologiques du Bacille tuberculeux. 

Les méthodes de culture réalisées par Koch ont réussi à démontrer 
que le Bacille isolé par lui dans les produits tuberculeux était bien 
l'agent de la tuberculose. Mais les difficultés de l'obtention d'une 
première culture,la lenteur et l'insuffisance du développement ex- 
pliquent, cette déclaration de Koch «qu’il n'y a pas à espérer que la 
culture du Bacille de la tuberculose joue un très grand rôle » dans 
l'étude de cette maladie. 

En 1887, Nocard et Roux ajoutèrent avant la gélatinisation du 
sérum et pour éviter la dessication de sa surface, une petite quan- 
tité de glycérine stérilisée dans la proportion de 5 p.100 environ. 
« Sur un tel milieu, disent les auteurs, ensemencé avec une cul- 
ture sur sérum pur, vers le dixième jour, la couche de Bacilles 
était plus marquée que celle qui se forme en un mois sur le sérum 
peptonisé. » Ils ensemencèrent de même avec succès du sérum 
glycériné et peptonisé, de la gélose glycérinée à 6 et 8 p. 100 et 
également des milieux liquides : bouillon de veau peptonisé et 
glycériné à 5 p. 100 : « Si le bouillon glycériné est ensemencé avec 
de la matière tuberculeuse prise sur un animal, la croissance est 
plus lente que si la semence est prélevée sur une culture dans un 

Archives de Parasitologie, XI, n° 1, 1906. 3 


‘ 


34 : G. BOUDIN 


milieu glycériné. 11 faut dans ces conditions un mois pour un dé- 
veloppement sérieux. Cependant en ajoutant, au bouillon glycé- 
-riné, un peu de l’albumine de l'œuf, nous avons eu, disent Nocard 
et Roux, une culture manifeste en partant de la tuberculose de 
Lapins au bout de cinq jours; le huitième jour elle était tout à fait 
abondante... La vigueur du Bacille cultivé dans les milieux glycé- 
rinés est telle qu'en sortant de ces milieux, il prospère dans les 
bouillons ordinaires de Veau et de Poule avec lesquels il est très 
difficile d'avoir une culture initiale ». Nocard et Roux notent que la 
température la plus favorable est celle de 34°, 37°, 390, Par addition 
de glycérine, la gélose, contrairement à l'opinion de Koch, peut 
être ensemencée et donner des cultures, et l’albumine d'œuf ajou- 
tée au bouillon glycériné aide au développement des miecro-orga- 
nismes. En réalité, dans les expériences de Nocard et Roux, les cul- 
tures, au moins dans certains Cas, pouvaient avoir été réaliséesavec 
le Bacille de la tuberculose aviaire, que jusque-là, on identifiait avec 
le Bacille de la tuberculose humaine. Des recherches ultérieures 
faites sur des cultures ensemencées directement avec des parcelles 
de lésions tuberculeuses d'Oiseaux, montrent que le Bacille aviaire 
végète rapidement, forme des colonies mamelonnées, grasses et 
confluentes, et qu'en règle généraleil produit chez le Lapin et sur- 
tout chez le Cobaye, une tuberculose septicémique, à Bacille de 
Koch sans lésions (tuberculose, type Yersin), tandis que le Bacille 
humain végète lentement en colonies écailleuses et sèches, provo- 
que la tuberculose chez le Cobayeetle Lapin et non chez la Poule. Et 
c'est ainsi que Straus et Gamaleia purent diminuer en partie la 
valeur du perfectionnement que Roux et Nocard avaient apporté 
par l'addition de glycérine aux milieux de culture. Straus et Ga- 
maleia en effet ne purent obtenir d'ensemencement direct des pro- 
duits de tuberculose des Mammifères sur gélose glycérinée : « Le 
développement sur gélose glycérinée ne nous a réussi avec sûreté 
et rapidité qu'en ensemencant des cultures sur sérums qui étaient 
déjà de cinquième ou sixième génération. L'aspect des cultures du 
Bacille de la tuberculose humaine sur gélose glycérinée se rappro- 
che de celui des cultures sur sérum, avec cette différence que le 
développement sur le milieu glycériné est plus rapide et plus abon- 
dant; la culture se compose d'un enduit blanchâtre, de surface 
sèche, hérissé d'une foule de petites saillies verruqueuses. » 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE A) 


Au contraire, les ensemencements directs que Straus et Gamaleia 
firent avec la rate de la Poule tuberculeuse sur gélose glycérinée 
ont été fertiles. Les cultures de tuberculose aviaire sont humides, 
grasses, de consistance molle et non pas cohérentes et dures 
comme les cultures de tuberculose humaine. (C’est donc à tort que 
l'on attribue à l'emploi des milieux glycérinés l'aspect gras et 
humide des cultures, que l’on opposait à leur aspect sec, maigre et 
écailleux sur sérum. Ces aspects différents tiennent non à la nature 
du milieu nutritif, mais à la provenance directe de la semence 
tuberculeuse. Si l'on a semé des produits de tuberculose aviairespon- 
tanée sur des tubes de sérum, la culture s'y développe aussi bien que 
dans la gélose glycérinée en un enduit gras et humide. D'autre 
part, la tuberculose humaine acclimatée par de nombreuses géné- 
rations sur la gélose glycérinée, y conserve toujours son aspect sec, 
verruqueux et sa consistance spéciale. » Mais le Bacille de la tuber- 
culose humaine transporté, d'un milieu solide sur gélose glycéri- 
née, « à la surface du bouillon glycériné, en pellicules minces », 
donne naissance en deux ou trois semaines à une membrane épaisse, 
blanche, ridée, sèche, qui a tendance à remonter le long des parois 
du vase. Si l'on répète fréquemment les ensemencements ( on ob- 
tient des cultures se développant avec une rapidité et une abon- 
dance surprenantes. Il est même difficile de trouver un autre Mi- 
crobe pathogène susceptible de fournir, dans un même espace de 
temps, une récolte aussi abondante ». Pour permettre l'extension 
du voile en surface, le bouillon doit être versé en des ballons d'assez 
grandes dimensions qu'on ne remplit qu'à moitié. Il est remar- 
quable qu'ici encore le bouillon ne se trouble jamais et si des 
fragments se détachent de la membrane superficielle, ils s'accu- 
mulent au fond du ballon, sans y manifester un développement 
comparableau développement superficiel. Et de même des parcelles 
de culture de tuberculose déposées directement au fond d’un milieu 
liquide, bouillon glycériné par exemple, ne s'y développent que très 
médiocrement. Les restrictions faites de Straus et Gamaleia sur 
la distinction à établir entre la tuberculose des Mammifères et la 
tuberculose des Oiseaux, il reste donc bien évident et c’est l'avis de 
ces expérimentateurs, que l'addition de glycérine aux milieux 
nutritifs, même dans les cas de Bacilles tuberculeux d’origine 
humaine, présente de très grands avantages. 


36 G. BOUDIN 


En 1888, Pavlovsky réussit à ensemencer la surface de tranches 
de pommes de terre, milieu riche en amidon, avec des parcelles 
de culture du Bacille de la tuberculose sur gélose glycérinée. Cet 
expérimentateur ne se contente pas de déposer les Bacilles à la 
surface de ce milieu végétal ; il les fait pénétrer dans sa substance 
même, en frottant la surface à l’aide d'une spatule. Les tranches de 
pommes de terre étaient incluses dans des tubes de Roux et ceux- 
ei fermés à la lampe pour éviter l'évaporation. 

En 1888-1891, Hammerschlag démontre que l'on peut remplacer 
la glycérine par de la glycose, de la saccharose, des amyloses: dex- 
trine, glycogène. Quoique la glycérine parût à cet auteur plus par- 
ticulièrement favorable, les sucres et les substances amylacées per- 
mettaient une croissance notable du Bacille tuberculeux. Glycérine, 
sucres, sont transformés par le micro-organisme partiellement en 
alcool. Hammerschlag remplace encore le bouillon de viande par la 
décoction de levure de bière additionnée de 5 p. 100 de glycérine ; on 
peut l'utiliser, soit comme milieu de culture liquide, soit comme 
milieu solide, en l’'additionnant de gélose. En 1887, Nocard et Roux 
avaient obtenu un développement du Bacille de Koch sur milieu 
liquide minéral, analogue à celui de Cohn, et auquel ils avaient 
ajouté de la glycérine. En 1892, Bouveault constate que le Bacille 
de la tuberculose aviaire, ensemencé en bouillon glycériné, con- 
somme la glycérine, et assimile d'autant mieux les matières azo- 
tées qu'elles sont de constitution moins complexe. Ammoniaque, 
créatine, créatinine, ne se retrouvent plus dans le bouillon après 
la culture. La gélatine, la peptone ne sont pas utilisées. En 1893, 
Sander reprend l'étude de la croissance des Bacilles tuberculeux 
de Mammifères, sur des terrains de nutrition de nature végétale. 
L'auteur utilise carotte, choux-raves, raifort, le macaroni, stérili- 
sés dans la vapeur d’eau à 1000. De tels milieux sont à réaction plus 
ou moins acide. L'apport d'air accélère la croissance des cultures; 
aussi Sander recommande de ne pas sceller à la lampe les tubes 
comme l'a fait Pawlowsky, de ne les obturer qu'avec un bouchon 
d'ouate et une membrane de caoutchouc. La température de crois- 
sance la plus favorable est 38-390. Les exigences du Bacille de 
Koch quant à la qualité nutritive des milieux de culture sont ex- 
trêmement peu considérables. Sander prépare un liquide résiduel 
de pommes de terre écrasées, mélangé sans addition de peptone 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 31 


ni de sel, de 4 p. 100 de glycérine. Une partie de ce milieu liquide 
est neutralisée par une petite proportion de soude; l'autre partie 
est employé comme milieu naturel acide. Ces deux milieux de cul- 
ture sont ensemencés; le développement le plus intense des colo- 
nies se manifesta sur le milieu de réaction acide. L'expérimenta- 
teur vit en outre que le développement des cultures avait tendance 
à s'arrêter quand la réaction du milieu primitivement acide deve- 
nait alcaline, du fait de l'accroissement des colonies. Si les mi- 
lieux glycérinés réussissent, c'estque, d’après Sander. ils deviennent 
acides et restent acides sous l'influence de la glycérine. Comme 
terrain de nutrition, la pomme de terre paraît devoir être préférée 
à la gélose glycérinée, et aux milieux d'origine animale. La crois- 
sance est plus importante et plus rapide sur les milieux végétaux ; 
et, d'autre part le Bacille, ici, a tendance à produire des formes bac- 
tériennes renflées à l'extrémité, en forme de tête, et que Sander 
interprète comme une formation de spores. 

En 1892-1893, Kühne faisant varier la composition des milieux 
de culture pour étudier la composition de la tuberculine ancienne, 
est arrivé à cultiver le Bacille de la tuberculose à la surface d'un 
liquide glycériné, sans peptone ni extrait de viande, mais conte- 
nant de la leucine, de la tyrosine, de l'asparagine, de la taurine. 
Dans d’autres expériences, la leucine, la tyrosine, la taurine furent 
supprimées sans inconvénient pour le succès de la culture. La gly- 
cérine, comme source de carbone, s’est montrée indispensable et 
l'asparagine comme source d'azote très favorable. 

En 1898, Kimla, Poupé, Vesely publient en commun une contri- 
bution à la biologie et à la morphologie du Bacille de la tuberculose. 
De leurs travaux, il résulte que le Bacille de Koch, pris des diverses 
formes de la tuberculose humaine et animale, puis cultivé, ne mon- 
tre pas toujours les mêmes qualités végétatives. Comme Straus, 
ils constatent que souvent la première génération végète mal, et 
qu après acclimatement les cultures ultérieures peuvent s'accroître 
rapidement. Cependantils voient des cultures qui, bien végétantes à 
la première génération, ne le sont plus du tout après plusieurs géné- 
rations successives ; d’autres cultures conservent la même faiblesse 
végétative au cours des ensemencements successifs, d'autres ne 
s’accroissent pas du tout. Le Bacille de la tuberculose végète 
habituellement bien dans les milieux neutres, faiblement alcalins, 


38 G. BOUDIN 


ou faiblement acides. Dans des conditions déterminées, les auteurs 
ont observéaussi, maisexceptionnellement, la végétation abondante 
du même Bacille dans les milieux considérablement acides; par 
exemple, l'accroissement en forme de colonie membraneuse mince, 
sur un terrain liquide, fortement acide de la composition suivante : 


Ÿ 


Eau distilée 070 CB 200SSr: 
Phosphate anne et de soude : 0 gr. 3 
Glycérine . ARS ER SRE HOT 
ÉYCÉLO PRE EC MES EN RE Or PRE 2 gr. 


La glycérine en faible proportion a une influence favorable sur 
le développement des colonies (glycérine dans les proportions 
de # à 10 p. 100). Mais, disent les expérimentateurs, «sur les ter- 
rains à une forte proportion de glycérine, la végétation du Bacille 
est empêchée (20-25 p. 100 de glycérine) ; nous avons pu constater 
souvent de bonne heure la transformation des pellicules sèches en 
pellicules visqueuses, puis émission des acides gras du Bacille aux 
alentours, dont on a eu facilement la preuve à l'aide de la colora- 
tion ». C'est d'ailleurs là un phénomène général que suivant son 
degré de concentration, de dilution, une même substance peut être 
nuisible ou alimentaire. Kimla, Poupé, Vesely ont encore constaté 
dans des conditions déterminées les très faibles exigences du 
Bacille, en ce qui concerne la quantité et la qualité des matières 
nutritives. Tout d'abord, le Bacille ne s'accoutume aux change- 
ments de terrain nutritif, que si ces changements ne sont pas trop 
brusques. Les auteurs ont commencé par une culture en bouillon 
glycériné contenant l'extrait de viande, la peptone, le sucre, les 
sels. Puis ils suppriment l'extrait et la peptone, puis le sucre et la 
glycérine, et ensemencent des milieux composés de sels d’ammo- 
nium (sels organiques et minéraux) de mannite, asparaginate de 
sodium, phospate de magnésie, sulfate de potasse. Ils ont ensuite 
pu se passer du lactate d’ammonium, de l’asparaginate de sodium 
et sont arrivés au milieu de culture sans albumine et sans glycérine 
de la composition suivante : 

Eau GISI Re RES ee RE SAT DO 
Mannite #22 PR dt en re aie ve 10 
Tartrate d’ammonium 
Chlorure de sodium . 


Phosphate de potassium . 
Sulfate de magnésie . 


SOors= 

Ja 0 0 Jo Oo 0e 
30 Ne EEE 
= 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 39 


Et évidemment, en enlevant la mannite la culture n’a pas réussi. 

Il est encore possible d'obtenir des cultures sur les milieux de 
composition végétale les plus divers: eau de pommes de terre, 
eau distillée additionnée de morceaux de truffes, liquides soumis à 
l’'ébullition à plusieurs reprises jusqu’à ce que l’eau reste limpide. 
Sur les terrains sans albumine, éventuellement sans glycérine, les 
cultures se présentent avec l'aspect : « d’une membrane mince, à 
peine visible, comme du papier de soie mouillé, de membranes 
réticulées, ou encore avec l'aspect de membranes de couleur blan- 
che, éclatante, de couleur jaunâtre, brunâtre. Enfin très remar- 
quables sont les membranes visqueuses, troublant le bouillon ; par 
suite de chocs qu'éprouve le vase, des nuages de poussière fine, ou 
des trainées entières d'une matière visqueuse se détachaient de la 
surface inférieure de la membrane et descendaient au fond... La 
pureté absolue des cultures à été toujours prouvée par la coloration 
spécifique, et la culture ultérieure des divers milieux. » 

Il faut citer enfin parmi les milieux où l'ensemencement de 
produits tuberculeux est relativement facile, le milieu acide de 
Ficker, formé de gélose et de substance cérébrale. Martin Ficker 
a préconisé ce terrain de culture afin d'éliminer tous les Bacilles 
ne poussant pas sur les milieux acides. 

Dansles culturessur sérum, sur milieux glycérinés, dans les colo- 
nies d'aspect radié, écailles ou croutelles sur milieux solides, 
pellicules ou membranes sur milieux liquides, on constate, au gros- 
sissement microscopique, la disposition déjà signalée des Bacilles 
juxtaposés plus ou moins étroitement les uns aux autresen filaments 
qui croissent en lignes spiralées. Ce sont cesfilaments qui, s'échap- 
pant du centre de la colonie, lui donnent cet aspect étoilé plus ou 
moins apparent, ou ens’anastomosant les unsaux autres constituent 
les colonies confluentes, en membrane. Les éléments bacillaires 
sont ainsi accolés les uns aux autres par la substance unissante 
dont il a déjà été fait mention, susceptible d'une coloration iden- 
tique à celle des Bacilles, mais de beaucoup moins intense. 

Puisque sur tous les milieux solides et liquides le développement 
se manifeste tout particulièrement sur les parties superficielles, le 
Bacille tuberculeux paraît être éminemment aérobie. Cependant 
il est peu sensible au défaut d'oxygène. Terre fait ces constatations 
sur le Bacille tuberculeux pisciaire : « Placé dans des conditions 


40 G. BOUDIN 


dysgénésiques, le Bacille pisciaire suspend sa croissance ; mais 
ramené dans des conditions convenables, il se remet à pousser. 
Des colonies conservées dans de l’eau stérilisée donnent encore des 
semis fertiles après plus de six mois. Dans les expériences d'anaé- 
robiose, les tubes replacés à l'air végètent. » Une adaptation 
complète du Bacille tuberculeux à la vie anaérobie a été réalisée 
par Marpmann. Le virus est susceptible de s'accroitre dans les 
conditions anaérobies, par réduction des substances nutritives du 
milieu de culture. C'est ainsi que Marpmann a obtenu des colonies 
en vie anaérobie, par ensemencements de milieux composés de 
gélatine, agar, glycérine et phosphate de chaux. La culture était 
blanche. Les ensemencements ont encore réussi dans les mêmes 
conditions, sur gélatine, agar et glycérophosphate de chaux; de 
même sur des milieux lécithinés. Dans les gaz de réduction on 
constate la présence de PH. L'’expérimentateur envisage la pos- 
sibilité d'un mode de vie anaérobie du virus tubereuleux dans les 
organismes vivants, et l'influence que peuvent avoir les produits 
de réduction qui en résultent sur les cellules, le sang, le sérum 
sanguin. 


CHAPITRE V 


1. Les différentes espèces ou variétés du Bacille tuberculeux. Sont-elles 
pratiquement transformables les unes en les autres? 

2. L'obtention d'une tuberculine active, produit artificiel, est un caractère 
tout à fait insuffisant de différenciation. 


Nous venons d'étudier les caractères généraux des cultures du 
Bacille tuberculeux. Maisil peut manifester des caractères de végé- 
tabilité particuliers, variables avec son origine parasitaire, Homme, 
Bovidés, Oiseaux, Vertébrés à sang froid. Les caractères morpho- 
logiques du Bacille humain et du Bacille bovin, l'aspect macrosco- 
pique de leurs colonies et les conditions de leur végétabilité sont 
identiques. Ils ne se différencient que par leur propriété de viru- 
lence ; ils sont tous deux pathogènes pour le Cobaye. Mais les Ba- 
cilles des lésions tuberculeuses humaines sont peu virulents pour 
les Bovidés, tandis que les Bacilles bovins inoculés à des Bovidés 
manifestent une virulence considérable. Koch considère les Bacilles 
tuberculeux de l'Homme et du Bœuf comme espèces distinctes. Il 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE Al 


est certain qu'un Bacille tuberculeux adapté à l'organisme humain 
a certaines propriétés biologiques différentes de celles d’un Bacille 
adapté à l'organisme des Bovidés. Mais, à moins que la Bactériologie 
ne soit qu'un catalogue de faits particuliers, on ne saurait pour 
cela différencier les deux virus d’une façon absolue, puisqu'il est 
possible de les transformer l’un en l’autre, soit par adaptation à 
des milieux inertes, soit par adaptation à un autre mode de vie 
parasitaire. Cette expérience de Vallée et Carré, à elle seule 
est probante : «(Un Singe (Macacus Rhesus) ingère une petite quantité 
d'une culture de tuberculose bovine très virulente, qui, inoculée 
dans la mamelle d’une Vache enr lactation, tue l'animal en 32 jours: 
ce Singe contracte une tuberculose généralisée dont il meurt rapi- 
dement. Le Bacille bovin repris dans les ganglions mésentériques 
du Singe, a perdu sa virulence pour la Vache, il doit passer succes- 
sivement par les mameïles de deux Vaches en lactation, pour re- 
trouver partiellement sa virulence initiale pour le Bœuf et tue enfin 
en six jours. par inoculation intra-mammaire, la troisième Vache 
éprouvée. » Les auteurs, qui en même temps produisent les résultats 
d'une autre expérience, concluent ainsi : « Ces expériences éta- 
blissent nettement l'extrême malléabilité du Bacille de Koch et 
sa faculté d'adaptation à des espèces animales autres que celles 
dont il provient.» 

Il a été précédemment mentionné que la luxuriance des cultures 
du Bacille de Koch dans les milieux glycérinés employés pour la pre- 
mière fois par Roux et Nocard, avait pu être attribuée à ce fait que 
les expérimentateurs avaient ensemencé du virus aviaire. On con- 
fondaït en effet à cette époque Bacille aviaire et Bacille des Mammi- 
fères. Les recherches de différents auteurs, en particulier de Straus 
et Gamaleia, Maffucci, démontrent que si, dansles lésions de tuber- 
culose aviaire, il y a un Bacille identique par ses réactions de colo- 
ration et par sa forme au Bacille des Mammifères, ce Bacille 
manifeste des caractères de culture et de virulence assez spéciaux, 
pour qu'on doive en faire une espèce distincte, irréductible au virus 
tuberculeux humain. En effet, le virus aviaire manifeste une végé- 
tabilité plus énergiqne. Il se développe sur les milieux de culture 
plus rapidement que le Bacille des Mammifères; il montre des co- 
lonies blanchâtres, mamelonnées, confluentes, d’un aspect gras et 
humide, différent de l'aspect écailleux et sec des Bactéries de Koch. 


42 G. BOUDIN 


La température optimum du développement de celle-ci est 37°-380, 
Leur développement s'arrête à 420. D'après Maffucci, les limites de 
végétabilité du Bacille aviaire oscillent entre 20° et 50°, 43° étant 
l'optimum. À hautes températures, 42°-46°, le Bacille aviaire croit 
en formes ramifiées, avec rameaux renflés à l'extrémité, forma- 
tions qui ne sont jamais réalisées par le Bacille tuberculeux des 
Mammifères. De plus, la tuberculose aviaire s’inocule facilement 
aux Gallinacés. Le Lapin est plus sensible au virus aviaire qu'au 
virus humain. Le Lapin et le Cobaye, après inoculation de Bacille 
des Oiseaux meurent le plus souvent de tuberculose septicémique 
(type Yersin) sans lésions nodulaires dans les organes. Les Galli- 
nacés sont réfractaires au Bacille de la tuberculose humaine. 

Mais on ne saurait baser une différenciation d'espèces sur le pou- 
voir pathogène d'un virus, et son mode d'action dans les orga- 
nismes. Un même microbe, agent de tuberculose, comme le 
Streptobacille que J. Courmont a isolé des lésions tuberculeuses 
du Bœuf, est capable, dans certaines conditions et chez certaines 
espèces aminales, de provoquer la mort de deux façons nettement 
différentes : ou en créant des lésions nodulaires, ou en détermi- 
nant une septicémie sans lésions. Le Bacille de Koch lui-même 
peut réaliser une septicémiechez les Mammifères sans réactions cel-* 
lulaires évidentes. 

Straus a pu constater que les formes ramifiées de la tubercu- 
lose aviaire sont présentes dans des cultures qui se sont développées 
à 37°. De plus, ramification et formation en massue ne sont pas, 
comme cela sera décrit plus loin, particulières au virus aviaire 
mais sont caractéristiques des Bacilles de la tuberculose humaine, 
bovine, aviaire, pisciaire. Cadiot, Gilbert et Roger, Courmont et 
Dor, Nocard ont démontré d’ailleurs que les caractères de viru 
lence du Bacille aviaire ne sont pas absolus, et que le Bacille aviaire 
et le Bacille des Mammifères ne sont ainsi que deux variétés d’une 
même espèce. Kimla, Poupé et Vesely ont pu acclimater le Bacille 
de la tuberculose humaine, même à une température de 43° à 45°, 
où sa végétation était parfaite : « C'est précisément cette qualité, 
et la faculté de métamorphose d'une culture du Bacille de la tuber- 
culose humaine sèche, enune culture humide, visqueuse, identique 
comme aspect à la tuberculose aviaire qui nous ont fait affirmer, 
disent-ils, que le Bacille de la tuberculose humaine et celui de la 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 43 


tuberculose aviaire ne sont pas deux espèces distinctes, mais bien 
deux variétés de la même espèce. » 

En 1897, Bataillon, Dubard et Terre ont l’occasion d'étudier une 
tumeur développée dans la cavité générale d'une Carpe. Ils en 
isolent des Bacilles manifestant les mêmes réactions de coloration 
que le Bacille de Koch, même résistance à la décoloration par les 
acides dilués et l'alcool, même aérobiose, même aspect des cul- 
tures sur les divers milieux, « surtout si l’on prend comme terme 
de comparaison l'aviaire ». Mais ils ont ce caractère particulier, de 
se développer très rapidement, en 3 ou 4 jours, à la température 
ordinaire : l’'optimum de croissance est à 25°. Au-dessus de 34°, la 
végétation s'arrête. Ces micro-organismes se développent égale- 
ment bien sur les milieux légèrement acides ou alcalins; « c’est 
sur la pomme de terre, terrain à réaction acide, que les récoltes 
sont le plus riches ». Les colonies revêtent assez souvent une colo- 
ration rosée. Elles donnent le même parfum que les cultures de la 
tuberculose des Mammifères et des Oiseaux. 

En plus de la particularité d’un développement abondant à la 
température ordinaire, les cultures de la tuberculose des Poissons, 
pathogènes pour les Animaux à sang froid, ne sont pas virulentes 
pour les Vertébrés à sang chaud. Ces deux caractères ne peuvent- 
ils être mis en relation l’un avec l’autre? Barthelat insiste sur ce 
fait déjà connu, que l’une des conditions importantes de la viru- 
lence de certaines Moisissures, Mucor, Aspergillus, est d'avoir un 
optimum de croissance à 35-38. 

Bataillon, Dubard et Terre, Kral et Dubard démontrent que le 
Bacille pisciaire n’est qu'une troisième variété du Bacille des Mam- 
miières. On peut transformer ce dernier, par passage sur l’animat 
à sang froid, en Bacille capable de croître à la température ordi- 
naire, pathogène pour les Vertébrés à sang froid, dépourvu de 
virulence pour les Animaux à sang chaud. 

Lubarsch constate que le Bacille des Mammifères se modifie par 
passage sur la Grenouille. Le Bacille de Koch inoculé dans les sacs 
Iymphatiques dorsaux envahit les viscères (rate, foie, reins) y reste 
plusieurs semaines, sans subir de modifications morphologiques 
notables. Maïs il devient de moins en moins virulent pour le Co- 
baye. Après 6 à 8 semaines, il n’est plus pathogène. C'est de la rate 
d'une Grenouille inoculée depuis dix semaines que Lubarsch a isolé 


LAN G. BOUDIN 


des Bacilles dont les cultures, végétant à une température optimum 
de 28°-30°, ont un aspect macroscopique comparable à celui des 
cultures ordinaires. 

Ces Bacilles ne donnent lieu chez le Lapin qu'à une tuberculose 
localisée. Mais avec la matière de cette tuberculose du Lapin, on 
donne au Cobaye une tuberculose inoculable en série; et il est pos- 
sible d'obtenir une forme croissant à la température de l’étuve. 
Après plusieurs passages par l'organisme des Animaux à sang- 
chaud, le Bacille des Mammifères, modifié par son séjour dans 
l'organisme de la Grenouille, serait donc capable de recupérer sa 
virulence. Mæller isole de la rate d'un Orvet inoculé avec des cra- 
chats tuberculeux, un Bacille dont les cultures eroissent bien à 20°, 
ne végètent plus au-dessus de 30° et sans virulence pour les Verté- 
brés à sang chaud. Mæller, Bataillon et Terre font ensemble des 
études comparatives sur le Bacille de la Carpe et le Bacille de l’Or- 
vet : «Les réactions colorantes, la résistance aux acides, la crépi- 
tation à la flamme, les limites de température, la puissance végé- 
tative, l'aspect des cultures, les modifications imprimées au milieu, 
la couleur, l'odeur, la saveur (le bouillon filtré laisse au goût une 
saveur de noisette) sont les mêmes. Ils sont pathogènes pour les 
Vertébrés à sang froid, ils sont inoffensifs pour les Vertébrés su- 
périeurs; donc il est impossible de donner un caractère précis 
pouvant les séparer et il y a lieu d'identifier le Bacille de la Carpe 
et le Bacille de l’Orvet ». Mais le fait fondamental, c'est la trans- 
formation du Bacille de l'Homme en Bacille de l'Orvet. (II y avait 
intérêt à rapprocher les résultats identiques obtenus isolément en 
France et en Allemagne par des voies différentes et sur les types 
les plus divers. » 

Terre estime en conséquence que le Bacille pisciaire représente 
bien une troisième variété du Bacille de Koch, adaptée aux Verté- 
brés à sang froid. Il lui est impossible de préciser toutefois les 
conditions de déterminisme de la transformation : « Nos essais 
positifs ont été obtenus par des cultures non pas très virulentes, 
mais douées d'une grande végétabilité. » Dubard dit d'autre 
part : « Peut-être devons-nous cette grande facilité de la trans 
formation de la tuberculose humaine à notre paresse etau manque 
d'aides, ce qui nous avait conduit à simplifier au maximum la com- 
position de nos bouillons. Ni sel, ni peptone, ni glycérine, ni 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 45 


sucre, le seul emploi de la somatose... «..… Cette tuberculose, très 
végétante, cultivée sur milieux très pauvres, à base de somatose 
ou de bouillon est peu virulente pour le Cobaye... Ceci parait avoir 
une importance, car jamais nous n'avons pu obtenir de transfor- 
mation en nous servant de produits tuberculeux purs, c’est-à-dire 
fortement adaptés à un sol. » 

Herzog, en 1902, obtient des lésions tuberculeuses, chez la Gre- 
nouille, par inoculation de tuberculose des Mammifères. Les Ba- 
cilles se multiplient rapidement dans l'organisme. En 1903, le 
même auteur fait paraître un mémoire sur l’atténuation de la viru- 
lence des Bacilles de la tuberculose des Mammifères par le séjour 
dans l'organisme des Vertébrés à sang froid. Les Grenouilles sont 
inoculées dans les sacs dorsaux. De là, les Bacilles envahissent les 
organes internes et y créent des lésions de tuberculose caractéris- 
tiques. C'est avec des parties du foie de la Grenouille ainsi 
infectée, que des Cobayes sont inoculés dans la cavité périto- 
néale. Par ces expériences, Herzog arrive aux résultats suivants : 
le Bacille tuberculeux, inoculé à des Animaux à sang froid 
conserve sa virulence pendant plus de 120 jours. Mais les Cobayes 
meurent d'autant plus tardivement que les Bacilles ont séjourné 
plus longtemps dans le corps des Grenouilles. La lenteur de 
l'évolution de cette tuberculose expérimentale du Cobaye ne sau- 
rait être imputée à la diminution du nombre des Bacilles dans 
le corps des Grenouilles. Herzog à vérifié qu'il s'agit bien là d’une 
atténuation de virulence. En multipliant les passages par l'orga- 
nisme de la Grenouille, on arrive à obtenir une variété de Bacilles 
tuberculeux dénués de toute virulence pour le Cobaye. Ces Bacilles 
quise sont multipliés dans le corps de Vertébrés à sang froid d’une 
façon souvent extraordinaire présentent la même morphologie, et 
les mêmes réactions tinctoriales que les Bacilles de la tuberculose 
humaine. 

Herzog arrive à des résultats comparables avec le Bacille de la 
tuberculose bovine. Ces expériences confirment donc les recherches 
de Lubarsch, conduites dans des conditions presque semblables. 

Cette conception d’un Bacille tuberculeux capable de manifester 
les trois variétés, humaine, aviaire, pisciaire, susceptible de se 
transformer les unes en les autres n’est pasadmise partousles bacté- 
riologistes. Borrel estime que l’on ne saurait encore identifier le Ba- 


46 G. BOUDIN 


cille aviaire, et le Bacille pisciaire avec le Bacille des Mammifères, 
parce que les deux premiers ne « secrètent » pas une tuberculine 
d'une activité comparable à la tuberculine des cultures de tubercu- 
lose humaine. Babès, Arloing,ont pu cependant obtenir des cultures 
d'aviairecomme des cultures du Bacille bovin des tuberculines très 
comparables comme activité. D’après Ramond et Ravaut, d'après 
Ledoux-Lebard, il serait possible avec le Bacille tuberculeux des 
Poissons d'obtenir une tuberculine à effets analogues à ceux de la 
tuberculine extraite des cultures en bouillon du Bacille de Koch. 
Toutelois, d'après ces expériences, la tuberculine pisciaireinoculée 
à des Cobayes tuberculeux n'agit qu'à doses plus élevées comme 
agent thermogène. Mais il paraît bien difficile de donner la tuber- 
culine comme bon caractère de différenciation d'espèces. 

Krompecher constate que des Bacilles de tuberculose humaine, 
cultivés pendant six années, sans interruption, sur des milieux 
artificiels arrivent à manifester les propriétés suivantes : inoculés 
aux animaux, même en grande quantité, ils ne les infectent plus. 
Ils se développent assez bien à des températures peu élevées (20°). 
Enfin on ne peut extraire des cultures de tuberculine efficace. En con- 
séquence, il paraît difficile d'attacher au seul caractère de la pré- 
sence ou de l'absence d'une tuberculine toxique une importance 
considérable pour classer des individus et devant l'emporter, à lui 
seul, sur les caractères tirés de la biologie générale des espèces, de 
la constitution intime, du mode de structure, de l'aspect général 
de leurs colonies. 

D’autres expérimentateurs font remarquer que les tentatives de 
transformation de la tuberculose humaine en tuberculose pisciaire 
ont échoué dans beaucoup de cas. Bataillon et Terre, Dubard ont 
eu en eflet de nombreux échecs. Mais les résultats positifs, obte- 
nus par eux et par d'autres expérimentateurs dans différentes con- 
ditions, doivent prévaloir sur les résultats négatifs. Même chez les 
auteurs qui ont échoué dans les tentatives de transformation 
(Auché et Hobbs, Nicolas et Lesieur, Morey, Herzog), on trouve, dit 
Terre, des conclusions qui viennent à l'appui des siennes, « soit 
pour la généralisation du Bacille de Koch dans l'organisme des 
animaux à sang-froid, soit pour les réactions de l'économie, soit 
pour la conservation d’abord, puis la disparition ultérieure de 
la virulence du Bacille vis-à-vis des Vertébrés à sang chaud. » 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 47 


En résumé, ce qui reste indécis dans l'adaptation de la tubercu- 
lose des Mammifères à l'organisme des Poissons, c’est son détermi- 
nisme. À ce propos, on doit faire remarquer, et comme cela résulte 
de l’ensemble des recherches faites à ce sujet, que l’acclimatement 
du Bacille de Koch à des milieux de culture de moins en moins 
différenciés, de moins en moins riches en matériaux nutritifs 
organiques, semble une condition préalable très importante de 
l'adaptation. Terre dit que les essais de transformation positifs 
ont été obtenus au moyen de cultures, non pas très virulentes, mais 
douées d'une grande végétabilité. 

Nous avons vu que Dubard employait comme milieux de culture 
des milieux somatosés : « Ni sel, ni peptone, ni glycérine, ni 
sucre. le seul emploi de la somatose. cette tuberculose très végé- 
tante cultivée sur milieux très pauvres, à base de somatose, ou de 
bouillon est peu virulente pour le Cobaye... Ceci paraît avoir une 
importance. Car jamais nous n'avons pu obtenir detransformation 
en nous servant de produits tuberculeux purs, c’est-à-dire forte- 
ment adaptés à un sol. » Il semble bien que ceux des bactériolo- 
gistes qui considèrent les différents Bacilles tuberculeux comme 
des espèces distinctes, pratiquement immuables, maintiennent 
précisément sous des conditions strictes de développement, et 
telles que Koch les a présentées en premier, les Bacilles tubercu- 
leux des Mammifères, des Oiseaux. Un des arguments qui tend de 
plus en plus à être invoqué par les adversaires de l'hypothèse trans- 
formiste est celui-ci : si certains expérimentateurs sont arrivés à 
modifier les aspects macroscopiques des cultures des différents 
Bacilles tuberculeux, et à identifier ceux-ci réciproquement les 
uns aux autres, et si ces auteurs ont pu obtenir des résultats 
d'inoculation variables et non conformes à ceux qui sont spécifiés 
pour chaque type de Bacille, c’est qu’en réalité les cultures de ces 
expérimentateurs sont impures, et contiennent simultanément 
les différents types de tuberculose, humaine et aviaire par 
exemple. La solution de ce problème de la variabilité ou de l’im- 
mutabilité des Bacilles tuberculeux et acido-résistants devient, 
dans ces conditions, extrêmement difficile, si ce n’est impossible 
à résoudre. Mais si, contre l'argument, on admet que les transfor- 
mations ont bien été obtenues avec des cultures pures, la question 
de la variabilité est bien résolue, dès lors, par l’affirmative. 


48 G. BOUDIN 


CHAPITRE VI 


1. Le nodule tuberculeux : phénomènes de mitose cellulaire. Caséification 
et calcification. Mode de répartition des Bacilles de la tuberculose dans la 
cellule géante. De la rareté du Bacille acido-résistant dans les lésions. 

2. Hypothèse de Koch sur la sporulation du Bacille en vie parasitaire. 
Hypothèse des variations morphologiques du Bacille (Srraus); faits positifs 
à l'appui de cette dernière hypothèse (FERRAN, ARLOING, F. BESANÇON). 
Inoculation négative au Cobaye de produits tuberculeux. 


Puisque le Bacille tuberculeux atteint Mammifères, Oiseaux et 
Vertébrés à sang froid, on a pu appeler justement la tuberculose 
«une panzootie universelle » (Lydtin). Les localisations des lésions, 
dans cette maladie, sont multiples ; les parenchymes, les séreuses, 
les ganglions peuvent être atteints. Malgré des aspects macrosco- 
piques différents, l'étude histologique des lésions montre qu'elles 
se réduisent à un type inflammatoire particulier: les masses 
nodulaires; les tubercules ne sont que des amas de granulations 
microscopiques évoluant soit vers la caséification, soit vers la calci- 
fication. 

La granulation tuberculeuse se compose de trois zones : une cel- 
lule géante multinucléée au centre, autour d'elle des cellules épi- 
thélioïdes; à la périphérie, des cellules embryonnaires à gros 
noyau, à protoplasma peu abondant. Il existe deux théories sur 
l'histogenèse du tubercule. Il serait édifié, d'après une première 
théorie, par les cellules fixes des tissus, cellules épithéliales et 
cellules fixes du tissu conjonctif. D'après une deuxième théorie, 
il serait édifié par les cellules migratrices seules. Dans la première 
doctrine (Baumgarten), les cellulesfixes des tissus, les cellules fixes 
du tissu conjonctif, cellules endothéliales des vaisseaux, cellules 
épithéliales, sous l’action du Bacille du Koch subissent, pour se 
transformer en cellules géantes, des phénomènes de division indi- 
recte du noyau : (les cellules en caryocinèse peuvent contenir un 
ou plusieurs Bacilles ; la plupart n'en renferment pas, mais des 
Bacilles s’observent dans leur voisinage. » D'après cette théorie, les 
leucocytes, éléments d'origine migratrice, ne présentent jamais de 
modification de nature progressive comme celle de la division 
caryocinétique. Leur évolution est toujours régressive. 

Dans la deuxième doctrine (Metshnikov), les cellules géantes 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 49 


montrent, si l'on emploie de forts grossissements, des phéno- 
mènes de mitose (1), elles seraient formées de phagocytes. Des étu- 
des de Cornil, faites à ce sujet, tendent à prouver que les cellules 
géantes se forment par prolifération caryokinétique des leucocytes 
intravasculaires.Mais Yersin et Borrel déclarent n'avoir pas observé 
de divisions caryocinétiques, ni des cellules épithéliales, ni des 
cellules migratrices. Pour ces auteurs, la cellule géante résulte 
de la fusion protoplasmique de leucocytes dont les noyaux seront 
les noyaux de la cellule géante. Cellules épithélioïdes, cellules 
mononucléaires auraient une même origine mésodermique. 

La granulation tuberculeuse se forme dans l'organisme infecté 
très rapidement ; puis elle a tendance à se caséifier, ou à évoluer 
vers la dégénéresence fibreuse, ou l’incrustation calcaire. La sclé- 
rose ou la calcification du tubercule sont considérées souvent 
comme des processus de guérison. Mais on peut constater la pré- 
sence des Bacilles dans des nodules très anciens et calcifiés (von 
Ziemmsen, Déjerine), découverts à l'autopsie de gens âgés et chez 
lesquels la tuberculose ne semblait pas avoir évolué. La matière 
de tels nodules peut être virulente pour le Cobaye. De plus la 
tuberculose- des Bovidés et la tuberculose des Oiseaux reçoivent 
une physionomie spéciale du fait de la rapidité de l'infiltration 
calcaire, et de son étendue. Le ramollissement et les cavernes sont 
rares dans la tuberculose des Bovidés, et Nocard met en évidence 
chez les Oiseaux, sur la rate particulièrement «de véritables tuber- 
cules durs, calcaires, agglomérés, en masses irrégulières, parfois 
très volumineuses ». Des Bacilles virulents sont cependant présents 
en plus ou moins grand nombre dans de telles lésions. Ils sont 
particulièrement nombreux dans les cas de tuberculose aviaire. 
Koch dit dans sa communication de 188%, « tous ces nodules 
tuberculeux provenant de quatre Poules étaient extraordinairement 
riches en Bacilles de la tuberculose, qu’on trouvait surtout accu- 
mulés dans le voisinage immédiat des parties calcifiées. » En consé- 
quence, si la calcification est un processus de guérison, elle n'est 
telle qu'indirectement et tout mécaniquement, et pourrait peut- 
être être attribuée à la teneur plus ou moins considérable en sels 


(1) Si nous insistons ici sur ces réactions cellulaires, c’est que les phénomènes 
de mitose observés par Metshnikov en certains cas ont eu une évolution tout à 
fait particulière. Cf. p. 118. 


Archives de Parasitologie, XI, n° 4, 1906. 4 


50 G. BOUDIN 


calcaires du sol minéral des organismes envahis par les Bacilles 
tuberculeux (1). C’est un phénomène indépendant de la bacté- 
riolyse. 

La lésion de granulation, la lésion nodulaire n’est pas spécifique. 
C'est une lésion dont les causes peuvent être multiples et très 
sensiblement différentes. On constate la formation de tubercules, 
après injection de particules inanimées et stérilisées : encre de 
Chine, mercure, huile d'olive. — Mais ces tuberculoses ne sont pas 
réinoculables en série. Ce sont elles seules que S. Arloing, Cour- 
mont désignent sous le nom de pseudo-tuberculoses. Il y a ensuite 
des tuberculoses microbiennes (Bacille de la tuberculose des Ron- 
sgeurs, Zooglée de Malassez et Vignal). Nous avons exposé plus 
haut les rapports apparents ou réels qu’elles pouvaient présenter 
entre elles et avec la tuberculose à Bacille de Koch. Il est enfin des 
tuberculoses mycosiques déterminées par différentes espèces du 
groupe Discomyces: Discomyces farcinicus (Nocard), Discomyces. aste- 
roïdes (Eppinger), Discomyces bovis et pardes Aspergillus. Il est done 
de toute nécessité d’avoir recours à l'examen microscopique et aux 
ensemencements d’une lésion tuberculeuse, pour en déterminer et 
la nature et la cause; et cette nécessité s'impose d'autant plus 
actuellement que l’action pathogène primitive de différentes Moisis- 
sures, de l’Aspergillus fumigatus par exemple, chez l'homme et chez 
les animaux n'est plus contestée. 

La quantité de Bacilles de Koch décelables dans les cellules 
géantes est extrêmement variable. Chez les Oiseaux, les lésions 
sont extrêmement riches en Bacilles. Chez l'Homme, chez les 
Mammifères, chez le Bœuf en particulier, les cellules géantes 
peuvent ne laisser voir que de très rares Bacilles et même n'en 
contenir aucun. Il a déjà été dit plus haut que Koch admettait 
la disparition des Bacilles, leur sporulation, et leur multiplication 
lente dans les tissus parasités. Spina, Malassez et Vignal font cette 
constatation de l'absence assez fréquente des Bacilles de Koch dans 
les tubercules; et c'est au cours d'examens systématiques d'infil- 
trations ou de nodules tuberculeux, qu'ils découvrent la Zooglée 
tuberculeuse. Nocard, à propos de la tuberculose des Bovidés dit : 


(1) Il est à remarquer que dans l’actinobacillose, ne se trouvent de touffes : 
massue à éléments rigides et calcifiés que dans les lésions de la mâchoire (Spitz 
et Lignières). 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 51 


«Les Bacilles de Koch ne se trouvent pas toujours également nom- 
breux dans toutes les lésions tuberculeuses: c’est là unedes obscu- 
rités de l'histoire de cette maladie. On ne trouve pas, parexemple, 
un nombre de Bacilles proportionnel à l'importance des lésions ; 
tel tubercule énorme en décèle, même à l'examen le plus attentif, 
quelques unités seulement, tandis que tel autre, beaucoup plus 
petit,en contient des quantités considérables. En thèse générale, 
lorsqu'il y a beaucoup de cellules géantes, on ne voit que très 
peu de Bacilles; parfois, il est vrai, l'examen attentif d’une prépa- 
tion ne permet pas de voir ces microbes, bien que, cependant, il y 
en ait qui sont dissimulés par un plan plus superficiel du tissu 
de la coupe; il n'est pas rare également de voir des grains colorés 
(en rouge ou en violet suivant le procédé de coloration employé) 
et qui représentent vraisemblablement des Bacilles coupés per- 
pendiculairement ou obliquement à l’axe (1). » 

Nocard revient à plusieurs reprises, dans son livre sur les 
tuberculoses animales et dans le Traité des Maladies microbiennes 
des animaux, sur cette difficulté qu’il y a à déceler des Bacilles 
dans les lésions. Et cette constatation est faite par nombre de 
bactériologistes. À la Société d’études scientifiques sur la tubercu- 
lose (mai et juin 1905), Darier présente un rapport sur les tuber- 
culides cutanées et les tuberculoses atténuées, dans lequel il 
montre, quen dehors de difiérentes formes de tuberculose 
cutanée indiscutables, puisqu'on peut y constater, «la présence 
du Bacille de Koch, et que leur tissu inoculé au Cobaye, tuber- 
culise cet animal », il est d’autres dermatoses provisoirement 
désignées sous le nom de tuberculides, et en relation manifeste 
avec une origine tuberculeuse. Ces tuberculides, en effet, se déve- 
loppent habituellement chez des sujets atteints de tuberculoses 
viscérales ou surtout de tuberculoses ganglionnaire et osseuse. 
L'anatomie pathologique de ces tuberculides, montre fréquem- 
ment une structure en tous points analogue à celle des tissus 
tuberculeux, mais aussi une constitution parfois différente, 
consistant en altérations vasculaires, périvasculaires, sclérose. 


(1) Cette hypothèse peut être plus vraisemblablement remplacée-par celle de 
la présence dans les coupes de cocci acido-résistants, qui sont bien des germes 
tuberculeux, tels que les ont vus beaucoup d’auteurs, Metshnikov, Straus entre 
autres. 


52 G. BOUDIN 


Mais les Bacilles de Koch sont exceptionnellement présents dans 
les lésions; l'inoculation au Cobaye des tuberculides reste habi- 
tuellement sans eflet; l'épreuve de la tuberculine donne des 
résultats inconstants et souvent incomplets. La structure des 
lésions, leur siège anatomique initial, leur symétrie plaident en 
faveur de l'apport par la voie vasculaire de l'agent virulent qui 
leur donne naissance; elles ne seraient pas créées par une inocula- 
tion locale exogène, comme il est de règle pour les tuberculoses 
cutanées non douteuses. Ces tuberculides ont tendance à la réso- 
lution spontanée : « Cette circonstance était de nature à impres- 
sionner l'esprit, à une époque où l'on ignorait les formes atté- 
nuées et curables de la tuberculose ; mais ces formes, dit Darier, 
on les connaît aujourd'hui à peu près dans tous les tissus et dans 
tous les organes: leur existence n'a plus rien de contradictoire 
avec la conception élargie que nous nous faisons du processus 
tuberculeux. En résumé on est fondé, je crois, à admettre que les 
tubereulides font partie de la classe des tuberculoses cutanées 
dont elles représentent des types atténués, et auxquelles elles se 
relient pas des transitions insensibles. » 

Mais, même dans les tuberculoses de la peau à origine bacillaire 
non douteuse, et spécialement dans le lupus, «la recherche des 
Bacilles, dit Darier, sur les coupes est si infructueuse qu'elle décou- 
rage la plupart des histologistes.. Koch, si mes souvenirs sont 
exacts, a annoncé qu'on ne découvre qu'un Bacille sur 47 coupes en 
moyenne; d'autres disent qu'il faut en examiner 60! L'inoculation 
au Cobaye, l'animal réactif, exige pour être probante l'injection 
d'au moins 50 centigrammes de tissu lupique; malgré cela com- 
bien de fois n'échoue-t-elle pas et qui fera le dénombrement des 
lupus tuberculeux véritables inoculés avec succès? » Darier 
signale en même temps d'autres lésions osseuses, articulaires, 
viscérales d’origine tuberculeuse, mais non bacillifères. « Dans 
les reins, dans le foie on observe des lésions diffuses, épithéliales 
ou interstitielles qu'on peut à bon droit rattacher à la tuberculose, 
malgré l'absence de Bacilles. Chacun sait que dans les pleurésies 
tuberculeuses, le liquide est d’une virulence très variable, quel- 
quefois à peine bacillifère.. S'il me fallait formuler une conclusion 
dit le rapporteur, je me bornerais à dire d'une façon volontairement 
assez vague qu'en pathologie le rôle de j'infection bacillaire paraît 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 93 


singulièrement plus étendu qu'on ne l'avait pensé jusqu'à ces 
dernières années. » Dans la discussion qui suivit ce rapport, Teis- 
sier fit valoir qu'il fallait tenir compte et de la nature spéciale du 
Bacille, et de la réaction particulière du terrain, celle-ci pouvant 
être un facteur très important de la structure des lésions. D'autre 
part, F. Bezançon cite les résultats d'expériences qui montrent Îré- 
quemment « des tuberculoses bénignes dues à des Bacilles de viru- 
lence très atténuée » et l'expérimentateur expose le fait suivant : 
«Une culture de Bacilles de Koch, provenant d’un cas de méningite 
tuberculeuse humaine et transformée en culture homogène par des 
agitations et des cultures successives, suivant la méthode de Ferran 
et d'Arloing, a fini par acquérir des propriétés nouvelles, qu'elle 
conserve indéfiniment,notammentune virulence très atténuée ;avec 
ces Bacilles, quelle que soit la dose injectée au Cobaye, on n'’ob- 
tient plus que des lésions minimes non inoculables en série. » 
Après de telles constatations cliniques et expérimentales,il devient 
évident que le diagnostic, dans différentes formes de tuberculose, 
devient particulièrement difficile, puisque les éléments de ce dia- 
gnostic, présence de Bacilles acido-résistants, inoculation positive 
au Cobaye, peuvent faire défaut. 

Et Bèzançon est d'avis que (ces cas d'interprétation difficile sont 
beaucoup plus fréquents qu'on ne serait tenté de le supposer ». 
Si la solution que donne ici F. Bezançon, après d’autres bactério- 
logistes, de ce problème de l'absence du Bacille de Koch dans beau- 
coup de lésions de tuberculose est exacte, elle est plus qu'un 
résultat particulier. Ces cultures homogènes du Bacille tuberculeux 
des Mammifères ont des caractères tout à fait spéciaux, et la pos- 
sibilité pour le virus tuberculeux de les acquérir est un fait d'une 
importance telle que le rôle de l'infection bacillaire, comme le 
disait Darier, peut être en effet, singulièrement plus étendu qu'on 
ne le croyait. 

De même, Vallée et Petit disent avoir trouvé fréquemment des 
tuberculoses ganglionnaires des Bovidés ou des tuberculoses pulmo- 
naires avancées du Porc sans Bacilles colorables. Küss et Guinard 
ont fait la même constatation, de ce fait d’ailleurs connu del’absence 
de Bacilles dans les crachats, dans des cas chez l'Homme où l’aus- 
cultation ne laisse aucun doute sur l'existence de grosses lésions 
ouvertes. 


54 G. BOUDIN 


C'est sur l'ensemble de tels faits et sur l’ensemble de ses propres 
observations que Middendorp établit cette thèse, à savoir que le 
Bacille de Koch n'est qu'un saprophyte indifférent, sans relation 
pathogénétique avec la tuberculose. Il prétend qu'en inoculant à 
des Cobayes de la matière caséeuse, dépourvue de Bacilles de Koch 
on les tuberculise; mais il soutient aussi qu'il est impossible de 
déceler dans les lésions obtenues dans ces conditions d'inoculation, 
des Bacilles à réaction colorante spécifique. Mais la critique de 
Middendorp est toute négative; cetauteur ne définit aucun autre 
germe tuberculeux. Actuellement, la question cependant mérite 
d'être posée : quand l'examen bactériologique des produits suspects 
n'a pas donné de résultats positifs, l’inoculation sous-cutanée de 
tels produits au Cobaye, donne-t-elle à cet animal réactif une tuber- 
culose dont les nodules contiennent toujours des Bacilles de Koch? 
I1 semble bien qu'il y ait des cas fort douteux. Nocard recommande 
l'extirpation des premiers ganglions envahis après l'inoculation 
sous-cutanée au Cobaye pour soumettre leur contenu à la réaction 
de Koch-Ehrlich. Par ce procédé on peut mettre en évidence « les 
Bacilles spécifiques qui s’y sont développés, parfois en quantité con- 
sidérable ». Mais « si l'examen bactériologique du ganglion extirpé ne 
donne rien ou si le vétérinaire n’est pas outillé pour le pratiquer, 
il lui faut attendre le résultat de l’inoculation ». Le diagnostic est 
alors assuré par la constatation de la généralisation des lésions 
tuberculeuses. 

En même temps qu'il rappelle l'hypothèse de Koch, Straus s'ex- 
prime ainsi au sujet des lésions de tuberculose sans Bacilles colo- 
rables. (Néanmoins cette matière caséeuse où les réactifs colorants 
ne décèlent la présence d'aucun microbe se montre encore viru- 
lente quand on vient à l’inoculer. Koch expliquait ce fait en admet- 
tant que les Bacilles avaient disparu, mais laissaient dans le caseum 
leurs spores résistantes. Aujourd'hui, l'existence de ces spores 
n'est acceptée qu'avec des réserves; mais quelle que soit l'opi- 
nion qu'on se fasse, il faut bien admettre qu'il existe dans les 
foyers caséeux des formes modifiées du Bacille, qui apparaissent 
dans certains cas comme de simples grains colorés ou qui même 
sont totalement réfractaires aux réactifs colorants, tout en étant 
néanmoins vivantes, susceptibles de rajeunissement et viru- 
lentes. » Comme Malassez et Vignal, Toussaint en 1883, Straus en 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 5) 


1896, mettent donc à nouveau en face d'une sporulation douteuse 
l'hypothèse des variations morphologiques du Bacille de la tuber- 
culose. 

Récemment, et ceci a déjà été signalé plus haut à propos des 
tuberculides, on a multiplié les réactions que pouvait manifester 
l'organisme vis-à-vis des Bacilles tuberculeux. A côté des nodules 
à cellules géantes, il existerait des lésions inflammatoires com- 
munes, et reconnaissant encore comme cause directe le Bacille de 
Koch ; le tubercule ne serait que la réaction «la plus hautement 
différenciée » des tissus vis-à-vis de ce virus. En réalité si les 
Bacilles acido-résistants spécifiques peuvent être présents dans 
certains de ces cas (néphrites), ils peuvent être très rares, en 
nombre disproportionné avec l'étendue des lésions inflammatoires. 
Les rapports, et spécialement ceux qui relient tout un groupe d'in- 
fections articulaires aiguës avec la tuberculose, s'ils paraissent 
bien exister, ne laissent pas que d’être obscurs dans la conception 
de la fixité des caractères morphologiques et histo-chimiques de la 
Bactérie de Koch. 

Mais nous avons vu, plus haut, qu'à propos de lésions inflamma- 
toires sans Bacilles colorables, Bezançon rappelle l'existence des 
variétés de Bacilles tuberculeux obtenues d'après les méthodes de 
Ferran et Arloing. Dans son rapport au congrès International de la 
Tuberculose de 1905, à propos du pouvoir pathogène de cette va- 
riété particulière de Bacilles humains, atténués artificiellement par 
la méthode des cultures homogènes, et ayant perdu en partie leur 
capacité de résistance à la décoloration par les acides, Arloing 
dit : « Ces Bacilles qui, avant la transformation jouissaient du 
pouvoir infectant habituel, étaient incapables. après la transfor- 
mation, de tuberculiser les animaux par infection sous-cutanée. 
Par contre, si la virulence a baissé pour le Cobaye et le Lapin, elle 
est devenue plus nocive pour le Veau, chez lequel elle détermine 
une tuberculose septicémique et infectieuse. Le rhumatisme tubercu- 
leux de M. Poncet est peut-être un type clinique de cette variété 
de tuberculose obtenue expérimentalement. » Mais pour les lé- 
sions de la tuberculose inflammatoire, on a invoqué aussi le rôle 
de toxines. Nous verrons d’après les faits expérimentaux ce que 
sont les toxines tuberculeuses actuellement connues, et le rôle 
qu'elles peuvent avoir dans la maladie. 


56 G. BOUDIN 


CHAPITRE VII 


1. Pénétration du Bacille de Koch par la voie pulmonaire; par les voies 
digestives. 

2. Rapport des variations morphologiques du Bacille tuberculeux avec la 
théorie de l'hérédité parasitaire. 


Le fait que la tuberculose expérimentale chez le Cobaye, à la 
suite d'une inoculation sous-cutanée suit une marche sensiblement 
constante, extensive, presque toujours fatalement progressive, a 
fait du Cobaye le réactif par excellence de la tuberculose; « lors- 
qu'un Cobaye a résisté à une inoculation bien faite, on peut dire 
que le produit inoculé ne possédait pas la virulence tuberculeuse » 
(Nocard). Chez le Cochon d'Inde, la généralisation du virus se fait 
en général par la voie lymphatique. Chez le Lapin, même dans le 
cas d'inoculation sous-cutanée, le sang semble être très rapidement 
envahi et les Bacilles se localisent surtoutau poumon, réalisant en 
quelque sorte un type morbide comparable à la tuberculose pul- 
monaire humaine. Mais la théorie de la tuberculose pulmonaire 
déterminée principalement par inhalation des germes virulents 
semble devoir être discutée à nouveau. S'il paraît y avoir des cas 
incontestables, cliniques et expérimentaux, de tuberculose par 
inhalation, il ne semble pas qu'ils doivent être aussi fréquents 
que cela est estimé généralement. L'apport du germe virulent 
dans certaines tuberculoses cutanées, et dans les formes ostéo-arti- 
culaires semble se faire par la voie sanguine, et sans qu'il y ait eu 
de lésions pulmonaires préalables. Letulle, se basant sur l'étude 
de plus de mille préparations de tuberculose pulmonaire recueillies 
et classées dans son laboratoire, croit pouvoir démontrer l'origine 
lymphatique fréquente de certains foyers nodulaires bien circons- 
crits; il semble, de plus, difficile à cet auteur (d'imposer une pa- 
thogénie purement respiratoire aux désastres de la pneumonie 
caséeuse sans faire appel, en outre, à la participation effective, peut- 
être même prédominante du torrentcireulatoire; le sang de l'artère 
pulmonaire n’apporte-t-il pas au poumon la vie normale et trop Îré- 
quemment aussi la vie pathologique? » Aufrecht (1901) émet de 
même cette conclusion, basée sur l'expérimentation et la clinique, 
de l'infection du poumon par la voie sanguine; la lésion initiale siè- 
serait dans le capillaires et dans les petits vaisseaux pulmonaires. 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 57 


D'après Von Behring, qui exposa cette théorie au congrès de 
Cassel en 1903, la tuberculose, quel que soit le siège deses lésions, 
serait presque sans exception d'origine intestinale. La contamina- 
tion se fait, chez le nourrisson, par le lait bacillifère; les Bacilles 
séjournent dans les ganglions mésentériques pour ensuite aller 
créer différentes lésions en divers points de l'organisme, au bout 
d'un temps plus ou moins long. Bartel, assistant de Weichselbaum, 
réalise l'infection tuberculeuse, par la voie digestive, de Lapins et 
de Cobayes, et sans que la muqueuse digestive, de la bouche, de 
l'estomac, de l'intestin manifeste de lésions. L'infection suit la 
voie lymphatique. Il y a dans les ganglions des lésions spécifiques 
de tuberculose. Si ces dernières manquent, la présence des 
Bacilles n’est souvent révélée que par une inoculation d'épreuve. 
Mais même quand il n’y a pasde signes visibles d'adénopathie, les 
animaux meurent de cachexie. Weleminsky, assistant de Hueppe, 
ayant inoculé plus d'un millier de Lapins, soit par voie sous-cu- 
tanée, soit par voie sous-muqueuse, a constaté que l'infection 
tuberculeuse suivait d'abord la voie lymphatique, se généralisant 
à tout le système ganglionnaire, pour aboutir à une tuberculose 
viscérale, pulmonaire, par voie sanguine. 

Calmette et Guérin font ingérer des cultures de tuberculose 
d'origine bovine, humaine, aviaire et phléolique à des Chevreaux, 
à des Chèvres et Boucs adultes par différents procédés : introduc- 
tion directe de cultures dans les voies digestives, ou contamination 
du lait d'alimentation. Leur conclusion est que dans l'immense 
majorité des cas, la tuberculose se contracte non par l'introduc- 
tion des Bacilles dans les voies aériennes, mais par l'ingestion de 
produits bacillifères. Chez l'animal jeune, leterritoire Iymphatique 
arrête longtemps la marche envahissante des Bacilles. L'ingestion 
de cultures de tuberculose bovine donne naissance, chez les Che- 
vreaux, à une tuberculose grave des ganglions mésentériques. 
Après la caséification de ceux-ci, les poumons et différents groupes 
ganglionnaires sont envahis et manifestent des lésions tubercu- 
leuses. Avec les Bacilles tuberculeux humains, aviaires, de la 
Phléole, se produit, à la suite de leur ingestion, une adénopathie 
mésentérique non spécifique. L'adénopathie déterminée par les 
Bacilles humains évolue vers la transformation fibreuse ou la cal- 
cification ; les Bacilles aviaires et les Bacilles de la Timothée sont 


58 G. BOUDIN 


détruits par les leucocytes. Chez lesanimaux adultes, au contraire, 
après ingestion de Bacilles de tuberculose bovine se produit une 
généralisation rapide avec localisation pulmonaire, sans lésions 
intestinales, sans adénopathie mésentérique préalables. 

Vallée n’a pu, chez des Veaux, parinjection directe dans la trachée, 
ou pulvérisation dans le naso-pharynx de cultures de tuberculose 
bovine, déterminer de lésions pulmonaires. Après ingestion de lait 
bacillifère, il produit une tuberculose des ganglions bronchiques. 

Enfin on doit rappeler que, chez les Gallinacés, le péritoine, le 
foie, la rate, la surface séreuse de l'intestin, depuis l'estomac jus- 
qu'au rectum, et non pas les poumons, sont les localisations habi- 
tuelles de la tuberculose. 

Leray a groupé une série de cas expérimentaux de tuberculisa- 
tion, auxquels il pense pouvoir donner une origine commune, 
intestinale; d'une part, Nocard a montré qu'au bout de 4 à 6 jours, 
ni le sang ni les muscles d'animaux infectés par la voie sanguine 
avec des cultures de tuberculose ne contiennent de Bacilles. Et 
Perroncito démontre que le suc musculaire d'animaux spontané- 
ment tuberculeux, sacrifiés en pleine vie, pour l'alimentation, ino- 
culé à des Cobayes, et à des Lapins ne les infecte pas. Mais Stein- 
heil, Straus par inoculation du suc des muscles prélevés sur les 
cadavres d'individus de l'espèce humaine, morts de phtisie, 
purent, dans la majorité des cas, tuberculiser des Cobayes. Leray 
fait d'autre part remarquer que les cas où l'infection tuberculeuse 
du fœtus fut démontrée par l'inoculation positive au Cobaye se 
comptent précisément quand le fœtus avait été prélevé sur des 
cadavres de femmes, ayant succombé à la phtisie; il oppose les 
résultats positifs de Landouzy et H. Martin, d'Aviragnet et Préfon- 
taine, d'Armanni aux résultats négatifs de Vignal inoculant à des 
Cobayes des fragments des organes de fœtus ou du placenta prove- 
nant de femmes phtisiques vivantes. Et l'auteur conclut «que l’on 
trouve très fréquemment le Bacille de Koch, ou l’une de ses formes 
involutives, dans des tissus qui en sont privés d'une façon générale 
(sang, muscle, fœtus) lorsque ces tissus proviennent de cadavres ; 
… Cela ne tient-il pas à ce fait, qu'au moment de l’agonie, les mi- 
crobes de l'intestin se sont répandus dans toute l’économie ? » 

Les expériences de Sanchez Toledo, faites dans le laboratoire de 
Straus, semblent cependant contredire cette hypothèse, puisque 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 59 


toutes aboutirent à des résultats négatifs, bien qu'en certains cas 
« des fœtus furent extraits des cornes utérines » des Cobayes 
femelles, inoculées de tuberculose et mortes avant d'avoir mis bas. 
Si les muscles, les fœtus prélevés sur des sujets morts de phtisie 
peuvent infecter les animaux, n'est-ce pas plutôt à cause d'une 
généralisation extrême des Bacilles, ayant précisément déter- 
miné la mort? 

Il n'en reste pas moins ces faits à élucider, que des inoculations 
ont été positives, bien que faites avec des fragments d'organes, 
sans lésions tuberculeuses, pris sur des fœtus absolument sains en 
apparence ; que des examens microscopiques faits sur des organes 
de petits, issus de Cobayes femelles tuberculeuses, et ayant suc- 
combé peu après leur naissance, ne décèlent ni Bacilles, ni lésions 
dans ces organes (Grancher, Straus). Maflucei inocule 18 œufs en 
incubation avec une culture de tuberculose aviaire; 8 arrivèrent 
à éclosion. Un des Poulets mourut 36 heures après la naissance 
sans lésions et sans Bacilles apparents dans les viscères. Un 
second mourut au bout de 20 jours, très maigre, sans lésions ma- 
croscopiques apparentes, mais à l'examen microscopique « le foie 
était parsemé de tubercules contenant des Bacilles ». D'autres 
Poulets morts à intervalles plus éloignés présentèrent des lésions 
comparables. Puis un autre Poulet mort 78 jours après l'éclosion 
montrait dans le poumon, et surtout dans le foie « des tubercules 
visibles à l'œil nu, caséifiés et remplis de Bacilles ». Le dernier 
Poulet mourut au bout de quatre mois et demi avec des tubercules 
en voie de caséification dans le poumon et dans le foie. 

Baumgarten a répété l'expérience de Maffucci etobtenu des résul- 
tats identiques; d'où la théorie de cet auteur de la transmission 
directe des parents aux enfants du Bacille de la tuberculose, par 
infection ovulaire, par infection conceptionnelle, ou par infection 
intra-utérine. Baumgarten considère la tuberculose congénitale 
comme le mode d'infection de beaucoup le plus fréquent; même 
lestuberculoses, ditesacquises, relèvent de ce processusétiologique, 
et il estime exagérée la théorie de l'inhalation du virus pour la ge- 
nèse de la tuberculose pulmonaire. « Si la présence du Bacille 
tuberculeux dans l'air était la principale cause de la phtisie pulmo- 
naire, il faudrait s'attendre à ce que la totalité des Hommes fussent 
atteints de la maladie dans le cours de leur existence.» Dans le mode 


60 G. BOUDIN 


prédominant de l'infection intra-utérine du fœtus par voie placen- 
taire, le nombrede Bacilles infectieux, d'après Baumgarten, est très 
petit, la résistance des tissus du fœtus et des jeunes animaux très 
grande. Ces conditions expliquent la «latence » de ces tuberculoses 
d'origine fœtale. Mais cette explication du développement tardif 
de la tuberculose héréditaire ne fut considérée que comme un pos- 
tulat, et la théorie de l'hérédité de terrain généralement admise. 

En réalité, les expériences de Maffueci et de Baumgarten nous 
montrent le développement lent de la tuberculose après la nais- 
sance, avec une période initiale où le Bacille de Koch reste introu- 
vable. Il faut rappeler que, jusqu'à ces dernières années, l'infection 
expérimentale du Cobaye fut considéréecommelecritériumle plus 
sûr pour le diagnotic de la tuberculose, l'inoculation non suivie de 
succès écartant sans recours la possibilité d'existence de la maladie 
spécifique. Or la valeur de ce critérium commence à être contestée, 
puisqu'on admet l'existence de formes atténuées du Bacille tubercu- 
leux, caractérisées en outre par d'autres réactions tinctoriales. 

La question de la tuberculose héréditaire ne pourrait-elle être 
envisagée d'après ces données nouvelles? La latence de certains 
cas de phtisie congénitale pourrait correspondre non à la présence 
toute passive dans les tissus de quelques Bacilles de Koch, mais à 
. l'évolution active de certaines formes peu virulentes du virus, res- 
tées jusqu'ici inaperçues, et capables de déterminer en plus des 
phénomènes d'’immunité temporaire, et ainsi comme pour la 
syphilis, une évolution périodique de la maladie. 


CHAPITRE VIII 


4. Variation de virulence du Bacillie tuberculeux. 

2. La nécro-tuberculose, déterminée par les Bacilles tuberculeux stérilises, 
par les spores d'Aspergillus fumigatus stérilisées. Expériences de Tu.-Cx. 
MACGÉ : rapport de la virulence avec la germination des spores vivantes. 

3. ILn'y a pas de toxalbumines actives dans les cultures liquides du Bacille 
tuberculeux. Les tuberculines obtenues après stérilisation des Bacilles sont 
des produits artificiels, dont l'action spécifique dans l'infection tuberculeuse 
n'est pas démontrée. 

4. Phénomènes d'inmunité (sérothérapie et vaccination) dans la tubercu- 
lose. 


Dans des conditions déterminées, fréquentes, la virulence du 
Bacille de Koch, acido-résistant, paraît être invariable. Jusqu'en 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 61 


1897, Koch considère le Bacille tuberculeux comme un parasite dont 
les caractères fonctionnels restent fixes. Il explique l’évolution lente 
de certaines formes de tuberculose localisées par le petit nombre 
des micro-organismes présents dans les lésions, ceux-ci conservant 
cependant leurs propriétés pathologiques constantes. Dans une telle 
- théorie, il faut donner la raison de la multiplication si restreinte 
des Bacilles dans les tissus; ou le virus confère une immunité 
relative, ou il y a une résistance spontanée de l'organisme à l’infec- 
tion. Mais cette immunité naturelle de l'organisme de certains 
seulement des individus d'une même race, tous placés dans des 
conditions biologiques sensiblement comparables, ne paraît 
guère vraisemblable si l'on considère les propriétés de virulence 
du Bacille de la tuberculose comme très accentuées et de plus 
invariables. Koch, par des expériences sur le Cobaye tuberculeux, 
observe ja non réinoculabilité de la tuberculose; une première 
atteinte conférant l'immunité, comme cela se présente dans 
l’immense majorité des cas pour la syphilis. Le phénomène de Koch 
ne fut pas observé par Arloing. Et ce dernier auteur se basant sur 
des expériences personnelles, explique la non réinoculabilité de la 
tuberculose constatée par Koch dans certaines conditions, non 
eomme l'effet d’une immunité, mais comme le résultat de l'atté- 
nuation des cultures de seconde inoculation. (« Mes expériences, 
dit Arloing, ont montré que les inoculations faites avec du virus 
des lésions pulmonaires tuaient par généralisation Lapins et Co- 
bayes, tandis que seuls les Cobayes, très sensibles à la tuberculose, 
étaient infectés par des virus de lésions ganglionnaires. Et ce n’est 
pas la rareté des agents virulents dans ces dernières qu'il faut invo- 
quer, car si on provoque par passages successifs la multiplication 
des Bacilles, le virus conserve le degré initial de sa virulence... On 
peut du reste faire passer deux ou trois fois le virus à travers un 
organisme favorable, pour lui faire augmenter sa virulence primi- 
tivement faible, et établir ainsi tous les degrés intermédiaires du 
virus. » En conséquence, les tuberculoses viscérales pulmonaires, 
longtemps localisées, les scrofulo-tuberculoses, les tuberculoses 
cutanées, les tuberculides, toutes ces formes cliniques qui se placent 
à côté des tuberculoses à marche extensive, rapide, sont déter- 
minées essentiellement par les Bacilles tuberculeux de virulence 
plus ou moins atténuée. Faut-il rappeler encore que Krompecher 


62 G. BOUDIN 


n'a pu infecter des animaux en leur inoculant, même en grande 
quantité, des Bacilles tubereuleux humains entretenus pendant 
longtemps sur des milieux artificiels? E. Klein a obtenu les mêmes 
résultats dans les mêmes conditions. 

Kimla, Poupé, Vesely font remarquer qu’en 1897, dans la nouvelle 
édition de l'ouvrage de Flugge, on retrouve encore l'opinion d'après 
laquelle le Bacille pris de n'importe quelle forme de la tuberculose 
humaine ou animale, puis cultivé, doit avoir toujours la même vi- 
rulence. Cependant Koch, en 1897, admet la variabilité de virulence 
du Bacille. 

En 1898, Kimla, Poupé, Vesely par l'expérimentation démon- 
trent que la virulence du micro-organisme est toujours très iné- 
gale : « Nous avons pris le Bacille des cas et des formes diverses, 
nousl'avonsexpérimenté d'une manièreabsolumentidentique,nous 
l'avons cultivé sur le même terrain, pendant le même temps, puis 
nous avons inoculé d’une manière absolument égale la même géné- 
ration et à la même dose aux Cobayes. Néanmoins l'inégalité de la 
virulence ressortait nettement de la différence dans la durée de la 
maladie, dans l'aspect de l'affection, dans l'intensité de la propa- 
gation aux organes internes, enfin dans la toxicité plus ou moins 
grande des produits de culture. Si nous insistons sur cette inéga- 
lité de la virulence, c’est qu'elle a une importance aussi bien pour 
le clinicien que pour l'appréciation juste des préparations curatives 
qu'on extrait des cultures du Bacille. » Vesely en effet note les 
variations d'activité des tuberculines extraites de Bacilles de Koch, 
spontanément plus ou moins virulents, ou modifiés artificielle 
ment par ensemencement sur différents milieux de culture. 

Mais il reste un fait signalé comme paradoxal par beaucoup 
d'auteurs : la persistance des propriétés pathogènes du Bacille tu- 
berculeux, après la perte de sa végétabilité. Le fait d'une action patho- 
gène, à peu près identique à l’action des germes vivants, persis- 
tant après la stérilisation de ces germes est en eflet remarquable. 
Il est vrai que Prudden a constaté une caséification moins fréquente 
des nodules tuberculeux déterminés par inoculation de Bacilles 
stérilisés. D'après Straus et Gamaleia, la caséification peut s'ob- 
server fréquemment même dans ces conditions, et pour ces auteurs 
la propriété du Bacille de Koch d'édifier des tubercules, même 
après stérilisation, est due à une substance spéciale. Pour Krom- 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 63 


pecher, l'action variable des Bacilles morts est en rapport direct 
avec la qualité de virulence des Bacilles vivants. Peut-être, certaines 
infections mycosiques peuvent donner quelques éclaircissements 
à ce sujet : des conidies d’Aspergillus fumigatus, ayant subi un 
chauffage à sec, ininterrompu de 5 heures à 100° sont capables de 
déterminer encore des tubercules dans les tissus. Rénon a établi 
l'innocuité absolue de spores stérilisées à 110° à l’autoclave, injectées 
dans les veines de Lapins et dans le péritoine de Cobayes; les ani- 
maux, sacrifiés quinze jours après, ne présentaient pas trace du 
moindre tubercule. Mais cet expérimentateur constate en plus ce 
fait, contraire à l'espoir d'une immunisation, que les animaux 
traités préalablement par des conidies stérilisées meurent plus vite 
que les témoins n'ayant reçu que des spores vivantes; et d'au- 
tant plus rapidement que la stérilisation des spores primiti- 
vement injectées avait été effectuée à un degré de température plus 
élevé. Mais Th.-Ch. Macé, par l’action de la chaleur sèche à 1000 
pendant 5 heures, désire tuer les conidies, « mais ne pas les mo- 
difier en tant que corps solides. A 110-115, la cellulose est altérée ; 
à 4100, il y a perte d’eau, la balance accuse une différence sensible. 
De plus, la couleur est nettement modifiée, elle est plus foncée; à 
l'examen microscopique il n'y a plus de chapelets de conidies; 
l'émulsion préparée comme pour les conidies vivantes est moins 
stable ». Voici les résultats de quelques-unes des inoculations expé- 
rimentales effectuées par Macé avec des conidies ainsi stérilisées : 

(Exp. 73. — Cobaye reçoit 0 gr O1 de conidies mortes dans la 
veine jugulaire; il meurt le 9° jour après avoir perdu 260 grammes 
sur 625. Les lésions sont générales : tubercules confluents du pou- 
mon, du foie, des reins; la rate surtout est criblée de granulations 
miliaires ; ses dimensions ont doublé. 

(Exp. 76. — 0gr0I de conidies mortes sont introduites sous la 
peau d'un Cobaye. L'animal meurt le troisième jour ayant perdu 
951 grammes sur 208. Une énorme boule d’æœdème est trouvée, 
quoique la quantité de liquide injecté ne fût que de 2 ce. Pas de 
suppuration. » 

Th.-Ch. Macé fit encore de telles expériences sur le Pigeon et 
telle est sa conclusion : «chez le Pigeon et le Cobaye, les conidies 
privées de la faculté de germer sont également dépourvues de 
la faculté de causer une inflammation. Mais comme les conidies 


64 G. BOUDIN 


vivantes injectées dans les veines, elles déterminent des embolies 
qui peuvent entrainer la mort ou de la nécrose très étendue. » 
Et l'auteur semble vouloir rattacher l’action des conidies stérilisées 
à celle d’un corps solide qui exerce un traumatisme local. CII y a 
dans les conidies d'Aspergillus fumigatus deux causes nocives : un 
corps solide qui exerce un traumatisme local et dans ce corps un 
poison. Nous avons essayé d'isoler ce poison après bien d’autres au- 
teurs, mais nous avons complètement échoué... Ce poison paraît être 
détruit par le chauffage nécessaire pour tuer le pouvoir germinatif. 
Les conidies extraordinairement adaptées pour la résistance à 
divers agents et à la dissémination de l'espèce n'ont pas cédé leur 
poison. » 

La tuberculose, créée par inoculation de Bacilles stérilisés, ne 
peut-elle être également considérée comme une pseudo-tubercu- 
lose par particules solides inanimées? Les lésions ne sont plus 
extensives, l'affection n'est plus réinoculable en série. 

Si l'évolution fréquente vers la caséification d’une telle tuber- 
culose peut être imputée en partie à la virulence que possédaient 
les Bacilles vivants, ne peut-elle être aussi, en partie, déterminée 
par les conditions de stérilisation du virus (température, humi- 
dité...)? Rénon avec des spores d'Aspergillus stérilisées à 110-115, 
n'obtenait pas de lésions nodulaires. Quoi qu'il en soit, le méca- 
nisme d'infection des mycoses est double : il y a une action toxique 
déterminant des phénomènes inflammatoires plus ou moins 
accentués, et un traumatisme local manifesté par des tubercules. 
N'en est-il pas de même dans la tuberculose? Mais l’action toxique 
des Mucor, des Aspergillus semble bien être liée à la germination 
de leurs conidies. Dans ces conditions même si l'on ne trouve 
pas dans les cultures de ces Champignons de toxalbumine active 
comme celles que « secrètent » certaines Bactéries, on ne saurait 
alors oublier, comme l’un des mécanismes de la toxicité, l’action 
des diastases mêmes qui servent à l'accroissement de ces micro- 
organismes et capables de déterminer chez les individus infectés 
un trouble important dans leuréquilibre de nutrition. 

Dans les expériences de Rénon, après l'injection non nocive en 
apparence d'une émulsion de conidies stérilisées à 41 5°, les ani- 
maux ont paru sensibilisés à l'action d'une infection consécutive 
de conidies vivantes. D'après Straus et Gamaleia, lorsque la 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 65 


quantité injectée de Bacilles tuberculeux morts est faible, les ani- 
maux ne succombent pas, mais sont excessivement prédisposés 
à une inoculation tuberculeuse ultérieure. 

En vain dans la tuberculose, comme dans l’aspergillose, comme 
dans les mucor-mycoses, dans l’actinomycose, a-t-on essayé d'isoler 
des milieux de culture « des produits solubles » ({) actifs. Mara- 
gliano, Schweinitz et M. Dorset, Gouget et Bezançon ont obtenu 
des cultures filtrées unetoxalbumine se détruisant par l’action de la 
chaleur à 1000, et produisant de l'hypothermie chez les animaux. 
De plus, il semble bien, d'après les recherches d'Hammerschlag, 
qu'il doive y avoir dans les milieux de culture, des enzymes 
alcooliques, puisque la glycose, la saccharose, la lactose y sont 
partiellement transformées en alcool. Mais on ne constate pas dans 
les cultures privées par filtration des éléments bacillaires vivants, 
de corps albuminoïdes d'activité comparable aux toxines diphtéri- 
que ou tétanique. La tuberculine ancienne de Koch ne saurait être 
en rien comparable à de telles substances, puisqu'elle est extraite 
artificiellement du protoplasma des Bacilles. La méthode de pré- 
paration, stérilisation à 1100 des Bacilles tuberculeux cultivés en 
bouillon peptonisé et glycériné, concentration au bain-marie et 
filtration, doit nécessairement supprimer les activités diastasiques 
que possède certainement le Bacille de Koch vivant (2). Et Borrel 

(1) L'expression de « produits solubles » pour désigner les toxalbumines micro- 
biennes est en réalité impropre, puisqu'il ne s’agit pas pour elles d’une solution 
vraie avec ionisation, mais de suspension colloïdale, où les particules extrêmement 
divisées donnent au liquide des propriétés, optiques, de résistivité électrique, de 
diffusion, spéciales. 

(2) On tend à considérer beaucoup d'actions diastasiques comme des actions de 
catalyse opérées par des métaux, fer, calcium, manganèse, magnésium, liés à des 
matières organiques dans un état colloïdal stable et altérables par la chaleur. 
Nous pouvons donner ici deux définitions des diastases, définitions basées sur des 
faits expérimentaux. 

— «.… dans les oxydations effectuées par la laccase, il entre en jeu ce système 
de deux substances complémentaires ; l’une représentée par le manganèse, suffit à 
produire la réaction considérée et pourrait, à cause de cela, être appelée la 
complémentaire active ; l’autre, de nature organique, altérable par la chaleur, 
est La complémentaire activante. » — G. Berrranp, Revue générale des sciences, 
30 mai 1905, p. 458. 

Autre définition : (Une diastase pourrait bien être fréquemment formée par 
un colloïde minéral instable exerçant toutes les catalyses qui caractérisent la dias- 
tase, protégé contre la coagulation par un colloïde hydrophile. » (J. Perrin cité 
d’après Le Danrec, Introduction à la Pathologie générale, p. 357). La matière 
organique à l’état colloïdal stable, serait « activante » parce qu’elle augmente 


dans des proportions considérables et à cause de son état physique, La surface du 
métal qui opère la catalyse et protège, par sa stabilité l’hydrosol de ce métal 


Archives de Parasitologie, XI, n° 1, 1926. 5 


66 G. BOUDIN 


dit que « la tuberculine est une susbtance très stable et qu'il est fort 
difficile de détruire ou de faire disparaître. Elle peut être chauffée 
à des températures très élevées; des corps bacillaires ont été 
chaufiés en suspension dans l’eau et dans des tubes clos à 100, 
150, 250, 300 degrés. A partir de 250° seulement la tuberculine est 
complètement détruite. » 

Après l'exposé des nombreuses recherches faites sur la tuber- 
culine, Straus conclut ainsi : «Le principe actif de la tuberculine 
est contenu dans les protéines du corps des bacilles tubereuleux ». 
Si cela pouvait donner quelqu'éclaircissement, on pourrait dire 
que la tuberculine est une ( toxine adhérente. » La tuberculine 
isolée par Brieger, les cendres déduites, se rapproche des matières 
nucléiques, à composition phosphorée. 

L'action spécifique de ce corps, obtenu en dehors des manifes- 
tations biologiques du Bacille tuberculeux, est très discutée. Pour 
beaucoup d’expérimentateurs elle ne serait pas directement et 
spécialement active. Les protéines de Bacilles différents, obtenues 
par la méthode de préparation de la tuberculine de Koch agiraient 
comme cette dernière substance sur les Cobayes tuberculeux 
(Rœmer, Buchner). Le sérum sanguin, les albumoses, les peptones 
seraient capables de provoquer chez les tuberculeux une réaction 
thermique comparable à celle que détermine la tuberculine. 
D'autre part les syphilitiques, les lépreux, et surtout les sujets 
atteints d'actinomycose, réagiraient particulièrement bien à l'ac- 
tion de cette substance. 

Chez les animaux sains, en inoculation sous-cutanée la tubercu- 
line reste sans résultat; chez le Cobaye en bon état de santé une 
injection de 2 cc reste presque sans effet. Mais par l'inoculation 
intra-cérébrale, Lingelsheim et Borrelontdémontréquelesanimaux 
sains sont presque aussi sensibles que les animaux tuberculeux. Ce 
dernier expérimentateur, qui attache la plus grande importance à 
la « sécrétion » de tuberculine pour séparer ou rapprocher les 
différents Bacilles tuberculeux pisciaire, aviaire, humain, fait à ce 
sujet une hypothèse d’après laquelle la tuberculine n’agirait chez 
les malades que par l'intermédiaire du système nerveux : « On 
pourrait supposer que chez l'animal sain, la tuberculine inoculée 


qui peut, étant seul, être coagulé par une trace de sel quelconque dans la 
liqueur, et ainsi rendu inactif. 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 67 


par la voie sous-cutanée n'arrive pas aux centres nerveux pour y 
produire son action nocive; l'organisme intact ne laisse pas passer 
le poison. Au contraire, chez l'animal malade, criblé de tubercules, 
serait possible l'absorption du poison au niveau des tubercules par 
les filets nerveux terminaux; les portes d'entrée et les voies 
d'absorption seraient d'autant plus nombreuses que l'animal serait 
plus tubereuleux.. Cette hypothèse permettrait d'expliquer la sen- 
sibilité si grande des Cobayes pseudo-tuberculeux, qui éloigne l’idée 
d’une réaction strictement spécifique, — les réactions obtenues par 
les inoculations de Bacilles morts sensibilisant les animaux, — les 
observations cliniques de réaction tuberculinique chez les lépreux 
et les syphilitiques. » 

PourF.Bezançonet Küss, «laconstatation d'une réaction positive à 
la tuberculine n'implique pas nécessairement que la lésion suspecte 
est de nature tuberculeuse, elle indique seulement que l'individu 
est porteur dans une région quelconque de l'organisme de Bacilles 
tuberculeux; la fréquence extrême chez l'adulte de lésions tuber- 
culeuses anciennes, latentes du sommet du poumon ou des gan- 
glions du médiastin rend souvent difficile l'interprétation des 
renseignements donnés par l'inoculation ». 

Dans la pratique vétérinaire, après les recherches de Nocard, on 
utilise les inoculations de tuberculine (0,30 — 0,40 centigr.) pour 
aider au diagnostic précoce de la tuberculose chez les Bovidés. 
Cette méthode donnerait des renseignements d'autant plus exacts 
que les animaux seraient moins atteints. « La réaction, dit 
F. Bezançon, serait si sensible qu'elle pourrait exister alors que 
l’autopsie ne montrerait aucune lésion tuberculeuse; il s'agirait 
alors de petites lésions tuberculeuses microscopiques. » 

Pour Arloing, Rodet et Courmont, la réaction fébrile caractéris- 
tique aurait été présentée après injection de doses très faibles de 
tuberculine, par des Génisses saines et par des Bovidés atteints 
d’'Echinocoques despoumons. D'après toutes ces recherches, on voit 
combien il est difficile d'établir le rapport spécifique de la tuber- 
culine avec l'infection tuberculeuse. 

La nouvelle tuberculine de Koch, tuberculine résiduelle, fut 
obtenue par des procédés mécaniques beaucoup plus ménagés, 
et peut-être comparables aux procédés de trituration employés dans 
certains cas pour l'obtention, à partir des corps cellulaires, des sub- 


68 G. BOUDIN 


stances diastasiques, que ceux-ci peuvent contenir (extraction de 
la zymase des globules de levure : Buchner). La tuberculine rési- 
duelle s'obtient par concentration et dessiccation dans le vide d’une 
culture virulente; les Bacilles sont ensuite minutieusement broyés; 
la masse bacillaire obtenue est émulsionnée dans l’eau distillée, 
centrifugée. La masse résiduelle de centrifugation est à nouveau 
séchée, broyée, centriftugée. Une semblable opération est répétée 
plusieurs fois, jusqu'à ce qu'il ne reste presque plus de sédiment; 
les liquides obtenus à la suite des centrifugations successives sont 
mélangés. Dans un tel mode de préparation, l’action de la chaleur 
est évitée, et la dessiccation se fait dans le vide. De plus, autre élé- 
ment important, pour avoir, d'après Koch, une tuberculine vérita- 
blement active, il faut opérer avec des cultures bien virulentes, Les 
cultures âgées peu virulentes ne donnent que des substances inac- 
tives. Nous ignorons si cette tuberculine fut envisagée comme subs- 
tance diastasique ; par ce mode de préparation, Koch voulaitenlever 
aux Bacilles la couche de matières grasses qui peut !es protéger con- 
tre l’activité leucocytaire (1). Après injection de tuberculine rési- 
duelle, la réaction fébrile serait moins constante qu'après injection 
de tuberculine ancienne. Cette dernière produit l’accoutumance ; 
celle-là ne la produirait pas. La réaction morbide qu'elle détermine 
pourrait être tardive, assez prolongée, et l'injection pourrait être 
suivie delésions locales, telles quelymphangite, adénite. L'influence 
thérapeutique destuberculines est discutée. Dans certains cas etpar- 
ticulièrement dans les tuberculoses localisées, on aurait obtenu par 
leuremploi des améliorations assez considérables, mais passagères. 

(4) Vis-à-vis du mode de préparation de cette tuberculine résiduelle, on peut 
exposer le mode de prévention de la tuberculose bovine, indiqué par von Behring. 
Cet expérimentateur utilise pour sa ( jennérisation » des cultures de tuberculose 
humaine entretenues longtemps dans le laboratoire et d’une virulence très atté- 
nuée. La méthode d'immunisation consiste : « en deux inoculations intraveineuses 
respectivement de # et de 20 milligrammes de Bacilles humains desséchés, ces 
inoculations étant faites à {rois mois d'intervalle sur des jeunes Bovidés âgés de 
moins de quatre mois ». Les cultures desséchées doivent être broyées, converties 
en une émulsion homogène, afin d'éviter, puisque les deux inoculations vaccinales 
s'effectuent en voie intraveineuse, les accidents emboliques. Dans l’émulsion de 
culture, on voit au microscope les Bacilles isolés. C’est dans de telles conditions 
que furent réalisées à Melun, par Vallée, les expériences de vaccination antitu- 
berculeuse de jeunes Bovidés. Ces expériences montrèrent que le vaccin de von 
Behring est inoflensif pour les Bovidés, et qu'il leur confère une résistance consi- 
dérable vis-à-vis de Bacilles bovins virulents. — C. GuÉRIN, Immunisation active 
contre la tuberculose. Presse médicale, 6 janvier 1906. — Vazrée, Revue de la 
tuberculose, 1906. 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 69 


Diverses tuberculines furent encore isolées par d’autres expéri- 
mentateurs, et par des procédés différents. Au lieu de préparer la 
tuberculine par macération à haute température des Bacilles tuber- 
culeux, Koch obtint une tuberculine alecaline, par macération des 
Bacilles dans une solution de soude caustique à 10 p. 100. D'après 
Borrel, « les corps des Bacilles tués par la chaleur et desséchés 
constituent une tuberculine excellente et de beaucoup la plus 
active. » 

Mais encore il semble bien qu'on ne traite pas le Bacille tuber- 
culeux comme une substance vivante, à l’état colloïdal infiniment 
sensibleet variable, capable d'actions diastasiques fragiles, suscep- 
tible d'adaptation, de modifications fonctionnelles lentes mais cer- 
taines sous des influences ménagées; mais il est plutôt envisagé 
comme un corps organique inerte et stable, auquel on peut appli- 
quer, puisqu'il ne paraît pas donner de toxines actives dans les 
milieux de culture, les manipulations souvent brutales de la chimie 
des corps bruts. Si les tuberculines sont en partie la substance 
elle-même des corps bacillaires, elle sont cette substance modifiée 
par la chaleur, la glycérine à chaud, la soude caustique; ce sont 
des produits de composition complexe plus ou moins mélangés 
des sels et des substances des milieux de culture, de composition 
non constante, évidemment en rapport avec la composition brute 
du protoplasma bacillaire, mais de teneur variable avec les pro- 
cédés d'extraction, avec le mode de culture, avec l’âge des cultu- 
res. Ce ne sont pas des corps secrétés par le Bacille de Koch dans 
les cultures; ce sont des produits de macération de ce Bacille. Le 
mode d'obtention empêche d'affirmer qu'on se trouve bien en 
présence de produits de sécrétion physiologique, et que c'est par 
eux que s'effectue l’action infectieuse et toxique dans les organis- 
mes envahis par le Bacille tuberculeux. Leur préparation à haute 
température (100c), les différencie déjà complètement des diastases 
et des toxalbumines, toxine tétanique, toxine diphtérique par 
exemple. Il est à remarquer que le Cobaye tuberculeux et le 
Cobaye sain présentent une sensibilité égale vis-à-vis de ces deux 
dernières substances. « Seule, dit Borrel, la malléine constitue 
une exception qui mérite d'être notée, elle est aussi toxique que 
la tuberculine pour le Cobaye tuberculeux, par la voie intracéré- 
brale ; elle est inofftensive par la voie sous-cutanée. » Mais précisé- 


70 G. BOUDIN 


ment la malléine est une substance préparée artificiellement et 
dans les mêmes conditions que la tuberculine, obtenue comme elle 
en dehors des conditions biologiques du Bacille de la morve. 

Et même en considérant que le degré d'activité toxique de la 
tuberculine obtenue par le premier procédé de Koch semble être 
en rapport direct avec la qualité de virulence des cultures, leur 
âge, et la variété de tuberculose, le problème n’en reste pas moins 
celui du mécanisme d'action des Bacilles stérilisés : traumatisme 
local d’une part et en plus résorption de tels Bacilles ou des subs- 
tances organiques extraites de ces Bacilles tués, résorption plus 
plus ou moins difficile, variable avec le mode de stérilisation et le 
degré de transformation préalable des Bacilles avant l'inoculation. 
Arloing fait remarquer que la tuberculine ancienne a exercé dans 
plusieurs cas une action prédisposante; attendu que ce sont des 
animaux prétenduement vaccinés avec la tuberculine qui ont 
offert les lésions les plus confluentes et la généralisation la plus 
étendue. 

Les expériences de Rénon et Th.-Ch. Macé, sur l’action physio- 
logique des spores, stérilisées à températures différentes d’Asper- 
gillus fumigatus se superposent par leur analogie aux expériences 
de Straus et Gamaleia, d’Arloing sur l’action des Bacilles tuber- 
culeux stérilisés et de la tuberculine ancienne. Et par le manque 
de congestion intense, par le défaut d'extension des lésions, quel- 
quefois par l'absence de caséification, dans la tuberculose comme 
dans l’aspergillose, les résultats de l’action physiologique des 
micro-organismes stérilisés sont différents de ceux obtenus par 
l’activité vitale, spontanée, des parasites vivants. Non pas que dans 
chacune de ces deux séries parallèles d'expériences, pas plus dans 
l’aspergillose que dans la tuberculose, on puisse actuellement 
établir avec certitude une relation de spécificité entre l’action, sur 
les animaux, des spores ou des Bacilles tués et la réceptivité consé- 
cutive plus grande de ces animaux à l'infection par les spores ou 
les Bacilles vivants. L'injection préalable de produits organiques 
plus ou moins transformés par les procédés de stérilisation et spé- 
cialement par la chaleur (dont l'effet premier est la coagulation de 
la matière vivante et probablement un changement de constitution 
chimique) peut ne pas correspondre à une addition de corps spé- 
cifiques; elle a pu créer seulement un premier déficit des enzymes 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 71 


leucocytaires (1). C'est peut-être ainsi qu'il faut traduire l'hypothèse 
de Buchner, disant que la tuberculine n'agit pas d'une facon par- 
ticulière, spécifiqne, mais seulement en tant que protéine bacté- 
rienne. Si l’action de cette substance est marquée surtout sur les 
tuberculeux, c'est que (l’économie de ces sujets est en état d'équilibre 
instable ». De même une réaction semblable est observée chez eux 
après injection d’autres protéines bactériennes; Buchner a repro- 
duit, par injection à des Cobayes tuberculeux de ces protéines déri- 
vées du corps de différentes Bactéries, des lésions congestives au 
voisinage des foyers tuberculeux, en tout semblables à celles qui 
suivent l'injection de tuberculine. Et de même la tuberculine agit 
sur l’économie des sujets atteints d'infection à marche chronique : 
syphilis, lèpre, actinomycose. 

La tuberculine ne saurait servir à la division des Bacilles tuber- 
culeux bovin, pisciaire, aviaire en catégories pratiquementimmua- 
bles. D'abord, on n'obtient pas d'effets physiologiques marqués 
avec la tuberculine du Bacille des Mammiières longtemps entre- 
tenu, sans passage par le corps des animaux, sur des milieux arti- 


(1) La physico-chimie nous montre les phénomènes d’intoxication par les subs- 
tances bactériennes comme des réactions de colloïdes à colloïdes, ou de colloïdes 
avec un mélange de colloïde et d’électrolyte. Les colloïdes cellulaires des orga- 
nismes vivants ont, du fait de leur état physique, un grand pouvoir d'absorption 
vis-à-vis des substances étrangères injectées dans les humeurs; « l’absorption de 
la toxine par les substances cellulaires cause la mort non pas de la cellule elle- 
même qui continue à vivre dans une direction différente, mais de l’ensemble de 
l'organisme, où cette cellule vient à manquer à son rôle spécial » (J. Duclaux). Cette 
théorie du mécanisme d'intoxication, tout en étant extrêmement générale, paraît 
être exacte, précise et semble devoir être féconde. Elle se divise en deux parties; 
la première concerne les réactions limitées et réversibles des colloïdes entre eux 
ou de colloïdes avec mélange de colloïdes et électrolytes. A. Croft Hill a vérifié 
la réversibilité de l’action zymotique de la maltase de la levure de fermentation 
basse sur la maltose et sur la glycose et pense que de telles réversions s'effectuent 
dans les cellules vivantes. S. Arrhenius et Madsen appliquent à la toxine téta- 
nique et à la toxine diphtérique la loi des équilibres chimiques exprimée par 
Berthelot et Guldberg et Waage. E. Wahlen explique l’évolution périodique de la 
tuberculose par une limitation automatique de la toxine tuberculeuse par ses 
produits de transformation. 

Dans la deuxième partie de la théorie de J. Duclaux, il s’agit précisément du 
«déficit diastasique » (Wahlen) déterminé par les réactions précédentes; l’enzyme 
engagée dans un complexe avec une substance étrangère manque à son rôle 
spécial. En réalité on ne saurait que soustraire à un organisme vivant ; CI. Ber- 
nard expliquait la mort dans l’intoxication par l’oxyde de carbone non par ad- 
dition de ce gaz aux éléments cellulaires, mais par déficit d'oxygène. 

Dans le cas particulier, le processus tout passif d’assimilation de la tubercu- 
line, substance modifiée par la chaleur, peut différer du processus de réaction 
des produits solubles des Bacilles tuberculeux vivants avec les diastases de l’or- 
ganisme; et le déficit créé peut être tout différent. 


72 G. BOUDIN 


ficiels (Krompecher). Certaines variétés du Bacille tuberculeux 
humain, isolé de lésions de tuberculose humaine, peuvent être trans- 
formées par certains procédés en cultures homogènes. La poudre 
bacillaire obtenue avec les micro-organismes de ces cultures (tu- 
berculine de Borrel) peut être injectée à doses extrêmement con- 
sidérables sans amener la mort des Cobayes tuberculeux. Borrel 
expose qu'il a pu injecter 200 milligrammes de cette tuberculinesous 
la peau d’un Cobaye tuberculeux de 30 jours sans le tuer ; même 
résultat négatif après injection intracérébrale de 2 milligrammes 
de cette substance. Mais il faut dire que Borrel, justement à cause 
de ces faits, met en doute l’origine humaine du Bacille homogène 
de $S. Arloing et tend à le ranger dans les Bacilles du type aviaire. 
Mais des transformations semblables, plus complètes encore du 
Bacille de Koch ont été obtenues par Ferran et Auclair, Bezançon, 
par le procédé des cultures homogènes. 

On ne saurait donc refuser au Bacille tuberculeux d'Arloing ses 
relations directes avec le Bacille de la tuberculose des Mammifères, 
bien qu'il soit (un exemple unique d'une transformation si com- 
plète ». En conséquence si, dans la pratique, on retire par la 
macération, ou par la dessication et le broyage des Bacilles tués des 
Mammifères, les tuberculines les plus actives, on ne saurait dans 
l'hypothèse transformiste attacher une grande importance à ce fait. 
Même en admettant que la tuberculine soit un produit physiolo- 
gique de sécrétion, on ne saurait utiliser ce caractère que pour dis- 
tünguer les Bacilles de la tuberculose en variété virulente et variété 
non virulente, mais non pas pour systématiser des espèces. 

D'une façon générale, il ne paraît pas nécessaire pour obtenir 
des effets d’immunité avec des substances diastasiques retirées des 
cultures microbiennes, que ces substances soient primitivement 
d'une grande activité toxique. Hammerschlag opérant sur 3 litres 
de culture du Bacille tuberculeux en bouillon glycériné ou glycosé a 
pu obtenir une toxalbumine à effets toxiques peu prononcés, seule- 
ment hyperthermisante. En 1896, Maragliano fixe les conditions 
d'obtention d'un sérum immunisant contre la tuberculose; il 
mélange les protéines extraites des corps bacillaires par concen- 
tration des cultures à 1000 (substances de la lymphe de Koch) avec 
une toxalbumine, obtenue par concentration dans le vide à 300 
d'une culture filtrée sur bougie de porcelaine. L’expérimentateur 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 73 


inocule des animaux avec des doses progressivement croissantes 
de ce mélange de protéine (3 parties) et de toxalbumine (1 partie). 
Au bout de six mois, le sérum d'animaux ainsi traités, injecté au 
Cobaye tuberculeux, ou à l'Homme tuberculeux leur permet de 
résister à l’action toxique de la tuberculine. Si Maragliano à pu 
ainsi neutraliser l’action toxique de la tuberculine, précisément 
les animaux qui ont fourni le sérum immunisant avaient été traités 
par un mélange où il entrait une proportion considérable de 
lymphe de Koch (1). Nous ne saurions là encore avoir de rensei- 
gnements au sujet de l’activité spécifique de la tuberculineancienne. 
Mais avec le mélange où il entre de la toxalbumine, obtenue dans 
des conditions biologiques, Maragliano obtient un sérum capable, 
dans certains cas de tuberculose humaine, d'abaisser la fièvre, 
d'enrayerle processus d'intoxication, de faire disparaître les symp- 
tômes physiques des foyers infectieux. 

Courmont et Dor en 1890, avec le filtrat de cultures de Bacille 
aviaire, injecté préventivement à des Lapins et à des Cobayes, ont 
obtenu des résultats positifs d'immunité contre le Bacille viru- 
lent. Dans quelques cas, les produits solubles de tuberculose 
aviaire ont immunisé contre le Bacille de Koch. 

D'autres expérimentateurs ontobtenu une vaccination active par 
Bacilles tuberculeux modifiés ou à virulence atténuée. De même 
que Rénon arrivait à conférer une certaine immunité à des ani- 
maux contre des spores jeunes et virulentes d'Aspergillus fumigatus, 
au moyen de conidies encore vivantes, mais à pouvoir pathogène 
atténué par le vieillissement, de même, en 1890, Grancher et 
H. Martin avaient réussi dans une certaine mesure, à vacciner quel- 
ques Lapins par l'inoculation à virulences croissantes de culturesde 
tuberculose aviaire, tout d'abord affaiblies par le vieillissement. 

D'autres expériences vinrent confirmer ces premiers faits. Une 
vaccination est réalisée par von Behring chez de jeunes Bovidés 
par des Bacilles humains atténués. Mæller, sur lui-même et sur des 
animaux, obtient des résultats positifs d'immunisation, en se 
servant des cultures de tuberculose humaine, mais modifiées par 
un passage préalable sur l'Orvet, c'est-à-dire sur un Vertébré à 


(1) «L’immunité par la tuberculine est seulement l’immunité contre la tuber- 
culine et elle ne l’est pas contre la tuberculose, non plus peut-être contre la toxine 
vraie, in vivo, des Bacilles tuberculeux » — TArsusABuRO YABÉ. 


74 G. BOUDIN 


sang froid. De son côté, Friedmann vaccine des Cobayes contre 
des cultures de tuberculose humaine virulente, au moyen des Ba- 
cilles tuberculeux de la Tortue; avec des cultures de tuberculose 
humaine, le même expérimentateur vaccine aussi des Tortues 
contre le Bacille qui développe spontanément chez ces Reptiles des 
lésions tuberculeuses. 

Les Bacilles tuberculeux de la Tortue poussent déjà bien à la 
température de la chambre. Mais l’optimum de croissance est 370. 
Friedmann isola cependant d'une Tortue un Bacille acido-résistant 
ne poussant qu'à 22. Au-dessous de 25°, il n'y avait pas de déve- 
loppement. Ce dernier type paraît avoir un pouvoir vaccinant moin- 
dre. Le développement à la température de 37 paraît être une 
bonne condition pour l'obtention d’un bon vaccin. 

De plus, Friedmann (1) a obtenu une vaccination active chez des 
Bovidés ; en leur injectant dans les veines une émulsion de Bacilles 
tuberculeux de la Tortue, l’auteur est parvenu à leur conférer une 
immunité solide contre le Bacille tuberculeux bovin. D'autre part, 
le sérum des animaux vaccinés au moyen des Bacilles de la Tortue 
a des propriétés préventives. Des Cobayes traités par ce sérum et 
inoculés de tuberculose virulente manifestent des lésions insigni- 
fiantes à côté de Cobayes témoins non préventivement traités. 

Toutes ces expériences de différents auteurs incitent à rechercher 
toute la plasticité, fonctionnelle et morphologique, dont est suscep- 
tible le Bacille de la tuberculose. Ces phénomènes d'immunité 
créés réciproquement par des Bacilles tuberculeux de Vertébrés 
à sang froid, et des Bacilles tuberculeux de Vertébrés à sang chaud 
pourraient être aussi bien invoqués comme preuve de la parenté 
étroite qui existe entre ces différents Bacilles. Mais, dans l'état 
actuel, il est impossible d'affirmer, par ce seul caractère connu 
d'une immunité conférée par deux virus, que ces deux virus appar- 
tiennent à la même espèce. 

(1) En 1905, A. Weber et M. Taute groupent autour du Bacille pisciaire de Batail- 
lon, du Bacille de l’Orvet (Mæller) et du Bacille de Friedmann, types principaux 
des Bacilles tuberculeux des Vértébrés à sang froid, 36 espèces de Bacilles tuber- 


culeux. (C.R. in Bulletin de l’Institut Pasteur, 1905). Ce nombre augmentera 
encore irès vraisemblablement. 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 79 


CHAPITRE IX 


4. Fragilité du Bacille de Koch dans les organismes où il vit en parasite. 
Longévité dans les milieux extérieurs : spores. 

2. Action des diastases digestives. Action de la pancréatine. 

3. Sensibilité aux hautes températures, à la lumière. Pouvoir chromogène. 


Koch et Straus considèrent le Bacille de la tuberculose comme 
un parasite rigoureux, à cause de son développement obligé à 380 
environ, et sa difficulté d’acclimatement sur les milieux de culture 
artificiels. «Les conditions de température relativement élevées et 
constantes, écrit Straus, ne sont guère réalisées que dans le corps 
de l'Homme ou des animaux : le Bacille de la tuberculose ne sau- 
rait donc vivre et se multiplier en dehors du corps, dans les cir- 
cumfusa, dans le sol, dansles eaux, comme peuvent le faire d'autre 
microbes pathogènes, celui du charbon par exemple, de la fièvre 
typhoïde ou du choléra. Il doit donc être considéré comme étant 
rigoureusement parasite (Koch). » 

A l'inversedes micro-organismes précédemmenteités, le Bacilledu 
charbon par exemple, le Bacille tuberculeux pourraitsporuler dans 
les organismes vivants. Koch explique la disparition des Bacilles 
dans les cellules géantes par la formation de spores non colorables, 
qui maintiennent la virulence des nodules tuberculeux sans Bacilles 
apparents : (Dans les cellules géantes une nouvelle génération de 
Bacilles succède toujours à la génération suivante. Pendant ce 
temps les Bacilles forment dans l'intérieur des cellules géantes des 
spores et laissent après leur disparition les germes pour la progé- 
niture suivante. » 

De plus, dans les organismes vivants et en dehors d'eux, le 
Bacille de la tuberculose garde ses propriétés de coloration et une 
certaine virulence, bien quil semble avoir perdu toute végétabilité. 
« Même dans le corps des animaux ou de l'Homme le Bacille de la 
tuberculose ne possède pas cette vitalité dont on fait volontiers un 
de ses principaux attributs. Il ressort en effet des recherches de 
Kitasato que la plupart des Bacilles contenus dans des crachats 
expectorés par les phtisiques ou dans les cavernes du cadavre sont 
des Bacilles morts. Il est possible qu'il en soit de même des Bacilles 
contenus dans l'intimité des tissus, et ainsi s'expliquerait en partie 


76 G. BOUDIN 


la difficulté que l'on rencontre à obtenir des cultures en ensemençant des 
produits tuberculeux. Mais si le Bacille de la tuberculose semble 
périr assez facilement, même dans l'organisme de l'Homme et des 
animaux qu'il a envahis, ce Bacille mort est loin d'être inoftensif : 
les cadavres des Bacilles tuberculeux... continuent pendant long- 
temps à persister dans les organes où ils ont vécu et y exercent 
une action à la fois phlogogène et toxique qui n’est pas un des traits 
les moins curieux dans l’histoire de ce Microbe » (Straus, p. 229). 

Ainsi, d'après ces auteurs, le Bacille tuberculeux montre, dans les 
organismes où il s'est adapté, les caractères d’une vie fragile : il 
meurt ou sporule rapidement! Et pour Straus la sporulation est 
douteuse. D'autre part, il est certain que la longévité du Bacille 
de Koch en dehors des organismes animaux, dans les milieux de 
culture, est grande; et là il est virulent; les lésions que ces cul- 
tures développent ne sont pas des lésions de nécro-tuberculose 
par particules bacillaires mortes, difficilement assimilables, mais 
les lésions s'étendent etleur matière s'inocule en série. Puis à me- 
sure que les cultures vieillissent, la virulence décroit, jusqu à ce 
que les lésions deviennent incapables de généralisation. Au bout 
de cinq mois, des cultures de tuberculose humaine peuvent encore 
être réensemencées. Maffucei a pu réensemencer des cultures 
de tuberculose aviaire âgées de un an, un an et demi, deux ans. 
Terre considère la persistance de la vitalité du Bacille pisciaire 
en cultures comme indéfinie : «€ une culture initiale sur gélose 
portant la date du 9 mars 1897 est largement humectée de bouillon 
le 15 juillet 1902, c'est-à-dire plus de cinq ans après le semis pri- 
mitif, et ce tube a donné dans la partie déclive un splendide voile. 
Cette remarquable longévité est due vraisemblablement à la pré- 
sence de spores. » Beaucoup d'auteurs, Villemin, Koch entre 
autres, ont admis que la grande résistance des Bacilles tubercu- 
leux dans les milieux extérieurs, résistance à la dessiccation, à la 
putréfaction, au froid. à la congélation était due à la présence de 
spores. « Schottelius affirme que des poumons de phtisiques, 
enterrés pendant « plusieurs années » contiennent encore des 
Bacilles colorables et que ces poumons possèdent encore la viru- 
lence tuberculeuse. Tous ces faits établissent donc que les matières 
tuberculeuses peuvent conserver leur virulence pendant un temps 
relativement long dans les eaux non renouvelées, dans les fumiers 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 7lg 


et dans le sol » (Straus, p. 209.) Mais le Bacille tuberculeux est 
sensible à l’action des températures élevées. En général, en milieu 
humide, l’action d'une température de 70°, pendant 10 minutes, lui 
enlève sa végétabilité. Or, les spores des Bactéries leur permettent de 
résister à des températures supérieures à 1000. — La sporulation en 
vie parasitaire et la faible résistance des spores à la chaleur seraient 
donc des caractères spéciaux au Bacille tuberculeux; et ces 
caractères deviennent d'autant plus singuliers que les auteurs ne 
sont pas d'accord sur les formations qui dans la constitution intime 
du Bacille de Koch, répondent aux spores. Cependant cette ques- 
tion du mode de sporulation est de toute importance; la solution 
mérite d'en être cherchée, si l’on veut connaître la façon dont l'agent 
de la tuberculose maintient sa virulence, essaime et se développe. 

La résistance du virus vis-à-vis des antiseptiques est assez consi- 
dérable. Cependant Villemin entrave le développement du Bacille 
tuberculeux cultivé en gélose glycérinée par addition au milieu de 
culture de 1 p.100 d'iodure de potassium. Koch emploie avec succès, 
pour arrêter la végétabilité des cultures, le violet de gentiane, la 
fuchsine, le bleu de méthylène, l’auramine, les cyanures d’or, ces 
derniers employés dans la proportion de 1 à 2 millionièmes. 

Straus et Wurtz ont essayé l’action du suc gastrique à 38°, actif, 
digérant bien le blanc d'œuf coagulé, sur des cultures de tubercu- 
lose aviaire en agar glycériné, âgées d'environ six semaines à deux 
mois. Un centimètre cube de suc gastrique fraîchement recueilli 
était ensemencé avec une anse de fil de platine de la culture. 

Les tubes contenant un tel mélange étaient exposés à la chaleur 
de l'étuve un temps variable. Des Lapins, des Cobayes furent 
_inoculés dans le tissu cellulaire sous-cutané et dans le péritoine 
avec un demi-centimètre cube de mélange. « Les animaux mou- 
rurent ou furent sacrifiés au bout d’un temps variable. A l’au- 
topsie, on constata que ceux qui avaient reçu des cultures ayant 
séjourné dans le suc gastrique pendant 1, 2, 3, 4, 5 et 6 heures 
étaient devenus tuberculeux. Ceux qui avaient été inoculés dans 
le péritoine présentaient une tuberculose péritonéale avec des 
nodules disséminés dans le foie, la rate et les poumons; ceux 
qui avaient été inoculés sous la peau présentaient au point d’ino- 
culation, un abcès caséeux, riche en Bacilles. La même injec- 
tion sous-cutanée, faite avec une culture soumise à l’action du suc 


78 G. BOUDIN 


gastrique, pendant 10 à 12 heures, ne provoquait qu'un abcès tu- 
berculeux local, à Bacilles colorables par le procédé d'Ehrlich et 
finissant par disparaître du point inoculé. 

Straus de là que les Bacilles de la tuberculose, après un séjour 
de 8 à 12 heures dans le suc gastrique, sont atténués, mais avec 
cette restriction que ces Bacilles étaient peut-être déjà morts. 
« Pour décider la question, il faudrait recourir non pas à l'inocu- 
lation, mais à l’ensemencement ». Cette restriction est peut-être 
juste; il serait étonnant qu'avec des cultures du Bacille aviaire, il 
ait obtenu des lésions nodulaires de tubereulose aussi constamment 
chez des Lapins et des Cobayes. Il n’en est pas moins vrai que les 
Bacilles disparaissaient au niveau du point inoculé. L'action du suc 
gastrique n’aurait-elle pas favorisé leur résorption? — Suivant 
Terre le Bacille pisciaire résiste aux diastases agissant sur les hy- 
drates de carbone ; «il n’est pas attaqué par le suc gastrique artifi- 
ciel ou naturel; reporté sur milieux ordinaires, il persiste à croître. 
Mais l’action de la pancréatine est toute différente, les Bacilles sont 
frappés de mort, ils se colorent mal, il y a eu sans doute disso- 
lution de la substance qui possède une affinité spéciale pour les 
colorants. » 

Cet auteur estime que le Bacille tuberculeux pisciaire résistant 
aux ferments qui transforment les hydrates de carbone et les al- 
buminoïdes est atteint par ceux qui saponifient les graisses. «Ces 
résultats, ajoute-t-il, s'appliquent aux expériences in vitro et ne 
préjugent rien sur ce qui se passe dans l'organisme (1). » Il faut 
dire cependant que l'idée directrice de ces expériences sur les mo- 
difications du virus tuberculeux par les diastases, partait de l’ob- 


(1) Faut-il rattacher à la désintégration du Bacille tuberculeux pisciaire réalisée 
in vitro par la pancréatine les résultats des expériences de P. Carnot sur l’inocu- 
lation de Bacilles tuberculeux dans le pancréas ? « Les expérieuces de P. Carnot 
expliquent la rareté relative des lésions directement tuberculeuses du pancréas. 
En eflet, par des injections massives de cultures de Bacilles de Koch on n’arrive- 
rait pas à produire des foyers caséeux dans le tissu pancréatique. Il semble que 
cette glande détruise les Bacilles et rende stériles les inoculations. » (A. MATHIEU, 
Traité de Médecine de Bouchard et Brissaud, 2° édit., IV, p. 397). La dispari- 
tion rapide des Bacilles a été constatée également dans la rate, que cet organe 
montrât ou non des granulations, à côté des autres viscères montrant des nodu- 
les et des Bacilles à l'examen microscopique.(Friedrich et Nôüsske, O0. Schulze, F. 
Bezançon). Comme nous le verrons au cours de l’analyse des travaux de ces der- 
niers auteurs, la destruction des Bacilles semble d’ailleurs varier avec les orga- 
nes chez les différentes espèces animales : rate, pancréas, foie, et n'être jamais 
nulle dans quelque organe que ce soit. Nous ne parlons pas cependant de l’évo- 
lution des Bacilles dans les cavernes pulmonaires. 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 79 


servation que Bataillon, Terre et Dubard avaient faite des transfor- 
mations subies par le Bacille de Koch dans l'organisme humain et 
dans l'organisme des différents animaux. 

Le Bacille de Koch est sensible à l’action de la lumière solaire. 
Il est tué par la lumière directe en un temps variant de quelques 
minutes à plusieurs heures et deux jours environ. C’est pour évi- 
ter cette action des rayons lumineux sur la végétabilité des Bacil- 
les et pour leur permettre un développement plus rapide qu'il est 
habituel de laisser dans l'obscurité les étuves contenant les cultu- 
res. Les cultures de tuberculose aviaire, pisciaire, humaine mani- 
festenten vieillissantun pouvoirchromogène plus ou moinsintense. 
Straus signale que «les cultures des deux tuberculoses, aviaire 
et humaine, sur milieux solides ou liquides prennent souvent en 
vieillissant une teinte rosée particulière. Terre constate la même 
coloration des colonies de tuberculose pisciaire. Les cultures âgées 
sur lait de cette derniére variété prennent une nuance violacée. De 
plus, après un mois, les cultures, tant sur milieux solides que sur 
milieux liquides, prennent une teinte brune qui augmente avec 
l'âge, et se dirige progressivement de la périphérie vers la profon- 
deur. Cette coloration forcée ne se manifeste que sur les cultures 
contenantdes sucres. «La propriété chromogène du Bacille pisciaire 
paraît donc rattachée à son action sur les sucres » (Terre). Sur les 
milieux de culture au sang gélosé, «les colonies empruntent l’hé- 
moglobine du milieu et prennent une couleur chocolat » (Bezan- 
con). Shumovsky ajoute qu’un petit cristal de Fe?So* donne 
ainsi à la cette culture une coloration brun jaunâtre. P. Cour- 
mont et Potet notent la variabilité du pouvoir chromogène du Ba- 
cille de Koch : « J. Nicolas a obtenu artificiellement des cultures 
colorées jaunes ou rougeàtres, grasses et vernissées, ressemblant 
de tout point à telles cultures du Bacille du beurre de Petri, de 
Korn, de Tobler. L'un de nous a souvent constaté la coloration 
rouge brique ou saumon de certaines cultures, typiques d'ailleurs, 
de tuberculose humaine. » La coloration du pigment bacillaire 
semble donc varier avec la qualité du milieu nutritif. De plus, on 
pourrait peut-être, étant donnée la vive sensibilité du Bacille tu- 
berculeux à la lumière, considérer l’apparition d’une coloration 
comme une réaction contre l’insolation, ou liée à la formation de 
spores. 


80 G. BOUDIN 


CHAPITRE X 


1. Étude histo-chimique : matières grasses, cires, phosphates, cellulose, 
nucléine (volutine). 

2. Étude histologique : noyau, corpuscules métuchromatiques, grains de 
volutine, zymogène. 


L'étude de la constitution chimique du Bacille de Koch peut aider 
à déterminer la cause des réactions spéciales de coloration du mi- 
cro-organisme. L'étude cytologique permettra d'aborder la ques- 
tion du mode de sporulation. | 

ÉTUDE HISTO-CHIMIQUE. — Hammerschlag, sous la direction de 
Nencki, étudie la composition chimique des Bacilles tuberculeux. 
Ceux-ci sont traités par l’eau, puis desséchés; ils sont soumis à 
l’action d'un mélange d'’éther et d'alcool. Cette opération leur fait 
perdre environ 27 p. 100 de leur poids. L’extrait alcoolique et 
éthéré est composé de graisse et de lécithine, sans cholestérine. 
Les corps bacillaires sont traités ensuite par une solution de po- 
tasse à 1 p. 100 qui dissout une matière albuminoïde caractérisée 


par les réactions habituelles avec l’acide xanthoprotéique, réactif 


de Millon, réactif de Tanret. Le résidu bacillaire se dissout dans 
l'acide sulfurique concentré; la solution réduit la liqueur de 
Fehling. Hammerschlag pense que ce résidu est une cellulose. 
Les recherches de Th. Weyl portent sur des cultures de Bacille 
de Koch en gélose glycérinée. Les conglomérats des cultures sont 
dilués à chaud dans une lessive de soude qui se sépare en 2 couches, 
une couche supérieure en gelée ressemblant à de la gélose, une 
couche inférieure composée de grumeaux blanchâtres. Weyl arrive 
à séparer complètement, par l’action réitérée d'une lessive de 
soude diluée et chaude sur la couche supérieure mise à part, cette 
couche opaque gélatineuse, des parties grumeleuses qu'elle peut 
encore contenir. La couche gélatineuse, dérivée d'après Weyl du 
protoplasma bacillaire se dissout en milieu légèrement alcalin; on 
en précipite par l'acide acétique une substance brunâtre, insoluble 
dans un excès d'acide. C'est une substance se rapprochant des gly- 
co-protéides. Elle contient carbone, hydrogène, azote, soufre et du 
phosphore. Quant à la couche blanche grumeleuse elle contient du 


carbone, de l'hydrogène, de l'azote, du soufre; elle se dissout len-. 


tement et seulement dans l'acide sulfurique concentré. Pour Weyl, 


sue 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE S1 


cette substance (qui se rapproche de la chitine), constitue la mem- 
brane d'enveloppe des Bacilles. 

Aronson traite des Bacilles tuberculeux, par l'alcool, l’éther, la 
benzine, le chloroforme. Il extrait ainsi jusqu'à plus de 30 p. 100 
de matières grasses. Puis par l’action de l’éther, du chloroforme 
ou de la benzine bouillants, il extrait une cire. Ensuite par divers 
réactifs, il extrait des protéiques. Bulloch répète les expériences 
d'Aronson, et sur le Bacille de Koch et sur le Bacille acido-résis- 
tant de la Timothée. Il extrait, comme Aronson, et des deux micro- 
organismes, des graisses, une cire, en proportion importante; des 
matières protéiques; parmi ces matières protéiques, il trouve une 
proportion considérable d'un acide nucléique que Ruppel a carac- 
térisé sous le nom d'acide tuberculinique. (Certains auteurs, 
Brieger en particulier, ayant cherché à purifier la tuberculine 
brute par filtration et précipitation par l'alcool, sont arrivés à la 
suite de ces analyses à considérer la tuberculine ainsi purifiée 
comme. une substance albuminoïde phosphorée, comme une 
nucléine.) Bulloch constate en plus la présence de sels miné- 
raux, avec prédominance de phosphates. Après l'enlèvement des 
protéiques, de la graisse, de la cire, des sels, il reste une substance 
contenant avec une quantité considérable d’azote, un polysaccha- 
ride. L'auteur estime que ce corps à noyau azoté avec substances 
pectiques est de la chitine. 

Dans un travail sur les constituants minéraux du Bacille tuber- 
culeux, Schweinitz et M. Dorset constatent que les cendres conte- 
naient plus de 50 p. 100 d'acide phosphorique et une forte propor- 
tion de soude, de chaux et de magnésie, bien que les Bacilles se 
fussent développés sur des sols où aucun phosphate minéral ou 
autre sel n'avait été ajouté (excepté 0.5 p. 100 de chlorure de so- 
dium). « En conséquence, disent-ils, le haut pourcentage d'acide 
phosphorique peut être attribué seulement au fait que ce corps et 
avec lui le calcium et le magnésium sont absolument nécessaires au 
développement du Bacille tuberculeux; ce germe emprunte ces 
corps au bouillon de Bœuf où ils sont normalement présents. Dans 
le cas de tuberculose manifeste chez les animaux, nous trouvons 
souvent des nodules calcaires durs; ces nodules contiennent des 
Bacilles tuberculeux. Dans d’autres cas de tuberculose guérie, où 
les nodules calcaires sont absents, aucun Bacille ne saurait être 

Archives de Parasilologie, XI, n° 1, 1906. 6 


82 G. BOUDIN 


trouvé. Il est facile d'établir une relation étroite entre ces nodules 
dans la tuberculose et la cendre des germes tuberculeux. Le haut 
pourcentage de graisses contenues dans le corps des Bacilles tuber- 
culeux, que nous avons consigné dans des mémoires précédents, 
mis en Comparaison avec le haut pourcentage de phosphate de cal- 
cium et de magnésium dans les cendres donne lieu à quelques 
spéculations intéressantes. On pourrait se demander, si dans la 
méthode de traitement des tuberculeux par les graisses et par les 
phosphates, nous ne sommes pas plutôt en train de nourrir le Ba- 
cille que l'individu ». Mais peut-être, ajoutent Schweinitz et Dor- 
set, augmente-t on simultanément la vitalité du Bacille et de l'être 
parasité. 

Shumovsky fait croître des Bacilles tuberculeux sur des mi- 
lieux dépourvus de matières protéiques de composition semblable 
aux milieux employés par Schweinitz et modifiés par Uschinsky, 
milieux dans lesquels la glycérine s’est montrée comme indispen- 
sable au développement du Bacille tuberculeux. Ainsi que nous 
l'avons déjà dit, Shumovsky additionna pariois les milieux de 
culture de sulfate de fer : la membrane de la colonie bacillaire se 
colorait alors en jaune brun. Tout d’abord ces cultures croissaient 
lentement; mais une culture à la troisième génération, qui jusqu à 
la sixième semaine s'était très lentement développée, commence 
alors à croître vigoureusement. Les éléments bacillaires de cette 
culture deviennent granuleux:; les grains se colorent intensément 
dans le protoplasma microbien faiblement teint. Une étude com- 
parative de la composition du milieu de culture avant et après 
l’ensemencement indique une utilisation des substances nutritives 
dans les proportions suivantes : CI, 26 °/,; P?0°, 18 0/4; AzEP, 50 0; 
SO", 19 o/0; glycérine, 40 °/,. La saccharose n'a pas été utilisée. 
D'après Shumovsky, les Bacilles tuberculeux sont composés de 
substances albuminoïdes, de graisse et de cellulose. Par l'adap- 
tation du virus aux milieux liquides, dépourvus de matières pro- 
téiques, les Bacilles deviennent plus pauvres en graisse et en 
albumine et plus riches en cellulose. 

Pour Hammerschlag, la cellulose du Bacille de Koch se constitue 
aux dépens de la glycose, de la saccharose, de la glycérine, ces 
substances d'autre part donnant naissance sous l'influence du mi- 
cro-organisme, à une faible quantité d'alcool qui donne aux cultures 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 83 


du Bacille de la tuberculose humaine, pisciaire, aviaire leur odeur 
de levure. 

De même pour Marpmann, le Bacille de Koch contient de la cel- 
lulose vraie ; et cette substance n'existe que chez les champignons 
aérobies, elle ne se forme qu'en présence de l'air. 

Von Behring, dans sa très succinte communication au Congrès 
de la tuberculose de Paris 1905), ditavoir retiré du Bacille de Koch 
trois groupes de substances bacillaires. « Une première substance 
soluble seulement dans l’eau pure, et qui possède une action fermen- 
tative et catalytique. De cette substance soluble dans l'eau dérivent 
les parties toxiques de la tuberculine de Koch. Cette substance, dit- 
il, a toutes les qualités chromophiles, physiques et chimiques de 
la VoLurine, décrite par notre botaniste de Marbourg, Arthur 
Meyer. Je nomme cette substance TV. 

« Pour donner une idée du pouvoir toxique de la TV, je puis dire 
qu'un gramme de cette substance à l'état sec est plus puissant 
qu'un litre de tuberculine de Koch. 

(«2° Une substance globulineuse soluble seulement dans un sel 
neutre (par exemple le chlorure de sodium à 10 p. 100) cette subs- 
tance est nommée par moi TGL ; elle aussi est toxique à la façon 
de la tuberculine de Koch. 

(«3° Plusieurs substances non toxiques solubles seulement dans l'al- 
cool, l'éther, le chloroforme, etc. » Les résultats obtenus par von 
Behring quant à la composition du Bacille de Koch semblent bien 
concorder avec les résultats des auteurs précédents ; il a extrait 
des substances protéiques, une globuline etune substance phospho- 
rée, nucléine, analogue à la volutine de A. Meyer. La tuberculine 
de Koch d’après lui dérive de cette nucléine, et nous avons vu 
que Brieger a donné à la tuberculine de Koch purifiée une com- 
position nucléinique. Mais l'activité de la nucléine isolée par 
Behring paraît résider dans son action de toxine soluble, de fer- 
ment, action que ne posséderait pas la tuberculine de Koch, étant 
donné son mode de préparation. Von Behring a extrait ensuite des 
matières grasses (solubilité dans l’éther, le chloroforme). Mais le 
Bacille tuberculeux délivré des trois groupes de substances il lui 
reste un corps, désigné sous le nom de « Resthacillus ». Ce 
Resthacillus ou TC « préexiste dans le Bacille de la tuberculose 
comme un agent doué d'un grand nombre de qualités extraor- 


84 G. BOUDIN 


dinaires. Cet agent remplit, dans le Bacille tuberculeux, la fonction 
de substance formative. En outre, il possède des qualités fermenta- 
tives (et spécialement catalytiques). Cet agent peut fixer d’une ma- 
nière élective, par contact, d’autres substances (phénomène qu'on 
a nommé adsorption) ; de plus, dans certaines conditions, il pos- 
sède des qualités assimilatrices. En un mot, il représente le prin- 
cipe quasi-vital des Bacilles ». 

Pour von Behring («dans le processus d'immunisation des bovi- 
dés contre la tuberculose, la TC des bacilles est délivrée des substan- 
cesaccidentelles (volutine, globuline, matières grasses); elle exerce 
une action symbiotique à l'intérieur des cellules organiques, en 
particulier dans les éléments cellulaires qui dérivent des centres 
germinatifs du tissu lymphatique ». Mais nous ignorons ce qu'est 
le Resthacillus et (les préparations convenables » que von Behring 
lui a fait subir pour le transformer en substance amorphe déter- 
minant après son élaboration et sa transformation par les cellules 
lymphatiques des organismes l'immunisation passive contre la 
tuberculose. Mais, ainsi qu’on le voit par sa communication, l’au- 
teur paraît bien considérer le Bacille tuberculeux, comme un col- 
loïde vivant, et lui applique une série de réactions très ménagées. 
En résumé, le Bacille tuberculeux, et comme lui le Bacille acido- 
résistant de la Phléole des Prés, contiennent des matières grasses, 
des matières cireuses, des sels avec prédominance de phosphates de 
calcium et de magnésium, des matières albuminoïdes avec une te- 
neur importante de matières protéiques phosphorées, polysacchari- 
des, matières pectiques, cellulose, ou d'après certains auteurs, 
Weyl, Bulloch, un glycoside : la chitine (1). 


(1) Cette composition chimique du Bacillen’a rien despécial. D’autres Protistes 
peuvent posséder une richesse comporable en matières phosphorées calciques et 
magnésiennes. La cellulose, de composition variable avec les végétaux peut être 
imprégnée de différentes matières minérales : phosphates, sulfates de chaux, de 
magnésie ; elle est unie étroitement à des matières protéiques : « Si l’on traite la 
levure de bière successivement par la potasse, par l’eau, et par l’acide acétique, 
on obtient une cellulose peu compacte (épidermose mêlée de nucléine) qui est 
insoluble dans le réactif cupro-ammoniacal. L’acide sulfurique et l’eau la transfor- 
ment en glycose » A. Gautier). Toutefois une telle composition du Bacille de 
Koch, sa richesse en calcium et en magnésium rendent très plausible l'hypothèse 
de le regarder comme un ferment actif, ces corps jouant dans les diastases le rôle 
de « complémentaires aclivantes ». 

C’est ainsi que G. Bertrand (Revue générale des Sciences, 30 mai 1905, p. 458) 
envisage le rôle du manganèse dans la laccase ; et que J. Gaube (cours de Miné- 
ralogie biologique) considère chaque zymase comme ayant une minéralisation pro- 
pre en l’absence de laquelle elle reste inerte. 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 85 


ETUDE HISTOLOGIQUE. — Noyau cellulaire, spores, corpuscules 
métachromatiques, grains de volutine, zymogène,ce sont là autant 
de formations cellulaires en connexion genétique étroite les unes 
avec les autres, et qui auraient été décelées par différents observa- 
teurs dans le Bacille tuberculeux. Ces observations tendent à pré- 
ciser les caractères de similitude ou de dissemblance de ce micro- 
organisme avec certains Protistes. Et si bien des points de sa 
constitution intime restent encore très obscurs, ils ne le sont pas 
pour lui tout spécialement, mais pour la généralité des micro- 
organismes. Examinés après coloration, les Bacilles de Koch pré: 
sentent très fréquemment un aspect granuleux: à intervalles régu- 
liers, des espaces clairs au nombre de 3 à 6 alternent avec des 
points fortement colorés. Cette constitution est tellement constante 
qu'on la voit signalée et figurée dans tous les traités de Microbiolo- 
gie. Certains auteurs, Piéry et Mandoul en particulier, ont établi 
divers types de Bacille de Koch, d’après le nombre ou le rapport de 
ces granulations. À côté d’un type homogène court, uniformément 
coloré, ils figurent un type moniliforme représenté par une série 
de grains disposés comme en chapelet et lui donnant l'apparence 
d'un streptocoque. Mais si l’on fait agir sur le premier type de colo: 
ration uniforme, de l’éther, du chloroforme ou des alcalis, ce type 
homogène prend l'aspect moniliforme. « La coloration au Gram et 
la coloration successive par le bleu de méthylène, puis par le Ziehl- 
Hauser, permettent, dans certains cas, de voir que les Bacilles 
homogènes possèdent une charpente centrale monoliforme plus 
chromatique que le protoplasma périphérique ». En conséquence, 
le Bacille tuberculeux, même du type homogène, se résout souvent 
en une charpente de points chromatiques entourée d'une sub- 
stance de chromaticité variable (1). La substance intermédiaire peu 
colorée peut donner, en de nombreuses occasions, l'apparence de 
grains, fortement réfringents, intermédiaires aux points colorés. 
Koch a signalé le premier ces parties non colorées et les à consi- 
dérées comme les spores du virus. « Si l’on emploie, dit Koch, de 
forts grossissements, on s'assure que le Bacille sporulé de la tuber- 
culose présente la même image, maisen miniature, que le Bacille 


(1) Le mémoire de Piéry et Mandoul tend à établir un rapport entre les variations 
morphologiques et numériques du Bacille de Koch et la séméiologie de la tuber - 
culose pulmonaire (Archives générales de Médecine, 9 mai 1905, n° 19). 


86 G. BOUDIN 


sporulé du charbon. Les spores sont ovoïdes,au nombre de deux à 
six dans un Pacille, limitées latéralement par une fine ligne colo- 
rée. Si on examine les Bacilles sporulés sans coloration, on cons- 
tate qu'ils renferment des points brillants fortement réfringents. 
Il ne s’agit donc pas là de vacuoles, mais bien de véritables spo- 
res » (cité d'après Straus, p. 166). Mais l'opinion qui est de 
plus en plus admise, c'est que les parties non colorables du 
Bacille décrites par Koch comme des spores, ne sont que des va- 
cuoles intermédiaires aux grains fortement colorés. Dans les 
vieilles cultures. dans les nodules caséeux, il ne subsiste, dit 
Metsnikov, aucune de ces spores réfringentes comparables à celles 
que la Bactérie charbonneuse montre dans les cultures âgées et 
qui chez ce dernier micro organisme sont des formations cellu- 
laires colorables. Et cet expérimentateur fait remarquer que les 
autres parties claires du Bacille tuberculeux ne se colorent jamais, 
même après action prolongée de la solution colorante, et dans les 
conditions où se colorent les spores d'autres Bactéries, celles du 
charbon en particulier. Maflucci observe que ces parties soi-disant 
réfringentes, les spores de Koch, apparaisent plus particulièrement 
chez le Bacille aviaire, et sous l'influence des hautes températu- 
res. D'après lui : « c'est une erreur que de vouloir assimiler ces 
espaces intermédiaires non colorés aux spores du charbon, parce 
que le Bacille du charbon après sa destruction laisse des spores 
libres reconnaissables, tandis que le Bacille de la tuberculose ne 
laisse aucune trace de telles formations. Le Bacille du charbon 
lorsqu'il est détruit est encore capable de végétabilité à cause de 
ses spores, ce qui n'est pas le cas pour le Bacille de la tubercu- 
lose. » Pour d’autres auteurs, les espaces clairs n’ont ni la réfrin- 
gence, ni l'aspect sphérique propre aux vraies spores. Ce qui 
rend la question difficile à trancher, c'est que les grains qui com- 
posent le Bacille de Koch, sont, comme cela a déjà été men- 
tionné, précisément colorables par les procédés qui servent à mettre 
les spores en évidence, et donnent ainsi l'aspect de spores. Roux 
et Nocard, en examinant des cultures de tuberculose en bouillon 
glycériné et peptonisé y voient les Bacilles, «en vieillissant, se colo- 
rer d’une facon moins intense.On aperçoit dans leur intérieur des 
grains plus foncés; soit au nombre de deux, un à chaque extré- 
mité; soit au nombre de trois, deux aux extrémités, un au milieu 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE S1 


du Bacille. Un Bacille n'a quelquefois qu'un grain soit au bout, 
soit avant son milieu; parfois aussi, on en voit plusieurs répartis 
sur toute sa longueur. Ces grains, qui ont tout à fait l'aspect de 
spores, deviennent plus nombreux et plus nets avec l’âge des cul- 
tures. » Babès dit que : «les points colorés du Bacille tuberculeux 
sont tantôt arrondis, tantôt cylindriques ou biconcaves; cette ap- 
parence permet de supposer qu'on a quelquefois affaire à des 
spores, tandis que le plus souvent les parties colorées appar- 
tiennent au protoplasma des bâtonnets, situé entre les spores et 
non à celles-ci. » Donc les parties claires du Bacille tuberculeux 
sont considérées comme des vacuoles, et non comme des spores et 
parmi les parties granuleuses et colorées, qui ne sont pas toutes de 
dimensions semblables, il en est, d'après Babès, qui figurent des 
grains ovoides plus gros et retenant plus énergiquement la cou- 
leur après l’action des acides. Babès en colorant des cultures pures 
de tuberculose par un séjour de plusieurs jours dans la solution 
d'Ehrlich, en les décolorant fortement, et les recolorant à nouveau 
d’une façon intense par le bleu de méthylène, a obtenu un aspect 
comparable à celui de la Bactérie du charbon sporulée : « Par ce 
procédé certains grains restent rouges, tandis que les bâtonnets 
sont bleus ou d’un rouge pâle. Ces grains (spores?) sont ronds et 
ordinairement terminaux. Un Bacille n’en possède habituellement 
qu'un... » Ehrlich en décolorant par l’action prolongée du sulfure 
de sodium est arrivé à décolorer tout le Bacille, sauf quelques 
grains qui restaient rouges. Babès à soumis systématiquement à 
cette action du sulfure de sodium « toutes les variétés de Bacilles 
de n'importe quelle maladie contenant des grains. Dans ces prépa- 
rations, comme dans celles de la tuberculose, les spores étaient 
colorées le plus souvent en rouge et les Bacilles en bleu. D'après 
ces recherches, on doit admettre que ces grains sont des spores 
de la tuberculose, ou bien que la réaction des spores indiquée par 
Bienstock, Neisser, Hueppe n'est pas concluante et ne permet pas 
de les diagnostiquer.» Comme Ehrlich et Babès, Czaplewski avec 
une culture un peu âgée de la tuberculose, fait une préparation 
qu'il soumet pendant plusieurs heures à l’action du liquide de 
Ziehl chaufté; on décolore par le bisulfite de soude, puis colore à 
nouveau au moyen du bleu de méthylène phéniqué ; «on voit alors 
à l’intérieur du Bacille coloré en bleu de petits corps ovoïdes for- 


88 G. BOUDIN 


tement colorés en rouge débordant beaucoup le contour du Bacille 
et rappelant tout à fait les spores colorées. » Koch pensa que les 
grains constatés par Ehrlich étaient des grains artificiels. Il est 
évident que Koch ne pouvait admettre que les spores du Bacille 
de la tuberculose pussent être colorables, puisqu'il interprétait 
la virulence tuberculeuse persistante de certaines lésions nodu- 
laires et caséeuses sans Bacilles colorables, justement par la pré- 
sence de spores incolorables. Mais si l’on admet que les spores de 
Koch ne sont que des vacuoles, et que le Bacille tuberculeux de 
même que le Bacille du charbon ne sporule pas dans les lésions, 
il faut attribuer alors définitivement la virulence de ces lésions 
sans Bacilles acido-résistants à des formes différentes acquises 
par le virus sous l'influence de l'organisme. Les auteurs qui ont 
trouvé dans le Bacille tuberculeux des formations en tout sem- 
blables aux spores du charbon les ont constatées dans des cultures 
(Czaplewski, Babès). Il n'en est pas moins vrai qu'on peut observer 
des granulations remarquables, par leur disposition régulière, 
leurscontours et leur acido-résistance et dans les crachats et dans 
les cultures. Un seul point permet de faire des réserves quant à la 
nature réelle de spores des grains de Babès, Ehrlich, Czaplewski, 
Nocard et Roux, c'est leur faible résistance à l’action de la cha- 
leur. Si la grande résistance des Bacilles tuberculeux dans les mi- 
lieux de culture et dans les milieux extérieurs, dans certaines con- 
ditions de faible insolation, autorise à considérer les grains ovoïdes 
comme de vraies spores, il n'en est pas moins vrai que ces spores 
ne résistent pas à l’action d'une température de 90° prolongée pen- 
dant dix minutes en milieu humide. En cela les formes durables 
du Bacille de Koch diffèrent des spores des Bacilles du charbon, 
du tétanos, du Bacillus subtilis, et se rapprochent plutôt des formes 
durables de diverses Moisissures, Discomyces, Aspergillus, détruites 
en général au-dessous de 1000. 

Mais si, à cause de leur faible résistance à l’action des hautes 
températures, en n'envisage pas les granules du Bacille tubercu- 
leux comme des spores, on doit les envisager d’après certains au- 
teurs comme des corpuscules métachromatiques, comme des 
accumulations de chromatine (Babès, Straus). Ce n'est pas là beau- 
coup difiérer. On sait que, d’une façon générale, outre son rôle 
essentiel dans les phénomènes de bipartition et les phénomènes de 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 89 


fécondation, le noyau cellulaire paraît encore avoir, d'après les 
recherches de K. Nakanishi, de Schaudinn, sur les Bactéries, de 
Guilliermond sur les Levures, un rôle très important dans la forma- 
tion des spores. L'existence d’un noyau à contours définis, ou d'un 
noyau diffus, représenté par des grains de chromatine distribués 
dans les cellules des Bactéries est de moins en moins contesté. Et 
pour le Bacille de Koch en particulier, K. Nakanishi aurait démon- 
tré l'existence d'un noyau à contours nets, chez les Bactéries des 
cultures récemment ensemencées, ce noyau étant remplacé dans 
les cultures âgées par une difilusion de grains nucléaires dans le 
cytoplasme des cellules bactériennes. A l'étude de la structure des 
Bactéries, Nakanishi a appliqué une méthode de coloration spé- 
ciale, tendant à éviter l’action trop peu ménagée sur les micro-or- 
ganismes, des procédés tels que fixation au moyen de procédés 
chimiques, de la chaleur, et l’action successive des opérations de 
différenciation par les teintures; ilémulsionne donc les Bactéries, 
dont la croissance s'est faite sur les milieux solides, dans de l’eau 
distillée; pour celles qui se sont developpées en milieux liquides, 
bouillonsnutritifs,il lesexamine dansles liquidesmêmesde culture. 
Dans l’'émulsion, dans le milieu liquide contenant les micro-orga- 
nismes, il dissout du bleu de méthylène, substance colorante la 
plus généralement soluble dans les sues végétaux, bouillon, géla- 
tine liquéfiée, et eau de condensation des terrains de culture ; dans 
ces conditions la teinture se fixe sur les Protistes dont on veut 
observerla structure. « Toutes les Bactéries prennent la subtance 
colorante très rapidement et le Bacille tuberculeux qui ne prend 
que très difficilement la couleur dans la préparation fixée se colore 
d'après cette méthode, en peu de temps. » D'une façon générale, 
la périphérie de la cellule bactérienne fixe la première la teinture, 
puis les noyaux manifestent une coloration intense, puis le cyto- 
plasma apparaît en bleu clair de nuance plus foncée dans la zone 
externe, presque incolore dans la zone périnuecléaire. 

D'après cette méthode, K. Nakanishi observe chez les Bacilles 
du groupe diphtérique, et chez le Bacille tuberculeux des modes de 
structure très variés, mais très comparables les uns aux autres. 
Ces Bactéries peuvent être représentées d'abord par une seule cel- 
lule à noyau unique, puis par une série de plusieurs cellules dispo- 
sées bout à bout, de telle sorte que cette dernière formation prend 


90 G. BOUDIN 


un aspect filamenteux, à noyaux multiples, bien visibles, disposés 
en série. Ensuite des ramifications prennent naissance sur les fila- 
ments qui présentent alors un cytoplasme teint d'une façon tout 
particulièrement intense; et sur le fond sombre, granuleux, de ce 
cytoplasme ressortent des corpuscules, épais, discoïdes, très inten- | 
sément colorés. Pour l'étude du Bacille tuberculeux, l'observateur 
s’est servi exclusivement de cultures jeunes, âgées de 6 à 10 jours, 
sur bouillon, sérum sanguin et agar glycériné. Dans les prépara- 
tions d'une émulsion de fragments de culture de Bacilles de tu- 
berculose sur milieux solides, on voit des Bacilles minces, étroits, 
souvent libres, souvent inclus dans une masse glaireuse; ils fixent 
rapidement la teinture. Le cytoplasme est profondément coloré. 
Les extrémités de l'élément bacillaire sont souvent renflées, et plus 
intensément colorées encore que le reste du protoplasme. On re- 
marque également des bâtonnets de plus grande longueur, une fois 
et demi plus grands que les normaux qui montrent en plus, dans 
leur milieu, une troisième formation corpusculaire, aussi intensé- 
ment colorée que les granules des extrémités. En s'en rapportant 
aux figures données par Nakanishi, cette forme trouvée principa- 
lement sur les milieux de cultures solides, correspondrait à la 
forme classique du Bacille de la tuberculose. Mais sur les milieux 
liquides, on observe surtout des Bacilles à forme cellulaire typique, 
à noyau central bien coloré, à cytoplasme de teinte claire, 
dépourvus de ligne extérieure foncée. Cette forme serait plutôt en 
rapport avec les formes en lancette, formes naines décrites par 
Metshnikov et Straus et prédominantes dans certaines cultures 
de tuberculose aviaire. Dans de tels corps cellulaires, sont visi- 
bles des gouttelettes d'un éclat comparable à celui que donnent 
habituellement les gouttelettes de graisse. Le noyau est la plu- 
part du temps long et ovale, et se tient constamment au centre 
de la cellule. On trouve aussi très fréquemment dans un seul 
corps cellulaire, deux noyaux piriformes, accolés par leur petite 
extrémité, de telle sorte que tous deux, dans leur ensemble, 
figurent une disposition en forme de sablier. Cette cellule à deux 
noyaux est toujours plus longue que la cellule uninucléée; elle est 
souvent plus ou moins étranglée au milieu. La formation d'une 
cloison intermédiaire aux deux noyaux ne se produit jamais. L'au- 
teur n’a pas poursuivi ses recherches sur des cultures âgées de plus 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 91 


de dix jours, puisque le Bacille tuberculeux croit d'après luicomme 
le Bacille diphtérique; c'est-à-dire que dans les cultures jeunes le 
développement des Bacilles se fait par division nucléaire et divi- 
sion cytoplasmique simultanées. Puis au fur et à mesure que la cul- 
ture avance en âge, le noyau se divise plus vite que le cytoplasme; 
et comme la division nucléaire s'effectue dans un seul sens, il en 
résulte l'apparition de formes filamenteuses où figurent des points 
très colorés, d'un diamètre sensiblement constant, séparés à in- 
tervalles presque égaux par des zones claires. Mais les deux extré- 
mités des filaments les plus longs sont particulièrement et profon- 
dément teintes. Sur de tels filaments, l’un quelconque dans la série 
des corpuscules très colorés peut se résoudre en nombreux gra- 
nules, dont quelques-uns, tout en restant dans la même forma- 
tion cellulaire, s'échappent latéralement, entraînant une partie du 
cytoplasme dans une direction perpendiculaire à l’axe longitudinal 
du premier filament. Ces formations apparaissent dans les cultures 
les plus âgées. Nakanishi pense avoir ainsi observé la genèse des 
formes ramifiées; il est cependant d'avis que ses observa- 
tions ont encore besoin d'être justifiées par des recherches com- 
plémentaires. Mais quoi qu'il en soit, au fur et à mesure que Les 
cultures deviennent plus âgées, au mode de multiplication ordi- 
naire des Bactéries par division, se substitue un mode de croissance 
non pas diflérent, mais phase consécutive du premier mode de 
genèse, aboutissant à des formes variées, fillamenteuses, ramifiées, 
particulièrement renflées à leur extrémité, et dans le protoplasma 
homogène desquelles s'échelonnent des grains fortement colorés. 
Les extrémités renflées, comme le reste du filament, contiennent 
des corpuscules fixant énergiquement la teinture. En de telles for- 
mes, il n'y a rien de comparable au noyau des formes unicellu- 
laires qui se présentent dans les cultures peu âgées en milieux 
liquides. Dans les Bactéries jeunes, teintes au bleu de méthyle, 
le noyau n'apparaît pas toujours bleu, mais souvent est coloré 
en rouge. Dans les formes filamenteuses, les corpuscules sont tan- 
tôt colorés en bleu d'une façon homogène, tantôt n'ont pris la cou- 
leur qu’à la périphérie, tandis que la partie centrale manifeste une- 
réfringence considérable. Ces corpusecules se colorent comme 
des spores puisqu'ils prennent également la coloration de Neis- 
ser. Nakanishi discute la nature de ces corpuscules métachro- 


92 G. BOUDIN 


matiques. D'après lui, ils ont certains caractères des spores des Bac- 
téries; vraisemblablement ils représentent une masse de proto- 
plasma condensé autour d'un noyau, et ainsi peuvent aboutir à la 
formation des spores. Nakanishi a constaté, en effet, que chez tou- 
tes les Bactéries, les spores sont toujours constituées par une masse 
nucléaire centrale, entourée de matières de réserve. Mais d’une part 
l'observateur n'a pas constaté de la part de ces corpuscules une 
grande résistance sous l'influence des températures élevées et, d'au- 
tre part, il n'en a jamais observé la germination. 

Dans une autre partie de son travail, il donne les résultats de son 
étude sur les Spirilles et en particulier sur le Spirillum volutans. 
Nous devons parler ici de ce dernier micro-organisme, puisqu'on 
aurait trouvé chez le Bacille tuberculeux une substance cellulaire 
de composition identique à la volutine du Spirillum. Nakanishi a 
étudié le développement de ce Protiste sur des milieux peptonés; 
dans les caltures jeunes, les Spirilles ont une forme très mobile, 
avec cils, et sont particulièrement riches en corpuscules ronds, 
très intensément colorés. Ces derniers n'ont aucune régularité de 
nombre, de dimensions, de disposition. Mais ils disparaissent au 
fur et à mesure que la culture vieillit, de telle sorte que dans les 
milieux âgés on ne trouve plus que des formes immobiles à proto- 
plasma homogène teint profondément sur la périphérie avec noyau 
central allongé. Pour l’auteur, et il ne donne là qu'une opinion 
personnelle, ces corpuscules, qui fixent si énergiquement la tein- 
ture, et colorés en bleu par le bleu de méthylène, correspondent à 
des matières de réserve qui disparaissent au fur et à mesure que 
le terrain de culture s'épuise. 

Mais a-t-on le droit d'homologuer les granulations du Bacille de 
Koch et les corpuscules métachromatiques du Spirillum volutans? 
Ainsi que Guilliermond le fait remarquer, il n'y a point dans le 
Bacille de la tuberculose de corpuseules marquant une métachro- 
masie nette, c'est-à-dire capables de prendre directement cette co- 
loration d’un rouge plus ou moins sombre par un grand nombre 
de colorants bleus. Il semble cependant que dans la méthode de Na- 
kanishi, seuls, les noyaux des cellules existant dans les cultures 
jeunes manifestent une métachromasie nette, tandis que les grains 
du Bacille tuberculeux et les corpuscules du Spirille marquent 
surtout cette propriété de fixer énergiquement la teinture, sans mo- 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 93 


dification de teinte. D'autre part, on peut rappeler la richesse en ma- 
tières nucléiques et en matièresgrasses du Bacille de Koch.C'est pré- 
cisément une composition analogue que présentent les organismes, 
riches en corpuscules métachromatiques. A. Meyer désigne sous 
le nom général de grains de volutine des corpuscules possédant une 
affinité considérable pour les colorants, présents en plus ou moins 
grand nombre dans les cellules de diverses Bactéries, Algues, té- 
tes sporifères des Moisissures, Levures, et tout spécialement nom- 
breux dans le Spirillum volutans, d'où ce nom de volutine. Pour 
Mever, la volutine serait une substance composée d'acide nucléique 
et d'une base non albuminoïde. Malgré cette composition, il pense 
que les grains chromophiles sont des formations indépendantes du 
noyau, d’origine cytoplasmique exclusive. Ce ne seraient que des 
matières de réserve, comme le sont les huiles, les hydrates de car- 
bone, les polysaccharides, substances d’ailleurs dans un rapport si 
étroit avec les grains de chromatine que Fischer considère ceux- 
ci comme uniquement formés d'une condensation d'un glycogène 
auquel il donne le nom d'anabénine (à cause de la richesse par- 
ticulière en cette substance d’une Algue Nostoccacée du genre Ana- 
bena). Pour Guilliermond, d’après ses observations sur le Saccharo- 
myces Ludwigi et sur les Oscillaires, les grains de volutine consti- 
tuent bien des matières de réserve et contribuent d’une façon très 
importante à la formation des spores. Mais cet auteur se sépare de 
A. Meyer en faisant des corpuscules métachromatiques des produc- 
tions d'origine nucléaire. De plus d’après beaucoup d'observateurs, 
Schaudinn et F. Mesnil entre autres, dans les différents Protistes où 
il n'y a pas de noyau central à contours définis, il y a dans le cy- 
toplasme des grains fixant les colorants nucléaires et qui sont un 
appareil nucléaire diffus. Ces recherches sont en accord avec celles de 
Guilliermond sur l'origine nucléaire des grains de volutine. [n'est 
pas pour ces auteurs de micro-organismes sans noyau ;ilexiste, ou 
concentré, ou divisé en multiples grains dans le corps cellulaire. 
Dans les phénomèmes de sporulation, les grains nucléaires épars 
se groupent en amas plus ou moins considérables et s'entourent 
d'une mince couche de cytoplasme et de membranes résistantes. 
Et ainsi peut-être justifiée l'opinion de Nakanishi sur les analogies 
de la composition des corpuscules métachromatiques et des spores: 
présence constante d'un noyau entouré de matières de réserve. 


9% G. BOUDIN 


D'une façon générale, chez tous les micro-organismes, le noyau 
unique, ou à l’état diffus, joue un rôle comparable dans les phéno- 
mènes de division, de sporulation, de concentration des substances 
de réserve. De plus, pour d’autres auteurs, les grains de chroma- 
tine épars, d'origine nucléaire, seraient des grains de zymogène, 
ou proenzyme servant à la production de ferments, enzymes de 
dédoublement, oxydases, etc. La masse nucléaire serait donc en- 
core le pôle actif autour duquel s'effectuent les phénomènes 
d'échanges diastasiques. C'est de ce dernier point de vue, rapport 
des grains métachromatiques avec la formation des enzymes, et 
dans le cas particulier, de toxalbumines, que von Behring semble 
avoir considéré le Bacille tuberculeux pour définir la substance nu- 
cléique qu'il en a extraite: «substance soluble seulement dans l'eau 
pure, et qui possède une action fermentative et catalytique. De cette 
substancesoluble dans l’eau dérivent les partiestoxiques de la tuber- 
culine de Koch. Cette substance a toutes les qualités chromophiles, 
physiques et chimiques, de la volutine, décrite par notre botaniste 
de Marbourg, Arthur Meyer. Je nomme cette substance TV. » 

Il ne semble guère douteux, et comme il résulte des recherches 
de Nakanishi, et des différentes recherches sur la composition chi- 
mique de la tuberculine ancienne et du Bacille tuberculeux, que 
cette volutine de von Behring n'ait un rapport étroit avec les grains 
de chromatine du Bacille tuberculeux; mais von Behring ne dit 
pas dans quelles conditions de culture il a pu obtenir le maximum 
d'activité diastasique de ces grains, qui dans les conditions de déve- 
loppement habituel des Bacilles de la tuberculose et, étant donnée la 
lenteur du développement des colonies, la richesse des Bacilles en 
matières grasses, semblent plutôt tendre à la formation de spores. 


CHAPITRE XI 
Les réactions chromatiques du Bacille tuberculeux ; leur variabilité. 


A laquelle des substances contenues dans le Bacille tuberculeux, 
et dans le Bacille de la Phléole faut-il rapporter les réactions spé- 
ciales de coloration? Dans les recherches d'Hammerschlag, ni la 
substance albuminoïde extraite par la potasse, ni la cellulose ne 
résistent séparément à la décoloration par les acides. Hammers- 
chlag en a conclu que la matière qui présente la réaction colorante 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 95 


caractéristique est une sorte de combinaison d’albuminoïde et de 
cellulose. D'après Weyl, la substance qui présente les colora- 
tions du Bacille de Koch, se dissout lentement dans l'acide sulfu- 
rique, mais contient de l’azote. Cette substance constituante de la 
membrane d'enveloppe du Bacille serait donc formée par union 
d'une cellulose à un radical azoté. D'après Koch, la substance colo- 
rable et acido-résistante serait un acide gras. Borrel, comme il l’a 
fait déjà avec Roux, « dégraisse totalement les Bacilles en les trai- 
tant d’abord par une solution faible d'HCI portée à l’ébullition ; 
les Bacilles ultérieurement desséchés sont traités par le xylène à 
chaud dans un appareil à épuisement. L'action préalable de l'acide 
peut être remplacée par un chauffage à sec, au four à flamber, vers 
1400-1500; épuisés ensuite par le xylène à chaud, les Bacilles perdent 
complètement leur propriété acido-résistante ;.… étalée sur lame, la 
substante grasse totale extraite par le xylène se colore très éner- 
giquement et la coloration résiste aux acides. » 

Pour Aronson et Bulloch, la propriété de résistance à l’action dé- 
colorante des acides n’est pas due précisément à une graisse, mais 
à une cire; après action de l’éther, du chloroforme, de la benzine 
durant plusieurs jours, les Bacilles tuberculeux sont encore colo- 
rés; mais l'alcool, l'éther, le chloroforme bouillants enlèvent une 

matière cireuse qui est puissamment acido-résistante et ne se laisse 
pas teindre par les réactifs habituels de la graisse, par exemple le 
réactif Soudan II. Bulloch attribue à cette même substance cireuse 
la résistance à la décoloration du Bacille de la Timothée. 
. Pour E. Klein, la résistance à l'acide du Bacille de Koch n’est pas 
due à une enveloppe de graisse. En ensemencant, sur sérum de 
cheval coagulé, des Bacilles tuberculeux, cultivés en série sur agar 
glycériné et dépourvus de virulence, on voit apparaître les colonies 
à la fin de la première semaine sous formes de petits points gris 
blanchâtres, d'aspect brillant, à centre saillant. Entre le 6me et le 
12me jour, Klein fait des préparations par impression de ces colonies 
et les colore d’après la méthode d'Ehrlich; il constate que beaucoup 
des stries onduleuses de la préparation n'ont pas résisté à la déco- 
loration par l'acide nitrique au tiers. Ce fait fut observé également 
par Ledoux-Lebard : (Lorsqu'on étudie, dit-il, la structure des colo- 
nies sur des préparations colorées à la fuchsine (Ziehl), puis lavées 
à l'acide et à l'alcool dilués, on observe presque toujours, même 


96 G. BOUDIN 


sur des cultures très jeunes, des Bacilles non colorés dont on 
remarque la présence, si l’on a soin de faire varier l'éclairage et 
l'ouverture du diaphragme. » E.Klein observant ce phénomène d'une 
facon constante, sur des Bacilles de virulence très affaiblie se de- 
mande si la faible résistance à l'acide peut avoir quelque rapport 
avec le faible pouvoir pathogène. Il constate d'abord que les Bacilles 
tuberculeux longtemps entretenus en série sur des milieux artifi- 
ciels, agar glycériné par exemple, non seulement perdent leur 
virulence, mais encore se développent plus rapidement sur tous les 
milieux, agar glycériné, sérum, lait, et que les cultures jeunes 
montrent de nombreux éléments bacillaires non acido-résistants 
(Klein confirme ainsi les résultats de Krompecher, sur la dispa- 
rition du pouvoir pathogène des Bacilles tuberculeux entretenus 
longtemps en milieux artificiels). En second lieu, l’auteur voit que 
le défaut d’'acido-résistance est également manifesté par les cul- 
tures jeunes de tuberculose virulente. Dans tous les cas, après la 
deuxième semaine les Bacilles sont presque tous acido-résistants. 
Seules les cultures dans le lait manifestent une acido-résistance 
constante et permanente. Puisque le Bacille tuberculeux acquiert 
la réaction d'Ehrlich sur des milieux totalement dépourvus de corps 
gras, comme le sérum gélatiné, il doit cette réaction d'après Klein, 
à certaines substances chimiques, absentes chez les éléments bacté- 
riens jeunes et qui se forment au bout d'un certain temps dans leur 
protoplasma. 

Pour C. Feistmantel également, la résistance à l'acide est indé- 
pendante des corps gras que peut posséder le Bacille tuberculeux. 
Il répète l'expérience de Unna tendant à révéler, par l’action de la 
solution de Flemming, la présence des corps gras dans la Bactérie. 
- Il vérifie la propriété acido-résistante d'une culture jeune en série, 
sur agar, mais n'arrive pas à imprégner les éléments bacillaires 
par le Flemming. Mais d’autres cultures peu âgées, traitées de la 
même façon, pour contrôle, montrèrent des éléments bacillaires 
complètement noirs. Ensuite il essaye de teindre le Bacille de Koch, 
d'après la méthode de Sata, qui a coloré des articles filamenteux 
d'actinomycose au moyen du réactif colorant de la graisse, le 
Soudan IIT. Le résultat fut encore négatif. Carl Ramus a cependant 
pu colorer très souvent des Bacilles tuberculeux avec le Soudan III. 
Mais cette réaction colorante, d'après cet auteur, n'est pas cons- 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 97 


tante. En conséquence, et étant donnée la variabilité des réactions 
colorantes, C. Feistmantel estime que les Bacilles sont redevables 
de leurs propriétés de coloration et de leur résistance à l'ac- 
tion des acides, à une combinaison spéciale des substances qui les 
composent, susceptible de modifications avec leurs conditions 
de vie, et non pas à une seule de ces substances. Quoi qu'il 
en soit, les recherches des auteurs précédents montrent que les 
Bacilles tuberculeux peuvent être teints par les réactifs colorants 
de la graisse, mais que cette réaction n'est pas constante. 
Von Behring, après avoir traité les Bacilles par l’eau, une solution 
de NaCI à 10 p. 100, par les dissolvants des graisses, alcool, éther, 
chloroforme, obtient finalement le « Resthacillus » « qui possède 
encore la formeetles qualités tinctoriales des Bacilles tuberculeux ». 
Schumowski ayant extrait la graisse et les matières albuminoïdes 
du virus tuberculeux constate que la résistance à la décoloration 
par les acides est encore manifestée par le résidu des Bacilles. Il 
attribue cette propriété à la cellulose. Après cette analyse des di- 
vers travaux, il est bien difficile de se prononcer. Les diverses 
solutions proposées sont celles-ci : la résistance à l'acide est due à 
une graisse (Borrel), à une cire (Bulloch, Aronson), ou bien à une 
combinaison d'un polysaccharide avec une substance azotée 
(Weyl, Hammerschlag), ou à une cellulose (Shumovski). D'autre 
part, on peut mettre parfois en évidence des graisses chez le Bacille 
tuberculeux par les réactifs colorants des substances grasses, tels 
que la solution de Flemming et le Soudan III; le Bacille ne 
pourrait-il dans son évolution posséder des acides gras se modifiant 
d'une façon plus ou moins régulière par oxydation, ici colorables 
par les réactifs des graisses et peu acido-résistants, là manifestant 
une considérable résistance à la décoloration par les acides? 
Quelles que soient les conclusions, elles semblent devoir s'appliquer 
aussi bien aux Bacilles tuberculeux, qu'au Bacille de la Timothée, 
qu'au Discomyces farcinicus dans certaines conditions de sa vie 
(GC. Feistmantel). Comme Berestnev, Feistmantel a teint les fila- 
ments de certaines cultures d’Actinomyces farcinicus au moyen 
de la solution phéniquée de Ziehl. Il a remarqué en outre une ré- 
sistance très marquée des filamentsainsi colorés à l’action prolongée 
des acides ou de l'alcool. L'auteur cherchant à se rendre compte 
de la raison de cette propriété vit qu’elle se conservait longtemps 
Archives de Parasilologie, XI, n° 1, 1906. 7 


98 G. BOUDIN 


si les cultures restaient exposées à la température de la cham- 
bre, tandis qu'exposées à la température de l'étuve, en l’es- 
pace de quelques jours, les filaments très acido-résistants se résol- 
vaient en grains colorables directement par le bleu de méthylène. 

Mais, d'autre part, il est certaines considérations qui tendent 
à montrer que les réactions de coloration, et en particulier la ré- 
sistance à la décoloration par les acides, ne sauraient être le 
résultat d’une réaction chimique, d'une combinaison spécifique de 
la matière colorante avec une seule substance définie du corps 
microbien. Les colorations des matières organiques par les cou- 
leurs d'aniline seraient, d'après les recherches de la physico- 
chimie, essentiellement des phénomènes de teinture. Il n'y aurait 
pas combinaison, mais fixation de la couleur sur la substance 
à colorer; et les lois de ces phénomènes de teinture semblent 
pouvoir être ramenées aux lois de l'électrisation de contact. Puis- 
qu'il y a là phénomène en partie physique, et de même que 
l'opalescence peut être réalisée et par des suspensions de ma- 
tières grasses et par des matières albuminoïdes, a priori plusieurs 
substances différentes et des combinaisons de substances peuvent 
réaliser les conditions physiques identiques pour la fixation éner- 
gique d'une même teinture. Et c'est ainsi que Spina, en ajoutant à 
des cultures vivantes de différentes Bactéries soit des graisses, soit 
du tannin, voit que les Bactéries acquièrent les propriétés de colo- 
ration du Bacille tuberculeux avec résistance aux acides. Bienstock 
cultive sur gélose additionnée de beurre des microbes comme Ba- 
cillus subtilis, Bacillus anthracis et constate que ces Bactéries se déve- 
loppant en milieu additionné de graisse présentent les réactions de 
coloration du Bacille de Koch. « Colorés pendant dix minutes dans 
le liquide chauffé de Ziehl, ces divers Bacilles résistent énergique- 
ment à la décoloration par l'acidenitrique au 1/3.» La conclusion de 
Bienstock est que la réaction d'Ehrlich ne saurait être considérée 
comme caractéristique du Bacille de Koch, celui-ci empruntant 
uniquement cette réaction à un revêtement de graisse qui se forme- 
rait autour, de lui dans la sécrétion des cavernes et dans les masses 
caséeuses. 

Gotistein constate que les Bacilles du cérumen ont les mêmes 
réactions de coloration que les Bacilles du Smegma. Comme Biens- 
tock, il ajoute aux milieux de culture de différents Bacilles, beurre, 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 99 


lanoline, et constate la propriété acido-résistante consécutive de 
ces micro-organismes. Pour Gottstein cependant les Bacilles de la 
tuberculose se différencient des Bacilles du smegma et des Ba- 
cilles du cérumen en ce que ces derniers, soumis à l’action à chaud 
d'une lessive de soude additionnée de 5 p.100 d'alcool, sont débar- 
rassés de leur revêtement graisseux. La graisse est en effet sapo- 
nifiée par la solution alcaline et dissoute dans l'alcool et l'eau. 
Les Bacilles de Koch restent colorés au contraire après ce traite- 
ment par lessive de soude chaude additionnée d'alcool. Leur réac- 
tion colorante ne saurait donc être imputée à une enveloppe grasse. 
Nous avons vu en eflet que les dissolvants des corps gras même 
après une action prolongée à froid n’enlevaient en rien au Bacille 
tuberculeux sa propriété acido-résistante. Mais l’étude des divers 
procédés de coloration nous a montré combien cette propriété est 
variable; tantôt on peut employer les acides minéraux, tantôt au 
contraire il faut employer les acides organiques faibles; enfin 
parfois une véritable couche grasse peut être mise en évidence au- 
tour du Bacille tuberculeux; si bien que le terme acido-résistant 
n'est pas encore précisé. 

Au Congrès international de la tuberculose, en octobre 1905, 
Bezançon et Philibert « divisent les Bacilles acido-résistants en 
deux catégories : les uns sont fortement résistants, acido et 
alcoolo-résistants, et cela même héréditairement; les autres 
(cérumen, smegma etc...) résistent faiblement, ne sont pas alcoolo- 
résistants et n'ont leur propriété que dans des milieux particuliers. 
Ces derniers, disent les auteurs, sont pour nous médecins les plus 
fréquemment rencontrés, et peuvent même coexister (gangrène 
pulmonaire), avec le Bacille de Koch. Or, on arrive en cultivant des 
microbes quelconques sur des milieux gras, à leur communiquer 
des propriétés acido-résistantes faibles (B. diphtérique).» P. Cour- 
mont, de Lyon, répond « que la distinction établie par MM. Bezan- 
çon et Philibert en deux catégories d’acido-résistants n’est guère 
valable, parce que tous les intermédiaires peuvent être obtenus 
entre les Bacilles fortement ou faiblement acido-résistants. « Si 
on compare une culture classique de Bacilles tuberculeux aux 
Bacilles acido-résistants les différences sont très nettes. Si l'on 
compare ces acido-résistants aux cultures homogènes de Bacilles de 
Koch, dès lors les différences s’eflacent. » 


100 G. BOUDIN 


En réalité, c'est bien en examinant les variations morphologiques 
et biologiques du Bacille tuberculeux, qu'on peut arriver à cette 
conclusion, déterminée alors par des faits expérimentaux, mais qui 
ressort déjà des diverses recherches venant d'être citées, à savoir la 
grande relativité des réactions chromatiques, puisqu'elles peuvent être 
manifestées à un degré plus ou moins accentué par diverses subs- 
tances,ou combinaison de substances, instables elles-mêmes dans le 
cours de la vie du micro-organisme. Il est prouvé actuellement qu'on 
peut transformer par la méthode deJ. Ferran, le Bacille de Koch très 
fortement acido-résistant en des variétés de moins en moins résis- 
tantes aux acides, et à tel point qu'on arrive à pouvoir colorer 
directement et rapidement les éléments bacillaires par les couleurs 
basiques d’aniline. 

Certains faits d'expérience et d'observation nous conduisent 
à penser qu'une telle désintégration est réalisée dans l'organisme. 
F. Bezancon, comme cela a déjà été mentionné, invoque de telles 
modifications du parasite dans ces cas nombreux de tubercu- 
lose à diagnostic difficile, presque impossible, puisque les Ba- 
cilles ne peuvent être décelés, ni par les procédés de teinture, 
ni par l'inoculation au Cobaye. En telle occurrence, en ajoutant 
aux milieux de culture où vivent les Bacilles tuberculeux, trans- 
formés par la méthode de Ferran, de la graisse ou une solution de 
tannin, ne pourra-t-on leur conférer à nouveau l’acido-résistance ? 
Et des Bacilles tuberculeux transformés par la vie parasitaire ne 
pourront-ils récupérer à nouveau une certaine acido-résistance, 
plus ou moins accentuée, s'ils viennent à se développer en des 
milieux riches en matières grasses? Ou bien indépendamment 
même d'un développement en ces milieux spéciaux, additionnés de 
graisses ou d'acide tannique, la variété non acido-résistanteet mobile 
du Bacille de Koch, peu fixée dans cet état, ne peut-elle, dans les 
cultures, recouvrer avec le vieillissement, le caractère de Bactérie 
immobile et la propriété de résister d’une façon de plus en plus 
marquée à la décoloration par les acides”? Les travaux de J.Ferran, 
confirmés en partie par les recherches de S. Arloing et P. Cour- 
mont et surtout par celles de J. Auclair, peuvent nous renseigner 
à ce sujet. 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 401 


CHAPITRE XII 


Races bacillaires ciliées et mobiles, non acido-résistantes (J. FERRAN 1897, 
S. ARLOING 1898 et P. CourMonT 1909, J. Aucrair 1903). 


Nous plaçant au point de vue historique, nous n'avons fait jus- 
qu'ici que des allusions aux travaux de J. Ferran, et dans la mesure 
même, très restreinte encore, où on y a recours actuellement 
pour rendre compte des obscurités nombreuses que laisse la 
théorie du parasitisme exclusif du Bacille de Koch. La première 
communication de Ferran, faite à l’Académie des Sciences de Paris 
en date du 6 août 1897 ; c'est une note relative aux aptitudes sapro- 
phytiques du Bacille de Koch, et à sa parenté avec le Bacille du 
typhus et le Coli-bacille. Si l'on résume les mémoires nombreux 
qui ont suivi cette communication, nous voyons que les travaux 
de Ferran comportent ces trois séries de recherches : 

4° Les Bacilles de Koch, Bactéries immobiles et végétant en 
conglomérats plus ou moins denses sur les milieux solides et 
liquides, à réaction acide, peuvent être convertis en Bacilles mo- 
biles et ciliés, se tenant en suspension homogène dans les milieux 
liquides alcalins. 

2° Dans les crachats des tuberculeux, existe toujours en abon- 
dance, à côté du Bacille de Koch, et même avant que celui-ci 
n'apparaisse, un autre Bacille tuberculogène, non acido-résistant, 
pouvant être identifié avec le Bacille mobile et cilié, obtenu en 
cultures pures à partir du Bacille de Koch. 

9° Le Coli-bacille isolé des excréments de différents animaux : 
Homme, Chien, Chat peut, par inoculations expérimentales répé- 
tées, en vie parasitaire, acquérir la propriété tuberculogène et les 
réactions chromatiques du Bacille de Koch. Ainsi, «(la tuberculose 
est une variété de Coli-bacillose ; le Bacille de Koch n’est qu'un Coli- 
bacille modifié par les changements chimiques qu'il détermine 
dans les tissus infectés. » 

C'est en ensemençant en série le Bacille de Koch dans des 
bouillons chaque fois plus pauvres en glycose, en glycérine, et en 
peptone, et en agitant quotidiennement les cultures, que Ferran 4 
obtenu des races émulsionnables à éléments bacillaires ciliés et 
mobiles. Ces microbes se développent alors à la température ordi- 
naire, acidifient les milieux lactosés, donnent la réaction de l'indol 


102 G. BOUDIN 


dans les milieux contenant des peptones, et en outre offrent la par- 
ticularité de se laisser agglutiner par le sérum des tuberculeux. 
Par ces caractères, cette race microbienne d'origine tuberculeuse 
authentique se rapproche du Coli-bacille. De tels changements 
s'opèrent lentement, par sélection et par adaptation successives aux 
milieux de moins en moins concentrés ; la réaction chromatique de 
la Bactérie acido-résistante et sa virulence spécifique (formation de 
nodules) diminuent ainsi progressivement, jusqu'à ce que («Le clas- 
sique Bacille de Koch demeure définitivement converti en un vul- 
gaire Coli-bacille». Les cultures de ce nouveau microbe, développées 
sur un sérum liquide de Cheval, de Mouton, de Bœuf, à la tempé- 
rature du laboratoire et injecté à doses fractionnées et repétées dans 
le tissu cellulaire sous-cutané de l'abdomen d’un Cobaye, déter- 
minentd'abord del’œdéme, puis un phlegmon. Les Bacilles isolés de 
la sérosité de l’æœdème ou du pus, semés en sérum liquide donnent 
une race microbienne qui produit une substance dialysable, à 
odeur de sperme humain, et qui possède les réactions que Pæœhl 
attribue à la spermine : le chlorure d’or en solution à 1 p. 1000 
n’est pas réduit sous la forme de poudre de couleur violette par 
addition à la solution aurique de magnésium en poudre. «Il 
semble, dit Ferran, que ce soient les leucocytes accompagnant la 
semence quiexaltent sa fonction spermigène.» Pour rendre à la va- 
riété coli-bacillaire dérivée du Bacillede Koch, maintenant race sper- 
migène,son action tuberculogène,ilfautexaltersa virulenceau moyen 
d'inoculations sériées de Cobaye à Cobaye, puis (l'inoculer maintes 
fois à un même animal, jusqu'à ce que celui-ci meure et dans ce cas 
il sera possible de trouver dans ses organes des nodules tubercu- 
leux. » Aux lésions inflammatoires phlegmasiques, ont donc suc- 
cédé les lésions tuberculiformes ; mais en même temps que s’opèrent 
ces changements, les Bactéries se transforment. (Une fois que dans 
les tissus enflammés ont apparu les tubercules, une recherche 
patiente, dit Ferran, montrera déjà une ou autre Bactérie, possé- 
dant les réactions chromatiques propres au Bacille de Koch; c'est 
qu'alors le Bacille primitif a adjoint à sa constitution chimique les 
acides gras qu'il ne possédait pas avant, devenant ainsi le prototype 
des Bacilles dits acides, ou ce qui revientau même, devenant Bacille 
de Koch. Quand cela ne se produit pas chez le premier Cobaye de 
la série, cela se présente sûrement chez quelqu'un des suivants, à 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 103 


condition de les infecter par l’inoculation de pus caséeux, ou de 
pulpe de tubercule provenant du Cobaye antérieur de la même 
série. » Ces résultats ne se superposent-ils pas à ceux obtenus par 
Toussaint, Cornil et Watson Cheyne, Malassez et Vignal”? Le rapport 
des nombreux microbes pseudo-tuberculeux polymorphes avec le 
Bacille de Koch semble bien être réel; l'hypothèse de Toussaint sur 
les variations morphologiques du microbe de la tuberculose semble 
ainsi bien vérifiée. D'après Ferran, les phases principalesde la vie 
de ce micro-organisme seraient celles de Coli-bacille banal, Bacille 
spermigène, Bacille tuberculogène, Bacille de Koch acido-résistant. 
Dans l'ordre de succession qui va de la phlegmasie prétuberculeuse 
aux lésions nodulaires, les variétés coli-bacillaires, s'adaptent de 
plus en plus à la vie endonucléaire dans les leucocytes. 

Et dans ces variétés il en est qui, sans être des Bactéries acido- 
résistantes, « possèdent la faculté d'infecter d'emblée le noyau des 
leucocytes et provoquent, comme elles, la formation de pus caséeux, 
la suppuration des ganglions, la cachexie, la tuberculisation cons- 
tante des viscères abdominaux et thoraciques, en un mot, sans 
être acides, se conduisent comme le Bacille de Koch ». Elles exis- 
tent toujours dans les crachats de tuberculeux, et sans que celui-ci 
soit nécessairement présent, puisqu'il n’est que le stade ultime de 
la variété spermigène. « En démontrant la présence constante des 
variétés spermigènes chez les tuberculeux, conclut Ferran, en 
démontrant aussi leur abondance et leurs aptitudes saprophytiques, 
on fait perdre au Bacille de Koch le droit d'être considéré comme 
l'agent exclusif de la tuberculose spontanée de l'Homme. » 

De tels résultats obtenus avec le type des Bactéries spécifiques, 
furent dès le début très critiqués. Pour la plupart des auteurs, les 
comptes rendus des revues de Bactériologie en font foi, les races 
saprophytes cultivées par Ferran à partir du Bacille tuberculeux 
n'avaient rien à faire avec lui; elles n'étaient que le résultat de 
contaminations. Mais en 1898, pour se livrer à l'étude sur le phé- 
nomène de l’agglutination, et sans connaître la technique de 
Ferran, S. Arloing confirme en partie les résultats de ce der- 
nier auteur. Arloing obtient sur pomme de terre cuite, impré- 
gnée d’eau glycérinée, des cultures faciles à émulsionner. 
Parmi ces cultures, il en est dont les colonies, au lieu de pousser 
en voile à la surface de l'eau glycérinée qui vient baigner la 


104 G. BOUDIN 


pomme de terre, tendent à se désagréger dans la profondeur du 
liquide. Par très légère agitation des tubes de culture, les éléments 
bacillaires forment émulsion dans l’eau glycérinée. Des ballons de 
bouillon glycériné, ensemencés par les Bacilles ainsi divisés, sont 
agités jusqu'à plusieurs fois par jour; des colonies s'y développent, 
qui troublent la masse du liquide de culture; celle-ci est compo- 
sée d'organismes mobiles: «les Bacilles sont isolés, rarement acco- 
lés, droits ou légèrement courbés, souvent granuleux, un peu plus 
gros que les Bacilles contenus dans les crachats tuberculeux et 
présentent la réaction caractéristique aux procédés de coloration de 
Ziehl et d'Ehrlich. » Avec les émulsions homogènes du Bacille de 
Koch, S. Arloing et P. Courmont ont obtenu des résultats positifs 
d'agglutination par lesérum de sujets tuberculeux (1). Mais, d'après 
ces auteurs, dans le phénomène d'agglutination, il faut tenir grand 
compte de la variabilité morphologique et histo-chimique des 
éléments bacillaires des races émulsionnées. En effet, Arloing et 
P. Courmont, qui sont parvenus comme Ferran à faire végéter le 
Bacille tuberculeux dans du bouillon non glycériné, notent au fur 


(1) On tend à admettre que le développement du pouvoir agglutinant du sérum 
sanguin sur des suspensions homogènes d’un microbe donné résulte de l’intro- 
duction dans l'organisme vivant, de substances Spécifiques; dans cette théorie, 
le phénomène de l’agglutination serait une réaction due à des corps chimiques 
spéciaux, appartenant en propre à chaque micro-organisme et désignés sous le 
nom général d’agglutinines. Mais le séro-diagnostic est établi au moyen des sus- 
pensions homogènes des microbes, c’est-à-dire au moyen de solutions colloïdales, 
dont les lois qui fixent les relations des corpuscules microbiens (toxalbumines et 
corps microbiens eux-mêmes) avec le liquide intergranulaire de culture sont 
plus des rapports physiques que des rapports chimiques. Dans ces conditions, si 
aux cultures homogènes, physiquement identiques de Coli-bacille, de Bacille 
typhique, de Bacille de Koch, on ajoute des corps différents (soit électrolytes, 
soit colloïdes, ou mélange de ces corps), ceux-ci du fait d’un état physique très 
comparable, d’une charge électrique équivalente, pourront amener une rupture 
d'équilibre des particules colloïdales, une précipitation des suspensions micro- 
biennes. D'autre part, l’action coagulante peut être également en rapport avec 
la stabilité de la suspension colloïdale traitée. Sans connaître actuellement 
d’une façon précise, les raisons précises pour lesquelles le sérum des individus 
malades ou vaccinés est souvent très agglutinant pour les suspensions micro- 
biennes, on peutcomprendre cependant dans l'hypothèse du mécanisme physico- 
chimique de l’agglutination, pourquoi cette réaction d'ordre surtout physique 
n’est pas exclusive. En pratique, en effet, du sérum de malades atteints de septi- 
cémie par Proteus vulgaris, d'animaux inoculés expérimentalement avec ce 
microbe peut être très agglutinant des suspensions homogènes de Bacille typhi- 
que; le sérum de typhiques, de sujets atteints d’actinomycose, ou traités depuis 
quelque temps par le mercure agglutinent les cultures homogènes du Bacille de 
Koch. Dans les conditions actuelles tout au moins, il semble donc difficile d’ap- 
parenter ou de différencier deux agents pathogènes, en se basant sur la pré- 
sence ou l'absence de la réaction d’agglutination. 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 105 


et à mesure des ensemencements successifs la disparition progres- 
sive de la propriété de résister à la décoloration par les acides. 
« L'expérimentateur qui emploie ces cultures, disent les auteurs, 
doit connaître la variabilité de leurs caractères pour ne pas se 
laisser tromper et prendre pour des cultures impures celles où les 
Bacilles auraient perdu une partie de leurs propriétés classiques. 
Le retour de ces derniers à la normale par vieillissement sera tou- 
jours un critérium à employer ». Arloing et Courmont disent en 
effet plus haut dans leur mémoire : («Si nous laissons vieillir la 
culture (où le Bacille se laisse facilement décolorer par les acides), 
nous verrons Celui-ci récupérer peu à peu ses caractères classi- 
ques: il résistera aux décolorants (méthode de Ziehl ou de Hauser), 
alors qu'il n'avait pas ce caractère pendant les premiers jours 
de son développement. » Enfin, il est remarquable que les Bacilles 
tuberculeux non acido-résistants, d'origine humaine, réense- 
mencés en milieux solides, forment une membrane plissée, mame- 
lonnée, simulant des colonies de tuberculose aviaire. 

Les résultats obtenus par Arloing et Courmont vérifient donc en 
partie les recherches de Ferran. En 1903, J. Auclair fait paraître un 
mémoire « sur l'aptitude du Bacille de Koch à se transformer en 
saprophyte ». L'auteur se sert tout d'abord de culture liquide de 
tuberculose sur bouillon de Bœuf et de pomme de terre additionné 
de sel marin, de peptone, de sucre et de glycérine. Un fragment de 
la colonie d’une telle culture pure de Bacilles tuberculeux humains 
est écrasé contre la paroi interne d’un tube à essai contenant un 
bouillon stérilisé de même composition. Bouillon et Bacilles 
sont mélangés intimement. Les cultures sont mises à l'étuve à: 
38-400; elles sont agitées une ou deux fois par jour. Du huitième 
au douzième jour, après une légère floculation des agrégats bacil- 
laires, ou bien toutes les parties solides de certaines cultures 
tombent au fond du tube, forment dépôt, tandis que le bouillon qui 
surnage reste clair; ou bien, en d’autres tubes, le bouillon au début 
tout à fait limpide devient peu à peu légèrement et uniformément 
opalescent vers le vingtième jour : « Du fait de légères secousses 
imprimées à ces tubes, des ondes se produisent dans le liquide 
donnant lieu à un moirage fort élégant. » Le Bacille de Koch est 
alors transformé; et par ensemencements en série, on obtient une 
suite de cultures homogènes semblables à la culture d'origine. Les 


106 G. BOUDIN 


premiers réensemencements toutefois peuvent échouer : « La vita- 
lité du Bacille homogène est encore bien délicate, dit Auclair; et il 
m'est arrivé plusieurs fois d'échouer dans une tentative de réense- 
mencement. Tant que le nouveau microbe n'est pas acclimaté au 
bouillon de culture par excellence de ses ancêtres, il semble garder 
une grande fragilité. Mais l'accoutumance définitive une fois faite, 
les cultures sont faciles à obtenir et cela sur des milieux de plus 
en plus pauvres en glycérine et en sucre, et même entièrement 
dépourvus de ces deux substances. » Comme l’auteur le fait remar- 
quer, sa technique comparable dans ses grandes lignes à celle de 
Ferran, en diffère surtout par le point de départ; tandis que Ferran 
habitue les Bacilles tuberculeux à se développer en des milieux de 
plus en plus pauvres en sucre et en glycérine, Auclair ne supprime 
ces deux substances que quand la transformation du Bacille de Koch 
en saprophyte est déjà complète. 

Le nouveau Bacille pousse rapidement sur les milieux usuels, 
bouillon, agar, pomme de terre, gélatine, avec une grande rapidité. 
Il se développe bien à l’étuve à 370. A la température ordinaire, la 
culture s'effectue moins rapidement. Ce Bacille tuberculeux sapro- 
phyte, une fois adapté, revêtindéfiniment les mêmes caractères sur 
les différents milieux. « La ressemblance des cultures en bouillon 
avec celles du microbe de la fièvre typhoïde est parfois si parfaite 
que lorsqu'on place côte à côte les cultures en bouillon de ces deux 
microbes, ilestimpossible même à un œil exercé de ne pas les con- 
fondre, surtout les premiers jours de leur développement. » Les Ba- 
cilles des cultures homogènes sont très mobiles; ils possèdent des 
cils longs et nombreux, qui, « par leur enchevétrement autour de 
l'élément microbien, forment un lacis souvent inextricable. » Pla- 
cés bout à bout, ils figurent des Strepto-bacilles; sur agar, ils 
forment des filaments dont la largeur peut atteindre dix à quinze 
fois celle du Bacille de Koch. Ils se colorent directement par les 
teintures basiques d'aniline, prennent ou ne prennent pasle Gram, 
ne résistent pas à l’action décolorante des acides minéraux. Et ici 
Auclair note ce fait très important, observé par lui dans la phase de 
transformation du Bacille acido-résistant en saprophyte; à ce mo- 
ment, dans les préparations colorées au Ziehl, décolorées, puis 
recolorées au violet de gentiane, « le même micro-organisme peut 
être coloré en violet par une extrémité, tandis que par l’autre, ou 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 107 


dans une certaine partie de son étendue, il a gardé la coloration 
rouge caractéristique. Cette image prouve nettement la trans- 
formation du Bacille de Koch en Bacille tuberculeux homogène ». 
Mais bien que le Bacille homogène ne prenne pas la réaction d’Ehr- 
lich, les extraits chloroformé et éthéré de cette variété microbienne, 
colorés par le Ziehl et traités par l'acide azotique au 1/3, résistent 
à la décoloration, même sous l'influence prolongée de l'acide. 

D'après Auclair, la matière grasse, disposée en membrane très 
mince autour du Bacille mobile lui a été retirée par les procédés 
chimiques. Mais faut-il croire ici nécessairement à une disposition 
en membrane de la graisse autour de la Bactérie: les microbes ne 
peuvent-ils contenir à l’intérieur de leur cytoplasme des matières 
grasses, susceptibles d'être retirées de même par l'éther ou le 
chloroforme, et acido-résistantes ? Quoi qu'il en soit, on ne saurait 
admettre que le Bacïlle cilié et mobile provient d'une contamination 
des cultures, puisque certains des éléments microbiens peuvent, à 
certain moment, participer par leurs réactions chromatiques, à la 
fois du Bacille de Koch et du Bacille mobile ; et, en plus, il faudrait 
expliquer pourquoi l'impureté est toujours la même; pour- 
quoi, s’il s'agissait d'un saprophyte banal, habitué aux différentes 
variations des milieux, les premiers réensemencements de ce 
saprophyte sont si inconstants. 

La variété saprophyte du Bacille de Koch n'a pas de virulence 
pour le Cobaye ou le Lapin ; les Bacilles paraissent être rapidement 
détruits dans les tissus. Mais après inoculations répétées et espa- 
cées, les animaux après une période de plusieurs mois meurent 
de cachexie et sans lésions nodulaires dans les organes. 

Par inoculations expérimentales, Auclair n'a pu effectuer la 
transformation inverse du Bacille saprophyte en Bacille de Koch. 
« Faut-il forcément en conclure, dit l’auteur, que les échantillons 
de Bacilles homogènes que je possède sont tout à fait différents de 
ceux obtenus par le médecin de Barcelone? Je ne le pense pas. 
Peut-être ai-je seulement poussé plus loin leur transformation ; 
peut-être leurs aptitudes saprophytiques sont-elles plus solidement 
fixées. Et ce qui donne quelque crédit à cette manière de voir, 
c'est la remarque faite par J. Ferran lui-même, qui a écrit que l'on 
redonnait d'autant plus difficilement sa virulence au Bacille homo- 
gène, qu'on le cultivait depuis plus longtemps sous cette nouvelle 


108 G. BOUDIN 


forme. » Ferran, dans une communication postérieure au mémoire 
d'Auelair, insiste à nouveau non pas sur les caractères définis, d'une 
variété saprophyte du Bacille tuberculeux, mais sur la variabilité 
extrême des caractères des races saprophytes du Bacterium tuber- 
culosis. Tandis que J. Auclair est arrivé à caractériser une race 
microbienne strictement aérobie et liquéfiant la gélatine, Ferran 
a pu obtenir une variété incapable de liquéfier la gélatine, mais à 
la fois aérobie et anaérobie. Il fait remarquer qu'en des circonstances 
tout à fait identiques, Auclair a obtenu, ici, des races homogènes, et 
là a constaté la persistance des caractères de Bactérie immobile, 
végétant en conglomérats sur les milieux de culture : («Je ne me 
lasse pas de répéter, dit-il, dans mes publications, que la ver- 
satilité du chimisme de cette Bactérie est telle, que les influences 
mésologiques, pour insignifiantes qu'elles paraissent, la modifient 
profondément. » Il pense enfin que le Bacille de Koch, ayant servi 
de point de départ au D''Auclair, était déjà doué d’une virulence 
extrêmement faible pour que l’on püt obtenir de ses descendants 
les effets tuberculogènes. 

Ces recherches de Ferran et Auclair nous montrent toute la 
plasticité presque indéterminable, capricieuse et décevante de la 
substance vivante, sur laquelle quelques ions peuvent agir de façon 
considérable, empêchant ou favorisant la végétation. De même que 
certains auteurs n'ont pu obtenir la transformation du Bacille de 
Koch en Bacille pisciaire, de même d'autres expérimentateurs ont 
échoué dans la transformation en variété saprophyte ciliée et mo- 
bile. Et de même ceux des bactériologistes qui ont obtenu des 
résultats positifs ne les ont pas toujours atteints en se conformant 
à une technique constamment identique à elle-même. Et dans les 
deux séries d'expérimentations, transiormation en Bacille pisciaire, 
transformation en Bacille mobile, d'une part Lubarsch, avec un 
Bacille tuberculeux humain modifié par passage sur la Grenouille, 
Klein avec des Bactéries de Koch systématiquement écartées de toute 
vie parasitaire, dépourvues de virulence, végétantrapidement dans 
les milieux artificiels, ont pu leur rendre une virulence spécifique, 
le premier auteur par les inoculations expérimentales en série, le 
second par cultures sur lait; d'autre part, Ferran à pu rendre à 
des races saprophytes homogènes leur propriété tuberculogène par 
inoculations expérimentales en série. 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 109 


Demême qu'au furetàa mesure desensemencements surles milieux 
de culture appauvris et soumis à l'agitation fréquente, la vitalité 
du microbe semble faiblir tout d’abord extrêmement pour s'adap- 
ter ensuite à une végétation en milieux alcalins, de même dans 
les inoculations sériées de Bataillon et Terre, seront constatées la 
transformation successive de la Bactérie tuberculeuse humaine, en 
Bactérie pisciaire, Zooglée, Strepto-bacille, colorables directement 
par les couleurs basiques d'aniline et finalement la réduction 
extrême de la vitalité du micro-organisme. Mais ces races micro- 
biennes progressivement détruites, hydrolysées, par les humeurs 
et les tissus vivants des animaux où elles sont introduites pour- 
raient cependant, au fur et à mesure que faiblit chez l'animal ses 
activités diastasiques d'assimilation, récupérer, d'après J. Ferran, 
partie de leurs caractères ancestraux. 

Pour cet auteur, la scissiparité des Microbes en général, dans 
nos milieux de culture artificiels n'est qu'un mode inférieur, 
transitoire de multiplication, dans le cyele de vie de végétaux d'une 
hiérarchie supérieure dans l'échelle de l’organisation, et pourvus 
de sexualité. En particulier, dans la transformation des colonies 
conglomérées du Bacille de Koch en suspensions homogènes, l’agi- 
tation paraît avoir un rôle prépondérant. N'y a-t-il pas là exacte- 
ment phénomènes de dilution, d'hydrolyse et ensuite équilibre plus 
ou moins stable des corps microbiens avec le liquide de culture ? 
On pourrait peut-être appliquer à ces transformations les considé- 
rations suivantes de J. Perrin sur la théorie des solutions colloï- 
dales : «.… Pour chaque état du milieu s'établit d’ailleurs un équi- 
libre différent. Si l’on admet que les charges électriques des par- 
ticules colloïdales sont dues à des ions (H +, ou OH —) répandus 
dans le liquide et qui se fixent sur elles, on verra que lorsqu'une 
particule est assez grosse et que le nombre des ions est assez grand 
pour qu'elle arrive à en fixer plusieurs, elle porte là en elle une 
cause interne de dislocation qui peut en causer la bipartition. Ainsi 
peuvent se résoudre en éléments plus fins, sous l'influence d'un 
changement de milieu, les colloïdes à grosses particules. Les phé- 
nomènes de bipartition si fréquents chez les éléments de la cellule 
vivante trouvent là un modèle qui peut avoir avec lui d'étroites 
analogies. » Et si véritablement la matière vivante peut de plus en 
plus être envisagée comme formée de systèmes colloïdaux, nous 


110 G. BOUDIN 


devons alors considérer comme possible le retour des micro-orga- 
nismes vers des états ancestraux, l’ensemble de leurs réactions 
physico-chimiques étant réversibles. 

Auclair tout en s'en tenant uniquement aux faits qu’il a obser- 
vés ne nie pas la transformation possible du germe prétuberculeux 
de Ferran en Bacille de Koch, et se demande si cette dernière Bac- 
térie «n'est pas le Bacille homogène transformé devenu virulent et 
adapté à une vie parasitaire? » Les oscillations dans la forme du 
microbe acido-résistant en vie parasitaire ne sont-elles pas démon- 
trées tantôt par sa présence, tantôt par son absence apparente en des 
lésions qui gardent une virulence spécifique? Mais les faits ap- 
portés par Ferran méritent toute réflexion; pour cet auteur la tuber- 
culose n'est bien qu'une variété de coli-bacillose. Dans l'hypothèse 
transformiste, le Coli-bacille paraît être davantage un état biolo- 
logique propre à plusieurs espèces, qu'une espèce déterminée ; 
nombre de Bactéries acido-résistantes peuvent être transformées en races 
homogènes. On peut penser que le Coli-bacille n'est « le plus 
vulgaire et le plus abondant des saprophytes » que précisément 
parce qu'il est l’une des phases terminales dans un processus 
commun de désintégration de celles des Moiïsissures qui sont le 
plus nombreuses dans les milieux extérieurs, susceptibles de 
pénétrer dans l'intestin des animaux, et d'y être plus ou moins 
hydrolysées par les sues digestifs. 

En conséquence, s'il était bien démontré qu'il n'y a pas un 
Coli-bacille, mais des formes coli-bacillaires voisines, s'il était 
bien démontré que celles-ci peuvent arriver à produire chez les 
animaux, résorbées de l'intestin où elles sont toujours présentes et 
dans un état de désintégration plus ou moins avancé, des lésions 
de tuberculose, si les résultats obtenus par Ferran étaient confirmés, 
il faudrait alors concevoir différentes variétés de tuberculose, les 
unes déterminées par les états encore différenciés de micro-orga- 
nismes divers: Bacilles acido-résistants, Aspergillus, certains Disco- 
myces, les autres produites par des formes inférieures, devenues 
comparables entre elles, d'espèces microbiennes. Et ces dernières, 
d'abord très sensiblement différentes dans leur vie saprophytique 
en dehors de l'intestin, pourraientacquérir dans une vie parasitaire 
commune, chez l'Homme, les Oiseaux, les Vertébrés à sang froid, la 
propriétéacido-résistante etcertaines facultés pathogènesnouvelles. 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 11 


On comprend dès lors l'importance que certains auteurs ont 
donnée à ces formes si polymorphes, à fonctions fermentatives si 
variables, englobées sous les dénominations générales de Bacté- 
rium termo, Proteus vulgaris dans la genèse de la tuberculose, ou 
d'une façon plus précise, dans la genèse des phlegmasies prétuber- 
culeuses, et de la phtisie cousécutive. (II s’agit ici d'une erreur 
d'interprétation, dit Artault, erreur que commettent beaucoup 
de médecins pour qui la tuberculose et la phtisie ne font qu’un, 
tandis qu'en réalité la première prépare quelquefoisla seconde, et 
encore dans des proportions infimes, comme le prouvent les obser- 
vations de tant de médecins, rapportées dans la thèse de Knopf en 
particulier... Tout dans les allures du Bacille de Koch rappelle les 
saprophytes ; il détruit les matières vivantes, toutes Les fois qu’elles 
manquent de résistance et se laissent entamer, soit par faiblesse 
congénitale, soit par surmenage ou dénutrition, comme les Moi- 
sissures décomposent les substances organiques vieillies et expo- 
sées à l'humidité et au manque d'air... Ces allures placent 
donc la tuberculose en dehors du cadre des maladies infectieu- 
ses, à évolution fixe, pour en faire une maladie de misère phy- 
siologique, ce qui la rapproche singulièrement des maladies 
constitutionnelles. » C'est bien là la théorie de la tuberculose, 
maladie sociale ; l'alimentation défectueuse, les troubles de secré- 
tion des ferments digestifs sous des influences diverses, l’alcoo- 
lisme en particulier, les fermentations intestinales secondaires, la 
résorption des micro-organismes, saprophytes de l'intestin, dans 
les tissus, les phlegmasies consécutives répétées, coagulation et 
nécroses locales, tel serait le mode de développement de la phtisie. 

Les recherches de J.Ferran, et les travaux de Toussaint, Malassez 
et Vignal, Bataillon et Terre, quileur donnent appui, sont les seules 
jusqu'ici qui précisent cette conception de la tuberculose, maladie 
sociale. 


CHAPITRE XIII 


Résumé de la première partie. Dans quel groupe de Bactéries faut-\l 
ranger le micro-organisme de la tuberculose? 

A quel groupe de Schizophytes doit-on rattacher le Bacille de la 
tuberculose ? Il est habituel de lui donner « une-place à part » par- 
mi les Bactéries. 


112 G. BOUDIN 


Si nous résumons les principaux caractères morphologiques et 
biologiques de ce micro-organisme, nous voyons qu'il présente des 
caractères de coloration qui ne lui sont pas particuliers, mais 
peuvent être présentés par un nombre considérable de Bactéries 
saprophytes, tel le Bacille de la Timothée, tels des Champignons 
inférieurs comme certains Discomyces. Ces caractères de coloration 
ne sont pas stables; ils se modifient en même temps que le Bacille 
tuberculeux évolue, est désintégré dans sa vie parasitaire : des lé- 
sions tuberculeuses restent virulentes, où il est impossible de 
déceler par les réactions classiques de coloration aucun Bacille de 
Koch, et ce fait est fréquemment observé. 

Le Bacille tuberculeux détermine chez les animaux surtout des 
lésions nodulaires, comme en déterminent les spores de nom- 
breuses Moisissures : Aspergillus, Discomyces farcinicus, Discomyces 
Eppingeri, Sterigmatocystis, Mucors. Les Bacilles de Koch, et les 
spores des Aspergillus stérilisés dans de certaines conditions, déter- 
minent encore des lésions nodulaires, comme en déterminent les 
particules inertes : ces tuberculoses ne sont pas réinoculables en 
série. Elles ne progressent pas; les nodules ont une tendance 
moindre à évoluer vers la caséification. S'il est des Bactéries, 
Strepto-bacilles, Zooglées, capables de déterminer des lésions de 
tuberculose, il apparaît comme probable que beaucoup de ces 
micro-organismes ont des relations très étroites avec le Bacille de 
Koch. 

Non seulement le Bacille de la tuberculose perd dans les orga- 
nismes qu'il a envahis ses réactions de coloration, mais encore il 
n'y sporule pas, sauf peut-être dans les poumons et cavernes pulmo- 
naires, dont l’état hygrométrique et les conditions de température 
et d'aération peuvent être favorables au développement de nom- 
breux micro-organismes. Les formations décrites autrefois comme 
spores ne sont que des vacuoles; et puisque le virus se multiplie 
lentement dans sa vie parasitaire et tend souvent à être hydrolisé, 
il faut définitivement attribuer la persistance de la virulence des 
lésions sans Bacilles de Koch, à des variations morphologiques de 
ces Bacilles. 

Dans les cultures, le Bacille de la tuberculose, tant dans les mi- 
lieux liquides que les milieux solides, se développe en colonies plus 
ou moins confluentes. Les micro-organismes semblent se dévelop- 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 113 


per de mieux en mieux, à mesure qu'ils s'adaptent aux milieux 
artificiels. Ils sont réunis en conglomérats plus ou moins denses, 
parce que les éléments bacillaires sont réunis très étroitement les 
uns aux autres, par l'intermédiaire d'une substance unissante. Les 
Bacilles sont dépourvus de cils et par suite de mouvement; ils pos- 
sèdent des endospores. Si l’on adopte la classification de Migula, 
on doit donc classer le virus tuberculeux dans la famille des Bac- 
tériacées, genre Bacterium, et non dans le genre Bacillus où sont 
rangés les micro-organismes à cellules mobiles, munies de cils vi- 
bratiles. Mais les endospores du Bacterium tuberculosis présentent, 
à l'encontre des spores des autres Bactéries, une faible résistance à 
l'action des températures élevées: elles se rapprochent ainsi des 
formes durables des Champignons inférieurs. De plus, les carac- 
tères de culture, développement en conglomérats isolés, en saiïllies 
verruqueuses et filaments périphériques radiés, ou en membranes 
plissées rapprochent sous un aspect commun le Bacterium tubercu- 
losis et certains Actinomyces. 

En vie parasitaire, le Bacille de Koch se modifie et peut arriver 
à perdre toute végétabilité (Kitasato-Straus). Comme conséquence 
secondaire, si l’on offre au micro-organisme ayant subi l'in- 
fluence, nocive pour lui, des organismes qu'il a envahis, et pour ré- 
cupérer sa vitalité, des milieux au sérum sanguin, les milieux 
communs utilisés pour la généralité des microbes, en réalité on ne 
fait que lui présenter encore des conditions défavorables, dysgé- 
nésiques. Sans doute sa virulence estainsi maintenue ou renforcée. 
De même, Chauveau rendait la virulence au Bacille du charbon 
atténué, en le plaçant en de mauvaises conditions de développement 
par emploi de cultures au sang de Cobaye, puis au sang de Mou- 
ton. Mais si l'on donne à la Bactérie tuberculeuse des milieux 
sucrés, glycérinés, de composition végétale, tous milieux à réac- 
tions faiblement alcaline et plus souvent acide, et utilisés par 
Roux et Nocard, Sander, Kimla, Poupé et Vesely, le développe- 
ment des colonies est plus abondant, et l’acclimatement plus ra- 
pide. La lenteur, l'irrégularité du développement peuvent en partie 
s'expliquer par des transformations préalables plus ou moins im- 
portantes, subies par le Bacille au cours d’une vie parasitaire plus 
ou moins longue. Par les conditions de son développement, le 
Bacille de Koch s'éloigne des Bactéries et se rapproche des Moisis- 

Archives de Parasitologie, XI, n° 1, 1906. 8 


414 G. BOUDIN 


sures qui préfèrent les milieux acides, aux milieux alcalins. De 
plus, il n’exige pas de milieux de culture spéciaux, rappelant par 
leur constitution le sol des organismes où il a vécu en parasite; des 
milieux artificiels composés de sels minéraux, additionnés de gly- 
cérine et même de mannite lui permettent de se développer. 

Les tuberculines, produits artificiels, n’existant pas dans les cul- 
tures vivantes du micro-organisme, ne sauraient intervenir en rien 
pour différencier des bactéries vivantes. | 

La température de 38°, qu'exige le Bacille de Koch pour son dé- 
veloppement, ne paraît être qu'un optimum, que ne réclament pas 
certaines variétés de Bacilles tuberculeux. Maffucei a pu cultiver 
le Bacille tuberculeux aviaire entre des limites très éloignées de 
température. Le Bacille des Vertébrés à sang froid se développe 
bien sur des milieux de culture soumis à des températures relati- 
vement basses : 200-250. Et même en admettant que le Bacille de la 
tuberculose humaine ne soit capable de végétabilité qu'à des tem- 
pératures élevées, cela ne saurait être un argument contre la pos- 
sibilité d'une vie saprophytique : toute cette série des innom- 
brables Moisissures : Aspergillus, Penicillium, Sterigmatocystis, 
Mucor, ont une vie saprophytique indéniable; mais se développent 
aussi aux températures de 37°, 39, et 45° avec vigueur, et comme 
si les hautes températures accéléraient leur croissance. Et l’action 
pathogène primitive de beaucoup de ces germes n'est plus contes- 
table actuellement. 

Enfin très fréquemment, dans les cultures âgées ou tout au moins 
dans les cultures où se développent des Bacilles n'ayant pas été 
soumis depuis un Certain temps à la vie parasitaire, apparaissent 
des formes ramifiées. On invoque fréquemment l'opinion de ceux 
qui les ont observées en premier pour en faire des formes d'invo- 
lution, c'est-à-dire de dégénérescence : «jusqu'à plus ample in- 
formé, dit E. Macé, il paraît préférable de se rallier à l'opinion de 
Metchnikoff et de faire de ces formes de simples déviations invo- 
lutives du type normal. » 

Précisément Metshnikov insiste sur le sens précis qu'il donne 
a l'expression, formes d'involution : « Quoiqu'il n'y ait pas 
de doutes, dit-il, que les formes des Bactéries de la tuberculose, 
allongées et ramifiées, appartiennent à la catégorie des soi- 
disant formes involutives, on n'entend en rien affirmer par cela 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 4115 


qu'elles représentent des états de dégénérescence. » Et l’auteur 
exprime cette opinion qu'il s’agit là de formes indiquant un 
retour vers un état ancestral supérieur. 

Cet état ancestral est-il loin de la forme bacillaire? Mais cette 
forme bacillaire elle-même ne paraît être qu'un état très transi- 
toire dans la vie parasitaire du micro-organisme de la tuberculose. 

Du point de vue théorique, comme du point de vue pratique, 
il est de toute importance de connaître la forme normale du Ba- 
cille tuberculeux hors les conditions de vie parasitaire. Il y a inté- 
rêt à savoir d'où il essaime, à connaître les transformations qu'il 
peut subir au cours d’adaptations successives à des conditions de 
vie différentes; au lieu de renforcer sa virulence par des conditions 
de développement trop artificielles, il y a intérêt à diminuer cette 
virulence, commé l'a fait déjà J. Ferran, pour pouvoir obtenir, 
selon les principes de la méthode pastorienne, des variétés atté- 
nuées susceptibles d'être utilisées comme vaccins. 

Les recherches que nous allons maintenant résumer pourraient 
paraître nouvelles. En réalité, le premier travail qui discute la 
place systématique du Bacille de la tuberculose date de 1884. Les 
mémoires qui se sont succédés les uns aux autres depuis cette 
époque, traitant du même sujet, forment un ensemble très homo- 
gène, d'où il ressort nettement que le Bacterium tuberculosis appar- 
tient au groupe des Hyphomycètes, au groupe des Champignons 
de Moisissures. 

La forme de Bactérie, sous laquelle on convient généralement 
d'envisager le virus, n'est elle-même que transitoire; l’Hypho- 
mycète de la tuberculose réalise, en effet, les différentes formes 
microbiennes : Bactérie immobile, Strepto bacille, Bacille mobile, 
formes qui résultent d'une vie parasitaire anormale pour l'Hyÿpho- 
mycète, ou d'une vie particulière en différentes conditions de 
culture. 

Cette conception évolue parallèlement à la théorie qui tend à 
considérer le Bacille de Koch comme un parasite strict; elle ne 
pourra sembler nouvelle que si elle l'emporte sur cette dernière 
théorie plus généralement admise. 


416 G. BOUDIN 


DEUXIÈME PARTIE 


I. — Formes ramifiées du microbe de la tuberculose, dans les cultures 
et en vie parasitaire. 
II. — Formations actinomycosiques en vie parasitaire. 


CHAPITRE I 


Formes filamenteuses et ramifiées du Bacille aviaire (A. PETRONE, 1884 ; 
E. MersaniKov, 1887; E. KLEIxX, 1889; Marruccr, 1892). 


En 1884, Angelo Petrone, de Naples, constate dans l’'exsudat de 
méningites tuberculeuses, des formes variées du Bacille de Koch, 
et à ce sujet exprime cette opinion : «Je crois que le Bacille de la 
tuberculose appartient à un grade élevé dans l'échelle des Schizo- 
mycètes.. et qu'il est un Microbe intermédiaire entre le groupe 
des Champignons microscopiques et celui des Schizomycètes. » 

En 1887, E. Metshnikov fait paraître un mémoire sur le rôle 
phagocytaire des cellules géantes dans la tuberculose. L'auteur 
étudie préalablement l'agent spécifique de l'infection. Le parasite 
de la tuberculose, d’après ses observations, peut ne pas toujours 
être constitué par des Bacilles de dimensions constantes. Dans les 
crachats de phtisiques, et dans la rate tuberculeuse du Moineau, il 
a vu les bâtonnets s'allonger en filaments minces, assez longs, con- 
tournés, montrant à leur intérieur des parties non colorées, inter- 
médiaire à des points du protoplasma bactérien ayant énergique- 
ment retenu la teinture, Dans les cultures, les formes du Bacille 
sont particulièrement variées. La forme en bâtonnet est sans doute 
la forme prédominante; mais à côté d'elle, on peut constater la 
présence de formes microbiennes, de dimensions très réduites, 
d'aspect ovalaire, en lancette. Ces dernières formes composent par- 
fois des cultures entières, développées sur sérum sanguin gélatiné 
ou agar glycériné, poussées à 36° ou à 420. Les Bacilles ovalaires 
montrent en leur centre un seul point plus intensément coloré que 
le protoplasma environnant. De plus, en cultures âgées, appa- 
raissent des formes ramifiées, à extrémités terminales renflées. 
Par exposition des cultures aux hautes températures : 430, 449, ces 
formes apparaissent plus tôt et se développent plus rapidement; 
c'est ainsi que, 20 jours après l’ensemencement, apparaissent 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 117 


parmi les éléments bacillaires habituels, des formes longues, 
filamenteuses. Ces filaments se colorent souvent intensément; 
leurs extrémités sont renflées en massue. Dans les cultures plus 
âgées, vieilles d'environ trois mois, on voit se développer la 
série des formes suivantes : sur les 

filaments qui viennent d’être décrits, 

des bourgeons apparaissent en plu- } 

sieurs endroits, formant des rameaux, À 

d'où s’échappent encore des ramifi- 
cations secondaires. Branches prin- 
cipales et rameaux ont les mêmes 

réactions colorantes que les Bacilles sé DR de DU 0 
tuberculeux. Les colonies où de telles nodule pulmonaire d’un La- 
formes ramifiées sont nombreuses De ne ai 
conservent leur aspect macroscopique térieure de l'œil. —2, Bacilles 
caractéristique. La forme bâcillaire se de CRIE Dre 
n'est donc pas un état parfait, mais 

seulement un stade dans le cycle de développement d'un micro- 
organisme filamenteux, et les formes ramifiées font partie du 
cycle de développement normal de ce micro-organisme. (« Quoi- 
qu'il n’y ait point de doute que les formes du Bacille de la tuber- 
culose, allongées en filaments, ramifiées, appartiennent à la 
catégorie des formes dites d’involution, on ne veut pas du tout 
affirmer, dit Metshnikov, par cette expression, qu'elles représen- 
tent des états de dégénérescence. » Ce sont des formations de 
retour vers un stade supérieur. 

D'après Methsnikov, on ne saurait considérer les parties claires 
des Bacilles comme des spores, comparables aux spores si résis- 
tantes du Bacille du charbon. Étant donnée la faible résistance du 
Bacille tuberculeux aux hautes températures, et l'impossibilité de 
colorer ces parties claires, il n’y a là que des vacuoles. On doit plu- 
tôt considérer comme spores, des grains très résistants à la décolo- 
ration, de forme régulièrement sphérique, en nombre variable 
avec la longueur des éléments bacillaires. En conséquence, Metsh- 
nikov pense qu'on ne doit pas rattacher le microbe de la tubercu- 
culose au genre Bacille, qui n’est qu'un stade de dévelopement que 
peuvent réaliser nombre de micro-organismes tout à fait dissem- 
blables. Étant donnée l'enveloppe solide qu'il parait posséder, le 


118 G. BOUDIN 


micro-organisme tuberculeux doit plutôt être rattaché à un genre 
spécial, le genre Sclerothrix, dont il représente l’une des espèces; 
il mérite le nom de Sclerothrix Kochi. 

Dans la deuxième partie de son mémoire, E. Metshnikov étudie 
l'influence des cellules géantes sur le microbe tuberculeux. Il s'est 
servi pour ses expériences du Lapin, et d'un autre Rongeur parti- 
culièrement abondant aux environs d’Odessa, lé Spermophile. Ce 
dernier animal, très réfractaire à la tuberculose, est inoculé dans 
la cavité péritonéale, tandis que le Lapin, animal plus sensible est 
inoculé dans la chambre antérieure de l'œil. L’expérimentateur a 
employé pour ces injections des cultures très virulentes, dévelop- 
pées sur agar glycériné. Chez le Spermophile, les cellules géantes 
se développent par suite d'un bourgeonnement tout à fait particu- 
lier (1) du noyau de cellules épithélioïdes, tandis que, chezle Lapin, 
la cellule géante ne résulte pas de ce bourgeonnement du noyau, 


(1) Le mode de développement caryokinétique de la cellule géante, chez le 
Spermophile, les figures que donne Metshnikov relativement aux phases de cette 
division nucléaire sont tout à fait singulières. Les phénomènes de mitose des cel- 
lules épithélioïdes ont, d’après l’auteur : (cette propriété remarquable, qu’ils 
ne sont représentés que par un seul aster, tandis que les asters doubles aussi 
bien que le sectionnement du protoplasma sont toujours absents ». Les extrémi- 
tés des filaments de l’aster s’épaississent à leur périphérie. Cette apparence leur 
donne un aspect en massue. Ces rayons ont une chromatine homogène. Puis 
leur extrémité devient transparente, etse fragmente. Chacun des rayons de l’aster 
évolue donc ainsi : par épaissement progressif et périphérique, par fragmenta- 
tion du renflement terminal en masses hyalines, irrégulières, qui finalement 
deviennent ovales ou sphériques : ce sont les noyaux de la cellule géante. Un tel 
mode de division nucléaire, les conditions exceptionnelles dans lesquelles il a été 
observé, les figures même qui s’y rapportent laissent des doutes sur la nature 
de ces phénomènes, en tant que divisions caryokinétiques; mais ces formations 
radiées, avec massues périphériques qui se fragmentent réalisent précisé- 
ment l’aspect, le mode de groupement, l’évolution fréquente des grains à 
massues d’actinomycose dans les tissus. L'observation que nous nous permettons 
de présenter ici, si elle est exacte, s’applique exclusivement au cas particulier. 
En aucune façon nous ne sommes autorisé à nier les phénomènes de caryo- 
cinèse des cellules du tissu conjonctif, comme des cellules des tissus épithéliaux 
sous l'influence d'infections à marche essentiellement lente comme la tubercu- 
lose et la syphilis. Bien au contraire, de nombreux faits d'observation générale, 
tels ceux cités par H. Claude dans sa monographie : Cancer et tuberculose, les 
relations invoquées aujourd’hui entre la syphilis et certains néoplasmes, l’aspect 
nettement néoplasique de différentes tumeurs qu’on hésite à rattacher à un- 
germe microbien : Bactérie ou Champignon, doivent attirer l’attention sur ces 
phénomènes de mitose à côté de foyers infectieux bactériens ou mycosiques. 
Bien démontrés, ils rendraient très légitime cette hypothèse du développement 
indirect des tumeurs cancéreuses soit sous l'influence de l’irritation locale ménagée, 
soit sous l'influence des troubles généraux de nutrition (fixation et suppression 
des enzymes d’assimilation réalisant la sénescence) que déterminent très certaine- 
ment toutes les infections lentes. 


ET À 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 119 


caractéristique chez le Spermophile, mais de la fusion de plusieurs 
cellules épithélioïdes dont les noyaux ne montrent pas de modifi- 
cations notables. Quoi qu'il en soit, on peut suivre dans les cellules 
géantes du Lapin et surtout du Spermophile, les modifications 
subies par les Bacilles. 

Ou bien ceux-ci disparaissent sans laisser de traces; ou bien, très 
fréquemment,augmentent de dimensions, s'enveloppent d'une 


3 


Fig. 2, d’après E. Metshnikov. — 1, cellule géante d’un nodule tuberculeux du 
foie d’un Spermophile mort 21 jours après l'injection intrapéritonéale; b, 
Bacilles tuberculeux normaux; 7%, formes résultant du sectionnement du 
noyau cellulaire. — ?, cellule épithélioïde d’un foyer tuberculeux du même 
Spermophile; m, Monasterform : division du noyau sans formation de deux 
asters et sectionnement consécutif du protoplasma; db, Bacille tuberculeux nor- 
mal. — 3, partie d’une cellule géante d’un nodule de la rate d’un Spermophile, 
tué trois mois après l’inoculation ; €, amas de Bacilles tuberculeux, réunis 
les uns aux autres par la substance capsulaire. — 4, cellule géante d’un no- 
dule tuberculeux du Lapin; d, Bacilles tuberculeux épaissis, avec substance 
capsulaire; n, Bacilles tuberculeux normaux. 


capsule d'apparence jaunâtre, non colorable par les réactifs habi- 
tuels du Bacille tuberculeux. Progressivement les éléments bacil- 
laires arrivent à disparaître dans cette enveloppe, et ne peuvent 
plus être colorés. 

Ces nouvelles formations ont alors une couleur naturelle jaune 
ambrée et peuvent se réunir très étroitement les unes aux autres 
pour former des amas compacts, de consistance solide. Ces phéno- 
mènes d'encapsulement qui ne se produisent jamais dans les cul- 
tures, sont déterminés d’après Metshnikov par l’action directe des 


120 G. BOUDIN 


phagocytes. L'auteur présente les conclusions suivantes : le fait de 
la disparition rapide des Bacilles dans les cellules géantes, con- 
trastant avec leur persistance et leur lente évolution dans les cul- 
tures; le fait que les micro-organismes ne laissent jamais de spores 
dans les lésions; enfin les phénomènes d'encapsulement des Ba- 
cilles ; la réunion des éléments bacillaires, ainsi épaissis, transior- 
més, les uns aux autres par l'intermédiaire de la capsule; la for- 
mation consécutive d'amas compacts, d'apparence jaune ambrée, 
de consistance solide, très résistants à l’action des acides forts et de 
la potasse, tous ces faits démontrent l’action destructive des phago- 
cytes sur le Bacille de Koch. Au Congrès international d'Hygiène 
de Londres, en 1891, Metshnikov rapporte des résultats compa- 
rables, à la suite d'expériences sur le Meriones, petit Rongeur vivant 
en Afrique; cet animal est particulièrement résistant à la tubercu- 
lose. Il peut vivre fort longtemps après inoculation de virus tuber- 
culeux dans la chambre antérieure de l'œil. Dans les cellules géantes 
des nodules tuberculeux présentés par ces animaux sacrifiés au 
bout de six à sept mois, les Bacilles sont fréquemment inclus en 
des enveloppes concentriques, de consistance solide, non colora- 
bles, et imprégnées de phosphate de chaux. 

En 1889-1890, E. Klein, de Londres, dans un rapport sur l'étiologie 
de la diphtérie, mentionne le développement en filaments ramifiés 
du micro-organisme de Læffler. Et à ce sujet, il expose qu'il à fait 
des constatations identiques sur le Bacille de Koch. En des cultures 
sur agar glycériné et bouillon de Bœuî développées à 37°, âgées de 
plusieurs semaines à plusieurs mois, il constate, après coloration 
classique des préparations par la fuchsine, et décoloration par 
l'acidenitrique au 1/3, la présence au milieu deséléments bacillaires 
de filaments plus ou moins longs, avec renflements terminaux. 
Ces formations sont de plus en plus nombreuses, à mesure que la 
culture vieillit; elles présentent les mêmes réactions de coloration 
que les Bacilles tuberculeux. («Je dois faire ressortir, dit E. Klein, 
que les cultures où ces formations sont trouvées, sont pures; j'ai 
fait des préparations de diverses colonies de Bacilles tuberculeux 
à des époques différentes, et je trouvais sans exception, qu'après plu- 
sieurs semaines, les filaments ci-dessus mentionnés se présentent 
en nombre de plus en plus élevé dans les cultures, et se laissent fa- 
cilement rattacher dans leur évolution aux Bacilles tuberculeux 


NL 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 121 


typiques par des formes de transition. De nombreuses cultures pures 
de tuberculose sur agarglycériné et bouillon furent examinées 
et l n'y eut pas un cas où elles ne purent être trouvées ;.… ce qui prouve 
nettement que nous n'avons pas affaire ici à des formes d'’involu- 
tion, c'est le fait digne de remarque que beaucoup des filaments 
sont ramifiés à la facon d'un mycélium ; les filaments les plus longs 
avec extrémités divisées dichotomiquement, à massues terminales 
sont si semblables à des hyphes mycéliennes qu'il paraît à peine 
possible, si les phases de transition et le mode de coloration 


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Fig. 3, d’après Maffucei. — «a, «’, &”, b, c, formes ramifiées d’une culture de 
tuberculose aviaire à 45°, âgée de 2 mois; à droite, longues formes bacillaires 
(b) granuleuses et à extrémités renflées, au milieu de Bacilles longs, minces et 
granuleux (&). Culture de tuberculose aviaire sur sérum glycériné. 


= 


n'étaient présents, de pouvoir les considérer comme appartenant 
au Microbe de la tuberculose. » 

Etant donné qu'il s’agit là de ramifications vraies, étant donnée 
l’apparition constante et progressive des formations ramifiées dans 
les cultures, l’auteur conclut que : «les Bacilles tuberculeux, tels 
qu'ils se rencontrent dans le corps de l'Homme ou des animaux, 
dans les cultures sur sérum, dans les premiers mois des cultures 
sur agar glycériné et en bouillon, ne représentent qu'une phase 
dans le cycle du développement d'un micro-organisme se rappro- 
chant morphologiquement d’un Champignon à mycélium. » En 
1892, après ies travaux de Maffucci et de Fischel sur ce sujet, 
E. Klein, dans une revendication de priorité, expose à nouveau les 
principaux résultats de ses constatations sur le mode de dévelop- 
pement en cultures des Bactéries de la tuberculose. 

En 1892, Maffucci donne les résultats de recherches expérimen- 
tales sur la tuberculose aviaire. À partir de 43° jusqu'à 50°, les cul- 


122 G. BOUDIN 


tures de la tuberculose des Gallinacés contiennent toujours, d’après 
lui, des formes ramifiées, avec ou sans renflements terminaux. 
L'observateur examine le développement de ces formes ramifiées 
dans une première série de cultures, exposées à la température de 
450. Au bout d'un mois, les Bacilles s’allongent, deviennent granu- 
leux, se ramifient. Les ramifications sont bien réelles; elles ne 
sont pas dues à une superposition des filaments. Les rameaux se 
terminent fréquemment par des renflements en forme de massue, 
où apparaissent des grains retenant énergiquement la couleur. Si 
les cultures développées à 45° sont transportées dans une étuve, où 
la température n'est que de 37, au bout d’un mois il n’est plus 
possible d'y trouver ces formes ramifiées et renflées. Si au contraire 
elles sont maintenues à la température de 45°, on voit, dans le cou- 
rant du deuxième mois, les Bacilles devenir très granuleux, les 
filaments s'allonger encore, se ramifier, les formations renflées en 
massue augmenter en dimensions. On pourrait penser à une con- 
tamination des cultures, à une pénétration d'autres micro-orga- 
nismes. Mais les cultures conservent toujours leur même aspect 
microscopique. Enfin, dans le courant du troisième mois, tous les 
Bacilles deviennent filamenteux. Dans le corps des articles baeil- 
laires, les granulations s'espacent et deviennent plus petites. 

Maffucci étudie ensuite l'apparition des formes ramifiées sur des 
cultures maintenues à la température de 50°. Au bout de8 jours, les 
Bacilles deviennent granuleux et s'allongent en filaments qui com- 
mencent à se ramifier. Après 18 jours, et sans que le développe- 
ment soit macroscopiquement très manifeste, les formes 
filamenteuses, ramifiées, avec massues terminales se sont multi- 
pliées. Un ensemencement peut être encore réalisé avec ces cul- 
tures, au bout de 50 jours d'exposition à 500. Pourtant l'examen 
microscopique montre que beaucoup des Bacilles sont très granu- 
leux et trèslongs ; cependant on aperçoit encore à côté des filaments, 
et des formations renflées de petits Bacilles colorés d'une facon 
homogène. Mais après deux mois d'exposition à 500, toutes les 
formes, Bacilles, filaments, massues se désagrégent et la culture 
ne contient plus que des granules capables de fixer intensément 
la couleur, et qui sont peut-être des spores. Maïs ces granules sont 
détruits à des températures relativement basses. 

Enfin à 430, même après trois mois, les Bacilles des cultures de 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 2103 


tuberculose aviaire ne se transforment pas en filaments ramifiés, à 
extrémités renflées. 

De tous ces faits, Maffucci conclut que les variations morpholo- 
giques du Bacille aviaire sont en rapport direct avec un dévelop- 
pement à températures élevées, 45 à 50°. De 25 à 43°, les formes 
filamenteuses et ramifiées n'apparaissent jamais. Le Bacille de la 
tuberculose des Mammifères ne se développe pas au-dessus de 42°. 
Il ne peut done manifester de variations morphologiques spéciales 
comme le Bacille tuberculeux aviaire. C’est encore là un caractère 
distinctif des deux virus. L'auteur croit que Metshnikov a fait ses 
recherches seulement sur des cultures de tuberculose aviaire; 
Metsnikov, en effet, a observé les formes ramifiées sur des cultures 
développées à la température de 43°,6. En 1888, on ne faisait pas de 
distinction entre le Bacille de la tuberculose aviaire et le Bacille de 
la tuberculose humaine, qui ne se développe cependant pas au-des- 
sus de 42°, Maffucci pense que les formes ramifiées, étant donnée 
leur apparition à haute température, ne sont que des formes de 
dégénérescence. 

Toutefois, d'après l'auteur lui-même, les cultures quicontiennent, 
même en abondance, ces formations ramifiées, à extrémités ter- 
minales renflées, peuvent être réensemencées et sont pathogènes 
pour la Poule. 

Mais, d’une part du sérum sanguin ensemencé avec de telles 
cultures, et maintenu à la température de 37, d'autre part 
les tissus de Gallinacés inoculés avec ces mêmes cultures, ne 
présentent à l'examen microscopique rien autre chose que la forme 
bacillaire. 


CHAPITRE II 


Formes filamenteuses et ramifiées du Bacille des Mammifères (FISCHEL, 
HueppE, 1893; HaAyo Bruns, 1895; CoppeN Jones, 1893-1896). 


En 1893, Fischel, de l'Université de Prague, rappelle les faits de 
pléomorphisme du Bacille tuberculeux déjà observés par Metshni- 
kov, Klein, Hueppe, Mafiucci. On doit les rechercher à propos de 
ce micro-organisme important, étant donné que, d'une part, 
nombre de Bactéries mamifestent une pléomorphie considérable 
variable avec le terrain de culture : Bacillus pyocyaneus Charrin, 


124 G. BOUDIN 


Coccobacillus prodigiosus (Schottelius) et que, d'autre part, des orga- 
nismes plus élevés en organisation, comme l’Actinomyces bovis, pré- 
sentent une grande variabilité morphologique dans les cultures. Il 
est donc légitime de se poser la question : certains micro-orga- 
nismes considérés comme parasites ne sont-ils pas des formes par- 
ticulières d'espèces pléomorphes d'organisation plus élevée? En 
particulier, Bacillus tuberculosis appartient-il à une espèce pléo- 
morphe et quelles formes peut-il manifester ? 

D'abord Fischel avait à retrouver les différentes formes décrites 
antérieurement, et spécialement les renflements en massue et les 
formes ramifiées décelées par Metshnikov et Maffucci dans les cul- 
tures de tuberculose aviaire. Fischel, non seulement constate la 
présence de ces formes dans les cultures de tuberculose aviaire, 
mais encore dans les cultures de la tuberculose des Mammifères. — 
Ces deux virus ne sont d’ailleurs que des variétés d’une même es- 
pèce. Par des expériences, il démontre que la sensibilité du Chien 
à la tuberculose humaine est inconstante. L'auteur rappelle les 
expériences de Cadiot, Gilbert et Roger, sur des Lapins inoculés 
avec le Bacille aviaire et morts en trois mois environ avec des lé- 
sions nodulaires, ce que n’admet pas Maffucei. Il modifie les ter- 
rains de culture pour faire varier l'aspect macroscopique des colo- 
nies des deux variétés de la tuberculose. Sur du sérum de sang de 
Poule glycériné, le Bacille des Mammifères prend sensiblement 
l'aspect des colonies de tuberculose aviaire. De même, sur sérum 
de sang de Chien. Avec des parcelles de lésions nodulaires du La- 
pin, il ensemence des œuîs; et après une croissance de plusieurs 
mois dans un tel milieu, les Bacilles sont transportés sur de l’agar 
glycériné et boriqué. L'inoculation de telles cultures à des Cobayes 
ou à des Lapins ne produit qu'une tuberculose à évolution très 
lente et ne donnant lieu, pendant plusieurs mois, avant la générali- 
sation par conséquent très tardive, qu'à des modifications locales. 
Des Poules inoculées avec les mêmes cultures moururent en mani- 
festant les signes de la tuberculose des Oiseaux. De plus, l'aspect 
macroscopique des cultures directement ensemencées avec des lé- 
sions de tuberculose spontanée, soit de Faisans ou de Poules 
(Hueppe) ou de Singe (Fischel), n’est pas toujours aussi différencié 
qu'on l'estime généralement. Les cultures faites par Hueppe dans 
le premier cas, et avant l’acclimatement à une suite de milieux 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 495 


artificiels, avaient une apparence grise et sèche. Dans le second 
cas, les cultures de la tuberculose du Singe ressemblaient macros- 
copiquement à celles de la tuberculose aviaire. Fischel pense que la 
tuberculose des Oiseaux n'est, comparativement à la tuberculose des 
Mammifères, que le même virus modifié et affaibli par l’adapta- 
tion au corps des Gallinacés. En plus, dans des cultures de tuber- 
culose aviaire et humaine, sur gélose glycérinée et sur sérum 
sanguin, développées à la température de 40°, Fischel constate, en 
examinant les portions marginales de la masse en croissance, en 


préparations non colorées, la présence de filaments présentant de 


courtes ramifications et partant de la tige principale à angle aigu. 
Dans des préparations colorées de cultures sur sérum de sang de 
Chien coagulé, de tuberculose des Mammifères, l’auteur relève égale- 
ment la présence de nombreuses formes ramifiées, à côté de la 
forme habituelle en bätonnet. Le filament bacillaire peut s’amin- 
cir à l’une des extrémités, et dans l’intérieur d’un tel bâtonnet sont 
visibles des formations nodulaires séparées, à protoplasma con- 
densé. « Les ramifications ne sont point constituées par une juxta- 
position fortuite. Cela est facile à voir même sur la plaque photo- 
graphique, où l'on constate le passage direct de la membrane 
protectrice de la tige sur la branche. » Fischel n'a jamais pu cons- 
tater de cloisons dans les formes ramifiées de la tuberculose des 
Oiseaux ou des Mammifères. En plus, il aperçoit dans des cultures 
vieilles de quatre semaines du Bacille aviaire, développées à 370 
sur un milieu nutritif contenant de l'acide borique, des bâtonnets 
régulièrement plus longs que les Bacilles de la tuberculose aviaire 
et qui portent à l’une de leurs extrémités un renflement piriforme. 
Cet élément bacillaire avec renflement a ainsi l'aspect d'une ba- 
guette de tambour à poignée mince, à extrémité arrondie, mais lé- 
gerement étirée à la pointe. Ces massues contiennent des parties 
brillantes, claires, non colorables; mais les contours se laissent 
colorer. En considérant que ces formes renflées ont été trouvées, 
et sur des cultures âgées et sur des cultures plus jeunes contenant 
une substance stimulante, par exemple du thymol, qu'elles se sont 
développées sur un micro-organisme filamenteux, alors on arrive 
à cette conviction que de telles formes peuvent être des modes 
de fructification d'un état de croissance saprophytique de la tu- 
berculose des Oiseaux, et que peut-être, ce sont des formes compa- 


126 G. BOUDIN 


rables à des conidies. De plus, le fait qu'après la coloration à la 
fuchsine phéniquée, elles résistent plusieurs minutes à l’action dé- 
colorante de l'acide sulfurique montre encore qu'il s’agit bien là de 
formes durables du Bacille de la tuberculose aviaire. Et ainsi ce 
sont des formes d'évolution et nullement de dégénérescence. Le 
Bacille de la tuberculose manifesterait-il donc des formes de fruc- 
tification diverses? En réalité les formations décrites par Koch 
comme spores, sont plutôt, de l'avis de Hueppe, des vacuoles, et 
la multiplication des Bacilles paraît se faire par arthrospores. 

Des cultures de tuberculose des Mammifères et de tuberculose 
des Oiseaux furent encore faites sur de l'agar glycériné contenant 
2 p. 100 d'une solution saturée de thymol. Les colonies se déve- 
loppent en une pellicule qui s'épaissit, forme des proéminences, 
devient par places nettement jaune; de telles colonies de 
Bacilles aviaire et humain (ont, dans cet état, une ressemblance 
frappante avec de vieilles cultures d’Actinomyces sur glycérine 
agar ». Ces cultures s'étaient développées aussi bien à 37° qu'à 
40° : les colonies de tuberculose aviaire laissaient voir très rapi- 
dement les formations en baguette de tambour, déjà décrites; les 
préparations colorées des colonies de tuberculose humaine mon- 
traient des formes ramifiées et filamenteuses. 

En cultivant le Bacille des Mammifères sur des œufs, 3 fois sur ), 
les éléments bacillaires ont pris une forme courte et très granuleuse. 
Ces cultures contiennent également des formations sphériques résis- 
tant à la décoloration par les acides. Dans toutes les cultures, les 
Bacilles s'étaient multipliés dans le jaune de l'œuf. En ensemençant 
les Bacilles très courts et granuleux décrits plus haut sur agar 
glycériné et boriqué, Fischel obtint, aussi bien à 37° qu'à 40°, des 
colonies rondes, par endroits isolées, en d’autres confluentes. Elles 
avaient ainsi l'aspect de colonies de tuberculose aviaire. A l'exa- 
men microscopique on voyait, à côté de bâtonnets courts, des formes 
filamenteuses dont les ramifications se terminaient par un renfle- 
ment. La grosseur de ces renflements terminaux dépassait celle des 
massues constatées dans des cultures de tuberculose aviaire du 
même âge et soumises à une température égale. On pouvait encore 
remarquer des formes filamenteuses, mais avec de très courtes 
ramifications, en tout semblables à celles que Maflucci décrit dans 
les cultures du Bacille aviaire. Mais Fischel dit ne pas savoir pour- 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 197 


quoi, dans les deux autres cas, les ramifications avec intumes- 
cences terminales manquaient. 

Des cultures de tuberculose des Mammifères sur peptone agar à 
8 p. 100, montrent des colonies petites, en forme de rosette, à 
partie centrale jaune brun, à zone périphérique constituée par des 
plis rayonnant régulièrement de la partie centrale vers l'extérieur. 
Le même aspect fut réalisé par des cultures de tuberculose 
aviaire sur peptone agar à 10 p. 100. De telles colonies sont essen- 
tiellement comparables, macroscopiquement, aux colonies d’acti- 
nomycose. Hueppe d'ailleurs, depuis longtemps, avait été frappé de 
cette ressemblance, et en avait fait mention au Congrès de Londres 
en 1891. Maïffucci pensait que les formes renflées et ramifiées ne 
s'observent jamais dans les cultures de tuberculose des Mammifères, 
et qu'elles s’observent dans les cultures de tuberculose aviaire sous 
des conditions spéciales de haute température de croissance de 
46 à 50°. Fischel pense avoir démontré que le Bacille tuberculeux, 
chez les Mammifères comme chez les Oiseaux, montre en culture 
des formes pléomorphes, mais déterminées; leur apparition 
relève plus du sol des cultures que de l’âge de celles-ci, et de 
la température auxquelles elles se développent. La question 
reste non résolue, de savoir si ces formes ramifiées peuvent 
apparaître en dehors des organismes, dans la nature, et 
et telles qu’elles se manifestent sur les terrains de culture artifi- 
ciels. En conséquence, Fischel termine ainsi : « L'agent de la 
tuberculose est un micro-organisme pléomorphe. La forme bacil- 
laire est la forme parasitaire du micro-organisme qui montre 
dans son existence saprophytique des filaments ramifiés. La dési- 
gnation spécifique de ce micro-organisme ne me paraît pas encore 
pouvoir être donnée avec assurance. Ce n'est morphologiquement 
ni un Bacille, ni un Cladothrix; mais il appartient, dans son 
existence saprophytique, vraisemblablement à un Champignon 
pléomorphe de genre plus élevé. La ressemblance macroscopique 
qui existe entre les cultures d’actinomycose et de tuberculose, 
aussi bien que la présence de formations microscopiques compa- 
rables dans les cultures de ces micro-organismes font penser à 
une parenté étroite entre le virus de la tuberculose et l’Actinomyces 
bovis. » 

Si nous résumons, d'après les photographies qu'a données 


128 G. BOUDIN 


Fischel à la fin de son mémoire, nous voyons que cet auteur a 
trouvé des formes montrant des ramifications non douteuses avec 
légers renflements terminaux sur des préparations colorées de 
cultures de tuberculose aviaire, âgées de quatre semaines, et s'étant 
développées à 40° sur agar glycériné. Des formes tout à fait com- 
parables ont été également trouvées dans des cultures de tuber- 
culose des Mammifères [Lapin], ayant subi préalablement deux 
ensemencements successifs sur l'œuf et ensuite réensemencées à 
37° et à 40° sur agar glycériné et boriqué. Les massues terminant 
les rameaux étaient plus épaisses que les renflements des formes 
ramifiées décelées dans des cultures de tuberculose aviaire du 
même âge et développées également à 37-400. Ces cultures étaient 
vieilles d'environ huit semaines. Les ramifications se font à angle 
aigu ou à angle droit. 

Des formes moins richement ramifiées, colorées, résistantes à 
la décoloration par les acides furent encore trouvées sur des pré- 
parations de cultures de tuberculose des Oiseaux sur sérum de 
sang de Bœuf coagulé développées à 40° et âgées de 4 semaines. Des 
formes exactementsemblables furent décelées dans des préparations 
colorées de cultures de tuberculose des Mammifères développées 
à 37° sur sérum de sang de Chien coagulé. L'auteur ne précise pas 
l'âge des cultures. 

Quant aux formes montrant des renflements très considérables, 
en tout comparables aux formes que Metsnikov et Maffucci ont 
représentées dans leurs figures, quelquelois reliées deux à deux ou 
trois à trois par des portions intermédiaires filamenteuses très 
étroites, elle ont été trouvées par Fischel sur des préparations 
colorées de cultures de tuberculose aviaire, vieilles d’un an et 
7 mois, développées à la température de 37° sur bouillon glycériné. 
Les préparations, sans exception, furent examinées avec un gros- 
sissement de 1200. Elles étaient colorées à la fuchsine phéniquée, 
et traitées ensuite par l'acide sulfurique. Nous ne croyons pas que 
Fischel ait obtenu les différentes formes ramifiées dans des cultures 
anaérobies, comme l'ont mentionné différents auteurs. Du moins, 
nous ne l'avons pas lu. On fait grief à Fischel du manque de netteté 
de ses photogravures; Coppen Jones à pu comparer certaines 
d’entre elles à des photographies de taches de la lune. En réalité, 
les figures obtenues par coloration des préparations; fig. 2. 6, 9, 11 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 199 


de la pl. III sont suffisamment précises. C'est d’après elles que 
nous avons fait le résumé ci-dessus. On ne saurait douter des 
ramifications réelles qu’elles présentent et de l’idendité de telles 
formations avec celles que Metshnikov, Maffucci, Hayo Bruns 
figurent dans leurs planches. L'aspect macroscopique des cultures 
de tuberculose du Lapin sur agar glycériné, et de tuberculose 
aviaire sur agar peptoné est exactement celui d'une formation en 
rosette, régulière, à centre jaune et plis radiés blanchâtres. Cer- 
tains auteurs ont pu trouver que les renflements terminaux des 
formations ramifiées des cultures de tuberculose ne ressemblaient 
que très peu aux massues que le Discomyces bovis forme dans les 
tissus. Il ne semble pas que Fischel ait présenté la comparaison 
dans ces termes : il a comparé les intumescences terminales des 
filaments ramifiés de tuberculose seulement aux renflements que 
l’'Actinomyces forme également dans les cultures |... mikrosko- 
pische Gebilde, auch in Culturen des Actinomycespilzes gefunden 
wurden.….). Les formes ramifiées ont été trouvées non seulement 
dans des cultures additionnées de thymol ou d'acide borique, 
mais encore dans des milieux ordinaires : agar glycériné, sérum 
de sang de Bœuf. Les figures sont faites d'après des préparations 
de cultures âgées d'au moins quatre semaines. 

Le travail de Fischel fut fait sous la direction de Hueppe. Ce der- 
dier auteur, dans uneconférence,en 1893, renouvellelesconclusions 
de Fischel. « D'après les recherches de Klein, de Fischel et d’après 
mes propresobservations, le soi-disant Bacille tuberculeux n’estque 
la forme parasitaire d’un Champignon pléomorphe. » Les Bacilles 
tuberculeux des Oiseaux et des Mammifères, que Koch et Maffucei 
veulent séparer en espèces distinctes, ne sont que des formes para- 
sitaires du même micro-organisme adaptées à des êtres différents. 
Ils en recoivent des caractères singuliers, mais il est possible de 
transitormer réciproquement ces deux variétés l’une en l’autre. 

Hayo Bruns, de la Faculté de Strasbourg, produit en 1895 une 
contribution personnelle à la question de la pléomorphie du mi- 
cro-organisme de la tuberculose. Il rappelle que les formations my- 
céliennes n'ont été trouvées jusqu'ici que sur des cultures de tuber- 
culose aviaire. Fischel cependant est le premier à les avoir misesen 
évidence en des cultures de tuberculose des Mammifères. C'est une 
confirmation des observations de Fischel qu'apporte l'auteur. Deux 

Archives de Parasilologie, XI, n° 1, 1906. 9 


130 G. BOUDIN 


cultures pures de tuberculose d'origine humaine non douteuse, dé- 
veloppées sur agar glycériné, exposées constamment pendant cinq 
mois environ à la température de 37 à 3705, lui ont montré des for- 
mes ramifiées typiques et nombreuses. Ces formes ne purent être 
trouvées dans d'autres cultures développées en des conditions iden- 
tiques. La coloration des préparations des deux premières cultures 
fut réalisée à l’aide de la solution de fuchsine phéniquée, et la dé- 
coloration effectuée par action de l'acide nitrique au quart, et de 
l'alcool. Les formations, filamenteuses et ramifiées, se coloraient, 
d'après cette méthode, comme les Bacilles tuberculeux; leur image 
a été reproduite avec un grossissement de 1200, par un artiste, pour 
éviter toute interprétation personnelle. Les figures que donne Hayo 
Bruns ont été ainsi dessinées d'après une seule préparation; elles 
permettent de montrer toutes les phases de transition entre le 
simple bâtonnet et la formation richement ramifiée à extrémités 
terminales renflées en massue. H. Bruns pense que les corpusecules 
oveïdes, assez volumineux, très chromophiles, qui s’échelonnent 
au nombre de deux ou trois dans un bâtonnet, et dépassant sa lar- 
seur, peuvent être considérés comme des formes durables. Comme 
des spores, il$ donnent d'une façon nette la réaction de Neïsser; 
mais les cultures où ces corpuscules sont présents sont stérilisées 
après dix minutes d'exposition à la température de 80°. Sur les fi- 
laments, les rameaux se séparent à angle droit de la tige principale 
ou bien la ramification se présente comme dichotomique. Si les 
formes ramifiées, dit l'observateur, étaient des formes dégénérati- 
ves, on devrait les remarquer de plus en plus nombreuses au fur 
et à mesure que les cultures vieillissent et dans la plupart des cul- 
tures. En réalité, ces formes qui montrent une organisation caracté 

ristique, n'apparaissent pas dans toutes les cultures indistincte- 
ment ;et quand elles apparaissent, c'est à un certain momentdel'évo- 
lution des micro-organismes, sous des conditions indéterminées, 
mais bien dans la phase active du développement. Au contraire, 
d’une façon constante, la dégénérescence des cultures, leur vieil- 
lissement, se manifeste toujours par une désintégration des Bacilles 
-qui deviennent granuleux, très vacuolaires, en partie incolorables, 
et se résolvent en cocci de dimensions réduites, très chromophiles. 
Si l’on doit désigner les formes ramifiées commedes formes d'invo- 
lution, il faut bien comprendre qu'on les considère ainsi, comme 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 131 


des formes de retour vers l'état ancestral d'un micro-organisme 
saprophyte, dont la forme parasitaire est un bâtonnet. En outre, dans 
un assez grand nombre de cultures âgées de tuberculose aviaire, 
développées sur agar glycériné, à la température de 37°, H. Bruns 
constate encore la présence de formes ramifiées, tout à fait compa- 
rables à celles qu'il a décrites précédemment dans les deux cultu- 
res de tuberculose humaine; les filaments y étaient cependant plus 
grêles et les ramifications moins nombreuses. 

L'auteur présente les conclusions suivantes : « La thèse de 
Maffucci, d'après laquelle les formes pléomorphes n'apparaissent 
que dans la tuberculose aviaire, et non dans les cultures de tuber- 
culose humaine, n'est plus exacte. On peut ainsi expliquer l’appa- 
rition plus fréquente des formes filamenteuses et ramifiées dans 
la tuberculose aviaire : l'adaptation à la vie parasitaire du micro- 
organisme delatuberculose est plus complète chez les Mammifères 
que chez les Oiseaux. Cette différence d'adaptation est peut-être 
due à la température plus élevée des Oiseaux; de sorte que le 
Bacille aviaire, parasite peu adapté, reprend plus rapidement sa 
forme saprophytique. » 

Le travail de H. Bruns fut fait sous la direction de E. Levy. En 
1899, ce dernier auteur, qui a vu les préparations de Bruns, s’ex- 
prime ainsi dans un article « sur les Actinomyces et les Bactéries 
proches parentes de ce groupe » : «Les ramifications, dans les 
préparations de Bruns, du micro-organisme de la tuberculose des 
Mammiières se montraient, en quelques préparations, extraordi- 
nairement prononcées : elles correspondent, comme on peut l’affir- 
mer maintenant avec certitude et en raison des connaissances plus 
récentes, absolument à celles des Actinomyces. » 

En 1$93, Coppen Jones rapporte le résultat de ses observations 
sur des formations spéciales contenues dans l’expectoration de phti- 
siques, à la période des ulcérations pulmonaires. Fréquemment sur 
les fibres élastiques des crachats, il remarque, sans coloration préa- 
lable des préparations, des corps réfringents de 4 à 20 w de longueur 
pressés les uns contre les autres, saillant à la façon des massues 
que l’Actinomyces forme dans les tissus. Ces massues, colorées à la 
fuchsine, se décolorent par l'alcool. D'après Coppen Jones, elles 
existent dans 30 p.100 des cas de tuberculose ulcéreuse à évolution 
lente et dans 75-80 p. 100 des cas où la fonte du tissu pulmonaire 


132 G. BOUDIN 


est rapide. De plus, à l’intérieur de fragments de masses caséeuses, 
dans douze cas de tuberculose, l’auteur a vu des formations 
rayonnées, ( non pas développées sur les fibres élastiques, mais 
indépendantes dans les conglomérats de cellules mortifiées et de 
Bacilles tuberculeux qui composent les masses caséeuses, et 
donnantà s’y méprendre l'aspect des petits grains d’actinomycose. » 
Tout en établissant un rapport de fréquence étroit entre les cas 
de tuberculose à Bacilles de Koch et la présence de telles forma- 
tions, Coppen Jones dans cette communication provisoire n'établit 
aucun lien botanique entre les Bacilles tuberculeux et les mas- 
sues. Il considère cependant celles-ci comme des formes d’origine 


Fig. 4, d’après Coppen Jones. — 1 (X 1000) et 2 (X 1250), filaments ramifiés du 
Microbe de la tuberculose constatés dans des crachats humains; 3 {X 1250), 
filament de tuberculose avec vacuoles pénétrant dans les ramifications ; 4, forme 
ramifiée du Microbe tuberculeux de crachats humains avec « spores ». 


mycélienne. En 1895 et 1896, il produit deux communications sur 
la morphologie et la place systématique du Champignon de la 
tuberculose et sur les formations en massue de l’Actinomyces et 
du Tuberculomyces (Bacille de Koch). Comme Fischel Coppen 
Jones estime que : «la rareté des formes ramifiées et filamen- 
teuses dans les cultures pures tient en partie aux procédés peu 
ménagés dont on use dans les méthodes usuelles de préparation. » 
Il emploie pour ses observations deux méthodes : 1° : les macéra- 
tions, soit en solution saline, soit dans la solution alcoolique de 
Ranvier, (celle-ci est préférable); 2° les coupes, après inclusion 
des colonies dans la paraffine. 
Les cultures macérées étaient des cultures de tuberculose humaine 
agées de 3 à 4 mois développées sur agar glycériné. Dans les pré- 
parations de ces cultures on voit des filaments incurvés qui ne sont 
pas constitués par une chaîne de courts bâtonnets comme les fila- 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 133 


ments du Bacille du charbon. De plus, «dans chaque champ visuel 
apparaissent un ou plusieurs filaments qui montrent des branches 
et des rameaux. La ramification est vraie; ce n'est pas une ramifi- 
cation par pseudo-dichotomie comme celle des Cladothrix. On peut 
voir les ramifications dans toutes leurs phases ; depuis les plus pe- 
tits bourgeons qui sont à peine une légère saillie des parois cellu- 
laires, jusqu'à de plus grandes branches (10 ») avec 
ramifications secondaires.» Pour Coppen Jones, les 
spores de Koch sont des formations vacuolaires; et 
ces vacuoles peuvent pénétrer en partie de la bran- 
che principale dans le bourgeon latéral. Elles s'é- 
chelonnent à intervalles variables, séparées par des 
portions de protoplasma fixant énergiquement les 
colorants. Le fait qu'elles existent à la bas ô de dun LT 
S. I s exiS à la base même A AL 
des bourgeons empêche de les considérer comme culture pure 
f 4 ti décé , ti sur agar pres- 
ormations dégénératives. ea la 
L'apparence qu'en reçoit le micro-organisme melle, d'après 
© ae : à CoppenJo- 
tuberculeux est singulière pour un Bacille, mais ne 
elle est tout à fait en accord avec la structure d’un 
filament mycélien. Les petits bourgeons sont souvent renflés à 
l'extrémité comme ceux des Actinomyces et ceux d’autres Cham- 
pignons. Sur les coupes des colo- 
nies, âgées d'environ 2 mois, Cop- 
pne Jones fait cette constatation que 
les membranes de la culture ne se 
composent pas d'une simple accu- 
mulation de bâtonnets, mais bien 
d'une grande quantité de filaments 
parallèles les uns aux autres et s’é- 
\ levant verticalement sur le sol de 
en6 d'après Coppen Jones" Culture. Iliny a que dans les parties 
1, une formation en massue du î À 
Microbe de la tuberculose ; les plus minces des coupes qu'on 
One Ste EU re Sr d'autrepart. que des 
Champignon de l’actinomycose. s é : : : 
ramifications vraies existent. L'an- 
gle de ramification est ouvert du côté de la surface de la culture. 
Dans la profondeur de l’agar même, il n'y a presque pas de fila- 
(e) 9 
ments, mais seulement de petits Bacilles; ce qui indiquerait à 
l'auteur que la formation mycélienne est en rapport direct avec 


134 G. BOUDIN 


la présence de l'oxygène. Dans un filament, les parties colorables 
prennent inégalement la couleur. Celles qui sont le plus intensément 
colorées s'échelonnent à intervalles variables, et résistent à l’action 
décolorante des acides très énergiquement. Elles sont générale- 
ment discoïdes, de diamètre supérieur à celui du bâtonnet. Et 
bien qu'elles ne résistent pas aux hautes températures, elles doi- 
vent être considérées, d'après Coppen Jones, comme des spores. 
L'auteur rappelle la ressemblance macroscopique considérable des 
colonies d’actinomycose et de tuberculose, remarque déjà faite par 
Hueppe et Fischel. De plus, les massues que ces deux micro-orga- 
nismes forment dans les tissus sont absolument identiques entre 
elles: même réfringence, même apparence digitée, stratifiée. Si ces 
renilements terminaux sont en rapport direct avec les filaments 
dans la tuberculose comme dans l'actinomycose, il est cependant 
plus facile de suivre le filament à l'intérieur de la massue dans 
le dernier Cas. Ce caractère mis à part, il est impossible de difré- 
rencier les formations rayonnées des deux micro-organismes. De 
même que l’Actinomyces est rattaché aux Hyphomycètes, de 
même doit y être rattaché le microbe de la tuberculose, et l'auteur 
pose les conclusions suivantes : 

19 Dans les tissus'et les secrétions, le virustuberculeux se présente 
principalement comme un bâtonnet de longueur variable, qui se 
multiplie par division transversale. 

20 Detemps en temps dans les sécrétions (expectoration), et tou- 
jours dans les cultures âgées sur agar, paraissent des formations 
filamenteuses qui, a) ne montrent pas de cloisons, b) montrent 
une vraie ramification. 

30 Ces formes filamenteuses se présentent seulement à la surface 
des milieux de culture. Dans la profondeur des cultures solides 
ou liquides, comme dans les tissus (endroits où l'apport d'oxygène 
est empêché), on ne trouve que de courts bâtonnets. 

4° Les bâtonnets ne contiennent pas d'endospores comparables à 
celles que nous rencontrons chez d’autres Bactéries. Mais, dans les 
bâtonnets aussi bien que dans les filaments, se présentent des for- 
mations qui possèdent beaucoup des propriétés physiques des 
formes durables. 

50 Dans certaines circonstances apparaissent, en un étroit rapport 
avec les Bacilles tuberculeux, certaines formations qui ont les 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 435 


mêmes propriétés de structure et la même conformation que les 
masses du Champignon de l’actinomycose. 

Dans un dernier paragraphe, Coppen Jones rapproche les spores 
du Bacille de la tuberculose des chlamydospores du Chlamydomucor 
racemosus. Il montre la pléomorphie de plusieurs espèces de Cham- 
pignons selon les milieux de culture, et les conditions de leur 
développement. Etant données les variations morphologiques du 
Bacille de Koch, il est trop exclusif d'admettre son parasitisme 
obligatoire. Il paraît plus probable qu'il possède une existence 
saprophytique hors du corps de l’animal. « Ce que nous savons de 
sa morphologie, dit l’auteur, nous permet d'affirmer que ce n’est 
pas un Bacille mais un Champignon filamenteux et ramifié que l'on 
peut dénommer Tuberculomyces. » 


CHAPITRE III 


Formes filamenteuses et ramifiées du Bacille pisciaire. Transformation du 
Bacille des Mammifères en race saprophyte filamenteuse et ramifiée (BATAIL- 
LON, DUBARD, TERRE, 1897-1902 ; Kraz et DuBarp, 1898). 


Comme le Bacille des Mammifères, comme le Bacille de la tuber- 
culose aviaire, le Bacille tuberculeux pisciaire présente les formes 
filamenteuses et ramifiées dans le cours de son développement. En 
mai 1897, Bataillon, Dubard et Terre présentent une description du 
Bacille tuberculeux de la Carpe : « Sur gélose, disent-ils, si l’on 
examine des cultures vieilles de 9 ou 10 jours, on ne trouve plus, 
au lieu de Bacilles typiques, identiques par la taille et par la forme 
au Bacille de Koch, et colorés par la méthode d'Ehrlich, que des 
amas volumineux simulant de riches dichotomies avec des ramifi- 
cations souvent étirées en pointes. Ces amas ont une base mal 
colorée et la méthode d'Ehrlich fait ressortir dans leur intérieur 
une grande quantité de granulations mieux teintées. Nous sommes 
portés à voir dans ces figures spéciales, difficilement colorables, 
des formes de reproduction. L'observation des cultures montre en 
tous cas qu'il y a là la fin d'un cycle; et l'étude des stades inter- 
médiaires donne la conviction que les Bacilles s’agglutinent en 
masse pour produire ce résultat. L'évolution à la température ordi- 
naire ou à 12° présente sur les différents milieux des caractères mor- 
phologiques identiques. Mais elle est plus lente; une culture sur 


136 G. BOUDIN 


bouillon à 12° demande une douzaine de jours pourarriverau point 
qu’elle atteint en 3 jours à 23°». Pourtant, d'après les auteurs eux- 
mêmes, le micro-organisme reste indéterminé, étant donnée sa 
grande pléomorphie. 

Mais les Carpes, sur lesquelles avaient été trouvés les nodules 
tuberculeux, avaient pu être contaminées par des produits 
tuberculeux humains; Bataillon, Dubard et Terre arrivent à 
transformer, par passage sur les Vertébrés à sang froid, le Bacille 
des Mammifères et le Bacille aviaire en Bacille pisciaire, capable 
de végéter rapidement à basse température, et dépourvu de pro- 
priétés toxi-infectieuses pour les Vertébrés à sang chaud. Cette 
variété nouvelle présente les mêmes caractères morphologiques et 
biologiques que le Bacille de la Carpe : les auteurs la décrivent 
comme variété saprophyte du Bacille de Koch. 

Mais dans le cours de leurs expériences, Bataillon et Terre remar- 
quent que la tuberculose humaine ou aviaire, après passage sur la 
Grenouille ou sur la Carpe, et selon la durée du passage, fournit des 
cultures souvent différentes des cultures du Bacille pisciaire, c'est- 
a-dire ne donne pas toujours la même variété saprophyte. C'est 
ainsi qu'après un séjour de3 jourssur la Grenouille, le Bacille tuber- 
euleux de l'Homme donne des cultures capables de se développer 
aux températures élevées et troublant le bouillon ordinaire. Des 
reports de ces cultures dans les sacs lymphatiques dorsaux de la 
Grenouille donnent encore une forme nouvelle : « de Bacilles 
aréolés avec points de condensation; et s'il n'y a qu'un point de 
condensation à chaque extrémité, les Bacilles sont de véritables 
tonnelets rappelant le type décrit par Courmont en 1887. Les 
méthodes d'Ehrlich et de Gram ne les colorent pas. Mais sur 
milieu se desséchant progressivement, sur des tubes de gélatine 
non encapuchonnés par exemple, on constate en 12 ou 15 jours 
l'apparition graduelle d'un voile opaque constitué par des Bacilles 
typiques; même phénomène sur des milieux qui s'épuisent. Les 
formes primitives semblent sporuler pour fournir ces éléments 
spéciaux capables de multiplication dans certains milieux... En 
tout cas les coupes pratiquées sur nos plaques de gélatine montrent 
une couche superficielle bien limitée de Bacilles colorés par la mé- 
thode d'Ehrlich; il n'y en a pas un seul dans la profondeur. » 

En outre, le Bacille tuberculeux humain inoculé au Cobaye, après 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 137 


le court passage de trois jours sur la Grenouille, a fourni aux expé- 
rimentateurs des séries d'animaux tuberculeux, mais dont 
les nodules ne contenaient aucun Bacille de Koch, mais une 
forme de Bacilles mobiles, dont la puissance végétative s’affai- 
blissait rapidement au fur et à mesure des inoculations en série. 
Ces micro-organismes donnent un trouble floconneux dans les 
milieux de cultureliquides. De plus, le Bacille qui, chez le Cobaye, 
produit des lésions nodulaires sans Bactéries acido-résistantes, tue 
le Lapin par septicémie, sans déterminer de tubercules dans les 
organes. D'autres expériences ont conduit encore à d'autres formes 
microbiennes : Streptobacilles, Zooglées. « Un polvymorphisme 
aussi étendu nous porte à croire, disent Bataillon et Terre, 
qu'avant la découverte de Koch, des savants comme Toussaint et 
Klebs ont pu isoler certaines formes du même genre. Nos études 
expérimentales, rapprochées des observations antérieures, nous 
laissent la conviction que bien:des cas de pseudo-tuberculose sont 
des tuberculoses vraies, ayant pour agent l’une des nombreuses 
formes du bacille de Koch. » En 1899, les expérimentateurs donnent 
une systématisation des principaux groupes qui relient le Bacille 
de Koch acido-résistant au type Malassez-Vignal; ils différencient 
les micro-organismes. selon leurs réactions chromatiques, selon 
leur température eugérésique de développement, selon leur aspect 
morphologique en filaments ramifiés, ou en éléments bacillaires 
distincts mobiles ou immobiles. Ils distinguent particulièrement 
l'une des formes ramifiées qui prend le Gram et se développe bien 
aux températures élevées. À la suite d'expériences comparatives 
sur des cultures d'actinomycose provenant du laboratoire du pro- 
fesseur Arloing, cultures qu ils ‘ont fait ingérer à des Cobayes, ils 
constatent et l'identité macroscopique des cultures obtenues d'un 
de ces Cobayes mort au bout de 34 jours, avec les cultures de la 
forme ramifiée d’origine tuberculeuse, et l'identité morphologique 
de cesformes filamenteuses de provenancesdifférentes, actinomyco- 
siques d'une part, tuberculeuses d'autre part. («Ce mycèle d'acti- 
nomycose authentique ne saurait alors être distingué morpholo- 
giquement du mycèle tuberculeux qui prend place dans notre 
cycle. Mais nous obtenons en même temps, ajoutent Bataillon 
et Terre, avec ce mycèle actinomycosique des colonies de Bacilles 
peu ou point ramifiés, mais susceptibles de revenir dans certaines 


138 G. BOUDIN 


conditions au type mycélien avec la même pigmentation du 
milieu, rappelant la pseudo-actinomycose de Poncet et Dor. L'acti- 
nomycose, évidemment instable dansles conditions expérimentales 
que nous avons indiquées, identique au type de tuberculose que 
nous rencontré, ne se confondrait-elle pas avec lui ? Il est permis de 
poser la question. 

« En résumé, au point de vue morphologique, nous admettons une 
série dégradée continue (en ce qui concerne les réactions colo- 
rantes) évoluant dans l’organisme animal (vraisemblablement sous 
l'action hydrolysante des sues digestifs). La forme bacillaire, qu'elle 
prenne l'Ehrlich, qu'elle ne prenne que le Gram, ou qu'elle ait 
perdu ces deux réactions, se ramifie facilement. Il s'agit donc en 
réalité d'hyphes etnon de Bacilles. C'est toujours le même Hyphomy- 
céte, avec une perméabilité variable aux solutions colorantes. La 
reproduction, nettement observée sous les deux allures les mieux 
caractérisées à ce point de vue {Ehrlich ou Gram seul), place le 
germe en question dans le genre Oospora. Il devient provisoire- 
ment Oospora Kochi. 

« Au point de vue pathogénique, la tuberculose des Mammifères, 
des Oiseaux et des animaux à sang froid, la tuberculose appendi- 
culaire du Lapin, les pseudo-tuberculoses groupées par Ledoux- 
Lebard, peut-être même l'actinomycose et la pseudo-actinomycose 
de Mosetig, Poncet et Dor, correspondraient à des adaptations, à 
des variétés de la même forme parasitaire. » 

En 1902, Terre, dans sa thèse sur la tuberculose des Vertébrés à 
sang-froid, rappelle dans les mêmes termes, les faits de polymor- 
phisme du Bacille de Koch, observés par Bataillon et lui-même ; 
il ne donne qu'une légère variante dans la classification des Ba- 
cilles tuberculeux : (Le Bacille de la Carpe est un Hyphomycète… 
comme le Bacille de Koch dont il n'est qu'une variété. Les 
espèces pisciaire, aviaire et humaine ne constituent que des 
variétés d’un même genre : Sclerothrix appartenant au groupe des 
actinomycètes ». Terre reprend donc la dénomination déjà em- 
ployée par Metshnikov en 1888. 

En 1898, Kral (Prague) et Dubard (Dijon) produisent des résultats 
tout à fait comparables à ceux de Bataillon et Terre, dont Dubard 
avait été d'ailleurs le collaborateur dans la première série d’ex- 
périmentations sur le Bacille tuberculeux de la Carpe. « La forme 


Dre 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 139 


exclusivement parasitaire est le Bacille, disent ces auteurs. C’est 
aussi sous cette forme que notre micro-organisme se présente 
dans les cultures récentes. Mais sous l'influence du temps, des 
agents physiques et chimiques, qui hâtent ou entravent sa vie 
saprophytique, on assiste à la formation d'éléments nouveaux. de 
longs filaments simples ou dichotomiques. » Au bout de 10 jours, 
une culture sur bouillon somatosé glyco-glycériné, examinée 
vivante, montre d'abord des Bacilles, non pas isolés les uns des 
autres, mais groupés en faisceaux par une substance intermédiaire. 
Les faisceaux primaires donnent lieu à des faisceaux secondaires 
(« qui peuvent en im- 

poser pour des ramifi- 

cations vraies. Un exa- 

men attentifprouveque 


l'on a affaire à une 
succession d'éléments : V4 
mais non à un élément er or 
unique qui s'allonge et 

. 9 | 
se ramilie. Ce n’est pas Ÿ _. 


à cette disposition en A 
faisceaux linéaires ou 


latéraux que nous don- Fig. 7, d’après Kral et Dubard. — Culture de 
. tuberculose pisciaire sur pomme de terre, gly- 

nons le nom de dicho- cérine-peptonée d’un mois et demi, exposée à 

tomies. Celles-ci provi- la lumière. Température de la chambre. 


ennent d'un élément, 

en tout semblable à un Bacille au début, qui s’allonge, élargit 
son diamètre et émet des rameaux. Dans les ramifications ainsi 
formées, la membrane qui enveloppe le protoplasma nest pas 
étranglée en articles. C'est donc bien à une ramification vraie 
que donne naissance le Bacillus tuberculosus piscium. Les élé- 
ments ramifiés peuvent avoir un diamètre trois et quatre fois plus 
considérable que celui des Bacilles. Il n’est pas possible de con- 
fondre l’image que l’on voit avec une superposition de filaments 
ou un artifice de préparation. » Les filaments, d'abord à contenu 
homogène se colorant par l'Ehrlich, montrent ensuite un aspect 
granuleux, dont les seuls grains ont les réactions chromatiques 
des Bacilles tuberculeux. Parmi ces grains, il en est de plus gros, 
figurant des corpuscules ovoïdes saillants dans la continuité du fila- 


440 G. BOUDIN 


ment, ou fixés à son extrémité. Les granules colorables disposés 
dans la gaine se déplacent vers des rameaux plus jeunes, ne lais- 
sant que des tubes mycéliens vides. Les gros corpuscules ovoïdes 
sont particulièrement résistants à la décoloration par les acides. 
Kral et Dubard les ont observés dans les cultures de tubercu- 
lose aviaire, humaine. « Certains filaments, disent-ils à propos 
d'une culture de la tuberculose aviaire, portent à leur extrémité 
des renflements piriformes, en raquette, fixant le Ziehl et le Gram, 
ressemblant aux corps en raquette que l’on trouve figurés dans le 
livre de MM. Poncet et Bérard sur l'actinomycose, et que M. Dor 
nous avait déjà indiqués. Ces organes sont fragiles, et en se déta- 

. chant, ilsconstituent 
les gros Bacilles en 
forme de pelle ou de 
têtards de Grenouil- 
les. Leur volume 
est considérable par 
rapport à celui des 


0 Bacilles. » C'est le 


plus souvent au ni- 
Fig. 8, d’après Kral et Dubard. Culture de tuber- veau desrenflements 
culose pisciaire sur milieu mannité, mise au bout . A 

de 48 heures à 36° et examinée 12 heures après. intra-mycéliens des 
filaments que prend 

naissance un nouveau rameau, et ainsi cette observation peut 
être comparée à celle de K. Nakanishi mentionnée plus haut : 
«le protoplasma intérieur paraissant s'introduire dans le bour- 
geon latéral de la gaine à la facon du doigt dans un gant sans so- 
lution de continuité. » Coppen Jones avait rapproché les corpus- 
cules discoïdes, très résistants à la décoloration par les acides, de 
chlamydospores de Mucorinées ; Kral et Dubard font les hypo- 
thèses suivantes : ébauches de spores, organes de réserve ou 
de défense, fructifications avortées d'un Champignon. Et à 
propos de cette dernière hypothèse, ils font remarquer que 
« c'est en ensemençant quantité égale de cultures de Bacille 
tuberculeux pisciaire, obtenues en milieux différents, dans le 
même tube, que l’un d'eux a cru voir de la conjugaison et des 
phénomènes d'une haute portée générale, si confirmation en est 
apportée par la suite. » Mais les Discomyces qui ont des conidies 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 141 


groupées sur des hyphes aériennes, et le micro-organisme de la 
tuberculose qui, d’après Bataillon et Terre, possède également ces 
formations conidiennes, peuvent-ils former, à l'intérieur des mi- 
lieux liquides, en dehors de l'influence directe de l'air des spores 
intra-mycéliennes. Gasperini en 1894 (Congrès de Rome) dit que 
chez les espèces du genre Actinomyces, il y a formation de spores 
dans le mycélium, si la sporulation aérienne normale est empêchée. 
Mais en plus, si l’on tient compte des phénomènes de conjugaison 
peut-être observés par Dubard, et, comme cela sera mentionné 
plus loin, vus ensuite par Droba, il faut se demander si des for- 
mations de conidies aériennes groupées en chapelet, et non réunies 
dans un sporange, peuvent coexister sur une espèce avec des phé- 
nomènes de conjugaison et production de zygospores. L'individua- 
lité des Champignons est certes très effacée; et comme le fait 
observer Dangeard, il y a transition des Mucors à conidies incluses 
en des sporanges, aux Penicillium à conidies libres. Mais ce trans- 
formisme peut-il être aussi rapide qu'on doit le supposer d'après 
les observations de Dubard d’une part, de Bataillon et Terre d'autre 
part, sur la végétation et la sporulation du Champignon de la 
tuberculose en milieux solides et milieux liquides. D'ailleurs, ces 
observations restent assez imprécises et ce qui paraît actuellement 
certain, c'est que Kral et Dubard n'ont pu observer que la forma- 
tion d’un Bacille libre à partir d’un des corpuscules, formes dura- 
bles, et non la naissance de filaments se ramifiant. 

Il est remarquable, d'autre part, que, dans les phases initiales de 
la vie des micro-organismes de la tuberculose en culture pure, ne 
se développent que des formes bacillaire et que ce n’est qu’au 
bout d’un certain temps que les filaments avec ramifications ap- 
paraissent à la suite de l'allongement des éléments bacillaires. La 
multiplication parseission semble ici encore s'effectuer pendant une 
période d'autant plus longue, que le milieu liquide est moins riche 
en matières nutritives, moins concentré, et soumis à l'agitation 
qui favorise la dilution des éléments bacillaires. Et il est remar- 
quable aussi que ceux-ci arrivent à être mobiles. Dans le cas 
particulier, comme dans les recherches de Ferran et Auclair, les 
scissions répétées semblent être davantage un phénomène de bi- 
partition artificielle, passager, manifesté par des filaments mycé- 
liens très fragiles, et hydrolysés en milieux nutritifs très dilués, 


149 G. BOUDIN 


qu'un phénomène normal d’accroisement. Nous avons vu que Ba- 
taillon et Terre ont pu transformer le Bacille de Koch, par passages 
de durée variable sur les animaux à sang froid, en variétés manifes- 
tant dans les milieux de culture liquides des caractères nouveaux de 
m obilité et de décoloration rapide par les acides, mais variétéstrès 
fragiles, puisqu'au fur et à mesure des inoculations, la puissance 
végétative s'affaiblissait rapidement. Kral et Dubard constatent 
que des cultures de tuberculose humaine, aviaire, pisciaire en 
milieux nutritifs pauvres, au bout de très nombreux réensemen- 
cements en série de très courte durée chacun, contiennent des 
bâtonnets décolorables par les acides et mobiles. Tout d’abord, 
Dubard crut à des impuretés, bien que Ferran lui eut communiqué 
de ses propres cultures, ne contenant que des Bacilles mobiles, race 
issue directement, comme nous l'avons vu, de cultures du Bacille 
tuberculeux de Mammifères, sans passage par l'animal. Mais en- 
suite, Kral et Dubard acceptent cette opinion que les formes de 
Bacilles mobiles ne sont pas dues à des contaminations : (leur 
apparition à date fixe, constante suivant certaines conditions de 
culture, leur disparition et leur retour à volonté démontrent que 
c'est une modalité du Bacille de Koch. » Et leur conclusion géné- 
rale est celle-ci : «Les ramifications et les formes allongées qui 
existent avec les mêmes caractères chez les trois tuberculoses, 
malgré leurs caractères propres, nous autorisent à ranger la tuber- 
culose dans la classe des Champignons filamenteux. Les caractères 
morphologiques que nous avons réunis nous autorisent à nommer 
Streptothrix tuberculosis l'agent de la tuberculose et à le ranger 
dans la classe des Hyphomycètes, tout près de l'actinomycose. » 


CHAPITRE IV 


1. Rapports du Microbe de la tuberculose avec les principaux types de 
Bactéries acido-résistantes {Champignon de la Timothée). 

2. Croissance en Cladothrix des Bactéries acido-résistantes (Lenoux- 
LEBARD, 1898). 

9. Le Champignon de la tuberculose est une Mucorinée (S. DroBa, 1902). 


A côté du Bacille de Koch et de ses variétés, existent différents 
types de Bactéries très acido-résistantes, dont les principaux, Ba- 
cille du beurre de Petri-Rabinowitsch, Bacille du fumier (Mæller), 
Bacille de la Timothée, Bacille des Graminées II (Mæller), ont entre 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 143 


eux, etavec le Microbe de la tuberculose, un grand nombre de carac- 
tères communs ; Maæller, Lubarsch, A. Pettersson, E. Schütz nous les 
montrent comme micro-organismes polymorphes, évoluant de la 
forme bacillaire qui se multiplie par scission, vers la forme filamen- 
teuse homogène ou granuleuse, sans cloisons, avec ramifications 
vraies, munies de renflements terminaux. Nous donnons dans les 
figures, reproduites d'après 0. Lubarsch, l'aspect réalisé par le Ba- 
cille des Graminées II (Mæller) en culture puresuragar, au bout de 
cinqjours.On peut voir, surl'une desfigures,lesgranulations éparses 
dans le protoplasma clair du filament. Pour Lubarsch, le Bacille du 
beurre de Lydia Rabinowitsch est plus long et plus fin que le Ba- 


Fig. 9. — Bacille des Graminées II (Moeller). Culture sur agar vieille 
de 5 jours, d’après O. Lubarsch. 


cille de la Timothée, et les ramifications en sont plus nombreuses. 
Les milieux glycérinés sont favorables au développement de tous 
ces micro-organismes. [ls végètent en conglomérats de consistance 
plus ou moins sèche, d'aspect ridé ou mamelonné. Ils ont un pou- 
voir chromogène marqué; leurs colonies varient du jaune au rouge. 
Nous avons vu que le Bacille de la Timothée avait, d'après Bulloch, 
la même composition chimique que le Bacille de la tuberculose 
des Mammifères. 

Mais d’une part les Bactéries acido-résistantes, le Bacille de Koch 
mis de côté, manifestent une grande rapidité de développement, 
même à température peu élevée, et ensuite un pouvoir pathogène 
peu accentué; les lésions tuberculiformes qu'elles peuvent provo- 
quer n'ont pas tendance à la généralisation. En réalité, Krompecher, 
Klein, Friedrich et Nôüsske, ont obtenu par ensemencements suc- 
cessifs nombreux, et en dehors de tout passage par l'animal, une 
variété de Bactéries d'origine tuberculeuse authentique, se dévelop- 
pant rapidement dans les milieux de culture, et dépourvus de 


144 G. BOUDIN 


virulence pour le Cobaye en inoculation sous-cutanée, ou intra- 
péritonéale, même à fortes doses. Nous verrons, dans les expériences 
de Babès et Levaditi, Schulze et Lubarsch, Cornil et F. Bezancçon, 
relatées dans le chapitre suivant, que, très souvent, la tuberculose, 
en inoculation locale, ne se généralise pas nécessairement. Dans 
80 pour 100 des cas, dit Lubarsch, d'inoculation expérimentale à 
des Lapins, la tuberculose n'a pas progressé. Après injection du 
Bacille de la Timothée, il y a production de cellules géantes évo- 
luant vers la caséification, indiscernables de celles que provoque 
le Bacille de la tuberculose. 

D'autre part Mæller, dans son rapport au Congrès de Londres, 
dit qu'il aurait isolé, de nodules de tuberculose bovine, un Bacille 
acido-résistant, donnant à 37° des colonies visibles au bout de 
24 heures, et capable de tuer le Cobaye en créant des lésions de 
tuberculose. Enfin le Bacille de la tuberculose humaine etle Bacille 
des Graminées IT, par passage chez les animaux à sang froid, arri- 
vent à réaliser le même type morphologique de la tuberculose pis- 
ciaire (Freymuth). 

En résumé, et bien que les Bacilles acido-résistants saprophytes 
n'aient pas encore été transformés expérimentalement en variétés 
très virulentes, entre eux et le Bacille tuberculeux et ses variétés 
pathogènes ou non pathogènes, à croissance tardive ou précoce, il 
ne semble pas y avoir plus de différence au point de vue botanique, 
qu'il n'en existe par exemple entre les variétés ou espèces, inofften- 
sives ou virulentes, des Aspergillus. 

En 1898 et 1900, Ledoux-Lebard fait paraître deux mémoires sur 
le développement et la structure des colonies des Bacilles de la tu- 
berculose des Mammifères, des Oiseaux, des Poissons, et du Ba- 
cille de la Timothée. Pour cet auteur, tous ces micro-organismes 
ont des caractères communs, et avec le genre Oospora, auquel 
appartiennent, suivant certains auteurs, les Discomyces, et avec le 
genre Cladothrix, parce qu’ils ne possèdent que les fausses rami- 
fications de la Cladothrix dichotoma {(Cohn) qui est l'espèce type du 
genre, et non la ramification vraie des Discomyces. Et Ledoux-Le- 
bard « propose de leur donner le nom générique de Sclerothrix 
créé par Metshnikov, mais de transporter ce genre de la place que 
lui avait assignée Metshnikov auprès des Streptothrix, à une autre, 
à côté des Cladothrix. » La croissance des Bacilles tuberculeux et 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 145 


acido-résistants saprophytes s'effectue d'après les observations de 
Ledoux-Lebard conformément à la description que Cohn donne du 
mode de ramification de la Cladothrix : «le filament se sépare en 
son milieu, en une moitié supérieure et une moitié inférieure. 
Tandis que les deux moitiés s’accroissent à leur extrémité, l'infé- 
rieure s'allonge par croissance directe, en se plaçant à côté de la 
supérieure qui est ainsi rejetée sur le côté, comme une branche 
latérale. La forme en + se produit lorsque la moitié supérieure 
s'allonge à ses deux extrémités. » Les Bacilles se ramifiant selon 
le mode en Cladothrix constituent une file irrégulière, un filament 
où l’on distingue deux zones : une zone centrale composée par les 
éléments bacillaires, une zone extérieure et intercalaire qui con- 
stitue une gaîne, par l'intermédiaire de laquelle les filaments se 
groupent en faisceaux et forment un réseau à mailles de plus en 
plus étroites à mesure que la culture se développe. 

Mais il est à remarquer que Ledoux-Lebard a observé la crois- 
sance du Bacille tuberculeux aviaire et du Bacille de Koch en 
goutte pendante, et en se servant surtout de liquide nutritif peu 
concentré, de simple bouillon de viande (formule de Ferran), où 
les éléments bacillaires ont plutôt tendance à évoluer vers des 
formes régressives ciliées et mobiles, que vers les formes ramifiées 
supérieures; et l’auteur lui-même s'exprime ainsi à propos de la 
croissance du Bacille des Mammifères : «Nous n'avons pu suivre 
dans la goutte pendante les phénomènes ultérieurs du dévelop- 
pement et la formation des colonies, comme nous l’avions fait pour 
le Bacille tuberculeux aviaire. Les courts filaments ramifiés font 
place, au bout de quelque temps, à de petites Zooglées, dont la 
structure ne peut être déterminée, même sur les préparations co- 
lorées, à cause de l’entassement des Bacilles. » De plus, Ledoux- 
Lebard aurait observé assez fréquemment tant sur des cultures 
de tuberculose humaine que sur des cultures de tuberculose 
aviaire des apparences de vraies ramifications. «€ Kaut-il attri- 
buer, dit-il, au Bacille tuberculeux, deux modes de ramification ; 
celui que nous avons décrit et qui est la règle, et un autre mode 
exceptionnel, caractérisé par de vraies ramifications? » Pour 
lui, iln'y aurait qu'apparence de vraie ramification ; ou les éléments 
bacillaires sont restés en étroit contact, ou, gràce à leur brieveté, 
«( les Bacilles peuvent facilement être déviés à angle droit à l'inté- 

Archives de Parasitologie, XI, n° 1, 1906. 10 


146 G. BOUDIN 


rieur de la gaine, s'allonger ensuite et donner un rameau latéral 
qui paraît être une vraie ramification. » Et les figures données par 
l'auteur, simulant une ramification vraie, ne laissent pas que de 
laisser dans l’indécision. Mais, si la critique formulée plus haut sur 
les conditions dysgénésiques imposées au micro-organisme peut 
être valable, s’il n’est pas juste, dans le développement d'un micro- 
organisme de ne pas tenir compte d’une de ses parties consti- 
tuantes, c'est-à-dire de la gaine, et si l'on s’en rapporte aux 
nombreuses figures des auteurs déjà cités, prouvant sur des articles 
filamenteux, à structure homogène, l'existence de ramifications 
vraies, il faut évidemment ranger les Bacilles de la tuberculose, et 
les Bacilles acido-résistants saprophytes dans le genre Streptothrix 
et non dans le genre Cladothrix. 

Mais nous voyons que la discussion a lieu en termes identiques, 
pour la classification de chacune des espèces du groupe des Dis- 
comyces. Et, dans la série de leurs synonymies, constamment figure 
comme plus ancienne désignation le nom de genre Cladothrix. 
Comme Discomyces bovis, Discomyces farcinicus, Discomyces aste- 
roïdes, les Bacilles tuberculeux et acidorésistants auront pu être 
envisagés dans une phase de leur développement comme Clado- 
thrix. Cette instabilité des termes de classification répond en réa- 
lité à l'instabilité même de la morphologie de tous ces micro-orga- 
nismes, capables d’une part de croître en mycélium ramifié, 
d'autre part de se résoudre en articles de très petite taille, se 
multipliant par scission. 

Nous devons enfin rappeler ici les observations de Droba, de 
Cracovie, que nous avons seulement signalées plus haut, et qui 
confirmeraient les observations de Dubard sur les phénomènes de 
conjugaison manifestés par le micro-organisme de la tuberculose 
en milieux artificiels. Droba n'a fait à ce sujet qu'une communica- 
tion provisoire. Cet auteur rappelle la pléomorphie du Bacille tu- 
berculeux. Lesformesramifiées ont été trouvées spécialement dans 
des cultures bien développées et aussi dans le crachat et le contenu 
des cavernes de tuberculeux. Craig et Marpmann les ont en effet 
constatées en ces dernières circonstances. On ne saurait cependant, 
d'après Droba, ranger le micro-organisme dans les Streptothrix. 
Au cours de ses recherches, contrôlées par le Pr Rostafinski, il a 
observé la croissance mycélienne du Microbe de la tuberculose ; 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 147 


on peut distinguer, dans le thalle, des branches principales épaisses 
et longues (stolons) portant des rameaux courts et minces (rhi- 
zoïdes). Le thalle n’est pas cloisonné. Les grains réfringents con- 
tenus à l’intérieur des branches mycéliennes seraient des goutte- 
lettes graisseuses, se dissolvant dans l’éther. Souvent au sommet 
d'hyphes aériennes (stylospores) se forment des conidies ressem- 
blant à celles des Chaetocladiacées. Les conidies germent dans 
différentes directions. De plus, Droba a pu observer la formation 
de zygospores. Deux rameaux renflés, d'abord juxtaposés, puis 
écartés l’un de l’autre, se courbent et se réunissent en forme de 
tenailles, comme chez la Mortiérelle. Après la copulation et la for- 
mation de l'œuf, les deux rameaux qui le portent développent des 
ramuseules très nombreux qui l'entourent. L'œuf peut germer, 
s'allonger en tube qui se ramifie au sommet et forme des conidies 
groupées d’une façon typique. « En raison de ces résultats, dit 
l'auteur, je puis affirmer, en‘toute assurance, que le virus de la 
tuberculose est un Champignon appartenant aux Zygomycètes; en 
vérité, il doit être rangé dans les Chætocladiacées, parmi lesquelles 
il forme un nouveau genre, que je me réserve de désigner dans le 
travail détaillé qui suivra cette communication provisoire. » 


CHAPITRE V 


1. Les formes actinomycosiques du Champignon de la tuberculose des 
Mammifères et des Oiseaux. 

2. Les formes actinomycosiques des Champignons acido-résistants sapro- 
phytes : du Champignon de la Timothée et de différents Discomyces. 

3. Valeur des foyers à massues rayonnées en classification. 


Nous allons maintenant exposer les recherches expérimentales 
démontrant les formes actinomycosiques du Bacille tuberculeux 
en vie parasitaire, et comparativement, les mêmes formations pro- 
duites par les principaux types de Bactéries acido-résistantes, par 
difiérents Discomyces comme Discomyces asteroïdes, Discomyces far- 
cinicus. 

Koch fait remarquer la disposition souvent singulière des Bacilles 
tuberculeux dans la cellule géante. Les noyaux forment une 
couronne à la périphérie de celle-ci; et si les Bacilles sont nom- 
breux, on voit ces derniers comme émaner du centre de la cellule, 
irradier la périphérie, et s’insinuer dans les intervalles laissés libres 


148 G. BOUDIN 


entre les noyaux. La figure 30 page 255, de Straus (La Tuber- 
culose et son Bacille), et empruntée à Koch, est bien représentative 
de cet aspect. 

Coppen Jones, le premier, trouve dansles petites masses caséeu- 
ses de l’expectoration de tuberculeux cavitaires, des formations 
rayonnées avec crosses périphériques, en tout identiques aux 
massues que le Discomyces bovis manifeste en vie parasitaire. 
Cependant, une différence, méritant d'être signalée, consistait en 
la difficulté que l'auteur avait à suivre le filament mycélien dans 
l'intérieur de la crosse du Microbe de la tuberculose. Mais, ainsi 
que le font remarquer Friedrich, et Dalous, Coppen Jones n’a pas 
coloré les filaments mycéliens eux-mêmes, et n’a fait ni inocula- 
tion, ni culture à partir des formes actinomycosiques trouvées 
dans les crachats des phtisiques. Elle n’appartiennent peut-être pas 
en propre au Bacille de Koch : « Le fait nous paraît d'autant plus 
possible, dit Dalous, que nous-même, ayant examiné un grand 
nombre de fois des crachats et le produit de ràclage des parois de 
cavernes, nous n'avons jamais trouvé de fibres élastiques hérissées 
de crosses, comme en décrit Coppen Jones ». 

Mais en 1897, Babès et Levaditi, au cours de recherches sur l'effet 
local du Bacille de la tuberculose en différents tissus, injectent un 
centimètre cube d'’émulsion de cultures de la Bactérie humaine, de 
provenance différente, peu virulente, dans les méninges et la subs- 
tance cérébrale, chez des Lapins. Le même résultat fut toujours 
obtenu, si la culture avait conservé encore une certaine 
virulence. Chez ceux des animaux, morts au bout de deux ou trois 
jours par suite du traumatisme, l'examen microscopique des 
méninges montre des Bacilles tuberculeux transformés en fila- 
ments ondulés, pressés les uns contre les autres en paquets, à 
l'intérieur de leucocytes agglutinés les uns aux autres. Au bout de 
de huit ou dix jours, (les gros paquets de Bacilles filamenteux, 
ramifiés, tendent à prendre une disposition radiaire, et sont en- 
tourés d'une zone de leucocytes à noyaux fragmentés et renfermant 
des Bacilles ». Puis au bout de 30 jours, dans les méninges de 
Lapins sacrifiés, les paquets de Bacilles présentent une zone cen- 
trale formée « d'un réseau de filaments ramifiés ayant l'aspect 
d'un mycèle de la grosseur du Bacille de la tuberculose, ou un peu 
plus épais et émettant des ramifications terminales granuleuses, 


« 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 149 


un peu épaisses vers la périphérie. Ce mycèle central est entour 
par une zone très régulière de crosses, souvent en rapport avec les 
ramifications terminales des Bacilles, ne se colorant pas par le 
procédé Ehrlich et ayantla dimension des crosses de l'Actinomyces. » 
Comme pour l'Actinomyces la terminaison des filaments dans la 
massue se fait parfois par un petit bouton. La figure 10, reproduite 
d’après Babès, montre cette disposition. Elle se rapporte à une pré- 
paration obtenue sur 
une pièce datant de 
trente jours après 
l'inoculation, sur la 
figure originale, les 
filaments bacillaires 
ramifiés sont colorés 
en rouge par la mé- 
thode d'Ehrlich, et les 
crosses colorées en 
violet pâle par le bleu 
deméthylène.Eneftet, 
tandis que le mycèle 
central se colore par 
l'Ehrlich comme les 
Bacilles de Koch iso- Fig. 10. — Une colonie tuberculeuse sous forme d’Ac- 
lés, les crosses de tinomyces, d'après Babès et Levaditi. — €, cros- 
l'Acrinomyces tuberou- … #59; leuroertés polraueléaies avec des Basile 
5 : s mycéliens de la 


leux sont mises en zone centrale; {, tige terminée par un bouton 
dans la crosse. X 900. 


évidence, de même 
que celles de l’Actinomuyces bovis par la safranine anilinée et trai- 
tement consécutif par l’iode ioduré et alcool : elles sont colorées 
en rouge carmin (procédé de Babès). Comme les capsules, que 
Metshnikov a décrites aux Bacilles tuberculeux isolés, inoculés à 
la Gerbille d'Algérie et au Spermophile, les crosses résistent bien 
à l’action des acides et des alcalis; elles peuvent s’isoler de la 
colonie. On les trouve incluses alors dans des grandes cellules du 
foyer actinomycosique. D'après Babès et Levaditi, elles seraient 
composées d'une sorte de cellulose; mais ils donnent à ces for- 
mations périphériques un rôle spécial; elles représenteraient des 
épaississements protecteurs des spores du microphyte. Quoi qu'il 


150 G. BOUDIN 


en soit, Babès et Levaditi notent une telle ressemblance des for- 
mations rayonnées de l'Actinomyces bovis et du Bacille tubercu- 
leux, que, si la culture pure ayant servi à l'infection et le déve- 
loppement du processus n'étaient pas là comme un témoignage 
de l'infection pure : («ils auraient pu penser à une infection 
combinée de l'actinomycose et de la tuberculose. » Leur conclu- 
sion est celle-ci : « On doit placer le Bacille de Koch dans le même 
groupe que l'Actinomyces, c’est-à-dire, dans une famille intermé- 
diaire aux Bactériacées et aux Ascomycètes. » 

En 1897, et sans connaître les recherches de Babès et Levaditi, 
Friedrich (Leipzig) publie un mémoire sur les formations rayonnées 
du Bacille tuberculeux dans le corps des animaux. En 1899, le même 
auteur, en collaboration avec Nôüsske, fait paraître un second mé- 
moire sur la même question : la localisation des Bacilles tubercu- 
leux, avec foyers à massues, dans les viscères des animaux, après 
inoculation intra-artérielle (ventricule gauche). Nous pouvons 
réunir ici ces deux séries de recherches qui donnent des résultats 
identiques. C’est tout inopinément et en cherchant à éclaircir par 
l’'expérimentation certains faits touchant la pathogénie des tuber- 
culoses chirurgicales, que Friedrich constata, à la suite d'injections 
intra-artérielles, le développement dans les tissus des formations 
rayonnées du Bacille tuberculeux, tout à fait analogues à celles 
que l’Actinomnyces bovis développe en vie parasitaire. Dans leurs 
travaux, les auteurs ont employé pour l’inoculation la voie intra- 
artérielle ; et c'est à cette technique qu'ils attribuent en partie la 
constance des résultats obtenus; dans la carotide droite d'un La- 
pin, on fait pénétrer, après ligature du bout périphérique de ce 
vaisseau, une fine canule mousse, longue de 7 centimètres, jusque 
dans le ventricule gauche. L'opération doit être faite avec grand 
ménagement et aseptiquement; ensuite on injecte à l'aide d’une 
seringue stérilisée bien adaptée à la canule, de 0 ce. 2 à 0 ce. 5 
d’une émulsion de Bacilles tuberculeux humains. La colonieestpour 
cela très finement broyée et diluée dans une solution physiologique 
de chlorure de sodium. 

Les cultures de tuberculose humaine, recueillies directement ou 
après passage sur le Cobaye étaient de provenances différentes. 
Elles étaient âgées de trois à six semaines et bien virulentes. Pour 
conserver ou augmenter leur virulence, les auteurs avaient recours 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 451 


à l'inoculation au Cobaye; ils ont en effet remarqué qu’au bout de 
réensemencements en série sur bouillon glycériné et glycosé, les 
Bacilles arrivaient à perdre parfois toute leur virulence. 

Les expériences portent sur 130 animaux, dont 12 Cobayes, 2 
Poules, 116 Lapins. Ces derniers étaient de provenance, de race, 
d'âge différents. Ils ont succombé à l'infection en un temps variant 
de 24 à 86 jours. D'une façon constante, dans les deux ou trois pre- 
mières semaines qui suivent l'injection intra-artérielle, peut être 
constatée une diminution marquée du poids de l'animal. Ce symp- 
tôme ne s’observe que sous l'influence de Bacilles virulents. Si 
l'on emploie des cultures de faible virulence, ou des substances 
infectieuses provenant d'abcès froids, ou de ganglions lymphati- 
ques, ou si l’on a recours à la voie d'injection intra-veineuse ou 
sous-cutanée, ce signe ne s'observe pas. D'après les auteurs, l’amai- 
grissement, qui suit immédiatement l'infection par voie intra-ar- 
térielle, serait dû à l'envahissement simultané par le virus de 
plusieurs organes importants. Le type anatomo-pathologique réa- 
lisé ainsi est tout à fait particulier : malgré sa vascularisation, la 
rate, par exemple, dont l'artère, ramification du tronc cœliaque, 
doit lui apporter directement les Bacilles, reste intacte jusqu'à la 
mort de l'animal : elle n'est pas augmentée de volume; on ne peut 
y déceler ni tubercules microscopiques, ni Bactéries colorables. 
D'autres animaux inoculés avec des fragments de ce viscère pris 
sur des sujets injectés par voie intra-artérielle, n'ont manifesté 
aucun signe de maladie. Friedrich et Nôüsske font l'hypothèse du 
rôle bactéricide important de la rate (1). De même le foie ne con- 
tient que de rares tubercules, et pour les expérimentateurs, leur 
apparition n’est pas en rapport direct avec l'infection intra-arté- 
rielle ; il y a là infection métastatique.. Les reins, après injection 


x 


de Bacilles peu virulents, même à doses considérables, ne mani- 


(1) Nous devons citer, ici, des observations comparables de F. Bezaniçon et sur 
lesquelles il s'appuie pour rappeler les difficultés que l’on éprouve à mettre en 
évidence la nature bacillaire de certaines lésions, d’origine probablement tuber- 
culeuse. C’est ainsi que des ganglions du cou hypertrophiés, présentant à l’exa- 
men microscopique des lésions, avec structure typique de follicule tuberculeux, 
ne contenaient pas de Bacilles colorables, et que les résultats de l’inoculation res- 
tèrent négatifs ; ( depuis longtemps, ajoute l’auteur, j'avais été d’ailleurs frappé 
de ce que, sur les rates d'individus morts de granulie, on ne parvient pas à trou- 
ver de Bacilles dans les nodules miliaires, alors qu’on en trouve dans les foyers 
caséeux voisins. Tous ces faits doivent être groupés... » (Revue de La Tuberculose, 
février 1906, p. 69). 


152 G. BOUDIN 


festent aucune hypertrophie, mais des dépressions cicatricielles à 
leur surface et une dégénérescence scléreuse de la substance cor- 
ticale sans Bacilles colorables. Le résultat est identique parfois 
après l'injection intra-artérielle d'une forte dose (2 centimètres 
cubes) de l'émulsion concentrée de Bacilles tuberculeux très viru- 
lents. Il peut même dans ce cas y avoir absence complète d'infection 
et les auteurs se demandent si l'animal ne serait pas capable de 
mieux résister à de hautes doses de Bacilles virulents qu'à des do- 
ses minimes. Toutefois ils ne cherchent en rien à objectiver ces 
résultats divers, de leur avis propre, encore trop particuliers. Mais 
d'une façon générale aux doses de 0 ce, 2 à 0 ce, 5 d'émulsion de 
Bacilles tuberculeux d'une virulence moyenne, les organes les plus 
généralement envahis et montrant des nodules tuberculeux sont 
la substance corticale des reins, l'iris, les poumons, le cerveau. 
Dans les reins du Lapin, les tubercules ont plutôt tendance à éva- 
luer vers la sclérose. C’est là surtout que furent observées les for- 
mations rayonnées. On pourrait s'étonner, disent Friedrich et Nôss- 
ke, que celles-ci n'aient pas été observées plus souvent; mais, c'est 
grace à la technique spéciale de coloration, qu'ils ont pu les ob- 
server; là où les méthodes de Koch, Ehrlich, Ziehl-Neelsen ne 
montrent que des bâtonnets isolés, la méthode de Friedrich et Nôüss- 
ke, montre des Bactéries parfois disposées bout à bout et des mas- 
sues périphériques ayant pris la teinture de différenciation. Les pré- 
parations sont fixées dans l'alcool, ou une solution de sublimé, ou 
dans le formol et incluses dans la paraffine. Les coupes sont tein- 
tes suivant cette technique : Colorer au bleu de Victoria. Chaufter 
légèrement et laisser refroidir. Plonger dans la solution de Lugol 
pendant deux minutes. Laver à l’eau et à l'alcool. Décolorer à l'a- 
niline. Laver à l'alcool et à l'eau. Colorer pendant 2 minutes avec 
la solution d’éosine à 2 p. 100. Laver à l’eau. Colorer au bleu de 
méthylène alcalinisé avec du carbonate de lithium. Laver à l'alcool 
Eclaircir au xylol. Monter au baume du Canada. Dans cette com- 
binaison de la méthode de Gram avec la coloration à l’éosine, les 
Bacilles sont colorés en bleu, les massues en rouge par l'éosine, 
et les tissus environnants en bleu clair. A l’aide d'un tel procédé 
de teinture, les foyers tuberculeux donnent l'apparence typique de 
foyers actinomycosiques. D'une facon très caractéristique, on peut 
voir, mais assez rarement, le rapport direct d'une Bactérie avec la 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 153 


massue qui la prolonge. Mais si les Bacilles de la zone centrale peu- 
vent parfois être placés bout à bout et figurer ainsi un filament 
mycélien, ils donnent plus souvent l'apparence de bâtonnets inclus 
dans une masse commune réalisant ainsi un aspect de Zooglée. Frie- 
drich et Nôüsske n’ont donc pas obtenu des résultats aussi nets que 
ceux de Babès et Levaditi, sur la disposition en mycélium ramifié 
de la zone centrale des foyers tuberculeux. L'interprétation est par- 
ticulièrement difficile, disent les auteurs, car dans le cas du Bacille 
tuberculeux, il s'agit d'un micro-organisme d'un 1/3 plus petit que 
le Champignon de l’Actinomycose. En moyenne, dans le cas de la 
tuberculose, les massues atteignent une longueur d'environ 20 y. 
Jamais elles ne se sont montrées colorables d'après les méthodes 
de teinture du Bacille de Koch, mais peuvent être colorées 
comme les massues d’actinomycose vraie. Les expériences sur 
la constitution chimique des massues n'ont pas donné de résultats 
précis; toutefois les crosses tuberculeuses sont moins facilement 
détruites que les crosses d’Actinomyces, dans les stades primaires 
de leur développement, par les solutions alcalines et les sucs di- 
gestifs. Elles ne sont pas modifiées par le suc gastrique. mais gon- 
flent facilement surtout celles de l'Actinomyces bovis, dans la try- 
psine. Mais l'hydrolyse vraie des unes et autres formations, tu- 
berculeuses et actinomycosiques, n’a jamais été observée. Les 
loyers peuvent n être composés que de quelques Bacilles colorables 
entourés d'un grand nombre de massues. Enfin dans les cultures 
qui servaient aux injections, Friedrich et Nôsske n'ont jamais vu 
de formes ramifiées : ils ne nient pas qu'elles puissent apparaître ; 
en eflet, il s'agissait dans leurs expériences de cultures jeunes de 
tuberculose humaine. Les formations en massue, en vie parasi- 
taire sont donc indépendantes de la présence des formes ramifiées 
dans les cultures; mais elles sont en rapport direct avec la viru- 
lence et la vitalité de celles-ci. En effet des colonies stérilisées n’ont 
jamais déterminé l'apparition de foyers actinomycosiques. Plus 
les cultures sont jeunes et virulentes, plus l'invasion bacillaire se 
généralise rapidement et plus vite apparaissent les formations 
rayonnées : c’est ainsi qu'elles se montrent de façon plus précoce 
après l'injection intra-artérielle qu'après l'injection intra-veineuse 
:Le moment le plus favorable pour l'examen est la période comprise 
entre le 20e et le 30° jour après l'injection intra-artérielle. Ce n’est 


154 G. BOUDIN 


qu'exceptionnellement que les massues ont pu être décelées au 
56° jour de l'infection. Dans la tuberculose comme dans l’actino- 
mycose, au fur et à mesure que la maladie évolue et manifeste des 
foyers métastatiques, on trouve bien dans le pus, des Bacilles, ou 
des fragments mycéliens, mais sans massues; les foyers actinomyco- 
siques se présentent donc dans la phase primitive de l'infection. I 
faut d'autre part, pour qu'ils apparaissent, que les animaux soient 
en bon état de santé, capables de résister à l’envahissement des 
micro-organismes. Enfin, il estindispensable qu'il y ait production 
d'embolies bacillaires, pour obtenir la formation de crosses ; cel- 
les-ci se produisent aux dépens, non de Bacilles isolés, mais de 
petits amas de Bactéries. 

En conséquence, les formes actinomycosiques sont un phéno- 
mène transitoire dans la vie parasitaire du microbe de la tuber- 
culose; les massues sont l'indice de sa réaction contre les obsta- 
cles soit d'ordre chimique, soit d'ordre mécanique que les organis- 
mes envahis opposent à son développement. 

Puis Friedrich et Nôsske font des expériences comparatives avec 
différents Champignons. D'abord ils s'attachent à réfuter les criti- 
ques qu'on pourrait leur faire; ils ont opéré avec des cultures 
pures, puisqu'ils ont réussi régulièrement à produire une tubercu- 
lose miliaire typique en injections intra-veineuse et intra-abdomi- 
nale, tant chez des Cobayes que chez des Lapins. Et de leurs lésions, 
ils ont obtenu des cultures pures de tuberculose. Des cultures de 
Bactéries de Koch, contaminées par des Moisissures, inoculées au 
Lapin, l'ont fait mourir de tuberculose chronique ; dans les orga- 
nes, ne purent être mis en évidence ni formations rayonnées 
tuberculeuses, ni mycèles de Moisissures. Le Lapin inoculé avec 
des cultures de tuberculose mélangées d’Actinomyces bovis est mort 
de tuberculose miliaire aiguë, avec foyers actinomycosiques typi- 
ques développés par des. Bacilles de Koch; dans les reins, les 
auteurs n'ont pu trouver que quelques fragments difficilement colo- 
rables de mycélium d’Actinomyces bovis, et s'ils ont pu obtenir des 
cultures pures de tuberculose, ils n’ont pu en avoir d'actinomy- 
cose. Des cultures pures d'Actinomyces bovis émulsionnées n'ont 
pas donné de formations rayonnées. Le mycèle est détruit en quel- 
ques jours; il fut impossible d'isoler le micro-organisme en cul 
ture, à partir des lésions. Une seule fois, en injection intra-périto- 


La 


CHU 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 155 
néale, Friedrich et Nôüsske purent voir des foyers à massues 
périphériques. Ces foyers inclus en de petits tubercules semés sur 
la séreuse péritonéale, étaient de dimensions très réduites, peu 
colorés et ne suggéraient pas l’idée d’un envahissement actif et 
progressif par un micro-organisme vigoureux. 

En injection intra-artérielle, Streptothrix asteroïdes, Bacterium 
tub. avium, n’ont pas donné de foyers à formations radiées. Asper- 
gillus fumigatus, des Mucorinées, en injections intra veineuses, 
donnèrent chez le Lapin des formations rayonnées. Mais on ne 
pouvait confondre celles-ci avec celles de l’Actinomyces Bovis, ou de 
Bacterium tuberculosis. En eftetelles présentaient des réactions dif- 
férentes vis-à-vis des teintures, etleurs localisations sur les viscères 
étaient différentes. 

L'injection intra-artérielle mixte de Bacilles de Koch et de Strep- 
tocoques a amené la mort de l'animal très rapidement; des 
formes actinomycosiques ne purent être décelées. L'injection mixte 
de Bactéries tuberculeuses et Staphylocoques dorésa étésuivied'un 
développement de foyers à massues radiées dans le foie, dès le cin- 
quième jour après l'injection; mais à la suite de la laparotomie faite 
pour l’excision d'un fragment du foie, l'animal est mort de péri- 
ritonite à Staphylocoques, 8 jours après l'opération, c'est-à-dire 
13 jours après l'injection : les foyers actinomycosiques qui auraient 
dû progresser dans les reins et le foie ne s'étaient pas développés; 
ils donnaient exactement l'aspect qui avait été observé au 5° jour. 
De toutes ces expériences comparatives, Friedrich et Nôüsske con- 
eluent que les formations actinomycosiques observées par eux 
appartiennent bien en propre aux Bacilles de la tuberculose. 

En 1898, Cornil, F. Bezançon et Griffon répètent sur le Lapin et 
dans les mêmes conditions, les expériences de Babès et Levaditi. 
Ils se sont servi, pour l'injection subdurale (1 cc), d’une culture 
vieille de deux mois, de tuberculose humaine en bouillon glycériné. 
Sous la pie-mère épaissie, ils ont trouvé dans les lésions tubercu- 
leuses localisées de 12 à 15 jours, des cellules géantes occupant la 
cavité de vaisseauxsanguins dilatés. C’est là qu'ils ont observé des 
formes actinomycosiques du Bacille tubereuleux : « Dans un cas 
en particulier, observé chez un annimal sacrifié 15 jours après l'ino- 
culation, les Bacilles forment de véritables touffes, partant d'un 
centre et rayonnant de tous les côtés à la périphérie, où ils se ter- 


156 G. BOUDIN 


minent par des crosses. Bacilles et crosses se colorent exclusive- 
ment par la méthode d’Ehrlich ou de Ziehl. » Les auteurs n'ont pu 
en effet obtenir une coloration de différenciation des crosses. Les 
foyers actinomycosiques ne se sont pas développés dans des vais- 
seaux de néoformation comme Babès et Levaditi le pensent, mais 
bien dans les vaisseaux sanguins préexistants, où les Bacilles ont 
déterminé des embolies. Ainsi, l'opinion de Friedrich et Nüsske 
que les foyers actinomycosiques se forment aux dépens d'amas 
bacillaires trouve appui dans les expériences de Cornil et F. Be- 
zancon. Les inoculations furent faites avec des cultures de Bacilles 
peu virulents; les tubercules ont guéri, et on ne pouvait en trouver 
trace au bout de 30 à 58 jours. Cornil, F. Bezançon et Griffon n'ont 
pu constater par l'inoculation directe de cultures de tuberculose 
dans la carotide interne du Lapin, de foyers microbiens à forme 
actinomycosique. 

En 1899, O0. Schulze (Magdebourg), sous la direction de O0. Lu- 
barsch (Rostock), publie un mémoire sur les formes de Champi- 
gnon rayonné du Microbe de la tuberculose, et 0. Lubarsch lui-même 
donne communicafion d'un travail d'ensemble sur les Champi- 
gnons rayonnés. 

Dans ses recherches, O0. Schulze s'est servi de cultures de tuber- 
culose humaine de virulence variable et d'origine différente ; les 
unes tuaient le Cobaye, en inoculation sous-cutanée, en cinq 
semaines ; les autres le tuaient, à doses considérables, et en ino- 
culation intra-péritonéale, en sept semaines: il en est qui n’ont 
pas amené la mort de l'animal. Avec toutes ces cultures, l’auteur 
a pu obtenir la formation de foyers actinomycosiques. Toutefois, 
ceux-ci se sont montrés d'une façon plus précoce, après l'injection 
des cultures les moins virulentes. 

Deux séries d'expériences ont été instituées. Dans la première 
série, l'infection était réalisée, selon le procédé de Friedrich, par 
la voie intra-artérielle. Dans la deuxième série, Schulze eut recours 
à l’inoculation locale dans certains viscères : cerveau, rein, foie, 
mamelle, testicule. Mais, au lieu d'introduire dans ces organes une 
émulsion de Bacilles tuberculeux, on y faisait pénétrer, après 
section de la substance des parenchymes, au moyen d'une aiguille 
de platine flambée, de très petits conglomérats prélevés sur des 
colonies de tuberculose ; la quantité de Microbes, ainsi introduite, 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 19 


est moins considérable que dans la méthode de Babès et Levaditi. 
Les fragments des organes infectés sont excisés à des époques plus 
ou moins éloignées de la date d'inoculation ; ils sont fixés dans le 
formol à 10 p. 100, ensuite inclus dans la paraffine. Les coupes 
furent colorées différemment, ou par la méthode de Ziehl-Neelsen, 
ou par la méthode de Gram-Weïgert, ou celle de Birch-Hirschfeld 
(hématoxyline, fuchsine phéniquée, solution de Lugol ; différen- 
ciation avec l'alcool picriqué) utilisée pour la coloration de l’A cti- 
nomyees bovis, ou par la méthode de Friedrich. 

Après les injections intra-artérielles chez le Lapin, le même 
type anatomo-pathologique, décrit par Friedrich, fut reproduit : 
la rate et le foie peuvent rester intacts. Les organes les plus cons- 
tamment envahis sont la substance corticale des reins, le cerveau, 
l'iris, la capsule adipeuse de l'orbite; et c'est dans ces organes que 
l'auteur put voir les formations rayonnées. Elles n’apparurent pas 
avant le 14° jour. Mais contrairement aux données de Friedrich, 
elles furent encore trouvées assez fréquemment du 33 jusqu'au 
59e jour. 

Après les injections subdurales, les foyers actinomycosiques 
furent apparents le plus habituellement du 14e au 16%e jour. De 
même, dans les reins. Dans la mamelle, après 25 jours, les foyers 
affectent deux dispositions; ou bien la masse principale consiste 
en bâtonnets qui possèdent des massues assez petites, ou bien la 
formation rayonnée n’est composée que de longues et épaisses 
massues, se colorant facilement par la fuchsine phéniquée. C’est, 
dans le foie et dans les testicules, que les formations rayonnées 
se sont montrées de la façon la moins apparente et la moins cons- 
tante. 

D'une facon générale, les formations à massues peuvent appa- 
raitre à partir du 14e jour qui suit l'injection et jusqu'au 59me 
jour, et dans cet intervalle d'environ quarante jours, l'aspect des 
foyers change avec leur âge. Tout d’abord, et ainsi que l’ont cons- 
taté Babès et Levaditi, les conglomérats bacillaires sont formés 
d'éléments placés dans une direction principale; on dirait une 
foule de petits Poissons nageant dans une même direction. Puis à 
partir de la 13e journée, on observe que les éléments bacillaires 
de la périphérie se disposent en rayons perpendiculaires à l'axe 
principal du foyer. Ils s’allongent en filaments s'épaississant à la 


158 G. BOUDIN 


périphérie ; les rayons augmentent de volume; à première vue, on 
dirait presque qu'il s’agit là, tant l’évolution en est régulière, de 
phénomènes de croissance normaux. Mais avec le développement 
des rayons, la zone centrale, bacillaire et filamenteuse, disparaît, 
devient incolorable par le Ziehl, et finalement les foyers rayonnés 
sont exclusivement composés de massues. Ce n’est que dans quel- 
ques cas, et au début de l'infection, qu'il est possible d'obtenir 
des cultures pures de tuberculose à partir des organes contenant 
de tels foyers. Les éléments bacillaires et filamenteux du centre dis- 
parus, les massues périphériques prennent une apparence hyaline 
et se dissocient en fragments résistants. Les éléments de la zone cen- 
trale, etles massues peuvent, surtout au début, prendre la même 
coloration, d’après la méthode de ZiehIl-Neelsen, ou d’aprèscelle de 
Gram-Weigert. Toutefois la méthode de Ziehl peut ne pas teindre 
les massues, et ainsi les laisser invisibles. La méthode de Gram: 
Weigert donne des résultats plus constants. Dans la suite, les 
crosses exigent une coloration de différenciation. Et, d'une facon 
générale, on ne saurait établir une méthode de coloration spécifique 
des massues, pas plus dans la tuberculose que dans l'actinomycose. Dans 
les deux cas, lorsqu'elles ont acquis de grandes dimensions, elles 
deviennent très réfringentes, tandis qu'il faut les colorer pour les 
voir, lorsqu'elles sont de formation récente. Elles sont insolubles 
dans l’eau, l'alcool, les alcalis forts et les acides. Les unes et les 
autres peuvent se calcifier. En résumé, il n’y a pas de différences 
essentielles entre les crosses de l’actinomycose et celles de la tu- 
berculose. 

Dans 4% cas, après injection intra-artérielle et inoculation locale 
(rein, cerveau.) de tuberculose aviaire, Schulze a observé des for- 
mations rayonnées. 

Après inoculation subdurale de Streptothrix Eppingeri, les lésions 
du cerveau d'un Lapin, tué au bout de 17 jours en état de santé très 
satisfaisant, montrèrent en coupe des foyers actinomycosiques par- 
ticulièrement nets. 

Pour Schulze, les formations rayonnées peuvent provenir aussi 
bien d'éléments bacillaires isolés, que d’amas de Bacilles. En 
effet, après injection intra-artérielle, on peut constater la pré- 
sence de foyers actinomycosiques dans l’intimité[même des tissus, 
aussi bien que dans la voie sanguine elle-même; dans la pre- 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 159 


mière circonstance, ils ne sauraient donc provenir que de Bacilles 
simples. 

Les recherches de Lubarsch portent sur les différentes variétés 
du Microbe tuberculeux. D'après les observations personnelles de 
l’auteur, la Bactérie aviaire n’est bien que la Bactérie des Mammi- 
Îères modifiée par une existence parasitaire différente. Elle-même, 
peut donner et des colonies écailleuses et sèches, et des colo- 
nies membraneuses humides et mamelonnées. C’est surtout dans 
ces dernières, et non dans les colonies écailleuses que peuvent 
être décelées les formes filamenteuses et ramifiées; dans une cul- 
ture de tuberculose aviaire, vieille de trois mois, les formes mycé- 
liennes à renflements terminaux étaient en telle abondance qu'elles 
frappaient au premier examen. Comme Schulze, avec le Bacille 
aviaire, Lubarsch a obtenu chez le Lapin des formes actinomyco- 
siques, tant par l'injection intra-artérielle, que par l'inoculation 
locale. Il a observé au 49ne jour'sur des coupes de nodules tuber- 
culeux, des foyers, composés au centre, partie de filaments à rami- 
fications vraies, partie de bâtonnets et de grains bacillaires, à la 
périphérie de massues. 

La variété microbienne se développant bien à 28-300, obtenue 
par Lubarsch, par passage d'une durée de dix semaines du Bacille 
tubereuleux humain sur la Grenouille, montre des ramifications 
nombreuses dans les milieux de culture dépourvus d’albumine. 
Après inoculation intra-rénale au Lapin, cette race bacillaire 
était difficilement colorable dans les lésions locales qu'elle déter- 
mina, et se présentait sous l'aspect de bâtonnets isolés. Un Cobaye 
inoculé dans le péritoine avec la matière de cette lésion localisée, 
devint tuberculeux. Les cultures faites au bout de six semaines, 
avec les lésions de cet animal, étaient en tous points des cultures 
de tuberculose des Mammifères. Inoculées au Lapin, elles repro- 
duisaient à nouveau des foyers actinomycosiques typiques. 

Une culture du Bacille tuberculeux de l'Orvet, donnée par 
Moœæller, a montré des ramifications vraies ; elle n’a pas déterminé 
chez le Lapin de formations rayonnées. Dans les lésions contenant 
peu de cellules géantes et de cellules épithélioïdes, les Champi- 
gnons étaient divisés en bâtonnets à peine colorables. Lubarsch 
n'a pu ramener la Bactérie de l'Orvet à sa forme initiale de Bac- 
térie de la tuberculose des Mammifères par les inoculations 


160 G. BOUDIN 


sériées. Il en conclut que ce micro-organisme obtenu par Mœæller 
est plus profondément modifié que la Bactérie transformée par lui 
à la suite du passage sur la Grenouille. 

Une culture de tuberculose pisciaire, donnée par Kral (Prague), 
montre des formes ramifiées nombreuses ; en inoculation locale 
chez le Lapin (cerveau, rein), il n'y a pas eu formation de foyers 
actinomycosiques. Un ensemencement n'a pu être obtenu des 
lésions. Ces expériences montrent que les formations radiées ne 
sont en rien des formes de dégénérescence, puisqu'on ne les obtient 
que lorsque le Microbe, habitué à une croissance à température 
élévée est inoculé à des Vertébrés à sang chaud, et non quand il 
est inoculé à des Vertébrès à sang froid. De même, elles n'appa- 
raissent pas lorsque le Champignon habitué à un développement à 
basses températures est inoculé à des animaux à sang chaud. Et 
d'autre part, des Bacilles tuberculeux stérilisés ne donnent jamais 
lieu à un développement en foyers radiés. Ces derniers sont donc 
bien l'indice d'un développement actif, mais d'un développement 
avorté, dévié du type normal par la vie parasitaire. 

Le fait que les formes filamenteuses et ramifiées avec intumes- 
cences terminales apparaissent de plus en plus nombreuses dans 
les cultures, au fur et à mesure que le Microbe abandonne sa vie 
parasitaire et devient saprophyte, ce fait montre qu'elles sont des 
phénomènes normaux de croissance et non des phénomènes de 
dégénérescence. Dans les cultures, ne se montrent jamais des 
formes en massue telles qu'elle se présentent dans les tissus. Les 
intumescences qui terminent les rameaux se colorent comme le 
Bacille tuberculeux, et n’ont pas la même évolution que les crosses. 
Comme chez la plupart des Streptothrix, chez le Microbe de la 
tuberculose les filaments se laissent facilement désintégrer en 
bâtonnets et en grains. Le Microbe de la tuberculose est un Cham- 
pignon ; il doit être classé dans le groupe des Champignons 
rayonnés. 

Lubarsch étudie en plus le micro-organisme de la Timothée. Il en 
a isolé lui-même des cultures pures à partir de la Phléole des Prés, 
recueillie en divers endroits aux environs de Rostock. Ces cultures 
servirent à des inoculatious locales et à des injections intra-arté- - 
rielles. Le développement de foyers actinomycosiques typiques fut 
observé: les massues périphériques, d'abord petites, augmentent 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 161 


progressivement ; puis leur résistance primitive à la décoloration 
par les acides et l'alcool diminue; elles prennent enfin une 
coloration différente de celle des filaments de la zone centrale. Ces 
filaments eux-mêmes finissent par perdre la réaction caractéris- 
tique de coloration par le Ziehl-Neelsen, et ainsi les formations 
rayonnées du Microbe acido-résistant de la Timothée deviennent 
en tout semblables, par les réactionschromatiques, les dimensions et 
la disposition, à des grains d’Actinomyces bovis. « Cette analogie 
est à la fin si grande, dit Lubarsch, qu'on constate même dans les 
nodules ramollis, la formation de petits grains visibles à l'œil nu, 
qui consistent seulement en formes actinomycosiques-et cellules de 
pus qui y sont adhérentes. » Les foyers rayonnés apparaissent 
d'une façon plus précoce que ceux de la tuberculose : ils se mon- 
trent au dixième jour environ. Quand à l'aspect histologique des 
lésions, il réalise, d'une façon étonnante, par la formation de cel- 
lules géantes, et l’évolution de celles-ci vers la caséification, celui 
des lésions tuberculeuses authentiques. Toutefois Lubarsch estime 
que le Microbe du beurre de Lydia Rabinovitsch, à cause de sa mor- 
phologie, de ses dimensions, est encore plus près que le Microbe de 
la Timothée, du Champignon de la tuberculose. Le Bacille de la 
Phléole n’est pas dépourvu de virulence pour l'Homme : Lubarsch 
s'est inoculé à l’avant-bras, une particule de culture du Champi- 
gnon de Timothée. Après dix jours, il y eut formation de saillies 
verruqueuses, de consistance ferme, de coloration rosée. Le chirur- 
gien qui en fit l’excision porta le diagnostic de tubercule anato- 
mique. Pour Lubarsch, il est très probable que le Champignon de 
la tuberculose et le Champignon de la Phléole des Prés sont au 
moins les descendants d’une forme initiale unique. 

Avec les Champignons acido-résistants du fumier (Mæller), des 
Graminées Il (Mæller), du beurre (L. Rabinowitsch), Lubarsch a 
obtenu dans les tissus des foyers rayonnés, apparaissant toutefois 
d'une façon plus précoce qu'après injection ou inoculation du Mi- 
: crobe tuberculeux. Avec le Streptothrix Eppingeri, dont les filaments 
ramifiés se dissocient si facilement en éléments bactériens, et dont 
le mode de croissance est en tout semblable à celui des Microbes 
tuberculeux et pseudo-tuberculeux, l’'expérimentateur a constaté, 
après inoculation au Lapin, l'apparition de formes actinomyco- 
siques. La figure XI, reproduite d'après 0. Lubarsch, montre l’une 

Archives de Parasitologie, XI, n° 1, 1906. 11 


162 G. BOUDIN 


des formations rayonnées développées dans le rein d'un Lapin, au 
cinquième jour après l'inoculation. Les foyers radiés disparaissent 
progressivement, jusqu'à ce qu'il ne reste plus que des formes ba- 
cillaires, qui subsistent pendant très longtemps, et à partir des- 
quelles il est encore possible d'obtenir une culture pure. 

Avéc les Bacilles de la morve, de la diphtérie, micro-organismes 
capables de montrer des formes filamenteuses et ramifiées en cul- 
ture, avec Streptothrix Petruschky (isolé de crachats humains), 
Lubarsch n'a pas obtenu de foyers actinomycosiques. 

En septembre 1898, au Congrès des na- 
turalistes allemands, à Düsseldorf, Lu- 
barsch présenta des préparations de Schulze 
montrant les formes actinom ycosiques du 
Bacille tuberculeux. Bostræœm  objecta 
que les préparations de Babès et Le- 
M Le Mens aitu vaditi, Friedrich, Lubarsch, provenaient 

mycosique du Strepto- de tissus envahis par des Moisissures en 

Hi tons même temps que par des Bacilles tuber- 

culeux, plutôt que par les Bacilles de Koch 

seuls. Et à l'appui de cette opinion, il donna les arguments suivants : 

1° Certains des amas rayonnés montrés par Lubarsch ne sont 

composés que de renflements périphériques, sans zone centrale 

bacillaire. Les rayons n'ont donc aucun rapport avec les Bacilles 
tuberculeux. 

20 Les intumescences terminales décelées jusqu'ici dans les cul- 
tures de tuberculose peuvent toujours être colorées comme les Ba- 
cilles eux-mêmes et ne manifestent pas de métachromasie comme 
les massues constatées en vie parasitaire. 

3° Nombre de foyers rayonnés ressemblent à ceux que Lichtheim 
et Ribbert ont décrits dans les poumons et les reins des Lapins, 
après injection intra-veineuse de petites quantités de spores de 
Moisissures. La disparition dans les tissus des Champignons rayon- 
nés qui se présentent après injection de Bacilles tuberculeux cor- 
respond bien à l'évolution des Moisissures en vie parasitaire. 

O. Schulze répond à ces arguments que les réactions chroma- 
tiques de la zone filamenteuse centrale et des crosses périphériques, 
identiques dans la première phase des formations actinomyco- 
siques, et le fait d'avoir pu obtenir à partir des lésions jeunes des 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 163 


cultures pures de tuberculose témoigne déjà en faveur d'une con- 
tamination spécifique. L'évolution des Aspergillus niger et fumiga- 
tus, Mucor corymbifer et rhizopodiformis en vie parasitaire, telle 
qu’elle a été observée par Ribbert et Lichtheim et par Schulze lui- 
même, est infiniment plus rapide que celle du Microbe de la tu- 
berculose. Les massues des Aspergilles et Mucorinées apparaissent 
et disparaissent en quelques jours; celles du Microbe de la tuber- 
culose n'apparaissent pas avant le 14me jour et disparaissent très 
lentement. On peut les voir encore jusqu'au 59e jour. Les phases 
de transition entre les foyers rayonnés de tuberculose, jeunes, et 
les ioyers seulement composés de massues calcifiées montrent 
bien l'origine de ces dernières. 

Pour Lubarsch et Schulze, il faut remplacer la dénomination de 
Bacille tuberculeux par celle de Champignon tuberculeux. Il faut 
apparenter celui-ci aux Streptothrir, mais donner à cette dernière 
dénomination un sens très compréhensif, s'appliquant à des mi- 
cro-organismes capables de croître tantôt comme des Schizomy- 
cètes, tantôt comme des Moisissures. On peut les diviser en deux 
sous-groupes : d'une part, les Champignons rayonnés, c'est-à-dire 
ceux qui sont capables de former des colonies d’une structure ra- 
diée, en vie parasitaire; et d'autre part, ceux qui en sont inca- 
pables. Le Microbe de la tuberculose appartient aux premiers; les 
Bacilles de la morve, de la diphtérie appartiennent aux seconds. 
On ne saurait actuellement se servir d'une classification plus mé- 
thodique, puisque chez la plupart des individus de ce groupe, on 
n'a pu constater le mode de sporulation. 

En 1898, Morel et Dalous (Toulouse) avaient présenté à la Société 
de Médecine de cette ville des préparations montrant des foyers 
actinomycosiques du Bacille tuberculeux aviaire, développés chez 
un Lapin à la suite d'inoculation dans la trachée. En 1901, Dalous 
fait paraître un mémoire complétant les recherches précédentes. 
Il a observé des formes actinomycosiques chez le Lapin à la suite 
d'injection intra-veineuse et d'inoculations locales (trachée, mé- 
ninges) de tuberculose aviaire. « Il semble, dit l’auteur, qu'un cer- 
tain degré de virulence des cultures soit favorable à la production 
des crosses. Jamais nous n’en avons pu obtenir avec des cultures 
atténuées par un long séjour à haute température. Il nous a été 
impossible d'en observer par l'inoculation de cultures à virulence 


164 G. BOUDIN 


exaltée pour le Lapin par une longue série de passages par l'orga- 
nisme de cet animal ». Les formes actinomycosiques se sont mon- 
trées, dans les recherches de Dalous, surtout dans le poumon, et 
n'ont pas été observées dans les reins. Mais l’auteur assimile les 
crosses observées en vie parasitaire aux renflements qui se déve- 
loppent dans les cultures pures, à l'extrémité des filaments. Les 
réactions chromatiques, la forme et l’évolution, différentes dans 


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Fig. 12. — Forme actinomycosique du Bacille tuberculeux dans un nodule du 
poumon d’un Lapin : 30° jour après injection intra-veineuse de culture pure de 
Bacille de Koch. D’après Abbott et Gildersleeve. 


les deux cas, empêchent cette assimilation. Quoi qu'il en soit, Da- 
lous conclut que le Microbe de la tuberculose est, «un Hyphomy- 
cète qu'on peut, avec Lehmann et Neumann, classer dans le groupe 
des Actinomyces. Avec le Microbe de la lèpre et les espèces micro- 
biennes connues sous le nom de pseudo-tuberculeux, il y constitue 
le genre Mycobacterium. » 

En 1902, Abbott et Gildersleeve (Pennsylvanie) font paraître un 
mémoire sur le rôle pathogène des différentes Bactéries acido-ré- 
sistantes et leur parenté botanique avec le Bacille de Koch. Leurs 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 165 


recherches sont une confirmation de celles de Schulze et Lubarsch. 
Chez le Lapin, ils ont remarqué que les formations rayonnées ap- 
paraissent dans les poumons et dans les reins, plus rarement et 
plus tardivement, après injection intra-veineuse de cultures du 
. Bacille de Koch, qu'à la suite de l'injection du Bacille de la Timo- 
thée, du Bacille du beurre {L. Rabinowitsch). Pour colorer les 
filaments mycéliens, les auteurs se sont servis de la safranine ani- 


Fig.13.— Forme actinomycosique du Bacille du beurre {L. Rabinowitsch) dans 
le rein d’un Lapin, après injection intra-veineuse de culture pure, d’après Abbott 
et Gildersleeve. 


linée (méthode de Babès). Ils ont remarqué que de gros amas ba- 
cillaires ne donnent pas lieu au développement de formations 
rayonnées ; celles-ci paraissent provenir d'amas très réduits. Tous 
ces micro-organismes, Bacilles de la tuberculose, Bacilles acido- 
résistants ne doivent pas être classés, d'après Abbott et Gilders- 
leeve, parmi les Bactéries, mais parmi les Champignons du groupe 
Actinomyces. 

Pour résumer, nous voyons que trois opinions principales ont 
été émises sur la valeur des crosses du Champignon de la tubercu- 


166 G. BOUDIN 


lose et des différents Microbes acido-résistants pseudo-tubercu- 
leux. Ou bien ce sont : 

a) des organes de fructification; 

b) ou des formes normales de croissance ; 

c)ou des formes en rapport avec une végétation active des 
micro-organismes, mais déviée par une vie parasitaire. Ces trois 
opinions ont été émises pour les massues de l’Actinomyces bovis. 


Fig. 14. — Forme actinomycosique du Bacille de la Timothée (Mœæller) dans 
le poumon d’un Lapin, après injection intra-veineuse de culture pure, d’après 
Abbottet Gildersleeve. x 


Mais, le fait très important que les unes et les autres ne se mani- 
festent qu'en vie parasitaire, leur évolution régressive, leurs 
caractères physico-chimiques montrent qu'il s'agit là de formes 
de croissance anormales, résultant très probablement d’un épais- 
sissement des filaments mycéliens. Babès, Schulze, Dalous ont rap- 
proché la substance des crosses de la substance capsulaire décrite 
par Metshnikov autour des Bacilles tuberculeux inoculés au Sper- 
mophile et à laGerbille. Pour Babès, ces deux substances semblent 
être composées de cellulose. Ainsi que nous l’avons vu, le Microbe 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 167 


tuberculeux, qui est un Champignon, est riche en cette substance, 
ou en substances voisines, capables peut-être de s'hydrater, de se 
gonfler, et se gélifier sous l'influence des humeurs des organismes. 
C'est peut-être là qu'est le mécanisme de formation des massues, 
plutôt que dans le refoulement mécanique des filaments mycéliens 
par les leucocytes. 

Le fait pour un microbe de former des foyers à massues en vie 
parasitaire n’est pas un caractère distinctif d'espèces ou de genre; 
il est présenté par un grand nombre de Champignons tout à fait 
différents tels que Mucorinées, Aspergillus (Lichtheim, Laulanié, 
Ribbert, Rénon, Lucet}), Discomyces. Les foyers actinomycosiques 
de ces divers micro-organismes diffèrent surtout par la date plus 
ou moins précoce de leur apparition dans les tissus, après la con- 
tamination. Mais jusqu'ici ils paraissent spéciaux à des Protistes 
d'une constitution chimique déjà très différenciée, comme les 
Champignons. Actuellement on ne connaît pasde Bactéries suscep- 
tibles de développer des foyers actinomycosiques dans les tissus; 
seul en est capable l’Actinobacille (Lignières et Spitz). Mais étant 
donné le polymorphisme de ce Bacille (formes cocco-bacillaire, 
strepto-bacillaire), sa vitalité très fragile, étant donné que son mode 
de sporulation est inconnu, on doit plutôt l’envisager comme une 
forme microbienne transitoire dans la vie d’un Champignon pléo- 
morphe,déjà modifié par une vie parasitaire, que comme une Bac- 
térie stable etbien adaptée. 


CHAPITRE VI 


1. Rapports du Discomyces farcinicus, acido-résistant, avec le Microbe de 
la tuberculose (C. FEISTMANTEL). 

2. Mycose innominée à filaments mycéliens acido-résistants (E. LEGRAIN). 
Foyers actinomycosiques dans deux cas de tuberculose spontanée (PELNAR). 
3. Classification du Microbe de la tuberculose : Actinomyces, Streptothrix, 
Oospora, Discomyces ? 


Dans un cas de tuberculose expérimentale du Pigeon produite 
par l’inoculation de tuberculose aviaire, Dalous vit dans les tuber- 
cules caséeux du poumon « des Bacilles très longs et nettement 
ramifiés. Leur aspect rappelait assez bien celui de Streptothrix 
farcinica du Bœuf, mais leurs ramifications y étaient bien moins 


168 G. BOUDIN 


nombreuses, que celles presentées par ce micro-organisme. Ils se 
coloraient très nettement, d'une façon très élective par les mé- 
thodes habituelles employées pour la coloration du parasite de la 
tuberculose; ils étaient presque toujours placés au voisinage 
d’autres Bacilles de Koch isolés et leur ressemblaient absolument 
comme épaisseur et structure. Les ramifications de ces filaments 
sont si évidentes quil est impossible de songer à une simple juxta- 
position d'individus isolés. » Mais une identification plus complète 
encore de Streptothrix farcinica et du Microbe de la tuberculose a 
été faite, non seulement basée sur des caractères morphologiques 
mais sur des réactions chromatiques semblables. En 1902, Carl 
Feistmantel (Budapest), sous la direction de Pertik et de Krompe- 
cher, publie un mémoire, dont nous avons déjà parlé, sur les ca- 
ractères de coloration de Streptothrix farcinica : résistance aux 
acides et à l'alcool, et sur les rapports des Streptothrix en général 
avec les Champignons acido-résistants. Les cultures provenaient 
de colonies de Discomyces farcinicus faites par Nocard quelques 
années avant. D'après Feistmantel, la résistance très énergique à 
la décoloration par les acides et l'alcool est un état périodique 
dans le développement du Champignon du farcin du Bœuf, et 
indépendant des substances grasses auxquelles on attribue habi- 
tuellement ces qualités tinctoriales. De plus, l’auteur observe, dans 
les poumons du Cobaye, 17 jours environ après l'injection intra- 
veineuse du micro-organisme, l'apparition de foyers actinomyco 
siques, à zone centrale filamenteuse, à zone périphérique composée 
de massues. Les filaments de Discomyces farcinicus se révèlent dans 
les tissus par les méthodes de coloration du Microbe de la tubercu- 
lose. Feistmantel rappelle que Berestnev a déjà constaté une légère 
acido-résistance de Streptothrix Eppingeri, Streptothrix farcinica. Le 
Microbe de la tuberculose dans ses variétés pathogènes et sapro- 
phytes, et les Bactéries acido-résistantes d'une part, sont donc 
reliés, par les réactions chromatiques de différents types de Strep- 
tothrix, aux Actinomyces non acido-résistants d'autre part. Comme 
ces deux groupes de micro-organismes ont d’autres caractères 
communs, Croissance en filaments ramifiés avec intumescences 
terminales dans les cultures, formation de lésions nodulaires avec 
foyers actinomycosiques en vie parasitaire, ils doivent être rangés 
sous la désignation commune de Streptothrix. 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 169 


Mais toutes les observations qui ont rapport aux formes actino- 
mycosiques du Microbe de la tuberculose ont été faites à la suite 
d'inoculations expérimentales. Babès et Levaditi pensent que, par 
des examens microscopiques attentifs, il sera possible d'observer 
des formations rayonnées dans des cas de tuberculose spon- 
tanée. En 1900, Pelnar décrit deux cas de tuberculose, l'un 
de la séreuse du péricarde chez un enfant de 4% ans, l’autre de 
tuberculose intestinale et mésentérique chez une femme de 41 ans; 
dans les lésions de ces sujets, l’auteur note des formes actino- 
mycosiques des Bacilles tuberculeux. En 1898, E. Legrain décrit 
chez un Arabe une mycose innominée du pied, à propos de laquelle, 
l'auteur porta tout d'abord le diagnostic d’actinomycose cutanée. 
Nous pouvons ici en rapporter l'observation. « L'examen mi- 
croscopique, dit E. Legrain, des petites masses blanc grisätre in- 
crustées dans les parois des ulcérations me les montra constituées 
par des filamments radiés, enchevêtrés, et souvent terminés par 
des massues. Autour de ces éléments une infiltration leucocytaire 
sans éléments géants; détail particulier : ces filaments et ces mas- 
sues se colorent parfaitement par la méthode d’Ehrlich. » Le malade 
fut revu 7 mois après. Il avaitété soigné par un empirique au moyen 
d'applications de goudron (préparation excellente contre les tuber- 
culoses cutanées en général... En face de quel parasite pouvais-je 
me trouver? dit l'auteur. Etais-je en présence d'une variété de 
Discomyces colorable par la méthode d’Ehrlich ou bien d'une forme 
spéciale du Bacille de Koch, forme anormale il est vrai, mais au- 
jourd'hui bien connue de tout bactériologiste qui peut l'observer 
dans certaines vieilles cultures”? Je ne saurais trancher la question. » 
Cette observation prend actuellement une signification assez im- 
portante et incite à rechercher les rapports du Microbe de la tu- 
berculose avec les autres types de Discomyces; d'autant plus que 
l'étiologie de l'actinomycose elle-même prend une extension plus 
grande. À. Poncet pense qu'il a trop insisté sur le développement 
de cette maladie sous l'influence directe de grains, pailles, comme 
agents de transmission du virus : (il est plus probable que le Cham- 
pignon rayonné peutse trouver sur des fruits, légumes, salades,ete.; 
mangés à l’état de crudité, sur les végétaux les plus divers. » 
Artault invoque l’origine alimentaire des cas d'actinomycose viscé- 
rale profonde, et il fait remarquer comment la tuberculose et l'ac- 


170 G. BOUDIN 


nomycose évoluent par poussées périodiques. Dans l’une et l’autre 
maladie il y a comme équilibre de foyer à foyer, l’un se développant 
lorsque l’autre diminue, ou est excisé; ce qui explique pourquoi le 
traitement chirurgical dans les deux cas, peut être si particulière- 
ment décevant. («Lorsqu'il n°y à pas indication particulière d'inci- 
sions évacuatrices, dit À. Poncet, je considère les actinomycosiques 
comme des noli me tangere. » La clinique et les recherches botani- 
ques rapprochent donc étroitement la tuberculose et les actinomy- 
coses. 

De plus, si nous nous en rapportons à l’ensemble des recherches, 
on peut voir que la maladie, dans la tuberculose déterminée par les 
formes ramifiées et bactériennes acido-résistantes du Microbe, et 
dans les différentes mycoses, est faite d’une première phase d’un dé- 
veloppement actif tout transitoire (germination des spores, foyers 
actinomycosiques) des micro-organismes en vie parasitaire, à la- 
quelle fait suite une phase régressive pendant laquelle les Cham- 
pignons tendent à être détruits par les humeurs du sujet in- 
fecté (1). La durée de ces phases semble varier avec les différentes 
mycoses, rapide pour les Aspergillus par exemple, lente pour les 
Champignons acido-résistants tel l'Hyphomycète de la Timothée 
(Mæller), plus lente encore pour le Champignon de la tuberculose 
ou le Discomyces asteroïides. Et ce n'est pas quand les Mucédinées 
sont capables d’un certain développement en vie parasitaire que 
le sujet infecté réalise le type morbide le plus grave : la formation 
rayonnée, développement normal d'un Champignon, mais dévié 
par une vie parasitaire, se manifeste surtout chez des animaux re- 
lativement réfractaires (Lapin); elle existe surtout dans des or- 
ganes à activités diastasiques peu marquées (reins, cerveau, pou- 
mons, iris) et sont absentes dans la rate, le pancréas, lefoie, viscères 
où la forme bacillaire elle-même paraît rapidement hydrolysée. 
Et de même la formation rayonnée n'est pas décelée chez des 
animaux, comme le Cobaye, pour lesquels le Microbe tuber- 
culeux est particulièrement virulent. Et ainsi il est remarqua- 
ble que la gravité de la maladie semble bien correspondre, 
au moins en partie, à la désintégration la plus rapide de l'Hypho- 


(1) Nous ne parlons que des phénomènes se passant au sein même des tissus, 
et exceptons les phénomènes de croissance active que les Moisissures semblent 
bien pouvoir manifester dans les cavernes pulmonaires. 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 174 


mycète dans les organismes et non pas au développement actif, 
normal de celui-ci. Toujours il semble y avoir hydrolyse des élé- 
ments microbiens vivants, qui se multiplient alors par scission, 
et réalisent dans les organismes différents types bactériens, 
dont la complexité moléculaire paraît s'abaisser progressive- 
ment jusqu'à disparition complète de la vitalité. Mais précisé- 
ment du fait même de cette bactériolyse, décroissent et sont enle- 
vées à leur rôle normal certaines activités diastasiques de l’orga- 
nisme parasité; et c'est là que paraît résider tout d’abord la cause 
des troubles morbides. Et pour mieux préciser par un exemple em- 
prunté à d'autres séries de faits, on voit la toxine tétanique ne 
déterminer aucun trouble chez certains Vertébrés à sangfroid ; 
mais précisément elle ne réalise que très lentement des complexes 
avec les humeurs de ces animaux, et elle peut être retrouvée chez 
ces derniers longtemps après l'injection. La virulence n’est pas 
une qualité propre à un micro-organisme; elle est indépendante 
de son développement normal. Elle est en rapport non seulementavec 
les caractères biologiques du Microbe, mais encore avec le mode 
de nutrition de l'organisme infecté. C’est un rapport biologique de 
deux espèces animales ou végétales menant une vie concurrentielle, 
non un caractère fonctionnel isolé chez l’une d'elles et dont on 
doit tenir compte dans une classification. 

Le fait de croître en filaments ramifiés, et accessoirement celui 
de développer des formations rayonnées en vie parasitaire, le fait 
de se développer en conglomérats sur les milieux liquides et soli- 
des, riches en glycose, glycérine et à réaction acide, la faible résis- 
tance des formes durables aux hautes températures sont autant de 
caractères qui éloignent le Microbe de la tuberculose, des Bactéries 
et l’'apparentent aux Moisissures. Pour le ranger parmi les Disco- 
myces on se base sur les caractères macroscopiques de croissance 
en colonies verruqueuses, ou en membranes lichénoïdes, pouvant 
manifester une coloration variable du blanc jaunâtre au rouge; et 
sur les caractères microscopiques suivants : développement en fila- 
ments ramifiés, non cloisonnés. Les filaments, tout d’abord, sont 
formés d'un protoplasme homogène, qui ensuite devient granuleux 
de telle façon qu'il semble fragmenté. De plus, d'après Bataillon 
et Terre, des hyphes aériennes peuvent se diviser en spores. Maïs 
d'autres formations corpusculaires existent dans l’intérieur des 


417122 G. BOUDIN 


filaments ou à leur extrémité, que certains auteurs ont assimilées 
soit à des chlamydospores, soit à des conidies terminales uniques. 
D'autre part, la germination des différents corpuscules n'a jamais 
été observée. Il est vrai que le mode de sporulation est tout à fait 
indéterminé ou inconnu chez certains micro-organismes classés 
parmi les Discomyces; tels Discomyces Eppingeri, Discomyces farcini- 
cus, Discomyces caprae. 

Si l’on passe en revue les principales dénominations données 
par les différents auteurs au Microbe de la tuberculose, on note 
celles-ci principalement : Actinomyces, Streptothrix, Oospora. Ainsi 
que l'ont fait remarquer R. Blanchard en 1895, et Lévy et Lachner- 
Sandoval en 1898, on ne saurait assimiler les Actinomyces à des 
espèces du genre OÜospora, qui comprend des individus d'une 
taille bien plus considérable, de structure plus compliquée, à 
mycélium à double contour bien défini et s’afflaissant facilement 
sous l'influence de la dessiccation. Quant au nom Streptothrix, il 
ne saurait convenir puisqu'il fut donné en 1839 par Corda à des 
Hyphomycètes à ramifications tubulaires segmentées et portant 
des spores axillaires, où à l'extrémité de leurs segments. 

Lachner-Sandoval est d'avis de se conformer à la loi de priorité 
et de retenir le nom Actinomyces employé pour la première fois, en 
1877, par Harz pour désigner le micro-organisme de l’actinomycose 
du Bœuf. R. Blanchard fait remarquer que Lachner-Sandoval et 
Levy font une fausse application de la loi de priorité, puisque Meyen 
en 1827 à introduit en mycologie un genre À ctinomyce. Il faut donc 
employer la dénomination Discomyces utilisée pour la première 
fois, en 1878, par Rivolta pour désigner le Champignon décrit pour 
la première fois par Harz sous le nom d’Actinomyces bovis. Le nom 
de Discomyces est ainsi employé comme nom de genre par L. Ge- 
doelst dans son guide technique de parasitologie végétale, et c'est 
ce nom quon doit donner au Microbe de la tuberculose, si tou- 
teiois il peut lui être appliqué avec justesse. Quoi qu'il en soit, 
il faut bien savoir que nous sommes là, en présence de Champi- 
gnons encore indéterminés, puisque nous n'en connaissons pas les 
formes sexuées et le cycle complet de développement; et si le nom 
de Discomyces peut être employé comme désignation générale du 
Microbe de la tuberculose, ce nom ne préjuge absolument en rien 
ni du maintien définitif du micro-organisme dans ce groupe qui 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 173 


n'est pas un genre botanique bien défini, ni de son passage dans 
un autre groupe ou un autre genre. 


CONCLUSIONS 


De tout ce qui précède, nous croyons pouvoir tirer les conclu- 
sions suivantes : 


1° Le Bacille acido-résistant de Koch n'est qu'un stade dans la 
vie d’un micro-organisme supérieur, filamenteux et ramifié. La 
forme de Bactérie immobile ne se multiplie pas par formation de 
spores dans l'intimité des tissus; très fréquemment, cette forme 
disparaît, et plus ou moins rapidement selon les organes envahis : 
cependant ces lésions sans Bactéries colorables restent virulentes. 
La fragilité, mort ou transformation, du Microbe en vie parasitaire 
montre qu'il n'est pas un parasite bien adapté. 

20 Des cultures de tuberculose humaine, aviaire, pisciaire 
montrent dansles phases actives de leur développement des formes 
ramifiées, contenant à intervalles variables dans l'intérieur des 
filaments, des corpuscules ovalaires, se colorant comme des spores, 
et que leur composition histo-chimique et leur degré de résistance 
à la chaleur doivent faire considérer comme formes durables. 
Elles peuvent être situées également à l'extrémité des filaments. 
Toutefois leur germination n’a pas été nettement observée. 

Les formes ramifiées apparaissent rapidement et constamment 
dans les cultures de tuberculose pisciaire, plus lentement mais 
constamment dans les cultures de tuberculose aviaire, tardivement 
et d’une manière inconstante dans les cultures de tuberculose hu- 
maine. Après adaptation de la Bactérie tuberculeuse des Mammi- 
fères à l'organisme des Vertébrés à sang froid, et ensemencement 
consécutif, les formes filamenteuses et ramifiées apparaissent rapi- 
dement. Les formes mycéliennes apparaissent dans la phase active 
du développement des cultures : celles-ci en effet conservent leur 
aspect macroscopique, peuvent être réensemencées, et restent 
virulentes, dans les cas de tuberculose humaine et aviaire, pour 
les Vertébrés à sang chaud. 

3° La forme bactérienne de tuberculose humaine injectée à des 
animaux assez réfractaires, Spermophile et Gerbille, développe une 


174 G. BOUDIN 


membrane extérieure très épaisse, consistante, réfringente qui se 
vélifie et s'incruste de sels calcaires. 

Des cultures de tuberculose humaine ou aviaire, bien développées, 
d'une virulence normale, injectées à des animaux adultes, en bon 
état de santé et doués d'une légère résistance (Lapin), soit locale- 
ment, soit par la voie intra-veineuse ou intra-artérielle, produisent 
des formes actinomycosiques typiques. Les formations rayonnées 
apparaissent de 15 à 20 jours après l'inoculation. Tout d'abord la 
zone centrale, filamenteuse et ia zone périphérique à massues rami- 
fiées, digitées, se colorent d’après la méthode d'Ehrlich. Puis ces” 
foyers entrent dans une phase régressive d’une durée variable ; les 
massues deviennent difficilement colorables, sont réfringentes, se 
calcifient. Les filaments de la zone centrale se dissocient en Bacilles 
isolés, qui deviennent de plus en plus rares. 

Les difficultés des réensemencements peuvent s'expliquer par les 
altérations que subissent les éléments mycéliens dans les tissus. 
C'est là un phénomène général dans les infections mycosiques, et 
en particulier pourrait y être rattaché ce fait de la difficulté d'une 
inoculation expérimentale positive dans le cas du Discomyces bovis. 

4° Les principaux types de Bactéries acido-résistantes (B. la Ti- 
mothée, B. du beurre)se développent en filamentsramifiés dans les 
cultures et forment des foyers actinomycosiques dans les tissus. 
L'apparition de ces foyers est alors plus précoce que dans le cas des 
Bactéries de la tuberculose. 

50 L'apparition des massues en seule vie parasitaire, leur évo- 
lution doit les faire considérer comme des formes de croissance 
avortées ; peut-être peuvent-elles être rattachées à la richesse en 
matières pectiques des variétés microbiennes qui les manifestent. 
La gélification des filaments avec incrustation calcaire consécutive, 
d’une part, et d'autre part l'inclusion desformes bactériennes isolées 
dans une membrane gélatineuse se calcifiant paraissent être des 
processus identiques. Le fait de croître en filaments ramifiés et le 
fait de manifester en vie parasitaire des foyers actinomycosiques 
sont des propriétés communes à des Champignons tout à fait diffé- 
rents : Discomyces, Aspergillus. 

6° La croissance en conglomérats, dans les milieux à réaction fai- 
blement alcaline ou acide, tant liquides que solides, la présence des 
filaments ramifiés, l'absence de toxalbumines actives dans les mi- 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 179 


lieux liquides, la résistance relativement faible des formes durables 
aux températures élevées, la formation de grains actinomycosiques 
dans les tissus sont des propriétés qui classent le Microbe de la 
tuberculose, et avec lui les Bactéries acido-résistantes du beurre, 
de la Timothée, parmi les Hyphomycètes. 

En vie parasitaire et dans les milieux de culture liquides peu 
concentrés et à réaction alcaline, l'Hyphomycète de la tuberculose 
se scinde en forme bactériennes immobiles, eten formes bacillaires 
ciliées et mobiles, non acido-résistantes. 

Il existe trois types principaux de races saprophytes du Microbe 
de la tuberculose : 

Une race mobile et ciliée (Ferran);. 

Une race filamenteuse et ramifiée (Bataillon, Dubard, Terre) réa- 
lisée par passage sur Vertébrés à sang froid; 

Une race filamenteuse et ramifiée, réalisée par une suite très lon- 
gue d’ensemencements successifs, sans passage par l'animal 
(Krompecher, Klein). 

70 L'aspect des filaments, fins, non eloisonnés, souvent contour- 
nés, la présence des corpusecules ovalaires (formes durables), dans 
le cours ou à l'extrémité des filaments ; la ramification de ceux-ci 
par bourgeonnement latéral ; leur structure homogène, puis vacuo- 
laire et granuleuse, leur facile dissociation en bâtonnets et fins gra- 
nules, l'aspect macroscopique des cultures; les réactions chroma- 
tiques (acido-résistance) en tout semblables à celles de certaines 
espèces de Discomyces dans une des phases de leur développement : 
Discomyces farcinicus par exemple, tous ces caractères rapprochent 
l'Hyphomycète de la tuberculose, et les autres types de Microbes 
acido-résistants du groupe des Discomyces. Comme chez certaines des 
espèces ou variétés rangées dans ce groupe d’une classification tran- 
sitoire, chez le Microbe de la tuberculose, le mode de groupement 
des formations durables, spores ou conidies, est indéterminé. 
Le cyele complet du développement des Discomyces est inconnu. 
Ce n’est que sur des probabilités ou sur des observations isolées, 
qu'on se base actuellement pour apparenter ces Champignons 
avec des Myxomycètes, des Oomycètes (certains auteurs décrivent 
au micro-organisme de la tuberculose des zygospores) ou des 
Ascomycètes. 

Tirons maintenant quelques conclusions pratiques : 


176 G. BOUDIN 


1° Dans la théorie de la seule vie parasitaire du Microbe de la 
tuberculose, la maladie ne peut se transmettre que par contagion 
et par hérédité. Les faits d'hérédité parasitaire, basés sur la pré- 
sence du Bacille acido-résistant dansles lésions et surtout sur l'ino- 
culation positive au Cobaye, seraient très rares par rapport aux 
faits d'hérédité de terrain. 

Etant données les variations morphologiques du Champignon 
de la tuberculose, l'absence d'acido-résistance et de virulence spéci- 
fique pour le Cobaye dans certaines de ses phases évolutives, il ya 
lieu de se demander si l'hérédité parasitaire ne peut s'effectuer par 
ces formes, si certaines des infections secondaires dans la tubercu- 
lose ne peuvent leur être imputées. 

20 L'infection tuberculeuse semble se réaliser surtout par les 
voies digestives. Elle est en rapport avec la pénétration des formes 
virulentes et peut-être des formes saprophytes diverses du Champi- 
gnon de la tuberculose répandues dans les milieux extérieurs, et 
plus ou moins hydrolysées dans le tube digestif. 


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Streptothrices. The Lancet, 1901. 


MICROBE DE LA TUBERCULOSE 181 


Mo@œLLER (A.), die Beziehungen des Tuberkelbacillus zu den anderen säurefes- 
ten Bakterien und zu den Strahlenpilzen. Centralb. f. Bakt., XXX, 1901. 
Morey (A.), Tuberculose expérimentale de quelques Poissons et de la Gre- 
nowille Thèse de Lyon, 1900. 
NAKanisxi (K.), Ueber den Bau der Bakterien. Centr. f. Bakt., XXX, 1901. 
NaATTAN-LaRRier, Diagnostic de la tuberculose. Œuvre Médico-Chirurgical. 
Nocarp et Roux, Sur la culture du Bacille de la tuberculose. Annales Institut 
Pasteur, 1887. 
Nocarp (E.) et LEGLAINCHE (E.), Les maladies microbiennes des animaux. Paris, 
Masson, 2° édit., 1898. 
Nocarp (E.), Les tuberculoses animales. Coll. Léauté. 
PERRIN (J.), Électrisation de contact et théorie des solutions colloïdales. C. 
R. Acad. Sciences, p. 513 et p. 564, 1903. 
PELNAR, Zwei Fälle von tuberkulose... Strahlenpilzähnliche Formen des Tu- 
berkelbacillen. Wiener klinische Rundschau, 1900. 
Poncert (A.) et Bérarp, Traité clinique de l’actinomycose humaine, 1898. 
Poncer (A.) et Marccaun M., Rhumatisme tuberculeux. Collection Critzmann, 
1903. 
Poxcer (A.), Actinomycose et grossesse. Gaz, des H6p., 31 mai 1906. 
Porer (M.), Etudes sur les Bactéries dites « acidophiles ». Thèse de Lyon, 1902. 
PETTERSSEN (A.),Untersuchungen über saurefeste Bakterien. Berl. klin. Wo- 
chens., 26 juin 1899. 
RAmus (C.), Variability of the tubércle Bacillus. The Journal of the Amer. 
Med. Assoc., Chicago, June 15, 1901. 
Ramoxp et Ravaur., Les pseudo-tuberculeux. Le Progrès médical, 1900. 
RÉNON (L.), Etudes sur l’aspergillose chez les animaux et chez l'Homme. 
Paris, Masson, 1897. é 
RÉNON (L.), Les maladies populaires. Paris, Masson, 1905. 
ROGER (G. H.). Maladies infectieuses communes à l’homme et aux animaux. 
Traité de médecine de Bouchard et Brissaud, 2° édit. 
SAUVAGEAU et Rapais, Sur les genres Cladothrix, Sreptothrix, Actinomyces 
et description de deux Streptothrix nouveaux. Ann. Inst. Pasteur, VI, 1892. 
SANDER, Ueber das Wachstum von Tuberkelbacillen auf planzlichen Nähr- 
boben. Archiv. f. Hygiene, XVI, 1893. 
SCHAUDINN, Beiträgez ur Kenntniss der Bakterien und verwandter Organis- 
men. Archiv f. Protistenkunde, 1902. 
SCHULZE (0.), Untersuchungen über die Strahlenpilzformen der Tuberkulo- 
seerregers. Zeitschrift f. Hygiene, XXXI, 1899. 
ScauMowski (W.), Ueber die Beweglichkeit der Tuberkelbacillen. Centralb. 
f. Bakt., XXII, 1898. 
SCHUMOwsKI (W.), Studien an auf eiweissfreien Nährbôden gezüchteter Tuber- 
kulose. Centralbl. f. Bakt., XXVI, 1899. 
Scaürz (E.), Untersuchung der saurefesten Pilze sur Fürderung der Molke- 
reiwirthschaft. Thèse de Heildeberg, 1900. 
SCHWEINITZ (DE) and Dorser (M.), The mineral constituents of the tubercle Ba- 
cilli. Centr. f. Bakt., XXIII, 1898. 
SILBERSCHMIDT, Nouveau Streptothrix pathogène. Ann. Inst. Pasteur, 1899. 
SriNA, Le Bacille de la tuberculose. Journal des Connaissances médicales, p. 
88, 1883. 
SPiNA, Recherches sur la décoloration des Bactéries colorées aux couleurs d’ani- 
line. Allgemeine Wiener med. Zeitung, 1887. 
SrrAUs, La tuberculose et son Bacille. Paris, Rueff, 1895. 
Terre (L.), Essai sur la tuberculose des Vertébrés à sang froid. Dijon, 
Barbier-Marillier, 1902. 
Toussaixr, Sur le parasite de la tuberculose. C. R. Acad. Sciences, Paris, 1881. 
VALLÉE (H.), Origine intestinale de la tuberculose pulmonaire. Annales de 
l'Institut Pasteur, 1904. 


182 G. BOUDIN. — MICROBE DE LA TUBERCULOSE 


VALLÉE (H.) et Carré, Tuberculose humaine et tuberculose bovine. Revue de 
la tuberculose, 1906. ; 

VAN THIEGHEM (Pu.), Éléments de Botanique. Paris, Masson, 1891. 

Vinay (CH.), La tuberculose inflammatoire. Arch. gén. de médecine, 28 no- 
vembre 1905. 

VuiLzzemMn (P.) Le problème de l’origine des Levüres. Revue générale des sciences, 
1906. 

WaunLen (E.), Vaccination spontanée au cours de la tuberculose. C. R. So- 
ciété Biologie, 1904. 

WauxLEN (E.), Nucléine vaccinante secrétée par le Bäcille tuberculeux C. R. 
Soc. Biologie, 1904. 

WAuLEN (E.), Les toxines tuberculeuses et la vaccination contre la tuberculose. 
Gazette médicale de Paris, 1904, n°° 24, 28, 29. 

WeLEmINsky, Berl. klin. Wochenschrift, 1905. — Les ganglions bronchiques 
et la pathogénie de la tuberculose pulmonaire. Presse médicale, août 1905. 

WEBER (A.) und TaAuTE (M.), Die Kaltblütertuberkulose, Tuberkulose-Arbeiten 
aus dem kaiserl. Gesundheitsamte, 1905; Bull. Inst. Pasteur, p. 456, 1905. 

VEsELY (A.), Des effets des produits du Bacille de Koch sur la tuberculose 
et sur la tub. expérimentale. Revue de la tuberculose, 1898. 

YABÉ (T.), Premier mémoire sur l'étude de l’immunité de la tuberculose, 
Paris. Larose, 1900. 

Zurxix (L.), Ueber die Entdeckungen Ferran’s bezüglich des Bacillus der Tu- 
berkulose. Centralblatt f. Bakt., XXIV, 1898. 


OUVRAGES REÇUS 


Tous les ouvrages reçus sont annoncés. 


Trématodes. 


J. Gurarr, Bilharziose. Trailé de médecine et de thérapeutique de Brouardel 
et Gilbert, p. 374-384, 1905. 

G. HEyMaANN, Neue Distomen aus Cheloniern. Zool.Jahrbücher, Abth. für Syst., 
XXII, p. 81-100, pl. VI, 1905. 

J. HozLack, Die Häufigkeit der Trematoden bei Rana esculenta Lin. Central- 
blatt für Bakteriol., Originale, XXXNIII, p. 199-200, 1905. 

W. Kzein, Neue Distomen aus Rana hexadaclyla. Inaug. Diss., Kônigsberg i. 
Pr., in-8° de 22 p., 1 pl., 1905. 

Von Lixsrow, Ueber eine neue Art der Copula bei Distomen. Zoo!, Anzeiger, 
XXVIII, p. 252-254, 1904. 

A. Looss, Schistosomum japonicum Katsurada, eine neue asiatische Bilharzia 
des Menschen. Centrablatt für Bakteriol.. Orginiale, XXXIX, p. 280-285, 1905. 

W. S. MarsHaALz and N. C. GizserT, Three new Trematodes found principally in 
Black Bass. Zoo!. Jahrbücher, Syst., XXII, p. 477-488, pl. XV, 1905. 

Ta. Onaner, Die Trematoden des arktischen Gebietes. Inaug. Diss., Upsala, 
1905. — Fauna arctica, IV, p. 289-372, pl. I-III, 1905. 

Tu. Opxner, Die Trematoden des arktischen Gebietes. Fauna arctica von Rô- 
mer und Schaudinn, IV, p. 289-372, pl. IT-IV, 1905. 


Némathelminthes. 


G. ALESSANDRINI, Brevi osservazioni sullo sviluppo e ciclo evolutivo dell’ Anchy- 
lostoma (Uncinaria) duodenale (Dub). Boll. della Soc. zool. italiana, XIN, 
in-8° de 20 p., 1904. 

G. ALESSANDRINI, Sulla patogenesi dell’anemia da Anchylostoma. Policlinico, 
XI-M., 11 p., 1904. 

G. ALESSANDRINI, Su di un nuovo segno per poter diagnosticare la presenza di 
Uncinariae nell'intestino umano. Boll. della Soc. zool. ital., XIV, in-8° de 2 p., 
1905. 

G. ALESSANDRINI, Ulteriori osservazioni sul ciclo di sviluppo dell’ Uncinaria 
duodenalis (Dub.). Boll. della Soc. zool. ital:, XIV, in-8° de 4 p., 1905. 

G. ALESSANDRINI, Storia e corologia dell’ Uncinaria. Boll. della Soc. zool. ilal., 
XIV, in-8° de 6 p., 1 carte, 1905. 

G. ALESSANDRINI, Su di alcune Uncinarite parassite dell’ Uomo ed altri Verte- 
brati. Boll. della Soc. zool. ital., XIV, in-8° de 28 p., pl. I-IV, 1905. 

G. ALESSANDRINI, In un ambiente liquido possono svilupparsi le uova di Unci- 
naria. Boll. della Soc. zool. ital., XIV, in-8° de 4 p., 1905. 

G. CARLIER, Perforation intestinale et lombricose. Dauphiné médical, 
p. 103-113. 1905. 

M. GueureLzmi, Contribution à l'étude de l’action pathogène de quelques Vers 
intestinaux dans l’étiologie et la propagation de certaines maladies infectieuses 
(fièvre typhoide, dysenterie, appendicile). Thèse de Lyon, in-& de 85 p., 1905. 

J. GurarT, Ankylostomose. Traité de médecine et de thérapeutique de Brouar- 


del et Gilbert, p. 403-424, 1906. 


M. G. LeBreno, Metamorfosis de la Filaria sanguinis hominis nocturna, en el 
Mosquito y causas que aceleran o retardan su evolucién. Punto por donde salen. 
Modo experimental de hacerlas salir, bajo el microscopio. Revista de med. tropical, 
in-8° de 36, p. 1905. 


184 OUVRAGES REÇUS 


A. LincarD, Observations on the Filarial embryos fond in the general circu- 
lation of the Equidae and Bovidae and their probable pathological signi- 
ficance. I, Bursati (part 1). Londres, in-8° de 1v-59 p., 12 pl., 1905. 

0. von Lisrow, Zur Anatomie des Genus Paramermis. Zool. Anzeiger, XXIX, 
p. 393-396, 1905. É 

A. Looss, Die Wanderung der Ancylostomum- und Strongyloides-Larven von 
der Haut nach dem Darm. C. R. du 6° Congrès internat. de zool. à Berne, 1904, 
p. 225-233, 1905. 

A. Looss, The anatomy and life history of Agchylostoma duodenale Dub. Part 1. 
The anatomy of the adult Worm. Records of the egyptian government school! of 
medicine, IT, in-4° de 159 p., 10 pl., 1905. 

M. Neveu-LEMAIRE, Sur un nouvel Acanthocéphale (Echinorhynchus Orestiae, 
n. sp.) parasite des Poissons du genre Orestias. C.R. Soc. biol., LIX, p. 31-32, 1905. 

Poznaru-Cipcescu, Un caz de eustrongylozä renalä. Rev. stuintelor médicale, 
in-8° de 12 p., 1905. 

RAGaINE P., L’appendicite vermineuse. Thèse de Paris, in-8° de 60 p., 1905. 

H.B. Wan, The earliest record of Filaria loa. Zool. Annalen, L, p. 376-384, 1904. 


Hirudinées 


P. MÉGnIN, Sangsues parasites des Palmipèdes. Archives de Parasitologie, X, 
p. 71-76, 1905. 


Insectes 


R. Dequen, Myase des cavités naturelles. Thèse de Paris, in-8° de 100 p., 1905. 

A. EvseLz, Sind die « Culiciden » eine Familie. XLIX. Bericht des Vereins 
für Naturkunde zu Cassel, in-8° de 11 p., 1905. 

A. EyseLz, Die Stechmücken. Handbuch der Tropenkrankheiten von C. Mense, 
IL, p. 44-94, pl. I-V, 1905. 

B. Garzi-VALERIO € J. RocHAZ DE JoNGx, Studi e ricerche sui Culicidi dei generi 
Culex e Anopheles, 3? memoria. Atti della Soc. per gli studi della malaria, NI, 
in-8° de 25 p., 1905. 

L. GEpoeLsr, Contribution à l’étude des larves cuticoles de Muscides africaines 
Archives de Parasitologie, IX, p. 568-592, 1905. | 

F. Laxizce, Notes sur la classification des Moustiques. Actas y trabajos del 
segundo Congresso médico latino-americano, Buenos-Aires, II, in-8° de 23 p., 
5 pl., 1904. 

A. Lurz, Nota preliminar sobre os Insectos sugadores de sangue observados 
nos estados de S. Paulo e Rio de Janeiro. Brazil medico, in-8 de 9 p., 1903. 

A. Lurz, Technica seguida nas experiencias feitas com Mosquitos. Revista do 
gremio dos Internos da Bahia, in-8° de 8 p., 1904. 

P. Jusr Navarre, Les Insectes inoculateurs de maladies infectieuses. Lyon, 
Rey, in-8° de 60 p., 5 pl., 1905. 

M. Neveu-LEeMaIRE, Sur un nouveau Moustique appartenant à la sous-famille 
des Anophelinae (Nyssorhynchus Bozasi n. sp.). C. R. Soc. biol., LIX, p. 32-33, 
1905. 

M. NEvEu-LEMAIRE, Description d’une nouvelle espèce de Stegomyia recueillie 
parle D' Brumpt à Harar. Bull. Soc. zool. de France, XXX, p. 8-11, 1905. 

G. H. F. Nurrazz, Note on the prevalence of Auopheles. Journal of hyg., V, 
p. 485-487, 1905. 

SPEISER, Krankheïiten übertragende Insekten. Bericht des westpreussischen bot. 
zoo. Vereins, Danzig, p. 94-101, 1905. 


ASSELIN et HOUZEAU, Éditeurs 
Place de l'École-de-Médecine, PARIS RE 


2 RAMUË DE ANOLOGE MÉDICALE À AGRICOLE: 


A RAILLIET 


Professeur à l'École vétérinaire d'Alfort, Membre de FAcadémie de Médecime 


DEUXIEME ÉDITION 


* Un: vol: an in- 8 de 1305 pages ay ec 892 figures dans le texte, cartonné. 
EE 


TRAITÉE 


MALADIES PARASITAIRES \ON MCROBIENNES 


DÉS ANIMAUX DOMESTIQUES 
PAR 


; Le NEUMANN. 


Professeur à l'École vétérinaire de Toulouse 


DEUXIÈME ÉDITION 


Un ot grand in- 1-8 de 780 pages, avec. 364 figures intercalées dans le texte, 


LES MIPÈRES. DE FRANCE 


M. KAUFMANN 


Professeur à FÉcole vétérinaire d’Alfort 
Un vol. in- 18 de 180 pages avec une PRACRE en couleurs, cartonné. Prix 2 fr. 50 


: MÉDECINE VÉT ÉRINAIRE 


L'ÉCOLE D’ ABLFORT 


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= Civils et Militaires. 


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partant toujours du 45 Janvier -{- Pour FUnion postale..........1:........ 17 > 


Le Recueil de Médecine vétérinaire paräté les 15 et 30 de chaque mois 


- Le numéro du 30 contient IN EXTENSO le Bulletin des séances de la Société centrale 
È de Médecine vétérinaire. 


ARCHIVES DE PARASITOLOGIE 


RÉDACTION : 15, Rue de l’École de Médecine, PARIS VIS 


ABONNEMENT : 


Paris et Départements : 30 fr. — Union postale : 32 fr. par volume. 


Les Archives de Parasitologie publient des mémoires originaux écrits dans l’une ow 


l'autre des sept langues suivantes : français, allemand, anglais, espagnol, esperanto, ita- 
lien_et tatin. Les auteurs doivent, autant que possible, FOURNIR UN TEXTE DACTYLOGRAPHIÉ 
técril à la inachine), afin de réduire les corrections au minimum. 

Ce texte doit être conforme aux règles suivantes : 

1° On appliquera strictement les règles de la Nomenclature zoologique ou botanique 
adoptées par les Congrès internationaux de zoologie et de botanique; 

2° On fera usage, tant pour les noms d° auteurs que pour les indications bibliogra- 
phiques, des abréviations adoptées par ces mêmes Congrès ou par le Zoological Record 
de Londres; 

3 Les noms géographiques oules roms s propres empruntés à des langues qui n’ont 
pas l alphabet latin seront transerits conformément aux règles internationales adoptées 
par les Congrès de zoologie ; 

% Tout nom d être vivant, animal ou plante, commencera par une première lettre 
ne 

Tout nom scientifique latin sera imprimé en italiques (souligné une fois sur le 
nie 

Dans l'intérèt de la publication et pour assurer le maximum de perfection dans la 
reproduction des planches et figures, tout en supprimant des dépenses inutiles, nos 
collaborateurs sont priés de se conformer aux règles suivantes : 

4° Dessiner sur papier ou sur bristol bien blane. 

2 Ne rien écrire sur les dessins originaux. 

3° Toutes les indieations (lettres, chifires, explications de figures, ete.) seront placées 
sur un calque recouvrant la planche ou le dessin. 

4 Abandonner le plus possible le crayon à la mine de plomb pour Je crayon Wolf 
ou l'encre de Chine, 

Les auteurs d'articles insérés aux Archives sont instamment priés de renvoyer à 
la Rédaction, dans un délai minimune de huil jours, les épreuves corrigées ayec le 
manuscrit ou l'épreuve précédente. 

Ils recevront gratis 50 tirés à part de leur article. Ils sont invités à faire connaitre 
sans délai s'ils désirent en recevoir un plus grand nombre (50 au maximum). à leurs 
frais etconformément au tarif ci-dessous. Ce tarif ne vise que l'impression typographique; 
ilne concerne point les planches, dont le prix peut varier considérablement. Toutefois, 
il importe de dire que, pour les exemplaires d'auteurs, les planches seront comptées 
strictement au prix de revient, Les tirés & part ne peuvent êlre mis en vente. 


TARIF DES TIRÉS A PART 


Une feuille entière. 


Trois quarts de feuille 
Une demi-feuille 

Un quart de feuille . 
Un huitième de feuille 


Le Gérant : 


HOUZEAU. 


École Professionnelle d’Imprimerie, à Noisy-le-Grand (Seine-ct-Oise) 


PTIT UE CPP NIET) 


Tome XI, n°2. … 10 Février 1907 


ARCHIVES 


DE 


PARASITOLOGIE 


PUBLIÉES PAR 


RAPHAËL BLANCHARD 


PROFESSEUR À LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE PARIS 
MEMBRE DE L' AÇADÉMIE DE MÉDECINE 
ê 


PARIS 


ASSELIN ET HOUZEAU, ÉDITEURS 


PLACE DE L'ÉCOLE DE MÉDECINE 
14997 


Les Archives paraissent tous les trois mois. 


SOMMAIRE 


R. BLancHarD. — Le paludisme à Madagascar. . , . . , . . . . . . . . , 15 
L.-G. NEuMANx. — Notes sur les Ixodidés. — V (avec 14 fig. dans le texte). . 2415 
FRANGiISQUE JANIN. — Recherches sur la sarcosporidie du Mouton(pl. II et 
Je dans le Hexte) SN Re RES EN Nr Re ER 233 
PauLz Née. — Élat actuel de la question du favus humain. . : : . . . . . 269 
Pasquaze MoL4A. — Osservazioni sul tegumento (ectoderma) dell” Anchis- 
trocephalus microcephalus (Rud.) (pl I) . à: . . . : . A PE UN UE 339 
Notestetinformations (pl ele RS REA RE EN ET 343 


AVIS 


Les Archives de Parasitologie sont publiées 
par MM. ASSELIN et HOUZEAU, Énrreurs, Place de 
École de Médecine, Paris (6°). 


On est prié de s'adresser aux Editeurs pour tout ce qui 
concerne l'administration (abonnements, achat des volu- 


mes antérieurs, etc.). 


Les quatre premiers volumes ne sont plus représentés 
en magasin que par un pelit nombre d'exemplaires. Leur 


prix sera prochainement élevé. 


N.B. — Il est déjà paru quatre fascicules du tome X; par 
exception, ce même volume comprendra un cinquième et dernier 
fascicule, renfermant la table générale des dix premiers volumes. 
La confection de celte table exigeant un certain temps, nous 
continuons la publication du tome XI, pour ne pas infliger trop 
de retard aux travaux qui attendent leur tour de publication. 


LE PALUDISME À MADAGASCAR"” 


PAR 


Le Professeur R. BLANCHARD 


On commence à s'émouvoir d'une très grave épidémie de palu- 
disme qui ravage Madagascar et sévit particulièrement dans l'Ime- 
rina et à Tananarive. J’ai reçu, à plusieurs reprises et de divers 
correspondants, des renseignements précis sur cette épidémie; à 
part une brève communication faite récemment à la section de mé- 
decine du Congrès colonial français, j'ai tenu ces renseignements 
en réserve, afin de ne pas alarmer l'opinion publique et dans la 
prévision que l'administration locale saurait prendre les énergiques 
mesures que commande la situation. La divulgation de celle-ci par 
la presse politique (2) m'enlève tout scrupule et me permet de 
parler librement d’un état sanitaire vraiment inquiétant. 

Le massif central de Madagascar, qui comprend le Betsileo et 
l’Imerina, a joui jusqu’à ces temps derniers d’une réputation de 
salubrité solidement assise; Tananarive était comme un sanatorium 
vers lequel aspiraient tous ceux qui s'étaient impaludés à la côte. 
Et l'on sait à quel point celle-ci est insalubre (3)! Or, depuis 
quelques années, le paludisme s'est implanté dans ces régions 
jusqu'alors à peu près indemnes et n’a cessé depuis lors de s'y pro- 
pager : actuellement, il constitue une véritable calamité publique. 

A vrai dire, l’Académie a déjà été avertie des progrès du palu- 
disme à Madagascar; dans ses importants rapports annuels sur 


(1) Communication faite à l’Académie de médecine, le 10 juillet 1906; ef. 
Bulletin, (3), LVI, p. 80-96. 

(2) Cf. la Liberté du 27 juin 1906. 

(3) Les troupes qui ont pris part à l'expédition de 18%, lors de la conquête de 
l’île, ont été très durement éprouvées, puisque, sur un total de 14.850 hommes de 
troupes régulières, il n'y a pas eu moins de 4.498 décès. Le feu de l’ennemi n’a 
causé qu'une mortalité insignifiante, le nombre des décès par blessures ne dé- 
passant pas 0.75 p. 100; en revanche, 72 p. 100 des décès étaient dus au paludisme. 
Celui-ci, contracté à la côte et dans les régions basses, exerçait dans notre armée 
de terribles ravages, dont Darricarère, médecin du corps expédilionnaire, nous à 
donné un récit des plus poignants. 


Archives de Parasitologie, XI, n° 2, 1907. 13 


186 R. BLANCHARD 


l’état sanitaire de nos colonies, notre collègue M. Kermorgant n’a 
pas manqué d'y insister. Ces divers documents permettent de sui- 
vre pas à pas la marche envahissante du fléau. 

En 1902, il est cantonné à la côte et aux altitudes moyennes de 
1.000 mètres. « Sur les hauts plateaux, ses atteintes sont en géné- 
ral beaucoup plus rares, et surtout plus bénignes. Là, la fièvre ne se 
montre guère que chez les Européens déjà impaludés par un séjour 
antérieur à la côte ou dans une autre colonie. » Cette même année, 
on relevait dans les hôpitaux 46 décès pour 4.430 malades européens, 
et 80 décès pour 1.435 malades indigènes. 

En 1903, le paludisme s'est notablement étendu : « L'Emyrne et 
le Betsiléo, autrement dit la région des hauts plateaux, lui paie 
également son tribut. On constate même une recrudescence dans 
ces régions qui en avaient été à peu près indemnes jusqu'ici. Cet 
accroissement a coïncidé avec une grande abondance d'Anophèles. 
Toutelois si le nombre ces impaludés augmente sur les hauts pla- 
teaux, les formes observées sont relativement bénignes. » 

En 190%, la situation est singulièrement aggravée. «Le paludisme, 
écrit M. Kermorgant, a revêtu l'allure épidémique dans la province 
de l'Imérina centrale; on constate que la mortalité augmente dans 
cette région et que la natalité diminue. Ce déficit est imputable à la 
malaria qui sévit avec intensité depuis 1899 sur les hauts plateaux.» 

Depuis lors, le fléau n’a cessé d'étendre son œuvre de dévasta- 
tion; les renseignements ci-dessous vont permettre de juger de 
l’'exceptionnelle gravité de la situation. 

Tananarive a une population indigène d'environ 40.000 habi- 
tants. D'après des renseignements qui me sont communiqués par 
M. le D: Fontoynont, professeur à l'École de médecine, la mortalité 
pour cause de paludisme a suivi la progression suivante parmi 
cette population : 


EnAO00 MS déCes 

EnlO0 ISERE 

En 1902 . . .: 104 — 

En 190362 1 0MS 7 

En 1904 . . . 271 — 

END ENMESCN 

En 1906 . . . 980 — (pour les 4 premiers mois seulement.) 


Le D: Jourdran., directeur de l'Ecole de médecine, donne des chif- 


LE PALUDISME A MADAGASCAR 187 


fres concordant avec ceux-ci. D’après lui (1), la proportion des 
cas de paludisme traités à l'hôpital indigène a été la suivante : 


BOOM AR ASS 6 100 
Ho HOLD ee SR AE OC 
DCR OR NEA SR ENS ERE PET Ce 
DIU Re M mn une M 0e 


Voici enfin le chiffre des entrées à l'hôpital militaire de Tana- 
narive, du 1° janvier au 23 mars 1906, soit pour une période de 83 
jours : 


: Maladies diverses. . 106 
x à é 
Janvier ee 0 900'entrées | ee 94 
; Maladies diverses. 66 
sy 9, ; : 
Hévrier meme ee 0 0/9lentrées | en DE 183 
Maladies diverses. . 45 
N/ er 9) o) 2 
NES (du Lau 23) 7.57 209 entrées | ea M OU Tr 
ROTAURS RE ER OS ; 217 44 


Sur 658 militaires hospitalisés, tant blancs qu'indigènes, 441 
étaient donc atteints de paludisme, soit 67 p. 100. 

Tous les chiffres qui précèdent concordent à démontrer que les 
indigènes et les corps de troupes sont atteints du paludisme dans 
la mesure la plus grave et la plus inquiétante. 

Les colons, commerçants, administrateurs et officiers sont frap- 
pés pareillement, mais ils se soignent chez eux etéchappent à la sta- 
tistique; il en est de même pour un certain nombre d'indigènes 
plus ou moins riches. Le désastre est donc encore bien plus étendu 
que les chifires ci-dessus ne le laissent entrevoir. En fait Tanana- 
rive se dépeuple : les indigènes émigrent vers d’autres régions, et 
notamment vers la côte, où ils deviennent promptement la proie 
du fléau même qu'ils voulaient éviter; d'autre part, le nombre des 
décès l'emporte très notablement sur celui des naissances; en 
février dernier, on a enregistré 334 décès contre 264 naissances. 

Il importe d’élucider les raisons d’une situation aussi tragique; 
nous ne pouvons le faire qu'après avoir pris connaissance des di- 
vers Moustiques qui vivent à Madagascar, 

Nous en donnerons tout d’abord la liste, après quoi nous recher- 
cherons si les déplorables conditions sanitaires dontil vient d'être 


(2) Jourpran, Un danger public;sombres nuages. Le Pelit Courrier de Tanana- 
rive, 3 et 10 mai 1906. 


188 R. BLANCHARD 


question ne seraient pas dues éventuellement à quelque modifica- 
tion survenue, ces années dernières, dans la faune de l’Imerina et 
du Betsileo, à ce point de vue spécial. 


LISTE DES ESPÈCES DE MOUSTIQUES DE MADAGASCAR. 


Myzomyia funesta, var. Neireti = Culex Neireti Ventrillon, 1906 «, p. 103; 
4906 c. — R.Blanchard, 1905, p. 180, 3. — Cité par Laveran (1903 « et b, 
1904 db) au camp d'Ankourik, près Diego-Suarez; par Ventrillon à Tana- 
narive, en avril. Ne représente que 2 p. 100 des Anophelinæ capturés 
dans la capitale. 

Pyretophorus costalis (Læw, 1866). — R. Blanchard, 1905, p. 186, 1. — 
Habite les deux côtes et le plateau central ; se trouve maintenant à Tana- 
narive. Confondu d’abord par Laveran (1902) avec Myzomyia superpicta. 

Myzorhynchus Coustani (Laveran, 3 février 1900) — Anopheles mauritia- 
nus Daruty et d'Emmerez, 1900. — R. Blanchard, 1905, p. 199, 9 et 200, 10. 
— Madagascar, Réunion, île Maurice; d'après Ventrillon, représente à 
Tananarive 48 p. 100 des Anophelinae; très répandu dans toute l'ile. 

Cellia squamosa (Theobald, 1901) —C. tananariviensis Ventrillon, 1906 c. 
— R. Blanchard, 1905, p. 216, 3. — Tananarive; toute l'année, surtout 
pendant la saison des pluies; représente 48 p.100 des Anophelinae captu- 
rés dans la capitale. Répandu sur les côtes et le plateau central. 

C.pharoensis (Theobald, 1901)— Anopheles albus Ventrillon (in Laveran, 
1904 b, p. 211) — Cellia alba(Ventrillon, 1906 c) . — R. Blanchard, 1905, p. 
214, 1. —Côte ouest et plateau central; représente 2 p. 100 des Anophelinae 
capturés à Tananarive. 

Eretmapodites Condei Ventrillon, 1905 «a, p. 444. — Mayotte. 

Stegomyiacalopus (Meigen, 1818) = St. Lamberti Ventrillon, 1904 1905 a, 
p. 441. — R. Blanchard, 1905, p. 249, 1. — Sur les deux côtes: Diego- 
Suarez, Fort-Dauphin, Morondava, Ankazobé, Majunga, Andribé ; hôpital 
militaire de Tananarive. Pique en plein jour. 

St. Cartroni Ventrillon, 1906 b. — ©. —Toute l’année. Sur la côte ouest 
(Morondava) et sur la côte est (Maintirano); Mayotte. 

Culex insahiabilhis Bigot, 1859. — R. Blanchard, 1905, p. 313, 79. 

C. fatigans Wiedemann, 1828. — R. Blanchard, 1905, p. 353, 136. 

C. Grandidieri R. Blanchard, 1905, p. 627 = C. flavus Ventrillon, 1904; 
(non Motshulsky, 1859). — Ankazobé, à l'ouest de Tananarive. 

C. Cartroni Ventrillon, 1905 b. — © et ©. — Majunga, Morondava. 

C. gaganteus Ventrillon, 1906 a. — Tananarive; toute l’année. 

Mansonia uniformis (Theobald, 1901). — R. Blanchard, 1905, p. 379, 3. 

M. Seguini (Laveran, 1901).— R. Blanchard, 1905, p. 380, 5. — Cité par 
Laveran (1903 b) à Fort-Dauphin. 

M. titillans (Walker, 1848). —R. Blanchard, 1905, p. 377, 1. — Cette espèce 


ou une forme très voisine est citée par Laveran (1903 b) dans le cercle 


d'Analava. 


LE PALUDISME À MADAGASCAR 189 


Tæniorhynchus sp. — Cité par Laveran (1904 b) à Ankazobé, au nord 


de l’Imerina. 
Grabhamia n. sp. — Ventrillon in litt. Côte ouest (Morondava),. 
Heptaphlebomyia argenteopunctata Ventrillon, 1905 «, p.446. — Tanana- 
rive et ses environs; toute l’année, surtout pendant la saison des pluies. 


Très rare. 
H. Monforti Ventrillon 1905 &, p. 448. — Ankajobé, Arivonimamo, Tana- 


narive; toute l’année. Très commun. 
Pseudo- Heptaphlebomyia madagascariensis Ventrillon, 1905 b. — 9. — 


Tananarive. 
Aëdimorphus n. sp. — Ventrillon in litt. — Côte ouest (Morondava). 


Les Moustiques sont donc représentés à Madagascar par 20 à 
25 espèces. À Tananarive même ou dans ses environs immédiats, 
on trouve jusqu'à cinq espèces d’'Anophelinæ, savoir : 


1° Myzomyia funesta, var. Neireti ; 
2 Pyretophorus costalis ; 

9° Myzorhynchus Coustani ; 

&° Cellia squamosa ; 

5° Cellia pharoensis, var. alba. 


Myzorhynchus Coustani et Cellia squamosa sont très communs à 
Tananarive; ils ne semblent jouer aucun rôle dans la propagation 
du paludisme. Aïlleurs déjà (1905, p. 200 et 201), nous avons discuté 
ce point, en ce qui concerne la première de ces deux espèces; voici 
quelques détails concernant la seconde : 

Cellia squamosa pullule à l'hôpital militaire de Tananarive. On le 
trouve en abondance dans les logements des médecins et des phar- 
maciens, surtout au rez-de-chaussée, ainsi que dans un local qui, 
pendant le jour, sert de bureau au commis des entrées et, pendant 
la nuit, de poste aux infirmiers de garde. Cet Insecte est alors si 
importun que les deux infirmiers de garde, un blanc et un Mal- 
gache, ne peuvent prendre aucun repos et sont, le plus souvent, 
obligés de marcher toute la nuit, pour échapper autant que pos- 
sible aux incessantes attaques dont ils sont l'objet. Malgré le 
nombre infini de piqüres endurées par le personnel de garde, le 
nombre des accès de fièvre est longtemps demeuré très restreint 
chez les gens attachés à ce service. Il est donc très probable que 
Cellia squamosa est inapte à propager l'endémie palustre. 

Les deux autres Anophelinæ actuellement connus du plateau cen- 
tral, Myzomyia funesta et Pyretophorus costalis, sont, au contraire, 


190 R. BLANCHARD 


de très actifs propagateurs du paludisme; ils semblent être l’un et 
l’autre d'introduction récente dans l'Imerina, ou du moins ils s'y 
sont beaucoup multipliés dans ces temps derniers. 

L'an dernier déjà, les cas de fièvre se montraient plus nombreux 
parmi le personnel de l'hôpital militaire; cela coïncidait d'une fa- 
con très marquée avec l'apparition d'un très petit Moustique, My- 
zomyia funesta var. Neireti, jusqu'alors inobservé à Tananarive. 
Cette année, c'est-à-dire durant l'hivernage de 1905-1906, ce même 
Insecte est devenu beaucoup plus commun et le nombre des cas de 
fièvre a subi lui-même une poussée formidable. C'est donc, selon 
toute apparence, à ce redoutable Culicide qu'est dû le très inquié- 
tant état sanitaire dont jouit actuellement Tananarive. On sait d’ail- 
leurs qu'à la côte orientale d'Afrique il joue un rôle prépondérant 
dans la transmission de la Plasmodie paludique. 

Ces déductions trouvent leur confirmation indirecte dans cer- 
tains renseignements donnés par Laveran (1903 b et 190%). En mars 
1903, sur 22 Moustiques capturés à l'Institut Pasteur de Tanana- 
rive, on comptait 16 Anophelinæ, parmi lesquels Myzorhynchus 
Coustani. En novembre et décembre de la même année, cette même 
espèce était rencontrée, seule ou en compagnie de Cellia squamosa, 
dans la caserne du Palais, à l'hôpital indigène, aux casernements 
et à l'infirmeriedu 13° régiment colonial, etc. ; nulle part Yyzomyia 
funesta n’est signalé. 

Comment expliquer l'apparition récente de cette dernière espèce 
à Tananarive et dans l’Imerina en général ? 

__ Deux causes successives sont intervenues, qui se réduisent en 
réalité à une seule. C'est tout d'abord la construction de la route 
de Tamatave à Tananarive, puis celle du chemin de fer du littoral, 
ou plutôt du canal des pangalanes à la capitale. Ces importants 
travaux publics ont été l'occasion d'un grand déplacement de po- 
pulation : des ouvriers très nombreux sont venus travailler à la 
côte, où ils se sont impaludés dans une excessive proportion; la 
mortalité est montée de ce chef à des chiffres très élevés. A mesure 
que la route et la ligne avançaient, ces équipes de terrassiers 
malades gagnaient eux-mêmes l'intérieur du pays : pour établir 
leurs cases ou leurs tentes, ils défonçaient le sol plus ou moins 
profondément, creusant ainsi des dépressions et cuvettes où s'ac- 
cumulaient les eaux de pluie; les Moustiques et spécialement 


LE PALUDISME À MADAGASCAR 491 


Myzomyia funesta et Pyretophorus costalis, espèces jusqu'alors sur- 
tout côtières, y trouvaient des gîtes très favorables à l’éclosion de 
leur ponte. 

C’est ainsi que, de proche en proche et du littoral au plateau de 
l’Imerina, le paludisme s’est propagé; c'est de cette même manière 
que la fièvre jaune et Stegomyia calopus, partis ensemble de la 
région de Vera-Cruz, ont escaladé petit à petit les massifs monta- 
gneux du Mexique, à mesure que progressaient les lignes de che- 
min de fer; j'ai décrit ailleurs (1905, p. 519) cette marche envahis- 
sante, qui constitue un phénomène actuellement bien élucidé. Iei 
le procédé est exactement le même. On comprend donc l'extension 
progressive du paludisme vers l’'Imerina et le Betsileo et finalement 
l'épidémie meurtrière qui sévit depuis plusieurs années en ces 
régions et qui, cette saison, en décime littéralement la popu- 
lation. 

Le chemin de fer s'arrête actuellement au 148° kilomètre, c'est- 
à-dire au passage du Mangoro, à la station de Moramanga. Cette 
localité est située par une altitude de 945 mètres et à 122 kilomètres 
de Tananarive. Le reste du trajet se fait le long de la route nou- 
velle, en automobiles ou en pousse-pousse; la filanzane est passée 
de mode. Le transport des marchandises se fait par les mêmes 
moyens ou par des charrettes à Bœufs; le portage à dos d'Homme 
n'existe pour ainsi dire plus. La route de Moramanga à Tananarive 
est donc le siège d'un trafic très intense; elle présente diverses 
étapes, qui se sont successivement contaminées par le procédé qui 
vient d'être dit. On voit donc de quelle manière la capitale reçoit 
de constants apports de Moustiques venus de régions plus basses : 
ces Insectes trouvent d’ailleurs à Tananarive, comme il à été dit 
plus haut, de très bonnes conditions pour leur pullulation sur 
place. 

Maintenant que la domination française leur confère la sécurité, 
les Hovas se départissent de leur ancienne coutume de construire 
leurs villages sur les hauteurs, comme des sortes d'observatoires : 
ils descendent vers la plaine, c'est-à-dire vers les rizières et les 
eaux stagnantes; la construction de leurs nouvelles cases détermine 
des inégalités du sol aussitôt remplies d'eau de pluie et adoptées 
par les Moustiques comme gîtes de ponte. Cet exode des indigènes 
vers les vallées est surtout manifeste à Tananarive; les quartiers 


192 R. BLANCHARD 


élevés de la ville sont le siège de l'administration et du commerce 
européen; les cases des Malgaches dévalent de plus en plus nom- 
breuses vers les bas-fonds. Des flaques d’eau, où grouillent une 
infinité de larves et de nymphes, se voient partout; autour de 
chaque habitation, de chaque agglomération de cases, on en compte 
un grand nombre. 

L'administration ne pouvait rester indifférente en présence d'un 
état sanitaire aussi déplorable. Saisi de la question par le Gouver- 
neur Genéral intérimaire, M. Lepreux, le Ministre des colonies 
adressait au Président de la République, à la date du 18 octobre 
1905, le rapport suivant : 


MONSIEUR LE PRÉSIDENT, 


Le paludisme fait à Madagascar des ravages, chaque année plus consi- 
dérables, parmi la population européenne et indigène de l'île; les auto- 
rités locales de la colonie ont pensé que le moyen le plus propre à en 
combattre les effets était de faciliter la vente des sels de quinine et d'en 
répandre l'usage. Jusqu'à présent, on ne trouve ce médicament que dans 
les quelques pharmacies établies sur tout le territoire malgache, ou dans 
les dépôts spéciaux, créés en exécution du décret du 7 mars 1904, sur 
l'exercice de la pharmacie à Madagascar, pour la vente, par des personnes 
non diplômées, de certains articles pharmaceutiques. Il en résulte que, 
dans les régions non pourvues de formations sanitaires de l'assistance 
médicale, l’indigène n'a pas de ressources suffisantes pour se procurer 
les sels dont il s’agit. M. le Gouverneur Général intérimaire a pensé qu'il 
y avait, dans cet état de choses, un véritable péril qu'il fallait combattre 
et il m'a demandé de lui en fournir les moyens en modifiant, à cet eflet, 
la réglementation existante. 

J'ai accueilli cette proposition et j'ai fait préparer dans ce but le 
décret ci-joint que j'ai l'honneur de soumettre à votre haute sanction. 


Le Ministre des colonies, 
CLÉMENTEL. 


Ce rapport a été publié au Journal officiel de la République fran- 
çaise, le 27 octobre 1905, n° 292, p. 6310; il y est accompagné d'un 
décret en date du 20 octobre, relatif à la vente des sels de quinine 
dans la colonie de Madagascar et dépendances et dont l'article 1°, 
le seul essentiel, est ainsi conçu : 


Le Gouverneur Général de Madagascar est autorisé à prendre, par voie 
d'arrêté, toutes les dispositions nécessaires pour que les sels de quinine 
soient mis à la disposition de tous et au plus bas prix possible. 


4 


LE PALUDISME À MADAGASCAR 193 


Le 14 décembre 1905, le Gouverneur Général intérimaire de la 
colonie de Madagascar et dépendances prenait un arrêté promul- 
guant le décret ci-dessus (1). 

Enfin, le 9 mars 1906, un dernier arrêté, pris en exécution des 
dispositions de ce même décret, détermine les mesures à prendre 
pour la distribution de la quinine aux particuliers européens et 
indigènes. Cet arrêté (1) porte la signature du nouveau Gouverneur 
Général, M. V. Augagneur, ancien député du Rhône, ancien profes- 
seur à la Faculté de médecine de Lyon. Vu son importance, il 
nous semble utile d'en transcrire ici les dispositions les plus inté- 
ressantes : 


ARTICLE PREMIER. — Il sera constitué, dans chaque province, des dépôts 
de quinine confiés à certains fonctionnaires européens et indigènes. 

ART. 2. — Les localités où ces dépôts seront constitués, ainsi que 
les noms des fonctionnaires qui en seront chargés, seront déterminés, 
pour chaque circonscription, par dééision locale du chef de la province, 
soumise à l'approbation de M. le Gouverneur Général, après avis du 
directeur du service de santé. 

ART. 3. — La quinine sera fournie aux gérants des dépôts en poudre 
ou en comprimés et dans des flacons d'une contenance parfaitement dé- 
terminée. 

Le stock nécessaire à chaque dépôt sera fixé par décision du chef de la 
province. 

ART. 4. — Les fonctionnaires gérant un dépôt de quinine la déli- 
vreront aux particuliers à raison de 0 fr. 05 (cinq centimes) le gramme. 

Ils ne pourront pas en délivrer moins d'un gramme. 

ART. 5. — Le gérant d’un dépôt est dépositaire-comptable de la quinine 
qui lui est confiée. 

Il tient un registre sur lequel il mentionne les quantités reçues par 
lui. Il lui est fourni, en outre, un registre à souches destiné à recevoir, 
tant au talon que sur la souche remise au cessionnaire, les noms de ce 
dernier, le numéro de sa carte s’il est indigène, l'indication de la quantité 
délivrée et du prix perçu. 

L'état des quantités reçues et des quantités délivrées gratuitement ou 
contre espèces est envoyé, chaque mois, au chef de la province qui s'as- 
sure, au cours de ses tournées, de la bonne tenue des registres et de leur 
concordance avec les états qui lui sont fournis. 

ART. 6. — La quinine ne peut être cédée gratuitement par les gérants 
de ces dépôts qu'aux particuliers européens ou indigènes en état d'indi- 
gence notoire constatée par un certificat délivré par l‘autorité française 
ou indigène compétente. 


(1) Journal officiel de Madagascar et dépendances, n° 1029, 16 déc. 1905. 


194% R. BLANCHARD 


Ce certificat, valable pour un an, demeurera annexé au talon constatant la 
délivrance gratuite au cessionnaire et sera tamponné à chaque délivrance. 
ART. 7. — Le tarif de cession de la quinine pour les dépôts de chaque 
province est affiché, en langues française et malgache, dans les bureaux 
de tous les fonctionnaires de l'administration française ou indigène de la 


province. 
Il est accompagné de la mention, en langue malgache, que tout gérant 


de dépôt qui délivrerait de la quinine à un taux supérieur au prix indiqué 
par le tarif sera poursuivi conformément à la loi. 

ART. 8. — Les dépenses occasionnés par les cessions de quinine seront 
supportées par les budgets autonomes de l'assistance médicale, dans les 
circonscriptions où ce service fonctionne, et par le budget local dans les 
autres régions de l'ile. 


Conformément à cet arrêté, divers administrateurs des colonies, 
chefs de provinces, ont pris des « décisions locales » déterminant 
les localités où des dépôts de quinine seraient constitués; ces déci- 
sions ont été approuvées par le Gouverneur Général et insérées au 
Journal officiel de Madagascar et dépendances (1). De la sorte, il a été 
constitué jusqu'à ce jour 28 dépôts dans la province de l'Imerina 
du Nord, 8 dans celle de Diego-Suarez, 20 dans celle de l'Itasy, 
8 dans celle des Betsimisaraka du Sud et 12 dans celle d'Ambositra. 
Les gérants sont, suivant les circonstances, des Européens (chef 
du district, du canton, du poste de police, du poste administratif, 
garde régional, adjoint des services civils) ou des indigènes (gou- 
verneur madinika (2), médecin de colonisation, infirmier en chef, 
sage-femme). 

Nous aurons indiqué toutes les mesures prises par le gouverne- 
ment général, quand nous aurons ajouté qu'ona répandu également 
des affiches, rédigées en langues française et malgache et signalant 
aux populations les avantages de la quinine et les localités où l’on 
peut s'en procurer. 

Tout en rendant un juste hommage à la sollicitude dont l'admi- 
nistration à fait preuve en la circonstance, il nous faut pourtant 
exprimer l'avis que de telles mesures sont insuffisantes et illusoires. 
Insuffisantes, car elles ne tiennent aucun compte des procédés les 
plus efficaces que l'on doit mettre en œuvre contre le fléau palu- 
déen, à savoir la destruction des gîtes de ponte et la protection 


(1) Numéros des 12, 19 et 26 mai 1906. 
(2) Chef indigène d’un groupe de villages. 


LE PALUDISME À MADAGASCAR 495 


mécanique des habitations : le traitement curatif ou préventif par 
les sels de quinine n'est plus actuellement, si j'ose dire, qu'un 
procédé ambulant, indispensable et le plus pratique pour les indi- 
vidus isolés ou les troupes en marche; mais pour les sédentaires, 
il ya mieux et les décrets et arrêtés cités plus haut n'y font aucune 
allusion. Ces mêmes mesures sont illusoires, car elles comptent 
trop complètement sur l'initiative individuelle et ne sont pas suffi- 
samment impératives; l'indigène connaît les effets de la quinine, il 
a confiance en ce médicament, mais il est pauvre et n'arrive que 
péniblement à payer ses impôts; aussi, malgré le bas prix auquel 
elle est vendue, n'achète-t-il guère de quinine ou n'en achète-t-il 
que des quantités insuffisantes et à des intervalles trop éloignés. 
On en peut dire autant des colons, dont la situation financière, le 
plus souvent, n'est guère enviable. 

M.Kermorgant évalue à 1000 kilogrammes la quantité de quinine 
qu'il serait utile de faire distribuer annuellement aux indigènes 
de toute l’île, par les soins des fonctionnaires de l'assistance 
médicale. Une telle provision peut paraître formidable; elle était 
peut-être suffisante en 1903, mais sürement elle serait à l'heure 
actuelle très inférieure aux besoins. Cela ne représente, en somme, 
qu'une seule et unique dose d’un gramme pour un million d'habi- 
tants, c'est donc très loin des quantités nécessaires. Or, si nos 
renseignements sont exacts, la provision commandée pour 1907 
n'atteindrait même pas 300 kilogrammes, soit une seule et unique 
dose de 0 gr. 75 pour chacun des 40.000 habitants de la seule ville 
de Tananarive. 

On demeure vraiment surpris qu'aucune mesure n'ait été pres- 
crite contre les Moustiques eux-mêmes. Non seulement les condi- 
tions de milieu, esquissées plus haut, assurent leur reproduction 
par myriades, maisrien ne leur interdit l'accès des êtres humains 
sains ou malades. Le gouvernement général avait résolu « d’es- 
sayer » à Diego-Suarez les toiles métalliques. L'expérience a dû 
être faite, mais sans doute a-t-elle été jugée peu favorable, car, 
jusqu'à ce jour, on n'a pas encore songé à protéger de cette manière 
les divers établissements où un tel moyen de sauvegarde est pour- 
tant indispensable : les hôpitaux, qui regorgent de malades et où 
les Moustiques sont innombrables, continuent donc à être pour 
la population ambiante le pire des dangers. 


196 R. BLANCHARD 


A l'hôpital militaire, il y a une telle affluence de malades que, 
dès que l’un deux est quelque peu amélioré, on s'empresse de le 
faire sortir pour donner sa place à un autre. Avant d'être rendu à la 
liberté. le sortant est mis en observation dans une salle de la 
caserne : à ce moment, les gamètes pullulent dans son sang; il est 
donc infectieux au plus haut point. Or, la salle où on le recueille 
ne possède aucun moyen de protection : les Moustiques vont et 
viennent en toute liberté; ils piquent le convalescent, ou plutôt le 
malade, puis s'envolent dans les chambrées voisines et inoculent 
la maladie aux rares soldats encore indemnes. 

Ce que l'administration a négligé de faire, la population indigène 
ou européenne ne l'a pas fait davantage. Nulle part à Madagascar, 
et spécialement à Tananarive, on ne voit de toiles métalliques aux 
maisons; nulle part on ne songe à détruire, en les comblant ou en 
les pétrolant, les flaques d’eau où grouillent les larves de Mousti- 
ques. La population ignore évidemment les admirables résultats 
obtenus en Italie, à Cuba, au canal de Suez et en tant d’autres en- 
droits : elle reste, insouciante et inerte, exposée sans défense aux 
atteintes d’un fléau sans précédent, que des mesures très simples 
permettraient pourtant de conjurer. 

A Tananarive même, on n'est pourtant pas resté indifiérent de- 
vanttant de misère. Des personnes charitables, émues de l'effroyable 
mortalité qui frappe les indigènes, ont fondé une Société de secours 
aux Malgaches (1). On a recueilli des sommes assez importantes, 
dont on avait la ferme résolution de faire le meilleur usage. Or, on 
n'a rien trouvé de mieux à faire que de distribuer aux nécessiteux… 
des couvertures et du riz. 

Vraiment, le paludisme a beau jeu! La prophétie du vieux roi 
Andrianampoinimerina se réalise : le général Tazo (la fièvre) est en 
train de prendre sa revanche; seulement, au lieu d'atteindre les 
seuls Vazahas, il frappe avec plus de rage encore les malheureux 
Hovas. 

Une situation aussi tragique ne peut se prolonger : elle compro- 
met gravement la bonne réputation de notre pays; elle menace de 
réduire à néant les eflorts accomplis jusqu'à ce jour, avec tant de 
peine, en vue d'asseoir notre autorité politique et morale dans no- 


(1) Cf. Revue de Madagascar, I, p. 458 et 471, 1906. 


PERS 


LE PALUDISME A MADAGASCAR 197 


tre nouvelle colonie. À moins qu'on ne prenne sans le moindre re- 
tard les mesures les plus énergiques, la saison prochaine va voir 
éclater une épidémie terrible, qui tuera des milliers de victimes : 
ce sera un désastre sans exemple, comparable et supérieur à ceux 
qui ont marqué de si lugubre façon les premiers temps de la con- 
quête de l'Algérie. 

Avant que Maillot n'eût découvertl'action curative de la quinine, 
on était entièrement désarmé envers la fièvre, dont la nature pa- 
rasitaire et les moyens de transmission étaient totalement inconnus : 
les médecins ne pouvaient qu'assister, impuissants et angoissés, à 
ces hécatombes auxquelles ils ne pouvaient rien comprendre. Au- 
jourd'hui, il en est tout autrement : le mystère est éclairci tout en- 
tier; nous connaissons dans ses moindres détails l'histoire du pa- 
ludisme et notre pays, à moins de se diminuer aux yeux du monde 
civilisé, ne peut permettre qu’une de nos colonies se dépeuple et 
périclite, alors qu'il est si facile de lui restituer les meilleures con- 
ditions sanitaires. 

En présence de la navrante situation que nous venons d'indiquer, 
nous accomplissons un devoir en jetant un cri d'alarme et en de- 
mandant qu'un pareil état de choses cesse au plus tôt. Le Gouver- 
neur Général de Madagascar a été professeur à la Faculté de méde- 
cine de Lyon : il doit à son passé d’enrayer sans retard une épidémie 
aussi meurtrière ; la santé publique est, nous le savons, l’objet de sa 
constante sollicitude. Si ce n'était empiéter sur ses attributions, il 
nous serait facile de lui désigner deux ou trois personnes qui, ha- 
bitant Tananarive, connaissent à fond la question des Moustiqueset 
sont très aptes à mener avec énergie, vers un succès assuré, la lutte 
contre ces redoutables Insectes. 

Les procédés à mettre en œuvre sont ceux-là mêmes que les Amé- 
ricains ont appliqués à Cuba, avec un succès si éclatant, dans leur 
lutte contre la fièvre jaune. Ils sont trop connus maintenant pour 
qu'il soit utile de les rappeler ici; je les ai décrits ailleurs d'une 
façon détaillée (1). L'autorité civile, dans une colonie telle que Ma- 
dagascar, a le pouvoir d'ordonner les mesures les plus énergiques 
et les plus radicales : la situation actuelle n'en permet pas d’autres. 
Il est tout à fait urgent d'organiser des (brigades à Moustiques », 


(1) R. BLancHArD, Les Moustiques, 1905; cf. p. 555-558 et 569-586. 


198 R. BLANCHARD 


d'assainir Tananarive et les autres localités, suivant les principes 
auxquels la Havane doit d'être devenue si remarquablement salu- 
bre, de protéger par des toiles métalliques les hôpitaux, les bâti- 
ments administratifs et les habitations particulières, tout en con- 
tinuant à distribuer la quinine d'une part aux individus impalu- 
dés, d'autre part aux individus sains qui, travaillant au dehors, 
sont exposés aux piqüres de Moustiques. 

Myzomyia funesta, l'une des plus petites espèces d'Anophelinæ 
connues, traverse sans aucune difficulté les toiles métalliques dont 
il est fait communément usage en Europe et en Amérique. Une 
toile à mailles larges de 1mm5 ne peut en aucune façon lui opposer 
une barrière suffisante ; on ne peut com pter sur une sécurité absolue 
qu'en employant des toiles dont les mailles ne dépassent pas 
1 millimètre de largeur. Cette notion est d'autant plus indispen- 
sable à connaître que le Moustique en question ne se borne pas à 
propager très activement le paludisme, mais qu'il est aussi, à 
Madagascar du moins, l’un des agents de la dissémination de la 
filariose. 

Des différentes manières de lutter contre le paludisme, aucune 
n’est exclusive et ne peut raisonnablement être appliquée à l’ex- 
clusion des autres. C’est pourquoi le traitement curatif et préventif 
par les sels de quinine garde toute sa valeur; il a ses indications 
précises, que nous avons énoncées plus haut. Aussi, le budget 
d’une colonie telle que Madagascar peut-il en venir à être grevé 
lourdement par les dépenses pour achat de quinine; il serait très 
avantageux que la colonie püt fabriquer elle-même ce précieux 
médicament, au moyen de plantations de Quinquina faites dans 
des conditions favorables. 

En maintes régions, notamment dans sa partie septentrionale, 
Madagascar jouit d'un climat assez chaud pour que la culture du 
Quinquina puisse réussir. Le général Galliéni s'était déjà préoc- 
cupé de ce problème; vers 1900, il envoya en Extrême-Orient une 
mission chargée d'en étudier la réalisation. M. Prudhomme (1), 
directeur de l’agriculture dans la colonie, visita notamment Ceylan 
et Java: il rapporta de cette dernière île des graines de Cinchona 

(4) Prupnomme, Notes sur le Quinquina, L’Agriculture pratique des pays 


chauds, I, p. 545-573 et 710-728, 1902. — Le Quinquina à Madagascar. 1bidem, IT, 
p. 198-210, 1902. 


LE PALUDISME A MADAGASCAR 199 


succirubra et du C. ledgeriana, qui furent semées à la station d'essai 
de Nanisana; celles de la dernière espèce germèrent seules. Depuis 
lors, diverses tentatives du même genre ont été faites, avec un 
meilleur succès. En 1902, la station de Nanisana commençait à 
mettre en distribution des plants originaires de Bourbon, relati- 
vement pauvres en alcaloïdes, et des plants de C. ledgeriana, beau- 
coup plus riches en principes actifs. Les essais semblent être cou- 
ronnés de succès, car la même station d'essais vend actuellement 
le plant de C. succirubra et de C. ledgeriana au prix minime de 
0 fr. 05 l’un (1). 

À la demande de M. le général Galliéni, l'essai chimique de dii- 
férentes terres a été fait par M. le professeur Müntz, de l'Académie 
des sciences. On a pu déterminer ainsi, pour certaines provinces, 
les sols où la culture du Quinquina serait susceptible de réussir : 
on a, notamment, acquis cette notion pour la montagne d'Ambre, 
la région d'Ambatondrazaka, celle de Moramanga et la province 
de Betafo, c'est-à-dire pour une série de localités comprises entre 
800 et 1.350 mètres d'altitude. Espérons que bientôt la colonie sera 
en mesure de produire les écorces utiles à sa consommation, d'en 
extraire les alcaloïdes et d'exporter même les produits d'une in- 
dustrie aussi utile, qui doit tant contribuer à sa richesse et à son 
assainissement. 

Le 31 janvier 1903, M. Laveran (1903 a) écrivait : (Je regrette 
d'avoir à constater que dans notre armée on n'a pas encore adopté 
les mesures prophylactiques qui s'imposent depuis que l'on sait 
exactement comment se propage le paludisme. » 

Malgré l'autorité d’une telle parole, rien n'a été fait, aucune 
mesure de protection n'a été adoptée et le paludisme, déjà si 
meurtrier, a continué à se répandre. LeS mars 190%, notre collègue 
revenait à la charge et faisait adopter par l’Académie un vœu ten- 
dant à ce que la « méthode prophylactique (au moyen de la pro- 
tection mécanique de l'habitation contreles Moustiques) soit appli- 
quée dans l’armée, notamment dans les casernements militaires 
de Madagascar où abondent les Moustiques propagateurs du palu- 
disme. » 

Deux années se sont écoulées : le paludisme a atteint l’effroyable 


(1) Cf. Journal officiel de Madagascar et dépendances, 26 mai 1906, p. 13.682. 


200 R. BLANCHARD 


extension que l’on sait et l’on attend toujours l'exéc tio. des me- 
sures de prophylaxie sur l'urgence desquelles l'Académie s'est 
prononcée deux fois. L'état sanitaire de notre grandeñcolonie sud- 
africaine est devenu si grave que l'Académie ne se lassera pas de 
faire entendre sa voix autorisée et qu'elle voudra émettre, une 
fois encore, le vœu que soient appliquées, sans nouveau délai, dans 
toute l'étendue de la colonie de Madagascar et dans ses dépendances, 
toutes les mesures prophylactiques dont l'efficacité est actuellement in- 
discutable, notamment : comblement ou pétrolage des eaux stagnantes 
etusage général de toiles métalliques dont le diamètre ne peut être supé- 
rieur à un millimètre. 


INDEX BIBLIOGRAPHIQUE 


BLAncHARD (R) 


1902. — Climat, hygiène et maladies, in Madagascar au début du xx! siècle. 
Paris, in-$° de vir-465 p.; cf. p. 397-452. 
1905. — Les Moustiques; histoire naturelle et médicale. Paris, in-8° de xr1- 
673 p. 
DARRICARÈRE (J.). 
1904. — Au pays de la fièvre. Impressions de la campagne de Madagascar. 
Paris, in 16 de xvin1-387 p. 
Dyé (L.). 
1902. — Notes et observations sur les Culicides. — I. Description de Hyzo- 


rhynchus Coustanti (Laveran). Archives de Parasitologie, VI, p. 359. 
KERMORGANT. 


1904 a. — Maladies épidémiques et contagieuses qui ont régné dans les co- 
lonies françaises en 1902. Bull. de l’Acad. de méd. (3), LI, p. 147-174; cf. p. 170. 
1904 b. — Sur le fonctionnement de l’Assistance médicale et de l’hygiène 


publique indigènes à Madagascar pendant l’année 1903. Zbidem, LIT, p. 65-92; cf. 
p. 86-90. 


1905. — Maladies endémiques, épidémiques et contagieuses qui ont régné dans 
les colonies françaises en 1903. 1bideim, LIIT, p. 287-312 ; cf. p. 308. 
1906. — Sur le fonctionnement de l’Assistance médicale et de l'hygiène publique 


indigènes à Madagascar pendant l’année 1904. 1bidem, LV, p. 206-227; cf. p. 225. 
LAVERAN (A.). 


1900. Sur un Anopheles provenant de Madagascar. Comptes rendus de la 
Société de Biologie, LH, p. 109. 

1902. — Sur des Culicides de Diégo-Suarez (Madagascar). Ibidem, LIV, p. 235. 

1903 a. — Sur des Culicides de Diégo-Suarez (Madagascar) et du Sénégal. Zbidem, 
LV, p. 149. 

1903 b. — Sur des Culicides de Madagascar et de Dakar (Sénégal). Ibidem, LV, 
p. 1327. 

1904 a. — Sur la prophylaxie du paludisme à Madagascar, principalement dans 
l'armée. Bulletin de l’Académie de medecine, (3), LI, p. 183-190. 

1904 b. — Anopheles et paludisme à Madagascar. Prophylaxie du paludisme. 


Ibidem, (3), LIT, p. 197-218. 

NEvVEU-LEMAIRE (M.). 

1906. — Mission du Bourg de Bozas en Afrique tropicale. Étude sur les Culi- 
cides africains. Archives de Purasilologie, X, p. 238 288; cf. p. 286. 


LE PALUDISME À MADAGASCAR 201 


VENY{RILION (E.). 

1904. — Description de Culicides de Madagascar. Bulletin du Muséum d'his- 
toire naturelle, X, p. 550-555. 

1905 a. — Cu! cides nouveaux de Madagascar. Arch. de Parasit., IX, p. 441-450. 

1905 db. — Culicides nouveaux de Madagascar. Bulletin du Muséum d'histoire 
naturelle, XI, p. 427-431. 

4905 c. — Note sur une nouvelle espèce de Moustique à Madagascar (Stegomyia 
Lamberti). Annales d'hygiène et de médecine coloniales, VITE, p. 217-220. 

1906 &. — Culex nouveaux de Madagascar. Bulletin du Muséum, XII, p. 100. 

4906 bd. — Stegomyia Cartroni, Culicide nouveau de Madagascar. Bulletin du 
Muséum, XL, p. 145. 

4906 c. — Cellia tananariviensis, Culicide nouveau de Madagascar, 9° genre 
de la sous-famille des Anophelina. Bulletin du Muséum, XII, p. 198. 


Discussion (1). 


M. KERMORGANT. — Dansla dernière séance, notre collègue, M. Blanchard, 
nous a entretenus du mauvais état sanitaire qui règne à Madagascar, et 
plus particulièrement à Tananarive, où le paludisme sévit avec intensité 
depuis quelques années, ainsi que j'ai eu l’occasion dele dire l’année der- 
nière, dans une note parue dans les ‘Annales d'hygiène et de médecine colo- 
niales (VIIL, p. 632). 

Je signalais dans cette note que le chiffre des décès par paludisme était 
déjà plus élevé pour les quatre premiers mois de 1905 que pour les mois 
correspondants des années précédentes. Et j'ajoutais: « Les mois de mai 
et de juin sont ceux où la mortalité est la plus élevée à Tananarive, ilya 
donc lieu de craindre que le paludisme, qui a déjà fait plus de victimes 
que d'habitude pendant les mois précédents, ne sévisse encore davantage 
au cours des deux mois précités. » Pour enrayer cette épidémie, les auto- 
rités locales ont pris les mesures suivantes: 

a) Des kabarys (allocutions) ont été faits à la population dans chaque 
quartier de la ville pour signaler le danger. On prescrivit en même 
temps l’asséchement et le comblement des petites mares, des dépressions, 
des trous d'eau, la suppression de tous les récipients dans lesquels l’eau 
est abandonnée à l'air libre, l'enlèvement ou la destruction par le feu 
des herbes et des diverses Graminées qui couvraient les talus d'une végé- 
tation parasite. Ces kabarys ont été faits par le gouverneur malgache, 
assisté du médecin inspecteur et du brigadier indigène, chef du poste de 
police de l'arrondissement. 

Les médecins inspecteurs indigènes insistaient, de leur côté, sur la 
nécessité de prendre régulièrement de la quinine en quantité suffisante. 

b) Outre les kabarys officiels et les conférences médicales, on a porté à 
la connaissance de la population, par l'organe du journal le Vaovao, par 
le moyen de placards et de brochures, par l'intermédiaire des institu- 
teurs publics et privés, etc., les moyens à employer pour arrêter les pro- 
grès du paludisme et le traitement à suivre pour le guérir. 


1; Bulletin de l’'Acad. de méd., (3), LVI, p. 110, séance du 17 juillet 1906. 
Archives de Parasitologie, XI, n° 2, 1907. 14 


202 R. BLANCHARD 


ce) Des équipes d'indigènes, sous la direction d'un surveillant européen 
et sous le contrôle du conducteur de la voirie, procédaient à l’assèche- 
ment et au comblement des fossés, des marais, des dépressions et des cu- 
vettes naturelles dépendant du domaine public. Les caniveaux, les fossés, 
les talus, les terrains vagues, les parties marécageuses de la ville, ont 
été l'objet de soins particuliers. Le comblement, au moyen de terres 
rapportées, de la rizière dite de la Reine avait déjà été décidé à cette épo- 
que. De plus, ainsi que vous l’a indiqué notre collègue, M. Blanchard, des 
mesures ont été prises pour que la quinine soit vendue à un prix très 
modique, cinq centimes le gramme. Ce prix étant encore trop élevé, elle 
est distribuée gratuitement depuis le mois de février dernier : il n’est pas 
inutile de rappeler que, dès 1903, le général Galliéni avait pris les mêmes 
dispositions pour les indigents. Un arrêté de ce mème gouverneur pres- 
crivait aux administrateurs de délivrer des passe-ports sanitaires aux 
indigènes des hauts plateaux allant travailler à la construction du che- 
min de fer. Ces ouvriers devaient s'arrêter dans toutes les formations sani- 
taires de la route, où on leur faisait absorber des doses de quinine, en 
présence du médecin. Les mêmes mesures étaient prises au retour. De 
plus, des brigades de médecins indigènes, sous la conduite d'un médecin 
européen, étaient dirigées chaque année sur les localités où sévissait l'é- 
pidémie paludique; ils y pratiquaient des injections sous-cutanées de 
quinine en masse. Ainsi que l’on peut en juger par cette courte énuméra- 
lion, on n’est jamais resté inactif en présence du fléau. 

La recrudescence du paludisme sur les hauts plateaux a toujours coïn- 
cidé avec la saison des pluies et une pullulation plus grande des Ano- 
pheles. Dans ces régions, les pluies commencent vers la fin de novembre et 
tombent chaque jour par averses torrentielles, souvent sans discontinuer, 
de trois heures de l'après-midi à minuit ou deux heures du matin. Il 
est difficile, pour ne pas dire impossible, que dans ces conditions, il ne 
se forme pas des flaques, alors que les rues de Tananarive, transfor- 
mées en ruisseaux, ne sont praticables qu'en filanzanes. Quiconque con- 
nait la topographie de la capitale de l'Emyrne, située au fond d’une cu- 
vette vallonnée, ne taxera jamais d'imprévoyance l'administration qui ne 
peut changer les conditions locales. On se rendra compte d’ailleurs des 
difficultés que l’on éprouve à éviter la formation des marécages sur les 
routes pendant la saison des pluies, quand on saura qu'une somme de 
1.600.000 à 1.800.000 francs est prévue chaque année au budget local, 
pour l'empierrement et la construction des routes sur le haut plateau. 
D'autre part, on ne peut songer à détruire les rizières qui enserrent Tana- 
narive de toutes parts et sont des nids à Moustiques. 

La recrudescence du paludisme sur les hauteurs de Madagascar a été 
attribuée à différentes causes sur lesquelles je ne reviendrai pas, mais 
il ne faudrait pas croire que l’'endémie n’a paru dans les régions 
élevées de l'ile qu'au cours de ces dernières années. Ainsi que j'ai eu 
l’occasion de le dire à cette tribune (Bulletin de l’Académie, LV, p. 255), 


LE PALUDISME À MADAGASCAR 203 


quelques points de ces régions ont toujours joui d'une réputation d'in- 
salubrité et la génération actuelle a conservé le souvenir d'une affection 
fébrile, à caractère intermittent, survenue en 1878, et réapparaissant chaque 
année à la saison d'hivernage et à l'époque de la culture des rizières. 

L'apparition du paludisme sur les hauteurs n'est pas particulière à 
Madagascar, nous l’observons en Annam, au Tonkin, et aussi à la Réu- 
nion. Dans cette dernière colonie, les hauteurs de 300 mètres étaient au- 
trefois considérées comme à l'abri de la fièvre, aujourd’hui nous en cons- 
tatons par 1.214 mètres d'altitude, dans le cirque de Cilaos. Les Ano- 
pheles ont gagné peu à peu les altitudes dans cette région de la Réunion, 
sans que l’on y ait fait des travaux. Il est probable que ces Culicides dont 
nous ne connaissons qu'impariaitement les mœurs, s’acclimatent peu à 
peu sur les hauteurs, de même que leurs larves ont fini par s’acclimater 
dans les eaux salées. Ce qu'il y a de certain, c’est que les bouffées de 
paludisme coïncident toujours avec la présence plus nombreuse de ces 
Diptères dont la multiplication a lieu dans des conditions qui nous échap- 
pent. Nous les voyons, en effet, apparaître subitement dans une région 
et disparaitre de même sans que nous sachions pourquoi. 

Un des bons moyens de se préserver de la piqüre de ces Insectes et 
par suite de la fièvre est de faire apposer des toiles métalliques à toutes 
les ouvertures des habitations. Ce mode de préservation a fait ses preu- 
ves, mais combien il est difficile à appliquer ! Tout le monde n'est pas en 
effet convaincu de la transmission de la fièvre par le Moustique et la pre- 
mière chose à faire serait de convaincre les récalcitrants. D'autre part, 
on ne peut songer à appliquer ce mode de protection aux cases indigènes 
qui ne*‘s'y prêtent pas; il n'est pratique que pour les bâtiments collectifs. 
Là encore, on se heurte à de grosses difficultés. L'essai de toiles métal- 
liques a été fait dans des casernements du Sénégal; les hommes n'ont 
pas voulu rester dans les chambrées ainsi protégées, prétextant qu'ils y 
manquaient d'air et sont allés dormir sous les vérandas. Le thermomètre 
n accusait cependant pas une température plus élevée dans les chambrées 
protégées que dans celles qui ne l'étaient pas, mais il est certain que la 
toile métallique tamise la brise et que l'on n'a plus cette sensation de 
iraicheur qu’elle procure quand rien ne vient l'arrêter et que l’on aime 
tant à ressentir aux pays chauds. 

Aussi, tout en reconnaissant que le vœu formulé par M. Blanchard 
peut avoir son utilité, nous estimons qu'ii serait urgent, avant tout, de 
faire des conférences aux hommes de troupe pour les mettre au courant 
des bienfaits de la protection mécanique, afin qu'ils ne soient pas tentés 
de s’y soustraire ou de les rendre inutiles en perçant les toiles à coups de 
baïonnettes pour avoir plus d'air, ainsi que cela s’est passé jadis en Italie. 


M. A. Lavera. — Notre collègue M. R. Blanchard nous demande de 
voter le vœu que soient appliquées, sans nouveau délai, dans toute l'étendue 
de la colonie de Madagascar et dans ses dépendances, toutes les mesures dont 


20% R. BLANCHARD 


l'efficacité est actuellement indiscutable notamment : comblement ou pétro- 
lage des eaux stagnantes et usage général de toiles métalliques dont le dia- 
mètre ne peut êlre supérieur à un millimètre. 

Je suis un partisan convaincu des mesures prophylactiques préconisées 
par notre collègue (mesures d'ailleurs classiques aujourd'hui dans la 
lutte contre le paludisme) ; je connais les services qu'elles ont rendus en 
Italie, en Corse, en Algérie, à Cuba, au Sénégal et à Ismailia ; je crois 
que ces mesures sont applicables partiellement à Madagascar, mais 
j'estime que l’Académie ne peut pas, en votant le vœu tel qu'il est for- 
mulé, mettre les pouvoirs publics en demeure de combler ou pétroler, sans 
délai, les eaux stagnantes dans toute l'étendue de la colonie de Madagascar 
et de ses dépendances et de garnir de toiles métalliques toutes les habilations. 

M. Blanchard qualifie de très simples les mesures qu'il préconise pour 
enrayer la grave épidémie de paludisme qui sévit sur Madagascar; je 
crois au contraire que ces mesures sont d'une application extrémement 
difficile, pour ne pas dire impossible. 

La superficie de Madagascar est de 600.000 kilomètres carrés, elle 
dépasse donc celle de la France; la principale culture du pays est Ie Riz; 
or, qui dit rizière dit eau stagnante; les rizières à eau courante sont 
rares et, même dans ces dernières, il y a toujours des points où le cou- 
rant est nul ou assez faible pour permettre la pullulation des Culicides ; 
ajoutons que les voies de communication sont rares et que la population 
indigène est ignorante et misérable. Comment, dans ces conditions, assu- 
rer le comblement ou le pétrolage de toutes les eaux stagnantes ; comment 
protéger à l’aide de toiles métalliques les misérables huttes dans lesquel- 
les habitent les Malgaches ? 

Ainsi que M. Blanchard a bien voulu le rappeler, c'est sur ma propo- 
sition que l'Académie de médecine a émis, en 1904, un vœu en faveur de 
l'emploi de la protection mécanique de l'habitation contre les Moustiques 
à Madagascar, mais il s'agissait surtout de protéger nos soldats. 

Si l'Académie désire clore cette discussion par un vœu, j'estime qu'il y a 
lieu de modifier la rédaction du vœu qui a été formulé par M. Blanchard. 


M. R. BLANCHARD. — J'ai écouté avec le plus vif intérêt les renseignements 
que M. Kermorgant vient de nous communiquer. Grâce à ses importantes 
fonctions au ministère des Colonies, notre collègue peut prendre con- 
naissance de documents officiels qui ne sont pas accessibles à d'autres 
personnes ; de là l'intérêt si particulier que présentent d'ordinaire ses 
communications. Dans le cas présent, les faits qu'il vient d'exposer ne 
font que confirmer ceux que j'ai moi-même fait connaître ; ils sont une 
preuve nouvelle et irrécusable de la gravité de la situation que j'ai cru 
devoir signaler à la sollicitude de l'Académie. Je remercie donc très vive- 
ment M. Kermorgant de donner l'appui de sa grande autorité à la thèse 
que j'ai défendue ici même. 

Qu'il me permette toutefois de lui faire observer que les mesures 


LE PALUDISME A MADAGASCAR 205 


adoptées jusqu'à ce jour par l'administration locale sont tout à fait 
insuffisantes. Elles laissent une trop grande part à l'initiative privée ; 
on compte trop sur le bon vouloir des indigènes ; les kabarys, même 
officiels (les palabres, comme on dirait à la côte occidentale d'Afrique), 
n'ont qu'une portée illusoire et n'ont aucune sanction. De même, la 
distribution de la quinine aux indigènes impaludés ne peut avoir d'eftet 
vraiment utile qu’à la condition d'être poursuivie méthodiquement, au 
lieu de se faire, comme à présent, d'une manière intermittente et, pour 
ainsi dire, accidentelle. D'autres mesures s'imposent, et notre collègue 
est bien évidemment de cet avis : &« tout le monde, dit-il, n'est pas con- 
vaincu de la transmission de la fièvre par le Moustique et la première 
chose à faire serait de convaincre les récalcitrants. » 

En attendant que la lumière se fasse dans l'esprit de ces derniers, le 
paludisme continuera ses ravages, la mortalité, déjà effroyable, atteindra 
des chiffres inconnus jusqu’à ce jour et notre colonie, déjà gravement 
compromise, sera devenue le tombeau commun des indigènes et de ceux 
de nos compatriotes qui, soldats, administrateurs ou colons, auront été 
exposés sans défense à un fléau chaque jour plus envahissant. La situa- 
tion est critique : elle ne permet plus d’atermoiements. L'Académie est 
trop convaincue de la réalité de la transmission du paludisme par les Ano- 
phelinæ pour ne pas adopter, sinon dans sa forme, tout au moins dans 
son esprit, le vœu que je propose. 

En efiet, rien ne s'oppose d'une façon absolue à ce que la protection 
mécanique des habitations devienne générale dans les régions actuelle- 
ment décimées par le paludisme. Les cases des indigènes, construites en 
feuilles de Palmier, sont très mal closes et offrent mille ouvertures par 
où peuvent pénétrer les Moustiques; elles sont, à cet égard, tout à fait 
comparables aux paillottes où vivent, jusqu'aux portes de Rome, Îles 
«contadini » de la campagne romaine. On sait quel effroyable tribut ces 
travailleurs agricoles payaient à l'endémie palustre; c’est vraiment le cas 
de dire, avec le fabuliste : 


Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés. 


Or, par les soins du professeur Celli et de ses collaborateurs, on a 
entrepris la protection systématique de ces paillottes au moyen de toiles 
métalliques, et l’état sanitaire s'est aussitôt amélioré de la façon la plus 
remarquable. Je ne puis entrer ici dans plus de détails; ces faits sont 
bien connus ou, du moins, aucun médecin ne devrait plus actuellement 
les ignorer et, encore moins, douter de leur réalité. On en trouvera tout le 
détail, soit dans mon livre : Les Moustiques, histoire naturelle et médicale, 
soit dans les Atti della Società per gli studi della malaria, soit encore dans 
les Annali d'igiene sperimentale. 

La cause est entendue et ce qui se pratique avec succès en Italie peut 
tout aussi bien être appliqué à Madagascar. 11 n’y a à cela aucune difficulté 
d'ordre théorique et c’est pourquoi j'ai pu qualifier de très simples les 


206 R. BLANCHARD 


mesures que je préconise. En émettant une telle opinion, je n'envisage, 
cela va sans dire, que le côté scientifique de la question; le côté pratique, 
avec ses conséquences financières, ne saurait nous préoccuper ici. Il 
n'appartient qu'à l'administration locale d'aviser, suivant les circons- 
tances, aux meilleurs moyens pour engager contre les Moustiques une 
lutte sans trêve ni merci, dont il est de notre devoir de lui indiquer les 
diverses modalités. 

Au nombre de celles-ci figurent le pétrolage et le comblement des 
eaux stagnantes. M. Laveran me reproche de réclamer la suppression des 
rizières! Notre collègue, assurément, a mal lu ma communication, car 
je n'ai rien dit de semblable; pour éviter une confusion possible (et j'étais 
loin de supposer que celle-ci dût être faite par M. Laveran), j'ai systéma- 
tiquement laissé de côté les rizières, pour ne parler que des flaques d’eau 
entourant les habitations. Je n'ignore point que le riz constitue l'aliment 
essentiel des Malgaches; je sais même que les Hovas, venus de l'archipel 
malais, ont apporté avec eux cette denrée, qu'aucune personne sérieuse 
ne peut songer à leur enlever. Done, les rizières sont hors de cause; tout 
au plus peut-on songer à réglementer la distance à laquelle les habitations 
pourront être établies, par rapport à celles-ci. 

D'ailleurs, il est de connaissance vulgaire que les Culicinæ, qui ne 
transmettent pas le paludisme, gitent de préférence dans les eaux sta- 
gnantes, boueuses ou corrompues, dont les rizières sont le type, tandis 
que les Anophelinæ, qui propagent l’'endémie palustre, recherchent des eaux 
plus limpides et spécialement de petites collections liquides, telles que 
les flaques laissées çà et là par les pluies, les eaux résiduelles accumulées 
dans les tessons de poterie, etc. Tout cela est bien connu; M. Laveran 
ne peut l'ignorer; son objection relative aux rizières est donc sans 
eftet. 

M. Laveran a pu être trompé sur mes intentions par la formule même 
du vœu que je propose. Cette formule est, en effet, quelque peu générale, 
maiselle résume, en termes aussi brefs que possible, les raisons exposées 
dans mon travail. Le sens exact d'une loi se déduit de l'exposé des motifs; 
de même, le sens et la portée de mon vœu doivent être très clairs pour 
quiconque a pris la peine de me lire. Toutefois, comme toute fausse inter- 
prétation ne peut qu'être préjudiciable au but que je poursuis, je suis 
tout disposé à préciser davantage le texte de mon vœu, tout en lui lais- 
sant son sens général. 


M. Le PRÉSIDENT. — M. Blanchard estime-t-il que les explications qu'il 
vient de présenter aux objections de MM. Kermorgant et Laveran sont une 
justification suffisante des termes de ses conclusions, sans qu'il soit besoin 
de les soumettre à un vote ? 


M. R. BLANCHARD. — Quelque déférence que j'aie pour l'avis si autorisé 
de M. le Président, je pense qu'il est indispensable, vu l’urgence des me- 
sures à prendre, que l’Académie procède au vote du vœu que je lui ai 


LE PALUDISME A MADAGASCAR 207 


proposé. La situation sanitaire de Madagascar est très grave; on ne com- 
prendrait pas que l’Académie, saisie de cette question, reculât devant 
l'émission d’un vœu, düt-il rester sans effet. 

Le 3 juillet dernier, j'ai proposé à l’Académie de déclarer « qu'il est 
urgent d'interdire d’une façon absolue l'arrosage des cultures avec l’en- 
grais humain ». Le Bureau n’a pas cru devoir soumettre ce vœu au suf- 
frage de l'Académie, sous prétexte qu'il va à l'encontre de la loi sur 
l'épandage. Je suis plein de respect pour les décisions du Bureau, mais je 
crois qu'en la circonstance il se montre trop timoré. 

L'Académie n'est pas seulement un corps consultatif, apte à répondre 
aux questions qui lui sont posées par les pouvoirs publics; j'estime, pour 
ma part, que son rôle est plus élevé et qu'elle a la mission très impor- 
tante d'éclairer l'opinion et d'indiquer à ces mêmes pouvoirs publics quels 
dangers menacent la population, quelles mesures sont capables de détour- 
ner ces dangers. Son rôle tutélaire, sa vigilance éclairée ne doivent pas 
s'étendre seulement sur tout le territoire de la métropole; ils doivent 
également viser nos colonies et les pays soumis à notre protectorat. Si les 
pouvoirs publics, dûment éclairés par nous, ne tiennent aucun compte de 
nos avis, nous n'en subissons aucun échec; nous avons, au contraire, la 
satisfaction d'avoir accompli un devoir impérieux. 

En me basant sur ces considérations générales, j'estime donc que la 
question que j'ai soulevée comporte un vœu auquel l’Académie ne peut se 
soustraire, quelque formule qu'on lui donne. 


M. Roux. — J'ai écouté avec attention l'intéressante communication de 
M. Blanchard sur la situation sanitaire actuelle de Madagascar. 

Je crois qu'il serait sage de charger une Commission d'élaborer, pour 
la prochaine séance, un projet de vœu, tenant compte des diverses obser- 
vations qui viennent d'être émises. 


M. R. BLancHaRD. — J'y consens volontiers. 


M. CHANTEMESSE. — La méthode de lutte contre le paludisme proposée 
par M. Blanchard n'est pas autre chose que la méthode classique, insti- 
tuée en Corse par M. Laveran, suivie à Ismaïlia, en Italie, etc. Le gou- 
verneur de Madagascar en connait les détails aussi bien que nous et iln'y 
a pas grande utilité à lui spécifier la largeur des mailles des treillis mé- 
talliques des portes et fenêtres. Un plan de lutte ne peut être utilement 
dressé que dans l'ile même (1). 


M. LE PRÉSIDENT. — Ce sera l'affaire de la Commission. 


(1) Je n’ai pas relevé, au cours de la discussion, la façon dont M. Chantemesse 
écrit l’histoire; je dois le faire ici. La lutte contre les Moustiques au moyen des 
toiles métalliques n’a été nullement « instituée en Corse par M. Laveran, suivie 
à Ismaïlia, en Italie, ete. » La vérité, connue de chacun, c’est que cette méthode, 
déjà pratiquée anciennement en France et dans les colonies françaises, a été 
appliquée en Italie par Grassi et Celli (1900), avec le succès que l’on sait, en 
même temps que par Low et Sambon; les résultats en étaient publiés depuis 


208 R. BLANCHARD 


M. CHANTEMESSE. — Quant à la question de l'épandage pratiqué sur les 
légumes mangés crus, il y a plusieurs années que le Comité consultatif 
d'hygiène publique a adressé aux pouvoirs publics une demande pour la 
suppression de l’épandage sur de tels légumes. 

Le vœu de M. Blanchard est la reproduction de la demande du Comité 
consultatif faite après le rapport de MM. Wurtz et Bourges, sur cette 
question. MM. Wurtz et Bourges ont fait non seulement une mise au point 
de cette étude, mais ils ont apporté des expériences personnelles con- 
cluantes. Leur travail mérite de ne pas être oublié. 


M. LE PRÉSIDENT. — La proposition déposée à la dernière séance par 
M. Blanchard est renvoyée à l'examen d'une Commission composée de 
MM. Roux, Laveran, Kermorgant, Chantemesse et Blanchard. 


RAPPORT 


Sur un vœu relatif à la prophylaxie du paludisme à Madagascar, au nom 
d'une Commission composée de MM. BLANCHARD, CHANTEMESSE, KER- 


MORGANT, Roux et 
LAVERAN, rapporteur (1). 


Dans la séance du 17 juillet, l'Académie a nommé une Commission qui 
a été chargée de rédiger un vœu au sujet des mesures prophylactiques à 
prendre pour atténuer la gravité de l’endémo-épidémie palustre qui sévit 
à Madagascar. 

Votre Commission tient d'abord à constater que les Gouverneurs de 
Madagascar et le Corps de santé des Colonies ont entrepris déjà cette 
lutte contre le paludisme. C’est ainsi que la quinine est aujourd'hui ven- 
due à très bas prix à Madagascar et même distribuée gratuitement aux 
indigents. L'emploi préventif de la quinine est d'une utilité incontestable 
dans la prophylaxie du paludisme, les mesures prises à Madagascar pour 
faciliter cet emploi méritent donc notre entière approbation. 

Nous pensons qu'il ne nous appartient pas d'arrêter le programme des 
mesures complémentaires à prendre; une Commission formée à Tanana- 
rive et composée de médecins connaissant bien le pays nous parait beau- 
coup mieux indiquée pour cet objet. 
deux ans, quand la Ligue corse contre le paludisme se fonda et fit appel aux 
conseils de M. Laveran (a). — Note ajoutée. 

(1) Bull. de l’Acad. de méd., (3), LVI, p. 132-133, séance du 24 juillet 1906. — La 
Commission constituée le 17 juillet s’est réunie une seule et unique fois, avant la 
séance du 24 juillet. En dehors de toute discussion et sans en avoir aucunement 
reçu mandat, M. Laveran a donné lecture du rapport ci-contre, qu'il avait jugé 
bon de rédiger au préalable. Je n’ai pas relevé un procédé aussi insolite, dans 
un but de conciliation que chacun appréciera. Il m’est du moins permis de faire 
observer que les conclusions proposées par M. Laveran, el que j'ai votées avec 
les autres membres de la Commission, ne sont que la paraphrase de; arguments 
exposés dans mon mémoire. — Note ajoutée, 

(a) R. BLancHarp, Les Moustiques, histoire naturelle et médicale, 1905; cf. 
P. 569-576 et 593. 


LE PALUDISME À MADAGASCAR 209 


Cette Commission devra naturellement s'inspirer des données, aujour- 
d'hui classiques, relatives au rôle des Anopheles dans la propagation du 
paludisme, en tenant compte des circonstances particulières à Madagas- 
car. 

Peut-être pourrait-on organiser à Madagascar une Société analogue à 
la Ligue contre le paludisme qui a rendu de grands services en Corse. 
Pour une œuvre aussi difficile que l'assainissement de Madagascar, il faut 
faire appel à toutes les bonnes volontés et une première obligation s’im- 
pose, c’est d'instruire les populations, de leur faire connaître quelle est 
la cause du paludisme et comment la maladie se propage. 

Nous proposons à l'Académie d'émettre le vœu suivant : 

L'Académie, considérant que l’endémo-épidémie palustre continue à 
s'étendre et à s’'aggraver à Madagascar, malgré les mesures déjà prises, 
émet le vœu qu'une Commission soit formée à Tananarive pour rechercher 
les causes des progrès inquiétants que fait le paludisme et les nouvelles 
mesures à prendre pour combattre ce fléau. 

— Le vœu, mis aux voix, est adopté. 


0 


Observations à l’occasion du procès-verbal (1). 


M. R. BcancHarp. — L'Académie n'ayant pas de sténographes, on com- 
prend que les notes remises pour le procès-verbal, par les personnes qui 
ont pris inopinément la parole dans une discussion, ne soient pas textuel- 
lement conformes à l'improvisation. Du moins, la bonne foi la plus 
élémentaire exige-t-elle que ces notes, rédigées après coup, se rapprochent 
autant que possible des paroles prononcées au cours de la discussion et 
qu'on n'y introduise pas des attaques ou des imputations auxquelles le 
contradicteur n'aurait pas été à même de répondre. Ces principes sont la 
sauvegarde de notre dignité; sans eux ne saurait exister la courtoisie 
qu'on se doit entre collègues et qu'il est traditionnel d'observer dans les 
discussions académiques. 

Or, en lisant le compte rendu de la dernière séance (p. 118), j'ai été 
très surpris d'y trouver, sous la signature de M. Chantemesse, le passage 
suivant : 

€ Quant à la question de l'épandage pratiqué sur les légumes mangés 
crus, il y a plusieurs années que le Comité consultatif d'hygiène publique 
a adressé aux pouvoirs publics une demande pour la suppression de 
l’'épandage sur de tels légumes. 

« Le vœu de M. Blanchard est la reproduction de la demande du Comité 
consultatif faite après le rapport de MM. Wurtz et Bourges, sur cette 
question. MM. Wurtz et Bourges ont fait non seulement une mise au point 
de cette étude, mais ils ont apporté des expériences personnelles conclu- 
antes. Leur travail mérite de ne pas être oublié. » 


(1) Bull. de l'Acad. de méd., (3), LV, p. 125-131, séance du 24 juillet 1906. 


210 R. BLANCHARD 


La personnalité de MM. Wurtz et Bourges, introduite dans ce débat par 
M. Chantemesse, doit rester hors de cause. Mais je ne puis laisser passer 
sans une protestation énergique l'affirmation gratuite émise par notre 
collègue. D'abord, parce qu’elle n’a pas été énoncée en séance et qu'elle 
rentre ainsi dans cette catégorie d'additions inadmissibles dont je parlais 
tout à l'heure. Ensuite, parce qu’elle est absolument contraire à la vérité, 
ainsi qu'il me sera facile de l’établir. 

Du 10 au 17 août 1900, s’est tenu à Paris le X° Congrès international 
d'Hygiène et de Démographie. Le Comité d'organisation m'avait chargé de 
présenter à la première section (Microbiologie et Parasitologie appliquées 
à l'Hygiène) un rapport intitulé : Du rôle des eaux et des légumes dans 
l'étiologie de l’helminthiase intestinale. Ce rapport, le voici; j'ai l'honneur 
d'en déposer un exemplaire entre les mains de M. le Président, avec prière 
de le transmettre à la bibliothèque de l'Académie. Il a été imprimé avant 
l'ouverture du Congrès et distribué par centaines d'exemplaires aux mem- 
bres de la première section. Il se termine par cette phrase non équivoque : 
la pratique des maraîchers de Provence, qui arrosent leurs cullures avec 
l'engrais humain, doit être formellement interdite. 

Ce point important se trouvait alers soulevé pour la première fois au 
sein d'une assemblée savante; il fut l’objet d'une discussion à laquelle M. 
Laveran prit part; on reconnut l'urgence de l'interdiction demandée et la 
section, par un vote unanime, adopta sur ma proposition le vœu suivant: 
on interdira d'une façon absolue l’arrosage des cultures avec l’engrais 
humain. Ce même vœu fut également adopté à l'unanimité par le Congrès, 
dans son assemblée générale de clôture, puis transmis au ministre de 
l'Intérieur par notre collègue M. Lannelongue, président du Congrès, qui 
voulut bien alors m'en aviser. 

Mon rapport et le vœu consécutif ont été signalés à l’époque dans les 
journaux de médecine (1), puis reproduits intégralement, au cours de 
cette mème année 1900, dans les Archives de Parasitologie (2) et dans le 
Compte rendu du Congrès international d'Hygiène et de Démographie (p. 
51-56). Or, c'est seulement en juillet 1901 que MM. Wurtz et Bourges ont 
publié le travail auquel M. Chantemesse fait allusion (3) et c'est seulement 
en 1902 que M. Wurtz a présenté au Comité consultatif d'hygiène publi- 
que un rapport (4) dont le texte ne fut publié qu’en 1904. 


(1) Bulletin médical, p. 1057 et 1058, 8 septembre 1900. 

(2) Tome III. p. 485-491, fascicule 3, paru le 15 octobre 1900; pour la date de 
publication de ce fascicule, cf. p.648. 

(3) R. Wurrz et H. BourGes, Sur la présence de Microbes pathogènes à la sur- 
face des feuilles et des tiges des végétaux qui se sont développés dans un sol 
arrosé avec de l’eau contenant ces micro-organismes. Archives de médecine 
expérimentale, XIII, p. 575-579, juillet 1901. 

(4) Wurrz, Danger que peut présenter la consommation à l’état cru des 
légumes et des fruits provenant des champs d'épandage. Recueil des travaux 
du Comité consultatif d'hygiène publique de France, XXXHI, p. 93-96, 1902; 
publié en 1904. 


LE PALUDISME A MADAGASCAR 211 


A l’époque où ils firent leurs publications, MM. Wurtz et Bourges ne 
pouvaient donc ignorer mon rapport et mon vœu. Et pourtant, ils n'y 
font aucune allusion; en particulier, M. Wurtz discute le fait de l’adduc- 
tion des œufs d'Helminthes dans l'intestin par les eaux d'épandage et il 
passe totalement sous silence, non seulement mon rapport et mon vœu 
de l’année 1900, mais encore un travail beaucoup plus étendu que j'avais 
publié sur ce même sujet en 1890, c'est-à-dire dix ans auparavant, et qui 
eut alors trois éditions, dont une en langue espagnole (1). Voici le livre 
qui contient la version espagnole de mon travail; j'ai l'honneur de l'offrir 
à la bibliothèque de l’Académie. Il est vrai que les deux auteurs susdits 
ne connaissent pas davantage les importantes recherches de notre collè- 
gue M. Galippe sur l'existence de Microbes dans les tissus de végétaux 
cultivés dans les champs d'épandage (2): ils donnent comme une nou- 
veauté, en 1901, une constatation qui avait été déjà faite par M. Galippe 
quatorze ans auparavant. | 

On voit donc combien peu ces deux auteurs étaient au courant de la 
question étudiée par eux; je ne leur en fais aucun grief, car je répète 
qu'ils ne sauraient être mis en cause dans le présent débat. Je constate 
simplement que, bien loin de m'être inspiré de leurs travaux ou d'un vœu 
émis par le Comité consultatif d'hygiène, comme le prétend M. Chante- 
messe, c'est M. Galippe et moi qui aurions le droit de nous plaindre d'avoir 
été oubliés, attendu que nos travaux avaient respectivement une priorité 
de treize, dix et deux années. 

Mais il n'importe. Ce qui me semble particulièrement regrettable, c'est 
de constater que M. Chantemesse, qui pourtant devrait connaitre d'une 
façon approfondie les questions d'hygiène, n’est pas mieux renseigné que 
les deux auteurs précités. S'il avait eu la prudence de contrôler, avant de 
l'émettre, l'affirmation qu'il a insérée au procès-verbal, sans l'avoir d'ail- 
leurs formulée en séance, si même il avait pris la peine de lire ma com- 
munication, où je donne une référence bibliographique qui aurait 
pu éveiller son attention, il m'aurait évité l'obligation de rectifier ses 
inexactitudes. 


M. CHANTEMESSE. — Je suis extrêmement surpris de l'intervention de 
M. Blanchard. Vraiment, si j'avais modifié par écrit le sens de ce que 
j'avais dit de vive voix, si j'avais écrit noir après avoir dit blanc, je serais 


(4) R. BLancarp, Les animaux parasites introduits par l’eau dans l’orga- 
nisme. Revue d'hygiène et de police sanitaire, XII, p. 828-870 et 923-969, 
1890. Bulletin de la Société de médecine pratique et d'hygiène profession- 
nelle, XIII, p. 238-326, 1890. — Los animales parasitos introducidos por el 
agua en el organismo. Dans A. E. Sarazar y C. NEWMAN, Examen quimico y 
bacteriologico de las aguas potables. Londres, Burns y Oates, in-8° de xx1-513 
p., 1890; cf. p. 375-502. 

(2) V. Gazrppr, Sur la présence des micro-organismes dans les tissus végétaux. 
Journal des connaissances médicales, 1887. Présence des micro-organismes dans 
les végétaux. Zbidem, 1890. 


2 12 R. BLANCHARD 


impardonnable. (Voir sur cette question intéressante le Bulletin de l'Aca- 
démie, séance du 3 novembre 1903) (1). 

Voyons les faits dont il s'agit. 

J'ai dit en séance que le vœu présenté par M. Blanchard était la répéti- 
tion du vœu émis par le Comité consultatif, et j'ai ajouté, à la plume, que 
ce vœu avait été émis après avoir entendu le rapport de MM. Wurtz et 
Bourges, qui relatait des expériences personnelles concluantes et méritait 
de ne pas être oublié. J'ai fait cette addition, non pas pour contredire la 
parole prononcée par moi, en séance, mais pour l'appuyer, pour en per- 
mettre à tous le contrôle et montrer que je n'avais pas laissé échapper une 
phrase vaine. Cela s'appelle partout un acte de probité scientifique. Et 
c'est cela qui indigne M. Blanchard! 

En vérité, quelle est donc la sensibilité extraordinaire dont jouit notre 
collègue ! 

M. Blanchard croit-il qu'il a été le premier à signaler le danger de 
l’épandage sur des légumes mangés crus? Tel n’est pas mon avis. Il y a 
des années et des années que M. Metshnikov répète cette affirmation dans 
ses cours, et il y a plus longtemps encore que M. Cornil, dans son livre 
sur les Bactéries et dans ses rapports au Sénat, a parlé de ces faits et 
des expériences de M. Galippe. 

Toutefois, M. Blanchard a-t-il fait connaitre sur ce sujet, aujourd'hui 
ou autrefois, des idées nouvelles, des faits inconnus, des expériences 
inédites? Ils m'ont totalement échappé. Son travail sur l’épandage est ce 
qu'on nomme dans les laboratoires : une œuvre littéraire. 

Si MM. Wurtz et Bourges n'avaient apporté au Comité consultatif que 
des phrases grandiloquentes et creuses, il est probable que le Comité ne 
se serait pas laissé convaincre. Il exigeait autre chose; il demandait des 
faits nouveaux, des preuves, des expériences personnelles; et ces savants 
les lui ont fournies. C’est pourquoi il a été convaincu. 

Ma réponse sera donc très simple : 

1° Est-il vrai que la demande de M. Blanchard soit la répétition de la 
demande du Comité consultatif, faite après la lecture en séance du rapport 
de MM. Wurtz et Bourges ? 

C’est incontestable. Alors? 

2° Est-il exact que le rapport de MM. Wurtz et Bourges soit un travail 


(1) Cette allusion au procès-verbal de la séance du 3 novembre 1903 se trouve 
insidieusement-insérée dans la présente discussion; elle n’a pas été formulée en 
séance, sans quoi je ne l’eusse pas laissé passer : nouvel exemple de la singulière 
façon dont M. Chantemesse sait accommoder les textes, une fois qu’il a la plume 
à la main. 

J'aurais pu, le 31 juillet, remonter à la tribune de l’Académie et présenter de 
nouvelles observations à propos du procès-verbal de la séance précédente. Mais 
la chose en valait-elle la peine? De telles querelles n’ont rien de scientifique et 
ne sauraient intéresser l’Académie. Et puis, il est des gens qui se font de la cour- 
toisie et de la bonne foi une conception tellement personnelle qu'on perd son 
temps à discuter avec eux et à tenter de les convaincre. — Note ajoulée, 


LE PALUDISME A MADAGASCAR 213 


qui mérite le nom de scientifique, parce qu'il contient des faits nouveaux, 
des expériences personnelles et des résultats concluants ? À 

Certes. Alors ? 

3° Était-il nécessaire à ma démonstration de citer le travail qui avait 
emporté le vote du Comité consultatif d'hygiène publique de France? 

Sans doute. Alors ? 

L'Académie jugera. 


M. R. Bcancaarp. — C'est en vain que M. Chantemesse cherche des 
faux-fuyants et des échappatoires. La question doit rester sur le terrain 
où je l'ai placée; je ne la laisserai pas dévier. 

Le silence de M. Chantemesse sur les deux points que je lui reproche 
démontre assez clairement qu'il n’a rien à répondre. Ces deux points sont 
les suivants : 

1° M. Chantemesse a ajouté au procès-verbal de la séance du 17 juillet 
une note volontairement désobligeante, contenant des insinuations qui 
n'ont pas été formulées en séance. De pareilles additions au procès-verbal 
sont inacceptables; il ne s ‘élèvera pas une seule voix dans l'Académie pour 
les approuver. ' 

2 Inutile d'épiloguer au sujet de mon vœu sur la suppression de l'ar- 
rosage des cultures maraichères par l’engrais humain. J’ai incontestable- 
ment une priorité de deux années sur MM. Wurtz et Bourges, à qui M. 
Chantemesse attribue le mérite d'avoir attiré les premiers l'attention des 
pouvoirs publics sur le danger d'une telle pratique. Les dates et les textes 
sont précis : la démonstration est péremptoire ; M. Chantemesse n’a même 
pas la bonne grâce de le reconnaitre! 

Assurément, l'Académie jugera; le sens de son verdict ne fait aucun 
doute. 


M. Corniz. — M. Blanchard rappelle ses travaux, cela est tout naturel. 
Mais, on ne saurait élever de revendications de priorité à propos des dan- 
gers que présente l’'épandage des matières fécales; cela a été connu de 
tout temps. J'ai eu moi-même autrefois, à propos de l'établissement des 
champs d'épandage de Gennevilliers, à signaler les inconvénients que 
peut présenter ce système et, de méme, Pasteur et ses élèves ont fait des 
remarques analogues. 


M. R. BcancHaRp. — Je ne prétends aucunement avoir été le premier à 
signaler le danger de l’épandage des matières fécales ; j'affirme simplement 
avoir été le premier à obtenir d'un Congrès ou d'une Société savante quel- 
conque un vœu relatif à la suppression de l’arrosage des cultures marai- 
chères par l'engrais humain. 

A tort ou à raison, j'attache à ce fait une certaine importance. Le Con- 
grès d'hygiène s’est à l'unanimité prononcé en faveur de ce vœu, qui d’ail- 
leurs n’a pas eu de suite. Quelque dangers qui résultent d’une pratique 
aussi malsaine, une assemblée internationale, composée des personnalités 


214 R. BLANCHARD. — LE PALUDISME A MADAGASCAR. 


les plus compétentes, a du moins tenté d'éclairer l'opinion publique; la 
responsabilité du corps médical se trouve dégagée, de ce fait, et ce n'est 
pas un résultat négligeable. 


M. LE PRÉSIDENT. — La question est entendue. 


Note additionnelle. 


Depuis ma communication à l'Académie, j'ai continué à recevoir des 
renseignements sur la marche du paludisme à Madagascar et spéciale- 
ment sur l’état sanitaire de Tananarive; je les résume ci-après : 

L'épidémie a continué ses ravages et s’est encore développée, ainsi que 
je l'avais prévu. La population malgache est décimée. A la fin de juin 1906, 
le maire de Tananarive avouait 18.000 malades, qui recevaient des secours 
soit à domicile, soit dans les temples transformés en salles de consulta- 
tion; la mortalité était de 12 à 15 décès par jour. 

Il est hors de doute que cette grave épidémie est due à l’excessive 
multiplication de Myzomyia funesta : elle ne sévit avec intensité que là où 
cet Insecte abonde. Il est venu de la côte à Tananarive, par la route de 
l’est. Dans la seconde moitié de l’année 1903, ce Moustique était abondant 
à l'Institut Pasteur, et ne se trouvait que là; il n'existait ni à l'hôpital 
militaire, qui en est séparé par la route de l’est et par deux rizières en 
gradin, ni en ville. A cette époque et pendant 1904, on ne trouvait guère 
que des Cellia à l'hôpital militaire : le personnel hospitalier restait in- 
demne; en 1905, les Myzomyia se montrent à l'hôpital militaire et le palu- 
disme éclate violemment parmi le personnel hospitalier ; en 1906, ce per- 
sonnel tout entier est malade. 

L'état sanitaire s'est amélioré pendant les mois de juillet et août, non 
par suite des mesures prises, mais à cause de la saison froide; pour peu 
que persiste l'incurie actuelle, il s'aggravera de nouveau d'une façon ter- 
rible dès la fin d'octobre, c'est-à-dire au commencement des chaleurs. 
J'en attends la nouvelle avec anxiété. Puissé-je apprendre en même 
temps qu'on s'est enfin décidé à lutter contre ce fléau exterminateur par 
des moyens plus sérieux que ceux jusqu'à présent mis en œuvre! 


NOTES SUR LES IXODIDÉS. — V. 


PAR 


L.-G. NEUMANN 


Professeur à l’École vétérinaire de Toulouse. 


1. — RHIPICEPHALUS LUNULATUS D. SP. 


Mâle. — Corps presque pluslarge et un peu acuminé en arrière, 
long de 4mm (rostre compris), large de 1*"9 vers le tiers postérieur. 
Écusson convexe, brillant, brun noirâtre, sans taches, un peu 
débordé sur les côtés par l'abdomen; sillons cervicaux très courts; 
sillons marginaux profonds, occupés par de grosses ponctuations, 
commençant immédiatement derrière les yeux et arrêtés au sillon 
qui sépare le feston extrême du suivant; ponctuations grandes, 
distantes, en alignements irréguliers, une ligne prolongeant de 
chaque côté, en avant et un peu en dedans le sillon marginal; en 
avant, quelques autres ponctuations très 
fines, presque obsolètes; yeux plats, jau- 
nâtres, grands, marginaux. Face ventrale 
brun rougeûtre, ponctuée, à poils rares 
et très courts. Anus vers le tiers anté- 
rieur des écussons adanaux; ceux-ci 
réformes allongés, le bord interne con- 
cave, l'externe convexe, le postérieur en 0 nou 
échaneré en deux lobes inégaux dont nulalus Gt. — Extrémité 
l'externe spiniforme; écussons externes postérieure de la face ven- 
chitineux, saillants, spiniformes; pas de .n 
prolongement caudal. Péritrèmes étroits, allongés en virgule, à 
pointe recourbée vers la face dorsale. — Rostre long de 0°"55, à 
base dorsale plus large que longue, les angles latéraux saillants 
vers le tiers antérieur de la longueur, les postérieurs peu saillants. 
Hypostome un peu spatulé, à 6 files de dents. Palpes à peine plus 
longs que larges, plats à la face dorsale, le deuxième article aussi 
long que le troisième et rétréci en pointe à son bord postérieur 
dorsal. — Pattes relativement fortes. Hanches I à sommet anté- 


216 L.-G. NEUMANN 


rieur un peu visible à la face dorsale, deux épines très longues ; 
au bord postérieur des autres hanches, deux dents larges et plates. 
Tarses moyens, à deux éperons terminaux. 

Femelle. — Inconnue. 

D'après 2 S pris sur le Cheval, près des rives du Lualaba, dans 
l'État libre du Congo avec Rh. supertritus. — British Museum. 


2. — RHIPICEPHALUS SUPERTRITUS N. Sp. 


Mâle. — Corps près de deux fois aussi large vers le tiers posté- 
rieur qu'à l'extrémité antérieure, long de 5"" (rostre compris), 
large de 2mm8, — Écusson convexe, brillant, brun rouge noirâtre, 
sans taches, débordé par l'abdomen un peu sur les côtés, beau- 
coup en arrière des festons 
par d’autres festons chiti- 
neux, noiraätres, bordés de 
rouge safran et d'autant plus 
longs qu'ils sont plus pro- 
ches de la ligne médiane; 
sillons cervicaux superficiels, 
diffus; sillons marginaux 
profonds, larges, commen- 
çcantimmédiatement derrière 
Fig. 2. — Rhipicephalus supertritus OT. les yeux et arrêtés au sillon 

— Extrémité postérieure de la face dor- qui sépare le feston extrême 

sale. ; è 

du suivant; chaque sillon 
marginal est continué en avant par une crête festonnée, un peu 
plus rapprochée de la ligne médiane et qui va rejoindre le som- 
met du sillon cervical; festons très inégaux, les cinq médians trois 
fois aussi longs que larges, les autres décroissant graduellement 
jusqu'à l'extrême, qui est plus large que long; ponctuations pro- 
fondes, nettes, inégales sur le bourrelet marginal, sur les festons 
et un peu en avant d'eux; de là jusqu à l'extrémité antérieure, les 
ponctuations se transforment en des dépressions superficielles, 
irrégulières, inégales, allongées, plus creuses à leur extrémité 
antérieure, laissant entre elles presque autant de saillies bril- 
lantes etallongées, plus, de chaque côté, une fosse cervicale trian- 
gulaire unie, entre le sillon cervical et la crête marginale; plus en 


NOTES SUR LES IXODIDÉS 217 
arrière, cinq sillons longitudinaux, larges et profonds, dont le 
médian est bien plus long que les autres ; dans toutes les parties en 
creux de l'écusson, le tégument montre des plis transversaux 
- extrêmement fins. Yeux plats, grands, jaune clair, marginaux. 
Face ventrale jaunâtre, à ponctuations éparses, revêtue de longs 
poils blanchâtres dans ses deux tiers antérieurs. Anus vers le 
tiers antérieur des écussons adanaux; ceux-ci en forme de vir- 
gule renversée, le bord interne un peu concave, l’externe très 
convexe, le postérieur convexe; écussons externes chitineux, 
étroits, cinq fois aussi longs que larges. Au bord postérieur, onze 
festons non chitineux, les trois médians coniques, plus longs 
et plus saillants que les au- 
tres, le médian impair dépas- | 
sant ses voisins. Péritrèmes 
erands, en virguleallongée.— 
Rostre long de 0"°7, à base 
dorsale plus large que lon- 
gue, plus étroite dans ses 
deux tiers postérieurs, les 
angles postérieurs bien sail- 
lants. Hypostome ? Palpes 
un peu plus longs que larges, 
plats à la face dorsale; le 
deuxième article un peu plus Fig. de Rhipicephalus Supertrilus 1. — 

; Extrémité postérieure de la face ventrale. 
long que le troisième. — Pat- 
tes épaisses, fortes. Hanches I à sommet antérieur visible à la 
face dorsale, deux épines très longues; aux hanches IT et III une 
dent large et plate près de l'angle interne; deux dents semblables 
au bord postérieur des hanches IV. Tarses relativement petits et 
minces, à deux éperons terminaux. 


Femelle. — Inconnue. 
D'après 2 Gf pris sur le Cheval, près des rives du Lualaba dans 
l'Etat libre du Congo, avec Rh. lunulatus. — British Museum. 


Rh. lunulatus et Rh. supertritus seront déterminés par l'emploi du 
tableau suivant : 


1 YOUR AE RSR 
Yeux orbités. 
Archives de Parasitologie, XI, n° 2, 1907. 15 


IQ 


L.-G. NEUMANN 


à ( Sullon mareainal bien ÉnMIArQUE APP CAC APN PNR 
”  Sillon marginal nul. 
Écusson dorsalleoncolore "brun NC PORTE Re CT 
: Écusson dorsal blanc et noir . . . . . . . À. pulchellus. 
Écussons adanaux prolongés en pointe, leur bord pos- 
térieur droit ou convexe. . . . NPA 2 
à Écussons adanaux prolongés en te us de a. 
TIEUT CONCAVE SCA LE RME EN PET 
Bord postérieur du corps uni ou muni d'un 
à prolongement. 
° ) Bord postérieur du corps muni de trois pro- 
long ements ER ESe US MS UT A RUUS 
[usure adanaux à Doiute Dnneipale in- 
6 TERDB TE RO A RER ET NT TILOLOUS 
Écuscons als à pointe externe . . . . . À. lunulatus 
3. — MARGAROPUS LOUNSBURYI n. Sp. 
et sur le genre MarGaropus Karsch. 
Mâle. — Corps plat, ovale, à côtés convexes, plus large vers le 


milieu de la longueur, terminé en arrière par un prolongement 
conique, plus long que large et plus large qu'épais; longueur totale 


Fig. 4 


pus LounsburyiS". des ponctuations très rares, petites, inégales. 
— Face dorsale. 


(de l'extrémité antérieure du rostre à l'extré- 
mité du prolongement caudal) 3mm9 à 4mm3; 
largeur 1m/m9 à 2m/m3. Écusson peu convexe, 
brun marron foncé, brillant, ne recouvrant 
pas toute la face dorsale et laissant libre de 
chaque côté une marge étroite, finementstriée, 
qui se prolonge par l'appendice caudal der- 
rière le bord régulièrement arrondi de l'écus- 
son; en avant une échancrure profonde pour 
recevoir le rétrécissement cervical du rostre. 
Quelques poils très courts en arrière de la 
surface correspondant à un écusson femelle; 


À 


Sillons cervicaux superficiels, atteignant pres- 


que le tiers antérieur de la longueur de l’écusson ; pas de sillon 
marginal ni de festons postérieurs ; trois sillons postérieurs lon- 


NOTES SUR LES IXODIDÉS 219 


gitudinaux, le médian un peu plus court que les deux autres, qui 
s’'avancent jusque près du milieu de la longueur. Yeux très petits, 
déprimés, très peu visibles, marginaux, en arrière de l'émergence 
des pattes I. Bordure marginale revêtue, surtout dans sa moitié 
postérieure, de poils longs, réunis par 6 à 10 en bandes trans- 
versales. Appendice caudal portant, de chaque côté, à sa base, une 
saillie hémisphérique et revêtue d'un bouquet de poils longs; 


Fig. 5. — Margaropus Lounsburyi ©. — Face ventrale 


en arrière et de chaque côté, un bouquet dorsal et lâche de poils 
semblables, qui se relie à une bande ventrale et longitudinale de 
poils ; les deux bandes ventrales se réunissent en avant d'un autre 
appendice sous-caudal, chitineux, noirâtre, mousse, deux fois aussi 
long que large. Face ventrale brun rougeûtre, presque plane, à 
ponctuations peu profondes et éparses, revêtue de poils courts."Pore 
génital recouvert d'une valvule rétrograde, situé en regard du pre- 
mier espace intercoxal. Anus au sommet antérieur d'une profonde 
fosse médiane, limitée de chaque côté par un écusson adanal en 


290 L.-G. NEUMANN 


forme d'épine aiguë, longue, chitineuse, libre dans toute son éten- 
due; ces deux épines se réunissent sur la ligne médiane au bord 
antérieur de l'anus, formant ainsi une fourche à deux dents qui se 
prolonge en avant par une plaque impaire, lisse, jusqu'au niveau 
du dernier espace intercoxal 
Péritremés en ovale court, à 
bord brunâtre, l’orifice stigma- 
tique à peu près central, le fond 
blanchâtre et formédenombreu- 
ses granulations hémisphéri- 
ques et brillantes. — Rostre long 
de 500 » environ; base dorsale 
plus large que longue, sans sail- 
lie latérale, plus large en avant 
qu'en arrière, les angles posté- 
rieurs indiqués par deux petites 
saillies coniques. Chélicères à 
Fig. 6. — Margaropus Lounsburyi doigt long de 10 2,5 ; apophyse 
OR NS interne conique, subterminale, 
transversale, à base large, à sommet bifide; apophyse externe à 
deux dents, la terminale petite. Hypostome large, un peu plus 
long que les palpes, à huit files de 6-7 dents, précédées d’une surface 
chargée de très nombreux et très petits denti- 
cules. Palpes très courts (270 à 300), épais, le pre- 
mier article visible seulement à la face ventrale, 
sous forme de bande transversale; le second au 
moins aussi large que long, arrondi en dehors, 
plus large à la face dorsale, plus étroit à sa base et 
pourvu de poils coniques sur son bord externe dor- 
sal; le troisième près de deux fois aussi large que Pie 7 are 
long, formant en dehors, vers le milieu de Son pus Lounsbu- 
bord externe, une pointe courte; le quatrième  ?7Y? d:-— doigt 
; de la chélicère 
petit, court, cylindro-conique,subterminal. — Pat- gauche. x 255. 
tes fortes, épaisses, croissant de la première à la 
quatrième. Hanches contiguës subtriangulaires; I, IT et III pour- 
vues d'une très petite épine près de leur angle postéro-externe, 
plus à I une petite épine près de l'angle interne. Tarses tous coni- 
ques, semblables, croissant un peu de 1 à IV, une fausse articu- 


NOTES SUR LES IXODIDÉS 291 


lation distale à I, proximale à IL, IT et IV; un éperon terminal 
fort, long, précédé d'une épine au bord ventral et portant à sa 
base, au bord dorsal, un ambulacre à ventouse aussi long que 
l’éperon et terminé par deux ongles faibles. Tous les articles très 
chitineux, brun foncé à leur bord distal et ventral. A la 4° paire, 
le 2e article est subeylindrique; le 3°, fortement dilaté en dehors, 
est rendu ainsi rectangulaire, plus large que long, aplati d'un 
côté à l’autre, et sa fausse articulation proximale est indiquée par 
un petit disque d'insertion; le 4°, dilaté de même, est irrégulière - 
ment hexagonal: le 5°, moins dilaté, semble inséré par le milieu 
de son bord ventral sur le précédent; cette disposition donne, sur 
le bord dorsal de la patte, trois sinus profonds qui co rrespondent 
aux 2, æ et 4° articulations. La 3° paire montre une dilatation 
semblable, mais moins prononcée des mêmes articles ; le 3° et le 
4e sont rectangulaires, mais un. peu plus longs que larges ; le 5° se 
rapproche de la forme ordinaire, et les sinus articulaires sont 
moins profonds qu'à la 4° paire. Il en est de même et à un degré 
de plus en plus faible à la 2e et à la {re paire. 

Femelle. — Corps elliptique ou ovale (un peu plus large en avant 
qu'en arrière), généralement un peu étranglé dans le milieu (au 
niveau des stigmates), pouvant atteindre 16%® de long sur 10°" de 
large; de teinte gris jaunâtre (jeune) ou rouge brique foncé (repue 
et dans l'alcool). Ecusson dorsal glabre, très petit, plus long que 
large (environ 1mm{0 sur Omm92), échancré en avant pour enca- 
drer la base du rostre, à bords latéraux parallèles et un peu 
convexes d'abord, puis courbés et convergents à partir des yeux 
pour se réunir en un angle largement arrondi; sillons cervicaux 
bien marqués, partageant l'écusson en trois parties, la médiane 
deux fois au moins aussi large que les latérales. Yeux relativement 
grands, saillants, de la même couleur que l’écusson, vers le milieu 
de sa longueur. Ponctuations nulles. Couleur brun rougeàtre. Sur 
presque toute la longueur de la face dorsale, deux sillons longitu- 
dinaux, moins marqués en avant, s'arrêtant à peu de distance de 
l’'écusson et du bord postérieur; entre eux, un sillon impair occu- 
pant plus de la moitié postérieure de la longueur du corps. A la 
face ventrale, pore génital petit, très antérieur, en regard des 
hanches I. Sillons génitaux commençant seulement au niveau des 
hanches IT. Stigmates en ovale court, à grand axe longitudinal. 


299 L.-G. NEUMANN 


Des poils très courts, épars sur toute la surface du corps. — Aostre 
très court (600 x, de son bord postérieur dorsal au sommet de 
l'hypostome), la base plus de deux fois aussi large que longue, sub- 
hexagonale, enchâssée dans l'écusson par sa moitié postérieure, 
à côtés convexes, non anguleux; angles postérieurs non saillants; 
aires poreuses allongées transversalement, deux fois aussi larges 
que longues, et séparées par un intervalle bien inférieur à leur 
grand diamètre. Chélicères à doigt long de 11 # et semblable à 
celui du mâle. Hypostome semblable à celui du mâle, mais à 
8-9 dents par file, avec denticules antérieurs peu nombreux. 
Palpes semblables à ceux du mâle, plus longs, le 3° article moins 
anguleux en dehors. — Pattes très différentes de celles du mâle 
et conformes à celles de Warqgaro- 
pus annulatus ®, mais plus épais- 
ses, à articles brun foncé à leur 
extrémité distale. Hanches subtrian- 
gulaires, àsommet interne, arrondi ; 
une très petite épine vers le milieu 
du bord postérieur des hanches I. 
Articles 2 à 6 renflés à leur extré- 
a À irons TonConn mité distale. Tarses longs, terminés 

®. — Face dorsale du rostre, par un éperon long et relativement 

Nr grêle, précédé d'une petite épine au 
bord ventral et portant à sa base, au bord dorsal, un ambu- 
lacre à ventouse semblable à celui du mâle. 

Nymphe. — Corps long de 2mm à 2mm5, grisâtre, cordiforme 
(large en avant, atténué en arrière). Écusson aussi large que long, 
pentagonal. Pattes moniliformes, à articles courts et renflés à 
l'extrémité distale ; tarses courts. 

D'après 25 ©', 28 © et 5 nymphes, recueillis par Lounsbury en 
différents points des colonies du Cap et d'Orange. L'espèce s'est 
montrée en hiver sur les Chevaux, en bien moindre quantité sur 
les Bœufs. Elle paraît n'avoir qu'une seule génération dans l'année, 
comme les autres formes du même genre; elle effectue ses mues 
sur son hôte (Lounsbury). 

Observations. — Si l’on ne connaissait de cette espèce que le 
mâle, on serait embarrassé pour le rapporter à l'un des genres con 
nus, non seulement à cause des particularités si exceptionnelles 


NOTES SUR LES IXODIDÉS 293 


des pattes, mais encore et surtout à cause de celles des écussons 
adanaux. La présence de ces écussons rapproche l'espèce des 
genres Hyalomma et Rhipicephalus ; la forme du rostre l'éloigne des 
Hyalomma et il ne resterait de doute que pour Rhipicephalus. La 
connaissance de la forme femelle supprime toute hésitation. Il s’a- 
git évidemment d'une espèce voisine de ce que j'ai appelé Rhipice- 
phalus (Boophilus) annulatus (Say). 

La nouvelle espèce a l'avantage de préciser la signification de ce 
groupe. Il est d'abord évident qu'en raison des ressemblances mor- 
phologiques des femelles, on ne peut songer à séparer générique- 
ment annulatus de Lounsburyi. D'autre part, la forme si spéciale des 
écussons adanaux de la nouvelle espèce, celle des mêmes écussons 
chez annulatus, où ils diffèrent nettement deceux des autres Rhipice- 
phalus, l'absence du sillon anal, la forme circulaire ou ovale des 
plaques stigmatiques, constituent un ensemble qui éloigne net- 
tement ces deux formes des Rhipicephalus. Aussi, au lieu de persister 
à y voir un sous-genre, je me rallie à l'opinion qui élève ce groupe 
au rang de genre. 

Quel nom convient-il de lui donner? C'est simplement une 
question de priorité. Le nom de Boophilus, employé jusqu'ici, a été 
proposé en 1891 par Curtice (1) pour l’Irodes bois Riley. Mais, bien 
auparavant, Karsch (2) avait nommé Margaropus Winthemi, un in- 
dividu recueilli à Valparaiso par Winthem et que, après examen 
au Musée de Berlin, j'ai reconnu pour un mâle tératologique de ce 
que j'ai appelé Rhipicephalus annulatus. Un détail intéressant, c'est 
que les particularités tératologiques des pattes de cet individu 
semblent représenter une ébauche de celles qui sont caractéristi- 
ques dans la nouvelle espèce. En vertu ‘de l’article 27 des Règles 
internationales de la Nomenclature zoologique, Margaropus a la 
priorité sur Boophilus. Ce genre Margaropus sera ainsi caractérisé : 

Rostre court, à palpes plus ou moins anguleux. Des yeux. Pas 
de sillon anal. Péritrèmes circulaires ou ovales. Deux écus- 
sons adanaux libres ou réunis en avant, avec ou sans écussons 
accessoires, chez le mâle. Un fort éperon terminal aux tarses, 


(1) GC. Curricr, The biology of the Cattle Tick. Journal of compar. Medicine and 
Veterinary Archives, XII, ne 7, p. 317; 1891. 

(2) F. Karsca, Zwei neue Arachniden des Berliner Museums. Mittheil der 
Münchener entomol. Vereine, 1879, p. 96. 


19 


29% L.-G. NEUMANN 


Les deux espèces du genre sont opposées par leurs principaux 


caractères dans le tableau suivant: 


% écussons adanaux libres en avant de 


/ 
| l'anus; des pattes subcylindriques. 
< 2 écussons adanaux réunis en avant de 
l'anus; articles des pattes très dilatés, 
à angles articulaires très profonds. 
Articles des pattes subcylindriques; épe- 
ron court; ambulacre subterminal. . 
Articles des pattes dilatés à l'extrémité 
distale; éperon très long; ambulacre 
inséré au bord dorsal de l’éperon, loin 


de sa pointe. 


A. annulatus. 


M. Lounsburyi. 


M. annulatus. 


M. Lounsburyi. 


4. ARGAS BRUMPTI D. SP. 


Corps généralement plat, mesurant en moyenne 15m de lon- 
gueur sur 10m de largeur, n'ayant que 7" sur 5mm chez les plus 
petits individus(nymphes ou mâles jeunes). jpouvant atteindre 20mm 


IRIS ANGE 


— Argas Brumpti. — D, 
Y, face ventrale. 


face dorsale ; 


de longeur et 13m» de 
largeur chez les femel- 
les adultes. Il n’est ren- 
flé, au point d’avoir le 
dos convexe, que chez 
untrès petit nombre de 
nymphes ou de mâles. 
Couleur générale brun 
rougeätre plusou moins 
foncé, variant du rouge 
brique au noirâtre vio- 
lacé, rostre et pattes 
jaunâtres. Bords laté- 


raux droits, parallèles sur environ la moitié de la longueur du 
corps, se rapprochant en avant pour former une pointe mousse, 
analogue à celle des Ornithodorus; bord postérieur en courbe 
large. Sur tout le pourtour, une suture formée par la réunion 
de deux bordures, une ventrale et une dorsale, constituées par 
des plis fins (45 » d'épaisseur) et mesurant 400 : de largeur. 


NOTES SUR LES IXODIDES 225 


Face dorsale irrégulièrement excavée par la saillie de la bordure 
et relevée par d’autres saillies qui limitent des dépressions polygo- 


nales, symétriques et constantes, savoir: 
une impaire (n° 1) aussi large que lon- 
gue, vers le tiers antérieur; deux paires 
contiguës (n° 2 et 2’), en arrière de 
celle-ci, qui les surplombe par son borä 
postérieur; un impaire (n° 3), près de 
deux fois aussi longue que large, faisant 
suite aux deux précédentes; de chaque 
côté de celle-ci, deux paires, placées l’une 
{nos 4 et 4’) devant l’autre (n° 5 et 5’), 
aussi larges que longues. Autour de ces 
grandes dépressions en sont réparties 
d'autres plus petites, moins bien déli- 
mitées, qui, avec des plis périphériques 
irréguliers, occupent le reste de la face 


Fig.10. — Argas Brumpti. — 
Bordure droite, en regard 
de 5: x 25: 


dorsale. Les saillies sont formées par des plis disposés en che- 


Fig, 11. — Argas Brumpti. — Tégument 
dorsal à droite, au niveau des dépres- 
sions 2, 3, Æet 5. x 11. 


vronsserrés, analogues à ceux 
des bordures et qui se conti- 
nuent en flexuosités dans les 
dépressions pour entourer de 
petites plaques, où le tégu- 
ment estaminei en des sortes 
de cribles imperforés. La dé- 
pression n° 1 a deux de ces 
plaques accolées sur la ligne 
médiane; les n° 2 et 2° ont 
deux plaques consécutives, 
écartées, l'antérieure plus 
grande; le n° 3, une série 
médiane à éléments contigus; 
4 et 4’ en ont deux consécu- 
tivess 5, et\ 51, une -princi- 
pale et plusieurs petites. 
D'autres plaques plus petites 


et moins nettes sont réparties à la périphérie. Des poils 
courts et très clairsemés sont distribués sur cette face; ils sont 


226 L.-G. NEUMANN 


« 


plus abondants à la périphérie, surtout dans le quart antérieur. 

Face ventrale saillante le long de la ligne médiane, les côtés 
relevés vers la face dorsale. L’extrémité antérieure, conique, s'in- 
fléchit en bas et est creusée d’un profond camérostome triangulaire, 
où le rostre est encastré, sauf chez les individus renflés, dont 
le camérostome s'efface en partie, le rostre étant alors repoussé 
en avant au point de dépasser un peu l'extrémité du corps. Le 
camérostome est bordé de deux lèvres divergentes en arrière, où 


Fig. 12. — Argas Brumpti. — Rostre vu de face et de profil. x 28. 


leur face interne embrasse les commissures d’une lèvre posté- 
rieure, médiane, transversale. Immédiatement en arrière de 
celle-ci, chez la femelle, s'étend la vulve, qui a à peu près la même 
largeur, avec une lèvre antérieure étroite et une lèvre postérieure 
plus courte et plus épaisse. Chez le mâle, le pore génital est placé 
un peu plus loin; il est étroit chez les adultes, ponctiforme chez les 
jeunes. Les plis qui continuent les lèvres latérales du camérostome 
se prolongent en arrière du pore génital. Plaque anale ovale, longi- 
tudinale, située un peu en avant du tiers postérieur. Sillons géni- 
taux superficiels, très divergents en arrière, limitant en dedans, de 
chaque côté, un pli coxal analogue à celui des Ornithodorus; en 
dehors des hanches, un pli sus-coxal peu saillant. Péritrèmes 


NOTES SUR LES IXODIDÉS 297 


semi-lunaires, blanchâtres, à convexité antérieure, plus petits 
que la plaque anale. Tégument chagriné, formé de plis semblables 
à ceux de la face dorsale. Le long du bord postérieur, des dépres- 
sions polygonales, dont une grande, impaire, médiane, suivie d’une 
petite; de chaque côté, cinq dépressions plus ou moins marquées. 
Poils un peu plus abondants qu'à la face dorsale, surtout à la péri- 
phérie. 

Rostre jaunâtre, à base très épaisse, formant une pyramide tron- 
quée, dont les deux tiers sont cachés dans la partie postérieure du 
camérostome ; la face ventrale en rectangle allongé, plane dans le 
sens transversal ; les faces latérales planes ettriangulaires,à sommet 
antérieur ; la face dorsale triangulaire et très convexe transversale- 
ment. Longueur totale du rostre (du côté de la face ventrale), 
275, dont 1""8 pour la base et 0""95 pour les pal- 
pes. — Chélicères longues de 2""15, dont 150 » pour 
le doigt, {mm pour la tige et {mm pour la base; apo- 
physe externe à trois dents successives, la basilaire 
plus forte; apophyse interne située en arrière de 
l’autre, à deux dents. — Hypostome étroit, lancéolé, 

à quatre files de 14-15 dents, les files internes écar- 

tées. — Palpes cylindro-coniques, les trois premiers 

articles cylindriques, décroissant en diamètre du 

premier au quatrième; longueur : 375 # pour le Fig. 13. — 4rgas 
Lx, 3252 pour le >, 1504 pour le 3, 100 pourle 4;  Doigt”de la 
celui-ci, qui est tronconique, est terminé par dix à a 
douze cirres. Au bord interne de la face dorsale des 

articles II et IIT, des poils très longs et nombreux, entre-croi- 
sés avec ceux du côté opposé; des poils semblables s'observent 
à la face dorsale de 1; des poils longs et clairsemés sur le bord 
externe de I, Il et IIT, et sur la face dorsale de la base, en arrière 
de l'insertion des palpes. Deux longues soies ornent la base de 
l'hypostome. 

Pattes jaunâtres, relativement courtes et fortes. Hanches [ écar- 
tées des hanches IT par un intervalle égal à leur largeur, les trois 
autres contiguës, toutes recouvertes, sur leurs bords antérieur et 
postérieur et sur leur face dorsale, par le tégument strié. Premier 
article cylindrique, sa longueur égale à une fois et demie son dia- 
mètre. Les autres articles un peu aplatis dans le sens dorso-ventral ; 


1 


228 L.-G. NEUMANN 


IT, IV et V un peu plus larges à l'extrémité distale; une fausse arti- 
culation à la base de III et des tarses ; ceux-ci aussi larges à l’extré- 
mité distale qu'à la base, avec une bosse spiniforme, plus longue 
que large, qui fait paraître bifide leur extrémité. Sur tous les 
articles, sauf les hanches, des poils épars, semblables à ceux du 
corps. — Pattes IV longues de 11""74 (chez une femelle de 17mm), 
la longueur des articles (des hanches aux tarses) étant respectif 
vement210 120220900048 M0 0 M0 0 lus 0 S ADou 
l’'ambulacre. 

D'après35 individus rapportés par M. le Dr Brumpt de l'Ogaden 
(pays Somali), à la suite de la mission du Bourg de Bozas en Afri- 
que centrale. 

M. Brumpt m'a communiqué sur la piqûre de cet Argas les ren- 
seignements suivants : 

« La piqûre du grand Argas est un peu plus douloureuse que celle 
de l'Ornithodorus moubata; elle peut inter - 
romprele sommeil. Elle est suivie de prurit 
pendant plusieurs jours. Quand l'animal se 
détache, la plaie saigne légèrement, puis il 
s'y forme une pelite croûte sanguine, au- 
dessous de laquelle une petite goutte de 
sang extravasé s'accumule. En l'espace de 
deux heures environ, la piqûre s'entoure 
d'une ecchymose violette, circulaire, de 6 à 
S centimètres de diamètre et ressemblant 
aux larges marques que les ventouses lais- 
Fig. 14. — Argas Brumpli. sent sur la peau. Cette tache passe par tou- 

— Tarses I et IV. x 14. ! 2 ' . 

tes les teintes des résorptions sanguines et 


disparaît en six à huit jours ; mais le centre reste induré long- 
temps. Sur les 17 piqûres qui m'ont été faites il y a cinq ans, 
quatre ou cinq ont laissé de petits noyaux indurés sous-cutanés, 
qui ne paraissent pas avoir de tendance à disparaître.» 

Le lableau dichotomique des espèces d’Argas se trouve mainte- 
nant établi sous la forme suivante: 


19 


en avant. CR RE RS NE 
| Corps presque circulaire, aussi large en 
avant qu'en arrière. 1. 104008, D A NES DENTS 


Corps ovale, plus longque large, plus étroit 


NOTES SUR LES IXODIDÉS 229 


Bordure du corps iorméede plis étroits. M". :. 3 

| Bordure du corps formée de festons rectan- 
SNA RS ET ANNE NN Amen SiCuse 
Téguments à plis grossiers. Corps “IE. ARE AREAS M Era LE 
3 | Tégument à plis très fins. Corps long, renflé. 


19 


Hanches IV vers le tiers antérieur de la 


longueur "0. SRE RE ne ANT ORGUE 
ñ Corps bien plus étroit en avant qu'en arrière. D 
Corps presque aussi large en avant qu'en arrière . . . . 6 
Extrémité antérieure du corps plate etarrondie. A. reflexus. 
à) | Extrémité antérieure du corps rétrécie en un 
CAMÉTUSIOME E PALS AQU PERTE D AD TEUNINTT 
Corps court, à peine plus long oo Rostre 
6 ; bien en avant des hanches [I . . . A. transgariepinus. 
Corps deux fois aussi long que large. . A. cucumerinus. 


5. — Sur IXoDEs PUTUS (Cambridge). 


En 1876, Cambridge a décrit (1), sous le nom de Hyalomma puta, 
quelques Ixodidés recueillis par A. E. Eaton sur un Pingouin 
(Pygosceles tæniatus) des iles Kerguelen. En 1899, m'appuyant sur 
la description et, plutôt, sur les figures données par Cambridge, 
j'ai considéré (2) cette espèce comme appartenant au genre /xodes 
et je lui ai rapporté plusieurs spécimens des îles Saint-Pierre et 
Miquelon, King, Saint-Paul, Campbell et du Cap Horn. Plus 
tard (3), j'ai fait de même pour 15 nymphes et une larve, recueil- 
lies par l'Expédition antarctique belge sur des Cormorans et des 
Manchots de la Terre de Feu et de l'Antarctique. 

J'ai reconnu ensuite (4) que le mâle de l'espèce est identique à 
Ixodes fimbriatus Kramer et Neumann (1883), et les caractères des 


(1) O. P. CAMBRipcE, On a new Order and some new Genera of Arachnida from 
Kergeuelen’s Land. Proceedings of the Zoological Society of London, 1876, p. 260 ; 
pl. XIX, fig 3. — An Account of the Collections made in Kerguelen'’s anni du- 
ring the transit of Venus Expedition. Arachnida, p. 222; pl. XIII, fig. 4 Philo- 
Sophical Transactions of the Royal Society of London, 1879. 

(2) G. NEumANx, Revision de la famille des Ixodidés 3° mémoire). Mém. de la 
Soc. Zoologique de France, XII, p. 125, fig. 7-9, 1879. 

(3) G. NEuMANN, Revision... (4° mémoire). Zbidem XIV, p. 283, 1901. 

(4) G. Neumann, Notes sur les Ixodidés. Archives de Parasitologie, VI, p. 115, 
fig. 4; 1902. — Inem, Il. Zbidem, VIII, p. 44%, 1904. — Acariens parasites. Résul- 
tats du voyage de S. Y. Belgica, Zoologie, 1903. 


230 L.-G. NEUMANN 


deux sexes m'ont paru justifier pour Zxodes putus la création 
dans le genre {rodes, du sous-genre Ceratixodes. Les spécimens 
mâles qui m'ont servi pour cette identification provenaient des fa- 
laises du Yorkshire. 

Dans ces derniers temps, M. William Evans (d' Edimbourg) m'a 
communiqué, pour le déterminer, un individu femelle de cette 
espèce, provenant de l'île Saint-Kilda,sur les côtes occidentales de 
l'Écosse, où elle vit en parasite sur des « Oiseaux de mer (Frater- 
cula arctica, etc.) ». M. Evans rapportait cette Tique à Zrodes borealis 
(synonyme de Zr. putus), mais hésitait fortement pour l'identifier 
à Hyalomma puta. M. Cambridge, à qui il s'était adressé, lui 
avait répondu que son individu de Saint-Kilda n’a rien du tout à 
faire avec H. puta (it has nothing whatever to do with FH. puta). 
Peu de temps après, M. W. Evans publiait (1) ce qu'il savait de cet 
Ixodidé, sous le nom d’Zrodes borealis Kram. et Neum. 

J'ai obtenu, de l’obligeance de M. Cambridge, communication 
d'un exemplaire de son Hyalomma puta et je puis maintenir, avec 
certitude, l'identification que j'en ai faite avec Irodes borealis. Je 
dirai d'abord que rien n’explique son attribution au genre Hya- 
lomma, avec lequel il n’a rien de commun, et qui, entre autres ca- 
ractères, exige la présence des yeux. L’exemplaire que j'ai vu est 
une nymphe; la figure, les dimensions, la description données par 
Cambridge prouvent que tous ceux qu'il a eus étaient aussi des 
nymphes. Comme c'est une femelle qu'Evans lui a communiquée, 
la différence entre les deux états explique que Cambridge se soit 
refusé à y voir letype qu'il avait déerit. Mais je possède des lots qui 
comprennent des nymphes et des femelles, dont l'identité spéci- 
fique n’est pas douteuse; et cette réunion n'est même pas utile 
pour la détermination, car /rodes putus a un ensemble de carac- 
tères qui interdit de le confondre avec toute autre espèce et qui 
permet la diagnose à première vue. La signification que j'ai 
attribuée à Hyalomma puta Cambr., à Irodes borealis et à Ir. fim- 
briatus Kr. et Neum. demeure donc entière. 

J'ai identifié les formes boréales et les formes australes. Il est 
possible qu'il existe entre elles des différences subspécifiques; je 
n'en ai pas reconnu jusqu'à présent et celles que les divers exem- 


(1) W. Evans, Some Znverlebrala, including Zxodes borealis, from St Kilda. 
The Annals of Scottish Natural History, avril 1906, p. 85. 


NOTES SUR LES IXODIDÉS 231 


plaires que j'ai examinés présentaient m'ont paru individuelles et 
non géographiques. Je dois dire cependant que le mâle n’est connu 
que pour la forme boréale; on ne pourra se prononcer définitive- 
ment que lorsqu'on aura vu celui des régions antarctiques. 


Le travail d'Evans renferme, sur les Tiques de Saint-Kilda, des 
détails intéressants et que je crois utile de reproduire. 

Plusieurs d’entre elles ont été recueillies par M. Waterston sur 
des Puffins et des Pétrels (?) capturés sur les falaises; elles étaient 
portées surtout par des jeunes et étaient fixées à la peau nue des 
commissures du bec, sous le bec même et dans les angles des yeux. 
On les rencontre aussi sur les rochers et les endroits que ces Oi 
seaux fréquentent; c’est un fait bien connu des habitants, qui 
redoutent beaucoup la piqüre de ces Acariens. M. Waterston en a 
trouvé souvent sur ses vêtements lorsqu'il grimpait sur les rochers, 
mais il n’en a jamais été piqué. Wolley rapporte qu'en 1849, il fut 
plusieurs fois gravement piqué par des Tiques de grande taille en 
grimpant pieds nus sur les rochers. 


En 1903, je disais : «1. putus paraît vivre en parasite exclusive- 
ment sur des Palmipèdes des régionsfroides des deux hémisphères. 
De fait, les hôtes que l'on a signalés sont des Manchots (Pygoscelis 
tæniatus, Spheniscus magellanicus), des Cormorans (Phalacrocorax 
magellamicus, P. carunculatus) et des Guillemots (Uria troile). 
Or, si les Manchots sont fatalement localisés aux régions polaires 
antarctiques, les Guillemots et surtout les Cormorans ont une aire 
géographique très étendue. Le Cormoran Nigaud (Phalacrocorax 
graculus L.), commun dans les régions arctiques et antarctiques, 
est répandu partout et on le trouve en Afrique et au Brésil. C'est 
probablement lui et, sans doute aussi, quelques autres espèces de 
Palmipèdes aussi largement réparties qui ont distribué, dans 
les régions arctiques et antarctiques et plus ou moins loin des 
cercles polaires, l'intéressante espèce d'Ixode dontilest ici ques- 
tion. » 

Sans contredire cette explication, M. Evans objecte que Phala- 
crocorax graculus ne se trouve ni au Brésil ni dans l'Antarctique. Je 
m'en suis rapporté à ce que Gerbe en a dit (Dict. d'hist. nat. de 
D'ORBIGNY, IV, p. 245). « Le Nigaud, quoique plus commun dans 


232 L..G. NEUMANN. — NOTES SUR LES IXODIDÉS 


les régions arctiques et antarctiques, est répandu partout; on le 
trouve en Afrique et au Brésil. » Je dois dire cependant que, vu la 
synonymie complexe et embrouillée des Cormorans, j'ai eu tort 
de me servir du nom vulgaire « Nigaud » et qu'il faut probable- 
ment regarder comme espèces distinctes le Nigaud de l'Europe, 
de l'Asie orientale et d'Afrique, Graculus cristatus (Fabr.), et le 
Nigaud du Brésil, Gr. brasilianus (Gmelin). Le fait essentiel est que 
le genre (rraculus où Phalacrocorax a, par ses espèces, une aire 
d'expansion qui va d'un pôle à l’autre, ce qui explique l'unité de 
l'espèce d'Ixode qui les attaque (cf. Giebel, Thesaurus ornitho- 
logiæ). 


RECHERCHES 
SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 


PAR 


Le D' Francisque JANIN 
Préparateur au Laboratoire de Parasitologie 


(PLANCHE II) 


Peu de Protozoaires sont aussi répandus dans la nature que les 
Sarcosporidies et, pourtant, peu sont moins connus. Parasites des 
muscles striés et du tissu conjonctif des Vertébrés à sang chaud, 
saui quelques rares exceptions (Gecko, Lézard) on les trouvechezles 
Mammifères y compris l'espèce humaine: le Mouton, le Porc, le 
Cheval, le Bœuf, le Cerf, le Singe, le Lapin, le Kangouroo, le Phoque, 
le Chien, le Chat, la Souris, le Rat; chez les Oiseaux: la Poule, le 
Canard, le Merle, le Corbeau, la Pie; on en a encore cité chez 
la Tortue, le Barbeau et la Crevette. L'obscurité qui les entoure. 
ne tient certes pas au manque d'effort des naturalistes, car, 
depuis leur découverte, bon nombre de travaux importants ont 
paru sur ces intéressants parasites et les noms de Virchow, 
Leuckart, Balbiani, R. Blanchard, Pfeiffer, Bertram, Laveran et 
Mesnil, suffiraient à montrer l'intérêt et la difficulté des recher- 
ches; mais l’expérimentation a de tout temps dérouté les zoolo- 
gistes; l'impossibilité d'infester nos animaux de laboratoire, d’iso- 
ler et de cultiver les Sarcosporidies a toujours été l’écueil contre 
lèquel se sont heurtés leurs efforts continus et, sauf les principaux 
caractères morphologiques, quelques points de la physiologie et 
de l'évolution, le mode de propagation de ces Sporozoaires nous 
est totalement inconnu. 

Désignées indifféremment sous les noms de Psorospernies utriculi- 
formes ou utriculaires, tubes psorospermiques, tübes ou utricules de 
Miescher ou de Rainey, placées tour à tour dans le règne végétal et 
le règne animal, les Sarcosporidies furent classées dans le cadre 

Archives de Parasitologie, XI, n° 2, 1907. 16 


234 F. JANIN 


zoologique par Balbiani en 1884; le savant professeur du Collège 
de France montra leurs affinités avec les Sporozoaires et les ran- 
gea définitivement à côté des Grégarines et des Coccidies; pour 
rappeler leur habitat intramusculaire, considéré par lui comme 
exclusif, il préféra l'appellation de Sarcosporidies à celle, moins 
exacte, de Psorospermies utriculiformes; la plupart de ces para- 
sites, en effet, ne revêtant pas la forme de gourdes, mais plutôt de 
tubes excessivement allongés. 

Depuis, nombre d'auteurs ontrepris la question, enrichi legroupe 
d'espèces nouvelles et décrit quelques-uns des stades d'évolution 
de ces espèces. Notre maître, le professeur R. Blanchard, ayant 
trouvé des Sarcosporidies dans la sous-muqueuse du gros intestin 
d'un Kangouroo des rochers, mort au Jardin d’acclimatation, 
a établi une classification de ces animaux, qu'il différencie sui- 
vant leur habitat et la structure intime de leur membrane. 


CLASSE DES SPOROZOAIRES 


Ordre des Sarcosporidies. 


I. Fam. Miescheridae siégeant dans Hour pui ee NUR UE 
les muscles striés. Membrane d’enve- Sn . .. ; 
Epaissie, traversée de fins cana- 
IGppe ER EEE RENE licules — 2. Genus Sarcocystis. 
II. Fam. Balbianidae siégeant 
dans le tissu conjonctif. Membrane 
d'enveloppe mince et anhiste. . . 1. Genus Balbiania. 


Le professeur R. Blanchard nous a inspiré le sujet de ce travail. 
Il nous a accordé la faveur de travailler au Laboratoire de Parasi- 
tologie et de suivre son enseignement si précis et si clair. Nous 
lui sommes redevable de l'intérêt que nous prenons chaque jour 
aux études parasitologiques et de nous avoir éclairé la route; 
nous le remercions sincèrement. 

Qu'il nous soit permis d'adresser aussi nos vifs remerciements 
aux docteurs Brumpt et Langeron, préparateurs au Laboratoire, 
qui nous ont toujours encouragé dans notre tâche et guidé de 
leurs conseils. 


RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 239: 


Historique. 


En 1843, le professeur F. Miescher, de Bâle, en pratiquant l’au- 
topsie d'une Souris, rencontra dans les muscles de cette dernière, 
dont l'aspect blanchâtre et strié avait tout d'abord fixé son atten- 
tion, des sortes de tubes allongés dans le sens des fibres et dont 
l'épaisseur était # à 6 fois plus considérable que celle des faisceaux 
primitifs, les dimensions variant de 44 à 208 ». Le tissu musculaire 
du tronc, des membres, de la tête et du diaphragme présentait cette 
anomalie; le reste était indemne. 

Ces tubes étaient bourrés de petits corps arrondis, réniformes 
ou allongés, d’une longueur de 9 à 14 # et d'une largeur de 37 à 
6uA. 

C'était la première observation de Sarcosporidies. Mais Miescher 
ne sut se prononcer sur la véritable nature de ces kystes particu- 
liers, qu'il interpréta comme un état pathologique, tout en faisant 
une certaine réserve sur leur nature parasitaire. 

Th. von Hessling, trois ans plus tard, trouva des formations 
semblables dans le cœur d'un Mouton et reconnut leur analogie 
avec celles décrites par Miescher. 

Ces corps pouvaient être facilement isolés de leur gaine ; ils pré- 
sentaient une membrane transparente, anhiste, épaisse de 1 425 
à 6 # 39 et un contenu variable d'aspect : libre à l'intérieur des 
jeunes kystes, condensé en amas séparés par une enveloppe à peine 
appréciable, dans les vieux. Leur forme était arrondie ou allon- 
gée, le diamètre variant de 0725 à 0"”167, la longueur 
de 077312 à 0""420. Les corpuscules qu'ils renfermaient, 
arrondis, plus souvent ovales, réniformes ou en croissant 
avaient 10 à 12 de long et 4 à 6 x de large en moyenne. 
Le professeur Leuckart retrouve chez le Porc et aussi chez le 
Mouton, deux fois sur quatre, des productions que Raïiney avait 
prises, chez le Porc, pour les phases de développement du Cysticers 
cus cellulosae. Il remarque, comme lui, de fins bâtonnets implantés 
a la surface de la membrane,qui paraissait traversée de fins cana- 
licules poreux.Leuckartconsidérale premier de ces états comme dé- 
rivant du second, par suite d'une désagrégation de la cuticule,comme 
cela se voit pour le plateau des cellules épithéliales de l'intestin. 


v” CAT PNA PE NN FRE 
Er? ” "42 


236 F. JANIN 


Krause observe des tubes psorospermiques chez la plupart des 
animaux domestiques, Bœuf, Veau, Porc, Mouton et souvent dans 
les muscles de l'œil ; il n'émet aucun doute sur leur ressemblance 
avec les Psorospermies de Von Hessling. 

Winckler, vétérinaire départemental de Marienwerder, fut le 
témoin d'une véritable épidémie de mort subite chez un grand 
nombre de Moutons; à l'autopsie, il remarqua sur le trajet de 
l'æsophage des kystes nodulaires dont la nature lui était inconnue. 
Ces nodules, renfermés dans la couche musculaire de l’œsophage, 
avaient un aspect jaunâtre et faisaient saillie à l'extérieur dans le 
tissu conjonetif ambiant. Si on les ouvrait, il s'en écoulait un liquide 
lacto-purulent ; examiné au microscope, ce dernier laissait voir une 
infinité de corpuseules réniformes dans une masse plus cohérente, 
transparente et tremblotante. En certains points, ces kystes étaient 
accumulés en si grande quantité que le tissu musculaire ne pré- 
sentait pas la moindre fibre saine. 

Cobbold fit les mêmes observations chez le Bœut et le Mouton, 
mais il remarqua la segmentation des tubes en des sortes de 
cellules dont le contenu est formé de pseudo-navicelles mesurant12: 
les unes arrondies, les autres ovales, plusieurs incurvées et 
fusiformes, d'autres à pointe mousse à leurs extrémités, la 
plupart réniformes. Il compta 1000 tubes par once de cœur de 
Mouton. 

Carl Dammann, professeur de médecine vétérinaire à l'Académie 
de Proskau, eut l'occasion d'observer chez une Brebis âgée de 9 ans 
des tubes psorospermiques qui avaient déterminé la mort de l’ani- 
mal. Les nodules amassés, le long de l'æsophage, se rencontraient 
nombreux dans les parois du pharynx et à la base de la langue; 
la muqueuse, indemne, présentait en certains points de l'infiltration 
et de la rougeur. 

Il décela, en outre, au microscope, dans la plupart des fibres mus- 
culaires, la présence de tubes semblables : certaines en ébergeaient 
deux et même trois juxtaposés. Ces différentes constatations furent 
faites non seulement dans les muscies de l’æsophage mais aussi 
dans ceux de l'abdomen et du cou. 

Dammann explique la mort de la Brebis par l'œdème de la glotte 
consécutif à l’irritation et à l'inflammation du pharynx causées par 
la présence des nodules parasilaires. Il pense que la mort subite 


RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 237 


des Moutons de Winckler ne doit pas être attribuée à d'autre 
cause. 

Zürn a vu plusieurs Moutons pris d'accès épileptiformes et mou- 
rir ; des tubes psorospermiques dont la taille variait de celle d'un 
grain de mil à celle d'une fève, se trouvaient nombreux dans la lan- 
gue,les muscles du pharynx, du larynx, du cou, des joues, des 
-lombes, du ventre et des cuisses. Cet auteur considère ces parasites 
comme des végétaux voisins des Chitridinées. 

C'est non seulement chez le Bœuf, mais aussi chez le Mouton, 
que Beale a observé des tubes de Miescher, très souvent chez des 
animaux bien portants. Dans les figures qu'il donne de ces produc- 
tions, il les représente tantôt avec une membrane striée, tantôt 
couvertes de prolongements fins. 

La plupart de ces observations se rapportent à des kystes situés 
sur le trajet de l'æœsophage et ne mentionnent que par hasard la 
- présence de ces parasites dans le tissu musculaire proprement dit. 
Moulé, médecin vétérinaire inspecteur des viandes à Paris, a étu- 
dié les Sarcosporidies chez les animaux de boucherie et a constaté 
leur présence fréquente dans le tissu musculaire des Moutons at- 
teints de cachexie aqueuse. Situées à l'intérieur du faisceau pri- 
mitif, ovoides à l'état jeune, fusiformes à l’état adulte, elles ont 
un demi millimètre de long sur 60 à 100 & de large; vues au mi- 
croscope à un faible grossissement et si l'on a pas exercé une 
pression trop forte sur le fibre, on aperçoit des cloisons à leur inté- 
rieur d'autant plus apparentes que le grossissement est plus fort. 
A l'immersion homogène, on les voit entourées d’une membrane 
régulièrement ciliée, beaucoup plus apparente aux extrémités que 
sur les parties latérales, cils extrêmement fragiles, si fragiles qu'ils 
- disparaissent sous l’action des réactifs les plus inoffensifs, la gly- 
cérine par exemple. 

L'auteur n'emploie que l’eau distillée. La membrane est si mince 
qu'elle se rupture sous la moindre pression et le contenu, sous 
forme de corpuscules falciformes ou réniformes, se répand dans 
toutes les directions. 

Laveran et Mesnil ont repris l'étude des Sarcosporidies du Porc 
et du Mouton. Ils ont donné, les premiers, une bonne description 
de la structure des spores et étudié la toxine découverte par Pfeif- 
fer dans les kystes; ils l'ont dénommée sarcocystine. Ces deux au- 


238 F. JANIN 


teurs, trouvant constamment dans les kystes une membrane mince 
et ciliée, ne conservent pour toutes les Sarcosporidies que le genre 
- Sarcocystis Ray Lankester. 

La membrane devait être remarquablement étudiée quelques 
années plus tard par G, Ferret, qui suivit son évolution chez 
l’Agneau. Mince tout d'abord et ciliée, elle devient épaisse et striée 

pendant la plus grande partie de la croissance du kyste, pour rede- 
venir mince et anhiste à l’état adulte. 

Pluymers, professeur à Liège, s'est intéressé à l'anatomie patho- 
logique du tissu musculaire infesté de Sarcosporidies et nous a 
montré les relations de ces dernières avec la pathogénie des myo- 
sites si fréquentes chez les animaux parasités. 

En 1896, Gian Pietro Piana lut à la Société médico-vétérinaire 
de Lombardie un important rapport sur un essai de culture de 
sporozoïtes, d’après les règles indiquées par Celli et Fiocca pour 
les Amibes. D'après l’auteur, les corpuscules falciformes se décom- 
poseraient et mettraient en liberté des globules hyalins nucléés 
qui, après enkystement, mèneraient une vie ralentie; mais il ne 
dit pas 's'ilest arrivé à infester des animaux sous cette nouvelle 
forme. 

L'étude de ces animaux, on peut le voir par cet historique, est 
loin d’être terminée et si leur nature et leur mode de formation 
se sont quelque peu éclaircis, leur mode de pénétration est encore 
ignoré. 

Nous reprenons aujourd’hui cette étude. Après avoir eu l’occa- 
sion d'examiner un grand nombre d'œsophages de Moutons, si 
nos observations ne paraissent pas élucider complètement l'histoire 
du parasitisme, nous aurons du moins fait œuvre utile, par 
la mise au point aussi scrupuleuse que possible d'une question en- 
core fort obscure et si controversée. Après avoir décrit la morpho- 
logie des kystes et des sporozoïtes, nous passons successivement en 
revue leur mode de formation et de transmission. L'échec que 
nous relaterons de nos expériences ne doit nullement dérouter les 
chercheurs : en expérimentation, le négatif a sa valeur et doit être 
pris en considération. Une voie différente sera peut-être plus heu- 
reuse et plus féconde en résultats; pour la science, nous le souhai- 
tons en toute sincérité. 


RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 239 


Étude morphologique du kyste. 


Avant d'entreprendre l'étude morphologique de la Sarcosporidie 
du Mouton, nous devons faire remarquer au préalable la difficulté, 
nousdironsmêmel'impossibilité, de nous procurer des échantillons 
de viande dans chaque région des animaux infestés: nous avons 
donc été contraints de porter uniquement nos investigations sur 
des œsophages. Les abattoirs de la Villette nous ont fourni un vaste 
champ d’études; malheureusement, nous ne pouvons donner une 
statistique assez précise du nombre de Moutons infestés parmi les 
Moutons sains sacrifiés et livrés à la consommation, les rensei- 
gnements que nous avons pu recueillir, à ce sujet, n'ayant pas la 
rigueur scientifique désirable pour être pris en considération. Tou- 
tefois, nous pouvons dire que le nombre de Moutons malades est 
assez restreint ; sur 10.000 bêtes sacrifiées chaque jour,une centaine 
seulement présentent des Sarcosporidies. 

Les œsophages des Moutons parasités sont facilement reconnals- 
sables pour toutes les personnes qui fréquentent les abattoirs ; à pre- 
mière vue, leur surface est parsemée dans toute son étendue de petits 
corps ovoides, blanchâtres, dont le volume varie de celui d’un 
grain de blé ou d'un petit pois à celui d'une noisette; ils offrent 
assez l'apparence de petits abcès ou de petits amas graisseux et 
font des saillies plus ou moins accentuées sur le tube æsophagien. 
La confusion, d’ailleurs, n’est guère possible : l'examen microsco- 
pique, comme nous le verrons plus loin, du contenu lacto-puriforme 
ou caséeux en révèle immédiatement la nature. 

_ La situation de ces kystes peut prêter à discussion. Raïlliet dis- 
tingue chez le Mouton une psorospermose des muscles et une 
psorospermose du tissu conjonctif; il sépare les kystes les plus vo- 
lumineux, visibles à l'œil nu, des kystes microscopiques parasites 
de la fibre encore saine et non augmentée de volume ; il range les 
Sarcosporidies de l’œsophage du Mouton dans le genre Balbiania 
R. Blanchard. Remarquant chez ces mêmes œsophages un pas- 
sage graduel entre les parasites dits intramusculaires (Sarcocystis 
tenella Raïlliet) et ceux que l’on représente inclus dans le tissu con- 
jonctif (Balbiania gigantea Raïlliet), Laveran et Mesnil font dispa- 
raître cette dernière espèce, et rangent toutes les Sarcosporidies 


240 F. JANIN 


dans l'unique genre Sarcocystis Ray Lankester; ils n'admettent pas 
les deux familles établies par R. Blanchard, basées sur la nature des 
tissus parasités. 

Quant à nous, nous conservons ces familles et nous rangeons 
les kystes de l'æsophage du Mouton, quels qu'ils soient, micros- 
copiques ou non, dans le genre Sarcocystis Ray Lankester, 
les kystes que l'on peut trouver dans le tissu conjonctif ayant 
comme nous allons le voir, leur origine au sein d'une fibre muscu- 
laire. Nous avons remarqué que, au cours de son évolution, la Sar- 
cosporidie distend de plus en plus la fibre musculaire, détruit le 


Fig. 1. — Coupe longitudinale d’un kyste de Sarcosporidie 
inclus dans le tissu musculaire d’un œsophage de Mouton. X 11. 


myoplasme et finit par être entourée par le sarcolemne et le sarco- 
 plasme qui a beaucoup proliféré; les Balbiania gigantea ont donc 
toujours une enveloppe secondaire, dérivant du muscle et leur 
énucléation donne le parasite, entouré de cette couche musculaire. 
Puis le myoplasme lui-même finit par disparaître et le kyste tombe 
dans le tissu conjonctif ambiant. Nous avons maintes fois disséqué 
minutieusement des kystes de Balbiania; leur enveloppe nous a 
très souvent donné les réactions du sarcolemne et non celles du 
tissu conjonctif; en particulier, elle se dissout dans la potasse et 
ne se colore pas par l'éosine et l'acide picrique (fig. 1). 

Bertram ne fait pas de distinction entre les petites Sarcosporidies 
et les gros kystes chez le Mouton ; pour cet auteur, ce ne sont que 
des stades différents d'une seule et même espèce, les deux formes 


PTS 


RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 2/4 | 


se rencontrant toujours simultanément. Le passage de l'une à 
l'autre est facile à constater; leur structure semblable, d’ailleurs, 
suffit à les identifier. 

De cette différence de siège, entre les différents kystes, il résulte 
une différence de forme, à laquelle il ne faudrait pas attacher trop 
d'importance; ronde ou ovale, arrondie ou oblongue, les diamètres 
varient suivant qu'on examine les Sarcosporidies intra-musculaires 
oucelles quisontdéjàenfouies dans le tissu conjonctif. Si la première 
est beaucoup plus longue que large, si la seconde se rapproche de 
la forme sphérique, cela tient à une sorte d'adaptation au milieu. 
« Dans le muscle, le sens de la moindre résistance coïncide avec 
la direction des fibres : de là l'étirement des tubes psorospermi- 
ques » ; dans le tissu conjonctif, « le tissu se laisse refouler au 
contraire aussi facilement dans tous les sens : de là la forme plus 


condensée du kyste. » Nous pensons aussi que la forme et les di- 


mensions des kystes varient suivant l’état d'activité de l'organe; 
il est certain qu'une Sarcosporidie a plus de latitude pour se déve- 
lopper régulièrement et grossir dans les muscles de l'æsophage, 
soumis à de simples mouvements de péristallisme, que dans 
ceux de la cuisse, qui sont constamment en état de contraction 
violente. 

D'après Pfeifier, les Sarcosporidies sont très fréquentes ; sur en- 
viron 100 bêtes qu'il a examinées, il les a trouvées dans 40 cas. 
D’après Bertram, la proportion serait encore plus grande; il a ren 
contré 175 Moutons infectés sur 182 et pense que, vraisemblable- 
ment, il n'y a que les jeunes animaux, restant au pâturage, qui peu- 
vent se contaminer. 

Moulé, se limitant aux animaux de boucherie, a pu examiner 
11.000 échantillons de viande environ; il arrive à cette conclusion 
que non seulement les Sarcosporidies sont très fréquentes chez les 
animaux destinés à notre alimentation, mais que, de tousles para- 
sites connus, ce sont ceux que l'on trouve le plus communé- 
ment. 

A l'appui de cette assertion, il a pris des échantillons de viande 
sur 200 Moutons cachectiques, que leur maigreur extrême et la pré- 
sence d'une quantité considérable d’eau dans le tissu cellulaire 
inter etintramuseulaire, avaient rendus impropres à la consomma- 
tion ; il a toujours trouvé des Sarcosporidies, à part 4 cas, dans les 


242 F. JANIN 


parcelles prélevées dans les différents muscles de l’économie ani- 
male, soit 98 pour 100. Les résultats sont loin d’être les mêmes 
chez les Moutons de bonne qualité : sur 100 bêtes, 44 seulement en 
hébergent. D'après cet auteur, la Sarcosporidie trouverait des 
conditions de vie excellentes chez l'animal cachectique, dont tous 
les muscles, à dire vrai, en sont farcis. Les Moutons examinés pro- 
venaient de 12 pays différents et éloignés les uns des autres : 
les uns de la Nouvelle-Zélande, les autres d'Autriche et d’Alle 
magne. 

Bergmann, de Stockholm, a noté l'influence de la saison et de la 
latitude sur la fréquence des parasites. Ce serait la saison chaude, 
juillet, août et septembre, qui favoriserait le mieux l’infestation; 
celle-ci, d'autre part, serait plus manifeste dans les districts du sud 
que dans ceux du nord. 

Les dimensions des Sarcosporidies varient nécessairement sui- 
vant l’âge de l'animal; mais, si nous prenons un Mouton adulte de 
> à 6 ans, elles varieront suivant le siège : relativement peu volu- 
mineuses dans les fibres musculaires du cœur, pour une raison 
ignorée, elles atteignent dans l’æsophage les dimensions d'une 
noisette. La longueur l'emporte toujours sur la largeur dans les 
kystes qui habitent encore la fibre musculaire; les deux diamètres 
sont sensiblement les mêmes chez ceux du tissu conjonctif. Les 
corps allongés fusiformes intramusculaires ont une longueur qui 
varie de Omm5 à 3mm de longueur ; les gros kystes de l'æœsophage 
ont une longueur de 10 à 15 et même 20mn; entre ces dimensions 
extrêmes, il y a place pour une foule d’intermédiaires, on le 
conçoit facilement. 


DESCRIPTION DU KYSTE 


Parlons d'abord succinctement des deux procédés de prépara- 
tion que nous avons mis en œuvre pour l'étude du kyste, soit à 
l'état frais, soit à l'état de coupes. 

L'examen à l'état frais est des plus simples :.il suffit de disso- 
cier dans la glycérine ou l’eau physiologique de petits lambeaux 
musculaires que l’on écrase entre lame et lamelle ; on peut éclair- 
cir les préparations au moyen d'acide acétique à 20 pour 100 sans 
modifier le sarcolemne. Quant à la méthode des coupes, nous avons 
procédé commeil suit : aprèsavoir découpé au rasoir des fragments 


RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 243 


d’'æsophage, aussi petits que possible, nous les avons fixés dans le 
picroformol de Bouin durant 12 heures, puis déshydratés par des 
passages successifs dans l'alcool à 70°, 90° et absolu, enfin inclus à 
la paraffine. Les matériaux inclus ont été débités en coupes de 5x 
d'épaisseur : ces dernières, fixées sur le porte-objet, ont été colorées 
à l’hématéine-éosine, seule méthode de coloration qui donne 
de bonnes préparations : le bleu violacé des Sarcosporidies se déta 
che merveilleusement sur le fond rose du tissu musculaire. 


MEMBRANE 


La question de la membrane des Sarcosporidies a été, depuis leur 
découverte, l’objet de sérieuses discussions, qui ont donné le jour 
aux opinions les plus contradictoires. Observée et étudiée d'abord 
chez le Porc, elle a été décrite tantôt mince et anhiste, tantôt 
épaisse et striée. 

Miescher la décrit mince et homogène ; Rainey nous la montre 
couverte de fibres courtes qui deviennent plus grandes et plus 
distinctes à mesure que « l'animal » s'accroît. 

Leuckart retrouve ce revêtement de fins bâtonnets chez la plu- 
part des tubes psorospermiques; chez quelques-uns la membrane 
est simplement traversée de canaïicules poreux : deux états qui 
dérivent l’un de l’autre, d’après l’auteur, par une sorte de fonte, 
de désagrégation de la cuticule. 

Pour Virchow, ces cils, n'apparaissant qu'au moment de la dis- 
sociation de la fibre musculaire qui entoure le parasite, ne seraient 
que les fibres transversales de cette cellule musculaire. Dans les 
coupes colorées à l’hématoxyline, il aperçoit des bâtonnets prenant 
énergiquement la matière colorante sur la portion la plus externe 
de la cuticule. 

Manz considère la paroi comme formée d'une enveloppe finement 
homogène, appliquée sur le contenu de l'utricule ; les jeunes kystes, 
seuls, présentent des cils délicats qui peuvent passer facilement 
inaperçus. Iladopte l'opinion de Leuckart et pense aussi que l'aspect 
cilié résulte de la désagrégation d'une cuticule striée et canaliculée. 
Rivolta assimile ces formes ciliées à des Infusoires dont les cils 
seraient devenus rigides. Bütschli voit, au-dessous d'une membrane 
striée et poreuse pouvant se dissocier en un revêtement de cils, 
une autre membrane continue, mince, homogène, d'où s'échappent 


4h F. JANIN 


LE 


des prolongements qui vont former, à l'intérieur de l'élément, un 
système réticulé et alvéolaire. 

Pour Bertram, dans les kystes jeunes, la cuticuleestunemembrane 
homogène, mince, sans prolongements intérieurs, recouverte de 
cils fins à sa surface ; plus tard, la couche externe de cette cuticule 
peut se dissocier et se résoudre en bâtonnets, pendant que de fines 
travées naissent de la couche interne, la plus mince, pour former 
un réseau interne très délicat. 

D'après les observations de Laveran et Mesnil, la membrane est 
toujours très mince, moins de 1 x d'épaisseur, et recouverte exté- 

-rieurement de filaments ténus disposés transversalement, sauf aux 
extrémités où ils deviennent obliques et longitudinaux. Les fila- : 
ments, obsérvés sur des Sarcosporidies fraîches, donnent à la mem- 
brane un aspect strié bien visible sur les bords et n’ont d'autre 
fonction que de rattacher le kyste à sa paroi musculaire. | 

Les auteurs, on le voit, sont loin d'être d'accord sur la consti- 
tution de la membrane. Rien n'est moins surprenant, si nous 
demandons l'explication de ces divergences d'opinion à des 
examens faits sur des kystes d'âge différent. Mince et ciliée dans 
les jeunes, elle se différencie plus tard en deux zones au cours 
de son évolution: une zone externe striée et une zone interne 
mince, contiguë à la précédente; enfin, dans les formes adultes, 
on la retrouve mince etunique. 

Ferret, qui a pu suivre le développement du Sarcocystis tenella 
du tout jeune Agneau au Mouton adulte, nous a donné de ce fait 
une remarquable interprétation. 

La forme la plus jeune du parasite, observée par cet auteur chez 
un Agneau de deux mois, est un amas d'une trentaine d'éléments 
dont l'ensemble a l'aspect d'une mûre, à la périphérie de laquelle 
on n'observe pas de membrane, mais une simple zone mince et pâle. 

À un stade plus avancé, en même temps que les éléments aug- 
mentent de volume, deviennent plusnets et mieux limités, une 
première ébauche de la cuticule apparaît, résultant de l’épaississe- 
ment de leur couche externe à la périphérie de l'amas. Bientôt 
cette membrane s'individualise, devient homogène, à double 
contour, prenant énergiquement la coloration (pl. IL, fig. 1 et 2). 

L'Agneau a deux mois et demi. Le parasiteest alors passé à l'état 
de kyste et il s'est développé à la surface un très grand nombre de 


RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 245 


cils à direction presque perpendiculaire ; leur extrémité libre, 
ondulée, est plus mince que leur base implantée sur des petites 
excroissances ; pour Ferret, ces cils ne semblent nullement dériver 
de la dissociation de bâtonnets appartenant à une cuticule épaissie. 

_Le stade suivant est caractérisé par l'apparition d’une membrane 
mince et striée, dont l’origine échappe; provient-elle directement de 
la membrane ciliée ou est-elle une nouvelle formation, l’auteur ne 
se prononce pas (pl. IL, fig. 4, 5 et 7). 

Au début, les stries de la cuticule sont extrêmement fines, diri- 
gées normalement au kyste et alternativement composées d'élé- 
ments très minces et très réfringents et d'éléments qui se colorent 
à l'hémalun. Du côté de la substance musculaire, pas de limite net- 
te; du côté interne, les stries sont séparées de l'intérieur du kyste 
par une ligne sombre, laquelle a été considérée, par la plupart des 
auteurs, comme une deuxième couche plus primitive encore que 
la couche des bâtonnets. En examinant les préparations avec soin, 
il est impossible, d'après Ferret, de distinguer un double contour 
à cette couche; il pense que cet aspect pourrait être dû à une grande 
différence de réfringence entre la membrane cuticulaire etles élé- 
ments du kyste; cette différenceétant moins accentuée du côté dela 
substancemusculaire, la ligne de démarcation est aussi moins tran- 
chée. Plus tard, la cuticule s'amineit, les éléments s'élargissent, de- 
viennent plus nets, lesstries colorées sont devenues de petits bâton- 
nets séparés par une substance incolore fort réfringente. Vue de 
face, elle présente alors l'aspect d'une membrane transparente, à 
travers laquelle s'apercoivent les éléments du kyste, c'est-à-dire les 
corps falciformes, qui apparaissent à ce stade (pl. IL, fig. 8 et 10). 

La fibre musculaire parasitée a perdu par place sa striation, 
quoique les fibres contractiles soient pourtant visibles etles noyaux 
sains; le tissu conjonctif est normal. 

Si l'on examine maintenant les kystes les plus développés que l'on 
puisse rencontrer chez un Mouton de six ans par exemple, la mem- 
brane n'est plus composée que par une mince couche fortement 
colorée par l'hématoxyline, coloration qui n'est pas continue, Car 
elle présente des portions plus vivement teintées, séparées par des 
intervalles plus clairs. La surface externe est parfaitement lisse ; à 
sa face interne sont accolées des cellules entre lesquelles s'échap- 
pent les travées qui cloisonnent l'élément; ces travées, intimement 


dr," FER 


246 F. JANIN 


soudées, ne se colorent pas si fortement que la cuticule. A la périphé- 
rie, la fibre musculaire forme une couche claire, granuleuse, dans 
laquelle on ne peut déceler aucune trace d'éléments contractiles, 
mais dont les noyaux subsistent encore et ne présentent aucune 
altération notable. Autour de la fibre, s'est développée une couche 
de tissu conjonctif homogène, avec noyaux, dont l'épaisseur est sen- 
siblement égale à celle que présente le reste de la substance mus- 
culaire : cette couche, qui n'existe pas chez les jeunes kystes, est la 
première manifestation de l’irritation provoquée par la présence 
du parasite au sein des tissus (pl. IT, fig. 11). 


CONTENU 


De la couche interne de la cuticule, membrane fine et homogène 
des auteurs, partent des prolongements membraniformes, sans 
structure, qui se colorent énergiquement par l'hématéine; leurs 
nombreuses anastomoses dessinent un réticulum et délimitent un 
système de mailles dont la grandeur et la forme varient suivant les 
kystes et, dans un même kyste, suivant le point considéré. 

Si nous examinons attentivement la coupe longitudinale d'une 
Sarcosporidie, nous y trouvons trois zones d’alvéoles: une première 
sous-Cuticulaire, une deuxième centrale et une zone moyenne 
intermédiaire aux deux autres. Tantôt ovales, tantôt polyédriques, 
les alvéoles varient de grandeur de la périphérie au centre; 
ceux qui se trouvent immédiatement en contact avec le cuti- 
cule sont les plus petits; puis, ils s’accroissent et deviennent 
d'autant plus larges qu'on se rapproche davantage du centre de 
l'élément : de 20 & ils peuvent atteindre 200 et 300 z de diamètre. 

L'épaisseur des cloisons varie de 2 à 18 », elle diminue de la 
périphérie au centre. 

Les divers groupes d’alvéoles, que nous venons d'énumérer, ren- 
ferment un contenu tout aussi varié. Les petites cavités périphéri- 
ques sont remplies de cellulesirrégulières, généralement arrondies, 
quelquefois polyédriques par pression réciproque, à contours nets 
et mesurant de 6 à 82. Le protoplasma, presque homogène, ne con- 
tient que peu de granulations; le noyau, relativement volumineux, 
mesure de 2 à 3 - et se colore d'une façon intense, le protoplasma 
se colorant faiblement. Ces cellules se répartissent aux deux pôles 
et sur toute la surface; elles sont particulièrement abondantes en 


RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 247 


certains points, formant des amas bien visibles, des ilots, des 
foyers, pourrait-on dire, où la prolifération est plus active. 

A cette couche d'éléments en voie de multiplication, fait suite 
une seconde couche beaucoup plus épaisse, plus colorée par les 
réactifs et représentée par les corps réniformes adultes, qui rem- 
plissent complètement les cellules de la zone moyenne. Ces cor 
puscules ou sporozoîtes, arrivés à leur complet développement, pré- 
sentent des aspects variés; on les a tour à tour comparés à des 
reins, à des faux, des navicelies, des fuseaux, pour montrer la forme 


Fig. 2. — Coupe longitudinale d’un kyste de Sarcosporidie du Mouton; 
coupe de l’æsophage avec sa muqueuse. X 11. 


plus ou moins arquée de leur corps et celle plus ou moins effilée 
de leurs extrémités. La banane serait peut-être la meilleure com- 
paraison ; car le sporozoïte mür a, comme ce fruit, un corps incurvé, 
une extrémité pointue, l’autre arrondie. 

Le contenu des cellules centrales est représenté par des éléments 
minces, plus ou moins effrités ou altérés, pointus à leurs deux 
bouts, qui sont des sporozoites vieillis, et par des détritus granu- 
leux, résultant de la désagrégation de ces derniers. 

Les débris des sporozoïtes disparaissent, les vides s'accroissent, 
le cœur du kyste n'est bientôt plus formé que par des alvéoles 
réduits à leur paroi (fig. 2). 

On passe ainsi de la périphérie au centre, de l'élément arrondi, 
plus ou moins régulier, à la forme adulte, incurvée, par une sé- 


218 F. JANIN 


rie de formes de transition qui constituent comme les différentes 
étapes de l’évolution des sporozoïtes. L'examen microscopique du 
liquide kystique nous montre, nageant au sein de la masse, à la 
fois des formes arrondies, piriformes, ovalaires ou incurvées. 

- Il est curieux de remarquer, à ce propos, que les différentes for- 
mes d'évolution des sporozoïtes de la Sarcosporidie du Mouton 
peuvent se trouver à l’état adulte chez les animaux inférieurs. La 
Sarcosporidie de la petite Crevette blanche (Palæmon rectirostris) 
se reproduit par des sporozoïtes piriformes; celle de l'Otarie (Otaria 
californiana) par des corpuscules naviculaires. 

La technique de coloration que nous avons employée pour exa- 
miner la structure des corps réniformes est la méthode de Lave- 
ran-Brumpt. Elle est des plus simples : après avoir fixé le frottis 
pendant 10 minutes dans l'alcool absolu, on le laisse sécher à l'air 
et l'on procède à la coloration en étendant sur la lame un mé- 
lange de bleu Borrel (à l’oxyde d'argent) et d’éosine de Hôchst à 
4 pour 4000. La quantité de cette dernière varie suivant l’âge etla 
force du bleu; on fait un mélange dans la proportion de 10, 42, 
15 gouttes d'éosine pour une goutte de bleu. Un premier essai ren- 
seigne sur les proportions à employer. Le liquide doit être d'une 
belle teinte violet rouge et ne doit pas précipiter. 

La coloration est complète en 5 à 20 minutes; on la surveille au 
microscope. Quand elle est jugée suffisante, on lave rapidement 
dans de l’eau ordinaire et l’on procède à la différenciation par le 
tannin orange de Unna. L'opération est terminée en une à trois mi- 
nutes : on lave à l’eau et l’on sèche au buvard. L'examen microsco- 
pique se fait dans l'huile de cèdre, sans lamelle et sans monter au 
baume. 

Le sporozoîïte, sur une préparation ainsi colorée, a la forme d'une 
banane de 14 : de long sur 5 » d'épaisseur en moyenne, entourée 
d'une membrane délicate. Son extrémité amincie présente une va- 
cuole claire,ovalaire, déjà visible à l'état frais, dans laquelle on aper- 
çoit un chapelet ou des grains isolés de chromatine colorés en rouge 
violet : c'est le noyau. Laveran et Mesnil, par la méthode de Hei- 
denhain (hématoxyline et alun), ont pu y déceler un caryosome 
central ou deux périphériques. La partie médiane contient, dis- 
séminés dans la masse du protoplasma bleu foncé, des granules 
réfringents d'origine nucléaire : par la méthode de triple colora- 


RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 289 


tion hématéine-safranine-Lichtgrün ou hématéine-magenta-Licht- 
orün, ils retiennent la coloration de la safranine ou du magenta; 
il y en a quelquefois dans toute l'étendue du protoplasma et 
même de chaque côté du noyau; mais le plus souvent ils sont 
confinés dans la région moyenne de l'élément (fig. 3). 

L'autre moitiéest arrondie et présente, dans le plusgrand nombre 
de cas, un espace clair dont la longueur est égale au tiers du corps 
réniforme etla largeur au diamètre del'élément; on peut apercevoir, 
à l'intérieur, une fine striation qui rappelle ceNe des capsules po- 
laires des Myxosporidies. Laveran et Mesnil n'ont pu mettre en évi - 


Fig. 3. — Corps falciformes (sporozoïtes) de la Sarcosporidie du Mouton. Colora 
ration : méthode de Laveran-Brumpt, bleu Borrel-éosine. X 1325. & 


dence un filament, comme Pfeiffer en 1890 et Van Eecke en 1892 ont 
prétendu le faire. Th. von Wasielewski a réussi à observer avec 
certitude, dit-il, la sortie de fils d’un pôle des corpuscules : «les 
fils, faisant lentement saillie, se détachaient et disparaissaient très 
rapidement »; d'après l’auteur, ils n'ont aucun point de comparai- 
son avec les fils polaires des Myxosporidies. 

M. Koch, qui a étudié récemment les sporozoïtes du Miescheria 
muris, n'a pas aperçu d'appendices filiformes, mais, pour lui, la 
facon dont se meuvent ces corpuscules n'exclut pas l'existence de 
tels cils. Cet auteur, en effet, observant des corpuscules falciformes 
de la Souris sur la platine chauffante du microscope, a aperçu subite- 
ment, à une température voisine de celle du sang, quelques-uns de 
ces corpuscules « exécuter de vifs mouvements, de telle facon 
qu'il n'est pas possible de les attribuer à des courants de liquide, 
a des mouvements moléculaires ou à des phénomènes de gonfle- 

Archives de Parasitologie, XI, n° 2, 1907. 17 


250 F. JANIN 


ment. Ce ne sont pas des mouvements amiboïdes ni de simples 
changements de position, mais des mouvements de rotation de 
chaque spore autour de son axe longitudinal. » 

L. Pfeifler divise les corps falciformes du Porc en faux simples, 
qui exercent des mouvements rapprochant ou éloignant leurs extré- 
mités ou se tournant dans un cercle à petit rayon et en germes de 
faux, à contenu différencié, qui sont immobiles. 

Nous avons certainement aperçu ces mouvements de rotation, en 
pas de vis, chez certains sporozoïtes de la Sarcosporidie du Mouton, 
mais les ayant observés aussi bien à latempérature ambiante qu'à 
une température élevée, nous les avons attribués aux courantsdes 
milieux liquides ou aux mouvements moléculaires des granules 
brillants, dont quelques-uns s'attachent aux corpuseules et leur 
font perdre l'équilibre. Quoi qu'il en soit, si ces mouvements sont 
des phénomènes vitaux, on peut douter qu'ils puissent être assez 
énergiques pour entraîner les éléments au travers des muqueuses 
ou de Ja paroi des capillaires sanguins. 

Comme tout être vivant, les corps falciformes manifestent leur 
vitalité par la production de toxines qui s'accumulent dans le li- 
quide kystique. L. Pfeiffer, le premier, a signalé que, si l’on injec- 
tait dans le tissu. conjonctif ou dans la trachée d'un Lapin un ex- 
trait aqueux de Sarcosporidie, le Lapin est pris de diarrhée, 
d’abaissement de température et meurt en quatre ou sept heures. 

Laveran et Mesnil ont repris ces recherches et ont vérifié l’exis- 
tence de cette toxine dans la Sarcosporidie du Mouton; ils lui 
donnent le nom de sarcocystine. Elle est très toxique pour le Lapin, 
peu pour les autres animaux. Une quantité d'extrait glycériné, 
correspondant à mm de Sarcosporidie fraîche, le tueau bout de deux 
à trois heures. On observe de la diarrhée, de l'abaissement de 
température et la mort au milieu de convulsions. Si la dose est 
plus faible, on remarque de l’æœdème au point d'inoculation et de la 
fièvre ; la diarrhée est plus tardive, l’hypothermie moins marquée, 
l'animal maigrit et meurt au bout de vingt jours. Pas de lésion im- 
portante à l’autopsie. La mort est retardée, si l'on injecte la toxine 
dans les centres nerveux; celle-ci n'agit done pas directement sur 
le système cérébro-spinal. 

Rivel et Behrens, expérimentant celle de la Sarcosporidie du 
Buffle, ont pu obtenir des effets identiques chez le Lapin, mais 


RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 251 


à l'encontre des derniers auteurs, ils pensent à un poison nerveux. 
Ils ont cherché à préciser la nature chimique de la substance active ; 
ils concluent que c'est une substance voisine des enzymes. Se basant 
sur son action spécifique sur le Lapin, ils croient qu'il est possible 
d'immuniser cet animal. 


Évolution des Sarcosporidies. 


L'évolution de la Sarcosporidie se confond en quelque sorteavec 
l'étude anatomo-pathologique du tissu parasité. La difficulté d'ob- 
server dans les préparations de jeunes éléments dont le noyau est 
en voie de multiplication explique pourquoi l'étude de cette évo- 
lution est restée longtemps limitée au stade si communément ren- 
contré dans les muscles, le stade de sporulation. Ferret et Pluymers 
étudiant, l'un des kystes contemporains de leur hôte, le second les 
relations de la psorospermose avec les myosites que l’on observe 
parfois chez les animaux atteints, élargirent le cadre anatomo- 
pathologique et mirent en pleine lumière l’évolution du parasite. 

Nous avons déjà étudié succinctement les premiers stades de 
développement du kyste, dans la mesure où cela pouvait nous être 
utile pour comprendre l’évolution de la membrane; nous sommes 
obligé de reprendre cette courte étude avec plus de détails et, le 
plus clairement possible, nous suivrons pas à pas les phases d’ac- 
croissement de la Sarcosporidie et sa destinée ultérieure. 

La forme primitive sous laquelle elle a été observée est un groupe 
d'éléments situé à l’intérieur d'une fibre musculaire cardiaque et 
dont l'aspect fait songer aux sphères primitives des Myxosporidies. 
A leur intérieur, on aperçoit des grains de chromatine isolés ou 
disposés en demi-iune; à la phériphérie de l’amas, une zone pâle 
et mince se différencie par la condensation du protoplasma. 

Plus tard, les éléments s’accroissent, deviennent plus nets et 
leurs amas chromatiques s'arrondissent et se hérissent d'aspérités. 
La zone claire de la phériphérie est devenue granuleuse, s’est 
épaissie et a donné naissance à des cils (pl. HT, fig. 1-5). 

La phase suivante est caractérisée par un amas de cellules net- 
tement différenciées, à gros noyau arrondi central, et par une mem- 
brane striée. On assiste alors à une division du noyau, bientôt suivie 
d'une division cellulaire : la cellule primitive donne naissance à 


PONTS 


252 F. JANIN 


deux ou plusieurs cellules qui vont devenir les spores définitives ; 
elles sont arrondies, à contours parfois polyédriques, entourées 
d'une mince membrane, occupées par un noyau volumineux. 
Au pourtour se dessine bientôt la substance trabéculaire qui va 
constituer les cloisons du réseau alvéolaire, pendant que le proto- 
plasma et le noyau, se multipliant en nombre infini, vont former 
une quantité de petites cellules rondes, première ébauche des spo- 
rozoites. 

La Sarcosporidie estalors constituée par de nombreuses spores, 
bourrées de petits corpuscules et séparées par des cloisons. Ses 
deux extrémités, en particulier, sont occupées par des amas 
de jeunes éléments, qui font penser à l'accroissement du kyste 
par la formation de spores nouvelles à ses deux bouts. A me- 
sure qu'il grossit, il détend de plus en plus la fibre muscu- 
laire, détruit le myoplasme et finit par être entouré uniquement 
par le sarcolemne et le tissu conjonctif intermuseulaire ; il s’'arron- 
dit par suite dela résistance qu'il éprouve de toutes parts et sa zone 
de prolifération, jusque-là localisée aux deux pôles, s'étend à toute 
la périphérie : le kyste adulte est constitué (pl. IL, fig. 10 et 11). 

Ainsi arrivé à son complet développement, subit-il un temps d’ar- 
rêt ou évolue-t-il? S'il évolue, quel est son sort ultérieur et quels 
désordres peut-il entraîner chez son hôte ? Pleiffer nous répond, tout 
d’abord, en distinguant deux formes: une passagère et une durable, 
sans toutefois pouvoir les différencier au point de vue morphologi- 
que. Les unes demeureraient indéfiniment sans produire d'em- 
bryons; les autres, après des phénomènes de multiplication, éclate- 
raient par distension etmettraient ainsi en liberté leurssporozoîïtes. 
Actuellement, la plupart des auteurs, avec Bertram, Laulanié, Braun, 
admettent que l’évolution se termine avec la formation des sporo- 
zoites. 

Les tubes peuvent persister longtemps dans l'intérieur des 
fibres musculaires, attendant la mort de leur hôte. Si elle tarde trop 
à venir, ils finissent par dégénérer et disparaître ; quant à l’altéra- 
tion des tissus, on ne mentionne que la dilatation et l'aspect mo- 
niliforme des faisceaux primitifs. Cependant, d'après Perroncito, 
les Sarcosporidies peuvent se mouvoir dans l’intérieur du sarco- 
lemme et laisser des traces de leur passage. Quand elles sont an- 
ciennes, elles peuvent subir la dégénérescence crétacée. Moulé, tout 


RECHERCHES SUR LA SARUOSPORIDIE DU MOUTON 253 


en remarquant la fréquence des Sarcosporidies chez les Moutons 
atteints de cachexie aqueuse, ne se prononce pas nettement surleurs 
relations avec cette maladie. Laulanié a vu, chezle Porc il est vrai, 
certains points des faisceaux primitifs envahis rester sains, d'au- 
tres subir la dégénérescence vitreuse; le parasite a irrité le tissu 
conjonctif : il s'est formé des nodules analogues aux granulations 
tuberculeuses, en même temps que de la myosite interstitielle. Les 
éléments musculaires englobés, d'abord atrophiés, sont progressi- 
vement détruits; la myosite parenchymateuse s'ajoute à la myosite 
interstitielle. 

D'après Pluymers, ce n’est qu'exceptionnellement que les para- 
sites peuvent déterminer une myosite de voisinage entrainant leur 
propre destruction. Le kyste, une fois tombé dansletissu conjonctif 
interfasciculaire, produit une irritation qui se manifeste bientôt 
par des phénomènes inflammatoires. Comme autour de tout corps 
étranger, tubercule ou parasite quelconque, l'organisme prépare 
sa défense par un afflux de leucocytes et par une multiplication 
conjonctive intense. Il se crée un foyer inflammatoire, au centre 
duquel est le parasite entouré de fragments musculaires, d’une 
couche de cellules épithélioïdes et d'une auréole de leucocytes. 
L'auteur a également constaté la présence de cellules géantes ; mais 
s'agit-il là de véritables ou de pseudo-cellules géantes, dérivant 
des cellules musculaires ? 

La nutrition nécessairement défectueuse du foyer va lui faire su- 
bir certaines modifications qui vont entraîner sa dégénérescence : le 
contour en devient moins net, la coloration moins sensible. Les fi- 
bres musculaires voisines réagissent par une augmentation corré- 
lative de leurs noyaux ; l'infiltrat cellulaire augmente et s'organise 
par l'apparition de capillaires de nouvelle formation; il en résulte 
une dissociation complète des fibres musculaires. 

La guérison peut se faire par dégénérescence caséeuse de l’îlot 
enflammé et des sels calcaires peuvent s'y déposer. 

L'inflammation se termine, le plus souvent, par l'organisation 
d'un tissu de granulations limité par une coque conjonctive et par 
la transformation du foyer en tissu fibreux;les fibres musculaires 
et les débris du parasite ont totalement disparu. 

Parfois les îlots inflammatoires sont si confluents quele muscle, 
considérablement atrophié, n'est plus représenté que par quelques 


254 F. JANIN 


ilots de tissu musculaire englobés dans le tissu fibreux ; il s’est pro- 
duit une sclérose presque totale. 


Symptômes de la sarcosporidiose. 


Qu'elles soient à l'état de kystes volumineux comme dans l'æso- 
phage, ou de tubes allongés infiltrant le tissu musculaire, ces deux 
formes pouvant se trouver chez le même individu, les Sarcospo- 
ridies peuvent-elles trahir leur présence pendant la vie de l'animal 
et donner lieu à des symptômes qui font soupçonner l'infestation ? 
Nous avons vu, dans le cours de l'historique, que les Moutons de 
Winckler sont morts subitement, la mortalité prenant les allures 
d’une épizootie,; que la Brebis de Dammann avait succombé à 
l'æœdème de la glotte, conséquence de l'inflammation du pharynx ; 
que Zürn avait assisté à la mort de plusieurs Moutons pris d'accès 
épileptiformes. 

En face de faits aussi significatifs, ces auteurs n'ont pas hésité 
à attribuer aux parasites les symptômes morbides observés chez 
ces animaux. Aujourd'hui, la plupart des naturalistes nient la rela- 
tion entre la mort et la psorospermose et ne voient qu'une simple 
coïncidence. 

Les recherches de Morot semblent bien établir la vraisemblance 
d'une telle innocuité de la part des parasites. Il en a très souvent 
trouvé chez les Moutons abattus à Troyes pour la boucherie ; nous- 
même nous avons fait, maintes fois, la constatation aux abattoirs de 
la Villette, à Paris. 

Surenviron 900 bêtes ovines, Morot en a trouvé 272 porteuses de 
kystes, le même sujet pouvant en présenter de toutes dimensions 
et dans toutes les parties du corps : 6 en avaient dans la plèvre, 10 
dans le péritoine, 27 dans la plèvre et le péritoine; une Brebis de 
deuxième qualité, bien portante, en avait 227 dans l'œsophage et 
128 dans la langue, quelques-uns dans les régions scapulaires et 
crurales. 

Malgré ces chiftres, il serait difficile d'admettre l'innocuité ab- 
solue des Sarcosporidies, si nous nous en rapportons à ce que nous 
Savons aujourd'hui de leur évolutien dans les tissus et de l'élabo- 
ration par elles d'un principe toxique. Leur présence dans les 
muscles de la vie de relation peut, sans doute, rester longtemps 


RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 255 


inaperçue, bien qu'ils doivent perdre à la longue leur élasticité et 
leur souplesse normale, mais il semble illogique que leur appari- 
tion en grand nombre dans les organes importants, comme le 
cœur en particulier, ne puisse engendrer des troubles mécaniques, 
sinon la dégénérescence parenchymateuse ou graisseuse pouvant 
entrainer la mort. D'autre part, la toxine élaborée par les sporo- 
zoïtes, la sarcocystine, si elle ne tue pas l'animal, n'a-t-elle pas à 
priori, comme toute substance toxique, une action défavorable 
sur la nutrition? Dans les œdèmes, l'amaigrissement, la cachexie, 
dans tous ces phénomènes si souvent concomitants, ne doit-elle pas 
entrer en ligne de compte? 

Quoi qu'il en soit, si les symptômes précités ont pour cause les 
parasites, on ne peut, à l'heure actuelle, dépister l’infestation, car 
ils n'ont rien de spécifique et peuvent être produits par nombre 
de maladies infectieuses. 


Mode de reproduction. 


L'étude de l'infestation du Mouton par les Sarcosporidies nous 
oblige, pour la compréhension du sujet, à reculer les limites que 
nous nous sommes tracées et à faire uneincursion dans le vaste 
domaine des Sporozoaires, à y envisager plus spécialement leur 
mode de reproduction. De ces données préalables, nous pourrons 
tirer un enseignement suffisant pour élucider, sinon pour mettre 
au point cette question de la propagation des Sarcosporidies en 
général, de celles qui nous intéressent en particulier. 

Si nous jetons un coup d'œil d'ensemble sur les Coccidies, nous 
voyons que, dans cet ordre de Sporozoaires, il existe deux modes 
de reproduction : une reproduction asexuée ou endogène, la schi- 
zogonie, qui aboutit, par la segmentation du noyau, à la formation 
et à la mise en liberté de petits corps allongés et nucléés (méro- 
zoïtes); ces organismes reproducteurs ou corpusecules falciformes, 
considérés comme les équivalents des corpuscules réniformes des 
Sarcosporidies, peuvent infester une nouvellecelluleépithéliale. Un 
autre mode de reproduction, celui-ci sexué, la sporogonie, s’ac- 
complit par la conjugaison de deux éléments différenciés, mâle et 
femelle, et aboutit à la formation de spores qui assurent la per- 
pétuité de l'espèce hors de son hôte. 


256 F. JANIN 


Nous retrouvons ce double cycle évolutif chez les Hémosporidies, 
en particulier chez celles qui déterminent le paludisme, mais la 
sporogonie a ceci de curieux qu'elle a lieu chez un hôte intermé- 
diaire,le Moustique, devenu ainsi agent de dissémination du para- 
site dans le monde extérieur. 

L'ordre des Sarcosporidies, si voisin des précédents, a-t-il cette 
doubleévolution,endogène ou exogène?A-t-il, comme les Coccidies, 
une évolution exogène simple ou, comme les Hémosporicies, une 
évolution exogène chez un hôte intermédiaire ? C’est cette question 
que nous devons nous efforcer de résoudre, tout au moins de 
rendre plus précise, d’après les travaux les plus récents. 

La voie de pénétration la plus ordinaire des Sporozoaires est la 
voie digestive. La localisation plus particulière des Sarcosporidies 
dans les muscles voisins du tube digestif a fait admettre l'infesta- 
tion par cette voie. Le Balbiania mucosa, que le professeur R. Blan- 
chard a découverte dans la sous-muqueuse du gros intestin du 
Kangouroo des rochers; le Sarcocystis tenella, que l’on trouve 
fréquemment dans les diverses couches musculeuses du canal 
digestif, suffisent à le démontrer. Un cas de sarcosporidiose du 
foie, dûment constaté chez un Soudanais par Kartulis, en Égypte, 
nous fait suivre pas à pas la progression du parasite à travers 
les tuniques intestinales, dans le système porte et son arrêt 
dans le foie. Cette barrière franchie, le cœur peut être touché; 
S. H. Wooldrige et A. E. Mettam (Dublin) ont trouvé des quantités 
de kystes dans le muscle du cœur d’un Mouton; bien plus, Mettam 
a vu des sporozoïtes dans le sang et des kystes dans les fibres de 
Purkinje du muscle cardiaque. Harlow Brooks décrit aussi une 
maladie des Élans, des Buffles caribou et des Daims produite par 
une Sarcosporidie. Cette dernière se loge fréquemment dans les 
muscles du cœur, dont elle produit la dégénérescence parenchy- 
mateuse. Mais le cœur, n’est pas forcément lésé et les parasites 
peuvent cheminer dans le courant circulatoire, qui les disperse 
dans tout le tissu musculaire, leur dernière étape. 

Ces diverses observations nous rendent séduisante l'hypothèse 
de l'infestation des animaux par la voie digestive; mais alors une 
autre question se pose et surgit d'elle-même : y a-t-il pénétration 
directe du sporozoïte dans le nouvel hôte par ingestion des tissus 
du premier animal infesté ? 


RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 251 


Cette nouvelle hypothèse a contre elle le petitnombre de cas rele- 
vés chez les Carnivores et les résultats négatifs des expériencesd'in- 
festation d'animaux par ingestion de viandes contaminées. 

- Virchow a nourri des Chats et des Lapins avec de la viande de 
Porc renfermant de grandes quantités de Psorospermies ; ses expé- 
riences sont demeurées sans résultat. Il en conclut simplement que 
l'ingestion de ces viandes est inoffensive. 

Manz a tenté d’infester des Cochons d'Inde, des Ratset des Souris 
blanches ; il tua des animaux quelques heures après le repas sus- 
pect ; il ne trouva que des débris de tubes psorospermiques dans 
l'intestin, rien d'anormal dans les parois ou dans tout autre organe. 
Il doute donc que l'infestation se fasse par la voie digestive. 

Nous n'avons pas été plus heureux dans nos essais d’infestation. 
Nous avons nourri des Cobayes avec des carottes parsemées de 
kystes psorospermiques frais de Mouton, des Souris blanches avec 
de la viande fraîche parasitée, d'autres de grains auxquels nous 
avions inêlé des kystes desséchés de Sarcosporidies. Tous ces ani- 
maux n'ont fait qu'un repas contaminé et ont été sacrifiés 40 à 50 
jours après. L'examen du sang, pratiqué régulièrement, est resté 
négatif; l'autopsie n’a rien montré de suspect ni dans les organes 
ni dans le tissu musculaire. Une Marmotte endormie, à laquelle 
nous favions fait ingérer, au moyen d'une sonde, 5 à 6 d'une 
solution physiologique tenant en suspension des sporozoïites, 
provenant d’un kyste frais de Mouton, est morte deux jours 
après. L'autopsie nous révéla l'existence d'une broncho-pneu- 
monie banale, sans les parasites que nous nous attendions à 
rencontrer. Les liquides intestinal et stomacal examinés n'ont mon- 
tré que des débris de sporozoïtes ; les parois de l'intestin et de l’es- 
tomac ne présentaient aucune lésion. 

De tous ces résultats négatifs, nous devrions logiquement con- 
clure que l’infestation directe par ingestion du corps réniforme 
n'existe pas; l’expérimentation, en effet, est en contradiction évi- 
dente avec l'observation, le laboratoire avec la nature. D'ailleurs, 
la faible résistance de ces organismes vis-à-vis dessucs digestifs 
et des influences extérieures devait à priori nous faire présager de 
tels résultats. Mais alors, comment interpréter l'expérience que Th. 
Smith rapporta en 1900, expérience positive qui, sans doute, va 


« 


donner un nouvel essor à des recherches aussi dignes d'intérêt? 


258 F. JANIN 


Smith a nourri des Souris grises avec de la chair musculaire 
de Souris infestées de Sarcosporidies; après un délai minimum de 
45 jours, elles se montrèrent infestées à leur tour dans la proportion 
de 63,6 p.100, alors que8 p. 100 seulement des Souris grises de con- 
trôle présentèrent l'infestation spontanée. Dans un autre rapport 
de 1905, Smith cite de nombreux faits d'infestation, après repas 
contaminé, qui corroborent complètement les faits précédents. Les 
Souris qui naissent de Souris infestées, a remarqué l’auteur, ne sont 
pas infestées. M. Koch confirme les recherches de Th. Smith sur 
le mode de propagation des Sarcosporidies des Souris. Il à pris 
soin, avant de faire servir l'animal à une recherche de cette nature, 
de s'assurer, par l'examen microscopique d'un fragment de muscle, 
que la Souris était indemne. La plupart des Souris qui ont mangé 
de la viande contaminée ont été trouvées infestées. 

Quel enseignement peuvent comporter les expériences de Theo- 
bald Smith et de M. Koch? L'infestation paraît indéniable et la 
voie digestive semble être la voie suivie par les parasites. La seule 
objection grave, que les auteurs ont écartée, d'ailleurs, après vérifi- 
cation, était Ja possibilité de transport des Sarcosporidies d’un ani- 
mal à l’autre par un hôte intermédiaire : la Puce des Souris (Ty- 
phlopsylla musculi) ou le Dermanysse (Dermanyssus avium) ou 
peut-être un Sarcopte de là gale. 

L'infestation directe est done ici réelle, mais elle est particulière 
à cette espèce animale; et nous dirons à une même espèce de 
Sarcosporidie, car comment expliquer les insuccès d'infestation 
des Souris par le Sarcocystis tenella. si ce n'est par la différenciation 

qui s'opère chez les diverses espèces de Sarcosporidies et par les 
caractères particuliers qu'elles acquièrent en habitant un même 
organisme ? 

Aussi, l'expérience de Smith n'explique-t-elle que la contagion 
d'une même espèce animale, à la rigueur celle des omnivores ou 
tout au moins des carnivores, mais elle ne nous renseigne que 
faiblement sur la contagion bien plus considérable des herbi- 
vores. 

Chez ces animaux, il n’est pas possible de se représenter la ques- 
tion sans admettre une phase intermédiaire de développement hors 
de l'organisme, en un mot l'hypothèse d'un hôte intermédiaire 
ou d'une phase inconnue enkystée de la Sarcosporidie. 


RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 259 


Cette phase kystique aurait été provoquée par G. P. Piana dans 
des essais de culture des Balbiania. 

Cet auteur abandonne des Balbianies, isolées du tissu musculaire, 
dans des capsules de cristal stérilisées, avec un peu d’eau stérilisée 
ou de gélatine préparée avec du Fucus crispus, d'après les règles 
indiquées par Celli et Fiocca pour la culture des Amibes. Les cor- 
puscules falciformes se décomposent et mettent en liberté de petits 
globules hyalins, qui augmentent graduellement de volume et ac- 
quièrent un noyau contractile. [ls prennent des formes amiboïdes, 
sont mobiles durant plusieurs jours, puis s'enkystent, subissent un 
véritable encapsulement et entrent dans un état de vie latente. 
L'auteur a observé ces faits dans un espace de 25 à 60 jours. Cette 
expérience intéressante mérite d'être reprise; et si elle est confir- 
mée, contrôlée par des inoculations ou des infestations positives 
chez le Mouton, elle nous donnera certainement la clef des points 

les plus obscurs de cette étude. : 

_ Étudions maintenant, avec Mesnil et Marchoux, un Sporozoaire 
voisin des Sarcosporidies, le Cœlosporidium chydoricola, nous serons 
frappés de son importance dans la question qui nous intéresse. Ce 
Sporozoaire vit et se développe à l'état libre dans la cavité du corps 
du Chydorus sphæricus, Crustacé cladocère de la famille des Lin- 
ceidæ. Son évolution rappelle assez celle des Sarcosporidies : elle 
débute par une petite masse arrondie, de 6à8z de diamètre, pour- 
vue d'une membrane mince et d'un noyau vacuolaire contenant 
une masse chromatique centrale. L'élément grossit, s'allonge, le 
noyau se divise et l'on a bientôt un kyste en forme de boudin, 
long, de 60 à 100 y rempli d'un nombre illimité de noyaux et de 
nombreux globules réfringents qui, s'entourant chacun d'une par- 
celle de protoplasma, vont former des corpusecules analogues aux 
corps réniformes de Sarcosporidies. 

On observe en outre, à l'intérieur du corps du Chydorus, un autre 
cycle évolutif : dans les tissus avoisinant le tube digestif, on trouve 
d'autres kystes à noyaux plus gros et moins nombreux, dont la 
structure est identique à celle d'une forme libre de même taille, 
et que les auteurs considèrent comme des éléments capables de 
multiplier l'infestation chez un individu déterminé. 

L'infestation d'un Chydorus à certainement lieu par la voie di- 
geslive, car on voit, dansles cellules du tube digestif, de petits corps 


260 F. JANIN 


ronds avec un protoplasma clair et un petit point chromatique 
central, rappelant comme forme et comme grosseur les corpuscules 
des gros kystes. 

Mesnil et Marchoux regardent le Cœlosporidium chydoricola 
oomme le type d'un sous-ordre de Sarcosporidies qui augmente 
considérablement la compréhension de ce groupe. Il démontre 
en effet, chez les Sarcosporidies, l'existence d’un double cycle 
évolutif, les rapproche des Coccidies et met en évidence la 
généralité du dimorphisme évolutif des Sporozoaires. 

Nous sommes ainsi tenté d'admettre, malgré la structure appa- 
remment identique des corps falciformes, deux sortes d'agents 
reproducteurs, les uns, agents de dissémination endogène, homo- 
logues des mérozoïtes des Coccidies, les autres, capables de per- 
pétuer le parasite à l'extérieur, homologues des sporozoïtes des Coc- 
cidies. Ces derniers, que deviennent-ils horsde leur hôte? La ques- 
tion est encore en suspens. 

Certains auteurs, se basant, à juste titre, sur leur nature fragile, 
croient à l'existence d’un hôte intermédiaireanimal se nourrissant 
de charogne, soit un Vertébré, Oiseau ou Mammifère, soit un In- 
vertébré, Mouche à viande ou Scarabée. Il est tout aussi rationnel 
d'admettre un stade de vie à l'état libre, sous une forme kystique 
encore inconnue, capable de résister aux agents extérieurs et 
d'infester un organisme quelconque par les eaux de boisson ou 
les aliments. Le corps réniforme, ainsi introduit dans le tube di- 
gestif, y subirait la transformation amiboïde qui lui permettrait 
de pénétrer les tissus et d'accomplir les phases de son développe- 
ment. Tel serait, pour nous, le mode de reproduction chez les 
herbivores. 


Les Sarcosporidies chez l’Homme. 


On a cru longtemps que la sarcosporidiose, apanage exclusif des 
animaux, ne se rencontrait pas chez l'Homme ; le fait est si vrai que 
les premiers cas ont été fortement contestés. 

En 1892, Rosenberg constatait la présence dans le muscle cardia- 
que d'une Femme de 40 ans, morte d’une pleurite gauche et d'une 
endocardite végétante, d’un kyste long de 5mm et large de 2mm 
qu'il prit pour une vésicule échinococcique ; il ne trouva ni scolex 


RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 261 


ni crochets, mais une quantité innombrable de corpuscules de 
forme variable, ronde, réniforme, ovale ou allongée et des germes 
falciformes caractéristiques. L'auteur donna à cette formation le 
nom de Sarcocytis hominis, d'après la classification de R. Blan- 
chard. 

Lindemann avait déjà parlé, en 1863, de « Grégarines » qui 
s'étaient développées dans les valvules du cœur d’un Homme et 
qui avaient formé des amas brunâtres, longs de 3mm, larges de 
{mm 5. L'élasticité des valvules diminuant, il en était résulté de 
l'insuffisance, qui avait amené des stases dans la circulation et une 
hydropisie mortelle. La fréquence, comme nous savons, des Sarco- 
sporidies dans le muscle cardiaque, chez les animaux, peut faire 
songer ici à ces parasites; en l'absence de tout dessin on ne peut 
l'affirmer. 

Les deux observations de Rosenberg et de Lindemann, certaine- 
menttrès imparfaites, ne peuvent être acceptées sans restriction; 
mais les cas suivants de Baraban et Saint-Rémy, de Hoche, de Kar- 
tulis, de O’Kinealy. pour ne citer que les principaux, ne laissent 
aucun doute sur la nature du parasitisme. 

Les deux premiers auteurs ont observé, en 1894, dans une corde 
vocale d’un supplicié à Nancy, des tubes psorospermiques parfaite- 
ment caractérisés, ayant la forme de longs cylindres terminés en 
pointe à leurs extrémités, entourés d'une mince membrane anhiste ; 
ils renfermaient une masse considérable de corps falciformes, en 
forme de bâtonnets légèrement incurvés, atteignant 8 à 9 ». Baraban 
et Saint-Rémy rattachent cette Sarcosporidie au genre Miescheria ; 
il est regrettable que des observations semblables n'aient pu être 
faites sur les autres muscles, vu l'ancienneté de la pièce. 

Le 21 décembre 1900, le D' Hoche à présenté à la Société anato- 
mique les coupes transversales d'une Sarcosporidie du genre Sar- 
cocystis, dans les muscles d'un tuberculeux, mort à Nancy. L'exa- 
men des préparations a permis à Vuillemin de reconnaître l’exac- 
titude de la détermination générique ; ce dernier auteur a fait 
une étude comparative de ces pièces avec les préparations précé- 
dentes; il en est résulté que les Sarcosporidies des muscles de 
l'Homme, observées deux fois à Nancy, appartiennent à une même 
espèce et répondent au Sarcocystis tenella Raïlliet. 

Le Dr Kartulis, d'Alexandrie, découvrit en 1895, à l'autopsie d'un 


262 F. JANIN 


Soudanais, un gros abcès au centre du lobe droit du foie; des abcès 
plus petits étaient disséminés à la surface et dans la profondeur de 
l'organe. Il ne trouva pas d'Amibes dans le pus, mais des corpuscu- 
les réniformeslongsde8 zet d’autres arrondis, d'un diamètre de 2 y. 
Des Sarcosporidies de taille diverse avaient aussi envahi le tissu 
conjonetif et les muscles voisins; l'intestin en renfermait un très 
petit nombre, dans le tissu conjonctif interstitiel de ses couches 
musculeuses ; la muqueuse était infiltrée de petites cellules, mais 
ne montrait pas de kystes. 

Max Braun, qui à examiné les préparations, est convaincu de 
l'exactitude de l'observation du D: Kartulis. 

Il est presque évident que, dans ce cas, l’infestation s'est faite 


par la voie intestinale: le parasite, traversant la muqueuse, est 


tombé dans les branches de la veine porte, qui l'a transporté au foie, 
d'où il s'est dispersé dans le voisinage; l’arrivée concomitante de 
microbes de la flore intestinale explique les abcès qui se sont for- 
més par infection secondaire. 

Plus récemment, O'Kinealy a observé à Calcutta un cas de Psoros- 
permies de la cloison du nez chez un Homme de 32 ans, qui avait 
travaillé dans un magasin de peaux. C'était une petite tumeur, 
pédiculée, saignant facilement, du volume et de la forme d'un gros 
pois, attachée dans la fosse nasale gauche, à la partie supérieure et 
antérieure de la cloison cartilagineuse. Cette tumeur excisée, l'exa- 
men microscopique en fut pratiqué: recouverte d'un épithélium 
dégénéré, squameux, elle était formée en grande partie d'un tissu 
degranulations plus ou moins organisé, dans lequel étaientenfouies 
un grand nombre de formations kystiques; le tissu épithélial et 
sous-épithélial avait été, sans doute, le siège d'une irritation chro- 
nique, due à la présence et au développement progressif de ces 
kystes. Larges de mm 4% à 2mm2 ils étaient entourés d'une mem- 
brane hyaline et bourrés de petites cellules semblables à des spo- 
rozoites, arrondies ou ovoides, larges de 5: en moyenne. Ces cor- 
puscules, emprisonnés dans une mince et délicate membrane, 
étaient remplis d'une matière granuleuse. 

Pour l’auteur, c'est un cas véritable de psorospermose de la cloi- 
son des fosses nasales. Le Major Evan, professeur de pathologie à 
Calcutta, avait vu quelques cas semblables chez les mêmes ouvriers; 
sa mort prématurée l’a empêché de les publier. 


RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 263 


Cette observation nous intéresse à un double point de vue: 
d’abord la localisation de Sarcosporidies dans une muqueuse, fait 
peu commun; ensuite l'infestation localisée des premières voies 
respiratoires nous fait penser à la pénétration possible du parasite 
par cette voie et nous rapprochons, malgré nous, la constatation 
d'O’Kinealy de celle de Baraban et Saint-Rémy. Ce mode d'infes- 
tation, s'il est réel, est d'un certain appoint à la théorie de la phase 
kystique du sporozoite. 

Ces quelques observations, contrôlées pour la plupart, établissent 
d'une facon certaine que les Sarcosporidies peuvent se développer 
chez l'Homme. Korté a pu, en 1905, en donner une autre preuve 
en signalant, dans les muscles de la cuisse du Macacus Rhesus, 
une Sarcosporidie qui présente les caractères communs de cet 
ordre. Si ce parasite trouve un terrain favorable à son déve- 
loppement chez les Anthropoïdes, nul doute qu'il ne devienne, 
pour l'Homme, un hôte fréquent. Il devrait donc être l’objet de 
recherches systématiques; nous sommes certain que les cas se 
multiplieraient et que la sarcosporidiose, à côté de la coccidiose, 
aurait sa place dans la pathologie. 

Les Sarcosporidies sont donc pour notre race des hôtes accideniels 
qui, comme chez les animaux, semblent prendre la voie digestive 
et peuvent dans certains cas devenir pathogènes. Leur plus grande 
rareté chez l'Homme, relativement à la fréquente infestation des 
viandes dont il fait sa nourriture, s'explique par les préparations 
culinaires qu'il fait subir à ses aliments. Quel que soit le mode 
de contagion, directe par les viandes infestées ou indirecte par les 
eaux de boisson et les légumes souillés de parasites, les quelques 
cas de sarcosporidiose, relevés chez lui, sont-ils justiciables de 
mesures prophylactiques et doit-on songer à le préserver de toute 
contamination? Nous le croyons. À l'heure où la thérapeutique a 
recours à la viande crue pour l'alimentation des tuberculeux, des 
convalescents et des enfants, et qu’elle tend à substituer, à la viande 
de Bœuf si souvent contaminée parle Cysticercus bovis, la viande de 
Mouton qui héberge si souvent le Sarcocystis tenella, cette question 
est d'importance et mériterait d'être envisagée sérieusement. Aux 
abattoirs, on rejette facilement les viandes de Moutons maigres et 
cachectiques qui recèlent des parasites, mais il serait presque 
impossible de rebuter les viandescontaminées, fournies par des bêtes 


26% F. JANIN 


grasses et de bonne santé apparente ; à combien d'intérêts parti- 
culiers n'aurait-on pas alors à faire obstacle, avant d'arriver à une 
solution convenable ?Les cas de contamination sont d'ailleurs trop 
peu nombreux, pour que l’hygiéniste ait le droit d'outrepasser ces 
considérations d'ordre personnel; aussi, tout en souhaitant que 
pareille mesure soit appliquée, nous formulerons simplement, si 
nous voulons être efficace : cuisson de la viande et des légumes; 
filtration ou ébullition de l’eau potable. 


Conclusions. 


1° Les deux genres Sarcocystis et Balbiania, ce dernier établi par 
R. Blanchard, doivent être maintenus. 

La Balbiania gigantea Raïlliet, 1886, parasite du tissu conjonc- 
tif dans lequel est plongé l'œsophage du Mouton, prend son origine 
dans une des couches musculaires de cet œsophage et, par consé- 
quent, doit passer dans le genre Sarcocystis. Elle disparait done, 
et rentre dans l'espèce Sarcocystis tenella Raïlliet, 1886. 

20 Les diverses opinions émises au sujet de la membrane du 
Sarcocystis tenella s'expliquent par son mode d'évolution. D'abord 
mince et ciliée à l’état jeune, cette cuticule passe par un stade 
épais et strié, pour redevenir mince à l'état adulte. 

Le contenu du kyste est représenté par un certain nombre 
de logettes (spores) remplies de corpuscules réniformes (sporo- 
zoïtes). Ces derniers, entourés d'une mince pellicule, sont consti- 
tués par une bande de protoplasma qui renferme, à l’une de ses 
extrémités, un noyau ovalaire, à l'autre une striation spiralée, 
de nature indéfinie, à sa partie moyenne des granulations chro- 
matiques. 

30 Le kyste jeune a la forme d'une mûre dont les éléments, au 
nombre d'une trentaine environ, proviennent de la division primi- 
tive de la cellule du sporozoïte. Chacun de ceséléments augmente de 
volume et donne naissance, par segmentation secondaire, à deux 
ou plusieurs cellules (spores) qui s'individualisent au moyen de 
cloisons intercalaires. La multiplication infinie du noyau de ces 
dernières est l'origine des corps réniformes. 

4° Les sporozoïtes prennent, très problablement mais non exclu- 
sivement, la voie digestive. Ils infectent directement les Carnivores, 


RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 265 


mais leur pénétration chez les Herbivores ne peut s'expliquer que 
par l'intermédiaire d'un nouvel hôte ou plus vraisemblablement 
par une forme kystique inconnue, vivant dans la nature à l’état 
ralenti. La culture des corps réniformes donnera la clef de l'énigme. 

5e L'infestation de la race humaine par les Sarcosporidies n'est 
plus discutée. Le Sarcocystis tenella a été reconnu, à deux reprises 
diférentes, par Vuillemin, dansles observations citées par Baraban 
et Saint-Rémy, puis par Hoche. 

Les parasites suivent fréquemment le tube intestinal, mais deux 
cas d'infestation des premières voies respiratoires font penser à 
leur pénétration possible par cette voie. 

Le petit nombre d'observations recueillies chez l'Homme ne jus- 
tifient pas de rigoureuses mesures de prophylaxie. Des préceptes 
de saine hygiène suffisent à le préserver de l’infestation. 


« 


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EXPLICATION DE LA PLANCHE III 


ÉVOLUTION DE LA CUTICULE DU SARCOCYSTIS TENELLA, d’après FERRET. 


Fig. 4 et 2. — Coupe longitudinale d’un très jeune Sarcocystis dans une cellule 
. musculaire cardiaque d’un Agneau. 
Fig. 3. — La cuticule présente de petites aspérités. 
Fig. 4. — État cilié de la cuticule. 
Fig. 5.— Coupe d’un Sarcocystis isolé d’une fibre musculaire cardiaque. Cils à la 
surface du kyste. 


Fig. 6. — Coupe transversale d’une fibre musculaire striée parasitée d’un æso- 
phage d’Agneau. Cuticule plus épaisse que précédemment el lisse. 


Fig. 7. — Aspect cilié de la cuticule d’un kyste moyennement développé. — f, 
corps falciformes ; sc, cellules sous-cuticulaires. 
Fig. 8. — Cuticule avec ponctuation à la base des bâtonnets. 


Fig. 9— Demi-schématique,montrant les rapports entre la striation de la fibre 
musculaire et les dimensions du parasite. 


268. F. JANIN. — SARCOSPORIDIE DU MOUTON 


Fig.10.— Cuticule d'épaisseur inégale, sans modification de la fibre musculaire. 
Fig.11— Coupe d’un gros kyste.— c, cuticule ; conÿ., couche conjonctive anhiste ; 


f, corps falciformes ; mn, fibre musculaire dégénérée avec noyaux ; SC, cellules sous- 


1 


cuticulaires. 3 


Fig. 12. — Vue en surface, dans une coupe transversale de fibre musculaire, 
d’une cuticule de parasite à un stade de striation comparable à la figure 7. 


Fig. 43. — Deux kystes dans une même fibre musculaire. 


ÉTAT ACTUEL 
DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 


PAR 
Le D' Paul NÉE 


Ancien interne des hôpitaux de Rennes 


Le favus à attiré, à des reprises différentes, l'attention des der- 
matologistes ; des découvertes, suiviés de controverses ardentes, ont 
marqué dans son histoire des étapes isolées; car l'enthousiasme, 
que suscitait ce sujet particulièrement intéressant, semblait amener 
à sa suite une réaction fâcheuse d'oubli. Actuellement, les résul- 
tats de ces études successives se trouvent épars dans de très nom- 
breux ouvrages ; aussi avons-nous pensé faire œuvre utile en con- 
densant et en groupant, dans une monographie, les documents qui 

peuvent mettre en relief l'intérêt que présente cette affection, et 
aussi qui peuvent faciliter les recherches ultérieures. 

Nous ne nous sommes pas proposé de faire seulement une étude 
complète du favus, mais surtout de montrer ce qu'est le favus 

actuellement et par quelles vicissitudes il a dû passer pour arriver 
à ce degré. Voilà le but de notre œuvre. Aussi avons-nous dû rap- 
peler au début les grandes lignes de l'histoire du favus, afin de pou- 
voir mieux faire ressortir l'état actuel de la question et montrer 
l'enchaîinement des progrès accomplis. Nous diviserons donc notre 
sujet en deux parties : la partie scientifique et la partie clinique. 


PARTIE SCIENTIFIQUE 
I. — De l’Antiquité à 1839. 


Le mot favus, par lequel les Romains désignaient le rayon de 
miel, sert aujourd'hui à désigner une dermatomycose ayant pour 
siège principal le cuir chevelu, caractérisée extérieurement par 
des croûtes de couleur jaune soufre, dont l'aspect rappelle les go- 
dets ou alvéoles où les Abeilles déposent leur miel. 


270 P. NÉE 


Depuis l'antiquité grecque jusqu’au commencement du dix-neu- 
vième siècle,on a fait de vains efforts pour distinguer les affections 
croûteuses et squameuses du cuir chevelu. Les Grecs désignaient 
communément, par le mot latin porrigo (crasse de la tête, teigne) 
cet ensemble d'affections. Celse, un médecin célèbre du siècle 
d'Auguste, appelait favus toutes les affections du cuir chevelu 
accompagnées d'exsudat plus ou moins comparable au miel 
(d’après Besnier et Doyon). 

Les Arabes ont décrit deux sortes d’affections contagieuses 
entraînant la chute des cheveux, l’une humide, l’autre sèche, qui 
est notre favus actuel. 

En 1363, un français, Guy de Chauliac, appela tinea ficosa et tinea 
lupirosa deux sortes de teignes parmi les cinq qu'il décrivait. Ces 
deux variétés étaient du favus. Le mot lupinosa, employé souvent 
depuis cet auteur, vient de ce que les croûtes sèches circulaires du 
favus présentent une dépression centrale les faisant ressembler 
aux semences du Lupin. 

Quant au mot teigne, qui désignait toute maladie rongeante, 
causée par une humeur mauvaise qui s’exhale de la tête en détrui- 
sant les cheveux, on reconnut que cette dénomination s’appliquait 
particulièrement au favus. Aussi un français, Lorry (1726-1783), 
donna-t-il le nom de teigne vraie, tinea vera, à l'espèce de teigne 
qui est notre favus. Cette appellation, acceptée et publiée par Mur- 
ray en 1782, semblait devoir persister, quand vint Alibert. 

Nous arrivons au moment où l’on sépare les maladies de la peau 
des autres branches de la médecine, et où l'on réserve l'hôpital 
Saint-Louis à l'étude et au traitement des malades atteints d’aftec- 
tions cutanées. Alibert (1776-1837) fit ses débuts, en 1803, dans cette 
spécialité toute nouvelle et, grâce à son talent d'observateur, 
il retira de ses travaux une grande gloire. Tout d'abord, n'admet- 
tant pas les opinions de Lorry et Murray, il réunit malheureuse- 
ment, sous le nom de teigne, toutes les maladies du cuir chevelu en 
donnant, toutefois, le nom de tinea favosa à notre favus. 

Alibert eut l’idée remarquable de rapprocher la teigne de la 
gale, comme étant deux affections parasitaires causées par un 
agent extrinsèque; de plus, il ne considéra pas la tinea favosa 
comme pustuleuse, les godets apparaissant, à ses yeux clairvoyants, 
comme une production particulière, spéciale à l'affection. 


PACE 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 271 


D'autre part, après la description du scabies capitis favosa par le 
viennois Plenck en 1776, Willan, d'Édimbourg (1757-1812), rangeant 
les teignes dans les maladies pustuleuses avec la dénomination de 
porrigo, appela porrigo lupinosa ce qu'Alibert appelait la teigne 
faveuse. Son élève, Bateman, popularisa son œuvre. 

Alors Biett, attaché à Saint-Louis (1784-1840), dans son voyage 
en Angleterre, apprend ces doctrines nouvelles et, les transior- 
mant quelque peu, revient faire opposition à Alibert. Comme 
Willan et Bateman, il considère à tort le favus comme pustuleux; 
mais, comme Lorry, il l'appelle tinea vera pour le distinguer des 
autres teignes et de plus favosa, comme Alibert. De cette teigne 
faveuse de Biett, on n’a retranché depuis que le porrigo scutulata, 
qui est l'herpès tonsurant. 

Mahon combattit la croyance à la nature pustuleuse du favus en 
1829 et, en même temps, annonça la contagion de cette affection. 

En 1835, d'après Rayer, il n'y avait plus qu'une teigne propre- 
ment dite, comme l’avait pensé Lorry: le favus. A cette époque,on 
donnait comme siège à cette affection les bulbes pilaires, parce que 
_ l'épilation, le mode de traitement trouvé par Mahon, guérissait la 
maladie. Un grand nombre d’observateurs avaient, comme Mahon, 
cherché en vain des pustules au début de la formation des croûtes 
faviques; aussi les théories de Willan et de Bateman, à ce sujet, 
cessaient d'avoir Cours. 

Peu après, Baudelocque, en 1831, expliqua la ‘vraie nature de la 
matière faveuse; pour lui, il s'agissait simplement d'une sécrétion 
du follicule pilifère modifié par la maladie. Mais il y avait, vrai- 
ment, des pustules mélangées aux concrétions faviques; ces pus- 
‘ tules n’appartenaient pas au favus; elles ne pouvaient provenir que 
d’une cause infectieuse surajoutée au favus. 


II. — Découverte du parasite du favus. 


Nous arrivons en 1839 : le favus est considéré, ‘à cette époque, 
comme une lésion de sécrétion et toujours il représente la seule 
teigne. Cette date ouvre une ère nouvelle dans l'histoire du favus 
par la découverte de la nature parasitaire de cette affection. Cette 
découverte se préparait déjà depuis quelques années; car, en 1835, 
Bassi et Balsamo avaient reconnu que des Champignons, fixés à la 


272 P. NÉE 


surface du corps des Vers-à-soie, déterminaient une maladie chez 
ces Insectes; on pouvait déjà conclure qu'un Champignon pouvait 
être la cause et l'agent de propagation d'une affection des tissus 
animaux. Schôünlein, de Zurich, adapte alors à l'étude du favus les 
procédés récents d'histologie qui naissaient du perfectionnement 
du microscope; d'après ses recherches, entreprises à son laboratoire 
de l'hôpital de Zurich, il écrit dans les Archives de Müller : die ersten 
Versuche liessen kéinen Zweifel über die Pilz-Natur der sogenannten 
Pusteln. Pour Schônlein, le favus est dù à un parasite végétal et il 
en figure les éléments constitutifs; cependant sa note sur le por- 
rigo lupinosa tient à peine une page et il n'attribue pas d'impor- 
tance à sa découverte. Les auteurs qui, les premiers, contrôlent 
les travaux de Schônlein : Remak, en 1840, à Berlin, de même 
Langenbeck la même année, donnent également très peu de détails, 
en Allemagne, sur cette découverte qu'ils considèrent comme une 
simple curiosité. 

Le micrographe Gruby, en 1841, vient lire, à l’Académie des 
sciences de Paris, son Mémoire sur une végétation qui constitue 
la vraie teigne. Quelque temps après, il se défend de bonne foi de 
connaître les travaux de Schônlein sur le sujet, avant d’avoir 
accompli ses travaux personnels. Dans ce mémoire, après avoir 
exposé l'insuffisance des caractères connus jusqu'alors du favus 
pour faire un diagnostic certain, c'est-à-dire la forme des croûtes, 
la contagiosité seulement probable, l'odeur inconstante, il décrit 
un caractère constant et net, c'est le caractère végétal, que montre 
le microscope et qui est hors de doute; il indique la technique à 
suivre pour voir ce végétal: «on met, dit-il, une parcelle de croûte 
dans l’eau, on la délaye, on l’applique entre deux lames de verre 
et on l’observe avec le grossissement linéaire 300. On voit des cor- 
puscules et des filaments... » [1 décrit aussi la constitution de la 
croûte favique et même donne des détails remarquables comme 
celui-ci: «la croûte est enveloppée dans des cellules d'épiderme, 
bien plus nombreuses sur la partie aérienne que cutanée », ou en- 
core : (à la périphérie de la croûte, on trouve la substance amor- 
phe et les racines; au centre, la ramification.. » Il trouve des 
granules, qui semblent des produits de la plante servant à la pro- 
pagation de l'affection comme du parasite. La nature végétale du 
favus étant reconnue, il considère sa contagiosité comme beau- 


"STE 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 273 


coup plus probable. Il localise sa plante dans le tissu de l’épiderme 
et il reconnaît que ce Mycoderme se propage entre les cellules. 

Peu après, la même année, Gruby, dans une nouvelle note à 
l'Académie Sur les Mycodermes qui constituent la teigne faveuse, 
complète ses premières indications et explique les différences de 
ses trouvailles avec celles de Schônlein : (Schônlein, dit-il, voyait 
une végétation sur une pustule ; or les pustules ne sont rien dans 
cette affection; les croûtes ne sont qu'une agglomération de 
Mycodermes. » 

Enfin, Gruby fait des expériences d’inoculation pour prouver la 
nature contagieuse du favus, non seulement de l'Homme à l'Hom- 
me, mais aussi de l Homme aux animaux. 

Schônlein appelle son parasite du favus Oidium et c'est Remak, 
en 1845,qui l'appelle A chorion Schünleini; A chorion, parce que le dou- 
ble contour de l'enveloppe des cellules mycéliennes est peu visible. 
Nous savons, aujourd’hui, que le protoplasma du parasite est éolo- 
rable, au contraire de son enveloppe cellulosique. 

L'étiologie du favus connue, les moyens de diagnostic et de trai- 
tement basés sur la nature parasitaire de l'affection font de rapides 
progrès. 

L'œuvre de Gruby fut poursuivie par Bazin, mais plus spéciale- 
ment au point de vue clinique; nous en parlerons dans la deuxiè- 
me partie de notre travail. 


III. — L’Achorion, seul parasite du favus jusqu’en 1851. 


Schônlein et Gruby détruisent cette opinion, alors courante, que 
les croûtes faviques étaient des produits de dépuration de l’orga- 
nisme malade, une décharge fluxionnaire, soit provisoire, quand 
elle cessait au moment de la puberté, soit permanente, soit héré- 
ditaire. 

Schôünlein, Remak et Gruby ne réussissent pas à cultiver le para- 
site du favus; cependant déjà Schônlein considère son végétal com- 
me un Champignon. C'était un Champignon aussi qu'on venait de 
découvrir sur le corps des Vers-à-soie et l'on n'admettait pas que des 
végétaux, autres que les Algues et les Champignons, püssent vivre 
en parasites sur le corps des ani maux vivants. On range bientôt le 


274 P. NÉE 


Champignon du favus dans la division des Arthrosporés, la tribu 
des Oïdiés et le genre Achorion, sans toutefois connaître encore les 
rapports de ce parasite avec les autres Moisissures. A cette époque, 
la classification des Champignons est très compliquée; les divisions 
et subdivisions abondent et cependant l’Achorion Schünleini est 
considéré comme une espèce distincte et unique. 

Bientôt, la confusion des Champignons devient évidente; on 
s'aperçoit, en 1851, qu'un même Champignon peut se voir sous 
des formes différentes; on rattache l’Achorion aux Moisissures; on 
considère que divers Champignons peuvent donner le favus. Ainsi 
la question parasitaire du favus se complique par ces théories 
nouvelles et la découverte des favus animaux vient la compliquer 
davantage. Nous allons, d'abord, régler ce point des favus ani- 
maux. 


IV. — Les favus animaux. 


C'est Jacquetant, de Lyon, qui signale le premier, dans sa thèse 
de 1847, la présence du favus chez les animaux ; il s’agit de deux 
Chats qui jouaient avec des enfants faviques. 

Peu après, Draper, un médecin de New-York, observant des Souris 
malades, remarque des croûtes faviformes sur la tête et les mem- 
bres antérieurs de ces animaux ; il abandonne à un Chat les Souris 
prises au piège et le Chat présente, peu de jours après, les mêmes 
croûtes au-dessus de l'œil. Plus tard, deux enfants de la maison, 
qui jouaient avec le Chat, présentent également du favus au niveau 
_ de l'épaule, de la face et de la cuisse. Robin retrouve l'Achorion 
Schünleini dans ces croûtes de porrigo favosa. 


A. — FAVUS DES MURIDIENS. 


En 1864, Anderson présente plusieurs observations de Souris 
faveuses, transmettant cette affection à un Chien et à des enfants. 

En 1873, Rodet remarque trois cas de favus chez les habitants 
d'une maison où il avait recueilli de nombreuses Souris faviques. 

La même année et deux ans plus tard, Horand raconte diverses 
histoires de contagion du favus des Rats et des Souris à l'Homme; 
ses observations personnelles sont précises. 

A Lyon, le favus de la Souris est signalé par Poncet, Mollière, 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 275 


Tripier et d’autres. Citons seulement le cas, rapporté par Saint-Cyr, 
de la contagion d’une chambrée à l'École vétérinaire de Lyon par 
des Souris faveuses, trouvées dans le placard à linge. 

A Paris, le favus de la Souris est observé par Mégnin d’abord. 

Enfin les observations de Quincke, en 1887, et plus tard celles 
de Bodin viennent s'ajouter à la liste déjà longue. 

On remarque vite que les animaux les plus prédisposés au favus 
sont le Rat etla Souris, et même cette affection est quelquefois tel- 
lement dangereuse qu'elle détermine leur mort. 

Puisque le parasite du favus de la Souris se rencontre quelque- 
fois dans les lésions de favus chez l'Homme, nous le décrirons 
sommairement à la suite du parasite proprement humain. 


B. — FAVUS DU CHIEN. 


Le Chien est moins susceptible au favus que le Chat; cependant, 
Saint-Cyr signale le favus chez ‘des Chiens qui fréquentaient des 
Chats. Trasbot, en 1871, le signale aussi chez une Chienne ratière 
et il remarque que les petits de cette Chienne présentent des 
godets faviques autour de l’ombilic. 

Andrew Buckanan signale le ïfavus du Chien en 1872. De 
même, Siedamgrotzki en 1874. 

Cadiot observe, en 1889, le favus chez un Chien non ratier; 
d’après l’auteur, il aurait été contaminé par la tondeuse. 

Schervel, en 1892, raconte la contagion de deux jeunes filles par 
les deux Chiens de la maison; à noter que, dans cette maison, on 
trouve des Souris faviques et Unna trouve, dans leurs lésions, 
l’Achorion euthythrix. 

Nocard isole le Champignon du favus du Chien de Cadiot; il 
ensemence, sur divers milieux, les poussières prises à la partie 
profonde de la croûte épaisse des godets, il trouve toujours l’Acho- 
rion et il pose la question de savoir si cet Achorion est identique 
à celui que l’on trouve dans les lésions du favus humain, ou bien 
s’il est une variété de cette espèce de Champignons faviques. Sa- 
brazès observe ces cultures de Nocard et, après avoir fait des ino- 
culations à l'Homme et aux animaux, il dispose Cadiot à faire des 
réserves sur la diversité d'espèces de Champignons capables de 
créer le favus du Chien. 

Enfin Sabrazès conclut, après de sérieuses recherches entrepri- 


276 P. NÉE 


ses avec Costantin, à l'existence d'un Champignon spécial, mafs 
voisin de l'Achorion Schôünleini, dans les godets faviques du 
Chien : c'est l'Oospora canina Costantin et Sabrazès, nettement dé- 
fini, capable de se développer sur l'Homme et que nous décrirons 
avec le parasite du favus muridien. 


C. — AUTRES FAYVUS ANIMAUX. 


Le favus est signalé chez le Lapin par Mourrand, Récordon, 
Mégnin, Saint-Cyr, Kôbner: ce favus, ainsi que celui du Chat, est 
probablement d'origine muridienne. Kôübner réussit à inoculer 
l’'Achorion humain au Cobaye. Quant aux animaux de l'espèce 
bovine et chevaline, ils ne sont que très exceptionnellement atteints 
de favus, au contraire de la trichophytie, d'après Saint-Cyr; d'autre 
part, d'après Neumann, de Toulouse, 1892, les vétérinaires pensent 
que le Cheval et le Bœuf sont réfractaires à l’Achorion humain. 


D. — LE PSEUDO-FAVUS DES POULES. 


On à cru longtemps que la Poule avait son favus : Gerlach, en 
1859, reconnaît que l'affection dite crête blanche chez la Volaille, 
particulièrement fréquente chez le Coq et le Poulet, est de nature 
parasitaire; dans les squames, il découvre au microscope un 
mycélium et des spores. 

Cette découverte estconfirmée par Leisering, en 1864. Puis Mül- 
ler raconte un cas de contagion de favus à la Poule et Rivolta 
décrit le favus des Poules. 

En 1881, Mégnin remarque de fines Moisissures blanches sur la 
crête d’un Coq; de simples lavages suffisent à les détacher; mais 
elles ne tardent pas à réapparaître. A l'autopsie,il trouve l'épiderme 
envahi par une production farineuse et le Champignon lui parait 
pulluler exclusivement à la surface et entre les lames de l'épi- 
derme. Au microscope, il reconnaît un mycélium fin, court et tor- 
tueux avec des spores. Il considère d'abord ce Champignon 
comme voisin de l'Achorion Schônleini et de l'Oidium albicans, 
identique à celui trouvé par Rivolta, et lui donne le nom d’Epi- 
dermophyton gatlinae. 

Zürn émet la même opinion que Mégnin. Puis Schültz, après 
avoir cultivé ce Champignon sur divers milieux et l’avoir étudié 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 2 


au microscope, le classe dans le genre Torula. Plus tard, en 1890, 
il ne peut inoculer cette affection qu'à des Poules. 

Neumann, dans une note à la Société de biologie du 3 avril 1886, 
identifie la dermatomycose de la tête et du cou des Poules au favus 
de l'Homme; pour lui, il s’agit de la même affection et du même 
parasite ; il base son affirmation sur l'identité de la morphologie 
des lésions occasionnées par des inoculations de favus; ainsi il 
inocule son favus de la Poule à un Chien et le favus de l'Homme 
à un autre Chien; il constate que les lésions obtenues sont identi- 
ques, au point de vue elinique. Cependant il n’est pas possible d’ad : 
mettre, sans plus de preuves, les conclusions de Neumann. 

Mégnin, dans cette même séance fait part de ses travaux sur ce 
sujet; il reconnaît deux sortes de « teignes» chez les Poules: l’une, 
la vraie teigne faveuse, est due au Champignon favique; l’autre, 
dont l'aspect de lait de chaux fait penser à un pityriasis épais, 
est due à l’'Epidermophyton gallinae. 

- Neumann, le 1er mai 1886, répond que l’on a observé, en Alle- 
magne et en Italie, le favus des Poules sous cetteforme pityriasique 
et qu'il ne faut pas s'étonner de ne pas trouver de godets sur la 
crête, puisque la présence de poils est nécessaire à leur formation. 

Quelque temps après, Duclaux isole et étudie le parasite de 
Mégnin, en le cultivant sur la gélatine; pour lui, l'aspect seul de 
cette culture, qui ne présente pas de godets, suffit à écarter toute 
idée de possibilité de présence de l’'Achorion Schünleini ; d'ailleurs, 
ii fait remarquer le caractère spécial de la culture d’Epidermo- 
phyton sur la gélatine : il s'écoule, en efiet, un liquide de couleur 
jus de groseille, si l'on brise sa partie superficielle à aspect neigeux. 

C'est alors qu'arrive Sabrazès : il recueille des squames d'un 
Coq atteint de cette affection; 1l les sème sur des plaques de gélose 
et, après étude, il conclut que cette teigne est réellement du favus; 
mais que le parasite en es! bien l'Epidermovhyton, différent de 
l’'Achorion Schünleini par l'aspect de ses cultures, sa situation dans 
la classification botanique et le résultat de ses inoculations. 

À la suite des belles recherches de Matruchot et Dassonville, 
en 1899, l'Epidermophyton qui n'a jamais été trouvé, semble-t-il, 
dans les lésions faviques humaines, reste maintenant le Lophophy- 
ton gallinae de la médecine vétérinaire; ce parasite détermine, 
chez la Poule, une sorte de trichophytie qu'on appelle Ia lophophy- 


278 P. NÉE 


tie. Le Lophophyton Matruchot et Dassonville des Gallinacés ne 
s'observe pas chez les Mammifères et ne provoque que des lésions 
épidermiques superficielles; il se rattache à la famille des Gym- 
noascées parmi les Ascomycètes. 

Sabrazès prétendait, cependant, avoir inoculé avec succès à la 
Poule le favus humain, en frottant la crête préalablement grattée 
avec des débris de godet. D'autre part, est-ce bien du favus, cette 
lésion observée, en janvier 1897, par Campana chez un Coq”? Ce Coq 
semblait présenter, depuis huit mois, de véritables godets faviques 
et le microscope semblait montrer les éléments de l’Achorion. 


V. — Pluralité parasitaire du favus. 


Préliminaires. — En 1851, les frères Tulasne démontrent qu'une 
même espèce de Champignons peut fructifier sous des formes 
variées, suivant les circonstances. C'est la théorie du polymor- 
phisme qui prend déjà naissance; la forme de l'organe de fructi- 
fication ne peut suffire à caractériser l'espèce et, pour frapper 
l'esprit de leurs contemporains, les frères Tulasne ne peuvent 
imaginer rien de mieux que l’image de la transiormation de la 
Chenille en Papillon. Cette théorie nouvelle est bien séduisante 
pour les mycologues; aussi leurs premiers travaux sur la parasito- 
logie du favus, comme d'ailleurs des autres teignes, non contrôlés 
par une méthode de technique rigoureuse, ne tardent pas à res- 
sentir les effets de l'imagination. 

Le favus humain peut-il être causé par d’autres végétaux que le 
parasite connu déjà? Les premières recherches sur ce sujet furent 
d'autant plus laborieuses qu’à cette époque l’on n'’osait ajouter foi à 
la réalité des images fournies par le microscope et que la méthode 
des cultures pures, si nécessaire aux études mycologiques approfon- 
dies, était encore à trouver. 

Hebra, en 185%, puis Lowe comparent les Champignons des 
teignes aux Moisissures communes. Hallier et Baumgarten rat- 
tachent l'Achorion au Penicillium; Hoffmann au Mucor. Cepen- 
dant, d'autres auteurs de l’époque ne reconnaissent, dans le 
Penicillium et le Mucor, que des impuretés de culture. 

Grawitz, tout d'abord, en 1870, en Allemagne, veut identifier le 
parasite de Schôünlein au Champignon de l'herpès tonsurant, à 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 279 


x 


celui du pityriasis versicolor, à celui du muguet, au Mycoderma 
vini; ces divers Champignons ne sont d'abord, pour lui, que des 
modalités différentes de l'Oidium lactis. Mais, poursuivant ses étu- 
des, il reconnaît lui-même son erreur, qui s'explique par la variété 
des modes de fructification que l'on peut rencontrer chez les Cham- 

pignons, et aussi par les fructifications concomitantes de Chambpi- 
gnons communs, mêlés à l’'Achorion en culture impure. En 1886, 
Grawitz trouve cependant, le premier, le procédé des cultures 
pures et il retire du favus un Champignon susceptible de repro- 
duire des godets jaune soufre sur l'Homme. 

Au même moment, en 1886, Duclaux et Verujski montrent que le 
Champignon du favus est bien différent de celui de la trichophytie. 

C'est en 1886 que commence véritablement l’époque de la mul- 
tiplicité parasitaire du favus; car, si avant cette date l’on identi- 
fiait le parasite du favus aux Moisissures communes, on ne {rou- 
vait pas, dans les lésions faviques, deux Champignons distincts 
l’un de l’autre. 

La question de la multiplicité proprement dite du favus se pose. — 
Quincke, en 1886, fait la découverte des variétés d’'Achorion z,6 et y; 
il oriente les idées vers la pluralité de Champignons faviques; 
il signale, comme preuve de ces espèces diverses, des différences 
dans la culture, dans l'habitat, dans le résultat de l’inoculation. 
Mais, alors qu'il ne trouve son Champignon ; que dans les régions 
poilues, en association avec 6, Fabry trouve le Champignon y dans 
les parties glabres. 

Elsenberg, en 1889, retrouve la symbiose de # et de y de Quincke; 
mais, en 1890, il ne reconnaît qu'un seul Champignon et explique 
les divers aspects qu'il peut prendre par de légères différences 
dans la composition des milieux de culture. Il devient alors un 
adepte de la théorie de l’unicité parasitaire du favus. 

Y a-t-il pluralité ou unicité parasitaire favique? — En 1889, Jadas- 
sohn ne trouve, à Vienne, qu'un seul et même Champignon favique. 

Kräl qui, en 1889, trouvait six Champignons de favus, les ra- 
mène tous à un seul, dès 1891.Mibelliet Marianelli, en Italie, abou- 
tissent aux mêmes conclusions: de même Pick, qui hésitait deux 
ans auparavant. | 

C'est la réaction à la suite des idées de pluralité parasitaire de 
Quincke et l’on se trouve alors tant poussé vers l’unicité du favus 


280 P. NÉE 


que Désir de Fortunet et Courmont, à Lyon, en 1890, ne voient 
dans le favus de la Souris que l’Achorion Schünleini lui-même. 

En 1890, Dubreuilh et Sabrazès ne trouvent qu'un seul Champi- 
gnon, sur sept cas de cultures du favus et ce Champignon est de 
même aspect que celui trouvé par Kräl etMibelli dans un godet de 
favus humain. 

La théorie de la pluralité des Champignons faviques commence 
à échouer, depuis que Quincke lui-même renonce à prouver l'exis- 
tence de sa variété z et associe ses deux autres variétés 6 et y. C’est 
alors qu'apparaît la doctrine de Unna et de Frank, concluant à la 
pluralité des Champignons faviques. 

Unna et Frank, travaillant ensemble, annoncent d'abord l’exis- 
tence de trois sortes de Champignons du favus; l'espèce 1 et l'es- 
pèce 3 sont vérifiées par Willan; quoique évoluant, d'après leurs 
auteurs, chez un même individu et dans une même région, ces deux 
espèces se distinguent toujours l’une de l’autre : ainsi les godets 
du favus 3 sont couleur jaune soufre, tandis que ceux du jfavus 
1 sont gris jaune; les godets du favus 3 sont plus nombreux, plus 
arrondis, moins adhérents et moins friables que ceux du favus 1, 
et la réaction inflammatoire est plus marquée dans l'espèce 1 que 
dans l’espèce 3. L'espèce 2 de Unna donne, d'après son auteur, des 
godets sur le Cobaye et la Souris, mais pas sur l'Homme. 

La première espèce s'appelle euthythrix, la deuxième dikroon, 
la troisième atakton. 

En 1892, Unna et Frank annoncent la découverte d'espèces nou- 
velles de parasites du favus ; puis Neebe, la même année, ajoute 
_ sept nouveaux Champignons du favus à la liste de Unna. 

Neebe et Unna, quelques mois plus tard, veulent caractériser le 
genre Achorion et ils décrivent diverses espèces appartenant à ce 
genre; leurs procédés de technique sont beaucoup plus compliqués 
etmoins sûrs que les procédés actueis; ces auteurs décriventlongue- 
ment les caractères morphologiques de chaque espèce. 

Pour Unna et Neebe, il y a autant de sortes de favus que de 
peuples; cependant Kral,dans ses recherches à Cagliari, à Bordeaux, 
à Pise, à Leipzig, déclare ne trouver qu'un seul et même Champi- 
gnon. Il est évident que Neebe et Unna n'ont pas vérifié suffisam- 
ment l'exactitude de leurs travaux; ils auraient sûrement changé 
d'opinion, s'ils avaient, comme l'avait fait Frank pour ses travaux 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 281 : 


avec Unna, par une série d'ensemencements parallèles sur divers 
milieux et des inoculations diverses, cherché à compléter leurs 
premières données. 

La théorie de l’unicité l'emporte. — Aussi la théorie de Neebe et 
Unna est-elle vivement combattue. Sabrazès, étudiant à nouveau 
dix-huit cas de favus humain spontané, ne trouve qu'un seul et 
même Champignon. 

Plaut, de Leipzig, combat aussi, en 1892, la théorie de la pluralité 
favique. Le Champignon qu'il isole répond, d’après lui, à celui de 
Kral, à celui de Grawitz de 1886, de Quincke de 1887 (Champi- 
gnon V), de Munnich de 1888, d'Elsenberg de 1889. Pour lui, les dif- 
férences de détail tiennent à la concentration, à la réaction dif- 
férente du terrain nutritif. Il rappelle, à l'appui de la théorie 
uniciste, l'analogie de ce qui se passe chez les végétaux inférieurs : 
l'aspect des cultures du muguet, par exemple, varie suivant la 
composition du terrain nutritif. Il rappelle aussi que certains 
Bacilles perdent la faculté de produire des spores et transmettent 
cette anomalie héréditairement. [Il faut remarquer, en effet, qu'une 
légère différence dans les conditions de culture, soit dans le degré 
- de température, soit dans la quantité ou l’âge de la graine favique, 
soit dans la composition du milieu ou dans le mode d’ensemence- 
ment, retentit sur l’évolution de l’Achorion. En déterminant expé- 
rimentalement ces modifications dans la vie du parasite, Sabrazès 
montre des modifications du Champignon. Kral écrit à Sabrazès : 
« soit une seule spore d'Achorion réensemencée pendant long- 
temps et cultivée à des températures variées, on aperçoit, à la 
périphérie, des végétations un peu différentes du premier type et, 
si on ensemence ces points-là, ils conservent l'aspect des points 
qui leur ont donné naissance. » Cependant Sabrazès, tout en 
admettant ce pléomorphisme, croit que l’on peut conserver en 
dehors de l’Achorion Schôünleini l'euthytrix et l'atakton d'Unna. 

Quant à Sabouraud, il n'a jamais trouvé qu'une seule et même 
espèce de Champignon favique; aussi ne peut-il croire à la multi- 
plicité parasitaire d'Unna. Cependant il avoue que ses recherches 
personnelles ne sont pas encore assez nombreuses. Il base son 
appréciation sur ce qu'un même milieu chimique n'est pas suf- 
fisant à la persistance d'un même aspect de culture d'un même 
échantillon favique; car de multiples conditions interviennent 

Archives de Parasitologie, XI, n° 2, 1907. 19 


282 P. NÉE 


pour faire varier la culture. Il va plus loin : pour lui, le favus du 
Chien est peut-être réductible aux trichophyties et le favus de la 
Souris de Bodin n'est peut-être causé que par l'Achorion Schünleini. 
Sabouraud enfin, non seulement réduit à un type le parasite cau- 
sal du favus, mais encore il le classe tout près des Trichophyton, 
comme un proche parent. 

En 1893, Sabouraud découvre une diversité d'espèces de Tricho- 
phyton et autant de formes cliniques que d'espèces. Alors, sous 
l'influence de cette découverte, la question de la pluralité favique 
revient à l'ordre du jour et Bodin publie ses travaux sur ce sujet, 
en 1894 : après examen de cinquante cas de favus, il conclut à la 
pluralité parasitaire, comme pour les Trichophyton; mais, au con- 
traire de ces derniers, à l'unité au point de vue clinique. Cepen- 
dant, quand Bodin parle de pluralité parasitaire, il dit bien 
qu'il s'agit plutôt de variétés d'une même espèce que d'espèces 
entièrement séparées et irréductibles. Il explique ses conclu- 
sions : il y a unité clinique; en eflet, pour créer des espèces cli- 
niques nettement séparées, il faudrait des lésions élémentaires 
distinctes par leurs caractères fondamentaux; or on ne trouve, 
pour différencier ces espèces cliniques, que des caractères acces- 
soires de nombre, d'étendue, d'intensité des lésions; même dans 
le favus sans favus, le cheveu favique est constant, invariable, 
même sans le microscope. Au microscope, on retrouve les carac- 
tères fondamentaux invariables du parasite, malgré l'irrégularité 
apparente de la disposition du mycélium et des spores; aussi le 
microscope ne prouve pas la pluralité parasitaire; il faut chercher 
la preuve de celle-ci dans les cultures. Bodin, convaincu de l'im- 
portance du milieu nutritif, mise en évidence par Raulin dans ses 
études sur l'Aspergillus, recherche un milieu de culture suffisam- 
ment favorable au développement du Champignon et, de plus, 
toujours chimiquement identique à lui-même et assez facile à pré- 
parer. Dans ses cultures sur la pomme de terre, l'agar ordinaire 
et l'agar peptonisé à 5/100, il croit reconnaître d'abord une plu- 
ralité d'Achorion, puis sept, puis seulement cinq types divers, 
dont un plus fréquent que les autres, l’Achorion de Kräl. Cependant, 
il observe que ces divers types ont une même forme conidienne 
de reproduction, une même affinité pour les substances nutritives 
et un même mode de développement en culture. Ce travail de 


- ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 283: 


Bodin ne semble pas mettre en opposition complète les partisans 
de l’unicité et de la pluricité du favus humain; car, pour lui 
déjà, les divers favus sont des variétés d’une même espèce. 

D'autre part, Sabrazès, après avoir découvert le favus du Chien 
avec Costantin, considère les divers favus animaux comme venant 
d'une même souche et devenus seulement, peu à peu, irréducti- 
bles les uns aux autres par suite de l'adaptation à l'animal. 

Remarquons que, longtemps auparavant, Bazin avait dit que 
l’Achorion en passant d’un animal à un autre, pouvait varier un 
peu, sans toutefois se transformer d’une espèce dans une autre. 
Sans être obligé de faire remonter l’origine des diverses espèces 
de favus à l'une quelconque d’entre elles, muridienne parexemple, 
comine le voulait Busquet, en 1892, sous prétexte que les cas de 
contagion par les Rats et les Souris sont très communs et que le 
Champignon favique cultive particulièrement bien sur ces ani- 
maux, on explique clairement maintenant les divers aspects que 
peut prendre l’Achorion dans les cultures, par la théorie du poly- 
morphisme émise déjà en France, en 1851, par les frères Tulasne 
que nous avons cités plus haut et reprise, peu après, par Berkeley 
en Angleterre, de Bary en Allemagne, puis par Bodin en 1900, à 
l’occasion du Microsporum du Cheval et aussi, la même année, 
par Beauverie. 

Remarquons que le polymorphisme a créé, à l’origine, la théorie 
de la multiplicité du favus et, finalement, a été le point de départ 
de la théorie de l’unicité du favus. 

La question des favus trichophytoïdes nous amènera à faire 
une dernière considération sur la question de l’unicité et de la 
pluralité favique. 


VI. — Le polymorphisme du favus. 


Nous pouvons rapprocher le polymorphisme des Champignons 
de celui des Bactéries que Nägeli, Zopf, Metshnikov, Guignard 
et Charrin et aussi Pasteur ont les premiers observé : il est bien 
établi que les Bactéries ont un aspect variable, suivant le milieu 
où elles vivent et suivant leur âge. Bien plus, le polymorphisme 
est une condition nécessaire à l’Évolution; car tous les êtres ont 
besoin, pour subsister dans leur milieu non immuable, de se 


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284 P. NÉ 


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transformer continuellement, de s'adapter aux conditions nou- 
velles de vie qui résultent de ce mouvement perpétuel. 

Des Botanistes de grande réputation ont émis les mêmes idées 
que les frères Tulasne; de Bary a montré que des organes repro- 
ducteurs divers pouvaient se montrer chez un même Champignon, 
si l'on suivait son évolution, étape par étape. 

Mibelli qui, en 1891, ne trouvait qu'un seul Cham pignon favique, 
recommandait de prendre garde, afin de ne pas se tromper, à la 
variété morphologique de l’Achorion que pouvait causer une dif- 
férence d'âge ou de composition de culture; il semblait donc 
admettre le polymorphisme du Champignon. 

Sabrazès reconnaissait, en 1892, que l'origine et la quantité de 
la semence, son passage sur divers terrains, les conditions de tem- 
pérature, de sécheresse, du milieu, d'aération même, changent la 
physionomie des cultures. 

Biro, en 1893, attribue au polymorphisme la différence qui 
existe entre les Champignons faviques de Quincke, de Kräl, de 
Plaut, de Mibelli, de Frank, d'Unna et de Quinquaud. De plus, il 
annonce que, si l'on reporte sur le même terrain de culture, un 
certain nombre de fois, des Champignons faviques paraissant dit- 
férents, ils perdent peu à peu ces caractères propres qui servaient 
à les distinguer, et s'accommodent enfin au terrain de culture; donc 
il n'y a pas de motif pour admettre la pluralité favique. 

Tishutkin, en 1894, regarde comme insuffisantes les variations 
d'aspect de l’Achorion en culture pour que l’on puisse admettre 
diverses espèces de ce Champignon, d'autant plus qu'il a reconnu 
lui-même que l'Achorion peut garder, pendant plusieurs généra- 
tions, les caractères particuliers acquis dans certaines cultures. 

Enfin Truffi, en 1900, ne trouve qu'un seul parasite du favus, 
mais doué d’un remarquable polymorphisme. 

Dans le polymorphisme des Champignons il y a deux choses à 
envisager, d'après Bodin: d'abord, tout changement de conditions 
de culture conduit à une variation d'aspect du Champignon. Il faut, 
en effet, que ce végétal, comme le font tous les autres, s'adapte à 
son milieu légèrement transformé, non complètement inapte à le 
nourrir; d’ailleurs, l'expérience prouve qu'il'en est ainsi; de nom- 
breux Mycologues, depuis la méthode des cultures pures, ont observé 
la variation du Champignon parallèlement à la variation du milieu. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 285 


L'autre point, concernant le polymorphisme, sur lequel insiste 
Bodin, est celui-ci: la forme nouvelle de Champignon, qui résulte 
d'une longue culture sur un terrain spécial, peut devenir tellement 
fixe qu'il est parfois impossible d'obtenir sa retransformation en 
forme identique à celle du début de l'expérience. Notons cepen- 
dant que, dans d'autres cas, on a pu réobtenir le type premier 
par le retour aux conditions primitives. Si donc l'Achorion se pré- 
sente sous diverses formes, on peut contester la réalité des espèces 
diverses ; on doit chercher à ramener ces espèces à un type primi- 
tif et, quand même on n'y parviendrait pas, on ne serait pas encore 
en droit de conclure à la pluralité parasitaire du favus; car le pro- 
cédé employé peut être insuffisant. 

En quoi consiste la variation du Champignon sous l'influence du 

milieu? Ce changement est très variable, d’après Bodin ; il peutne 
- porter que sur le rameau qui porte le fruit, ou bien sur le fruit lui- 
-même dont la forme se trouve altérée, ou bien sur le genre de 
-fructification même. Il faut remarquer que le Champignon se 
reproduit parfois sous une forme dite de souffrance et, comme 
ces formes de souffrance sont les mêmes pour des espèces voisines, 
on est obligé, pour classer le Champignon, de rechercher s’il ne 
pourrait se reproduire suivant une forme de fructification plus 
élevée. C'est ainsi que, pour ne citer qu'un exemple, Beauverie a 
montré qu'Hygrocrocis, ce Champignon à aspect de ouate sur les 
sirops, est le même que Penicillium glaucum, cette Moisissure verte 
très commune sur l'orange, la colle, le pain. 

Il y a plus: Sabouraud a mis en évidence le caractère particu- 
-lièrement polymorphe de l’Achorion comparé aux autres Cham- 
pignons. Les frères Tulasne considéraient l'Achorion comme très 
voisin des Trichophyton ou plutôt du Trichophyton, car il n'y 
avait pour eux qu'un parasite de la trichophytie; ils considéraient 
l’'Achorionetle Trichophyton comme deux'formes sœurs d'un Cham- 
pignon ancestral non reproduit. Sabouraud, à son tour, sans tou- 
tefois unir si étroitement ces deux auteurs d'affections si diverses, 
les regarde comme proches parents de la même famille, en atten- 
dant que la découverte de leur fruit supérieur vienne confirmer 
cette classification. 

Nous retrouverons le polymorphisme du Champignon favi que à 
propos de sa disposition intrapilaire. 


-286 P. NÉE 


x 


Cependant, malgré la tendance du polymorphisme à ne voir, 
au fond, qu'une espèce unique de parasites du favus, nous 
devons faire une restriction à cette idée d'unicité. 

Le favus de l'Homme est très généralement causé, il est vrai, par 
un même parasite, l'Achorion Schônleini : mais nous devons admet- 
tre que, dans des cas exceptionnels, le favus peut être causé chez 
l'Homme par deux autres Champignons ressemblant fort à celui de 
Schôünlein, appartenant à la même famille que lui, mais, dans l’état 
actuel de la science, irréductibles à lui : ce sont l'Oospora canina 
Costantin et Sabrazès, qui détermine ordinairement le favus du 
Chien, et l'Achorion quinckeanum, qui détermine ordinairement le 
favus chez la Souris. Ces deux Champignons ont la propriété d'être 
pathogènes pourl' Homme, au même titre que l'Achorion Schünleini; 
comme lui, ils déterminent les godets caractéristiques et les autres 
mêmes lésions du favus. Que trois Champignons différents puis- 
sent vivre sur l'Homme au même titre, cela n'étonne pas, depuis 
que Sabrazès a cultivé sur la Souris l'Achorion Schünleini et l'Oo- 
spora canina, et qu’il a reconnu des différences de malignité de l’af- 
fection suivant le parasite en cause. 

Cependant, il ne faut pas perdre de vue que la présence des pa- 
rasites Oospora canina et Achorion quinckeanum sur l'Homme n'est 
qu'exceptionnellement constatée, probablement parce que la con- 
tagion par la Souris et le Chien est beaucoup plus rare qu'on ne le 
pensait tout d'abord, relativement aux autres causes de conta- 
gion, comme nous le verrons plus loin. 

Aussi allons-nous décrire d'abord l'Achorion Schônleini, le para- 
site proprement dit du favus humain, puis l'Oospora canina Costan- 
tin et Sabrazès, enfin l'Achorion de Quincke et Bodin, comme étant 
susceptibles de créer le favus humain. 


VII. — Étude de l’Achorion Schônleini dans ses cultures 
artificielles. 


A. — CULTURES. 


Hallier employait comme milieu de culture les fruits, le sang, 
l’'albumine et enfin la glycérine. Grawitz cultivait l'Achorion pur 
sur la gélatine, l'agar-agar et le sérum du sang. 

L'Achorion, au contraire du Trichophyton, ne pousse bien que 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 287 


sur les milieux azotés. Les bonnes cultures sont très difficiles à 
obtenir; elles contiennent plus d’impuretés que celles des Tricho- 
phyton et le milieu le plus convenable ne semble pas encore être 
obtenu. Verujski, voulant donner une explication, en 1887, aux 
premières erreurs de Grawitz, disait que les Champignons divers 
se ressemblaient entre eux sous leurs formes de souffrance et que 
Grawitz n'avait pu cultiver le Champignon du favus sur un milieu 
suffisamment favorable pour obtenir une fructification élevée, pou- 
vant servir de base à la classification. 

Le procédé des cultures pures est tiré de la méthode que suivait 
Pasteur en bactériolegie ; puis Koch perfectionne cette méthode, 
en faisant usage de milieux solides ; dès lors, l'étude des cultures 
des Champignons prend sa place dans le domaine scientifique. Les 
premières cultures pures qui furent faites, celles de Duclaux, de 
Verujski, de Grawitz servent à démontrer la spécificité du Cham- 
pignon favique que les cultures impures étaient incapables de 
prouver et qui était surtout mise en doute d'après les idées des 
frères Tulasne. Cependant, le caractère spécial du favus au point 
de vue clinique avait attiré l'attention, et de même l'obtention de 
godets faviques par l’inoculation; alors on considérait le favus 
comme un syndrôme pouvant être fourni par divers Champignons 
placés dans certaines conditions de vie. 

Verujski cultive le Champignon du favus en cellules humides, 
en 1886; il constate la lenteur de son développement comparati- 
vement au Trichophyton; il obtient de grosses spores avec un 
mycélium épais, quoique moins enchevêtré et plus fragile que 
celui du Trichophyton. 

Duclaux, en 1886, fait ses cultures pures de favus avec un che- 
veu stérilisé par lavage à l'alcool et l’éther; il se sert, parfois 
aussi, de parcelle de godet qu'il ensemence à l'aide d’un scalpel 
flambé ; il choisit des liquides de culture non acides ; car il remar- 
que que l'acide acétique arrête la culture, au contraire de la po- 
tasse qui l’active. 

Sabrazès, à ses débuts, utilise pour ses cultures des fragments 
de cheveux bien nettoyés et coupés à l’aide de ciseaux aseptisés, 
un milieu solide, un peu desséché, présentant une réaction neutre 
ou très faiblement alcaline; de plus, s’il reconnaît des colonies 
bactériennes dans sa culture, il reporte son Champignon sur un 


28$K P. NÉE 


autre milieu en le saisissant, avec l’anse de platine, dans une ré- 
gion dépourvue d'impuretés. La culture se fait à 37° en tube coïiffé. 
Plus tard, Sabrazès obtient des cultures plus favorables et il peut 
suivre les colonies issues d’une seule spore, en faisant son ense- 
mencementd'après les règles de Kral etde Mibelli ; il peutainsi com- 
parer les résultats. Grawitz avait déjà cherché à dissocier les spores 
agglutinées du godet, afin de les ensemencer; mais Kral réussit à 
trouver un bon moyen de séparation en brisant les godets, dans 
un mortier, avec l'acide salicylique ; il mélange cette poudre à de 
la gélose liquide, qu'il coule enfin en plaques. Après Kral, Mibelli 
- se contente de dissocier les spores, avec un pilon, dans l’eau sté- 
rilisée; ces spores peuvent être ensuite ensemencées sur plaques 
ou bien sur des milieux solides un peu secs, sur du bouillon pep- 
tonisé avec 1°/, d'agar rigoureusement neutralisé et porté à 20 ou 
25°. On isole non seulement les spores les unes des autres, mais 
encore les Bactéries et autres Champignons toujours nombreux 
dans les godets. Enfin, on peut se servir des boîtes de Petri ou de 
Soyka et aussi des tubes à l'étuve à 37°, température du corps 
humain. Cependant, d'après Sabrazès, les basses températures 
donnent des cultures plus pures, quoique plus lentes. | 
L'ensemencement est très facile avec les godets et les cheveux 
malades. Mais, si l'on se sert de squames ou de vésicules des lésions 
érythémateuses faviques, la culture est bien plus difficile et les 
résultats sont peu probants; dans ce cas, on lave ces produits 
pathologiques, devant servir à l'ensemencement, à l'alcool à 90° 
et on ne fait pas usage d'antiseptiques. Si l’on se sert des ongles, 
on enlève, d’après Sabrazès, une tranche superficielle, pour râcler 
-les parties profondes de la région malade, en les réduisant à une 
poussière impalpable que l'on ensemence sur les milieux gélosés. 
Bodin recommande d’ensemencer sur de larges surfaces, afin que 
les colonies ne se gènent pas mutuellement. D'après Sabouraud, les 
vases plats, les boîtes de Petri sont à rejeter, parce que la buée se 
condense sous leurs couverceles et empêche de voir les cultures. 
Quant aux cultures en tube, elles se déforment dès qu'elles ren- 
-contrent la paroï du verre; aussi Sabouraud cultive les Champignons 
sur de larges matras à fond plat, qui permettent aux cultures de 
s'étendre excentriquement sans rencontrer les parois du verre. 
Comme milieu, Sabouraud emploie les milieux peptonisés à 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 289 


2 pour 100 et glycosés à 4 pour 100. Le milieu d'épreuve de Sabou- 
raud se compose de gélose 1 gr.5, maltose 3 gr. 80, peptone O gr. 75, 
-eau 100 gr. 

Il y a encore le milieu de Sabouraud liquide, qui ne difière du 
précédent que par l'absence de gélose. Les cultures en goutte sus- 
pendue sont, surtout, utiles pour l'étude du Champignon. Bodin 
recommande les milieux peptonisés à 5 pour 100; l’Achorion y 
pousse en quinze jours et donne des colonies gris blanchâtre ou, si 
elles confluent, cérébriformes. | 

Sabouraud mesure la convenance du milieu pour un Champignon 
par la profondeur de son implantation et la rapidité de son déve- 
loppement. 

Milieux liquides. Cultures sur bouillon. — Verujski remarque que 
-l’'Achorionse développe difficilement en milieux liquides; il obtient 
des formes mycéliennes très irrégulières avec une ébauche de for- 
mation de conidies. Dans le bouillon de veau simple ou peptonisé, 
le petit lait, le liquide d’ascite, l’Achorion se développe bien et par- 
fois avec godets. Kral obtient, dans le bouillon peptonisé à 37°,un 
gazon d'Achorion limité par des productions caractéristiques sem- 
blables à de la Mousse; le liquide ne se décolore pas; il remarque 
de nombreuses conidies et pas d’hyphes aériennes. 

Sur le lait, Verujski obtient une couche cotonneuse et mate, 
blanche, compacte, d’une épaisseur de deux à trois millimètres ; 
la surface inférieure de cette culture en contact avec le liquide est 
pigmentée en jaune; la couche superficielle présente des filaments 
aériens et des tubercules épais, irréguliers, s’élevant au-dessus 
du niveau liquide; la forme de ces tubercules rappelle le godet. 
Kräl obtient sur le lait à 37° une couche compacte, blanche au 
début comme la neige et plus tard jaune maïs ; les portions de 
la culture plus exposées au sec deviennent même orangé foncé. 
- Le sérum du lait devient fluorescent. Au microscope, il trouve des 
filaments très allongés et pas de conidies. L'Achorion liquéfie la 
caséine assez rapidement. 

Sur le sérum du sang à 37°, Kral obtient un duvet uni à lasurface 
avec croissance notable en profondeur ; des prolongements sem- 
blables à de la Mousse limitent la culture. Le microscope ne mon- 
tre, sur un mycélium de 30 jours, ni conidies ni cloisonnement 
des hyphes. SE 


290 P. NÉE 


Milieux solides. — Verujski considère les milieux solides comme 
moins favorables que les milieux liquides; les moins défavorables 
sont, pour lui, la gélatine et la gélose ; le développement du Cham- 
pignon y est plus lent et moins abondant que sur les milieux 
liquides ; cependant, on obtient encore des spores aériennes; mais 
la désagrégation du végétal est plus rapide. 

Culture sur gélatine. — La gélatine se liquéfie et l'on a une couleur 
jaune intense; on peut trouver de véritables godets faviques, si le 
tube de gélatine est couché. Grawitz remarquait sur la gélatine de 
petits flocons ; le Champignon ne liquéfiait la gélatine que très len- 
tement. Sabrazès remarque aussi la liquéfaction de la gélatine et, 
en employant la méthode de Kral, il signale un voile blanchâtre 
nuageux qu'il considèrecomme un phénomène chimique, de nature 
inconnue, puisqu'il n'est pas dù à la présence d'impuretés mi- 
crobiennes. Kral remarque que l’Achorion ne liquéfie pas la 
gélatine, même en couche mince, avant trente jours. Bodin obtient 
sur la gélatine une petite culture irrégulière blanchâtre, non 
duveteuse; la liquéfaction ne commence qu'au huitième jour et 
avec lenteur. 

Sur gélose. — D'après Gaucher, on trouve sur gélose des amas 
jaunâtres, cupuliformes, pareils aux godets faviques. Sabrazès 
remarque, sur gélose glycérinée très molle, une végétation active 
qui s'étend plus en profondeur et en surface qu’en hauteur; d'après 
lui, les milieux gélosés sont très favorables à l'étude du pléomor- 
phisme. Sur la gélose simple, Sabrazès obtient une culture caracté- 
risée par sa croûte saillante, un contour nettement défini et irré- 
gulier, légèrement translucide et rappelant l'aspect de la cire, de 
consistance assez ferme. 

La culture que l’on obtient sur gélose peptonisée et glycérinée 
présente également ces caractères : la surface peut prendre l'aspect 
de godet ou bien l'aspect cérébriforme ou verruqueux; ces cultures 
grisètres peuvent se poudrer finement de blanc sans former de 
duvet; si le milieu est assez mou, la culture émetdes prolongements 
mousseux. 

Grawitz remarque la forme étoilée de l’Achorion sur l’agar. Kral 
remarque surtout, sur l’agar, les prolongements, rappelant la 
Mousse, qui s'étendent horizontalement au-delà de la culture et 
aussi dans l'’agar même, là surtout. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 291 


Sur un milieu d’agar sec et très consistant, Sabrazès reconnait la 
difficulté qu'a la culture à pénétrer profondément; elle se sou- 
lève, seplisse plutôt; d’abord verruqueuse, elle devient vermi- 
forme. 

Sur pomme de terre, Sabrazès obtient des résultats très différents, 
suivant l’état de cuisson de la pomme; il remarque des îlots acu- 
minés, d'un blanc grisàtre, sans mycélium aérien le plus souvent. 
Kral obtient, sur les disques de pomme de terre à 37°, un dévelop- 
pement lent d'Achorion, remarquable par le duvet s'élevant perpen- 
diculairement, gris jaunâtre, en forme d’anneau, et portant un 
mycélium aérien, clairsemé et peu visible; au microscope, il trouve 
de grosses conidies sphériques et quelques hyphes grêles, présen- 
tant parfois un élargissement de diamètre. Bodin obtient des 
monticules blanchâtres, sans duvet ni pigmentation au début. En 
somme, la caractéristique de la:culture sur pomme de terre est 
l’enduit surélevé, mamelonné, sec, gris brunâtre. | 

Sur la carotte, Sabrazès obtient une culture analogue, mais plus 
lente. 

Sur la tige de Chou, le développement est moins lent et l'aspect 
plus grisâtre. 

Sabrazès reconnaît comme milieux très mauvais : la poire, la 
pomme cuite, la peau d'orange, le jus d'oignons, de cerises, de 
prunes, le liquide de Raulin. 

Enfin, sur le milieu de Sabouraud, l'Achorion se développe très 
bien, sous forme d'un enduit jaune brun, plissé, déprimé au centre 
et rappelant le godet. | 

Les duvets blancs pléomorphiques. — Dans des conditions encore 
iucertaines, on peut obtenir sur les cultures un duvet fin et blanc. 
On peut isoleret cultiver ce duvet doué d'une grande vitalité, pous- 
sant même très bien sur des milieux peu favorables à l'Achorion. 
Sabouraud fait l'étude mycologique de ces duvets blancs pléomor- 
… phiques; il n'y trouve pas de forme de reproduction, mais seule- 
ment des filaments mycéliens minces, buissonnants, très vivaces, 
stériles. Remarquons que Sabouraud obtient le retour de cette 
forme duveteuse au type primitif, par cultures successives, fait 
qui ne se rencontre paschez les Trichophyton et les Microsporum en 
cultures artificielles. 


292 P. NÉE 


B. — MORPHOLOGIE DE L'Achorion DANS SES CULTURES ARTIFICIELLES. 


Procédés d'étude. —D'après Sabouraud, pour examiner l'Achorion 
dans sa vie artificielle, il faut se servir des cultures en goutte sus- 
pendue. « Pour en avoir de bonnes, dit-il, dans la Pratique derma- 
tologique, on choisit avec le plus grand soin la culture mère qui 
servira de reproducteur. On recueille la culture d’un grand nombre 
de cas différents de favus de tout âge. Il est très utile d’avoir, en 
outre, plusieurs cultures en milieux liquides, où elles prennent 
une croissance beaucoup plus rapide, et deles reporter etimplanter 
en masse sur gélose, où elles donneront ensuite assez vite des cul- 
tures florissantes. On fait un premier ensemencement avec tous les 
exemplaires de favus recueillis; avec chacun d'eux on fait quatre 
ou cinq cultures en goutte suspendue. » Ensuite, d’après Sabou- 
raud, on surveille le développement de ces cultures en goutte; on 
tâtonne, plusieurs semaines s’il le faut, jusqu’à ce qu’on ait obtenu 
une culture dont le développement soit manifeste avant trois 
jours. C’est cette culture qui servira à l'examen microscopique, si 
l’on veut obtenir un bon résultat. Sabouraud insiste particulière- 
ment sur la nécessité d'employer ces cultures en goutte suspen- 
due; c’est, en effet, avec ces cultures qu'il a pu obtenir des résul- 
tats d'examen remarquables. ; 

Tishutkin, en 1894, a étudié de son côté la morphologie et la 
biologie des Achorion; il s’est servi pour cette étude de plus 
de mille cultures sur une cinquantaine de milieux. Malgré la 
grande variabilité des cultures, il trouvait à l'examen microsco- 
pique des caractères assez stables pour différencier l'Achorion 
Schünleini. 

Sabrazès a recherché aussi, sur quelques milieux divers, l’as- 
pect microscopique de l'Achorion; il préparait ainsi ses colonies 
sur gélose pour l'examen microscopique : d’abord inclusion dans 
la celloïdine, coupage au microtome mécanique et enfin montage 
dans la glycérine sans coloration. 

Kräl en 1892 se servait, pour l'étude microscopique de ce Cham- 
pignon, de divers milieux qu'il préparait suivant une technique 
toute spéciale et très compliquée. 

Verujski, qui donnait en 1886 une bonne description du parasite 
du favus, le cultivait en cellules humides et se servait aussi de 
milieux liquides et solides. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 293 


Kral se servait de cultures dans les petites coupes doubles de 
Soyka et les examinait à un faible grossissement. 

Résultats. — L'étude de la morphologie de l’Achorion, comme celle 
de n'importe quel Champignon, offre deux choses à considérer : 
l'appareil végétatif ou mycélium etles formes de reproduction. Voyons 
d'abord le mycélium, d’après Sabouraud. Soit une culture jeune, 
à développement rapide, obtenue par le procédé dont nous avons 
parlé : le microscope montre une forêt defilaments mycéliens rappe- 
lant l’aspect des têtes de Méduse. Ces filaments sont d’un diamètre 
très inégal et l’on voit même un filament donner naissance à un 
autre plus large, donner une ramification comparable à celle du 
bois de Renne. C’est une forme végétative intense, qui contraste 
fort avec le mycélium grêle et atrophié que présente l'Achorion 
dans les cultures en goutte, à développement tardif. Sabrazès, 
étudiant au microscope les cultures sur gélose, en 1893, constatait 
la ramification dichotomique fréquente et irrégulière des tubes 
mycéliens. 

Verujski en 1886 remarquait, d'après les cultures en cellules hu- 
mides, que le mycélium de l’Achorion est plus épais et plus seg- 
menté que celui du Trichophyton ; ses enchevêtrements lui appa- 
raissaient aussi Comme moins compliqués. 

Ajoutons que la dimension des filaments qui forment le mycé- 
lium varie de 3 à 8 v ; ils sont divisés en segments de longueur 
très inégale, mais dépassant en général d'au moins trois fois la 
largeur. 

Sabouraud, qui donne de l'examen des cultures à développe- 
ment rapide une description détaillée, reconnaît plusieurs aspects 
du Champignon, dus soit au mode de développement du mycélium, 
soit à la forme de fructification; il caractérise ces aspects par 
l'image de l’objet qu'ils évoquent : ainsi l’on a les têtes de clou 
faviques, les chandeliers faviques qui sont, au contraire des fuseaux 
trichophytiques, rarement multiloculaires et rarement septés, la 
forme en dents de peigne; enfin les conidies vraies, lesquelles prè- 
tent à une considération spéciale : ces conidies se montrent sur des 
Cultures en goutte à développement peu rapide, sans être toutefois 
tardif;cesont ces mêmes conidies que l’on rencontre chez le Tricho- 
phyton et le Microsporum Andouini. Cesconidies toujours pyriformes 
sont parfois, par groupes de deux ou trois, supportées par un pédicule 


294 P. NÉE 


bifurqué et très grêle; leurs dimensions sont plus variables que 
chez le Trichophyton; ces conidies sont, de plus, disposées très 
irrégulièrement sur le mycélium et elles présententune déhiscence 
remarquable, qui explique pourquoi l'on trouve souvent de nom- 
breuses conidies autour du mycélium. 

Il faut rapprocher ces conidies des endoconidies dont parle aussi 
Sabouraud, que l’on retrouve également dans les vieilles cultures 
trichophytiques, aussi bien que dans les cultures de favus en 
goutte à développement tardif. Ce sont des formes de reproduction 
dites de souffrance et d'attente. Ces organes ont une enveloppe à 
double contour assez épaisse et renferment du protoplasma très 
réfringent, granuleux, que l’éosine colore fortement, au contraire 
des rares et minces filaments noueux de mycélium qui les unis- 
sent. Ces endoconidies sont nombreuses dans les cultures peu fa- 
vorables; elles sont disposées en chaîne et leur forme, comme 
leur dimension, est très variable. Remarquons, en passant, que ce 
sont les mêmes endoconidies que Bodin a trouvées comme étant la 
forme la plus ordinaire de la reproduction du Microsporum Au- 
douini. | 

Ce sont également des formes de souffrance et d'attente que la 
plupart des auteurs décrivent comme organes de reproduction de 
l'Achorion, faute de milieu suffisamment favorable pour obtenir 
un mode de fructification supérieur. 

Le double contour des spores semble indiquer qu'elles ont un 
noyau, que les colorants n'ont pas encore mis en lumière. 

D'après Verujski, une culture d’Achorion agitée avec de l'eau y 
laisse instantanément les spores en suspension; de là vient que la: 
surface des vieilles cultures est farineuse. 

Verujski constate, par ses cultures en cellules humides, que les 
spores de l’Achorion sont généralement plus grosses que celles du 
Trichophyton, qu'elles sont souvent ovales, parfois sphériques et 
qu'il est rare de les trouver réunies à des fragments de filaments. 

Sabrazès remarque, par ses cultures sur gélose, que les extré- 
mités des filaments mycéliens se renflent et donnent lieu à la pro- 
duction de chapelets irréguliers de cellules ovoïdes, qu'il appelle 
des gemmes. Ces gemmes ou spores, dont le double contour est 
difficile à voir, lui apparaissent plus souvent aplaties que rondes et 
même, parfois, pourvues d'irrégularités comme des saillies laté- 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 290 


rales ou des cônes terminaux. Les spores sont en amas ou bien en 
chapelets, ayant alors dans ce cas pour origine la segmentation 
d'un filament mycélien; parfois, deux fragments de ces courts cha- 
pelets sont séparés par un ensemble de cellules végétatives et, 
d’autres fois, on trouve sur le mycélium même les cellules ren- 
flées. Les gemmes se développent davantage, quand les cultures 
commencent à vieillir, puis elles finissent par se flétrir en pre- 
nant la couleur jaune ocre et, à ce moment, Sabrazès les compare 
à des outres demi-vides. 

Tishutkin en 1893 observe, le troisième ou quatrième jour 
de la culture, ce que Kräl appelait des corps jaunes, renflements 
ovoides à l'extrémité des filaments; ce sont pour lui des amas de 
plasma colorés que les tubes mycéliens expulsent : le tube s'évide, 
cette masse se détruit, une fois expulsée; cependant le même fait 
se produit pour l'Aspergillus glaucus et cette expulsion de plasma 
coïncide avec des conditions peu favorables à la culture. En 
somme, ces renflements ovoides ont 8 à 15 de diamètre, un 
double contour et laissent échapper au dehors, après déhiscence, 
leur contenu granuleux. C’est une forme de résistance de la plante. 

Résumé. — En somme, l’Achorion Schünleini se reproduit d'ordi- 
naire suivant deux modes : 1°sur le mycélium paraît un renflement 
qu'on appelle corps jaune et renfermant du protoplasma : c'est la 
chlamydospore; 2° sur le mycélium paraît une hyphe fertile où les 
conidies sont bout à bout : c'est la forme conidienne. Ces deux 
modes peuvent exister, simultanément ou non, sur un même 
mycélium, car on peut ne trouver que la forme conidienne. 

Si l’on veut suivre la germination des conidies, on peut, comme 
le faisait Sabrazès, se servir de lames creuses, lavées à l'alcool et 
passées à la flamme ; on les recouvre d’une lamelle tenant en suspen- 
sion une goutte de gélose renfermant quelques spores : on lutte 
à la paraffine; on place la lame dans la chambre chaude de Vignal 
réglée à 400 et fixée sur la platine du microscope; on voit ainsi un 
mycélium irradié qui finit par se fragmenter sans aboutir à la spo- 
rulation. 

Pour voir le mycélium aérien, Jessner conseille d'appliquer un 
porte-objet enduit de blanc d'œuf sur les colonies; après quelques 
heures de contact, les parties superficielles de la culture restent adhé- 
réntes au verre. 


296 P. NÉE 


Enfin, d'après de Nabias et Sabrazès, la dissociation, quoique très 
utile pour examiner les détails d’une colonie, ne peut pas remplacer 
les inclusions à la paraffine qui permettent de couper en série le 
Champignon. 

Kral donne les caractères suivants, comme étant les plus impor- 
tants et les plus caractéristiques de l’Achorion en culture : dans 
tous les milieux nutritifs, transparents, liquides et solides, l'Acho- 
rion émet à la périphérie de la culture une production analogue à la 
Mousse; de plus, il croît en profondeur dans ces milieux, il ne li- 
quéfie pas la gélatine pendant les trente premiers jours de la cul- 
ture ; il produit, sur la pomme de terre et la rave, des duvets gris 
jaunâtre qui s'élèvent perpendiculairement. La culture sur le lait 
est particulièrement caractéristique; nous l'avons décrite. Enfin, il 
se forme sur les milieux nutritifs solides des productions qui, au 
bout de quelques jours de dessiccation, apparaissent jaunes, friables 
et d'aspect tout-à-fait analogue macroscopiquement et microscopi- 
quement au godet favique. 


C. — CLASSIFICATION DE L'Achorion Schonleini. 


Duclaux en 1886 rattachait ce parasite, de même que le Tricho- 
phyton, à cause de l'existence de spores sexuées, à la famille des 
Périsporiacées, tribu des Ascomycètes, dont les Oidium font aussi 
partie. Les Mycologues, après Duclaux, le rattachaient aux Mucédi- 
nées, type Vospora, à cause des spores groupées en chapelets sim- 
ples ou ramifiés. Pour Costantin et Sabrazès, c'est peut-être une for- 
me conidienne d’Ascomycète dont la forme parfaite est à rechercher. 
Enfin Sabouraud, ayant parfois observé de petites conidies facile- 
ment caduques, disposées sur les parties latérales de l'hyphe fertile, 
rapproche l'Achorion des Trichophyton et Microsporum qui en pré- 
sentent de semblables, et le range avec eux dans les Gymnoascées; 
mais ce n'est que par comparaison qu'il range les Achorion, Tricho- 
phyton et Microsporum dans les Discomycètes, dans la grande fa- 
mille des Ascosporées. Pour être certain, il faudrait avoir le fruit 
supérieur. 

Voilà pour ce qui concerne les modes de fructification inférieure. 
Mais Sabrazès, puis Sabouraud et Bodin, pour ne citer que ces au- 
teurs, ont observé un semblant de fructification plus élevée, quoi- 
que mal définie et encore obscure. Bodin a trouvé trois fois une 


ETAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 297 


sorte de bouquet, à l'extrémité d'une hyphe terminale. Sabouraud, 
-qui s'est particulièrement occupé de cette question importante 
-pour la classification de l'Achorion, a fait des réensemencements 
en série ; il a trouvé une sorte d'amas mycélien, comme un cocon de 
-Chenilles entre des brindilles; il a trouvé aussi des productions qui 
évoquent l'image des périthèces. Cette recherche demande à être 
poursuivie. 

Matruchot et Dassonville rangent l'Achorion dans les Gymnoas- 
-cées; mais, disent-ils, ( l’'Achorion serait un parasite plus ancré 
dans la vie parasitaire et ne ferait retour que plus difficilement et 
plus lentement aux formes saprophytiques sporifères. » 


D. — CGARACTÈRES BIOLOGIQUES DE L'Achorion 
DANS SES CULTURES ARTIFICIELLES. 


Le milieu et l'activité vitale. — D'après Kral, le cycle de végétation 
de l’Achorion est complet en sept jours dans de l’agar nutritif à 
-3710 et la germination commence quatre heures après l’ensemence- 
ment. Nous avons déjà parlé du milieu le moins défavorable actuel, 
composé de glycose et de peptone. Quant à la réaction du milieu, 
ajoutons que Tishutkin préfère cultiver l'Achorion sur un mi- 
lieu contenant 0,018 p. 100 d'acide chlorhydrique ou bien un milieu 
-alcalin contenant 0,037 p. 100 de carbonate de soude. 

La température la plus favorable. — La température la plus con- 
venable est, d'après Sabrazès, de 300 à 35°. Kral emploie de pré- 
férence la température de 37°. Tishutkin prétend, en 1894, que 
J'Achorion Schôünleini se développe le mieux à 32°. Sur le milieu de 
-Sabouraud, le parasite se développe à 33° et ne croît plus à 380. 

La résistance. — Tishutkin a recherché la résistance à la tem- 
pérature des diverses parties composantes du Champignon; le 
-mycélium périt le premier, puis les spores. Pour tuer les spores, il 
‘laut les maintenir longtemps à 40°. D'après Sabrazès, les spores 
du godet ne germent pas encore à 12° et sont tuées à 55° en 
10 minutes. Les spores en liberté périssent facilement sous l'in- 
-fluence des antiseptiques, d'après Tishutkin. Cependant, d'après 
Calderone, le sublimé au 4/1000 agissant 5 minutes sur une cul- 
ture ne la tue pas; pour arriver à ce résultat, il faudrait faire agir 
-24 heures une solution de sublimé à 1/1000. L'acide phénique, qui 
a Cependant un pouvoir antimycotique supérieur au sublimé, doit 

Archives de Parasilologie, XI, n° 2, 1957. 20 


298 P. NÉE : 


être employé au 1/100 et agir 40 minutes sur la culture pour la 
détruire. Diverses solutions ne font que retarder le développe- 
ment : ce sont la solution de résorcine, de chrysarobine, de thy- 
mol, d'acide salycilique à 10/100, de même la solution d'acide 
pyrogallique, d'acide acétique à 20/100; enfin l'alcool à 50/100 et 
l'acide formique. D'autres substances n’ont aucune action; ce sont, 
par exemple, le naphtol 5, le soufre sublimé, l'ichtyol, la teinture 
d'iode, le baume du Pérou, le chloroforme, l'éther. Bogrow et 
Sharkevitch-Sharshinsky remarquent l’action active de la forma- 
line, laquelle, en solution aqueuse à 5/100, tue en vingt minutes 
l’Achorion, si le mycélium n'est pas trop compact pour créer un 
obstacle à la pénétration du liquide. Nous verrons plus loin ce qu'il 
faut déduire de ces recherches au point de vue traitement. 

Aécrobiose. — Sans être anaérobie, ce Champignon s'accommode 
d'une aérobiose médiocre; il pousse très lentement dans la profon- 
deur des milieux (Sabrazès). D'après Tishutkin, il ne pousse pas 
dans des milieux non oxygénés, en y conservant cependant sa vita- 
lité un mois. Le degré d'aération de la culture influe aussi sur son 
développement. 

Hygrométrie. — Sous l'influence de l'humidité atmosphérique 
exagérée, Sabrazès voit sa culture sur gélose se modifier un peu; 
ainsi la croûte perd son contour net et se hérisse de nom- 
breuses pointes. Tishutkin voit aussi la culture se modifier suivant 
le degré d'humidité. 

Influence bactérienne. — La présence de certains Bacilles dans les 
cultures, d’après Tishutkin, suffit à tuer le Champignon : tels 
sont les Bacillus proteus, prodigiosus et pyocyaneus ; toutefois, il y a 
des exceptions dans des conditions spéciales. Pour le même au- 
teur, le ralentissement du favus dans la fièvre typhoïde n'est pas 
dû seulement au trouble de nutrition du cuir chevelu et à la tem- 
pérature élevée qui ralentit la culture, mais aussi à l'influence des 
Microbes ou de leurs toxines. 

Adaptation. — Quant au caractère de plasticité et de malléabilité 
de l’Achorion, nous l'avons déjà signalé à propos du polymor- 
phisme; cependant, aucun Trichophyton ne le présente à un si haut 
degré. Verujski reconnaissait, en 1886, que la régularité et l’abon- 
dance du développement de l'Achorion augmentaient progressive- 
ment, si l’on faisait des réensemencements successifs sur un même 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 299 


-milieu; il se faisait une acclimatation progressive au milieu choisi. 
Plautremarquait également ce fait et arrivait ainsi à faire accepter 
facilement au Champignon du favus des milieux que celui-ci sem- 
blait vouloir refuser tout d'abord. Sabouraud reconnaît les dif- 
ficultés de caractériser nettement l'Achorion; car, quand il trans- 
porte l’Achorion d'un milieu sur un autre, le Champignon change 
d'aspect et, si le milieu n'est pas très favorable, prend une forme 
sénile avant de s'acclimater ; cette forme sénile apparaît comme 
une éponge, une pellicule boursoufée et très anfractueuse. Le Tri- 
chophyton, vivant sur un terrain insuffisant, prend aussi cette 
même forme spongoide, pseudo-favique; mais définitivement, 
comme Sabouraud le fait remarquer, il ne prend pas, au contraire 
de l’Achorion, la forme duveteuse ou spongoïde alternativement, 
suivant les besoins physiologiques du moment. 

Sabrazès remarque, par le microscope, les zones successives de 
Ja colonie favique, dues à ce que la végétation se produit, d'une 
part, périodiquement en suriace, d'autre part, simultanément, 
mais moins abondamment en profondeur. 


E. — INOCULATIONS DE L'Achorion Schonleini. 


À l'Homme. — Remak réussit, en 1842, à s’inoculer le favus sur 
le bras; il obtient des godets faviques. Deffis inocule aussi le favus 
avec succès. Sabrazès, inoculant la culture de favus à l'Homme, 
obtient un placard érythémateux au point d'inoculation : il se 
manifeste, les premiers jours, une sensation de cuisson; le cin- 
quième jour apparaît une tache rosée bordée de vésicules; enfin, 
l'évolution continuant, il ne se forme ni points jaunes ni godets,et 
cette tache érythémateuse guérit d'elle-même après quatre se- 
maines. Dans de nouvelles expériences, Sabrazès obtient des 
godets sur l'Homme et il vérifie ce fait, déjà connu de divers 
auteurs et en particulier de Kral, que l'inoculation est plus aisée 
sur la femme que sur l’homme. Pour faire des inoculations, il 
emploie des cultures renfermant de préférence des conidies, cul- 
tures recueillies sur des milieux solides, en particulier sur l'agar 
glycériné ; après avoir dissocié et émietté ces cultures dans l'eau 
stérilisée, désinfecté le champ opératoire, il pratique l'inocula- 
tion. 

Pick, en 1891, pour faire ses inoculations se sert de Champignons 


300 P. NÉE 


délayés dans le bouillon; la peau étant aseptisée autant que pos- 
sible, il écrase à cet endroit l'élément du favus à l’aide de l’an- 
neau de platine; c’est l'inoculation épidermique; mais il pratique 
aussi l'inoculation intradermique, à l'aide d’une aiguille à inocu- 
-lation introduite dans un follicule de la peau, en évitant l’écoule- 
ment de sang. 

D'autres inoculations à l'Homme sont faites, depuis, en particu- 
lier par Folly; mais non plus seulement dans le but d'obtenir des 
godets faviques, mais pour préciser les premiers symptômes, pour 
rechercher par exemple la période dite herpétique de Kôübner; 
nous en reparlerons à l'occasion de la symptomatologie. 

Aux animaux. — Le favus humain a été inoculé aux animaux, 
d'abord aux animaux de laboratoire : déjà, en 1886, d'après Neu- 
mann, on savait que l'Achorion Schünleini peut développer le favus 
sur la Souris, le Rat, le Chat, le Chien, le Lapin, aussi bien que 
sur l'Homme; cependant, ces favus ainsi inoculés aux animaux 
guérissent ordinairement d'eux-mêmes. À Lyon, Saint-Cyr inocule 
le favus de l'Homme au Chat; Tripier l'inocule à des Souris et des 
Rats. Saint-Cyr dit, en 1869, que les Souris, les Rats, les Chiens et 
les Chats peuvent contracter le favus dans leurs rapports avec les 
enfants faviques. 

Sabrazès remarque que la Souris prend particulièrement bien 
le favus de l'Homme et que le Rat noir semble réfractaire aux 
divers favus. Le lieu d'élection d'inoculation est, d'après lui, chez 
la Souris, le Lapin et le Chien, les oreilles, au niveau d’une exco- 
riation. L'inoculation du favus humain échoue sur le Chien; donc 
le favus obtenu sur cet animal par Neumann était dù, sans doute, 
à une autre espèce d'Achorion inconnue alors. Sabrazès n'obtient 
pas, non plus, de résultat sur le Chat et le Singe. Les godets obte- 
nus sur le Lapin par inoculation sont superficiels. 

Bodin considère la Souris grise comme l'animal de choix pour 
l’inoculation de l’Achorion Schônleini. 

Nous avons parlé de la lophophytie des Poules, que l'on croyait 
être du favus, avant Matruchot et Dassonville. Sabrazès, qui a 
étudié cette teigne aviaire comme étant du favus, dit en outre 
-qu'il a obtenu des godets faviques superficiels sur la crête de la 
Poule par inoculation du favus humain : («au bout de vingt-deux 
jours la crête était parsemée de mamelons squameux, de couleur 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 301 


jaune, très adhérents, enchâssés par leur base dans l'épiderme 
épaissi; dans ce cas, la guérison fut spontanée en deux mois; le 
derme n'était pas atteint et les végétations de l’épiderme avaientla 
texture du godet favique. Le Champignon semblait favique.. » 

Il semblerait donc que l’on puisse trouver sur la Poule, en dehors 
de la lophophitie, dans des conditions tout à fait exceptionnelles, 
un Favus de la Poule résultant d’une inoculation humaine. 


VIII. — L'Oospora canina Costantin-Sabrazés. 


- Costantin et Sabrazès, qui l'ont découvert, en ont donné les ca- 
ractères botaniques, en 1893, après en avoir reconnu la constance 
par passages successifs sur divers animaux et sur l'Homme.  : 

Aspect microscopique. — Le mycélium n'a pas de terminaisons 
renflées et n’est pas ramifié dichotomiquement, comme celui du 

favus humain. On remarque, sur les bords de la culture, des fila- 
ments composés de cellules courtes, qui apparaissent quelquefois 
comme demi-cloisonnées. Un caractère constant est la coloration du 
substratum en rose ou violet par un pigment rouge intense, 
produit par le mycélium et contrôlé par Laborde, à Bordeaux. 

La fructification est conidienne seulement; pas de corps jaunes, 
mais des spores rondes, disposées en chaînes le plus souvent sim- 
ples et longues. Ce Champignon est classé parmi les Oospora, par 
analogie avec les formes dégradées d'Oospora. 

Cultures et biologie. — Sur l’agar peptoniséà 1 pour 100, il se déve- 
loppe, au bout de vingt-quatre heures, à 37°, se pigmente très vite à 
sa partie inférieure en rouge intense, se recouvre d'un duvet blanc 
serré et ras. Les conidies se forment, dès le troisième jour, en 
chaînes longues de 4 à 8 et renferment de nombreux pigments 
brun jaune. | 

Par piqütes sur les milieux humides et bien aérés, le même du- 
vetse produit sur la culture et il est entouré d'une petite zone de 
filaments droits et soyeux: la face inférieure se pigmente en 
rouge d'autant plus vite que l'extension de la culture est plus 
prompte. 

Sur la gélatine on voit des îlots de duvet blanc, d'aspect rouillé 
à leur partie inférieure; à 25° le Champignon liquéfie la gélatine 
qui devient brune. nee 1 


302 P. NÉE 


Sur le sérum à 25°, si l'on fait l'ensemencement par piqüres et 
si l’on se sert d'un tube coiffé au caoutchouc, l’on obtient dès le 
cinquième jour une colonie dite principale, humide, arrondie, de 
six millimètres de diamètre et un millimètre de hauteur, entourée 
de filaments droits rayonnés; on ne voit pas de mycélium aérien 
ni de dépôt poudreux; la face dorsale, dont le centre est un peu 
excavé, est à ce niveau brun rougeñâtre. Autour de cette colonie, il 
y en a d’autres grosses comme une tête d'épingle et qui ne sont 
que des amas delongueschaines conidiennes, pigmentées en rouge 
jaunâtre. Le sérum ne se liquéfie qu'au bout d'un moiset demi. 

Sur la pomme de terre à 37°, on a des massifs confluents acumi- 
nés, circonserits par une zone duveteuse, d'un blanc argenté, qui 
peut couvrir toute la colonie. 

Sur la carotte à 37°, la végétation en surface est abondante; 
le mycélium aérien est très blanc et duveteux; la face inférieure 
est d'un beau rouge carminé. Pas plus que sur la pomme de terre 
ou la gélose, on ne retrouve pour l'Oospora canina l'aspect de croûte 
cireuse de l’Achorion Schünleini. 

Dans le lait à 20° et à 37°, dans les flacons à fond plat de Gayon, 
la culture se fixe sur les parois du verre et apparaît comme un pi- 
queté rouge analogue au purpura. 

Enfin, la température la plus favorable au développement 
de l'Oospora canina est de 30°; mais le développement se fait 
encore au-dessous de + 12°, au contraire de l'Achorion Schôn- 
leini. Le contour des cultures n'est pas net, le plus souvent, et la 
partie supérieure est blanche. 

Inoculations à la Souris. — La malignité de ce Champignon vis- 
à-vis de la Souris est aussi forte que celle del’A chorion Schènleini; on 
obtient des godets, dès le onzième jour, et l'animal finit par succom- 
ber au bout de deux mois et demi, par exemple. Remarquons que 
ce Champignon ne perd pas son individualité en cultivant sur la 
Souris. 

Sur le Chien, on obtient des godets faviques et ce favus ne semble 
pas guérir spontanément. 

Sur l'Homme, on obtient, dans la grande majorité des cas, des 
placards érythémato-squameux et très rarement des godets,; les 
filaments de ces godets se colorent plus difficilement par le violet 
de gentiane que ceux du favus humain. 


 - - 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 303 


Sur le Lapin, après inoculation dans les veines ou dans la 
chambre antérieure de l'œil, la mort arrive vers le troisième jour, 
avec des phénomènes dyspnéiques; on peut retrouver des colonies 
du parasite dans la chambre antérieure de l'œil et des granulations 
miliaires intra-vasculaires, surtout dans le poumon; ces granula- 
tions sont des colonies en évolution, composées d’un mycélium vi- 
vace se colorant facilement. 


IX. — L’Achorion Quinckeanum. 


Ce parasite du favus de la Souris a été étudié par Quincke, en 
1886, et depuis surtout par Bodin, en 1902. Nous ne décrirons ce 
parasite que sommairement, malgré son importance, en renvoyant 
pour plus de détails à la description qu'en a faite Bodin dans les 
Archives de Parasitologie de 1902.. 


À. — CULTURES. 


Les milieux les plus favorables sont les milieux glycosés ou 
encore glycérinés ou encore maltosés ; ces milieux doivent être 
neutres ou faiblement acides et portés à 35°. 

Sur gélose peptonisée à 1 °/, et glycosée à 3 °/, on obtient une eul- 
ture uniformément blanche et duveteuse avec, au centre, de larges 
plis ou des ondulations saillantes; la surface inférieure est d’un 
blanc jaunâtre et finit par se pigmenter en violet foncé. Si dans ce 
milieu on remplace la glycose par la glycérine, on obtient une cul- 
ture moins abondante, quoique aussi rapide, et on trouve l'aspect 
cérébriforme. 

Sur le bouillon de bœuf, on voit de petits îlots de duvet blanc 
neigeux dont la face inférieure est jaunâtre et, de plus, de petits 
flocons grisâtres dans le liquide. 

Sur le lait, on a une culture blanche, duveteuse, qui surnage; 
il se produit, d’après Bodin, de la présure et de la caséase. 

Sur la gélatine ordinaire, la liquéfaction, évidente dès le dixième 
jour, est étendue, en trois semaines, à toute la gélatine en tube 
ordinaire, sans que le duvet blanc de la surface se soit notable- 
ment accru. 


304 P. NÉE 


B. — MORPHOLOGIE ET BIOLOGIE. 


Si l'on fait germer, sur un milieu convenable, de gros éléments 
arrondis à parois épaisses constituant la majeure partie d’une 
vieille culture de ce parasite, on voit à 37° des filaments mycéliens 
de 2» 5 de largeur, présentant des cloisonnements, se ramifiant 
latéralement et s'enchevètrant; dès le cinquième jour, on voit des 
conidiesappendues latéralement aux hyphes aériennes, constituant 
le duvet blanc de la culture; ce mode de reproduction rappelle 
celui des Botrytis et, surtout des Acladium; voilà donc, à cause de 
sa fructification, l'Achorion Quinckeanum rapproché des Tricho- 
phyton et des Microsporum. 

Le mode de maturation des conidies latérales se rapproche 
beaucoup de celui selon lequel se forment les chlamydospores. 

Les chlamydospores, nées à l'extrémité ou dans la continuité d'un 
rameau, donnent naissance à de gros éléments très nombreux, de 
8 à 12% de diamètre, renfermant du protoplasma; ces éléments 
finissent par devenir libres et susceptibles de reproduire la plante 
par leur germination. Boer, en 1887, considère déjà les renflements 
claviformes de cette Mucédinée comme caractéristiques. 


C. — INOCULATIONS. 


“ 


Les inoculations sont faciles à faire à la Souris grise et au 
Cobaye, surtout si l’on se sert de cultures jeunes; il se produit une 


lésion érythémato-squameuse, puis de petits godets qui finalement 


confluent; la mort arrive vite chez la Souris, tandis que le Cobaye 
- guérit spontanément. 

Bodin n'a retrouvé l'Achorion Quinckeanum, chez l'Homme, que 
2 fois sur 250 cas; dans le 1°r cas, ce parasite déterminait des go- 
dets sur l'Homme et, dans le deuxième cas, une lésion érythémato- 
squameuse paraissant de nature trichophytique à première vue. 


X. — Rapports entre le groupe des favus 
et celui des trichophyties. 


- Nous avons décrit les parasites du favus comme tout à fait dis- 
tincts des Trichophyton. 

L'Achorion Schünleini, rattaché d'abord au type Oospora parmi 
les Mucédinées, à cause de ses chapelets de spores, se rapproche 


ETAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 309 


cependant des Trichophyton et des Microsporum par un autre mode 
de fructification, lequel est analogue à celui des Acladium. Quant 
à l'Achorion Quinckeanum, il ne fructifie pas selon le mode Oospora; 
c'est un Acladium type, que Bodin, en 1903, considère comme un 
terme de passage entre le groupe des trichophyties et des favus. 

Matruchot et Dassonville rattachent, en 1899, les Trichophyton 
aux Ascomycètes, famille des Gymnoascées et Sabouraud classe 
dans cette même famille les parasites du favus, en même temps 
que le Microsporum Audouini. 

Bodin trouve le premier, en 1896, des termes de passage entre 
le favus et la trichophytie : il trouve chez le Veau, l’Ane, le Cheval, 
l'Homme, des lésions paraissant trichophytiques par leur aspect 
clinique et même microscopique et dont les parasites, isolés en 
cultures pures, reproduisent la morphologie et la biologie des 
Achorion. Ainsi, dans un cas de pseudo-teigne tondante chez le 
Veau, Bodin isole un parasite ressemblant microscopiquement au 
Trichophyton endoectothrix, mais donnant des cultures dont les 
caractères se rapprochent de ceux des Achorion en s'éloignant 
beaucoup de ceux des Trichophyton. L'examen des cultures montre 
une fructification conidienne du type Oospora. Précédemment, dans 
sa thèse de 1896 sur les Teiynes tondantes du Cheval, Bodin avait déjà 
signalé deux types d'Achorion mycologiquement qui déterminent 
chez l'Homme et l’Animal des lésions d'aspect trichophytoïde. 

D'autre part, Sabrazès, en 1898, signale un Trichophyton du 
Cheval qui, inoculé à la Souris, produit des godets faviques. 

- Sabrazès et Brengues obtiennent des godets faviques par inocu- 
lation à l'Homme et à la Souris d'un Trichophyton pyogène extrait 
d’un sycosis parasitaire; ce Champignon est morphologiquement 
trichophytique. | 

. Mewborn, en 1903, rapporte un cas de favus du scrotum à lésions 
trichophytoïdes; il s'agit d’un Trichophyton qui, en certaines 
régions, produit des lésions d'herpès circiné et ailleurs des lésions 
faviques. 

S'agit-il, comme le croit Sabouraud, d'une classe spéciale de Tri- 
chophyton à culture faviforme ? Pour éclaireir la question il faudra 
faire une étude mycologique difficile, car on n'’étudie pas les para- 
sites du favus par les mêmes procédés que les Trichophyton. 

- Sabouraud se range à l'avis que Bodin exprimait dans sa thèse 


306 : NP ON ÉES AULAE 


de 1896, déjà citée : « la barrière entre les Achorion et les Tricho- 
ghyton paraît s'abaisser tous les jours. » Sur quoi se base-t-on, en: 
effet, pour caractériser le favus ? Ni la formation de godet, ni la 
forme spongoïde des cultures, ni le mode de fructification ne 
peuvent, d'après Sabouraud, caractériser le favus. 

Tout en admettant un Achorion humain typique, la découverte 
des Achorion trichophytoïdes nous amène à faire quelques ré- 
serves sur l'unité absolue du parasite humain et, à ce propos, nous 
devons signaler, et peut-être l'avenir prochain en signalera d’autres 
encore, la nouvelle variété d'Achorion que Billet a vue, en 1899, 
dans un favus scrotal à cultures très particulières. 


XI. — Étiologie du favus. 


Gruby, reconnaissant le favus comme affection parasitaire, 
pensa à sa nature contagieuse et il ne tarda pas à l’affirmer, en 
même temps que Mahon. Cependant, à cette époque, on faisait 
encore quelques restrictions à la contagiosité du favus; ainsi l’on 
admettait que des fomentations puissent occasionner le favus. 
Aujourd'hui, l'on n’admet pas la spontanéité du favus; le favus 
a toujours la même cause efficiente, le parasite, et si l'application 
de cataplasme sur la peau est parfois suivie d'éruption favique, c’est 
que les compresses et les substances composant la fomentation. 
recèlent de la poussière favique. La contagion par inoculation du 
parasite a été prouvée par Remak, Pick, Bazin, Deffis, Grawitz, 
Unna, etc. Le favus est contagieux d'Homme à Homme, des Ani- 
maux à l'Homme, de l'Homme à certains Animaux, des Animaux 
entre eux. 

La contagiosité du favus n’est cependant pas aussi grande que 
celle de la trichophytie et elle présente un caractère tout spécial. 
Le faible degré de contagion est remarquable, alors que la pous- 
sière favique est très abondante sur la peau des personnes faviques ; 
cette poussière se dissémine et ses nombreuses spores semblent 
n'attendre que la porte d'entrée pour créer de nouveaux foyers de 
favus; malgré cela, l'on voit parfois dans les groupements d'indi- 
vidus, dans la famille ou dans l’armée, des faviques qui conservent 
leur affection un certain nombre d'années, sans la propager autour 
d'eux et aussi sans que les lésions ne se multiplient sur eux- 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 307 


mêmes, autour du foyer primitii où dans d’autres endroits du 
corps, par auto-inoculation résultant du grattage. Les grandes 
épidémies de favus sont très rares. Il y à, il est vrai, des individus 
inaccessibles au favus : les exemples de personnes vivant journel- 
lement et faisant lit commun avec un sujet favique, sans devenir 
à leur tour faviques, sont innombrables. D'après Hardy, il y a 
même des sujets qui échappent à l’inoculation du favus; chez 
d'autres, l'inoculation ne produit qu’une végétation sans activité, 
de courte durée et guérissant spontanément. Les réfractaires au 
favus que Gaucher à pu observer, appartiennent à la classe aisée 
et ce sont des adultes robustes, bien constitués, vivant dans de 
bonnes conditions hygiéniques. Quoique ces paradoxes de conta- 
giosité soient très fréquents dans la pelade, on ne les observe que 
rarement dans la trichophytie. Ce fait n'est-il pas analogue à celui 
de la réceptivité bactérienne? . 

Et, non seulement, l'Homme peut opposer au favus une immunité 
entière de tout son être; mais il peut encore présenter seulement 
une immunité partielle, régionale : on voit des régions du cuir 
chevelu atteintes de favus et d'autres respectées; ces régions ne 
sont pas identiques pour tous les malades; cependant, le pourtour 
du cuir chevelu est toujours épargné, comme le fait remarquer 
Besnier. De plus, les ongles sont rarement atteints chez les favi- 
ques et ce n’est pas à cause des difficultés d’inoculation; car la rai- 
nure des ongles est souvent bourrée de matière favique. Il faut 
donc admettre sur la réceptivité favique une influence, non seu- 
lement générale, mais encore locale de l'individu. 

De même que certains individus reçoivent difficilement la graine 
favique, d'autres présentent au développement de cette graine un 
terrain particulièrement favorable, tant à cause desconditionsinhé- 
rentes à l'individu qu'aux conditions extrinsèques. Voyons les 
causes prédisposantes du favus : I moment de la vie le plus favo- 
rable à la réceptivité du favus est l'enfance, comme toutes les tei- 
gnes, et principalement de cinq à quatorze ans. Cependant Besnier 
et Vidal ont vu le favus aux deux âges extrêmes de la vie. Vidal a 
vu des godets faviques sur le cuir chevelu d'un enfant de six se- 
maines; la mère qui était favique depuis plusieurs années, avait 
déterminé la contagion et elle avait remarqué, dès le commen- 
cement de la quatrième semaine après la naissance, de petits 


308 P. NÉE 


points jaunâtres qui graduellement s'étaient agrandis. Besnier a 
vu aussi un cas de favus du cuir chevelu chez un enfant de six 
mois. D'autre part, Besnier et Vidal ont vu des cas de favus chez 
des octogénaires dont la contagion remontait à de très nombreuses 
années, à l'enfance, dans un cas. En Italie surtout, on signale des 
cas de favus chez des adultes de tout âge. Au moment de la pu- 
berté, le favus disparaît parfois spontanément. Enfin, d'après le 
compte rendu des études faites à l'hôpital Saint-Gallicano, il 
résulte que le favus est héréditaire dans certaines familles de la 
province de Rome. 

Le tempérament débile, lymphatique, scrofuleux est particu- 
lièrement favorable au développement du favus, de même les con- 
ditions de mauvaise hygiène, de misère physiologique, d'alimen- 
tation insuffisante, enfin de malpropreté. Déjà, avant la découverte 
de Gruby, de multiples auteurs avaient noté la coïncidence du 
favus avec les conditionsdesaleté : autour deslésions faviques du 
cuir chevelu, on trouve souvent une abondance de poux et de 
lésions d'impétigo; de plus, les faviques vivent généralement dans 
un état de malpropreté rare, ne prenant pas de bains et renouve- 
lant trop rarement leur linge de corps. 

Bazin et Deffis ont prouvé, par des expériences, quel'airqui véhi- 
cule et dissémine les spores des lésions faviques peut être un 
moyen de propagation du favus. D'autre part, les objets divers, 
susceptibles de recéler de la poussière favique, peuvent aussi ser- 
vir à cette propagation, en particulier les objets de toilette com- 
muns, comme les brosses, les peignes et aussi les coiffures com- 
munes et même les vêtements. Les spores ainsi disséminées peu- 
vent conserver leur vitalité plusieurs années, comme l’a montré 
Sabrazès. D'autre part, dans le godet favique expulsé, l'Achorion 
peut conserver plus de dix mois sa vitalité, d’après Tishutkin. 
Enfin, des cheveux faviques enveloppés dans du papier peuvens 
coloniser encore, au bout d'un an. 

L'origine du favus la plus commune est l'origine humaine: la 
contagion se fait d' Homme à Homme ou plutôt d'enfant à enfant, 
ainsi que l’ont remarqué Sabrazès et Bodin; d’après Sabrazès, à 
l'origine de la plupart des cas de favus, on trouve la cohabitation 
avec un favique. 

Le favus à quelquefois cependant une origine animale. Comme 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 309 


le fait remarquer Bodin, le Chien, le Chat, la Souris offrent, pour 
l'Achorion humain, une réceptivité très marquée et ainsi ces ani- 
maux peuvent, surtout, servir d'intermédiaires dans la propagation 
du favus humain. 

Enfin, le favus pourrait avoir parfois une origine saprophytique, 
comme Bodin en a émis l'hypothèse à la Société de dermatologie 
en 1893; il s'appuyait sur les raisons suivantes : 

19 On peut cultiver le favus sur le bois, sur les substances 
inertes, quoique très difficilement; 

20 L'analogie avec l'Oospora bovis et les Champignons voisins; 

30 L'impossibilité parfois de retrouver l'origine de la contagion; 

4 Les formes de souffrance du Champignon dans la vie parasi- 
taire qui font soupçonner une fructification normale probable sur 
certaines substances de la nature. 

Toutefois, d'après Bodin lui-même, l'origine saprophytique du 
favus serait négligeable en pratique. Remarquons, à ce propos, 
que Gruby avait très difficilement réussi, après trente essais infruc- 
tueux, à inoculer l’Achorion à un végétal; dès ce moment, on 
-pouvait donc songer à l’origine végétale du favus que Hillier a 
soutenue, et faire déjà de cette affection une maladie rurale. Au- 
-jourd'hui, pour déclarer le favus maladie rurale, on se base sur 
d’autres considérations, en particulier, des considérations tirées de 
la statistique du favus. 


XII. — Distribution géographique du favus. 


La plupart des cas traités à Saint-Louis et à Saint-Gallicano 
-Viennent des campagnes. D'après Gaucher, les départements qui 
-possèdent le plus de faviques sont ceux des campagnes misérables : 
les départements du nord, la Bretagne, les départements voisins 
des Pyrénées et ceux du Plateau central; d’après Gaucher, il y a 
-aussi des conditions régionales; car, à Lyon et aux environs, le 
favus est commun et la trichophytie est rare; c’est le contraire, à 
-Paris. En général, le favus s’observe à la campagne et la tricho- 
phytie à la ville. D'après Feulard, de 1887 à 1891, les départements 
les plus atteints sont l'Hérault et les départements limitrophes; la 
-Seine-Inférieure, le Finistère, le Morbihan, la Loire-Inférieure et 
les départements limitrophes; l’est est moins atteint; ainsi l'étude 


310 P. NÉE 


e 


‘de Feulard, faite en 1892 d’après les statistiques d’exemption 
au service militaire, nous montre que le favus semble se localiser 
de préférence autour de certaines régions, dans les campagnes, au 
contraire des grands centres comme Paris. Dans la statistique de 
Feulard, contrairement à l'opinion de Gaucher, Lyon compte parmi 
les centres possédant le moins de favus. Feulard attribue cette loca- 
lisation au contact avec les animaux comme les Rats, les Souris, 
les Chats qui sont plus fréquents à la campagne; c'est, d’ailleurs, 
l'opinion de Hardy qui rencontre surtout le favus chez les petits 
pâtres qui couchent dans les écuries et les étables. Nous avons, 
cependant, déjà dit que la majeure partie des auteurs ne consi- 
dèrent l'origine animale du favus que comme relativement rare, 
à moins que l’on ne regarde les animaux que comme intermé- 
diaires dans la propagation. Feulard dit aussi qu'il faut tenir 
compte des mauvaises conditions hygiéniques de la vie et, surtout, 
du manque de soins et de surveillance et de traitement. Aussi, 
grâce aux progrès de la civilisation, le Favus disparaît. D'après 
Besnier et Doyon, la statistique de favus annuelle comporte la 
moitié des cas de celle d'il y a vingt-cinq ans. Par ordre de fré- 
quence, les pays possédant le plus de faviques sont la Hollande, Ia 
France (le midi et le nord-ouest), les États-Unis, l'Autriche, l'An- 
gleterre. À Amsterdam, en 1855, il y avait mille faviques; le 
nombre s'est abaissé progressivement pour reprendre ces dernières 
années. Cette recrudescence du favus à Amsterdam en 1904 est 
due, d’après de Vijk, à l'insuffisance du personnel chargé du traite- 
ment. Pour enrayer la contagion on fut obligé de n'admettre à 
l’école que les enfants non malades, ou au moins ayant la tête pour- 
vue d'un bandage occlusif, délivré gratuitement dans une polyceli- 
nique ouverte à cet effet; de plus, de Vijk réclamait une école spé- 
ciale pour instruire les enfants malades. A Lyon, les statistiques, 
d'après Lesterlin, montrent une diminution évidente et considé- 
rable dans le nombre des exemptions pour teignes, comparative- 
ment aux statistiques d'il y a vingt-cinq ans. 

Petersen, Pick et Tishutkin croient le favus d'autant plus fré- 
quent que le degré de civilisation du pays est moins élevé. Le 
favus est assez répandu chez les Musulmans et les Israélites. 

Espérons qu'avec une prophylaxie plus soutenue le favus recu- 
lera et disparaîtra devant la civilisation. | 


17 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN ol 


PARTIE CLINIQUE 


I. — Introduction. 


La question clinique du favus typique n'a guère varié depuis 
Bazin qui débute à l'hôpital Saint-Louis, en 1849, marche dans la 
voie tracée par Gruby, mais se préoccupe surtout du favus au 
point de vue clinique. Avec le microscope, Bazin découvre que la 
production végétale se retrouve dans le bulbe et ïl tire, de ce fait, 
la conséquence : (les poils atteints tombent et la calvitie est défi- 
nitive. » Bazin déclare que la présence de poils est nécessaire à la 
production du favus; il décrit très bien le poil malade. Bazin 
donne une nouvelle définition de la teigne : (« une affection des 
poils, dit-il, produite ou entretenue par la présence d'un végétal 
parasite.» Aussi son traitement rationnel éclairé par ses recherches 
est commun à toutes les teignes : l'épilation et les parasiticides. 
-C'est Bazin qui, en 1857, divise les affections parasitaires en deux 
groupes; le premier groupe comprend les affections causées par 
les végétaux parasites ; le deuxième groupe, celles causées par 
Jlesanimaux parasites; au moment où il quitte l'hôpital Saint-Louis, 
-ses idées sont acceptées partout; le favus est connu au point de 
vue clinique. 

Nous avons fait déjà remarquer, dans la première partie de 
l'ouvrage, qu'il n’y a pas de correspondance du type clinique aux 
espèces parasitaires. Pick, en 1891, a d'ailleurs recherché si, vrai- 
ment, il y avait des différences, entre les divers favus, autres que 
celles de localisation; après avoir étudié vingt deux cas de favus, 
dont quatorze exclusivement du cuir chevelu, deux exclusivement 
et primitivement des régions non velues (couronne du gland et 
sillon coronaire), il conclut à l'identité des godets et des éléments 
faviques. 


II. — Symptômes du favus des régions pileuses. 


A. — SYMPTOMES DU FAVUS TYPIQUE DU CUIR CHEVELU. 


Les phénomènes subjectifs sont presque nuls, il n'y a pas de 
douleur véritable cependant, le début s'accompagne parfois de 
démangeaisons modérées, le plus souvent, dues à des lésions 


312 : P. NÉE 


de grattage ou à la présence de phtiriase d'impétigo, d’eczéma. 

Les couches superficielles de l'épiderme sont, au début, seules 
intéressées par le développement de l’Achorion et la réaction 
inflammatoire consécutive. Il apparaît une rougeur érylhémateuse 
pouvant prendre un aspect circiné, dont nous parlerons plus loin 
à propos de la question du favus herpeticus : cet érythème est peu 
visible sur le cuir chevelu et n’est pas toujours observé ; à ceniveau 
on remarque bientôt, parmi les squames, des points jaunes que la 
loupe montre ombiliqués. 

Le godet est considéré aussi par Gaucher comme la production 
sous-épidermique cireumpilaire initiale. Un poil traverse le godet 
jaune soufre ; il ne faut pas, cependant, en conclure quele poil est 
absolument nécessaire à la production du godet; car nous verrons 
plus loin que, si l'on trouve toujours un poil follet émergeant du 
godet dans le favus des régions glabres, on n’en trouve pas sur le 
godet du favus du gland. 

Les godets, s'accroissant peu à peu, forment de véritables croû- 
tes du dixième au vingtième jour. 

Besnier et Doyon font remarquer que, si l’on pique la petite tache 
blanc jaunâtre qui doit se transformer en godet manifeste, il s’é- 
coule une matière analogue au pus; d'autre part, Bazin avait re- 
marqué, à cette époque de l’évolution favique, la présence de réelles 
pustules très petites. Mahon et Baudelocque se seraient-ils donc 
trompés, en niant la pustule favique? Leloir a constaté l'existence 
-de cette pustule sur le cuir chevelu constamment, de huit à dix 
jours après l'épilation. Pour Leloir et Vidal, le liquide purulent ne 
s'écoule que si l'on rompt les points jaunâtres : autrement, ces 
pseudo-pustules se transforment en godet. Aujourd'hui, on consi- 
dère ces pustules comme des folliculites du système pilo-sébacé 
dues à une irritation quelconque, ou même à l'irritation provoquée 
par la présence du Champignon. Hallopeau reconnaît, d’ailleurs, 
que des pustules peuvent apparaître dans les aréoles érythémateu- 
ses qui entourent les poils. 

La surface déprimée du godet peut être polie ou hérissée de 
petites saillies, d'après Leloir et Vidal; on voit à l'extérieur les 
couches concentriques, bourrelets circulaires dus à l'intermittence 
de progression des lésions, aux poussées d'extension qui donnent 
au godet, comme le disait Bazin, l'aspect du nid d'Hirondelle. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 313 


Pourquoi le godet est-il déprimé? Pour Kaposi, la dépression 
est due à ce que la couche cornée superficielle, étant adhérente au 
poil, ne peut se soulever en même temps que le godet grossit. 
Pour Leloir, le favus a comme toutes les teignes une tendance à 
guérir au centre et à se propager d'une façon excentrique. 

La face profonde du godet est, au contraire, convexe et lisse ; la 
dépression qui la loge est petite et en entonnoir, d'après Leloir et 
Vidal, pour les plus petits godets, alors qu'elle est concave et cupu- 
liforme pour les gros godets; la surface de cette dépression est 
rouge, congestionnée, suintante et, le godet enlevé, la dépression se 
comble en quelques minutes, la compression ayant cessé. 

La dimension des godets adultes varie de celle d’une lentille à 
celle d'une pièce d'un centime; rarement, ils atteignent un dia- 
mètre de deux centimètres; dans le cas de favus urcéolaire de 
Bazin, on voit les godets dépasser le niveau de la peau d’une hau- 
teur de dix à quinze millimètres. Si on n'enlève pas ces godets, 
ils peuvent rester longtemps adhérents. L'épidermicule épider- 
mique de revêtement du godet qui n'existe qu'à la partie extérieure 
de la lésion, ne se détache que tard par suite de l'extension du 
processus; alors ils’ensuit une dessication des masses faviqueset l'on 
voit des amas inégaux, durs, ayant parfois un centimètre d'épais- 
seur, de couleur plus claire, d'un blanc jaunâtre ou grisâtre, à 
aspect de mortier parfois, à moins que le sang ne les colore en 
brun; ces concrétions deviennent pulvérulentes, se détachent en 
poussière ou en parcelles plus souvent qu'en masse; à cette pé- 
riode d'évolution, on ne reconnaît plus le godet favique, sauf sur 
le pourtour de la lésion. 

Aspect du cheveu favique. — Les cheveux faviques sont souvent 
accolés et, quand on cherche à extraire l’un deux, on en obtient 
plusieurs confondus dans une gaine commune, d’après Hallopeau. 

Les cheveux faviques s’arrachent, d’abord, à la main par toufites, 
puis il deviennent si fragiles que les habiles épileurs en cassent : 
les cheveux deviennent ternes, gris de souris, ou rougeûtre fauve 
d'aspect poudreux. Çà et là, on trouve quelques cheveux épars épar- 
gnés non seulement parce que l’Achorion ne s’est pas développé 
chez eux, mais aussi parce que, suivant Besnier et Doyon, leurs 
papilles n'ont pas été comprimées par les godets. 

Variétés du favus typique du cuir chevelu. — Leslésions prennent 

Archives de Parasilologie, XI, n° 2, 1907. 21 


314 P, NÉE 


un aspect différent suivant leur âge, leur nombre, la période de leur 
développement, ou bien encore, suivant leur étendue et leurs 
complications. Bazin décrivait trois formes : le favus urcéolaire 
(de urceus, tasse), le favus scutiforme (de scutum, bouclier), le 
favus squarreux, (de squarrosus, couvert de boutons montagneux). 
Le favus urcéolaire est une forme de début; les godets sont dis- 
tincts, isolés. Dans le favus scutiforme, le développement est plus 
rapide et plus exubérant; on voit des plaques jaunâtres, surtout 
sur les bords, résultant de la confluence des godets. Dans le favus 


squarreux, on voit des amas irréguliers, anfractueux, d'un jaune 
gris blanchâtre, couleur de vieux plâtre, et pulvérulents à la surface. 


Quant aux formes dues à des complications, nous les décrirons plus 
loin. 


Remarquons, enfin, que le favus respecte toujours une bande 
de cheveux en bordure du cuir chevelu, sans jamais entamer 
cette bordure; de plus, la cicatrice qu'il amène est définitive. 


B. — LE FAVUS DE LA BARBE. 


Là, le favus est beaucoup plus rare que sur le cuir chevelu : les 
godets y sont à peine visibles. D'après Hallopeau, la végétation ne 
se ferait là que dans le poil et pas en surface. Cependant, la con- 
gestion péripilaire est intense, et Leloir et Vidal ont constaté à la 
barbe la forme érythémato-pityriasique et la forme typique en 
godet extrêmement petit. Besnier et Doyon ont signalé le sycosis 
favique; pour eux, il faut avoir soin de ne pas confondre ce Favus, 
d’un diagnostic souvent difficile, avec les autres affections de la 
barbe ; ils ont remarqué aussi, dans la barbe, le favus avec éry- 
thème et desquamation. 


C. — LE FAVUS DE LA RÉGION PUBIENNE. 


Là, le favus est encore plus rare qu'à la barbe. Leloir et Vidalen 
ont observé un cas chez un homme de quarante ans atteint de 
favus généralisé; chez l'enfant, alors que cette région est encore 
glabre, le favus s'y observe parfois, mais ne présente rien de par- 
ticulier. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN D 19 


III. — Le favus typique des régions glabres. 


A. — LE FAVUS DES RÉGIONS GLABRES EN GÉNÉRAL. 


Là, les godetsapparaissent, le plus souvent, sur une nappe érythé- 
mateuse : cependant, entre les cas où il n’y a que des godets ou que 
de la rougeur, on trouve toutes les transitions. 

Bazin, à la suite d’une inoculation de favus, faite à la jambe 
d'unenfant, remarque une tache érythémateuse cerclée qui s’agran- 
dit excentriquement; au centre de cette tache se développe le 
godet; ces cercles rouges que l’on rencontre dans le favus, et sur- 
tout dans le favus des régions glabres, ont une importance symp- 
tomatologique assez grande, pour que nous devions consacrer à 
leur étude notre prochain article. 

Les follicules des poils follets sont très superficiels; aussi les 
sodets de la peau glabre tombent, au bout de quelques mois ou, par- 
fois même, au bout de quelques semaines. 

Le favus des régions glabres peut être primitif ou bien il est 
secondaire, c'est-à-dire consécutif à un favus du cuir chevelu, par 
exemple, qui se généralise par inoculation en quelques mois ou 
quelques années. 

Le favus peut atteindre tous les points de la face; sur le tronc, 
on trouve surtout le favus au niveau du dos, des épaules, des 
fesses; sur les membres, le favus atteint particulièrement les 
régions pileuses ou celles qui sont exposées au frottement. 

Le développement du favus se fait beaucoup plus rapidement 
sur les parties glabres que sur le cuir chevelu; c'est là surtout que 
l’on trouve les énormes concrétions faviques. 

Le godet des parties glabres se détache plus facilement que 
celui du cuir chevelu ; mais, comme partout ailleurs, l’ablation du 
godet n'est pas suffisante à guérir le favus et on voit, bientôt, un 
nouveau godet remplacer l’ancien disparu. 

Les lésions jeunes alternent avec les lésions vieilles au niveau des 
concrétions faviques ; aussi, l'infection secondaire aidant, il en 
résulte un aspect polymorphe. 

Kaposi donne, comme caractères du favus aigu du corps, la 
‘présence de godets multiples en tête d'épingle et l'intensité de la 
dermite. 


316 P. NÉE 


Enfin, le favus du corps guéri, on peut voir des cicatrices dues à 
la sclérose provoquée par la dermite : ces cicatrices sont lisses, 
entourées d'une zone brune et il ne faut pas les confondre avec les 
cicatrices de syphilis. 


B. — LA QUESTION DU FAVUS HERPETICUS. 


Dans le favus du cuir chevelu, du tronc ou des membres, on voit 
pariois des cercles rouges, parfois vésiculeux ou squameux, analo- 
gues à ceux de l’herpès tonsurant; aussi, Hebra identifiait le favus 
et la trichophytie. Pour Kôbner, ces cercles constituent la période 
herpétique prodromique du favus; mais cette façon d'envisager 
l'éruption herpétique ne tarda pas à susciter de nombreuses re- 
cherches et à être contestée. 

Les manifestations herpétiques du début du favus, surtout du 
favus des régions glabres, sont communes; Pick les observait sou- 
vent; Sabrazès et Dubreuilh en ont vu quelques exemples. L'érup- 
tion peut donner lieu à une erreur de diagnostic; on peut la con- 
fondre avec une manifestation trichophytique; mais les placards 
dans le ‘cas de favus, sans être diffus, n’ont pas un rebord aussi net 
que dans la trichophytie: les cercles de favus ne présentent pas 
de régression centrale et sont bien moins tenaces que les cercles 
trichophytiques; au microscope, les différences sont encore plus 
grandes : dans le cas de favus, les parasites sont plus nombreux et 
plus faciles à trouver. 

Besnier et Doyon reconnaissent que le favus des régions glabres 
peut se manifester par des éruptions érythémateuses ou érythéma- 
to-squameuses, analogues à celles de la trichophytie, mais de dimen- 
sions plus petites et sans être aussi irritantes. Quand ceséruptions 
précèdent la formation de godets, on a le favus herpétique qui 
attira l'attention de Quincke. Mais, d'après Pick, 1891, le favus des 
parties glabres ne débute pas toujours par une période herpétique; 
car au lieu d'herpès on peut observer, comme l’a fait remarquer 
Kaposi, des plaques rouge brun très squameuses. 

Rossi, en 1891, à aussi remarqué, dans ur cas de favus de la face, 
la présence de vésicules herpétiques. 

Derville rapporte, en 1892, un cas de favus épidermique, favus 
circiné qui serait forcément confondu avec la trichophytie, s'il 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 317 


n'existait en même temps d’autres lésions faviques plus caracté- 
ristiques. 

Leloir et Vidal admettent également, au début de la forma- 
tion des godets, l'existence de plaques érythémateuses se recouvrant 
d'une légère desquamation pityriasique; ces cercles réguliers 
rouges, de petit diamètre, s'étendent beaucoup plus lentement que 
dans le cas de trichophytie; on peut, cependant, faire l'erreur de 
les confondre avec la trichophytie circinée. 

Folly observe, en 1893, au niveau d’une inoculation, faite deux à 
trois semaines auparavant, un processus inflammatoire le plus 
souvent intense, avec production herpétique suivie bientôt de la 
formation de godets. : 

Bukovsky, en 1901, considère la forme herpétique comme dis- 
tincte des autres formes cliniques du favus; il la caractérise par 
l'inflammation de l’épiderme qui, par son intensité, sa durée, mo- 
difie le terrain, le rend impropre au développement de l’Achorion 
et élimine ce Champignon comme corps étranger. L'auteur oppose 
cette forme à la forme scutulaire, qui représente, au contraire de 
la première, le terrain de choix pour l’Achorion. En outre, les lé- 
sions cutanées qui dominent dans la forme herpétique, ne sont que 
tout à fait insignifiantes dans le favus scutulaire et y semblent, 
plutôt, résulter de l'action mécanique et chimique du godet. Ainsi, 

€e que Kôübner appelle la période herpétique est une forme abor- 
tive du favus due à l'intensité de l’inflammation, l’ennemie du 
Champignon, qui empêche le godet de se former. 

Pick, en 1891, a recherché si la période herpétique antérieure de 
Kôübner est un caractère constant du favus des parties glabres et si 
elle ne se rencontre jamais dans le favus des régions velues. Ob- 
servant des récidives du favus du cuir chevelu, il remarque un 
cercle herpétique précédant le développement du godet. De plus, 
il ne reconnaît pas toujours la période herpétique, au début de la 
formation des godets sur les parties glabres. Comme Kôbner, il 
remarque que la méthode d’inoculation employéé a une certaine 
influence sur l'apparition de la période herpétique antérieure: 
ainsi cette période est plus nette, à la suite de l’inoculation épider- 
mique, que sous-épidermique ou plutôt intra-épidermique. Or, au 
cuir chevelu il est bien diflicile de ne faire qu’une inoculation épi- 
dermique ; car les érosions par rasage de la région sont communes; 


318 : P. NÉE 


l'Achorion y pénètre, comme aussi dans les parois des follicules 
pileux; d'où la formation de godets qui gènent le développement 
du cercle herpétique. Ainsi, pour Pick, la période herpétique peut 
exister au cuir chevelu, quoiqu'il y soit rare et difficilement 
observable, même dans les meilleures conditions possibles d'ob- 
servation. 


IV. — Le favus des muqueuses. 


Le favus du gland n’est pas rare; il a été observé en particulier 
par Pick, Leloir et Vidal; mais Bazin l'avait déjà signalé. Ce favus 
ne présente rien de particulier, sauf que les godets ne s'y trouvent 
pas traversés par un poil. 

Winfield, en janvier 1897, a signalé une éruption favoïde de la 
muqueuse buccale, caractérisée par des plaques jaune soufre qui 
devenaient, peu à peu, d'un brun grisätre; mais, comme les cultu- 
res et le microscope ont montré qu'il s'agissait d’une lésion pro- 
duite par l’Aspergillus nigrescens, nous ne nous y arrêterons pas 
ici. En somme, l'on n’a jamais constaté de favus sur la muqueuse 
des narines, ni sur celle de la cavité buccale, ni sur la limite 
muqueuse du bord libre de la lèvre; il n'en est pas de même pour 
la muqueuse digestive. 

Kaposi, 1884, a observé un cas de favus de la muqueuse diges- 
tive, survenu à la suite d'un favus généralisé : il s’agit d’un 
homme qui a, d'abord, présenté de petits points jaunes, gros comme 
une tête d'épingle; l’éruption favique se généralisa en quelques 
semaines; puis, quelque temps après, sur divers endroits du corps 
se déclara une dermite intense, amenant en ces points la desqua- 
mation favique. Mais ce qui nous intéresse surtout ici, c'est la pré- 
sence de vomissements et de diarrhée incoercibles, faisant soupçon- 
ner la pullulation d'Achorion dans le tube intestinal. La mort sur- 
vint par épuisement. L'autopsie révéla des foyers de favus sur la 
muqueuse æœsophagienne et stomachale ; quant à la muqueuse intes- 
tinale, elle fut trouvée avec de nombreux ulcères folliculaires, ainsi 
que des cicatrices de nature inconnue, imputables très probable- 
ment au favus. Ce cas de gastro-entérite faveuse fut présenté, par 
Kaposi et Kundrat, à la Société de médecine de Vienne, en 1884; 
mais la nature favique n’est appuyée ni par des cultures, ni par 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 319 


des inoculations expérimentales. D'autre part, Sabrazès a produit 
chez le Cobaye, en injectant dans le péritoine une culture sporulée 
d'Achorion, une pseudo-tuberculose mycosique favique; cinq 
semaines après l'injection de culture, il sacrifia l'animal, semblant 
bien portant, et il trouva au microscope une sorte de mycélium 
ramifié, entouré de leucocytes nombreux. C'est en cherchant à 
reproduire le favus intestinal de Kaposi que Sabrazès a obtenu ce 
résultat; les lésions de pseudo-tuberculose étaient localisées aux 
poumons et au péritoine. 

Sabrazès a répété ces expériences avec Dubreuilh; Dubreuilh et 
Sabrazès ont également obtenu ces résultats par l’inoculation intra- 
veineuse de spores de cultures. A ce sujet, Rénon fait remarquer 
que les faits de tuberculose mycosique, signalés comme dus à 
l’Achorion ou à l’Aspergillus suivant les cas, sont à rapprocher de 
l’actinomycose et il voit là un exemple du pléomorphisme des 
Champignons. 


V. — Le favus généralisé. 


Les expériences de Dubreuilh et Sabrazès nous amènent à par- 
ler du favus généralisé; ces auteurs ont songé à la possibilité de 
la généralisation du favus par la voie sanguine, les lésions favi- 
ques atteignant, en effet, le voisinage de la région papillaire ; cepen- 
dant, il n’est pas prouvé que les cas de généralisation rapide obser- 
vés soient dus à ce mode de généralisation. Noblobserve, en 1895, 
chez un garcon de quatorze ans, un favus remarquable par 
l'étendue et le développement des lésions; dans les déjections 
diarrhéiques il y avait du mycélium paraissant favique. Les obser- 
vations de favus du cuir chevelu étendu à la majeure partie du 
corps sont communes. 


VI. — Favus atypiques. 


Les favus atypiques se rencontrent environ dans la proportion 
de 8 à 10 contre 100 cas de Favus typique; ils ont été étudiés sur- 
tout par Dubreuilh, puis par Alardo. 

Ces auteurs, ainsi que Bodin, admettent trois favus atypiques du 
cuir chevelu : la forme alopécique, impétigineuse et pityriasique, 


320 P. NÉE 


Forme alopécique. — On voit des plaques lisses, glabres, sans go- 
dets, parce que dans ce Favus la réaction folliculaire est exagérée; 
la folliculite est profonde et intense, alors que les lésions superfi- 
cielles y sont réduites à leur minimum (Dubreuilh). La présence 
de quelques cheveux est beaucoup plus rare sur ces plaques que 
sur celles d'alopécie favique typique; même l'altération de cou- 
leur des cheveux manque souvent. D'après Alardo, on trouve sur le 
bord de ces plaques, à contours irréguliers, de petits points rouges 
légèrement papuleux et correspondant à l'orifice des follicules 
pileux. 

Cette forme de favus est la plus difficile à reconnaître, malgré la 
décomposition de la lésion en partie centrale et périphérique. Un 
peut la confondre avec les folliculites décalvantes, surtout avec 
celle de Quinquaud et Brocq qui ne se distingue du favus que par 
l'examen microscopique ; toutefois, l'examen microscopique des 
cheveux qui bordent la plaque alopécique favique, ne donne pas 
toujours un résultat positif (Dubreuilh). 


Forme impétigineuse. — Dans cette forme, au contraire de la pré- 
cédente, l'alopécie n’est pas appréciable; la réaction superficielle 
de la peau, due à la suppuration, domine ici les symptômes du 
favus. On y voit des croûtes jaunâtres, molles, étendues, comme 
dans l’impétigo dont cette forme de favus ne se distingue guère 
que par sa durée beaucoup plus longue. Les cheveux sont agglu- 
tinés et leur aspect extérieur n'est pas toujours caractéristique du 
favus. On trouve même de petites cicatrices de 5 à 10 millimètres 
_de diamètre que l’on pourrait confondre avec celle de l'impétigo 
pédiculaire. Pour établir le diagnostic, il faut se baser non seule- 
ment sur la ténacité et la fixité des phénomènes observés, mais 
encore sur l'examen microscopique des cheveux. 


Forme pityriasique. — Ce favus présente des squames blanches, 
sèches ; on trouve au-dessous d'elles de petits godets. Les cheveux 
de la région malade présentent l'aspect favique, maïs assez tard; 
car l’alopécie, de même que dans la forme précédente, est très 
lente à se produire (Dubreuilh). Les poils sont secs et ternes; les 
plaques pityriasiformes ont un contour assez net. L'eczéma sec, le 
psoriasis n'offrent pas la même fixité de lésions; d’ailleurs, l’exa- 
men microscopique tranche au besoin la question. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 321 


Alardo considère cette forme comme dés plus contagieuses; 
d’ailleurs, il y a lieu de faire remarquer que son évolution est plus 


rapide que celle des autres favus atypiques. 


Pathogénie des formes atypiques. — On n’explique ces formes aty- 
piques que par des hypothèses. Les uns veulent y voir l'effet d’une 
infection secondaire; mais cette solution du problème ne peut 
être admise pour la forme alopécique; d’autres y voient une réac- 
tion spéciale du sujet, ce que l’on pourrait admettre pour la forme 
pityriasique et, surtout, la forme alopécique. Quant à l'opinion 
émise par Alardo, en 1896, expliquant ces différentes formes par 
des différences dans l'aspect microscopique du parasite trouvé 
dans ces lésions, par la pluralité favique, en somme, Bodin ne l’ad- 
met pas en 1900, comme d’ailleurs, aujourd'hui, la majorité des 
mycologues. 


VII. — Les Champignons faviques dans la vie parasitaire. 


A. — TECHNIQUE D ÉTUDE. 


Il faut dégraisser le cheveu et le décolorer, afin de le rendre 
transparent. On peut se servir du procédé suivant dont Balzer 
faisait usage : on dégraisse le cheveu par l’éther ; on fait agir une 
solution à 40 °/, de soude ou mieux de potasse caustique pour le 
décolorer, en ayantsoin de ne pas en pousser l’action jusqu'à dété- 
riorer les éléments; puis, on achève cet éclaircissement par l'am- 
moniaque et, pour rendre la préparation durable, on examine dans 
la glycérine. L'action de la potasse peut se faire à froid; elle est 
ainsi plus régulière qu’à chaud; mais, si le cheveu est épais ou très 
foncé, pour éviter un trop long séjour dans ceite solution insuffi- 
sante, on a recours à la solution concentrée ou tiède. 

Cette méthode peut également servir pour l'examen des squames ; 
mais la squame est plus difficile à éclaircir que le cheveu et on 
reconnaît qu'elle est bien transparente, quand les cellules montrent 
nettement leur contour, comme si elles étaient vides. 

Un autre procédé que Berdal recommande, pour les poils et les 
squames, donne encore un meilleur résultat : on fait agir, pendant 
une ou deux minutes, l'acide formique pur marquant 16° Baumé : 


322 P. NÉE 


on remplace ensuite l'acide formique pur par une goutte de glycé- 
rine additionnée de 1/100 d'acide formique, pour rendre la prépa- 
ration durable. 

Sabrazès faisait macérer dans la potasse à 40 °/, les squames, les 
cheveux et les ongles destinés à l'examen. Pour ce qui concerne le 
sodet, Sabrazès le dissociait dans l’eau, pour voir le mycélium et 
les spores ; cela était suffisant, ou bien encore il se servait de la 
potasse, comme pour les cheveux. Leloir et Vidal délayaient, dans 
une solution de potasse caustique ou d’ammoniaque, une parcelle 
de godet jeune dont le revêtement épidermique n'était pas encore 
rompu; la parcelle désagrégée, ils enlevaient la matière grasse 
par l’éther. 

Pour examiner les ongles, on peut se servir de la méthode de 
Tenneson et Berdal indiquée en 1892 : on place les ongles dans un 
verre de montre contenant la potasse concentrée; on chaufle un 
peu sur la flamme de la lampe à alcool. 

Coloration du parasite. — On a essayé tous les colorants connus 
en histologie : Malcolm Morris propose d’abord, comme Unna, de 
colorer par le Gram un peu modifié. La teinture d’iode réussit 
bien; mais l'excellent résultat est d'une trop courte durée. Balzer 
préfère se servir de l'éosine et du violet de méthylaniline, l’éosine 
pour les spores dans les cheveux et le violet pour les éléments du 
godet. Leloir colorait les éléments du godet avec une goutte de 
glycérine éosinée ou une goutte de solution iodo-iodurée. Sabrazès 
modifiait pour son usage la méthode de Weigert; il se servait de 
la solution de violet de gentiane aniline très concentrée, qu'il 
laissait agir plus d'une demi-heure, et il décolorait lentement par 
l'huile d'aniline, etc... Berlese emploie l'acide acétique glacial pour 
bien voir les conidies. Bodin n'utilise le même procédé que pour la 
névroglie : coloration par le bleu Victoria et solution de Gram ; 
décoloration par le xylol et l'huile d’aniline. Enfin, on peut fixer le 
Champignon par l'acide acétique. 

Choix du microscope. — Il suffit d’un objectif à sec donnant un 
grossissement de 300 à 500 diamètres; on donne peu de lumière en 
se servant de petits diaphragmes. 


ETAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 923 


VIII. — Anatomie pathologique du favus. 


A. — L'ÉVOLUTION FAVIQUE EN GÉNÉRAL. 


Pour Unna, en 1880, la prolifération de l’Achorion a lieu, d'abord 
et surtout, entre la couche cornée superficielle etla couche cornée 
basale; aussi la dépression qui contient le godet est lisse, brillante, 
parce que l'épiderme qui la forme est kératinisée en partie. La 
couche malpighienne s’aplatit et, enfin, l’Achorion passe dans le 
derme et envahit le follicule, sans envahir le bulbe pileux. 

Pour Balzer, 1881, l'Achorion végète d'abord dans l’épiderme, 
forme un godet dans l'infundibulum pilaire, enfin envahit le poil 
secondairement; dans une deuxième phase l’Achorion pénètre dans 
le derme, atteint le bulbe au contraire d'Unna, cela après avoir 
franchi la gaine interne et la gaine externe du cheveu ; le Champi- 
gnon en ulcérant les papilles fait tomber les poils; cette deuxième 
phase d'évolution terminée, il s'ensuit une alopécie cicatricielle 
définitive sans papilles, ni poils, ni parasites. ; 

Pour Tenneson, 1893, le développement de l’Achorion débute 
dans l’infundibulum pilaire et se continue, ensuite, dans trois di- 
rections ; vers l'extérieur, vers le follicule et le cheveu. et vers le 
derme. 

Remarquons que tous les auteurs sont d'accord à considérer la 
végétation comme intra-épidermique au début, d'où la formation 
du godet, et à reconnaître que, dans l'étude du favus adulte, on 
trouve des lésions dermiques et pilaires coexistant à tous leurs 
stades. 


B. — RAPPORTS DE L'Achorion Schôonleini AVEC L'ÉPIDERME. 


D'après Unna (1880), la couche granuleuse disparaît plus ou 
moins et la couche cornée basale est œdémateuse ; Bodin remarque 
ce fait et, de même que Leloir, il trouve de nombreuses cellules 
embryonnaires dans le corps muqueux; d’après Leloir, au début, 
les cellules du stratum lucidum etles cellules malpighiennes super- 
ficielles ont même de la tendanee à la vésico-pustulation. Le my- 
célium ne pénètre guère dans l’'épiderme au début; ce sont, surtout, 
des spores qu'on y trouve. 


324 P. NÉE 


C. — LA FORMATION DU GODET ET SA DESCRIPTION MICROSCOPIQUE. 


En examinant un favus récidivant, on voit, à travers la pellicule 
épidermique qui est mince jusqu'à la transparence, un très petit 
disque jaune qui atteint la dimension d'une lentille en quelques 
semaines; sa surface inférieure est hémisphérique, unie, humide 
et dépourvue d'épiderme. Quant au lieu de formation du godet, 
d'après Kaposi, comme les couches épidermiques supérieures 
adhèrent horizontalement au poil, alors que les couches inférieures 
s'inclinent vers la profondeur du follicule, il en résulte un espace 
infundibuliforme préformé où les Champignons se réunissent pour 
former un corps compact. Ainsi, la formation du godetcommence 
entre la couche cornée de l’épiderme et le corps muqueux; puis, 
la lésion s'étendant, la couche cornée adhérente au poil se trouve 
soulevée à sa partie périphérique, d'après Kaposi, et alors l'infun- 
dibulum pilaire, qui contient le godet, prend une forme conique. 
D'après Besnier et Doyon, le produit de grattage de la surface pro- 
fonde du godet renferme toujours des leucocytes. 

Barthélémy a fait remarquer que l’Achorion peut germer, pour 
former le godet, par bourgeonnement ou segmentation de la spore:; 
ou encore, la spore donne naissance à des filaments qui deviennent 
les tubes de mycélium, puis les tubes sporifères et, enfin, les 
chaînes de spores terminales. 

Balzer a bien dit que l'évolution de l’Achorion commenceet finit 
par la spore : de la spore naît le filament de mycélium; dans ce 
filament, le noyau bourgeonnant forme le tube sporifère. et; quand 
cette gaine se segmente, se transforme en chaînes de spores, de 
nouvelles spores évoluent à leur tour; mais il peut arriver que la 
transformation n'ait lieu qu'à l'extrémité des tubes; alors le reste 
de la plante se flétrit. 

A l'examen du godet, on trouve, sous la pellicule épidermique 
cornée de revêtement, une zone visqueuse avec de fines granu- 
lations et, comme on retrouve des prolongements de cet élément 
visqueux entre les filaments de mycélium, il s'agit probablement 
d'un assemblage de débris de cellules épidermiques (Kaposi). 
D'après Balzer, Gaucher et autres, cette gangue amorphe,visqueuse, 
qui réunit les éléments d'Achorion, ne se trouve que dans le godet, 
non dans le poil. 


ETAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 325 


Unna, Frank, Mibelli, Sabrazès ont prouvé que le godet n'est 
qu'une culture de Champignon, en faisant des ensemencements; 
cependant, on y remarque quelques produits de désintégration 
cellulaire représentés par des granulations, entre les filaments my- 
céliens de la périphérie et les conidies du centre. Pour Sabouraud, 
chaque filament mycélien a une enveloppe invisible et, entre deux 
filaments, il n'y a que cet espace clair. 

D'après Leloir, l'examen d’une coupe de godet dure montre des 
tubes sporifères et des spores, au centre et à la partie superficielle 
du godet, tandis que, latéralement, on trouve des tubes de mycé- 
lium plus ou moins riches en spores et quelquesspores seulement, 
indice de la marche envahissante du Champignon. Pour Kaposi, 
le centre du godet est occupé par les conidies et les granulations; 
près de là, sont les filaments de mycélium disposés en couches pa- 
rallèles. Mibelli, 1892, annonçait que la partie supérieure du go- 
det est celle qui contient le moins de suecs nutritifs; là, le développe- 
ment est lent et la segmentation se fait en conidies. 

Sabouraud recommande d'étudier le godet par la microtomie et 
Bodin fait remarquer que le godet, se développantde la surface vers 
la profondeur, a vaguement la forme d'un tronc de cône dont la 
base est la partie la plus profonde et non la partie superficielle. 

Pour Leloir et Vidal, le mycélium est très abondant, de forme 
très irrégulière; on voit des filaments brisés, ramifiés dichotomi- 
quement; mais la direction de ces rameaux est irrégulière. Balzer, 
en 1881, reconnaissait des filaments clairs, dits tubes à nutrition, 
et d’autres plus larges, dits tubes sporifères et contenant des spores 
tassées, cubiques, sans gaine amorphe; car la paroi tubulaire en 
tient lieu. La paroi des tubes de mycélium est homogène, d'après 
Leloir. 

Le mycélium, d'après Bodin, est disposé dans le godet comme 
les brindilles d’un bouquet; au centre et à la surface du godet, on 
ne trouve que de courts segments mycéliens, tandis qu'ailleurs les 
segments sont plus longs. 

Les spores du godet ont une forme le plus souvent ovoïde, mais 
pouvant êtretriangulaire ou quadrilatère ; leur volume est supérieur 
à 3 - et peut atteindre, d'après Charles Robin, jusqu'à 10 y. Ces 
spores peuvent se trouver à la portion terminale des filaments; 
elles peuvent être en chaîne; elles sont facilement caduques et, 


326 P. NÉE 


en tout cas, facilement isolables; elles ont un noyau central gra- 
nuleux, une membrane d’'enveloppe homogène, hyaline, inco- 
lorable et très résistante. Si le noyau est en voie de segmentation, 
la spore apparaît étranglée. 


D. — MARCHE DU FAVUS DANS L'APPAREIC PILAIRE 
ET DESCRIPTION DU CHEVEU FAVIQUE. 


L'Achorion envahit le poil. en même temps qu'il végète, au 
centre du godet, et dépasse l’épiderme. Pour Kaposi, qui s’est 
occupé spécialement de cette question, l’'Achorion prolifère entre 
les cellules de la gaine de la racine du poil jusqu’à la base du fol- 
licule; ensuite il va dans le bulbe pileux et remonte, de bas en 
haut, dans le poil lui-même. Cette théorie est appelée théorie du 
détour; cependant, Kaposi admet aussi la possibilité de l’envahis- 
sement du cheveu par la voie latérale, par les gaines de la racine. 
Pour Unna (1880) le bulbe n'est jamais envahi; l’Achorion, pour 
lui, préfère les cellules kératinisées aux cellules molles; il va de 
l’'épiderme corné de l'infundibulum pilaire à la gaine interne 
kératinisée, de là à la cuticule et à la tige; il s'arrête devant la 
couche de Malpighi, la gaine externe de la racine et le bulbe. 

Avant l'apparition du godet, on voit des spores s’accumuler 
autour du poil, puis pénétrer entre les cellules de la gaine; alors 
les cellules du corps muqueux de la gaine se gonflent et, si on 
arrache le poil, on voit l'aspect transparent et œdémateux du fol- 
licule. D'après Besnier et Doyon, on trouve parfois des leucocytes 
dans la gaine du poil. 

Bien que toutes les parties du cheveu peuvent recéler des para- 
sites, c'est surtout l'écorce qui est envahie; le parasite prolifère 
en longueur. D'après Bodin, le mycélium peut pénétrer en haut, 
du côté de l'extrémité pilaire, sur une étendue de un à deux 
centimètres; il n’est pas rare même de voir des cheveux, de 
plusieurs centimètres de longueur, envahis jusqu'à leur extrémité 
terminale. Quant à la racine du poil, le Champignonnetarde pas à 
l’envahir, d'après Bedin. Lailler enseignait que lefavus se dévelop- 
pe, surtout, aux dépens des follicules pileux et des poils; on cons- 
tate, d’ailleurs, aujourd'hui que le Champignon est plus abondant 
et plus constant dans la racine du poil que dans sa portion libre. 

Enfin, remarquons que les Champignons, proliférant dans l'ap- 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 327 


pareil pilaire, occasionnent au début le relâchement des cheveux, 
puis déterminent la chute et, enfin, l'atrophie des papilles pilifères ; 
l'atrophie des papilles peut, également, être consécutive à la com- 
pression par les godets. 

Dans le cheveu on voit de nombreux filaments mycéliens spo- 
rulés ou non, placés suivant l'axe du cheveu, ténus, flexueux, 
noueux, simples ou pourvus de deux à quatre ramifications. Le 
poil n’est pas bourré comme dans les autres teignes. Les filaments 
sont parallèles dans leur ensemble seulement; leur largeur est de 
2 à 4 4; ils présentent des cloisons transversales et, s'ils sont spo- 
rulés, ils se divisent par tri ou tétratomie, ce qui, d’après Bodin, 
est une caractéristique du Favus. D'une agglomération de spores, 
-on voit souvent partir trois ou quatre filaments, dont la disposition 
rappelle un tarse. Dans les parties les plus éloignées de la peau, 
sous l'écorce du poil, on voit des boyaux deshabités, remplis 
d'air. Voilà la forme classique du parasite dans le poil, celle que 
Sabouraud appelle la forme sporulée. Rappelons que l’Achorion 
est essentiellement polymorphe dans le poil. 

Sabouraud décrit une autre forme d'Achorion dans le poil; c'est 
la forme mycélienne, caractérisée par l'absence de spores; le poil 
contient seulement des filaments plus nombreux et plus réguliers 
que dans le type précédent; la ramification a lieu ici par dicho- 
tomie; chaque article a une longueur notable, de 15 à 20 ». Cette 
forme n'est qu'une modification dans le mode végétatif du Cham- 
pignon et Sabouraud compare, à ce point de vue, l’Achorion au 
Trichophyton qui, lui aussi, présente une forme sporulée et une 
forme mycélienne. 

C'est Bazin quia reconnu, le premier, les spores faviques, princi- 
palement sur les bords des cheveux. Les spores ont 3 à 7 4 de 
diamètre; elles sont arrondies ou légèrement aplaties, n'infiltrent 
pas tout le poil, mais y forment des chaînettes rectangulaires ou 
des amas rectangulaires ou polyédriques; elles peuvent résulter 
d'un simple cloisonnement du mycélium; elles sont moins abon- 
dantes que chez le Trichophyton. 


E. — DERME ET FAVUS. 


Gruby avait déjà soupçonné l'existence de l'Achorion dans 
l'épaisseur du derme. Pour Unna et pour Besnier et Doyon, le favus 


328 P. NÉE 


ne va pas dans le derme. D'après Tenneson, l’Achorion n'envahit 
pas toujours le derme, mais l’envahit sûrement pariois. Le derme 
réagit peu; sa réaction est caractérisée par du suintement au 
niveau des godets. 

Pour Dubreuilh et Sabrazès, le Champignon, partant du godet, 
irradie son mycélium vers la couche malpighienne, la dépasse 
même en allant jusqu'aux vaisseaux capillaires. 

Pour Cornil et Ranvier, le mycélium ne refoule pas seulement 
le derme, mais l’envahit; il envoie ses prolongements perpendi- 
culairement dans le derme. 

Pour Leloir et Vidal, l'envahissement du derme, occasionnant 
de la dermite, explique l’aréole inflammatoire rouge qui entoure 
le godet lequel, d'ailleurs, peut être entouré d'un cercle de suppu- 
ration remarqué aussi par Besnier. D'après Sabrazès, les glandes 
sébacées s’atrophient et disparaissent. 

Sur les coupes, on voit le mycélium aller directement du godet 
au tissu conjonctif du derme; ce tissu conjonctif se résorbe et on 
peut ainsi expliquer les cicatrices parfois profondes qui appa- 
raissent sous l'emplacement des godets après leur guérison: 
d'autre part, le derme étant envahi, il survient nécessairement de 
la sclérose. 


IX. — Le favus des ongles. 


Alibert avait remarqué le favus des ongles; l’un des frères Mahon 
avait contracté cette affection en épilant les faviques. Puis ce Favus 
a été étudié par Bazin, Laïller et, depuis, par de nombreux auteurs 
parmi lesquels Fournier et Fabry. 

Le favus des ongles est relativement rare; cependant, d’après 
Besnier et Doyon, les cas d'onychomycose favique ne sont pas tou- 
jours reconnus par les médecins, bien que la connaissance de cette 
affection soit d'une grande utilité pratique. 

Le favus des ongles est primitif ou secondaire; Vidal et Brocq 
en ont observé un cas primitif limité à l’'ongle d'un des gros orteils ; 
outre cette observation, il en existe une autre, due à Fabry, relatant 
un deuxième cas de favus des orteils, mais accompagné d'un 
favus des ongles de la main. Si l’on ne connaît que deux cas de 
favus des orteils, les cas de favus des ongles des doigts sont in- 


ETAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 329 


innombrables et le favus secondaire y est plus souvent observé que 
le favus primitif, par exemple à la suite de favus généralisé, 
comme dans l'observation de Malcolm Morris de 1891. 

Le favus débute entre la couche cornée et le derme sous-un- 
guéal; il ne s'accompagne pas de douleur spontanée et, d'après 
Fabry, la pression manuelle des ongles ne provoque même pas de 
douleur. 

Kaposi a décrit deux formes du favus unguéal : une forme cir- 
conscrite, caractérisée par des opacités rappelant vaguement les 
godets faviques et une forme diffuse, présentant une opacité totale. 

Symptômes. — L'ongle malade devient gris, puis jaune; il s’é- 
paissit; il devient friable; divers auteurs, entre autres Bodin, 
Danlos, comparent son aspect à la moelle de jonc, sans pour cela 
vouloir différencier le favus d'avec les autres affections teigneuses. 
Bientôt l’ongle malade présente des stries longitudinales, des ru- 
gosités, des soufflures; il paraît rongé dans son épaisseur. Danlos, 
en 1900, observe la destruction de la lame cornée de l’ongle dans 
son tiers inférieur; en mettant à nu le lit de l’ongle, il le trouve 
tuméfié. Fabry fait remarquer que les lames unguéales sont un 
peu soulevées et écartées du lit de l’ongle par la masse parasitaire. 
Mais l'ongle ne tombe pas, à moins que toutefois la présence excep- 
tionnelle d’un panaris n’en détermine la chute; dans ce cas, l’ongle 
repousse ensuite. D'après Besnier et Doyon, il est tout à fait excep- 
tionnel de voir des lésions trophiques proprement dites, des extré- 
mités unguéales, consécutives au favus. 

Durée. — Le plus souvent la lésion, une fois constituée, évolue 
très lentement, dure des années. D’après Henri Fournier, le favus 
des ongles est particulièrement tenace; il survit de longues années 
après que le favus du cuir chevelu est éteint. 

Anatomie pathologique. — Fabry a fait l'étude histologique et 
phytologique de l'ongle favique : au microscope, il trouve un 
mycélium et des spores; cependant, les spores ne se rencontrent 
pas en amas au niveau de l’ongle. A un faible grossissement, on 
voit, d'après cet auteur, les réseaux compacts de Champignon 
parmi les papilles de l’Achorion et les filaments se ramifier jus- 
que dans la couche de Malpighi, A un grossissement plus fort, on 
voit, de plus, qu'il n'y a pas de filaments dans les lamelles cor- 
nées de l'ongle, à cause probablement de la résistance de ce tissu : 

Archives de Parasitologie, XI, n° 2, 1907. 22 


390 P. NÉE 


les filaments ont souvent leurs extrémités en massue et détachent 
çà et là, des spores. Le microscope semble prouver que l’Achorion 
s’avance, spontanément, dans le tissu de l’ongle et n'y est pas seu- 
lement transporté d'une manière mécanique. La modification de 
l’'ongle est due à ce que le parasite sépare les couches épithéliales 
des vaisseaux qui nourrissent les papilles du derme. Pour Fabry, 
le Champignon ne pénètre ni dans les papilles ni dans le derme:; il 
végète, surtout, entre les papilles et les prolongements interpapil- 
laires du corps de Malpighi. 

Lailler a vu les filaments de mycélium dans la substance un- 
guéale dissocier les cellules de l’ongle. Besnier et Doyon pensent, 
comme Fabry, que sur l’ongle le Favus se développe dans la cou- 
che épithéliale sans la dépasser. 

Bodin remarque, comme Fabry, queles filaments mycéliens sont 
altérés dans l’ongle et que les spores sont plus nombreuses. 

Diagnostic. — Lindstrem fait remarquer que l’on ne peuttoujours 
établir le diagnostic de l’onychomycose favique, d'après la couleur 
jaune du dépôt sous-unguéal et des taches sous la lamelle. On a 
souvent besoin de recourir au microscope qui montre le mycélium 
favique, ou bien aux cullures. 

L'aspect de moelle de jonc se retrouve dans le psoriasis et les 
autres onychomycoses. Ancel croit, cependant, pouvoir baser le 
diagnostic sur la coloration gris brunâtre, puis jaunâtre de l’ongle, 
con épaisseur, ses stries longitudinales, ses soufflures. 


X. — Pronostic du favus. 


Le favus n'altère pas la santé générale; mais il reste cependant 
une affection grave à cause de la contagion, de la récidive et, sur- 
tout, à cause de l’alopécie irrémédiable qu'il entraîne. Sa guérison 
spontanée est rare. 

Au contraire des autres teignes tondantes, le favus n'est pas 
toujours arrêté par la puberté; sa durée est très variable, suivant 
les individus; le lymphatisme et la tuberculose favorisent le déve- 
loppement du favus; on a vu des poussées de favus accompagner 
des poussées de tuberculose. D'autre part, on admet que, si le 
développement du favus est favorisé par un mauvais état général, 
il amène à son tour, quand il persiste très longtemps sur une 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 991 


grande étendue, une débilité de l'organisme évidente et très im- 
portante, un étiolement remarqué surtout par Hardy. 

Le favus peut durer vingt, trente ans et même davantage; car 
il peut s'observer dans la première enfance et se prolonger dans 
l’âge le plus avancé. Michel fait exception pour le favus du tronc 
et des membres qu'il ne voit persister au-delà d’une vingtaine 
d'années que tout à fait rarement. On peut voir aussi des interrup- 
tions dans le développement du favus. Pour toutes les raisons 
énoncées le favus est la plus grave de toutes les teignes, si elle 
n’est pas traitée; mais le traitement lui ôte toute gravité. 


XI. — Diagnostic. 


Unna veut appuyer le diagnostic du favus sur la présence de 
véritables godets et sur le caractère sous-cutané et chronique de la 
maladie provoquée par l'Achorion. 

Neisser, en 1890, recommande d'humecter les croûtes avec 
l'alcool et, dans le cas seul de favus, on obtient la couleur jaune 
foncé très intense. 

Mais le diagnostic ne présente de réelles difficultés que dans le 
cas de favus atypique. Besnier et Doyon recommandent alors, 
quand cela est possible, d'examiner les cheveux; nous en avons 
indiqué les moyens et les résultats. Il faut éviter de confondre 
l’'Achorion avec le Trichophyton endothrix qui, comme lui, se 
développe dans le poil lui-même; l'Achorion cependant présente, 
seul, des spores suivant la direction du cheveu. 

A la lumière oblique, on distingue, à la couleur et à l'apparence 
des cheveux, les parties du cuir chevelu malades. La gaine épi- 
dermique est vitreuse et plus grosse que celle d'un cheveu sain; 
la racine paraît enveloppée d’un manchon -blanc, comparé à de 
l’amidon cuit et dû au gonflement des gaines du poil; mais ce 
gonflement existe aussi dans l’eczéma, la pseudo-pelade de Brocq. 

Bazin à remarqué que les cheveux s’éclaircissent en clairière et 
tombent inégalement et non sous forme de tonsure, comme dans 
la trichophytie et la pelade. 

Au contraire de la tondante rebelle et de la trichophytie, dans 
le favus les éléments du cuir chevelu sont détruits et la cicatrice 
est définitive. 


392 P. NÉE 


L'odeur du favus est caractéristique; elle peut servir à diffé- 
rencier les croûtes faviques des croûtes d'autre origine. Le favus, 
surtout le favus étendu, a l'odeur de Souris qui se distingue net- 
tement de l'odeur fade et fétide du pus. Si le favus est ancien, on 
peut avoir une odeur de Moisissure, d'après Kaposi. Nous rappel- 
lerons que l'odeur de Souris est tellement caractéristique du favus 
que Verujski la trouvait, également, dans les cultures pures et 
non pas dans les cultures trichophytiques; cette odeur était, sur- 
tout, évidente après la filtration ou après un léger degré de dessè- 
chement de la culture; il la considérait comme due à la consom- 
mation de matière albuminoïde. 

La forme pityriasique du favus peut être confondue avec le 
psoriasis, le pityriasis capitis intense, la teigne amiantacée de 
Devergie, qui est une séborrhée. 

Nous avons parlé de la différenciation du favus herpeticus d'avec 
les trichophyties circinées. 

La forme de favus la plus dificile à reconnaître est la forme alo- 
pécique que l’on pourrait confondre avec le lupus erythémateux 
et certaines folliculites décalvantes. 

Les affections suivantes se distinguent ainsi du favus, d'après 
Besnier et Doyon: 

L'eczéma avec ses croûtes sans odeur favique et ses lésions 
périauriculaires,; 

L'impétigo avec ses concrétions melliformes; 

La phtiriase avec ses lésions polymorphes et ses lentes attachées 
aux cheveux elc... D'ailleurs, ces affections peuvent coexister; dans 
des cas très rares, on trouve favus et trichophytie chez un même 
enfant à l'hôpital. 


XII. — Complications du favus. 


D'après Gaucher, on peut observer des pustules circumpilaires, 
dues à l’inflammation des follicules par le parasite, d'où la forma- 
lion de croûtes ne donnant pas de cicatrices. 

On peut voir de l'impétigo surajouté au favus, de l’eczéma, de 
la phtiriase et autres affections. 

Le favus du cuir chevelu est surtout exposé aux complications 
et cela d'autant mieux que les sujets sont plus lymphatiques. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN D 9 


Charpy signale, sous le nom de favus miliaire, un favus appauvri 
par les complications. 


TRAITEMENT DU FAVUS 


Longtemps on s’est obstiné à vouloir guérir le favus par les 
parasiticides; or, bien que l’Achorion à nu ne puisse guère résister 
aux antiseptiques énergiques que l’on applique sur la peau, il ne 
faut pas oublier qu'il habite aussi des retraites profondes, les raci- 
nes des cheveux, où il se développe à l'aise sans craindre les anti- 
septiques qui ne peuvent atteindre jusqu'à lui; c'est pourquoi 
Bodin ne reconnaît aux antiseptiques dans le traitement du favus 
qu'une valeur accessoire de dernier ordre. En effet, d'après les 
conditions de vie de l’Achorion, il faut, pour le détruire complète- 
tement, non seulement désinfecter la peau, mais aussi et surtout 
les follicules pileux ; il faut épiler. 

Le traitement du favus pour Bodin, traitement radical, comprend 
deux phases principales : on commence par nettoyer et aseptiser 
la peau, autant que possible; puis on extirpe le poil. 

Stérilisation de la peau. — Bodin conseille de couper ras les che- 
veux; puis d'appliquer partie égale d'axonge fraiche et savon noir 
qu'on laisse pendant deux à trois heures; ensuite on savonne; on 
laisse un cataplasme d'amidon cuit sur les lésions, pendant une 
nuit; on enlève alors facilement les godets. 

Pour calmer et cicatriser la région malade, on la recouvre d'un 
pansement humide qu'on laisse deux jours. C'est alors que Bodin 
pratique l'épilation nécessaire. 

Malgré le grand succès qu'a toujours eu l'épilation, dans le 
traitement du favus, depuis les frères Mahon, un très grand nom- 
bre d'auteurs ont voulu néanmoins, jusqu'à ces derniers temps 
même, s'obstiner à chercher l'antiseptique guérisseur. Ces recher- 
ches offrent cependant quelque intérêt; car elles ont conduit à 
faire un meilleur choix de l’antiseptique adjuvant du traitement. 

Schuster, en 1890, recommande l'emploi des vapeurs d'acide sul- 
fureux ; les séances ont lieu chaque jour et il a vu, au bout de six 
à huit semaines de ce traitement, un semblant de guérison. 

Peroni, 1891, recommande les pulvérisations d'acide acétique ; 
il se produit d'abord une anémie, puis une congestion du cuir 


3934 P. NÉE 


chevelu qui dure quarante-huit heures environ et amène de la 
desquamation; puis, il emploie l’onguent de Hébra, l’eau chaude 
et le savon au sublimé. Il n'a pu suivre ses cas de guérison que 
trois mois. Reale (1853) conteste l'efficacité de ce traitement. 

Estèves (1891) guérit le favus en un mois par des antiseptiques 
divers, mais auxquels il joint l'épilation; de même Viñeta Bella- 
sera (1892). 

Gouladzé (1894) guérit le favus par des antiseptiques et l’épila- 
tion. 

Tsitrine (1894) prétend rendre l'épilation inutile par l'emploi de 
la pommade de Pirogov, qui contient surtout de la teinture d'iode 
et du goudron; la guérison s'obtiendrait en trois semaines. 

L'eau chaude et les frictions à l’onguent gris ont donné quelque 
résultat à Zinsser, 1895. 

Ciarrocchi admet la nécessité de l'épilation, en 1897. 

Petersen préfère les antiseptiques à l'épilation, en 1898, au con- 
traire de Jakimovitch et Polotebnov. 

Il nous suffira d'indiquer, à ce sujet, les parasiticides reconnus 
les plus énergiques contre le favus : la solution de sublimé au 1/500, 
la pommade au turbith minéral, la pommade soufrée, la pommade 
à l'acide salicylique ou à la résorcine, au naphtol, à l'acide chryso- 
phanique et surtout la teinture d'iode. 

Comme autre traitement adjuvant on peut prescrire, pourrelever 
l’état général, une médication interne tonique à base de fer ou de 
l’iodure de fer, du sirop iodo-tannique, de l'huile de foie de morue 
en émulsion ou non, enfin des bains sulfureux qui stimulent la 
nutrition (Gaucher). 

Épilation. — Les frères Mahon la faisaient avec les doigts et l'un 
d'eux à gagné ainsi le favus unguéal. On peut épiler à la pince, 
dans le sens de l'implantation des cheveux, progressivement pour 
ne pas les casser autant que possible et un à un. On crée une zone 
de protection en épilant les cheveux sains sur une bordure de un 
centimètre environ. Chaque séance est d'au plus deux heures. On 
recommence l'épilation huit jours après, c'est-à-dire au moment où 
les poils cassés, çà et là, ont assez poussé pour être pincés. L'épi- 
lation est ainsi recommencée, chaque semaine, pendant trois mois. 

Pour faciliter la première épilation, on peut ne pas couper les 
cheveux complètement ras. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 990: 

La première épilation détermine habituellement une réaction 
inflammatoire assez vive du cuir chevelu, caractérisée par de la 
rougeur et de la douleur; la réaction qui suit les épilations sui- 
vantes est moins marquée. 

Nous n'insisterons pas sur l’ancien procédé d'épilation par la 
calotte ou les emplâtres épilatoires quelconques qui, adhérant 
fortement aux cheveux, les entrainent, si on les retire avec bru- 
talité. 

Mais l'épilation à la main est longue, nécessite un très grand 
soin et elle est remplacée avantageusement par l'épilation par 
radiothérapie. Brocq, dans son traité des maladies de la peau, de 
1906, adopte cette méthode. 

A propos du traitement du favus par la radiothérapie, Freund 
fait remarquer à la Société de Dermatologie de Vienne, le 10 mai 1899, 
la grande importance des ondes électriques en médecine et il com- 
pare l'action électrique dans là radiothérapie et les courants de 
haute fréquence. 

L'emploi des rayons X, comme méthode d'épilation, a l'avantage 
de n’exiger qu'un temps relativement court, sans déterminer de 
douleur. En un mois, l'enfant n’est plus considéré comme favique ; 
en trois mois, il est déclaré guéri. Quelques jours après la séance, 
la peau devient érythémateuse; les cheveux de la région traitée 
tombent spontanément, au bout de quinze jours environ, et on 
peut exciter cette dépilation par des frictions du cuir chevelu. La 
papille se trouve comme sidérée par les rayons X; le follicule ex- 
pulse le cheveu comme un corps étranger. La région devenue 
glabre, l'enfant est considéré comme guéri. La papille secrète un 
nouveau poil, environ 3 mois après le traitement. 

Il faut que la dose de rayons X soit suffisante, afin de n'être pas 
obligé d'attendre plusieurs semaines pour recommencer la séance 
et, d'autre part, la dose ne doit pas être trop forte, afin d'éviter soit 
un retard dans la repousse des cheveux ou même la radiodermite, 
terrible par l’alopécie définitive qu'elle entraîne. Aussi on se sert, 
comme mesure, d'unités, par exemple suivant la méthode de Sa- 
bouraud. 

Remarquons, aussi, que le cuir chevelu exposé aux rayons X est 
plus facile à s'infecter. 

Pour limiter l’action des rayons X autour de la région malade, 


330 P. NÉE 


on se sert de localisateurs ou de lames de plomb et l’on ne peut 
traiter à la fois qu'une surface de sept centimètres, dans sa plus 
grande dimension, s'il s'agit des parties plates de la tête et une 
surface moins grande encore, s’il s'agit des parties arrondies, afin 
d'éviter les rayons trop obliques. Pour la tête entière, l'épilation 
complète exige douze irradiations. Sans compter les préparatifs de 
l'enfant qui doublent le temps de l'épilation, il faut compter pour 
chaque irradiation environ vingt minutes, suivant le procédé le 
plus en usage. On ne fait guère de séances de plus de 2 heures. 

Les antiseptiques sont utilisés après les séances de radiothérapie, 
comme après l'épilation à la main. 


Quant au favus des parties glabres, on enlève les poils follets et 
on applique les parasiticides. 

Pour les ongles le procédé de Fabry est à recommander : on 
détache avec des ciseaux les parties malades de l’ongle; on 
enlève les masses parasitaires sous-jacentes et on injecte dans ces 
cavités des antiseptiques. La guérison s'obtient souvent; mais 
n'oublions pas que le favus des ongles est parfois rebelle au traite- 
ment, si l’on n'enlève pas l’ongle malade. 


Bibliographie. 


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ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 991 


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La pratique dermatologique Articles Dermatophytes, par SasourauD et Favus, 
par Boni, 1900. 

Enfin voir les Annales de Dermatologie et Syphiligraphie, avec les nom- 
breuses indications bibliographiques qu’elles contiennent. 


TABLE DES MATIÈRES 


PARTIE SCIENTIFIQUE . . . SAS LE TE Tir ae ie Era ee 260 
1. De l'Antiquité à 1839... RAT SRE A TU NT ER AD 650) 
IT. — Découverte du parasite an TAMUS AE 6 UE Tel 
II. — L'Achorion, seul parasite du favus JR en 1851. A RATE 
IV. — Les favus animaux : 274 

a) Favus des Muridiens. . 274 

b) Favus du Chien. . 213 

c) Autres favus animaux . : 276 

d) Le pseudo-favus des Poules.. 276 

V. — Pluralité parasitaire du favus 278 

VI. — Le polymorphisme du favus À 282 
VII. — Étude de l'Achorion Schünleini dans ses enlivres ie 

cielles :. 286 


AO UT EURE SAR EU RE PR NT Re D SG 


398 


VIII. — L'Oospora canina Costantin Sabrazès . . . . . . 
XL ACROMONIQUINCREANUNLINEMEMPO PEER IEPRENPESUTS 
X. — Rapports entre le groupe des favus et celui des tricho- 

PAYLTES AE MALUS. OL RAS RE EP 
XI. — Étiologie du favus . . . . AE SE 
XII. — Distribution géographique ïn dome, NE A AE BON Le Lc 
PARTIE CLINIQUE ANSE POESIE NERe ER RTE SR 
É UNTrOdUCTIONLE SAN NE ET EN RS Ne 
II. — Symptômes du favus des régions pileuses. . . . . . . 
a) Symptômes du favus typique du cuir chevelu. 
b'ibetavuside lasbarhe sms ve en nn 
c) Le favus de larégion pubienne MN 
IIL. — Le favus typique des régions glabres:. . : … : 
a) Le favus des régions glabres en général . 
b) La question du favus herpeticus . . 
IV Perfavusides muqueuses EPP EN RE 
V. — Le favus généralisé. . 
MI APav us AY DIQUeS MES EME RER PE EEE 
VII. — Les Champignons anilarnss Sens la vie  rmeliaine. 
VIIT. — Anatomie pathologique du favus . . . . . . . . . . 
oévolutiontavique lente ÉnÉLal EEE 
b) Rapports de l’Achorion Schôünleini avec l'épiderme. 
c) La formation du godet et sa description microsco- 
PIQUE URSS NS RENTE ER SR eee Ur RCA 
d) Marche du favus dans l'appareil pilaire et descrip- 
tons du CheveutTaVIQUe EMEA NCA 
e) Derme et favus.. . 
IX. — Le favus des ongles . . 
X. — Pronostic du favus. 
XIE DIa nos (ICRA MEL 
XIE Complications AUTaAVUS RENE RENE NE EE 


P. NÉE. — LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 


B. Morphologie de l’Achorion dans ses cultures artifi- 
Ciellés: tree Reese AL M NME ANSE 
C. Classification ja l’Achorion Sanrio SR Eee 
D. Caractères biologiques de l’Achorion dans ses cul- 
tureS artificrelle See EEE ROUTE RES NERERe CRE 
E. Inoculations de l’Achorion Schôünleini. . . 


TRAITEMENT DU FAVUS. . 


BIBLIOGRAPHIE (00 AU TANT Qt PEN EUR EE a SAN A 


OSSERVAZIONT SUL TEGUMENTO (ECTODERMA) 
DELL’ ANCHISTROCEPHALUS MICROCEPHALUS (RUD.) 


PEL 
D' PASQUALE MOLA 


(TivoLzA I) 


Alla famiglia dei Botriocefalidi appartiene un parassita che di 
frequente si trova nel tubo digerente dell’ Orthagori scus mola e 
che dal Rudolphi ebbe nome di Bothriocephalus microcephalus. 

Nel 1890 il Monticelli, in una nota elmintologica Intorno ad un 
cestode del Polypterus bichir, smembrava il genere Bothriocephalus, 
cosi ricco di specie, creando il genere Anchistrocephalus e compren- 
deva in esso le due specie Anchistrocephalus microcephalus (Rud.) 
[— Bothriocephalus microcephalus Rud.] e Anchistrocephalus polyp- 
teri (Leidy) [= Tetrabothrium polypteri Leidy]. Le ragioni addotte 
erano quelle della presenza degli uneini sul capo, caratteristica 
questa mancante al genere Bothriocephalus. Ora nello studiare il 
tegumento (ectoderma) di vari Cestodi, mi è occorso di esaminare 
alcuni esemplari dell’ Anchistrocephalus microcephalus raccolti nell’ 
intestino di alcuni Orthagoriseus mola pescati nel golfo di Na- 
poli (1903). 

Senza entrare a discutere delle particolarità di struttura del tegu- 
mento dell’ Anchistrocephalus microcephalus, di cui mi occuperd 
dettagliatamente in appresso, per ora mi piace di far rilevare una 
singolare pelatura riscontrata sulla superficie del corpo. 

Il tegumento dell’ Anchistrocephalus microcephalus si presenta in 
parte liscio, in parte crenato. Le crenature sono di aspetto e di lun- 
ghezza variabili, a contorni integri; gl'infossamenti che separono 
una crenatura dall’altra non hanno la medesima profondità, essi 
non arrivano mai alla membrana basale; ma si arrestano ad un 
terzo da questa. 

La membrana basale si presenta con un cammino più o meno 
flessuoso, la quale alle volte si addentra nel parenchima, altre 


340 P. MOLA 


nell'ectoderma, sempre perd conservando l'istesso spessore. Que- 
sta poggia sul sacco muscolare eutaneo, il quale non differisce per 
nulla da quello degli altri Cestodi. Esso è costituito da uno strato 
esterno di fibre circolari e da uno interno di fibre longitudinali, 
spesso, disposte ortogonalmente alle prime. Entrambi questi due 
strati costituiscono il sacco muscolare cutaneo abbastanza spesso e 
decorrente per tutta la lunghezza dello strobilo. Tra le fibre longi- 
tudinali s'insinuano i prolungamenti anteriori delle cellule della 
cosi detta sub-cuticula. Queste cellule allungate, affusolate, sono 
abbastanza grandi e si mostrano nette e distinte dal parenchima 
circostante ; con le ematossoline si colorano bene e lasciano vedere 
un distinto nucleo che occupa la loro parte centrale. 

Dalla figura 2 si ricavano i vari aspetti di queste cellule, le quali 
dal lato del parenchima spiccano un solo prolungamento, mentre 
danno origine à uno, due o più prolungamenti dalla parte dell 
ectoderma, i quali ultimi, attraversando il sacco muscolare cutaneo, 
ragoiungono la membrana basale, alla quale vanno ad attaccarsi. 

L'aspetto della cuticula esterna, in tutti i miei preparati, è stato 
quello di uno strato di rivestimento uniforme, continuo e a faccia 
esterna crenata o liscia, provvisto di una fitta peluria. Questa si 
presenta variamente su tutto il Cestode in parola, più pronunziata 
ai margini di ciascuna proglottide, meno su tutto il resto del 
corpo. La peluria ha l'aspetto setoloso; le setole che la compongono 
sono infisse nella cuticula e riposanti sulla membrana basale, con- 
siderevoli per numero e del tutto independenti dall'ectoderma. 

A forte ingrandimento, le setole si presentano coniche con l’apice 
acuto e sensibilmente ricurvo (fig. 8). Agli orli di ciaseuna campa- 
natura delle proglottidi pigliano l’aspetto di una frangia spessa, 
intensa, molta pronunziata, e ivi la cuticula s'infossa alquanto per 
il grande numero delle setole che vi sono allogate. Queste setole si 
colorano intasamente con l’ematossilina, che le lascia ben distin- 
guere dall ectoderma dove esse sono infisse. 

Nei tagli longitudinali agli orli della campanatura delle proglot- 
tidi pigliano l’aspetto di ciuffi setolosi, come fanno vedere le 
fig. 2-5. Le setole, su tutto il resto del corpo per numero sono con- 
siderevoli, ma poco pronunziate, esse pigliano l’aspetto delle 
fig. 3-4. Mi è dato osservare ciuffi di setole staccantesi dalla euti- 
cula, dove si osserva bene tutta la loro lunghezza e la loro parte 


TEGUMENTO DELL ANCHISTROCEPHALUS 341 


basale: cid da far vedere il modo come esse sono infisse nella cuti- 
cula. Esse sono archilosate, staccandosi dalla cuticula lasciano 
questa bucherellata à guisa di un crivello. | 

La presenza di tali setole sul corpo del Cestode in parola, la di- 
sposizione varia che quelle hanno sui vari punti, il modo come esse 
sono pronunziate in determinati luoghi delle proglottidi lasciano 
in me una convinzione tale da non farmi meravigliare la presenza 
degli uncini sulla cupoletta terminale dello scolice dell’ Anchistro- 
cephalus microcephalus. Infatti basta osservare la varia grandezza 
degli uncini disposti a diadema sull orlo della cupola terminale 
dello scolice, il loro modo di fissazione nell’ ectoderma (fig. 6-7), la 
loro caducità, la loro caratteristica disposizione a frangia sullo 
scolice, non ultima la disposizione della punta degli uncini, come 
anche l'embriogenia degli uneini, per convincersi della mia asser- 
zione. Per la qual cosa credo opportuno per ora aggiungere come 
carattere distintivo della specie,'oltre la presenza degli uncini all’ 
estremità anteriore dello scolice, la pelatura del corpo da me ri- 
scontrato sull’ Anchistrocephalus microcephalus. 

Studi ulteriori potranno darei come carattere generico la pela- 
tura del corpo; se il risultato delle ricerche ci dia la presenza 
della pelatura sul tegumento (ectoderma) dell” Anchistrocephalus 
polypteri. 

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SPIEGAZIONE DELLA TAVOLA I 


Fig. 4. — Scolice di Anchistrocephalus microcephalus a notevole ingrandi- 
mento, visto di lato; vi si scorgono gli uncini della cupoletta terminale /uc), i 
botridi /b), le campanature delle proglottidi {cp} con le setole /S). 

Fig. 2. — Sezione longitudinale di proglottide a forte Re che lascia 
vedere la cuticula /c) con le produzioni ectodermali, setole _imuscoli longitu- 
dinali /ml) e le Sue sotto cuticulari /Cs). 

Fig. 3. — Sezione obliqua fortemente ingrandita della cuticula /c},dove si scor- 
gono le setole /s/, la membrana basale /mb) e i muscoli longitudinali /ml). 

Fig. 4. — Sezione longitudinale fortemente ingrandita della cuticula, dove si 
scorgono il modo come sono infisse le setole /s) nella cuticula /c) e i muscoli cir- 
colari /mcC). 

Fig. 5. — Sezione longitudinale dello scolice e di proglottidi, interessante gli 
uncini {uc) della parte basale della cupoletta terminale e le setole delle campa- 
nature di proglottidi {Cp}. 

Fig. 6 et 7. — Uncini fortemente ingranditi dello scolice. 

Fig. 8. — Setole fortemente ingrandite. 


NOTES ET INFORMATIONS 


Inauguration du monument de Nocard (pl. II). — La cérémonie d'inau- 
guration du monument édifié à la mémoire glorieuse de Nocarp a eu lieu 
le dimanche matin 24 juin 1906, sous la présidence de M. le Ministre de 
l'Agriculture, en présence d'une foule énorme et distinguée et par un 
temps magnifique. Grâce à l'initiative du Comité et du directeur de l'École 
d'Alfort, deux énormes et superbes tribunes tapissées de velours rouge 
à crépines d'or, ornées de trophées de drapeaux, agrémentées de plantes 
vertes, avaient été dressées, en face du monument, sur la pelouse fleurie 
de la cour d'honneur. Bien que capables de contenir 2000 personnes, 
elles furent bientôt archicombles, et beaucoup ce retardataires furent 
obligés de s'installer dans les bas-côtés ou en dehors des tribunes. Mais 
les organisateurs avaient pris leurs précautions pour que chacun, quelle 
que füt sa place, put voir et entendre, de sorte que la satisfaction fut gé- 
nérale. 


La musique de l’École d’Artillerie de Vincennes rehaussait par sa pré- 
sence l'éclat de la fête. ve 

Le monument (pl. Il) est d’un eftet très artistique; il résulte d'une 
triple collaboration : le buste du maître est dû au sculpteur GEOFFROY, 
ami personnel de Nocarp; les allégories sont l'œuvre de l'éminent sta- 
tuaire Alfred Boucner; enfin M. Bovin est l'architecte du monument. 
Haut de cinq mètres, il se compose d’une stèle de granit rouge des Vos- 
ges, que surmonte le buste et qui repose sur des marçhes-de granit. 

Sur cette stèle, face au public se lit l'inscription suivante : 


A EDMOND NOCARD 
1850-1903 
SES CONFRÈRES — SES ÉLÈVES — SES AMIS. 


De l’avis à peu près unanime, le buste n'est pas la ressemblance par- 
faite de celui dont il a la prétention de reproduire les traits: mais il faut 
reconnaitre que la tâche, acceptée avec un bel enthousiasme par le sculp- 
teur GEOFFROY, était particulièrement ardue, puisque le modèle, hélas! 
faisait défaut et que l'artiste, à coup sûr distingué, n'a pu s’inspi- 
rer que de documents photographiques plus ou moins imparfaits et de ses 
souvenirs personnels. Du reste, la première impression, un peu décevante, 
s'améliore dès qu'on examine le buste avec persistance, sous dif- 
férentes incidences et à des heures variables de la journée. Le souvenir 
précis que l’on a conservé de Nocarp, de la mobilité deses traits, le pieux 


344 NOTES ET INFORMATIONS 


et inconscient désir de voir s’animer l'image de ce maitre tant regretté, 
donne une sorte de vie factice à son effigie, au point que les imperfections 
s’amoindrissent jusqu'à disparaitre. 

Les trois personnages allégoriques groupés autour de la stèle sont d'un 
effet poétique et charmant, en même temps que d'un exquis symbolisme. 
Le sculpteur Alfred Boucxer, dont il convient de louer sans réserves 
l'inspiration et le talent, a voulu personnifier l'Agriculture moderne sous 
les traits d'un jeune pâtre et d'une gentille fermière, debout l'un et l’au- 
tre de chaque côté de la stèle, sur le granit de laquelle ils s'appuient. Le 
garçon, placé à droite, élève d'un joli geste une palme d'or vers (le bien- 
faiteur de l'Agriculture ». Quant à la jeune paysanne, placée à gauche de 
la stèle, son tablier est rempli de volailles, dont les têtes effarées dépas- 
sent curieusement les bords. La main droite, tenue à demi baissée, tient les 
fleurs dont elle fera au Maitre l'hommage touchant. L'expression admira- 
tive, sérieuse et fière de ces deux personnages est fort réussie et d’un in- 
térêt puissant. 

Au premier plan, la figure la plus gracieuse représente, à n'en pas 
douter, la jeune Science, c'est-à-dire la science pastorienne, dont la foi 
est profonde en la parole du Maitre et qui n’a plus pour lui de secrets. 
C'est pourquoi sans doute le statuaire l’a personnifiée sous la figure d'une 
jeune fille dépouillée de ses voiles, assise aux pieds du savant, attentive 
et soumise à sa parole auguste et qui, par ses formes d'une beauté par- 
faite, montre que, si elle est encore jeune et gracile, à peine sortie deson 
adolescence imprécise, elle promet du moins pour l'avenir maturité et 
vigueur certaines. 

Ce personnage doux et charmant inscrit sur des tables d'airain le nom 
à jamais glorieux de Nocarp. 

A l'issue de la cérémonie, M. le Ministre de l'Agriculture a exprimé 
ses regrets de n'avoir pu apporter au professeur KAUFFMANN la croix de la 
Légion d'honneur, qu'il recevra, du reste, à l’occasion du 14 juillet. Puis 
il a décerné : à M. le Professeur RAILLIET, la Cravate de commandeur du 
. Mérite agricole ; aux Professeurs Perir et VALLÉE, la croix d'officier du 
même ordre; à M. BIGoTEAU, vétérinaire à Auneau (Eure-et-Loir), celle 
de chevalier du Mérite agricole; enfin, à M. BoBiN , architecte de l’École 
d'Alfort, la rosette d'oflicier de l’Instruction publique. 


Discours de M. Leclainche 
Professeur à l'École vétérinaire de Toulouse. 


MonsIEUR LE MINISTRE, 
MESDAMES, 
MESSIEURS, 


C’est pour nous jour de fête. Cependant notre esprit rappelle des sou- 
venirs de deuil et notre pensée voile d'un crêpe les claires couleurs des 
oriflammes. 


NOTES ET INFORMATIONS 349 


Nous avons voulu cette hâtive commémoration. Il nous semblait que 
Nocarp ne devait pas attendre qu'on lui rendit justice, et notre empres- 
sement à le glorifier nous apparaissait comme un dernier témoignage de 
notre affection. 

Mais comment célébrer aujourd'hui la mémoire de NocaRp sans raviver 
notre commune douleur ? Il faut le recul lointain des ans pour que 
l’image estompée des êtres aimés puisse être évoquée sans amertume, et 
celte solennité qui nous enchante par la grandeur de l'hommage rendu au 
savant entré dans l'immortalité prend malgré nous le caractère attristé 
des pieux anniversaires. 

Il y aura quarante années bientôt que Nocarp franchit pour la première 
fois la porte de cette École. Il n'y était attiré ni par une irrésistible 
vocation, ni par l'amour de la science, ni même par le renom d’'Alfort. 
En vérité, Nocarp ne nous eût jamais appartenu si Provins n'avait possédé 
une garnison de dragons. L'histoire parait merveilleuse. Nocarp aimait à 
la conter. è 

Autant et plus peut-être que de ses roses, Provins est fière de ses dra- 
gons. On s'intéresse au spectacle, pourtant familier, des prises d'armes, 
et les curieux encombrent la rue quand défilent les escadrons. Élève du 
collège et bon Provinois s’il en fut, le jeune Nocarp professait le culte 
du dragon. Mais le casque prestigieux, au plumet en bataille et à la cri- 
nière flottante, n'avait pas ses préférences. Il avait découvert, à la queue 
des colonnes, deux cavaliers chevaucha nt côte à côte, tout semblables, 
encore que l’un portât les broderies d'or et l’autre les broderies d'argent. 
Le sort de ces cavaliers parut enviable à notre ami. Il se demanda quel- 
que temps s'il serait médecin ou vétérinaire. Les broderies d'argent lui 
parurent plus seyantes : sa carrière était choisie. 

A dix-sept ans, Nocarp avait terminé ses humanités. Le baccalauréat 
ouvrait alors toutes grandes les portes de nos Écoles, mais le règlement 
fixait une inexorable limite d'âge. Il fallait attendre toute une année. 
Pour tromper l'ennui, Nocarp entre comme clerc chez un notaire de Pro- 
vins. Il ne semble pas qu'il se soit passionné pour la rédaction des gri- 
moires ; mais cette année de notariat n'avait pas été perdue ; le jeune 
clerc était devenu de première force au billard. 

Ces années heureuses d’adolescence avaient laissé des souvenirs pro- 
fonds dans le cœur de Nocarp. Il avait pour sa petite patrie une tendresse 
infinie. De Provins il connaissait toute l'histoire et il savait tous les 
détours. Plus tard, il aimait à y entrainer quelque ami, et de ce pèleri- 
nage on gardait un souvenir ému. 

C'était, dans l’ancienne maison familiale, l'accueil cordial des bons 
parents et du grand frère, et puis les interminables promenades, la visite 
au collège, les vieilles rues et le Grand-Grenier, les remparts et les vues 
sur la plaine, et la toute gracieuse Voulzie que chanta Moreau. 

En 1868, Nocarp entre à Alfort et prend d'emblée la tête de sa promotion. 
Il est en troisième année quand éclate l'orage de 1870. En notre terre de 


Archives de Parasitologie, XI, n° 2, 1907. 23 


946 NOTES ET INFORMATIONS 


France, l'amour du clocher se confond avec l'amour de la patrie. Les 
camarades plus âgés sont appelés à l’armée; l’École est licenciée. Nocarp 
n'hésite pas; il sera soldat tant que durera la guerre. On l’incorpore dans 
un régiment de lanciers et on l’oublie dans un dépôt du sud-ouest. 

La paix est signée. Nocarp rentre à Alfort et termine brillamment ses 
études. 

Par ses succès scolaires, le lauréat d’Alfort pouvait prétendre à la 
carrière, alors enviée, du professorat; ses rêves de gloire militaire s’en 
étaient allés, il ne se souciait guère d'exercer son métier. Le poste de 
clinique devenait vacant à ce moment ; NocarD l'obtient au concours, le 
6 novembre 1873. 

La tâche qui lui incombe est ingrate entre toutes. La chaire à laquelle 
il est attaché comporte l'enseignement de la pathologie interne et externe 
et celui de la clinique; le titulaire assume, en outre, la charge très lourde 
de la consultation et celle des hôpitaux de l'École. 

Nocarp remplit avec une vigoureuse conscience ses difficiles fonctions ; 
de plus, il recueille et publie de nombreuses observations. 

En 1876, Henri BouLey est jugé traitreà la cause d’Alfort ; son journal, 
le Recueil, est mis à l'index ; on décide que l'École doit posséder un organe 
pour s'affirmer et se défendre. En fait, des querelles personnelles moti- 
vent seules l'anathème; toutelois, le bon BouLey a commis un crime 
notoire : il a emporté avec lui le prestige de la maison! On n'a pas de 
peine à persuader aux jeunes chefs de service qu'il s'agit uniquement de 
servir les intérêts de l'École, et Nocarp devient le secrétaire de la rédac- 
tion des Archives. 

Sa production scientifique est considérable ; elle porte à la fois sur les 
sujets les plus divers : médecine, chirurgie, hygiène, police sanitaire, 
jurisprudence... Elle témoigne de l’activité débordante d’une intelligence 
que sollicitent indifféremment tous les objets ; elle traduit aussi les ineer- 
titudes d'un esprit qui cherche encore ses directions. 

Jusque-là Nocarp à eu des professeurs ; il n'a pas trouvé un maitre. 

Le Maitre! Ce n’est pas le chef qu'une hiérarchie administrative nous 
impose. À celui-ci, nous ne devons que la déférence banale et les mar- 
ques extérieures du respect. Ce n’est pas encore celui qui nous dispense 
la science, qui nous apprend une technique ou un métier. A celui-ci, nous 
devons seulement la reconnaissance que mérite son zèle et son désinté- 
ressement. 

Le Maitre! C'est celui qui, s'emparant de notre esprit, le domine et 
le façonne, le féconde et l’éclaire. C’est celui qui nous montre le chemin 
et quiguide notreroute. C’est celui qui, élevant notre àme jusqu'à la sienne, 
lui révèle et lui impose une foi commune et un commun idéal. A celui- 
là, nous devons l'hommage de toutes nos pensées, notre affection et notre 
dévouement; nous lui sommes liés pour toujours, et jamais n'est éteinte 
la dette sacrée de nos obligations. 

A cette heure décisive où s'affirme la personnalité, Nocarp se lie à un 


NOTES ET INFORMATIONS 9341 


homme qui exerce sur sa vie une influence aussi profonde que bienfai- 
sante. Du Mesnir était alors le médecin de l'École d'Alfort. Ce n'était pas 
seulement un savant, C'était aussi et surtout une âme d'élite, faite de 
droiture et de modestie, de dévouement et d'abnégation. NocarD est 
accueilli familièrement au foyer de Du Mesnir. Là, dans le salon d'une 
femme dont l'intelligence égale la haute distinction, il rencontre les 
hommes qui devaient occuper, quelques années plus tard, les plus hautes 
charges de l'État. On est à la veille du 16 mai, et le château de Créteil, 
comme on appelle un peu pompeusement dans le pays la demeure de Du 
MEsniz, est le rendez-vous des chefs républicains. Dans ce milieu 
ardemment libéral, Nocarp puise des convictions politiques et des idées 
philosophiques auxquelles il reste fidèle jusqu'à sa dernière heure. 

Quel exemple aussi que la vie de Du MEesxir ! Après avoir lutté et souf- 
fert pour ses opinions, il assiste au triomphe de son parti. Ses amis, ses 
obligés parfois, sont au pouvoir ; lui-même pourrait occuper avec distinc- 
tion les plus hautes fonctions et cependant il ne veut rien être et son 
influence ne s'exerce jamais qu’en faveur des déshérités. Il a voué sa vie 
aux humbles et aux malheureux. Pour améliorer leur sort, il s'impose un 
écrasant labeur, pour eux il dépense sans compter, sa fortune et sa vie. 
Il meurt pauvre, presque oublié, et un modeste monument, élevé par ses 
amis, marque la place où repose, dans un cimetière parisien, un homme 
qui honora l'humanité. 

Tel était celui qui fut pour Nocarp le conseiller des heures difficiles, 
le modèle et le guide. Peut-être ne comprendrait-on pas Nocarp si l'on 
ne connaissait Du MEsniz. 

Dans une autre maison amie, NocaRp fréquentait aussi, dès ses pre- 
mières années d'Alfort. Chez le bon docteur Josras, il retrouve une seconde 
famille ; il trouve aussi une jeune fille dont il fait bientôt la compagne de 
sa vie. Cest l'avenir radieux qui s'ouvre, avec toutes les promesses 
du bonheur. Et voici que, moins d’un an plus tard, la jeune femme meurt, 
laissant à Nocarp une enfant dont la santé précaire devait lui causer de 
continuelles alarmes. 

Nocarp porta pendant toute sa vie le deuil de son foyeret jamais, sans 
doute, au cours de sa brillante carrière, il ne ressentit pleinement des 
joies qu’il eùt voulu partager avec l'élue de son cœur. 

.… Avec une sollicitude discrète, Henri BouLey avait suivi les premiers 
pas de Nocarp dans la carrière scientifique. Il découvre l'élève qu'il avait 
rêvé, et peut-être aussi sa propre image, dans ce jeune homme au 
caractère indépendant et à l'intelligence avisée. Il lui prodigue ses encou- 
ragements et, pour mieux marquer sa prédilection, il signe avec Nocarp 
un important rapport au Congrès international d'hygiène de Paris sur 
«les moyens pratiques de constater et d'assurer la bonne qualité des 
viandes de boucherie ». C’est un lumineux exposé de toutes les données 
-alors acquises sur les caractères des viandes saines et altérées, en même 
temps qu'un projet de réglementation si bien conçu qu'il se trouve appli- 


348 NOTES ET INFORMATIONS 


-qué, à l'heure actuelle, dans la plupart des pays d'Europe. Le mémoire 
atteste la souplesse du talent de Nocarp et la sûreté de son jugement, 
car, on peut bien le révéler aujourd'hui, BouLey n'avait pas ajouté une 
ligne au manuscrit de son collaborateur. 

Ce fut entre ces deux hommes, si bien faits pour se comprendre et 
pour s'aimer, l'origine d'une intimité que la mort seule pouvait briser. 
On peut dire que BouLey fut le premier maitre de Nocarp. Si cette in- 
fluence n'est pas plus évidente, c'est qu'à cette heure précise BouLEY 
cherche lui-même sa voie. 

Quelques années plus tôt, il eût entrainé son élève vers cette médecine 
d'observation qu'il voyait si belle, et il lui eùt transmis le sceptre de la 
clinique. Et voici que maintenant sa foi chancelle. Une doctrine nouvelle 
vient de naître; ses premières lueurs ont éclairé le temple, et le prêtre 
d'Isis s'aperçoit avec stupeur que l’idole vénérée n'est faite que de voiles. 

Avant même qu'il ait pu pressentir toute la fécondité de la méthode 
pasteurienne, BouLeyx est converti à l’expérimentation, et dans cette voie 
qu'il méconnut jadis, sur ce chemin de la vérité encore ignoré de la foule, 
il se précipite entrainant son disciple avec lui. 

En 1878, l'enseignement de la pathologie et de la clinique est dédoublé. 
Il est entendu que la chaire de pathologie interne, avec la pathologie gé- 
nérale et l'anatomie pathologique, sera mise au concours. Nocarp est tout 
désigné pour l’occuper; il va se spécialiser, organiser un laboratoire et 
entreprendre des recherches personnelles. Il achève sa préparation, quand 
un coup de théâtre se produit. Au moment où le programme du concours 
va être publié, ilapprend par une lettre indignée de BouLey que le titutaire 
-de la chaire a changé d'avis et qu'il garde pour lui la pathologie interne. 

Il ne s’agit point seulement pour Nocarp d'aborder sans préparation 
spéciale un concours public; il va se trouver muré entre les horizons 
étroits de la chirurgie vétérinaire. 

Le 25 novembre 1878, après un concours brillant, Nocarp est nommé 
professeur de pathologie chirurgicale, manuel opératoire, ferrure et cli- 
nique. 

S'il ne détient pas l’enseignement de son choix, Nocarp possède au 
moins les moyens d'étude et la liberté dans la recherche que donne seule 
chez nous l'accession à la chaire. Il réorganise l’enseignement pratique 
de la chirurgie et il essaie d'introduire à la clinique d'Alfort des mœurs 
nouvelles. Son activité est prodigieuse; il accumule d'importantes contri- 
butions sur toutes les parties de la pathologie, et ce chirurgien malgré lui 
donne, en quelques années, une série de travaux qui le classent parmi les 
meilleurs maitres de la chirurgie vétérinaire. 

C’est vers les précisions de la science que Nocarp est attiré par les 
tendances de son esprit. Son sens critique avisé lui a permis de mesurer 
toutes les incertitudes et les puérilités des théories médicales régnantes. 
C'est avec anxiété qu'il suit les phases précipitées de la révolution scien- 
tifique qui s'opère sous ses yeux. 


NOTES ET INFORMATIONS 349 


La doctrine pasteurienne subit le fameux assaut des traditionalistes. 
Alfort est intéressé dans la lutte; l’un de ses maîtres, Cou, est le plus 
déterminé des adversaires de Pasreur. Toute l’École est avec lui. Dans ce 
milieu aussi, on trouve osée l'intervention de ce chimiste qui prétend 
régenter la médecine. 

Ce n’est point sans réflexion que Nocarp prononce son acte de foi. Si 
BouLey ut un pasteurien d'enthousiasme, Nocarp fut un pasteurien de 
raison. Il est ébranlé déjà par les premières communications de PASTEUR . 
sur le charbon; mais il attend la démonstration définitive, qu'il pressent 
prochaine. Enfin paraît le magnifique mémoire Sur l’éhiologie du charbon, 
tout irradiant de lumière et de vérité. Cette fois, Nocarp ne résiste plus 
et voici ce qu'il écrit dans le journal d'Alfort : 

€ Dans la lutte de tous les jours, où M. PAsTEUR disputait pied à pied 
le terrain qu'il gagnait, ne laissant pas une objection sans la réfuter, re- 
prenant dix fois, sous une forme nouvelle, la démonstration de la veille 
qui n'avait pas convaincu tous les auditeurs, la galerie, muette d'admi- 
ration, assistait à cet étrange spectacle : les adversaires de la théorie des 
germes piétinant sur place, produisant de nouvelles expériences et de 
nouveaux arguments pour remplaëer ceux que l'infatigable lutteur avait 
détruits la veille, reprenant toujours les mêmes hypothèses, © s’épuisant 
dans la recherches de vaines « contradictions, obscurément formulées », 
tandis que l'illustre savant marchait à pas de géant, écrasant ses adver- 
saires sous les coups de nouvelles découvertes plus ingénieuses, plus 
fécondes en résultats les unes que les autres... » 

C'est le 25 juillet 1880 que Nocarp publiait ces lignes. Cette date 
marque pour lui l’aurore d'une vie nouvelle. Retracer la vie de Nocarp en 
ces vingt-cinq dernières années, c'est découper un chapitre de l'épopée 
pasteurienne. Célébrer Nocarp, c'est gloritier la mémoire immortelle de 
PASTEUR. 

Nocarp est accueilli dans le sanctuaire de la rue d'Ulm. Avec une inlas- 
sable patience, il s’initie aux plus délicates manipulations et, avec les 
autres disciples du maitre, il prend sa part de la tâche commune. 

Les publications de Nocarb à cette époque ne traduisent guère ses 
préoccupations dominantes. Tandis qu'il se rend maitre des techniques 
nouvelles et notamment des méthodes de coloration microbienne, il rédige 
encore des études de pathologie et de clinique. C'est une circonstance 
imprévue qui le relève au grand public. 

En 1883. le gouvernement français décide d'envoyer une mission scien- 
tique pour l'étude du choléra en Égypte. Avec Roux, SrRaus et THUILLIER, 
Nocarp est désigné par Pasteur. On sait ce qui advint de cette expédition, 
et comment TauiLrier fut emporté par le fléau qu'il allait combattre. 
C’est par un acte d'héroïsme qu'il a fait ses débuts de bactériologiste. 

Dans son service de la « cour des forges », celui-là même qu'occupait 
Coin, NocarpD installe un laboratoire de fortune, et c’est là qu'il s'en-. 
ferme, indifférent au bruit et aux sollicitations du dehors. Sa porte est 


390 NOTES ET INFORMATIONS 


défendue par une consigne sévère; les ümportuns qui l’enfreignent 
tentent rarement une seconde visite. Là, pendant des mois et des années, 
il travaille sans s'accorder jamais de repos, ne profitant des heures de 
liberté que pour consacrer plus de temps à la recherche ou pour remplir 
quelque laborieuse mission. C’est encore ici la maison de Pasreur et la 
règle commune y est fidèlement observée. 

Alors commence une série ininterrompue d'importantes publications. 
Nocarp fait connaitre des techniques nouvelles : il indique une méthode 
de récolte du sang et du sérum sanguin, merveilleuse desimplicité etpar- 
tout utilisée depuis; il indique la composition d’un bouillon de culture 
pour le Bacille tuberculeux, et il obtient pour la première fois le déve- 
loppement du Bacille aviaire; il applique aux animaux le procédé d'ExRLICH 
pour la recherche du Bacille de Kocx. 

Avec MoLLeREAU, l’un de ses amis les plus chers, Nocarp étudie la 
mammite enzootique des Vaches laitières, dans une monographie qui 
reste comme un modèle d'analyse bactériologique: il isole le Strepto- 
coque pathogène, précise tous les points de l’étiologie et de la pathologie 
et formule les règles, toujours présentes, de la prophylaxie et du 
traitement. 

Peu après, il entreprend une étude analogue sur une mammite gangré- 
neuse enzootique des Brebis laitières et il démontre encore sa nature 
microbienne. 

Avec Roux, il fait connaitre les propriétés spéciales des milieux glycé- 
rinés pour la culture du Bacille de la tuberculose et il réalise des 
recherches sur le charbon symptomatique et sur la vaccination des 
herbivores contre la rage. 

Les travaux de laboratoire ne l’absorbent pas tout entier. En 1886, il 
remplit dans la Nièvre une importante mission pour l'étude de l'avor- 
tement épizootique et il fait connaître des mesures préventives que 
l'expérience a définitivement consacrées. 

En 1885, BouLey, malade, est contraint d'abandonner la direction du 
Recueil et d'interrompre ces vivantes chroniques où, pendant tant d'an- 
nées, il avait continué sa noble mission d'enseignement. C’est Nocarp 
qu'il désigne pour remplir un intérim qu'il sait bien devoir durer tou- 
jours et c’est à Nocarp qu'il confie le soin de continuer son œuvre. 

Pendant cinq années, Nocarp donne des « chroniques » au Recueil, et 
l’on peut dire qu'il supporta sans faiblir l’écrasante succession de l'in- 
comparable journaliste que fut Bourey. 

Jusqu'en 1887, Nocarp, le bactériologiste connu dans le monde entier, 
est encore professeur de pathologie chirurgicale, d'obstétrique et de 
maréchalerie. A défaut d'un cours de bactériologie, que nous ne pos- 
sédons pas encore aujourd'hui, il existait bien une chaire de pathologie 
des maladies contagieuses; mais celle-ci est occupée qur un anatomiste, 
le directeur GouBaux. Celui-ci a repassé la presque totalité de son 
enseignement aux deux professeurs de clinique, et Nocarp a reçu en 


NOTES ET INFORMATIONS 3)1 


partage. la législation commerciale. Les deux puissances qui gouvernent 
nos Écoles, le règlement et la tradition, avaient ‘été scrupuleusement 
respectées. 

La mise à la retraite de Goupaux donne à Nocarp l’enseignement qu'il 
illustre déjà par ses travaux; elle lui apporte aussi le présent peu 
enviable de la direction d'Alfort, qu'il n'accepte qu'avec résignation, pour 
l’abandonner avec joie trois années plus tard. 

Le labeur de chaque jour est écrasant. Tout en assumant la lourde 
charge et les soucis de la direction, Nocarp conserve la totalité de l’en- 
seignement qui lui est attribué. Il inaugure un cours et il installe un 
service. Seul, sans répétiteur la plupart du temps, il pourvoit à tout 
avec une impeccable régularité. 

L'abandon de la direction allège sa tâche; mais d'autres obligations 
sont nées. NocaRD paie la rançon de sa notoriété. Pour remplir envers 
son École et sa profession des devoirs qu'il s’exagère peut-être, il paraît 
dans les Sociétés et dans les Académies. Il est appelé dans les Conseils et 
dans les Comités et partout il fait apprécier l'étendue de ses connais- 
sances et la netteté de son esprit. 

Malgré ce labeur imposé de chaque jour, Nocarp trouve encore de 
longues heures pour la recherche et sa production scientifique ne se 
ralentit point. 

Il découvre le Streptothrix du farcin du Bœuf; il apporte des docu- 
ments nouveaux sur la tuberculose zoogléique, sur l’étiologie du tétanos, 
sur la pathogénie de la tuberculose, sur le diagnostic de la Iymphangite 
épizootique, sur la virulence des viandes et du lait des animaux tuber- 
culeux. 

Avec une ingéniosité merveilleuse, il décèle la véritable nature de la 
cornstalk disease des Bœuîs américains. [l déploie la même sagacité dans 
l'étude des infections provoquées chez l'Homme par les Perruches 
importées de l'Amérique du sud; en possession de quelques fragments 
d'ailes des Oiseaux malades, il découvre le Microbe pathogène dans la 
moelle des os, le cultive et reconstitue toute l’étiologie de la psittacose. 

Nocarp constate les effets surprenants du traitement ioduré dans 
l'actinomycose, préconisé déjà par THoMASSEN, de l'École vétérinaire 
d'Utrecht. Il donne à cette belle découverte l'appui de son autorité et 
multiplie les démonstrations. Aujourd'hui, le (traitement de THOMASSEN » 
est connu dans le monde entier; il sauve chaque année des milliers 
d'animaux et quelques vies humaines. 

Dès 1891, Nocarp entreprend l'étude des propriétés révélatrices de 
la tuberculine de Kocx, utilisées pour la première fois chez les Bovidés 
par Gurmann, de l'École vétérinaire de Dorpat. Il poursuit avec méthode 
un travail patient de contrôle, sans se laisser influencer par les condam- 
nations bâtives des uns ou par les enthousiasmes irréfléchis des autres. 
Sa conviction faite, il proclame le merveilleux pouvoir de la tuberculine 
et précise les conditions de son emploi. 


9302 NOTES ET INFORMATIONS 


Les conclusions primitives de Nocarp restent vraies et définitives. Il faut 
seulement les entendre avec cette restriction qu’elles n'ont point la 
rigueur mathématique que parait impliquer la simplicité des formules. 
C'est en vain que l'on s’est efflorcé à en modifier l'expression pour y 
faire rentrer tous les faits. Les séries indéfinies des phénomènes 
complexes de la pathologie échappent à nos tentatives de groupement 
systématique, et c'est peut-être l’un des caractères de la légitimité d'une 
loi biologique que de comporter des exceptions. 

NocarD comprend aussitôt ce que l'on peut obtenir de l'emploi raisonné 
de la tuberculine dans la lutte contre ce fléau, chaque jour plus menaçant, 
qu'est la tuberculose des Bovidés. Avec la tuberculine, il est possible 
à la fois de découvrir et d'isoler les malades, que de nouvelles générations 
indemnes viendront remplacer dans l'étable assainie. C'est la libération 
obtenue à coup sûr, presque sans frais, c'est l’agriculture mondiale exo- 
nérée d'un impôt annuel qui se chiffre par centaines de millions. 

Nocarp comprend aussi que l'on ne peut imposer de telles mesures ; il 
sait que l’on ne peut rien sans la volonté réfléchie des éleveurs, qu'il 
faut obtenir leur adhésion et diriger leurs efforts. 

Il commence alors une admirable croisade contre la tuberculose bovine, 
véritable apostolat qu'il poursuit sans défaillance pendant plus de cinq 
années. Il lutte dans les Sociétés, dans les Congrès et réduit partout ses 
adversaires. Il multiplie les communications et les brochures. Enfin il 
porte un peu partout la bonne parole, dans une série de conférences qui 
lui valent autant de triomphes. 

A ne considérer que notre pays, on ne saurait dire queles résultats 
aient répondu à cet effort; ce sont destentatives isolées, qui ont été réalisées, 
et si ces essais confirment l'exactitude des prévisions de NocaRp, ils 
démontrent aussi toutes les difficultés de cette colossale entreprise. 

La tuberculineétaitencore discutée qu'une découverte nouvelle sollicitait 
Nocarp. Les vétérinaires russes HELMAN et KALNING découvrent la malléine ; 
leurs premières recherches tendent à montrer qu'elle jouit de propriétés 
révélatrices analogues à celles de la tuberculine. Nocarp entreprend de 
nouvelles études de contrôle et reprend une campagne nouvelle. Il retrouve 
devant lui des obstacles et des adversaires déjà connus ; mais cette fois le 
succès est complet. Il ne s'agit plus, comme pour la tuberculose, de com- 
battre une infection partout répandue, dont les origines nous apparaissent 
chaque jour plus incertaines; la morve est localisée en quelques foyers 
et elle procède des modes connus de la contagion directe. 

Avec une vigueur et un esprit de décision admirables, Nocarp formule 
les indications de la malléine. Il répond à toutes les objections. Il com- 
munique sa foi et il impose sa volonté. Partout, les résultats prophétisés 
sont obtenus. Les cavaleries des grandes Compagnies de transport sont 
libérées: la morve est chassée de l'armée. Partout la méthode de Nocarp 
s'affirme, triomphante, et l'on peut prédire que la morve va disparaitre 
de la surface du globe. 


NOTES ET INFORMATIONS 393 


Il est juste de confondre dans un même hommage de reconnaissance 
tous les auteurs de cette belle conquête : HELMAN, mort avant d’avoir 
terminé ses recherches; KALNING, qui les achève et succombe à la morve 
contractée dans le laboratoire; Nocarp enfin, qui base sur la découverte 
des savants russes une méthode certaine de prophylaxie. 

La défense de la malléine est pour Nocarp l'occasion de nouvelles 
découvertes. Il montre que les Bacilles morveux pénètrent par l'intestin, 
sans que rien trahisse leur passage, pour déterminer dans le poumon 
des lésions primitives en apparence. Cette notion, vérifiée depuis pour 
d’autres infections, comporte des applications indéfinies et elle est le 
point de départ de recherches pleines de promesses sur de nouveaux 
procédés d'immusisation par les voies digestives. 

Nocarb apporte en même temps la démonstration de la curabilité de la 
morve du Cheval, de la fréquence des invasions avortées et du rôle 
prédominant de la résistance organique dans la marche des infections. 

La malléine encore lui permet de différencier une maladie bénigne, 
jusque-là confondue avec la morve, la lymphangite ulcéreuse, d'en pré- 
ciser l'origine microbienne et de sauver les animaux affectés. 

En 1898, le nom de NocaRp est attaché à un fait scientifique considé- 
rable. NocarDp, Roux, BORREL, SALIMBENI et DUuJARDIN-BEAUMETZ déter- 
minent l'agent de la virulence péripneumonique, dont ils font connaître 
les caractéristiques et les propriétés essentielles. Ce n'est pas seulement 
un microbe nouveau qui est découvert, l'origine inconnue d'une maladie 
qui est dévoilée, ce sont des méthodes qui sont créées, c'est une voie 
nouvelle qui est tracée, c’est toute une vaste étendue de la pathologie 
mystérieuse qui est ouverte aux investigations des savants. 

La découverte des « virus filtrants » marque le début d'une période 
nouvelle dans la microbiologie. En quelque années, malgré toutes les 
difficultés des techniques nouvelles, on a pu leur rapporter : la fièvre 
aphteuse, l'æœdème myxomateux, la peste bovine, le molluscum conta- 
giosum, la fièvre jaune, la horse sickness, la peste aviaire, la clavelée. et 
ce sont les beaux travaux de deux élèves aimés de Nocarp qui, dans son 
laboratoire d'Alfort, viennent d'ajouter à cette liste toujours ouverte 
l’anémie infectieuse du Cheval et la maladie des Chiens. 

Il faut bien citer encore, dans cette rapide revue des travaux de NocaRp, 
son étude bactériologique de la dermite ulcéreuse, ses recherches sur 
les infections ombilicales des nouveau-nés, sur la tuberculose du 
Cheval, les expériences si intéressantes qu'il réalise avec RossIGNoL sur 
la pathogénie de l'infection tuberculeuse, sa mission en Algérie et les 
conclusions si fermes et si sages de son rapport sur la prophylaxie de la 
clavelée. 

Cette nomenclature serait interminable, si elle devait être complète. Il 
n'est peut-être pas un chapitre de la pathologie des infections animales 
que Nocarp n'ait enrichi ou rénové. 

Ce n’est là qu'une partie de son œuvre. 


394 NOTES ET INFORMATIONS 


Une collaboration, qui fut la consécration d'une indéfectible amitié de 
vingt années, m'interdit de parler d'un livre que Nocarp inspira et me 
prive du plaisir de dire tout le bien que j'en pense. 

Mais il faudrait montrer ce que fut Nocarp dans les Sociétés et les Aca- 
démies. Il faudrait le montrer surtout dans les Congrès internationaux, 
s'imposant à tous par sa science et par son éloquence, remportant des 
victoires, en merveilleux tacticien qu'il était, conquérant tous les cœurs 
par son aménité et son entrain. € C'était le Français idéal », a dit un 
savant allemand qui le connaissait bien. On ne saurait faire un plus bel 
éloge de notre ami. 

Ce que Nocarp a fait dans la science, il l’a réalisé dans l’enseignement. 
Sa mission d'enseignant lui apparait comme un devoir sacré et pri- 
mordial. Presque toujours seul pour assumer les multiples obligations 
de sa chaire, il pourvoit à tout avec une impeccable ponetualité. Ce savant, 
dont les instants sont si précieux, consacre plusieurs heures par semaine 
à enseigner les techniques les plus élémentaires. Il multiplie les formes 
et les occasions de la démonstration; il communique à tous ceux qui l'ap- 
prochent son ardeur et sa foi; son service est une ruche bourdonnante, 
débordante de vie et d'activité. 

Nocarp eut à un degré rare le don et la passion de l’enseignement. Il 
fut un maitre de la narole, un séducteur et un conquérant de la pensée, 
sans avoir jamais Cultivé l’art de plaire. On ne trouve dans ses discours 
ni vocables rares, ni jeux de rhétorique. C’est par la sincérité et les con- 
victions qui sont en lui qu'il force l'attention des auditoires les plus indif- 
férents et qu'il con quiert les plus rebelles. 

Cet esprit droit et lucide ne connait point les hésitations de l'expres- 
sion. Le mot juste vient tout naturellement sur ses lèvres ou sous sa 
plume. Il parle avec une remarquable facilité, et ses manuscrits, jamais 
recopiés, portent à peine quelques ratures. 

Son œuvre est faite de probité et de sincérité. Jamais savant plus con- 
sciencieux n exerça sur lui-même une plus rigoureuse critique. Ses expé- 
riences sont vingt fois renouvelées, et bien souvent il demande à d'autres 
de nouveaux contrôles avant d’en proclamer les résultats. Ceux-là seuls 
qui ont vécu près de lui peuvent avoir une idée de ses scrupules d'expé- 
rimentateur. Plusieurs découvertes retentissantes appartieudraient à 
Nocarp, s'il avait consenti à mettre plus de hâte dans la publication de 
constatations qu'il jugeait toujours insuffisamment vérifiées. 

Mais dès que la vérité lui apparait, le savant timide et prudent se trans- 
forme en un apôtre ardent et plein de foi. Il croit en la science, en la 
sécurité de ses méthodes; jamais le doute ne vient effleurer son esprit. 
La controverse renforce sa croyance et la contradiction apparente des faits 
ne trouble point sa sérénité. | 

Nocarp fut admirable à Montoire. Alors que toutes les données acqui- 
ses sur la malléine paraissent controuvées, que tous croient à la faillite 
de la méthode, lui seul, ou presque seul, garde toute sa confiance. Les cons- 


NOTES ET INFORMATIONS 39) 


tatations nouvelles, basées sur la méthode expérimentale, ne peuvent être 
controuvées par les résultats d’une observation, même séculaire; ce sont 
les conceptions anciennes qui doivent être modifiées. Avec une éton- 
nante sagacité, il esquisse une interprétation que l'expérience confirme 
sur tous les points. 

Cet épisode avait eu un précédent peu conuu. Qu'on me permette de le 
rapporter ici. C'était au Congrès de Berne, en 1895. On discutait devant 
une assemblée, hostile en grande majorité, la valeur de la tuberculine 
dans le diagnostic et la prophylaxie de la tuberculose ; Nocarp avait pro- 
noncé un superbe plaidoyer; il avait fait voter par acclamation toutes 
ses propositions et remporté un magnifique succès. 

Ce succès de tribune ne lui suffisait pas cependant. Il voulait convain- 
cre, par une démonstration directe, les plus considérables de ses audi- 
teurs. Trois animaux sains en apparence, mais dénoncés comme tubercu- 
leux par la tuberculine, devaient être abattus. L'expérience fut faite à 
l'auberge de la Waldau, à quelques kilomètres de Berne; il n'y avait là 
qu'une trentafne d'assistants, mais tous étaient des maitres réputés, l'élite 
des spécialistes du monde entier. Chez deux des sujets, l'autopsie permet 
de découvrir les lésions annoncées ; on ne trouve rien chez le troisième. 
Dans ces circonstances solennelles, après les votes de la veille, l'échec a les 
proportions d’un désastre et certains ne savent pas dissimuler leur joie. 

Mais voici que Nocarp parait et qu'il accueille par un sourire l'annonce 
de la défaite: « Ce n’est pas possible, dit-il à ceux qui l'entourent; vous 
n'avez pas bien cherché. » Puis, sans hâte, toujours calme et souriant, il 
cherche avec méthode, sûr de lui et de sa science. Et tandis que toute 
l'assistance, anxieuse, suit chacun de ses mouvements, voici qu'un foyer 
méconnu apparaît sous le couteau. 

L'émotion est telle que des applaudissements éclatent de tous côtés, et 
Nocarp estétonné de cette manifestation. Lui seul n'avait pas douté; lui seul 
n'avait pas éprouvé l'angoisse qui nous étreignait, et à ceux qui le félici- 
taient il disait simplement: « Le résultat était certain; ne vous avais-je 
pas dit que la méthode est sûre? » 

Jamais savant n'eut l'esprit plus positif, ne fut plus sobre de commen- 
taires et de déductions. Ce n'est point à la dialectique qu'il a recours pour 
défendre ses conclusions. A ses adversaires il oppose sans cesse des 
faits nouveaux et il les accumule jusqu'à ce que la démonstration soit 
évidente. Il reste fidèle à la tactique pasteurienne et il semble que l'on 
soit reporté aux premiers temps de l'ère nouvelle. 

Son intelligence est orientée vers l'application; cette tendance est appa- 
rente dès ses premiers travaux et il est peu de ses recherches qui ne 
comportent des enseignements pratiques. 

La nécessité d'une telle direction lui apparaît plus évidente encore en 
ces derniers temps. Comment n'être point effrayé par la disproportion, 
chaque jour plus monstrueuse, entre l'énorme effort réalisé dans les seien- 
ces médicales et la pauvreté des résultats utilisables? N'est-il pas possi- 


396 NOTES ET INFORMATIONS 


ble de discipliner la recherche, de limiter son objet à des buts concrets 
immédiats, de faire rendre à nos méthodes tout ce qu'elles peuvent don- 
ner à l'hygiène et à la médecine ? 

C'est cette mission que Nocarp entendait assigner aux € Instituts » 
dont il recommandait la création au Congrès de Bade; c'est ce but que 
lui-même voulait poursuivre dans ce magnifique « laboratoire de recher- 
ches » d'Alfort, que son ami Viet aménageait avec la science d'un ingé- 
nieur consommé. La mort a interrompu son œuvre; il eut au moins cette 
suprême consolation de savoir qu'elle serait dignement continuée par l’un 
de ses élèves les plus affectionnés. 

J'ai terminé la tâche que je m'étais imposée. Je savais tout ce qui me 
manquait pour louer dignement celui dont je suis fier d’avoir été le dis- 
ciple et l'ami, et je n'eusse point accepté cette trop lourde mission, si je 
n'avais su remplir l'un de ses vœux. 

J'ai dit ta vie, mon bon maitre, devant ceux que tu aimais et qui t'ai- 
maient. J'ai dit ta vie devant ce veillard vénéré qui te saluait tout à 
l'heure, vers qui vont nos respects et nos affections, devant notre maître 
à tous, le grand et l’immortel CHaAuvEAu. J'ai dit ta vie devant tes parents 
affectionnés, devant tes amis les plus chers, devant ceux qui n'oublient 
point et qui te pleurent encore. J'ai dit ta vie devant tes collègues, tes 
confrères, tes élèves. 

Tous nous garderons pieusement fon souvenir. Dans cette maison qui 
te fut chère, que tu illustras par ta science et par ton travail, ton nom 
restera à jamais respecté. 

Et plus tard, bien plus tard, quand des années et des années auront 
passé, quand notre pauvre science d'aujourd'hui sera noyée dans de nou- 
veaux concepts, ce monument redira aux générations à venir ce que fut 
Nocarp d'Alfort, le grand savant et le bon Français. 


Discours de M. le D' Roux 


Membre de l'Institut, Directeur de l’Institut Pasteur. 
MESSIEURS, 


Pendant plus de vingt années, la vie d'Edmond Nocarp et la mienne 
ont été pour ainsi dire confondues; c'est pourquoi nos amis m'ont designé 
pour parler en leur nom dans cette cérémonie. 

En 1876, j'étais aide de clinique à l'Hôtel-Dieu; un jour, le chef de: 
laboratoire, LonGuETr, me présenta un grand et solide garçon plein de 
naturel et d’aisance, dont la physionomie révélait le caractère. Elle res- 
pirait la franchise, l'œil rayonnait la finesse et la bonté, le sourire de la 
bouche un peu sensuelle était charmant. 

Ce jeune homme, en bel équilibre de santé morale et physique, c'était 
Nocarp, chef de service à l'École d’Alfort. Tel je l'ai connu en 1876, tel il 
est resté jusqu'à la fin. Il émanait de sa personne de la loyauté, de la 
cordialité et comme une force saine et communicative. 


NOTES ET INFORMATIONS 391 


Les idées pastoriennes commençaient alors à agiter la médecine et 
dans cette première entrevue nous parlämes des maladies contagieuses 
des animaux. Avant de nous séparer, nous avions tracé un programme 
d'expériences à entreprendre sur la rage. 

Mais c’est surtout à partir de 1881 que nos relations sont devenues 
intimes. J'étais entré, en 1878, au laboratoire de Pasteur; j y introduisis 
Nocar», sur qui BouLey avait déjà attiré l'attention du maitre. 

Ces belles années de notre existence, nous les avons passées, côte à 
côte, à travailler à l'œuvre pastorienne. Labeurs, succès, espoirs, décep- 
tions, tout nous a été commun. 

À expérimenter ensemble, on apprend vite à se connaître; les compa- 
gnons de laboratoire pénètrent dans l'esprit et aussi dans le cœur les uns 
des autres. De bons collaborateurs sont bientôt de vrais amis. L'amitié 
de Nocarp était la plus réconfortante qu'on puisse éprouver, ni exigeante, 
ni inquiète, mais attentive et agissante ; amitié de toute sécurité, à la fois 
solide et délicate. 

Le collaborateur valait l'ami. Riche d'idées lui-même, il excellait à 
éveiller les idées chez les autres. Plein de hardiesse dans ses conceptions, 
il était maintenu dans la bonne voie par un bon sens supérieur. Avec lui, 
on ne s’attardait pas longtemps aux charmes de la spéculation, il fallait 

aboutir. Il concevait rapidement l'expérience à faire et l'exécutait avec 

une habileté de technicien consommé. Nocarb prenait pour lui la plus 
grande partie de la besogne; il m'épargnait la peine et partageait avec 
moi le succès. 

: Que ne dois-je pas à cette collaboration! Elle m'a souvent obligé à 
secouer la torpeur où je me serais endormi, elle m'a associé à la renom- 
mée de Nocarp, elle m'a procuré les meilleurs moments de ma vie. Aussi, 
depuis que la mort de Nocarp l’a interrompue, il me semble que les re- 

- cherches scientifiques ont moins d’attrait. 

L'entrée de Nocarp au laboratoire de PASTEUR a été un heureux évé- 
nement. Tout le monde y a gagné : Nocarp, l'École pastorienne et la 
science elle-même. NocarD y trouvait une méthode, une direction scien- 
tifique et des moyens de travail; en retour, il apportait ses connaissances 
vétérinaires, son esprit prompt à comprendre, son activité et cet admirable 
sens critique qui fit bientôt de lui le conseiller indispensable. De plus, il 

- mettait au service de la doctrine pastorienne une force de persuasion que 
peu de personnes ont possédée au même degré que lui. 

Si les vaccinations charbonneuses ont été si promptement acceptées par 
les vétérinaires et les agriculteurs, nous le devons en partie à Nocarp. 
Après les expériences de Pouilly-le-Fort, comme CHAMBERLAND, Comme 
THUILLIER, Comme moi-même, Nocarp courait les fermes, inoculant des 
- milliers d'animaux et faisant des conférences aux agriculteurs assemblés. 
Il laissait derrière lui la bonne semence et emportait la sympathie et la 
confiance des fermiers briards et beaucerons. Ce jeune professeur sans 
morgue, qui organisait le travail avec ordre et entrain, qui expliquait 


398 NOTES ET INFORMATIONS 


avec une conviction si persuasive les avantages des inoculations préven- 
tives, fit une impression durable sur nos populations agricoles. Et puis, 
une fois la besogne finie, Nocarp se montrait si aimable convive, si gai 
compagnon que les obstinés qui avaient résisté aux raisons du savant 
étaient gagnés par le charme de l’homme. Vraiment, PASTEUR ne pouvait 
souhaiter un apôtre plus entrainant. 

De ce premier contact avec les agriculteurs date l'influence que Nocarp a 
exercée sur eux; elle a grandi avec le temps, et il est devenu leur conseiller, 
celui auquel on recourt quand les épizooties frappent les étables. 

L'aide puissante qu'il nous a donnée au moment des vaccinations anti- 
charbonneuses, il nous l’a prêtée encore lors des grandes querelles sur la 
prévention de la rage. Il s’est jeté dans la mêlée, parlant et écrivant 
comme il savait le faire, apportant sans relâche des expériences nouvelles. 
Car il savait bien que seuls les faits ont vertu probante; sa manière de 
soutenir une cause consistait à en assembler de décisifs, puis à les pré- 
senter en un bel ordre qui augmentait leur valeur démonstrative. 

Pour cela, il faut l'imagination qui suggère les expériences, l'activité 
qui les réalise, la sagacité qui en démêle le fort et le faible, l'honnéteté 
scientifique qui ne dissimule aucune difficulté, et enfin le talent d'expo- 
sition qui fait ressortir ce qui doit apparaitre à tous. De ces qualités, 
Nocarp a donné maintes fois la preuve ; jamais d'une manière plus écla- 
tante que dans ses recherches sur la morve et la tuberculose. Elles res- 
teront un modèle. Sans elles, nous ne saurions peut-être pas encore nous 
servir, avec sécurité, des précieux moyens de diagnostic que nous four- 
nissent la malléine et la tuberculine. 

Une fois en possession de la vérité, mieux que personne Nocarp savait 
la répandre; car il avait au suprême degré le don de persuasion. Non pas 
seulement parce que sa parole était facile en même temps que précise et 
courtoise, parce que son discours bien ordonné était dit d’une voix sym- 
pathique, mais surtout parce qu'il savait avoir raison sans froisser per- 
sonne. Les personnalités ne se sentaient pas à travers ses arguments. Ses 
adversaires étaient convaincus et contents de l'être. De là, cette extraor- 
dinaire influence que Nocarp prenait, tout naturellement et comme sans 
le faire exprès, dans les commissions et les assemblées scientifiques. Elle 
avait débordé bien en dehors des limites du monde vétérinaire, elle était 
acceptée par les médecins et les biologistes. Au cours de ces vingt der- 
nières années, dans les Congrès internationaux, NocaRp a été à maintes 
reprises, et pour le plus grand avantage de notre pays, le représentant 
de la science française. 

Par ce don éminent de persuader, Nocarp a plus fait encore pour 
l'avancement de la science que par ses travaux originaux. En faisant 
accueillir la vérité de ceux qui la méconnaissaient, combien de tâtonne- 
ments n'a-t-il pas supprimés, combien d'efforts et de controverses inutiles 
n'a-t-il pas économisés ? Grâce à lui, la science a gagné un temps précieux, 
et nous avons avancé plus vite sur le chemin du progrès. 


nl 


NOTES ET INFORMATIONS 399 


Des générations de vétérinaires, des centaines de médecins français et 
étrangers ont suivi son enseignement, soit à l'École d’Alfort, soit à l’Ins- 
titut Pasteur. Tous gardent le souvenir de ces leçons lumineuses qu'ani- 
maient l'amour du vrai et la joie d'enseigner. Il était impossible d'écouter 
une leçon de Nocarp sans se sentir passionné pour la science et attiré 
vers le professeur. Son action était encore plus profonde sur ceux qui ont 
eu le bonheur de travailler dans son laboratoire. Ceux-là l'ont connu tout 
entier avec sa bonhomie brusque, sa belle humeur dans le travail, son 
coup d'œil sûr dans la recherche. Ils ont éprouvé la sensibilité de son âme, 
sa générosité, son désintéressement. Il leur a communiqué le feu sacré, 
son amour de l'indépendance et de la probité scientifique. Il faut les 
entendre parler de NocaRp pour Comprendre quel maître, quel beau carac- 
tère, quel brave homme il a été. 

NocaRp a pris sa part de tous les événements survenus à l’Institut Pas- 
teur depuis sa fondation. Quand la sérothérapie est entrée dans la pratique, 
nous n’aurions jamais pu, sans Nocarp», installer aussi promptement un 
service capable de répondre à la légitime impatience du public. Ses qua- 
lités d'organisateur et de conducteur d'hommes, son habileté expérimen- 
tale nous ont tiré d'affaire. Le laboratoire d’Alfort était devenu une suc- 
cursale de l’Institut Pasteur; NocaRD y préparait des sérums, y instrui- 
sait les jeunes vétérinaires qui sont devenus pour nous des collaborateurs 
précieux, animés de l'esprit de leur maitre. 

Nocarp était tout dévoué à cet Institut Pasteur, à la fondation duquel 
il avait aidé et où s’est déroulée une bonne partie de sa vie scientifique. 
Ce milieu de libre discussion, qui ne connaït guère d'autre hiérarchie que 
celle du mérite et dont les membres sont unis par une estime mutuelle, 
lui plaisait entre tous. Ses affinités y étaient satisfaites. D'ailleurs, il y 
tenait une place à part, à cause de l'admiration que nous avions pour ses 
travaux, de la reconnaissance que nous inspiraient ses services. Nous ne 
lui marchandions pas notre affection et il nous la rendait bien. 

Quand Nocarp venait à l'Institut, la bonne nouvelle se répandait aussi- 
tôt; l’on accourait à mon laboraloire pour se rencontrer avec lui. Nocarp 
apportait toujours quelques préparations ou quelques cultures; il tirait 
des flacons de toutes ses poches et, au milieu de la bonne humeur que sa 
présence suffisait à éveiller, il distribuait à chacun ce qui lui revenait. 
On lui soumettait des projets d'expériences, on lui montrait celles en cours. 
Il savait tant de choses qu'il avait toujours un bon avis à donner. Que 
les heures passaient vite quand Nocarp, DucLaux, METSHNIKOV, VAIL- 
LARD, CHAMBERLAND, pour ne nommer que ceux-là, se trouvaient ainsi 
réunis! 

Nocarp venait à l'Institut les mardis, après l’Académie, et les vendredis, 
au sortir du Conseil d'hygiène; ces jours-là, nous dinions ensemble et 
nous prolongions le repas en de cordiales causeries. Quel charmant 
compagnon, sachant apprécier tout ce que la vie a de bon et sachant en 
user | 


300 NOTES ET INFORMATIONS 


Tout cela n’est plus que souvenir ; en quelques mois, Duczaux et Nocarp 
nous ont été ravis. Les belles heures que j'évoque s’en sont allées avec 
ces chers disparus. 

Nocarp était attaché de tout son cœur à l'Institut Pasteur; mais des 
liens encore plus forts peut-être l’unissaient à l'École d'Alfort. J'en ai eu 
la preuve lorsqu'il quitta la direction de l'École vétérinaire. Il était fatigué 
et un peu déçu. Je lui proposai de renoncer aux fatigues de l’enseigne- 
ment, de venir parmi nous se consacrer entièrement à la recherche 
scientifique. NocarD refusa; il ne pouvait se séparer de cette École à 
laquelle il s'était dévoué et qu'il avait illustrée. 

Vous ne pouviez, Messieurs, choisir un meilleur emplacement pour 
ériger un monument à celui qui a voulu vous appartenir jusqu'à la fin. 
Vous avez dressé son buste parmi les arbres qui ont abrité ses prome- 
nades, presque en face du pavillon qu'il a habité. près de cette cour des 
forges où il a accompli ses premières découvertes, à peu de distance de ce 
nouveau laboratoire de recherches que le Gouvernement a fait construire 
pour Nocarp dans l'intérêt de l’agriculture. Nous en avions dressé les 
plans ensemble avec le concours de notre ami Vrer. Qu'il était heureux 
de le voir achevé! C’est à peine s’il a eu le temps de s'y installer. 

Les amis de NocarD qui m'écoutent pourraient beaucoup ajouter à ce 
que j'ai dit de lui. Chacun pourrait rappeler quelque nouvel exemple de 
l'élévation de son caractère. C'est que, plus on pense à Nocarp, plus on 
trouve de raisons de le regretter. 


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Archives de Parasitologie , AT, 7907. 


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Inauguré à Alfort, le 24 juin 1906. 


Archives de Parasitologie, XI, 1907. PIATRIE 


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D’après FERRET. 


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à  ASSELIN et HOUZEAU, Éditeurs 
Place de l'École-de-Médecine, PARIS (VI') 


A. RAILLIET 


Professeur à l’École vétérinaire d’Alfort, Membre de l'Académie de Médecine 


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DES AN con PR RAR ESS 6 20 francs. 


TERAITÉEÉ 


MALADIES PARASITAIRES NON HICROBIENNES 


DES ANIMAUX DOMESTIQUES 


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L-G. NEUMANN 


Professeur à l'École vétérinaire de Toulouse 


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LES | VIPÈRES DE FRANCE 


M. KAUFMANN 
Professeur à l'École vétérinaire d'Alfort 
Un vol. in-18 de 180 pages avec une planche en couleurs, cartonné. Prix 2 fr. 50 


MÉDECINE VÉTÉRINAIRE 


L'ÉCOLE D'ALRFORT 


Avec le concours d’un grand nombre de Professeurs et de Vétérinaires prüaliciens 
Civils et Militarres. 


Pour Paris, Seine, Seine-et-Oise......... 44 50 
PRIX DE L'ABONNEMENT | Pour les autres Départements........... 16 » 
partant loujours du 15 Janvier À Pour l'Union postale ..................., 47 » 


Le Recueil de Médecine vétérinaire paraît les 15 et 30 de chaque mois 


Le numéro du 80 contient IN EXTENSO le Bulletin des séances de la Société centrale 
de Médecine vétérinaire. 


ar 


ARCHIVES DE PARASITOLOGIE 


RÉDACTION : 15, Rue de l'École de Médecine, PARIS VIe 


ABONNEMENT : 


Paris et Départements : 30 fr. — Union postale: 32 fr. par volume. - 


Les Archives de Parasitologie publient des mémoires originaux écrits dans l’une ou 
l’autre des sept langues suivantes : français, allemand, anglais, espagnol, esperanto, ita- 


lien et latin. Les auteurs doivent, autant que possible, ‘FOURNIR UN TEXTE DACTYLOGRAPHIÉ 


(écrit à la machine), afin de réduire les corrections au minimum. 

Ce texte doit être conforme aux règles -suivantes : 

1° On appliquera strictement les règles de la Nomenclature zoologique ou botanique 
adoptées par les Congrès internationaux de zoclogie et de botanique; 


20 On fera usage, tant pour les noms d’ auteurs que pour les indications bibliogra-. 


phiques, des abréviations adoptées par ces mêmes Congrès ou par le Zoclogical Record 
de Londres; 

3° Les noms géographiques ou les noms propres empruntés à des langues qui n’ont 
pas l'alphabet latin seront transerits conformément aux règles internationales adoptées 
par les Congrès de zoologie; 

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reproduction des planches et figures, tout en supprimant des dépenses inutiles, nos 
collaborateurs sont priés de se conformer aux règles suivantes : 

1° Dessiner sur papier ou sur bristol bien blanc. 

2 Ne rien écrire sur les dessins originaux. 

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Les auteurs d'articles insérés aux Archives sont instamment priés de renvoyer à 
la Rédaction, dans ‘un délai minimum de huit jours, les épreuves corrigées avec le 
manuscrit où l'épreuve précédente. 

ls recevront gratis 50 tirés à part de leur article. Ils sont invités à faire connaître 
sans délai s'ils désirent en recevoir un plus grand nombre (50 au maximum), à leurs 
frais et conformément au tarif ci-dessous. Ce tarif ne vise que l'impression typographique 
ilne concerne point les planches, dont le prix peut varier considérablement. Toutefois, 
il importe de dire que, pour les exemplaires d'auteurs, les planches seront comptées 
strictement au prix de revient. Les trés à part ne peuvent être mis en vente. 


TARIF DES TIRÉS A PART 


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Trois quarts de feuille 

Une demi-feuille RSR NÉ RD AE EU EI PHP en 
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Unhuitième;de-feuillent-:2r er an ce Re el 50 


Le Gérant : 


HOUZEAU. 


École Professionnelle d'Imprimerie, à Noisy-le-Grand (Seine-et-Oise). 


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ARCHIVES. 


PARASITOLOGIE 


RAPHAEL BLANCHARD 


PROFESSEUR À LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE PARIS 


MEMBRE DE L' ACADÉMIE DE MÉDECINE 


PARIS 


ASSELIN ET HOUZEAU, ÉDITEURS 


PLACE DE L'ÉCOLE DE MÉDECINE 


1907 


Les Archives paraissent tous les trois mois, 


CE Re SOMMAIRE 


R. BzancrAnp el MARC BLATIN. — lmmunité de la Marmotte en hibernation à 


l'égard des maladies paräsitaires.. . : .'. . . . no le elle QU LR 501 
PasquaALEe MoLA. — Una nuova Tenia della Talpa (tav. IV). A ne En PART NS 379 
Maurice LANGERON. — Notices biographiques. — XVII, Fritz Schaudinn 

(1871-1906) (avec un fac-simile dans le texte et pl. VII). . . . : . . : . 388 
CuarLes Joyeux. — Recherches sur le pouvoir antibactérien de l'extrait de 

Cestodes pl: V'Et VIe I ST RSS EE AR DR AR OC AE k09 

_M. Trurr. — Hyphomycète du type Achorion déterminant chez l'Homme 
| des lésions trichophytoïdes. 52 177.86. 00 4e a PAPER AN 200) 
Bruno GaLLi-VALERIO. — Notices biographiques. — XVIII.  Prospero Sue 

sino (avec deux portraits et un fac-simile dans le texte). . . . . . . . 425 
R. BLANCHARD. — Parasitisme du Dipylidium caninwm dans l'espèce 

humaine, à propos d’un nouveau cas ( avec 15 fig. dans le texte). . . . 439 
J. Surcour. — Notes sur des Tabanides de la côte occidentale d'Afrique (pl. IX). 472 
Revue bibliographique. . . . . DA UNE ET AD SE A SD OR PR AG A Ses 475 


Notes et Informations (avec un portrait dans le texte et pl. X). . . . . . . 481 
Planches IV-VIIT et X. 
La planche IX paraîtra ultérieurement. 


AVIS 


Les Archives de Parasitologie sont publiées 
par MM. ASSELIN et HOUZEAU, Éprisurs, Place de 
l'École de Médecine, Paris (6°). 


On est prié dé s’adresser aux Editeurs pour tout ce qui 
concerne l'administration (abonnements, achat des volu- 
mes antérieurs, etc.). À 


. Les quatre premiers volumes ne sont plus représentés 
en magasin que par un petit nombre d'exemplaires. Leur 
prix sera prochainement élevé. 


N.B.— Il est déja paru quatre fascicules du tome X ; par 
exception, ce même volume comprendra un cinquième et dernier 
fascicule, renfermant la table générale des dix premiers volumes. 
La confection de cette table exigeant un certain temps, nous 
continuons la publication du tome XI, pour ne pas infliger trop 
de retard aux travaux qui attendent leur tour de publication. 


IMMUNITÉ DE LA MARMOTTE 
EN HIBERNATION A L'ÉGARD DES MALADIES PARASITAIRES 


PAR 


R. BLANCHARD et MARC BLATIN 


L'un de nous a entrepris, depuis plusieurs années, des études 
sur le parasitisme chez la Marmotte à l’état d'hibernation et sur 
les réactions que présente cet animal vis-à-vis de quelques toxi- 
nes (1); il espérait ainsi arriver à d'intéressantes constatations sur 
le mécanisme de l'immunité. Une série de notes publiées en 1903 
ont fait connaître des faits sur lesquels il nous a paru opportun de 
revenir, en expérimentant dans des conditions tout à la fois plus 
rigoureuses et de plus grande commodité. 

A cette époque, le Laboratoire de Parasitologie, très médiocre- 
ment installé, comme la plupart de ceux de la Faculté de médecine 
de Paris, ne possédait aucun local où il fut possible d'entretenir 
à l’état permanent une basse température, encore moins une tem- 
pérature uniforme. [1 avait donc fallu chercher ailleurs une instal- 
lation favorable aux expériences que l'on comptait entreprendre ; 
on avait cru la trouver au Frigorifique installé dans les sous-sols de 
la Bourse de commerce. Les animaux en expérience y avaient été 
installés dans une petite chambre ; on allait les observer, suivant 
les cas, une ou deux fois par jour. 

La vaste et d'ailleurs très remarquable installation frigorifique 
de la Bourse de commerce a été créée en vue de la conservation des 
viandes, du poisson, du gibier, des fruits et des primeurs. Elle ré- 
pond admirablement à ce but et rend de très grands services à cer- 
tains marchands de comestibles, qui y accumulent de grandes pro- 
visions et ne les en retirent, souvent après plusieurs semaines, 
qu'au fur età mesure des besoins de la consommation. Il y règne, 
suivant les salles, une température uniforme de quelques degrés 
au-dessus ou au-dessous de zéro. 

(1) R. BLancxarp, Expériences et observations sur la Marmotte en hibernation. 
CR. Soc. de biologie, LV, p. 734-741 et 1120-1126, 1903. 

Archives de Parasitologie, XI, n° 3, 1907. 


19 
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362 R. BLANCHARD ET M. BLATIN 


R. Dubois a démontré que les Marmottes dorment mal par d'aussi 
basses températures (1) : elles sont inquiètes, excitables, sortent fa- 
cilement de leur somnolence, ou même restent éveillées, avec une 
température rectale plus ou moins élevée. Ces faits étaient connus et 
cependant on avait cru pouvoir installer les animaux en expérience 
successivementdans des chambres à —3° et à + 3°. On espérait qu'en 
leur fournissant une litière abondante ils se feraient une sorte de ter- 
rier artificiel, au fond duquel se constituerait une atmosphère con- 
finée, dont la température monterait plus ou moins, ce qui leur 
procurerait un sommeil hibernal régulier. En réalité, cette prévi- 
sion ne s'est pas réalisée : les animaux ont eu froid et ont très mal 
dormi, d'autant plus que les fréquentes allées et venues du person- 
nel et des clients, dans les couloirs parquetés et bordés de parois 
en bois, occasionnaient un tapage et une trépidation très préjudi- 
ciables au repos. 

Pour ces raisons, il nous a paru nécessaire de reprendre les ex- 
périences précédentes. Ayant pu disposer enfin, à la Faculté de 
médecine, d'une vaste chambre en sous-sol, dont la température 
est de + 6° en hiver et au printemps, nous avons pu instituer de 
nouvelles recherches, cette fois dans de très bonnes conditions. 

Toutes nos Marmottes nous parviennent des Alpes vers la fin d’oc- 
tobre: elle arrivent réveillées et très excitées par le voyage; elles 
sont alors d’un maniement irès dangereux. Transportées dans le 
sous-sol, elles s'y endormentpromptement, d'ordinaire en moins de 
24 heures, et elles continuent d'y dormir avec la plus grande régu- 
larité,même jusqu’en avril et mai; elles ne sortent de leur engour- 
dissement que tous les quinze jours en moyenne, pour vider leur 
vessie. Toutes dorment et l’on n’observe plus cette veillée des armes 
qui était si frappante au Frigorifique et au grenier du labora- 
toire (2) : dans ces milieux défavorables, à température trop basse 
ou trop variable, les animaux dormaient mal, ainsi qu'il a été dit 
plus haut; un ou plusieurs d’entre eux étaient toujours éveillés, 


(1) R. Dugors, Étude sur le mécanisme de la thermogenèse et du sommeil chez 
les Mammifères. Physiologie comparée de la Marmotte. Annales de l’Université 
de Lyon, XXV, in-8° de 268-Lxx p. avec 125 pl., 1896. 

(2) Ce grenier, où sont installées des cages pour les animaux en expérience, est 
tourné en plein midi, d’où de grandes variations de température; par excès de 
froid ou de chaleur, les Marmottes ne peuvent y dormir régulièr ement pendant 
l'hiver. 


IMMUNITÉ DE LA MARMOTTE 303 


prêts à donner l'alarme aux autres par un sifflement aigu, à la 
moindre alerte. 

Chez une Marmotte en sommeil hibernal régulier, la tempéra- 
ture subit de grandes oscillations : elle reste normalement aux 
environs de + 8 à 10°, mais peut remonter jusqu'à 95° et même 
au-delà, quand le sommeil devient moins profond. Nous avons 
cherché à établir une relation entre la marche de la température 
et celle des infections expérimentales, mais nous avons fini par 
nous convaincre qu'on ne saurait tirer aucune conclusion précise 
de l'étude thermométrique des Marmottes infectées. 

Pendant la saison d'hiver, le nombre des globules du sang, éva- 
lué par le moyen de l’hématocrite, par conséquent sans distinction 
entre hématies et leucocytes, subit une diminution progressive et 
constante. On l'observe aussi bien chez les animaux sains, main- 
tenus à une trop basse température, telle que celle réalisée au Fri- 
gorifique ; chez les animaux inoculés d’une trypanosomose et con- 
servés en sommeil hibernal, dans la cave à + 6°; chez des animaux 
également inoculés d’une trypanosomose, conservés à l'état de 
veille dans l’une des salles du laboratoire et régulièrement nourris 
de carottes. Nous pensons donc qu'il s'agit là d'un phénomène 
général, qui n’a aucune relation avec la maladie expérimentale. Le 
tableau suivant montre la marche de cette diminution progressive 
du nombre des globules sanguins. 

La déglobulisation progressive de la Marmotte en sommeil hi- 
bernal a été déjà notée par Vierordt (1) et par R. Dubois (2) ; toute- 
fois, ces observateurs n’ont point vu que la diminution du nombre 
des globules ne se fait pas suivant une courbe régulière. L'examen 
du tableau ci-dessous permet, en effet, de constater que le nombre 
des globules, au lieu de subir une diminution régulière, se relève 
parfois assez brusquement, pour redescendre ensuite. Ces ressauts 
de la ligne de chute peuvent tenir à une exagération passagère de 
la fonction hématopoiétique, sous des influences qu'il s'agirait de 
déterminer; nous croyons plutôt qu’ils sont dus à une suractivité 
de la fonction rénale, qui déshydrate le sang et, par conséquent, 
tend à augmenter la quantité des globules par rapport au plasma. 

(4) Vrerorpr, Notiz über die Zählung der Blutkôrperchen. Zeitschrift fur rat. 


Med., XXXI, p. 863, 1887. 
(2) Loco citato, p. 82-84. 


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BLANCHARD ET M. 


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IMMUNITÉ DE LA MARMOTTE 309 


Dubois a d’ailleurs reconnu que le sang de la Marmotte endormie 
contient moins d'eau que celui de la Marmotte éveillée (1). 

Les colonnes A, B, C et D du tableau précédent correspondent à 
des animaux non inoculés, qui étaient conservés en sommeil hiber- 
nal dans la cave à + 6°. 

Pour réveiller une Marmotte et la maintenir éveillée, il suffit de 
la transporter dans une pièce chauffée, à une température de 12 à 
150, puis de lui donner à manger. Pour la faire dormir, il suffit de 
la transporter à la cave à + 6° et de ja priver de nourriture. Les 
variations nécessaires à l'expérience se réalisent donc avec une ex- 
trême facilité : on les a littéralement dans la main. 


I. — Immunité à l’égard des trypanosomoses. 


La réceptivité des Marmottes (Arctomys marmota) à l'égard de 
divers Trypanosomes varie du tout au tout, suivant que les ani- 
maux sont éveillés ou en état de sommeil hibernal. A l’état de 
veille, les Marmottes se laissent infecter à coup sûr par Trypa- 
nosoma Brucei, Tr. gambiense, Tr.Evansiet par le Trypanosome d'El 
Debab; toutefois, elles se montrent réfractaires au Tr. Lewisi, s’il 
est permis de tirer une conclusion d’une seule expérience. A l'état 
de sommeil hibernal continu, elles jouissent d’une immunité abso- 
lue envers les trypanosomoses (2). 

Ces faits, croyons-nous, ressortenttrèsnettementde nos expérien- 
ces, dont quelques-unes sont rapportées ci-dessous ; les autres 
étant toutes semblables à celles que nous résumons, il nous a paru 
inutile de les consigner ici. Des constatations identiques résultent 
d’ailleurs d'expériences du même genre, entreprises avec d'autres 
parasites, ainsi que nous aurons l’occasion de le faire connaître 
ultérieurement. 

Pour nous en tenir aux seules trypanosomoses, voici de quelle 
manière nous avons opéré : 

(1) Loco citalo, p. 86. 

(2) Dans mes premières expériences, faites dans les conditions défavorables qui 
viennent d’être dites, j'ai constaté la réceptivité de la Marmotte éveillée à l'égard 
du Tr. Brucei. Les expériences ci-dessous m'’autorisent à donner une interpréta- 
tion nouvelle de l'expérience XXVIII (C. R. Soc.de biologie, p. 1123, 1902). L’ani- 
mal dont il s’agit a sûrement guéri de sa première inoculation; il n’a été infecté 


que par la seconde. La Marmotte en sommeil hibernal régulier ne se laisse donc 
pas infecter par le Tr. Brucei. — R. Br. 


366 R. BLANCHARD ET M. BLATIN 


Nos virus sont conservés dans le sang des animaux généralement 
usités à cet effet dans les laboratoires (Rats, Souris, Singes). Le 
sang parasité est recueilli avec une pipette à la queue ou à l'oreille 
des animaux, ou encore par ponction du cœur; suivant la richesse en 
Trypanosomes, constatée au microscope, le sang est dilué dans une 
solution de citrate de potasse au centième, additionnée ou non 
de sérum physiologique. Le mélange ainsi obtenu est inoculé, à la 
dose d’un centimètre cube environ, dans le péritoine de Marmottes 
éveillées ou endormies, suivant les cas. 

L'incculation à l'animal éveillé est délicate et dangereuse, car 
il est très difficile de le fixer dans l'appareil à contention : mieux 
vaut le faire maintenir par un aide robuste et expérimenté, qui 
tienne d'une main la tête et les pattes de devant, de l’autre les pattes 
de derrière. L'expérience nous à du reste montré qu'il est inutile 
d'opérer sur la Marmotte éveillée, l’inoculation à une bête endor- 
mie, qu'on met au chaud et laisse s’éveiller aussitôt après, don- 
nant identiquement les mêmes résultats. 

Pour savoir si un animal en expérience est atteint ou non de 
trypanosomose, il suffit, en général, de rechercher les parasites 
dans une goutte de sang périphérique, à un grossissement de 400 à 
500 diamètres. Quand trois ou quatre examens successifs, prati- 
qués à 48 heures d'intervalle, se sont montrés négatifs, on peut 
tenir l'animal pour non atteint ou guéri. Pour plus de sûreté, nous 
avons fréquemment inoculé à des Souris du sang de nos Marmottes 
se trouvant dans ces conditions; les inoculations ont toujours été 
négatives et la suite des observations nous à toujours prouvé qu'ef- 
fectivement nos animaux étaient indemnes. Toutefois, il serait 
imprudent de généraliser une pareille méthode: on peut démontrer 
l'existence de Trypanosomes dans le sang du Cobaye, en inoculant 
ce sang à la Souris, alors que l'examen microscopique, pratiqué 
plusieurs jours de suite, n’a pas permis de trouver le moindre pa- 
rasite dans la circulation périphérique. 


Expériences avec Trypanosoma gambiense. 
ExPÉRIENCE I. — Marmotte inoculée le 12 janvier 1905 avec 2 ec. de 


sang citraté de Cercopithecus ruber, assez riche en Trypanosomes. L'ani- 
mal est éveillé au moment de l’inoculation. On le porte au Frigorifique et 


IMMUNITÉ DE LA MARMOTTE 307 


on l'y laisse sans nourriture, dans une chambre à — 3; il ne s'endort 
pas. 

La température oscille entre 25 et 30° pendant les quatre premiers jours; 
elle s’abaisse à 13° au 7° jour, mais remonte à 36° le 10° jour, puis oscille 
entre 36 et 31° les jours suivants. Le 15° jour, l'animal est porté dans une 
chambre à + 3°; la température se maintient entre 33 et 37° les jours 
suivants; le 30° jour, elle commence à s’abaisser progressivement; 
le 34° jour, la mort survient par une température de 15°. 

Les Trypanosomes se sont montrés dans le sang au 8° jour et s’y sont 
maintenus, sans être jamais nombreux; c’est seulement vers le 25° jour 
qu'on à fini par en trouver 10 et plus par champ microscopique. 
Le 29° jour, on en comptait 30 par champ. A cette date, la température ayant 
commencé sa chute progressive vers la mort, le nombre des parasites a 
suivi une diminution parallèle : il n’était plus que de 20 par champ au 
31° jour et seulement de 8 à 10 au 33° jour, au moment de la mort. 

Autopsie. — Poumons normaux. Péricardite à épanchement louche; 
fausse membrane entourant complètement le cœur. Foie muscade très 
gros, friable. Rate très hypertrophiée, environ dix fois plus grosse qu'à 
l'état normal. Reins normaux. Estomac rempli de sang; muqueuse 
gastrique parsemée de taches hémorrhagiques ulcérées. Intestin avec 
épanchement de sang et de bile; quelques taches congestives sur la mu- 
queuse; pas d'Helminthes. Pas d'hypertrophie des ganglions Iymphatiques. 
Vessie vide. 


Exp. II. — Marmotte inoculée le 12 janvier 1905, avec le même virus 
que la précédente. Portée au Frigorifique, dans une chambre à — 3°; on l'y 
laisse sans nourriture; elle ne s'endort pas. La marche de l'expérience 
est tout à fait conforme à la précédente; la température se comporte de 
même. L’animal est porté au 14° jour dans une chambre à + 3°; sa tempé- 
rature se maintient très élevée, pour subir, à partir du 26° jour, une chute 
progressive de 35°5 à 9°,aboutissant à la mort. Celle-ci survient le 13février, 
au 33° jour. 

Les Trypanosomes apparaissent le 8° jour et se maintiennent dans le 
sang jusqu'aux derniers jours, sans être jamais nombreux. Le 30° jour, 
on en compte 10 par champ microscopique, chiffre le plus élevé de ceux 
obtenus ; la chute de la température détermine la disparition progressive 
des parasites : on n’en trouve plus qu'un seul par champ microscopique, 
peu d'heures avant la mort. d 

Autopsie. — Poumons normaux. Péricardite purulente avec léger exsudat 
contenant des Trypanosomes; des fausses membranes. Cœur conges- 
tionné. Foie de couleur pâle. Rate hypertrophiée, environ trois fois plus 
grosse qu'à l’état normal. Reins normaux; légère adhérence de la capsule. 
Tube digestif normal, sauf de légères ecchymoses dans l'intestin grêle; 
pas d'Helminthes. Un gros ganglion hémorrhagique près du pylore. Ves- 
sie contenant environ » ec. d'urine légèrement albumineuse. 


308 R. BLANCHARD ET M. BLATIN 


Exp. III. — Marmotte témoin, inoculée le 12 janvier 1905, avec le même 
virus que les précédentes. Elle est réveillée et le reste constamment par 
la suite. On la garde au laboratoire et on la nourrit ; la chaleur, d’ailleurs 
très inégale de la nuit au jour, la tient éveillée. Les Trypanosomes se 
montrent dans le sang au 7° jour; ils y persistent 28 jours de suite, 
puis disparaissent. La température oscille entre 32 et38° et descend progres- 
sivement jusqu à 16° pendant les six derniers jours. La mort survient le 
19 février, au 38° jour. 

Autlopsie. — Animal très amaigri. Poumons sains. Péricardite purulente 
avec adhérences. Ascite purulente. Foie muscade. Rate énorme. Reins 
d'aspect normal. Intestin grêle sans Helminthes. Quelques ecchymoses 
dans le gros intestin. Système nerveux central d'aspect normal. 


Les Marmottes inoculées de la maladie du sommeil (Trypanosoma 
gambiense) et conservées au Frigorifique dans des chambres à — 3° 
et à + 3° dorment mal : leur sommeil est entrecoupé de longs 
réveils et d'agitation; elles contractent la trypanosomose et en 
meurent tout aussi sûrement et à peu près dans le même laps de 
temps que la Marmotte témoin, inoculée dans les mêmes condi- 
tions, mais conservée à l'état de veille, dans une chambre chauffée. 

Ce résultat, conforme à celui des anciennes expériences, met 
bien en évidence l’action néfaste des trop basses températures. Ces 
faits constatés d'une façon certaine, nous avons continué nos ino- 
culations dans les mêmes conditions, mais conservé nos animaux 
en expérience dans la cave à + 6°; nous avons déjà dit que, sauf 
de rares exceptions (exp. IV), elles s’y endorment très prompte- 
ment et continuent d'y dormir de la façon la plus régulière. Voici 
le résumé de quelques expériences de cette seconde série : 


Exp. IV. — Marmotte inoculée pendant le sommeil hibernal, le 
10 février 1905, avec 9 ce. de sang citraté de Marmotte infestée par le 
Tr. gambiense. La température est de 11° au moment de l'inoculation. L'ani- 
mal est placé à la cave. Le 11 au matin, il est réveillé et sa température 
est de 37°; il ne se rendort plus. Les parasites se montrent dans le sang 
au 5° jour. La mort survient le 28 février, au 18° jour. 


Exp. V.— Marmotte inoculée le 12 février, pendant le sommeil, sa tempé- 
rature étant de 14°; elle reçoit 3 cc. de sang citraté de Cebus capucinus très 
richeen Tr. gambiense (300.000 par millimètre cube). Portée à la cave, elle 
continue à dormir, avec une température moyenne de 9. Elle se réveille 
temporairement le 4° jour (température 33°) et le 9° jour (temp. 27°), mais 
se rendort promptement. Au 28: jour, elle n’a pas encore présenté de Try- 
panosomes dans le sang. 


IMMUNITÉ DE LA MARMOTTE 309 


Le 12 mars, au 28° jour, on la remonte au laboratoire ; on place sa cage 
à proximité du poële; elle ne tarde pas à se réveiller. On l'inocule alors 
avec 8 gouttes de sang citraté de Souris infestée par le Tr. gambiense. La 
Marmotte est gardée au laboratoire, oùelle reste éveillée. Le 18 mars, c'est- 
à-dire au 6° jour après cette nouvelle inoculation, les parasites se mon- 
trent dans le sang, où ils persistent jusqu'à la mort. Celle-ci survient le 
2 avril, 21 jours après la seconde inoculation. 


Exe. VI. — Marmotte inoculée le 2 mars, pendant le sommeil, sa tempéra- 
ture étant de 8’;on lui injecte 1 cc.5 de sang défibriné d'un Maki de Mada- 
gascar (Lemur rubriventer Is. Geoffroy) très riche en Trypanosomes (140.000 
par millimètre cube). L'animal est mis à la cave, où il continue à dormir; 
il se réveille temporairement le 7 mars, au 6° jour, mais ne tarde pas à 
se rendormir. Au 18° jour, il ne s’est encore montré aucun Trypanosome 
dans le sang. La Marmotte est alors remontée au laboratoire, où elle se 
réveille. On la nourrit; elle reste éveillée et continue à se bien porter 
Pendant plus de deux semaines, on procède à l’examer journalier du sang, 
sans jamais y trouver ancun parasite. Puis l'animal continue à vivre au 
laboratoire, sans présenter aucun malaise. 


Exp. VII. — Marmotte inoculée le‘12 mars, pendant le sommeil, sa tempé- 
rature étant de 8’:elle reçoit 1cc.de sang citraté d’une Souris très infestée 
de Tr.gambiense. Le jour de l’inoculation, la température monte à 24°; elle 
retombe à 9° le lendemain. L'animal continue à dormir et les parasites ne 
se montrent pas dans le sang. Le 1° avril, les Trypanosomes n’apparais- 
sant toujours pas, on remonte la Marmotte au laboratoire; elle s’y réveille 
et continue à se bien porter. 


Exp. VIII. — Marmotte inoculée à l’état de veille, le 18 mars, avec 2 ce. 
de sang de Rat citraté, contenant beaucoup de Tr. Lewisi. Il ne se produit 
aucune infection. 

En même temps que les Marmottes 4 et suivantes, on a toujours inoculé 
avec le même virus des Souris témoins; toutes ont été infectées. 


Exe. IX. — Marmotte inoculée du Tr. gambiense, le 4 mai 1905 ; éveillée 
au moment de l'inoculation. Reste éveillée et meurt le 21° jour. 


Exp. X. — Marmotte inoculée avec la précédente, pendant le sommeil. 


S'éveille au 4° jour et reste éveillée. Elle meurt le 25° jour. 


Exp. XI.— Marmotte inoculée en même temps et avec le même virus que 
les deux précédentes. Reste endormie. Vit encore le 11 juillet, sans avoir 
jamais présenté de Trypanosomes. 


Ces expériences démontrent, entre autres conclusions : 

1° que la Marmotte en sommeil hibernal jouit d'une immunité 
absolue à l'égard de Trypanosoma Brucci et de Tr. gambiense ; 

2° que cette immunité ne se prolonge pas au-delà du sommeil 


310 R, BLANCHARD ET M. BLATIN 


hibernal, l'animal réveillé étant immédiatement apte à se laisser 
infester par les trypanosomoses mêmes auxquelles il résistait pré- 
cédemment; 

30 que cette immunité ne semble pas être déterminée par un 
phénomène phagocytaire, mais par le phénomène physique de 
l’abaissement de la température du corps des animaux inoculés ; 

4° que cette immunité ne s'établit pas d'emblée : pendant les 
quatre à cinq premiers jours, et même jusqu'au neuvième jour, 
les Trypanosomes luttent contre le refroidissement et parviennent 
à se maintenir dans l'organisme, les animaux réveillés à ce moment 
contractant alors une infection ( spontanée » qui suit la marche 
normale. 

Il nous à paru nécessaire de contrôler ces conclusions par des 
expériences avec des Trypanosomes d'autre espèce, afin d'établir 
si l'immunité à frigore ainsi mise en évidence était générale, ou au 
contraire spéciale aux deux espèces étudiées jusqu'à présent. Nous 
nous proposions de rechercher également si, dans certaines condi- 
tions, l'immunité hibernale ne pourrait pas se maintenir à l'état 
de veille, puis enfin nous efforcer de guérir un animal éveillé, en 
pleine évolution de sa trypanosomose, en le ramenant à l'état d'hi- 
bernation. 

Pour ces expériences nouvelles, nous nous sommes adressés au 
Trypanosoma Evansi du surra, que le Professeur Nuttall, de Cam- 
bridge, a eu l’amabilité de nous fournir. Nous avons également eu 
recours au virus d'El Debab, que nous devons à l'obligeance du 
Dr Ed. Sergent. Nous adressons à ces deux savants collègues nos 
plus sincères remerciements. 


Expériences avec Trypanosoma Evansi. 


Ex». XII — Marmotte en sommeil, inoculée, le 8 janvier 1906, avec du 
sang de Souris très riche en Trypanosomes. Est portée à la cave à + 6° 
et y reste endormie. Le 10 janvier, éveillée ; pas de parasites dans le sang. 
Le 13, endormie; pas de parasites. Le 15, au septième jour, éveillée; 
rares parasites. Le 17, éveillée; parasites plus nombreux. Le 19, toujours 
éveillée; parasites très nombreux, mais presque tous immobiles; l'animal 
est très malade. Le 22, sommeil; les parasites ont disparu. Le 24, mort, 
au 16° jour. 

Autopsie. — Estomac très dilaté par une énorme quantité de sang 
noirätre; muqueuse très congestionnée, avec de petites ulcérations super- 


IMMUNITÉ DE LA MARMOTTE pla 


ficielles. Intestin grêle sans Helminthes; de petites hémorragies de la 
muqueuse. Rate énorme. 


Exe. XIII. — Marmotte témoin, endormie, inoculée en même temps et 
avec le même virus que la précédente. On la conserve au chaud, au labo- 
ratoire: elle se réveille très promptement et reste éveillée par la suite. 
Le 11 janvier, au 3° jour, pas de Trypanosomes dans le sang. Le 13, para- 
sites assez nombreux. Le 15, parasites très abondants; l'animal semble 
malade. Le 17, au 9° jour, mort. 

Autopsie. — Rate énorme. Pas d'Helminthes dans l'intestin grêle. 


Exp. — Marmotte endormie, inoculée, le 26 février 1906, avec du 
sang de Souris très riche en Trypanosomes On la porte immédiatement à 
la cave, où elle continue à dormir. Le 1° mars, dort bien ; pas de parasites 
dans le sang. Le 5 mars, même état. Le 8, même état. On remonte alors 
l'animal au laboratoire, où il se réveille rapidement et reste ensuite 
éveillé. Le 13 mars, pas de parasites. Le 31, toujours le même état. Le 
3 avril, encore le même état ; on inocule sans résultat quelques gouttes de 
sang de notre Marmotte à une Souris. Le 11 avril, animal toujourséveillé, 
toujours bien portant. Le 30 avril, au 63° jour, même état. 


Exe. XV. — Marmotte témoin, endormie, inoculée le 26 février 1906, 
en même temps et avec le même virus que la précédente. On la met 
au chaud au laboratoire; elle s'y réveille et reste ensuite éveillée. 
Le 1° mars, éveillée ; pas de Trypanosomes dans le sang. Le 2, 
même état. Le 3, toujours éveillée; un petit nombre de parasites, 5 ou 6: 
par préparation; l'animal est porté'à la cave. Le 5, toujours éveillé; para- 
sites abondants. Le 8, toujours éveillé, parasites beaucoup plus rares. 
Le 10 mars, mort, au 12° jour. 

Autopsie. — Foie très gros, rate énorme. Pas d'Helminthes dans l’in- 


testin grêle. 


Expériences avec le virus d'El Debad. 


Exp. XVI — Marmotte endormie, inoculée, le 6 janvier 1906, avec du 
sang de Rat contenant le Trypanosome d'El Debab; on la met au chaud, 
où elle se réveille très promptement. Le 10, éveillée ; parasites assez 
abondants dans le sang (10 par champ microscopique). Le 15, toujours 
éveillée ; les Trypanosomes sont abondants; l'animal est descendu à la 
cave à + 6°. Le 17, encore éveillé ; parasites abondants. Le 19, même 
état. Le 20, somnolence; parasites disparus. Le 22, même état. Le 25, 
endormi; pas de parasites. Le 30, même état. Le 2 février, même état; 
aucun parasite dans le sang depuis le 20 janvier, c'est-à-dire depuis 
1% jours: l’animal doit donc être considéré comme guéri. Le 3 février, 
trouvé mort dans sa cage. 

Autopsie. — Pas de parasites dans le sang. Rate normale, foie normal, 
ce qui exclut l'hypothèse de mort par trypanosomose. 


DH, R. BLANCHARD ET M. BLATIN 


Exp. XVII. — Marmotte inoculée le 6 janvier 1906, exactement dans les 
mêmes conditions que la précédente. Mise au chaud; se réveille. Le 10, 
éveillée ; Trypanosomesabondants dans le sang. Le 15, même état ; l'animal 
est descendu à la cave. Le 17, encore éveillé; parasites abondants. Le 19, 
profondément endormi; parasites peu nombreux. Sacrifié par erreur, ce 
jour-là : les Trypanosomes avaient beaucoup diminué de nombre et étaient 
manifestement en voie de disparition. 


Exp. XVIII. — Marmotte inoculée le 6 janvier 1906, dans les mêmes con- 
ditions que les deux précédentes. Mise au chaud ; se réveille. Le 10, éveil- 
lée ; Trypanosomes abondants. Le 15, même état. Le 17, même état. Le 20, 
pas de parasites dans le sang ; animal engourdi, semblant très malade; on 
le met auprès du feu. Le 24, Marmotte éveillée; Trypanosomes assez 
abondants. Même état jusqu’au 21 février, avec des variations dans l’abon- 
dance des parasites. Le 23, animal toujours éveillé; parasites peu abon- 
dants et presque tous immobiles. Le 24, au 49° jour, mort. 

Autopsie. — Pas de Trypanosomes dans le sang du cœur. Rate énorme. 
Foie énorme et très graisseux. Pas de lésions hémorragiques de l’esto- 
mac. Pas d'Helminthes dans le tube digestif. 


Exp. XIX. — Marmotte inoculée le 6 janvier 1906, avec le même virus 
que les trois précédentes, maïs portée endormie à la cave + 6°, où elle 
continue à dormir régulièrement. Jusqu'au 21 janvier, examen presque 
journalier; dort; pas de Trypanosomes dans le sang. Le 22, éveillée; 
pas de parasites. Du 24 janvier au 4 février, dort; pas de parasites. Le 
» février, éveillée; pas de parasites ; on la remonte au laboratoire, où elle 
se réveille. Du 8 février au 15 mars, méme état. Le 19, toujours éveillée, 
semble très malade ; pas de Trypanosomes. Le 20, mort, au 73° jour. 

Autopsie. — Rate normale, ce qui exclut l’idée de trypanosomose. Esto- 
mac etintestin grêle normaux; pas d'Helminthes. Abondante hémorra- 
gie intra-cæcale. Le foie porte une tumeur volumineuse, qui suffit à ex- 
pliquer la mort. 


Exp. XX. — Marmotte inoculée, le 6 janvier 1906, avec le même 
virus que les quatre précédentes; portée endormie à la cave, où elle con- 
tinue à dormir régulièrement. Le 10, dort; pas de Trypanosomes. Le 13, 
même état. Le 15, éveillée ; pas des parasite. Le 17, dort ; quelques rares 
Trypanosomes. Le 19, dort; pas de parasites. Le 22, éveillée ; pas de para- 
sites. Du 2% janvier au 4 février, dort; pas de parasites. Le 6 février, 
éveillée; pas de parasites. Du 8 au 14, dort; pas de parasites. On la monte 
au chaud, au laboratoire; elle se réveille. Du 15 février au 11 avril, 
éveillée, bien portante ; pas de Trypanosomes. Le 11 avril, on cesse l’ob- 
servation, au 95e jour. 


Exp. XXI. — Marmotte inoculée le 6 janvier 1906, avec le même virus 
que les cinq précédentes; portée au grenier, où elle s’éveille tout de suite. 
Le 10, éveillée ; Trypanosomes en abondance dans le sang ; on porte l'animal 


à , 7 \ 
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. 


IMMUNITÉ DE LA MARMOTTE UE 


à la cave. Le 13, éveillé; parasites abondants. Le 15, sommeil profond; 
parasites beaucoup plus rares. Le17, sommeil profond; parasites très rares 
(un seul par champ microscopique). Du 19 janvier au 12 février, dort; 
pas de parasiles; on remonte l'animal au laboratoire, où il se réveille. 

Du 15 au 19 février, éveillé ; pas de parasites. Le 19, on inocule son 
sang à une Souris, qui reste indemne. Du 20 au 26, éveillé; pas de para- 
sites. Le 26, on fait une nouvelle inoculation de sang de cette Marmotte 
àune Souris, qui reste indemne. 

Le même jour, on réinocule la Marmotte avec le virus d'El Debab pro- 
venant du Rat. L'animal est toujours au chaud, au laboratoire; il reste 
éveillé. Le 1% mars, éveillé; on trouve dans le sang un seul Trypanosome. 
Le 2, éveillé; très rares parasites. Le 3, éveillé; parasites assez abon- 
dants; la Marmotte est reportée à la cave. Le 5, encore éveillée; parasi- 
tes nombreux. Le 8, toujours éveillée; parasites moins nombreux. Le 10, 
endormie; parasites aussi nombreux. Le 13, dort; parasites encore nom- 
breux. Du 15 au 2%, dort; pas de parasites; on remonte l'animal au labo- 
ratoire, où il se réveille. Du 24 mars au 3 avril, éveillé; pas de parasites ; 
on fait une injection de sang de Marmotte à une Souris, qui reste indemne. 
Du 3 au 30 avril, animal toujours éveillé; se nourrit bien, en parfaite 
santé; pas de parasites dans le sang. À cette dernière date, on cesse l’ob- 
servation. 


Exe. XXII — Marmotte endormie, inoculée le 3 février 1906, avec du 
virus d'El Debab provenant d'une Souris ; portée à la cave, où elle continue 
à dormir. Du 5 au 23, dort; pas de parasites. Le 23, remontée au labora- 
toire, où elle se réveille. Du 24.février au 25 mars, éveillée; se nourrit 
bien ; pas de Trypanosomes. Le 28, mort. 

Autopsie. — Rate normale, ce qui exclut le diagnostic de trypanosomose. 
Foie congestionné. Poumon congestionné et hépatisé ; pneumonie massive 
ayant causé la mort. Pas de parasites intestinaux. 


Exp. XXIIL — Marmotte endormie, inoculée le 23 février 1906, avec 
quelques gouttes de sang de Marmotte pauvre en Trypanosomes. L'ani- 
mal est conservé au laboratoire, où il s'éveille promptement. Du 24 fé- 
vrier au 1* mars, éveillé; pas de parasites. Le 2 mars, éveillé; parasi- 
sites assez nombreux (6 par champ microscopique). Le 3, éveillé; parasi- 
tes très abondants (100 par champ); l'animal est descendu à la cave. Du 
5 au 18 mars, toujours éveillé. Le 5, parasites très abondants (100 par 
champ) : le 8, très peu nombreux (2 à 3 par champ) ; le 10, très rares; le 
13, parasites plus nombreux que les globules; le 15, encore plus nom- 
breux ; le 17, très abondants. Le 21, animal endormi, refroidi; pas de para- 
sites. Le 24, mort. 

Autopsie. — Rate énorme. Gros foie. Légère hémorrhagie stomacale; des 
ecchymoses sur la muqueuse. Pas d'Helminthes. 


314 R. BLANCHARD ET M. BLATIN 


Conclusions. 


On peut tirer de ces expériences les conclusions suivantes : 

1° La Marmotte éveillée n’est pas sensible au Trypanosoma Lerwisi; 
toutefois, l'unique expérience que nous avons faite avec ce virus 
mérite confirmation. 

2 La Marmotte éveillée est à coup sûr sensible au Tr. Brucei, au 
Tr. gambiense, au Tr. Evansi, ainsi qu'au Trypanosome d'El Debab, 
si faible que soit la quantité de virus inoculée. 

3° Toute Marmotte éveillée, inoculée avec ces Trypanosomes, est 
irrémédiablement condamnée à mort; les parasites apparaissent 
dans le sang et deviennent chaque jour plus nombreux. La maladie 
expérimentale a toujours une marche très rapide. 

4° Toute Marmotte dans le sang de laquelle est apparu un seul 
Trypanosome et qui ne s'endort pas est fatalement condamnée. 

5° Toute Marmotte dont le sang contient des Tr. gambiense ou des 
Tr. Evansi, même en faible quantité, ne s'endort plus, alors même 
qu'on la place dans les conditions les plus favorables au sommeil. 
Ce résultat, constant dans nos expériences, peut être subordonné 
à la virulence des parasites employés. 

6° La Marmotte en état d'hibernation présente une immunité 
absolue envers les quatre Trypanosomes énumérés ci-dessus. 

7 L'inoculation est ordinairement négative, quand la Marmotte 
ne se réveille qu'au bout de quatre à cinq jours; toutefois, ce délai 
peut être plus long, dans certains cas, et aller jusqu'au neuvième 
jour. 

8 L'inoculation est ordinairement positive, quand l'animal se 
réveille avant le quatrième ou cinquième jour. 

90 Les parasites ne se sont donc pas rassemblés dans quelque 
organe profond, tel que la rate, pour s'y maintenir en vie ralentie, 
repasser dans le torrent circulatoire et s’y multiplier, quand la 
température du corps devient plus favorable. 

100 La Marmotte dont le sang contient des Trypanosomes d'El De- 
bab, même en abondance, peut, en général, s'endormir et guérir, 
si on la met dans les conditions favorables au sommeil. Une fois 
guérie, on peut l'inoculer de nouveau avec le même virus, la ré- 


Do 
VE 


IMMUNITÉ DE LA MARMOTTE 319 


veiller, attendre que ïes Trypanosomes soient nombreux dans son 
sang, puis la guérir de nouveau par le même procédé. 

11° Les animaux qui ont été inoculés à l’état de sommeil et chez 
lesquels le virus ne s’est pas développé et même ceux qui, ayant 
eu des Trypanosomes en abondance dans le sang, en ont guéri par 
retour à l'hibernation, ne présentent pas la moindre immunité vis- 
à-vis des trypanosomoses en général ou vis-à-vis du même virus, 
celui-ci évoluant chez eux comme chez des animaux neufs. 

12° Les Trypanosomes inoculés à l'animal endormi ne meurent 
pas très vite; ils sont capables de résister de quatre à neuf joursau 
refroidissement, en milieu lymphatique ou sanguin, et de causer 
ultérieurement l'infection, si l'animal vient à se réveiller dans les 
délais voulus. 

13° Dans ce cas, l'infection part du moment du réveil, l'animal 
inoculé dans ces conditions étant en retard sur les témoins (main- 
tenus éveillés dès le moment de l'inoculation) d’une période égale 
à la durée de sa torpeur. s 

440 La fin de la maladie estordinairement annoncée par une chute 
progressive de la température. Ce refroidissement s’observe égale- 
ment chez l'Homme dans la maladie du sommeil; il résulte de 
l’action exercée sur les centres nerveux par les toxines éliminées 
par les Trypanosomes et accumulées dans le sang. 

15° Quand ce refroidissement est très accentué et de longue durée, 
les Trypanosomes disparaissent du sang, où ils étaient jusque-là 
très nombreux : ils sont tués soit par les toxines elles-mêmes, soit 
par le refroidissement progressif du corps. 

16° Chez la Marmotte en hibernation, les toxines font défaut ; ce 
n'est donc pas une auto-intoxication qui empêche les Trypanoso- 
mes de se multiplier. L'hypothèse de la destruction des Trypano- 
somes par leurs propres toxines, à la période algide de la maladie 
expérimentale, n’est donc pas soutenable. La seconde hypothèse, 
celle de la mort par refroidissement, reste seule debout. 

17 Cette même hypothèse donne la seule explication rationnelle 
de l’immunité de la Marmotte en hibernation: les Trypanosomes 
sont inaptes à se multiplier dans le sang de l'animal hibernant et 
finissent par y mourir, à cause de la basse température à laquelle 
ils sont soumis. 

18° Il n’est pas nécessaire, d'ailleurs, que la température soit 


3176 R. BLANCHARD ET M. BLATIN 


très basse ; le point critique, au-dessous duquel les parasites ne 
peuvent vivre dans le sang, est situé aux environs de 160. 

19° L'immunité dont la Marmotte en hibernation jouit à l'égard 
des trypanosomoses tient donc essentiellement à l'hypothermie. Les 
phagocytes n'y prennent qu'une part secondaire; l’hypertrophie 
de la rate indique cependant qu'ils ne sont pas inactifs dans les try- 
panosomoses ; leur rôle sera ultérieurement défini. 

20° A l'autopsie des Marmottes mortes de trypanosomose, on 
observe toujours une hypertrophie énorme de la rate, souvent aus- 
si du foie. On trouve aussi assez fréquemment des lésions hémor- 
rhagiques du tube digestif. 


La Marmotte en hibernation résiste à la trichinose. 


L'un de nous a eu fréquemment l’occasion de disséquer des Mar- 
mottes tuées à la chasse, dans le courant des mois d'août et de sep- 
tembre, c'est-à-dire au moment où ces Rongeurs sont en pleine ac- 


tivité : tous les animaux disséqués avaient dans l'intestin de très 


nombreux parasites, notamment des Ctenotænia marmotae (Krôlich) 
Or, les Marmottes en hibernation n'ont jamais aucun Helminthe dans 
l'intestin. 

Ce fait remarquable a déjà été signalé par l'un de nous (1), d'a- 
près l'examen d'une trentaine de Marmottes d'expérience. Depuis 
lors, cetexamen a été poursuivi méthodiquement sur toutes les Mar- 
mottes en hibernation que nous avons sacrifiées. Le nombre total 
des animaux examinés à ce point de vue spécial dépasse une cen- 
taine : chez aucun d'eux, il n'a été possible de trouver des para- 
sites intestinaux, à l'exception de Némnatodes à l'état larvaire en- 
. kystés dans la paroi de l'intestin grêle et du cæcum. 

L'absence d'Helminthes chez la Marmotte en hibernation est done 
un fait constant. Il ne peut s'expliquer que par l'engourdissement 
des parasites d'été, lors de la chute de la température de la Mar- 
motte qui les héberge : cet engourdissement fait cesser leur adhé- 
rence à la muqueuse intestinale, les rend inertes et permet leur ex- 
pulsion hors de l'intestin, grâce aux mouvements péristaltiques, en 
même temps que celle des derniers bols fécaux. 

Cela étant, il nous à paru intéressant de rechercher d'une façon 


(1) R. BLancuarD, Loco citato, p. 1124. 


À 
Æ 
PR 


IMMUNITÉ DE LA MARMOTTE 311 


comparative de quelle manière la Marmotte se comporte envers 
l’infestation helminthique, pendant l’état de veille et pendant l'hi- 
bernation. Dans ce but, nous avons choisi la Trichine (Trichinella 
spiralis). Sur un Rat trichiné, nous prélevons un fragment du dia- 
phragme ou de la langue; nous dilacérons avec des aiguilles, nous 
délavons dans l’eau distillée, puis nous aspirons cette pulpe dans 
un tube portant deux ampoules. Nous introduisons par l’æsophage, 
jusque dans l'estomac d'une Marmotte endormie, une sonde de 
Nélaton en caoutchouc rouge; l’un des bouts de notre tube est alors 
adapté à la sonde, l’autre bout au tuyau d’une soufflerie de thermo- 
cautère, qui nous donne une pression suffisante pour chasser la 
pulpe dans l'estomac de l'animal. Nous avons obtenu ainsi les ré- 
sultats suivants : 


Exp. XXIV. — Marmotte endormie, infestée le 9 décembre 1905. On la 
garde au laboratoire ; elle s'éveille et reste éveillée par la, suite. Elle est 
sacrifiée le 17 janvier 1906, au 39° jour. 

Autopsie. — Kystes de Trichine assez abondants, notamment à la lan- 
gue et au diaphragme. 


Exp. XXV. — Marmotte endormie, infestée le 9 décembre 1905. On 
la porte à la cave, où elle continue à dormir. Le 8 janvier 1906, au 31° jour, 
on la remonte au laboratoire; elle s'éveille et reste éveillée par la suite. 
On la sacrifie le 25 janvier, au 47° jour. 

Autopsie. — Pas trace de kystes de Trichine. 


Exe. XXVI. — Marmotte endormie, infestée le 20 janvier 1906. Dort 
jusqu'au 12 février; s’éveille alors pendant trois jours, puis se rendort 
jusqu'au 23. Se réveille le 23 (au 34° jour) et reste éveillée. Sacrifiée le 24 
mars, 63° jour après l’infestation et 29° jour après le réveil. 

Autopsie. — Pas trace de kystes de Trichine. 


Malgré le petit nombre de ces expériences, nous croyons pouvoir 
en tirer les conclusions suivantes : 

1° La Marmotte à l’état de veille se laisse infester par la Tri- 
chine ; 

20 La Marmotte à l'état de sommeil hibernal est réfractaire à l’in- 
festation par la Trichine ; 

90 Les Trichines ingérées pendant l'hibernation, qu'elles restent à 
l'état larvaire ou qu'elles passent à l’état adulte, fait qui n’a pas été 
vérilié, survivent moins de 30 jours dans l'intestin. 


Archives de Parasitologie, XI, n° 3, 1907. 25 


318 R. BLANCHARD ET M. BLATIN 


Immunité de la Marmotte envers le Spirochæta Duttoni. 


Grâce à l’obligeance de M. le Dr Levaditi, nous avons pu expéri- 
menter l'action du virus de la fièvre des Tiques (Spirochæta Duttoni) 
sur la Marmotte, tant à l'état de veille qu'à l’état de sommeil hi- 
bernal. Notre virus, injecté à la Souris, donnait toujours une ino- 
culation positive. 

Trois Marmottes à l’état de veille ont été inoculées. Le résultat 
à été négatif. Les animaux n'ont présenté aucun signe de maladie 
et l'examen du sang, répété quinze jours de suite, n'a jamais per- 
mis d'observer le moindre Spirochète. 

Trois Marmottes en hibernation, inoculées avec le même virus, 
ont donné le même résultat. Deux de ces animaux, réveillés au bout 
de quinze jours et maintenus en éveil, ont été réinoculés, également 
sans résultat. 

La Marmotte, tant à l’état de veille qu'à l’état d'hibernation, est 
donc réfractaire à la spirochétose causée par le Spirochæta Duttoni. 


L 


" 


PRE 
es à Parasitologie, XI. 1907: 


PAfob dis. | LU AUNE Arai Laptg 
Tania Dlaichardi Mot. 


UNA NUOVA TENIA DELLA TALPA 


PEL 


D' PASQUALE MOLA 


(TavozA IV) 


Nel marzo dello scorso anno trovai nell’intestino tenue di alcune 
Talpe (Talpa europæa), catturate nelle campagne della provincia di 
Napoli, pochi esemplari di Cestodi di piccole dimensioni. 

Dallo studio fatto su i vari esemplari e frammenti, provenienti 
dai diversi individui ospitatori, di sesso e località differenti, mi è 
dato rilevare che essi appartengono ad una sola specie elmintica, 
specie che, per una somma di caratteri, deve includersi nella fa- 
miglia delle Tæniadæ, sub-famiglia Cystotæniæ. 

L'aspetto generale di questa nuova specie di Tenia armata si 
rileva dalla fig. 3: uno strobilo à nastro, lungo 25-30 mm, quasi 
uniformemente largo da un estremo all'altro, costituito da un 
numero abbastanza considerevole di proglottidi, relativamente a 
tutta la lunghezza del Verme, e sormontato in avanti da uno scolice 
piccolo o provvisto di un brevissimo collo. 

La scolice (fig. 1 e 2) ha l’aspetto di un pomo da bastone, sferico, 
con 4 ventose circolari, diamentralmente opposte erilevate. In alto, 
al centro della convessità, si osserva un peduncolo a guisa di clave 
e lungo quanto un terzo dello scolice, retrattile in una cavità pro- 
dotta dallo invaginarsi del peduncolo. Verso l’apice di questi, à 
guisa di diadema, trovansi attaccati a bilanciere gli uncini, i quali 
hanno la forma di una} (fig. 13). I collo è cortissimo, iniziandosi la 
segmentazione, netta e precisa, appena dopo lo scolice ; 1 primi 
articoli sono più larghi che lunghi, poscia la lunghezza predomina 
sulla larghezza : cosi quelle pregne d'uova mature hanno una 
forma rettangolare con i lati maggiori lateralmente. 

ORGANI GENITALI. — La aperture genitali, marginali e irregolar- 
mente alterne, sboccano insieme, la maschile in alto e dorsal- 
mente, la femminile in basso e ventralmente, nel fondo di un antro 
o cloaca genitale, che si apre all'esterno per una piccola apertura, 
stre ta e arrotondata, la quale si trova superiormente a ciascuna 


380 PASQUALE MOLA 


proglottide e propriamente poco al disotto della linea di demarca- 
zione delle proglottidi. L'antro, di piccole dimensioni, è costituito 
da un infossamento del tegumento esterno (ectoderma). Non ci ha 
muscoli propri per permettere il dilatarsi o il restingersi del suo 
orifizio ; poichè i muscoli dell'orifizio atriale sono quelli stessi che 
longitudinalmente e circolarmente costituiscono il sacco musco- 
lare del Cestode. In un preparato di tagli trasversi mi è dato osser- 
vare il pene protratto nella vagina ; ci fa vedere che esiste in 
detto Cestode un autofecondazione (fig. 10). 

Organi maschili. — Gli organi genitali maschili sicompongono 
di un certo numero di testicoli, del vaso deferente e dell’organo 
copulatore, pene. Gli abbozzi di tali organi incominciano à compa- 
rire ben presto : nelle prime proglottidi dopo il corto collo. 

I 'testicoli, di forma sferica nelle proglottidi giovani, sono co- 
stituiti da cumuli di cellule rotondeggianti con nucleo distinto e da 
una membrana involgente. Man mano che le proglottidi si avanzano 
nella catena, queste sfere divengono ovali, le cellule si riducono e 
i cumuli nucleari si concentrano verso il centro di ciascuna 
vescicola testicolare, lasciando un vuoto occupata dai filamenti 
spermatici che si aggomitolano in ciascuna vescicola testicolare. 
I testicoli non sono tanti numerosi, essi sono situati ventralmente 
a ciascuna proglottide in un piano o in due, a secondc che gli 
organi genitali femminili lasciano più o meno spazio, occupano la 
zona centrale della proglottide, e non oltre passano i dotti escre- 
tori, mantenendosi sempre nel sacco muscolare longitudinale. 

La membrana vescicoiare, inviluppato che ha le cellule sperma- 
tiche, si restringe formando un dottolino, canalicolo efferente, breve 
e sottile a pareti esilissime, che si unisce a quello del testicolo 
prossimo, dando cosi luogo ad un canalicolo di maggior diametro, 
il quale à sua volta, si fonde con un canalicolo omologo, forman- 
done uno di terzo ordine, più grosso, e cosi di seguito fino alla 
formazione di dottolini efferenti principali ognuno corrispondente 
all’insieme di un certo numero di masse testicolari (fig. 11). Questa 
confluenza avviene ventralmente ad un terzo di ciascuna proglot- 
tide e propriamente all’altezza della parte ristretta del ricettacolo 
seminale, in un deferente unico di calibro molto pronunziato e 
molto lungo, il quale dopo un certo numero di piccole anse penetra 
nella tasca del pene formando il canale eiaculatore, il quale, a sua 


UNA NUOVA TENIA DELLA TALPA 981 


volta, sbocca all'apice del pene, attraversandolo per tutta la sua 
lunghezza. Le pareti del canale deferente sono formate da una fina 
membrana cuticulare interna ricoverta da uno strato di cellule epi- 
teliali poligonali possedendo un nucleo arrotondato che si colora 
fortemente con il paracarminio e con l’ematossilina. 

Il pene, di forma cilindrica, è relativamente molte lungo, le sue 
pareti esternamente presentano una fitta pelatura costituita da un 
gran numero di setole, quelle stesse che si riscontrano su tutta la 
superficie cuticulare del Cestode (fig. 7-14). Non mancano gli strati 
musColari, che ci hanno tutti gli attributi della potente musco- 
latura della cuticula. Considerando percid la struttura del pene con 
i rapporti dell’antro genitale, si è facilmente indotti alla conclu- 
sione che il pene debba ritenersi come invaginazione delle pareti 
atriali, giusto quanto ho detto altrove (1). 

In un preparato in toto (fig. 7) mi è dato oservare il pene svagi- 
nato, cid è dovuto alla compressione subita dal preparato; poichè 
in tale Cestode il pene si protrae nella vagina senza fuori uscire 
dall'orifizio atriale.come vedesiin un preparato di sezione trasversa 
(fig. 10). Il completosvaginarsi del pene esternamente porta l'occlu- 
dersicompleto dell’apertura dell'atrio; anzi i muscoli longitudinali, 
circolari all'apertura, sono forzati dal protrarsi di quello.Il pene in 
vaginato con le anse del dotto eiaculatore sono contenute nella 
tasca del pene, questa ha forma di fiasco con il collo verso l’aper- 
tura atriale ed è situato superiormente al ricettacolo seminale. Le 
pareti sono formate da due strati : una, esterno, di cellule poligo- 
nali con grossi nucleï, l’altro muscolare. 

La tasca, che rimane indifferente in tutti i movimenti di estro 
flessione ed introflessione del pene stesso, è, a differenza di questo, 
una formazione del parenchima, La fig. 9 mostra la tasca del pene 
con il pene, il dotto eiaculatore e il deferente di un preparato per 
dissezione. 

Organi femminili. — L'ovario è situato dorsalmente in un piano 
ravvicinato al sacco muscolare,occupando quasi tutta la proglottide 
da quel lato. Esso si presenta come un organo glandolare formato 
da ux certo numero di tubi piriformi. Questi tubi convergono verso 
un punto centrale, l’entrata dell’ovidotto, dando l’aspetto di un ven- 


(1) P. Mora, Su di un Cestode del Carcharodon Rondeleti. Archivio zo0olo- 
gico, 1903. 


382 PASQUALE MOLA 


taglio. I tubi ovar,ci, al numero di circa una ventina, sono in for- 
ma d’otre; il loro diametro e la loro lunghezza è varia: essi sono 
nettamente seperati gli uni dagli altri da una esile membrana. 
Nell'interno di ciascun tubo ovarico si trovano le cellule uova; 
queste sono di forma sferica e sono costituite da una massa proto- 
plasmatica chiara, senza struttura definita e da un nucleo con nu- 
cleoli, che si colorano intensamente, sia col paracarminio che con 
l’ematossilina. 

Nella metà, e centralmente a ciascuna proglottide, si forma dal 
confluire dei tubi ovarici l'ovidotto, il quale con un decorso obli- 
quamente trasversale si porta dal lato dorsale al lato ventrale, pas- 
sando al disopra della vagina e formando una curva sinusoide. 
Dorsalmente riceve la sbocco della vagina; indi, a brevissima dis- 
tanza da questa, riceve lo sbocco del vitellodutto; e proseguendo 
nel suo cammino discendente va a formare l’utero, che trovasi pos- 
teriormente alla proglottide (fig. 6). Nell'ultima porzione dell'ovi- 
dotto, appena dopo lo shocco del vittellodutto, si osserva che il cali- 
bro è alquanto più grosso inviluppato da rade cellule di dubbia 
forma. Tale ingrossamento si potrebbe interpetrare per ootipo, 
come le celluleinviluppante, glandole del guscio; per sia l’uno che 
le altre, non è ben chiaro dal materiale da me posseduto (fig. 6 e 8). 

Dopo tale ingrossamento dell'ovidotto si osserva posteriormente 
a ciascuna proglottide giovane un Canale impari, di forma cilin- 
droide, con un percorso quasi rettilineo, disposto trasversalmente 
e occupante tutta la larghezza della proglottide, sempre compreso 
tra i tronchi longitudinali degli organi escretori. Tale canale è 
l’utero; il quaie è al disotto di tutto gli organi genitali, in mezzo, a 
guisa di tubo, parallelamente alla divisione della proglottide 
(fig. 5, 6 e 8). 

La struttura dell'utero, nelle giovani proglottidi, è semplice, le 


pareti sono formati da una quantità di cellule rotonde o poliedriche, 


con membrana indistinta e poco protoplasma; i nuclei sono visi- 
bilissimi perché, con le varie colorazioni da me usate, si tingona 
fortemente. Queste cellule dell’utero sono cosi addensate da dare 
nel loro insieme un netto contorno al tubo uterino, il quale ha 
l’aspetto di un nastro che va da un lato all'altro della proglottide. 

Cominciando ad arrivare le uova nell'utero, le pareti di questi 
vanno mano distendendosi dovuto all pressione esercitato dalle 


jy ii) 


UNA NUOVA TENIA DELLA TALPA 383 


uova che provengono dall’ovidotto. Cosi, nelle proglottidi mature, 
l'utero finisce per occuparla tutta intiera, lasciando solo lo spazio 
al ricettacolo seminale e la tasca del pene, le quali si trovano 
addossate, entrambi, verso una faccia. Le numerose cellule disposte 
irregolarmente e sù più strati intorno al giovane utero, vanno à 
poco à poco ad orientarsi, disponendosi luna accanto l’altra : cosi 
le pareti uterine rimangonocostituite da uno strato delle anzidette 
cellule e da un altro, che forma l’esile epitelio. 

La vagina ha origine dall'antro genitale, un poco al disotto 
dell'orifizio maschile e ventralmente. Essa si porta dorsalmente 
slargandosi in un ricettacolo seminale considerevole à guisa di 
fiasco a lungo collo. Al fondo di tale slargamento la vagina si re- 
stringe in uno stretto dotto, il quale traversando al disotto dell’o- 
vidotto e arcuandosi, dal dorso al ventre, forma un arco con la 
convesità che guarda la faccia dorsale. À circa un terzo, prima di 
terminare la proglottide, la vagina sbocca nell'ovidotto, punto 
innanzi detto (fig. 18-23). Grosse cellule poligonali, con nuclei 
visibili, costituiscono le pareti esterne della vagina; a questi 
s'aggiunge una membrana cuticolare sottoposto allo strato cêl- 
lulare : il tutto forma le pareti della vagina. 

Le glandole del vitellogeno sono formate da un ammasso cellu- 
lare, che nell'insieme dà l’aspetlo di un rene. Quest’ammasso si 
trova ventralmente all'ovario e propriamente all'altezza del 
confluire i tubi ovariei ed è separato dagli altri organi merce un 
esile membrana, la quale involge internamente le numerosissime 
cellule vitelline a guisa di sacco. Dall’apertura di tale sacco parte 
un corto dottolino, il vitellodotto imparti, il quale con un percorso 
a S e obliquo indietro, sbocca nel punto innanzi detto, avanti 
l’'ammasso delle cellule glandolari del guscio. 

STRUTTURA DELLE PARETI DEL CORPO. — [Il tegumento (ectoderma) 
del parassita in esame si presenta liscio, uniforme, continuo ; esso 
non differisce per nulla da quello degli altri Cestodi, solo si ris- 
contra una fitta peluria, di aspetto setoloso, la quale è costuita 
da setole, ben pronunziate, su tutta la superficie del corpo dell 
animale. Queste setole sono infisse nella cuticula e riposano 
sulla membrana basale; a forte ingrandimento si presentano 
coniche con l’apice acuto e sensibilmente ricurvo, con l'ematos- 
silina si colorano intensamente. Il tegumento (ectoderma) costi” 


334 PASQUALE MOLA 


tuito dai due strati, cuticula e membrana basale, poggia sul 
sacco muscolare cutaneo. Questo costituito da un sottile strato di 
fibre circolari, e da un potente sistema di fibre longitudinali, 
raccolte in fascetti decorrenti per tutta la lunghezza dello strobilo 
e constituenti nell'insieme uno strato molto spesso (fig. 8). 

I numerosi fasci di fibre longitudinali à misura che risalgono 
prossimalmente, tendono, nel collo a convergere verso la zona cen- 
trale del parenchima, enello scolice, penetratovi, divergono in tutti 
i sensi. Un certo numero di tali fibre si raccoglie in 5 robusti fa- 
scetti : 4 prendono attacco alle ventosee propriamente alla superficie 
dorsale delle stesse; uno, proseguendo verso l’apice, si porta al 
peduncolo. Ivi, arrivato, divérge in tutti i sensi, mandando Îa- 
scetti di fibre a ciascuno degli uneini che trovansi attacati a bilan- 
cieri verso l’apice, a guisa di diadema Tali muscoli sono quelli 
che danno il movimento di erezione o di prostazione agli uncini. 
Essi, a forte Ingradimento, si presentano con una parle slargata, 
inferiormente, e terminata con 2 punte, e una parte conica, assoti- 
gliata e ricurva superiormente. Nell'insieme si potrebbero rasso- 
migliare ad un (fig. 13 e 2). 

In riguardo alla speciale armatura della parte apicale del Cestode 
in parola nulla ho potuto per ora precisare; se esso sia un rostello 
0 una pura e semplice armatura, costituita dalla serie di uncini 
disposti intorno al peduncolo apicale. Studi ulteriori, sulle produ- 
zioni cuticulari e sulle varie armature dei Cestodi, da me intrapreso, 
mi diranno quale sia il valore anotomico da attribuirsi a tale arma- 
tura. Per ora basta ritenerla come semplice sviluppo delle setole 
cuticulari del Cestode che per adattamento hanno preso tale svi- 
luppo. 

Le 4 ventose, diametralmente opposte, sono costituite dalle solite 
fibre, circolari e radiali, e sono in connessione con le fibre longitu- 
dinali, come innanzi è detto (fig. 1 e 2). 

Sopra altri dettagli anatomici dei muscoli dello scolice null altro- 
posso dire, non avendo avuto materiale abbastanza per studiarne 
la complicata muscolatura. Aggiungo solo che contraendosi i mu- 
scoli longitudinali del peduncolo, queti si ritrae in una inva- 
ginazione cefalica, che produce, nell'affondorsi del parenchima, 
un infossamento apicale. Il sistema escretore dello strobilo 
è costituito da quattro canali longitudinali principali, decorrenti 


«2 


UNA NUOVA TENIA DELLA TALPA 38) 


lateralmente per tutta la lunghezza dello strobilo (fig. 8 e 12.) 
Varie anastomosi riuniscano i dotti escretori tra di loro e tra questi 
. vanno menzionati le 2 grandi anastomosi, anteriormente e infe- 
riormente, a ciascuna proglottide e che uniscono, due per facce, 1 
vasi ventrali tra loro e dorsali. Topograficamente i canali escretor 
sono situati tra i muscoli longitudinali interni, 2 ventrali e 2 dor- 
sali, quasi nello stesso piano, dorso-ventrale. Tra i vasi escretori e 
nello stesso senso corrono i cordoni nervosi, uno per lato longitu- 
dinalmente allo strobilo (fig. 8 e 12). 

BiocoGra. — Il poco materiale, che mi ha permesso lo studio ana- 
tomico della Tenia in parola, fu trovato nell'intestino tenue di al- 
cune Talpe, insieme a vari pezzi di Lumbricus terrestris e di Zulus 
terrestris, nonchè ad altre sostanze organiche, che formavano il 
nutrimento degl' Insettivori catturati. 

Ora la presenza del Lumbricus terrestris e dell’ Zulus terrestris, nell” 
intestino tenue, insieme ai frammenti ed esemplari, corrispondenti 
ai vari gradi di sviluppo del Cestode in parola, fece sorgere in me 
l'idea di ricercarne l'ospite intermedio o nel Miriapodo o nell'Anel- 
lide. Infatti esaminando i vari pezzi del Miriapodo (Zulus terrestris) 
e dell’ Anellide(Lumbricus terrestris), dopo un paziente esame, scorsi 
nell'intestino dell Zulus terrestris pochissime uova e un Cisticerco 
di Cestode. Dall’esame comrarativo eanatomica del material notai, 
che le uova preseutavano un inviluppo medio, ovale, e uno interno, 
sferico nel quale si osservava una parvenza di embrione (fig. 17). 
Paragonate le uova trovate nell'intestino del Miriapodo con quelle 
uterine., riscontrate nell'utero maturo e pregno di uova, ho notato 
una certa correlazione tra loro, che veniva à chiarire l'idea della 
ricerca dell'ospite intermedio. La conferma di ciù lo ha dato la pre- 
senza del Cisticerco a Cenuro riscontrato insieme alle uova nell’ 
intestino dell Zulus terrestris. Nulla ho trovato nell'intestino dell’ 
Anellide (fig. 15). Ora considerando quanto sopra è detto e quanto 
afferma la biologia del Miriapodo e dell'Insettivoro, si pu senza 
difficoltà stabilirne il ciclo biologico del parassita in esame. 

Infatti considerando che il modo di vita dell Zulus terrestris e 
della Talpa europæa è identico, entrambi menano vita sotteranea, e 
che il nutrimento del Miriapodo, tra l'altro, è costituito dalle feci 
dell’Insettivoro; come il nutrimento di questi é formato da Miria- 
podi, Anellidi, ecc., ne viene di conseguenza, che il ciclo biool- 


386. PASQUALE MOLA 


gico del parassita in esame non rimane per nulla estraneo. Anzi è 
tanto ovvio che non lascia verun dubbio nel passaggio delle uova nel 
tubo digerente dell’ Zulus, come i Cisticerchi del parassita nell'in- 
testino della Talpa. 

Adunque si pud stabilire che l'ospite intermedio di questa specie 
di Tenia armata è un Invertebrato, Miriapodo, Lulus terrestris. 

Dallo studio anatomico e biologico dell’ Elminto in parola si 
osserva che la Talpa europæa, tra gli altri parassiti, alberga una 
nuova specie di Tenia armata. Cosi, come minimo tributo di alta 
stima e riconoscenza, dedicherd la specie nuova all’illustre scien- 
ziato professore Raffaele Blanchard, nominando Tænia Blanchardi 
la nuova specie di Tenia, trovata pel primo nell'intestino tenue 
della Talpa. 


Le caratteristiche di quanto sopra ho esposto, vengono cosi rias- 
sunte: 


Scolice sferico con un peduncolo armato e quattro ventose cir- 
colari e diametralmente opposte. Collo e strobilo corto con seg- 
mentazione netla fin dal principio. Proglottidi quasi identiche; 
aperture genitali marginali e irregolarmente alterne. Vagina prov- 
vista di un ricettacolo seminale, molto pronunziato; glandola 
vitellina impari; ootipo poco sviluppato; utero posteriormente, 
cilindrico. Pene lungo, cilindrico, ricoperto di setole come tutto 
il corpo dell'animale. 


Habitat: Intestino tenue della Talpa europæa, campagne napoli- 
tane, 1905. 


BIBLIOGRAFIA 


1878. — O. von Lixsrow, Compendium der Helminthologie. Hannover, 1878- 
1889. 


1896. — M. BraAux, Vermes, Cestoda. Bronn’s Klassen und Ordnungen des Thier- 
Reichs, IV. 


1903. — P. Mora, Su di un Cestode del Carcharodon Rondeleti M. Hle. Archivio 
Zoologico, I, 1903. 


SPIEGAZIONE DELLA TAVOLA IV 


Lettere comuni a tutte le figure : ac, aculei; ag, antro genitale; &t, apertura 
uterina; &gin, apertura genitale maschile; €, collo; en, nervi longitudinali; 
d, deferente; de, canali escretori; ef efferenti; gg, glandole del guscio; 71e, mu- 
scoli estrinsee, del ventose; ml, muscoli longitudinali; od, ovidotto; of, ootipo; 
ov, ovario; p, pene; ({, testicoli; {p, tasca del pene; «w{, utero; v, vagina; 
ri, vitellodutto impari; vs, vescicola seminale. 


LS 


UNA NUOVA TENIA DELLA TALPA 381 


F1G. 1. — Scolice della Tænia Blanchardi, molto ingrandito, da un preparato in 
glicerina un poco compressa. X 20. 

Fi. 2. — Scolice dello stesso, molto più ingrandito e compresso, da una prepa- 
razione in toto. X 25. 

Fi. 3. — Aspetto generale della Tænia Blanchardi, da un esemplare fissato in 
sublimato e conservato in alcool. X 10. 

Fig. 4. — Aspetto generale di alcune proglottidi della catena, da un preparato in 
toto. X 10. 

F1G. 5. — Una proglottide delle ultime della catena con pene svaginato; vista 
dal dorso da una preparazione in 1oto per compressionne. X 60. 

Fig. 6. — Figura schematica, ricostruita da sezioniin serie trasversali e sagittali, 
per dimostrare i rapporti reciproci degli organi genitali femminili. 

Fic. 7. — Aspetto del pene svaginato e fuoruscente dall’apertura genitale; da 
un preparato in toto molto compresso. X 104. 


Fic. 8. — Proglottide delle ultime della catena, vista da sopra; da una prepara- 
zione in lolo per compressione. X 60. 

FiG. 9. — Aspetto dellà tasca del pene con pene invaginato e deferente : da una 
preparazione in toto per dissezione. X 125. 

Fi. 10. — Sezione trasversale, che mostra il pene nell’atto che svaginandosi 
penetra nella vagina dilatata per accoglierlo. X 85. 

FiG. 11. — Sezione trasversale di proglottide che mette in evidenza le vescieole 


testicolari con l’originarsi degli efferenti, e sbocco di questi negli efferenti di 
calibro maggiore. X 104. 

Fic. 12. — Sezione traversale diproglottide, alquanto obliqua, all’altezza dell'o- 
vario e del confluire degli efferenti nel deferente che interessa la tasca del pene 
e la vescicola seminale. x 85. : 


FiG. 13. — Un uncino dell’armatura del peduncolo. X 1000. 

Fic. 14. — Vari aspetti delle setole delle pareti del corpo e del pene. X 1000. 

FiG. 15, — Cisticerco da un preparato in glicerina un poco compresso. X 240. 

Fic. 16. — Sezione trasversa di proglottide che lascia vederela vescicola semi- 
nale con la vagina circondata dalle cellule poligonali vaginali. X 120. 

Fig. 17. — Uovo, da un preparato in glicerina un poco compresso. X 540. 

Fig. 18-23. — Sei sezioni consecutive trasversali di proglottide che valgono a 


mostrare il confluire dei tubi ovarici nell’ovidotto (fig. 18-19), l’originarsi della 
vagina dalla vescicola seminale (fig. 20), l’inizio del vitellodotto imparti con i 
rapporti degli altri organi femminili (fig. 21), l’'imbocco dell'ovidotto nell’utero 
(fig. 22) e la forma dell’utero con l’apertura dell’imbocco dell’'ovidotto (fig. 23). 


x 125. 


NOTICES BIOGRAPHIQUES 


XVII. — FRITZ SCHAUDINN 
(1871-1906) 


PAR 
Le D' MAURICE LANGERON 


Préparateur au Laboratoire de Parasitologie 


(PLANCHE VII) 


La vie si courte de Fritz Schaudinn ne lui a permis ni d'écrire 
des ouvrages fondamentaux, ni même d'achever les recherches qui 
l'intéressaient le plus. La plupart du temps, il n'a pu faire connaî- 
tre ses travaux que par de courtes notes préliminaires, qui sont 
plutôt des jalons et où les résultats acquis ne sont qu'indiqués. 
Pourtant l'importance de ses découvertes est telle, leurs consé- 
quences sont si grandes que son nom doit être inscrit parmi ceux 
des savants qui ont fait faire les plus grands progrès à la science et à 
la médecine. Exceptionellement doué sous le rapport des facultés 
d'observation et de l’habileté technique, il a su voir et interpréter 
ce que tant d’autres avant lui avaient laissé passer inaperçu. Bien 
que ses travaux aient été souvent inspirés par des vues théoriques 
et des conceptions philosophiques, il a su merveilleusement s'adap- 
ter à des recherches d'intérêt moins spéculatif. 

Zoologiste de tempérament et d'éducation, il a évolué sans 
peine vers la médecine scientifique. Cette faculté d'adaptation 
n'est pas une des qualités les moins frappantes de cette grande in- 
telligence ; là ou d’autres se seraient rebutés devant des résistances 
administratives et des ordres formels, il a su se plier aux travaux 
qui lui étaient imposés et trouver encore, dans la voie plus in- 
grate qui lui était tracée, l’occasion de découvertes de premier 
ordre. S'il eût été plus libre ou s'il eût vécu plus longtemps, il au- 
rait pu se donner tout entier aux questions qui l'intéressaient entre 
toutes; il aurait certainement fait faire des progrès encore plus 
grands à nos connaissances sur les Protozoaires et en particulier sur 
les Flagellés. 

Telle qu’elle est, la carrière de Schaudinn est si féconde en tra- 
vaux eten découvertes qu'il est difficile, dans une courte biographie, 


NOTICES BIOGRAPHIQUES. — FR. SCHAUDINN 389 


d'en faire connaître toute l'étendue et surtout d'en apprécier la 
portée. Lorsque des recherches ultérieures auront jeté de la lumière 
sur ces questions difficiles et encore bien obscures, on pourra plei- 
nement connaître le prix des services qu'il a rendus à la zoologie 
et à la médecine. 

Fritz Richard Scaupinx est né le 19 septembre 1871, à Rosening- 
ken, dans la Prusse Orientale. Il fit ses études dans les gymnases 
d'Insterburg et de Gumbinnen et, après avoir subi son examen de 
maturité, se rendit en 1890 à l'Université de Berlin. Comme il est 
arrivé fréquemment pour d’autres hommes éminents, il n'avait d’a- 
bord nulle idée de la carrière qui devait le rendre illustre. Il se pro- 
posait simplement d'étudier la philologie. Mais bientôt, abandon- 
nant ce projet, il se mit à travailler avec ardeur les sciences natu- 
relles et particulièrement la zoologie. Sous l'inspiration de F. E. 
Schulze, il ne tarda pas à étudier plus spécialement les Protozoaires. 

Premiers travaux (1890-1894). — La première partie de sa vie scien- 
tifique fut consacrée à des travaux sur les Foraminifères. Ses pre- 
mières publications qui datent de 1893, et sa thèse de doctorat qu'il 
soutint en 1894, ont trait à des espèces nouvelles de ce groupe; elles 
montrent déjà la puissance de ses facultés d'observation et la süû- 
reté de son jugement. 

Ces travaux sont consacrés à l'étude de la reproduction chez les 
Foraminiières, notamment en ce qui concerne la division et la 
multiplication de la chromatine chez ces animaux; bien que ces 
recherches n’intéressent pas directement la parasitologie, nous ne 
pouvons nous contenter de les mentionner, car nous y trouvons la 
_ première indication de sa théorie du dualisme nucléaire, qui do- 

mine toutes ses recherches sur les Flagellés. 

Schaudinn chercha, après tant d’autres, l'explication du dimor- 
phisme si curieux qui se manifeste, chez les Foraminifères, par la 
production, dans la même espèce, de formes macrosphères et mi- 
crosphères. Il trouva que ce dimorphisme de l'enveloppe a pour 
cause un dimorphisme du noyau, ou mieux de la chromatine, dont 
le dualisme primitif s'imposait déjà à sa pensée. Ces travaux lui 
permirent encore d'établir une homologie entre le développement 
du corps des Métazoaires et la génération asexuée des Protozoaires. 
Dès cette époque, Schaudinn, était préoccupé de rechercher les 
rapports qui existent entre la phylogénie et les divisions nucléaires; 


390 M. LANGERON 


cette idée est l'âme de ses travaux sur les Foraminifères et les Hé- 
liozaires. 

Séjour à Bergen (1894). — Pendant l'été de l'année 1894, Schaudian 
fit un séjour à la station biologique de Bergen, sur la côte de Nor- 
vège, dans le but de travailler à une monographie de la reproduc- 
tion chez les Foraminifères. Il ne put terminer ce travail, mais les 
observations qu'il fit à cette époque achevèrent de le familiariser 
avec l'étude du protoplasma vivant; elles contribuèrent à lui donner 
cette sûreté de coup d'œil qui devait l'aider si puissamment dans 
ses découvertes futures. Aussi Schaudinn parlait volontiers de son 
voyage à Bergen dont il conservait un excellent souvenir. A la fin de 
son séjour, il se contenta de publier une courte liste de 139 Fora- 
minifères observés par lui. La même année, il fut nommé assis- 
tant à l’Institut zoologique de Berlin. 

Premier séjour à Berlin, à l'Institut zoologique (1894-1898). — De 
189% à 1898, époque à laquelle il fut nommé privat-docent, puis 
entreprit son voyage au Spitzherg, l’activité de Schaudiun s’est 
manifestée surtout par de nombreuses recherches sur l'évolution 
et la cytologie des Rhizopodes et des Héliozoaires. Nous devons nous 
borner à indiquer ses découvertes les plus remarquables, en insis- 
tant sur celles dont l'influence a été plus marquée sur ses futurs 
travaux de parasitologie. Dans le groupe des Héliozoaires, il mit en 
évidence l'existence d'un second noyau, issu du premier, et analogue 
au centrosome des Métazoaires. Chez un Héliozoaire, Actinophrys 
sol, ildécouvrit une véritable fécondation par karyogamie, précédée 
par un phénomène de réduction chromatique : c'est la première 
fois que ces phénomènes étaient observés chez un Protozoaire aussi 
inférieur. 

Dans la classe des Rhizopodes, ses travaux ne sont pas moins 
remarquables. Il observe le premier chez des Amibes (Amæba crys- 
talligera et À. binucleata) les phénomènes de la karyokinèse. Chez 
Paramæba Eilhardi, il découvre un véritable centrosome met 
entièrement en évidence le cycle évolutif de cette Amibe; à un 
certain moment celle-ci se fragmente pour donner naissance à 
des formes flagellées, phénomène au cours duquel le centrosome 
joue un rôle particulier. Enfin, il étudie un nouveau type de Rhi- 
zopode, le Campionema nutans, qui se rapproche beaucoup des 
Héliozoaires. Dans cet être, dont la position systématique est 


NOTICES BIOGRAPHIQUES. — FR. SCHAUDINN 391 


très remarquable, il découvre de curieux rapports entre le noyau 
et l'appareil locomoteur formé par les pseudopodes. 

Le mémoire consacré à l'étude des générations alternantes du 
Trichosphærium Sieboldi constitue le couronnement des recher- 
ches de Schaudinn sur les Protozoaires libres. L'étude du dimor- 
phisme et de ses causes est encore l'idée directrice de ce travail. 
Frappé par les alternances de générations qu'il avait observées chez 
les Foraminifères, chez Paramæba, ainsi que par les phénomènes de 
copulation que présentent les genres À ctinophrys et Actinosphærium, 
il se demande si le dimorphisme est dü à ces alternances. Ce mé- 
moire est un modèle de recherche scientifique; il paraît que 
Schaudinn aimait à le relire pour y puiser des inspirations. En 
eftet, il était arrivé le premier à suivre le cycle complet de l’évolu- 
tion d’un Rhizopode libre, avec l'alternance des deux générations 
sexuée et asexuée. La découverte de ces deux cycles et des multiples 
chargements de forme auxquels ils donnent lieu, lui fut plus tard 
d'un grand secours dans l'étude des Protozoaires parasites. Nous 
verrons en particulier comment il sut utiliser ces données dans 
ses travaux sur les Coccidies et les Hémosporidies. 

Voyage au Spitzberg (1898). — En mai 1898, il entreprit, sur le 
petit vapeur Helgoland, un voyage au Spitzherg et dans les mers 
arctiques. Il était accompagné de son ami Rômer et d’un parent de 
ce dernier, Friese, peintre d'animaux. Au cours de ce voyage, il fit 
d'abondantes récoltes zoologiques et découvrit un certain nombre 
de types nouveaux, appartenant à la faune abyssale. Au retour, cet 
abondant matériel, dont la conservation était parfaite, fut réparti 
entre divers spécialistes. Les résultats de l'expédition devaient 
former un ensemble de volumes, publiés sous le titre de Fauna 


‘arctica, par Schaudinn et Rôümer. Quatre volumes ont déjà paru : 


dans l’un d'eux se trouve une monographie des Tardigrades, écrite 
par Schaudinn. L'expédition opéra la plupart de ses dragages dans 
une région tout à fait inexplorée au point de vue zoologique, sur 
les bords du bassin polaire découvert par Nansen. Les explorateurs 
s'avancèrent jusqu'à 81° 32° de latitude nord et firent une impor- 
tante série d'observations topographiques et géographiques sur la 
côte occidentale du Spitzhberg. 

Retour à Berlin (1899-1901). — C'est après cette expédition que 


x 
« 


Schaudinn commença à s'occuper plus spécialement des Proto- 


392 M. LANGERON 


zoaires pathogènes. Jusqu'alors, ses travaux étaient plutôt du res- 
sort de la zoologie pure : désormais il va pénétrer dans le domaine 
de la médecine scientifique et y porter la rigueur de sa méthode et 
la largeur de ses vues. 

Il avait fait connaître, en 1896, un curieux organisme, le Leydenia 
gemmipara, probablement voisin des Amibes et parasite acciden- 
tel du liquide ascitique chez l'Homme. Il avait entrepris ensuite, 
en collaboration avec Siedlecki, l'étude des générations alternan- 
tes chez les Coccidies. Il prit comme matériel de recherches un 
Myriapode que l'on rencontre communément sous les pierres, dans 
les lieux ombragés, le Lithobius forficatus. On savait depuis long- 
temps que les cellules épithéliales de l'intestin de cet animal sont 
fréquemment infestées par des Coccidies. En moins d'une année, 
Schaudinn put débrouiller le cycle évolutif complet de ces diverses 
formes et suivre d'un bout à l’autre l’évolution d’un type nouveau, 
se Coccidium Schubergi Schd. I] put ainsi faire connaître la succes- 
sion, désormais classique, de deux générations, l'une asexuée, 
l’autre sexuée. Dans la première, à laquelle il donna le nom de 
schizogonie, le nombre des parasites augmente considérablement, 
par suite de phénomènes successifs de division nucléaire : c'est- 
pour l'hôte, la période d’infestation, qui peut revêtir un caractère 
aigu. Au bout d'un certain temps, cette faculté de multiplication 
s’épuise, par suite de diverses causes. On voit alors se différencier 
des formes sexuées, qui subissent des phénomènes de maturation, 
puis copulent absolumentcomme les éléments sexués des animaux 
supérieurs. Schaudinn a observé, en effet, la pénétration du micro- 
gamète, qui est analogue au spermatozoïde, dansle macrogamète, 
de tous points identique à l'œuf. Il suivitensuite la transformation 
du produitdelacopulation, ouzygote, en oocyste, puis ensporocyste, 
ainsi que la mise en liberté des sporozoïtes et l’infestation d'un 
nouvel hôte, phénomène par lequel termine le second cycle, ou 
sporogonie. 

Schaudinn avait indiqué la succession de ces phénomènes dans 
un travail publié, en 1897, en collaboration avec Siedlecki; mais 
leur véritable signification et le rôle qu'ils jouent dans les manifes- 
tations pathologiques de la coccidiose ne sont véritablement mis en 
valeur que dans le mémoire publié par Schaudinn seul en 1900. 
Dès cette époque, il présentait l'influence que ses travaux sur les 


NOTICES BIOGRAPHIQUES. — FR. SCHAUDINN 9393 


Coccidies exerceraient sur la connaissance des parasites du palu- 
disme : il devinait l'analogie du cycle évolutif de ces deux classes 
d'organismes. Ce furent en effet ses deux mémoires fondamentaux 
sur Trichosphærium Sieboldi, Protozoaire libre, et sur Coccidium 
Schubergi, Protozoaire parasite, qui firent définitivement connaî- 
tre le cycle évolutif des Sporozoaires et mirent Ross et Grassi sur 
la voie de leurs grandes découvertes concernant le paludisme. Ces 
travaux, qui inauguraient brillamment la carrière de Schaudinn 
comme protozoologiste, furent couronnés, en 1903, par la Société 
des Naturalistes de Francfort, qui lui décerna le prix Tiedemann. 
En même temps, l'attention du gouvernement fut attirée sur Schau- 
dinn et celui-ci fut appelé à l'Office impérial de santé de Berlin. 

Là, sa valeur fut vite appréciée et on le choisit comme directeur 
du futur Institut de protistologie qui allait être bâti, suivant ses 
indications, à Lichterfeld, près de Berlin. En attendant l'achève- 
ment de cet Institut, et sur la proposition du Dr Hermès, directeur 
de l'aquarium de Berlin, Schaudinn fut envoyé avec sa famille à 
la station zoologique de Rovigno, sur l'Adriatique, pour y étudier 
les Protozoaires pathogènes. 

Séjour à Rovigno (1901-1904). — En avril 1901, commence donc 
la partie la plus heureuse et la plus féconde de la courte vie de 
Schaudinn. Délivré des froissements de la vie bureaucratique de 
Berlin, libre de travailler suivant ses goûts, il voit ses découvertes se 
succéder si rapidement qu'il a à peine le temps de les publier. 
Désormais, la plupart de ses travaux ou communications vont 
paraître dans le recueil des travaux de l'Office impérial de santé. 

Schaudinn se mit d’abord à étudier le cycle évolutif d’une Coc- 
cidie de la Taupe, le Cyclospora karyolytica, qui produit chez cet 
animal une entérite pernicieuse. Jusqu'ici, ses recherches ne 
s'étaient adressées qu'aux Coccidies des Arthropodes : il voulut 
étudier une espèce vivant chez un Vertébré à sang chaud. Le Cy- 
clospora présente ce caractère particulier d'être un parasite du 
noyau cellulaire ; non seulement il s'attaque aux cellules épithé- 
liales et glandulaires, mais encore il détruit les leucocytes qui se 
trouvent dans la muqueuse intestinale, ainsi qu'une partie du tis- 
su conjonctif de la sous-muqueuse. Les lésions ainsi produites sont 
très profondes et peuvent s'étendre à toute la longueur de l'intes- 
tin. Cette espèce présente en outre un dimorphisme sexuel très 


Archives de Parasitologie, XI, n° 3, 1907. 26 


394 M. LANGERON 


accentué : les sporozoïtes affectent deux formes différentes, d'où 
naissent des schizontes mâles et femelles. 

Ce n’est pas la seule découverte importante que Schaudinn fut 
amené à faire par l'étude de cette espèce : nous devons encore 
mentionner ses observations sur les phénomènes de réduction 
nucléaire, sur les troubles que le parasite produit chez son hôte et 
enfin sur les phénomènes de dégénérescence que le parasite peut 
subir à son tour. Déjà, dans son mémoiresur le Coccidium Schuber- 
gi, Schaudinn avait étudié la dégénérescence des éléments parasi- 
taires dans les cellules de l'hôte; il revient sur cette question à 
propos du Cyclospora et met en évidence une sorte de surmenage 
qui aménerait, en définitive, un « affaiblissement des mécanismes 
régulateurs de la cellule ». De là découlent d'intéressantes déduc- 
tions concernant la genèse des tumeurs. 

Dès 1899, Schaudinn avait comparé le cycle évolutif des Hémo- 
sporidies à celui des Coccidies et montré comment, par l'étude de 
ces derniers parasites, on pouvait jeter une vive lumière sur l'his- 
toire du paludisme. Malgré la deuxième édition de l'ouvrage de 
Grassi, qui avait étudié à fond la sporogonie, il restait encore bien 
des particularités à éclaircir lorsque Schaudinn arriva en Istrie. 
Cette province était ravagée par le paludisme et présentait les 
meilleures conditions pour l'étude de cette maladie. Schaudinn 
choisit comme station d'expériences le petit village de San Michele 
di Leme, situé à 130 mètres au-dessus du niveau de la mer et à 
10 kilomètres environ de Rovigno. C'étaitune petite agglomération 
isolée, composée de onze maisons habitées par une population 
misérable, illettrée et décimée par l'endémie palustre. Les Ano- 
pheles y abondaïent et pouvaient se multiplier à l’aise, soit dans 
les mares du village, soit dans les citernes des maisons. C'est là 
que Schaudinn entreprit ses recherches sur le Plasmodium vivax 
{Grassi et Feletti 1890), parasite qui produit, chez l'Homme, la 
fièvre tierce bénigne. 

Ces travaux étaient très pénibles, car il lui fallait aller de Rovi- 
gno à San Michele au moins une fois par semaine, soit à pied, soit 
par bateau. Dans ia belle saison, non seulement la température est 
accablante, mais encore la réverbération intense et aveuglante, 
produite par le sol blanc et calcaire de ces régions, rend la cha- 
leur et la lumière solaires encore plus insupportables. Mais 


NOTICES BIOGRAPHIQUES. — FR. SCHAUDINN 395 


Schaudinn fut bien dédommagé de ses fatigues par l'importance 
de ses découvertes. Mentionnons seulement ses recherches sur la 
biologie des Moustiques et indiquons en quelques mots les résul- 
tats essentiels auxquels il est parvenu, en ce qui concerne les Plas- 
modies paludiques. 

Grâce à son habileté technique extraordinaire et à sa rigoureuse 
méthode d’expérimentation, il observe, à l’état vivant, toutes les 
transformations du parasite. Le premier, il suit et dessine au mi- 
croscope la pénétration des sporozoiïtes et des mérozoïtes dans les 
globules rouges, ainsi que les modifications produites par la qui- 
nine chez le parasite. [1 élucide le problème des récidives en dé- 
montrant qu'elles sont dues à une multiplication parthénogénétique 
des macrogamètes; on sait en effet que ceux-ci persistent pendant 
très longtemps dans le sang des paludiques. On ne saurait trop 
regretter qu'il n'ait pas eu le temps de publier aussi les résultats 
de ses recherches sur le parasite de la quarte et sur celui de la 
tierce maligne. 

Quoi qu'il en soit, les travaux de Schaudinn sont devenus des 
données fondamentales pour l'histoire des Plasmodies paludiques 
et pour les questions d'assainissement, dont il s'était activement 
occupé en faveur du petit village de San Michele. L'application de 
ces découvertes aux autres localités insalubres des côtes autri- 
chiennes de l’Adriatique donna rapidement de brillants résultats ; 
on vit accourir à Rovigno une foule de jeunes chercheurs, qui ve- 
naient travailler sous la direction du maître et apprendre à lutter 
contre le paludisme. 

A ces travaux sur les Hémosporidies, se rattache la continua- 
tion de ses recherches sur une Hémogrégarine du Lézard, le Ka- 
ryolysus lacertarum, déja commencées à Berlin. Schaudinn décou- 
vrit que l'hôte intermédiaire de ce parasite est une Tique, l'Zxodes 
ricinus, dans l'intestin de laquelle se produit la fusion des gamètes 
et la formation des oocystes. Il arriva même à suivre la pénétra- 
tion du parasite dans les ovaires et à démontrer l'infestation pri- 
mitive des larves d’Ixodes. Ces résultats sont à rapprocher de ceux 
qu'il obtint dans ses recherches sur la transmission du Spirochète 
de la fièvre récurrente par les Punaises; il constata aussi, chez ces 
Insectes, l'infestation des ovaires par les Spirochètes. 

On sait que Dutton et Todd, puis R. Koch, ont obtenu des résultats 


396 M. LANGERON 


analogues en Afrique, dans l'étude de la tick fever, et qu'ils ont sui- 
vi l'évolution du Spirochète chez l'Ornithodorus moubata. Dans le 
même ordre d'idées, nous devons encore mentionner la découverte 
de l’infestation des ovaires du Moustique par les Spirochètes issus 
du développement du Plasmodium Ziemanni et par les Trypanosomo- 
ses que produit l Hæmoproteus noctuae. Schaudinn a donc mis en 
évidence trois faits importants de transmission héréditaire des pa- 
rasites sanguicoles à des générations successives d'Acariens ou 
d'Insectes. < | 

Les Hémosporidies ne sont pas les seuls Protozoaires pathogènes 
qui infestent les côtes de l'Istrie et de la Dalmatie. Outre le palu- 
disme, elles sont encore désolées par la dysenterie qui fait de 
grands ravages surtout parmi les jeunes enfants. 

Les travaux de Schaudinn sur la dysenterie sont la suite logique 
de ses précédentes recherches sur les Rhizopodes. Déjà, en 1896, il 
avait décrit en collaboration avec Leyden, un curieux organisme, 
semblable à une Amibe, le Leydenia gemmipara, trouvé deux fois 
dans le liquide ascitique de malades atteints de carcinome. L'in- 
terprétation de cette forme problématique reste encore douteuse, 
mais cela n’enlève rien à la valeur et à la précision des observations 
de Schaudinn. 

À Rovigno, il put reprendre ses recherches sur les Amibes para- 
sites de l'Homme. Il fut d’ailleurs beaucoup aidé par ses précédents 
travaux sur les Rhizopodes libres, soit marins, soit d'eau douce; 
sans l'habitude qu'il avait acquise d'observer ces êtres de forme si 
variable, il n'aurait pu mener à bien ses recherches sur la dysen- 
terie. Nous ne pouvons donner ici un résumé, même très som- 


maire, de ses expériencessur les genres Polystomella, Echinopyxis,' 


Chlamydophrys et Entamæba. 

Au point de vue pratique, Schaudinn parvint à distinguer, dans 
les Amibes parasites de l'Homme, deux espèces, l’une inofiensive, 
Entamæba coli, l'autre très dangereuse, Entamæba histolytica : c'est 
cette dernière espèce qui cause les lésions si graves de la dysenterie 
amibienne. Ces travaux devaient être pour lui la cause de cruelles 
soufirances : en eftet, il n'hésita pas à expérimenter sur lui-même 
l'effet de ces dangereux parasites. Non content de se procurer des 
matériaux d'étude en avalant des kystes de Chlamydophrys sterco- 


rea, il s'infesta aussi avec Entamæba coli et Entamæba histolytica. Le 


NOTICES BIOGRAPHIQUES. — FR. SCHAUDINN ‘397 


premier essai qu'il fit, à Berlin, le rendit très malade ; il fut pris de 


dysenterie violente et rendit de nombreuses Amibes; il put heureu- 
sement se débarrasser en peu de jours de ces parasites, à l’aide du 
calomel. Son deuxième essai fut moins heureux : il n’arriva à faire 
disparaître les Amibes qu'au bout de trois mois et à force d’em- 
ployer les lavages au sublimé et les injections de bleu de méthy- 
lène. Il n'est pas douteux que sa dernière maladieet sa mort n'aient 
été en grande partie causées par ces tentatives expérimentales. Il 
succomba, en effet, à la suite d’abcès intestinaux analogues à ceux 
qu'il avait démontré être le résultat de l’infestation amibienne: 
Au point de vue théorique, les résultats de ses recherches sur les 


‘Rhizopodes ne sont pas moins remarquables. {1 découvrit la fécon- 
-dation du Polystomella et démontra les rapports étroits qui existent 


entre cette forme et les genres Centropyxis et Chlamydophrys. W sui- 
vit entièrement le cycle évolutif de ce dernier Rhizopode et put ar- 
river à le reproduire par infestation expérimentale, au moyen du 
kyste qui se forme après la fécondation. Enfin, il applique ces re- 
cherches à la confirmation de la théorie chromidiale de R. Hertwig : 
il montra qu'à côté des chromidies somatiques, il y a encore, chez 


les Rhizopodes, des chromidies sexuelles, qui président aux phéno- 


mènes de la sexualité et du développement. Dans le même ordre 
d'idées, il découvrit, chez Entamæba coli, l'existence d’une double 
fécondation autogame, constituée par la fusion de deux noyaux fils, 
issus du noyau primitif. 

A peine ces ÿrands travaux sur les Rhizopodes étaient-ils ter- 
minés, qu'il faisait paraître, le 15 octobre 1903, sa retentissante 
communication sur les générations alternantes et les HIBTAUQNS 
dans les genres Trypanosoma et Spirochæta. 

Les Oiseaux ont toujours été le matériel de choix pour l'étude des 
Hémosporidies : c’est déjà en étudiantles parasites des Oiseaux que 
Ross fit les remarquables travaux qui jetèrent un jour si considé- 
rable sur l'histoire du paludisme et qui lui valurent le prix Nobel- 
C'est encore aux Oiseaux que Schaudinn s'adressa pour recher- 
cher lesaflinités des Trypanosomes. Dans ce but, ilchoïsit la Chevéche 


(Athenenoctua), dont le sang renferme généralement trois parasites : 


un Plasmodium qui est probablement le P. Danilevskyi, puis rie 
modium Ziemanni et Hæmoproteus noctuae. 
Schaudinn est arrivé à démontrer que ces deux Pr 


398 M. LANGERON 


sites passent par les stades Trypanosome et Spirochète. Le cycle 
évolutif de ces organismes est très complexe, et des plus curieux ; 
en effet, il y a coexistence de formes mâles, femelles et indiffé- 
rentes, tant chez le Moustique que chez l’Oiseau, et il y a aussi 
plusieurs générations de Trypanosomes ou de Spirochètes. Nous ne 
pouvons entrer ici dans le détail compliqué de l’évolution de ces 
diverses formes. Contentons-nous de dire que non seulement les 
découvertes de Schaudinn sont des plus curieuses en elles-mêmes, 
mais encore qu'elles ont une grande importance au point de vue de la 
médecine humaine et comparée. Elles tendent en effet à démontrer, 
d'une part que les Spirochètes, considérés autrefois comme des 
Bactéries, doivent être rangés parmi les Flagellés, d'autre part que 
les Hémosporidies, et en particulier les Plasmodies paludiques, 
devraient aussi rentrer dans cette même classe des Flagellés. Ces 
notions peuvent avoir une grande importance au point de vue de 
la transmission et de la prophylaxie des maladies causées par ces 
parasites. 

A côté de ce point de vue plus spécialement médical et pratique 
nous devons encore faire ressortir l'intérêt des vues théoriques de 
Schaudinn sur le dualisme nucléaire. Dans le noyau de ces orga- 
nismes, il est arrivé à distinguer deux parties, l'une somatique ou 
noyau animal, plus spécialement en rapport avec l'appareil de lo- 
comotion, et constituant le blépharoplaste, l’autre reproductrice, 
ou noyau végétatif. Selon lui, ces deux noyaux sont antagonistes 
et la prédominance de l’un ou de l’autre va caractériser les sexes. La 
forme primitive de ces Flagellés serait morphologiquement uninu- 
cléée, c'est-à-dire que le noyau animal serait pour ainsi dire inclus 

dans le noyau végétatif et en sorlirait au cours du développement. 
Dans la cellule mâle, le noyau végétatif dégénère et le noyau animal 
(blépharoplaste) prend une importance prépondérante. Dans la 
cellule femelle, c'est l'inverse qui se produit. 

Par suite, la fécondation est double et les noyaux homologues 
fusionnent : le gros noyau femelle du macrogamète fusionne avec 
le petit noyau femelle du microgamète, tandis que le petit noyau 
mâle du macrogamète fusionne avec le gros noyau mâle du micro- 
samète, De cette double fécondation résultent deux synkarions 
qui s'unissent à leur tour, de sorte que finalement le noyau mâle 
gagne le centre du noyau femelle. Le noyau de l’ookinète à donc 


NOTICES BIOGRAPHIQUES. — FR. SCHAUDINN 399 


une structure très compliquée : c'est un synkarion qui renferme 
S chromosomes et qui possède en son centre un karyosome, formé 
a son tour de 8 chromosomes et d'un corpuscule central. C’est ce 
karyosome qui va s'échapper du noyau pour constituer l'appareil 
locomoteur. 

Schaudinn attachait autant d'importance à ces vues théoriques 
qu'aux applications pratiques qui pouvaient être le résultat de ses 
découvertes. Peu de temps avant sa mort, en 1905, il revint encore 
sur ces questions dans le rappport qu'il présenta, au Congrès z00- 
logique de Breslau, sur la fécondation chez les Protozoaires. D'après 
lui, pendant la vie végétative, autrement dit pendant la schizo- 
gonie ou période de multiplication, il y a rupture de l'équilibre 
nucléaire. Les conditions du milieu externe produisent fatalement 
la prédominance de l’une des deux portions du noyau, soit mâle, 
soit femelle. À ce moment, la faculté de multiplication de la cel- 
lule subit un arrêt, une sorte d'inhibition. L'organisme est con- 
damné à périr s'il ne survient un processus capable de rétablir 
l'équilibre. Ce processus est ia fécondation. Pour Schaudinn, la 
signification et le but de ce phénomène seraient donc de produire 
des formes cellulaires indifférentes, chez lesquelles les deux fonc- 
tions, végétative et animale, soient en parfait équilibre ; par suite, 
ces formes peuvent de nouveau se multiplier. 

Tout, dans l'œuvre de Schaudinn, repose sur l'hypothèse du dua- 
lisme nucléaire. Pour lui, ce dualisme représente la nécessité de 
la concurrence de deux principesindissolublement liés et constitue 
l'expression du processus vital. Les troubles apportés àce dualisme 
amènent la cessation de la vie. Le dualisme peut se manifester de 
façons diverses : tantôt par un dimorphisme del’organisme entier, 
tantôt par un simple dimorphisme nucléaire, tantôt enfin par un 
dimorphisme physiologique, maïs partout il constitue le postulat de 
toute existence. En même temps qu'il est l'essence dela vie, il porte 
en lui-même un germe de destruction, par suite de la prépondé- 
rance fatale de l’un des deux principes. De là découle la nécessi- 
té de la fécondation pour la conservation de la vie. En définitive, 
Schaudinn considère que si l'on admet le dualisme physiologique 
primitif de la substance organique, on acquiert immédiatement 
aussi la notion du dimorphisme sexuel et de la fécondation. 

Quelle que soit la valeur de ces conceptions et quel que soit le 


400 M. LANGERON 


sort que leur réserve l'avenir, on ne peut nier la puissance du gé- 
nie de Schaudinn et l'ampleur de ses vues. Tout, dans son œuvre, 
se tient logiquement : depuis ses travaux sur le dimorphisme des 
Foraminifères jusqu'à la découverte des formes sexuées et indil- 
férentes des Hématozoaires de la Chevêche, nous pouvons suivre 
le développement ininterrompu de sa pensée philosophique. Pour 
arriver à de tels résultats, il savait mettre au service de ses dons 
naturels une méthode de recherche très particulière. D'abord sa 
puissance de travail lui permettait d'observer au microscope une 
partie de la nuit, afin de suivre cerlains stades d'évolution, qui 
sont exclusivement nocturnes. Puis il ne s’appliquait pas seule- 
ment à rechercher. le cycle évolutif aussi complet que possible 
d'une espèce donnée, il étudiait encore en même temps et compa- 
rativement une série de formes diverses, de facon à éclairer ses 
découvertes l'une par l’autre. De là le lien si étroit qui existe entre 
ses travaux sur les Foraminifères, les Amibes et les Hémospo- 
ridies. 

Pour donner une idée de la façon dont Schaudinn étudiait toutes 
les questions dans les détails les plus minutieux, nous pouvons 
rappeler brièvement la manière dont il comprenait le mécanisme 
physiologique de la piqûre du Moustique. 

Pour lui, la salive du Moustique n'est pas venimeuse :la substance 
irritante qu'elle renferme serait produite par une Levure vivanten 
commensale dans les glandes salivaires; les spores de cette Levure 
peuvent être transmises aux générations futures, en pénétrant dans 
les œufs. Il reste à déterminer la facon dont la salive va s'écouler 
dans la plaie produite par les stylets et comment le sang va mon- 
ter le long de ces appendices. Schaudinn remarqua que la mince 
couche d'acide carbonique qui se trouve à la surface de la peau 
humaine gêne la respiration de l’Insecte et l'oblige à contracter 
assez violemment son abdomen. Ces contractions se propagent aux 
muscles du thorax et de la tête et produisent mécaniquement la 
sortie de la salive, dans laquelle se trouvent le Champignon et son 
ferment: en même temps, une bulle d'acide carbonique reste ap- 
pendue à la pointe de l'hypopharynx. Le ferment exerce une action 
irriltante qui provoque l'afflux du sang, tandis que l'acide carbo- 
nique s oppose à la coagulation. Le sang monte donc le long des 
slylets, aidé par la puissante aspiration du pharynx. Telle est la 


FX 
FA 


m7. 


NOTICES BIOGRAPHIQUES. — FR. SCHAUDINN 401 


facon ingénieuse dont Schaudinn explique la piqüre du Moustique 


et l'irritation qui en résulte, en tenant compte de là dépendance 


réciproque d'un grand nombre de facteurs. 
Second séjour à Berlin, à l'Office impérial de santé (1904- 1905). — 
Malheureusement il fallut, par ordre supérieur, s'arracher à ces 


‘recherches captivantes. Au mois d'avril 190%, Schaudinn fut 
rappelé à Berlin et dut quitter Rovigno avec sa famille. Le séjour 


de trois ans qu'il venait d’y faire lui avait procuré de précieux 
matériaux de travail, mais avait été très nuisible à sa santé’et 
a celle des siens. Néanmoins, Schaudinn conserva toujours un bon 
souvenir de Rovigno, car il avait pu y travailler selon son inspira- 
tion, d'une façon libre et indépendante. 

A Berlin, il en fut tout autrement. On ne tarda pas à lui faire sa- 
voir qu'il n'était pas à l'Office impérial de santé pour entreprendre 
des recherches personnelles, mais pour effectuer les vérifications 
qui lui seraientindiquées. Schaudinn fut donc obligé d'abandonner 


ses travaux sur les Trypanosomes. Cette soumission lui fut très pé- 


nible; il protesta autant que la prudence le lui permettait, mais 
il finit par se résigner dans l'intérêt de sa famille. C'était presque 
la ruine de ses espérances et de ses projets; il commença à déses- 
pérer de jamais obtenir la mission qu'on lui avait promise pour 
l'étude des Trypanosomes et de la dysenterie. 

Pourtant il ne perd pas courage et dirige docilement son acti- 
vité dans les directions variées qu'on lui impose. Appliquant son 
génie aux travaux qui lui incombent par voie officielle, il trouve, 
là encore, l'occasion de découvertes retentissantes. Il fut d'abord 
chargé de vérifier les expériences de Looss sur Fa pénétration des 
larves d'Uncinaires à travers la peau. Ces recherches, motivéés par 
les ravages que l’uncinariose exerçait dans les districts miniers de 
la Westphalie, furent couronnées de succès. En expérimentant sur 
de jeunes Singes (Znuus sinicus), Schaudinn démontra d'une façon 
évidente l'infestation par voie cutanée. 

Au milieu du programme hétérogène et astreignant qui lui était 
tracé, Schaudinn reçut un jour l'ordre d'étudier la question de la 
syphilis et de vérifier en même temps les prétendues découvertes 
d'agents pathogènes dans la variole, la fièvre aphteuse, la scarlati- 
né, ete. Pour faciliter son travail il devait avoir, au point de vue cli- 
nique, la collaboration du D' Hoffmann, de la clinique. de Lesser. 


402 M. LANGERON 


Au commencement de mars 1905, 1l remarqua, en examinant à 
l’état frais des exsudats d'ulcérations syphilitiques, la présence 
constante d'un Spirochète particulier et mobile. Continuant ses 
recherches, il trouva ce même Spirochète dans la profondeur des 
tissus et dans les ganglions inguinaux atteints de l'infection spéci- 
fique. A cause de sa faible affinité pour les matières colorantes, il 
nomma cet organisme Spirochæte pallida ; dans la suite, il changea 
ce nom en celui de Treponema pallidum, plus conforme aux règles 
de la nomenclature et qui doit seul être conservé. 

Bien que convaincu de la réalité de sa découverte, Schaudinn n a 
jamais affirmé la signification étiologique du Treponema; il s'est 
contenté de montrer sa constance dans les produits spécifiques. 
Cette découverte fut accueillie, comme il arrive toujours, par un 
mélange d'enthousiasme, de scepticisme et d'attaques envieuses. 
Pourtant les confirmations ne tardèrent pas à affluer, si bien qu'à 
l'heure actuelle la bibliographie de cette question est immense. On 
trouve constamment le Treponema dans toutes les manifestations 
primaires et secondaires de la syphilis acquise, dans la syphilis 
congénitale, ainsi que dans la syphilis expérimentale des Singes; 
on Je rencontre même quelquefois dans les produits tertiaires, ce 
qui est d'accord avec leur moindre virulence. 

Le rôle étiologique et la valeur diagnostique du Treponema sont 
actuellement reconnus. La découverte de Schaudinn à donc fait 
faire un pas immense à la question de la syphilis en soulevantenfin 
le voile qui couvrait l'origine mystérieuse de cette terrible infec- 
tion. Cela seul suffirait à immortaliser son nom; c'est d’ailleurs la 
plus retentissante de ses découvertes, et celle qui devait frapper le 
plus le monde médical. 

Si nous recherchons la genèse de cette découverte, ainsi que le 
lien qui la rattache aux précédents travaux de Schaudinn, nous 
voyons qu'elle est le fruit de ses recherches sur les Hémosporidies 
de la Chevêche et de sa méthode d'observation véritablement biolo- 
gique. Il ne se contentait pas, en effet, d'employer les matières 
colorantes et la méthode des coupes; il pratiquait de préférence 
l'examen des parasites vivants et c’est à cette méthode qu'il doit ses 
plus belles découvertes. ’ 

Départ pour Hambourg, les derniers mois (1905-1906).—- Au mois de 
juillet 1905, Schaudinn prit un congé de six mois; il devait passer 


NOTICES BIOGRAPHIQUES. — FR. SCHAUDINN . 403 


ce temps à Hambourg, à l'Institut de médecine navale et tropicale, 
pour y préparer sa mission d'étude de la maladie du sommeil, 
mission qui partit plus tard, sous la direction de R. Koch. C'est à 
peu près à cette époque qu il reçut de Londres des offres pressantes : 
on lui proposait une situation indépendante, largement rémunérée. 
Schaudinn hésita quelque temps, mais enfin le patriotisme l'em- 
porta et il renonça définitivement à s'expatrier. 

Pendant son séjour à Hambourg, il publia une série de commu- 
nications importantes au sujet du Treponema. Il se proposait d’étu- 
dier comparativement une série de Spirochètes et autres formes 
affines pour arriver à découvrir le cyele évolutif complet de ces 
organismes. Le type morphologique Spirochète, de même que la 
forme Trypanosome, lui apparaissaient de plus en plus comme des 
stades passagers, réalisés au cours du développement de divers 
Protozoaires et, en quelque sorte, analogues à la gastrula des Méta- 
zoaires. Ces stades représentaient pour lui des relations phylogé- 
nétiques dont il lui était encore impossible d'apprécier la valeur. 
Il rappelait à ce propos l’évolution du Plasmodium Ziemanni : cet 
organisme passe en effet, pendant un certain temps, par la forme 
Spirochète, mais il est en réalité très éloigné des véritables Spiro- 
chæta, tels que $. plicatilis et S. recurrentis. 

Schaudinn aura donc la gloire d’avoir reconnu l’affinité qui existe 
probablement entre les Spirochètes, les Flagellés et les Hémospo- 
ridies; il aura contribué à établir une distinction bien tranchée 
entre ces organismes et les Bactéries du genre Spirillum. Il se peut, 
en effet, que le Treponema soit un Protozoaire considérablement 
modifié par la perte de son hôte intermédiaire et par le parasitisme. 
Ce ne serait pas le premier exemple d'un Fagellé dont la transmis- 
sion d'hôte à hôte se ferait par le simple contact des muqueuses. 
Le Trypanosoma equiperdum, qui provoque chez les Équidés la ma- 
ladie de la dourine, paraît se transmettre uniquement par le coîït. 
De même que le Treponema, il cause une maladie de longue durée, 
à manifestations polymorphes, au cours de laquelle le parasite 
est fort difficile à déceler. 

Au mois de janvier 1906, Schaudinn fut choisi à l'unanimité par 
le Conseil de la bourgeoisie de Hambourg, sur la proposition du 
Sénat, pour être directeur de la section de protistologie de l'Institut 
de médecine navale et tropicale. Il accepta avec joie cette situation 


404 -M.. LANGEROÔN 


nouvelle, où il espérait jouir enfin de la vie de famille ét de Ja li- 
_berté de travailler suivant ses goûts, sans être préoccupé de soucis 
‘matériels. Il dut auparavant retourner à Bérlin, pourachever d'or- 
_ganiser l'Institut de protistologie de Lichterfeld, où sa femme et 
ses enfants résidaient depuis le mois d'octobre 1905. Enfin, en 
mars 1906, il revint définitivement à Hambourg, où il s'installa 
avec sa famille. FA 
Malheureusement, la maladie quiletourmentaitdepuislongtemps 
s'aggrava : il souffrait, en effet, d'abcès du rectum. Choisi pour re- 
présenter l'Allemagne au Congrès de Lisbonne, il espérait que ce 
voyage allait améliorer sa santé. Bien au contraire son état ne fit 
qu'empirer. Au retour, il dut rester presque constamment cou- 
ché, dans sa cabine du paquebot Oceana; il subit même, en cours 
de route, üune première 6pération destinée à évacuer le pus des ab- 
cès. Dès son arrivée à Hambourg, il fut obligé de s’aliter à la mai- 
son de santé d'Eppendorf. Les suites de la première opération pa- 
rurent d’abord favorables, mais bientôt une nouvelle opération de- 
vint urgente; puis apparurent des symptômes de septicémie et le 
22 juin 1906, à 5 heures du matin, Schaudinn mourut, à peine âgé 
de 35 ans, dans le plein développement de son talent, laissant une 
veuve et trois enfants en bas âge, dont le dernier ne devait voir 
le jour que trois semaines après la mort de son père. 
Nousdonnons ci-après la liste des publications de Fritz Schaudinn, 
mais nous devons une mention particulière au périodique qu'il 
avait fondé en 1902, sous le titre d’Archiv für Protistenkunde. I 
voulait, par cette publication, établir un lien étroit entre la-botani- 
que, la zoologie et la médecine, en réunissant tous les travaux qui 
sont du domaine de la protistologie. Ce périodique en est actuelle- 
ment à son huitième volume. Outre des listes bibliographiques très 
complètes des travaux de protistologie, Schaudinn y à publié deux 
mémoires de bactériologie; consacrés à des recherches sur des Bac- 
téries de grande taille, le Bacillus Bütschlii et le Bacillus sporonema. 
Là encore, il montra que le biologiste, familiarisé avec l'étude des 
Protozoaires, sait voir des choses qui échappent au simple bacté- 
riologiste. 
Enfin nous joignons à cette notice un portrait de Schaudinn et, 
comme fac-similé de son écriture, la reproduction d'une lettre 
adressée par lui au Professeur R. Blanchard. 


Archives de Parasitologie, XI, 1907. PI. VII. 


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406 M. LANGERON 


En mourant, Schaudinn laissait dans une situation des plus pré- 
caires sa veuve et ses enfants. L'Allemagne ne possédant pas d’ins- 
titution analogue à notre Société des amis des sciences, qui pût subvenir 
à leurs besoins et se charger de l'éducation des tout petits, il se cons- 
titua, sous la présidence de M. Stammann, bourgmestre de Ham- 
bourg, un Comité de 99 personnes, comprenant les noms les plus 
marquants, parmi les professeurs de médecine et de zoologie, à 
l'effet de provoquer une souscription. 

Le professeur R. Blanchard reçut cette circulaire en juillet 1906. 
Elle portait la mention « confidentiel ». Il paraîtra peut-être indis- 
cret, après une telle recommandation, de faire allusion ici à la 
souscription ouverte en faveur de Mme Schaudinn et de ses 
enfants, mais le magnifique résultat qui fut obtenu donne à cette 
souscription le caractère d’une belle manifestation de solidarité 
scientifique, à laquelle un petit nombre d'étrangers furent invités à 
prendre part, et les manifestations de ce genre sont toujours d’un 
belexemple. D'ailleurs nos scrupules n'auraient plus aucune raison 
d'être, attendu que divers journaux ont déjà dévoilé depuis long- 
temps l'existence de la souscription. 

La lettre-circulaire rédigée et répandue par le Comité était 
libellée comme suit : 


Im Alter von nicht ganz 35 Jahren starb am 22. Juni zu Hamburg 
D' FRITZ SCHAUDINN 

der früher dem Zoologischen Institut zu Berlin als Assistent, dann 
dem Kaiserlichen Gesundheïitsamt als Mitglied und zuletzt dem Institut 
für Schiffs- und Tropenkrankheiten als Leiter der Protisten Abteilung 
angehôrt hatte. Seine grossen Verdienste um die Wissenschaît sind in 
der ganzen Welt bekannt. Die Protistenkunde hat in Schaudinn einen 
bahnbrechenden Forscher, die Medizin einen glücklichen Entdecker ver- 
loren. Mitten aus einem arbeitsreichen Leben wurde er, der erst an der 
Schwelle des Mannesalters stand, durch ein unerbittliches Schicksal 
herausgerissen. Grosses hat Schaudinn in dieser kurzen Frist geleistet. 
Aber sein allzufrüher Tod hat ihn, der ohne Rücksicht auf die Gesund 
heit seine ganze Kraft in den Dienst der Forschung stellte, verhindert, 
die Zukunft seiner Gattin und seiner Kinder zu sichern. 

Da ist es eine Ehrenpflicht der Vertreter und Fôrderer der Wissenschaf- 
ten, die dem Verstorbenen so grosse Fortschritte und Entdeckungen ver- 
danken, helfend einzutreten und wenigstens nach Môglichkeiïit materielle 
Sorgen von den vom Schicksal so hart betroffenen Hinterbliebenen 
fernzuhalten. 


NOTICES BIOGRAPHIQUES. — FR.SCHAUDINN 407 


Le professeur R. Blanchard donna communication de cette lettre 
au Dr J. Guiart, alors agrégé et chef des travaux pratiques de pa- 
rasitologie à la Faculté de médecine de Paris. Tous deux étaient 
en relations amicales avec Schaudinn ; tous deux étaient vivement 
émus par sa mort prématurée. Aussi répondirent-ils avec empres- 
sement à l'appel du Comité. 

La souscription donna un résultat des plus satisfaisants. A la 
date du 98 octobre, il avait été encaissé une somme de 85. 710 mKk. 
90 pf. (110.000 francs, en chiffres ronds), dont le Professeur Nocht, 
directeur de l'Institut pour les maladies navales et tropicales, in- 
diquait l'emploi par la lettre suivante: 


Hamburg, den 8. November 1906, 


Auf den im Interesse der Hinterbliebenen des verstorbene D" Fritz 
Schaudinn erlassenen Aufruf ist bis zum 28. Oktober der Betrag voi: 
M. 85 710, 90 eingegangen. 

Um sicher zu stellen, dass dieses Kapital in sachgemässer Weise zu 
Gunsten der Familie Schaudinn verwendet wird, ist damit eine Stiftung 
unter dem Namen « D’. Fritz Schaudinn Gedächtnisstiftung » begründet 
worden, deren Zinsen zunächst der Witwe ausgekehrt werden sollen 
während das Kapital in späterer Zeit den Kindern zufallen wird. Die 
Verwaltung dieser Stiftung, die ihren Sitz im hamburgischen Staatsge- 
biet haben soll, ist von den Herren Medizinalrat Professor D' Nocht- 
Hamburg als Vorsitzenden, Oberlandesgerichtsrat D' Philippi-Ham- 
burg als stellvertretenden Vorsitzenden, Edmund J. A. Siemers- Ham- 
burg als Schatzmeister sowie den Herren Geheimrat Professor D' Gaffky- 
Berlin, Geheimrat Professsor D' Lesser-Berlin und D' med E. Paschen- 
Hambourg als Beïisitzern übernommen worden und untersteht gemäss 
Artikel 95 der hamburgischen Verfassung der Oberaufsicht des hambur- 
gischen Staates. 

Wir freuen uns, dass auf diese Weise die Ehrenpflicht, den Hinterblie- 
benen des verdienstvollen Gelehrten und Forschers eine sorgenlose Zu- 
kunft zu sichern, in so ausreichender und rascher Weise hat erfüllt 
werden kôünnen und danken Ihnen herzlich dafür. dass Sie durch Ihre 
willige Hilfe hierzu beigetragen haben. 


Im Auftrage der Unterzeichner des Aufrufs 
Professor D' Nocur. 


En face d'une perte aussi déplorable, il est consolant de savoir 
que la veuve et les orphelins ne connaîtront pas le besoin, grâce à 
une manifestation de touchante solidarité qui honore autant ceux 
qui en bénéficient que ceux qui en sont les auteurs. 


408 M. LANGERON 


PUBLICATIONS PARASITOLOGIQUES DE F. SCHAUDINN 


E. von LEYDEN und F. ScHauniNn, Leydenia gemmipara Schaudinn, ein neuer 
in der Ascites-Flussigkeit des lebender Menschen gefundener amôbenähnlicher 
Rhizopode. Sitzber. d. kgl. preuss. Akad. d. Wiss. zu Berlin, p. 951-963, pl. VI, 
1896. 

F. ScHaupinn und M. Srepcecxt, Beitrage zur Kenntnis der Coccidien. Verh. d. 
deutsch. Zool. Ges., Kiel, p. 192-203, 1897. 

Ueber den Generationswechsel der Coccidien und die neuere Malariaforschung. 
Silzber. der Ges. der Naturf. Freunde, Berlin, p. 154-178, 1899. 

Ueber den Einfluss der Rôntgenstrahlen auf Protozen. Archiv der ges. Phy- 
siol., LXXVII, p. 29-43, 1899. 

M. JaxoBy und F. ScHaupiNn, Ueber zwei neue Infusorien im Darm des 
Menschen. Centralblatt für Bakteriol., XXV, p. 487-494, 1899. 

Der Generationswechsel der Coccidien und Hämosporidien. Zool. Centralblatt, 
VI, p. 865-783, 1899. 

Untersuchungen über den Generationswechsel von Trichosphærium Sieboldi. 
Schn. Arch. z. der Abh. der kgl. preuss. Akad. der Wiss., Berlin, p.1-93, 1899. 

Untersuchungen über den Generationswechsel bei Coccidien. Zoo!l. Jahrb., 
Abt. für Morphol.,XIII, p. 197-293, 1900. 

Malaria. Wandtafel mit erläuterndem Text, in Leucxarr’s Sammlung Zoolo- 
gischer Wandtafeln. Fischer et Kassel, (1), pl. CII, 1901. 

Coccidien. Zbidem, (1), pl. CII, 1901. 

Beiträge zur Kenntnis der Bakterien und verwandter Organismen.— I. Bacillus 
Bütschlii n. sp. Archiv für Protistenkunde, 1, p. 306-343, pl. X, 1902. 

Studien über krankheïitserregende Protozoen. — I. Cyclospora caryolytica 
Schaud. der Erreger der pernicidsen Enteritis des Maulwurfs. Arbeilen aus dem 
kais. Gesundheitsamte, XVII, p. 378-416, 1902. 

Studien über krankheïitserregende Protozoen. — II. Plasmodium vivax (Grassi 
et Feletti) der Erreger des Tertianfiebers des Menschen. Arbeiten aus dem kais. 
(esundheitsamte, XIX, p. 169-240, 1902. 

Anhangs-Bemerkung über Karyolysus lacertae und dessen Ueberträger 1x0- 
des ricinus. Archiv für Protistenkunde, 11, p. 339-340, 1903. 

Untersuchungen über die Fortpflanzung einiger Rhizopoden. Arbeiten aus dem 
kais. Gesundheitsamte, XIX, p. 547-576, 1903. 

Beiträge zur Kenntnis der Bakterien und verwandter Organismen.— II. Bacillus 
sporonema n. sp. Archiv fur Protistenkunde, 11, p. 421-444, pl. XII, 1903. 

Generations- und Wirtswechsel bei Trypanosoma und Spirochæte. Arbeiten 
aus dem kais. Gesundheitsamte, XX, 1904. 

Ueber die Einwanderung der Ankylostomum-Larven von der Haut aus. 
Deutsche med. Woch., p. 1338-1339, 1904. 

F. ScHAuDINN und E. HorFMaNN, Vorläufiger Bericht über das Vorkommen 
von Spirochæten in syphilitischen Krankheïtsprodukten und bei Papillomen. 
Arbeiten aus dem kais. Gesundheitsante, XXII, p. 527, 1905. 

Neuere Forschungen über die Befruchtung bei Protozoen. Verh. deutsch. Zool. 
Ges., Breslau, p. 16-35, pl. 1, 1905. 

F. Scaaupinn und E. Horrmanx, Ueber Spirochætenbefunde im Lymphdrü- 
sensaft Syphilitischer. Deutsche med. Woch., p. 711-714, 1905. 

Ueber Spirochæte pallida bei Syphilis und die Unterschiede dieser Form gegen- 
über andern Arten dieser Gattung. Berliner klin. Woch., p. 373-375, 1905 

Zur Kenntnis von Spirochæle pallida. Deutsche med. Woch., p. 1665-1667, 
1905. 

Protozoenliteratur. Archiv fur Protistenkunde, 1V, p. 391-400 ; V, p. 267-270, 
370-385; VI, p. 131-146, 334-350. 


RECHERCHES SUR LE POUVOIR ANTIBACTÉRIEN 
DE L’EXTRAIT DE CESTODES (1 


PAR 


Le D’ CHARLES JOYEUX 


(PLANCHES V ET VI) - 


L'influence antibactérienne de l'extrait de Cestodes n’est guère 
connue que depuis les travaux de Picou et Ramond et surtout de 
Jammes et Mandoul. Cette question complexe, très diverse- 
ment interprétée, suivant les résultats obtenus, est encore loin 
d’avoir reçu une solution définitive. Les expériences varient con- 
sidérablement suivant le Microbe et l’'Helminthe employés, et il 
n'est guère possible, à l'heure actuelle, de connaître les rapports 
qui existent entre les Vers intestinaux et la flore microbienne au 
milieu de laquelle ils vivent. 

Il paraît cependant se dégager des travaux des auteurs précé- 
dents ce fait que le Ténia et la Bactérie intestinale vivant ensemble 
ne se détruisent pas. L'extrait n'est pas bactéricide pour les « habi- 
tués » de l'intestin, il ne le devient que pour les Bacilles pathogè- 
nes ou étrangers. 

Mais la notion de Microbe pathogène est fort variable. Des espèces 
considérées comme telles : le Bacille de Lôffler ou d’Eberth, vivent 
sans nous occasionner d'accidents dans notre organisme et, d'autre 
part, certaines autres, telles que le Bacillus mesentericus, ont été iso- 
lées de plusieurs affections dont elles étaient la cause, bien qu'on 
ait l'habitude de les ranger parmi les Microbes inoffensifs ; la notion 
de virulence paraît l'emporter de beaucoup sur la notion d'espèce. 

Il nous à paru intéressant, au cours d'expériences sur le pouvoir 
antibactérien de l'extrait de Cestodes, de rechercher si l'influence 
de cet extrait variait selon la pius grande intensité du pouvoir 
pathogène chez une même espèce bactérienne. 

Pour cela nous nous sommes servi du procédé des sacs de collo- 

(1) Travail du laboratoire d'Histoire Naturelle de la Faculté de Médecine de 
Nancy. 

Archives de Parasitologie, XI, n° 3, 1907. 27 


410 CH. JOYEUX 


dion. Imaginée par Metshnikov, Roux et Salimbeni au cours de leurs 
recherches sur la toxine cholérique, cette méthode a pour but de 
cultiver les Microbes dans l'organisme à l'abri des phagocytes dans 
un sachet de collodion, dont les parois s'opposent au passage des 
cellules, mais permettent les échanges osmotiques qui modifient 
la composition du milieu. Nous avons employé la méthode indi- 
quée par Besson (1), en nous servant du Cobaye comme animal de 
passage. 

Les Bacilles choisis étaient restés indifférents à nos extraits dans 
de nombreuses expériences précédentes ; c'étaient : 

1° Bacillus mesentericus vulgatus Flügge ; 

20 Bacillus paratyphi Schotmüller, type B ; 

30 Bacilius paratyphi Bron-Kayser, type A. — Nous avons opéré 
parallèlement sur deux échantillons : l’un provenant du laboratoire 
de M. Netter, l’autre de la maison Kräl de Prague. 

4° Bacillus psittacorum Nocard. — Enfin, pour être sûr d’avoir 
des espèces saprophytes, nous avons isolé des Bactéries banales 
d'un intestin de Mouton, et setrouvant à la surface même du Ténia 
sur lequel nous allions expérimenter. Pour cela, nous ensemencions 
des tubes de bouillon avec un fil de platine promené sur le corps du 
Ver, puis portant à l'étuve à 370, nous réensemensions dès le moin- 
dre trouble du milieu. 

En renouvelant cette opération 5 à 6 fois de suite, nous avons 
obtenu une culture pure de bâtonnets mobiles, ne gardant pas la 
coloration de Gram, poussant sur gélatine en surface et en piqüre 
sans la liquéfier, décolorant le bouillon de lactose à la fuchsine acide 
de Ramond; les cultures sur bouillon traitées par l’azotite de po- 
tasse et l'acide sulfurique donnaient la réaction de l’indol à partir 
de la 4° semaine. Ces caractères nous permettent de ranger nos 
microbes dans le groupe du Bacillus coli. Nous n'avons pu, toute- 
fois obtenir sur pomme de terre l’enduit caractéristique, mais on 
sait que la réussite de ces cultures tient surtout à la race de pom- 
me de terre employée, et un autre Coli typique ensemencé sur ce 
milieu nous a également donné un résultat négatif. Par cette mé- 
thode, deux Microbes ont été isolés, que nous appellerons-et 6, et 
qui présentent tous deux les propriétés ci-dessus. 


(1) A. Besson, Technique microbiologique et sérothérapique. Paris, 2° édition, 
1902. 


POUVOIR ANTIBACTÉRIEN DES CESTODES alt 


Toutes ces espèces étaient cultivées sur un même bouillon de 
- peptone à # 0/0, en alcalinisant légèrement à la soude caustique. 
Nous préparions de grandes quantités de ce milieu, pour éviter les 
modifications qui se produisent souvent dans les cultures, lors- 
qu’on passe d'un bouillon à l’autre. 

Les extraits de Vers étaient obtenus ainsi : nous employions le 
Tænia saginata Gæze, 1782; le Moniezia expansa (Rudolphi, 1810) et 
le Thysanosoma Giardi (Moniez, 1879). 

Ces parasites étaient lavés sous un fort courant d’eau pendant un 
quart d'heure, puis pesés et broyés dans un mortier avec du coton 
de verre pour faciliter la dilacération des tissus, nous mélangions 
ensuite dans les proportions suivantes : 


Pulpede Ne Tr RE Darties 
Faut diS LI e RSR MERE 3 parties. 


Nous portions alors nos macérations pendant 24 heures soit à 
la température de 37°, soit à uhe température de 15 à 18, soit à 
une température de 0°. Disons de suite que dans toutes ces condi- 
tions le résultat a été le même. On pourrait, en effet, nous objecter 
que l’action bactéricide sur nos Microbes employés était due, non 
aux Cestodes mais à d’autres germes que notre lavage n'avait pu 
faire disparaître et qui se développaient pendant les 24 heures de 
macération; or on sait que les germes ne se développent pas à 0. 

Au bout de ce temps, les extraits étaient filtrés aseptiquement 
sur une bougie Chamberland F, et l'on obtenait ainsi un liquide 
clair, opalescent, d'odeur fade, ne se troublant pas, même au bout 
de plusieurs mois. 

Nos matériaux étant ainsi préparés, nous opérions dela manière 
suivante. Nous prenions quatre tubes de bouillon : dansle premier, 
nous mettions quelques gouttes de l'extrait de Ténia prélevé au 
moyen d'une pipette stérile, dans le deuxième nous mettions encore 
quelques gouttes d'extrait et nous ensemencions en même temps 
le Microbe à étudier. Le troisième et le quatrième étaient ense- 
mencés avec le Microbe seul. Le tout était porté pendant 24 heures à 
l’étuve à 37°. Au bout de cetemps, nous examinions d’abord le pre- 
mier tube, ensemencé avec l'extrait seul, qui devait être resté par- 
faitement clair, prouvant ainsi l’asepsie de notre préparation. Nous 
comparions ensuite le deuxième tube avec l'un des deux suivants; 


&12 CH. JOYEUX 


en cas de résultat positif, le tube contenant le Microbe seul devait 
être beaucoup plus poussé que celui contenant le Microbe et l’ex- 
trait, cette différence se traduisant par le trouble plus ou moins 
grand de la culture. Quant au quatrième tube contenant également 
le Microbe seul, nous en inoculions 2° sous la peau de cuisse d’un 
Cobaye, afin de mesurer son pouvoir pathogène. Faisons remarquer, 
afin que l’on ne nous objecte pas que nos pipettes n’étaient pas gra- 
Jduées ou que nos tubes de bouillon pouvaient contenir des quantités 
de liquide inégales, que le pouvoir bactéricide de ces extraits est 
indépendant de la quantité introduite dans la culture, à moins 
naturellement qu'on en emploie des doses infimes ou absolument 
exagérées. C'est d’ailleurs ce qu'avaient déjà constaté Jammes et 
Mandoul. 

Les résultatsobtenus nous ont parus assez intéressants pour être 
placés sous les yeux du lecteur, en recourant à la photographie. 
Ainsi qu'on l’a vu plus haut, deux tubes de bouillon dans lesquels 
une culture est plus ou moins poussée présentent entre eux des dif- 
férences de trouble et par conséquent de transparence que nous 
avons essayé de représenter par l'artifice suivant : 

Une glace de verre dépoli et une grille métallique préalablement 
enduite d'un vernis noir et dont les quadrillés avaient 3 millimètres 
de côté se trouvaient accolées dans un châssis de bois. Nous 
placions les tubes à photographier devant la grille en les appliquant 
étroitement contre elle au moyen d’un cordon élastique dont les 
extrémités étaient fixées sur les montants du châssis. Le tout 
était éclairé par derrière au moyen d'une lanterne à projections. 
L'appareil photographique était alors placé devant les tubes. Nous 
nous servions d'un objectif double Protar-Zeiss, d'ouverture 1: 6°, 
d'un foyer de 295 millimètres dont la grande profondeur nous 
dispensait de l'emploi du diaphragme. Les tubes, formant un écran 
jaune, motivaient l'emploi de plaques orthochromatiques à cette 
couleur. Nous avons employé celles de la maison Grieshaber 
(Integrum), dont la sensibilité pour le jaune est bonne, ainsi que 
l’on peut s’en rendre compte par le tube témoin qui contient du 
bouillon non ensemencé (fig. 1). Nous nous trouvions ainsi par 
suite de la sensibilité des plaques aux radiations jaunes à même 
d'apprécier les moindres différences d'opacité. Nous n'avons qu'un 
regret, c'est que le temps ne nous ait pas permis de faire confec- 


POUVOIR ANTIBACTÉRIEN DES CESTODES 413 


tionner sur un cadre un ensemble de lignes parallèles horizontales 
au lieu du quadrillage employé que nous avions sous la main. Les 
tubes formant lentille cylindrique ont amené dans l’ensemble du 
quadrillage des déviations qu'il eût été préférable d'éviter pour 
une sensation plus agréable à l'œil. La durée du temps de pose 
étant fixée (5 minutes), et la même pour tous les tubes, nous avons 
employé comme révélateur un produit assurant des conditions de 
développement identiques d’une expérience à l’autre. L’oxalate 
ferreux plus semblable à lui-même d’une solution à l'autre, nous a 
paru devoir être employé de préférence aux révélateurs organiques. 
Dans ces derniers en effet, en dehors des proportions qui ont une 
importance énorme sur le pouvoir réducteur du révélateur, le 
sulfite, extrêmement oxydable et de qualité très variable est la 
cause de continuelles modifications des bains. 

Notre révélateur s'est trouvé ainsi d'une expérience à une autre 
aussi semblable à lui-même qu'il a été possible. La formule était 
la suivante : 


OxAAte TERESA RS DD Sr 
PAUSE AEMEMENEC PER AE 1 litre. 
SULALENTOR EL EN to 0e) fEPe 
BI Acide citrique NN RENE SERRE A gr. 
HaUIdiS CCR PSC 1 litre. 


Pour l'emploi, nous prenions 60° de A et 20° de B. 

Ajoutons que nos plaques ont été développées à une température 
uniforme de 15° centigrades. 

Avec toute cette technique nous avons procédé ainsi : nous 
opérions sur chaque Microbe d'abord tel qu'il se trouvait dans les 
collections du laboratoire, ensuite après le premier passage en sac 
de collodion, et après un deuxième passage, soit trois essais en 
tout. De plus, pour nos saprophytes «et 6, donnant des résultats 
positifs dès le premier passage, il nous a semblé intéressant de les 
laisser pendant trois mois au repos, en neles réensemençant qu'une 
seule fois, afin de vérifier si leur pouvoir pathogène diminuerait 
pendant ce temps. 


ExPÉRIENCE I. — Bacillus mesentericus avec Moniezia expansa. : 
Avant passage. — 22 novembre, pas de différence dans nos cultures 
(fig. 2). — Inoculation d'un Cobaye pesant 492 gr. — Le 28 novembre, 


eschare abdominale, l'animal pèse 450 gr. — 5 décembre, l’eschare évolue, 


14 CH. JOYEUX 


le poids est de 420 gr. — Le 12 décembre, cicatrisation, poids 435 gr. — 
Le 18 décembre, la plaie est refermée, poids : 437gr. — Le 26 décembre, 
l'animal peut être considéré comme guéri, pèse 432 gr. 

Premier passage. — Les sacs de collodion, mis dans le péritoine le 24 no- 
vembre, sont retirés le 30. — 1* décembre, légère différence dansles cul- 
tures, (fig. 3). — Inoculation d’un Cobaye pesant 350 gr. — Le 5 décembre, 
pèse 342 gr. — Le 11 décembre, eschare abdominale, le poids est de 338 gr. 
— Le 18 décembre, l'eschare suppure, poids : 350 gr. — Le 26 décembre, 
Suppuration moins abondante, poids : 368 gr. — Le 3 janvier, cicatrisation, 


poids : 394 gr. — Le 12 janvier, l'animal peut être considéré comme 
guéri, pèse 440 gr. 
Deuxième passage. — Les sacs de collodion, mis le 4 décembre, sont 


retirés le 11. — Le 12 décembre, différence considérable dans nos tubes 
(fig. 4). — Inoculation d’un Cobaye pesant 570 gr. — L'animal meurt dans 
la nuit, pèse 550 gr. A l’autopsie, lésions de péritonite suraiguë avec 
liquide abondant dans la cavité abdominale. 


EXPÉRIENCE II. — Bacillus paratyphi Schotmüller avec Tænia saginata. 
Avant passage. — 22 novembre, pas de différence dans nos cultures 


(fig. 5). — Inoculation d’un Cobaye pesant 398 gr. — Le 5 décembre, l’ani- 
mal présente une eschare abdominale, pèse 395 gr. — Le 12 décembre, 
cicatrisation, poids : 440 gr. — Le 18 décembre, la plaie est refermée, 


poids : 447 gr. — Le 26 décembre, l'animal peut être considéré comme 
guéri, pèse 465 gr. 

Premier passage. — Les sacs de collodion, mis le 24 novembre, sont 
retirés le 30, — Le 1% décembre, différence sensible dans nos tubes 
(fig. 6). — Inoculation d'un Cobaye pesant 520 gr. — Le5 décembre, pèse 
495 gr. — Le 10 décembre, mort de l'animal, pèse 440 gr. A l’autopsie, faus- 
ses membranes sur le foie, liquide dans le péritoine. 

Deuxième passage. — Les sacs de collodion, mis le 5 décembre, sont 
retirés le 11. — Le 12 décembre, forte différence dans nos tubes (fig. 7). 
— Inoculation d’un Cobaye pesant 412 gr. — L'animal meurt quelques 
heures après. A l’autopsie, fausses membranes sur le foie et le mésentère, 
liquide dans la cavité abdominale. 


EXPÉRIENCE III. — Bacillus paratyphi Brion-Kayser (provenance Kräl) 
avec Tænia saginata. 

Avant passage. — 27 novembre, résultat négatif dans nos tubes (fig. 8). 
— Inoculation d'un Cobaye pesant 395 gr. — Le 5 décembre, présente une 
eschare abdominale, poids : 502 gr. — Le 12 décembre, cicatrisation de 
la plaie, poids 510 gr. — Le 18 décembre la plaie est refermée, poids : 
518 gr. — Le 26 décembre, l’animal peut être considéré comme guéri, 
pèse 515 gr. 

Premier passage. — Les sacs de collodion, mis le 27 novembre, sont 
retirés le 2 décembre. — Le 3 décembre, différence appréciable dans nos 
tubes (fig 9) — Inoculation d’un Cobaye pesant 595 gr. — Le 4 décembre, 


POUVOIR ANTIBACTÉRIEN DES CESTODES 415 


mort de l'animal. A l’autopsie, péritonite avec liquide très abondant, 
quelques fausses membranes. 

Deuxième passäge. — Les sacs de collodion, mis le & décembre, sont 
retirés le 11. — Le 12 décembre, différence appréciable entre nos tubes 
(fig. 10). — Inoculation d’un Cobaye pesant 438 gr. — L'animal meurt 
quelques heures après. A l’autopsie, péritonite avec fausses EME 
sur le foie et le mésentère. 


ExPÉRIENCE IV.— Bacillus paratyphi Brion-Kayser (provenance Netter) 
avec Tænia saginata. 

Avant passage. — 271 novembre, pas de différence dans nos tubes 
(fig. 11). — Inoculation d'un Cobaye pesant 378 gr. —- Le 5 décembre, pèse 
305 gr. eschare abdominale. — Le 12 décembre, pèse 320 gr., la plaie 
commence à se refermer. — Le 18 décembre, pèse 310 gr. la cicatrisation 
s'opère. — Le 26 décembre, la plaie est complètement ns et l’animal 
entièrement guéri, pèse 324 gr. 

Premier passage. — Les sacs de collodion, mis le 22 novembre, sont 
retirés le 2 décembre. — Le 3 décembre, différence importante entre nos 
- tubes (fig. 12). — Inoculation d’un Cobaye pesant 382 gr. — Le 4 décembre, 
mort de l'animal. A l’autopsie, péritonite généralisée et ingestion abdo- 
minale. 

Deuxième passage. -- Les sacs de collodion, mis le # décembre, sont 
retirés le 11. — Le 12 décembre, différence entre nos tubes (fig. 13). — 
Inoculation d'un Cobaye pesant 465 gr. — L'animai meurt quelques 
heures après, pèse 445 gr. A l’autopsie, lésions de péritonite suraigué. 


ExPÉRIENCE V.— Bacillus psittacorum Nocard avec Tænia saginata. 

Avant passage. — Le 27 novembre, pas de différence dans nos tubes 
(fig. 14). — Inoculation d'un Cobaye pesant 385 gr. — Contrairement à nos 
prévisions, l'animal meurt dans la nuit, a perdu 50 gr. de son poids. A 
l’autopsie, péritonite et hyperémie généralisée de tous les viscères. 

Premier passage. — Les sacs de collodion, mis le 27 rovembre, sont retirés 
le 3 décembre. — Le 4 décembre, différence assez appréciable entre nos 
tubes (fig. 15).— Inoculation d’un Cobaye pesant 410 gr. — Le 5 décembre, 
eschare abdominale, poids : 379 gr. — Le 12 décembre, l’eschare évolue, 
poids 315 gr. — Le 17 décembre, mort de l’animal, pèse 262 gr. A l’autopsie; 
pus dans la cavité péritonéale, peu de liquide. 

Deuxième passage. — Les sacs de collodion, mis Le 4 décembre, sont retirés 
le 11. — Le 12 décembre différence considérable entre nos tubes (fig. 16), 
— Inoculation d'un Cobaye pesant 417 gr. — L'animal meurt quelques 
heures après. A l’autopsie, lésions de péritonite généralisée. 


ExPÉRIENCE VI. — : saprophyte de Mouton avec Thysanosoma Giardi. 

Avant passage. — 3 juillet, résultat négatif dans nos tubes (fig. 17). — 
Inoculation d’un Cobaye pesant 382 gr. — Le 9 juillet, légère eschare 
abdominale, poids 348 gr. — Le 13 juillet, la plaie est cicatrisée, poids 


416 CH. JOYEUX 
370 gr. — Le 1° août, l'animal peut être considéré comme guéri, pèse 
380 gr. 


Premier passage. — Les sacs de collodion, mis le 4 juillet, sont retirés 
le 10. — Le 11 juillet, différence entre nos tubes (fig. 19). — Inoculation 
d'un Cobaye pesant 310 gr. — L'animal meurt dans la nuit suivante. A 
l’autopsie, organes pâles, quelques fausses membranes. 

La culture est alors laissée jusqu’au 1° décembre, n'ayant été réense- 
mencée que le 23 août. Nous reprenons nos expériences. 

Le 2 décembre, différence entre nos cultures (fig. 21). — Inoculation d'un 
Cobaye pesant 368 gr. — Le 3 décembre, mort de l'animal. A l’autopsie, 
péritonite avec fausses membranes sur le foie et le mésentère. 

Deuxième passage. — Les sacs de collodion, mis le 4 décembre, sont 
retirés le 11. — Le 12 décembre, différence considérable entre les cultures 
(fig. 23). — inoculation d'un Cobaye pesant 418 gr. L'animal meurt daus 
la nuit suivante. A l’autopsie, péritonite avec fausses membranes. 


EXPÉRIENCE VII. — £ saprophyte de Mouton avec Moniezia expansa. 

Avant passage. — Le 10 juillet, pas de différence entre nos cultures 
(fig. 18). — Inoculation d’un Cobaye pesant 318 gr. — Le 16 juillet, pèse 
310 gr. Le 20 juillet. pèse 315 gr. et peut être considéré comme indemne, 
résultat qui se maintient dans la suite. 

Premier passage. — Les sacs de collodion, mis le 10 juillet, sont retirés 
le 17. — Le 18 juillet, différence appréciable dans nos tubes (fig. 20). — 
Inoculation d'un Cobaye pesant 465 gr. — Le 19 juillet, mort de l'animal. 
A l'autopsie, péritonite avec liquide abondant dans la cavité abdomi- 
nale 

La culture est alors laissée jusqu'au 1” décembre, ayant été réense- 
mencée seulement le 23 août. Nous reprenons nos expériences. 

Le 2 décembre, légère différence entre nos tubes (fig. 22). — Inocula- 
tion d'un Cobaye pesant 350 gr. — Le 5 décembre, l’animal présente une 
eschare abdominale, pèse 325 gr. — Le 12 décembre, l'eschare suppure, 
poids : 316 gr. — Le 18 décembre, la suppuration continue, le poids est 
encore de 316 gr. — Le 26 décembre, la suppuration diminue, poids : 322 gr. 
— Le 3 janvier, la cicatrisation se fait, poids: 375 gr. — Le 12 janvier, la 
plaie se referme, pèse 399 gr. — Le 18 janvier, l'animal peut être consi- 
déré comme guéri, pèse 412 gr. 

Deuxième passage. — Les sacs de collodion, mis le 4 décembre, sont retirés 
le 11. — Le 12 décembre différence notable entre nos cultures (fig. 24). — 
Inoculation d'un Cobaye pesant 527 gr. — L'animal meurt quelques heures 
après. À l’autopsie, péritonite avec fausses membranes et liquide abon- 
dant. 

Tels sont les résultats obtenus dans nos expériences. Pour les 


rendre plus intelligibles nous les avons résumés dans le tableau 
suivant, indiquant par le signe + les expériences où l'extrait a 
agi commeantibactérien (colonne cultures) et où le Cobayea succom- 


PIE 


ARCHIVES DE PARASITOLOGIE, XI, 1907. 


\ 0 ; 


4 
# 


Joyeux phot. 


DACHE 


ARCHIVES DE PARASITOLOGIE, XI, 1907. PI. VI. 


# 


ELLITTTITT 


» 


une 


D' Ch. Joyeux phot. 


POUVOIR ANTIBACTÉRIEN DES CESTODES 417 


bé (colonne Cobaye). Le signe — indique les résultats contraires. 
Toutefois ce tableau, forcément schématique, ne peut servir que 
de résumé, et il est bon, pour avoir une idée plus juste de notre 
travail, de consulter le détail de nos expériences et nos planches. 
Rappelons que, sur ces planches, la figure 1 représente un tube de 
bouillon témoin non ensemencé. 


ESPÈCES AVANT PASSAGE 127 PASSAGE 2° PASSAGE 
DS RER RENNES One ROSE" 
EMPLOYÉES Cultures Cobayes Cultures Cobayes Cultures Cobayes 

Bacillus mesenterieus vulgatus. | — fig. 2 — — fig. 3 — + fig. 4 + 

Bacille de Schotmüller . . . . fig 5 = + fig. 6 + + fig. 7 2e 

— de Brion-Kayser (Kral).] —fig 8 — + fig. 9 + + fig. 10 + 

— de Brion-Kayser (Netter)] —_fig. 11 —— + fig. 12 — + fig. 13 + 

— de Nocard......... — fig. 14 27 + fig. 15 = + fig. 16 + 

a saprophyte Mouton... . | —fig. 17 = + fig. 19 (+ juillet À + fig. 23 + 
| + fig. 21 | + décembre 

G saprophyle Mouton... —fig.18| — + fig. 20 (+ juillet | + fig. 24 + 
2 | —décembre 


On le voit, nos Microbes rendus pathogènes par passages en sacs 
de collodion, ainsi que le prouvent les inoculations, sont détruits 
par les extraits de Cestodes alors qu'ils ne l'étaient pas aupara- 
vant. Des sept Bacilles employés, le Bacillus psittacorum de Nocard 
nous a seul donné un échec : l'animal étant mort tandis que l'ex- 
trait de Ténia n’agissait pas sur le Microbe. Le Bacillus paratyphi 
Schotmüller, les deux échantillons du Bacillus paratyphi Brion- 
Kayser ont donné des résultats positifs dès le premier passage, 
confirmés par le deuxième. Le Bacillus mesentericus vulyatus n'est 
devenu pathogène qu'au deuxième passage. 

Quant à nos deux saprophytes « et 6, après avoir provoqué une 
réaction dès le premier passage, ils ont agi de façon différente au 
bout de 4 mois. : resté pathogène, a continué à être influencé par 
nos extraits, 6 n'a plus été détruit par nos préparations d'une 
façon aussi évidente, et le Cobaye a guéri, quoiqu'ayant suppuré 
pendant longtemps. Au deuxième passage, ils sont tous deux 
redevenus pathogènes. 


Conclusion. — La conclusion de ces expériences, c'est que les para- 
sites de l'intestin paraissent tendre à la tolérance réciproque. Ainsi 


AS CH. JOYEUX 


que l'ont montré Jammes et Mandoul, expériences que nous avons 
nous-mêmes vérifiées dans notre thèse, ils évoluent ensemble sans 
produire de réactions entre eux. Mais que l’état biologique de l’un 
d'eux vienne à changer et il n’en est plus ainsi. La modification du 
pouvoir pathogène du Microbe paraît jouer un grand rôle dans ces 
réactions ainsi que nous avons essayé de le démontrer par les 
expériences précédentes. 

Nous avons tenté de vérifier ces faits in vivo et d'étudier l'in- 
fluence des Cestodes ou de leurs extraits sur les maladies mico- 
biennes de l'intestin, expérimentales ou spontanées. Les résultats, 
publiés dans notre thèse, ne nous semblent ni assez nombreux ni 
assez caractéristiques pour être rapportés ici. Nous espérons néan- 
moins pouvoir continuer nos recherches et arriver à des résultats 
plus concluants. 


INDEX BIBLIOGRAPHIQUE 


R. BLANCHARD, Substances toxiques produites par les parasites intestinaux. 
Archives de Parasilologie, X, p. 84, 1905. 

L. James, Recherches expérimentales sur la toxicité des Vers intestinaux. 
C. R. Ac. sc. CXXXVIII, p. 1734, 1904. 

L. Jammeset H, MaAnpouL, Propriétés bactéricides dessucs helminthiques. C.R. Ac. 
Sc., CXXXVIIT. p. 329, 1904. Bull. Soc. hist. nat. de Toulouse, 6 juillet 1904. — 
Sur la spécificité des hôtes des Cestodes. C. R. Soc. biol. p. 104-106, 1905. — Sur 
la biologie des Cestodes. C. R. Ac. sc., CXI, p. 271-273, 1905. — Tænias et flore 
intestinale. C. R. Soc. biol., 3 février 1906. 

Ch. Joyeux, Helminthes et Bactéries. Recherches sur l'association biologique 
et l’action pathogène de quelques parasites intestinaux. Thèse de Nancy, 1907. 


HYPHOMYCÈTE DU TYPE ACHORION 
DÉTERMINANT CHEZ L'HOMME DES LÉSIONS TRICHOPHYTOIDES 


- PAR 


Le D' M. TRUFFI 


Bien que les recherches sur les parasites des teignes soient actuel- 
lement très nombreuses, elles laissent encore beaucoup de points 
obscurs dans l'histoire de ces Champignons, et c’est pour cela que 
je désire publier cette note dont le butest de démontrer les rapports 
très étroits qui relient les parasites du groupe Trichophyton à ceux 
du groupe Achorion. 

Mes recherches ont porté sur les cas suivants : 1° cas de folli- 
culite agminée, à foyers multiples, profondément infiltrés de 
l’avant-bras chez un marchand de Veaux ; 2° cas de folliculite agmi- 
née de la lèvre supérieure, chez une femme de la campagne âgée 
de 40 ans; 3° cas de kérion de la barbe avec lésions profondes, dif- 
fuses, végétantes chez un paysan de 37 ans; 4° cas de kérion du 
cuir chevelu, chez le fils du malade de l'observation précédente, 
en foyers multiples, avec lésions intenses, plus graves que toutes 
celles que j'ai vues jusqu'ici; 5° cas de trichophytie érythémato- 
squameuse et vésiculo-pustuleuse des membres supérieurs, de la 
face et du tronc, avec blépharite concomitante (folliculites ciliaires, 
cils cassés) chez un paysan âgé de 14 ans; 6° cas de kérion du dos 
de la main chez un paysan âgé de 27 ans. 

Dans tous ces cas, les malades attribuaient leur affection à une 
contagion par le Veau, mais je dois dire que je n'ai pu moi-même 
constater la maladie chez l'animal. 

Le diagnostic a été confirmé dans toutes les observations par 
l'examen miscroscopique. Dans les squames, le pus, les poils, j'ai 
constamment rencontré un parasite offrant les caractères de Tri- 
chophyton. Dans les poils, le parasite est tantôt ectothrix (poils du 
dos de la main et de l’avant-bras), tantôt endo-ectothrix (poils de la 
barbe du 3% cas, du cuir chevelu du 4° cas et cils du 5° cas) avec 


420 M. TRUFFI 


invasion complète de la substance corticale. Cette dernière locali- 
sation a été en outre vérifiée sur des coupes de tissus (3 cas). 

Des six cas précédents, j'ai isolé, en partant des squames, des 
poils et du pus, un Champignon identique et qui, dans les foyers 
non ouverts et profonds, existait à l’état de pureté; voici quels 
sont ses caractères : 

Colonies se développant lentement, mieux sur les milieux forte- 
ment peptonisés et à la température de 33 à 36°, poussant surtout 
en profondeur, avec ur bouton central grisätre ou légèrement 
jaune et de fines arborisations dendritiques à la périphérie. Après 
passages successifs sur milieux glycosés on note une tendance 
progressive au développement en surface; la colonie est alors 
formée par un bouton large, plus ou moins régulier, en gâteau, rap- 
pelant l'aspect descirconvolutions cérébrales, grisàtre ou jaune sale, 
lisse ou recouvert de poussière, bordé par un liseré de fines ar- 
borisations. Ultérieurement, le développement aérien est de plus 
en plus net et les colonies se recouvrent d’une poussière crème ou 
quelquefois jaune. 

Sur des cultures anciennes, de préférence sur milieux sucrés et 
à l'étuve, on peut voir très nettement de petits flocons de duvet blanc 
parfaitement semblables à ceux que l’on a décrits dans les cultures 
d’Achorion. de Trichophyton et de Microsporum. Ce duvet ensemencé 
sur gélose glycosée, ou mieux sur rave, donne naissance à des 
colonies aériennes, blanches, duveteuses, 

En suivant à l’aide du microscope le parasite dans son dévelop-. 
pement, voici ce que j'ai noté : 

_ Au cours des premières générations, on ne trouve, dans les vé- 
gétations profondes, que des filaments enchevêtrés, des spores sphé- 
riques de 6 à 84, dues à la fragmentation du mycélium, des chlamy- 
dospores et des petitsamas de granulations jaunes, fortement réfrin- 
gentes de 12 à 20 de diamètre, sans aucune membrane périphérique 
évidente. Ces granulations sont situées à l'extrémité ou sur les 
parties latérales des filaments et sont identiques aux corps jaunes 
granuleux décrits par Kräl dans les cultures d’Achorion. Dans le 
bouton aérien, on voit à l'extrémité, ou plus rarement sur le trajet 
des filaments, des éléments plus gros que les spores mycéliennes, 
atteignant jusqu'à 25 & et offrant une incisure centrale en V, qui 
leur donne :'aspect d’une pince d'Écrevisse. Ces éléments semblent 


HYPHOMYCÈTE DU TYPE ACHORION 4921 


dériver d'une chlamydospore, à l’un des pôles de laquelle le proto- 
plasma s’accumule, tandis qu'à l’autre pôle il se produit une fissure 
en V. 

Dans les cultures duveteuses, on voit une fructification par spores 
aériennes, petites, sessiles, piriformes, du type Acladium ou Bo- 
trytis. Sur la rave, j'ai pu voir enfin des éléments allongés rappe- 
lant les fuseaux des Trichophyton et des Microsporum. 

L'inoculation au Cobaye et au Lapin a donné lieu à la formation 
de larges placards de lésoins folliculaires profondes rappelant de 
près les lésions du kérion. Les poils de la région malade étaient en- 
vahis par le parasite, qui se présentait avec les caractères d’un endo- 
ectothrix. C’est faits sont particulièrement remarquables, les parasi- 
tes des teignes donnant presque toujours lieu dansleurs inocula- 
tions aux animaux delaboratoire à deslésions superficiellessèches. 

Tous les caractères de culture du Champignon décrit plus haut 
rappellent ceux des cultures d’Achorion : les premières colonies 
à développement profond ont'le type classique de l’Achorion de 
Kräl, non seulement dans leur aspect macroscopique, mais aussi 
dans leurs caractères microscopiques. Même ramification du my- 

célium, même fragmentation en chapelets de spores, mêmes 
corps granuleux jaunes, décrits par Kräl et qui n’ont pas été 
rencontrés jusqu'ici chez d'autres Hyphomycètes pathogènes. Dans 
les cultures obtenues après repiquages successifs, on observe les 
mêmes caractères que ceux que Sabouraud et moi nous avons 
notés dans les cultures d’Achorion au cours de leur adaptation 
à la vie saprophytique. Le type de sporulation par conidies laté- 
-rales ou en grappes est tout à fait identique à celui que j'ai vu 
dans les colonies du pléomorphisme de l’Achorion. Sur un seul 
point, l’analogie du Champignon que j'ai isolé et de l’A chorion ne se 
poursuit pas, sur celui de l'existence dans les cultures de ce para- 
site des grosses spores mycéliennes en pince d’'Écrevisse. 

Des formations analogues ont bien été décrites par Pelagak dans 
sa huitième espèce de Trichophyton (à cultures jaunes cratéri-. 
formes). Mais alors ces éléments ne se produisent que sur certains 
milieux de culture et ils présentent une disposition en série li- 
néaire tout à fait particulière. Entre l'Hyphomycète décrit par Pe- 
lagak et le nôtre, il existe d’aïlleurs des différences très nettes, 
permettant d'affirmer la non-identité de ces deux Champignons. 


422 M. TRUFFI 


Mais si les caractères de l'Hyphomycète que je viens de décrire 
sont tels qu'il faut le classer parmi les Achorion, les lésions qu'il 
provoque chez l'Homme s'éloignent du type favique et se. rap- 
prochent des altérations inflammatoires aiguës occasionnées par les 
Trichophyton. 

Des faits analogues ont déjà été relatés par d’autres auteurs; 
Bodin, dans un travail sur les teignes du Cheval, a décrit deux 
Hyphomycètes (Trichophyton faviforme à cultures brunes et Tricho- 
phyton faviforme à cultures grises), qui, tout en étant distincts 
de l’Achorion, ont avec lui de nombreuses analogies (dévelop- 
pement plus accentué sur milieux peptonisés que sur milieux 
giycosés, action protéolytique intense, formes de reproduction 
très analogues à celles du genre Oospora); chez l'Homme, ces 
parasites donnent des lésions folliculaires et des lésions superfi- 
cielles vésiculo-pustuleuses. Le même auteur a observé sur le Veau 
une affection trichophytoïde due à un parasite dont les cultures 
sont si analogues à celles de l’Achorion qu'il est «parfois impossible 
de les différencier les unes des autres ». C’est pour cela que, reve- 
nant sur la dénomination de Trichophyton faviforme, Bodin adopte 
celle, proposée par Sabouraud, de Favus à lésions trichophytoïdes. 
Dans l’article Dermatophytes de la Pratique dermatologique, Sabou- 
raud, reprenant la question du classement de ces parasites, semble 
se rallier, bien que l'étude de ces formes mycologiques soit loin 
d’être complète, à la première opinion émise par Bodin, d'après 
laquelle il s'agirait de Trichophyton. Le savant dermatologiste rap- 
pelle à ce sujet, pour appuyer son opinion, que la lésion cutanée 
en ces Cas est nettement trichophytique, que dans le poil le para- 

site présente les caractères des Trichophyton, que sur les vieilles 
cultures trichophytiques en voie de dégénérescence il se dé- 
veloppe quelquefois des tubercules faviques, et qu'enfin les 
cultures d’Achorion peuvent perdre la forme vermiculaire spon- 
gioide. 

Pour être complet, je dois dire encore que Plaut a décrit comme 
cause du kérion un Hyphomycète provenant du Veau qui, d’après 
la reproduction photographique, ressemble beaucoup à celui que 

j'ai isolé des cas rapportés précédemment, mais qui en diffère 
cependant par quelques caractères biologiques (Favusähnliche oder 
Kerionpilze, pl.- VIT, fig. 184). 


HYPHOMYCÈTE DU TYPE ACHORION 493 


Après ce bref exposé, on peut se demander comment il faut 

classer au point de vue mycologique l'Hyphomycète que je viens 
de décrire. Sur ce point, mon opinion difière de celle de Sabouraud. 
Il est évident, en effet, que les lésions à type de kérion appar- 
tiennent cliniquement aux trichophyties; mais, au point de vue 
d’une classification, l’on ne doit pas envisager seulement l’expres- 
sion clinique d'un parasite sur la peau humaine, et il importe de 
tenir compte de ce parasite lui-même. Or, comme le Champignon 
que j'ai isolé offre en ses cultures des caractères qui correspondent 
à ceux de l’Achorion, on est conduit à le ranger à côté de ce der- 
nier et à le considérer comme un Achorion capable de donner des 
lésions du type clinique trichophytique, c’est-à-dire comme un 
Achorion à lésions trichophytoïdes. D'ailleurs, cette question est 
peut-être oiseuse, car les frontières entre les deux groupes parasi- 
taires des Trichophyton et des Achorion n'ont pas de délimitation 
bien nette et paraissent avoir été tracées artificiellement. 
_ En réalité, tous les caractères sur lesquels on a fondé la difté- 
renciation des Trichophyton et des Achorion n'ont pas de valeur 
absolue. Mes recherches et celles de Sabouraud sur le pléomor- 
phisme de l'Achorion ont démontré que les cultures de cet Hypho- 
mycète peuvent aisément perdre leurs caractères distinctifs (végé- 
tation profonde plus abondante à une température élevée et en 
milieux peptonisés, sporulation suivant le type Oospora) et donner 
lieu à d'autres cultures avec des caractères tout opposés et en tout 
semblables à ceux des cultures des Trichophyton (végétation 
aérienne sur milieux sucrés, sporulation suivant les types À cladium 
ou Botrytis). 

D'un autre côté, les recherches de Quincke (Achorion a), de Boer, 
de Buschke (Mansachorion), de Bodin (Achorion quinckeanum) per- 
mettent d'établir que des Hyphomycètes qui nese différencient pas, 
au point de vue morphologique, des Trichophyton peuvent déter- 
miner chez l'Homme ou chez les animaux la lésion spécifique du 
favus, le godet. Je dois même dire que, en comparant mes formes 
pléomorphiques d’Achorion et les cultures de Mansachorion qui ont 

été obligeamment mises à ma disposition par Buschke, je n'ai pu 
déceler aucun caractère bien net de différenciation entre ces 
Champignons. Enfin, les observations de Majocchi et les miennes 
prouvent que l'Achorion peut donner lieu quelquefois sur la peau 


424 M. TRUFFI 


de l'Homme à des altérations inflammatoires qui rappellent de très 
près celles qui sont dues aux Trichophyton. 

Voilà bien des faits qui s'opposent à une différenciation nette 
entre les Achorion et les 7richophyton, puisqu'il existe des analo- 
gies, au point de vue botanique et qu'en outre, au point de vue cli- 
nique, il y a des Champignons appartenant aux Trichophyton qui 
peuvent déterminer des lésions faviques, et inversement que l’on 
observe des parasites du groupe Achorion qui occasionnent des 
lésions cutanées trichophytiques. 

La conclusion qui se dégage des faits précédents, c'est qu’on ne 
peut établir, au point de vue mycologique et comme l'ont fait 
la plupart des auteurs, de distinction réelle et précise entre les 
Achorion et les Trichophyton, car on peut trouver aisément beau- 
coup plus de différences botaniques entre deux espèces de Tricho- 
phyton qu'entre l'Achorion et certains Trichophyton. 

Voilà pourquoi je pense que la question de la classification des 
Hyphomycètes parasites doit être soumise à une révision complète 
et établie sur les faits que nous ont révélés les travaux de ces der- 
nières années et sur des études nouvelles et approfondies du sujet. 
Mais c’est surtout aux mycologues, qui jusqu'à présent ont laissé 
de côté ces études, qu'on pourra demander de nouvelles recherches 
propres à résoudre définitivement le problème. Pour moi, il me 
suffit d’avoir contribué à mettre la question au point, en apportant 
des fait nouveaux. 


INDEX BIBLIOGRAPHIQUE 


PEeLzaGar, Ueber die Morphologie der Trichophytonpilze. Monatshefte fur prakt. 
Dermatol., XXIX, 1899. 

Boni, Les leignes tundantes du Cheval et leurs inoculations humaines. Thèse 
de Paris, 1896. 

Boni, Sur les favus à lésions trichophytoïdes. C. R. Soc. de biol., p. 711, 1896. 

SaBouraAuD, Les trichophyties et la teigne tondante de Gruby. C. R. du 5° Con- 
grès internat. de dermatol., Londres, 1896. 

PLaur, in Kolle und Wassermann’s Hindbuch der pathogenen Mikroorganis- 
men, I, p. 633 et 642. 

Trurri, Les teignes. Giornale ital. mal. vener., 1901-1902. 

SaBouraup, La Pratique dermatologique, article Dermatophyltes. 

Trurri, Un cas de kérion déterminé par l’Achorion. Giornale ital. mal. 


vener., 1902. 


NOTICES BIOGRAPHIQUES 


XVII. — PROSPERO SONSINO 
PAR 


Le D' BRUNO GALLI-VALERIO 
Professeur à la Faculté de Médecine de Lausanne. 


C'est en 1894, à Rome et à l'une des séances du xr° Congrès 
international de médecine, que j'ai fait la connaissance person- 
nelle de Prospero Sonsino. Grand, maigre, droit, la barbe grison- 
nante, l'expression sympathique et douce, l'air très distingué, il 
se révélait d'emblée et aux premiers mots ce qu'il était: un savant 
et un modeste. Il pouvait prendre comme devise un mot du grand 
physiologiste Valentin : 1! faudrait que l'amour de la science 
n'eût d'autre mobile que son progrès et non la vanité de se faire 
connaître. Nous nous liâmes à Rome d'une amitié qui ne devait 
cesser qu'avec sa mort et la correspondance que j'ai échangée avec 
ce savant pendant quelques années restera parmi les souvenirs les 
plus chers de ma vie scientifique. 

Prospero Sonsino est né à Tunis, le 6 août 1835, de parents ita- 
liens ; très jeune encore, il suivit sa famille en Italie (1). Sesétudes 
médicales accomplies à l’université de Pise, son esprit d'aventures 
et de recherches scientifiques le poussa vers l'Orient. De 1860 à 
186% il voyagea et exerca son art en Turquie et en Asie Mineure; il 
fut attaché pendant trois ans au Conseil sanitaire de Constanti- 
nople. Rentré en Italie en 186%, il s'établit à Florence et y dirigea le 
journal de médecine l’?mparziale. Mais lorsqu'éclata l'épidémie de 
choléra de 1865, Sonsino vola au secours des malheureux atteints 
par cette grave maladie à Ancona, Lucera et San Severo (province 
de Foggia). 

Le courage, le zèle, l'abnégation dont il fit preuve en cette occa- 
sion, lui valurent de nombreuses attestations de reconnaissance 
des autorités communales et gouvernementales. Rentré à Florence, 
il y fut nommé membre du conseil provincial de santé de 1870 à 

(1) Je remercie vivement MM. les Professeurs Vachetta et Del Rossi de l'Uni- 
versité de Pise, qui ont bien voulu me fournir des renseignements pour cette bio- 
graphie. 

Archives de Parasitologie, XI, n° 3, 1907. 


12 
(o2) 


426 B. GALLI-VALERIO 


873. Mais l'Afrique où il était né et, parmi les contrées de ce con- 
tinent, l'Egypte surtout, exerçait sur lui une attraction toute spé- 
ciale, car c'était une terre qui offrait au médecin un terrain mer- 
veilleux de recherches. C'est de ce pays que Bilharz écrivait à von 
Siebold, le 4er mai 1851 : « Was die Helminthen im Allgemeinen, auch 
die des Menschen, betrifft, so glaube ich dass Aegypten eines der güns- 
tigsten Länder für ihre Entwickelung und ihr Studium ist. » 

En 1873, Sonsino s’embarque pour l'Égypte où il devait séjourner 
jusqu'en 1885, d'abord comme médecin exerçant, puis comme 
micrographe du laboratoire khédivial du Caire. Il s'y voue 
à l'étude des Helminthes de l'Homme et des animaux, il y fait ses 
plus importantes découvertes : « Sie haben in Aegypten, lui écrivait 
Leuckart, le 2 février 1877, reiche (relegenheit zu den interessantesten 
helminthologischen Studien. Ich beneide Sie fast darum, und zweifle 
nicht, dass Sie uns noch mit zahlreichen wichtigen Tatsachen bekannt 
machen werden. Schon jetzt verdanken wir Ihnen vieles. » 

Les recherches scientifiques n’étouffèrent pas l'homme de cœur 
que s'était montré Sonsino en 1865, lors de l'épidémie de choléra 
en Italie. Ainsi, pendant la mémorable insurrection de 1882, il fut 
un des rares Européens qui refusèrent de quitter le Caire et il 
resta à la tête de l'hôpital européen de cette ville, hôpital qui de 
cette façon ne Îut pas fermé. Je me rappelle toujours comment, 
douze ans après ces événements, il me racontait, dans un lan- 
gage simple et expressif, les moments de danger que courut l'hô- 
pital, l'entrée brusque d’une des infirmières dans une salle de ma- 
lades en disant qu'un officier anglais demandait à parier au direc- 
teur, son étonnement profond, car il croyait les Anglais bien loin 
du Caire, sa joie de se trouver en effet vis-à-vis d'un officier qui 
avait devancé avec une patrouille le reste des troupes et venait 
d'entrer au Caire. Ses malades n'avaient plus rien à craindre, Le 
courage montré en cette occasion par Sonsino lui valut la décora- 
tion d'officier de la couronne d'Italie. 

Puis l'épidémie de choléra éclata, et il se mit à soigner les ma- 
lades européens et indigènes, dévouement qui lui valut des témoi- 
gnages de vive reconnaissance du Khédive. De 1885 à 1886 il reprit 
sa vie de voyages, et visita comme médecin de la navigation géné- 
rale italienne, l'Amérique du Sud et l’'Extrême-Orient, étudiant et 
observant partout. 


+9 


NOTICES BIOGRAPHIQUES. — P. SONSINO . 427 


Rentré en Italie, il fit à l’Université de Pise un cours libre de 
parasitologie. En 1895, il fit un long séjour en Tunisie pour des 
études et des recherches helminthologiques et en 1897 il visita de 
nouveau l'Égypte. 


Sonsino passa les dernières années de sa vie à Montepiano, petit 


atal… 263 Cfa Re Sonulere) 


ProsPero Soxsixo en 1893. 


village de l’Appenin de la Toscane et c'est là qu'après une vie 
bien remplie il cessa de vivre le 19 novembre 1901. 

Il était membre de plusieurs Sociétés savantes italiennes et 
étrangères, parmi lesquelles je citerai l'Epidemiological Society de 
Londres et l’Institut Égyptien. Il est mort avec le regret profond 
d’avoir quitté l'Égypte, pays où il avait tant et si utilement tra- 
vaillé pour la science et pour l'humanité. Il me le dit à Rome, pen- 
dant que son regard se perdait là-bas vers le pays où il aurait pu 


“l 
is 

# 
158 


428 B. GALLI-VALERIO 


se créer, s’il y était resté, une situation plus brillante que celle qui 
l’attendait en Italie. 

L'œuvre de Prospero Sonsino comprend 139 travaux, dont 68 se 
rapportent à des sujets très variés de médecine, chirurgie, hygiène, 
et 70 traitent d’helminthologie. Je dirai quelques mots de ces 
derniers. 

Un des premiers mérites de l'œuvre helminthologique de Son- 
sino a été de démontrer l'importance de l’étude des Helminthes, non 
seulement au point de vue scientifique, mais aussi au point de 
vue pratique. Cet effort mérite d'être signalé, surtout si l'on pense 
qu'il était fait à une époque où l’on ne voyait que les Bactéries 
et où l’on souriait lorsqu'on parlait du rôle pathogène des para- 
sites animaux. Les Plasmodies paludiques n’avaient-elles pas été 
accueillies avec le plus grand scepticisme ? 

Les Helminthes, pourtant si importants pour la pathologie de 
l'Homme, étaient complètement méconnus, ou considérés comme 
ne jouant aucun rôle. Voici ce que disait Sonsino, dans une com- 
munication faite à l'Institut Égyptien en 1875 : 

« La découverte faite par moi du Schistosomum hæmatobium à 
l'hôpital de Casr-el-Ain, fut comme une première découverte pour 
les médecins de cet hôpital. Plusieurs se rappelaient l'avoir vu, ou 
en avoir entendu parler à l’époque de Bilharz, mais pas un seul 
n'en avait une idée claire et exacte. On en avait gardé le souvenir 
comme par tradition et avec les années ce souvenir se perdait. 
Quand je demandai de faire des autopsies à l'hôpital pour le re- 
chercher, le désir de voir ce Ver se réveilla chez plusieurs, mais 
pas un ne fut capable de faciliter ma recherche et quelques-uns 
disaient que ce Ver n'était qu'une mystification. » Mohammed-Ali 
directeur de l'École de médecine et de l'hôpital Casr-el-Ain, disait 
que le Schistosomum hæmatobium n'avait rien à faire avec l'héma- 
turie d'Égypte (1)! 

Mais Sonsino était profondément convaincu de l'importance. 
pratique de l'étude de l'helminthologie et, en 1885, il écrivait à pro- 
pos de l'Égypte : « Le nombre toujours croissant des personnes qua 
s'intéressent ici à l'helminthologie permet d'espérer de nouveaux progrès 


(1) Contributo all’entozoologia d'Egitto. Mémoires de l’Institut Égyptien, 
Le Caire, 4896, p. 285. 


| 


NO 


SONSI 
sur son lit de mort (19 novembre 


PROSPERO 


j 


901 


1 


430 B. GALLI-VALERIO 


pour le bien de l'humanité souffrante » (1). Pour lui, les Helminthes 
ne jouaient pas exclusivement un rôle direct comme agents pro- 
ducteurs de maladies, mais de même que les autres parasites ani- 
maux, un rôle prédisposant, facilitant le développement des ma- 
ladies bactériennes. Voici en effet ce qu'il écrivait en 1896 (2) : 
«So if there is a branch of pathology that is worthy the attention of 
the rulers in Egypt, for being cultivated in a special manner, it is z00- 
parasitology. The importance of this branch of medicine being consi- 
dered in relation to the occurrence of epidemics of cholera, to whose 
extension severity and large death-rate this patients contribute, I 
cannot doubt the alterations that obtain in the intestines of a large 
number of natives in consequence of having been subjected to dysentery, 
Bülharzia, Ankylostoma, Rhabdonema which, by themselves, are already 
common as ordinary causes of morbidity and mortality in Egypt and 
in Africa, are an additionnal cause of mortality from cholera. » 

Toujours dans cet ordre d'idées, Sonsino émit l'hypothèse que 
l'épizootie de typhus du cheval qui, en 1876, détruisit en Égypte 
tous les Équidés, était due à l’action du Sclerostomum armatum et 
Sclerostomum tetracanthum (3). Comme nous le savons aujourd'hui, 
ce rôle important des Helminthes est admis par tous ceux qui s'oc- 
cupent de l’étiologie des maladies parasitaires de l'Homme et des 
animaux. 

Un autre point, sur lequel Sonsino insistait dans tous ses tra- 
vaux, est celui de la présence possible des Helminthes des animaux 
chez l'Homme. C’est ainsi qu'il signalait (4) la possibilité de l’infes- 
tation de l'Homme par l'Opisthorchis felineus Riv., qui existe pres- 
que partout chez le Chien et chez le Chat et que Vinogradov avait 
trouvé, en 1892, chez l'Homme en Sibérie et décrit comme Distoma 
sibiricum. Nous savons que, cinq ans plus tard, Askanazy (5) con- 
firmait les prévisions de Sonsino en découvrant ce Trématode 
chez l'Homme à Kônigsberg. 

Sousino concluait son travail en disant, qu'il lui semblait dé- 
montrer l'importance de l'étude des parasites animaux, non seulement 
indigènes mais aussi exotiques, non seulement de ceux qui aujourd'hui 

(1) Zbidem, p. 307. 

(2) The Lancet, 18 juillet 1896. 

(3) Contributo ali’entozoologia, p. 333. 


(4) Gazzelta degli ospedali e delle cliniche, n° 111, 1895. 
(5) Centralblatt fur Bakteriologie, XXVTII, p. 491, 4900. 


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432 B. GALLI-VALERIO 


sont connus comme capables d'infester l'Homme, mais aussi de ceux 
qui, aujourd'hui parasites seulement des'animaux, peuvent l'être demain 
de l'Homme. 

Pour Sonsino, les études helminthologiques devaient avoir pour 
base la recherche minutieuse et l’expérimentation. 1! faut sortir, 
disait-il(1), dela routine des autopsies cadavériques ordinaires, car pour 
trouver un Helminthe, il ne faut pas attendre qu’il tombe par hasard, 
sous nos yeux, mais il faut le chercher avec tous les moyens dont nous 
pouvons disposer. Il considérait l’expérimentation comme indispen- 
sable pour résoudre bien des questions d'helminthologie : les in- 
ductions ne suffisent pas pour la solution de ces problèmes, il est encore 
nécessaire de faire des recherches expérimentales (2). Et il insistait vi- 
vement sur l'usage du microscope de la part du médecin, surtout 
pour l'examen des matières fécales, des urines, des crachats, etc., 
au point de vue de la recherche des œufs d'Helminthes. 

Ceci dit en général sur l’œuvre helminthologique de Sonsino, 
passons en revue quelques-unes de ses recherches les plus im- 
portantes. 

Ses études sur Schistosomum hæmatobium (Bilharz) ont été des 
plus intéressantes (3). Cet important parasite de l'Homme, décou- 
vert et décrit en 1852 par Bilharz (4), avait été, comme je l'ai dit, 
presque complètement oublié. C’est Sonsino qui, l'ayant retrouvé 
en 1874 à l'hôpital de Casr-el-Aïn, attira de nouveau sur lui l’atten- 
tion du corps médical et prépara le terrain aux recherches des 
observateurs quile suivirent en Égypte. Il fut le premier à signaler 
ce parasite chez la femme, chez laquelle ni Bilharz, ni Griesinger 
ne l'avaient constaté. Il signala aussi d'une façon certaine l’exis- 
tence du Schistosomum hæmatobium en Tunisie et, en particu- 
lier, à Gafsa en 1893 (5). Il fit aussi des expériences pour étudier le 
cycle évolutif et le mode de pénétration dans l'organisme humain 
de ce redoutable parasite, sans pouvoir arriver, comme du reste 
tous les autres observateurs, à résoudre cet important problème. 


(1) Gazzelta degli ospedali e delle cliniche, n° 411, 1895. 

(2) Contributo all’entozoologia, etc., p. 317. 

(3) Rend. della R. Ac. delle scienze fisiche e matematiche di Napoli, fase. 6, 
1874. — L'Imparziale, n°° 16 et 17, 1874; n° 24, 1875; n°° 1 et 2, 1876. — 1l Mowi- 
mento, VI, p.305-321, 1874. — Veterinarian, XLIX, p. 223, 1876. 

(4) Zeitschrift fur wiss. Zool., I, p. 453, 1852. 

(5) Atti dell XI° Congresso internazionale di med. a Roma, II, p. 211, 18% 


NOTICES BIOGRAPHIQUES. — P. SONSINO 433 


On peut dire qu'il a laissé une véritable monographie de la bilhar- 
ziose. 

Peu de temps après avoir trouvé de nouveau en Égypte 
le Schistosomum hæmatobium, ily découvrait une nouvelle espèce 
de ce même genre : Schistosomum crassum, chez les Bovidés (1) et 
plus tard chez le Mouton (2). Cet intéressant parasite fut ensuite 
retrouvé anx Indes par Bomford (3), en Sicile par Grassi et 
Rovelli (5) et par Barbagallo (4), en Sardaigne par Sanfelice et 
Loi (6). A cause de la forme des œufs, Sonsino n'hésita pas à 
différencier cette espèce du Schistosomum hæmatobium, auquel 
elle ressemble beaucoup. Presque à la même époque, il dé- 
couvrit un autre Trématode très intéressant : (Gastrodiscus ægyp 
tiacus du gros intestin et de l’iléon du Cheval (7), retrouvé en- 
suite en Sénégambie, en Assam et à la Guadeloupe chez les 
Équidés et qui, dans certains cas, semble provoquer des troubles 
très graves et mortels. 

Il découvrit aussi en Égypte les embryons de Filaria Ban- 
crofti dans le sang de l'Homme, 2 février 187% 8), deux ans 
après que Lewis les eut trouvés dans le sang de l'Homme aux 
Indes; il en étudia le cycle évolutif chez Culex pipiens, cycle 
évolutif qui venait d'être décrit par Manson en Extrême-Orient (9). 
Il avait au début considéré les embryons trouvés dans le sang de 
l'Homme en Égypte comme différents de ceux observés par Lewis 
et, pour cette raison, il leur avait donné le nom de F. sanguinis 
hominis ægyptiaca ; mais il reconnut ensuite qu'il s'agissait seule- 
ment d'embryons de F. Bancrofti qui avaient perdu leur gaine 
d’enveloppe. 

Je signalerai enfin les nouvelles espèces d'Helminthes signalées 


(4) Rend. della R. Accad, di scienze fis. e mut. di Napoli, 1876. 

(2) C. R. du Ve: Congrès international de méd. à Genève, 1877, p.651, 1878. 

(3) Quarterly Journal of vet. sc. in India, p. 345, 1887. 

(4) Rend. della R. Ac. dei Lincei, IV, 1888. 

(5) Atti dell’Accademia Giolnia di Sc. nat. in Catania XIT. 

(6) Di alcune infezioni del bestiame trovate in Sardegna nel quadriennio, 
1892 96, Cagliari, 1897. 

(7) Veterinarian, febr. and march 1877. Monitore Zoologico, 1895. 

(8) Rendiconti dell’Accad. di sc. fis. e mat. di Napoli fase. 3. marzo 1876. — 
L'Imparziale, 1876, p.272— Inst. Egyptien, I, 1877. L’'Imparziale, p. 297, 1877. 
C. R. du V* Congrès international de médecine de Genève, p.651, 1877. Bulletin 
de l'Institut Egyplien, p. 118, 1877. 

(9) Tansact. of the Linn. Soc. of London, IT, p. 10 et 367, 1884. 


434 B. GALLI-VALERIO 


par Sonsino chez le Caméléon et les Amphibies de Tunisie (1), chez 
des Oiseaux et des Reptiles d'Égypte (2), chez Salamandrina perspi- 
cillata (3), puis ses études sur la distribution géographique des 
Helminthes en Tunisie (4) où il signale Uncinaria duodenalis à Gabès 
et à Gafsa et Schistosomum hæmatobium à Gafsa et près du chott 
el Gerid; ses recherches sur les Cercaires des Gastéropodes des 
environs de Pise (5), ses observations sur Hymenolepis nana (6) et 
enfin ses recherches sur les ténifuges (7). 

Je n’en finirai pas avec l’œuvre de Sonsino sans mentionner 
l'intéressant aperçu historique sur les études helminthologiques 
en Égypte, qu'il a publié dans les Mémoires de l'Institut Egyp- 
tien (8) : il y expose les causes les plus importantes qui peuvent 
favoriser la dissémination des Helminthes dans cette contrée. 

J'ai parlé rapidement de l'Homme et de son œuvre. Pour bien 
apprécier l’un et l’autre, il faut savoir que Sonsino a presque 
toujours travaillé dans des conditions peu favorables. En effet, 
pendant un séjour de douzeans en Égypte. il ne put en passer que 
deux (1883-1885) au laboratoire khédivial du Caire. Il a dû prati- 
quer ses recherches de ci, de-là, à Zagazig, à Benha, à Alexandrie, 
etc. Il rencontrait des difficultés de toutes sortes pour faire des 
autopsies; il devait les effectuer avec des instruments insuffisants, 
à la campagne, souvent sur le sol, sous un soleil brûlant, à peine 
abrité par l'ombre d'un arbre, harcelé par les Mouches ou par les 
Moustiques, sans de bons réactifs pour fixer les Helminthes ré- 
coltés (9). 

Après son retour en Italie, sa collection était restée en grande 
partie au Caire et il ne put plus l’étudier. Il lui manqua du resteen 
Italie une chaire et un laboratoire. Il y arriva en effet à un moment 
où, comme je l'ai dit, les parasites animaux et surtout les Helmin- 
thes étaient considérés comme ayant peu d'importance pour la 
pathologie de l'Homme. En dehors des laboratoires de zoologie et 


(1) Processi verbali della Soc. tosc. di sc. nat., 6 maggio 1894. 

(2) Mon. zool. ital., 1895. — Proc. verb. etc. 12 maggio 13 gennaio 1889. 

(3) Proc. verb. etc., 1896. 

(4) Atti. dell XI° Cong int. di. med. Roma, II, p. 214, 1894. 

(5) Proc. verb. etc., 1897. 

(6) Riv. ital. di clin. med., n° 8 e 9,1891. — Boll. della Soc. med. pisana, I. 
(7) Lo Sperimentale, sez. clinica, XIXe 

(8) Contr. all’entozoologia etc., p. 286. 

9) fbidem, p. 333. 


NOTICES BIOGRAPHIQUES. — P. SONSINO 435 


des Ecoles vétérinaires, personne ne s’en occupait. Parler d’une 
chaire d'helminthologie appliquée à la médecine, aurait été chose 
absolument contraire aux règlements. [Il est vrai que l'arbitraire 
des ministres a créé depuis des chaires qui n'ont jamais existé; 
mais : 

Vuolsi cosi colà dove si puote 

Cio che si vuole e più non domandare. 


et Sonsino n'était pas un intrigant. Il resta sans chaire et sans 
laboratoire. Dans les derniers temps de sa vie, dans le petit village 
de Montepiano, il a dû redire les paroles de son concitoyen F. Pa- 
cini : Quand mes découvertes auront fait le tour de l'Europe et, rentrant 
en Italie sous forme étrangère, seront acceptées comme des dogmes, je 
dormirai dans le cimetière de Trespiano. 

Maintenant que les études helminthologique appliquées à la 
médecine et surtout à la médecine tropicale se réveillent partout, 
l'œuvre de Prospero Sonsino sera plus appréciée qu’elle ne le fut 
jusqu'à présent, et tous ceux qui travaillent aux progrès de la 
parasitologie ne l’oublieront pas. 


TRAVAUX HELMINTHOLOGIQUES DE P. SONSINO. 


1. Ricerche intorno alla Bilharzia hæmatobia in relazione colla ematu- 
ria endemica dell Egitto e nota intorno and un Nematoideo trovato nel 
sangue umano. Rendiconto della R. Accad. delle sc. fis. e mat. di Napoli, fase. 
6, 1874. — Imparziale, n° 16 e 17, 1874, — Movimento (Napoli), VI, p. 305, 
321, 1874. — Veterinarian, XLIX, p. 233, 1876. 

2. Della Biharzia hæmatobia e delle alterazioni anatomo-patologiche che 
induce nell'organismo umano, loro importanza comme fattori della mor- 
bidità et mortalità in Egitto, con cenno sopra una larva d’Insetto parassita 
dell’ Uomo. Imparziale, n° 24, 18%; n° 8 e 9°, 1876. — Veterarian, XLIX, 
p. 233, 1876. 

3. Communicazione sulla Filaria sanguinis hominis ægyptiaca. Rend. R. 
Acc. sc. fis. e mat. di Napoli, fasc. 3, 1876. — Imparziale, p. 272, 1876. 

4. Intorno ad un nuovo parassita del Bue (Bilharzia bovis). Rend. R. Acc. 
sc. fis. e mat. di Napoli, fase. 5, 1876. 

5. Consigli al popolo per prevenire i disturbi prodotti da un Verme che 
altera gli organi orinari. Giornale la Finanza di Allessandria d'Egitto e in 
arabo nel giornale Roda el madares, pubblicazsione bimensile del Ministero 
della pubblica istruzione d'Egitto, 1876. 

6. On theentozoa of the Horsein relation to the late egyptian equine pla- 
gue. Veterinarian, 1877. 


436 B. GALLI-VALERIO 


7. Sugli ematozoi come contributo alla fauna entozoica egiziana. Institut 
égyptien, 13 janvier 1877. — Imparziale, p. 297, 1871. 

8. Rendiconto di una comunicazione verbale (sopra elminti osservati in 
Egitto) alla Società medico-fiorentina nella seduta del 20 maggio 1877. 
Imparziale, p. 317, 1877. 

9. Nouvelles recherches sur les Hématozoaires de l'Homme en Égypte. 
Compte-rendu du Congrès périodique internat. des sc. méd., 3° session, 
Genève, p. 651, 1877. 

10. L'Anchilostoma duodenale in relazione coll'anemia progressiva per- 
niciosa. Imparziale, p. 227, 1878. 

11. Sull’Anchilostoma duodenale. Imparziale, 1878. 

12. Risposta all’articolo critico alla nota sull’Anchilostoma duodenale in 
relazione all’anemia progressiva perniciosa. Imparziule, p. 487, 1878. 

13. Sull’Anchilostoma duodenale in riposta al Prof Sangalli. Imparziale, 
p. 609, 1878. 

1%. Sull’anchilostomiasi. Imparziale, p. 641, 1880. 

15. La Filaria sanguinis hominis et son rôle pathologique. Bull. de l'Ins- 
titut égyptien, (2), p. 118, 1881. 

16. Filaria sanguinis hominis, lymphocele, lymphuria and other asso- 
ciated morbid disorders vith a hint of other Worm diseases in Egypt. 
Medical Times and Gazette, may 1882. — Transactions of the Epidemio- 
logical Society of London, I, 148. 

17. À new series of cases of Filaria sanguinis parasitism observed in 
Egypt with the results of experiments on filariated suctorial Insects. 
Medical Times and Gazette, 22-29 sept., 13 oct. 1883. 

18. Il ciclo vitale della Filaria sanguinis hominis. Processi verbali 
della Società toscana di scienze naturali residente in Pisa, 1884. 

19. Di una particolarità di struttura di certe Cercarie, cellule a baston- 
cini e della sua significazione funzionale. Processi verbali della Soc. Losc. 
di sc. nat. 1n Pisa, 1824. — Archives italiennes de biologie, VI, p. 57. 

20. Della emottisi da Distoma endemica in Giappone e in Formosa in 
confronto colla ematuria da Bilharzia endemica in Egitto e in altre con- 
trade africane. Lo Sperimentale, 1884. 

21. La Fasciola epatica e il suo ciclo vitale. Natura, n° 32, 1884. 

22. Contro lo sviluppo della Fasciola epatica nelle gregge. Natura, 
n° 47, 1884. 

23. La Filaria sanguinis hominis osservata in Egitto, esperimenti intor- 
no al suo passaggio nelle Zanzare e in altri Insetti ematofagi. Giornale 
della R. Accademia di medicina di Torino, fasc. 8, 1884. 

24. Ricerche sullo svilupo della Bilharzia hæmatobia. Giorn. R. Accad. 
di med. di Torino, fasc. 8, 1884. 

25. Aperçu sur les études helminthologiques en Égypte. Bull. de 
l'Inst. égyptien, (2), p. 146, 1885. 

26. The treatment of Bilharzia disease. British med. Journal, 1885. 

27. Notizie elmintologiche. — I. Sul ciclo vitale di un Nematode ematozoo 


VS 
n 


NOTICES BIOGRAPHIQUES. — P. SONSINO 437 


del Cane. — II. Rictularia plagiostoma e specie affini. Processi verbali 
della Soc. tosc. di sc. nat. Pisa, 1888. — Archives vtal. de biologie, X, p.190. 

28. Le condizioni di Massaua per rispetto alla vita e diffusione di certi 
Elminti perniciosi all’ Uomo, in paragone a quelle dei paesi dove questi 
Elminti sono già conosciuti. Processi verb. della Soc. tosc. di sc. nat. 
Pisa, 1888. 

29. Ricerche sugli Ematozoi del Cane e sul ciclo vitale della Tenia cucu- 
merina. Mem. della Soc. tosc. di sc. nat. Pisa, 1888. 

30. Anchilostomiasi complicante clorosi. Osservazioni cliniche con re- 
lative considerazioni. Lo Sperimentale, 1888. 

31. Sull'anchilostomiasi. Lavori del 1°. Congresso di medicina interna 
tenuto in Roma nell'octobre 1888. Milano, Vallardi, 1889; cf. p. 381. 

32. Notizie elmintologiche. Processi verbali della Soc. tosc. di sc. nat. 
Pisa, 1889. 

34. Studi e notizie elmintologiche. 1bidem, 1889. 

35. Anchilostomiasi nei dintorni di Pisa e il timolo contro’il Tricocefalo. 
Rivista generale italiana di clinica medica, 1889. 

36. Importanza dell’esame degli escreti per la diagnosi e conveniente 
cura delle malattie da Entozoi. Lavori del 2 Congresso di medicina in- 
terna di Roma nell'anno 1889. Milano, Vallardi, 1890; cf. p. 379. 

37. Sull’ Anchilostoma duodenale nel! Uomo nella provincia di Pisa. 
Giornale della Soc., fior. ntina d’igiene, 1889. 

38. Perche i motaioli delle fabbriche di mattoni vanno soggetti a man- 
canza di sangue e modo di evitare questo male. Istruzione popolare. Gior- 
nale della Soc. fiorentina d’igiene, 1889. 

39. L’anemia, il beriberi e l’Anchilostoma (nota critica). Rassegna gene- 
rale ital. di clinica medica, n° 8 et 9, 1890. 

40. Studie notizie elmintologiche. Proc. verb. Soc. toscana disc. nat., 1890. 

41. Notizie di Trematodi della collezione del Museo di Pisa.Z1bidem, 1890. 

42. Un nuovo Distoma del sotto-genere Polyorchis Stossich, Distomum 
formosum mihi. Ibidem, 1890. 

43. Un nuovo Heterakis del Gallus domesticus, Heterakis differens mihi. 
Ibidem, 1890. 

44. Di un nuovo Trematode raccolto dal Pagrus orphus. Cenno prelimi- 
nare. lbidem, 1890. Archives italiennes de biologie, 1891. 

45. Notizie di Trematodi e Nematodi della collezione del Museo di Pisa. 
Ibidem, 1890. 

46. Notizie di parassiti. Zbidem, 1891. 

47. Importanza della zooparassitologia medica e specialmente degli zoo- 
parassiti come fattori di malattie. Prelezione ad un corso di parassitologia 
letto nella scuola medica dell’ Università di Pisa il 12 gennaio 1891. Lo 
Spallanzant, fasc. 12, 1891. 

48. Sull’ Octocotyle (Vallesia) striata Parona e Perugia.Zool. Anzeiger,1891. 

49. Tre casi di Tænia nana nei dintorni di Pisa. Rivista ital. di clinica 
medica, III, 1891. 


438 B. GALLI-VALERIO 


30. Necessità di misure atte ad impedire la diffusione della malattia da 
Anchilostoma. Salute pubblica di Perugia, 1891. 

51. Parassiti del Mugil cephalus e di altri Pesci della collezione del 
Museo di Pisa. Proc. verb. della Società tosc. di scienze nat., 1891. 

52. Tre casi di malattia da. Rhabdonema intestinale, o rabdonemiasi. 
Riv. gener. ital. di clinica medica, n° 12 et 13 suppl., 1891. 

53. Di un nuovo Microcotyle dell” Umbrina cirrhosa, Microcotyle Pan- 
cerii. Cenno preliminare. Proc. verb. della Soc. tosc. di scienze nat., 1891. 

54. The principal and most efficacious means of preventing the spread 
of entozoal diseases. Internat. Congress of hygiene and demography, Lon- 
don, 1891. 

55. Sul Distomum ovocaudatum Vulpian. Monitore zool. ital., 1893. 

56. Confronto tra gli Entozoi dell’ Uomo in Egitto e in Tunisia. Con- 
gresso di medicina di Roma, Il, p. 211; VI, p. 97. 

57. Rivendicazione a proposito di una memoria del Sig. Cerfontaine sul 
genere Anthocotyle. Monitore 3001. ital., 1895. 

58. Di alcuni Entozoi raccolti in Egitto finora non descritti. Monitore 
zool. ital., 1895. é 

59, Contributo alla entozoografia egiziana. Mémoires de l'Institut Egyp- 
tien, p. 285, 1895. 

60. Di alcuni Distomi comuni all’ Uomo e a certi Carnivori, e del peri- 
colo della loro diffusione. Bollett. della Soc. med. pisana, 1, 1895. 

61. Considerazionisuirimedi controle Tenie intestinali esopra altri par- 
ticolari riguardanti le Tenie dell Uomo. Bollettino Soc. med. pisana, 1895. 

62. Nuove osservazioni di Tæma nana. Bollettino della Soc. med. pisa- 
na, 1, 1895. 

63. Del Gastrodiscus del Cavallo e di alcuni Amfistomidi esotici poco 
conosciuti cn poroposta di modificazione nella classificazione degli Am- 
fistomidi. Monitore 3901. ital., 1895. | 

64. Sui parassiti dell’ Uomo, con un nuovo caso di Tæmia flavopunctata 
Weinland. Centralblatt für Bakteriol., XXX, p. 937. 

65. La Filaria nel sangue, nelle orine e nelle feci di un Umbro? Clinica 
moderna, 1896. 

66. Forme nuove, o poco conosciute, in parte indeterminate d'Entozoi 
raccolti o osservati in Egitto. Centralblatt für Bakteriol., XX, p. 437. 

67. The life history of Fularia Bancrofti in the body of Mosquito. Bri- 
tish med. Journal, 1900. 

68. Ankylostoma in northern Europa. Janus, 1900. 

69. À case of Filaria sanguinis hominis observed in Egypt in negro. 
Physician and surgeon, 1900. 

70. Bilharzia ova, as found in the urine sediment in the urinary blad- 
der, in intestine. Physician and surgeon, 1900. 

71. Colorazione accidentale di strobila di Tænia saginata Güze. Archives 
de Parasitologie, IV, p. 222, 1901. 


PARASITISME DU DIPYLIDIUM CANINUM 
DANS L’ESPÈCE HUMAINE 
A PROPOS D'UN CAS NOUVEAU 


PAR 


Le Professeur R. BLANCHARD 


Dans le courant d'octobre 1906, M. le Dr H. Papillon, médecin 
des hôpitaux, a eu l’amabilité de me remettre un parasite évacué 
par un enfant de dix mois. Cet Helminthe consistait en deux frag- 
ments d’un même Cestode, atteignant ensemble une longueur de 
50 centimètres exactement. Le plus petit fragment est long de 
7 centimètres; il débute par un cou très grêle, la tête faisant dé- 
faut. Le plus long mesure 43 centimètres; il comprend un bon 
nombre d’anneaux mûrs, ayant l'aspect de graines de Concombre 
et pourvus chacun d'un double pore génital. Il s'agit du Dipyli- 
dium caninum (Linné, 1758). Notre certitude à cet égard n'est pas 
basée seulement sur la grande taille du parasite, ainsi que sur l’as- 
pect général et la dimension de ses anneaux; elle résulte encore 
de l'étude anatomique de ces derniers. | 

Nous avons détaché le premier et le dernier anneau du grand 
fragment, et leur étude a pleinement confirmé notre détermina- 
tion : en particulier, les œufs sont larges de 33 à 42 », soit de 37 
en moyenne ; ils sont rassemblés en nombre variable, le plus sou- 
vent de 8 à 15, dans les diverses capsules utérines; l’oncosphère a 
une dimension moyenne de 26 y. L'étude d’un anneau parvenu à 
maturité sexuelle n'aurait rien ajouté à notre conviction; aussi 
avons-nous reculé devant la nécessité de briser encore notre spéci- 
men, si remarquable par sa belle dimension et si précieux comme 
pièce de collection et de démonstration. 11 a été présenté à l'Aca- 
démie de médecine, dans sa séance du 7 mai 1907, puis déposé 
dans les collections du Laboratoire de Parasitologie (collection 
R. Blanchard, n° 919). 

Contrairement à l'opinion courante, D. caninum est loin d’être 
un Helminthe exceptionnel dans l'espèce humaine ; il ne s’observe 
pas seulement chez l'enfant, mais aussi chez l'adulte. A l’occasion 


440 R. BLANCHARD 


du cas nouveau qui s'offrait à nous, il nous a paru opportun de 
faire une étude d'ensemble de ce parasite, encore trop peu connu 
des cliniciens, de préciser ses caractères zoologiques, de recher- 
cher avec quelle fréquence et dans quelles conditions il s’observe 
chez l'Homme, s'il cause quelques accidents morbides et quelles 
mesures prophylactiques doivent être adoptées contre lui. 

Ce Ver est, à proprement parler, un parasite des Carnivores; on 
ne le trouve qu'accidentellement chez l'Homme, mais les condi- 
tions de cette transmission fortuite sont fréquemment réalisées. I] 
appartient à un groupe assez artificiel de Tæniadae, dont Wardell 
Stiles a fait la sous-famille des Dipylidiinae; nous donnerons tout 
d'abord la diagnose de cette sous-famille. Nous aborderons ensuite 
l'étude spéciale du genre Dipylidium et donnerons une caractéris- 
tique sommaire des espèces qui le composent : une telle étude est 
seule capable de conduire à une détermination précise d'un pa- 
rasite donné. 


Sous-famille des Dipylidiinae Stiles, 1896. 


Diagnose. — «Téniadés : ventouses inermes. Rostre armé, rare- 
ment absent. Pores sexuels latéraux, simples ou doubles et oppo- 
sés. Organes génitaux en série simple ou double dans les divers 
segments. Utérus ordinairement divisé en sacs ovigères ou entière- 
ment atrophié, les œufs étant alors libres dans le parenchyme. 
OEufs à coques minces et transparentes, avec ou sans appendices. 
Formes larvaires (Cysticercoïdes) chez les Arthropodes et les Mol- 
lusques. Forme adulte chez les Mammifères, les Oiseaux et les 
Reptiles. » — Stiles. 

Genre type : Dipylidium Leuckart, 1863. Autres genres : Amæbo- 
tænia, Choanotænia, Cotugnoa, Dilepis, Hymenolepis, Monopylidium, 
Nematotænia, Oochoristica et Panceria. Les genres Dipylidium et 
Hymenolepis sont seuls représentés chez l'Homme. 


Genre Dipylidium Leuckart, 1863, 


Diagnose. — Dipylidiinés de taille moyenne ou petite. Tête pour- 
vue d'un rostre rétractile, armé de plusieurs couronnes de cro- 
chets ayant la forme d'aiguillons de Rosier, le manche et la garde 


DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 441 


étant réduits à une base plus ou moins discoïde, sauf certains cas 
exceptionnels (D. Trinchesei); parfois aussi, des crochets existent 
sur la partie antérieure de la tête, autrement dit sur la paroi 
externe et dans le fond de l'infundibulum céphalique (D. echinor- 
rhynchoides). Ventouses inermes. Chaqueanneau renferme deux ap- 
pareils reproducteurs, disposés de part et d'autre de la ligne mé- 
diane, constitués chacun sur le même plan général que chez les 
Tænia et aboutissant chacun à un sinus génital latéral; à première 
vue, les Dipylidium se reconnaissent donc à ce que chacun de leurs 
anneaux présente deux pores sexuels symétriques et latéraux. 
mais il ne faut pas perdre de vue que ce caractère ne leur est nul- 
lement particulier. 

Testicules très nombreux,compris surtout dans le champ médian: 
chacun d'eux, dans les anneaux un peu avancés, est logé dans 
une sorte d'alvéole, qui donne à l’anneau un aspect très spécial. 
Spermiductes très grêles, aboutissant au canal déférent, sans in- 
terposition de réservoir spermatique. Canal déférent parcourant 
un trajet très bref, mais formant sur lui-même un très grand nom- 
bre de circonvolutions. Poche du cirre de dimension variable. Va- 
gin situé en arrière du canal déférent, mais s’ouvrant soit au-des- 
sous de la poche du cirre (D. caninum, D. echinorrhynchoides), soit 
au même niveau que celle-ci (D. Pasqualei), soit au-dessus (D. Trin- 
chesei). À son extrémité interne, le vagin se dilate en un receptacu- 
lum seminis (D. Pusqualei, D. Trinchesei, D. echinorrhynchoides) ; d'au- 
tres fois, un tel réservoir fait défaut (D. caninum) ; il est alors rem- 
placé par une dilatation de l’oviducte, appelée par Diamare cham- 
bre fécondatrice ou réservoir commun aux produits des deux sexes. 

Un ovaire bilobé dans chaque appareil génital; les deux lobes 
sont compacts (D. Trinchesei) ou ramifiés (D. caninum). Vitellogène 
compact, arrondi, situé en arrière de l'ovaire. L'utérus se forme 
sous l'aspect d’un réseau de cellules formatrices, dont les mailles 
entourent les vésicules testiculaires. Ce réseau se laisse pénétrer 
par les œuis sortant de l'oviducte et se creuse ainsi progressi- 
vement en canal. À ce moment-là, les testicules sont en voie 
de résorption; ils laissent des lacunes dans lesquelles les œufs 
viennent s'accumuler. Puis les parties du canal utérin interposées 
à ces amas ovulaires se rétrécissent et s’'étranglent : l'utérus ses 
transforme alors en un grand nombre de capsules indépendantes 


Archives de Parasitologie, XI, n° 3, 1907. 29 


442 R. BLANCHARD 


les unes des autres et renfermant, suivant les espèces, soit un seul 
œuf, soit plusieurs œufs. L’utérus est la seule partie de tout l'or- 
gane reproducteur qui soit commune aux deux 
appareils génitaux. 

OEufs à double coque transparente, agglu- 
tinés par une sorte de ciment qui résulte d'une 
sécrétion de la capsule utérine. La larve est un 
Cysticercoïde du type Cryptocystis Villot (fig.1). 
Elle vit soit dans la cavité générale de certains 
Insectes (D. caninum), soit enkystée dans la 
paroi intestinale de certains Ophidiens (D. Trin-. 
Fig. 1.— Cryptocystis chesei). 

ae Jecie Ropres Type du genre : D. caninum (Linné, 1758), 

parasite du Chien, du Chat, du Felis maniculata 

et même de l'Homme. Toutes les autres espèces sont parasites des 
Carnivores. 


Les Dipylidium présentent d'assez fréquentes 
anomalies. Certains anneaux n'ont qu'un seul 
pore génital, par avortement total ou partiel 
de l'appareil génital du côté opposé; d’autres 
sont stériles; d'autres encore ont quatre pores 
sexuels, comme Shipley en a fait connaître un 
exemple (fig. 2). Diamare a vu chez D. caninum 
un anneau où l'appareil mâle était normal, 
mais où l'appareil femelle était réduit aux 
deux vagins. Le même observateur a retrouvé 
chez D. Trinchesei une anomalie que j'ai cons- 
tatée pour la première fois chez Tænia sagi- 
nata et qui consiste en un renversement 
véritable de l'appareil génital, les parties 
Fig. 2. — Anomalie antérieures étant devenues postérieures et 

de l’appareil géni- +. CAR AT Ent 

tal chez Dipylidium réciproquement. Cette monstruosité n'existait 

Caninum, d'après qu'à gauche; dans la moitié droite du même 

SLIPIET anneau, on ne trouvait qu'une demi-douzaine 
de vésicules testiculaires, le canal déférent avec sa poche du 
cirre, puis le vagin; le reste de l'appareil génital femelle 
faisait défaut. 


DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 443 


Diagnose des Dipylidium actuellement connus. 


Le genre Dipylidium comprend actuellement douze espèces; nous 
en donnons une brève diagnose. 


1° D. caninum (Linné, 1758). — Synonymie : Tænia canina Linné, 
1758 (non Batsch, 1786) ; T. moniliformis Pallas, 1781 ; T. cucumerina 


Fig. 3. — Tête de Dipylidium caninum. — 
À, rostre évaginé; B, rostre invaginé. x 75. 


Bloch, 1782 (chez le Chien) ; T. cateniformis Güze, 1782, partim; T. ellip- 
hica Batsch, 1786, partim (chez le Chat) ; T. cuneiceps Zeder, 1800. 

Ver long de 150 à 400 mm. et parfois même davantage, pour une largeur 
maximale de 2 à 3 mm. Tête petite, rhomboïdale, large de 350 à 460 », sui- 
vant l’état de contraction (fig. 3). Rostre claviforme, long de 185 z à l'état 
d'évagination complète, large de 110 à 120 z; rétractile dans un vaste 
infundibulum céphalique, très visible par transparence ; armé de 3 ou #4 
couronnes de crochets ayant l'aspect d’aiguillons de Rosier, c’est-à-dire 
à manche et à garde très réduits. Ces crochets diminuent de taille d'une 
rangée à l’autre : ceux du premier cercle sont longs de 12 à 15 , ceux du 
dernier n'ont pas plus de 5 à 6 ». Les crochets sont du reste très caducs : 
il est fréquent de les voir faire complètement défaut ou de ne plus 


Lh4 R. BLANCHARD 


observer que quelques crochets épars. Ventouses assez grandes, ellip- 
soïdes. Cou court et gréle. Anneaux d'abord très courts, puis trapézoïdes, 
finalement plus longs que larges. Organes génitaux à développement 


Fig. 4. — Anneau de Dipylidium 
caninum à maturité sexuelle. x 20. 


tardif ; les anneaux sexués et les 
anneaux muürs ont les bords laté- 
raux nettement bombhés, ce qui 
leur donne l'aspect de graines de 
Concombre (fig. 4). Vagin dépour- 
vu de réservoir séminal. OEufs 
arrondis, larges de 35 à 40 », grou- 
pés en nombre variable, ordinaire- 
ment de 8 à 15, dans une même 
capsule utérine. Vus par trans- 
parence, ils donnent à la partie 
médiane de l'anneau mür une teinte 
rougeätre qui disparait dans les 
liquides conservateurs; oncosphère 
large de 25 à 30 x, avec des cro- 
chets longs de 11 à 14 y. 

La larve (Cryptocystis trichodec- 
is Villot, 1882) vit dans la cavité 
viscérale de divers Insectes (Tri- 
chodectes canis, Ctenocephalus canis, 
Pulex irritans). 


Dipylidium caninum est un 
parasite très fréquent du Chien 
et du Chat; il se tient de préfé- 
rence dans le tiers moyen et le 
tiers postérieur de l'intestin 
grêle. Sa taille varie assez nota- 
blement suivant l'hôte qui l'hé- 
berge : il atteint communé- 
ment 20 à 30 cm. et même jus- 
qu'à 50 et S0 cm. chez le Chien, 
alors qu'il ne dépasse guère 
15 à 20 em. et atteint rarement 


32 em. chez le Chat. Ces différences ont conduit certains helmin- 
thologistes à considérer la variété féline du parasite comme une 
espèce distincte (Tænia elliptica Batsch, 1786). 

L'Helminthe est rarement solitaire; on le trouve ordinairement 
en plus ou moins grand nombre dans le même intestin. Chez 


DIPYLIDIUM CANINUM DANS L' ESPÈCE HUMAINE 445 


le Chat, il est rare de trouver plus de 50 exemplaires, mais Krabbe 
en a vu deux fois jusqu'à 500 et 600 ; chez le Chien, le nombre peut 
s'élever jusqu'à 2000, ainsi que l'a constaté également l'helmintho- 
logiste danois. 

Comme le Chien et ses Puces, ce parasite est actuellement cos- 
mopolite. On peut donc s'attendre en toute région à le voir passer 
chez l'Homme; le cas de Stiles et Duffield (n° 27) démontre que ce 
parasitisme, observé jusqu'à présent en Europe seulement, se 
réalise aussi en Amérique. 


2° D. genettae (P. Gervais, 1847) — Halysis genettae P. Gervais, 1847. — 
Ver long de 80 mm. Tête globuleuse, médiocrement renflée. Bostre couvert, 
sur ses deux tiers inférieurs, de petits crochets épineux, très fins, très 
nombreux, disposés en quinconce. Les derniers anneaux sont un peu plus 
longs que larges, les plus grands ayant une largeur de 2 mm. La disposition 
des pores génitaux n’est pas indiquée, ils sont figurés tantôt comme 
alternes, tantôt comme doubles et symétriques. — Chez la Genette Viverra 
genetta L.), des environs de Montpellier. 

Malgré l'insuffisance de cette description, nous partageons l'avis de 
Diamare, qui rattache cette espèce au genre Dipylidium. 


3 D. echinorrhynchoides (Sonsino, 1889) = Tænia echinorhyncoides Son- 
sino, 1889. — Ver adulte inconnu; les individus les plus àgés que l’on 
ait vus avaient l'appareil mâle développé et atteignaient une longueur 
de 70mm. Tête rhomboïdale, large de Omm.40 à Omm.45; ventouses 
larges de Omm.18. Rostre subcylindrique, claviforme, long de 0 mm. 26, 
armé de 12 à 16 rangs de petits crochets assez caducs, en forme d'aiguil- 
lons de Rosier, les plus grands en avant et mesurant 18 », les plus petits 
mesurant 5 z ; le fond de l’infundibulum céphalique est également orné 
de crochets. À 30mm. de la tête, les anneaux sont aussi larges que 
longs ; plus loin, ils sont deux fois plus longs que larges. Pores génitaux 
s’ouvrant dans la moitié antérieure du bord latéral. Ovaires lobés ; vitel- 
logène sphérique. — Chez le Fennec (Megalots cerdo), en Égypte. 


4° D. Trinchesei Diamare, 1892 = D. Trinchesii Diamare, 1892. — Ver long 
de 25 mm. Tête arrondie, ventouses un peu saillantes. Rostre assez grand, 
formé de deux parties, l’antérieure sphérique, la postérieure infundi- 
buliforme ; sur la partie antérieure, 80 crochets de taille diverse, disposés 
sur 4 rangs, les plus grands en avant. Organes génitaux à développement 
très précoce; déjà apparents sur l’anneau 2, déjà parvenus à maturité 
sur l'anneau 10. Pores génitaux s’ouvrant dans la moitié antérieure du 
bord latéral. Ovaire formé de deux lobes compacts ; vitellogène sphérique ; 
vagin pourvu d'un réservoir séminal. Un seul œuf par capsule utérine. — 
Chez le Chat domestique, à Naples et à Alexandrie d'Égypte. 


446 R. BLANCHARD 


Suivant Diamare, le Cysticercus acanthotetra Parona, 1887 (fig. 5), qui vit 
en Sardaigne dans des kystes de la paroi intestinale d'un Ophidien (Zamenis 
viridiflavus), serait la larve de D. Trinchesei. Si une telle assimilation est 


D 


Fig, 5. — Crochets de Cysticercus acanthotetra, d'après Parona. — 
De gauche à droite, crochets des rangs 1 à 4. 


exacte, cette espèce pourrait donc se trouver aussi en Sardaigne et même 
dans d'autres pays, tels que le sud de la France, où se rencontre la Cou- 
leuvre verte-et-jaune. Comme les Chats répugnent à se nourrir de la 
chair des Serpents, la présence du Ver adulte 
chez ces carnassiers serait exceptionnelle et il 
faudrait plutôt chercher l'Helminthe dans l’in- 
testin d'animaux ophiophages, tels que les 
Echassiers et les Rapaces. La constatation d’un 
tel parasitisme serait intéressante, puisqu'elle 
démontrerait l'existence des Dipylidium chez 
les Oiseaux. 


5° D. Pasqualei Diamare, 1893. — Ver long 
de 200 à 300 mm. et plus. Têle globuleuse, ven- 
touses arrondies. Rostre allongé, claviforme, 
effilé en avant, armé de 16 rangs de crochets à 
base presque circulaire, hauts de 7 », larges de 
s ._. . 8»; le fond de l’invagination céphalique est 
D cu inerme. Parenchyme littéralement farci de cor- 
Setti. puscules calcaires. Anneaux postérieurs carrés ; 
anneaux mürs lancéolés. Lacune longitudinale 
très large, environ trois fois plus large que chez D. caninum. Organes 
génitaux à développement tardif; pores 
génitaux dans la moitié antérieure du 
bord latéral. Vagin pourvu d'un réser- 
voir séminal; ovaire bilobé, rameux; 
vitellogène bilobé. Un seul œuf par cap- 
sule utérine. — Chez le Chat, à Alexan- 
Fig. 7. — Dipylidium Gervaisi; drie d'Egypte. 
a, œuf; b, crochets vus de profil Cette espèce est très probablement 
et de trois quarts. D’après Setti. identique à D. echinorrhynchoides. 


6° D. Gervaisi Setti, 1895. — Ver long de 10 à 40 mm. pour une lar- 
geur maximale de 1mm.5. Tête longue de Omm. 15, large de O0 mm 25.; 


DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 447 


ventouses arrondies (fig. 6). Rostre cylindro-conique, armé d’une soixan- 
taine de crochets en forme de piquants de Rosier (fig. 7, b), longs de 10 
en moyenne et disposés sur 8 à 12 rangs; fond de l’infundibulum cépha- 


Fig. 8. — Anneau sexué Fig. 9.-- Anneau mûr 
de Dipylidium Gervaisi, de Dipylidium Gercuaisi, 
d’après Setti. d’après Setti. 


lique non armé de crochets. Organes génitaux à développement assez 
précoce; ils sont déjà entièrement formés vers l'anneau 30, à 3 mm. de la 
tête (fig. 8). Pores génitaux s’ouvrant au quart antérieur du bord laté- 


Fig. 10. —Tète de Dipylidium Fig. 11. — Tête de Dipylidium 
Chyzeri, d’après von Rätz. Chyzeri, d’après von Rätz. 


ral (fig. 9). Cirre long et grêle, pendant en général sur les côtés du Ver ; 
vagin dépourvu de réservoir spermatique. Un seul œuf par capsule uté- 
rine (fig. 7, a). — Chez la Genette d'Erythrée (Genetta tigrina Gray). 


LS R. BLANCHARD 


7 D. Chyzeri von Räâtz, 1897. — Ver long de 120 200 mm. Tête sphérique 
petite, large de 350 à 450 y (fig. 10). Rostre subconique (fig. 11), long de 
110 y, d'égale largeur à la base, armé de 13 à 14 rangs de crochets en 
aiguillon de Rosier, disposés en quinconce, les plus grands en avant et 
mesurant 14, leur hauteur égalant au plus les deux tiers de la longueur, 
de la base. Anneaux ayant une largeur maximale de 1 mm. 4 à À mm. 5, 
plus étroits en arrière. Organes génitaux à développement tardif; Ja 
poche du cirre est grande et n’appa- 
rait que vers l'anneau 85. On compte 
environ 58 à 60 anneaux à maturité 
sexuelle (fig. 12) et seulement 5 à 6 
anneaux remplis d'œufs. Pores géni- 
taux dans la moitié antérieure du 
bord latéral. Canal déférent très si- 
nueux. OEuf à deux coques, rond, 
large de 52; oncosphère mesurant 
42 ». Un seul œuf par capsule utérine. 
— Chez le Chat domestique, à Buda- 
pest. 

Cette espèce devra sans doute être 
identifiée à D. echinorrhynchoides Son- 
Sino. 


8° D. triseriale Lühe, 1898. — Ver 
long de 25 mm. Tête large de 0 mm.3; 
diamètre des ventouses Ü mm. 1. Ros- 
tre large de Omm.15, armé de trois 
rangs decrochets ayant la même forme 
que chez D. Trinchesei; la plus grande 
longueur est de 68 z 2 pour ceux du 
premier rang, de 56 z 8 pour ceux du 
deuxième, de 43 z 2 pour ceux du troi- 
Fig. 12. — Anneau mür de Dipyli- sième. Pores génitaux situés au pre- 
dium Chyzeri, d'après von Rätz. mier tiers de la longueur. L'anneau 
parvenu à maturité sexuelle est aussi 
long que large et mesure Oinm.8; l'anneau mür atteint une longueur 
de 5 mm. pour une largeur de 1 mm. Un seul œuf par capsule utérine. 
— Chez la Civette (Viverra civetta ), en Tunisie et aux Indes. 


9 D. monoophorum Lühe, 1898. — Ver long de 10 mm. Tête large de 
Omm.15; diamètre des ventouses Omm.07. Rostre large de Omm.07 à 
0 mm. 1, armé de trois rangs de crochets, ayant la même forme que chez 
D. Trinchesei et D. triseriale, mais beaucoup plus petits, ceux du premier 
rang n'ayant que 30 - de longueur. Pores génitaux situés au premier quart 
du bord latéral. L’anneau parvenu à maturité sexuelle plus long que large; 
il mesure Omm.6 sur Omm.3. Les testicules ont tendance à se groupe, 


DIPYLIDIUM CANINUM DANS L' ESPÈCE HUMAINE 449 


en deux rangées longitudinales presque régulières. L'ovaire de chaque 
côté est représenté par une glande arrondie, située en dedans du vagin 
et correspondant au lobe interne de l'ovaire des autres Dipylidium, le 
lobe externe étant avorté totalement. L'anneau mür atteint une longueur 
de 2 mm. pour une largeur de Omm.4; il s’allonge uniquement par sa 
moilié postérieure, grâce à l'accumulation progressive des œufs dansle 


Fig. 13. — Anneau sexué de Dipylidium Ürleyt, d’après vor Rätz. 


parenchyme, ce qui tend à reporter les pores génitaux encore plus en 
avant. Un seul œuf par capsule utérine. —Chez la Civette (Viverra civetta) 
en Tunisie. 


10° D. OÜrleyi von Rätz, 1900. — Ver long de 50 à 115 mm. Tête petite, 
longue de 330 », large de 390 ». Rostre haut de 67 », large de 70 » à 
la base, ordinairement invaginé, nu au sommet, armé de 5 rangées 
alternantes de crochets à base ovale, ressemblant à des aiguillons de 
Rosier. Cou court, trapu, un peu aminci en arrière. Anneaux au nom- 
bre de 70 à 90, ayant au maximum 4 à 5 mm. de longueur et 2 mm. de 


450 R. BLANCHARD 


largeur (fig. 13); les postérieurs de teinte jaunâtre, à contour postérieur 
piriforme. OEufs arrondis, larges de 25 », réunis au nombre de 3 à 12 dans 
chaque capsule. — Chez le Chat, à Budapest. 


11° D. sexcoronatum von Rätz, 1900.— Ver long de 100 à 235 mm. Tête lon- 
gue de 330 v, large de 370 », de forme ovoïde, la partie antérieure conique. 


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Fig. 1%. — Anneau sexué de Dipylidium sexcoronalum, d'après von Rätz. 


Rostre généralement rétracté, à base conique, longue de 46, large de 
54 », armé de 6 rangées de crochets très serrés, en aiguillon de Rosier, 
les antérieurs plus grands. Anneaux ayant au maximum 6 à 7mm. de lon- 
gueur et mm. à 1mm.5 de largeur (fig. 14). OEufs arrondis, mesurant 22 
de diamètre, rassemblés au nombre de 2 à 15 dans des capsules qui 
s'accumulent surtout en arrière des pores génitaux. — Chez le Chien, à 
Budapest. 


T 


DIPYLIDIUM CANINUM DANS L' ESPÈCE HUMAINE 451 


12° D. Monticellii Diamare, 1893. — Espèce nominale, établie d’après des 
croquis pris par Monticelli au Musée Britannique sur un Ver rapporté 
par l'expédition de l’Euphrate, sans indication d'hôte. 


En résumé, on connaît actuellement, d'une façon plus ou moins 
certaine, 12 espèces de Dipylidium. Déduction faite de D. genettae, 
D. echinorrhynchoides et D. Monticellii, dont les caractères sont trop 
indécis, on peut établir pour les neuf espèces restantes le tableau 
comparatif suivant : 


D OF W N 


9 


10. 
als 


Tableau comparatif des espèces du genre Dipylidium. 


. Capsule utérine renfermant . 
. Un seul œuf. Crochets du rostre . À 
. Sur trois rangs. Crochets du premier rang . 


Longs de 68 
Longs de 30 ». 


. Sur quatre rangs, ceux ds. Durs mener rangs 


beaucoup plus grands et rappelant la forme des 
crochets des Tænia. Lobes ovariens compacts; un 
receptaculum seminis à la terminaison du vagin. 


. Sur huit à douze rangs. Ovaire non rameux; Fe 


sans receptaculum seminis. 


. Sur treize à quatorze rangées. Ovaire rameux ; Viteh 


logène do RP un receptaculum 
seminis 
Sur seize rangs. Drame rameux ; rallacéme Pobee 
vagin pourvu d'un receptaculum seminis . 
Plusieurs œufs. Crochets du rostre . : 
Sur trois à quatre rangs. Lobes ovariens rameux; 
pas de receptaculum seminis. 


. Sur cinq rangs. Ovaire rameux; Tone 


rameux; un receptaculum seminis. 


. Sur six rangs. Ovaire rameux; Hlasene à com- 


pact; un receptaculum es 


triseriale. 
monoophorum. 


Trinchesei. 


Gervaisi. 


Chyzeri. 


Pasqualei. 
LE CieISE 


caninum. 
Orleyi. 


Sexcoronatum. 


Observations de Dipylidium caninum chez l'Homme. 


En 1888, j'évaluais à 19 le nombre des cas connus; depuis lors, 
beaucoup de cas nouveaux ont été publiés. En les faisant entrer 
en ligne de compte, ainsi qu'un petit nombre de cas que j'avais 
méconnus, on arrive actuellement à un total de 59 observations de 


452 R. BLANCHARD 


Dipylidium dans l'espèce humaine; soit un total de 60 cas en y 
comprenant l'observation de Papillon. Même alors que la déter- 
mination zoologique des parasites n’a pas été faite par des per- 
sonnes compétentes, on peut admettre que la grande majorité, 
sinon la totalité des ces observations se rapportent à D. caninum. 


1° Cas de G. Dubois, 1751. — God. Dubois, élève de Linné, donne Ja pre- 
mière description de Tænia canina et signale aussi pour la première fois 
la fréquence de ce Ver dans l’espèce humaine : «Est Tæniæ species, quæ.… 
vulgariter in cinibus et sæpissime apud homines invenitur. » Il en donne 
une figure et dit, dans la légende explicative : « nobis visa in homine el 
cane. » 


2 Cas de Blasius. — A la clinique chirurgicale de Blasius, à Halle, un 
garçon de 13 ans évacue 40 à 50 Vers. Ceux-ci sont conservés au Musée 
d'anatomie comparée ; ils ont été déterminés par Meckel, comme en fait 
foi l’éliquette écrite de sa main. Leuckart en a eu communication et a 
reconnu l'exactitude de cette détermination; ils consistent en 40 à 50 
fragments, ayant pour la plupart une longueur de 100 à 130 mm. 


3° Cas de Salzmann, 1861. — A Esslingen (Württemberg), un enfant 
de 16 mois rend de temps à autre des anneaux rougeâtres; il dort mal et 
est devenu très excitable. On lui administre un vermifuge. Au bout de 
huit mois, les anneaux ne sont pas réapparus; on donne le kousso, 
mais sans résultat. La structure des anneaux ne laisse aucun doute sur 
la détermination du parasite : un sinus génital de chaque côté; œufs 
larges de 50 z environ, à coque lisse, renfermant une oncosphère large 
de 30 z environ et agglomérés au nombre de 5 à 7 dans des capsules uté- 
rines de forme régulièrement ovale. 


4° Cas de Küster et Schmidt. — A Croneberg, un enfant de 13 semaines 
expulse par l'anus un Dipylidium. La mère voit le Ver qui pend, tire des- 
sus, en arrache un morceau long d'une quinzaine de centimètres et l’ap- 
porte à Küster. Celui-ci le transmet à Schmidt, de Franciort, en vue de 
la détermination. La tête faisait défaut. 


5° Cas de Cobbold, 1872. — Un homme adulte présente, depuis quatre 
ans environ, divers symptômes nerveux qui peuvent être attribués à la 
présence d'un Ténia. Divers anthelminthiques restent sans effet ; il con- 
tinue à rendre des anneaux de grande taille, appartenant soit au Tænia 
solium, soit plutôt au T. saginata, parmi lesquels on remarque des 
anneaux beaucoup plus petits, à pore sexuel bilatéral; il finit par évacuer 
un Ver long d'environ cinq mètres. Il s’agit donc ici d'une infestation 
mixte; l'expulsion du Dipylidium n’a pas été constatée. 


6° Cas de Heller, 1876. — L'Institut pathologique d'Erlangen possède 
des anneaux évacués par un enfant. 


DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 453 


7° Cas de Schoch-Bolley. — A Zurich, sous l'influence du kamala, un 
enfant expulse deux Vers ayant une longueur d'environ un pied. Ce cas, 
mentionné, tout d'abord par Leuckart, est également cité par Zäslein. 


8°-12° Cas de Leuckart, 1880. — Leuckart a eu connaissance de cinq cas 
nouveaux, chez des enfants de 9 mois à 3 ans. Les anneaux, pourvus des 
capsules utérines caractéristiques du Dipylidium caninum, étaient le plus 
souvent expulsés isolément; ils étaient sortis une fois par le nez. 


43°-14° Cas de Friis, 1884. — Deux cas observés aux environs de Tônder 
(Danemark) : 1° chez un enfant de 7 semaines, Ver sorti spontanément 
par l'anus; 2° chez un enfant de 6 mois, Ver sans tête expulsé par le kamala. 


45° Cas d'Hoffmann, 1887. — Fillette tenue très malproprement, à Darm- 
stadt. Vers le début du cinquième mois, elle évacue des anneaux, sans 
présenter d’ailleurs aucun trouble. Au début du septième mois, l’enfant 
a de la diarrhée et rend, presque avec chaque selle, un très grand nombre 
d’anneaux; elle est très abattue et affaiblie. On lui fait évacuer plusieurs 
Vers, après quoi son état redevient normal. 


16° Cas de Krüger, 1887. — Une fillette de 16 mois, jusqu'alors gaie et 
bien portante, devient triste et abattue; elle est sans appétit, ne joue 
plus, pleure facilement; d’autres fois, elle revient à la gaité. Selles 
irrégulières; tour à tour diarrhée et constipation. L'enfant rend par- 
fois, soit spontanément, soit avec les selles, des anneaux rougeâtres, 
longs de 10mm. environ; elle a la fièvre depuis quatre jours : la tempéra- 
ture est entre 38° 5 et 39° 5, Le pouls est à 114. On administre le kamala; la 
petite malade évacue plusieurs fragments de Dipylidium, dépourvus de 
tête et ayant plus d'un mètre de longueur totale; l’un des fragments, 
formé de 51 anneaux, presque tous mürs, mesurait 35cm. ce qui suppose 
une longueur de 45 à 50cm. pour le Ver entier. Le nombre des parasites 
ainsi expulsés à l’état de fragmerits pouvait être de quatre à six. Le len- 
demain, l'enfant a recouvré sa gaîté et son appétit ; les selles sont rede- 
venues régulières ; la température est à 37° 7, le pouls à 96; la santé se main- 
tient par la suite. 


17-18° Cas de Brandt, 1887. — 1° Un jeune paysan de 15 ans est amaigri, 
faible et maladif depuis un an; il passe alternativement par des périodes 
de bonne santé et de malaise, celles-ci coïncidant avec l'expulsion par 
l’anus de Vers isolés, très nombreux ou même rendus par véritables 
paquets ; il éprouve de temps à autre des douleurs à l’épigastre et des 
battements de cœur. L'état général s'améliore après la première éva- 
cuation de parasites, mais ces mêmes symptômes réapparaissent au bout 
de deux mois, plus intenses et accompagnés de douleurs lombaires et de 
constipation. Une seconde évacuation est également suivie d'une amélio- 
ration notable, mais les accidents morbides reviennent bientôt, encore 
plus graves, avec des vomissements et des troubles marqués du côté du 


454 R. BLANCHARD 


système nerveux et de l’appareil digestif. Ces alternatives de malaise et 
d'amélioration se reproduisent plusieurs fois; la sortie des parasites 
s'accompagne le plus souvent d’un fort prurit et de brülures à l’anus. 

Le malade continuant à rendre avec les selles des anneaux mürs de 
teinte rougeätre, on lui administre de l'extrait éthéré de Fougère mâle et 
de l'huile de Ricin. Il expulse 48 Vers, dont 27 mesurant 30cm. et 3 ayant 
35cm. de longueur. Ce jeune garçon jouait souvent avec un Chien infesté 
de Trichodectes; il était lui-même, après chaque contact, envahi par ces 
Insectes. Un an après le traitement, la santé n'avait cessé d'être parfaite 
et les Vers n'avaient pas reparu. 

20 Une fillette de huit ans, jusqu'alors gaie et bien portante, perd sa 
bonne humeur et se montre excitée; elle se plaint de douleurs à l’épigas- 
tre et de malaise; respiration difficile, inappétence, constipation. Environ 
un mois après le début de ces symptômes, expulsion spontanée de Verset 
tout s’amende. Les mêmes accidents se reproduisent bientôt, suivis d'une 
nouvelle expulsion spontanée qui produit une amélioration. Il en est en- 
core ainsi une ou deux fois; la sortie des parasites cause du prurit etune 
sensation de brülure à l’anus. Un certain jour, la fillette se trouve mal 
pendant quelques minutes; elle expulse deux Vers entiers sans la tête et 
quelques anneaux isolés. L'extrait éthéré de Fougère mâle provoque alors 
l'expulsion de 30 Vers, tous pourvus de leur tête, et de 30 anneaux isolés; 
la plupart ont une longueur de 25cm. environ; quatre seulement sont plus 
petits. 

Cette fillette jouait constamment avec un Chien à longs poils, qu’elle 
faisait même dormir sur son lit. Cet animal avait dans son pelage un 
grand nombre de Trichodectes, qui passaient sur elle et jusque dans sa 
chevelure. 


190 Cas de Martin, cité par R. Blanchard, 1888. — « À ces observations, 
nous pouvons en ajouter une autre, la première, à notre connaissance, 
qui ait été faite en France; elle nous a été gracieusement communiquée 
par le D' H. Ch. Martin, de Passy. Cette observation présente un intérêt 
particulier, en ce qu'elle est jusqu’à présent la seule qui se rapporte à un 
adulte. La personne qui en fait l’objet avait l'habitude de faire coucher 
son Chien au pied de son lit, souvent même le laissait entrer dans le lit; 
le Ver était long de 40centimètres environ. » 


20° Cas de Blanchard et Drouet, 1895. — Ce cas s’est présenté à moi en 
mars 1895, au moment même où j'écrivais l’article Parasites animaux du 
Traité de pathologie générale de Ch. Bouchard, en sorte que j'ai pu déjà 
le mentionner dans ce travail. Je reprends et complète l'observation : 

Une femme habitant rue Mercœur, en plein Paris, se présente au dis- 
pensaire de la rue de l’Épée-de-bois avec une fillette de vingt-quatre mois 
qui, depuis quatre à cinq mois, rendait à peu près tous les jours un ou 
deux corps rougeâtres ayant l'aspect de graines de Concombre. Le D' H. 
Drouet voit l'enfant, demande qu'on lui apporte quelques-uns de ces corp : 


DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 455 


blancs et m'en transmet deux: j'y reconnais des anneaux de Dipylidium 
caninum.. 

En compagnie du D' Drouet, je me rends alors au domicile de l'enfant. 
Je trouve une fillette assez robuste, qui ne paraît nullement incommodée 
par son parasite; elle habite un véritable taudis, où elle est en contact 
journalier avec un Chien et deux Chats; l’un de ceux-ci partage même 
ordinairement sa couche. Nous essayons de débarrasser la petite ma- 
lade de son parasite, mais sans succès : le tannate de pelletiérine, puis 
la noix d’arec ne donne aucun résultat. Après une interruption de quel- 
ques jours, due à une tentative de meurtre par un ivrogne envers l’un 
des membres de cette famille, nous revenons à la charge et sommes, cette 
fois, assez heureux, au moyen de la pelletiérine et de l'huile de Ricin, 
pour faire rendre à la fillette un Ver muni de sa tête. 

Ce Ver est long de 58mm. Le rostre est rétracté; on voit par transparence 
des crochets en aiguillons de Rosier, nettement disposés sur quatre rangs. 
Les deux anneaux mürs obtenus précédemment sont longs de 7 mm.etlarges 
de 2mm5. L'un deux est monté en préparation microscopique : les œufs 
sont groupés au nombre de 8 à 16 dans chaque capsule utérine; leur dia- 
mètre varie de 38 à 45 v, celui de l’oncosphère est de 29 à 30 . Le Ver in- 
tact et l'anneau muür restant sont déposés au Laboratoire de parasitolo- 
gie de la Faculté de médecine de Paris (collection R. Blanchard, n° 29). 


21° Cas de Sarensen, 1896. — Un enfant de 12 semaines, nourri au biberon, 
rend des anneaux. On le purge; il rend septanneaux. On le purge encore ; 
il rend un grand fragment sans tête. Il y avait un Chien dans la maison. 


22°-25° Cas de Müller, 1899. — À Zurich, Müller observe 4 cas : 1° chez 
un enfant de 13 mois; 2° chez un homme de 40 ans; 3° chez un homme de 
45 ans; 4 chez une femme de 38 ans. Il n’y avait ni Chien ni Chat dans 
la maison d'aucun de ces malades. 


26° Cas de Lœnnecken, 1901. — Un garçon de 5 ans, fils d'un paysan de 
Hardanger, rend des anneaux. On le nourrit de lait crù et d’eau prove- 
nant d’une fontaine où s'abreuvait un Chien. 


27 Cas de Stiles et Duffield, 1903. — A Detroit, Mich. (États-Unis), un 
enfant de 16 mois évacue un Ver. 


28° Cas d’Asam, 1903. — Une fillette de 19 mois rend dansses selles des 
anneaux rosés, semblables à des graines de Concombre; ils se inontrent 
tous les deux ou trois jours, toujours isolés; l'enfant est bien portante, mais 
a grand appétit et présente une inquiétude et une agitation anormales. 
Environ un mois après la première constatation des anneaux, on admi- 
nistre un vermifuge et l’on obtient un Dipylidium long de 120"", sans la 
tête. Au bout de trois semaines, les anneaux réapparaissent dans les selles; 
on administre un nouvel anthelminthique et l’on obtient alors divers frag- 
ments représentant trois Vers, l’un avec tête. L'enfant est alors guérie. 

Depuis un an exactement, il n’y avait plus de Chien dans la maison; 


456 R. BLANCHARD 


Asam ne fait aucune allusion à la présence possible d’un Chat. Même en 
l'absence d’un animal de cette dernière espèce, la longue persistance des 
Puces dans les habitations mal tenues donnerait une suffisante explica- 
tion étiologique. 

29° Cas de Zschokke, 1903. — En disséquant le cadavre d'un homme âgé 
de 35 à 40 ans, un étudiant trouve dans le gros intestin un certain nom- 
bre d'anneaux libres, pleins d'œuîs disposés par paquets, atteignant une 
longueur de 10 mm. et une largeur de 1 mm.5. 


30° Cas de Bulloch et Braun, 1903. — Un enfant traité à la policlinique 
du London hospital medical College rendait par centaines des anneaux; 
quelques-uns furent envoyés par W. Bulloch à Max Braun. 


31° Cas de Kühl, 1904. — Un enfant âgé de 40 jours commence à rendre 
des anneaux d'un rose clair, renfermant des œufs groupés par paquets 
de 6 à 12. Ces anneaux continuent à se montrer dans les selles tous les- 
deux ou trois jours, jusqu'au sixième mois. On fait alors appel au mé- 
decin, qui administre le kamala et provoque l'expulsion d’un Ver. Il y 
avait un Chat dans la maison, mais pas de Chien. La mère avait nourri son 
enfant au sein pendant dix-sept jours, puis lui avait donné le biberon. A 
supposer que l'infestation ait eu lieu dès le début de ce changement de 
régime, c'est donc au maximum en vingt-trois jours que le Ver s’est déve- 
loppé au point d'émettre des anneaux mürs. 


32° Cas de Sonnenschein, 1904. — A Olmütz, un garçon de six mois, 
nourri uniquement au lait de Vache étendu d’eau, rend des anneaux. On 
lui administre l’extrait éthéré de Fougère mâle : il expulse quatre Vers et 
reste désormais bien portant. 


33° Cas de Freriks et Broers, 1904. — A Utrecht, un enfant de 2 ans rend 
des anneaux blancs, longs de 8 à 10 mm. larges de 2mm.5 à 3 mm.5,ressem- 
blant à des graines de Concombre; les œufs y sont groupés au nombre de 
10 en moyenne dans des capsules utérines. On administre l'extrait éthéré 
de Fougère mâle; l'enfant évacue un Ver sans tête, long de 50 em.,environ; 
le lendemain, un nouveau ténifuge reste sans effet; au bout trois mois, il 
n’y avait pas eu de récidive. L'enfant jouait fréquemment avec un Chien, 
qui rendait lui-même des anneaux de même nature. 


. 34° Cas de Rosenberg, 190%. — A Vienne, un enfant de 13 mois, qui jouait 
fréquemment avec un Chien, évacue des anneaux. Un mois plus tard, on 
le traite par l'extrait éthéré de Fougère mâle; il rend 10 Vers adultes. 


35° Cas de B. de Nabias, 1904. — Enfant de deux ans, de santé délicate, 
observé par le D' Callen, de Sore (Landes). Depuis trois semaines envi- 
ron, il rend chaque matin quelques anneaux; il expulse un Ver long de 
180mm., sous l'influence d’une décoction de racine de Grenadier. 


36°-53° Cas de Krabbe, 1866-1905. — Le professeur H. Krabbe, de Co- 
penhague, a porté d’une façon toute spéciale son attention sur les Cestodes 
de l'Homme et sur la fréquence relative des différentes espèces; il nous a 


DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 457 


donné sur ce point de précieuses indications, que nous résumerons dans le 
tableau ci-dessous : 


Nombre Nombre Sexe Age Nombre | 
Année |des Cestodes A Pourcentage| du Gt mecs. des Vers 
ne de lt . | d'ordre 
examinés. | D.caninum. malade one lle | MÉVRENSE 

1866 5) 1 36 
a |314/2 il 37 

ei! 4 1 38 

1881 | 100 4 & | cn La ; . 
CRE lD 2 40 

eu 2 1 4 

1887 | 300 l 0, 75 Ê A ANUS 
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1896 | 100 6 6 À He Piel 
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1905 50 3 6 | © & 3 52 
| © 18 1 99 


54° Cas de Zschokke, 1905. — Un jeune garçon de 4 ans, maladif et amai- 
gri depuis longtemps, rend des anneaux; il est en contact fréquent avec 
des Chiens. On lui administre un vermifuge, qui provoque l'expulsion de 
9 à 6 Vers longs de 120 à 150mm. 


55°-58° Cas de Bollinger, 1905. — Quatre cas observés en Bavière : 

4° Un enfant de 5 ans se plaint fréquemment de prurit à l'anus. Un cer- 
tain jour, il rend un fragment qui figure dans les collections de l'Institut 
pathologique de l'Université de Munich (n° 4%, 1889). L'enfant n’a pas été 
soumis au traitement vermifuge. Il jouait constamment avec un Chien, qui 
rendait lui-même beaucoup de Vers. 

2° Une femme de 55 ans souffre de pression à l’épigastre et de violents 
maux de tête. Elle évacue 6 Vers (n°129, 1896) et tout rentre dans l'ordre. 
Elle avait un Chien qui mangeait avec elle à table. 

3° Une cuisinière de 31 ans, ayant déjà subi plusieurs fois le traitement 

Archives de Parasilologie, XI, n° 3, 1907. 30 


458 R. BLANCHARD 


anthelminthique, est sujette à des malaises passagers. Elle expulse un Ver 
(n° 52, 1897). Il y avait un Chien et des Chats dans la maison. 
4° Un enfant de 4 mois rend un certain nombre d'anneaux (n° 81, 1900). 


59° Cas de Pollak, 1907. — Présente à la Société des médecins de Vienne 
un nourrisson qui, depuis trois mois, élimine chaque jour des anneaux 
dans les selles. L'enfant a été infesté par un Chat vers l’âge de cinq semaines 
l’infestation se manifesta par un arrêt dans l'augmentation du poids du 
corps. 


60° Cas de Papillon, 1907. — « Lucien R., âgé de 10 mois, est amené par 
sa mère, le 25 septembre 1906, à ma consultation de l'hôpital Bretonneau. 

« La mère raconte que, depuis deux semaines, l'enfant rend tous les 
jours, dans ses selles, des fragments de Ténia et que l'avant-veille, le 
dimanche 23 septembre, il avait expulsé spontanément, en allant à la 
garde-robe, un Ver assez long qu'elle apporte dans une bouteille. Étonné 
de l'existence d’un Ténia chez un nourrisson et n'ayant pas le temps d'ap- 
profondir cette histoire à la consultation, je fais revenir, le lendemain 
matin, la mère et l'enfant dans le service, remettant à ce moment-là l'in- 
terrogatoire de la mère et l'examen du parasite. De plus, comme celui-ci 
ne me parait pas complet, je donne les instructions nécessaires pour l'ad- 
ministration d'un anthelmintique à l'enfant dès son arrivée dans le ser- 
vice. 

« Le lendemain, à la visite du matin, l’enfant a absorbé les 2 grammes 
d'extrait éthéré de Fougère mâle et les Ogr.05 de calomel prescrits la 
veille. 

« La mère, interrogée minutieusement, confirme les renseignements 
donnés à la consultation sur l'expulsion spontanée du parasite, d'abord 
en fragments (un anneau à la fois, parfois deux ou trois), puis globale. 
Depuis le dimanche, rien n’a été évacué. L'enfant, bien portant depuis sa 
naissance, a été d'abord nourri au sein par la mère; depuis trois ou quatre 
mois, allaitement mixte au sein et au biberon (lait bouilli). L’excellent 
état de l'enfant montre d’ailleurs que cette alimentation a été bien réglée 
et soigneusement pratiquée. 

« À aucun moment, ni avant ni pendant l'expulsion du Ténia, l'enfant 
n'a présenté de symptômes pouvant être, de près ou de loin, rapportés à 
un parasite intestinal; il n’y a eu ni convulsions, ni méningisme; pas de 
troubles nerveux, pas de troubles digestifs. 

« Après avoir recueilli ces renseignements sur l'hygiène et la santé de 
l'enfant, j'ai recherché la possibilité d'infection parasitaire par cohabita- 
tion animale. Là encore, l'enquête a été négative. A la connaissance de 
la mère, l’enfant n’a jamais été en contact avec des Chiens ou des Chats. 
Cependant, dans ces dernières semaines, l'enfant passait ses après-midi à 
la crèche, la mère étant prise à ce moment-là par son travail. Bien qu'il 
n’y eut pas d'animaux à demeure dans cet établissement, la mère ne peut 
savoir d'une façon absolue si l'enfant a été préservé, pendant le séjour à 


DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 459 


la crèche, de tout contact avec un animal quelconque. Ce qu’elle nous 
affirme, c'est qu'on ne faisait prendre aux enfants que du lait bouilli, au 
biberon, à l’exclusion de tout autre aliment. 

« Ne trouvant dans ces renseignements rien qui püt m'expliquer la pré- 
sence d'un Ténia chez un enfant aussi jeune, dont l'alimentation est exclu- 
sivement lactée, j'examine le parasite. Sa faible longueur, bien qu'il me 
parut presque complet, la forme des derniers anneaux et leur double 
pore génital, me montrèrent qu'il s'agissait d'une espèce insolite, peut- 
être banale pour des zoologistes, mais en tous cas intéressante pour des 
cliniciens, en raison des circonstances dans lesquelles elle avait été 
rencontrée. J'envoyai donc le parasite à M. le Professeur R. Blanchard, 
qui reconnut un Dipylidium. 

« A la suite du traitement anthelminthique, il n’y eut aucune expulsion 
de parasite ou de fragment de parasite. Le soir même, la mère rentrait 

chez elle avec son enfant. Quelques jours après, le 1“ octobre, elle nous le 
ramenait présentant une poussée d'entérite, due sans doute à l’adminis- 
tration de l'extrait éthéré de Fougère mâle. Gardé quelques jours et soigné 
dans le service. l’enfant fut définitivement rendu à sa mère, en parfaite 
état. J’ai profité du séjour du petit malade dans notre salle pour examiner 


ses selles au microscope et y rechercher des œuîs d'Helminthe : cet exa- 
men fut toujours négatif. » 


Les 60 observations ci-dessus ont été relevées dans les différents 
pays d'Europe, à l'exception d'un seul cas constaté en Amérique. 
Elles se répartissent comme suit : 


France, 4 cas. — Martin (obs. n° 19), R. Blanchard et Drouet (20), 
de Nabias (35), Papillon (60). 

Allemagne, 16 cas. — Blasius (2), Salzmann (3), Küster et Schmidt 
4), Heller (6), Leuckart}(8-12), Hoffmann (15), Asam (28), Kôhl (31), 
Bollinger (55-58). 

Angleterre, 2 cas. — Cobbold (5), Bulloch (30). 

Autriche, 3 cas. — Sonnenschein (32), Rosenberg (34), Pollak (59). 

Danemark, 21 cas. — Friis (13-14), Sérensen (21), Krabbe (36-53). 

États-Unis, 1 cas. — Stiles et Duffield (27). 

Hollande, 1 cas. — Freriks et Broers (33). 

Norvège, 1 cas. — Lænnecken (26). 

Russie, 3 cas. — Krüger (16), Brandt (17-18). 

Suède, 1 cas. — Dubois (1). 

Suisse, 7 cas. — Schoch-Bolley (7), Müller (22-25), Zschokke (29, 
53). 


Il conviendrait d'ajouter à cette liste encore un autre cas, que 


460 R. BLANCHARD 


d'inexactes références bibliographiques ne nousont pas permis de 
contrôler : celui de Lindblad en Suède, vers 1883, chez un enfant 
de trois mois et demi. Rappelons enfin que Dubois affirme qu’à 
Upsal le parasite se voit très fréquemment chez l'Homme (sæpis- 
sime apud homines invenitur). On arrive ainsi à la conviction que le 
Dipylidium caninum est très loin d'être rare dans l'espèce humaine. 


Biologie du parasite; conditions de sa dissémination. — On sait 
que le parasite se trouve normalement dans l'intestin grêle du 
Chien et du Chat, souvent en nombre considérable. Il grandit 
rapidement et les anneaux mûrs ne tardent pas à se détacher. 
Ceux-ci rampent alors dans l'intestin grêle et passent dans le 
gros intestin, en partie grâce à leurs mouvement propres, en 
partie entraînés avec les résidus de la digestion; de même, ils 
sortent par l’anus soit spontanément, soit avec les matières fécales. 
Dans les conditions ordinaires, le Chien et le Chat n’émettent donc 
que des anneaux isolés, maisil n’est pas rare de voir aussi ces ani- 
maux rejeter des fragments formés d’un plus ou moins grand 
nombre d'anneaux encore unis les uns aux autres. 

Une fois qu'ils sont sortis spontanément du rectum, lesanneaux 
isolés restent fréquemment au pourtout de l'anus et rampent ça et 
là jusque vers le pelage. Ils se dessèchent, se déchirent et meurent, 
non sans avoir semé sur le mucus et dans les poils un certain 
nombre d'œufs qui restent ainsi à la surface du corps. Surviennent 
alors le Trichodecte ou la Puce : le premier, en broûtant les débris 
épidermiques, rencontre l'œuf et l'avale; la seconde fait de même 
en promenant son rostre à la surface de la peau et en aspirant les 
humeurs qui la souillent; dans un cas comme dans l’autre, l'Insecte 
s'infeste. 

En eftet, Melnikov a établi que le Ricin du Chien, Trichodectes 
canis (Retzius), est l'hôte intermédiaire de notre Cestode; Grassi 
a donné la même démonstration pour la Puce du Chien, Cteno- 
cephalus canis (Curtis). On sait que la Puce du Chat, Ct. felis (Bou- 
ché), ne diffère guère de cette dernière, dont elle représente tout 
au plus une variété; la notion ci-dessus s'applique donc aussi à 
elle. La larve serait également capable d'évoluer dans la Puce de 
l'Homme (Pulex irritans Linné). Enfin, ilest très vraisemblable quele 
icin du Chat(Trichodectes subrostratus Nitzsch) peutaussil'héberger. 


- 


DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 461 


Le Chien s'infeste à son tour en faisant la chasse aux Insectes 
qui vivent dans son pelage et en les déglutissant. Le Chat n'a pas 
l'habitude de croquer tout vifs les parasites de son pelage, mais il 
lisse fréquemment ses poils avec sa langue et cela lui donne aussi 
l'occasion d’avaler quelques-uns des Insectes qui s'y cachent. Les 
Trichodectes du Chien et du Chat sont plutôt rares, tout au moins 
dans les villes, alors que les’ Puces sont extrêmement communes; 
en fait, c'est donc celles-ci qui sont les propagateurs presque exclu- 
sifs du parasite. 

En ce qui concerne l'Italie, le fait a été mis hors de doute par 
. les observations de Grassi. Certaines Puces du Chien, remarquables 
par leur grosseur et leur couleur cendrée, renferment jusqu'à 50 
Cryptocystis, appartenant tous à la même génération et d'autant 
plus petits qu'ils sont plus nombreux. Ces larves sont libres 
dans la cavité générale de l'Insecte : quand on le dilacère dans une 
goutte de liquide, elles sortent et se répandent aussitôt dans celui- 
ci, sous l'aspect d’une très fine poussière blanche. Introduites alors 
dans le tube digestif du Chien, elles meurent, car on ne trouve pas, 
par la suite, de jeunes Ténias dans l'intestin; dégluties avec la 
Puce qui les abrite, elles éclosent au contraire, dans l'intestin grêle 
et provoquent l'infestation. C’est donc bien, comme il a été dit 
plus haut, en avalant leurs Puces que le Chien et le Chat se conta- 
minent. 

Ces animaux sont d’ailleurs parasités dans la plus large mesure. 
A Copenhague, Krabbe trouve le Dipylidium caninum 87 fois sur 
421 Chiens et 15 fois sur 26 Chats, soit une proportion respective 
de 72et de 60 pour 100. En France, à Paris notamment, on obtien- 
drait des chiffres très analogues, vu la très grande fréquence de ce 
parasite. 

On l’observe chez de tout jeunes Chiens, qui tettent encore leur 
mère; ils avalent fortuitement une Puce contaminée et s'infestent 
de la sorte. Une Chienne dépourvue de Trichodectes, mais porteuse 
de Puces très infectées, mit bas des petits qui, au bout de cinq à 
dix jours, étaient déjà parasités ; ils l’étaient à un haut degré, au 
bout d'un mois; par contre, on ne trouva aucun Dipylidium chez 
les petits d'une autre Chienne, qui n'avait ni Puces ni Tricho- 
dectes. Chez un jeune Chien de dix jours, on peut trouver des Vers 
longs de 25 mm; chez le Chien d’un à deux mois, il est ordinaire de 


462 R. BLANCHARD 


trouver des Vers adultes. Il suffit, en effet, d’une vingtaine de jours 
pour que ceux-ci parviennent à maturité sexuelle (cf. obs. 30). 
C'est encore en avalant des Puces, ou plus rarement des Tricho- 
dectes de Chien ou de Chat que l'espèce humaine se contamine: 
mais, sauî le cas très exceptionnel d'individus déments ou atteints 
de perversion du goût, l'ingestion de ces Insectes n'estaucunement 
volontaire; elle résulte d'une circonstance toute fortuile, qui se 


Fig. 15. — Chat lapant le lait et y semant ses Puces. 


comprend d'ailleurs très aisément. Les Insectes qui vivent norma- 
lement dans le pelage du Chien et du Chat, et particulièrement les 
_ Puces, le délaissent de temps à autre pour sautiller çà et là; ils 
tombent et se noïent dans les aliments et les préparations culi- 
naires (soupe, bol de lait, ete.). Le Chat, au reste, est un marau- 
deur fort impudent : il se dresse le long du pot au laït et y intro- 
duit sa tête pour laper le liquide savoureux; il ne craint même pas 
de s'attaquer au bol qui vient d’être placé sur la table; les gestes me- 
naçants d'un enfant ne l’effrayent guère (fig. 15). Bien loin d'écar- 
ter des convives aussi importuns, nombre de personnes font d'ail- 
leurs manger à table, avec elles-mêmes, leur Chien ou leur Chat, 
sans se douter du danger qui en résulte (obs. 56). Enfin, l'absence 
d'un Chat ou d'un Chien n'exclut aucunement l’étiologie que nous 
venons d'exposer, attendu que le lait a pu être souillé à la laiterie 


DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 463 


(obs. 32); tel doit être fréquemment le cas pour les enfants élevés 
au biberon (obs. 21, 31, 60). 

L'infestation s'accomplit dans ces diverses conditions. Elle est 
plus fréquénte chez l'adulte qu’on ne serait tenté de le croire; la 
plus forte proportion des cas s’observe néanmoins chez les enfants. 
Cela tient évidemment, d’une façon absolue, à ce que les enfants 
fontune grande consommation de laitage, qui se trouve facilement 
souillé par le Chat, et sont en contact plus familier que les adultes 
avec les deux animaux incriminés; cela peut tenir aussi, d’une 
façon relative, à la plus grande sensibilité des enfants à l’helmin- 
thiase et à ce qu'on surveille plus attentivement leurs déjections 
que celles des personnes âgées. 


Fréquence et nombre des parasites. — Le Dipylidium caninum 
peut s'observer chez l'Homme à tous les âges de la vie; il est 
plus fréquent dans l'enfance, pour les raisons exposées plus haut. 
On peut déjà constater sa présence chez des nourrissons de 
o semaines (obs. 59), de 6 semaines (obs. 51), de 7 semaines 
(obs. 13). Il n’est pas rare de 2 à 5 mois (obs. 41, 42; 21, 36, 45; 4; 
31; 38, 43, 46, 48, 58; 15), de 6 à 10 mois (obs. 14, 32, 52; 49; 44; 
39; 40, 51, 60), de 11 à 15 mois (obs. 50; 22; 34), de 16 à 24 mois 
(obs.3, 16,27; 53; 28; 20), de 2 à 5 ans (obs.33,35 ; 5,47, 54; 26, 55). 
Les observations 7 à 12 et 30 concernent aussi de jeunes enfants. 

Nous ne relevons qu'un cas à 8 ans (obs. 18), un cas à 13 ans 
(obs. 2) et un cas à 15 ans (obs. 17). Chez les adultes, un cas sans 
indication d'âge (obs. 19), un cas à 31 ans (obs. 57), un cas à 38 ans 
(obs. 26), un cas de 35 à 40 ans (obs. 29), un cas à 40 ans (obs. 24) 
un cas à 45 ans (obs. 25) et un cas à 55 ans (obs. 56). En résumé, 
cette statistique portant sur 59 cas donne les résultats suivants: 


De 5 semaines à 6 mois. 20 cas, soit. . . . . . 33.9 pour 100 
Deal MOIS NET _ 11.61 — 
a 13 à DABINOIS EN EC ER0 — 182 Pate Puel 
CRAARIANS ER. RUE 2 — 3.99 
De 9 mois à 3 ans . . . 7 — 11#0 100) — 
DÉPAAASIANS EEE ES ES 0010 — RS HAOMAGNUNE 
Dear P0 ans Len 2 — LATE RAR ES de LEE 
Au delà de 20 ans . . . 6 — AD D AO TORRES 


Il semble que l'intestin ne contienne ordinairement qu'un seul 
Dipylidium, soit qu'effectivement l'expulsion constatée d'un seul 


464 R. BLANCHARD 


parasite coïncide avec la cessation des accidents morbides, soit 
que le petit nombre des anneaux évacués avec les selles plaide en 
faveur d’une telle interprétation; en fait, dans beaucoup de cas, le 
nombre total des parasites reste incertain. Par contre, dans 15 ob- 
servations, soit dans 25 pour 100 des cas, ceux-ci se sont montrés 
plus ou moins nombreux : depuis 2 Vers (obs. 7, 40, 42, 44) jusqu’à 
3 Vers (obs. 28, 50 et 52), 4 Vers (obs. 32), 4 à 6 Vers (obs. 16), 
6 Vers (obs. 56), 10 Vers (obs. 34), plusieurs Vers (obs. 15), 30 Vers 
(obs. 18), 48 Vers (obs. 17), 40 à 50 Vers (obs. 2) et jusqu à des Vers 
en grande quantité, mais indéterminée (obs. 30). 


Symptomatologie, pathogénie. — Les parasites sont-ils pathogènes 
et, dans ce cas, la symptomatologie varie-t-elle d'intensité suivant 
leur siège ou leur nombre? Les observations qui précèdent ré- 
pondent nettement à cette double question. 

Voici une fillette de 24 mois, robuste et bien portante, qui, 
depuis # ou 5 mois, rend un ou deux anneaux dans chacune de 
ses selles (obs. 20); son état général est d’ailleurs excellent et, 
n'était la présence constante de ces corps insolites dans ses déjec- 
tions, les parents n'auraient aucune raison de faire appel au méde- 
cin. Nombre d'observations sont, pour ainsi dire, calquées sur celle- 
ci, l'attention de la mère n'étant sollicitée par rien d'anormal, en 
dehors des anneaux qui sont évacués avec les selles. Il est donc 
évident que, dans les conditions ordinaires, l'organisme délicat de 
l'enfant n’est pas influencé d’une façon appréciable par la présence 
d'un seul parasite ou même d’un petit nombre de parasites. 
Voici, d'autre part, un enfant de 16 mois qui dort mal et est très 

excitable; il rejette de temps à autre des anneaux rougeûtres, 
qu'un vermifuge fait disparaître d’une façon définitive (obs. 3). 
Voici encore un enfant de 2 ans, de santé délicate, qui depuis 
quelques semaines rend chaque matin plusieurs anneaux 
(obs. 35). Tel autre garconnet de 4 ans, maladif et amaigri depuis 
longtemps, rend également des anneaux {0bs. 54). Une fillette de 
19 mois, qui semble d’ailleurs bien portante, a grand appétit et est 
en proie à une inquiétude et à une agitation anormales; elle évacue 
trois Vers et tout rentre dans l’ordre (obs. 28). Un nourrisson, 
infesté vers l'âge de 5 semaines, cesse dès lors d'augmenter de 
poids (obs. 59). Une fillette de 16 mois devient triste et abattue 


DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 465 


elle perd l'appétit, ne joue plus, pleure facilement, puis revient à 
la gaîté; ses selles sont irrégulières, elle a tour à tour dela diarrhée 
et de la constipation et même une forte fièvre; elle expluse de 4 à 
6 Vers et guérit (obs.16). Une fillette de 5 mois commence à rendre 
des anneaux, sans présenter de troubles appréciables; deux mois 
plus tard, les anneaux sont très nombreux dans les déjections, 
l'enfant est affaibli, très abattu et a de la diarrhée; il évacue plu- 
sieurs Vers, après quoi son état redevient normal (obs. 15). Une 
femme de 55 ans se plaint de pression à l’épigastre et de violents 
maux de tête; ces symptômes disparaissent après l'expulsion de 
6 Vers (obs. 56). Enfin, une femme de 31 ans est sujette à des 
malaises passagers, qui ne se renouvellent plus après l'évacuation 
d'un Ver (obs. 57). 

D’après ces exemples, il est clair que l'organisme, aussi bien de 
l'adulte que de l'enfant, n’est pas doué d’une indifférence absolue 
envers le parasite, que celui-ci soit représenté par un petit nombre 
d'exemplaires ou même par un seulindividu. Quand les Helminthes 
sont nombreux, les accidents que nous venons de constater 
deviennent plus manifestes et s’aggravent plus ou moins : les deux 
observations rapportées par Brandt sont très démonstratives à cet 
égard. 

Un garçon de 15 ans, amaigri, faible et maladif depuis un an, 
passe par des alternatives de santé et de malaise, ce dernier s'accom- 
pagnant parfois de douleurs à l’épigastre et de palpitations du cœur; 
l'état général s'améliore après l'expulsion de Vers en nombre par- 
fois considérable. Au bout de deux mois, ces premiers symptômes 
reviennent plus intenses, en s’'accompagnant de douleurs lombaires 
et de constipation ; une nouvelle évacuation de parasites est encore 
suivie d’une rémission d'assez longue durée. Puis les accidents 
reviennent bientôt, encore plus graves et compliqués de vomisse- 
ments et de troubles nerveux et digestifs; la sortie des parasites 
s'accompagne habituellement de prurit et de brülure à l'anus. 
Finalement, le malade expulse 48 Vers et guérit (obs. 17). 

Rappelons enfin l'observation d’une fillette de 8 ans, qui offrait 
un tableau symptomatique encore plus varié : excitation, tristesse, 
douleurs à l’épigastre, malaise, respiration difficile, inappétence, 
constipation. La sortie spontanée de quelques Vers détermine une 
amélioration, mais les accidents se renouvellent, allant même 


466 R. BLANCHARD 


jusqu à la perte de connaissance. L'amélioration succède à la 
rechute deux ou trois fois de suite, grâce à l’expulsion de parasites 
qui, en passant à l’anus, provoquent du prurit et une sensation de 
brülure. La petite malade finit par expulser une trentaine de Vers, 
ce qui amène la guérison (obs. 18). 

Les symptômes variés que nous venons de décrire nous donnent 
le tableau fidèle des accidents de l’helminthiase; ils mettent hors 
de doute la nuisance du Dipylidium caninum, dans des conditions 
que nous allons déterminer. La doctrine microbienne a éclairé 
d'une si vive lumière l’étiologie des maladies infectieuses qu'elle 
a obscurci pour un temps la notion du rôle pathogène des Hel- 
minthes. Cette notion a subi une éclipse d'assez longue durée; il 
importe de réagir contre l’injuste oubli où elle est tombée et, par 
une plus équitable appréciation des faits d'observation et d'expé- 
rience, de restituer aux Vers intestinaux la signification pathogé- 
nique dont, pendant les deux premiers tiers du xix® siècles, on les 
a très justement tenus pour coupables. 

Les accidents causés pour le Dipylidium n'ont rien de spécifique ; 
ils sont identiques à ceux déterminés par certains autres Helmin- 
thes de petite taille, tels que les Hymenolepis ; ils ont la plus grande 
analogie et reconnaissent la même cause générale que ceux de l’ap- 
pendicite et de la typhlo-colite vermineuses; ils résultent, en un 
mot, d’excitations exercées sur les plexus nerveux de l'intestin, 
d'où des accidents à la fois locaux et généraux, ces derniers étant 
d'ordre réflexe. La démonstration que j'ai donnée jadis au sujet 
des Hymenolepis et celle que j'ai exposée plus récemment à l'Aca- 
démie de médecine, au sujet du rôle du Trichocéphale dans la pro- 
duction de l'appendicite, me semblent assez positives pour qu'il 
soit inutile de revenir ici sur ces notions désormais acquises. 

Le parasite se fixe ordinairement à la surface de la muqueuse, à 
la base des villosités; ses ventouses sont profondes au maximum, 
entièrement remplies par une partie aspirée de la muqueuse; le 
cou est court et renflé, comme pour donner une insertion solide 
aux muscles dilatateurs des ventouses et faciliter ainsi leur action 
aspiratrice. Dans de telles conditions, l’épithélium reste intact et le 
Ver ne saurait provoquer aucune irritation des plexus nerveux. 
Mais cet Helminthe, grâce à la ténuité de son extrémité anté- 
rieure, est capable de s’enfoncer jusqu'au fond des glandes de Lie- 


DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 467 


berkühn, en leur faisant subir une dilatation notable : l'épi- 
thélium reste encore intact, d'après les observations de Mingaz- 
zini; mais, On conçoit qu'il n’en soit pas toujours ainsi et que les 
nombreux crochets qui hérissent le rostre, en dilacérant quelques 
cellules de revêtement du cul-de-sac glandulaire, puissent entrer 
en contact avec les filets sympathiques : ainsi prennent naissance 
des accidents nerveux dont le type varie suivant le point de l’in- 
testin où se produit cette minuscule lésion. 

Schiefferdecker a reconnu, chez des Chiens depuis longtemps 
porteurs du Dipylidium caninum, une hypertrophie considérable 
des villosités, qui atteignent une taille quatre à cinq fois plus con- 
sidérable qu'à l'état normal, avec un riche réseau capillaire. La 
muqueuse peut présenter en outre de véritables tunnels disposés 
dans le sens longitudinal, ayant de 3 à 6 mm. de long sur 2 à 
3 mm. de large, tunnels que le parasite traverse de part en part; 
on peut même trouver jusqu'à deux ou trois Vers engagés dans le 
même tunnel. Ces formations curieuses, dont j'ai vainement cher- 
ché des exemples, n'intéressent que les couches superficielles de 
la muqueuse : elles sont creusées à travers la couche glandulaire 
et résultent, non d’une perforation exercée par les parasites, mais 
plutôt d'un processus irritatif déterminant une prolifération su- 
perficielle du tissu conjonctif, puis une fusion du tissu néoformé 
par-dessus le corps des Helminthes. 

Quoi qu'il en soit, l’action pathogène du parasite, bien qu'obs- 
cure dans nombre de cas, se manifeste fréquemment par des 
symptômes plus ou moins graves; ses relations avec la muqueuse 
et les lésions reconnues sur celle-ci expliquent qu'il en soit ainsi. 
Au surplus, les accidents morbides ne sont pas particuliers à l'es- 
pèce humaine : les vétérinaires ont signalé chez le Chien des trou- 
bles intestinaux plus ou moins graves ou, plus habituellement, des 
troubles nerveux simulant l'épilepsie et la rage. 

Le prurit et la sensation de brülure à l'anus (obs. 17, 18 et 55) 
sont, d'autre part, l'indice d'une substance irritante, de nature 
chimique, qui se trouve éliminée avec les parasites, ou plutôt éla- 
borée et éliminée par eux. Qu'une part lui revienne dans la pro- 
duction des phénomènes réflexes et spécialement dans celle des 
troubles de la nutrition (arrêt de la croissance, inappétence, fai- 
blesse, etc.), cela ne me semble pas contestable ; 1l sera nécessaire 


468 R. BLANCHARD 


de préciser par l'expérience ce point très intéressant, qui touche 
directement à la question si controversée de la toxicité des Hel- 
minthes. 


Traitement. — On a vu le parasite sortir spontanément par 
l'anus (obs. 4, 13 et 60) et même par le nez (obs. 12); mais on ne 
peut compter sur cette évacuation spontanée, qui doit n'intéresser 
d’ailleurs d'une partie du Ver, la tête restant dans l'intestin. La 
présence de l'Helminthe une fois constatée, il est donc nécessaire 
de procéder à la cure ténifuge. On a obtenu de bons résultats avec 
l'extrait éthéré de Fougère mâle, mais ce médicament ne doit être 
administré qu'avec prudence aux enfants, chez lesquels il provo- 
que facilement de l’entérite (obs. 60). La pelletiérine est plus re- 
commandable, ainsi que le kamala, ce dernier à la dose de 0 gr. 50 
à 3 grammes, suivant l’âge du patient, associé ou non au calomel. 
On pourra essayer aussi le thymol, administré en cachets, en te- 
nant compte de ce que trois doses d’un gramme, à une heure d'in- 
tervalle, sont suffisantes pour un adulte. 


Prophylaxie. — La prophylaxie est des plus simples; elle con- 
siste à débarrasser les Chiens et les Chats de leurs parasites intes- 
tinaux ; à les délivrer aussi de leurs parasites externes et à tenirleur 
pelage en bon état de propreté, au moyen de bains insecticides et 
de savonnages. Au surplus, on doit éviter d'une façon générale les 
privautés avec ces animaux domestiques, qui peuvent être l'ori- 
gine de diverses maladies parasitaires. 

« Cave canem », écrivaient les Romains à la porte de leurs habi- 
tations. Cette formule lapidaire, déviée de son sens antique, ré- 
sume pour nous un utile précepte d'hygiène. 


INDEX BIBLIOGRAPHIQUE 


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Cf. [, p. 481, 1‘ nov. 1888. 

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DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 469 


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della Soc. dei natural. in Napoli, VI, p. 46, 1892. — Il genere Dipylidium 
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Cestodi. Bollettino Soc. natural. Napoli, VI, p. 9, 1893. — Bemerkungen 
über Dipylidienlarven. Centralblatt für Bakteriol., XVI, p. 565, 1894. 

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cf. IL, p. 59. Holmiae, editio altera, 1762; cf. Il, p. 73et 88. — cf. R. BLaN- 
cHARD, Traité de zoologie méd., 1, p. 481, 1888. 

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XVI, n° 6, 1884 — Tænia cucumerina hos Born. Ugeskrift for Laeger, (5), 
II, p. 777, 1896 (discussion; pas de nouveau cas). 

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Acad. des sc. et lettres de Montpellier, 1, p. 85, 1847; cf. p. 88. 

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Parasiten des Hundes (Tænia cucumerina Gæze; Ascaris marginata Rud. ; 
Spiroptera sanguinolenta Rud.; Filaria imanitis Leidy und Hæmatozoon 
- Lewis). Centralblatt für Bakteriol., IV, p. 609, 1888. 

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Württemberg. naturwiss. Jahreshefte, p. 356, 1873. 

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Kinde. Jahrbuch für Kinderheilkunde, XXVI, p. 386, 1887. 

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H. KraBse, Recherches helminthologiques en Danemark et en Islande. 
. Paris, Londres et Copenhague, in-4° de 68 p. avec 7 pl., 1886: cf. p. 18. 
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med. Arkiv, XII, n° 23, 1881. — 300 Tiliälde af Bändelorm hos Mennes- 


470 R. BLANCHARD 


ket, iagttagne i Danmark. ibidem, XIX, n° 12, 1887. — Forekomsten af 
Bändelorme hos Mennesket i Danmark. Beretning om 100 nye Tilfälde. 
Ibidem, XXVIII, n° 19, 1896. — Ueber das Vorkommen von Bandwürmern 
beim Menschen. 1bidem, Afd. 2, n° 2, 1905. 

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Küsrer et Scamipr, cité par Leuckart, 1° édition, I, p. 756, 1863; 
2° éd., I, p. 846, 1880. 

R. LeuckarT, Die menschlichen Parasiten. Leipzig, 1863; cf. I, p. 756 
— Die Parasiten des Menschen und die von Thnen herrührenden Krankhei- 
ten. Leipzig, 2’ édition; cf. I, p. 845-847, 1880. 

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Barn. Nordiskt med. Arkiv, XXXIV, p. 24, 1901. 

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intestinale. Bollettino dell’ Accad. Gioenia di sc. nat. in atania, LVI, 1898. 

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DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 471 


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Tænia cucumerina. Atti della Soc. toscana di sc. nat., 1888. — Notizie 
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(Dipylidium caninum) in an american child. American Medicine, V, p. 65, 
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zool., (6), XV, art. n° 4, 1883; cf. p. 56. 

Th. ZÂsLEIN, Ueber die geographische Verbreitung und Häufgkeit 
der menschlichen Entozoen in der Schweiz. Gorrespondenz-Blatt für 
Schweizer Aerzte, XI, p. 673, 1881; cf. p. 681. 

Zscaokke, Ein neuer Fall von Dipylidium caninum beim Menschen. 
Centralblatt für bakteriol., Originale, XXXIV, p. 42, 1903. — Dipylidium 
caninum (L.) als Schmarotzer des Menschen. Ibidem, XXXVIIL, p. 534, 
1905. 


NOTE SUR DES 


TABANIDES DE LA COTE OCCIDENTALE D'AFRIQUE 


PAR 


J. SURCOUF 


Chef de travaux au Laboratoire colonial du Muséum. 


(PLANCHE IX) 


Le Dr Best, médecin des colonies anglaises, a fait parvenir aù 
professeur R. Blanchard un certain nombre de Diptères prove- 
nant des régions de la Guinée anglaise comprises entre 6° et 8° 
de latitude nord et entre 3° et 5° de longitude est. Parmi ces Dip- 
tères, la famille des Tabanides se trouvait représentée par huit 
exemplaires appartenant à quatre espèces différentes : 

10 Tabanus ruficrus Palisot de Beauvoir. — Un exemplaire fe- 
melle (fig. 2). Espèce de grande taille, à vol rapide et dont l’aire de 
dispersion connue actuellement comprend le Congo et la Gambie. 

20 Tabanus tæniola Pal.-Beauv. — Troisexemplaires (fig. 1). Cette 
espèce fait partie d'un groupe naturel très homogène, qui com- 
prend : T. striatus Fabr., de la Chine, de l'Inde, de Sumatra et de 
Java; T. indicus Fabr., des Indes; T. trivittatus Fabr., du Brésil et 
de la République Argentine. 

T. iæniola est un des Taons les plus répandus dans l'Afrique 
tropicale. La collection du Laboratoire d'entomologie du Muséum 
en comprend 35 exemplaires provenant des régions suivantes : 
Sénégal, Soudan, Guinée francaise, Côte d'Ivoire, Congo, région du 
Tchad, Khartoum, Abyssinie, Haut-Zambèze, lac Nyassa. Walker 
avait décrit ce Taon de Gambie sous le nom de 7. dorsivitta, tombé 
depuis en synonymie. 

Il est à remarquer que T. tæniola a été de tous temps indiqué 
comme s'attaquant aux troupeaux. Son congénère T. trivittatus 
assaille de même les bêtes à cornes dans les plaines de la Répu- 
blique Argentine. Une note du lieutenant de zouaves Chapin signale 
que la piqüre du T. tæniola fait mourir les Chameaux dans le 
Congo. Cet Insecte est donc intéressant à suivre de très près et il 
serait à désirer que tous les explorateurs et chargés de mission 


TABANIDES DE LA COTE OCCIDENTALE D'AFRIQUE 473 


voulussent bien recueillir toutes les notes possibles sur les cas 
d'infection qu ils constatent. 

3° Tabanus Besti, nova species. 

Un exemplaire femelle. L'espèce est dédiée au Dr Best, qui l’a 
découverte et a bien voulu en faire part au Laboratoire de para- 
sitologie de la Faculté de médecine de Paris. 

D. — Noir. Tête : Yeux bronzés, glabres, sans bandes, à cor- 
néules égales. Bande intra-oculaire étroite, brune, portant une 
callosité d'un brun clair brillant, de la largeur de la bande intra- 
oculaire à la base et se prolongeant progressivement en une ligne 
saillante et étroite qui parcourt la bande en entier. Partie infé- 
rieure de la tête jaune chamoiïs. Antennes noir brunâtre à la base 
(les deux articles suivants manquent). Palpes noirs à pubescence 
noire. Thorax d’un noir brunâtre avec une pubescence noire. . 
Abdomen noir en entier. Pattes antérieures noires, tibias fortement 
ciliés au bord externe, blancs dans leur moitié basilaire. Pattes 
intermédiaires et postérieures noires à tibias brun rougeâtre foncé. 
Ailes hyalines, enfumées, plus claires au bord interne. Balanciers 
noirs. 

Longueur du corps : 15 mm. 

Un exemplaire femelle, se rapprochant du T. Besti, se trouve 
dans la collection du Muséum et avait été recueilli par Delafosse 
en 1895, sur la Côte d'Ivoire. 

Le Tabanus Besti appartient au groupe qui comprend en Europe 
T. micans et T. ater; en Afrique, T. alexandrinus, T. algirus et T. ni- 
gritus. 

4° Tabanus Blanchardi, nova species. 

Trois exemplaires femelles (fig. 3-et 4). L'espèce est dédiée au 
professeur R. Blanchard, à la bienveillance de qui je dois d'avoir 
pu étudier ces Insectes. 

®.— Brun. Téte noire, yeux arrondis. non déprimés, à cornéules 
égales sans pubescence et sans bandes colorées. Bande intra-ocu- 
laire étroite, de couleur cuir. Callosité inférieure d'un brun brillant, 
longue et arrondie au sommet, prolongée par une ligne saillante 
étroite, se dilatant très légèrement vers la partie médiane de la 
bande intra-oculaire. Antennes brun rougeàätre sombre, à troisième 
article muni d'une petite dent aiguë. Partie inférieure de la tête 
jaune chamoïs. Palpes brunâtres à pubescence sombre. Thorax noir, 

Archives de Parasilologre, XI, n° 3, 1907. 31 


#74 J. SURCOUF 


orné de quatre lignes parallèles de pubescence jaune doré, dont les 
deux médianes se prolongent sur le scutellum qu'elles entourent. 
Flancs et parties inférieures revêtus d’une courte pubescence gris 
jaunâtre. Abdomen noirâtre en dessus, portant une bande jaune 
rougeñtre médiane et orné de fascies rougeätres sur les deux 
premiers segments. Côtés de l'abdomen étroitement bordés de 
jaune. Ventre noir, chacun des segments marqué largement de 
grisätre. Ailes transparentes, colorées en brun au bord costal, de 
teinte plus claire à l’apex et au bord interne. Nervation normale. 

Longueur 15 à 16 mm. 

Cette nouvelle espèce appartient au groupe du T. gabonensis; 
elle se distingue de celui-ci par la couleur de l'abdomen et du tho-. 
rax, brun ciair chez T. gabonensis, et par sa moindre taille. Elle se 
sépare également du T. secedens par l'absence de bandes abdomi- 
nales latérales. 

Tous lesexemplaires énumérés ou décrits dans cette note ont été 
donnés par M. le Professeur R. Blanchard au Muséum d'histoire 
naturelle. 


EXPLICATION DE LA PLANCHE IX. 


Fig. 1. — Tabanus tæniola ©. x 2,5. 
Fig. 2. — Tabanus ruficrus ©. x 2,5. 
Fig. 3 et 4. — Tabanus Blanchardi nova species ©. x 2,5 


Archives de larasitoloqie , XI, 1907. DIX 


£ Lartaud seulp 


M.Trottet ad nat. del.et pirx 


Tabanides de la côte occidentale d Afrique 


Jmp.Ceny-Gros, Paris 


re Li] # 
HA L'EN 
(£ : 
er 


REVUE BIBLIOGRAPHIQUE 


M. BRAUN, The animal parasites of Man; a handbook for students and 
medical Men. London, J. Bale, sons and Danielsson, in-8° de xix-453p., 
avec 290 fig. — Prix, cartonné : 1 guinée — 26 fr. 25. 

Cette édition anglaise du livre bien connu du professeur Max BRAUN a 
été faite sur la troisième édition allemande; elle a été complétée et mise 
à jour par les professeurs SamBon et THEoBALD : C’est dire qu’elle est 
absolument au courant des dernières acquisitions de la science et qu'elle 
équivaut en réalité à une nouvelle édition. 

La Parasitologie a réalisé de tels progrès, au cours de ces dernières 
années, qu'un nouvel ouvrage, résultant des efforts combinés de trois sa- 
vants aussi qualifiés, ne peut être accueilli qu'avec la plus grande faveur. 
Celui-ci est recommandable entre tous, à cause de sa précision et du 
choix heureux des figures dont il est parsemé. Pour la première fois 
dans un traité de parasitologie, une large part est accordée aux Mous- 
tiques, en raison de leur rôle capital comme transmetteurs de diverses 
maladies parasitaires. Un tel livre doit être le vade-mecum de tout méde- 
cin, de tout étudiant; il rendra de grands services aussi bien dans les 
régions intertropicales que dans lés pays tempérés. 


C. MExse, Handbuch der Tropenkrankheiten. Leipzig, J.-A. Barth, IT, 
in-8° de xu-472 p. avec 18 pl. hors texte et 126 fig. dans le texte, 1905. — 
Prix, broché : 16 mk; cartonné : 17 mk 50. 

Nous avons déjà rendu compte du premier volume de cet important 
ouvrage (IX, 632). Voici maintenant le deuxième volume : il ne le cède 
en rien au précédent. 

Le Dr A. VAN DER SCHEER donne d’abord une très bonne étude des aphtes 
tropicaux (p. 1-43) : la maladie sévit chez les blancs et les mulâtres; 
l'étiologie en est inconnue. EysELL fait un bon résumé des notions zoolo- 
giques concernant les Moustiques (p. 44-94). Le D' C.-L. VAN DER BuRG 
(récemment décédé) décrit la fièvre dengue (p. 95-107); la spécificité de 
l’'Hæmatozoon denguii reste incertaine. La fièvre jaune est étudiée par 
J. CaRRoOLL (p. 108-139), le béribéri par BAzz et MrurA (p. 140-174); cette 
dernière affection, dont l'étiologie reste obscure, est considérée comme 
une maladie infectieuse. Puis viennent la lèpre par G. Sricker (p. 175-218), 
la dysenterie bacillaire par R. Rue (p. 219-292), le choléra par KRAUSE et 
Rumer (p. 293-346), la fièvre ondulante par BasseTT-Suirx (p. 347-364), le 
typhus des tropiques par L. MARTIN, de Diessen (p. 365-390), la peste par 
Pocx (p. 391-433), enfin les exanthèmes aigus (verruga, variole et ses va- 
riétés (1), rougeole et scarlatine) par A. PLEHN (p. 434-456). 

Un tel ouvrage ne s’analyse pas; il ne vaut que par la qualité de ses 
collaborateurs : or, ceux-ci sont choisis parmi les plus compétents et les 

(1) Notamment variole des bords du Sanaga, fleuve du Cameroun. 


476 REVUE BIBLIOGRAPHIQUE 


mieux instruits des questions spéciales qu'ils avaient à traiter. L'impres- 
sion très favorable qui se dégageait de la lecture du premier volume se 
confirme entièrement après celle du second. L'ouvrage dirigé par le 
D' MExse est véritablement une œuvre capitale, qui fixe avec justesse l’état 
actuel de la science et qui ne manquera pas de rendre les plus grands 
services aux médecins de colonisation. Il contribuera ainsi, par une voie 
des plus directes, au progrès et au succès des Européens dans les pays 
tropicaux. 


W. Hallock Park and Anna W. Wiccrams, Pathogenic Microorganisms 
including Bacteria and Protozoa, 'a practical manual for students, physi- 
cians and health officers. New-York and Philadelphia, Lea brothers and C”’, 
2° édition, in-8° de vin et 17-556 p., 1905. 

Excellent ouvrage, d’une exécution typographique très élégante. Il 
débute par une longue étude de la biologie des Bactéries (p. 17-184), 
y compris l’agglutination, l’immunité, la phagocytose, etc. Puis vient 
l'étude systématique des principales Bactéries pathogènes pour l'Homme 
(p. 185-468) : diphtérie, tétanos, fièvre typhoïde, morve, choléra, peste, 
etc. L'histoire de chaque espèce est exposée dans tous ses détails et à tous 
les points de vue spéciaux que l’on peut envisager, mais en s’en tenant 
exclusivement aux méthodes delaboratoire. Un dernier chapitre (p. 469- 
538) est consacré aux Protozoaires parasites. Il est moins complet que 
les précédents, mais peut encore être consulté utilement. 

Pour la partie bactériologique, ce livre est beaucoup plus complet et beau- 
coup plus au courant des multiples faces de la science que les ouvrages 
similaires publiés en Europe, spécialement en France. Il est tout à fait 
recommandable. 


E. JEANSELME, agrégé à la Faculté de Médecine, Le Béribéri. Paris, Mas- 
son et C*, un vol. petit in-8° de l'Encyclopédie des Aide-Mémoire. — Prix : 
broché, 2 fr. 50 ; cartonné toile, 3 francs. 

Le béribéri est une polynévrite infectieuse ou toxique, grave et souvent 
mortelle, qui règne à l'état endémo-épidémique dans plusieurs régions 
chaudes et même tempérées du globe et fait d'innombrables victimes 
parmi les races de couleur. Nous ne possédions jusqu'ici, en France, 
aucune monographie d'ensemble sur ce sujet. Le D' JEANSELME vient de 
combler cette lacune : pour écrire cette monographie, il a utilisé les 
nombreux matériaux qu'il a recueillis lui-mème en Indo-Chine, en Bir- 
manie et à Java, sans négliger toutefois {les ouvrages des médecins hoi- 
landais, allemands et japonais qui ont poussé si loin l'étude de cette 
maladie. Ce volume rendra de grands services aux médecins de la marine 
et des colonies, aux médecins de district et de plantation, aux médecins 
sanitaires maritimes et, en général, à tous les colons ou fonctionnaires 
qui emploient des coolies dans les pays décimés par le béribéri. 


REVUE BIBLIOGRAPHIQUE 477 


A. LavEerAN, Trailé du paludisme. Paris, Masson et C'°, 2*édition, grand 
in-8° de vrr-622 p. avec une planche en couleurs et 58 fig. dans le texte. 

Cet important ouvrage constitue une monographie complète du palu- 
disme. L'auteur étudie depuis longtemps cette maladie; nous sommes 
convaincu que la partie clinique de sonlivre, dont ilne saurait être question 
ici, est des plus instructives et donne ur bon résumé de l’état actuel de 
la science.Les autres chapitres rentrent plus directement dans le cadre 
de nos études; ils doivent donc fixer notre attention. 

L'ouvrage débute par l'exposé des anciennes théories sur l’origine des 
fièvres paludéennes. L'histoire des Palmellacées et du prétendu Bacillus 
malariae s'y trouve tout au long, mais on est surpris qu'il ne soit 
fait aucune allusion aux observations de KLENCKE qui, dès 1843, décrivit 
et figura d’une façon très nette certaines formes de l’Hématozoaire. Quand 
M. LAvEeRAN retrouva le parasite, en 1880, la question avait donc été déjà 
quelque peu déflorée. 

En 1885, MaArcHiAFAvA et CELLI ont créé pour le parasite du paludisme le 
génre Plasmodium, auquel Grassret FELETTI ont vainement tenté, en 1890, 
de substituer le genre Hæmäamæba. Eu égard à la loi de priorité, ce dernier 
nom ne pouvait être accepté; la plupart des auteurs sont d'accord sur ce 
point. Cependant, M. LaAvERAN continue à méconnaitre le genre Plasmo- 
dium, de même qu'il se refuse à admettre les trois espèces fondamentales 
(PL. vivaxæ, PI. malariae et PI. falciparum), qui se distinguent pourtant 
les unes des autres, non seulement par leur structure, leur évolution, leur 
action sur l'hématie, la forme de leurs gamètes, mais encore en ce qu’elles 
déterminent chacune un type morbide particulier. Il en résulte, dans les 
descriptions de l’auteur, une confusion vraiment inattendueet singulière- 
ment génante; son langage n’est plus celui de l'heure présente. 

Nous devons en dire autant du chapitre intitulé : Notions élémentaires sur 
les Culicides. Considérant que les Anophelinae sont actuellement les seuls 
Culicides auxquels on soit en droit d'attribuer le rôle de propagateurs du 
paludisme, l’auteur s’en tient à l'étude de ce seul groupe, et cette restric- 
tion est tout à fait raisonnable. Mais on est étonné que les progrès 
très heureusement accomplis dans la classification des Anophelinae, 
depuis cinq années déjà, ne soient pas encore acceptés de M. LAVERAN, qui 
continue à ne mentionner que le seul et unique genre Anopheles. Sa 
nomenclature et son langage se trouvent, de ce fait, en complet désaccord 
avec ceux de tous les entomologistes actuels. 

A la page 179, l’auteur donne la liste des « principaux ouvrages à 
consulter ». La première édition du livre de G1LEs (1900) se trouve indi- 
quée, mais non la seconde (1902). Comme ouvrage français, on ne relève 
qu'un seul travail, d’ailleurs très important, de NEVEU-LEMAIRE, paru 
dans les Mémoires de la Société Zoologique de France (1902). Aucune men- 
tion du livre, très important aussi, du Professeur R. BLANCHARD : Les 
Moustiques, histoire naturelle et médicale (Paris, 1905, un vol. grand in-8° 
de xm1-673 pages). Un tel oubli est particulièrement regrettable, car 


478 REVUE BIBLIOGRAPHIQUE 


l’auteur aurait pu trouver de très utiles indications dans cet ouvrage, 
qui est incontestablement, à l'heure actuelle, le plus complet que nous 
possédions sur le paludisme envisagé au point de vue scientifique. Il y 
aurait trouvé, notamment, une théorie de la fièvre, qu'il eùt été avanta- 
geux de substituer à celle vraiment bien archaïque de l'irritation des 
centres nerveux par les Hématozoaires. Les longs commentaires dont est 
agrémentée cette doctrine surannée ne font queen mettre en relief 
toute l'insuffisance. 

Les longs chapitres consacrés aux complications du paludisme, aux 
maladies intercurrentes, à l'anatomie pathologique, au diagnostic, au 
traitement et à la prophylaxie sont bien documentés et d’une lecture très 
utile. La croyance à l’unité spécifique des Hématozoaires, dont l'auteur est 
à peu près le seul défenseur, l’entraine à méconnaitre de précieux carac- 
tères distinctifs, qui sont pourtant très utiles dans le diagnostic : il 
n'attribue aucune importance eaux granulations de SCHÜFFNER et de 
MAURER; on sait pourtant que ces deux sortes de granulations sont abso- 
lument distinctes, les premières caractérisant la tierce bénigne et les 
secondes la tierce maligne. 

Nos critiques montrent que cet ouvrage n’est pas au courant de l’état 
actuel de la science ; c’est assurément très regrettable, mais le mal n'in- 
téresse qu'une minorité. La masse des cliniciens, pour lesquels les ques- 
tions d'ordre purement scientifique sont d'un moindre intérêt,ne seront 
pas trop gênés par ces imperfections ; ils auront dans ce livre, non un 
guide journalier, mais un ouvrage de bibliothèque, auquel ils pourront 
se reporter; ils le consulteraient avec plus de commodité, s’il était en- 
richi d’une table analytique des matières. — M. B. 


P. Kisrner, Die tierpathogenen Protozoen. Berlin, R. Schôtz, in-8° de 
vir-161 p. avec 42 fig., 1906. — Prix : broché, 5 mk; cartonné, 6 mk. 


L'auteur est vétérinaire à Berlin. Cet ouvrage constitue une revue géné 
rale des Protozoaires pathogènes. D'allure élémentaire, il donne les 
caractères zoologiques essentiels de ces animaux, avec une brève indica- 

_tion des lésions ou accidents qu'ils déterminent. Écrit en vue des vétéri- 
naires, il rendra à ceux ci de véritables services; les médecins en tire- 
ront un moindre parti, car les Protozoaires parasites de l’Homme y sont 
ou passés sous silence ou très brièvement indiqués. La nomenclature 
n'est pas sans défauts. Les figures sont généralement bonnes; quelques- 
unes, comme la figure 7, devront être remplacées à la seconde édition. 


R. Doerr, Das Dysenterieloxin. Iena, Fischer, in-8° de 76 p., 1 pl., 1907. 
— Prix, broché : 2 mk. 50. 
L'auteur consacre quatre pages à l'historique de la question, rappelle la 


distinction entre les dysenteries ambienne et bacillaire : cette dernière 
présentant deux types au point de vue bactériologique : Shiga-Kruse et 


LA 1 


REVUE BIBLIOGRAPHIQUE 479 


Flexner. La question de priorité, soulevée par CHANTEMESSE et WipaL 
contre SxiGA et KRUSE, est tranchée en faveur de ceux-ci. 

Passant ensuite aux recherches personnelles, l'auteur étudie la toxine 
dysentérique : son extraction, sa nature suivant les différents milieux de 
culture, la toxicité de différentes races de Bacilles (de provenances di- 
verses), l'extraction de la toxine sèche, la résistance de ces toxines à 
divers agents, leur effet sur l'intestin grêle du Lapin, sur difiérents orga- 
nismes, les altérationsanatomo-pathologiques. Dorrr décrit aussi, avec une 
planche à l'appui, les lésions macroscopiques de la dysenterie expérimen- 
tale, répète ces recherches sur différents animaux (Chien, Singe, Chat, 
Cobaye) et termine par une étude sur la manière dont se répartit et se Lo- 


calise la toxine dans l'organisme. 


Toutes ces expériences sont rapportées en détail et la technique en est 
minutieusement décrite. Nous ne pouvons, faute de place, que donner les 
conclusions de cet intéressant mémoire : Les Bacilles de la dysenterie du 
type Shiga-Kruse secrètent une toxine, à l'exclusion de ceux du type 
Flexner. On peut extraire cette toxine par filtration stérile d'une jeune 
culture sur bouillon en quantité appréciable. Une autre méthode consiste 
à l’extraire d’une culture sur gélose au moyen de sérum physiologique, 
puis à filtrer; cette solution est très toxique; l’autolyse n’est pas néces- 
saire. L'intensité de la production de toxine dépend de la race de Bacilles 
employés et de l’alcalinité de la solution (l’'optimum est de 3 gr. de soude 
cristallisée par litre). Le pouvoir toxique croit avec l’alcalinité de la so- 
lution. Le pouvoir fermentatif sert d'indicateur pour son entretien. 

Les Bacilles en milieu albumineux ou en milieu anaérobie n'émettent 
pas de poison spécifique. La toxine résiste à la chaleur, une heure à 70°, est 
détruite à 80° et au-dessus, ne se combine pas à la trypsine, à la bile ou 
à l’entérokinase. La toxicité des filtrats de bouillon de culture se détruit par 
les acides, est régénérée par les alcalis ; il y a donc une simple combinaison, 
pas de destruction. La toxine dysentérique agit chez les Lapins, Chats, 
Chiens, Singes, Cobayes, Souris blanches; la Poule et le Pigeon sont 
réfractaires. Par injections intra-veineuses, péritonéales et sous-cuta- 
nées, on produit une inflammation avec nécrose et hémorrhagie de la 
muqueuse intestinale; à doses plus fortes, on observe des lésions des 
centres nerveux. L'animal de choix est le Lapin, qui réagit dans un tiers 
des cas avec les lésions typiques; l'intestin grêle est intact comme chez 
l'Homme. La toxine n'a pas d'affinités pour un organe quelconque ; 
il semble cependant que l'extrait frais d’intestin grêle de Lapin la déplace 
de ses solutions. Le poison parait être absorbé surtout dans l'intestin, 
un peu dans le rein, pas dans le foie; la bile n'est pas toxique. La produc- 
tion de la typhlite dysentérique dépend de la quantité de bile se déver- 
sant dans l'intestin. 

Un index bibliographique de 70 numéros se trouve à la fin de l'ouvrage. 


CH. Joyeux. 


480 REVUE BIBLIOGRAPHIQUE 


A. Laver, Professeur d'hygiène à la Faculté de Médecine de Bordeaux, 
Hygiène et Colonisation. La santé des Européens entre les tropiques. — 
PREMIÈRE PARTIE : Le climat, le sol, les agents vivants d'agression mor- 
bide. Paris, F. Alcan, un vol. grand in-8 de 364 pages avec 162 figures 
dans le texte. — Prix, broché : 7 francs. 


Cet euvrage comprend trois parties et sera publié en trois volumes. 
Chacune de ces parties, bien que reliée aux deux autres par l'exposé des 
faits d'observation acquis jusqu'à ce jour et des faits d'expérimentation 
qui tendent à donner à la plupart des maladies des pays chauds une pa- 
thologie naturaliste nouvelle, forme à elle seule un tout complet par la 
nature même du sujet qui en constitue le fond. 

L'auteur, dans le premier volume que nous annonçons aujourd'hui, 
après avoir fixé les caractères climatériques des régions tropicales et en 
avoir spécifié les influences modificatrices sur l'organisme humain passe 
successivement en revue les divers mondes d'agents animés d'agression 
morbide : Bactéries, Moisissures, Protozoaires et Métazoaires; leur en- 
semble constitue pour ainsi dire un milieu vivant superposé au milieu 
physique, avec lequel doit compter l'organisme rendu plus ou moins 
susceptible par les influences directes du climat. 

La deuxième partie traitera du rôle que l'organisme humain est appelé 
à jouer par lui-même dans la création et la généralisation de ses propres 
maladies. L'auteur montrera qu'il n'y a pas, à vrai dire, de maladies 
essentiellement propres à une race, mais seulement des modifications 
dans leur expression symptomatologique. Enfin, dans la troisième partie 
seront comprises toutes les questions d'hygiène appliquée afférentes à 
l'alimentation, à l'habitation, au travail des Européens et au traitement 
des maladies dans les pays chauds. 


NOTES ET INFORMATIONS 


LA CHAIRE D'HISTOIRE NATURELLE MÉDICALE 
DE LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE PARIS; SON HISTOIRE 


Origines. — La Faculté de médecine de Paris ne comptait primitivement 
que deux chaïires, l'une traitant des «(choses naturelles et non natu- 
relles », l’autre traitant des (choses contre nature ». Deux professeurs 
ou lecteurs éventuellement aidés ou suppléés par des bacheliers émérites, : 
suffisaient à cet enseignement : les deux premiers que la Faculté ait 
nommés directement furent Jean GuicHarp et Jean pe RuEL, qui furent 
investis en 1505. Le 19 octobre 1634, la Faculté décréta la création d'une 
troisième chaire, celle de chirurgie, qui fut attribuée à Antoine CHAR- 
PENTIER. ; 

La pathologie et la matière médicale, son corollaire naturel, relevaient 
de la chaire traitant des (choses contre nature ». Dans le but de favori- 
ser l'études des simples, la Faculté avait annexé à l'Ecole, dès 1506, un 
petit jardin botanique, où l’on pénétrait par la rue des Rats (1) et pour 
l'entretien duquel les bacheliers payaient chacun dix-huit sous par an. 
Il s'y donnait un enseignement élémentaire, qui devint, par la suite, as- 
sez important pour que les étudiants eux-mêmes demandassent, dès 1626, 
la nomination d'un professeur spécial. C'est seulement le 8 juin 1646, 
sous le décanat de Jacques PERREAU, que la Faculté créa cette quatrième 
chaire, qui fut confiée à François BLONDEL. 

Le professeur de botanique se borna longtemps à faire connaitre les 
plantes et leurs propriétés. Quand la Faculté révisa ses statuts, en 1696, 
il fut chargé en outre de parler des animaux, des minéraux et, en un 
mot, des remèdes de toute espèce que fournit la nature pour la guérison 
des maladies. 

Le traitement était d'abord de 390 livres, savoir : 90 livres payées par 
la Faculté et 300 livres provenant du Trésor royal et prélevées sur la 
ferme des Postes et Messageries. À partir du 28 août 1651, l'Université 
versa annuellement à la Faculté de médecine une somme de 800 livres 
pour ses quatre professeurs, ce qui porta finalement le traitement du 
professeur de botanique, comme celui de ses trois collègues, à une 
somme de 590 livres par an (2). 


Période révolutionnaire. — Par un décret en date du 18 août 1792, 
l'Assemblée Législative supprima toutes les corporations enseignantes : la 
Faculté de médecine fut emportée par la tourmente révolutionnaire et 


(1) Actuellement rue de l'Hôtel-Colbert. 
(2) A. CorcEu L'ancienne Faculté de médecine de Paris. Paris, in-8° de 1v- 
287 p., 1877 ; cf. p. 124, 136, 137. 


482 NOTES ET INFORMATIONS 


avec elle la chaire de botanique. Toutefois l’enseignement supérieur, et 
spécialement l’enseignement médical, allait être bientôt réorganisé. 


L'École de santé; la Faculté nouvelle. — Le 7 frimaire an III (27 no- 
vembre 1794), Fourcroy présente à la Convention nationale, au nom des 
Comités de salut public et d'instruction publique, un rapport du plus 
haut intérêt tendant à la création de trois Ecoles de santé, à Paris, à 
Montpellier et à Strasbourg, la première avec douze professeurs, [la se- 
conde avec huit, la troisième avec six, chaque professeur étant doublé 
d’un professeur adjoint. Le 14 frimaire an III (4 décembre 1794), la Con- 
vention promulgue un décret conforme à ce projet. 

Aux termes de ce décret, il est créé à Paris une Ecole de santé; cette 
Ecole « sera placée dans le local de la ci-devant Académie de chirur- 
gie (1), auquel on réunira le ci-devant couvent des Cordeliers (2) ». Les 
nouveaux professeurs furent nommés ce même jour: la chaire d'Histoire 
naturelle médicale (la sixièmesur la liste) eut PEYRILHE Comme professeur 
titulaire et L. C. M. RicHaRD comme professseur adjoint. 


La chaire d'histoire naturelle médicale de 1823 à 1895. — En fait, la 
chaire d'histoire naturelle médicale fut subdivisée dès sa fondation en une 
chaire de matière médicale, attribuée à PEYRILHE, et une chaire de bota- 
nique, donnée à RICHARD. 

PevyriLue mourut en ventôse an XII (1804); un arrêté du 23 germinal 
an XII lui donna pour successeur Antoine-Laurent DE JUSSIEU, qui prit 
sa retraite en 1822. La chaire de matière médicale fut alors réunie à celle 
de thérapeutique, sur la tête d'ALIBERT. 

Louis-Claude-Marie RicHARD n'était ni médecin ni pharmacien. @ Fils 
d'un jardinier du pare de Versailles, il avait beaucoup voyagé, à la 
recherche de plantes inconnues dans nos pays. Il avait fait une riche pro- 
vision d'espèces et, après une douzaine d'années d'absence, il revint à 
Paris en 1789. Nommé professeur de botanique en 1795, il suivit scrupu- 
leusement le programme tracé par Fourcroy, organisa le jardin botanique 
installé dans le jardin du couvent des Cordeliers (3). Il faisait sa leçon 
théorique dans l’amphithéâtre de l'Ecole de santé, et ses leçons pratiques 
dans le jardin botanique, organisé selon la classification de LINNÉ. RICHARD 
a peu écrit, et il est mort le 7 juin 1821 ». 

La Faculté (4) « présenta ALIBERT qui fut nommé Le 9 août 1821. ALIBERT 
ne convenait guère à cette chaire, dans laquelle il ne parut que nomina- 


(1) Il en reste actuellement la colonnade, la cour carrée et le grand amphi- 
théatre. 

2) Il en reste actuellement le bâtiment dans lequel est installé le Musée Du- 
puytren. 

(3) Ce jardin a disparu depuis longtemps, Son emplacement est occupé actuel- 
lement par cette partie de l’Ecole pratique qui confine aux rues Racine et Mon- 
sieur-le-Prince. 

(4) L'Ecole de santé fut transformée en Faculté de médecine par le décret im- 
périal du 17 mars 1808; elle devient un corps universitaire à partir du 1°" jan- 
vier 1809. Son corps professoral ne fut pas modifié, 


NOTES ET INFORMATIONS 483 


tivement, car l'année suivante la Faculté fut dissoute », par l'ordonnance 
royale du 21 novembre 1822. 

La Faculté fut réorganisée bientôt après, par l'ordonnance du 2 février 
1823, qui créait en même temps le corps des agrégés, en remplacement 
des professeurs adjoints. Comme ila été dit plus haut, la matière médicale 
était réunie à la thérapeutique et la chaire ainsi constituée était donnée 
à ALIBERT. La chaire de botanique devenait done vacante; elle prenait le 
nom de chaire d'histoire naturelle médicale et était attribuée à CLARION. 

(€ CLARION avait été pharmacien de l'Empereur en 1805 et directeur de 
la pharmacie du château de Saint-Cloud. En 1819, il avait été nommé 
professeur adjoint de botanique à l'École de pharmacie. Ses opinions 
avaient changé avec la politique. Excellent homme au fond, mais profes- 
seur froid et monotone, CLARION occupa sa chaire jusqu’en 1830... L’or- 
donnance royale du 5 octobre 1830 le destitua avec huit de ses collègues, 
et sa chaire fut mise au concours, qui venait d'être rétabli. 

«L'ouverture du concours fut fixée au 2 avril 1831, et trois candidats 
se présentèrent, Achille RicHArp, Foy et FouREAU DE BEAUREGARD. » Les 
deux derniers retirèrent bientôt leur candidature et Richard concourut 
seul. « À la neuvième séance, le 11 avril, il obtint 12 voix sur 12 votants, 
et un décret du 22 avril 1831 nomma Achille RicHarp professeur d'his- 
toirenaturelle médicale. Il occupa sa chaire jusqu’à sa mort, le5octobre1852. 

Les titres antérieurs de RicHArp consistaient dans la publication de 
plusieurs mémoires présentés à l'Institut sur la botanique.entre autres 
son important mémoire sur le Rubiacées, en un cours public de bota- 
nique, en une suppléance de Desfontaines dans la chaire de botanique 
de la Faculté des sciences. Il avait été nommé aide-démonstrateur de 
botanique à la Faculté en 1817, et il était aide-naturaliste auMuséum. 

« Il avait publié : Nouveaux éléments ce botanique appliquée à la méde- 
cine (1819). Dans une nouvelle édition, il y ajouta la physiologie végé- 
tale; en 1823 parut son Traité de botanique médicale, en deux volumes. 
Les Nouveaux éléments de botanique médicale furent pendant longtemps 
le livre classique des étudiants. 

«€ RicHARD était un professeur excellent, méthodique, à la parole facile, 
s'enthousiasmant quelquefois, surtout quand il parlait de la taxonomie, 
bienveillant, aux manières distinguées et aimé des élèves. 

« Plusieurs candidats se présentèrent pour succéder à RicHarp, entre 
autres Charles MARTINS, agrégé de la Faculté de Paris (1), qui avait déjà 
suppléé plusieurs fois Ricarp et qui était très connu par ses Etapes d’un 
naturaliste, du Spitzberg au Sahara. Mais un décret du 30 avril 1853, 
signé ForTouLz, nomma comme professeur MoquiN-TANDoN, qui était pro- 
fesseur à la Faculté des sciences de Toulouse et au Jardin des plantes de 
cette ville, et, par compensation, Charles MarTINs fut nommé professeur 
d'histoire naturelle à la Faculté de médecine de Montpellier. 


(1) Nommé au concours de 1839. 


48% NOTES ET INFORMATIONS 


« MoquiNn-Tanpox était connu par sa Monographie des Hirudinées (1826), 
par le Dédoublement des organes végélaux (1826) qui étaient ses thèses de 
doctorat ès-sciences, par ses Eléments de tératologie végétale (1841), par 
la Monographie des Chénopodées (1840). Depuis son entrée à la Faculté de 
Paris, il avait publie l'Hstoire naturelle des Mollusques terrestres et fluvia- 
tiles de France (1855), des Eléments de Zoologie médicale, de Botanique mé- 
dicale, etc. 

«Moquin-TanDoN occupa sa chaire avec distinction. C'était un homme 
d'un caractère droit, ennemi des privilèges d'aucune sorte, ennemi du 
favorilisme, méprisant l’adulation, ne demandant rien qu'au travail ; esprit 
séduisant, physionomie ouverte, d'une bonhomie qui n'était pas sans 
malice, tel était MoquiN-Tanpox. Ses leçons, bien préparées, étaient faites 
avec une verve méridionale, et sa voix toute musicale se prêtait à l’expres- 
sion de sa pensée. Il y avait en lui du savant, de l'artiste, du poète et de 
l'écrivain (1). 

«Deux candidats se présentèrent pour la chaire de MoquiN-TANDoN : 
BaizLon (2) et DE SEYNES (3). Présenté en première ligne, BaïzLon fut 
nommé le 22 novembre 1863. Il avait été reçu le premier au concours de 
l’internat en 1853, avait obtenu la médaille de l'internat, le grand prix de 
l'Ecole pratique, avait été nommé le premier au concours d'agrégation en 
1857, était docteur ès sciences depuis 1858, avait fait un cours de bota- 
nique à l'Ecole pratique en 1862, et avait suppléé le professeur Moquix- 
Tanxpon en 1863. Il avait fait ses preuves dans l'enseignement et avait 
déjà publié, outre ses deux thèses sur les Aurantiacées et sur les Euphor- 
biacées, des Recherches organographiques sur la fleur femelle des Conifères 
(1860), sur l'Organisation, le développement et l'anatomie des Caprifoliacées 
(1861). Depuis sa nomination, BAILLON a encore publié Adansonia, recueil 
périodique d'observations botaniques (1860-1873): Histoire des plantes 
(1867-1891); Dictionnaire de botanique (1876-1891); Traité de botanique 
médicale phanérogamique (1883); Le Jardin botaniquede la Faculté de 
Médecine de Paris (1884); Iconographie de la flore française (1886) ; Traité 
de Botanique médicale cryptogamique (1889); les Herborisations pari- 

siennes, etc. » 


Le Jardin botanique. — Nous avons vu que, lors de la création de l'É- 
cole de santé, on décida d'organiser un jardin botanique dans l’enclos du 
couvent des Cordeliers. « Le prolongement de la rue Racine, en 1834, prit 
une partie de ce jardin. Une ordonnance royale du 4 juillet 183% mit la 
partie est du jardin du Luxembourg à la disposition de la Faculté de 
médecine, pour y transporter son Jardin botanique. 

« Mais en 1869, le Jardin du Luxembourg fut mutilé par le percement 


(1) Comme poète, il a écril des poésies en langue provençale; comme écri- 
vain, il à publié chez Hachette, sous le pseudonyme de FREDoL, un intéressant 
ouvrage de vulgarisation scientifique, Le monde de la mer. 

(2) Henri Ernest BAILLON, né à Calais le 30 novembre 1827. 

(3) Agrégé en 1863, 


NOTES ET INFORMATIONS 485 


de rues nouvelles, et le Jardin botanique de la Faculté fut supprimé et 
reporté rue Cuvier, n° 12, en face du Muséum. Le professeur BAïLLON en 
a été l'organisateur et il y a réuni plus de 2000 espèces appartenant à 300 
familles. Il a successivement introduit dans les serres et dans l'Ecole de 
pleine terre un grand nombre de plantes utiles; le jardin est trop petit 
pour contenir autre chose que les végétaux relatifs à la thérapeutique et 
les espèces vénéneuses et alimentaires. Elles sont classées suivant une 
méthode nouvelle qui respecte les affinités multiples. Depuis sa nomina- 
tion, BAILLON dirigeait, tous les dimanches, dans les environs de Paris, 
des herborisations qui étaient très suivies. 

« Il est mort le 18 juillet 1895, » dans ce Jardin Botanique qu'il avait 
planté et cultivé avec tant de sollicitude et où ils’était réservé un pavillon 
d'habitation. Le jardin et l’enseignement de la botanique médicale ne 
devaient pas lui survivre (1). 


Réorganisation des études médicales; le P.C.N. — Le professeur BAILLON 
est mort au moment même où allait entrer en vigueur le nouveau régime 
des études médicales. Jusqu'alors, l’histoire naturelle médicale avait été 
enseignée aux élèves de première année; elle figurait désormais au pro- 
gramme des troisième et quatrième années. Le cours d'histoire naturelle 
devant être, en fait, suspendu pendant deux ans, l'administration profita 
de la circonstance pour laisser la chaire vacante pendant deux 
années. 

Comme je viens de le dire, un nouveau régime d'études était en vigueur 
depuis deux ans. On avait créé près des Facultés des sciencesunenseigne- 
ment nouveau, préparatoire à la médecine et consistant en une année 
d’études portant sur les sciences Physiques, Chimiques et Naturelles 
connu pour cette raison sous la dénomination quelque peu cabalistique 
de P.C.N. Cet enseignement avait la prétention, qu'il n’a guère réalisée, de 
nous fournir des élèves doués d’une solide éducation scientifique, capables, 
par conséquent, de suivre avec profit les cours très techniques qu'il allait 
être désormais possible de leur faire. Une telle innovation, excellente en 
principe, entrainait en effet une refonte complète de l’enseignement des 
sciences naturelles dans les Facultés de médecine. La botanique descrip- 
tive, qui jusqu'alors avait fait le fond de cet enseignement, figurait au 
programme du P.C.N.; elle méritait de figurer encore à celui des Facultés 
mixtes de médecine et de pharmacie, à cause des étudiants de cette der- 
uière spécialité, mais elle n'avait plus guère d intérêt pour les Facultés 
strictement médicales, comme celle de Paris. En revanche, le rôle para- 
sitaire des animaux et des végétaux inférieurs devenait de plus en plus 
manifeste et sollicitait très vivement l'attention. 


(4) Les longues citations qui précèdent sont tirées de l’ouvrage consacré par 
CorLiEu à l’histoire de la Faculté de médecine de Paris, pendant le premier siècle 
de son existence (&). 

(a) A. Corrieu, Centenaire de la Faculté de Médecine de Paris (1794-1894). 
Paris, in-4° de v-607 p. avec un album, 1896; cf. p. 286-291. 


486 NOTES ET INFORMATIONS 


Déjà pendant les années 1883-1892, en qualité d'agrégé, j'avais orienté 
exclusivement vers la parasitologie la zoologie médicale, que j'avais mis- 
sion d'enseigner. Cette innovation avait été accueillie avec une faveur 
qu'il ne m'appartient pas d'apprécier ; j'avais la conviction que là devait 
être désormais la voie à suivre et qu'il était nécessaire de rénover de la 
même façon l'enseignement de la botanique médicale; en d’autres termes, 
qu'il fallait instaurer, aux lieu et place de l’ancienne histoire naturelle 
médicale, purement descriptive, un enseignement de la Parasitologie 
animale et végétale. Dans ma pensée, cet enseignement nouveau, bien 
loin d'être « accessoire », comme on qualifiait dédaigneusement celui 
dont il allait prendre la place, ne tarderait pas à devenir l'un des plus 
vivants, des plus actifs, des plus utiles de la Faculté. Bien loin de s’at- 
tarder dans des descriptions sans utilité pratique, il allait attaquer de 
front les questions les plus obscures de l'hygiène et de la pathologie, 
apportant au diagnostic la précision qui lui fait trop souvent défaut, 
éclairant l’étiologie morbide et la prophylaxie, expliquant la symptoma- 
tologie et l'anatomie pathologique. 

J’exposai ce programme au Directeur de l’enseignement supérieur, puis 
aux professeurs de la Faculté de médecine. Tous l’approuvèrent et en 
reconnurent l'importance, puisque le Conseil de la Faculté me présenta 
à l'unanimité pour occuper la chaire vacante depuis deux ans. Je fus 
nommé professeur, le 25 juillet 1897. 

Malgré le changement de direction que j'étais résolu à lui imprimer, 
avec l'approbation de la Faculté et de l'administration supérieure, ma chaire 
continuait à porter officiellement son titre ancien d'histoire naturelle 
médicale. Il eut été plus logique d'y substituer le titre de parasitologie, 
mais il me sembla que le temps devait accomplir son œuvre et qu'il n’y 
avait aucune urgence à cette modification. Du moins, les travaux pra- 
tiques recevaient, du fait même de l'administration, cette dénomination 
nouvelle, prélude d'une transformation plus complète. 


Suppression du Jardin botanique. — A cette époque, le P.C.N. existait 
depuis deux ans. On l'installa tout d’abord dans les vieux bâtiments du 
Collège Rollin, à titre provisoire. La grande affluence des élèves ne per- 

mettait pas d'accueillir ceux-ci dans les laboratoires de la Sorbonne; on 
avait d'ailleurs créé pour eux un corps très nombreux de professeurs, 
chefs de travaux, préparateurs, etc.; à cet organisme nouveau, il fallait 
une installalion nouvelle : on chercha un emplacement favorable et on 
jeta les yeux sur le Jardin botanique de la Faculté de médecine. Une 
Commission composée de MM. GrÉarp», vice-recteur, président du Con- 
seil de l’Université, BRouARDEL, doyen de la Faculté de médecine, Dar- 
Boux, doyen de la Faculté des sciences, et NéNor, architecte, fut nommée, 
à l'effet de procéder à son expropriation. Elle se rendit sur les lieux, 
le 12 juillet 1897, et décida que le jardin botanique serait, en fait, supprimé 
el que le vaste emplacement qu'il occupait jusqu'alors serait attribué à 
la Faculté des sciences, pour y construire les services du P.C.N. Toute- 


1} 


NOTES ET INFORMATIONS 48T 


fois, on laissait à la Faculté de médecine une bande de terrain ayant une 
superficie de 550 mètres environ, à peu près inutilisable et jusqu’à pré- 
sent demeurée sans emploi. 

Le procès-verbal de cette réunion du 12 juillet 1897 me fut commu- 
niqué officieusement. En voici le texte : 

« Après examen des emplacements, il a été arrêté ce qui suit : 

«1° L'emplacement de 750 mètres environ destiné à l'établissement d'un 
jardin botanique, est exclusivement réservé aux services de la Faculté de 
médecine, sauf une bande de 5"50 de profondeur et un trottoir de 1"50: 
environ, longeant les bâtiments affectés à la Faculté des sciences et fer- 
mé du côté du jardin par une barrière à claire-voie, lesquels sont 
attribués, la bande de 1"50 à la Faculté des sciences pour un abri propre 
aux animaux, le trottoir à l'accès de cet abri. 

« L'entrée de cet emplacement (rue Cuvier) sera commune aux deux 
services. Elle Sera gardée par un jardinier qui remplira l'office de con- 


cierge. 
«2° Il est attribué à la Faculté de médecine, pour la direction du jar- 
din botanique, un local de... mètres de largeur sur... mètres de profon- 


deur, sur l'emplacement actuellement désigné au plan sous le titre de : 
Tableau. » 

Et M. BrouarpEeL, doyen de la. Faculté de médecine, approuvait une 
telle combinaison! En me communiquant le document ci-dessus, il solli- 
citait mes observations. Je lui fis remarquer combien il était regrettable 
que la Faculté de médecine supprimât son jardin, ou du moins fit aban- 
don d'un aussi vaste terrain, qui ne pouvait manquer un jour ou l’autre 
de lui être d'une grande utilité. 

Les choses en restèrent là, les vacances arrivèrent et c’est seulement à 
la rentrée que la question fut reprise. Le 8 novembre, on me demanda mon 
avis sur la suppression de l’emploi de jardinier; le 3 décembre, on m'in- 
vita à partager les plantes du jardin et:des serres entre la Faculté des 
sciences, l'École supérieure de pharmacie et le Muséum d'histoire naturelle. 
J’adressai alors au Doyen la lettre suivante, datée du 40 novembre 1907: 


«Monsieur le Doyen, 


« Vous avez bien voulu me communiquer une lettre de M. le Recteur 
en date du 3 décembre, concernant les plantes qui se trouvent dans le 
jardin botanique et dans les serres de la Faculté de médecine. J ai l’hon- 
neur de vous exposer ci-dessous les réflexions qui me suggère cette 
question. 

«Tout d'abord, permettez-moi d'exprimer un regret profond de voir 
la Faculté (de médecine) abandonner le Jardin. Nen pas qu'un jardin bo- 
tanique soit de première utilité, dans l’état actuel de l'enseignement et 
de la science (je m’expliquerai plus bas sur ce point); mais il me semble 
que la possession du terrain, vaste et bien situé, eût dù être revendiquée 
énergiquement par la Faculté. 


488 NOTES ET INFORMATIONS 


« Enserrée dans ses locaux actuels, déjà trop petits, la Faculté est 
inextensible ; elle ne peut s'’agrandir qu'au prix d'expropriations très oné- 
reuses, devant lesquelles il est à craindre qu'on ne recule longtemps. Il 
est impossible d'y installer, dans des conditions convenables, des ani- 
maux en expérience; ceux-ci doivent être conservés dans les laboratoires 
mêmes, ce qui constitue de déplorables conditions hygiéniques et un 
danger de tous les instants. Or, la médecine devient de plus en plus ex- 
périmentale ;elle ne peut progresser qu'à cette condition. Oùdonc loger, 
dans la Faculté actuelle, des animaux de basse-cour ou d’écurie ? On 
doit prévoir le jour prochain où ces conditions essentielles de tout pro- 
grès scientifique seront devenues encore plus impérieuses et où il sera 
de toute nécessité de construire des écuries, des étables, des chenils. 
Cela est impossible dans les locaux actuels, mais cela serait très facile, 
en conservant le Jardin botanique. 

« Ce terrain devrait donc, à mon avis, rester la propriété de la Faculté 
(de médecine), qui pourrait à peu de frais y édifier une sorte d'Institut 
Pasteur, comprenant tous les services qui ont plus spécialement recours 
à l’expérimentation (physiologie, pathologie comparée, parasitologie) ; 
elle trouverait sans aucun doute, sinon dans les libéralités de l'Etat, tout 
au moins dans des donations particulières, les fonds nécessaires à l'exé- 
cution de ce projet. En construisant des pavillons isolés, le reste du ter- 
rain pourrait être utilisé comme jardin botanique. On tirerait ainsi le 
meilleur parti possible de ce terrain (1). 

« En mettant les choses au pis et en admettant que la Faculté (de mé- 
decine) doive abandonner définitivement le Jardin, on se trouverait donc 
en face du projet dont, au mois de juillet dernier, il m'a été donné com- 
munication à titre officieux. Ce projet consiste à aliéner le Jardin au 
profit de la Faculté des sciences, qui y construirait des laboratoires ; on 
réserverait à la Faculté de médecine une surface d'environ 750 mètres 
carrés, sur laquelle il serait encore prélevé divers passages et emplace- 
ments, Ce qui réduirait finalement à moins de 600 mètres le lopin de 
de terre concédé à notre Faculté. 

« Veuillez remarquer, M. le Doyen, que la Faculté de médecine, en 
raison du plus grand nombre de ses étudiants, se trouve plus à l'étroit 
que la Faculté des sciences; néanmoins, c'est celle-ci qui prétend à la 


possession presque totale de notre jardin. La portion très restreinte qui 


nous en serait laissée ne peut être utilisée comme jardin botanique : com- 


(1) Mes prévisions, quant à l'obligation de créer un laboratoire pour l’expéri- 
mentation sur les grands animaux, n’ont pas tardé à se réaliser. Voilà déjà 
plusieurs années que le professeur de physiologie, trop à l’étroit dans son labo- 
ratoire de l'Ecole pratique, a sollicité et obtenu l'installation de locaux plus 
vastes et pourvus des dépendances nécessaires. A cet effet, la Faculté de méde- 
cine a obtenu du Ministre de la guerre la désaffectation et la cession de l’un des 
bastions de l'enceinte de Paris. Ce bastion est situé au boulevard Brune, n°8, 
près la porte d'Orléans, par conséquent beaucoup plus loin de la Faculté que ne 
l'était le Jardin botanique de la rue Cuvier. 


e 


NOTES ET INFORMATIONS 489 


prise entre le grand immeuble portant le n° 16 de la rue Cuvier et la 
construction qu'on se propose d'élever d'autre part, elle n'aurait ni l'air 
ni le soleil nécessaires à une bonne réussite des cultures. On ne peut en 
faire qu'une réserve pour les grands animaux en expérience. Dans ce 
dernier cas, il serait évidemment nécessaire d'y construire des labo- 
ratoires. 

(€. Je suis d'avis que ni le jardin ni les serres ne peuvent être con- 
servés, au moins avec leur importance actuelle, comme j'ai eu l'honneur 
de vous l'exposer plus haut, cette opinion n'implique nullement dans ma 
pensée l’abandon du terrain, dont la possession rendrait à la Faculté (de 
médecine) les plus grands services. 

« Dès lors, que faire des plantes qui existent actuellement dans le jar- 
din et dans les serres et dont, effectivement, un bon nombre sont sans 
utilité pour la Faculté (de médecine) ? M. le Ministre pense qu'on pour- 
rait répartir entre la Faculté des sciences, l'Ecole de pharmacie et le Mu- 
séum toutes celles qu'il n'y aurait pas lieu de garder pour notre usage. 
Je partage entièrement cette opinion... » 

Mes revendications n'eurent aucun succès. L'administration résolut 
définitivement de supprimer le Jardin botanique, conformément au pro- 
tocole du 12 juillet 1897, et je fus invité à procéder à la répartition des 
plantes. Je convoquai donc dans te but MM. les professeurs BoNNieR, 
Cornu et GuiGNaRD; à cette occasion fut rédigé le procès-verbal suivant : 


« Paris, le 5 mars 1898. 


« Conformément aux instructions données par M. le Recteur et en ré- 
ponse à la convocation à eux adressée par M. R. BLANCHARD, professeur à 
la Faculté de médecine, directeur du Jardin botanique de la Faculté de 
médecine, MM. G. BonNieR, professeur à la Faculté des sciences, M. Cor- 
NU, professeur au Muséum d'histoire naturelleet L. GuIGNARD, professeur 
à l'École supérieur de pharmacie, se sont réunis aujourd'hui à une heure 
et demie de l'après-midi, au Jardin botanique de la Faculté de médecine, 
12 ,rue Cuvier. 

«M. R. BLAncaaRD leur a fait remise officielle des plantes de pleine 
terre et de serres, cultivées au Jardin botanique, en leur laissant le soin 
de les répartir entre leurs divers services, conformément à leurs besoins 
respectifs, réserve étant faite des plantes conservées pour les besoins de 
la Faculté de médecine, dont une liste se trouve entre les tuains de 
M. LavancHYy, jardinier en chef. 

«M. R. BLANCHARD réserve également pour la Faculté de médecine la 
serre hollandaise de taille moyenne, mettant les autres à la disposition de 
la Faculté des sciences. 

« En foi de quoi le présent procès-verbal a été signé. 


& R. BLANCHARD, G. BonNier, M. CorNu, L. GUIGNARD. » 


Le sacrifice était consommé : le Jardin botanique de la Faculté de méde- 


Archives de Parasilologie, XI, n° 3, 1907. 32 


490 NOTES ET INFORMATIONS 


cine de Paris avait vécu. Il ne restait plus à cette Faculté qu'un terrain de 
750 mètres environ, une serre hollandaise et quelques plantes. 

Je voulus tirer le meilleur parti possible d’une situation aussi défavo- 
rable, mais je me heurtai à une difficulté insurmontable. Dans le but 
assurément louable de faire des économies, l'administration avait, sur ces 
entrefaites, supprimé en totalité le budget du Jardin botanique, déjà 
très réduit depuis la mort de M. Barccon. On ne prit pas garde qu'on 
emportait du même coup le crédit personnel du professeur, en sorte que 
je n'avais pas la plus petite somme à ma disposition. Cette situation 
regrettable dure depuis dix ans : sous le décanat de M. BROUARDEL, il m'a 
été impossible de récupérer la moindre parcelle des crédits dont j'avais 
été dépouillé par erreur ou excès de zèle; depuis l'avènement de M. le 
professeur DEBOvE, j'ai pu enfin bénéficier d’un crédit ultra-modeste de 
950 fr. par an. 

Donc, que faire? Devant l'impossibilité absolue d'organiser quoi que ce 
soit, je laissai les choses en l’état et je procédai à une nouvelle et ultime 
distribution des plantes. J’adressai quelques pieds de Rhubarbe (Rheum 
officinale, Rh. collinianum, Rh. florentinum) au prof. A. Tscaircu, de l'Uni- 
versité de Berne; j'envoyai un exemplaire de Didierea mirabilis à M. T. 
Dyer, directeur du Jardin de Kew, et je mis les autres plantes, parmi 
lesquelles se trouvaient deux autres Didierea, à la disposition de mes trois 
collègues susnommés. 

Ainsi finit le Jardin botanique de la Faculté de médecine de Paris. Sur 
son emplacement s'élèvent maintenant les vastes bâtiments du P. C. N. Il 
ne reste plus, de l’ancien domaine de la Faculté de médecine, que le terrain 
plusieurs fois cité, (de 750 mètres environ », en réalité de 550 mètres ou 
un peu plus. Ce terrain est sans emploi depuis dix ans; il n’en est pas 
moins la propriété de la Faculté de médecine et spécialement du Labora- 
toire de Parasitologie. 

Depuis juillet 1897. — En prenant possession de ma chaire, j'étais donc 
résolu à donner à mon enseignement une direction toute nouvelle, ou 
plutôt à refaire comme professeur, en l’étendant aussi à la botanique, un 
enseignement de la parasitologie que comme agrégé, de 1883 à 1890, 
j'avais appliqué à la zoologie. Cette orientation particulière m’obligeait à 
faire table rase de toute l’organisation ancienne, d’ailleurs singulièrement 
à la débandade depuis deux ans, et à choisir un personnel nouveau. Depuis 
1880, j'étais secrétaire général de la Société Zoologique de France; j'étais 
donc assez bien placé pour connaitre et apprécier les naturalistes. Je jetai 
les yeux sur deux jeunes zoologistes, tous deux élèves du professeur H. 
DE LACAZE-DUTHIERS ; ils Consentirent à venir avec moi, et je ne crois pas 
qu'ils aient eu trop à le regretter. 

M. Jules Gurarr était alors licencié ès sciences naturelles, préparateur 
au laboratoire de zoologie de la Faculté des sciences, docteur en médecine 
et lauréat de la Faculté depuis 1896. J'avais remarqué sa thèse sur le 
corps thyroïde dans la série des Vertébrés et je pensais que l’auteur d'un 


AIN 


NOTES ET INFORMATIONS 491 


tel travail était capable de suivre la carrière scientifique avec succès. Je 
lui offris donc la place de chef des travaux pratiques de Parasitologie; il 
accepta. Il se mit avec ardeur à sa tâche et obtint dans ses fonctions un 
légitime succès. En 1901, il fut nommé agrégé; il fit, dès lors, des confé- 
rences complémentaires de mon enseignement et y trouva une occasion 
nouvelle d'affirmer ses brillantes qualités. Il ne tarda pas à devenir 
docteur ès-sciences. Aussi, la chaire d'Histoire Naturelle médicale de la 
Faculté de Lyon étant devenue vacante, en fut-il nommé titulaire, par un 
décret en date du 12 novembre 1906. 

M. Maurice NevEu-LEMAIRE était lui-même licencié en droit, licencié 
es-sciences naturelles et étudiant en médecine. Il entra comme prépara- 
teur à mon laboratoire, fut reçu docteur en médecine, avec une thèse 
remarquée sur les Hématozoaires du paludisme (1901), et publia une série 
de travaux intéressants. MM. le comte pE CRÉQUI-MoNTFORT et SÉNÉCHAL 
DE LA GRANGE, organisant une mission scientifique sur les hauts plateaux 
de Bolivie, me demandérent de leur désigner un compagnon de route, 
qui püt être à la fois le médecin et le zoologiste de l'expédition. Je leur 
présentai le D' NEvEu-LEMAIRE, qui eût ainsi l'occasion de faire un assez 
long séjour sur les sommets des Andes et d'y accomplir de bonne 
besogne (1). Candidat au concours d’agrégation de 1904, il fut nommé 
agrégé d'Histoire Naturelle à la Faculté de médecine de Lyon. 

Un peu après les deux précédents, M. Emile BruMmPrT quitta également 
la Sorbonne, où il était préparateur adjoint, et entra en qualité de prépa- 
rateur dans mon laboratoire (1° novembre 1899). Il était alors licencié ès 
sciences naturelles, étudiant en médecine et commençait une thèse de 
doctorat ès-sciences, à laquelle il travaillait avec ardeur. Les recherches 
concernant cette thèse étaient à peu près achevées, quand le vicomte 
Robert pu BourG DE Bozas vint, comme on devait le faire plus tard pour 
la mission de Bolivie, me demander de lui désigner un jeune médecin et 
naturaliste, décide à tenter avec lui l’aventure d’un voyage d'exploration 
en Afrique tropicale. Je songeai tout d'abord à NEVEU-LEMAIRE, qui refusa. 
BruMmPT me demande donc de partir à sa place; le vicomte pu BourG l’a- 
grée et voilà BRUMPT qui, en moins de deux mois, rédige sa thèse sur la 
reproduction des Hirudinées, en fait les dessins, la soutient devant la 
Faculté des sciences et prépare dans ses moindres détails la partie médi- 
cale et scientifique d'une expédition qui devait durer deux ans et 
demi (2). 

Revenu sain et sauf de cette mission périlleuse, qui lui a fait traverser 
l'Afrique de Djibouti au Congo et où le vicomte pu BourG pe Bozas devait 
si malheureusement trouver la mort, BRUMPT a repris à mon laboratoire 

(1) Cf, M. Neveu-Lemaire, Les lacs des hauts plateaux de l'Amérique du Sud. 
Paris, in-8° de vi-197 p. avec 18 planches, 1906. — Ce premier ouvrage sera 
suivi de plusieurs autres, 

(2) Mission scientifique du Bourg de Bozas. De la mer Rouge à l'Atlantique 
à travers l'Afrique tropicale (octobre 1900 mai-1905). Paris, in-4° de virr-442 p., 
1906. 


492 NOTES ET INFORMATIONS 


son poste de préparateur et s’est aussitôt signalé par une série de publi- 
cations importantes. Voilà quelques mois, il a été nommé chevalier de la 
Légion d'honneur, au titre d'explorateur. Plus récemment, il a subi sa 
thèse de doctorat en médecine; puis, par suite du départ du professeur 
GurarT pour la Faculté de médecine de Lyon, il a été promu chef des 
travaux pratiques de parasitologie (novembre 1906). Enfin, le jour même 
où j'écris ces lignes (14 juin 1907), il conquiert, à la suite d’un brillant 
concours, le poste d'agrégé laissé vacant par le départ de J. Gurarr. 

Puisque je suis amené à passer en revue mes principaux collaborateurs, 
je dois encore une mention toute spéciale au D' Maurice LANGERON, mon 
préparateur en chef. Entré chez moi à titre intérimaire, pendant le voyage 
de NevEu-LEMaIRE en Bolivie, il y est resté et n'a cessé, depuis le pre- 
mier jour, de me donner la plus vive satisfaction. Ses connaissances 
étendues, sa très grande habileté technique, son ardeur au travail sont 
hautement appréciées de tous; sa grande modestie m'oblige à lui rendre 
ici ce public hommage. 

Avant d'en finir avec cet historique un peu long, je dois encore rappe- 
ler la création de l’Institut de Médecine coloniale, dont j'ai pris l'initia- 
tive et qui est venu donner plus d'activité et plus de portée à l’enseigne- 
ment de la Parasitologie. JI en a été trop souvent question dans les 
Archives pour qu'il me paraisse utile d'entrer dans plus de détails à son 
sujet; d'ailleurs on trouvera plus loin des renseignements statistiques 
qui montreront en quoi consiste l’œuvre accomplie par les cinq premières 
sessions. 

En 1902, les fonctions de chef des travaux pratiques y ont été remplies 
par le D' GurarT; de 1903 à 1906,clles l'ont été par le D' Brumpr; elles 
seront occupées désormais par le D' LANGERON. 

Création de la chaire de Parasitologie. — Enfin, le moment de transfor- 
mer ma chaire m'a semblé être venu. Dans le courant de novembre 1906, 
je demandai au Conseil de la Faculté de médecine d'émettre un vœu en 
faveur de la transformation de la chaire d'Histoire Naturelle médicale en 
une chaire de Parasitologie et Histoire Naturelle médicale. Ce vœu fut 
_ adopté à l’unanimité. Bientôt après, il recevait la consécration officielle, 

par un décret en date du 15 décembre,paru au Journal ofjiciel du 19 dé- 
cembre. 

Simple changement d’étiquette, simple affaire de mots, dira-t-on ? Sans 
doute, puisque ce décret ne fait que consacrer un état de choses existant 
depuis dix ans. Toutelois, ce décret consacre aussi et rend définitive la 
suppression de la Zoologie et de la Botanique purement descriptives, pour 
lesquelles il ne saurait plus y avoir de place dans l'enseignement médi- 
cal. La Parasitologie les supplante et se place au premier rang : les 
découvertes qu'elle a accomplies dans ces dernières années prouvent 
qu'elle sera désormais l’un des guides les plus fidèles de la Médecine sur 
la route du progrès scientifique. — R. BLANCHARD. 


Re 


< NOTES ET INFORMATIONS 493 


La Parasitologie à la Faculté de Médecine de Paris. — A la date du 
5 novembre 1906, les professeurs et agrégés de physique, chimie et his- 
toire naturelle médicales de la Faculté de médecine de Paris recevaient 
de M. le Doyen la lettre suivante: 


MoN CHER COLLÈGUE, 


Je reçois de M. le Recteur la lettre dont voici copie: 

« Conformément aux instructions de M. le Ministre, je vous prie de 
m'envoyer des renseignements aussi complets qu'il vous sera possible sur 
l’enseignement de l'Histoire Naturelle à la Faculté de médecine de Paris, 
depuis la réforme de 1893. 

«L'Administration supérieure désirerait connaitre notamment les sujets 
et, si possible, les programmes des cours professés pendant ces cinq der- 
nières années, l'organisation et l’objet des travaux pratiques correspon- 
dants, et la nature des questions posées aux examens. » 

€ J'ai l'honneur de vous prier de vouloir bien me mettre en mesure de 
renseigner M. le Recteur. 

« Je serais heureux qu'il vous fût possible de me faire parvenir votre 
réponse avant le 15 novembre, dernier délai. 


« Veuillez agréer, etc. » 
« Le Doyen: M. DEBOVE. » 


M. le D’ J. GurarT, agrégé, chef des travaux pratiques, répondit en ce 
qui concerne ses conférences et les travaux pratiques. J’adressai moi- 
même à M. le Doyen, au sujet des examens et de la direction générale de 
l’enseignement, les deux rapports ci-après. 


RAPPORT SUR L'ENSEIGNEMENT DE L' HISTOIRE NATURELLE (PARASITOLOGIE) 
A LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE PARIS 


Par le Professeur R. BLANCHARD 


Dès l’année 1883, au cours de ma première année d’agrégation, J'ai 
orienté résolument l’enseignement de la Zoologie médicale vers la Parasi- 
tologie. Pendant les huit années qui ont suivi, j'ai poursuivi cette ten- 
tative et j'ose croire qu'elle répondait à un véritable besoin, en raison 
du succès qui est venu la consacrer. Si M. le Professeur BAïLLoN ne 
m'avait pas interdit de toucher à la Botanique, je n'aurais pas manqué 
de traiter également dans mon cours complémentaire des questions 
parasitologiques relevant des Champignons et des Microbes. 

J'ai donc, pendant neuf années consécutives, en qualité d’agrégé, fait 
un cours systématique de Parasitologie animale, le premier qui ait 
jamais été fait dans une Faculté de médecine française. II me semblait 
déjà, à cette époque, que la Parasitologie, jusqu'alors à peu près complè- 
tement passée sous silence, méritait de prendre, dans l'enseignement 
médical, une place importante. 

Les nombreuses découvertes qui se sont succédé dans ce domaine, 


49% NOTES ET INFORMATIONS 


au cours de ces dernières années, et qui ont déversé tant de lumière sur 
une foule de questions encore obscures, sont la justification du point de 
vue auquel je m'étais placé, voilà déjà vingt-trois ans, et dont je ne me 
suis jamais départi depuis lors. 

Nommé professeur d'Histoire Naturelle médicale à la Faculté de méde- 
cine de Paris, en 1897, j'ai orienté d’une façon plus complète encore, puis- 
que j'avais toute liberté d'action, vers la Parasitologie l’enseignement qui 
m'était confié. Je dois dire que j'avais eu soin d'exposer mes tendances 
et mon programme aux Professeurs de la Faculté de médecine, à l’époque 
où j'étais candidat à la chaire, et que j'avais trouvé auprès d'eux une 
entière approbation. C’est donc, je puis le dire, avec l'assentiment una- 
nime de la Faculté, que l’enseignement de l'Histoire Naturelle médicale a 
été complètement dévié de sa direction primitive. Dans le langage cou- 
rant, on disait jadis « le cours de Botanique »; on dit actuellement « le 
cours de Parasitologie. » 

Il ne me semble pas utile de justifier plus longtemps cette déviation: 
elle répond si étroitement aux tendances scientifiques actuelles, qu'elle a 
été imitée d'une façon plus ou moins complète dans les différentes Facul- 
tés et Ecoles de médecine françaises, ainsi que dans les Facultés étran- 
gères établies d’après le système français. 

Le titre de ma chaire est: Histoire Naturelle médicale. Un tel titre m'o- 
blige à ne point négliger certaines parties de la science qui ne relèvent 
pas directement de la Parasitologie, mais qu’un médecin doit connaître, 
comme l'étude des animaux venimeux. Il m'oblige également à envisager 
les maladies parasitaires et infectieuses, non pas au point de vue clinique 
ou thérapeutique, mais au point de vue de l’histoire naturelle des parasi- 
tes qui les déterminent. La position de ces parasites dans la classifica- 
tion, leurs caractères naturels et différentiels, leur structure, leur évolu- 
tion, leurs migrations éventuelles, sont des questions de première impor- 
tancé que je dois envisager. Ces préliminaires me semblent indispensa- 
bles, même dans l’état actuel des programmes généraux de l’enseigne- 
ment supérieur, attendu que les élèves qui sortent du P.C.N. n'ont que 
des notions tout-à-fait insuffisantes, ainsi que me le démontre une longue 
expérience. 

Ces faits étant connus, j'aborde l'étude des relations du parasite avec 
l'organisme humain. S'il est inoculé par quelque animal piqueur ou suceur 
de sang, il devient nécessaire de connaître celui-ci dans ses caractères 
généraux ou tout au moins de rechercher en quelle partie de son corps 
le parasite pénètre pour y subir éventuellement des métamorphoses. 

La manière dont il se comporte dans l'organisme de l'Homme fait l’ob- 
jet d’une étude détaillée: on assiste à la lutte qui s'établit entre le para- 
site et l'organisme, aux diverses réactions d'ordre chimique ou anatomi- 
que dont celui-ci devient le siège, aux différentes transformations ou 
métamorphoses que subit celui-là. L'organisme se présente ainsi comme 
un champ clos, dans lequel s’accomplit une lutte dont on suit toutes les 


NOTES ET INFORMATIONS 495 


péripéties. Le parasite sort vainqueur de cette lutte; il s'établit dans l’or- 
ganisme, il y provoque des lésions dont il est nécessaire de suivre le 
processus évolutif ; il y subit des transformations nouvelles, il peut deve- 
nir adulte, s’y multiplier; et il est alors indispensable de déterminer par 
quel moyen il sème sa progéniture autour de lui, d'où une infestation 
sans cesse plus complète de l’organisme, ou au contraire la répand en 
dehors, d'où une dissémination de sa propre espèce dans l’espace et dans 
le temps. Cela nous ramène au point de départ, c’est-à-dire aux procédés 
suivant lesquels s’accomplit la pénétration du premier parasite dans un 
organisme sain. 

Tel est le cadre général dans lequel je m'efforce de faire rentrer l'his- 
toire naturelle et médicale de chacun des très nombreux parasites qui 
s'observent dans les différentes races humaines et dont un bon nombre 
sont au plus haut point redoutables. Un tel cadre est assez large pour 
qu'on puisse donner à chacune des questions qui se présentent toute 
l'ampleur qu’elle mérite, tant au point de vue pratique qu'au point de 
vue scientifique. Je m'efforce de concilier autant que possible ces deux 
points de vue, bien loin de sacrifier l’un à l’autre. Une Faculté de méde- 
cine n'est, pour la plupart de ses élèves, qu'une école professionnelle; 
mais elle est aussi, pour une élite plus ou moins restreinte, une école 
de haut enseignement, et il est impossible de passer sous silence les com- 
paraisons, les rapprochements, les aperçus strictement scientifiques. Ils 
ne profitent en général qu'à un petit nombre, mais j'estime que ce petit 
nombre a droit à un enseignement élevé. 

L'enseignement de la Parasitologie est incontestablement l’un des plus 
complexes qui existent ; le professeur doit être à la fois très versé dans 
les connaissances médicales et dans la connaissance des diverses sciences 
naturelles. Les parasites, en effet, appartiennent les uns à différents 
groupes du règne animal (Protozoaires, Vers, Acariens, Insectes), les 
autres aux Microbes ou aux Champignons. L'étude de chacune de ces caté- 
gories dêtres nécessite une technique particulière, un ensemble de 
méthodes très spécialisées. Sauf dans les Facultés de médecine françaises, 
on ne trouve plus nulle part maintenant de Professeurs qui soient char- 
gés d'un enseignement aussi vaste et aussi hétérogène. Les progrès 
quotidiens de la science, en ces questions dont l'importance grandit 
chaque jour, sont tellement rapides et tellement variés que c’est une rude 
besogne que de se tenir au courant. Je ne crains pas d'affirmer que, dans 
aucuñe branche des sciences biologiques, on ne doit faire appel à des 
doctrines et à-des connaissances aussi étendues et aussi disparates. 

C'est une caractéristique des Universités françaises que de posséder un 
enseignement de ce genre. Des personnes assurément bien intentionnées, 
mais d’ailleurs mal renseignées sur l'utilité des sciences dans les Facultés 
de médecine, n'ont pas craint de dire qu'un tel enseignement était inutile 
en France, puisqu'il n'existait point dans un grand nombre d'Universités 
étrangères. Remarquons tout d'abord qu'une telle assertion est inexacte, 


496 NOTES ET INFORMATIONS 


car des cours de sciences naturelles à l'usage exclusif des médecins sont 
faits dans les Facultés de philosophie de toutes les Universités allemandes. 
Portant d’abord sur les sciences naturelles en général, ces cours se sont 
spécialisés dans ces temps derniers et traitent de plus en plus, sinon 
exclusivement, de la seule Parasitologie ; il suffit pour s’en rendre compte 
de jeter un coup d'œil sur le Deutscher Universitäts-Kalender et, pour plus 
de détails, sur le Verzeichnis der Vorlesungen des différentes Universités. 

Il en est de même en Hollande et en Italie; dans ce dernier pays, c'est, 
comme chez nous, à la Faculté de médecine que cet enseignement a lieu. 
Il en est de même aussi dans les écoles anglaises et dans un grand nom- 
bre d'Universités américaines. 

Vraiment, il existe donc à l'heure actuelle une poussée générale vers les 
études parasitologiques, encore que ce mouvement si profitable au progrès 
de la science soit généralement méconnu dans notre pays. 

Il y a mieux : certaines Écoles de médecine ou Universités, jugeant 
avec raison que le programme de la Parasitologie était déjà trop vaste 
pour faire l’objet d’un unique enseignement, ont pris l'initiative de dédou- 
bler les chaires, et c’est un exemple qui, tôt ou tard, devra être imité 
ailleurs. Je crois pouvoir dire que je n'ai pas été étranger à ce résultat 
et qu'il est la conséquence d’une conversation que j'eus certain jour avec 
sir Patrick Manson. 

Le célèbre parasitologue anglais auquel, ccmme on sait, est due la 
création de l'Ecole de Médecine tropicale de Londres, me demandait de 
lui préciser en quoi consistait mon cours d'Histoire naturelle médicale. 
Très frappé de mes explications, il me dit : (C’est une bonne chose, nous 
devrons faire ainsi ; j y songerai. » Quelques mois plus tard, l'Ecole de 
Médecine tropicale de Londres avait recueilli les fonds nécessaires pour 
créer deux enseignements nouveaux et ainsi ont pris naissance les deux 
chaires d'helminthologie et de protozoologie. L'École de médecine tropi- 
cale de Liverpool s'empressa d'en faire autant. Puis l'Université de 
Londres chargea le professeur MiNcuiN, jusqu'alors connu par de très 
importants travaux sur les Éponges, de se spécialiser dans l'étude des 
Protozoaires parasites, particulièrement des Sporozoaires. Enfin, tout 
récemment, l'Université de Cambridge, en Angleterre, créait une chaire 
pour l'étude des Protozoaires dans leurs relations avec les maladies ; cette 
chaire nouvelle vient d'être fort heureusement attribuée au D' Nurrazz, 
jusqu'alors chargé du cours de pathologie expérimentale à la même Uni- 
versité. 

Je pourrais multiplier ces exemples. Je dois en citer encore deux, dont 
l'importance est trop considérable pour qu'il n’en soit pas fait men- 
tion. 

On n'ignore pas que les États-Unis ont annexé au Ministère fédéral de 
l'Agriculture des services scientifiques considérables, royalement dotés, 
ayant un très nombreux personnel et dirigés par des hommes d’une 
haute valeur. Le Bureau de l'Industrie animale, fondé par le Dr SALMON, 


NOTES ET INFORMATIONS 497 


avait comme zoologiste le D' Ch. Wardell Srices, dont les très importants 
travaux de parasitologie animale sont trop connus pour qu'il soit néces- 
saire d'y insister. Devenus puissance coloniale par la conquête des Philip- 
pines et de Porto-Rico, les États-Unis n’ont pas hésité a créer à Washing- 
ton, près le Service de santé de la Marine, deux Instituts nouveaux, l’un 
de bactériologie, dirigé par le Docteur RosEeNAU, l’autre de zoologie, c'est- 
à-dire de parasitologie animale, dirigé par le même D' Wardell STiLes. 
Les publications sortant deces deux Instituts sont le meilleur témoignage 
de l’activité scientifique qu'on y déploie : la médecine clinique n’y tient 
aucune part et les questions de Parasitologie en font tous les frais. 

Enfin, l'Institut de médecine tropicale, annexé au port de Hambourg et 
dirigé par le D' Nocur, créa récemment un service de zoologie médicale, 
à la tête duquel fut placé le D' Scaauninx. Cet illustre zoologiste aban- 
donna sans esprit de retour toutes ses recherches antérieures de zoologie 
pure et résolut de se consacrer à l'étude exclusive des Protozoaires para- 
sites de l'Homme. Déjà bien connu pour ses très importants travaux sur 
les Coccidies et sur les Hématozoaires du paludisme, il ne tarda pas à 
faire la découverte sensationnelle du Tréponème de la syphilis. Sa mort 
prématurée, à l’âge de 35 ans, est une perte irréparable pour la Parasito- 
logie. Son très court passage à l’Institut de Hambourg est au plus haut 
point glorieux pour celui-ci. ‘ 

La préférence que ScHAUDINN avait finalement donnée aux études para- 
sitologiques est une démonstration convaincante de l'importance capitale 
de ces questions nouvelles, tant au point de vue pratique qu'à celui de 
la science pure. Au surplus, cette importance se trouve démontrée encore 
par l'attribution du prix Nobel de médecine qui, à deux reprises, fut 
décerné à des parasitologues ; à Ronald Ross, en 1902, pour sa décou- 
verte des métamorphoses de l'Hématozoaire du paludisme dans le corps 
des Moustiques êt à GoL@r, en 1906, pour ses recherches capitales sur la 
structure des centres nerveux, ainsi que sur la structure et l'évolution 
schizogonique de ce même parasite. 

Dans cet ordre d'idées, il n’est pas sans intérêt de constater aussi les ten- 
dances qui se manifestent en divers points du globle, quant à la direction 
imprimée aux recherches de médecine scientifique. A peine installés aux 
Philippines, les Américains y ont créé de très importants laboratoires, 
dans lesquels on poursuit activement la solution des nombreux problè- 
mes concernant l’état sanitaire de ces régions. De même, il s’est trouvé 
un riche chimiste anglais pour fonder à Khartoum, de ses deniers, un 
très bel établissement scientifique, le Gordon Medical College. Les splen- 
dides publications qui sortent de ces deux centres nouveaux touchent 
aux questions médicales les plus diverses, mais on ne peut manquer 
d'être frappé de la part prépondérante et même presque exclusive qu'y 
prend la Parasitologie. 

Le rôle qui revient à cette branche des sciences médicales est, en effet, 
tout à fait exceptionnel, en ce qui concerne la pathologie des pays chauds. 


498 : NOTES ET INFORMATIONS 


Dans ces régions, les maladies parasitaires dominent et parmi celles-ci 
les zooses, c’est-à-dire les maladies causées par les animaux, occupent 
la première place. Il est même curieux de constater que les bactérioses, 
prépondérantes dans les pays tempérés, n’occupent que la seconde place 
dans la pathologie des pays tropicaux. Quant aux maladies non parasi- 
taires, on peut affirmer qu'elles ne prennent qu’une place des plus res 
treintes. | 

Cette prédominance du parasitisme animal en pathologie exotique fait 
que l’enseignement donné dans les Facultés des pays tempérés et visant 
plus spécialement les maladies de ces contrées, n’est qu'une préparation 
très insuffisante pour les médecins qui doivent exercer leur art sous les 
tropiques. D'où la nécessité de créer en faveur de ces médecins un ensei- 
gnement complémentaire étroitement spécialisé; de là les diverses Écoles 
de médecine coloniale; telle est l’idée qui m'a conduit à prendre l'initia- 
tive de la création de l’Institut de médecine coloniale annexé à la Faculté 
de médecine de Paris. Sous quelque forme qu’on le présente, cet ensei- 
gnement complémentaire ne concerne presque exclusivement que des 
questions de Parasitologie. 

La médecine curative, c'est-à-dire la médecine des symptômes, a été 
prépondérante, tant que les causes réelles des maladies sont restées in- 
connues : les recherches plus étroitement scientifiques qui s’accomplissent 
dans les laboratoires, en élucidant les causes des affections, en mettant 
en évidence le rôle des agents parasitaires animés, restreignent chaque 
jour davantage l'importance de la médecine curative et augmentent celle 
de la médecine prophylactique. Qu'on le veuille ou non, les doctrines 
médicales se transforment et la lutte contre la maladie revêt des aspects 
nouveaux. L'agent le plus actif de ce progrès, c’est la Parasitologie. Elle tend 
à prendre une place dominante dans la doctrine médicale, comme à res- 
treindre le rôle de la thérapeutique au profit de celui de la prophy- 
laxie. 

Après cet exposé, il me semble superflu d'entrer dans le détail des 
sujets qui font l’objet du cours d'histoire naturelle médicale. Comme il 
vient d'être dit, il est surtout question des parasites et des affections qu'ils 
déterminent. Dans le rapportci-dessous, traitant de la nature des examens, 
je montrerai dans quel sens ceux-ci sont conduits et on y trouvera une in- 
dication suffisante des matières traitées au cours. Je dois rappeler toute- 
lois, comme il a été dit plus haut, que la Parasitologie n'y est pas seule 
envisagée, mais que d’autres questions importantes y sont également ex- 
posées : telles sont celles afférentes aux animaux venimeux. En principe, 
la besogne est divisée entre le professeur et l’agrégé, de telle sorte que 
l’ensemble des matières soit traité en une seule année, le professeur se 
réservant de traiter en détails certains points, différents d’une année à 
l’autre, qui lui semblent correspondre aux préoccupations scientifiques 
du moment. 

Je n'ai pas gardé copie du programme des cours de ces années derniè- 


NOTES ET INFORMATIONS 499 


res, tel qu'il a figuré sur l'affiche; le libellé suivant en donne néanmoins 
une idée exacte. 

Hiver 1903-1904. — Vers et Arthropodes parasites; animaux venimeux; 
Champignons parasites. 

Hiver 1904-1905. — Maladies causées par les Protozoaires; leurs rela- 
tions avec les Insectes; étiologie et prophylaxie. 

Hiver 1905-1906. — Histoire naturelle et médicale des Microbes ; Cham- 
pignons parasites. : 

Hiver 1906-1907. — L'être vivant envisagé comme propagateur des 
maladies parasitaires; étiologie et prophylaxie des maladies infectieuses 
et parasitaires. 


RAPPORT SUR LES EXAMENS DE PARASITOLOGIE 
Par le Professeur R. BLANCHARD 


La Parasitologie figure au programme de deux examens, mais il est 
rare qu'un méme candidat soit interrogé deux fois sur cette matière, en 
raison du grand nombre des examens et du petit nombre des juges com- 
pétents, qui ne sont représentés que par le professeur et l’agrégé de pa- 
rasitologie (histoire naturelle médicale). 

3° examen, 2° partie, épreuve pratique. — Le programme comprend l'a- 
natomie pathologique, la chimie clinique et la parasitologie; il est fréquent 
que le parasitologue soit occupé ailleurs et soit remplacé par un clinicien, 
auquel cas il n’est pas question de parasitologie à cette épreuve. 

En vue de la préparation de cette épreuve, j'ai constitué au laboratoire 
une petite collection des parasites les plus utiles à connaître, collection 
accessible tous les jours aux étudiants, dans l'après-midi. Cette collection 
est faite en double : l’une des séries est dûment étiquetée; l’autre, identi- 
que à la première, est sans étiquettes ; ce sont les bocaux de cette dernière 
série qui, à l'examen pratique, sont présentés aux candidats. 

On demande à ceux-ci de reconnaitre extemporanément trois ou quatre 
pièces, ainsi qu'une ou deux préparations microscopiques, relatives aux 
parasites et aux maladies parasitaires les plus usuels; des explications 
orales accompagnent cette reconnaissance; elles peuvent être poussées 
assez loin, quand le candidat fait preuve de savoir. 

Ainsi compris, cet examen pratique force les étudiants à revoir les piè- 
ces pathologiques d'organes parasités, les diverses préparations et d'une 
façon générale l’ensemble des matières qui ont fait l'objet des travaux pra- 
tiques et qu'ils ont la faculté de venir voir au laboratoire aussi fréquem- 
ment qu'il leur plait. En outre des Helminthes usuels, ils prennent ainsi 
connaissance des préparations concernant l’actinomycose, l’aspergillose, 
les teignes, la trichinose, la filariose, la bilharziose et un bon nombre d'au- 
tres affections ou fréquentes en France ou pouvant s’observer accidentel 
lement dans nos hôpitaux. Les Acariens et les Insectes parasites ou trans- 
metteurs de maladies parasitaires sont suffisamment représentés dans 


500 NOTES ET INFORMATIONS 


cette collection et, par conséquent, à l'examen, pour que l’éudiant se fami- 
liarise avec les types les plus essentiels. 

A une certaine époque, j'avais mis également à la disposition des élèves 
un microscope et une série de préparations, parmi lesquelles devaient 
être prises celles présentées à l'examen. J'ai dù y renoncer, en raison de 
la détérioration rapide dont elles étaient l’objet, d'où la nécessité de les 
remplacer constamment. Or, les préparations bien démonstratives sont 
toujours rares et précieuses, et il m'a semblé impossible de continuer à 
mettre à la disposition des élèves des préparations de valeur, que la 
plupart d’entre eux détériorent, faute de savoir assez bien manier le mi- 
croscope. 

Pour remédier à cet état de choses, il a été entendu entre l'agrégé et 
moi que les préparations microscopiques présentées à l'examen seraient 
identiques ou analogues à celles que les étudiants sont priés d'examiner 
à la suite de chacune des séances de travaux pratiques. 

Je crois avoir ainsi tenu compte, dans la plus large mesure, de la né- 
cessité de rendre l'épreuve pratique à la lois utile pour le candidat et 
facile à préparer. D'une façon générale, les résultats sont satisfaisants, 
assez souvent même ils sont très bons. Toutefois, un des vices de cette 
épreuve, c'est qu'elle ne rentre pas dans la catégorie des examens à ma- 
tières multiples et que les élèves peu laborieux profitent de cette circons- 
tance pour préparer à peu près suffisamment deux des matières et 
négliger entièrement la troisième. Même avec une boule noire en parasi- 
tologie, ils sont reçus, pourvu qu'ils aient d'autre part une rouge noire et 
une rouge. Un tel système me semble déplorable et je crois qu'il serait 
utile de ranger cet examen dans la catégorie de ceux à matières séparées. 

3* examen, 2° partie, épreuve orale. — Le programme comprend la 
pathologie interne, la pathologie générale et la parasitologie. Ce pro- 
gramme est beaucoup trop vaste et beaucoup trop hétérogène. Les clini- 
ciens se plaignent à juste titre, selon moi, de ce que la pathologie interne 
soit beaucoup trop restreinte; ils iraient volontiers jusqu'à demander 
la suppression des deux autres branches de l’examen, ce en quoi je ne 
puis être de leur avis. J’estime, pour ma part, que la pathologie in- 
_terne mérite de faire à elle seule les frais d'un examen tout entier et 

qu'il serait utile de créer un examen nouveau, qui comprendrait la pa- 
thologie générale, la pathologie comparée et la parasitologie. On aurait 
ainsi deux épreuves très homogènes chacune et d'un caractère bien 
défini : la première essentiellement clinique et professionnelle, la seconde 
d'allure plus scientifique, mais portant sur des matières que, dans l'état 
actuel de la science, aucun médecin n’a le droit d'ignorer. 

Pour s’en tenir à l'examen tel qu'il se pratique aujourd'hui, l'inconvé- 
nient que je signalais plus haut se reproduit ici avec une fréquence en- 
core plus grande, à savoir que, faute d'examinateurs, les parasitologues 
sont trop rarement représentés dans cette épreuve. Le jury doit être norma- 
lement constitué par deux médecins et un bactériologiste ou un parasito- 


NOTES ET INFORMATIONS 501 


logue. L'un des médecins interroge sur les maladies des organes situés 
au-dessus du diaphragme, l'autre sur les affections des organes situés 
au-dessous de cette membrane. Le troisième examinateur assume à lui 
tout seul la tâche d'examiner en pathologie générale et en parasitologie. 

Que M. GurarT ou moi fassions partie de ce jury, les choses se passent 
de la même façon, car il s’est établi entre nous une entente complète sur 
la manière dont nous devions procéder. 

Les principes qui dominent notre enseignement et que j'ai exposés dans 
mon précédent rapport trouvent ici leur application, c'est-à-dire que nous 
nous efforçons de rendre l'examen aussi professionnel que possible, sans 
négliger le côté scientifique élevé qui est inhérent à cet enseignement 
lui-même. Pour bien faire comprendre quelles idées générales nous guident, 
je crois utile de citer ici quelques questions usuelles. 

Fièvre intermittente. — Diagnostic microscopique ; recherche et prépa- 
ration des parasites ; caractères distinctifs des trois types parasitaires ; 
lésions caractéristiques des globules rouges et des organes dans ces trois 
types morbides. La fièvre; Son origine toxique, causes de sa périodicité. 
La tierce double; causes du redoublement des accès fébriles. Diagnostic 
microscopique des fièvres doubles. Les rechutes; leur cause. Moustiques 
transmettant le paludisme. Carattères zoologiques des Anopheles. En 
l'absence des Insectes adultes, comment peut-on reconnaitre si un pays 
est insalubre ? Prophylaxie du paludisme; quinine curative et préventive; 
monopole de la quinine en Italie; pétrolage des eaux stagnantes; pro- 
tection mécanique des habitations ; précautions à prendre pour sortir de 
nuit dans les pays insalubres. Et nombre de questions du même ordre, 
venant se grefier sur celles-ci. 

Maladie du sommeil. — Sa nature parasitaire. Histoire zoologique des 
Trypanosomes. Diagnostic des trypanosomoses. Recherche et prépara- 
tion des parasites, leur inoculation expérimentale ; animaux réceptifs, ani- 
maux réfractaires. Mode de propagation. Les Glossines; caractères zoolo- 
giques de ces Insectes, leur répartition géographique. Prophylaxie. Les 
trypanosomoses en dehors des régions à Glossines ; leur transmission par 
d'autres Diptères, notamment par les Tabanides. Symptomatologie et ana- 
tomie pathologie de la maladie du sommeil. Et nombre d’autres questions 
venant se greffer sur celles-ci. 

Les hématuries des pays chauds. — On les observe souvent en Europe. 
Diagnostic différentiel par l'examen des urines, des selles et du sang. La 
filariose et ses diverses modalités; ses relations avec l'éléphantiasis des 
Arabes. Distribution géographique des diverses filarioses ; recherche des 
Vers adultes dans les organes ; propagation de la maladie par les Insectes. 
Indication des Moustiques qui sont connus comme propagateurs de l’infec- 
tion. — La bilharziose. Diagnostic, symptomatologie, anatomie patholo- 
_gique, traitement chirurgical. Caractères zoologiques de la Bilharzie; sa 
distribution géographique, etc. 

Helminthes intestinaux. — Symptômes, étiologie, prophylaxie, histoire 


502 NOTES ET INFORMATIONS 


zoologique, diagnostic différentiel. Recherche des œufs dans les déjections ; 
caractères distinctifs, cultures de ces œufs; infestation expérimentale, 
ses résultats. Relations des Helminthes avec les affections intestinales : 
dysenterie, fièvre typhoïde, appendicite. Nécessité d'un examen microsco- 
pique des selles et d'un traitement anthelminthique dans l’appendicite. 

Kyste hydatique. — Evolution, migrations et caractères distinctifs du 
Tænia echinococcus. Moyens suivant lesquels le Chien, le Mouton etl'Homme 
se contaminent respectivement. Les diverses variétés de kystes hydatiques, 
leurs relations, leur importance clinique. Echinococcose secondaire; 
comment elle se constitue. Moyens de l’éviter. Distribution géographique 
des kystes hydatiques, leur prophylaxie. Police des abattoirs et des bou- 
cheries, surveillance des Chiens, mesures à prendre contre eux. 

Actinomycose.— Sa fréquence dans les différents pays, notamment en 
France. Son origine. Espèces végétales sur lesquelles le Champignon vit 
à l’état de saprophyte; conséquences pratiques de cette connaissance. 
Infestation, développement du parasite à l'intérieur du corps; formation de 
la tumeur, sa structure, son siège. Voies de pénétration du Champignon, 
lésions qu'il détermine. Thérapeutique, action de l’iodure de potassium. 
Le Champignon en culture; ses caractères botaniques, sa place dans la 
classification. Notions sur le parasitisme des Champignons envisagé 
comme une adaptation à des conditions de milieu anormales. 

Cette même notion à l’égard des aspergilloses et des teignes. Différents 
types de teignes; lésions des poils et de la peau; caractères microscopi- 
ques différentiels. Les teignes du type endothrix et leur extension dans 
les races humaines; les teignes du type ectothrix et leur extension chez 
les animaux. Origine animale de certaines teignes humaines; leurs ca- 
ractères cliniques spécifiques; récolte, préparation, examen des éléments 
teigneux; cultures pures des teignes, leurs caractères morphologiques et 
microscopiques. Notions qui en dérivent relativement aux affinités des 
Champignons des teignes avec d’autres Champignons plus élevés en or- 
ganisation, d'où la notion de l'origine saprophytique des teignes. 

Caractères généraux des maladies infectieuses. — Les Microbes et leurs di- 
vers modes de reproduction. Les spores envisagées comme assurant la 
reproduction de l'espèce dans l'espace et dans le temps; leur résistance 
aux intempéries ; conditions suivant lesquelles elles prennent naissance. 
Action générale des Microbes sur l'organisme animal et humain; réac- 
tion de l'organisme; l’inflammation, la phagocytose; rôle des diverses 
formes leucocytaires et des cellules du tissuconjonctif; la cellule 
géante. 

Production de toxines par les Microbes in vitro et dans l'organisme. Ca- 
ractères chimiques et action physiologique des toxines. Réactions de 
l'organisme envers elles, production des antitoxines; leur rôle curatif et 
préventif ; application de cette notion à la thérapeutique. La sérothérapie ; 
production des sérums curatifs (diphtérie, peste, tétanos), législation qui 
les régit. — Le mithridatisme; accoutumance de l'organisme aux poisons 


NOTES ET INFORMATIONS 503 


minéraux, végétaux et aux venins. Les Serpents venimeux. Caractères 
zoologiques ; énumération, habitat des principaux types et des principales 
espèces. Constitution chimique et action physiologique des venins; 
antidotes ; sérothérapie antivenimeuse. 

Les exemples qui précèdent ne concernent qu'un très petit nombre de 
chapitres de la parasitologie et de l’histoire naturelle médicale. 1ls don- 
nent, semble-t-il, une physionomie assez exacte de l’examen oral. Comme 
il m'arrive, toutes les fois que je fais partie du jury de cet examen, 
d'interroger. en même temps en parasitologie et en pathologie générale, 
j'ai tenu à indiquer par les derniers exemples de quelle manière je m'ac- 
quittais de cette partie de ma tâche. 


La Medicina tropical en la Republica Argentina; una carta del Profesor 
Blanchard. — En un pais tan inmenso como el nuestro, que tiene todos 
los climas, desde el tôrrido de los tropicos hasta el frio de los polos, las 
manifestaciones mérbidas deben necesariamente ser multiformes, dado 
que son, en cierto modo, funciôn de las condiciones del medio. La pato- 
logia de las regiones torridas difiere de la de las regiones templadas como 
ambas difieren de la patologia de las regiones frias, reducida esta ultima 
à infimas manifestaciones que no merecen casi el nombre de enfermeda- 
des. 

La bacteriologia, con el prodigioso desarrollo verificado en menos de 
medio siglo, ha venido 4 descorrer el velo que escondia la etiologia de un 
sinnumero de enfermedades, que nos son ahora completamente conocidas, 
y en muchas de las cuales ha obtenido el triunfo terapéutico ansiodo; citar 
la difteria, el tétano, el carbunclo, la peste, etc., seria casi inferir una 
ofensa à los que tienen el derecho y el deber de conocer esas cosas. Y 
aun ignorando el agente causal de una enfermedad como la rabia, la vi- 
ruela, ha sabido la bacteriologia sacar provecho de una generalizaciôn de 
procedimiento, y la médula de un Conejo, en el primer caso, y el cow-pox, 
en el segundo, estän ahi para patentizar un triunfo. 

Cuando aparecié la bacteriologia como ciencia constituida y completa, 
un reläâmpago de esperanza brillé en el cielo de los que sufren. Por fin 
conoceremos los Microbios — se decifan, porque admitieron desde luego 
que todas las enfermedades eran microbianas — y conocerlos es ya mu- 
cho, porque conociéndolos sabremos precavernos. Forzoso es decir, en 
homenaje de la verdad, que esta esperanza era compartida y alimentada 
por los mismos sabios que se ocupaban en la manipulacidn microbiana. 
No merecen una critica ni unos ni otros, porque todos eran sinceros. Y 
no la merecerian de ningün modo, porque ellos podrian reivindicar este de- 
recho : los treinta uültimos años de experimentacion consciente de labo- 
ratorio, han hecho avanzar la medicina mäs que lo que ha aprendido en 
diez siglos de observaciôn empirica. Y es verdad. 

Suponer que la bacteriologia deba caer en descrédito porque no ha res- 
pondido à todas las esperanzas, seria admitir y justificar una apreciacion 


04 NOTES ET INFORMATIONS 


erronea que hace considerar como definitivo algo que en la evolucion 
lôgica y natural de las cosas no es mâs que temporario é incompleto. 

EI dia que la fisica nos di6 el microscopio, naci la ciencia de lo infini- 
tamente pequeño. ScawaANx descubre la célula para que Vrrcaow edifique 
su patologia celular (1), y para que CLAUDI0o BERNARD y sus satélites estu- 
dien su fisiologia. Todo se hizo reposar sobre la célula; sus lesiones pa- 
recieron iluminar la pathologia de entonces, y se dijeron : he ahi la ex- 
plicacién de lo que sabemos. Y 10 que sabian se reducia à la constataciôn 
clinica de los fenomenos morbidos. La anatomia patolôgica, y mäs aun, 
la anatomia patolégica microscépica, sirvié, sin embargo, para algo, y en 
la época para mucho : la constatacion de las ulceraciones de las placas 
de Peyer produjo la unidad de la tifoidea, y la unidad de los tubér- 
culos di à LAËNNEc la identidad de la escrôfula y de a tuberculosis. 

La sagacidad de LEEUWENHOEK Y SPALLANZANI, la constancia de DAVAINE 
y æl genio de PASTEUR, Supieron revelar un mundo nuevo: no debia 
buscarse en la célula muerta la explicaciôn de un fenémeno vivo, y si en 
algo vivo, y ese algo Îueron los Microbios con los que, cual modernos 
dioses, poblaron la tierra, las aguas y el aire. Todo respondia à la evo- 
lucion hacia el camino del perfeccionamiento : el periodo anätomo-pato- 
légico que reemplazé al periodo clinico, se vié 4 su vez reemplazado por 
el que llamé periodo etiolégico. Los tres han dado sus resultados : los 
conocimienftos amontonados en las tres épocas servirän para edificar la 
verdad definitiva.…. si la verdad definitiva existe como concepciôn metafisica. 

Y ahora mismo comenzamos ya à reconocer que la patologia microbiana 
sola no basta para explicar ciertos fenomenos, como no bastaba in illo 
tempore la patologia celular de VircaoWw (1). Hay algo mäs que un Micro- 
bio; el organismo sobre el cual éste opera no se comporta como algo 
inerte sin vida; muy al contrario, el organismo, es decir, el conjunto ar- 
mônico de células, obedeciendo al principio universal de acciôn y reacciôn, 
responde à su manera à las incitaciones microbianas, responde defen- 
diéndose. : es la patologia cito-microbiana instalada por BoucHaRp y 
coronada por METsHNIKov, EHRLICH y otras firmas no menos ilustres. 
Y aun hay algo mas nuevo, que es hasta cierto punto una variacién de la 
anterior : la patologia cito-citolégica inaugurada por Borper en el 
Instituto Pasteur, de Paris, no hace aüun ocho años, y que con sus 
hemotoxinas, precipitinas, aglutirinas, etc., ha revelado un mundo 
completamente nuevo à los ojos asombrados de los que aceptan el ;nihil 
novum sub sole! 

Que la bacteriologia, propiamente dicho, ceda el campo à otro género 


(1) J'ai démontré («&) que la théorie cellulaire et la pathologie cellulaire, com- 
munément attribuées à tort, la première à SCHwANN, la seconde à VircHow, 
étaient toutes les deux l’œuvre de Fr. V. RaspaiLz. Cette vérité historique est 
d’une trop haute importance pour que je laisse passer une occasion de la rev en- 
diquer en faveur de mon illustre compatriote. — R. BL. 

(a) R. BLaxcaarp, Notices biographiques. — XVI. F.V. Raspail. Archives de 
Parasitologie, VII, p. 5-87, 1904; cf. p. 18 et 20. 


mel 


NOTES ET INFORMATIONS 505 


de investigaciones nacidas de aquélla, pero de ningün modo idénticas, no 
es mengua : es evoluciôn. Hay que admitirlo como légico y fatal; hay 
que adaptarse, 

Cambiemos el nombre demasiado estrecho de Bacteriologia por el mäs 
amplio y mäs conforme con los hechos de Microbiologia, y veremos 
ensancharse prodigiosamente sus dominios. Una respetable cantidad de 
hechos y fenômenos que antes le escapaban, entran de Ileno en el nuevo 
concepto; la patologia cito-microbiana le pertenece, asi como la cito-ci- 
tolégica y aun otras de las cuales hablaremos en otra oportunidad. 

De una manera general puede decirse (la afirmacién no puede ser abso- 
luta), que la bacteriologia ha estudiado sobre todo la patologia de los 
paises templados; la de los paises tropicales es distinta y no podria ser 
comprendida en la férmula comuün. El Hematozoario del paludismo no 
es un Bacterio, como no lo es la Babesia de la fiebre de Tejas, como no 
lo es el Tripanosoma de la enfermedad del sueño, y como no loes tampoco 


-el Amiba de los abcesos disentéricos (el Bacilo disentérico de SuicA per- 


tenece à la patologia de los païses templados). Completando en lo posible 
la formula mäs arriba enunciada, podemos añadir : los paräsitos mâs 
inferiores (Bacterio) forman la infima minoria en la patologia tropical, 
que es, sobre todo, funciôn de los Protozoarios y paräsitos superiores en 
organizacion. É 

& Qué sabemos de nuestra patologia tropical? Nada, 6 casi nada : apenas 
si la coccidiosis de Posadas, la Filaria descubierta en Santiago del Estero, 
el pie de Madura descripto por el profesor SomMER y por GRECo, el 
abceso hepätico anübico estudiado por Dessy y MorATTA, sirven para 
probar cuäntos lauros conquistaria la parasitologia, si parasitologia se 
hiciera entre nosotros. Dése al término parasitologia toda la extension 
que le acuerda la clasificacién racional, y se verä si hay ancho campo 
para futuras investigaciones. 

La importancia de esta rama del gran ärbol de la ciencia en lo que 
atañe à la medicina actual estä magistralmente expresada en la carta que 
trascribimos y que nos ha sido dirigida por el profesor BLANCHARD, de la 
Facultad de Medicina, cuya presentaciôn no necesitamos hacer porque es 
bien conocido por su preparaciôn indiscutible en la materia. Dice asi : 


Paris, le 30 mars 1906. 


À M. ce D' PEenRo J. GARCIA, 
Directeur de l’Institut Parasitologique de Tucumän (République Argentine). 


Mon cher collègue et ami, 

Vous avez bien voulu vous intéresser à mon Laboratoire de Parasito- 
logie, à l’enseignement oral et pratique que j'y ai organisé, aux résultats 
obtenus jusqu'à ce jour, et vous m'avez demandé de vous exposer par 
écrit mes opinions personnelles sur la direction qui doit être imprimée 
aux études parasitologiques. A la vérité, la demande que vous m'avez 
adressée vous est inspirée par une modestie excessive, car vous 


Archives de Parasitologie, XI, n° 3, 1907. 33 


506 NOTES ET INFORMATIONS 


connaissez dans tous ses détails et sous ses faces multiples la question 
fort importante au sujet de laquelle vous me demandez mon avis; vous 
savez mieux que personnne ce qu'on a fait en France et à l'étranger, vous 
avez notamment visité les Écoles de Londres et de Liverpool, et les 
diverses conversations que nous avons eues ensemble m'ont montré à 
quel point vous étaient familières les idées les plus récentes sur les 
problèmes actuels de la pathologie parasitaire. Je me rends néanmoins, 
avec le plus grand plaisir, à votre aimable invitation et, au risque 
d’énoncer des considérations que vous jugerez peut-être banales, j'exprime 
ci-après quelques vues générales sur l'avenir de la médecine scienti- 
fique et les moyens d'en assurer le progrès. 

Aucun médecin éclairé ne doute plus maintenant des étroites relations 
de l'Homme avec le milieu ambiant : ce dernier agit sur lui non seule- 
ment par ses qualités physico-chimiques ou météorologiques, mais encore 
par l'intermédiaire des êtres qui y vivent. La réaction réciproque de 


l'Homme sur la nature vivante et de celle-ci sur l'Homme est une des. 


formes les plus énergiques de la lutte pour la vie. On constate chaque 
jour de nouveaux faits qui viennent corroborer cette affirmation : là où 
l’on ne voyait qu'une action de climat, c'est-à-dire de la nature physique, 
il s’agit en réalité de l’action des êtres vivants, Animaux ou Plantes, 
Vers ou Microbes, Protozoaires ou Champignons, qui s'introduisent dans 
notre organisme et y exercent les ravages les plus variés et les plus 
graves. Le nombre des maladies spontanées diminue chaque jour, celui 
des maladies parasitaires augmente proportionnellement. Des doctrines 
nouvelles envahissent donc la Médecine et viennent renverser avec une 
irrésistible puissance les vieilles conceptions nuageuses dont l'esprit avait 
tant de peine à s’accommoder. 

En fait, les théories parasitaires n’ont jamais fait défaut en médecine; 
elles onttrouvé, voilà quelque vingt ans, la confirmation la plus éclatante 
dans les travaux de PASTEUR : depuis lors, nul ne doute plus du rôle des 
Bactéries dans la production des maladies infectieuses. L'éclat de l'École 
pastorienne a pu éclipser pour un certain temps les travaux plus modestes 
qui se poursuivaient dans un autre domaine ; la Bactériologie continue 
- de briller au firmament de la science, mais voici que deux astres nou- 
veaux montent à ses côtés et répandent une lumière jusqu'alors insoup- 
connée. L'un d'eux s'appelle la Parasitologie animale, l’autre la Mycologie. 
Ces trois planètes, à peine dégagées du brouillard qui les obscurcissait 
depuis si longtemps, forment une constellation étincelante et dévoilent au 
médecin une route sur laquelle il peut enfin s'engager en toute sécurité. 

Je sais bien que la masse des praticiens n'a guère besoin de suivre cette 
voie nouvelle; les connaissances que possèdent la généralité des médecins 
peuvent suffire à la pratique journalière. Mais un pays qui ferait bon 
marché du progrès scientifique et qui, pouvant aider à ce progrès par ses 
ressources fiscales ou par la munificence de quelques citoyens, ne consi- 
dérerait pas comme un devoir impérieux de le favoriser de toutes ses forces, 


NOTES ET INFORMATIONS 507 


ce pays-là serait indigne d'être compté au nombre des États civilisés. Le 
progrès scientifique est la source la plus pure de la gloire des nations; en 
particulier, le progrès de la Médecine est la source exclusive de la pros- 
périté physique des peuples et de leur bien-être moral; aucun moyen 
n'assure plus efficacement la richesse et n’a une action sociale plus directe 
et plus bienfaisante. | 

Vous avez, mon cher ami, l'inestimable bonheur d'appartenir à une 
nation jeune, active, intelligente, audacieuse, qui voit s'ouvrir devant elle 
un avenir extraordinairement brillant : la richesse publique s’aceroit 
tous les jours, elle est déjà considérable, elle va devenir fabuleuse, comme 
aux États-Unis. Vous connaissez notre proverbe : « Noblesse oblige ». 
Je veux dire par là que cette prospérité économique si remarquable, que 
cette intelligence et cette initiative qui nous frappent si vivement, nous 
autres enfants de la vieille Europe, constituent pour la République Ar- 
gentine une obligation inéluctable d'entrer résolument dans la voie du 
progrès médical et de se guide: sur la constellation lumineuse dont tout 
à l'heure je parlais. : 

Que faut-il pour cela? Quel but devez-vous poursuivre ? Les trois astres 
de la constellation répondent à cette double question. La Bactériologie est 
déjà très brillamment représentée chez vous par un Institut dont les tra- 
vaux sont connus et hautement appréciés de tout le monde savant. Il 
reste donc à organiser l’enseignement et l'étude de la Parasitologie ani- 
male et de la Mycologie. Ne croyez pas que ce soient là des branches 
accessoires de la Médecine scientifique : ce sont, bien au contraire, deux 
côtés du trépied sur lequel va désormais reposer l'édifice médical; les 
trois côtés sont de même valeur et de même importance. 

L'immensité de votre territoire, la diversité des climats, l'inégalité des 
flores et des faunes, voilà quelques-unes des raisons qui me permettent 
d'affirmer que la nosologie présenteelle-même, dans votre vaste pays, une 
surprenante variété. On sait encore peu de chose à cet égard, mais le 
mal de caderas, la tristeza, la maladie de Posadas, l’actinomycose, la 
lombriz, l'organisme de Seeber, etc. témoignent d'une diversité de zooses 
et de mycoses (1) qu'on chercherait vainement ailleurs. 

Ce n’est que le début, et déjà l'étude de ces maladies exige des con- 
naissances d'histoire naturelle très approfondies et très variées. Je viens 
de citer non seulement des maladies humaines, mais aussi des maladies 
du bétail; c’est que, pour un Parasitologue, la médecine vétérinaire est diffi- 
cilement séparable de la médecine humaine. Les philosophes spiritualistes 
ont pu croire que l'Homme était dans la Nature un être à part: la Méde- 
cine vient leur infliger un démenti cruel. Elle précipite l'Homme du pié- 
destal où ils l’avaient hissé péniblement, elle établit ses étroites affinités 
avec les animaux qui l'entourent : elle le montre doué de la même struc- 
ture, capable des mêmes actions, subissant les mêmes maladies. La Méde- 
cine scientifique ne peut donc, sous peine de s’entourer d’une muraille de 


(4) Maladies causées par les Animaux et par les Champignons parasites. 


DOS NOTES ET INFORMATIONS 


Chine, borner son horizon à la seule contemplation de l'Homme malade ; 
il est une foule de phénomènes dont elle ne peut trouver l'explication que 
dans les maladies des Animaux domestiques ou sauvages. 

Mais je me laisse entrainer à des considérations qui ne vous apprennent 
rien, Car votre esprit philosophique m'est connu et j'ai plaisir à constater 
qu'il existe entre nous, sur ces questions fondamentales, une parfaite 
communion d'idées. Je reviens donc au sujet que je n'aurais pas dù perdre 
de vueet je crois ne pouvoir mieux faire que de vous donner connais- 
sance d'un document où j'ai eu déjà l’occasion de formuler mon opinion sur 
les questions qui nous occupent. 

Voilà bientôt un an, le D' Miguel Couro, professeur à la Faculté de Mé- 
decine de Rio-de-Janeiro, m'a fait l'honneur de m'écrire pour me deman- 
der ce que je pensais äe la création, dans les Facultés de Médecine du 
Brésil, d’une chaire spéciale de clinique des maladies tropicales, à laquelle 
serait adjoint un laboratoire. Je vous transcris ci-après ma réponse; elle 
exprime, aujourd hui encore, très fidèlement mon opinion; elle s applique 
d'ailleurs à votre pays tout aussi bien qu'au Brésil. 

{Suit la lettre à M. le Professeur M. Couro, précédemment publiée dans 
les Archives (1).] 

La République Argentine me semble être, entre tous les pays de l'hé- 
misphère austral, la terre promise aux Parasitologues. Jouissant d’un 
climat tropical par ses contrées septentrionales, par la région où vous 
allez installer votre Institut, elle passe progressivement par toute la gamme 
des climats, jusqu'aux plus rigoureux; aucune terre australe ne s’avance 
plus loin vers le pôle. Des conditions aussi diverses pour la flore et la 
faune, des étendues aussi immenses ouvertes à l’activité des Hommes 
réservent à ceux-ci et aux animaux domestiques des maladies infiniment 
variées. Nul pays sous-équatorial n'est donc plus directement intéressé 
aux créations scientifiques auxquelles je faisais allusion tout à l'heure. 
Vous allez, à Tucumän, organiser un Institut Parasitologique qui, je n’en 
doute pas, s’inspirera de ces principes, mais cela ne saurait suffire et, 
dans un avenir prochain, il sera nécessaire de multiplier les établisse- 
ments de ce genre : vous aurez du moins le mérite considérable d'avoir 
le premier compris l'importance de ces questions et d'avoir réalisé la pre- 
mière organisation de ce genre, J’entrevois la création successive d'Ins- 
tituts analogues, dans les grands centres de population, à mesure que 
ceux-ci se constituent et s’accroissent, et j'ai la vision très nette, non 
seulement des bienfaits qui en résulteront au point de vue de l'hygiène 
générale, mais aussi du labeur scientifique intense qui s'accomplira en 
chacun d'eux. Vous avez une Nature toute neuve, vous avez l'intelligence, 
l'énergie, l'argent; vous formerez ou nous vous formerons les savants 
capables de mener à bien une aussi vaste entreprise, et la République 
Argentine conquerraau soleil de la science une place éminemment enviable. 


(1) L'enseignement de la Médecine coloniale. Archives de Parasilologie, X, 
p. 107, 1905. 


er 


NOTES ET INFORMATIONS 509 


Ce ne sont point là, mon cher ami, des visions fantaisistes : c'est, j'en 
ai la certitude absolue, un aperçu des progrès futurs et prochains. Chaque 
pays a ses maladies, comme il a ses Animaux et ses Plantes, ou plutôt 
parce qu'il a ses Animaux et ses Plantes : il est donc nécessaire d'étudier 
ces maladies spéciales, d'en déterminer les causes, les moyens de trans- 
mission, de suivre dans toutes les phases de leur évolution, à travers les 
hôtes variés qui les peuvent héberger, les organismes parasitaires qui 
déterminent l'infection : ces études aussi compliquées que diverses sont 
seules capables de mener à une connaissance parfaite des conditions 
morbides et, par conséquent, de dicter une prophylaxie rationnelle. Le 
programme est immense et de nombreuses générations d'Hommes de 
science pourront y exercer leur talent et leur patience sansen venir à bout. 

Ce programme, c'est celui des pays neufs, encore imparfaitement 
connus dans leurs conditions d'acelimatement et d'habitabilité: tout està 
faire et la moisson des découvertes s'annonce particulièrement abondante. 

Quant à nous, Européens, qui habitons une toute petite portion du 
globe, où les climats sont plus homogènes et les maladies moins variées 
et d'ailleurs mieux connues, notre rôle n'est pas achevé. Il nous reste à 
mieux étudier nos affections propres, qui sont celles de la race blanche 
et qui, avec celle-ci, se sont répandues à la surface du globe : ce sont 
aussi, pour une part, les affections de votre pays, et voilà comment nos 
études se rapprochent. 

Il reste également, à ceux des pays d'Europe ou possèdent des colo- 
nies, à faire une étude approfondie des maladies qui y sévissent et dont 
quelques-unes sont excessivement meurtrières; et voilà comment, encore 
une fois, votre programme et le nôtre se confondent. Notre solidarité 
scientifique s'affirme donc de toutes les manières; cela nous promet la 
continuation et l'extension des relations d'estime et d'amitié réciproques 
entre savants de pays différents, unis dans une même poursuite de la 
vérité scientifique et animés du même désir de contribuer au bien-être 
de l'humanité soufirante. 

En Europe, les nations colonisatrices ont, depuis quelques années, en- 
trepris avec ardeur la lutte contre les maladies des pays chauds; elles 
ont, eu outre, donné une extension nouvelle à l’enseignement de la patho- 
logie exotique, dans le but de fournir aux colonies et aux pays de pro- 
tectorat un corps de médecins qui fussent au courant des questions très 
spéciales afférentes à cette branche particulière des sciences médicales. 
La France possède actuellement trois centres d'enseignement de la patho- 
logie exotique : Bordeaux pour les médecins de la marine, Marseille pour 
les médecins coloniaux, enfin Paris. 

Ici, la clientèle nous vient de sources très diverses. C’est d’abord, 
pour une petite part, des médecins coloniaux, profitant d'un congé pour 
suivre nos cours et fréquenter nos laboratoires; c'est surtout des méde- 
cins civils, voulant faire leur carrière aux colonies; c'est enfin une forte 
proportien de médecins étrangers venant de Colombie, du Vénézuela, 


510 NOTES ET INFORMATIONS 


de Porto Rico, du Nicaragua, du Guatemala, de Bolivie, d'Haïti, de la 
xépublique Dominicaine, de l’armée des États-Unis, d'Angola, de Grèce, 
d'Italie, de Maurice, des Indes, etc. Si les statistiques n'étaient si fasti- 
dieuses, je pourrais dresser un tableau montrant la proportion des difié- 
rentes nationalités; vous y verriez que les Hispano-Américains forment 
la très grande majorité des élèves de notre Institut de Médecine colo- 
niale. Nous n'avons eu encore aucun Argentin; je le regrette, car j'ai vos 
compatriotes en grande estime, mais je m'en console, car cela démontre 
l'excellence de vos Facultés de Médecine. 

Qu'ajouterai-je encore, mon cher ami? Le rôle social du médecin 
grandit chaque jour; il doit être prépondérant dans les sociétés à dévelop- 
pement rapide, comme la vôtre, car de lui dépendent pour une très large 
part la salubrité des cités nouvelles, le choix de leur emplacement, les 
conditions de leur extension : il est l'arbitre pacifique des destinées des 
peuples. Quel rôle plus noble a jamais été joué dans l'histoire de l'huma- 
nité? Les notions scientifiques sur lesquelles repose ce rôle admirable 
dérivent essentiellement de la connaissance des maladies parasitaires. La 
Parasitologie domine toute la Médecine scientifique : le Parasitologue doit 
être désormais le conseiller et le guide des Pouvoirs publics. Vous avez 
plus qu'aucun autre les qualités morales et la solide instruction tech- 
nique qui sont indispensables à l'exécution d’une tâche aussi élevée. 

Bien cordialement à vous. 

R. BLANCHARD. 


Hemos traducido fielmente la carta del profesor BLANCHARD, sin añadir 
ni quitar nada, ni aun los pärrafos que se refieren à nuestra persona y 
de los cuales protestamos sincera y amigablemente; era necesario no 
alterar su pensamiento, y nos hemos conformado. 

EL profesor BLANCHARD es uno de los pocos hombres de ciencia que no 
ignora absolutamente lo que pasa en nuestro pais: es un poliglota distin- 
guido, pues habla alemän, inglés, italiano, español; puede estar y estä, 
pues, al corriente de nuestro movimiento cientifico. 

Ultimamente sir Patrick Mansox. el ilustre director de la Escuela de 
Medicina Tropical de Londres, ha sido invitado por una Universidad norte- 
americana (creo que la de San Francisco), para dar una serie de con- 
ferencias, y ha ido en efecto y satisfecho su programa. No seria posible, 
digo yo, que nuestra Universidad 6 nuestro Gobierno invitara à conoci- 
dos hombres de ciencia en las diferentes ramas del saber humano, no 
digo 4 dar conferencias, pero aunque mäs no fuera que para visitar y 
conocer nuestro pais. { Hay alguien que pueda desconocer 10 benéfico que 
seria para nosotros el ser mejor conocidos en el exterior ? Dejo la pregunta 


y espero la respuesta. 


Dr. PEDRO J. GARCIA. 
Paris, abril de 1906. 


— L'article qui précède a été publié dans La Prensa de Buenos Aires, 
numéros du lundi 7 mai et du mercredi 16 mai 1906; il a été publi 


NOTES ET INFORMATIONS 511 


aussi dans la Revista de letras y ciencias sociales, Tucumän, V, p. 3-15, 
octobre 1906. Nous le reproduisons intégralement, à cette différence près, 
que nous rétablissons dans son texte français la lettre du Professeur R. 
BLANCHARD, publiée en espagnol dans les deux journaux argentins. 


La chaire de Parasitologie de la Faculté de Médecine de Paris. — Par 
décret en date du 15 décembre 1906, la chaire d'Histoire Naturelle médi- 
cale de la Faculté de Médecine de Paris a été transformée en une chaire 
de Parasitologie et d'Histoire Naturelle médicale. Nous avons annoncé 
déjà ce fait, mais nouscroyons utile d'y revenir, pour dégager sa portée et 
sa signification. 

Il ne s’agit, à première vue, que d’une simple modification du titre de 
l’une des chaires les plus anciennes de la Faculté. En réalité, le faitest plus 
important : il consacre et rend officielle une évolution profonde qui s’est 
accomplie dans l'orientation et l’enseignement des sciences naturelles 
appliquées à la médecine. 0 

Jusqu'en 18S3, l’enseignement de l'Histoire Naturelle à la Faculté de 
Médecine de Paris consistait en un cours de botanique et de zoologie 
pures, qui aurait pu tout aussi légitimement trouver sa place à la Faculté 
des sciences. Le professeur BAILLON, qui enseignait les familles végétales, 
l’agrégé DE LANESSAN, qui enseignait la zoologie, n'avaient guère souci du 
point de vue médical proprement dit; ils avaient beaucoup de talent et 
beaucoup de succès, mais l'’amphithéâtre était, à juste titre, assidüment 
iréquenté par les élèves de la Sorbonne, qui venaient y entendre une 
excellente préparation à la licence. 

Dès le mois de novembre 1883, époque où il inaugura son enseignement 
à titre d'agrégé, M. R. BLancaarD donna à la zoologie médicale une 
direction toute différente. Il se renferma presque exclusivement dans l’é- 
tude des parasites et des maladies qu'ils déterminent; d'année en année, 
des questions nouvelles surgissant, cet enseignement nouveau prit une 
ampleur remarquable. Ce serait perdre son temps à raconter ce que cha- 
cun sait, que d'insister sur le succès considérable qu'il rencontra auprès 
des jeunes générations médicales. À cette époque, les étudiants suivaient 
encore les cours et le grand amphithéâätre était comble à chacune des 
leçons du jeune agrégé. L'exemple donné par Paris fut alors suivi plus ou 
moins complètement par les Facultés et Écoles de province, ainsi que par 
un certain nombre de Facultés étrangères. 

Nommé professeur d'Histoire Naturelle médicale à la Faculté de Paris, 
en 1897, M. R. BLancHaRp reprit et acheva son œuvre. Il fit pour la bota- 
nique ce qu'il avait fait pour la zoologie, c'est-à-dire qu'il la spécialisa 
étroitement dans le sens de la parasitologie. Les conférences de l’agrégé, 
les travaux pratiques des élèves, furent spécialisés de la même façon. Ainsi 
se trouva définitivement constitué à tous ses degrés l’enseignement de la 
Parasitologie. 

Il suffit d'ouvrir les yeux pour constater que! les agents animés jouent 
un rôle de plus en plus important en pathologie. Dans une foule de mala- 


ol 


1Ÿ 


NOTES ET INFORMATIONS 


dies longtemps considérées comme essentielles, on trouve comme agent 
étiologique soit un parasite animal (Protozoaire, Helminthe, Acarien,etc.), 
soit un parasite végétal (Bactérie, Champignon). La connaissance de ces 
êtres parasitaires dans toutes leurs métamorphoses et à travers leurs mi- 
grations est de première importance, puisqu'elle seule peut éclairer l'étio- 
logie ou indiquer les mesures prophylactiques. Une telle notion ne peut 
résulter d’ailleurs que d'études très techniques, qui nécessitent une con- 
naissance approfondie des diverses branches de l'histoire naturelle. 

Bien plus, de très nombreux animaux (Moustiques, Glossines, Acariens 
divers, etc.), sans être parasites par eux-mêmes, disséminent de très 
redoutables maladies infectieuses (paludisme, maladie du sommeil, fièvre 
récurrente, etc.), en sorte que leur étude devient urgente pour le méde- 
cin, tout au moins pour tous ceux qui doivent exercer leur art dans les 
pays où sévissent ces affections et pour tous ceux qui veulent entrer dans 
la carrière scientifique. Ce que nous venons de dire des animaux, tant 
parasites que pathogènes, est également vrai des Champignons, dont 
l'importance va chaque jour en grandissant. Nous passons sous silence 
les Bactéries, dont personne ne songe plus à contester ou à restreindre le 
rôle en pathologie. 

Bien loin de passer à l'état de science accessoire ou démodée, l'Histoire 
Naturelle médicale devient donc véritablement prépondérante en médecine 
scientifique. Le progrès de nos connaissances ne la réduit point à la por- 
tion congrue, ainsi que des esprits chagrins et mal informés croient 
encore pouvoir le dire; il lui imprime, au contraire, une impulsion nou- 
veille et vigoureuse; il la place en lumière; il ouvre devant elle un champ 
immense, qui sera fertile en découvertes sans nombre et dont le défriche- 
ment est à peine ébauché. Ou plutôt, car il serait plus juste de s’expri- 
mer ainsi, la conception parasitaire moderne a engagé les recherches de 
médecine scientifique dans une voie toute nouvelle, qui sera particulière- 
ment féconde. 

C'est la Parasitologie qui a été l'instigatrice de ces nouvelles tendances. 
Elle a vaillamment conquis droit de cité dans nos Facultés de médecine. 
Il était juste qu’une chaire de Parasitologie fut créée à la Faculté de Paris, 
il est également juste que le premier titulaire soit le savant à l'initiative 
duquel est dù cet enseignement nouveau, dont le succès et l'utilité vont 
chaque jour en s'affirmant. 

M. ie Professeur R. BLancHARD est pour le Progrès Médical un collabo- 
rateur et un ami de trop ancienne date pour que nous n'éprouvions pas 
un vif plaisir à le féliciter. Il a le bonheur de voir son œuvre officiel- 
lement reconnue et consacrée; il fait école : ses deux premiers élèves, le 
D' J. Guiarr et le D' NeEvEu-LEMAIRE, sont l’un professeur, l’autre agrégé 
a la Faculté de médecine de Lyon; il imprime sa direction à une phalange 
de jeunes savants qui se forment à bonne école et dont quelques-uns, 
comme le D’ Brumpr, jouissent déjà d'une notoriété considérable. 

Les Archives de Parusitologie, que le Professeur R. BLANCHARD a fondées 


NOTES ET INFORMATIONS 513 


en 1898 et dont le 11° volume est en cours de publication, témoignent 
d'ailleurs de l’activité du Laboratoire de Parasitologie. De même, le succès 
de l’Institut de Médecine coloniale, que le professeur R. BLANcHARD a fondé 
en 1902 et qui, à chacune de ses sessions, attire une forte proportion 
d'étrangers, montre assez clairement la bonne réputation dont jouit au 
loin l’enseignement nouveau, qui ajoute un nouveau fleuron à la cou- 


ronne de notre Faculté parisienne. — BourNeviLe, Le Progrès médical, 
(3), XXIII, p. 52, 26 janvier 1907. 
Institut de Médecine Coloniale. — Par une délibération en date du 13 


mars 1902, le Conseil de la Faculté de Médecinede Paris a décidé la création 
d'un Institut de Médecine coloniale : c'était la réalisation d'un projet que, 
depuis deux années, M. le professeur R. Blanchard poursuivait par des 
moyens variés, notamment par la publication de plusieurs articles et bro- 
chures. Un peu plus tard, le Conseil de l'Université de Paris instituait un 
diplôme de Médecin colonial en faveur des élèves ayant subi avec succès 
l'examen de sortie. 

L'Institut a pour but de donner aux médecins destinés à exercer leur 
art dans les pays chauds un complément d'instruction sur les questions 
capitales d'hygiène, de médecine, de parasitologie avec lesquelles ils se 
trouveront aux prises et dont la solution exige des connaissances scien- 
tifiques très spéciales. Il reçoit comme élèves des docteurs français et 
étrangers, des internes des hôpitaux et des étudiants de cinquième année 
La grande majorité des élèves sont des médecins civils ; aussi l'Institut de 
Médecine coloniale de Paris a-t-il une physionomie bien particulière et ne 
fait-il aucune concurrence aux institutions similaires de Marseille et de 
Bordeaux. 

Chaque année, pendant les trois mois d'octobre, novembre et décembre 
a lieu une session de cours et de travaux pratiques, à la Faculté de Méde- 
cine. L'enseignement clinique est donné à l’hôpital de l'Association des 
Dames Françaises, 93, rue Michel-Ange. La première session a eu lieu en 
1902; la cinquième s’est ouverte le lundi 15 octobre 1906, avec 32 élèves. 
Voici l'état nominatif de ces 32 élèves, classés par nationalités; le nom 
de ceux encore dépourvus du diplôme de docteur, bien qu'ayant achevé 
leur scolarité, est imprimé en italiques : 


FRANCE : MM. Alexandre, Bacaresse, Blanquier, Boricaud, Dauge, Janin 
Josephson, Lenoble, Mathieu, Mauroy, Thiercelin et Tremblin. 

BRESIL : M. Bourroul. 

CocoMBie : MM. Barreto, Ca]iao et Ricardo. 

EGyprTe : M. Sabitt. 

GRÈCE : MM. Adam, Sykiotis, Ventouras et Zoulia. 

Hart : MM. Malebranche et Pérez. 

ParaGuay : MM. Coronel et Gubetich. 
_ Porro Rico : M. Manzano y Soto. 

SAN-SALVADOR : M. Soriano. 


514 NOTES ET INFORMATIONS 


Turquie : MM. Bicas, Christodoulos et Ségal. 

VENEZUELA : MM. Gonzalez et Tinoco. 

Au total, douze Français contre vingt étrangers. 

Jusqu'à ce jour, le diplôme de Médecin colonial de l'Université de Paris 
a été délivré à 133 élèves. Il nous paraît intéressant de présenter dans 
les trois tableaux ci-contre divers renseignements statistiques relative- 
ment aux cinq premières promotions. 

Pendant le cinquième session, le programme des divers cours et exer- 
cices pratiques a été le suivant : 

M. le professeur RoGEer. — Du 15 au 31 octobre, quinze leçons de tech- 
nique bactériologique et hématologique, suivies d'exercices pratiques, au 
laboratoire de pathologie expérimentale de la Faculté de Médecine. 

M. le professeur R. BLancHarp. — Du 2 au 26 novembre, vingt et une 
leçons sur les maladies parasitaires, suivies d'exercices pratiques, au 
laboratoire de parasitologie. 

M. le professeur CHANTEMESSE. — Du 24 novembre au 8 décembre, sept 
leçons d'hygiène et de police sanitaire, suivies d'exercices pratiques, au 
laboratoire d'hygiène. 

M. le professeur DE LAPERSONNE. — Quatre leçons d’ophtalmologie, à 
l’'Hôtel-Dieu. 

M. le professeur GAUCHER. — Quatre leçons de dermatologie, à l'hôpi- 
tal Saint-Louis. 

M. le docteur Wurrz, chargé de cours. — Treize leçons cliniques, à 
l'hôpital de l'Association des Dames Françaises, 93, rue Michel Ange. — 
Six leçons théoriques et onze exercices pratiques au laboratoire d'hygiène. 


M. le docteur JEANSELME, agrégé. — Quatre leçons de dermatologie, à 
l'hôpital Saint-Louis. 
M. le docteur MoREsTIN, agrégé. — Six leçons de chirurgie, au petit 


amphithéâtre de la Faculté. 

Les étrangers, presque tous docteurs, qui recherchent le diplôme de 
Médecin colonial de l'Université de Paris, représentent exactement 50 
pour 100 des élèves, on comprend tout l'intérêt de ce fait, au point de 
vue de l'influence française à l'étranger. Quelques-uns d’entre eux occu- 
- pent déjà d'importantes situations scientifiques ou administratives dans 
leur pays. L'Université de Bogota (Colombie) a fondé une chaire de cli- 
nique des maladies tropicales en faveur du D' FRANCO, major de la pre- 
mière promotion. Le D' ne MaGaLnies est chef de clinique à l'École de 
médecine tropicale de Lisbonne. 

Quant aux médecins français, ils trouvent très facilement des emplois 
avantageux, soit dans diverses colonies (Indo-Chine, Madagascar, Afrique 
occidentale, Congo), soit auprès de diverses Compagnies de colonisation, 
qui réservent à juste titre leurs postes médicaux aux titulaires du diplôme 
de Médecin colonial. 

Tout récemment encore, le Gouverneur général de l’Indo-Chine créait 
une importante organisation sanitaire, dans les cadres de laquelle il 
offrait des avantages spéciaux aux possesseurs de ce même diplôme. 


NOTES ET INFORMATIONS 515 


4° Répartilion des élèves suivant leur situation médicale. 


1903 190% 1905 1906 


em | 0 | 0 || 


Franc. Élrang. Franc. Étrang.|| Franc. Étrang. Frane. Étrang. 


1902 


a, 


France. Étrang. 


Professeurs d’Université.| » » ) » » 1 ) » » » 
Docteurs en médecine . .| 6 6 6 ON A2) MAS MIO 8 |18 
Internes des hôp. deParis.| 3 » || 3 1 il ) Il » » » 
Etudiants de 5° année. .| 5 » | 4 2 3 » 5) 3 5 il 


190% 1905 1906 


Docteurs français 

Docteurs étrangers pourvus du diplôme 
français . 

Docteurs étrangers pourvus d'un di- 
plôme étranger. ë : 


5° Répartition des élèves suivant leur nationalité. 


1902 1903 190 1905 1906 Totaux 


er] 


O6 OO en en Ho en QO me mn CO me me Ra OO en m7 CO de me NO © ee =  hO Où 


BTAN CEA RE EE ALMA PES 17 
Belgique . Î 
Bolivie. . . 

Brésil 

Chili. 

Colombie. 

Costa-Rica . à ot 
République Dominicaine . 
Esypier We 
Etats-Unis . 

Grèce 3 

Guatémala . . 

Haïtieee 

Italie 

Maurice 

Nicaragua 

Paraguay 

Pérou . 

Porto Rico. 

Portugal. 

Roumanie 

Russie . 

San Salvador. 

Suisse . 

Turquie . 

Venezuela 


x 
Ce 
(9!) 


Totaux. . 


516 NOTES ET INFORMATIONS 


Pour mettre en évidence ïa variété et l'importance des travaux pra- 
tiques de Parasitologie, nous croyons utile de donner ici le programme 
des vingt-et-une manipulations que les élèves de l’Institut de Médecine 
coloniale ont faites pendant la dernière session, sous la direction de M. le 
D' Brumprt, chef des-travaux pratiques, assisté de M. le D' M. LANGERON, 
préparateur. 

1" manipulation. — Recherche de diverses espèces d’Amibes dans 
l’eau douce. — Étude sommaire des êtres vivants de l’eau (Infu- 
soires, Nématodes libres, Diatomées). — Montage sur lames de trois 
coupes de dysenterie amibienne. 

2° manipulation. — Coloration des coupes distribuées et étude de 
la distribution des Amibes dans les tissus, formation des ulcérations 
spécifiques. — Recherche des Infusoires dans le gros intestin de 
la Grenouille verte. — Montage sur lames de trois coupes de Coc- 
cidium cuniculi et de Coccidium hominis; d’une coupe de la Coccidie 
du Poulpe et d’une coupe de la Coccidie de la Seiche. 

3° manipulation. — Coloration et étude des coupes distribuées. 
Cycle évolutif de la Coccidie intestinale du Lapin comme type d’évo- 
lution d’un Sporozoaire (schizogonie dans les points récemment 
envahis; sporogonie dans les lésions anciennes : macrogamétocyte, 
microgamétocytes et microgamètes, oocystes). — Étude de la Coc- 
cidie du Poulpe et de celle de la Seiche. Grâce au volume des para- 
sites, il est facile de différencier les éléments qui caractérisent la 
_ sporogonie, il est facile de suivre les microgamètes à travers les 

mailles du tissu conjonctif. La formation des sporozoïtes à l’inté- 
rieur des spores se rencontre à tous ses stades sur les coupes et 
ne nécessite pas une culture en dehors du corps de l'animal comme 
c'est le cas pour la Coccidie du Lapin. 

4° manipulation. — Coloration de frottis de spores de la Sarcospo- 
ridie de l’æœsophage du Mouton par le mélange bleu Borrel-éosine. — 
Montage de deux coupes de Sarcosporidies ; coupes d'organes d’un 
individu mort d’un accès de paludisme pernicieux (pancréas, rein, 
rate et foie). 
5° manipulation. — Coloration des coupes de la manipulation 
précédente. Recherche des corps en rosace dans les capillaires des 
organes; ces formations sont très nombreuses, certains capillaires 
en sont bourréset ne renferment plus de globules rouges. Recherche 
des leucocytes mélanifères. Recherche du pigment noir dans le foie 
et la rate et du pigment ocre dans le foie. Diflérenciation facile de 
ces pigments après action du sulfhydrate d’ammoniaque. 

6° manipulation. — Coloration au bleu Borrel-éosine des Héma- 
tozoaires endoglobulaires du sang d'Oiseau (Padda), de la Babésie 
du Chien ou du Bœuf; de l'Hémogrégarine de la Tortue d’eau. — 
Différenciation facile des macrogamètes et des microgamètes d’Æal- 
teridium dans le sang coloré du Padda. Examen de sang frais d'Oiseau, 


st 


NOTES ET INFORMATIONS 4 147 


pour reconnaître les microgamètes émis par les éléments parasitaires 
mâles. 

Cette première manipulation sur les parasites du sang a pour but 
de familiariser les. élèves avec la technique très simple que nous 
recommandons pour leur coloration. 

7e manipulation. — Étude des trois parasites de la fièvre palu- 
déenne de l'Homme. Coloration du parasite de la fièvre tierce bénigne 
(Plasmodium vivar). Remarquer lhypertrophie du globule et l’exis- 
tence des granulations de Schüffner. Gamètes; rosaces. — Colora- 
tion du parasite de la fièvre tierce maligne (Plasmodium  falci- 
parum). Reconnaître les granulations de Maurer, faciles à distinguer 
de celles de Schüffner. Gamètes ou corps en croissants. — Coloration 
du parasite de la fièvre quarte (Plasmodium malariæ). Constater 
l’absence de granulations dans l’hématie parasitée et son atrophie 
très nette; corps en rosace. 

8° manipulation. — Études des Flagellés. Recherche à l’état frais 
de Trypanosomes et de Trypanoplasmes dans le sang de divers 
animaux. Recherche des 7richomonas dans l'intestin du Cobaye ou 
dans celui d’une Sangsue d’eau douce (/æmopis sanquisuga). — Colo- 
ration du Trypanosome de la maladie du sommeil dans des frottis. — 
Coloration du Trypanosoma inopinatum dans le sang de Grenouilles 
infestées expérimentalement. Constater l'intensité de la réaction pha- 
gocytaire dans cette maladie, certains macrophages englobent quel- 
quefois dix ou vingt Trypanosomes. Coloration du Trypanoplasme de 
la Tanche. 

9° manipulation. — Coloration de nouveaux frottis de parasites du 
sang. Montage sur lames de deux coupes de cerveau et d’une coupe 
de cervelet d’un Nègre mort de maladie du sommeil et ayant des 
lésions typiques. 

10° manipulation. — Coloration des coupes de la précédente mani- 
pulation. Remarquer la leptoméningite très nette qui, au point de 
vue anatomo-pathologique, caractérise la maladie du sommeil. Les 
vaisseaux sanguins du système nerveux sont entourés d’une gaine 
de cellules embryonnaires. Les lésions des cellules nerveuses ne 
peuvent être étudiées que par une technique spéciale (méthode de 
Nissl). — Montage d'une coupe de kyste hydatique du foie ou du 
poumon, d'une coupe de foie humain douvé; d’une coupe de foie 
de Mouton parasité par la grande Douve (Fasciola hepatica) et d’une 
coupe de foie de Mouton parasité par la petite Douve (Dicrocælium 
lanceatun)). 

11° manipulation. — Coloration des coupes distribuées à la précé- 
dente manipulation. — Remarquer sur la coupe de kyste hydatique 
la réaction défensive de l'hôte; la membrane germinative stratifiée et 
plissée; les vésicules proligères. Sur les coupes de foie humain, 
remarquer la sclérose qui entoure les canaux biliaires hypertro- 


518 NOTES ET INFORMATIONS 


phiés et adénomateux, ainsi que la dégénérescence graisseuse des 
cellules hépatiques. Sur les coupes de foie de Mouton, étudier la 
sclérose et l’atrophie du tissu hépatique. 

19° manipulation. — Étude des Moustiques. Montage dans la 
gélatine glycérinée de la larve et de la nymphe de Culex; du mâle et 
de la femelle de Culex ; de la larve et de l’adulte (mâle ou femelle) 
d'Anopheles. Étude de la nervure des ailes, des pièces buccales, 
des écailles, des ongles et des éléments anatomiques capables de 
faciliter la détermination de ces Insectes. — Cette manipulation se 
faisant au mois de novembre, il est impossible de la compléter par 
la dissection de Moustiques frais, ce qui permettrait d'étudier le tube 
digestif, les tubes de Malpighi et les glandes salivaires, dont l’impor- 
tance est très grande en parasitologie. 

13° manipulation. — Etude des Cestodes. Constater la vivacité 
relative des Cestodes des animaux à sang chaud, quand on les exa- 
mine dans la solution physiologique chauffée à 37°. La démonstration 
peutse faire avecles Cestodes si communs dans l'intestin du Chien. — 
Rechercher des Æymenolepis, dans la dernière portion de l'intestin 
grêle du Surmulot ; étudier leur mode de fixation, regarder la tête et 
les crochets au microscope. Les œufs très transparents permettent de 
bien suivre les mouvements des embryons hexacanthes; en pressant 
sur le couvre-objet, les embryons sortent de leur œuf et effectuent des 
mouvements caractéristiques qui permettent de bien comprendre 
leur pénétration à travers les parois du tube digestif. Rechercher des 
Dipylidium dans l'intestin du Chien ou du Chat. Monter dans le 
lactophénol une tête armée de crochets du Zænia serrata du Chien. 
Disséqueret monter la tête du Zæna sohium extraite des Cysticerques 
du Porc. Monter des œufs de Zænia saginata dans du lactophénol. 
Examiner des œufs de Bothriocéphale par dilacération d’un anneau 
de ce Ver; constater la présence d’un clapet. 

14° manipulation. — Étude des Trématodes. Étudier à l’état frais, 
par compression, la petite Douve du foie du Mouton (Dicrocælium 
lanceatum); en distinguer les divers organes. Étudier de la même 
façon la grande Douve du même animal (Fasciola hepatica). — Colo- 
rer des petites Douves au carmin chlorhkydrique et les monter dans 
le baume ou dans la gélatine glycérinée. Revoir les coupes colorées 
à la 49° manipulation et se rendre compte de la structure histolo- 
gique des Douves, ainsi que des réactions qu’elles produisent chez 
l'hôte parasité. — Examiner des coupes de Poumon parasité par le 
Paragonimus Westermanni et constater la formation de l’épithélium 
pavimenteux stratifié. | 

15° manipulation. — Étude des Nématodes. Constater que les 
Nématodes, qui paraissent immobiles quand on les examine à la 
température ordinaire, effectuent des mouvements très violents à la 
température de 37°. Examiner dans l’eau physiologique, à 37°, des 


NOTES ET INFORMATIONS 519 


Ascarides du Chat ou du Chien, des Oxyures et des Trichocéphales 
de la Souris grise. Étudier des Ascarides des deux sexes (Ascaride 
du Cheval ou du Porc). Monter dans le lactophénol, des Oxyures 
(Oxyure de la Souris grise). — Monter dans le lactophénol, un peu du 
contenu de l'intestin grêle d’un Rat trichiné depuis une semaine, pour 
étudier les Trichines adultes, mâles et femelles. Dissocier et monter 
dans le lactophénol un fragment de muscle de Rattrichiné. Examiner 
par compression, à l’état frais, de la viande trichinée. Monter sur 
lame une coupe de langue de Rat mort de trichinose expérimentale. 

16° manipulation. — Études des Nématodes (suite). Monter sur 
lame une coupe de tumeur à filaria volyulus, ainsi qu'une coupe de 
peau éléphantiasique. Colorer les coupes et reconnaître, dans la 
tumeur à filaria volovulus, de nombreuses sections du corps des Filai- 
res femelles et mäles; les tubes utérins sont remplis de Microfilaires 
qui, une fois pondues, se fraient un passage à travers le tissu con- 
jonctif. Dans la peau éléphantiasique, reconnaitre l'intégrité de l’épi- 
derme et la sclérose intense du derme. — Examiner à l’état frais du 
sang d’une Grenouille verte présentant de nombreuses Microfilaires 
pourvues d'une gaine. 

17 manipulation. — Etude des matières fécales et de l'urine. 
Monter une parcelle de matières .dans du lactophénol, directement 
ou après dilution, si la consistance l’impose; reconnaître les débris 
végétaux et animaux de l'alimentation : fragments de fibres muscu- 
laires, tissu conjonctif, vaisseaux spiralés, annelés, ponctués des 
faisceaux libéro-ligneux des végétaux, poils végétaux, cellules végé- 
tales, épiderme végétal avec ses stomates souvent caractéristiques. 
Reconnaître les cellules intestinales desquamées au cours de la diges- 
tion. Ne pas confondre des grains de pollen, des segments de 
faisceaux annelés des végétaux ou des spores de divers Champignons 
et en particulier des Truffes avec des œufs de parasites. — Recher- 
cher des oocystes de Coccidie dans des crottes de Lapin infesté ; exa- 
miner des déjections humaines contenant des œufs d’Ascaride, de 
Trichocéphale, d'Oxyure, d’Uncinaire. Etant donnée la rareté des 
affections à Douves chez l'Homme dans nos contrées, se familiariser 
avec l’aspect que présentent leurs œufs dans les matières en exami- 
nant des déjections de Mouton douvé. Monter et examiner des œufs 
de Linguatule et d’Acanthocéphale. —- Chercher dans le sédiment 
urinaire d’un individu atteint d'hématurie d'Égypte les œufs carac- 
téristiques du Schistosomum hæmatobium. Examiner des embryons 
d'Uncinaire provenant d’une culture. 

18° manipulation. — Monter et colorer une coupe d’adénome 
bilharzien de l'intestin ; remarquer l'abondance des œufs en certains 
endroits. — Étude des Acariens parasites : les Tiques. — Étude des 
Insectes parasites : monter, dans le baume de Canada ou la gélatine 
glycérinée, des Puces et leurs larves; remarquer les caractères des 


520: NOTES ET INFORMATIONS 


diverses parties du corps qui permettent de distinguer les espèces. 
Cette détermination, étant donné le mode de transmission dela peste, 
a une réelle importance. Disséquer et monter les pièces buccales de 


diverses Mouches piqueuses. — Monter plusieurs coupes d’actino- 
mycose du Bœuf. 
19° manipulation. — Colorer une coupe d’actinomycose à l'héma- 


téine-éosine pour voir les réactions inflammatoires des tissus para- 
sités (cellules géantes, cellules épithélioïdes, cellules embryonnaires). 
Colorer une coupe au Gram, reconnaitre les spores mycéliennes dans 
les vieux grains, les filaments mycéliens et les massues dichoto- 
miques, quisouvent pénètrent dans les cellules épithélioïdes. Colorer 
une coupe d'actinomycose d’abord à l’hématéine, puis au Gram: les 
rapports des tissus et des parasites sont plus faciles à étudier. — 
Monter une coupe de mycétome à grains blancs de Vincent (Dis- 
comyces Maduræ); une coupe de mycétome à grains noirs classique 
(Madurella mycetomi) ; une coupe de mycétome à grains noirs produit 
par l'Aspergillus Bouffardi. 

20° manipulation. — Colorer les trois coupes distribuées à la 
précédente séance. Etudier dans chaque coupe les tissus inflamma- 
toires, le mode de progression du Champignon parasite. Constater 
l’abondance des conidies dans les grains du mycétome à Aspergillus 


Bouffardi. — Faire bouillir dans la potasse un cheveu ou un poil 
teigneux, pour mettre en évidence le parasite. 
21° manipulation. — Cette séance est consacrée à des démonstra- 


tions au microscope de préparations rares qui ne peuvent être don- 
nées en manipulation ou qui demandent une préparation spéciale. 
Un certain nombre de microscopes sont disposés sur les tables ; à 
côté de chacun d'eux un croquis indique le point intéressant à 
remarquer. Les élèves peuvent ainsi voir des coupes montrant l’évo- 
lutionde la Filaria Bancrofti, les parasites du kala-azar, le Tréponème 
de la syphilis, le Spirochète de la fièvre récurrente; l’évolution des 
parasites du paludisme, l'évolution des Trypanosomes chez les Sang- 
sues; des coupes de divers Nématodes démontrant comment on peut 
arriver à caractériser le genre de ces Vers’; des frotlis avec les trois 
Filaires du sang les plus communes : #ilaria Bancrofti, F. loa, F. 
perstans ; des coupes de peau atteinte de gale démodectique, des 
coupes de tissus parasités par des Blastomycètes, des fructifications 
de diverses Moisissures (/hizopus, Aspergillus, Penicillium), ete. 


Programme et organisation des travaux pratiques de Parasitologie à 
la Faculté de Médecine de Paris. —Les travaux pratiques de Parasito- 
logie sont obligatoires pour tous les étudiants en médecine de troisième 
année. Ils ont lieu dans le semestre d'hiver et comportent quarante 
séances. 

Les élèves de troisième année sont, bon an mal an, au nombre de cinq 


NOTES ET INFORMATIONS 521 


cents environ. Il est impossible de recevoir en même temps dans le 
laboratoire, et de faire manipuler un nombre de travailleurs aussi consi- 
dérable. Force a été, dès le début, de les répartir en quatre séries, qui 
passent successivement par le laboratoire et dont chacune ne compte pas 
moins de 120 à 130 élèves. C’est encore beaucoup trop : les locaux sont 
trop exigus, le personnel trop peu nombreux, l’instrumentation optique 
trop restreinte et le budget du laboratoire beaucoup trop maigre, pour 
qu'il soit possible de donner à une telle foule l'instruction pratique dont 
le besoin se fait sentir de plus en plus. Nous faisons de notre mieux: le 
chef des travaux et les préparateurs rivalisent de zèle, mais nous avons 
conscience que cet enseignement pratique serait plus profitable, si les 
multiples conditions défavorables que nous venons d'indiquer ne nous 
empêéchaient pas de lui donner toute l'ampleur qu'il mérite. En parti- 
culier, il est tout à fait regrettable que nos élèves n'aient, en fait et par 
suite de la pléthore dont souffre tant notre Faculté, que dix séances 
chacun, au lieu des quarante séances inscrites au programme. 

Les travaux pratiques de Parasitologie fonctionnent régulièrement 
depuis le mois de novembre 1897. Comme il a été dit plus haut, le D° J. 
GurarT en à pris la direction dès cette époque. Nous avions décidé qu’en 
dix séances il exposerait oralement l’ensemble des questions afférentes à 
la Parasitologie humaine et que‘chacune de ces conférences serait suivie 
de démonstrations portant sur des préparations microscopiques et sur 
les diverses pièces de la collection créée par moi au laboratoire. Les mi- 
croscopes dont nous disposions étaient en uombre beaucoup trop restreint 
pour qu'il füt possible de faire davantage. Malgré ces conditions fâcheu- 
ses, M. Gurarr se mit avec ardeur à la besogne et je suis heureux de 
constater le succès qui est venu récompenser ses efforts. 

Depuis novembre 1906, par suite de la nomination de M. Gurarr au 
titre de professeur à la Faculté de médecine de Lyon, le D' E. Brumpr est 
devenu chef des travaux pratiques. L'organisation générale restant la 
même, il s’est eflorcé de développer la seconde partie du programme 
ci-dessus et d'intéresser plus directement les élèves à l'examen et à la 
reconnaissance des préparations microscopiques. 


Ne pouvant songer à faire manipuler simultanément les 120 élèves 
qui composent chaque série, 1l a du moins essayé de les exercer aux 
recherches pratiques ; dans ce but, ilretient au laboratoire, durant deux 
séances consécutives, le cinquième des élèves de la série. La séance 
commençant à une heure et demie etla conférence durant une heure 
environ, ces élèves restent de deux et demie à quatre, pour étudier 
le contenu des boîtes de préparations d'étude, qui sont mises à leur 
disposition (boîtes A). Le second cinquième des élèves de la série 
reste aprèsla troisième etla quatrième démonstration, pour effectuer 
le mêmetravail. Les autres groupes se succèdent dans le même ordre. 

Pendant que les élèves examinent le contenu des boîtes du type 
À, un préparateur place sur une grande table une série de micros- 


Archives de Parasitologie, XI, n° 3, 1907. 34 


522 NOTES ET INFORMATIONS 


copes munis d’un objectif à immersion et d’un oculaire indicateur. 
Sous chaque microscope, il place une préparation provenant d'une 
boîte de démonstration (boîte B) et dessine sur une feuille de papier 
les caractères du parasite que les élèves doivent reconnaître. Les 
élèves sont alors priés de venir isolément passer en revue les 
préparations qui leur sont montrées. 

Les étudiants ne peuvent donc quitter le laboratoire sans avoir 
vu les préparations contenues dans les boîtes A et B, dont la liste 
est ci-dessous ; il leur manque pourtant la pratique, que le travail 
personnel seul peut faire acquérir ; il leur manque également une 
collection personnelle de préparations qui, dans leur carrière médi- 
cale, pourrait leur rendre de grands services. Il est donc indispen- 
sable que les étudiants manipulent eux-mêmes. 

Nous allons pouvoir prochainement combler cette lacune, dans 
la mesure du possible. En effet, escomptant des subventions que 
l'importance de la question nous permet d'espérer, mais que rien ne 
nous autorise à considérer comme certaines ou même probables, et 
au risque d'engager pour longtemps les crédits très modestes(4,500fr.) 
dont dispose le laboratoire des travaux pratiques de Parasitologie, 
nous venons de faire la commande de quarante microscopes Stiassnie, 
avec objectif à immersion. De plus, le Dr Brumper, chef des travaux 
pratiques, va, dés l’année scolaire prochaine, modifier son programme 
de la facon suivante : 

La série comprendra, comme ci-devant, dix démonstrations pra- 
tiques (lundi, mercredi, vendredi). Les élèves seront tenus d'assister 
à ces dix leçons ; ils seront divisés en cinq groupes, qui resteront au 
laboratoire trois jours successifs. Si, par exemple, la série com- 
mence un lundi, le premier groupe restera le lundi après la première 
démonstration, pour examiner le contenu des boîtes du type A, et 
quelques-unes des préparations de la boîte B; le lendemain, les 
élèves pourront manipuler eux-mêmes, d’une heure et demie à quatre 
heures. Le surlendemain (mercredi), ils resteront après la deuxième 
démonstration, pour finir l'examen des préparations des boîtes A et 
- B. Les autres groupes suivront un ordre identique, successivement. 

Cette manipulation pratique roulera sur les sujets suivants : Re- 
cherche des œufs de parasites dans les matières fécales, montage de 
préparations. — Examen direct de quelques Levures (muguet) et 
Moisissures pathogènes (Aspergillus, teignes), montage de prépara- 
tions. — Recherche du Bacille tuberculeux dans les crachats, direc- 
tement ou après inoscopie; coloration; inoculation au Cobaye. 
Aspect macroscopique, typique des lésions tuberculeuses chez le 
Cobaye. — Recherche et coloration du Gonocoque. — Recherche et 
coloration du Bacille diphtérique ; coloration au Gram (1). 


(1) Pour éviter des accidents dans ces manipulations, les cultures seront préa- 
lablement stérilisées. 


NOTES ET INFORMATIONS 523 


PROGRAMME DES CONFÉRENCES 


1" conférence. — But et importance de la Parasitologie. — Utilité 
de l'étude comparée de la Parasitologie. — Classification des para- 
sites. — Mode d'action des parasites : a) action mécanique; 6) action 
toxique; c) action spoliatrice. — Réactions locales de l’hôte contre 
le parasite : a) phagocytose; b) tumeurs inflammatoires; c) sclérose 
et enkystement; d) formations d’épithélium pavimenteux stratifié aux 
dépens d’épithélium cylindrique simple ; e) formations adénoma- 
teuses du tube digestif, des conduits biliaires, etc. — Réactions gé- 
nérales de l'hôte parasité : a) modifications du sang, importance 
diagnostique des variations dans les formules sanguines ; d) modifi- 
cations des autres organes : organes lymphoïdes, hématopoiétiques, 
etc. — Diagnostic du parasitisme: a) par la découverte du parasite 
lui-même (gale, anneaux des Cestodes, etc.); b) par l’étude du sang; 
c) par l'étude des matières fécales ; d) par l'étude de diverses sécré- 
tions (expectoration pulmonaire, urine, etc.). 

Au cours de cette première conférence, divers types de parasites 
et les tumeurs qu'ils produisent sont montrés aux élèves. Cette lecon 
se termine par l'explication sommaire des principales préparations 
des boites du type A que les élèves doivent étudier successivement. 

2° conférence. — Technique bactériologique. — Coloration du sang 
et des parasites qu'il peut contenir. — Examen des matières fécales, 
leur importance en pathologie et en médecine légale. 

3° conférence. — Amibes, Coccidies, Sarcosporides. 

4° conférence. — Hémosporidies : action sur les hématies, mode de 
transmission. à 

5° conférence. — Prophylaxie du paludisme. Moustiques. Maladies 
produites par les Flagellés ou flagelloses : maladie du sommeil, kala- 
azar, bouton d'Orient. 


6° conférence. — Généralités sur les Helminthes. — Cestodes, 
Trématodes. 

7° conférence. — Trématodes (suite), Nématodes, Hirudinées. 

8° conférence. — Arthropodes : Arachnides, Insectes. 

9 conférence. — Champignons parasites. Généralités sur le para- 


sitisme des Champignons. Étude de quelques groupes. 
10° conférence. — Champignons parasites (suite). — Classification 
des Microbes. 


COMPOSITION DES BOÎTES DE PRÉPARATIONS DU TYPE À. 


1.— Coupe d’une ulcération dysentérique montrant denombreuses 
Amibes. 

2. — Coupe d’un estomac de Poulpe montrant tous les stades 
évolutifs de la Coccidie de cet animal. 


524 NOTES ET INFORMATIONS 


3. — Coupe longitudinale d’un intestin grêle de Lapin montrant 
divers stades évolutifs du Coccidium hominis. 

4. — Coupe de tumeurs produites par le Coccidium cuniculi dans 
le foie du Lapin. 

5. — Coupe de rein d'individu mort de paludisme. Les corps en 
rosace remplissent les capillaires. 

6. — Coupe de pancréas du même individu. Les corps en rosace 
sont aussi nombreux que dans la coupe précédente. 

7. — Coupe de foie du même individu. Le pigment noir et le 
pigment ocre abondent. 

8. — Coupe de rate du même sujet. Le nt noir est très 
abondant. 

9. — Coupe d'un æœsophage de Mouton montrant des Sarcosporidies. 

10. — Coupe de cervelet d’un Nègre mort de maladie du som- 
meil. La lentoméningite est très marquée. 

11. — Coupe de poumon avec un jeune kyste hydatique. 

12. — Foie d’Annamite envahi par les Douves. La cirrhose et la 
dégénérescence graisseuse sont extrêmement marquées. 

13. — Coupe de poumon envahi par la Douve pulmonaire (Para- 


gonimus Westermanni). Cette Douve produit l’hémoptysie parasitaire 
de l’Extrême-Orient. 


14. — Coupe d'un adénome rectal produit par les œufs de la 
Bilharzie (Schistosomum hæmatobium), d'après le cas étudié par Letulle. 

15. — Diaphragme de Souris montrant des Trichines enkystées. 

16. — Coupe de tumeur humaine à ilaria voloulus. 

17. — Coupe de tumeur actinomycosique. 

18. — Coupe de mycétome à grains blancs produit par le Disco- 
myces maduræ Vincent. 

19. — Coupe de mycétome à grains noirs à Aspergillus Bouffardi. 

20. — Coupe de mycétome à grains noirs à Madurella mycetomi. 
. 21. — Coupe d’intestin de Lapin montrant divers stades évolutifs 
du Coccidium hominis. 

29, — Coupe de peau éléphantiasique (femme de la Guyane). 

23. — Petite Douve {Dicrocælium lanceatum). 

24. — Douve du foie de l'Homme (Clonorchis sinensis). 

25. — Larve de Linquatula rlhinarrs. 

26. — Oocystes de Coccidium cuniculi dans des matières fécales. 

27. — OEufs de 7'ænia saginata. 

28. — OEufs de Dibothriocephalus latus. 

29. — OEufs de grande Douve (Fasciola hepatica). 

30. — OEufs de petite Douve (Dicrocælium lanceatum). 

31. — OEults de Clonorchis sinensts. 

32. — O(Euts de Paragonimus Westermanni. 

33. — OEufs d’Ascaris lumbricoides. 

34. — OEufs de Zrichocephalus trichiurus. 


RE — 


NOTES ET INFORMATIONS 525 


35. — OEufs d'Uncinaria duodenalis. 
36. — OEufs d’£ustrongylus visceralis. 
37. — OEufs d'Oxyurus vermicularis. 
38. — OEufs de Gigantorrhynchus gigas. 
39. — OEufs de ZLingualula rhinaris. 


40. — Matières fécales avec œufs d’'Ascarides. 

41. — Matières fécales avec œufs d’Anguillule intestinale. 

49. — Matières fécales avec spores de Truffe, faciles à confondre 
avec des œufs d'Helminthes. 

43. — Coupe d’un ganglion tuberculeux de Cobaye. 

4%. — Coupe de poumon tuberculeux de Cobaye. 

45. — Coupe d'un embryon de Souris, pour montrer les hématies 
nucléées remplissant l’appareil circulatoire. 

46. — Coupe d'un abcès du foie amibien. 

47. — Trichines adultes écloses dans l’intestin. 

48. — Embryons d'Uncinaire. 

49. — Larve de Culex et larve d’Anopheles. 

50. — Tête de Culex femelle et tête d'Anopheles femelle. 


COMPOSITION DES BOÎTES DE DÉMONSTRATION DU TYPE B. 


_ 4. — Amibes de la dysenterie. 
2. — Coccidies à divers stades de développement. 
3. — Plasmodium malariæ (fièvre quarte). 
4. — Plasmodium vivax (fièvre tierce). 
5. — Plasmodium falciparum (fièvre estivo-automnale). 
6. — Plasmodium falciparum, corps en rosace dans les capillaires 
du rein. 
1. — Halteridium, gamètes mâles et femelles. 
8. — Hæmogregarina Stepanovi. 
9. — Babesia bovis. 
40. — Leishmania Donovani, frottis de rate d’un individu mort de 
kala-azar. 
11. — Trypanosoma Lewisi. 
12. — Trypanosoma gambiense parasite de la maladie du sommeil. 
-13. — Treponema pallidum parasite de la syphilis, dans le pou- 
mon du nouveau-né. 
14. — Spirochæta Duttoni de la fièvre des Tiques. 
15. — Actinomycose colorée au Gram. 
16. — Filaria nocturna, Microfilaire du sang de l'Homme. 
17. — Corps en croissant (Plasmodium falciparum). 
18. — Phagocytosedu 7rypanosoma inopinatum par des macro- 
phages. 
19. — Bacilles tuberculeux dans des coupes. 


20. — Gonocoques dans un frottis de pus. 
21. — Bacilles diphtériques d’une culture. 


526 NOTES ET INFORMATIONS 


École de Médecine tropicale de Lisbonne. — La loi du 24 avril 4902 a 
créé à Lisbonne une École de Médecine tropicale (1). Cette Ecole est sous la 
dépendance du Ministre du commerce, de la marine et des colonies, mais 
ses ressources lui sont entièrement fournies par les colonies, pour les- 
quelles c’est une dépense obligatoire. 

L'École est annexée à l'Hôpital colonial, installé provisoirement dans 
une ancienne corderie de la marine, tout près du Tage, entre Lisbonne et 
Belem. Elle occupe le rez-de-chaussée et le premier étage. En bas, c’est 
l'école proprement dite, avec ses laboratoires. En haut, trois salles : deux 
infirmeries de 25 lits chacune, l’une pour les blancs, l’autre pour les noirs, 
plus une petite salle pour les sous-officiers. On y peut étudier couramment 
le paludisme, le béribéri, l’éléphantiasis des Arabes, diverses formes de 
filariose {Filaria perstans, F. nocturna) et surtout la maladie du sommeil: 
c'est dans cette clinique que le D’ Ayres Kopxe a fait ses belles études 
sur le traitement de cette trypanosomose par l’atoxyl. 

L'École dispose en outre de l'Hôpital de la marine, mais cet établisse- 
ment est situé au Campo Sainte-Claire, à l’autre bout de la ville ; on 
peut du moins y mener les élèves ou en faire venir des malades. 

Le Directeur est le D' Rama pa Curro, ancien cheî du service de santé 
à Angola, chef du service de santé au ministère de la marine et des colo- 
nies. Les chaires sont seulement au nombre de trois, savoir : 

1° Pathologie et clinique. — Professeur : dom Antonio LANcASTRE. Une 
leçon clinique, deux outrois fois par semaine. 

2° Hygiène et climatologie. — Professeur : D’ Francisco pa SILVA TELLES, 
médecin de la marine, professeur de géographie à la Faculté des lettres. 
Cours exclusivement théorique ; trois leçons d’une heure par semaine. 

3° Bactériologie et Parasitologie. — Professeur : D'Ayres Kopke. Tous les 
jours, de 3 à 4 heures, une leçon théorique, accompagnée de démonstra- 
tions. Les élèves restent ensuite au laboratoire jusqu'à 6 heures ou 
6 heures et demie; ils font eux-mêmes des préparations sur l’objet de la 
leçon ; ils disposent d'un microscope Reichert pour deux élèves. 

Les cours durent quatre mois, du 1‘ novembre à la fin de février. Les 
examens ont lieu en mars. Les frais d'inscription sont de 5000 reis, soit 
environ 26 francs, que tous les élèves, sans exception, doivent payer. 

Les élèves sont de deux sortes: 

i° Obligatoires. — Les docteurs en médecine sortant de l’une ou l’autre 
des Facultés du Portugal (Coïmbre, Lisbonne et Porto) et prenant du ser- 
vice dans la marine ou aux colonies ; 

2° Facultatifs. — Tous les médecins civils ou militaires qui viennent 
s'inscrire bénévolement ; tous les médecins entrés au service de la ma- 
rine ou des colonies avant la création de l’École et qui viennent aussi 
s'inscrire bénévolement. 

La première session (novembre 1903-février 1904) n’a compté que 4 ou 


(1) Regulamento da Escola de medicina tropical. Lisboa, Imprensa nacional, 
in-8 de 12 p., 19083. 


NOTES ET INFORMATIONS 227 


5 élèves ; la deuxième session (1904-1905) en a eu 5 ou 6; la troisième (1905- 
1906) n’en comptait que 4 ; la quatrième (1906-1907) en aréuni 15. L'École 
est maintenant lancée et les bons résultats de son enseignement se font 
déjà sentir. Elle n’a encore attiré aucun étranger. En outre des profes- 
seurs dénommés ci-dessus, on y tronve comme chef de cliniquele D' Jose 
DE MAGALHAES, diplômé de l'Institut de médecine coloniale de Paris (deu- 
xième session, 1903). 

Puisque nous nous occupons de l’enseignement de la médecine colo- 
niale au Portugal, il n’est pas hors de propos de donner quelques brefs 
renseignements sur l’organisation du corps de santé des colonies dans ce 
même pays. 

Au Congrès international de médecine vétérinaire, réuni à Budapest 
en septembre 1905, puis au Congrès colonial français réuni à Paris en 
juin 1906, j'ai présenté des vœux tendant pour chaque colonie ou chaque 
groupe géographique de colonies dépendant d'un même pays, d'une part 
à la création d’un Laboratoire central de Parasitologie, d'autre part à la 
constitution d'un corps distinct et sédentaire de médecins coloniaux, 
acquiérant sur place leur avancement et y parcourant toute leur 
carrière (1). Ces vœux ont été adoptés à l’unanimité, ce qui en démontre 
l'utilité, mais ce qui n'implique nullement que les administrations rou- 
tinières aient jugé à propos d'en tenir compte. 

Eu France, on a déjà organisé quelques laboratoires coloniaux (2), mais 
en géneral leur action est trop restreinte, leur budget trop infime et leur 
personnel numériquement insuffisant ; il reste beaucoup à faire dans cette 
voie. 

Quant aux médecins coloniaux, on continue à les promener tous les 
deux ou trois ans d’un bout à l’autre du monde, du Congo à la Nouvelle- 
Calédonie, de la Guyane au Tonkin, de Saint-Pierre et Miquelon au Séné- 
gal ; ils doivent partir, juste au moment où ils commencent à connaître le 
pays, totalement ignoré d'eux jusqu'alors, où il a plu à l'Administration de 
les envoyer. On ne saurait rêver régime plus stérilisant, plus amollis- 
sant : les réels eflorts accomplis par les médecins coloniaux ne donnent 
que des résultats très insuffisants, car les meilleures volontés, soumises 
à un tel régime, finissent par se lasser. 

Que ce régime ait pu paraître nécessaire à un certain moment, je veux 
bien l’admettre, encore que je n'en comprenne pas laraison, même au 
point de vue administratif. Il est maintenant assez établi que les méde- 
cins coloniaux ne sont pas de simples fonctionnaires de l’ordre médical, 
mais leurs connaissances scientifiques sont assez solides pour qu'ils puis- 
sent contribuer d’une façon sérieuse au progrès de la science. Ils sont 
animés d'une ardeur à laquelle je me plais à rendre hommage, mais ils 
ne peuvent utilement la mettre en œuvre qu’à la condition de faire un 

(1) Archives de Parasitologie, X, p. 298 et 470, 1906. 


(2) R. BLancraRD, La médecine coloniale. Archives de Parasitologie, IX, p. 95- 
121, 1904; cf. p. 120. 


DAS NOTES ET INFORMATIONS 


séjour prolongé dans une même contrée. Leur désir est conforme à ces 


considérations; je le sais, car j'ai maintes fois recueilli leurs doléances. 
Quand donc l'administration les entendra-t-elle ? 

Or, il est intéressant de noter (je l’ignorais à l’époque) que les deside- 
rata formulés dans les deux vœux indiqués ci-dessus se trouvent déjà 
réalisés au Portugal. 

Les médécins coloniaux sont, depuis longtemps déjà, répartis en cinq 
cadres : 1° Cap Vert; et Guinée; 2° Angola, Säo Thomé et Principe; 3° Mo- 
çambique et Lourenço Marques; 4 Inde, avec une petite École de méde- 
cine à Goa, pour les métis et les indigènes ; 5° Macao. Les médecins affec- 
tés à l’un ou l’autre de ces cadres y accomplissent toute leur carrière ; 
il est tout à fait exceptionnel qu’ils puissent passer d'un cadre à l’autre. 

Le Portugal possède aussi des laboratoires coloniaux de Parasitologie à 
Saint-Paul de Loanda, Säo Thomé et Säo Thiago (Cap Vert); on va pro- 
chainement en créer un autre à Macao. Sauf le premier, qui existait 
avant la création de l’École de médecine tropicale de Lisbonne, tous ces 
laboratoires sont ou seront dirigés par des médecins coloniaux ayant le 
diplôme de cette École. — R. BL. 


École de Médecine tropicale de Bruxelles.— L'État Indépendant du 
Congo a fondé récemment à Bruxelles une École de médecine tropicale, 
aux besoins de laquelle il pourvoit entièrement. Les cours théoriques 
et pratiques se font à l’ancien Observatoire, le cours clinique à la Villa 
coloniale de Watermael, où l'École dispose de 17 lits, dont une dizaine 
sont ordinairement occupés. 

Le règlement et l'emploi du temps ont été établis comme suit : 

1° Il y aura trois sessions annuelles, de deux mois et demi chacune, 
savoir : 1” octobre-15 décembre; 1* janvier-15 mars; 1% mai-15 juillet. 

2° Au commencement de chaque session, les heures des cours et clini- 
ques seront affichées dans les locaux de l'École, place Quetelet (ancien 
Observatoire). 

3° La présence aux cours et cliniques est obligatoire. Toute absence 
doit être justifiée par une lettre adressée au Professeur donnant la leçon 
et, autant que possible, en temps utile pour parvenir avant la fin de la 
Séance. 

4° Les élèves malades devront faire constater leur état de santé par M. 
le D' Van CamPENHouT, demeurant rue Marie-Thérese, 45. S'il y a lieu, 
ce médecin délivrera une constatation aux malades. 

9° Les élèves sont tenus de donner leur adresse dès le premier jour de 
la session : 1° aux bureaux du personnel de l’État indépendant du Congo, 
10, rue Bréderode; 2° à M. le D' VAN CAMPENHOUT, au siège de l'École. 

6° Certaines séances pourront être consacrées par les Professeurs à des 
examens sur les cours ou parties de cours. 

1° Chaque élève devra fournir, pendant la durée de la session, des 
travaux ou rapports dont l’objet sera indiqué par le professeur d'hygiène. 


7 


NOTES ET INFORMATIONS 529 


8° À la fin de chaque session, les élèves subiront un examen sur les 
branches enseignées. 

9° L'élève est rendu responsable de toute dégradation survenue aux 
instruments qui lui sont confiés. 

10° Toutes demandes relatives à l'École doivent être adressées à M. 
le D' VAN CAMPENHOUT. 


EMPLOI DU TEMPS 


MATIN APRÈS-MIDI 
| 8 1/2 à 10 Clinique. de à 
Lundi ' 4 à 5 1/2 Zoologie médicale. 
0 à 111/2 | Travaux pratiques. 
Mardi 9 1/2 à 11 Hygiène. 2 à 4 Pathologie. 
: Travaux Examen des malades 
Mercredi |10 à 12 1/2 Que 
de laboratoire. et rapports. 
Jeudi 10 à 12 1 ee 4 à 5 1/2 | Zoologi édical 
eudi à 12 1/2 AN à 5 1/2 oologie médicale. 
Ste 81/2 à 10 Clinique. Re OS . 
; j a 
re lg 11:/2 | Travaux pratiques 7e P00IOBICrMEMERe 
S di |HOà121 ie 2aà4 Pathologi 
HET ue de laboratoire. Ç USE 


La 1‘* session s’est ouverte le 1” octobre 1906; elle a compté sept 
élèves. La seconde, ouverte le 1° janvier 1907, en a compté six; pour 
la troisième, qui doit commencer le 1° mai, sept élèves sont déjà inscrits 
(24 avril). Ces élèves sont de nationalités diverses; on y trouve des 
Belges, des Italiens, des Norvégiens et un Anglais. 

Les élèves ayant contracté un engagement envers l'État du Congo ne 
paient aucun minerval; ils reçoivent même une indemnité de séjour. Les 
élèves libres ne sont admis qu'autant qu'il y a des places disponibles; ils 
payent un minerval de 200 fr., qui leur est remboursé en cas d'engagement 
ultérieur. 

Le corps enseignant comprend quatre professeurs : 

M. FirkeT, professeur à l’Université de Liége. — Pathologie exotique 


530 NOTES ET INFORMATIONS 


(cours exclusivement théorique) : # heures par semaine, soit 44 heures 
pour 11 semaines. 

M. JaAcQUÉ, sous-directeur de l’Institut sérothérapique de Bruxelles. — 
Direction des travaux pratiques : théorie, 2 heures par semaine, soit 22 
heures pour 11 semaines; pratique, 5 heures par semaine, soit 55 heures 
pour 11 semaines. 

M. SEVERIN, conservateur au Musée royal d'histoire naturelle.— Ento- 
mologie théorique et pratique : théorie, 2 heures par semaine, soit 22 
heures pour 11 semaines; pratique, 2heures et demie par semaine, soit 27 
heures et demie pour 11 semaines. 

M. Van CamPpENHouT. — Hygiène et clinique : hygiène (théorie), une 
heure et demie par semaine, soit 17 heures pour 11 semaines; clinique, 
4 heures par semaine, soit 44 heures pour 11 semaines. 

Au total, 231 heures et demie de cours, travaux pratiques et démons- 
trations cliniques, réparties sur 11 semaines. 

Les élèves sont obligés de faire, sous la direction du professeur de 
clinique, des travaux sur tel sujet d'hygiène ou de clinique qui leur sera 
désigné. 

Les malades admis à la clinique proviennent des pays tropicaux, à 
l'exclusion de tous autres. A la date du 24 avril, on y comptait deux 
cas de trypanosomose, un cas d'abcès du foie, deux cas de dysenterie, 
un cas de polynévrite paludéenne, deux cas d'anémie paludéenne, un 
cas d’hématurie vraie (bilharziose ?) et un cas de cure radicale de hernie 
chez un convalescent d’anémie. 


2.2 ee 


Le « Dutton Memorial »; une nouvelle chaire à l’Ecole de Médecine tro- 
picale de Liverpool. — En France, quand meurt un savant illustre, on 
lui élève un buste dans la cour de son hôpital ou dans le grand Hall de 
l'Ecole où il enseignait. En Allemagne et en Italie, pensée plus touchante, 
ses élèves et ses amis publient un livre auquel chacun apporte comme 
collaboration un travail scientifique personnel : le nom de celui à qui 
l’on veut rendre hommage devient ainsi le titre inoubliable d’un recueil 
. de travaux des plus intéressants, recueil digne d'occuper une place d’hon- 
neur dans toutes les bibliothèques scientifiques. En Angleterre, ou rap- 
pelle souvent le souvenir d'un mort en attachant son nom à une fon- 
dation d'intérêt publique, bibliothèque, école ou hôpital, 

Fidèle à cet usage, l'Ecole de Médecine tropicale de Liverpool entre- 
prend de fonder en souvenir de Joseph Everett Durron, une chaire de 
«recherches de pathologie tropicale ». Elle ne peut rendre un plus bel 
hommage au jeune savant mort à 29 ans pour cette science qui lui doit tant. 

Durron avait fait, pour le compte de l'Ecole de Liverpool, trois expé- 
ditions scientifiques en Nigeria, en Gambie et en Sénégambie, expéditions 
dont les résultats furent des plus importants, spécialement en ce qui 
concerne lalutte contre le paludisme. Au cours de l’une d'elles, il découvrit 


NOTES ET INFORMATIONS 531 


et décrivit le Trypanosoma gambiense, qui cause la maladie du sommeil. 
Un quatrième voyage le conduisit au Congo, où il allait étudier la (fièvre 
des Tiques » (Tick fever) : il mourut de cette maladie, à Kasongo, dans 
l'Afrique centrale, mais non sans avoir reconnu qu’elle était causée par 
un Spirochète qui vit dans le sang et auquel son nom fut ultérieurement 
attribué: Spirochæta Duttonri (Novy et Knap, 1906). 

L'Ecole de médecine tropicale de Liverpool a besoin de 250.000 francs 
pour fonder la chaire projetée et subvenir à ses besoins. Elle demande 
cette somme à une souscription publique, c’est-à-dire aux généreux 
donateurs dont les largesses lui ont déjà permis d'accomplir des mer- 
veilles. Elle envoie à tous ceux qu'elle croit susceptibles de contribuer à 
son œuvre une courte circulaire dans laquelle, après avoir retracé la 
carrière de Durrow, elle rappelle en quelques lignes les immenses progrès 
accomplis par la médecine et l'hygiène tropicales depuis quinze ans, c’est- 
à-dire depuis qu'on s’est attaqué résolument à l'étude de la Parasitologie : 

A Ismailia, ville de 6.000 habitants, presque tous employés du canal de 
Suez, il y avait 2.250 cas de paludisme en 1900 et 2.000 en 1901. En 
1903, on commence vigoureusement la lutte contre les Moustiques et la 
morbidité tombe à 214 cas, puis à 90 en 1904 et à 37 en 1905 ; 

La Havane avait 1385 cas de fièvre jaune en 1896, 745 en 1897 et 302 en 
1900. Les Américains appliquent alors d'énergiques mesures pour la des- 
truction des Moustiques et on ne relève plus que 5 cas en 1901 et pas un 
seul en 1902 et 1903. 

En octobre 1884, la Compagnie française du canal de Panama avait, 
sur 19.000 ouvriers, 84 cas de fièvre jaune et 21 décès. En octobre 1905, 
l'entreprise américaine ne compte pas un seul cas sur ses 22.000 em- 
ployés. Quelle économie de vies humaines et d'argent! 

L'Ecole de Liverpool trouvera les 250.000 francs qu'elle demande: elle 
trouvera bien plus encore, quand cela lui sera nécessaire. 

En France, à Paris, il existe un seul laboratoire de Parasitologie, auquel 
on alloue 3500 francs par an et un Institut de Médecine coloniale, qui 
fait de bonne besogne, mais dont les moyens financiers sont ridicu- 
lement limités. Le gouvernement ne s'intéresse pas aux questions d'hy- 
giène et de médecine tropicales et les particuliers non plus. Aussi, la 
fièvre jaune, chassée de Cuba, s’est-elle réfugiée depuis deux ans au Sé- 
négal et le paludisme, expulsé de Suez, colonise-t-il à son aise Mada- 
gascar. — Marc BLATIN. 


École de Médecine tropicale de Londres. — L'Ecole en est actuellement 
à sa sixième année d'existence. Une nouvelle session vient de s'ouvrir 
avec 38 élèves, sous une forme solennelle qui sera désormais renouvelée 
chaque année et que justifie pleinement le succès toujours croissant de 
cette utile et florissante institutiou. Jusqu'à ce jour, l'Ecole a donné 
l'instruction théorique et pratique, relative aux maladies et à l'hygiène 
des pays chauds, à plus de 600 docteurs en médecine, appartenant pour 


532 NOTES ET INFORMATIONS 


la plupart à la marine et au service médical des colonies anglaises, mais 
parmi lesquels on compte aussi un certain nombre d'étrangers. 

L'Ecole s’est agrandie considérablement par la construction de nouvelles 
salles d'hôpital et de nouveaux laboratoires, dont la disposition confor- 
table et pratique peut servir de modèle aux établissements similaires. 
Maintenant, grâce aux importantes libéralités dont elle a bénéficié, son 
installation est suffisante et répond à tous les besoins actuels; elle a donc 
pu recevoir dignement, non seulement les médecins, mais aussi les dames 
et hauts personnages du commerce, de la science et de l'administration 
qui s'intéressent aux questions coloniales, et les convier à une conférence 
d'un haut intérêt, faite par le colonel Mac Lrop, de l’armée des Indes, 
ancien médecin du roi, actuellement Doyen de l'Ecole. 

Le soir, maîtres et élèves se réunissaient au Cecil Hotel en un banquet 
savoureux, auquel étaient conviés également diverses autorités et les 
Mécènes que suscite en Angleterre toute œuvre d'intérêt général et 
patriotique. Une invitation spéciale avait été adressée aussi au professeur 
R. BLANCHARD, fondateur de l'Institut de Médecine coloniale de Paris. 

Sir Wm Hood TREACHER, ancien gouverneur des colonies anglaises, 
présidait en l’absence du duc de MarLBoRoUGH. Après le toast au roi, le 
président a bu à la prospérité de l'Ecole de Médecine tropicale et de l'Ecole 
de Médecine clinique, tout récemment créée, ces deux Ecoles étant sous 
le patronage de la bienfaisante et puissante Société de l'Hôpital des marins: 

Sir Patrick MaAxson, membre de la Société royale et membre associé de 
l’Académie de Médecine de Paris, répond au nom de la première de ces 
institutions dont, avec l’ancien ministre sir J. CHAMBEREAIN, il a été le 
fondateur. Avec la grande autorité que lui donnent ses travaux scientifi- 
ques et sa haute valeur morale, il expose l'œuvre accomplie par l'Ecole 
de Médecine tropicale, non seulement comme éducatrice, mais aussi 
comme foyer de recherches scientifiques. Il montre ce qu'il reste à faire, 
les questions capitales qu'il est urgent de résoudre, les enseignements 
qu'il importe de créer ou de perfectionner et il conclut, comme l'avait 
déjà fait le colonel Mac Leon, à la nécessité de donner de nouvelles som- 
mes à l'Ecole qui sait en faire un si bon usage. L'Ecole a reçu jusqu’à 
ce jour, de diverses provenances et, notamment, de riches particuliers, 
une somme totale de 40,000 liv. st. (1,000,000 de francs); une somme de 
60,000 liv. st. (1,500,000 francs) lui est encore nécessaire ; il est certain 
que cette somme considérable sera promptement souscrite. 

Les applaudissements chaleureux qui accueillent le discours de sir 
Parrick démontrent que ses paroles ont été comprises et qu'il n'adresse 
pas un inutile appel à la générosité toujours en éveil de ses concitoyens. 
Aussi bien, il a été le héros de la fête d'hier. Tous ont tenu à lui témoi- 
gner de la facon la plus claire leur reconnaissance pour les services con- 
sidérables qu'il a rendus à la métropoie et aux colonies, par la création 
de l'Ecole de Médecine tropicale actuellement si florissante, ainsi que par 
les découvertes qui lui ont valu une notoriété universelle et par l'impul- 


NOTES ET INFORMATIONS 533 


sion si active qu'il a su donner aux études portant sur les maladies des 
pays chauds. 

Après divers autres toasts, le professeur R. BLANCHARD prend la parole 
Dans un discours très applaudi, il dit en quelle haute estime on tient à 
l'étranger l'Ecole de Médecine tropicale et les travaux accomplis par 
elle. En Angleterre comme en France, on enseigne depuis longtemps, 
d'une façon plus ou moins complète, l’épidémiologie et l'hygiène des pays 
chauds dans les Ecoles de Médecine navale ou militaire. Les progrès de 
la colonisation, en fixant dans les pays nouveaux des colons, des indus- 
triels ou des commerçants qui ne sont point soumis à l'autorité militaire 
ou navale, ont créé l'obligation de fournir à ces populations nouvelles 
des médecins civils qui fussent instruits des maladies qui sévissent parmi 
elles. De là l’idée d'organiser un enseignement nouveau; de là la création 
de l'Ecole de Médecine tropicale de Londres. Des Ecoles ou Instituts ana- 
logues ont pris naissance dans différents pays et tel est le cas notamment 
pour l'Institut de Médecine coloniale de Paris. Mais il est juste de dire 
que ces créations se sont inspirées de l'Ecole de Médecine tropicale de 
Londres. C'est donc dans un sentiment de juste déférence que le profes- 
seur R. BLANCHARD apporte à l'Ecole de Londres le salut et l'hommage de 
l'Institut de Médecine coloniale. 

Bien que plus jeune de deux. années et surtout bien que disposant de 
moyens extraordinairement réduits, puisque, en dehors d'une généreuse 
subvention du Gouvernement général de l’Indo-Chine, il n’a rencontré 
jusqu’à ce jour que l'indifférence la plus complète, l'Institut de Médecine 
coloniale a fait, lui aussi, de la bonne besogne. Quand les pouvoirs publics 
et les colonies voudront bien connaître et apprécier l'œuvre qu'il a déjà 
accomplie et ce dont il est capable, et lui attribuer quelques subventions, 
il n'est pas douteux que son activité scientifique ne devienne plus intense 
et qu'il ne contribue, lui aussi, dans une plus large mesure à l'avancement 
de nos connaissances. Les colonies, pour le bien desquelles il travaille, 
ne peuvent lui marchander plus longtemps leur concours pécuniaire, si 
restreint soit-il, et les Mécènes, qui ne manquent pas en France, voudront 
témoigner leur intérêt à une institution qui n’a d'autre but que de travailler 
au progrès de la science et à l'amélioration des conditions sanitaires 
contre lesquelles ont à lutter ceux dé nos compatriotes qui s’en vont met- 
tre en valeur les immenses territoires de l'empire colonial français. 

L'inspecteur général H. M. Ezzrs, directeur général du corps de santé 
de la marine, et le chirurgien général A. M. BrANroor, président du Conseil 
médical du ministère de l'Inde, prennent ensuite la parole. Il nous suffit 
de citer leurs noms pour montrer quelle importance on attache en haut 
lieu à l'Ecole de Médecine tropicale. Les lecteurs de la Dépêche Coloniale, 
au surplus, connaissent bien les brillantes découvertes qui en sont sorties 
relativement au paludisme, à la filariose, au kala-azar et à nombre d'’au- 
tres maladies qui, dans les pays chauds, déciment indigènes et Européens. 
— R. W. Frencx, Dépêche Coloniale du 12 octobre 1906. 


Ga, 0 NOTES ET IKFORMATIONS 


Une chaire de Parasitologie à la Faculté de Médecine de Lyon. — A 
l'exemple de la Faculté de Médecine de Paris, la Faculté de Lyon a émis 
un vœu en faveur de la transformation de la chaire d'Histoire Naturelle 
médicale en une chaire de Parasitologie et Histoire Naturelle médicale. 
Un décret en date du 26 mars 1907 a rendu officielle cette transformation. 
M le professeur GurarT (pl. X) prend donc le titre de Professeur de 
Parasitologie. 


Une nouvelle chaire à l'École de Médecine tropicale de Londres. — 
Comme il a été dit plus haut, l'École de Médecine tropicale de Londres a 
fondé récemment une chaire de Protozoologie et une chaire d'Helmin- 
thologie. Voici maintenant qu'elle se prépare à fonder une chaire con- 
sacrée à l'étude des animaux piqueurs, suceurs de sang et capables 
d'inoculer des maladies parasitaires ou infectieuses. Lord ELGin, 
ministre des colonies, a garanti la somme de 1000 livres nécessaire au 
maintien de la nouvelle chaire pendant trois ans. Passé ce délai, on compte 
sur la générosité publique pour assurer la permanence de cette utile 
création, et l’on sait qu'en Angleterre un pareil appel est toujours entendu. 

La chaire nouvelle, pour laquelle une désignation convenable n'a pas 
encore été trouvée, répond à un vœu que j'ai fait voter par divers Congrès 
scientifiques, sans que les pouvoirs publics aient d’ailleurs rien fait pour 
le réaliser. Là-bas, on agit, et l'initiative éclairée de sir Patrick MansoN 
se fait encore sentir en cette circonstance. — R. Br. 


Est-ce la fin de l'I M. G.? — Le 4 juillet 1907, M. le Doyen DEBOvE a 
communiqué au Conseil de la Faculté de Médecine de Paris une lettre du 
Gouverneur général de l’Indo-Chine, annonçant que le crédit de 30.000 
francs, inscrit depuis cinq années au budget de la colonie, en faveur de 
l’Institut de Médecine Coloniale de Paris (1. M. C.) était désormais sup- 
primé. 

Est-ce la fin de l'I. M. C.? Quand je rendis visite, en compagnie de 
M. BrouaARpneL, alors Doyen, à M. Paul DouMER, alors Gouverneur général 
de l'Indo-Chine, l'éminent homme d'Etat fut très attentif à nos explica- 
tions; puis, pour nous prouver à quel point il jugeait importante la fon- 
dation de II. M. C.. il nous déclara spontanément qu'il inscrirait celui-ci 
à son budget pour une période de cinq années et pour une somme de 
30.000 francs par an (1). Ainsi fut fait : grâce à cette intelligente géné- 
rosité, l'I.M.C. a traversé sans encombre les cinq premières années de 
son existence. Mais nous voici arrivés à la fin de cette période bienfai- 
sante et l'existence de l'Institut se trouve gravement compromise. 

Chacun sait que cette utile institution a été fondée par mes soins, mal- 
gré des difficultés qui, deux années durant, en ont retardé l’éclosion et 


(1) R. BLancaarp, L'Institut de Médecine coloniale; histoire de sa fondation. 
Archives de Parasilologie, VI, p. 586-603, 1902; cf. p. 593. 


Archives de Parasitologie, XI, 1907. PIE 


Dr JULES GUIART 


Professeur de Parasitologie à la Faculté de Médecine de Lyon. 


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NOTES ET INFORMATIONS De 


dont la moindre n’a pas été l’inertie, le plus décourageant des obstacles. La 
création une fois réalisée, M. BROUARDEL, alors descendu du décanat, se fit 
attribuer la direction de l’'I. M. C. On pouvait espérer que les loisirs dont 
il disposait alors lui permettraient de prouver sa sollicitude à la nouvelle 
institution en lui attirant des subsides, en faisant pour elle une propagande 
féconde, en parant à ses conditions précaires d'existence, en intéressant 
à son sort les pouvoirs publics, l'Université, les diverses colonies et pays 
de protectorat, les grandes sociétés de colonisation, de navigation, de ban- 
que et d'affaires coloniales, etc., ainsi que les Mécènes dont notre pays 
n'est pas encore totalement dépourvu et qui, trop souvent, ne savent pas 
employer leur argent de la façon la plus judicieuse et la plus profitable à 
l'intérêt général. 

Par ses vastes relations, sa grande notoriété, les hautes fonctions dont il 
avaitété si longtemps investi, M. BRouARDEL eût pu faire tout cela; lui seul 
avait qualité pour le faire. Or, on ne saurait citer la moindre subvention 
acquise par ses soins à l’I.M.C., pas même le moindre appui moral gagné 
à l'institution. Les Anglais, qui suivaient avec intérêt le développement de 
l'I.M.C., dans lequel ils savaient bien n'avoir pas un rival, mais un émule, 
auquel d’ailleurs ils ont très courtoisement témoigné en toute circons- 
tance leur amicale sympathie, n'ont pas tardé à constater combien était 
stérile une telle direction et ils n’ont pas craint de nous le dire (1). Leur 
appréciation quelque peu sévère, mais dont on ne saurait contester la jus- 
tesse, est demeurée vraie jusqu’au bout. 

A la mort du professeur BRoUARDEL, l'Institut de Médecine coloniale 
n’était donc pas plus avancé que le jour même de sa fondation; il était 
même moins avancé, puisqu'il avait derrière lui quatre années entière- 
ment perdues, au point de vue financier s'entend, et n'avait plus l’exis- 
tence assurée que pour un an. 

Cette année est maintenant écoulée, et voici que l'existence même de 
l’Institut est mise en question! Les services considérables qu’il a rendus 
ne sont pourtant pas contestables ; la fermeture de cet établissement, qui 
ne lui a jamais rien coûté et qui, en revanche, lui a rapporté de l'honneur 
et de la considération, serait un amoindrissement pour la Faculté de Mé- 
decine de Paris. 

Depuis la mort de BROUARDEL, les choses sont restées en l’état ou elles 
se trouvaient alors : la situation matérielle de l'I.M.C. n’a pas changé; 
c’est dire qu'en fait elle a empiré. Il a été vaguement question d'élire 
un nouveau Directeur, mais aussitôt des compétitions, tout au moins des 
mauvais vouloirs se sont affirmés et rien n'a été fait. La situation actuelle 
est donc des plus critiques. 

Et pourtant, il n’est pas malaisé de relever l'I.M.C. de la ruine qui le 
menace. Je lui connais des sympathies auxquelles on n’a jamais voulu faire 
appel; il compte assez d'amis dévoués, son rôle utile, l'excellence des 


(1) La Médecine tropicale en France. Archives de Parasitologie, VIII, p. 475, 
1904. 


536 NOTES ET INFORMATIONS 


résultats acquis (1) sont assez appréciés pour qu'on puisse espérer le tirer 
d'affaire. Il a des réserves suffisantes pour vivre un ou deux ans; c’est 
plus qu'il n'en faut pour créer un mouvement d'opinion en sa faveur et 
pour constituer le Comité de patronage que, dès le début, j'avais considéré 
comme indispensable, mais dont, je ne sais pourquoi, on a préféré se 
passer. C’est, j'en suis plus que jamais convaincu, dans la constitution 
d'un tel Comité que se trouve le salut. — R. BL. 


Hommage au professeur F. S. Monticelli. — Le 22 décembre 1906, a été 
célébré le centenaire de la fondation de la chaire de zoologie de l'Univer- 
sité de Naples. En cette circonstance solennelle, le professeur MoNTICELLI, 


Le Professeur F. S. MoNTICELLI. 


titulaire actuel de la chaire, a reçu l'hommage d'une foule de savants et 
de Sociétés scientifiques. Il m'a été particulièrement agréable d'exprimer 
mes plus cordiales félicitations à cet ami de longue date, à ce savantillus- 
tre qui honore si hautement la Parasitologie. A cet effet, je lui ai fait 
remettre une adresse dont nous donnons une reproduction (pl. VII); 
l'original portait ma signature et celle de tous mes collaborateurs et 
élèves. — R. BL. 
(4) Cf. plus haut, p. 515. 


Archives de Parasitologie, XI, 1907. 


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NOTES ET INFORMATIONS 531 


La lutte contre les maladies infectieuses (X, 300). — Maladie du som- 
meil. — Du 10 au 15 juin 1907, doit se réunir à Londres la huitième: 
Conférence internationale de la Croix-Rouge. Au nombre des questions 
soumises à la discussion figure la suivante, présentée par l'Association 
congolaise et africaine de la Croix-Rouge : 

1° Types d'établissements hospitaliers et de lazarets pour personnes 
atteintes de trypanosomose. 

2° Emplacement de ces établissements. 

A. — Faut-il les édifier en région indemne ou en région infectée ? 

B. — Quels sont les endroits à choisir de préférence? Quelles mesures 
convient-il de prendre pour les lazarets et leurs environs, au point de 
vue du débroussement, du ravitaillement en eau (boisson, bain, etc.) et 
d'éloignement des agglomérations ? 

3° Y a-t-il avantage à faire la séparation des malades en diverses caté- 
gories, suivant la gravité de leur état? 

: 4° Quels seront les infirmiers à employer”? Choix d'infirmiers parmi les 
malades les moins gravement atteints. 

Tuberculose. — La lutte contre la tuberculose continue à revêtir les 
formes les plus diverses. Nous n’en donnerons plus que quelques exem- 
ples, pour ne pas insister outre mesure sur ce point. 

La Compagnie des chemins de fer du sud de l'Autriche, dont nous 
avons déjà signalé l’active et intelligente initiative (X, 301), multiplie les 
affiches polyglottes, en allemand, en italien et en slovène. Voici la trans- 


cription d'une affiche que nous avons copiée en cours de route, en sep- 
tembre 1905 : 


K. K. PRIV. SÜDBAHN-GESELLSCHAFT 


Zur FÔRDERUNG DER 
ÔFFENTLICHEN GESUNDHEITSPFLEGE 
WIRD DRINGEND ERSUCHT, 
IN DEN BAHNHOFRÂUMEN, AUF DEN BAHNSTEIGEN UND TREPPEN, 
GLEICHWIE IN DEN ÉISENBAHNWAGEN 
DAS AUSSPUCKEN ZU UNTERLASSEN. 


La même formule se trouve affichée, en langues tchèque et allemande, 
dans toutes les gares de la Bohême; la disposition typographique en est 
simplement différente. 

En plus d’un endroit, on fait la guerre à la poussière soulevée par la 
traine des robes et diverses municipalités ont enjoint aux dames de 
porter des robes courtes. L'administration de l'établissement thermal 
d'Abbazia, dans le sud de l'Autriche. sans se préoccuper de déplaire à ses 


Archives de Parasitologie, XI, n° 3, 1907. 35 


538 NOTES ET INFORMATIONS 


jolies clientes, a pris une décision toute semblable. A toutes les entrées 
du jardin se dressent des plaques en fonte portant cette inscription : 


Die P. T. DAMEN WERDEN 
HIERMIT HÔFLICHST ERSUCHT, 
DER GESUNDHEITSSCH À DLICHEN 
STAUBENTWICKLUNG WEGEN, 
AUF DER PROMENADE KEINE 
SCHLEPPKLEIDER ZU TRAGEN 

Die Cur-CoMMIisSIoN. 


Toutes les dames se conforment à cette invitation. N'est-ce pas pour les 
élégantes Viennoises une occasion inespérée de faire admirer leurs fines 
attaches et de laisser soupçonner la rondeur savoureuse de leurs... 
gastrocnémiens ? 

Plus récemment, la municipalité de Nordhausen (Hanovre) a pris un 
arrêté punissant d’une amende de 30 marks toute personne portant une 
robe à traîne dans la rue. 


Les Francais les plus illustres du XIX'‘ siècle. — Le Petit Parisien. a 
demandé à ses lecteurs de bien vouloir indiquer quels étaient, à leur 
avis, Les dix Français les plus illustres ayant vécu au dix-neuvième siècle. 

Ce concours original comportait 500.000 francs de prix, dont un de 
100.000 francs en espèces. Plus de 1.500.000 personnes ont répondu à la 
question; {e dépouillement des feuilles de concours a donné les résul- 
tats suivants : 


Pasteur er RE 1958 225 VOIX 
Victor A6 PEER Ne 1027 MORE 
Gambetta tas M TETE TO SION 
Napoléon ERP EN ARE RER ETS OSARE 
TRIeRS AN EE ANTENNES OASIS 
Pazare Carnot MERE RES 950.772 — 
CUTLE ER ANSE CENT PR ee 851.107 — 
DUMAS pere PARENT RE 850.602 — 
Docteur RDA MEME EN 603.941 — 
Panmentienr M MERCI 498.863 — 
Le Cysticercus cellulosae chez les indigènes d'Angola. — BaMBALLA, 


négresse de 6 à 7 ans, originaire de Dondo, meurt de la maladie du som- 
meil à l'hôpital Maria Pia, à Saint-Paul de Loanda. L'autopsie montre 
qu'elle était atteinte de cysticercose généralisée. 

«Nous avons trouvé dans le cerveau, écrivent Bettencourt et ses collabo- 
rateurs (1), un grand nombre de kystes; ceux-ci envahissaient, du reste, 


(1) A Berrexcourr, A. Kopxe, G. DE REzENDE et C. MENDEs, La maladie du 
sommieil. Lisbonne, in-4° de 280 p. et 24 pl., 1903; cf. p. 58 et 118-120. 


NOTES ET INFORMATIONS D39 


l'organisme entier, même le myocarde. Dans le jéjunum il y avait un 
Tænia très grêle, réduit à un petit nombre d'anneaux. » 

Revenant plus loin sur ce même cas, les quatre observateurs portugais 
signalent encore la présence des kystes dans le cerveau, le cœur, le pou- 
mon droit et surtout les muscles. « L'intestin gréle contient... un filament 
qui mesure 75 millimètres de longueur, qui est un Tænia au début de 
son développement. » 

Pendant la vie, on avait observé dans les selles diarrhéiques, sans pré- 
ciser davantage sa nature, € uu œuf elliptique, entouré par une mem- 
brane renfermant une masse protoplasmique en voie de segmentation. » 
A l’autopsie, on examine les matières fécales, sans y trouver ni Uncinaires, 
ni œufs. 

Que sont ces kystes et ce Ténia? La question n'était pas sans intérêt. 
car nous sommes évidemment bien loin de connaitre tous les Helminthes 
des nègres africains. Dans l'espoir de la trancher, j'ai prié le D' A. Bet- 
tencourt, directeur de l'Institut bactériologique Camara Pestana, à Lis- 
bonne, de m'envoyer quelques kystes etle Ténia. Ila eu la grande amabi- 
lité de répondre à ma demande et de m'envoyer un fragment de cerveau 
et un fragment de myocarde, conservés dans la liqueur de Kaiserling et 
contenant chacun plusieurs kystes; quant au Ténia, il avait été laissé en 
Afrique ou perdu pendant le voyage d'Angola au Portugal. 


D'après Leuckarr | D'après Raizzier | Cas d ANGOLA 
a ——— RE RC LT 
Grand Petit Grand Petit | Grand | Grand 
crochet | crochet | crochet | crochet ferochet crochet 


= —— 
Longueur totale........ 67 à 175110 à 130[160 à 1S0!110.a 1401 186 125,4 
Distance rectiligne de 
la pointe au sommet 
de la garde ou racine 


postérieure. ......... 90 à 100! 64 à 70 87,4 | 68,4 
Distance de la garde à 

l'extrémité du man- 

che ou racine anté- 

DCR CAE ES ares 90 à 100! 64 à 70 95 97 


Les kystes sont des Cysticerques, qu'il a été facile d'identifier à Cysti- 
cercus cellulosae. Le rostre porte 28 crochets allernativement grands et 
petits ; leur forme et leurs dimensions sont celles des crochets de Tænia 
solium, en tenant compte des variations ordinaires chez cette espèce. Le 
tabeau suivant démontre d'ailleurs cette identilé; les dimensions y sont 
indiquées en ». 

Cyslicercus cellulosae est fréquent chez le Porc à la côte occidentale 
d'Afrique, spécialement au Congo. Il n'y avait pas encore étésignalé dans 
l'espèce humaine. 


D40 NOTES ET INFORMATIONS 


Les deux fragments de cœur et de cerveau reçus du D' Bettencourt ont 
été conservés au Laboratoire de Parasitolologie (collection R. Blanchard, 
n° 916). — R. Br. 


Prix Adolphe Monbinne. — Dans sa séance générale annuelle, l’Aca- 
démie de Médecine a décerné le prix Monbinne pour 1906 à M. le 
D'E. Brumpr, chef des travaux pratiques de Parasitologie à la Faculté 
de Médecine de Paris, pour sa mission scientifique au Congo français, 
en 1903, à l'effet d'y étudier la maladie du sommeil. 


Souscription universelle pour une statue de Lamarck. — Nous sommes 
très heureux de signaler à l'attention de nos lecteurs la belle initiative 
qu'avec l'approbation de M. Brianp, ministre de l'Instruction publique, 
viennent de prendre les professeurs du Muséum national d'histoire natu- 
relle pour réunir l'argent nécessaire à l'érection d’une statue à LAMARCK, 
cet immortel naturaliste et philosophe qui est une de nos plus belles 
gloires françaises. Tous les pays disséminés à la surface de notre planète 
ont en effet contracté une véritable dette de reconnaissance envers le pen- 
seur qui, le premier, a su appliquer d'une façon concrète la conception de 
l'évelution à l'étude des phénomènes naturels. 

Longtemps avant que Darwix n’eût expliqué l'existence des espèces 
par le jeu de la sélection naturelle et rendu compte ainsi de la dispersion 
et la vie terrestre, LAMARCK avait eu le sentiment profond de son unité 
et montré, dans la diversité de ses réalisations, une seule matière vivante 
se transiormant au cours des âges en nouvelles formes organiques. Ainsi, 
l’auteur de la Philosophie zoologique, du Système des animaux sans ver- 
tèbres, de la Flore française, des Fossiles des environs de Paris, du Sys- 
tème des connaissances positives, de l’Hydrogéologie, etc., par une vue 
d'ensemble véritablement géniale, déterminait tout le travail que es natu- 
ralistes ont accompli depuis plus d'un siècle. 

Cependant, tandis que DARwIN repose à côté de SHAKESPEARE dans: 
l’abbaye de Westminster, ce Panthéon anglais, LAMARCK n'a pas même une 
statue chez nous. Il en aura prochainement une au Jardin des Plantes. 
L'initiative des savants professeurs du Muséum est donc l’acquittement 
d'une dette de reconnaissance. On adressera les souscriptions à 
M. le professeur L. JouBix, secrétaire du Comité, 55, rue de Buffon, Paris. 

Les Archives de Parasitologie s'inscrivent pour 20 francs. 


Prix Barbier. — L'Académie des sciences a décerné le prix Barbier 
(2000 francs) à M. Adrien Lucer, vétérinaire à Courtenay (Loiret), pour 
ses Recherches bactériclogiques sur la suppuration chez les animaux de 
l'espèce bovine et pour ses Recherches sur les Moisissures pathogènes, faites 
en collaboration avec M. le professeur COoSrANTIN. 

La plupart des travaux récompensés ainsi par l'Académie des sciences 
ont été publiés dans les Archives. 


OUVRAGES REÇUS 


Tous les ouvrages reçus sont annoncés. 


Généralités. 


Bulletin du laboratoire de bactériologie de l’Institut Pasteur de la Loire- 
Inférieure. Nantes, in-8° de 52 p., 2 pl., 2 tableaux, 1905. 

XV° Congrès international de médecine. Lisbonne, 1906. Section XVII, méde- 
cine coloniale et navale. 1‘ fascicule, in-8° de 233 p., 1906. 

Congrès de Lisbonne, 1906. Section de médecine coloniale et navale. Résumés 
el communications. Lisbonne, in-8° de 13 p., 1906. 

Exposition des Institutions el des œuvres inspirées, encouragées réalisées, 
par la province de Hainaut. Instruction. Extrail : hygiène, prévoyance. 

Frameries, in-8° de 69 p., 1905. 

R. BLaNcHarp, Accidents causés par une Graminée américaine /Stipa Nee- 
Siana). Archives de Purasilologie, X, p. 187-194, 1906. 

J. Brauzr, L’épithélioma chez les mans musulmans d'Algérie. Janus, X, 
in-8° de 4 p., 1605. 

O. CASAGRANDI et P. BaARBAGALLO. Sulla trasmissibilita dell’infezione alteridica 
per mezzo del sangue infetto. Atti Soc. per gli studi della malaria, VE, p. 39-54, 
1905. | 

A. CasreLLantr, Report of the Soysa bactériological Instituie for the year 1904 
Colombo, in-4° de 10 p., 1905. 

G. DELAMARE et LECENF, Sur la présence de cellules géantes dans les cancers 
épithéliaux. Arch. de méd. expér., XNIIT, p. 102-108, pl. 1, 1906. 

L. FEeINBERG, Die Erreger und der Bau der (reschiwulste insbesondere der 
Krebsgeschwulste. Il. Band. Mikroskopischer Atlas, Berlin, Unger, in-4 de %5 pl, 
1906. 

Fontoynontr, La médecine à Madagascar. Archires de Parasitologie, X, p. 227- 
237, 1606. 

J. A. Forpycer, A case of undetermined tropical ulceration involving the nose, 
pharynx and larynx, with histological findings. Journal of cut. diseases, in-8° 
de 12 p., 6 pl., 1906. ‘ 

M. Lesreno, La Parasitologie à Cuba. Archives de Parasitologie, X, p. 150-159, 
1906. ÿ 

M. LereBvre, Le sung. Louvain, in-8° de 86 p., 1 pl., 1904. 

B. Nocur, Ueber Schwarzwasserfieber. Verh. des deutsch. Kolomalkongresses, 
p.218-225, 4 pl. 1905: 

B. Nocur, Ueber Tropenkrankheiten im Sceverkechr. Ferh. des deutsch. Kolo- 
nialkongresses, p. 305-316, 1905. 

G. P. Praxa, Esame microscopico delle feci per la ricerca di Elminti. La Cli- 
nica veterinaria, XXIX, in-8° de 21 p., 1905. 

J. L. Sanre-Marie Dopeuir, Tuberculose el appendicite. Thèse de Paris, in-8° 
de 163 p., 1906. 

E. Scawazse, Die Entstehung der Geschwülste im Lichte der Teratologie. 
Verh. d. matur hist.-mediz UN. Veréins zu Heidelberg, VIT, p. 337-354, 1906. 

C. W. Srices, The international code of zoological nomenclature as applied to 
medicine. Hygienic laboratory, Washington, But. 1° 27%, in-8° de 50 p., 1905. 


Protozoaires 


R. Dugois, Les vacuolides. Réponse à la note de M. J. Künstler sur la consti- 
tution intime du protoplasma des Protozoaires. C, R. Soc. biol., LX, p. 526 
529, 1906. 


D42 OUVRAGES REÇUS 


F. ScaauniN\, Neuere Forschungen über die Befruchtung bei Protozoen. Ver- 
handl. d. deutsch. zool. Gesellschaft, p..16-35. pl. I, 1905. 

M.Srpcecxt, Ueber die Bedeutung des Karyosomes. Bull. Acad. sc. Craco- 
vie, classe des sc. math. et nat., p. 559-580, pl. XVI, 1905. 


Rhizopodes 


A. GaupucnEAU, Reproduction expérimentale de La dysenterie amibienne par 
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Sporozoaires. 


L. Brasir, Eleutheroschizon Duboscqi, Sporozoaire nouveau, parasite de Sco- 
loplos armiger O.F. Müller. Archives de zoo. expér. el génér.,(4), IV, p. XVII- 
XXII, 1906. 

L. Lécer, Etude sur Tæniocystis mira Léger, Grégarine métamérique. Archiv 
fur Protistenkunde, VIT, p. 307-329, pl. XII-XIIT, 1906. 

L. LéGer et O. Dusosco, L'évolution des Eccrina des Glomeris. C.R. Acad. des 
sc., in-4° de 3 p., 5 mars 1906. 

L. LéGer et E. Hesse, Sur la structure de la paroi sporale des Myxosporidies. 
C. R. Acad. des sc., in-4 de 3 p., 19 mars 1906. 

Th. Mororr, Sur l’évolution des prétendues Coccidies des Céphalopodes. C. R. 
Acad. des sc., in-4° de 3p., 12 mars 1906. 


Hémosporidies 


Suppression du paludisme à Ismailia. Note et planches. Compagnie universelle 
du canal maritime de Suez, Paris, in-8° de 30 p., 2pl., 1906. 

R. Boycr, Report lo the government of British Honduras upon the outbreak 
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out or prevent the recurrence of yellow fever. London, Waterlow, in-4° de IX- 
105 p., XII pl.. 1 carte, 1906. 

S. CorvoBA, El paräsito del paludismo y su manera de combatirlo. Rev. de la 
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L. Ducroux, Sur une Hémogrégarine de £mys leprosa. C. R. Soc. biol., LVI, p. 
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E. Duccoux, Sur une coccidiose intestinale du Bœuf en Tunisie. C. R. Soc. biol., 
LIX, p. 352-354, 1905. 

E. Duccoux, Sur une piroplasmose bacilliforme du Bœuf en Tunisie. C. R. 
. Soc. biol., LIX, p. 461-463, 1905. 

F. Fagarpo, Étiologie et prophylaxie de la fièvre jaune. Congrès de Lisbonne, 
1906, in-8°de 16 p., 1905. 

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Ed.et Et. SERGENT, Évolution des Hématozoaires de PAthene noctua. C. R. du 
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paludisme. C. R. Soc. biol., LIX, p. 499-500, 1£05. 


EN 


(0m 


OUVRAGES REÇUS D43 


Flagellés 


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Semaine inéd., in-8° de 28 p., 1906. 

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tion des maladies, in-8° de 23 p., 1906. 

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Trypanosome d’un Crapaud africain. C. R. Soc. biol., LX, p. 162-163, 1906. 

E. Brumpr, La maladie du sommeil. La Nature, XXXIV, p. 339-343, 1906. 

O. CasagRanpi e R. De Luca, Tentativi di profilassi eterapia antisifilitica coi fil- 
trati amicrobici di manifestazioni sifilitiche e con siero di Cane trattato con i 
filtrati stessi. Ann. d’ig. Sperim.,p. 49-66, 1906. 

P. Van Dune, Contribution à l'étude des trypanosomoses. Répartition des 
Trypanosomes dans les organes. Arch. de Parasitologie, X, p. 160-170, 1906. 

O. GorgeL, Sur les propriétés osmotiques des Trypanosomes. Ann.Soc. de 
méd. de Gand, LXXXVI, p. 11-18, 1906. 

F. KrzyszraLowicz et M. Siepzecxi, Contribution à l’étude de la structure et 
du cycle évolutif du Spirochæte pallida Schaud. Bull. Acad. sc. Cracovie, classe 
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F. Luxs, Trypanosoma Theileri in Transkaukasien. Archires de Parasitologie, 
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D. Popovrrcu, Les Spirochètes en pathologie humaine. Thèse de Paris, in-8° de 
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W. Scxuzze, Das Verhalten des Cytorrhyctes Luis (Siegel) in der mit Syphilis 
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Helminthologie. 


G. DesauNaIsS de GuerMarQuER, L'appendicite purasilaire. Thèse de Paris, in-8° 
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I. Goosmanorr, Helminthes intestinaux de l'Homme. Leur fréquence dans Le 
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Spolia seylanica, HT, XI, p. 463-188, pl. I-IIT, 1906. 

W. S. MarsaaLz and N.C. Gizgerr, Notes on the food and parasites of some fresh- 


044 QUVRAGES REÇUS 


water Fishes from the lakes at Madison, Wis. Appendix to the Rep. of the Com- 
missioner of fisheries to the Secretary of commerce and labor for the year 
ending june 30, 1904. Washington, p. 513-522, 1905. 


Crustacés 


H. CouriÈëRe, Sur un type nouveau de Rhizocéphale, parasite des A/pheidue. 
C. R. Acad. des SC., in-4° de 3 p., 1902. 

H. CouriëRe, Sur la morphologie interne du genre Thylacoplethus, parasite 
grégaire des Alpheidue. C.R. Acad des Sc., in-4° de 3 p., 14902. 

H. CouriÈRE, Sur un nouveau type de Rhizocéphale grégaire parasite des Alphei- 
düe (deuxième note). C. R. Soc. biol., in-8° de 2 p., 1902. 


Linguatules. 


Tarmoux, Un cas de Pentaslomum constrictum observé au Sénégal. C. R. Sec. 
biol., LIX, p. 78-80, 1905. 
(2 
Acariens 


M. Carpano, La rogna psoroptica nei Bovini della colonia Eritrea. Asmara, 
Istituto siero-vaccinogeno eritreo, in-80 de 19 p., 4905. 

F. LaniLe, Contribution à l'étude des Ixodidés de la République Argentine. 
Anales del Ministero de agricultura, W, in-8 de 166 p., 43 pl., 1905. 

PoENARU-CiPpLescu, Contributiuni la studiul scabiei in România. Rev. Spitalul, 
in-8° de 25 p., 1905. 

LI Tarcärpx, Monographie der arktischen Acariden. Inaug. Diss., Upsala, in-4° 
de 78 p., 1 pl., 1904. 


Bactériologie 


L. BaRuCHELLO 6 H. Mori, Sulla eziologia del cosi detto tifo o febbre petecchiale 
del Cavallo. Contributo allo studio della piroplasmosi equina. Rivista d'artigliera 
e genio, I, in-8° de 16 p., 2 pl., 1905. 

CALMETTE, L’assainissement des villes et les procédés modernes d'épuration des 
eaux d’égout. Revue pratique d'hygiène municipale urbaine et rurale, T, p. 293- 
332, 3 pl., 1905. ’ 

A. Cazmerre, Recherches Sur l’épuration biologique et chimique des eaux 
d’égout effectuées à l'Institut Pasteur de Lille et à la Station expérimentale de 
la Madeleine, I. Paris, Masson, in-8° de 194 p., 2 pl., 1905. 

J. CANrTACUzÈNE et S. Irimesou, Recherches Sur la maladie toxique produite 
par l’inoculation des Bacilles tuberculeux dégraissés. Congrès internat. de la 
tuberculose, Paris, in-8° de 7 p., 4905. É 

J. CanracuzëNE, Recherches sur l'infection expérimentale par les Bacilles para- 
tuberculeux (Bacilles du Timothée). Congrès internat. de la tuberculose, Paris, 
in-8° de 14 p., 1905. 

E. Dscauxxowsky und J. Kurzis, Ueber die Bereitung des trockenen Antirinder- 
pestserums. Centralblatt fur Bakteriol., Originale, XXXVI, p. 90-94, 1904. 

R. Duron», Recherches sur la motilité et les organes moteurs des Bactéries. 
Thèse de Nancy, in-8° de 191 p., 5 pl., 1905. 

Furruxa, Etablissement de principes uniformes pour l'estimation de la réac- 
tion de la tuberculine et de la malléine. VIII* Congrès internat. de méd. vétéri- 
naire à Budapest, in-8° de 24 p., 1905. 

A. Gaupucneau, Note sur l’épuration des eaux argileuses. Bull. économique de 
l’Indo-Chine, in-4 de 5 p., 1905. 

C. Gorescu, Action de l'iodure de potassium sur l'histozenèse du tubercule 
expérimental provoqué par l’inoculalion de poudres inertes. Congrès internat. 
de la tuberculose, Paris, in-8° de 5 p., 1905. 


4 UN CLOUS 6, QT + 


De RITES TE 


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_ ASSELIN et HOUZEAU, Éditeurs 


A. RAILLIET 


Professeur à l'École vétérinaire d’Alfort, Membre de l'Académie de Médecine 
à a : 


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DES ANIMAUX DOMESTIQUES 


PAR 


L.-G. NEUMANN 


Professeur à l'École vétérinaire de Toulouse 


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M. KAUFMANN 


Professeur à l'École vétérinaire d’'AJfort 


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Le Recueil de Médecine vétérinaire paraît les 15 et 20 de chaque mois 


Le numéro du 30 contient IN EXTENSO le Bulletin des séances de la Société centrale 
de Médecine vétérinaire. 


ABONNEMENT : 


Paris et Départements : 30 fr. — Union postale: 32 fr. par volume, 


Les Archives de Pur asilulogie publient des mémoires originaux écrits dans l’une ou. 
l'autre des sept langües suivantes : français, allemand, anglais, espagnol, esperanto, ita- 


lien et latin. Les auteurs doivent, autant que possible, “FOURNIR UN TEXTE DACTYLOGRAPHIÉ 


{écrit & La machine), afin de réduire les corrections au minimum. 

Ce texle doit être conforme aux règles suivantes : 

1° On appliquera strictement les règles de la Nomenclature zoologique ou botanique 
adoptées par les Congrès internationaux de zoologie et de botanique; 

2° On fera usage, tant pour les noms d' auteurs que pour les indications bibliogra= 
phiques, des abréviations adoptées par ces mêmes Congrès ou par le Zoo Record 
de Londres ; : 

3’ Les noms géographiques ou les noms propres empruntés à des langues qui n'ont 
pas Palphabet latin seront transcrits conformément aux règles internationales adoptées 
par les Congrès de zoologie ; 

% Tout nom d'être vivant, animal ou plante, commencera par une prenMens lettre 
capitale, 

5° Tout nom scientilique lalin sera imprimé en italiques {souligné une fois sur le 
manuscrit). 

Dans l'intérêt de la publication et pour assurer le maximum de perfection dans la 
reproduction des planches et figures, tout en supprimant des dépenses inutiles, nos 
collaborateurs sont priés de se conformer aux règles suivantes : 

4° Dessiner sur papier ou sur bristol bien blanc, 

2 Ne rien écrire sur les dessins originaux. 

3° Toutes les indications (lettres, chifires, explications de figures, etc.) seront placées . 
sur un calque recouvrant la planche ou le dessin. 

4° Abandonner le plus possible le crayon à la mine de plomb pour le crayon Wolf 
ou l'encre de Chine. 

Les auteurs d'articles insérés aux Archives sont instamment priés de renvoyer à 
la Rédaction, dans un délai minimum de huil jours, les épreuves corrigées avec le 
manuscrit où l'épreuve précédente. 

Is recevront gratis 50 tirés à part de leur article. Ils sont invités à faire connaître 


sans délai s'ils désirent en recevoir un plus grand nombre (50 au maximum), à leurs … 


frais et conformément au tarif ci-dessous. Ce tarif ne vise que l impression typographique 
ilne concerne point les planches, dont le prix peut varier considérablement. Toutefois, 
il importe de dire que, pour les exemplaires d'auteurs, les planches seront comptées 
strictement au prix de revient. Les tirés à part ne peur ent étre mis en vente. 


TARIF DES TIRÉS A PART 


Une feuille entière. 


Trois quarts de feuille 
Une demi-feuille . . 
Un quart de feuille . 
Un huitième de feuille 


. Le Secrétaire de la rédaction, Gérant : 


Dr MAURICE LANGERON. 


École Professionnelle d’Imprimerie, à Noisy-le-Grand (Seine-et-Oise) 


rt 


ARCHIVES à 


DE ‘ho 
k PUBLIÉES PAR 
RAPHAEL BLANCHARD 
PROFESSEUR À LA FACULTÉ DE MÉDECINE D£ PARIS REX 
i. MEMBRE DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE : ae 
\ à 
PARIS * 
ASSELIN ET HOUZEAU, ÉDITEURS k 
PLACE DE L'ÉCOLE DE MÉDECINE a 
1907 | 
Les Archives paraissent tous les trois mois | 


dit SOMMAIRE + 0 0 


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_ CaRLo TIRABOSCHI. — État actuel de la question du véhicule de la peste . . 545 ‘2 
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AcLEssANDRo SAnricomi. — Lesioni polmonari prodotte dagli Strongilidi. : . 621 “#R 
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AVIS | 


Les Archives de Parasitologie sont publiées 
par MM. ASSELIN et HOUZEAU, Épireurs, Place de 
l'École de Médecine, Paris (6°). dei 


On est prié de s’adresser aux Editeurs pour tout ce qui 
_ concerne l'administration (abonnements, achat des volu- 


e 


mes antérieurs, etc.). : ; 


Les quatre premiers volumes ne sont plus représentés 
en magasin que par un petit nombre d'exemplaires. Leur 
prix sera prochainement élevé. 


\ f 


N.B. — 11 est déja paru quatre fascicules du tome X ; par 
exception, cemême volume comprendra un cinquième et dernier 
fascicule, renfermant la table générale des dix premiers volumes, 
La confection de cette table exigeant un certain temps, nous 
continuons la publication du tome XI, pour ne pas infliger trop 
de retard aux travaux qui attendent leur tour de publication. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION 
DU VÉHICULE DE LA PESTE 


PAR 


Le D: CARLO TIRABOSCHI 
Assislant au Service de la Santé publique (Rome). 


Il y a plus de trois ans, j'ai publié dans ces Archives (4)un long mé- 
moire sur les Rats, les Souris et leurs parasites cutanés, dans leurs 
rapports avec la propagation de la peste. Ce travail contenait : 
1° une revue critique et historique, très sommaire, sur la question 
des Rats et des Puces, considérés comme agents propagateurs de 
la peste ; 2° la description des espèces de Rats répandues en Italie, 
et des indications sur leur distribution et sur leurs mœurs, surtout 
au point de vue de la dissémination de la peste; 3° la description dé- 
taillée de la morphologie du squelette chitineux des Puces et notam- 
ment de leur appareil buccal; 4° des notions biologiques sur les 
Puces : développement, parasitisme, mode de sucer le sang, etc.: 
examen des Puces; 5° la description des espèces de Puces observées 
sur les Rats : description détaillée des espèces les plus répandues 
et des espèces nouvelles découvertes par moi-même; leur distribu- 
tion géographique, énumération des hôtes sur lesquels elles avaient 
été rencontrées, expériences sur leur aptitude ou non à sucer 
le sang de l'Homme; 6° la description des Pédiculidés et des 
Acariens observés sur les Rats; notions morphologiques et biolo- 
giques, etc. 

La même année 190%, j'ai publié un autre mémoire (2), dans le- 
quel je développais largement le point de vue historique, que j'avais 
à peine indiqué dans mon mémoire précédent. Les conclusions que 
l’on pouvait tirer de cette revue, étaient que le rôle des Rats dans la 
diffusion de la peste avait été observé et constaté presque partout, 
aussi bien à terre qu'à bord des navires, et que les affirmations 
contraires, d’ailleurs très rares, devaient être attribuées, le plus 
souvent au moins, à un défaut d'observation (1). Au contraire, la 

(1) J'entends parler des épidémies de peste; cependant d’après Hankin, des épi- 


démies importantes de peste pourraient se développer sans la collaboration des 
Rats. 


Archives de Parasitologie, XI, n° 4, 1907. 36 


546 CARLO TIRABOSCHI 


théorie qui considère les Puces comme de redoutables agents pro- 
pagateurs de la maladie, avait été niée par la plupart des observa- 
teurs; parmi les nombreuses expériences exécutées avec des Rats 
et des Puces, celles de Simond et de Gauthier et Raybaud avaient 
seules eu quelquefois un résultat positif. Ces expériences, celles de 
Simond en particulier, ont été l'objet d’une critique peut-être trop 
rigoureuse; on a voulu leur enlever toute valeur, en leur opposant 
les essais infructueux de tous les autres expérimentateurs; mais 
je faisais remarquer (1, p. 182) que (une expérience positive bien 
faite (et telles étaient, à mon avis, quelques-unes des expériences 
de Gauthier et Raybaud) vaut mieux que plusieurs négatives » et 
j'en concluais que la possibilité de la transmission de la peste par 
les Puces était démontrée. 

Mais récemment l’Advisory Committee for Plague Investigation 
in India vient de publier une relation très intéressante sur les ex- 
périences exécutées à Bombay en 1905-1906, Ces expériences ont 
été si nombreuses et si rigoureuses et leurs résultats si souvent po- 
sitifs, que désormais le fait de la transmission de la peste par les 
Puces ne peut plus être mis en doute. 

D'ailleurs, ce côté de l'épidémiologie de la peste ne doit pas être 
envisagé seulement au point de vue des expériences de laboratoire, 
il faut prendre en considération les observations épidémiologiques, 
la biologie des Puces, etc. D'après Simond (p.17), si quelques auteurs 
« n’ont pas accordé une grande importance au rôle des Puces, 
c'est qu'ils ont fondé leur opinion plutôt sur les recherches de labo- 
ratoire que sur l'observation des faits épidémiologiques... L’évolu- 
tion de toute épidémie importante de peste fourmille de faits dont 
l'explication est facile et satisfait l'esprit, si l'on admet la Puce 
comme intermédiaire entre les Rats et l'Homme, mais qui demeu- 
rent mystérieux et inexplicables, si l’on essaie de les interpréter en 
s'appuyant sur toute autre hypothèse ». Cette observation critique, 
qui me parait très juste, a été répétée tout récemment par Thomp- 
son (3); moi-même j'avais déjà remarqué ce fait (2), à propos des 
travaux de Yersin, Wernitz. Lydston, Thompson, Tidswell, etc. 

Après la publication de mes travaux, bien d’autres recherches 
ont été faites dans tous ces champs d'observation, et je ne crois pas 
inutile de soumettre les résultats obtenus à une revue critique, qui 
peut servir de complément à mes travaux précédents. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION. DU VÉHICULE DE LA PESTE 547 


I. — Les Rats et les Souris considérés 
comme agents propagateurs de la peste. 


A. — Les RATS ET LES Souris. 


Il serait fastidieux et presque inutile de citer ici toutes les obser- 
vations faites à ce propos, d'autant plus que la conclusion, qu'on 
en pourrait tirer, serait exactement celle que j'ai tirée de mon pré- 
cédent mémoire. Aussi me bornerai-je à citer les auteurs qui ont 
étudié les diverses espèces de Rats et de Souris, au point de vue de 
leur rôle plus ou moins important dans la transmission de la peste. 
J'ai déjà remarqué que cette question avait été envisagée par un 
tres petit nombre des premiers observateurs; malheureusement elle 
a été négligée aussi par la plupart des derniers épidémiologistes. 

Parmiles auteurs déjà cités, je dois mentionner iei Nime, qui, à 
Formose, constata la présence du Bacillus pestis le plus souvent dans 
les Rats domestiques et beaucoup plus rarement chez les Rats 
d'égout, les Souris et les Musettes. 

Mitchell dit qu’en 1903, à la ville du Cap, les Souris et aussi des 
« Rats des champs » (Arvicanthus pumilio), qui pénètrent dans 
les habitations, furent fréquemment trouvés atteints de peste. 

D’après Baxter-Tyrie, dans le Queensland, en 190%, sur 11 479 Rats 
examinés, on en trouva infectés 310, c’est-à-dire 2,70 pour cent, 
(à Brisbane 7,30 pour cent), et sur 3276 Souris, seulement 3, c'est- 
à-dire moins de 1 pour cent (à Brisbane 0,22 pour cent). Des 
310 Rats trouvés atteints de peste, la plupart (249) étaient Mus decu- 
manus, 58 Mus rattus (31 Mus alexandrinus et 27 Mus rattus s. str.) et 
3 appartenaient à une espèce indéterminée. 

Simond dit avoir vu des Mus decumanus morts de peste spontanée 
en Chine, au Brésil et dans l'Inde, aussi bien à Bombay que dans 
presque toutes les villes où il à suivi une épidémie pesteuse. (A 
vrai dire, dans certaines de ces villes, la plupart des Rats frappés 
par l'épizootie appartenaient à l'espèce Mus rattus, mais ce fait 
parait venir de la prédominance de cette dernière espèce dans les 
villes en question. » 

Thompson écrit que, durant une période de neuf mois 
(ler mars-3 décembre 1904), parmi 43 822 Rats de Sydney soumis à 


D£S CARLO TIRABOSCHI 


l'examen bactériologique, 243 ont été trouvés infectés, et que 108 
étaient Mus decumanus, 13 Mus rattus, et 62 Mus musculus. 


Le même Thompson (3) vient de résumer tout récemment les 


observations déjà publiées à propos de quatre épidémies de peste à 
Sydney (1900, 02, 03, 04). Les conclusions qu'il déduit de la grande 
quantité de faits observés sont les suivantes (p. 539) : 1° la peste 
ne doit pas sa forme épidémique au contact avec l'Homme malade; 
2° la peste du Rat est un facteur nécessaire de l'épidémie; 3° un 
être vivant intermédiaire (la Puce) est nécessaire pour communi- 
quer l'infection du Rat à l'Homme. 

Il nous est impossible de suivre l'auteur dans la discussion de 
tous les faits qu'il rapporte. Il examine d'abord (p. 539-547) les phé- 
nomènes de la peste épidémique et démontre que : 1° «the infec- 
tion is not diffused by communication with the sick »; 20 « the in- 
fection is associated in some way with locality »; 3° (incidence of 
the disease on households iserratie » ; 4° Cepidemic plague is asso- 
ciated with epizootic plague », ete. Et il conclut : (the infection of 
plague exists in, and is disseminated with, the bodies of some spe- 
cies of lower animal, wich is free to wander. » 

Puis (p. 547-557) Thompson examine les phénomènes de la peste 
épizootique et dit que trois espèces de Rats et de Souris sont victi- 
mes, dans la nature, de la peste épizootique et ont des rapports avec 
la peste humaine : Mus decumanus, Mus rattus avec la variété Mus 
alexandrinus rufus, Mus musculus. Le Mus decumanus « can by itself 
cause plague in Man, as we saw in the case of the troop-ship An- 
tillean Which carried no other species, and on which two cases of 
_plague occurred in port, but before pratique had been granted. We 
have also found this species far from any town on the banks of a 
river 300 miles north of Sydney where, no doubt, specimens had 
been originally landed from Sydney cargo-boats. At the time of 
examination they extended to premises inland, where they were 
found in the village and on farms; there, also, they alone were the 
cause of 12 cases of plague, of which 7 were fatal, and which occur- 
red in 10 houses. Large numbers of Rats were examined; there were 
but a half-dozen M. rattus among them, all of which were plague- 
îree, while all the infected Rats of which there were many were 
M. decumanus. » Quant au Mus rattus : («We have found M. rattus 
alone in connection with plague in Man: we have also found itin 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 549 


the same connection in conjunetion with infected Mus musculus 
only, and apart from Ï]. decumanus. T1, too, can by itself cause plague 
in Man. » Enfin le Wus musculus semble moins sensible non seule- 
ment à l'infection artificielle, mais aussi à l'infection naturelle: en 
1904, par exemple, les Rats furent trouvés infectés dans la propor- 
tion de 0,99 pour cent, les Souris seulement dans la proportion 
de 0,26. 

D'ailleurs la proportion des Rats trouvés infectés est certaine- 
ment inférieure à la vérité, car: 1° la plupart des Rats meurent de 
peste dans leurs cachettes (1); 2° il est plus facile de capturer avec 
des pièges des Rats sains (qui sont très voraces) que des Rats pes- 
teux; 5° bien des Rats morts vraisemblablement de peste n’ont pas 
été considérés comme pesteux, parce qu'ils avaient été trouvés en 
putréfaction. 

Thompson démontre ensuite : 1° (irregular infestation (par les 
Rats) of buildings, which furnished an explanation of the erratic 
incidence of plague on houses: 2 small number of plague-Rats 
usually found ou single premises ; 3° slow progress of the disease 
in hordes infesting any premises; 4° interval between epizoôtics and 
(bridge » which connects them, » etc. 

Enfin (p. 560-562) Thompson envisage la question de l'association 
des épidémies et et des épizooties pesteuses et démontre : «1° there 
is a relationship in time and place between plague in Rat and plague 
in Man. 2° an interval elapses between the beginning of epizoôtics 
and attack of Man ; 3° evidence that Rats must die before Man can be 
attacked ; 4° seasonal incidence of plague. » 

La Commission anglaise dans les Indes (1905-06) trouva que la 
plupart des Rats atteints de peste à Bombay étaient Mus rattus 
(p. 44), qui est l'espèce la plus répandue dans les Indes. Dans cette 
relation on trouve aussi des observations intéressantes sur la 
virulence du Bacillus pestis après passage par les Rats au moyen 
d'inoculations cutanées et sous-cutanées, sans l'intermédiaire de 
cultures (p. 496 et 502); sur l'immunité des Rats de Bombay à des 
inoculations cutanées ou sous-cutanées de petites quantités de cul- 
tures de peste (p. 506); sur le nombre des Bacilles pesteux dans le 
sang, l'urine et les excréments des Rats morts de peste (p. 519): 


(1) D’autres observateurs ont affirmé précisément le contraire. 


590 CARLO TIRABOSCHI 


sur l'existence de la peste chronique chez les Rats de localités 
dans lesquelles la peste est endémique (p.530) (dans deux villages on 
trouva, durant la période d’accalmie, 7 Rats atteints de peste chro- 
nique (1), tous les 7 étant Mus rattus). 

De tous ces rapports on peut donc tirer des conclusions identi- 
ques à celles que j'ai déjà exposées dans mon mémoire précédent (2) : 
«les Rats d'égout et les Rats domestiques jouent, ou pour mieux 
dire peuvent jouer, le même rôle prépondérant dans la propaga- 
tion de la peste; cela tient peut-être tout simplement à la prépondé- 
rance de l’une ou de l’autre espèce; les observateurs des futures épi- 
démies devront préciser ce point particulier... Quant aux Souris, 
elles peuvent jouer un rôle actif dans la propagation de la peste, 
mais le fait est beaucoup plus rare que pour les Rats. » Peut-être, le 
rôle différent des diverses espèces de Rats et de Souris dans la diffu- 
sion de la peste dépend-il aussi de la fréquence différente avec la- 
quelle ces divers Rongeurs sont parasités par les Puces. 

J'ai déjà dit (4, p. 170) que parmi les Rongeurs qu'on considère 
comme étant des agents propagateurs de la peste bubonique, il y 
en …à un qui mérite une mention spéciale, le Tarabagan ou Arcto- 
mys bobac Schr. « Le Tarabagan est une espèce de Marmotte qui vit 
dans la Mongolie et dans la Transbaïkalie et qui présente souvent 
une maladie épizootique, qui paraît être une véritable peste bubo- 
nique et se transmettre à l'Homme avec la plus grande facilité ; 
dans ces régions donc, le Tarabagan remplacerait le Rat. » 

(1) Ces Rats ne présentaient aucun symptôme de maladie, mais l’autopsie 
révéla la présence d’abcès chroniques dus au B. peslis. La Commission a égale- 
ment enregistré deux cas de peste chronique expérimentale chez des Rats infec- 
tés par des Puces au laboratoire. 

(2) TrrABoscui, 4, p. 137. Cependant ces conclusions ne correspondent pas à 
celles formulées récemment par MEYER à la suite de ses observations et des ren- 
seignements donnés par les médecins officiels de plusieurs districts de l’Inde 
et publiés dans le n° 7de l’Indian Medical Gazette, XLVI, 1906 (BROWNING-SMITH, 
p. 241-254; STEVENS, p. 254-270; Tucker, p. 270-274; Ross, p. 274-277; ELrior, 
p. 277-285; Gizz, p. 286-288). Meyer vient à la conclusion que Mus rattus est un 
agent propagateur de la peste bien plus dangereux et plus actif que Mus decuma- 
nus et cela à*cause de son genre de vie. « Während H. raltus eng mit dem Men- 
schen zusammenlebt, ist dies bei 4. decumanus viel weniger der Fall... In den 
meisten Gegenden, besonders wo die Häuser noch primitiv und ohne Kanalisation 
sind, findet sich 31. rattus und durch ihr enges Zuzammenleben mit den Mens- 
chen erklären sich die Ausbrücke menschlicher Pest, wo unter den Ratten die 
Seuche ausgebrochen ist. Besonders in dem Hauptpestherde Indiens, in Bombay, 
soll überall 4. rattus herrschen, und man erklärt sich im Gegensatz die relative 


Iamunität Kalkuttas — wo es nie zu einer allgemeinen Ausbreitung kam — 
durch das Ucberwiegen von H. decumanus. » 


= 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 991 


Tout récemment le D' Kashkadamov vient de publier un mé- 
moire sur la petite épidémie de peste de la Mandchourie, en automne 
1905, épidémie qui dura un mois seulement et qui frappa 13 in- 
dividus, dont 12 moururent. Voici les observations (faites par plu- 
sieurs commissions de médecins) relatives au rôle du Tarabagan : 
1° Dans quelques localités « wurden weder Erkrankungen unter 
den Buriaten, noch eine Seuche der Tarabaganen gefunden » ; 
2° dans d’autres localités où l’on observa la maladie parmi les Tara- 
bagans, quelquefois on ne constata aucun cas de peste chez les 
Hommes (fait que les observateurs expliquèrent par la circonstance 
que les Hommes « sich vor der Tarabaganen hüteten »), d’autres 
fois au contraire on observa quelques cas de peste humaine (( was 
man durch den Verbrauch des Fleisches, bezw. durch die Bearbei- 
tung der Felle der verendeten Nagetiere erklärt »). En conclusion 
les commissions ont établi : 1° (die zweifellose Seuche der Tara- 
baganen in der Richtung des grossen Weges von Chajlar nach 
Zuruchatuj » ; 2° (eine zweifellose Pestepidemie lokalen Charak- 
ters unter der Mongolen » ; 3° € der sehr wahrscheinliche Zusam- 
menhang zwischen beiden. » 


B. — Les Puces. 


1. — OBSERVATIONS ÉPIDÉMIOLOGIQUES. — Üriarte dit (4, p. 709) que 
les épidémies de pesteen Amérique (Buenos-Ayres, Rosario de Santa 
Fé,etc.) ont confirmé l'importance du rôle, non seulement des Rats, 
mais aussi de quelques-uns de leurs parasites, dans la diffusion de 
Ja peste. Les Rats atteints étaient porteurs de plusieurs Puces (Pulex 
ârritans?); «einige Untersuchungen bewiesen die externe Anstec- 
kung dieser Insekten, ebenso wie das Vorhandensein virulenter 
Pesthacillen in ihrem Blute »; « des Puces prises sur des Rats pes- 
teux peuvent, par leur simple passage sur la gélose, déterminer 
l'apparition de nombreuses colonies de peste et leur intestin est 
rempli de Bacilles pesteux (2) ». 

Au contraire Herzog, qui a étudié l'épidémie de Manille, 1904, 
ne semble pas attribuer aux Puces une grande importance et décrit 
un cas de peste, dans lequel la maladie fut très probablement ino- 
culée par le Poux de tête. 

Hankin, après avoir remarqué les mauvaises conditions hygiéni- 


552 CARLO TIRABOSCHI 


ques et la grande abondance de Puces dans les localités où la peste 
estendémique (Garhwal, Yunnan, Beni-Cheir, Agra, Transbaïkalie, 
etc.), rapporte un grand nombre de faits, qu'il a observés dans les 


Indes et qui l'amènent à conclure que la transmission de la peste 


n'est pas due à l'infection du sol ou desaliments, ni au contact acei- 
dentel du microbe, ni à la piqûre des Moustiques, mais bien à la 
piqûre des Puces. D’après lui (p. 79), «the true nidus of the plague 
infection is some species of Flea, in which the microbe causes a 
slowly developing infection, that at length renders the Insect capa- 
ble of transmitting the disease, and in which Insect the virus can 
retain or regainits virulence. If Simond's view were true, namely, 
that the Flea merely retains the microbein its intestine and passes 
it out with its dejecta, one would expect Fleas to be most virulent 
immediately after, or soon aîter, ingesting the blood of infected 
Rats. The theory now put forward is that the microbe developes (1) 
in the Flea, and only after à lapse of time is in à position to reach 
the proboseis in the act of biting. This theory obviously presuppo- 
ses an interval between the time of reception of the virus by the 
Flea and the development of its capacity to pass this virus on to 
other animals. As explained above such an interval is usually ob- 


served in outbreaks of plague. Changes in the habits of Fleas as 


the Rat population dies off may explain cases in which Ratsappear 
to play different parts in the spread ofthe disease at different 
periods of the outbreack. Differences in the habits of Fleas in diffe- 
rent localities may be the cause of abnormal outbreacks in which 
certain susceptible species of animals temporarily or perma- 
nently escape. The class of facts here referred to, and which have 
been described in earlier paragraphs, are impossible to explain 
on the theory that plague transmission is simply a chance passage 


of the microbe from infected dejecta to accidental cuts or scratches 


on the bodies of susceptible animals. » 


(1) Pour démontrer que les Bacilles pesteux se multiplient dans le corps de la 
Puce, Hankin (p. 81) captura une Puce vivante sur un Rat trouvé mort après le 
premier cas de peste humaine; il la secoua fortement dans plusieurs tubes de 
bouillon stérile, et en ayant extrait l’estomac par dissection aseptique, y trouva 
des Bacilles semblables au Bacillus pestis, « arranged in clusters of about a 


dozen individuals each, and embedded ‘in the tissues of the stomach wall. No: 


Bacilli were observed in the liquid contents of the stomach. The arrangementof 
the Bacilli in clusters obviously suggests that they were engaged in reproduction. 
in situ». Zirozra et Lisron avaient déjà observé que les Bacilles de la peste peu- 
vent se multiplier dans l’estomac des Puces. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 599 


Donc, pour Hankin, la Puce ne transporterait pas la maladie avec 
sa trompe pleine du sang pesteux qu'elle à sucé; la peste serait au 
contraire une vraie maladie de la Puce, chez laquelle le Bacille se 
généraliserait avec lenteur, et aurait besoin d'un certain temps 
(10-20 jours?) pour arriver à la trompe et rendre ainsi la Puce in- 
fectieuse. Je dois faire remarquer ici que quelques-unes des expé- 
riences de la Commission anglaise dans les Indes ne semblent pas. 
confirmer l'hypothèse de Hankin. En effet, des Rats sur lesquels se 
transportèrent des Puces, placées auparavant sur d’autres Rats, ino- 
culés de peste, moururent de cette maladie 6 jours seulement après 
que les Puces eurent été placées sur le Rat inoculé (p. 437 et 443); 
même en supposant que les Puces aient sucé du sang pesteux dès 
le premier Jour et même en comptant deux jours seulement pour 
le développement complet, jusqu'à la mort, de la maladie chez le 
deuxième Rat, les Puces auraient été capables d'inoculer la peste 
4 jours seulement après l’ingestion du sang pesteux. Comme consé- 
quence de son hypothèse, Hankin dit (p. 50) que les voyageurs ou 
les personnes qui fuient un foyer pesteux (pourraient être porteurs, 
pendant longtemps, de Puces infectées, sans être contaminés par 
elles et semer la maladie sur leur itinéraire en abandonnant leurs 
parasites dans les logements où ils séjournent ». 

Un autre fait épidémiologique sur lequel Hankin insiste (p. 80) 
est celui de la coïncidence de la disparition des Puces et de la ces- 
sation de l'épidémie. Au commencement du 1901, il put recueillir 
en Agra grand nombre de Puces sur les Chiens et sur les Chats; 
au commencement de la saison chaude, il trouva que les Puces 
avaient totalement disparu des Chats du Laboratoire, et ayant fait 
faire des recherches très soigneuses dans plusieurs quartiers de la 
ville et dans les villages, il ne put avoir une seule Puce; la cessation 
de la peste coïncida avec la disparition des Puces. Nous rappelle- 
rons ici que Tidswell aussi aobservé que les Puces, et notamment 
le Ctenocephalus serraticeps, très fréquentes sur les Rats durant l'épi- 
zootie pesteuse de Sydney, avaient presque complètement disparu 
après qu'elle eût cessé. D'autres observations analogues sur une 
saison des Puces ont été faites par Simond dansles Indeseten Cochin- 
chine, par Yersin en Annam, par Hill à Maritzburg (Natal), par 
Vassal à Maurice et à la Réunion, par Liston à Bombay, ete. D'après 
Thompson (3, p. 564), il y a aussi une season of Fleas et cette saison 


594 CARLO TIRABOSCHI 


est, pour Sydney, précisément l'automne, qui comprend, dans ces 
régions, les mois de mars, avrilet mai, et qui est la season of danger, 
parce qu'elle est la saison (when most people suffer and when Rats 
most suffer » et comprend le temps pendant lequel il est difficile 
d'arrêter l'épizootie pesteuse. Généralement, la saison des Puceset 
du danger (1) est la saison chaude ; à Sydney elle coïnciderait avec 
l'automne; à Bombay au contraire, d'après Hankin, la saisonchaude 
serait précisément la saison de la disparition des Puces et de la ces- 
sation du danger. Nous croyons qu'il sera très intéressant de pour- 
suivre cesinvestigations dans toutes les localités où la peste esten- 
démique ; c'est seulement d’un nombre très grand d'observations 
qu'on pourra tirer des conclusions sûres et importantes. 

Liston (1) a poursuivi pendant trois ans, dans les Indes, des re- 
cherches très soigneuses sur la distribution et sur les mœurs des 
diverses espèces de Rats et sur leurs parasites cutanés. Il conclut 
que l’espèce de Puce la plus répandue sur les Rats des Indes est le 
Pulex cheopis Roth, et que cette Puce, en l'absence de Rats, se porte 
sur l'Homme et sur d’autres animaux, les pique et peut ainsileur 
communiquer la peste. Plusieurs faits cités par Liston démontrent 
la vérité de cette assertion. Ainsi, par exemple, au mois de mars 
1903, une épizootie pesteuse ayant éclaté parmi les Cobayes du Jar- 
din zoologique de Bombay, Liston observa que ces animaux, eten 
particuiier les individus atteints de peste, étaient infestés par Pulex 
cheopis, alors que les Cobayes en sont ordinairement tout à fait 
€xempts. Tout près des cages où les Cobayes étaient renfermés, 
Liston trouva des Rats morts. Ce fait l’amena à se servir des Cobayes 
<omme de « pièges » pour capturer les Puces des Rats dans les maïi- 


(1) D’après GorscaLics, il y aurait aussi une saison des Rats coïncidante avec 
une saison du danger. Nous avons déjà vu (4, p. 167) que, suivant cet auteur, 
les épidémies pesteuses du type estive ou bubonique sont dues à la contamina- 
tion par les Rats et qu’elles surviennent l’été à cause de la reproduction de ces 
animaux en cette saison. Gotschlich a confirmé ensuite cette manière de voir: 
«das zeitliche Zusammenfallen der Rattenvermehrung und des Wiederauflebens 
der Pest im Frühjahr steht ausser allem Zweifel ». Voilà l'explication de ce fait: 
«der Rattenbestand in der seuchefreien Zeit besteht eben wahrscheinlich im 
wesentlichen aus Individuen, die gegen die Pest eine gewisse Widerstandsfähig- 
keit haben, da alle hochempfängliche Tiere durch die vorangegangene Seuchen- 
periode hingerafit wurden. Sobald jedoch durch eine neue Wurfzeit massenhaft 
neue hochempfängliche Generationen von Ratten auf den Plan gebracht sind, so 
kann von einem einzigen latenten Fall aus eine neue akute Pestepizootie unter 
den Ratten und damit gleichzeitig eine neue Pestepidemie unter den Menschen 
<ntstehen. » 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 3) 


sons infestées. Le 7 mars, on évacua une maison dans laquelle un 
Homme avait été frappé par la peste; 9 jours plus tard, on trouva 
dans une chambre un Rat mort de peste; on porta deux Cobayes 
dans cette chambre, et quatre Cobayes dans deux autres chambres 
indemnes de peste; de ces 4 Cobayes pas un ne contracta la maladie 
et pas un ne présenta de Puces, tandis que sur les 2 Cobayes de la 
chambre infestée on recueillit le matin suivant 10 Puces (dans 
trois desquelles on trouva de nombreux Bacilles pesteux vivants 
dans l'estomac) et l’un d'eux mourut de peste (1).  «Aboutthe 6th or 
7th of April, Rats began to die in large number in a chawl, or 
block of tenement houses. Suddenly the deaths among Rats ceased, 
and on April 1lth the people became troubled with Kleas. ‘The 
Fleas were so numerous that they had to quit their rooms and sleep 
outh in the verandah. While living in the verandah on April 17th 
one of the inhabitants of the particular room in which the Fleas 
were taken became infected with plague. Another case occurred on 
the same day in a room adjoining. The people who inhabited the 
room where the above case occurred were induced to collect some 
of the Fleas from their persons which they said troubled them. » 
Des 30 Puces ainsi recueillies, 14, c'est-à-dire la moitié, étaient P. 
cheopis, tandis que sur 246 Puces capturées sur l'Homme en condi- 
tions normales, une seulement était P. cheopis. 

La conclusion de Liston, que les Puces peuvent jouer un rôle très 
important dans la transmission de la peste, est fort intéressante, 
parce que Liston vient à cette conclusion exclusivement par l'ob- 
servation des faits épidémiologiques, malgré même les résultats 
tout à fait négatifs (2) de ses essais de transporter la peste d'un 
animal à l’autre par l'intermédiaire des Puces. 

D'après cet observateur, (the Flea theory serves to explain the 


(1) Dans le mémoire de MAYER je viens de lire que « Liston hat in einer Reiïhe 
von Fällen in Räumen, in denen pestkranke Ratten oder Ratten kadaver gefun- 
den worden, Meerschweinchen eingebracht und fand dann auf diesen jedesmal 
Rattenflôhe, von denen sets ein Teil inficiert war, wodurch eine Anzahl der 
Meerschweinchen an Pest starb.… Bei Kontrollversuchen in nichtinficierten 
Räüumen wurden auf diese Weise keine Rattenflôhe erhalten. » 

(2) Je n’ai pas eu à ma disposition le mémoire original de Liston, mais j'en ai 
lu plusieurs pages citées par Bannermann, par Thompson et dans le rapport de 
la Commission anglaise ; or, tandis que d’après cette dernière (p. 430), les expé- 
riences de Liston auraient eu toujours un résultat négatif, d’après Thompson (3, 
P- 566)une fois le résultat aurait été positif avec Pulex pallidus (P. cheopis). En 
ce qui concerne les expériences exécutées avec LaMB, voir aux pages 559-560. 


596 CARLO TIRABOSCHI 


infectivity of clothes so often noticed. [It is probably the Fleasin the 
clothes that are the danger, not the clothes themselves. It also ser- 
ves to explain why there were as many buboes in the groin in the 
booted Australians as among the barefooted Indians of Bombay. 
for the legs are the places most often bitten by Fleas. If the plague 
infection was derived from the soil the latter class of person ought 
to develop more groin buboes than the former. but this is not so. » 

Nous avons déjà vu que Thompson conclut à la nécessité d'un être 
vivant intermédiaire entre l'Homme et le Rat. En effet (3, p. 563), 
l'infection pesteuse a été trouvée, en dehors du corps humain, 
seulement dans le corps des animaux inférieurs; l'Homme doit done 
recevoir cette infection de la part du Rat ; mais le Rat mort ne peut 
pas l’infecter, donc (the intermediation of some [nsect which has 
the power of taking it from the Ratand of inoculating it into Man, 
and which can retain the latter power ior a considerable time, is 
the only means consonant with all the recognised phenomena which 
can be imagined ». Pour démontrer que cet intermédiaire doit être 
la Puce, Thompson examine les 12 cas de peste de 1902, «in which 
solitary buboes, situated in the femoral chain (resultant, therefore, 
from inoculation in the lower extremity) were exhibited by persons 
who had certainly received the infection at their workplaces. There 
they were all clothed. Their lower extremities were thoroughly 
well-protected, at all events from casual contact with deposited 
infection, by boots and socks or stockings, and by trousers or pet- 
ticoats, while their hands, arms and faces, and sometimes their 
chest too, no doubt, were fully exposed. Yet they were not inocu- 
lated in those exposed partes, but in their protected parts. These 
cases showed that inoculation must have been eflected by some 
agent to which neither clothes nor the epithelium offered serious 
obstacles; by some agent which could evade the one, and which 
could penetrate the other without causing either noticeable pain or 
a visible wound (1). It was perceived, of course, that the Flea alone 
answered these requirements ».. 

Mayer, après avoir résumé les expériences de Liston et de Lamb 
(voir p. 559), ajoute : (Für die Flohtheorie spräche praktisch auch 


(1) Bannermann aussi (2) donne une grande valeur au fait que les bubons ingui- 
naux sont également plus fréquents chez les Australiens chaussés que chez ceux 
qui vont nu-pieds. 


rase 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 997 


die häufige Uebertragung von Mensch zu Mensch in den Behausun- 
gen; besonders sollen nächtliche Besuche in solchen Räumen, also 
zur Zeit, wo die Flühe besonders gern stechen (?), gefährlich sein. 
Dagegen ist eine Uebertragung in den Hospitälern bei Bubonenpest 
von Mensch zu Mensch recht selten, also unter Verhältnissen, wo 
eine Uebertragung durch Flühe weniger in Betracht kommt; die 
Flôühe lieben ja nich den Aufenthalt in hellen, luftigen Räumen. » 

Avant de résumer les essais de transmission expérimentale de la 
peste de Rat à Rat par les Puces, je rappellerai que Chantemesse, 
Marchoux etHaury, ayant fait une enquête épidémiologique à l’oc- 
casion d'une épidémie de suette miliaire qui avait sévi en mai et 
juin dans la Charente, ont relevé un ensemble de faits qui leur a 
suggéré l'hypothèse que la suette miliaire pourrait être une mala- 
die des Campagnols transmissible à l'Homme par les Puces. 


IT. — EXPÉRIENCES DE LABORATOIRE. — ( Nous tenons de Hafkine 
que des médecins qui, à Bombay, ont répété les expériences de 
Simond, auraient obtenu exceptionnellement quelque succès, dont 
ils n’ont pas fait état parce qu'ils supposaient que ces Rats avaient 
pu contracter l'infection spontanée avant leur capture. » Le même 
fait est rapporté par Thompson (2), qui cite le nom du D'Elkington. 

Simpson fit deux expériences avec deux Singes sains et des Rats 
infestés par des Puces et inoculés de peste; il employa une cage 
double, qui permettait aux Puces de se transporter d'une chambre 
à l’autre, mais ne permettait pas aux Singes de venir en contact 
avec les Rats. Ceux-ci furent déplacés lorsqu'ils moururent. Les 
deux Singes tombèrent sérieusement malades (de peste?) (1) au 
troisième ou quatrième jour, mais après ils guérirent. 

Les expériences de Hill, qui sont très peu concluantes, ont été 
faites dans des miniature granaries, dans lesquels il présumait 
avoir éliminé toutesles Puces avec des fumigations d'acide sulfureux 
et de paraformol ; il en conclut que l'infection peut avoir lieu sans 
l'intermédiaire des Puces. 

Hunter envisage à un point de vue général la question de la 
diffusion de la peste et d’autres maladies infectieuses par les In- 
sectes. [1 étudie les‘trois facteurs qu'il croit nécessaires pour l’in- 

(1)Je n’ai pas lu l’article original de Simpson; les indications que j'ai données 


ci-dessus sont cellesque j'ai trouvées dans le rapport de la Commission anglaise 
(p. 429); suivant Hunter (p. 52, les résultats auraient été entièrement négatifs. 


598 CARLO TIRABOSCHI 


fection de l'Insecte, c'est-à-dire : arrivéedes germes à la surface du 
corps del’Insecte, introduction desgermes dans l'intestin, virulence 
des germes. Puis il considère le mécanisme de l'infection chez 
les Insectes hématophages etchez les Insectes quinesucent pas de 
sang, ainsi que les relations qui existent entre les diverses espèces 
d'insectes et leurs hôtes, ete. Il conclut que : 1° les Insectes peuvent 
héberger les Bacilles pesteux et les disséminer «over indefinite 
areas » ; 2° le rôle joué par les Insectes suceurs (Puces, Punaises, etc.) 
est le même que celui joué par les Insectes non suceurs, c'est-à-dire 
le transport mécanique de l'infection d’une place à l’autre ; en 
conséquence, le danger attribué à leur piqûre serait exagéré ; 3° le 
dépôt, par les Insectes, de Bacilles pesteux sur les aliments, etc. 
«is bound tooccurin plagueinfected areas » ; l'importanceépidémio- 
logique de ce facteur est loin d’être négligeable. 

Baxter-Tyrie. qui n’a pas fait d'expériences, affirme aussi que le 
rôle des Puces dans la diffusion de la peste à été exagéré ; leur 
rôle le plus important est celui de porteurs du virus (carriers of 
infection), le mème rôle donc qui est joué par les Punaises, les. 
Mouches, etc. 

Noc (p. 303) a tenté de répéter les expériences de Gauthier et 
Raybaud «dans des conditions telles que toute voie de propaga- 
tion, autre que celle des Puces, fut rigoureusement écartée. Ces 
expériences, interrompues pendant l'hiver, nous ont permis de 
nous rendre compte des conditions difficiles où se place l'expéri- 
mentateur. Ces conditions, très différentes de celles qu'on trouve 
dans la nature, expliquent parfaitement les faits négatifs qu’on a 
voulu opposer à la théorie de Simond : 1° Les Rats infectés par des. 
cultures de peste ne présentent pas toujours (?) une infection pes- 
teuse généralisée... ; au contraire, les Rats trouvés morts de peste 
dans la nature ont leurs tissus littéralement bourrés de Bacilles 
pesteux.….. 2° Les Rats sauvages se débarrassent de leurs Puces avec 
la plus grande facilité... Il paraît nécessaire de s'adresser, pour une 
bonne expérimentation, à de vieux Rats, qui, privés de leurs dents, 
sont malhabiles à se débarrasser de leurs parasites. 3° Les espèces 
de Puces qui existent sur les Rats sont très variables suivant les 
climats et les latitudes... (1) » 


(1) Suivant Simonp, « nous ignorons les conditions que doit présenter une Puce 
pour être en mesure de communiquer la maladie; nous ignorons si c’est par la 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE  D5® 


Kister et Schumacher ont fait leurs expériences (p. 140) à l'Insti- 
tut d'Hygiène de Hambourg. « In einem grossen cylindrischen, 
mit durch Watte gedichteten Drahtdeckel versehenen Glaskäfig.… 
wurde über einer dünnen Lage Torfstreu ein Drahteinsatz mit 
weiten Maschen als Unterlage für die Versuchsratten eingebracht. 
Auf diesem Drahteinsatz ruhte eine dichte Blechwand, durch wel- 
che der Käfig in zwei Theile getheilt wurde... Auf die eine Seite. 
wurde nun eine... gesauberte Ratte gesetzt, auf die andere eine 
mit Pest inficirte Ratte, welche môglichst viel Flôühe (les auteurs 
n'indiquent pas l'espèce) hatte.. Dass das Ueberwandern der Flôhe- 
von einer Seite auf die andere stattfindet, hatten wir durch Vor- 
versuche festgestellt... Im Ganzen wurden mit Pestratten 23 Ver- 
suche angestellt. Starb die mit Pest inficirte Ratte, so wurde- 
der Cadaver noch einen Tag liegen gelassen und so den Flühen 
Gelegenheit gegeben, den erkalteten Cadaver zu verlassen...; 
dann wurde eine neue mit Pest inficirte Ratte gesetzt. Die Käfige- 
wurden während der ganzen Dauer der Versuche nichtgereinigt.… 
Das Ergebniss dieser Versuche war ein absolut negatives... » On 
transporta aussi, sur de jeunes Rats blancs, des Punaises (les- 
quelles ?), qui, après un jeûne très long, avaient été placées, du- 
rant un à trois jours, sur du matériel pesteux ; les expériences, au 
nombre de 8, furent toutes négatives. 

Je n'ai pas lu le mémoire de Bannermann, que j'ai vu cité dans. 
le «Bulletin de l'Institut Pasteur », et où il dit que les Cobayes sont 
capables d’être infectés par l'intermédiaire des Puces. 

J'ai déjà signalé les expériences de Liston. Cependant je viens. 
de lire dans le mémoire de Mayer que : « Liston stellte auch ge- 
meinsam mit Lamb ausgedehnte Laboratoriumsversuche an, derart, 
dass in einem langen Behälter ein Dutzend Ratten räumlich von 


trompe qu’elle inoeule le virus sous la peau, ou si c’est en souillant la surface de- 
l’'épiderme où siège la piqüre; s’il existe ou non une période d’incubation durant 
laquelle elle ne peut transmettre le microbe. De plus, la Puce est un animal difi- 
cilea manier; il est impossible d’avoir la certitude qu’elleest infectée. Enfin il y 
a la question de l’espèce ou des espèces pestiferes, sur laquelle on ne peut 
encore qu'émettre des suppositions. » 

Une circonstance, qui pourrait, elle aussi, expliquer les échees de la plupart 
des expérimentateurs et qui n’est pas envisagée par Noc, Simond, etc., est que: 
la piqûre d’une seule Puce infectée ne suftit peut-être pas pour communiquer à 
l'animal piqué la maladie et la mort; cette circonstance pourrait aussi expliquer 
quelques-uns des faits épidémiologiques, qui semblent contredire la théorie de la 
transmission de la peste par l'intermédiaire des Puces. 


560 CARLO TIRABOSCHI 


einander getrennt gehalten wurden; inficierten sie die erste mit 
Pest, so ging trotz der räumlichen Trennung die Infektion von Ratte 
zu Ratte weiter, und es konnte direkt häufig das Ueberwandern der 
Flühe beobachtet werden, die die inficierten Tiere bald nach de- 
ren Tode verliessen. In dem betreffenden Laboratoriumsraume 
lässt man für den Fall, dass Flôhe aus den Behältern entschlüpfen, 
Meerschweinchen frei umherlaufen, und nach den Angaben, die 
uns Lamb machte, sterben sehr häufig solche Meerschweinchen an 
Pest. » Je rappellerai ici que Liston et Lamb font partie, tous les 
deux, de la Commission anglaise (voir ci-dessous). 

En résumé, de toutes les expériences instituées par les nom- 
breux observateurs qui se sont occupés de cette question, celles de 
Simond, de Gauthier et Raybaud, de Simpson (?), de Elkington et 
d’autres médecins de Bombay, de Liston (?) et de Bannermann ont 
eu seules quelquefois un résultat positif. Mais récemment la ques- 
tion a été définitivement résolue par la Commission anglaise dans 
les Indes (1905-1906), qui a exécuté trois séries d'expérience, très 
nombreuses et très rigoureuses, que je vais résumer. 


A. — Transmission expérimentale de la peste d'un Rat à l'autre par 
l'intermédiaire des Puces. 

a. — Expériences faites avec des Rats placés l’un près de l’autre (mais 
pas en contact) et en présence de Puces. 

C'est là une répétition des expériences de Gauthier et Ravhaud : 
on se servait de deux cages en treillis métallique, à mailles de 
gun, éloignées l’une de l’autre de quelques centimètres et placées 
dans une cuve de verre, couverte par du tulle; au fond des cages 
on disposait du sable ou de la terre sèche, pour absorber l'urine 
et la vapeur d’eau provenant de la respiration des Rats, maintenir 
le fond sec et empêcher ainsi la mort des Puces. Dans une des 
cages (1), on plaçait un Rat inoculé et des Puces (P. cheopis) re- 
cueillies sur les Rats de Bombay; parfois on ajoutait après d'au- 
tres Puces. À la mort du Rat inoculé, on mettait un Rat sain 
dans l’autre cage et après 8 ou 12 heures le Rat mort était déplacé 
et examiné, pour constater si son sang contenait des Bacilles pes- 

(1) Chacune des deux cages était surmontée d’un large tube en fer blanc, dépas- 


sant la hauteur de la cuve et se fermant par un couvercle ; par ce tube on intro- 
duisait dans la cage les Rats et les aliments. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 56 


teux. Lorsque le Rat sain mourait, on examinait soigneusement 
s'ilétait mort vraiment de peste ; lorsqu'il ne mourait pas dans une 
période de trois semaines, on le tuait pour voir s’il était atteint de 
peste, aiguë ou chronique. 

Dans une première série on expérimenta avec des Rats sauvages 
de Bombay, dont 60 pour cent environ ont été trouvés réfractaires 
à l'inoculation cutanée de petites quantités de Bacilles pesteux ; de 
plus il n'y avait pas de sable au fond des cages et les Puces de- 
meuraient collées au fond de la cage et mouraient vite; c'est sur- 
tout par cette circonstance défavorable que la Commission explique 
les échecs de toutes les expériences de cette première série. 

Dans une deuxième série on se servit de Rats blancs, importés 
d'Angleterre ; sur 16 expériences, 11, c’est-à-dire 69 pour cent, 
eurent un résultat positif (1) et dans l'estomac des Puces recueil- 
lies sur ces Rats on trouva souvent des Bacilles tout à fait sem- 
blables au B. pestis; quelques-unes de ces Puces, transportées sur 
deux Rats blanes sains, leur communiquèrent la peste. 

Enfin, dans une troisième série de 50 expériences, on employa 
des Rats de Bombay (35 Mus rattus et 15 Mus decumanus); 19 Rats 
(13 Mus rattus et 6 Mus decumanus; la proportion est à peu près la 
même pour les deux espèces), c'est-à-dire 38 pour cent (2) contrac- 
tèrent la maladie. En résumé, sur les 66 expériences de la 2e et de 
la 3me série, 30 eurent un résultat positif. 


b. — Expériences faites avec des Puces recueillies sur des Rats morts 
de septicémie pesteuse, et transportées sur des Rats sains gardés dans 
des «Klea-proof cages ». 

Dans une première série, sur 13 Rats blancs d'Angleterre, 8 
(61 pour cent) moururent de peste et dans l'estomac de trois Puces 
prises sur ces Rats on trouva des Bacilles semblables au B. pestis ; 
dans une deuxième série, sur 25 Rats de Bombay (19 Mus rattus et 
6 Mus decumanus), 13 (52 pour cent) contractèrent l'infection (3). 


(1). Quelquefois la mort arriva le sixième jour; voir ce que j'ai dit à la p. 553. 

(2) Selon toute probabilité quelques-uns des Rats étaient réfractaires à la peste ; 
si cela avait été vérifié dans la proportion citée plus haut de 60 pour cent, 
sur 50 Rats mis en expérience, 20 seulement auraient été sensibles et sur ces 
20 Rats, 19, c’est-à-dire 95 pour cent, auraient été infectés par les Puces. 

(3). Ici la proportion des Rats infectés serait un peu plus grande pour le Hus 
decumanus (66 pour cent) que pour le Mus raltus (47 pour ceht), mais on ne 
peut pas en tirer de conclusions, à cause du petit nombre des individus mis en 
expérience. 


Archives de Parasilologie, XI, n° #, 1907. 97 


562 CARLO TIRABOSCHI 


B. — Production expérimentale d'épidémies de peste chez les Cobayes. 


Plusieurs séries d'expériences furent poursuivies, dans des petits 
go-downs expressément construits, avec grand nombre de 
Cobayes et avec 2 Singes; l'espèce de Puce dont on se servit, 
P. cheopis, pique ces animaux en l'absence de son hôte véritable, le 
Rat (Liston). Voici les résultats obtenus, dont j emprunte le résumé 
à l'analyse de Simond publiée dans le Bulletin de l'Institut Pasteur. 

Dans une cabine exempte de Puces, on a placé 50 Cobayes sains 
et 10 Cobayes inoculés de peste et débarrassés de leurs Puces. Ces 
10 Cobayes ont vécu librement jusqu'à leur mort au contact des 
50 Cobayes sains.Aucun de ceux-cin'a contracté la peste. La même 
expérience renouvelée a manifesté un cas de peste parmi les Cobayes 
sains, mais on à constaté alors l'existence de Puces qui s'étaient 
introduites dans la cabine en dépit des précautions prises. 

D’autres expériences ont été faites avec addition de Puces en 
abondance. En un cas, 49 Cobayes sains ont été placés dans, une 
cabine avec 10 Cobayes inoculés et pourvus de Puces. Ces derniers 
sont morts et chaque fois le cadavre n’a été retiré qu'au bout de 
24 heures. Dans les 17 jours qui ontsuivi, tousles Cobayes sains ont 
contracté une peste mortelle. 

Dans un autre cas, 5 Cobayes inoculés et pourvus de Puces sont 
placés dans une cabine. Après leur mort, on introduit dans la ca- 
bine 26 Cobayes sains. L’épizootie se répand rapidement et tous 
meurent de peste. 

On a réussi également à déterminer l'épizootie par l'introduction 
de Puces pesteuses dans une cabine où vivaient des animaux sains. 
La cabine exempte de Puces contenait 49 Cobayes en bonne santé. 
On y introduit un premier lot de 115 Puces provenant de Rats pes- 
teux moribonds et le jour suivant un second lot de 106 Puces de 
même provenance. Cinq jours après, un premier Cobaye meurt de 
peste. On continue à introduire fréquemment des Puces et tous 
les Cobayes en expérience meurent pesteux en l’espace de 40 jours. 

En vue de vérifier que la contagion persiste dans le local et qu’elle 
esten rapport avec la facilité plus ou moins grande qu'ont les Puces 
de parasiter les animaux, on a fait une série d'expériences où les 
Cobayes sont séparés en groupes, dans des conditions qui ne per- 
mettent pas aux Puces de les atteindre avec une égale facilité. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 563 


Dans une cabine infectée, où des Cobayes pesteux sont morts et 
ont laissé des Puces, on a placé, le jour même où le dernier 
Cobaye pesteux est mort, deux groupes de Cobayes sains. Les 
4 Cobayes du groupe A sont libres sur le sol, tandis que legroupe B 
est enfermé dans une cage, accessible aux Puces, suspendue à 
» cent. au-dessus du sol. Après un séjour de 24 heures, les deux 


groupes sont retirés et l'examen fait découvrir 95 Puces sur le 


groupe À et 11 sur le groupe B. Chacun des Cobayes est isolé et 
gardé en observation. Les 5 du groupe À meurent de peste, ainsi 
que 2 du groupe B. L'expérience est répétée dans la même cabine, 
8 jours après la mort du dernier Cobaye pesteux. On recueille, 
au bout de 24 heures, 58 Puces chez le groupe A et uneseule parmi 
le groupe B. Deux Cobayes du groupe A sont morts de peste, ceux 
du groupe B sont restés en bonne santé. 

Dans une cabine infectée, où le dernier Cobaye est mort depuis 
8 jours, on place trois groupes de 4 Cobayes sains et exempts de 
Puces (le groupe C est dans une cage suspendue à 60 cent. au-dessus 
du sol). Le lendemain, on trouve 330 Puces chez le groupe A et 41 
chez le groupe B. Ces Puces sont rejetées dans la cabine et les Co- 
bayes A et B sont mis en observation isolément tandis que le grou- 
pe C est laissé dans la cabine. Trois Cobayes A et deux B sont morts 
de peste ; les 4 Cobayes C sont restés sains. L'expérience deux fois 
répétée donne des résultats similaires. 

Pour varier l'expérience, on a protégé un Singe, placé en cage 
sur le sol d'une cabine infectée, au moyen d'une couche de tangle- 
foot; ce Singe est resté bien portant, tandis qu'un Singe témoin 
placé dans les mêmes conditions, mais dont la cage n'était pas en- 
tourée de tangle-foot, a pris la peste. 

On a placé 95 Puces, recueillies sur un Cobaye mourant de peste, 
dans des tubes fermés au moyen de gaze; on a ensuite fait piquer 
4 Cobayes sains par:ces Puces à travers la gaze. Trois Cobayes ont 
contracté la peste. 

Quatre femelles ayant mis bas alors qu'elles étaient infectées de 
peste, ont allaité leurs petits durant la maladie; elles sont mortes 
en quelques jours et les petits n’ont pas eu la peste. 

Voici les conclusions : 

1° Un contact intime et même très long (jusqu'à un mois en- 
viron) des Cobayes infectés avec des animaux sains ne détermina 


564 CARLO TIRABOSCHI 


jamais une épizootie chez ces derniers, lorsque les Puces étaient 
complètement éliminées. Il faut remarquer que les go-downs ne 
furent jamais nettoyés et qu’en conséquence le contact s’étendit 
aussi aux déjections, aux aliments infectés par ces déjections, 
etc. (1). Le contact très intime (et même l'allaitement) de petits 
Cobayes avec leurs mères infectées ne donna jamais lieu à des cas 
de contagion. 2° En présence de Puces, l’épizootie, une fois décla- 
rée, se propage d'animal à animal et ses progrès sont en raison 
directe du nombre des Puces présentes. 3° Une épizootie pesteuse 


peut survenir sans le contact direct des animaux sains (introduits. 


dans le go-down après la mort et le déplacement des Cobayes in- 
fectés) avec les animaux pesteux. 4° Des Puces, recueillies dans 
des go-downs infectés, et transportées sur des Cobayes et des Rats 
sains, leur donnèrent la peste. 5° L'infection peut avoir lieu même 
en dehors du contact avec le sol infecté (Cobayes renfermés dans 
des cages métalliques, placées à 5 cent. du sol). 6° L'infection ne 
se produit pas par l'air. En effet, des Cobayes renfermés dans un 
cage placée à 60 cent. du sol restèrent indemnes, tandis que 
d'autres, qui étaient en liberté dans le même go-down où dans des 
cages placées à 5 cent. du sol, contractèrent la peste. 


— Expériences dans les maisons pesteuses de Bombay. 


Pour ces expériences on a presque toujours choisi des chambres. 
dans lesquelles deux ou plusieurs individus étaient atteints de 
peste, ou dans lesquelles on avait trouvé des Rats infectés de peste, 


(1) On a peut-être exagéré la facilité avec laquelle les Rats s’infectent ab in- 
gestis. Suivant KLEIN, la transmission de la peste au Rat, exceptionnelle par les 
Puces, s’exercerait surtout par les voies digestives; je n’ai pas lu le mémoire de: 
Klein, mais seulement le résumé du Bulletin de l’Institut Pasteur et il me sem- 
ble que les expériences de Klein ne démontrent point la facilité de l'infection ab 
ingestis. D’après Kisrer et ScHuMACHER, (die Ratten reagiren nichtauf jede Einver- 
leibung, insbesondere Futterung, auch v irulenten Pestmaterials ». En ce qui regarde 
les Cobayes, les expériences de Lisrox et de la Commission anglaise ont été si 
favorables à une infection par le tube digestif et elles ont été prolongées pendant 
tant de temps, que si une contamination par cette voie peut avoir lieu, elle doit 
être certainement très rare. J’ajouterai que GAUTHIER et RAYBAUD ont exécuté aussi 
une vingtaine d'essais de transmission de la peste par simple contact, en plaçant 
des animaux sains dans le même bocal où ils enfermaient les Rats ou les Souris 
inoculés et privés de leurs Puces ; tous les essais, même ceux rendus plus rigou- 
reux par la longue durée du contact, etc., furent négatifs. Simoxp, lui aussi, n’a 
jamais réussi à infecter un Rat ni une Souris en le plaçant en contact d'animaux 
inoculés et exempts de parasites; suivant le même Simond, les Souris sont abso- 
lument réfractaires à la contamination par le tube digestif. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 969 


ou dans lesquelles il y avait une « histoire de Rats morts ». 

a. — Des Cobayes, qu'on laissa libres, pendant 18 à 40 heures, 
dans des chambres pesteuses, attirèrent souvent sur leur corps un 
nombre très grand de Puces (1) et moururent de peste dans 29 pour 
cent des cas (2). La même proportion se vérifia dans des maisons 
pesteuses, dont les parois et les planchers avaient été désinfectés 
soigneusement, soit par le bichlorure de mercure, soit par l'acide 
sulfureux, soit enfin par ces deux agents (3). 

b.— Un Ratblancet3 Cobayes, enfermés dans des Flea-proof cages 
et sur lesquels on porta des Puces recueillies sur des Rats sauvages, 
trouvés morts ou mourants de peste, moururent de la même mala- 
die. On obtint de même 20 pour cent de cas positifs avec des Puces 
prises sur des Cobayes et des Rats blancs, qui avaient été mis en 
liberté pendant 18 à 40 heures dans des chambres pesteuses. 

ce. — On plaça dans des maisons pesteuses deux animaux (Cobayes. 
Rats blancs, Singes), tous deux également protégés contre 
l'infection du sol et contre l'infection par contact, tous deux égale- 
ment exposés à l'infection aérienne (dans les cages), mais l’un pro- 
tégé contre les Puces {« by means of a curtain made of fine wire 
gauze »), l’autre non protégé. Pas un des animaux protégés ne con- 
tracta l'infection, tandis que quelques-uns des autres (10 pour 
cent) (4) moururent de peste. 

d. — On obtint le même résultat, lorsqu'on protégea un des deux 
animaux contre les Puces au moyen d’une couche de « tangle-foot » 
(préparation résineuse usitée pour capturer les Mouches); 24 pour 
cent des animaux non protégés (5 Rats blanes et 1 Singe) mouru- 


(1). Une fois on captura sur deux Cobayes d’une chambre pesteuse 263 Puces; 
da plupart des Puces étaient toujours Pulex cheopis. Voir ce que j'ai dit à p. 555. 

(2). Si l’on considère seulement les Cobayes sur lesquels on trouva plus que 
20 Puces, la proportion monte jusqu'à 50 pour cent. 

(3) D’après MEYER, « bei der bisher üblichen Desinfektion mit Sublimatlüsung 
oder Karbolpräparaten gelingtes bekanntlich nicht, Insekten zu tôten. Man be- 
streicht daher jetzt Fussbüden und Wände mit Petroleumrückstand, einer zähen, 
bräunlichen Masse, die in den Lehmboden und die Kalkwände sehr leicht ein- 
dringt. Der Erfolg hat sich in einigen Fällen bereits gezeigt, indem nach der 
Desinfektion von Räumen nach dieser Methode Meerschweinchen nicht am Pest 
erkrankten, in Fällen von Sublimat-und Karboldesinfektion dagegen inficiert 
“wurden. » 

(4) Cette faible mortalité dépend, probablement, de ce que les animaux étaient 
moins facilement accessibles aux Puces. En etfet, on recueillit au plus 27 de ces 
parasites sur un seul Cobaye; la moyenne fut de 3 par maison, tandis que dans 
les expériences des deux premières séries, la moyenne fut respectivement 20 et 
40 et le maximum 116 et 263. 


566 CARLO TIRABOSCHI 


rent de peste. Sur le Ctangle-foot » on trouva de nombreuses Puces. 
Des 247 Puces identifiées, 147 étaient des Puces de l'Homme, 84 des 
Puces du Rat et 16 des Puces du Chat; sur 166 Puces examinées 
(85 d'Homme, 77 de Rat, 4 de Chat), 24 (1 d'Homme et 23 de Rat) 
furent trouvés infectées (Bacilles pesteux dans l'estomac) (1). 

Dans la plupart des cas, le bubon des animaux atteints de peste 
était placé dans la région cervicale; on a constaté que cette situa- 
tion correspondait au siège favori de la Puce sur le Cobaye. 


II. — Distribution et mœurs des Rats. 


Nous avons déjà vu que le Mus decumanus et le Mus rattus sont 
peut-être des agents propagateurs de la peste également redoutables 
et que la prépondérance de l'une ou de l'autre espèce parmi les 
Rats trouvés atteints de peste dépend probablement de leur plus 
grande diffusion. Suivant Simond, Bannermann, la Commission 
anglaise (1905-1906), etc., le Mus rattus est l'espèce la plus répan- 
due dans les Indes en général: d’après Simond il est particulière- 
ment abondant dans quelques villes et villages de l'Inde; d'après 
Bannermann (2, p. 187) il est (the common Rat of India and the 
one found in its houses » et le Mus decumanus (though certainly 
not indigenous in India, is found now in all large towns, and along 
the banks of the rivers and canals, having been introduced no doubt 
by ships » (2). Le Mus rattus Qis a most nimble climber and when 
it enters a house always takes up its quarters in the roof. But the 


(1) La Commission n'insiste pas sur un point qui me parait d'un grand intérêt, 
c’est-à-dire sur la proportion des Puces infectées ; pour le Pulex cheopis (du Rat) 
elle monta à 30 pour cent, tandis que pour le Pulex irritans (de l'Homme) elle 
fut environ de 1 pour cent. Et si l’on considère que dans le sang du Rat pesteux 
on rencontre une énorme quantité de B. pestis et dans le sang de l'Homme on 
n’en rencontre que rarement et en nombre beaucoup moindre, on voit par là 
combien doit s’opérer rarement la contagion d'Homme à Homme par les Puces. 

(2) ArrkeN, 1899. — Je rappellerai ici qu'autrefois le Mus rattus devait être 
très abondant en Europe, mais que peu à peu il a dû abandonner un grand nom- 
bre de localités devant les incessantes poursuites du Aus decumanus, qui, venu 
plus tard, s’est répandu rapidement partout; peut-être le même fait va-t-il se 
produire dans les Indes. En effet, je viens de lire dans le mémoire de Meyer que 
« Mus rattus ist in Indien mit der fortschreitenden Civilisation fast ganz ver- 
schwunden. In hygienisch gebauten Häusern mit dem Wegfall dunkler Boden- 
und verwahrloster Kellerräume verschwand sie, wurde fast gänzlich verdrängt 
von Mus decumanus. » Voir ce que j'ai dit à p. 550. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 567 


majority do not live in houses at all but in trees. In the monsoon 
they come into houses more than at other times for refuge from 
the rain. When the monsoon is over they go out again and lead a 
vagrant life, feeding on seeds and fruits and birds’eggs, and even 
on birds, which they catch sleeping. They climb trees and do much 
damage to young cocoanuts. To an animal of such habits, an Indian 
village, with its thatched roofs to nestle in, and its stores of grain 
to feed on, must offer every attraction, and we need not be surpri- 
sed to hear of nearly 200 being found dead in a single house... » 

Suivant Thompson (3, p. 549), le Mus decumanus et le Mus rattus 
seraient à peu près également répandus à Sydney; le Mus decuma- 
nus (lives in burrows, infestsewers, basements, and rights-of-way, 
and feeds in garbage. » Le Mus rattus, qui comprend aussi la 
variété Mus alexandrinus rufus, « prefers upper floors, roofs, some- 
times the branches of climbing plants, and feeds on grain and 
fruits ». Tandis que le Mus decumanus «cannot be tamed and in 
captivity soon dies as à rule », le Mus rattus (is easily tamed, and 
lives but will not breed in captivity ». L'un et l’autre, à Sydney, 
« breed all the year round, but probably a little less freely in the 
four colder months », tandis que à Brisbane, qui est 5 degrés plus 
au Nord, ils se multiplient durant toute l’année sans variation (1). 

En Angleterre, d’après Rothschild (2) et Bannermann (2, p.187) le 
Mus rattus est rare; il a été trouvé à Manille, par Herzog, avec le 
Mus decumanus, à Prétoria, etc. 

Suivant quelques observateurs (voir Thompson), les Rats pesteux 
meurent dans leurs cachettes; au contraire, selon Bannermann (2, 
p. 189) ils «come out by day contrary to their usual habits, impel- 
led by the fever-thirst to look for water; and that owing to this and 
their pecular limping gait attention is directed to them. Probably 


(1) Nous avons déjà dit que, d’après Gorscazicx, la reproduction des Rats est 
bien plus intense en printemps et en été qu’en hiver. «€ Während der pestfreien 
Wintermonate wurden in Alexandrien stets nur weniger als 2 Proz. der einge- 
brachten Ratten als schwanger befunden; im Marz und in der ersten Hälfte des 
April erfolgt ein langsames Ansteigen, worauf dann in der zweiten Aprilhälfte 
die genannte Verhältniszahl auf 6 Proz. geht und sogar im Mai und bis mitte 
Juni sich auf der Hôhe von 12 Proz. hält, um dann rasch abzufallen bis endlich 
Anfangs Oktober der definitive Abfall auf 2 Proz. erfolgt. Das Diagramm der Rat- 
tenvermehrung geht volkommen parallel mit den Diagrammen der Sommerepi- 
demien » (Voir p. 594). 

(2) Journal of hygiene, VI, p. 483, 1906. 


568 CARLO TIRABOSCHI 


they wander just as much when in health, but being shy animals 
escape observation. » 

Suivant Thompson (3, p. 550), « Rats eat each other in nature; 
rather more than 8 per cent. of the carcases brought in have been 
partly devoured, but sometimes so completely that nothing but the 
head, paws, tail and skin remained. We have also ascertained that 
Rats eat Mice in nature. » D'après Simond au contraire, « bien que 
notre attention fut attirée sur ce point, nous n'avons jamais pu 
constater un fait de ce genre, même au cours d’épidémies où il 
était le plus facile d'observer des Rats morts ou malades, comme 
celle de Kurachi en 1898. Le D' Mason nous a communiqué un ré- 
sultat identique provenant de ses observations faites sur les épidé- 
mies du Kattiwar. Nous croyons les Surmulots trop avisés pour 
manger, en temps d'épizootie, leurs camarades malades ou morts... 
Si dans une habitation infestée de Surmulots on dispose des appâts 
vénéneux, quelques-uns se laissent tenter par la nourriture offerte, 
tombent malades et meurent, et les autres non seulement ne s'aven- 
turent pas à dévorer les malades, mais il se gardent aussi de 
toucher aux appâts devenus suspects et s’enfuient... » Moi aussi, 
jai vu quelque chose de semblable; à mon avis, les Rats man- 
gent certainement leurs camarades, lorsqu'ils ne sont pas malades, 
mais ils les mangent difficilement ou ne les mangent pas, lorsqu'ils 
sont malades ou atteints de peste, etc. De plus, j'ai déjà remarqué. 
(p. 564, note 1) qu'on a peut-être exagéré la facilité avec laquelle 
les Rats s'infectent ab ingestis. 

Plusieurs observateurs ont confirmé le fait des émigrations en 
masse des Rats; je renvoie à ce propos aux mémoires de Simond, 
Hankin, Bannermann (2), etc. 

En ce qui concerne les mœurs du Tarabagan, j'emprunte les no- 
tices suivantes au mémoire du Dr Kaschkadamoff. Les Tarabagans 
vivent dans les localités montueuses, éloignées des fleuves, et se 
nourrissent exclusivement de substances végétales. En hiver ils 
dorment dans des tanières très larges et profondes, où ils se cachent 
plus tôt ou plus tard suivant que l'automne est froid ou chaud. 
Dans la seconde moitié de mars, ils quittent leurs tanières; c’est 
alors qu'on commence à les chasser. Les Mongoles et les Buriates 
les mangent volontiers et on emploie leur graisse pour oindre les 
roues, etc. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 569 


III. — Morphologie et biologie des Puces. 


APPAREIL BUCCAL. — J'ai déjà donné dans mon mémoire précédent 
une description détaillée de la morphologie des Puces et en parti- 
culier de leur appareil buccal. Rothschild, dans son mémoire sur 
les Sarcopsyllidés (11, p. 26-28) et plus encore la Commission 
anglaise dans son rapport (p. 486-491) donnent une description de 
l'appareil buccal qui confirme la mienne dans presque tous ses 
détails (1). 

Rothschild appelle rostrum l'ensemble de l’unpaired underlip, 
qui correspond à ma «pièce basilaire impaire de la lèvre inférieu- 
re » et des labial palpi; dans la famille des Pulicidae les articles 
des palpes labiaux seraient ordinairement au nombre de 5 
{moins de 5 «in true Pulex », 6 chez les Puülex de l'Amérique, plus 
nombreux chez quelques «stationary Pulicidae like Vermipsylla » 
et chez les Puces de l’Ours). Suivant la Commission anglaise, la 
pièce que j'ai nommée (pièce basilaire impaire » et qu'elle nomme 
unpaired portion (fig. 3 et 6, 6) est articulée avec une autre pièce 
qui serait la véritable pièce basilaire (basal element, fig. 3 et 6, 7) 
qui s'articule avec l’ € anneau périoral » (perioral ring, fig. 6, 29), 
qui serait le contour de ce que j'ai désigné (4, p. 215) sous le nom 
de (ouverture buccale », puisque par cette ouverture font saillie 
au dehors les différentes pièces buccales. La Commission anglaise 
garde le nom de « bouche » (fig. 3, 4 et 6, 26) à une ouverture bien 
plus petite, située plus intérieurement et formant « the definitive 
opening into the alimentary canal ». 

D'après la Commission anglaise, chaque « mandibule » est, elle 
aussi, articulée avec l'anneau périoral par le moyen d'une pièce 
basilaire (fig. 3, 5 et 6, 8); de plus chaque mandibule « contains 
on its mesial surface (fig. 5) a salivary groowe which proximally 
widens ont into a trough and distally is nearly closed by the ap- 
proximation ofitslips forming a practically closed canal » (canal 
salivaire) (fig. 5, 28). 

J'ai déjà indiqué (4, pag. 213) combien de noms on a introduits 
pour désigner la pièce buccale que j'ai décrite sous le nom de lan- 


(4) La description de la Commission anglaise est celle du Pulex cheopis Roth- 
schild. 


570 CARLO TIRABOSCHI 


gue (fig. 3, # et 6, 3). Rothschild emprunte la dénomination de 
Kraepelin et de Heymons (upperlip), la Commission anglaise celle 
de Karsten (epipharynx), puisque cette pièce, et surtout sa paroi 
ventrale, est le prolongement de la paroi dorsale du pharynx. Je 


Fig. 1. — Pulex cheopis Roth., ©’, d’après Tiraboschi (Pulex murinus Tirab.). 


conviens que le nom d'épipharynx (et par conséquent celui même 
de lèvre supérieure) correspond à la position de cette pièce. Sui- 
vant la Commission anglaise, l’'épipharynx est un organe pointu 
et creux : (this hollow ends blindly at the distal extremity and 
proximally is in communication with the hæmocoel; it has no 
connection with the aspiratory canal. » 

Une autre pièce, que je n'ai pas mentionnée dans ma description, 
parce qu'elle ne fait pas saillie au dehors, est celle que la Commis- 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 71 


sion anglaise décrit sous le nom de hypopharynx (1), car elle est 
placée sous le pharynx aspirant (fig. 3, 4 et6, 10); elle est «a chiti- 
nous plate concave downwards, extending backwards from the: 
mandibulo-basal articulation to the subϾsophageal ganglion. It 
supports the salivary pump (fig., 9), the muscles for operating 
which occupy its concavity. The dorsal convex surface is in rela- 
tion with the under site of the aspiratory pharynx from which it 
is separated by a space; this 
space is bridged by a liga- 
ment (fig., 27), which divides 
it into two parts, a posterior 
(hœmocoel) and an anterior 
(aspiratory canal). The ante- 
rior margin at its centre is 
prolonged into a pointed 
process (fig. 4, 9), which 
contains the exit duct of the 
salivary pump. » 

The salivary pump (fig. 3, 
et 6, 9) is situated medially 
at the anterior end of the 
under surface of the hypo- 


pharynx. It receives thesaliva 

from he glands by means Mg 2, lues Phtippineneis Fons 
of the salivary ducts (fig., 11) la ©, d’après Herzog. 

and propels it through the 

exit duct oi the pump into the salivary grooves in the mandibles. 
(fig. # et 5) It is a hollow chitinous organ... Normally its cavity is. 
obliterated by the spring-like action of the chitinous walls, but the 
muscles attached to the posterior wall when contracted cause a 
lumen to appear which then becomes full of salivary secretion. On 
the muscles relaxing the elastic reaction of the walls closes the 
lumen and the secretion is expelled through the exit duct. The: 
opening of the salivary duct is in apposition with the salivary 
canals in the mandibles (fig. # et 5), which canals extend down 
the mandibles. » 


(1) Ce nom a été employé d’une manière erronée par Gerstfeld et Grube pour- 
désigner l’épipharynx. 


DA CARLO TIRABOSCHI 


«The aspiratory pharynx (fig. 3, # et 6, 12) extends from the 
mouth to the œsophageal commissure.. Under the action of the 
muscles (fig., 13) attached to its dorsal chitinous plate a lumen 
appears, which on the relaxation of the muscles vanishes owing 
to the elastic reaction of the walls. » 

Chacune des quatre glandes salivaires (fig. 3, 16) Cis a simple aci- 
nous gland lined with secretory cells resting on a basement mem- 


16 16 13 1328 25 


Fig. 3. — Diagramme d’une section longitudinale médiane de Pulex chkeopis 
Roth., d’après la Commission anglaise. — 1, palpe maxillaire; 2, màächoire; 
3, épipharynx (langue, lèvre supérieure); 4, mandibule; 5, palpes labiaux ; 
6, lèvre inférieure (pièce impaire ; 7, pièce basilaire de la lèvre inférieure; 
8, pièce basilaire d’une mandibule; 9, pompe salivaire; 19, hypopharynx; 
11, conduits salivaires; 12, pharynx aspirant; 13, muscles du pharynx aspi- 
rant; 14, ganglion sus-æsophagien; 15, ganglion sous-æsophagien ; 16, glandes 
salivaires (une paire); 17, gosier; 18, estomac; 19, tubes de Malpighi; 20, rec- 
tum; 21, glandes rectales; 22, tenaille du mâle; 23, pygidium ; 24, soie api- 
cale; 26, bouche; 27, ligament. 


brane. The ducts from each pair unite and the two ducts thus for- 
med (fig., 11) run forward under the subϾsophageal ganglion..., 
to open into the salivary pump. They are lined with a spirally ar- 
ranged chitinous membrane and may be mistaken for tracheal tu- 
bes, but the absence of air therein... makes recognition easy. » 

En résumé, même d'après la Commission anglaise, il y a dans 
l'appareil perforateur et suceur, constitué par les mandibules et 
l'épipharynx (langue), deux canaux distincts, l’un efférent, le long 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 572 


duquel la salive coule jusque dans la petite plaie de la piqûre et 
l'autre afférent, le long duquel le sang est aspiré dans l'estomac de 
la Puce; la différence entre la description de Wagner et de celle de 
la Commission anglaise, est que pour Wagner le canal excréteur 
de la salive est unique et creusé dans l’épipharynx, tandis que 
pour la Commission anglaise, il est double et creusé à la surface in- 
térieure des deux mandibules. En ce qui concerne le canal suceur, 
voir Tiraboschi, 4, p. 214. 


MÉCANISME DE LA SUCCION. — Rothschild (44, p. 26) partage ma ma- 
nière de voir (4, p.212-214; 234); il considère les mandibules comme 


Fig. # — Epipharynx (langue, lèvre supérieure) et hypopharvnx, 
d’après la Commission anglaise. — Les chiffres comme à la fig. 3. 


les véritables armes piquantes, s'enfonçant activement dans la peau 
de l'hôte, tandis que la lèvre supérieure (langue), renfermée entre 
les mandibules, pénètre dans la peau d'une manière tout à fait 
passive. «(The mandibles are piercing organs penetratingthe skin of 
the host, the upperlip serving as a sucking tube... The maxillae 
protect the mandibles and upperlip, and push aside the hairs of the: 
host. » D'après le même savant, les Puces ont deux organes princi- 
paux de fixation : les pattes et l'appareil perforateur; le développe- 
ment extrème de ces organes est représenté d'un côté parles Puces 
du genre Malacopsylla (appareil perforateur faible et court, ongles 
et soies des pattes très fortement développés) et de l’autre côté 
par les Sarcopsyllidae (mandibules larges et fortes, soies et ongles 
des pattes très faibles) ; parmi les ?ulicidae, l'espèce qui a les man- 
dibules le plus développées et leur réunion la plus étroite, est le 
Pulex irritans de l'Homme. 

Les actes de la pénétration et de l'extraction de l'appareil perfora- 


574 CARLO TIRABOSCHI 


© 


teur sont décrits à peu près comme dans mon mémoire (4, p. 236- 
937). Je dirai donc seulement que, d’après Rothschild, les palpes 
Jlabiaux sont dirigés toujours au dehors; (the deeper the upperlip 
and mandibles penetrate into the skin, the further are the labial 
palpi separated from one another, till they are finally quite apart, 


Fig. 5. — Mandibule, d’après la Comm. anglaise. — (Les chiffres comme à la fig. dj 


lying right and left on the skin, but assuming again their normal 
position close to one another as soon as the Insect retracts the man- 
.dibles and upperlip... The Flea, in the act of piercing the skin, has 
to overcome the rigidity of the rostrum as well as the resistance of 


* 
13 12 10 27 26 9 3 Fe 
SD RARES E ï- : 


11 SN 7 29 6 


Fig. 6. — Diagramme des pièces buccales, d’après la Comm. anglaise. 
29, anneau périoral. — (Les autres chiffres comme à la fig. 3). 


the skin of the host and, when sucking, has to use a certain amount 
of force to counteract the spring-like action of the labial palpi. » 
La rigidité des palpes labiaux peut diminuer ou par réduction de 
Ja chitinisation (Sarcopsyllidae) ou par augmentation dela segmenta- 
tion (Vermipsyllidae). 

Au contraire, la Commission anglaise considère l'épipharynx 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE J4) 


comme le véritable organe piquant : (The epipharynx makes a 
way through the skin for the mandibles, and the mandibles enlarge 
and lacerate the hole thus bored. » Cependant la pénétration de 
l’épipharynx et des mandibules s’accomplit dans le même temps : 
« The entire epipharynx-mandibles combination is 
inserted by aspushing action of the whole body of 
the Flea » et les mandibule peuvent exécuter des 
mouvements indépendants : « Once inserted the 
mandibles, owing to their basal element (fig. 3, 5 
et 6, 8), are capable of independent action, sliding 
up and down but maintaining their relative posi- 
tions and preserving the lumen of the aspiratory 
channel »... « A supply of saliva is introduced 
into the wound. A minute drop of blood now 
collects at the aperture through which the pricking 


Fig. 7. — Jarn- 


be et pre- 

organs were inserted into the skin and this is drawn mier article 
9 c £ d'uMRrarse 

up into the pharynx by the action of the aspiratory LAnoN pile 
muscles. » postérieure, 


d’après Roth 


Quant au phénomène (signalé par Zirolia et con- child 


firmé par moi) du sang expulsé par la Puce sous 

forme de jets, la Commission anglaise dit que ce phénomène a 
été fréquemment observé et semble être « a common praclice » 
chez les Insectes suceurs ; il a été observé aussi chez le Pou trouvé 
communément sur le Mus de- 
cumanus (Polyplax spinulosus ur L- 
Burm. ?; voir p.610)etchezle 
Pediculus capitis (Pou de tête, 
de l'Homme) suçant avide- 


ment le sang du Mus decu- s2 ‘at 
‘Mmanus. Fig. 8. — Tenaille du mâle, d’après Roth- 
schild. — 30, doigt mobile externe 
è (anterior process); 31, doigt mobile 
PARASITISME DES PUCES. — interne (second process);32, manubrium. 


Dans mon mémoire précé- 

dent, j'ai déjà dit (1, p. 230) que «chaque espèce de Puce recherche 
de préférence les individus d’une espèce déterminée de Mammifère 
ou d'Oiseau, que l’on peut désigner sous le nom de «véritable hôte». 
En dehors de cet hôte, on ne la rencontre ordinairement, dans la 
nature, que sur des individus d’une espèce voisine ou d'une espèce 


576 CARLO TIRABOSCHI 


qui à avec la première des rapports quelconques. Ces rapports. 
peuvent être de deux sortes ; ou bien un animal devient la proie 
d'un autre et alors les Puces du premier peuvent se transporter sur 
le second (1); ou bien un animal pénètre dans la tanière d'un autre 
et alors l'échange des Puces peut être réciproque. » Baker dit à peu 

$ près les mêmes choses(1, p. 368) 


RE nre et ajoute : « The caracter of the 
hair and thickness of skin was 


Fig. 9. — Bande ventrale du 9 segment at first considered as control- 
abdominal du mâle, d’après Roth- ,- - 

nl, ling the range of parasites, due 

to the close relation these con- 
ditions must have to the structure of the Flea, especially the 
length of mouth parts and covering of bristles. Exceptions were 
soon found to this rule, though in general such relations may be 
said to exist. » 

De même, j'ai déjà fait remarquer (4, p. 180 et250-251 ; 2, p. 546- 
947) que sur les Rats des Indes, de l'Afrique, de 
l'Australie, du port et des navires de Marseille, 
Venise, Gênes, elc., en un mot sur les Rats des 
régions chaudes ou des villes qui ont des rapports. 
avec ces régions, on trouve très fréquemment 
et parfois aussi (Bombay, etc.) presque exclusive- 
ment des espèces de Puces (groupe du Pulex pal- 
lidus) qui piquent l'Homme. Baker (2, p. 121) con- 
Fig. 10. — Bande firme ce fait : (Rat Fleas of the Tropies were far 

dorsale du # More nearly related to the Fleas of human beings. 

segment abdo- 

minal de la fe- than were those of temperate regions » (2), mais 

re puis observe : (Tiraboschi does not emphasize, 

this fact » (?) 


Rothschild (44, p. 27) écrit : « A Pulex or Ceratophyllus if hungry 


(1) Cependant, quelquefois, c’est précisément le contraire qui se vérifie, c’est-à- 
dire que l’on rencontre les Puces qui sont particulières à une espèce ani- 
male sur une autre espèce animale, qui est pourchassée par la première; c’est ce 
qui arrive, par exemple, pour le Chat et le Rat; on a rencontré souvent et parfois. 
aussi fréquemment sur les Rats la Puce qui a pour hôte véritable le Chat, c’est-à- 
dire Ctenocephalus felis Bouché, tandis que jusqu’à présent on n’a jamais capturé 
sur les Chats les espèces de Puces qui sont les plus fréquentes et les plus abon- 
dantes sur les Rats et sur les Souris, c’est-à-dire Pulex cheopis Roth., Cerato- 
phyllus fasciatus Bosc et Ctenopsylla musculi Dugès. 

(2) Baker dit aussi (4, p. 368) : « In the United States the Cat, Dog and Rabbit 
Fleas are closely related to Pulex irrilans and will readily attack the human 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 577 


will generally take readily to Man, though a Bird or Rat Flea ap- 
pears to be rather disgusted with a human host, retracting the pier- 
cing organs hastily as a rule when the blood is first tasted, and not 
sucking for so long a time as do Pulex irritans and Ctenocephalus 
canis and felis under the same cireumstances. » Il ya ici une con- 
fusion. Rothschild dit d’abord que les espèces des genres Pulex et 
Ceratophyllus piquent facilement l'Homme; c’est vrai en ce qui 
regarde le genre Puler, ou du moins les espèces mises jusqu'ici 
en expérience ont presque toujours piqué l'Homme (1). Mais on 
ne peut dire de même du genre Ceratophyllus ; en eftet, d’après mes 
expériences et celles de Galli-Valerio, suivant Wagner, Nuttall, etc., 
le Ceratophyllus fasciatus ou quelques espèces voisines ne piquent 
pas l'Homme (2) ; de plus Galli-Valerio n’a pas été piqué par C. hi- 
rundinis (?), tandis que Lucet dit que le C. avium (?) pique l'Homme. 

Rothschild dit ensuite que les Puces des Oiseaux et des Rats ne 
sucent pas volontiers le sang de l'Homme; en ce qui concerne les 
Puces des Oiseaux, cette affirmation est peut-être exacte, bien que 
C. avium, d'après Lucet, non seulement pique l'Homme, mais 
puisse lui faire de cruelles morsures; mais quant aux Puces des 
Rats, l’assertion n'est pas exacte, puisque Pulex cheopis Roth. ou les 
espèces voisines que l’on rencontre communément sur les Rats des 
régions chaudes, piquent rapidement l'Homme et en sucent le 
sang pendant longtemps; si l’assertion de Rothschild a trait aux 
Puces, qui vivent habituellement sur les Rats et les Souris de la 
plupart des pays tempérés, je dirai que d'après les résultats de 
mes essais de transport sur l'Homme, non seulement elles « not 
sucking for so long a time as do P. irritans and Ct. canis and felis », 
mais elles ne piquent point du tout l'Homme et n’en goûtent poini 
le sang. 

En ce qui concerne la question de l’existence d’une saison des 
Puces, voir ce que j'ai dit à la page 553. 


being, while the Mouse, Rat, Squirrel, Mole and Shrew Fleas are not closely 
related to P. irritans and have never been known to bite the human being. » 
C'est là une autre observation que j'avais déjà faite (1, p. 179, 232, etc.) pour les 
Puces européennes, du Chien et du Chat d’un côté, et des Rats et des Souris de 
l’autre. 

(1) 11 faudrait excepter le Pulex philippinensis Herzog (— P.cheopis Roth. ?) 
qui selon le même Herzog ne piquerait pas l'Homme. 

(2) Au contraire, suivant Tidswell, Gauthier et Raybaud, elles piqueraient 
l'Homme (Tiraboschi, 4, p. 179-180 ; 231 ; 266; 268. 


Archives de Parasitologie, XI, n° %, 1907. 38 


578 CARLO TIRABOSCHI 


EXAMEN DES Puces. — Un procédé ingénieux de montage des 
Insectes, qui en permet une longue et bonne conservation, a été 
décrit tout récemment par Marchoux et Simond (p. 122-124) pour 
les Moustiques et il pourrait être employé aussi pour les Puces. 

La Commission anglaise a trouvé (p. 491-492) un procédé pour 
avoir de belles dissections de Puces. On doit travailler sous le mi- 
croscope stéréoscopique, dans une goutte de solution physiologique 
avec des aiguilles très fines (1); on tient dans la main gauche une 
aiguille à pointe obtuse, avec laquelle on transperce les fosses 
antennales; puis, de la main droite, on enfonce obliquement une 
aiguille très fine sous le bord du 3° ou 4° segment abdominal; les 
segments abdominaux sont ainsi « peeled off much as a shrimp is 
skinned ». Les organes intérieurs viennent alors à flotter dans la 
goutte de liquide et on peut les séparer avec deux aiguilles très 
fines, dont une peut même être crochue. On peut ainsi extraire 
sans difficulté les glandes salivaires. La dissection de l'hypopha- 
rynx est particulièrement difficile. 

Les coupes histologiques de Puces sont très difficiles. Le procédé le 
plus convenable est l'inclusion double dans le collodion et la paraf- 
fine. « Prolonged soaking in celloiïdin is necessary to obtain pene- 
tration and very slow tickening of the celloidin is essential. A mini- 
mum exposure in the paraffin bath is advisable to prevent the chi- 
tin becoming brittle. » 


IV. — Espèces de Puces observées sur les Rats. 


Le nombre des espèces de Puces, qui avaient été décrites lors 
de la publication de mon premier mémoire, était à peu près 135 
(1, p. 208); lorsque je publiai mon deuxième mémoire, il était 
voisin de 200 (2, p. 546). Depuis cette époque il s’est accru considé- 
rablement, jusqu’à dépasser plusieurs centaines, surtout à la suite 
des travaux de Rothschild. Je n'ai pas à énumérer ici toutes ces es- 
pèces, je me bornerai donc à celles qui parasitent les Rats, les 
Souris et les Campagnols (2). 


(1) « This is best done by arranging to revolve the needle rapidly its long 
axis, the point the while pressing on a rapildy revolving emery wheel (revolvingin 
the same direction). The inclination of the axis of the needle to the planeof the 
emery wheel should be capable of being varied so as to get points of difterent 
angles. » 

(2) G. M. G. (Gizes ?) dans une petite note, publiée récemment dans le Journal 
of tropical medicine, donne une clef analytique et les figures originales (dessi- 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 579 


J'ai déjà exposé dans un tableau synoptique (1, p.243) mon essai 
de classification des Aphaniptères et (p. 624) celui de Baker. Ce 
savant a sensiblement modifié (2, p. 123) sa classification, qui 
cependant a encore le défaut d'être combinée surtout pour les 
Siphonaptères de l'Amérique; voici son nouvel essai de classifica- 
tion : 


Genre Rhynchoprion Oken 


Famille des RHYNCHOPRIONIDAE —  Argopsylla End. 
—  Echidnophaga Olifr. 
= HECTOPSYLLIDAE —  Hectopsylla Franenfeld. 
or MALACOPSYLLIDAE —  Malacopsylla Wey. 
— LYCOPSYLLIDAE | —  Lycopsylla Roth. 


. Sous-famille des VERMIPSYLLINAE 


ANOMIOPSYLLINAE 
— PULICIDAE 
— PULICINAE 
— DOLICHOPSYLLINAE 
c Nr Genre Ctenopsyllus Kol. 
== TENOPSY : 
—  Stephanocircus Skuse 
— HYSTRICHOPSYLLIDAE —  Hystrichopsylla Tschb. 
== CERATOPSYLLIDAE | —  Ceratopsyllus Kol. 


Rothschild (14, p. 17-19) partage les SYPHONAPTERA en trois 
familles : 1° SARCOPSYLLIDAE, avec trois genres; 2 PULICIDAE, com- 
prenant la plupart des Puces ; 3° CERATOPSYLLIDAE, Comprenant les 
Puces parasites des Chiroptères. 

Il n’est pas encore possible de donner une bonne classification 
des Puces; c'est pour cela que je suivrai encore mon essai de clas- 
sification, en plaçant près des genres dont ils sont les plus voisins 
les genres nouveaux qui comprennent des espèces parasites des 
Rats, ete. ; il faut pourtant remarquer qu'il règne encore une cer- 
taine confusion dans la constitution et la dénomination des genres. 


nées d’après des exemplaires pris par Liston et par l’auteur lui-même et iden- 
tifiés par Rothschild) des 5 espèces de Puces que l’on rencontre le plus fréquera- 
ment sur les Rats (Pulex irritans, P. cheopis, P. felis, Ceratophyllus fasciatus, 
Cienopsylla musculi). 


580 CARLO TIRABOSCHI 


FAMILLE DES PULICIDAE Taschenberg. 


Sous-famille des Pulicinae Tiraboschi. 


GENRE PULEX sensu stricto Hilger. 


Absence complète de peignes d'épines. Tête largement arrondie 
en dessus et en avant; yeux grands, éloignés du bord inférieur de 
la tête; soies de la série oculaire au nombre de 2 seulement (1 ocu- 
laire et 1 submaxillaire); palpes labiaux à 4 articles. Pattes ro- 
bustes; un peigne de denticules sur la surface interne des hanches 
postérieures; soies latérales du dernier article des tarses posté- 
rieurs au nombre de 4 paires, la distance entre la 3° et la 4e soie 
étant plus grande. Une seule soie apicale par côté. Doigts mobiles 
de l'appareil de fixation du mâle généralement au nombre de deux 
par côté. . 


Depuis 1903, des espèces nouvelles très nombreuses ont été dé- 
crites dans ce genre par Baker et surtout par Rothschild; de plus 
quelques-unes de ces espèces ont donné lieu à la création de genres 
nouveaux qui ne nous intéressent pas. Nous considérons ici trois 
ou quatre espèces seulement : Pulex irritans L., Pulex brasiliensis 
Baker, P. cheopis Roth. (et P. philippinensis Herzog ?). 


PULEX IRRITANS Linné. 


Tiraboschi, 4, p. 246-249. 

Véritable hôte : l'Homme. Hôtes accidentels : Chien, Chat, Cha- 
cal, Renard, Lapin, Cheval, Poulet, etc. Cette Puce a été trouvée 
aussi sur les Rats : Mus decumanus et Mus rattus-alerandrinus, par 
Tiraboschi (4, p. 249; rarement sur les Surmulots et sur les Rats 
domestiques d'Italie, un peu plus fréquemment sur ceux des na- 
vires), par Erlanger et Neumann (sur les « gros Rats » d'Abyssi- 
nie), par Wagner (sur les Rats d’Odessa, durant la peste de 1901- 
1902), par Gauthier et Raybaud (sur un « Rat de navire » (1) à 
Marseille), par Uriarte (sur les Surimulots atteints de peste 
de l'Amérique méridionale : Buenos Aires, Rosario de Santa 


(1) Ces auteurs n’ont jamais trouvé P.irritans chez les « Rats de terre »; nous 
verrons que c’est précisément le contraire qui s’est vérifié pour le Ctenocephalus 
serraliceps; les résultats de Gauthier et Raybaud correspondent aux miens. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 581 


Fé, etc.) (1), par G. M. G. (sur les Rats des Indes). Cette espèce a 
donc été trouvée sur les Rats en Europe, Amérique, Afrique, etc. 

J'ai déjà dit dans mon mémoire précédent (1, p. 180, note 1) que 
la Puce de l'Homme pique les Rats et en suce le sang. 


PuLEx cxeopis Rothschild. 


Pulex murinus : Tiraboschi, 1, p. 252, 1904. 

Pulex pallidus : cité par Gauthier et Raybaud, Tidswell, Thomp- 
son, etc. 

Pulex philippinensis ? : Herzog, p. 273, 1904. 

Pulex cheopis: Rothschild, 4, p. 85, 1903; Liston; Commission 
anglaise, etc. 

Dans le groupe du Pulex pallidus j'ai décrit en 1904 (4, p. 249) 
sous le nom de Pulex murinus une espèce de Puce que j'ai rencon- 
trée fréquemment sur les Rats ; mais cette espèce avait été déjà dé- 
crite par Rothschild en 1903 sous le nom de Pulex cheopis; n'ayant 
pas eu alors connaissance du: travail de Rothschild, je l'ai décrite 
comme espèce nouvelle. Pulex murinus Tirab. est donc synonyme 
de Pulex cheopis Roth. 

Comme je l'ai dit plus haut ‘p. 576), Pulex cheopis est l'espèce 
de Puce que l’on rencontre le plus communément sur les Rats des 
pays chauds et sur ceux des villes qui ont des rapports avec ces 
pays. Elle a été capturée la première fois, en 1900, par Winton, sur 
Mus gentilis, près de Suez, puis en 1901 sur plusieurs animaux près 
de Shendi; tous ces spécimens ont servi à Rothschild pour établir 
sa nouvelle espèce. 

En 1903, Gauthier et Raybaud rencontrèrent à Marseille, sur les 
«Rats de terre» et plus fréquemment (dans 25 pour cent des cas) (2) 
sur les « Rats de navires » de provenances très diverses, une espèce 
de Puce qui se rapprochait beaucoup du Pulex pallidus ; des spéci- 


(1) D’après UÜriarte, parmi les 86 Puces recueillies sur les Rats, 82 auraient élé 
P. vrritans ; ce nombre me semble trop fort; peut-être s'agit-il ici de Pulex cheo- 
pis Roth. ? 

(2) Gauthier et Raybaud ont observé chez les « Rats de navires » 250 Ruces, 
dont 64 étaient P. cheopis et 178 Ctenopsylla musculi; mais il faut remarquer 
que 158 exemplaires de Ct. musculi avaient été recueillis sur un seul Rat et si 
l’on ne tient pas compte de cette récolte tout à fait extraordinaire, la proportion 
des spécimens de P. cheopis est de 64 pour 92, c’est-à-dire 70 pour cent. 


582 CARLO TIRABOSCHI 


mens de ces Puces furent envoyés à Rothschild, qui les identifia 
avec Pulex cheopis. 

La même année Tidswell, à Sydney et à Brisbane, sur les 
Rats capturés durant une épidémie de peste, trouva dans une 
proportion remarquable (81 pour cent) des Puces, qu'il donna 
comme appartenant à l'espèce P. pallidus; Rothschild, qui en recut 
des échantillons, les reconnut comme étant des P. cheopis. Thomp- 
son aussi a observé très fréquemment (dans la proportion de 
70 pour cent) sur les Rats de Sydney, pendant l'épidémie del'année 
suivante, une espèce qu'il croyait être P. pallidus et qui évidemment 
est la même que celle trouvée par Tidswell, c’est-à-dire P. cheopis. 

En 1902, 1903 et 1904, j'aicapturé plusieursexemplaires de F. mu- 
rinus Tirab. — PF. cheopis Roth. sur les Rats d'Italie (Mus decumanus 
et Mus rattus-alexandrinus) et notamment (dans la proportion de 
40 pour cent environ) sur les Rats des navires du port de Gênes 
(4, p.253) et aussi sur les Rats du port et même sur ceux de la 
ville. 

En 1904, Herzog (p. 272) captura, sur 153 Rats (Mus rattus et Mus 
decumanus) de Manille, 42 Puces, appartenant toutes à la mêmees- 
pèce, qu'il éécrit comme uneespèce nouvelle sous le nom de P. phi- 
lippinensis; Rothschild (1) ditque, d'après la description de Herzog, 
il est evident » que P. philippinensis Herzog est identique à P. cheo- 
pis Roth. (2). 

Liston trouva que la Puce qui infeste communément les Rats des 
Indes est une espèce très semblable au P. irritans; Rothschild 
l'identifia avec P. cheopis (3). 

G. M. G., ayant trouvé P. cheopis sur un Rat capturé en Angle- 
terre, à Plymouth, et emporté, très problablement, par un navire 
dans ce port qui est en communication constante avec tous les 


(1) Journal of hygiene, VI, p. 484, 1906. 

(2) Je ne trouve pas que la description de Herzog autorise à affirmer l’évidence 
de l'identité du P. philippinensis et du P. cheopis; cette description en eftet est 
trop insuffisante et ne donne pas les caractères différentiels; on peut seulement 
soupconner la possibilité de l'identité, d'autant plus que, relativement au para- 
silisme, le P. philippinensis se comporterait vis-à-vis de l'Homme, autrement que 
le véritable P. cheopis Roth. Suivant Herzog, son P. philippinensis serait voisin 
de Pulex (Hoplopsyllus) anomalus Baker, qui cependant a un peigne d’épines 
au pronotum et appartient pour cela à un autre genre {/Hoplopsyllus Baker). 

(3; Journal of hygiene, VI, p. 430, 1906. D’après Liston (cité par G. M. G.) le Mus 
ratius parait être l’hôte le plus recherché par P. cheopis, tandis que Cer. fa- 
Scialus parait être le parasite le plus fréquent du Mus decumannus. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 983 


pays de la terre, dit que son observation démontre que P. cheopis 
peut se maintenir dans des climats tempérés. J'ai déjà dit que 
P. cheopis a été observé par Gauthier et Raybaud à Marseille, 
par Tiraboschi à Gênes et dans plusieurs villes et régions 
d'Italie. Il est donc certain que P. cheopis peut se maintenir 
dans des climats tempérés, mais les observations de Gauthier 
et Raybaud (qui ont trouvé P. cheopis plus fréquent sur les « Rats 
de navires » que sur les « Rats de terre ») et surtout les miennes 
(d'après lesquelles P. cheopis est très répandu sur les Rats de na- 
vires du port de Gênes, moins répandu sur les Rats de la ville et 
moins encore sur ceux d'autres localités d'Italie) démontreraient 
que P. cheopis ne pourrait peut-être se multiplier dans nos régions 
ou sur nos Rats. 

Rothschild (1) dit que dans l'Amérique méridionale (2), près de 
Valparaiso, on a constaté sûrement la présence d'un grandnombre 
de P. cheopis. Cette même espèce a été observée aussi dans le Sou- 
dan et sur le Mus rattus de Prétoria. D’après les échantillons qu'il 
a reçus, Rothschild dit que le P. cheopis est l'espèce qui paraît être la 
plus commune dans les Indes. Enfin la Commission anglaise 
(p. 435, note 2) dit que 99 pour cent des Puces capturées sur les 
Rats de Bombay (Mus rattus et Mus decumanus) ont été identifiées 


avec P. cheopis Roth. 

En résumé, P. cheopis a été rencontré sur les Rats de presque 
tous les pays chauds et même des pays tempérés : exclusivement 
ou presque exclusivement à Manille (Herzog, P. philippinensis) et 
dans les Indes (Liston, Rothschild, Commission anglaise), très fré- 
quemment à Sydney et à Brisbane (Tidswell, Thompson) et à 
Valparaiso, etc., fréquemment dans le Soudan, à Prétoria, sur les 
navires du port de Gênes (Tiraboschi) et de Marseille (Gauthier et 
Raybaud), et enfin quelquefois en plusieurs régions d'Italie 
(Tiraboschi) et une fois près de Suez (sur Mus gentilis; Roth- 
schild) et à Plymouth (G. M. G.). 

(1) Journal of hygiene, NI, p. 484, 1906. 

(2) J'ai déjà dit (p. 581, note 1) que les Puces recueillies sur les Rats de Buenos-Ai- 
res, etc. etindiquées par Uriarte comme étant P. irritans,étaient peut-être, elles 
aussi, P. cheopis. À la même espèce peut-être, ou à une espèce du groupe 
P. pallidus (P. brasuliensis Baker?), on peut rattacher aussi les Puces « more 
nearly related to P. irritans, than even the Cat and Dog Flea » vivantes sur les 


Rats, les Souris et autres Rongeurs au Sud des Etats-Unis, et les Puces observées 
par le D: Lutzsur les Rats et sur les Souris du Brésil (Baker, 4, p. 368- 369). 


58/4 CARLO TIRABOSCHI 


Cette espèce de Puce, lorsqu'elle est transportée artificiellement 
sur l'Homme et sur plusieurs animaux, les pique très facilement 
et en suce le sang volontiers; elle a été rencontrée aussi dans la 
nature sur l'Homme et sur des animaux autres que les Rats. 

Il ressort de mes nombreuses expériences (4, p. 232) qu'elle peut 
piquer l'Homme avec la plus grande facilité; d'après Gauthier et 
Raybaud,un P. cheopis, mis en expérience après 24 heures de jeüne, 
aurait piqué € pendant un temps assez court, laissant une seule 
marque punetiforme, sans aréole périphérique ni pétéchies (1) »; 
les échantillons mis en expérience par Tidswell après 4 heures de 
jeûne sucaient le sang de l'Homme; de même les exemplaires de 
P. irritans (P. cheopis ?) examinés par Uriarte piquaient l'Homme, 
même lorsqu'ils n'étaient pas à jeun. Au contraire, suivant Herzog 
(p. 272), le P. philippinensis, que Rothschild ditidentique au P. cheo- 
pis, n'a pas piqué Herzog lui-même ni un indigène de Manille, même 
après plusieurs heures de jeûne (2). 

Que P. cheopis, dans la nature, en l'absence de Rats, puisse pas- 
ser sur l'Homme (et le piquer), cela a été démontré par Liston, qui 
trouva 44 P. cheopis parmi les 30 Puces recueillies sur des Hommes 
dans les conditions que j'ai exposées (p. 555). Suivant la Commis. 
sion anglaise dans les Indes, parmi 247 Puces capturées sur des 
couches de tangle-foot dans des maisons pesteuses de Bombay, 84, 
c'est-à-dire plus du tiers, étaient P. cheopis (p. #79). 

Liston a même observé que P. cheopis se porte très facilement 
sur les Cobayes et aussi sur les Singes, et ce fait a été confirmé 
par la Commission anglaise (voir p. 562). 

Les spécimens de P. cheopis envoyés à Rothschild et provenant 
de Shendi (voir p. 581) avaient été capturés sur Gerbillus robustus 
(20 échantillons), Arvicanthis testicularis (20), Acomys Witherbyi (3), 


(4), 11 faut pourtant remarquer que ces observations ont été faites avec un 
exemplaire de P. cheopis mêlé à trois exemplaires de Ceratophyllus fa- 
sciatus. 

(2) De plus « in dem verhältnissmässig engen Laboratoriumsraum, in dem ziem- 
lich viele Thiere, wie Hunde, Kaninchen, Meerschweinchen, Tauben u.s.w. gehal- 
ten und zahlreiche Ratten zur Untersuchung auf Pest eingeliefert wurden, wurden 
auch gelegentlich Flôhe auf Menschen gefangen, jedoch nur P. irritans und P. 
serraticeps, niemals P. philippinensis. » Toutes ces constatations, contraires à 
celles des autres observateurs relativement au véritable P. cheapis, confirment 
l'exactitude de la remarque que j'ai faite ci-dessus, c’est-à-dire que l’on ne peut 
pas affirmer l'évidence de l'identité du P. philippinensis Herzog et du P. cheopis 
Roth. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 395 


Dipodillus Watersi (1), Dipus jaculus (1), Genetta dongolana (1), c'est- 
à-dire sur plusieurs Rongeurs et sur un Carnivore. 

Je rappellerai enfin que c'est précisément et exclusivement ou 
presque exclusivement avec des exemplaires de P. cheopis, que la 
Commission anglaise dans ies Indes a exécuté les expériences de 
transmission de la peste, que j'ai résumées aux pages 560-566 et qui 
eurent si souvent un résultat positif (1); de plus la proportion des 
Puces trouvées infectées dans les expériences citées à la page 566, 
pour le P. cheopis fut de 30 pour cent, tandis que pour le ?. irritans 
elle futenviron de 1 pour cent. Ce serait donc précisément P. cheopis 
et non Ctenocephalus serraticeps Tschb., comme le voudrait Simond 
(p.29), qui mériterait davantage de retenir notre attention. 


Dans mon précédent mémoire, j'ai placé le P. murinus dans un 
groupe que j'ai nommé GROUPE DU PULEX PALLIDUS, et dans lequel 
Wagner énumérait 9 espèces. Maintenant on en connait, peut-être, 
jusqu'à 18 ou 19, qui sont : le véritable P. pallidus Tschb. (d'après 
Wagner et Rothschild, P. Witherbyi Roth. est identique au P. palli- 
dus Tschb.), P. æquisetosus End. (?), P. brasiliensis Baker (?), P. cheo- 
pis Roth. (—P. murinus Tirab., — (?) P. philippinensis Herzog), 
P. chersinus Roth., P. Cleopatrae Roth., P. conformis Wagner, P. 
Creusae Roth.(?), P. eridos Roth., P. erilli Roth.(?), P. Isidis Roth. (?), 
P. longispinus Wagner, P. mycerini Roth., P. nubicus Roth., P. pyra- 
midis Roth., P. Ramesis Roth., P. regis Roth., P. Riggenbachi 
Roth.(?). 

La plupart de ces espèces ont été établies par Rothschild, d’après 
des exemplaires qui avaient été capturés sur des Rongeurs (et par- 
fois aussi sur d'autres animaux), dans l'Égypte, la Colonie du Cap, 
l'Arabie, etc. Sur les Rats, on a trouvé seulement, jusqu'à présent : 


(1) Gauthier et Raybaud n’ont pas précisé les espèces de Puces avec lesquelles 
ils ont fait leurs 5 expériences, qui eurent toujours un résultat positif et dont 
5 furent exécutées rigoureusement ; ils en ont donné seulement la provenance : 
« Rats de navires »; j'ai déjà observé que 70 pour cent des Puces de cette prove- 
nance étaient P. cheopis; donc, très probablement, même les expériences de 
Gauthier et Raybaud furent exécutées avec P. cheopis. 

Simond aussi n’a pas indiqué l'espèce de Puce dont il s’est servi pour ses 
expériences; il dit tout simplement que la Puce que l’on rencontre communément 
sur les Rats de l’Inde, transportée sur l'Homme ou sur le Chien, lesattaque im- 
médiatement; vraisemblablement il s’agit de P. cheopis, mais il faut remarquer 
que Simond, dans ses expériences, aux Puces qui se trouvaient sur les Rats 
pesteux, ajouta des Puces d’un Chat (Ctenocephalus felis?). 


586 CARLO TIRABOSCHI 


Pulex cheopis Roth., (Pulex philippinensis Herzog ?), P. brasiliensis 
Baker et P. pallidus Tschb. (sur Mus albipes, à Socotra ?). 

Suivant Wagner, le Pulex pallidus et les espèces voisines sont 
bien distinctes du P. irritans ; Voici les caractères du groupe : 

Soie oculaire placée en avant de l'œil (1) (chez le P. irritans, elle 
est en dessous de l'œil); doigts mobiles des tenailles du mâle très 
peu développés. 

Parmi ceux qui ont trouvé le P. cheopis Roth., Rothschild et Tira- 
boschi en ont seuls donné une description (2); voici les caractères 
les plus importants, d’après ces deux observateurs. 


Description du PuLex cHEopis Roth. 


Mächoires allongées; palpes maxillaires un peu plus courts que 
les palpes labiaux et sensiblement plus courts que les hanches des 
pattes antérieures (fig. 3); rapport de longueur des articles : 9, 12, 
7, 13. Lamelle chitineuse des fossettes antennales bien accusée. 
Derrière ces fossettes, une série de 2 à 3 soies; près du bord pos- 
térieur de la tête. une autre série de 4 à 5 soies; les deux séries se 
rencontrent à l'angle inféro-postérieur de la tête, où elles ont une 
soie en commun ; le long du bord postérieur des fossettes anten- 
nales, une série bien marquée de petits poils (fig. 4). 

Les bandes dorsales des segments abdominaux ont une série de 
6 à 7 soies par côté ; celle du 8 segment de la ® est représentée 
dans la fig. 10 ; sur les bandes ventrales du 3° au 7° segment, 4 (chez 
le S') ou 5 (chez la © ) soies par côté; dans le 8e segment, de nom- 
breuses petites soies et deux longues soies par côté (fig. 4). Stig- 
mates s’ouvrant dans l'intervalle entre la dernière et l’avant-der- 
nière soies des bandes dorsales (fig. 1). 

A la surface externe des hanches antérieures, nombreuses séries 
de soies (fig. 4); sur celle des jambes postérieures (3), une longue 


(1) D’après ce caractère il faudrait placer ici-même P. anomalus Baker et P. 
Lynx Baker, qui cependant n’appartiennent pas au genre Pulex s. str. (ils ont un 
peigne d’épines au pronotum) mais au genre Hoplopsyllus Baker (4, p. 381 et 
383; 2, p. 130). 

(2) La description du P.philippinensis Herzog esttrop insuffisante, n’envisage pas 
les caractères différentiels du P. cheopis Roth. et s’applique peut-être à une 
espèce différente du P. cheopis Roth. 

(3). D’après Herzog, chez son P. philippinensis, « die längsten sind je sechs 
am unteren Ende des Femur stehende »; peut-être il y a ici de la confusion 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 987 


série de petites soies, se dédoublant près de l'extrémité inférieure 
et se continuant sur le premier article du tarse (fig. 4 et 7); une 
des soiïes apicales du 2° article des tarses postérieurs du mâle très 
longue, touchart le 5° article (fig. 4). Longueur des articles des 
tarses, mesurés chez une femelle longue de 2mm1 : pattes anté- 
rieures : p 50-55-45-35-95; pattes moyenries : # 100-130-70-50-100 (1) ; 
pattes postérieures :  290-190-100-65-125 (2). 

Doigts mobiles des tenailles du mâle peu développés (fig. 1 et 8); 
l'externe (fig. 8, 30), ou anterior process de Rothschild, est plus large, 
comprimé, asymétrique, pourvu d'une dizaine de soies grandes 
et Îortes, rangées le long de son bord supérieur qui est convexe; 
le doigt interne ou second process de Rothschild (fig. 8, 31) est plus 
mince, pourvu de poils très petits et très clairs, placés au sommet. 
Le manubrium est bien développé (fig. 8, 32) et plus gros vers le 
sommet. La bande dorsale du 9% segment (fig. 9) s'élargit graduel- 
lement vers l'extrémité et porte de rares poils le long de son bord 
inférieur et au sommet. 

Longueur : 20m à 2nm31{(3). . 


PULEX BRASILIENSIS Baker. 


Baker 1p:319:2 p.129: 

Les exemplaires qui ont servi à Baker pour établir cette espèce 
avaient été capturés par le Dr Lutz sur Mus rattus et Mus decumanus 
à Sao Paulo (Brésil). D'après Baker, cette espèce est très rapprochée 
du P. irritans, dont elle se distingue facilement par les denticules 
disposés en forme de peigne à la surface interne des hanches pos- 
térieures; chez le P. irritans ces denticules sont nombreux et 
irrégulièrement rangés, tandis que chez le P. brasiliensis ils sont 
au nombre de six, formant une petite rangée transversale. Man- 
dibules et palpes labiaux aussi longs que les hanches antérieures. 


entre le Femur ou Schenkel (cuisse) et la Tibia ou Schiene (jambe); ces soies 
de l'extrémité distale des jambes seraient longues de 0m15 (œ) à Or" 2 

(4) D’après Rothschild, le 1% article est « rather less than two-thirds the 
length of the second ». 

(2) Suivant Rothschild, le 1° article est « about three-quarters as long again 
as the second » et le 4 article est « half as long again as it is broad ». 

(3) Suivant Herzog, la longueur de son P. philippinensis serait : 1" 16 à 1%" 
78); Arr 80228 67 0)" 


588 CARLO TIRABOSCHI 


Soie oculaire placée en avant de l'extrémité supérieure de l'œil 
(p. 586). Segments abdominaux avec une série de 7 soies par côté 
sur les bandes dorsales, de 4 soies par côté sur les bandes ven- 
trales. Cuisses postérieures avec une série longitudinale de 8 soies 
bien développées. Rapport de longueur des articles des tarses 
postérieurs : 28-18-9-5-11. Longueur de la Q; 5°" 5; du & 
gmm à. 


PuLex PALLIDUS Taschenberg. 


P. Witherbyi Roth. : Rothschild, 1, p. 86 (1903). 

D'après Baker (4, p. 369), le véritable l’ulex pallidus Tschb. (trouvé 
par Taschenberg sur Herpestes ichneumon, en Égypte) aurait été cap- 
turé sur Mus albipes, dans l’île de Socotra; Rothschild l’a observé 
sur d’autres animaux. Je renvoie à la description et aux figures de 
Rothschild. 


Genre CTENOCEPHALUS Kolenati. 


Beaucoup de caractères communs avec le genre Pulex (yeux bien 
développés, série oculairede soies, pattes robustes (1), soies latérales 
du dernier article des tarses postérieurs, soie apicale, etc.). Au bord 
inférieur de la tête, de chaque côté, un peigne d’épines (uzeis, ztevis 
et xv4)4) et un autre peigne au bord postérieur du pronotum. Tête 
plus allongée que dans le genre Pulex. 

Depuis 1903, une ou deux espèces nouvelles seulement ont été 
décrites dans ce genre, que Rothschild considère aussi maintenant 
(9, p. 175) comme un genre distinct du genre Pulex, comprenant, 
d'après lui, deux espèces seulement : Cf. canis et Ct. felis, qui 
d'ailleurs sont les seules qui nous intéressent. 


CTENOCEPHALUS CANIS Curtis et CT. FELIS Bouché. 


Pulex serraticevs : cité par Thompson, Tidswell, Galli-Valerio, 
Zirolia, Nuttall, Zinno, Gauthier et Raybaud, etc. 

Ctenocephalus serraticeps : Tiraboschi, Simond. 

Dans mon précédent mémoire (4, p. 254-256) j'ai décrit le Ctenoce- 


(1) Les Puces des espèces Ctenocephalus canis et Ct. felis sautent aussi faci- 
lement et aussi haut que la Puce de l'Homme. 


ÉTAT ACTUEL .DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 589 


phalus serraticeps Tschb. comme étant une espèce unique compre- 
nant une variété, que j'ai nommée Ct. serr. var. murina (1, p. 259). 
Cela contrairement à l'opinion de Rothschild, qui dans l’ancienne 
espèce de Taschenberg trouvait deux espèces distinctes, celle du 
Chien (Pulex canis Curtis) et celle du Chat (P. felis Bouché); mais 
les différences que le même Rothschild donnait pour ces espèces, 
avaient trait seulement au mâle et elles me semblaient d'ailleurs 
si peu visibles et si peu constantes (quelques-unes surtout), que je 
ne pouvais pas partager l'opinion de Rothschild et je pensais qu'on 
pouvait tout au plus parler de deux variétés. Je considérais même 
comme étant une simple variété (var. murina) une forme de Ct. 
serraticeps rencontrée par moi sur les Rats, pour laquelle cepen- 
dant les différences étaient bien plus mombreuses que celles don- 
nées par Rothschild pour P. canis et P. felis; de plus ces différences 
avaient trait aussi aux femelles. Rothschild, auquel j'envoyai des 
échantillons de ma varietas murina, trouva qu'ils n'étaient autre 
chose que des exemplaires de son P. felis, il reconnut que les carac- 
tères différentiels signalés par moi étaient réels et constants et en 
ajouta d’autres (8, p. 192-193). Ayant examiné de nouveau des 
spécimens de mon (t. serraticeps et de ma var. murina, j'ai trouvé 
qu'entre les deux formesil y aeneftet des différences telles, qu'on est 
maintenant autorisé à les regarder comme deux espèces distinctes. 

Si l’on se place au point de vue du parasitisme de ces Puces, je 
suis forcé de les considérer encore comme étant une seule espèce; 
en effet les observations relatives à leur distribution géographique, 
aux animaux qu'elles affectionnent, à la facilité avec laquelle elles 
se portent sur l'Homme ou sur des animaux qui ne sont pas leurs 
véritables hôtes, toutes ces observations ne se rapportent jamais ou 
presque jamais à l’une ou à l’autre espèce séparément; d’ailleurs, il 
paraît que sous le rapport du parasitisme il n'ya pas de grandes dif- 
férences entre les deux espèces. Voici le résumé de ces observations. 

Le Ct. serraticeps affectionne surtout le Chien (Ct. canis) et le 
Chat (Ct. felis), mais il a été observé sur un grand nombre de 
Carnivores (Tiraboschi, 4, p. 257-258) et aussi sur le Lièvre, surle 
Lapin, Sur un Singe et enfin sur l'Homme et sur le Rat. Sur 
l'Homme il a été constaté : en Hollande et à Java par Taschenberg, 
en Danemark par Meinert, en France par Railliet, en Italie par 
Tiraboschi et par Galli-Valerio, dans le grand-duché de Bade par 


590 CARLO TIRABOSCHI 


Hilger, qui sur 2 036 Pucesrecueillies sur l'Homme dans lesthéâtres, 
écoles, maisons, casernes, hôpitaux, prisons, etc., trouva 1 071, 
donc plus de la moitié, Ct. serraticeps. Il semble aussi, d’après 
Baker (1, p. 384) que quelques cas d’infestation de maisons par les 
Puces ont été occasionnés plutôt par Ct. serraticeps que par P. irri- 
tans; d'après Simond (p. 29), le Ct. serraticeps pullule dans les 
habitations en Asie plus encore qu'en Europe, tandis que suivant 
la Commission anglaise dans les Indes, parmi 247 Puces prises sur 
des couches de « tangle-foot » (voir p.566), dans des maisons pes- 
teuses de Bombay, 16 seulement, c’est-à-dire moins de 7 pour 
cent, étaient Ct. serraticeps (Ct. felis). 

En ce qui concerne les Rats, j'ai déjà fait remarquer dans mon 
précédent mémoire (1, p. 258-259) que « à l'exception de Thompson 
{qui durant l'épidémie de peste de 1900 à Sydney, parmi les Puces 
recueillies sur les Rats trouva dans deux cas sur neuf le Ct. serra-- 
ticeps) personne n'avait observé le Ct. serraticeps sur les Rats, même 
en dépit de longues recherches (Galli-Valerio); pourtant j'en ai 
pris de nombreux spécimens sur les Rats de plusieurs régions 
d'Italie et surtout sur le Mus decumanus (dans la proportion de 25 & 
90 pour cent environ). Il a échappé peut-être aux recherches des 
autres observateurs parce que, doué d'une très grande agilité dans 
le saut, il se déplace plus facilement et plus vite que les autres 
espèces parasites des Rats; en effet, je l'ai recueilli presque exclu- 
sivement sur les Rats que je tuais avec les vapeurs de chloroforme, 
aussitôt qu'on me les livrait vivants au laboratoire. Il faut aussi 
remarquer que les Rats capturés (morts par l'action de l'acide sul-- 
fureux et de l'acide carbonique) sur les navires du port de Gênes 
n’ont jamais donné celte espèce de Puce » (1). 

D’autres observateurs ont confirmé la présence du Cf. serraticeps 
sur les Rats ou sur les Souris. Wagner en a trouvé des spécimens 
parmi les Puces capturées sur les Rats d'Odessa pendant la peste; 
Gauthier et Raybaud ont trouvé chez les « Rats de terre (1) », à Mar- 
seille, sur 52 Puces, 2 Ct. serraticeps; Tidswell, chez les Rats de 
Sydney, sur 100 Puces, 4 C5. serraticeps; Zinno, sur une Souris 
capturée à Naples pendant la petite épidémie de peste de 1901, un 


(1) Gauthier et Raybaud eux-mêmes n'ont jamais rencontré C{. serraliceps sur 
les « Rats de navires »; voir ce que j'ai dit à la page 580, relativement à la dis- 
tribution du P.irrilans et du Ci. Serraliceps sur les « Rats de terre » et les « Rats 
de navires ». 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 991 


Ct. serraticeps; Uriarte (1, p. 709), chez les Rats d’égout de Buenos- 
Aires, sur 86 Puces, 4 Ct. serraticeps; Gonçalves Cruz et Lutz 
(cités par Simond), au Brésil, et Hankin dans les Indes auraient 
observé le Ci. serraticeps sur les « Rats d'habitation » ; d’après Roth- 
schild (1), on a capturé 1 Ct. serraticeps (P. felis) sur Mus rattus à 
Prétoria et quelques exemplaires aussi sur les Rats des Indes; 
d’après G. M. G., on rencontre fréquemment, sur les Rats, P, felis; 
enfin, suivant Simond (p. 29), « en Cochinchine, sur le cadavre (?) 
d'un Rat abandonné dans une cave du laboratoire, les Puces se 
sont multipliées au point d'envahir cette cave; la plupart étaient 
Ct. serraticeps. » 

Simond conclut aussi que cette espèce de Puce, en raison de son 
cosmopolitisme (et aussi de ses mœurs), mérite davantage de rete- 
nir l'attention comme véhicule de la peste (2); « grâce à la profu- 
sion de Chiens et de Chats qui vivent dans les habitations hu- 
maines, elle est partout en contact avec l'Homme et avec les Rats ». 
Or il est vrai qu'elle a été trouvée sur les Rats par bien des obser- 
vateurs et dans des régions différentes (Europe, Asie, Amérique, 
Australie), mais toujours ou presque toujours en petit nombre 
et parfois même exceptionnellement. 

Le Ct. serraticeps, d'après les observations concordantes de Galli- 
Valerio, Tiraboschi (3), etc., pique très facilement l'Homme ; suivant 
Hilger (der auffallend hohe Prozentsatz (voir ci-dessus) scheint 
dafür zu sprechen, dass der Mensch nicht nür vorübergehend Wirt 
des Hundeflohs ist »; au contraire, suivant Baker (4, p. 368), 
« while these Fleas (Cat, Dog and Rabbit Fleas) will remain on a 
human being for some little time and bite frequently wilhe there, 
still they do not habitually frequent that host and his clothing and 
bed as does P. irritans. » J'ai déjà dit dans mon mémoire précé- 
dent (1, p. 180, note 1) que le Cf. serraticeps pique aussi les Rats et 
en suce le sang. 


CTENOCEPHALUS CANIS Curtis. 


Ctenocephalus serraticeps Tschb. : Tiraboschi, 4, p. 255-256. 


(1) Journal of hygiene, VI, p. 485, 1906. 

(2) Voir ce que j'ai dit à la page 585. 

(3) Mes observations regardent non seulement le Cf. canis (Ct. serraticeps pro- 
prement dit), mais aussi le C£. felis {C. Serr. var. murina). 


592 CARLO TIRABOSCHI 


Je renvoie à ma description du Ct. serraticeps, qui regarde prin- 
cipalement le Cf. canis; pour les différences entre Ct. canis et 
Ct. felis, voir ci-dessous. 


CTENOCEPHALUS FELIS Bouché. 


Ctenocephalus serraticeps Taschenberg, var. murina Tiraboschi, 
4, p. 259-260. 

Pulex felis Bouché : Rothschild, 8, p. 192-193. 

Tête de la femelle (et un peu aussi celle du mâle) plus pointue 
et beaucoup plus allongée que chez Ct. canis (fig. 14, A’etB'). Épine 


A? 


a. 


Fig. 11. — Ctenocephalus canis Curtis (A et A’) et Clenocephalus felis Bouché 
(B et B'), d’après Rothschild. — A et B, appareil de fixation du mâle; d on, 
doigt mobile; #9, manubrium. — A et B', tête de la femelle. 


terminale de la lamelle des fossettes antennales (1), première épine 
du peigne de la tête (et épine inférieure du peigne du prothorax) 
plus grandes et plus longues que chez Cf. canis (fig. 11, A’ et B°). Troi- 
sième article des antennes, chez la femelle, pourvu d’incisions seu- 
lement sur le côté dorsal (2). 

Peigne du pronotum comprenant 17 à 18 épines, tandis que 


(1) Rothschild appelle cette épine « the spine situated at the posterior angle 
of the genal process ». 

(2) D’après Rothschild, « the segments of the antennal club are, on the ventral 
side, almost completely fused in the © of both species ». 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 593 


celles-ci sont ordinairement au nombre de 16 à 17 chez C4. canis (1). 
Stigmates abdominaux plus petits que chez Ct. canis. Bande 
dorsale du Se segment abdominal de la femelle un peu plus arrondie 
au sommet, que chez Ct. canis. À la surface interne des cuisses 
postérieures une série de 7 à 10 soies, tandis que celles-ci sont au 
nombre de 10 à 13 chez Ct. canis. 

A la surface externe du doigt mobile (fig. 41, A et B, d m) des 
tenailles du mâle, poils un peu plus nombreux que chez Ct. canis; 
bord supérieur de ce doigt légèrement plus arrondi et bord infé- 
rieur moins droit (un peu concave) que chez Ct. canis; manubrium 
(fig. 41, A et B, m) à peu près de la même largeur dans toute sa 
longueur (2). 

Le Ctenocephalus felis a été sûrement observé sur les Rats : par moi 
en Italie (sur Mus decumanus et Mus rattus-aiexandrinus), par. 
Rothschild dans les Indes (Mus rattus et Mus decumanus?) et dans 
l'Europe méridionale (?), à Prétoria (sur Mus rattus). D'après 
mes observations, il pique l'Homme, etc., tout à fait comme 
Ct. canis. En ce qui concerne la présence sur les Rats de cette 
espèce de Puce, dont le véritable hôte est le Chat, je renvoie aux 
remarques que j'ai faites à la page 576, note 1. 


Genre C£ERATOPHYLLUS Curtis. 


Jamais de peignes à la tête: toujours un peigne au bord posté- 
rieur du pronotum (genre Ctenonotus de Kolenati). Forme de la tête 
différente dans les deux sexes : chez la ©, la courbure du bord 
supérieur de la tête commence presque à l'occiput; chez le &, 
l'occiput s'étend presque horizontalement et le front descend à pic, 
et ainsi il y a entre le sommet et le front une limite bien marquée, 
puisqu'ils forment un angle arrondi, au-dessus duquel on aperçoit, 
de chaque côté de la tête, un petit denticule chitineux, qui chez la © 
est ordinairement plus petit. Yeux bien développés, ovalaires, plus 
ou moins rapprochés du bord inférieur de la tête. Petites pointes 
chitineuses sur les bandes dorsales des 4 ou 6 premiers segments 
abdominaux. Soies apicales, chez la ©, au nombre de 2 à 4, dont 


(1) Cela d’après Rothschild; je n’ai pas constaté cette différence. à 
(2) Chez le Cl. canis, le manubrium est considérablement élargi à son extré- 
mité antérieure. 


Archives de Parasitologie, XI, n° 4, 1907. 39 


594 CARLO TIRABOSCHI 


une au moins est bien développée. Pattes plus minces (1); soies la- 
térales du dernier article des tarses postérieurs au nombre de 5 
par côté, équidistantes et rangées sur une même ligne (parfois la 
première est légèrement déplacée). Sur la saillie articulaire des 
tenailles du c', deux soies très longues, dirigées en arrière et en 
haut. 

Depuis 1905, de très nombreuses espèces nouvelles ont été décrites 
dans ce genre (qui en était déjà très riche) par Wabhlgren, etc., mais 
surtout par Baker et plus encore peut-être par Rothschild; de plus 
quelques-unes de ces espèces ont donné lieu à la création de nou- 
veaux genres, dont deux seulement nous intéressent : Odontopsyllus 
Baker et Pygiopsylla Roth. — Nous décrirons ici 17 espèces. 


CERATOPHYLLUS FASCIATUS Bosc. 


Pulex fasciatus : cité par Tidswell, Thompson, Galli-Valerio, Gau- 
thier et Raybaud, etc. 

Tandis que le Pulex cheopis Roth. paraît être l'espèce de Puce par- 
ticulière aux Rats des pays chauds, le groupe du Ceratophyllus 
fasciatus comprend les espèces de Puces qui affectionnent com- 
munément les Rats de l’Europe et surtout de l'Europe centrale et 
septentrionale. 

Voici quelques-unes des espèces que l’on pourrait placer dans 
ce groupe: C. fasciatus Bosc, C. æger Roth. (?), C. agilis Roth. (?), C. 
consimilis Wagner, C. dubius Wagner, C. Henleyi Roth., C. italicus 
Tirab. — Cer. londiniensis Roth., C. lagomys Wagner, C. mustelae 
Wagner, C.nepos Roth. (?), C. penicilliger Grube, C. sexdentatus Ba- 
ker (?), C. simplex Wagner, C. tesquorum Wagner, C. Walkeri Roth., 
C. Wickhami Baker (?). 

De ces 13 espèces, 7 ont été observées plus ou moins fréquem- 
ment sur les Rats ou sur les Souris. Les différences entre le véri- 
table Cer. fasciatus et quelques-unes de ces espèces sont si faibles et 
si difficilement appréciables que l’on peut bien douter si les Puces 
signalées par quelques auteurs sous le nom de Pulex fasciatus ou 
de Cer. fasciatus soient vraiment des Cer. fasciatus Bosc ou plutôt 


(1) Le Ceratophyllus fasciatus Bosc et le C.italicus Tirab. ne sautent pas aussi 
haut que Pulex irritans, Fulex cheopis, Clenocephalus canis et Cé. felis (Ti- 
raboschi). 


+ 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 595 


l’une ou l'autre des espèces voisines. Ceci pourrait peut-être expli- 
quer les divergences entre les auteurs relativement à la possibilité 
et à la facilité de piquer l'Homme et d'en sucer le sang. En ce qui 
concerne le parasitisme, mes citations se rapportent donc aux espè- 
ces du groupe Cer. fasciatus sensu lato. 

Ces Puces ont été fréquemment observées sur les Rats (Mus decu- 
manus et Mus rattus-alexandrinus) d'Europe : Hollande (Ritsema), 
Halle (Taschenberg), Suisse (Galli-Valerio), Hongrie (Kohaut), Da- 
nemark (Meinert), Bade (Hilger), Angleterre et Europe en général 
(Rothschild) (1), Marseille (Gauthier et Raybaud) (2), Russie (Wa- 
gner) (3), Italie (Galli-Valerio et Tiraboschi) (4). En dehors de l'Eu- 
rope, le C. fasciatus (sensu lato!) a été trouvé à Sydney, sur les Rats, 
par Thompson en 1900 (7 fois sur 9), par Tidswell en 1902 (10 pour 
cent) et par Lydston en 1902; Rothschild dit (5) que les Rats de la 
ville du Cap, dont quelques-uns seulement furent examinés, étaient 
infestés par C. fasciatus, mais que cette espèce a été capturée 
exceptionnellement sur les Rats des Indes; Baker n'a jamais pu la 
rencontrer en Amérique, ni sur les Rats, ni sur d’autres animaux : 
G. M. G. range le Cer. fasciatus parmi les 5 espèces de Puces les 
plus fréquentes sur les Rats. Elle est donc particulière, mais non 
absolument, à l'Europe, où elle a été observée aussi sur d’autres 
Rongeurs : Mus musculus (Hollande, Italie, Danemark, Bade, Russie, 
Angleterre), Mus silvaticus, Mus agrarius, Arvicola Savi, Microtus 
agrestis, Myoxus nitela, Myoxus glis, Cricetus frumentarius, et en 
dehors des Rongeurs, sur Talpa europæa, Mustela foina, M. putorius, 
Canis lagopus, Crossarchus fasciatus. Les véritables hôtes seraient 
- (1) Suivant Rothschild {in litt.), le véritable Cer. fasciatus Bosc serait en Eu- 
rope beaucoup plus rare que Cer. consimilis Wagn., Cer. penicilliger Grube, 
Cer. lagomys Wagn., Cer. mustelae Wagn., mais je n’ai jamais rencontré ces 
espèces sur les Rats d'Italie. 

(2) Ces auteurs ont trouvé 45 Cer. fasciatus sur 52 Puces, chez les « Rats de 
terre » et 6 seulement sur 250 Puces chez les « Rats de navires ». 

(3) Le véritable Cer. fasciatus « kann leicht, von der gewôhnlichen Maus oder 
Hausratte gewonnen werden ». 

(4) J’ai observé le véritable Cer. fasciatus Bosc ‘très fréquemment sur le Mus 
decumanus dans toutes les provinces d'Italie (et aussi sur les navires du port de 
Gênes); il représente l’espèce la plus répandue sur ces Rats. Je l’ai vu plus rare- 
ment sur le Mus rattus-alexandrinus (presque partout, notamment dans la pro- 
vince de Caserte, sur les navires, etc.) et sur l’Arvicola Savii (province de Ca- 
serte), plus rarement encore sur le Mus musculus (Turin, etc.)et sur le Mus silva- 


ticus (Come, etc.); en dehors des Rats, Souris etc. j'ai eu l’occasion de le rencon- 
trer sur le Hyoxus glis. 


(5) Journal of hygiene, VI, p.484-485, 1906. 


596 CARLO TIRABOSCHI 


donc Mus decumanus et Mus rattus, en particulier ceux de l’Europe; 
d'après Liston, le Rat le plus parasité par Cer. fasciatus serait le 
Mus decumanus. 

D'après mes expériences et celles de Galli-Valerio, et suivant 
aussi Wagner, Nuttall, etc., le C. fasciatus ne pique pas l'Homme: 
au contraire, selon Gauthier et Raybaud et selon Tidswell, il peut 
sucer le sang de l'Homme ; les deux premiers observateurs affir- 
ment même que « un C. fasciatus a survécu 20 jours malgré son ré- 
gime exclusivement humain » (1). 

Pour la description du véritable Cer. fasciatus et des espèces 
suivantes, je renvoie à mon mémoire précédent (4, p. 263-275). 


CERATOPHYLLUS LONDINIENSIS Rothschild. 


Ceratophyllus italicus Tiraboschi. 

Sous le nom de C. italicus nova sp., j'ai décrit en 1904 (4, p. 266) 
une Puce, très voisine du C. fasciatus Bosc, et que j'avais observée 
assez fréquemment en Italie sur les mêmes Rongeurs que l'espèce 
précédente, c'est-à-dire sur Mus decumanus, Mus rattus-alexandri- 
nus, Mus musculus, Mus silvaticus, Arvicola Savii; maintenant je 
vois que mon C. italicus est identique à C. londiniensis Roth., 
décrit par ce savant en 1903 et dont je n'avais pas connais- 
sance lors de la publication de mon mémoire; je n'ai pas à ma 
disposition des spécimens de Cer. londiniensis Roth., mais la 
description et la figure (de l’appareil de fixation du mâle) don- 
nées par Rothschild correspondent tellement aux miennes que 


(1) Les différents exemplaires de Cer. fasciatus, mis en expérience par Gau- 
thier et Raybaud, ne se sont pas comportés tous également ; 3 échantillons, pla- 
cés sur l’avant-bras de À, ont piqué pendant un temps assez court, laissant une 
seule marque punctiforme, sans aréole périphérique ni pétéchies; ils ont été 
conservés en tubes respectivement 2, 4, 8 jours faisant chaque jour 1 à 2 repas, 
dont la durée augmenta progressivement de 2 à 9 minutes; les piqûres qui dans 
les premiers jours ne laissaient que des traces à peine perceptibles, détermi- 
naient ensuite sur la peau des pétéchies très nettes et prurigineuses. Deux au- 
tres échantillons, placés sur l’avant-bras de C après 48 heures de jeûne, ont pi- 
qué immédiatement; avec la loupe on les vit rougir et se gonfler; la piqüre fut 
nettement ressentie. Un autre spécimen, laissé à jeûn depuis 24 heures et placé 
à la région interne de la jambe de B, fit ainsi plusieurs repas dans la journée 
(4 applications, 4 piqüres). Enfin l’exemplaire qui a survécu 20 jours, nourri 
d'ordinaire sur l’avant-bras de C, prit de temps en temps sans difficulté un repas 
sur D; les marques des piqüres n'étaient pas constantes, toujours fort peu pru- 
rigineuses, plus accentuées sur D que sur C. 

D’après Tidswell, C. fasciatus piqua une seule fois un des assistants. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 997 


je n'hésite pas à reconnaître que C. italicus Tirab. est synonyme 
de C. londiniensis Roth. (1). 

Cer. londiniensis Roth. a été capturé en grand nombre sur Mus 
musculus, à Londres (South Kensington), en 1900. 

D'après mes expériences, cette Puce ne pique pas l'Homme. 


CERATOPHYLLUS CONSIMILIS Wagner, C. MUSTELAE Wagner, 
C. Lacomys Wagner, C. PENICILLIGER Grube. 


Suivant Rothschild (in litt.), toutes ces espèces, voisines du Cer. 
fasciatus Bosc, représentent les espèces que l’on rencontre le plus 
souvent en Europe sur le Mus decuma- 
nus ; j'ai déjà dit que je ne les ai jamais 
observées sur les Rats d'Italie. | 


. di dm 
* ni 


CErarToPHYLLUSs WaLkeri Rothschild. 


Cette espèce, très voisine du C. lagomys Fig.12.— Ceratophyllus Wal- 
x7 RAR : : keri Roth.; appareil de fi- 
Wagn., a été HOUNEE par Fais . nan otre 
Angleterre : la première fois dans le nid  schild. d à, doigt immobile; 
, : : : d m, doigt mobile; m, ma- 
d ue Souris), . Chattenden, puis SUT }priwm. 
Arvicola amphibius et sur Evotomys gla- 
reolus à Tring, etc. — Caractérisée par la structure des tenailles du 
oc‘ et surtout par celle du doigt mobile (fig. 12, dm); très foncée et 


longue de 3°". 
CERATOPHYLLUS PINNATUS Wagner. 


Capturé en 1906, à New-Alexandria, sur Mus sp. (Tiraboschi, 4, 
D270) 
CERATOPHYLLUS GALLINÆ SChrank. 
Cette Puce, qui est particulière des Oiseaux, a été observée aussi 


(près de Brighton, par Rothschild) sur la Noctule et sur le Hus sil- 
vaticus. | 


CERATOPHYLLUS SILANTIEWI Wagner. 


Cette espèce, à vrai dire, n’a pas été observée sur les Rats, ni sur 


(1) Je viens de recevoir une lettre de Rothschild, auquel j'avais envoyé des 
spécimens de mon C. italicus et qui les a trouvés tout à fait identiques à ses 
échantillons de C. londiniensis. 


598 CARLO TIRABOSCHI 


les Souris, ni sur les Campagnols, mais sur le Tarabagan (Arctomys 
bobac Schreber) (1), en Russie (voir p. 550). 

Nous citons encore : C. ABANTIS Roth., C. LucIFER Roth., et C. 
POLLIONIS Roth., décrits par Rothschild (8, p.164,170,171) et trouvés 
sur Microtus Drummondi dans le Canada ; C. AGILIS Roth. (8, p. 167), 
trouvé aussi dans le Canada sur un Wood-rat; et enfin CER. CALIFOR- 
nicus Baker, capturéen Californie sur un Campagnol des champs (2), 


Genre OpontoPsyLzzius Baker. 


D'après Baker (2, p. 129 et 131), ce genre est très voisin du genre 
Ceratophyllus et s'en distingue par la présence de denticules à la 
surface interne des hanches postérieures (comme chez le genre 
Pulex; voir à la page 580). Baker décrit ici 4 espèces, dont une ou 
deux seules nous intéressent. 


ODONTOPSYLLUS CHARLOTTENSIS Baker. 


Baker : 4, p. 390 et 2, p. 131; Rothschild : 8, p. 174 (Ceratophyllus 
charl.). 

Cette espèce a été trouvée la première fois (Baker) dans le nid 
d'une Souris à Masset (Queen Charlotte Islands), puis (Rothschild) 
sur d’autres Rongeurs, dans le Canada. Denticules des hanches 
postérieures disposés dans une seule rangée. Voir la description et 
les figures de Baker et de Rothschild. 

Le CERATOPHYLLUS (ODONTOPSYLLUS) TELEGONI Roth. est très voisin 
du Odontopsyllus charlottensis. Il a été décrit par Rothschild (8, 
p. 172), et trouvé sur Microtus Drummondi dans le Canada. 


Genre PyGropsyzia Rothschild. 


D'après Rothschild (4, p. 221), ce genre est lui aussi très rappro- 
ché du genre Ceratophyllus, duquel ilse distingue surtout par l’ab- 
sence des tubercules frontaux (voir p.593) Des huit espèces placées 
dans ce genre, une seule nous intéresse. 


(1) Sur cette espèce d’Arctomys on a rencontré seulement le C. Silantiewi W.; 
sur l’Arctomys monax, au contraire, on a observé : C. arctomys Baker, C. 
pseudarctomys B., C. Wackhami (B.) W.; sur Arctomys flaviventer avarus : C. aca- 
mantis Roth. 

(2) Baker dit (4, p. 395) : sur un « Field Mouse » qui serait le Campagnol vul- 
gaire (Microtus arvalis Pallas), mais dans l’« Host Index » il nomme le Microtus 
californicus. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 999 


PyGiopsyYLLA coLossus Rothschild. 


On connaît de cette espèce un seul exemplaire ®, capturé à Ho- 
bart (Tasmanie) sur un Tasmanian Rat (Mus sp. ?). — Longueur : 
Anms, 


Sous-famille des Typhlopsyllinae Tiraboschi. 


Genre CrEexoPsyLLa Kolenati. 


Tête paraissant comme un cône, ordinairement pourvue d'épines 
et (dans la moitié postérieure) de nombreuses séries de soies ; fos- 
settes antennales fermées à leur extrémité supérieure; yeux 
absents, ou rudimentaires, ou incomplètement pigmentés. Jamais 
de peignes sur le métathorax et sur les segments abdominaux. 
Soies au bord postérieur des jambes rapprochées l’une de l’autre 
et rangées en une série en forme de peigne; au dernierarticle des 
tarses postérieurs, 4 paires de soies latérales et 1 paire de soies ac- 
cessoires; soies unguiculaires très petites. Jamais de soies, parfois 
quelques poils, à l'angle postéro-supérieur des tenailles ; pas de 
saillie triangulaire au bord postérieur; parfois une soie impaire 
en dessus de l'articulation du doigt mobile. 

Depuis 1903, des espèces nouvelles ont été décrites ici par Baker 
et par Rothschild, etc.; nous en décrivons 7. 


CTENOPSYLLA MUSCULI Dugès. 


Ctenopsyllus mexicanus Baker. 

Typhlopsylla musculi : citée par Galli-Valerio, Tidswell, Nuttall, 
Gauthier et Raybaud, etc. 

Cette Puce a été rencontrée presque exclusivement sur les Rats 
et sur les Souris. Son véritable hôte paraît être Mus musculus (et 
peut-être aussi Mus rattus), chez lequel on l'a observée fréquem- 
ment et abondamment dans plusieurs régions de l'Europe : Hollan- 
de (Ritsema), Halle (Taschenberg), Danemark (Meinert), Bade 
(Hilger), Suisse (Galli-Valerio), Angleterre (Rothschild), Italie (Ti- 
raboschi). En Italie elle est l'espèce de Puce la plus répandue sur 
le Mus musculus, soit sur les individus vivant en liberté (dans 
toutes les provinces d'Italie), soit sur les Souris domestiques (je 


600 CARLO TIRABOSCHI 


l'ai observée en quantités inouïes sur les Souris blanches du labo- 
ratoire). 

Sur les Rats aussi (Mus decumanus et notamment Mus rattus- 
alerandrinus) elle a été fréquemment et abondamment observée 
en Europe, à peu près dans les mêmes régions que sur Mus muscu- 
lus; d'après moi, elle représente l'espèce de Puce la plus répandue 
chez le Mus rattus d'Italie, surtout chez la variété à ventre blanc; 
je l'ai rencontrée sur des individus capturés dans toutes les régions 
d'Italie, y compris les villes de Gênes, Venise, etc., etaussi sur ceux 
pris dans les navires du port de Gênes; la même distribution a été 
observée relativement au Mus decumanus ; seulement Ct. musculi 
y est bien plus rare. Selon Gauthier et Raybaud (à Marseille), sur 
160 Puces capturées sur un Rat (Mus sp.), 158 étaient Ct. musculi et 
sur 250 Puces prises sur des « Rats de navires », 178 étaient Ct. 
musculi; au contraire, sur 52 Puces, recueillies sur les « Rats de 
terre », 2 seulement étaient Cf. musculi. Enfin, d’après Roth- 
schild (1), en Angleterre et en Irlande Ct. musculi infeste parfois 
les Rats (Mus decumanus seulement ?) en quantités considérables- 

CT. musculi a été rencontrée sur les Rats, même en dehors de l'Eu- 
rope, c'est-à-dire : en Amérique et plus particulièrement au Mexique 
et aux États-Unis (Baker) (2), en Afrique (à Prétoria, sur Mus rattus: 
un seul exemplaire, d'après Rothschild) (3), en Australie et plus 
précisément à Sydney (Tidswell, qui l’a observée dans 8 pour cent 
des cas, sur les «Rats de la ville »). 

Enfin C€. musculi a été capturée : sur Mus silvaticus,en Italie, par 
Tiraboschi; sur Mus agrarius, à Halle, par Taschenberg ; sur Micro- 
tus arvalis, etc. 

D'après les observations concordantes de Nuttall, Galli-Valerio, 
Tiraboschi, Wagner (in litt.) et Tidswell, Ct. musculi ne pique pas 
l'Homme ; Gauthier et Raybaud, touten disant que les Puces para- 
sites des Rats et des Souris piquent toutes l'Homme sans difficulté, 
ne désignent pas expressément Ct. musculi, que pourtant ils ont 
trouvée très fréquente sur les «Rats de navires ». 


(1) Journal of hygiene, VI, p. 483, 1906. 

(2) Baker d’après des exemplaires provenant de Guanajuato (Mexique) et cap- 
turés par le D' Dugès sur Mus rattus et Mus decumanus, établit une espèce nou- 
velle /Clenopsyllus mexicanus), que maintenant (2, p. 156) lui aussi, suivant 
Wagner et Tiraboschi (4, p. 278, note 1), considère commeidentique à Cé.museuli. 

(3) Journal of hygiene, NI, p. 485, 1906. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 601: 


Pour les caractères de Ct. musculi, je renvoie à ma description: 
(4, p. 278-281). 


CTENOPSYLLA SPECTABILIS Rothschild. 


Capturée en 1898 sur Evotomys glareolus, à North Berwick (Tira- 
boschi, 1, p. 282). 


CTENOPSYLLA TASCHENBERGI Wagner. 


Capturée sur us silvaticus (dans le Caucase) et sur d’autres Ron- 
geurs (Tiraboschi, 1, p. 284). 


CTENOPSYLLA AGANIPPES Rothschild. 


Cette espèce nouvelle a été établie en 1904 par Rothschild, d'après 
un seul exemplaire ©, pris 
en 1902 sur Mus sp., à 
Deelfontein (Coionie du 
Cap). Pour les caractères 
je renvoie à la description 
et aux figures de Roth- 
schild (7, p. 647). 


CTENOPSYLLA ELLOBIUS 
Rothschild. 


Décrite en 1905, d'après 
unexemplaire oc", recueilli 
à Sibudeni, Zululand, en 
1903, sur Mus sp., et 2 Fig. 13. — Stephanocircus Simsoni Roth, ; tête 
a et1@ pris en 1904, de la femelle, d’après Rothschild. : 
dans la Colonie du Cap, sur Crocidura flavescens (8, p. 490-491). 

Nous citons encore : CTENOPSYLLA PECTINICEPS Wagner, trouvée 
sur Microtus æconomus, dans la Transbaïkalie (Tiraboschi, 4, p. 283) 
et CTENOPSYLLA SELENIS Roth., observée sur Microtus Drummondi et 
d'autres Rongeurs, dans le Canada (Rothschild, 12, p. 322). 


Genre STEPHANOCIRCUS Skuse. 


= 


Comme je l'ai déjà dit (4, p. 275), ce genre est voisin du genre 
Ctenopsylla; Baker (2, p. 136) réunit les deux genres dans une fa- 
mille : Ctenopsyllidae. Le genre Stephanocircus est très bien carac- 
térisé par une couronne (57#pzx) d'épines sur la tête (fig. 13). Pour les 


602 CARLO TIRABOSCHI 


autres caractères et pour la description et les figures des espèces 
citées ci-dessous, je renvoie à Baker (4, p. 430), à Rainbow et à 
Rothschild (3, p. 60-62; 5, p. 545; 6, p. 318 et 319). 

Ce genre comprend actuellement 5 espèces, dont 3 nous intéres- 
sent : STEPHANOCIRCUS THOMASI Roth. (1) (1 ©, prise en 1901, sur 
Mus ferculinus, en Australie), STEPHANOCIRGUS pASYUR1 Skuse et STE- 
PHANOCIRCUS SIMSONI Roth., dont quelques spécimens ont élé cap- 
turés sur Mus velutinus en Tasmanie. 


Genre TyPHLOPSYLLA sensu stricto Wagner. 


Genre Ctenophthalmus Kolenati. 

Tête régulièrement arrondie en avant, pourvue d'épines sur les 
joues. Série des soies oculaires comprenant ordinairement 3 soies 
fortes, presque égales, équidistantes, la première étant placée sur 
le bord antérieur des fossettes antennales; du sommet postérieur 
de la tête jusqu’à l'insertion des palpes maxillaires, une longue sé- 
rie de 10 soies, dont 5 en arrière des fossettes antennales et 5 (par- 
fois 6) en avant, celles-ci décroissant en longueur. Yeux ordinaire- 
ment rudimentaires. Un peigne au prothorax; jamais de peignes 
sur les métathorax et sur les segments abdominaux. Soies au bord 
postérieur des jambes rangées en couples. Soies latérales du der- 
nier article des tarses postérieurs au nombre de trois, la 3° étant 
plus éloignée de la 2e que celle-ci de la 1"; dans l'intervalle, un poil; 
deux soies accessoires (subbasal spines de Baker) bien développées 
et 2 soies unguiculaires (subapical spines de Baker). A l'angle 
postéro-supérieur des tenailles du mâle, des broussailles de soies 
longues et fortes ; au bord postérieur une saillie triangulaire jouant 
le rôle de doigt immobile; en dessous de cette saillie, ordinaire- 
ment, une soie impaire. 

Depuis 1903, on a décrit ici (Baker, Rothschild, Kohaut, etc). des 
espèces nouvelles. Les espèces qui nous intéressent sont 4 seule- 
ment. 


TYPHLOPSYLLA ASsIMILIS Taschenberg. 


Cette espèce a été trouvée en Europe dans le nid d’une Souris et 
sur : Mus silvaticus, Arvicola amphibius, Microtus arvalis, Microtus ni- 
valis, Evotomys glareolus; de plus, sur Talpa europæa, etc. D'après 


(4) Ne pas confondre avec Ceratophyllus Thomasi décrit par le même auteur 
(7, p. 625). 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 603 


Wagner, son véritable hôte serait Microtus arvalis. Pour la descrip- 
tion, voir Tiraboschi, 1, p. 286-288. 


T'YPHLOPSYLLA AGYRTES Heller. 


Observée en Angleterre, par Rothschild, sur Mus musculus, Mus 
silvaticus, Arvicola amphibius (sur ce Campagnol Rothschild a trouvé 
aussi une variété nouvelle : T. agyrtes, subsp. nobilis), Evotomys 
glareolus et sur d’autres animaux; par Wagner, sur Mus sp. et sur 
Microtus arvalis. D'après Wagner, le véritable hôte serait Mus silva- 
ticus ou Microtus arvalis. Pour la description, voir Tiraboschi, 1, 
p. 289-291. 

TYPHLOPSYLLA PSEUDAGYRTES Baker. 

Ctenophthalmus pseudagyrtes : Baker, 1, p. 421 et Rothschild, 7, 
p. 641. 

Pour cette espèce, que j'ai déjà citée dans mon mémoire précé- 
dent (1, p. 290), je renvoie à Baker et à Rothschild. Elle a été trou- 


vée, par Rothschild, dans le Canada, sur Microtus Drummondi et 
Microtus saturatus. 


TYPHLOPSYLLA PROXIMA Wagner. 

(Tiraboschi, 1, p. 292). Capturée dans le Caucase, sur Mus silvati- 
cus et Sorex araneus. 

Genre NEopsyLLa Wagner. 

Très rapproché du genre précédent. Soies latérales du dernier 
article des tarses postérieurs au nombre de 4; soies accessoires 
absentes. Pas de saillie au bord postérieur des tenailles; soie im- 
paire peu développée ou absente. Nous citons ici trois espèces. 

NEOPSYLLA BIDENTATIFORMIS Wagner. 

Observée par Wagner sur Mus decumanus en Crimée et sur Sper- 
mophilus sp. en Sibérie et dans le Caucase (Tiraboschi, 1, p. 292). 
NEOPSYLLA PENTACANTHUS Rothschild. 

Observée par Rothschild, en Angleterre, sur : Mus silvaticus, Mi- 
crotus agrestis, etc.; d'après Wagner, son véritable hôte serait Mus 
silvaticus ou Microtus agrestis (Tiraboschi, 1, p. 293.). 

NEOPSYLLA ISACANTHUS Rothschild. 


Très rapprochée de N. pentacanthus ; espèce nouvelle, créée tout 
récemment par Rothschild (4 bis) et capturée sur Evotomys glareolus. 


604. CARLO TIRABOSCHI 


Genre TypHLOCERAS Wagner. 

D'après Wagner, ce genre serait rapproché d'un côté du genre 
Ceratophyllus et de l’autre côté du genre Typhlopsylla, d'où le nom; 
au contraire, suivant Rothschild, il est rapproché du genre Typhlo- 
psylla et du genre Hystrichopsylla et c'est ici, en effet, que je l'avais 
déjà placé (1, p. 295: voir 
à cette page les caractè- 
res du genre). Rothschild 
décritiei2 espèces: T. Pop- 
pei quiest laseule quinous 
intéresse et T. Rosenbergi, 
que Baker place dans le 
genre Paiæopsylla (Tira- 
boschi, 4, p. 294). | 


TYPHLOCERAS PoPPEI 
Wagner. 


J'ai déjà résumé (1, 
p. 295-296) la description 
que de cette espèce a don- 
née Wagner en 1902, d'après un seul exemplaire ® découvert 
par Poppe en 1898, sur Mus silvaticus, à Vegesack, près de Brême; 
Rothschild ayant reçu plusieurs spécimens et ®, capturés tous 
sur Mus silvaticus, en 1900-1903, dans plusieurs localités de l’Angle- 
terre, compléta (10) la description de Wagner (fig. 44). Le véri- 
table hôte de cette Puce serait donc le Mulot, sur lequel exclusi- 
vement elle a été observée jusqu'à présent. 


Fig. 14. — Typhloceras Poppei Wagner. — Ap- 
pareil de fixation du mâle, d’après Rothschild. 


Sous-famille des Hystrichopsyllinae Tiraboschi. 


Baker (2, p.136) a élevé cette sous-famille à la dignité de famille. 
Au genre Hystrichopsylla il faut maintenant ajouter le genre Macro- 
psylla Rothschild (et aussi le genre Uropsylla Roth.,qui par quelques 
caractères ressemble au genre Macropsylla ?). 


Genre HysrricHopsYLLaA Taschenberg. 


Tête tronquée en avant. Yeux absents ou rudimentaires. Peignes 
d'épines sur les joues et au bord postérieur du prothorax et de quel- 
ques segments abdominaux. Tout le corps pourvu desoies et de poils 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 605 


extraordinairement nombreux (ÿsraë, ÿsruyoc). Appareil de fixation 
du œ pourvu ordinairement d’une pièce accessoire. 

Cinq espèces, dont trois nous intéressent. 

HYSTRICHOPSYLLA TRIPECTINATA Tiraboschi. 

Observée par moi (1, p. 297-299), sur Mus musculus, à Rome. Le 
seul exemplaire que j'ai mis en expérience et qui n’était pas à jeûün, 
ne m'a pas piqué. à 

HYSTRICHOPSYLLA TALPAE Curtis. 
. Observée dans plusieurs régions de l’Europe et sur plusieurs ani- 
maux (Tiraboschi, 4, p.301), dont je cite ici : Mus silcaticus, Microtus 
arvalis, Microtus agrestis, Evotomys glareolus. 


Fig. 15. — Macropsylla hercules Roth.; tête, d’après Rothschild. 


HYsTRICHOPSYLLA NARBELI Galli-Valerio, 


Observée par Galli-Valerio sur Microtus nivalis, en Suisse (Tira- 
boschi, 4, p. 301). 


606 CARLO TIRABOSCHI 


GENRE MacroPsyzLa Rothschild. 


Comprend jusqu'à présent une seule espèce, longue de 5mm2, 
capturée en Tasmanie sur Mus velutinus et sur Mus sp. : 


MACROPSYLLA HERCULES Rothschild. 


Pour les caractères du genre et de l'espèce je renvoie à Rothschild 
(8, p. 486). 


FAMILLE DES SARCOPSYLLIDAE Taschenberg. 


Rhynchoprionidae et Hectopsyllidae : Baker, 2, p. 124; Sarcopsyl- 
lidae : Tiraboschi, 4, p. 302; Rothschild, 44. 

Pas de peignes. Palpes labiaux plutôt longs, mais très faibles 
et fragiles, pâles, peu chitinisés (voir p.574), résultant de 1 ou 2 ar- 
ticles seulement; mâchoires petites, peu saïllantes; appareil perfo- 
rateur très développé (voir p.573); mandibules larges, longues et 
fortes. Extrémité génale de la tête toujours prolongée en bas et en 
arrière dans un processus, placé derrière l'insertion des mâchoires. 
Bandes dorsales des segments thoraciques plus courtes que celle du 
premier segment abdominal. 

Pour tout ce qui regarde cette famille (histoire, morphologie, 
biologie, description des espèces, etc.) je renvoie au mémoire très 
intéressant de Rothschild (41). Ce savant rassemble ici 14 espèces 
partagées en trois genres, dont voici la clef analytique : 


(a) Hind coxa with patch of spines on inner side, ÆEchidnophaga. 
Hind coxa without such a patch of spines. . b 


(b) Hind femur with large basal tooth-like pro- 
jeCtON a DIN PNR ETC CT O DS y TIU 
Hindemur simple ARE Rats 


Genre DERMATOPHILUS (Guérin) Rothschild. 


Sarcopsylla partim : Tiraboschi, 4, p. 302; Baker, 1, p. 374; Rhyn- 
choprion : Baker, 2, p. 125; Dermatophilus : Rothschild, 14, p. 65. — 
Deux espèces. 


DERMATOPHILUS PENETRANS Linné. 


Sarcopsylla penetrans etc. : Tiraboschi, 4, p. 307; Rothschild, 
A1, p. 67. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 607 


J'ai déjà dit que cette espèce attaque l'Homme et bien des ani- 
maux, parmi lesquels on l’a observée aussi sur Microtus arvalis. 


DERMATOPHILUS CÆCATA Enderlein. 


Tiraboschi, 4, p. 306; Rothschild, 44, p.70. Cette Chique a été dé- 
crite par Enderlein, d'après 17 exemplaires © capturés sur Mus 
rattus à Piracicaba, Sao Paulo (Brésil). 


Genre EcHipNopxAGaA (Olliff) Rothschild. 


Sarcopsylla partim : Tiraboschi; Xestopsylla : Baker, 1,p. 174; Ar- 
gopsylla et Echidnophaga : Baker, 2, p. 138; Echidnophaga : Rothschild 
11, p. 43. Ce genre comprend 8 espèces, dont 2 seulement nous in- 
téressent. 


ECHIDNOPHAGA RHYNCHOPSYLLA Tiraboschi. 


Sarcopsylla rhynchopsylla : Tiraboschi, 1, p. 309; Ech. muri- 
na : Rothschild, 44, p. 55; Argopsylla rhynchopsylla : Baker, 2, 
p. 125. 

J'ai capturé cette espèce de Chique sur Mus rattus-alerandrinus 
de quelques régions d'Italie; tous les spécimens que j'ai observés 
(femelles), étaient solidement fixés par leur appareil perforateur 
dans la peau de l'hôte (généralement sur le museau). Kohaut et 
Wagner (in litt.), à qui j'en ai envoyé des échantillons, ontconfirmé 
qu'il s’agit ici vraiment d’une espèce nouvelle. Rothschild, qui a 
étudié les spécimens envoyés à Kohautest du même avis ; il nomme 
(1906) cette espèce : Echidnophaga murina; à cause de la loi de la 
priorité, il faut conserver le nom de Ech. rhynchopsylla, sous lequel 
j'ai décrit la première fois (1904) cette espèce nouvelle. La création, 
de la part de Rothschild d'un nom nouveau pour désigner une 
espèce déjà pourvue de son nom spécifique, dépend peut-être de ce 
qu'il donne comme synomyme de Ech. murina (= Sarcopsylla rhyn- 
chopsylla Tirab. 1904) la Sarcopsylla gallinacea décrite par moi en 
1902, 1903 et même en 1904. C'est là une erreur; en effet, j'ai déja 
dit dans mon mémoire de 190% (4, p. 303-305 et 309-310) que j'ai 
capturé sur le Mus rattus-alexandrinus d'Italie non seulement la 
Sarcopsylla rhynchopsyllaTirab. (p. 309-310) maïs aussi la véritable 
Sarcopsylla gallinacea Westwood (p. 303-305) ; je considérais d'abord 
la Sarcopsylla rhynchopsylla comme étant une simple variété (var. 
murina ou var. italica) de la S. gallinacea; cela a donné lieu à une 


608 CARLO TIRABOSCHI 


confusion, que j'avais déjà corrigée dans ma note rectificative (4, 
p. 626), où je faisais remarquer qu'il fallait supprimer les 3 der- 
nières lignes de la p. 305 et les 31 premières lignes de la page 
306, qui contenaient la description de la S. rhynchopsylla, trans- 
portée aux pages 309-310. 

Rothschild a complété cette description, en y ajoutant des carac- 
tères différentiels, dont la plupart sont dessinés dans ma figure. 
11 y a une seule divergence: d'après moi, les bandes dorsales des 
segments abdominaux ont une seule soie impaire; suivant Roth- 
schild, elles en ont une par côté. 


ECHIDNOPHAGA GALLINACEA WesTrwood. 


Sarcopsylla gallinacea : Tiraboschi, 4, p. 303-305 ; Argopsylla gall. : 
Baker, 2, p. 125; Echidnophaga gall : Rothschild, 44, p. 52. 

J'ai capturé des échantillons de cette espèce sur le même hôte et 
à peu près dans les mêmes conditions que les spécimens de l’es- 
pèce précédente; à elles deux, elles représentent les deux seules 
Chiques, que l’on a observées jusqu'à présent en Europe. De plus 
j'ai trouvé Echidn. gallinacea bien au delà de la dernière limite de 
latitude Nord, où on l'avait observée auparavant, et sur un hôte 
nouveau, le Rat domestique. En ce qui regarde les autres hôtes et 
les autres localités infestées par la Chique des Oiseaux. je renvoie 
à la page 305 de mon premier mémoire (1); pour la description, 


u 


voir aussi Rothschild, 44, p. 52-54. 


V. — Les Pédiculidés et les Acariens parasites 
des Rats, etc. 


J'ai déja observé dans mon mémoire précédent (1, p. 311) que si 
l'on ne peut aflirmer d'une manière absolue que les Poux ne jouent 
aucun rôle dans la propagation de la peste, on doitadmettre qu'ils 
ne peuvent pas être des agents propagateurs aussi actifs que les 
Puces. Aux observations relatives aux Pédiculidés, que j'ai déjà 
résumées, il faut ajouter ici celles de Skinner et celles de Herzog. 

Herzog, qui n’attribue pas aux Puces une grande importance 
dans la diffusion de la peste, décrit (parmi les 20 cas de peste ob- 
servés par lui à Manille en 1904) un cas dans lequel le transport de 
l'infection fut accompli, selon toute probabilité, par le Poux de 
tête, de l'Homme (Pediculus capitis. Nit z; (ce cas concerne un 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 609 


enfant, frappé de véritable peste bubonique, et montrant des bu- 
bons primaires dans la région cervicale ; à l’autopsie on observa 
aussi que (in der behaarten Kopfhaut laufen ein Anzahl von Pedi- 
culus capitis unruhig umbher ; drei derselben werden mit steriler 
Pincette in leere sterile Rôhrchen und spâter in je 50 ccm. einer 
leicht alkalischen Nährbouïillon eingebracht ». « Es gelang von 
allen drei Pediculus capitis typische Pestculturen zu erlangen » 
(p. 276-277). 

Herzog rappelle aussi (p. 271) le fait (observé par la Commission 
anglaise dans les Indes, 1901) de la très grande mortalité (S pour 
cent environ, tandis que la mortalité générale fut de 2 pour 
cent seulement) constatée à Bombay en 1896 parmi les individus 
appartenant à la caste des (Janis », qui regardent comme sacrés tous 
les animaux et sont fortement infestés par les Insectes parasites ; 
d'après Herzog, cette circonstance « sicher (?) einigermaassen dafür 
spricht, dass ue eine Rolle bei der Uebertragung der Pest 
spielen künnen. 

Je n'ai pas eu à ma disposition les notes ÉAubénee Skinner,mais 
j'en ai lu le résumé de la Deutsche med. Wochenschrift, d'où j'ap- 
prends que, suivant Skinner, le transport de la peste peut avoir 
dieu par l'intermédiaire des Poux du bétail (Rindviehläuse), qui 
peuvent infester non seulement les Hommes, mais aussi les 
Rats. 

Pour tout ce qui concerne la taxinomie, la morphologie, la bio- 
logie et la classification des Pédiculidés, je renvoie à mon travail 
précédent (1, p.312-314)etaux mémoires très intéressants de Ender- 
lein(1); cet auteur a donné une descripuon très détaillée et très 
exacte de la morphologie du corps des Poux et notamment de leur 
appareil buceal. 

Les Pédiculidés appartiennent à l’ordre des RHYNcHoTA: cet 
«ordre comprend, d'après Enderlein, 5 sous-ordres, dont un 
seulement nous intéresse, celui des AxoPLurA. Ce dernier, toujours 
d'après Enderlein, comprend #% familles : celles qui nous intéres- 
sent sont les familles des Pediculidae et des Hæmatopinidae. Voici 


un tableau des genres comprenant des espèces parasites des Rats, 
CIC 


(4) Zoologischer Anzeiger, XXVHI, p. 121-147,220-233 et 626.638; XXIX, p. 192- 
49%, 1905-1906. 


Archives de Parasitologie, XI, n° 4, 1907. 40 


610 CARLO TIRABOSCHI 
Familles Sous-familles Genres 
PEDICUEIDAE PEDICULINAE Pediculus L. 
HÆMATOPININAE Hæmatopinus Leach. 


yplax End. 
| Hoplopleura End. 
| TRICHAULINAE | 


Le genre Pediculus L. comprend les deux espèces parasites de 
l'Homme : P. vestimenti Nitzsch et P. capitis Nitzsch. Nous avons 
vu ci-dessus que le Poux de tête a été accusé récemment par Her- 
zog d'être un agent propagateur de la peste; chez cet Insect suceur 
on a observé le phénomène, constaté aussi chez les Puces (voir p.575), 
du sang expulsé par l'ouverture anale sous forme de jets; nous 
dirons enfin que P. capitis, transporté sur les Rats (Mus decumanus), 
les pique et en suce le sang. 

On plaçaitjadis dansle genre Hæmatopinus Leach (de la sous-famille 
des Hæmatopininae) toutes les espèces rencontrées sur les Rats; 
cependant la plupart de ces espèces (que j'ai décrites, 4, p. 316-319) 
ont été transportées par Enderlein dans le nouveau genre Polyplax 
End., appartenant à une autre sous-famille : Trichaulinae. D'après 
cet auteur, la forme typique du genre serait : 


HÆMATOPINIDAE 


POLYPLAX SPINULOSUS Burmeister. 


J'ai déjà donné une description et des figures de cette espèce 
(Hæmatopinus spinulosus Burm., 4, p.316), car elle avait été observée 
par Piaget sur Mus decumanus. Plusieurs spécimens de cette espèce 
ont été trouvés ensuite sur le même hôte, par Gast, près de Dessau, 
en 1897, et puis d’autres sur les Rats blancs, par Rômer, à Frank- 
furt a. M., et enfin, en 1904, par Enderlein, sur un Surmulot, qui 
en était fortement infesté. J'ai rencontré aussi très fréquemment et 
parfois très abondammentle Polyplax spinulosus sur les Rats d’égout 
d'Italie et même sur les Rats domestiques; quelques individus de 
Mus decumanus (Rome, etc.) en étaient littéralement envahis 
(jusqu'à 300 Poux environ sur un seul Rat). 

Polyplax spinulosus Burm. serait donc l'espèce de Poux la plus 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE (61 


répandue sur le Surmulot; elle est peut-être l'espèce chez laquelle 
j'ai dit qu'en a observé l'expulsion du sang sucé sous forme de 
jets (voir p. 515). 

En ce qui concerne le développement du Trypanosoma Leiwvisi 
Kent dans le corps (estomac) du Polyplax spinulosus (qui est l'hôte 
intermédiaire de ce parasite du sang des Rats), je renvoie aux 
travaux de PROWAZEK. 


D'autres espèces parasites des Rats, etc., appartenant jadis au 
genre {æmatopinus et transportées maintenant dans le genre 
Polyplax, sont : P.spixiaer Denny, observé sur Arvicola amphibius ; 
P. sERRATUS Burm., capturé sur Mus musculus; P.ArrINIS Burm.. 
pris sur Mus silvaticus et sur Mus agrarius; P. SPIGULIFER Gervais, 
capturé sur Mus barbatus; et probablement aussi P. PR&cisus Neu- 
mann, trouvé sur Mus sp. — À ces espèces il fauten ajouter une autre : 
P. MIACANTHA Speiser, récemment décrite par Speiser (1), qui l’a 
rencontrée sur un petit Rat (Wus sp. ?) provenant de l’Abyssinie, 
celte espèce serait rapprochée de P. præcisus Neum. 

Enderlein plaçait aussi dans le genre Polyplax l'espèce que j'ai 
déjà décrite sous le nom de Hæmatopinus acanthopus Denny 
(1, p. 317); mais récemment il a transporté cette espèce dans un 
genre nouveau : Hoplopleura End., rapproché du genre Polyplax et 
appartenant à la même sous-famille. HOPLOPLEURA ACANTHOPUS à été 
observé sur Mus decumanus, Mus musculus, Microtus agrestis, Mi- 
crotus arvalis. 


En ce qui concerne les Acariens, je dirai seulement que Skinner 
que j'ai cité tout à l'heure, considère comme un véhicule de la 
peste le Hyalomma ægyptium (un Ixodidé), dont il donne la deserip- 
tion et la figure (n° 2337). Ce même auteur affirme (n° 2344) que la 
peste est transportée par les Tiques (1xodinae), «die in der trockenen 
lahreszeit auf Pflanzen hausen und von ihnen auf Menschen und 
Tiere übergehen. Dies geschieht hauptsächlich während der Wei- 
zenernte, die auch viele Ratten in die Felder lockt. Und so werden 
die Ratten ebenfalls infiziert, gleichwie Menschen, Vieh u. s. w. ». 


Je citerai enfin les observations de Simond relativement aux 
Puxaises : « Tandis que la Puce ne séjourne que temporairement 


(1) Centralblatt für Bakteriologie, Orig., XXXVIIL, p. 314-319, 


612 CARLO TIRABOSCHI 


pans les lits, la Punaise y élit domicile et ne s'en écarte pas. Si 
elle était fréquerniment infectieuse, on devrait donc observer, pour 
la peste, ce qui se présente pour le typhus récurrent, dont le Spiro- 
chète est inoculé à l'Homme par la Punaise; c'est-à-dire que le lit, 
où un individu a éprouvé la maladie, demeurerait source d'infection 
pour ceux qui y couchent après lui. Or, pour contracter la peste, 
il n’est pas besoin de coucher dans un lit d’une maison pestiférée; 
il suffit de passer quelques heures, parfois quelques instants, dans 
une telle habitation. De plus la Punaise n’est pas, comme la Puce, 
un parasite habituel des Rats ou des animaux domestiques; elle 
ne pourrait done servir d'intermédiaire ni entre les Rats, ni entre 
le Rat et l'Homme... Tout au plus pourrait-on supposer qu'elle 
sert, en quelques cas, de véhicule au Bacille pesteux pour le trans- 
porter d'Homme à Homme, si des observations nouvelles étaient 
apportées à l'appui de cette opinion. » Je rappelle que les expé- 
riences de transmission expérimentale de la peste, exécutées avec 
les Punaises, n'eurent jamais de succès : Nuttall en 1897, Kolle en 
1897 eten 1899-1900, etc., et tout récemment Kister et Schumacher, 
en 190% (voir p. 559). 


Conclusions. 


1° Les observations épidémiologiques de ces dernières années 
ont confirmé le fait, déjà établi, du rôle prépondérant que tes Rats 
(Mus decumanus et Mus rattus) et parfois aussi les Souris (Mus mus- 
culus) jouent dans l'apparition et dans la propagation de la peste 
bubonique. L'importance plus ou moins grande du rôle de Hus 
decumanus où de Mus rattus dépend peut-être de la prépondérance 
locale de l’une ou de l’autre espèce (p. 517-551). 

20 Les investigations épidémiologiques de ces dernières années, 
ajoutées à celles déjà publiées par Simond, Yersin, Blakmore, 
Chalmers, Hankin, Wernitz, Lydston, Tidswell, Thompson, etc., 
ont établi l’importance que les Puces peuvent avoir, dans la nature, 
relativement à la propagation de la peste de Rat à Rat, d'Homme à 
Homme et du Rat à l'Homme. Parmi ces investigations, celles de 
Hankin, de Liston et de Thompson sont les plus intéressantes et les 
plus importantes (p. 551-557). 

30 Les résultats des expériences de la Commission anglaise dans 
les Indes en 1905-1906 ont définitivement résolu la question de la 


“100 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 613 


possibilité de la transmission de la peste de Rat à Rat par l'inter- 
médiaire des Puces. Ces expériences, ajoutées à celles de Simond, 
de Gauthier et Raybaud, de Elkington, de Bannermann, ont été si 
nombreuses et si rigoureuses et leurs résultats si souvent positifs, 
que désormais le fait de la transmission de la peste par les Puces 
ne peut plus être mis en doute (p. 557-566). 

40 Les recherches de dissection et d'histologie des Puces (exé- 
cutées par la Commission anglaise) ont confirmé la présence, dans 
l'appareil perforateur et suceur de ces Insectes, de deux canaux 
distincts, l’un efférent, le long duquel la salive est convoyée dans la 
petite plaie de la piqüre et l'autre afférent, le long duquel le sang 
est aspiré dans l'estomac de la Puce. De même, les recherches de 
la Commission anglaise et celles de Rohtschild ont confirmé dans 
presque tous les détails le mécanisme de la succion tel que je l'ai 
décrit; les observations de Baker ont confirmé ce que j'avais déjà 
dit à propos du parasitisme des Puces (p. 569-578). 

9° Parmi les nombreuses espèces de Puces que j'ai décrites ou 
citées (p. 580-608), celles que l’on doit considérer comme lesvéhicules 
les plus importants de la peste de Rat à Rat, sont, en raison de 
leur plus grande diffusion sur ces Rongeurs: Pulex cheopis Roth. (et 
peut-être aussi quelques-unes des espèces voisines), Ceratophyllus 
fasciatus Bosc (et les espèces voisines), Ctenopsylla musculi Dugès, 
Ctenocephalus felis Bouché et Ctenocephalus canis Curtis. 

Celles que l’on peut regarder comme véhicules probables de la 
peste du Rat à l'Homme sont, non seulement en raison de leur dif- 
fusion, mais aussi de leur facilité à se transporter sur l'Homme et 
à le piquer : Pulex cheopis Roth. (et les espèces voisines ?), Cteno- 
cephalus felis Bouché, Pulex irritans L., Ctenocephalus canis Curtis, 
et peut-être aussi Ceratophyllus fasciatus où quelques-unes des 
espèces rapprochées de lui. 

C’est donc le Pulex cheopis Roth. qui,à présent, mérite le plus de- 
retenir l'attention comme le véhicule le plus important de la peste: 
de Rat à Rat et aussi comme véhicule probable de l'infection du 
Rat à l'Homme; cela en raison de sagrande diffusion sur les Rats (et 
en particulier sur les Rats des régions chaudes infestées par la peste: 
Indes, Australie, etc.), des résultats positifs (de transmission expéri- 
mentale de Rat à Rat) obtenus par la Comission anglaise avec cette. 
espèce de Puce, et enfin de la facilité avec laquelle Pulex cheopis se: 


614 CARLO TIRABOSCHI 


transporte, dans la nature, sur l'Homme, en l'absence de Rats 


(Liston) et le pique (Tiraboschi, Tidswell, Gauthier et Raybaud,, 


Liston). 

Les Chiques (Sarcopsyllidae) sont naturellement hors de considé- 
:ation, en raison de leur genre de vie. 

Il en estde même aussi, en général, pour les Pédiculidés et pour les 
Acariens, qui, bien qu'il ne soient pas liés à leur hôte comme les 
Chiques, ne se déplacent pas aussi vite que les Puces proprement 
dites. De même, les Punaises ne peuvent jouer ordinairement un 
rôle important dans la diffusion de la peste. 


INDEX BIBLIOGRAPHIQUE (1) 


ADVISORY COMMITTEE FOR PLAGUE INVESTIGATION IN INprA, Journ. of hygiene, 
VI, p. 421-536, 1906. 

AIrkEN, Times of India, 1899. 

4. Baxer, Proceedings of the U. S. national Museum, XXVI!, p. 365-469, 1904. 

2. Baker, Proceedings of the U. S. nat. Museum, XXIX, p. 121-170, 1905. 

4. BANNERMANN, Report of the Plague research Laboratory for the official 
Year ending 51 St March 1905. Bombay, 1906. (Cité dans le Bull. de l'Inst. Pas- 
teur 1906, p. 510). 

2. BANNERMANN, Journ. of hygiene, NT, p. 179-211, 1906. 

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4. Rorascuizn, The Entomologists Monthly Magazine, (2) XIV, p. 83-87, 1903. 

2. Roruscizp, lbidem, (2) XII, p. 225, 1902. 

3. Rorascuizo, 1biden, (2) XVI, p. 60-62, 1905. 


(1) Naturellement je ne donne pas ici la bibliographie qui a été déjà citée dans 
mes mémoires précédents; de même, j'omets les ouvrages qui ne sont pas men- 
tionnés dans le texte. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 615 


4. RorascniLp, Zbidem, (2) XVII, p. 221-224, 1906. 

4 bis. RorascmiLp, Zbidem, (2) XNIII, 1907. 6 

5. RornscniLp, Novitates zoologicue, NV, p- 533-545, 1898. 

6. Rornscairn, Zbidem, X, p. 317-325, 1903. 

7. Rorusomizn, Ibidem, XI, p. 602-653, 1904. 

8. RorasciLo, Ibidem, XII, p. 153-174; 192-193; 479-491, 1905. 

9. Rornscnicp, Ibidem, XII, p. 170-177, 1906. 

10. Rorascmizp, The Entomologists Record and Journ. of variation, XV, n° 3 
et 8, 1903. 

11. Rorascnizp, Thompson, Yates and Johnston Laboratories Report, VI, p. 
15-72, 1906. 

42. Rorascnirp, The Canadian Entomologist, XXXVIIT, p. 321- 325, 1906. 

Simpson, Report on the causes and continuance of Plague in Hong-Kong, p. 
49-103, 1903. 

SIMOND, Revue Médico-chirurgicale du Brésil et de l'Amérique latine, n°5, 
4905. 

SKINNER, British medical Journal, n° 2333, 2337, 2344. 1905. (Cité dans Deustche 
med. Wochenschr. p. 1570, 1730, 2027. 1905). 

4. Taompson, Report on a fourth Outbreack of Plaque at Syaäney, 1904. 

2. Tuompsow, Medical Record, LXV, p. 338-339, 1904. 

3. THoMpson, Journ. of hygiene, VI, p. 537-569, 1906. 

TinsweLL, Report on ectoparasites of tlxe Rat, 1902. 

1. TiraBoscur, Archives de Parasitologie, VIII, p. 161-349; p. 623-627, 1904. 

2. TirABoscar, Zeitschrift fur Hygiene, XLVIII, p. 512-522, 1904. 

4. Urrarre, Centralblatt fur Backteriologie, Referate, XXXNV, p. 705-709, 1904. 

2. Urrarre, Comptes Rendus de la Société de Biologie, LVII, p. 255, 1904. 

Vassar, Revue d'hygiène et de police sanitaire, XXVIIT, p. 279-292, 1906. 

WAHLGREN, ATchiv fur Zoologie, 1, p. 181-196, 1905. 


NOTE ADDITIONNELLE 


La composition de ce mémoire était déjà achevée, lorsque j'ai vu parai- 
tre dans le Gentralblatt für Bakteriologie une revue critique de GarLr- 
VALERIO, qui donne une grande valeur aux expériences de la Commis- 
sion anglaise et reconnait qu'elles ont démontré scientifiquement la pos- 
sibilité de la transmission de la peste de Rat à Rat par l'intermédiaire 
des Puces, mais il nie absolument la possibilité de cette transmission du 
Rat à l'Homme. 


616 


CARLO TIRABOSCHI 


TABLEAU SYNOPTIQUE DES ESPÈCES DE PUCES 
OBSERVÉES SUR LES RATS, LES SOURIS ET LES CAMPAGNOLS. 


FAMILLES 


Tiraboschi 


Tiraboschi 


PULICIDAE Taschenbere. 
EE À 
PULICINAE 


TYPHLOPSYLLINAE 


RYSTRICHO- 
PSYLLINAE 
Tirab 


SARCOP 
LIDAE 
Taschenberg. 


ua 
rQ 


LE 


USS-FAMILEES 


GENRES 


| 


INPUuLEx Linné …. 0 


CrenocepnALus Kolenati. 


| CERATOPHYLLUS Curtis. . 


: OponropsyLLus Baker. . 
: PycropsyzLaA Rothschild. 
’ 


| 


CrenopsyLLA Kolenati. . 


STEPHANOCIRCUS Skuse , 


TyYPHLOPSYLLA Wagner . 


NeopsyLLza Wagner . . 
\ TypnLoceras Wagner. . 


| HysrricHoPsYLLA Tschb. 


| MacroPpsyLLA Rothschild 


\ DErMAToPHILUS Guérin . 


| EcninoPnaGa OI. . . 
\ 


Re RSS Se) TS 


ESPÈCES 


P.irritans L. 

P. cheopis Roth. 

(=? P. philippinensis Herzog). 
P. brasiliensis Baker. 
Ct. felis Bouché. 

Ct. canis Curtis. 

Cer. fasciatus Bosc. . . 
Cer. londiniensis Roth. 
(— Cer. italicus Tirab.) 
Cer. consimilis Wagn.. 
Cer. mustelae Wagn. . 
Cer. lagomys Wagn.. . 
Ler. penicilliger Grube. 
Cer. Walkeri Roth. . . 
Cer. pinnatus Wagn. 
Cer. gallinae Schrank. 
Cer. abantis Roth. 

Cer. lucifer Roth. 

Cer. pollionis Roth. 
Cer. agilis Roth. 

Cer. californicus Bak. 
Od. charlottensis Baker: 
Od. telegoni Roth. 
Pyg. colossus Roth. 

Ct. musculi Dugès. 

Ct. speclabilis Roth. 

Ct. Taschenbergi Wagn. 
Ct. aganippes Roth. 

CT. ellobius Roth. 

CL. pecliniceps Wagn. 
CT. selenis Roth. 

St. Thomasi Roth. 

St. dasyuri Skuse. 

St. Simsoni Roth. 
Typhl. assimilis Tsehb. 
Typhl. agyrtes Heller. 
Typhl. pseudagyrtes Bak. 
Typhl. proxima Wagn. 

N. bidentatiformis W. 

N. pentacanthus Roth. 

N. isacanthus Roth. 
Typhl. Poppei Wagn. 
Hystr. tripectinata Tirab. 
Hystr. talpae Curtis. 
Hystr. Narbeli Galli-V. 
Macr. hercules Roth. 
Derm. penetrans L. 

Derm. cæcata End. 

Ech. rhynchopsylla Tirab. 
Ech. gallinacea Westw. 


Groupe du Cer, fasciatus 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 617 


INDEX DES RATS, DES SOURIS, ETC:ET DES. PUCES 
LEURS PARASITES HABITUELS OÙ ACCIDENTELS. 


HÔTES PUCES 
Ceralophyllus Walkeri Roth. 
Typhlopsylla agyrtes Heller. 
T. ag. subsp. nobilis Roth. 

T. assimilis Tschb. 
 Ceratophyllus fasciatus Bosc. 
Typhlopsylla assimilis Tschp. 
Neopsylla pentacanthus Roth. 
Hystrichopsylla talpae Curtis. 
Ctenopsylla musculi Dugès. 
Typhlopsylla agyrtes Heller. 
T. assimilis Tschb. 
Hystrichopsylla talpae Curtis. 
Dermatoplilus penetrans L. 
Microtus cal:fornicus . . . . . | Ceratophyllus californicus Baker. 
| Ceratophyllus abantis Roth. 

| 


Microtus amphibius. . 


Microtus agrestis. . . . . 1 | 
\ 
MicrotuS anvalis re Eee | 


Cer. lucifer Roth. 

Cer. pollionis Roth. 
Odontopsyllus telegoni Roth. 
Ctenopsylla selenis Roth. 
Typhlopsylla pseudagyrtes Baker. 
Typhlopsylla assimailis Tschb. 
Hystrichopsylla Narbeli Galli-Val. 


Microtus Drummondi . . . . . 


Microtus nivalis. . . . . . . . 


Microtus œconomus . . . . . | Clenopsylla pectiniceps Tschb. 
Microtus saturatus . . . . . . | Typhlopsylla pseudagyrtes Bak. 
Microtus subterraneus |[Savii, ( Ceratophyllus fasciatus Buse. 
DE SNS en Re PR EE CT ES a EE | Cer. londiniensis Roth. 
Microtus sp" ere . . | Ceratophyllus consimilis Wagn. 


ç Ceralophyllus fasciatus Bosc. 
| Clenopsylla musculi Dugès. 
MUSRAIDIDeE SE EN RE .. | Pulex pallidus Tschb. 
{ Pulex cheopis Roth. 
|. P. irritans L. 
| P. brasiliensis Baker. 


Mus agrarius . 


(P, philippinensis Herzog?). 
Ctenocephalus felis Bouché. 
Ct. canis Curtis. 
| Ceratophyllus fasciatus Bose. 
Mus decumanus- Cer. londiniensis Roth. 
Cer. consimilis Wagn. 
Cer. lagomys Wagn. 
Cer. nrustelae Wagn. 
Cer. penicilliger Grube. 
Clenopsylla musculi Dugès. 
Neopsylla bidentatiformis Wagn.. 


61S. 


HÔTES 


Mus ferculinus . . . 
Mus gentilis 


Mus musculus 


:Mus rattus-alexandrinus 


.Mus silvaticus 


Mus velutinus. . 


-Mus sp. 


CARLO TIRABOSCHI 


PUCES 
Sltephanocireus Thomasi Roth. 
Pulex cheopis Roth. à 
Ceratophyllus fasciatus Bose. 

Cer. londiniensis Roth. 

Cer. Walkeri Roth. (?) 
Odontopsyllus charlottensis Bak. (?) 
Ctenocephalus Serraticeps Tschb. 
Ctenopsylla musculi Dugès. 
Typhlopsylla assimilis Tschb 

T. agyrtes Heller. 

Hystrichopsylla tripectinata Tirab. 
Pulex cheopis Roth. 

P. brasiliensis Baker. 

P. irritans L. 

(P. philippinensis Herzog ?) 
Clenocephalus felis Bouché. 

CL. canis Curtis. 

Ceratophyllus fasciatus Bose. 

Cer. londiniensis Roth. 

Ctenopsylla nusculi Dugès. 
Dermatophilus cæcata End. 
Echidnophaga rhynchopsylla Tirab. 
Ech. gallinacea Westwood. 
Ceratophyllus fasciatus Bosc. 

Cer. londiniensis Roth. J 
Cer. gallinae Schrank. 
Ctenopsylla musculi Dugès. 
Ct. Taschenbergi Wagner. 
Typhlopsylla agyrltes Heller. 
T. assinilis Tschb. 

T. proxima Wagn. 

Neopsylla pentacanthus Roth. 
Typhloceras Poppei Wagn. | 
Hystrichopsylla lalpue Curtis. 

Stephanocireus Dasyuri Skuse. 

St. Simsoni Roth. 

Macropsylla hercules Roth. 

Ceratophyllus pinnatus Wagn. 

Pygiopsylla colossus Roth. 

Clenopsylla aganippes Roth. 

Ct. ellobius Roth. 

Typhlopsylla àgyrtes Keller. 

Macropsylla hercules Roth. 


ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION 


DU VÉHICULE DE LA PESTE 


INDEX DES ESPÈCES DE PUCES DÉCRITES OU CITÉES 


SYNONYMES. 


Pages. 


Argopsylla Baker /Echidnopha- 
ACC RENTE D VEN TRE 
En li Curtis. : 
DOTÉRTUUTSAR OEM NC : 
Cer abantis Roth 
Cer. californicus Bak. . 
Cer. charlottensis lOdontosut- 
DULSIIED AIRE 
CER. CONSIMILIS Wagn. 
CER. FASCIATUS Bosc 


Cernaallinae Schrank 
CORNOUNICOMNNEIDMERREMENON ONE 


CHR LAGOMMSNWV A CNET ENT 

CER. LONDINIENSIS RO... | 
Cer. Lucifer Roth. 
CER. MUSTELAE Wagn. te 


Cer. nn Wagn. 
Cer. pollionis Roth. 
ICER. SILANTIEWI Wagn. . . 
Cer. telegoni Roth. |Ouontopsut- 
Lus 1.) ic tee 
(CER. WALKERI Roth. . 
Ctenocephalus Kol. 
(CTACANISICUELISE RES EE EC 
(Cr. FELIS Bouché 
Ct. serraticeps Tschb. 
Ct. serr. var. murina Tirab . 
Re Kol. / or 
psylla Wagn.) . : Se 
Ctenopsylla ROIS EMA 
Ct. aganippes Roth. . . 
Ct. ellobius Roth. 
Ct. mexicanus Baker . . 
‘Cr. MuscuLI Dugès. . . . . 
CT. pectiniceps Wagn. 
CIS CLIENT SER OEM qe 
Ct. spectabilis Roth. . . . 
‘Cr. TASCHENBERGI Wagn. 
Dermatophylus Guérin. . 
DERSAICACATANEN TEEN NE 
Derm. penetrans L. 
Echidnophaga Olif. 
Ech. gallinacea Westw. À 
Os TOUTOND =; re ete le ere 
— Ecx. RHYNCHOPSYLLA Tirab . . 
Hystrichopsylla Tschb. . . . 
H-NTRIPECTINATANTITAD EN UN NT 


mile elfe) ot i-ee 


607 
093 
598 
298 
598 


598 
597 
59% 
597 
596 
097 
596 
598 
597 
997 
597 
598 
597 


598 
597 
588 
591 
592 
588 
589 


619 


Pages. 
HR PN EM CU IS RENE AT O0 
HENTAI NA PARU 605 
Macropsylla Roth. . . . . .. 605 
Macr. hercules Roth. . C06 
Neopsylla Wagon. Lie 603 
N. BIDENTATIFORMIS Wagn. 603 
N. isacanthus Roth. 60% 
N° PENTACANTHUS Roth. . … . 603 
Odontopsyllus Baker . . . . . 598 
Od. charlottensis Baker . . . 598 
Od. telegoni Roth. {C eratophyl- 
DÉSERT ne EE ME 598 
pulex NP 580 
P. BRASILIENSIS Bak. : 91 
P. canis Curt. [Ctenocephalus) oO 
PcasoBis Roth NU Un 581 
PB fase tus Bosc /Ceratophyllus 
SN RE 094 
P. felis Bouché [Ctenocephatus) 592 
P. IRRITANS L. NAME OR 380 
PNEUS MRITAD EME PER 581 
P. pallidus Tschh. . . 588 
P. pallidus (groupe du) . prb) 
P. philippinensis Herzog . . . 582 
P. serraticeps Tschpb. /Ctenoce- 
DILONS NAS EEE IEEE 588 
PAT EROURAROINA ER D88 
PyGOPSVILA ROGERS 598 
Py. colossus Roth. . . . 599 
Rhynchoprion Baker | (Derma- 
LODIVYLUSIEREREE 606 
Sarcopsylla /Der matophilus et 
Echidnophaga) DT EE LUE 607 
Stephanocircus Skuse . . G0i 
SÉRDHSUURURS LUS NME" 602 
SULSUTS OUR OUEN NEO 602 
St. Thomasi Roth. . . . 602 
Typhloceras Wagn. 60% 
TypaL. Popper Wagn. . . . . . 604 
Typhlopsylla Wagn MONA TENNE de 602 
PAGMEMESN NET ES 603 
T. ag. Subsp. nobilis Roth. . 603 
PASSIMIPISS SCD RE ER 602 
T. musculi {Ctenopsylla) Dugès. 599 
Tpseudagyntes Baker. MN" 605 
LPO O LUNA DEEE ST 602 
Xestopsylla Baker /£chidno- 
DRÉGO)FEMESERTE ATARI TETE 607 


620 ©. TIRABOSCHI — ÉTAT ACTUEL DU VÉHICULE DE LA PESTE 


TABLE DES MATIÈRES 


INTRODUCTION . 


I. — Les RATS Er LES PUCES CONSIDÉRÉS COMME AGENTS PROPAGATEURS DE 


LA PESTE. 
A) Les Rats et 1 Sous 
B\ Les Puces . rie ROME 
a) Observations Didermoloe ques . 
b) Expériences de laboratoire 
IT. — DISTRIBUTION ET MOEURS DES RATS . 
II. — MORPHOLOGIE ET BIOLOGIE DES PUCES. 
IV. — Espèces DE PUCES OBSERVÉES SUR LES RATS . 
V. — Les PÉDICULIDÉS ET LES ACARIENS PARASITES DES RATS. 
CONCLUSIONS. à 
Index bibliographique. 
Tableau synoptique des espèces de Dites 


Index des Rats, des Souris, etc. et des es ie asie 4 


Index des espèces de Puces. Synonymes . 


LESIONT POLMONARI 
PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI © 


PER 


il Dott. ALESSANDRO SANTICCHI 


Rimaste troppo tempo nel dominio della pura Zoologia o della 
pura Patologia non tutte le lesioni elmintiche furono' guardate 
nell’intima loro natura e troppe questioni vi si riannodano, spesso 
ingrossate senza reale motivo. Essendomi proposto il compito di 
una revisione di alcune di queste, mi sia permesso di esporre nel 
presente lavoro i risultati desunti da un coscenzioso studio della 
letteratura, e le riflessioni che ho falto dopo che ho potuto diret- 
tamente studiare dei casi di invasioni zooparassitarie. Mi limito 
specialmente a riferire sulle modificazioni prodotte sui tessuti 
degli Strongili, in specie nel polmone, facendo prima una esposi- 
zione riassuntiva delle conoscenze desunte dalla letteratura con 
qualche mia propria riflessione ed i risultati delle ricerche che ho 
fatto direttamente anche su di aleuni casi. 


Della strongilosi polmonare. 


Sotto questo nome come sotto quello di polmonite verminosa, di 
bronchite verminosa si indica la malattia dovuta a dei parassiti (Ne- 
matodi) appartenenti al genere Strongylus : spesso, nei casi pit 
gravi, Si aCCoMpagna à macie Oo à una vera cachessia. Si à creato 
anzi l’appellativo di strongilosi a comprendere un quadro nosolo- 
gico particolare indotto da questi parasiti. Moltissimi animali ven- 
gono attaccati ed in modo particolare gli Ovini e Suini; in minor 
erado i Bovini, Equini e Roditori. S'indicano come cause di diffu- 
sione i pascoli umidi, le pioggie frequenti. Indubhiamente la ma- 
lattia si propaga per dispersione delle uova eliminate dai Vermi : 
vedremo che sulla maniera con la quale questa dispersione avviene 
regna tutt'altro che accordo, anzi come avvenga non è noto con 


(1) Dall'Istituto di Anatomia comparata e Zoologia dell’ Università di Perugia, 
diretto dal prof. Vincenzo DIAMARE. 


622 . A. SANTICCHI 


sicurezza che per taluni speciali Strongilidi. Si pud credere che 
l’espulsione delle uova avvenga mediante i colpi di tosse e che le 
materie emesse dalle narici costituiscano quindi il mezzo di propa- 
gazione, di diflusione. Ma vi sono osservatori contrari a questa 
credenza. Quello che è sicuro è la presenza di Vermi adulti nell'appa- 
rato bronchiale; le uova emesse da questi possono scendere fino ai 
polmoni, negli alveoli, segmentarsi e dare origine a degli embrioni, 
producendosi cosi processi morbosi più o meno gravi e modifica- 
zioni istopatologiche differenti, nel polmone (bronchi, alveoli, tes- 
suto interstiziale). 

Ma quello che è piu, come apparirà da uno sguardo complessivo 
e critico dei casi descritti dalla letteratura, e dalle mie personali, 
osservazioni, Col variare della specie e dell'ospite e secondo il grado: 
dell’invasione varia la sintomatologia, ossia la entità e la natura 
delle modificazioni del tessuto, dell'apparecchio bronco-polmonare 
come l’essenza stessa delle singole lesioni bronchiali e polmonari, 
per cui potrà essere giustificato ora l’appellativo di polmonite o 
bronco-polmonite verminosa o tisi verminosa, dato alla malattia. 

Varie sono le specie di Strongili che noi troviamo nel polmone. 
Le specie che atfliggono 1 nostri più comuni animali domestiei e che 
quindi offrono uno speciale interesse dal punto di vista Veterinario 
sono; per il Cavallo e l'Asino lo Strongylus Arnfieldi) :nei Bovini lo 
Strongylus micrurus e meno frequente lo Strongylus pulmonalis : 
negli Ovini lo Strongylus filaria che vive nel parenchima polmo- 
nare; nei Suini lo Strongylus paradoxus; e meno frequente lo: 
Str.rufescens ; nel Camello come negli Ovini lo Strongylus filaria ; 
nei Cani lo Strongylus vasorum ; l'Ollulanus bicuspis nel Gatto come 
pure lo Strongylus pusillus ; nel Coniglio e Lepre lo Strongylus com- 
mutatus. 


Riassunto della letteratura sulla entità delle 
alterazioni polmonari. 


La presenza ed i movimenti di questi embrioni e dei Vermiadulti 
nei bronchi producono irritazione ed inflammazione negli alveoli 
Avremo quindi maggiore secrezione di muco ed anche di pus per 
concomitanti invasioni bacteriche (piogeni). Il tessuto in corrispon- 
denza dei vermi ed embrioni viene impregnato da essudato che 
determina auche la sua impermeabilità all'aria atmosferica. 


LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 623: 


Secondo Neumann all’autopsia noi troveremo tutte le lesioni 
dell'asfissia congiunte à quelle della cachessia, nei casi avanzati : 
nel pericardio troveremo sierosita. I bronchi (nella bronchite) pre- 
senteranno dilatazioni sacciformi a volte considerevoli e raccolte di 
sierosità più o meno purulente. Bugnion secondo la natura delle: 
lesioni distinse in tre ordini le forme del processo di pneumonite 
verminosa : 

1° La pneumonite lobulare (dovuta a Strongili adulti nei bron- 
chi). 

29 La pneumonite diffusa (dovuta alle uova ed agli embrioni ris- 
contrati nel parenchima polmonare e che realizzano quanto Bol- 
linger aveva chiamato pneumonite essudativa. 

3° La pneumonite nodulosa 6 pseudo tubercolare nella quale le 
uova degli embrioni occupano punti circoseritti dal parenchima ; 
questa forma è la più comune. Ë caratterizzata da focolai distinti 
d'apparenza tubercolare ; questi focolai possono assumere il carat- 
tere caseoso e subire l’infiltrazione cretacea. Ne sono occupati in 
modo particolare i bordi del polmone. Le uova depos te dalle fem- 
mine negli alveoli polmonari, danno origine a questi focolai, ed 
a fenomeni infiammatori speciali, ad infiltrazione delle pareti degli 
alveoli di elementi embrionari. Dopo la schiusa gli embrioni di- 
venuti liberi provocano un'irritazione molto più viva ed una pneu- 
monite miliare. Tale affezione quindi non va assomigliata alla tu- 
bercolosi, come Colin aveva pensato, nè le va conservato il nome 
di etisia verminosa che sovente le vien dato, poichè nè la sintoma- 
tologia, ne l’anatomia patologica lo giustificano (Neumann). 

E notevole ed interessante rilevare la molteplicità degli aspetti e 
la diversa natura delle lesioni nei casi illustrati dalla letteratura. 
Secondo gli animali, secondo la specie di Strongilo occorre un qua- 
dro necroscopico talora assai diverso. E vedremo, sulla base di 
uno sguardo d'insieme sulla letteratura che l'affermazione di Neu- 
mann, per lo meno dal lato istopatologico potra essere in parte 
troppo rigorosa. 

| parassiti possono soffermarsi nelle prime vie, ossia rinvenirsi 
forse in grado iniziale nei bronchi solamente. Cosi Frank-Nicholls 
trovd all'autopsia la trachea ed i bronchi pieni di piccoli Vermi 
aventi due pollici di lunghezza. Camper in una epizoozia di Vitelli, 
osservû che mentre questi perivano, le Vacchi invece ed i Cavalli 


524 A. SANTICCHI 


che pascolavano negli stessi stessi prati erano rispettati. All'esame 
necroscopico trovô la trachea quasi occupata completamente da 
Strongili mentre non esistevano nelle vescicoli polmonari. 

All'inverso Vigney trovo degli Strongili fino alle ultime ramifi- 
cazioni dei bronchi. Morier riporta che in un cavallo il lato destro del 
polmone aveva alla sua superficie, entro la pleura polmonore ed il 
tessuto stesso di quest'organo, una quantita di piccoli Vermi fino 
agli ultimi ramusco!hi dei bronchi : non esistevano nelle grosse 
divisioni, nè nel tessuto stesso dei polmoni. La membrana mucosa 
invasa da Strongili é sede di una viva infiammazione : la sua su- 
perficie è qua e là rossa, punteggiata ecchimosata : il suo tessuto 
è in dei punti ulcerato. Nella mucosa dei grandi bronchi esistono 
anche dei rilievi, delle borse formate da nidi degli Strongili. In 
fine, parti più o meno grandi di parenchima sono epatizzate ed i 
polmoni sono in generale enfisematosi. 

Chausset poi nei polmoni e bronchi di Porco, non trovo lesioni 
patologiche notevoli. Modeer osservo Vermi dello stesso genere 
(Strongylus paradoxus) nei bronchi del Porco : e soggiunge di averli 
trovati allo stato sporadico. Ercolani dice che « non è raro trovare 
in vecchie Pecore specialmente in estate vari tubercoli di sostanza 
gipsea o calcare, molti dei quali sono cavi, e nei quali non si ha 
piu traccia aleuna di Strongili ». Piot nel Camello trovo le lesioni 
della bronco-polmonite. 

Nei Bovini lealterazioni sono simili a quelle dei Montoni : visi ris- 
contra lo Strongylus micrurus e meno ditrequente lo Srr. pulmonalis. 

Di particolare interesse dal punto di vista speciale delle lesioni 
prodotte dagli Strongili ed in generale per il parassitismo (ossia 
dal punto di vista dei rapporti reattivi Îra ospite e parassita, quale 
- esso sia) sono le osservazioni di neoplasie di granulomi e tuber coli 
provocati da questi vermi. 

Gia Vulpian vide un gran numero di Strongili (Strongylus para- 
doxus) nei piccoli bronechi di un Maiale di sette mesi e nei polmoni 
di questi numerosi tumori che defini epiteliomi. Gratia, nel Porco, 
trovô parecchie volte la pneumonite verminosa sotto forma di 
pseudo-tubercoli aventi la più grande analogia con quelli che 
accompagnano nel Montone la presenza dello Strongylus rufescens ; 
queste nodosità della bronco-polmonite sono essenzialmente costi- 
tuite da endoalveolite e da endobronchite, in focolai limitati. 


LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 625 


Anche prima Osler parla di bronchite verminosa nel Cane con 
carattere di tubercolosi : il parenchima gli stride sotto il coltello 
quasi contenesse sabbia come nei casi di granulomi calcificati nell’ 
Uomo. Osilser perd non ha dato un esame istologico degno di 
rilievo. 

Nel Gatto fu poco studiato, se ne occuparono Bugnon e Müller 
superficialemente. Ebstein e Nicolaier descrissero nel rene veri tu- 
bercoli provocati da uova di Strongili. Ma Cadéac osservd nel pol- 
mone di Gatto delle granulazioni bianco-giallastre della gros- 
sezza di un grano di miglio a quella d’un pisello; tali neoforma- 
zioni, egli dice, non hanno nulla di simile con la tubercolosi. Bou- 
chard ed altri trovarono nell'Uomo larve di parassiti in trachea e 
laringe : non determinarono la specie. 

Ma venendo ai lavori piu recenti Laulanié osservd nel Cane 
(Strongylus vasorum) che i polmoni, nella loro parte inferiore, pre- 
sentano una zona di tessuto grigiastro, compatto, pesante, formato 
da granulazioni che all'esame microscopico offrono la stessa strut- 
tura di neoformazioni tubercolari costituite da tre strati : 

1° Un inviluppo esterno dato da cellule embrionali. 

20 Da uno strato mediano di cellule epitelioidi. 

30 Di una cellula gigante centrale contenente un uovo ed un 
embrione. 

Laulanié rileva anche che il polmone presenta lesioni di bronco- 
polmonite catarrale con trombosi arteriosa, In conclusione Laulanié 
osserva la formazione di veri tubercoli, come nella tubercolosi 
bacillare e distingue anzi due tipi formativi gia da Kiener distinti 
nella tubercolosi bacillare, cioè esogeno ed endogeno rispetto ai 
vasi sanguigni. 

Il Brusasco trovd nella bronchite verminoa dei Bovini che il 
parenchima polmonare è impregnato di sierosità e che dal lume 
dei bronchi esce un muco spumoso sanguinolento, purulento. 

Il Mazzanti dice di aver trovato nel Coniglio (Strongylus commu- 
tatus Diesing) tratti di tessuto disseminati da embrioni liberi e 
contenuti ancora nel guscio. Si rinvengono ai bordi e alla periferia 
del polmone sotto forma di noduli. Érimarchevole che la parete 
interalveolare interposta ai due contigui alveoli e racchiudente uova 
subisce un certo grado di atrofia. I noduli sono più o meno estesi e 
gli alveoli o bronchi sono iperemici e alla periferia vi è una fitta de 

Archives de Parasilologie, XI, n° 4, 1907. Al 


626 A. SANTICCHI 


estesa areola infiltrata da elementi giovani di nuova formazione. 

Mazzarelli, poi, nel Gatto trovd che nelle sezioni del polmone vi 
erano lunghi tratti completamente infiltrati e gli alveoli ancora 
esistenti erano ocupati da uova (uno per alveolo) in via di segmen- 
tazione in tutti gli stati di sviluppo, e addirittura da embrioni. I 
blastomeri erano in ottimo stato e con mitosi evidentissime. Gli 
alveoli nei quali sono le uova non mostrano alcuna alterazione salvo 
chè una maggiore dilatazione ed assottigliamento della parete 
(atrofia da compressione)la quale perd non presenta alcuna traccia 
di desquamazione come osservd anche il Mazzanti nella pneumo- 
nite da Strongylus commutatus del Coniglio domestico. Se gli 
embrioni sono piccoli gli alveoli si comportano analogamente 
a quelli che contengano le uova. Se sono di dimensione maggiore 
gli alveoli sono circondati da molti leucociti tra i quali predomi- 
nano quelli a nucleo polimortfo. | leucociti poi con l'accrescersi 
dei parassiti invadono l'alveolo e l'accumolo loro intorno ad esso 
diventa notevole soprattutto quando il parassita comincia a spos- 
tarsi per migrare verso il lume dei piccoli bronchi. Cid trova ris- 
contro in quanto ha osservato il Mazzanti nel Coniglio. 

Giunto ai piccoli bronchi il parassita si presenta circondato da 
leucociti provenienti da un'attiva diapedesi e la sua cavità appare 
riempita da un contenuto mucoso purulento, ricco di elementi in 
degenerazione, i quali sono tanto leucociti che, insieme col Nema- 
tode, hanno irrotto nel bronco stesso, quanto cellule derivate da 
un'attivo processo di desquamazione dell'epitelio bronchiale. 

Molti alveoli in seguito ai movimenti del parassita e special- 
mente quelli dai quali i parassiti sono venuti fuori si trovano del 
tutto infiltrati, e dove gli elementi non riempono le cavità si scorge 
qualche traccia di essi : in tali punti vedremo masse quasi omo- 
genee colorate in rosso-violaceo dal carmallume. Un gran numero 
di leucociti li circonderà e formerà un focolaio che sta in continua- 
zione coi rimanenti elementi che infiltrano la massa polmonare : 
alcune volte contengono qualche uovo in segmentazione ed anche 
qualche embrione, perd puo darsi anche il caso che non conten- 
gano nè gli uni nè gli altri. I nuclei di questi elementi sono note- 
volmente alterati; possiame trovarvi anche granuli di natura nu- 
cleinica. Questi elementi non sono altro che leucociti in degenera- 
zione ipercromatica. Si trovano anche piccole masse fra alveolo ed 


LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 627 


alveolo il significato delle quali é la loro origine non & facile a 
dirsi. 

Attenendosi a quanto dice il Laulanié a proposito di tubercoli 
in degenerazione che si osservano nella Strongilosi del Cane (Str. 
vasorum) Si tratterebbe di un essudato reattivo di natura probabil- 
mente fibrinosa. 

Ignotoé il ciclo dello Strongylus pusillus ma osservando le migra- 
zioni che fanno gli embrioni verso il lume dei bronchi possiamo 
ritenere analogamente a quanto lo Schegel ha affermato per lo 
Strongylus capillaris della Capra, che per le vie respiratorie stesse 
i giovani nematodi vengano assieme al muco rigettati fuori dal 
loro ospite. Non sembra poi che essi quatunque risalgano per le 
vie respiratorie che vengano eliminati per le vie nasali come a pro- 
posito dello Strongylus filaria della Pecora, aveva ritenuto nel 
1843 l'Ercolani. Ed infattiil Piana ed il Renzi nel mattatoio di 
Imola mai ritrovarono embrioni nelle mucosità delle cavità nasali, 
siebbene negli escrementi. Anche nel caso presente nell'autopsia 
del Gatto studiato, inutilmentte il Piana cercd gli embrioni dello 
Strongylus pusillus nelle mucosità della cavità nasale : furono invece 
ritrovati nel retto. 

Con le feci avverrebbe l’infezione nell'ambiente : e Mazzarelli 
serive: « In questo reperto concordemente a quanto l'Ebstein ed il 
Nicolaier affermano nulla fu ritrovato di quanto trovasi nella tu- 
bercolosi bacterica e quindi non si hanno i cosi detti pseudo tu- 
bercoli o tubercoli elmintici », essendo in ci d’accordo con Lau- 
lanié il quale pure ossendo stato il primo a descrivere veri tuber- 
oli nel Cane indica che nel Gatto non ha trovato altro che focolai 
di polmonite purulenta miliare che non hanno somiglianza di 
sorta con i tubercoli. 

Mazzarelli soggiunge di non aver trovato cellule giganti ed ele- 
menti epitelioidi nè attorno agli embrioni, nè attorno alle uova. 
ma à torto crede che quanto è stato descritto per tubercolo tanto 
nel Gatto'quanto in altri, non sia che una massa data dall’essudato 
già notato e scambiato assieme agli elementi che contiene per 
un'accumulo di cellule giganti, ed i leucociti che li circondano 
per cellule epitelioidi. 


628 A. SANTICCHI 


Considerazioni critiche. 


Si è fatta a bello studio questa relazione particolareggiata. Le 
conclusioni che se ne ricavano sono: 

1° Natura diversa delle alterazioni secondo le diverse specie e 
secondo gli ospiti. 

20 Diversa sintomatologia secondo i gradi dell'invasione e secon- 
do infezioni bacteriche. 

90 La tisi verminosa, in tutti i Casi, non è un espressione Cor- 
retta anche quando le lesioni hanno apparenza di lesioni tuber- 
colari. Trattasidi una cachessia, di una macie generale data anzitut- 
to dalle condizioni deplorevoli delle funzioni respiratorie, ma 
non & afflatto paragonabile all'avvelenamento'specifico del bacillo di 
Koch. Ma quel che é più i focolai hanno una sola grossolana rasso- 
miglianza con i focolai tubercolari, che l'esame accurato facil- 
mente distrugge. 

40 Ë questione perd grave ed importante se si debba credere op- 
pure no che la strongilosi possa presentaïsi in differenti casi com 
le note anatomo-patologiche della tubercolosi: se cioè esistano: 
veri tubercoli da Strongili. 

Su quest'ultimo caso é bene che mi soffermi: 

La letteratura più recente tende ad escluderla; anzi abbiamo 
veduto addirittura come si creda che siasi preso un granchio a secco- 
scambiandosi‘zone necrotiche o essudato con nuclei con cellule gi- 
ganti. Per trattare questa questione é necessario allargare alquanto- 
1 limiti della nostra indagine. 

Nella letteratura sui Vermi parassiti dei tessuti animali e spe- 
. cialmente dell'Uomo si trovano osservazioni sufficentemente nume- 
rose di tubercoli elmintici. Preziose notizie si trovano in proposito- 
nello seritto di R. Blanchard (1895). 

Dalle indagini di medici giapponesi Miura, Otani, lamagiva, su 
lesioni riscontrate in individui affetti da distomatosi polmonare- 
(Mesogonimus Westermanni) risulta anzitutto che la causa delle- 
epilessie jaksoniane presentate dagli infermi sono cisti del cervello- 
sulle cui pareti si trovano uova di parassiti in veri tubercoli con 
cellule giganti riferibili alla forma fibrosa di Virchow : si trovano:- 
anche nella sierosa dello spazic di Douglas. Kartulis li ha riscon- 


LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 629 


trati nel fegato di individui affetti da bilarziosi (Schistosomum hæ- 
matobium). 

Laulanié, come vedemmo, parla di veri tubercoli con uova di 
Strongili, cosè Ebstein e Nicolaier. La questione se i Vermi 
possono dar luogo a tubercoli fu ripresa da altri (Diamare) a pro- 
posito di un caso di vera ed estesa tubercolizzazione di una Tarta- 
ruga. Diamare descrive infatti nella sierosa intestinale, nel pan- 
creas etc.,la presenza di formazioni nodulari con veri tubercoli 
con uova di Distoma (Mesogonimus constrictus). Un esame poi 
più accurato fece rilevare che i noduli erano dilatazioni aneurisma- 
tiche dei vasi della sierosa intestinale e del pancreas : nel pancreas, 
nella tonaca muscolare e submucosa dell’intestino i tubercoli erano 
numerosi e davano l’aspetto di una tubercolosi miliare. L'autore 
potè dimostrare che il Verme viveva nel cuore e che le lesioni 
erano dovute a soffermamento di uova trasportate col sangue 
nei vasi. Le tasche aneurismatiche erano gruppi di tubercoii 
svoltisi nella parete vasale con partecipazione del tessuto con- 
nettivo perivasale : i tubercoli miliari della tonaca muscolare, 
dell'intestino e del pancreas si erano svolti in seguito alla totale 
occlusione dei capillari: si erano sostituiti ai vasi. Le cellule 
giganti erano molto sviluppate e spiegavano un’azione distrut- 
trice evidente sugli embrioni e sulle uova, il cui guscio rima- 
neva ridotto a minime goccioline: non mancava all'esterno 
una zona linfogranulosa. Cid fu confermato dalla comparsa di 
uno seritto di Park il quale vide tubercoli caratteristici, ed anche 
prove di azione fagocitaria in tubercoli di Bovini ed Ovini affetti 
contemporaneamente dalla Spiroptera reticulata, Discomyces e dal 
Bacillo tubercolare. Da questi fatti risulta evidente che dei Vermi 
endoparassiti possono provocare la formazione di veri tubercoli. 

Miura, Otani, lamagiva parlano anche di fasi degenerative del 
£Tranuloma : alcuni di degenerazione caseosa, che altri perd negano 
{Ebstein e Nicolaier, Diamare). 

Per quanto riguarda gli Strongili le figure e la descrizione di 
Ebstein e Nicolaier non lasciano dubbio alcuno chesi tratti di pic- 
coli tubercoli simili a quelli prodotti dal germe tubercolare, Ma 
come del resto fu già da altri notato (Diamare) non deve recare 
meraviglia che vermi possano indurre questa neoplasia giacchè si 
possono ottenere tubercoli tipiei con le tre tipiche zone con ia 


630 A. SANTICCHI 


semplice introduzione di corpi stranieri nel circolo (V. Schrün) 
e quandosi rifletta che questa neoplasia à semplicemente l'espressione di 
una intensa reazione del tessuto verso l'agente invasore, qualunque 
esso sia, Verme, Bacillo, frammento di sughero o di ostrica (Cornil e 
Toupet). 

Queste constatazioni collimano d'altro canto con legeniali dimos- 
trazioni di Metshnikov circa la natura ed il significato delle cellule 
giganti nel tubercolo e con quelli che gli studi di Ziegler e di altri 
già posero in rilievo nel processo di riassorbimento dei corpi estra- 

nei nell’organismo e dei tessuti stessi divenuti corpi stranieri per 
 necrosie necrobiosi. Ma la questione che si offre a noi è se proprio 
nel polmone risulti possibile la formazione di tubercoli per opera 
di Strongili. 

Le osservazioni di Laulanié attestano che cid pu verificarsi e 
propriamente nel Cane, dubbio che sorgeva già dalle osservazioni 
di Osler. In tutti i casi devesi osservare che la Strougilosi del Cane 
come ce l'ha descritta Laulanié è di origine vasale : ossia igiovani 
parassiti e leuova invadono i canali vascolari ed i focolai tubercolari 
si svolgono precisamente qui come nei casi citati di pseudo-tuber- 
colosi zooparassitaria ematogena. 

lo tenterei di spiegare il fatto nel senso che, imprigionati nel 
letto chiuso dei vasi, agendo da emboli e coinvolti e dimoranti 
lungo nei punti trombosati, durante il processo di risoluzione del 
trombo, pud qui organizzarsi il tubercolo, senza dubbio favorito da 
unaimmobilità dei parassiti, comea un dipressonella formazione di 
altre neoplasie elmintiche (trichinosi, tricosomosi) (Diamare). 

Viceversa questo non è possibile nel polmone in eui i vermi atti- 
vissimi e mobili nelle dilatazioni terminali dei canali bronchiali 
(alveoli) devono uscirne per raggiungere altra sede per completare 
il loro sviluppo. Essi non possono che indurre qui solo alterazioni 
alveolari ed un'’infiltramento più o meno spiceato che per noi rap- 
presenta, in essenza, l’acme di un'infiammazione, la quale, solo 
per una susseguente infezione di piogeni, traducesi in una bron- 
chite purulenta. 

Penetrando nel tessuto interstiziale per rottura di alveoli, se 
eventualmente possa verificarsi la organizzazione del tubercolo, è a 
discutersi. 

Sembra perd che cid possa accadere solo di rado. 


LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 631 


Relazione riassuntiva su di alcuni casi osservati. 


Per formarmi un concetto «de visu » dei rapporti fra gli Stron- 
gili e polmone io ho direttamente esaminato dei casi tipici nei 
seguenti animali : Delfino, Pecora, Porco, Lepre. 


DELrINO (Delphinus tursio). — 11 Prof. Diamare, in un Delfino 
sezionato a Napoli nell’estate dello scorso anno, ha trovato il pol- 


Fig. 1. — Apparenza macroscopica del taglio traversale di lobo polmonare di 
Delfino con chiazze ardesiache separate da esili tratti di tessuto polmonare 
normale; le chiazze ardesiache sono lobuli infiltrati di leucociti e contenenti 
embrioni (Diamare). - 


mone iperemico, di color rosso intenso, duro, in massima parte 
epatizzato. Sul taglio tutto il polmone, specialmente la metà si- 
nistra, aveva un caratteristico aspetto : era marezzato da chiazze 
rosse e grigio ardesiache (fig. 1). Si notava che le chiazze arde- 
siache avevano per lo più una relazione con la sezione di un bron- 
chiolino. 

Nel cavo dei bronchi di medio calibro egli trovo molti Vermi 
(Nematodi) identificati per Pseudalius. Come risulta da un accurato 
esame della letteratura le lesioni provocate dallo Pseudalius (1) 


(4) Pseudalius. — 11 genere Pseudalius Dujardin differisce dal genere Stenu- 
rus, a cui è molto affine, per la coda corta e puntata della femmina, e la coda 
bifida dei maschi i cui spicoli sono contornati ma non saldati. Sono Nematodi 
vivipari. 


632 A. SANTICCHI 


(forma affine allo Strongilo) non sono stati studiati ancora da nes- 
sun autore, per cui non sarà inutile l'espusizione in breve dei risul- 
tati delle osservazioni fatte su questo caso dal prof. V. Diamare 
tanto più che quanto egli ha osservato si riannoda cosi da vicino 
alla questione della bronchite verminosa in generale, oggetto che 
ora Ci preoccupa maggiormente. Riporto la relazione favoritami 
dal prof. Diamare con le figure che egli stesso ha eseguite. 


00. et 
°e 


Fig. 2. — Lesioni di un medio bronco dovute a parassiti adulti à mucosa infil- 
trata, sollevata, desquamata, con epitelio quà e là necrotico : sottomucosa in 
filtrata con piccoli vasi ectasici : leucociti nel lume, essendo passati anche 
oltre l’epitelio {Diamare). 


All'esame macroscopico come dissi, il polmone nel suo stato 
totale gli siè mostrato molto alterato. 

In alcuni punti appare enfisematoso, in pochi punti normale. 
Sezionandolo, sulla superficie di taglio si trovano nei bronchi 
dilatazioni sinuose con scarso essudato. Le aree grigiastre (fig. 1-3) 
Sono territori polmonari fortemente infiltrati con neoformazione 
di connettivo con pigmento : le aree rossastre sono dovute a tratti 
di tessuto polmonare notevolmente iperemici, qua e là infiltrati. 


LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 633 


All'esame istologico gli alveoli sono notevolmente dilatati, la 
parete di questi é talmente assotligliata che con difficoltà se ne 
puù riconoscere l'epitelio; in altri il setto interalveolare è rotto. 
Ma il fatto caratteristico è che essi sono notevolmente infiltrati 


Fig. 3. — Struttura d’una delle chiazze ardesiache : sono lobuli infiltrati in rela 
zione con un bronco di piccolo calibro in cui si trovano parassiti adulti e la 
mucosa è turgida. Qua e là in seno all’area si trovano infundiboli dilatati am- 
polliformi (Diamare). 


riempiti di leucociti specialmente polinueleati (fig. 3e 4)e larve del 
parassita, e percid colorabili intensamente : fra essi si trovano 
alveoli enfisematosi, ancora più rari sono gli alveoli normali. Qui 
infine si pud riassurmere dicendo che si tratta, èome osservarono 
il Mazzanti nel Coniglio, il Mazzarelli nel Gatto di un fortissimo 
infiltramento leucocitario con scomparsa di alveoli. Le enorme 
infiltrazioni devonsi unicamente ai movimenti del parassita. È in 


Go A. SANTICCHI 


essenza un'intensa flogosi provocata da embrioni nei territori 
alveolari in relazione con i bronchi in cui trovasi il parassita 
adulto. | 

La mucosa dei piccoli bronchi ove risiedono i parassiti era ipe- 
remica e turgida all'esame macroscopico. All'esame microscopico si 
nota una forte replezione dei vasi (fig 2) : quà e là l’epitelio è sfal- 
dato, sollevato e necrotico (fig. 2 e 5). Nelle chiazze di epitelio ne- 
crotico non è riuscita possibile colorazione di sorta nè del proto- 
plasma nè del nucleo : sono attraversati da leucociti che spiecano: 


) 


Fig. 4. — Contenuto degli alveoli infiltrati (da un preparato per raschiamento) : 
Embrioni di Pseudalius e leucociti specialmente polinucleati e cellule epite- 
liali. Colorazione con carminio alcoolico di Grenacher (Diamare). 


in essi : leucociti stanno pure nel lume (fig. 5). Infine Diamare: 
rileva le note di una bronchite circoscritta, di una intensa flogosi 
provocata da questi corpi estranei nei bronchi, e di una vera 
prneumonite diffusa. 


PEcoRA. — Il polmone dall'aspetto generale si mostra alterato. 
Qua e là è enfisematoso, in molti punti è normale, in altri è di 
colore bleu-scuro, ed anche grigio-sporco : il suo volume è aumen- 
tato. Alla palpazione sentiamo noduli più o meno consistenti della. 
grandezza d'un'avellana, aleuni dei quali sono calcificati, stridono, 
sotto il coltello, altri si mostrano cavi. La presenza degli Strongili. 
in questi noduli non si riscontra. I bronchi sono dilatati, for- 
mano delle sinuosità, ed in questi troviamo veri gomitoli di vermi 
(Strongylus filaria) mescolati a muco-pus. I focolai si presentano: 


LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 635 


in generale sotto forma più che di tubercoli, di noduli di varia: 
grandezza : si trovano in modo particolare ai bordi del polmone, e- 
sono piuttosto supertficiali. 
All'esame istologico le alterazioni che noi riscostriamo sono si- 
mili a quelle già state descritte per il Delfino. Solo perd mentre: 
nel Delfino l'estensione è enorme in quanto tutto il polmone & 


RAILS 


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&: 
D 
2 
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Fig. 5. — Tratto di mucosa bronchiale con enorme ectasia vasale e replezione 
sanguigna ; sottomucosa infiltrata, epitelio alterato, desquamato (Diamare). 


affetto, qui invece il processo è localizzato, e solo qua e là si ris- 
contrano leggere invasioni nel parenchima. Negli alveoli troviamo: 
notevole dilatazione, e rotture in molti punti si notano. Qua e là 
uova ed embrioni del parassita, che danno luogo ad una spiccatis- 
sima infiltrazione leucocitaria; in alcuni punti gli alveoli sono 
conservati, ma le loro pareti sono sensibilmente assottigliate (fig. 6: 
et 7). Nel lume di brochiolini si trova il parassita adulto, che visto 
in sezione trasversale, presenta una cuticola fortemente colorata 
all'interno, una più intensa rifrangente alla luce : sotto la cuticola 
troviamo grandi cellule con dei prolungamenti a mo'’di ciglia vibra- 


636 A. SANTICCH 


tili e che costituiscono la ben nota muscolatura cutanea di questi 
vermi (celomiaria). Intensa in tali punti è l'infiltrazione. Anche 


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Fig. 6. — Apparenza microscopica di un lobulo di polmone di Pecora con bronco 
di medio calibro : enorme infiltramento, invasione considerevoie di leucociti, 
alveoli notevolmente sfiancati. 


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Fig. 7. — Lobulo di polmone di Pecora con estesa infiltrazione: presenza del 
parassita in un alveolo ed in alcuni punti anche di embrioni. 


qui queste lesioni si devono unicamente ai movimenti del paras- 
sita. T bronchi in vari punti, e specialmente ove sono gli embrioni, 


LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 637 


sono ostruiti in modo completo da essudato fibrinoso. In alcuni 
appariscono piccoli noduli come nella peribronchite nodosa : in 
altri il bronco é dilatato venendo ad assumere forma di ampolla. 
L'epitelio è qua e là sfaldato. 
Porco. — A prima vista il polmone presenta noduli di colore 
rosso-scuro più o meno duri localizzati in generale nei bordi del 


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#7 HT: NRA 


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Fig. 8. — Lobulo di polmone di Porco con alveoli infiltrati, 
presenza di numerosi leucoelti e parassiti aduiti. 


polmone. Il volume è aumentato, il polmone è enfisematoso in vari 
punti. Nei bronchi troviamo raggruppati, affastellati quasi, nume- 
_rosiparassiti, checoniloro movimenti hanno prodotto una note- 
vole infiltrazoine. 

All'esame microscopico troviamo notevole dilatazione degli 
alveoli; rottura in più parti del setto interalveolare: qui infiltra- 
zione diffusa ed intensa specialmente se vi è il parassita (fig. 8). 
Negli alveoli ove sono le uova le pareti sono sfiancate e l'infiltra 
zione e solo in alcuni punti sensibile. Cid dimostra come in realta 
non si verifichi un movimento molto attivo delle larve per cui 
l'infiltramento parvicellulare non é intenso. Talora nel connettivo 
esterno alla cartilagine di un bronco si rileva marcata infiltrazione. 


‘638 . A. SANTICCHI 


In uno stato più avanzato del processo la dilatazione del bronchiolo 
terminale è più spiccata, e le pareti dell'ampolla che ne nasce sono 
spesse : del resto anche qui è notevole lo sfaldamento dell’epitelio : 
‘più intensi sono i fenomeni consecutivi alla notevole flogosi svilup 
patasi nei bronchi ove stanno i parassiti adulti. 

LEPRE. — All'esame macroscopico troviamo chiazze di forte 
infiltramento. All'esame istologico troviamo gli alveoli notevol- 


Fig. 9. — Apparenza microscopica di un lobulo di polmone di Lepre, . 
con notevole infiltrazione e presenza di numerosi embrioni del parassita. 


smente dilatati : in dei punti il setto interalveolare è del tutto scom- 
parso. In quelle zone ove troviamo maggior numero di parassiti 
(Stongylus commutatus Diesing ?) l'infiltrazione è notevole. In altri 
punti ove è limitato il numero dei parassiti, la parete è assottigliata 
-e qua e là leggermente desquamata. Nulla addirittura è l'infiltra- 
zione negli alveoli dove si trovano le uova; soltanto laddove trovansi 
le larve troviamo leucociti che hanno invaso l’alveolo (fig. 9). A pic- 
colo ingrandimento gruppi di alveoli infestati danno l’apparenza 
-di una massa compatta seminata d'embrioni. 


Riepilogo. 


lo mi propongo di continuare lo studio comparativo delle alte- 
razioni che la presenza di (Strongilidi » induce nel polmone, e 


LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 639 


specialmente di estendere la ricerca sulla strongilosi polmonare 
ematogena, in connessione dei fatti desunti già da altri in altre 
invasioni zooparassitarie. 

Riassumo ora quanto ho ricavato dall’esame critico della lette- 
ratura e dalle mieosservazioni, seb bene non molto estese. Aggiun- 
go inoltre in questo riepilogo qualche dato di fatto o constatazione 
emergente dall'esposizione fatta innanzi : 

1° Le lesioni indotte nel polmone dagli «Strongilidi», nei Bovini, 
Equini e Roditori sono completamente di natura irritativa ; solo 
infezioni secondarie bacteriche complicano l'andamento delle 
lesioni stesse. 

20 Secondo la specie di Strongilidi e specialmente secondo l'os- 
pice varia la reazione infiammatoria e spesso anche l'aspetto gros- 
solano della malattia. 

30 In tesi generale in relazione con la forma adulta del parassita 
stà una bronchite in specie dei medi, e piccoli bronchi più o me- 
no estesa: in rapporto con le uova e gli embrioni stà una flogosi 
del polmone, d'ordinario una polmonite lobulare talvolta diffusa. 
Carateristica è la forma nodulare à grossi nodi con centro cretiti- 
çcato o calcificato del bordo polmonare di Pecora. 

40 Essenzialmente la lesione consiste in una flogosi notevole del 
tessuto con suoi postumi. Negli alveoligradi vari di infiltramento, 
formazione di focolai in eui osservasi confluenza di territori infil: 
trati, quindi formazione di nodi che in seguito a ritrazione cicatri- 
ziale assumono aspetto differente, persino di tumoretti (Pecora). 

50 Negli alveoli la desquamazione dell'epitelio è un fatto secon- 
dario mentre questa nei bronchi s’accompagna al turgore vasale. 
Non mi consta che si verifichi ipertrofia dell'epitelio stesso : ciù 
che caratterizza la lesione alveolare è un infiltramento notevole di 
leucociti specialmente polinueleati, cid che giustifica la qualifica 
da darsi alla Strongilosi di malattia essenzialmente di reazione. 

6° Nel a Strongilosi polmonare dei nominati mammiferi Costan- 
temente manca la formazione di veri tubercoli. Le forme nodulari 
molto piccole possono essere solo grossolanamente scambiate per 
tali. 

19 L'espressione di «tisi verminosa » non sarebbe qualificata 
percid né anatomo-patologicamente, nè dal punto di vista fisio-pa- 
tologico. 


640 A. SANTICCHI 


La macie, la cachessia degli animali dipende dalle gravi condi- 
zioni del sistema respiratorio, tanto più gravi per il secondario 
attecchimento di Bacterii spec. piogeni, e non hanno nulla a che 
vedere con la cachessia indotta dal germe tubercolare, nella stessa 
guisa che i noduli ed 1 focolai nulla presentano che ricordi la 
lesione specifica di questo Schizomicete. 

8° Ma se questo puÿ dirsi circa i sunnominati mammiferi altret- 
tanto non sarebbe giusto applicare in tesi generale. Indubbiamente 
(in modo speciale nei Carnivori) possono svolgersi processi polmonari 
per opera di Strongili, à quali hanno tutti icaratteri istologici di veri 
tubercoli. Sono tubercoli zooparassitari identiei a quelliconstatati da 
numerosi Autori inlorno a vermi, Oo uova, o embrioni di vermi ap- 
partenenti a Trematodi o a stessi Nematodi. 

90 Analogamente qui la tubercolinizzazione del polmone è di ori- 
gine vasale: trattasi di Strongilidi emoparassiti le cui uova 0 i cui 
embrioni nei capillari previa occlusione determinano la formazione 
di neoplasie identiche alla neoplasia prodotta dal Bacillo di Koch. 

Gli autori che escludono la forma tubercolare evidentemente 
non sono al corrente di questi fatti. 

10° Risulta dalle indagine di Diamare che lo Pseudalius, forma 
affine agli Strongylus, di cui finora non furono studiate le lesioni che 
produce, provoca nel polmone di Delfino un processo infiammato- 
rio, ma non iperplastico nodulare. Nel caso avuto in esame l'inva- 
sione era straordinariamente estesa a tutto il polmone. Con la 
bronchite dei medii e piccoli bronchi coincideva uno stato infiama- 
torio acuto di quasi tutto il polmone per opera degli embrioni. Le 
numerosissime aree di pneumonitelobulare (corrispondenti al ter- 
ritorio di distribuzione del ramo bronchiale, in cui vivevano 1 pa- 
rassiti adulti) coincidevano più o meno tra loro, separate solo da 
scarsi tratti normali, enfisematosi (enfisema vicariante) derivan- 
done una vera pneumonite diffusa. 

Ringrazio sentitamente il Professore Diamare che mi fu largo 
di consiglio ed aiuto in questo mio studio. 


LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 641 


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Archives de Parasitologie, XI, n° 4, 1907. 42 


TABLE DES ESPÈCES NOUVELLES 


DÉCRITES DANS LE TOME XI 


CESTODES 

Pages 

TENTOIBIANChATATEP MOINE RE NN EEE RE 379 
DIPTÈRES 

TAbLONUS AB ESS SULCOULC RE EN ANT ANERNEEER EE R nr Nes TES ST RO 473 


TBPlancharat SUrCOUL NE ENNEMI LENS ORDER RE ER 473 


TABLE DES MATIÈRES 


R. BLaAncHARD. — Le paludisme à Madagascar. . . . . . . . . à 

R. BLANCHARD. — Parasitisme du Dipylidium caninum dans l'espèce hu- 
maine, à propos d’un cas nouveau (avec 15 fig. dans le texte) . 

R. BLancHaRD et M. BLariN. — Immunité de la Marmotte en hibernation à 
l'égard des maladies parasitaires . . . . . . . se 

M. Bzarnin et R. BLancHaRD, cf. R. Blanchard et M. Blatin. 

G. Boupix. — Les variations morphologiques du Microbe de la tuberculose 
(avec 14 fig. dans le texte) .‘. . . . . Rene DR A EN CT Le 

B. Gazzi-VaALErI0. — Notices biographiques. — XVIII. Prospero Sonsino 
(avec 2 portraits et un fac-simile dans le texte). . . . . . . . . . . 

Fr. JANIN. — Recherches sur la Sarcosporidie du Mouton {avec 3 fig. dans 
leite tete ip ID) ERREUR En EE A CAN TE SE 

Ch. Joyeux. — Recherches sur le pouvoir antibactérien de l’extrait de Ces- 
LOdES ND IEUE VAE LAVAL) DNS ART TRS ER PU D Pr ÉD EEE 

M. LANGERON. — Notices biographiques. — XVII. Fritz Schaudinn, 1871-1906 

(avec 1’fac-simile dans letexte et pl. NII) d'o 000 06 0 

P. MoLa. — Osservazioni sul tegumento (ectoderma) dell’ Anchistrocepha- 
USM OC RAT SRU AE) DIN EE EE 

P. Mora. — Una nuova Tenia della Talpa (pl. IV) . . - . . . . . . . : . 

P. Née. — État actuel de la question du favus humain. . . . . . . . . . 

L. G. NEUMANN. — Notes sur les Ixodidés. — V (avec 14 fig. dans le texte). 

Al. SanriccHi. — Lesioni polmonari prodotte dagli Strongilidi (avec S fig. 
J'ANSMICILCXTIE) CR TR BD PAU STAR ! 

J. Surcour, — Note sur des Tabanides de la côte occidentale d'Afrique 


CD RENE) Pr PAS ANNE PS A NE ER RE ete LE SN Le AS 
C. TirABoscnr. — État actuel de la question du véhicule de la peste (avec 
15 fig. dans le texte). . . . . . ACER EL OMR RE Ie 
M. Trurri. — Hyphomycète du type Achorion déterminant chez l'Homme 
deSRlÉSIONSEICNOPhVLOITES EE AN EEE 
Revuelbibliographique 1:00 D NS Ce Em ent le 
M. Braun, 475. — KR. Dœrr, 478. — E. Jeanselme, 476. — P. Kästner, 
478. — A. Laveran, 477. — A. Layet, 480. — C. Mense, 475, — W. H. Park 
and A. W. Williams, 476. 


Pages 
185 


439 


361 


644 


TABLE DES MATIÈRES 
Notes et Informations... . . . . . . . . . . . .. 343, 4S1 
R. BLANCHARD. — La chaire d'Histoire Naturelle médicale de la Faculté 


de Médecine de Paris, 481. — La Parasitologie à la Faculté de Médecine 
deParis, 492. — Institut de Médecine coloniale, 513. — Ecole de Médecine 
tropicale de Lisbonne, 526. — Ecole de Médecine tropicale de Bruxelles, 
528. — Une chaire de Parasitologie à la Faculté de Médecine de Lyon 
(pl. X), 534. — Uné nouvelle chaire à l'Ecole de Médecine tropicale de 
Londres, 534. — Est-ce la fin de l’I.M. C. ? 534. — Hommage au profes- 
seur F. S. Monticelli (avec une fig. dans le texte et pl. VIII), 536. — 
La lutte contreles maladies infectieuses, 537. — Prix Adolphe Mon- 
binne, 540. — Souscription universelle pour une statue de Lamarck, 
540. — Prix Barbier, 540. 


R. BcancHarD. — Cysticercus cellulosae chez les indigènes d'Angola . . 

M. BLariN. — Le Dulton Memorial ; une nouvelle chaire à l'Ecole de 
Médecine tropicale de Liverpool. . . . . : . . . . RUE CT ARR 

BouRNEvILLE. — La chaire de Parasitologie de la Faculté de Médecine 
dePATIS ae RAR AN ES SE PE QE SPRL EE PLAN SE 

R. W. FRENCH. — Ecole de Médecine-tropicale de Londres . . 

P. J. Garcra. — La medicina tropical en la Republica Argentina; una 


carta del Profesor Blanchard . . . . . . 


Inauguration du monument de Nocard (pl. II). - . . . . . . . . .. 


Les Français les plus illustres du XIX: siècle. . . . - . . . - . | 5 6 


OÙùUvrages recus PME ERA LEE Me eue te ASS, 


Table des Espèces nouvelles décrites dans le tome XI. . . .. 
Table des Matières: : .::.. : 1... RAS OR ea 


Le présent volume comprend 11 planches hors texte, dont une planche-fron- 
tispice non numérotée, 3 portraits, 2 fac-simile d'écriture et 70 figures dans le 


texte. 


IL a été publié en quatre fascicules : 

{er fasciculé, comprenant les pages 1 à 18%, paru le 15 décembre 196; 
9» fascicule, pages 185 à 360, paru le 10 février 1907; 

3e fascicule, pages 361 à 540, paru le 1° août 1907; 

4° fascicule, pages 541 à 644, paru le 25 août 1007. 


Le Secrétaire de là rédaction, Gérant : 


DT MAURICE LANGERON. 


Ecole Professionnelle d’Imprimerie, à Noisy-le-Grand (Seine-et-Oise). 


| ASSELIN et HOUZEAU, Éditeurs 
7 Place de l’École-de-Médecine, PARIS os 


ne DE ZUOLOGIE MÉDICALE & AGRICOLE 


A. RAILLIET 


Professeur: à l'École vétérinaire d’Alfort, Membre de l'Académie de Médecine 


ZT 


DEUXIÈME EDITION 


Un vol. grand in-8 de 1305 pages avec 892 Deus à dans le texte, louis 
PO M D es RÉ ES 1 5er O0)francs: 


TRAITÉE 


MALADIES PARASITAIRES NON HICRUBIENNES * 


DES ANIMAUX DOMESTIQUES 


PAR 


L-G. NEUMANN 


Professeur à l'École vétérinaire de Toulouse 
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Avec le concours d’un grand nombre de Professeurs et de V étérinair es praticiens 
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PRIX DE L ABONNEMENT \ Pour les autres Départements........... 46 » 
partant toujours du 15 Janvier À Pour l'Union postale ...:................ 47 > 


Le Recueil de Médecine vétérinaire parait les 15 et 30 de chaque mois 


Le numéro du 30 contient IN EXTENSO le Bulletin des séances de la Société centrale 
de Médecine vétérinaire. 


ARCHIVES DE PARASITOLOGIE 
RÉDACTION: 45, Rue de l'École de Médecine, PARIS, VIe 


{ 


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Les Archives de Purasilologie publient des mémoires originaux écrits dans l’une ou 
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lien et latin. Les auteurs doivent, autant que possible, FOURNIR UN TEXTE DACTYLOGRAPHIÉ 
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1° On appliquera strictement les règles de la Nomenclature zoologique ou botanique 
adoptées par les Congrès internationaux de zoologie et de botanique; ÿ 

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phiques, des abréviations adoptées par ces mêmes Congrès ou par le Zoological Record 
de Londres; ô 

3 Les noms géographiques ou les noms propres empruntés à des langues qui n'ont 
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par les Congrès de zoologie ; # 

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capitale; | 

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‘la Rédaction, dans an délai maininrunr de huit jours, les épreuves corrigées avec le 
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Ils recevront gratis 50 tirés à part de leur article. Ils sont invités à faire connaître 
sans délai s’ils désirent en recevoir un plus grand nombre (50 au maximum), à leurs 
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il ne concerne point les planches, dont le prix peut varier considérablement. Toutefois, 
il importe de dire que, pour les. exemplaires d'auteurs, les planches séront comptées 
strictement au prix de revient. Les tirés à part ne peuvent être mis en vente. i] 


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Un quart de feuille . 
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