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LIBRARY
OF THE
Museum of Comparative Zoology
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LIBRARY
JUN 1 2 1959
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ARCHIVES
DE
PARASITOLOGIE
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Archives de Parasitologie, XI, 1906. FRONTISPICE.
DEUX AMIS
Groupe en marbre, par CHARLES PAILLET
Salon de 1904 (S. A. F.), 2° médaille,
ARCHIVES
DE
PARASITOLOGIE
PUBLIÉES PAR
RAPHAËL BLANCHARD
PROFESSEUR A LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE PARIS
MEMBRE DE L' ACADÉMIE DE MÉDECINE
TOME ONZIÈME
PARIS
ASSELIN ET HOUZEAU, ÉDITEURS
PLACE DE L'ÉCOLE DE MÉDECINE
1906-1907
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Tome XI, n° 1. 15 DécemBre 1906
ae ARCHIVES
DE
PARASITOLOGIE
PUBLIÉES PAR
RAPHAEL BLANCHARD
PROTESSEUR A LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE PARIS
MEMBRE DE L ACADÉMIE DE MÉDECINE
PARIS
ASSELIN ET HOUZEAU, ÉDITEURS
PLACE DE L ÉCOLE DE MÉDECINE
1906
Les Archives paraissent tous les trois mois.
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culose (avec 14 figures dans le texte) . : . .. . . ù - + © +. 5
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AVIS
Les Archives de Parasitologie sont publiées
par MM. ASSELIN et HOUZEAU, -Énrreuns, Place de
l'École de Médecine, Paris (6°):
On est prié de s'adresser aux Sn pour tout ce qui
concerne l’administration abonnements, achat des volu-
mes antérieurs, etc.).
Les quatre premiers volumes ne sont plus représentés
en magasin que par un petit nombre d'exemplaires. Leur
prix Sera prochainement élevé.
N. B.— Il est déjà paru quatre fascicules du tome X;, par
exception, ce même volume comprendra un cinquième et dernier
fascicule, renfermant la table générale des dix premiers volumes.
La confection de cette table exigeant un certain temps, nous
commencons dès maintenant la publication du tome XH, pour ne
pas infliger trop de retard aux travaux qui attendent leur tour de
publication.
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LES VARIATIONS MORPHOLOGIQUES
DU MICROBE DE LA TUBERCULOSE
PAR
Le D' Gabriel BOUDIN
Le travail que nous présentons est un essai de synthèse des prin-
cipaux faits expérimentaux produits par les nombreux auteurs
qui se sont eflorcés, par l'étude de l'agent spécifique de la tuber-
culose, à déterminer l’étiologie, la pathogénie et l’évolution de
celle-ci. Il semble bien que cette maladie soit considérée actuelle-
ment de façons différentes, presque contradictoires.
Ou bien, dans la théorie de la spécificité des espèces micro-
biennes, le Bacille tuberculeux, micro-organisme immobile, à
endospores, Bacterium tuberculosis, représenté comme parasite
exclusif à virulence sensiblement constante, créant des lésions à
marche toujours extensive, est le facteur primordial de la tubercu-
lose. Et ne voyons-nous pas, en effet, la maladie se développer par
exemple chez des animaux de l'espèce bovine, en bonnes conditions
d'alimentation et d'aération, et qui ne sont ni des surmenés ni des
alcoolisés ?
Ou bien la tuberculose est une maladie sociale. L'Homme ne
représente pas le milieu favorable au développement de la Bac-
térie : il faut des facteurs aussi indispensables que le micro-orga-
nisme lui-même, pour la réalisation de l'infection; alimentation
défectueuse et insuffisante, air vicié d'une part, activité exagérée
d'autre part, tels sont les déterminants de l'état dit de prétuber-
culose.
Mais précisément, n'est-il pas contradictoire de fixer d'impor-
tantes conditions d'adaptation à une Bactérie très répandue au
dehors par l'expectoration de nombreux phtisiques, très résistante
aux causes de destruction, de virulence constante et parasite
exclusif. En réalité, et si l'on s’en rapporte aux seuls faits expéri-
mentaux concernant le Bacille acido-résistant de Koch, on voit
6 G. BOUDIN
que ce micro-organisme peut déterminer dans les tissus qu'il en-
vahit les troubles morbides les plus différents, parce qu'il n’est en
aucune façon un parasite exclusif et que la forme de Bactérie elle-
même, sous laquelle on convient de l’envisager, subit en vie para-
sitaire des variations morphologiques considérables. Le virus tu-
berculeux répond aux formes suivantes : Bacille cilié et mobile,
Bactérie immobile, mycélium à filaments ramifiés ; il pourrait
appartenir au groupe des Moisissures et plus spécialement au genre
Discomyces.
Si pratiquement, dans les maladies qui relèvent plus d'une
intoxication que d'une infection, comme la diphtérie ou le tétanos,
il peut paraître d'intérêt secondaire d'essayer de systématiser
l'agent spécifique de la maladie, il n’en est plus de même dans la
tuberculose. Iei, le micro-organisme, dans son état de virulence
le plus marqué, ne donne jamais dans les cultures liquides de
toxalbumines, douées de propriétés diastasiques actives : du moins,
on n'en a pas obtenu jusqu'à maintenant. Mais expérimentalement,
tantôt, par inoculation locale, ou intra-veineuse ou intra-artérielle,
il détermine des lésions nodulaires avec formations rayonnées,
d'aspect actinomycosique typique; tantôt il détermine des lésions
de tubercules étant à l’état de Bactérie résistant ou non à l’action
décolorante des acides, tantôt il crée des bacillémies toxi-infec-
tieuses à type clinique variable. Cependant il est juste de dire que
les recherches expérimentales concernant ce dernier processus
morbide n'ont été encore réalisées que par peu d'auteurs, J. Fer-
ran, de Barcelone, et le Professeur Arloing, de Lyon.
Ce n’est donc pas par un vain désir de classification que nous
avons entrepris ce travail; moins que jamais, « les espèces botani-
ques ont été créées pour la plus grande joie des botanistes. » Mais
il nous semble qu'on ne saurait relier les uns aux autres les mul-
tiples faits touchant la question de l'infection tuberculeuse, la
biologie de l'agent de la maladie, qu'à la condition expresse de se
placer au point de vue de la méthode d'observation évolutionniste,
suivant Ce principe «qui consiste à envisager dans l'être vivant
une histoire plutôt qu'un état, à le caractériser par un représen-
tation cinématographique et non par une photographie, par la vie
et non par la forme figée de son cadavre » (N. Bernard).
En 1904, alors que nous assistions au cours de Pathologie expé-
MICROBE DE LA TUBERCULOSE fl
rimentale de la Faculté, le Professeur Roger, dans les dernières
leçons faites à l’École pratique, tint à montrer aux auditeurs
différentes cultures de Bactéries, entre autres, des cultures du
Bacille de la tuberculose et de Discomyces bovis ; il insista sur les
ressemblances des colonies de ces deux micro-organismes et exposa
rapidement les raisons pour lesquelles on devait plutôt ranger le
Bacille tuberculeux dans le groupe des Streptothrir. Nous connais-
sions d'autre part les travaux du D: Ferran, de Barcelone, et du
Dr Auclair, médecin des hôpitaux de Paris, sur la variété mobile
du Bacille de Koch. Nous pûmes, pour nous renseigner sur les
stades supérieurs de pléomorphie, trouver les premières indica-
tions bibliographiques dans l’article « les maladies infectieuses com-
munes à l'Homme et aux animaux », de M. le Professeur Roger
(Traité de Médecine de Bouchard et Brissaud, 2° éd., tome I).
Le Professeur R. Blanchard eut la très grande obligeance de
nous donner des renseignements bibliographiques complémentai-
reset, dans son cours sur les parasites végétaux, du premier semes-
tre de 1906, nous fit connaître tout particulièrement le polymor-
phisme des Champignons en général, l'importance et la fréquence
des mycoses humaines et, à ce propos, des faits multiples de
pathologie comparée.
Enfin, au cours de chimie biologique du Professeur A. Gautier,
et par certaines de ses œuvres, nous pümes comprendre l'impor-
tance des échanges moléculaires dans les variations des races et
des espèces. La théorie évolutionniste, qui nous a semblé dans le
cas de l’Hyphomycète de la tuberculose celle qui actuellement
coordonne le mieux les faits, nous paraît en plus devoir être de
grande utilité pour la compréhension des nombreux faits de bac-
tériologie encore non systématisés jusqu'ici. Cette théorie ne
s’'appuie-t-elle pas essentiellement sur les lois de la chimie physi-
que? Et les lois de cette science sont celles que l’on doit appliquer
à l'étude de ces états biologiques groupés sous les noms de toxines
solubles, microbes invisibles, agglutinines, ete, ; les sciences expé-
rimentales s’approprient de plus en plus les phénomènes de la
vie normale et pathologique.
8 G. BOUDIN
PREMIÈRE PARTIE
I. — Rôle du Bacille de Koch dans les lésions de tuberculose.
II. — Les caractères biologiques et morphologiques du Bacille acido-
résistant de la tuberculose; leur valenr en classification.
CHAPITRE I
1. Tuberculose expérimentale : par inoculation, Vizzemin (1865); par
ingestion, CHAUVEAU (1868).
2. Micro-organismes, agents infectieux de tuberculose, découverts par
KLegs (1877), ToussaiNT (1880), R. Kocx (1882).
3. Critiques restrictives de l’action spécifique du Bacille de Koch, agent
infectieux unique de tiberculose.
En 1865-1866, Villemin démontre expérimentalement l'inocula-
bilité de la tuberculose de l'Homme à différents animaux. Ses ex-
périmentations portèrent sur 96 animaux dont 77 Lapins; le Lapin
et le Cobaye donnèrent une grande majorité de résultats posi-
tifs ; le Chien, le Chat, le Mouton, la Chèvre ne furent pas toujours
contaminés. Un Coq, un Pigeon, dans une première série d'expé-
riences, inoculés à plusieurs reprises, restèrent réfractaires. Ces ex-
périences déterminent Villemin à considérer la tuberculose comme
une maladie contagieuse, due au développement dans les orga-
nismes d'un agent microbien spécifique. À cause des résultats
négatifs de l'inoculation chez les Oiseaux, l’auteur considére
l'existence de la tuberculose chez ces animaux comme incertaine.
Villemin démontre également l'inoculabilité de la tuberculose
bovine au Lapin; et dans ce dernier cas, le Lapin accuse des lésions
plus manifestes encore qu'à la suite de l'inoculation de substance
tuberculeuse humaine.
En 1868, Chauveau tuberculise des génisses en les soumettant à
l'ingestion de substance tuberculeuse provenant de Vache phti-
sique; il tuberculise des Veaux en leur faisant ingérer de la ma-
tière tuberculeuse provenant de poumons humains.
Villemin et Chauveau obtiennent chez les animaux des résultats
positifs d'infection spécifique, aussi bien avec les produits de gra-
nulations isolées, qu'avec ceux d'infiltration tuberculeuse, de pneu-
monie caséeuse. Lebert (Breslau) confirme, en 1866, les expériences
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 9
de Villemin et démontre également que l’inoculation de substance
caséeuse détermine une éruption de tubercules disséminés. Mais
cet expérimentateur neconcluait pas, de l'inoculabilité de la tuber-
culose par les modes artificiels et peu ménagés de l'infection expé-
rimentale, à la contagiosité naturelle de la maladie.
Tous ces faits de contamination par inoculation et par ingestion
s’augmentent ensuite des résultats positifs d'autres expérimenta-
teurs. Fallait-il objecter contre « la virulence spécifique et l'inocu-
labilité de la tuberculose » que l'inoculation de toute poudre inerte
provoque également des granulations typiques? Dans ce dernier
cas, les réinoculations en série restent négatives; si bien que celles
des tuberculoses qui sont capables d'être réinoculées en série
(H. Martin, 1879-1881) sont désormais les seules à être considérées
comme l'effet d'un agent microbien spécifique.
En même temps, on revenait à la doctrine de Laënnec (1819) de
l'unité de la tuberculose; pneumonie caséeuse, granulation tuber-
culeuse, considérées d'apres les recherches histologiques (Virchow
1852, Niemeyer, Robin, Empis 1865) comme maladies différentes
n'étaient plus, après les recherches de pathologie expérimentale de
Villemin et de Chauveau, et de nouvelles recherches histologiques
(Grancher, 1872), que deux lésions développées sous l'influence d'un
même virus, qu'il s'agissait dès lors de déterminer.
En 1877, Klebs (Prague) cultive en ballons stérilisés, sur du
blanc d'œuf recueilli aseptiquement et ensemencé avec de la ma-
tière caséeuse, des micro-organismes extrêmement ténus, sphé-
riques, mobiles, d'un diamètre de 2, qu'il appelle Monas tuber-
culosum; à ces granulations mobiles étaient associées parfois de
courtes Bactéries. Klebs obtient des lésions nodulaires, par
inoculation de culture pure de ces Monadines dans le péritoine
du Chat; il retrouve dans les tubercules le micro-organisme
inoculé. Reinstadler (1879), puis Schuller (1880) isolent et inoculent
un microbe agent de la tuberculose qu'ils considérent comme iden
tique au Monas tuberculosum de Klebs. Deutschmann (1881) pense,
d’après des expériences personnelles, que la Monade tuberculeuse
de Klebs n’est pas capable à elle seule de donner la tuberculose.
Pour le démontrer, il fait une émulsion de pus tuberculeux qui
se sépare en un dépôt et un liquide plus clair surnageant. Ce li-
quide clair contient le Monas tuberculosum ; mais inoculé aux ani-
10 G. BOUDIN
maux, il ne provoque aucun trouble, tandis que l’inoculation du
sédiment détermine des lésions de tuberculose.
En 1880, Toussaint ensemence des ballons de bouillon de Chat,
de Porc, de Lapin avec du sérum de sang recueilli aseptiquement
sur la Vache tuberculeuse. Il cultive ainsi des Microcoques, « gra-
nulations très petites, simples, géminées ou réuniesen petits amas».
Par inoculation des cultures de ces micro-organismes, il détermine
chez le Chat une tuberculose expérimentale. En 1881, Toussaint,
après tuberculisation d'une jeune Truie par ingestion de substance
tuberculeuse, ensemence avec du sang, avec de la pulpe de gan-
glions pharyngiens, bronchiques et intestinaux de cetanimal, sept
ballons de bouillon de Lapin légèrement alcalin. Dès le lendemain,
il constate le trouble du bouillon de culture dans les 7 ballons.
Ceux-ci contiennent tous un seul et même Microbe. « Ces cultures
poussées jusqu'à la dixième ont conservé toute leur pureté. L'ac-
tivité de la multiplication dure de dix à quinze jours, puis, après
ce temps, le liquide épuisé s’éclaireit, les microbes tombent au
fond du vase et forment un dépôt de couleur légèrement jaunâtre.
«Ce dépôt estexclusivement composé de très petites granulations
isolées, géminées, réunies par groupes de trois à dix ou en petits
amas irréguliers. Dans les premiers jours de la culture, on voit
des flocons blanchâtres assez consistants, qui ressemblent beaucoup
aux filaments des cultures de bactéridie; lorsqu'on aspire avec un
tube effilé, la plus grande partie du nuage monte dans le tube ou
reste suspendue à son extrémité; elle persiste plusieurs jours dans
le liquide clair sans se diluer : le Microbe est donc entouré à ce mo-
ment par une atmosphère de matière gluante et assez consistante.
« Examinés au microscope, les points agglomérés montrent des
amas extrêmement riches d'un microbe qui paraît alors immobile
et répandu isolément sur toute la surface de la préparation. Dans
les parties liquides, on observe, au contraire, dans les granulations
isolées, géminées ou réunies en plus grand nombre, des mouve-
ments browniens très prononcés. Plus tard, la couleur blanchâtre
du liquide devient uniforme et enfin les Microbes tombent au fond
du liquide. Leur réfringence est beaucoup plus grande à la fin
qu'au début de la culture, le diamètre a diminué : il est un peu
inférieur à celui du Microbe du choléra des Poules et n'offre guère
que OnmH001 à Omm0002 de diamètre. »
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 1
Par inoculation des premières séries des cultures pures de ce
Microbe, Toussaint n'obtient aucun résultat. Par inoeulation d’une
troisième culture, il obtient des tubercules chez un Lapin. « Des
Chats inoculés dans le péritoine meurent de cachexie après un
mois de captivité, pendant lequel ils ont été constamment nourris
avec des viandes très cuites. Le premier Chat qui mourutavait des
ganglions intestinaux énormes, en certains points même, caséeux ;
mais à ce moment la tuberculose n'était pas encore généralisée ».
Toussaint inocule ensuite la pulpe et la sérosité de ces ganglions
à des Lapins jeunes. « Tous les animaux ainsi traités, au nombre
de huit, sont devenus tuberculeux. Après deux mois, l'infection
était devenue générale, le poumon et la rate étaient remplis de
tubercules gris. Les premiers Lapins tués ont servi à l’inocula-
tion d’une seconde série de Lapins qui présentent en ce momen
tous les symptômes de la tuberculose. »
En 1881, Aufrecht décrit chez des Lapins rendus tuberculeux
par inoculation de lésions de pommelière, de fins Microcoques,
isolés ou réunis par deux ou par trois occupant le centre des tuber-
cules miliaires. À côté des Microcoques, se voient des Bacilles très
réfringents, se colorant directement par la fuchsine, et dont la
longueur est double de la largeur.
Le 24 mars 1882, R. Koch communique à la Société de Physio-
logie de Berlin une note sur la recherche et la culture du Bacille
de la tuberculose. Le 10 avril, dans le Berliner klinische Wochen-
schrift, il publie, sur l’étiologie de la tuberculose, un mémoire
d'après lequel, le Microbe de la tuberculose serait un Bacille qu'il
décèle, dans les crachats et les lésions tuberculeuses humaines,
d'après une méthode spéciale.
La réaction colorante caractéristique du Bacille de la tubercu-
lose d’après Koch, consiste en ce que ce micro-organisme ne se
laisse pas teindre par les couleurs basiques d’aniline, mais par
une solution de bleu de méthylène alcalinisée par la potasse. En
conséquence, Koch laisse séjourner pendant 24 heures les prépara-
tions à examiner dans le liquide tinctorial suivant :
Solution alcoolique concentrée de bleu
10 MÉTIER CS, 0 cent. cube
Solution de AA 400 . es o0r 20
BaurdiS lé PEAR Sent ne 200 gr.
12 G. BOUDIN
Il recouvre la préparation ainsi traitée d'une lamelle sur laquelle
a été préalablement déposée une goutte de solution aqueuse con-
centrée de vésuvine filtrée. À l'examen microscopique, les Bacilles
apparaissent colorés en bleu, tranchant sur le fond jaune brun du
reste de la préparation; ils paraissent donc particulièrement diffi-
ciles à colorer; il faut ajouter en effet à la solution de couleur d'’a-
niline un mordant, ici, une substance alcaline, la potasse; et en
plus il faut faire agir cette solution colorante un temps plus ou
moins long sur les produits suspects à colorer. Si l’on veut abréger
le séjour des préparations dans le liquide colorant, il est néces-
saire de chauffer celui-ci.
Presque immédiatement, Ehrlich, élève de Koch, propose une
autre méthode de teinture plus rapide et plus sûre, basée sur cette
constatation de la difficulté de décoloration du Bacille tuberculeux
par les acides. Ehrlich obtient la coloration par un séjour d'une
demi-heure à froid, ou cinq minutes à chaud, des préparations
dans la solution suivante, toujours fraîchement préparée et dans
laquelle l'huile d'aniline remplace la potasse.
Fautdaniline EE OC tACUDES
AICO0lR APS PR RP lCeNt- Cube:
Solution alcoolique concentrée de fuch-
sine ou de violet de gentiane. . . . 1 cent. cube.
La coloration obtenue, la préparation, coupe ou lamelle, est lavée
dans l’eau filtrée, puis soumise à l'action décolorante d’une solu-
tion aqueuse d'acide azotique au tiers, ou dans une solution alcoo-
lique d'acide azotique au dixième. — L'acide doit agir pendant
environ une ou deux minutes, la préparation ne devant plus avoir
qu'une légère coloration rosée ou bleuâtre, suivant la couleur em-
ployée. L'examen dela lamelle après la décoloration à l'acide montre
le Bacille tuberculeux, coloré en rouge ou en violet ; les autres élé-
ments de la préparation sont décolorés. Les Bacilles ne se détachent
pas nettement sur le fond clair de la préparation; on teinte alors le
fond à l’aide d'une solution aqueuse de vésuvine, puis on examine
à l’aide de l'objectif à immersion homogène et l'éclairage Abbe.
A l'aide de ces moyens de révélation du virus spécifique, Koch
formule les propositions suivantes : Le micro-organisme décelé
par les méthodes de coloration appropriées a une forme invariable en
bâtonnet.
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 143
Dans toutes les affections tuberculeuses et exclusivement dans
celles-ci, se trouvent les Bacilles tuberculeux.
Ils apparaissent toujours avant le début du processus tubercu-
leux, qu'ils déterminent. Ils sont alors en grande quantité puis
deviennent moins nombreux avec l'évolution des lésions, puis
disparaissent.
Les Bacilles tuberculeux peuvent être isolés des lésions sur des
milieux appropriés, en cultures pures.
Pour réussir à ensemencer les milieux artificiels, il faut se sou-
mettre à des conditionsspécialesde température (38°), et desubstra-
tum nutritif. Et même, si l’ensemencement est fait dans ces
conditions, il peut n'être pas suivi de succès. Les Bacilles de la
tuberculose apparaissent donc comme des parasites exclusifs. Cul-
tivés et entretenus dans les milieux artificiels par des ensemen-
cements en série, ils déterminent expérimentalement chez les
animaux les lésions spécifiques de la maladie.
Ces Bacilles sont les seuls agents, cause incontestable, de la tuber-
culose. C’est la présence des Bacilles tuberculeux, soit mis en évi-
dence directement dans les lésions ou crachats, par les méthodes de
coloration appropriées, soit isolés des lésions par les cultures, qui
donne le droit de faire le diagnostic de tuberculose.
Enfin Koch, se basant sur l'identité des Bacilles et de leurs réac-
tions colorantes, mais non sur l'aspect physique des cultures (il
n'avait pas encore cultivé le Bacille de la tuberculose aviaire) con-
sidère comme provoquées par un même microbe, les tuberculoses
de l'Homme, des Mammifères, des Oiseaux. Et, le premier, il fit
connaître ainsi la tuberculose des Oiseaux, que Villemin avait
mise en doute à cause des échecs réitérés de ses inoculations sur
un Coq et un Pigeon ; en effet Koch put découvrir le Bacille acido-
résistant dans les tumeurs caséo-calcaires du foie et de l'intestin
des Poules. : £
Tel est l'exposé général des découvertes de Koch sur le virus
tuberculeux. D'une façon plus complète qu'en 1882, il avait exposé
en 1884 le résultat de ses recherches dans « les Communications
de l'Office de Santé impérial » dans un mémoire intitulé : l’étio-
logie de la tuberculose.
Koch ne modifie guère ensuite sa doctrine quant à la biologie
générale et les caractères botaniques du micro-organisme spé-
14 G. BOUDIN
cifique de la tuberculose qu'il avait isolé et décrit en tant que Ba-
cille du groupe des Schizophytes. Il soutenait d'ailleurs la théorie
du développement des maladies sous l'influence prédominante des
Bactéries sur les Moisissures.
En novembre 1890, en avril 1897, il expose une méthode de trai-
tement de la tuberculose par des extraits de bacilles stérilisés par
la chaleur (tuberculine ancienne), ou tués mécaniquement (tuber-
culine résiduelle).
Middendorp fait remarquer qu'à la dernière de ces dates « Koch
émet sur la présence et le nombre des Bacilles dans les tissus une
théorie restrictive de son opinion primitive. Il dit d’abord :
« qu'ordinairement les Bacilles tuberculeux ne s’accroissent qu'en
nombre restreint et très lentement dans les tissus du corps » et puis
que « dans la tuberculose aiguë de l'Homme, de même que dans la
tuberculose expérimentale du Cobaye aurait lieu une invasion subite
de Bacilles tuberculeux qui, après quelque temps, disparaîtraient.
« La première assertion est donc bien contraire à son opinion pri-
mitive, suivant laquelle les Bacilles s'y trouvent ordinairement en
foule considérable. Elle est de plus tout à fait en contradiction avec
les résultats de l’autopsie de poumons phtisiques, où ces microbes
se rencontrent constamment en foule énorme dans chaque caverne
ouverte. » |
De plus, Koch, qui avait admis une virulence invariable du Ba-
cille tuberculeux, le considère à cette date comme un miCcro-0rga-
nisme à pouvoir toxi-infectieux non constant.
Et enfin revenant sur son ancienne théorie de l'unicité des tuber-
culosesanimalesetaviaire l’auteuravaitséparé comme espèces diffé-
rentes, à caractères distinctifs persistants, le Bacille humain, le
Bacille bovin, le Bacille des Oiseaux.
A propos de ce dernier virus, il reconnut, au Congrès international
de médecine de Berlin de 1890, avoir identifié le Bacille aviaire au
Bacille humain, sans avoir eu de cultures faites en partant de lésions
de tuberculose aviaire. Mais ayant obtenu ensuite des cultures de
cette origine, à cause de leur aspect spécial, il sépare en espèces
distinctes, les différents Bacilles acido-résistants des tuberculoses
animales. Il était en cela conforme à sa doctrine générale de l’im-
portance descaractères physiques des colonies bactériennes, comme
signes particuliers et distinctifs d'espèce.
Re
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 15
Dès leur apparition, les communications de Koch soulevèrent
des objections. Les arguments des adversaires, s'ils ne contredisent
pas les faits essentiels de la découverte du bactériologiste allemand,
tendent à en limiter les conclusions trop rigoureuses. Ces argu-
ments sont, aujourd hui encore, tout particulièrement valables.
C'est ainsi que Crämer, Balogh, constatent le premier, dans les ex-
créments humains, le deuxième dans les liquides en putréfaction,
des micro-organismes se colorant comme ceux de la tuberculose.
Lichtheim découvre, dans les selles des tuberculeux, des Microco-
ques maniiestant la coloration spéciale. Spina, dont les critiques
en particulier eurent un certain retentissement, tend à montrer
que le Bacille de Koch, dans sa réaction colorante par la méthode
d'Ehrlich, ne manifeste pas une propriétéspécifique due à une mem-
brane impénétrable aux acides, comme le prétendent Koch et Ehr-
lich en 1882. Le micro-organisme peut se laisser colorer par la
fuchsine en solution aqueuse, sans addition de phénol ; et dans le
procédé Ehrlich, la résistance de décoloration aux acides varie
avec la plus ou moins grande durée d'action de ceux-ci; les Bacilles
de Koch se laissent pénétrer et décolorer par l'acide azotique.
Cette résistance toute quantitative aux acides est manifestée par
des Bactéries de la putréfaction. En plus elle peut s'acquérir
artificiellement; le contact du tannin ou de substances grasses donne
à des bactéries mortes l'acido-résistance. En 1887, Spina reviendra
encore sur cette particularité d'action de l'acide tannique en solu-
tion, des graisses ajoutées au milieu de culture de différentes
Bactéries, et conférant à celles-ci le pouvoir de résister plus ou
moins à l’action des acides.
Pour Spina, la forme en bâtonnet mince du Bacille de Koch
n'est pas constante. Il peut se présenter sous l'aspect d'élé-
ments courts et épais, minces et longs, de filaments scindés en
articles et placés bout à bout. Le Bacille de Koch n'existe pas que
dans le mucus des bronches des tuberculeux. D'autre part, Spina
a étudié un nombre considérable de tubercules du mésentère et
n'a pas trouvé à leur intérieur de Bactéries décelables par les pro-
cédés Koch-Ehrlich ;en conséquence, les produits de la tuberculose,
qui ne sont pas en contact direct avec l'air, ne contiennent pas de
Bacillescapables de résister à la décoloration parles acides.De toutes
ses recherches, Spina conclut que si l’on doit accorder une valeur
16 G. BOUDIN
au grand nombre de Bactéries, présentant la réaction colorante de
Koch, trouvées dans les expectorations des tuberculeux, il n’en est
pas moins vrai que les Bactéries de la tuberculose ont la même
réaction tinctoriale que certaines Bactéries de la putréfaction.
Quant aux cultures de Koch, s'il n’est pas douteux qu'elles contien-
nent des Bacilles spéciaux et déterminant l'apparition de lésions
nodulaires, des germes infectieux d'apparence différente, obtenus
en culture, peuvent également produire des nodules semblables.
Koch répondit à toutes ces critiques dans un travail d'ensemble
qu'il fit paraître en 1883, dans le n° 10 du Deulsche medic. Wochens-
chrift. Il y expose à nouveau les faits principaux de sa découverte
et notamment dit qu'on peut baser le diagnostic de la phtisie
sur la présence des Bacilles dans les crachats. Quelquefois ils sont
peu nombreux; mais il est toujours possible de les découvrir
après des recherches minutieuses. Ceux qui ne trouvent pas le
Bacille de la tuberculose dans les crachats ne possèdent pas de
bonnes méthodes de coloration et de recherche de ce micro-orga-
nisme. Puis à Crämer, à Balogh et à différents autres auteurs, il
fait cette réponse que si des Bacilles sont très voisins les uns des
autres par certains caractères, cela ne prouve pas qu'ils soient les
mêmes. [ls peuvent, quoique presque semblables, posséder des
propriétés pathogènes différentes. Ainsi, les Bacilles de la lèpre,
analogues à ceux de la tuberculose par bien des points, ne pro-
duisent pas en inoculation des nodules tuberculeux; et d’ailleurs,
il n’a pas dit qu'on ne trouvera jamais de Bactéries semblables à
celles de la tuberculose. Il à dit seulement qu'on en avait pas
trouvé jusqu'ici. Quant aux critiques de Spina, Koch pensa qu'au
total elles étaient basées sur une technique défectueuse et des pro-
cédés expérimentaux non rigoureux, d'où des arguments sans
valeur scientifique.
Devant là valeur indiscutable et le nombre des expériences de
Koch, malgré les travaux de Klebs, et surtout malgré les recherches
très complètes de Toussaint, à partir de 1882, on considère le
Bacille acido-résistant de Koch comme l'unique, le seul vrai agent
de la tuberculose. Il est à voir dans tous les crachats des phtisiques
et dans toutes les lésions nodulaires. Bacille de Koch et tubercu-
lose sont désormais deux termes d’une inséparable association.
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 17
CHAPITRE II
1. Travaux de MaLaAssez et ViGNAL sur la tuberculose zoogléique. Raisons
déterminantes de leurs expériences. Leurs deux hypothèses sur le rapport de
la Zooglée, comme agent infectieux de tuberculose, avec le Bacille de Koch.
2. Rapports apparents ou réels de Microbes polymorphes avec le Bacille de
Koch : travaux de CHANTEMESSE, de GRANCHER 8 LEDoux-LEBARD, de
LEGRAIN.
3. Définition du terme pseudo-tuberculeux, par S. ARLOING.
Dès 1883, la pathologie expérimentale semble vouloir apporter
des résultats inquiétants pour l'unité de la maladie spécifique, en
multipliant les germes capables de produire les nodules tubercu-
leux. En réalité, le problème est considéré dès lors avec plus de
précision et sous un aspect différent; les conditions de la solution
vont se restreindre de plus en plus aux seules données de la patho-
logie expérimentale, vérification faite de la possibilité de réactions
cellulaires identiques sous l'influence de virus différents. Dans
une communication faite le 22 avril 1882, au Congrès de Wiesba-
den, Koch disait avoir toujours constaté, même dans les adénites
scrofuleuses et les arthrites fongueuses, les Bacilles acido-résis-
tants : «Il admettait cependant qu'ils puissent faire défaut, leurs
spores étant invisibles par la coloration » (Malassez et Vignal). En
1883, ces deux derniers auteurs mettent nettementen évidence la
disproportion considérable que l’on constate si souvent entre le
très petit nombre de Bacilles trouvés et l'importance des lésions
observées ; même dans des lésions composées de granulations con-
fluentes, il arrive qu'aucun Bacille ne peut être trouvé : « Ces der-
niers faits sont indéniables, ils ont été reconnus par ceux-là même
qui étaient les plus aptes, les plus intéressés pourrait-on dire, à
découvrir le parasite, Koch lui-même et plusieurs de ses parti-
sans. » En conséquence, Malassez et Vignal cherchent à voir si les
animaux inoculés avec une lésion tuberculeuse sans Bacilles,
deviennent tuberculeux. et si l’on trouve dans les lésions d’ino-
culation le Bacille de Koch ou tout autre micro-organisme para-
site. Un nodule tuberculeux sous-cutané de l'avant-bras que
portait un enfant de quatre ans mort de méningite tuberculeuse,
et la paroi d’un abcès ossifluent que portait au cou-de-pied un en-
fant de deux ans, furent les deux pièces principales ne contenant
Archives de Parasitologie, XI, n° 1, 1906. 2
18 G. BOUDIN
pas de Bacilles, utilisées pour les expériences de Malassez et Vignal.
Les résultats principaux de ces expériences sont les suivants :
1° Ces lésions dépourvues de Bacilles de Koch ont produit
par inoculation, tantôt une tuberculose zoogléique, tantôt une
tuberculose bacillaire ordinaire.
20 Ces tuberculoses zoogléiques se sont transformées en tubercu-
loses bacillaires après un nombre plus ou moins considérable de
générations d'inoculation. Les Bacilles existent en plus grand
nombre chez les animaux inoculés depuis déjà un certain temps.
Les produits de culture ont déterminé également par inoculation,
des tuberculoses zoogléiques devenant ensuite bacillaires. (Les cul-
tures avaient été faites selon la méthode de Koch sur du sérum de
sang de bœuf stérilisé et gélatiné. Beaucoup de tubes ensemencés
restèrent stériles. Les colonies qui se développèrent au bout de
quelques jours eurent un développement en croutelle desséchée,
prenant un aspect écailleux).
3° Deux cultures provenant d’une même lésion tuberculeuse
sans Bacilles de Koch ont donné par inoculation, l'une une tuber-
culose zoogléique, l’autre une tuberculose d'emblée bacillaire.
Les Zooglées sont polymorphes et peuvent manifester des formes
en Microcoques, Diplocoques et en chapelets courts et longs, unis
par une matière glaireuse. Elles peuvent se résoudre dans les tis-
sus en très fines granulations à peine perceptibles — ce qui pour-
rait faire croire à leur disparition. Dans cet état cependant la réino-
culation est possible, et, dans les lésions nouvelles, la forme z00-
gléique réapparait avec ses caractères habituels. Dans les tissus
caséifiés en voie de ramollissement on trouve en plus des Zooglées,
des Microcoques isolés, sans matière glaireuse, moins allongés
que les micro-organismes de la forme zoogléique pure, mais pou-
vant aussi se présenter sous forme de Diplocoques, de chapelets,
d'amas. Tous ces micro-organismes de la tuberculose zoogléique
se colorent sensiblement d’une façon analogue par le bleu de mé-
thylène et l'huile d’'aniline ; on fait agir ensuite sur la préparation
l’action décolorante de l'alcool et du carbonate de soude. Cette
méthode ne colore pas le Bacille de Koch. Le procédé Ehrlich ne
colore pas les Zooglées. (Il y aurait lieu, disent Malassez et Vi-
gnal, de comparer les formes en Microcoques et Diplocoques de
notre tuberculose zoogléique avec la Monade tuberculeuse de
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 19
Klebs, ainsi qu'avec les autres prétendus Microbes de la tubercu-
lose de Toussaint, Aufrecht et autres. Il y a évidemment entre
elles toutes de grandes ressemblances, mais y a-t-il similitude ?
Le fait est possible, mais nous n’oserions pas l’affirmer, n'étant pas
assez sûrs de ce que les auteurs susdits ont vu en réalité ». On pré-
tendit, en Allemagne en particulier, que «tout l'échafaudage du
travail de Malassez et Vignal était vraisemblablement faux. » Ces
auteurs, tenant compte de tous les faits et sûrs de la complexité de
ceux-ci, gardèrent dans les conclusions de leur mémoire une très
grande réserve. Se basant surtout sur le rapport dela généralisation
extrêmement rapide des lésions tuberculeuses avec la présence des
Zooglées d’une part, et d'autre part sur l'apparition tardive du
Bacille de Koch dans les lésions, Malassez et Vignal font deux
hypothèses. Après avoir émis une première hypothèse à savoir que
les Zooglées et les Bacilles ne sont que deux formes différentes
d'un même micro-organisme, ils considèrent une seconde hypo-
thèse qui paraît rendre compte de tous les faits observés : « Elle
consiste à admettre que les pièces d’inoculation contenaient à la
tois le germe de deux tuberculoses. On pourrait dire en effet que
si dans deux de nos séries d'expériences, les Zooglées se sont
seules montrées pendant plusieurs générations, c’est que nous
avions eu affaire à des tuberculoses zoogléiques suraiguës, qui
emportaient nos animaux avant que la tuberculose bacillaire ait
eu le temps de se manifester; cette dernière ne serait apparue que
lorsque l'infection zoogléique, s'étant affaiblie, les animaux ont
pu résister et vivre plus longtemps. Et si deux cultures provenant
d'une même pièce ont donné lieu à deux tuberculoses difiérentes,
c'est que dans chacune d'elles, il s'était développé un seul des deux
micro-organismes, ou du moins l’un d'eux plus spécialement. Telle
est l'hypothèse qui nous paraît rendre le meilleur compte de
l'ensemble des faits actuellement connus, mais nous ne voulons
pas, nous ne pouvons rien affirmer encore, ce n’est qu'une théorie
d'attente... la démonstration expérimentale n’en est pas faite. »
En 1885, Nocard décrit un cas de tuberculose zoogléique obser-
vée dans le poumon d’une Poule. Eberth décrit deux cas de tuber-
culose zoogléique, l’un chez le Cobaye, l’autre chez le Lapin.
En 1887, Chantemesse publie le résultat d’un travail sur la tuber-
culose zoogléique entrepris dans les circonstances suivantes :
20 G. BOUDIN
« En octobre 1885, M. le Dr Terrier nous a remis, dit l'auteur au la-
boratoire du professeur Cornil, des tubes fermés à la lampe qui con-
tenaient des fragments d’ouate. Sur cette ouate, M. Terrier avait fait
passer une centaine de litres d'air puisé dans des salles où des ma-
lades atteints de tuberculose pulmonaire allaient se soumettre à des
inhalations médicamenteuses. Les malades étaient nombreux
et aucune précaution sérieuse n'était prise pour la désinfection
de la salle. » Chacun des fragments d'ouate fut introduit avec
toutes les précautions antiseptiques dans le péritoine de Cobayes.
Les animaux moururent en l’espace d'un mois environ. Les lé-
sions avaient tellement l'apparence de tubercules ordinaires que
nous avons cru tout d'abord qu'il s'agissait de cette maladie, aussi
n'avons-nous pas, par une négligence très regrettable, tenté de
faire des cultures et des inoculations en série. » Chantemesse
conclut qu'à la suite de l'observation microscopique il croit avoir
observé la tuberculose zoogléique telle que l'ont décrite, Malassez
et Vignal, Nocard, Eberth.
En 1888, Charrin et Roger observent une pseudo-tuberculose
bacillaire développée spontanément chez un Cobaye, obtiennent
des cultures pures d'un micro-organisme polymorphe, mais à in-
dividus distincts et non réunis en Zooglées. Les granulations déter-
minées par l'inoculation diffèrent histologiquement de celles de la
tuberculose vraie (type Koch) et de la tuberculose zoogléique et ne
présentent pas de dégénérescence centrale des lobules. Dans la
mêmeannée, Dor décrit une tuberculose à streptobacille développée
chez un Lapin mortspontanément. Et Roger constate une tubercu-
lose à streptobacille, spontanée, chez le Cobaye et le Lapin.
En 1889, Grancher et Ledoux-Lebard présentent un mémoire
sur la tuberculose zoogléique. Ils ont été amenés à cette étude d'une
facon tout à fait indirecte : «Au mois d'avril 188$, dansle cours de
recherchessur le pouvoir de filtration du sol, nous avons, disent-ils,
observé un cas de tuberculose zoogléique, chez un Cobaye mort
quatre où cinq jours après une inoculation pratiquée de la manière
suivante : Trois cultures du Bacille de Koch sur gélose glycérinée
avaient été répandues à la surface d'une couche de terre de Om15
de hauteur, contenue dans un cylindre de verre de 010 de dia-
mètre. La terre provenait du jardin de l'hôpital des enfants. On
l’arrosait chaque jour avec de l'eau stérilisée tombant goutte à
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 21
goutte d'un vase de Mariotte, sur ce sol, et s'écoulant, après filtra-
tion, par un tube placé à la partie inférieure du cylindre. Le
liquide était recueilli dans un verre stérilisé. C’est avec un eme de
liquide, le 3° jour après l'installation de l'appareil, que futinoculé,
dans l'abdomen, le Cobaye dont il est question. Ce Cobaye fut le
point dedépart d'une courtesérie d’inoculations de Cobaye à Cobaye,
jusqu'au 4° passage. » [ls n’ont done pas poussé aussi loin que
Malassez et Vignal leurs inoculations en série; ces deux derniers au-
teursobservèrent en effet la tuberculose bacillaire à Bacilles de Koch,
en plus dela tuberculose zoogléique,surlacinquièmesérie d'animaux
inoculés. Mais comme Malassez et Vignal, Grancher et Ledoux Le-
bard remarquent que dans les inoculations en série de Cobaye à Co-
baye ou de Lapin à Lapin, les Zooglées deviennentde plus en plus pe-
tites et netardent pas à disparaître ; ou bien on n'arrive plus à déceler
le micro-organisme dans les tissus par les procédés de coloration qui
jusque-là avaient réussi, ou bien on ne trouve plus dans les organes
que de courtes chaînettes ou des Bacilles isolés, « comme si la Zoo-
glée avait diffusé en tronçons épars les longs chapelets qui la cons-
tituent ». Les organes des animaux des dernières séries d'inocula-
tion donnent en culture, «non des filaments articulés comme ceux
de la Zooglée, mais des Bacilles en tout semblables à ceux de la
pseudo-tuberculose bacillaire de Charrin et Roger. Ces cultures ino-
culées donnent le tableau anatomo-pathologique de la tuberculose
zoogléique, mais sans Zooglées dans les tissus. De plus, Gran-
cher et Ledoux-Lebard passent de la forme bacillaire à la forme
zoogléique. Sur des cultures de pseudo-tuberculose, en faisant va-
rier la composition des milieux et surtout la température à laquelle
se développent les colonies, ils observent les phénomènes suivants :
les Bacilles isolés s'allongent, se fragmentent et forment de longs
chapelets en forme de bâtonnets articulés bout à bout. Puis des flo-
cons blanchâtres se forment dans les cultures liquides, composés
«d’une touffe de filaments articulés qui rappellent absolument les
parties périphériques et lâches de la Zooglée, développée dans
les organes du Cobaye. Les articles sont réunis l’un à l'autre au
niveau de leurs points de contact, par toute la surface de leurs
extrémités en regard, à l’aide d'une substance pâle, rétablissant la
orme cylindrique du filament qui ne présenterait ainsi qu'une
fausse articulation due à une différenciation de la substance. Les
129 G. BOUDIN
parties colorables du protoplasma se disposeraient en chapelet,
à l'intérieur du filament cylindrique... » En second lieu, des
Cobayes inoculés dans l'abdomen avec une culture ayant pour ori-
gine une culture de pseudo-tuberculose de Charrin et Roger, con-
servée par ensemencements successifs, présentèrent dans le foie des
Zooglées identiques par leur structure à la Zooglée de Malassez et
Vignal. Ainsi de même que les Bacilles, isolés d'une culture sur
agar peptonisé, donnent, dans du bouillon à 38° - 40° de longs cha-
pelets, de même dans l'organisme de certains animaux, le Bacille
se développe en filaments et forme des Zooglées. Comme concelu-
sions, les auteurs :
1° Identifient la « pseudo-tuberculose » de Charrin et Roger et
leur tuberculose zoogléique, découverte dans les conditions ci-des-
sus eXPOsées ;
20 Ayant recherché le Bacille de Koch dans les différentes lésions
manifestées par les animaux au cours des inoculations en série,
ils n'ont pu constater sa présence. Mais, énumérant les nombreux
caractères de ressemblance que présentent les Zooglées de Malassez
et Vignal et celles qu'ils ont étudiées, ils affirmeraient leur iden-
tité, si : («dans les expériences de Malassez et Vignal, l'apparition
des Bacilles de Koch après un certain nombre de passages et lors-
que les Zooglées disparaissaient, n'éveillait quelque doute et n’auto-
risait peut-être d'autres interprétations. »
En 1891, Legrain décrivit une pseudo-tuberculose produite chez
le Lapin, par inoculation d’un Bacille trouvé dans les crachats d'un
phtisique, où il était associé au Bacille de Koch.
Puis les tuberculoses à Zooglées, à Bacilles isolés, ou à Strep-
tobacilles, donc différentes par leur agent causal, de la tubercu-
lose de Koch, se multiplient. Mais les connexions singulières que
certains de ces micro-organismes montrent avec le Bacille de
Koch dans certains cas d'observation ou d'expérimentation, leur
polymorphisme considérable, leur tendance à croître en filaments
de très grande longueur composés de 15 à 20 éléments bacillaires
réunis bout à bout par une gaine incolore, leur aptitude à se trans-
former, à se désintégrer dans les cultures et dans les tissus, à me-
sure que les lésions évoluent, enfin les parentés étroites que tous
ces germes semblent avoir entre eux, autorisent à la très pru-
dente réserve que tinrent Malassez et Vignal, Grancher et Ledoux-
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 23
Lebard. Toutefois, d'une facon générale, on conclut à l'autonomie
des Zooglées, ou des Streptobacilles, capables de déterminer des
lésions nodulaires. Certains auteurs peut-être, par prudence, les
rangent sous la dénomination générale de pseudo-tuberculoses.
Arloing s'élève contre cette appellation. Le terme de pseudo-tu-
berculose, d'aprèslui, doit étreuniquement réservé aux tuberculoses
développées sous l'influence de particules fines inanimées, et de
poudres inertes. Ces tuberculoses ne font que simuler les lésions
infectieuses et ne sont pas réinoculables en série. Et toutes les tu-
berculoses dues à un germe spécifique, vivant, doivent être dési-
gnées sous les noms distinctifs de tuberculose à Bacilles de Koch,
tuberculose streptobacillaire de Courmont, tuberculose à Zooglée.
Pour cet auteur, en 1892, tous ces virus sont nettement indépen-
dants : «La Zooglée ne peut être une modification du Bacille de
Koch, car la transformation serait tellement profonde que cela
équivaudrait à admettre une espèce distincte. »
Cependant nous verrons Arloing en 1898, après Jaime Ferran,
développer chez le Bacille de Koch des modifications d’une impor-
tance presque aussi considérable etappliquer les cultures modifiées
au séro-diagnostic de la tuberculose bacillaire de Koch.
CHAPITRE III
1. Techniques de coloration du Bacille tuberculeux de Koch; hypothèses
sur la cause des réactions chromatiques. Découvertes des Bactéries acido-
résistantes.
2. Morphologie du Bacille; forme en bâtonnet immobile; formes nai-
nes (METSHNIKOV, STRAUS); formes d'involution: sens de cette expression.
3. Revendication de BAUMGARTEN sur la découverte du Bacille tuberculeux.
L'emploi de la dénomination ( pseudo-tuberculoses micro-
biennes » caractérise bien la tendance générale qu'il y a à considérer
le Bacille de Koch comme facteur principal des lésions nodulaires
et de la phtisie. En réalité il semble bien être l’agent le plus fré-
quent des tuberculoses; à bon droit, les recherches se sont multi-
pliées pour le mieux caractériser. Ehrlich avait très rapidement
perfectionné la technique de coloration et avait émis avec Koch,
pour expliquer la coloration spécifique du Bacille, l'hypothèse
qu'il était entouré d'une membrane seulement perméable aux
24 AS G. BOUDIN
alcalis et imperméable aux acides. Déjà Spina s'était élevé contre
cette hypothèse. Ziehl démontre que l’adjonction d'acide phénique,
comme l'addition de potasse ou d'huile d’aniline permet une bonne
coloration du Bacille.
Comme la solution d'Ehrlich est instable, commeelle perd rapi-
dement ses propriétés colorantes, afin d'éviter les inconvénients
d'avoir à préparer cette solution pour chaque examen, il y a avan-
tage à la remplacer par la liqueur de Ziehl qui se conserve long-
temps sans s’altérer :
Euchsinecubine PER EEE 1 gramme.
Alcoolabsolue er re MOIcenttACubes:
Eau phéniquée à 5 p. 100 . . . . 100 cent. cubes.
Les procédés classiques employés actuellement restent compa-
rables à cette dernière technique, dite technique de Ziehl-Neelsen.
(Neelsen a modifié la solution de Ziehl en ce qu'il prend pour faire
la solution colorante 1 gramme de fuchsine, au lieu de 0 gr. 25).
La liqueur colorante est versée sur la préparation, chauftée
jusqu'à dégagement de vapeurs, retirée alors, puis chauffée à nou-
veau, lorsque les vapeurs ne se dégagent plus. On chauffe ainsi à
plusieurs reprises. On lave ensuite à l’eau, puis décolore avec
quelques’ gouttes d'acide nitrique au tiers et on traite alors la
préparation par l'alcool absolu. Au contraire de la plupart des
microbes, le Bacille de la tuberculose reste coloré après action de
l'acide et alcool. Dans la méthode de Kühne-Borrel, après coloration
comme précédemment par le liquide de Ziehl et lavage à l'eau, on
décoloreau moyen d'alcool absolu, après avoir soumis la préparation
pendant quelques secondes à l’action d'une solution aqueuse à
2 p.100 de chlorhydrate d’aniline fraichement préparée, agent de
différenciation qui nuit moins que les acides aux éléments cel-
lulaires. On fait ensuite la recoloration du fond de la prépara-
tion.
La décoloration et la recoloration peuvent se faire simultanément
dans les procédés de Frænkel et de Gabbet, par des mélanges
d'alcool, d'acide nitrique, et de couleurs basiques d'aniline. La
coloration initiale a été effectuée au moyen de la solution d'Ehrlich
ou du liquide de Ziehl-Neelsen.
Le Bacille tuberculeux reste coloré par la méthode de Gram. On
fait agir la solution iodée de Lugol pendant quelques minutes sur
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 25
la préparation préalablement colorée par un séjour prolongé dans
une solution anilinée de violet de gentiane. On décolore ensuite
par l'alcool absolu, complètement. On éclaircit la préparation au
xylol. « Les Bacilles, dit Straus, sont colorés d’une façon intense,
en violet presque noir; comme Gram l'avait déjà observé, les
Bacilles de la tuberculose ainsi colorés se présentent fréquemment
sous forme de points colorés séparés par des intervalles clairs, de
façon à simuler une chaînette de très petits Coceus .»
Dans le procédé de Gram, la décoloration est obtenue au moyen
de l’acool absolu. Weigert remplace l'alcool par l'huile d’aniline
qui déshydrate et décolore.
Tous ces procédés par adjonction aux colorants de potasse,
d'aniline, d'acide phénique sont assez rapides. En 1883, Lichteim
de Giacomi, Baumgarten réussissent à colorer les Bacilles tuber-
culeux par la méthode générale de Weigert, c'est-à-dire par les
simples solutions aqueuses, faibles ou concentrées, des couleurs
basiques d'aniline et sans que ces solutions aient été additionnées
d'un mordant queiconque, potasse, aniline, phénol. Mais le
Bacille de Koch, contrairement aux autres Bactéries, ne se
laisse teindre que très lentement par cette méthode; et la
coloration obtenue, il résiste, comme après teinture par les pro-
cédés rapides, à l'action des acides minéraux. D'ailleurs,
l'obligation de constater de plus en plus la variabilité de l’acido-
résistance fait qu'on remplace fréquemment l'action des acides
minéraux par l'action plus ménagée des acides organiques, avec
lesquels la décoloration s'effectue dans l’espace de quelques minutes
à une demi-heure. On emploi l'acide tartrique, citrique à 5 et
10 p. 100 en solution aqueuse (procédé de Ziehl-Hauser), acide
lactique en solution alcoolique à 2 p. 100 (procédé de Ziehl-Cour-
mont et Lesieur), l'acide acétique concentré (Petri).
Cette énumération des procédés de coloration du Bacille tuber-
culeux de Koch met donc en évidence ces 2 caractères, de la
résistance à l’action des liquides colorants d’une part, et d'autre
part, la coloration effectuée, de la résistance à la décoloration. Ces
caractères ne sont pas particuliers au Bacille de Koch. Se com-
portent d'une façon analogue les spores de nombreux Schizophytes.
On sensibilise ces spores aux réactifs colorants par la chaleur, par
les alcalis (Büchner), par la fuchsine anilinée (Hueppe), par la
26 G. BOUDIN
fuschine phéniquée chaude (liquide de Ziehl). Les préparations
traitées ensuite par les acides minéraux dilués, les spores seules
restent colorées.
De même, la coloration des filaments mycéliens de diverses Moi-
sissures par lescouleurs basiques d’aniline présente très souvent des
difficultés comparables à celles de la coloration du Bacille de Koch.
C’est ainsi qu'on emploie pour déceler le mycélium de Mucorinées,
d'Aspergillées, les procédés qu'on peut employer pour le Bacille
tuberculeux — les solutions aqueuses de potasse plus ou moins
concentrées. Klissitch, pour colorer des Mucorinées, emploie la
safranine anilinée agissant à froid pendant 15 à 20 heures ou à
chaud plus rapidement. L'excès du colorant est éliminé au
moyen d’une solution aqueuse d'acide acétique à 1-p. 500 que l’on
fait agir pendant # à 5 secondes.
Les teintures d’aniline, mélangées de phénol, telles que la fuch-
sine de Zieh]l très étendue d'eau, la thionine phéniquée servent à
la coloration de l’Aspergillus fumigatus (Rénon), du Rhizomucor pa-
rasiticus (Lucet et Costantin).
Le Bacille de la lèpre se colore plus facilement que le Bacille de
Koch par le bleu de méthylène alcalin, par les solutions aqueuses
de couleurs basiques d’aniline, même agissant à froid ; mais d'autre
part il est plus difficilement décolorable que le Bacille de Koch.
Le nombre des Bactéries présentant le même mode général de
coloration que le Bacille de Koch, les spores des Schizophytes, et
le Bacille de la lèpre, croit d'année en année depuis la découverte
du Bacille du smegma (1885) par Alvarez et Tavel. En 1896, et dans
les années qui suivent, des Bacilles qui résistent à la décoloration
par les acides et alcool, sont découverts dans le sol, sur les céréales,
sur les herbes, dans le beurre, dans le lait, dans les excréments
des animaux, en nombre extrêmement considérable. Ils sont grou-
pés sous la dénomination d’acido-résistants (P. Courmont). Mais
ici, les types principaux de ces micro-organismes présentent entre
eux et le Bacille de Koch, en plus des réactions de coloration, des
caractères de parenté naturelle. Cependant, si certains bactériolo-
gistes, tendent en se basant sur l’ensemble de ces caractères à con-
sidérer beaucoup de ces Bactéries comme des espèces voisines, ou
plutôt des variétés d'une même espèce, transformables pratique-
ment les unes en les autres, d'autres auteurs se basant seulement
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 27
sur la faible résistance que beaucoup de ces Bacilles présentent à
la décoloration par les acides et par l'alcool, sur leur virulence
peu considérable, sur la non-spécificité des lésions qu'ils peuvent
provoquer, les considèrent comme des Bacilles pseudo-tubercu-
leux, paratuberculeux, très différents du Bacille de Koch.
Colorés, il faut employer pour examiner les Bacilles tuberculeux
un objectif à immersion homogène, et l'éclairage Abbe (gross. 500
à 700). C'est un micro-organisme immobile très petit et grêle. Il a,
de 1 25 à 3 y delongueur (quart ou moitié du diamètre d'un globule
sanguin). Il peut atteindre parfois 10 y. Son épaisseur est d’envi-
ron 0 43. Les bâtonnets ne sont pas rectilignes mais fréquemment
infléchis «quelquefois ils sont comme brisés et formés de segments
articulés à angle très ouvert » (Straus). Dans les cultures jeunes
les Bacilles sont très courts et paraissent homogènes dans toute
leur longueur. Dans les cultures âgées on trouve parfois des formes
très allongées, en même temps que l'on constate un phénomène
particulier, que Koch a signalé : le Bacille est segmenté en une
série régulière de grains ovoïdes, clairs, réfractaires aux matières
colorantes, d’où la transformation apparente des formes allongées
en une chaîne de Coccus. Les Bacilles tuberculeux, immobiles, se
présentent en amas et dans ces amas, leurs dimensions apparaissent
légèrement variables avec le mode de coloration : € Dans les cul-
tures, dit Koch, où les Bacilles sont étroitement juxtaposés, ils
semblent se toucher quand la préparation est faite avec le violet
de méthyle, tandis que si la préparation est obtenue à l’aide du
bleu de méthylène, les Bacilles plus minces sont séparés les uns
des autres par des espaces nettement visibles ». Et c'est sur les faits
d'abord des difficultés de coloration, mais aussi, de la non-juxta-
position des Bacilles dans les cultures, et de leur cohésion, que
Koch établissait son hypothèse d'une membrane imperméable aux
acides. Du moins, et puisque les procédés de coloration ont fait
rejeter cette hypothèse d'une membrane, il semble bien y avoir une
substance unissante, capable elle-même de fixer dans une légère
mesure les colorants, et cause de la cohésion particulière des colo-
nies du Bacille tuberculeux. Les micro-organismes en forme de
bâtonnet sont accolés dans cette substance unissante comme en
files sensiblement parallèles les unes aux autres.
L'aspect du Bacille tuberculeux, en bâtonnet étroit, mince, très
28 G. BOUDIN
souvent arqué n'est pas constant ; les Bacilles, ainsi que cela a déjà
été mentionné, peuvent donner l'apparence d'une chaîne de fins
granules. Souvent dans les crachats des phtisiques, dans les coupes
des lésions nodulaires, les Bacilles peuvent figurer comme des
amas de grains colorés appartenant à des bâtonnets parallèles, très
rapprochés les uns des autres. Les bâtonnets sont alors à peine
reconnaissables. On reconnaît seulement des grains ronds disposés
en séries presque parallèles. Ces grains, dit Straus, « représentent
les détritus du Bacille, mais ayant encore la réaction colorante
spécifique. Dans les cultures, surtout dans les cultures âgées, et
surtout dans les cultures aviaires, d’autres formes se manifestent
très intéressantes, quoique nos notions sur ce point soient encore
insuffisantes. Il se passe pour le Bacille de la tuberculose quelque
chose d'analogue à ce que l'on connaît pour le Bacille du charbon :
on sait que dans le corps des animaux le Bacille du charbon n’ap-
paraît que sous la forme d'un bâtonnet, simple ou articulé, plus
ou moins long, mais qui n’afflecte jamais le développement fila-
menteux que l'on observe dans les cultures. Jamais non plus il ne
donne de spores dans le corps de l'animal. Il existe donc pour ce
Bacille, des différences morphologiques considérables, selon qu'il
se développe en parasite dans le corps des animaux ou qu'il est
cultivé sur des milieux inertes. Pour le Bacille de la tuberculose,
les choses se passent dans une certaine mesure de la même façon ».
Straus rappelle que c'est à Metshnikov (1888) que l'on doit d'avoir
appelé l'attention sur les formes variables du Bacille de Koch dans
les cultures : formes très petites en coccus, formes ovoïdes en lan-
cette, ou au contraire, formes filamenteuses, ramifiées à renflements
terminaux. Straus lui-même constate que des cultures de tuber-
culose aviaire «ayant poussé en voile à la surface de bouillon gly-
cériné à la température de 37°-38°, examinées au bout de trois à
quatre semaines, étaient constituées presque exclusivement de
ces formes naines. » Inoculés à des animaux, les micro-orga-
nismes gardent les mêmes dimensions. Réensemencées, ce n'est
qu'après un long séjour à l'étuve qu'apparaissaient au milieu des
formes exiguës primitives, des Bacilles tuberculeux de dimen-
sions normales. Et Straus donne encore, dans son ouvrage, une
figure comparable aux figures de Metchnikoff, et représentant des
formes géantes, ramifiées et renflées d'une culture de tuberculose
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 29
aviaire en bouillon glycériné, à la température de 37%, âgée de
deux mois. «Ce sont, dit Straus, les formes que l'on rencontre
habituellement dans les cultures aviaires ; je ne les ai jamais
observées dans les cultures du Baeille de l'Homme ou des Mam-
mifères. »
Nocard et Roux, en 1888, examinant des préparations d'une cul-
ture âgée de plusieurs mois, sur gélose glycérinée font les consta-
tations suivantes et peut-être leurs observations s'appliquent-elles
encore au virus de la tuberculose aviaire : « Dans les pre-
miers jours de la culture les Bacilles sont homogènes et se co-
lorent dans toutes leurs parties. A mesure que la culture
vieillit, les Bacilles les plus anciens prennent moins fortement
Ja couleur. Dans une culture vieille de plusieurs mois, nous
avons rencontré des formes renflées, plus longues qu'à l'ordinaire;
quelques-unes d’entre elles présentaient comme un bourgeon laté-
ral, branché presque à angle droit sur le Bacille principal et ter-
miné quelquefois par un renflement à son extrémité ». Nocard et
Roux ne formulent aucune conclusion au sujet de ces formes sin-
gulières. Mais «ils se proposent de traiter dans un autre exposé,
les modifications que peut subir le Bacille par suite des change-
ments dans la nature du milieu de culture. »
Quoi qu'il en soit, d’une façon générale, le virus de la tuberculose
manifestant le plus souvent dans les crachats, lésions, humeurs des
organismes la forme bacillaire, cette forme est considérée comme
la forme normale du parasite, et les autres formes comme des «for-
mations involutives ». Le nom de « formes d’involution » englobe
habituellement les formes anormales de croissance des Bactéries.
Büchner qui a employé pour la première fois cette expression
l’affecte tantôt à des parties de Bactéries, mortifiées, en voie de dé-
composition, mais aussi à des Bactéries vivantes de dimensions
considérables par rapport au type habituel de l'espèce, et ainsi
exceptionnelles.
Les auteurs qui se servent de cette expression de formes d'invo-
lution, pour désigner les formes filamenteuses et ramifiées du
Bacille de Koch, l'emploient dans le sens de formes de dégénéres-
cence, dépourvues de toute importance dans la vie normale du pa-
rasite exclusif qu'est le Bacille de Koch.
Baumgarten, le 3 avril 1882, 10 jours après la communication de
30 G. BOUDIN
Koch à la Société de Physiologie de Berlin, le 24 mars 1882, annon-
çait dans ure publication, qu'il avait vu depuis quelque temps
déjà, et montré le 18 mars à plusieurs collègues des amas de
Bactéries dans des tubercules provoqués chez le Lapin par inocu-
lation de lésions de pommelière. Le 7 avril, il ajouta qu'il avait
maintenant réussi à les découvrir dans les tubercules de l'Homme.
Ces Bactéries ne présentaient aucune réaction aux solutions
aqueuses de couleur d’aniline; elles ne se coloraient pas, en effet,
par la méthode de Weigert. Baumgarten avait réussi à voir ces
Bactéries en traitant les coupes par une solution faible de potasse
ou de soude, à condition d'examiner des tubercules frais recueillis
sur des animaux vivants ou venant d'être tués. Il est exact en effet
qu'on peut déceler les Bacilles de Koch par cette dernière méthode.
Mais Baumgarten n'avait pas isolé sa bactérie en cultures. Et Mid-
dendorp fait remarquer que la revendication de priorité de Baum-
garten, dix jours après le discours de Koch, est assez étrange,
puisque Baumgarten admit lui-même, « que ses Bactéries tubercu-
leuses étaient notablement plus grosses et plus courtes que les
Bacilles tuberculeux de Koch, qu'elles ressemblaient surtout au
Bactérium termo et qu'elles ne se laissaient pas colorer d'aucune
manière comme les Bacilles de Koch. »
Était-ce bien là le Bacille de Koch, ou le virus différent d’une
autre tuberculose à forme et à réactions colorantes particu-
lières? Quoi qu’il en soit, lorsque Baumgarten soumit ses prépa-
rations à Koch, dans une séance de la Société de Médecine de
Berlin, ce dernier estima que les micro-organismes qu'elles conte-
naient paraissaient bien être identiques à son Bacille de la tuber-
culose.
CHAPITRE IV
. Culture du PBacille tuberculeux. Difficultés. Phénomènes d'adaptation du
Microbe aux milieux artificiels. Importance de l'addition de glycérine à
ces milieux (Nocarp et Roux). Aspects des colonies en milieux solides et
liquides.
2. Végétation sur milieux de composition végétale à réaction acide, sur
milieux minéraux acides. Fermentation alcoolique de la glycose.
3. Possibilité d'une végétation anaérobie (MARPMANN).
La culture du Bacilie de Koch est particulièrement difficile.
Koch avait essayé en vain les milieux usuels et notamment la gé-
MICROBE DU LA TUBERCULOSE 31
latine. Il parvint cependant à ensemencer du sérum stérilisé par
la méthode de Tyndall, et solidifié par la chaleur (650), avec des
matières tuberculeuses aussi fraiches que possible; il avait soin
de broyer préalablement celles-ci avec soin, afin que les Bacilles
tuberculeux fussent délivrés de la gangue de tissu qui les entoure
et les empêche de prendre contact avec le sol nutritif. Les tubes
contenant le sérum gélatinisé sont placés dans une étuve chauffée
à 910-380. Beaucoup de tubes de sérum ensemencés dans ces
conditions restent stériles; ét si, dès les premiers jours, on
observe des colonies à la surface du sérum, on peut conclure à la
contamination des tubes.
Ce n'est en effet que vers le 10e jour que la multiplication des
Bactéries se manifeste à l'œil nu par de petits points de couleur
grise ou jaunâtre. Ces points restent en général isolés; ils sont
secs, d'aspect écailleux, de consistance ferme, d'autant plus
écailleux, que le sérum lui-même est plus sec, d'autant plus adhé-
rents au sol nutritif que le sérum est plus mou, si adhérents dans
ce dernier cas qu'on entraine des parcelles de sérum en enlevant
des fragments de culture Au bout de quelques semaines, l’accrois-
sement des colonies arrive à son maximum et s'arrête. Pour con-
tinuer la culture et l'activer on fait desensemencements succesifs
sur des tubes contenant le même milieu nutritif. Straus exprime
ainsi les caractères de développement du Bacille de Koch dans les
cultures. « Les débutants doivent être prévenus qu'il faut ense-
mencer un assez grand nombre de tubes de sérum, et se féliciter
si quelques-uns donnent des cultures. De même les deuxièmes et
même les troisièmes cultures sur sérum ne sont pas toutes fé-
condes; bon nombre de tubes ensemencés ne présentent aucun
développement, et les tubes fertiles continuent à ne donner que des
colonies petites et isolées. Dans les nombreux essais de culture aux-
quels je me suis livré avec Gamaleia, ce n’est qu'à partir de la
4me ou bien de la 5me génération que la culture s’est effectuée d'une
façon plus régulière, plus rapide et plus abondante. Il y a là un
phénomène d’acclimatement sur lequel nous avons beaucoup insisté
et qui domine toute l'histoire du Bacille de la tuberculose. »
« Les cultures subséquentes, ainsi obtenues ne se composent pas
seulement d'écailles isolées, mais de colonies confluentes; toute la
surface du sérum est recouverte d'une couche mince etsèche, par-
32 G. BOUDIN
semée de petites saillies. Comme le fait remarquer Koch, les Ba-
cilles en se multipliant ne se développent pas en profondeur, mais
toujours en surface et en faisant en quelque sorte cheminer la
membrane déjà formée à la surface du sérum. Ce fait est surtout
remarquable quand la membrane est arrivée au niveau de la cou-
che liquide amassée au fond du tube ; elle ne pénètre pas dans cette
couche, mais s'étale à sa surface; habituellement même, elle re-
monte de quelques millimètres sur la surface opposée du tube de
verre, sous la forme d'une pellicule blanchâtre » (Straus, p. 182).
Koch essaya d’autres milieux de culture que le sérum coagulé.
Déposant à la surface de sérum liquide des parcelles d'une cul-
ture développée sur le sérum solidifié, il obtint un voile mince,
blanc grisâtre, très fragile, se développant à la surface de la subs-
tance nutritive, sans la troubler. Le ballon de culture agité, la pel-
licule légère se dissocie et gagne le fond, sans que le sérum perde
de sa clarté. Koch ensemence également dans les mêmes condi-
tions du bouillon neutralisé; la culture ne réussit pas aussi bien.
Le liquide nutritif reste clair; un dépôt sableux formé par de
petits conglomérats de Bacilles se forme au fond du ballon. Les
essais d'ensemencement sur le blanc d'œuf coagulé restent sans
résultat.
De tels caractères de culture font du Bacille de Koch un micro-or-
ganisme différent des virus isolés par Klebs et Toussaint; et ainsi
il semble juste de n'attacher aucune importance dans la genèse des
lésions tuberculeuses, pas plus à la Monadine de Klebs qu'aux Mi-
crocoques de Toussaint. En eftet Klebs cultivait le Monas tuberculo-
sum mobile, sur l’albumine d'œuf; le Bacille de Kochest immobile;
il ne peut croître sur le blanc d'œuf. Le micro-parasite de Tous-
saint provoquait dès le lendemain de l’ensemencement du bouillon
alcalanisé réparti en sept flacons, le trouble dans les septflacons ;
le Bacille de Koch croît à la surface du sérum liquide se déve-
loppe mal dans le bouillon neutralisé et seulement sous l'aspect
d'un dépôt sableux. De plus, il ne manifeste qu’une croissance tar-
dive, qui nese montre qu'au bout d'une dizaine de jours environ.
Et fait de grande importance, Watson Cheyne et Cornil purent
déceler sur des coupes d'organes enlevés aux animaux rendus
tuberculeux par Toussaint, après inoculation des cultures du
Microcoque, des Bacilles de Koch. On en conclut que Microco-
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 33
que de Toussaint s'était développé dans les flacons en agent de con-
tamination, à côté de Bacilles de Koch. Quant au Monas tuberculosum,
ilest bien évident qu'il n'est pasle vrai germe infectieux de la tuber-
culose, puisqu'il n’a aucun rapport avec le Bacille de Koch. Quoi
qu'il en soit, en 1883, Klebs, qui jusque-là refusait à ce dernier
micro -organisme le pouvoir de produire la tuberculose, modifie sa
manière de voir; iladmet, en plus du Bacille de Koch, comme fac-
teurs de lésions nodulaires, des amas finement granuleux, formés
de Microcoques existant dansles cultures et à l'intérieur des tuber-
cules. Pour lui plusieurs microbes étaient donc capables de produire
la tuberculose. Les découvertes ultérieures des difiérents auteurs
justifient son opinion, puisque fut créé le groupe des pseudo-tuber-
culoses microbiennes. Toussaint, dont les expériences, complétées
parles observations de Waston Cheyne et Cornil, concordent d'une
manière remarquable avec celles de Malassez et Vignal fut d'avis
que le Bacille de Koch était un Microbe très polymorphe, dont il
avait isolé l’une des formes. Il a déjà été mentionné que Malassez,
Vignal et d'autres auteurs restèrent dans le doute au sujet de l’exis-
tence des variations morphologiques du Bacille tuberculeux.
Les méthodes de culture réalisées par Koch ont réussi à démontrer
que le Bacille isolé par lui dans les produits tuberculeux était bien
l'agent de la tuberculose. Mais les difficultés de l'obtention d'une
première culture,la lenteur et l'insuffisance du développement ex-
pliquent, cette déclaration de Koch «qu’il n'y a pas à espérer que la
culture du Bacille de la tuberculose joue un très grand rôle » dans
l'étude de cette maladie.
En 1887, Nocard et Roux ajoutèrent avant la gélatinisation du
sérum et pour éviter la dessication de sa surface, une petite quan-
tité de glycérine stérilisée dans la proportion de 5 p.100 environ.
« Sur un tel milieu, disent les auteurs, ensemencé avec une cul-
ture sur sérum pur, vers le dixième jour, la couche de Bacilles
était plus marquée que celle qui se forme en un mois sur le sérum
peptonisé. » Ils ensemencèrent de même avec succès du sérum
glycériné et peptonisé, de la gélose glycérinée à 6 et 8 p. 100 et
également des milieux liquides : bouillon de veau peptonisé et
glycériné à 5 p. 100 : « Si le bouillon glycériné est ensemencé avec
de la matière tuberculeuse prise sur un animal, la croissance est
plus lente que si la semence est prélevée sur une culture dans un
Archives de Parasitologie, XI, n° 1, 1906. 3
‘
34 : G. BOUDIN
milieu glycériné. 11 faut dans ces conditions un mois pour un dé-
veloppement sérieux. Cependant en ajoutant, au bouillon glycé-
-riné, un peu de l’albumine de l'œuf, nous avons eu, disent Nocard
et Roux, une culture manifeste en partant de la tuberculose de
Lapins au bout de cinq jours; le huitième jour elle était tout à fait
abondante... La vigueur du Bacille cultivé dans les milieux glycé-
rinés est telle qu'en sortant de ces milieux, il prospère dans les
bouillons ordinaires de Veau et de Poule avec lesquels il est très
difficile d'avoir une culture initiale ». Nocard et Roux notent que la
température la plus favorable est celle de 34°, 37°, 390, Par addition
de glycérine, la gélose, contrairement à l'opinion de Koch, peut
être ensemencée et donner des cultures, et l’albumine d'œuf ajou-
tée au bouillon glycériné aide au développement des miecro-orga-
nismes. En réalité, dans les expériences de Nocard et Roux, les cul-
tures, au moins dans certains Cas, pouvaient avoir été réaliséesavec
le Bacille de la tuberculose aviaire, que jusque-là, on identifiait avec
le Bacille de la tuberculose humaine. Des recherches ultérieures
faites sur des cultures ensemencées directement avec des parcelles
de lésions tuberculeuses d'Oiseaux, montrent que le Bacille aviaire
végète rapidement, forme des colonies mamelonnées, grasses et
confluentes, et qu'en règle généraleil produit chez le Lapin et sur-
tout chez le Cobaye, une tuberculose septicémique, à Bacille de
Koch sans lésions (tuberculose, type Yersin), tandis que le Bacille
humain végète lentement en colonies écailleuses et sèches, provo-
que la tuberculose chez le Cobayeetle Lapin et non chez la Poule. Et
c'est ainsi que Straus et Gamaleia purent diminuer en partie la
valeur du perfectionnement que Roux et Nocard avaient apporté
par l'addition de glycérine aux milieux de culture. Straus et Ga-
maleia en effet ne purent obtenir d'ensemencement direct des pro-
duits de tuberculose des Mammifères sur gélose glycérinée : « Le
développement sur gélose glycérinée ne nous a réussi avec sûreté
et rapidité qu'en ensemencant des cultures sur sérums qui étaient
déjà de cinquième ou sixième génération. L'aspect des cultures du
Bacille de la tuberculose humaine sur gélose glycérinée se rappro-
che de celui des cultures sur sérum, avec cette différence que le
développement sur le milieu glycériné est plus rapide et plus abon-
dant; la culture se compose d'un enduit blanchâtre, de surface
sèche, hérissé d'une foule de petites saillies verruqueuses. »
MICROBE DE LA TUBERCULOSE A)
Au contraire, les ensemencements directs que Straus et Gamaleia
firent avec la rate de la Poule tuberculeuse sur gélose glycérinée
ont été fertiles. Les cultures de tuberculose aviaire sont humides,
grasses, de consistance molle et non pas cohérentes et dures
comme les cultures de tuberculose humaine. (C’est donc à tort que
l'on attribue à l'emploi des milieux glycérinés l'aspect gras et
humide des cultures, que l’on opposait à leur aspect sec, maigre et
écailleux sur sérum. Ces aspects différents tiennent non à la nature
du milieu nutritif, mais à la provenance directe de la semence
tuberculeuse. Si l'on a semé des produits de tuberculose aviairespon-
tanée sur des tubes de sérum, la culture s'y développe aussi bien que
dans la gélose glycérinée en un enduit gras et humide. D'autre
part, la tuberculose humaine acclimatée par de nombreuses géné-
rations sur la gélose glycérinée, y conserve toujours son aspect sec,
verruqueux et sa consistance spéciale. » Mais le Bacille de la tuber-
culose humaine transporté, d'un milieu solide sur gélose glycéri-
née, « à la surface du bouillon glycériné, en pellicules minces »,
donne naissance en deux ou trois semaines à une membrane épaisse,
blanche, ridée, sèche, qui a tendance à remonter le long des parois
du vase. Si l'on répète fréquemment les ensemencements ( on ob-
tient des cultures se développant avec une rapidité et une abon-
dance surprenantes. Il est même difficile de trouver un autre Mi-
crobe pathogène susceptible de fournir, dans un même espace de
temps, une récolte aussi abondante ». Pour permettre l'extension
du voile en surface, le bouillon doit être versé en des ballons d'assez
grandes dimensions qu'on ne remplit qu'à moitié. Il est remar-
quable qu'ici encore le bouillon ne se trouble jamais et si des
fragments se détachent de la membrane superficielle, ils s'accu-
mulent au fond du ballon, sans y manifester un développement
comparableau développement superficiel. Et de même des parcelles
de culture de tuberculose déposées directement au fond d’un milieu
liquide, bouillon glycériné par exemple, ne s'y développent que très
médiocrement. Les restrictions faites de Straus et Gamaleia sur
la distinction à établir entre la tuberculose des Mammifères et la
tuberculose des Oiseaux, il reste donc bien évident et c’est l'avis de
ces expérimentateurs, que l'addition de glycérine aux milieux
nutritifs, même dans les cas de Bacilles tuberculeux d’origine
humaine, présente de très grands avantages.
36 G. BOUDIN
En 1888, Pavlovsky réussit à ensemencer la surface de tranches
de pommes de terre, milieu riche en amidon, avec des parcelles
de culture du Bacille de la tuberculose sur gélose glycérinée. Cet
expérimentateur ne se contente pas de déposer les Bacilles à la
surface de ce milieu végétal ; il les fait pénétrer dans sa substance
même, en frottant la surface à l’aide d'une spatule. Les tranches de
pommes de terre étaient incluses dans des tubes de Roux et ceux-
ei fermés à la lampe pour éviter l'évaporation.
En 1888-1891, Hammerschlag démontre que l'on peut remplacer
la glycérine par de la glycose, de la saccharose, des amyloses: dex-
trine, glycogène. Quoique la glycérine parût à cet auteur plus par-
ticulièrement favorable, les sucres et les substances amylacées per-
mettaient une croissance notable du Bacille tuberculeux. Glycérine,
sucres, sont transformés par le micro-organisme partiellement en
alcool. Hammerschlag remplace encore le bouillon de viande par la
décoction de levure de bière additionnée de 5 p. 100 de glycérine ; on
peut l'utiliser, soit comme milieu de culture liquide, soit comme
milieu solide, en l’'additionnant de gélose. En 1887, Nocard et Roux
avaient obtenu un développement du Bacille de Koch sur milieu
liquide minéral, analogue à celui de Cohn, et auquel ils avaient
ajouté de la glycérine. En 1892, Bouveault constate que le Bacille
de la tuberculose aviaire, ensemencé en bouillon glycériné, con-
somme la glycérine, et assimile d'autant mieux les matières azo-
tées qu'elles sont de constitution moins complexe. Ammoniaque,
créatine, créatinine, ne se retrouvent plus dans le bouillon après
la culture. La gélatine, la peptone ne sont pas utilisées. En 1893,
Sander reprend l'étude de la croissance des Bacilles tuberculeux
de Mammifères, sur des terrains de nutrition de nature végétale.
L'auteur utilise carotte, choux-raves, raifort, le macaroni, stérili-
sés dans la vapeur d’eau à 1000. De tels milieux sont à réaction plus
ou moins acide. L'apport d'air accélère la croissance des cultures;
aussi Sander recommande de ne pas sceller à la lampe les tubes
comme l'a fait Pawlowsky, de ne les obturer qu'avec un bouchon
d'ouate et une membrane de caoutchouc. La température de crois-
sance la plus favorable est 38-390. Les exigences du Bacille de
Koch quant à la qualité nutritive des milieux de culture sont ex-
trêmement peu considérables. Sander prépare un liquide résiduel
de pommes de terre écrasées, mélangé sans addition de peptone
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 31
ni de sel, de 4 p. 100 de glycérine. Une partie de ce milieu liquide
est neutralisée par une petite proportion de soude; l'autre partie
est employé comme milieu naturel acide. Ces deux milieux de cul-
ture sont ensemencés; le développement le plus intense des colo-
nies se manifesta sur le milieu de réaction acide. L'expérimenta-
teur vit en outre que le développement des cultures avait tendance
à s'arrêter quand la réaction du milieu primitivement acide deve-
nait alcaline, du fait de l'accroissement des colonies. Si les mi-
lieux glycérinés réussissent, c'estque, d’après Sander. ils deviennent
acides et restent acides sous l'influence de la glycérine. Comme
terrain de nutrition, la pomme de terre paraît devoir être préférée
à la gélose glycérinée, et aux milieux d'origine animale. La crois-
sance est plus importante et plus rapide sur les milieux végétaux ;
et, d'autre part le Bacille, ici, a tendance à produire des formes bac-
tériennes renflées à l'extrémité, en forme de tête, et que Sander
interprète comme une formation de spores.
En 1892-1893, Kühne faisant varier la composition des milieux
de culture pour étudier la composition de la tuberculine ancienne,
est arrivé à cultiver le Bacille de la tuberculose à la surface d'un
liquide glycériné, sans peptone ni extrait de viande, mais conte-
nant de la leucine, de la tyrosine, de l'asparagine, de la taurine.
Dans d’autres expériences, la leucine, la tyrosine, la taurine furent
supprimées sans inconvénient pour le succès de la culture. La gly-
cérine, comme source de carbone, s’est montrée indispensable et
l'asparagine comme source d'azote très favorable.
En 1898, Kimla, Poupé, Vesely publient en commun une contri-
bution à la biologie et à la morphologie du Bacille de la tuberculose.
De leurs travaux, il résulte que le Bacille de Koch, pris des diverses
formes de la tuberculose humaine et animale, puis cultivé, ne mon-
tre pas toujours les mêmes qualités végétatives. Comme Straus,
ils constatent que souvent la première génération végète mal, et
qu après acclimatement les cultures ultérieures peuvent s'accroître
rapidement. Cependantils voient des cultures qui, bien végétantes à
la première génération, ne le sont plus du tout après plusieurs géné-
rations successives ; d’autres cultures conservent la même faiblesse
végétative au cours des ensemencements successifs, d'autres ne
s’accroissent pas du tout. Le Bacille de la tuberculose végète
habituellement bien dans les milieux neutres, faiblement alcalins,
38 G. BOUDIN
ou faiblement acides. Dans des conditions déterminées, les auteurs
ont observéaussi, maisexceptionnellement, la végétation abondante
du même Bacille dans les milieux considérablement acides; par
exemple, l'accroissement en forme de colonie membraneuse mince,
sur un terrain liquide, fortement acide de la composition suivante :
Ÿ
Eau distilée 070 CB 200SSr:
Phosphate anne et de soude : 0 gr. 3
Glycérine . ARS ER SRE HOT
ÉYCÉLO PRE EC MES EN RE Or PRE 2 gr.
La glycérine en faible proportion a une influence favorable sur
le développement des colonies (glycérine dans les proportions
de # à 10 p. 100). Mais, disent les expérimentateurs, «sur les ter-
rains à une forte proportion de glycérine, la végétation du Bacille
est empêchée (20-25 p. 100 de glycérine) ; nous avons pu constater
souvent de bonne heure la transformation des pellicules sèches en
pellicules visqueuses, puis émission des acides gras du Bacille aux
alentours, dont on a eu facilement la preuve à l'aide de la colora-
tion ». C'est d'ailleurs là un phénomène général que suivant son
degré de concentration, de dilution, une même substance peut être
nuisible ou alimentaire. Kimla, Poupé, Vesely ont encore constaté
dans des conditions déterminées les très faibles exigences du
Bacille, en ce qui concerne la quantité et la qualité des matières
nutritives. Tout d'abord, le Bacille ne s'accoutume aux change-
ments de terrain nutritif, que si ces changements ne sont pas trop
brusques. Les auteurs ont commencé par une culture en bouillon
glycériné contenant l'extrait de viande, la peptone, le sucre, les
sels. Puis ils suppriment l'extrait et la peptone, puis le sucre et la
glycérine, et ensemencent des milieux composés de sels d’ammo-
nium (sels organiques et minéraux) de mannite, asparaginate de
sodium, phospate de magnésie, sulfate de potasse. Ils ont ensuite
pu se passer du lactate d’ammonium, de l’asparaginate de sodium
et sont arrivés au milieu de culture sans albumine et sans glycérine
de la composition suivante :
Eau GISI Re RES ee RE SAT DO
Mannite #22 PR dt en re aie ve 10
Tartrate d’ammonium
Chlorure de sodium .
Phosphate de potassium .
Sulfate de magnésie .
SOors=
Ja 0 0 Jo Oo 0e
30 Ne EEE
=
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 39
Et évidemment, en enlevant la mannite la culture n’a pas réussi.
Il est encore possible d'obtenir des cultures sur les milieux de
composition végétale les plus divers: eau de pommes de terre,
eau distillée additionnée de morceaux de truffes, liquides soumis à
l’'ébullition à plusieurs reprises jusqu’à ce que l’eau reste limpide.
Sur les terrains sans albumine, éventuellement sans glycérine, les
cultures se présentent avec l'aspect : « d’une membrane mince, à
peine visible, comme du papier de soie mouillé, de membranes
réticulées, ou encore avec l'aspect de membranes de couleur blan-
che, éclatante, de couleur jaunâtre, brunâtre. Enfin très remar-
quables sont les membranes visqueuses, troublant le bouillon ; par
suite de chocs qu'éprouve le vase, des nuages de poussière fine, ou
des trainées entières d'une matière visqueuse se détachaient de la
surface inférieure de la membrane et descendaient au fond... La
pureté absolue des cultures à été toujours prouvée par la coloration
spécifique, et la culture ultérieure des divers milieux. »
Il faut citer enfin parmi les milieux où l'ensemencement de
produits tuberculeux est relativement facile, le milieu acide de
Ficker, formé de gélose et de substance cérébrale. Martin Ficker
a préconisé ce terrain de culture afin d'éliminer tous les Bacilles
ne poussant pas sur les milieux acides.
Dansles culturessur sérum, sur milieux glycérinés, dans les colo-
nies d'aspect radié, écailles ou croutelles sur milieux solides,
pellicules ou membranes sur milieux liquides, on constate, au gros-
sissement microscopique, la disposition déjà signalée des Bacilles
juxtaposés plus ou moins étroitement les uns aux autresen filaments
qui croissent en lignes spiralées. Ce sont cesfilaments qui, s'échap-
pant du centre de la colonie, lui donnent cet aspect étoilé plus ou
moins apparent, ou ens’anastomosant les unsaux autres constituent
les colonies confluentes, en membrane. Les éléments bacillaires
sont ainsi accolés les uns aux autres par la substance unissante
dont il a déjà été fait mention, susceptible d'une coloration iden-
tique à celle des Bacilles, mais de beaucoup moins intense.
Puisque sur tous les milieux solides et liquides le développement
se manifeste tout particulièrement sur les parties superficielles, le
Bacille tuberculeux paraît être éminemment aérobie. Cependant
il est peu sensible au défaut d'oxygène. Terre fait ces constatations
sur le Bacille tuberculeux pisciaire : « Placé dans des conditions
40 G. BOUDIN
dysgénésiques, le Bacille pisciaire suspend sa croissance ; mais
ramené dans des conditions convenables, il se remet à pousser.
Des colonies conservées dans de l’eau stérilisée donnent encore des
semis fertiles après plus de six mois. Dans les expériences d'anaé-
robiose, les tubes replacés à l'air végètent. » Une adaptation
complète du Bacille tuberculeux à la vie anaérobie a été réalisée
par Marpmann. Le virus est susceptible de s'accroitre dans les
conditions anaérobies, par réduction des substances nutritives du
milieu de culture. C'est ainsi que Marpmann a obtenu des colonies
en vie anaérobie, par ensemencements de milieux composés de
gélatine, agar, glycérine et phosphate de chaux. La culture était
blanche. Les ensemencements ont encore réussi dans les mêmes
conditions, sur gélatine, agar et glycérophosphate de chaux; de
même sur des milieux lécithinés. Dans les gaz de réduction on
constate la présence de PH. L'’expérimentateur envisage la pos-
sibilité d'un mode de vie anaérobie du virus tubereuleux dans les
organismes vivants, et l'influence que peuvent avoir les produits
de réduction qui en résultent sur les cellules, le sang, le sérum
sanguin.
CHAPITRE V
1. Les différentes espèces ou variétés du Bacille tuberculeux. Sont-elles
pratiquement transformables les unes en les autres?
2. L'obtention d'une tuberculine active, produit artificiel, est un caractère
tout à fait insuffisant de différenciation.
Nous venons d'étudier les caractères généraux des cultures du
Bacille tuberculeux. Maisil peut manifester des caractères de végé-
tabilité particuliers, variables avec son origine parasitaire, Homme,
Bovidés, Oiseaux, Vertébrés à sang froid. Les caractères morpho-
logiques du Bacille humain et du Bacille bovin, l'aspect macrosco-
pique de leurs colonies et les conditions de leur végétabilité sont
identiques. Ils ne se différencient que par leur propriété de viru-
lence ; ils sont tous deux pathogènes pour le Cobaye. Mais les Ba-
cilles des lésions tuberculeuses humaines sont peu virulents pour
les Bovidés, tandis que les Bacilles bovins inoculés à des Bovidés
manifestent une virulence considérable. Koch considère les Bacilles
tuberculeux de l'Homme et du Bœuf comme espèces distinctes. Il
MICROBE DE LA TUBERCULOSE Al
est certain qu'un Bacille tuberculeux adapté à l'organisme humain
a certaines propriétés biologiques différentes de celles d’un Bacille
adapté à l'organisme des Bovidés. Mais, à moins que la Bactériologie
ne soit qu'un catalogue de faits particuliers, on ne saurait pour
cela différencier les deux virus d’une façon absolue, puisqu'il est
possible de les transformer l’un en l’autre, soit par adaptation à
des milieux inertes, soit par adaptation à un autre mode de vie
parasitaire. Cette expérience de Vallée et Carré, à elle seule
est probante : «(Un Singe (Macacus Rhesus) ingère une petite quantité
d'une culture de tuberculose bovine très virulente, qui, inoculée
dans la mamelle d’une Vache enr lactation, tue l'animal en 32 jours:
ce Singe contracte une tuberculose généralisée dont il meurt rapi-
dement. Le Bacille bovin repris dans les ganglions mésentériques
du Singe, a perdu sa virulence pour la Vache, il doit passer succes-
sivement par les mameïles de deux Vaches en lactation, pour re-
trouver partiellement sa virulence initiale pour le Bœuf et tue enfin
en six jours. par inoculation intra-mammaire, la troisième Vache
éprouvée. » Les auteurs, qui en même temps produisent les résultats
d'une autre expérience, concluent ainsi : « Ces expériences éta-
blissent nettement l'extrême malléabilité du Bacille de Koch et
sa faculté d'adaptation à des espèces animales autres que celles
dont il provient.»
Il a été précédemment mentionné que la luxuriance des cultures
du Bacille de Koch dans les milieux glycérinés employés pour la pre-
mière fois par Roux et Nocard, avait pu être attribuée à ce fait que
les expérimentateurs avaient ensemencé du virus aviaire. On con-
fondaït en effet à cette époque Bacille aviaire et Bacille des Mammi-
fères. Les recherches de différents auteurs, en particulier de Straus
et Gamaleia, Maffucci, démontrent que si, dansles lésions de tuber-
culose aviaire, il y a un Bacille identique par ses réactions de colo-
ration et par sa forme au Bacille des Mammifères, ce Bacille
manifeste des caractères de culture et de virulence assez spéciaux,
pour qu'on doive en faire une espèce distincte, irréductible au virus
tuberculeux humain. En effet, le virus aviaire manifeste une végé-
tabilité plus énergiqne. Il se développe sur les milieux de culture
plus rapidement que le Bacille des Mammifères; il montre des co-
lonies blanchâtres, mamelonnées, confluentes, d’un aspect gras et
humide, différent de l'aspect écailleux et sec des Bactéries de Koch.
42 G. BOUDIN
La température optimum du développement de celle-ci est 37°-380,
Leur développement s'arrête à 420. D'après Maffucci, les limites de
végétabilité du Bacille aviaire oscillent entre 20° et 50°, 43° étant
l'optimum. À hautes températures, 42°-46°, le Bacille aviaire croit
en formes ramifiées, avec rameaux renflés à l'extrémité, forma-
tions qui ne sont jamais réalisées par le Bacille tuberculeux des
Mammifères. De plus, la tuberculose aviaire s’inocule facilement
aux Gallinacés. Le Lapin est plus sensible au virus aviaire qu'au
virus humain. Le Lapin et le Cobaye, après inoculation de Bacille
des Oiseaux meurent le plus souvent de tuberculose septicémique
(type Yersin) sans lésions nodulaires dans les organes. Les Galli-
nacés sont réfractaires au Bacille de la tuberculose humaine.
Mais on ne saurait baser une différenciation d'espèces sur le pou-
voir pathogène d'un virus, et son mode d'action dans les orga-
nismes. Un même microbe, agent de tuberculose, comme le
Streptobacille que J. Courmont a isolé des lésions tuberculeuses
du Bœuf, est capable, dans certaines conditions et chez certaines
espèces aminales, de provoquer la mort de deux façons nettement
différentes : ou en créant des lésions nodulaires, ou en détermi-
nant une septicémie sans lésions. Le Bacille de Koch lui-même
peut réaliser une septicémiechez les Mammifères sans réactions cel-*
lulaires évidentes.
Straus a pu constater que les formes ramifiées de la tubercu-
lose aviaire sont présentes dans des cultures qui se sont développées
à 37°. De plus, ramification et formation en massue ne sont pas,
comme cela sera décrit plus loin, particulières au virus aviaire
mais sont caractéristiques des Bacilles de la tuberculose humaine,
bovine, aviaire, pisciaire. Cadiot, Gilbert et Roger, Courmont et
Dor, Nocard ont démontré d’ailleurs que les caractères de viru
lence du Bacille aviaire ne sont pas absolus, et que le Bacille aviaire
et le Bacille des Mammifères ne sont ainsi que deux variétés d’une
même espèce. Kimla, Poupé et Vesely ont pu acclimater le Bacille
de la tuberculose humaine, même à une température de 43° à 45°,
où sa végétation était parfaite : « C'est précisément cette qualité,
et la faculté de métamorphose d'une culture du Bacille de la tuber-
culose humaine sèche, enune culture humide, visqueuse, identique
comme aspect à la tuberculose aviaire qui nous ont fait affirmer,
disent-ils, que le Bacille de la tuberculose humaine et celui de la
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 43
tuberculose aviaire ne sont pas deux espèces distinctes, mais bien
deux variétés de la même espèce. »
En 1897, Bataillon, Dubard et Terre ont l’occasion d'étudier une
tumeur développée dans la cavité générale d'une Carpe. Ils en
isolent des Bacilles manifestant les mêmes réactions de coloration
que le Bacille de Koch, même résistance à la décoloration par les
acides dilués et l'alcool, même aérobiose, même aspect des cul-
tures sur les divers milieux, « surtout si l’on prend comme terme
de comparaison l'aviaire ». Mais ils ont ce caractère particulier, de
se développer très rapidement, en 3 ou 4 jours, à la température
ordinaire : l’'optimum de croissance est à 25°. Au-dessus de 34°, la
végétation s'arrête. Ces micro-organismes se développent égale-
ment bien sur les milieux légèrement acides ou alcalins; « c’est
sur la pomme de terre, terrain à réaction acide, que les récoltes
sont le plus riches ». Les colonies revêtent assez souvent une colo-
ration rosée. Elles donnent le même parfum que les cultures de la
tuberculose des Mammifères et des Oiseaux.
En plus de la particularité d’un développement abondant à la
température ordinaire, les cultures de la tuberculose des Poissons,
pathogènes pour les Animaux à sang froid, ne sont pas virulentes
pour les Vertébrés à sang chaud. Ces deux caractères ne peuvent-
ils être mis en relation l’un avec l’autre? Barthelat insiste sur ce
fait déjà connu, que l’une des conditions importantes de la viru-
lence de certaines Moisissures, Mucor, Aspergillus, est d'avoir un
optimum de croissance à 35-38.
Bataillon, Dubard et Terre, Kral et Dubard démontrent que le
Bacille pisciaire n’est qu'une troisième variété du Bacille des Mam-
miières. On peut transformer ce dernier, par passage sur l’animat
à sang froid, en Bacille capable de croître à la température ordi-
naire, pathogène pour les Vertébrés à sang froid, dépourvu de
virulence pour les Animaux à sang chaud.
Lubarsch constate que le Bacille des Mammifères se modifie par
passage sur la Grenouille. Le Bacille de Koch inoculé dans les sacs
Iymphatiques dorsaux envahit les viscères (rate, foie, reins) y reste
plusieurs semaines, sans subir de modifications morphologiques
notables. Maïs il devient de moins en moins virulent pour le Co-
baye. Après 6 à 8 semaines, il n’est plus pathogène. C'est de la rate
d'une Grenouille inoculée depuis dix semaines que Lubarsch a isolé
LAN G. BOUDIN
des Bacilles dont les cultures, végétant à une température optimum
de 28°-30°, ont un aspect macroscopique comparable à celui des
cultures ordinaires.
Ces Bacilles ne donnent lieu chez le Lapin qu'à une tuberculose
localisée. Mais avec la matière de cette tuberculose du Lapin, on
donne au Cobaye une tuberculose inoculable en série; et il est pos-
sible d'obtenir une forme croissant à la température de l’étuve.
Après plusieurs passages par l'organisme des Animaux à sang-
chaud, le Bacille des Mammifères, modifié par son séjour dans
l'organisme de la Grenouille, serait donc capable de recupérer sa
virulence. Mæller isole de la rate d'un Orvet inoculé avec des cra-
chats tuberculeux, un Bacille dont les cultures eroissent bien à 20°,
ne végètent plus au-dessus de 30° et sans virulence pour les Verté-
brés à sang chaud. Mæller, Bataillon et Terre font ensemble des
études comparatives sur le Bacille de la Carpe et le Bacille de l’Or-
vet : «Les réactions colorantes, la résistance aux acides, la crépi-
tation à la flamme, les limites de température, la puissance végé-
tative, l'aspect des cultures, les modifications imprimées au milieu,
la couleur, l'odeur, la saveur (le bouillon filtré laisse au goût une
saveur de noisette) sont les mêmes. Ils sont pathogènes pour les
Vertébrés à sang froid, ils sont inoffensifs pour les Vertébrés su-
périeurs; donc il est impossible de donner un caractère précis
pouvant les séparer et il y a lieu d'identifier le Bacille de la Carpe
et le Bacille de l’Orvet ». Mais le fait fondamental, c'est la trans-
formation du Bacille de l'Homme en Bacille de l'Orvet. (II y avait
intérêt à rapprocher les résultats identiques obtenus isolément en
France et en Allemagne par des voies différentes et sur les types
les plus divers. »
Terre estime en conséquence que le Bacille pisciaire représente
bien une troisième variété du Bacille de Koch, adaptée aux Verté-
brés à sang froid. Il lui est impossible de préciser toutefois les
conditions de déterminisme de la transformation : « Nos essais
positifs ont été obtenus par des cultures non pas très virulentes,
mais douées d'une grande végétabilité. » Dubard dit d'autre
part : « Peut-être devons-nous cette grande facilité de la trans
formation de la tuberculose humaine à notre paresse etau manque
d'aides, ce qui nous avait conduit à simplifier au maximum la com-
position de nos bouillons. Ni sel, ni peptone, ni glycérine, ni
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 45
sucre, le seul emploi de la somatose... «..… Cette tuberculose, très
végétante, cultivée sur milieux très pauvres, à base de somatose
ou de bouillon est peu virulente pour le Cobaye... Ceci parait avoir
une importance, car jamais nous n'avons pu obtenir de transfor-
mation en nous servant de produits tuberculeux purs, c’est-à-dire
fortement adaptés à un sol. »
Herzog, en 1902, obtient des lésions tuberculeuses, chez la Gre-
nouille, par inoculation de tuberculose des Mammifères. Les Ba-
cilles se multiplient rapidement dans l'organisme. En 1903, le
même auteur fait paraître un mémoire sur l’atténuation de la viru-
lence des Bacilles de la tuberculose des Mammifères par le séjour
dans l'organisme des Vertébrés à sang froid. Les Grenouilles sont
inoculées dans les sacs dorsaux. De là, les Bacilles envahissent les
organes internes et y créent des lésions de tuberculose caractéris-
tiques. C'est avec des parties du foie de la Grenouille ainsi
infectée, que des Cobayes sont inoculés dans la cavité périto-
néale. Par ces expériences, Herzog arrive aux résultats suivants :
le Bacille tuberculeux, inoculé à des Animaux à sang froid
conserve sa virulence pendant plus de 120 jours. Mais les Cobayes
meurent d'autant plus tardivement que les Bacilles ont séjourné
plus longtemps dans le corps des Grenouilles. La lenteur de
l'évolution de cette tuberculose expérimentale du Cobaye ne sau-
rait être imputée à la diminution du nombre des Bacilles dans
le corps des Grenouilles. Herzog à vérifié qu'il s'agit bien là d’une
atténuation de virulence. En multipliant les passages par l'orga-
nisme de la Grenouille, on arrive à obtenir une variété de Bacilles
tuberculeux dénués de toute virulence pour le Cobaye. Ces Bacilles
quise sont multipliés dans le corps de Vertébrés à sang froid d’une
façon souvent extraordinaire présentent la même morphologie, et
les mêmes réactions tinctoriales que les Bacilles de la tuberculose
humaine.
Herzog arrive à des résultats comparables avec le Bacille de la
tuberculose bovine. Ces expériences confirment donc les recherches
de Lubarsch, conduites dans des conditions presque semblables.
Cette conception d’un Bacille tuberculeux capable de manifester
les trois variétés, humaine, aviaire, pisciaire, susceptible de se
transformer les unes en les autres n’est pasadmise partousles bacté-
riologistes. Borrel estime que l’on ne saurait encore identifier le Ba-
46 G. BOUDIN
cille aviaire, et le Bacille pisciaire avec le Bacille des Mammifères,
parce que les deux premiers ne « secrètent » pas une tuberculine
d'une activité comparable à la tuberculine des cultures de tubercu-
lose humaine. Babès, Arloing,ont pu cependant obtenir des cultures
d'aviairecomme des cultures du Bacille bovin des tuberculines très
comparables comme activité. D’après Ramond et Ravaut, d'après
Ledoux-Lebard, il serait possible avec le Bacille tuberculeux des
Poissons d'obtenir une tuberculine à effets analogues à ceux de la
tuberculine extraite des cultures en bouillon du Bacille de Koch.
Toutelois, d'après ces expériences, la tuberculine pisciaireinoculée
à des Cobayes tuberculeux n'agit qu'à doses plus élevées comme
agent thermogène. Mais il paraît bien difficile de donner la tuber-
culine comme bon caractère de différenciation d'espèces.
Krompecher constate que des Bacilles de tuberculose humaine,
cultivés pendant six années, sans interruption, sur des milieux
artificiels arrivent à manifester les propriétés suivantes : inoculés
aux animaux, même en grande quantité, ils ne les infectent plus.
Ils se développent assez bien à des températures peu élevées (20°).
Enfin on ne peut extraire des cultures de tuberculine efficace. En con-
séquence, il paraît difficile d'attacher au seul caractère de la pré-
sence ou de l'absence d'une tuberculine toxique une importance
considérable pour classer des individus et devant l'emporter, à lui
seul, sur les caractères tirés de la biologie générale des espèces, de
la constitution intime, du mode de structure, de l'aspect général
de leurs colonies.
D’autres expérimentateurs font remarquer que les tentatives de
transformation de la tuberculose humaine en tuberculose pisciaire
ont échoué dans beaucoup de cas. Bataillon et Terre, Dubard ont
eu en eflet de nombreux échecs. Mais les résultats positifs, obte-
nus par eux et par d'autres expérimentateurs dans différentes con-
ditions, doivent prévaloir sur les résultats négatifs. Même chez les
auteurs qui ont échoué dans les tentatives de transformation
(Auché et Hobbs, Nicolas et Lesieur, Morey, Herzog), on trouve, dit
Terre, des conclusions qui viennent à l'appui des siennes, « soit
pour la généralisation du Bacille de Koch dans l'organisme des
animaux à sang-froid, soit pour les réactions de l'économie, soit
pour la conservation d’abord, puis la disparition ultérieure de
la virulence du Bacille vis-à-vis des Vertébrés à sang chaud. »
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 47
En résumé, ce qui reste indécis dans l'adaptation de la tubercu-
lose des Mammifères à l'organisme des Poissons, c’est son détermi-
nisme. À ce propos, on doit faire remarquer, et comme cela résulte
de l’ensemble des recherches faites à ce sujet, que l’acclimatement
du Bacille de Koch à des milieux de culture de moins en moins
différenciés, de moins en moins riches en matériaux nutritifs
organiques, semble une condition préalable très importante de
l'adaptation. Terre dit que les essais de transformation positifs
ont été obtenus au moyen de cultures, non pas très virulentes, mais
douées d'une grande végétabilité.
Nous avons vu que Dubard employait comme milieux de culture
des milieux somatosés : « Ni sel, ni peptone, ni glycérine, ni
sucre. le seul emploi de la somatose. cette tuberculose très végé-
tante cultivée sur milieux très pauvres, à base de somatose, ou de
bouillon est peu virulente pour le Cobaye... Ceci paraît avoir une
importance. Car jamais nous n'avons pu obtenir detransformation
en nous servant de produits tuberculeux purs, c’est-à-dire forte-
ment adaptés à un sol. » Il semble bien que ceux des bactériolo-
gistes qui considèrent les différents Bacilles tuberculeux comme
des espèces distinctes, pratiquement immuables, maintiennent
précisément sous des conditions strictes de développement, et
telles que Koch les a présentées en premier, les Bacilles tubercu-
leux des Mammifères, des Oiseaux. Un des arguments qui tend de
plus en plus à être invoqué par les adversaires de l'hypothèse trans-
formiste est celui-ci : si certains expérimentateurs sont arrivés à
modifier les aspects macroscopiques des cultures des différents
Bacilles tuberculeux, et à identifier ceux-ci réciproquement les
uns aux autres, et si ces auteurs ont pu obtenir des résultats
d'inoculation variables et non conformes à ceux qui sont spécifiés
pour chaque type de Bacille, c’est qu’en réalité les cultures de ces
expérimentateurs sont impures, et contiennent simultanément
les différents types de tuberculose, humaine et aviaire par
exemple. La solution de ce problème de la variabilité ou de l’im-
mutabilité des Bacilles tuberculeux et acido-résistants devient,
dans ces conditions, extrêmement difficile, si ce n’est impossible
à résoudre. Mais si, contre l'argument, on admet que les transfor-
mations ont bien été obtenues avec des cultures pures, la question
de la variabilité est bien résolue, dès lors, par l’affirmative.
48 G. BOUDIN
CHAPITRE VI
1. Le nodule tuberculeux : phénomènes de mitose cellulaire. Caséification
et calcification. Mode de répartition des Bacilles de la tuberculose dans la
cellule géante. De la rareté du Bacille acido-résistant dans les lésions.
2. Hypothèse de Koch sur la sporulation du Bacille en vie parasitaire.
Hypothèse des variations morphologiques du Bacille (Srraus); faits positifs
à l'appui de cette dernière hypothèse (FERRAN, ARLOING, F. BESANÇON).
Inoculation négative au Cobaye de produits tuberculeux.
Puisque le Bacille tuberculeux atteint Mammifères, Oiseaux et
Vertébrés à sang froid, on a pu appeler justement la tuberculose
«une panzootie universelle » (Lydtin). Les localisations des lésions,
dans cette maladie, sont multiples ; les parenchymes, les séreuses,
les ganglions peuvent être atteints. Malgré des aspects macrosco-
piques différents, l'étude histologique des lésions montre qu'elles
se réduisent à un type inflammatoire particulier: les masses
nodulaires; les tubercules ne sont que des amas de granulations
microscopiques évoluant soit vers la caséification, soit vers la calci-
fication.
La granulation tuberculeuse se compose de trois zones : une cel-
lule géante multinucléée au centre, autour d'elle des cellules épi-
thélioïdes; à la périphérie, des cellules embryonnaires à gros
noyau, à protoplasma peu abondant. Il existe deux théories sur
l'histogenèse du tubercule. Il serait édifié, d'après une première
théorie, par les cellules fixes des tissus, cellules épithéliales et
cellules fixes du tissu conjonctif. D'après une deuxième théorie,
il serait édifié par les cellules migratrices seules. Dans la première
doctrine (Baumgarten), les cellulesfixes des tissus, les cellules fixes
du tissu conjonctif, cellules endothéliales des vaisseaux, cellules
épithéliales, sous l’action du Bacille du Koch subissent, pour se
transformer en cellules géantes, des phénomènes de division indi-
recte du noyau : (les cellules en caryocinèse peuvent contenir un
ou plusieurs Bacilles ; la plupart n'en renferment pas, mais des
Bacilles s’observent dans leur voisinage. » D'après cette théorie, les
leucocytes, éléments d'origine migratrice, ne présentent jamais de
modification de nature progressive comme celle de la division
caryocinétique. Leur évolution est toujours régressive.
Dans la deuxième doctrine (Metshnikov), les cellules géantes
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 49
montrent, si l'on emploie de forts grossissements, des phéno-
mènes de mitose (1), elles seraient formées de phagocytes. Des étu-
des de Cornil, faites à ce sujet, tendent à prouver que les cellules
géantes se forment par prolifération caryokinétique des leucocytes
intravasculaires.Mais Yersin et Borrel déclarent n'avoir pas observé
de divisions caryocinétiques, ni des cellules épithéliales, ni des
cellules migratrices. Pour ces auteurs, la cellule géante résulte
de la fusion protoplasmique de leucocytes dont les noyaux seront
les noyaux de la cellule géante. Cellules épithélioïdes, cellules
mononucléaires auraient une même origine mésodermique.
La granulation tuberculeuse se forme dans l'organisme infecté
très rapidement ; puis elle a tendance à se caséifier, ou à évoluer
vers la dégénéresence fibreuse, ou l’incrustation calcaire. La sclé-
rose ou la calcification du tubercule sont considérées souvent
comme des processus de guérison. Mais on peut constater la pré-
sence des Bacilles dans des nodules très anciens et calcifiés (von
Ziemmsen, Déjerine), découverts à l'autopsie de gens âgés et chez
lesquels la tuberculose ne semblait pas avoir évolué. La matière
de tels nodules peut être virulente pour le Cobaye. De plus la
tuberculose- des Bovidés et la tuberculose des Oiseaux reçoivent
une physionomie spéciale du fait de la rapidité de l'infiltration
calcaire, et de son étendue. Le ramollissement et les cavernes sont
rares dans la tuberculose des Bovidés, et Nocard met en évidence
chez les Oiseaux, sur la rate particulièrement «de véritables tuber-
cules durs, calcaires, agglomérés, en masses irrégulières, parfois
très volumineuses ». Des Bacilles virulents sont cependant présents
en plus ou moins grand nombre dans de telles lésions. Ils sont
particulièrement nombreux dans les cas de tuberculose aviaire.
Koch dit dans sa communication de 188%, « tous ces nodules
tuberculeux provenant de quatre Poules étaient extraordinairement
riches en Bacilles de la tuberculose, qu’on trouvait surtout accu-
mulés dans le voisinage immédiat des parties calcifiées. » En consé-
quence, si la calcification est un processus de guérison, elle n'est
telle qu'indirectement et tout mécaniquement, et pourrait peut-
être être attribuée à la teneur plus ou moins considérable en sels
(1) Si nous insistons ici sur ces réactions cellulaires, c’est que les phénomènes
de mitose observés par Metshnikov en certains cas ont eu une évolution tout à
fait particulière. Cf. p. 118.
Archives de Parasitologie, XI, n° 4, 1906. 4
50 G. BOUDIN
calcaires du sol minéral des organismes envahis par les Bacilles
tuberculeux (1). C’est un phénomène indépendant de la bacté-
riolyse.
La lésion de granulation, la lésion nodulaire n’est pas spécifique.
C'est une lésion dont les causes peuvent être multiples et très
sensiblement différentes. On constate la formation de tubercules,
après injection de particules inanimées et stérilisées : encre de
Chine, mercure, huile d'olive. — Mais ces tuberculoses ne sont pas
réinoculables en série. Ce sont elles seules que S. Arloing, Cour-
mont désignent sous le nom de pseudo-tuberculoses. Il y a ensuite
des tuberculoses microbiennes (Bacille de la tuberculose des Ron-
sgeurs, Zooglée de Malassez et Vignal). Nous avons exposé plus
haut les rapports apparents ou réels qu’elles pouvaient présenter
entre elles et avec la tuberculose à Bacille de Koch. Il est enfin des
tuberculoses mycosiques déterminées par différentes espèces du
groupe Discomyces: Discomyces farcinicus (Nocard), Discomyces. aste-
roïdes (Eppinger), Discomyces bovis et pardes Aspergillus. Il est done
de toute nécessité d’avoir recours à l'examen microscopique et aux
ensemencements d’une lésion tuberculeuse, pour en déterminer et
la nature et la cause; et cette nécessité s'impose d'autant plus
actuellement que l’action pathogène primitive de différentes Moisis-
sures, de l’Aspergillus fumigatus par exemple, chez l'homme et chez
les animaux n'est plus contestée.
La quantité de Bacilles de Koch décelables dans les cellules
géantes est extrêmement variable. Chez les Oiseaux, les lésions
sont extrêmement riches en Bacilles. Chez l'Homme, chez les
Mammifères, chez le Bœuf en particulier, les cellules géantes
peuvent ne laisser voir que de très rares Bacilles et même n'en
contenir aucun. Il a déjà été dit plus haut que Koch admettait
la disparition des Bacilles, leur sporulation, et leur multiplication
lente dans les tissus parasités. Spina, Malassez et Vignal font cette
constatation de l'absence assez fréquente des Bacilles de Koch dans
les tubercules; et c'est au cours d'examens systématiques d'infil-
trations ou de nodules tuberculeux, qu'ils découvrent la Zooglée
tuberculeuse. Nocard, à propos de la tuberculose des Bovidés dit :
(1) Il est à remarquer que dans l’actinobacillose, ne se trouvent de touffes :
massue à éléments rigides et calcifiés que dans les lésions de la mâchoire (Spitz
et Lignières).
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 51
«Les Bacilles de Koch ne se trouvent pas toujours également nom-
breux dans toutes les lésions tuberculeuses: c’est là unedes obscu-
rités de l'histoire de cette maladie. On ne trouve pas, parexemple,
un nombre de Bacilles proportionnel à l'importance des lésions ;
tel tubercule énorme en décèle, même à l'examen le plus attentif,
quelques unités seulement, tandis que tel autre, beaucoup plus
petit,en contient des quantités considérables. En thèse générale,
lorsqu'il y a beaucoup de cellules géantes, on ne voit que très
peu de Bacilles; parfois, il est vrai, l'examen attentif d’une prépa-
tion ne permet pas de voir ces microbes, bien que, cependant, il y
en ait qui sont dissimulés par un plan plus superficiel du tissu
de la coupe; il n'est pas rare également de voir des grains colorés
(en rouge ou en violet suivant le procédé de coloration employé)
et qui représentent vraisemblablement des Bacilles coupés per-
pendiculairement ou obliquement à l’axe (1). »
Nocard revient à plusieurs reprises, dans son livre sur les
tuberculoses animales et dans le Traité des Maladies microbiennes
des animaux, sur cette difficulté qu’il y a à déceler des Bacilles
dans les lésions. Et cette constatation est faite par nombre de
bactériologistes. À la Société d’études scientifiques sur la tubercu-
lose (mai et juin 1905), Darier présente un rapport sur les tuber-
culides cutanées et les tuberculoses atténuées, dans lequel il
montre, quen dehors de difiérentes formes de tuberculose
cutanée indiscutables, puisqu'on peut y constater, «la présence
du Bacille de Koch, et que leur tissu inoculé au Cobaye, tuber-
culise cet animal », il est d’autres dermatoses provisoirement
désignées sous le nom de tuberculides, et en relation manifeste
avec une origine tuberculeuse. Ces tuberculides, en effet, se déve-
loppent habituellement chez des sujets atteints de tuberculoses
viscérales ou surtout de tuberculoses ganglionnaire et osseuse.
L'anatomie pathologique de ces tuberculides, montre fréquem-
ment une structure en tous points analogue à celle des tissus
tuberculeux, mais aussi une constitution parfois différente,
consistant en altérations vasculaires, périvasculaires, sclérose.
(1) Cette hypothèse peut être plus vraisemblablement remplacée-par celle de
la présence dans les coupes de cocci acido-résistants, qui sont bien des germes
tuberculeux, tels que les ont vus beaucoup d’auteurs, Metshnikov, Straus entre
autres.
52 G. BOUDIN
Mais les Bacilles de Koch sont exceptionnellement présents dans
les lésions; l'inoculation au Cobaye des tuberculides reste habi-
tuellement sans eflet; l'épreuve de la tuberculine donne des
résultats inconstants et souvent incomplets. La structure des
lésions, leur siège anatomique initial, leur symétrie plaident en
faveur de l'apport par la voie vasculaire de l'agent virulent qui
leur donne naissance; elles ne seraient pas créées par une inocula-
tion locale exogène, comme il est de règle pour les tuberculoses
cutanées non douteuses. Ces tuberculides ont tendance à la réso-
lution spontanée : « Cette circonstance était de nature à impres-
sionner l'esprit, à une époque où l'on ignorait les formes atté-
nuées et curables de la tuberculose ; mais ces formes, dit Darier,
on les connaît aujourd'hui à peu près dans tous les tissus et dans
tous les organes: leur existence n'a plus rien de contradictoire
avec la conception élargie que nous nous faisons du processus
tuberculeux. En résumé on est fondé, je crois, à admettre que les
tubereulides font partie de la classe des tuberculoses cutanées
dont elles représentent des types atténués, et auxquelles elles se
relient pas des transitions insensibles. »
Mais, même dans les tuberculoses de la peau à origine bacillaire
non douteuse, et spécialement dans le lupus, «la recherche des
Bacilles, dit Darier, sur les coupes est si infructueuse qu'elle décou-
rage la plupart des histologistes.. Koch, si mes souvenirs sont
exacts, a annoncé qu'on ne découvre qu'un Bacille sur 47 coupes en
moyenne; d'autres disent qu'il faut en examiner 60! L'inoculation
au Cobaye, l'animal réactif, exige pour être probante l'injection
d'au moins 50 centigrammes de tissu lupique; malgré cela com-
bien de fois n'échoue-t-elle pas et qui fera le dénombrement des
lupus tuberculeux véritables inoculés avec succès? » Darier
signale en même temps d'autres lésions osseuses, articulaires,
viscérales d’origine tuberculeuse, mais non bacillifères. « Dans
les reins, dans le foie on observe des lésions diffuses, épithéliales
ou interstitielles qu'on peut à bon droit rattacher à la tuberculose,
malgré l'absence de Bacilles. Chacun sait que dans les pleurésies
tuberculeuses, le liquide est d’une virulence très variable, quel-
quefois à peine bacillifère.. S'il me fallait formuler une conclusion
dit le rapporteur, je me bornerais à dire d'une façon volontairement
assez vague qu'en pathologie le rôle de j'infection bacillaire paraît
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 93
singulièrement plus étendu qu'on ne l'avait pensé jusqu'à ces
dernières années. » Dans la discussion qui suivit ce rapport, Teis-
sier fit valoir qu'il fallait tenir compte et de la nature spéciale du
Bacille, et de la réaction particulière du terrain, celle-ci pouvant
être un facteur très important de la structure des lésions. D'autre
part, F. Bezançon cite les résultats d'expériences qui montrent Îré-
quemment « des tuberculoses bénignes dues à des Bacilles de viru-
lence très atténuée » et l'expérimentateur expose le fait suivant :
«Une culture de Bacilles de Koch, provenant d’un cas de méningite
tuberculeuse humaine et transformée en culture homogène par des
agitations et des cultures successives, suivant la méthode de Ferran
et d'Arloing, a fini par acquérir des propriétés nouvelles, qu'elle
conserve indéfiniment,notammentune virulence très atténuée ;avec
ces Bacilles, quelle que soit la dose injectée au Cobaye, on n'’ob-
tient plus que des lésions minimes non inoculables en série. »
Après de telles constatations cliniques et expérimentales,il devient
évident que le diagnostic, dans différentes formes de tuberculose,
devient particulièrement difficile, puisque les éléments de ce dia-
gnostic, présence de Bacilles acido-résistants, inoculation positive
au Cobaye, peuvent faire défaut.
Et Bèzançon est d'avis que (ces cas d'interprétation difficile sont
beaucoup plus fréquents qu'on ne serait tenté de le supposer ».
Si la solution que donne ici F. Bezançon, après d’autres bactério-
logistes, de ce problème de l'absence du Bacille de Koch dans beau-
coup de lésions de tuberculose est exacte, elle est plus qu'un
résultat particulier. Ces cultures homogènes du Bacille tuberculeux
des Mammifères ont des caractères tout à fait spéciaux, et la pos-
sibilité pour le virus tuberculeux de les acquérir est un fait d'une
importance telle que le rôle de l'infection bacillaire, comme le
disait Darier, peut être en effet, singulièrement plus étendu qu'on
ne le croyait.
De même, Vallée et Petit disent avoir trouvé fréquemment des
tuberculoses ganglionnaires des Bovidés ou des tuberculoses pulmo-
naires avancées du Porc sans Bacilles colorables. Küss et Guinard
ont fait la même constatation, de ce fait d’ailleurs connu del’absence
de Bacilles dans les crachats, dans des cas chez l'Homme où l’aus-
cultation ne laisse aucun doute sur l'existence de grosses lésions
ouvertes.
54 G. BOUDIN
C'est sur l'ensemble de tels faits et sur l’ensemble de ses propres
observations que Middendorp établit cette thèse, à savoir que le
Bacille de Koch n'est qu'un saprophyte indifférent, sans relation
pathogénétique avec la tuberculose. Il prétend qu'en inoculant à
des Cobayes de la matière caséeuse, dépourvue de Bacilles de Koch
on les tuberculise; mais il soutient aussi qu'il est impossible de
déceler dans les lésions obtenues dans ces conditions d'inoculation,
des Bacilles à réaction colorante spécifique. Mais la critique de
Middendorp est toute négative; cetauteur ne définit aucun autre
germe tuberculeux. Actuellement, la question cependant mérite
d'être posée : quand l'examen bactériologique des produits suspects
n'a pas donné de résultats positifs, l’inoculation sous-cutanée de
tels produits au Cobaye, donne-t-elle à cet animal réactif une tuber-
culose dont les nodules contiennent toujours des Bacilles de Koch?
I1 semble bien qu'il y ait des cas fort douteux. Nocard recommande
l'extirpation des premiers ganglions envahis après l'inoculation
sous-cutanée au Cobaye pour soumettre leur contenu à la réaction
de Koch-Ehrlich. Par ce procédé on peut mettre en évidence « les
Bacilles spécifiques qui s’y sont développés, parfois en quantité con-
sidérable ». Mais « si l'examen bactériologique du ganglion extirpé ne
donne rien ou si le vétérinaire n’est pas outillé pour le pratiquer,
il lui faut attendre le résultat de l’inoculation ». Le diagnostic est
alors assuré par la constatation de la généralisation des lésions
tuberculeuses.
En même temps qu'il rappelle l'hypothèse de Koch, Straus s'ex-
prime ainsi au sujet des lésions de tuberculose sans Bacilles colo-
rables. (Néanmoins cette matière caséeuse où les réactifs colorants
ne décèlent la présence d'aucun microbe se montre encore viru-
lente quand on vient à l’inoculer. Koch expliquait ce fait en admet-
tant que les Bacilles avaient disparu, mais laissaient dans le caseum
leurs spores résistantes. Aujourd'hui, l'existence de ces spores
n'est acceptée qu'avec des réserves; mais quelle que soit l'opi-
nion qu'on se fasse, il faut bien admettre qu'il existe dans les
foyers caséeux des formes modifiées du Bacille, qui apparaissent
dans certains cas comme de simples grains colorés ou qui même
sont totalement réfractaires aux réactifs colorants, tout en étant
néanmoins vivantes, susceptibles de rajeunissement et viru-
lentes. » Comme Malassez et Vignal, Toussaint en 1883, Straus en
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 5)
1896, mettent donc à nouveau en face d'une sporulation douteuse
l'hypothèse des variations morphologiques du Bacille de la tuber-
culose.
Récemment, et ceci a déjà été signalé plus haut à propos des
tuberculides, on a multiplié les réactions que pouvait manifester
l'organisme vis-à-vis des Bacilles tuberculeux. A côté des nodules
à cellules géantes, il existerait des lésions inflammatoires com-
munes, et reconnaissant encore comme cause directe le Bacille de
Koch ; le tubercule ne serait que la réaction «la plus hautement
différenciée » des tissus vis-à-vis de ce virus. En réalité si les
Bacilles acido-résistants spécifiques peuvent être présents dans
certains de ces cas (néphrites), ils peuvent être très rares, en
nombre disproportionné avec l'étendue des lésions inflammatoires.
Les rapports, et spécialement ceux qui relient tout un groupe d'in-
fections articulaires aiguës avec la tuberculose, s'ils paraissent
bien exister, ne laissent pas que d’être obscurs dans la conception
de la fixité des caractères morphologiques et histo-chimiques de la
Bactérie de Koch.
Mais nous avons vu, plus haut, qu'à propos de lésions inflamma-
toires sans Bacilles colorables, Bezançon rappelle l'existence des
variétés de Bacilles tuberculeux obtenues d'après les méthodes de
Ferran et Arloing. Dans son rapport au congrès International de la
Tuberculose de 1905, à propos du pouvoir pathogène de cette va-
riété particulière de Bacilles humains, atténués artificiellement par
la méthode des cultures homogènes, et ayant perdu en partie leur
capacité de résistance à la décoloration par les acides, Arloing
dit : « Ces Bacilles qui, avant la transformation jouissaient du
pouvoir infectant habituel, étaient incapables. après la transfor-
mation, de tuberculiser les animaux par infection sous-cutanée.
Par contre, si la virulence a baissé pour le Cobaye et le Lapin, elle
est devenue plus nocive pour le Veau, chez lequel elle détermine
une tuberculose septicémique et infectieuse. Le rhumatisme tubercu-
leux de M. Poncet est peut-être un type clinique de cette variété
de tuberculose obtenue expérimentalement. » Mais pour les lé-
sions de la tuberculose inflammatoire, on a invoqué aussi le rôle
de toxines. Nous verrons d’après les faits expérimentaux ce que
sont les toxines tuberculeuses actuellement connues, et le rôle
qu'elles peuvent avoir dans la maladie.
56 G. BOUDIN
CHAPITRE VII
1. Pénétration du Bacille de Koch par la voie pulmonaire; par les voies
digestives.
2. Rapport des variations morphologiques du Bacille tuberculeux avec la
théorie de l'hérédité parasitaire.
Le fait que la tuberculose expérimentale chez le Cobaye, à la
suite d'une inoculation sous-cutanée suit une marche sensiblement
constante, extensive, presque toujours fatalement progressive, a
fait du Cobaye le réactif par excellence de la tuberculose; « lors-
qu'un Cobaye a résisté à une inoculation bien faite, on peut dire
que le produit inoculé ne possédait pas la virulence tuberculeuse »
(Nocard). Chez le Cochon d'Inde, la généralisation du virus se fait
en général par la voie lymphatique. Chez le Lapin, même dans le
cas d'inoculation sous-cutanée, le sang semble être très rapidement
envahi et les Bacilles se localisent surtoutau poumon, réalisant en
quelque sorte un type morbide comparable à la tuberculose pul-
monaire humaine. Mais la théorie de la tuberculose pulmonaire
déterminée principalement par inhalation des germes virulents
semble devoir être discutée à nouveau. S'il paraît y avoir des cas
incontestables, cliniques et expérimentaux, de tuberculose par
inhalation, il ne semble pas qu'ils doivent être aussi fréquents
que cela est estimé généralement. L'apport du germe virulent
dans certaines tuberculoses cutanées, et dans les formes ostéo-arti-
culaires semble se faire par la voie sanguine, et sans qu'il y ait eu
de lésions pulmonaires préalables. Letulle, se basant sur l'étude
de plus de mille préparations de tuberculose pulmonaire recueillies
et classées dans son laboratoire, croit pouvoir démontrer l'origine
lymphatique fréquente de certains foyers nodulaires bien circons-
crits; il semble, de plus, difficile à cet auteur (d'imposer une pa-
thogénie purement respiratoire aux désastres de la pneumonie
caséeuse sans faire appel, en outre, à la participation effective, peut-
être même prédominante du torrentcireulatoire; le sang de l'artère
pulmonaire n’apporte-t-il pas au poumon la vie normale et trop Îré-
quemment aussi la vie pathologique? » Aufrecht (1901) émet de
même cette conclusion, basée sur l'expérimentation et la clinique,
de l'infection du poumon par la voie sanguine; la lésion initiale siè-
serait dans le capillaires et dans les petits vaisseaux pulmonaires.
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 57
D'après Von Behring, qui exposa cette théorie au congrès de
Cassel en 1903, la tuberculose, quel que soit le siège deses lésions,
serait presque sans exception d'origine intestinale. La contamina-
tion se fait, chez le nourrisson, par le lait bacillifère; les Bacilles
séjournent dans les ganglions mésentériques pour ensuite aller
créer différentes lésions en divers points de l'organisme, au bout
d'un temps plus ou moins long. Bartel, assistant de Weichselbaum,
réalise l'infection tuberculeuse, par la voie digestive, de Lapins et
de Cobayes, et sans que la muqueuse digestive, de la bouche, de
l'estomac, de l'intestin manifeste de lésions. L'infection suit la
voie lymphatique. Il y a dans les ganglions des lésions spécifiques
de tuberculose. Si ces dernières manquent, la présence des
Bacilles n’est souvent révélée que par une inoculation d'épreuve.
Mais même quand il n’y a pasde signes visibles d'adénopathie, les
animaux meurent de cachexie. Weleminsky, assistant de Hueppe,
ayant inoculé plus d'un millier de Lapins, soit par voie sous-cu-
tanée, soit par voie sous-muqueuse, a constaté que l'infection
tuberculeuse suivait d'abord la voie lymphatique, se généralisant
à tout le système ganglionnaire, pour aboutir à une tuberculose
viscérale, pulmonaire, par voie sanguine.
Calmette et Guérin font ingérer des cultures de tuberculose
d'origine bovine, humaine, aviaire et phléolique à des Chevreaux,
à des Chèvres et Boucs adultes par différents procédés : introduc-
tion directe de cultures dans les voies digestives, ou contamination
du lait d'alimentation. Leur conclusion est que dans l'immense
majorité des cas, la tuberculose se contracte non par l'introduc-
tion des Bacilles dans les voies aériennes, mais par l'ingestion de
produits bacillifères. Chez l'animal jeune, leterritoire Iymphatique
arrête longtemps la marche envahissante des Bacilles. L'ingestion
de cultures de tuberculose bovine donne naissance, chez les Che-
vreaux, à une tuberculose grave des ganglions mésentériques.
Après la caséification de ceux-ci, les poumons et différents groupes
ganglionnaires sont envahis et manifestent des lésions tubercu-
leuses. Avec les Bacilles tuberculeux humains, aviaires, de la
Phléole, se produit, à la suite de leur ingestion, une adénopathie
mésentérique non spécifique. L'adénopathie déterminée par les
Bacilles humains évolue vers la transformation fibreuse ou la cal-
cification ; les Bacilles aviaires et les Bacilles de la Timothée sont
58 G. BOUDIN
détruits par les leucocytes. Chez lesanimaux adultes, au contraire,
après ingestion de Bacilles de tuberculose bovine se produit une
généralisation rapide avec localisation pulmonaire, sans lésions
intestinales, sans adénopathie mésentérique préalables.
Vallée n’a pu, chez des Veaux, parinjection directe dans la trachée,
ou pulvérisation dans le naso-pharynx de cultures de tuberculose
bovine, déterminer de lésions pulmonaires. Après ingestion de lait
bacillifère, il produit une tuberculose des ganglions bronchiques.
Enfin on doit rappeler que, chez les Gallinacés, le péritoine, le
foie, la rate, la surface séreuse de l'intestin, depuis l'estomac jus-
qu'au rectum, et non pas les poumons, sont les localisations habi-
tuelles de la tuberculose.
Leray a groupé une série de cas expérimentaux de tuberculisa-
tion, auxquels il pense pouvoir donner une origine commune,
intestinale; d'une part, Nocard a montré qu'au bout de 4 à 6 jours,
ni le sang ni les muscles d'animaux infectés par la voie sanguine
avec des cultures de tuberculose ne contiennent de Bacilles. Et
Perroncito démontre que le suc musculaire d'animaux spontané-
ment tuberculeux, sacrifiés en pleine vie, pour l'alimentation, ino-
culé à des Cobayes, et à des Lapins ne les infecte pas. Mais Stein-
heil, Straus par inoculation du suc des muscles prélevés sur les
cadavres d'individus de l'espèce humaine, morts de phtisie,
purent, dans la majorité des cas, tuberculiser des Cobayes. Leray
fait d'autre part remarquer que les cas où l'infection tuberculeuse
du fœtus fut démontrée par l'inoculation positive au Cobaye se
comptent précisément quand le fœtus avait été prélevé sur des
cadavres de femmes, ayant succombé à la phtisie; il oppose les
résultats positifs de Landouzy et H. Martin, d'Aviragnet et Préfon-
taine, d'Armanni aux résultats négatifs de Vignal inoculant à des
Cobayes des fragments des organes de fœtus ou du placenta prove-
nant de femmes phtisiques vivantes. Et l'auteur conclut «que l’on
trouve très fréquemment le Bacille de Koch, ou l’une de ses formes
involutives, dans des tissus qui en sont privés d'une façon générale
(sang, muscle, fœtus) lorsque ces tissus proviennent de cadavres ;
… Cela ne tient-il pas à ce fait, qu'au moment de l’agonie, les mi-
crobes de l'intestin se sont répandus dans toute l’économie ? »
Les expériences de Sanchez Toledo, faites dans le laboratoire de
Straus, semblent cependant contredire cette hypothèse, puisque
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 59
toutes aboutirent à des résultats négatifs, bien qu'en certains cas
« des fœtus furent extraits des cornes utérines » des Cobayes
femelles, inoculées de tuberculose et mortes avant d'avoir mis bas.
Si les muscles, les fœtus prélevés sur des sujets morts de phtisie
peuvent infecter les animaux, n'est-ce pas plutôt à cause d'une
généralisation extrême des Bacilles, ayant précisément déter-
miné la mort?
Il n'en reste pas moins ces faits à élucider, que des inoculations
ont été positives, bien que faites avec des fragments d'organes,
sans lésions tuberculeuses, pris sur des fœtus absolument sains en
apparence ; que des examens microscopiques faits sur des organes
de petits, issus de Cobayes femelles tuberculeuses, et ayant suc-
combé peu après leur naissance, ne décèlent ni Bacilles, ni lésions
dans ces organes (Grancher, Straus). Maflucei inocule 18 œufs en
incubation avec une culture de tuberculose aviaire; 8 arrivèrent
à éclosion. Un des Poulets mourut 36 heures après la naissance
sans lésions et sans Bacilles apparents dans les viscères. Un
second mourut au bout de 20 jours, très maigre, sans lésions ma-
croscopiques apparentes, mais à l'examen microscopique « le foie
était parsemé de tubercules contenant des Bacilles ». D'autres
Poulets morts à intervalles plus éloignés présentèrent des lésions
comparables. Puis un autre Poulet mort 78 jours après l'éclosion
montrait dans le poumon, et surtout dans le foie « des tubercules
visibles à l'œil nu, caséifiés et remplis de Bacilles ». Le dernier
Poulet mourut au bout de quatre mois et demi avec des tubercules
en voie de caséification dans le poumon et dans le foie.
Baumgarten a répété l'expérience de Maffucci etobtenu des résul-
tats identiques; d'où la théorie de cet auteur de la transmission
directe des parents aux enfants du Bacille de la tuberculose, par
infection ovulaire, par infection conceptionnelle, ou par infection
intra-utérine. Baumgarten considère la tuberculose congénitale
comme le mode d'infection de beaucoup le plus fréquent; même
lestuberculoses, ditesacquises, relèvent de ce processusétiologique,
et il estime exagérée la théorie de l'inhalation du virus pour la ge-
nèse de la tuberculose pulmonaire. « Si la présence du Bacille
tuberculeux dans l'air était la principale cause de la phtisie pulmo-
naire, il faudrait s'attendre à ce que la totalité des Hommes fussent
atteints de la maladie dans le cours de leur existence.» Dans le mode
60 G. BOUDIN
prédominant de l'infection intra-utérine du fœtus par voie placen-
taire, le nombrede Bacilles infectieux, d'après Baumgarten, est très
petit, la résistance des tissus du fœtus et des jeunes animaux très
grande. Ces conditions expliquent la «latence » de ces tuberculoses
d'origine fœtale. Mais cette explication du développement tardif
de la tuberculose héréditaire ne fut considérée que comme un pos-
tulat, et la théorie de l'hérédité de terrain généralement admise.
En réalité, les expériences de Maffueci et de Baumgarten nous
montrent le développement lent de la tuberculose après la nais-
sance, avec une période initiale où le Bacille de Koch reste introu-
vable. Il faut rappeler que, jusqu'à ces dernières années, l'infection
expérimentale du Cobaye fut considéréecommelecritériumle plus
sûr pour le diagnotic de la tuberculose, l'inoculation non suivie de
succès écartant sans recours la possibilité d'existence de la maladie
spécifique. Or la valeur de ce critérium commence à être contestée,
puisqu'on admet l'existence de formes atténuées du Bacille tubercu-
leux, caractérisées en outre par d'autres réactions tinctoriales.
La question de la tuberculose héréditaire ne pourrait-elle être
envisagée d'après ces données nouvelles? La latence de certains
cas de phtisie congénitale pourrait correspondre non à la présence
toute passive dans les tissus de quelques Bacilles de Koch, mais à
. l'évolution active de certaines formes peu virulentes du virus, res-
tées jusqu'ici inaperçues, et capables de déterminer en plus des
phénomènes d'’immunité temporaire, et ainsi comme pour la
syphilis, une évolution périodique de la maladie.
CHAPITRE VIII
4. Variation de virulence du Bacillie tuberculeux.
2. La nécro-tuberculose, déterminée par les Bacilles tuberculeux stérilises,
par les spores d'Aspergillus fumigatus stérilisées. Expériences de Tu.-Cx.
MACGÉ : rapport de la virulence avec la germination des spores vivantes.
3. ILn'y a pas de toxalbumines actives dans les cultures liquides du Bacille
tuberculeux. Les tuberculines obtenues après stérilisation des Bacilles sont
des produits artificiels, dont l'action spécifique dans l'infection tuberculeuse
n'est pas démontrée.
4. Phénomènes d'inmunité (sérothérapie et vaccination) dans la tubercu-
lose.
Dans des conditions déterminées, fréquentes, la virulence du
Bacille de Koch, acido-résistant, paraît être invariable. Jusqu'en
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 61
1897, Koch considère le Bacille tuberculeux comme un parasite dont
les caractères fonctionnels restent fixes. Il explique l’évolution lente
de certaines formes de tuberculose localisées par le petit nombre
des micro-organismes présents dans les lésions, ceux-ci conservant
cependant leurs propriétés pathologiques constantes. Dans une telle
- théorie, il faut donner la raison de la multiplication si restreinte
des Bacilles dans les tissus; ou le virus confère une immunité
relative, ou il y a une résistance spontanée de l'organisme à l’infec-
tion. Mais cette immunité naturelle de l'organisme de certains
seulement des individus d'une même race, tous placés dans des
conditions biologiques sensiblement comparables, ne paraît
guère vraisemblable si l'on considère les propriétés de virulence
du Bacille de la tuberculose comme très accentuées et de plus
invariables. Koch, par des expériences sur le Cobaye tuberculeux,
observe ja non réinoculabilité de la tuberculose; une première
atteinte conférant l'immunité, comme cela se présente dans
l’immense majorité des cas pour la syphilis. Le phénomène de Koch
ne fut pas observé par Arloing. Et ce dernier auteur se basant sur
des expériences personnelles, explique la non réinoculabilité de la
tuberculose constatée par Koch dans certaines conditions, non
eomme l'effet d’une immunité, mais comme le résultat de l'atté-
nuation des cultures de seconde inoculation. (« Mes expériences,
dit Arloing, ont montré que les inoculations faites avec du virus
des lésions pulmonaires tuaient par généralisation Lapins et Co-
bayes, tandis que seuls les Cobayes, très sensibles à la tuberculose,
étaient infectés par des virus de lésions ganglionnaires. Et ce n’est
pas la rareté des agents virulents dans ces dernières qu'il faut invo-
quer, car si on provoque par passages successifs la multiplication
des Bacilles, le virus conserve le degré initial de sa virulence... On
peut du reste faire passer deux ou trois fois le virus à travers un
organisme favorable, pour lui faire augmenter sa virulence primi-
tivement faible, et établir ainsi tous les degrés intermédiaires du
virus. » En conséquence, les tuberculoses viscérales pulmonaires,
longtemps localisées, les scrofulo-tuberculoses, les tuberculoses
cutanées, les tuberculides, toutes ces formes cliniques qui se placent
à côté des tuberculoses à marche extensive, rapide, sont déter-
minées essentiellement par les Bacilles tuberculeux de virulence
plus ou moins atténuée. Faut-il rappeler encore que Krompecher
62 G. BOUDIN
n'a pu infecter des animaux en leur inoculant, même en grande
quantité, des Bacilles tubereuleux humains entretenus pendant
longtemps sur des milieux artificiels? E. Klein a obtenu les mêmes
résultats dans les mêmes conditions.
Kimla, Poupé, Vesely font remarquer qu’en 1897, dans la nouvelle
édition de l'ouvrage de Flugge, on retrouve encore l'opinion d'après
laquelle le Bacille pris de n'importe quelle forme de la tuberculose
humaine ou animale, puis cultivé, doit avoir toujours la même vi-
rulence. Cependant Koch, en 1897, admet la variabilité de virulence
du Bacille.
En 1898, Kimla, Poupé, Vesely par l'expérimentation démon-
trent que la virulence du micro-organisme est toujours très iné-
gale : « Nous avons pris le Bacille des cas et des formes diverses,
nousl'avonsexpérimenté d'une manièreabsolumentidentique,nous
l'avons cultivé sur le même terrain, pendant le même temps, puis
nous avons inoculé d’une manière absolument égale la même géné-
ration et à la même dose aux Cobayes. Néanmoins l'inégalité de la
virulence ressortait nettement de la différence dans la durée de la
maladie, dans l'aspect de l'affection, dans l'intensité de la propa-
gation aux organes internes, enfin dans la toxicité plus ou moins
grande des produits de culture. Si nous insistons sur cette inéga-
lité de la virulence, c’est qu'elle a une importance aussi bien pour
le clinicien que pour l'appréciation juste des préparations curatives
qu'on extrait des cultures du Bacille. » Vesely en effet note les
variations d'activité des tuberculines extraites de Bacilles de Koch,
spontanément plus ou moins virulents, ou modifiés artificielle
ment par ensemencement sur différents milieux de culture.
Mais il reste un fait signalé comme paradoxal par beaucoup
d'auteurs : la persistance des propriétés pathogènes du Bacille tu-
berculeux, après la perte de sa végétabilité. Le fait d'une action patho-
gène, à peu près identique à l’action des germes vivants, persis-
tant après la stérilisation de ces germes est en eflet remarquable.
Il est vrai que Prudden a constaté une caséification moins fréquente
des nodules tuberculeux déterminés par inoculation de Bacilles
stérilisés. D'après Straus et Gamaleia, la caséification peut s'ob-
server fréquemment même dans ces conditions, et pour ces auteurs
la propriété du Bacille de Koch d'édifier des tubercules, même
après stérilisation, est due à une substance spéciale. Pour Krom-
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 63
pecher, l'action variable des Bacilles morts est en rapport direct
avec la qualité de virulence des Bacilles vivants. Peut-être, certaines
infections mycosiques peuvent donner quelques éclaircissements
à ce sujet : des conidies d’Aspergillus fumigatus, ayant subi un
chauffage à sec, ininterrompu de 5 heures à 100° sont capables de
déterminer encore des tubercules dans les tissus. Rénon a établi
l'innocuité absolue de spores stérilisées à 110° à l’autoclave, injectées
dans les veines de Lapins et dans le péritoine de Cobayes; les ani-
maux, sacrifiés quinze jours après, ne présentaient pas trace du
moindre tubercule. Mais cet expérimentateur constate en plus ce
fait, contraire à l'espoir d'une immunisation, que les animaux
traités préalablement par des conidies stérilisées meurent plus vite
que les témoins n'ayant reçu que des spores vivantes; et d'au-
tant plus rapidement que la stérilisation des spores primiti-
vement injectées avait été effectuée à un degré de température plus
élevé. Mais Th.-Ch. Macé, par l’action de la chaleur sèche à 1000
pendant 5 heures, désire tuer les conidies, « mais ne pas les mo-
difier en tant que corps solides. A 110-115, la cellulose est altérée ;
à 4100, il y a perte d’eau, la balance accuse une différence sensible.
De plus, la couleur est nettement modifiée, elle est plus foncée; à
l'examen microscopique il n'y a plus de chapelets de conidies;
l'émulsion préparée comme pour les conidies vivantes est moins
stable ». Voici les résultats de quelques-unes des inoculations expé-
rimentales effectuées par Macé avec des conidies ainsi stérilisées :
(Exp. 73. — Cobaye reçoit 0 gr O1 de conidies mortes dans la
veine jugulaire; il meurt le 9° jour après avoir perdu 260 grammes
sur 625. Les lésions sont générales : tubercules confluents du pou-
mon, du foie, des reins; la rate surtout est criblée de granulations
miliaires ; ses dimensions ont doublé.
(Exp. 76. — 0gr0I de conidies mortes sont introduites sous la
peau d'un Cobaye. L'animal meurt le troisième jour ayant perdu
951 grammes sur 208. Une énorme boule d’æœdème est trouvée,
quoique la quantité de liquide injecté ne fût que de 2 ce. Pas de
suppuration. »
Th.-Ch. Macé fit encore de telles expériences sur le Pigeon et
telle est sa conclusion : «chez le Pigeon et le Cobaye, les conidies
privées de la faculté de germer sont également dépourvues de
la faculté de causer une inflammation. Mais comme les conidies
64 G. BOUDIN
vivantes injectées dans les veines, elles déterminent des embolies
qui peuvent entrainer la mort ou de la nécrose très étendue. »
Et l'auteur semble vouloir rattacher l’action des conidies stérilisées
à celle d’un corps solide qui exerce un traumatisme local. CII y a
dans les conidies d'Aspergillus fumigatus deux causes nocives : un
corps solide qui exerce un traumatisme local et dans ce corps un
poison. Nous avons essayé d'isoler ce poison après bien d’autres au-
teurs, mais nous avons complètement échoué... Ce poison paraît être
détruit par le chauffage nécessaire pour tuer le pouvoir germinatif.
Les conidies extraordinairement adaptées pour la résistance à
divers agents et à la dissémination de l'espèce n'ont pas cédé leur
poison. »
La tuberculose, créée par inoculation de Bacilles stérilisés, ne
peut-elle être également considérée comme une pseudo-tubercu-
lose par particules solides inanimées? Les lésions ne sont plus
extensives, l'affection n'est plus réinoculable en série.
Si l'évolution fréquente vers la caséification d’une telle tuber-
culose peut être imputée en partie à la virulence que possédaient
les Bacilles vivants, ne peut-elle être aussi, en partie, déterminée
par les conditions de stérilisation du virus (température, humi-
dité...)? Rénon avec des spores d'Aspergillus stérilisées à 110-115,
n'obtenait pas de lésions nodulaires. Quoi qu'il en soit, le méca-
nisme d'infection des mycoses est double : il y a une action toxique
déterminant des phénomènes inflammatoires plus ou moins
accentués, et un traumatisme local manifesté par des tubercules.
N'en est-il pas de même dans la tuberculose? Mais l’action toxique
des Mucor, des Aspergillus semble bien être liée à la germination
de leurs conidies. Dans ces conditions même si l'on ne trouve
pas dans les cultures de ces Champignons de toxalbumine active
comme celles que « secrètent » certaines Bactéries, on ne saurait
alors oublier, comme l’un des mécanismes de la toxicité, l’action
des diastases mêmes qui servent à l'accroissement de ces micro-
organismes et capables de déterminer chez les individus infectés
un trouble important dans leuréquilibre de nutrition.
Dans les expériences de Rénon, après l'injection non nocive en
apparence d'une émulsion de conidies stérilisées à 41 5°, les ani-
maux ont paru sensibilisés à l'action d'une infection consécutive
de conidies vivantes. D'après Straus et Gamaleia, lorsque la
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 65
quantité injectée de Bacilles tuberculeux morts est faible, les ani-
maux ne succombent pas, mais sont excessivement prédisposés
à une inoculation tuberculeuse ultérieure.
En vain dans la tuberculose, comme dans l’aspergillose, comme
dans les mucor-mycoses, dans l’actinomycose, a-t-on essayé d'isoler
des milieux de culture « des produits solubles » ({) actifs. Mara-
gliano, Schweinitz et M. Dorset, Gouget et Bezançon ont obtenu
des cultures filtrées unetoxalbumine se détruisant par l’action de la
chaleur à 1000, et produisant de l'hypothermie chez les animaux.
De plus, il semble bien, d'après les recherches d'Hammerschlag,
qu'il doive y avoir dans les milieux de culture, des enzymes
alcooliques, puisque la glycose, la saccharose, la lactose y sont
partiellement transformées en alcool. Mais on ne constate pas dans
les cultures privées par filtration des éléments bacillaires vivants,
de corps albuminoïdes d'activité comparable aux toxines diphtéri-
que ou tétanique. La tuberculine ancienne de Koch ne saurait être
en rien comparable à de telles substances, puisqu'elle est extraite
artificiellement du protoplasma des Bacilles. La méthode de pré-
paration, stérilisation à 1100 des Bacilles tuberculeux cultivés en
bouillon peptonisé et glycériné, concentration au bain-marie et
filtration, doit nécessairement supprimer les activités diastasiques
que possède certainement le Bacille de Koch vivant (2). Et Borrel
(1) L'expression de « produits solubles » pour désigner les toxalbumines micro-
biennes est en réalité impropre, puisqu'il ne s’agit pas pour elles d’une solution
vraie avec ionisation, mais de suspension colloïdale, où les particules extrêmement
divisées donnent au liquide des propriétés, optiques, de résistivité électrique, de
diffusion, spéciales.
(2) On tend à considérer beaucoup d'actions diastasiques comme des actions de
catalyse opérées par des métaux, fer, calcium, manganèse, magnésium, liés à des
matières organiques dans un état colloïdal stable et altérables par la chaleur.
Nous pouvons donner ici deux définitions des diastases, définitions basées sur des
faits expérimentaux.
— «.… dans les oxydations effectuées par la laccase, il entre en jeu ce système
de deux substances complémentaires ; l’une représentée par le manganèse, suffit à
produire la réaction considérée et pourrait, à cause de cela, être appelée la
complémentaire active ; l’autre, de nature organique, altérable par la chaleur,
est La complémentaire activante. » — G. Berrranp, Revue générale des sciences,
30 mai 1905, p. 458.
Autre définition : (Une diastase pourrait bien être fréquemment formée par
un colloïde minéral instable exerçant toutes les catalyses qui caractérisent la dias-
tase, protégé contre la coagulation par un colloïde hydrophile. » (J. Perrin cité
d’après Le Danrec, Introduction à la Pathologie générale, p. 357). La matière
organique à l’état colloïdal stable, serait « activante » parce qu’elle augmente
dans des proportions considérables et à cause de son état physique, La surface du
métal qui opère la catalyse et protège, par sa stabilité l’hydrosol de ce métal
Archives de Parasitologie, XI, n° 1, 1926. 5
66 G. BOUDIN
dit que « la tuberculine est une susbtance très stable et qu'il est fort
difficile de détruire ou de faire disparaître. Elle peut être chauffée
à des températures très élevées; des corps bacillaires ont été
chaufiés en suspension dans l’eau et dans des tubes clos à 100,
150, 250, 300 degrés. A partir de 250° seulement la tuberculine est
complètement détruite. »
Après l'exposé des nombreuses recherches faites sur la tuber-
culine, Straus conclut ainsi : «Le principe actif de la tuberculine
est contenu dans les protéines du corps des bacilles tubereuleux ».
Si cela pouvait donner quelqu'éclaircissement, on pourrait dire
que la tuberculine est une ( toxine adhérente. » La tuberculine
isolée par Brieger, les cendres déduites, se rapproche des matières
nucléiques, à composition phosphorée.
L'action spécifique de ce corps, obtenu en dehors des manifes-
tations biologiques du Bacille tuberculeux, est très discutée. Pour
beaucoup d’expérimentateurs elle ne serait pas directement et
spécialement active. Les protéines de Bacilles différents, obtenues
par la méthode de préparation de la tuberculine de Koch agiraient
comme cette dernière substance sur les Cobayes tuberculeux
(Rœmer, Buchner). Le sérum sanguin, les albumoses, les peptones
seraient capables de provoquer chez les tuberculeux une réaction
thermique comparable à celle que détermine la tuberculine.
D'autre part les syphilitiques, les lépreux, et surtout les sujets
atteints d'actinomycose, réagiraient particulièrement bien à l'ac-
tion de cette substance.
Chez les animaux sains, en inoculation sous-cutanée la tubercu-
line reste sans résultat; chez le Cobaye en bon état de santé une
injection de 2 cc reste presque sans effet. Mais par l'inoculation
intra-cérébrale, Lingelsheim et Borrelontdémontréquelesanimaux
sains sont presque aussi sensibles que les animaux tuberculeux. Ce
dernier expérimentateur, qui attache la plus grande importance à
la « sécrétion » de tuberculine pour séparer ou rapprocher les
différents Bacilles tuberculeux pisciaire, aviaire, humain, fait à ce
sujet une hypothèse d’après laquelle la tuberculine n’agirait chez
les malades que par l'intermédiaire du système nerveux : « On
pourrait supposer que chez l'animal sain, la tuberculine inoculée
qui peut, étant seul, être coagulé par une trace de sel quelconque dans la
liqueur, et ainsi rendu inactif.
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 67
par la voie sous-cutanée n'arrive pas aux centres nerveux pour y
produire son action nocive; l'organisme intact ne laisse pas passer
le poison. Au contraire, chez l'animal malade, criblé de tubercules,
serait possible l'absorption du poison au niveau des tubercules par
les filets nerveux terminaux; les portes d'entrée et les voies
d'absorption seraient d'autant plus nombreuses que l'animal serait
plus tubereuleux.. Cette hypothèse permettrait d'expliquer la sen-
sibilité si grande des Cobayes pseudo-tuberculeux, qui éloigne l’idée
d’une réaction strictement spécifique, — les réactions obtenues par
les inoculations de Bacilles morts sensibilisant les animaux, — les
observations cliniques de réaction tuberculinique chez les lépreux
et les syphilitiques. »
PourF.Bezançonet Küss, «laconstatation d'une réaction positive à
la tuberculine n'implique pas nécessairement que la lésion suspecte
est de nature tuberculeuse, elle indique seulement que l'individu
est porteur dans une région quelconque de l'organisme de Bacilles
tuberculeux; la fréquence extrême chez l'adulte de lésions tuber-
culeuses anciennes, latentes du sommet du poumon ou des gan-
glions du médiastin rend souvent difficile l'interprétation des
renseignements donnés par l'inoculation ».
Dans la pratique vétérinaire, après les recherches de Nocard, on
utilise les inoculations de tuberculine (0,30 — 0,40 centigr.) pour
aider au diagnostic précoce de la tuberculose chez les Bovidés.
Cette méthode donnerait des renseignements d'autant plus exacts
que les animaux seraient moins atteints. « La réaction, dit
F. Bezançon, serait si sensible qu'elle pourrait exister alors que
l’autopsie ne montrerait aucune lésion tuberculeuse; il s'agirait
alors de petites lésions tuberculeuses microscopiques. »
Pour Arloing, Rodet et Courmont, la réaction fébrile caractéris-
tique aurait été présentée après injection de doses très faibles de
tuberculine, par des Génisses saines et par des Bovidés atteints
d’'Echinocoques despoumons. D'après toutes ces recherches, on voit
combien il est difficile d'établir le rapport spécifique de la tuber-
culine avec l'infection tuberculeuse.
La nouvelle tuberculine de Koch, tuberculine résiduelle, fut
obtenue par des procédés mécaniques beaucoup plus ménagés,
et peut-être comparables aux procédés de trituration employés dans
certains cas pour l'obtention, à partir des corps cellulaires, des sub-
68 G. BOUDIN
stances diastasiques, que ceux-ci peuvent contenir (extraction de
la zymase des globules de levure : Buchner). La tuberculine rési-
duelle s'obtient par concentration et dessiccation dans le vide d’une
culture virulente; les Bacilles sont ensuite minutieusement broyés;
la masse bacillaire obtenue est émulsionnée dans l’eau distillée,
centrifugée. La masse résiduelle de centrifugation est à nouveau
séchée, broyée, centriftugée. Une semblable opération est répétée
plusieurs fois, jusqu'à ce qu'il ne reste presque plus de sédiment;
les liquides obtenus à la suite des centrifugations successives sont
mélangés. Dans un tel mode de préparation, l’action de la chaleur
est évitée, et la dessiccation se fait dans le vide. De plus, autre élé-
ment important, pour avoir, d'après Koch, une tuberculine vérita-
blement active, il faut opérer avec des cultures bien virulentes, Les
cultures âgées peu virulentes ne donnent que des substances inac-
tives. Nous ignorons si cette tuberculine fut envisagée comme subs-
tance diastasique ; par ce mode de préparation, Koch voulaitenlever
aux Bacilles la couche de matières grasses qui peut !es protéger con-
tre l’activité leucocytaire (1). Après injection de tuberculine rési-
duelle, la réaction fébrile serait moins constante qu'après injection
de tuberculine ancienne. Cette dernière produit l’accoutumance ;
celle-là ne la produirait pas. La réaction morbide qu'elle détermine
pourrait être tardive, assez prolongée, et l'injection pourrait être
suivie delésions locales, telles quelymphangite, adénite. L'influence
thérapeutique destuberculines est discutée. Dans certains cas etpar-
ticulièrement dans les tuberculoses localisées, on aurait obtenu par
leuremploi des améliorations assez considérables, mais passagères.
(4) Vis-à-vis du mode de préparation de cette tuberculine résiduelle, on peut
exposer le mode de prévention de la tuberculose bovine, indiqué par von Behring.
Cet expérimentateur utilise pour sa ( jennérisation » des cultures de tuberculose
humaine entretenues longtemps dans le laboratoire et d’une virulence très atté-
nuée. La méthode d'immunisation consiste : « en deux inoculations intraveineuses
respectivement de # et de 20 milligrammes de Bacilles humains desséchés, ces
inoculations étant faites à {rois mois d'intervalle sur des jeunes Bovidés âgés de
moins de quatre mois ». Les cultures desséchées doivent être broyées, converties
en une émulsion homogène, afin d'éviter, puisque les deux inoculations vaccinales
s'effectuent en voie intraveineuse, les accidents emboliques. Dans l’émulsion de
culture, on voit au microscope les Bacilles isolés. C’est dans de telles conditions
que furent réalisées à Melun, par Vallée, les expériences de vaccination antitu-
berculeuse de jeunes Bovidés. Ces expériences montrèrent que le vaccin de von
Behring est inoflensif pour les Bovidés, et qu'il leur confère une résistance consi-
dérable vis-à-vis de Bacilles bovins virulents. — C. GuÉRIN, Immunisation active
contre la tuberculose. Presse médicale, 6 janvier 1906. — Vazrée, Revue de la
tuberculose, 1906.
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 69
Diverses tuberculines furent encore isolées par d’autres expéri-
mentateurs, et par des procédés différents. Au lieu de préparer la
tuberculine par macération à haute température des Bacilles tuber-
culeux, Koch obtint une tuberculine alecaline, par macération des
Bacilles dans une solution de soude caustique à 10 p. 100. D'après
Borrel, « les corps des Bacilles tués par la chaleur et desséchés
constituent une tuberculine excellente et de beaucoup la plus
active. »
Mais encore il semble bien qu'on ne traite pas le Bacille tuber-
culeux comme une substance vivante, à l’état colloïdal infiniment
sensibleet variable, capable d'actions diastasiques fragiles, suscep-
tible d'adaptation, de modifications fonctionnelles lentes mais cer-
taines sous des influences ménagées; mais il est plutôt envisagé
comme un corps organique inerte et stable, auquel on peut appli-
quer, puisqu'il ne paraît pas donner de toxines actives dans les
milieux de culture, les manipulations souvent brutales de la chimie
des corps bruts. Si les tuberculines sont en partie la substance
elle-même des corps bacillaires, elle sont cette substance modifiée
par la chaleur, la glycérine à chaud, la soude caustique; ce sont
des produits de composition complexe plus ou moins mélangés
des sels et des substances des milieux de culture, de composition
non constante, évidemment en rapport avec la composition brute
du protoplasma bacillaire, mais de teneur variable avec les pro-
cédés d'extraction, avec le mode de culture, avec l’âge des cultu-
res. Ce ne sont pas des corps secrétés par le Bacille de Koch dans
les cultures; ce sont des produits de macération de ce Bacille. Le
mode d'obtention empêche d'affirmer qu'on se trouve bien en
présence de produits de sécrétion physiologique, et que c'est par
eux que s'effectue l’action infectieuse et toxique dans les organis-
mes envahis par le Bacille tuberculeux. Leur préparation à haute
température (100c), les différencie déjà complètement des diastases
et des toxalbumines, toxine tétanique, toxine diphtérique par
exemple. Il est à remarquer que le Cobaye tuberculeux et le
Cobaye sain présentent une sensibilité égale vis-à-vis de ces deux
dernières substances. « Seule, dit Borrel, la malléine constitue
une exception qui mérite d'être notée, elle est aussi toxique que
la tuberculine pour le Cobaye tuberculeux, par la voie intracéré-
brale ; elle est inofftensive par la voie sous-cutanée. » Mais précisé-
70 G. BOUDIN
ment la malléine est une substance préparée artificiellement et
dans les mêmes conditions que la tuberculine, obtenue comme elle
en dehors des conditions biologiques du Bacille de la morve.
Et même en considérant que le degré d'activité toxique de la
tuberculine obtenue par le premier procédé de Koch semble être
en rapport direct avec la qualité de virulence des cultures, leur
âge, et la variété de tuberculose, le problème n’en reste pas moins
celui du mécanisme d'action des Bacilles stérilisés : traumatisme
local d’une part et en plus résorption de tels Bacilles ou des subs-
tances organiques extraites de ces Bacilles tués, résorption plus
plus ou moins difficile, variable avec le mode de stérilisation et le
degré de transformation préalable des Bacilles avant l'inoculation.
Arloing fait remarquer que la tuberculine ancienne a exercé dans
plusieurs cas une action prédisposante; attendu que ce sont des
animaux prétenduement vaccinés avec la tuberculine qui ont
offert les lésions les plus confluentes et la généralisation la plus
étendue.
Les expériences de Rénon et Th.-Ch. Macé, sur l’action physio-
logique des spores, stérilisées à températures différentes d’Asper-
gillus fumigatus se superposent par leur analogie aux expériences
de Straus et Gamaleia, d’Arloing sur l’action des Bacilles tuber-
culeux stérilisés et de la tuberculine ancienne. Et par le manque
de congestion intense, par le défaut d'extension des lésions, quel-
quefois par l'absence de caséification, dans la tuberculose comme
dans l’aspergillose, les résultats de l’action physiologique des
micro-organismes stérilisés sont différents de ceux obtenus par
l’activité vitale, spontanée, des parasites vivants. Non pas que dans
chacune de ces deux séries parallèles d'expériences, pas plus dans
l’aspergillose que dans la tuberculose, on puisse actuellement
établir avec certitude une relation de spécificité entre l’action, sur
les animaux, des spores ou des Bacilles tués et la réceptivité consé-
cutive plus grande de ces animaux à l'infection par les spores ou
les Bacilles vivants. L'injection préalable de produits organiques
plus ou moins transformés par les procédés de stérilisation et spé-
cialement par la chaleur (dont l'effet premier est la coagulation de
la matière vivante et probablement un changement de constitution
chimique) peut ne pas correspondre à une addition de corps spé-
cifiques; elle a pu créer seulement un premier déficit des enzymes
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 71
leucocytaires (1). C'est peut-être ainsi qu'il faut traduire l'hypothèse
de Buchner, disant que la tuberculine n'agit pas d'une facon par-
ticulière, spécifiqne, mais seulement en tant que protéine bacté-
rienne. Si l’action de cette substance est marquée surtout sur les
tuberculeux, c'est que (l’économie de ces sujets est en état d'équilibre
instable ». De même une réaction semblable est observée chez eux
après injection d’autres protéines bactériennes; Buchner a repro-
duit, par injection à des Cobayes tuberculeux de ces protéines déri-
vées du corps de différentes Bactéries, des lésions congestives au
voisinage des foyers tuberculeux, en tout semblables à celles qui
suivent l'injection de tuberculine. Et de même la tuberculine agit
sur l’économie des sujets atteints d'infection à marche chronique :
syphilis, lèpre, actinomycose.
La tuberculine ne saurait servir à la division des Bacilles tuber-
culeux bovin, pisciaire, aviaire en catégories pratiquementimmua-
bles. D'abord, on n'obtient pas d'effets physiologiques marqués
avec la tuberculine du Bacille des Mammiières longtemps entre-
tenu, sans passage par le corps des animaux, sur des milieux arti-
(1) La physico-chimie nous montre les phénomènes d’intoxication par les subs-
tances bactériennes comme des réactions de colloïdes à colloïdes, ou de colloïdes
avec un mélange de colloïde et d’électrolyte. Les colloïdes cellulaires des orga-
nismes vivants ont, du fait de leur état physique, un grand pouvoir d'absorption
vis-à-vis des substances étrangères injectées dans les humeurs; « l’absorption de
la toxine par les substances cellulaires cause la mort non pas de la cellule elle-
même qui continue à vivre dans une direction différente, mais de l’ensemble de
l'organisme, où cette cellule vient à manquer à son rôle spécial » (J. Duclaux). Cette
théorie du mécanisme d'intoxication, tout en étant extrêmement générale, paraît
être exacte, précise et semble devoir être féconde. Elle se divise en deux parties;
la première concerne les réactions limitées et réversibles des colloïdes entre eux
ou de colloïdes avec mélange de colloïdes et électrolytes. A. Croft Hill a vérifié
la réversibilité de l’action zymotique de la maltase de la levure de fermentation
basse sur la maltose et sur la glycose et pense que de telles réversions s'effectuent
dans les cellules vivantes. S. Arrhenius et Madsen appliquent à la toxine téta-
nique et à la toxine diphtérique la loi des équilibres chimiques exprimée par
Berthelot et Guldberg et Waage. E. Wahlen explique l’évolution périodique de la
tuberculose par une limitation automatique de la toxine tuberculeuse par ses
produits de transformation.
Dans la deuxième partie de la théorie de J. Duclaux, il s’agit précisément du
«déficit diastasique » (Wahlen) déterminé par les réactions précédentes; l’enzyme
engagée dans un complexe avec une substance étrangère manque à son rôle
spécial. En réalité on ne saurait que soustraire à un organisme vivant ; CI. Ber-
nard expliquait la mort dans l’intoxication par l’oxyde de carbone non par ad-
dition de ce gaz aux éléments cellulaires, mais par déficit d'oxygène.
Dans le cas particulier, le processus tout passif d’assimilation de la tubercu-
line, substance modifiée par la chaleur, peut différer du processus de réaction
des produits solubles des Bacilles tuberculeux vivants avec les diastases de l’or-
ganisme; et le déficit créé peut être tout différent.
72 G. BOUDIN
ficiels (Krompecher). Certaines variétés du Bacille tuberculeux
humain, isolé de lésions de tuberculose humaine, peuvent être trans-
formées par certains procédés en cultures homogènes. La poudre
bacillaire obtenue avec les micro-organismes de ces cultures (tu-
berculine de Borrel) peut être injectée à doses extrêmement con-
sidérables sans amener la mort des Cobayes tuberculeux. Borrel
expose qu'il a pu injecter 200 milligrammes de cette tuberculinesous
la peau d’un Cobaye tuberculeux de 30 jours sans le tuer ; même
résultat négatif après injection intracérébrale de 2 milligrammes
de cette substance. Mais il faut dire que Borrel, justement à cause
de ces faits, met en doute l’origine humaine du Bacille homogène
de $S. Arloing et tend à le ranger dans les Bacilles du type aviaire.
Mais des transformations semblables, plus complètes encore du
Bacille de Koch ont été obtenues par Ferran et Auclair, Bezançon,
par le procédé des cultures homogènes.
On ne saurait donc refuser au Bacille tuberculeux d'Arloing ses
relations directes avec le Bacille de la tuberculose des Mammifères,
bien qu'il soit (un exemple unique d'une transformation si com-
plète ». En conséquence si, dans la pratique, on retire par la
macération, ou par la dessication et le broyage des Bacilles tués des
Mammifères, les tuberculines les plus actives, on ne saurait dans
l'hypothèse transformiste attacher une grande importance à ce fait.
Même en admettant que la tuberculine soit un produit physiolo-
gique de sécrétion, on ne saurait utiliser ce caractère que pour dis-
tünguer les Bacilles de la tuberculose en variété virulente et variété
non virulente, mais non pas pour systématiser des espèces.
D'une façon générale, il ne paraît pas nécessaire pour obtenir
des effets d’immunité avec des substances diastasiques retirées des
cultures microbiennes, que ces substances soient primitivement
d'une grande activité toxique. Hammerschlag opérant sur 3 litres
de culture du Bacille tuberculeux en bouillon glycériné ou glycosé a
pu obtenir une toxalbumine à effets toxiques peu prononcés, seule-
ment hyperthermisante. En 1896, Maragliano fixe les conditions
d'obtention d'un sérum immunisant contre la tuberculose; il
mélange les protéines extraites des corps bacillaires par concen-
tration des cultures à 1000 (substances de la lymphe de Koch) avec
une toxalbumine, obtenue par concentration dans le vide à 300
d'une culture filtrée sur bougie de porcelaine. L’expérimentateur
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 73
inocule des animaux avec des doses progressivement croissantes
de ce mélange de protéine (3 parties) et de toxalbumine (1 partie).
Au bout de six mois, le sérum d'animaux ainsi traités, injecté au
Cobaye tuberculeux, ou à l'Homme tuberculeux leur permet de
résister à l’action toxique de la tuberculine. Si Maragliano à pu
ainsi neutraliser l’action toxique de la tuberculine, précisément
les animaux qui ont fourni le sérum immunisant avaient été traités
par un mélange où il entrait une proportion considérable de
lymphe de Koch (1). Nous ne saurions là encore avoir de rensei-
gnements au sujet de l’activité spécifique de la tuberculineancienne.
Mais avec le mélange où il entre de la toxalbumine, obtenue dans
des conditions biologiques, Maragliano obtient un sérum capable,
dans certains cas de tuberculose humaine, d'abaisser la fièvre,
d'enrayerle processus d'intoxication, de faire disparaître les symp-
tômes physiques des foyers infectieux.
Courmont et Dor en 1890, avec le filtrat de cultures de Bacille
aviaire, injecté préventivement à des Lapins et à des Cobayes, ont
obtenu des résultats positifs d'immunité contre le Bacille viru-
lent. Dans quelques cas, les produits solubles de tuberculose
aviaire ont immunisé contre le Bacille de Koch.
D'autres expérimentateurs ontobtenu une vaccination active par
Bacilles tuberculeux modifiés ou à virulence atténuée. De même
que Rénon arrivait à conférer une certaine immunité à des ani-
maux contre des spores jeunes et virulentes d'Aspergillus fumigatus,
au moyen de conidies encore vivantes, mais à pouvoir pathogène
atténué par le vieillissement, de même, en 1890, Grancher et
H. Martin avaient réussi dans une certaine mesure, à vacciner quel-
ques Lapins par l'inoculation à virulences croissantes de culturesde
tuberculose aviaire, tout d'abord affaiblies par le vieillissement.
D'autres expériences vinrent confirmer ces premiers faits. Une
vaccination est réalisée par von Behring chez de jeunes Bovidés
par des Bacilles humains atténués. Mæller, sur lui-même et sur des
animaux, obtient des résultats positifs d'immunisation, en se
servant des cultures de tuberculose humaine, mais modifiées par
un passage préalable sur l'Orvet, c'est-à-dire sur un Vertébré à
(1) «L’immunité par la tuberculine est seulement l’immunité contre la tuber-
culine et elle ne l’est pas contre la tuberculose, non plus peut-être contre la toxine
vraie, in vivo, des Bacilles tuberculeux » — TArsusABuRO YABÉ.
74 G. BOUDIN
sang froid. De son côté, Friedmann vaccine des Cobayes contre
des cultures de tuberculose humaine virulente, au moyen des Ba-
cilles tuberculeux de la Tortue; avec des cultures de tuberculose
humaine, le même expérimentateur vaccine aussi des Tortues
contre le Bacille qui développe spontanément chez ces Reptiles des
lésions tuberculeuses.
Les Bacilles tuberculeux de la Tortue poussent déjà bien à la
température de la chambre. Mais l’optimum de croissance est 370.
Friedmann isola cependant d'une Tortue un Bacille acido-résistant
ne poussant qu'à 22. Au-dessous de 25°, il n'y avait pas de déve-
loppement. Ce dernier type paraît avoir un pouvoir vaccinant moin-
dre. Le développement à la température de 37 paraît être une
bonne condition pour l'obtention d’un bon vaccin.
De plus, Friedmann (1) a obtenu une vaccination active chez des
Bovidés ; en leur injectant dans les veines une émulsion de Bacilles
tuberculeux de la Tortue, l’auteur est parvenu à leur conférer une
immunité solide contre le Bacille tuberculeux bovin. D'autre part,
le sérum des animaux vaccinés au moyen des Bacilles de la Tortue
a des propriétés préventives. Des Cobayes traités par ce sérum et
inoculés de tuberculose virulente manifestent des lésions insigni-
fiantes à côté de Cobayes témoins non préventivement traités.
Toutes ces expériences de différents auteurs incitent à rechercher
toute la plasticité, fonctionnelle et morphologique, dont est suscep-
tible le Bacille de la tuberculose. Ces phénomènes d'immunité
créés réciproquement par des Bacilles tuberculeux de Vertébrés
à sang froid, et des Bacilles tuberculeux de Vertébrés à sang chaud
pourraient être aussi bien invoqués comme preuve de la parenté
étroite qui existe entre ces différents Bacilles. Mais, dans l'état
actuel, il est impossible d'affirmer, par ce seul caractère connu
d'une immunité conférée par deux virus, que ces deux virus appar-
tiennent à la même espèce.
(1) En 1905, A. Weber et M. Taute groupent autour du Bacille pisciaire de Batail-
lon, du Bacille de l’Orvet (Mæller) et du Bacille de Friedmann, types principaux
des Bacilles tuberculeux des Vértébrés à sang froid, 36 espèces de Bacilles tuber-
culeux. (C.R. in Bulletin de l’Institut Pasteur, 1905). Ce nombre augmentera
encore irès vraisemblablement.
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 79
CHAPITRE IX
4. Fragilité du Bacille de Koch dans les organismes où il vit en parasite.
Longévité dans les milieux extérieurs : spores.
2. Action des diastases digestives. Action de la pancréatine.
3. Sensibilité aux hautes températures, à la lumière. Pouvoir chromogène.
Koch et Straus considèrent le Bacille de la tuberculose comme
un parasite rigoureux, à cause de son développement obligé à 380
environ, et sa difficulté d’acclimatement sur les milieux de culture
artificiels. «Les conditions de température relativement élevées et
constantes, écrit Straus, ne sont guère réalisées que dans le corps
de l'Homme ou des animaux : le Bacille de la tuberculose ne sau-
rait donc vivre et se multiplier en dehors du corps, dans les cir-
cumfusa, dans le sol, dansles eaux, comme peuvent le faire d'autre
microbes pathogènes, celui du charbon par exemple, de la fièvre
typhoïde ou du choléra. Il doit donc être considéré comme étant
rigoureusement parasite (Koch). »
A l'inversedes micro-organismes précédemmenteités, le Bacilledu
charbon par exemple, le Bacille tuberculeux pourraitsporuler dans
les organismes vivants. Koch explique la disparition des Bacilles
dans les cellules géantes par la formation de spores non colorables,
qui maintiennent la virulence des nodules tuberculeux sans Bacilles
apparents : (Dans les cellules géantes une nouvelle génération de
Bacilles succède toujours à la génération suivante. Pendant ce
temps les Bacilles forment dans l'intérieur des cellules géantes des
spores et laissent après leur disparition les germes pour la progé-
niture suivante. »
De plus, dans les organismes vivants et en dehors d'eux, le
Bacille de la tuberculose garde ses propriétés de coloration et une
certaine virulence, bien quil semble avoir perdu toute végétabilité.
« Même dans le corps des animaux ou de l'Homme le Bacille de la
tuberculose ne possède pas cette vitalité dont on fait volontiers un
de ses principaux attributs. Il ressort en effet des recherches de
Kitasato que la plupart des Bacilles contenus dans des crachats
expectorés par les phtisiques ou dans les cavernes du cadavre sont
des Bacilles morts. Il est possible qu'il en soit de même des Bacilles
contenus dans l'intimité des tissus, et ainsi s'expliquerait en partie
76 G. BOUDIN
la difficulté que l'on rencontre à obtenir des cultures en ensemençant des
produits tuberculeux. Mais si le Bacille de la tuberculose semble
périr assez facilement, même dans l'organisme de l'Homme et des
animaux qu'il a envahis, ce Bacille mort est loin d'être inoftensif :
les cadavres des Bacilles tuberculeux... continuent pendant long-
temps à persister dans les organes où ils ont vécu et y exercent
une action à la fois phlogogène et toxique qui n’est pas un des traits
les moins curieux dans l’histoire de ce Microbe » (Straus, p. 229).
Ainsi, d'après ces auteurs, le Bacille tuberculeux montre, dans les
organismes où il s'est adapté, les caractères d’une vie fragile : il
meurt ou sporule rapidement! Et pour Straus la sporulation est
douteuse. D'autre part, il est certain que la longévité du Bacille
de Koch en dehors des organismes animaux, dans les milieux de
culture, est grande; et là il est virulent; les lésions que ces cul-
tures développent ne sont pas des lésions de nécro-tuberculose
par particules bacillaires mortes, difficilement assimilables, mais
les lésions s'étendent etleur matière s'inocule en série. Puis à me-
sure que les cultures vieillissent, la virulence décroit, jusqu à ce
que les lésions deviennent incapables de généralisation. Au bout
de cinq mois, des cultures de tuberculose humaine peuvent encore
être réensemencées. Maffucei a pu réensemencer des cultures
de tuberculose aviaire âgées de un an, un an et demi, deux ans.
Terre considère la persistance de la vitalité du Bacille pisciaire
en cultures comme indéfinie : «€ une culture initiale sur gélose
portant la date du 9 mars 1897 est largement humectée de bouillon
le 15 juillet 1902, c'est-à-dire plus de cinq ans après le semis pri-
mitif, et ce tube a donné dans la partie déclive un splendide voile.
Cette remarquable longévité est due vraisemblablement à la pré-
sence de spores. » Beaucoup d'auteurs, Villemin, Koch entre
autres, ont admis que la grande résistance des Bacilles tubercu-
leux dans les milieux extérieurs, résistance à la dessiccation, à la
putréfaction, au froid. à la congélation était due à la présence de
spores. « Schottelius affirme que des poumons de phtisiques,
enterrés pendant « plusieurs années » contiennent encore des
Bacilles colorables et que ces poumons possèdent encore la viru-
lence tuberculeuse. Tous ces faits établissent donc que les matières
tuberculeuses peuvent conserver leur virulence pendant un temps
relativement long dans les eaux non renouvelées, dans les fumiers
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 7lg
et dans le sol » (Straus, p. 209.) Mais le Bacille tuberculeux est
sensible à l’action des températures élevées. En général, en milieu
humide, l’action d'une température de 70°, pendant 10 minutes, lui
enlève sa végétabilité. Or, les spores des Bactéries leur permettent de
résister à des températures supérieures à 1000. — La sporulation en
vie parasitaire et la faible résistance des spores à la chaleur seraient
donc des caractères spéciaux au Bacille tuberculeux; et ces
caractères deviennent d'autant plus singuliers que les auteurs ne
sont pas d'accord sur les formations qui dans la constitution intime
du Bacille de Koch, répondent aux spores. Cependant cette ques-
tion du mode de sporulation est de toute importance; la solution
mérite d'en être cherchée, si l’on veut connaître la façon dont l'agent
de la tuberculose maintient sa virulence, essaime et se développe.
La résistance du virus vis-à-vis des antiseptiques est assez consi-
dérable. Cependant Villemin entrave le développement du Bacille
tuberculeux cultivé en gélose glycérinée par addition au milieu de
culture de 1 p.100 d'iodure de potassium. Koch emploie avec succès,
pour arrêter la végétabilité des cultures, le violet de gentiane, la
fuchsine, le bleu de méthylène, l’auramine, les cyanures d’or, ces
derniers employés dans la proportion de 1 à 2 millionièmes.
Straus et Wurtz ont essayé l’action du suc gastrique à 38°, actif,
digérant bien le blanc d'œuf coagulé, sur des cultures de tubercu-
lose aviaire en agar glycériné, âgées d'environ six semaines à deux
mois. Un centimètre cube de suc gastrique fraîchement recueilli
était ensemencé avec une anse de fil de platine de la culture.
Les tubes contenant un tel mélange étaient exposés à la chaleur
de l'étuve un temps variable. Des Lapins, des Cobayes furent
_inoculés dans le tissu cellulaire sous-cutané et dans le péritoine
avec un demi-centimètre cube de mélange. « Les animaux mou-
rurent ou furent sacrifiés au bout d’un temps variable. A l’au-
topsie, on constata que ceux qui avaient reçu des cultures ayant
séjourné dans le suc gastrique pendant 1, 2, 3, 4, 5 et 6 heures
étaient devenus tuberculeux. Ceux qui avaient été inoculés dans
le péritoine présentaient une tuberculose péritonéale avec des
nodules disséminés dans le foie, la rate et les poumons; ceux
qui avaient été inoculés sous la peau présentaient au point d’ino-
culation, un abcès caséeux, riche en Bacilles. La même injec-
tion sous-cutanée, faite avec une culture soumise à l’action du suc
78 G. BOUDIN
gastrique, pendant 10 à 12 heures, ne provoquait qu'un abcès tu-
berculeux local, à Bacilles colorables par le procédé d'Ehrlich et
finissant par disparaître du point inoculé.
Straus de là que les Bacilles de la tuberculose, après un séjour
de 8 à 12 heures dans le suc gastrique, sont atténués, mais avec
cette restriction que ces Bacilles étaient peut-être déjà morts.
« Pour décider la question, il faudrait recourir non pas à l'inocu-
lation, mais à l’ensemencement ». Cette restriction est peut-être
juste; il serait étonnant qu'avec des cultures du Bacille aviaire, il
ait obtenu des lésions nodulaires de tubereulose aussi constamment
chez des Lapins et des Cobayes. Il n’en est pas moins vrai que les
Bacilles disparaissaient au niveau du point inoculé. L'action du suc
gastrique n’aurait-elle pas favorisé leur résorption? — Suivant
Terre le Bacille pisciaire résiste aux diastases agissant sur les hy-
drates de carbone ; «il n’est pas attaqué par le suc gastrique artifi-
ciel ou naturel; reporté sur milieux ordinaires, il persiste à croître.
Mais l’action de la pancréatine est toute différente, les Bacilles sont
frappés de mort, ils se colorent mal, il y a eu sans doute disso-
lution de la substance qui possède une affinité spéciale pour les
colorants. »
Cet auteur estime que le Bacille tuberculeux pisciaire résistant
aux ferments qui transforment les hydrates de carbone et les al-
buminoïdes est atteint par ceux qui saponifient les graisses. «Ces
résultats, ajoute-t-il, s'appliquent aux expériences in vitro et ne
préjugent rien sur ce qui se passe dans l'organisme (1). » Il faut
dire cependant que l'idée directrice de ces expériences sur les mo-
difications du virus tuberculeux par les diastases, partait de l’ob-
(1) Faut-il rattacher à la désintégration du Bacille tuberculeux pisciaire réalisée
in vitro par la pancréatine les résultats des expériences de P. Carnot sur l’inocu-
lation de Bacilles tuberculeux dans le pancréas ? « Les expérieuces de P. Carnot
expliquent la rareté relative des lésions directement tuberculeuses du pancréas.
En eflet, par des injections massives de cultures de Bacilles de Koch on n’arrive-
rait pas à produire des foyers caséeux dans le tissu pancréatique. Il semble que
cette glande détruise les Bacilles et rende stériles les inoculations. » (A. MATHIEU,
Traité de Médecine de Bouchard et Brissaud, 2° édit., IV, p. 397). La dispari-
tion rapide des Bacilles a été constatée également dans la rate, que cet organe
montrât ou non des granulations, à côté des autres viscères montrant des nodu-
les et des Bacilles à l'examen microscopique.(Friedrich et Nôüsske, O0. Schulze, F.
Bezançon). Comme nous le verrons au cours de l’analyse des travaux de ces der-
niers auteurs, la destruction des Bacilles semble d’ailleurs varier avec les orga-
nes chez les différentes espèces animales : rate, pancréas, foie, et n'être jamais
nulle dans quelque organe que ce soit. Nous ne parlons pas cependant de l’évo-
lution des Bacilles dans les cavernes pulmonaires.
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 79
servation que Bataillon, Terre et Dubard avaient faite des transfor-
mations subies par le Bacille de Koch dans l'organisme humain et
dans l'organisme des différents animaux.
Le Bacille de Koch est sensible à l’action de la lumière solaire.
Il est tué par la lumière directe en un temps variant de quelques
minutes à plusieurs heures et deux jours environ. C’est pour évi-
ter cette action des rayons lumineux sur la végétabilité des Bacil-
les et pour leur permettre un développement plus rapide qu'il est
habituel de laisser dans l'obscurité les étuves contenant les cultu-
res. Les cultures de tuberculose aviaire, pisciaire, humaine mani-
festenten vieillissantun pouvoirchromogène plus ou moinsintense.
Straus signale que «les cultures des deux tuberculoses, aviaire
et humaine, sur milieux solides ou liquides prennent souvent en
vieillissant une teinte rosée particulière. Terre constate la même
coloration des colonies de tuberculose pisciaire. Les cultures âgées
sur lait de cette derniére variété prennent une nuance violacée. De
plus, après un mois, les cultures, tant sur milieux solides que sur
milieux liquides, prennent une teinte brune qui augmente avec
l'âge, et se dirige progressivement de la périphérie vers la profon-
deur. Cette coloration forcée ne se manifeste que sur les cultures
contenantdes sucres. «La propriété chromogène du Bacille pisciaire
paraît donc rattachée à son action sur les sucres » (Terre). Sur les
milieux de culture au sang gélosé, «les colonies empruntent l’hé-
moglobine du milieu et prennent une couleur chocolat » (Bezan-
con). Shumovsky ajoute qu’un petit cristal de Fe?So* donne
ainsi à la cette culture une coloration brun jaunâtre. P. Cour-
mont et Potet notent la variabilité du pouvoir chromogène du Ba-
cille de Koch : « J. Nicolas a obtenu artificiellement des cultures
colorées jaunes ou rougeàtres, grasses et vernissées, ressemblant
de tout point à telles cultures du Bacille du beurre de Petri, de
Korn, de Tobler. L'un de nous a souvent constaté la coloration
rouge brique ou saumon de certaines cultures, typiques d'ailleurs,
de tuberculose humaine. » La coloration du pigment bacillaire
semble donc varier avec la qualité du milieu nutritif. De plus, on
pourrait peut-être, étant donnée la vive sensibilité du Bacille tu-
berculeux à la lumière, considérer l’apparition d’une coloration
comme une réaction contre l’insolation, ou liée à la formation de
spores.
80 G. BOUDIN
CHAPITRE X
1. Étude histo-chimique : matières grasses, cires, phosphates, cellulose,
nucléine (volutine).
2. Étude histologique : noyau, corpuscules métuchromatiques, grains de
volutine, zymogène.
L'étude de la constitution chimique du Bacille de Koch peut aider
à déterminer la cause des réactions spéciales de coloration du mi-
cro-organisme. L'étude cytologique permettra d'aborder la ques-
tion du mode de sporulation. |
ÉTUDE HISTO-CHIMIQUE. — Hammerschlag, sous la direction de
Nencki, étudie la composition chimique des Bacilles tuberculeux.
Ceux-ci sont traités par l’eau, puis desséchés; ils sont soumis à
l’action d'un mélange d'’éther et d'alcool. Cette opération leur fait
perdre environ 27 p. 100 de leur poids. L’extrait alcoolique et
éthéré est composé de graisse et de lécithine, sans cholestérine.
Les corps bacillaires sont traités ensuite par une solution de po-
tasse à 1 p. 100 qui dissout une matière albuminoïde caractérisée
par les réactions habituelles avec l’acide xanthoprotéique, réactif
de Millon, réactif de Tanret. Le résidu bacillaire se dissout dans
l'acide sulfurique concentré; la solution réduit la liqueur de
Fehling. Hammerschlag pense que ce résidu est une cellulose.
Les recherches de Th. Weyl portent sur des cultures de Bacille
de Koch en gélose glycérinée. Les conglomérats des cultures sont
dilués à chaud dans une lessive de soude qui se sépare en 2 couches,
une couche supérieure en gelée ressemblant à de la gélose, une
couche inférieure composée de grumeaux blanchâtres. Weyl arrive
à séparer complètement, par l’action réitérée d'une lessive de
soude diluée et chaude sur la couche supérieure mise à part, cette
couche opaque gélatineuse, des parties grumeleuses qu'elle peut
encore contenir. La couche gélatineuse, dérivée d'après Weyl du
protoplasma bacillaire se dissout en milieu légèrement alcalin; on
en précipite par l'acide acétique une substance brunâtre, insoluble
dans un excès d'acide. C'est une substance se rapprochant des gly-
co-protéides. Elle contient carbone, hydrogène, azote, soufre et du
phosphore. Quant à la couche blanche grumeleuse elle contient du
carbone, de l'hydrogène, de l'azote, du soufre; elle se dissout len-.
tement et seulement dans l'acide sulfurique concentré. Pour Weyl,
sue
MICROBE DE LA TUBERCULOSE S1
cette substance (qui se rapproche de la chitine), constitue la mem-
brane d'enveloppe des Bacilles.
Aronson traite des Bacilles tuberculeux, par l'alcool, l’éther, la
benzine, le chloroforme. Il extrait ainsi jusqu'à plus de 30 p. 100
de matières grasses. Puis par l’action de l’éther, du chloroforme
ou de la benzine bouillants, il extrait une cire. Ensuite par divers
réactifs, il extrait des protéiques. Bulloch répète les expériences
d'Aronson, et sur le Bacille de Koch et sur le Bacille acido-résis-
tant de la Timothée. Il extrait, comme Aronson, et des deux micro-
organismes, des graisses, une cire, en proportion importante; des
matières protéiques; parmi ces matières protéiques, il trouve une
proportion considérable d'un acide nucléique que Ruppel a carac-
térisé sous le nom d'acide tuberculinique. (Certains auteurs,
Brieger en particulier, ayant cherché à purifier la tuberculine
brute par filtration et précipitation par l'alcool, sont arrivés à la
suite de ces analyses à considérer la tuberculine ainsi purifiée
comme. une substance albuminoïde phosphorée, comme une
nucléine.) Bulloch constate en plus la présence de sels miné-
raux, avec prédominance de phosphates. Après l'enlèvement des
protéiques, de la graisse, de la cire, des sels, il reste une substance
contenant avec une quantité considérable d’azote, un polysaccha-
ride. L'auteur estime que ce corps à noyau azoté avec substances
pectiques est de la chitine.
Dans un travail sur les constituants minéraux du Bacille tuber-
culeux, Schweinitz et M. Dorset constatent que les cendres conte-
naient plus de 50 p. 100 d'acide phosphorique et une forte propor-
tion de soude, de chaux et de magnésie, bien que les Bacilles se
fussent développés sur des sols où aucun phosphate minéral ou
autre sel n'avait été ajouté (excepté 0.5 p. 100 de chlorure de so-
dium). « En conséquence, disent-ils, le haut pourcentage d'acide
phosphorique peut être attribué seulement au fait que ce corps et
avec lui le calcium et le magnésium sont absolument nécessaires au
développement du Bacille tuberculeux; ce germe emprunte ces
corps au bouillon de Bœuf où ils sont normalement présents. Dans
le cas de tuberculose manifeste chez les animaux, nous trouvons
souvent des nodules calcaires durs; ces nodules contiennent des
Bacilles tuberculeux. Dans d’autres cas de tuberculose guérie, où
les nodules calcaires sont absents, aucun Bacille ne saurait être
Archives de Parasilologie, XI, n° 1, 1906. 6
82 G. BOUDIN
trouvé. Il est facile d'établir une relation étroite entre ces nodules
dans la tuberculose et la cendre des germes tuberculeux. Le haut
pourcentage de graisses contenues dans le corps des Bacilles tuber-
culeux, que nous avons consigné dans des mémoires précédents,
mis en Comparaison avec le haut pourcentage de phosphate de cal-
cium et de magnésium dans les cendres donne lieu à quelques
spéculations intéressantes. On pourrait se demander, si dans la
méthode de traitement des tuberculeux par les graisses et par les
phosphates, nous ne sommes pas plutôt en train de nourrir le Ba-
cille que l'individu ». Mais peut-être, ajoutent Schweinitz et Dor-
set, augmente-t on simultanément la vitalité du Bacille et de l'être
parasité.
Shumovsky fait croître des Bacilles tuberculeux sur des mi-
lieux dépourvus de matières protéiques de composition semblable
aux milieux employés par Schweinitz et modifiés par Uschinsky,
milieux dans lesquels la glycérine s’est montrée comme indispen-
sable au développement du Bacille tuberculeux. Ainsi que nous
l'avons déjà dit, Shumovsky additionna pariois les milieux de
culture de sulfate de fer : la membrane de la colonie bacillaire se
colorait alors en jaune brun. Tout d’abord ces cultures croissaient
lentement; mais une culture à la troisième génération, qui jusqu à
la sixième semaine s'était très lentement développée, commence
alors à croître vigoureusement. Les éléments bacillaires de cette
culture deviennent granuleux:; les grains se colorent intensément
dans le protoplasma microbien faiblement teint. Une étude com-
parative de la composition du milieu de culture avant et après
l’ensemencement indique une utilisation des substances nutritives
dans les proportions suivantes : CI, 26 °/,; P?0°, 18 0/4; AzEP, 50 0;
SO", 19 o/0; glycérine, 40 °/,. La saccharose n'a pas été utilisée.
D'après Shumovsky, les Bacilles tuberculeux sont composés de
substances albuminoïdes, de graisse et de cellulose. Par l'adap-
tation du virus aux milieux liquides, dépourvus de matières pro-
téiques, les Bacilles deviennent plus pauvres en graisse et en
albumine et plus riches en cellulose.
Pour Hammerschlag, la cellulose du Bacille de Koch se constitue
aux dépens de la glycose, de la saccharose, de la glycérine, ces
substances d'autre part donnant naissance sous l'influence du mi-
cro-organisme, à une faible quantité d'alcool qui donne aux cultures
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 83
du Bacille de la tuberculose humaine, pisciaire, aviaire leur odeur
de levure.
De même pour Marpmann, le Bacille de Koch contient de la cel-
lulose vraie ; et cette substance n'existe que chez les champignons
aérobies, elle ne se forme qu'en présence de l'air.
Von Behring, dans sa très succinte communication au Congrès
de la tuberculose de Paris 1905), ditavoir retiré du Bacille de Koch
trois groupes de substances bacillaires. « Une première substance
soluble seulement dans l’eau pure, et qui possède une action fermen-
tative et catalytique. De cette substance soluble dans l'eau dérivent
les parties toxiques de la tuberculine de Koch. Cette substance, dit-
il, a toutes les qualités chromophiles, physiques et chimiques de
la VoLurine, décrite par notre botaniste de Marbourg, Arthur
Meyer. Je nomme cette substance TV.
« Pour donner une idée du pouvoir toxique de la TV, je puis dire
qu'un gramme de cette substance à l'état sec est plus puissant
qu'un litre de tuberculine de Koch.
(«2° Une substance globulineuse soluble seulement dans un sel
neutre (par exemple le chlorure de sodium à 10 p. 100) cette subs-
tance est nommée par moi TGL ; elle aussi est toxique à la façon
de la tuberculine de Koch.
(«3° Plusieurs substances non toxiques solubles seulement dans l'al-
cool, l'éther, le chloroforme, etc. » Les résultats obtenus par von
Behring quant à la composition du Bacille de Koch semblent bien
concorder avec les résultats des auteurs précédents ; il a extrait
des substances protéiques, une globuline etune substance phospho-
rée, nucléine, analogue à la volutine de A. Meyer. La tuberculine
de Koch d’après lui dérive de cette nucléine, et nous avons vu
que Brieger a donné à la tuberculine de Koch purifiée une com-
position nucléinique. Mais l'activité de la nucléine isolée par
Behring paraît résider dans son action de toxine soluble, de fer-
ment, action que ne posséderait pas la tuberculine de Koch, étant
donné son mode de préparation. Von Behring a extrait ensuite des
matières grasses (solubilité dans l’éther, le chloroforme). Mais le
Bacille tuberculeux délivré des trois groupes de substances il lui
reste un corps, désigné sous le nom de « Resthacillus ». Ce
Resthacillus ou TC « préexiste dans le Bacille de la tuberculose
comme un agent doué d'un grand nombre de qualités extraor-
84 G. BOUDIN
dinaires. Cet agent remplit, dans le Bacille tuberculeux, la fonction
de substance formative. En outre, il possède des qualités fermenta-
tives (et spécialement catalytiques). Cet agent peut fixer d’une ma-
nière élective, par contact, d’autres substances (phénomène qu'on
a nommé adsorption) ; de plus, dans certaines conditions, il pos-
sède des qualités assimilatrices. En un mot, il représente le prin-
cipe quasi-vital des Bacilles ».
Pour von Behring («dans le processus d'immunisation des bovi-
dés contre la tuberculose, la TC des bacilles est délivrée des substan-
cesaccidentelles (volutine, globuline, matières grasses); elle exerce
une action symbiotique à l'intérieur des cellules organiques, en
particulier dans les éléments cellulaires qui dérivent des centres
germinatifs du tissu lymphatique ». Mais nous ignorons ce qu'est
le Resthacillus et (les préparations convenables » que von Behring
lui a fait subir pour le transformer en substance amorphe déter-
minant après son élaboration et sa transformation par les cellules
lymphatiques des organismes l'immunisation passive contre la
tuberculose. Mais, ainsi qu’on le voit par sa communication, l’au-
teur paraît bien considérer le Bacille tuberculeux, comme un col-
loïde vivant, et lui applique une série de réactions très ménagées.
En résumé, le Bacille tuberculeux, et comme lui le Bacille acido-
résistant de la Phléole des Prés, contiennent des matières grasses,
des matières cireuses, des sels avec prédominance de phosphates de
calcium et de magnésium, des matières albuminoïdes avec une te-
neur importante de matières protéiques phosphorées, polysacchari-
des, matières pectiques, cellulose, ou d'après certains auteurs,
Weyl, Bulloch, un glycoside : la chitine (1).
(1) Cette composition chimique du Bacillen’a rien despécial. D’autres Protistes
peuvent posséder une richesse comporable en matières phosphorées calciques et
magnésiennes. La cellulose, de composition variable avec les végétaux peut être
imprégnée de différentes matières minérales : phosphates, sulfates de chaux, de
magnésie ; elle est unie étroitement à des matières protéiques : « Si l’on traite la
levure de bière successivement par la potasse, par l’eau, et par l’acide acétique,
on obtient une cellulose peu compacte (épidermose mêlée de nucléine) qui est
insoluble dans le réactif cupro-ammoniacal. L’acide sulfurique et l’eau la transfor-
ment en glycose » A. Gautier). Toutefois une telle composition du Bacille de
Koch, sa richesse en calcium et en magnésium rendent très plausible l'hypothèse
de le regarder comme un ferment actif, ces corps jouant dans les diastases le rôle
de « complémentaires aclivantes ».
C’est ainsi que G. Bertrand (Revue générale des Sciences, 30 mai 1905, p. 458)
envisage le rôle du manganèse dans la laccase ; et que J. Gaube (cours de Miné-
ralogie biologique) considère chaque zymase comme ayant une minéralisation pro-
pre en l’absence de laquelle elle reste inerte.
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 85
ETUDE HISTOLOGIQUE. — Noyau cellulaire, spores, corpuscules
métachromatiques, grains de volutine, zymogène,ce sont là autant
de formations cellulaires en connexion genétique étroite les unes
avec les autres, et qui auraient été décelées par différents observa-
teurs dans le Bacille tuberculeux. Ces observations tendent à pré-
ciser les caractères de similitude ou de dissemblance de ce micro-
organisme avec certains Protistes. Et si bien des points de sa
constitution intime restent encore très obscurs, ils ne le sont pas
pour lui tout spécialement, mais pour la généralité des micro-
organismes. Examinés après coloration, les Bacilles de Koch pré:
sentent très fréquemment un aspect granuleux: à intervalles régu-
liers, des espaces clairs au nombre de 3 à 6 alternent avec des
points fortement colorés. Cette constitution est tellement constante
qu'on la voit signalée et figurée dans tous les traités de Microbiolo-
gie. Certains auteurs, Piéry et Mandoul en particulier, ont établi
divers types de Bacille de Koch, d’après le nombre ou le rapport de
ces granulations. À côté d’un type homogène court, uniformément
coloré, ils figurent un type moniliforme représenté par une série
de grains disposés comme en chapelet et lui donnant l'apparence
d'un streptocoque. Mais si l’on fait agir sur le premier type de colo:
ration uniforme, de l’éther, du chloroforme ou des alcalis, ce type
homogène prend l'aspect moniliforme. « La coloration au Gram et
la coloration successive par le bleu de méthylène, puis par le Ziehl-
Hauser, permettent, dans certains cas, de voir que les Bacilles
homogènes possèdent une charpente centrale monoliforme plus
chromatique que le protoplasma périphérique ». En conséquence,
le Bacille tuberculeux, même du type homogène, se résout souvent
en une charpente de points chromatiques entourée d'une sub-
stance de chromaticité variable (1). La substance intermédiaire peu
colorée peut donner, en de nombreuses occasions, l'apparence de
grains, fortement réfringents, intermédiaires aux points colorés.
Koch a signalé le premier ces parties non colorées et les à consi-
dérées comme les spores du virus. « Si l’on emploie, dit Koch, de
forts grossissements, on s'assure que le Bacille sporulé de la tuber-
culose présente la même image, maisen miniature, que le Bacille
(1) Le mémoire de Piéry et Mandoul tend à établir un rapport entre les variations
morphologiques et numériques du Bacille de Koch et la séméiologie de la tuber -
culose pulmonaire (Archives générales de Médecine, 9 mai 1905, n° 19).
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sporulé du charbon. Les spores sont ovoïdes,au nombre de deux à
six dans un Pacille, limitées latéralement par une fine ligne colo-
rée. Si on examine les Bacilles sporulés sans coloration, on cons-
tate qu'ils renferment des points brillants fortement réfringents.
Il ne s’agit donc pas là de vacuoles, mais bien de véritables spo-
res » (cité d'après Straus, p. 166). Mais l'opinion qui est de
plus en plus admise, c'est que les parties non colorables du
Bacille décrites par Koch comme des spores, ne sont que des va-
cuoles intermédiaires aux grains fortement colorés. Dans les
vieilles cultures. dans les nodules caséeux, il ne subsiste, dit
Metsnikov, aucune de ces spores réfringentes comparables à celles
que la Bactérie charbonneuse montre dans les cultures âgées et
qui chez ce dernier micro organisme sont des formations cellu-
laires colorables. Et cet expérimentateur fait remarquer que les
autres parties claires du Bacille tuberculeux ne se colorent jamais,
même après action prolongée de la solution colorante, et dans les
conditions où se colorent les spores d'autres Bactéries, celles du
charbon en particulier. Maflucci observe que ces parties soi-disant
réfringentes, les spores de Koch, apparaisent plus particulièrement
chez le Bacille aviaire, et sous l'influence des hautes températu-
res. D'après lui : « c'est une erreur que de vouloir assimiler ces
espaces intermédiaires non colorés aux spores du charbon, parce
que le Bacille du charbon après sa destruction laisse des spores
libres reconnaissables, tandis que le Bacille de la tuberculose ne
laisse aucune trace de telles formations. Le Bacille du charbon
lorsqu'il est détruit est encore capable de végétabilité à cause de
ses spores, ce qui n'est pas le cas pour le Bacille de la tubercu-
lose. » Pour d’autres auteurs, les espaces clairs n’ont ni la réfrin-
gence, ni l'aspect sphérique propre aux vraies spores. Ce qui
rend la question difficile à trancher, c'est que les grains qui com-
posent le Bacille de Koch, sont, comme cela a déjà été men-
tionné, précisément colorables par les procédés qui servent à mettre
les spores en évidence, et donnent ainsi l'aspect de spores. Roux
et Nocard, en examinant des cultures de tuberculose en bouillon
glycériné et peptonisé y voient les Bacilles, «en vieillissant, se colo-
rer d’une facon moins intense.On aperçoit dans leur intérieur des
grains plus foncés; soit au nombre de deux, un à chaque extré-
mité; soit au nombre de trois, deux aux extrémités, un au milieu
MICROBE DE LA TUBERCULOSE S1
du Bacille. Un Bacille n'a quelquefois qu'un grain soit au bout,
soit avant son milieu; parfois aussi, on en voit plusieurs répartis
sur toute sa longueur. Ces grains, qui ont tout à fait l'aspect de
spores, deviennent plus nombreux et plus nets avec l’âge des cul-
tures. » Babès dit que : «les points colorés du Bacille tuberculeux
sont tantôt arrondis, tantôt cylindriques ou biconcaves; cette ap-
parence permet de supposer qu'on a quelquefois affaire à des
spores, tandis que le plus souvent les parties colorées appar-
tiennent au protoplasma des bâtonnets, situé entre les spores et
non à celles-ci. » Donc les parties claires du Bacille tuberculeux
sont considérées comme des vacuoles, et non comme des spores et
parmi les parties granuleuses et colorées, qui ne sont pas toutes de
dimensions semblables, il en est, d'après Babès, qui figurent des
grains ovoides plus gros et retenant plus énergiquement la cou-
leur après l’action des acides. Babès en colorant des cultures pures
de tuberculose par un séjour de plusieurs jours dans la solution
d'Ehrlich, en les décolorant fortement, et les recolorant à nouveau
d’une façon intense par le bleu de méthylène, a obtenu un aspect
comparable à celui de la Bactérie du charbon sporulée : « Par ce
procédé certains grains restent rouges, tandis que les bâtonnets
sont bleus ou d’un rouge pâle. Ces grains (spores?) sont ronds et
ordinairement terminaux. Un Bacille n’en possède habituellement
qu'un... » Ehrlich en décolorant par l’action prolongée du sulfure
de sodium est arrivé à décolorer tout le Bacille, sauf quelques
grains qui restaient rouges. Babès à soumis systématiquement à
cette action du sulfure de sodium « toutes les variétés de Bacilles
de n'importe quelle maladie contenant des grains. Dans ces prépa-
rations, comme dans celles de la tuberculose, les spores étaient
colorées le plus souvent en rouge et les Bacilles en bleu. D'après
ces recherches, on doit admettre que ces grains sont des spores
de la tuberculose, ou bien que la réaction des spores indiquée par
Bienstock, Neisser, Hueppe n'est pas concluante et ne permet pas
de les diagnostiquer.» Comme Ehrlich et Babès, Czaplewski avec
une culture un peu âgée de la tuberculose, fait une préparation
qu'il soumet pendant plusieurs heures à l’action du liquide de
Ziehl chaufté; on décolore par le bisulfite de soude, puis colore à
nouveau au moyen du bleu de méthylène phéniqué ; «on voit alors
à l’intérieur du Bacille coloré en bleu de petits corps ovoïdes for-
88 G. BOUDIN
tement colorés en rouge débordant beaucoup le contour du Bacille
et rappelant tout à fait les spores colorées. » Koch pensa que les
grains constatés par Ehrlich étaient des grains artificiels. Il est
évident que Koch ne pouvait admettre que les spores du Bacille
de la tuberculose pussent être colorables, puisqu'il interprétait
la virulence tuberculeuse persistante de certaines lésions nodu-
laires et caséeuses sans Bacilles colorables, justement par la pré-
sence de spores incolorables. Mais si l’on admet que les spores de
Koch ne sont que des vacuoles, et que le Bacille tuberculeux de
même que le Bacille du charbon ne sporule pas dans les lésions,
il faut attribuer alors définitivement la virulence de ces lésions
sans Bacilles acido-résistants à des formes différentes acquises
par le virus sous l'influence de l'organisme. Les auteurs qui ont
trouvé dans le Bacille tuberculeux des formations en tout sem-
blables aux spores du charbon les ont constatées dans des cultures
(Czaplewski, Babès). Il n'en est pas moins vrai qu'on peut observer
des granulations remarquables, par leur disposition régulière,
leurscontours et leur acido-résistance et dans les crachats et dans
les cultures. Un seul point permet de faire des réserves quant à la
nature réelle de spores des grains de Babès, Ehrlich, Czaplewski,
Nocard et Roux, c'est leur faible résistance à l’action de la cha-
leur. Si la grande résistance des Bacilles tuberculeux dans les mi-
lieux de culture et dans les milieux extérieurs, dans certaines con-
ditions de faible insolation, autorise à considérer les grains ovoïdes
comme de vraies spores, il n'en est pas moins vrai que ces spores
ne résistent pas à l’action d'une température de 90° prolongée pen-
dant dix minutes en milieu humide. En cela les formes durables
du Bacille de Koch diffèrent des spores des Bacilles du charbon,
du tétanos, du Bacillus subtilis, et se rapprochent plutôt des formes
durables de diverses Moisissures, Discomyces, Aspergillus, détruites
en général au-dessous de 1000.
Mais si, à cause de leur faible résistance à l’action des hautes
températures, en n'envisage pas les granules du Bacille tubercu-
leux comme des spores, on doit les envisager d’après certains au-
teurs comme des corpuscules métachromatiques, comme des
accumulations de chromatine (Babès, Straus). Ce n'est pas là beau-
coup difiérer. On sait que, d’une façon générale, outre son rôle
essentiel dans les phénomènes de bipartition et les phénomènes de
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 89
fécondation, le noyau cellulaire paraît encore avoir, d'après les
recherches de K. Nakanishi, de Schaudinn, sur les Bactéries, de
Guilliermond sur les Levures, un rôle très important dans la forma-
tion des spores. L'existence d’un noyau à contours définis, ou d'un
noyau diffus, représenté par des grains de chromatine distribués
dans les cellules des Bactéries est de moins en moins contesté. Et
pour le Bacille de Koch en particulier, K. Nakanishi aurait démon-
tré l'existence d'un noyau à contours nets, chez les Bactéries des
cultures récemment ensemencées, ce noyau étant remplacé dans
les cultures âgées par une difilusion de grains nucléaires dans le
cytoplasme des cellules bactériennes. A l'étude de la structure des
Bactéries, Nakanishi a appliqué une méthode de coloration spé-
ciale, tendant à éviter l’action trop peu ménagée sur les micro-or-
ganismes, des procédés tels que fixation au moyen de procédés
chimiques, de la chaleur, et l’action successive des opérations de
différenciation par les teintures; ilémulsionne donc les Bactéries,
dont la croissance s'est faite sur les milieux solides, dans de l’eau
distillée; pour celles qui se sont developpées en milieux liquides,
bouillonsnutritifs,il lesexamine dansles liquidesmêmesde culture.
Dans l’'émulsion, dans le milieu liquide contenant les micro-orga-
nismes, il dissout du bleu de méthylène, substance colorante la
plus généralement soluble dans les sues végétaux, bouillon, géla-
tine liquéfiée, et eau de condensation des terrains de culture ; dans
ces conditions la teinture se fixe sur les Protistes dont on veut
observerla structure. « Toutes les Bactéries prennent la subtance
colorante très rapidement et le Bacille tuberculeux qui ne prend
que très difficilement la couleur dans la préparation fixée se colore
d'après cette méthode, en peu de temps. » D'une façon générale,
la périphérie de la cellule bactérienne fixe la première la teinture,
puis les noyaux manifestent une coloration intense, puis le cyto-
plasma apparaît en bleu clair de nuance plus foncée dans la zone
externe, presque incolore dans la zone périnuecléaire.
D'après cette méthode, K. Nakanishi observe chez les Bacilles
du groupe diphtérique, et chez le Bacille tuberculeux des modes de
structure très variés, mais très comparables les uns aux autres.
Ces Bactéries peuvent être représentées d'abord par une seule cel-
lule à noyau unique, puis par une série de plusieurs cellules dispo-
sées bout à bout, de telle sorte que cette dernière formation prend
90 G. BOUDIN
un aspect filamenteux, à noyaux multiples, bien visibles, disposés
en série. Ensuite des ramifications prennent naissance sur les fila-
ments qui présentent alors un cytoplasme teint d'une façon tout
particulièrement intense; et sur le fond sombre, granuleux, de ce
cytoplasme ressortent des corpuscules, épais, discoïdes, très inten- |
sément colorés. Pour l'étude du Bacille tuberculeux, l'observateur
s’est servi exclusivement de cultures jeunes, âgées de 6 à 10 jours,
sur bouillon, sérum sanguin et agar glycériné. Dans les prépara-
tions d'une émulsion de fragments de culture de Bacilles de tu-
berculose sur milieux solides, on voit des Bacilles minces, étroits,
souvent libres, souvent inclus dans une masse glaireuse; ils fixent
rapidement la teinture. Le cytoplasme est profondément coloré.
Les extrémités de l'élément bacillaire sont souvent renflées, et plus
intensément colorées encore que le reste du protoplasme. On re-
marque également des bâtonnets de plus grande longueur, une fois
et demi plus grands que les normaux qui montrent en plus, dans
leur milieu, une troisième formation corpusculaire, aussi intensé-
ment colorée que les granules des extrémités. En s'en rapportant
aux figures données par Nakanishi, cette forme trouvée principa-
lement sur les milieux de cultures solides, correspondrait à la
forme classique du Bacille de la tuberculose. Mais sur les milieux
liquides, on observe surtout des Bacilles à forme cellulaire typique,
à noyau central bien coloré, à cytoplasme de teinte claire,
dépourvus de ligne extérieure foncée. Cette forme serait plutôt en
rapport avec les formes en lancette, formes naines décrites par
Metshnikov et Straus et prédominantes dans certaines cultures
de tuberculose aviaire. Dans de tels corps cellulaires, sont visi-
bles des gouttelettes d'un éclat comparable à celui que donnent
habituellement les gouttelettes de graisse. Le noyau est la plu-
part du temps long et ovale, et se tient constamment au centre
de la cellule. On trouve aussi très fréquemment dans un seul
corps cellulaire, deux noyaux piriformes, accolés par leur petite
extrémité, de telle sorte que tous deux, dans leur ensemble,
figurent une disposition en forme de sablier. Cette cellule à deux
noyaux est toujours plus longue que la cellule uninucléée; elle est
souvent plus ou moins étranglée au milieu. La formation d'une
cloison intermédiaire aux deux noyaux ne se produit jamais. L'au-
teur n’a pas poursuivi ses recherches sur des cultures âgées de plus
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 91
de dix jours, puisque le Bacille tuberculeux croit d'après luicomme
le Bacille diphtérique; c'est-à-dire que dans les cultures jeunes le
développement des Bacilles se fait par division nucléaire et divi-
sion cytoplasmique simultanées. Puis au fur et à mesure que la cul-
ture avance en âge, le noyau se divise plus vite que le cytoplasme;
et comme la division nucléaire s'effectue dans un seul sens, il en
résulte l'apparition de formes filamenteuses où figurent des points
très colorés, d'un diamètre sensiblement constant, séparés à in-
tervalles presque égaux par des zones claires. Mais les deux extré-
mités des filaments les plus longs sont particulièrement et profon-
dément teintes. Sur de tels filaments, l’un quelconque dans la série
des corpuscules très colorés peut se résoudre en nombreux gra-
nules, dont quelques-uns, tout en restant dans la même forma-
tion cellulaire, s'échappent latéralement, entraînant une partie du
cytoplasme dans une direction perpendiculaire à l’axe longitudinal
du premier filament. Ces formations apparaissent dans les cultures
les plus âgées. Nakanishi pense avoir ainsi observé la genèse des
formes ramifiées; il est cependant d'avis que ses observa-
tions ont encore besoin d'être justifiées par des recherches com-
plémentaires. Mais quoi qu'il en soit, au fur et à mesure que Les
cultures deviennent plus âgées, au mode de multiplication ordi-
naire des Bactéries par division, se substitue un mode de croissance
non pas diflérent, mais phase consécutive du premier mode de
genèse, aboutissant à des formes variées, fillamenteuses, ramifiées,
particulièrement renflées à leur extrémité, et dans le protoplasma
homogène desquelles s'échelonnent des grains fortement colorés.
Les extrémités renflées, comme le reste du filament, contiennent
des corpuscules fixant énergiquement la teinture. En de telles for-
mes, il n'y a rien de comparable au noyau des formes unicellu-
laires qui se présentent dans les cultures peu âgées en milieux
liquides. Dans les Bactéries jeunes, teintes au bleu de méthyle,
le noyau n'apparaît pas toujours bleu, mais souvent est coloré
en rouge. Dans les formes filamenteuses, les corpuscules sont tan-
tôt colorés en bleu d'une façon homogène, tantôt n'ont pris la cou-
leur qu’à la périphérie, tandis que la partie centrale manifeste une-
réfringence considérable. Ces corpusecules se colorent comme
des spores puisqu'ils prennent également la coloration de Neis-
ser. Nakanishi discute la nature de ces corpuscules métachro-
92 G. BOUDIN
matiques. D'après lui, ils ont certains caractères des spores des Bac-
téries; vraisemblablement ils représentent une masse de proto-
plasma condensé autour d'un noyau, et ainsi peuvent aboutir à la
formation des spores. Nakanishi a constaté, en effet, que chez tou-
tes les Bactéries, les spores sont toujours constituées par une masse
nucléaire centrale, entourée de matières de réserve. Mais d’une part
l'observateur n'a pas constaté de la part de ces corpuscules une
grande résistance sous l'influence des températures élevées et, d'au-
tre part, il n'en a jamais observé la germination.
Dans une autre partie de son travail, il donne les résultats de son
étude sur les Spirilles et en particulier sur le Spirillum volutans.
Nous devons parler ici de ce dernier micro-organisme, puisqu'on
aurait trouvé chez le Bacille tuberculeux une substance cellulaire
de composition identique à la volutine du Spirillum. Nakanishi a
étudié le développement de ce Protiste sur des milieux peptonés;
dans les caltures jeunes, les Spirilles ont une forme très mobile,
avec cils, et sont particulièrement riches en corpuscules ronds,
très intensément colorés. Ces derniers n'ont aucune régularité de
nombre, de dimensions, de disposition. Mais ils disparaissent au
fur et à mesure que la culture vieillit, de telle sorte que dans les
milieux âgés on ne trouve plus que des formes immobiles à proto-
plasma homogène teint profondément sur la périphérie avec noyau
central allongé. Pour l’auteur, et il ne donne là qu'une opinion
personnelle, ces corpuscules, qui fixent si énergiquement la tein-
ture, et colorés en bleu par le bleu de méthylène, correspondent à
des matières de réserve qui disparaissent au fur et à mesure que
le terrain de culture s'épuise.
Mais a-t-on le droit d'homologuer les granulations du Bacille de
Koch et les corpuscules métachromatiques du Spirillum volutans?
Ainsi que Guilliermond le fait remarquer, il n'y a point dans le
Bacille de la tuberculose de corpuseules marquant une métachro-
masie nette, c'est-à-dire capables de prendre directement cette co-
loration d’un rouge plus ou moins sombre par un grand nombre
de colorants bleus. Il semble cependant que dans la méthode de Na-
kanishi, seuls, les noyaux des cellules existant dans les cultures
jeunes manifestent une métachromasie nette, tandis que les grains
du Bacille tuberculeux et les corpuscules du Spirille marquent
surtout cette propriété de fixer énergiquement la teinture, sans mo-
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 93
dification de teinte. D'autre part, on peut rappeler la richesse en ma-
tières nucléiques et en matièresgrasses du Bacille de Koch.C'est pré-
cisément une composition analogue que présentent les organismes,
riches en corpuscules métachromatiques. A. Meyer désigne sous
le nom général de grains de volutine des corpuscules possédant une
affinité considérable pour les colorants, présents en plus ou moins
grand nombre dans les cellules de diverses Bactéries, Algues, té-
tes sporifères des Moisissures, Levures, et tout spécialement nom-
breux dans le Spirillum volutans, d'où ce nom de volutine. Pour
Mever, la volutine serait une substance composée d'acide nucléique
et d'une base non albuminoïde. Malgré cette composition, il pense
que les grains chromophiles sont des formations indépendantes du
noyau, d’origine cytoplasmique exclusive. Ce ne seraient que des
matières de réserve, comme le sont les huiles, les hydrates de car-
bone, les polysaccharides, substances d’ailleurs dans un rapport si
étroit avec les grains de chromatine que Fischer considère ceux-
ci comme uniquement formés d'une condensation d'un glycogène
auquel il donne le nom d'anabénine (à cause de la richesse par-
ticulière en cette substance d’une Algue Nostoccacée du genre Ana-
bena). Pour Guilliermond, d’après ses observations sur le Saccharo-
myces Ludwigi et sur les Oscillaires, les grains de volutine consti-
tuent bien des matières de réserve et contribuent d’une façon très
importante à la formation des spores. Mais cet auteur se sépare de
A. Meyer en faisant des corpuscules métachromatiques des produc-
tions d'origine nucléaire. De plus d’après beaucoup d'observateurs,
Schaudinn et F. Mesnil entre autres, dans les différents Protistes où
il n'y a pas de noyau central à contours définis, il y a dans le cy-
toplasme des grains fixant les colorants nucléaires et qui sont un
appareil nucléaire diffus. Ces recherches sont en accord avec celles de
Guilliermond sur l'origine nucléaire des grains de volutine. [n'est
pas pour ces auteurs de micro-organismes sans noyau ;ilexiste, ou
concentré, ou divisé en multiples grains dans le corps cellulaire.
Dans les phénomèmes de sporulation, les grains nucléaires épars
se groupent en amas plus ou moins considérables et s'entourent
d'une mince couche de cytoplasme et de membranes résistantes.
Et ainsi peut-être justifiée l'opinion de Nakanishi sur les analogies
de la composition des corpuscules métachromatiques et des spores:
présence constante d'un noyau entouré de matières de réserve.
9% G. BOUDIN
D'une façon générale, chez tous les micro-organismes, le noyau
unique, ou à l’état diffus, joue un rôle comparable dans les phéno-
mènes de division, de sporulation, de concentration des substances
de réserve. De plus, pour d’autres auteurs, les grains de chroma-
tine épars, d'origine nucléaire, seraient des grains de zymogène,
ou proenzyme servant à la production de ferments, enzymes de
dédoublement, oxydases, etc. La masse nucléaire serait donc en-
core le pôle actif autour duquel s'effectuent les phénomènes
d'échanges diastasiques. C'est de ce dernier point de vue, rapport
des grains métachromatiques avec la formation des enzymes, et
dans le cas particulier, de toxalbumines, que von Behring semble
avoir considéré le Bacille tuberculeux pour définir la substance nu-
cléique qu'il en a extraite: «substance soluble seulement dans l'eau
pure, et qui possède une action fermentative et catalytique. De cette
substancesoluble dans l’eau dérivent les partiestoxiques de la tuber-
culine de Koch. Cette substance a toutes les qualités chromophiles,
physiques et chimiques, de la volutine, décrite par notre botaniste
de Marbourg, Arthur Meyer. Je nomme cette substance TV. »
Il ne semble guère douteux, et comme il résulte des recherches
de Nakanishi, et des différentes recherches sur la composition chi-
mique de la tuberculine ancienne et du Bacille tuberculeux, que
cette volutine de von Behring n'ait un rapport étroit avec les grains
de chromatine du Bacille tuberculeux; mais von Behring ne dit
pas dans quelles conditions de culture il a pu obtenir le maximum
d'activité diastasique de ces grains, qui dans les conditions de déve-
loppement habituel des Bacilles de la tuberculose et, étant donnée la
lenteur du développement des colonies, la richesse des Bacilles en
matières grasses, semblent plutôt tendre à la formation de spores.
CHAPITRE XI
Les réactions chromatiques du Bacille tuberculeux ; leur variabilité.
A laquelle des substances contenues dans le Bacille tuberculeux,
et dans le Bacille de la Phléole faut-il rapporter les réactions spé-
ciales de coloration? Dans les recherches d'Hammerschlag, ni la
substance albuminoïde extraite par la potasse, ni la cellulose ne
résistent séparément à la décoloration par les acides. Hammers-
chlag en a conclu que la matière qui présente la réaction colorante
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 95
caractéristique est une sorte de combinaison d’albuminoïde et de
cellulose. D'après Weyl, la substance qui présente les colora-
tions du Bacille de Koch, se dissout lentement dans l'acide sulfu-
rique, mais contient de l’azote. Cette substance constituante de la
membrane d'enveloppe du Bacille serait donc formée par union
d'une cellulose à un radical azoté. D'après Koch, la substance colo-
rable et acido-résistante serait un acide gras. Borrel, comme il l’a
fait déjà avec Roux, « dégraisse totalement les Bacilles en les trai-
tant d’abord par une solution faible d'HCI portée à l’ébullition ;
les Bacilles ultérieurement desséchés sont traités par le xylène à
chaud dans un appareil à épuisement. L'action préalable de l'acide
peut être remplacée par un chauffage à sec, au four à flamber, vers
1400-1500; épuisés ensuite par le xylène à chaud, les Bacilles perdent
complètement leur propriété acido-résistante ;.… étalée sur lame, la
substante grasse totale extraite par le xylène se colore très éner-
giquement et la coloration résiste aux acides. »
Pour Aronson et Bulloch, la propriété de résistance à l’action dé-
colorante des acides n’est pas due précisément à une graisse, mais
à une cire; après action de l’éther, du chloroforme, de la benzine
durant plusieurs jours, les Bacilles tuberculeux sont encore colo-
rés; mais l'alcool, l'éther, le chloroforme bouillants enlèvent une
matière cireuse qui est puissamment acido-résistante et ne se laisse
pas teindre par les réactifs habituels de la graisse, par exemple le
réactif Soudan II. Bulloch attribue à cette même substance cireuse
la résistance à la décoloration du Bacille de la Timothée.
. Pour E. Klein, la résistance à l'acide du Bacille de Koch n’est pas
due à une enveloppe de graisse. En ensemencant, sur sérum de
cheval coagulé, des Bacilles tuberculeux, cultivés en série sur agar
glycériné et dépourvus de virulence, on voit apparaître les colonies
à la fin de la première semaine sous formes de petits points gris
blanchâtres, d'aspect brillant, à centre saillant. Entre le 6me et le
12me jour, Klein fait des préparations par impression de ces colonies
et les colore d’après la méthode d'Ehrlich; il constate que beaucoup
des stries onduleuses de la préparation n'ont pas résisté à la déco-
loration par l'acide nitrique au tiers. Ce fait fut observé également
par Ledoux-Lebard : (Lorsqu'on étudie, dit-il, la structure des colo-
nies sur des préparations colorées à la fuchsine (Ziehl), puis lavées
à l'acide et à l'alcool dilués, on observe presque toujours, même
96 G. BOUDIN
sur des cultures très jeunes, des Bacilles non colorés dont on
remarque la présence, si l’on a soin de faire varier l'éclairage et
l'ouverture du diaphragme. » E.Klein observant ce phénomène d'une
facon constante, sur des Bacilles de virulence très affaiblie se de-
mande si la faible résistance à l'acide peut avoir quelque rapport
avec le faible pouvoir pathogène. Il constate d'abord que les Bacilles
tuberculeux longtemps entretenus en série sur des milieux artifi-
ciels, agar glycériné par exemple, non seulement perdent leur
virulence, mais encore se développent plus rapidement sur tous les
milieux, agar glycériné, sérum, lait, et que les cultures jeunes
montrent de nombreux éléments bacillaires non acido-résistants
(Klein confirme ainsi les résultats de Krompecher, sur la dispa-
rition du pouvoir pathogène des Bacilles tuberculeux entretenus
longtemps en milieux artificiels). En second lieu, l’auteur voit que
le défaut d’'acido-résistance est également manifesté par les cul-
tures jeunes de tuberculose virulente. Dans tous les cas, après la
deuxième semaine les Bacilles sont presque tous acido-résistants.
Seules les cultures dans le lait manifestent une acido-résistance
constante et permanente. Puisque le Bacille tuberculeux acquiert
la réaction d'Ehrlich sur des milieux totalement dépourvus de corps
gras, comme le sérum gélatiné, il doit cette réaction d'après Klein,
à certaines substances chimiques, absentes chez les éléments bacté-
riens jeunes et qui se forment au bout d'un certain temps dans leur
protoplasma.
Pour C. Feistmantel également, la résistance à l'acide est indé-
pendante des corps gras que peut posséder le Bacille tuberculeux.
Il répète l'expérience de Unna tendant à révéler, par l’action de la
solution de Flemming, la présence des corps gras dans la Bactérie.
- Il vérifie la propriété acido-résistante d'une culture jeune en série,
sur agar, mais n'arrive pas à imprégner les éléments bacillaires
par le Flemming. Mais d’autres cultures peu âgées, traitées de la
même façon, pour contrôle, montrèrent des éléments bacillaires
complètement noirs. Ensuite il essaye de teindre le Bacille de Koch,
d'après la méthode de Sata, qui a coloré des articles filamenteux
d'actinomycose au moyen du réactif colorant de la graisse, le
Soudan IIT. Le résultat fut encore négatif. Carl Ramus a cependant
pu colorer très souvent des Bacilles tuberculeux avec le Soudan III.
Mais cette réaction colorante, d'après cet auteur, n'est pas cons-
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 97
tante. En conséquence, et étant donnée la variabilité des réactions
colorantes, C. Feistmantel estime que les Bacilles sont redevables
de leurs propriétés de coloration et de leur résistance à l'ac-
tion des acides, à une combinaison spéciale des substances qui les
composent, susceptible de modifications avec leurs conditions
de vie, et non pas à une seule de ces substances. Quoi qu'il
en soit, les recherches des auteurs précédents montrent que les
Bacilles tuberculeux peuvent être teints par les réactifs colorants
de la graisse, mais que cette réaction n'est pas constante.
Von Behring, après avoir traité les Bacilles par l’eau, une solution
de NaCI à 10 p. 100, par les dissolvants des graisses, alcool, éther,
chloroforme, obtient finalement le « Resthacillus » « qui possède
encore la formeetles qualités tinctoriales des Bacilles tuberculeux ».
Schumowski ayant extrait la graisse et les matières albuminoïdes
du virus tuberculeux constate que la résistance à la décoloration
par les acides est encore manifestée par le résidu des Bacilles. Il
attribue cette propriété à la cellulose. Après cette analyse des di-
vers travaux, il est bien difficile de se prononcer. Les diverses
solutions proposées sont celles-ci : la résistance à l'acide est due à
une graisse (Borrel), à une cire (Bulloch, Aronson), ou bien à une
combinaison d'un polysaccharide avec une substance azotée
(Weyl, Hammerschlag), ou à une cellulose (Shumovski). D'autre
part, on peut mettre parfois en évidence des graisses chez le Bacille
tuberculeux par les réactifs colorants des substances grasses, tels
que la solution de Flemming et le Soudan III; le Bacille ne
pourrait-il dans son évolution posséder des acides gras se modifiant
d'une façon plus ou moins régulière par oxydation, ici colorables
par les réactifs des graisses et peu acido-résistants, là manifestant
une considérable résistance à la décoloration par les acides?
Quelles que soient les conclusions, elles semblent devoir s'appliquer
aussi bien aux Bacilles tuberculeux, qu'au Bacille de la Timothée,
qu'au Discomyces farcinicus dans certaines conditions de sa vie
(GC. Feistmantel). Comme Berestnev, Feistmantel a teint les fila-
ments de certaines cultures d’Actinomyces farcinicus au moyen
de la solution phéniquée de Ziehl. Il a remarqué en outre une ré-
sistance très marquée des filamentsainsi colorés à l’action prolongée
des acides ou de l'alcool. L'auteur cherchant à se rendre compte
de la raison de cette propriété vit qu’elle se conservait longtemps
Archives de Parasilologie, XI, n° 1, 1906. 7
98 G. BOUDIN
si les cultures restaient exposées à la température de la cham-
bre, tandis qu'exposées à la température de l'étuve, en l’es-
pace de quelques jours, les filaments très acido-résistants se résol-
vaient en grains colorables directement par le bleu de méthylène.
Mais, d'autre part, il est certaines considérations qui tendent
à montrer que les réactions de coloration, et en particulier la ré-
sistance à la décoloration par les acides, ne sauraient être le
résultat d’une réaction chimique, d'une combinaison spécifique de
la matière colorante avec une seule substance définie du corps
microbien. Les colorations des matières organiques par les cou-
leurs d'aniline seraient, d'après les recherches de la physico-
chimie, essentiellement des phénomènes de teinture. Il n'y aurait
pas combinaison, mais fixation de la couleur sur la substance
à colorer; et les lois de ces phénomènes de teinture semblent
pouvoir être ramenées aux lois de l'électrisation de contact. Puis-
qu'il y a là phénomène en partie physique, et de même que
l'opalescence peut être réalisée et par des suspensions de ma-
tières grasses et par des matières albuminoïdes, a priori plusieurs
substances différentes et des combinaisons de substances peuvent
réaliser les conditions physiques identiques pour la fixation éner-
gique d'une même teinture. Et c'est ainsi que Spina, en ajoutant à
des cultures vivantes de différentes Bactéries soit des graisses, soit
du tannin, voit que les Bactéries acquièrent les propriétés de colo-
ration du Bacille tuberculeux avec résistance aux acides. Bienstock
cultive sur gélose additionnée de beurre des microbes comme Ba-
cillus subtilis, Bacillus anthracis et constate que ces Bactéries se déve-
loppant en milieu additionné de graisse présentent les réactions de
coloration du Bacille de Koch. « Colorés pendant dix minutes dans
le liquide chauffé de Ziehl, ces divers Bacilles résistent énergique-
ment à la décoloration par l'acidenitrique au 1/3.» La conclusion de
Bienstock est que la réaction d'Ehrlich ne saurait être considérée
comme caractéristique du Bacille de Koch, celui-ci empruntant
uniquement cette réaction à un revêtement de graisse qui se forme-
rait autour, de lui dans la sécrétion des cavernes et dans les masses
caséeuses.
Gotistein constate que les Bacilles du cérumen ont les mêmes
réactions de coloration que les Bacilles du Smegma. Comme Biens-
tock, il ajoute aux milieux de culture de différents Bacilles, beurre,
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 99
lanoline, et constate la propriété acido-résistante consécutive de
ces micro-organismes. Pour Gottstein cependant les Bacilles de la
tuberculose se différencient des Bacilles du smegma et des Ba-
cilles du cérumen en ce que ces derniers, soumis à l’action à chaud
d'une lessive de soude additionnée de 5 p.100 d'alcool, sont débar-
rassés de leur revêtement graisseux. La graisse est en effet sapo-
nifiée par la solution alcaline et dissoute dans l'alcool et l'eau.
Les Bacilles de Koch restent colorés au contraire après ce traite-
ment par lessive de soude chaude additionnée d'alcool. Leur réac-
tion colorante ne saurait donc être imputée à une enveloppe grasse.
Nous avons vu en eflet que les dissolvants des corps gras même
après une action prolongée à froid n’enlevaient en rien au Bacille
tuberculeux sa propriété acido-résistante. Mais l’étude des divers
procédés de coloration nous a montré combien cette propriété est
variable; tantôt on peut employer les acides minéraux, tantôt au
contraire il faut employer les acides organiques faibles; enfin
parfois une véritable couche grasse peut être mise en évidence au-
tour du Bacille tuberculeux; si bien que le terme acido-résistant
n'est pas encore précisé.
Au Congrès international de la tuberculose, en octobre 1905,
Bezançon et Philibert « divisent les Bacilles acido-résistants en
deux catégories : les uns sont fortement résistants, acido et
alcoolo-résistants, et cela même héréditairement; les autres
(cérumen, smegma etc...) résistent faiblement, ne sont pas alcoolo-
résistants et n'ont leur propriété que dans des milieux particuliers.
Ces derniers, disent les auteurs, sont pour nous médecins les plus
fréquemment rencontrés, et peuvent même coexister (gangrène
pulmonaire), avec le Bacille de Koch. Or, on arrive en cultivant des
microbes quelconques sur des milieux gras, à leur communiquer
des propriétés acido-résistantes faibles (B. diphtérique).» P. Cour-
mont, de Lyon, répond « que la distinction établie par MM. Bezan-
çon et Philibert en deux catégories d’acido-résistants n’est guère
valable, parce que tous les intermédiaires peuvent être obtenus
entre les Bacilles fortement ou faiblement acido-résistants. « Si
on compare une culture classique de Bacilles tuberculeux aux
Bacilles acido-résistants les différences sont très nettes. Si l'on
compare ces acido-résistants aux cultures homogènes de Bacilles de
Koch, dès lors les différences s’eflacent. »
100 G. BOUDIN
En réalité, c'est bien en examinant les variations morphologiques
et biologiques du Bacille tuberculeux, qu'on peut arriver à cette
conclusion, déterminée alors par des faits expérimentaux, mais qui
ressort déjà des diverses recherches venant d'être citées, à savoir la
grande relativité des réactions chromatiques, puisqu'elles peuvent être
manifestées à un degré plus ou moins accentué par diverses subs-
tances,ou combinaison de substances, instables elles-mêmes dans le
cours de la vie du micro-organisme. Il est prouvé actuellement qu'on
peut transformer par la méthode deJ. Ferran, le Bacille de Koch très
fortement acido-résistant en des variétés de moins en moins résis-
tantes aux acides, et à tel point qu'on arrive à pouvoir colorer
directement et rapidement les éléments bacillaires par les couleurs
basiques d’aniline.
Certains faits d'expérience et d'observation nous conduisent
à penser qu'une telle désintégration est réalisée dans l'organisme.
F. Bezancon, comme cela a déjà été mentionné, invoque de telles
modifications du parasite dans ces cas nombreux de tubercu-
lose à diagnostic difficile, presque impossible, puisque les Ba-
cilles ne peuvent être décelés, ni par les procédés de teinture,
ni par l'inoculation au Cobaye. En telle occurrence, en ajoutant
aux milieux de culture où vivent les Bacilles tuberculeux, trans-
formés par la méthode de Ferran, de la graisse ou une solution de
tannin, ne pourra-t-on leur conférer à nouveau l’acido-résistance ?
Et des Bacilles tuberculeux transformés par la vie parasitaire ne
pourront-ils récupérer à nouveau une certaine acido-résistance,
plus ou moins accentuée, s'ils viennent à se développer en des
milieux riches en matières grasses? Ou bien indépendamment
même d'un développement en ces milieux spéciaux, additionnés de
graisses ou d'acide tannique, la variété non acido-résistanteet mobile
du Bacille de Koch, peu fixée dans cet état, ne peut-elle, dans les
cultures, recouvrer avec le vieillissement, le caractère de Bactérie
immobile et la propriété de résister d’une façon de plus en plus
marquée à la décoloration par les acides”? Les travaux de J.Ferran,
confirmés en partie par les recherches de S. Arloing et P. Cour-
mont et surtout par celles de J. Auclair, peuvent nous renseigner
à ce sujet.
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 401
CHAPITRE XII
Races bacillaires ciliées et mobiles, non acido-résistantes (J. FERRAN 1897,
S. ARLOING 1898 et P. CourMonT 1909, J. Aucrair 1903).
Nous plaçant au point de vue historique, nous n'avons fait jus-
qu'ici que des allusions aux travaux de J. Ferran, et dans la mesure
même, très restreinte encore, où on y a recours actuellement
pour rendre compte des obscurités nombreuses que laisse la
théorie du parasitisme exclusif du Bacille de Koch. La première
communication de Ferran, faite à l’Académie des Sciences de Paris
en date du 6 août 1897 ; c'est une note relative aux aptitudes sapro-
phytiques du Bacille de Koch, et à sa parenté avec le Bacille du
typhus et le Coli-bacille. Si l'on résume les mémoires nombreux
qui ont suivi cette communication, nous voyons que les travaux
de Ferran comportent ces trois séries de recherches :
4° Les Bacilles de Koch, Bactéries immobiles et végétant en
conglomérats plus ou moins denses sur les milieux solides et
liquides, à réaction acide, peuvent être convertis en Bacilles mo-
biles et ciliés, se tenant en suspension homogène dans les milieux
liquides alcalins.
2° Dans les crachats des tuberculeux, existe toujours en abon-
dance, à côté du Bacille de Koch, et même avant que celui-ci
n'apparaisse, un autre Bacille tuberculogène, non acido-résistant,
pouvant être identifié avec le Bacille mobile et cilié, obtenu en
cultures pures à partir du Bacille de Koch.
9° Le Coli-bacille isolé des excréments de différents animaux :
Homme, Chien, Chat peut, par inoculations expérimentales répé-
tées, en vie parasitaire, acquérir la propriété tuberculogène et les
réactions chromatiques du Bacille de Koch. Ainsi, «(la tuberculose
est une variété de Coli-bacillose ; le Bacille de Koch n’est qu'un Coli-
bacille modifié par les changements chimiques qu'il détermine
dans les tissus infectés. »
C'est en ensemençant en série le Bacille de Koch dans des
bouillons chaque fois plus pauvres en glycose, en glycérine, et en
peptone, et en agitant quotidiennement les cultures, que Ferran 4
obtenu des races émulsionnables à éléments bacillaires ciliés et
mobiles. Ces microbes se développent alors à la température ordi-
naire, acidifient les milieux lactosés, donnent la réaction de l'indol
102 G. BOUDIN
dans les milieux contenant des peptones, et en outre offrent la par-
ticularité de se laisser agglutiner par le sérum des tuberculeux.
Par ces caractères, cette race microbienne d'origine tuberculeuse
authentique se rapproche du Coli-bacille. De tels changements
s'opèrent lentement, par sélection et par adaptation successives aux
milieux de moins en moins concentrés ; la réaction chromatique de
la Bactérie acido-résistante et sa virulence spécifique (formation de
nodules) diminuent ainsi progressivement, jusqu'à ce que («Le clas-
sique Bacille de Koch demeure définitivement converti en un vul-
gaire Coli-bacille». Les cultures de ce nouveau microbe, développées
sur un sérum liquide de Cheval, de Mouton, de Bœuf, à la tempé-
rature du laboratoire et injecté à doses fractionnées et repétées dans
le tissu cellulaire sous-cutané de l'abdomen d’un Cobaye, déter-
minentd'abord del’œdéme, puis un phlegmon. Les Bacilles isolés de
la sérosité de l’æœdème ou du pus, semés en sérum liquide donnent
une race microbienne qui produit une substance dialysable, à
odeur de sperme humain, et qui possède les réactions que Pæœhl
attribue à la spermine : le chlorure d’or en solution à 1 p. 1000
n’est pas réduit sous la forme de poudre de couleur violette par
addition à la solution aurique de magnésium en poudre. «Il
semble, dit Ferran, que ce soient les leucocytes accompagnant la
semence quiexaltent sa fonction spermigène.» Pour rendre à la va-
riété coli-bacillaire dérivée du Bacillede Koch, maintenant race sper-
migène,son action tuberculogène,ilfautexaltersa virulenceau moyen
d'inoculations sériées de Cobaye à Cobaye, puis (l'inoculer maintes
fois à un même animal, jusqu'à ce que celui-ci meure et dans ce cas
il sera possible de trouver dans ses organes des nodules tubercu-
leux. » Aux lésions inflammatoires phlegmasiques, ont donc suc-
cédé les lésions tuberculiformes ; mais en même temps que s’opèrent
ces changements, les Bactéries se transforment. (Une fois que dans
les tissus enflammés ont apparu les tubercules, une recherche
patiente, dit Ferran, montrera déjà une ou autre Bactérie, possé-
dant les réactions chromatiques propres au Bacille de Koch; c'est
qu'alors le Bacille primitif a adjoint à sa constitution chimique les
acides gras qu'il ne possédait pas avant, devenant ainsi le prototype
des Bacilles dits acides, ou ce qui revientau même, devenant Bacille
de Koch. Quand cela ne se produit pas chez le premier Cobaye de
la série, cela se présente sûrement chez quelqu'un des suivants, à
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 103
condition de les infecter par l’inoculation de pus caséeux, ou de
pulpe de tubercule provenant du Cobaye antérieur de la même
série. » Ces résultats ne se superposent-ils pas à ceux obtenus par
Toussaint, Cornil et Watson Cheyne, Malassez et Vignal”? Le rapport
des nombreux microbes pseudo-tuberculeux polymorphes avec le
Bacille de Koch semble bien être réel; l'hypothèse de Toussaint sur
les variations morphologiques du microbe de la tuberculose semble
ainsi bien vérifiée. D'après Ferran, les phases principalesde la vie
de ce micro-organisme seraient celles de Coli-bacille banal, Bacille
spermigène, Bacille tuberculogène, Bacille de Koch acido-résistant.
Dans l'ordre de succession qui va de la phlegmasie prétuberculeuse
aux lésions nodulaires, les variétés coli-bacillaires, s'adaptent de
plus en plus à la vie endonucléaire dans les leucocytes.
Et dans ces variétés il en est qui, sans être des Bactéries acido-
résistantes, « possèdent la faculté d'infecter d'emblée le noyau des
leucocytes et provoquent, comme elles, la formation de pus caséeux,
la suppuration des ganglions, la cachexie, la tuberculisation cons-
tante des viscères abdominaux et thoraciques, en un mot, sans
être acides, se conduisent comme le Bacille de Koch ». Elles exis-
tent toujours dans les crachats de tuberculeux, et sans que celui-ci
soit nécessairement présent, puisqu'il n’est que le stade ultime de
la variété spermigène. « En démontrant la présence constante des
variétés spermigènes chez les tuberculeux, conclut Ferran, en
démontrant aussi leur abondance et leurs aptitudes saprophytiques,
on fait perdre au Bacille de Koch le droit d'être considéré comme
l'agent exclusif de la tuberculose spontanée de l'Homme. »
De tels résultats obtenus avec le type des Bactéries spécifiques,
furent dès le début très critiqués. Pour la plupart des auteurs, les
comptes rendus des revues de Bactériologie en font foi, les races
saprophytes cultivées par Ferran à partir du Bacille tuberculeux
n'avaient rien à faire avec lui; elles n'étaient que le résultat de
contaminations. Mais en 1898, pour se livrer à l'étude sur le phé-
nomène de l’agglutination, et sans connaître la technique de
Ferran, S. Arloing confirme en partie les résultats de ce der-
nier auteur. Arloing obtient sur pomme de terre cuite, impré-
gnée d’eau glycérinée, des cultures faciles à émulsionner.
Parmi ces cultures, il en est dont les colonies, au lieu de pousser
en voile à la surface de l'eau glycérinée qui vient baigner la
104 G. BOUDIN
pomme de terre, tendent à se désagréger dans la profondeur du
liquide. Par très légère agitation des tubes de culture, les éléments
bacillaires forment émulsion dans l’eau glycérinée. Des ballons de
bouillon glycériné, ensemencés par les Bacilles ainsi divisés, sont
agités jusqu'à plusieurs fois par jour; des colonies s'y développent,
qui troublent la masse du liquide de culture; celle-ci est compo-
sée d'organismes mobiles: «les Bacilles sont isolés, rarement acco-
lés, droits ou légèrement courbés, souvent granuleux, un peu plus
gros que les Bacilles contenus dans les crachats tuberculeux et
présentent la réaction caractéristique aux procédés de coloration de
Ziehl et d'Ehrlich. » Avec les émulsions homogènes du Bacille de
Koch, S. Arloing et P. Courmont ont obtenu des résultats positifs
d'agglutination par lesérum de sujets tuberculeux (1). Mais, d'après
ces auteurs, dans le phénomène d'agglutination, il faut tenir grand
compte de la variabilité morphologique et histo-chimique des
éléments bacillaires des races émulsionnées. En effet, Arloing et
P. Courmont, qui sont parvenus comme Ferran à faire végéter le
Bacille tuberculeux dans du bouillon non glycériné, notent au fur
(1) On tend à admettre que le développement du pouvoir agglutinant du sérum
sanguin sur des suspensions homogènes d’un microbe donné résulte de l’intro-
duction dans l'organisme vivant, de substances Spécifiques; dans cette théorie,
le phénomène de l’agglutination serait une réaction due à des corps chimiques
spéciaux, appartenant en propre à chaque micro-organisme et désignés sous le
nom général d’agglutinines. Mais le séro-diagnostic est établi au moyen des sus-
pensions homogènes des microbes, c’est-à-dire au moyen de solutions colloïdales,
dont les lois qui fixent les relations des corpuscules microbiens (toxalbumines et
corps microbiens eux-mêmes) avec le liquide intergranulaire de culture sont
plus des rapports physiques que des rapports chimiques. Dans ces conditions, si
aux cultures homogènes, physiquement identiques de Coli-bacille, de Bacille
typhique, de Bacille de Koch, on ajoute des corps différents (soit électrolytes,
soit colloïdes, ou mélange de ces corps), ceux-ci du fait d’un état physique très
comparable, d’une charge électrique équivalente, pourront amener une rupture
d'équilibre des particules colloïdales, une précipitation des suspensions micro-
biennes. D'autre part, l’action coagulante peut être également en rapport avec
la stabilité de la suspension colloïdale traitée. Sans connaître actuellement
d’une façon précise, les raisons précises pour lesquelles le sérum des individus
malades ou vaccinés est souvent très agglutinant pour les suspensions micro-
biennes, on peutcomprendre cependant dans l'hypothèse du mécanisme physico-
chimique de l’agglutination, pourquoi cette réaction d'ordre surtout physique
n’est pas exclusive. En pratique, en effet, du sérum de malades atteints de septi-
cémie par Proteus vulgaris, d'animaux inoculés expérimentalement avec ce
microbe peut être très agglutinant des suspensions homogènes de Bacille typhi-
que; le sérum de typhiques, de sujets atteints d’actinomycose, ou traités depuis
quelque temps par le mercure agglutinent les cultures homogènes du Bacille de
Koch. Dans les conditions actuelles tout au moins, il semble donc difficile d’ap-
parenter ou de différencier deux agents pathogènes, en se basant sur la pré-
sence ou l'absence de la réaction d’agglutination.
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 105
et à mesure des ensemencements successifs la disparition progres-
sive de la propriété de résister à la décoloration par les acides.
« L'expérimentateur qui emploie ces cultures, disent les auteurs,
doit connaître la variabilité de leurs caractères pour ne pas se
laisser tromper et prendre pour des cultures impures celles où les
Bacilles auraient perdu une partie de leurs propriétés classiques.
Le retour de ces derniers à la normale par vieillissement sera tou-
jours un critérium à employer ». Arloing et Courmont disent en
effet plus haut dans leur mémoire : («Si nous laissons vieillir la
culture (où le Bacille se laisse facilement décolorer par les acides),
nous verrons Celui-ci récupérer peu à peu ses caractères classi-
ques: il résistera aux décolorants (méthode de Ziehl ou de Hauser),
alors qu'il n'avait pas ce caractère pendant les premiers jours
de son développement. » Enfin, il est remarquable que les Bacilles
tuberculeux non acido-résistants, d'origine humaine, réense-
mencés en milieux solides, forment une membrane plissée, mame-
lonnée, simulant des colonies de tuberculose aviaire.
Les résultats obtenus par Arloing et Courmont vérifient donc en
partie les recherches de Ferran. En 1903, J. Auclair fait paraître un
mémoire « sur l'aptitude du Bacille de Koch à se transformer en
saprophyte ». L'auteur se sert tout d'abord de culture liquide de
tuberculose sur bouillon de Bœuf et de pomme de terre additionné
de sel marin, de peptone, de sucre et de glycérine. Un fragment de
la colonie d’une telle culture pure de Bacilles tuberculeux humains
est écrasé contre la paroi interne d’un tube à essai contenant un
bouillon stérilisé de même composition. Bouillon et Bacilles
sont mélangés intimement. Les cultures sont mises à l'étuve à:
38-400; elles sont agitées une ou deux fois par jour. Du huitième
au douzième jour, après une légère floculation des agrégats bacil-
laires, ou bien toutes les parties solides de certaines cultures
tombent au fond du tube, forment dépôt, tandis que le bouillon qui
surnage reste clair; ou bien, en d’autres tubes, le bouillon au début
tout à fait limpide devient peu à peu légèrement et uniformément
opalescent vers le vingtième jour : « Du fait de légères secousses
imprimées à ces tubes, des ondes se produisent dans le liquide
donnant lieu à un moirage fort élégant. » Le Bacille de Koch est
alors transformé; et par ensemencements en série, on obtient une
suite de cultures homogènes semblables à la culture d'origine. Les
106 G. BOUDIN
premiers réensemencements toutefois peuvent échouer : « La vita-
lité du Bacille homogène est encore bien délicate, dit Auclair; et il
m'est arrivé plusieurs fois d'échouer dans une tentative de réense-
mencement. Tant que le nouveau microbe n'est pas acclimaté au
bouillon de culture par excellence de ses ancêtres, il semble garder
une grande fragilité. Mais l'accoutumance définitive une fois faite,
les cultures sont faciles à obtenir et cela sur des milieux de plus
en plus pauvres en glycérine et en sucre, et même entièrement
dépourvus de ces deux substances. » Comme l’auteur le fait remar-
quer, sa technique comparable dans ses grandes lignes à celle de
Ferran, en diffère surtout par le point de départ; tandis que Ferran
habitue les Bacilles tuberculeux à se développer en des milieux de
plus en plus pauvres en sucre et en glycérine, Auclair ne supprime
ces deux substances que quand la transformation du Bacille de Koch
en saprophyte est déjà complète.
Le nouveau Bacille pousse rapidement sur les milieux usuels,
bouillon, agar, pomme de terre, gélatine, avec une grande rapidité.
Il se développe bien à l’étuve à 370. A la température ordinaire, la
culture s'effectue moins rapidement. Ce Bacille tuberculeux sapro-
phyte, une fois adapté, revêtindéfiniment les mêmes caractères sur
les différents milieux. « La ressemblance des cultures en bouillon
avec celles du microbe de la fièvre typhoïde est parfois si parfaite
que lorsqu'on place côte à côte les cultures en bouillon de ces deux
microbes, ilestimpossible même à un œil exercé de ne pas les con-
fondre, surtout les premiers jours de leur développement. » Les Ba-
cilles des cultures homogènes sont très mobiles; ils possèdent des
cils longs et nombreux, qui, « par leur enchevétrement autour de
l'élément microbien, forment un lacis souvent inextricable. » Pla-
cés bout à bout, ils figurent des Strepto-bacilles; sur agar, ils
forment des filaments dont la largeur peut atteindre dix à quinze
fois celle du Bacille de Koch. Ils se colorent directement par les
teintures basiques d'aniline, prennent ou ne prennent pasle Gram,
ne résistent pas à l’action décolorante des acides minéraux. Et ici
Auclair note ce fait très important, observé par lui dans la phase de
transformation du Bacille acido-résistant en saprophyte; à ce mo-
ment, dans les préparations colorées au Ziehl, décolorées, puis
recolorées au violet de gentiane, « le même micro-organisme peut
être coloré en violet par une extrémité, tandis que par l’autre, ou
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 107
dans une certaine partie de son étendue, il a gardé la coloration
rouge caractéristique. Cette image prouve nettement la trans-
formation du Bacille de Koch en Bacille tuberculeux homogène ».
Mais bien que le Bacille homogène ne prenne pas la réaction d’Ehr-
lich, les extraits chloroformé et éthéré de cette variété microbienne,
colorés par le Ziehl et traités par l'acide azotique au 1/3, résistent
à la décoloration, même sous l'influence prolongée de l'acide.
D'après Auclair, la matière grasse, disposée en membrane très
mince autour du Bacille mobile lui a été retirée par les procédés
chimiques. Mais faut-il croire ici nécessairement à une disposition
en membrane de la graisse autour de la Bactérie: les microbes ne
peuvent-ils contenir à l’intérieur de leur cytoplasme des matières
grasses, susceptibles d'être retirées de même par l'éther ou le
chloroforme, et acido-résistantes ? Quoi qu'il en soit, on ne saurait
admettre que le Bacïlle cilié et mobile provient d'une contamination
des cultures, puisque certains des éléments microbiens peuvent, à
certain moment, participer par leurs réactions chromatiques, à la
fois du Bacille de Koch et du Bacille mobile ; et, en plus, il faudrait
expliquer pourquoi l'impureté est toujours la même; pour-
quoi, s’il s'agissait d'un saprophyte banal, habitué aux différentes
variations des milieux, les premiers réensemencements de ce
saprophyte sont si inconstants.
La variété saprophyte du Bacille de Koch n'a pas de virulence
pour le Cobaye ou le Lapin ; les Bacilles paraissent être rapidement
détruits dans les tissus. Mais après inoculations répétées et espa-
cées, les animaux après une période de plusieurs mois meurent
de cachexie et sans lésions nodulaires dans les organes.
Par inoculations expérimentales, Auclair n'a pu effectuer la
transformation inverse du Bacille saprophyte en Bacille de Koch.
« Faut-il forcément en conclure, dit l’auteur, que les échantillons
de Bacilles homogènes que je possède sont tout à fait différents de
ceux obtenus par le médecin de Barcelone? Je ne le pense pas.
Peut-être ai-je seulement poussé plus loin leur transformation ;
peut-être leurs aptitudes saprophytiques sont-elles plus solidement
fixées. Et ce qui donne quelque crédit à cette manière de voir,
c'est la remarque faite par J. Ferran lui-même, qui a écrit que l'on
redonnait d'autant plus difficilement sa virulence au Bacille homo-
gène, qu'on le cultivait depuis plus longtemps sous cette nouvelle
108 G. BOUDIN
forme. » Ferran, dans une communication postérieure au mémoire
d'Auelair, insiste à nouveau non pas sur les caractères définis, d'une
variété saprophyte du Bacille tuberculeux, mais sur la variabilité
extrême des caractères des races saprophytes du Bacterium tuber-
culosis. Tandis que J. Auclair est arrivé à caractériser une race
microbienne strictement aérobie et liquéfiant la gélatine, Ferran
a pu obtenir une variété incapable de liquéfier la gélatine, mais à
la fois aérobie et anaérobie. Il fait remarquer qu'en des circonstances
tout à fait identiques, Auclair a obtenu, ici, des races homogènes, et
là a constaté la persistance des caractères de Bactérie immobile,
végétant en conglomérats sur les milieux de culture : («Je ne me
lasse pas de répéter, dit-il, dans mes publications, que la ver-
satilité du chimisme de cette Bactérie est telle, que les influences
mésologiques, pour insignifiantes qu'elles paraissent, la modifient
profondément. » Il pense enfin que le Bacille de Koch, ayant servi
de point de départ au D''Auclair, était déjà doué d’une virulence
extrêmement faible pour que l’on püt obtenir de ses descendants
les effets tuberculogènes.
Ces recherches de Ferran et Auclair nous montrent toute la
plasticité presque indéterminable, capricieuse et décevante de la
substance vivante, sur laquelle quelques ions peuvent agir de façon
considérable, empêchant ou favorisant la végétation. De même que
certains auteurs n'ont pu obtenir la transformation du Bacille de
Koch en Bacille pisciaire, de même d'autres expérimentateurs ont
échoué dans la transformation en variété saprophyte ciliée et mo-
bile. Et de même ceux des bactériologistes qui ont obtenu des
résultats positifs ne les ont pas toujours atteints en se conformant
à une technique constamment identique à elle-même. Et dans les
deux séries d'expérimentations, transiormation en Bacille pisciaire,
transformation en Bacille mobile, d'une part Lubarsch, avec un
Bacille tuberculeux humain modifié par passage sur la Grenouille,
Klein avec des Bactéries de Koch systématiquement écartées de toute
vie parasitaire, dépourvues de virulence, végétantrapidement dans
les milieux artificiels, ont pu leur rendre une virulence spécifique,
le premier auteur par les inoculations expérimentales en série, le
second par cultures sur lait; d'autre part, Ferran à pu rendre à
des races saprophytes homogènes leur propriété tuberculogène par
inoculations expérimentales en série.
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 109
Demême qu'au furetàa mesure desensemencements surles milieux
de culture appauvris et soumis à l'agitation fréquente, la vitalité
du microbe semble faiblir tout d’abord extrêmement pour s'adap-
ter ensuite à une végétation en milieux alcalins, de même dans
les inoculations sériées de Bataillon et Terre, seront constatées la
transformation successive de la Bactérie tuberculeuse humaine, en
Bactérie pisciaire, Zooglée, Strepto-bacille, colorables directement
par les couleurs basiques d'aniline et finalement la réduction
extrême de la vitalité du micro-organisme. Mais ces races micro-
biennes progressivement détruites, hydrolysées, par les humeurs
et les tissus vivants des animaux où elles sont introduites pour-
raient cependant, au fur et à mesure que faiblit chez l'animal ses
activités diastasiques d'assimilation, récupérer, d'après J. Ferran,
partie de leurs caractères ancestraux.
Pour cet auteur, la scissiparité des Microbes en général, dans
nos milieux de culture artificiels n'est qu'un mode inférieur,
transitoire de multiplication, dans le cyele de vie de végétaux d'une
hiérarchie supérieure dans l'échelle de l’organisation, et pourvus
de sexualité. En particulier, dans la transformation des colonies
conglomérées du Bacille de Koch en suspensions homogènes, l’agi-
tation paraît avoir un rôle prépondérant. N'y a-t-il pas là exacte-
ment phénomènes de dilution, d'hydrolyse et ensuite équilibre plus
ou moins stable des corps microbiens avec le liquide de culture ?
On pourrait peut-être appliquer à ces transformations les considé-
rations suivantes de J. Perrin sur la théorie des solutions colloï-
dales : «.… Pour chaque état du milieu s'établit d’ailleurs un équi-
libre différent. Si l’on admet que les charges électriques des par-
ticules colloïdales sont dues à des ions (H +, ou OH —) répandus
dans le liquide et qui se fixent sur elles, on verra que lorsqu'une
particule est assez grosse et que le nombre des ions est assez grand
pour qu'elle arrive à en fixer plusieurs, elle porte là en elle une
cause interne de dislocation qui peut en causer la bipartition. Ainsi
peuvent se résoudre en éléments plus fins, sous l'influence d'un
changement de milieu, les colloïdes à grosses particules. Les phé-
nomènes de bipartition si fréquents chez les éléments de la cellule
vivante trouvent là un modèle qui peut avoir avec lui d'étroites
analogies. » Et si véritablement la matière vivante peut de plus en
plus être envisagée comme formée de systèmes colloïdaux, nous
110 G. BOUDIN
devons alors considérer comme possible le retour des micro-orga-
nismes vers des états ancestraux, l’ensemble de leurs réactions
physico-chimiques étant réversibles.
Auclair tout en s'en tenant uniquement aux faits qu’il a obser-
vés ne nie pas la transformation possible du germe prétuberculeux
de Ferran en Bacille de Koch, et se demande si cette dernière Bac-
térie «n'est pas le Bacille homogène transformé devenu virulent et
adapté à une vie parasitaire? » Les oscillations dans la forme du
microbe acido-résistant en vie parasitaire ne sont-elles pas démon-
trées tantôt par sa présence, tantôt par son absence apparente en des
lésions qui gardent une virulence spécifique? Mais les faits ap-
portés par Ferran méritent toute réflexion; pour cet auteur la tuber-
culose n'est bien qu'une variété de coli-bacillose. Dans l'hypothèse
transformiste, le Coli-bacille paraît être davantage un état biolo-
logique propre à plusieurs espèces, qu'une espèce déterminée ;
nombre de Bactéries acido-résistantes peuvent être transformées en races
homogènes. On peut penser que le Coli-bacille n'est « le plus
vulgaire et le plus abondant des saprophytes » que précisément
parce qu'il est l’une des phases terminales dans un processus
commun de désintégration de celles des Moiïsissures qui sont le
plus nombreuses dans les milieux extérieurs, susceptibles de
pénétrer dans l'intestin des animaux, et d'y être plus ou moins
hydrolysées par les sues digestifs.
En conséquence, s'il était bien démontré qu'il n'y a pas un
Coli-bacille, mais des formes coli-bacillaires voisines, s'il était
bien démontré que celles-ci peuvent arriver à produire chez les
animaux, résorbées de l'intestin où elles sont toujours présentes et
dans un état de désintégration plus ou moins avancé, des lésions
de tuberculose, si les résultats obtenus par Ferran étaient confirmés,
il faudrait alors concevoir différentes variétés de tuberculose, les
unes déterminées par les états encore différenciés de micro-orga-
nismes divers: Bacilles acido-résistants, Aspergillus, certains Disco-
myces, les autres produites par des formes inférieures, devenues
comparables entre elles, d'espèces microbiennes. Et ces dernières,
d'abord très sensiblement différentes dans leur vie saprophytique
en dehors de l'intestin, pourraientacquérir dans une vie parasitaire
commune, chez l'Homme, les Oiseaux, les Vertébrés à sang froid, la
propriétéacido-résistante etcertaines facultés pathogènesnouvelles.
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 11
On comprend dès lors l'importance que certains auteurs ont
donnée à ces formes si polymorphes, à fonctions fermentatives si
variables, englobées sous les dénominations générales de Bacté-
rium termo, Proteus vulgaris dans la genèse de la tuberculose, ou
d'une façon plus précise, dans la genèse des phlegmasies prétuber-
culeuses, et de la phtisie cousécutive. (II s’agit ici d'une erreur
d'interprétation, dit Artault, erreur que commettent beaucoup
de médecins pour qui la tuberculose et la phtisie ne font qu’un,
tandis qu'en réalité la première prépare quelquefoisla seconde, et
encore dans des proportions infimes, comme le prouvent les obser-
vations de tant de médecins, rapportées dans la thèse de Knopf en
particulier... Tout dans les allures du Bacille de Koch rappelle les
saprophytes ; il détruit les matières vivantes, toutes Les fois qu’elles
manquent de résistance et se laissent entamer, soit par faiblesse
congénitale, soit par surmenage ou dénutrition, comme les Moi-
sissures décomposent les substances organiques vieillies et expo-
sées à l'humidité et au manque d'air... Ces allures placent
donc la tuberculose en dehors du cadre des maladies infectieu-
ses, à évolution fixe, pour en faire une maladie de misère phy-
siologique, ce qui la rapproche singulièrement des maladies
constitutionnelles. » C'est bien là la théorie de la tuberculose,
maladie sociale ; l'alimentation défectueuse, les troubles de secré-
tion des ferments digestifs sous des influences diverses, l’alcoo-
lisme en particulier, les fermentations intestinales secondaires, la
résorption des micro-organismes, saprophytes de l'intestin, dans
les tissus, les phlegmasies consécutives répétées, coagulation et
nécroses locales, tel serait le mode de développement de la phtisie.
Les recherches de J.Ferran, et les travaux de Toussaint, Malassez
et Vignal, Bataillon et Terre, quileur donnent appui, sont les seules
jusqu'ici qui précisent cette conception de la tuberculose, maladie
sociale.
CHAPITRE XIII
Résumé de la première partie. Dans quel groupe de Bactéries faut-\l
ranger le micro-organisme de la tuberculose?
A quel groupe de Schizophytes doit-on rattacher le Bacille de la
tuberculose ? Il est habituel de lui donner « une-place à part » par-
mi les Bactéries.
112 G. BOUDIN
Si nous résumons les principaux caractères morphologiques et
biologiques de ce micro-organisme, nous voyons qu'il présente des
caractères de coloration qui ne lui sont pas particuliers, mais
peuvent être présentés par un nombre considérable de Bactéries
saprophytes, tel le Bacille de la Timothée, tels des Champignons
inférieurs comme certains Discomyces. Ces caractères de coloration
ne sont pas stables; ils se modifient en même temps que le Bacille
tuberculeux évolue, est désintégré dans sa vie parasitaire : des lé-
sions tuberculeuses restent virulentes, où il est impossible de
déceler par les réactions classiques de coloration aucun Bacille de
Koch, et ce fait est fréquemment observé.
Le Bacille tuberculeux détermine chez les animaux surtout des
lésions nodulaires, comme en déterminent les spores de nom-
breuses Moisissures : Aspergillus, Discomyces farcinicus, Discomyces
Eppingeri, Sterigmatocystis, Mucors. Les Bacilles de Koch, et les
spores des Aspergillus stérilisés dans de certaines conditions, déter-
minent encore des lésions nodulaires, comme en déterminent les
particules inertes : ces tuberculoses ne sont pas réinoculables en
série. Elles ne progressent pas; les nodules ont une tendance
moindre à évoluer vers la caséification. S'il est des Bactéries,
Strepto-bacilles, Zooglées, capables de déterminer des lésions de
tuberculose, il apparaît comme probable que beaucoup de ces
micro-organismes ont des relations très étroites avec le Bacille de
Koch.
Non seulement le Bacille de la tuberculose perd dans les orga-
nismes qu'il a envahis ses réactions de coloration, mais encore il
n'y sporule pas, sauf peut-être dans les poumons et cavernes pulmo-
naires, dont l’état hygrométrique et les conditions de température
et d'aération peuvent être favorables au développement de nom-
breux micro-organismes. Les formations décrites autrefois comme
spores ne sont que des vacuoles; et puisque le virus se multiplie
lentement dans sa vie parasitaire et tend souvent à être hydrolisé,
il faut définitivement attribuer la persistance de la virulence des
lésions sans Bacilles de Koch, à des variations morphologiques de
ces Bacilles.
Dans les cultures, le Bacille de la tuberculose, tant dans les mi-
lieux liquides que les milieux solides, se développe en colonies plus
ou moins confluentes. Les micro-organismes semblent se dévelop-
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 113
per de mieux en mieux, à mesure qu'ils s'adaptent aux milieux
artificiels. Ils sont réunis en conglomérats plus ou moins denses,
parce que les éléments bacillaires sont réunis très étroitement les
uns aux autres, par l'intermédiaire d'une substance unissante. Les
Bacilles sont dépourvus de cils et par suite de mouvement; ils pos-
sèdent des endospores. Si l’on adopte la classification de Migula,
on doit donc classer le virus tuberculeux dans la famille des Bac-
tériacées, genre Bacterium, et non dans le genre Bacillus où sont
rangés les micro-organismes à cellules mobiles, munies de cils vi-
bratiles. Mais les endospores du Bacterium tuberculosis présentent,
à l'encontre des spores des autres Bactéries, une faible résistance à
l'action des températures élevées: elles se rapprochent ainsi des
formes durables des Champignons inférieurs. De plus, les carac-
tères de culture, développement en conglomérats isolés, en saiïllies
verruqueuses et filaments périphériques radiés, ou en membranes
plissées rapprochent sous un aspect commun le Bacterium tubercu-
losis et certains Actinomyces.
En vie parasitaire, le Bacille de Koch se modifie et peut arriver
à perdre toute végétabilité (Kitasato-Straus). Comme conséquence
secondaire, si l’on offre au micro-organisme ayant subi l'in-
fluence, nocive pour lui, des organismes qu'il a envahis, et pour ré-
cupérer sa vitalité, des milieux au sérum sanguin, les milieux
communs utilisés pour la généralité des microbes, en réalité on ne
fait que lui présenter encore des conditions défavorables, dysgé-
nésiques. Sans doute sa virulence estainsi maintenue ou renforcée.
De même, Chauveau rendait la virulence au Bacille du charbon
atténué, en le plaçant en de mauvaises conditions de développement
par emploi de cultures au sang de Cobaye, puis au sang de Mou-
ton. Mais si l'on donne à la Bactérie tuberculeuse des milieux
sucrés, glycérinés, de composition végétale, tous milieux à réac-
tions faiblement alcaline et plus souvent acide, et utilisés par
Roux et Nocard, Sander, Kimla, Poupé et Vesely, le développe-
ment des colonies est plus abondant, et l’acclimatement plus ra-
pide. La lenteur, l'irrégularité du développement peuvent en partie
s'expliquer par des transformations préalables plus ou moins im-
portantes, subies par le Bacille au cours d’une vie parasitaire plus
ou moins longue. Par les conditions de son développement, le
Bacille de Koch s'éloigne des Bactéries et se rapproche des Moisis-
Archives de Parasitologie, XI, n° 1, 1906. 8
414 G. BOUDIN
sures qui préfèrent les milieux acides, aux milieux alcalins. De
plus, il n’exige pas de milieux de culture spéciaux, rappelant par
leur constitution le sol des organismes où il a vécu en parasite; des
milieux artificiels composés de sels minéraux, additionnés de gly-
cérine et même de mannite lui permettent de se développer.
Les tuberculines, produits artificiels, n’existant pas dans les cul-
tures vivantes du micro-organisme, ne sauraient intervenir en rien
pour différencier des bactéries vivantes. |
La température de 38°, qu'exige le Bacille de Koch pour son dé-
veloppement, ne paraît être qu'un optimum, que ne réclament pas
certaines variétés de Bacilles tuberculeux. Maffucei a pu cultiver
le Bacille tuberculeux aviaire entre des limites très éloignées de
température. Le Bacille des Vertébrés à sang froid se développe
bien sur des milieux de culture soumis à des températures relati-
vement basses : 200-250. Et même en admettant que le Bacille de la
tuberculose humaine ne soit capable de végétabilité qu'à des tem-
pératures élevées, cela ne saurait être un argument contre la pos-
sibilité d'une vie saprophytique : toute cette série des innom-
brables Moisissures : Aspergillus, Penicillium, Sterigmatocystis,
Mucor, ont une vie saprophytique indéniable; mais se développent
aussi aux températures de 37°, 39, et 45° avec vigueur, et comme
si les hautes températures accéléraient leur croissance. Et l’action
pathogène primitive de beaucoup de ces germes n'est plus contes-
table actuellement.
Enfin très fréquemment, dans les cultures âgées ou tout au moins
dans les cultures où se développent des Bacilles n'ayant pas été
soumis depuis un Certain temps à la vie parasitaire, apparaissent
des formes ramifiées. On invoque fréquemment l'opinion de ceux
qui les ont observées en premier pour en faire des formes d'invo-
lution, c'est-à-dire de dégénérescence : «jusqu'à plus ample in-
formé, dit E. Macé, il paraît préférable de se rallier à l'opinion de
Metchnikoff et de faire de ces formes de simples déviations invo-
lutives du type normal. »
Précisément Metshnikov insiste sur le sens précis qu'il donne
a l'expression, formes d'involution : « Quoiqu'il n'y ait pas
de doutes, dit-il, que les formes des Bactéries de la tuberculose,
allongées et ramifiées, appartiennent à la catégorie des soi-
disant formes involutives, on n'entend en rien affirmer par cela
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 4115
qu'elles représentent des états de dégénérescence. » Et l’auteur
exprime cette opinion qu'il s’agit là de formes indiquant un
retour vers un état ancestral supérieur.
Cet état ancestral est-il loin de la forme bacillaire? Mais cette
forme bacillaire elle-même ne paraît être qu'un état très transi-
toire dans la vie parasitaire du micro-organisme de la tuberculose.
Du point de vue théorique, comme du point de vue pratique,
il est de toute importance de connaître la forme normale du Ba-
cille tuberculeux hors les conditions de vie parasitaire. Il y a inté-
rêt à savoir d'où il essaime, à connaître les transformations qu'il
peut subir au cours d’adaptations successives à des conditions de
vie différentes; au lieu de renforcer sa virulence par des conditions
de développement trop artificielles, il y a intérêt à diminuer cette
virulence, commé l'a fait déjà J. Ferran, pour pouvoir obtenir,
selon les principes de la méthode pastorienne, des variétés atté-
nuées susceptibles d'être utilisées comme vaccins.
Les recherches que nous allons maintenant résumer pourraient
paraître nouvelles. En réalité, le premier travail qui discute la
place systématique du Bacille de la tuberculose date de 1884. Les
mémoires qui se sont succédés les uns aux autres depuis cette
époque, traitant du même sujet, forment un ensemble très homo-
gène, d'où il ressort nettement que le Bacterium tuberculosis appar-
tient au groupe des Hyphomycètes, au groupe des Champignons
de Moisissures.
La forme de Bactérie, sous laquelle on convient généralement
d'envisager le virus, n'est elle-même que transitoire; l’Hypho-
mycète de la tuberculose réalise, en effet, les différentes formes
microbiennes : Bactérie immobile, Strepto bacille, Bacille mobile,
formes qui résultent d'une vie parasitaire anormale pour l'Hyÿpho-
mycète, ou d'une vie particulière en différentes conditions de
culture.
Cette conception évolue parallèlement à la théorie qui tend à
considérer le Bacille de Koch comme un parasite strict; elle ne
pourra sembler nouvelle que si elle l'emporte sur cette dernière
théorie plus généralement admise.
416 G. BOUDIN
DEUXIÈME PARTIE
I. — Formes ramifiées du microbe de la tuberculose, dans les cultures
et en vie parasitaire.
II. — Formations actinomycosiques en vie parasitaire.
CHAPITRE I
Formes filamenteuses et ramifiées du Bacille aviaire (A. PETRONE, 1884 ;
E. MersaniKov, 1887; E. KLEIxX, 1889; Marruccr, 1892).
En 1884, Angelo Petrone, de Naples, constate dans l’'exsudat de
méningites tuberculeuses, des formes variées du Bacille de Koch,
et à ce sujet exprime cette opinion : «Je crois que le Bacille de la
tuberculose appartient à un grade élevé dans l'échelle des Schizo-
mycètes.. et qu'il est un Microbe intermédiaire entre le groupe
des Champignons microscopiques et celui des Schizomycètes. »
En 1887, E. Metshnikov fait paraître un mémoire sur le rôle
phagocytaire des cellules géantes dans la tuberculose. L'auteur
étudie préalablement l'agent spécifique de l'infection. Le parasite
de la tuberculose, d’après ses observations, peut ne pas toujours
être constitué par des Bacilles de dimensions constantes. Dans les
crachats de phtisiques, et dans la rate tuberculeuse du Moineau, il
a vu les bâtonnets s'allonger en filaments minces, assez longs, con-
tournés, montrant à leur intérieur des parties non colorées, inter-
médiaire à des points du protoplasma bactérien ayant énergique-
ment retenu la teinture, Dans les cultures, les formes du Bacille
sont particulièrement variées. La forme en bâtonnet est sans doute
la forme prédominante; mais à côté d'elle, on peut constater la
présence de formes microbiennes, de dimensions très réduites,
d'aspect ovalaire, en lancette. Ces dernières formes composent par-
fois des cultures entières, développées sur sérum sanguin gélatiné
ou agar glycériné, poussées à 36° ou à 420. Les Bacilles ovalaires
montrent en leur centre un seul point plus intensément coloré que
le protoplasma environnant. De plus, en cultures âgées, appa-
raissent des formes ramifiées, à extrémités terminales renflées.
Par exposition des cultures aux hautes températures : 430, 449, ces
formes apparaissent plus tôt et se développent plus rapidement;
c'est ainsi que, 20 jours après l’ensemencement, apparaissent
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 117
parmi les éléments bacillaires habituels, des formes longues,
filamenteuses. Ces filaments se colorent souvent intensément;
leurs extrémités sont renflées en massue. Dans les cultures plus
âgées, vieilles d'environ trois mois, on voit se développer la
série des formes suivantes : sur les
filaments qui viennent d’être décrits,
des bourgeons apparaissent en plu- }
sieurs endroits, formant des rameaux, À
d'où s’échappent encore des ramifi-
cations secondaires. Branches prin-
cipales et rameaux ont les mêmes
réactions colorantes que les Bacilles sé DR de DU 0
tuberculeux. Les colonies où de telles nodule pulmonaire d’un La-
formes ramifiées sont nombreuses De ne ai
conservent leur aspect macroscopique térieure de l'œil. —2, Bacilles
caractéristique. La forme bâcillaire se de CRIE Dre
n'est donc pas un état parfait, mais
seulement un stade dans le cycle de développement d'un micro-
organisme filamenteux, et les formes ramifiées font partie du
cycle de développement normal de ce micro-organisme. (« Quoi-
qu'il n’y ait point de doute que les formes du Bacille de la tuber-
culose, allongées en filaments, ramifiées, appartiennent à la
catégorie des formes dites d’involution, on ne veut pas du tout
affirmer, dit Metshnikov, par cette expression, qu'elles représen-
tent des états de dégénérescence. » Ce sont des formations de
retour vers un stade supérieur.
D'après Methsnikov, on ne saurait considérer les parties claires
des Bacilles comme des spores, comparables aux spores si résis-
tantes du Bacille du charbon. Étant donnée la faible résistance du
Bacille tuberculeux aux hautes températures, et l'impossibilité de
colorer ces parties claires, il n’y a là que des vacuoles. On doit plu-
tôt considérer comme spores, des grains très résistants à la décolo-
ration, de forme régulièrement sphérique, en nombre variable
avec la longueur des éléments bacillaires. En conséquence, Metsh-
nikov pense qu'on ne doit pas rattacher le microbe de la tubercu-
culose au genre Bacille, qui n’est qu'un stade de dévelopement que
peuvent réaliser nombre de micro-organismes tout à fait dissem-
blables. Étant donnée l'enveloppe solide qu'il parait posséder, le
118 G. BOUDIN
micro-organisme tuberculeux doit plutôt être rattaché à un genre
spécial, le genre Sclerothrix, dont il représente l’une des espèces;
il mérite le nom de Sclerothrix Kochi.
Dans la deuxième partie de son mémoire, E. Metshnikov étudie
l'influence des cellules géantes sur le microbe tuberculeux. Il s'est
servi pour ses expériences du Lapin, et d'un autre Rongeur parti-
culièrement abondant aux environs d’Odessa, lé Spermophile. Ce
dernier animal, très réfractaire à la tuberculose, est inoculé dans
la cavité péritonéale, tandis que le Lapin, animal plus sensible est
inoculé dans la chambre antérieure de l'œil. L’expérimentateur a
employé pour ces injections des cultures très virulentes, dévelop-
pées sur agar glycériné. Chez le Spermophile, les cellules géantes
se développent par suite d'un bourgeonnement tout à fait particu-
lier (1) du noyau de cellules épithélioïdes, tandis que, chezle Lapin,
la cellule géante ne résulte pas de ce bourgeonnement du noyau,
(1) Le mode de développement caryokinétique de la cellule géante, chez le
Spermophile, les figures que donne Metshnikov relativement aux phases de cette
division nucléaire sont tout à fait singulières. Les phénomènes de mitose des cel-
lules épithélioïdes ont, d’après l’auteur : (cette propriété remarquable, qu’ils
ne sont représentés que par un seul aster, tandis que les asters doubles aussi
bien que le sectionnement du protoplasma sont toujours absents ». Les extrémi-
tés des filaments de l’aster s’épaississent à leur périphérie. Cette apparence leur
donne un aspect en massue. Ces rayons ont une chromatine homogène. Puis
leur extrémité devient transparente, etse fragmente. Chacun des rayons de l’aster
évolue donc ainsi : par épaissement progressif et périphérique, par fragmenta-
tion du renflement terminal en masses hyalines, irrégulières, qui finalement
deviennent ovales ou sphériques : ce sont les noyaux de la cellule géante. Un tel
mode de division nucléaire, les conditions exceptionnelles dans lesquelles il a été
observé, les figures même qui s’y rapportent laissent des doutes sur la nature
de ces phénomènes, en tant que divisions caryokinétiques; mais ces formations
radiées, avec massues périphériques qui se fragmentent réalisent précisé-
ment l’aspect, le mode de groupement, l’évolution fréquente des grains à
massues d’actinomycose dans les tissus. L'observation que nous nous permettons
de présenter ici, si elle est exacte, s’applique exclusivement au cas particulier.
En aucune façon nous ne sommes autorisé à nier les phénomènes de caryo-
cinèse des cellules du tissu conjonctif, comme des cellules des tissus épithéliaux
sous l'influence d'infections à marche essentiellement lente comme la tubercu-
lose et la syphilis. Bien au contraire, de nombreux faits d'observation générale,
tels ceux cités par H. Claude dans sa monographie : Cancer et tuberculose, les
relations invoquées aujourd’hui entre la syphilis et certains néoplasmes, l’aspect
nettement néoplasique de différentes tumeurs qu’on hésite à rattacher à un-
germe microbien : Bactérie ou Champignon, doivent attirer l’attention sur ces
phénomènes de mitose à côté de foyers infectieux bactériens ou mycosiques.
Bien démontrés, ils rendraient très légitime cette hypothèse du développement
indirect des tumeurs cancéreuses soit sous l'influence de l’irritation locale ménagée,
soit sous l'influence des troubles généraux de nutrition (fixation et suppression
des enzymes d’assimilation réalisant la sénescence) que déterminent très certaine-
ment toutes les infections lentes.
ET À
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 119
caractéristique chez le Spermophile, mais de la fusion de plusieurs
cellules épithélioïdes dont les noyaux ne montrent pas de modifi-
cations notables. Quoi qu'il en soit, on peut suivre dans les cellules
géantes du Lapin et surtout du Spermophile, les modifications
subies par les Bacilles.
Ou bien ceux-ci disparaissent sans laisser de traces; ou bien, très
fréquemment,augmentent de dimensions, s'enveloppent d'une
3
Fig. 2, d’après E. Metshnikov. — 1, cellule géante d’un nodule tuberculeux du
foie d’un Spermophile mort 21 jours après l'injection intrapéritonéale; b,
Bacilles tuberculeux normaux; 7%, formes résultant du sectionnement du
noyau cellulaire. — ?, cellule épithélioïde d’un foyer tuberculeux du même
Spermophile; m, Monasterform : division du noyau sans formation de deux
asters et sectionnement consécutif du protoplasma; db, Bacille tuberculeux nor-
mal. — 3, partie d’une cellule géante d’un nodule de la rate d’un Spermophile,
tué trois mois après l’inoculation ; €, amas de Bacilles tuberculeux, réunis
les uns aux autres par la substance capsulaire. — 4, cellule géante d’un no-
dule tuberculeux du Lapin; d, Bacilles tuberculeux épaissis, avec substance
capsulaire; n, Bacilles tuberculeux normaux.
capsule d'apparence jaunâtre, non colorable par les réactifs habi-
tuels du Bacille tuberculeux. Progressivement les éléments bacil-
laires arrivent à disparaître dans cette enveloppe, et ne peuvent
plus être colorés.
Ces nouvelles formations ont alors une couleur naturelle jaune
ambrée et peuvent se réunir très étroitement les unes aux autres
pour former des amas compacts, de consistance solide. Ces phéno-
mènes d'encapsulement qui ne se produisent jamais dans les cul-
tures, sont déterminés d’après Metshnikov par l’action directe des
120 G. BOUDIN
phagocytes. L'auteur présente les conclusions suivantes : le fait de
la disparition rapide des Bacilles dans les cellules géantes, con-
trastant avec leur persistance et leur lente évolution dans les cul-
tures; le fait que les micro-organismes ne laissent jamais de spores
dans les lésions; enfin les phénomènes d'encapsulement des Ba-
cilles ; la réunion des éléments bacillaires, ainsi épaissis, transior-
més, les uns aux autres par l'intermédiaire de la capsule; la for-
mation consécutive d'amas compacts, d'apparence jaune ambrée,
de consistance solide, très résistants à l’action des acides forts et de
la potasse, tous ces faits démontrent l’action destructive des phago-
cytes sur le Bacille de Koch. Au Congrès international d'Hygiène
de Londres, en 1891, Metshnikov rapporte des résultats compa-
rables, à la suite d'expériences sur le Meriones, petit Rongeur vivant
en Afrique; cet animal est particulièrement résistant à la tubercu-
lose. Il peut vivre fort longtemps après inoculation de virus tuber-
culeux dans la chambre antérieure de l'œil. Dans les cellules géantes
des nodules tuberculeux présentés par ces animaux sacrifiés au
bout de six à sept mois, les Bacilles sont fréquemment inclus en
des enveloppes concentriques, de consistance solide, non colora-
bles, et imprégnées de phosphate de chaux.
En 1889-1890, E. Klein, de Londres, dans un rapport sur l'étiologie
de la diphtérie, mentionne le développement en filaments ramifiés
du micro-organisme de Læffler. Et à ce sujet, il expose qu'il à fait
des constatations identiques sur le Bacille de Koch. En des cultures
sur agar glycériné et bouillon de Bœuî développées à 37°, âgées de
plusieurs semaines à plusieurs mois, il constate, après coloration
classique des préparations par la fuchsine, et décoloration par
l'acidenitrique au 1/3, la présence au milieu deséléments bacillaires
de filaments plus ou moins longs, avec renflements terminaux.
Ces formations sont de plus en plus nombreuses, à mesure que la
culture vieillit; elles présentent les mêmes réactions de coloration
que les Bacilles tuberculeux. («Je dois faire ressortir, dit E. Klein,
que les cultures où ces formations sont trouvées, sont pures; j'ai
fait des préparations de diverses colonies de Bacilles tuberculeux
à des époques différentes, et je trouvais sans exception, qu'après plu-
sieurs semaines, les filaments ci-dessus mentionnés se présentent
en nombre de plus en plus élevé dans les cultures, et se laissent fa-
cilement rattacher dans leur évolution aux Bacilles tuberculeux
NL
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 121
typiques par des formes de transition. De nombreuses cultures pures
de tuberculose sur agarglycériné et bouillon furent examinées
et l n'y eut pas un cas où elles ne purent être trouvées ;.… ce qui prouve
nettement que nous n'avons pas affaire ici à des formes d'’involu-
tion, c'est le fait digne de remarque que beaucoup des filaments
sont ramifiés à la facon d'un mycélium ; les filaments les plus longs
avec extrémités divisées dichotomiquement, à massues terminales
sont si semblables à des hyphes mycéliennes qu'il paraît à peine
possible, si les phases de transition et le mode de coloration
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Fig. 3, d’après Maffucei. — «a, «’, &”, b, c, formes ramifiées d’une culture de
tuberculose aviaire à 45°, âgée de 2 mois; à droite, longues formes bacillaires
(b) granuleuses et à extrémités renflées, au milieu de Bacilles longs, minces et
granuleux (&). Culture de tuberculose aviaire sur sérum glycériné.
=
n'étaient présents, de pouvoir les considérer comme appartenant
au Microbe de la tuberculose. »
Etant donné qu'il s’agit là de ramifications vraies, étant donnée
l’apparition constante et progressive des formations ramifiées dans
les cultures, l’auteur conclut que : «les Bacilles tuberculeux, tels
qu'ils se rencontrent dans le corps de l'Homme ou des animaux,
dans les cultures sur sérum, dans les premiers mois des cultures
sur agar glycériné et en bouillon, ne représentent qu'une phase
dans le cycle du développement d'un micro-organisme se rappro-
chant morphologiquement d’un Champignon à mycélium. » En
1892, après ies travaux de Maffucci et de Fischel sur ce sujet,
E. Klein, dans une revendication de priorité, expose à nouveau les
principaux résultats de ses constatations sur le mode de dévelop-
pement en cultures des Bactéries de la tuberculose.
En 1892, Maffucci donne les résultats de recherches expérimen-
tales sur la tuberculose aviaire. À partir de 43° jusqu'à 50°, les cul-
122 G. BOUDIN
tures de la tuberculose des Gallinacés contiennent toujours, d’après
lui, des formes ramifiées, avec ou sans renflements terminaux.
L'observateur examine le développement de ces formes ramifiées
dans une première série de cultures, exposées à la température de
450. Au bout d'un mois, les Bacilles s’allongent, deviennent granu-
leux, se ramifient. Les ramifications sont bien réelles; elles ne
sont pas dues à une superposition des filaments. Les rameaux se
terminent fréquemment par des renflements en forme de massue,
où apparaissent des grains retenant énergiquement la couleur. Si
les cultures développées à 45° sont transportées dans une étuve, où
la température n'est que de 37, au bout d’un mois il n’est plus
possible d'y trouver ces formes ramifiées et renflées. Si au contraire
elles sont maintenues à la température de 45°, on voit, dans le cou-
rant du deuxième mois, les Bacilles devenir très granuleux, les
filaments s'allonger encore, se ramifier, les formations renflées en
massue augmenter en dimensions. On pourrait penser à une con-
tamination des cultures, à une pénétration d'autres micro-orga-
nismes. Mais les cultures conservent toujours leur même aspect
microscopique. Enfin, dans le courant du troisième mois, tous les
Bacilles deviennent filamenteux. Dans le corps des articles baeil-
laires, les granulations s'espacent et deviennent plus petites.
Maffucci étudie ensuite l'apparition des formes ramifiées sur des
cultures maintenues à la température de 50°. Au bout de8 jours, les
Bacilles deviennent granuleux et s'allongent en filaments qui com-
mencent à se ramifier. Après 18 jours, et sans que le développe-
ment soit macroscopiquement très manifeste, les formes
filamenteuses, ramifiées, avec massues terminales se sont multi-
pliées. Un ensemencement peut être encore réalisé avec ces cul-
tures, au bout de 50 jours d'exposition à 500. Pourtant l'examen
microscopique montre que beaucoup des Bacilles sont très granu-
leux et trèslongs ; cependant on aperçoit encore à côté des filaments,
et des formations renflées de petits Bacilles colorés d'une facon
homogène. Mais après deux mois d'exposition à 500, toutes les
formes, Bacilles, filaments, massues se désagrégent et la culture
ne contient plus que des granules capables de fixer intensément
la couleur, et qui sont peut-être des spores. Maïs ces granules sont
détruits à des températures relativement basses.
Enfin à 430, même après trois mois, les Bacilles des cultures de
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 2103
tuberculose aviaire ne se transforment pas en filaments ramifiés, à
extrémités renflées.
De tous ces faits, Maffucci conclut que les variations morpholo-
giques du Bacille aviaire sont en rapport direct avec un dévelop-
pement à températures élevées, 45 à 50°. De 25 à 43°, les formes
filamenteuses et ramifiées n'apparaissent jamais. Le Bacille de la
tuberculose des Mammifères ne se développe pas au-dessus de 42°.
Il ne peut done manifester de variations morphologiques spéciales
comme le Bacille tuberculeux aviaire. C’est encore là un caractère
distinctif des deux virus. L'auteur croit que Metshnikov a fait ses
recherches seulement sur des cultures de tuberculose aviaire;
Metsnikov, en effet, a observé les formes ramifiées sur des cultures
développées à la température de 43°,6. En 1888, on ne faisait pas de
distinction entre le Bacille de la tuberculose aviaire et le Bacille de
la tuberculose humaine, qui ne se développe cependant pas au-des-
sus de 42°, Maffucci pense que les formes ramifiées, étant donnée
leur apparition à haute température, ne sont que des formes de
dégénérescence.
Toutefois, d'après l'auteur lui-même, les cultures quicontiennent,
même en abondance, ces formations ramifiées, à extrémités ter-
minales renflées, peuvent être réensemencées et sont pathogènes
pour la Poule.
Mais, d’une part du sérum sanguin ensemencé avec de telles
cultures, et maintenu à la température de 37, d'autre part
les tissus de Gallinacés inoculés avec ces mêmes cultures, ne
présentent à l'examen microscopique rien autre chose que la forme
bacillaire.
CHAPITRE II
Formes filamenteuses et ramifiées du Bacille des Mammifères (FISCHEL,
HueppE, 1893; HaAyo Bruns, 1895; CoppeN Jones, 1893-1896).
En 1893, Fischel, de l'Université de Prague, rappelle les faits de
pléomorphisme du Bacille tuberculeux déjà observés par Metshni-
kov, Klein, Hueppe, Mafiucci. On doit les rechercher à propos de
ce micro-organisme important, étant donné que, d'une part,
nombre de Bactéries mamifestent une pléomorphie considérable
variable avec le terrain de culture : Bacillus pyocyaneus Charrin,
124 G. BOUDIN
Coccobacillus prodigiosus (Schottelius) et que, d'autre part, des orga-
nismes plus élevés en organisation, comme l’Actinomyces bovis, pré-
sentent une grande variabilité morphologique dans les cultures. Il
est donc légitime de se poser la question : certains micro-orga-
nismes considérés comme parasites ne sont-ils pas des formes par-
ticulières d'espèces pléomorphes d'organisation plus élevée? En
particulier, Bacillus tuberculosis appartient-il à une espèce pléo-
morphe et quelles formes peut-il manifester ?
D'abord Fischel avait à retrouver les différentes formes décrites
antérieurement, et spécialement les renflements en massue et les
formes ramifiées décelées par Metshnikov et Maffucci dans les cul-
tures de tuberculose aviaire. Fischel, non seulement constate la
présence de ces formes dans les cultures de tuberculose aviaire,
mais encore dans les cultures de la tuberculose des Mammifères. —
Ces deux virus ne sont d’ailleurs que des variétés d’une même es-
pèce. Par des expériences, il démontre que la sensibilité du Chien
à la tuberculose humaine est inconstante. L'auteur rappelle les
expériences de Cadiot, Gilbert et Roger, sur des Lapins inoculés
avec le Bacille aviaire et morts en trois mois environ avec des lé-
sions nodulaires, ce que n’admet pas Maffucei. Il modifie les ter-
rains de culture pour faire varier l'aspect macroscopique des colo-
nies des deux variétés de la tuberculose. Sur du sérum de sang de
Poule glycériné, le Bacille des Mammifères prend sensiblement
l'aspect des colonies de tuberculose aviaire. De même, sur sérum
de sang de Chien. Avec des parcelles de lésions nodulaires du La-
pin, il ensemence des œuîs; et après une croissance de plusieurs
mois dans un tel milieu, les Bacilles sont transportés sur de l’agar
glycériné et boriqué. L'inoculation de telles cultures à des Cobayes
ou à des Lapins ne produit qu'une tuberculose à évolution très
lente et ne donnant lieu, pendant plusieurs mois, avant la générali-
sation par conséquent très tardive, qu'à des modifications locales.
Des Poules inoculées avec les mêmes cultures moururent en mani-
festant les signes de la tuberculose des Oiseaux. De plus, l'aspect
macroscopique des cultures directement ensemencées avec des lé-
sions de tuberculose spontanée, soit de Faisans ou de Poules
(Hueppe) ou de Singe (Fischel), n’est pas toujours aussi différencié
qu'on l'estime généralement. Les cultures faites par Hueppe dans
le premier cas, et avant l’acclimatement à une suite de milieux
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 495
artificiels, avaient une apparence grise et sèche. Dans le second
cas, les cultures de la tuberculose du Singe ressemblaient macros-
copiquement à celles de la tuberculose aviaire. Fischel pense que la
tuberculose des Oiseaux n'est, comparativement à la tuberculose des
Mammifères, que le même virus modifié et affaibli par l’adapta-
tion au corps des Gallinacés. En plus, dans des cultures de tuber-
culose aviaire et humaine, sur gélose glycérinée et sur sérum
sanguin, développées à la température de 40°, Fischel constate, en
examinant les portions marginales de la masse en croissance, en
préparations non colorées, la présence de filaments présentant de
courtes ramifications et partant de la tige principale à angle aigu.
Dans des préparations colorées de cultures sur sérum de sang de
Chien coagulé, de tuberculose des Mammifères, l’auteur relève égale-
ment la présence de nombreuses formes ramifiées, à côté de la
forme habituelle en bätonnet. Le filament bacillaire peut s’amin-
cir à l’une des extrémités, et dans l’intérieur d’un tel bâtonnet sont
visibles des formations nodulaires séparées, à protoplasma con-
densé. « Les ramifications ne sont point constituées par une juxta-
position fortuite. Cela est facile à voir même sur la plaque photo-
graphique, où l'on constate le passage direct de la membrane
protectrice de la tige sur la branche. » Fischel n'a jamais pu cons-
tater de cloisons dans les formes ramifiées de la tuberculose des
Oiseaux ou des Mammifères. En plus, il aperçoit dans des cultures
vieilles de quatre semaines du Bacille aviaire, développées à 370
sur un milieu nutritif contenant de l'acide borique, des bâtonnets
régulièrement plus longs que les Bacilles de la tuberculose aviaire
et qui portent à l’une de leurs extrémités un renflement piriforme.
Cet élément bacillaire avec renflement a ainsi l'aspect d'une ba-
guette de tambour à poignée mince, à extrémité arrondie, mais lé-
gerement étirée à la pointe. Ces massues contiennent des parties
brillantes, claires, non colorables; mais les contours se laissent
colorer. En considérant que ces formes renflées ont été trouvées,
et sur des cultures âgées et sur des cultures plus jeunes contenant
une substance stimulante, par exemple du thymol, qu'elles se sont
développées sur un micro-organisme filamenteux, alors on arrive
à cette conviction que de telles formes peuvent être des modes
de fructification d'un état de croissance saprophytique de la tu-
berculose des Oiseaux, et que peut-être, ce sont des formes compa-
126 G. BOUDIN
rables à des conidies. De plus, le fait qu'après la coloration à la
fuchsine phéniquée, elles résistent plusieurs minutes à l’action dé-
colorante de l'acide sulfurique montre encore qu'il s’agit bien là de
formes durables du Bacille de la tuberculose aviaire. Et ainsi ce
sont des formes d'évolution et nullement de dégénérescence. Le
Bacille de la tuberculose manifesterait-il donc des formes de fruc-
tification diverses? En réalité les formations décrites par Koch
comme spores, sont plutôt, de l'avis de Hueppe, des vacuoles, et
la multiplication des Bacilles paraît se faire par arthrospores.
Des cultures de tuberculose des Mammifères et de tuberculose
des Oiseaux furent encore faites sur de l'agar glycériné contenant
2 p. 100 d'une solution saturée de thymol. Les colonies se déve-
loppent en une pellicule qui s'épaissit, forme des proéminences,
devient par places nettement jaune; de telles colonies de
Bacilles aviaire et humain (ont, dans cet état, une ressemblance
frappante avec de vieilles cultures d’Actinomyces sur glycérine
agar ». Ces cultures s'étaient développées aussi bien à 37° qu'à
40° : les colonies de tuberculose aviaire laissaient voir très rapi-
dement les formations en baguette de tambour, déjà décrites; les
préparations colorées des colonies de tuberculose humaine mon-
traient des formes ramifiées et filamenteuses.
En cultivant le Bacille des Mammifères sur des œufs, 3 fois sur ),
les éléments bacillaires ont pris une forme courte et très granuleuse.
Ces cultures contiennent également des formations sphériques résis-
tant à la décoloration par les acides. Dans toutes les cultures, les
Bacilles s'étaient multipliés dans le jaune de l'œuf. En ensemençant
les Bacilles très courts et granuleux décrits plus haut sur agar
glycériné et boriqué, Fischel obtint, aussi bien à 37° qu'à 40°, des
colonies rondes, par endroits isolées, en d’autres confluentes. Elles
avaient ainsi l'aspect de colonies de tuberculose aviaire. A l'exa-
men microscopique on voyait, à côté de bâtonnets courts, des formes
filamenteuses dont les ramifications se terminaient par un renfle-
ment. La grosseur de ces renflements terminaux dépassait celle des
massues constatées dans des cultures de tuberculose aviaire du
même âge et soumises à une température égale. On pouvait encore
remarquer des formes filamenteuses, mais avec de très courtes
ramifications, en tout semblables à celles que Maflucci décrit dans
les cultures du Bacille aviaire. Mais Fischel dit ne pas savoir pour-
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 197
quoi, dans les deux autres cas, les ramifications avec intumes-
cences terminales manquaient.
Des cultures de tuberculose des Mammifères sur peptone agar à
8 p. 100, montrent des colonies petites, en forme de rosette, à
partie centrale jaune brun, à zone périphérique constituée par des
plis rayonnant régulièrement de la partie centrale vers l'extérieur.
Le même aspect fut réalisé par des cultures de tuberculose
aviaire sur peptone agar à 10 p. 100. De telles colonies sont essen-
tiellement comparables, macroscopiquement, aux colonies d’acti-
nomycose. Hueppe d'ailleurs, depuis longtemps, avait été frappé de
cette ressemblance, et en avait fait mention au Congrès de Londres
en 1891. Maïffucci pensait que les formes renflées et ramifiées ne
s'observent jamais dans les cultures de tuberculose des Mammifères,
et qu'elles s’observent dans les cultures de tuberculose aviaire sous
des conditions spéciales de haute température de croissance de
46 à 50°. Fischel pense avoir démontré que le Bacille tuberculeux,
chez les Mammifères comme chez les Oiseaux, montre en culture
des formes pléomorphes, mais déterminées; leur apparition
relève plus du sol des cultures que de l’âge de celles-ci, et de
la température auxquelles elles se développent. La question
reste non résolue, de savoir si ces formes ramifiées peuvent
apparaître en dehors des organismes, dans la nature, et
et telles qu’elles se manifestent sur les terrains de culture artifi-
ciels. En conséquence, Fischel termine ainsi : « L'agent de la
tuberculose est un micro-organisme pléomorphe. La forme bacil-
laire est la forme parasitaire du micro-organisme qui montre
dans son existence saprophytique des filaments ramifiés. La dési-
gnation spécifique de ce micro-organisme ne me paraît pas encore
pouvoir être donnée avec assurance. Ce n'est morphologiquement
ni un Bacille, ni un Cladothrix; mais il appartient, dans son
existence saprophytique, vraisemblablement à un Champignon
pléomorphe de genre plus élevé. La ressemblance macroscopique
qui existe entre les cultures d’actinomycose et de tuberculose,
aussi bien que la présence de formations microscopiques compa-
rables dans les cultures de ces micro-organismes font penser à
une parenté étroite entre le virus de la tuberculose et l’Actinomyces
bovis. »
Si nous résumons, d'après les photographies qu'a données
128 G. BOUDIN
Fischel à la fin de son mémoire, nous voyons que cet auteur a
trouvé des formes montrant des ramifications non douteuses avec
légers renflements terminaux sur des préparations colorées de
cultures de tuberculose aviaire, âgées de quatre semaines, et s'étant
développées à 40° sur agar glycériné. Des formes tout à fait com-
parables ont été également trouvées dans des cultures de tuber-
culose des Mammifères [Lapin], ayant subi préalablement deux
ensemencements successifs sur l'œuf et ensuite réensemencées à
37° et à 40° sur agar glycériné et boriqué. Les massues terminant
les rameaux étaient plus épaisses que les renflements des formes
ramifiées décelées dans des cultures de tuberculose aviaire du
même âge et développées également à 37-400. Ces cultures étaient
vieilles d'environ huit semaines. Les ramifications se font à angle
aigu ou à angle droit.
Des formes moins richement ramifiées, colorées, résistantes à
la décoloration par les acides furent encore trouvées sur des pré-
parations de cultures de tuberculose des Oiseaux sur sérum de
sang de Bœuf coagulé développées à 40° et âgées de 4 semaines. Des
formes exactementsemblables furent décelées dans des préparations
colorées de cultures de tuberculose des Mammifères développées
à 37° sur sérum de sang de Chien coagulé. L'auteur ne précise pas
l'âge des cultures.
Quant aux formes montrant des renflements très considérables,
en tout comparables aux formes que Metsnikov et Maffucci ont
représentées dans leurs figures, quelquelois reliées deux à deux ou
trois à trois par des portions intermédiaires filamenteuses très
étroites, elle ont été trouvées par Fischel sur des préparations
colorées de cultures de tuberculose aviaire, vieilles d’un an et
7 mois, développées à la température de 37° sur bouillon glycériné.
Les préparations, sans exception, furent examinées avec un gros-
sissement de 1200. Elles étaient colorées à la fuchsine phéniquée,
et traitées ensuite par l'acide sulfurique. Nous ne croyons pas que
Fischel ait obtenu les différentes formes ramifiées dans des cultures
anaérobies, comme l'ont mentionné différents auteurs. Du moins,
nous ne l'avons pas lu. On fait grief à Fischel du manque de netteté
de ses photogravures; Coppen Jones à pu comparer certaines
d’entre elles à des photographies de taches de la lune. En réalité,
les figures obtenues par coloration des préparations; fig. 2. 6, 9, 11
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 199
de la pl. III sont suffisamment précises. C'est d’après elles que
nous avons fait le résumé ci-dessus. On ne saurait douter des
ramifications réelles qu’elles présentent et de l’idendité de telles
formations avec celles que Metshnikov, Maffucci, Hayo Bruns
figurent dans leurs planches. L'aspect macroscopique des cultures
de tuberculose du Lapin sur agar glycériné, et de tuberculose
aviaire sur agar peptoné est exactement celui d'une formation en
rosette, régulière, à centre jaune et plis radiés blanchâtres. Cer-
tains auteurs ont pu trouver que les renflements terminaux des
formations ramifiées des cultures de tuberculose ne ressemblaient
que très peu aux massues que le Discomyces bovis forme dans les
tissus. Il ne semble pas que Fischel ait présenté la comparaison
dans ces termes : il a comparé les intumescences terminales des
filaments ramifiés de tuberculose seulement aux renflements que
l’'Actinomyces forme également dans les cultures |... mikrosko-
pische Gebilde, auch in Culturen des Actinomycespilzes gefunden
wurden.….). Les formes ramifiées ont été trouvées non seulement
dans des cultures additionnées de thymol ou d'acide borique,
mais encore dans des milieux ordinaires : agar glycériné, sérum
de sang de Bœuf. Les figures sont faites d'après des préparations
de cultures âgées d'au moins quatre semaines.
Le travail de Fischel fut fait sous la direction de Hueppe. Ce der-
dier auteur, dans uneconférence,en 1893, renouvellelesconclusions
de Fischel. « D'après les recherches de Klein, de Fischel et d’après
mes propresobservations, le soi-disant Bacille tuberculeux n’estque
la forme parasitaire d’un Champignon pléomorphe. » Les Bacilles
tuberculeux des Oiseaux et des Mammifères, que Koch et Maffucei
veulent séparer en espèces distinctes, ne sont que des formes para-
sitaires du même micro-organisme adaptées à des êtres différents.
Ils en recoivent des caractères singuliers, mais il est possible de
transitormer réciproquement ces deux variétés l’une en l’autre.
Hayo Bruns, de la Faculté de Strasbourg, produit en 1895 une
contribution personnelle à la question de la pléomorphie du mi-
cro-organisme de la tuberculose. Il rappelle que les formations my-
céliennes n'ont été trouvées jusqu'ici que sur des cultures de tuber-
culose aviaire. Fischel cependant est le premier à les avoir misesen
évidence en des cultures de tuberculose des Mammifères. C'est une
confirmation des observations de Fischel qu'apporte l'auteur. Deux
Archives de Parasilologie, XI, n° 1, 1906. 9
130 G. BOUDIN
cultures pures de tuberculose d'origine humaine non douteuse, dé-
veloppées sur agar glycériné, exposées constamment pendant cinq
mois environ à la température de 37 à 3705, lui ont montré des for-
mes ramifiées typiques et nombreuses. Ces formes ne purent être
trouvées dans d'autres cultures développées en des conditions iden-
tiques. La coloration des préparations des deux premières cultures
fut réalisée à l’aide de la solution de fuchsine phéniquée, et la dé-
coloration effectuée par action de l'acide nitrique au quart, et de
l'alcool. Les formations, filamenteuses et ramifiées, se coloraient,
d'après cette méthode, comme les Bacilles tuberculeux; leur image
a été reproduite avec un grossissement de 1200, par un artiste, pour
éviter toute interprétation personnelle. Les figures que donne Hayo
Bruns ont été ainsi dessinées d'après une seule préparation; elles
permettent de montrer toutes les phases de transition entre le
simple bâtonnet et la formation richement ramifiée à extrémités
terminales renflées en massue. H. Bruns pense que les corpusecules
oveïdes, assez volumineux, très chromophiles, qui s’échelonnent
au nombre de deux ou trois dans un bâtonnet, et dépassant sa lar-
seur, peuvent être considérés comme des formes durables. Comme
des spores, il$ donnent d'une façon nette la réaction de Neïsser;
mais les cultures où ces corpuscules sont présents sont stérilisées
après dix minutes d'exposition à la température de 80°. Sur les fi-
laments, les rameaux se séparent à angle droit de la tige principale
ou bien la ramification se présente comme dichotomique. Si les
formes ramifiées, dit l'observateur, étaient des formes dégénérati-
ves, on devrait les remarquer de plus en plus nombreuses au fur
et à mesure que les cultures vieillissent et dans la plupart des cul-
tures. En réalité, ces formes qui montrent une organisation caracté
ristique, n'apparaissent pas dans toutes les cultures indistincte-
ment ;et quand elles apparaissent, c'est à un certain momentdel'évo-
lution des micro-organismes, sous des conditions indéterminées,
mais bien dans la phase active du développement. Au contraire,
d’une façon constante, la dégénérescence des cultures, leur vieil-
lissement, se manifeste toujours par une désintégration des Bacilles
-qui deviennent granuleux, très vacuolaires, en partie incolorables,
et se résolvent en cocci de dimensions réduites, très chromophiles.
Si l’on doit désigner les formes ramifiées commedes formes d'invo-
lution, il faut bien comprendre qu'on les considère ainsi, comme
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 131
des formes de retour vers l'état ancestral d'un micro-organisme
saprophyte, dont la forme parasitaire est un bâtonnet. En outre, dans
un assez grand nombre de cultures âgées de tuberculose aviaire,
développées sur agar glycériné, à la température de 37°, H. Bruns
constate encore la présence de formes ramifiées, tout à fait compa-
rables à celles qu'il a décrites précédemment dans les deux cultu-
res de tuberculose humaine; les filaments y étaient cependant plus
grêles et les ramifications moins nombreuses.
L'auteur présente les conclusions suivantes : « La thèse de
Maffucci, d'après laquelle les formes pléomorphes n'apparaissent
que dans la tuberculose aviaire, et non dans les cultures de tuber-
culose humaine, n'est plus exacte. On peut ainsi expliquer l’appa-
rition plus fréquente des formes filamenteuses et ramifiées dans
la tuberculose aviaire : l'adaptation à la vie parasitaire du micro-
organisme delatuberculose est plus complète chez les Mammifères
que chez les Oiseaux. Cette différence d'adaptation est peut-être
due à la température plus élevée des Oiseaux; de sorte que le
Bacille aviaire, parasite peu adapté, reprend plus rapidement sa
forme saprophytique. »
Le travail de H. Bruns fut fait sous la direction de E. Levy. En
1899, ce dernier auteur, qui a vu les préparations de Bruns, s’ex-
prime ainsi dans un article « sur les Actinomyces et les Bactéries
proches parentes de ce groupe » : «Les ramifications, dans les
préparations de Bruns, du micro-organisme de la tuberculose des
Mammiières se montraient, en quelques préparations, extraordi-
nairement prononcées : elles correspondent, comme on peut l’affir-
mer maintenant avec certitude et en raison des connaissances plus
récentes, absolument à celles des Actinomyces. »
En 1$93, Coppen Jones rapporte le résultat de ses observations
sur des formations spéciales contenues dans l’expectoration de phti-
siques, à la période des ulcérations pulmonaires. Fréquemment sur
les fibres élastiques des crachats, il remarque, sans coloration préa-
lable des préparations, des corps réfringents de 4 à 20 w de longueur
pressés les uns contre les autres, saillant à la façon des massues
que l’Actinomyces forme dans les tissus. Ces massues, colorées à la
fuchsine, se décolorent par l'alcool. D'après Coppen Jones, elles
existent dans 30 p.100 des cas de tuberculose ulcéreuse à évolution
lente et dans 75-80 p. 100 des cas où la fonte du tissu pulmonaire
132 G. BOUDIN
est rapide. De plus, à l’intérieur de fragments de masses caséeuses,
dans douze cas de tuberculose, l’auteur a vu des formations
rayonnées, ( non pas développées sur les fibres élastiques, mais
indépendantes dans les conglomérats de cellules mortifiées et de
Bacilles tuberculeux qui composent les masses caséeuses, et
donnantà s’y méprendre l'aspect des petits grains d’actinomycose. »
Tout en établissant un rapport de fréquence étroit entre les cas
de tuberculose à Bacilles de Koch et la présence de telles forma-
tions, Coppen Jones dans cette communication provisoire n'établit
aucun lien botanique entre les Bacilles tuberculeux et les mas-
sues. Il considère cependant celles-ci comme des formes d’origine
Fig. 4, d’après Coppen Jones. — 1 (X 1000) et 2 (X 1250), filaments ramifiés du
Microbe de la tuberculose constatés dans des crachats humains; 3 {X 1250),
filament de tuberculose avec vacuoles pénétrant dans les ramifications ; 4, forme
ramifiée du Microbe tuberculeux de crachats humains avec « spores ».
mycélienne. En 1895 et 1896, il produit deux communications sur
la morphologie et la place systématique du Champignon de la
tuberculose et sur les formations en massue de l’Actinomyces et
du Tuberculomyces (Bacille de Koch). Comme Fischel Coppen
Jones estime que : «la rareté des formes ramifiées et filamen-
teuses dans les cultures pures tient en partie aux procédés peu
ménagés dont on use dans les méthodes usuelles de préparation. »
Il emploie pour ses observations deux méthodes : 1° : les macéra-
tions, soit en solution saline, soit dans la solution alcoolique de
Ranvier, (celle-ci est préférable); 2° les coupes, après inclusion
des colonies dans la paraffine.
Les cultures macérées étaient des cultures de tuberculose humaine
agées de 3 à 4 mois développées sur agar glycériné. Dans les pré-
parations de ces cultures on voit des filaments incurvés qui ne sont
pas constitués par une chaîne de courts bâtonnets comme les fila-
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 133
ments du Bacille du charbon. De plus, «dans chaque champ visuel
apparaissent un ou plusieurs filaments qui montrent des branches
et des rameaux. La ramification est vraie; ce n'est pas une ramifi-
cation par pseudo-dichotomie comme celle des Cladothrix. On peut
voir les ramifications dans toutes leurs phases ; depuis les plus pe-
tits bourgeons qui sont à peine une légère saillie des parois cellu-
laires, jusqu'à de plus grandes branches (10 ») avec
ramifications secondaires.» Pour Coppen Jones, les
spores de Koch sont des formations vacuolaires; et
ces vacuoles peuvent pénétrer en partie de la bran-
che principale dans le bourgeon latéral. Elles s'é-
chelonnent à intervalles variables, séparées par des
portions de protoplasma fixant énergiquement les
colorants. Le fait qu'elles existent à la bas ô de dun LT
S. I s exiS à la base même A AL
des bourgeons empêche de les considérer comme culture pure
f 4 ti décé , ti sur agar pres-
ormations dégénératives. ea la
L'apparence qu'en reçoit le micro-organisme melle, d'après
© ae : à CoppenJo-
tuberculeux est singulière pour un Bacille, mais ne
elle est tout à fait en accord avec la structure d’un
filament mycélien. Les petits bourgeons sont souvent renflés à
l'extrémité comme ceux des Actinomyces et ceux d’autres Cham-
pignons. Sur les coupes des colo-
nies, âgées d'environ 2 mois, Cop-
pne Jones fait cette constatation que
les membranes de la culture ne se
composent pas d'une simple accu-
mulation de bâtonnets, mais bien
d'une grande quantité de filaments
parallèles les uns aux autres et s’é-
\ levant verticalement sur le sol de
en6 d'après Coppen Jones" Culture. Iliny a que dans les parties
1, une formation en massue du î À
Microbe de la tuberculose ; les plus minces des coupes qu'on
One Ste EU re Sr d'autrepart. que des
Champignon de l’actinomycose. s é : : :
ramifications vraies existent. L'an-
gle de ramification est ouvert du côté de la surface de la culture.
Dans la profondeur de l’agar même, il n'y a presque pas de fila-
(e) 9
ments, mais seulement de petits Bacilles; ce qui indiquerait à
l'auteur que la formation mycélienne est en rapport direct avec
134 G. BOUDIN
la présence de l'oxygène. Dans un filament, les parties colorables
prennent inégalement la couleur. Celles qui sont le plus intensément
colorées s'échelonnent à intervalles variables, et résistent à l’action
décolorante des acides très énergiquement. Elles sont générale-
ment discoïdes, de diamètre supérieur à celui du bâtonnet. Et
bien qu'elles ne résistent pas aux hautes températures, elles doi-
vent être considérées, d'après Coppen Jones, comme des spores.
L'auteur rappelle la ressemblance macroscopique considérable des
colonies d’actinomycose et de tuberculose, remarque déjà faite par
Hueppe et Fischel. De plus, les massues que ces deux micro-orga-
nismes forment dans les tissus sont absolument identiques entre
elles: même réfringence, même apparence digitée, stratifiée. Si ces
renilements terminaux sont en rapport direct avec les filaments
dans la tuberculose comme dans l'actinomycose, il est cependant
plus facile de suivre le filament à l'intérieur de la massue dans
le dernier Cas. Ce caractère mis à part, il est impossible de difré-
rencier les formations rayonnées des deux micro-organismes. De
même que l’Actinomyces est rattaché aux Hyphomycètes, de
même doit y être rattaché le microbe de la tuberculose, et l'auteur
pose les conclusions suivantes :
19 Dans les tissus'et les secrétions, le virustuberculeux se présente
principalement comme un bâtonnet de longueur variable, qui se
multiplie par division transversale.
20 Detemps en temps dans les sécrétions (expectoration), et tou-
jours dans les cultures âgées sur agar, paraissent des formations
filamenteuses qui, a) ne montrent pas de cloisons, b) montrent
une vraie ramification.
30 Ces formes filamenteuses se présentent seulement à la surface
des milieux de culture. Dans la profondeur des cultures solides
ou liquides, comme dans les tissus (endroits où l'apport d'oxygène
est empêché), on ne trouve que de courts bâtonnets.
4° Les bâtonnets ne contiennent pas d'endospores comparables à
celles que nous rencontrons chez d’autres Bactéries. Mais, dans les
bâtonnets aussi bien que dans les filaments, se présentent des for-
mations qui possèdent beaucoup des propriétés physiques des
formes durables.
50 Dans certaines circonstances apparaissent, en un étroit rapport
avec les Bacilles tuberculeux, certaines formations qui ont les
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 435
mêmes propriétés de structure et la même conformation que les
masses du Champignon de l’actinomycose.
Dans un dernier paragraphe, Coppen Jones rapproche les spores
du Bacille de la tuberculose des chlamydospores du Chlamydomucor
racemosus. Il montre la pléomorphie de plusieurs espèces de Cham-
pignons selon les milieux de culture, et les conditions de leur
développement. Etant données les variations morphologiques du
Bacille de Koch, il est trop exclusif d'admettre son parasitisme
obligatoire. Il paraît plus probable qu'il possède une existence
saprophytique hors du corps de l’animal. « Ce que nous savons de
sa morphologie, dit l’auteur, nous permet d'affirmer que ce n’est
pas un Bacille mais un Champignon filamenteux et ramifié que l'on
peut dénommer Tuberculomyces. »
CHAPITRE III
Formes filamenteuses et ramifiées du Bacille pisciaire. Transformation du
Bacille des Mammifères en race saprophyte filamenteuse et ramifiée (BATAIL-
LON, DUBARD, TERRE, 1897-1902 ; Kraz et DuBarp, 1898).
Comme le Bacille des Mammifères, comme le Bacille de la tuber-
culose aviaire, le Bacille tuberculeux pisciaire présente les formes
filamenteuses et ramifiées dans le cours de son développement. En
mai 1897, Bataillon, Dubard et Terre présentent une description du
Bacille tuberculeux de la Carpe : « Sur gélose, disent-ils, si l’on
examine des cultures vieilles de 9 ou 10 jours, on ne trouve plus,
au lieu de Bacilles typiques, identiques par la taille et par la forme
au Bacille de Koch, et colorés par la méthode d'Ehrlich, que des
amas volumineux simulant de riches dichotomies avec des ramifi-
cations souvent étirées en pointes. Ces amas ont une base mal
colorée et la méthode d'Ehrlich fait ressortir dans leur intérieur
une grande quantité de granulations mieux teintées. Nous sommes
portés à voir dans ces figures spéciales, difficilement colorables,
des formes de reproduction. L'observation des cultures montre en
tous cas qu'il y a là la fin d'un cycle; et l'étude des stades inter-
médiaires donne la conviction que les Bacilles s’agglutinent en
masse pour produire ce résultat. L'évolution à la température ordi-
naire ou à 12° présente sur les différents milieux des caractères mor-
phologiques identiques. Mais elle est plus lente; une culture sur
136 G. BOUDIN
bouillon à 12° demande une douzaine de jours pourarriverau point
qu’elle atteint en 3 jours à 23°». Pourtant, d'après les auteurs eux-
mêmes, le micro-organisme reste indéterminé, étant donnée sa
grande pléomorphie.
Mais les Carpes, sur lesquelles avaient été trouvés les nodules
tuberculeux, avaient pu être contaminées par des produits
tuberculeux humains; Bataillon, Dubard et Terre arrivent à
transformer, par passage sur les Vertébrés à sang froid, le Bacille
des Mammifères et le Bacille aviaire en Bacille pisciaire, capable
de végéter rapidement à basse température, et dépourvu de pro-
priétés toxi-infectieuses pour les Vertébrés à sang chaud. Cette
variété nouvelle présente les mêmes caractères morphologiques et
biologiques que le Bacille de la Carpe : les auteurs la décrivent
comme variété saprophyte du Bacille de Koch.
Mais dans le cours de leurs expériences, Bataillon et Terre remar-
quent que la tuberculose humaine ou aviaire, après passage sur la
Grenouille ou sur la Carpe, et selon la durée du passage, fournit des
cultures souvent différentes des cultures du Bacille pisciaire, c'est-
a-dire ne donne pas toujours la même variété saprophyte. C'est
ainsi qu'après un séjour de3 jourssur la Grenouille, le Bacille tuber-
euleux de l'Homme donne des cultures capables de se développer
aux températures élevées et troublant le bouillon ordinaire. Des
reports de ces cultures dans les sacs lymphatiques dorsaux de la
Grenouille donnent encore une forme nouvelle : « de Bacilles
aréolés avec points de condensation; et s'il n'y a qu'un point de
condensation à chaque extrémité, les Bacilles sont de véritables
tonnelets rappelant le type décrit par Courmont en 1887. Les
méthodes d'Ehrlich et de Gram ne les colorent pas. Mais sur
milieu se desséchant progressivement, sur des tubes de gélatine
non encapuchonnés par exemple, on constate en 12 ou 15 jours
l'apparition graduelle d'un voile opaque constitué par des Bacilles
typiques; même phénomène sur des milieux qui s'épuisent. Les
formes primitives semblent sporuler pour fournir ces éléments
spéciaux capables de multiplication dans certains milieux... En
tout cas les coupes pratiquées sur nos plaques de gélatine montrent
une couche superficielle bien limitée de Bacilles colorés par la mé-
thode d'Ehrlich; il n'y en a pas un seul dans la profondeur. »
En outre, le Bacille tuberculeux humain inoculé au Cobaye, après
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 137
le court passage de trois jours sur la Grenouille, a fourni aux expé-
rimentateurs des séries d'animaux tuberculeux, mais dont
les nodules ne contenaient aucun Bacille de Koch, mais une
forme de Bacilles mobiles, dont la puissance végétative s’affai-
blissait rapidement au fur et à mesure des inoculations en série.
Ces micro-organismes donnent un trouble floconneux dans les
milieux de cultureliquides. De plus, le Bacille qui, chez le Cobaye,
produit des lésions nodulaires sans Bactéries acido-résistantes, tue
le Lapin par septicémie, sans déterminer de tubercules dans les
organes. D'autres expériences ont conduit encore à d'autres formes
microbiennes : Streptobacilles, Zooglées. « Un polvymorphisme
aussi étendu nous porte à croire, disent Bataillon et Terre,
qu'avant la découverte de Koch, des savants comme Toussaint et
Klebs ont pu isoler certaines formes du même genre. Nos études
expérimentales, rapprochées des observations antérieures, nous
laissent la conviction que bien:des cas de pseudo-tuberculose sont
des tuberculoses vraies, ayant pour agent l’une des nombreuses
formes du bacille de Koch. » En 1899, les expérimentateurs donnent
une systématisation des principaux groupes qui relient le Bacille
de Koch acido-résistant au type Malassez-Vignal; ils différencient
les micro-organismes. selon leurs réactions chromatiques, selon
leur température eugérésique de développement, selon leur aspect
morphologique en filaments ramifiés, ou en éléments bacillaires
distincts mobiles ou immobiles. Ils distinguent particulièrement
l'une des formes ramifiées qui prend le Gram et se développe bien
aux températures élevées. À la suite d'expériences comparatives
sur des cultures d'actinomycose provenant du laboratoire du pro-
fesseur Arloing, cultures qu ils ‘ont fait ingérer à des Cobayes, ils
constatent et l'identité macroscopique des cultures obtenues d'un
de ces Cobayes mort au bout de 34 jours, avec les cultures de la
forme ramifiée d’origine tuberculeuse, et l'identité morphologique
de cesformes filamenteuses de provenancesdifférentes, actinomyco-
siques d'une part, tuberculeuses d'autre part. («Ce mycèle d'acti-
nomycose authentique ne saurait alors être distingué morpholo-
giquement du mycèle tuberculeux qui prend place dans notre
cycle. Mais nous obtenons en même temps, ajoutent Bataillon
et Terre, avec ce mycèle actinomycosique des colonies de Bacilles
peu ou point ramifiés, mais susceptibles de revenir dans certaines
138 G. BOUDIN
conditions au type mycélien avec la même pigmentation du
milieu, rappelant la pseudo-actinomycose de Poncet et Dor. L'acti-
nomycose, évidemment instable dansles conditions expérimentales
que nous avons indiquées, identique au type de tuberculose que
nous rencontré, ne se confondrait-elle pas avec lui ? Il est permis de
poser la question.
« En résumé, au point de vue morphologique, nous admettons une
série dégradée continue (en ce qui concerne les réactions colo-
rantes) évoluant dans l’organisme animal (vraisemblablement sous
l'action hydrolysante des sues digestifs). La forme bacillaire, qu'elle
prenne l'Ehrlich, qu'elle ne prenne que le Gram, ou qu'elle ait
perdu ces deux réactions, se ramifie facilement. Il s'agit donc en
réalité d'hyphes etnon de Bacilles. C'est toujours le même Hyphomy-
céte, avec une perméabilité variable aux solutions colorantes. La
reproduction, nettement observée sous les deux allures les mieux
caractérisées à ce point de vue {Ehrlich ou Gram seul), place le
germe en question dans le genre Oospora. Il devient provisoire-
ment Oospora Kochi.
« Au point de vue pathogénique, la tuberculose des Mammifères,
des Oiseaux et des animaux à sang froid, la tuberculose appendi-
culaire du Lapin, les pseudo-tuberculoses groupées par Ledoux-
Lebard, peut-être même l'actinomycose et la pseudo-actinomycose
de Mosetig, Poncet et Dor, correspondraient à des adaptations, à
des variétés de la même forme parasitaire. »
En 1902, Terre, dans sa thèse sur la tuberculose des Vertébrés à
sang-froid, rappelle dans les mêmes termes, les faits de polymor-
phisme du Bacille de Koch, observés par Bataillon et lui-même ;
il ne donne qu'une légère variante dans la classification des Ba-
cilles tuberculeux : (Le Bacille de la Carpe est un Hyphomycète…
comme le Bacille de Koch dont il n'est qu'une variété. Les
espèces pisciaire, aviaire et humaine ne constituent que des
variétés d’un même genre : Sclerothrix appartenant au groupe des
actinomycètes ». Terre reprend donc la dénomination déjà em-
ployée par Metshnikov en 1888.
En 1898, Kral (Prague) et Dubard (Dijon) produisent des résultats
tout à fait comparables à ceux de Bataillon et Terre, dont Dubard
avait été d'ailleurs le collaborateur dans la première série d’ex-
périmentations sur le Bacille tuberculeux de la Carpe. « La forme
Dre
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 139
exclusivement parasitaire est le Bacille, disent ces auteurs. C’est
aussi sous cette forme que notre micro-organisme se présente
dans les cultures récentes. Mais sous l'influence du temps, des
agents physiques et chimiques, qui hâtent ou entravent sa vie
saprophytique, on assiste à la formation d'éléments nouveaux. de
longs filaments simples ou dichotomiques. » Au bout de 10 jours,
une culture sur bouillon somatosé glyco-glycériné, examinée
vivante, montre d'abord des Bacilles, non pas isolés les uns des
autres, mais groupés en faisceaux par une substance intermédiaire.
Les faisceaux primaires donnent lieu à des faisceaux secondaires
(« qui peuvent en im-
poser pour des ramifi-
cations vraies. Un exa-
men attentifprouveque
l'on a affaire à une
succession d'éléments : V4
mais non à un élément er or
unique qui s'allonge et
. 9 |
se ramilie. Ce n’est pas Ÿ _.
à cette disposition en A
faisceaux linéaires ou
latéraux que nous don- Fig. 7, d’après Kral et Dubard. — Culture de
. tuberculose pisciaire sur pomme de terre, gly-
nons le nom de dicho- cérine-peptonée d’un mois et demi, exposée à
tomies. Celles-ci provi- la lumière. Température de la chambre.
ennent d'un élément,
en tout semblable à un Bacille au début, qui s’allonge, élargit
son diamètre et émet des rameaux. Dans les ramifications ainsi
formées, la membrane qui enveloppe le protoplasma nest pas
étranglée en articles. C'est donc bien à une ramification vraie
que donne naissance le Bacillus tuberculosus piscium. Les élé-
ments ramifiés peuvent avoir un diamètre trois et quatre fois plus
considérable que celui des Bacilles. Il n’est pas possible de con-
fondre l’image que l’on voit avec une superposition de filaments
ou un artifice de préparation. » Les filaments, d'abord à contenu
homogène se colorant par l'Ehrlich, montrent ensuite un aspect
granuleux, dont les seuls grains ont les réactions chromatiques
des Bacilles tuberculeux. Parmi ces grains, il en est de plus gros,
figurant des corpuscules ovoïdes saillants dans la continuité du fila-
440 G. BOUDIN
ment, ou fixés à son extrémité. Les granules colorables disposés
dans la gaine se déplacent vers des rameaux plus jeunes, ne lais-
sant que des tubes mycéliens vides. Les gros corpuscules ovoïdes
sont particulièrement résistants à la décoloration par les acides.
Kral et Dubard les ont observés dans les cultures de tubercu-
lose aviaire, humaine. « Certains filaments, disent-ils à propos
d'une culture de la tuberculose aviaire, portent à leur extrémité
des renflements piriformes, en raquette, fixant le Ziehl et le Gram,
ressemblant aux corps en raquette que l’on trouve figurés dans le
livre de MM. Poncet et Bérard sur l'actinomycose, et que M. Dor
nous avait déjà indiqués. Ces organes sont fragiles, et en se déta-
. chant, ilsconstituent
les gros Bacilles en
forme de pelle ou de
têtards de Grenouil-
les. Leur volume
est considérable par
rapport à celui des
0 Bacilles. » C'est le
plus souvent au ni-
Fig. 8, d’après Kral et Dubard. Culture de tuber- veau desrenflements
culose pisciaire sur milieu mannité, mise au bout . A
de 48 heures à 36° et examinée 12 heures après. intra-mycéliens des
filaments que prend
naissance un nouveau rameau, et ainsi cette observation peut
être comparée à celle de K. Nakanishi mentionnée plus haut :
«le protoplasma intérieur paraissant s'introduire dans le bour-
geon latéral de la gaine à la facon du doigt dans un gant sans so-
lution de continuité. » Coppen Jones avait rapproché les corpus-
cules discoïdes, très résistants à la décoloration par les acides, de
chlamydospores de Mucorinées ; Kral et Dubard font les hypo-
thèses suivantes : ébauches de spores, organes de réserve ou
de défense, fructifications avortées d'un Champignon. Et à
propos de cette dernière hypothèse, ils font remarquer que
« c'est en ensemençant quantité égale de cultures de Bacille
tuberculeux pisciaire, obtenues en milieux différents, dans le
même tube, que l’un d'eux a cru voir de la conjugaison et des
phénomènes d'une haute portée générale, si confirmation en est
apportée par la suite. » Mais les Discomyces qui ont des conidies
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 141
groupées sur des hyphes aériennes, et le micro-organisme de la
tuberculose qui, d’après Bataillon et Terre, possède également ces
formations conidiennes, peuvent-ils former, à l'intérieur des mi-
lieux liquides, en dehors de l'influence directe de l'air des spores
intra-mycéliennes. Gasperini en 1894 (Congrès de Rome) dit que
chez les espèces du genre Actinomyces, il y a formation de spores
dans le mycélium, si la sporulation aérienne normale est empêchée.
Mais en plus, si l’on tient compte des phénomènes de conjugaison
peut-être observés par Dubard, et, comme cela sera mentionné
plus loin, vus ensuite par Droba, il faut se demander si des for-
mations de conidies aériennes groupées en chapelet, et non réunies
dans un sporange, peuvent coexister sur une espèce avec des phé-
nomènes de conjugaison et production de zygospores. L'individua-
lité des Champignons est certes très effacée; et comme le fait
observer Dangeard, il y a transition des Mucors à conidies incluses
en des sporanges, aux Penicillium à conidies libres. Mais ce trans-
formisme peut-il être aussi rapide qu'on doit le supposer d'après
les observations de Dubard d’une part, de Bataillon et Terre d'autre
part, sur la végétation et la sporulation du Champignon de la
tuberculose en milieux solides et milieux liquides. D'ailleurs, ces
observations restent assez imprécises et ce qui paraît actuellement
certain, c'est que Kral et Dubard n'ont pu observer que la forma-
tion d’un Bacille libre à partir d’un des corpuscules, formes dura-
bles, et non la naissance de filaments se ramifiant.
Il est remarquable, d'autre part, que, dans les phases initiales de
la vie des micro-organismes de la tuberculose en culture pure, ne
se développent que des formes bacillaire et que ce n’est qu’au
bout d’un certain temps que les filaments avec ramifications ap-
paraissent à la suite de l'allongement des éléments bacillaires. La
multiplication parseission semble ici encore s'effectuer pendant une
période d'autant plus longue, que le milieu liquide est moins riche
en matières nutritives, moins concentré, et soumis à l'agitation
qui favorise la dilution des éléments bacillaires. Et il est remar-
quable aussi que ceux-ci arrivent à être mobiles. Dans le cas
particulier, comme dans les recherches de Ferran et Auclair, les
scissions répétées semblent être davantage un phénomène de bi-
partition artificielle, passager, manifesté par des filaments mycé-
liens très fragiles, et hydrolysés en milieux nutritifs très dilués,
149 G. BOUDIN
qu'un phénomène normal d’accroisement. Nous avons vu que Ba-
taillon et Terre ont pu transformer le Bacille de Koch, par passages
de durée variable sur les animaux à sang froid, en variétés manifes-
tant dans les milieux de culture liquides des caractères nouveaux de
m obilité et de décoloration rapide par les acides, mais variétéstrès
fragiles, puisqu'au fur et à mesure des inoculations, la puissance
végétative s'affaiblissait rapidement. Kral et Dubard constatent
que des cultures de tuberculose humaine, aviaire, pisciaire en
milieux nutritifs pauvres, au bout de très nombreux réensemen-
cements en série de très courte durée chacun, contiennent des
bâtonnets décolorables par les acides et mobiles. Tout d’abord,
Dubard crut à des impuretés, bien que Ferran lui eut communiqué
de ses propres cultures, ne contenant que des Bacilles mobiles, race
issue directement, comme nous l'avons vu, de cultures du Bacille
tuberculeux de Mammifères, sans passage par l'animal. Mais en-
suite, Kral et Dubard acceptent cette opinion que les formes de
Bacilles mobiles ne sont pas dues à des contaminations : (leur
apparition à date fixe, constante suivant certaines conditions de
culture, leur disparition et leur retour à volonté démontrent que
c'est une modalité du Bacille de Koch. » Et leur conclusion géné-
rale est celle-ci : «Les ramifications et les formes allongées qui
existent avec les mêmes caractères chez les trois tuberculoses,
malgré leurs caractères propres, nous autorisent à ranger la tuber-
culose dans la classe des Champignons filamenteux. Les caractères
morphologiques que nous avons réunis nous autorisent à nommer
Streptothrix tuberculosis l'agent de la tuberculose et à le ranger
dans la classe des Hyphomycètes, tout près de l'actinomycose. »
CHAPITRE IV
1. Rapports du Microbe de la tuberculose avec les principaux types de
Bactéries acido-résistantes {Champignon de la Timothée).
2. Croissance en Cladothrix des Bactéries acido-résistantes (Lenoux-
LEBARD, 1898).
9. Le Champignon de la tuberculose est une Mucorinée (S. DroBa, 1902).
A côté du Bacille de Koch et de ses variétés, existent différents
types de Bactéries très acido-résistantes, dont les principaux, Ba-
cille du beurre de Petri-Rabinowitsch, Bacille du fumier (Mæller),
Bacille de la Timothée, Bacille des Graminées II (Mæller), ont entre
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 143
eux, etavec le Microbe de la tuberculose, un grand nombre de carac-
tères communs ; Maæller, Lubarsch, A. Pettersson, E. Schütz nous les
montrent comme micro-organismes polymorphes, évoluant de la
forme bacillaire qui se multiplie par scission, vers la forme filamen-
teuse homogène ou granuleuse, sans cloisons, avec ramifications
vraies, munies de renflements terminaux. Nous donnons dans les
figures, reproduites d'après 0. Lubarsch, l'aspect réalisé par le Ba-
cille des Graminées II (Mæller) en culture puresuragar, au bout de
cinqjours.On peut voir, surl'une desfigures,lesgranulations éparses
dans le protoplasma clair du filament. Pour Lubarsch, le Bacille du
beurre de Lydia Rabinowitsch est plus long et plus fin que le Ba-
Fig. 9. — Bacille des Graminées II (Moeller). Culture sur agar vieille
de 5 jours, d’après O. Lubarsch.
cille de la Timothée, et les ramifications en sont plus nombreuses.
Les milieux glycérinés sont favorables au développement de tous
ces micro-organismes. [ls végètent en conglomérats de consistance
plus ou moins sèche, d'aspect ridé ou mamelonné. Ils ont un pou-
voir chromogène marqué; leurs colonies varient du jaune au rouge.
Nous avons vu que le Bacille de la Timothée avait, d'après Bulloch,
la même composition chimique que le Bacille de la tuberculose
des Mammifères.
Mais d’une part les Bactéries acido-résistantes, le Bacille de Koch
mis de côté, manifestent une grande rapidité de développement,
même à température peu élevée, et ensuite un pouvoir pathogène
peu accentué; les lésions tuberculiformes qu'elles peuvent provo-
quer n'ont pas tendance à la généralisation. En réalité, Krompecher,
Klein, Friedrich et Nôüsske, ont obtenu par ensemencements suc-
cessifs nombreux, et en dehors de tout passage par l'animal, une
variété de Bactéries d'origine tuberculeuse authentique, se dévelop-
pant rapidement dans les milieux de culture, et dépourvus de
144 G. BOUDIN
virulence pour le Cobaye en inoculation sous-cutanée, ou intra-
péritonéale, même à fortes doses. Nous verrons, dans les expériences
de Babès et Levaditi, Schulze et Lubarsch, Cornil et F. Bezancçon,
relatées dans le chapitre suivant, que, très souvent, la tuberculose,
en inoculation locale, ne se généralise pas nécessairement. Dans
80 pour 100 des cas, dit Lubarsch, d'inoculation expérimentale à
des Lapins, la tuberculose n'a pas progressé. Après injection du
Bacille de la Timothée, il y a production de cellules géantes évo-
luant vers la caséification, indiscernables de celles que provoque
le Bacille de la tuberculose.
D'autre part Mæller, dans son rapport au Congrès de Londres,
dit qu'il aurait isolé, de nodules de tuberculose bovine, un Bacille
acido-résistant, donnant à 37° des colonies visibles au bout de
24 heures, et capable de tuer le Cobaye en créant des lésions de
tuberculose. Enfin le Bacille de la tuberculose humaine etle Bacille
des Graminées IT, par passage chez les animaux à sang froid, arri-
vent à réaliser le même type morphologique de la tuberculose pis-
ciaire (Freymuth).
En résumé, et bien que les Bacilles acido-résistants saprophytes
n'aient pas encore été transformés expérimentalement en variétés
très virulentes, entre eux et le Bacille tuberculeux et ses variétés
pathogènes ou non pathogènes, à croissance tardive ou précoce, il
ne semble pas y avoir plus de différence au point de vue botanique,
qu'il n'en existe par exemple entre les variétés ou espèces, inofften-
sives ou virulentes, des Aspergillus.
En 1898 et 1900, Ledoux-Lebard fait paraître deux mémoires sur
le développement et la structure des colonies des Bacilles de la tu-
berculose des Mammifères, des Oiseaux, des Poissons, et du Ba-
cille de la Timothée. Pour cet auteur, tous ces micro-organismes
ont des caractères communs, et avec le genre Oospora, auquel
appartiennent, suivant certains auteurs, les Discomyces, et avec le
genre Cladothrix, parce qu’ils ne possèdent que les fausses rami-
fications de la Cladothrix dichotoma {(Cohn) qui est l'espèce type du
genre, et non la ramification vraie des Discomyces. Et Ledoux-Le-
bard « propose de leur donner le nom générique de Sclerothrix
créé par Metshnikov, mais de transporter ce genre de la place que
lui avait assignée Metshnikov auprès des Streptothrix, à une autre,
à côté des Cladothrix. » La croissance des Bacilles tuberculeux et
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 145
acido-résistants saprophytes s'effectue d'après les observations de
Ledoux-Lebard conformément à la description que Cohn donne du
mode de ramification de la Cladothrix : «le filament se sépare en
son milieu, en une moitié supérieure et une moitié inférieure.
Tandis que les deux moitiés s’accroissent à leur extrémité, l'infé-
rieure s'allonge par croissance directe, en se plaçant à côté de la
supérieure qui est ainsi rejetée sur le côté, comme une branche
latérale. La forme en + se produit lorsque la moitié supérieure
s'allonge à ses deux extrémités. » Les Bacilles se ramifiant selon
le mode en Cladothrix constituent une file irrégulière, un filament
où l’on distingue deux zones : une zone centrale composée par les
éléments bacillaires, une zone extérieure et intercalaire qui con-
stitue une gaîne, par l'intermédiaire de laquelle les filaments se
groupent en faisceaux et forment un réseau à mailles de plus en
plus étroites à mesure que la culture se développe.
Mais il est à remarquer que Ledoux-Lebard a observé la crois-
sance du Bacille tuberculeux aviaire et du Bacille de Koch en
goutte pendante, et en se servant surtout de liquide nutritif peu
concentré, de simple bouillon de viande (formule de Ferran), où
les éléments bacillaires ont plutôt tendance à évoluer vers des
formes régressives ciliées et mobiles, que vers les formes ramifiées
supérieures; et l’auteur lui-même s'exprime ainsi à propos de la
croissance du Bacille des Mammifères : «Nous n'avons pu suivre
dans la goutte pendante les phénomènes ultérieurs du dévelop-
pement et la formation des colonies, comme nous l’avions fait pour
le Bacille tuberculeux aviaire. Les courts filaments ramifiés font
place, au bout de quelque temps, à de petites Zooglées, dont la
structure ne peut être déterminée, même sur les préparations co-
lorées, à cause de l’entassement des Bacilles. » De plus, Ledoux-
Lebard aurait observé assez fréquemment tant sur des cultures
de tuberculose humaine que sur des cultures de tuberculose
aviaire des apparences de vraies ramifications. «€ Kaut-il attri-
buer, dit-il, au Bacille tuberculeux, deux modes de ramification ;
celui que nous avons décrit et qui est la règle, et un autre mode
exceptionnel, caractérisé par de vraies ramifications? » Pour
lui, iln'y aurait qu'apparence de vraie ramification ; ou les éléments
bacillaires sont restés en étroit contact, ou, gràce à leur brieveté,
«( les Bacilles peuvent facilement être déviés à angle droit à l'inté-
Archives de Parasitologie, XI, n° 1, 1906. 10
146 G. BOUDIN
rieur de la gaine, s'allonger ensuite et donner un rameau latéral
qui paraît être une vraie ramification. » Et les figures données par
l'auteur, simulant une ramification vraie, ne laissent pas que de
laisser dans l’indécision. Mais, si la critique formulée plus haut sur
les conditions dysgénésiques imposées au micro-organisme peut
être valable, s’il n’est pas juste, dans le développement d'un micro-
organisme de ne pas tenir compte d’une de ses parties consti-
tuantes, c'est-à-dire de la gaine, et si l'on s’en rapporte aux
nombreuses figures des auteurs déjà cités, prouvant sur des articles
filamenteux, à structure homogène, l'existence de ramifications
vraies, il faut évidemment ranger les Bacilles de la tuberculose, et
les Bacilles acido-résistants saprophytes dans le genre Streptothrix
et non dans le genre Cladothrix.
Mais nous voyons que la discussion a lieu en termes identiques,
pour la classification de chacune des espèces du groupe des Dis-
comyces. Et, dans la série de leurs synonymies, constamment figure
comme plus ancienne désignation le nom de genre Cladothrix.
Comme Discomyces bovis, Discomyces farcinicus, Discomyces aste-
roïdes, les Bacilles tuberculeux et acidorésistants auront pu être
envisagés dans une phase de leur développement comme Clado-
thrix. Cette instabilité des termes de classification répond en réa-
lité à l'instabilité même de la morphologie de tous ces micro-orga-
nismes, capables d’une part de croître en mycélium ramifié,
d'autre part de se résoudre en articles de très petite taille, se
multipliant par scission.
Nous devons enfin rappeler ici les observations de Droba, de
Cracovie, que nous avons seulement signalées plus haut, et qui
confirmeraient les observations de Dubard sur les phénomènes de
conjugaison manifestés par le micro-organisme de la tuberculose
en milieux artificiels. Droba n'a fait à ce sujet qu'une communica-
tion provisoire. Cet auteur rappelle la pléomorphie du Bacille tu-
berculeux. Lesformesramifiées ont été trouvées spécialement dans
des cultures bien développées et aussi dans le crachat et le contenu
des cavernes de tuberculeux. Craig et Marpmann les ont en effet
constatées en ces dernières circonstances. On ne saurait cependant,
d'après Droba, ranger le micro-organisme dans les Streptothrix.
Au cours de ses recherches, contrôlées par le Pr Rostafinski, il a
observé la croissance mycélienne du Microbe de la tuberculose ;
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 147
on peut distinguer, dans le thalle, des branches principales épaisses
et longues (stolons) portant des rameaux courts et minces (rhi-
zoïdes). Le thalle n’est pas cloisonné. Les grains réfringents con-
tenus à l’intérieur des branches mycéliennes seraient des goutte-
lettes graisseuses, se dissolvant dans l’éther. Souvent au sommet
d'hyphes aériennes (stylospores) se forment des conidies ressem-
blant à celles des Chaetocladiacées. Les conidies germent dans
différentes directions. De plus, Droba a pu observer la formation
de zygospores. Deux rameaux renflés, d'abord juxtaposés, puis
écartés l’un de l’autre, se courbent et se réunissent en forme de
tenailles, comme chez la Mortiérelle. Après la copulation et la for-
mation de l'œuf, les deux rameaux qui le portent développent des
ramuseules très nombreux qui l'entourent. L'œuf peut germer,
s'allonger en tube qui se ramifie au sommet et forme des conidies
groupées d’une façon typique. « En raison de ces résultats, dit
l'auteur, je puis affirmer, en‘toute assurance, que le virus de la
tuberculose est un Champignon appartenant aux Zygomycètes; en
vérité, il doit être rangé dans les Chætocladiacées, parmi lesquelles
il forme un nouveau genre, que je me réserve de désigner dans le
travail détaillé qui suivra cette communication provisoire. »
CHAPITRE V
1. Les formes actinomycosiques du Champignon de la tuberculose des
Mammifères et des Oiseaux.
2. Les formes actinomycosiques des Champignons acido-résistants sapro-
phytes : du Champignon de la Timothée et de différents Discomyces.
3. Valeur des foyers à massues rayonnées en classification.
Nous allons maintenant exposer les recherches expérimentales
démontrant les formes actinomycosiques du Bacille tuberculeux
en vie parasitaire, et comparativement, les mêmes formations pro-
duites par les principaux types de Bactéries acido-résistantes, par
difiérents Discomyces comme Discomyces asteroïdes, Discomyces far-
cinicus.
Koch fait remarquer la disposition souvent singulière des Bacilles
tuberculeux dans la cellule géante. Les noyaux forment une
couronne à la périphérie de celle-ci; et si les Bacilles sont nom-
breux, on voit ces derniers comme émaner du centre de la cellule,
irradier la périphérie, et s’insinuer dans les intervalles laissés libres
148 G. BOUDIN
entre les noyaux. La figure 30 page 255, de Straus (La Tuber-
culose et son Bacille), et empruntée à Koch, est bien représentative
de cet aspect.
Coppen Jones, le premier, trouve dansles petites masses caséeu-
ses de l’expectoration de tuberculeux cavitaires, des formations
rayonnées avec crosses périphériques, en tout identiques aux
massues que le Discomyces bovis manifeste en vie parasitaire.
Cependant, une différence, méritant d'être signalée, consistait en
la difficulté que l'auteur avait à suivre le filament mycélien dans
l'intérieur de la crosse du Microbe de la tuberculose. Mais, ainsi
que le font remarquer Friedrich, et Dalous, Coppen Jones n’a pas
coloré les filaments mycéliens eux-mêmes, et n’a fait ni inocula-
tion, ni culture à partir des formes actinomycosiques trouvées
dans les crachats des phtisiques. Elle n’appartiennent peut-être pas
en propre au Bacille de Koch : « Le fait nous paraît d'autant plus
possible, dit Dalous, que nous-même, ayant examiné un grand
nombre de fois des crachats et le produit de ràclage des parois de
cavernes, nous n'avons jamais trouvé de fibres élastiques hérissées
de crosses, comme en décrit Coppen Jones ».
Mais en 1897, Babès et Levaditi, au cours de recherches sur l'effet
local du Bacille de la tuberculose en différents tissus, injectent un
centimètre cube d'’émulsion de cultures de la Bactérie humaine, de
provenance différente, peu virulente, dans les méninges et la subs-
tance cérébrale, chez des Lapins. Le même résultat fut toujours
obtenu, si la culture avait conservé encore une certaine
virulence. Chez ceux des animaux, morts au bout de deux ou trois
jours par suite du traumatisme, l'examen microscopique des
méninges montre des Bacilles tuberculeux transformés en fila-
ments ondulés, pressés les uns contre les autres en paquets, à
l'intérieur de leucocytes agglutinés les uns aux autres. Au bout de
de huit ou dix jours, (les gros paquets de Bacilles filamenteux,
ramifiés, tendent à prendre une disposition radiaire, et sont en-
tourés d'une zone de leucocytes à noyaux fragmentés et renfermant
des Bacilles ». Puis au bout de 30 jours, dans les méninges de
Lapins sacrifiés, les paquets de Bacilles présentent une zone cen-
trale formée « d'un réseau de filaments ramifiés ayant l'aspect
d'un mycèle de la grosseur du Bacille de la tuberculose, ou un peu
plus épais et émettant des ramifications terminales granuleuses,
«
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 149
un peu épaisses vers la périphérie. Ce mycèle central est entour
par une zone très régulière de crosses, souvent en rapport avec les
ramifications terminales des Bacilles, ne se colorant pas par le
procédé Ehrlich et ayantla dimension des crosses de l'Actinomyces. »
Comme pour l'Actinomyces la terminaison des filaments dans la
massue se fait parfois par un petit bouton. La figure 10, reproduite
d’après Babès, montre cette disposition. Elle se rapporte à une pré-
paration obtenue sur
une pièce datant de
trente jours après
l'inoculation, sur la
figure originale, les
filaments bacillaires
ramifiés sont colorés
en rouge par la mé-
thode d'Ehrlich, et les
crosses colorées en
violet pâle par le bleu
deméthylène.Eneftet,
tandis que le mycèle
central se colore par
l'Ehrlich comme les
Bacilles de Koch iso- Fig. 10. — Une colonie tuberculeuse sous forme d’Ac-
lés, les crosses de tinomyces, d'après Babès et Levaditi. — €, cros-
l'Acrinomyces tuberou- … #59; leuroertés polraueléaies avec des Basile
5 : s mycéliens de la
leux sont mises en zone centrale; {, tige terminée par un bouton
dans la crosse. X 900.
évidence, de même
que celles de l’Actinomuyces bovis par la safranine anilinée et trai-
tement consécutif par l’iode ioduré et alcool : elles sont colorées
en rouge carmin (procédé de Babès). Comme les capsules, que
Metshnikov a décrites aux Bacilles tuberculeux isolés, inoculés à
la Gerbille d'Algérie et au Spermophile, les crosses résistent bien
à l’action des acides et des alcalis; elles peuvent s’isoler de la
colonie. On les trouve incluses alors dans des grandes cellules du
foyer actinomycosique. D'après Babès et Levaditi, elles seraient
composées d'une sorte de cellulose; mais ils donnent à ces for-
mations périphériques un rôle spécial; elles représenteraient des
épaississements protecteurs des spores du microphyte. Quoi qu'il
150 G. BOUDIN
en soit, Babès et Levaditi notent une telle ressemblance des for-
mations rayonnées de l'Actinomyces bovis et du Bacille tubercu-
leux, que, si la culture pure ayant servi à l'infection et le déve-
loppement du processus n'étaient pas là comme un témoignage
de l'infection pure : («ils auraient pu penser à une infection
combinée de l'actinomycose et de la tuberculose. » Leur conclu-
sion est celle-ci : « On doit placer le Bacille de Koch dans le même
groupe que l'Actinomyces, c’est-à-dire, dans une famille intermé-
diaire aux Bactériacées et aux Ascomycètes. »
En 1897, et sans connaître les recherches de Babès et Levaditi,
Friedrich (Leipzig) publie un mémoire sur les formations rayonnées
du Bacille tuberculeux dans le corps des animaux. En 1899, le même
auteur, en collaboration avec Nôüsske, fait paraître un second mé-
moire sur la même question : la localisation des Bacilles tubercu-
leux, avec foyers à massues, dans les viscères des animaux, après
inoculation intra-artérielle (ventricule gauche). Nous pouvons
réunir ici ces deux séries de recherches qui donnent des résultats
identiques. C’est tout inopinément et en cherchant à éclaircir par
l’'expérimentation certains faits touchant la pathogénie des tuber-
culoses chirurgicales, que Friedrich constata, à la suite d'injections
intra-artérielles, le développement dans les tissus des formations
rayonnées du Bacille tuberculeux, tout à fait analogues à celles
que l’Actinomnyces bovis développe en vie parasitaire. Dans leurs
travaux, les auteurs ont employé pour l’inoculation la voie intra-
artérielle ; et c'est à cette technique qu'ils attribuent en partie la
constance des résultats obtenus; dans la carotide droite d'un La-
pin, on fait pénétrer, après ligature du bout périphérique de ce
vaisseau, une fine canule mousse, longue de 7 centimètres, jusque
dans le ventricule gauche. L'opération doit être faite avec grand
ménagement et aseptiquement; ensuite on injecte à l'aide d’une
seringue stérilisée bien adaptée à la canule, de 0 ce. 2 à 0 ce. 5
d’une émulsion de Bacilles tuberculeux humains. La colonieestpour
cela très finement broyée et diluée dans une solution physiologique
de chlorure de sodium.
Les cultures de tuberculose humaine, recueillies directement ou
après passage sur le Cobaye étaient de provenances différentes.
Elles étaient âgées de trois à six semaines et bien virulentes. Pour
conserver ou augmenter leur virulence, les auteurs avaient recours
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 451
à l'inoculation au Cobaye; ils ont en effet remarqué qu’au bout de
réensemencements en série sur bouillon glycériné et glycosé, les
Bacilles arrivaient à perdre parfois toute leur virulence.
Les expériences portent sur 130 animaux, dont 12 Cobayes, 2
Poules, 116 Lapins. Ces derniers étaient de provenance, de race,
d'âge différents. Ils ont succombé à l'infection en un temps variant
de 24 à 86 jours. D'une façon constante, dans les deux ou trois pre-
mières semaines qui suivent l'injection intra-artérielle, peut être
constatée une diminution marquée du poids de l'animal. Ce symp-
tôme ne s’observe que sous l'influence de Bacilles virulents. Si
l'on emploie des cultures de faible virulence, ou des substances
infectieuses provenant d'abcès froids, ou de ganglions lymphati-
ques, ou si l’on a recours à la voie d'injection intra-veineuse ou
sous-cutanée, ce signe ne s'observe pas. D'après les auteurs, l’amai-
grissement, qui suit immédiatement l'infection par voie intra-ar-
térielle, serait dû à l'envahissement simultané par le virus de
plusieurs organes importants. Le type anatomo-pathologique réa-
lisé ainsi est tout à fait particulier : malgré sa vascularisation, la
rate, par exemple, dont l'artère, ramification du tronc cœliaque,
doit lui apporter directement les Bacilles, reste intacte jusqu'à la
mort de l'animal : elle n'est pas augmentée de volume; on ne peut
y déceler ni tubercules microscopiques, ni Bactéries colorables.
D'autres animaux inoculés avec des fragments de ce viscère pris
sur des sujets injectés par voie intra-artérielle, n'ont manifesté
aucun signe de maladie. Friedrich et Nôüsske font l'hypothèse du
rôle bactéricide important de la rate (1). De même le foie ne con-
tient que de rares tubercules, et pour les expérimentateurs, leur
apparition n’est pas en rapport direct avec l'infection intra-arté-
rielle ; il y a là infection métastatique.. Les reins, après injection
x
de Bacilles peu virulents, même à doses considérables, ne mani-
(1) Nous devons citer, ici, des observations comparables de F. Bezaniçon et sur
lesquelles il s'appuie pour rappeler les difficultés que l’on éprouve à mettre en
évidence la nature bacillaire de certaines lésions, d’origine probablement tuber-
culeuse. C’est ainsi que des ganglions du cou hypertrophiés, présentant à l’exa-
men microscopique des lésions, avec structure typique de follicule tuberculeux,
ne contenaient pas de Bacilles colorables, et que les résultats de l’inoculation res-
tèrent négatifs ; ( depuis longtemps, ajoute l’auteur, j'avais été d’ailleurs frappé
de ce que, sur les rates d'individus morts de granulie, on ne parvient pas à trou-
ver de Bacilles dans les nodules miliaires, alors qu’on en trouve dans les foyers
caséeux voisins. Tous ces faits doivent être groupés... » (Revue de La Tuberculose,
février 1906, p. 69).
152 G. BOUDIN
festent aucune hypertrophie, mais des dépressions cicatricielles à
leur surface et une dégénérescence scléreuse de la substance cor-
ticale sans Bacilles colorables. Le résultat est identique parfois
après l'injection intra-artérielle d'une forte dose (2 centimètres
cubes) de l'émulsion concentrée de Bacilles tuberculeux très viru-
lents. Il peut même dans ce cas y avoir absence complète d'infection
et les auteurs se demandent si l'animal ne serait pas capable de
mieux résister à de hautes doses de Bacilles virulents qu'à des do-
ses minimes. Toutefois ils ne cherchent en rien à objectiver ces
résultats divers, de leur avis propre, encore trop particuliers. Mais
d'une façon générale aux doses de 0 ce, 2 à 0 ce, 5 d'émulsion de
Bacilles tuberculeux d'une virulence moyenne, les organes les plus
généralement envahis et montrant des nodules tuberculeux sont
la substance corticale des reins, l'iris, les poumons, le cerveau.
Dans les reins du Lapin, les tubercules ont plutôt tendance à éva-
luer vers la sclérose. C’est là surtout que furent observées les for-
mations rayonnées. On pourrait s'étonner, disent Friedrich et Nôss-
ke, que celles-ci n'aient pas été observées plus souvent; mais, c'est
grace à la technique spéciale de coloration, qu'ils ont pu les ob-
server; là où les méthodes de Koch, Ehrlich, Ziehl-Neelsen ne
montrent que des bâtonnets isolés, la méthode de Friedrich et Nôüss-
ke, montre des Bactéries parfois disposées bout à bout et des mas-
sues périphériques ayant pris la teinture de différenciation. Les pré-
parations sont fixées dans l'alcool, ou une solution de sublimé, ou
dans le formol et incluses dans la paraffine. Les coupes sont tein-
tes suivant cette technique : Colorer au bleu de Victoria. Chaufter
légèrement et laisser refroidir. Plonger dans la solution de Lugol
pendant deux minutes. Laver à l’eau et à l'alcool. Décolorer à l'a-
niline. Laver à l'alcool et à l'eau. Colorer pendant 2 minutes avec
la solution d’éosine à 2 p. 100. Laver à l’eau. Colorer au bleu de
méthylène alcalinisé avec du carbonate de lithium. Laver à l'alcool
Eclaircir au xylol. Monter au baume du Canada. Dans cette com-
binaison de la méthode de Gram avec la coloration à l’éosine, les
Bacilles sont colorés en bleu, les massues en rouge par l'éosine,
et les tissus environnants en bleu clair. A l’aide d'un tel procédé
de teinture, les foyers tuberculeux donnent l'apparence typique de
foyers actinomycosiques. D'une facon très caractéristique, on peut
voir, mais assez rarement, le rapport direct d'une Bactérie avec la
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 153
massue qui la prolonge. Mais si les Bacilles de la zone centrale peu-
vent parfois être placés bout à bout et figurer ainsi un filament
mycélien, ils donnent plus souvent l'apparence de bâtonnets inclus
dans une masse commune réalisant ainsi un aspect de Zooglée. Frie-
drich et Nôüsske n’ont donc pas obtenu des résultats aussi nets que
ceux de Babès et Levaditi, sur la disposition en mycélium ramifié
de la zone centrale des foyers tuberculeux. L'interprétation est par-
ticulièrement difficile, disent les auteurs, car dans le cas du Bacille
tuberculeux, il s'agit d'un micro-organisme d'un 1/3 plus petit que
le Champignon de l’Actinomycose. En moyenne, dans le cas de la
tuberculose, les massues atteignent une longueur d'environ 20 y.
Jamais elles ne se sont montrées colorables d'après les méthodes
de teinture du Bacille de Koch, mais peuvent être colorées
comme les massues d’actinomycose vraie. Les expériences sur
la constitution chimique des massues n'ont pas donné de résultats
précis; toutefois les crosses tuberculeuses sont moins facilement
détruites que les crosses d’Actinomyces, dans les stades primaires
de leur développement, par les solutions alcalines et les sucs di-
gestifs. Elles ne sont pas modifiées par le suc gastrique. mais gon-
flent facilement surtout celles de l'Actinomyces bovis, dans la try-
psine. Mais l'hydrolyse vraie des unes et autres formations, tu-
berculeuses et actinomycosiques, n’a jamais été observée. Les
loyers peuvent n être composés que de quelques Bacilles colorables
entourés d'un grand nombre de massues. Enfin dans les cultures
qui servaient aux injections, Friedrich et Nôsske n'ont jamais vu
de formes ramifiées : ils ne nient pas qu'elles puissent apparaître ;
en eflet, il s'agissait dans leurs expériences de cultures jeunes de
tuberculose humaine. Les formations en massue, en vie parasi-
taire sont donc indépendantes de la présence des formes ramifiées
dans les cultures; mais elles sont en rapport direct avec la viru-
lence et la vitalité de celles-ci. En effet des colonies stérilisées n’ont
jamais déterminé l'apparition de foyers actinomycosiques. Plus
les cultures sont jeunes et virulentes, plus l'invasion bacillaire se
généralise rapidement et plus vite apparaissent les formations
rayonnées : c’est ainsi qu'elles se montrent de façon plus précoce
après l'injection intra-artérielle qu'après l'injection intra-veineuse
:Le moment le plus favorable pour l'examen est la période comprise
entre le 20e et le 30° jour après l'injection intra-artérielle. Ce n’est
154 G. BOUDIN
qu'exceptionnellement que les massues ont pu être décelées au
56° jour de l'infection. Dans la tuberculose comme dans l’actino-
mycose, au fur et à mesure que la maladie évolue et manifeste des
foyers métastatiques, on trouve bien dans le pus, des Bacilles, ou
des fragments mycéliens, mais sans massues; les foyers actinomyco-
siques se présentent donc dans la phase primitive de l'infection. I
faut d'autre part, pour qu'ils apparaissent, que les animaux soient
en bon état de santé, capables de résister à l’envahissement des
micro-organismes. Enfin, il estindispensable qu'il y ait production
d'embolies bacillaires, pour obtenir la formation de crosses ; cel-
les-ci se produisent aux dépens, non de Bacilles isolés, mais de
petits amas de Bactéries.
En conséquence, les formes actinomycosiques sont un phéno-
mène transitoire dans la vie parasitaire du microbe de la tuber-
culose; les massues sont l'indice de sa réaction contre les obsta-
cles soit d'ordre chimique, soit d'ordre mécanique que les organis-
mes envahis opposent à son développement.
Puis Friedrich et Nôsske font des expériences comparatives avec
différents Champignons. D'abord ils s'attachent à réfuter les criti-
ques qu'on pourrait leur faire; ils ont opéré avec des cultures
pures, puisqu'ils ont réussi régulièrement à produire une tubercu-
lose miliaire typique en injections intra-veineuse et intra-abdomi-
nale, tant chez des Cobayes que chez des Lapins. Et de leurs lésions,
ils ont obtenu des cultures pures de tuberculose. Des cultures de
Bactéries de Koch, contaminées par des Moisissures, inoculées au
Lapin, l'ont fait mourir de tuberculose chronique ; dans les orga-
nes, ne purent être mis en évidence ni formations rayonnées
tuberculeuses, ni mycèles de Moisissures. Le Lapin inoculé avec
des cultures de tuberculose mélangées d’Actinomyces bovis est mort
de tuberculose miliaire aiguë, avec foyers actinomycosiques typi-
ques développés par des. Bacilles de Koch; dans les reins, les
auteurs n'ont pu trouver que quelques fragments difficilement colo-
rables de mycélium d’Actinomyces bovis, et s'ils ont pu obtenir des
cultures pures de tuberculose, ils n’ont pu en avoir d'actinomy-
cose. Des cultures pures d'Actinomyces bovis émulsionnées n'ont
pas donné de formations rayonnées. Le mycèle est détruit en quel-
ques jours; il fut impossible d'isoler le micro-organisme en cul
ture, à partir des lésions. Une seule fois, en injection intra-périto-
La
CHU
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 155
néale, Friedrich et Nôüsske purent voir des foyers à massues
périphériques. Ces foyers inclus en de petits tubercules semés sur
la séreuse péritonéale, étaient de dimensions très réduites, peu
colorés et ne suggéraient pas l’idée d’un envahissement actif et
progressif par un micro-organisme vigoureux.
En injection intra-artérielle, Streptothrix asteroïdes, Bacterium
tub. avium, n’ont pas donné de foyers à formations radiées. Asper-
gillus fumigatus, des Mucorinées, en injections intra veineuses,
donnèrent chez le Lapin des formations rayonnées. Mais on ne
pouvait confondre celles-ci avec celles de l’Actinomyces Bovis, ou de
Bacterium tuberculosis. En eftetelles présentaient des réactions dif-
férentes vis-à-vis des teintures, etleurs localisations sur les viscères
étaient différentes.
L'injection intra-artérielle mixte de Bacilles de Koch et de Strep-
tocoques a amené la mort de l'animal très rapidement; des
formes actinomycosiques ne purent être décelées. L'injection mixte
de Bactéries tuberculeuses et Staphylocoques dorésa étésuivied'un
développement de foyers à massues radiées dans le foie, dès le cin-
quième jour après l'injection; mais à la suite de la laparotomie faite
pour l’excision d'un fragment du foie, l'animal est mort de péri-
ritonite à Staphylocoques, 8 jours après l'opération, c'est-à-dire
13 jours après l'injection : les foyers actinomycosiques qui auraient
dû progresser dans les reins et le foie ne s'étaient pas développés;
ils donnaient exactement l'aspect qui avait été observé au 5° jour.
De toutes ces expériences comparatives, Friedrich et Nôüsske con-
eluent que les formations actinomycosiques observées par eux
appartiennent bien en propre aux Bacilles de la tuberculose.
En 1898, Cornil, F. Bezançon et Griffon répètent sur le Lapin et
dans les mêmes conditions, les expériences de Babès et Levaditi.
Ils se sont servi, pour l'injection subdurale (1 cc), d’une culture
vieille de deux mois, de tuberculose humaine en bouillon glycériné.
Sous la pie-mère épaissie, ils ont trouvé dans les lésions tubercu-
leuses localisées de 12 à 15 jours, des cellules géantes occupant la
cavité de vaisseauxsanguins dilatés. C’est là qu'ils ont observé des
formes actinomycosiques du Bacille tubereuleux : « Dans un cas
en particulier, observé chez un annimal sacrifié 15 jours après l'ino-
culation, les Bacilles forment de véritables touffes, partant d'un
centre et rayonnant de tous les côtés à la périphérie, où ils se ter-
156 G. BOUDIN
minent par des crosses. Bacilles et crosses se colorent exclusive-
ment par la méthode d’Ehrlich ou de Ziehl. » Les auteurs n'ont pu
en effet obtenir une coloration de différenciation des crosses. Les
foyers actinomycosiques ne se sont pas développés dans des vais-
seaux de néoformation comme Babès et Levaditi le pensent, mais
bien dans les vaisseaux sanguins préexistants, où les Bacilles ont
déterminé des embolies. Ainsi, l'opinion de Friedrich et Nüsske
que les foyers actinomycosiques se forment aux dépens d'amas
bacillaires trouve appui dans les expériences de Cornil et F. Be-
zancon. Les inoculations furent faites avec des cultures de Bacilles
peu virulents; les tubercules ont guéri, et on ne pouvait en trouver
trace au bout de 30 à 58 jours. Cornil, F. Bezançon et Griffon n'ont
pu constater par l'inoculation directe de cultures de tuberculose
dans la carotide interne du Lapin, de foyers microbiens à forme
actinomycosique.
En 1899, O0. Schulze (Magdebourg), sous la direction de O0. Lu-
barsch (Rostock), publie un mémoire sur les formes de Champi-
gnon rayonné du Microbe de la tuberculose, et 0. Lubarsch lui-même
donne communicafion d'un travail d'ensemble sur les Champi-
gnons rayonnés.
Dans ses recherches, O0. Schulze s'est servi de cultures de tuber-
culose humaine de virulence variable et d'origine différente ; les
unes tuaient le Cobaye, en inoculation sous-cutanée, en cinq
semaines ; les autres le tuaient, à doses considérables, et en ino-
culation intra-péritonéale, en sept semaines: il en est qui n’ont
pas amené la mort de l'animal. Avec toutes ces cultures, l’auteur
a pu obtenir la formation de foyers actinomycosiques. Toutefois,
ceux-ci se sont montrés d'une façon plus précoce, après l'injection
des cultures les moins virulentes.
Deux séries d'expériences ont été instituées. Dans la première
série, l'infection était réalisée, selon le procédé de Friedrich, par
la voie intra-artérielle. Dans la deuxième série, Schulze eut recours
à l’inoculation locale dans certains viscères : cerveau, rein, foie,
mamelle, testicule. Mais, au lieu d'introduire dans ces organes une
émulsion de Bacilles tuberculeux, on y faisait pénétrer, après
section de la substance des parenchymes, au moyen d'une aiguille
de platine flambée, de très petits conglomérats prélevés sur des
colonies de tuberculose ; la quantité de Microbes, ainsi introduite,
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 19
est moins considérable que dans la méthode de Babès et Levaditi.
Les fragments des organes infectés sont excisés à des époques plus
ou moins éloignées de la date d'inoculation ; ils sont fixés dans le
formol à 10 p. 100, ensuite inclus dans la paraffine. Les coupes
furent colorées différemment, ou par la méthode de Ziehl-Neelsen,
ou par la méthode de Gram-Weïgert, ou celle de Birch-Hirschfeld
(hématoxyline, fuchsine phéniquée, solution de Lugol ; différen-
ciation avec l'alcool picriqué) utilisée pour la coloration de l’A cti-
nomyees bovis, ou par la méthode de Friedrich.
Après les injections intra-artérielles chez le Lapin, le même
type anatomo-pathologique, décrit par Friedrich, fut reproduit :
la rate et le foie peuvent rester intacts. Les organes les plus cons-
tamment envahis sont la substance corticale des reins, le cerveau,
l'iris, la capsule adipeuse de l'orbite; et c'est dans ces organes que
l'auteur put voir les formations rayonnées. Elles n’apparurent pas
avant le 14° jour. Mais contrairement aux données de Friedrich,
elles furent encore trouvées assez fréquemment du 33 jusqu'au
59e jour.
Après les injections subdurales, les foyers actinomycosiques
furent apparents le plus habituellement du 14e au 16%e jour. De
même, dans les reins. Dans la mamelle, après 25 jours, les foyers
affectent deux dispositions; ou bien la masse principale consiste
en bâtonnets qui possèdent des massues assez petites, ou bien la
formation rayonnée n’est composée que de longues et épaisses
massues, se colorant facilement par la fuchsine phéniquée. C’est,
dans le foie et dans les testicules, que les formations rayonnées
se sont montrées de la façon la moins apparente et la moins cons-
tante.
D'une facon générale, les formations à massues peuvent appa-
raitre à partir du 14e jour qui suit l'injection et jusqu'au 59me
jour, et dans cet intervalle d'environ quarante jours, l'aspect des
foyers change avec leur âge. Tout d’abord, et ainsi que l’ont cons-
taté Babès et Levaditi, les conglomérats bacillaires sont formés
d'éléments placés dans une direction principale; on dirait une
foule de petits Poissons nageant dans une même direction. Puis à
partir de la 13e journée, on observe que les éléments bacillaires
de la périphérie se disposent en rayons perpendiculaires à l'axe
principal du foyer. Ils s’allongent en filaments s'épaississant à la
158 G. BOUDIN
périphérie ; les rayons augmentent de volume; à première vue, on
dirait presque qu'il s’agit là, tant l’évolution en est régulière, de
phénomènes de croissance normaux. Mais avec le développement
des rayons, la zone centrale, bacillaire et filamenteuse, disparaît,
devient incolorable par le Ziehl, et finalement les foyers rayonnés
sont exclusivement composés de massues. Ce n’est que dans quel-
ques cas, et au début de l'infection, qu'il est possible d'obtenir
des cultures pures de tuberculose à partir des organes contenant
de tels foyers. Les éléments bacillaires et filamenteux du centre dis-
parus, les massues périphériques prennent une apparence hyaline
et se dissocient en fragments résistants. Les éléments de la zone cen-
trale, etles massues peuvent, surtout au début, prendre la même
coloration, d’après la méthode de ZiehIl-Neelsen, ou d’aprèscelle de
Gram-Weigert. Toutefois la méthode de Ziehl peut ne pas teindre
les massues, et ainsi les laisser invisibles. La méthode de Gram:
Weigert donne des résultats plus constants. Dans la suite, les
crosses exigent une coloration de différenciation. Et, d'une facon
générale, on ne saurait établir une méthode de coloration spécifique
des massues, pas plus dans la tuberculose que dans l'actinomycose. Dans
les deux cas, lorsqu'elles ont acquis de grandes dimensions, elles
deviennent très réfringentes, tandis qu'il faut les colorer pour les
voir, lorsqu'elles sont de formation récente. Elles sont insolubles
dans l’eau, l'alcool, les alcalis forts et les acides. Les unes et les
autres peuvent se calcifier. En résumé, il n’y a pas de différences
essentielles entre les crosses de l’actinomycose et celles de la tu-
berculose.
Dans 4% cas, après injection intra-artérielle et inoculation locale
(rein, cerveau.) de tuberculose aviaire, Schulze a observé des for-
mations rayonnées.
Après inoculation subdurale de Streptothrix Eppingeri, les lésions
du cerveau d'un Lapin, tué au bout de 17 jours en état de santé très
satisfaisant, montrèrent en coupe des foyers actinomycosiques par-
ticulièrement nets.
Pour Schulze, les formations rayonnées peuvent provenir aussi
bien d'éléments bacillaires isolés, que d’amas de Bacilles. En
effet, après injection intra-artérielle, on peut constater la pré-
sence de foyers actinomycosiques dans l’intimité[même des tissus,
aussi bien que dans la voie sanguine elle-même; dans la pre-
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 159
mière circonstance, ils ne sauraient donc provenir que de Bacilles
simples.
Les recherches de Lubarsch portent sur les différentes variétés
du Microbe tuberculeux. D'après les observations personnelles de
l’auteur, la Bactérie aviaire n’est bien que la Bactérie des Mammi-
Îères modifiée par une existence parasitaire différente. Elle-même,
peut donner et des colonies écailleuses et sèches, et des colo-
nies membraneuses humides et mamelonnées. C’est surtout dans
ces dernières, et non dans les colonies écailleuses que peuvent
être décelées les formes filamenteuses et ramifiées; dans une cul-
ture de tuberculose aviaire, vieille de trois mois, les formes mycé-
liennes à renflements terminaux étaient en telle abondance qu'elles
frappaient au premier examen. Comme Schulze, avec le Bacille
aviaire, Lubarsch a obtenu chez le Lapin des formes actinomyco-
siques, tant par l'injection intra-artérielle, que par l'inoculation
locale. Il a observé au 49ne jour'sur des coupes de nodules tuber-
culeux, des foyers, composés au centre, partie de filaments à rami-
fications vraies, partie de bâtonnets et de grains bacillaires, à la
périphérie de massues.
La variété microbienne se développant bien à 28-300, obtenue
par Lubarsch, par passage d'une durée de dix semaines du Bacille
tubereuleux humain sur la Grenouille, montre des ramifications
nombreuses dans les milieux de culture dépourvus d’albumine.
Après inoculation intra-rénale au Lapin, cette race bacillaire
était difficilement colorable dans les lésions locales qu'elle déter-
mina, et se présentait sous l'aspect de bâtonnets isolés. Un Cobaye
inoculé dans le péritoine avec la matière de cette lésion localisée,
devint tuberculeux. Les cultures faites au bout de six semaines,
avec les lésions de cet animal, étaient en tous points des cultures
de tuberculose des Mammifères. Inoculées au Lapin, elles repro-
duisaient à nouveau des foyers actinomycosiques typiques.
Une culture du Bacille tuberculeux de l'Orvet, donnée par
Moœæller, a montré des ramifications vraies ; elle n’a pas déterminé
chez le Lapin de formations rayonnées. Dans les lésions contenant
peu de cellules géantes et de cellules épithélioïdes, les Champi-
gnons étaient divisés en bâtonnets à peine colorables. Lubarsch
n'a pu ramener la Bactérie de l'Orvet à sa forme initiale de Bac-
térie de la tuberculose des Mammifères par les inoculations
160 G. BOUDIN
sériées. Il en conclut que ce micro-organisme obtenu par Mœæller
est plus profondément modifié que la Bactérie transformée par lui
à la suite du passage sur la Grenouille.
Une culture de tuberculose pisciaire, donnée par Kral (Prague),
montre des formes ramifiées nombreuses ; en inoculation locale
chez le Lapin (cerveau, rein), il n'y a pas eu formation de foyers
actinomycosiques. Un ensemencement n'a pu être obtenu des
lésions. Ces expériences montrent que les formations radiées ne
sont en rien des formes de dégénérescence, puisqu'on ne les obtient
que lorsque le Microbe, habitué à une croissance à température
élévée est inoculé à des Vertébrés à sang chaud, et non quand il
est inoculé à des Vertébrès à sang froid. De même, elles n'appa-
raissent pas lorsque le Champignon habitué à un développement à
basses températures est inoculé à des animaux à sang chaud. Et
d'autre part, des Bacilles tuberculeux stérilisés ne donnent jamais
lieu à un développement en foyers radiés. Ces derniers sont donc
bien l'indice d'un développement actif, mais d'un développement
avorté, dévié du type normal par la vie parasitaire.
Le fait que les formes filamenteuses et ramifiées avec intumes-
cences terminales apparaissent de plus en plus nombreuses dans
les cultures, au fur et à mesure que le Microbe abandonne sa vie
parasitaire et devient saprophyte, ce fait montre qu'elles sont des
phénomènes normaux de croissance et non des phénomènes de
dégénérescence. Dans les cultures, ne se montrent jamais des
formes en massue telles qu'elle se présentent dans les tissus. Les
intumescences qui terminent les rameaux se colorent comme le
Bacille tuberculeux, et n’ont pas la même évolution que les crosses.
Comme chez la plupart des Streptothrix, chez le Microbe de la
tuberculose les filaments se laissent facilement désintégrer en
bâtonnets et en grains. Le Microbe de la tuberculose est un Cham-
pignon ; il doit être classé dans le groupe des Champignons
rayonnés.
Lubarsch étudie en plus le micro-organisme de la Timothée. Il en
a isolé lui-même des cultures pures à partir de la Phléole des Prés,
recueillie en divers endroits aux environs de Rostock. Ces cultures
servirent à des inoculatious locales et à des injections intra-arté- -
rielles. Le développement de foyers actinomycosiques typiques fut
observé: les massues périphériques, d'abord petites, augmentent
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 161
progressivement ; puis leur résistance primitive à la décoloration
par les acides et l'alcool diminue; elles prennent enfin une
coloration différente de celle des filaments de la zone centrale. Ces
filaments eux-mêmes finissent par perdre la réaction caractéris-
tique de coloration par le Ziehl-Neelsen, et ainsi les formations
rayonnées du Microbe acido-résistant de la Timothée deviennent
en tout semblables, par les réactionschromatiques, les dimensions et
la disposition, à des grains d’Actinomyces bovis. « Cette analogie
est à la fin si grande, dit Lubarsch, qu'on constate même dans les
nodules ramollis, la formation de petits grains visibles à l'œil nu,
qui consistent seulement en formes actinomycosiques-et cellules de
pus qui y sont adhérentes. » Les foyers rayonnés apparaissent
d'une façon plus précoce que ceux de la tuberculose : ils se mon-
trent au dixième jour environ. Quand à l'aspect histologique des
lésions, il réalise, d'une façon étonnante, par la formation de cel-
lules géantes, et l’évolution de celles-ci vers la caséification, celui
des lésions tuberculeuses authentiques. Toutefois Lubarsch estime
que le Microbe du beurre de Lydia Rabinovitsch, à cause de sa mor-
phologie, de ses dimensions, est encore plus près que le Microbe de
la Timothée, du Champignon de la tuberculose. Le Bacille de la
Phléole n’est pas dépourvu de virulence pour l'Homme : Lubarsch
s'est inoculé à l’avant-bras, une particule de culture du Champi-
gnon de Timothée. Après dix jours, il y eut formation de saillies
verruqueuses, de consistance ferme, de coloration rosée. Le chirur-
gien qui en fit l’excision porta le diagnostic de tubercule anato-
mique. Pour Lubarsch, il est très probable que le Champignon de
la tuberculose et le Champignon de la Phléole des Prés sont au
moins les descendants d’une forme initiale unique.
Avec les Champignons acido-résistants du fumier (Mæller), des
Graminées Il (Mæller), du beurre (L. Rabinowitsch), Lubarsch a
obtenu dans les tissus des foyers rayonnés, apparaissant toutefois
d'une façon plus précoce qu'après injection ou inoculation du Mi-
: crobe tuberculeux. Avec le Streptothrix Eppingeri, dont les filaments
ramifiés se dissocient si facilement en éléments bactériens, et dont
le mode de croissance est en tout semblable à celui des Microbes
tuberculeux et pseudo-tuberculeux, l’'expérimentateur a constaté,
après inoculation au Lapin, l'apparition de formes actinomyco-
siques. La figure XI, reproduite d'après 0. Lubarsch, montre l’une
Archives de Parasitologie, XI, n° 1, 1906. 11
162 G. BOUDIN
des formations rayonnées développées dans le rein d'un Lapin, au
cinquième jour après l'inoculation. Les foyers radiés disparaissent
progressivement, jusqu'à ce qu'il ne reste plus que des formes ba-
cillaires, qui subsistent pendant très longtemps, et à partir des-
quelles il est encore possible d'obtenir une culture pure.
Avéc les Bacilles de la morve, de la diphtérie, micro-organismes
capables de montrer des formes filamenteuses et ramifiées en cul-
ture, avec Streptothrix Petruschky (isolé de crachats humains),
Lubarsch n'a pas obtenu de foyers actinomycosiques.
En septembre 1898, au Congrès des na-
turalistes allemands, à Düsseldorf, Lu-
barsch présenta des préparations de Schulze
montrant les formes actinom ycosiques du
Bacille tuberculeux. Bostræœm objecta
que les préparations de Babès et Le-
M Le Mens aitu vaditi, Friedrich, Lubarsch, provenaient
mycosique du Strepto- de tissus envahis par des Moisissures en
Hi tons même temps que par des Bacilles tuber-
culeux, plutôt que par les Bacilles de Koch
seuls. Et à l'appui de cette opinion, il donna les arguments suivants :
1° Certains des amas rayonnés montrés par Lubarsch ne sont
composés que de renflements périphériques, sans zone centrale
bacillaire. Les rayons n'ont donc aucun rapport avec les Bacilles
tuberculeux.
20 Les intumescences terminales décelées jusqu'ici dans les cul-
tures de tuberculose peuvent toujours être colorées comme les Ba-
cilles eux-mêmes et ne manifestent pas de métachromasie comme
les massues constatées en vie parasitaire.
3° Nombre de foyers rayonnés ressemblent à ceux que Lichtheim
et Ribbert ont décrits dans les poumons et les reins des Lapins,
après injection intra-veineuse de petites quantités de spores de
Moisissures. La disparition dans les tissus des Champignons rayon-
nés qui se présentent après injection de Bacilles tuberculeux cor-
respond bien à l'évolution des Moisissures en vie parasitaire.
O. Schulze répond à ces arguments que les réactions chroma-
tiques de la zone filamenteuse centrale et des crosses périphériques,
identiques dans la première phase des formations actinomyco-
siques, et le fait d'avoir pu obtenir à partir des lésions jeunes des
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 163
cultures pures de tuberculose témoigne déjà en faveur d'une con-
tamination spécifique. L'évolution des Aspergillus niger et fumiga-
tus, Mucor corymbifer et rhizopodiformis en vie parasitaire, telle
qu’elle a été observée par Ribbert et Lichtheim et par Schulze lui-
même, est infiniment plus rapide que celle du Microbe de la tu-
berculose. Les massues des Aspergilles et Mucorinées apparaissent
et disparaissent en quelques jours; celles du Microbe de la tuber-
culose n'apparaissent pas avant le 14me jour et disparaissent très
lentement. On peut les voir encore jusqu'au 59e jour. Les phases
de transition entre les foyers rayonnés de tuberculose, jeunes, et
les ioyers seulement composés de massues calcifiées montrent
bien l'origine de ces dernières.
Pour Lubarsch et Schulze, il faut remplacer la dénomination de
Bacille tuberculeux par celle de Champignon tuberculeux. Il faut
apparenter celui-ci aux Streptothrir, mais donner à cette dernière
dénomination un sens très compréhensif, s'appliquant à des mi-
cro-organismes capables de croître tantôt comme des Schizomy-
cètes, tantôt comme des Moisissures. On peut les diviser en deux
sous-groupes : d'une part, les Champignons rayonnés, c'est-à-dire
ceux qui sont capables de former des colonies d’une structure ra-
diée, en vie parasitaire; et d'autre part, ceux qui en sont inca-
pables. Le Microbe de la tuberculose appartient aux premiers; les
Bacilles de la morve, de la diphtérie appartiennent aux seconds.
On ne saurait actuellement se servir d'une classification plus mé-
thodique, puisque chez la plupart des individus de ce groupe, on
n'a pu constater le mode de sporulation.
En 1898, Morel et Dalous (Toulouse) avaient présenté à la Société
de Médecine de cette ville des préparations montrant des foyers
actinomycosiques du Bacille tuberculeux aviaire, développés chez
un Lapin à la suite d'inoculation dans la trachée. En 1901, Dalous
fait paraître un mémoire complétant les recherches précédentes.
Il a observé des formes actinomycosiques chez le Lapin à la suite
d'injection intra-veineuse et d'inoculations locales (trachée, mé-
ninges) de tuberculose aviaire. « Il semble, dit l’auteur, qu'un cer-
tain degré de virulence des cultures soit favorable à la production
des crosses. Jamais nous n’en avons pu obtenir avec des cultures
atténuées par un long séjour à haute température. Il nous a été
impossible d'en observer par l'inoculation de cultures à virulence
164 G. BOUDIN
exaltée pour le Lapin par une longue série de passages par l'orga-
nisme de cet animal ». Les formes actinomycosiques se sont mon-
trées, dans les recherches de Dalous, surtout dans le poumon, et
n'ont pas été observées dans les reins. Mais l’auteur assimile les
crosses observées en vie parasitaire aux renflements qui se déve-
loppent dans les cultures pures, à l'extrémité des filaments. Les
réactions chromatiques, la forme et l’évolution, différentes dans
D EC
7 Ë
STÈUE on
+ \ Rat Se 0) Re
7
Fig. 12. — Forme actinomycosique du Bacille tuberculeux dans un nodule du
poumon d’un Lapin : 30° jour après injection intra-veineuse de culture pure de
Bacille de Koch. D’après Abbott et Gildersleeve.
les deux cas, empêchent cette assimilation. Quoi qu'il en soit, Da-
lous conclut que le Microbe de la tuberculose est, «un Hyphomy-
cète qu'on peut, avec Lehmann et Neumann, classer dans le groupe
des Actinomyces. Avec le Microbe de la lèpre et les espèces micro-
biennes connues sous le nom de pseudo-tuberculeux, il y constitue
le genre Mycobacterium. »
En 1902, Abbott et Gildersleeve (Pennsylvanie) font paraître un
mémoire sur le rôle pathogène des différentes Bactéries acido-ré-
sistantes et leur parenté botanique avec le Bacille de Koch. Leurs
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 165
recherches sont une confirmation de celles de Schulze et Lubarsch.
Chez le Lapin, ils ont remarqué que les formations rayonnées ap-
paraissent dans les poumons et dans les reins, plus rarement et
plus tardivement, après injection intra-veineuse de cultures du
. Bacille de Koch, qu'à la suite de l'injection du Bacille de la Timo-
thée, du Bacille du beurre {L. Rabinowitsch). Pour colorer les
filaments mycéliens, les auteurs se sont servis de la safranine ani-
Fig.13.— Forme actinomycosique du Bacille du beurre {L. Rabinowitsch) dans
le rein d’un Lapin, après injection intra-veineuse de culture pure, d’après Abbott
et Gildersleeve.
linée (méthode de Babès). Ils ont remarqué que de gros amas ba-
cillaires ne donnent pas lieu au développement de formations
rayonnées ; celles-ci paraissent provenir d'amas très réduits. Tous
ces micro-organismes, Bacilles de la tuberculose, Bacilles acido-
résistants ne doivent pas être classés, d'après Abbott et Gilders-
leeve, parmi les Bactéries, mais parmi les Champignons du groupe
Actinomyces.
Pour résumer, nous voyons que trois opinions principales ont
été émises sur la valeur des crosses du Champignon de la tubercu-
166 G. BOUDIN
lose et des différents Microbes acido-résistants pseudo-tubercu-
leux. Ou bien ce sont :
a) des organes de fructification;
b) ou des formes normales de croissance ;
c)ou des formes en rapport avec une végétation active des
micro-organismes, mais déviée par une vie parasitaire. Ces trois
opinions ont été émises pour les massues de l’Actinomyces bovis.
Fig. 14. — Forme actinomycosique du Bacille de la Timothée (Mœæller) dans
le poumon d’un Lapin, après injection intra-veineuse de culture pure, d’après
Abbottet Gildersleeve. x
Mais, le fait très important que les unes et les autres ne se mani-
festent qu'en vie parasitaire, leur évolution régressive, leurs
caractères physico-chimiques montrent qu'il s'agit là de formes
de croissance anormales, résultant très probablement d’un épais-
sissement des filaments mycéliens. Babès, Schulze, Dalous ont rap-
proché la substance des crosses de la substance capsulaire décrite
par Metshnikov autour des Bacilles tuberculeux inoculés au Sper-
mophile et à laGerbille. Pour Babès, ces deux substances semblent
être composées de cellulose. Ainsi que nous l’avons vu, le Microbe
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 167
tuberculeux, qui est un Champignon, est riche en cette substance,
ou en substances voisines, capables peut-être de s'hydrater, de se
gonfler, et se gélifier sous l'influence des humeurs des organismes.
C'est peut-être là qu'est le mécanisme de formation des massues,
plutôt que dans le refoulement mécanique des filaments mycéliens
par les leucocytes.
Le fait pour un microbe de former des foyers à massues en vie
parasitaire n’est pas un caractère distinctif d'espèces ou de genre;
il est présenté par un grand nombre de Champignons tout à fait
différents tels que Mucorinées, Aspergillus (Lichtheim, Laulanié,
Ribbert, Rénon, Lucet}), Discomyces. Les foyers actinomycosiques
de ces divers micro-organismes diffèrent surtout par la date plus
ou moins précoce de leur apparition dans les tissus, après la con-
tamination. Mais jusqu'ici ils paraissent spéciaux à des Protistes
d'une constitution chimique déjà très différenciée, comme les
Champignons. Actuellement on ne connaît pasde Bactéries suscep-
tibles de développer des foyers actinomycosiques dans les tissus;
seul en est capable l’Actinobacille (Lignières et Spitz). Mais étant
donné le polymorphisme de ce Bacille (formes cocco-bacillaire,
strepto-bacillaire), sa vitalité très fragile, étant donné que son mode
de sporulation est inconnu, on doit plutôt l’envisager comme une
forme microbienne transitoire dans la vie d’un Champignon pléo-
morphe,déjà modifié par une vie parasitaire, que comme une Bac-
térie stable etbien adaptée.
CHAPITRE VI
1. Rapports du Discomyces farcinicus, acido-résistant, avec le Microbe de
la tuberculose (C. FEISTMANTEL).
2. Mycose innominée à filaments mycéliens acido-résistants (E. LEGRAIN).
Foyers actinomycosiques dans deux cas de tuberculose spontanée (PELNAR).
3. Classification du Microbe de la tuberculose : Actinomyces, Streptothrix,
Oospora, Discomyces ?
Dans un cas de tuberculose expérimentale du Pigeon produite
par l’inoculation de tuberculose aviaire, Dalous vit dans les tuber-
cules caséeux du poumon « des Bacilles très longs et nettement
ramifiés. Leur aspect rappelait assez bien celui de Streptothrix
farcinica du Bœuf, mais leurs ramifications y étaient bien moins
168 G. BOUDIN
nombreuses, que celles presentées par ce micro-organisme. Ils se
coloraient très nettement, d'une façon très élective par les mé-
thodes habituelles employées pour la coloration du parasite de la
tuberculose; ils étaient presque toujours placés au voisinage
d’autres Bacilles de Koch isolés et leur ressemblaient absolument
comme épaisseur et structure. Les ramifications de ces filaments
sont si évidentes quil est impossible de songer à une simple juxta-
position d'individus isolés. » Mais une identification plus complète
encore de Streptothrix farcinica et du Microbe de la tuberculose a
été faite, non seulement basée sur des caractères morphologiques
mais sur des réactions chromatiques semblables. En 1902, Carl
Feistmantel (Budapest), sous la direction de Pertik et de Krompe-
cher, publie un mémoire, dont nous avons déjà parlé, sur les ca-
ractères de coloration de Streptothrix farcinica : résistance aux
acides et à l'alcool, et sur les rapports des Streptothrix en général
avec les Champignons acido-résistants. Les cultures provenaient
de colonies de Discomyces farcinicus faites par Nocard quelques
années avant. D'après Feistmantel, la résistance très énergique à
la décoloration par les acides et l'alcool est un état périodique
dans le développement du Champignon du farcin du Bœuf, et
indépendant des substances grasses auxquelles on attribue habi-
tuellement ces qualités tinctoriales. De plus, l’auteur observe, dans
les poumons du Cobaye, 17 jours environ après l'injection intra-
veineuse du micro-organisme, l'apparition de foyers actinomyco
siques, à zone centrale filamenteuse, à zone périphérique composée
de massues. Les filaments de Discomyces farcinicus se révèlent dans
les tissus par les méthodes de coloration du Microbe de la tubercu-
lose. Feistmantel rappelle que Berestnev a déjà constaté une légère
acido-résistance de Streptothrix Eppingeri, Streptothrix farcinica. Le
Microbe de la tuberculose dans ses variétés pathogènes et sapro-
phytes, et les Bactéries acido-résistantes d'une part, sont donc
reliés, par les réactions chromatiques de différents types de Strep-
tothrix, aux Actinomyces non acido-résistants d'autre part. Comme
ces deux groupes de micro-organismes ont d’autres caractères
communs, Croissance en filaments ramifiés avec intumescences
terminales dans les cultures, formation de lésions nodulaires avec
foyers actinomycosiques en vie parasitaire, ils doivent être rangés
sous la désignation commune de Streptothrix.
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 169
Mais toutes les observations qui ont rapport aux formes actino-
mycosiques du Microbe de la tuberculose ont été faites à la suite
d'inoculations expérimentales. Babès et Levaditi pensent que, par
des examens microscopiques attentifs, il sera possible d'observer
des formations rayonnées dans des cas de tuberculose spon-
tanée. En 1900, Pelnar décrit deux cas de tuberculose, l'un
de la séreuse du péricarde chez un enfant de 4% ans, l’autre de
tuberculose intestinale et mésentérique chez une femme de 41 ans;
dans les lésions de ces sujets, l’auteur note des formes actino-
mycosiques des Bacilles tuberculeux. En 1898, E. Legrain décrit
chez un Arabe une mycose innominée du pied, à propos de laquelle,
l'auteur porta tout d'abord le diagnostic d’actinomycose cutanée.
Nous pouvons ici en rapporter l'observation. « L'examen mi-
croscopique, dit E. Legrain, des petites masses blanc grisätre in-
crustées dans les parois des ulcérations me les montra constituées
par des filamments radiés, enchevêtrés, et souvent terminés par
des massues. Autour de ces éléments une infiltration leucocytaire
sans éléments géants; détail particulier : ces filaments et ces mas-
sues se colorent parfaitement par la méthode d’Ehrlich. » Le malade
fut revu 7 mois après. Il avaitété soigné par un empirique au moyen
d'applications de goudron (préparation excellente contre les tuber-
culoses cutanées en général... En face de quel parasite pouvais-je
me trouver? dit l'auteur. Etais-je en présence d'une variété de
Discomyces colorable par la méthode d’Ehrlich ou bien d'une forme
spéciale du Bacille de Koch, forme anormale il est vrai, mais au-
jourd'hui bien connue de tout bactériologiste qui peut l'observer
dans certaines vieilles cultures”? Je ne saurais trancher la question. »
Cette observation prend actuellement une signification assez im-
portante et incite à rechercher les rapports du Microbe de la tu-
berculose avec les autres types de Discomyces; d'autant plus que
l'étiologie de l'actinomycose elle-même prend une extension plus
grande. À. Poncet pense qu'il a trop insisté sur le développement
de cette maladie sous l'influence directe de grains, pailles, comme
agents de transmission du virus : (il est plus probable que le Cham-
pignon rayonné peutse trouver sur des fruits, légumes, salades,ete.;
mangés à l’état de crudité, sur les végétaux les plus divers. »
Artault invoque l’origine alimentaire des cas d'actinomycose viscé-
rale profonde, et il fait remarquer comment la tuberculose et l'ac-
170 G. BOUDIN
nomycose évoluent par poussées périodiques. Dans l’une et l’autre
maladie il y a comme équilibre de foyer à foyer, l’un se développant
lorsque l’autre diminue, ou est excisé; ce qui explique pourquoi le
traitement chirurgical dans les deux cas, peut être si particulière-
ment décevant. («Lorsqu'il n°y à pas indication particulière d'inci-
sions évacuatrices, dit À. Poncet, je considère les actinomycosiques
comme des noli me tangere. » La clinique et les recherches botani-
ques rapprochent donc étroitement la tuberculose et les actinomy-
coses.
De plus, si nous nous en rapportons à l’ensemble des recherches,
on peut voir que la maladie, dans la tuberculose déterminée par les
formes ramifiées et bactériennes acido-résistantes du Microbe, et
dans les différentes mycoses, est faite d’une première phase d’un dé-
veloppement actif tout transitoire (germination des spores, foyers
actinomycosiques) des micro-organismes en vie parasitaire, à la-
quelle fait suite une phase régressive pendant laquelle les Cham-
pignons tendent à être détruits par les humeurs du sujet in-
fecté (1). La durée de ces phases semble varier avec les différentes
mycoses, rapide pour les Aspergillus par exemple, lente pour les
Champignons acido-résistants tel l'Hyphomycète de la Timothée
(Mæller), plus lente encore pour le Champignon de la tuberculose
ou le Discomyces asteroïides. Et ce n'est pas quand les Mucédinées
sont capables d’un certain développement en vie parasitaire que
le sujet infecté réalise le type morbide le plus grave : la formation
rayonnée, développement normal d'un Champignon, mais dévié
par une vie parasitaire, se manifeste surtout chez des animaux re-
lativement réfractaires (Lapin); elle existe surtout dans des or-
ganes à activités diastasiques peu marquées (reins, cerveau, pou-
mons, iris) et sont absentes dans la rate, le pancréas, lefoie, viscères
où la forme bacillaire elle-même paraît rapidement hydrolysée.
Et de même la formation rayonnée n'est pas décelée chez des
animaux, comme le Cobaye, pour lesquels le Microbe tuber-
culeux est particulièrement virulent. Et ainsi il est remarqua-
ble que la gravité de la maladie semble bien correspondre,
au moins en partie, à la désintégration la plus rapide de l'Hypho-
(1) Nous ne parlons que des phénomènes se passant au sein même des tissus,
et exceptons les phénomènes de croissance active que les Moisissures semblent
bien pouvoir manifester dans les cavernes pulmonaires.
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 174
mycète dans les organismes et non pas au développement actif,
normal de celui-ci. Toujours il semble y avoir hydrolyse des élé-
ments microbiens vivants, qui se multiplient alors par scission,
et réalisent dans les organismes différents types bactériens,
dont la complexité moléculaire paraît s'abaisser progressive-
ment jusqu'à disparition complète de la vitalité. Mais précisé-
ment du fait même de cette bactériolyse, décroissent et sont enle-
vées à leur rôle normal certaines activités diastasiques de l’orga-
nisme parasité; et c'est là que paraît résider tout d’abord la cause
des troubles morbides. Et pour mieux préciser par un exemple em-
prunté à d'autres séries de faits, on voit la toxine tétanique ne
déterminer aucun trouble chez certains Vertébrés à sangfroid ;
mais précisément elle ne réalise que très lentement des complexes
avec les humeurs de ces animaux, et elle peut être retrouvée chez
ces derniers longtemps après l'injection. La virulence n’est pas
une qualité propre à un micro-organisme; elle est indépendante
de son développement normal. Elle est en rapport non seulementavec
les caractères biologiques du Microbe, mais encore avec le mode
de nutrition de l'organisme infecté. C’est un rapport biologique de
deux espèces animales ou végétales menant une vie concurrentielle,
non un caractère fonctionnel isolé chez l’une d'elles et dont on
doit tenir compte dans une classification.
Le fait de croître en filaments ramifiés, et accessoirement celui
de développer des formations rayonnées en vie parasitaire, le fait
de se développer en conglomérats sur les milieux liquides et soli-
des, riches en glycose, glycérine et à réaction acide, la faible résis-
tance des formes durables aux hautes températures sont autant de
caractères qui éloignent le Microbe de la tuberculose, des Bactéries
et l’'apparentent aux Moisissures. Pour le ranger parmi les Disco-
myces on se base sur les caractères macroscopiques de croissance
en colonies verruqueuses, ou en membranes lichénoïdes, pouvant
manifester une coloration variable du blanc jaunâtre au rouge; et
sur les caractères microscopiques suivants : développement en fila-
ments ramifiés, non cloisonnés. Les filaments, tout d’abord, sont
formés d'un protoplasme homogène, qui ensuite devient granuleux
de telle façon qu'il semble fragmenté. De plus, d'après Bataillon
et Terre, des hyphes aériennes peuvent se diviser en spores. Maïs
d'autres formations corpusculaires existent dans l’intérieur des
417122 G. BOUDIN
filaments ou à leur extrémité, que certains auteurs ont assimilées
soit à des chlamydospores, soit à des conidies terminales uniques.
D'autre part, la germination des différents corpuscules n'a jamais
été observée. Il est vrai que le mode de sporulation est tout à fait
indéterminé ou inconnu chez certains micro-organismes classés
parmi les Discomyces; tels Discomyces Eppingeri, Discomyces farcini-
cus, Discomyces caprae.
Si l’on passe en revue les principales dénominations données
par les différents auteurs au Microbe de la tuberculose, on note
celles-ci principalement : Actinomyces, Streptothrix, Oospora. Ainsi
que l'ont fait remarquer R. Blanchard en 1895, et Lévy et Lachner-
Sandoval en 1898, on ne saurait assimiler les Actinomyces à des
espèces du genre OÜospora, qui comprend des individus d'une
taille bien plus considérable, de structure plus compliquée, à
mycélium à double contour bien défini et s’afflaissant facilement
sous l'influence de la dessiccation. Quant au nom Streptothrix, il
ne saurait convenir puisqu'il fut donné en 1839 par Corda à des
Hyphomycètes à ramifications tubulaires segmentées et portant
des spores axillaires, où à l'extrémité de leurs segments.
Lachner-Sandoval est d'avis de se conformer à la loi de priorité
et de retenir le nom Actinomyces employé pour la première fois, en
1877, par Harz pour désigner le micro-organisme de l’actinomycose
du Bœuf. R. Blanchard fait remarquer que Lachner-Sandoval et
Levy font une fausse application de la loi de priorité, puisque Meyen
en 1827 à introduit en mycologie un genre À ctinomyce. Il faut donc
employer la dénomination Discomyces utilisée pour la première
fois, en 1878, par Rivolta pour désigner le Champignon décrit pour
la première fois par Harz sous le nom d’Actinomyces bovis. Le nom
de Discomyces est ainsi employé comme nom de genre par L. Ge-
doelst dans son guide technique de parasitologie végétale, et c'est
ce nom quon doit donner au Microbe de la tuberculose, si tou-
teiois il peut lui être appliqué avec justesse. Quoi qu'il en soit,
il faut bien savoir que nous sommes là, en présence de Champi-
gnons encore indéterminés, puisque nous n'en connaissons pas les
formes sexuées et le cycle complet de développement; et si le nom
de Discomyces peut être employé comme désignation générale du
Microbe de la tuberculose, ce nom ne préjuge absolument en rien
ni du maintien définitif du micro-organisme dans ce groupe qui
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 173
n'est pas un genre botanique bien défini, ni de son passage dans
un autre groupe ou un autre genre.
CONCLUSIONS
De tout ce qui précède, nous croyons pouvoir tirer les conclu-
sions suivantes :
1° Le Bacille acido-résistant de Koch n'est qu'un stade dans la
vie d’un micro-organisme supérieur, filamenteux et ramifié. La
forme de Bactérie immobile ne se multiplie pas par formation de
spores dans l'intimité des tissus; très fréquemment, cette forme
disparaît, et plus ou moins rapidement selon les organes envahis :
cependant ces lésions sans Bactéries colorables restent virulentes.
La fragilité, mort ou transformation, du Microbe en vie parasitaire
montre qu'il n'est pas un parasite bien adapté.
20 Des cultures de tuberculose humaine, aviaire, pisciaire
montrent dansles phases actives de leur développement des formes
ramifiées, contenant à intervalles variables dans l'intérieur des
filaments, des corpuscules ovalaires, se colorant comme des spores,
et que leur composition histo-chimique et leur degré de résistance
à la chaleur doivent faire considérer comme formes durables.
Elles peuvent être situées également à l'extrémité des filaments.
Toutefois leur germination n’a pas été nettement observée.
Les formes ramifiées apparaissent rapidement et constamment
dans les cultures de tuberculose pisciaire, plus lentement mais
constamment dans les cultures de tuberculose aviaire, tardivement
et d’une manière inconstante dans les cultures de tuberculose hu-
maine. Après adaptation de la Bactérie tuberculeuse des Mammi-
fères à l'organisme des Vertébrés à sang froid, et ensemencement
consécutif, les formes filamenteuses et ramifiées apparaissent rapi-
dement. Les formes mycéliennes apparaissent dans la phase active
du développement des cultures : celles-ci en effet conservent leur
aspect macroscopique, peuvent être réensemencées, et restent
virulentes, dans les cas de tuberculose humaine et aviaire, pour
les Vertébrés à sang chaud.
3° La forme bactérienne de tuberculose humaine injectée à des
animaux assez réfractaires, Spermophile et Gerbille, développe une
174 G. BOUDIN
membrane extérieure très épaisse, consistante, réfringente qui se
vélifie et s'incruste de sels calcaires.
Des cultures de tuberculose humaine ou aviaire, bien développées,
d'une virulence normale, injectées à des animaux adultes, en bon
état de santé et doués d'une légère résistance (Lapin), soit locale-
ment, soit par la voie intra-veineuse ou intra-artérielle, produisent
des formes actinomycosiques typiques. Les formations rayonnées
apparaissent de 15 à 20 jours après l'inoculation. Tout d'abord la
zone centrale, filamenteuse et ia zone périphérique à massues rami-
fiées, digitées, se colorent d’après la méthode d'Ehrlich. Puis ces”
foyers entrent dans une phase régressive d’une durée variable ; les
massues deviennent difficilement colorables, sont réfringentes, se
calcifient. Les filaments de la zone centrale se dissocient en Bacilles
isolés, qui deviennent de plus en plus rares.
Les difficultés des réensemencements peuvent s'expliquer par les
altérations que subissent les éléments mycéliens dans les tissus.
C'est là un phénomène général dans les infections mycosiques, et
en particulier pourrait y être rattaché ce fait de la difficulté d'une
inoculation expérimentale positive dans le cas du Discomyces bovis.
4° Les principaux types de Bactéries acido-résistantes (B. la Ti-
mothée, B. du beurre)se développent en filamentsramifiés dans les
cultures et forment des foyers actinomycosiques dans les tissus.
L'apparition de ces foyers est alors plus précoce que dans le cas des
Bactéries de la tuberculose.
50 L'apparition des massues en seule vie parasitaire, leur évo-
lution doit les faire considérer comme des formes de croissance
avortées ; peut-être peuvent-elles être rattachées à la richesse en
matières pectiques des variétés microbiennes qui les manifestent.
La gélification des filaments avec incrustation calcaire consécutive,
d’une part, et d'autre part l'inclusion desformes bactériennes isolées
dans une membrane gélatineuse se calcifiant paraissent être des
processus identiques. Le fait de croître en filaments ramifiés et le
fait de manifester en vie parasitaire des foyers actinomycosiques
sont des propriétés communes à des Champignons tout à fait diffé-
rents : Discomyces, Aspergillus.
6° La croissance en conglomérats, dans les milieux à réaction fai-
blement alcaline ou acide, tant liquides que solides, la présence des
filaments ramifiés, l'absence de toxalbumines actives dans les mi-
MICROBE DE LA TUBERCULOSE 179
lieux liquides, la résistance relativement faible des formes durables
aux températures élevées, la formation de grains actinomycosiques
dans les tissus sont des propriétés qui classent le Microbe de la
tuberculose, et avec lui les Bactéries acido-résistantes du beurre,
de la Timothée, parmi les Hyphomycètes.
En vie parasitaire et dans les milieux de culture liquides peu
concentrés et à réaction alcaline, l'Hyphomycète de la tuberculose
se scinde en forme bactériennes immobiles, eten formes bacillaires
ciliées et mobiles, non acido-résistantes.
Il existe trois types principaux de races saprophytes du Microbe
de la tuberculose :
Une race mobile et ciliée (Ferran);.
Une race filamenteuse et ramifiée (Bataillon, Dubard, Terre) réa-
lisée par passage sur Vertébrés à sang froid;
Une race filamenteuse et ramifiée, réalisée par une suite très lon-
gue d’ensemencements successifs, sans passage par l'animal
(Krompecher, Klein).
70 L'aspect des filaments, fins, non eloisonnés, souvent contour-
nés, la présence des corpusecules ovalaires (formes durables), dans
le cours ou à l'extrémité des filaments ; la ramification de ceux-ci
par bourgeonnement latéral ; leur structure homogène, puis vacuo-
laire et granuleuse, leur facile dissociation en bâtonnets et fins gra-
nules, l'aspect macroscopique des cultures; les réactions chroma-
tiques (acido-résistance) en tout semblables à celles de certaines
espèces de Discomyces dans une des phases de leur développement :
Discomyces farcinicus par exemple, tous ces caractères rapprochent
l'Hyphomycète de la tuberculose, et les autres types de Microbes
acido-résistants du groupe des Discomyces. Comme chez certaines des
espèces ou variétés rangées dans ce groupe d’une classification tran-
sitoire, chez le Microbe de la tuberculose, le mode de groupement
des formations durables, spores ou conidies, est indéterminé.
Le cyele complet du développement des Discomyces est inconnu.
Ce n’est que sur des probabilités ou sur des observations isolées,
qu'on se base actuellement pour apparenter ces Champignons
avec des Myxomycètes, des Oomycètes (certains auteurs décrivent
au micro-organisme de la tuberculose des zygospores) ou des
Ascomycètes.
Tirons maintenant quelques conclusions pratiques :
176 G. BOUDIN
1° Dans la théorie de la seule vie parasitaire du Microbe de la
tuberculose, la maladie ne peut se transmettre que par contagion
et par hérédité. Les faits d'hérédité parasitaire, basés sur la pré-
sence du Bacille acido-résistant dansles lésions et surtout sur l'ino-
culation positive au Cobaye, seraient très rares par rapport aux
faits d'hérédité de terrain.
Etant données les variations morphologiques du Champignon
de la tuberculose, l'absence d'acido-résistance et de virulence spéci-
fique pour le Cobaye dans certaines de ses phases évolutives, il ya
lieu de se demander si l'hérédité parasitaire ne peut s'effectuer par
ces formes, si certaines des infections secondaires dans la tubercu-
lose ne peuvent leur être imputées.
20 L'infection tuberculeuse semble se réaliser surtout par les
voies digestives. Elle est en rapport avec la pénétration des formes
virulentes et peut-être des formes saprophytes diverses du Champi-
gnon de la tuberculose répandues dans les milieux extérieurs, et
plus ou moins hydrolysées dans le tube digestif.
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OUVRAGES REÇUS
Tous les ouvrages reçus sont annoncés.
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et Gilbert, p. 374-384, 1905.
G. HEyMaANN, Neue Distomen aus Cheloniern. Zool.Jahrbücher, Abth. für Syst.,
XXII, p. 81-100, pl. VI, 1905.
J. HozLack, Die Häufigkeit der Trematoden bei Rana esculenta Lin. Central-
blatt für Bakteriol., Originale, XXXNIII, p. 199-200, 1905.
W. Kzein, Neue Distomen aus Rana hexadaclyla. Inaug. Diss., Kônigsberg i.
Pr., in-8° de 22 p., 1 pl., 1905.
Von Lixsrow, Ueber eine neue Art der Copula bei Distomen. Zoo!, Anzeiger,
XXVIII, p. 252-254, 1904.
A. Looss, Schistosomum japonicum Katsurada, eine neue asiatische Bilharzia
des Menschen. Centrablatt für Bakteriol.. Orginiale, XXXIX, p. 280-285, 1905.
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Black Bass. Zoo!. Jahrbücher, Syst., XXII, p. 477-488, pl. XV, 1905.
Ta. Onaner, Die Trematoden des arktischen Gebietes. Inaug. Diss., Upsala,
1905. — Fauna arctica, IV, p. 289-372, pl. I-III, 1905.
Tu. Opxner, Die Trematoden des arktischen Gebietes. Fauna arctica von Rô-
mer und Schaudinn, IV, p. 289-372, pl. IT-IV, 1905.
Némathelminthes.
G. ALESSANDRINI, Brevi osservazioni sullo sviluppo e ciclo evolutivo dell’ Anchy-
lostoma (Uncinaria) duodenale (Dub). Boll. della Soc. zool. italiana, XIN,
in-8° de 20 p., 1904.
G. ALESSANDRINI, Sulla patogenesi dell’anemia da Anchylostoma. Policlinico,
XI-M., 11 p., 1904.
G. ALESSANDRINI, Su di un nuovo segno per poter diagnosticare la presenza di
Uncinariae nell'intestino umano. Boll. della Soc. zool. ital., XIV, in-8° de 2 p.,
1905.
G. ALESSANDRINI, Ulteriori osservazioni sul ciclo di sviluppo dell’ Uncinaria
duodenalis (Dub.). Boll. della Soc. zool. ital:, XIV, in-8° de 4 p., 1905.
G. ALESSANDRINI, Storia e corologia dell’ Uncinaria. Boll. della Soc. zool. ilal.,
XIV, in-8° de 6 p., 1 carte, 1905.
G. ALESSANDRINI, Su di alcune Uncinarite parassite dell’ Uomo ed altri Verte-
brati. Boll. della Soc. zool. ital., XIV, in-8° de 28 p., pl. I-IV, 1905.
G. ALESSANDRINI, In un ambiente liquido possono svilupparsi le uova di Unci-
naria. Boll. della Soc. zool. ital., XIV, in-8° de 4 p., 1905.
G. CARLIER, Perforation intestinale et lombricose. Dauphiné médical,
p. 103-113. 1905.
M. GueureLzmi, Contribution à l'étude de l’action pathogène de quelques Vers
intestinaux dans l’étiologie et la propagation de certaines maladies infectieuses
(fièvre typhoide, dysenterie, appendicile). Thèse de Lyon, in-& de 85 p., 1905.
J. GurarT, Ankylostomose. Traité de médecine et de thérapeutique de Brouar-
del et Gilbert, p. 403-424, 1906.
M. G. LeBreno, Metamorfosis de la Filaria sanguinis hominis nocturna, en el
Mosquito y causas que aceleran o retardan su evolucién. Punto por donde salen.
Modo experimental de hacerlas salir, bajo el microscopio. Revista de med. tropical,
in-8° de 36, p. 1905.
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A. Looss, Die Wanderung der Ancylostomum- und Strongyloides-Larven von
der Haut nach dem Darm. C. R. du 6° Congrès internat. de zool. à Berne, 1904,
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Poznaru-Cipcescu, Un caz de eustrongylozä renalä. Rev. stuintelor médicale,
in-8° de 12 p., 1905.
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Hirudinées
P. MÉGnIN, Sangsues parasites des Palmipèdes. Archives de Parasitologie, X,
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Insectes
R. Dequen, Myase des cavités naturelles. Thèse de Paris, in-8° de 100 p., 1905.
A. EvseLz, Sind die « Culiciden » eine Familie. XLIX. Bericht des Vereins
für Naturkunde zu Cassel, in-8° de 11 p., 1905.
A. EyseLz, Die Stechmücken. Handbuch der Tropenkrankheiten von C. Mense,
IL, p. 44-94, pl. I-V, 1905.
B. Garzi-VALERIO € J. RocHAZ DE JoNGx, Studi e ricerche sui Culicidi dei generi
Culex e Anopheles, 3? memoria. Atti della Soc. per gli studi della malaria, NI,
in-8° de 25 p., 1905.
L. GEpoeLsr, Contribution à l’étude des larves cuticoles de Muscides africaines
Archives de Parasitologie, IX, p. 568-592, 1905. |
F. Laxizce, Notes sur la classification des Moustiques. Actas y trabajos del
segundo Congresso médico latino-americano, Buenos-Aires, II, in-8° de 23 p.,
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nos estados de S. Paulo e Rio de Janeiro. Brazil medico, in-8 de 9 p., 1903.
A. Lurz, Technica seguida nas experiencias feitas com Mosquitos. Revista do
gremio dos Internos da Bahia, in-8° de 8 p., 1904.
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parle D' Brumpt à Harar. Bull. Soc. zool. de France, XXX, p. 8-11, 1905.
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zoo. Vereins, Danzig, p. 94-101, 1905.
ASSELIN et HOUZEAU, Éditeurs
Place de l'École-de-Médecine, PARIS RE
2 RAMUË DE ANOLOGE MÉDICALE À AGRICOLE:
A RAILLIET
Professeur à l'École vétérinaire d'Alfort, Membre de FAcadémie de Médecime
DEUXIEME ÉDITION
* Un: vol: an in- 8 de 1305 pages ay ec 892 figures dans le texte, cartonné.
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TRAITÉE
MALADIES PARASITAIRES \ON MCROBIENNES
DÉS ANIMAUX DOMESTIQUES
PAR
; Le NEUMANN.
Professeur à l'École vétérinaire de Toulouse
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Professeur à FÉcole vétérinaire d’Alfort
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Le Recueil de Médecine vétérinaire paräté les 15 et 30 de chaque mois
- Le numéro du 30 contient IN EXTENSO le Bulletin des séances de la Société centrale
È de Médecine vétérinaire.
ARCHIVES DE PARASITOLOGIE
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Les Archives de Parasitologie publient des mémoires originaux écrits dans l’une ow
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técril à la inachine), afin de réduire les corrections au minimum.
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1° On appliquera strictement les règles de la Nomenclature zoologique ou botanique
adoptées par les Congrès internationaux de zoologie et de botanique;
2° On fera usage, tant pour les noms d° auteurs que pour les indications bibliogra-
phiques, des abréviations adoptées par ces mêmes Congrès ou par le Zoological Record
de Londres;
3 Les noms géographiques oules roms s propres empruntés à des langues qui n’ont
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ne
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reproduction des planches et figures, tout en supprimant des dépenses inutiles, nos
collaborateurs sont priés de se conformer aux règles suivantes :
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2 Ne rien écrire sur les dessins originaux.
3° Toutes les indieations (lettres, chifires, explications de figures, ete.) seront placées
sur un calque recouvrant la planche ou le dessin.
4 Abandonner le plus possible le crayon à la mine de plomb pour Je crayon Wolf
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Les auteurs d'articles insérés aux Archives sont instamment priés de renvoyer à
la Rédaction, dans un délai minimune de huil jours, les épreuves corrigées ayec le
manuscrit ou l'épreuve précédente.
Ils recevront gratis 50 tirés à part de leur article. Ils sont invités à faire connaitre
sans délai s'ils désirent en recevoir un plus grand nombre (50 au maximum). à leurs
frais etconformément au tarif ci-dessous. Ce tarif ne vise que l'impression typographique;
ilne concerne point les planches, dont le prix peut varier considérablement. Toutefois,
il importe de dire que, pour les exemplaires d'auteurs, les planches seront comptées
strictement au prix de revient, Les tirés & part ne peuvent êlre mis en vente.
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Une demi-feuille
Un quart de feuille .
Un huitième de feuille
Le Gérant :
HOUZEAU.
École Professionnelle d’Imprimerie, à Noisy-le-Grand (Seine-ct-Oise)
PTIT UE CPP NIET)
Tome XI, n°2. … 10 Février 1907
ARCHIVES
DE
PARASITOLOGIE
PUBLIÉES PAR
RAPHAËL BLANCHARD
PROFESSEUR À LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE PARIS
MEMBRE DE L' AÇADÉMIE DE MÉDECINE
ê
PARIS
ASSELIN ET HOUZEAU, ÉDITEURS
PLACE DE L'ÉCOLE DE MÉDECINE
14997
Les Archives paraissent tous les trois mois.
SOMMAIRE
R. BLancHarD. — Le paludisme à Madagascar. . , . . , . . . . . . . . , 15
L.-G. NEuMANx. — Notes sur les Ixodidés. — V (avec 14 fig. dans le texte). . 2415
FRANGiISQUE JANIN. — Recherches sur la sarcosporidie du Mouton(pl. II et
Je dans le Hexte) SN Re RES EN Nr Re ER 233
PauLz Née. — Élat actuel de la question du favus humain. . : : . . . . . 269
Pasquaze MoL4A. — Osservazioni sul tegumento (ectoderma) dell” Anchis-
trocephalus microcephalus (Rud.) (pl I) . à: . . . : . A PE UN UE 339
Notestetinformations (pl ele RS REA RE EN ET 343
AVIS
Les Archives de Parasitologie sont publiées
par MM. ASSELIN et HOUZEAU, Énrreurs, Place de
École de Médecine, Paris (6°).
On est prié de s'adresser aux Editeurs pour tout ce qui
concerne l'administration (abonnements, achat des volu-
mes antérieurs, etc.).
Les quatre premiers volumes ne sont plus représentés
en magasin que par un pelit nombre d'exemplaires. Leur
prix sera prochainement élevé.
N.B. — Il est déjà paru quatre fascicules du tome X; par
exception, ce même volume comprendra un cinquième et dernier
fascicule, renfermant la table générale des dix premiers volumes.
La confection de celte table exigeant un certain temps, nous
continuons la publication du tome XI, pour ne pas infliger trop
de retard aux travaux qui attendent leur tour de publication.
LE PALUDISME À MADAGASCAR"”
PAR
Le Professeur R. BLANCHARD
On commence à s'émouvoir d'une très grave épidémie de palu-
disme qui ravage Madagascar et sévit particulièrement dans l'Ime-
rina et à Tananarive. J’ai reçu, à plusieurs reprises et de divers
correspondants, des renseignements précis sur cette épidémie; à
part une brève communication faite récemment à la section de mé-
decine du Congrès colonial français, j'ai tenu ces renseignements
en réserve, afin de ne pas alarmer l'opinion publique et dans la
prévision que l'administration locale saurait prendre les énergiques
mesures que commande la situation. La divulgation de celle-ci par
la presse politique (2) m'enlève tout scrupule et me permet de
parler librement d’un état sanitaire vraiment inquiétant.
Le massif central de Madagascar, qui comprend le Betsileo et
l’Imerina, a joui jusqu’à ces temps derniers d’une réputation de
salubrité solidement assise; Tananarive était comme un sanatorium
vers lequel aspiraient tous ceux qui s'étaient impaludés à la côte.
Et l'on sait à quel point celle-ci est insalubre (3)! Or, depuis
quelques années, le paludisme s'est implanté dans ces régions
jusqu'alors à peu près indemnes et n’a cessé depuis lors de s'y pro-
pager : actuellement, il constitue une véritable calamité publique.
A vrai dire, l’Académie a déjà été avertie des progrès du palu-
disme à Madagascar; dans ses importants rapports annuels sur
(1) Communication faite à l’Académie de médecine, le 10 juillet 1906; ef.
Bulletin, (3), LVI, p. 80-96.
(2) Cf. la Liberté du 27 juin 1906.
(3) Les troupes qui ont pris part à l'expédition de 18%, lors de la conquête de
l’île, ont été très durement éprouvées, puisque, sur un total de 14.850 hommes de
troupes régulières, il n'y a pas eu moins de 4.498 décès. Le feu de l’ennemi n’a
causé qu'une mortalité insignifiante, le nombre des décès par blessures ne dé-
passant pas 0.75 p. 100; en revanche, 72 p. 100 des décès étaient dus au paludisme.
Celui-ci, contracté à la côte et dans les régions basses, exerçait dans notre armée
de terribles ravages, dont Darricarère, médecin du corps expédilionnaire, nous à
donné un récit des plus poignants.
Archives de Parasitologie, XI, n° 2, 1907. 13
186 R. BLANCHARD
l’état sanitaire de nos colonies, notre collègue M. Kermorgant n’a
pas manqué d'y insister. Ces divers documents permettent de sui-
vre pas à pas la marche envahissante du fléau.
En 1902, il est cantonné à la côte et aux altitudes moyennes de
1.000 mètres. « Sur les hauts plateaux, ses atteintes sont en géné-
ral beaucoup plus rares, et surtout plus bénignes. Là, la fièvre ne se
montre guère que chez les Européens déjà impaludés par un séjour
antérieur à la côte ou dans une autre colonie. » Cette même année,
on relevait dans les hôpitaux 46 décès pour 4.430 malades européens,
et 80 décès pour 1.435 malades indigènes.
En 1903, le paludisme s'est notablement étendu : « L'Emyrne et
le Betsiléo, autrement dit la région des hauts plateaux, lui paie
également son tribut. On constate même une recrudescence dans
ces régions qui en avaient été à peu près indemnes jusqu'ici. Cet
accroissement a coïncidé avec une grande abondance d'Anophèles.
Toutelois si le nombre ces impaludés augmente sur les hauts pla-
teaux, les formes observées sont relativement bénignes. »
En 190%, la situation est singulièrement aggravée. «Le paludisme,
écrit M. Kermorgant, a revêtu l'allure épidémique dans la province
de l'Imérina centrale; on constate que la mortalité augmente dans
cette région et que la natalité diminue. Ce déficit est imputable à la
malaria qui sévit avec intensité depuis 1899 sur les hauts plateaux.»
Depuis lors, le fléau n’a cessé d'étendre son œuvre de dévasta-
tion; les renseignements ci-dessous vont permettre de juger de
l’'exceptionnelle gravité de la situation.
Tananarive a une population indigène d'environ 40.000 habi-
tants. D'après des renseignements qui me sont communiqués par
M. le D: Fontoynont, professeur à l'École de médecine, la mortalité
pour cause de paludisme a suivi la progression suivante parmi
cette population :
EnAO00 MS déCes
EnlO0 ISERE
En 1902 . . .: 104 —
En 190362 1 0MS 7
En 1904 . . . 271 —
END ENMESCN
En 1906 . . . 980 — (pour les 4 premiers mois seulement.)
Le D: Jourdran., directeur de l'Ecole de médecine, donne des chif-
LE PALUDISME A MADAGASCAR 187
fres concordant avec ceux-ci. D’après lui (1), la proportion des
cas de paludisme traités à l'hôpital indigène a été la suivante :
BOOM AR ASS 6 100
Ho HOLD ee SR AE OC
DCR OR NEA SR ENS ERE PET Ce
DIU Re M mn une M 0e
Voici enfin le chiffre des entrées à l'hôpital militaire de Tana-
narive, du 1° janvier au 23 mars 1906, soit pour une période de 83
jours :
: Maladies diverses. . 106
x à é
Janvier ee 0 900'entrées | ee 94
; Maladies diverses. 66
sy 9, ; :
Hévrier meme ee 0 0/9lentrées | en DE 183
Maladies diverses. . 45
N/ er 9) o) 2
NES (du Lau 23) 7.57 209 entrées | ea M OU Tr
ROTAURS RE ER OS ; 217 44
Sur 658 militaires hospitalisés, tant blancs qu'indigènes, 441
étaient donc atteints de paludisme, soit 67 p. 100.
Tous les chiffres qui précèdent concordent à démontrer que les
indigènes et les corps de troupes sont atteints du paludisme dans
la mesure la plus grave et la plus inquiétante.
Les colons, commerçants, administrateurs et officiers sont frap-
pés pareillement, mais ils se soignent chez eux etéchappent à la sta-
tistique; il en est de même pour un certain nombre d'indigènes
plus ou moins riches. Le désastre est donc encore bien plus étendu
que les chifires ci-dessus ne le laissent entrevoir. En fait Tanana-
rive se dépeuple : les indigènes émigrent vers d’autres régions, et
notamment vers la côte, où ils deviennent promptement la proie
du fléau même qu'ils voulaient éviter; d'autre part, le nombre des
décès l'emporte très notablement sur celui des naissances; en
février dernier, on a enregistré 334 décès contre 264 naissances.
Il importe d’élucider les raisons d’une situation aussi tragique;
nous ne pouvons le faire qu'après avoir pris connaissance des di-
vers Moustiques qui vivent à Madagascar,
Nous en donnerons tout d’abord la liste, après quoi nous recher-
cherons si les déplorables conditions sanitaires dontil vient d'être
(2) Jourpran, Un danger public;sombres nuages. Le Pelit Courrier de Tanana-
rive, 3 et 10 mai 1906.
188 R. BLANCHARD
question ne seraient pas dues éventuellement à quelque modifica-
tion survenue, ces années dernières, dans la faune de l’Imerina et
du Betsileo, à ce point de vue spécial.
LISTE DES ESPÈCES DE MOUSTIQUES DE MADAGASCAR.
Myzomyia funesta, var. Neireti = Culex Neireti Ventrillon, 1906 «, p. 103;
4906 c. — R.Blanchard, 1905, p. 180, 3. — Cité par Laveran (1903 « et b,
1904 db) au camp d'Ankourik, près Diego-Suarez; par Ventrillon à Tana-
narive, en avril. Ne représente que 2 p. 100 des Anophelinæ capturés
dans la capitale.
Pyretophorus costalis (Læw, 1866). — R. Blanchard, 1905, p. 186, 1. —
Habite les deux côtes et le plateau central ; se trouve maintenant à Tana-
narive. Confondu d’abord par Laveran (1902) avec Myzomyia superpicta.
Myzorhynchus Coustani (Laveran, 3 février 1900) — Anopheles mauritia-
nus Daruty et d'Emmerez, 1900. — R. Blanchard, 1905, p. 199, 9 et 200, 10.
— Madagascar, Réunion, île Maurice; d'après Ventrillon, représente à
Tananarive 48 p. 100 des Anophelinae; très répandu dans toute l'ile.
Cellia squamosa (Theobald, 1901) —C. tananariviensis Ventrillon, 1906 c.
— R. Blanchard, 1905, p. 216, 3. — Tananarive; toute l'année, surtout
pendant la saison des pluies; représente 48 p.100 des Anophelinae captu-
rés dans la capitale. Répandu sur les côtes et le plateau central.
C.pharoensis (Theobald, 1901)— Anopheles albus Ventrillon (in Laveran,
1904 b, p. 211) — Cellia alba(Ventrillon, 1906 c) . — R. Blanchard, 1905, p.
214, 1. —Côte ouest et plateau central; représente 2 p. 100 des Anophelinae
capturés à Tananarive.
Eretmapodites Condei Ventrillon, 1905 «a, p. 444. — Mayotte.
Stegomyiacalopus (Meigen, 1818) = St. Lamberti Ventrillon, 1904 1905 a,
p. 441. — R. Blanchard, 1905, p. 249, 1. — Sur les deux côtes: Diego-
Suarez, Fort-Dauphin, Morondava, Ankazobé, Majunga, Andribé ; hôpital
militaire de Tananarive. Pique en plein jour.
St. Cartroni Ventrillon, 1906 b. — ©. —Toute l’année. Sur la côte ouest
(Morondava) et sur la côte est (Maintirano); Mayotte.
Culex insahiabilhis Bigot, 1859. — R. Blanchard, 1905, p. 313, 79.
C. fatigans Wiedemann, 1828. — R. Blanchard, 1905, p. 353, 136.
C. Grandidieri R. Blanchard, 1905, p. 627 = C. flavus Ventrillon, 1904;
(non Motshulsky, 1859). — Ankazobé, à l'ouest de Tananarive.
C. Cartroni Ventrillon, 1905 b. — © et ©. — Majunga, Morondava.
C. gaganteus Ventrillon, 1906 a. — Tananarive; toute l’année.
Mansonia uniformis (Theobald, 1901). — R. Blanchard, 1905, p. 379, 3.
M. Seguini (Laveran, 1901).— R. Blanchard, 1905, p. 380, 5. — Cité par
Laveran (1903 b) à Fort-Dauphin.
M. titillans (Walker, 1848). —R. Blanchard, 1905, p. 377, 1. — Cette espèce
ou une forme très voisine est citée par Laveran (1903 b) dans le cercle
d'Analava.
LE PALUDISME À MADAGASCAR 189
Tæniorhynchus sp. — Cité par Laveran (1904 b) à Ankazobé, au nord
de l’Imerina.
Grabhamia n. sp. — Ventrillon in litt. Côte ouest (Morondava),.
Heptaphlebomyia argenteopunctata Ventrillon, 1905 «, p.446. — Tanana-
rive et ses environs; toute l’année, surtout pendant la saison des pluies.
Très rare.
H. Monforti Ventrillon 1905 &, p. 448. — Ankajobé, Arivonimamo, Tana-
narive; toute l’année. Très commun.
Pseudo- Heptaphlebomyia madagascariensis Ventrillon, 1905 b. — 9. —
Tananarive.
Aëdimorphus n. sp. — Ventrillon in litt. — Côte ouest (Morondava).
Les Moustiques sont donc représentés à Madagascar par 20 à
25 espèces. À Tananarive même ou dans ses environs immédiats,
on trouve jusqu'à cinq espèces d’'Anophelinæ, savoir :
1° Myzomyia funesta, var. Neireti ;
2 Pyretophorus costalis ;
9° Myzorhynchus Coustani ;
&° Cellia squamosa ;
5° Cellia pharoensis, var. alba.
Myzorhynchus Coustani et Cellia squamosa sont très communs à
Tananarive; ils ne semblent jouer aucun rôle dans la propagation
du paludisme. Aïlleurs déjà (1905, p. 200 et 201), nous avons discuté
ce point, en ce qui concerne la première de ces deux espèces; voici
quelques détails concernant la seconde :
Cellia squamosa pullule à l'hôpital militaire de Tananarive. On le
trouve en abondance dans les logements des médecins et des phar-
maciens, surtout au rez-de-chaussée, ainsi que dans un local qui,
pendant le jour, sert de bureau au commis des entrées et, pendant
la nuit, de poste aux infirmiers de garde. Cet Insecte est alors si
importun que les deux infirmiers de garde, un blanc et un Mal-
gache, ne peuvent prendre aucun repos et sont, le plus souvent,
obligés de marcher toute la nuit, pour échapper autant que pos-
sible aux incessantes attaques dont ils sont l'objet. Malgré le
nombre infini de piqüres endurées par le personnel de garde, le
nombre des accès de fièvre est longtemps demeuré très restreint
chez les gens attachés à ce service. Il est donc très probable que
Cellia squamosa est inapte à propager l'endémie palustre.
Les deux autres Anophelinæ actuellement connus du plateau cen-
tral, Myzomyia funesta et Pyretophorus costalis, sont, au contraire,
190 R. BLANCHARD
de très actifs propagateurs du paludisme; ils semblent être l’un et
l’autre d'introduction récente dans l'Imerina, ou du moins ils s'y
sont beaucoup multipliés dans ces temps derniers.
L'an dernier déjà, les cas de fièvre se montraient plus nombreux
parmi le personnel de l'hôpital militaire; cela coïncidait d'une fa-
con très marquée avec l'apparition d'un très petit Moustique, My-
zomyia funesta var. Neireti, jusqu'alors inobservé à Tananarive.
Cette année, c'est-à-dire durant l'hivernage de 1905-1906, ce même
Insecte est devenu beaucoup plus commun et le nombre des cas de
fièvre a subi lui-même une poussée formidable. C'est donc, selon
toute apparence, à ce redoutable Culicide qu'est dû le très inquié-
tant état sanitaire dont jouit actuellement Tananarive. On sait d’ail-
leurs qu'à la côte orientale d'Afrique il joue un rôle prépondérant
dans la transmission de la Plasmodie paludique.
Ces déductions trouvent leur confirmation indirecte dans cer-
tains renseignements donnés par Laveran (1903 b et 190%). En mars
1903, sur 22 Moustiques capturés à l'Institut Pasteur de Tanana-
rive, on comptait 16 Anophelinæ, parmi lesquels Myzorhynchus
Coustani. En novembre et décembre de la même année, cette même
espèce était rencontrée, seule ou en compagnie de Cellia squamosa,
dans la caserne du Palais, à l'hôpital indigène, aux casernements
et à l'infirmeriedu 13° régiment colonial, etc. ; nulle part Yyzomyia
funesta n’est signalé.
Comment expliquer l'apparition récente de cette dernière espèce
à Tananarive et dans l’Imerina en général ?
__ Deux causes successives sont intervenues, qui se réduisent en
réalité à une seule. C'est tout d'abord la construction de la route
de Tamatave à Tananarive, puis celle du chemin de fer du littoral,
ou plutôt du canal des pangalanes à la capitale. Ces importants
travaux publics ont été l'occasion d'un grand déplacement de po-
pulation : des ouvriers très nombreux sont venus travailler à la
côte, où ils se sont impaludés dans une excessive proportion; la
mortalité est montée de ce chef à des chiffres très élevés. A mesure
que la route et la ligne avançaient, ces équipes de terrassiers
malades gagnaient eux-mêmes l'intérieur du pays : pour établir
leurs cases ou leurs tentes, ils défonçaient le sol plus ou moins
profondément, creusant ainsi des dépressions et cuvettes où s'ac-
cumulaient les eaux de pluie; les Moustiques et spécialement
LE PALUDISME À MADAGASCAR 491
Myzomyia funesta et Pyretophorus costalis, espèces jusqu'alors sur-
tout côtières, y trouvaient des gîtes très favorables à l’éclosion de
leur ponte.
C’est ainsi que, de proche en proche et du littoral au plateau de
l’Imerina, le paludisme s’est propagé; c'est de cette même manière
que la fièvre jaune et Stegomyia calopus, partis ensemble de la
région de Vera-Cruz, ont escaladé petit à petit les massifs monta-
gneux du Mexique, à mesure que progressaient les lignes de che-
min de fer; j'ai décrit ailleurs (1905, p. 519) cette marche envahis-
sante, qui constitue un phénomène actuellement bien élucidé. Iei
le procédé est exactement le même. On comprend donc l'extension
progressive du paludisme vers l’'Imerina et le Betsileo et finalement
l'épidémie meurtrière qui sévit depuis plusieurs années en ces
régions et qui, cette saison, en décime littéralement la popu-
lation.
Le chemin de fer s'arrête actuellement au 148° kilomètre, c'est-
à-dire au passage du Mangoro, à la station de Moramanga. Cette
localité est située par une altitude de 945 mètres et à 122 kilomètres
de Tananarive. Le reste du trajet se fait le long de la route nou-
velle, en automobiles ou en pousse-pousse; la filanzane est passée
de mode. Le transport des marchandises se fait par les mêmes
moyens ou par des charrettes à Bœufs; le portage à dos d'Homme
n'existe pour ainsi dire plus. La route de Moramanga à Tananarive
est donc le siège d'un trafic très intense; elle présente diverses
étapes, qui se sont successivement contaminées par le procédé qui
vient d'être dit. On voit donc de quelle manière la capitale reçoit
de constants apports de Moustiques venus de régions plus basses :
ces Insectes trouvent d’ailleurs à Tananarive, comme il à été dit
plus haut, de très bonnes conditions pour leur pullulation sur
place.
Maintenant que la domination française leur confère la sécurité,
les Hovas se départissent de leur ancienne coutume de construire
leurs villages sur les hauteurs, comme des sortes d'observatoires :
ils descendent vers la plaine, c'est-à-dire vers les rizières et les
eaux stagnantes; la construction de leurs nouvelles cases détermine
des inégalités du sol aussitôt remplies d'eau de pluie et adoptées
par les Moustiques comme gîtes de ponte. Cet exode des indigènes
vers les vallées est surtout manifeste à Tananarive; les quartiers
192 R. BLANCHARD
élevés de la ville sont le siège de l'administration et du commerce
européen; les cases des Malgaches dévalent de plus en plus nom-
breuses vers les bas-fonds. Des flaques d’eau, où grouillent une
infinité de larves et de nymphes, se voient partout; autour de
chaque habitation, de chaque agglomération de cases, on en compte
un grand nombre.
L'administration ne pouvait rester indifférente en présence d'un
état sanitaire aussi déplorable. Saisi de la question par le Gouver-
neur Genéral intérimaire, M. Lepreux, le Ministre des colonies
adressait au Président de la République, à la date du 18 octobre
1905, le rapport suivant :
MONSIEUR LE PRÉSIDENT,
Le paludisme fait à Madagascar des ravages, chaque année plus consi-
dérables, parmi la population européenne et indigène de l'île; les auto-
rités locales de la colonie ont pensé que le moyen le plus propre à en
combattre les effets était de faciliter la vente des sels de quinine et d'en
répandre l'usage. Jusqu'à présent, on ne trouve ce médicament que dans
les quelques pharmacies établies sur tout le territoire malgache, ou dans
les dépôts spéciaux, créés en exécution du décret du 7 mars 1904, sur
l'exercice de la pharmacie à Madagascar, pour la vente, par des personnes
non diplômées, de certains articles pharmaceutiques. Il en résulte que,
dans les régions non pourvues de formations sanitaires de l'assistance
médicale, l’indigène n'a pas de ressources suffisantes pour se procurer
les sels dont il s’agit. M. le Gouverneur Général intérimaire a pensé qu'il
y avait, dans cet état de choses, un véritable péril qu'il fallait combattre
et il m'a demandé de lui en fournir les moyens en modifiant, à cet eflet,
la réglementation existante.
J'ai accueilli cette proposition et j'ai fait préparer dans ce but le
décret ci-joint que j'ai l'honneur de soumettre à votre haute sanction.
Le Ministre des colonies,
CLÉMENTEL.
Ce rapport a été publié au Journal officiel de la République fran-
çaise, le 27 octobre 1905, n° 292, p. 6310; il y est accompagné d'un
décret en date du 20 octobre, relatif à la vente des sels de quinine
dans la colonie de Madagascar et dépendances et dont l'article 1°,
le seul essentiel, est ainsi conçu :
Le Gouverneur Général de Madagascar est autorisé à prendre, par voie
d'arrêté, toutes les dispositions nécessaires pour que les sels de quinine
soient mis à la disposition de tous et au plus bas prix possible.
4
LE PALUDISME À MADAGASCAR 193
Le 14 décembre 1905, le Gouverneur Général intérimaire de la
colonie de Madagascar et dépendances prenait un arrêté promul-
guant le décret ci-dessus (1).
Enfin, le 9 mars 1906, un dernier arrêté, pris en exécution des
dispositions de ce même décret, détermine les mesures à prendre
pour la distribution de la quinine aux particuliers européens et
indigènes. Cet arrêté (1) porte la signature du nouveau Gouverneur
Général, M. V. Augagneur, ancien député du Rhône, ancien profes-
seur à la Faculté de médecine de Lyon. Vu son importance, il
nous semble utile d'en transcrire ici les dispositions les plus inté-
ressantes :
ARTICLE PREMIER. — Il sera constitué, dans chaque province, des dépôts
de quinine confiés à certains fonctionnaires européens et indigènes.
ART. 2. — Les localités où ces dépôts seront constitués, ainsi que
les noms des fonctionnaires qui en seront chargés, seront déterminés,
pour chaque circonscription, par dééision locale du chef de la province,
soumise à l'approbation de M. le Gouverneur Général, après avis du
directeur du service de santé.
ART. 3. — La quinine sera fournie aux gérants des dépôts en poudre
ou en comprimés et dans des flacons d'une contenance parfaitement dé-
terminée.
Le stock nécessaire à chaque dépôt sera fixé par décision du chef de la
province.
ART. 4. — Les fonctionnaires gérant un dépôt de quinine la déli-
vreront aux particuliers à raison de 0 fr. 05 (cinq centimes) le gramme.
Ils ne pourront pas en délivrer moins d'un gramme.
ART. 5. — Le gérant d’un dépôt est dépositaire-comptable de la quinine
qui lui est confiée.
Il tient un registre sur lequel il mentionne les quantités reçues par
lui. Il lui est fourni, en outre, un registre à souches destiné à recevoir,
tant au talon que sur la souche remise au cessionnaire, les noms de ce
dernier, le numéro de sa carte s’il est indigène, l'indication de la quantité
délivrée et du prix perçu.
L'état des quantités reçues et des quantités délivrées gratuitement ou
contre espèces est envoyé, chaque mois, au chef de la province qui s'as-
sure, au cours de ses tournées, de la bonne tenue des registres et de leur
concordance avec les états qui lui sont fournis.
ART. 6. — La quinine ne peut être cédée gratuitement par les gérants
de ces dépôts qu'aux particuliers européens ou indigènes en état d'indi-
gence notoire constatée par un certificat délivré par l‘autorité française
ou indigène compétente.
(1) Journal officiel de Madagascar et dépendances, n° 1029, 16 déc. 1905.
194% R. BLANCHARD
Ce certificat, valable pour un an, demeurera annexé au talon constatant la
délivrance gratuite au cessionnaire et sera tamponné à chaque délivrance.
ART. 7. — Le tarif de cession de la quinine pour les dépôts de chaque
province est affiché, en langues française et malgache, dans les bureaux
de tous les fonctionnaires de l'administration française ou indigène de la
province.
Il est accompagné de la mention, en langue malgache, que tout gérant
de dépôt qui délivrerait de la quinine à un taux supérieur au prix indiqué
par le tarif sera poursuivi conformément à la loi.
ART. 8. — Les dépenses occasionnés par les cessions de quinine seront
supportées par les budgets autonomes de l'assistance médicale, dans les
circonscriptions où ce service fonctionne, et par le budget local dans les
autres régions de l'ile.
Conformément à cet arrêté, divers administrateurs des colonies,
chefs de provinces, ont pris des « décisions locales » déterminant
les localités où des dépôts de quinine seraient constitués; ces déci-
sions ont été approuvées par le Gouverneur Général et insérées au
Journal officiel de Madagascar et dépendances (1). De la sorte, il a été
constitué jusqu'à ce jour 28 dépôts dans la province de l'Imerina
du Nord, 8 dans celle de Diego-Suarez, 20 dans celle de l'Itasy,
8 dans celle des Betsimisaraka du Sud et 12 dans celle d'Ambositra.
Les gérants sont, suivant les circonstances, des Européens (chef
du district, du canton, du poste de police, du poste administratif,
garde régional, adjoint des services civils) ou des indigènes (gou-
verneur madinika (2), médecin de colonisation, infirmier en chef,
sage-femme).
Nous aurons indiqué toutes les mesures prises par le gouverne-
ment général, quand nous aurons ajouté qu'ona répandu également
des affiches, rédigées en langues française et malgache et signalant
aux populations les avantages de la quinine et les localités où l’on
peut s'en procurer.
Tout en rendant un juste hommage à la sollicitude dont l'admi-
nistration à fait preuve en la circonstance, il nous faut pourtant
exprimer l'avis que de telles mesures sont insuffisantes et illusoires.
Insuffisantes, car elles ne tiennent aucun compte des procédés les
plus efficaces que l'on doit mettre en œuvre contre le fléau palu-
déen, à savoir la destruction des gîtes de ponte et la protection
(1) Numéros des 12, 19 et 26 mai 1906.
(2) Chef indigène d’un groupe de villages.
LE PALUDISME À MADAGASCAR 495
mécanique des habitations : le traitement curatif ou préventif par
les sels de quinine n'est plus actuellement, si j'ose dire, qu'un
procédé ambulant, indispensable et le plus pratique pour les indi-
vidus isolés ou les troupes en marche; mais pour les sédentaires,
il ya mieux et les décrets et arrêtés cités plus haut n'y font aucune
allusion. Ces mêmes mesures sont illusoires, car elles comptent
trop complètement sur l'initiative individuelle et ne sont pas suffi-
samment impératives; l'indigène connaît les effets de la quinine, il
a confiance en ce médicament, mais il est pauvre et n'arrive que
péniblement à payer ses impôts; aussi, malgré le bas prix auquel
elle est vendue, n'achète-t-il guère de quinine ou n'en achète-t-il
que des quantités insuffisantes et à des intervalles trop éloignés.
On en peut dire autant des colons, dont la situation financière, le
plus souvent, n'est guère enviable.
M.Kermorgant évalue à 1000 kilogrammes la quantité de quinine
qu'il serait utile de faire distribuer annuellement aux indigènes
de toute l’île, par les soins des fonctionnaires de l'assistance
médicale. Une telle provision peut paraître formidable; elle était
peut-être suffisante en 1903, mais sürement elle serait à l'heure
actuelle très inférieure aux besoins. Cela ne représente, en somme,
qu'une seule et unique dose d’un gramme pour un million d'habi-
tants, c'est donc très loin des quantités nécessaires. Or, si nos
renseignements sont exacts, la provision commandée pour 1907
n'atteindrait même pas 300 kilogrammes, soit une seule et unique
dose de 0 gr. 75 pour chacun des 40.000 habitants de la seule ville
de Tananarive.
On demeure vraiment surpris qu'aucune mesure n'ait été pres-
crite contre les Moustiques eux-mêmes. Non seulement les condi-
tions de milieu, esquissées plus haut, assurent leur reproduction
par myriades, maisrien ne leur interdit l'accès des êtres humains
sains ou malades. Le gouvernement général avait résolu « d’es-
sayer » à Diego-Suarez les toiles métalliques. L'expérience a dû
être faite, mais sans doute a-t-elle été jugée peu favorable, car,
jusqu'à ce jour, on n'a pas encore songé à protéger de cette manière
les divers établissements où un tel moyen de sauvegarde est pour-
tant indispensable : les hôpitaux, qui regorgent de malades et où
les Moustiques sont innombrables, continuent donc à être pour
la population ambiante le pire des dangers.
196 R. BLANCHARD
A l'hôpital militaire, il y a une telle affluence de malades que,
dès que l’un deux est quelque peu amélioré, on s'empresse de le
faire sortir pour donner sa place à un autre. Avant d'être rendu à la
liberté. le sortant est mis en observation dans une salle de la
caserne : à ce moment, les gamètes pullulent dans son sang; il est
donc infectieux au plus haut point. Or, la salle où on le recueille
ne possède aucun moyen de protection : les Moustiques vont et
viennent en toute liberté; ils piquent le convalescent, ou plutôt le
malade, puis s'envolent dans les chambrées voisines et inoculent
la maladie aux rares soldats encore indemnes.
Ce que l'administration a négligé de faire, la population indigène
ou européenne ne l'a pas fait davantage. Nulle part à Madagascar,
et spécialement à Tananarive, on ne voit de toiles métalliques aux
maisons; nulle part on ne songe à détruire, en les comblant ou en
les pétrolant, les flaques d’eau où grouillent les larves de Mousti-
ques. La population ignore évidemment les admirables résultats
obtenus en Italie, à Cuba, au canal de Suez et en tant d’autres en-
droits : elle reste, insouciante et inerte, exposée sans défense aux
atteintes d’un fléau sans précédent, que des mesures très simples
permettraient pourtant de conjurer.
A Tananarive même, on n'est pourtant pas resté indifiérent de-
vanttant de misère. Des personnes charitables, émues de l'effroyable
mortalité qui frappe les indigènes, ont fondé une Société de secours
aux Malgaches (1). On a recueilli des sommes assez importantes,
dont on avait la ferme résolution de faire le meilleur usage. Or, on
n'a rien trouvé de mieux à faire que de distribuer aux nécessiteux…
des couvertures et du riz.
Vraiment, le paludisme a beau jeu! La prophétie du vieux roi
Andrianampoinimerina se réalise : le général Tazo (la fièvre) est en
train de prendre sa revanche; seulement, au lieu d'atteindre les
seuls Vazahas, il frappe avec plus de rage encore les malheureux
Hovas.
Une situation aussi tragique ne peut se prolonger : elle compro-
met gravement la bonne réputation de notre pays; elle menace de
réduire à néant les eflorts accomplis jusqu'à ce jour, avec tant de
peine, en vue d'asseoir notre autorité politique et morale dans no-
(1) Cf. Revue de Madagascar, I, p. 458 et 471, 1906.
PERS
LE PALUDISME A MADAGASCAR 197
tre nouvelle colonie. À moins qu'on ne prenne sans le moindre re-
tard les mesures les plus énergiques, la saison prochaine va voir
éclater une épidémie terrible, qui tuera des milliers de victimes :
ce sera un désastre sans exemple, comparable et supérieur à ceux
qui ont marqué de si lugubre façon les premiers temps de la con-
quête de l'Algérie.
Avant que Maillot n'eût découvertl'action curative de la quinine,
on était entièrement désarmé envers la fièvre, dont la nature pa-
rasitaire et les moyens de transmission étaient totalement inconnus :
les médecins ne pouvaient qu'assister, impuissants et angoissés, à
ces hécatombes auxquelles ils ne pouvaient rien comprendre. Au-
jourd'hui, il en est tout autrement : le mystère est éclairci tout en-
tier; nous connaissons dans ses moindres détails l'histoire du pa-
ludisme et notre pays, à moins de se diminuer aux yeux du monde
civilisé, ne peut permettre qu’une de nos colonies se dépeuple et
périclite, alors qu'il est si facile de lui restituer les meilleures con-
ditions sanitaires.
En présence de la navrante situation que nous venons d'indiquer,
nous accomplissons un devoir en jetant un cri d'alarme et en de-
mandant qu'un pareil état de choses cesse au plus tôt. Le Gouver-
neur Général de Madagascar a été professeur à la Faculté de méde-
cine de Lyon : il doit à son passé d’enrayer sans retard une épidémie
aussi meurtrière ; la santé publique est, nous le savons, l’objet de sa
constante sollicitude. Si ce n'était empiéter sur ses attributions, il
nous serait facile de lui désigner deux ou trois personnes qui, ha-
bitant Tananarive, connaissent à fond la question des Moustiqueset
sont très aptes à mener avec énergie, vers un succès assuré, la lutte
contre ces redoutables Insectes.
Les procédés à mettre en œuvre sont ceux-là mêmes que les Amé-
ricains ont appliqués à Cuba, avec un succès si éclatant, dans leur
lutte contre la fièvre jaune. Ils sont trop connus maintenant pour
qu'il soit utile de les rappeler ici; je les ai décrits ailleurs d'une
façon détaillée (1). L'autorité civile, dans une colonie telle que Ma-
dagascar, a le pouvoir d'ordonner les mesures les plus énergiques
et les plus radicales : la situation actuelle n'en permet pas d’autres.
Il est tout à fait urgent d'organiser des (brigades à Moustiques »,
(1) R. BLancHArD, Les Moustiques, 1905; cf. p. 555-558 et 569-586.
198 R. BLANCHARD
d'assainir Tananarive et les autres localités, suivant les principes
auxquels la Havane doit d'être devenue si remarquablement salu-
bre, de protéger par des toiles métalliques les hôpitaux, les bâti-
ments administratifs et les habitations particulières, tout en con-
tinuant à distribuer la quinine d'une part aux individus impalu-
dés, d'autre part aux individus sains qui, travaillant au dehors,
sont exposés aux piqüres de Moustiques.
Myzomyia funesta, l'une des plus petites espèces d'Anophelinæ
connues, traverse sans aucune difficulté les toiles métalliques dont
il est fait communément usage en Europe et en Amérique. Une
toile à mailles larges de 1mm5 ne peut en aucune façon lui opposer
une barrière suffisante ; on ne peut com pter sur une sécurité absolue
qu'en employant des toiles dont les mailles ne dépassent pas
1 millimètre de largeur. Cette notion est d'autant plus indispen-
sable à connaître que le Moustique en question ne se borne pas à
propager très activement le paludisme, mais qu'il est aussi, à
Madagascar du moins, l’un des agents de la dissémination de la
filariose.
Des différentes manières de lutter contre le paludisme, aucune
n’est exclusive et ne peut raisonnablement être appliquée à l’ex-
clusion des autres. C’est pourquoi le traitement curatif et préventif
par les sels de quinine garde toute sa valeur; il a ses indications
précises, que nous avons énoncées plus haut. Aussi, le budget
d’une colonie telle que Madagascar peut-il en venir à être grevé
lourdement par les dépenses pour achat de quinine; il serait très
avantageux que la colonie püt fabriquer elle-même ce précieux
médicament, au moyen de plantations de Quinquina faites dans
des conditions favorables.
En maintes régions, notamment dans sa partie septentrionale,
Madagascar jouit d'un climat assez chaud pour que la culture du
Quinquina puisse réussir. Le général Galliéni s'était déjà préoc-
cupé de ce problème; vers 1900, il envoya en Extrême-Orient une
mission chargée d'en étudier la réalisation. M. Prudhomme (1),
directeur de l’agriculture dans la colonie, visita notamment Ceylan
et Java: il rapporta de cette dernière île des graines de Cinchona
(4) Prupnomme, Notes sur le Quinquina, L’Agriculture pratique des pays
chauds, I, p. 545-573 et 710-728, 1902. — Le Quinquina à Madagascar. 1bidem, IT,
p. 198-210, 1902.
LE PALUDISME A MADAGASCAR 199
succirubra et du C. ledgeriana, qui furent semées à la station d'essai
de Nanisana; celles de la dernière espèce germèrent seules. Depuis
lors, diverses tentatives du même genre ont été faites, avec un
meilleur succès. En 1902, la station de Nanisana commençait à
mettre en distribution des plants originaires de Bourbon, relati-
vement pauvres en alcaloïdes, et des plants de C. ledgeriana, beau-
coup plus riches en principes actifs. Les essais semblent être cou-
ronnés de succès, car la même station d'essais vend actuellement
le plant de C. succirubra et de C. ledgeriana au prix minime de
0 fr. 05 l’un (1).
À la demande de M. le général Galliéni, l'essai chimique de dii-
férentes terres a été fait par M. le professeur Müntz, de l'Académie
des sciences. On a pu déterminer ainsi, pour certaines provinces,
les sols où la culture du Quinquina serait susceptible de réussir :
on a, notamment, acquis cette notion pour la montagne d'Ambre,
la région d'Ambatondrazaka, celle de Moramanga et la province
de Betafo, c'est-à-dire pour une série de localités comprises entre
800 et 1.350 mètres d'altitude. Espérons que bientôt la colonie sera
en mesure de produire les écorces utiles à sa consommation, d'en
extraire les alcaloïdes et d'exporter même les produits d'une in-
dustrie aussi utile, qui doit tant contribuer à sa richesse et à son
assainissement.
Le 31 janvier 1903, M. Laveran (1903 a) écrivait : (Je regrette
d'avoir à constater que dans notre armée on n'a pas encore adopté
les mesures prophylactiques qui s'imposent depuis que l'on sait
exactement comment se propage le paludisme. »
Malgré l'autorité d’une telle parole, rien n'a été fait, aucune
mesure de protection n'a été adoptée et le paludisme, déjà si
meurtrier, a continué à se répandre. LeS mars 190%, notre collègue
revenait à la charge et faisait adopter par l’Académie un vœu ten-
dant à ce que la « méthode prophylactique (au moyen de la pro-
tection mécanique de l'habitation contreles Moustiques) soit appli-
quée dans l’armée, notamment dans les casernements militaires
de Madagascar où abondent les Moustiques propagateurs du palu-
disme. »
Deux années se sont écoulées : le paludisme a atteint l’effroyable
(1) Cf. Journal officiel de Madagascar et dépendances, 26 mai 1906, p. 13.682.
200 R. BLANCHARD
extension que l’on sait et l’on attend toujours l'exéc tio. des me-
sures de prophylaxie sur l'urgence desquelles l'Académie s'est
prononcée deux fois. L'état sanitaire de notre grandeñcolonie sud-
africaine est devenu si grave que l'Académie ne se lassera pas de
faire entendre sa voix autorisée et qu'elle voudra émettre, une
fois encore, le vœu que soient appliquées, sans nouveau délai, dans
toute l'étendue de la colonie de Madagascar et dans ses dépendances,
toutes les mesures prophylactiques dont l'efficacité est actuellement in-
discutable, notamment : comblement ou pétrolage des eaux stagnantes
etusage général de toiles métalliques dont le diamètre ne peut être supé-
rieur à un millimètre.
INDEX BIBLIOGRAPHIQUE
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LE PALUDISME À MADAGASCAR 201
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1905 db. — Culicides nouveaux de Madagascar. Bulletin du Muséum d'histoire
naturelle, XI, p. 427-431.
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Lamberti). Annales d'hygiène et de médecine coloniales, VITE, p. 217-220.
1906 &. — Culex nouveaux de Madagascar. Bulletin du Muséum, XII, p. 100.
4906 bd. — Stegomyia Cartroni, Culicide nouveau de Madagascar. Bulletin du
Muséum, XL, p. 145.
4906 c. — Cellia tananariviensis, Culicide nouveau de Madagascar, 9° genre
de la sous-famille des Anophelina. Bulletin du Muséum, XII, p. 198.
Discussion (1).
M. KERMORGANT. — Dansla dernière séance, notre collègue, M. Blanchard,
nous a entretenus du mauvais état sanitaire qui règne à Madagascar, et
plus particulièrement à Tananarive, où le paludisme sévit avec intensité
depuis quelques années, ainsi que j'ai eu l’occasion dele dire l’année der-
nière, dans une note parue dans les ‘Annales d'hygiène et de médecine colo-
niales (VIIL, p. 632).
Je signalais dans cette note que le chiffre des décès par paludisme était
déjà plus élevé pour les quatre premiers mois de 1905 que pour les mois
correspondants des années précédentes. Et j'ajoutais: « Les mois de mai
et de juin sont ceux où la mortalité est la plus élevée à Tananarive, ilya
donc lieu de craindre que le paludisme, qui a déjà fait plus de victimes
que d'habitude pendant les mois précédents, ne sévisse encore davantage
au cours des deux mois précités. » Pour enrayer cette épidémie, les auto-
rités locales ont pris les mesures suivantes:
a) Des kabarys (allocutions) ont été faits à la population dans chaque
quartier de la ville pour signaler le danger. On prescrivit en même
temps l’asséchement et le comblement des petites mares, des dépressions,
des trous d'eau, la suppression de tous les récipients dans lesquels l’eau
est abandonnée à l'air libre, l'enlèvement ou la destruction par le feu
des herbes et des diverses Graminées qui couvraient les talus d'une végé-
tation parasite. Ces kabarys ont été faits par le gouverneur malgache,
assisté du médecin inspecteur et du brigadier indigène, chef du poste de
police de l'arrondissement.
Les médecins inspecteurs indigènes insistaient, de leur côté, sur la
nécessité de prendre régulièrement de la quinine en quantité suffisante.
b) Outre les kabarys officiels et les conférences médicales, on a porté à
la connaissance de la population, par l'organe du journal le Vaovao, par
le moyen de placards et de brochures, par l'intermédiaire des institu-
teurs publics et privés, etc., les moyens à employer pour arrêter les pro-
grès du paludisme et le traitement à suivre pour le guérir.
1; Bulletin de l’'Acad. de méd., (3), LVI, p. 110, séance du 17 juillet 1906.
Archives de Parasitologie, XI, n° 2, 1907. 14
202 R. BLANCHARD
ce) Des équipes d'indigènes, sous la direction d'un surveillant européen
et sous le contrôle du conducteur de la voirie, procédaient à l’assèche-
ment et au comblement des fossés, des marais, des dépressions et des cu-
vettes naturelles dépendant du domaine public. Les caniveaux, les fossés,
les talus, les terrains vagues, les parties marécageuses de la ville, ont
été l'objet de soins particuliers. Le comblement, au moyen de terres
rapportées, de la rizière dite de la Reine avait déjà été décidé à cette épo-
que. De plus, ainsi que vous l’a indiqué notre collègue, M. Blanchard, des
mesures ont été prises pour que la quinine soit vendue à un prix très
modique, cinq centimes le gramme. Ce prix étant encore trop élevé, elle
est distribuée gratuitement depuis le mois de février dernier : il n’est pas
inutile de rappeler que, dès 1903, le général Galliéni avait pris les mêmes
dispositions pour les indigents. Un arrêté de ce mème gouverneur pres-
crivait aux administrateurs de délivrer des passe-ports sanitaires aux
indigènes des hauts plateaux allant travailler à la construction du che-
min de fer. Ces ouvriers devaient s'arrêter dans toutes les formations sani-
taires de la route, où on leur faisait absorber des doses de quinine, en
présence du médecin. Les mêmes mesures étaient prises au retour. De
plus, des brigades de médecins indigènes, sous la conduite d'un médecin
européen, étaient dirigées chaque année sur les localités où sévissait l'é-
pidémie paludique; ils y pratiquaient des injections sous-cutanées de
quinine en masse. Ainsi que l’on peut en juger par cette courte énuméra-
lion, on n’est jamais resté inactif en présence du fléau.
La recrudescence du paludisme sur les hauts plateaux a toujours coïn-
cidé avec la saison des pluies et une pullulation plus grande des Ano-
pheles. Dans ces régions, les pluies commencent vers la fin de novembre et
tombent chaque jour par averses torrentielles, souvent sans discontinuer,
de trois heures de l'après-midi à minuit ou deux heures du matin. Il
est difficile, pour ne pas dire impossible, que dans ces conditions, il ne
se forme pas des flaques, alors que les rues de Tananarive, transfor-
mées en ruisseaux, ne sont praticables qu'en filanzanes. Quiconque con-
nait la topographie de la capitale de l'Emyrne, située au fond d’une cu-
vette vallonnée, ne taxera jamais d'imprévoyance l'administration qui ne
peut changer les conditions locales. On se rendra compte d’ailleurs des
difficultés que l’on éprouve à éviter la formation des marécages sur les
routes pendant la saison des pluies, quand on saura qu'une somme de
1.600.000 à 1.800.000 francs est prévue chaque année au budget local,
pour l'empierrement et la construction des routes sur le haut plateau.
D'autre part, on ne peut songer à détruire les rizières qui enserrent Tana-
narive de toutes parts et sont des nids à Moustiques.
La recrudescence du paludisme sur les hauteurs de Madagascar a été
attribuée à différentes causes sur lesquelles je ne reviendrai pas, mais
il ne faudrait pas croire que l’'endémie n’a paru dans les régions
élevées de l'ile qu'au cours de ces dernières années. Ainsi que j'ai eu
l’occasion de le dire à cette tribune (Bulletin de l’Académie, LV, p. 255),
LE PALUDISME À MADAGASCAR 203
quelques points de ces régions ont toujours joui d'une réputation d'in-
salubrité et la génération actuelle a conservé le souvenir d'une affection
fébrile, à caractère intermittent, survenue en 1878, et réapparaissant chaque
année à la saison d'hivernage et à l'époque de la culture des rizières.
L'apparition du paludisme sur les hauteurs n'est pas particulière à
Madagascar, nous l’observons en Annam, au Tonkin, et aussi à la Réu-
nion. Dans cette dernière colonie, les hauteurs de 300 mètres étaient au-
trefois considérées comme à l'abri de la fièvre, aujourd’hui nous en cons-
tatons par 1.214 mètres d'altitude, dans le cirque de Cilaos. Les Ano-
pheles ont gagné peu à peu les altitudes dans cette région de la Réunion,
sans que l’on y ait fait des travaux. Il est probable que ces Culicides dont
nous ne connaissons qu'impariaitement les mœurs, s’acclimatent peu à
peu sur les hauteurs, de même que leurs larves ont fini par s’acclimater
dans les eaux salées. Ce qu'il y a de certain, c’est que les bouffées de
paludisme coïncident toujours avec la présence plus nombreuse de ces
Diptères dont la multiplication a lieu dans des conditions qui nous échap-
pent. Nous les voyons, en effet, apparaître subitement dans une région
et disparaitre de même sans que nous sachions pourquoi.
Un des bons moyens de se préserver de la piqüre de ces Insectes et
par suite de la fièvre est de faire apposer des toiles métalliques à toutes
les ouvertures des habitations. Ce mode de préservation a fait ses preu-
ves, mais combien il est difficile à appliquer ! Tout le monde n'est pas en
effet convaincu de la transmission de la fièvre par le Moustique et la pre-
mière chose à faire serait de convaincre les récalcitrants. D'autre part,
on ne peut songer à appliquer ce mode de protection aux cases indigènes
qui ne*‘s'y prêtent pas; il n'est pratique que pour les bâtiments collectifs.
Là encore, on se heurte à de grosses difficultés. L'essai de toiles métal-
liques a été fait dans des casernements du Sénégal; les hommes n'ont
pas voulu rester dans les chambrées ainsi protégées, prétextant qu'ils y
manquaient d'air et sont allés dormir sous les vérandas. Le thermomètre
n accusait cependant pas une température plus élevée dans les chambrées
protégées que dans celles qui ne l'étaient pas, mais il est certain que la
toile métallique tamise la brise et que l'on n'a plus cette sensation de
iraicheur qu’elle procure quand rien ne vient l'arrêter et que l’on aime
tant à ressentir aux pays chauds.
Aussi, tout en reconnaissant que le vœu formulé par M. Blanchard
peut avoir son utilité, nous estimons qu'ii serait urgent, avant tout, de
faire des conférences aux hommes de troupe pour les mettre au courant
des bienfaits de la protection mécanique, afin qu'ils ne soient pas tentés
de s’y soustraire ou de les rendre inutiles en perçant les toiles à coups de
baïonnettes pour avoir plus d'air, ainsi que cela s’est passé jadis en Italie.
M. A. Lavera. — Notre collègue M. R. Blanchard nous demande de
voter le vœu que soient appliquées, sans nouveau délai, dans toute l'étendue
de la colonie de Madagascar et dans ses dépendances, toutes les mesures dont
20% R. BLANCHARD
l'efficacité est actuellement indiscutable notamment : comblement ou pétro-
lage des eaux stagnantes et usage général de toiles métalliques dont le dia-
mètre ne peut êlre supérieur à un millimètre.
Je suis un partisan convaincu des mesures prophylactiques préconisées
par notre collègue (mesures d'ailleurs classiques aujourd'hui dans la
lutte contre le paludisme) ; je connais les services qu'elles ont rendus en
Italie, en Corse, en Algérie, à Cuba, au Sénégal et à Ismailia ; je crois
que ces mesures sont applicables partiellement à Madagascar, mais
j'estime que l’Académie ne peut pas, en votant le vœu tel qu'il est for-
mulé, mettre les pouvoirs publics en demeure de combler ou pétroler, sans
délai, les eaux stagnantes dans toute l'étendue de la colonie de Madagascar
et de ses dépendances et de garnir de toiles métalliques toutes les habilations.
M. Blanchard qualifie de très simples les mesures qu'il préconise pour
enrayer la grave épidémie de paludisme qui sévit sur Madagascar; je
crois au contraire que ces mesures sont d'une application extrémement
difficile, pour ne pas dire impossible.
La superficie de Madagascar est de 600.000 kilomètres carrés, elle
dépasse donc celle de la France; la principale culture du pays est Ie Riz;
or, qui dit rizière dit eau stagnante; les rizières à eau courante sont
rares et, même dans ces dernières, il y a toujours des points où le cou-
rant est nul ou assez faible pour permettre la pullulation des Culicides ;
ajoutons que les voies de communication sont rares et que la population
indigène est ignorante et misérable. Comment, dans ces conditions, assu-
rer le comblement ou le pétrolage de toutes les eaux stagnantes ; comment
protéger à l’aide de toiles métalliques les misérables huttes dans lesquel-
les habitent les Malgaches ?
Ainsi que M. Blanchard a bien voulu le rappeler, c'est sur ma propo-
sition que l'Académie de médecine a émis, en 1904, un vœu en faveur de
l'emploi de la protection mécanique de l'habitation contre les Moustiques
à Madagascar, mais il s'agissait surtout de protéger nos soldats.
Si l'Académie désire clore cette discussion par un vœu, j'estime qu'il y a
lieu de modifier la rédaction du vœu qui a été formulé par M. Blanchard.
M. R. BLANCHARD. — J'ai écouté avec le plus vif intérêt les renseignements
que M. Kermorgant vient de nous communiquer. Grâce à ses importantes
fonctions au ministère des Colonies, notre collègue peut prendre con-
naissance de documents officiels qui ne sont pas accessibles à d'autres
personnes ; de là l'intérêt si particulier que présentent d'ordinaire ses
communications. Dans le cas présent, les faits qu'il vient d'exposer ne
font que confirmer ceux que j'ai moi-même fait connaître ; ils sont une
preuve nouvelle et irrécusable de la gravité de la situation que j'ai cru
devoir signaler à la sollicitude de l'Académie. Je remercie donc très vive-
ment M. Kermorgant de donner l'appui de sa grande autorité à la thèse
que j'ai défendue ici même.
Qu'il me permette toutefois de lui faire observer que les mesures
LE PALUDISME A MADAGASCAR 205
adoptées jusqu'à ce jour par l'administration locale sont tout à fait
insuffisantes. Elles laissent une trop grande part à l'initiative privée ;
on compte trop sur le bon vouloir des indigènes ; les kabarys, même
officiels (les palabres, comme on dirait à la côte occidentale d'Afrique),
n'ont qu'une portée illusoire et n'ont aucune sanction. De même, la
distribution de la quinine aux indigènes impaludés ne peut avoir d'eftet
vraiment utile qu’à la condition d'être poursuivie méthodiquement, au
lieu de se faire, comme à présent, d'une manière intermittente et, pour
ainsi dire, accidentelle. D'autres mesures s'imposent, et notre collègue
est bien évidemment de cet avis : &« tout le monde, dit-il, n'est pas con-
vaincu de la transmission de la fièvre par le Moustique et la première
chose à faire serait de convaincre les récalcitrants. »
En attendant que la lumière se fasse dans l'esprit de ces derniers, le
paludisme continuera ses ravages, la mortalité, déjà effroyable, atteindra
des chiffres inconnus jusqu’à ce jour et notre colonie, déjà gravement
compromise, sera devenue le tombeau commun des indigènes et de ceux
de nos compatriotes qui, soldats, administrateurs ou colons, auront été
exposés sans défense à un fléau chaque jour plus envahissant. La situa-
tion est critique : elle ne permet plus d’atermoiements. L'Académie est
trop convaincue de la réalité de la transmission du paludisme par les Ano-
phelinæ pour ne pas adopter, sinon dans sa forme, tout au moins dans
son esprit, le vœu que je propose.
En efiet, rien ne s'oppose d'une façon absolue à ce que la protection
mécanique des habitations devienne générale dans les régions actuelle-
ment décimées par le paludisme. Les cases des indigènes, construites en
feuilles de Palmier, sont très mal closes et offrent mille ouvertures par
où peuvent pénétrer les Moustiques; elles sont, à cet égard, tout à fait
comparables aux paillottes où vivent, jusqu'aux portes de Rome, Îles
«contadini » de la campagne romaine. On sait quel effroyable tribut ces
travailleurs agricoles payaient à l'endémie palustre; c’est vraiment le cas
de dire, avec le fabuliste :
Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés.
Or, par les soins du professeur Celli et de ses collaborateurs, on a
entrepris la protection systématique de ces paillottes au moyen de toiles
métalliques, et l’état sanitaire s'est aussitôt amélioré de la façon la plus
remarquable. Je ne puis entrer ici dans plus de détails; ces faits sont
bien connus ou, du moins, aucun médecin ne devrait plus actuellement
les ignorer et, encore moins, douter de leur réalité. On en trouvera tout le
détail, soit dans mon livre : Les Moustiques, histoire naturelle et médicale,
soit dans les Atti della Società per gli studi della malaria, soit encore dans
les Annali d'igiene sperimentale.
La cause est entendue et ce qui se pratique avec succès en Italie peut
tout aussi bien être appliqué à Madagascar. 11 n’y a à cela aucune difficulté
d'ordre théorique et c’est pourquoi j'ai pu qualifier de très simples les
206 R. BLANCHARD
mesures que je préconise. En émettant une telle opinion, je n'envisage,
cela va sans dire, que le côté scientifique de la question; le côté pratique,
avec ses conséquences financières, ne saurait nous préoccuper ici. Il
n'appartient qu'à l'administration locale d'aviser, suivant les circons-
tances, aux meilleurs moyens pour engager contre les Moustiques une
lutte sans trêve ni merci, dont il est de notre devoir de lui indiquer les
diverses modalités.
Au nombre de celles-ci figurent le pétrolage et le comblement des
eaux stagnantes. M. Laveran me reproche de réclamer la suppression des
rizières! Notre collègue, assurément, a mal lu ma communication, car
je n'ai rien dit de semblable; pour éviter une confusion possible (et j'étais
loin de supposer que celle-ci dût être faite par M. Laveran), j'ai systéma-
tiquement laissé de côté les rizières, pour ne parler que des flaques d’eau
entourant les habitations. Je n'ignore point que le riz constitue l'aliment
essentiel des Malgaches; je sais même que les Hovas, venus de l'archipel
malais, ont apporté avec eux cette denrée, qu'aucune personne sérieuse
ne peut songer à leur enlever. Done, les rizières sont hors de cause; tout
au plus peut-on songer à réglementer la distance à laquelle les habitations
pourront être établies, par rapport à celles-ci.
D'ailleurs, il est de connaissance vulgaire que les Culicinæ, qui ne
transmettent pas le paludisme, gitent de préférence dans les eaux sta-
gnantes, boueuses ou corrompues, dont les rizières sont le type, tandis
que les Anophelinæ, qui propagent l’'endémie palustre, recherchent des eaux
plus limpides et spécialement de petites collections liquides, telles que
les flaques laissées çà et là par les pluies, les eaux résiduelles accumulées
dans les tessons de poterie, etc. Tout cela est bien connu; M. Laveran
ne peut l'ignorer; son objection relative aux rizières est donc sans
eftet.
M. Laveran a pu être trompé sur mes intentions par la formule même
du vœu que je propose. Cette formule est, en effet, quelque peu générale,
maiselle résume, en termes aussi brefs que possible, les raisons exposées
dans mon travail. Le sens exact d'une loi se déduit de l'exposé des motifs;
de même, le sens et la portée de mon vœu doivent être très clairs pour
quiconque a pris la peine de me lire. Toutefois, comme toute fausse inter-
prétation ne peut qu'être préjudiciable au but que je poursuis, je suis
tout disposé à préciser davantage le texte de mon vœu, tout en lui lais-
sant son sens général.
M. Le PRÉSIDENT. — M. Blanchard estime-t-il que les explications qu'il
vient de présenter aux objections de MM. Kermorgant et Laveran sont une
justification suffisante des termes de ses conclusions, sans qu'il soit besoin
de les soumettre à un vote ?
M. R. BLANCHARD. — Quelque déférence que j'aie pour l'avis si autorisé
de M. le Président, je pense qu'il est indispensable, vu l’urgence des me-
sures à prendre, que l’Académie procède au vote du vœu que je lui ai
LE PALUDISME A MADAGASCAR 207
proposé. La situation sanitaire de Madagascar est très grave; on ne com-
prendrait pas que l’Académie, saisie de cette question, reculât devant
l'émission d’un vœu, düt-il rester sans effet.
Le 3 juillet dernier, j'ai proposé à l’Académie de déclarer « qu'il est
urgent d'interdire d’une façon absolue l'arrosage des cultures avec l’en-
grais humain ». Le Bureau n’a pas cru devoir soumettre ce vœu au suf-
frage de l'Académie, sous prétexte qu'il va à l'encontre de la loi sur
l'épandage. Je suis plein de respect pour les décisions du Bureau, mais je
crois qu'en la circonstance il se montre trop timoré.
L'Académie n'est pas seulement un corps consultatif, apte à répondre
aux questions qui lui sont posées par les pouvoirs publics; j'estime, pour
ma part, que son rôle est plus élevé et qu'elle a la mission très impor-
tante d'éclairer l'opinion et d'indiquer à ces mêmes pouvoirs publics quels
dangers menacent la population, quelles mesures sont capables de détour-
ner ces dangers. Son rôle tutélaire, sa vigilance éclairée ne doivent pas
s'étendre seulement sur tout le territoire de la métropole; ils doivent
également viser nos colonies et les pays soumis à notre protectorat. Si les
pouvoirs publics, dûment éclairés par nous, ne tiennent aucun compte de
nos avis, nous n'en subissons aucun échec; nous avons, au contraire, la
satisfaction d'avoir accompli un devoir impérieux.
En me basant sur ces considérations générales, j'estime donc que la
question que j'ai soulevée comporte un vœu auquel l’Académie ne peut se
soustraire, quelque formule qu'on lui donne.
M. Roux. — J'ai écouté avec attention l'intéressante communication de
M. Blanchard sur la situation sanitaire actuelle de Madagascar.
Je crois qu'il serait sage de charger une Commission d'élaborer, pour
la prochaine séance, un projet de vœu, tenant compte des diverses obser-
vations qui viennent d'être émises.
M. R. BLancHaRD. — J'y consens volontiers.
M. CHANTEMESSE. — La méthode de lutte contre le paludisme proposée
par M. Blanchard n'est pas autre chose que la méthode classique, insti-
tuée en Corse par M. Laveran, suivie à Ismaïlia, en Italie, etc. Le gou-
verneur de Madagascar en connait les détails aussi bien que nous et iln'y
a pas grande utilité à lui spécifier la largeur des mailles des treillis mé-
talliques des portes et fenêtres. Un plan de lutte ne peut être utilement
dressé que dans l'ile même (1).
M. LE PRÉSIDENT. — Ce sera l'affaire de la Commission.
(1) Je n’ai pas relevé, au cours de la discussion, la façon dont M. Chantemesse
écrit l’histoire; je dois le faire ici. La lutte contre les Moustiques au moyen des
toiles métalliques n’a été nullement « instituée en Corse par M. Laveran, suivie
à Ismaïlia, en Italie, ete. » La vérité, connue de chacun, c’est que cette méthode,
déjà pratiquée anciennement en France et dans les colonies françaises, a été
appliquée en Italie par Grassi et Celli (1900), avec le succès que l’on sait, en
même temps que par Low et Sambon; les résultats en étaient publiés depuis
208 R. BLANCHARD
M. CHANTEMESSE. — Quant à la question de l'épandage pratiqué sur les
légumes mangés crus, il y a plusieurs années que le Comité consultatif
d'hygiène publique a adressé aux pouvoirs publics une demande pour la
suppression de l’épandage sur de tels légumes.
Le vœu de M. Blanchard est la reproduction de la demande du Comité
consultatif faite après le rapport de MM. Wurtz et Bourges, sur cette
question. MM. Wurtz et Bourges ont fait non seulement une mise au point
de cette étude, mais ils ont apporté des expériences personnelles con-
cluantes. Leur travail mérite de ne pas être oublié.
M. LE PRÉSIDENT. — La proposition déposée à la dernière séance par
M. Blanchard est renvoyée à l'examen d'une Commission composée de
MM. Roux, Laveran, Kermorgant, Chantemesse et Blanchard.
RAPPORT
Sur un vœu relatif à la prophylaxie du paludisme à Madagascar, au nom
d'une Commission composée de MM. BLANCHARD, CHANTEMESSE, KER-
MORGANT, Roux et
LAVERAN, rapporteur (1).
Dans la séance du 17 juillet, l'Académie a nommé une Commission qui
a été chargée de rédiger un vœu au sujet des mesures prophylactiques à
prendre pour atténuer la gravité de l’endémo-épidémie palustre qui sévit
à Madagascar.
Votre Commission tient d'abord à constater que les Gouverneurs de
Madagascar et le Corps de santé des Colonies ont entrepris déjà cette
lutte contre le paludisme. C’est ainsi que la quinine est aujourd'hui ven-
due à très bas prix à Madagascar et même distribuée gratuitement aux
indigents. L'emploi préventif de la quinine est d'une utilité incontestable
dans la prophylaxie du paludisme, les mesures prises à Madagascar pour
faciliter cet emploi méritent donc notre entière approbation.
Nous pensons qu'il ne nous appartient pas d'arrêter le programme des
mesures complémentaires à prendre; une Commission formée à Tanana-
rive et composée de médecins connaissant bien le pays nous parait beau-
coup mieux indiquée pour cet objet.
deux ans, quand la Ligue corse contre le paludisme se fonda et fit appel aux
conseils de M. Laveran (a). — Note ajoutée.
(1) Bull. de l’Acad. de méd., (3), LVI, p. 132-133, séance du 24 juillet 1906. — La
Commission constituée le 17 juillet s’est réunie une seule et unique fois, avant la
séance du 24 juillet. En dehors de toute discussion et sans en avoir aucunement
reçu mandat, M. Laveran a donné lecture du rapport ci-contre, qu'il avait jugé
bon de rédiger au préalable. Je n’ai pas relevé un procédé aussi insolite, dans
un but de conciliation que chacun appréciera. Il m’est du moins permis de faire
observer que les conclusions proposées par M. Laveran, el que j'ai votées avec
les autres membres de la Commission, ne sont que la paraphrase de; arguments
exposés dans mon mémoire. — Note ajoutée,
(a) R. BLancHarp, Les Moustiques, histoire naturelle et médicale, 1905; cf.
P. 569-576 et 593.
LE PALUDISME À MADAGASCAR 209
Cette Commission devra naturellement s'inspirer des données, aujour-
d'hui classiques, relatives au rôle des Anopheles dans la propagation du
paludisme, en tenant compte des circonstances particulières à Madagas-
car.
Peut-être pourrait-on organiser à Madagascar une Société analogue à
la Ligue contre le paludisme qui a rendu de grands services en Corse.
Pour une œuvre aussi difficile que l'assainissement de Madagascar, il faut
faire appel à toutes les bonnes volontés et une première obligation s’im-
pose, c’est d'instruire les populations, de leur faire connaître quelle est
la cause du paludisme et comment la maladie se propage.
Nous proposons à l'Académie d'émettre le vœu suivant :
L'Académie, considérant que l’endémo-épidémie palustre continue à
s'étendre et à s’'aggraver à Madagascar, malgré les mesures déjà prises,
émet le vœu qu'une Commission soit formée à Tananarive pour rechercher
les causes des progrès inquiétants que fait le paludisme et les nouvelles
mesures à prendre pour combattre ce fléau.
— Le vœu, mis aux voix, est adopté.
0
Observations à l’occasion du procès-verbal (1).
M. R. BcancHarp. — L'Académie n'ayant pas de sténographes, on com-
prend que les notes remises pour le procès-verbal, par les personnes qui
ont pris inopinément la parole dans une discussion, ne soient pas textuel-
lement conformes à l'improvisation. Du moins, la bonne foi la plus
élémentaire exige-t-elle que ces notes, rédigées après coup, se rapprochent
autant que possible des paroles prononcées au cours de la discussion et
qu'on n'y introduise pas des attaques ou des imputations auxquelles le
contradicteur n'aurait pas été à même de répondre. Ces principes sont la
sauvegarde de notre dignité; sans eux ne saurait exister la courtoisie
qu'on se doit entre collègues et qu'il est traditionnel d'observer dans les
discussions académiques.
Or, en lisant le compte rendu de la dernière séance (p. 118), j'ai été
très surpris d'y trouver, sous la signature de M. Chantemesse, le passage
suivant :
€ Quant à la question de l'épandage pratiqué sur les légumes mangés
crus, il y a plusieurs années que le Comité consultatif d'hygiène publique
a adressé aux pouvoirs publics une demande pour la suppression de
l’'épandage sur de tels légumes.
« Le vœu de M. Blanchard est la reproduction de la demande du Comité
consultatif faite après le rapport de MM. Wurtz et Bourges, sur cette
question. MM. Wurtz et Bourges ont fait non seulement une mise au point
de cette étude, mais ils ont apporté des expériences personnelles conclu-
antes. Leur travail mérite de ne pas être oublié. »
(1) Bull. de l'Acad. de méd., (3), LV, p. 125-131, séance du 24 juillet 1906.
210 R. BLANCHARD
La personnalité de MM. Wurtz et Bourges, introduite dans ce débat par
M. Chantemesse, doit rester hors de cause. Mais je ne puis laisser passer
sans une protestation énergique l'affirmation gratuite émise par notre
collègue. D'abord, parce qu’elle n’a pas été énoncée en séance et qu'elle
rentre ainsi dans cette catégorie d'additions inadmissibles dont je parlais
tout à l'heure. Ensuite, parce qu’elle est absolument contraire à la vérité,
ainsi qu'il me sera facile de l’établir.
Du 10 au 17 août 1900, s’est tenu à Paris le X° Congrès international
d'Hygiène et de Démographie. Le Comité d'organisation m'avait chargé de
présenter à la première section (Microbiologie et Parasitologie appliquées
à l'Hygiène) un rapport intitulé : Du rôle des eaux et des légumes dans
l'étiologie de l’helminthiase intestinale. Ce rapport, le voici; j'ai l'honneur
d'en déposer un exemplaire entre les mains de M. le Président, avec prière
de le transmettre à la bibliothèque de l'Académie. Il a été imprimé avant
l'ouverture du Congrès et distribué par centaines d'exemplaires aux mem-
bres de la première section. Il se termine par cette phrase non équivoque :
la pratique des maraîchers de Provence, qui arrosent leurs cullures avec
l'engrais humain, doit être formellement interdite.
Ce point important se trouvait alers soulevé pour la première fois au
sein d'une assemblée savante; il fut l’objet d'une discussion à laquelle M.
Laveran prit part; on reconnut l'urgence de l'interdiction demandée et la
section, par un vote unanime, adopta sur ma proposition le vœu suivant:
on interdira d'une façon absolue l’arrosage des cultures avec l’engrais
humain. Ce même vœu fut également adopté à l'unanimité par le Congrès,
dans son assemblée générale de clôture, puis transmis au ministre de
l'Intérieur par notre collègue M. Lannelongue, président du Congrès, qui
voulut bien alors m'en aviser.
Mon rapport et le vœu consécutif ont été signalés à l’époque dans les
journaux de médecine (1), puis reproduits intégralement, au cours de
cette mème année 1900, dans les Archives de Parasitologie (2) et dans le
Compte rendu du Congrès international d'Hygiène et de Démographie (p.
51-56). Or, c'est seulement en juillet 1901 que MM. Wurtz et Bourges ont
publié le travail auquel M. Chantemesse fait allusion (3) et c'est seulement
en 1902 que M. Wurtz a présenté au Comité consultatif d'hygiène publi-
que un rapport (4) dont le texte ne fut publié qu’en 1904.
(1) Bulletin médical, p. 1057 et 1058, 8 septembre 1900.
(2) Tome III. p. 485-491, fascicule 3, paru le 15 octobre 1900; pour la date de
publication de ce fascicule, cf. p.648.
(3) R. Wurrz et H. BourGes, Sur la présence de Microbes pathogènes à la sur-
face des feuilles et des tiges des végétaux qui se sont développés dans un sol
arrosé avec de l’eau contenant ces micro-organismes. Archives de médecine
expérimentale, XIII, p. 575-579, juillet 1901.
(4) Wurrz, Danger que peut présenter la consommation à l’état cru des
légumes et des fruits provenant des champs d'épandage. Recueil des travaux
du Comité consultatif d'hygiène publique de France, XXXHI, p. 93-96, 1902;
publié en 1904.
LE PALUDISME A MADAGASCAR 211
A l’époque où ils firent leurs publications, MM. Wurtz et Bourges ne
pouvaient donc ignorer mon rapport et mon vœu. Et pourtant, ils n'y
font aucune allusion; en particulier, M. Wurtz discute le fait de l’adduc-
tion des œufs d'Helminthes dans l'intestin par les eaux d'épandage et il
passe totalement sous silence, non seulement mon rapport et mon vœu
de l’année 1900, mais encore un travail beaucoup plus étendu que j'avais
publié sur ce même sujet en 1890, c'est-à-dire dix ans auparavant, et qui
eut alors trois éditions, dont une en langue espagnole (1). Voici le livre
qui contient la version espagnole de mon travail; j'ai l'honneur de l'offrir
à la bibliothèque de l’Académie. Il est vrai que les deux auteurs susdits
ne connaissent pas davantage les importantes recherches de notre collè-
gue M. Galippe sur l'existence de Microbes dans les tissus de végétaux
cultivés dans les champs d'épandage (2): ils donnent comme une nou-
veauté, en 1901, une constatation qui avait été déjà faite par M. Galippe
quatorze ans auparavant. |
On voit donc combien peu ces deux auteurs étaient au courant de la
question étudiée par eux; je ne leur en fais aucun grief, car je répète
qu'ils ne sauraient être mis en cause dans le présent débat. Je constate
simplement que, bien loin de m'être inspiré de leurs travaux ou d'un vœu
émis par le Comité consultatif d'hygiène, comme le prétend M. Chante-
messe, c'est M. Galippe et moi qui aurions le droit de nous plaindre d'avoir
été oubliés, attendu que nos travaux avaient respectivement une priorité
de treize, dix et deux années.
Mais il n'importe. Ce qui me semble particulièrement regrettable, c'est
de constater que M. Chantemesse, qui pourtant devrait connaitre d'une
façon approfondie les questions d'hygiène, n’est pas mieux renseigné que
les deux auteurs précités. S'il avait eu la prudence de contrôler, avant de
l'émettre, l'affirmation qu'il a insérée au procès-verbal, sans l'avoir d'ail-
leurs formulée en séance, si même il avait pris la peine de lire ma com-
munication, où je donne une référence bibliographique qui aurait
pu éveiller son attention, il m'aurait évité l'obligation de rectifier ses
inexactitudes.
M. CHANTEMESSE. — Je suis extrêmement surpris de l'intervention de
M. Blanchard. Vraiment, si j'avais modifié par écrit le sens de ce que
j'avais dit de vive voix, si j'avais écrit noir après avoir dit blanc, je serais
(4) R. BLancarp, Les animaux parasites introduits par l’eau dans l’orga-
nisme. Revue d'hygiène et de police sanitaire, XII, p. 828-870 et 923-969,
1890. Bulletin de la Société de médecine pratique et d'hygiène profession-
nelle, XIII, p. 238-326, 1890. — Los animales parasitos introducidos por el
agua en el organismo. Dans A. E. Sarazar y C. NEWMAN, Examen quimico y
bacteriologico de las aguas potables. Londres, Burns y Oates, in-8° de xx1-513
p., 1890; cf. p. 375-502.
(2) V. Gazrppr, Sur la présence des micro-organismes dans les tissus végétaux.
Journal des connaissances médicales, 1887. Présence des micro-organismes dans
les végétaux. Zbidem, 1890.
2 12 R. BLANCHARD
impardonnable. (Voir sur cette question intéressante le Bulletin de l'Aca-
démie, séance du 3 novembre 1903) (1).
Voyons les faits dont il s'agit.
J'ai dit en séance que le vœu présenté par M. Blanchard était la répéti-
tion du vœu émis par le Comité consultatif, et j'ai ajouté, à la plume, que
ce vœu avait été émis après avoir entendu le rapport de MM. Wurtz et
Bourges, qui relatait des expériences personnelles concluantes et méritait
de ne pas être oublié. J'ai fait cette addition, non pas pour contredire la
parole prononcée par moi, en séance, mais pour l'appuyer, pour en per-
mettre à tous le contrôle et montrer que je n'avais pas laissé échapper une
phrase vaine. Cela s'appelle partout un acte de probité scientifique. Et
c'est cela qui indigne M. Blanchard!
En vérité, quelle est donc la sensibilité extraordinaire dont jouit notre
collègue !
M. Blanchard croit-il qu'il a été le premier à signaler le danger de
l’épandage sur des légumes mangés crus? Tel n’est pas mon avis. Il y a
des années et des années que M. Metshnikov répète cette affirmation dans
ses cours, et il y a plus longtemps encore que M. Cornil, dans son livre
sur les Bactéries et dans ses rapports au Sénat, a parlé de ces faits et
des expériences de M. Galippe.
Toutefois, M. Blanchard a-t-il fait connaitre sur ce sujet, aujourd'hui
ou autrefois, des idées nouvelles, des faits inconnus, des expériences
inédites? Ils m'ont totalement échappé. Son travail sur l’épandage est ce
qu'on nomme dans les laboratoires : une œuvre littéraire.
Si MM. Wurtz et Bourges n'avaient apporté au Comité consultatif que
des phrases grandiloquentes et creuses, il est probable que le Comité ne
se serait pas laissé convaincre. Il exigeait autre chose; il demandait des
faits nouveaux, des preuves, des expériences personnelles; et ces savants
les lui ont fournies. C’est pourquoi il a été convaincu.
Ma réponse sera donc très simple :
1° Est-il vrai que la demande de M. Blanchard soit la répétition de la
demande du Comité consultatif, faite après la lecture en séance du rapport
de MM. Wurtz et Bourges ?
C’est incontestable. Alors?
2° Est-il exact que le rapport de MM. Wurtz et Bourges soit un travail
(1) Cette allusion au procès-verbal de la séance du 3 novembre 1903 se trouve
insidieusement-insérée dans la présente discussion; elle n’a pas été formulée en
séance, sans quoi je ne l’eusse pas laissé passer : nouvel exemple de la singulière
façon dont M. Chantemesse sait accommoder les textes, une fois qu’il a la plume
à la main.
J'aurais pu, le 31 juillet, remonter à la tribune de l’Académie et présenter de
nouvelles observations à propos du procès-verbal de la séance précédente. Mais
la chose en valait-elle la peine? De telles querelles n’ont rien de scientifique et
ne sauraient intéresser l’Académie. Et puis, il est des gens qui se font de la cour-
toisie et de la bonne foi une conception tellement personnelle qu'on perd son
temps à discuter avec eux et à tenter de les convaincre. — Note ajoulée,
LE PALUDISME A MADAGASCAR 213
qui mérite le nom de scientifique, parce qu'il contient des faits nouveaux,
des expériences personnelles et des résultats concluants ? À
Certes. Alors ?
3° Était-il nécessaire à ma démonstration de citer le travail qui avait
emporté le vote du Comité consultatif d'hygiène publique de France?
Sans doute. Alors ?
L'Académie jugera.
M. R. Bcancaarp. — C'est en vain que M. Chantemesse cherche des
faux-fuyants et des échappatoires. La question doit rester sur le terrain
où je l'ai placée; je ne la laisserai pas dévier.
Le silence de M. Chantemesse sur les deux points que je lui reproche
démontre assez clairement qu'il n’a rien à répondre. Ces deux points sont
les suivants :
1° M. Chantemesse a ajouté au procès-verbal de la séance du 17 juillet
une note volontairement désobligeante, contenant des insinuations qui
n'ont pas été formulées en séance. De pareilles additions au procès-verbal
sont inacceptables; il ne s ‘élèvera pas une seule voix dans l'Académie pour
les approuver. '
2 Inutile d'épiloguer au sujet de mon vœu sur la suppression de l'ar-
rosage des cultures maraichères par l’engrais humain. J’ai incontestable-
ment une priorité de deux années sur MM. Wurtz et Bourges, à qui M.
Chantemesse attribue le mérite d'avoir attiré les premiers l'attention des
pouvoirs publics sur le danger d'une telle pratique. Les dates et les textes
sont précis : la démonstration est péremptoire ; M. Chantemesse n’a même
pas la bonne grâce de le reconnaitre!
Assurément, l'Académie jugera; le sens de son verdict ne fait aucun
doute.
M. Corniz. — M. Blanchard rappelle ses travaux, cela est tout naturel.
Mais, on ne saurait élever de revendications de priorité à propos des dan-
gers que présente l’'épandage des matières fécales; cela a été connu de
tout temps. J'ai eu moi-même autrefois, à propos de l'établissement des
champs d'épandage de Gennevilliers, à signaler les inconvénients que
peut présenter ce système et, de méme, Pasteur et ses élèves ont fait des
remarques analogues.
M. R. BcancHaRp. — Je ne prétends aucunement avoir été le premier à
signaler le danger de l’épandage des matières fécales ; j'affirme simplement
avoir été le premier à obtenir d'un Congrès ou d'une Société savante quel-
conque un vœu relatif à la suppression de l’arrosage des cultures marai-
chères par l'engrais humain.
A tort ou à raison, j'attache à ce fait une certaine importance. Le Con-
grès d'hygiène s’est à l'unanimité prononcé en faveur de ce vœu, qui d’ail-
leurs n’a pas eu de suite. Quelque dangers qui résultent d’une pratique
aussi malsaine, une assemblée internationale, composée des personnalités
214 R. BLANCHARD. — LE PALUDISME A MADAGASCAR.
les plus compétentes, a du moins tenté d'éclairer l'opinion publique; la
responsabilité du corps médical se trouve dégagée, de ce fait, et ce n'est
pas un résultat négligeable.
M. LE PRÉSIDENT. — La question est entendue.
Note additionnelle.
Depuis ma communication à l'Académie, j'ai continué à recevoir des
renseignements sur la marche du paludisme à Madagascar et spéciale-
ment sur l’état sanitaire de Tananarive; je les résume ci-après :
L'épidémie a continué ses ravages et s’est encore développée, ainsi que
je l'avais prévu. La population malgache est décimée. A la fin de juin 1906,
le maire de Tananarive avouait 18.000 malades, qui recevaient des secours
soit à domicile, soit dans les temples transformés en salles de consulta-
tion; la mortalité était de 12 à 15 décès par jour.
Il est hors de doute que cette grave épidémie est due à l’excessive
multiplication de Myzomyia funesta : elle ne sévit avec intensité que là où
cet Insecte abonde. Il est venu de la côte à Tananarive, par la route de
l’est. Dans la seconde moitié de l’année 1903, ce Moustique était abondant
à l'Institut Pasteur, et ne se trouvait que là; il n'existait ni à l'hôpital
militaire, qui en est séparé par la route de l’est et par deux rizières en
gradin, ni en ville. A cette époque et pendant 1904, on ne trouvait guère
que des Cellia à l'hôpital militaire : le personnel hospitalier restait in-
demne; en 1905, les Myzomyia se montrent à l'hôpital militaire et le palu-
disme éclate violemment parmi le personnel hospitalier ; en 1906, ce per-
sonnel tout entier est malade.
L'état sanitaire s'est amélioré pendant les mois de juillet et août, non
par suite des mesures prises, mais à cause de la saison froide; pour peu
que persiste l'incurie actuelle, il s'aggravera de nouveau d'une façon ter-
rible dès la fin d'octobre, c'est-à-dire au commencement des chaleurs.
J'en attends la nouvelle avec anxiété. Puissé-je apprendre en même
temps qu'on s'est enfin décidé à lutter contre ce fléau exterminateur par
des moyens plus sérieux que ceux jusqu'à présent mis en œuvre!
NOTES SUR LES IXODIDÉS. — V.
PAR
L.-G. NEUMANN
Professeur à l’École vétérinaire de Toulouse.
1. — RHIPICEPHALUS LUNULATUS D. SP.
Mâle. — Corps presque pluslarge et un peu acuminé en arrière,
long de 4mm (rostre compris), large de 1*"9 vers le tiers postérieur.
Écusson convexe, brillant, brun noirâtre, sans taches, un peu
débordé sur les côtés par l'abdomen; sillons cervicaux très courts;
sillons marginaux profonds, occupés par de grosses ponctuations,
commençant immédiatement derrière les yeux et arrêtés au sillon
qui sépare le feston extrême du suivant; ponctuations grandes,
distantes, en alignements irréguliers, une ligne prolongeant de
chaque côté, en avant et un peu en dedans le sillon marginal; en
avant, quelques autres ponctuations très
fines, presque obsolètes; yeux plats, jau-
nâtres, grands, marginaux. Face ventrale
brun rougeûtre, ponctuée, à poils rares
et très courts. Anus vers le tiers anté-
rieur des écussons adanaux; ceux-ci
réformes allongés, le bord interne con-
cave, l'externe convexe, le postérieur en 0 nou
échaneré en deux lobes inégaux dont nulalus Gt. — Extrémité
l'externe spiniforme; écussons externes postérieure de la face ven-
chitineux, saillants, spiniformes; pas de .n
prolongement caudal. Péritrèmes étroits, allongés en virgule, à
pointe recourbée vers la face dorsale. — Rostre long de 0°"55, à
base dorsale plus large que longue, les angles latéraux saillants
vers le tiers antérieur de la longueur, les postérieurs peu saillants.
Hypostome un peu spatulé, à 6 files de dents. Palpes à peine plus
longs que larges, plats à la face dorsale, le deuxième article aussi
long que le troisième et rétréci en pointe à son bord postérieur
dorsal. — Pattes relativement fortes. Hanches I à sommet anté-
216 L.-G. NEUMANN
rieur un peu visible à la face dorsale, deux épines très longues ;
au bord postérieur des autres hanches, deux dents larges et plates.
Tarses moyens, à deux éperons terminaux.
Femelle. — Inconnue.
D'après 2 S pris sur le Cheval, près des rives du Lualaba, dans
l'État libre du Congo avec Rh. supertritus. — British Museum.
2. — RHIPICEPHALUS SUPERTRITUS N. Sp.
Mâle. — Corps près de deux fois aussi large vers le tiers posté-
rieur qu'à l'extrémité antérieure, long de 5"" (rostre compris),
large de 2mm8, — Écusson convexe, brillant, brun rouge noirâtre,
sans taches, débordé par l'abdomen un peu sur les côtés, beau-
coup en arrière des festons
par d’autres festons chiti-
neux, noiraätres, bordés de
rouge safran et d'autant plus
longs qu'ils sont plus pro-
ches de la ligne médiane;
sillons cervicaux superficiels,
diffus; sillons marginaux
profonds, larges, commen-
çcantimmédiatement derrière
Fig. 2. — Rhipicephalus supertritus OT. les yeux et arrêtés au sillon
— Extrémité postérieure de la face dor- qui sépare le feston extrême
sale. ; è
du suivant; chaque sillon
marginal est continué en avant par une crête festonnée, un peu
plus rapprochée de la ligne médiane et qui va rejoindre le som-
met du sillon cervical; festons très inégaux, les cinq médians trois
fois aussi longs que larges, les autres décroissant graduellement
jusqu'à l'extrême, qui est plus large que long; ponctuations pro-
fondes, nettes, inégales sur le bourrelet marginal, sur les festons
et un peu en avant d'eux; de là jusqu à l'extrémité antérieure, les
ponctuations se transforment en des dépressions superficielles,
irrégulières, inégales, allongées, plus creuses à leur extrémité
antérieure, laissant entre elles presque autant de saillies bril-
lantes etallongées, plus, de chaque côté, une fosse cervicale trian-
gulaire unie, entre le sillon cervical et la crête marginale; plus en
NOTES SUR LES IXODIDÉS 217
arrière, cinq sillons longitudinaux, larges et profonds, dont le
médian est bien plus long que les autres ; dans toutes les parties en
creux de l'écusson, le tégument montre des plis transversaux
- extrêmement fins. Yeux plats, grands, jaune clair, marginaux.
Face ventrale jaunâtre, à ponctuations éparses, revêtue de longs
poils blanchâtres dans ses deux tiers antérieurs. Anus vers le
tiers antérieur des écussons adanaux; ceux-ci en forme de vir-
gule renversée, le bord interne un peu concave, l’externe très
convexe, le postérieur convexe; écussons externes chitineux,
étroits, cinq fois aussi longs que larges. Au bord postérieur, onze
festons non chitineux, les trois médians coniques, plus longs
et plus saillants que les au-
tres, le médian impair dépas- |
sant ses voisins. Péritrèmes
erands, en virguleallongée.—
Rostre long de 0"°7, à base
dorsale plus large que lon-
gue, plus étroite dans ses
deux tiers postérieurs, les
angles postérieurs bien sail-
lants. Hypostome ? Palpes
un peu plus longs que larges,
plats à la face dorsale; le
deuxième article un peu plus Fig. de Rhipicephalus Supertrilus 1. —
; Extrémité postérieure de la face ventrale.
long que le troisième. — Pat-
tes épaisses, fortes. Hanches I à sommet antérieur visible à la
face dorsale, deux épines très longues; aux hanches IT et III une
dent large et plate près de l'angle interne; deux dents semblables
au bord postérieur des hanches IV. Tarses relativement petits et
minces, à deux éperons terminaux.
Femelle. — Inconnue.
D'après 2 Gf pris sur le Cheval, près des rives du Lualaba dans
l'Etat libre du Congo, avec Rh. lunulatus. — British Museum.
Rh. lunulatus et Rh. supertritus seront déterminés par l'emploi du
tableau suivant :
1 YOUR AE RSR
Yeux orbités.
Archives de Parasitologie, XI, n° 2, 1907. 15
IQ
L.-G. NEUMANN
à ( Sullon mareainal bien ÉnMIArQUE APP CAC APN PNR
” Sillon marginal nul.
Écusson dorsalleoncolore "brun NC PORTE Re CT
: Écusson dorsal blanc et noir . . . . . . . À. pulchellus.
Écussons adanaux prolongés en pointe, leur bord pos-
térieur droit ou convexe. . . . NPA 2
à Écussons adanaux prolongés en te us de a.
TIEUT CONCAVE SCA LE RME EN PET
Bord postérieur du corps uni ou muni d'un
à prolongement.
° ) Bord postérieur du corps muni de trois pro-
long ements ER ESe US MS UT A RUUS
[usure adanaux à Doiute Dnneipale in-
6 TERDB TE RO A RER ET NT TILOLOUS
Écuscons als à pointe externe . . . . . À. lunulatus
3. — MARGAROPUS LOUNSBURYI n. Sp.
et sur le genre MarGaropus Karsch.
Mâle. — Corps plat, ovale, à côtés convexes, plus large vers le
milieu de la longueur, terminé en arrière par un prolongement
conique, plus long que large et plus large qu'épais; longueur totale
Fig. 4
pus LounsburyiS". des ponctuations très rares, petites, inégales.
— Face dorsale.
(de l'extrémité antérieure du rostre à l'extré-
mité du prolongement caudal) 3mm9 à 4mm3;
largeur 1m/m9 à 2m/m3. Écusson peu convexe,
brun marron foncé, brillant, ne recouvrant
pas toute la face dorsale et laissant libre de
chaque côté une marge étroite, finementstriée,
qui se prolonge par l'appendice caudal der-
rière le bord régulièrement arrondi de l'écus-
son; en avant une échancrure profonde pour
recevoir le rétrécissement cervical du rostre.
Quelques poils très courts en arrière de la
surface correspondant à un écusson femelle;
À
Sillons cervicaux superficiels, atteignant pres-
que le tiers antérieur de la longueur de l’écusson ; pas de sillon
marginal ni de festons postérieurs ; trois sillons postérieurs lon-
NOTES SUR LES IXODIDÉS 219
gitudinaux, le médian un peu plus court que les deux autres, qui
s’'avancent jusque près du milieu de la longueur. Yeux très petits,
déprimés, très peu visibles, marginaux, en arrière de l'émergence
des pattes I. Bordure marginale revêtue, surtout dans sa moitié
postérieure, de poils longs, réunis par 6 à 10 en bandes trans-
versales. Appendice caudal portant, de chaque côté, à sa base, une
saillie hémisphérique et revêtue d'un bouquet de poils longs;
Fig. 5. — Margaropus Lounsburyi ©. — Face ventrale
en arrière et de chaque côté, un bouquet dorsal et lâche de poils
semblables, qui se relie à une bande ventrale et longitudinale de
poils ; les deux bandes ventrales se réunissent en avant d'un autre
appendice sous-caudal, chitineux, noirâtre, mousse, deux fois aussi
long que large. Face ventrale brun rougeûtre, presque plane, à
ponctuations peu profondes et éparses, revêtue de poils courts."Pore
génital recouvert d'une valvule rétrograde, situé en regard du pre-
mier espace intercoxal. Anus au sommet antérieur d'une profonde
fosse médiane, limitée de chaque côté par un écusson adanal en
290 L.-G. NEUMANN
forme d'épine aiguë, longue, chitineuse, libre dans toute son éten-
due; ces deux épines se réunissent sur la ligne médiane au bord
antérieur de l'anus, formant ainsi une fourche à deux dents qui se
prolonge en avant par une plaque impaire, lisse, jusqu'au niveau
du dernier espace intercoxal
Péritremés en ovale court, à
bord brunâtre, l’orifice stigma-
tique à peu près central, le fond
blanchâtre et formédenombreu-
ses granulations hémisphéri-
ques et brillantes. — Rostre long
de 500 » environ; base dorsale
plus large que longue, sans sail-
lie latérale, plus large en avant
qu'en arrière, les angles posté-
rieurs indiqués par deux petites
saillies coniques. Chélicères à
Fig. 6. — Margaropus Lounsburyi doigt long de 10 2,5 ; apophyse
OR NS interne conique, subterminale,
transversale, à base large, à sommet bifide; apophyse externe à
deux dents, la terminale petite. Hypostome large, un peu plus
long que les palpes, à huit files de 6-7 dents, précédées d’une surface
chargée de très nombreux et très petits denti-
cules. Palpes très courts (270 à 300), épais, le pre-
mier article visible seulement à la face ventrale,
sous forme de bande transversale; le second au
moins aussi large que long, arrondi en dehors,
plus large à la face dorsale, plus étroit à sa base et
pourvu de poils coniques sur son bord externe dor-
sal; le troisième près de deux fois aussi large que Pie 7 are
long, formant en dehors, vers le milieu de Son pus Lounsbu-
bord externe, une pointe courte; le quatrième ?7Y? d:-— doigt
; de la chélicère
petit, court, cylindro-conique,subterminal. — Pat- gauche. x 255.
tes fortes, épaisses, croissant de la première à la
quatrième. Hanches contiguës subtriangulaires; I, IT et III pour-
vues d'une très petite épine près de leur angle postéro-externe,
plus à I une petite épine près de l'angle interne. Tarses tous coni-
ques, semblables, croissant un peu de 1 à IV, une fausse articu-
NOTES SUR LES IXODIDÉS 291
lation distale à I, proximale à IL, IT et IV; un éperon terminal
fort, long, précédé d'une épine au bord ventral et portant à sa
base, au bord dorsal, un ambulacre à ventouse aussi long que
l’éperon et terminé par deux ongles faibles. Tous les articles très
chitineux, brun foncé à leur bord distal et ventral. A la 4° paire,
le 2e article est subeylindrique; le 3°, fortement dilaté en dehors,
est rendu ainsi rectangulaire, plus large que long, aplati d'un
côté à l’autre, et sa fausse articulation proximale est indiquée par
un petit disque d'insertion; le 4°, dilaté de même, est irrégulière -
ment hexagonal: le 5°, moins dilaté, semble inséré par le milieu
de son bord ventral sur le précédent; cette disposition donne, sur
le bord dorsal de la patte, trois sinus profonds qui co rrespondent
aux 2, æ et 4° articulations. La 3° paire montre une dilatation
semblable, mais moins prononcée des mêmes articles ; le 3° et le
4e sont rectangulaires, mais un. peu plus longs que larges ; le 5° se
rapproche de la forme ordinaire, et les sinus articulaires sont
moins profonds qu'à la 4° paire. Il en est de même et à un degré
de plus en plus faible à la 2e et à la {re paire.
Femelle. — Corps elliptique ou ovale (un peu plus large en avant
qu'en arrière), généralement un peu étranglé dans le milieu (au
niveau des stigmates), pouvant atteindre 16%® de long sur 10°" de
large; de teinte gris jaunâtre (jeune) ou rouge brique foncé (repue
et dans l'alcool). Ecusson dorsal glabre, très petit, plus long que
large (environ 1mm{0 sur Omm92), échancré en avant pour enca-
drer la base du rostre, à bords latéraux parallèles et un peu
convexes d'abord, puis courbés et convergents à partir des yeux
pour se réunir en un angle largement arrondi; sillons cervicaux
bien marqués, partageant l'écusson en trois parties, la médiane
deux fois au moins aussi large que les latérales. Yeux relativement
grands, saillants, de la même couleur que l’écusson, vers le milieu
de sa longueur. Ponctuations nulles. Couleur brun rougeàtre. Sur
presque toute la longueur de la face dorsale, deux sillons longitu-
dinaux, moins marqués en avant, s'arrêtant à peu de distance de
l’'écusson et du bord postérieur; entre eux, un sillon impair occu-
pant plus de la moitié postérieure de la longueur du corps. A la
face ventrale, pore génital petit, très antérieur, en regard des
hanches I. Sillons génitaux commençant seulement au niveau des
hanches IT. Stigmates en ovale court, à grand axe longitudinal.
299 L.-G. NEUMANN
Des poils très courts, épars sur toute la surface du corps. — Aostre
très court (600 x, de son bord postérieur dorsal au sommet de
l'hypostome), la base plus de deux fois aussi large que longue, sub-
hexagonale, enchâssée dans l'écusson par sa moitié postérieure,
à côtés convexes, non anguleux; angles postérieurs non saillants;
aires poreuses allongées transversalement, deux fois aussi larges
que longues, et séparées par un intervalle bien inférieur à leur
grand diamètre. Chélicères à doigt long de 11 # et semblable à
celui du mâle. Hypostome semblable à celui du mâle, mais à
8-9 dents par file, avec denticules antérieurs peu nombreux.
Palpes semblables à ceux du mâle, plus longs, le 3° article moins
anguleux en dehors. — Pattes très différentes de celles du mâle
et conformes à celles de Warqgaro-
pus annulatus ®, mais plus épais-
ses, à articles brun foncé à leur
extrémité distale. Hanches subtrian-
gulaires, àsommet interne, arrondi ;
une très petite épine vers le milieu
du bord postérieur des hanches I.
Articles 2 à 6 renflés à leur extré-
a À irons TonConn mité distale. Tarses longs, terminés
®. — Face dorsale du rostre, par un éperon long et relativement
Nr grêle, précédé d'une petite épine au
bord ventral et portant à sa base, au bord dorsal, un ambu-
lacre à ventouse semblable à celui du mâle.
Nymphe. — Corps long de 2mm à 2mm5, grisâtre, cordiforme
(large en avant, atténué en arrière). Écusson aussi large que long,
pentagonal. Pattes moniliformes, à articles courts et renflés à
l'extrémité distale ; tarses courts.
D'après 25 ©', 28 © et 5 nymphes, recueillis par Lounsbury en
différents points des colonies du Cap et d'Orange. L'espèce s'est
montrée en hiver sur les Chevaux, en bien moindre quantité sur
les Bœufs. Elle paraît n'avoir qu'une seule génération dans l'année,
comme les autres formes du même genre; elle effectue ses mues
sur son hôte (Lounsbury).
Observations. — Si l’on ne connaissait de cette espèce que le
mâle, on serait embarrassé pour le rapporter à l'un des genres con
nus, non seulement à cause des particularités si exceptionnelles
NOTES SUR LES IXODIDÉS 293
des pattes, mais encore et surtout à cause de celles des écussons
adanaux. La présence de ces écussons rapproche l'espèce des
genres Hyalomma et Rhipicephalus ; la forme du rostre l'éloigne des
Hyalomma et il ne resterait de doute que pour Rhipicephalus. La
connaissance de la forme femelle supprime toute hésitation. Il s’a-
git évidemment d'une espèce voisine de ce que j'ai appelé Rhipice-
phalus (Boophilus) annulatus (Say).
La nouvelle espèce a l'avantage de préciser la signification de ce
groupe. Il est d'abord évident qu'en raison des ressemblances mor-
phologiques des femelles, on ne peut songer à séparer générique-
ment annulatus de Lounsburyi. D'autre part, la forme si spéciale des
écussons adanaux de la nouvelle espèce, celle des mêmes écussons
chez annulatus, où ils diffèrent nettement deceux des autres Rhipice-
phalus, l'absence du sillon anal, la forme circulaire ou ovale des
plaques stigmatiques, constituent un ensemble qui éloigne net-
tement ces deux formes des Rhipicephalus. Aussi, au lieu de persister
à y voir un sous-genre, je me rallie à l'opinion qui élève ce groupe
au rang de genre.
Quel nom convient-il de lui donner? C'est simplement une
question de priorité. Le nom de Boophilus, employé jusqu'ici, a été
proposé en 1891 par Curtice (1) pour l’Irodes bois Riley. Mais, bien
auparavant, Karsch (2) avait nommé Margaropus Winthemi, un in-
dividu recueilli à Valparaiso par Winthem et que, après examen
au Musée de Berlin, j'ai reconnu pour un mâle tératologique de ce
que j'ai appelé Rhipicephalus annulatus. Un détail intéressant, c'est
que les particularités tératologiques des pattes de cet individu
semblent représenter une ébauche de celles qui sont caractéristi-
ques dans la nouvelle espèce. En vertu ‘de l’article 27 des Règles
internationales de la Nomenclature zoologique, Margaropus a la
priorité sur Boophilus. Ce genre Margaropus sera ainsi caractérisé :
Rostre court, à palpes plus ou moins anguleux. Des yeux. Pas
de sillon anal. Péritrèmes circulaires ou ovales. Deux écus-
sons adanaux libres ou réunis en avant, avec ou sans écussons
accessoires, chez le mâle. Un fort éperon terminal aux tarses,
(1) GC. Curricr, The biology of the Cattle Tick. Journal of compar. Medicine and
Veterinary Archives, XII, ne 7, p. 317; 1891.
(2) F. Karsca, Zwei neue Arachniden des Berliner Museums. Mittheil der
Münchener entomol. Vereine, 1879, p. 96.
19
29% L.-G. NEUMANN
Les deux espèces du genre sont opposées par leurs principaux
caractères dans le tableau suivant:
% écussons adanaux libres en avant de
/
| l'anus; des pattes subcylindriques.
< 2 écussons adanaux réunis en avant de
l'anus; articles des pattes très dilatés,
à angles articulaires très profonds.
Articles des pattes subcylindriques; épe-
ron court; ambulacre subterminal. .
Articles des pattes dilatés à l'extrémité
distale; éperon très long; ambulacre
inséré au bord dorsal de l’éperon, loin
de sa pointe.
A. annulatus.
M. Lounsburyi.
M. annulatus.
M. Lounsburyi.
4. ARGAS BRUMPTI D. SP.
Corps généralement plat, mesurant en moyenne 15m de lon-
gueur sur 10m de largeur, n'ayant que 7" sur 5mm chez les plus
petits individus(nymphes ou mâles jeunes). jpouvant atteindre 20mm
IRIS ANGE
— Argas Brumpti. — D,
Y, face ventrale.
face dorsale ;
de longeur et 13m» de
largeur chez les femel-
les adultes. Il n’est ren-
flé, au point d’avoir le
dos convexe, que chez
untrès petit nombre de
nymphes ou de mâles.
Couleur générale brun
rougeätre plusou moins
foncé, variant du rouge
brique au noirâtre vio-
lacé, rostre et pattes
jaunâtres. Bords laté-
raux droits, parallèles sur environ la moitié de la longueur du
corps, se rapprochant en avant pour former une pointe mousse,
analogue à celle des Ornithodorus; bord postérieur en courbe
large. Sur tout le pourtour, une suture formée par la réunion
de deux bordures, une ventrale et une dorsale, constituées par
des plis fins (45 » d'épaisseur) et mesurant 400 : de largeur.
NOTES SUR LES IXODIDES 225
Face dorsale irrégulièrement excavée par la saillie de la bordure
et relevée par d’autres saillies qui limitent des dépressions polygo-
nales, symétriques et constantes, savoir:
une impaire (n° 1) aussi large que lon-
gue, vers le tiers antérieur; deux paires
contiguës (n° 2 et 2’), en arrière de
celle-ci, qui les surplombe par son borä
postérieur; un impaire (n° 3), près de
deux fois aussi longue que large, faisant
suite aux deux précédentes; de chaque
côté de celle-ci, deux paires, placées l’une
{nos 4 et 4’) devant l’autre (n° 5 et 5’),
aussi larges que longues. Autour de ces
grandes dépressions en sont réparties
d'autres plus petites, moins bien déli-
mitées, qui, avec des plis périphériques
irréguliers, occupent le reste de la face
Fig.10. — Argas Brumpti. —
Bordure droite, en regard
de 5: x 25:
dorsale. Les saillies sont formées par des plis disposés en che-
Fig, 11. — Argas Brumpti. — Tégument
dorsal à droite, au niveau des dépres-
sions 2, 3, Æet 5. x 11.
vronsserrés, analogues à ceux
des bordures et qui se conti-
nuent en flexuosités dans les
dépressions pour entourer de
petites plaques, où le tégu-
ment estaminei en des sortes
de cribles imperforés. La dé-
pression n° 1 a deux de ces
plaques accolées sur la ligne
médiane; les n° 2 et 2° ont
deux plaques consécutives,
écartées, l'antérieure plus
grande; le n° 3, une série
médiane à éléments contigus;
4 et 4’ en ont deux consécu-
tivess 5, et\ 51, une -princi-
pale et plusieurs petites.
D'autres plaques plus petites
et moins nettes sont réparties à la périphérie. Des poils
courts et très clairsemés sont distribués sur cette face; ils sont
226 L.-G. NEUMANN
«
plus abondants à la périphérie, surtout dans le quart antérieur.
Face ventrale saillante le long de la ligne médiane, les côtés
relevés vers la face dorsale. L’extrémité antérieure, conique, s'in-
fléchit en bas et est creusée d’un profond camérostome triangulaire,
où le rostre est encastré, sauf chez les individus renflés, dont
le camérostome s'efface en partie, le rostre étant alors repoussé
en avant au point de dépasser un peu l'extrémité du corps. Le
camérostome est bordé de deux lèvres divergentes en arrière, où
Fig. 12. — Argas Brumpti. — Rostre vu de face et de profil. x 28.
leur face interne embrasse les commissures d’une lèvre posté-
rieure, médiane, transversale. Immédiatement en arrière de
celle-ci, chez la femelle, s'étend la vulve, qui a à peu près la même
largeur, avec une lèvre antérieure étroite et une lèvre postérieure
plus courte et plus épaisse. Chez le mâle, le pore génital est placé
un peu plus loin; il est étroit chez les adultes, ponctiforme chez les
jeunes. Les plis qui continuent les lèvres latérales du camérostome
se prolongent en arrière du pore génital. Plaque anale ovale, longi-
tudinale, située un peu en avant du tiers postérieur. Sillons géni-
taux superficiels, très divergents en arrière, limitant en dedans, de
chaque côté, un pli coxal analogue à celui des Ornithodorus; en
dehors des hanches, un pli sus-coxal peu saillant. Péritrèmes
NOTES SUR LES IXODIDÉS 297
semi-lunaires, blanchâtres, à convexité antérieure, plus petits
que la plaque anale. Tégument chagriné, formé de plis semblables
à ceux de la face dorsale. Le long du bord postérieur, des dépres-
sions polygonales, dont une grande, impaire, médiane, suivie d’une
petite; de chaque côté, cinq dépressions plus ou moins marquées.
Poils un peu plus abondants qu'à la face dorsale, surtout à la péri-
phérie.
Rostre jaunâtre, à base très épaisse, formant une pyramide tron-
quée, dont les deux tiers sont cachés dans la partie postérieure du
camérostome ; la face ventrale en rectangle allongé, plane dans le
sens transversal ; les faces latérales planes ettriangulaires,à sommet
antérieur ; la face dorsale triangulaire et très convexe transversale-
ment. Longueur totale du rostre (du côté de la face ventrale),
275, dont 1""8 pour la base et 0""95 pour les pal-
pes. — Chélicères longues de 2""15, dont 150 » pour
le doigt, {mm pour la tige et {mm pour la base; apo-
physe externe à trois dents successives, la basilaire
plus forte; apophyse interne située en arrière de
l’autre, à deux dents. — Hypostome étroit, lancéolé,
à quatre files de 14-15 dents, les files internes écar-
tées. — Palpes cylindro-coniques, les trois premiers
articles cylindriques, décroissant en diamètre du
premier au quatrième; longueur : 375 # pour le Fig. 13. — 4rgas
Lx, 3252 pour le >, 1504 pour le 3, 100 pourle 4; Doigt”de la
celui-ci, qui est tronconique, est terminé par dix à a
douze cirres. Au bord interne de la face dorsale des
articles II et IIT, des poils très longs et nombreux, entre-croi-
sés avec ceux du côté opposé; des poils semblables s'observent
à la face dorsale de 1; des poils longs et clairsemés sur le bord
externe de I, Il et IIT, et sur la face dorsale de la base, en arrière
de l'insertion des palpes. Deux longues soies ornent la base de
l'hypostome.
Pattes jaunâtres, relativement courtes et fortes. Hanches [ écar-
tées des hanches IT par un intervalle égal à leur largeur, les trois
autres contiguës, toutes recouvertes, sur leurs bords antérieur et
postérieur et sur leur face dorsale, par le tégument strié. Premier
article cylindrique, sa longueur égale à une fois et demie son dia-
mètre. Les autres articles un peu aplatis dans le sens dorso-ventral ;
1
228 L.-G. NEUMANN
IT, IV et V un peu plus larges à l'extrémité distale; une fausse arti-
culation à la base de III et des tarses ; ceux-ci aussi larges à l’extré-
mité distale qu'à la base, avec une bosse spiniforme, plus longue
que large, qui fait paraître bifide leur extrémité. Sur tous les
articles, sauf les hanches, des poils épars, semblables à ceux du
corps. — Pattes IV longues de 11""74 (chez une femelle de 17mm),
la longueur des articles (des hanches aux tarses) étant respectif
vement210 120220900048 M0 0 M0 0 lus 0 S ADou
l’'ambulacre.
D'après35 individus rapportés par M. le Dr Brumpt de l'Ogaden
(pays Somali), à la suite de la mission du Bourg de Bozas en Afri-
que centrale.
M. Brumpt m'a communiqué sur la piqûre de cet Argas les ren-
seignements suivants :
« La piqûre du grand Argas est un peu plus douloureuse que celle
de l'Ornithodorus moubata; elle peut inter -
romprele sommeil. Elle est suivie de prurit
pendant plusieurs jours. Quand l'animal se
détache, la plaie saigne légèrement, puis il
s'y forme une pelite croûte sanguine, au-
dessous de laquelle une petite goutte de
sang extravasé s'accumule. En l'espace de
deux heures environ, la piqûre s'entoure
d'une ecchymose violette, circulaire, de 6 à
S centimètres de diamètre et ressemblant
aux larges marques que les ventouses lais-
Fig. 14. — Argas Brumpli. sent sur la peau. Cette tache passe par tou-
— Tarses I et IV. x 14. ! 2 ' .
tes les teintes des résorptions sanguines et
disparaît en six à huit jours ; mais le centre reste induré long-
temps. Sur les 17 piqûres qui m'ont été faites il y a cinq ans,
quatre ou cinq ont laissé de petits noyaux indurés sous-cutanés,
qui ne paraissent pas avoir de tendance à disparaître.»
Le lableau dichotomique des espèces d’Argas se trouve mainte-
nant établi sous la forme suivante:
19
en avant. CR RE RS NE
| Corps presque circulaire, aussi large en
avant qu'en arrière. 1. 104008, D A NES DENTS
Corps ovale, plus longque large, plus étroit
NOTES SUR LES IXODIDÉS 229
Bordure du corps iorméede plis étroits. M". :. 3
| Bordure du corps formée de festons rectan-
SNA RS ET ANNE NN Amen SiCuse
Téguments à plis grossiers. Corps “IE. ARE AREAS M Era LE
3 | Tégument à plis très fins. Corps long, renflé.
19
Hanches IV vers le tiers antérieur de la
longueur "0. SRE RE ne ANT ORGUE
ñ Corps bien plus étroit en avant qu'en arrière. D
Corps presque aussi large en avant qu'en arrière . . . . 6
Extrémité antérieure du corps plate etarrondie. A. reflexus.
à) | Extrémité antérieure du corps rétrécie en un
CAMÉTUSIOME E PALS AQU PERTE D AD TEUNINTT
Corps court, à peine plus long oo Rostre
6 ; bien en avant des hanches [I . . . A. transgariepinus.
Corps deux fois aussi long que large. . A. cucumerinus.
5. — Sur IXoDEs PUTUS (Cambridge).
En 1876, Cambridge a décrit (1), sous le nom de Hyalomma puta,
quelques Ixodidés recueillis par A. E. Eaton sur un Pingouin
(Pygosceles tæniatus) des iles Kerguelen. En 1899, m'appuyant sur
la description et, plutôt, sur les figures données par Cambridge,
j'ai considéré (2) cette espèce comme appartenant au genre /xodes
et je lui ai rapporté plusieurs spécimens des îles Saint-Pierre et
Miquelon, King, Saint-Paul, Campbell et du Cap Horn. Plus
tard (3), j'ai fait de même pour 15 nymphes et une larve, recueil-
lies par l'Expédition antarctique belge sur des Cormorans et des
Manchots de la Terre de Feu et de l'Antarctique.
J'ai reconnu ensuite (4) que le mâle de l'espèce est identique à
Ixodes fimbriatus Kramer et Neumann (1883), et les caractères des
(1) O. P. CAMBRipcE, On a new Order and some new Genera of Arachnida from
Kergeuelen’s Land. Proceedings of the Zoological Society of London, 1876, p. 260 ;
pl. XIX, fig 3. — An Account of the Collections made in Kerguelen'’s anni du-
ring the transit of Venus Expedition. Arachnida, p. 222; pl. XIII, fig. 4 Philo-
Sophical Transactions of the Royal Society of London, 1879.
(2) G. NEumANx, Revision de la famille des Ixodidés 3° mémoire). Mém. de la
Soc. Zoologique de France, XII, p. 125, fig. 7-9, 1879.
(3) G. NEuMANN, Revision... (4° mémoire). Zbidem XIV, p. 283, 1901.
(4) G. Neumann, Notes sur les Ixodidés. Archives de Parasitologie, VI, p. 115,
fig. 4; 1902. — Inem, Il. Zbidem, VIII, p. 44%, 1904. — Acariens parasites. Résul-
tats du voyage de S. Y. Belgica, Zoologie, 1903.
230 L.-G. NEUMANN
deux sexes m'ont paru justifier pour Zxodes putus la création
dans le genre {rodes, du sous-genre Ceratixodes. Les spécimens
mâles qui m'ont servi pour cette identification provenaient des fa-
laises du Yorkshire.
Dans ces derniers temps, M. William Evans (d' Edimbourg) m'a
communiqué, pour le déterminer, un individu femelle de cette
espèce, provenant de l'île Saint-Kilda,sur les côtes occidentales de
l'Écosse, où elle vit en parasite sur des « Oiseaux de mer (Frater-
cula arctica, etc.) ». M. Evans rapportait cette Tique à Zrodes borealis
(synonyme de Zr. putus), mais hésitait fortement pour l'identifier
à Hyalomma puta. M. Cambridge, à qui il s'était adressé, lui
avait répondu que son individu de Saint-Kilda n’a rien du tout à
faire avec H. puta (it has nothing whatever to do with FH. puta).
Peu de temps après, M. W. Evans publiait (1) ce qu'il savait de cet
Ixodidé, sous le nom d’Zrodes borealis Kram. et Neum.
J'ai obtenu, de l’obligeance de M. Cambridge, communication
d'un exemplaire de son Hyalomma puta et je puis maintenir, avec
certitude, l'identification que j'en ai faite avec Irodes borealis. Je
dirai d'abord que rien n’explique son attribution au genre Hya-
lomma, avec lequel il n’a rien de commun, et qui, entre autres ca-
ractères, exige la présence des yeux. L’exemplaire que j'ai vu est
une nymphe; la figure, les dimensions, la description données par
Cambridge prouvent que tous ceux qu'il a eus étaient aussi des
nymphes. Comme c'est une femelle qu'Evans lui a communiquée,
la différence entre les deux états explique que Cambridge se soit
refusé à y voir letype qu'il avait déerit. Mais je possède des lots qui
comprennent des nymphes et des femelles, dont l'identité spéci-
fique n’est pas douteuse; et cette réunion n'est même pas utile
pour la détermination, car /rodes putus a un ensemble de carac-
tères qui interdit de le confondre avec toute autre espèce et qui
permet la diagnose à première vue. La signification que j'ai
attribuée à Hyalomma puta Cambr., à Irodes borealis et à Ir. fim-
briatus Kr. et Neum. demeure donc entière.
J'ai identifié les formes boréales et les formes australes. Il est
possible qu'il existe entre elles des différences subspécifiques; je
n'en ai pas reconnu jusqu'à présent et celles que les divers exem-
(1) W. Evans, Some Znverlebrala, including Zxodes borealis, from St Kilda.
The Annals of Scottish Natural History, avril 1906, p. 85.
NOTES SUR LES IXODIDÉS 231
plaires que j'ai examinés présentaient m'ont paru individuelles et
non géographiques. Je dois dire cependant que le mâle n’est connu
que pour la forme boréale; on ne pourra se prononcer définitive-
ment que lorsqu'on aura vu celui des régions antarctiques.
Le travail d'Evans renferme, sur les Tiques de Saint-Kilda, des
détails intéressants et que je crois utile de reproduire.
Plusieurs d’entre elles ont été recueillies par M. Waterston sur
des Puffins et des Pétrels (?) capturés sur les falaises; elles étaient
portées surtout par des jeunes et étaient fixées à la peau nue des
commissures du bec, sous le bec même et dans les angles des yeux.
On les rencontre aussi sur les rochers et les endroits que ces Oi
seaux fréquentent; c’est un fait bien connu des habitants, qui
redoutent beaucoup la piqüre de ces Acariens. M. Waterston en a
trouvé souvent sur ses vêtements lorsqu'il grimpait sur les rochers,
mais il n’en a jamais été piqué. Wolley rapporte qu'en 1849, il fut
plusieurs fois gravement piqué par des Tiques de grande taille en
grimpant pieds nus sur les rochers.
En 1903, je disais : «1. putus paraît vivre en parasite exclusive-
ment sur des Palmipèdes des régionsfroides des deux hémisphères.
De fait, les hôtes que l'on a signalés sont des Manchots (Pygoscelis
tæniatus, Spheniscus magellanicus), des Cormorans (Phalacrocorax
magellamicus, P. carunculatus) et des Guillemots (Uria troile).
Or, si les Manchots sont fatalement localisés aux régions polaires
antarctiques, les Guillemots et surtout les Cormorans ont une aire
géographique très étendue. Le Cormoran Nigaud (Phalacrocorax
graculus L.), commun dans les régions arctiques et antarctiques,
est répandu partout et on le trouve en Afrique et au Brésil. C'est
probablement lui et, sans doute aussi, quelques autres espèces de
Palmipèdes aussi largement réparties qui ont distribué, dans
les régions arctiques et antarctiques et plus ou moins loin des
cercles polaires, l'intéressante espèce d'Ixode dontilest ici ques-
tion. »
Sans contredire cette explication, M. Evans objecte que Phala-
crocorax graculus ne se trouve ni au Brésil ni dans l'Antarctique. Je
m'en suis rapporté à ce que Gerbe en a dit (Dict. d'hist. nat. de
D'ORBIGNY, IV, p. 245). « Le Nigaud, quoique plus commun dans
232 L..G. NEUMANN. — NOTES SUR LES IXODIDÉS
les régions arctiques et antarctiques, est répandu partout; on le
trouve en Afrique et au Brésil. » Je dois dire cependant que, vu la
synonymie complexe et embrouillée des Cormorans, j'ai eu tort
de me servir du nom vulgaire « Nigaud » et qu'il faut probable-
ment regarder comme espèces distinctes le Nigaud de l'Europe,
de l'Asie orientale et d'Afrique, Graculus cristatus (Fabr.), et le
Nigaud du Brésil, Gr. brasilianus (Gmelin). Le fait essentiel est que
le genre (rraculus où Phalacrocorax a, par ses espèces, une aire
d'expansion qui va d'un pôle à l’autre, ce qui explique l'unité de
l'espèce d'Ixode qui les attaque (cf. Giebel, Thesaurus ornitho-
logiæ).
RECHERCHES
SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON
PAR
Le D' Francisque JANIN
Préparateur au Laboratoire de Parasitologie
(PLANCHE II)
Peu de Protozoaires sont aussi répandus dans la nature que les
Sarcosporidies et, pourtant, peu sont moins connus. Parasites des
muscles striés et du tissu conjonctif des Vertébrés à sang chaud,
saui quelques rares exceptions (Gecko, Lézard) on les trouvechezles
Mammifères y compris l'espèce humaine: le Mouton, le Porc, le
Cheval, le Bœuf, le Cerf, le Singe, le Lapin, le Kangouroo, le Phoque,
le Chien, le Chat, la Souris, le Rat; chez les Oiseaux: la Poule, le
Canard, le Merle, le Corbeau, la Pie; on en a encore cité chez
la Tortue, le Barbeau et la Crevette. L'obscurité qui les entoure.
ne tient certes pas au manque d'effort des naturalistes, car,
depuis leur découverte, bon nombre de travaux importants ont
paru sur ces intéressants parasites et les noms de Virchow,
Leuckart, Balbiani, R. Blanchard, Pfeiffer, Bertram, Laveran et
Mesnil, suffiraient à montrer l'intérêt et la difficulté des recher-
ches; mais l’expérimentation a de tout temps dérouté les zoolo-
gistes; l'impossibilité d'infester nos animaux de laboratoire, d’iso-
ler et de cultiver les Sarcosporidies a toujours été l’écueil contre
lèquel se sont heurtés leurs efforts continus et, sauf les principaux
caractères morphologiques, quelques points de la physiologie et
de l'évolution, le mode de propagation de ces Sporozoaires nous
est totalement inconnu.
Désignées indifféremment sous les noms de Psorospernies utriculi-
formes ou utriculaires, tubes psorospermiques, tübes ou utricules de
Miescher ou de Rainey, placées tour à tour dans le règne végétal et
le règne animal, les Sarcosporidies furent classées dans le cadre
Archives de Parasitologie, XI, n° 2, 1907. 16
234 F. JANIN
zoologique par Balbiani en 1884; le savant professeur du Collège
de France montra leurs affinités avec les Sporozoaires et les ran-
gea définitivement à côté des Grégarines et des Coccidies; pour
rappeler leur habitat intramusculaire, considéré par lui comme
exclusif, il préféra l'appellation de Sarcosporidies à celle, moins
exacte, de Psorospermies utriculiformes; la plupart de ces para-
sites, en effet, ne revêtant pas la forme de gourdes, mais plutôt de
tubes excessivement allongés.
Depuis, nombre d'auteurs ontrepris la question, enrichi legroupe
d'espèces nouvelles et décrit quelques-uns des stades d'évolution
de ces espèces. Notre maître, le professeur R. Blanchard, ayant
trouvé des Sarcosporidies dans la sous-muqueuse du gros intestin
d'un Kangouroo des rochers, mort au Jardin d’acclimatation,
a établi une classification de ces animaux, qu'il différencie sui-
vant leur habitat et la structure intime de leur membrane.
CLASSE DES SPOROZOAIRES
Ordre des Sarcosporidies.
I. Fam. Miescheridae siégeant dans Hour pui ee NUR UE
les muscles striés. Membrane d’enve- Sn . .. ;
Epaissie, traversée de fins cana-
IGppe ER EEE RENE licules — 2. Genus Sarcocystis.
II. Fam. Balbianidae siégeant
dans le tissu conjonctif. Membrane
d'enveloppe mince et anhiste. . . 1. Genus Balbiania.
Le professeur R. Blanchard nous a inspiré le sujet de ce travail.
Il nous a accordé la faveur de travailler au Laboratoire de Parasi-
tologie et de suivre son enseignement si précis et si clair. Nous
lui sommes redevable de l'intérêt que nous prenons chaque jour
aux études parasitologiques et de nous avoir éclairé la route;
nous le remercions sincèrement.
Qu'il nous soit permis d'adresser aussi nos vifs remerciements
aux docteurs Brumpt et Langeron, préparateurs au Laboratoire,
qui nous ont toujours encouragé dans notre tâche et guidé de
leurs conseils.
RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 239:
Historique.
En 1843, le professeur F. Miescher, de Bâle, en pratiquant l’au-
topsie d'une Souris, rencontra dans les muscles de cette dernière,
dont l'aspect blanchâtre et strié avait tout d'abord fixé son atten-
tion, des sortes de tubes allongés dans le sens des fibres et dont
l'épaisseur était # à 6 fois plus considérable que celle des faisceaux
primitifs, les dimensions variant de 44 à 208 ». Le tissu musculaire
du tronc, des membres, de la tête et du diaphragme présentait cette
anomalie; le reste était indemne.
Ces tubes étaient bourrés de petits corps arrondis, réniformes
ou allongés, d’une longueur de 9 à 14 # et d'une largeur de 37 à
6uA.
C'était la première observation de Sarcosporidies. Mais Miescher
ne sut se prononcer sur la véritable nature de ces kystes particu-
liers, qu'il interpréta comme un état pathologique, tout en faisant
une certaine réserve sur leur nature parasitaire.
Th. von Hessling, trois ans plus tard, trouva des formations
semblables dans le cœur d'un Mouton et reconnut leur analogie
avec celles décrites par Miescher.
Ces corps pouvaient être facilement isolés de leur gaine ; ils pré-
sentaient une membrane transparente, anhiste, épaisse de 1 425
à 6 # 39 et un contenu variable d'aspect : libre à l'intérieur des
jeunes kystes, condensé en amas séparés par une enveloppe à peine
appréciable, dans les vieux. Leur forme était arrondie ou allon-
gée, le diamètre variant de 0725 à 0"”167, la longueur
de 077312 à 0""420. Les corpuscules qu'ils renfermaient,
arrondis, plus souvent ovales, réniformes ou en croissant
avaient 10 à 12 de long et 4 à 6 x de large en moyenne.
Le professeur Leuckart retrouve chez le Porc et aussi chez le
Mouton, deux fois sur quatre, des productions que Raïiney avait
prises, chez le Porc, pour les phases de développement du Cysticers
cus cellulosae. Il remarque, comme lui, de fins bâtonnets implantés
a la surface de la membrane,qui paraissait traversée de fins cana-
licules poreux.Leuckartconsidérale premier de ces états comme dé-
rivant du second, par suite d'une désagrégation de la cuticule,comme
cela se voit pour le plateau des cellules épithéliales de l'intestin.
v” CAT PNA PE NN FRE
Er? ” "42
236 F. JANIN
Krause observe des tubes psorospermiques chez la plupart des
animaux domestiques, Bœuf, Veau, Porc, Mouton et souvent dans
les muscles de l'œil ; il n'émet aucun doute sur leur ressemblance
avec les Psorospermies de Von Hessling.
Winckler, vétérinaire départemental de Marienwerder, fut le
témoin d'une véritable épidémie de mort subite chez un grand
nombre de Moutons; à l'autopsie, il remarqua sur le trajet de
l'æsophage des kystes nodulaires dont la nature lui était inconnue.
Ces nodules, renfermés dans la couche musculaire de l’œsophage,
avaient un aspect jaunâtre et faisaient saillie à l'extérieur dans le
tissu conjonetif ambiant. Si on les ouvrait, il s'en écoulait un liquide
lacto-purulent ; examiné au microscope, ce dernier laissait voir une
infinité de corpuseules réniformes dans une masse plus cohérente,
transparente et tremblotante. En certains points, ces kystes étaient
accumulés en si grande quantité que le tissu musculaire ne pré-
sentait pas la moindre fibre saine.
Cobbold fit les mêmes observations chez le Bœut et le Mouton,
mais il remarqua la segmentation des tubes en des sortes de
cellules dont le contenu est formé de pseudo-navicelles mesurant12:
les unes arrondies, les autres ovales, plusieurs incurvées et
fusiformes, d'autres à pointe mousse à leurs extrémités, la
plupart réniformes. Il compta 1000 tubes par once de cœur de
Mouton.
Carl Dammann, professeur de médecine vétérinaire à l'Académie
de Proskau, eut l'occasion d'observer chez une Brebis âgée de 9 ans
des tubes psorospermiques qui avaient déterminé la mort de l’ani-
mal. Les nodules amassés, le long de l'æsophage, se rencontraient
nombreux dans les parois du pharynx et à la base de la langue;
la muqueuse, indemne, présentait en certains points de l'infiltration
et de la rougeur.
Il décela, en outre, au microscope, dans la plupart des fibres mus-
culaires, la présence de tubes semblables : certaines en ébergeaient
deux et même trois juxtaposés. Ces différentes constatations furent
faites non seulement dans les muscies de l’æsophage mais aussi
dans ceux de l'abdomen et du cou.
Dammann explique la mort de la Brebis par l'œdème de la glotte
consécutif à l’irritation et à l'inflammation du pharynx causées par
la présence des nodules parasilaires. Il pense que la mort subite
RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 237
des Moutons de Winckler ne doit pas être attribuée à d'autre
cause.
Zürn a vu plusieurs Moutons pris d'accès épileptiformes et mou-
rir ; des tubes psorospermiques dont la taille variait de celle d'un
grain de mil à celle d'une fève, se trouvaient nombreux dans la lan-
gue,les muscles du pharynx, du larynx, du cou, des joues, des
-lombes, du ventre et des cuisses. Cet auteur considère ces parasites
comme des végétaux voisins des Chitridinées.
C'est non seulement chez le Bœuf, mais aussi chez le Mouton,
que Beale a observé des tubes de Miescher, très souvent chez des
animaux bien portants. Dans les figures qu'il donne de ces produc-
tions, il les représente tantôt avec une membrane striée, tantôt
couvertes de prolongements fins.
La plupart de ces observations se rapportent à des kystes situés
sur le trajet de l'æœsophage et ne mentionnent que par hasard la
- présence de ces parasites dans le tissu musculaire proprement dit.
Moulé, médecin vétérinaire inspecteur des viandes à Paris, a étu-
dié les Sarcosporidies chez les animaux de boucherie et a constaté
leur présence fréquente dans le tissu musculaire des Moutons at-
teints de cachexie aqueuse. Situées à l'intérieur du faisceau pri-
mitif, ovoides à l'état jeune, fusiformes à l’état adulte, elles ont
un demi millimètre de long sur 60 à 100 & de large; vues au mi-
croscope à un faible grossissement et si l'on a pas exercé une
pression trop forte sur le fibre, on aperçoit des cloisons à leur inté-
rieur d'autant plus apparentes que le grossissement est plus fort.
A l'immersion homogène, on les voit entourées d’une membrane
régulièrement ciliée, beaucoup plus apparente aux extrémités que
sur les parties latérales, cils extrêmement fragiles, si fragiles qu'ils
- disparaissent sous l’action des réactifs les plus inoffensifs, la gly-
cérine par exemple.
L'auteur n'emploie que l’eau distillée. La membrane est si mince
qu'elle se rupture sous la moindre pression et le contenu, sous
forme de corpuscules falciformes ou réniformes, se répand dans
toutes les directions.
Laveran et Mesnil ont repris l'étude des Sarcosporidies du Porc
et du Mouton. Ils ont donné, les premiers, une bonne description
de la structure des spores et étudié la toxine découverte par Pfeif-
fer dans les kystes; ils l'ont dénommée sarcocystine. Ces deux au-
238 F. JANIN
teurs, trouvant constamment dans les kystes une membrane mince
et ciliée, ne conservent pour toutes les Sarcosporidies que le genre
- Sarcocystis Ray Lankester.
La membrane devait être remarquablement étudiée quelques
années plus tard par G, Ferret, qui suivit son évolution chez
l’Agneau. Mince tout d'abord et ciliée, elle devient épaisse et striée
pendant la plus grande partie de la croissance du kyste, pour rede-
venir mince et anhiste à l’état adulte.
Pluymers, professeur à Liège, s'est intéressé à l'anatomie patho-
logique du tissu musculaire infesté de Sarcosporidies et nous a
montré les relations de ces dernières avec la pathogénie des myo-
sites si fréquentes chez les animaux parasités.
En 1896, Gian Pietro Piana lut à la Société médico-vétérinaire
de Lombardie un important rapport sur un essai de culture de
sporozoïtes, d’après les règles indiquées par Celli et Fiocca pour
les Amibes. D'après l’auteur, les corpuscules falciformes se décom-
poseraient et mettraient en liberté des globules hyalins nucléés
qui, après enkystement, mèneraient une vie ralentie; mais il ne
dit pas 's'ilest arrivé à infester des animaux sous cette nouvelle
forme.
L'étude de ces animaux, on peut le voir par cet historique, est
loin d’être terminée et si leur nature et leur mode de formation
se sont quelque peu éclaircis, leur mode de pénétration est encore
ignoré.
Nous reprenons aujourd’hui cette étude. Après avoir eu l’occa-
sion d'examiner un grand nombre d'œsophages de Moutons, si
nos observations ne paraissent pas élucider complètement l'histoire
du parasitisme, nous aurons du moins fait œuvre utile, par
la mise au point aussi scrupuleuse que possible d'une question en-
core fort obscure et si controversée. Après avoir décrit la morpho-
logie des kystes et des sporozoïtes, nous passons successivement en
revue leur mode de formation et de transmission. L'échec que
nous relaterons de nos expériences ne doit nullement dérouter les
chercheurs : en expérimentation, le négatif a sa valeur et doit être
pris en considération. Une voie différente sera peut-être plus heu-
reuse et plus féconde en résultats; pour la science, nous le souhai-
tons en toute sincérité.
RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 239
Étude morphologique du kyste.
Avant d'entreprendre l'étude morphologique de la Sarcosporidie
du Mouton, nous devons faire remarquer au préalable la difficulté,
nousdironsmêmel'impossibilité, de nous procurer des échantillons
de viande dans chaque région des animaux infestés: nous avons
donc été contraints de porter uniquement nos investigations sur
des œsophages. Les abattoirs de la Villette nous ont fourni un vaste
champ d’études; malheureusement, nous ne pouvons donner une
statistique assez précise du nombre de Moutons infestés parmi les
Moutons sains sacrifiés et livrés à la consommation, les rensei-
gnements que nous avons pu recueillir, à ce sujet, n'ayant pas la
rigueur scientifique désirable pour être pris en considération. Tou-
tefois, nous pouvons dire que le nombre de Moutons malades est
assez restreint ; sur 10.000 bêtes sacrifiées chaque jour,une centaine
seulement présentent des Sarcosporidies.
Les œsophages des Moutons parasités sont facilement reconnals-
sables pour toutes les personnes qui fréquentent les abattoirs ; à pre-
mière vue, leur surface est parsemée dans toute son étendue de petits
corps ovoides, blanchâtres, dont le volume varie de celui d’un
grain de blé ou d'un petit pois à celui d'une noisette; ils offrent
assez l'apparence de petits abcès ou de petits amas graisseux et
font des saillies plus ou moins accentuées sur le tube æsophagien.
La confusion, d’ailleurs, n’est guère possible : l'examen microsco-
pique, comme nous le verrons plus loin, du contenu lacto-puriforme
ou caséeux en révèle immédiatement la nature.
_ La situation de ces kystes peut prêter à discussion. Raïlliet dis-
tingue chez le Mouton une psorospermose des muscles et une
psorospermose du tissu conjonctif; il sépare les kystes les plus vo-
lumineux, visibles à l'œil nu, des kystes microscopiques parasites
de la fibre encore saine et non augmentée de volume ; il range les
Sarcosporidies de l’œsophage du Mouton dans le genre Balbiania
R. Blanchard. Remarquant chez ces mêmes œsophages un pas-
sage graduel entre les parasites dits intramusculaires (Sarcocystis
tenella Raïlliet) et ceux que l’on représente inclus dans le tissu con-
jonctif (Balbiania gigantea Raïlliet), Laveran et Mesnil font dispa-
raître cette dernière espèce, et rangent toutes les Sarcosporidies
240 F. JANIN
dans l'unique genre Sarcocystis Ray Lankester; ils n'admettent pas
les deux familles établies par R. Blanchard, basées sur la nature des
tissus parasités.
Quant à nous, nous conservons ces familles et nous rangeons
les kystes de l'æsophage du Mouton, quels qu'ils soient, micros-
copiques ou non, dans le genre Sarcocystis Ray Lankester,
les kystes que l'on peut trouver dans le tissu conjonctif ayant
comme nous allons le voir, leur origine au sein d'une fibre muscu-
laire. Nous avons remarqué que, au cours de son évolution, la Sar-
cosporidie distend de plus en plus la fibre musculaire, détruit le
Fig. 1. — Coupe longitudinale d’un kyste de Sarcosporidie
inclus dans le tissu musculaire d’un œsophage de Mouton. X 11.
myoplasme et finit par être entourée par le sarcolemne et le sarco-
plasme qui a beaucoup proliféré; les Balbiania gigantea ont donc
toujours une enveloppe secondaire, dérivant du muscle et leur
énucléation donne le parasite, entouré de cette couche musculaire.
Puis le myoplasme lui-même finit par disparaître et le kyste tombe
dans le tissu conjonctif ambiant. Nous avons maintes fois disséqué
minutieusement des kystes de Balbiania; leur enveloppe nous a
très souvent donné les réactions du sarcolemne et non celles du
tissu conjonctif; en particulier, elle se dissout dans la potasse et
ne se colore pas par l'éosine et l'acide picrique (fig. 1).
Bertram ne fait pas de distinction entre les petites Sarcosporidies
et les gros kystes chez le Mouton ; pour cet auteur, ce ne sont que
des stades différents d'une seule et même espèce, les deux formes
PTS
RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 2/4 |
se rencontrant toujours simultanément. Le passage de l'une à
l'autre est facile à constater; leur structure semblable, d’ailleurs,
suffit à les identifier.
De cette différence de siège, entre les différents kystes, il résulte
une différence de forme, à laquelle il ne faudrait pas attacher trop
d'importance; ronde ou ovale, arrondie ou oblongue, les diamètres
varient suivant qu'on examine les Sarcosporidies intra-musculaires
oucelles quisontdéjàenfouies dans le tissu conjonctif. Si la première
est beaucoup plus longue que large, si la seconde se rapproche de
la forme sphérique, cela tient à une sorte d'adaptation au milieu.
« Dans le muscle, le sens de la moindre résistance coïncide avec
la direction des fibres : de là l'étirement des tubes psorospermi-
ques » ; dans le tissu conjonctif, « le tissu se laisse refouler au
contraire aussi facilement dans tous les sens : de là la forme plus
condensée du kyste. » Nous pensons aussi que la forme et les di-
mensions des kystes varient suivant l’état d'activité de l'organe;
il est certain qu'une Sarcosporidie a plus de latitude pour se déve-
lopper régulièrement et grossir dans les muscles de l'æsophage,
soumis à de simples mouvements de péristallisme, que dans
ceux de la cuisse, qui sont constamment en état de contraction
violente.
D'après Pfeifier, les Sarcosporidies sont très fréquentes ; sur en-
viron 100 bêtes qu'il a examinées, il les a trouvées dans 40 cas.
D’après Bertram, la proportion serait encore plus grande; il a ren
contré 175 Moutons infectés sur 182 et pense que, vraisemblable-
ment, il n'y a que les jeunes animaux, restant au pâturage, qui peu-
vent se contaminer.
Moulé, se limitant aux animaux de boucherie, a pu examiner
11.000 échantillons de viande environ; il arrive à cette conclusion
que non seulement les Sarcosporidies sont très fréquentes chez les
animaux destinés à notre alimentation, mais que, de tousles para-
sites connus, ce sont ceux que l'on trouve le plus communé-
ment.
A l'appui de cette assertion, il a pris des échantillons de viande
sur 200 Moutons cachectiques, que leur maigreur extrême et la pré-
sence d'une quantité considérable d’eau dans le tissu cellulaire
inter etintramuseulaire, avaient rendus impropres à la consomma-
tion ; il a toujours trouvé des Sarcosporidies, à part 4 cas, dans les
242 F. JANIN
parcelles prélevées dans les différents muscles de l’économie ani-
male, soit 98 pour 100. Les résultats sont loin d’être les mêmes
chez les Moutons de bonne qualité : sur 100 bêtes, 44 seulement en
hébergent. D'après cet auteur, la Sarcosporidie trouverait des
conditions de vie excellentes chez l'animal cachectique, dont tous
les muscles, à dire vrai, en sont farcis. Les Moutons examinés pro-
venaient de 12 pays différents et éloignés les uns des autres :
les uns de la Nouvelle-Zélande, les autres d'Autriche et d’Alle
magne.
Bergmann, de Stockholm, a noté l'influence de la saison et de la
latitude sur la fréquence des parasites. Ce serait la saison chaude,
juillet, août et septembre, qui favoriserait le mieux l’infestation;
celle-ci, d'autre part, serait plus manifeste dans les districts du sud
que dans ceux du nord.
Les dimensions des Sarcosporidies varient nécessairement sui-
vant l’âge de l'animal; mais, si nous prenons un Mouton adulte de
> à 6 ans, elles varieront suivant le siège : relativement peu volu-
mineuses dans les fibres musculaires du cœur, pour une raison
ignorée, elles atteignent dans l’æsophage les dimensions d'une
noisette. La longueur l'emporte toujours sur la largeur dans les
kystes qui habitent encore la fibre musculaire; les deux diamètres
sont sensiblement les mêmes chez ceux du tissu conjonctif. Les
corps allongés fusiformes intramusculaires ont une longueur qui
varie de Omm5 à 3mm de longueur ; les gros kystes de l'æœsophage
ont une longueur de 10 à 15 et même 20mn; entre ces dimensions
extrêmes, il y a place pour une foule d’intermédiaires, on le
conçoit facilement.
DESCRIPTION DU KYSTE
Parlons d'abord succinctement des deux procédés de prépara-
tion que nous avons mis en œuvre pour l'étude du kyste, soit à
l'état frais, soit à l'état de coupes.
L'examen à l'état frais est des plus simples :.il suffit de disso-
cier dans la glycérine ou l’eau physiologique de petits lambeaux
musculaires que l’on écrase entre lame et lamelle ; on peut éclair-
cir les préparations au moyen d'acide acétique à 20 pour 100 sans
modifier le sarcolemne. Quant à la méthode des coupes, nous avons
procédé commeil suit : aprèsavoir découpé au rasoir des fragments
RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 243
d’'æsophage, aussi petits que possible, nous les avons fixés dans le
picroformol de Bouin durant 12 heures, puis déshydratés par des
passages successifs dans l'alcool à 70°, 90° et absolu, enfin inclus à
la paraffine. Les matériaux inclus ont été débités en coupes de 5x
d'épaisseur : ces dernières, fixées sur le porte-objet, ont été colorées
à l’hématéine-éosine, seule méthode de coloration qui donne
de bonnes préparations : le bleu violacé des Sarcosporidies se déta
che merveilleusement sur le fond rose du tissu musculaire.
MEMBRANE
La question de la membrane des Sarcosporidies a été, depuis leur
découverte, l’objet de sérieuses discussions, qui ont donné le jour
aux opinions les plus contradictoires. Observée et étudiée d'abord
chez le Porc, elle a été décrite tantôt mince et anhiste, tantôt
épaisse et striée.
Miescher la décrit mince et homogène ; Rainey nous la montre
couverte de fibres courtes qui deviennent plus grandes et plus
distinctes à mesure que « l'animal » s'accroît.
Leuckart retrouve ce revêtement de fins bâtonnets chez la plu-
part des tubes psorospermiques; chez quelques-uns la membrane
est simplement traversée de canaïicules poreux : deux états qui
dérivent l’un de l’autre, d’après l’auteur, par une sorte de fonte,
de désagrégation de la cuticule.
Pour Virchow, ces cils, n'apparaissant qu'au moment de la dis-
sociation de la fibre musculaire qui entoure le parasite, ne seraient
que les fibres transversales de cette cellule musculaire. Dans les
coupes colorées à l’hématoxyline, il aperçoit des bâtonnets prenant
énergiquement la matière colorante sur la portion la plus externe
de la cuticule.
Manz considère la paroi comme formée d'une enveloppe finement
homogène, appliquée sur le contenu de l'utricule ; les jeunes kystes,
seuls, présentent des cils délicats qui peuvent passer facilement
inaperçus. Iladopte l'opinion de Leuckart et pense aussi que l'aspect
cilié résulte de la désagrégation d'une cuticule striée et canaliculée.
Rivolta assimile ces formes ciliées à des Infusoires dont les cils
seraient devenus rigides. Bütschli voit, au-dessous d'une membrane
striée et poreuse pouvant se dissocier en un revêtement de cils,
une autre membrane continue, mince, homogène, d'où s'échappent
4h F. JANIN
LE
des prolongements qui vont former, à l'intérieur de l'élément, un
système réticulé et alvéolaire.
Pour Bertram, dans les kystes jeunes, la cuticuleestunemembrane
homogène, mince, sans prolongements intérieurs, recouverte de
cils fins à sa surface ; plus tard, la couche externe de cette cuticule
peut se dissocier et se résoudre en bâtonnets, pendant que de fines
travées naissent de la couche interne, la plus mince, pour former
un réseau interne très délicat.
D'après les observations de Laveran et Mesnil, la membrane est
toujours très mince, moins de 1 x d'épaisseur, et recouverte exté-
-rieurement de filaments ténus disposés transversalement, sauf aux
extrémités où ils deviennent obliques et longitudinaux. Les fila- :
ments, obsérvés sur des Sarcosporidies fraîches, donnent à la mem-
brane un aspect strié bien visible sur les bords et n’ont d'autre
fonction que de rattacher le kyste à sa paroi musculaire. |
Les auteurs, on le voit, sont loin d'être d'accord sur la consti-
tution de la membrane. Rien n'est moins surprenant, si nous
demandons l'explication de ces divergences d'opinion à des
examens faits sur des kystes d'âge différent. Mince et ciliée dans
les jeunes, elle se différencie plus tard en deux zones au cours
de son évolution: une zone externe striée et une zone interne
mince, contiguë à la précédente; enfin, dans les formes adultes,
on la retrouve mince etunique.
Ferret, qui a pu suivre le développement du Sarcocystis tenella
du tout jeune Agneau au Mouton adulte, nous a donné de ce fait
une remarquable interprétation.
La forme la plus jeune du parasite, observée par cet auteur chez
un Agneau de deux mois, est un amas d'une trentaine d'éléments
dont l'ensemble a l'aspect d'une mûre, à la périphérie de laquelle
on n'observe pas de membrane, mais une simple zone mince et pâle.
À un stade plus avancé, en même temps que les éléments aug-
mentent de volume, deviennent plusnets et mieux limités, une
première ébauche de la cuticule apparaît, résultant de l’épaississe-
ment de leur couche externe à la périphérie de l'amas. Bientôt
cette membrane s'individualise, devient homogène, à double
contour, prenant énergiquement la coloration (pl. IL, fig. 1 et 2).
L'Agneau a deux mois et demi. Le parasiteest alors passé à l'état
de kyste et il s'est développé à la surface un très grand nombre de
RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 245
cils à direction presque perpendiculaire ; leur extrémité libre,
ondulée, est plus mince que leur base implantée sur des petites
excroissances ; pour Ferret, ces cils ne semblent nullement dériver
de la dissociation de bâtonnets appartenant à une cuticule épaissie.
_Le stade suivant est caractérisé par l'apparition d’une membrane
mince et striée, dont l’origine échappe; provient-elle directement de
la membrane ciliée ou est-elle une nouvelle formation, l’auteur ne
se prononce pas (pl. IL, fig. 4, 5 et 7).
Au début, les stries de la cuticule sont extrêmement fines, diri-
gées normalement au kyste et alternativement composées d'élé-
ments très minces et très réfringents et d'éléments qui se colorent
à l'hémalun. Du côté de la substance musculaire, pas de limite net-
te; du côté interne, les stries sont séparées de l'intérieur du kyste
par une ligne sombre, laquelle a été considérée, par la plupart des
auteurs, comme une deuxième couche plus primitive encore que
la couche des bâtonnets. En examinant les préparations avec soin,
il est impossible, d'après Ferret, de distinguer un double contour
à cette couche; il pense que cet aspect pourrait être dû à une grande
différence de réfringence entre la membrane cuticulaire etles élé-
ments du kyste; cette différenceétant moins accentuée du côté dela
substancemusculaire, la ligne de démarcation est aussi moins tran-
chée. Plus tard, la cuticule s'amineit, les éléments s'élargissent, de-
viennent plus nets, lesstries colorées sont devenues de petits bâton-
nets séparés par une substance incolore fort réfringente. Vue de
face, elle présente alors l'aspect d'une membrane transparente, à
travers laquelle s'apercoivent les éléments du kyste, c'est-à-dire les
corps falciformes, qui apparaissent à ce stade (pl. IL, fig. 8 et 10).
La fibre musculaire parasitée a perdu par place sa striation,
quoique les fibres contractiles soient pourtant visibles etles noyaux
sains; le tissu conjonctif est normal.
Si l'on examine maintenant les kystes les plus développés que l'on
puisse rencontrer chez un Mouton de six ans par exemple, la mem-
brane n'est plus composée que par une mince couche fortement
colorée par l'hématoxyline, coloration qui n'est pas continue, Car
elle présente des portions plus vivement teintées, séparées par des
intervalles plus clairs. La surface externe est parfaitement lisse ; à
sa face interne sont accolées des cellules entre lesquelles s'échap-
pent les travées qui cloisonnent l'élément; ces travées, intimement
dr," FER
246 F. JANIN
soudées, ne se colorent pas si fortement que la cuticule. A la périphé-
rie, la fibre musculaire forme une couche claire, granuleuse, dans
laquelle on ne peut déceler aucune trace d'éléments contractiles,
mais dont les noyaux subsistent encore et ne présentent aucune
altération notable. Autour de la fibre, s'est développée une couche
de tissu conjonctif homogène, avec noyaux, dont l'épaisseur est sen-
siblement égale à celle que présente le reste de la substance mus-
culaire : cette couche, qui n'existe pas chez les jeunes kystes, est la
première manifestation de l’irritation provoquée par la présence
du parasite au sein des tissus (pl. IT, fig. 11).
CONTENU
De la couche interne de la cuticule, membrane fine et homogène
des auteurs, partent des prolongements membraniformes, sans
structure, qui se colorent énergiquement par l'hématéine; leurs
nombreuses anastomoses dessinent un réticulum et délimitent un
système de mailles dont la grandeur et la forme varient suivant les
kystes et, dans un même kyste, suivant le point considéré.
Si nous examinons attentivement la coupe longitudinale d'une
Sarcosporidie, nous y trouvons trois zones d’alvéoles: une première
sous-Cuticulaire, une deuxième centrale et une zone moyenne
intermédiaire aux deux autres. Tantôt ovales, tantôt polyédriques,
les alvéoles varient de grandeur de la périphérie au centre;
ceux qui se trouvent immédiatement en contact avec le cuti-
cule sont les plus petits; puis, ils s’accroissent et deviennent
d'autant plus larges qu'on se rapproche davantage du centre de
l'élément : de 20 & ils peuvent atteindre 200 et 300 z de diamètre.
L'épaisseur des cloisons varie de 2 à 18 », elle diminue de la
périphérie au centre.
Les divers groupes d’alvéoles, que nous venons d'énumérer, ren-
ferment un contenu tout aussi varié. Les petites cavités périphéri-
ques sont remplies de cellulesirrégulières, généralement arrondies,
quelquefois polyédriques par pression réciproque, à contours nets
et mesurant de 6 à 82. Le protoplasma, presque homogène, ne con-
tient que peu de granulations; le noyau, relativement volumineux,
mesure de 2 à 3 - et se colore d'une façon intense, le protoplasma
se colorant faiblement. Ces cellules se répartissent aux deux pôles
et sur toute la surface; elles sont particulièrement abondantes en
RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 247
certains points, formant des amas bien visibles, des ilots, des
foyers, pourrait-on dire, où la prolifération est plus active.
A cette couche d'éléments en voie de multiplication, fait suite
une seconde couche beaucoup plus épaisse, plus colorée par les
réactifs et représentée par les corps réniformes adultes, qui rem-
plissent complètement les cellules de la zone moyenne. Ces cor
puscules ou sporozoîtes, arrivés à leur complet développement, pré-
sentent des aspects variés; on les a tour à tour comparés à des
reins, à des faux, des navicelies, des fuseaux, pour montrer la forme
Fig. 2. — Coupe longitudinale d’un kyste de Sarcosporidie du Mouton;
coupe de l’æsophage avec sa muqueuse. X 11.
plus ou moins arquée de leur corps et celle plus ou moins effilée
de leurs extrémités. La banane serait peut-être la meilleure com-
paraison ; car le sporozoïte mür a, comme ce fruit, un corps incurvé,
une extrémité pointue, l’autre arrondie.
Le contenu des cellules centrales est représenté par des éléments
minces, plus ou moins effrités ou altérés, pointus à leurs deux
bouts, qui sont des sporozoites vieillis, et par des détritus granu-
leux, résultant de la désagrégation de ces derniers.
Les débris des sporozoïtes disparaissent, les vides s'accroissent,
le cœur du kyste n'est bientôt plus formé que par des alvéoles
réduits à leur paroi (fig. 2).
On passe ainsi de la périphérie au centre, de l'élément arrondi,
plus ou moins régulier, à la forme adulte, incurvée, par une sé-
218 F. JANIN
rie de formes de transition qui constituent comme les différentes
étapes de l’évolution des sporozoïtes. L'examen microscopique du
liquide kystique nous montre, nageant au sein de la masse, à la
fois des formes arrondies, piriformes, ovalaires ou incurvées.
- Il est curieux de remarquer, à ce propos, que les différentes for-
mes d'évolution des sporozoïtes de la Sarcosporidie du Mouton
peuvent se trouver à l’état adulte chez les animaux inférieurs. La
Sarcosporidie de la petite Crevette blanche (Palæmon rectirostris)
se reproduit par des sporozoïtes piriformes; celle de l'Otarie (Otaria
californiana) par des corpuscules naviculaires.
La technique de coloration que nous avons employée pour exa-
miner la structure des corps réniformes est la méthode de Lave-
ran-Brumpt. Elle est des plus simples : après avoir fixé le frottis
pendant 10 minutes dans l'alcool absolu, on le laisse sécher à l'air
et l'on procède à la coloration en étendant sur la lame un mé-
lange de bleu Borrel (à l’oxyde d'argent) et d’éosine de Hôchst à
4 pour 4000. La quantité de cette dernière varie suivant l’âge etla
force du bleu; on fait un mélange dans la proportion de 10, 42,
15 gouttes d'éosine pour une goutte de bleu. Un premier essai ren-
seigne sur les proportions à employer. Le liquide doit être d'une
belle teinte violet rouge et ne doit pas précipiter.
La coloration est complète en 5 à 20 minutes; on la surveille au
microscope. Quand elle est jugée suffisante, on lave rapidement
dans de l’eau ordinaire et l’on procède à la différenciation par le
tannin orange de Unna. L'opération est terminée en une à trois mi-
nutes : on lave à l’eau et l’on sèche au buvard. L'examen microsco-
pique se fait dans l'huile de cèdre, sans lamelle et sans monter au
baume.
Le sporozoîïte, sur une préparation ainsi colorée, a la forme d'une
banane de 14 : de long sur 5 » d'épaisseur en moyenne, entourée
d'une membrane délicate. Son extrémité amincie présente une va-
cuole claire,ovalaire, déjà visible à l'état frais, dans laquelle on aper-
çoit un chapelet ou des grains isolés de chromatine colorés en rouge
violet : c'est le noyau. Laveran et Mesnil, par la méthode de Hei-
denhain (hématoxyline et alun), ont pu y déceler un caryosome
central ou deux périphériques. La partie médiane contient, dis-
séminés dans la masse du protoplasma bleu foncé, des granules
réfringents d'origine nucléaire : par la méthode de triple colora-
RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 289
tion hématéine-safranine-Lichtgrün ou hématéine-magenta-Licht-
orün, ils retiennent la coloration de la safranine ou du magenta;
il y en a quelquefois dans toute l'étendue du protoplasma et
même de chaque côté du noyau; mais le plus souvent ils sont
confinés dans la région moyenne de l'élément (fig. 3).
L'autre moitiéest arrondie et présente, dans le plusgrand nombre
de cas, un espace clair dont la longueur est égale au tiers du corps
réniforme etla largeur au diamètre del'élément; on peut apercevoir,
à l'intérieur, une fine striation qui rappelle ceNe des capsules po-
laires des Myxosporidies. Laveran et Mesnil n'ont pu mettre en évi -
Fig. 3. — Corps falciformes (sporozoïtes) de la Sarcosporidie du Mouton. Colora
ration : méthode de Laveran-Brumpt, bleu Borrel-éosine. X 1325. &
dence un filament, comme Pfeiffer en 1890 et Van Eecke en 1892 ont
prétendu le faire. Th. von Wasielewski a réussi à observer avec
certitude, dit-il, la sortie de fils d’un pôle des corpuscules : «les
fils, faisant lentement saillie, se détachaient et disparaissaient très
rapidement »; d'après l’auteur, ils n'ont aucun point de comparai-
son avec les fils polaires des Myxosporidies.
M. Koch, qui a étudié récemment les sporozoïtes du Miescheria
muris, n'a pas aperçu d'appendices filiformes, mais, pour lui, la
facon dont se meuvent ces corpuscules n'exclut pas l'existence de
tels cils. Cet auteur, en effet, observant des corpuscules falciformes
de la Souris sur la platine chauffante du microscope, a aperçu subite-
ment, à une température voisine de celle du sang, quelques-uns de
ces corpuscules « exécuter de vifs mouvements, de telle facon
qu'il n'est pas possible de les attribuer à des courants de liquide,
a des mouvements moléculaires ou à des phénomènes de gonfle-
Archives de Parasitologie, XI, n° 2, 1907. 17
250 F. JANIN
ment. Ce ne sont pas des mouvements amiboïdes ni de simples
changements de position, mais des mouvements de rotation de
chaque spore autour de son axe longitudinal. »
L. Pfeifler divise les corps falciformes du Porc en faux simples,
qui exercent des mouvements rapprochant ou éloignant leurs extré-
mités ou se tournant dans un cercle à petit rayon et en germes de
faux, à contenu différencié, qui sont immobiles.
Nous avons certainement aperçu ces mouvements de rotation, en
pas de vis, chez certains sporozoïtes de la Sarcosporidie du Mouton,
mais les ayant observés aussi bien à latempérature ambiante qu'à
une température élevée, nous les avons attribués aux courantsdes
milieux liquides ou aux mouvements moléculaires des granules
brillants, dont quelques-uns s'attachent aux corpuseules et leur
font perdre l'équilibre. Quoi qu'il en soit, si ces mouvements sont
des phénomènes vitaux, on peut douter qu'ils puissent être assez
énergiques pour entraîner les éléments au travers des muqueuses
ou de Ja paroi des capillaires sanguins.
Comme tout être vivant, les corps falciformes manifestent leur
vitalité par la production de toxines qui s'accumulent dans le li-
quide kystique. L. Pfeiffer, le premier, a signalé que, si l’on injec-
tait dans le tissu. conjonctif ou dans la trachée d'un Lapin un ex-
trait aqueux de Sarcosporidie, le Lapin est pris de diarrhée,
d’abaissement de température et meurt en quatre ou sept heures.
Laveran et Mesnil ont repris ces recherches et ont vérifié l’exis-
tence de cette toxine dans la Sarcosporidie du Mouton; ils lui
donnent le nom de sarcocystine. Elle est très toxique pour le Lapin,
peu pour les autres animaux. Une quantité d'extrait glycériné,
correspondant à mm de Sarcosporidie fraîche, le tueau bout de deux
à trois heures. On observe de la diarrhée, de l'abaissement de
température et la mort au milieu de convulsions. Si la dose est
plus faible, on remarque de l’æœdème au point d'inoculation et de la
fièvre ; la diarrhée est plus tardive, l’hypothermie moins marquée,
l'animal maigrit et meurt au bout de vingt jours. Pas de lésion im-
portante à l’autopsie. La mort est retardée, si l'on injecte la toxine
dans les centres nerveux; celle-ci n'agit done pas directement sur
le système cérébro-spinal.
Rivel et Behrens, expérimentant celle de la Sarcosporidie du
Buffle, ont pu obtenir des effets identiques chez le Lapin, mais
RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 251
à l'encontre des derniers auteurs, ils pensent à un poison nerveux.
Ils ont cherché à préciser la nature chimique de la substance active ;
ils concluent que c'est une substance voisine des enzymes. Se basant
sur son action spécifique sur le Lapin, ils croient qu'il est possible
d'immuniser cet animal.
Évolution des Sarcosporidies.
L'évolution de la Sarcosporidie se confond en quelque sorteavec
l'étude anatomo-pathologique du tissu parasité. La difficulté d'ob-
server dans les préparations de jeunes éléments dont le noyau est
en voie de multiplication explique pourquoi l'étude de cette évo-
lution est restée longtemps limitée au stade si communément ren-
contré dans les muscles, le stade de sporulation. Ferret et Pluymers
étudiant, l'un des kystes contemporains de leur hôte, le second les
relations de la psorospermose avec les myosites que l’on observe
parfois chez les animaux atteints, élargirent le cadre anatomo-
pathologique et mirent en pleine lumière l’évolution du parasite.
Nous avons déjà étudié succinctement les premiers stades de
développement du kyste, dans la mesure où cela pouvait nous être
utile pour comprendre l’évolution de la membrane; nous sommes
obligé de reprendre cette courte étude avec plus de détails et, le
plus clairement possible, nous suivrons pas à pas les phases d’ac-
croissement de la Sarcosporidie et sa destinée ultérieure.
La forme primitive sous laquelle elle a été observée est un groupe
d'éléments situé à l’intérieur d'une fibre musculaire cardiaque et
dont l'aspect fait songer aux sphères primitives des Myxosporidies.
A leur intérieur, on aperçoit des grains de chromatine isolés ou
disposés en demi-iune; à la phériphérie de l’amas, une zone pâle
et mince se différencie par la condensation du protoplasma.
Plus tard, les éléments s’accroissent, deviennent plus nets et
leurs amas chromatiques s'arrondissent et se hérissent d'aspérités.
La zone claire de la phériphérie est devenue granuleuse, s’est
épaissie et a donné naissance à des cils (pl. HT, fig. 1-5).
La phase suivante est caractérisée par un amas de cellules net-
tement différenciées, à gros noyau arrondi central, et par une mem-
brane striée. On assiste alors à une division du noyau, bientôt suivie
d'une division cellulaire : la cellule primitive donne naissance à
PONTS
252 F. JANIN
deux ou plusieurs cellules qui vont devenir les spores définitives ;
elles sont arrondies, à contours parfois polyédriques, entourées
d'une mince membrane, occupées par un noyau volumineux.
Au pourtour se dessine bientôt la substance trabéculaire qui va
constituer les cloisons du réseau alvéolaire, pendant que le proto-
plasma et le noyau, se multipliant en nombre infini, vont former
une quantité de petites cellules rondes, première ébauche des spo-
rozoites.
La Sarcosporidie estalors constituée par de nombreuses spores,
bourrées de petits corpuscules et séparées par des cloisons. Ses
deux extrémités, en particulier, sont occupées par des amas
de jeunes éléments, qui font penser à l'accroissement du kyste
par la formation de spores nouvelles à ses deux bouts. A me-
sure qu'il grossit, il détend de plus en plus la fibre muscu-
laire, détruit le myoplasme et finit par être entouré uniquement
par le sarcolemne et le tissu conjonctif intermuseulaire ; il s’'arron-
dit par suite dela résistance qu'il éprouve de toutes parts et sa zone
de prolifération, jusque-là localisée aux deux pôles, s'étend à toute
la périphérie : le kyste adulte est constitué (pl. IL, fig. 10 et 11).
Ainsi arrivé à son complet développement, subit-il un temps d’ar-
rêt ou évolue-t-il? S'il évolue, quel est son sort ultérieur et quels
désordres peut-il entraîner chez son hôte ? Pleiffer nous répond, tout
d’abord, en distinguant deux formes: une passagère et une durable,
sans toutefois pouvoir les différencier au point de vue morphologi-
que. Les unes demeureraient indéfiniment sans produire d'em-
bryons; les autres, après des phénomènes de multiplication, éclate-
raient par distension etmettraient ainsi en liberté leurssporozoîïtes.
Actuellement, la plupart des auteurs, avec Bertram, Laulanié, Braun,
admettent que l’évolution se termine avec la formation des sporo-
zoites.
Les tubes peuvent persister longtemps dans l'intérieur des
fibres musculaires, attendant la mort de leur hôte. Si elle tarde trop
à venir, ils finissent par dégénérer et disparaître ; quant à l’altéra-
tion des tissus, on ne mentionne que la dilatation et l'aspect mo-
niliforme des faisceaux primitifs. Cependant, d'après Perroncito,
les Sarcosporidies peuvent se mouvoir dans l’intérieur du sarco-
lemme et laisser des traces de leur passage. Quand elles sont an-
ciennes, elles peuvent subir la dégénérescence crétacée. Moulé, tout
RECHERCHES SUR LA SARUOSPORIDIE DU MOUTON 253
en remarquant la fréquence des Sarcosporidies chez les Moutons
atteints de cachexie aqueuse, ne se prononce pas nettement surleurs
relations avec cette maladie. Laulanié a vu, chezle Porc il est vrai,
certains points des faisceaux primitifs envahis rester sains, d'au-
tres subir la dégénérescence vitreuse; le parasite a irrité le tissu
conjonctif : il s'est formé des nodules analogues aux granulations
tuberculeuses, en même temps que de la myosite interstitielle. Les
éléments musculaires englobés, d'abord atrophiés, sont progressi-
vement détruits; la myosite parenchymateuse s'ajoute à la myosite
interstitielle.
D'après Pluymers, ce n’est qu'exceptionnellement que les para-
sites peuvent déterminer une myosite de voisinage entrainant leur
propre destruction. Le kyste, une fois tombé dansletissu conjonctif
interfasciculaire, produit une irritation qui se manifeste bientôt
par des phénomènes inflammatoires. Comme autour de tout corps
étranger, tubercule ou parasite quelconque, l'organisme prépare
sa défense par un afflux de leucocytes et par une multiplication
conjonctive intense. Il se crée un foyer inflammatoire, au centre
duquel est le parasite entouré de fragments musculaires, d’une
couche de cellules épithélioïdes et d'une auréole de leucocytes.
L'auteur a également constaté la présence de cellules géantes ; mais
s'agit-il là de véritables ou de pseudo-cellules géantes, dérivant
des cellules musculaires ?
La nutrition nécessairement défectueuse du foyer va lui faire su-
bir certaines modifications qui vont entraîner sa dégénérescence : le
contour en devient moins net, la coloration moins sensible. Les fi-
bres musculaires voisines réagissent par une augmentation corré-
lative de leurs noyaux ; l'infiltrat cellulaire augmente et s'organise
par l'apparition de capillaires de nouvelle formation; il en résulte
une dissociation complète des fibres musculaires.
La guérison peut se faire par dégénérescence caséeuse de l’îlot
enflammé et des sels calcaires peuvent s'y déposer.
L'inflammation se termine, le plus souvent, par l'organisation
d'un tissu de granulations limité par une coque conjonctive et par
la transformation du foyer en tissu fibreux;les fibres musculaires
et les débris du parasite ont totalement disparu.
Parfois les îlots inflammatoires sont si confluents quele muscle,
considérablement atrophié, n'est plus représenté que par quelques
254 F. JANIN
ilots de tissu musculaire englobés dans le tissu fibreux ; il s’est pro-
duit une sclérose presque totale.
Symptômes de la sarcosporidiose.
Qu'elles soient à l'état de kystes volumineux comme dans l'æso-
phage, ou de tubes allongés infiltrant le tissu musculaire, ces deux
formes pouvant se trouver chez le même individu, les Sarcospo-
ridies peuvent-elles trahir leur présence pendant la vie de l'animal
et donner lieu à des symptômes qui font soupçonner l'infestation ?
Nous avons vu, dans le cours de l'historique, que les Moutons de
Winckler sont morts subitement, la mortalité prenant les allures
d’une épizootie,; que la Brebis de Dammann avait succombé à
l'æœdème de la glotte, conséquence de l'inflammation du pharynx ;
que Zürn avait assisté à la mort de plusieurs Moutons pris d'accès
épileptiformes.
En face de faits aussi significatifs, ces auteurs n'ont pas hésité
à attribuer aux parasites les symptômes morbides observés chez
ces animaux. Aujourd'hui, la plupart des naturalistes nient la rela-
tion entre la mort et la psorospermose et ne voient qu'une simple
coïncidence.
Les recherches de Morot semblent bien établir la vraisemblance
d'une telle innocuité de la part des parasites. Il en a très souvent
trouvé chez les Moutons abattus à Troyes pour la boucherie ; nous-
même nous avons fait, maintes fois, la constatation aux abattoirs de
la Villette, à Paris.
Surenviron 900 bêtes ovines, Morot en a trouvé 272 porteuses de
kystes, le même sujet pouvant en présenter de toutes dimensions
et dans toutes les parties du corps : 6 en avaient dans la plèvre, 10
dans le péritoine, 27 dans la plèvre et le péritoine; une Brebis de
deuxième qualité, bien portante, en avait 227 dans l'œsophage et
128 dans la langue, quelques-uns dans les régions scapulaires et
crurales.
Malgré ces chiftres, il serait difficile d'admettre l'innocuité ab-
solue des Sarcosporidies, si nous nous en rapportons à ce que nous
Savons aujourd'hui de leur évolutien dans les tissus et de l'élabo-
ration par elles d'un principe toxique. Leur présence dans les
muscles de la vie de relation peut, sans doute, rester longtemps
RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 255
inaperçue, bien qu'ils doivent perdre à la longue leur élasticité et
leur souplesse normale, mais il semble illogique que leur appari-
tion en grand nombre dans les organes importants, comme le
cœur en particulier, ne puisse engendrer des troubles mécaniques,
sinon la dégénérescence parenchymateuse ou graisseuse pouvant
entrainer la mort. D'autre part, la toxine élaborée par les sporo-
zoïtes, la sarcocystine, si elle ne tue pas l'animal, n'a-t-elle pas à
priori, comme toute substance toxique, une action défavorable
sur la nutrition? Dans les œdèmes, l'amaigrissement, la cachexie,
dans tous ces phénomènes si souvent concomitants, ne doit-elle pas
entrer en ligne de compte?
Quoi qu'il en soit, si les symptômes précités ont pour cause les
parasites, on ne peut, à l'heure actuelle, dépister l’infestation, car
ils n'ont rien de spécifique et peuvent être produits par nombre
de maladies infectieuses.
Mode de reproduction.
L'étude de l'infestation du Mouton par les Sarcosporidies nous
oblige, pour la compréhension du sujet, à reculer les limites que
nous nous sommes tracées et à faire uneincursion dans le vaste
domaine des Sporozoaires, à y envisager plus spécialement leur
mode de reproduction. De ces données préalables, nous pourrons
tirer un enseignement suffisant pour élucider, sinon pour mettre
au point cette question de la propagation des Sarcosporidies en
général, de celles qui nous intéressent en particulier.
Si nous jetons un coup d'œil d'ensemble sur les Coccidies, nous
voyons que, dans cet ordre de Sporozoaires, il existe deux modes
de reproduction : une reproduction asexuée ou endogène, la schi-
zogonie, qui aboutit, par la segmentation du noyau, à la formation
et à la mise en liberté de petits corps allongés et nucléés (méro-
zoïtes); ces organismes reproducteurs ou corpusecules falciformes,
considérés comme les équivalents des corpuscules réniformes des
Sarcosporidies, peuvent infester une nouvellecelluleépithéliale. Un
autre mode de reproduction, celui-ci sexué, la sporogonie, s’ac-
complit par la conjugaison de deux éléments différenciés, mâle et
femelle, et aboutit à la formation de spores qui assurent la per-
pétuité de l'espèce hors de son hôte.
256 F. JANIN
Nous retrouvons ce double cycle évolutif chez les Hémosporidies,
en particulier chez celles qui déterminent le paludisme, mais la
sporogonie a ceci de curieux qu'elle a lieu chez un hôte intermé-
diaire,le Moustique, devenu ainsi agent de dissémination du para-
site dans le monde extérieur.
L'ordre des Sarcosporidies, si voisin des précédents, a-t-il cette
doubleévolution,endogène ou exogène?A-t-il, comme les Coccidies,
une évolution exogène simple ou, comme les Hémosporicies, une
évolution exogène chez un hôte intermédiaire ? C’est cette question
que nous devons nous efforcer de résoudre, tout au moins de
rendre plus précise, d’après les travaux les plus récents.
La voie de pénétration la plus ordinaire des Sporozoaires est la
voie digestive. La localisation plus particulière des Sarcosporidies
dans les muscles voisins du tube digestif a fait admettre l'infesta-
tion par cette voie. Le Balbiania mucosa, que le professeur R. Blan-
chard a découverte dans la sous-muqueuse du gros intestin du
Kangouroo des rochers; le Sarcocystis tenella, que l’on trouve
fréquemment dans les diverses couches musculeuses du canal
digestif, suffisent à le démontrer. Un cas de sarcosporidiose du
foie, dûment constaté chez un Soudanais par Kartulis, en Égypte,
nous fait suivre pas à pas la progression du parasite à travers
les tuniques intestinales, dans le système porte et son arrêt
dans le foie. Cette barrière franchie, le cœur peut être touché;
S. H. Wooldrige et A. E. Mettam (Dublin) ont trouvé des quantités
de kystes dans le muscle du cœur d’un Mouton; bien plus, Mettam
a vu des sporozoïtes dans le sang et des kystes dans les fibres de
Purkinje du muscle cardiaque. Harlow Brooks décrit aussi une
maladie des Élans, des Buffles caribou et des Daims produite par
une Sarcosporidie. Cette dernière se loge fréquemment dans les
muscles du cœur, dont elle produit la dégénérescence parenchy-
mateuse. Mais le cœur, n’est pas forcément lésé et les parasites
peuvent cheminer dans le courant circulatoire, qui les disperse
dans tout le tissu musculaire, leur dernière étape.
Ces diverses observations nous rendent séduisante l'hypothèse
de l'infestation des animaux par la voie digestive; mais alors une
autre question se pose et surgit d'elle-même : y a-t-il pénétration
directe du sporozoïte dans le nouvel hôte par ingestion des tissus
du premier animal infesté ?
RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 251
Cette nouvelle hypothèse a contre elle le petitnombre de cas rele-
vés chez les Carnivores et les résultats négatifs des expériencesd'in-
festation d'animaux par ingestion de viandes contaminées.
- Virchow a nourri des Chats et des Lapins avec de la viande de
Porc renfermant de grandes quantités de Psorospermies ; ses expé-
riences sont demeurées sans résultat. Il en conclut simplement que
l'ingestion de ces viandes est inoffensive.
Manz a tenté d’infester des Cochons d'Inde, des Ratset des Souris
blanches ; il tua des animaux quelques heures après le repas sus-
pect ; il ne trouva que des débris de tubes psorospermiques dans
l'intestin, rien d'anormal dans les parois ou dans tout autre organe.
Il doute donc que l'infestation se fasse par la voie digestive.
Nous n'avons pas été plus heureux dans nos essais d’infestation.
Nous avons nourri des Cobayes avec des carottes parsemées de
kystes psorospermiques frais de Mouton, des Souris blanches avec
de la viande fraîche parasitée, d'autres de grains auxquels nous
avions inêlé des kystes desséchés de Sarcosporidies. Tous ces ani-
maux n'ont fait qu'un repas contaminé et ont été sacrifiés 40 à 50
jours après. L'examen du sang, pratiqué régulièrement, est resté
négatif; l'autopsie n’a rien montré de suspect ni dans les organes
ni dans le tissu musculaire. Une Marmotte endormie, à laquelle
nous favions fait ingérer, au moyen d'une sonde, 5 à 6 d'une
solution physiologique tenant en suspension des sporozoïites,
provenant d’un kyste frais de Mouton, est morte deux jours
après. L'autopsie nous révéla l'existence d'une broncho-pneu-
monie banale, sans les parasites que nous nous attendions à
rencontrer. Les liquides intestinal et stomacal examinés n'ont mon-
tré que des débris de sporozoïtes ; les parois de l'intestin et de l’es-
tomac ne présentaient aucune lésion.
De tous ces résultats négatifs, nous devrions logiquement con-
clure que l’infestation directe par ingestion du corps réniforme
n'existe pas; l’expérimentation, en effet, est en contradiction évi-
dente avec l'observation, le laboratoire avec la nature. D'ailleurs,
la faible résistance de ces organismes vis-à-vis dessucs digestifs
et des influences extérieures devait à priori nous faire présager de
tels résultats. Mais alors, comment interpréter l'expérience que Th.
Smith rapporta en 1900, expérience positive qui, sans doute, va
«
donner un nouvel essor à des recherches aussi dignes d'intérêt?
258 F. JANIN
Smith a nourri des Souris grises avec de la chair musculaire
de Souris infestées de Sarcosporidies; après un délai minimum de
45 jours, elles se montrèrent infestées à leur tour dans la proportion
de 63,6 p.100, alors que8 p. 100 seulement des Souris grises de con-
trôle présentèrent l'infestation spontanée. Dans un autre rapport
de 1905, Smith cite de nombreux faits d'infestation, après repas
contaminé, qui corroborent complètement les faits précédents. Les
Souris qui naissent de Souris infestées, a remarqué l’auteur, ne sont
pas infestées. M. Koch confirme les recherches de Th. Smith sur
le mode de propagation des Sarcosporidies des Souris. Il à pris
soin, avant de faire servir l'animal à une recherche de cette nature,
de s'assurer, par l'examen microscopique d'un fragment de muscle,
que la Souris était indemne. La plupart des Souris qui ont mangé
de la viande contaminée ont été trouvées infestées.
Quel enseignement peuvent comporter les expériences de Theo-
bald Smith et de M. Koch? L'infestation paraît indéniable et la
voie digestive semble être la voie suivie par les parasites. La seule
objection grave, que les auteurs ont écartée, d'ailleurs, après vérifi-
cation, était Ja possibilité de transport des Sarcosporidies d’un ani-
mal à l’autre par un hôte intermédiaire : la Puce des Souris (Ty-
phlopsylla musculi) ou le Dermanysse (Dermanyssus avium) ou
peut-être un Sarcopte de là gale.
L'infestation directe est done ici réelle, mais elle est particulière
à cette espèce animale; et nous dirons à une même espèce de
Sarcosporidie, car comment expliquer les insuccès d'infestation
des Souris par le Sarcocystis tenella. si ce n'est par la différenciation
qui s'opère chez les diverses espèces de Sarcosporidies et par les
caractères particuliers qu'elles acquièrent en habitant un même
organisme ?
Aussi, l'expérience de Smith n'explique-t-elle que la contagion
d'une même espèce animale, à la rigueur celle des omnivores ou
tout au moins des carnivores, mais elle ne nous renseigne que
faiblement sur la contagion bien plus considérable des herbi-
vores.
Chez ces animaux, il n’est pas possible de se représenter la ques-
tion sans admettre une phase intermédiaire de développement hors
de l'organisme, en un mot l'hypothèse d'un hôte intermédiaire
ou d'une phase inconnue enkystée de la Sarcosporidie.
RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 259
Cette phase kystique aurait été provoquée par G. P. Piana dans
des essais de culture des Balbiania.
Cet auteur abandonne des Balbianies, isolées du tissu musculaire,
dans des capsules de cristal stérilisées, avec un peu d’eau stérilisée
ou de gélatine préparée avec du Fucus crispus, d'après les règles
indiquées par Celli et Fiocca pour la culture des Amibes. Les cor-
puscules falciformes se décomposent et mettent en liberté de petits
globules hyalins, qui augmentent graduellement de volume et ac-
quièrent un noyau contractile. [ls prennent des formes amiboïdes,
sont mobiles durant plusieurs jours, puis s'enkystent, subissent un
véritable encapsulement et entrent dans un état de vie latente.
L'auteur a observé ces faits dans un espace de 25 à 60 jours. Cette
expérience intéressante mérite d'être reprise; et si elle est confir-
mée, contrôlée par des inoculations ou des infestations positives
chez le Mouton, elle nous donnera certainement la clef des points
les plus obscurs de cette étude. :
_ Étudions maintenant, avec Mesnil et Marchoux, un Sporozoaire
voisin des Sarcosporidies, le Cœlosporidium chydoricola, nous serons
frappés de son importance dans la question qui nous intéresse. Ce
Sporozoaire vit et se développe à l'état libre dans la cavité du corps
du Chydorus sphæricus, Crustacé cladocère de la famille des Lin-
ceidæ. Son évolution rappelle assez celle des Sarcosporidies : elle
débute par une petite masse arrondie, de 6à8z de diamètre, pour-
vue d'une membrane mince et d'un noyau vacuolaire contenant
une masse chromatique centrale. L'élément grossit, s'allonge, le
noyau se divise et l'on a bientôt un kyste en forme de boudin,
long, de 60 à 100 y rempli d'un nombre illimité de noyaux et de
nombreux globules réfringents qui, s'entourant chacun d'une par-
celle de protoplasma, vont former des corpusecules analogues aux
corps réniformes de Sarcosporidies.
On observe en outre, à l'intérieur du corps du Chydorus, un autre
cycle évolutif : dans les tissus avoisinant le tube digestif, on trouve
d'autres kystes à noyaux plus gros et moins nombreux, dont la
structure est identique à celle d'une forme libre de même taille,
et que les auteurs considèrent comme des éléments capables de
multiplier l'infestation chez un individu déterminé.
L'infestation d'un Chydorus à certainement lieu par la voie di-
geslive, car on voit, dansles cellules du tube digestif, de petits corps
260 F. JANIN
ronds avec un protoplasma clair et un petit point chromatique
central, rappelant comme forme et comme grosseur les corpuscules
des gros kystes.
Mesnil et Marchoux regardent le Cœlosporidium chydoricola
oomme le type d'un sous-ordre de Sarcosporidies qui augmente
considérablement la compréhension de ce groupe. Il démontre
en effet, chez les Sarcosporidies, l'existence d’un double cycle
évolutif, les rapproche des Coccidies et met en évidence la
généralité du dimorphisme évolutif des Sporozoaires.
Nous sommes ainsi tenté d'admettre, malgré la structure appa-
remment identique des corps falciformes, deux sortes d'agents
reproducteurs, les uns, agents de dissémination endogène, homo-
logues des mérozoïtes des Coccidies, les autres, capables de per-
pétuer le parasite à l'extérieur, homologues des sporozoïtes des Coc-
cidies. Ces derniers, que deviennent-ils horsde leur hôte? La ques-
tion est encore en suspens.
Certains auteurs, se basant, à juste titre, sur leur nature fragile,
croient à l'existence d’un hôte intermédiaireanimal se nourrissant
de charogne, soit un Vertébré, Oiseau ou Mammifère, soit un In-
vertébré, Mouche à viande ou Scarabée. Il est tout aussi rationnel
d'admettre un stade de vie à l'état libre, sous une forme kystique
encore inconnue, capable de résister aux agents extérieurs et
d'infester un organisme quelconque par les eaux de boisson ou
les aliments. Le corps réniforme, ainsi introduit dans le tube di-
gestif, y subirait la transformation amiboïde qui lui permettrait
de pénétrer les tissus et d'accomplir les phases de son développe-
ment. Tel serait, pour nous, le mode de reproduction chez les
herbivores.
Les Sarcosporidies chez l’Homme.
On a cru longtemps que la sarcosporidiose, apanage exclusif des
animaux, ne se rencontrait pas chez l'Homme ; le fait est si vrai que
les premiers cas ont été fortement contestés.
En 1892, Rosenberg constatait la présence dans le muscle cardia-
que d'une Femme de 40 ans, morte d’une pleurite gauche et d'une
endocardite végétante, d’un kyste long de 5mm et large de 2mm
qu'il prit pour une vésicule échinococcique ; il ne trouva ni scolex
RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 261
ni crochets, mais une quantité innombrable de corpuscules de
forme variable, ronde, réniforme, ovale ou allongée et des germes
falciformes caractéristiques. L'auteur donna à cette formation le
nom de Sarcocytis hominis, d'après la classification de R. Blan-
chard.
Lindemann avait déjà parlé, en 1863, de « Grégarines » qui
s'étaient développées dans les valvules du cœur d’un Homme et
qui avaient formé des amas brunâtres, longs de 3mm, larges de
{mm 5. L'élasticité des valvules diminuant, il en était résulté de
l'insuffisance, qui avait amené des stases dans la circulation et une
hydropisie mortelle. La fréquence, comme nous savons, des Sarco-
sporidies dans le muscle cardiaque, chez les animaux, peut faire
songer ici à ces parasites; en l'absence de tout dessin on ne peut
l'affirmer.
Les deux observations de Rosenberg et de Lindemann, certaine-
menttrès imparfaites, ne peuvent être acceptées sans restriction;
mais les cas suivants de Baraban et Saint-Rémy, de Hoche, de Kar-
tulis, de O’Kinealy. pour ne citer que les principaux, ne laissent
aucun doute sur la nature du parasitisme.
Les deux premiers auteurs ont observé, en 1894, dans une corde
vocale d’un supplicié à Nancy, des tubes psorospermiques parfaite-
ment caractérisés, ayant la forme de longs cylindres terminés en
pointe à leurs extrémités, entourés d'une mince membrane anhiste ;
ils renfermaient une masse considérable de corps falciformes, en
forme de bâtonnets légèrement incurvés, atteignant 8 à 9 ». Baraban
et Saint-Rémy rattachent cette Sarcosporidie au genre Miescheria ;
il est regrettable que des observations semblables n'aient pu être
faites sur les autres muscles, vu l'ancienneté de la pièce.
Le 21 décembre 1900, le D' Hoche à présenté à la Société anato-
mique les coupes transversales d'une Sarcosporidie du genre Sar-
cocystis, dans les muscles d'un tuberculeux, mort à Nancy. L'exa-
men des préparations a permis à Vuillemin de reconnaître l’exac-
titude de la détermination générique ; ce dernier auteur a fait
une étude comparative de ces pièces avec les préparations précé-
dentes; il en est résulté que les Sarcosporidies des muscles de
l'Homme, observées deux fois à Nancy, appartiennent à une même
espèce et répondent au Sarcocystis tenella Raïlliet.
Le Dr Kartulis, d'Alexandrie, découvrit en 1895, à l'autopsie d'un
262 F. JANIN
Soudanais, un gros abcès au centre du lobe droit du foie; des abcès
plus petits étaient disséminés à la surface et dans la profondeur de
l'organe. Il ne trouva pas d'Amibes dans le pus, mais des corpuscu-
les réniformeslongsde8 zet d’autres arrondis, d'un diamètre de 2 y.
Des Sarcosporidies de taille diverse avaient aussi envahi le tissu
conjonetif et les muscles voisins; l'intestin en renfermait un très
petit nombre, dans le tissu conjonctif interstitiel de ses couches
musculeuses ; la muqueuse était infiltrée de petites cellules, mais
ne montrait pas de kystes.
Max Braun, qui à examiné les préparations, est convaincu de
l'exactitude de l'observation du D: Kartulis.
Il est presque évident que, dans ce cas, l’infestation s'est faite
par la voie intestinale: le parasite, traversant la muqueuse, est
tombé dans les branches de la veine porte, qui l'a transporté au foie,
d'où il s'est dispersé dans le voisinage; l’arrivée concomitante de
microbes de la flore intestinale explique les abcès qui se sont for-
més par infection secondaire.
Plus récemment, O'Kinealy a observé à Calcutta un cas de Psoros-
permies de la cloison du nez chez un Homme de 32 ans, qui avait
travaillé dans un magasin de peaux. C'était une petite tumeur,
pédiculée, saignant facilement, du volume et de la forme d'un gros
pois, attachée dans la fosse nasale gauche, à la partie supérieure et
antérieure de la cloison cartilagineuse. Cette tumeur excisée, l'exa-
men microscopique en fut pratiqué: recouverte d'un épithélium
dégénéré, squameux, elle était formée en grande partie d'un tissu
degranulations plus ou moins organisé, dans lequel étaientenfouies
un grand nombre de formations kystiques; le tissu épithélial et
sous-épithélial avait été, sans doute, le siège d'une irritation chro-
nique, due à la présence et au développement progressif de ces
kystes. Larges de mm 4% à 2mm2 ils étaient entourés d'une mem-
brane hyaline et bourrés de petites cellules semblables à des spo-
rozoites, arrondies ou ovoides, larges de 5: en moyenne. Ces cor-
puscules, emprisonnés dans une mince et délicate membrane,
étaient remplis d'une matière granuleuse.
Pour l’auteur, c'est un cas véritable de psorospermose de la cloi-
son des fosses nasales. Le Major Evan, professeur de pathologie à
Calcutta, avait vu quelques cas semblables chez les mêmes ouvriers;
sa mort prématurée l’a empêché de les publier.
RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 263
Cette observation nous intéresse à un double point de vue:
d’abord la localisation de Sarcosporidies dans une muqueuse, fait
peu commun; ensuite l'infestation localisée des premières voies
respiratoires nous fait penser à la pénétration possible du parasite
par cette voie et nous rapprochons, malgré nous, la constatation
d'O’Kinealy de celle de Baraban et Saint-Rémy. Ce mode d'infes-
tation, s'il est réel, est d'un certain appoint à la théorie de la phase
kystique du sporozoite.
Ces quelques observations, contrôlées pour la plupart, établissent
d'une facon certaine que les Sarcosporidies peuvent se développer
chez l'Homme. Korté a pu, en 1905, en donner une autre preuve
en signalant, dans les muscles de la cuisse du Macacus Rhesus,
une Sarcosporidie qui présente les caractères communs de cet
ordre. Si ce parasite trouve un terrain favorable à son déve-
loppement chez les Anthropoïdes, nul doute qu'il ne devienne,
pour l'Homme, un hôte fréquent. Il devrait donc être l’objet de
recherches systématiques; nous sommes certain que les cas se
multiplieraient et que la sarcosporidiose, à côté de la coccidiose,
aurait sa place dans la pathologie.
Les Sarcosporidies sont donc pour notre race des hôtes accideniels
qui, comme chez les animaux, semblent prendre la voie digestive
et peuvent dans certains cas devenir pathogènes. Leur plus grande
rareté chez l'Homme, relativement à la fréquente infestation des
viandes dont il fait sa nourriture, s'explique par les préparations
culinaires qu'il fait subir à ses aliments. Quel que soit le mode
de contagion, directe par les viandes infestées ou indirecte par les
eaux de boisson et les légumes souillés de parasites, les quelques
cas de sarcosporidiose, relevés chez lui, sont-ils justiciables de
mesures prophylactiques et doit-on songer à le préserver de toute
contamination? Nous le croyons. À l'heure où la thérapeutique a
recours à la viande crue pour l'alimentation des tuberculeux, des
convalescents et des enfants, et qu’elle tend à substituer, à la viande
de Bœuf si souvent contaminée parle Cysticercus bovis, la viande de
Mouton qui héberge si souvent le Sarcocystis tenella, cette question
est d'importance et mériterait d'être envisagée sérieusement. Aux
abattoirs, on rejette facilement les viandes de Moutons maigres et
cachectiques qui recèlent des parasites, mais il serait presque
impossible de rebuter les viandescontaminées, fournies par des bêtes
26% F. JANIN
grasses et de bonne santé apparente ; à combien d'intérêts parti-
culiers n'aurait-on pas alors à faire obstacle, avant d'arriver à une
solution convenable ?Les cas de contamination sont d'ailleurs trop
peu nombreux, pour que l’hygiéniste ait le droit d'outrepasser ces
considérations d'ordre personnel; aussi, tout en souhaitant que
pareille mesure soit appliquée, nous formulerons simplement, si
nous voulons être efficace : cuisson de la viande et des légumes;
filtration ou ébullition de l’eau potable.
Conclusions.
1° Les deux genres Sarcocystis et Balbiania, ce dernier établi par
R. Blanchard, doivent être maintenus.
La Balbiania gigantea Raïlliet, 1886, parasite du tissu conjonc-
tif dans lequel est plongé l'œsophage du Mouton, prend son origine
dans une des couches musculaires de cet œsophage et, par consé-
quent, doit passer dans le genre Sarcocystis. Elle disparait done,
et rentre dans l'espèce Sarcocystis tenella Raïlliet, 1886.
20 Les diverses opinions émises au sujet de la membrane du
Sarcocystis tenella s'expliquent par son mode d'évolution. D'abord
mince et ciliée à l’état jeune, cette cuticule passe par un stade
épais et strié, pour redevenir mince à l'état adulte.
Le contenu du kyste est représenté par un certain nombre
de logettes (spores) remplies de corpuscules réniformes (sporo-
zoïtes). Ces derniers, entourés d'une mince pellicule, sont consti-
tués par une bande de protoplasma qui renferme, à l’une de ses
extrémités, un noyau ovalaire, à l'autre une striation spiralée,
de nature indéfinie, à sa partie moyenne des granulations chro-
matiques.
30 Le kyste jeune a la forme d'une mûre dont les éléments, au
nombre d'une trentaine environ, proviennent de la division primi-
tive de la cellule du sporozoïte. Chacun de ceséléments augmente de
volume et donne naissance, par segmentation secondaire, à deux
ou plusieurs cellules (spores) qui s'individualisent au moyen de
cloisons intercalaires. La multiplication infinie du noyau de ces
dernières est l'origine des corps réniformes.
4° Les sporozoïtes prennent, très problablement mais non exclu-
sivement, la voie digestive. Ils infectent directement les Carnivores,
RECHERCHES SUR LA SARCOSPORIDIE DU MOUTON 265
mais leur pénétration chez les Herbivores ne peut s'expliquer que
par l'intermédiaire d'un nouvel hôte ou plus vraisemblablement
par une forme kystique inconnue, vivant dans la nature à l’état
ralenti. La culture des corps réniformes donnera la clef de l'énigme.
5e L'infestation de la race humaine par les Sarcosporidies n'est
plus discutée. Le Sarcocystis tenella a été reconnu, à deux reprises
diférentes, par Vuillemin, dansles observations citées par Baraban
et Saint-Rémy, puis par Hoche.
Les parasites suivent fréquemment le tube intestinal, mais deux
cas d'infestation des premières voies respiratoires font penser à
leur pénétration possible par cette voie.
Le petit nombre d'observations recueillies chez l'Homme ne jus-
tifient pas de rigoureuses mesures de prophylaxie. Des préceptes
de saine hygiène suffisent à le préserver de l’infestation.
«
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EXPLICATION DE LA PLANCHE III
ÉVOLUTION DE LA CUTICULE DU SARCOCYSTIS TENELLA, d’après FERRET.
Fig. 4 et 2. — Coupe longitudinale d’un très jeune Sarcocystis dans une cellule
. musculaire cardiaque d’un Agneau.
Fig. 3. — La cuticule présente de petites aspérités.
Fig. 4. — État cilié de la cuticule.
Fig. 5.— Coupe d’un Sarcocystis isolé d’une fibre musculaire cardiaque. Cils à la
surface du kyste.
Fig. 6. — Coupe transversale d’une fibre musculaire striée parasitée d’un æso-
phage d’Agneau. Cuticule plus épaisse que précédemment el lisse.
Fig. 7. — Aspect cilié de la cuticule d’un kyste moyennement développé. — f,
corps falciformes ; sc, cellules sous-cuticulaires.
Fig. 8. — Cuticule avec ponctuation à la base des bâtonnets.
Fig. 9— Demi-schématique,montrant les rapports entre la striation de la fibre
musculaire et les dimensions du parasite.
268. F. JANIN. — SARCOSPORIDIE DU MOUTON
Fig.10.— Cuticule d'épaisseur inégale, sans modification de la fibre musculaire.
Fig.11— Coupe d’un gros kyste.— c, cuticule ; conÿ., couche conjonctive anhiste ;
f, corps falciformes ; mn, fibre musculaire dégénérée avec noyaux ; SC, cellules sous-
1
cuticulaires. 3
Fig. 12. — Vue en surface, dans une coupe transversale de fibre musculaire,
d’une cuticule de parasite à un stade de striation comparable à la figure 7.
Fig. 43. — Deux kystes dans une même fibre musculaire.
ÉTAT ACTUEL
DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN
PAR
Le D' Paul NÉE
Ancien interne des hôpitaux de Rennes
Le favus à attiré, à des reprises différentes, l'attention des der-
matologistes ; des découvertes, suiviés de controverses ardentes, ont
marqué dans son histoire des étapes isolées; car l'enthousiasme,
que suscitait ce sujet particulièrement intéressant, semblait amener
à sa suite une réaction fâcheuse d'oubli. Actuellement, les résul-
tats de ces études successives se trouvent épars dans de très nom-
breux ouvrages ; aussi avons-nous pensé faire œuvre utile en con-
densant et en groupant, dans une monographie, les documents qui
peuvent mettre en relief l'intérêt que présente cette affection, et
aussi qui peuvent faciliter les recherches ultérieures.
Nous ne nous sommes pas proposé de faire seulement une étude
complète du favus, mais surtout de montrer ce qu'est le favus
actuellement et par quelles vicissitudes il a dû passer pour arriver
à ce degré. Voilà le but de notre œuvre. Aussi avons-nous dû rap-
peler au début les grandes lignes de l'histoire du favus, afin de pou-
voir mieux faire ressortir l'état actuel de la question et montrer
l'enchaîinement des progrès accomplis. Nous diviserons donc notre
sujet en deux parties : la partie scientifique et la partie clinique.
PARTIE SCIENTIFIQUE
I. — De l’Antiquité à 1839.
Le mot favus, par lequel les Romains désignaient le rayon de
miel, sert aujourd'hui à désigner une dermatomycose ayant pour
siège principal le cuir chevelu, caractérisée extérieurement par
des croûtes de couleur jaune soufre, dont l'aspect rappelle les go-
dets ou alvéoles où les Abeilles déposent leur miel.
270 P. NÉE
Depuis l'antiquité grecque jusqu’au commencement du dix-neu-
vième siècle,on a fait de vains efforts pour distinguer les affections
croûteuses et squameuses du cuir chevelu. Les Grecs désignaient
communément, par le mot latin porrigo (crasse de la tête, teigne)
cet ensemble d'affections. Celse, un médecin célèbre du siècle
d'Auguste, appelait favus toutes les affections du cuir chevelu
accompagnées d'exsudat plus ou moins comparable au miel
(d’après Besnier et Doyon).
Les Arabes ont décrit deux sortes d’affections contagieuses
entraînant la chute des cheveux, l’une humide, l’autre sèche, qui
est notre favus actuel.
En 1363, un français, Guy de Chauliac, appela tinea ficosa et tinea
lupirosa deux sortes de teignes parmi les cinq qu'il décrivait. Ces
deux variétés étaient du favus. Le mot lupinosa, employé souvent
depuis cet auteur, vient de ce que les croûtes sèches circulaires du
favus présentent une dépression centrale les faisant ressembler
aux semences du Lupin.
Quant au mot teigne, qui désignait toute maladie rongeante,
causée par une humeur mauvaise qui s’exhale de la tête en détrui-
sant les cheveux, on reconnut que cette dénomination s’appliquait
particulièrement au favus. Aussi un français, Lorry (1726-1783),
donna-t-il le nom de teigne vraie, tinea vera, à l'espèce de teigne
qui est notre favus. Cette appellation, acceptée et publiée par Mur-
ray en 1782, semblait devoir persister, quand vint Alibert.
Nous arrivons au moment où l’on sépare les maladies de la peau
des autres branches de la médecine, et où l'on réserve l'hôpital
Saint-Louis à l'étude et au traitement des malades atteints d’aftec-
tions cutanées. Alibert (1776-1837) fit ses débuts, en 1803, dans cette
spécialité toute nouvelle et, grâce à son talent d'observateur,
il retira de ses travaux une grande gloire. Tout d'abord, n'admet-
tant pas les opinions de Lorry et Murray, il réunit malheureuse-
ment, sous le nom de teigne, toutes les maladies du cuir chevelu en
donnant, toutefois, le nom de tinea favosa à notre favus.
Alibert eut l’idée remarquable de rapprocher la teigne de la
gale, comme étant deux affections parasitaires causées par un
agent extrinsèque; de plus, il ne considéra pas la tinea favosa
comme pustuleuse, les godets apparaissant, à ses yeux clairvoyants,
comme une production particulière, spéciale à l'affection.
PACE
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 271
D'autre part, après la description du scabies capitis favosa par le
viennois Plenck en 1776, Willan, d'Édimbourg (1757-1812), rangeant
les teignes dans les maladies pustuleuses avec la dénomination de
porrigo, appela porrigo lupinosa ce qu'Alibert appelait la teigne
faveuse. Son élève, Bateman, popularisa son œuvre.
Alors Biett, attaché à Saint-Louis (1784-1840), dans son voyage
en Angleterre, apprend ces doctrines nouvelles et, les transior-
mant quelque peu, revient faire opposition à Alibert. Comme
Willan et Bateman, il considère à tort le favus comme pustuleux;
mais, comme Lorry, il l'appelle tinea vera pour le distinguer des
autres teignes et de plus favosa, comme Alibert. De cette teigne
faveuse de Biett, on n’a retranché depuis que le porrigo scutulata,
qui est l'herpès tonsurant.
Mahon combattit la croyance à la nature pustuleuse du favus en
1829 et, en même temps, annonça la contagion de cette affection.
En 1835, d'après Rayer, il n'y avait plus qu'une teigne propre-
ment dite, comme l’avait pensé Lorry: le favus. A cette époque,on
donnait comme siège à cette affection les bulbes pilaires, parce que
_ l'épilation, le mode de traitement trouvé par Mahon, guérissait la
maladie. Un grand nombre d’observateurs avaient, comme Mahon,
cherché en vain des pustules au début de la formation des croûtes
faviques; aussi les théories de Willan et de Bateman, à ce sujet,
cessaient d'avoir Cours.
Peu après, Baudelocque, en 1831, expliqua la ‘vraie nature de la
matière faveuse; pour lui, il s'agissait simplement d'une sécrétion
du follicule pilifère modifié par la maladie. Mais il y avait, vrai-
ment, des pustules mélangées aux concrétions faviques; ces pus-
‘ tules n’appartenaient pas au favus; elles ne pouvaient provenir que
d’une cause infectieuse surajoutée au favus.
II. — Découverte du parasite du favus.
Nous arrivons en 1839 : le favus est considéré, ‘à cette époque,
comme une lésion de sécrétion et toujours il représente la seule
teigne. Cette date ouvre une ère nouvelle dans l'histoire du favus
par la découverte de la nature parasitaire de cette affection. Cette
découverte se préparait déjà depuis quelques années; car, en 1835,
Bassi et Balsamo avaient reconnu que des Champignons, fixés à la
272 P. NÉE
surface du corps des Vers-à-soie, déterminaient une maladie chez
ces Insectes; on pouvait déjà conclure qu'un Champignon pouvait
être la cause et l'agent de propagation d'une affection des tissus
animaux. Schôünlein, de Zurich, adapte alors à l'étude du favus les
procédés récents d'histologie qui naissaient du perfectionnement
du microscope; d'après ses recherches, entreprises à son laboratoire
de l'hôpital de Zurich, il écrit dans les Archives de Müller : die ersten
Versuche liessen kéinen Zweifel über die Pilz-Natur der sogenannten
Pusteln. Pour Schônlein, le favus est dù à un parasite végétal et il
en figure les éléments constitutifs; cependant sa note sur le por-
rigo lupinosa tient à peine une page et il n'attribue pas d'impor-
tance à sa découverte. Les auteurs qui, les premiers, contrôlent
les travaux de Schônlein : Remak, en 1840, à Berlin, de même
Langenbeck la même année, donnent également très peu de détails,
en Allemagne, sur cette découverte qu'ils considèrent comme une
simple curiosité.
Le micrographe Gruby, en 1841, vient lire, à l’Académie des
sciences de Paris, son Mémoire sur une végétation qui constitue
la vraie teigne. Quelque temps après, il se défend de bonne foi de
connaître les travaux de Schônlein sur le sujet, avant d’avoir
accompli ses travaux personnels. Dans ce mémoire, après avoir
exposé l'insuffisance des caractères connus jusqu'alors du favus
pour faire un diagnostic certain, c'est-à-dire la forme des croûtes,
la contagiosité seulement probable, l'odeur inconstante, il décrit
un caractère constant et net, c'est le caractère végétal, que montre
le microscope et qui est hors de doute; il indique la technique à
suivre pour voir ce végétal: «on met, dit-il, une parcelle de croûte
dans l’eau, on la délaye, on l’applique entre deux lames de verre
et on l’observe avec le grossissement linéaire 300. On voit des cor-
puscules et des filaments... » [1 décrit aussi la constitution de la
croûte favique et même donne des détails remarquables comme
celui-ci: «la croûte est enveloppée dans des cellules d'épiderme,
bien plus nombreuses sur la partie aérienne que cutanée », ou en-
core : (à la périphérie de la croûte, on trouve la substance amor-
phe et les racines; au centre, la ramification.. » Il trouve des
granules, qui semblent des produits de la plante servant à la pro-
pagation de l'affection comme du parasite. La nature végétale du
favus étant reconnue, il considère sa contagiosité comme beau-
"STE
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 273
coup plus probable. Il localise sa plante dans le tissu de l’épiderme
et il reconnaît que ce Mycoderme se propage entre les cellules.
Peu après, la même année, Gruby, dans une nouvelle note à
l'Académie Sur les Mycodermes qui constituent la teigne faveuse,
complète ses premières indications et explique les différences de
ses trouvailles avec celles de Schônlein : (Schônlein, dit-il, voyait
une végétation sur une pustule ; or les pustules ne sont rien dans
cette affection; les croûtes ne sont qu'une agglomération de
Mycodermes. »
Enfin, Gruby fait des expériences d’inoculation pour prouver la
nature contagieuse du favus, non seulement de l'Homme à l'Hom-
me, mais aussi de l Homme aux animaux.
Schônlein appelle son parasite du favus Oidium et c'est Remak,
en 1845,qui l'appelle A chorion Schünleini; A chorion, parce que le dou-
ble contour de l'enveloppe des cellules mycéliennes est peu visible.
Nous savons, aujourd’hui, que le protoplasma du parasite est éolo-
rable, au contraire de son enveloppe cellulosique.
L'étiologie du favus connue, les moyens de diagnostic et de trai-
tement basés sur la nature parasitaire de l'affection font de rapides
progrès.
L'œuvre de Gruby fut poursuivie par Bazin, mais plus spéciale-
ment au point de vue clinique; nous en parlerons dans la deuxiè-
me partie de notre travail.
III. — L’Achorion, seul parasite du favus jusqu’en 1851.
Schônlein et Gruby détruisent cette opinion, alors courante, que
les croûtes faviques étaient des produits de dépuration de l’orga-
nisme malade, une décharge fluxionnaire, soit provisoire, quand
elle cessait au moment de la puberté, soit permanente, soit héré-
ditaire.
Schôünlein, Remak et Gruby ne réussissent pas à cultiver le para-
site du favus; cependant déjà Schônlein considère son végétal com-
me un Champignon. C'était un Champignon aussi qu'on venait de
découvrir sur le corps des Vers-à-soie et l'on n'admettait pas que des
végétaux, autres que les Algues et les Champignons, püssent vivre
en parasites sur le corps des ani maux vivants. On range bientôt le
274 P. NÉE
Champignon du favus dans la division des Arthrosporés, la tribu
des Oïdiés et le genre Achorion, sans toutefois connaître encore les
rapports de ce parasite avec les autres Moisissures. A cette époque,
la classification des Champignons est très compliquée; les divisions
et subdivisions abondent et cependant l’Achorion Schünleini est
considéré comme une espèce distincte et unique.
Bientôt, la confusion des Champignons devient évidente; on
s'aperçoit, en 1851, qu'un même Champignon peut se voir sous
des formes différentes; on rattache l’Achorion aux Moisissures; on
considère que divers Champignons peuvent donner le favus. Ainsi
la question parasitaire du favus se complique par ces théories
nouvelles et la découverte des favus animaux vient la compliquer
davantage. Nous allons, d'abord, régler ce point des favus ani-
maux.
IV. — Les favus animaux.
C'est Jacquetant, de Lyon, qui signale le premier, dans sa thèse
de 1847, la présence du favus chez les animaux ; il s’agit de deux
Chats qui jouaient avec des enfants faviques.
Peu après, Draper, un médecin de New-York, observant des Souris
malades, remarque des croûtes faviformes sur la tête et les mem-
bres antérieurs de ces animaux ; il abandonne à un Chat les Souris
prises au piège et le Chat présente, peu de jours après, les mêmes
croûtes au-dessus de l'œil. Plus tard, deux enfants de la maison,
qui jouaient avec le Chat, présentent également du favus au niveau
_ de l'épaule, de la face et de la cuisse. Robin retrouve l'Achorion
Schünleini dans ces croûtes de porrigo favosa.
A. — FAVUS DES MURIDIENS.
En 1864, Anderson présente plusieurs observations de Souris
faveuses, transmettant cette affection à un Chien et à des enfants.
En 1873, Rodet remarque trois cas de favus chez les habitants
d'une maison où il avait recueilli de nombreuses Souris faviques.
La même année et deux ans plus tard, Horand raconte diverses
histoires de contagion du favus des Rats et des Souris à l'Homme;
ses observations personnelles sont précises.
A Lyon, le favus de la Souris est signalé par Poncet, Mollière,
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 275
Tripier et d’autres. Citons seulement le cas, rapporté par Saint-Cyr,
de la contagion d’une chambrée à l'École vétérinaire de Lyon par
des Souris faveuses, trouvées dans le placard à linge.
A Paris, le favus de la Souris est observé par Mégnin d’abord.
Enfin les observations de Quincke, en 1887, et plus tard celles
de Bodin viennent s'ajouter à la liste déjà longue.
On remarque vite que les animaux les plus prédisposés au favus
sont le Rat etla Souris, et même cette affection est quelquefois tel-
lement dangereuse qu'elle détermine leur mort.
Puisque le parasite du favus de la Souris se rencontre quelque-
fois dans les lésions de favus chez l'Homme, nous le décrirons
sommairement à la suite du parasite proprement humain.
B. — FAVUS DU CHIEN.
Le Chien est moins susceptible au favus que le Chat; cependant,
Saint-Cyr signale le favus chez ‘des Chiens qui fréquentaient des
Chats. Trasbot, en 1871, le signale aussi chez une Chienne ratière
et il remarque que les petits de cette Chienne présentent des
godets faviques autour de l’ombilic.
Andrew Buckanan signale le ïfavus du Chien en 1872. De
même, Siedamgrotzki en 1874.
Cadiot observe, en 1889, le favus chez un Chien non ratier;
d’après l’auteur, il aurait été contaminé par la tondeuse.
Schervel, en 1892, raconte la contagion de deux jeunes filles par
les deux Chiens de la maison; à noter que, dans cette maison, on
trouve des Souris faviques et Unna trouve, dans leurs lésions,
l’Achorion euthythrix.
Nocard isole le Champignon du favus du Chien de Cadiot; il
ensemence, sur divers milieux, les poussières prises à la partie
profonde de la croûte épaisse des godets, il trouve toujours l’Acho-
rion et il pose la question de savoir si cet Achorion est identique
à celui que l’on trouve dans les lésions du favus humain, ou bien
s’il est une variété de cette espèce de Champignons faviques. Sa-
brazès observe ces cultures de Nocard et, après avoir fait des ino-
culations à l'Homme et aux animaux, il dispose Cadiot à faire des
réserves sur la diversité d'espèces de Champignons capables de
créer le favus du Chien.
Enfin Sabrazès conclut, après de sérieuses recherches entrepri-
276 P. NÉE
ses avec Costantin, à l'existence d'un Champignon spécial, mafs
voisin de l'Achorion Schôünleini, dans les godets faviques du
Chien : c'est l'Oospora canina Costantin et Sabrazès, nettement dé-
fini, capable de se développer sur l'Homme et que nous décrirons
avec le parasite du favus muridien.
C. — AUTRES FAYVUS ANIMAUX.
Le favus est signalé chez le Lapin par Mourrand, Récordon,
Mégnin, Saint-Cyr, Kôbner: ce favus, ainsi que celui du Chat, est
probablement d'origine muridienne. Kôübner réussit à inoculer
l’'Achorion humain au Cobaye. Quant aux animaux de l'espèce
bovine et chevaline, ils ne sont que très exceptionnellement atteints
de favus, au contraire de la trichophytie, d'après Saint-Cyr; d'autre
part, d'après Neumann, de Toulouse, 1892, les vétérinaires pensent
que le Cheval et le Bœuf sont réfractaires à l’Achorion humain.
D. — LE PSEUDO-FAVUS DES POULES.
On à cru longtemps que la Poule avait son favus : Gerlach, en
1859, reconnaît que l'affection dite crête blanche chez la Volaille,
particulièrement fréquente chez le Coq et le Poulet, est de nature
parasitaire; dans les squames, il découvre au microscope un
mycélium et des spores.
Cette découverte estconfirmée par Leisering, en 1864. Puis Mül-
ler raconte un cas de contagion de favus à la Poule et Rivolta
décrit le favus des Poules.
En 1881, Mégnin remarque de fines Moisissures blanches sur la
crête d’un Coq; de simples lavages suffisent à les détacher; mais
elles ne tardent pas à réapparaître. A l'autopsie,il trouve l'épiderme
envahi par une production farineuse et le Champignon lui parait
pulluler exclusivement à la surface et entre les lames de l'épi-
derme. Au microscope, il reconnaît un mycélium fin, court et tor-
tueux avec des spores. Il considère d'abord ce Champignon
comme voisin de l'Achorion Schônleini et de l'Oidium albicans,
identique à celui trouvé par Rivolta, et lui donne le nom d’Epi-
dermophyton gatlinae.
Zürn émet la même opinion que Mégnin. Puis Schültz, après
avoir cultivé ce Champignon sur divers milieux et l’avoir étudié
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 2
au microscope, le classe dans le genre Torula. Plus tard, en 1890,
il ne peut inoculer cette affection qu'à des Poules.
Neumann, dans une note à la Société de biologie du 3 avril 1886,
identifie la dermatomycose de la tête et du cou des Poules au favus
de l'Homme; pour lui, il s’agit de la même affection et du même
parasite ; il base son affirmation sur l'identité de la morphologie
des lésions occasionnées par des inoculations de favus; ainsi il
inocule son favus de la Poule à un Chien et le favus de l'Homme
à un autre Chien; il constate que les lésions obtenues sont identi-
ques, au point de vue elinique. Cependant il n’est pas possible d’ad :
mettre, sans plus de preuves, les conclusions de Neumann.
Mégnin, dans cette même séance fait part de ses travaux sur ce
sujet; il reconnaît deux sortes de « teignes» chez les Poules: l’une,
la vraie teigne faveuse, est due au Champignon favique; l’autre,
dont l'aspect de lait de chaux fait penser à un pityriasis épais,
est due à l’'Epidermophyton gallinae.
- Neumann, le 1er mai 1886, répond que l’on a observé, en Alle-
magne et en Italie, le favus des Poules sous cetteforme pityriasique
et qu'il ne faut pas s'étonner de ne pas trouver de godets sur la
crête, puisque la présence de poils est nécessaire à leur formation.
Quelque temps après, Duclaux isole et étudie le parasite de
Mégnin, en le cultivant sur la gélatine; pour lui, l'aspect seul de
cette culture, qui ne présente pas de godets, suffit à écarter toute
idée de possibilité de présence de l’'Achorion Schünleini ; d'ailleurs,
ii fait remarquer le caractère spécial de la culture d’Epidermo-
phyton sur la gélatine : il s'écoule, en efiet, un liquide de couleur
jus de groseille, si l'on brise sa partie superficielle à aspect neigeux.
C'est alors qu'arrive Sabrazès : il recueille des squames d'un
Coq atteint de cette affection; 1l les sème sur des plaques de gélose
et, après étude, il conclut que cette teigne est réellement du favus;
mais que le parasite en es! bien l'Epidermovhyton, différent de
l’'Achorion Schünleini par l'aspect de ses cultures, sa situation dans
la classification botanique et le résultat de ses inoculations.
À la suite des belles recherches de Matruchot et Dassonville,
en 1899, l'Epidermophyton qui n'a jamais été trouvé, semble-t-il,
dans les lésions faviques humaines, reste maintenant le Lophophy-
ton gallinae de la médecine vétérinaire; ce parasite détermine,
chez la Poule, une sorte de trichophytie qu'on appelle Ia lophophy-
278 P. NÉE
tie. Le Lophophyton Matruchot et Dassonville des Gallinacés ne
s'observe pas chez les Mammifères et ne provoque que des lésions
épidermiques superficielles; il se rattache à la famille des Gym-
noascées parmi les Ascomycètes.
Sabrazès prétendait, cependant, avoir inoculé avec succès à la
Poule le favus humain, en frottant la crête préalablement grattée
avec des débris de godet. D'autre part, est-ce bien du favus, cette
lésion observée, en janvier 1897, par Campana chez un Coq”? Ce Coq
semblait présenter, depuis huit mois, de véritables godets faviques
et le microscope semblait montrer les éléments de l’Achorion.
V. — Pluralité parasitaire du favus.
Préliminaires. — En 1851, les frères Tulasne démontrent qu'une
même espèce de Champignons peut fructifier sous des formes
variées, suivant les circonstances. C'est la théorie du polymor-
phisme qui prend déjà naissance; la forme de l'organe de fructi-
fication ne peut suffire à caractériser l'espèce et, pour frapper
l'esprit de leurs contemporains, les frères Tulasne ne peuvent
imaginer rien de mieux que l’image de la transiormation de la
Chenille en Papillon. Cette théorie nouvelle est bien séduisante
pour les mycologues; aussi leurs premiers travaux sur la parasito-
logie du favus, comme d'ailleurs des autres teignes, non contrôlés
par une méthode de technique rigoureuse, ne tardent pas à res-
sentir les effets de l'imagination.
Le favus humain peut-il être causé par d’autres végétaux que le
parasite connu déjà? Les premières recherches sur ce sujet furent
d'autant plus laborieuses qu’à cette époque l’on n'’osait ajouter foi à
la réalité des images fournies par le microscope et que la méthode
des cultures pures, si nécessaire aux études mycologiques approfon-
dies, était encore à trouver.
Hebra, en 185%, puis Lowe comparent les Champignons des
teignes aux Moisissures communes. Hallier et Baumgarten rat-
tachent l'Achorion au Penicillium; Hoffmann au Mucor. Cepen-
dant, d'autres auteurs de l’époque ne reconnaissent, dans le
Penicillium et le Mucor, que des impuretés de culture.
Grawitz, tout d'abord, en 1870, en Allemagne, veut identifier le
parasite de Schôünlein au Champignon de l'herpès tonsurant, à
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 279
x
celui du pityriasis versicolor, à celui du muguet, au Mycoderma
vini; ces divers Champignons ne sont d'abord, pour lui, que des
modalités différentes de l'Oidium lactis. Mais, poursuivant ses étu-
des, il reconnaît lui-même son erreur, qui s'explique par la variété
des modes de fructification que l'on peut rencontrer chez les Cham-
pignons, et aussi par les fructifications concomitantes de Chambpi-
gnons communs, mêlés à l’'Achorion en culture impure. En 1886,
Grawitz trouve cependant, le premier, le procédé des cultures
pures et il retire du favus un Champignon susceptible de repro-
duire des godets jaune soufre sur l'Homme.
Au même moment, en 1886, Duclaux et Verujski montrent que le
Champignon du favus est bien différent de celui de la trichophytie.
C'est en 1886 que commence véritablement l’époque de la mul-
tiplicité parasitaire du favus; car, si avant cette date l’on identi-
fiait le parasite du favus aux Moisissures communes, on ne {rou-
vait pas, dans les lésions faviques, deux Champignons distincts
l’un de l’autre.
La question de la multiplicité proprement dite du favus se pose. —
Quincke, en 1886, fait la découverte des variétés d’'Achorion z,6 et y;
il oriente les idées vers la pluralité de Champignons faviques;
il signale, comme preuve de ces espèces diverses, des différences
dans la culture, dans l'habitat, dans le résultat de l’inoculation.
Mais, alors qu'il ne trouve son Champignon ; que dans les régions
poilues, en association avec 6, Fabry trouve le Champignon y dans
les parties glabres.
Elsenberg, en 1889, retrouve la symbiose de # et de y de Quincke;
mais, en 1890, il ne reconnaît qu'un seul Champignon et explique
les divers aspects qu'il peut prendre par de légères différences
dans la composition des milieux de culture. Il devient alors un
adepte de la théorie de l’unicité parasitaire du favus.
Y a-t-il pluralité ou unicité parasitaire favique? — En 1889, Jadas-
sohn ne trouve, à Vienne, qu'un seul et même Champignon favique.
Kräl qui, en 1889, trouvait six Champignons de favus, les ra-
mène tous à un seul, dès 1891.Mibelliet Marianelli, en Italie, abou-
tissent aux mêmes conclusions: de même Pick, qui hésitait deux
ans auparavant. |
C'est la réaction à la suite des idées de pluralité parasitaire de
Quincke et l’on se trouve alors tant poussé vers l’unicité du favus
280 P. NÉE
que Désir de Fortunet et Courmont, à Lyon, en 1890, ne voient
dans le favus de la Souris que l’Achorion Schünleini lui-même.
En 1890, Dubreuilh et Sabrazès ne trouvent qu'un seul Champi-
gnon, sur sept cas de cultures du favus et ce Champignon est de
même aspect que celui trouvé par Kräl etMibelli dans un godet de
favus humain.
La théorie de la pluralité des Champignons faviques commence
à échouer, depuis que Quincke lui-même renonce à prouver l'exis-
tence de sa variété z et associe ses deux autres variétés 6 et y. C’est
alors qu'apparaît la doctrine de Unna et de Frank, concluant à la
pluralité des Champignons faviques.
Unna et Frank, travaillant ensemble, annoncent d'abord l’exis-
tence de trois sortes de Champignons du favus; l'espèce 1 et l'es-
pèce 3 sont vérifiées par Willan; quoique évoluant, d'après leurs
auteurs, chez un même individu et dans une même région, ces deux
espèces se distinguent toujours l’une de l’autre : ainsi les godets
du favus 3 sont couleur jaune soufre, tandis que ceux du jfavus
1 sont gris jaune; les godets du favus 3 sont plus nombreux, plus
arrondis, moins adhérents et moins friables que ceux du favus 1,
et la réaction inflammatoire est plus marquée dans l'espèce 1 que
dans l’espèce 3. L'espèce 2 de Unna donne, d'après son auteur, des
godets sur le Cobaye et la Souris, mais pas sur l'Homme.
La première espèce s'appelle euthythrix, la deuxième dikroon,
la troisième atakton.
En 1892, Unna et Frank annoncent la découverte d'espèces nou-
velles de parasites du favus ; puis Neebe, la même année, ajoute
_ sept nouveaux Champignons du favus à la liste de Unna.
Neebe et Unna, quelques mois plus tard, veulent caractériser le
genre Achorion et ils décrivent diverses espèces appartenant à ce
genre; leurs procédés de technique sont beaucoup plus compliqués
etmoins sûrs que les procédés actueis; ces auteurs décriventlongue-
ment les caractères morphologiques de chaque espèce.
Pour Unna et Neebe, il y a autant de sortes de favus que de
peuples; cependant Kral,dans ses recherches à Cagliari, à Bordeaux,
à Pise, à Leipzig, déclare ne trouver qu'un seul et même Champi-
gnon. Il est évident que Neebe et Unna n'ont pas vérifié suffisam-
ment l'exactitude de leurs travaux; ils auraient sûrement changé
d'opinion, s'ils avaient, comme l'avait fait Frank pour ses travaux
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 281 :
avec Unna, par une série d'ensemencements parallèles sur divers
milieux et des inoculations diverses, cherché à compléter leurs
premières données.
La théorie de l’unicité l'emporte. — Aussi la théorie de Neebe et
Unna est-elle vivement combattue. Sabrazès, étudiant à nouveau
dix-huit cas de favus humain spontané, ne trouve qu'un seul et
même Champignon.
Plaut, de Leipzig, combat aussi, en 1892, la théorie de la pluralité
favique. Le Champignon qu'il isole répond, d’après lui, à celui de
Kral, à celui de Grawitz de 1886, de Quincke de 1887 (Champi-
gnon V), de Munnich de 1888, d'Elsenberg de 1889. Pour lui, les dif-
férences de détail tiennent à la concentration, à la réaction dif-
férente du terrain nutritif. Il rappelle, à l'appui de la théorie
uniciste, l'analogie de ce qui se passe chez les végétaux inférieurs :
l'aspect des cultures du muguet, par exemple, varie suivant la
composition du terrain nutritif. Il rappelle aussi que certains
Bacilles perdent la faculté de produire des spores et transmettent
cette anomalie héréditairement. [Il faut remarquer, en effet, qu'une
légère différence dans les conditions de culture, soit dans le degré
- de température, soit dans la quantité ou l’âge de la graine favique,
soit dans la composition du milieu ou dans le mode d’ensemence-
ment, retentit sur l’évolution de l’Achorion. En déterminant expé-
rimentalement ces modifications dans la vie du parasite, Sabrazès
montre des modifications du Champignon. Kral écrit à Sabrazès :
« soit une seule spore d'Achorion réensemencée pendant long-
temps et cultivée à des températures variées, on aperçoit, à la
périphérie, des végétations un peu différentes du premier type et,
si on ensemence ces points-là, ils conservent l'aspect des points
qui leur ont donné naissance. » Cependant Sabrazès, tout en
admettant ce pléomorphisme, croit que l’on peut conserver en
dehors de l’Achorion Schôünleini l'euthytrix et l'atakton d'Unna.
Quant à Sabouraud, il n'a jamais trouvé qu'une seule et même
espèce de Champignon favique; aussi ne peut-il croire à la multi-
plicité parasitaire d'Unna. Cependant il avoue que ses recherches
personnelles ne sont pas encore assez nombreuses. Il base son
appréciation sur ce qu'un même milieu chimique n'est pas suf-
fisant à la persistance d'un même aspect de culture d'un même
échantillon favique; car de multiples conditions interviennent
Archives de Parasitologie, XI, n° 2, 1907. 19
282 P. NÉE
pour faire varier la culture. Il va plus loin : pour lui, le favus du
Chien est peut-être réductible aux trichophyties et le favus de la
Souris de Bodin n'est peut-être causé que par l'Achorion Schünleini.
Sabouraud enfin, non seulement réduit à un type le parasite cau-
sal du favus, mais encore il le classe tout près des Trichophyton,
comme un proche parent.
En 1893, Sabouraud découvre une diversité d'espèces de Tricho-
phyton et autant de formes cliniques que d'espèces. Alors, sous
l'influence de cette découverte, la question de la pluralité favique
revient à l'ordre du jour et Bodin publie ses travaux sur ce sujet,
en 1894 : après examen de cinquante cas de favus, il conclut à la
pluralité parasitaire, comme pour les Trichophyton; mais, au con-
traire de ces derniers, à l'unité au point de vue clinique. Cepen-
dant, quand Bodin parle de pluralité parasitaire, il dit bien
qu'il s'agit plutôt de variétés d'une même espèce que d'espèces
entièrement séparées et irréductibles. Il explique ses conclu-
sions : il y a unité clinique; en eflet, pour créer des espèces cli-
niques nettement séparées, il faudrait des lésions élémentaires
distinctes par leurs caractères fondamentaux; or on ne trouve,
pour différencier ces espèces cliniques, que des caractères acces-
soires de nombre, d'étendue, d'intensité des lésions; même dans
le favus sans favus, le cheveu favique est constant, invariable,
même sans le microscope. Au microscope, on retrouve les carac-
tères fondamentaux invariables du parasite, malgré l'irrégularité
apparente de la disposition du mycélium et des spores; aussi le
microscope ne prouve pas la pluralité parasitaire; il faut chercher
la preuve de celle-ci dans les cultures. Bodin, convaincu de l'im-
portance du milieu nutritif, mise en évidence par Raulin dans ses
études sur l'Aspergillus, recherche un milieu de culture suffisam-
ment favorable au développement du Champignon et, de plus,
toujours chimiquement identique à lui-même et assez facile à pré-
parer. Dans ses cultures sur la pomme de terre, l'agar ordinaire
et l'agar peptonisé à 5/100, il croit reconnaître d'abord une plu-
ralité d'Achorion, puis sept, puis seulement cinq types divers,
dont un plus fréquent que les autres, l’Achorion de Kräl. Cependant,
il observe que ces divers types ont une même forme conidienne
de reproduction, une même affinité pour les substances nutritives
et un même mode de développement en culture. Ce travail de
- ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 283:
Bodin ne semble pas mettre en opposition complète les partisans
de l’unicité et de la pluricité du favus humain; car, pour lui
déjà, les divers favus sont des variétés d’une même espèce.
D'autre part, Sabrazès, après avoir découvert le favus du Chien
avec Costantin, considère les divers favus animaux comme venant
d'une même souche et devenus seulement, peu à peu, irréducti-
bles les uns aux autres par suite de l'adaptation à l'animal.
Remarquons que, longtemps auparavant, Bazin avait dit que
l’Achorion en passant d’un animal à un autre, pouvait varier un
peu, sans toutefois se transformer d’une espèce dans une autre.
Sans être obligé de faire remonter l’origine des diverses espèces
de favus à l'une quelconque d’entre elles, muridienne parexemple,
comine le voulait Busquet, en 1892, sous prétexte que les cas de
contagion par les Rats et les Souris sont très communs et que le
Champignon favique cultive particulièrement bien sur ces ani-
maux, on explique clairement maintenant les divers aspects que
peut prendre l’Achorion dans les cultures, par la théorie du poly-
morphisme émise déjà en France, en 1851, par les frères Tulasne
que nous avons cités plus haut et reprise, peu après, par Berkeley
en Angleterre, de Bary en Allemagne, puis par Bodin en 1900, à
l’occasion du Microsporum du Cheval et aussi, la même année,
par Beauverie.
Remarquons que le polymorphisme a créé, à l’origine, la théorie
de la multiplicité du favus et, finalement, a été le point de départ
de la théorie de l’unicité du favus.
La question des favus trichophytoïdes nous amènera à faire
une dernière considération sur la question de l’unicité et de la
pluralité favique.
VI. — Le polymorphisme du favus.
Nous pouvons rapprocher le polymorphisme des Champignons
de celui des Bactéries que Nägeli, Zopf, Metshnikov, Guignard
et Charrin et aussi Pasteur ont les premiers observé : il est bien
établi que les Bactéries ont un aspect variable, suivant le milieu
où elles vivent et suivant leur âge. Bien plus, le polymorphisme
est une condition nécessaire à l’Évolution; car tous les êtres ont
besoin, pour subsister dans leur milieu non immuable, de se
pré PCT, DEC PT <
‘ : ER
284 P. NÉ
E
transformer continuellement, de s'adapter aux conditions nou-
velles de vie qui résultent de ce mouvement perpétuel.
Des Botanistes de grande réputation ont émis les mêmes idées
que les frères Tulasne; de Bary a montré que des organes repro-
ducteurs divers pouvaient se montrer chez un même Champignon,
si l'on suivait son évolution, étape par étape.
Mibelli qui, en 1891, ne trouvait qu'un seul Cham pignon favique,
recommandait de prendre garde, afin de ne pas se tromper, à la
variété morphologique de l’Achorion que pouvait causer une dif-
férence d'âge ou de composition de culture; il semblait donc
admettre le polymorphisme du Champignon.
Sabrazès reconnaissait, en 1892, que l'origine et la quantité de
la semence, son passage sur divers terrains, les conditions de tem-
pérature, de sécheresse, du milieu, d'aération même, changent la
physionomie des cultures.
Biro, en 1893, attribue au polymorphisme la différence qui
existe entre les Champignons faviques de Quincke, de Kräl, de
Plaut, de Mibelli, de Frank, d'Unna et de Quinquaud. De plus, il
annonce que, si l'on reporte sur le même terrain de culture, un
certain nombre de fois, des Champignons faviques paraissant dit-
férents, ils perdent peu à peu ces caractères propres qui servaient
à les distinguer, et s'accommodent enfin au terrain de culture; donc
il n'y a pas de motif pour admettre la pluralité favique.
Tishutkin, en 1894, regarde comme insuffisantes les variations
d'aspect de l’Achorion en culture pour que l’on puisse admettre
diverses espèces de ce Champignon, d'autant plus qu'il a reconnu
lui-même que l'Achorion peut garder, pendant plusieurs généra-
tions, les caractères particuliers acquis dans certaines cultures.
Enfin Truffi, en 1900, ne trouve qu'un seul parasite du favus,
mais doué d’un remarquable polymorphisme.
Dans le polymorphisme des Champignons il y a deux choses à
envisager, d'après Bodin: d'abord, tout changement de conditions
de culture conduit à une variation d'aspect du Champignon. Il faut,
en effet, que ce végétal, comme le font tous les autres, s'adapte à
son milieu légèrement transformé, non complètement inapte à le
nourrir; d’ailleurs, l'expérience prouve qu'il'en est ainsi; de nom-
breux Mycologues, depuis la méthode des cultures pures, ont observé
la variation du Champignon parallèlement à la variation du milieu.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 285
L'autre point, concernant le polymorphisme, sur lequel insiste
Bodin, est celui-ci: la forme nouvelle de Champignon, qui résulte
d'une longue culture sur un terrain spécial, peut devenir tellement
fixe qu'il est parfois impossible d'obtenir sa retransformation en
forme identique à celle du début de l'expérience. Notons cepen-
dant que, dans d'autres cas, on a pu réobtenir le type premier
par le retour aux conditions primitives. Si donc l'Achorion se pré-
sente sous diverses formes, on peut contester la réalité des espèces
diverses ; on doit chercher à ramener ces espèces à un type primi-
tif et, quand même on n'y parviendrait pas, on ne serait pas encore
en droit de conclure à la pluralité parasitaire du favus; car le pro-
cédé employé peut être insuffisant.
En quoi consiste la variation du Champignon sous l'influence du
milieu? Ce changement est très variable, d’après Bodin ; il peutne
- porter que sur le rameau qui porte le fruit, ou bien sur le fruit lui-
-même dont la forme se trouve altérée, ou bien sur le genre de
-fructification même. Il faut remarquer que le Champignon se
reproduit parfois sous une forme dite de souffrance et, comme
ces formes de souffrance sont les mêmes pour des espèces voisines,
on est obligé, pour classer le Champignon, de rechercher s’il ne
pourrait se reproduire suivant une forme de fructification plus
élevée. C'est ainsi que, pour ne citer qu'un exemple, Beauverie a
montré qu'Hygrocrocis, ce Champignon à aspect de ouate sur les
sirops, est le même que Penicillium glaucum, cette Moisissure verte
très commune sur l'orange, la colle, le pain.
Il y a plus: Sabouraud a mis en évidence le caractère particu-
-lièrement polymorphe de l’Achorion comparé aux autres Cham-
pignons. Les frères Tulasne considéraient l'Achorion comme très
voisin des Trichophyton ou plutôt du Trichophyton, car il n'y
avait pour eux qu'un parasite de la trichophytie; ils considéraient
l’'Achorionetle Trichophyton comme deux'formes sœurs d'un Cham-
pignon ancestral non reproduit. Sabouraud, à son tour, sans tou-
tefois unir si étroitement ces deux auteurs d'affections si diverses,
les regarde comme proches parents de la même famille, en atten-
dant que la découverte de leur fruit supérieur vienne confirmer
cette classification.
Nous retrouverons le polymorphisme du Champignon favi que à
propos de sa disposition intrapilaire.
-286 P. NÉE
x
Cependant, malgré la tendance du polymorphisme à ne voir,
au fond, qu'une espèce unique de parasites du favus, nous
devons faire une restriction à cette idée d'unicité.
Le favus de l'Homme est très généralement causé, il est vrai, par
un même parasite, l'Achorion Schônleini : mais nous devons admet-
tre que, dans des cas exceptionnels, le favus peut être causé chez
l'Homme par deux autres Champignons ressemblant fort à celui de
Schôünlein, appartenant à la même famille que lui, mais, dans l’état
actuel de la science, irréductibles à lui : ce sont l'Oospora canina
Costantin et Sabrazès, qui détermine ordinairement le favus du
Chien, et l'Achorion quinckeanum, qui détermine ordinairement le
favus chez la Souris. Ces deux Champignons ont la propriété d'être
pathogènes pourl' Homme, au même titre que l'Achorion Schünleini;
comme lui, ils déterminent les godets caractéristiques et les autres
mêmes lésions du favus. Que trois Champignons différents puis-
sent vivre sur l'Homme au même titre, cela n'étonne pas, depuis
que Sabrazès a cultivé sur la Souris l'Achorion Schünleini et l'Oo-
spora canina, et qu’il a reconnu des différences de malignité de l’af-
fection suivant le parasite en cause.
Cependant, il ne faut pas perdre de vue que la présence des pa-
rasites Oospora canina et Achorion quinckeanum sur l'Homme n'est
qu'exceptionnellement constatée, probablement parce que la con-
tagion par la Souris et le Chien est beaucoup plus rare qu'on ne le
pensait tout d'abord, relativement aux autres causes de conta-
gion, comme nous le verrons plus loin.
Aussi allons-nous décrire d'abord l'Achorion Schônleini, le para-
site proprement dit du favus humain, puis l'Oospora canina Costan-
tin et Sabrazès, enfin l'Achorion de Quincke et Bodin, comme étant
susceptibles de créer le favus humain.
VII. — Étude de l’Achorion Schônleini dans ses cultures
artificielles.
A. — CULTURES.
Hallier employait comme milieu de culture les fruits, le sang,
l’'albumine et enfin la glycérine. Grawitz cultivait l'Achorion pur
sur la gélatine, l'agar-agar et le sérum du sang.
L'Achorion, au contraire du Trichophyton, ne pousse bien que
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 287
sur les milieux azotés. Les bonnes cultures sont très difficiles à
obtenir; elles contiennent plus d’impuretés que celles des Tricho-
phyton et le milieu le plus convenable ne semble pas encore être
obtenu. Verujski, voulant donner une explication, en 1887, aux
premières erreurs de Grawitz, disait que les Champignons divers
se ressemblaient entre eux sous leurs formes de souffrance et que
Grawitz n'avait pu cultiver le Champignon du favus sur un milieu
suffisamment favorable pour obtenir une fructification élevée, pou-
vant servir de base à la classification.
Le procédé des cultures pures est tiré de la méthode que suivait
Pasteur en bactériolegie ; puis Koch perfectionne cette méthode,
en faisant usage de milieux solides ; dès lors, l'étude des cultures
des Champignons prend sa place dans le domaine scientifique. Les
premières cultures pures qui furent faites, celles de Duclaux, de
Verujski, de Grawitz servent à démontrer la spécificité du Cham-
pignon favique que les cultures impures étaient incapables de
prouver et qui était surtout mise en doute d'après les idées des
frères Tulasne. Cependant, le caractère spécial du favus au point
de vue clinique avait attiré l'attention, et de même l'obtention de
godets faviques par l’inoculation; alors on considérait le favus
comme un syndrôme pouvant être fourni par divers Champignons
placés dans certaines conditions de vie.
Verujski cultive le Champignon du favus en cellules humides,
en 1886; il constate la lenteur de son développement comparati-
vement au Trichophyton; il obtient de grosses spores avec un
mycélium épais, quoique moins enchevêtré et plus fragile que
celui du Trichophyton.
Duclaux, en 1886, fait ses cultures pures de favus avec un che-
veu stérilisé par lavage à l'alcool et l’éther; il se sert, parfois
aussi, de parcelle de godet qu'il ensemence à l'aide d’un scalpel
flambé ; il choisit des liquides de culture non acides ; car il remar-
que que l'acide acétique arrête la culture, au contraire de la po-
tasse qui l’active.
Sabrazès, à ses débuts, utilise pour ses cultures des fragments
de cheveux bien nettoyés et coupés à l’aide de ciseaux aseptisés,
un milieu solide, un peu desséché, présentant une réaction neutre
ou très faiblement alcaline; de plus, s’il reconnaît des colonies
bactériennes dans sa culture, il reporte son Champignon sur un
28$K P. NÉE
autre milieu en le saisissant, avec l’anse de platine, dans une ré-
gion dépourvue d'impuretés. La culture se fait à 37° en tube coïiffé.
Plus tard, Sabrazès obtient des cultures plus favorables et il peut
suivre les colonies issues d’une seule spore, en faisant son ense-
mencementd'après les règles de Kral etde Mibelli ; il peutainsi com-
parer les résultats. Grawitz avait déjà cherché à dissocier les spores
agglutinées du godet, afin de les ensemencer; mais Kral réussit à
trouver un bon moyen de séparation en brisant les godets, dans
un mortier, avec l'acide salicylique ; il mélange cette poudre à de
la gélose liquide, qu'il coule enfin en plaques. Après Kral, Mibelli
- se contente de dissocier les spores, avec un pilon, dans l’eau sté-
rilisée; ces spores peuvent être ensuite ensemencées sur plaques
ou bien sur des milieux solides un peu secs, sur du bouillon pep-
tonisé avec 1°/, d'agar rigoureusement neutralisé et porté à 20 ou
25°. On isole non seulement les spores les unes des autres, mais
encore les Bactéries et autres Champignons toujours nombreux
dans les godets. Enfin, on peut se servir des boîtes de Petri ou de
Soyka et aussi des tubes à l'étuve à 37°, température du corps
humain. Cependant, d'après Sabrazès, les basses températures
donnent des cultures plus pures, quoique plus lentes. |
L'ensemencement est très facile avec les godets et les cheveux
malades. Mais, si l'on se sert de squames ou de vésicules des lésions
érythémateuses faviques, la culture est bien plus difficile et les
résultats sont peu probants; dans ce cas, on lave ces produits
pathologiques, devant servir à l'ensemencement, à l'alcool à 90°
et on ne fait pas usage d'antiseptiques. Si l’on se sert des ongles,
on enlève, d’après Sabrazès, une tranche superficielle, pour râcler
-les parties profondes de la région malade, en les réduisant à une
poussière impalpable que l'on ensemence sur les milieux gélosés.
Bodin recommande d’ensemencer sur de larges surfaces, afin que
les colonies ne se gènent pas mutuellement. D'après Sabouraud, les
vases plats, les boîtes de Petri sont à rejeter, parce que la buée se
condense sous leurs couverceles et empêche de voir les cultures.
Quant aux cultures en tube, elles se déforment dès qu'elles ren-
-contrent la paroï du verre; aussi Sabouraud cultive les Champignons
sur de larges matras à fond plat, qui permettent aux cultures de
s'étendre excentriquement sans rencontrer les parois du verre.
Comme milieu, Sabouraud emploie les milieux peptonisés à
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 289
2 pour 100 et glycosés à 4 pour 100. Le milieu d'épreuve de Sabou-
raud se compose de gélose 1 gr.5, maltose 3 gr. 80, peptone O gr. 75,
-eau 100 gr.
Il y a encore le milieu de Sabouraud liquide, qui ne difière du
précédent que par l'absence de gélose. Les cultures en goutte sus-
pendue sont, surtout, utiles pour l'étude du Champignon. Bodin
recommande les milieux peptonisés à 5 pour 100; l’Achorion y
pousse en quinze jours et donne des colonies gris blanchâtre ou, si
elles confluent, cérébriformes. |
Sabouraud mesure la convenance du milieu pour un Champignon
par la profondeur de son implantation et la rapidité de son déve-
loppement.
Milieux liquides. Cultures sur bouillon. — Verujski remarque que
-l’'Achorionse développe difficilement en milieux liquides; il obtient
des formes mycéliennes très irrégulières avec une ébauche de for-
mation de conidies. Dans le bouillon de veau simple ou peptonisé,
le petit lait, le liquide d’ascite, l’Achorion se développe bien et par-
fois avec godets. Kral obtient, dans le bouillon peptonisé à 37°,un
gazon d'Achorion limité par des productions caractéristiques sem-
blables à de la Mousse; le liquide ne se décolore pas; il remarque
de nombreuses conidies et pas d’hyphes aériennes.
Sur le lait, Verujski obtient une couche cotonneuse et mate,
blanche, compacte, d’une épaisseur de deux à trois millimètres ;
la surface inférieure de cette culture en contact avec le liquide est
pigmentée en jaune; la couche superficielle présente des filaments
aériens et des tubercules épais, irréguliers, s’élevant au-dessus
du niveau liquide; la forme de ces tubercules rappelle le godet.
Kräl obtient sur le lait à 37° une couche compacte, blanche au
début comme la neige et plus tard jaune maïs ; les portions de
la culture plus exposées au sec deviennent même orangé foncé.
- Le sérum du lait devient fluorescent. Au microscope, il trouve des
filaments très allongés et pas de conidies. L'Achorion liquéfie la
caséine assez rapidement.
Sur le sérum du sang à 37°, Kral obtient un duvet uni à lasurface
avec croissance notable en profondeur ; des prolongements sem-
blables à de la Mousse limitent la culture. Le microscope ne mon-
tre, sur un mycélium de 30 jours, ni conidies ni cloisonnement
des hyphes. SE
290 P. NÉE
Milieux solides. — Verujski considère les milieux solides comme
moins favorables que les milieux liquides; les moins défavorables
sont, pour lui, la gélatine et la gélose ; le développement du Cham-
pignon y est plus lent et moins abondant que sur les milieux
liquides ; cependant, on obtient encore des spores aériennes; mais
la désagrégation du végétal est plus rapide.
Culture sur gélatine. — La gélatine se liquéfie et l'on a une couleur
jaune intense; on peut trouver de véritables godets faviques, si le
tube de gélatine est couché. Grawitz remarquait sur la gélatine de
petits flocons ; le Champignon ne liquéfiait la gélatine que très len-
tement. Sabrazès remarque aussi la liquéfaction de la gélatine et,
en employant la méthode de Kral, il signale un voile blanchâtre
nuageux qu'il considèrecomme un phénomène chimique, de nature
inconnue, puisqu'il n'est pas dù à la présence d'impuretés mi-
crobiennes. Kral remarque que l’Achorion ne liquéfie pas la
gélatine, même en couche mince, avant trente jours. Bodin obtient
sur la gélatine une petite culture irrégulière blanchâtre, non
duveteuse; la liquéfaction ne commence qu'au huitième jour et
avec lenteur.
Sur gélose. — D'après Gaucher, on trouve sur gélose des amas
jaunâtres, cupuliformes, pareils aux godets faviques. Sabrazès
remarque, sur gélose glycérinée très molle, une végétation active
qui s'étend plus en profondeur et en surface qu’en hauteur; d'après
lui, les milieux gélosés sont très favorables à l'étude du pléomor-
phisme. Sur la gélose simple, Sabrazès obtient une culture caracté-
risée par sa croûte saillante, un contour nettement défini et irré-
gulier, légèrement translucide et rappelant l'aspect de la cire, de
consistance assez ferme.
La culture que l’on obtient sur gélose peptonisée et glycérinée
présente également ces caractères : la surface peut prendre l'aspect
de godet ou bien l'aspect cérébriforme ou verruqueux; ces cultures
grisètres peuvent se poudrer finement de blanc sans former de
duvet; si le milieu est assez mou, la culture émetdes prolongements
mousseux.
Grawitz remarque la forme étoilée de l’Achorion sur l’agar. Kral
remarque surtout, sur l’agar, les prolongements, rappelant la
Mousse, qui s'étendent horizontalement au-delà de la culture et
aussi dans l'’agar même, là surtout.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 291
Sur un milieu d’agar sec et très consistant, Sabrazès reconnait la
difficulté qu'a la culture à pénétrer profondément; elle se sou-
lève, seplisse plutôt; d’abord verruqueuse, elle devient vermi-
forme.
Sur pomme de terre, Sabrazès obtient des résultats très différents,
suivant l’état de cuisson de la pomme; il remarque des îlots acu-
minés, d'un blanc grisàtre, sans mycélium aérien le plus souvent.
Kral obtient, sur les disques de pomme de terre à 37°, un dévelop-
pement lent d'Achorion, remarquable par le duvet s'élevant perpen-
diculairement, gris jaunâtre, en forme d’anneau, et portant un
mycélium aérien, clairsemé et peu visible; au microscope, il trouve
de grosses conidies sphériques et quelques hyphes grêles, présen-
tant parfois un élargissement de diamètre. Bodin obtient des
monticules blanchâtres, sans duvet ni pigmentation au début. En
somme, la caractéristique de la:culture sur pomme de terre est
l’enduit surélevé, mamelonné, sec, gris brunâtre. |
Sur la carotte, Sabrazès obtient une culture analogue, mais plus
lente.
Sur la tige de Chou, le développement est moins lent et l'aspect
plus grisâtre.
Sabrazès reconnaît comme milieux très mauvais : la poire, la
pomme cuite, la peau d'orange, le jus d'oignons, de cerises, de
prunes, le liquide de Raulin.
Enfin, sur le milieu de Sabouraud, l'Achorion se développe très
bien, sous forme d'un enduit jaune brun, plissé, déprimé au centre
et rappelant le godet. |
Les duvets blancs pléomorphiques. — Dans des conditions encore
iucertaines, on peut obtenir sur les cultures un duvet fin et blanc.
On peut isoleret cultiver ce duvet doué d'une grande vitalité, pous-
sant même très bien sur des milieux peu favorables à l'Achorion.
Sabouraud fait l'étude mycologique de ces duvets blancs pléomor-
… phiques; il n'y trouve pas de forme de reproduction, mais seule-
ment des filaments mycéliens minces, buissonnants, très vivaces,
stériles. Remarquons que Sabouraud obtient le retour de cette
forme duveteuse au type primitif, par cultures successives, fait
qui ne se rencontre paschez les Trichophyton et les Microsporum en
cultures artificielles.
292 P. NÉE
B. — MORPHOLOGIE DE L'Achorion DANS SES CULTURES ARTIFICIELLES.
Procédés d'étude. —D'après Sabouraud, pour examiner l'Achorion
dans sa vie artificielle, il faut se servir des cultures en goutte sus-
pendue. « Pour en avoir de bonnes, dit-il, dans la Pratique derma-
tologique, on choisit avec le plus grand soin la culture mère qui
servira de reproducteur. On recueille la culture d’un grand nombre
de cas différents de favus de tout âge. Il est très utile d’avoir, en
outre, plusieurs cultures en milieux liquides, où elles prennent
une croissance beaucoup plus rapide, et deles reporter etimplanter
en masse sur gélose, où elles donneront ensuite assez vite des cul-
tures florissantes. On fait un premier ensemencement avec tous les
exemplaires de favus recueillis; avec chacun d'eux on fait quatre
ou cinq cultures en goutte suspendue. » Ensuite, d’après Sabou-
raud, on surveille le développement de ces cultures en goutte; on
tâtonne, plusieurs semaines s’il le faut, jusqu’à ce qu’on ait obtenu
une culture dont le développement soit manifeste avant trois
jours. C’est cette culture qui servira à l'examen microscopique, si
l’on veut obtenir un bon résultat. Sabouraud insiste particulière-
ment sur la nécessité d'employer ces cultures en goutte suspen-
due; c’est, en effet, avec ces cultures qu'il a pu obtenir des résul-
tats d'examen remarquables. ;
Tishutkin, en 1894, a étudié de son côté la morphologie et la
biologie des Achorion; il s’est servi pour cette étude de plus
de mille cultures sur une cinquantaine de milieux. Malgré la
grande variabilité des cultures, il trouvait à l'examen microsco-
pique des caractères assez stables pour différencier l'Achorion
Schünleini.
Sabrazès a recherché aussi, sur quelques milieux divers, l’as-
pect microscopique de l'Achorion; il préparait ainsi ses colonies
sur gélose pour l'examen microscopique : d’abord inclusion dans
la celloïdine, coupage au microtome mécanique et enfin montage
dans la glycérine sans coloration.
Kräl en 1892 se servait, pour l'étude microscopique de ce Cham-
pignon, de divers milieux qu'il préparait suivant une technique
toute spéciale et très compliquée.
Verujski, qui donnait en 1886 une bonne description du parasite
du favus, le cultivait en cellules humides et se servait aussi de
milieux liquides et solides.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 293
Kral se servait de cultures dans les petites coupes doubles de
Soyka et les examinait à un faible grossissement.
Résultats. — L'étude de la morphologie de l’Achorion, comme celle
de n'importe quel Champignon, offre deux choses à considérer :
l'appareil végétatif ou mycélium etles formes de reproduction. Voyons
d'abord le mycélium, d’après Sabouraud. Soit une culture jeune,
à développement rapide, obtenue par le procédé dont nous avons
parlé : le microscope montre une forêt defilaments mycéliens rappe-
lant l’aspect des têtes de Méduse. Ces filaments sont d’un diamètre
très inégal et l’on voit même un filament donner naissance à un
autre plus large, donner une ramification comparable à celle du
bois de Renne. C’est une forme végétative intense, qui contraste
fort avec le mycélium grêle et atrophié que présente l'Achorion
dans les cultures en goutte, à développement tardif. Sabrazès,
étudiant au microscope les cultures sur gélose, en 1893, constatait
la ramification dichotomique fréquente et irrégulière des tubes
mycéliens.
Verujski en 1886 remarquait, d'après les cultures en cellules hu-
mides, que le mycélium de l’Achorion est plus épais et plus seg-
menté que celui du Trichophyton ; ses enchevêtrements lui appa-
raissaient aussi Comme moins compliqués.
Ajoutons que la dimension des filaments qui forment le mycé-
lium varie de 3 à 8 v ; ils sont divisés en segments de longueur
très inégale, mais dépassant en général d'au moins trois fois la
largeur.
Sabouraud, qui donne de l'examen des cultures à développe-
ment rapide une description détaillée, reconnaît plusieurs aspects
du Champignon, dus soit au mode de développement du mycélium,
soit à la forme de fructification; il caractérise ces aspects par
l'image de l’objet qu'ils évoquent : ainsi l’on a les têtes de clou
faviques, les chandeliers faviques qui sont, au contraire des fuseaux
trichophytiques, rarement multiloculaires et rarement septés, la
forme en dents de peigne; enfin les conidies vraies, lesquelles prè-
tent à une considération spéciale : ces conidies se montrent sur des
Cultures en goutte à développement peu rapide, sans être toutefois
tardif;cesont ces mêmes conidies que l’on rencontre chez le Tricho-
phyton et le Microsporum Andouini. Cesconidies toujours pyriformes
sont parfois, par groupes de deux ou trois, supportées par un pédicule
294 P. NÉE
bifurqué et très grêle; leurs dimensions sont plus variables que
chez le Trichophyton; ces conidies sont, de plus, disposées très
irrégulièrement sur le mycélium et elles présententune déhiscence
remarquable, qui explique pourquoi l'on trouve souvent de nom-
breuses conidies autour du mycélium.
Il faut rapprocher ces conidies des endoconidies dont parle aussi
Sabouraud, que l’on retrouve également dans les vieilles cultures
trichophytiques, aussi bien que dans les cultures de favus en
goutte à développement tardif. Ce sont des formes de reproduction
dites de souffrance et d'attente. Ces organes ont une enveloppe à
double contour assez épaisse et renferment du protoplasma très
réfringent, granuleux, que l’éosine colore fortement, au contraire
des rares et minces filaments noueux de mycélium qui les unis-
sent. Ces endoconidies sont nombreuses dans les cultures peu fa-
vorables; elles sont disposées en chaîne et leur forme, comme
leur dimension, est très variable. Remarquons, en passant, que ce
sont les mêmes endoconidies que Bodin a trouvées comme étant la
forme la plus ordinaire de la reproduction du Microsporum Au-
douini. |
Ce sont également des formes de souffrance et d'attente que la
plupart des auteurs décrivent comme organes de reproduction de
l'Achorion, faute de milieu suffisamment favorable pour obtenir
un mode de fructification supérieur.
Le double contour des spores semble indiquer qu'elles ont un
noyau, que les colorants n'ont pas encore mis en lumière.
D'après Verujski, une culture d’Achorion agitée avec de l'eau y
laisse instantanément les spores en suspension; de là vient que la:
surface des vieilles cultures est farineuse.
Verujski constate, par ses cultures en cellules humides, que les
spores de l’Achorion sont généralement plus grosses que celles du
Trichophyton, qu'elles sont souvent ovales, parfois sphériques et
qu'il est rare de les trouver réunies à des fragments de filaments.
Sabrazès remarque, par ses cultures sur gélose, que les extré-
mités des filaments mycéliens se renflent et donnent lieu à la pro-
duction de chapelets irréguliers de cellules ovoïdes, qu'il appelle
des gemmes. Ces gemmes ou spores, dont le double contour est
difficile à voir, lui apparaissent plus souvent aplaties que rondes et
même, parfois, pourvues d'irrégularités comme des saillies laté-
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 290
rales ou des cônes terminaux. Les spores sont en amas ou bien en
chapelets, ayant alors dans ce cas pour origine la segmentation
d'un filament mycélien; parfois, deux fragments de ces courts cha-
pelets sont séparés par un ensemble de cellules végétatives et,
d’autres fois, on trouve sur le mycélium même les cellules ren-
flées. Les gemmes se développent davantage, quand les cultures
commencent à vieillir, puis elles finissent par se flétrir en pre-
nant la couleur jaune ocre et, à ce moment, Sabrazès les compare
à des outres demi-vides.
Tishutkin en 1893 observe, le troisième ou quatrième jour
de la culture, ce que Kräl appelait des corps jaunes, renflements
ovoides à l'extrémité des filaments; ce sont pour lui des amas de
plasma colorés que les tubes mycéliens expulsent : le tube s'évide,
cette masse se détruit, une fois expulsée; cependant le même fait
se produit pour l'Aspergillus glaucus et cette expulsion de plasma
coïncide avec des conditions peu favorables à la culture. En
somme, ces renflements ovoides ont 8 à 15 de diamètre, un
double contour et laissent échapper au dehors, après déhiscence,
leur contenu granuleux. C’est une forme de résistance de la plante.
Résumé. — En somme, l’Achorion Schünleini se reproduit d'ordi-
naire suivant deux modes : 1°sur le mycélium paraît un renflement
qu'on appelle corps jaune et renfermant du protoplasma : c'est la
chlamydospore; 2° sur le mycélium paraît une hyphe fertile où les
conidies sont bout à bout : c'est la forme conidienne. Ces deux
modes peuvent exister, simultanément ou non, sur un même
mycélium, car on peut ne trouver que la forme conidienne.
Si l’on veut suivre la germination des conidies, on peut, comme
le faisait Sabrazès, se servir de lames creuses, lavées à l'alcool et
passées à la flamme ; on les recouvre d’une lamelle tenant en suspen-
sion une goutte de gélose renfermant quelques spores : on lutte
à la paraffine; on place la lame dans la chambre chaude de Vignal
réglée à 400 et fixée sur la platine du microscope; on voit ainsi un
mycélium irradié qui finit par se fragmenter sans aboutir à la spo-
rulation.
Pour voir le mycélium aérien, Jessner conseille d'appliquer un
porte-objet enduit de blanc d'œuf sur les colonies; après quelques
heures de contact, les parties superficielles de la culture restent adhé-
réntes au verre.
296 P. NÉE
Enfin, d'après de Nabias et Sabrazès, la dissociation, quoique très
utile pour examiner les détails d’une colonie, ne peut pas remplacer
les inclusions à la paraffine qui permettent de couper en série le
Champignon.
Kral donne les caractères suivants, comme étant les plus impor-
tants et les plus caractéristiques de l’Achorion en culture : dans
tous les milieux nutritifs, transparents, liquides et solides, l'Acho-
rion émet à la périphérie de la culture une production analogue à la
Mousse; de plus, il croît en profondeur dans ces milieux, il ne li-
quéfie pas la gélatine pendant les trente premiers jours de la cul-
ture ; il produit, sur la pomme de terre et la rave, des duvets gris
jaunâtre qui s'élèvent perpendiculairement. La culture sur le lait
est particulièrement caractéristique; nous l'avons décrite. Enfin, il
se forme sur les milieux nutritifs solides des productions qui, au
bout de quelques jours de dessiccation, apparaissent jaunes, friables
et d'aspect tout-à-fait analogue macroscopiquement et microscopi-
quement au godet favique.
C. — CLASSIFICATION DE L'Achorion Schonleini.
Duclaux en 1886 rattachait ce parasite, de même que le Tricho-
phyton, à cause de l'existence de spores sexuées, à la famille des
Périsporiacées, tribu des Ascomycètes, dont les Oidium font aussi
partie. Les Mycologues, après Duclaux, le rattachaient aux Mucédi-
nées, type Vospora, à cause des spores groupées en chapelets sim-
ples ou ramifiés. Pour Costantin et Sabrazès, c'est peut-être une for-
me conidienne d’Ascomycète dont la forme parfaite est à rechercher.
Enfin Sabouraud, ayant parfois observé de petites conidies facile-
ment caduques, disposées sur les parties latérales de l'hyphe fertile,
rapproche l'Achorion des Trichophyton et Microsporum qui en pré-
sentent de semblables, et le range avec eux dans les Gymnoascées;
mais ce n'est que par comparaison qu'il range les Achorion, Tricho-
phyton et Microsporum dans les Discomycètes, dans la grande fa-
mille des Ascosporées. Pour être certain, il faudrait avoir le fruit
supérieur.
Voilà pour ce qui concerne les modes de fructification inférieure.
Mais Sabrazès, puis Sabouraud et Bodin, pour ne citer que ces au-
teurs, ont observé un semblant de fructification plus élevée, quoi-
que mal définie et encore obscure. Bodin a trouvé trois fois une
ETAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 297
sorte de bouquet, à l'extrémité d'une hyphe terminale. Sabouraud,
-qui s'est particulièrement occupé de cette question importante
-pour la classification de l'Achorion, a fait des réensemencements
en série ; il a trouvé une sorte d'amas mycélien, comme un cocon de
-Chenilles entre des brindilles; il a trouvé aussi des productions qui
évoquent l'image des périthèces. Cette recherche demande à être
poursuivie.
Matruchot et Dassonville rangent l'Achorion dans les Gymnoas-
-cées; mais, disent-ils, ( l’'Achorion serait un parasite plus ancré
dans la vie parasitaire et ne ferait retour que plus difficilement et
plus lentement aux formes saprophytiques sporifères. »
D. — CGARACTÈRES BIOLOGIQUES DE L'Achorion
DANS SES CULTURES ARTIFICIELLES.
Le milieu et l'activité vitale. — D'après Kral, le cycle de végétation
de l’Achorion est complet en sept jours dans de l’agar nutritif à
-3710 et la germination commence quatre heures après l’ensemence-
ment. Nous avons déjà parlé du milieu le moins défavorable actuel,
composé de glycose et de peptone. Quant à la réaction du milieu,
ajoutons que Tishutkin préfère cultiver l'Achorion sur un mi-
lieu contenant 0,018 p. 100 d'acide chlorhydrique ou bien un milieu
-alcalin contenant 0,037 p. 100 de carbonate de soude.
La température la plus favorable. — La température la plus con-
venable est, d'après Sabrazès, de 300 à 35°. Kral emploie de pré-
férence la température de 37°. Tishutkin prétend, en 1894, que
J'Achorion Schôünleini se développe le mieux à 32°. Sur le milieu de
-Sabouraud, le parasite se développe à 33° et ne croît plus à 380.
La résistance. — Tishutkin a recherché la résistance à la tem-
pérature des diverses parties composantes du Champignon; le
-mycélium périt le premier, puis les spores. Pour tuer les spores, il
‘laut les maintenir longtemps à 40°. D'après Sabrazès, les spores
du godet ne germent pas encore à 12° et sont tuées à 55° en
10 minutes. Les spores en liberté périssent facilement sous l'in-
-fluence des antiseptiques, d'après Tishutkin. Cependant, d'après
Calderone, le sublimé au 4/1000 agissant 5 minutes sur une cul-
ture ne la tue pas; pour arriver à ce résultat, il faudrait faire agir
-24 heures une solution de sublimé à 1/1000. L'acide phénique, qui
a Cependant un pouvoir antimycotique supérieur au sublimé, doit
Archives de Parasilologie, XI, n° 2, 1957. 20
298 P. NÉE :
être employé au 1/100 et agir 40 minutes sur la culture pour la
détruire. Diverses solutions ne font que retarder le développe-
ment : ce sont la solution de résorcine, de chrysarobine, de thy-
mol, d'acide salycilique à 10/100, de même la solution d'acide
pyrogallique, d'acide acétique à 20/100; enfin l'alcool à 50/100 et
l'acide formique. D'autres substances n’ont aucune action; ce sont,
par exemple, le naphtol 5, le soufre sublimé, l'ichtyol, la teinture
d'iode, le baume du Pérou, le chloroforme, l'éther. Bogrow et
Sharkevitch-Sharshinsky remarquent l’action active de la forma-
line, laquelle, en solution aqueuse à 5/100, tue en vingt minutes
l’Achorion, si le mycélium n'est pas trop compact pour créer un
obstacle à la pénétration du liquide. Nous verrons plus loin ce qu'il
faut déduire de ces recherches au point de vue traitement.
Aécrobiose. — Sans être anaérobie, ce Champignon s'accommode
d'une aérobiose médiocre; il pousse très lentement dans la profon-
deur des milieux (Sabrazès). D'après Tishutkin, il ne pousse pas
dans des milieux non oxygénés, en y conservant cependant sa vita-
lité un mois. Le degré d'aération de la culture influe aussi sur son
développement.
Hygrométrie. — Sous l'influence de l'humidité atmosphérique
exagérée, Sabrazès voit sa culture sur gélose se modifier un peu;
ainsi la croûte perd son contour net et se hérisse de nom-
breuses pointes. Tishutkin voit aussi la culture se modifier suivant
le degré d'humidité.
Influence bactérienne. — La présence de certains Bacilles dans les
cultures, d’après Tishutkin, suffit à tuer le Champignon : tels
sont les Bacillus proteus, prodigiosus et pyocyaneus ; toutefois, il y a
des exceptions dans des conditions spéciales. Pour le même au-
teur, le ralentissement du favus dans la fièvre typhoïde n'est pas
dû seulement au trouble de nutrition du cuir chevelu et à la tem-
pérature élevée qui ralentit la culture, mais aussi à l'influence des
Microbes ou de leurs toxines.
Adaptation. — Quant au caractère de plasticité et de malléabilité
de l’Achorion, nous l'avons déjà signalé à propos du polymor-
phisme; cependant, aucun Trichophyton ne le présente à un si haut
degré. Verujski reconnaissait, en 1886, que la régularité et l’abon-
dance du développement de l'Achorion augmentaient progressive-
ment, si l’on faisait des réensemencements successifs sur un même
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 299
-milieu; il se faisait une acclimatation progressive au milieu choisi.
Plautremarquait également ce fait et arrivait ainsi à faire accepter
facilement au Champignon du favus des milieux que celui-ci sem-
blait vouloir refuser tout d'abord. Sabouraud reconnaît les dif-
ficultés de caractériser nettement l'Achorion; car, quand il trans-
porte l’Achorion d'un milieu sur un autre, le Champignon change
d'aspect et, si le milieu n'est pas très favorable, prend une forme
sénile avant de s'acclimater ; cette forme sénile apparaît comme
une éponge, une pellicule boursoufée et très anfractueuse. Le Tri-
chophyton, vivant sur un terrain insuffisant, prend aussi cette
même forme spongoide, pseudo-favique; mais définitivement,
comme Sabouraud le fait remarquer, il ne prend pas, au contraire
de l’Achorion, la forme duveteuse ou spongoïde alternativement,
suivant les besoins physiologiques du moment.
Sabrazès remarque, par le microscope, les zones successives de
Ja colonie favique, dues à ce que la végétation se produit, d'une
part, périodiquement en suriace, d'autre part, simultanément,
mais moins abondamment en profondeur.
E. — INOCULATIONS DE L'Achorion Schonleini.
À l'Homme. — Remak réussit, en 1842, à s’inoculer le favus sur
le bras; il obtient des godets faviques. Deffis inocule aussi le favus
avec succès. Sabrazès, inoculant la culture de favus à l'Homme,
obtient un placard érythémateux au point d'inoculation : il se
manifeste, les premiers jours, une sensation de cuisson; le cin-
quième jour apparaît une tache rosée bordée de vésicules; enfin,
l'évolution continuant, il ne se forme ni points jaunes ni godets,et
cette tache érythémateuse guérit d'elle-même après quatre se-
maines. Dans de nouvelles expériences, Sabrazès obtient des
godets sur l'Homme et il vérifie ce fait, déjà connu de divers
auteurs et en particulier de Kral, que l'inoculation est plus aisée
sur la femme que sur l’homme. Pour faire des inoculations, il
emploie des cultures renfermant de préférence des conidies, cul-
tures recueillies sur des milieux solides, en particulier sur l'agar
glycériné ; après avoir dissocié et émietté ces cultures dans l'eau
stérilisée, désinfecté le champ opératoire, il pratique l'inocula-
tion.
Pick, en 1891, pour faire ses inoculations se sert de Champignons
300 P. NÉE
délayés dans le bouillon; la peau étant aseptisée autant que pos-
sible, il écrase à cet endroit l'élément du favus à l’aide de l’an-
neau de platine; c’est l'inoculation épidermique; mais il pratique
aussi l'inoculation intradermique, à l'aide d’une aiguille à inocu-
-lation introduite dans un follicule de la peau, en évitant l’écoule-
ment de sang.
D'autres inoculations à l'Homme sont faites, depuis, en particu-
lier par Folly; mais non plus seulement dans le but d'obtenir des
godets faviques, mais pour préciser les premiers symptômes, pour
rechercher par exemple la période dite herpétique de Kôübner;
nous en reparlerons à l'occasion de la symptomatologie.
Aux animaux. — Le favus humain a été inoculé aux animaux,
d'abord aux animaux de laboratoire : déjà, en 1886, d'après Neu-
mann, on savait que l'Achorion Schünleini peut développer le favus
sur la Souris, le Rat, le Chat, le Chien, le Lapin, aussi bien que
sur l'Homme; cependant, ces favus ainsi inoculés aux animaux
guérissent ordinairement d'eux-mêmes. À Lyon, Saint-Cyr inocule
le favus de l'Homme au Chat; Tripier l'inocule à des Souris et des
Rats. Saint-Cyr dit, en 1869, que les Souris, les Rats, les Chiens et
les Chats peuvent contracter le favus dans leurs rapports avec les
enfants faviques.
Sabrazès remarque que la Souris prend particulièrement bien
le favus de l'Homme et que le Rat noir semble réfractaire aux
divers favus. Le lieu d'élection d'inoculation est, d'après lui, chez
la Souris, le Lapin et le Chien, les oreilles, au niveau d’une exco-
riation. L'inoculation du favus humain échoue sur le Chien; donc
le favus obtenu sur cet animal par Neumann était dù, sans doute,
à une autre espèce d'Achorion inconnue alors. Sabrazès n'obtient
pas, non plus, de résultat sur le Chat et le Singe. Les godets obte-
nus sur le Lapin par inoculation sont superficiels.
Bodin considère la Souris grise comme l'animal de choix pour
l’inoculation de l’Achorion Schônleini.
Nous avons parlé de la lophophytie des Poules, que l'on croyait
être du favus, avant Matruchot et Dassonville. Sabrazès, qui a
étudié cette teigne aviaire comme étant du favus, dit en outre
-qu'il a obtenu des godets faviques superficiels sur la crête de la
Poule par inoculation du favus humain : («au bout de vingt-deux
jours la crête était parsemée de mamelons squameux, de couleur
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 301
jaune, très adhérents, enchâssés par leur base dans l'épiderme
épaissi; dans ce cas, la guérison fut spontanée en deux mois; le
derme n'était pas atteint et les végétations de l’épiderme avaientla
texture du godet favique. Le Champignon semblait favique.. »
Il semblerait donc que l’on puisse trouver sur la Poule, en dehors
de la lophophitie, dans des conditions tout à fait exceptionnelles,
un Favus de la Poule résultant d’une inoculation humaine.
VIII. — L'Oospora canina Costantin-Sabrazés.
- Costantin et Sabrazès, qui l'ont découvert, en ont donné les ca-
ractères botaniques, en 1893, après en avoir reconnu la constance
par passages successifs sur divers animaux et sur l'Homme. :
Aspect microscopique. — Le mycélium n'a pas de terminaisons
renflées et n’est pas ramifié dichotomiquement, comme celui du
favus humain. On remarque, sur les bords de la culture, des fila-
ments composés de cellules courtes, qui apparaissent quelquefois
comme demi-cloisonnées. Un caractère constant est la coloration du
substratum en rose ou violet par un pigment rouge intense,
produit par le mycélium et contrôlé par Laborde, à Bordeaux.
La fructification est conidienne seulement; pas de corps jaunes,
mais des spores rondes, disposées en chaînes le plus souvent sim-
ples et longues. Ce Champignon est classé parmi les Oospora, par
analogie avec les formes dégradées d'Oospora.
Cultures et biologie. — Sur l’agar peptoniséà 1 pour 100, il se déve-
loppe, au bout de vingt-quatre heures, à 37°, se pigmente très vite à
sa partie inférieure en rouge intense, se recouvre d'un duvet blanc
serré et ras. Les conidies se forment, dès le troisième jour, en
chaînes longues de 4 à 8 et renferment de nombreux pigments
brun jaune. |
Par piqütes sur les milieux humides et bien aérés, le même du-
vetse produit sur la culture et il est entouré d'une petite zone de
filaments droits et soyeux: la face inférieure se pigmente en
rouge d'autant plus vite que l'extension de la culture est plus
prompte.
Sur la gélatine on voit des îlots de duvet blanc, d'aspect rouillé
à leur partie inférieure; à 25° le Champignon liquéfie la gélatine
qui devient brune. nee 1
302 P. NÉE
Sur le sérum à 25°, si l'on fait l'ensemencement par piqüres et
si l’on se sert d'un tube coiffé au caoutchouc, l’on obtient dès le
cinquième jour une colonie dite principale, humide, arrondie, de
six millimètres de diamètre et un millimètre de hauteur, entourée
de filaments droits rayonnés; on ne voit pas de mycélium aérien
ni de dépôt poudreux; la face dorsale, dont le centre est un peu
excavé, est à ce niveau brun rougeñâtre. Autour de cette colonie, il
y en a d’autres grosses comme une tête d'épingle et qui ne sont
que des amas delongueschaines conidiennes, pigmentées en rouge
jaunâtre. Le sérum ne se liquéfie qu'au bout d'un moiset demi.
Sur la pomme de terre à 37°, on a des massifs confluents acumi-
nés, circonserits par une zone duveteuse, d'un blanc argenté, qui
peut couvrir toute la colonie.
Sur la carotte à 37°, la végétation en surface est abondante;
le mycélium aérien est très blanc et duveteux; la face inférieure
est d'un beau rouge carminé. Pas plus que sur la pomme de terre
ou la gélose, on ne retrouve pour l'Oospora canina l'aspect de croûte
cireuse de l’Achorion Schünleini.
Dans le lait à 20° et à 37°, dans les flacons à fond plat de Gayon,
la culture se fixe sur les parois du verre et apparaît comme un pi-
queté rouge analogue au purpura.
Enfin, la température la plus favorable au développement
de l'Oospora canina est de 30°; mais le développement se fait
encore au-dessous de + 12°, au contraire de l'Achorion Schôn-
leini. Le contour des cultures n'est pas net, le plus souvent, et la
partie supérieure est blanche.
Inoculations à la Souris. — La malignité de ce Champignon vis-
à-vis de la Souris est aussi forte que celle del’A chorion Schènleini; on
obtient des godets, dès le onzième jour, et l'animal finit par succom-
ber au bout de deux mois et demi, par exemple. Remarquons que
ce Champignon ne perd pas son individualité en cultivant sur la
Souris.
Sur le Chien, on obtient des godets faviques et ce favus ne semble
pas guérir spontanément.
Sur l'Homme, on obtient, dans la grande majorité des cas, des
placards érythémato-squameux et très rarement des godets,; les
filaments de ces godets se colorent plus difficilement par le violet
de gentiane que ceux du favus humain.
- -
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 303
Sur le Lapin, après inoculation dans les veines ou dans la
chambre antérieure de l'œil, la mort arrive vers le troisième jour,
avec des phénomènes dyspnéiques; on peut retrouver des colonies
du parasite dans la chambre antérieure de l'œil et des granulations
miliaires intra-vasculaires, surtout dans le poumon; ces granula-
tions sont des colonies en évolution, composées d’un mycélium vi-
vace se colorant facilement.
IX. — L’Achorion Quinckeanum.
Ce parasite du favus de la Souris a été étudié par Quincke, en
1886, et depuis surtout par Bodin, en 1902. Nous ne décrirons ce
parasite que sommairement, malgré son importance, en renvoyant
pour plus de détails à la description qu'en a faite Bodin dans les
Archives de Parasitologie de 1902..
À. — CULTURES.
Les milieux les plus favorables sont les milieux glycosés ou
encore glycérinés ou encore maltosés ; ces milieux doivent être
neutres ou faiblement acides et portés à 35°.
Sur gélose peptonisée à 1 °/, et glycosée à 3 °/, on obtient une eul-
ture uniformément blanche et duveteuse avec, au centre, de larges
plis ou des ondulations saillantes; la surface inférieure est d’un
blanc jaunâtre et finit par se pigmenter en violet foncé. Si dans ce
milieu on remplace la glycose par la glycérine, on obtient une cul-
ture moins abondante, quoique aussi rapide, et on trouve l'aspect
cérébriforme.
Sur le bouillon de bœuf, on voit de petits îlots de duvet blanc
neigeux dont la face inférieure est jaunâtre et, de plus, de petits
flocons grisâtres dans le liquide.
Sur le lait, on a une culture blanche, duveteuse, qui surnage;
il se produit, d’après Bodin, de la présure et de la caséase.
Sur la gélatine ordinaire, la liquéfaction, évidente dès le dixième
jour, est étendue, en trois semaines, à toute la gélatine en tube
ordinaire, sans que le duvet blanc de la surface se soit notable-
ment accru.
304 P. NÉE
B. — MORPHOLOGIE ET BIOLOGIE.
Si l'on fait germer, sur un milieu convenable, de gros éléments
arrondis à parois épaisses constituant la majeure partie d’une
vieille culture de ce parasite, on voit à 37° des filaments mycéliens
de 2» 5 de largeur, présentant des cloisonnements, se ramifiant
latéralement et s'enchevètrant; dès le cinquième jour, on voit des
conidiesappendues latéralement aux hyphes aériennes, constituant
le duvet blanc de la culture; ce mode de reproduction rappelle
celui des Botrytis et, surtout des Acladium; voilà donc, à cause de
sa fructification, l'Achorion Quinckeanum rapproché des Tricho-
phyton et des Microsporum.
Le mode de maturation des conidies latérales se rapproche
beaucoup de celui selon lequel se forment les chlamydospores.
Les chlamydospores, nées à l'extrémité ou dans la continuité d'un
rameau, donnent naissance à de gros éléments très nombreux, de
8 à 12% de diamètre, renfermant du protoplasma; ces éléments
finissent par devenir libres et susceptibles de reproduire la plante
par leur germination. Boer, en 1887, considère déjà les renflements
claviformes de cette Mucédinée comme caractéristiques.
C. — INOCULATIONS.
“
Les inoculations sont faciles à faire à la Souris grise et au
Cobaye, surtout si l’on se sert de cultures jeunes; il se produit une
lésion érythémato-squameuse, puis de petits godets qui finalement
confluent; la mort arrive vite chez la Souris, tandis que le Cobaye
- guérit spontanément.
Bodin n'a retrouvé l'Achorion Quinckeanum, chez l'Homme, que
2 fois sur 250 cas; dans le 1°r cas, ce parasite déterminait des go-
dets sur l'Homme et, dans le deuxième cas, une lésion érythémato-
squameuse paraissant de nature trichophytique à première vue.
X. — Rapports entre le groupe des favus
et celui des trichophyties.
- Nous avons décrit les parasites du favus comme tout à fait dis-
tincts des Trichophyton.
L'Achorion Schünleini, rattaché d'abord au type Oospora parmi
les Mucédinées, à cause de ses chapelets de spores, se rapproche
ETAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 309
cependant des Trichophyton et des Microsporum par un autre mode
de fructification, lequel est analogue à celui des Acladium. Quant
à l'Achorion Quinckeanum, il ne fructifie pas selon le mode Oospora;
c'est un Acladium type, que Bodin, en 1903, considère comme un
terme de passage entre le groupe des trichophyties et des favus.
Matruchot et Dassonville rattachent, en 1899, les Trichophyton
aux Ascomycètes, famille des Gymnoascées et Sabouraud classe
dans cette même famille les parasites du favus, en même temps
que le Microsporum Audouini.
Bodin trouve le premier, en 1896, des termes de passage entre
le favus et la trichophytie : il trouve chez le Veau, l’Ane, le Cheval,
l'Homme, des lésions paraissant trichophytiques par leur aspect
clinique et même microscopique et dont les parasites, isolés en
cultures pures, reproduisent la morphologie et la biologie des
Achorion. Ainsi, dans un cas de pseudo-teigne tondante chez le
Veau, Bodin isole un parasite ressemblant microscopiquement au
Trichophyton endoectothrix, mais donnant des cultures dont les
caractères se rapprochent de ceux des Achorion en s'éloignant
beaucoup de ceux des Trichophyton. L'examen des cultures montre
une fructification conidienne du type Oospora. Précédemment, dans
sa thèse de 1896 sur les Teiynes tondantes du Cheval, Bodin avait déjà
signalé deux types d'Achorion mycologiquement qui déterminent
chez l'Homme et l’Animal des lésions d'aspect trichophytoïde.
D'autre part, Sabrazès, en 1898, signale un Trichophyton du
Cheval qui, inoculé à la Souris, produit des godets faviques.
- Sabrazès et Brengues obtiennent des godets faviques par inocu-
lation à l'Homme et à la Souris d'un Trichophyton pyogène extrait
d’un sycosis parasitaire; ce Champignon est morphologiquement
trichophytique. |
. Mewborn, en 1903, rapporte un cas de favus du scrotum à lésions
trichophytoïdes; il s'agit d’un Trichophyton qui, en certaines
régions, produit des lésions d'herpès circiné et ailleurs des lésions
faviques.
S'agit-il, comme le croit Sabouraud, d'une classe spéciale de Tri-
chophyton à culture faviforme ? Pour éclaireir la question il faudra
faire une étude mycologique difficile, car on n'’étudie pas les para-
sites du favus par les mêmes procédés que les Trichophyton.
- Sabouraud se range à l'avis que Bodin exprimait dans sa thèse
306 : NP ON ÉES AULAE
de 1896, déjà citée : « la barrière entre les Achorion et les Tricho-
ghyton paraît s'abaisser tous les jours. » Sur quoi se base-t-on, en:
effet, pour caractériser le favus ? Ni la formation de godet, ni la
forme spongoïde des cultures, ni le mode de fructification ne
peuvent, d'après Sabouraud, caractériser le favus.
Tout en admettant un Achorion humain typique, la découverte
des Achorion trichophytoïdes nous amène à faire quelques ré-
serves sur l'unité absolue du parasite humain et, à ce propos, nous
devons signaler, et peut-être l'avenir prochain en signalera d’autres
encore, la nouvelle variété d'Achorion que Billet a vue, en 1899,
dans un favus scrotal à cultures très particulières.
XI. — Étiologie du favus.
Gruby, reconnaissant le favus comme affection parasitaire,
pensa à sa nature contagieuse et il ne tarda pas à l’affirmer, en
même temps que Mahon. Cependant, à cette époque, on faisait
encore quelques restrictions à la contagiosité du favus; ainsi l’on
admettait que des fomentations puissent occasionner le favus.
Aujourd'hui, l'on n’admet pas la spontanéité du favus; le favus
a toujours la même cause efficiente, le parasite, et si l'application
de cataplasme sur la peau est parfois suivie d'éruption favique, c’est
que les compresses et les substances composant la fomentation.
recèlent de la poussière favique. La contagion par inoculation du
parasite a été prouvée par Remak, Pick, Bazin, Deffis, Grawitz,
Unna, etc. Le favus est contagieux d'Homme à Homme, des Ani-
maux à l'Homme, de l'Homme à certains Animaux, des Animaux
entre eux.
La contagiosité du favus n’est cependant pas aussi grande que
celle de la trichophytie et elle présente un caractère tout spécial.
Le faible degré de contagion est remarquable, alors que la pous-
sière favique est très abondante sur la peau des personnes faviques ;
cette poussière se dissémine et ses nombreuses spores semblent
n'attendre que la porte d'entrée pour créer de nouveaux foyers de
favus; malgré cela, l'on voit parfois dans les groupements d'indi-
vidus, dans la famille ou dans l’armée, des faviques qui conservent
leur affection un certain nombre d'années, sans la propager autour
d'eux et aussi sans que les lésions ne se multiplient sur eux-
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 307
mêmes, autour du foyer primitii où dans d’autres endroits du
corps, par auto-inoculation résultant du grattage. Les grandes
épidémies de favus sont très rares. Il y à, il est vrai, des individus
inaccessibles au favus : les exemples de personnes vivant journel-
lement et faisant lit commun avec un sujet favique, sans devenir
à leur tour faviques, sont innombrables. D'après Hardy, il y a
même des sujets qui échappent à l’inoculation du favus; chez
d'autres, l'inoculation ne produit qu’une végétation sans activité,
de courte durée et guérissant spontanément. Les réfractaires au
favus que Gaucher à pu observer, appartiennent à la classe aisée
et ce sont des adultes robustes, bien constitués, vivant dans de
bonnes conditions hygiéniques. Quoique ces paradoxes de conta-
giosité soient très fréquents dans la pelade, on ne les observe que
rarement dans la trichophytie. Ce fait n'est-il pas analogue à celui
de la réceptivité bactérienne? .
Et, non seulement, l'Homme peut opposer au favus une immunité
entière de tout son être; mais il peut encore présenter seulement
une immunité partielle, régionale : on voit des régions du cuir
chevelu atteintes de favus et d'autres respectées; ces régions ne
sont pas identiques pour tous les malades; cependant, le pourtour
du cuir chevelu est toujours épargné, comme le fait remarquer
Besnier. De plus, les ongles sont rarement atteints chez les favi-
ques et ce n’est pas à cause des difficultés d’inoculation; car la rai-
nure des ongles est souvent bourrée de matière favique. Il faut
donc admettre sur la réceptivité favique une influence, non seu-
lement générale, mais encore locale de l'individu.
De même que certains individus reçoivent difficilement la graine
favique, d'autres présentent au développement de cette graine un
terrain particulièrement favorable, tant à cause desconditionsinhé-
rentes à l'individu qu'aux conditions extrinsèques. Voyons les
causes prédisposantes du favus : I moment de la vie le plus favo-
rable à la réceptivité du favus est l'enfance, comme toutes les tei-
gnes, et principalement de cinq à quatorze ans. Cependant Besnier
et Vidal ont vu le favus aux deux âges extrêmes de la vie. Vidal a
vu des godets faviques sur le cuir chevelu d'un enfant de six se-
maines; la mère qui était favique depuis plusieurs années, avait
déterminé la contagion et elle avait remarqué, dès le commen-
cement de la quatrième semaine après la naissance, de petits
308 P. NÉE
points jaunâtres qui graduellement s'étaient agrandis. Besnier a
vu aussi un cas de favus du cuir chevelu chez un enfant de six
mois. D'autre part, Besnier et Vidal ont vu des cas de favus chez
des octogénaires dont la contagion remontait à de très nombreuses
années, à l'enfance, dans un cas. En Italie surtout, on signale des
cas de favus chez des adultes de tout âge. Au moment de la pu-
berté, le favus disparaît parfois spontanément. Enfin, d'après le
compte rendu des études faites à l'hôpital Saint-Gallicano, il
résulte que le favus est héréditaire dans certaines familles de la
province de Rome.
Le tempérament débile, lymphatique, scrofuleux est particu-
lièrement favorable au développement du favus, de même les con-
ditions de mauvaise hygiène, de misère physiologique, d'alimen-
tation insuffisante, enfin de malpropreté. Déjà, avant la découverte
de Gruby, de multiples auteurs avaient noté la coïncidence du
favus avec les conditionsdesaleté : autour deslésions faviques du
cuir chevelu, on trouve souvent une abondance de poux et de
lésions d'impétigo; de plus, les faviques vivent généralement dans
un état de malpropreté rare, ne prenant pas de bains et renouve-
lant trop rarement leur linge de corps.
Bazin et Deffis ont prouvé, par des expériences, quel'airqui véhi-
cule et dissémine les spores des lésions faviques peut être un
moyen de propagation du favus. D'autre part, les objets divers,
susceptibles de recéler de la poussière favique, peuvent aussi ser-
vir à cette propagation, en particulier les objets de toilette com-
muns, comme les brosses, les peignes et aussi les coiffures com-
munes et même les vêtements. Les spores ainsi disséminées peu-
vent conserver leur vitalité plusieurs années, comme l’a montré
Sabrazès. D'autre part, dans le godet favique expulsé, l'Achorion
peut conserver plus de dix mois sa vitalité, d’après Tishutkin.
Enfin, des cheveux faviques enveloppés dans du papier peuvens
coloniser encore, au bout d'un an.
L'origine du favus la plus commune est l'origine humaine: la
contagion se fait d' Homme à Homme ou plutôt d'enfant à enfant,
ainsi que l’ont remarqué Sabrazès et Bodin; d’après Sabrazès, à
l'origine de la plupart des cas de favus, on trouve la cohabitation
avec un favique.
Le favus à quelquefois cependant une origine animale. Comme
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 309
le fait remarquer Bodin, le Chien, le Chat, la Souris offrent, pour
l'Achorion humain, une réceptivité très marquée et ainsi ces ani-
maux peuvent, surtout, servir d'intermédiaires dans la propagation
du favus humain.
Enfin, le favus pourrait avoir parfois une origine saprophytique,
comme Bodin en a émis l'hypothèse à la Société de dermatologie
en 1893; il s'appuyait sur les raisons suivantes :
19 On peut cultiver le favus sur le bois, sur les substances
inertes, quoique très difficilement;
20 L'analogie avec l'Oospora bovis et les Champignons voisins;
30 L'impossibilité parfois de retrouver l'origine de la contagion;
4 Les formes de souffrance du Champignon dans la vie parasi-
taire qui font soupçonner une fructification normale probable sur
certaines substances de la nature.
Toutefois, d'après Bodin lui-même, l'origine saprophytique du
favus serait négligeable en pratique. Remarquons, à ce propos,
que Gruby avait très difficilement réussi, après trente essais infruc-
tueux, à inoculer l’Achorion à un végétal; dès ce moment, on
-pouvait donc songer à l’origine végétale du favus que Hillier a
soutenue, et faire déjà de cette affection une maladie rurale. Au-
-jourd'hui, pour déclarer le favus maladie rurale, on se base sur
d’autres considérations, en particulier, des considérations tirées de
la statistique du favus.
XII. — Distribution géographique du favus.
La plupart des cas traités à Saint-Louis et à Saint-Gallicano
-Viennent des campagnes. D'après Gaucher, les départements qui
-possèdent le plus de faviques sont ceux des campagnes misérables :
les départements du nord, la Bretagne, les départements voisins
des Pyrénées et ceux du Plateau central; d’après Gaucher, il y a
-aussi des conditions régionales; car, à Lyon et aux environs, le
favus est commun et la trichophytie est rare; c’est le contraire, à
-Paris. En général, le favus s’observe à la campagne et la tricho-
phytie à la ville. D'après Feulard, de 1887 à 1891, les départements
les plus atteints sont l'Hérault et les départements limitrophes; la
-Seine-Inférieure, le Finistère, le Morbihan, la Loire-Inférieure et
les départements limitrophes; l’est est moins atteint; ainsi l'étude
310 P. NÉE
e
‘de Feulard, faite en 1892 d’après les statistiques d’exemption
au service militaire, nous montre que le favus semble se localiser
de préférence autour de certaines régions, dans les campagnes, au
contraire des grands centres comme Paris. Dans la statistique de
Feulard, contrairement à l'opinion de Gaucher, Lyon compte parmi
les centres possédant le moins de favus. Feulard attribue cette loca-
lisation au contact avec les animaux comme les Rats, les Souris,
les Chats qui sont plus fréquents à la campagne; c'est, d’ailleurs,
l'opinion de Hardy qui rencontre surtout le favus chez les petits
pâtres qui couchent dans les écuries et les étables. Nous avons,
cependant, déjà dit que la majeure partie des auteurs ne consi-
dèrent l'origine animale du favus que comme relativement rare,
à moins que l’on ne regarde les animaux que comme intermé-
diaires dans la propagation. Feulard dit aussi qu'il faut tenir
compte des mauvaises conditions hygiéniques de la vie et, surtout,
du manque de soins et de surveillance et de traitement. Aussi,
grâce aux progrès de la civilisation, le Favus disparaît. D'après
Besnier et Doyon, la statistique de favus annuelle comporte la
moitié des cas de celle d'il y a vingt-cinq ans. Par ordre de fré-
quence, les pays possédant le plus de faviques sont la Hollande, Ia
France (le midi et le nord-ouest), les États-Unis, l'Autriche, l'An-
gleterre. À Amsterdam, en 1855, il y avait mille faviques; le
nombre s'est abaissé progressivement pour reprendre ces dernières
années. Cette recrudescence du favus à Amsterdam en 1904 est
due, d’après de Vijk, à l'insuffisance du personnel chargé du traite-
ment. Pour enrayer la contagion on fut obligé de n'admettre à
l’école que les enfants non malades, ou au moins ayant la tête pour-
vue d'un bandage occlusif, délivré gratuitement dans une polyceli-
nique ouverte à cet effet; de plus, de Vijk réclamait une école spé-
ciale pour instruire les enfants malades. A Lyon, les statistiques,
d'après Lesterlin, montrent une diminution évidente et considé-
rable dans le nombre des exemptions pour teignes, comparative-
ment aux statistiques d'il y a vingt-cinq ans.
Petersen, Pick et Tishutkin croient le favus d'autant plus fré-
quent que le degré de civilisation du pays est moins élevé. Le
favus est assez répandu chez les Musulmans et les Israélites.
Espérons qu'avec une prophylaxie plus soutenue le favus recu-
lera et disparaîtra devant la civilisation. |
17
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN ol
PARTIE CLINIQUE
I. — Introduction.
La question clinique du favus typique n'a guère varié depuis
Bazin qui débute à l'hôpital Saint-Louis, en 1849, marche dans la
voie tracée par Gruby, mais se préoccupe surtout du favus au
point de vue clinique. Avec le microscope, Bazin découvre que la
production végétale se retrouve dans le bulbe et ïl tire, de ce fait,
la conséquence : (les poils atteints tombent et la calvitie est défi-
nitive. » Bazin déclare que la présence de poils est nécessaire à la
production du favus; il décrit très bien le poil malade. Bazin
donne une nouvelle définition de la teigne : (« une affection des
poils, dit-il, produite ou entretenue par la présence d'un végétal
parasite.» Aussi son traitement rationnel éclairé par ses recherches
est commun à toutes les teignes : l'épilation et les parasiticides.
-C'est Bazin qui, en 1857, divise les affections parasitaires en deux
groupes; le premier groupe comprend les affections causées par
les végétaux parasites ; le deuxième groupe, celles causées par
Jlesanimaux parasites; au moment où il quitte l'hôpital Saint-Louis,
-ses idées sont acceptées partout; le favus est connu au point de
vue clinique.
Nous avons fait déjà remarquer, dans la première partie de
l'ouvrage, qu'il n’y a pas de correspondance du type clinique aux
espèces parasitaires. Pick, en 1891, a d'ailleurs recherché si, vrai-
ment, il y avait des différences, entre les divers favus, autres que
celles de localisation; après avoir étudié vingt deux cas de favus,
dont quatorze exclusivement du cuir chevelu, deux exclusivement
et primitivement des régions non velues (couronne du gland et
sillon coronaire), il conclut à l'identité des godets et des éléments
faviques.
II. — Symptômes du favus des régions pileuses.
A. — SYMPTOMES DU FAVUS TYPIQUE DU CUIR CHEVELU.
Les phénomènes subjectifs sont presque nuls, il n'y a pas de
douleur véritable cependant, le début s'accompagne parfois de
démangeaisons modérées, le plus souvent, dues à des lésions
312 : P. NÉE
de grattage ou à la présence de phtiriase d'impétigo, d’eczéma.
Les couches superficielles de l'épiderme sont, au début, seules
intéressées par le développement de l’Achorion et la réaction
inflammatoire consécutive. Il apparaît une rougeur érylhémateuse
pouvant prendre un aspect circiné, dont nous parlerons plus loin
à propos de la question du favus herpeticus : cet érythème est peu
visible sur le cuir chevelu et n’est pas toujours observé ; à ceniveau
on remarque bientôt, parmi les squames, des points jaunes que la
loupe montre ombiliqués.
Le godet est considéré aussi par Gaucher comme la production
sous-épidermique cireumpilaire initiale. Un poil traverse le godet
jaune soufre ; il ne faut pas, cependant, en conclure quele poil est
absolument nécessaire à la production du godet; car nous verrons
plus loin que, si l'on trouve toujours un poil follet émergeant du
godet dans le favus des régions glabres, on n’en trouve pas sur le
godet du favus du gland.
Les godets, s'accroissant peu à peu, forment de véritables croû-
tes du dixième au vingtième jour.
Besnier et Doyon font remarquer que, si l’on pique la petite tache
blanc jaunâtre qui doit se transformer en godet manifeste, il s’é-
coule une matière analogue au pus; d'autre part, Bazin avait re-
marqué, à cette époque de l’évolution favique, la présence de réelles
pustules très petites. Mahon et Baudelocque se seraient-ils donc
trompés, en niant la pustule favique? Leloir a constaté l'existence
-de cette pustule sur le cuir chevelu constamment, de huit à dix
jours après l'épilation. Pour Leloir et Vidal, le liquide purulent ne
s'écoule que si l'on rompt les points jaunâtres : autrement, ces
pseudo-pustules se transforment en godet. Aujourd'hui, on consi-
dère ces pustules comme des folliculites du système pilo-sébacé
dues à une irritation quelconque, ou même à l'irritation provoquée
par la présence du Champignon. Hallopeau reconnaît, d’ailleurs,
que des pustules peuvent apparaître dans les aréoles érythémateu-
ses qui entourent les poils.
La surface déprimée du godet peut être polie ou hérissée de
petites saillies, d'après Leloir et Vidal; on voit à l'extérieur les
couches concentriques, bourrelets circulaires dus à l'intermittence
de progression des lésions, aux poussées d'extension qui donnent
au godet, comme le disait Bazin, l'aspect du nid d'Hirondelle.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 313
Pourquoi le godet est-il déprimé? Pour Kaposi, la dépression
est due à ce que la couche cornée superficielle, étant adhérente au
poil, ne peut se soulever en même temps que le godet grossit.
Pour Leloir, le favus a comme toutes les teignes une tendance à
guérir au centre et à se propager d'une façon excentrique.
La face profonde du godet est, au contraire, convexe et lisse ; la
dépression qui la loge est petite et en entonnoir, d'après Leloir et
Vidal, pour les plus petits godets, alors qu'elle est concave et cupu-
liforme pour les gros godets; la surface de cette dépression est
rouge, congestionnée, suintante et, le godet enlevé, la dépression se
comble en quelques minutes, la compression ayant cessé.
La dimension des godets adultes varie de celle d’une lentille à
celle d'une pièce d'un centime; rarement, ils atteignent un dia-
mètre de deux centimètres; dans le cas de favus urcéolaire de
Bazin, on voit les godets dépasser le niveau de la peau d’une hau-
teur de dix à quinze millimètres. Si on n'enlève pas ces godets,
ils peuvent rester longtemps adhérents. L'épidermicule épider-
mique de revêtement du godet qui n'existe qu'à la partie extérieure
de la lésion, ne se détache que tard par suite de l'extension du
processus; alors ils’ensuit une dessication des masses faviqueset l'on
voit des amas inégaux, durs, ayant parfois un centimètre d'épais-
seur, de couleur plus claire, d'un blanc jaunâtre ou grisâtre, à
aspect de mortier parfois, à moins que le sang ne les colore en
brun; ces concrétions deviennent pulvérulentes, se détachent en
poussière ou en parcelles plus souvent qu'en masse; à cette pé-
riode d'évolution, on ne reconnaît plus le godet favique, sauf sur
le pourtour de la lésion.
Aspect du cheveu favique. — Les cheveux faviques sont souvent
accolés et, quand on cherche à extraire l’un deux, on en obtient
plusieurs confondus dans une gaine commune, d’après Hallopeau.
Les cheveux faviques s’arrachent, d’abord, à la main par toufites,
puis il deviennent si fragiles que les habiles épileurs en cassent :
les cheveux deviennent ternes, gris de souris, ou rougeûtre fauve
d'aspect poudreux. Çà et là, on trouve quelques cheveux épars épar-
gnés non seulement parce que l’Achorion ne s’est pas développé
chez eux, mais aussi parce que, suivant Besnier et Doyon, leurs
papilles n'ont pas été comprimées par les godets.
Variétés du favus typique du cuir chevelu. — Leslésions prennent
Archives de Parasilologie, XI, n° 2, 1907. 21
314 P, NÉE
un aspect différent suivant leur âge, leur nombre, la période de leur
développement, ou bien encore, suivant leur étendue et leurs
complications. Bazin décrivait trois formes : le favus urcéolaire
(de urceus, tasse), le favus scutiforme (de scutum, bouclier), le
favus squarreux, (de squarrosus, couvert de boutons montagneux).
Le favus urcéolaire est une forme de début; les godets sont dis-
tincts, isolés. Dans le favus scutiforme, le développement est plus
rapide et plus exubérant; on voit des plaques jaunâtres, surtout
sur les bords, résultant de la confluence des godets. Dans le favus
squarreux, on voit des amas irréguliers, anfractueux, d'un jaune
gris blanchâtre, couleur de vieux plâtre, et pulvérulents à la surface.
Quant aux formes dues à des complications, nous les décrirons plus
loin.
Remarquons, enfin, que le favus respecte toujours une bande
de cheveux en bordure du cuir chevelu, sans jamais entamer
cette bordure; de plus, la cicatrice qu'il amène est définitive.
B. — LE FAVUS DE LA BARBE.
Là, le favus est beaucoup plus rare que sur le cuir chevelu : les
godets y sont à peine visibles. D'après Hallopeau, la végétation ne
se ferait là que dans le poil et pas en surface. Cependant, la con-
gestion péripilaire est intense, et Leloir et Vidal ont constaté à la
barbe la forme érythémato-pityriasique et la forme typique en
godet extrêmement petit. Besnier et Doyon ont signalé le sycosis
favique; pour eux, il faut avoir soin de ne pas confondre ce Favus,
d’un diagnostic souvent difficile, avec les autres affections de la
barbe ; ils ont remarqué aussi, dans la barbe, le favus avec éry-
thème et desquamation.
C. — LE FAVUS DE LA RÉGION PUBIENNE.
Là, le favus est encore plus rare qu'à la barbe. Leloir et Vidalen
ont observé un cas chez un homme de quarante ans atteint de
favus généralisé; chez l'enfant, alors que cette région est encore
glabre, le favus s'y observe parfois, mais ne présente rien de par-
ticulier.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN D 19
III. — Le favus typique des régions glabres.
A. — LE FAVUS DES RÉGIONS GLABRES EN GÉNÉRAL.
Là, les godetsapparaissent, le plus souvent, sur une nappe érythé-
mateuse : cependant, entre les cas où il n’y a que des godets ou que
de la rougeur, on trouve toutes les transitions.
Bazin, à la suite d’une inoculation de favus, faite à la jambe
d'unenfant, remarque une tache érythémateuse cerclée qui s’agran-
dit excentriquement; au centre de cette tache se développe le
godet; ces cercles rouges que l’on rencontre dans le favus, et sur-
tout dans le favus des régions glabres, ont une importance symp-
tomatologique assez grande, pour que nous devions consacrer à
leur étude notre prochain article.
Les follicules des poils follets sont très superficiels; aussi les
sodets de la peau glabre tombent, au bout de quelques mois ou, par-
fois même, au bout de quelques semaines.
Le favus des régions glabres peut être primitif ou bien il est
secondaire, c'est-à-dire consécutif à un favus du cuir chevelu, par
exemple, qui se généralise par inoculation en quelques mois ou
quelques années.
Le favus peut atteindre tous les points de la face; sur le tronc,
on trouve surtout le favus au niveau du dos, des épaules, des
fesses; sur les membres, le favus atteint particulièrement les
régions pileuses ou celles qui sont exposées au frottement.
Le développement du favus se fait beaucoup plus rapidement
sur les parties glabres que sur le cuir chevelu; c'est là surtout que
l’on trouve les énormes concrétions faviques.
Le godet des parties glabres se détache plus facilement que
celui du cuir chevelu ; mais, comme partout ailleurs, l’ablation du
godet n'est pas suffisante à guérir le favus et on voit, bientôt, un
nouveau godet remplacer l’ancien disparu.
Les lésions jeunes alternent avec les lésions vieilles au niveau des
concrétions faviques ; aussi, l'infection secondaire aidant, il en
résulte un aspect polymorphe.
Kaposi donne, comme caractères du favus aigu du corps, la
‘présence de godets multiples en tête d'épingle et l'intensité de la
dermite.
316 P. NÉE
Enfin, le favus du corps guéri, on peut voir des cicatrices dues à
la sclérose provoquée par la dermite : ces cicatrices sont lisses,
entourées d'une zone brune et il ne faut pas les confondre avec les
cicatrices de syphilis.
B. — LA QUESTION DU FAVUS HERPETICUS.
Dans le favus du cuir chevelu, du tronc ou des membres, on voit
pariois des cercles rouges, parfois vésiculeux ou squameux, analo-
gues à ceux de l’herpès tonsurant; aussi, Hebra identifiait le favus
et la trichophytie. Pour Kôbner, ces cercles constituent la période
herpétique prodromique du favus; mais cette façon d'envisager
l'éruption herpétique ne tarda pas à susciter de nombreuses re-
cherches et à être contestée.
Les manifestations herpétiques du début du favus, surtout du
favus des régions glabres, sont communes; Pick les observait sou-
vent; Sabrazès et Dubreuilh en ont vu quelques exemples. L'érup-
tion peut donner lieu à une erreur de diagnostic; on peut la con-
fondre avec une manifestation trichophytique; mais les placards
dans le ‘cas de favus, sans être diffus, n’ont pas un rebord aussi net
que dans la trichophytie: les cercles de favus ne présentent pas
de régression centrale et sont bien moins tenaces que les cercles
trichophytiques; au microscope, les différences sont encore plus
grandes : dans le cas de favus, les parasites sont plus nombreux et
plus faciles à trouver.
Besnier et Doyon reconnaissent que le favus des régions glabres
peut se manifester par des éruptions érythémateuses ou érythéma-
to-squameuses, analogues à celles de la trichophytie, mais de dimen-
sions plus petites et sans être aussi irritantes. Quand ceséruptions
précèdent la formation de godets, on a le favus herpétique qui
attira l'attention de Quincke. Mais, d'après Pick, 1891, le favus des
parties glabres ne débute pas toujours par une période herpétique;
car au lieu d'herpès on peut observer, comme l’a fait remarquer
Kaposi, des plaques rouge brun très squameuses.
Rossi, en 1891, à aussi remarqué, dans ur cas de favus de la face,
la présence de vésicules herpétiques.
Derville rapporte, en 1892, un cas de favus épidermique, favus
circiné qui serait forcément confondu avec la trichophytie, s'il
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 317
n'existait en même temps d’autres lésions faviques plus caracté-
ristiques.
Leloir et Vidal admettent également, au début de la forma-
tion des godets, l'existence de plaques érythémateuses se recouvrant
d'une légère desquamation pityriasique; ces cercles réguliers
rouges, de petit diamètre, s'étendent beaucoup plus lentement que
dans le cas de trichophytie; on peut, cependant, faire l'erreur de
les confondre avec la trichophytie circinée.
Folly observe, en 1893, au niveau d’une inoculation, faite deux à
trois semaines auparavant, un processus inflammatoire le plus
souvent intense, avec production herpétique suivie bientôt de la
formation de godets. :
Bukovsky, en 1901, considère la forme herpétique comme dis-
tincte des autres formes cliniques du favus; il la caractérise par
l'inflammation de l’épiderme qui, par son intensité, sa durée, mo-
difie le terrain, le rend impropre au développement de l’Achorion
et élimine ce Champignon comme corps étranger. L'auteur oppose
cette forme à la forme scutulaire, qui représente, au contraire de
la première, le terrain de choix pour l’Achorion. En outre, les lé-
sions cutanées qui dominent dans la forme herpétique, ne sont que
tout à fait insignifiantes dans le favus scutulaire et y semblent,
plutôt, résulter de l'action mécanique et chimique du godet. Ainsi,
€e que Kôübner appelle la période herpétique est une forme abor-
tive du favus due à l'intensité de l’inflammation, l’ennemie du
Champignon, qui empêche le godet de se former.
Pick, en 1891, a recherché si la période herpétique antérieure de
Kôübner est un caractère constant du favus des parties glabres et si
elle ne se rencontre jamais dans le favus des régions velues. Ob-
servant des récidives du favus du cuir chevelu, il remarque un
cercle herpétique précédant le développement du godet. De plus,
il ne reconnaît pas toujours la période herpétique, au début de la
formation des godets sur les parties glabres. Comme Kôbner, il
remarque que la méthode d’inoculation employéé a une certaine
influence sur l'apparition de la période herpétique antérieure:
ainsi cette période est plus nette, à la suite de l’inoculation épider-
mique, que sous-épidermique ou plutôt intra-épidermique. Or, au
cuir chevelu il est bien diflicile de ne faire qu’une inoculation épi-
dermique ; car les érosions par rasage de la région sont communes;
318 : P. NÉE
l'Achorion y pénètre, comme aussi dans les parois des follicules
pileux; d'où la formation de godets qui gènent le développement
du cercle herpétique. Ainsi, pour Pick, la période herpétique peut
exister au cuir chevelu, quoiqu'il y soit rare et difficilement
observable, même dans les meilleures conditions possibles d'ob-
servation.
IV. — Le favus des muqueuses.
Le favus du gland n’est pas rare; il a été observé en particulier
par Pick, Leloir et Vidal; mais Bazin l'avait déjà signalé. Ce favus
ne présente rien de particulier, sauf que les godets ne s'y trouvent
pas traversés par un poil.
Winfield, en janvier 1897, a signalé une éruption favoïde de la
muqueuse buccale, caractérisée par des plaques jaune soufre qui
devenaient, peu à peu, d'un brun grisätre; mais, comme les cultu-
res et le microscope ont montré qu'il s'agissait d’une lésion pro-
duite par l’Aspergillus nigrescens, nous ne nous y arrêterons pas
ici. En somme, l'on n’a jamais constaté de favus sur la muqueuse
des narines, ni sur celle de la cavité buccale, ni sur la limite
muqueuse du bord libre de la lèvre; il n'en est pas de même pour
la muqueuse digestive.
Kaposi, 1884, a observé un cas de favus de la muqueuse diges-
tive, survenu à la suite d'un favus généralisé : il s’agit d’un
homme qui a, d'abord, présenté de petits points jaunes, gros comme
une tête d'épingle; l’éruption favique se généralisa en quelques
semaines; puis, quelque temps après, sur divers endroits du corps
se déclara une dermite intense, amenant en ces points la desqua-
mation favique. Mais ce qui nous intéresse surtout ici, c'est la pré-
sence de vomissements et de diarrhée incoercibles, faisant soupçon-
ner la pullulation d'Achorion dans le tube intestinal. La mort sur-
vint par épuisement. L'autopsie révéla des foyers de favus sur la
muqueuse æœsophagienne et stomachale ; quant à la muqueuse intes-
tinale, elle fut trouvée avec de nombreux ulcères folliculaires, ainsi
que des cicatrices de nature inconnue, imputables très probable-
ment au favus. Ce cas de gastro-entérite faveuse fut présenté, par
Kaposi et Kundrat, à la Société de médecine de Vienne, en 1884;
mais la nature favique n’est appuyée ni par des cultures, ni par
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 319
des inoculations expérimentales. D'autre part, Sabrazès a produit
chez le Cobaye, en injectant dans le péritoine une culture sporulée
d'Achorion, une pseudo-tuberculose mycosique favique; cinq
semaines après l'injection de culture, il sacrifia l'animal, semblant
bien portant, et il trouva au microscope une sorte de mycélium
ramifié, entouré de leucocytes nombreux. C'est en cherchant à
reproduire le favus intestinal de Kaposi que Sabrazès a obtenu ce
résultat; les lésions de pseudo-tuberculose étaient localisées aux
poumons et au péritoine.
Sabrazès a répété ces expériences avec Dubreuilh; Dubreuilh et
Sabrazès ont également obtenu ces résultats par l’inoculation intra-
veineuse de spores de cultures. A ce sujet, Rénon fait remarquer
que les faits de tuberculose mycosique, signalés comme dus à
l’Achorion ou à l’Aspergillus suivant les cas, sont à rapprocher de
l’actinomycose et il voit là un exemple du pléomorphisme des
Champignons.
V. — Le favus généralisé.
Les expériences de Dubreuilh et Sabrazès nous amènent à par-
ler du favus généralisé; ces auteurs ont songé à la possibilité de
la généralisation du favus par la voie sanguine, les lésions favi-
ques atteignant, en effet, le voisinage de la région papillaire ; cepen-
dant, il n’est pas prouvé que les cas de généralisation rapide obser-
vés soient dus à ce mode de généralisation. Noblobserve, en 1895,
chez un garcon de quatorze ans, un favus remarquable par
l'étendue et le développement des lésions; dans les déjections
diarrhéiques il y avait du mycélium paraissant favique. Les obser-
vations de favus du cuir chevelu étendu à la majeure partie du
corps sont communes.
VI. — Favus atypiques.
Les favus atypiques se rencontrent environ dans la proportion
de 8 à 10 contre 100 cas de Favus typique; ils ont été étudiés sur-
tout par Dubreuilh, puis par Alardo.
Ces auteurs, ainsi que Bodin, admettent trois favus atypiques du
cuir chevelu : la forme alopécique, impétigineuse et pityriasique,
320 P. NÉE
Forme alopécique. — On voit des plaques lisses, glabres, sans go-
dets, parce que dans ce Favus la réaction folliculaire est exagérée;
la folliculite est profonde et intense, alors que les lésions superfi-
cielles y sont réduites à leur minimum (Dubreuilh). La présence
de quelques cheveux est beaucoup plus rare sur ces plaques que
sur celles d'alopécie favique typique; même l'altération de cou-
leur des cheveux manque souvent. D'après Alardo, on trouve sur le
bord de ces plaques, à contours irréguliers, de petits points rouges
légèrement papuleux et correspondant à l'orifice des follicules
pileux.
Cette forme de favus est la plus difficile à reconnaître, malgré la
décomposition de la lésion en partie centrale et périphérique. Un
peut la confondre avec les folliculites décalvantes, surtout avec
celle de Quinquaud et Brocq qui ne se distingue du favus que par
l'examen microscopique ; toutefois, l'examen microscopique des
cheveux qui bordent la plaque alopécique favique, ne donne pas
toujours un résultat positif (Dubreuilh).
Forme impétigineuse. — Dans cette forme, au contraire de la pré-
cédente, l'alopécie n’est pas appréciable; la réaction superficielle
de la peau, due à la suppuration, domine ici les symptômes du
favus. On y voit des croûtes jaunâtres, molles, étendues, comme
dans l’impétigo dont cette forme de favus ne se distingue guère
que par sa durée beaucoup plus longue. Les cheveux sont agglu-
tinés et leur aspect extérieur n'est pas toujours caractéristique du
favus. On trouve même de petites cicatrices de 5 à 10 millimètres
_de diamètre que l’on pourrait confondre avec celle de l'impétigo
pédiculaire. Pour établir le diagnostic, il faut se baser non seule-
ment sur la ténacité et la fixité des phénomènes observés, mais
encore sur l'examen microscopique des cheveux.
Forme pityriasique. — Ce favus présente des squames blanches,
sèches ; on trouve au-dessous d'elles de petits godets. Les cheveux
de la région malade présentent l'aspect favique, maïs assez tard;
car l’alopécie, de même que dans la forme précédente, est très
lente à se produire (Dubreuilh). Les poils sont secs et ternes; les
plaques pityriasiformes ont un contour assez net. L'eczéma sec, le
psoriasis n'offrent pas la même fixité de lésions; d’ailleurs, l’exa-
men microscopique tranche au besoin la question.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 321
Alardo considère cette forme comme dés plus contagieuses;
d’ailleurs, il y a lieu de faire remarquer que son évolution est plus
rapide que celle des autres favus atypiques.
Pathogénie des formes atypiques. — On n’explique ces formes aty-
piques que par des hypothèses. Les uns veulent y voir l'effet d’une
infection secondaire; mais cette solution du problème ne peut
être admise pour la forme alopécique; d’autres y voient une réac-
tion spéciale du sujet, ce que l’on pourrait admettre pour la forme
pityriasique et, surtout, la forme alopécique. Quant à l'opinion
émise par Alardo, en 1896, expliquant ces différentes formes par
des différences dans l'aspect microscopique du parasite trouvé
dans ces lésions, par la pluralité favique, en somme, Bodin ne l’ad-
met pas en 1900, comme d’ailleurs, aujourd'hui, la majorité des
mycologues.
VII. — Les Champignons faviques dans la vie parasitaire.
A. — TECHNIQUE D ÉTUDE.
Il faut dégraisser le cheveu et le décolorer, afin de le rendre
transparent. On peut se servir du procédé suivant dont Balzer
faisait usage : on dégraisse le cheveu par l’éther ; on fait agir une
solution à 40 °/, de soude ou mieux de potasse caustique pour le
décolorer, en ayantsoin de ne pas en pousser l’action jusqu'à dété-
riorer les éléments; puis, on achève cet éclaircissement par l'am-
moniaque et, pour rendre la préparation durable, on examine dans
la glycérine. L'action de la potasse peut se faire à froid; elle est
ainsi plus régulière qu’à chaud; mais, si le cheveu est épais ou très
foncé, pour éviter un trop long séjour dans ceite solution insuffi-
sante, on a recours à la solution concentrée ou tiède.
Cette méthode peut également servir pour l'examen des squames ;
mais la squame est plus difficile à éclaircir que le cheveu et on
reconnaît qu'elle est bien transparente, quand les cellules montrent
nettement leur contour, comme si elles étaient vides.
Un autre procédé que Berdal recommande, pour les poils et les
squames, donne encore un meilleur résultat : on fait agir, pendant
une ou deux minutes, l'acide formique pur marquant 16° Baumé :
322 P. NÉE
on remplace ensuite l'acide formique pur par une goutte de glycé-
rine additionnée de 1/100 d'acide formique, pour rendre la prépa-
ration durable.
Sabrazès faisait macérer dans la potasse à 40 °/, les squames, les
cheveux et les ongles destinés à l'examen. Pour ce qui concerne le
sodet, Sabrazès le dissociait dans l’eau, pour voir le mycélium et
les spores ; cela était suffisant, ou bien encore il se servait de la
potasse, comme pour les cheveux. Leloir et Vidal délayaient, dans
une solution de potasse caustique ou d’ammoniaque, une parcelle
de godet jeune dont le revêtement épidermique n'était pas encore
rompu; la parcelle désagrégée, ils enlevaient la matière grasse
par l’éther.
Pour examiner les ongles, on peut se servir de la méthode de
Tenneson et Berdal indiquée en 1892 : on place les ongles dans un
verre de montre contenant la potasse concentrée; on chaufle un
peu sur la flamme de la lampe à alcool.
Coloration du parasite. — On a essayé tous les colorants connus
en histologie : Malcolm Morris propose d’abord, comme Unna, de
colorer par le Gram un peu modifié. La teinture d’iode réussit
bien; mais l'excellent résultat est d'une trop courte durée. Balzer
préfère se servir de l'éosine et du violet de méthylaniline, l’éosine
pour les spores dans les cheveux et le violet pour les éléments du
godet. Leloir colorait les éléments du godet avec une goutte de
glycérine éosinée ou une goutte de solution iodo-iodurée. Sabrazès
modifiait pour son usage la méthode de Weigert; il se servait de
la solution de violet de gentiane aniline très concentrée, qu'il
laissait agir plus d'une demi-heure, et il décolorait lentement par
l'huile d'aniline, etc... Berlese emploie l'acide acétique glacial pour
bien voir les conidies. Bodin n'utilise le même procédé que pour la
névroglie : coloration par le bleu Victoria et solution de Gram ;
décoloration par le xylol et l'huile d’aniline. Enfin, on peut fixer le
Champignon par l'acide acétique.
Choix du microscope. — Il suffit d’un objectif à sec donnant un
grossissement de 300 à 500 diamètres; on donne peu de lumière en
se servant de petits diaphragmes.
ETAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 923
VIII. — Anatomie pathologique du favus.
A. — L'ÉVOLUTION FAVIQUE EN GÉNÉRAL.
Pour Unna, en 1880, la prolifération de l’Achorion a lieu, d'abord
et surtout, entre la couche cornée superficielle etla couche cornée
basale; aussi la dépression qui contient le godet est lisse, brillante,
parce que l'épiderme qui la forme est kératinisée en partie. La
couche malpighienne s’aplatit et, enfin, l’Achorion passe dans le
derme et envahit le follicule, sans envahir le bulbe pileux.
Pour Balzer, 1881, l'Achorion végète d'abord dans l’épiderme,
forme un godet dans l'infundibulum pilaire, enfin envahit le poil
secondairement; dans une deuxième phase l’Achorion pénètre dans
le derme, atteint le bulbe au contraire d'Unna, cela après avoir
franchi la gaine interne et la gaine externe du cheveu ; le Champi-
gnon en ulcérant les papilles fait tomber les poils; cette deuxième
phase d'évolution terminée, il s'ensuit une alopécie cicatricielle
définitive sans papilles, ni poils, ni parasites. ;
Pour Tenneson, 1893, le développement de l’Achorion débute
dans l’infundibulum pilaire et se continue, ensuite, dans trois di-
rections ; vers l'extérieur, vers le follicule et le cheveu. et vers le
derme.
Remarquons que tous les auteurs sont d'accord à considérer la
végétation comme intra-épidermique au début, d'où la formation
du godet, et à reconnaître que, dans l'étude du favus adulte, on
trouve des lésions dermiques et pilaires coexistant à tous leurs
stades.
B. — RAPPORTS DE L'Achorion Schôonleini AVEC L'ÉPIDERME.
D'après Unna (1880), la couche granuleuse disparaît plus ou
moins et la couche cornée basale est œdémateuse ; Bodin remarque
ce fait et, de même que Leloir, il trouve de nombreuses cellules
embryonnaires dans le corps muqueux; d’après Leloir, au début,
les cellules du stratum lucidum etles cellules malpighiennes super-
ficielles ont même de la tendanee à la vésico-pustulation. Le my-
célium ne pénètre guère dans l’'épiderme au début; ce sont, surtout,
des spores qu'on y trouve.
324 P. NÉE
C. — LA FORMATION DU GODET ET SA DESCRIPTION MICROSCOPIQUE.
En examinant un favus récidivant, on voit, à travers la pellicule
épidermique qui est mince jusqu'à la transparence, un très petit
disque jaune qui atteint la dimension d'une lentille en quelques
semaines; sa surface inférieure est hémisphérique, unie, humide
et dépourvue d'épiderme. Quant au lieu de formation du godet,
d'après Kaposi, comme les couches épidermiques supérieures
adhèrent horizontalement au poil, alors que les couches inférieures
s'inclinent vers la profondeur du follicule, il en résulte un espace
infundibuliforme préformé où les Champignons se réunissent pour
former un corps compact. Ainsi, la formation du godetcommence
entre la couche cornée de l’épiderme et le corps muqueux; puis,
la lésion s'étendant, la couche cornée adhérente au poil se trouve
soulevée à sa partie périphérique, d'après Kaposi, et alors l'infun-
dibulum pilaire, qui contient le godet, prend une forme conique.
D'après Besnier et Doyon, le produit de grattage de la surface pro-
fonde du godet renferme toujours des leucocytes.
Barthélémy a fait remarquer que l’Achorion peut germer, pour
former le godet, par bourgeonnement ou segmentation de la spore:;
ou encore, la spore donne naissance à des filaments qui deviennent
les tubes de mycélium, puis les tubes sporifères et, enfin, les
chaînes de spores terminales.
Balzer a bien dit que l'évolution de l’Achorion commenceet finit
par la spore : de la spore naît le filament de mycélium; dans ce
filament, le noyau bourgeonnant forme le tube sporifère. et; quand
cette gaine se segmente, se transforme en chaînes de spores, de
nouvelles spores évoluent à leur tour; mais il peut arriver que la
transformation n'ait lieu qu'à l'extrémité des tubes; alors le reste
de la plante se flétrit.
A l'examen du godet, on trouve, sous la pellicule épidermique
cornée de revêtement, une zone visqueuse avec de fines granu-
lations et, comme on retrouve des prolongements de cet élément
visqueux entre les filaments de mycélium, il s'agit probablement
d'un assemblage de débris de cellules épidermiques (Kaposi).
D'après Balzer, Gaucher et autres, cette gangue amorphe,visqueuse,
qui réunit les éléments d'Achorion, ne se trouve que dans le godet,
non dans le poil.
ETAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 325
Unna, Frank, Mibelli, Sabrazès ont prouvé que le godet n'est
qu'une culture de Champignon, en faisant des ensemencements;
cependant, on y remarque quelques produits de désintégration
cellulaire représentés par des granulations, entre les filaments my-
céliens de la périphérie et les conidies du centre. Pour Sabouraud,
chaque filament mycélien a une enveloppe invisible et, entre deux
filaments, il n'y a que cet espace clair.
D'après Leloir, l'examen d’une coupe de godet dure montre des
tubes sporifères et des spores, au centre et à la partie superficielle
du godet, tandis que, latéralement, on trouve des tubes de mycé-
lium plus ou moins riches en spores et quelquesspores seulement,
indice de la marche envahissante du Champignon. Pour Kaposi,
le centre du godet est occupé par les conidies et les granulations;
près de là, sont les filaments de mycélium disposés en couches pa-
rallèles. Mibelli, 1892, annonçait que la partie supérieure du go-
det est celle qui contient le moins de suecs nutritifs; là, le développe-
ment est lent et la segmentation se fait en conidies.
Sabouraud recommande d'étudier le godet par la microtomie et
Bodin fait remarquer que le godet, se développantde la surface vers
la profondeur, a vaguement la forme d'un tronc de cône dont la
base est la partie la plus profonde et non la partie superficielle.
Pour Leloir et Vidal, le mycélium est très abondant, de forme
très irrégulière; on voit des filaments brisés, ramifiés dichotomi-
quement; mais la direction de ces rameaux est irrégulière. Balzer,
en 1881, reconnaissait des filaments clairs, dits tubes à nutrition,
et d’autres plus larges, dits tubes sporifères et contenant des spores
tassées, cubiques, sans gaine amorphe; car la paroi tubulaire en
tient lieu. La paroi des tubes de mycélium est homogène, d'après
Leloir.
Le mycélium, d'après Bodin, est disposé dans le godet comme
les brindilles d’un bouquet; au centre et à la surface du godet, on
ne trouve que de courts segments mycéliens, tandis qu'ailleurs les
segments sont plus longs.
Les spores du godet ont une forme le plus souvent ovoïde, mais
pouvant êtretriangulaire ou quadrilatère ; leur volume est supérieur
à 3 - et peut atteindre, d'après Charles Robin, jusqu'à 10 y. Ces
spores peuvent se trouver à la portion terminale des filaments;
elles peuvent être en chaîne; elles sont facilement caduques et,
326 P. NÉE
en tout cas, facilement isolables; elles ont un noyau central gra-
nuleux, une membrane d’'enveloppe homogène, hyaline, inco-
lorable et très résistante. Si le noyau est en voie de segmentation,
la spore apparaît étranglée.
D. — MARCHE DU FAVUS DANS L'APPAREIC PILAIRE
ET DESCRIPTION DU CHEVEU FAVIQUE.
L'Achorion envahit le poil. en même temps qu'il végète, au
centre du godet, et dépasse l’épiderme. Pour Kaposi, qui s’est
occupé spécialement de cette question, l’'Achorion prolifère entre
les cellules de la gaine de la racine du poil jusqu’à la base du fol-
licule; ensuite il va dans le bulbe pileux et remonte, de bas en
haut, dans le poil lui-même. Cette théorie est appelée théorie du
détour; cependant, Kaposi admet aussi la possibilité de l’envahis-
sement du cheveu par la voie latérale, par les gaines de la racine.
Pour Unna (1880) le bulbe n'est jamais envahi; l’Achorion, pour
lui, préfère les cellules kératinisées aux cellules molles; il va de
l’'épiderme corné de l'infundibulum pilaire à la gaine interne
kératinisée, de là à la cuticule et à la tige; il s'arrête devant la
couche de Malpighi, la gaine externe de la racine et le bulbe.
Avant l'apparition du godet, on voit des spores s’accumuler
autour du poil, puis pénétrer entre les cellules de la gaine; alors
les cellules du corps muqueux de la gaine se gonflent et, si on
arrache le poil, on voit l'aspect transparent et œdémateux du fol-
licule. D'après Besnier et Doyon, on trouve parfois des leucocytes
dans la gaine du poil.
Bien que toutes les parties du cheveu peuvent recéler des para-
sites, c'est surtout l'écorce qui est envahie; le parasite prolifère
en longueur. D'après Bodin, le mycélium peut pénétrer en haut,
du côté de l'extrémité pilaire, sur une étendue de un à deux
centimètres; il n’est pas rare même de voir des cheveux, de
plusieurs centimètres de longueur, envahis jusqu'à leur extrémité
terminale. Quant à la racine du poil, le Champignonnetarde pas à
l’envahir, d'après Bedin. Lailler enseignait que lefavus se dévelop-
pe, surtout, aux dépens des follicules pileux et des poils; on cons-
tate, d’ailleurs, aujourd'hui que le Champignon est plus abondant
et plus constant dans la racine du poil que dans sa portion libre.
Enfin, remarquons que les Champignons, proliférant dans l'ap-
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 327
pareil pilaire, occasionnent au début le relâchement des cheveux,
puis déterminent la chute et, enfin, l'atrophie des papilles pilifères ;
l'atrophie des papilles peut, également, être consécutive à la com-
pression par les godets.
Dans le cheveu on voit de nombreux filaments mycéliens spo-
rulés ou non, placés suivant l'axe du cheveu, ténus, flexueux,
noueux, simples ou pourvus de deux à quatre ramifications. Le
poil n’est pas bourré comme dans les autres teignes. Les filaments
sont parallèles dans leur ensemble seulement; leur largeur est de
2 à 4 4; ils présentent des cloisons transversales et, s'ils sont spo-
rulés, ils se divisent par tri ou tétratomie, ce qui, d’après Bodin,
est une caractéristique du Favus. D'une agglomération de spores,
-on voit souvent partir trois ou quatre filaments, dont la disposition
rappelle un tarse. Dans les parties les plus éloignées de la peau,
sous l'écorce du poil, on voit des boyaux deshabités, remplis
d'air. Voilà la forme classique du parasite dans le poil, celle que
Sabouraud appelle la forme sporulée. Rappelons que l’Achorion
est essentiellement polymorphe dans le poil.
Sabouraud décrit une autre forme d'Achorion dans le poil; c'est
la forme mycélienne, caractérisée par l'absence de spores; le poil
contient seulement des filaments plus nombreux et plus réguliers
que dans le type précédent; la ramification a lieu ici par dicho-
tomie; chaque article a une longueur notable, de 15 à 20 ». Cette
forme n'est qu'une modification dans le mode végétatif du Cham-
pignon et Sabouraud compare, à ce point de vue, l’Achorion au
Trichophyton qui, lui aussi, présente une forme sporulée et une
forme mycélienne.
C'est Bazin quia reconnu, le premier, les spores faviques, princi-
palement sur les bords des cheveux. Les spores ont 3 à 7 4 de
diamètre; elles sont arrondies ou légèrement aplaties, n'infiltrent
pas tout le poil, mais y forment des chaînettes rectangulaires ou
des amas rectangulaires ou polyédriques; elles peuvent résulter
d'un simple cloisonnement du mycélium; elles sont moins abon-
dantes que chez le Trichophyton.
E. — DERME ET FAVUS.
Gruby avait déjà soupçonné l'existence de l'Achorion dans
l'épaisseur du derme. Pour Unna et pour Besnier et Doyon, le favus
328 P. NÉE
ne va pas dans le derme. D'après Tenneson, l’Achorion n'envahit
pas toujours le derme, mais l’envahit sûrement pariois. Le derme
réagit peu; sa réaction est caractérisée par du suintement au
niveau des godets.
Pour Dubreuilh et Sabrazès, le Champignon, partant du godet,
irradie son mycélium vers la couche malpighienne, la dépasse
même en allant jusqu'aux vaisseaux capillaires.
Pour Cornil et Ranvier, le mycélium ne refoule pas seulement
le derme, mais l’envahit; il envoie ses prolongements perpendi-
culairement dans le derme.
Pour Leloir et Vidal, l'envahissement du derme, occasionnant
de la dermite, explique l’aréole inflammatoire rouge qui entoure
le godet lequel, d'ailleurs, peut être entouré d'un cercle de suppu-
ration remarqué aussi par Besnier. D'après Sabrazès, les glandes
sébacées s’atrophient et disparaissent.
Sur les coupes, on voit le mycélium aller directement du godet
au tissu conjonctif du derme; ce tissu conjonctif se résorbe et on
peut ainsi expliquer les cicatrices parfois profondes qui appa-
raissent sous l'emplacement des godets après leur guérison:
d'autre part, le derme étant envahi, il survient nécessairement de
la sclérose.
IX. — Le favus des ongles.
Alibert avait remarqué le favus des ongles; l’un des frères Mahon
avait contracté cette affection en épilant les faviques. Puis ce Favus
a été étudié par Bazin, Laïller et, depuis, par de nombreux auteurs
parmi lesquels Fournier et Fabry.
Le favus des ongles est relativement rare; cependant, d’après
Besnier et Doyon, les cas d'onychomycose favique ne sont pas tou-
jours reconnus par les médecins, bien que la connaissance de cette
affection soit d'une grande utilité pratique.
Le favus des ongles est primitif ou secondaire; Vidal et Brocq
en ont observé un cas primitif limité à l’'ongle d'un des gros orteils ;
outre cette observation, il en existe une autre, due à Fabry, relatant
un deuxième cas de favus des orteils, mais accompagné d'un
favus des ongles de la main. Si l’on ne connaît que deux cas de
favus des orteils, les cas de favus des ongles des doigts sont in-
ETAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 329
innombrables et le favus secondaire y est plus souvent observé que
le favus primitif, par exemple à la suite de favus généralisé,
comme dans l'observation de Malcolm Morris de 1891.
Le favus débute entre la couche cornée et le derme sous-un-
guéal; il ne s'accompagne pas de douleur spontanée et, d'après
Fabry, la pression manuelle des ongles ne provoque même pas de
douleur.
Kaposi a décrit deux formes du favus unguéal : une forme cir-
conscrite, caractérisée par des opacités rappelant vaguement les
godets faviques et une forme diffuse, présentant une opacité totale.
Symptômes. — L'ongle malade devient gris, puis jaune; il s’é-
paissit; il devient friable; divers auteurs, entre autres Bodin,
Danlos, comparent son aspect à la moelle de jonc, sans pour cela
vouloir différencier le favus d'avec les autres affections teigneuses.
Bientôt l’ongle malade présente des stries longitudinales, des ru-
gosités, des soufflures; il paraît rongé dans son épaisseur. Danlos,
en 1900, observe la destruction de la lame cornée de l’ongle dans
son tiers inférieur; en mettant à nu le lit de l’ongle, il le trouve
tuméfié. Fabry fait remarquer que les lames unguéales sont un
peu soulevées et écartées du lit de l’ongle par la masse parasitaire.
Mais l'ongle ne tombe pas, à moins que toutefois la présence excep-
tionnelle d’un panaris n’en détermine la chute; dans ce cas, l’ongle
repousse ensuite. D'après Besnier et Doyon, il est tout à fait excep-
tionnel de voir des lésions trophiques proprement dites, des extré-
mités unguéales, consécutives au favus.
Durée. — Le plus souvent la lésion, une fois constituée, évolue
très lentement, dure des années. D’après Henri Fournier, le favus
des ongles est particulièrement tenace; il survit de longues années
après que le favus du cuir chevelu est éteint.
Anatomie pathologique. — Fabry a fait l'étude histologique et
phytologique de l'ongle favique : au microscope, il trouve un
mycélium et des spores; cependant, les spores ne se rencontrent
pas en amas au niveau de l’ongle. A un faible grossissement, on
voit, d'après cet auteur, les réseaux compacts de Champignon
parmi les papilles de l’Achorion et les filaments se ramifier jus-
que dans la couche de Malpighi, A un grossissement plus fort, on
voit, de plus, qu'il n'y a pas de filaments dans les lamelles cor-
nées de l'ongle, à cause probablement de la résistance de ce tissu :
Archives de Parasitologie, XI, n° 2, 1907. 22
390 P. NÉE
les filaments ont souvent leurs extrémités en massue et détachent
çà et là, des spores. Le microscope semble prouver que l’Achorion
s’avance, spontanément, dans le tissu de l’ongle et n'y est pas seu-
lement transporté d'une manière mécanique. La modification de
l’'ongle est due à ce que le parasite sépare les couches épithéliales
des vaisseaux qui nourrissent les papilles du derme. Pour Fabry,
le Champignon ne pénètre ni dans les papilles ni dans le derme:; il
végète, surtout, entre les papilles et les prolongements interpapil-
laires du corps de Malpighi.
Lailler a vu les filaments de mycélium dans la substance un-
guéale dissocier les cellules de l’ongle. Besnier et Doyon pensent,
comme Fabry, que sur l’ongle le Favus se développe dans la cou-
che épithéliale sans la dépasser.
Bodin remarque, comme Fabry, queles filaments mycéliens sont
altérés dans l’ongle et que les spores sont plus nombreuses.
Diagnostic. — Lindstrem fait remarquer que l’on ne peuttoujours
établir le diagnostic de l’onychomycose favique, d'après la couleur
jaune du dépôt sous-unguéal et des taches sous la lamelle. On a
souvent besoin de recourir au microscope qui montre le mycélium
favique, ou bien aux cullures.
L'aspect de moelle de jonc se retrouve dans le psoriasis et les
autres onychomycoses. Ancel croit, cependant, pouvoir baser le
diagnostic sur la coloration gris brunâtre, puis jaunâtre de l’ongle,
con épaisseur, ses stries longitudinales, ses soufflures.
X. — Pronostic du favus.
Le favus n'altère pas la santé générale; mais il reste cependant
une affection grave à cause de la contagion, de la récidive et, sur-
tout, à cause de l’alopécie irrémédiable qu'il entraîne. Sa guérison
spontanée est rare.
Au contraire des autres teignes tondantes, le favus n'est pas
toujours arrêté par la puberté; sa durée est très variable, suivant
les individus; le lymphatisme et la tuberculose favorisent le déve-
loppement du favus; on a vu des poussées de favus accompagner
des poussées de tuberculose. D'autre part, on admet que, si le
développement du favus est favorisé par un mauvais état général,
il amène à son tour, quand il persiste très longtemps sur une
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 991
grande étendue, une débilité de l'organisme évidente et très im-
portante, un étiolement remarqué surtout par Hardy.
Le favus peut durer vingt, trente ans et même davantage; car
il peut s'observer dans la première enfance et se prolonger dans
l’âge le plus avancé. Michel fait exception pour le favus du tronc
et des membres qu'il ne voit persister au-delà d’une vingtaine
d'années que tout à fait rarement. On peut voir aussi des interrup-
tions dans le développement du favus. Pour toutes les raisons
énoncées le favus est la plus grave de toutes les teignes, si elle
n’est pas traitée; mais le traitement lui ôte toute gravité.
XI. — Diagnostic.
Unna veut appuyer le diagnostic du favus sur la présence de
véritables godets et sur le caractère sous-cutané et chronique de la
maladie provoquée par l'Achorion.
Neisser, en 1890, recommande d'humecter les croûtes avec
l'alcool et, dans le cas seul de favus, on obtient la couleur jaune
foncé très intense.
Mais le diagnostic ne présente de réelles difficultés que dans le
cas de favus atypique. Besnier et Doyon recommandent alors,
quand cela est possible, d'examiner les cheveux; nous en avons
indiqué les moyens et les résultats. Il faut éviter de confondre
l’'Achorion avec le Trichophyton endothrix qui, comme lui, se
développe dans le poil lui-même; l'Achorion cependant présente,
seul, des spores suivant la direction du cheveu.
A la lumière oblique, on distingue, à la couleur et à l'apparence
des cheveux, les parties du cuir chevelu malades. La gaine épi-
dermique est vitreuse et plus grosse que celle d'un cheveu sain;
la racine paraît enveloppée d’un manchon -blanc, comparé à de
l’amidon cuit et dû au gonflement des gaines du poil; mais ce
gonflement existe aussi dans l’eczéma, la pseudo-pelade de Brocq.
Bazin à remarqué que les cheveux s’éclaircissent en clairière et
tombent inégalement et non sous forme de tonsure, comme dans
la trichophytie et la pelade.
Au contraire de la tondante rebelle et de la trichophytie, dans
le favus les éléments du cuir chevelu sont détruits et la cicatrice
est définitive.
392 P. NÉE
L'odeur du favus est caractéristique; elle peut servir à diffé-
rencier les croûtes faviques des croûtes d'autre origine. Le favus,
surtout le favus étendu, a l'odeur de Souris qui se distingue net-
tement de l'odeur fade et fétide du pus. Si le favus est ancien, on
peut avoir une odeur de Moisissure, d'après Kaposi. Nous rappel-
lerons que l'odeur de Souris est tellement caractéristique du favus
que Verujski la trouvait, également, dans les cultures pures et
non pas dans les cultures trichophytiques; cette odeur était, sur-
tout, évidente après la filtration ou après un léger degré de dessè-
chement de la culture; il la considérait comme due à la consom-
mation de matière albuminoïde.
La forme pityriasique du favus peut être confondue avec le
psoriasis, le pityriasis capitis intense, la teigne amiantacée de
Devergie, qui est une séborrhée.
Nous avons parlé de la différenciation du favus herpeticus d'avec
les trichophyties circinées.
La forme de favus la plus dificile à reconnaître est la forme alo-
pécique que l’on pourrait confondre avec le lupus erythémateux
et certaines folliculites décalvantes.
Les affections suivantes se distinguent ainsi du favus, d'après
Besnier et Doyon:
L'eczéma avec ses croûtes sans odeur favique et ses lésions
périauriculaires,;
L'impétigo avec ses concrétions melliformes;
La phtiriase avec ses lésions polymorphes et ses lentes attachées
aux cheveux elc... D'ailleurs, ces affections peuvent coexister; dans
des cas très rares, on trouve favus et trichophytie chez un même
enfant à l'hôpital.
XII. — Complications du favus.
D'après Gaucher, on peut observer des pustules circumpilaires,
dues à l’inflammation des follicules par le parasite, d'où la forma-
lion de croûtes ne donnant pas de cicatrices.
On peut voir de l'impétigo surajouté au favus, de l’eczéma, de
la phtiriase et autres affections.
Le favus du cuir chevelu est surtout exposé aux complications
et cela d'autant mieux que les sujets sont plus lymphatiques.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN D 9
Charpy signale, sous le nom de favus miliaire, un favus appauvri
par les complications.
TRAITEMENT DU FAVUS
Longtemps on s’est obstiné à vouloir guérir le favus par les
parasiticides; or, bien que l’Achorion à nu ne puisse guère résister
aux antiseptiques énergiques que l’on applique sur la peau, il ne
faut pas oublier qu'il habite aussi des retraites profondes, les raci-
nes des cheveux, où il se développe à l'aise sans craindre les anti-
septiques qui ne peuvent atteindre jusqu'à lui; c'est pourquoi
Bodin ne reconnaît aux antiseptiques dans le traitement du favus
qu'une valeur accessoire de dernier ordre. En effet, d'après les
conditions de vie de l’Achorion, il faut, pour le détruire complète-
tement, non seulement désinfecter la peau, mais aussi et surtout
les follicules pileux ; il faut épiler.
Le traitement du favus pour Bodin, traitement radical, comprend
deux phases principales : on commence par nettoyer et aseptiser
la peau, autant que possible; puis on extirpe le poil.
Stérilisation de la peau. — Bodin conseille de couper ras les che-
veux; puis d'appliquer partie égale d'axonge fraiche et savon noir
qu'on laisse pendant deux à trois heures; ensuite on savonne; on
laisse un cataplasme d'amidon cuit sur les lésions, pendant une
nuit; on enlève alors facilement les godets.
Pour calmer et cicatriser la région malade, on la recouvre d'un
pansement humide qu'on laisse deux jours. C'est alors que Bodin
pratique l'épilation nécessaire.
Malgré le grand succès qu'a toujours eu l'épilation, dans le
traitement du favus, depuis les frères Mahon, un très grand nom-
bre d'auteurs ont voulu néanmoins, jusqu'à ces derniers temps
même, s'obstiner à chercher l'antiseptique guérisseur. Ces recher-
ches offrent cependant quelque intérêt; car elles ont conduit à
faire un meilleur choix de l’antiseptique adjuvant du traitement.
Schuster, en 1890, recommande l'emploi des vapeurs d'acide sul-
fureux ; les séances ont lieu chaque jour et il a vu, au bout de six
à huit semaines de ce traitement, un semblant de guérison.
Peroni, 1891, recommande les pulvérisations d'acide acétique ;
il se produit d'abord une anémie, puis une congestion du cuir
3934 P. NÉE
chevelu qui dure quarante-huit heures environ et amène de la
desquamation; puis, il emploie l’onguent de Hébra, l’eau chaude
et le savon au sublimé. Il n'a pu suivre ses cas de guérison que
trois mois. Reale (1853) conteste l'efficacité de ce traitement.
Estèves (1891) guérit le favus en un mois par des antiseptiques
divers, mais auxquels il joint l'épilation; de même Viñeta Bella-
sera (1892).
Gouladzé (1894) guérit le favus par des antiseptiques et l’épila-
tion.
Tsitrine (1894) prétend rendre l'épilation inutile par l'emploi de
la pommade de Pirogov, qui contient surtout de la teinture d'iode
et du goudron; la guérison s'obtiendrait en trois semaines.
L'eau chaude et les frictions à l’onguent gris ont donné quelque
résultat à Zinsser, 1895.
Ciarrocchi admet la nécessité de l'épilation, en 1897.
Petersen préfère les antiseptiques à l'épilation, en 1898, au con-
traire de Jakimovitch et Polotebnov.
Il nous suffira d'indiquer, à ce sujet, les parasiticides reconnus
les plus énergiques contre le favus : la solution de sublimé au 1/500,
la pommade au turbith minéral, la pommade soufrée, la pommade
à l'acide salicylique ou à la résorcine, au naphtol, à l'acide chryso-
phanique et surtout la teinture d'iode.
Comme autre traitement adjuvant on peut prescrire, pourrelever
l’état général, une médication interne tonique à base de fer ou de
l’iodure de fer, du sirop iodo-tannique, de l'huile de foie de morue
en émulsion ou non, enfin des bains sulfureux qui stimulent la
nutrition (Gaucher).
Épilation. — Les frères Mahon la faisaient avec les doigts et l'un
d'eux à gagné ainsi le favus unguéal. On peut épiler à la pince,
dans le sens de l'implantation des cheveux, progressivement pour
ne pas les casser autant que possible et un à un. On crée une zone
de protection en épilant les cheveux sains sur une bordure de un
centimètre environ. Chaque séance est d'au plus deux heures. On
recommence l'épilation huit jours après, c'est-à-dire au moment où
les poils cassés, çà et là, ont assez poussé pour être pincés. L'épi-
lation est ainsi recommencée, chaque semaine, pendant trois mois.
Pour faciliter la première épilation, on peut ne pas couper les
cheveux complètement ras.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN 990:
La première épilation détermine habituellement une réaction
inflammatoire assez vive du cuir chevelu, caractérisée par de la
rougeur et de la douleur; la réaction qui suit les épilations sui-
vantes est moins marquée.
Nous n'insisterons pas sur l’ancien procédé d'épilation par la
calotte ou les emplâtres épilatoires quelconques qui, adhérant
fortement aux cheveux, les entrainent, si on les retire avec bru-
talité.
Mais l'épilation à la main est longue, nécessite un très grand
soin et elle est remplacée avantageusement par l'épilation par
radiothérapie. Brocq, dans son traité des maladies de la peau, de
1906, adopte cette méthode.
A propos du traitement du favus par la radiothérapie, Freund
fait remarquer à la Société de Dermatologie de Vienne, le 10 mai 1899,
la grande importance des ondes électriques en médecine et il com-
pare l'action électrique dans là radiothérapie et les courants de
haute fréquence.
L'emploi des rayons X, comme méthode d'épilation, a l'avantage
de n’exiger qu'un temps relativement court, sans déterminer de
douleur. En un mois, l'enfant n’est plus considéré comme favique ;
en trois mois, il est déclaré guéri. Quelques jours après la séance,
la peau devient érythémateuse; les cheveux de la région traitée
tombent spontanément, au bout de quinze jours environ, et on
peut exciter cette dépilation par des frictions du cuir chevelu. La
papille se trouve comme sidérée par les rayons X; le follicule ex-
pulse le cheveu comme un corps étranger. La région devenue
glabre, l'enfant est considéré comme guéri. La papille secrète un
nouveau poil, environ 3 mois après le traitement.
Il faut que la dose de rayons X soit suffisante, afin de n'être pas
obligé d'attendre plusieurs semaines pour recommencer la séance
et, d'autre part, la dose ne doit pas être trop forte, afin d'éviter soit
un retard dans la repousse des cheveux ou même la radiodermite,
terrible par l’alopécie définitive qu'elle entraîne. Aussi on se sert,
comme mesure, d'unités, par exemple suivant la méthode de Sa-
bouraud.
Remarquons, aussi, que le cuir chevelu exposé aux rayons X est
plus facile à s'infecter.
Pour limiter l’action des rayons X autour de la région malade,
330 P. NÉE
on se sert de localisateurs ou de lames de plomb et l’on ne peut
traiter à la fois qu'une surface de sept centimètres, dans sa plus
grande dimension, s'il s'agit des parties plates de la tête et une
surface moins grande encore, s’il s'agit des parties arrondies, afin
d'éviter les rayons trop obliques. Pour la tête entière, l'épilation
complète exige douze irradiations. Sans compter les préparatifs de
l'enfant qui doublent le temps de l'épilation, il faut compter pour
chaque irradiation environ vingt minutes, suivant le procédé le
plus en usage. On ne fait guère de séances de plus de 2 heures.
Les antiseptiques sont utilisés après les séances de radiothérapie,
comme après l'épilation à la main.
Quant au favus des parties glabres, on enlève les poils follets et
on applique les parasiticides.
Pour les ongles le procédé de Fabry est à recommander : on
détache avec des ciseaux les parties malades de l’ongle; on
enlève les masses parasitaires sous-jacentes et on injecte dans ces
cavités des antiseptiques. La guérison s'obtient souvent; mais
n'oublions pas que le favus des ongles est parfois rebelle au traite-
ment, si l’on n'enlève pas l’ongle malade.
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La pratique dermatologique Articles Dermatophytes, par SasourauD et Favus,
par Boni, 1900.
Enfin voir les Annales de Dermatologie et Syphiligraphie, avec les nom-
breuses indications bibliographiques qu’elles contiennent.
TABLE DES MATIÈRES
PARTIE SCIENTIFIQUE . . . SAS LE TE Tir ae ie Era ee 260
1. De l'Antiquité à 1839... RAT SRE A TU NT ER AD 650)
IT. — Découverte du parasite an TAMUS AE 6 UE Tel
II. — L'Achorion, seul parasite du favus JR en 1851. A RATE
IV. — Les favus animaux : 274
a) Favus des Muridiens. . 274
b) Favus du Chien. . 213
c) Autres favus animaux . : 276
d) Le pseudo-favus des Poules.. 276
V. — Pluralité parasitaire du favus 278
VI. — Le polymorphisme du favus À 282
VII. — Étude de l'Achorion Schünleini dans ses enlivres ie
cielles :. 286
AO UT EURE SAR EU RE PR NT Re D SG
398
VIII. — L'Oospora canina Costantin Sabrazès . . . . . .
XL ACROMONIQUINCREANUNLINEMEMPO PEER IEPRENPESUTS
X. — Rapports entre le groupe des favus et celui des tricho-
PAYLTES AE MALUS. OL RAS RE EP
XI. — Étiologie du favus . . . . AE SE
XII. — Distribution géographique ïn dome, NE A AE BON Le Lc
PARTIE CLINIQUE ANSE POESIE NERe ER RTE SR
É UNTrOdUCTIONLE SAN NE ET EN RS Ne
II. — Symptômes du favus des régions pileuses. . . . . . .
a) Symptômes du favus typique du cuir chevelu.
b'ibetavuside lasbarhe sms ve en nn
c) Le favus de larégion pubienne MN
IIL. — Le favus typique des régions glabres:. . : … :
a) Le favus des régions glabres en général .
b) La question du favus herpeticus . .
IV Perfavusides muqueuses EPP EN RE
V. — Le favus généralisé. .
MI APav us AY DIQUeS MES EME RER PE EEE
VII. — Les Champignons anilarnss Sens la vie rmeliaine.
VIIT. — Anatomie pathologique du favus . . . . . . . . . .
oévolutiontavique lente ÉnÉLal EEE
b) Rapports de l’Achorion Schôünleini avec l'épiderme.
c) La formation du godet et sa description microsco-
PIQUE URSS NS RENTE ER SR eee Ur RCA
d) Marche du favus dans l'appareil pilaire et descrip-
tons du CheveutTaVIQUe EMEA NCA
e) Derme et favus.. .
IX. — Le favus des ongles . .
X. — Pronostic du favus.
XIE DIa nos (ICRA MEL
XIE Complications AUTaAVUS RENE RENE NE EE
P. NÉE. — LA QUESTION DU FAVUS HUMAIN
B. Morphologie de l’Achorion dans ses cultures artifi-
Ciellés: tree Reese AL M NME ANSE
C. Classification ja l’Achorion Sanrio SR Eee
D. Caractères biologiques de l’Achorion dans ses cul-
tureS artificrelle See EEE ROUTE RES NERERe CRE
E. Inoculations de l’Achorion Schôünleini. . .
TRAITEMENT DU FAVUS. .
BIBLIOGRAPHIE (00 AU TANT Qt PEN EUR EE a SAN A
OSSERVAZIONT SUL TEGUMENTO (ECTODERMA)
DELL’ ANCHISTROCEPHALUS MICROCEPHALUS (RUD.)
PEL
D' PASQUALE MOLA
(TivoLzA I)
Alla famiglia dei Botriocefalidi appartiene un parassita che di
frequente si trova nel tubo digerente dell’ Orthagori scus mola e
che dal Rudolphi ebbe nome di Bothriocephalus microcephalus.
Nel 1890 il Monticelli, in una nota elmintologica Intorno ad un
cestode del Polypterus bichir, smembrava il genere Bothriocephalus,
cosi ricco di specie, creando il genere Anchistrocephalus e compren-
deva in esso le due specie Anchistrocephalus microcephalus (Rud.)
[— Bothriocephalus microcephalus Rud.] e Anchistrocephalus polyp-
teri (Leidy) [= Tetrabothrium polypteri Leidy]. Le ragioni addotte
erano quelle della presenza degli uneini sul capo, caratteristica
questa mancante al genere Bothriocephalus. Ora nello studiare il
tegumento (ectoderma) di vari Cestodi, mi è occorso di esaminare
alcuni esemplari dell’ Anchistrocephalus microcephalus raccolti nell’
intestino di alcuni Orthagoriseus mola pescati nel golfo di Na-
poli (1903).
Senza entrare a discutere delle particolarità di struttura del tegu-
mento dell’ Anchistrocephalus microcephalus, di cui mi occuperd
dettagliatamente in appresso, per ora mi piace di far rilevare una
singolare pelatura riscontrata sulla superficie del corpo.
Il tegumento dell’ Anchistrocephalus microcephalus si presenta in
parte liscio, in parte crenato. Le crenature sono di aspetto e di lun-
ghezza variabili, a contorni integri; gl'infossamenti che separono
una crenatura dall’altra non hanno la medesima profondità, essi
non arrivano mai alla membrana basale; ma si arrestano ad un
terzo da questa.
La membrana basale si presenta con un cammino più o meno
flessuoso, la quale alle volte si addentra nel parenchima, altre
340 P. MOLA
nell'ectoderma, sempre perd conservando l'istesso spessore. Que-
sta poggia sul sacco muscolare eutaneo, il quale non differisce per
nulla da quello degli altri Cestodi. Esso è costituito da uno strato
esterno di fibre circolari e da uno interno di fibre longitudinali,
spesso, disposte ortogonalmente alle prime. Entrambi questi due
strati costituiscono il sacco muscolare cutaneo abbastanza spesso e
decorrente per tutta la lunghezza dello strobilo. Tra le fibre longi-
tudinali s'insinuano i prolungamenti anteriori delle cellule della
cosi detta sub-cuticula. Queste cellule allungate, affusolate, sono
abbastanza grandi e si mostrano nette e distinte dal parenchima
circostante ; con le ematossoline si colorano bene e lasciano vedere
un distinto nucleo che occupa la loro parte centrale.
Dalla figura 2 si ricavano i vari aspetti di queste cellule, le quali
dal lato del parenchima spiccano un solo prolungamento, mentre
danno origine à uno, due o più prolungamenti dalla parte dell
ectoderma, i quali ultimi, attraversando il sacco muscolare cutaneo,
ragoiungono la membrana basale, alla quale vanno ad attaccarsi.
L'aspetto della cuticula esterna, in tutti i miei preparati, è stato
quello di uno strato di rivestimento uniforme, continuo e a faccia
esterna crenata o liscia, provvisto di una fitta peluria. Questa si
presenta variamente su tutto il Cestode in parola, più pronunziata
ai margini di ciascuna proglottide, meno su tutto il resto del
corpo. La peluria ha l'aspetto setoloso; le setole che la compongono
sono infisse nella cuticula e riposanti sulla membrana basale, con-
siderevoli per numero e del tutto independenti dall'ectoderma.
A forte ingrandimento, le setole si presentano coniche con l’apice
acuto e sensibilmente ricurvo (fig. 8). Agli orli di ciaseuna campa-
natura delle proglottidi pigliano l’aspetto di una frangia spessa,
intensa, molta pronunziata, e ivi la cuticula s'infossa alquanto per
il grande numero delle setole che vi sono allogate. Queste setole si
colorano intasamente con l’ematossilina, che le lascia ben distin-
guere dall ectoderma dove esse sono infisse.
Nei tagli longitudinali agli orli della campanatura delle proglot-
tidi pigliano l’aspetto di ciuffi setolosi, come fanno vedere le
fig. 2-5. Le setole, su tutto il resto del corpo per numero sono con-
siderevoli, ma poco pronunziate, esse pigliano l’aspetto delle
fig. 3-4. Mi è dato osservare ciuffi di setole staccantesi dalla euti-
cula, dove si osserva bene tutta la loro lunghezza e la loro parte
TEGUMENTO DELL ANCHISTROCEPHALUS 341
basale: cid da far vedere il modo come esse sono infisse nella cuti-
cula. Esse sono archilosate, staccandosi dalla cuticula lasciano
questa bucherellata à guisa di un crivello. |
La presenza di tali setole sul corpo del Cestode in parola, la di-
sposizione varia che quelle hanno sui vari punti, il modo come esse
sono pronunziate in determinati luoghi delle proglottidi lasciano
in me una convinzione tale da non farmi meravigliare la presenza
degli uncini sulla cupoletta terminale dello scolice dell’ Anchistro-
cephalus microcephalus. Infatti basta osservare la varia grandezza
degli uncini disposti a diadema sull orlo della cupola terminale
dello scolice, il loro modo di fissazione nell’ ectoderma (fig. 6-7), la
loro caducità, la loro caratteristica disposizione a frangia sullo
scolice, non ultima la disposizione della punta degli uncini, come
anche l'embriogenia degli uneini, per convincersi della mia asser-
zione. Per la qual cosa credo opportuno per ora aggiungere come
carattere distintivo della specie,'oltre la presenza degli uncini all’
estremità anteriore dello scolice, la pelatura del corpo da me ri-
scontrato sull’ Anchistrocephalus microcephalus.
Studi ulteriori potranno darei come carattere generico la pela-
tura del corpo; se il risultato delle ricerche ci dia la presenza
della pelatura sul tegumento (ectoderma) dell” Anchistrocephalus
polypteri.
Bibliografñia.
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SPIEGAZIONE DELLA TAVOLA I
Fig. 4. — Scolice di Anchistrocephalus microcephalus a notevole ingrandi-
mento, visto di lato; vi si scorgono gli uncini della cupoletta terminale /uc), i
botridi /b), le campanature delle proglottidi {cp} con le setole /S).
Fig. 2. — Sezione longitudinale di proglottide a forte Re che lascia
vedere la cuticula /c) con le produzioni ectodermali, setole _imuscoli longitu-
dinali /ml) e le Sue sotto cuticulari /Cs).
Fig. 3. — Sezione obliqua fortemente ingrandita della cuticula /c},dove si scor-
gono le setole /s/, la membrana basale /mb) e i muscoli longitudinali /ml).
Fig. 4. — Sezione longitudinale fortemente ingrandita della cuticula, dove si
scorgono il modo come sono infisse le setole /s) nella cuticula /c) e i muscoli cir-
colari /mcC).
Fig. 5. — Sezione longitudinale dello scolice e di proglottidi, interessante gli
uncini {uc) della parte basale della cupoletta terminale e le setole delle campa-
nature di proglottidi {Cp}.
Fig. 6 et 7. — Uncini fortemente ingranditi dello scolice.
Fig. 8. — Setole fortemente ingrandite.
NOTES ET INFORMATIONS
Inauguration du monument de Nocard (pl. II). — La cérémonie d'inau-
guration du monument édifié à la mémoire glorieuse de Nocarp a eu lieu
le dimanche matin 24 juin 1906, sous la présidence de M. le Ministre de
l'Agriculture, en présence d'une foule énorme et distinguée et par un
temps magnifique. Grâce à l'initiative du Comité et du directeur de l'École
d'Alfort, deux énormes et superbes tribunes tapissées de velours rouge
à crépines d'or, ornées de trophées de drapeaux, agrémentées de plantes
vertes, avaient été dressées, en face du monument, sur la pelouse fleurie
de la cour d'honneur. Bien que capables de contenir 2000 personnes,
elles furent bientôt archicombles, et beaucoup ce retardataires furent
obligés de s'installer dans les bas-côtés ou en dehors des tribunes. Mais
les organisateurs avaient pris leurs précautions pour que chacun, quelle
que füt sa place, put voir et entendre, de sorte que la satisfaction fut gé-
nérale.
La musique de l’École d’Artillerie de Vincennes rehaussait par sa pré-
sence l'éclat de la fête. ve
Le monument (pl. Il) est d’un eftet très artistique; il résulte d'une
triple collaboration : le buste du maître est dû au sculpteur GEOFFROY,
ami personnel de Nocarp; les allégories sont l'œuvre de l'éminent sta-
tuaire Alfred Boucner; enfin M. Bovin est l'architecte du monument.
Haut de cinq mètres, il se compose d’une stèle de granit rouge des Vos-
ges, que surmonte le buste et qui repose sur des marçhes-de granit.
Sur cette stèle, face au public se lit l'inscription suivante :
A EDMOND NOCARD
1850-1903
SES CONFRÈRES — SES ÉLÈVES — SES AMIS.
De l’avis à peu près unanime, le buste n'est pas la ressemblance par-
faite de celui dont il a la prétention de reproduire les traits: mais il faut
reconnaitre que la tâche, acceptée avec un bel enthousiasme par le sculp-
teur GEOFFROY, était particulièrement ardue, puisque le modèle, hélas!
faisait défaut et que l'artiste, à coup sûr distingué, n'a pu s’inspi-
rer que de documents photographiques plus ou moins imparfaits et de ses
souvenirs personnels. Du reste, la première impression, un peu décevante,
s'améliore dès qu'on examine le buste avec persistance, sous dif-
férentes incidences et à des heures variables de la journée. Le souvenir
précis que l’on a conservé de Nocarp, de la mobilité deses traits, le pieux
344 NOTES ET INFORMATIONS
et inconscient désir de voir s’animer l'image de ce maitre tant regretté,
donne une sorte de vie factice à son effigie, au point que les imperfections
s’amoindrissent jusqu'à disparaitre.
Les trois personnages allégoriques groupés autour de la stèle sont d'un
effet poétique et charmant, en même temps que d'un exquis symbolisme.
Le sculpteur Alfred Boucxer, dont il convient de louer sans réserves
l'inspiration et le talent, a voulu personnifier l'Agriculture moderne sous
les traits d'un jeune pâtre et d'une gentille fermière, debout l'un et l’au-
tre de chaque côté de la stèle, sur le granit de laquelle ils s'appuient. Le
garçon, placé à droite, élève d'un joli geste une palme d'or vers (le bien-
faiteur de l'Agriculture ». Quant à la jeune paysanne, placée à gauche de
la stèle, son tablier est rempli de volailles, dont les têtes effarées dépas-
sent curieusement les bords. La main droite, tenue à demi baissée, tient les
fleurs dont elle fera au Maitre l'hommage touchant. L'expression admira-
tive, sérieuse et fière de ces deux personnages est fort réussie et d’un in-
térêt puissant.
Au premier plan, la figure la plus gracieuse représente, à n'en pas
douter, la jeune Science, c'est-à-dire la science pastorienne, dont la foi
est profonde en la parole du Maitre et qui n’a plus pour lui de secrets.
C'est pourquoi sans doute le statuaire l’a personnifiée sous la figure d'une
jeune fille dépouillée de ses voiles, assise aux pieds du savant, attentive
et soumise à sa parole auguste et qui, par ses formes d'une beauté par-
faite, montre que, si elle est encore jeune et gracile, à peine sortie deson
adolescence imprécise, elle promet du moins pour l'avenir maturité et
vigueur certaines.
Ce personnage doux et charmant inscrit sur des tables d'airain le nom
à jamais glorieux de Nocarp.
A l'issue de la cérémonie, M. le Ministre de l'Agriculture a exprimé
ses regrets de n'avoir pu apporter au professeur KAUFFMANN la croix de la
Légion d'honneur, qu'il recevra, du reste, à l’occasion du 14 juillet. Puis
il a décerné : à M. le Professeur RAILLIET, la Cravate de commandeur du
. Mérite agricole ; aux Professeurs Perir et VALLÉE, la croix d'officier du
même ordre; à M. BIGoTEAU, vétérinaire à Auneau (Eure-et-Loir), celle
de chevalier du Mérite agricole; enfin, à M. BoBiN , architecte de l’École
d'Alfort, la rosette d'oflicier de l’Instruction publique.
Discours de M. Leclainche
Professeur à l'École vétérinaire de Toulouse.
MonsIEUR LE MINISTRE,
MESDAMES,
MESSIEURS,
C’est pour nous jour de fête. Cependant notre esprit rappelle des sou-
venirs de deuil et notre pensée voile d'un crêpe les claires couleurs des
oriflammes.
NOTES ET INFORMATIONS 349
Nous avons voulu cette hâtive commémoration. Il nous semblait que
Nocarp ne devait pas attendre qu'on lui rendit justice, et notre empres-
sement à le glorifier nous apparaissait comme un dernier témoignage de
notre affection.
Mais comment célébrer aujourd'hui la mémoire de NocaRp sans raviver
notre commune douleur ? Il faut le recul lointain des ans pour que
l’image estompée des êtres aimés puisse être évoquée sans amertume, et
celte solennité qui nous enchante par la grandeur de l'hommage rendu au
savant entré dans l'immortalité prend malgré nous le caractère attristé
des pieux anniversaires.
Il y aura quarante années bientôt que Nocarp franchit pour la première
fois la porte de cette École. Il n'y était attiré ni par une irrésistible
vocation, ni par l'amour de la science, ni même par le renom d’'Alfort.
En vérité, Nocarp ne nous eût jamais appartenu si Provins n'avait possédé
une garnison de dragons. L'histoire parait merveilleuse. Nocarp aimait à
la conter. è
Autant et plus peut-être que de ses roses, Provins est fière de ses dra-
gons. On s'intéresse au spectacle, pourtant familier, des prises d'armes,
et les curieux encombrent la rue quand défilent les escadrons. Élève du
collège et bon Provinois s’il en fut, le jeune Nocarp professait le culte
du dragon. Mais le casque prestigieux, au plumet en bataille et à la cri-
nière flottante, n'avait pas ses préférences. Il avait découvert, à la queue
des colonnes, deux cavaliers chevaucha nt côte à côte, tout semblables,
encore que l’un portât les broderies d'or et l’autre les broderies d'argent.
Le sort de ces cavaliers parut enviable à notre ami. Il se demanda quel-
que temps s'il serait médecin ou vétérinaire. Les broderies d'argent lui
parurent plus seyantes : sa carrière était choisie.
A dix-sept ans, Nocarp avait terminé ses humanités. Le baccalauréat
ouvrait alors toutes grandes les portes de nos Écoles, mais le règlement
fixait une inexorable limite d'âge. Il fallait attendre toute une année.
Pour tromper l'ennui, Nocarp entre comme clerc chez un notaire de Pro-
vins. Il ne semble pas qu'il se soit passionné pour la rédaction des gri-
moires ; mais cette année de notariat n'avait pas été perdue ; le jeune
clerc était devenu de première force au billard.
Ces années heureuses d’adolescence avaient laissé des souvenirs pro-
fonds dans le cœur de Nocarp. Il avait pour sa petite patrie une tendresse
infinie. De Provins il connaissait toute l'histoire et il savait tous les
détours. Plus tard, il aimait à y entrainer quelque ami, et de ce pèleri-
nage on gardait un souvenir ému.
C'était, dans l’ancienne maison familiale, l'accueil cordial des bons
parents et du grand frère, et puis les interminables promenades, la visite
au collège, les vieilles rues et le Grand-Grenier, les remparts et les vues
sur la plaine, et la toute gracieuse Voulzie que chanta Moreau.
En 1868, Nocarp entre à Alfort et prend d'emblée la tête de sa promotion.
Il est en troisième année quand éclate l'orage de 1870. En notre terre de
Archives de Parasitologie, XI, n° 2, 1907. 23
946 NOTES ET INFORMATIONS
France, l'amour du clocher se confond avec l'amour de la patrie. Les
camarades plus âgés sont appelés à l’armée; l’École est licenciée. Nocarp
n'hésite pas; il sera soldat tant que durera la guerre. On l’incorpore dans
un régiment de lanciers et on l’oublie dans un dépôt du sud-ouest.
La paix est signée. Nocarp rentre à Alfort et termine brillamment ses
études.
Par ses succès scolaires, le lauréat d’Alfort pouvait prétendre à la
carrière, alors enviée, du professorat; ses rêves de gloire militaire s’en
étaient allés, il ne se souciait guère d'exercer son métier. Le poste de
clinique devenait vacant à ce moment ; NocarD l'obtient au concours, le
6 novembre 1873.
La tâche qui lui incombe est ingrate entre toutes. La chaire à laquelle
il est attaché comporte l'enseignement de la pathologie interne et externe
et celui de la clinique; le titulaire assume, en outre, la charge très lourde
de la consultation et celle des hôpitaux de l'École.
Nocarp remplit avec une vigoureuse conscience ses difficiles fonctions ;
de plus, il recueille et publie de nombreuses observations.
En 1876, Henri BouLey est jugé traitreà la cause d’Alfort ; son journal,
le Recueil, est mis à l'index ; on décide que l'École doit posséder un organe
pour s'affirmer et se défendre. En fait, des querelles personnelles moti-
vent seules l'anathème; toutelois, le bon BouLey a commis un crime
notoire : il a emporté avec lui le prestige de la maison! On n'a pas de
peine à persuader aux jeunes chefs de service qu'il s'agit uniquement de
servir les intérêts de l'École, et Nocarp devient le secrétaire de la rédac-
tion des Archives.
Sa production scientifique est considérable ; elle porte à la fois sur les
sujets les plus divers : médecine, chirurgie, hygiène, police sanitaire,
jurisprudence... Elle témoigne de l’activité débordante d’une intelligence
que sollicitent indifféremment tous les objets ; elle traduit aussi les ineer-
titudes d'un esprit qui cherche encore ses directions.
Jusque-là Nocarp à eu des professeurs ; il n'a pas trouvé un maitre.
Le Maitre! Ce n’est pas le chef qu'une hiérarchie administrative nous
impose. À celui-ci, nous ne devons que la déférence banale et les mar-
ques extérieures du respect. Ce n’est pas encore celui qui nous dispense
la science, qui nous apprend une technique ou un métier. A celui-ci, nous
devons seulement la reconnaissance que mérite son zèle et son désinté-
ressement.
Le Maitre! C'est celui qui, s'emparant de notre esprit, le domine et
le façonne, le féconde et l’éclaire. C’est celui qui nous montre le chemin
et quiguide notreroute. C’est celui qui, élevant notre àme jusqu'à la sienne,
lui révèle et lui impose une foi commune et un commun idéal. A celui-
là, nous devons l'hommage de toutes nos pensées, notre affection et notre
dévouement; nous lui sommes liés pour toujours, et jamais n'est éteinte
la dette sacrée de nos obligations.
A cette heure décisive où s'affirme la personnalité, Nocarp se lie à un
NOTES ET INFORMATIONS 9341
homme qui exerce sur sa vie une influence aussi profonde que bienfai-
sante. Du Mesnir était alors le médecin de l'École d'Alfort. Ce n'était pas
seulement un savant, C'était aussi et surtout une âme d'élite, faite de
droiture et de modestie, de dévouement et d'abnégation. NocarD est
accueilli familièrement au foyer de Du Mesnir. Là, dans le salon d'une
femme dont l'intelligence égale la haute distinction, il rencontre les
hommes qui devaient occuper, quelques années plus tard, les plus hautes
charges de l'État. On est à la veille du 16 mai, et le château de Créteil,
comme on appelle un peu pompeusement dans le pays la demeure de Du
MEsniz, est le rendez-vous des chefs républicains. Dans ce milieu
ardemment libéral, Nocarp puise des convictions politiques et des idées
philosophiques auxquelles il reste fidèle jusqu'à sa dernière heure.
Quel exemple aussi que la vie de Du MEesxir ! Après avoir lutté et souf-
fert pour ses opinions, il assiste au triomphe de son parti. Ses amis, ses
obligés parfois, sont au pouvoir ; lui-même pourrait occuper avec distinc-
tion les plus hautes fonctions et cependant il ne veut rien être et son
influence ne s'exerce jamais qu’en faveur des déshérités. Il a voué sa vie
aux humbles et aux malheureux. Pour améliorer leur sort, il s'impose un
écrasant labeur, pour eux il dépense sans compter, sa fortune et sa vie.
Il meurt pauvre, presque oublié, et un modeste monument, élevé par ses
amis, marque la place où repose, dans un cimetière parisien, un homme
qui honora l'humanité.
Tel était celui qui fut pour Nocarp le conseiller des heures difficiles,
le modèle et le guide. Peut-être ne comprendrait-on pas Nocarp si l'on
ne connaissait Du MEsniz.
Dans une autre maison amie, NocaRp fréquentait aussi, dès ses pre-
mières années d'Alfort. Chez le bon docteur Josras, il retrouve une seconde
famille ; il trouve aussi une jeune fille dont il fait bientôt la compagne de
sa vie. Cest l'avenir radieux qui s'ouvre, avec toutes les promesses
du bonheur. Et voici que, moins d’un an plus tard, la jeune femme meurt,
laissant à Nocarp une enfant dont la santé précaire devait lui causer de
continuelles alarmes.
Nocarp porta pendant toute sa vie le deuil de son foyeret jamais, sans
doute, au cours de sa brillante carrière, il ne ressentit pleinement des
joies qu’il eùt voulu partager avec l'élue de son cœur.
.… Avec une sollicitude discrète, Henri BouLey avait suivi les premiers
pas de Nocarp dans la carrière scientifique. Il découvre l'élève qu'il avait
rêvé, et peut-être aussi sa propre image, dans ce jeune homme au
caractère indépendant et à l'intelligence avisée. Il lui prodigue ses encou-
ragements et, pour mieux marquer sa prédilection, il signe avec Nocarp
un important rapport au Congrès international d'hygiène de Paris sur
«les moyens pratiques de constater et d'assurer la bonne qualité des
viandes de boucherie ». C’est un lumineux exposé de toutes les données
-alors acquises sur les caractères des viandes saines et altérées, en même
temps qu'un projet de réglementation si bien conçu qu'il se trouve appli-
348 NOTES ET INFORMATIONS
-qué, à l'heure actuelle, dans la plupart des pays d'Europe. Le mémoire
atteste la souplesse du talent de Nocarp et la sûreté de son jugement,
car, on peut bien le révéler aujourd'hui, BouLey n'avait pas ajouté une
ligne au manuscrit de son collaborateur.
Ce fut entre ces deux hommes, si bien faits pour se comprendre et
pour s'aimer, l'origine d'une intimité que la mort seule pouvait briser.
On peut dire que BouLey fut le premier maitre de Nocarp. Si cette in-
fluence n'est pas plus évidente, c'est qu'à cette heure précise BouLEY
cherche lui-même sa voie.
Quelques années plus tôt, il eût entrainé son élève vers cette médecine
d'observation qu'il voyait si belle, et il lui eùt transmis le sceptre de la
clinique. Et voici que maintenant sa foi chancelle. Une doctrine nouvelle
vient de naître; ses premières lueurs ont éclairé le temple, et le prêtre
d'Isis s'aperçoit avec stupeur que l’idole vénérée n'est faite que de voiles.
Avant même qu'il ait pu pressentir toute la fécondité de la méthode
pasteurienne, BouLeyx est converti à l’expérimentation, et dans cette voie
qu'il méconnut jadis, sur ce chemin de la vérité encore ignoré de la foule,
il se précipite entrainant son disciple avec lui.
En 1878, l'enseignement de la pathologie et de la clinique est dédoublé.
Il est entendu que la chaire de pathologie interne, avec la pathologie gé-
nérale et l'anatomie pathologique, sera mise au concours. Nocarp est tout
désigné pour l’occuper; il va se spécialiser, organiser un laboratoire et
entreprendre des recherches personnelles. Il achève sa préparation, quand
un coup de théâtre se produit. Au moment où le programme du concours
va être publié, ilapprend par une lettre indignée de BouLey que le titutaire
-de la chaire a changé d'avis et qu'il garde pour lui la pathologie interne.
Il ne s’agit point seulement pour Nocarp d'aborder sans préparation
spéciale un concours public; il va se trouver muré entre les horizons
étroits de la chirurgie vétérinaire.
Le 25 novembre 1878, après un concours brillant, Nocarp est nommé
professeur de pathologie chirurgicale, manuel opératoire, ferrure et cli-
nique.
S'il ne détient pas l’enseignement de son choix, Nocarp possède au
moins les moyens d'étude et la liberté dans la recherche que donne seule
chez nous l'accession à la chaire. Il réorganise l’enseignement pratique
de la chirurgie et il essaie d'introduire à la clinique d'Alfort des mœurs
nouvelles. Son activité est prodigieuse; il accumule d'importantes contri-
butions sur toutes les parties de la pathologie, et ce chirurgien malgré lui
donne, en quelques années, une série de travaux qui le classent parmi les
meilleurs maitres de la chirurgie vétérinaire.
C’est vers les précisions de la science que Nocarp est attiré par les
tendances de son esprit. Son sens critique avisé lui a permis de mesurer
toutes les incertitudes et les puérilités des théories médicales régnantes.
C'est avec anxiété qu'il suit les phases précipitées de la révolution scien-
tifique qui s'opère sous ses yeux.
NOTES ET INFORMATIONS 349
La doctrine pasteurienne subit le fameux assaut des traditionalistes.
Alfort est intéressé dans la lutte; l’un de ses maîtres, Cou, est le plus
déterminé des adversaires de Pasreur. Toute l’École est avec lui. Dans ce
milieu aussi, on trouve osée l'intervention de ce chimiste qui prétend
régenter la médecine.
Ce n’est point sans réflexion que Nocarp prononce son acte de foi. Si
BouLey ut un pasteurien d'enthousiasme, Nocarp fut un pasteurien de
raison. Il est ébranlé déjà par les premières communications de PASTEUR .
sur le charbon; mais il attend la démonstration définitive, qu'il pressent
prochaine. Enfin paraît le magnifique mémoire Sur l’éhiologie du charbon,
tout irradiant de lumière et de vérité. Cette fois, Nocarp ne résiste plus
et voici ce qu'il écrit dans le journal d'Alfort :
€ Dans la lutte de tous les jours, où M. PAsTEUR disputait pied à pied
le terrain qu'il gagnait, ne laissant pas une objection sans la réfuter, re-
prenant dix fois, sous une forme nouvelle, la démonstration de la veille
qui n'avait pas convaincu tous les auditeurs, la galerie, muette d'admi-
ration, assistait à cet étrange spectacle : les adversaires de la théorie des
germes piétinant sur place, produisant de nouvelles expériences et de
nouveaux arguments pour remplaëer ceux que l'infatigable lutteur avait
détruits la veille, reprenant toujours les mêmes hypothèses, © s’épuisant
dans la recherches de vaines « contradictions, obscurément formulées »,
tandis que l'illustre savant marchait à pas de géant, écrasant ses adver-
saires sous les coups de nouvelles découvertes plus ingénieuses, plus
fécondes en résultats les unes que les autres... »
C'est le 25 juillet 1880 que Nocarp publiait ces lignes. Cette date
marque pour lui l’aurore d'une vie nouvelle. Retracer la vie de Nocarp en
ces vingt-cinq dernières années, c'est découper un chapitre de l'épopée
pasteurienne. Célébrer Nocarp, c'est gloritier la mémoire immortelle de
PASTEUR.
Nocarp est accueilli dans le sanctuaire de la rue d'Ulm. Avec une inlas-
sable patience, il s’initie aux plus délicates manipulations et, avec les
autres disciples du maitre, il prend sa part de la tâche commune.
Les publications de Nocarb à cette époque ne traduisent guère ses
préoccupations dominantes. Tandis qu'il se rend maitre des techniques
nouvelles et notamment des méthodes de coloration microbienne, il rédige
encore des études de pathologie et de clinique. C'est une circonstance
imprévue qui le relève au grand public.
En 1883. le gouvernement français décide d'envoyer une mission scien-
tique pour l'étude du choléra en Égypte. Avec Roux, SrRaus et THUILLIER,
Nocarp est désigné par Pasteur. On sait ce qui advint de cette expédition,
et comment TauiLrier fut emporté par le fléau qu'il allait combattre.
C’est par un acte d'héroïsme qu'il a fait ses débuts de bactériologiste.
Dans son service de la « cour des forges », celui-là même qu'occupait
Coin, NocarpD installe un laboratoire de fortune, et c’est là qu'il s'en-.
ferme, indifférent au bruit et aux sollicitations du dehors. Sa porte est
390 NOTES ET INFORMATIONS
défendue par une consigne sévère; les ümportuns qui l’enfreignent
tentent rarement une seconde visite. Là, pendant des mois et des années,
il travaille sans s'accorder jamais de repos, ne profitant des heures de
liberté que pour consacrer plus de temps à la recherche ou pour remplir
quelque laborieuse mission. C’est encore ici la maison de Pasreur et la
règle commune y est fidèlement observée.
Alors commence une série ininterrompue d'importantes publications.
Nocarp fait connaitre des techniques nouvelles : il indique une méthode
de récolte du sang et du sérum sanguin, merveilleuse desimplicité etpar-
tout utilisée depuis; il indique la composition d’un bouillon de culture
pour le Bacille tuberculeux, et il obtient pour la première fois le déve-
loppement du Bacille aviaire; il applique aux animaux le procédé d'ExRLICH
pour la recherche du Bacille de Kocx.
Avec MoLLeREAU, l’un de ses amis les plus chers, Nocarp étudie la
mammite enzootique des Vaches laitières, dans une monographie qui
reste comme un modèle d'analyse bactériologique: il isole le Strepto-
coque pathogène, précise tous les points de l’étiologie et de la pathologie
et formule les règles, toujours présentes, de la prophylaxie et du
traitement.
Peu après, il entreprend une étude analogue sur une mammite gangré-
neuse enzootique des Brebis laitières et il démontre encore sa nature
microbienne.
Avec Roux, il fait connaitre les propriétés spéciales des milieux glycé-
rinés pour la culture du Bacille de la tuberculose et il réalise des
recherches sur le charbon symptomatique et sur la vaccination des
herbivores contre la rage.
Les travaux de laboratoire ne l’absorbent pas tout entier. En 1886, il
remplit dans la Nièvre une importante mission pour l'étude de l'avor-
tement épizootique et il fait connaître des mesures préventives que
l'expérience a définitivement consacrées.
En 1885, BouLey, malade, est contraint d'abandonner la direction du
Recueil et d'interrompre ces vivantes chroniques où, pendant tant d'an-
nées, il avait continué sa noble mission d'enseignement. C’est Nocarp
qu'il désigne pour remplir un intérim qu'il sait bien devoir durer tou-
jours et c’est à Nocarp qu'il confie le soin de continuer son œuvre.
Pendant cinq années, Nocarp donne des « chroniques » au Recueil, et
l’on peut dire qu'il supporta sans faiblir l’écrasante succession de l'in-
comparable journaliste que fut Bourey.
Jusqu'en 1887, Nocarp, le bactériologiste connu dans le monde entier,
est encore professeur de pathologie chirurgicale, d'obstétrique et de
maréchalerie. A défaut d'un cours de bactériologie, que nous ne pos-
sédons pas encore aujourd'hui, il existait bien une chaire de pathologie
des maladies contagieuses; mais celle-ci est occupée qur un anatomiste,
le directeur GouBaux. Celui-ci a repassé la presque totalité de son
enseignement aux deux professeurs de clinique, et Nocarp a reçu en
NOTES ET INFORMATIONS 3)1
partage. la législation commerciale. Les deux puissances qui gouvernent
nos Écoles, le règlement et la tradition, avaient ‘été scrupuleusement
respectées.
La mise à la retraite de Goupaux donne à Nocarp l’enseignement qu'il
illustre déjà par ses travaux; elle lui apporte aussi le présent peu
enviable de la direction d'Alfort, qu'il n'accepte qu'avec résignation, pour
l’abandonner avec joie trois années plus tard.
Le labeur de chaque jour est écrasant. Tout en assumant la lourde
charge et les soucis de la direction, Nocarp conserve la totalité de l’en-
seignement qui lui est attribué. Il inaugure un cours et il installe un
service. Seul, sans répétiteur la plupart du temps, il pourvoit à tout
avec une impeccable régularité.
L'abandon de la direction allège sa tâche; mais d'autres obligations
sont nées. NocaRD paie la rançon de sa notoriété. Pour remplir envers
son École et sa profession des devoirs qu'il s’exagère peut-être, il paraît
dans les Sociétés et dans les Académies. Il est appelé dans les Conseils et
dans les Comités et partout il fait apprécier l'étendue de ses connais-
sances et la netteté de son esprit.
Malgré ce labeur imposé de chaque jour, Nocarp trouve encore de
longues heures pour la recherche et sa production scientifique ne se
ralentit point.
Il découvre le Streptothrix du farcin du Bœuf; il apporte des docu-
ments nouveaux sur la tuberculose zoogléique, sur l’étiologie du tétanos,
sur la pathogénie de la tuberculose, sur le diagnostic de la Iymphangite
épizootique, sur la virulence des viandes et du lait des animaux tuber-
culeux.
Avec une ingéniosité merveilleuse, il décèle la véritable nature de la
cornstalk disease des Bœuîs américains. [l déploie la même sagacité dans
l'étude des infections provoquées chez l'Homme par les Perruches
importées de l'Amérique du sud; en possession de quelques fragments
d'ailes des Oiseaux malades, il découvre le Microbe pathogène dans la
moelle des os, le cultive et reconstitue toute l’étiologie de la psittacose.
Nocarp constate les effets surprenants du traitement ioduré dans
l'actinomycose, préconisé déjà par THoMASSEN, de l'École vétérinaire
d'Utrecht. Il donne à cette belle découverte l'appui de son autorité et
multiplie les démonstrations. Aujourd'hui, le (traitement de THOMASSEN »
est connu dans le monde entier; il sauve chaque année des milliers
d'animaux et quelques vies humaines.
Dès 1891, Nocarp entreprend l'étude des propriétés révélatrices de
la tuberculine de Kocx, utilisées pour la première fois chez les Bovidés
par Gurmann, de l'École vétérinaire de Dorpat. Il poursuit avec méthode
un travail patient de contrôle, sans se laisser influencer par les condam-
nations bâtives des uns ou par les enthousiasmes irréfléchis des autres.
Sa conviction faite, il proclame le merveilleux pouvoir de la tuberculine
et précise les conditions de son emploi.
9302 NOTES ET INFORMATIONS
Les conclusions primitives de Nocarp restent vraies et définitives. Il faut
seulement les entendre avec cette restriction qu’elles n'ont point la
rigueur mathématique que parait impliquer la simplicité des formules.
C'est en vain que l'on s’est efflorcé à en modifier l'expression pour y
faire rentrer tous les faits. Les séries indéfinies des phénomènes
complexes de la pathologie échappent à nos tentatives de groupement
systématique, et c'est peut-être l’un des caractères de la légitimité d'une
loi biologique que de comporter des exceptions.
NocarD comprend aussitôt ce que l'on peut obtenir de l'emploi raisonné
de la tuberculine dans la lutte contre ce fléau, chaque jour plus menaçant,
qu'est la tuberculose des Bovidés. Avec la tuberculine, il est possible
à la fois de découvrir et d'isoler les malades, que de nouvelles générations
indemnes viendront remplacer dans l'étable assainie. C'est la libération
obtenue à coup sûr, presque sans frais, c'est l’agriculture mondiale exo-
nérée d'un impôt annuel qui se chiffre par centaines de millions.
Nocarp comprend aussi que l'on ne peut imposer de telles mesures ; il
sait que l’on ne peut rien sans la volonté réfléchie des éleveurs, qu'il
faut obtenir leur adhésion et diriger leurs efforts.
Il commence alors une admirable croisade contre la tuberculose bovine,
véritable apostolat qu'il poursuit sans défaillance pendant plus de cinq
années. Il lutte dans les Sociétés, dans les Congrès et réduit partout ses
adversaires. Il multiplie les communications et les brochures. Enfin il
porte un peu partout la bonne parole, dans une série de conférences qui
lui valent autant de triomphes.
A ne considérer que notre pays, on ne saurait dire queles résultats
aient répondu à cet effort; ce sont destentatives isolées, qui ont été réalisées,
et si ces essais confirment l'exactitude des prévisions de NocaRp, ils
démontrent aussi toutes les difficultés de cette colossale entreprise.
La tuberculineétaitencore discutée qu'une découverte nouvelle sollicitait
Nocarp. Les vétérinaires russes HELMAN et KALNING découvrent la malléine ;
leurs premières recherches tendent à montrer qu'elle jouit de propriétés
révélatrices analogues à celles de la tuberculine. Nocarp entreprend de
nouvelles études de contrôle et reprend une campagne nouvelle. Il retrouve
devant lui des obstacles et des adversaires déjà connus ; mais cette fois le
succès est complet. Il ne s'agit plus, comme pour la tuberculose, de com-
battre une infection partout répandue, dont les origines nous apparaissent
chaque jour plus incertaines; la morve est localisée en quelques foyers
et elle procède des modes connus de la contagion directe.
Avec une vigueur et un esprit de décision admirables, Nocarp formule
les indications de la malléine. Il répond à toutes les objections. Il com-
munique sa foi et il impose sa volonté. Partout, les résultats prophétisés
sont obtenus. Les cavaleries des grandes Compagnies de transport sont
libérées: la morve est chassée de l'armée. Partout la méthode de Nocarp
s'affirme, triomphante, et l'on peut prédire que la morve va disparaitre
de la surface du globe.
NOTES ET INFORMATIONS 393
Il est juste de confondre dans un même hommage de reconnaissance
tous les auteurs de cette belle conquête : HELMAN, mort avant d’avoir
terminé ses recherches; KALNING, qui les achève et succombe à la morve
contractée dans le laboratoire; Nocarp enfin, qui base sur la découverte
des savants russes une méthode certaine de prophylaxie.
La défense de la malléine est pour Nocarp l'occasion de nouvelles
découvertes. Il montre que les Bacilles morveux pénètrent par l'intestin,
sans que rien trahisse leur passage, pour déterminer dans le poumon
des lésions primitives en apparence. Cette notion, vérifiée depuis pour
d’autres infections, comporte des applications indéfinies et elle est le
point de départ de recherches pleines de promesses sur de nouveaux
procédés d'immusisation par les voies digestives.
Nocarb apporte en même temps la démonstration de la curabilité de la
morve du Cheval, de la fréquence des invasions avortées et du rôle
prédominant de la résistance organique dans la marche des infections.
La malléine encore lui permet de différencier une maladie bénigne,
jusque-là confondue avec la morve, la lymphangite ulcéreuse, d'en pré-
ciser l'origine microbienne et de sauver les animaux affectés.
En 1898, le nom de NocaRp est attaché à un fait scientifique considé-
rable. NocarDp, Roux, BORREL, SALIMBENI et DUuJARDIN-BEAUMETZ déter-
minent l'agent de la virulence péripneumonique, dont ils font connaître
les caractéristiques et les propriétés essentielles. Ce n'est pas seulement
un microbe nouveau qui est découvert, l'origine inconnue d'une maladie
qui est dévoilée, ce sont des méthodes qui sont créées, c'est une voie
nouvelle qui est tracée, c’est toute une vaste étendue de la pathologie
mystérieuse qui est ouverte aux investigations des savants.
La découverte des « virus filtrants » marque le début d'une période
nouvelle dans la microbiologie. En quelque années, malgré toutes les
difficultés des techniques nouvelles, on a pu leur rapporter : la fièvre
aphteuse, l'æœdème myxomateux, la peste bovine, le molluscum conta-
giosum, la fièvre jaune, la horse sickness, la peste aviaire, la clavelée. et
ce sont les beaux travaux de deux élèves aimés de Nocarp qui, dans son
laboratoire d'Alfort, viennent d'ajouter à cette liste toujours ouverte
l’anémie infectieuse du Cheval et la maladie des Chiens.
Il faut bien citer encore, dans cette rapide revue des travaux de NocaRp,
son étude bactériologique de la dermite ulcéreuse, ses recherches sur
les infections ombilicales des nouveau-nés, sur la tuberculose du
Cheval, les expériences si intéressantes qu'il réalise avec RossIGNoL sur
la pathogénie de l'infection tuberculeuse, sa mission en Algérie et les
conclusions si fermes et si sages de son rapport sur la prophylaxie de la
clavelée.
Cette nomenclature serait interminable, si elle devait être complète. Il
n'est peut-être pas un chapitre de la pathologie des infections animales
que Nocarp n'ait enrichi ou rénové.
Ce n’est là qu'une partie de son œuvre.
394 NOTES ET INFORMATIONS
Une collaboration, qui fut la consécration d'une indéfectible amitié de
vingt années, m'interdit de parler d'un livre que Nocarp inspira et me
prive du plaisir de dire tout le bien que j'en pense.
Mais il faudrait montrer ce que fut Nocarp dans les Sociétés et les Aca-
démies. Il faudrait le montrer surtout dans les Congrès internationaux,
s'imposant à tous par sa science et par son éloquence, remportant des
victoires, en merveilleux tacticien qu'il était, conquérant tous les cœurs
par son aménité et son entrain. € C'était le Français idéal », a dit un
savant allemand qui le connaissait bien. On ne saurait faire un plus bel
éloge de notre ami.
Ce que Nocarp a fait dans la science, il l’a réalisé dans l’enseignement.
Sa mission d'enseignant lui apparait comme un devoir sacré et pri-
mordial. Presque toujours seul pour assumer les multiples obligations
de sa chaire, il pourvoit à tout avec une impeccable ponetualité. Ce savant,
dont les instants sont si précieux, consacre plusieurs heures par semaine
à enseigner les techniques les plus élémentaires. Il multiplie les formes
et les occasions de la démonstration; il communique à tous ceux qui l'ap-
prochent son ardeur et sa foi; son service est une ruche bourdonnante,
débordante de vie et d'activité.
Nocarp eut à un degré rare le don et la passion de l’enseignement. Il
fut un maitre de la narole, un séducteur et un conquérant de la pensée,
sans avoir jamais Cultivé l’art de plaire. On ne trouve dans ses discours
ni vocables rares, ni jeux de rhétorique. C’est par la sincérité et les con-
victions qui sont en lui qu'il force l'attention des auditoires les plus indif-
férents et qu'il con quiert les plus rebelles.
Cet esprit droit et lucide ne connait point les hésitations de l'expres-
sion. Le mot juste vient tout naturellement sur ses lèvres ou sous sa
plume. Il parle avec une remarquable facilité, et ses manuscrits, jamais
recopiés, portent à peine quelques ratures.
Son œuvre est faite de probité et de sincérité. Jamais savant plus con-
sciencieux n exerça sur lui-même une plus rigoureuse critique. Ses expé-
riences sont vingt fois renouvelées, et bien souvent il demande à d'autres
de nouveaux contrôles avant d’en proclamer les résultats. Ceux-là seuls
qui ont vécu près de lui peuvent avoir une idée de ses scrupules d'expé-
rimentateur. Plusieurs découvertes retentissantes appartieudraient à
Nocarp, s'il avait consenti à mettre plus de hâte dans la publication de
constatations qu'il jugeait toujours insuffisamment vérifiées.
Mais dès que la vérité lui apparait, le savant timide et prudent se trans-
forme en un apôtre ardent et plein de foi. Il croit en la science, en la
sécurité de ses méthodes; jamais le doute ne vient effleurer son esprit.
La controverse renforce sa croyance et la contradiction apparente des faits
ne trouble point sa sérénité. |
Nocarp fut admirable à Montoire. Alors que toutes les données acqui-
ses sur la malléine paraissent controuvées, que tous croient à la faillite
de la méthode, lui seul, ou presque seul, garde toute sa confiance. Les cons-
NOTES ET INFORMATIONS 39)
tatations nouvelles, basées sur la méthode expérimentale, ne peuvent être
controuvées par les résultats d’une observation, même séculaire; ce sont
les conceptions anciennes qui doivent être modifiées. Avec une éton-
nante sagacité, il esquisse une interprétation que l'expérience confirme
sur tous les points.
Cet épisode avait eu un précédent peu conuu. Qu'on me permette de le
rapporter ici. C'était au Congrès de Berne, en 1895. On discutait devant
une assemblée, hostile en grande majorité, la valeur de la tuberculine
dans le diagnostic et la prophylaxie de la tuberculose ; Nocarp avait pro-
noncé un superbe plaidoyer; il avait fait voter par acclamation toutes
ses propositions et remporté un magnifique succès.
Ce succès de tribune ne lui suffisait pas cependant. Il voulait convain-
cre, par une démonstration directe, les plus considérables de ses audi-
teurs. Trois animaux sains en apparence, mais dénoncés comme tubercu-
leux par la tuberculine, devaient être abattus. L'expérience fut faite à
l'auberge de la Waldau, à quelques kilomètres de Berne; il n'y avait là
qu'une trentafne d'assistants, mais tous étaient des maitres réputés, l'élite
des spécialistes du monde entier. Chez deux des sujets, l'autopsie permet
de découvrir les lésions annoncées ; on ne trouve rien chez le troisième.
Dans ces circonstances solennelles, après les votes de la veille, l'échec a les
proportions d’un désastre et certains ne savent pas dissimuler leur joie.
Mais voici que Nocarp parait et qu'il accueille par un sourire l'annonce
de la défaite: « Ce n’est pas possible, dit-il à ceux qui l'entourent; vous
n'avez pas bien cherché. » Puis, sans hâte, toujours calme et souriant, il
cherche avec méthode, sûr de lui et de sa science. Et tandis que toute
l'assistance, anxieuse, suit chacun de ses mouvements, voici qu'un foyer
méconnu apparaît sous le couteau.
L'émotion est telle que des applaudissements éclatent de tous côtés, et
Nocarp estétonné de cette manifestation. Lui seul n'avait pas douté; lui seul
n'avait pas éprouvé l'angoisse qui nous étreignait, et à ceux qui le félici-
taient il disait simplement: « Le résultat était certain; ne vous avais-je
pas dit que la méthode est sûre? »
Jamais savant n'eut l'esprit plus positif, ne fut plus sobre de commen-
taires et de déductions. Ce n'est point à la dialectique qu'il a recours pour
défendre ses conclusions. A ses adversaires il oppose sans cesse des
faits nouveaux et il les accumule jusqu'à ce que la démonstration soit
évidente. Il reste fidèle à la tactique pasteurienne et il semble que l'on
soit reporté aux premiers temps de l'ère nouvelle.
Son intelligence est orientée vers l'application; cette tendance est appa-
rente dès ses premiers travaux et il est peu de ses recherches qui ne
comportent des enseignements pratiques.
La nécessité d'une telle direction lui apparaît plus évidente encore en
ces derniers temps. Comment n'être point effrayé par la disproportion,
chaque jour plus monstrueuse, entre l'énorme effort réalisé dans les seien-
ces médicales et la pauvreté des résultats utilisables? N'est-il pas possi-
396 NOTES ET INFORMATIONS
ble de discipliner la recherche, de limiter son objet à des buts concrets
immédiats, de faire rendre à nos méthodes tout ce qu'elles peuvent don-
ner à l'hygiène et à la médecine ?
C'est cette mission que Nocarp entendait assigner aux € Instituts »
dont il recommandait la création au Congrès de Bade; c'est ce but que
lui-même voulait poursuivre dans ce magnifique « laboratoire de recher-
ches » d'Alfort, que son ami Viet aménageait avec la science d'un ingé-
nieur consommé. La mort a interrompu son œuvre; il eut au moins cette
suprême consolation de savoir qu'elle serait dignement continuée par l’un
de ses élèves les plus affectionnés.
J'ai terminé la tâche que je m'étais imposée. Je savais tout ce qui me
manquait pour louer dignement celui dont je suis fier d’avoir été le dis-
ciple et l'ami, et je n'eusse point accepté cette trop lourde mission, si je
n'avais su remplir l'un de ses vœux.
J'ai dit ta vie, mon bon maitre, devant ceux que tu aimais et qui t'ai-
maient. J'ai dit ta vie devant ce veillard vénéré qui te saluait tout à
l'heure, vers qui vont nos respects et nos affections, devant notre maître
à tous, le grand et l’immortel CHaAuvEAu. J'ai dit ta vie devant tes parents
affectionnés, devant tes amis les plus chers, devant ceux qui n'oublient
point et qui te pleurent encore. J'ai dit ta vie devant tes collègues, tes
confrères, tes élèves.
Tous nous garderons pieusement fon souvenir. Dans cette maison qui
te fut chère, que tu illustras par ta science et par ton travail, ton nom
restera à jamais respecté.
Et plus tard, bien plus tard, quand des années et des années auront
passé, quand notre pauvre science d'aujourd'hui sera noyée dans de nou-
veaux concepts, ce monument redira aux générations à venir ce que fut
Nocarp d'Alfort, le grand savant et le bon Français.
Discours de M. le D' Roux
Membre de l'Institut, Directeur de l’Institut Pasteur.
MESSIEURS,
Pendant plus de vingt années, la vie d'Edmond Nocarp et la mienne
ont été pour ainsi dire confondues; c'est pourquoi nos amis m'ont designé
pour parler en leur nom dans cette cérémonie.
En 1876, j'étais aide de clinique à l'Hôtel-Dieu; un jour, le chef de:
laboratoire, LonGuETr, me présenta un grand et solide garçon plein de
naturel et d’aisance, dont la physionomie révélait le caractère. Elle res-
pirait la franchise, l'œil rayonnait la finesse et la bonté, le sourire de la
bouche un peu sensuelle était charmant.
Ce jeune homme, en bel équilibre de santé morale et physique, c'était
Nocarp, chef de service à l'École d’Alfort. Tel je l'ai connu en 1876, tel il
est resté jusqu'à la fin. Il émanait de sa personne de la loyauté, de la
cordialité et comme une force saine et communicative.
NOTES ET INFORMATIONS 391
Les idées pastoriennes commençaient alors à agiter la médecine et
dans cette première entrevue nous parlämes des maladies contagieuses
des animaux. Avant de nous séparer, nous avions tracé un programme
d'expériences à entreprendre sur la rage.
Mais c’est surtout à partir de 1881 que nos relations sont devenues
intimes. J'étais entré, en 1878, au laboratoire de Pasteur; j y introduisis
Nocar», sur qui BouLey avait déjà attiré l'attention du maitre.
Ces belles années de notre existence, nous les avons passées, côte à
côte, à travailler à l'œuvre pastorienne. Labeurs, succès, espoirs, décep-
tions, tout nous a été commun.
À expérimenter ensemble, on apprend vite à se connaître; les compa-
gnons de laboratoire pénètrent dans l'esprit et aussi dans le cœur les uns
des autres. De bons collaborateurs sont bientôt de vrais amis. L'amitié
de Nocarp était la plus réconfortante qu'on puisse éprouver, ni exigeante,
ni inquiète, mais attentive et agissante ; amitié de toute sécurité, à la fois
solide et délicate.
Le collaborateur valait l'ami. Riche d'idées lui-même, il excellait à
éveiller les idées chez les autres. Plein de hardiesse dans ses conceptions,
il était maintenu dans la bonne voie par un bon sens supérieur. Avec lui,
on ne s’attardait pas longtemps aux charmes de la spéculation, il fallait
aboutir. Il concevait rapidement l'expérience à faire et l'exécutait avec
une habileté de technicien consommé. Nocarb prenait pour lui la plus
grande partie de la besogne; il m'épargnait la peine et partageait avec
moi le succès.
: Que ne dois-je pas à cette collaboration! Elle m'a souvent obligé à
secouer la torpeur où je me serais endormi, elle m'a associé à la renom-
mée de Nocarp, elle m'a procuré les meilleurs moments de ma vie. Aussi,
depuis que la mort de Nocarp l’a interrompue, il me semble que les re-
- cherches scientifiques ont moins d’attrait.
L'entrée de Nocarp au laboratoire de PASTEUR a été un heureux évé-
nement. Tout le monde y a gagné : Nocarp, l'École pastorienne et la
science elle-même. NocarD y trouvait une méthode, une direction scien-
tifique et des moyens de travail; en retour, il apportait ses connaissances
vétérinaires, son esprit prompt à comprendre, son activité et cet admirable
sens critique qui fit bientôt de lui le conseiller indispensable. De plus, il
- mettait au service de la doctrine pastorienne une force de persuasion que
peu de personnes ont possédée au même degré que lui.
Si les vaccinations charbonneuses ont été si promptement acceptées par
les vétérinaires et les agriculteurs, nous le devons en partie à Nocarp.
Après les expériences de Pouilly-le-Fort, comme CHAMBERLAND, Comme
THUILLIER, Comme moi-même, Nocarp courait les fermes, inoculant des
- milliers d'animaux et faisant des conférences aux agriculteurs assemblés.
Il laissait derrière lui la bonne semence et emportait la sympathie et la
confiance des fermiers briards et beaucerons. Ce jeune professeur sans
morgue, qui organisait le travail avec ordre et entrain, qui expliquait
398 NOTES ET INFORMATIONS
avec une conviction si persuasive les avantages des inoculations préven-
tives, fit une impression durable sur nos populations agricoles. Et puis,
une fois la besogne finie, Nocarp se montrait si aimable convive, si gai
compagnon que les obstinés qui avaient résisté aux raisons du savant
étaient gagnés par le charme de l’homme. Vraiment, PASTEUR ne pouvait
souhaiter un apôtre plus entrainant.
De ce premier contact avec les agriculteurs date l'influence que Nocarp a
exercée sur eux; elle a grandi avec le temps, et il est devenu leur conseiller,
celui auquel on recourt quand les épizooties frappent les étables.
L'aide puissante qu'il nous a donnée au moment des vaccinations anti-
charbonneuses, il nous l’a prêtée encore lors des grandes querelles sur la
prévention de la rage. Il s’est jeté dans la mêlée, parlant et écrivant
comme il savait le faire, apportant sans relâche des expériences nouvelles.
Car il savait bien que seuls les faits ont vertu probante; sa manière de
soutenir une cause consistait à en assembler de décisifs, puis à les pré-
senter en un bel ordre qui augmentait leur valeur démonstrative.
Pour cela, il faut l'imagination qui suggère les expériences, l'activité
qui les réalise, la sagacité qui en démêle le fort et le faible, l'honnéteté
scientifique qui ne dissimule aucune difficulté, et enfin le talent d'expo-
sition qui fait ressortir ce qui doit apparaitre à tous. De ces qualités,
Nocarp a donné maintes fois la preuve ; jamais d'une manière plus écla-
tante que dans ses recherches sur la morve et la tuberculose. Elles res-
teront un modèle. Sans elles, nous ne saurions peut-être pas encore nous
servir, avec sécurité, des précieux moyens de diagnostic que nous four-
nissent la malléine et la tuberculine.
Une fois en possession de la vérité, mieux que personne Nocarp savait
la répandre; car il avait au suprême degré le don de persuasion. Non pas
seulement parce que sa parole était facile en même temps que précise et
courtoise, parce que son discours bien ordonné était dit d’une voix sym-
pathique, mais surtout parce qu'il savait avoir raison sans froisser per-
sonne. Les personnalités ne se sentaient pas à travers ses arguments. Ses
adversaires étaient convaincus et contents de l'être. De là, cette extraor-
dinaire influence que Nocarp prenait, tout naturellement et comme sans
le faire exprès, dans les commissions et les assemblées scientifiques. Elle
avait débordé bien en dehors des limites du monde vétérinaire, elle était
acceptée par les médecins et les biologistes. Au cours de ces vingt der-
nières années, dans les Congrès internationaux, NocaRp a été à maintes
reprises, et pour le plus grand avantage de notre pays, le représentant
de la science française.
Par ce don éminent de persuader, Nocarp a plus fait encore pour
l'avancement de la science que par ses travaux originaux. En faisant
accueillir la vérité de ceux qui la méconnaissaient, combien de tâtonne-
ments n'a-t-il pas supprimés, combien d'efforts et de controverses inutiles
n'a-t-il pas économisés ? Grâce à lui, la science a gagné un temps précieux,
et nous avons avancé plus vite sur le chemin du progrès.
nl
NOTES ET INFORMATIONS 399
Des générations de vétérinaires, des centaines de médecins français et
étrangers ont suivi son enseignement, soit à l'École d’Alfort, soit à l’Ins-
titut Pasteur. Tous gardent le souvenir de ces leçons lumineuses qu'ani-
maient l'amour du vrai et la joie d'enseigner. Il était impossible d'écouter
une leçon de Nocarp sans se sentir passionné pour la science et attiré
vers le professeur. Son action était encore plus profonde sur ceux qui ont
eu le bonheur de travailler dans son laboratoire. Ceux-là l'ont connu tout
entier avec sa bonhomie brusque, sa belle humeur dans le travail, son
coup d'œil sûr dans la recherche. Ils ont éprouvé la sensibilité de son âme,
sa générosité, son désintéressement. Il leur a communiqué le feu sacré,
son amour de l'indépendance et de la probité scientifique. Il faut les
entendre parler de NocaRp pour Comprendre quel maître, quel beau carac-
tère, quel brave homme il a été.
NocaRp a pris sa part de tous les événements survenus à l’Institut Pas-
teur depuis sa fondation. Quand la sérothérapie est entrée dans la pratique,
nous n’aurions jamais pu, sans Nocarp», installer aussi promptement un
service capable de répondre à la légitime impatience du public. Ses qua-
lités d'organisateur et de conducteur d'hommes, son habileté expérimen-
tale nous ont tiré d'affaire. Le laboratoire d’Alfort était devenu une suc-
cursale de l’Institut Pasteur; NocaRD y préparait des sérums, y instrui-
sait les jeunes vétérinaires qui sont devenus pour nous des collaborateurs
précieux, animés de l'esprit de leur maitre.
Nocarp était tout dévoué à cet Institut Pasteur, à la fondation duquel
il avait aidé et où s’est déroulée une bonne partie de sa vie scientifique.
Ce milieu de libre discussion, qui ne connaït guère d'autre hiérarchie que
celle du mérite et dont les membres sont unis par une estime mutuelle,
lui plaisait entre tous. Ses affinités y étaient satisfaites. D'ailleurs, il y
tenait une place à part, à cause de l'admiration que nous avions pour ses
travaux, de la reconnaissance que nous inspiraient ses services. Nous ne
lui marchandions pas notre affection et il nous la rendait bien.
Quand Nocarp venait à l'Institut, la bonne nouvelle se répandait aussi-
tôt; l’on accourait à mon laboraloire pour se rencontrer avec lui. Nocarp
apportait toujours quelques préparations ou quelques cultures; il tirait
des flacons de toutes ses poches et, au milieu de la bonne humeur que sa
présence suffisait à éveiller, il distribuait à chacun ce qui lui revenait.
On lui soumettait des projets d'expériences, on lui montrait celles en cours.
Il savait tant de choses qu'il avait toujours un bon avis à donner. Que
les heures passaient vite quand Nocarp, DucLaux, METSHNIKOV, VAIL-
LARD, CHAMBERLAND, pour ne nommer que ceux-là, se trouvaient ainsi
réunis!
Nocarp venait à l'Institut les mardis, après l’Académie, et les vendredis,
au sortir du Conseil d'hygiène; ces jours-là, nous dinions ensemble et
nous prolongions le repas en de cordiales causeries. Quel charmant
compagnon, sachant apprécier tout ce que la vie a de bon et sachant en
user |
300 NOTES ET INFORMATIONS
Tout cela n’est plus que souvenir ; en quelques mois, Duczaux et Nocarp
nous ont été ravis. Les belles heures que j'évoque s’en sont allées avec
ces chers disparus.
Nocarp était attaché de tout son cœur à l'Institut Pasteur; mais des
liens encore plus forts peut-être l’unissaient à l'École d'Alfort. J'en ai eu
la preuve lorsqu'il quitta la direction de l'École vétérinaire. Il était fatigué
et un peu déçu. Je lui proposai de renoncer aux fatigues de l’enseigne-
ment, de venir parmi nous se consacrer entièrement à la recherche
scientifique. NocarD refusa; il ne pouvait se séparer de cette École à
laquelle il s'était dévoué et qu'il avait illustrée.
Vous ne pouviez, Messieurs, choisir un meilleur emplacement pour
ériger un monument à celui qui a voulu vous appartenir jusqu'à la fin.
Vous avez dressé son buste parmi les arbres qui ont abrité ses prome-
nades, presque en face du pavillon qu'il a habité. près de cette cour des
forges où il a accompli ses premières découvertes, à peu de distance de ce
nouveau laboratoire de recherches que le Gouvernement a fait construire
pour Nocarp dans l'intérêt de l’agriculture. Nous en avions dressé les
plans ensemble avec le concours de notre ami Vrer. Qu'il était heureux
de le voir achevé! C’est à peine s’il a eu le temps de s'y installer.
Les amis de NocarD qui m'écoutent pourraient beaucoup ajouter à ce
que j'ai dit de lui. Chacun pourrait rappeler quelque nouvel exemple de
l'élévation de son caractère. C'est que, plus on pense à Nocarp, plus on
trouve de raisons de le regretter.
JALTE
Archives de Parasitologie , AT, 7907.
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MONUMENT DE NOCARD
Inauguré à Alfort, le 24 juin 1906.
Archives de Parasitologie, XI, 1907. PIATRIE
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Place de l'École-de-Médecine, PARIS (VI')
A. RAILLIET
Professeur à l’École vétérinaire d’Alfort, Membre de l'Académie de Médecine
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DES AN con PR RAR ESS 6 20 francs.
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MALADIES PARASITAIRES NON HICROBIENNES
DES ANIMAUX DOMESTIQUES
PAR
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Professeur à l'École vétérinaire de Toulouse
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M. KAUFMANN
Professeur à l'École vétérinaire d'Alfort
Un vol. in-18 de 180 pages avec une planche en couleurs, cartonné. Prix 2 fr. 50
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partant loujours du 15 Janvier À Pour l'Union postale ..................., 47 »
Le Recueil de Médecine vétérinaire paraît les 15 et 30 de chaque mois
Le numéro du 80 contient IN EXTENSO le Bulletin des séances de la Société centrale
de Médecine vétérinaire.
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ARCHIVES DE PARASITOLOGIE
RÉDACTION : 15, Rue de l'École de Médecine, PARIS VIe
ABONNEMENT :
Paris et Départements : 30 fr. — Union postale: 32 fr. par volume. -
Les Archives de Parasitologie publient des mémoires originaux écrits dans l’une ou
l’autre des sept langues suivantes : français, allemand, anglais, espagnol, esperanto, ita-
lien et latin. Les auteurs doivent, autant que possible, ‘FOURNIR UN TEXTE DACTYLOGRAPHIÉ
(écrit à la machine), afin de réduire les corrections au minimum.
Ce texte doit être conforme aux règles -suivantes :
1° On appliquera strictement les règles de la Nomenclature zoologique ou botanique
adoptées par les Congrès internationaux de zoclogie et de botanique;
20 On fera usage, tant pour les noms d’ auteurs que pour les indications bibliogra-.
phiques, des abréviations adoptées par ces mêmes Congrès ou par le Zoclogical Record
de Londres;
3° Les noms géographiques ou les noms propres empruntés à des langues qui n’ont
pas l'alphabet latin seront transerits conformément aux règles internationales adoptées
par les Congrès de zoologie;
4° Tout : nom d’ être vivant, arimal ou plante, commencera par une première lettre
capitale;
5° Tout nom scientifique latin sera imprimé en italiques (souligné une fois sur le
manuserit).
Dans l'intérêt de la publication et pour assurer le maximum de perfection dans la
reproduction des planches et figures, tout en supprimant des dépenses inutiles, nos
collaborateurs sont priés de se conformer aux règles suivantes :
1° Dessiner sur papier ou sur bristol bien blanc.
2 Ne rien écrire sur les dessins originaux.
3° Toutes les indications (lettres, chifires, nie de figures, ete. seront placées
sur un calqué recouvrant la planche ou le dessin.
4 Abandonner le plus possible le crayon à la mine de plomb pour le crayon Wolf
ou l'encre de Chine. :
Les auteurs d'articles insérés aux Archives sont instamment priés de renvoyer à
la Rédaction, dans ‘un délai minimum de huit jours, les épreuves corrigées avec le
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ls recevront gratis 50 tirés à part de leur article. Ils sont invités à faire connaître
sans délai s'ils désirent en recevoir un plus grand nombre (50 au maximum), à leurs
frais et conformément au tarif ci-dessous. Ce tarif ne vise que l'impression typographique
ilne concerne point les planches, dont le prix peut varier considérablement. Toutefois,
il importe de dire que, pour les exemplaires d'auteurs, les planches seront comptées
strictement au prix de revient. Les trés à part ne peuvent être mis en vente.
TARIF DES TIRÉS A PART
Une feuille entière.
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Le Gérant :
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École Professionnelle d'Imprimerie, à Noisy-le-Grand (Seine-et-Oise).
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ARCHIVES.
PARASITOLOGIE
RAPHAEL BLANCHARD
PROFESSEUR À LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE PARIS
MEMBRE DE L' ACADÉMIE DE MÉDECINE
PARIS
ASSELIN ET HOUZEAU, ÉDITEURS
PLACE DE L'ÉCOLE DE MÉDECINE
1907
Les Archives paraissent tous les trois mois,
CE Re SOMMAIRE
R. BzancrAnp el MARC BLATIN. — lmmunité de la Marmotte en hibernation à
l'égard des maladies paräsitaires.. . : .'. . . . no le elle QU LR 501
PasquaALEe MoLA. — Una nuova Tenia della Talpa (tav. IV). A ne En PART NS 379
Maurice LANGERON. — Notices biographiques. — XVII, Fritz Schaudinn
(1871-1906) (avec un fac-simile dans le texte et pl. VII). . . . : . . : . 388
CuarLes Joyeux. — Recherches sur le pouvoir antibactérien de l'extrait de
Cestodes pl: V'Et VIe I ST RSS EE AR DR AR OC AE k09
_M. Trurr. — Hyphomycète du type Achorion déterminant chez l'Homme
| des lésions trichophytoïdes. 52 177.86. 00 4e a PAPER AN 200)
Bruno GaLLi-VALERIO. — Notices biographiques. — XVIII. Prospero Sue
sino (avec deux portraits et un fac-simile dans le texte). . . . . . . . 425
R. BLANCHARD. — Parasitisme du Dipylidium caninwm dans l'espèce
humaine, à propos d’un nouveau cas ( avec 15 fig. dans le texte). . . . 439
J. Surcour. — Notes sur des Tabanides de la côte occidentale d'Afrique (pl. IX). 472
Revue bibliographique. . . . . DA UNE ET AD SE A SD OR PR AG A Ses 475
Notes et Informations (avec un portrait dans le texte et pl. X). . . . . . . 481
Planches IV-VIIT et X.
La planche IX paraîtra ultérieurement.
AVIS
Les Archives de Parasitologie sont publiées
par MM. ASSELIN et HOUZEAU, Éprisurs, Place de
l'École de Médecine, Paris (6°).
On est prié dé s’adresser aux Editeurs pour tout ce qui
concerne l'administration (abonnements, achat des volu-
mes antérieurs, etc.). À
. Les quatre premiers volumes ne sont plus représentés
en magasin que par un petit nombre d'exemplaires. Leur
prix sera prochainement élevé.
N.B.— Il est déja paru quatre fascicules du tome X ; par
exception, ce même volume comprendra un cinquième et dernier
fascicule, renfermant la table générale des dix premiers volumes.
La confection de cette table exigeant un certain temps, nous
continuons la publication du tome XI, pour ne pas infliger trop
de retard aux travaux qui attendent leur tour de publication.
IMMUNITÉ DE LA MARMOTTE
EN HIBERNATION A L'ÉGARD DES MALADIES PARASITAIRES
PAR
R. BLANCHARD et MARC BLATIN
L'un de nous a entrepris, depuis plusieurs années, des études
sur le parasitisme chez la Marmotte à l’état d'hibernation et sur
les réactions que présente cet animal vis-à-vis de quelques toxi-
nes (1); il espérait ainsi arriver à d'intéressantes constatations sur
le mécanisme de l'immunité. Une série de notes publiées en 1903
ont fait connaître des faits sur lesquels il nous a paru opportun de
revenir, en expérimentant dans des conditions tout à la fois plus
rigoureuses et de plus grande commodité.
A cette époque, le Laboratoire de Parasitologie, très médiocre-
ment installé, comme la plupart de ceux de la Faculté de médecine
de Paris, ne possédait aucun local où il fut possible d'entretenir
à l’état permanent une basse température, encore moins une tem-
pérature uniforme. [1 avait donc fallu chercher ailleurs une instal-
lation favorable aux expériences que l'on comptait entreprendre ;
on avait cru la trouver au Frigorifique installé dans les sous-sols de
la Bourse de commerce. Les animaux en expérience y avaient été
installés dans une petite chambre ; on allait les observer, suivant
les cas, une ou deux fois par jour.
La vaste et d'ailleurs très remarquable installation frigorifique
de la Bourse de commerce a été créée en vue de la conservation des
viandes, du poisson, du gibier, des fruits et des primeurs. Elle ré-
pond admirablement à ce but et rend de très grands services à cer-
tains marchands de comestibles, qui y accumulent de grandes pro-
visions et ne les en retirent, souvent après plusieurs semaines,
qu'au fur età mesure des besoins de la consommation. Il y règne,
suivant les salles, une température uniforme de quelques degrés
au-dessus ou au-dessous de zéro.
(1) R. BLancxarp, Expériences et observations sur la Marmotte en hibernation.
CR. Soc. de biologie, LV, p. 734-741 et 1120-1126, 1903.
Archives de Parasitologie, XI, n° 3, 1907.
19
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362 R. BLANCHARD ET M. BLATIN
R. Dubois a démontré que les Marmottes dorment mal par d'aussi
basses températures (1) : elles sont inquiètes, excitables, sortent fa-
cilement de leur somnolence, ou même restent éveillées, avec une
température rectale plus ou moins élevée. Ces faits étaient connus et
cependant on avait cru pouvoir installer les animaux en expérience
successivementdans des chambres à —3° et à + 3°. On espérait qu'en
leur fournissant une litière abondante ils se feraient une sorte de ter-
rier artificiel, au fond duquel se constituerait une atmosphère con-
finée, dont la température monterait plus ou moins, ce qui leur
procurerait un sommeil hibernal régulier. En réalité, cette prévi-
sion ne s'est pas réalisée : les animaux ont eu froid et ont très mal
dormi, d'autant plus que les fréquentes allées et venues du person-
nel et des clients, dans les couloirs parquetés et bordés de parois
en bois, occasionnaient un tapage et une trépidation très préjudi-
ciables au repos.
Pour ces raisons, il nous a paru nécessaire de reprendre les ex-
périences précédentes. Ayant pu disposer enfin, à la Faculté de
médecine, d'une vaste chambre en sous-sol, dont la température
est de + 6° en hiver et au printemps, nous avons pu instituer de
nouvelles recherches, cette fois dans de très bonnes conditions.
Toutes nos Marmottes nous parviennent des Alpes vers la fin d’oc-
tobre: elle arrivent réveillées et très excitées par le voyage; elles
sont alors d’un maniement irès dangereux. Transportées dans le
sous-sol, elles s'y endormentpromptement, d'ordinaire en moins de
24 heures, et elles continuent d'y dormir avec la plus grande régu-
larité,même jusqu’en avril et mai; elles ne sortent de leur engour-
dissement que tous les quinze jours en moyenne, pour vider leur
vessie. Toutes dorment et l’on n’observe plus cette veillée des armes
qui était si frappante au Frigorifique et au grenier du labora-
toire (2) : dans ces milieux défavorables, à température trop basse
ou trop variable, les animaux dormaient mal, ainsi qu'il a été dit
plus haut; un ou plusieurs d’entre eux étaient toujours éveillés,
(1) R. Dugors, Étude sur le mécanisme de la thermogenèse et du sommeil chez
les Mammifères. Physiologie comparée de la Marmotte. Annales de l’Université
de Lyon, XXV, in-8° de 268-Lxx p. avec 125 pl., 1896.
(2) Ce grenier, où sont installées des cages pour les animaux en expérience, est
tourné en plein midi, d’où de grandes variations de température; par excès de
froid ou de chaleur, les Marmottes ne peuvent y dormir régulièr ement pendant
l'hiver.
IMMUNITÉ DE LA MARMOTTE 303
prêts à donner l'alarme aux autres par un sifflement aigu, à la
moindre alerte.
Chez une Marmotte en sommeil hibernal régulier, la tempéra-
ture subit de grandes oscillations : elle reste normalement aux
environs de + 8 à 10°, mais peut remonter jusqu'à 95° et même
au-delà, quand le sommeil devient moins profond. Nous avons
cherché à établir une relation entre la marche de la température
et celle des infections expérimentales, mais nous avons fini par
nous convaincre qu'on ne saurait tirer aucune conclusion précise
de l'étude thermométrique des Marmottes infectées.
Pendant la saison d'hiver, le nombre des globules du sang, éva-
lué par le moyen de l’hématocrite, par conséquent sans distinction
entre hématies et leucocytes, subit une diminution progressive et
constante. On l'observe aussi bien chez les animaux sains, main-
tenus à une trop basse température, telle que celle réalisée au Fri-
gorifique ; chez les animaux inoculés d’une trypanosomose et con-
servés en sommeil hibernal, dans la cave à + 6°; chez des animaux
également inoculés d’une trypanosomose, conservés à l'état de
veille dans l’une des salles du laboratoire et régulièrement nourris
de carottes. Nous pensons donc qu'il s'agit là d'un phénomène
général, qui n’a aucune relation avec la maladie expérimentale. Le
tableau suivant montre la marche de cette diminution progressive
du nombre des globules sanguins.
La déglobulisation progressive de la Marmotte en sommeil hi-
bernal a été déjà notée par Vierordt (1) et par R. Dubois (2) ; toute-
fois, ces observateurs n’ont point vu que la diminution du nombre
des globules ne se fait pas suivant une courbe régulière. L'examen
du tableau ci-dessous permet, en effet, de constater que le nombre
des globules, au lieu de subir une diminution régulière, se relève
parfois assez brusquement, pour redescendre ensuite. Ces ressauts
de la ligne de chute peuvent tenir à une exagération passagère de
la fonction hématopoiétique, sous des influences qu'il s'agirait de
déterminer; nous croyons plutôt qu’ils sont dus à une suractivité
de la fonction rénale, qui déshydrate le sang et, par conséquent,
tend à augmenter la quantité des globules par rapport au plasma.
(4) Vrerorpr, Notiz über die Zählung der Blutkôrperchen. Zeitschrift fur rat.
Med., XXXI, p. 863, 1887.
(2) Loco citato, p. 82-84.
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IMMUNITÉ DE LA MARMOTTE 309
Dubois a d’ailleurs reconnu que le sang de la Marmotte endormie
contient moins d'eau que celui de la Marmotte éveillée (1).
Les colonnes A, B, C et D du tableau précédent correspondent à
des animaux non inoculés, qui étaient conservés en sommeil hiber-
nal dans la cave à + 6°.
Pour réveiller une Marmotte et la maintenir éveillée, il suffit de
la transporter dans une pièce chauffée, à une température de 12 à
150, puis de lui donner à manger. Pour la faire dormir, il suffit de
la transporter à la cave à + 6° et de ja priver de nourriture. Les
variations nécessaires à l'expérience se réalisent donc avec une ex-
trême facilité : on les a littéralement dans la main.
I. — Immunité à l’égard des trypanosomoses.
La réceptivité des Marmottes (Arctomys marmota) à l'égard de
divers Trypanosomes varie du tout au tout, suivant que les ani-
maux sont éveillés ou en état de sommeil hibernal. A l’état de
veille, les Marmottes se laissent infecter à coup sûr par Trypa-
nosoma Brucei, Tr. gambiense, Tr.Evansiet par le Trypanosome d'El
Debab; toutefois, elles se montrent réfractaires au Tr. Lewisi, s’il
est permis de tirer une conclusion d’une seule expérience. A l'état
de sommeil hibernal continu, elles jouissent d’une immunité abso-
lue envers les trypanosomoses (2).
Ces faits, croyons-nous, ressortenttrèsnettementde nos expérien-
ces, dont quelques-unes sont rapportées ci-dessous ; les autres
étant toutes semblables à celles que nous résumons, il nous a paru
inutile de les consigner ici. Des constatations identiques résultent
d’ailleurs d'expériences du même genre, entreprises avec d'autres
parasites, ainsi que nous aurons l’occasion de le faire connaître
ultérieurement.
Pour nous en tenir aux seules trypanosomoses, voici de quelle
manière nous avons opéré :
(1) Loco citalo, p. 86.
(2) Dans mes premières expériences, faites dans les conditions défavorables qui
viennent d’être dites, j'ai constaté la réceptivité de la Marmotte éveillée à l'égard
du Tr. Brucei. Les expériences ci-dessous m'’autorisent à donner une interpréta-
tion nouvelle de l'expérience XXVIII (C. R. Soc.de biologie, p. 1123, 1902). L’ani-
mal dont il s’agit a sûrement guéri de sa première inoculation; il n’a été infecté
que par la seconde. La Marmotte en sommeil hibernal régulier ne se laisse donc
pas infecter par le Tr. Brucei. — R. Br.
366 R. BLANCHARD ET M. BLATIN
Nos virus sont conservés dans le sang des animaux généralement
usités à cet effet dans les laboratoires (Rats, Souris, Singes). Le
sang parasité est recueilli avec une pipette à la queue ou à l'oreille
des animaux, ou encore par ponction du cœur; suivant la richesse en
Trypanosomes, constatée au microscope, le sang est dilué dans une
solution de citrate de potasse au centième, additionnée ou non
de sérum physiologique. Le mélange ainsi obtenu est inoculé, à la
dose d’un centimètre cube environ, dans le péritoine de Marmottes
éveillées ou endormies, suivant les cas.
L'incculation à l'animal éveillé est délicate et dangereuse, car
il est très difficile de le fixer dans l'appareil à contention : mieux
vaut le faire maintenir par un aide robuste et expérimenté, qui
tienne d'une main la tête et les pattes de devant, de l’autre les pattes
de derrière. L'expérience nous à du reste montré qu'il est inutile
d'opérer sur la Marmotte éveillée, l’inoculation à une bête endor-
mie, qu'on met au chaud et laisse s’éveiller aussitôt après, don-
nant identiquement les mêmes résultats.
Pour savoir si un animal en expérience est atteint ou non de
trypanosomose, il suffit, en général, de rechercher les parasites
dans une goutte de sang périphérique, à un grossissement de 400 à
500 diamètres. Quand trois ou quatre examens successifs, prati-
qués à 48 heures d'intervalle, se sont montrés négatifs, on peut
tenir l'animal pour non atteint ou guéri. Pour plus de sûreté, nous
avons fréquemment inoculé à des Souris du sang de nos Marmottes
se trouvant dans ces conditions; les inoculations ont toujours été
négatives et la suite des observations nous à toujours prouvé qu'ef-
fectivement nos animaux étaient indemnes. Toutefois, il serait
imprudent de généraliser une pareille méthode: on peut démontrer
l'existence de Trypanosomes dans le sang du Cobaye, en inoculant
ce sang à la Souris, alors que l'examen microscopique, pratiqué
plusieurs jours de suite, n’a pas permis de trouver le moindre pa-
rasite dans la circulation périphérique.
Expériences avec Trypanosoma gambiense.
ExPÉRIENCE I. — Marmotte inoculée le 12 janvier 1905 avec 2 ec. de
sang citraté de Cercopithecus ruber, assez riche en Trypanosomes. L'ani-
mal est éveillé au moment de l’inoculation. On le porte au Frigorifique et
IMMUNITÉ DE LA MARMOTTE 307
on l'y laisse sans nourriture, dans une chambre à — 3; il ne s'endort
pas.
La température oscille entre 25 et 30° pendant les quatre premiers jours;
elle s’abaisse à 13° au 7° jour, mais remonte à 36° le 10° jour, puis oscille
entre 36 et 31° les jours suivants. Le 15° jour, l'animal est porté dans une
chambre à + 3°; la température se maintient entre 33 et 37° les jours
suivants; le 30° jour, elle commence à s’abaisser progressivement;
le 34° jour, la mort survient par une température de 15°.
Les Trypanosomes se sont montrés dans le sang au 8° jour et s’y sont
maintenus, sans être jamais nombreux; c’est seulement vers le 25° jour
qu'on à fini par en trouver 10 et plus par champ microscopique.
Le 29° jour, on en comptait 30 par champ. A cette date, la température ayant
commencé sa chute progressive vers la mort, le nombre des parasites a
suivi une diminution parallèle : il n’était plus que de 20 par champ au
31° jour et seulement de 8 à 10 au 33° jour, au moment de la mort.
Autopsie. — Poumons normaux. Péricardite à épanchement louche;
fausse membrane entourant complètement le cœur. Foie muscade très
gros, friable. Rate très hypertrophiée, environ dix fois plus grosse qu'à
l'état normal. Reins normaux. Estomac rempli de sang; muqueuse
gastrique parsemée de taches hémorrhagiques ulcérées. Intestin avec
épanchement de sang et de bile; quelques taches congestives sur la mu-
queuse; pas d'Helminthes. Pas d'hypertrophie des ganglions Iymphatiques.
Vessie vide.
Exp. II. — Marmotte inoculée le 12 janvier 1905, avec le même virus
que la précédente. Portée au Frigorifique, dans une chambre à — 3°; on l'y
laisse sans nourriture; elle ne s'endort pas. La marche de l'expérience
est tout à fait conforme à la précédente; la température se comporte de
même. L’animal est porté au 14° jour dans une chambre à + 3°; sa tempé-
rature se maintient très élevée, pour subir, à partir du 26° jour, une chute
progressive de 35°5 à 9°,aboutissant à la mort. Celle-ci survient le 13février,
au 33° jour.
Les Trypanosomes apparaissent le 8° jour et se maintiennent dans le
sang jusqu'aux derniers jours, sans être jamais nombreux. Le 30° jour,
on en compte 10 par champ microscopique, chiffre le plus élevé de ceux
obtenus ; la chute de la température détermine la disparition progressive
des parasites : on n’en trouve plus qu'un seul par champ microscopique,
peu d'heures avant la mort. d
Autopsie. — Poumons normaux. Péricardite purulente avec léger exsudat
contenant des Trypanosomes; des fausses membranes. Cœur conges-
tionné. Foie de couleur pâle. Rate hypertrophiée, environ trois fois plus
grosse qu'à l’état normal. Reins normaux; légère adhérence de la capsule.
Tube digestif normal, sauf de légères ecchymoses dans l'intestin grêle;
pas d'Helminthes. Un gros ganglion hémorrhagique près du pylore. Ves-
sie contenant environ » ec. d'urine légèrement albumineuse.
308 R. BLANCHARD ET M. BLATIN
Exp. III. — Marmotte témoin, inoculée le 12 janvier 1905, avec le même
virus que les précédentes. Elle est réveillée et le reste constamment par
la suite. On la garde au laboratoire et on la nourrit ; la chaleur, d’ailleurs
très inégale de la nuit au jour, la tient éveillée. Les Trypanosomes se
montrent dans le sang au 7° jour; ils y persistent 28 jours de suite,
puis disparaissent. La température oscille entre 32 et38° et descend progres-
sivement jusqu à 16° pendant les six derniers jours. La mort survient le
19 février, au 38° jour.
Autlopsie. — Animal très amaigri. Poumons sains. Péricardite purulente
avec adhérences. Ascite purulente. Foie muscade. Rate énorme. Reins
d'aspect normal. Intestin grêle sans Helminthes. Quelques ecchymoses
dans le gros intestin. Système nerveux central d'aspect normal.
Les Marmottes inoculées de la maladie du sommeil (Trypanosoma
gambiense) et conservées au Frigorifique dans des chambres à — 3°
et à + 3° dorment mal : leur sommeil est entrecoupé de longs
réveils et d'agitation; elles contractent la trypanosomose et en
meurent tout aussi sûrement et à peu près dans le même laps de
temps que la Marmotte témoin, inoculée dans les mêmes condi-
tions, mais conservée à l'état de veille, dans une chambre chauffée.
Ce résultat, conforme à celui des anciennes expériences, met
bien en évidence l’action néfaste des trop basses températures. Ces
faits constatés d'une façon certaine, nous avons continué nos ino-
culations dans les mêmes conditions, mais conservé nos animaux
en expérience dans la cave à + 6°; nous avons déjà dit que, sauf
de rares exceptions (exp. IV), elles s’y endorment très prompte-
ment et continuent d'y dormir de la façon la plus régulière. Voici
le résumé de quelques expériences de cette seconde série :
Exp. IV. — Marmotte inoculée pendant le sommeil hibernal, le
10 février 1905, avec 9 ce. de sang citraté de Marmotte infestée par le
Tr. gambiense. La température est de 11° au moment de l'inoculation. L'ani-
mal est placé à la cave. Le 11 au matin, il est réveillé et sa température
est de 37°; il ne se rendort plus. Les parasites se montrent dans le sang
au 5° jour. La mort survient le 28 février, au 18° jour.
Exp. V.— Marmotte inoculée le 12 février, pendant le sommeil, sa tempé-
rature étant de 14°; elle reçoit 3 cc. de sang citraté de Cebus capucinus très
richeen Tr. gambiense (300.000 par millimètre cube). Portée à la cave, elle
continue à dormir, avec une température moyenne de 9. Elle se réveille
temporairement le 4° jour (température 33°) et le 9° jour (temp. 27°), mais
se rendort promptement. Au 28: jour, elle n’a pas encore présenté de Try-
panosomes dans le sang.
IMMUNITÉ DE LA MARMOTTE 309
Le 12 mars, au 28° jour, on la remonte au laboratoire ; on place sa cage
à proximité du poële; elle ne tarde pas à se réveiller. On l'inocule alors
avec 8 gouttes de sang citraté de Souris infestée par le Tr. gambiense. La
Marmotte est gardée au laboratoire, oùelle reste éveillée. Le 18 mars, c'est-
à-dire au 6° jour après cette nouvelle inoculation, les parasites se mon-
trent dans le sang, où ils persistent jusqu'à la mort. Celle-ci survient le
2 avril, 21 jours après la seconde inoculation.
Exe. VI. — Marmotte inoculée le 2 mars, pendant le sommeil, sa tempéra-
ture étant de 8’;on lui injecte 1 cc.5 de sang défibriné d'un Maki de Mada-
gascar (Lemur rubriventer Is. Geoffroy) très riche en Trypanosomes (140.000
par millimètre cube). L'animal est mis à la cave, où il continue à dormir;
il se réveille temporairement le 7 mars, au 6° jour, mais ne tarde pas à
se rendormir. Au 18° jour, il ne s’est encore montré aucun Trypanosome
dans le sang. La Marmotte est alors remontée au laboratoire, où elle se
réveille. On la nourrit; elle reste éveillée et continue à se bien porter
Pendant plus de deux semaines, on procède à l’examer journalier du sang,
sans jamais y trouver ancun parasite. Puis l'animal continue à vivre au
laboratoire, sans présenter aucun malaise.
Exp. VII. — Marmotte inoculée le‘12 mars, pendant le sommeil, sa tempé-
rature étant de 8’:elle reçoit 1cc.de sang citraté d’une Souris très infestée
de Tr.gambiense. Le jour de l’inoculation, la température monte à 24°; elle
retombe à 9° le lendemain. L'animal continue à dormir et les parasites ne
se montrent pas dans le sang. Le 1° avril, les Trypanosomes n’apparais-
sant toujours pas, on remonte la Marmotte au laboratoire; elle s’y réveille
et continue à se bien porter.
Exp. VIII. — Marmotte inoculée à l’état de veille, le 18 mars, avec 2 ce.
de sang de Rat citraté, contenant beaucoup de Tr. Lewisi. Il ne se produit
aucune infection.
En même temps que les Marmottes 4 et suivantes, on a toujours inoculé
avec le même virus des Souris témoins; toutes ont été infectées.
Exe. IX. — Marmotte inoculée du Tr. gambiense, le 4 mai 1905 ; éveillée
au moment de l'inoculation. Reste éveillée et meurt le 21° jour.
Exp. X. — Marmotte inoculée avec la précédente, pendant le sommeil.
S'éveille au 4° jour et reste éveillée. Elle meurt le 25° jour.
Exp. XI.— Marmotte inoculée en même temps et avec le même virus que
les deux précédentes. Reste endormie. Vit encore le 11 juillet, sans avoir
jamais présenté de Trypanosomes.
Ces expériences démontrent, entre autres conclusions :
1° que la Marmotte en sommeil hibernal jouit d'une immunité
absolue à l'égard de Trypanosoma Brucci et de Tr. gambiense ;
2° que cette immunité ne se prolonge pas au-delà du sommeil
310 R, BLANCHARD ET M. BLATIN
hibernal, l'animal réveillé étant immédiatement apte à se laisser
infester par les trypanosomoses mêmes auxquelles il résistait pré-
cédemment;
30 que cette immunité ne semble pas être déterminée par un
phénomène phagocytaire, mais par le phénomène physique de
l’abaissement de la température du corps des animaux inoculés ;
4° que cette immunité ne s'établit pas d'emblée : pendant les
quatre à cinq premiers jours, et même jusqu'au neuvième jour,
les Trypanosomes luttent contre le refroidissement et parviennent
à se maintenir dans l'organisme, les animaux réveillés à ce moment
contractant alors une infection ( spontanée » qui suit la marche
normale.
Il nous à paru nécessaire de contrôler ces conclusions par des
expériences avec des Trypanosomes d'autre espèce, afin d'établir
si l'immunité à frigore ainsi mise en évidence était générale, ou au
contraire spéciale aux deux espèces étudiées jusqu'à présent. Nous
nous proposions de rechercher également si, dans certaines condi-
tions, l'immunité hibernale ne pourrait pas se maintenir à l'état
de veille, puis enfin nous efforcer de guérir un animal éveillé, en
pleine évolution de sa trypanosomose, en le ramenant à l'état d'hi-
bernation.
Pour ces expériences nouvelles, nous nous sommes adressés au
Trypanosoma Evansi du surra, que le Professeur Nuttall, de Cam-
bridge, a eu l’amabilité de nous fournir. Nous avons également eu
recours au virus d'El Debab, que nous devons à l'obligeance du
Dr Ed. Sergent. Nous adressons à ces deux savants collègues nos
plus sincères remerciements.
Expériences avec Trypanosoma Evansi.
Ex». XII — Marmotte en sommeil, inoculée, le 8 janvier 1906, avec du
sang de Souris très riche en Trypanosomes. Est portée à la cave à + 6°
et y reste endormie. Le 10 janvier, éveillée ; pas de parasites dans le sang.
Le 13, endormie; pas de parasites. Le 15, au septième jour, éveillée;
rares parasites. Le 17, éveillée; parasites plus nombreux. Le 19, toujours
éveillée; parasites très nombreux, mais presque tous immobiles; l'animal
est très malade. Le 22, sommeil; les parasites ont disparu. Le 24, mort,
au 16° jour.
Autopsie. — Estomac très dilaté par une énorme quantité de sang
noirätre; muqueuse très congestionnée, avec de petites ulcérations super-
IMMUNITÉ DE LA MARMOTTE pla
ficielles. Intestin grêle sans Helminthes; de petites hémorragies de la
muqueuse. Rate énorme.
Exe. XIII. — Marmotte témoin, endormie, inoculée en même temps et
avec le même virus que la précédente. On la conserve au chaud, au labo-
ratoire: elle se réveille très promptement et reste éveillée par la suite.
Le 11 janvier, au 3° jour, pas de Trypanosomes dans le sang. Le 13, para-
sites assez nombreux. Le 15, parasites très abondants; l'animal semble
malade. Le 17, au 9° jour, mort.
Autopsie. — Rate énorme. Pas d'Helminthes dans l'intestin grêle.
Exp. — Marmotte endormie, inoculée, le 26 février 1906, avec du
sang de Souris très riche en Trypanosomes On la porte immédiatement à
la cave, où elle continue à dormir. Le 1° mars, dort bien ; pas de parasites
dans le sang. Le 5 mars, même état. Le 8, même état. On remonte alors
l'animal au laboratoire, où il se réveille rapidement et reste ensuite
éveillé. Le 13 mars, pas de parasites. Le 31, toujours le même état. Le
3 avril, encore le même état ; on inocule sans résultat quelques gouttes de
sang de notre Marmotte à une Souris. Le 11 avril, animal toujourséveillé,
toujours bien portant. Le 30 avril, au 63° jour, même état.
Exe. XV. — Marmotte témoin, endormie, inoculée le 26 février 1906,
en même temps et avec le même virus que la précédente. On la met
au chaud au laboratoire; elle s'y réveille et reste ensuite éveillée.
Le 1° mars, éveillée ; pas de Trypanosomes dans le sang. Le 2,
même état. Le 3, toujours éveillée; un petit nombre de parasites, 5 ou 6:
par préparation; l'animal est porté'à la cave. Le 5, toujours éveillé; para-
sites abondants. Le 8, toujours éveillé, parasites beaucoup plus rares.
Le 10 mars, mort, au 12° jour.
Autopsie. — Foie très gros, rate énorme. Pas d'Helminthes dans l’in-
testin grêle.
Expériences avec le virus d'El Debad.
Exp. XVI — Marmotte endormie, inoculée, le 6 janvier 1906, avec du
sang de Rat contenant le Trypanosome d'El Debab; on la met au chaud,
où elle se réveille très promptement. Le 10, éveillée ; parasites assez
abondants dans le sang (10 par champ microscopique). Le 15, toujours
éveillée ; les Trypanosomes sont abondants; l'animal est descendu à la
cave à + 6°. Le 17, encore éveillé ; parasites abondants. Le 19, même
état. Le 20, somnolence; parasites disparus. Le 22, même état. Le 25,
endormi; pas de parasites. Le 30, même état. Le 2 février, même état;
aucun parasite dans le sang depuis le 20 janvier, c'est-à-dire depuis
1% jours: l’animal doit donc être considéré comme guéri. Le 3 février,
trouvé mort dans sa cage.
Autopsie. — Pas de parasites dans le sang. Rate normale, foie normal,
ce qui exclut l'hypothèse de mort par trypanosomose.
DH, R. BLANCHARD ET M. BLATIN
Exp. XVII. — Marmotte inoculée le 6 janvier 1906, exactement dans les
mêmes conditions que la précédente. Mise au chaud; se réveille. Le 10,
éveillée ; Trypanosomesabondants dans le sang. Le 15, même état ; l'animal
est descendu à la cave. Le 17, encore éveillé; parasites abondants. Le 19,
profondément endormi; parasites peu nombreux. Sacrifié par erreur, ce
jour-là : les Trypanosomes avaient beaucoup diminué de nombre et étaient
manifestement en voie de disparition.
Exp. XVIII. — Marmotte inoculée le 6 janvier 1906, dans les mêmes con-
ditions que les deux précédentes. Mise au chaud ; se réveille. Le 10, éveil-
lée ; Trypanosomes abondants. Le 15, même état. Le 17, même état. Le 20,
pas de parasites dans le sang ; animal engourdi, semblant très malade; on
le met auprès du feu. Le 24, Marmotte éveillée; Trypanosomes assez
abondants. Même état jusqu’au 21 février, avec des variations dans l’abon-
dance des parasites. Le 23, animal toujours éveillé; parasites peu abon-
dants et presque tous immobiles. Le 24, au 49° jour, mort.
Autopsie. — Pas de Trypanosomes dans le sang du cœur. Rate énorme.
Foie énorme et très graisseux. Pas de lésions hémorragiques de l’esto-
mac. Pas d'Helminthes dans le tube digestif.
Exp. XIX. — Marmotte inoculée le 6 janvier 1906, avec le même virus
que les trois précédentes, maïs portée endormie à la cave + 6°, où elle
continue à dormir régulièrement. Jusqu'au 21 janvier, examen presque
journalier; dort; pas de Trypanosomes dans le sang. Le 22, éveillée;
pas de parasites. Du 24 janvier au 4 février, dort; pas de parasites. Le
» février, éveillée; pas de parasites ; on la remonte au laboratoire, où elle
se réveille. Du 8 février au 15 mars, méme état. Le 19, toujours éveillée,
semble très malade ; pas de Trypanosomes. Le 20, mort, au 73° jour.
Autopsie. — Rate normale, ce qui exclut l’idée de trypanosomose. Esto-
mac etintestin grêle normaux; pas d'Helminthes. Abondante hémorra-
gie intra-cæcale. Le foie porte une tumeur volumineuse, qui suffit à ex-
pliquer la mort.
Exp. XX. — Marmotte inoculée, le 6 janvier 1906, avec le même
virus que les quatre précédentes; portée endormie à la cave, où elle con-
tinue à dormir régulièrement. Le 10, dort; pas de Trypanosomes. Le 13,
même état. Le 15, éveillée ; pas des parasite. Le 17, dort ; quelques rares
Trypanosomes. Le 19, dort; pas de parasites. Le 22, éveillée ; pas de para-
sites. Du 2% janvier au 4 février, dort; pas de parasites. Le 6 février,
éveillée; pas de parasites. Du 8 au 14, dort; pas de parasites. On la monte
au chaud, au laboratoire; elle se réveille. Du 15 février au 11 avril,
éveillée, bien portante ; pas de Trypanosomes. Le 11 avril, on cesse l’ob-
servation, au 95e jour.
Exp. XXI. — Marmotte inoculée le 6 janvier 1906, avec le même virus
que les cinq précédentes; portée au grenier, où elle s’éveille tout de suite.
Le 10, éveillée ; Trypanosomes en abondance dans le sang ; on porte l'animal
à , 7 \
ÿ :
.
IMMUNITÉ DE LA MARMOTTE UE
à la cave. Le 13, éveillé; parasites abondants. Le 15, sommeil profond;
parasites beaucoup plus rares. Le17, sommeil profond; parasites très rares
(un seul par champ microscopique). Du 19 janvier au 12 février, dort;
pas de parasiles; on remonte l'animal au laboratoire, où il se réveille.
Du 15 au 19 février, éveillé ; pas de parasites. Le 19, on inocule son
sang à une Souris, qui reste indemne. Du 20 au 26, éveillé; pas de para-
sites. Le 26, on fait une nouvelle inoculation de sang de cette Marmotte
àune Souris, qui reste indemne.
Le même jour, on réinocule la Marmotte avec le virus d'El Debab pro-
venant du Rat. L'animal est toujours au chaud, au laboratoire; il reste
éveillé. Le 1% mars, éveillé; on trouve dans le sang un seul Trypanosome.
Le 2, éveillé; très rares parasites. Le 3, éveillé; parasites assez abon-
dants; la Marmotte est reportée à la cave. Le 5, encore éveillée; parasi-
tes nombreux. Le 8, toujours éveillée; parasites moins nombreux. Le 10,
endormie; parasites aussi nombreux. Le 13, dort; parasites encore nom-
breux. Du 15 au 2%, dort; pas de parasites; on remonte l'animal au labo-
ratoire, où il se réveille. Du 24 mars au 3 avril, éveillé; pas de parasites ;
on fait une injection de sang de Marmotte à une Souris, qui reste indemne.
Du 3 au 30 avril, animal toujours éveillé; se nourrit bien, en parfaite
santé; pas de parasites dans le sang. À cette dernière date, on cesse l’ob-
servation.
Exe. XXII — Marmotte endormie, inoculée le 3 février 1906, avec du
virus d'El Debab provenant d'une Souris ; portée à la cave, où elle continue
à dormir. Du 5 au 23, dort; pas de parasites. Le 23, remontée au labora-
toire, où elle se réveille. Du 24.février au 25 mars, éveillée; se nourrit
bien ; pas de Trypanosomes. Le 28, mort.
Autopsie. — Rate normale, ce qui exclut le diagnostic de trypanosomose.
Foie congestionné. Poumon congestionné et hépatisé ; pneumonie massive
ayant causé la mort. Pas de parasites intestinaux.
Exp. XXIIL — Marmotte endormie, inoculée le 23 février 1906, avec
quelques gouttes de sang de Marmotte pauvre en Trypanosomes. L'ani-
mal est conservé au laboratoire, où il s'éveille promptement. Du 24 fé-
vrier au 1* mars, éveillé; pas de parasites. Le 2 mars, éveillé; parasi-
sites assez nombreux (6 par champ microscopique). Le 3, éveillé; parasi-
tes très abondants (100 par champ); l'animal est descendu à la cave. Du
5 au 18 mars, toujours éveillé. Le 5, parasites très abondants (100 par
champ) : le 8, très peu nombreux (2 à 3 par champ) ; le 10, très rares; le
13, parasites plus nombreux que les globules; le 15, encore plus nom-
breux ; le 17, très abondants. Le 21, animal endormi, refroidi; pas de para-
sites. Le 24, mort.
Autopsie. — Rate énorme. Gros foie. Légère hémorrhagie stomacale; des
ecchymoses sur la muqueuse. Pas d'Helminthes.
314 R. BLANCHARD ET M. BLATIN
Conclusions.
On peut tirer de ces expériences les conclusions suivantes :
1° La Marmotte éveillée n’est pas sensible au Trypanosoma Lerwisi;
toutefois, l'unique expérience que nous avons faite avec ce virus
mérite confirmation.
2 La Marmotte éveillée est à coup sûr sensible au Tr. Brucei, au
Tr. gambiense, au Tr. Evansi, ainsi qu'au Trypanosome d'El Debab,
si faible que soit la quantité de virus inoculée.
3° Toute Marmotte éveillée, inoculée avec ces Trypanosomes, est
irrémédiablement condamnée à mort; les parasites apparaissent
dans le sang et deviennent chaque jour plus nombreux. La maladie
expérimentale a toujours une marche très rapide.
4° Toute Marmotte dans le sang de laquelle est apparu un seul
Trypanosome et qui ne s'endort pas est fatalement condamnée.
5° Toute Marmotte dont le sang contient des Tr. gambiense ou des
Tr. Evansi, même en faible quantité, ne s'endort plus, alors même
qu'on la place dans les conditions les plus favorables au sommeil.
Ce résultat, constant dans nos expériences, peut être subordonné
à la virulence des parasites employés.
6° La Marmotte en état d'hibernation présente une immunité
absolue envers les quatre Trypanosomes énumérés ci-dessus.
7 L'inoculation est ordinairement négative, quand la Marmotte
ne se réveille qu'au bout de quatre à cinq jours; toutefois, ce délai
peut être plus long, dans certains cas, et aller jusqu'au neuvième
jour.
8 L'inoculation est ordinairement positive, quand l'animal se
réveille avant le quatrième ou cinquième jour.
90 Les parasites ne se sont donc pas rassemblés dans quelque
organe profond, tel que la rate, pour s'y maintenir en vie ralentie,
repasser dans le torrent circulatoire et s’y multiplier, quand la
température du corps devient plus favorable.
100 La Marmotte dont le sang contient des Trypanosomes d'El De-
bab, même en abondance, peut, en général, s'endormir et guérir,
si on la met dans les conditions favorables au sommeil. Une fois
guérie, on peut l'inoculer de nouveau avec le même virus, la ré-
Do
VE
IMMUNITÉ DE LA MARMOTTE 319
veiller, attendre que ïes Trypanosomes soient nombreux dans son
sang, puis la guérir de nouveau par le même procédé.
11° Les animaux qui ont été inoculés à l’état de sommeil et chez
lesquels le virus ne s’est pas développé et même ceux qui, ayant
eu des Trypanosomes en abondance dans le sang, en ont guéri par
retour à l'hibernation, ne présentent pas la moindre immunité vis-
à-vis des trypanosomoses en général ou vis-à-vis du même virus,
celui-ci évoluant chez eux comme chez des animaux neufs.
12° Les Trypanosomes inoculés à l'animal endormi ne meurent
pas très vite; ils sont capables de résister de quatre à neuf joursau
refroidissement, en milieu lymphatique ou sanguin, et de causer
ultérieurement l'infection, si l'animal vient à se réveiller dans les
délais voulus.
13° Dans ce cas, l'infection part du moment du réveil, l'animal
inoculé dans ces conditions étant en retard sur les témoins (main-
tenus éveillés dès le moment de l'inoculation) d’une période égale
à la durée de sa torpeur. s
440 La fin de la maladie estordinairement annoncée par une chute
progressive de la température. Ce refroidissement s’observe égale-
ment chez l'Homme dans la maladie du sommeil; il résulte de
l’action exercée sur les centres nerveux par les toxines éliminées
par les Trypanosomes et accumulées dans le sang.
15° Quand ce refroidissement est très accentué et de longue durée,
les Trypanosomes disparaissent du sang, où ils étaient jusque-là
très nombreux : ils sont tués soit par les toxines elles-mêmes, soit
par le refroidissement progressif du corps.
16° Chez la Marmotte en hibernation, les toxines font défaut ; ce
n'est donc pas une auto-intoxication qui empêche les Trypanoso-
mes de se multiplier. L'hypothèse de la destruction des Trypano-
somes par leurs propres toxines, à la période algide de la maladie
expérimentale, n’est donc pas soutenable. La seconde hypothèse,
celle de la mort par refroidissement, reste seule debout.
17 Cette même hypothèse donne la seule explication rationnelle
de l’immunité de la Marmotte en hibernation: les Trypanosomes
sont inaptes à se multiplier dans le sang de l'animal hibernant et
finissent par y mourir, à cause de la basse température à laquelle
ils sont soumis.
18° Il n’est pas nécessaire, d'ailleurs, que la température soit
3176 R. BLANCHARD ET M. BLATIN
très basse ; le point critique, au-dessous duquel les parasites ne
peuvent vivre dans le sang, est situé aux environs de 160.
19° L'immunité dont la Marmotte en hibernation jouit à l'égard
des trypanosomoses tient donc essentiellement à l'hypothermie. Les
phagocytes n'y prennent qu'une part secondaire; l’hypertrophie
de la rate indique cependant qu'ils ne sont pas inactifs dans les try-
panosomoses ; leur rôle sera ultérieurement défini.
20° A l'autopsie des Marmottes mortes de trypanosomose, on
observe toujours une hypertrophie énorme de la rate, souvent aus-
si du foie. On trouve aussi assez fréquemment des lésions hémor-
rhagiques du tube digestif.
La Marmotte en hibernation résiste à la trichinose.
L'un de nous a eu fréquemment l’occasion de disséquer des Mar-
mottes tuées à la chasse, dans le courant des mois d'août et de sep-
tembre, c'est-à-dire au moment où ces Rongeurs sont en pleine ac-
tivité : tous les animaux disséqués avaient dans l'intestin de très
nombreux parasites, notamment des Ctenotænia marmotae (Krôlich)
Or, les Marmottes en hibernation n'ont jamais aucun Helminthe dans
l'intestin.
Ce fait remarquable a déjà été signalé par l'un de nous (1), d'a-
près l'examen d'une trentaine de Marmottes d'expérience. Depuis
lors, cetexamen a été poursuivi méthodiquement sur toutes les Mar-
mottes en hibernation que nous avons sacrifiées. Le nombre total
des animaux examinés à ce point de vue spécial dépasse une cen-
taine : chez aucun d'eux, il n'a été possible de trouver des para-
sites intestinaux, à l'exception de Némnatodes à l'état larvaire en-
. kystés dans la paroi de l'intestin grêle et du cæcum.
L'absence d'Helminthes chez la Marmotte en hibernation est done
un fait constant. Il ne peut s'expliquer que par l'engourdissement
des parasites d'été, lors de la chute de la température de la Mar-
motte qui les héberge : cet engourdissement fait cesser leur adhé-
rence à la muqueuse intestinale, les rend inertes et permet leur ex-
pulsion hors de l'intestin, grâce aux mouvements péristaltiques, en
même temps que celle des derniers bols fécaux.
Cela étant, il nous à paru intéressant de rechercher d'une façon
(1) R. BLancuarD, Loco citato, p. 1124.
À
Æ
PR
IMMUNITÉ DE LA MARMOTTE 311
comparative de quelle manière la Marmotte se comporte envers
l’infestation helminthique, pendant l’état de veille et pendant l'hi-
bernation. Dans ce but, nous avons choisi la Trichine (Trichinella
spiralis). Sur un Rat trichiné, nous prélevons un fragment du dia-
phragme ou de la langue; nous dilacérons avec des aiguilles, nous
délavons dans l’eau distillée, puis nous aspirons cette pulpe dans
un tube portant deux ampoules. Nous introduisons par l’æsophage,
jusque dans l'estomac d'une Marmotte endormie, une sonde de
Nélaton en caoutchouc rouge; l’un des bouts de notre tube est alors
adapté à la sonde, l’autre bout au tuyau d’une soufflerie de thermo-
cautère, qui nous donne une pression suffisante pour chasser la
pulpe dans l'estomac de l'animal. Nous avons obtenu ainsi les ré-
sultats suivants :
Exp. XXIV. — Marmotte endormie, infestée le 9 décembre 1905. On la
garde au laboratoire ; elle s'éveille et reste éveillée par la, suite. Elle est
sacrifiée le 17 janvier 1906, au 39° jour.
Autopsie. — Kystes de Trichine assez abondants, notamment à la lan-
gue et au diaphragme.
Exp. XXV. — Marmotte endormie, infestée le 9 décembre 1905. On
la porte à la cave, où elle continue à dormir. Le 8 janvier 1906, au 31° jour,
on la remonte au laboratoire; elle s'éveille et reste éveillée par la suite.
On la sacrifie le 25 janvier, au 47° jour.
Autopsie. — Pas trace de kystes de Trichine.
Exe. XXVI. — Marmotte endormie, infestée le 20 janvier 1906. Dort
jusqu'au 12 février; s’éveille alors pendant trois jours, puis se rendort
jusqu'au 23. Se réveille le 23 (au 34° jour) et reste éveillée. Sacrifiée le 24
mars, 63° jour après l’infestation et 29° jour après le réveil.
Autopsie. — Pas trace de kystes de Trichine.
Malgré le petit nombre de ces expériences, nous croyons pouvoir
en tirer les conclusions suivantes :
1° La Marmotte à l’état de veille se laisse infester par la Tri-
chine ;
20 La Marmotte à l'état de sommeil hibernal est réfractaire à l’in-
festation par la Trichine ;
90 Les Trichines ingérées pendant l'hibernation, qu'elles restent à
l'état larvaire ou qu'elles passent à l’état adulte, fait qui n’a pas été
vérilié, survivent moins de 30 jours dans l'intestin.
Archives de Parasitologie, XI, n° 3, 1907. 25
318 R. BLANCHARD ET M. BLATIN
Immunité de la Marmotte envers le Spirochæta Duttoni.
Grâce à l’obligeance de M. le Dr Levaditi, nous avons pu expéri-
menter l'action du virus de la fièvre des Tiques (Spirochæta Duttoni)
sur la Marmotte, tant à l'état de veille qu'à l’état de sommeil hi-
bernal. Notre virus, injecté à la Souris, donnait toujours une ino-
culation positive.
Trois Marmottes à l’état de veille ont été inoculées. Le résultat
à été négatif. Les animaux n'ont présenté aucun signe de maladie
et l'examen du sang, répété quinze jours de suite, n'a jamais per-
mis d'observer le moindre Spirochète.
Trois Marmottes en hibernation, inoculées avec le même virus,
ont donné le même résultat. Deux de ces animaux, réveillés au bout
de quinze jours et maintenus en éveil, ont été réinoculés, également
sans résultat.
La Marmotte, tant à l’état de veille qu'à l’état d'hibernation, est
donc réfractaire à la spirochétose causée par le Spirochæta Duttoni.
L
"
PRE
es à Parasitologie, XI. 1907:
PAfob dis. | LU AUNE Arai Laptg
Tania Dlaichardi Mot.
UNA NUOVA TENIA DELLA TALPA
PEL
D' PASQUALE MOLA
(TavozA IV)
Nel marzo dello scorso anno trovai nell’intestino tenue di alcune
Talpe (Talpa europæa), catturate nelle campagne della provincia di
Napoli, pochi esemplari di Cestodi di piccole dimensioni.
Dallo studio fatto su i vari esemplari e frammenti, provenienti
dai diversi individui ospitatori, di sesso e località differenti, mi è
dato rilevare che essi appartengono ad una sola specie elmintica,
specie che, per una somma di caratteri, deve includersi nella fa-
miglia delle Tæniadæ, sub-famiglia Cystotæniæ.
L'aspetto generale di questa nuova specie di Tenia armata si
rileva dalla fig. 3: uno strobilo à nastro, lungo 25-30 mm, quasi
uniformemente largo da un estremo all'altro, costituito da un
numero abbastanza considerevole di proglottidi, relativamente a
tutta la lunghezza del Verme, e sormontato in avanti da uno scolice
piccolo o provvisto di un brevissimo collo.
La scolice (fig. 1 e 2) ha l’aspetto di un pomo da bastone, sferico,
con 4 ventose circolari, diamentralmente opposte erilevate. In alto,
al centro della convessità, si osserva un peduncolo a guisa di clave
e lungo quanto un terzo dello scolice, retrattile in una cavità pro-
dotta dallo invaginarsi del peduncolo. Verso l’apice di questi, à
guisa di diadema, trovansi attaccati a bilanciere gli uncini, i quali
hanno la forma di una} (fig. 13). I collo è cortissimo, iniziandosi la
segmentazione, netta e precisa, appena dopo lo scolice ; 1 primi
articoli sono più larghi che lunghi, poscia la lunghezza predomina
sulla larghezza : cosi quelle pregne d'uova mature hanno una
forma rettangolare con i lati maggiori lateralmente.
ORGANI GENITALI. — La aperture genitali, marginali e irregolar-
mente alterne, sboccano insieme, la maschile in alto e dorsal-
mente, la femminile in basso e ventralmente, nel fondo di un antro
o cloaca genitale, che si apre all'esterno per una piccola apertura,
stre ta e arrotondata, la quale si trova superiormente a ciascuna
380 PASQUALE MOLA
proglottide e propriamente poco al disotto della linea di demarca-
zione delle proglottidi. L'antro, di piccole dimensioni, è costituito
da un infossamento del tegumento esterno (ectoderma). Non ci ha
muscoli propri per permettere il dilatarsi o il restingersi del suo
orifizio ; poichè i muscoli dell'orifizio atriale sono quelli stessi che
longitudinalmente e circolarmente costituiscono il sacco musco-
lare del Cestode. In un preparato di tagli trasversi mi è dato osser-
vare il pene protratto nella vagina ; ci fa vedere che esiste in
detto Cestode un autofecondazione (fig. 10).
Organi maschili. — Gli organi genitali maschili sicompongono
di un certo numero di testicoli, del vaso deferente e dell’organo
copulatore, pene. Gli abbozzi di tali organi incominciano à compa-
rire ben presto : nelle prime proglottidi dopo il corto collo.
I 'testicoli, di forma sferica nelle proglottidi giovani, sono co-
stituiti da cumuli di cellule rotondeggianti con nucleo distinto e da
una membrana involgente. Man mano che le proglottidi si avanzano
nella catena, queste sfere divengono ovali, le cellule si riducono e
i cumuli nucleari si concentrano verso il centro di ciascuna
vescicola testicolare, lasciando un vuoto occupata dai filamenti
spermatici che si aggomitolano in ciascuna vescicola testicolare.
I testicoli non sono tanti numerosi, essi sono situati ventralmente
a ciascuna proglottide in un piano o in due, a secondc che gli
organi genitali femminili lasciano più o meno spazio, occupano la
zona centrale della proglottide, e non oltre passano i dotti escre-
tori, mantenendosi sempre nel sacco muscolare longitudinale.
La membrana vescicoiare, inviluppato che ha le cellule sperma-
tiche, si restringe formando un dottolino, canalicolo efferente, breve
e sottile a pareti esilissime, che si unisce a quello del testicolo
prossimo, dando cosi luogo ad un canalicolo di maggior diametro,
il quale à sua volta, si fonde con un canalicolo omologo, forman-
done uno di terzo ordine, più grosso, e cosi di seguito fino alla
formazione di dottolini efferenti principali ognuno corrispondente
all’insieme di un certo numero di masse testicolari (fig. 11). Questa
confluenza avviene ventralmente ad un terzo di ciascuna proglot-
tide e propriamente all’altezza della parte ristretta del ricettacolo
seminale, in un deferente unico di calibro molto pronunziato e
molto lungo, il quale dopo un certo numero di piccole anse penetra
nella tasca del pene formando il canale eiaculatore, il quale, a sua
UNA NUOVA TENIA DELLA TALPA 981
volta, sbocca all'apice del pene, attraversandolo per tutta la sua
lunghezza. Le pareti del canale deferente sono formate da una fina
membrana cuticulare interna ricoverta da uno strato di cellule epi-
teliali poligonali possedendo un nucleo arrotondato che si colora
fortemente con il paracarminio e con l’ematossilina.
Il pene, di forma cilindrica, è relativamente molte lungo, le sue
pareti esternamente presentano una fitta pelatura costituita da un
gran numero di setole, quelle stesse che si riscontrano su tutta la
superficie cuticulare del Cestode (fig. 7-14). Non mancano gli strati
musColari, che ci hanno tutti gli attributi della potente musco-
latura della cuticula. Considerando percid la struttura del pene con
i rapporti dell’antro genitale, si è facilmente indotti alla conclu-
sione che il pene debba ritenersi come invaginazione delle pareti
atriali, giusto quanto ho detto altrove (1).
In un preparato in toto (fig. 7) mi è dato oservare il pene svagi-
nato, cid è dovuto alla compressione subita dal preparato; poichè
in tale Cestode il pene si protrae nella vagina senza fuori uscire
dall'orifizio atriale.come vedesiin un preparato di sezione trasversa
(fig. 10). Il completosvaginarsi del pene esternamente porta l'occlu-
dersicompleto dell’apertura dell'atrio; anzi i muscoli longitudinali,
circolari all'apertura, sono forzati dal protrarsi di quello.Il pene in
vaginato con le anse del dotto eiaculatore sono contenute nella
tasca del pene, questa ha forma di fiasco con il collo verso l’aper-
tura atriale ed è situato superiormente al ricettacolo seminale. Le
pareti sono formate da due strati : una, esterno, di cellule poligo-
nali con grossi nucleï, l’altro muscolare.
La tasca, che rimane indifferente in tutti i movimenti di estro
flessione ed introflessione del pene stesso, è, a differenza di questo,
una formazione del parenchima, La fig. 9 mostra la tasca del pene
con il pene, il dotto eiaculatore e il deferente di un preparato per
dissezione.
Organi femminili. — L'ovario è situato dorsalmente in un piano
ravvicinato al sacco muscolare,occupando quasi tutta la proglottide
da quel lato. Esso si presenta come un organo glandolare formato
da ux certo numero di tubi piriformi. Questi tubi convergono verso
un punto centrale, l’entrata dell’ovidotto, dando l’aspetto di un ven-
(1) P. Mora, Su di un Cestode del Carcharodon Rondeleti. Archivio zo0olo-
gico, 1903.
382 PASQUALE MOLA
taglio. I tubi ovar,ci, al numero di circa una ventina, sono in for-
ma d’otre; il loro diametro e la loro lunghezza è varia: essi sono
nettamente seperati gli uni dagli altri da una esile membrana.
Nell'interno di ciascun tubo ovarico si trovano le cellule uova;
queste sono di forma sferica e sono costituite da una massa proto-
plasmatica chiara, senza struttura definita e da un nucleo con nu-
cleoli, che si colorano intensamente, sia col paracarminio che con
l’ematossilina.
Nella metà, e centralmente a ciascuna proglottide, si forma dal
confluire dei tubi ovarici l'ovidotto, il quale con un decorso obli-
quamente trasversale si porta dal lato dorsale al lato ventrale, pas-
sando al disopra della vagina e formando una curva sinusoide.
Dorsalmente riceve la sbocco della vagina; indi, a brevissima dis-
tanza da questa, riceve lo sbocco del vitellodutto; e proseguendo
nel suo cammino discendente va a formare l’utero, che trovasi pos-
teriormente alla proglottide (fig. 6). Nell'ultima porzione dell'ovi-
dotto, appena dopo lo shocco del vittellodutto, si osserva che il cali-
bro è alquanto più grosso inviluppato da rade cellule di dubbia
forma. Tale ingrossamento si potrebbe interpetrare per ootipo,
come le celluleinviluppante, glandole del guscio; per sia l’uno che
le altre, non è ben chiaro dal materiale da me posseduto (fig. 6 e 8).
Dopo tale ingrossamento dell'ovidotto si osserva posteriormente
a ciascuna proglottide giovane un Canale impari, di forma cilin-
droide, con un percorso quasi rettilineo, disposto trasversalmente
e occupante tutta la larghezza della proglottide, sempre compreso
tra i tronchi longitudinali degli organi escretori. Tale canale è
l’utero; il quaie è al disotto di tutto gli organi genitali, in mezzo, a
guisa di tubo, parallelamente alla divisione della proglottide
(fig. 5, 6 e 8).
La struttura dell'utero, nelle giovani proglottidi, è semplice, le
pareti sono formati da una quantità di cellule rotonde o poliedriche,
con membrana indistinta e poco protoplasma; i nuclei sono visi-
bilissimi perché, con le varie colorazioni da me usate, si tingona
fortemente. Queste cellule dell’utero sono cosi addensate da dare
nel loro insieme un netto contorno al tubo uterino, il quale ha
l’aspetto di un nastro che va da un lato all'altro della proglottide.
Cominciando ad arrivare le uova nell'utero, le pareti di questi
vanno mano distendendosi dovuto all pressione esercitato dalle
jy ii)
UNA NUOVA TENIA DELLA TALPA 383
uova che provengono dall’ovidotto. Cosi, nelle proglottidi mature,
l'utero finisce per occuparla tutta intiera, lasciando solo lo spazio
al ricettacolo seminale e la tasca del pene, le quali si trovano
addossate, entrambi, verso una faccia. Le numerose cellule disposte
irregolarmente e sù più strati intorno al giovane utero, vanno à
poco à poco ad orientarsi, disponendosi luna accanto l’altra : cosi
le pareti uterine rimangonocostituite da uno strato delle anzidette
cellule e da un altro, che forma l’esile epitelio.
La vagina ha origine dall'antro genitale, un poco al disotto
dell'orifizio maschile e ventralmente. Essa si porta dorsalmente
slargandosi in un ricettacolo seminale considerevole à guisa di
fiasco a lungo collo. Al fondo di tale slargamento la vagina si re-
stringe in uno stretto dotto, il quale traversando al disotto dell’o-
vidotto e arcuandosi, dal dorso al ventre, forma un arco con la
convesità che guarda la faccia dorsale. À circa un terzo, prima di
terminare la proglottide, la vagina sbocca nell'ovidotto, punto
innanzi detto (fig. 18-23). Grosse cellule poligonali, con nuclei
visibili, costituiscono le pareti esterne della vagina; a questi
s'aggiunge una membrana cuticolare sottoposto allo strato cêl-
lulare : il tutto forma le pareti della vagina.
Le glandole del vitellogeno sono formate da un ammasso cellu-
lare, che nell'insieme dà l’aspetlo di un rene. Quest’ammasso si
trova ventralmente all'ovario e propriamente all'altezza del
confluire i tubi ovariei ed è separato dagli altri organi merce un
esile membrana, la quale involge internamente le numerosissime
cellule vitelline a guisa di sacco. Dall’apertura di tale sacco parte
un corto dottolino, il vitellodotto imparti, il quale con un percorso
a S e obliquo indietro, sbocca nel punto innanzi detto, avanti
l’'ammasso delle cellule glandolari del guscio.
STRUTTURA DELLE PARETI DEL CORPO. — [Il tegumento (ectoderma)
del parassita in esame si presenta liscio, uniforme, continuo ; esso
non differisce per nulla da quello degli altri Cestodi, solo si ris-
contra una fitta peluria, di aspetto setoloso, la quale è costuita
da setole, ben pronunziate, su tutta la superficie del corpo dell
animale. Queste setole sono infisse nella cuticula e riposano
sulla membrana basale; a forte ingrandimento si presentano
coniche con l’apice acuto e sensibilmente ricurvo, con l'ematos-
silina si colorano intensamente. Il tegumento (ectoderma) costi”
334 PASQUALE MOLA
tuito dai due strati, cuticula e membrana basale, poggia sul
sacco muscolare cutaneo. Questo costituito da un sottile strato di
fibre circolari, e da un potente sistema di fibre longitudinali,
raccolte in fascetti decorrenti per tutta la lunghezza dello strobilo
e constituenti nell'insieme uno strato molto spesso (fig. 8).
I numerosi fasci di fibre longitudinali à misura che risalgono
prossimalmente, tendono, nel collo a convergere verso la zona cen-
trale del parenchima, enello scolice, penetratovi, divergono in tutti
i sensi. Un certo numero di tali fibre si raccoglie in 5 robusti fa-
scetti : 4 prendono attacco alle ventosee propriamente alla superficie
dorsale delle stesse; uno, proseguendo verso l’apice, si porta al
peduncolo. Ivi, arrivato, divérge in tutti i sensi, mandando Îa-
scetti di fibre a ciascuno degli uneini che trovansi attacati a bilan-
cieri verso l’apice, a guisa di diadema Tali muscoli sono quelli
che danno il movimento di erezione o di prostazione agli uncini.
Essi, a forte Ingradimento, si presentano con una parle slargata,
inferiormente, e terminata con 2 punte, e una parte conica, assoti-
gliata e ricurva superiormente. Nell'insieme si potrebbero rasso-
migliare ad un (fig. 13 e 2).
In riguardo alla speciale armatura della parte apicale del Cestode
in parola nulla ho potuto per ora precisare; se esso sia un rostello
0 una pura e semplice armatura, costituita dalla serie di uncini
disposti intorno al peduncolo apicale. Studi ulteriori, sulle produ-
zioni cuticulari e sulle varie armature dei Cestodi, da me intrapreso,
mi diranno quale sia il valore anotomico da attribuirsi a tale arma-
tura. Per ora basta ritenerla come semplice sviluppo delle setole
cuticulari del Cestode che per adattamento hanno preso tale svi-
luppo.
Le 4 ventose, diametralmente opposte, sono costituite dalle solite
fibre, circolari e radiali, e sono in connessione con le fibre longitu-
dinali, come innanzi è detto (fig. 1 e 2).
Sopra altri dettagli anatomici dei muscoli dello scolice null altro-
posso dire, non avendo avuto materiale abbastanza per studiarne
la complicata muscolatura. Aggiungo solo che contraendosi i mu-
scoli longitudinali del peduncolo, queti si ritrae in una inva-
ginazione cefalica, che produce, nell'affondorsi del parenchima,
un infossamento apicale. Il sistema escretore dello strobilo
è costituito da quattro canali longitudinali principali, decorrenti
«2
UNA NUOVA TENIA DELLA TALPA 38)
lateralmente per tutta la lunghezza dello strobilo (fig. 8 e 12.)
Varie anastomosi riuniscano i dotti escretori tra di loro e tra questi
. vanno menzionati le 2 grandi anastomosi, anteriormente e infe-
riormente, a ciascuna proglottide e che uniscono, due per facce, 1
vasi ventrali tra loro e dorsali. Topograficamente i canali escretor
sono situati tra i muscoli longitudinali interni, 2 ventrali e 2 dor-
sali, quasi nello stesso piano, dorso-ventrale. Tra i vasi escretori e
nello stesso senso corrono i cordoni nervosi, uno per lato longitu-
dinalmente allo strobilo (fig. 8 e 12).
BiocoGra. — Il poco materiale, che mi ha permesso lo studio ana-
tomico della Tenia in parola, fu trovato nell'intestino tenue di al-
cune Talpe, insieme a vari pezzi di Lumbricus terrestris e di Zulus
terrestris, nonchè ad altre sostanze organiche, che formavano il
nutrimento degl' Insettivori catturati.
Ora la presenza del Lumbricus terrestris e dell’ Zulus terrestris, nell”
intestino tenue, insieme ai frammenti ed esemplari, corrispondenti
ai vari gradi di sviluppo del Cestode in parola, fece sorgere in me
l'idea di ricercarne l'ospite intermedio o nel Miriapodo o nell'Anel-
lide. Infatti esaminando i vari pezzi del Miriapodo (Zulus terrestris)
e dell’ Anellide(Lumbricus terrestris), dopo un paziente esame, scorsi
nell'intestino dell Zulus terrestris pochissime uova e un Cisticerco
di Cestode. Dall’esame comrarativo eanatomica del material notai,
che le uova preseutavano un inviluppo medio, ovale, e uno interno,
sferico nel quale si osservava una parvenza di embrione (fig. 17).
Paragonate le uova trovate nell'intestino del Miriapodo con quelle
uterine., riscontrate nell'utero maturo e pregno di uova, ho notato
una certa correlazione tra loro, che veniva à chiarire l'idea della
ricerca dell'ospite intermedio. La conferma di ciù lo ha dato la pre-
senza del Cisticerco a Cenuro riscontrato insieme alle uova nell’
intestino dell Zulus terrestris. Nulla ho trovato nell'intestino dell’
Anellide (fig. 15). Ora considerando quanto sopra è detto e quanto
afferma la biologia del Miriapodo e dell'Insettivoro, si pu senza
difficoltà stabilirne il ciclo biologico del parassita in esame.
Infatti considerando che il modo di vita dell Zulus terrestris e
della Talpa europæa è identico, entrambi menano vita sotteranea, e
che il nutrimento del Miriapodo, tra l'altro, è costituito dalle feci
dell’Insettivoro; come il nutrimento di questi é formato da Miria-
podi, Anellidi, ecc., ne viene di conseguenza, che il ciclo biool-
386. PASQUALE MOLA
gico del parassita in esame non rimane per nulla estraneo. Anzi è
tanto ovvio che non lascia verun dubbio nel passaggio delle uova nel
tubo digerente dell’ Zulus, come i Cisticerchi del parassita nell'in-
testino della Talpa.
Adunque si pud stabilire che l'ospite intermedio di questa specie
di Tenia armata è un Invertebrato, Miriapodo, Lulus terrestris.
Dallo studio anatomico e biologico dell’ Elminto in parola si
osserva che la Talpa europæa, tra gli altri parassiti, alberga una
nuova specie di Tenia armata. Cosi, come minimo tributo di alta
stima e riconoscenza, dedicherd la specie nuova all’illustre scien-
ziato professore Raffaele Blanchard, nominando Tænia Blanchardi
la nuova specie di Tenia, trovata pel primo nell'intestino tenue
della Talpa.
Le caratteristiche di quanto sopra ho esposto, vengono cosi rias-
sunte:
Scolice sferico con un peduncolo armato e quattro ventose cir-
colari e diametralmente opposte. Collo e strobilo corto con seg-
mentazione netla fin dal principio. Proglottidi quasi identiche;
aperture genitali marginali e irregolarmente alterne. Vagina prov-
vista di un ricettacolo seminale, molto pronunziato; glandola
vitellina impari; ootipo poco sviluppato; utero posteriormente,
cilindrico. Pene lungo, cilindrico, ricoperto di setole come tutto
il corpo dell'animale.
Habitat: Intestino tenue della Talpa europæa, campagne napoli-
tane, 1905.
BIBLIOGRAFIA
1878. — O. von Lixsrow, Compendium der Helminthologie. Hannover, 1878-
1889.
1896. — M. BraAux, Vermes, Cestoda. Bronn’s Klassen und Ordnungen des Thier-
Reichs, IV.
1903. — P. Mora, Su di un Cestode del Carcharodon Rondeleti M. Hle. Archivio
Zoologico, I, 1903.
SPIEGAZIONE DELLA TAVOLA IV
Lettere comuni a tutte le figure : ac, aculei; ag, antro genitale; &t, apertura
uterina; &gin, apertura genitale maschile; €, collo; en, nervi longitudinali;
d, deferente; de, canali escretori; ef efferenti; gg, glandole del guscio; 71e, mu-
scoli estrinsee, del ventose; ml, muscoli longitudinali; od, ovidotto; of, ootipo;
ov, ovario; p, pene; ({, testicoli; {p, tasca del pene; «w{, utero; v, vagina;
ri, vitellodutto impari; vs, vescicola seminale.
LS
UNA NUOVA TENIA DELLA TALPA 381
F1G. 1. — Scolice della Tænia Blanchardi, molto ingrandito, da un preparato in
glicerina un poco compressa. X 20.
Fi. 2. — Scolice dello stesso, molto più ingrandito e compresso, da una prepa-
razione in toto. X 25.
Fi. 3. — Aspetto generale della Tænia Blanchardi, da un esemplare fissato in
sublimato e conservato in alcool. X 10.
Fig. 4. — Aspetto generale di alcune proglottidi della catena, da un preparato in
toto. X 10.
F1G. 5. — Una proglottide delle ultime della catena con pene svaginato; vista
dal dorso da una preparazione in 1oto per compressionne. X 60.
Fig. 6. — Figura schematica, ricostruita da sezioniin serie trasversali e sagittali,
per dimostrare i rapporti reciproci degli organi genitali femminili.
Fic. 7. — Aspetto del pene svaginato e fuoruscente dall’apertura genitale; da
un preparato in toto molto compresso. X 104.
Fic. 8. — Proglottide delle ultime della catena, vista da sopra; da una prepara-
zione in lolo per compressione. X 60.
FiG. 9. — Aspetto dellà tasca del pene con pene invaginato e deferente : da una
preparazione in toto per dissezione. X 125.
Fi. 10. — Sezione trasversale, che mostra il pene nell’atto che svaginandosi
penetra nella vagina dilatata per accoglierlo. X 85.
FiG. 11. — Sezione trasversale di proglottide che mette in evidenza le vescieole
testicolari con l’originarsi degli efferenti, e sbocco di questi negli efferenti di
calibro maggiore. X 104.
Fic. 12. — Sezione traversale diproglottide, alquanto obliqua, all’altezza dell'o-
vario e del confluire degli efferenti nel deferente che interessa la tasca del pene
e la vescicola seminale. x 85. :
FiG. 13. — Un uncino dell’armatura del peduncolo. X 1000.
Fic. 14. — Vari aspetti delle setole delle pareti del corpo e del pene. X 1000.
FiG. 15, — Cisticerco da un preparato in glicerina un poco compresso. X 240.
Fic. 16. — Sezione trasversa di proglottide che lascia vederela vescicola semi-
nale con la vagina circondata dalle cellule poligonali vaginali. X 120.
Fig. 17. — Uovo, da un preparato in glicerina un poco compresso. X 540.
Fig. 18-23. — Sei sezioni consecutive trasversali di proglottide che valgono a
mostrare il confluire dei tubi ovarici nell’ovidotto (fig. 18-19), l’originarsi della
vagina dalla vescicola seminale (fig. 20), l’inizio del vitellodotto imparti con i
rapporti degli altri organi femminili (fig. 21), l’'imbocco dell'ovidotto nell’utero
(fig. 22) e la forma dell’utero con l’apertura dell’imbocco dell’'ovidotto (fig. 23).
x 125.
NOTICES BIOGRAPHIQUES
XVII. — FRITZ SCHAUDINN
(1871-1906)
PAR
Le D' MAURICE LANGERON
Préparateur au Laboratoire de Parasitologie
(PLANCHE VII)
La vie si courte de Fritz Schaudinn ne lui a permis ni d'écrire
des ouvrages fondamentaux, ni même d'achever les recherches qui
l'intéressaient le plus. La plupart du temps, il n'a pu faire connaî-
tre ses travaux que par de courtes notes préliminaires, qui sont
plutôt des jalons et où les résultats acquis ne sont qu'indiqués.
Pourtant l'importance de ses découvertes est telle, leurs consé-
quences sont si grandes que son nom doit être inscrit parmi ceux
des savants qui ont fait faire les plus grands progrès à la science et à
la médecine. Exceptionellement doué sous le rapport des facultés
d'observation et de l’habileté technique, il a su voir et interpréter
ce que tant d’autres avant lui avaient laissé passer inaperçu. Bien
que ses travaux aient été souvent inspirés par des vues théoriques
et des conceptions philosophiques, il a su merveilleusement s'adap-
ter à des recherches d'intérêt moins spéculatif.
Zoologiste de tempérament et d'éducation, il a évolué sans
peine vers la médecine scientifique. Cette faculté d'adaptation
n'est pas une des qualités les moins frappantes de cette grande in-
telligence ; là ou d’autres se seraient rebutés devant des résistances
administratives et des ordres formels, il a su se plier aux travaux
qui lui étaient imposés et trouver encore, dans la voie plus in-
grate qui lui était tracée, l’occasion de découvertes de premier
ordre. S'il eût été plus libre ou s'il eût vécu plus longtemps, il au-
rait pu se donner tout entier aux questions qui l'intéressaient entre
toutes; il aurait certainement fait faire des progrès encore plus
grands à nos connaissances sur les Protozoaires et en particulier sur
les Flagellés.
Telle qu’elle est, la carrière de Schaudinn est si féconde en tra-
vaux eten découvertes qu'il est difficile, dans une courte biographie,
NOTICES BIOGRAPHIQUES. — FR. SCHAUDINN 389
d'en faire connaître toute l'étendue et surtout d'en apprécier la
portée. Lorsque des recherches ultérieures auront jeté de la lumière
sur ces questions difficiles et encore bien obscures, on pourra plei-
nement connaître le prix des services qu'il a rendus à la zoologie
et à la médecine.
Fritz Richard Scaupinx est né le 19 septembre 1871, à Rosening-
ken, dans la Prusse Orientale. Il fit ses études dans les gymnases
d'Insterburg et de Gumbinnen et, après avoir subi son examen de
maturité, se rendit en 1890 à l'Université de Berlin. Comme il est
arrivé fréquemment pour d’autres hommes éminents, il n'avait d’a-
bord nulle idée de la carrière qui devait le rendre illustre. Il se pro-
posait simplement d'étudier la philologie. Mais bientôt, abandon-
nant ce projet, il se mit à travailler avec ardeur les sciences natu-
relles et particulièrement la zoologie. Sous l'inspiration de F. E.
Schulze, il ne tarda pas à étudier plus spécialement les Protozoaires.
Premiers travaux (1890-1894). — La première partie de sa vie scien-
tifique fut consacrée à des travaux sur les Foraminifères. Ses pre-
mières publications qui datent de 1893, et sa thèse de doctorat qu'il
soutint en 1894, ont trait à des espèces nouvelles de ce groupe; elles
montrent déjà la puissance de ses facultés d'observation et la süû-
reté de son jugement.
Ces travaux sont consacrés à l'étude de la reproduction chez les
Foraminiières, notamment en ce qui concerne la division et la
multiplication de la chromatine chez ces animaux; bien que ces
recherches n’intéressent pas directement la parasitologie, nous ne
pouvons nous contenter de les mentionner, car nous y trouvons la
_ première indication de sa théorie du dualisme nucléaire, qui do-
mine toutes ses recherches sur les Flagellés.
Schaudinn chercha, après tant d’autres, l'explication du dimor-
phisme si curieux qui se manifeste, chez les Foraminifères, par la
production, dans la même espèce, de formes macrosphères et mi-
crosphères. Il trouva que ce dimorphisme de l'enveloppe a pour
cause un dimorphisme du noyau, ou mieux de la chromatine, dont
le dualisme primitif s'imposait déjà à sa pensée. Ces travaux lui
permirent encore d'établir une homologie entre le développement
du corps des Métazoaires et la génération asexuée des Protozoaires.
Dès cette époque, Schaudinn, était préoccupé de rechercher les
rapports qui existent entre la phylogénie et les divisions nucléaires;
390 M. LANGERON
cette idée est l'âme de ses travaux sur les Foraminifères et les Hé-
liozaires.
Séjour à Bergen (1894). — Pendant l'été de l'année 1894, Schaudian
fit un séjour à la station biologique de Bergen, sur la côte de Nor-
vège, dans le but de travailler à une monographie de la reproduc-
tion chez les Foraminifères. Il ne put terminer ce travail, mais les
observations qu'il fit à cette époque achevèrent de le familiariser
avec l'étude du protoplasma vivant; elles contribuèrent à lui donner
cette sûreté de coup d'œil qui devait l'aider si puissamment dans
ses découvertes futures. Aussi Schaudinn parlait volontiers de son
voyage à Bergen dont il conservait un excellent souvenir. A la fin de
son séjour, il se contenta de publier une courte liste de 139 Fora-
minifères observés par lui. La même année, il fut nommé assis-
tant à l’Institut zoologique de Berlin.
Premier séjour à Berlin, à l'Institut zoologique (1894-1898). — De
189% à 1898, époque à laquelle il fut nommé privat-docent, puis
entreprit son voyage au Spitzherg, l’activité de Schaudiun s’est
manifestée surtout par de nombreuses recherches sur l'évolution
et la cytologie des Rhizopodes et des Héliozoaires. Nous devons nous
borner à indiquer ses découvertes les plus remarquables, en insis-
tant sur celles dont l'influence a été plus marquée sur ses futurs
travaux de parasitologie. Dans le groupe des Héliozoaires, il mit en
évidence l'existence d'un second noyau, issu du premier, et analogue
au centrosome des Métazoaires. Chez un Héliozoaire, Actinophrys
sol, ildécouvrit une véritable fécondation par karyogamie, précédée
par un phénomène de réduction chromatique : c'est la première
fois que ces phénomènes étaient observés chez un Protozoaire aussi
inférieur.
Dans la classe des Rhizopodes, ses travaux ne sont pas moins
remarquables. Il observe le premier chez des Amibes (Amæba crys-
talligera et À. binucleata) les phénomènes de la karyokinèse. Chez
Paramæba Eilhardi, il découvre un véritable centrosome met
entièrement en évidence le cycle évolutif de cette Amibe; à un
certain moment celle-ci se fragmente pour donner naissance à
des formes flagellées, phénomène au cours duquel le centrosome
joue un rôle particulier. Enfin, il étudie un nouveau type de Rhi-
zopode, le Campionema nutans, qui se rapproche beaucoup des
Héliozoaires. Dans cet être, dont la position systématique est
NOTICES BIOGRAPHIQUES. — FR. SCHAUDINN 391
très remarquable, il découvre de curieux rapports entre le noyau
et l'appareil locomoteur formé par les pseudopodes.
Le mémoire consacré à l'étude des générations alternantes du
Trichosphærium Sieboldi constitue le couronnement des recher-
ches de Schaudinn sur les Protozoaires libres. L'étude du dimor-
phisme et de ses causes est encore l'idée directrice de ce travail.
Frappé par les alternances de générations qu'il avait observées chez
les Foraminifères, chez Paramæba, ainsi que par les phénomènes de
copulation que présentent les genres À ctinophrys et Actinosphærium,
il se demande si le dimorphisme est dü à ces alternances. Ce mé-
moire est un modèle de recherche scientifique; il paraît que
Schaudinn aimait à le relire pour y puiser des inspirations. En
eftet, il était arrivé le premier à suivre le cycle complet de l’évolu-
tion d’un Rhizopode libre, avec l'alternance des deux générations
sexuée et asexuée. La découverte de ces deux cycles et des multiples
chargements de forme auxquels ils donnent lieu, lui fut plus tard
d'un grand secours dans l'étude des Protozoaires parasites. Nous
verrons en particulier comment il sut utiliser ces données dans
ses travaux sur les Coccidies et les Hémosporidies.
Voyage au Spitzberg (1898). — En mai 1898, il entreprit, sur le
petit vapeur Helgoland, un voyage au Spitzherg et dans les mers
arctiques. Il était accompagné de son ami Rômer et d’un parent de
ce dernier, Friese, peintre d'animaux. Au cours de ce voyage, il fit
d'abondantes récoltes zoologiques et découvrit un certain nombre
de types nouveaux, appartenant à la faune abyssale. Au retour, cet
abondant matériel, dont la conservation était parfaite, fut réparti
entre divers spécialistes. Les résultats de l'expédition devaient
former un ensemble de volumes, publiés sous le titre de Fauna
‘arctica, par Schaudinn et Rôümer. Quatre volumes ont déjà paru :
dans l’un d'eux se trouve une monographie des Tardigrades, écrite
par Schaudinn. L'expédition opéra la plupart de ses dragages dans
une région tout à fait inexplorée au point de vue zoologique, sur
les bords du bassin polaire découvert par Nansen. Les explorateurs
s'avancèrent jusqu'à 81° 32° de latitude nord et firent une impor-
tante série d'observations topographiques et géographiques sur la
côte occidentale du Spitzhberg.
Retour à Berlin (1899-1901). — C'est après cette expédition que
x
«
Schaudinn commença à s'occuper plus spécialement des Proto-
392 M. LANGERON
zoaires pathogènes. Jusqu'alors, ses travaux étaient plutôt du res-
sort de la zoologie pure : désormais il va pénétrer dans le domaine
de la médecine scientifique et y porter la rigueur de sa méthode et
la largeur de ses vues.
Il avait fait connaître, en 1896, un curieux organisme, le Leydenia
gemmipara, probablement voisin des Amibes et parasite acciden-
tel du liquide ascitique chez l'Homme. Il avait entrepris ensuite,
en collaboration avec Siedlecki, l'étude des générations alternan-
tes chez les Coccidies. Il prit comme matériel de recherches un
Myriapode que l'on rencontre communément sous les pierres, dans
les lieux ombragés, le Lithobius forficatus. On savait depuis long-
temps que les cellules épithéliales de l'intestin de cet animal sont
fréquemment infestées par des Coccidies. En moins d'une année,
Schaudinn put débrouiller le cycle évolutif complet de ces diverses
formes et suivre d'un bout à l’autre l’évolution d’un type nouveau,
se Coccidium Schubergi Schd. I] put ainsi faire connaître la succes-
sion, désormais classique, de deux générations, l'une asexuée,
l’autre sexuée. Dans la première, à laquelle il donna le nom de
schizogonie, le nombre des parasites augmente considérablement,
par suite de phénomènes successifs de division nucléaire : c'est-
pour l'hôte, la période d’infestation, qui peut revêtir un caractère
aigu. Au bout d'un certain temps, cette faculté de multiplication
s’épuise, par suite de diverses causes. On voit alors se différencier
des formes sexuées, qui subissent des phénomènes de maturation,
puis copulent absolumentcomme les éléments sexués des animaux
supérieurs. Schaudinn a observé, en effet, la pénétration du micro-
gamète, qui est analogue au spermatozoïde, dansle macrogamète,
de tous points identique à l'œuf. Il suivitensuite la transformation
du produitdelacopulation, ouzygote, en oocyste, puis ensporocyste,
ainsi que la mise en liberté des sporozoïtes et l’infestation d'un
nouvel hôte, phénomène par lequel termine le second cycle, ou
sporogonie.
Schaudinn avait indiqué la succession de ces phénomènes dans
un travail publié, en 1897, en collaboration avec Siedlecki; mais
leur véritable signification et le rôle qu'ils jouent dans les manifes-
tations pathologiques de la coccidiose ne sont véritablement mis en
valeur que dans le mémoire publié par Schaudinn seul en 1900.
Dès cette époque, il présentait l'influence que ses travaux sur les
NOTICES BIOGRAPHIQUES. — FR. SCHAUDINN 9393
Coccidies exerceraient sur la connaissance des parasites du palu-
disme : il devinait l'analogie du cycle évolutif de ces deux classes
d'organismes. Ce furent en effet ses deux mémoires fondamentaux
sur Trichosphærium Sieboldi, Protozoaire libre, et sur Coccidium
Schubergi, Protozoaire parasite, qui firent définitivement connaî-
tre le cycle évolutif des Sporozoaires et mirent Ross et Grassi sur
la voie de leurs grandes découvertes concernant le paludisme. Ces
travaux, qui inauguraient brillamment la carrière de Schaudinn
comme protozoologiste, furent couronnés, en 1903, par la Société
des Naturalistes de Francfort, qui lui décerna le prix Tiedemann.
En même temps, l'attention du gouvernement fut attirée sur Schau-
dinn et celui-ci fut appelé à l'Office impérial de santé de Berlin.
Là, sa valeur fut vite appréciée et on le choisit comme directeur
du futur Institut de protistologie qui allait être bâti, suivant ses
indications, à Lichterfeld, près de Berlin. En attendant l'achève-
ment de cet Institut, et sur la proposition du Dr Hermès, directeur
de l'aquarium de Berlin, Schaudinn fut envoyé avec sa famille à
la station zoologique de Rovigno, sur l'Adriatique, pour y étudier
les Protozoaires pathogènes.
Séjour à Rovigno (1901-1904). — En avril 1901, commence donc
la partie la plus heureuse et la plus féconde de la courte vie de
Schaudinn. Délivré des froissements de la vie bureaucratique de
Berlin, libre de travailler suivant ses goûts, il voit ses découvertes se
succéder si rapidement qu'il a à peine le temps de les publier.
Désormais, la plupart de ses travaux ou communications vont
paraître dans le recueil des travaux de l'Office impérial de santé.
Schaudinn se mit d’abord à étudier le cycle évolutif d’une Coc-
cidie de la Taupe, le Cyclospora karyolytica, qui produit chez cet
animal une entérite pernicieuse. Jusqu'ici, ses recherches ne
s'étaient adressées qu'aux Coccidies des Arthropodes : il voulut
étudier une espèce vivant chez un Vertébré à sang chaud. Le Cy-
clospora présente ce caractère particulier d'être un parasite du
noyau cellulaire ; non seulement il s'attaque aux cellules épithé-
liales et glandulaires, mais encore il détruit les leucocytes qui se
trouvent dans la muqueuse intestinale, ainsi qu'une partie du tis-
su conjonctif de la sous-muqueuse. Les lésions ainsi produites sont
très profondes et peuvent s'étendre à toute la longueur de l'intes-
tin. Cette espèce présente en outre un dimorphisme sexuel très
Archives de Parasitologie, XI, n° 3, 1907. 26
394 M. LANGERON
accentué : les sporozoïtes affectent deux formes différentes, d'où
naissent des schizontes mâles et femelles.
Ce n’est pas la seule découverte importante que Schaudinn fut
amené à faire par l'étude de cette espèce : nous devons encore
mentionner ses observations sur les phénomènes de réduction
nucléaire, sur les troubles que le parasite produit chez son hôte et
enfin sur les phénomènes de dégénérescence que le parasite peut
subir à son tour. Déjà, dans son mémoiresur le Coccidium Schuber-
gi, Schaudinn avait étudié la dégénérescence des éléments parasi-
taires dans les cellules de l'hôte; il revient sur cette question à
propos du Cyclospora et met en évidence une sorte de surmenage
qui aménerait, en définitive, un « affaiblissement des mécanismes
régulateurs de la cellule ». De là découlent d'intéressantes déduc-
tions concernant la genèse des tumeurs.
Dès 1899, Schaudinn avait comparé le cycle évolutif des Hémo-
sporidies à celui des Coccidies et montré comment, par l'étude de
ces derniers parasites, on pouvait jeter une vive lumière sur l'his-
toire du paludisme. Malgré la deuxième édition de l'ouvrage de
Grassi, qui avait étudié à fond la sporogonie, il restait encore bien
des particularités à éclaircir lorsque Schaudinn arriva en Istrie.
Cette province était ravagée par le paludisme et présentait les
meilleures conditions pour l'étude de cette maladie. Schaudinn
choisit comme station d'expériences le petit village de San Michele
di Leme, situé à 130 mètres au-dessus du niveau de la mer et à
10 kilomètres environ de Rovigno. C'étaitune petite agglomération
isolée, composée de onze maisons habitées par une population
misérable, illettrée et décimée par l'endémie palustre. Les Ano-
pheles y abondaïent et pouvaient se multiplier à l’aise, soit dans
les mares du village, soit dans les citernes des maisons. C'est là
que Schaudinn entreprit ses recherches sur le Plasmodium vivax
{Grassi et Feletti 1890), parasite qui produit, chez l'Homme, la
fièvre tierce bénigne.
Ces travaux étaient très pénibles, car il lui fallait aller de Rovi-
gno à San Michele au moins une fois par semaine, soit à pied, soit
par bateau. Dans ia belle saison, non seulement la température est
accablante, mais encore la réverbération intense et aveuglante,
produite par le sol blanc et calcaire de ces régions, rend la cha-
leur et la lumière solaires encore plus insupportables. Mais
NOTICES BIOGRAPHIQUES. — FR. SCHAUDINN 395
Schaudinn fut bien dédommagé de ses fatigues par l'importance
de ses découvertes. Mentionnons seulement ses recherches sur la
biologie des Moustiques et indiquons en quelques mots les résul-
tats essentiels auxquels il est parvenu, en ce qui concerne les Plas-
modies paludiques.
Grâce à son habileté technique extraordinaire et à sa rigoureuse
méthode d’expérimentation, il observe, à l’état vivant, toutes les
transformations du parasite. Le premier, il suit et dessine au mi-
croscope la pénétration des sporozoiïtes et des mérozoïtes dans les
globules rouges, ainsi que les modifications produites par la qui-
nine chez le parasite. [1 élucide le problème des récidives en dé-
montrant qu'elles sont dues à une multiplication parthénogénétique
des macrogamètes; on sait en effet que ceux-ci persistent pendant
très longtemps dans le sang des paludiques. On ne saurait trop
regretter qu'il n'ait pas eu le temps de publier aussi les résultats
de ses recherches sur le parasite de la quarte et sur celui de la
tierce maligne.
Quoi qu'il en soit, les travaux de Schaudinn sont devenus des
données fondamentales pour l'histoire des Plasmodies paludiques
et pour les questions d'assainissement, dont il s'était activement
occupé en faveur du petit village de San Michele. L'application de
ces découvertes aux autres localités insalubres des côtes autri-
chiennes de l’Adriatique donna rapidement de brillants résultats ;
on vit accourir à Rovigno une foule de jeunes chercheurs, qui ve-
naient travailler sous la direction du maître et apprendre à lutter
contre le paludisme.
A ces travaux sur les Hémosporidies, se rattache la continua-
tion de ses recherches sur une Hémogrégarine du Lézard, le Ka-
ryolysus lacertarum, déja commencées à Berlin. Schaudinn décou-
vrit que l'hôte intermédiaire de ce parasite est une Tique, l'Zxodes
ricinus, dans l'intestin de laquelle se produit la fusion des gamètes
et la formation des oocystes. Il arriva même à suivre la pénétra-
tion du parasite dans les ovaires et à démontrer l'infestation pri-
mitive des larves d’Ixodes. Ces résultats sont à rapprocher de ceux
qu'il obtint dans ses recherches sur la transmission du Spirochète
de la fièvre récurrente par les Punaises; il constata aussi, chez ces
Insectes, l'infestation des ovaires par les Spirochètes.
On sait que Dutton et Todd, puis R. Koch, ont obtenu des résultats
396 M. LANGERON
analogues en Afrique, dans l'étude de la tick fever, et qu'ils ont sui-
vi l'évolution du Spirochète chez l'Ornithodorus moubata. Dans le
même ordre d'idées, nous devons encore mentionner la découverte
de l’infestation des ovaires du Moustique par les Spirochètes issus
du développement du Plasmodium Ziemanni et par les Trypanosomo-
ses que produit l Hæmoproteus noctuae. Schaudinn a donc mis en
évidence trois faits importants de transmission héréditaire des pa-
rasites sanguicoles à des générations successives d'Acariens ou
d'Insectes. < |
Les Hémosporidies ne sont pas les seuls Protozoaires pathogènes
qui infestent les côtes de l'Istrie et de la Dalmatie. Outre le palu-
disme, elles sont encore désolées par la dysenterie qui fait de
grands ravages surtout parmi les jeunes enfants.
Les travaux de Schaudinn sur la dysenterie sont la suite logique
de ses précédentes recherches sur les Rhizopodes. Déjà, en 1896, il
avait décrit en collaboration avec Leyden, un curieux organisme,
semblable à une Amibe, le Leydenia gemmipara, trouvé deux fois
dans le liquide ascitique de malades atteints de carcinome. L'in-
terprétation de cette forme problématique reste encore douteuse,
mais cela n’enlève rien à la valeur et à la précision des observations
de Schaudinn.
À Rovigno, il put reprendre ses recherches sur les Amibes para-
sites de l'Homme. Il fut d’ailleurs beaucoup aidé par ses précédents
travaux sur les Rhizopodes libres, soit marins, soit d'eau douce;
sans l'habitude qu'il avait acquise d'observer ces êtres de forme si
variable, il n'aurait pu mener à bien ses recherches sur la dysen-
terie. Nous ne pouvons donner ici un résumé, même très som-
maire, de ses expériencessur les genres Polystomella, Echinopyxis,'
Chlamydophrys et Entamæba.
Au point de vue pratique, Schaudinn parvint à distinguer, dans
les Amibes parasites de l'Homme, deux espèces, l’une inofiensive,
Entamæba coli, l'autre très dangereuse, Entamæba histolytica : c'est
cette dernière espèce qui cause les lésions si graves de la dysenterie
amibienne. Ces travaux devaient être pour lui la cause de cruelles
soufirances : en eftet, il n'hésita pas à expérimenter sur lui-même
l'effet de ces dangereux parasites. Non content de se procurer des
matériaux d'étude en avalant des kystes de Chlamydophrys sterco-
rea, il s'infesta aussi avec Entamæba coli et Entamæba histolytica. Le
NOTICES BIOGRAPHIQUES. — FR. SCHAUDINN ‘397
premier essai qu'il fit, à Berlin, le rendit très malade ; il fut pris de
dysenterie violente et rendit de nombreuses Amibes; il put heureu-
sement se débarrasser en peu de jours de ces parasites, à l’aide du
calomel. Son deuxième essai fut moins heureux : il n’arriva à faire
disparaître les Amibes qu'au bout de trois mois et à force d’em-
ployer les lavages au sublimé et les injections de bleu de méthy-
lène. Il n'est pas douteux que sa dernière maladieet sa mort n'aient
été en grande partie causées par ces tentatives expérimentales. Il
succomba, en effet, à la suite d’abcès intestinaux analogues à ceux
qu'il avait démontré être le résultat de l’infestation amibienne:
Au point de vue théorique, les résultats de ses recherches sur les
‘Rhizopodes ne sont pas moins remarquables. {1 découvrit la fécon-
-dation du Polystomella et démontra les rapports étroits qui existent
entre cette forme et les genres Centropyxis et Chlamydophrys. W sui-
vit entièrement le cycle évolutif de ce dernier Rhizopode et put ar-
river à le reproduire par infestation expérimentale, au moyen du
kyste qui se forme après la fécondation. Enfin, il applique ces re-
cherches à la confirmation de la théorie chromidiale de R. Hertwig :
il montra qu'à côté des chromidies somatiques, il y a encore, chez
les Rhizopodes, des chromidies sexuelles, qui président aux phéno-
mènes de la sexualité et du développement. Dans le même ordre
d'idées, il découvrit, chez Entamæba coli, l'existence d’une double
fécondation autogame, constituée par la fusion de deux noyaux fils,
issus du noyau primitif.
A peine ces ÿrands travaux sur les Rhizopodes étaient-ils ter-
minés, qu'il faisait paraître, le 15 octobre 1903, sa retentissante
communication sur les générations alternantes et les HIBTAUQNS
dans les genres Trypanosoma et Spirochæta.
Les Oiseaux ont toujours été le matériel de choix pour l'étude des
Hémosporidies : c’est déjà en étudiantles parasites des Oiseaux que
Ross fit les remarquables travaux qui jetèrent un jour si considé-
rable sur l'histoire du paludisme et qui lui valurent le prix Nobel-
C'est encore aux Oiseaux que Schaudinn s'adressa pour recher-
cher lesaflinités des Trypanosomes. Dans ce but, ilchoïsit la Chevéche
(Athenenoctua), dont le sang renferme généralement trois parasites :
un Plasmodium qui est probablement le P. Danilevskyi, puis rie
modium Ziemanni et Hæmoproteus noctuae.
Schaudinn est arrivé à démontrer que ces deux Pr
398 M. LANGERON
sites passent par les stades Trypanosome et Spirochète. Le cycle
évolutif de ces organismes est très complexe, et des plus curieux ;
en effet, il y a coexistence de formes mâles, femelles et indiffé-
rentes, tant chez le Moustique que chez l’Oiseau, et il y a aussi
plusieurs générations de Trypanosomes ou de Spirochètes. Nous ne
pouvons entrer ici dans le détail compliqué de l’évolution de ces
diverses formes. Contentons-nous de dire que non seulement les
découvertes de Schaudinn sont des plus curieuses en elles-mêmes,
mais encore qu'elles ont une grande importance au point de vue de la
médecine humaine et comparée. Elles tendent en effet à démontrer,
d'une part que les Spirochètes, considérés autrefois comme des
Bactéries, doivent être rangés parmi les Flagellés, d'autre part que
les Hémosporidies, et en particulier les Plasmodies paludiques,
devraient aussi rentrer dans cette même classe des Flagellés. Ces
notions peuvent avoir une grande importance au point de vue de
la transmission et de la prophylaxie des maladies causées par ces
parasites.
A côté de ce point de vue plus spécialement médical et pratique
nous devons encore faire ressortir l'intérêt des vues théoriques de
Schaudinn sur le dualisme nucléaire. Dans le noyau de ces orga-
nismes, il est arrivé à distinguer deux parties, l'une somatique ou
noyau animal, plus spécialement en rapport avec l'appareil de lo-
comotion, et constituant le blépharoplaste, l’autre reproductrice,
ou noyau végétatif. Selon lui, ces deux noyaux sont antagonistes
et la prédominance de l’un ou de l’autre va caractériser les sexes. La
forme primitive de ces Flagellés serait morphologiquement uninu-
cléée, c'est-à-dire que le noyau animal serait pour ainsi dire inclus
dans le noyau végétatif et en sorlirait au cours du développement.
Dans la cellule mâle, le noyau végétatif dégénère et le noyau animal
(blépharoplaste) prend une importance prépondérante. Dans la
cellule femelle, c'est l'inverse qui se produit.
Par suite, la fécondation est double et les noyaux homologues
fusionnent : le gros noyau femelle du macrogamète fusionne avec
le petit noyau femelle du microgamète, tandis que le petit noyau
mâle du macrogamète fusionne avec le gros noyau mâle du micro-
samète, De cette double fécondation résultent deux synkarions
qui s'unissent à leur tour, de sorte que finalement le noyau mâle
gagne le centre du noyau femelle. Le noyau de l’ookinète à donc
NOTICES BIOGRAPHIQUES. — FR. SCHAUDINN 399
une structure très compliquée : c'est un synkarion qui renferme
S chromosomes et qui possède en son centre un karyosome, formé
a son tour de 8 chromosomes et d'un corpuscule central. C’est ce
karyosome qui va s'échapper du noyau pour constituer l'appareil
locomoteur.
Schaudinn attachait autant d'importance à ces vues théoriques
qu'aux applications pratiques qui pouvaient être le résultat de ses
découvertes. Peu de temps avant sa mort, en 1905, il revint encore
sur ces questions dans le rappport qu'il présenta, au Congrès z00-
logique de Breslau, sur la fécondation chez les Protozoaires. D'après
lui, pendant la vie végétative, autrement dit pendant la schizo-
gonie ou période de multiplication, il y a rupture de l'équilibre
nucléaire. Les conditions du milieu externe produisent fatalement
la prédominance de l’une des deux portions du noyau, soit mâle,
soit femelle. À ce moment, la faculté de multiplication de la cel-
lule subit un arrêt, une sorte d'inhibition. L'organisme est con-
damné à périr s'il ne survient un processus capable de rétablir
l'équilibre. Ce processus est ia fécondation. Pour Schaudinn, la
signification et le but de ce phénomène seraient donc de produire
des formes cellulaires indifférentes, chez lesquelles les deux fonc-
tions, végétative et animale, soient en parfait équilibre ; par suite,
ces formes peuvent de nouveau se multiplier.
Tout, dans l'œuvre de Schaudinn, repose sur l'hypothèse du dua-
lisme nucléaire. Pour lui, ce dualisme représente la nécessité de
la concurrence de deux principesindissolublement liés et constitue
l'expression du processus vital. Les troubles apportés àce dualisme
amènent la cessation de la vie. Le dualisme peut se manifester de
façons diverses : tantôt par un dimorphisme del’organisme entier,
tantôt par un simple dimorphisme nucléaire, tantôt enfin par un
dimorphisme physiologique, maïs partout il constitue le postulat de
toute existence. En même temps qu'il est l'essence dela vie, il porte
en lui-même un germe de destruction, par suite de la prépondé-
rance fatale de l’un des deux principes. De là découle la nécessi-
té de la fécondation pour la conservation de la vie. En définitive,
Schaudinn considère que si l'on admet le dualisme physiologique
primitif de la substance organique, on acquiert immédiatement
aussi la notion du dimorphisme sexuel et de la fécondation.
Quelle que soit la valeur de ces conceptions et quel que soit le
400 M. LANGERON
sort que leur réserve l'avenir, on ne peut nier la puissance du gé-
nie de Schaudinn et l'ampleur de ses vues. Tout, dans son œuvre,
se tient logiquement : depuis ses travaux sur le dimorphisme des
Foraminifères jusqu'à la découverte des formes sexuées et indil-
férentes des Hématozoaires de la Chevêche, nous pouvons suivre
le développement ininterrompu de sa pensée philosophique. Pour
arriver à de tels résultats, il savait mettre au service de ses dons
naturels une méthode de recherche très particulière. D'abord sa
puissance de travail lui permettait d'observer au microscope une
partie de la nuit, afin de suivre cerlains stades d'évolution, qui
sont exclusivement nocturnes. Puis il ne s’appliquait pas seule-
ment à rechercher. le cycle évolutif aussi complet que possible
d'une espèce donnée, il étudiait encore en même temps et compa-
rativement une série de formes diverses, de facon à éclairer ses
découvertes l'une par l’autre. De là le lien si étroit qui existe entre
ses travaux sur les Foraminifères, les Amibes et les Hémospo-
ridies.
Pour donner une idée de la façon dont Schaudinn étudiait toutes
les questions dans les détails les plus minutieux, nous pouvons
rappeler brièvement la manière dont il comprenait le mécanisme
physiologique de la piqûre du Moustique.
Pour lui, la salive du Moustique n'est pas venimeuse :la substance
irritante qu'elle renferme serait produite par une Levure vivanten
commensale dans les glandes salivaires; les spores de cette Levure
peuvent être transmises aux générations futures, en pénétrant dans
les œufs. Il reste à déterminer la facon dont la salive va s'écouler
dans la plaie produite par les stylets et comment le sang va mon-
ter le long de ces appendices. Schaudinn remarqua que la mince
couche d'acide carbonique qui se trouve à la surface de la peau
humaine gêne la respiration de l’Insecte et l'oblige à contracter
assez violemment son abdomen. Ces contractions se propagent aux
muscles du thorax et de la tête et produisent mécaniquement la
sortie de la salive, dans laquelle se trouvent le Champignon et son
ferment: en même temps, une bulle d'acide carbonique reste ap-
pendue à la pointe de l'hypopharynx. Le ferment exerce une action
irriltante qui provoque l'afflux du sang, tandis que l'acide carbo-
nique s oppose à la coagulation. Le sang monte donc le long des
slylets, aidé par la puissante aspiration du pharynx. Telle est la
FX
FA
m7.
NOTICES BIOGRAPHIQUES. — FR. SCHAUDINN 401
facon ingénieuse dont Schaudinn explique la piqüre du Moustique
et l'irritation qui en résulte, en tenant compte de là dépendance
réciproque d'un grand nombre de facteurs.
Second séjour à Berlin, à l'Office impérial de santé (1904- 1905). —
Malheureusement il fallut, par ordre supérieur, s'arracher à ces
‘recherches captivantes. Au mois d'avril 190%, Schaudinn fut
rappelé à Berlin et dut quitter Rovigno avec sa famille. Le séjour
de trois ans qu'il venait d’y faire lui avait procuré de précieux
matériaux de travail, mais avait été très nuisible à sa santé’et
a celle des siens. Néanmoins, Schaudinn conserva toujours un bon
souvenir de Rovigno, car il avait pu y travailler selon son inspira-
tion, d'une façon libre et indépendante.
A Berlin, il en fut tout autrement. On ne tarda pas à lui faire sa-
voir qu'il n'était pas à l'Office impérial de santé pour entreprendre
des recherches personnelles, mais pour effectuer les vérifications
qui lui seraientindiquées. Schaudinn fut donc obligé d'abandonner
ses travaux sur les Trypanosomes. Cette soumission lui fut très pé-
nible; il protesta autant que la prudence le lui permettait, mais
il finit par se résigner dans l'intérêt de sa famille. C'était presque
la ruine de ses espérances et de ses projets; il commença à déses-
pérer de jamais obtenir la mission qu'on lui avait promise pour
l'étude des Trypanosomes et de la dysenterie.
Pourtant il ne perd pas courage et dirige docilement son acti-
vité dans les directions variées qu'on lui impose. Appliquant son
génie aux travaux qui lui incombent par voie officielle, il trouve,
là encore, l'occasion de découvertes retentissantes. Il fut d'abord
chargé de vérifier les expériences de Looss sur Fa pénétration des
larves d'Uncinaires à travers la peau. Ces recherches, motivéés par
les ravages que l’uncinariose exerçait dans les districts miniers de
la Westphalie, furent couronnées de succès. En expérimentant sur
de jeunes Singes (Znuus sinicus), Schaudinn démontra d'une façon
évidente l'infestation par voie cutanée.
Au milieu du programme hétérogène et astreignant qui lui était
tracé, Schaudinn reçut un jour l'ordre d'étudier la question de la
syphilis et de vérifier en même temps les prétendues découvertes
d'agents pathogènes dans la variole, la fièvre aphteuse, la scarlati-
né, ete. Pour faciliter son travail il devait avoir, au point de vue cli-
nique, la collaboration du D' Hoffmann, de la clinique. de Lesser.
402 M. LANGERON
Au commencement de mars 1905, 1l remarqua, en examinant à
l’état frais des exsudats d'ulcérations syphilitiques, la présence
constante d'un Spirochète particulier et mobile. Continuant ses
recherches, il trouva ce même Spirochète dans la profondeur des
tissus et dans les ganglions inguinaux atteints de l'infection spéci-
fique. A cause de sa faible affinité pour les matières colorantes, il
nomma cet organisme Spirochæte pallida ; dans la suite, il changea
ce nom en celui de Treponema pallidum, plus conforme aux règles
de la nomenclature et qui doit seul être conservé.
Bien que convaincu de la réalité de sa découverte, Schaudinn n a
jamais affirmé la signification étiologique du Treponema; il s'est
contenté de montrer sa constance dans les produits spécifiques.
Cette découverte fut accueillie, comme il arrive toujours, par un
mélange d'enthousiasme, de scepticisme et d'attaques envieuses.
Pourtant les confirmations ne tardèrent pas à affluer, si bien qu'à
l'heure actuelle la bibliographie de cette question est immense. On
trouve constamment le Treponema dans toutes les manifestations
primaires et secondaires de la syphilis acquise, dans la syphilis
congénitale, ainsi que dans la syphilis expérimentale des Singes;
on Je rencontre même quelquefois dans les produits tertiaires, ce
qui est d'accord avec leur moindre virulence.
Le rôle étiologique et la valeur diagnostique du Treponema sont
actuellement reconnus. La découverte de Schaudinn à donc fait
faire un pas immense à la question de la syphilis en soulevantenfin
le voile qui couvrait l'origine mystérieuse de cette terrible infec-
tion. Cela seul suffirait à immortaliser son nom; c'est d’ailleurs la
plus retentissante de ses découvertes, et celle qui devait frapper le
plus le monde médical.
Si nous recherchons la genèse de cette découverte, ainsi que le
lien qui la rattache aux précédents travaux de Schaudinn, nous
voyons qu'elle est le fruit de ses recherches sur les Hémosporidies
de la Chevêche et de sa méthode d'observation véritablement biolo-
gique. Il ne se contentait pas, en effet, d'employer les matières
colorantes et la méthode des coupes; il pratiquait de préférence
l'examen des parasites vivants et c’est à cette méthode qu'il doit ses
plus belles découvertes. ’
Départ pour Hambourg, les derniers mois (1905-1906).—- Au mois de
juillet 1905, Schaudinn prit un congé de six mois; il devait passer
NOTICES BIOGRAPHIQUES. — FR. SCHAUDINN . 403
ce temps à Hambourg, à l'Institut de médecine navale et tropicale,
pour y préparer sa mission d'étude de la maladie du sommeil,
mission qui partit plus tard, sous la direction de R. Koch. C'est à
peu près à cette époque qu il reçut de Londres des offres pressantes :
on lui proposait une situation indépendante, largement rémunérée.
Schaudinn hésita quelque temps, mais enfin le patriotisme l'em-
porta et il renonça définitivement à s'expatrier.
Pendant son séjour à Hambourg, il publia une série de commu-
nications importantes au sujet du Treponema. Il se proposait d’étu-
dier comparativement une série de Spirochètes et autres formes
affines pour arriver à découvrir le cyele évolutif complet de ces
organismes. Le type morphologique Spirochète, de même que la
forme Trypanosome, lui apparaissaient de plus en plus comme des
stades passagers, réalisés au cours du développement de divers
Protozoaires et, en quelque sorte, analogues à la gastrula des Méta-
zoaires. Ces stades représentaient pour lui des relations phylogé-
nétiques dont il lui était encore impossible d'apprécier la valeur.
Il rappelait à ce propos l’évolution du Plasmodium Ziemanni : cet
organisme passe en effet, pendant un certain temps, par la forme
Spirochète, mais il est en réalité très éloigné des véritables Spiro-
chæta, tels que $. plicatilis et S. recurrentis.
Schaudinn aura donc la gloire d’avoir reconnu l’affinité qui existe
probablement entre les Spirochètes, les Flagellés et les Hémospo-
ridies; il aura contribué à établir une distinction bien tranchée
entre ces organismes et les Bactéries du genre Spirillum. Il se peut,
en effet, que le Treponema soit un Protozoaire considérablement
modifié par la perte de son hôte intermédiaire et par le parasitisme.
Ce ne serait pas le premier exemple d'un Fagellé dont la transmis-
sion d'hôte à hôte se ferait par le simple contact des muqueuses.
Le Trypanosoma equiperdum, qui provoque chez les Équidés la ma-
ladie de la dourine, paraît se transmettre uniquement par le coîït.
De même que le Treponema, il cause une maladie de longue durée,
à manifestations polymorphes, au cours de laquelle le parasite
est fort difficile à déceler.
Au mois de janvier 1906, Schaudinn fut choisi à l'unanimité par
le Conseil de la bourgeoisie de Hambourg, sur la proposition du
Sénat, pour être directeur de la section de protistologie de l'Institut
de médecine navale et tropicale. Il accepta avec joie cette situation
404 -M.. LANGEROÔN
nouvelle, où il espérait jouir enfin de la vie de famille ét de Ja li-
_berté de travailler suivant ses goûts, sans être préoccupé de soucis
‘matériels. Il dut auparavant retourner à Bérlin, pourachever d'or-
_ganiser l'Institut de protistologie de Lichterfeld, où sa femme et
ses enfants résidaient depuis le mois d'octobre 1905. Enfin, en
mars 1906, il revint définitivement à Hambourg, où il s'installa
avec sa famille. FA
Malheureusement, la maladie quiletourmentaitdepuislongtemps
s'aggrava : il souffrait, en effet, d'abcès du rectum. Choisi pour re-
présenter l'Allemagne au Congrès de Lisbonne, il espérait que ce
voyage allait améliorer sa santé. Bien au contraire son état ne fit
qu'empirer. Au retour, il dut rester presque constamment cou-
ché, dans sa cabine du paquebot Oceana; il subit même, en cours
de route, üune première 6pération destinée à évacuer le pus des ab-
cès. Dès son arrivée à Hambourg, il fut obligé de s’aliter à la mai-
son de santé d'Eppendorf. Les suites de la première opération pa-
rurent d’abord favorables, mais bientôt une nouvelle opération de-
vint urgente; puis apparurent des symptômes de septicémie et le
22 juin 1906, à 5 heures du matin, Schaudinn mourut, à peine âgé
de 35 ans, dans le plein développement de son talent, laissant une
veuve et trois enfants en bas âge, dont le dernier ne devait voir
le jour que trois semaines après la mort de son père.
Nousdonnons ci-après la liste des publications de Fritz Schaudinn,
mais nous devons une mention particulière au périodique qu'il
avait fondé en 1902, sous le titre d’Archiv für Protistenkunde. I
voulait, par cette publication, établir un lien étroit entre la-botani-
que, la zoologie et la médecine, en réunissant tous les travaux qui
sont du domaine de la protistologie. Ce périodique en est actuelle-
ment à son huitième volume. Outre des listes bibliographiques très
complètes des travaux de protistologie, Schaudinn y à publié deux
mémoires de bactériologie; consacrés à des recherches sur des Bac-
téries de grande taille, le Bacillus Bütschlii et le Bacillus sporonema.
Là encore, il montra que le biologiste, familiarisé avec l'étude des
Protozoaires, sait voir des choses qui échappent au simple bacté-
riologiste.
Enfin nous joignons à cette notice un portrait de Schaudinn et,
comme fac-similé de son écriture, la reproduction d'une lettre
adressée par lui au Professeur R. Blanchard.
Archives de Parasitologie, XI, 1907. PI. VII.
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406 M. LANGERON
En mourant, Schaudinn laissait dans une situation des plus pré-
caires sa veuve et ses enfants. L'Allemagne ne possédant pas d’ins-
titution analogue à notre Société des amis des sciences, qui pût subvenir
à leurs besoins et se charger de l'éducation des tout petits, il se cons-
titua, sous la présidence de M. Stammann, bourgmestre de Ham-
bourg, un Comité de 99 personnes, comprenant les noms les plus
marquants, parmi les professeurs de médecine et de zoologie, à
l'effet de provoquer une souscription.
Le professeur R. Blanchard reçut cette circulaire en juillet 1906.
Elle portait la mention « confidentiel ». Il paraîtra peut-être indis-
cret, après une telle recommandation, de faire allusion ici à la
souscription ouverte en faveur de Mme Schaudinn et de ses
enfants, mais le magnifique résultat qui fut obtenu donne à cette
souscription le caractère d’une belle manifestation de solidarité
scientifique, à laquelle un petit nombre d'étrangers furent invités à
prendre part, et les manifestations de ce genre sont toujours d’un
belexemple. D'ailleurs nos scrupules n'auraient plus aucune raison
d'être, attendu que divers journaux ont déjà dévoilé depuis long-
temps l'existence de la souscription.
La lettre-circulaire rédigée et répandue par le Comité était
libellée comme suit :
Im Alter von nicht ganz 35 Jahren starb am 22. Juni zu Hamburg
D' FRITZ SCHAUDINN
der früher dem Zoologischen Institut zu Berlin als Assistent, dann
dem Kaiserlichen Gesundheïitsamt als Mitglied und zuletzt dem Institut
für Schiffs- und Tropenkrankheiten als Leiter der Protisten Abteilung
angehôrt hatte. Seine grossen Verdienste um die Wissenschaît sind in
der ganzen Welt bekannt. Die Protistenkunde hat in Schaudinn einen
bahnbrechenden Forscher, die Medizin einen glücklichen Entdecker ver-
loren. Mitten aus einem arbeitsreichen Leben wurde er, der erst an der
Schwelle des Mannesalters stand, durch ein unerbittliches Schicksal
herausgerissen. Grosses hat Schaudinn in dieser kurzen Frist geleistet.
Aber sein allzufrüher Tod hat ihn, der ohne Rücksicht auf die Gesund
heit seine ganze Kraft in den Dienst der Forschung stellte, verhindert,
die Zukunft seiner Gattin und seiner Kinder zu sichern.
Da ist es eine Ehrenpflicht der Vertreter und Fôrderer der Wissenschaf-
ten, die dem Verstorbenen so grosse Fortschritte und Entdeckungen ver-
danken, helfend einzutreten und wenigstens nach Môglichkeiïit materielle
Sorgen von den vom Schicksal so hart betroffenen Hinterbliebenen
fernzuhalten.
NOTICES BIOGRAPHIQUES. — FR.SCHAUDINN 407
Le professeur R. Blanchard donna communication de cette lettre
au Dr J. Guiart, alors agrégé et chef des travaux pratiques de pa-
rasitologie à la Faculté de médecine de Paris. Tous deux étaient
en relations amicales avec Schaudinn ; tous deux étaient vivement
émus par sa mort prématurée. Aussi répondirent-ils avec empres-
sement à l'appel du Comité.
La souscription donna un résultat des plus satisfaisants. A la
date du 98 octobre, il avait été encaissé une somme de 85. 710 mKk.
90 pf. (110.000 francs, en chiffres ronds), dont le Professeur Nocht,
directeur de l'Institut pour les maladies navales et tropicales, in-
diquait l'emploi par la lettre suivante:
Hamburg, den 8. November 1906,
Auf den im Interesse der Hinterbliebenen des verstorbene D" Fritz
Schaudinn erlassenen Aufruf ist bis zum 28. Oktober der Betrag voi:
M. 85 710, 90 eingegangen.
Um sicher zu stellen, dass dieses Kapital in sachgemässer Weise zu
Gunsten der Familie Schaudinn verwendet wird, ist damit eine Stiftung
unter dem Namen « D’. Fritz Schaudinn Gedächtnisstiftung » begründet
worden, deren Zinsen zunächst der Witwe ausgekehrt werden sollen
während das Kapital in späterer Zeit den Kindern zufallen wird. Die
Verwaltung dieser Stiftung, die ihren Sitz im hamburgischen Staatsge-
biet haben soll, ist von den Herren Medizinalrat Professor D' Nocht-
Hamburg als Vorsitzenden, Oberlandesgerichtsrat D' Philippi-Ham-
burg als stellvertretenden Vorsitzenden, Edmund J. A. Siemers- Ham-
burg als Schatzmeister sowie den Herren Geheimrat Professor D' Gaffky-
Berlin, Geheimrat Professsor D' Lesser-Berlin und D' med E. Paschen-
Hambourg als Beïisitzern übernommen worden und untersteht gemäss
Artikel 95 der hamburgischen Verfassung der Oberaufsicht des hambur-
gischen Staates.
Wir freuen uns, dass auf diese Weise die Ehrenpflicht, den Hinterblie-
benen des verdienstvollen Gelehrten und Forschers eine sorgenlose Zu-
kunft zu sichern, in so ausreichender und rascher Weise hat erfüllt
werden kôünnen und danken Ihnen herzlich dafür. dass Sie durch Ihre
willige Hilfe hierzu beigetragen haben.
Im Auftrage der Unterzeichner des Aufrufs
Professor D' Nocur.
En face d'une perte aussi déplorable, il est consolant de savoir
que la veuve et les orphelins ne connaîtront pas le besoin, grâce à
une manifestation de touchante solidarité qui honore autant ceux
qui en bénéficient que ceux qui en sont les auteurs.
408 M. LANGERON
PUBLICATIONS PARASITOLOGIQUES DE F. SCHAUDINN
E. von LEYDEN und F. ScHauniNn, Leydenia gemmipara Schaudinn, ein neuer
in der Ascites-Flussigkeit des lebender Menschen gefundener amôbenähnlicher
Rhizopode. Sitzber. d. kgl. preuss. Akad. d. Wiss. zu Berlin, p. 951-963, pl. VI,
1896.
F. ScHaupinn und M. Srepcecxt, Beitrage zur Kenntnis der Coccidien. Verh. d.
deutsch. Zool. Ges., Kiel, p. 192-203, 1897.
Ueber den Generationswechsel der Coccidien und die neuere Malariaforschung.
Silzber. der Ges. der Naturf. Freunde, Berlin, p. 154-178, 1899.
Ueber den Einfluss der Rôntgenstrahlen auf Protozen. Archiv der ges. Phy-
siol., LXXVII, p. 29-43, 1899.
M. JaxoBy und F. ScHaupiNn, Ueber zwei neue Infusorien im Darm des
Menschen. Centralblatt für Bakteriol., XXV, p. 487-494, 1899.
Der Generationswechsel der Coccidien und Hämosporidien. Zool. Centralblatt,
VI, p. 865-783, 1899.
Untersuchungen über den Generationswechsel von Trichosphærium Sieboldi.
Schn. Arch. z. der Abh. der kgl. preuss. Akad. der Wiss., Berlin, p.1-93, 1899.
Untersuchungen über den Generationswechsel bei Coccidien. Zoo!l. Jahrb.,
Abt. für Morphol.,XIII, p. 197-293, 1900.
Malaria. Wandtafel mit erläuterndem Text, in Leucxarr’s Sammlung Zoolo-
gischer Wandtafeln. Fischer et Kassel, (1), pl. CII, 1901.
Coccidien. Zbidem, (1), pl. CII, 1901.
Beiträge zur Kenntnis der Bakterien und verwandter Organismen.— I. Bacillus
Bütschlii n. sp. Archiv für Protistenkunde, 1, p. 306-343, pl. X, 1902.
Studien über krankheïitserregende Protozoen. — I. Cyclospora caryolytica
Schaud. der Erreger der pernicidsen Enteritis des Maulwurfs. Arbeilen aus dem
kais. Gesundheitsamte, XVII, p. 378-416, 1902.
Studien über krankheïitserregende Protozoen. — II. Plasmodium vivax (Grassi
et Feletti) der Erreger des Tertianfiebers des Menschen. Arbeiten aus dem kais.
(esundheitsamte, XIX, p. 169-240, 1902.
Anhangs-Bemerkung über Karyolysus lacertae und dessen Ueberträger 1x0-
des ricinus. Archiv für Protistenkunde, 11, p. 339-340, 1903.
Untersuchungen über die Fortpflanzung einiger Rhizopoden. Arbeiten aus dem
kais. Gesundheitsamte, XIX, p. 547-576, 1903.
Beiträge zur Kenntnis der Bakterien und verwandter Organismen.— II. Bacillus
sporonema n. sp. Archiv fur Protistenkunde, 11, p. 421-444, pl. XII, 1903.
Generations- und Wirtswechsel bei Trypanosoma und Spirochæte. Arbeiten
aus dem kais. Gesundheitsamte, XX, 1904.
Ueber die Einwanderung der Ankylostomum-Larven von der Haut aus.
Deutsche med. Woch., p. 1338-1339, 1904.
F. ScHAuDINN und E. HorFMaNN, Vorläufiger Bericht über das Vorkommen
von Spirochæten in syphilitischen Krankheïtsprodukten und bei Papillomen.
Arbeiten aus dem kais. Gesundheitsante, XXII, p. 527, 1905.
Neuere Forschungen über die Befruchtung bei Protozoen. Verh. deutsch. Zool.
Ges., Breslau, p. 16-35, pl. 1, 1905.
F. Scaaupinn und E. Horrmanx, Ueber Spirochætenbefunde im Lymphdrü-
sensaft Syphilitischer. Deutsche med. Woch., p. 711-714, 1905.
Ueber Spirochæte pallida bei Syphilis und die Unterschiede dieser Form gegen-
über andern Arten dieser Gattung. Berliner klin. Woch., p. 373-375, 1905
Zur Kenntnis von Spirochæle pallida. Deutsche med. Woch., p. 1665-1667,
1905.
Protozoenliteratur. Archiv fur Protistenkunde, 1V, p. 391-400 ; V, p. 267-270,
370-385; VI, p. 131-146, 334-350.
RECHERCHES SUR LE POUVOIR ANTIBACTÉRIEN
DE L’EXTRAIT DE CESTODES (1
PAR
Le D’ CHARLES JOYEUX
(PLANCHES V ET VI) -
L'influence antibactérienne de l'extrait de Cestodes n’est guère
connue que depuis les travaux de Picou et Ramond et surtout de
Jammes et Mandoul. Cette question complexe, très diverse-
ment interprétée, suivant les résultats obtenus, est encore loin
d’avoir reçu une solution définitive. Les expériences varient con-
sidérablement suivant le Microbe et l’'Helminthe employés, et il
n'est guère possible, à l'heure actuelle, de connaître les rapports
qui existent entre les Vers intestinaux et la flore microbienne au
milieu de laquelle ils vivent.
Il paraît cependant se dégager des travaux des auteurs précé-
dents ce fait que le Ténia et la Bactérie intestinale vivant ensemble
ne se détruisent pas. L'extrait n'est pas bactéricide pour les « habi-
tués » de l'intestin, il ne le devient que pour les Bacilles pathogè-
nes ou étrangers.
Mais la notion de Microbe pathogène est fort variable. Des espèces
considérées comme telles : le Bacille de Lôffler ou d’Eberth, vivent
sans nous occasionner d'accidents dans notre organisme et, d'autre
part, certaines autres, telles que le Bacillus mesentericus, ont été iso-
lées de plusieurs affections dont elles étaient la cause, bien qu'on
ait l'habitude de les ranger parmi les Microbes inoffensifs ; la notion
de virulence paraît l'emporter de beaucoup sur la notion d'espèce.
Il nous à paru intéressant, au cours d'expériences sur le pouvoir
antibactérien de l'extrait de Cestodes, de rechercher si l'influence
de cet extrait variait selon la pius grande intensité du pouvoir
pathogène chez une même espèce bactérienne.
Pour cela nous nous sommes servi du procédé des sacs de collo-
(1) Travail du laboratoire d'Histoire Naturelle de la Faculté de Médecine de
Nancy.
Archives de Parasitologie, XI, n° 3, 1907. 27
410 CH. JOYEUX
dion. Imaginée par Metshnikov, Roux et Salimbeni au cours de leurs
recherches sur la toxine cholérique, cette méthode a pour but de
cultiver les Microbes dans l'organisme à l'abri des phagocytes dans
un sachet de collodion, dont les parois s'opposent au passage des
cellules, mais permettent les échanges osmotiques qui modifient
la composition du milieu. Nous avons employé la méthode indi-
quée par Besson (1), en nous servant du Cobaye comme animal de
passage.
Les Bacilles choisis étaient restés indifférents à nos extraits dans
de nombreuses expériences précédentes ; c'étaient :
1° Bacillus mesentericus vulgatus Flügge ;
20 Bacillus paratyphi Schotmüller, type B ;
30 Bacilius paratyphi Bron-Kayser, type A. — Nous avons opéré
parallèlement sur deux échantillons : l’un provenant du laboratoire
de M. Netter, l’autre de la maison Kräl de Prague.
4° Bacillus psittacorum Nocard. — Enfin, pour être sûr d’avoir
des espèces saprophytes, nous avons isolé des Bactéries banales
d'un intestin de Mouton, et setrouvant à la surface même du Ténia
sur lequel nous allions expérimenter. Pour cela, nous ensemencions
des tubes de bouillon avec un fil de platine promené sur le corps du
Ver, puis portant à l'étuve à 370, nous réensemensions dès le moin-
dre trouble du milieu.
En renouvelant cette opération 5 à 6 fois de suite, nous avons
obtenu une culture pure de bâtonnets mobiles, ne gardant pas la
coloration de Gram, poussant sur gélatine en surface et en piqüre
sans la liquéfier, décolorant le bouillon de lactose à la fuchsine acide
de Ramond; les cultures sur bouillon traitées par l’azotite de po-
tasse et l'acide sulfurique donnaient la réaction de l’indol à partir
de la 4° semaine. Ces caractères nous permettent de ranger nos
microbes dans le groupe du Bacillus coli. Nous n'avons pu, toute-
fois obtenir sur pomme de terre l’enduit caractéristique, mais on
sait que la réussite de ces cultures tient surtout à la race de pom-
me de terre employée, et un autre Coli typique ensemencé sur ce
milieu nous a également donné un résultat négatif. Par cette mé-
thode, deux Microbes ont été isolés, que nous appellerons-et 6, et
qui présentent tous deux les propriétés ci-dessus.
(1) A. Besson, Technique microbiologique et sérothérapique. Paris, 2° édition,
1902.
POUVOIR ANTIBACTÉRIEN DES CESTODES alt
Toutes ces espèces étaient cultivées sur un même bouillon de
- peptone à # 0/0, en alcalinisant légèrement à la soude caustique.
Nous préparions de grandes quantités de ce milieu, pour éviter les
modifications qui se produisent souvent dans les cultures, lors-
qu’on passe d'un bouillon à l’autre.
Les extraits de Vers étaient obtenus ainsi : nous employions le
Tænia saginata Gæze, 1782; le Moniezia expansa (Rudolphi, 1810) et
le Thysanosoma Giardi (Moniez, 1879).
Ces parasites étaient lavés sous un fort courant d’eau pendant un
quart d'heure, puis pesés et broyés dans un mortier avec du coton
de verre pour faciliter la dilacération des tissus, nous mélangions
ensuite dans les proportions suivantes :
Pulpede Ne Tr RE Darties
Faut diS LI e RSR MERE 3 parties.
Nous portions alors nos macérations pendant 24 heures soit à
la température de 37°, soit à uhe température de 15 à 18, soit à
une température de 0°. Disons de suite que dans toutes ces condi-
tions le résultat a été le même. On pourrait, en effet, nous objecter
que l’action bactéricide sur nos Microbes employés était due, non
aux Cestodes mais à d’autres germes que notre lavage n'avait pu
faire disparaître et qui se développaient pendant les 24 heures de
macération; or on sait que les germes ne se développent pas à 0.
Au bout de ce temps, les extraits étaient filtrés aseptiquement
sur une bougie Chamberland F, et l'on obtenait ainsi un liquide
clair, opalescent, d'odeur fade, ne se troublant pas, même au bout
de plusieurs mois.
Nos matériaux étant ainsi préparés, nous opérions dela manière
suivante. Nous prenions quatre tubes de bouillon : dansle premier,
nous mettions quelques gouttes de l'extrait de Ténia prélevé au
moyen d'une pipette stérile, dans le deuxième nous mettions encore
quelques gouttes d'extrait et nous ensemencions en même temps
le Microbe à étudier. Le troisième et le quatrième étaient ense-
mencés avec le Microbe seul. Le tout était porté pendant 24 heures à
l’étuve à 37°. Au bout de cetemps, nous examinions d’abord le pre-
mier tube, ensemencé avec l'extrait seul, qui devait être resté par-
faitement clair, prouvant ainsi l’asepsie de notre préparation. Nous
comparions ensuite le deuxième tube avec l'un des deux suivants;
&12 CH. JOYEUX
en cas de résultat positif, le tube contenant le Microbe seul devait
être beaucoup plus poussé que celui contenant le Microbe et l’ex-
trait, cette différence se traduisant par le trouble plus ou moins
grand de la culture. Quant au quatrième tube contenant également
le Microbe seul, nous en inoculions 2° sous la peau de cuisse d’un
Cobaye, afin de mesurer son pouvoir pathogène. Faisons remarquer,
afin que l’on ne nous objecte pas que nos pipettes n’étaient pas gra-
Jduées ou que nos tubes de bouillon pouvaient contenir des quantités
de liquide inégales, que le pouvoir bactéricide de ces extraits est
indépendant de la quantité introduite dans la culture, à moins
naturellement qu'on en emploie des doses infimes ou absolument
exagérées. C'est d’ailleurs ce qu'avaient déjà constaté Jammes et
Mandoul.
Les résultatsobtenus nous ont parus assez intéressants pour être
placés sous les yeux du lecteur, en recourant à la photographie.
Ainsi qu'on l’a vu plus haut, deux tubes de bouillon dans lesquels
une culture est plus ou moins poussée présentent entre eux des dif-
férences de trouble et par conséquent de transparence que nous
avons essayé de représenter par l'artifice suivant :
Une glace de verre dépoli et une grille métallique préalablement
enduite d'un vernis noir et dont les quadrillés avaient 3 millimètres
de côté se trouvaient accolées dans un châssis de bois. Nous
placions les tubes à photographier devant la grille en les appliquant
étroitement contre elle au moyen d’un cordon élastique dont les
extrémités étaient fixées sur les montants du châssis. Le tout
était éclairé par derrière au moyen d'une lanterne à projections.
L'appareil photographique était alors placé devant les tubes. Nous
nous servions d'un objectif double Protar-Zeiss, d'ouverture 1: 6°,
d'un foyer de 295 millimètres dont la grande profondeur nous
dispensait de l'emploi du diaphragme. Les tubes, formant un écran
jaune, motivaient l'emploi de plaques orthochromatiques à cette
couleur. Nous avons employé celles de la maison Grieshaber
(Integrum), dont la sensibilité pour le jaune est bonne, ainsi que
l’on peut s’en rendre compte par le tube témoin qui contient du
bouillon non ensemencé (fig. 1). Nous nous trouvions ainsi par
suite de la sensibilité des plaques aux radiations jaunes à même
d'apprécier les moindres différences d'opacité. Nous n'avons qu'un
regret, c'est que le temps ne nous ait pas permis de faire confec-
POUVOIR ANTIBACTÉRIEN DES CESTODES 413
tionner sur un cadre un ensemble de lignes parallèles horizontales
au lieu du quadrillage employé que nous avions sous la main. Les
tubes formant lentille cylindrique ont amené dans l’ensemble du
quadrillage des déviations qu'il eût été préférable d'éviter pour
une sensation plus agréable à l'œil. La durée du temps de pose
étant fixée (5 minutes), et la même pour tous les tubes, nous avons
employé comme révélateur un produit assurant des conditions de
développement identiques d’une expérience à l’autre. L’oxalate
ferreux plus semblable à lui-même d’une solution à l'autre, nous a
paru devoir être employé de préférence aux révélateurs organiques.
Dans ces derniers en effet, en dehors des proportions qui ont une
importance énorme sur le pouvoir réducteur du révélateur, le
sulfite, extrêmement oxydable et de qualité très variable est la
cause de continuelles modifications des bains.
Notre révélateur s'est trouvé ainsi d'une expérience à une autre
aussi semblable à lui-même qu'il a été possible. La formule était
la suivante :
OxAAte TERESA RS DD Sr
PAUSE AEMEMENEC PER AE 1 litre.
SULALENTOR EL EN to 0e) fEPe
BI Acide citrique NN RENE SERRE A gr.
HaUIdiS CCR PSC 1 litre.
Pour l'emploi, nous prenions 60° de A et 20° de B.
Ajoutons que nos plaques ont été développées à une température
uniforme de 15° centigrades.
Avec toute cette technique nous avons procédé ainsi : nous
opérions sur chaque Microbe d'abord tel qu'il se trouvait dans les
collections du laboratoire, ensuite après le premier passage en sac
de collodion, et après un deuxième passage, soit trois essais en
tout. De plus, pour nos saprophytes «et 6, donnant des résultats
positifs dès le premier passage, il nous a semblé intéressant de les
laisser pendant trois mois au repos, en neles réensemençant qu'une
seule fois, afin de vérifier si leur pouvoir pathogène diminuerait
pendant ce temps.
ExPÉRIENCE I. — Bacillus mesentericus avec Moniezia expansa. :
Avant passage. — 22 novembre, pas de différence dans nos cultures
(fig. 2). — Inoculation d'un Cobaye pesant 492 gr. — Le 28 novembre,
eschare abdominale, l'animal pèse 450 gr. — 5 décembre, l’eschare évolue,
14 CH. JOYEUX
le poids est de 420 gr. — Le 12 décembre, cicatrisation, poids 435 gr. —
Le 18 décembre, la plaie est refermée, poids : 437gr. — Le 26 décembre,
l'animal peut être considéré comme guéri, pèse 432 gr.
Premier passage. — Les sacs de collodion, mis dans le péritoine le 24 no-
vembre, sont retirés le 30. — 1* décembre, légère différence dansles cul-
tures, (fig. 3). — Inoculation d’un Cobaye pesant 350 gr. — Le 5 décembre,
pèse 342 gr. — Le 11 décembre, eschare abdominale, le poids est de 338 gr.
— Le 18 décembre, l'eschare suppure, poids : 350 gr. — Le 26 décembre,
Suppuration moins abondante, poids : 368 gr. — Le 3 janvier, cicatrisation,
poids : 394 gr. — Le 12 janvier, l'animal peut être considéré comme
guéri, pèse 440 gr.
Deuxième passage. — Les sacs de collodion, mis le 4 décembre, sont
retirés le 11. — Le 12 décembre, différence considérable dans nos tubes
(fig. 4). — Inoculation d’un Cobaye pesant 570 gr. — L'animal meurt dans
la nuit, pèse 550 gr. A l’autopsie, lésions de péritonite suraiguë avec
liquide abondant dans la cavité abdominale.
EXPÉRIENCE II. — Bacillus paratyphi Schotmüller avec Tænia saginata.
Avant passage. — 22 novembre, pas de différence dans nos cultures
(fig. 5). — Inoculation d’un Cobaye pesant 398 gr. — Le 5 décembre, l’ani-
mal présente une eschare abdominale, pèse 395 gr. — Le 12 décembre,
cicatrisation, poids : 440 gr. — Le 18 décembre, la plaie est refermée,
poids : 447 gr. — Le 26 décembre, l'animal peut être considéré comme
guéri, pèse 465 gr.
Premier passage. — Les sacs de collodion, mis le 24 novembre, sont
retirés le 30, — Le 1% décembre, différence sensible dans nos tubes
(fig. 6). — Inoculation d'un Cobaye pesant 520 gr. — Le5 décembre, pèse
495 gr. — Le 10 décembre, mort de l'animal, pèse 440 gr. A l’autopsie, faus-
ses membranes sur le foie, liquide dans le péritoine.
Deuxième passage. — Les sacs de collodion, mis le 5 décembre, sont
retirés le 11. — Le 12 décembre, forte différence dans nos tubes (fig. 7).
— Inoculation d’un Cobaye pesant 412 gr. — L'animal meurt quelques
heures après. A l’autopsie, fausses membranes sur le foie et le mésentère,
liquide dans la cavité abdominale.
EXPÉRIENCE III. — Bacillus paratyphi Brion-Kayser (provenance Kräl)
avec Tænia saginata.
Avant passage. — 27 novembre, résultat négatif dans nos tubes (fig. 8).
— Inoculation d'un Cobaye pesant 395 gr. — Le 5 décembre, présente une
eschare abdominale, poids : 502 gr. — Le 12 décembre, cicatrisation de
la plaie, poids 510 gr. — Le 18 décembre la plaie est refermée, poids :
518 gr. — Le 26 décembre, l’animal peut être considéré comme guéri,
pèse 515 gr.
Premier passage. — Les sacs de collodion, mis le 27 novembre, sont
retirés le 2 décembre. — Le 3 décembre, différence appréciable dans nos
tubes (fig 9) — Inoculation d’un Cobaye pesant 595 gr. — Le 4 décembre,
POUVOIR ANTIBACTÉRIEN DES CESTODES 415
mort de l'animal. A l’autopsie, péritonite avec liquide très abondant,
quelques fausses membranes.
Deuxième passäge. — Les sacs de collodion, mis le & décembre, sont
retirés le 11. — Le 12 décembre, différence appréciable entre nos tubes
(fig. 10). — Inoculation d’un Cobaye pesant 438 gr. — L'animal meurt
quelques heures après. A l’autopsie, péritonite avec fausses EME
sur le foie et le mésentère.
ExPÉRIENCE IV.— Bacillus paratyphi Brion-Kayser (provenance Netter)
avec Tænia saginata.
Avant passage. — 271 novembre, pas de différence dans nos tubes
(fig. 11). — Inoculation d'un Cobaye pesant 378 gr. —- Le 5 décembre, pèse
305 gr. eschare abdominale. — Le 12 décembre, pèse 320 gr., la plaie
commence à se refermer. — Le 18 décembre, pèse 310 gr. la cicatrisation
s'opère. — Le 26 décembre, la plaie est complètement ns et l’animal
entièrement guéri, pèse 324 gr.
Premier passage. — Les sacs de collodion, mis le 22 novembre, sont
retirés le 2 décembre. — Le 3 décembre, différence importante entre nos
- tubes (fig. 12). — Inoculation d’un Cobaye pesant 382 gr. — Le 4 décembre,
mort de l'animal. A l’autopsie, péritonite généralisée et ingestion abdo-
minale.
Deuxième passage. -- Les sacs de collodion, mis le # décembre, sont
retirés le 11. — Le 12 décembre, différence entre nos tubes (fig. 13). —
Inoculation d'un Cobaye pesant 465 gr. — L'animai meurt quelques
heures après, pèse 445 gr. A l’autopsie, lésions de péritonite suraigué.
ExPÉRIENCE V.— Bacillus psittacorum Nocard avec Tænia saginata.
Avant passage. — Le 27 novembre, pas de différence dans nos tubes
(fig. 14). — Inoculation d'un Cobaye pesant 385 gr. — Contrairement à nos
prévisions, l'animal meurt dans la nuit, a perdu 50 gr. de son poids. A
l’autopsie, péritonite et hyperémie généralisée de tous les viscères.
Premier passage. — Les sacs de collodion, mis le 27 rovembre, sont retirés
le 3 décembre. — Le 4 décembre, différence assez appréciable entre nos
tubes (fig. 15).— Inoculation d’un Cobaye pesant 410 gr. — Le 5 décembre,
eschare abdominale, poids : 379 gr. — Le 12 décembre, l’eschare évolue,
poids 315 gr. — Le 17 décembre, mort de l’animal, pèse 262 gr. A l’autopsie;
pus dans la cavité péritonéale, peu de liquide.
Deuxième passage. — Les sacs de collodion, mis Le 4 décembre, sont retirés
le 11. — Le 12 décembre différence considérable entre nos tubes (fig. 16),
— Inoculation d'un Cobaye pesant 417 gr. — L'animal meurt quelques
heures après. A l’autopsie, lésions de péritonite généralisée.
ExPÉRIENCE VI. — : saprophyte de Mouton avec Thysanosoma Giardi.
Avant passage. — 3 juillet, résultat négatif dans nos tubes (fig. 17). —
Inoculation d’un Cobaye pesant 382 gr. — Le 9 juillet, légère eschare
abdominale, poids 348 gr. — Le 13 juillet, la plaie est cicatrisée, poids
416 CH. JOYEUX
370 gr. — Le 1° août, l'animal peut être considéré comme guéri, pèse
380 gr.
Premier passage. — Les sacs de collodion, mis le 4 juillet, sont retirés
le 10. — Le 11 juillet, différence entre nos tubes (fig. 19). — Inoculation
d'un Cobaye pesant 310 gr. — L'animal meurt dans la nuit suivante. A
l’autopsie, organes pâles, quelques fausses membranes.
La culture est alors laissée jusqu’au 1° décembre, n'ayant été réense-
mencée que le 23 août. Nous reprenons nos expériences.
Le 2 décembre, différence entre nos cultures (fig. 21). — Inoculation d'un
Cobaye pesant 368 gr. — Le 3 décembre, mort de l'animal. A l’autopsie,
péritonite avec fausses membranes sur le foie et le mésentère.
Deuxième passage. — Les sacs de collodion, mis le 4 décembre, sont
retirés le 11. — Le 12 décembre, différence considérable entre les cultures
(fig. 23). — inoculation d'un Cobaye pesant 418 gr. L'animal meurt daus
la nuit suivante. A l’autopsie, péritonite avec fausses membranes.
EXPÉRIENCE VII. — £ saprophyte de Mouton avec Moniezia expansa.
Avant passage. — Le 10 juillet, pas de différence entre nos cultures
(fig. 18). — Inoculation d’un Cobaye pesant 318 gr. — Le 16 juillet, pèse
310 gr. Le 20 juillet. pèse 315 gr. et peut être considéré comme indemne,
résultat qui se maintient dans la suite.
Premier passage. — Les sacs de collodion, mis le 10 juillet, sont retirés
le 17. — Le 18 juillet, différence appréciable dans nos tubes (fig. 20). —
Inoculation d'un Cobaye pesant 465 gr. — Le 19 juillet, mort de l'animal.
A l'autopsie, péritonite avec liquide abondant dans la cavité abdomi-
nale
La culture est alors laissée jusqu'au 1” décembre, ayant été réense-
mencée seulement le 23 août. Nous reprenons nos expériences.
Le 2 décembre, légère différence entre nos tubes (fig. 22). — Inocula-
tion d'un Cobaye pesant 350 gr. — Le 5 décembre, l’animal présente une
eschare abdominale, pèse 325 gr. — Le 12 décembre, l'eschare suppure,
poids : 316 gr. — Le 18 décembre, la suppuration continue, le poids est
encore de 316 gr. — Le 26 décembre, la suppuration diminue, poids : 322 gr.
— Le 3 janvier, la cicatrisation se fait, poids: 375 gr. — Le 12 janvier, la
plaie se referme, pèse 399 gr. — Le 18 janvier, l'animal peut être consi-
déré comme guéri, pèse 412 gr.
Deuxième passage. — Les sacs de collodion, mis le 4 décembre, sont retirés
le 11. — Le 12 décembre différence notable entre nos cultures (fig. 24). —
Inoculation d'un Cobaye pesant 527 gr. — L'animal meurt quelques heures
après. À l’autopsie, péritonite avec fausses membranes et liquide abon-
dant.
Tels sont les résultats obtenus dans nos expériences. Pour les
rendre plus intelligibles nous les avons résumés dans le tableau
suivant, indiquant par le signe + les expériences où l'extrait a
agi commeantibactérien (colonne cultures) et où le Cobayea succom-
PIE
ARCHIVES DE PARASITOLOGIE, XI, 1907.
\ 0 ;
4
#
Joyeux phot.
DACHE
ARCHIVES DE PARASITOLOGIE, XI, 1907. PI. VI.
#
ELLITTTITT
»
une
D' Ch. Joyeux phot.
POUVOIR ANTIBACTÉRIEN DES CESTODES 417
bé (colonne Cobaye). Le signe — indique les résultats contraires.
Toutefois ce tableau, forcément schématique, ne peut servir que
de résumé, et il est bon, pour avoir une idée plus juste de notre
travail, de consulter le détail de nos expériences et nos planches.
Rappelons que, sur ces planches, la figure 1 représente un tube de
bouillon témoin non ensemencé.
ESPÈCES AVANT PASSAGE 127 PASSAGE 2° PASSAGE
DS RER RENNES One ROSE"
EMPLOYÉES Cultures Cobayes Cultures Cobayes Cultures Cobayes
Bacillus mesenterieus vulgatus. | — fig. 2 — — fig. 3 — + fig. 4 +
Bacille de Schotmüller . . . . fig 5 = + fig. 6 + + fig. 7 2e
— de Brion-Kayser (Kral).] —fig 8 — + fig. 9 + + fig. 10 +
— de Brion-Kayser (Netter)] —_fig. 11 —— + fig. 12 — + fig. 13 +
— de Nocard......... — fig. 14 27 + fig. 15 = + fig. 16 +
a saprophyte Mouton... . | —fig. 17 = + fig. 19 (+ juillet À + fig. 23 +
| + fig. 21 | + décembre
G saprophyle Mouton... —fig.18| — + fig. 20 (+ juillet | + fig. 24 +
2 | —décembre
On le voit, nos Microbes rendus pathogènes par passages en sacs
de collodion, ainsi que le prouvent les inoculations, sont détruits
par les extraits de Cestodes alors qu'ils ne l'étaient pas aupara-
vant. Des sept Bacilles employés, le Bacillus psittacorum de Nocard
nous a seul donné un échec : l'animal étant mort tandis que l'ex-
trait de Ténia n’agissait pas sur le Microbe. Le Bacillus paratyphi
Schotmüller, les deux échantillons du Bacillus paratyphi Brion-
Kayser ont donné des résultats positifs dès le premier passage,
confirmés par le deuxième. Le Bacillus mesentericus vulyatus n'est
devenu pathogène qu'au deuxième passage.
Quant à nos deux saprophytes « et 6, après avoir provoqué une
réaction dès le premier passage, ils ont agi de façon différente au
bout de 4 mois. : resté pathogène, a continué à être influencé par
nos extraits, 6 n'a plus été détruit par nos préparations d'une
façon aussi évidente, et le Cobaye a guéri, quoiqu'ayant suppuré
pendant longtemps. Au deuxième passage, ils sont tous deux
redevenus pathogènes.
Conclusion. — La conclusion de ces expériences, c'est que les para-
sites de l'intestin paraissent tendre à la tolérance réciproque. Ainsi
AS CH. JOYEUX
que l'ont montré Jammes et Mandoul, expériences que nous avons
nous-mêmes vérifiées dans notre thèse, ils évoluent ensemble sans
produire de réactions entre eux. Mais que l’état biologique de l’un
d'eux vienne à changer et il n’en est plus ainsi. La modification du
pouvoir pathogène du Microbe paraît jouer un grand rôle dans ces
réactions ainsi que nous avons essayé de le démontrer par les
expériences précédentes.
Nous avons tenté de vérifier ces faits in vivo et d'étudier l'in-
fluence des Cestodes ou de leurs extraits sur les maladies mico-
biennes de l'intestin, expérimentales ou spontanées. Les résultats,
publiés dans notre thèse, ne nous semblent ni assez nombreux ni
assez caractéristiques pour être rapportés ici. Nous espérons néan-
moins pouvoir continuer nos recherches et arriver à des résultats
plus concluants.
INDEX BIBLIOGRAPHIQUE
R. BLANCHARD, Substances toxiques produites par les parasites intestinaux.
Archives de Parasilologie, X, p. 84, 1905.
L. James, Recherches expérimentales sur la toxicité des Vers intestinaux.
C. R. Ac. sc. CXXXVIII, p. 1734, 1904.
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Sur la spécificité des hôtes des Cestodes. C. R. Soc. biol. p. 104-106, 1905. — Sur
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intestinale. C. R. Soc. biol., 3 février 1906.
Ch. Joyeux, Helminthes et Bactéries. Recherches sur l'association biologique
et l’action pathogène de quelques parasites intestinaux. Thèse de Nancy, 1907.
HYPHOMYCÈTE DU TYPE ACHORION
DÉTERMINANT CHEZ L'HOMME DES LÉSIONS TRICHOPHYTOIDES
- PAR
Le D' M. TRUFFI
Bien que les recherches sur les parasites des teignes soient actuel-
lement très nombreuses, elles laissent encore beaucoup de points
obscurs dans l'histoire de ces Champignons, et c’est pour cela que
je désire publier cette note dont le butest de démontrer les rapports
très étroits qui relient les parasites du groupe Trichophyton à ceux
du groupe Achorion.
Mes recherches ont porté sur les cas suivants : 1° cas de folli-
culite agminée, à foyers multiples, profondément infiltrés de
l’avant-bras chez un marchand de Veaux ; 2° cas de folliculite agmi-
née de la lèvre supérieure, chez une femme de la campagne âgée
de 40 ans; 3° cas de kérion de la barbe avec lésions profondes, dif-
fuses, végétantes chez un paysan de 37 ans; 4° cas de kérion du
cuir chevelu, chez le fils du malade de l'observation précédente,
en foyers multiples, avec lésions intenses, plus graves que toutes
celles que j'ai vues jusqu'ici; 5° cas de trichophytie érythémato-
squameuse et vésiculo-pustuleuse des membres supérieurs, de la
face et du tronc, avec blépharite concomitante (folliculites ciliaires,
cils cassés) chez un paysan âgé de 14 ans; 6° cas de kérion du dos
de la main chez un paysan âgé de 27 ans.
Dans tous ces cas, les malades attribuaient leur affection à une
contagion par le Veau, mais je dois dire que je n'ai pu moi-même
constater la maladie chez l'animal.
Le diagnostic a été confirmé dans toutes les observations par
l'examen miscroscopique. Dans les squames, le pus, les poils, j'ai
constamment rencontré un parasite offrant les caractères de Tri-
chophyton. Dans les poils, le parasite est tantôt ectothrix (poils du
dos de la main et de l’avant-bras), tantôt endo-ectothrix (poils de la
barbe du 3% cas, du cuir chevelu du 4° cas et cils du 5° cas) avec
420 M. TRUFFI
invasion complète de la substance corticale. Cette dernière locali-
sation a été en outre vérifiée sur des coupes de tissus (3 cas).
Des six cas précédents, j'ai isolé, en partant des squames, des
poils et du pus, un Champignon identique et qui, dans les foyers
non ouverts et profonds, existait à l’état de pureté; voici quels
sont ses caractères :
Colonies se développant lentement, mieux sur les milieux forte-
ment peptonisés et à la température de 33 à 36°, poussant surtout
en profondeur, avec ur bouton central grisätre ou légèrement
jaune et de fines arborisations dendritiques à la périphérie. Après
passages successifs sur milieux glycosés on note une tendance
progressive au développement en surface; la colonie est alors
formée par un bouton large, plus ou moins régulier, en gâteau, rap-
pelant l'aspect descirconvolutions cérébrales, grisàtre ou jaune sale,
lisse ou recouvert de poussière, bordé par un liseré de fines ar-
borisations. Ultérieurement, le développement aérien est de plus
en plus net et les colonies se recouvrent d’une poussière crème ou
quelquefois jaune.
Sur des cultures anciennes, de préférence sur milieux sucrés et
à l'étuve, on peut voir très nettement de petits flocons de duvet blanc
parfaitement semblables à ceux que l’on a décrits dans les cultures
d’Achorion. de Trichophyton et de Microsporum. Ce duvet ensemencé
sur gélose glycosée, ou mieux sur rave, donne naissance à des
colonies aériennes, blanches, duveteuses,
En suivant à l’aide du microscope le parasite dans son dévelop-.
pement, voici ce que j'ai noté :
_ Au cours des premières générations, on ne trouve, dans les vé-
gétations profondes, que des filaments enchevêtrés, des spores sphé-
riques de 6 à 84, dues à la fragmentation du mycélium, des chlamy-
dospores et des petitsamas de granulations jaunes, fortement réfrin-
gentes de 12 à 20 de diamètre, sans aucune membrane périphérique
évidente. Ces granulations sont situées à l'extrémité ou sur les
parties latérales des filaments et sont identiques aux corps jaunes
granuleux décrits par Kräl dans les cultures d’Achorion. Dans le
bouton aérien, on voit à l'extrémité, ou plus rarement sur le trajet
des filaments, des éléments plus gros que les spores mycéliennes,
atteignant jusqu'à 25 & et offrant une incisure centrale en V, qui
leur donne :'aspect d’une pince d'Écrevisse. Ces éléments semblent
HYPHOMYCÈTE DU TYPE ACHORION 4921
dériver d'une chlamydospore, à l’un des pôles de laquelle le proto-
plasma s’accumule, tandis qu'à l’autre pôle il se produit une fissure
en V.
Dans les cultures duveteuses, on voit une fructification par spores
aériennes, petites, sessiles, piriformes, du type Acladium ou Bo-
trytis. Sur la rave, j'ai pu voir enfin des éléments allongés rappe-
lant les fuseaux des Trichophyton et des Microsporum.
L'inoculation au Cobaye et au Lapin a donné lieu à la formation
de larges placards de lésoins folliculaires profondes rappelant de
près les lésions du kérion. Les poils de la région malade étaient en-
vahis par le parasite, qui se présentait avec les caractères d’un endo-
ectothrix. C’est faits sont particulièrement remarquables, les parasi-
tes des teignes donnant presque toujours lieu dansleurs inocula-
tions aux animaux delaboratoire à deslésions superficiellessèches.
Tous les caractères de culture du Champignon décrit plus haut
rappellent ceux des cultures d’Achorion : les premières colonies
à développement profond ont'le type classique de l’Achorion de
Kräl, non seulement dans leur aspect macroscopique, mais aussi
dans leurs caractères microscopiques. Même ramification du my-
célium, même fragmentation en chapelets de spores, mêmes
corps granuleux jaunes, décrits par Kräl et qui n’ont pas été
rencontrés jusqu'ici chez d'autres Hyphomycètes pathogènes. Dans
les cultures obtenues après repiquages successifs, on observe les
mêmes caractères que ceux que Sabouraud et moi nous avons
notés dans les cultures d’Achorion au cours de leur adaptation
à la vie saprophytique. Le type de sporulation par conidies laté-
-rales ou en grappes est tout à fait identique à celui que j'ai vu
dans les colonies du pléomorphisme de l’Achorion. Sur un seul
point, l’analogie du Champignon que j'ai isolé et de l’A chorion ne se
poursuit pas, sur celui de l'existence dans les cultures de ce para-
site des grosses spores mycéliennes en pince d’'Écrevisse.
Des formations analogues ont bien été décrites par Pelagak dans
sa huitième espèce de Trichophyton (à cultures jaunes cratéri-.
formes). Mais alors ces éléments ne se produisent que sur certains
milieux de culture et ils présentent une disposition en série li-
néaire tout à fait particulière. Entre l'Hyphomycète décrit par Pe-
lagak et le nôtre, il existe d’aïlleurs des différences très nettes,
permettant d'affirmer la non-identité de ces deux Champignons.
422 M. TRUFFI
Mais si les caractères de l'Hyphomycète que je viens de décrire
sont tels qu'il faut le classer parmi les Achorion, les lésions qu'il
provoque chez l'Homme s'éloignent du type favique et se. rap-
prochent des altérations inflammatoires aiguës occasionnées par les
Trichophyton.
Des faits analogues ont déjà été relatés par d’autres auteurs;
Bodin, dans un travail sur les teignes du Cheval, a décrit deux
Hyphomycètes (Trichophyton faviforme à cultures brunes et Tricho-
phyton faviforme à cultures grises), qui, tout en étant distincts
de l’Achorion, ont avec lui de nombreuses analogies (dévelop-
pement plus accentué sur milieux peptonisés que sur milieux
giycosés, action protéolytique intense, formes de reproduction
très analogues à celles du genre Oospora); chez l'Homme, ces
parasites donnent des lésions folliculaires et des lésions superfi-
cielles vésiculo-pustuleuses. Le même auteur a observé sur le Veau
une affection trichophytoïde due à un parasite dont les cultures
sont si analogues à celles de l’Achorion qu'il est «parfois impossible
de les différencier les unes des autres ». C’est pour cela que, reve-
nant sur la dénomination de Trichophyton faviforme, Bodin adopte
celle, proposée par Sabouraud, de Favus à lésions trichophytoïdes.
Dans l’article Dermatophytes de la Pratique dermatologique, Sabou-
raud, reprenant la question du classement de ces parasites, semble
se rallier, bien que l'étude de ces formes mycologiques soit loin
d’être complète, à la première opinion émise par Bodin, d'après
laquelle il s'agirait de Trichophyton. Le savant dermatologiste rap-
pelle à ce sujet, pour appuyer son opinion, que la lésion cutanée
en ces Cas est nettement trichophytique, que dans le poil le para-
site présente les caractères des Trichophyton, que sur les vieilles
cultures trichophytiques en voie de dégénérescence il se dé-
veloppe quelquefois des tubercules faviques, et qu'enfin les
cultures d’Achorion peuvent perdre la forme vermiculaire spon-
gioide.
Pour être complet, je dois dire encore que Plaut a décrit comme
cause du kérion un Hyphomycète provenant du Veau qui, d’après
la reproduction photographique, ressemble beaucoup à celui que
j'ai isolé des cas rapportés précédemment, mais qui en diffère
cependant par quelques caractères biologiques (Favusähnliche oder
Kerionpilze, pl.- VIT, fig. 184).
HYPHOMYCÈTE DU TYPE ACHORION 493
Après ce bref exposé, on peut se demander comment il faut
classer au point de vue mycologique l'Hyphomycète que je viens
de décrire. Sur ce point, mon opinion difière de celle de Sabouraud.
Il est évident, en effet, que les lésions à type de kérion appar-
tiennent cliniquement aux trichophyties; mais, au point de vue
d’une classification, l’on ne doit pas envisager seulement l’expres-
sion clinique d'un parasite sur la peau humaine, et il importe de
tenir compte de ce parasite lui-même. Or, comme le Champignon
que j'ai isolé offre en ses cultures des caractères qui correspondent
à ceux de l’Achorion, on est conduit à le ranger à côté de ce der-
nier et à le considérer comme un Achorion capable de donner des
lésions du type clinique trichophytique, c’est-à-dire comme un
Achorion à lésions trichophytoïdes. D'ailleurs, cette question est
peut-être oiseuse, car les frontières entre les deux groupes parasi-
taires des Trichophyton et des Achorion n'ont pas de délimitation
bien nette et paraissent avoir été tracées artificiellement.
_ En réalité, tous les caractères sur lesquels on a fondé la difté-
renciation des Trichophyton et des Achorion n'ont pas de valeur
absolue. Mes recherches et celles de Sabouraud sur le pléomor-
phisme de l'Achorion ont démontré que les cultures de cet Hypho-
mycète peuvent aisément perdre leurs caractères distinctifs (végé-
tation profonde plus abondante à une température élevée et en
milieux peptonisés, sporulation suivant le type Oospora) et donner
lieu à d'autres cultures avec des caractères tout opposés et en tout
semblables à ceux des cultures des Trichophyton (végétation
aérienne sur milieux sucrés, sporulation suivant les types À cladium
ou Botrytis).
D'un autre côté, les recherches de Quincke (Achorion a), de Boer,
de Buschke (Mansachorion), de Bodin (Achorion quinckeanum) per-
mettent d'établir que des Hyphomycètes qui nese différencient pas,
au point de vue morphologique, des Trichophyton peuvent déter-
miner chez l'Homme ou chez les animaux la lésion spécifique du
favus, le godet. Je dois même dire que, en comparant mes formes
pléomorphiques d’Achorion et les cultures de Mansachorion qui ont
été obligeamment mises à ma disposition par Buschke, je n'ai pu
déceler aucun caractère bien net de différenciation entre ces
Champignons. Enfin, les observations de Majocchi et les miennes
prouvent que l'Achorion peut donner lieu quelquefois sur la peau
424 M. TRUFFI
de l'Homme à des altérations inflammatoires qui rappellent de très
près celles qui sont dues aux Trichophyton.
Voilà bien des faits qui s'opposent à une différenciation nette
entre les Achorion et les 7richophyton, puisqu'il existe des analo-
gies, au point de vue botanique et qu'en outre, au point de vue cli-
nique, il y a des Champignons appartenant aux Trichophyton qui
peuvent déterminer des lésions faviques, et inversement que l’on
observe des parasites du groupe Achorion qui occasionnent des
lésions cutanées trichophytiques.
La conclusion qui se dégage des faits précédents, c'est qu’on ne
peut établir, au point de vue mycologique et comme l'ont fait
la plupart des auteurs, de distinction réelle et précise entre les
Achorion et les Trichophyton, car on peut trouver aisément beau-
coup plus de différences botaniques entre deux espèces de Tricho-
phyton qu'entre l'Achorion et certains Trichophyton.
Voilà pourquoi je pense que la question de la classification des
Hyphomycètes parasites doit être soumise à une révision complète
et établie sur les faits que nous ont révélés les travaux de ces der-
nières années et sur des études nouvelles et approfondies du sujet.
Mais c’est surtout aux mycologues, qui jusqu'à présent ont laissé
de côté ces études, qu'on pourra demander de nouvelles recherches
propres à résoudre définitivement le problème. Pour moi, il me
suffit d’avoir contribué à mettre la question au point, en apportant
des fait nouveaux.
INDEX BIBLIOGRAPHIQUE
PEeLzaGar, Ueber die Morphologie der Trichophytonpilze. Monatshefte fur prakt.
Dermatol., XXIX, 1899.
Boni, Les leignes tundantes du Cheval et leurs inoculations humaines. Thèse
de Paris, 1896.
Boni, Sur les favus à lésions trichophytoïdes. C. R. Soc. de biol., p. 711, 1896.
SaBouraAuD, Les trichophyties et la teigne tondante de Gruby. C. R. du 5° Con-
grès internat. de dermatol., Londres, 1896.
PLaur, in Kolle und Wassermann’s Hindbuch der pathogenen Mikroorganis-
men, I, p. 633 et 642.
Trurri, Les teignes. Giornale ital. mal. vener., 1901-1902.
SaBouraup, La Pratique dermatologique, article Dermatophyltes.
Trurri, Un cas de kérion déterminé par l’Achorion. Giornale ital. mal.
vener., 1902.
NOTICES BIOGRAPHIQUES
XVII. — PROSPERO SONSINO
PAR
Le D' BRUNO GALLI-VALERIO
Professeur à la Faculté de Médecine de Lausanne.
C'est en 1894, à Rome et à l'une des séances du xr° Congrès
international de médecine, que j'ai fait la connaissance person-
nelle de Prospero Sonsino. Grand, maigre, droit, la barbe grison-
nante, l'expression sympathique et douce, l'air très distingué, il
se révélait d'emblée et aux premiers mots ce qu'il était: un savant
et un modeste. Il pouvait prendre comme devise un mot du grand
physiologiste Valentin : 1! faudrait que l'amour de la science
n'eût d'autre mobile que son progrès et non la vanité de se faire
connaître. Nous nous liâmes à Rome d'une amitié qui ne devait
cesser qu'avec sa mort et la correspondance que j'ai échangée avec
ce savant pendant quelques années restera parmi les souvenirs les
plus chers de ma vie scientifique.
Prospero Sonsino est né à Tunis, le 6 août 1835, de parents ita-
liens ; très jeune encore, il suivit sa famille en Italie (1). Sesétudes
médicales accomplies à l’université de Pise, son esprit d'aventures
et de recherches scientifiques le poussa vers l'Orient. De 1860 à
186% il voyagea et exerca son art en Turquie et en Asie Mineure; il
fut attaché pendant trois ans au Conseil sanitaire de Constanti-
nople. Rentré en Italie en 186%, il s'établit à Florence et y dirigea le
journal de médecine l’?mparziale. Mais lorsqu'éclata l'épidémie de
choléra de 1865, Sonsino vola au secours des malheureux atteints
par cette grave maladie à Ancona, Lucera et San Severo (province
de Foggia).
Le courage, le zèle, l'abnégation dont il fit preuve en cette occa-
sion, lui valurent de nombreuses attestations de reconnaissance
des autorités communales et gouvernementales. Rentré à Florence,
il y fut nommé membre du conseil provincial de santé de 1870 à
(1) Je remercie vivement MM. les Professeurs Vachetta et Del Rossi de l'Uni-
versité de Pise, qui ont bien voulu me fournir des renseignements pour cette bio-
graphie.
Archives de Parasitologie, XI, n° 3, 1907.
12
(o2)
426 B. GALLI-VALERIO
873. Mais l'Afrique où il était né et, parmi les contrées de ce con-
tinent, l'Egypte surtout, exerçait sur lui une attraction toute spé-
ciale, car c'était une terre qui offrait au médecin un terrain mer-
veilleux de recherches. C'est de ce pays que Bilharz écrivait à von
Siebold, le 4er mai 1851 : « Was die Helminthen im Allgemeinen, auch
die des Menschen, betrifft, so glaube ich dass Aegypten eines der güns-
tigsten Länder für ihre Entwickelung und ihr Studium ist. »
En 1873, Sonsino s’embarque pour l'Égypte où il devait séjourner
jusqu'en 1885, d'abord comme médecin exerçant, puis comme
micrographe du laboratoire khédivial du Caire. Il s'y voue
à l'étude des Helminthes de l'Homme et des animaux, il y fait ses
plus importantes découvertes : « Sie haben in Aegypten, lui écrivait
Leuckart, le 2 février 1877, reiche (relegenheit zu den interessantesten
helminthologischen Studien. Ich beneide Sie fast darum, und zweifle
nicht, dass Sie uns noch mit zahlreichen wichtigen Tatsachen bekannt
machen werden. Schon jetzt verdanken wir Ihnen vieles. »
Les recherches scientifiques n’étouffèrent pas l'homme de cœur
que s'était montré Sonsino en 1865, lors de l'épidémie de choléra
en Italie. Ainsi, pendant la mémorable insurrection de 1882, il fut
un des rares Européens qui refusèrent de quitter le Caire et il
resta à la tête de l'hôpital européen de cette ville, hôpital qui de
cette façon ne Îut pas fermé. Je me rappelle toujours comment,
douze ans après ces événements, il me racontait, dans un lan-
gage simple et expressif, les moments de danger que courut l'hô-
pital, l'entrée brusque d’une des infirmières dans une salle de ma-
lades en disant qu'un officier anglais demandait à parier au direc-
teur, son étonnement profond, car il croyait les Anglais bien loin
du Caire, sa joie de se trouver en effet vis-à-vis d'un officier qui
avait devancé avec une patrouille le reste des troupes et venait
d'entrer au Caire. Ses malades n'avaient plus rien à craindre, Le
courage montré en cette occasion par Sonsino lui valut la décora-
tion d'officier de la couronne d'Italie.
Puis l'épidémie de choléra éclata, et il se mit à soigner les ma-
lades européens et indigènes, dévouement qui lui valut des témoi-
gnages de vive reconnaissance du Khédive. De 1885 à 1886 il reprit
sa vie de voyages, et visita comme médecin de la navigation géné-
rale italienne, l'Amérique du Sud et l’'Extrême-Orient, étudiant et
observant partout.
+9
NOTICES BIOGRAPHIQUES. — P. SONSINO . 427
Rentré en Italie, il fit à l’Université de Pise un cours libre de
parasitologie. En 1895, il fit un long séjour en Tunisie pour des
études et des recherches helminthologiques et en 1897 il visita de
nouveau l'Égypte.
Sonsino passa les dernières années de sa vie à Montepiano, petit
atal… 263 Cfa Re Sonulere)
ProsPero Soxsixo en 1893.
village de l’Appenin de la Toscane et c'est là qu'après une vie
bien remplie il cessa de vivre le 19 novembre 1901.
Il était membre de plusieurs Sociétés savantes italiennes et
étrangères, parmi lesquelles je citerai l'Epidemiological Society de
Londres et l’Institut Égyptien. Il est mort avec le regret profond
d’avoir quitté l'Égypte, pays où il avait tant et si utilement tra-
vaillé pour la science et pour l'humanité. Il me le dit à Rome, pen-
dant que son regard se perdait là-bas vers le pays où il aurait pu
“l
is
#
158
428 B. GALLI-VALERIO
se créer, s’il y était resté, une situation plus brillante que celle qui
l’attendait en Italie.
L'œuvre de Prospero Sonsino comprend 139 travaux, dont 68 se
rapportent à des sujets très variés de médecine, chirurgie, hygiène,
et 70 traitent d’helminthologie. Je dirai quelques mots de ces
derniers.
Un des premiers mérites de l'œuvre helminthologique de Son-
sino a été de démontrer l'importance de l’étude des Helminthes, non
seulement au point de vue scientifique, mais aussi au point de
vue pratique. Cet effort mérite d'être signalé, surtout si l'on pense
qu'il était fait à une époque où l’on ne voyait que les Bactéries
et où l’on souriait lorsqu'on parlait du rôle pathogène des para-
sites animaux. Les Plasmodies paludiques n’avaient-elles pas été
accueillies avec le plus grand scepticisme ?
Les Helminthes, pourtant si importants pour la pathologie de
l'Homme, étaient complètement méconnus, ou considérés comme
ne jouant aucun rôle. Voici ce que disait Sonsino, dans une com-
munication faite à l'Institut Égyptien en 1875 :
« La découverte faite par moi du Schistosomum hæmatobium à
l'hôpital de Casr-el-Ain, fut comme une première découverte pour
les médecins de cet hôpital. Plusieurs se rappelaient l'avoir vu, ou
en avoir entendu parler à l’époque de Bilharz, mais pas un seul
n'en avait une idée claire et exacte. On en avait gardé le souvenir
comme par tradition et avec les années ce souvenir se perdait.
Quand je demandai de faire des autopsies à l'hôpital pour le re-
chercher, le désir de voir ce Ver se réveilla chez plusieurs, mais
pas un ne fut capable de faciliter ma recherche et quelques-uns
disaient que ce Ver n'était qu'une mystification. » Mohammed-Ali
directeur de l'École de médecine et de l'hôpital Casr-el-Ain, disait
que le Schistosomum hæmatobium n'avait rien à faire avec l'héma-
turie d'Égypte (1)!
Mais Sonsino était profondément convaincu de l'importance.
pratique de l'étude de l'helminthologie et, en 1885, il écrivait à pro-
pos de l'Égypte : « Le nombre toujours croissant des personnes qua
s'intéressent ici à l'helminthologie permet d'espérer de nouveaux progrès
(1) Contributo all’entozoologia d'Egitto. Mémoires de l’Institut Égyptien,
Le Caire, 4896, p. 285.
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SONSI
sur son lit de mort (19 novembre
PROSPERO
j
901
1
430 B. GALLI-VALERIO
pour le bien de l'humanité souffrante » (1). Pour lui, les Helminthes
ne jouaient pas exclusivement un rôle direct comme agents pro-
ducteurs de maladies, mais de même que les autres parasites ani-
maux, un rôle prédisposant, facilitant le développement des ma-
ladies bactériennes. Voici en effet ce qu'il écrivait en 1896 (2) :
«So if there is a branch of pathology that is worthy the attention of
the rulers in Egypt, for being cultivated in a special manner, it is z00-
parasitology. The importance of this branch of medicine being consi-
dered in relation to the occurrence of epidemics of cholera, to whose
extension severity and large death-rate this patients contribute, I
cannot doubt the alterations that obtain in the intestines of a large
number of natives in consequence of having been subjected to dysentery,
Bülharzia, Ankylostoma, Rhabdonema which, by themselves, are already
common as ordinary causes of morbidity and mortality in Egypt and
in Africa, are an additionnal cause of mortality from cholera. »
Toujours dans cet ordre d'idées, Sonsino émit l'hypothèse que
l'épizootie de typhus du cheval qui, en 1876, détruisit en Égypte
tous les Équidés, était due à l’action du Sclerostomum armatum et
Sclerostomum tetracanthum (3). Comme nous le savons aujourd'hui,
ce rôle important des Helminthes est admis par tous ceux qui s'oc-
cupent de l’étiologie des maladies parasitaires de l'Homme et des
animaux.
Un autre point, sur lequel Sonsino insistait dans tous ses tra-
vaux, est celui de la présence possible des Helminthes des animaux
chez l'Homme. C’est ainsi qu'il signalait (4) la possibilité de l’infes-
tation de l'Homme par l'Opisthorchis felineus Riv., qui existe pres-
que partout chez le Chien et chez le Chat et que Vinogradov avait
trouvé, en 1892, chez l'Homme en Sibérie et décrit comme Distoma
sibiricum. Nous savons que, cinq ans plus tard, Askanazy (5) con-
firmait les prévisions de Sonsino en découvrant ce Trématode
chez l'Homme à Kônigsberg.
Sousino concluait son travail en disant, qu'il lui semblait dé-
montrer l'importance de l'étude des parasites animaux, non seulement
indigènes mais aussi exotiques, non seulement de ceux qui aujourd'hui
(1) Zbidem, p. 307.
(2) The Lancet, 18 juillet 1896.
(3) Contributo ali’entozoologia, p. 333.
(4) Gazzelta degli ospedali e delle cliniche, n° 111, 1895.
(5) Centralblatt fur Bakteriologie, XXVTII, p. 491, 4900.
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432 B. GALLI-VALERIO
sont connus comme capables d'infester l'Homme, mais aussi de ceux
qui, aujourd'hui parasites seulement des'animaux, peuvent l'être demain
de l'Homme.
Pour Sonsino, les études helminthologiques devaient avoir pour
base la recherche minutieuse et l’expérimentation. 1! faut sortir,
disait-il(1), dela routine des autopsies cadavériques ordinaires, car pour
trouver un Helminthe, il ne faut pas attendre qu’il tombe par hasard,
sous nos yeux, mais il faut le chercher avec tous les moyens dont nous
pouvons disposer. Il considérait l’expérimentation comme indispen-
sable pour résoudre bien des questions d'helminthologie : les in-
ductions ne suffisent pas pour la solution de ces problèmes, il est encore
nécessaire de faire des recherches expérimentales (2). Et il insistait vi-
vement sur l'usage du microscope de la part du médecin, surtout
pour l'examen des matières fécales, des urines, des crachats, etc.,
au point de vue de la recherche des œufs d'Helminthes.
Ceci dit en général sur l’œuvre helminthologique de Sonsino,
passons en revue quelques-unes de ses recherches les plus im-
portantes.
Ses études sur Schistosomum hæmatobium (Bilharz) ont été des
plus intéressantes (3). Cet important parasite de l'Homme, décou-
vert et décrit en 1852 par Bilharz (4), avait été, comme je l'ai dit,
presque complètement oublié. C’est Sonsino qui, l'ayant retrouvé
en 1874 à l'hôpital de Casr-el-Aïn, attira de nouveau sur lui l’atten-
tion du corps médical et prépara le terrain aux recherches des
observateurs quile suivirent en Égypte. Il fut le premier à signaler
ce parasite chez la femme, chez laquelle ni Bilharz, ni Griesinger
ne l'avaient constaté. Il signala aussi d'une façon certaine l’exis-
tence du Schistosomum hæmatobium en Tunisie et, en particu-
lier, à Gafsa en 1893 (5). Il fit aussi des expériences pour étudier le
cycle évolutif et le mode de pénétration dans l'organisme humain
de ce redoutable parasite, sans pouvoir arriver, comme du reste
tous les autres observateurs, à résoudre cet important problème.
(1) Gazzelta degli ospedali e delle cliniche, n° 411, 1895.
(2) Contributo all’entozoologia, etc., p. 317.
(3) Rend. della R. Ac. delle scienze fisiche e matematiche di Napoli, fase. 6,
1874. — L'Imparziale, n°° 16 et 17, 1874; n° 24, 1875; n°° 1 et 2, 1876. — 1l Mowi-
mento, VI, p.305-321, 1874. — Veterinarian, XLIX, p. 223, 1876.
(4) Zeitschrift fur wiss. Zool., I, p. 453, 1852.
(5) Atti dell XI° Congresso internazionale di med. a Roma, II, p. 211, 18%
NOTICES BIOGRAPHIQUES. — P. SONSINO 433
On peut dire qu'il a laissé une véritable monographie de la bilhar-
ziose.
Peu de temps après avoir trouvé de nouveau en Égypte
le Schistosomum hæmatobium, ily découvrait une nouvelle espèce
de ce même genre : Schistosomum crassum, chez les Bovidés (1) et
plus tard chez le Mouton (2). Cet intéressant parasite fut ensuite
retrouvé anx Indes par Bomford (3), en Sicile par Grassi et
Rovelli (5) et par Barbagallo (4), en Sardaigne par Sanfelice et
Loi (6). A cause de la forme des œufs, Sonsino n'hésita pas à
différencier cette espèce du Schistosomum hæmatobium, auquel
elle ressemble beaucoup. Presque à la même époque, il dé-
couvrit un autre Trématode très intéressant : (Gastrodiscus ægyp
tiacus du gros intestin et de l’iléon du Cheval (7), retrouvé en-
suite en Sénégambie, en Assam et à la Guadeloupe chez les
Équidés et qui, dans certains cas, semble provoquer des troubles
très graves et mortels.
Il découvrit aussi en Égypte les embryons de Filaria Ban-
crofti dans le sang de l'Homme, 2 février 187% 8), deux ans
après que Lewis les eut trouvés dans le sang de l'Homme aux
Indes; il en étudia le cycle évolutif chez Culex pipiens, cycle
évolutif qui venait d'être décrit par Manson en Extrême-Orient (9).
Il avait au début considéré les embryons trouvés dans le sang de
l'Homme en Égypte comme différents de ceux observés par Lewis
et, pour cette raison, il leur avait donné le nom de F. sanguinis
hominis ægyptiaca ; mais il reconnut ensuite qu'il s'agissait seule-
ment d'embryons de F. Bancrofti qui avaient perdu leur gaine
d’enveloppe.
Je signalerai enfin les nouvelles espèces d'Helminthes signalées
(4) Rend. della R. Accad, di scienze fis. e mut. di Napoli, 1876.
(2) C. R. du Ve: Congrès international de méd. à Genève, 1877, p.651, 1878.
(3) Quarterly Journal of vet. sc. in India, p. 345, 1887.
(4) Rend. della R. Ac. dei Lincei, IV, 1888.
(5) Atti dell’Accademia Giolnia di Sc. nat. in Catania XIT.
(6) Di alcune infezioni del bestiame trovate in Sardegna nel quadriennio,
1892 96, Cagliari, 1897.
(7) Veterinarian, febr. and march 1877. Monitore Zoologico, 1895.
(8) Rendiconti dell’Accad. di sc. fis. e mat. di Napoli fase. 3. marzo 1876. —
L'Imparziale, 1876, p.272— Inst. Egyptien, I, 1877. L’'Imparziale, p. 297, 1877.
C. R. du V* Congrès international de médecine de Genève, p.651, 1877. Bulletin
de l'Institut Egyplien, p. 118, 1877.
(9) Tansact. of the Linn. Soc. of London, IT, p. 10 et 367, 1884.
434 B. GALLI-VALERIO
par Sonsino chez le Caméléon et les Amphibies de Tunisie (1), chez
des Oiseaux et des Reptiles d'Égypte (2), chez Salamandrina perspi-
cillata (3), puis ses études sur la distribution géographique des
Helminthes en Tunisie (4) où il signale Uncinaria duodenalis à Gabès
et à Gafsa et Schistosomum hæmatobium à Gafsa et près du chott
el Gerid; ses recherches sur les Cercaires des Gastéropodes des
environs de Pise (5), ses observations sur Hymenolepis nana (6) et
enfin ses recherches sur les ténifuges (7).
Je n’en finirai pas avec l’œuvre de Sonsino sans mentionner
l'intéressant aperçu historique sur les études helminthologiques
en Égypte, qu'il a publié dans les Mémoires de l'Institut Egyp-
tien (8) : il y expose les causes les plus importantes qui peuvent
favoriser la dissémination des Helminthes dans cette contrée.
J'ai parlé rapidement de l'Homme et de son œuvre. Pour bien
apprécier l’un et l’autre, il faut savoir que Sonsino a presque
toujours travaillé dans des conditions peu favorables. En effet,
pendant un séjour de douzeans en Égypte. il ne put en passer que
deux (1883-1885) au laboratoire khédivial du Caire. Il a dû prati-
quer ses recherches de ci, de-là, à Zagazig, à Benha, à Alexandrie,
etc. Il rencontrait des difficultés de toutes sortes pour faire des
autopsies; il devait les effectuer avec des instruments insuffisants,
à la campagne, souvent sur le sol, sous un soleil brûlant, à peine
abrité par l'ombre d'un arbre, harcelé par les Mouches ou par les
Moustiques, sans de bons réactifs pour fixer les Helminthes ré-
coltés (9).
Après son retour en Italie, sa collection était restée en grande
partie au Caire et il ne put plus l’étudier. Il lui manqua du resteen
Italie une chaire et un laboratoire. Il y arriva en effet à un moment
où, comme je l'ai dit, les parasites animaux et surtout les Helmin-
thes étaient considérés comme ayant peu d'importance pour la
pathologie de l'Homme. En dehors des laboratoires de zoologie et
(1) Processi verbali della Soc. tosc. di sc. nat., 6 maggio 1894.
(2) Mon. zool. ital., 1895. — Proc. verb. etc. 12 maggio 13 gennaio 1889.
(3) Proc. verb. etc., 1896.
(4) Atti. dell XI° Cong int. di. med. Roma, II, p. 214, 1894.
(5) Proc. verb. etc., 1897.
(6) Riv. ital. di clin. med., n° 8 e 9,1891. — Boll. della Soc. med. pisana, I.
(7) Lo Sperimentale, sez. clinica, XIXe
(8) Contr. all’entozoologia etc., p. 286.
9) fbidem, p. 333.
NOTICES BIOGRAPHIQUES. — P. SONSINO 435
des Ecoles vétérinaires, personne ne s’en occupait. Parler d’une
chaire d'helminthologie appliquée à la médecine, aurait été chose
absolument contraire aux règlements. [Il est vrai que l'arbitraire
des ministres a créé depuis des chaires qui n'ont jamais existé;
mais :
Vuolsi cosi colà dove si puote
Cio che si vuole e più non domandare.
et Sonsino n'était pas un intrigant. Il resta sans chaire et sans
laboratoire. Dans les derniers temps de sa vie, dans le petit village
de Montepiano, il a dû redire les paroles de son concitoyen F. Pa-
cini : Quand mes découvertes auront fait le tour de l'Europe et, rentrant
en Italie sous forme étrangère, seront acceptées comme des dogmes, je
dormirai dans le cimetière de Trespiano.
Maintenant que les études helminthologique appliquées à la
médecine et surtout à la médecine tropicale se réveillent partout,
l'œuvre de Prospero Sonsino sera plus appréciée qu’elle ne le fut
jusqu'à présent, et tous ceux qui travaillent aux progrès de la
parasitologie ne l’oublieront pas.
TRAVAUX HELMINTHOLOGIQUES DE P. SONSINO.
1. Ricerche intorno alla Bilharzia hæmatobia in relazione colla ematu-
ria endemica dell Egitto e nota intorno and un Nematoideo trovato nel
sangue umano. Rendiconto della R. Accad. delle sc. fis. e mat. di Napoli, fase.
6, 1874. — Imparziale, n° 16 e 17, 1874, — Movimento (Napoli), VI, p. 305,
321, 1874. — Veterinarian, XLIX, p. 233, 1876.
2. Della Biharzia hæmatobia e delle alterazioni anatomo-patologiche che
induce nell'organismo umano, loro importanza comme fattori della mor-
bidità et mortalità in Egitto, con cenno sopra una larva d’Insetto parassita
dell’ Uomo. Imparziale, n° 24, 18%; n° 8 e 9°, 1876. — Veterarian, XLIX,
p. 233, 1876.
3. Communicazione sulla Filaria sanguinis hominis ægyptiaca. Rend. R.
Acc. sc. fis. e mat. di Napoli, fasc. 3, 1876. — Imparziale, p. 272, 1876.
4. Intorno ad un nuovo parassita del Bue (Bilharzia bovis). Rend. R. Acc.
sc. fis. e mat. di Napoli, fase. 5, 1876.
5. Consigli al popolo per prevenire i disturbi prodotti da un Verme che
altera gli organi orinari. Giornale la Finanza di Allessandria d'Egitto e in
arabo nel giornale Roda el madares, pubblicazsione bimensile del Ministero
della pubblica istruzione d'Egitto, 1876.
6. On theentozoa of the Horsein relation to the late egyptian equine pla-
gue. Veterinarian, 1877.
436 B. GALLI-VALERIO
7. Sugli ematozoi come contributo alla fauna entozoica egiziana. Institut
égyptien, 13 janvier 1877. — Imparziale, p. 297, 1871.
8. Rendiconto di una comunicazione verbale (sopra elminti osservati in
Egitto) alla Società medico-fiorentina nella seduta del 20 maggio 1877.
Imparziale, p. 317, 1877.
9. Nouvelles recherches sur les Hématozoaires de l'Homme en Égypte.
Compte-rendu du Congrès périodique internat. des sc. méd., 3° session,
Genève, p. 651, 1877.
10. L'Anchilostoma duodenale in relazione coll'anemia progressiva per-
niciosa. Imparziale, p. 227, 1878.
11. Sull’Anchilostoma duodenale. Imparziale, 1878.
12. Risposta all’articolo critico alla nota sull’Anchilostoma duodenale in
relazione all’anemia progressiva perniciosa. Imparziule, p. 487, 1878.
13. Sull’Anchilostoma duodenale in riposta al Prof Sangalli. Imparziale,
p. 609, 1878.
1%. Sull’anchilostomiasi. Imparziale, p. 641, 1880.
15. La Filaria sanguinis hominis et son rôle pathologique. Bull. de l'Ins-
titut égyptien, (2), p. 118, 1881.
16. Filaria sanguinis hominis, lymphocele, lymphuria and other asso-
ciated morbid disorders vith a hint of other Worm diseases in Egypt.
Medical Times and Gazette, may 1882. — Transactions of the Epidemio-
logical Society of London, I, 148.
17. À new series of cases of Filaria sanguinis parasitism observed in
Egypt with the results of experiments on filariated suctorial Insects.
Medical Times and Gazette, 22-29 sept., 13 oct. 1883.
18. Il ciclo vitale della Filaria sanguinis hominis. Processi verbali
della Società toscana di scienze naturali residente in Pisa, 1884.
19. Di una particolarità di struttura di certe Cercarie, cellule a baston-
cini e della sua significazione funzionale. Processi verbali della Soc. Losc.
di sc. nat. 1n Pisa, 1824. — Archives italiennes de biologie, VI, p. 57.
20. Della emottisi da Distoma endemica in Giappone e in Formosa in
confronto colla ematuria da Bilharzia endemica in Egitto e in altre con-
trade africane. Lo Sperimentale, 1884.
21. La Fasciola epatica e il suo ciclo vitale. Natura, n° 32, 1884.
22. Contro lo sviluppo della Fasciola epatica nelle gregge. Natura,
n° 47, 1884.
23. La Filaria sanguinis hominis osservata in Egitto, esperimenti intor-
no al suo passaggio nelle Zanzare e in altri Insetti ematofagi. Giornale
della R. Accademia di medicina di Torino, fasc. 8, 1884.
24. Ricerche sullo svilupo della Bilharzia hæmatobia. Giorn. R. Accad.
di med. di Torino, fasc. 8, 1884.
25. Aperçu sur les études helminthologiques en Égypte. Bull. de
l'Inst. égyptien, (2), p. 146, 1885.
26. The treatment of Bilharzia disease. British med. Journal, 1885.
27. Notizie elmintologiche. — I. Sul ciclo vitale di un Nematode ematozoo
VS
n
NOTICES BIOGRAPHIQUES. — P. SONSINO 437
del Cane. — II. Rictularia plagiostoma e specie affini. Processi verbali
della Soc. tosc. di sc. nat. Pisa, 1888. — Archives vtal. de biologie, X, p.190.
28. Le condizioni di Massaua per rispetto alla vita e diffusione di certi
Elminti perniciosi all’ Uomo, in paragone a quelle dei paesi dove questi
Elminti sono già conosciuti. Processi verb. della Soc. tosc. di sc. nat.
Pisa, 1888.
29. Ricerche sugli Ematozoi del Cane e sul ciclo vitale della Tenia cucu-
merina. Mem. della Soc. tosc. di sc. nat. Pisa, 1888.
30. Anchilostomiasi complicante clorosi. Osservazioni cliniche con re-
lative considerazioni. Lo Sperimentale, 1888.
31. Sull'anchilostomiasi. Lavori del 1°. Congresso di medicina interna
tenuto in Roma nell'octobre 1888. Milano, Vallardi, 1889; cf. p. 381.
32. Notizie elmintologiche. Processi verbali della Soc. tosc. di sc. nat.
Pisa, 1889.
34. Studi e notizie elmintologiche. 1bidem, 1889.
35. Anchilostomiasi nei dintorni di Pisa e il timolo contro’il Tricocefalo.
Rivista generale italiana di clinica medica, 1889.
36. Importanza dell’esame degli escreti per la diagnosi e conveniente
cura delle malattie da Entozoi. Lavori del 2 Congresso di medicina in-
terna di Roma nell'anno 1889. Milano, Vallardi, 1890; cf. p. 379.
37. Sull’ Anchilostoma duodenale nel! Uomo nella provincia di Pisa.
Giornale della Soc., fior. ntina d’igiene, 1889.
38. Perche i motaioli delle fabbriche di mattoni vanno soggetti a man-
canza di sangue e modo di evitare questo male. Istruzione popolare. Gior-
nale della Soc. fiorentina d’igiene, 1889.
39. L’anemia, il beriberi e l’Anchilostoma (nota critica). Rassegna gene-
rale ital. di clinica medica, n° 8 et 9, 1890.
40. Studie notizie elmintologiche. Proc. verb. Soc. toscana disc. nat., 1890.
41. Notizie di Trematodi della collezione del Museo di Pisa.Z1bidem, 1890.
42. Un nuovo Distoma del sotto-genere Polyorchis Stossich, Distomum
formosum mihi. Ibidem, 1890.
43. Un nuovo Heterakis del Gallus domesticus, Heterakis differens mihi.
Ibidem, 1890.
44. Di un nuovo Trematode raccolto dal Pagrus orphus. Cenno prelimi-
nare. lbidem, 1890. Archives italiennes de biologie, 1891.
45. Notizie di Trematodi e Nematodi della collezione del Museo di Pisa.
Ibidem, 1890.
46. Notizie di parassiti. Zbidem, 1891.
47. Importanza della zooparassitologia medica e specialmente degli zoo-
parassiti come fattori di malattie. Prelezione ad un corso di parassitologia
letto nella scuola medica dell’ Università di Pisa il 12 gennaio 1891. Lo
Spallanzant, fasc. 12, 1891.
48. Sull’ Octocotyle (Vallesia) striata Parona e Perugia.Zool. Anzeiger,1891.
49. Tre casi di Tænia nana nei dintorni di Pisa. Rivista ital. di clinica
medica, III, 1891.
438 B. GALLI-VALERIO
30. Necessità di misure atte ad impedire la diffusione della malattia da
Anchilostoma. Salute pubblica di Perugia, 1891.
51. Parassiti del Mugil cephalus e di altri Pesci della collezione del
Museo di Pisa. Proc. verb. della Società tosc. di scienze nat., 1891.
52. Tre casi di malattia da. Rhabdonema intestinale, o rabdonemiasi.
Riv. gener. ital. di clinica medica, n° 12 et 13 suppl., 1891.
53. Di un nuovo Microcotyle dell” Umbrina cirrhosa, Microcotyle Pan-
cerii. Cenno preliminare. Proc. verb. della Soc. tosc. di scienze nat., 1891.
54. The principal and most efficacious means of preventing the spread
of entozoal diseases. Internat. Congress of hygiene and demography, Lon-
don, 1891.
55. Sul Distomum ovocaudatum Vulpian. Monitore zool. ital., 1893.
56. Confronto tra gli Entozoi dell’ Uomo in Egitto e in Tunisia. Con-
gresso di medicina di Roma, Il, p. 211; VI, p. 97.
57. Rivendicazione a proposito di una memoria del Sig. Cerfontaine sul
genere Anthocotyle. Monitore 3001. ital., 1895.
58. Di alcuni Entozoi raccolti in Egitto finora non descritti. Monitore
zool. ital., 1895. é
59, Contributo alla entozoografia egiziana. Mémoires de l'Institut Egyp-
tien, p. 285, 1895.
60. Di alcuni Distomi comuni all’ Uomo e a certi Carnivori, e del peri-
colo della loro diffusione. Bollett. della Soc. med. pisana, 1, 1895.
61. Considerazionisuirimedi controle Tenie intestinali esopra altri par-
ticolari riguardanti le Tenie dell Uomo. Bollettino Soc. med. pisana, 1895.
62. Nuove osservazioni di Tæma nana. Bollettino della Soc. med. pisa-
na, 1, 1895.
63. Del Gastrodiscus del Cavallo e di alcuni Amfistomidi esotici poco
conosciuti cn poroposta di modificazione nella classificazione degli Am-
fistomidi. Monitore 3901. ital., 1895. |
64. Sui parassiti dell’ Uomo, con un nuovo caso di Tæmia flavopunctata
Weinland. Centralblatt für Bakteriol., XXX, p. 937.
65. La Filaria nel sangue, nelle orine e nelle feci di un Umbro? Clinica
moderna, 1896.
66. Forme nuove, o poco conosciute, in parte indeterminate d'Entozoi
raccolti o osservati in Egitto. Centralblatt für Bakteriol., XX, p. 437.
67. The life history of Fularia Bancrofti in the body of Mosquito. Bri-
tish med. Journal, 1900.
68. Ankylostoma in northern Europa. Janus, 1900.
69. À case of Filaria sanguinis hominis observed in Egypt in negro.
Physician and surgeon, 1900.
70. Bilharzia ova, as found in the urine sediment in the urinary blad-
der, in intestine. Physician and surgeon, 1900.
71. Colorazione accidentale di strobila di Tænia saginata Güze. Archives
de Parasitologie, IV, p. 222, 1901.
PARASITISME DU DIPYLIDIUM CANINUM
DANS L’ESPÈCE HUMAINE
A PROPOS D'UN CAS NOUVEAU
PAR
Le Professeur R. BLANCHARD
Dans le courant d'octobre 1906, M. le Dr H. Papillon, médecin
des hôpitaux, a eu l’amabilité de me remettre un parasite évacué
par un enfant de dix mois. Cet Helminthe consistait en deux frag-
ments d’un même Cestode, atteignant ensemble une longueur de
50 centimètres exactement. Le plus petit fragment est long de
7 centimètres; il débute par un cou très grêle, la tête faisant dé-
faut. Le plus long mesure 43 centimètres; il comprend un bon
nombre d’anneaux mûrs, ayant l'aspect de graines de Concombre
et pourvus chacun d'un double pore génital. Il s'agit du Dipyli-
dium caninum (Linné, 1758). Notre certitude à cet égard n'est pas
basée seulement sur la grande taille du parasite, ainsi que sur l’as-
pect général et la dimension de ses anneaux; elle résulte encore
de l'étude anatomique de ces derniers. |
Nous avons détaché le premier et le dernier anneau du grand
fragment, et leur étude a pleinement confirmé notre détermina-
tion : en particulier, les œufs sont larges de 33 à 42 », soit de 37
en moyenne ; ils sont rassemblés en nombre variable, le plus sou-
vent de 8 à 15, dans les diverses capsules utérines; l’oncosphère a
une dimension moyenne de 26 y. L'étude d’un anneau parvenu à
maturité sexuelle n'aurait rien ajouté à notre conviction; aussi
avons-nous reculé devant la nécessité de briser encore notre spéci-
men, si remarquable par sa belle dimension et si précieux comme
pièce de collection et de démonstration. 11 a été présenté à l'Aca-
démie de médecine, dans sa séance du 7 mai 1907, puis déposé
dans les collections du Laboratoire de Parasitologie (collection
R. Blanchard, n° 919).
Contrairement à l'opinion courante, D. caninum est loin d’être
un Helminthe exceptionnel dans l'espèce humaine ; il ne s’observe
pas seulement chez l'enfant, mais aussi chez l'adulte. A l’occasion
440 R. BLANCHARD
du cas nouveau qui s'offrait à nous, il nous a paru opportun de
faire une étude d'ensemble de ce parasite, encore trop peu connu
des cliniciens, de préciser ses caractères zoologiques, de recher-
cher avec quelle fréquence et dans quelles conditions il s’observe
chez l'Homme, s'il cause quelques accidents morbides et quelles
mesures prophylactiques doivent être adoptées contre lui.
Ce Ver est, à proprement parler, un parasite des Carnivores; on
ne le trouve qu'accidentellement chez l'Homme, mais les condi-
tions de cette transmission fortuite sont fréquemment réalisées. I]
appartient à un groupe assez artificiel de Tæniadae, dont Wardell
Stiles a fait la sous-famille des Dipylidiinae; nous donnerons tout
d'abord la diagnose de cette sous-famille. Nous aborderons ensuite
l'étude spéciale du genre Dipylidium et donnerons une caractéris-
tique sommaire des espèces qui le composent : une telle étude est
seule capable de conduire à une détermination précise d'un pa-
rasite donné.
Sous-famille des Dipylidiinae Stiles, 1896.
Diagnose. — «Téniadés : ventouses inermes. Rostre armé, rare-
ment absent. Pores sexuels latéraux, simples ou doubles et oppo-
sés. Organes génitaux en série simple ou double dans les divers
segments. Utérus ordinairement divisé en sacs ovigères ou entière-
ment atrophié, les œufs étant alors libres dans le parenchyme.
OEufs à coques minces et transparentes, avec ou sans appendices.
Formes larvaires (Cysticercoïdes) chez les Arthropodes et les Mol-
lusques. Forme adulte chez les Mammifères, les Oiseaux et les
Reptiles. » — Stiles.
Genre type : Dipylidium Leuckart, 1863. Autres genres : Amæbo-
tænia, Choanotænia, Cotugnoa, Dilepis, Hymenolepis, Monopylidium,
Nematotænia, Oochoristica et Panceria. Les genres Dipylidium et
Hymenolepis sont seuls représentés chez l'Homme.
Genre Dipylidium Leuckart, 1863,
Diagnose. — Dipylidiinés de taille moyenne ou petite. Tête pour-
vue d'un rostre rétractile, armé de plusieurs couronnes de cro-
chets ayant la forme d'aiguillons de Rosier, le manche et la garde
DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 441
étant réduits à une base plus ou moins discoïde, sauf certains cas
exceptionnels (D. Trinchesei); parfois aussi, des crochets existent
sur la partie antérieure de la tête, autrement dit sur la paroi
externe et dans le fond de l'infundibulum céphalique (D. echinor-
rhynchoides). Ventouses inermes. Chaqueanneau renferme deux ap-
pareils reproducteurs, disposés de part et d'autre de la ligne mé-
diane, constitués chacun sur le même plan général que chez les
Tænia et aboutissant chacun à un sinus génital latéral; à première
vue, les Dipylidium se reconnaissent donc à ce que chacun de leurs
anneaux présente deux pores sexuels symétriques et latéraux.
mais il ne faut pas perdre de vue que ce caractère ne leur est nul-
lement particulier.
Testicules très nombreux,compris surtout dans le champ médian:
chacun d'eux, dans les anneaux un peu avancés, est logé dans
une sorte d'alvéole, qui donne à l’anneau un aspect très spécial.
Spermiductes très grêles, aboutissant au canal déférent, sans in-
terposition de réservoir spermatique. Canal déférent parcourant
un trajet très bref, mais formant sur lui-même un très grand nom-
bre de circonvolutions. Poche du cirre de dimension variable. Va-
gin situé en arrière du canal déférent, mais s’ouvrant soit au-des-
sous de la poche du cirre (D. caninum, D. echinorrhynchoides), soit
au même niveau que celle-ci (D. Pasqualei), soit au-dessus (D. Trin-
chesei). À son extrémité interne, le vagin se dilate en un receptacu-
lum seminis (D. Pusqualei, D. Trinchesei, D. echinorrhynchoides) ; d'au-
tres fois, un tel réservoir fait défaut (D. caninum) ; il est alors rem-
placé par une dilatation de l’oviducte, appelée par Diamare cham-
bre fécondatrice ou réservoir commun aux produits des deux sexes.
Un ovaire bilobé dans chaque appareil génital; les deux lobes
sont compacts (D. Trinchesei) ou ramifiés (D. caninum). Vitellogène
compact, arrondi, situé en arrière de l'ovaire. L'utérus se forme
sous l'aspect d’un réseau de cellules formatrices, dont les mailles
entourent les vésicules testiculaires. Ce réseau se laisse pénétrer
par les œuis sortant de l'oviducte et se creuse ainsi progressi-
vement en canal. À ce moment-là, les testicules sont en voie
de résorption; ils laissent des lacunes dans lesquelles les œufs
viennent s'accumuler. Puis les parties du canal utérin interposées
à ces amas ovulaires se rétrécissent et s’'étranglent : l'utérus ses
transforme alors en un grand nombre de capsules indépendantes
Archives de Parasitologie, XI, n° 3, 1907. 29
442 R. BLANCHARD
les unes des autres et renfermant, suivant les espèces, soit un seul
œuf, soit plusieurs œufs. L’utérus est la seule partie de tout l'or-
gane reproducteur qui soit commune aux deux
appareils génitaux.
OEufs à double coque transparente, agglu-
tinés par une sorte de ciment qui résulte d'une
sécrétion de la capsule utérine. La larve est un
Cysticercoïde du type Cryptocystis Villot (fig.1).
Elle vit soit dans la cavité générale de certains
Insectes (D. caninum), soit enkystée dans la
paroi intestinale de certains Ophidiens (D. Trin-.
Fig. 1.— Cryptocystis chesei).
ae Jecie Ropres Type du genre : D. caninum (Linné, 1758),
parasite du Chien, du Chat, du Felis maniculata
et même de l'Homme. Toutes les autres espèces sont parasites des
Carnivores.
Les Dipylidium présentent d'assez fréquentes
anomalies. Certains anneaux n'ont qu'un seul
pore génital, par avortement total ou partiel
de l'appareil génital du côté opposé; d’autres
sont stériles; d'autres encore ont quatre pores
sexuels, comme Shipley en a fait connaître un
exemple (fig. 2). Diamare a vu chez D. caninum
un anneau où l'appareil mâle était normal,
mais où l'appareil femelle était réduit aux
deux vagins. Le même observateur a retrouvé
chez D. Trinchesei une anomalie que j'ai cons-
tatée pour la première fois chez Tænia sagi-
nata et qui consiste en un renversement
véritable de l'appareil génital, les parties
Fig. 2. — Anomalie antérieures étant devenues postérieures et
de l’appareil géni- +. CAR AT Ent
tal chez Dipylidium réciproquement. Cette monstruosité n'existait
Caninum, d'après qu'à gauche; dans la moitié droite du même
SLIPIET anneau, on ne trouvait qu'une demi-douzaine
de vésicules testiculaires, le canal déférent avec sa poche du
cirre, puis le vagin; le reste de l'appareil génital femelle
faisait défaut.
DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 443
Diagnose des Dipylidium actuellement connus.
Le genre Dipylidium comprend actuellement douze espèces; nous
en donnons une brève diagnose.
1° D. caninum (Linné, 1758). — Synonymie : Tænia canina Linné,
1758 (non Batsch, 1786) ; T. moniliformis Pallas, 1781 ; T. cucumerina
Fig. 3. — Tête de Dipylidium caninum. —
À, rostre évaginé; B, rostre invaginé. x 75.
Bloch, 1782 (chez le Chien) ; T. cateniformis Güze, 1782, partim; T. ellip-
hica Batsch, 1786, partim (chez le Chat) ; T. cuneiceps Zeder, 1800.
Ver long de 150 à 400 mm. et parfois même davantage, pour une largeur
maximale de 2 à 3 mm. Tête petite, rhomboïdale, large de 350 à 460 », sui-
vant l’état de contraction (fig. 3). Rostre claviforme, long de 185 z à l'état
d'évagination complète, large de 110 à 120 z; rétractile dans un vaste
infundibulum céphalique, très visible par transparence ; armé de 3 ou #4
couronnes de crochets ayant l'aspect d’aiguillons de Rosier, c’est-à-dire
à manche et à garde très réduits. Ces crochets diminuent de taille d'une
rangée à l’autre : ceux du premier cercle sont longs de 12 à 15 , ceux du
dernier n'ont pas plus de 5 à 6 ». Les crochets sont du reste très caducs :
il est fréquent de les voir faire complètement défaut ou de ne plus
Lh4 R. BLANCHARD
observer que quelques crochets épars. Ventouses assez grandes, ellip-
soïdes. Cou court et gréle. Anneaux d'abord très courts, puis trapézoïdes,
finalement plus longs que larges. Organes génitaux à développement
Fig. 4. — Anneau de Dipylidium
caninum à maturité sexuelle. x 20.
tardif ; les anneaux sexués et les
anneaux muürs ont les bords laté-
raux nettement bombhés, ce qui
leur donne l'aspect de graines de
Concombre (fig. 4). Vagin dépour-
vu de réservoir séminal. OEufs
arrondis, larges de 35 à 40 », grou-
pés en nombre variable, ordinaire-
ment de 8 à 15, dans une même
capsule utérine. Vus par trans-
parence, ils donnent à la partie
médiane de l'anneau mür une teinte
rougeätre qui disparait dans les
liquides conservateurs; oncosphère
large de 25 à 30 x, avec des cro-
chets longs de 11 à 14 y.
La larve (Cryptocystis trichodec-
is Villot, 1882) vit dans la cavité
viscérale de divers Insectes (Tri-
chodectes canis, Ctenocephalus canis,
Pulex irritans).
Dipylidium caninum est un
parasite très fréquent du Chien
et du Chat; il se tient de préfé-
rence dans le tiers moyen et le
tiers postérieur de l'intestin
grêle. Sa taille varie assez nota-
blement suivant l'hôte qui l'hé-
berge : il atteint communé-
ment 20 à 30 cm. et même jus-
qu'à 50 et S0 cm. chez le Chien,
alors qu'il ne dépasse guère
15 à 20 em. et atteint rarement
32 em. chez le Chat. Ces différences ont conduit certains helmin-
thologistes à considérer la variété féline du parasite comme une
espèce distincte (Tænia elliptica Batsch, 1786).
L'Helminthe est rarement solitaire; on le trouve ordinairement
en plus ou moins grand nombre dans le même intestin. Chez
DIPYLIDIUM CANINUM DANS L' ESPÈCE HUMAINE 445
le Chat, il est rare de trouver plus de 50 exemplaires, mais Krabbe
en a vu deux fois jusqu'à 500 et 600 ; chez le Chien, le nombre peut
s'élever jusqu'à 2000, ainsi que l'a constaté également l'helmintho-
logiste danois.
Comme le Chien et ses Puces, ce parasite est actuellement cos-
mopolite. On peut donc s'attendre en toute région à le voir passer
chez l'Homme; le cas de Stiles et Duffield (n° 27) démontre que ce
parasitisme, observé jusqu'à présent en Europe seulement, se
réalise aussi en Amérique.
2° D. genettae (P. Gervais, 1847) — Halysis genettae P. Gervais, 1847. —
Ver long de 80 mm. Tête globuleuse, médiocrement renflée. Bostre couvert,
sur ses deux tiers inférieurs, de petits crochets épineux, très fins, très
nombreux, disposés en quinconce. Les derniers anneaux sont un peu plus
longs que larges, les plus grands ayant une largeur de 2 mm. La disposition
des pores génitaux n’est pas indiquée, ils sont figurés tantôt comme
alternes, tantôt comme doubles et symétriques. — Chez la Genette Viverra
genetta L.), des environs de Montpellier.
Malgré l'insuffisance de cette description, nous partageons l'avis de
Diamare, qui rattache cette espèce au genre Dipylidium.
3 D. echinorrhynchoides (Sonsino, 1889) = Tænia echinorhyncoides Son-
sino, 1889. — Ver adulte inconnu; les individus les plus àgés que l’on
ait vus avaient l'appareil mâle développé et atteignaient une longueur
de 70mm. Tête rhomboïdale, large de Omm.40 à Omm.45; ventouses
larges de Omm.18. Rostre subcylindrique, claviforme, long de 0 mm. 26,
armé de 12 à 16 rangs de petits crochets assez caducs, en forme d'aiguil-
lons de Rosier, les plus grands en avant et mesurant 18 », les plus petits
mesurant 5 z ; le fond de l’infundibulum céphalique est également orné
de crochets. À 30mm. de la tête, les anneaux sont aussi larges que
longs ; plus loin, ils sont deux fois plus longs que larges. Pores génitaux
s’ouvrant dans la moitié antérieure du bord latéral. Ovaires lobés ; vitel-
logène sphérique. — Chez le Fennec (Megalots cerdo), en Égypte.
4° D. Trinchesei Diamare, 1892 = D. Trinchesii Diamare, 1892. — Ver long
de 25 mm. Tête arrondie, ventouses un peu saillantes. Rostre assez grand,
formé de deux parties, l’antérieure sphérique, la postérieure infundi-
buliforme ; sur la partie antérieure, 80 crochets de taille diverse, disposés
sur 4 rangs, les plus grands en avant. Organes génitaux à développement
très précoce; déjà apparents sur l’anneau 2, déjà parvenus à maturité
sur l'anneau 10. Pores génitaux s’ouvrant dans la moitié antérieure du
bord latéral. Ovaire formé de deux lobes compacts ; vitellogène sphérique ;
vagin pourvu d'un réservoir séminal. Un seul œuf par capsule utérine. —
Chez le Chat domestique, à Naples et à Alexandrie d'Égypte.
446 R. BLANCHARD
Suivant Diamare, le Cysticercus acanthotetra Parona, 1887 (fig. 5), qui vit
en Sardaigne dans des kystes de la paroi intestinale d'un Ophidien (Zamenis
viridiflavus), serait la larve de D. Trinchesei. Si une telle assimilation est
D
Fig, 5. — Crochets de Cysticercus acanthotetra, d'après Parona. —
De gauche à droite, crochets des rangs 1 à 4.
exacte, cette espèce pourrait donc se trouver aussi en Sardaigne et même
dans d'autres pays, tels que le sud de la France, où se rencontre la Cou-
leuvre verte-et-jaune. Comme les Chats répugnent à se nourrir de la
chair des Serpents, la présence du Ver adulte
chez ces carnassiers serait exceptionnelle et il
faudrait plutôt chercher l'Helminthe dans l’in-
testin d'animaux ophiophages, tels que les
Echassiers et les Rapaces. La constatation d’un
tel parasitisme serait intéressante, puisqu'elle
démontrerait l'existence des Dipylidium chez
les Oiseaux.
5° D. Pasqualei Diamare, 1893. — Ver long
de 200 à 300 mm. et plus. Têle globuleuse, ven-
touses arrondies. Rostre allongé, claviforme,
effilé en avant, armé de 16 rangs de crochets à
base presque circulaire, hauts de 7 », larges de
s ._. . 8»; le fond de l’invagination céphalique est
D cu inerme. Parenchyme littéralement farci de cor-
Setti. puscules calcaires. Anneaux postérieurs carrés ;
anneaux mürs lancéolés. Lacune longitudinale
très large, environ trois fois plus large que chez D. caninum. Organes
génitaux à développement tardif; pores
génitaux dans la moitié antérieure du
bord latéral. Vagin pourvu d'un réser-
voir séminal; ovaire bilobé, rameux;
vitellogène bilobé. Un seul œuf par cap-
sule utérine. — Chez le Chat, à Alexan-
Fig. 7. — Dipylidium Gervaisi; drie d'Egypte.
a, œuf; b, crochets vus de profil Cette espèce est très probablement
et de trois quarts. D’après Setti. identique à D. echinorrhynchoides.
6° D. Gervaisi Setti, 1895. — Ver long de 10 à 40 mm. pour une lar-
geur maximale de 1mm.5. Tête longue de Omm. 15, large de O0 mm 25.;
DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 447
ventouses arrondies (fig. 6). Rostre cylindro-conique, armé d’une soixan-
taine de crochets en forme de piquants de Rosier (fig. 7, b), longs de 10
en moyenne et disposés sur 8 à 12 rangs; fond de l’infundibulum cépha-
Fig. 8. — Anneau sexué Fig. 9.-- Anneau mûr
de Dipylidium Gervaisi, de Dipylidium Gercuaisi,
d’après Setti. d’après Setti.
lique non armé de crochets. Organes génitaux à développement assez
précoce; ils sont déjà entièrement formés vers l'anneau 30, à 3 mm. de la
tête (fig. 8). Pores génitaux s’ouvrant au quart antérieur du bord laté-
Fig. 10. —Tète de Dipylidium Fig. 11. — Tête de Dipylidium
Chyzeri, d’après von Rätz. Chyzeri, d’après von Rätz.
ral (fig. 9). Cirre long et grêle, pendant en général sur les côtés du Ver ;
vagin dépourvu de réservoir spermatique. Un seul œuf par capsule uté-
rine (fig. 7, a). — Chez la Genette d'Erythrée (Genetta tigrina Gray).
LS R. BLANCHARD
7 D. Chyzeri von Räâtz, 1897. — Ver long de 120 200 mm. Tête sphérique
petite, large de 350 à 450 y (fig. 10). Rostre subconique (fig. 11), long de
110 y, d'égale largeur à la base, armé de 13 à 14 rangs de crochets en
aiguillon de Rosier, disposés en quinconce, les plus grands en avant et
mesurant 14, leur hauteur égalant au plus les deux tiers de la longueur,
de la base. Anneaux ayant une largeur maximale de 1 mm. 4 à À mm. 5,
plus étroits en arrière. Organes génitaux à développement tardif; Ja
poche du cirre est grande et n’appa-
rait que vers l'anneau 85. On compte
environ 58 à 60 anneaux à maturité
sexuelle (fig. 12) et seulement 5 à 6
anneaux remplis d'œufs. Pores géni-
taux dans la moitié antérieure du
bord latéral. Canal déférent très si-
nueux. OEuf à deux coques, rond,
large de 52; oncosphère mesurant
42 ». Un seul œuf par capsule utérine.
— Chez le Chat domestique, à Buda-
pest.
Cette espèce devra sans doute être
identifiée à D. echinorrhynchoides Son-
Sino.
8° D. triseriale Lühe, 1898. — Ver
long de 25 mm. Tête large de 0 mm.3;
diamètre des ventouses Ü mm. 1. Ros-
tre large de Omm.15, armé de trois
rangs decrochets ayant la même forme
que chez D. Trinchesei; la plus grande
longueur est de 68 z 2 pour ceux du
premier rang, de 56 z 8 pour ceux du
deuxième, de 43 z 2 pour ceux du troi-
Fig. 12. — Anneau mür de Dipyli- sième. Pores génitaux situés au pre-
dium Chyzeri, d'après von Rätz. mier tiers de la longueur. L'anneau
parvenu à maturité sexuelle est aussi
long que large et mesure Oinm.8; l'anneau mür atteint une longueur
de 5 mm. pour une largeur de 1 mm. Un seul œuf par capsule utérine.
— Chez la Civette (Viverra civetta ), en Tunisie et aux Indes.
9 D. monoophorum Lühe, 1898. — Ver long de 10 mm. Tête large de
Omm.15; diamètre des ventouses Omm.07. Rostre large de Omm.07 à
0 mm. 1, armé de trois rangs de crochets, ayant la même forme que chez
D. Trinchesei et D. triseriale, mais beaucoup plus petits, ceux du premier
rang n'ayant que 30 - de longueur. Pores génitaux situés au premier quart
du bord latéral. L’anneau parvenu à maturité sexuelle plus long que large;
il mesure Omm.6 sur Omm.3. Les testicules ont tendance à se groupe,
DIPYLIDIUM CANINUM DANS L' ESPÈCE HUMAINE 449
en deux rangées longitudinales presque régulières. L'ovaire de chaque
côté est représenté par une glande arrondie, située en dedans du vagin
et correspondant au lobe interne de l'ovaire des autres Dipylidium, le
lobe externe étant avorté totalement. L'anneau mür atteint une longueur
de 2 mm. pour une largeur de Omm.4; il s’allonge uniquement par sa
moilié postérieure, grâce à l'accumulation progressive des œufs dansle
Fig. 13. — Anneau sexué de Dipylidium Ürleyt, d’après vor Rätz.
parenchyme, ce qui tend à reporter les pores génitaux encore plus en
avant. Un seul œuf par capsule utérine. —Chez la Civette (Viverra civetta)
en Tunisie.
10° D. OÜrleyi von Rätz, 1900. — Ver long de 50 à 115 mm. Tête petite,
longue de 330 », large de 390 ». Rostre haut de 67 », large de 70 » à
la base, ordinairement invaginé, nu au sommet, armé de 5 rangées
alternantes de crochets à base ovale, ressemblant à des aiguillons de
Rosier. Cou court, trapu, un peu aminci en arrière. Anneaux au nom-
bre de 70 à 90, ayant au maximum 4 à 5 mm. de longueur et 2 mm. de
450 R. BLANCHARD
largeur (fig. 13); les postérieurs de teinte jaunâtre, à contour postérieur
piriforme. OEufs arrondis, larges de 25 », réunis au nombre de 3 à 12 dans
chaque capsule. — Chez le Chat, à Budapest.
11° D. sexcoronatum von Rätz, 1900.— Ver long de 100 à 235 mm. Tête lon-
gue de 330 v, large de 370 », de forme ovoïde, la partie antérieure conique.
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Fig. 1%. — Anneau sexué de Dipylidium sexcoronalum, d'après von Rätz.
Rostre généralement rétracté, à base conique, longue de 46, large de
54 », armé de 6 rangées de crochets très serrés, en aiguillon de Rosier,
les antérieurs plus grands. Anneaux ayant au maximum 6 à 7mm. de lon-
gueur et mm. à 1mm.5 de largeur (fig. 14). OEufs arrondis, mesurant 22
de diamètre, rassemblés au nombre de 2 à 15 dans des capsules qui
s'accumulent surtout en arrière des pores génitaux. — Chez le Chien, à
Budapest.
T
DIPYLIDIUM CANINUM DANS L' ESPÈCE HUMAINE 451
12° D. Monticellii Diamare, 1893. — Espèce nominale, établie d’après des
croquis pris par Monticelli au Musée Britannique sur un Ver rapporté
par l'expédition de l’Euphrate, sans indication d'hôte.
En résumé, on connaît actuellement, d'une façon plus ou moins
certaine, 12 espèces de Dipylidium. Déduction faite de D. genettae,
D. echinorrhynchoides et D. Monticellii, dont les caractères sont trop
indécis, on peut établir pour les neuf espèces restantes le tableau
comparatif suivant :
D OF W N
9
10.
als
Tableau comparatif des espèces du genre Dipylidium.
. Capsule utérine renfermant .
. Un seul œuf. Crochets du rostre . À
. Sur trois rangs. Crochets du premier rang .
Longs de 68
Longs de 30 ».
. Sur quatre rangs, ceux ds. Durs mener rangs
beaucoup plus grands et rappelant la forme des
crochets des Tænia. Lobes ovariens compacts; un
receptaculum seminis à la terminaison du vagin.
. Sur huit à douze rangs. Ovaire non rameux; Fe
sans receptaculum seminis.
. Sur treize à quatorze rangées. Ovaire rameux ; Viteh
logène do RP un receptaculum
seminis
Sur seize rangs. Drame rameux ; rallacéme Pobee
vagin pourvu d'un receptaculum seminis .
Plusieurs œufs. Crochets du rostre . :
Sur trois à quatre rangs. Lobes ovariens rameux;
pas de receptaculum seminis.
. Sur cinq rangs. Ovaire rameux; Tone
rameux; un receptaculum seminis.
. Sur six rangs. Ovaire rameux; Hlasene à com-
pact; un receptaculum es
triseriale.
monoophorum.
Trinchesei.
Gervaisi.
Chyzeri.
Pasqualei.
LE CieISE
caninum.
Orleyi.
Sexcoronatum.
Observations de Dipylidium caninum chez l'Homme.
En 1888, j'évaluais à 19 le nombre des cas connus; depuis lors,
beaucoup de cas nouveaux ont été publiés. En les faisant entrer
en ligne de compte, ainsi qu'un petit nombre de cas que j'avais
méconnus, on arrive actuellement à un total de 59 observations de
452 R. BLANCHARD
Dipylidium dans l'espèce humaine; soit un total de 60 cas en y
comprenant l'observation de Papillon. Même alors que la déter-
mination zoologique des parasites n’a pas été faite par des per-
sonnes compétentes, on peut admettre que la grande majorité,
sinon la totalité des ces observations se rapportent à D. caninum.
1° Cas de G. Dubois, 1751. — God. Dubois, élève de Linné, donne Ja pre-
mière description de Tænia canina et signale aussi pour la première fois
la fréquence de ce Ver dans l’espèce humaine : «Est Tæniæ species, quæ.…
vulgariter in cinibus et sæpissime apud homines invenitur. » Il en donne
une figure et dit, dans la légende explicative : « nobis visa in homine el
cane. »
2 Cas de Blasius. — A la clinique chirurgicale de Blasius, à Halle, un
garçon de 13 ans évacue 40 à 50 Vers. Ceux-ci sont conservés au Musée
d'anatomie comparée ; ils ont été déterminés par Meckel, comme en fait
foi l’éliquette écrite de sa main. Leuckart en a eu communication et a
reconnu l'exactitude de cette détermination; ils consistent en 40 à 50
fragments, ayant pour la plupart une longueur de 100 à 130 mm.
3° Cas de Salzmann, 1861. — A Esslingen (Württemberg), un enfant
de 16 mois rend de temps à autre des anneaux rougeâtres; il dort mal et
est devenu très excitable. On lui administre un vermifuge. Au bout de
huit mois, les anneaux ne sont pas réapparus; on donne le kousso,
mais sans résultat. La structure des anneaux ne laisse aucun doute sur
la détermination du parasite : un sinus génital de chaque côté; œufs
larges de 50 z environ, à coque lisse, renfermant une oncosphère large
de 30 z environ et agglomérés au nombre de 5 à 7 dans des capsules uté-
rines de forme régulièrement ovale.
4° Cas de Küster et Schmidt. — A Croneberg, un enfant de 13 semaines
expulse par l'anus un Dipylidium. La mère voit le Ver qui pend, tire des-
sus, en arrache un morceau long d'une quinzaine de centimètres et l’ap-
porte à Küster. Celui-ci le transmet à Schmidt, de Franciort, en vue de
la détermination. La tête faisait défaut.
5° Cas de Cobbold, 1872. — Un homme adulte présente, depuis quatre
ans environ, divers symptômes nerveux qui peuvent être attribués à la
présence d'un Ténia. Divers anthelminthiques restent sans effet ; il con-
tinue à rendre des anneaux de grande taille, appartenant soit au Tænia
solium, soit plutôt au T. saginata, parmi lesquels on remarque des
anneaux beaucoup plus petits, à pore sexuel bilatéral; il finit par évacuer
un Ver long d'environ cinq mètres. Il s’agit donc ici d'une infestation
mixte; l'expulsion du Dipylidium n’a pas été constatée.
6° Cas de Heller, 1876. — L'Institut pathologique d'Erlangen possède
des anneaux évacués par un enfant.
DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 453
7° Cas de Schoch-Bolley. — A Zurich, sous l'influence du kamala, un
enfant expulse deux Vers ayant une longueur d'environ un pied. Ce cas,
mentionné, tout d'abord par Leuckart, est également cité par Zäslein.
8°-12° Cas de Leuckart, 1880. — Leuckart a eu connaissance de cinq cas
nouveaux, chez des enfants de 9 mois à 3 ans. Les anneaux, pourvus des
capsules utérines caractéristiques du Dipylidium caninum, étaient le plus
souvent expulsés isolément; ils étaient sortis une fois par le nez.
43°-14° Cas de Friis, 1884. — Deux cas observés aux environs de Tônder
(Danemark) : 1° chez un enfant de 7 semaines, Ver sorti spontanément
par l'anus; 2° chez un enfant de 6 mois, Ver sans tête expulsé par le kamala.
45° Cas d'Hoffmann, 1887. — Fillette tenue très malproprement, à Darm-
stadt. Vers le début du cinquième mois, elle évacue des anneaux, sans
présenter d’ailleurs aucun trouble. Au début du septième mois, l’enfant
a de la diarrhée et rend, presque avec chaque selle, un très grand nombre
d’anneaux; elle est très abattue et affaiblie. On lui fait évacuer plusieurs
Vers, après quoi son état redevient normal.
16° Cas de Krüger, 1887. — Une fillette de 16 mois, jusqu'alors gaie et
bien portante, devient triste et abattue; elle est sans appétit, ne joue
plus, pleure facilement; d’autres fois, elle revient à la gaité. Selles
irrégulières; tour à tour diarrhée et constipation. L'enfant rend par-
fois, soit spontanément, soit avec les selles, des anneaux rougeâtres,
longs de 10mm. environ; elle a la fièvre depuis quatre jours : la tempéra-
ture est entre 38° 5 et 39° 5, Le pouls est à 114. On administre le kamala; la
petite malade évacue plusieurs fragments de Dipylidium, dépourvus de
tête et ayant plus d'un mètre de longueur totale; l’un des fragments,
formé de 51 anneaux, presque tous mürs, mesurait 35cm. ce qui suppose
une longueur de 45 à 50cm. pour le Ver entier. Le nombre des parasites
ainsi expulsés à l’état de fragmerits pouvait être de quatre à six. Le len-
demain, l'enfant a recouvré sa gaîté et son appétit ; les selles sont rede-
venues régulières ; la température est à 37° 7, le pouls à 96; la santé se main-
tient par la suite.
17-18° Cas de Brandt, 1887. — 1° Un jeune paysan de 15 ans est amaigri,
faible et maladif depuis un an; il passe alternativement par des périodes
de bonne santé et de malaise, celles-ci coïncidant avec l'expulsion par
l’anus de Vers isolés, très nombreux ou même rendus par véritables
paquets ; il éprouve de temps à autre des douleurs à l’épigastre et des
battements de cœur. L'état général s'améliore après la première éva-
cuation de parasites, mais ces mêmes symptômes réapparaissent au bout
de deux mois, plus intenses et accompagnés de douleurs lombaires et de
constipation. Une seconde évacuation est également suivie d'une amélio-
ration notable, mais les accidents morbides reviennent bientôt, encore
plus graves, avec des vomissements et des troubles marqués du côté du
454 R. BLANCHARD
système nerveux et de l’appareil digestif. Ces alternatives de malaise et
d'amélioration se reproduisent plusieurs fois; la sortie des parasites
s'accompagne le plus souvent d’un fort prurit et de brülures à l’anus.
Le malade continuant à rendre avec les selles des anneaux mürs de
teinte rougeätre, on lui administre de l'extrait éthéré de Fougère mâle et
de l'huile de Ricin. Il expulse 48 Vers, dont 27 mesurant 30cm. et 3 ayant
35cm. de longueur. Ce jeune garçon jouait souvent avec un Chien infesté
de Trichodectes; il était lui-même, après chaque contact, envahi par ces
Insectes. Un an après le traitement, la santé n'avait cessé d'être parfaite
et les Vers n'avaient pas reparu.
20 Une fillette de huit ans, jusqu'alors gaie et bien portante, perd sa
bonne humeur et se montre excitée; elle se plaint de douleurs à l’épigas-
tre et de malaise; respiration difficile, inappétence, constipation. Environ
un mois après le début de ces symptômes, expulsion spontanée de Verset
tout s’amende. Les mêmes accidents se reproduisent bientôt, suivis d'une
nouvelle expulsion spontanée qui produit une amélioration. Il en est en-
core ainsi une ou deux fois; la sortie des parasites cause du prurit etune
sensation de brülure à l’anus. Un certain jour, la fillette se trouve mal
pendant quelques minutes; elle expulse deux Vers entiers sans la tête et
quelques anneaux isolés. L'extrait éthéré de Fougère mâle provoque alors
l'expulsion de 30 Vers, tous pourvus de leur tête, et de 30 anneaux isolés;
la plupart ont une longueur de 25cm. environ; quatre seulement sont plus
petits.
Cette fillette jouait constamment avec un Chien à longs poils, qu’elle
faisait même dormir sur son lit. Cet animal avait dans son pelage un
grand nombre de Trichodectes, qui passaient sur elle et jusque dans sa
chevelure.
190 Cas de Martin, cité par R. Blanchard, 1888. — « À ces observations,
nous pouvons en ajouter une autre, la première, à notre connaissance,
qui ait été faite en France; elle nous a été gracieusement communiquée
par le D' H. Ch. Martin, de Passy. Cette observation présente un intérêt
particulier, en ce qu'elle est jusqu’à présent la seule qui se rapporte à un
adulte. La personne qui en fait l’objet avait l'habitude de faire coucher
son Chien au pied de son lit, souvent même le laissait entrer dans le lit;
le Ver était long de 40centimètres environ. »
20° Cas de Blanchard et Drouet, 1895. — Ce cas s’est présenté à moi en
mars 1895, au moment même où j'écrivais l’article Parasites animaux du
Traité de pathologie générale de Ch. Bouchard, en sorte que j'ai pu déjà
le mentionner dans ce travail. Je reprends et complète l'observation :
Une femme habitant rue Mercœur, en plein Paris, se présente au dis-
pensaire de la rue de l’Épée-de-bois avec une fillette de vingt-quatre mois
qui, depuis quatre à cinq mois, rendait à peu près tous les jours un ou
deux corps rougeâtres ayant l'aspect de graines de Concombre. Le D' H.
Drouet voit l'enfant, demande qu'on lui apporte quelques-uns de ces corp :
DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 455
blancs et m'en transmet deux: j'y reconnais des anneaux de Dipylidium
caninum..
En compagnie du D' Drouet, je me rends alors au domicile de l'enfant.
Je trouve une fillette assez robuste, qui ne paraît nullement incommodée
par son parasite; elle habite un véritable taudis, où elle est en contact
journalier avec un Chien et deux Chats; l’un de ceux-ci partage même
ordinairement sa couche. Nous essayons de débarrasser la petite ma-
lade de son parasite, mais sans succès : le tannate de pelletiérine, puis
la noix d’arec ne donne aucun résultat. Après une interruption de quel-
ques jours, due à une tentative de meurtre par un ivrogne envers l’un
des membres de cette famille, nous revenons à la charge et sommes, cette
fois, assez heureux, au moyen de la pelletiérine et de l'huile de Ricin,
pour faire rendre à la fillette un Ver muni de sa tête.
Ce Ver est long de 58mm. Le rostre est rétracté; on voit par transparence
des crochets en aiguillons de Rosier, nettement disposés sur quatre rangs.
Les deux anneaux mürs obtenus précédemment sont longs de 7 mm.etlarges
de 2mm5. L'un deux est monté en préparation microscopique : les œufs
sont groupés au nombre de 8 à 16 dans chaque capsule utérine; leur dia-
mètre varie de 38 à 45 v, celui de l’oncosphère est de 29 à 30 . Le Ver in-
tact et l'anneau muür restant sont déposés au Laboratoire de parasitolo-
gie de la Faculté de médecine de Paris (collection R. Blanchard, n° 29).
21° Cas de Sarensen, 1896. — Un enfant de 12 semaines, nourri au biberon,
rend des anneaux. On le purge; il rend septanneaux. On le purge encore ;
il rend un grand fragment sans tête. Il y avait un Chien dans la maison.
22°-25° Cas de Müller, 1899. — À Zurich, Müller observe 4 cas : 1° chez
un enfant de 13 mois; 2° chez un homme de 40 ans; 3° chez un homme de
45 ans; 4 chez une femme de 38 ans. Il n’y avait ni Chien ni Chat dans
la maison d'aucun de ces malades.
26° Cas de Lœnnecken, 1901. — Un garçon de 5 ans, fils d'un paysan de
Hardanger, rend des anneaux. On le nourrit de lait crù et d’eau prove-
nant d’une fontaine où s'abreuvait un Chien.
27 Cas de Stiles et Duffield, 1903. — A Detroit, Mich. (États-Unis), un
enfant de 16 mois évacue un Ver.
28° Cas d’Asam, 1903. — Une fillette de 19 mois rend dansses selles des
anneaux rosés, semblables à des graines de Concombre; ils se inontrent
tous les deux ou trois jours, toujours isolés; l'enfant est bien portante, mais
a grand appétit et présente une inquiétude et une agitation anormales.
Environ un mois après la première constatation des anneaux, on admi-
nistre un vermifuge et l’on obtient un Dipylidium long de 120"", sans la
tête. Au bout de trois semaines, les anneaux réapparaissent dans les selles;
on administre un nouvel anthelminthique et l’on obtient alors divers frag-
ments représentant trois Vers, l’un avec tête. L'enfant est alors guérie.
Depuis un an exactement, il n’y avait plus de Chien dans la maison;
456 R. BLANCHARD
Asam ne fait aucune allusion à la présence possible d’un Chat. Même en
l'absence d’un animal de cette dernière espèce, la longue persistance des
Puces dans les habitations mal tenues donnerait une suffisante explica-
tion étiologique.
29° Cas de Zschokke, 1903. — En disséquant le cadavre d'un homme âgé
de 35 à 40 ans, un étudiant trouve dans le gros intestin un certain nom-
bre d'anneaux libres, pleins d'œuîs disposés par paquets, atteignant une
longueur de 10 mm. et une largeur de 1 mm.5.
30° Cas de Bulloch et Braun, 1903. — Un enfant traité à la policlinique
du London hospital medical College rendait par centaines des anneaux;
quelques-uns furent envoyés par W. Bulloch à Max Braun.
31° Cas de Kühl, 1904. — Un enfant âgé de 40 jours commence à rendre
des anneaux d'un rose clair, renfermant des œufs groupés par paquets
de 6 à 12. Ces anneaux continuent à se montrer dans les selles tous les-
deux ou trois jours, jusqu'au sixième mois. On fait alors appel au mé-
decin, qui administre le kamala et provoque l'expulsion d’un Ver. Il y
avait un Chat dans la maison, mais pas de Chien. La mère avait nourri son
enfant au sein pendant dix-sept jours, puis lui avait donné le biberon. A
supposer que l'infestation ait eu lieu dès le début de ce changement de
régime, c'est donc au maximum en vingt-trois jours que le Ver s’est déve-
loppé au point d'émettre des anneaux mürs.
32° Cas de Sonnenschein, 1904. — A Olmütz, un garçon de six mois,
nourri uniquement au lait de Vache étendu d’eau, rend des anneaux. On
lui administre l’extrait éthéré de Fougère mâle : il expulse quatre Vers et
reste désormais bien portant.
33° Cas de Freriks et Broers, 1904. — A Utrecht, un enfant de 2 ans rend
des anneaux blancs, longs de 8 à 10 mm. larges de 2mm.5 à 3 mm.5,ressem-
blant à des graines de Concombre; les œufs y sont groupés au nombre de
10 en moyenne dans des capsules utérines. On administre l'extrait éthéré
de Fougère mâle; l'enfant évacue un Ver sans tête, long de 50 em.,environ;
le lendemain, un nouveau ténifuge reste sans effet; au bout trois mois, il
n’y avait pas eu de récidive. L'enfant jouait fréquemment avec un Chien,
qui rendait lui-même des anneaux de même nature.
. 34° Cas de Rosenberg, 190%. — A Vienne, un enfant de 13 mois, qui jouait
fréquemment avec un Chien, évacue des anneaux. Un mois plus tard, on
le traite par l'extrait éthéré de Fougère mâle; il rend 10 Vers adultes.
35° Cas de B. de Nabias, 1904. — Enfant de deux ans, de santé délicate,
observé par le D' Callen, de Sore (Landes). Depuis trois semaines envi-
ron, il rend chaque matin quelques anneaux; il expulse un Ver long de
180mm., sous l'influence d’une décoction de racine de Grenadier.
36°-53° Cas de Krabbe, 1866-1905. — Le professeur H. Krabbe, de Co-
penhague, a porté d’une façon toute spéciale son attention sur les Cestodes
de l'Homme et sur la fréquence relative des différentes espèces; il nous a
DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 457
donné sur ce point de précieuses indications, que nous résumerons dans le
tableau ci-dessous :
Nombre Nombre Sexe Age Nombre |
Année |des Cestodes A Pourcentage| du Gt mecs. des Vers
ne de lt . | d'ordre
examinés. | D.caninum. malade one lle | MÉVRENSE
1866 5) 1 36
a |314/2 il 37
ei! 4 1 38
1881 | 100 4 & | cn La ; .
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1887 | 300 l 0, 75 Ê A ANUS
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1896 | 100 6 6 À He Piel
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ct ; 10 1 o1
1905 50 3 6 | © & 3 52
| © 18 1 99
54° Cas de Zschokke, 1905. — Un jeune garçon de 4 ans, maladif et amai-
gri depuis longtemps, rend des anneaux; il est en contact fréquent avec
des Chiens. On lui administre un vermifuge, qui provoque l'expulsion de
9 à 6 Vers longs de 120 à 150mm.
55°-58° Cas de Bollinger, 1905. — Quatre cas observés en Bavière :
4° Un enfant de 5 ans se plaint fréquemment de prurit à l'anus. Un cer-
tain jour, il rend un fragment qui figure dans les collections de l'Institut
pathologique de l'Université de Munich (n° 4%, 1889). L'enfant n’a pas été
soumis au traitement vermifuge. Il jouait constamment avec un Chien, qui
rendait lui-même beaucoup de Vers.
2° Une femme de 55 ans souffre de pression à l’épigastre et de violents
maux de tête. Elle évacue 6 Vers (n°129, 1896) et tout rentre dans l'ordre.
Elle avait un Chien qui mangeait avec elle à table.
3° Une cuisinière de 31 ans, ayant déjà subi plusieurs fois le traitement
Archives de Parasilologie, XI, n° 3, 1907. 30
458 R. BLANCHARD
anthelminthique, est sujette à des malaises passagers. Elle expulse un Ver
(n° 52, 1897). Il y avait un Chien et des Chats dans la maison.
4° Un enfant de 4 mois rend un certain nombre d'anneaux (n° 81, 1900).
59° Cas de Pollak, 1907. — Présente à la Société des médecins de Vienne
un nourrisson qui, depuis trois mois, élimine chaque jour des anneaux
dans les selles. L'enfant a été infesté par un Chat vers l’âge de cinq semaines
l’infestation se manifesta par un arrêt dans l'augmentation du poids du
corps.
60° Cas de Papillon, 1907. — « Lucien R., âgé de 10 mois, est amené par
sa mère, le 25 septembre 1906, à ma consultation de l'hôpital Bretonneau.
« La mère raconte que, depuis deux semaines, l'enfant rend tous les
jours, dans ses selles, des fragments de Ténia et que l'avant-veille, le
dimanche 23 septembre, il avait expulsé spontanément, en allant à la
garde-robe, un Ver assez long qu'elle apporte dans une bouteille. Étonné
de l'existence d’un Ténia chez un nourrisson et n'ayant pas le temps d'ap-
profondir cette histoire à la consultation, je fais revenir, le lendemain
matin, la mère et l'enfant dans le service, remettant à ce moment-là l'in-
terrogatoire de la mère et l'examen du parasite. De plus, comme celui-ci
ne me parait pas complet, je donne les instructions nécessaires pour l'ad-
ministration d'un anthelmintique à l'enfant dès son arrivée dans le ser-
vice.
« Le lendemain, à la visite du matin, l’enfant a absorbé les 2 grammes
d'extrait éthéré de Fougère mâle et les Ogr.05 de calomel prescrits la
veille.
« La mère, interrogée minutieusement, confirme les renseignements
donnés à la consultation sur l'expulsion spontanée du parasite, d'abord
en fragments (un anneau à la fois, parfois deux ou trois), puis globale.
Depuis le dimanche, rien n’a été évacué. L'enfant, bien portant depuis sa
naissance, a été d'abord nourri au sein par la mère; depuis trois ou quatre
mois, allaitement mixte au sein et au biberon (lait bouilli). L’excellent
état de l'enfant montre d’ailleurs que cette alimentation a été bien réglée
et soigneusement pratiquée.
« À aucun moment, ni avant ni pendant l'expulsion du Ténia, l'enfant
n'a présenté de symptômes pouvant être, de près ou de loin, rapportés à
un parasite intestinal; il n’y a eu ni convulsions, ni méningisme; pas de
troubles nerveux, pas de troubles digestifs.
« Après avoir recueilli ces renseignements sur l'hygiène et la santé de
l'enfant, j'ai recherché la possibilité d'infection parasitaire par cohabita-
tion animale. Là encore, l'enquête a été négative. A la connaissance de
la mère, l’enfant n’a jamais été en contact avec des Chiens ou des Chats.
Cependant, dans ces dernières semaines, l'enfant passait ses après-midi à
la crèche, la mère étant prise à ce moment-là par son travail. Bien qu'il
n’y eut pas d'animaux à demeure dans cet établissement, la mère ne peut
savoir d'une façon absolue si l'enfant a été préservé, pendant le séjour à
DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 459
la crèche, de tout contact avec un animal quelconque. Ce qu’elle nous
affirme, c'est qu'on ne faisait prendre aux enfants que du lait bouilli, au
biberon, à l’exclusion de tout autre aliment.
« Ne trouvant dans ces renseignements rien qui püt m'expliquer la pré-
sence d'un Ténia chez un enfant aussi jeune, dont l'alimentation est exclu-
sivement lactée, j'examine le parasite. Sa faible longueur, bien qu'il me
parut presque complet, la forme des derniers anneaux et leur double
pore génital, me montrèrent qu'il s'agissait d'une espèce insolite, peut-
être banale pour des zoologistes, mais en tous cas intéressante pour des
cliniciens, en raison des circonstances dans lesquelles elle avait été
rencontrée. J'envoyai donc le parasite à M. le Professeur R. Blanchard,
qui reconnut un Dipylidium.
« A la suite du traitement anthelminthique, il n’y eut aucune expulsion
de parasite ou de fragment de parasite. Le soir même, la mère rentrait
chez elle avec son enfant. Quelques jours après, le 1“ octobre, elle nous le
ramenait présentant une poussée d'entérite, due sans doute à l’adminis-
tration de l'extrait éthéré de Fougère mâle. Gardé quelques jours et soigné
dans le service. l’enfant fut définitivement rendu à sa mère, en parfaite
état. J’ai profité du séjour du petit malade dans notre salle pour examiner
ses selles au microscope et y rechercher des œuîs d'Helminthe : cet exa-
men fut toujours négatif. »
Les 60 observations ci-dessus ont été relevées dans les différents
pays d'Europe, à l'exception d'un seul cas constaté en Amérique.
Elles se répartissent comme suit :
France, 4 cas. — Martin (obs. n° 19), R. Blanchard et Drouet (20),
de Nabias (35), Papillon (60).
Allemagne, 16 cas. — Blasius (2), Salzmann (3), Küster et Schmidt
4), Heller (6), Leuckart}(8-12), Hoffmann (15), Asam (28), Kôhl (31),
Bollinger (55-58).
Angleterre, 2 cas. — Cobbold (5), Bulloch (30).
Autriche, 3 cas. — Sonnenschein (32), Rosenberg (34), Pollak (59).
Danemark, 21 cas. — Friis (13-14), Sérensen (21), Krabbe (36-53).
États-Unis, 1 cas. — Stiles et Duffield (27).
Hollande, 1 cas. — Freriks et Broers (33).
Norvège, 1 cas. — Lænnecken (26).
Russie, 3 cas. — Krüger (16), Brandt (17-18).
Suède, 1 cas. — Dubois (1).
Suisse, 7 cas. — Schoch-Bolley (7), Müller (22-25), Zschokke (29,
53).
Il conviendrait d'ajouter à cette liste encore un autre cas, que
460 R. BLANCHARD
d'inexactes références bibliographiques ne nousont pas permis de
contrôler : celui de Lindblad en Suède, vers 1883, chez un enfant
de trois mois et demi. Rappelons enfin que Dubois affirme qu’à
Upsal le parasite se voit très fréquemment chez l'Homme (sæpis-
sime apud homines invenitur). On arrive ainsi à la conviction que le
Dipylidium caninum est très loin d'être rare dans l'espèce humaine.
Biologie du parasite; conditions de sa dissémination. — On sait
que le parasite se trouve normalement dans l'intestin grêle du
Chien et du Chat, souvent en nombre considérable. Il grandit
rapidement et les anneaux mûrs ne tardent pas à se détacher.
Ceux-ci rampent alors dans l'intestin grêle et passent dans le
gros intestin, en partie grâce à leurs mouvement propres, en
partie entraînés avec les résidus de la digestion; de même, ils
sortent par l’anus soit spontanément, soit avec les matières fécales.
Dans les conditions ordinaires, le Chien et le Chat n’émettent donc
que des anneaux isolés, maisil n’est pas rare de voir aussi ces ani-
maux rejeter des fragments formés d’un plus ou moins grand
nombre d'anneaux encore unis les uns aux autres.
Une fois qu'ils sont sortis spontanément du rectum, lesanneaux
isolés restent fréquemment au pourtout de l'anus et rampent ça et
là jusque vers le pelage. Ils se dessèchent, se déchirent et meurent,
non sans avoir semé sur le mucus et dans les poils un certain
nombre d'œufs qui restent ainsi à la surface du corps. Surviennent
alors le Trichodecte ou la Puce : le premier, en broûtant les débris
épidermiques, rencontre l'œuf et l'avale; la seconde fait de même
en promenant son rostre à la surface de la peau et en aspirant les
humeurs qui la souillent; dans un cas comme dans l’autre, l'Insecte
s'infeste.
En eftet, Melnikov a établi que le Ricin du Chien, Trichodectes
canis (Retzius), est l'hôte intermédiaire de notre Cestode; Grassi
a donné la même démonstration pour la Puce du Chien, Cteno-
cephalus canis (Curtis). On sait que la Puce du Chat, Ct. felis (Bou-
ché), ne diffère guère de cette dernière, dont elle représente tout
au plus une variété; la notion ci-dessus s'applique donc aussi à
elle. La larve serait également capable d'évoluer dans la Puce de
l'Homme (Pulex irritans Linné). Enfin, ilest très vraisemblable quele
icin du Chat(Trichodectes subrostratus Nitzsch) peutaussil'héberger.
-
DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 461
Le Chien s'infeste à son tour en faisant la chasse aux Insectes
qui vivent dans son pelage et en les déglutissant. Le Chat n'a pas
l'habitude de croquer tout vifs les parasites de son pelage, mais il
lisse fréquemment ses poils avec sa langue et cela lui donne aussi
l'occasion d’avaler quelques-uns des Insectes qui s'y cachent. Les
Trichodectes du Chien et du Chat sont plutôt rares, tout au moins
dans les villes, alors que les’ Puces sont extrêmement communes;
en fait, c'est donc celles-ci qui sont les propagateurs presque exclu-
sifs du parasite.
En ce qui concerne l'Italie, le fait a été mis hors de doute par
. les observations de Grassi. Certaines Puces du Chien, remarquables
par leur grosseur et leur couleur cendrée, renferment jusqu'à 50
Cryptocystis, appartenant tous à la même génération et d'autant
plus petits qu'ils sont plus nombreux. Ces larves sont libres
dans la cavité générale de l'Insecte : quand on le dilacère dans une
goutte de liquide, elles sortent et se répandent aussitôt dans celui-
ci, sous l'aspect d’une très fine poussière blanche. Introduites alors
dans le tube digestif du Chien, elles meurent, car on ne trouve pas,
par la suite, de jeunes Ténias dans l'intestin; dégluties avec la
Puce qui les abrite, elles éclosent au contraire, dans l'intestin grêle
et provoquent l'infestation. C’est donc bien, comme il a été dit
plus haut, en avalant leurs Puces que le Chien et le Chat se conta-
minent.
Ces animaux sont d’ailleurs parasités dans la plus large mesure.
A Copenhague, Krabbe trouve le Dipylidium caninum 87 fois sur
421 Chiens et 15 fois sur 26 Chats, soit une proportion respective
de 72et de 60 pour 100. En France, à Paris notamment, on obtien-
drait des chiffres très analogues, vu la très grande fréquence de ce
parasite.
On l’observe chez de tout jeunes Chiens, qui tettent encore leur
mère; ils avalent fortuitement une Puce contaminée et s'infestent
de la sorte. Une Chienne dépourvue de Trichodectes, mais porteuse
de Puces très infectées, mit bas des petits qui, au bout de cinq à
dix jours, étaient déjà parasités ; ils l’étaient à un haut degré, au
bout d'un mois; par contre, on ne trouva aucun Dipylidium chez
les petits d'une autre Chienne, qui n'avait ni Puces ni Tricho-
dectes. Chez un jeune Chien de dix jours, on peut trouver des Vers
longs de 25 mm; chez le Chien d’un à deux mois, il est ordinaire de
462 R. BLANCHARD
trouver des Vers adultes. Il suffit, en effet, d’une vingtaine de jours
pour que ceux-ci parviennent à maturité sexuelle (cf. obs. 30).
C'est encore en avalant des Puces, ou plus rarement des Tricho-
dectes de Chien ou de Chat que l'espèce humaine se contamine:
mais, sauî le cas très exceptionnel d'individus déments ou atteints
de perversion du goût, l'ingestion de ces Insectes n'estaucunement
volontaire; elle résulte d'une circonstance toute fortuile, qui se
Fig. 15. — Chat lapant le lait et y semant ses Puces.
comprend d'ailleurs très aisément. Les Insectes qui vivent norma-
lement dans le pelage du Chien et du Chat, et particulièrement les
_ Puces, le délaissent de temps à autre pour sautiller çà et là; ils
tombent et se noïent dans les aliments et les préparations culi-
naires (soupe, bol de lait, ete.). Le Chat, au reste, est un marau-
deur fort impudent : il se dresse le long du pot au laït et y intro-
duit sa tête pour laper le liquide savoureux; il ne craint même pas
de s'attaquer au bol qui vient d’être placé sur la table; les gestes me-
naçants d'un enfant ne l’effrayent guère (fig. 15). Bien loin d'écar-
ter des convives aussi importuns, nombre de personnes font d'ail-
leurs manger à table, avec elles-mêmes, leur Chien ou leur Chat,
sans se douter du danger qui en résulte (obs. 56). Enfin, l'absence
d'un Chat ou d'un Chien n'exclut aucunement l’étiologie que nous
venons d'exposer, attendu que le lait a pu être souillé à la laiterie
DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 463
(obs. 32); tel doit être fréquemment le cas pour les enfants élevés
au biberon (obs. 21, 31, 60).
L'infestation s'accomplit dans ces diverses conditions. Elle est
plus fréquénte chez l'adulte qu’on ne serait tenté de le croire; la
plus forte proportion des cas s’observe néanmoins chez les enfants.
Cela tient évidemment, d’une façon absolue, à ce que les enfants
fontune grande consommation de laitage, qui se trouve facilement
souillé par le Chat, et sont en contact plus familier que les adultes
avec les deux animaux incriminés; cela peut tenir aussi, d’une
façon relative, à la plus grande sensibilité des enfants à l’helmin-
thiase et à ce qu'on surveille plus attentivement leurs déjections
que celles des personnes âgées.
Fréquence et nombre des parasites. — Le Dipylidium caninum
peut s'observer chez l'Homme à tous les âges de la vie; il est
plus fréquent dans l'enfance, pour les raisons exposées plus haut.
On peut déjà constater sa présence chez des nourrissons de
o semaines (obs. 59), de 6 semaines (obs. 51), de 7 semaines
(obs. 13). Il n’est pas rare de 2 à 5 mois (obs. 41, 42; 21, 36, 45; 4;
31; 38, 43, 46, 48, 58; 15), de 6 à 10 mois (obs. 14, 32, 52; 49; 44;
39; 40, 51, 60), de 11 à 15 mois (obs. 50; 22; 34), de 16 à 24 mois
(obs.3, 16,27; 53; 28; 20), de 2 à 5 ans (obs.33,35 ; 5,47, 54; 26, 55).
Les observations 7 à 12 et 30 concernent aussi de jeunes enfants.
Nous ne relevons qu'un cas à 8 ans (obs. 18), un cas à 13 ans
(obs. 2) et un cas à 15 ans (obs. 17). Chez les adultes, un cas sans
indication d'âge (obs. 19), un cas à 31 ans (obs. 57), un cas à 38 ans
(obs. 26), un cas de 35 à 40 ans (obs. 29), un cas à 40 ans (obs. 24)
un cas à 45 ans (obs. 25) et un cas à 55 ans (obs. 56). En résumé,
cette statistique portant sur 59 cas donne les résultats suivants:
De 5 semaines à 6 mois. 20 cas, soit. . . . . . 33.9 pour 100
Deal MOIS NET _ 11.61 —
a 13 à DABINOIS EN EC ER0 — 182 Pate Puel
CRAARIANS ER. RUE 2 — 3.99
De 9 mois à 3 ans . . . 7 — 11#0 100) —
DÉPAAASIANS EEE ES ES 0010 — RS HAOMAGNUNE
Dear P0 ans Len 2 — LATE RAR ES de LEE
Au delà de 20 ans . . . 6 — AD D AO TORRES
Il semble que l'intestin ne contienne ordinairement qu'un seul
Dipylidium, soit qu'effectivement l'expulsion constatée d'un seul
464 R. BLANCHARD
parasite coïncide avec la cessation des accidents morbides, soit
que le petit nombre des anneaux évacués avec les selles plaide en
faveur d’une telle interprétation; en fait, dans beaucoup de cas, le
nombre total des parasites reste incertain. Par contre, dans 15 ob-
servations, soit dans 25 pour 100 des cas, ceux-ci se sont montrés
plus ou moins nombreux : depuis 2 Vers (obs. 7, 40, 42, 44) jusqu’à
3 Vers (obs. 28, 50 et 52), 4 Vers (obs. 32), 4 à 6 Vers (obs. 16),
6 Vers (obs. 56), 10 Vers (obs. 34), plusieurs Vers (obs. 15), 30 Vers
(obs. 18), 48 Vers (obs. 17), 40 à 50 Vers (obs. 2) et jusqu à des Vers
en grande quantité, mais indéterminée (obs. 30).
Symptomatologie, pathogénie. — Les parasites sont-ils pathogènes
et, dans ce cas, la symptomatologie varie-t-elle d'intensité suivant
leur siège ou leur nombre? Les observations qui précèdent ré-
pondent nettement à cette double question.
Voici une fillette de 24 mois, robuste et bien portante, qui,
depuis # ou 5 mois, rend un ou deux anneaux dans chacune de
ses selles (obs. 20); son état général est d’ailleurs excellent et,
n'était la présence constante de ces corps insolites dans ses déjec-
tions, les parents n'auraient aucune raison de faire appel au méde-
cin. Nombre d'observations sont, pour ainsi dire, calquées sur celle-
ci, l'attention de la mère n'étant sollicitée par rien d'anormal, en
dehors des anneaux qui sont évacués avec les selles. Il est donc
évident que, dans les conditions ordinaires, l'organisme délicat de
l'enfant n’est pas influencé d’une façon appréciable par la présence
d'un seul parasite ou même d’un petit nombre de parasites.
Voici, d'autre part, un enfant de 16 mois qui dort mal et est très
excitable; il rejette de temps à autre des anneaux rougeûtres,
qu'un vermifuge fait disparaître d’une façon définitive (obs. 3).
Voici encore un enfant de 2 ans, de santé délicate, qui depuis
quelques semaines rend chaque matin plusieurs anneaux
(obs. 35). Tel autre garconnet de 4 ans, maladif et amaigri depuis
longtemps, rend également des anneaux {0bs. 54). Une fillette de
19 mois, qui semble d’ailleurs bien portante, a grand appétit et est
en proie à une inquiétude et à une agitation anormales; elle évacue
trois Vers et tout rentre dans l’ordre (obs. 28). Un nourrisson,
infesté vers l'âge de 5 semaines, cesse dès lors d'augmenter de
poids (obs. 59). Une fillette de 16 mois devient triste et abattue
DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 465
elle perd l'appétit, ne joue plus, pleure facilement, puis revient à
la gaîté; ses selles sont irrégulières, elle a tour à tour dela diarrhée
et de la constipation et même une forte fièvre; elle expluse de 4 à
6 Vers et guérit (obs.16). Une fillette de 5 mois commence à rendre
des anneaux, sans présenter de troubles appréciables; deux mois
plus tard, les anneaux sont très nombreux dans les déjections,
l'enfant est affaibli, très abattu et a de la diarrhée; il évacue plu-
sieurs Vers, après quoi son état redevient normal (obs. 15). Une
femme de 55 ans se plaint de pression à l’épigastre et de violents
maux de tête; ces symptômes disparaissent après l'expulsion de
6 Vers (obs. 56). Enfin, une femme de 31 ans est sujette à des
malaises passagers, qui ne se renouvellent plus après l'évacuation
d'un Ver (obs. 57).
D’après ces exemples, il est clair que l'organisme, aussi bien de
l'adulte que de l'enfant, n’est pas doué d’une indifférence absolue
envers le parasite, que celui-ci soit représenté par un petit nombre
d'exemplaires ou même par un seulindividu. Quand les Helminthes
sont nombreux, les accidents que nous venons de constater
deviennent plus manifestes et s’aggravent plus ou moins : les deux
observations rapportées par Brandt sont très démonstratives à cet
égard.
Un garçon de 15 ans, amaigri, faible et maladif depuis un an,
passe par des alternatives de santé et de malaise, ce dernier s'accom-
pagnant parfois de douleurs à l’épigastre et de palpitations du cœur;
l'état général s'améliore après l'expulsion de Vers en nombre par-
fois considérable. Au bout de deux mois, ces premiers symptômes
reviennent plus intenses, en s’'accompagnant de douleurs lombaires
et de constipation ; une nouvelle évacuation de parasites est encore
suivie d’une rémission d'assez longue durée. Puis les accidents
reviennent bientôt, encore plus graves et compliqués de vomisse-
ments et de troubles nerveux et digestifs; la sortie des parasites
s'accompagne habituellement de prurit et de brülure à l'anus.
Finalement, le malade expulse 48 Vers et guérit (obs. 17).
Rappelons enfin l'observation d’une fillette de 8 ans, qui offrait
un tableau symptomatique encore plus varié : excitation, tristesse,
douleurs à l’épigastre, malaise, respiration difficile, inappétence,
constipation. La sortie spontanée de quelques Vers détermine une
amélioration, mais les accidents se renouvellent, allant même
466 R. BLANCHARD
jusqu à la perte de connaissance. L'amélioration succède à la
rechute deux ou trois fois de suite, grâce à l’expulsion de parasites
qui, en passant à l’anus, provoquent du prurit et une sensation de
brülure. La petite malade finit par expulser une trentaine de Vers,
ce qui amène la guérison (obs. 18).
Les symptômes variés que nous venons de décrire nous donnent
le tableau fidèle des accidents de l’helminthiase; ils mettent hors
de doute la nuisance du Dipylidium caninum, dans des conditions
que nous allons déterminer. La doctrine microbienne a éclairé
d'une si vive lumière l’étiologie des maladies infectieuses qu'elle
a obscurci pour un temps la notion du rôle pathogène des Hel-
minthes. Cette notion a subi une éclipse d'assez longue durée; il
importe de réagir contre l’injuste oubli où elle est tombée et, par
une plus équitable appréciation des faits d'observation et d'expé-
rience, de restituer aux Vers intestinaux la signification pathogé-
nique dont, pendant les deux premiers tiers du xix® siècles, on les
a très justement tenus pour coupables.
Les accidents causés pour le Dipylidium n'ont rien de spécifique ;
ils sont identiques à ceux déterminés par certains autres Helmin-
thes de petite taille, tels que les Hymenolepis ; ils ont la plus grande
analogie et reconnaissent la même cause générale que ceux de l’ap-
pendicite et de la typhlo-colite vermineuses; ils résultent, en un
mot, d’excitations exercées sur les plexus nerveux de l'intestin,
d'où des accidents à la fois locaux et généraux, ces derniers étant
d'ordre réflexe. La démonstration que j'ai donnée jadis au sujet
des Hymenolepis et celle que j'ai exposée plus récemment à l'Aca-
démie de médecine, au sujet du rôle du Trichocéphale dans la pro-
duction de l'appendicite, me semblent assez positives pour qu'il
soit inutile de revenir ici sur ces notions désormais acquises.
Le parasite se fixe ordinairement à la surface de la muqueuse, à
la base des villosités; ses ventouses sont profondes au maximum,
entièrement remplies par une partie aspirée de la muqueuse; le
cou est court et renflé, comme pour donner une insertion solide
aux muscles dilatateurs des ventouses et faciliter ainsi leur action
aspiratrice. Dans de telles conditions, l’épithélium reste intact et le
Ver ne saurait provoquer aucune irritation des plexus nerveux.
Mais cet Helminthe, grâce à la ténuité de son extrémité anté-
rieure, est capable de s’enfoncer jusqu'au fond des glandes de Lie-
DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 467
berkühn, en leur faisant subir une dilatation notable : l'épi-
thélium reste encore intact, d'après les observations de Mingaz-
zini; mais, On conçoit qu'il n’en soit pas toujours ainsi et que les
nombreux crochets qui hérissent le rostre, en dilacérant quelques
cellules de revêtement du cul-de-sac glandulaire, puissent entrer
en contact avec les filets sympathiques : ainsi prennent naissance
des accidents nerveux dont le type varie suivant le point de l’in-
testin où se produit cette minuscule lésion.
Schiefferdecker a reconnu, chez des Chiens depuis longtemps
porteurs du Dipylidium caninum, une hypertrophie considérable
des villosités, qui atteignent une taille quatre à cinq fois plus con-
sidérable qu'à l'état normal, avec un riche réseau capillaire. La
muqueuse peut présenter en outre de véritables tunnels disposés
dans le sens longitudinal, ayant de 3 à 6 mm. de long sur 2 à
3 mm. de large, tunnels que le parasite traverse de part en part;
on peut même trouver jusqu'à deux ou trois Vers engagés dans le
même tunnel. Ces formations curieuses, dont j'ai vainement cher-
ché des exemples, n'intéressent que les couches superficielles de
la muqueuse : elles sont creusées à travers la couche glandulaire
et résultent, non d’une perforation exercée par les parasites, mais
plutôt d'un processus irritatif déterminant une prolifération su-
perficielle du tissu conjonctif, puis une fusion du tissu néoformé
par-dessus le corps des Helminthes.
Quoi qu'il en soit, l’action pathogène du parasite, bien qu'obs-
cure dans nombre de cas, se manifeste fréquemment par des
symptômes plus ou moins graves; ses relations avec la muqueuse
et les lésions reconnues sur celle-ci expliquent qu'il en soit ainsi.
Au surplus, les accidents morbides ne sont pas particuliers à l'es-
pèce humaine : les vétérinaires ont signalé chez le Chien des trou-
bles intestinaux plus ou moins graves ou, plus habituellement, des
troubles nerveux simulant l'épilepsie et la rage.
Le prurit et la sensation de brülure à l'anus (obs. 17, 18 et 55)
sont, d'autre part, l'indice d'une substance irritante, de nature
chimique, qui se trouve éliminée avec les parasites, ou plutôt éla-
borée et éliminée par eux. Qu'une part lui revienne dans la pro-
duction des phénomènes réflexes et spécialement dans celle des
troubles de la nutrition (arrêt de la croissance, inappétence, fai-
blesse, etc.), cela ne me semble pas contestable ; 1l sera nécessaire
468 R. BLANCHARD
de préciser par l'expérience ce point très intéressant, qui touche
directement à la question si controversée de la toxicité des Hel-
minthes.
Traitement. — On a vu le parasite sortir spontanément par
l'anus (obs. 4, 13 et 60) et même par le nez (obs. 12); mais on ne
peut compter sur cette évacuation spontanée, qui doit n'intéresser
d’ailleurs d'une partie du Ver, la tête restant dans l'intestin. La
présence de l'Helminthe une fois constatée, il est donc nécessaire
de procéder à la cure ténifuge. On a obtenu de bons résultats avec
l'extrait éthéré de Fougère mâle, mais ce médicament ne doit être
administré qu'avec prudence aux enfants, chez lesquels il provo-
que facilement de l’entérite (obs. 60). La pelletiérine est plus re-
commandable, ainsi que le kamala, ce dernier à la dose de 0 gr. 50
à 3 grammes, suivant l’âge du patient, associé ou non au calomel.
On pourra essayer aussi le thymol, administré en cachets, en te-
nant compte de ce que trois doses d’un gramme, à une heure d'in-
tervalle, sont suffisantes pour un adulte.
Prophylaxie. — La prophylaxie est des plus simples; elle con-
siste à débarrasser les Chiens et les Chats de leurs parasites intes-
tinaux ; à les délivrer aussi de leurs parasites externes et à tenirleur
pelage en bon état de propreté, au moyen de bains insecticides et
de savonnages. Au surplus, on doit éviter d'une façon générale les
privautés avec ces animaux domestiques, qui peuvent être l'ori-
gine de diverses maladies parasitaires.
« Cave canem », écrivaient les Romains à la porte de leurs habi-
tations. Cette formule lapidaire, déviée de son sens antique, ré-
sume pour nous un utile précepte d'hygiène.
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DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 469
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über Dipylidienlarven. Centralblatt für Bakteriol., XVI, p. 565, 1894.
God. DeBois, Tænia. Linnæi Ameænitates academicae. Holmiae, 1751;
cf. IL, p. 59. Holmiae, editio altera, 1762; cf. Il, p. 73et 88. — cf. R. BLaN-
cHARD, Traité de zoologie méd., 1, p. 481, 1888.
B. Freriks en C. W. Broers, Een Tænia cucumerina bij een kind. Week-
blad van het nederl. Tijdschrift voor geneeskunde, (2), II, p. 33, 1904.
Frus, 50 Tillälde af Bändelorme hos Mennesket. Nordiskt med. Arkiv,
XVI, n° 6, 1884 — Tænia cucumerina hos Born. Ugeskrift for Laeger, (5),
II, p. 777, 1896 (discussion; pas de nouveau cas).
P. GERvVAIS, Sur quelques entozoaires tænioides et hydatides. Mém.
Acad. des sc. et lettres de Montpellier, 1, p. 85, 1847; cf. p. 88.
B. Grassr, Beiträge zur Kenntniss des Entwicklungscyelus von fünf.
Parasiten des Hundes (Tænia cucumerina Gæze; Ascaris marginata Rud. ;
Spiroptera sanguinolenta Rud.; Filaria imanitis Leidy und Hæmatozoon
- Lewis). Centralblatt für Bakteriol., IV, p. 609, 1888.
A. HELLER, Darmschmarotzer. Ziemssen’s Handbuch der speciellen Patho-
logie und Therapie, Il, p. 597, 1876.
HERING, Versuche mit Fütterung von Tænia cucumerina an Hunden.
Württemberg. naturwiss. Jahreshefte, p. 356, 1873.
A. HorFMANN, Tænia cucumerina (s. elliptica) bei einem 4 Monate altem
Kinde. Jahrbuch für Kinderheilkunde, XXVI, p. 386, 1887.
O. Kôuz, Tænia cucumerina bei einem 6 Wochen alten Kinde. Münche-
ner med. woch., LI, p. 157, 1904.
H. KraBse, Recherches helminthologiques en Danemark et en Islande.
. Paris, Londres et Copenhague, in-4° de 68 p. avec 7 pl., 1886: cf. p. 18.
— Om Forekomsten af Bändelorme hos Mennesket i Danmark. Nordiskt
med. Arkiv, XII, n° 23, 1881. — 300 Tiliälde af Bändelorm hos Mennes-
470 R. BLANCHARD
ket, iagttagne i Danmark. ibidem, XIX, n° 12, 1887. — Forekomsten af
Bändelorme hos Mennesket i Danmark. Beretning om 100 nye Tilfälde.
Ibidem, XXVIII, n° 19, 1896. — Ueber das Vorkommen von Bandwürmern
beim Menschen. 1bidem, Afd. 2, n° 2, 1905.
F. KaüGer, Tænia cucumerina s. elliptica beim Menschen. Sanct-Peters-
burger med. Wochenschrift, p. 341, 1887.
Küsrer et Scamipr, cité par Leuckart, 1° édition, I, p. 756, 1863;
2° éd., I, p. 846, 1880.
R. LeuckarT, Die menschlichen Parasiten. Leipzig, 1863; cf. I, p. 756
— Die Parasiten des Menschen und die von Thnen herrührenden Krankhei-
ten. Leipzig, 2’ édition; cf. I, p. 845-847, 1880.
W. LonNEckEN, Tænia elliptica s. cucumerina hos et 7 Uger gammelt
Barn. Nordiskt med. Arkiv, XXXIV, p. 24, 1901.
M. Lüxe, Beiträge zur Helminthenfauna der Berberei. Sitzungsber. der
k. preuss. Akad. der Wiss., XII, p. 619, 1898.
N. Mecnixow, Ueber die Jugendzustände der Tænia cucumerina. Archiv
für Naturgeschichte, 1, p. 62, 1869.
P. MinGazzini, Sul modo col quale le Tenie aderiscono alla mucosa
intestinale. Bollettino dell’ Accad. Gioenia di sc. nat. in atania, LVI, 1898.
H. MüLrcer, Fälle von Tænia elliptica. orrespondenzblatt für Schweizer.
Arzte, XXIX, p. 274, 1891.
DE Nagras, Nouveau cas de Tænia canina L. chez l'Homme. Journal de
méd. de Bordeaux, p. 619, 1904. ;
G. Pozcak. Semaine méd., p. 84, 1907.
C. ParoNA, Elmintologia sarda. Contribuzione allostudio dei Vermi paras-
siti in animali di Sardegna. Annali del Museo civico di storia nat. di
Genova, (2), IV, p. 275-384, 1887; ci. p. 317, pl. VI, fig. 23-25.
St. von Rärz, Dipylidium Chyzeri n. sp. (ein neuer Bandwurm der
Katze). Természetrajzi Füzetek, XX, p. 259-266, pl. IV, 1897. — Ein neuer
Bandwurm der Katze. entralblatt für Bakteriol., XXI, p. 465-473, 1897. —
Parasitologiai jegyzetek. - XI. Két uj galandféreg. Veterinarius, XXII,
n° 49, octobre 190.
L. RoseNBErRG, Zehn Bandwürmer |[Tæniae cucumerinae) bei einem
14 Monate alten Kinde. Wiener klin. Woch., LIV, p. 427, 1904.
SALZMANN, Ueber das Vorkommen der Tænia cucumerina im Menschen.
Jahreshefte des Vereins für vaterländ. Naturkunde in Württemberg, XVII,
p. 102, 1861.
P. ScaIEFFERDECKER, Ueber eine eigenthümliche pathologische Verän-
derung der Darmschleimhaut des Hundes durch Tænia cucumerina. Vir-
chow’s Archiv, LXII, p. 475, 1875.
Scaocx-BoLLey, cité par Leuckart, 2° édition, I, p. 846, 1880.
SETTI, Dipylidium Gervaisi n. sp. e qualche considerazione sui limite
specifici nei Cestodi. Atti Soc. ligustica sc. nat. e geogr., VI, 1893.
A. SHipLey, Note on an abnormality in Dipylidium caninum (Linné)
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DIPYLIDIUM CANINUM DANS L'ESPÈCE HUMAINE 471
G. SONNENSCHEIN, Tænia cucumerina s. elliptica bei einem 6 Monate
alten Kind. Münchener med. Woch., p. 157, 1904.
P. Soxsino, Ricerche sugli Ematozoi del Cane e sul ciclo vitale della
Tænia cucumerina. Atti della Soc. toscana di sc. nat., 1888. — Notizie
elmintologiche. Soc. toscana di sc. nat., 13 gennaio 1889.
P. SYRENSEN, Om Tænia cucumerina hos Born. Ugeskrift for laeger, (5),
III, p. 705, 1896.
C. W. Srices, À case of infection with the double-pored Dog Tapeworm
(Dipylidium caninum) in an american child. American Medicine, V, p. 65,
1903.
A. Vizcor, Mémoire sur les Cystiques des Ténias. Annales des sc. nat.,
zool., (6), XV, art. n° 4, 1883; cf. p. 56.
Th. ZÂsLEIN, Ueber die geographische Verbreitung und Häufgkeit
der menschlichen Entozoen in der Schweiz. Gorrespondenz-Blatt für
Schweizer Aerzte, XI, p. 673, 1881; cf. p. 681.
Zscaokke, Ein neuer Fall von Dipylidium caninum beim Menschen.
Centralblatt für bakteriol., Originale, XXXIV, p. 42, 1903. — Dipylidium
caninum (L.) als Schmarotzer des Menschen. Ibidem, XXXVIIL, p. 534,
1905.
NOTE SUR DES
TABANIDES DE LA COTE OCCIDENTALE D'AFRIQUE
PAR
J. SURCOUF
Chef de travaux au Laboratoire colonial du Muséum.
(PLANCHE IX)
Le Dr Best, médecin des colonies anglaises, a fait parvenir aù
professeur R. Blanchard un certain nombre de Diptères prove-
nant des régions de la Guinée anglaise comprises entre 6° et 8°
de latitude nord et entre 3° et 5° de longitude est. Parmi ces Dip-
tères, la famille des Tabanides se trouvait représentée par huit
exemplaires appartenant à quatre espèces différentes :
10 Tabanus ruficrus Palisot de Beauvoir. — Un exemplaire fe-
melle (fig. 2). Espèce de grande taille, à vol rapide et dont l’aire de
dispersion connue actuellement comprend le Congo et la Gambie.
20 Tabanus tæniola Pal.-Beauv. — Troisexemplaires (fig. 1). Cette
espèce fait partie d'un groupe naturel très homogène, qui com-
prend : T. striatus Fabr., de la Chine, de l'Inde, de Sumatra et de
Java; T. indicus Fabr., des Indes; T. trivittatus Fabr., du Brésil et
de la République Argentine.
T. iæniola est un des Taons les plus répandus dans l'Afrique
tropicale. La collection du Laboratoire d'entomologie du Muséum
en comprend 35 exemplaires provenant des régions suivantes :
Sénégal, Soudan, Guinée francaise, Côte d'Ivoire, Congo, région du
Tchad, Khartoum, Abyssinie, Haut-Zambèze, lac Nyassa. Walker
avait décrit ce Taon de Gambie sous le nom de 7. dorsivitta, tombé
depuis en synonymie.
Il est à remarquer que T. tæniola a été de tous temps indiqué
comme s'attaquant aux troupeaux. Son congénère T. trivittatus
assaille de même les bêtes à cornes dans les plaines de la Répu-
blique Argentine. Une note du lieutenant de zouaves Chapin signale
que la piqüre du T. tæniola fait mourir les Chameaux dans le
Congo. Cet Insecte est donc intéressant à suivre de très près et il
serait à désirer que tous les explorateurs et chargés de mission
TABANIDES DE LA COTE OCCIDENTALE D'AFRIQUE 473
voulussent bien recueillir toutes les notes possibles sur les cas
d'infection qu ils constatent.
3° Tabanus Besti, nova species.
Un exemplaire femelle. L'espèce est dédiée au Dr Best, qui l’a
découverte et a bien voulu en faire part au Laboratoire de para-
sitologie de la Faculté de médecine de Paris.
D. — Noir. Tête : Yeux bronzés, glabres, sans bandes, à cor-
néules égales. Bande intra-oculaire étroite, brune, portant une
callosité d'un brun clair brillant, de la largeur de la bande intra-
oculaire à la base et se prolongeant progressivement en une ligne
saillante et étroite qui parcourt la bande en entier. Partie infé-
rieure de la tête jaune chamoiïs. Antennes noir brunâtre à la base
(les deux articles suivants manquent). Palpes noirs à pubescence
noire. Thorax d’un noir brunâtre avec une pubescence noire. .
Abdomen noir en entier. Pattes antérieures noires, tibias fortement
ciliés au bord externe, blancs dans leur moitié basilaire. Pattes
intermédiaires et postérieures noires à tibias brun rougeâtre foncé.
Ailes hyalines, enfumées, plus claires au bord interne. Balanciers
noirs.
Longueur du corps : 15 mm.
Un exemplaire femelle, se rapprochant du T. Besti, se trouve
dans la collection du Muséum et avait été recueilli par Delafosse
en 1895, sur la Côte d'Ivoire.
Le Tabanus Besti appartient au groupe qui comprend en Europe
T. micans et T. ater; en Afrique, T. alexandrinus, T. algirus et T. ni-
gritus.
4° Tabanus Blanchardi, nova species.
Trois exemplaires femelles (fig. 3-et 4). L'espèce est dédiée au
professeur R. Blanchard, à la bienveillance de qui je dois d'avoir
pu étudier ces Insectes.
®.— Brun. Téte noire, yeux arrondis. non déprimés, à cornéules
égales sans pubescence et sans bandes colorées. Bande intra-ocu-
laire étroite, de couleur cuir. Callosité inférieure d'un brun brillant,
longue et arrondie au sommet, prolongée par une ligne saillante
étroite, se dilatant très légèrement vers la partie médiane de la
bande intra-oculaire. Antennes brun rougeàätre sombre, à troisième
article muni d'une petite dent aiguë. Partie inférieure de la tête
jaune chamoïs. Palpes brunâtres à pubescence sombre. Thorax noir,
Archives de Parasilologre, XI, n° 3, 1907. 31
#74 J. SURCOUF
orné de quatre lignes parallèles de pubescence jaune doré, dont les
deux médianes se prolongent sur le scutellum qu'elles entourent.
Flancs et parties inférieures revêtus d’une courte pubescence gris
jaunâtre. Abdomen noirâtre en dessus, portant une bande jaune
rougeñtre médiane et orné de fascies rougeätres sur les deux
premiers segments. Côtés de l'abdomen étroitement bordés de
jaune. Ventre noir, chacun des segments marqué largement de
grisätre. Ailes transparentes, colorées en brun au bord costal, de
teinte plus claire à l’apex et au bord interne. Nervation normale.
Longueur 15 à 16 mm.
Cette nouvelle espèce appartient au groupe du T. gabonensis;
elle se distingue de celui-ci par la couleur de l'abdomen et du tho-.
rax, brun ciair chez T. gabonensis, et par sa moindre taille. Elle se
sépare également du T. secedens par l'absence de bandes abdomi-
nales latérales.
Tous lesexemplaires énumérés ou décrits dans cette note ont été
donnés par M. le Professeur R. Blanchard au Muséum d'histoire
naturelle.
EXPLICATION DE LA PLANCHE IX.
Fig. 1. — Tabanus tæniola ©. x 2,5.
Fig. 2. — Tabanus ruficrus ©. x 2,5.
Fig. 3 et 4. — Tabanus Blanchardi nova species ©. x 2,5
Archives de larasitoloqie , XI, 1907. DIX
£ Lartaud seulp
M.Trottet ad nat. del.et pirx
Tabanides de la côte occidentale d Afrique
Jmp.Ceny-Gros, Paris
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REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
M. BRAUN, The animal parasites of Man; a handbook for students and
medical Men. London, J. Bale, sons and Danielsson, in-8° de xix-453p.,
avec 290 fig. — Prix, cartonné : 1 guinée — 26 fr. 25.
Cette édition anglaise du livre bien connu du professeur Max BRAUN a
été faite sur la troisième édition allemande; elle a été complétée et mise
à jour par les professeurs SamBon et THEoBALD : C’est dire qu’elle est
absolument au courant des dernières acquisitions de la science et qu'elle
équivaut en réalité à une nouvelle édition.
La Parasitologie a réalisé de tels progrès, au cours de ces dernières
années, qu'un nouvel ouvrage, résultant des efforts combinés de trois sa-
vants aussi qualifiés, ne peut être accueilli qu'avec la plus grande faveur.
Celui-ci est recommandable entre tous, à cause de sa précision et du
choix heureux des figures dont il est parsemé. Pour la première fois
dans un traité de parasitologie, une large part est accordée aux Mous-
tiques, en raison de leur rôle capital comme transmetteurs de diverses
maladies parasitaires. Un tel livre doit être le vade-mecum de tout méde-
cin, de tout étudiant; il rendra de grands services aussi bien dans les
régions intertropicales que dans lés pays tempérés.
C. MExse, Handbuch der Tropenkrankheiten. Leipzig, J.-A. Barth, IT,
in-8° de xu-472 p. avec 18 pl. hors texte et 126 fig. dans le texte, 1905. —
Prix, broché : 16 mk; cartonné : 17 mk 50.
Nous avons déjà rendu compte du premier volume de cet important
ouvrage (IX, 632). Voici maintenant le deuxième volume : il ne le cède
en rien au précédent.
Le Dr A. VAN DER SCHEER donne d’abord une très bonne étude des aphtes
tropicaux (p. 1-43) : la maladie sévit chez les blancs et les mulâtres;
l'étiologie en est inconnue. EysELL fait un bon résumé des notions zoolo-
giques concernant les Moustiques (p. 44-94). Le D' C.-L. VAN DER BuRG
(récemment décédé) décrit la fièvre dengue (p. 95-107); la spécificité de
l’'Hæmatozoon denguii reste incertaine. La fièvre jaune est étudiée par
J. CaRRoOLL (p. 108-139), le béribéri par BAzz et MrurA (p. 140-174); cette
dernière affection, dont l'étiologie reste obscure, est considérée comme
une maladie infectieuse. Puis viennent la lèpre par G. Sricker (p. 175-218),
la dysenterie bacillaire par R. Rue (p. 219-292), le choléra par KRAUSE et
Rumer (p. 293-346), la fièvre ondulante par BasseTT-Suirx (p. 347-364), le
typhus des tropiques par L. MARTIN, de Diessen (p. 365-390), la peste par
Pocx (p. 391-433), enfin les exanthèmes aigus (verruga, variole et ses va-
riétés (1), rougeole et scarlatine) par A. PLEHN (p. 434-456).
Un tel ouvrage ne s’analyse pas; il ne vaut que par la qualité de ses
collaborateurs : or, ceux-ci sont choisis parmi les plus compétents et les
(1) Notamment variole des bords du Sanaga, fleuve du Cameroun.
476 REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
mieux instruits des questions spéciales qu'ils avaient à traiter. L'impres-
sion très favorable qui se dégageait de la lecture du premier volume se
confirme entièrement après celle du second. L'ouvrage dirigé par le
D' MExse est véritablement une œuvre capitale, qui fixe avec justesse l’état
actuel de la science et qui ne manquera pas de rendre les plus grands
services aux médecins de colonisation. Il contribuera ainsi, par une voie
des plus directes, au progrès et au succès des Européens dans les pays
tropicaux.
W. Hallock Park and Anna W. Wiccrams, Pathogenic Microorganisms
including Bacteria and Protozoa, 'a practical manual for students, physi-
cians and health officers. New-York and Philadelphia, Lea brothers and C”’,
2° édition, in-8° de vin et 17-556 p., 1905.
Excellent ouvrage, d’une exécution typographique très élégante. Il
débute par une longue étude de la biologie des Bactéries (p. 17-184),
y compris l’agglutination, l’immunité, la phagocytose, etc. Puis vient
l'étude systématique des principales Bactéries pathogènes pour l'Homme
(p. 185-468) : diphtérie, tétanos, fièvre typhoïde, morve, choléra, peste,
etc. L'histoire de chaque espèce est exposée dans tous ses détails et à tous
les points de vue spéciaux que l’on peut envisager, mais en s’en tenant
exclusivement aux méthodes delaboratoire. Un dernier chapitre (p. 469-
538) est consacré aux Protozoaires parasites. Il est moins complet que
les précédents, mais peut encore être consulté utilement.
Pour la partie bactériologique, ce livre est beaucoup plus complet et beau-
coup plus au courant des multiples faces de la science que les ouvrages
similaires publiés en Europe, spécialement en France. Il est tout à fait
recommandable.
E. JEANSELME, agrégé à la Faculté de Médecine, Le Béribéri. Paris, Mas-
son et C*, un vol. petit in-8° de l'Encyclopédie des Aide-Mémoire. — Prix :
broché, 2 fr. 50 ; cartonné toile, 3 francs.
Le béribéri est une polynévrite infectieuse ou toxique, grave et souvent
mortelle, qui règne à l'état endémo-épidémique dans plusieurs régions
chaudes et même tempérées du globe et fait d'innombrables victimes
parmi les races de couleur. Nous ne possédions jusqu'ici, en France,
aucune monographie d'ensemble sur ce sujet. Le D' JEANSELME vient de
combler cette lacune : pour écrire cette monographie, il a utilisé les
nombreux matériaux qu'il a recueillis lui-mème en Indo-Chine, en Bir-
manie et à Java, sans négliger toutefois {les ouvrages des médecins hoi-
landais, allemands et japonais qui ont poussé si loin l'étude de cette
maladie. Ce volume rendra de grands services aux médecins de la marine
et des colonies, aux médecins de district et de plantation, aux médecins
sanitaires maritimes et, en général, à tous les colons ou fonctionnaires
qui emploient des coolies dans les pays décimés par le béribéri.
REVUE BIBLIOGRAPHIQUE 477
A. LavEerAN, Trailé du paludisme. Paris, Masson et C'°, 2*édition, grand
in-8° de vrr-622 p. avec une planche en couleurs et 58 fig. dans le texte.
Cet important ouvrage constitue une monographie complète du palu-
disme. L'auteur étudie depuis longtemps cette maladie; nous sommes
convaincu que la partie clinique de sonlivre, dont ilne saurait être question
ici, est des plus instructives et donne ur bon résumé de l’état actuel de
la science.Les autres chapitres rentrent plus directement dans le cadre
de nos études; ils doivent donc fixer notre attention.
L'ouvrage débute par l'exposé des anciennes théories sur l’origine des
fièvres paludéennes. L'histoire des Palmellacées et du prétendu Bacillus
malariae s'y trouve tout au long, mais on est surpris qu'il ne soit
fait aucune allusion aux observations de KLENCKE qui, dès 1843, décrivit
et figura d’une façon très nette certaines formes de l’Hématozoaire. Quand
M. LAvEeRAN retrouva le parasite, en 1880, la question avait donc été déjà
quelque peu déflorée.
En 1885, MaArcHiAFAvA et CELLI ont créé pour le parasite du paludisme le
génre Plasmodium, auquel Grassret FELETTI ont vainement tenté, en 1890,
de substituer le genre Hæmäamæba. Eu égard à la loi de priorité, ce dernier
nom ne pouvait être accepté; la plupart des auteurs sont d'accord sur ce
point. Cependant, M. LaAvERAN continue à méconnaitre le genre Plasmo-
dium, de même qu'il se refuse à admettre les trois espèces fondamentales
(PL. vivaxæ, PI. malariae et PI. falciparum), qui se distinguent pourtant
les unes des autres, non seulement par leur structure, leur évolution, leur
action sur l'hématie, la forme de leurs gamètes, mais encore en ce qu’elles
déterminent chacune un type morbide particulier. Il en résulte, dans les
descriptions de l’auteur, une confusion vraiment inattendueet singulière-
ment génante; son langage n’est plus celui de l'heure présente.
Nous devons en dire autant du chapitre intitulé : Notions élémentaires sur
les Culicides. Considérant que les Anophelinae sont actuellement les seuls
Culicides auxquels on soit en droit d'attribuer le rôle de propagateurs du
paludisme, l’auteur s’en tient à l'étude de ce seul groupe, et cette restric-
tion est tout à fait raisonnable. Mais on est étonné que les progrès
très heureusement accomplis dans la classification des Anophelinae,
depuis cinq années déjà, ne soient pas encore acceptés de M. LAVERAN, qui
continue à ne mentionner que le seul et unique genre Anopheles. Sa
nomenclature et son langage se trouvent, de ce fait, en complet désaccord
avec ceux de tous les entomologistes actuels.
A la page 179, l’auteur donne la liste des « principaux ouvrages à
consulter ». La première édition du livre de G1LEs (1900) se trouve indi-
quée, mais non la seconde (1902). Comme ouvrage français, on ne relève
qu'un seul travail, d’ailleurs très important, de NEVEU-LEMAIRE, paru
dans les Mémoires de la Société Zoologique de France (1902). Aucune men-
tion du livre, très important aussi, du Professeur R. BLANCHARD : Les
Moustiques, histoire naturelle et médicale (Paris, 1905, un vol. grand in-8°
de xm1-673 pages). Un tel oubli est particulièrement regrettable, car
478 REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
l’auteur aurait pu trouver de très utiles indications dans cet ouvrage,
qui est incontestablement, à l'heure actuelle, le plus complet que nous
possédions sur le paludisme envisagé au point de vue scientifique. Il y
aurait trouvé, notamment, une théorie de la fièvre, qu'il eùt été avanta-
geux de substituer à celle vraiment bien archaïque de l'irritation des
centres nerveux par les Hématozoaires. Les longs commentaires dont est
agrémentée cette doctrine surannée ne font queen mettre en relief
toute l'insuffisance.
Les longs chapitres consacrés aux complications du paludisme, aux
maladies intercurrentes, à l'anatomie pathologique, au diagnostic, au
traitement et à la prophylaxie sont bien documentés et d’une lecture très
utile. La croyance à l’unité spécifique des Hématozoaires, dont l'auteur est
à peu près le seul défenseur, l’entraine à méconnaitre de précieux carac-
tères distinctifs, qui sont pourtant très utiles dans le diagnostic : il
n'attribue aucune importance eaux granulations de SCHÜFFNER et de
MAURER; on sait pourtant que ces deux sortes de granulations sont abso-
lument distinctes, les premières caractérisant la tierce bénigne et les
secondes la tierce maligne.
Nos critiques montrent que cet ouvrage n’est pas au courant de l’état
actuel de la science ; c’est assurément très regrettable, mais le mal n'in-
téresse qu'une minorité. La masse des cliniciens, pour lesquels les ques-
tions d'ordre purement scientifique sont d'un moindre intérêt,ne seront
pas trop gênés par ces imperfections ; ils auront dans ce livre, non un
guide journalier, mais un ouvrage de bibliothèque, auquel ils pourront
se reporter; ils le consulteraient avec plus de commodité, s’il était en-
richi d’une table analytique des matières. — M. B.
P. Kisrner, Die tierpathogenen Protozoen. Berlin, R. Schôtz, in-8° de
vir-161 p. avec 42 fig., 1906. — Prix : broché, 5 mk; cartonné, 6 mk.
L'auteur est vétérinaire à Berlin. Cet ouvrage constitue une revue géné
rale des Protozoaires pathogènes. D'allure élémentaire, il donne les
caractères zoologiques essentiels de ces animaux, avec une brève indica-
_tion des lésions ou accidents qu'ils déterminent. Écrit en vue des vétéri-
naires, il rendra à ceux ci de véritables services; les médecins en tire-
ront un moindre parti, car les Protozoaires parasites de l’Homme y sont
ou passés sous silence ou très brièvement indiqués. La nomenclature
n'est pas sans défauts. Les figures sont généralement bonnes; quelques-
unes, comme la figure 7, devront être remplacées à la seconde édition.
R. Doerr, Das Dysenterieloxin. Iena, Fischer, in-8° de 76 p., 1 pl., 1907.
— Prix, broché : 2 mk. 50.
L'auteur consacre quatre pages à l'historique de la question, rappelle la
distinction entre les dysenteries ambienne et bacillaire : cette dernière
présentant deux types au point de vue bactériologique : Shiga-Kruse et
LA 1
REVUE BIBLIOGRAPHIQUE 479
Flexner. La question de priorité, soulevée par CHANTEMESSE et WipaL
contre SxiGA et KRUSE, est tranchée en faveur de ceux-ci.
Passant ensuite aux recherches personnelles, l'auteur étudie la toxine
dysentérique : son extraction, sa nature suivant les différents milieux de
culture, la toxicité de différentes races de Bacilles (de provenances di-
verses), l'extraction de la toxine sèche, la résistance de ces toxines à
divers agents, leur effet sur l'intestin grêle du Lapin, sur difiérents orga-
nismes, les altérationsanatomo-pathologiques. Dorrr décrit aussi, avec une
planche à l'appui, les lésions macroscopiques de la dysenterie expérimen-
tale, répète ces recherches sur différents animaux (Chien, Singe, Chat,
Cobaye) et termine par une étude sur la manière dont se répartit et se Lo-
calise la toxine dans l'organisme.
Toutes ces expériences sont rapportées en détail et la technique en est
minutieusement décrite. Nous ne pouvons, faute de place, que donner les
conclusions de cet intéressant mémoire : Les Bacilles de la dysenterie du
type Shiga-Kruse secrètent une toxine, à l'exclusion de ceux du type
Flexner. On peut extraire cette toxine par filtration stérile d'une jeune
culture sur bouillon en quantité appréciable. Une autre méthode consiste
à l’extraire d’une culture sur gélose au moyen de sérum physiologique,
puis à filtrer; cette solution est très toxique; l’autolyse n’est pas néces-
saire. L'intensité de la production de toxine dépend de la race de Bacilles
employés et de l’alcalinité de la solution (l’'optimum est de 3 gr. de soude
cristallisée par litre). Le pouvoir toxique croit avec l’alcalinité de la so-
lution. Le pouvoir fermentatif sert d'indicateur pour son entretien.
Les Bacilles en milieu albumineux ou en milieu anaérobie n'émettent
pas de poison spécifique. La toxine résiste à la chaleur, une heure à 70°, est
détruite à 80° et au-dessus, ne se combine pas à la trypsine, à la bile ou
à l’entérokinase. La toxicité des filtrats de bouillon de culture se détruit par
les acides, est régénérée par les alcalis ; il y a donc une simple combinaison,
pas de destruction. La toxine dysentérique agit chez les Lapins, Chats,
Chiens, Singes, Cobayes, Souris blanches; la Poule et le Pigeon sont
réfractaires. Par injections intra-veineuses, péritonéales et sous-cuta-
nées, on produit une inflammation avec nécrose et hémorrhagie de la
muqueuse intestinale; à doses plus fortes, on observe des lésions des
centres nerveux. L'animal de choix est le Lapin, qui réagit dans un tiers
des cas avec les lésions typiques; l'intestin grêle est intact comme chez
l'Homme. La toxine n'a pas d'affinités pour un organe quelconque ;
il semble cependant que l'extrait frais d’intestin grêle de Lapin la déplace
de ses solutions. Le poison parait être absorbé surtout dans l'intestin,
un peu dans le rein, pas dans le foie; la bile n'est pas toxique. La produc-
tion de la typhlite dysentérique dépend de la quantité de bile se déver-
sant dans l'intestin.
Un index bibliographique de 70 numéros se trouve à la fin de l'ouvrage.
CH. Joyeux.
480 REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
A. Laver, Professeur d'hygiène à la Faculté de Médecine de Bordeaux,
Hygiène et Colonisation. La santé des Européens entre les tropiques. —
PREMIÈRE PARTIE : Le climat, le sol, les agents vivants d'agression mor-
bide. Paris, F. Alcan, un vol. grand in-8 de 364 pages avec 162 figures
dans le texte. — Prix, broché : 7 francs.
Cet euvrage comprend trois parties et sera publié en trois volumes.
Chacune de ces parties, bien que reliée aux deux autres par l'exposé des
faits d'observation acquis jusqu'à ce jour et des faits d'expérimentation
qui tendent à donner à la plupart des maladies des pays chauds une pa-
thologie naturaliste nouvelle, forme à elle seule un tout complet par la
nature même du sujet qui en constitue le fond.
L'auteur, dans le premier volume que nous annonçons aujourd'hui,
après avoir fixé les caractères climatériques des régions tropicales et en
avoir spécifié les influences modificatrices sur l'organisme humain passe
successivement en revue les divers mondes d'agents animés d'agression
morbide : Bactéries, Moisissures, Protozoaires et Métazoaires; leur en-
semble constitue pour ainsi dire un milieu vivant superposé au milieu
physique, avec lequel doit compter l'organisme rendu plus ou moins
susceptible par les influences directes du climat.
La deuxième partie traitera du rôle que l'organisme humain est appelé
à jouer par lui-même dans la création et la généralisation de ses propres
maladies. L'auteur montrera qu'il n'y a pas, à vrai dire, de maladies
essentiellement propres à une race, mais seulement des modifications
dans leur expression symptomatologique. Enfin, dans la troisième partie
seront comprises toutes les questions d'hygiène appliquée afférentes à
l'alimentation, à l'habitation, au travail des Européens et au traitement
des maladies dans les pays chauds.
NOTES ET INFORMATIONS
LA CHAIRE D'HISTOIRE NATURELLE MÉDICALE
DE LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE PARIS; SON HISTOIRE
Origines. — La Faculté de médecine de Paris ne comptait primitivement
que deux chaïires, l'une traitant des «(choses naturelles et non natu-
relles », l’autre traitant des (choses contre nature ». Deux professeurs
ou lecteurs éventuellement aidés ou suppléés par des bacheliers émérites, :
suffisaient à cet enseignement : les deux premiers que la Faculté ait
nommés directement furent Jean GuicHarp et Jean pe RuEL, qui furent
investis en 1505. Le 19 octobre 1634, la Faculté décréta la création d'une
troisième chaire, celle de chirurgie, qui fut attribuée à Antoine CHAR-
PENTIER. ;
La pathologie et la matière médicale, son corollaire naturel, relevaient
de la chaire traitant des (choses contre nature ». Dans le but de favori-
ser l'études des simples, la Faculté avait annexé à l'Ecole, dès 1506, un
petit jardin botanique, où l’on pénétrait par la rue des Rats (1) et pour
l'entretien duquel les bacheliers payaient chacun dix-huit sous par an.
Il s'y donnait un enseignement élémentaire, qui devint, par la suite, as-
sez important pour que les étudiants eux-mêmes demandassent, dès 1626,
la nomination d'un professeur spécial. C'est seulement le 8 juin 1646,
sous le décanat de Jacques PERREAU, que la Faculté créa cette quatrième
chaire, qui fut confiée à François BLONDEL.
Le professeur de botanique se borna longtemps à faire connaitre les
plantes et leurs propriétés. Quand la Faculté révisa ses statuts, en 1696,
il fut chargé en outre de parler des animaux, des minéraux et, en un
mot, des remèdes de toute espèce que fournit la nature pour la guérison
des maladies.
Le traitement était d'abord de 390 livres, savoir : 90 livres payées par
la Faculté et 300 livres provenant du Trésor royal et prélevées sur la
ferme des Postes et Messageries. À partir du 28 août 1651, l'Université
versa annuellement à la Faculté de médecine une somme de 800 livres
pour ses quatre professeurs, ce qui porta finalement le traitement du
professeur de botanique, comme celui de ses trois collègues, à une
somme de 590 livres par an (2).
Période révolutionnaire. — Par un décret en date du 18 août 1792,
l'Assemblée Législative supprima toutes les corporations enseignantes : la
Faculté de médecine fut emportée par la tourmente révolutionnaire et
(1) Actuellement rue de l'Hôtel-Colbert.
(2) A. CorcEu L'ancienne Faculté de médecine de Paris. Paris, in-8° de 1v-
287 p., 1877 ; cf. p. 124, 136, 137.
482 NOTES ET INFORMATIONS
avec elle la chaire de botanique. Toutefois l’enseignement supérieur, et
spécialement l’enseignement médical, allait être bientôt réorganisé.
L'École de santé; la Faculté nouvelle. — Le 7 frimaire an III (27 no-
vembre 1794), Fourcroy présente à la Convention nationale, au nom des
Comités de salut public et d'instruction publique, un rapport du plus
haut intérêt tendant à la création de trois Ecoles de santé, à Paris, à
Montpellier et à Strasbourg, la première avec douze professeurs, [la se-
conde avec huit, la troisième avec six, chaque professeur étant doublé
d’un professeur adjoint. Le 14 frimaire an III (4 décembre 1794), la Con-
vention promulgue un décret conforme à ce projet.
Aux termes de ce décret, il est créé à Paris une Ecole de santé; cette
Ecole « sera placée dans le local de la ci-devant Académie de chirur-
gie (1), auquel on réunira le ci-devant couvent des Cordeliers (2) ». Les
nouveaux professeurs furent nommés ce même jour: la chaire d'Histoire
naturelle médicale (la sixièmesur la liste) eut PEYRILHE Comme professeur
titulaire et L. C. M. RicHaRD comme professseur adjoint.
La chaire d'histoire naturelle médicale de 1823 à 1895. — En fait, la
chaire d'histoire naturelle médicale fut subdivisée dès sa fondation en une
chaire de matière médicale, attribuée à PEYRILHE, et une chaire de bota-
nique, donnée à RICHARD.
PevyriLue mourut en ventôse an XII (1804); un arrêté du 23 germinal
an XII lui donna pour successeur Antoine-Laurent DE JUSSIEU, qui prit
sa retraite en 1822. La chaire de matière médicale fut alors réunie à celle
de thérapeutique, sur la tête d'ALIBERT.
Louis-Claude-Marie RicHARD n'était ni médecin ni pharmacien. @ Fils
d'un jardinier du pare de Versailles, il avait beaucoup voyagé, à la
recherche de plantes inconnues dans nos pays. Il avait fait une riche pro-
vision d'espèces et, après une douzaine d'années d'absence, il revint à
Paris en 1789. Nommé professeur de botanique en 1795, il suivit scrupu-
leusement le programme tracé par Fourcroy, organisa le jardin botanique
installé dans le jardin du couvent des Cordeliers (3). Il faisait sa leçon
théorique dans l’amphithéâtre de l'Ecole de santé, et ses leçons pratiques
dans le jardin botanique, organisé selon la classification de LINNÉ. RICHARD
a peu écrit, et il est mort le 7 juin 1821 ».
La Faculté (4) « présenta ALIBERT qui fut nommé Le 9 août 1821. ALIBERT
ne convenait guère à cette chaire, dans laquelle il ne parut que nomina-
(1) Il en reste actuellement la colonnade, la cour carrée et le grand amphi-
théatre.
2) Il en reste actuellement le bâtiment dans lequel est installé le Musée Du-
puytren.
(3) Ce jardin a disparu depuis longtemps, Son emplacement est occupé actuel-
lement par cette partie de l’Ecole pratique qui confine aux rues Racine et Mon-
sieur-le-Prince.
(4) L'Ecole de santé fut transformée en Faculté de médecine par le décret im-
périal du 17 mars 1808; elle devient un corps universitaire à partir du 1°" jan-
vier 1809. Son corps professoral ne fut pas modifié,
NOTES ET INFORMATIONS 483
tivement, car l'année suivante la Faculté fut dissoute », par l'ordonnance
royale du 21 novembre 1822.
La Faculté fut réorganisée bientôt après, par l'ordonnance du 2 février
1823, qui créait en même temps le corps des agrégés, en remplacement
des professeurs adjoints. Comme ila été dit plus haut, la matière médicale
était réunie à la thérapeutique et la chaire ainsi constituée était donnée
à ALIBERT. La chaire de botanique devenait done vacante; elle prenait le
nom de chaire d'histoire naturelle médicale et était attribuée à CLARION.
(€ CLARION avait été pharmacien de l'Empereur en 1805 et directeur de
la pharmacie du château de Saint-Cloud. En 1819, il avait été nommé
professeur adjoint de botanique à l'École de pharmacie. Ses opinions
avaient changé avec la politique. Excellent homme au fond, mais profes-
seur froid et monotone, CLARION occupa sa chaire jusqu’en 1830... L’or-
donnance royale du 5 octobre 1830 le destitua avec huit de ses collègues,
et sa chaire fut mise au concours, qui venait d'être rétabli.
«L'ouverture du concours fut fixée au 2 avril 1831, et trois candidats
se présentèrent, Achille RicHArp, Foy et FouREAU DE BEAUREGARD. » Les
deux derniers retirèrent bientôt leur candidature et Richard concourut
seul. « À la neuvième séance, le 11 avril, il obtint 12 voix sur 12 votants,
et un décret du 22 avril 1831 nomma Achille RicHarp professeur d'his-
toirenaturelle médicale. Il occupa sa chaire jusqu’à sa mort, le5octobre1852.
Les titres antérieurs de RicHArp consistaient dans la publication de
plusieurs mémoires présentés à l'Institut sur la botanique.entre autres
son important mémoire sur le Rubiacées, en un cours public de bota-
nique, en une suppléance de Desfontaines dans la chaire de botanique
de la Faculté des sciences. Il avait été nommé aide-démonstrateur de
botanique à la Faculté en 1817, et il était aide-naturaliste auMuséum.
« Il avait publié : Nouveaux éléments ce botanique appliquée à la méde-
cine (1819). Dans une nouvelle édition, il y ajouta la physiologie végé-
tale; en 1823 parut son Traité de botanique médicale, en deux volumes.
Les Nouveaux éléments de botanique médicale furent pendant longtemps
le livre classique des étudiants.
«€ RicHARD était un professeur excellent, méthodique, à la parole facile,
s'enthousiasmant quelquefois, surtout quand il parlait de la taxonomie,
bienveillant, aux manières distinguées et aimé des élèves.
« Plusieurs candidats se présentèrent pour succéder à RicHarp, entre
autres Charles MARTINS, agrégé de la Faculté de Paris (1), qui avait déjà
suppléé plusieurs fois Ricarp et qui était très connu par ses Etapes d’un
naturaliste, du Spitzberg au Sahara. Mais un décret du 30 avril 1853,
signé ForTouLz, nomma comme professeur MoquiN-TANDoN, qui était pro-
fesseur à la Faculté des sciences de Toulouse et au Jardin des plantes de
cette ville, et, par compensation, Charles MarTINs fut nommé professeur
d'histoire naturelle à la Faculté de médecine de Montpellier.
(1) Nommé au concours de 1839.
48% NOTES ET INFORMATIONS
« MoquiNn-Tanpox était connu par sa Monographie des Hirudinées (1826),
par le Dédoublement des organes végélaux (1826) qui étaient ses thèses de
doctorat ès-sciences, par ses Eléments de tératologie végétale (1841), par
la Monographie des Chénopodées (1840). Depuis son entrée à la Faculté de
Paris, il avait publie l'Hstoire naturelle des Mollusques terrestres et fluvia-
tiles de France (1855), des Eléments de Zoologie médicale, de Botanique mé-
dicale, etc.
«Moquin-TanDoN occupa sa chaire avec distinction. C'était un homme
d'un caractère droit, ennemi des privilèges d'aucune sorte, ennemi du
favorilisme, méprisant l’adulation, ne demandant rien qu'au travail ; esprit
séduisant, physionomie ouverte, d'une bonhomie qui n'était pas sans
malice, tel était MoquiN-Tanpox. Ses leçons, bien préparées, étaient faites
avec une verve méridionale, et sa voix toute musicale se prêtait à l’expres-
sion de sa pensée. Il y avait en lui du savant, de l'artiste, du poète et de
l'écrivain (1).
«Deux candidats se présentèrent pour la chaire de MoquiN-TANDoN :
BaizLon (2) et DE SEYNES (3). Présenté en première ligne, BaïzLon fut
nommé le 22 novembre 1863. Il avait été reçu le premier au concours de
l’internat en 1853, avait obtenu la médaille de l'internat, le grand prix de
l'Ecole pratique, avait été nommé le premier au concours d'agrégation en
1857, était docteur ès sciences depuis 1858, avait fait un cours de bota-
nique à l'Ecole pratique en 1862, et avait suppléé le professeur Moquix-
Tanxpon en 1863. Il avait fait ses preuves dans l'enseignement et avait
déjà publié, outre ses deux thèses sur les Aurantiacées et sur les Euphor-
biacées, des Recherches organographiques sur la fleur femelle des Conifères
(1860), sur l'Organisation, le développement et l'anatomie des Caprifoliacées
(1861). Depuis sa nomination, BAILLON a encore publié Adansonia, recueil
périodique d'observations botaniques (1860-1873): Histoire des plantes
(1867-1891); Dictionnaire de botanique (1876-1891); Traité de botanique
médicale phanérogamique (1883); Le Jardin botaniquede la Faculté de
Médecine de Paris (1884); Iconographie de la flore française (1886) ; Traité
de Botanique médicale cryptogamique (1889); les Herborisations pari-
siennes, etc. »
Le Jardin botanique. — Nous avons vu que, lors de la création de l'É-
cole de santé, on décida d'organiser un jardin botanique dans l’enclos du
couvent des Cordeliers. « Le prolongement de la rue Racine, en 1834, prit
une partie de ce jardin. Une ordonnance royale du 4 juillet 183% mit la
partie est du jardin du Luxembourg à la disposition de la Faculté de
médecine, pour y transporter son Jardin botanique.
« Mais en 1869, le Jardin du Luxembourg fut mutilé par le percement
(1) Comme poète, il a écril des poésies en langue provençale; comme écri-
vain, il à publié chez Hachette, sous le pseudonyme de FREDoL, un intéressant
ouvrage de vulgarisation scientifique, Le monde de la mer.
(2) Henri Ernest BAILLON, né à Calais le 30 novembre 1827.
(3) Agrégé en 1863,
NOTES ET INFORMATIONS 485
de rues nouvelles, et le Jardin botanique de la Faculté fut supprimé et
reporté rue Cuvier, n° 12, en face du Muséum. Le professeur BAïLLON en
a été l'organisateur et il y a réuni plus de 2000 espèces appartenant à 300
familles. Il a successivement introduit dans les serres et dans l'Ecole de
pleine terre un grand nombre de plantes utiles; le jardin est trop petit
pour contenir autre chose que les végétaux relatifs à la thérapeutique et
les espèces vénéneuses et alimentaires. Elles sont classées suivant une
méthode nouvelle qui respecte les affinités multiples. Depuis sa nomina-
tion, BAILLON dirigeait, tous les dimanches, dans les environs de Paris,
des herborisations qui étaient très suivies.
« Il est mort le 18 juillet 1895, » dans ce Jardin Botanique qu'il avait
planté et cultivé avec tant de sollicitude et où ils’était réservé un pavillon
d'habitation. Le jardin et l’enseignement de la botanique médicale ne
devaient pas lui survivre (1).
Réorganisation des études médicales; le P.C.N. — Le professeur BAILLON
est mort au moment même où allait entrer en vigueur le nouveau régime
des études médicales. Jusqu'alors, l’histoire naturelle médicale avait été
enseignée aux élèves de première année; elle figurait désormais au pro-
gramme des troisième et quatrième années. Le cours d'histoire naturelle
devant être, en fait, suspendu pendant deux ans, l'administration profita
de la circonstance pour laisser la chaire vacante pendant deux
années.
Comme je viens de le dire, un nouveau régime d'études était en vigueur
depuis deux ans. On avait créé près des Facultés des sciencesunenseigne-
ment nouveau, préparatoire à la médecine et consistant en une année
d’études portant sur les sciences Physiques, Chimiques et Naturelles
connu pour cette raison sous la dénomination quelque peu cabalistique
de P.C.N. Cet enseignement avait la prétention, qu'il n’a guère réalisée, de
nous fournir des élèves doués d’une solide éducation scientifique, capables,
par conséquent, de suivre avec profit les cours très techniques qu'il allait
être désormais possible de leur faire. Une telle innovation, excellente en
principe, entrainait en effet une refonte complète de l’enseignement des
sciences naturelles dans les Facultés de médecine. La botanique descrip-
tive, qui jusqu'alors avait fait le fond de cet enseignement, figurait au
programme du P.C.N.; elle méritait de figurer encore à celui des Facultés
mixtes de médecine et de pharmacie, à cause des étudiants de cette der-
uière spécialité, mais elle n'avait plus guère d intérêt pour les Facultés
strictement médicales, comme celle de Paris. En revanche, le rôle para-
sitaire des animaux et des végétaux inférieurs devenait de plus en plus
manifeste et sollicitait très vivement l'attention.
(4) Les longues citations qui précèdent sont tirées de l’ouvrage consacré par
CorLiEu à l’histoire de la Faculté de médecine de Paris, pendant le premier siècle
de son existence (&).
(a) A. Corrieu, Centenaire de la Faculté de Médecine de Paris (1794-1894).
Paris, in-4° de v-607 p. avec un album, 1896; cf. p. 286-291.
486 NOTES ET INFORMATIONS
Déjà pendant les années 1883-1892, en qualité d'agrégé, j'avais orienté
exclusivement vers la parasitologie la zoologie médicale, que j'avais mis-
sion d'enseigner. Cette innovation avait été accueillie avec une faveur
qu'il ne m'appartient pas d'apprécier ; j'avais la conviction que là devait
être désormais la voie à suivre et qu'il était nécessaire de rénover de la
même façon l'enseignement de la botanique médicale; en d’autres termes,
qu'il fallait instaurer, aux lieu et place de l’ancienne histoire naturelle
médicale, purement descriptive, un enseignement de la Parasitologie
animale et végétale. Dans ma pensée, cet enseignement nouveau, bien
loin d'être « accessoire », comme on qualifiait dédaigneusement celui
dont il allait prendre la place, ne tarderait pas à devenir l'un des plus
vivants, des plus actifs, des plus utiles de la Faculté. Bien loin de s’at-
tarder dans des descriptions sans utilité pratique, il allait attaquer de
front les questions les plus obscures de l'hygiène et de la pathologie,
apportant au diagnostic la précision qui lui fait trop souvent défaut,
éclairant l’étiologie morbide et la prophylaxie, expliquant la symptoma-
tologie et l'anatomie pathologique.
J’exposai ce programme au Directeur de l’enseignement supérieur, puis
aux professeurs de la Faculté de médecine. Tous l’approuvèrent et en
reconnurent l'importance, puisque le Conseil de la Faculté me présenta
à l'unanimité pour occuper la chaire vacante depuis deux ans. Je fus
nommé professeur, le 25 juillet 1897.
Malgré le changement de direction que j'étais résolu à lui imprimer,
avec l'approbation de la Faculté et de l'administration supérieure, ma chaire
continuait à porter officiellement son titre ancien d'histoire naturelle
médicale. Il eut été plus logique d'y substituer le titre de parasitologie,
mais il me sembla que le temps devait accomplir son œuvre et qu'il n’y
avait aucune urgence à cette modification. Du moins, les travaux pra-
tiques recevaient, du fait même de l'administration, cette dénomination
nouvelle, prélude d'une transformation plus complète.
Suppression du Jardin botanique. — A cette époque, le P.C.N. existait
depuis deux ans. On l'installa tout d’abord dans les vieux bâtiments du
Collège Rollin, à titre provisoire. La grande affluence des élèves ne per-
mettait pas d'accueillir ceux-ci dans les laboratoires de la Sorbonne; on
avait d'ailleurs créé pour eux un corps très nombreux de professeurs,
chefs de travaux, préparateurs, etc.; à cet organisme nouveau, il fallait
une installalion nouvelle : on chercha un emplacement favorable et on
jeta les yeux sur le Jardin botanique de la Faculté de médecine. Une
Commission composée de MM. GrÉarp», vice-recteur, président du Con-
seil de l’Université, BRouARDEL, doyen de la Faculté de médecine, Dar-
Boux, doyen de la Faculté des sciences, et NéNor, architecte, fut nommée,
à l'effet de procéder à son expropriation. Elle se rendit sur les lieux,
le 12 juillet 1897, et décida que le jardin botanique serait, en fait, supprimé
el que le vaste emplacement qu'il occupait jusqu'alors serait attribué à
la Faculté des sciences, pour y construire les services du P.C.N. Toute-
1}
NOTES ET INFORMATIONS 48T
fois, on laissait à la Faculté de médecine une bande de terrain ayant une
superficie de 550 mètres environ, à peu près inutilisable et jusqu’à pré-
sent demeurée sans emploi.
Le procès-verbal de cette réunion du 12 juillet 1897 me fut commu-
niqué officieusement. En voici le texte :
« Après examen des emplacements, il a été arrêté ce qui suit :
«1° L'emplacement de 750 mètres environ destiné à l'établissement d'un
jardin botanique, est exclusivement réservé aux services de la Faculté de
médecine, sauf une bande de 5"50 de profondeur et un trottoir de 1"50:
environ, longeant les bâtiments affectés à la Faculté des sciences et fer-
mé du côté du jardin par une barrière à claire-voie, lesquels sont
attribués, la bande de 1"50 à la Faculté des sciences pour un abri propre
aux animaux, le trottoir à l'accès de cet abri.
« L'entrée de cet emplacement (rue Cuvier) sera commune aux deux
services. Elle Sera gardée par un jardinier qui remplira l'office de con-
cierge.
«2° Il est attribué à la Faculté de médecine, pour la direction du jar-
din botanique, un local de... mètres de largeur sur... mètres de profon-
deur, sur l'emplacement actuellement désigné au plan sous le titre de :
Tableau. »
Et M. BrouarpEeL, doyen de la. Faculté de médecine, approuvait une
telle combinaison! En me communiquant le document ci-dessus, il solli-
citait mes observations. Je lui fis remarquer combien il était regrettable
que la Faculté de médecine supprimât son jardin, ou du moins fit aban-
don d'un aussi vaste terrain, qui ne pouvait manquer un jour ou l’autre
de lui être d'une grande utilité.
Les choses en restèrent là, les vacances arrivèrent et c’est seulement à
la rentrée que la question fut reprise. Le 8 novembre, on me demanda mon
avis sur la suppression de l’emploi de jardinier; le 3 décembre, on m'in-
vita à partager les plantes du jardin et:des serres entre la Faculté des
sciences, l'École supérieure de pharmacie et le Muséum d'histoire naturelle.
J’adressai alors au Doyen la lettre suivante, datée du 40 novembre 1907:
«Monsieur le Doyen,
« Vous avez bien voulu me communiquer une lettre de M. le Recteur
en date du 3 décembre, concernant les plantes qui se trouvent dans le
jardin botanique et dans les serres de la Faculté de médecine. J ai l’hon-
neur de vous exposer ci-dessous les réflexions qui me suggère cette
question.
«Tout d'abord, permettez-moi d'exprimer un regret profond de voir
la Faculté (de médecine) abandonner le Jardin. Nen pas qu'un jardin bo-
tanique soit de première utilité, dans l’état actuel de l'enseignement et
de la science (je m’expliquerai plus bas sur ce point); mais il me semble
que la possession du terrain, vaste et bien situé, eût dù être revendiquée
énergiquement par la Faculté.
488 NOTES ET INFORMATIONS
« Enserrée dans ses locaux actuels, déjà trop petits, la Faculté est
inextensible ; elle ne peut s'’agrandir qu'au prix d'expropriations très oné-
reuses, devant lesquelles il est à craindre qu'on ne recule longtemps. Il
est impossible d'y installer, dans des conditions convenables, des ani-
maux en expérience; ceux-ci doivent être conservés dans les laboratoires
mêmes, ce qui constitue de déplorables conditions hygiéniques et un
danger de tous les instants. Or, la médecine devient de plus en plus ex-
périmentale ;elle ne peut progresser qu'à cette condition. Oùdonc loger,
dans la Faculté actuelle, des animaux de basse-cour ou d’écurie ? On
doit prévoir le jour prochain où ces conditions essentielles de tout pro-
grès scientifique seront devenues encore plus impérieuses et où il sera
de toute nécessité de construire des écuries, des étables, des chenils.
Cela est impossible dans les locaux actuels, mais cela serait très facile,
en conservant le Jardin botanique.
« Ce terrain devrait donc, à mon avis, rester la propriété de la Faculté
(de médecine), qui pourrait à peu de frais y édifier une sorte d'Institut
Pasteur, comprenant tous les services qui ont plus spécialement recours
à l’expérimentation (physiologie, pathologie comparée, parasitologie) ;
elle trouverait sans aucun doute, sinon dans les libéralités de l'Etat, tout
au moins dans des donations particulières, les fonds nécessaires à l'exé-
cution de ce projet. En construisant des pavillons isolés, le reste du ter-
rain pourrait être utilisé comme jardin botanique. On tirerait ainsi le
meilleur parti possible de ce terrain (1).
« En mettant les choses au pis et en admettant que la Faculté (de mé-
decine) doive abandonner définitivement le Jardin, on se trouverait donc
en face du projet dont, au mois de juillet dernier, il m'a été donné com-
munication à titre officieux. Ce projet consiste à aliéner le Jardin au
profit de la Faculté des sciences, qui y construirait des laboratoires ; on
réserverait à la Faculté de médecine une surface d'environ 750 mètres
carrés, sur laquelle il serait encore prélevé divers passages et emplace-
ments, Ce qui réduirait finalement à moins de 600 mètres le lopin de
de terre concédé à notre Faculté.
« Veuillez remarquer, M. le Doyen, que la Faculté de médecine, en
raison du plus grand nombre de ses étudiants, se trouve plus à l'étroit
que la Faculté des sciences; néanmoins, c'est celle-ci qui prétend à la
possession presque totale de notre jardin. La portion très restreinte qui
nous en serait laissée ne peut être utilisée comme jardin botanique : com-
(1) Mes prévisions, quant à l'obligation de créer un laboratoire pour l’expéri-
mentation sur les grands animaux, n’ont pas tardé à se réaliser. Voilà déjà
plusieurs années que le professeur de physiologie, trop à l’étroit dans son labo-
ratoire de l'Ecole pratique, a sollicité et obtenu l'installation de locaux plus
vastes et pourvus des dépendances nécessaires. A cet effet, la Faculté de méde-
cine a obtenu du Ministre de la guerre la désaffectation et la cession de l’un des
bastions de l'enceinte de Paris. Ce bastion est situé au boulevard Brune, n°8,
près la porte d'Orléans, par conséquent beaucoup plus loin de la Faculté que ne
l'était le Jardin botanique de la rue Cuvier.
e
NOTES ET INFORMATIONS 489
prise entre le grand immeuble portant le n° 16 de la rue Cuvier et la
construction qu'on se propose d'élever d'autre part, elle n'aurait ni l'air
ni le soleil nécessaires à une bonne réussite des cultures. On ne peut en
faire qu'une réserve pour les grands animaux en expérience. Dans ce
dernier cas, il serait évidemment nécessaire d'y construire des labo-
ratoires.
(€. Je suis d'avis que ni le jardin ni les serres ne peuvent être con-
servés, au moins avec leur importance actuelle, comme j'ai eu l'honneur
de vous l'exposer plus haut, cette opinion n'implique nullement dans ma
pensée l’abandon du terrain, dont la possession rendrait à la Faculté (de
médecine) les plus grands services.
« Dès lors, que faire des plantes qui existent actuellement dans le jar-
din et dans les serres et dont, effectivement, un bon nombre sont sans
utilité pour la Faculté (de médecine) ? M. le Ministre pense qu'on pour-
rait répartir entre la Faculté des sciences, l'Ecole de pharmacie et le Mu-
séum toutes celles qu'il n'y aurait pas lieu de garder pour notre usage.
Je partage entièrement cette opinion... »
Mes revendications n'eurent aucun succès. L'administration résolut
définitivement de supprimer le Jardin botanique, conformément au pro-
tocole du 12 juillet 1897, et je fus invité à procéder à la répartition des
plantes. Je convoquai donc dans te but MM. les professeurs BoNNieR,
Cornu et GuiGNaRD; à cette occasion fut rédigé le procès-verbal suivant :
« Paris, le 5 mars 1898.
« Conformément aux instructions données par M. le Recteur et en ré-
ponse à la convocation à eux adressée par M. R. BLANCHARD, professeur à
la Faculté de médecine, directeur du Jardin botanique de la Faculté de
médecine, MM. G. BonNieR, professeur à la Faculté des sciences, M. Cor-
NU, professeur au Muséum d'histoire naturelleet L. GuIGNARD, professeur
à l'École supérieur de pharmacie, se sont réunis aujourd'hui à une heure
et demie de l'après-midi, au Jardin botanique de la Faculté de médecine,
12 ,rue Cuvier.
«M. R. BLAncaaRD leur a fait remise officielle des plantes de pleine
terre et de serres, cultivées au Jardin botanique, en leur laissant le soin
de les répartir entre leurs divers services, conformément à leurs besoins
respectifs, réserve étant faite des plantes conservées pour les besoins de
la Faculté de médecine, dont une liste se trouve entre les tuains de
M. LavancHYy, jardinier en chef.
«M. R. BLANCHARD réserve également pour la Faculté de médecine la
serre hollandaise de taille moyenne, mettant les autres à la disposition de
la Faculté des sciences.
« En foi de quoi le présent procès-verbal a été signé.
& R. BLANCHARD, G. BonNier, M. CorNu, L. GUIGNARD. »
Le sacrifice était consommé : le Jardin botanique de la Faculté de méde-
Archives de Parasilologie, XI, n° 3, 1907. 32
490 NOTES ET INFORMATIONS
cine de Paris avait vécu. Il ne restait plus à cette Faculté qu'un terrain de
750 mètres environ, une serre hollandaise et quelques plantes.
Je voulus tirer le meilleur parti possible d’une situation aussi défavo-
rable, mais je me heurtai à une difficulté insurmontable. Dans le but
assurément louable de faire des économies, l'administration avait, sur ces
entrefaites, supprimé en totalité le budget du Jardin botanique, déjà
très réduit depuis la mort de M. Barccon. On ne prit pas garde qu'on
emportait du même coup le crédit personnel du professeur, en sorte que
je n'avais pas la plus petite somme à ma disposition. Cette situation
regrettable dure depuis dix ans : sous le décanat de M. BROUARDEL, il m'a
été impossible de récupérer la moindre parcelle des crédits dont j'avais
été dépouillé par erreur ou excès de zèle; depuis l'avènement de M. le
professeur DEBOvE, j'ai pu enfin bénéficier d’un crédit ultra-modeste de
950 fr. par an.
Donc, que faire? Devant l'impossibilité absolue d'organiser quoi que ce
soit, je laissai les choses en l’état et je procédai à une nouvelle et ultime
distribution des plantes. J’adressai quelques pieds de Rhubarbe (Rheum
officinale, Rh. collinianum, Rh. florentinum) au prof. A. Tscaircu, de l'Uni-
versité de Berne; j'envoyai un exemplaire de Didierea mirabilis à M. T.
Dyer, directeur du Jardin de Kew, et je mis les autres plantes, parmi
lesquelles se trouvaient deux autres Didierea, à la disposition de mes trois
collègues susnommés.
Ainsi finit le Jardin botanique de la Faculté de médecine de Paris. Sur
son emplacement s'élèvent maintenant les vastes bâtiments du P. C. N. Il
ne reste plus, de l’ancien domaine de la Faculté de médecine, que le terrain
plusieurs fois cité, (de 750 mètres environ », en réalité de 550 mètres ou
un peu plus. Ce terrain est sans emploi depuis dix ans; il n’en est pas
moins la propriété de la Faculté de médecine et spécialement du Labora-
toire de Parasitologie.
Depuis juillet 1897. — En prenant possession de ma chaire, j'étais donc
résolu à donner à mon enseignement une direction toute nouvelle, ou
plutôt à refaire comme professeur, en l’étendant aussi à la botanique, un
enseignement de la parasitologie que comme agrégé, de 1883 à 1890,
j'avais appliqué à la zoologie. Cette orientation particulière m’obligeait à
faire table rase de toute l’organisation ancienne, d’ailleurs singulièrement
à la débandade depuis deux ans, et à choisir un personnel nouveau. Depuis
1880, j'étais secrétaire général de la Société Zoologique de France; j'étais
donc assez bien placé pour connaitre et apprécier les naturalistes. Je jetai
les yeux sur deux jeunes zoologistes, tous deux élèves du professeur H.
DE LACAZE-DUTHIERS ; ils Consentirent à venir avec moi, et je ne crois pas
qu'ils aient eu trop à le regretter.
M. Jules Gurarr était alors licencié ès sciences naturelles, préparateur
au laboratoire de zoologie de la Faculté des sciences, docteur en médecine
et lauréat de la Faculté depuis 1896. J'avais remarqué sa thèse sur le
corps thyroïde dans la série des Vertébrés et je pensais que l’auteur d'un
AIN
NOTES ET INFORMATIONS 491
tel travail était capable de suivre la carrière scientifique avec succès. Je
lui offris donc la place de chef des travaux pratiques de Parasitologie; il
accepta. Il se mit avec ardeur à sa tâche et obtint dans ses fonctions un
légitime succès. En 1901, il fut nommé agrégé; il fit, dès lors, des confé-
rences complémentaires de mon enseignement et y trouva une occasion
nouvelle d'affirmer ses brillantes qualités. Il ne tarda pas à devenir
docteur ès-sciences. Aussi, la chaire d'Histoire Naturelle médicale de la
Faculté de Lyon étant devenue vacante, en fut-il nommé titulaire, par un
décret en date du 12 novembre 1906.
M. Maurice NevEu-LEMAIRE était lui-même licencié en droit, licencié
es-sciences naturelles et étudiant en médecine. Il entra comme prépara-
teur à mon laboratoire, fut reçu docteur en médecine, avec une thèse
remarquée sur les Hématozoaires du paludisme (1901), et publia une série
de travaux intéressants. MM. le comte pE CRÉQUI-MoNTFORT et SÉNÉCHAL
DE LA GRANGE, organisant une mission scientifique sur les hauts plateaux
de Bolivie, me demandérent de leur désigner un compagnon de route,
qui püt être à la fois le médecin et le zoologiste de l'expédition. Je leur
présentai le D' NEvEu-LEMAIRE, qui eût ainsi l'occasion de faire un assez
long séjour sur les sommets des Andes et d'y accomplir de bonne
besogne (1). Candidat au concours d’agrégation de 1904, il fut nommé
agrégé d'Histoire Naturelle à la Faculté de médecine de Lyon.
Un peu après les deux précédents, M. Emile BruMmPrT quitta également
la Sorbonne, où il était préparateur adjoint, et entra en qualité de prépa-
rateur dans mon laboratoire (1° novembre 1899). Il était alors licencié ès
sciences naturelles, étudiant en médecine et commençait une thèse de
doctorat ès-sciences, à laquelle il travaillait avec ardeur. Les recherches
concernant cette thèse étaient à peu près achevées, quand le vicomte
Robert pu BourG DE Bozas vint, comme on devait le faire plus tard pour
la mission de Bolivie, me demander de lui désigner un jeune médecin et
naturaliste, décide à tenter avec lui l’aventure d’un voyage d'exploration
en Afrique tropicale. Je songeai tout d'abord à NEVEU-LEMAIRE, qui refusa.
BruMmPT me demande donc de partir à sa place; le vicomte pu BourG l’a-
grée et voilà BRUMPT qui, en moins de deux mois, rédige sa thèse sur la
reproduction des Hirudinées, en fait les dessins, la soutient devant la
Faculté des sciences et prépare dans ses moindres détails la partie médi-
cale et scientifique d'une expédition qui devait durer deux ans et
demi (2).
Revenu sain et sauf de cette mission périlleuse, qui lui a fait traverser
l'Afrique de Djibouti au Congo et où le vicomte pu BourG pe Bozas devait
si malheureusement trouver la mort, BRUMPT a repris à mon laboratoire
(1) Cf, M. Neveu-Lemaire, Les lacs des hauts plateaux de l'Amérique du Sud.
Paris, in-8° de vi-197 p. avec 18 planches, 1906. — Ce premier ouvrage sera
suivi de plusieurs autres,
(2) Mission scientifique du Bourg de Bozas. De la mer Rouge à l'Atlantique
à travers l'Afrique tropicale (octobre 1900 mai-1905). Paris, in-4° de virr-442 p.,
1906.
492 NOTES ET INFORMATIONS
son poste de préparateur et s’est aussitôt signalé par une série de publi-
cations importantes. Voilà quelques mois, il a été nommé chevalier de la
Légion d'honneur, au titre d'explorateur. Plus récemment, il a subi sa
thèse de doctorat en médecine; puis, par suite du départ du professeur
GurarT pour la Faculté de médecine de Lyon, il a été promu chef des
travaux pratiques de parasitologie (novembre 1906). Enfin, le jour même
où j'écris ces lignes (14 juin 1907), il conquiert, à la suite d’un brillant
concours, le poste d'agrégé laissé vacant par le départ de J. Gurarr.
Puisque je suis amené à passer en revue mes principaux collaborateurs,
je dois encore une mention toute spéciale au D' Maurice LANGERON, mon
préparateur en chef. Entré chez moi à titre intérimaire, pendant le voyage
de NevEu-LEMaIRE en Bolivie, il y est resté et n'a cessé, depuis le pre-
mier jour, de me donner la plus vive satisfaction. Ses connaissances
étendues, sa très grande habileté technique, son ardeur au travail sont
hautement appréciées de tous; sa grande modestie m'oblige à lui rendre
ici ce public hommage.
Avant d'en finir avec cet historique un peu long, je dois encore rappe-
ler la création de l’Institut de Médecine coloniale, dont j'ai pris l'initia-
tive et qui est venu donner plus d'activité et plus de portée à l’enseigne-
ment de la Parasitologie. JI en a été trop souvent question dans les
Archives pour qu'il me paraisse utile d'entrer dans plus de détails à son
sujet; d'ailleurs on trouvera plus loin des renseignements statistiques
qui montreront en quoi consiste l’œuvre accomplie par les cinq premières
sessions.
En 1902, les fonctions de chef des travaux pratiques y ont été remplies
par le D' GurarT; de 1903 à 1906,clles l'ont été par le D' Brumpr; elles
seront occupées désormais par le D' LANGERON.
Création de la chaire de Parasitologie. — Enfin, le moment de transfor-
mer ma chaire m'a semblé être venu. Dans le courant de novembre 1906,
je demandai au Conseil de la Faculté de médecine d'émettre un vœu en
faveur de la transformation de la chaire d'Histoire Naturelle médicale en
une chaire de Parasitologie et Histoire Naturelle médicale. Ce vœu fut
_ adopté à l’unanimité. Bientôt après, il recevait la consécration officielle,
par un décret en date du 15 décembre,paru au Journal ofjiciel du 19 dé-
cembre.
Simple changement d’étiquette, simple affaire de mots, dira-t-on ? Sans
doute, puisque ce décret ne fait que consacrer un état de choses existant
depuis dix ans. Toutelois, ce décret consacre aussi et rend définitive la
suppression de la Zoologie et de la Botanique purement descriptives, pour
lesquelles il ne saurait plus y avoir de place dans l'enseignement médi-
cal. La Parasitologie les supplante et se place au premier rang : les
découvertes qu'elle a accomplies dans ces dernières années prouvent
qu'elle sera désormais l’un des guides les plus fidèles de la Médecine sur
la route du progrès scientifique. — R. BLANCHARD.
Re
< NOTES ET INFORMATIONS 493
La Parasitologie à la Faculté de Médecine de Paris. — A la date du
5 novembre 1906, les professeurs et agrégés de physique, chimie et his-
toire naturelle médicales de la Faculté de médecine de Paris recevaient
de M. le Doyen la lettre suivante:
MoN CHER COLLÈGUE,
Je reçois de M. le Recteur la lettre dont voici copie:
« Conformément aux instructions de M. le Ministre, je vous prie de
m'envoyer des renseignements aussi complets qu'il vous sera possible sur
l’enseignement de l'Histoire Naturelle à la Faculté de médecine de Paris,
depuis la réforme de 1893.
«L'Administration supérieure désirerait connaitre notamment les sujets
et, si possible, les programmes des cours professés pendant ces cinq der-
nières années, l'organisation et l’objet des travaux pratiques correspon-
dants, et la nature des questions posées aux examens. »
€ J'ai l'honneur de vous prier de vouloir bien me mettre en mesure de
renseigner M. le Recteur.
« Je serais heureux qu'il vous fût possible de me faire parvenir votre
réponse avant le 15 novembre, dernier délai.
« Veuillez agréer, etc. »
« Le Doyen: M. DEBOVE. »
M. le D’ J. GurarT, agrégé, chef des travaux pratiques, répondit en ce
qui concerne ses conférences et les travaux pratiques. J’adressai moi-
même à M. le Doyen, au sujet des examens et de la direction générale de
l’enseignement, les deux rapports ci-après.
RAPPORT SUR L'ENSEIGNEMENT DE L' HISTOIRE NATURELLE (PARASITOLOGIE)
A LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE PARIS
Par le Professeur R. BLANCHARD
Dès l’année 1883, au cours de ma première année d’agrégation, J'ai
orienté résolument l’enseignement de la Zoologie médicale vers la Parasi-
tologie. Pendant les huit années qui ont suivi, j'ai poursuivi cette ten-
tative et j'ose croire qu'elle répondait à un véritable besoin, en raison
du succès qui est venu la consacrer. Si M. le Professeur BAïLLoN ne
m'avait pas interdit de toucher à la Botanique, je n'aurais pas manqué
de traiter également dans mon cours complémentaire des questions
parasitologiques relevant des Champignons et des Microbes.
J'ai donc, pendant neuf années consécutives, en qualité d’agrégé, fait
un cours systématique de Parasitologie animale, le premier qui ait
jamais été fait dans une Faculté de médecine française. II me semblait
déjà, à cette époque, que la Parasitologie, jusqu'alors à peu près complè-
tement passée sous silence, méritait de prendre, dans l'enseignement
médical, une place importante.
Les nombreuses découvertes qui se sont succédé dans ce domaine,
49% NOTES ET INFORMATIONS
au cours de ces dernières années, et qui ont déversé tant de lumière sur
une foule de questions encore obscures, sont la justification du point de
vue auquel je m'étais placé, voilà déjà vingt-trois ans, et dont je ne me
suis jamais départi depuis lors.
Nommé professeur d'Histoire Naturelle médicale à la Faculté de méde-
cine de Paris, en 1897, j'ai orienté d’une façon plus complète encore, puis-
que j'avais toute liberté d'action, vers la Parasitologie l’enseignement qui
m'était confié. Je dois dire que j'avais eu soin d'exposer mes tendances
et mon programme aux Professeurs de la Faculté de médecine, à l’époque
où j'étais candidat à la chaire, et que j'avais trouvé auprès d'eux une
entière approbation. C’est donc, je puis le dire, avec l'assentiment una-
nime de la Faculté, que l’enseignement de l'Histoire Naturelle médicale a
été complètement dévié de sa direction primitive. Dans le langage cou-
rant, on disait jadis « le cours de Botanique »; on dit actuellement « le
cours de Parasitologie. »
Il ne me semble pas utile de justifier plus longtemps cette déviation:
elle répond si étroitement aux tendances scientifiques actuelles, qu'elle a
été imitée d'une façon plus ou moins complète dans les différentes Facul-
tés et Ecoles de médecine françaises, ainsi que dans les Facultés étran-
gères établies d’après le système français.
Le titre de ma chaire est: Histoire Naturelle médicale. Un tel titre m'o-
blige à ne point négliger certaines parties de la science qui ne relèvent
pas directement de la Parasitologie, mais qu’un médecin doit connaître,
comme l'étude des animaux venimeux. Il m'oblige également à envisager
les maladies parasitaires et infectieuses, non pas au point de vue clinique
ou thérapeutique, mais au point de vue de l’histoire naturelle des parasi-
tes qui les déterminent. La position de ces parasites dans la classifica-
tion, leurs caractères naturels et différentiels, leur structure, leur évolu-
tion, leurs migrations éventuelles, sont des questions de première impor-
tancé que je dois envisager. Ces préliminaires me semblent indispensa-
bles, même dans l’état actuel des programmes généraux de l’enseigne-
ment supérieur, attendu que les élèves qui sortent du P.C.N. n'ont que
des notions tout-à-fait insuffisantes, ainsi que me le démontre une longue
expérience.
Ces faits étant connus, j'aborde l'étude des relations du parasite avec
l'organisme humain. S'il est inoculé par quelque animal piqueur ou suceur
de sang, il devient nécessaire de connaître celui-ci dans ses caractères
généraux ou tout au moins de rechercher en quelle partie de son corps
le parasite pénètre pour y subir éventuellement des métamorphoses.
La manière dont il se comporte dans l'organisme de l'Homme fait l’ob-
jet d’une étude détaillée: on assiste à la lutte qui s'établit entre le para-
site et l'organisme, aux diverses réactions d'ordre chimique ou anatomi-
que dont celui-ci devient le siège, aux différentes transformations ou
métamorphoses que subit celui-là. L'organisme se présente ainsi comme
un champ clos, dans lequel s’accomplit une lutte dont on suit toutes les
NOTES ET INFORMATIONS 495
péripéties. Le parasite sort vainqueur de cette lutte; il s'établit dans l’or-
ganisme, il y provoque des lésions dont il est nécessaire de suivre le
processus évolutif ; il y subit des transformations nouvelles, il peut deve-
nir adulte, s’y multiplier; et il est alors indispensable de déterminer par
quel moyen il sème sa progéniture autour de lui, d'où une infestation
sans cesse plus complète de l’organisme, ou au contraire la répand en
dehors, d'où une dissémination de sa propre espèce dans l’espace et dans
le temps. Cela nous ramène au point de départ, c’est-à-dire aux procédés
suivant lesquels s’accomplit la pénétration du premier parasite dans un
organisme sain.
Tel est le cadre général dans lequel je m'efforce de faire rentrer l'his-
toire naturelle et médicale de chacun des très nombreux parasites qui
s'observent dans les différentes races humaines et dont un bon nombre
sont au plus haut point redoutables. Un tel cadre est assez large pour
qu'on puisse donner à chacune des questions qui se présentent toute
l'ampleur qu’elle mérite, tant au point de vue pratique qu'au point de
vue scientifique. Je m'efforce de concilier autant que possible ces deux
points de vue, bien loin de sacrifier l’un à l’autre. Une Faculté de méde-
cine n'est, pour la plupart de ses élèves, qu'une école professionnelle;
mais elle est aussi, pour une élite plus ou moins restreinte, une école
de haut enseignement, et il est impossible de passer sous silence les com-
paraisons, les rapprochements, les aperçus strictement scientifiques. Ils
ne profitent en général qu'à un petit nombre, mais j'estime que ce petit
nombre a droit à un enseignement élevé.
L'enseignement de la Parasitologie est incontestablement l’un des plus
complexes qui existent ; le professeur doit être à la fois très versé dans
les connaissances médicales et dans la connaissance des diverses sciences
naturelles. Les parasites, en effet, appartiennent les uns à différents
groupes du règne animal (Protozoaires, Vers, Acariens, Insectes), les
autres aux Microbes ou aux Champignons. L'étude de chacune de ces caté-
gories dêtres nécessite une technique particulière, un ensemble de
méthodes très spécialisées. Sauf dans les Facultés de médecine françaises,
on ne trouve plus nulle part maintenant de Professeurs qui soient char-
gés d'un enseignement aussi vaste et aussi hétérogène. Les progrès
quotidiens de la science, en ces questions dont l'importance grandit
chaque jour, sont tellement rapides et tellement variés que c’est une rude
besogne que de se tenir au courant. Je ne crains pas d'affirmer que, dans
aucuñe branche des sciences biologiques, on ne doit faire appel à des
doctrines et à-des connaissances aussi étendues et aussi disparates.
C'est une caractéristique des Universités françaises que de posséder un
enseignement de ce genre. Des personnes assurément bien intentionnées,
mais d’ailleurs mal renseignées sur l'utilité des sciences dans les Facultés
de médecine, n'ont pas craint de dire qu'un tel enseignement était inutile
en France, puisqu'il n'existait point dans un grand nombre d'Universités
étrangères. Remarquons tout d'abord qu'une telle assertion est inexacte,
496 NOTES ET INFORMATIONS
car des cours de sciences naturelles à l'usage exclusif des médecins sont
faits dans les Facultés de philosophie de toutes les Universités allemandes.
Portant d’abord sur les sciences naturelles en général, ces cours se sont
spécialisés dans ces temps derniers et traitent de plus en plus, sinon
exclusivement, de la seule Parasitologie ; il suffit pour s’en rendre compte
de jeter un coup d'œil sur le Deutscher Universitäts-Kalender et, pour plus
de détails, sur le Verzeichnis der Vorlesungen des différentes Universités.
Il en est de même en Hollande et en Italie; dans ce dernier pays, c'est,
comme chez nous, à la Faculté de médecine que cet enseignement a lieu.
Il en est de même aussi dans les écoles anglaises et dans un grand nom-
bre d'Universités américaines.
Vraiment, il existe donc à l'heure actuelle une poussée générale vers les
études parasitologiques, encore que ce mouvement si profitable au progrès
de la science soit généralement méconnu dans notre pays.
Il y a mieux : certaines Écoles de médecine ou Universités, jugeant
avec raison que le programme de la Parasitologie était déjà trop vaste
pour faire l’objet d’un unique enseignement, ont pris l'initiative de dédou-
bler les chaires, et c’est un exemple qui, tôt ou tard, devra être imité
ailleurs. Je crois pouvoir dire que je n'ai pas été étranger à ce résultat
et qu'il est la conséquence d’une conversation que j'eus certain jour avec
sir Patrick Manson.
Le célèbre parasitologue anglais auquel, ccmme on sait, est due la
création de l'Ecole de Médecine tropicale de Londres, me demandait de
lui préciser en quoi consistait mon cours d'Histoire naturelle médicale.
Très frappé de mes explications, il me dit : (C’est une bonne chose, nous
devrons faire ainsi ; j y songerai. » Quelques mois plus tard, l'Ecole de
Médecine tropicale de Londres avait recueilli les fonds nécessaires pour
créer deux enseignements nouveaux et ainsi ont pris naissance les deux
chaires d'helminthologie et de protozoologie. L'École de médecine tropi-
cale de Liverpool s'empressa d'en faire autant. Puis l'Université de
Londres chargea le professeur MiNcuiN, jusqu'alors connu par de très
importants travaux sur les Éponges, de se spécialiser dans l'étude des
Protozoaires parasites, particulièrement des Sporozoaires. Enfin, tout
récemment, l'Université de Cambridge, en Angleterre, créait une chaire
pour l'étude des Protozoaires dans leurs relations avec les maladies ; cette
chaire nouvelle vient d'être fort heureusement attribuée au D' Nurrazz,
jusqu'alors chargé du cours de pathologie expérimentale à la même Uni-
versité.
Je pourrais multiplier ces exemples. Je dois en citer encore deux, dont
l'importance est trop considérable pour qu'il n’en soit pas fait men-
tion.
On n'ignore pas que les États-Unis ont annexé au Ministère fédéral de
l'Agriculture des services scientifiques considérables, royalement dotés,
ayant un très nombreux personnel et dirigés par des hommes d’une
haute valeur. Le Bureau de l'Industrie animale, fondé par le Dr SALMON,
NOTES ET INFORMATIONS 497
avait comme zoologiste le D' Ch. Wardell Srices, dont les très importants
travaux de parasitologie animale sont trop connus pour qu'il soit néces-
saire d'y insister. Devenus puissance coloniale par la conquête des Philip-
pines et de Porto-Rico, les États-Unis n’ont pas hésité a créer à Washing-
ton, près le Service de santé de la Marine, deux Instituts nouveaux, l’un
de bactériologie, dirigé par le Docteur RosEeNAU, l’autre de zoologie, c'est-
à-dire de parasitologie animale, dirigé par le même D' Wardell STiLes.
Les publications sortant deces deux Instituts sont le meilleur témoignage
de l’activité scientifique qu'on y déploie : la médecine clinique n’y tient
aucune part et les questions de Parasitologie en font tous les frais.
Enfin, l'Institut de médecine tropicale, annexé au port de Hambourg et
dirigé par le D' Nocur, créa récemment un service de zoologie médicale,
à la tête duquel fut placé le D' Scaauninx. Cet illustre zoologiste aban-
donna sans esprit de retour toutes ses recherches antérieures de zoologie
pure et résolut de se consacrer à l'étude exclusive des Protozoaires para-
sites de l'Homme. Déjà bien connu pour ses très importants travaux sur
les Coccidies et sur les Hématozoaires du paludisme, il ne tarda pas à
faire la découverte sensationnelle du Tréponème de la syphilis. Sa mort
prématurée, à l’âge de 35 ans, est une perte irréparable pour la Parasito-
logie. Son très court passage à l’Institut de Hambourg est au plus haut
point glorieux pour celui-ci. ‘
La préférence que ScHAUDINN avait finalement donnée aux études para-
sitologiques est une démonstration convaincante de l'importance capitale
de ces questions nouvelles, tant au point de vue pratique qu'à celui de
la science pure. Au surplus, cette importance se trouve démontrée encore
par l'attribution du prix Nobel de médecine qui, à deux reprises, fut
décerné à des parasitologues ; à Ronald Ross, en 1902, pour sa décou-
verte des métamorphoses de l'Hématozoaire du paludisme dans le corps
des Moustiques êt à GoL@r, en 1906, pour ses recherches capitales sur la
structure des centres nerveux, ainsi que sur la structure et l'évolution
schizogonique de ce même parasite.
Dans cet ordre d'idées, il n’est pas sans intérêt de constater aussi les ten-
dances qui se manifestent en divers points du globle, quant à la direction
imprimée aux recherches de médecine scientifique. A peine installés aux
Philippines, les Américains y ont créé de très importants laboratoires,
dans lesquels on poursuit activement la solution des nombreux problè-
mes concernant l’état sanitaire de ces régions. De même, il s’est trouvé
un riche chimiste anglais pour fonder à Khartoum, de ses deniers, un
très bel établissement scientifique, le Gordon Medical College. Les splen-
dides publications qui sortent de ces deux centres nouveaux touchent
aux questions médicales les plus diverses, mais on ne peut manquer
d'être frappé de la part prépondérante et même presque exclusive qu'y
prend la Parasitologie.
Le rôle qui revient à cette branche des sciences médicales est, en effet,
tout à fait exceptionnel, en ce qui concerne la pathologie des pays chauds.
498 : NOTES ET INFORMATIONS
Dans ces régions, les maladies parasitaires dominent et parmi celles-ci
les zooses, c’est-à-dire les maladies causées par les animaux, occupent
la première place. Il est même curieux de constater que les bactérioses,
prépondérantes dans les pays tempérés, n’occupent que la seconde place
dans la pathologie des pays tropicaux. Quant aux maladies non parasi-
taires, on peut affirmer qu'elles ne prennent qu’une place des plus res
treintes. |
Cette prédominance du parasitisme animal en pathologie exotique fait
que l’enseignement donné dans les Facultés des pays tempérés et visant
plus spécialement les maladies de ces contrées, n’est qu'une préparation
très insuffisante pour les médecins qui doivent exercer leur art sous les
tropiques. D'où la nécessité de créer en faveur de ces médecins un ensei-
gnement complémentaire étroitement spécialisé; de là les diverses Écoles
de médecine coloniale; telle est l’idée qui m'a conduit à prendre l'initia-
tive de la création de l’Institut de médecine coloniale annexé à la Faculté
de médecine de Paris. Sous quelque forme qu’on le présente, cet ensei-
gnement complémentaire ne concerne presque exclusivement que des
questions de Parasitologie.
La médecine curative, c'est-à-dire la médecine des symptômes, a été
prépondérante, tant que les causes réelles des maladies sont restées in-
connues : les recherches plus étroitement scientifiques qui s’accomplissent
dans les laboratoires, en élucidant les causes des affections, en mettant
en évidence le rôle des agents parasitaires animés, restreignent chaque
jour davantage l'importance de la médecine curative et augmentent celle
de la médecine prophylactique. Qu'on le veuille ou non, les doctrines
médicales se transforment et la lutte contre la maladie revêt des aspects
nouveaux. L'agent le plus actif de ce progrès, c’est la Parasitologie. Elle tend
à prendre une place dominante dans la doctrine médicale, comme à res-
treindre le rôle de la thérapeutique au profit de celui de la prophy-
laxie.
Après cet exposé, il me semble superflu d'entrer dans le détail des
sujets qui font l’objet du cours d'histoire naturelle médicale. Comme il
vient d'être dit, il est surtout question des parasites et des affections qu'ils
déterminent. Dans le rapportci-dessous, traitant de la nature des examens,
je montrerai dans quel sens ceux-ci sont conduits et on y trouvera une in-
dication suffisante des matières traitées au cours. Je dois rappeler toute-
lois, comme il a été dit plus haut, que la Parasitologie n'y est pas seule
envisagée, mais que d’autres questions importantes y sont également ex-
posées : telles sont celles afférentes aux animaux venimeux. En principe,
la besogne est divisée entre le professeur et l’agrégé, de telle sorte que
l’ensemble des matières soit traité en une seule année, le professeur se
réservant de traiter en détails certains points, différents d’une année à
l’autre, qui lui semblent correspondre aux préoccupations scientifiques
du moment.
Je n'ai pas gardé copie du programme des cours de ces années derniè-
NOTES ET INFORMATIONS 499
res, tel qu'il a figuré sur l'affiche; le libellé suivant en donne néanmoins
une idée exacte.
Hiver 1903-1904. — Vers et Arthropodes parasites; animaux venimeux;
Champignons parasites.
Hiver 1904-1905. — Maladies causées par les Protozoaires; leurs rela-
tions avec les Insectes; étiologie et prophylaxie.
Hiver 1905-1906. — Histoire naturelle et médicale des Microbes ; Cham-
pignons parasites. :
Hiver 1906-1907. — L'être vivant envisagé comme propagateur des
maladies parasitaires; étiologie et prophylaxie des maladies infectieuses
et parasitaires.
RAPPORT SUR LES EXAMENS DE PARASITOLOGIE
Par le Professeur R. BLANCHARD
La Parasitologie figure au programme de deux examens, mais il est
rare qu'un méme candidat soit interrogé deux fois sur cette matière, en
raison du grand nombre des examens et du petit nombre des juges com-
pétents, qui ne sont représentés que par le professeur et l’agrégé de pa-
rasitologie (histoire naturelle médicale).
3° examen, 2° partie, épreuve pratique. — Le programme comprend l'a-
natomie pathologique, la chimie clinique et la parasitologie; il est fréquent
que le parasitologue soit occupé ailleurs et soit remplacé par un clinicien,
auquel cas il n’est pas question de parasitologie à cette épreuve.
En vue de la préparation de cette épreuve, j'ai constitué au laboratoire
une petite collection des parasites les plus utiles à connaître, collection
accessible tous les jours aux étudiants, dans l'après-midi. Cette collection
est faite en double : l’une des séries est dûment étiquetée; l’autre, identi-
que à la première, est sans étiquettes ; ce sont les bocaux de cette dernière
série qui, à l'examen pratique, sont présentés aux candidats.
On demande à ceux-ci de reconnaitre extemporanément trois ou quatre
pièces, ainsi qu'une ou deux préparations microscopiques, relatives aux
parasites et aux maladies parasitaires les plus usuels; des explications
orales accompagnent cette reconnaissance; elles peuvent être poussées
assez loin, quand le candidat fait preuve de savoir.
Ainsi compris, cet examen pratique force les étudiants à revoir les piè-
ces pathologiques d'organes parasités, les diverses préparations et d'une
façon générale l’ensemble des matières qui ont fait l'objet des travaux pra-
tiques et qu'ils ont la faculté de venir voir au laboratoire aussi fréquem-
ment qu'il leur plait. En outre des Helminthes usuels, ils prennent ainsi
connaissance des préparations concernant l’actinomycose, l’aspergillose,
les teignes, la trichinose, la filariose, la bilharziose et un bon nombre d'au-
tres affections ou fréquentes en France ou pouvant s’observer accidentel
lement dans nos hôpitaux. Les Acariens et les Insectes parasites ou trans-
metteurs de maladies parasitaires sont suffisamment représentés dans
500 NOTES ET INFORMATIONS
cette collection et, par conséquent, à l'examen, pour que l’éudiant se fami-
liarise avec les types les plus essentiels.
A une certaine époque, j'avais mis également à la disposition des élèves
un microscope et une série de préparations, parmi lesquelles devaient
être prises celles présentées à l'examen. J'ai dù y renoncer, en raison de
la détérioration rapide dont elles étaient l’objet, d'où la nécessité de les
remplacer constamment. Or, les préparations bien démonstratives sont
toujours rares et précieuses, et il m'a semblé impossible de continuer à
mettre à la disposition des élèves des préparations de valeur, que la
plupart d’entre eux détériorent, faute de savoir assez bien manier le mi-
croscope.
Pour remédier à cet état de choses, il a été entendu entre l'agrégé et
moi que les préparations microscopiques présentées à l'examen seraient
identiques ou analogues à celles que les étudiants sont priés d'examiner
à la suite de chacune des séances de travaux pratiques.
Je crois avoir ainsi tenu compte, dans la plus large mesure, de la né-
cessité de rendre l'épreuve pratique à la lois utile pour le candidat et
facile à préparer. D'une façon générale, les résultats sont satisfaisants,
assez souvent même ils sont très bons. Toutefois, un des vices de cette
épreuve, c'est qu'elle ne rentre pas dans la catégorie des examens à ma-
tières multiples et que les élèves peu laborieux profitent de cette circons-
tance pour préparer à peu près suffisamment deux des matières et
négliger entièrement la troisième. Même avec une boule noire en parasi-
tologie, ils sont reçus, pourvu qu'ils aient d'autre part une rouge noire et
une rouge. Un tel système me semble déplorable et je crois qu'il serait
utile de ranger cet examen dans la catégorie de ceux à matières séparées.
3* examen, 2° partie, épreuve orale. — Le programme comprend la
pathologie interne, la pathologie générale et la parasitologie. Ce pro-
gramme est beaucoup trop vaste et beaucoup trop hétérogène. Les clini-
ciens se plaignent à juste titre, selon moi, de ce que la pathologie interne
soit beaucoup trop restreinte; ils iraient volontiers jusqu'à demander
la suppression des deux autres branches de l’examen, ce en quoi je ne
puis être de leur avis. J’estime, pour ma part, que la pathologie in-
_terne mérite de faire à elle seule les frais d'un examen tout entier et
qu'il serait utile de créer un examen nouveau, qui comprendrait la pa-
thologie générale, la pathologie comparée et la parasitologie. On aurait
ainsi deux épreuves très homogènes chacune et d'un caractère bien
défini : la première essentiellement clinique et professionnelle, la seconde
d'allure plus scientifique, mais portant sur des matières que, dans l'état
actuel de la science, aucun médecin n’a le droit d'ignorer.
Pour s’en tenir à l'examen tel qu'il se pratique aujourd'hui, l'inconvé-
nient que je signalais plus haut se reproduit ici avec une fréquence en-
core plus grande, à savoir que, faute d'examinateurs, les parasitologues
sont trop rarement représentés dans cette épreuve. Le jury doit être norma-
lement constitué par deux médecins et un bactériologiste ou un parasito-
NOTES ET INFORMATIONS 501
logue. L'un des médecins interroge sur les maladies des organes situés
au-dessus du diaphragme, l'autre sur les affections des organes situés
au-dessous de cette membrane. Le troisième examinateur assume à lui
tout seul la tâche d'examiner en pathologie générale et en parasitologie.
Que M. GurarT ou moi fassions partie de ce jury, les choses se passent
de la même façon, car il s’est établi entre nous une entente complète sur
la manière dont nous devions procéder.
Les principes qui dominent notre enseignement et que j'ai exposés dans
mon précédent rapport trouvent ici leur application, c'est-à-dire que nous
nous efforçons de rendre l'examen aussi professionnel que possible, sans
négliger le côté scientifique élevé qui est inhérent à cet enseignement
lui-même. Pour bien faire comprendre quelles idées générales nous guident,
je crois utile de citer ici quelques questions usuelles.
Fièvre intermittente. — Diagnostic microscopique ; recherche et prépa-
ration des parasites ; caractères distinctifs des trois types parasitaires ;
lésions caractéristiques des globules rouges et des organes dans ces trois
types morbides. La fièvre; Son origine toxique, causes de sa périodicité.
La tierce double; causes du redoublement des accès fébriles. Diagnostic
microscopique des fièvres doubles. Les rechutes; leur cause. Moustiques
transmettant le paludisme. Carattères zoologiques des Anopheles. En
l'absence des Insectes adultes, comment peut-on reconnaitre si un pays
est insalubre ? Prophylaxie du paludisme; quinine curative et préventive;
monopole de la quinine en Italie; pétrolage des eaux stagnantes; pro-
tection mécanique des habitations ; précautions à prendre pour sortir de
nuit dans les pays insalubres. Et nombre de questions du même ordre,
venant se grefier sur celles-ci.
Maladie du sommeil. — Sa nature parasitaire. Histoire zoologique des
Trypanosomes. Diagnostic des trypanosomoses. Recherche et prépara-
tion des parasites, leur inoculation expérimentale ; animaux réceptifs, ani-
maux réfractaires. Mode de propagation. Les Glossines; caractères zoolo-
giques de ces Insectes, leur répartition géographique. Prophylaxie. Les
trypanosomoses en dehors des régions à Glossines ; leur transmission par
d'autres Diptères, notamment par les Tabanides. Symptomatologie et ana-
tomie pathologie de la maladie du sommeil. Et nombre d’autres questions
venant se greffer sur celles-ci.
Les hématuries des pays chauds. — On les observe souvent en Europe.
Diagnostic différentiel par l'examen des urines, des selles et du sang. La
filariose et ses diverses modalités; ses relations avec l'éléphantiasis des
Arabes. Distribution géographique des diverses filarioses ; recherche des
Vers adultes dans les organes ; propagation de la maladie par les Insectes.
Indication des Moustiques qui sont connus comme propagateurs de l’infec-
tion. — La bilharziose. Diagnostic, symptomatologie, anatomie patholo-
_gique, traitement chirurgical. Caractères zoologiques de la Bilharzie; sa
distribution géographique, etc.
Helminthes intestinaux. — Symptômes, étiologie, prophylaxie, histoire
502 NOTES ET INFORMATIONS
zoologique, diagnostic différentiel. Recherche des œufs dans les déjections ;
caractères distinctifs, cultures de ces œufs; infestation expérimentale,
ses résultats. Relations des Helminthes avec les affections intestinales :
dysenterie, fièvre typhoïde, appendicite. Nécessité d'un examen microsco-
pique des selles et d'un traitement anthelminthique dans l’appendicite.
Kyste hydatique. — Evolution, migrations et caractères distinctifs du
Tænia echinococcus. Moyens suivant lesquels le Chien, le Mouton etl'Homme
se contaminent respectivement. Les diverses variétés de kystes hydatiques,
leurs relations, leur importance clinique. Echinococcose secondaire;
comment elle se constitue. Moyens de l’éviter. Distribution géographique
des kystes hydatiques, leur prophylaxie. Police des abattoirs et des bou-
cheries, surveillance des Chiens, mesures à prendre contre eux.
Actinomycose.— Sa fréquence dans les différents pays, notamment en
France. Son origine. Espèces végétales sur lesquelles le Champignon vit
à l’état de saprophyte; conséquences pratiques de cette connaissance.
Infestation, développement du parasite à l'intérieur du corps; formation de
la tumeur, sa structure, son siège. Voies de pénétration du Champignon,
lésions qu'il détermine. Thérapeutique, action de l’iodure de potassium.
Le Champignon en culture; ses caractères botaniques, sa place dans la
classification. Notions sur le parasitisme des Champignons envisagé
comme une adaptation à des conditions de milieu anormales.
Cette même notion à l’égard des aspergilloses et des teignes. Différents
types de teignes; lésions des poils et de la peau; caractères microscopi-
ques différentiels. Les teignes du type endothrix et leur extension dans
les races humaines; les teignes du type ectothrix et leur extension chez
les animaux. Origine animale de certaines teignes humaines; leurs ca-
ractères cliniques spécifiques; récolte, préparation, examen des éléments
teigneux; cultures pures des teignes, leurs caractères morphologiques et
microscopiques. Notions qui en dérivent relativement aux affinités des
Champignons des teignes avec d’autres Champignons plus élevés en or-
ganisation, d'où la notion de l'origine saprophytique des teignes.
Caractères généraux des maladies infectieuses. — Les Microbes et leurs di-
vers modes de reproduction. Les spores envisagées comme assurant la
reproduction de l'espèce dans l'espace et dans le temps; leur résistance
aux intempéries ; conditions suivant lesquelles elles prennent naissance.
Action générale des Microbes sur l'organisme animal et humain; réac-
tion de l'organisme; l’inflammation, la phagocytose; rôle des diverses
formes leucocytaires et des cellules du tissuconjonctif; la cellule
géante.
Production de toxines par les Microbes in vitro et dans l'organisme. Ca-
ractères chimiques et action physiologique des toxines. Réactions de
l'organisme envers elles, production des antitoxines; leur rôle curatif et
préventif ; application de cette notion à la thérapeutique. La sérothérapie ;
production des sérums curatifs (diphtérie, peste, tétanos), législation qui
les régit. — Le mithridatisme; accoutumance de l'organisme aux poisons
NOTES ET INFORMATIONS 503
minéraux, végétaux et aux venins. Les Serpents venimeux. Caractères
zoologiques ; énumération, habitat des principaux types et des principales
espèces. Constitution chimique et action physiologique des venins;
antidotes ; sérothérapie antivenimeuse.
Les exemples qui précèdent ne concernent qu'un très petit nombre de
chapitres de la parasitologie et de l’histoire naturelle médicale. 1ls don-
nent, semble-t-il, une physionomie assez exacte de l’examen oral. Comme
il m'arrive, toutes les fois que je fais partie du jury de cet examen,
d'interroger. en même temps en parasitologie et en pathologie générale,
j'ai tenu à indiquer par les derniers exemples de quelle manière je m'ac-
quittais de cette partie de ma tâche.
La Medicina tropical en la Republica Argentina; una carta del Profesor
Blanchard. — En un pais tan inmenso como el nuestro, que tiene todos
los climas, desde el tôrrido de los tropicos hasta el frio de los polos, las
manifestaciones mérbidas deben necesariamente ser multiformes, dado
que son, en cierto modo, funciôn de las condiciones del medio. La pato-
logia de las regiones torridas difiere de la de las regiones templadas como
ambas difieren de la patologia de las regiones frias, reducida esta ultima
à infimas manifestaciones que no merecen casi el nombre de enfermeda-
des.
La bacteriologia, con el prodigioso desarrollo verificado en menos de
medio siglo, ha venido 4 descorrer el velo que escondia la etiologia de un
sinnumero de enfermedades, que nos son ahora completamente conocidas,
y en muchas de las cuales ha obtenido el triunfo terapéutico ansiodo; citar
la difteria, el tétano, el carbunclo, la peste, etc., seria casi inferir una
ofensa à los que tienen el derecho y el deber de conocer esas cosas. Y
aun ignorando el agente causal de una enfermedad como la rabia, la vi-
ruela, ha sabido la bacteriologia sacar provecho de una generalizaciôn de
procedimiento, y la médula de un Conejo, en el primer caso, y el cow-pox,
en el segundo, estän ahi para patentizar un triunfo.
Cuando aparecié la bacteriologia como ciencia constituida y completa,
un reläâmpago de esperanza brillé en el cielo de los que sufren. Por fin
conoceremos los Microbios — se decifan, porque admitieron desde luego
que todas las enfermedades eran microbianas — y conocerlos es ya mu-
cho, porque conociéndolos sabremos precavernos. Forzoso es decir, en
homenaje de la verdad, que esta esperanza era compartida y alimentada
por los mismos sabios que se ocupaban en la manipulacidn microbiana.
No merecen una critica ni unos ni otros, porque todos eran sinceros. Y
no la merecerian de ningün modo, porque ellos podrian reivindicar este de-
recho : los treinta uültimos años de experimentacion consciente de labo-
ratorio, han hecho avanzar la medicina mäs que lo que ha aprendido en
diez siglos de observaciôn empirica. Y es verdad.
Suponer que la bacteriologia deba caer en descrédito porque no ha res-
pondido à todas las esperanzas, seria admitir y justificar una apreciacion
04 NOTES ET INFORMATIONS
erronea que hace considerar como definitivo algo que en la evolucion
lôgica y natural de las cosas no es mâs que temporario é incompleto.
EI dia que la fisica nos di6 el microscopio, naci la ciencia de lo infini-
tamente pequeño. ScawaANx descubre la célula para que Vrrcaow edifique
su patologia celular (1), y para que CLAUDI0o BERNARD y sus satélites estu-
dien su fisiologia. Todo se hizo reposar sobre la célula; sus lesiones pa-
recieron iluminar la pathologia de entonces, y se dijeron : he ahi la ex-
plicacién de lo que sabemos. Y 10 que sabian se reducia à la constataciôn
clinica de los fenomenos morbidos. La anatomia patolôgica, y mäs aun,
la anatomia patolégica microscépica, sirvié, sin embargo, para algo, y en
la época para mucho : la constatacion de las ulceraciones de las placas
de Peyer produjo la unidad de la tifoidea, y la unidad de los tubér-
culos di à LAËNNEc la identidad de la escrôfula y de a tuberculosis.
La sagacidad de LEEUWENHOEK Y SPALLANZANI, la constancia de DAVAINE
y æl genio de PASTEUR, Supieron revelar un mundo nuevo: no debia
buscarse en la célula muerta la explicaciôn de un fenémeno vivo, y si en
algo vivo, y ese algo Îueron los Microbios con los que, cual modernos
dioses, poblaron la tierra, las aguas y el aire. Todo respondia à la evo-
lucion hacia el camino del perfeccionamiento : el periodo anätomo-pato-
légico que reemplazé al periodo clinico, se vié 4 su vez reemplazado por
el que llamé periodo etiolégico. Los tres han dado sus resultados : los
conocimienftos amontonados en las tres épocas servirän para edificar la
verdad definitiva.…. si la verdad definitiva existe como concepciôn metafisica.
Y ahora mismo comenzamos ya à reconocer que la patologia microbiana
sola no basta para explicar ciertos fenomenos, como no bastaba in illo
tempore la patologia celular de VircaoWw (1). Hay algo mäs que un Micro-
bio; el organismo sobre el cual éste opera no se comporta como algo
inerte sin vida; muy al contrario, el organismo, es decir, el conjunto ar-
mônico de células, obedeciendo al principio universal de acciôn y reacciôn,
responde à su manera à las incitaciones microbianas, responde defen-
diéndose. : es la patologia cito-microbiana instalada por BoucHaRp y
coronada por METsHNIKov, EHRLICH y otras firmas no menos ilustres.
Y aun hay algo mas nuevo, que es hasta cierto punto una variacién de la
anterior : la patologia cito-citolégica inaugurada por Borper en el
Instituto Pasteur, de Paris, no hace aüun ocho años, y que con sus
hemotoxinas, precipitinas, aglutirinas, etc., ha revelado un mundo
completamente nuevo à los ojos asombrados de los que aceptan el ;nihil
novum sub sole!
Que la bacteriologia, propiamente dicho, ceda el campo à otro género
(1) J'ai démontré («&) que la théorie cellulaire et la pathologie cellulaire, com-
munément attribuées à tort, la première à SCHwANN, la seconde à VircHow,
étaient toutes les deux l’œuvre de Fr. V. RaspaiLz. Cette vérité historique est
d’une trop haute importance pour que je laisse passer une occasion de la rev en-
diquer en faveur de mon illustre compatriote. — R. BL.
(a) R. BLaxcaarp, Notices biographiques. — XVI. F.V. Raspail. Archives de
Parasitologie, VII, p. 5-87, 1904; cf. p. 18 et 20.
mel
NOTES ET INFORMATIONS 505
de investigaciones nacidas de aquélla, pero de ningün modo idénticas, no
es mengua : es evoluciôn. Hay que admitirlo como légico y fatal; hay
que adaptarse,
Cambiemos el nombre demasiado estrecho de Bacteriologia por el mäs
amplio y mäs conforme con los hechos de Microbiologia, y veremos
ensancharse prodigiosamente sus dominios. Una respetable cantidad de
hechos y fenômenos que antes le escapaban, entran de Ileno en el nuevo
concepto; la patologia cito-microbiana le pertenece, asi como la cito-ci-
tolégica y aun otras de las cuales hablaremos en otra oportunidad.
De una manera general puede decirse (la afirmacién no puede ser abso-
luta), que la bacteriologia ha estudiado sobre todo la patologia de los
paises templados; la de los paises tropicales es distinta y no podria ser
comprendida en la férmula comuün. El Hematozoario del paludismo no
es un Bacterio, como no lo es la Babesia de la fiebre de Tejas, como no
lo es el Tripanosoma de la enfermedad del sueño, y como no loes tampoco
-el Amiba de los abcesos disentéricos (el Bacilo disentérico de SuicA per-
tenece à la patologia de los païses templados). Completando en lo posible
la formula mäs arriba enunciada, podemos añadir : los paräsitos mâs
inferiores (Bacterio) forman la infima minoria en la patologia tropical,
que es, sobre todo, funciôn de los Protozoarios y paräsitos superiores en
organizacion. É
& Qué sabemos de nuestra patologia tropical? Nada, 6 casi nada : apenas
si la coccidiosis de Posadas, la Filaria descubierta en Santiago del Estero,
el pie de Madura descripto por el profesor SomMER y por GRECo, el
abceso hepätico anübico estudiado por Dessy y MorATTA, sirven para
probar cuäntos lauros conquistaria la parasitologia, si parasitologia se
hiciera entre nosotros. Dése al término parasitologia toda la extension
que le acuerda la clasificacién racional, y se verä si hay ancho campo
para futuras investigaciones.
La importancia de esta rama del gran ärbol de la ciencia en lo que
atañe à la medicina actual estä magistralmente expresada en la carta que
trascribimos y que nos ha sido dirigida por el profesor BLANCHARD, de la
Facultad de Medicina, cuya presentaciôn no necesitamos hacer porque es
bien conocido por su preparaciôn indiscutible en la materia. Dice asi :
Paris, le 30 mars 1906.
À M. ce D' PEenRo J. GARCIA,
Directeur de l’Institut Parasitologique de Tucumän (République Argentine).
Mon cher collègue et ami,
Vous avez bien voulu vous intéresser à mon Laboratoire de Parasito-
logie, à l’enseignement oral et pratique que j'y ai organisé, aux résultats
obtenus jusqu'à ce jour, et vous m'avez demandé de vous exposer par
écrit mes opinions personnelles sur la direction qui doit être imprimée
aux études parasitologiques. A la vérité, la demande que vous m'avez
adressée vous est inspirée par une modestie excessive, car vous
Archives de Parasitologie, XI, n° 3, 1907. 33
506 NOTES ET INFORMATIONS
connaissez dans tous ses détails et sous ses faces multiples la question
fort importante au sujet de laquelle vous me demandez mon avis; vous
savez mieux que personnne ce qu'on a fait en France et à l'étranger, vous
avez notamment visité les Écoles de Londres et de Liverpool, et les
diverses conversations que nous avons eues ensemble m'ont montré à
quel point vous étaient familières les idées les plus récentes sur les
problèmes actuels de la pathologie parasitaire. Je me rends néanmoins,
avec le plus grand plaisir, à votre aimable invitation et, au risque
d’énoncer des considérations que vous jugerez peut-être banales, j'exprime
ci-après quelques vues générales sur l'avenir de la médecine scienti-
fique et les moyens d'en assurer le progrès.
Aucun médecin éclairé ne doute plus maintenant des étroites relations
de l'Homme avec le milieu ambiant : ce dernier agit sur lui non seule-
ment par ses qualités physico-chimiques ou météorologiques, mais encore
par l'intermédiaire des êtres qui y vivent. La réaction réciproque de
l'Homme sur la nature vivante et de celle-ci sur l'Homme est une des.
formes les plus énergiques de la lutte pour la vie. On constate chaque
jour de nouveaux faits qui viennent corroborer cette affirmation : là où
l’on ne voyait qu'une action de climat, c'est-à-dire de la nature physique,
il s’agit en réalité de l’action des êtres vivants, Animaux ou Plantes,
Vers ou Microbes, Protozoaires ou Champignons, qui s'introduisent dans
notre organisme et y exercent les ravages les plus variés et les plus
graves. Le nombre des maladies spontanées diminue chaque jour, celui
des maladies parasitaires augmente proportionnellement. Des doctrines
nouvelles envahissent donc la Médecine et viennent renverser avec une
irrésistible puissance les vieilles conceptions nuageuses dont l'esprit avait
tant de peine à s’accommoder.
En fait, les théories parasitaires n’ont jamais fait défaut en médecine;
elles onttrouvé, voilà quelque vingt ans, la confirmation la plus éclatante
dans les travaux de PASTEUR : depuis lors, nul ne doute plus du rôle des
Bactéries dans la production des maladies infectieuses. L'éclat de l'École
pastorienne a pu éclipser pour un certain temps les travaux plus modestes
qui se poursuivaient dans un autre domaine ; la Bactériologie continue
- de briller au firmament de la science, mais voici que deux astres nou-
veaux montent à ses côtés et répandent une lumière jusqu'alors insoup-
connée. L'un d'eux s'appelle la Parasitologie animale, l’autre la Mycologie.
Ces trois planètes, à peine dégagées du brouillard qui les obscurcissait
depuis si longtemps, forment une constellation étincelante et dévoilent au
médecin une route sur laquelle il peut enfin s'engager en toute sécurité.
Je sais bien que la masse des praticiens n'a guère besoin de suivre cette
voie nouvelle; les connaissances que possèdent la généralité des médecins
peuvent suffire à la pratique journalière. Mais un pays qui ferait bon
marché du progrès scientifique et qui, pouvant aider à ce progrès par ses
ressources fiscales ou par la munificence de quelques citoyens, ne consi-
dérerait pas comme un devoir impérieux de le favoriser de toutes ses forces,
NOTES ET INFORMATIONS 507
ce pays-là serait indigne d'être compté au nombre des États civilisés. Le
progrès scientifique est la source la plus pure de la gloire des nations; en
particulier, le progrès de la Médecine est la source exclusive de la pros-
périté physique des peuples et de leur bien-être moral; aucun moyen
n'assure plus efficacement la richesse et n’a une action sociale plus directe
et plus bienfaisante. |
Vous avez, mon cher ami, l'inestimable bonheur d'appartenir à une
nation jeune, active, intelligente, audacieuse, qui voit s'ouvrir devant elle
un avenir extraordinairement brillant : la richesse publique s’aceroit
tous les jours, elle est déjà considérable, elle va devenir fabuleuse, comme
aux États-Unis. Vous connaissez notre proverbe : « Noblesse oblige ».
Je veux dire par là que cette prospérité économique si remarquable, que
cette intelligence et cette initiative qui nous frappent si vivement, nous
autres enfants de la vieille Europe, constituent pour la République Ar-
gentine une obligation inéluctable d'entrer résolument dans la voie du
progrès médical et de se guide: sur la constellation lumineuse dont tout
à l'heure je parlais. :
Que faut-il pour cela? Quel but devez-vous poursuivre ? Les trois astres
de la constellation répondent à cette double question. La Bactériologie est
déjà très brillamment représentée chez vous par un Institut dont les tra-
vaux sont connus et hautement appréciés de tout le monde savant. Il
reste donc à organiser l’enseignement et l'étude de la Parasitologie ani-
male et de la Mycologie. Ne croyez pas que ce soient là des branches
accessoires de la Médecine scientifique : ce sont, bien au contraire, deux
côtés du trépied sur lequel va désormais reposer l'édifice médical; les
trois côtés sont de même valeur et de même importance.
L'immensité de votre territoire, la diversité des climats, l'inégalité des
flores et des faunes, voilà quelques-unes des raisons qui me permettent
d'affirmer que la nosologie présenteelle-même, dans votre vaste pays, une
surprenante variété. On sait encore peu de chose à cet égard, mais le
mal de caderas, la tristeza, la maladie de Posadas, l’actinomycose, la
lombriz, l'organisme de Seeber, etc. témoignent d'une diversité de zooses
et de mycoses (1) qu'on chercherait vainement ailleurs.
Ce n’est que le début, et déjà l'étude de ces maladies exige des con-
naissances d'histoire naturelle très approfondies et très variées. Je viens
de citer non seulement des maladies humaines, mais aussi des maladies
du bétail; c’est que, pour un Parasitologue, la médecine vétérinaire est diffi-
cilement séparable de la médecine humaine. Les philosophes spiritualistes
ont pu croire que l'Homme était dans la Nature un être à part: la Méde-
cine vient leur infliger un démenti cruel. Elle précipite l'Homme du pié-
destal où ils l’avaient hissé péniblement, elle établit ses étroites affinités
avec les animaux qui l'entourent : elle le montre doué de la même struc-
ture, capable des mêmes actions, subissant les mêmes maladies. La Méde-
cine scientifique ne peut donc, sous peine de s’entourer d’une muraille de
(4) Maladies causées par les Animaux et par les Champignons parasites.
DOS NOTES ET INFORMATIONS
Chine, borner son horizon à la seule contemplation de l'Homme malade ;
il est une foule de phénomènes dont elle ne peut trouver l'explication que
dans les maladies des Animaux domestiques ou sauvages.
Mais je me laisse entrainer à des considérations qui ne vous apprennent
rien, Car votre esprit philosophique m'est connu et j'ai plaisir à constater
qu'il existe entre nous, sur ces questions fondamentales, une parfaite
communion d'idées. Je reviens donc au sujet que je n'aurais pas dù perdre
de vueet je crois ne pouvoir mieux faire que de vous donner connais-
sance d'un document où j'ai eu déjà l’occasion de formuler mon opinion sur
les questions qui nous occupent.
Voilà bientôt un an, le D' Miguel Couro, professeur à la Faculté de Mé-
decine de Rio-de-Janeiro, m'a fait l'honneur de m'écrire pour me deman-
der ce que je pensais äe la création, dans les Facultés de Médecine du
Brésil, d’une chaire spéciale de clinique des maladies tropicales, à laquelle
serait adjoint un laboratoire. Je vous transcris ci-après ma réponse; elle
exprime, aujourd hui encore, très fidèlement mon opinion; elle s applique
d'ailleurs à votre pays tout aussi bien qu'au Brésil.
{Suit la lettre à M. le Professeur M. Couro, précédemment publiée dans
les Archives (1).]
La République Argentine me semble être, entre tous les pays de l'hé-
misphère austral, la terre promise aux Parasitologues. Jouissant d’un
climat tropical par ses contrées septentrionales, par la région où vous
allez installer votre Institut, elle passe progressivement par toute la gamme
des climats, jusqu'aux plus rigoureux; aucune terre australe ne s’avance
plus loin vers le pôle. Des conditions aussi diverses pour la flore et la
faune, des étendues aussi immenses ouvertes à l’activité des Hommes
réservent à ceux-ci et aux animaux domestiques des maladies infiniment
variées. Nul pays sous-équatorial n'est donc plus directement intéressé
aux créations scientifiques auxquelles je faisais allusion tout à l'heure.
Vous allez, à Tucumän, organiser un Institut Parasitologique qui, je n’en
doute pas, s’inspirera de ces principes, mais cela ne saurait suffire et,
dans un avenir prochain, il sera nécessaire de multiplier les établisse-
ments de ce genre : vous aurez du moins le mérite considérable d'avoir
le premier compris l'importance de ces questions et d'avoir réalisé la pre-
mière organisation de ce genre, J’entrevois la création successive d'Ins-
tituts analogues, dans les grands centres de population, à mesure que
ceux-ci se constituent et s’accroissent, et j'ai la vision très nette, non
seulement des bienfaits qui en résulteront au point de vue de l'hygiène
générale, mais aussi du labeur scientifique intense qui s'accomplira en
chacun d'eux. Vous avez une Nature toute neuve, vous avez l'intelligence,
l'énergie, l'argent; vous formerez ou nous vous formerons les savants
capables de mener à bien une aussi vaste entreprise, et la République
Argentine conquerraau soleil de la science une place éminemment enviable.
(1) L'enseignement de la Médecine coloniale. Archives de Parasilologie, X,
p. 107, 1905.
er
NOTES ET INFORMATIONS 509
Ce ne sont point là, mon cher ami, des visions fantaisistes : c'est, j'en
ai la certitude absolue, un aperçu des progrès futurs et prochains. Chaque
pays a ses maladies, comme il a ses Animaux et ses Plantes, ou plutôt
parce qu'il a ses Animaux et ses Plantes : il est donc nécessaire d'étudier
ces maladies spéciales, d'en déterminer les causes, les moyens de trans-
mission, de suivre dans toutes les phases de leur évolution, à travers les
hôtes variés qui les peuvent héberger, les organismes parasitaires qui
déterminent l'infection : ces études aussi compliquées que diverses sont
seules capables de mener à une connaissance parfaite des conditions
morbides et, par conséquent, de dicter une prophylaxie rationnelle. Le
programme est immense et de nombreuses générations d'Hommes de
science pourront y exercer leur talent et leur patience sansen venir à bout.
Ce programme, c'est celui des pays neufs, encore imparfaitement
connus dans leurs conditions d'acelimatement et d'habitabilité: tout està
faire et la moisson des découvertes s'annonce particulièrement abondante.
Quant à nous, Européens, qui habitons une toute petite portion du
globe, où les climats sont plus homogènes et les maladies moins variées
et d'ailleurs mieux connues, notre rôle n'est pas achevé. Il nous reste à
mieux étudier nos affections propres, qui sont celles de la race blanche
et qui, avec celle-ci, se sont répandues à la surface du globe : ce sont
aussi, pour une part, les affections de votre pays, et voilà comment nos
études se rapprochent.
Il reste également, à ceux des pays d'Europe ou possèdent des colo-
nies, à faire une étude approfondie des maladies qui y sévissent et dont
quelques-unes sont excessivement meurtrières; et voilà comment, encore
une fois, votre programme et le nôtre se confondent. Notre solidarité
scientifique s'affirme donc de toutes les manières; cela nous promet la
continuation et l'extension des relations d'estime et d'amitié réciproques
entre savants de pays différents, unis dans une même poursuite de la
vérité scientifique et animés du même désir de contribuer au bien-être
de l'humanité soufirante.
En Europe, les nations colonisatrices ont, depuis quelques années, en-
trepris avec ardeur la lutte contre les maladies des pays chauds; elles
ont, eu outre, donné une extension nouvelle à l’enseignement de la patho-
logie exotique, dans le but de fournir aux colonies et aux pays de pro-
tectorat un corps de médecins qui fussent au courant des questions très
spéciales afférentes à cette branche particulière des sciences médicales.
La France possède actuellement trois centres d'enseignement de la patho-
logie exotique : Bordeaux pour les médecins de la marine, Marseille pour
les médecins coloniaux, enfin Paris.
Ici, la clientèle nous vient de sources très diverses. C’est d’abord,
pour une petite part, des médecins coloniaux, profitant d'un congé pour
suivre nos cours et fréquenter nos laboratoires; c'est surtout des méde-
cins civils, voulant faire leur carrière aux colonies; c'est enfin une forte
proportien de médecins étrangers venant de Colombie, du Vénézuela,
510 NOTES ET INFORMATIONS
de Porto Rico, du Nicaragua, du Guatemala, de Bolivie, d'Haïti, de la
xépublique Dominicaine, de l’armée des États-Unis, d'Angola, de Grèce,
d'Italie, de Maurice, des Indes, etc. Si les statistiques n'étaient si fasti-
dieuses, je pourrais dresser un tableau montrant la proportion des difié-
rentes nationalités; vous y verriez que les Hispano-Américains forment
la très grande majorité des élèves de notre Institut de Médecine colo-
niale. Nous n'avons eu encore aucun Argentin; je le regrette, car j'ai vos
compatriotes en grande estime, mais je m'en console, car cela démontre
l'excellence de vos Facultés de Médecine.
Qu'ajouterai-je encore, mon cher ami? Le rôle social du médecin
grandit chaque jour; il doit être prépondérant dans les sociétés à dévelop-
pement rapide, comme la vôtre, car de lui dépendent pour une très large
part la salubrité des cités nouvelles, le choix de leur emplacement, les
conditions de leur extension : il est l'arbitre pacifique des destinées des
peuples. Quel rôle plus noble a jamais été joué dans l'histoire de l'huma-
nité? Les notions scientifiques sur lesquelles repose ce rôle admirable
dérivent essentiellement de la connaissance des maladies parasitaires. La
Parasitologie domine toute la Médecine scientifique : le Parasitologue doit
être désormais le conseiller et le guide des Pouvoirs publics. Vous avez
plus qu'aucun autre les qualités morales et la solide instruction tech-
nique qui sont indispensables à l'exécution d’une tâche aussi élevée.
Bien cordialement à vous.
R. BLANCHARD.
Hemos traducido fielmente la carta del profesor BLANCHARD, sin añadir
ni quitar nada, ni aun los pärrafos que se refieren à nuestra persona y
de los cuales protestamos sincera y amigablemente; era necesario no
alterar su pensamiento, y nos hemos conformado.
EL profesor BLANCHARD es uno de los pocos hombres de ciencia que no
ignora absolutamente lo que pasa en nuestro pais: es un poliglota distin-
guido, pues habla alemän, inglés, italiano, español; puede estar y estä,
pues, al corriente de nuestro movimiento cientifico.
Ultimamente sir Patrick Mansox. el ilustre director de la Escuela de
Medicina Tropical de Londres, ha sido invitado por una Universidad norte-
americana (creo que la de San Francisco), para dar una serie de con-
ferencias, y ha ido en efecto y satisfecho su programa. No seria posible,
digo yo, que nuestra Universidad 6 nuestro Gobierno invitara à conoci-
dos hombres de ciencia en las diferentes ramas del saber humano, no
digo 4 dar conferencias, pero aunque mäs no fuera que para visitar y
conocer nuestro pais. { Hay alguien que pueda desconocer 10 benéfico que
seria para nosotros el ser mejor conocidos en el exterior ? Dejo la pregunta
y espero la respuesta.
Dr. PEDRO J. GARCIA.
Paris, abril de 1906.
— L'article qui précède a été publié dans La Prensa de Buenos Aires,
numéros du lundi 7 mai et du mercredi 16 mai 1906; il a été publi
NOTES ET INFORMATIONS 511
aussi dans la Revista de letras y ciencias sociales, Tucumän, V, p. 3-15,
octobre 1906. Nous le reproduisons intégralement, à cette différence près,
que nous rétablissons dans son texte français la lettre du Professeur R.
BLANCHARD, publiée en espagnol dans les deux journaux argentins.
La chaire de Parasitologie de la Faculté de Médecine de Paris. — Par
décret en date du 15 décembre 1906, la chaire d'Histoire Naturelle médi-
cale de la Faculté de Médecine de Paris a été transformée en une chaire
de Parasitologie et d'Histoire Naturelle médicale. Nous avons annoncé
déjà ce fait, mais nouscroyons utile d'y revenir, pour dégager sa portée et
sa signification.
Il ne s’agit, à première vue, que d’une simple modification du titre de
l’une des chaires les plus anciennes de la Faculté. En réalité, le faitest plus
important : il consacre et rend officielle une évolution profonde qui s’est
accomplie dans l'orientation et l’enseignement des sciences naturelles
appliquées à la médecine. 0
Jusqu'en 18S3, l’enseignement de l'Histoire Naturelle à la Faculté de
Médecine de Paris consistait en un cours de botanique et de zoologie
pures, qui aurait pu tout aussi légitimement trouver sa place à la Faculté
des sciences. Le professeur BAILLON, qui enseignait les familles végétales,
l’agrégé DE LANESSAN, qui enseignait la zoologie, n'avaient guère souci du
point de vue médical proprement dit; ils avaient beaucoup de talent et
beaucoup de succès, mais l'’amphithéâtre était, à juste titre, assidüment
iréquenté par les élèves de la Sorbonne, qui venaient y entendre une
excellente préparation à la licence.
Dès le mois de novembre 1883, époque où il inaugura son enseignement
à titre d'agrégé, M. R. BLancaarD donna à la zoologie médicale une
direction toute différente. Il se renferma presque exclusivement dans l’é-
tude des parasites et des maladies qu'ils déterminent; d'année en année,
des questions nouvelles surgissant, cet enseignement nouveau prit une
ampleur remarquable. Ce serait perdre son temps à raconter ce que cha-
cun sait, que d'insister sur le succès considérable qu'il rencontra auprès
des jeunes générations médicales. À cette époque, les étudiants suivaient
encore les cours et le grand amphithéâätre était comble à chacune des
leçons du jeune agrégé. L'exemple donné par Paris fut alors suivi plus ou
moins complètement par les Facultés et Écoles de province, ainsi que par
un certain nombre de Facultés étrangères.
Nommé professeur d'Histoire Naturelle médicale à la Faculté de Paris,
en 1897, M. R. BLancHaRp reprit et acheva son œuvre. Il fit pour la bota-
nique ce qu'il avait fait pour la zoologie, c'est-à-dire qu'il la spécialisa
étroitement dans le sens de la parasitologie. Les conférences de l’agrégé,
les travaux pratiques des élèves, furent spécialisés de la même façon. Ainsi
se trouva définitivement constitué à tous ses degrés l’enseignement de la
Parasitologie.
Il suffit d'ouvrir les yeux pour constater que! les agents animés jouent
un rôle de plus en plus important en pathologie. Dans une foule de mala-
ol
1Ÿ
NOTES ET INFORMATIONS
dies longtemps considérées comme essentielles, on trouve comme agent
étiologique soit un parasite animal (Protozoaire, Helminthe, Acarien,etc.),
soit un parasite végétal (Bactérie, Champignon). La connaissance de ces
êtres parasitaires dans toutes leurs métamorphoses et à travers leurs mi-
grations est de première importance, puisqu'elle seule peut éclairer l'étio-
logie ou indiquer les mesures prophylactiques. Une telle notion ne peut
résulter d’ailleurs que d'études très techniques, qui nécessitent une con-
naissance approfondie des diverses branches de l'histoire naturelle.
Bien plus, de très nombreux animaux (Moustiques, Glossines, Acariens
divers, etc.), sans être parasites par eux-mêmes, disséminent de très
redoutables maladies infectieuses (paludisme, maladie du sommeil, fièvre
récurrente, etc.), en sorte que leur étude devient urgente pour le méde-
cin, tout au moins pour tous ceux qui doivent exercer leur art dans les
pays où sévissent ces affections et pour tous ceux qui veulent entrer dans
la carrière scientifique. Ce que nous venons de dire des animaux, tant
parasites que pathogènes, est également vrai des Champignons, dont
l'importance va chaque jour en grandissant. Nous passons sous silence
les Bactéries, dont personne ne songe plus à contester ou à restreindre le
rôle en pathologie.
Bien loin de passer à l'état de science accessoire ou démodée, l'Histoire
Naturelle médicale devient donc véritablement prépondérante en médecine
scientifique. Le progrès de nos connaissances ne la réduit point à la por-
tion congrue, ainsi que des esprits chagrins et mal informés croient
encore pouvoir le dire; il lui imprime, au contraire, une impulsion nou-
veille et vigoureuse; il la place en lumière; il ouvre devant elle un champ
immense, qui sera fertile en découvertes sans nombre et dont le défriche-
ment est à peine ébauché. Ou plutôt, car il serait plus juste de s’expri-
mer ainsi, la conception parasitaire moderne a engagé les recherches de
médecine scientifique dans une voie toute nouvelle, qui sera particulière-
ment féconde.
C'est la Parasitologie qui a été l'instigatrice de ces nouvelles tendances.
Elle a vaillamment conquis droit de cité dans nos Facultés de médecine.
Il était juste qu’une chaire de Parasitologie fut créée à la Faculté de Paris,
il est également juste que le premier titulaire soit le savant à l'initiative
duquel est dù cet enseignement nouveau, dont le succès et l'utilité vont
chaque jour en s'affirmant.
M. ie Professeur R. BLancHARD est pour le Progrès Médical un collabo-
rateur et un ami de trop ancienne date pour que nous n'éprouvions pas
un vif plaisir à le féliciter. Il a le bonheur de voir son œuvre officiel-
lement reconnue et consacrée; il fait école : ses deux premiers élèves, le
D' J. Guiarr et le D' NeEvEu-LEMAIRE, sont l’un professeur, l’autre agrégé
a la Faculté de médecine de Lyon; il imprime sa direction à une phalange
de jeunes savants qui se forment à bonne école et dont quelques-uns,
comme le D’ Brumpr, jouissent déjà d'une notoriété considérable.
Les Archives de Parusitologie, que le Professeur R. BLANCHARD a fondées
NOTES ET INFORMATIONS 513
en 1898 et dont le 11° volume est en cours de publication, témoignent
d'ailleurs de l’activité du Laboratoire de Parasitologie. De même, le succès
de l’Institut de Médecine coloniale, que le professeur R. BLANcHARD a fondé
en 1902 et qui, à chacune de ses sessions, attire une forte proportion
d'étrangers, montre assez clairement la bonne réputation dont jouit au
loin l’enseignement nouveau, qui ajoute un nouveau fleuron à la cou-
ronne de notre Faculté parisienne. — BourNeviLe, Le Progrès médical,
(3), XXIII, p. 52, 26 janvier 1907.
Institut de Médecine Coloniale. — Par une délibération en date du 13
mars 1902, le Conseil de la Faculté de Médecinede Paris a décidé la création
d'un Institut de Médecine coloniale : c'était la réalisation d'un projet que,
depuis deux années, M. le professeur R. Blanchard poursuivait par des
moyens variés, notamment par la publication de plusieurs articles et bro-
chures. Un peu plus tard, le Conseil de l'Université de Paris instituait un
diplôme de Médecin colonial en faveur des élèves ayant subi avec succès
l'examen de sortie.
L'Institut a pour but de donner aux médecins destinés à exercer leur
art dans les pays chauds un complément d'instruction sur les questions
capitales d'hygiène, de médecine, de parasitologie avec lesquelles ils se
trouveront aux prises et dont la solution exige des connaissances scien-
tifiques très spéciales. Il reçoit comme élèves des docteurs français et
étrangers, des internes des hôpitaux et des étudiants de cinquième année
La grande majorité des élèves sont des médecins civils ; aussi l'Institut de
Médecine coloniale de Paris a-t-il une physionomie bien particulière et ne
fait-il aucune concurrence aux institutions similaires de Marseille et de
Bordeaux.
Chaque année, pendant les trois mois d'octobre, novembre et décembre
a lieu une session de cours et de travaux pratiques, à la Faculté de Méde-
cine. L'enseignement clinique est donné à l’hôpital de l'Association des
Dames Françaises, 93, rue Michel-Ange. La première session a eu lieu en
1902; la cinquième s’est ouverte le lundi 15 octobre 1906, avec 32 élèves.
Voici l'état nominatif de ces 32 élèves, classés par nationalités; le nom
de ceux encore dépourvus du diplôme de docteur, bien qu'ayant achevé
leur scolarité, est imprimé en italiques :
FRANCE : MM. Alexandre, Bacaresse, Blanquier, Boricaud, Dauge, Janin
Josephson, Lenoble, Mathieu, Mauroy, Thiercelin et Tremblin.
BRESIL : M. Bourroul.
CocoMBie : MM. Barreto, Ca]iao et Ricardo.
EGyprTe : M. Sabitt.
GRÈCE : MM. Adam, Sykiotis, Ventouras et Zoulia.
Hart : MM. Malebranche et Pérez.
ParaGuay : MM. Coronel et Gubetich.
_ Porro Rico : M. Manzano y Soto.
SAN-SALVADOR : M. Soriano.
514 NOTES ET INFORMATIONS
Turquie : MM. Bicas, Christodoulos et Ségal.
VENEZUELA : MM. Gonzalez et Tinoco.
Au total, douze Français contre vingt étrangers.
Jusqu'à ce jour, le diplôme de Médecin colonial de l'Université de Paris
a été délivré à 133 élèves. Il nous paraît intéressant de présenter dans
les trois tableaux ci-contre divers renseignements statistiques relative-
ment aux cinq premières promotions.
Pendant le cinquième session, le programme des divers cours et exer-
cices pratiques a été le suivant :
M. le professeur RoGEer. — Du 15 au 31 octobre, quinze leçons de tech-
nique bactériologique et hématologique, suivies d'exercices pratiques, au
laboratoire de pathologie expérimentale de la Faculté de Médecine.
M. le professeur R. BLancHarp. — Du 2 au 26 novembre, vingt et une
leçons sur les maladies parasitaires, suivies d'exercices pratiques, au
laboratoire de parasitologie.
M. le professeur CHANTEMESSE. — Du 24 novembre au 8 décembre, sept
leçons d'hygiène et de police sanitaire, suivies d'exercices pratiques, au
laboratoire d'hygiène.
M. le professeur DE LAPERSONNE. — Quatre leçons d’ophtalmologie, à
l’'Hôtel-Dieu.
M. le professeur GAUCHER. — Quatre leçons de dermatologie, à l'hôpi-
tal Saint-Louis.
M. le docteur Wurrz, chargé de cours. — Treize leçons cliniques, à
l'hôpital de l'Association des Dames Françaises, 93, rue Michel Ange. —
Six leçons théoriques et onze exercices pratiques au laboratoire d'hygiène.
M. le docteur JEANSELME, agrégé. — Quatre leçons de dermatologie, à
l'hôpital Saint-Louis.
M. le docteur MoREsTIN, agrégé. — Six leçons de chirurgie, au petit
amphithéâtre de la Faculté.
Les étrangers, presque tous docteurs, qui recherchent le diplôme de
Médecin colonial de l'Université de Paris, représentent exactement 50
pour 100 des élèves, on comprend tout l'intérêt de ce fait, au point de
vue de l'influence française à l'étranger. Quelques-uns d’entre eux occu-
- pent déjà d'importantes situations scientifiques ou administratives dans
leur pays. L'Université de Bogota (Colombie) a fondé une chaire de cli-
nique des maladies tropicales en faveur du D' FRANCO, major de la pre-
mière promotion. Le D' ne MaGaLnies est chef de clinique à l'École de
médecine tropicale de Lisbonne.
Quant aux médecins français, ils trouvent très facilement des emplois
avantageux, soit dans diverses colonies (Indo-Chine, Madagascar, Afrique
occidentale, Congo), soit auprès de diverses Compagnies de colonisation,
qui réservent à juste titre leurs postes médicaux aux titulaires du diplôme
de Médecin colonial.
Tout récemment encore, le Gouverneur général de l’Indo-Chine créait
une importante organisation sanitaire, dans les cadres de laquelle il
offrait des avantages spéciaux aux possesseurs de ce même diplôme.
NOTES ET INFORMATIONS 515
4° Répartilion des élèves suivant leur situation médicale.
1903 190% 1905 1906
em | 0 | 0 ||
Franc. Élrang. Franc. Étrang.|| Franc. Étrang. Frane. Étrang.
1902
a,
France. Étrang.
Professeurs d’Université.| » » ) » » 1 ) » » »
Docteurs en médecine . .| 6 6 6 ON A2) MAS MIO 8 |18
Internes des hôp. deParis.| 3 » || 3 1 il ) Il » » »
Etudiants de 5° année. .| 5 » | 4 2 3 » 5) 3 5 il
190% 1905 1906
Docteurs français
Docteurs étrangers pourvus du diplôme
français .
Docteurs étrangers pourvus d'un di-
plôme étranger. ë :
5° Répartition des élèves suivant leur nationalité.
1902 1903 190 1905 1906 Totaux
er]
O6 OO en en Ho en QO me mn CO me me Ra OO en m7 CO de me NO © ee = hO Où
BTAN CEA RE EE ALMA PES 17
Belgique . Î
Bolivie. . .
Brésil
Chili.
Colombie.
Costa-Rica . à ot
République Dominicaine .
Esypier We
Etats-Unis .
Grèce 3
Guatémala . .
Haïtieee
Italie
Maurice
Nicaragua
Paraguay
Pérou .
Porto Rico.
Portugal.
Roumanie
Russie .
San Salvador.
Suisse .
Turquie .
Venezuela
x
Ce
(9!)
Totaux. .
516 NOTES ET INFORMATIONS
Pour mettre en évidence ïa variété et l'importance des travaux pra-
tiques de Parasitologie, nous croyons utile de donner ici le programme
des vingt-et-une manipulations que les élèves de l’Institut de Médecine
coloniale ont faites pendant la dernière session, sous la direction de M. le
D' Brumprt, chef des-travaux pratiques, assisté de M. le D' M. LANGERON,
préparateur.
1" manipulation. — Recherche de diverses espèces d’Amibes dans
l’eau douce. — Étude sommaire des êtres vivants de l’eau (Infu-
soires, Nématodes libres, Diatomées). — Montage sur lames de trois
coupes de dysenterie amibienne.
2° manipulation. — Coloration des coupes distribuées et étude de
la distribution des Amibes dans les tissus, formation des ulcérations
spécifiques. — Recherche des Infusoires dans le gros intestin de
la Grenouille verte. — Montage sur lames de trois coupes de Coc-
cidium cuniculi et de Coccidium hominis; d’une coupe de la Coccidie
du Poulpe et d’une coupe de la Coccidie de la Seiche.
3° manipulation. — Coloration et étude des coupes distribuées.
Cycle évolutif de la Coccidie intestinale du Lapin comme type d’évo-
lution d’un Sporozoaire (schizogonie dans les points récemment
envahis; sporogonie dans les lésions anciennes : macrogamétocyte,
microgamétocytes et microgamètes, oocystes). — Étude de la Coc-
cidie du Poulpe et de celle de la Seiche. Grâce au volume des para-
sites, il est facile de différencier les éléments qui caractérisent la
_ sporogonie, il est facile de suivre les microgamètes à travers les
mailles du tissu conjonctif. La formation des sporozoïtes à l’inté-
rieur des spores se rencontre à tous ses stades sur les coupes et
ne nécessite pas une culture en dehors du corps de l'animal comme
c'est le cas pour la Coccidie du Lapin.
4° manipulation. — Coloration de frottis de spores de la Sarcospo-
ridie de l’æœsophage du Mouton par le mélange bleu Borrel-éosine. —
Montage de deux coupes de Sarcosporidies ; coupes d'organes d’un
individu mort d’un accès de paludisme pernicieux (pancréas, rein,
rate et foie).
5° manipulation. — Coloration des coupes de la manipulation
précédente. Recherche des corps en rosace dans les capillaires des
organes; ces formations sont très nombreuses, certains capillaires
en sont bourréset ne renferment plus de globules rouges. Recherche
des leucocytes mélanifères. Recherche du pigment noir dans le foie
et la rate et du pigment ocre dans le foie. Diflérenciation facile de
ces pigments après action du sulfhydrate d’ammoniaque.
6° manipulation. — Coloration au bleu Borrel-éosine des Héma-
tozoaires endoglobulaires du sang d'Oiseau (Padda), de la Babésie
du Chien ou du Bœuf; de l'Hémogrégarine de la Tortue d’eau. —
Différenciation facile des macrogamètes et des microgamètes d’Æal-
teridium dans le sang coloré du Padda. Examen de sang frais d'Oiseau,
st
NOTES ET INFORMATIONS 4 147
pour reconnaître les microgamètes émis par les éléments parasitaires
mâles.
Cette première manipulation sur les parasites du sang a pour but
de familiariser les. élèves avec la technique très simple que nous
recommandons pour leur coloration.
7e manipulation. — Étude des trois parasites de la fièvre palu-
déenne de l'Homme. Coloration du parasite de la fièvre tierce bénigne
(Plasmodium vivar). Remarquer lhypertrophie du globule et l’exis-
tence des granulations de Schüffner. Gamètes; rosaces. — Colora-
tion du parasite de la fièvre tierce maligne (Plasmodium falci-
parum). Reconnaître les granulations de Maurer, faciles à distinguer
de celles de Schüffner. Gamètes ou corps en croissants. — Coloration
du parasite de la fièvre quarte (Plasmodium malariæ). Constater
l’absence de granulations dans l’hématie parasitée et son atrophie
très nette; corps en rosace.
8° manipulation. — Études des Flagellés. Recherche à l’état frais
de Trypanosomes et de Trypanoplasmes dans le sang de divers
animaux. Recherche des 7richomonas dans l'intestin du Cobaye ou
dans celui d’une Sangsue d’eau douce (/æmopis sanquisuga). — Colo-
ration du Trypanosome de la maladie du sommeil dans des frottis. —
Coloration du Trypanosoma inopinatum dans le sang de Grenouilles
infestées expérimentalement. Constater l'intensité de la réaction pha-
gocytaire dans cette maladie, certains macrophages englobent quel-
quefois dix ou vingt Trypanosomes. Coloration du Trypanoplasme de
la Tanche.
9° manipulation. — Coloration de nouveaux frottis de parasites du
sang. Montage sur lames de deux coupes de cerveau et d’une coupe
de cervelet d’un Nègre mort de maladie du sommeil et ayant des
lésions typiques.
10° manipulation. — Coloration des coupes de la précédente mani-
pulation. Remarquer la leptoméningite très nette qui, au point de
vue anatomo-pathologique, caractérise la maladie du sommeil. Les
vaisseaux sanguins du système nerveux sont entourés d’une gaine
de cellules embryonnaires. Les lésions des cellules nerveuses ne
peuvent être étudiées que par une technique spéciale (méthode de
Nissl). — Montage d'une coupe de kyste hydatique du foie ou du
poumon, d'une coupe de foie humain douvé; d’une coupe de foie
de Mouton parasité par la grande Douve (Fasciola hepatica) et d’une
coupe de foie de Mouton parasité par la petite Douve (Dicrocælium
lanceatun)).
11° manipulation. — Coloration des coupes distribuées à la précé-
dente manipulation. — Remarquer sur la coupe de kyste hydatique
la réaction défensive de l'hôte; la membrane germinative stratifiée et
plissée; les vésicules proligères. Sur les coupes de foie humain,
remarquer la sclérose qui entoure les canaux biliaires hypertro-
518 NOTES ET INFORMATIONS
phiés et adénomateux, ainsi que la dégénérescence graisseuse des
cellules hépatiques. Sur les coupes de foie de Mouton, étudier la
sclérose et l’atrophie du tissu hépatique.
19° manipulation. — Étude des Moustiques. Montage dans la
gélatine glycérinée de la larve et de la nymphe de Culex; du mâle et
de la femelle de Culex ; de la larve et de l’adulte (mâle ou femelle)
d'Anopheles. Étude de la nervure des ailes, des pièces buccales,
des écailles, des ongles et des éléments anatomiques capables de
faciliter la détermination de ces Insectes. — Cette manipulation se
faisant au mois de novembre, il est impossible de la compléter par
la dissection de Moustiques frais, ce qui permettrait d'étudier le tube
digestif, les tubes de Malpighi et les glandes salivaires, dont l’impor-
tance est très grande en parasitologie.
13° manipulation. — Etude des Cestodes. Constater la vivacité
relative des Cestodes des animaux à sang chaud, quand on les exa-
mine dans la solution physiologique chauffée à 37°. La démonstration
peutse faire avecles Cestodes si communs dans l'intestin du Chien. —
Rechercher des Æymenolepis, dans la dernière portion de l'intestin
grêle du Surmulot ; étudier leur mode de fixation, regarder la tête et
les crochets au microscope. Les œufs très transparents permettent de
bien suivre les mouvements des embryons hexacanthes; en pressant
sur le couvre-objet, les embryons sortent de leur œuf et effectuent des
mouvements caractéristiques qui permettent de bien comprendre
leur pénétration à travers les parois du tube digestif. Rechercher des
Dipylidium dans l'intestin du Chien ou du Chat. Monter dans le
lactophénol une tête armée de crochets du Zænia serrata du Chien.
Disséqueret monter la tête du Zæna sohium extraite des Cysticerques
du Porc. Monter des œufs de Zænia saginata dans du lactophénol.
Examiner des œufs de Bothriocéphale par dilacération d’un anneau
de ce Ver; constater la présence d’un clapet.
14° manipulation. — Étude des Trématodes. Étudier à l’état frais,
par compression, la petite Douve du foie du Mouton (Dicrocælium
lanceatum); en distinguer les divers organes. Étudier de la même
façon la grande Douve du même animal (Fasciola hepatica). — Colo-
rer des petites Douves au carmin chlorhkydrique et les monter dans
le baume ou dans la gélatine glycérinée. Revoir les coupes colorées
à la 49° manipulation et se rendre compte de la structure histolo-
gique des Douves, ainsi que des réactions qu’elles produisent chez
l'hôte parasité. — Examiner des coupes de Poumon parasité par le
Paragonimus Westermanni et constater la formation de l’épithélium
pavimenteux stratifié. |
15° manipulation. — Étude des Nématodes. Constater que les
Nématodes, qui paraissent immobiles quand on les examine à la
température ordinaire, effectuent des mouvements très violents à la
température de 37°. Examiner dans l’eau physiologique, à 37°, des
NOTES ET INFORMATIONS 519
Ascarides du Chat ou du Chien, des Oxyures et des Trichocéphales
de la Souris grise. Étudier des Ascarides des deux sexes (Ascaride
du Cheval ou du Porc). Monter dans le lactophénol, des Oxyures
(Oxyure de la Souris grise). — Monter dans le lactophénol, un peu du
contenu de l'intestin grêle d’un Rat trichiné depuis une semaine, pour
étudier les Trichines adultes, mâles et femelles. Dissocier et monter
dans le lactophénol un fragment de muscle de Rattrichiné. Examiner
par compression, à l’état frais, de la viande trichinée. Monter sur
lame une coupe de langue de Rat mort de trichinose expérimentale.
16° manipulation. — Études des Nématodes (suite). Monter sur
lame une coupe de tumeur à filaria volyulus, ainsi qu'une coupe de
peau éléphantiasique. Colorer les coupes et reconnaître, dans la
tumeur à filaria volovulus, de nombreuses sections du corps des Filai-
res femelles et mäles; les tubes utérins sont remplis de Microfilaires
qui, une fois pondues, se fraient un passage à travers le tissu con-
jonctif. Dans la peau éléphantiasique, reconnaitre l'intégrité de l’épi-
derme et la sclérose intense du derme. — Examiner à l’état frais du
sang d’une Grenouille verte présentant de nombreuses Microfilaires
pourvues d'une gaine.
17 manipulation. — Etude des matières fécales et de l'urine.
Monter une parcelle de matières .dans du lactophénol, directement
ou après dilution, si la consistance l’impose; reconnaître les débris
végétaux et animaux de l'alimentation : fragments de fibres muscu-
laires, tissu conjonctif, vaisseaux spiralés, annelés, ponctués des
faisceaux libéro-ligneux des végétaux, poils végétaux, cellules végé-
tales, épiderme végétal avec ses stomates souvent caractéristiques.
Reconnaître les cellules intestinales desquamées au cours de la diges-
tion. Ne pas confondre des grains de pollen, des segments de
faisceaux annelés des végétaux ou des spores de divers Champignons
et en particulier des Truffes avec des œufs de parasites. — Recher-
cher des oocystes de Coccidie dans des crottes de Lapin infesté ; exa-
miner des déjections humaines contenant des œufs d’Ascaride, de
Trichocéphale, d'Oxyure, d’Uncinaire. Etant donnée la rareté des
affections à Douves chez l'Homme dans nos contrées, se familiariser
avec l’aspect que présentent leurs œufs dans les matières en exami-
nant des déjections de Mouton douvé. Monter et examiner des œufs
de Linguatule et d’Acanthocéphale. —- Chercher dans le sédiment
urinaire d’un individu atteint d'hématurie d'Égypte les œufs carac-
téristiques du Schistosomum hæmatobium. Examiner des embryons
d'Uncinaire provenant d’une culture.
18° manipulation. — Monter et colorer une coupe d’adénome
bilharzien de l'intestin ; remarquer l'abondance des œufs en certains
endroits. — Étude des Acariens parasites : les Tiques. — Étude des
Insectes parasites : monter, dans le baume de Canada ou la gélatine
glycérinée, des Puces et leurs larves; remarquer les caractères des
520: NOTES ET INFORMATIONS
diverses parties du corps qui permettent de distinguer les espèces.
Cette détermination, étant donné le mode de transmission dela peste,
a une réelle importance. Disséquer et monter les pièces buccales de
diverses Mouches piqueuses. — Monter plusieurs coupes d’actino-
mycose du Bœuf.
19° manipulation. — Colorer une coupe d’actinomycose à l'héma-
téine-éosine pour voir les réactions inflammatoires des tissus para-
sités (cellules géantes, cellules épithélioïdes, cellules embryonnaires).
Colorer une coupe au Gram, reconnaitre les spores mycéliennes dans
les vieux grains, les filaments mycéliens et les massues dichoto-
miques, quisouvent pénètrent dans les cellules épithélioïdes. Colorer
une coupe d'actinomycose d’abord à l’hématéine, puis au Gram: les
rapports des tissus et des parasites sont plus faciles à étudier. —
Monter une coupe de mycétome à grains blancs de Vincent (Dis-
comyces Maduræ); une coupe de mycétome à grains noirs classique
(Madurella mycetomi) ; une coupe de mycétome à grains noirs produit
par l'Aspergillus Bouffardi.
20° manipulation. — Colorer les trois coupes distribuées à la
précédente séance. Etudier dans chaque coupe les tissus inflamma-
toires, le mode de progression du Champignon parasite. Constater
l’abondance des conidies dans les grains du mycétome à Aspergillus
Bouffardi. — Faire bouillir dans la potasse un cheveu ou un poil
teigneux, pour mettre en évidence le parasite.
21° manipulation. — Cette séance est consacrée à des démonstra-
tions au microscope de préparations rares qui ne peuvent être don-
nées en manipulation ou qui demandent une préparation spéciale.
Un certain nombre de microscopes sont disposés sur les tables ; à
côté de chacun d'eux un croquis indique le point intéressant à
remarquer. Les élèves peuvent ainsi voir des coupes montrant l’évo-
lutionde la Filaria Bancrofti, les parasites du kala-azar, le Tréponème
de la syphilis, le Spirochète de la fièvre récurrente; l’évolution des
parasites du paludisme, l'évolution des Trypanosomes chez les Sang-
sues; des coupes de divers Nématodes démontrant comment on peut
arriver à caractériser le genre de ces Vers’; des frotlis avec les trois
Filaires du sang les plus communes : #ilaria Bancrofti, F. loa, F.
perstans ; des coupes de peau atteinte de gale démodectique, des
coupes de tissus parasités par des Blastomycètes, des fructifications
de diverses Moisissures (/hizopus, Aspergillus, Penicillium), ete.
Programme et organisation des travaux pratiques de Parasitologie à
la Faculté de Médecine de Paris. —Les travaux pratiques de Parasito-
logie sont obligatoires pour tous les étudiants en médecine de troisième
année. Ils ont lieu dans le semestre d'hiver et comportent quarante
séances.
Les élèves de troisième année sont, bon an mal an, au nombre de cinq
NOTES ET INFORMATIONS 521
cents environ. Il est impossible de recevoir en même temps dans le
laboratoire, et de faire manipuler un nombre de travailleurs aussi consi-
dérable. Force a été, dès le début, de les répartir en quatre séries, qui
passent successivement par le laboratoire et dont chacune ne compte pas
moins de 120 à 130 élèves. C’est encore beaucoup trop : les locaux sont
trop exigus, le personnel trop peu nombreux, l’instrumentation optique
trop restreinte et le budget du laboratoire beaucoup trop maigre, pour
qu'il soit possible de donner à une telle foule l'instruction pratique dont
le besoin se fait sentir de plus en plus. Nous faisons de notre mieux: le
chef des travaux et les préparateurs rivalisent de zèle, mais nous avons
conscience que cet enseignement pratique serait plus profitable, si les
multiples conditions défavorables que nous venons d'indiquer ne nous
empêéchaient pas de lui donner toute l'ampleur qu'il mérite. En parti-
culier, il est tout à fait regrettable que nos élèves n'aient, en fait et par
suite de la pléthore dont souffre tant notre Faculté, que dix séances
chacun, au lieu des quarante séances inscrites au programme.
Les travaux pratiques de Parasitologie fonctionnent régulièrement
depuis le mois de novembre 1897. Comme il a été dit plus haut, le D° J.
GurarT en à pris la direction dès cette époque. Nous avions décidé qu’en
dix séances il exposerait oralement l’ensemble des questions afférentes à
la Parasitologie humaine et que‘chacune de ces conférences serait suivie
de démonstrations portant sur des préparations microscopiques et sur
les diverses pièces de la collection créée par moi au laboratoire. Les mi-
croscopes dont nous disposions étaient en uombre beaucoup trop restreint
pour qu'il füt possible de faire davantage. Malgré ces conditions fâcheu-
ses, M. Gurarr se mit avec ardeur à la besogne et je suis heureux de
constater le succès qui est venu récompenser ses efforts.
Depuis novembre 1906, par suite de la nomination de M. Gurarr au
titre de professeur à la Faculté de médecine de Lyon, le D' E. Brumpr est
devenu chef des travaux pratiques. L'organisation générale restant la
même, il s’est eflorcé de développer la seconde partie du programme
ci-dessus et d'intéresser plus directement les élèves à l'examen et à la
reconnaissance des préparations microscopiques.
Ne pouvant songer à faire manipuler simultanément les 120 élèves
qui composent chaque série, 1l a du moins essayé de les exercer aux
recherches pratiques ; dans ce but, ilretient au laboratoire, durant deux
séances consécutives, le cinquième des élèves de la série. La séance
commençant à une heure et demie etla conférence durant une heure
environ, ces élèves restent de deux et demie à quatre, pour étudier
le contenu des boîtes de préparations d'étude, qui sont mises à leur
disposition (boîtes A). Le second cinquième des élèves de la série
reste aprèsla troisième etla quatrième démonstration, pour effectuer
le mêmetravail. Les autres groupes se succèdent dans le même ordre.
Pendant que les élèves examinent le contenu des boîtes du type
À, un préparateur place sur une grande table une série de micros-
Archives de Parasitologie, XI, n° 3, 1907. 34
522 NOTES ET INFORMATIONS
copes munis d’un objectif à immersion et d’un oculaire indicateur.
Sous chaque microscope, il place une préparation provenant d'une
boîte de démonstration (boîte B) et dessine sur une feuille de papier
les caractères du parasite que les élèves doivent reconnaître. Les
élèves sont alors priés de venir isolément passer en revue les
préparations qui leur sont montrées.
Les étudiants ne peuvent donc quitter le laboratoire sans avoir
vu les préparations contenues dans les boîtes A et B, dont la liste
est ci-dessous ; il leur manque pourtant la pratique, que le travail
personnel seul peut faire acquérir ; il leur manque également une
collection personnelle de préparations qui, dans leur carrière médi-
cale, pourrait leur rendre de grands services. Il est donc indispen-
sable que les étudiants manipulent eux-mêmes.
Nous allons pouvoir prochainement combler cette lacune, dans
la mesure du possible. En effet, escomptant des subventions que
l'importance de la question nous permet d'espérer, mais que rien ne
nous autorise à considérer comme certaines ou même probables, et
au risque d'engager pour longtemps les crédits très modestes(4,500fr.)
dont dispose le laboratoire des travaux pratiques de Parasitologie,
nous venons de faire la commande de quarante microscopes Stiassnie,
avec objectif à immersion. De plus, le Dr Brumper, chef des travaux
pratiques, va, dés l’année scolaire prochaine, modifier son programme
de la facon suivante :
La série comprendra, comme ci-devant, dix démonstrations pra-
tiques (lundi, mercredi, vendredi). Les élèves seront tenus d'assister
à ces dix leçons ; ils seront divisés en cinq groupes, qui resteront au
laboratoire trois jours successifs. Si, par exemple, la série com-
mence un lundi, le premier groupe restera le lundi après la première
démonstration, pour examiner le contenu des boîtes du type A, et
quelques-unes des préparations de la boîte B; le lendemain, les
élèves pourront manipuler eux-mêmes, d’une heure et demie à quatre
heures. Le surlendemain (mercredi), ils resteront après la deuxième
démonstration, pour finir l'examen des préparations des boîtes A et
- B. Les autres groupes suivront un ordre identique, successivement.
Cette manipulation pratique roulera sur les sujets suivants : Re-
cherche des œufs de parasites dans les matières fécales, montage de
préparations. — Examen direct de quelques Levures (muguet) et
Moisissures pathogènes (Aspergillus, teignes), montage de prépara-
tions. — Recherche du Bacille tuberculeux dans les crachats, direc-
tement ou après inoscopie; coloration; inoculation au Cobaye.
Aspect macroscopique, typique des lésions tuberculeuses chez le
Cobaye. — Recherche et coloration du Gonocoque. — Recherche et
coloration du Bacille diphtérique ; coloration au Gram (1).
(1) Pour éviter des accidents dans ces manipulations, les cultures seront préa-
lablement stérilisées.
NOTES ET INFORMATIONS 523
PROGRAMME DES CONFÉRENCES
1" conférence. — But et importance de la Parasitologie. — Utilité
de l'étude comparée de la Parasitologie. — Classification des para-
sites. — Mode d'action des parasites : a) action mécanique; 6) action
toxique; c) action spoliatrice. — Réactions locales de l’hôte contre
le parasite : a) phagocytose; b) tumeurs inflammatoires; c) sclérose
et enkystement; d) formations d’épithélium pavimenteux stratifié aux
dépens d’épithélium cylindrique simple ; e) formations adénoma-
teuses du tube digestif, des conduits biliaires, etc. — Réactions gé-
nérales de l'hôte parasité : a) modifications du sang, importance
diagnostique des variations dans les formules sanguines ; d) modifi-
cations des autres organes : organes lymphoïdes, hématopoiétiques,
etc. — Diagnostic du parasitisme: a) par la découverte du parasite
lui-même (gale, anneaux des Cestodes, etc.); b) par l’étude du sang;
c) par l'étude des matières fécales ; d) par l'étude de diverses sécré-
tions (expectoration pulmonaire, urine, etc.).
Au cours de cette première conférence, divers types de parasites
et les tumeurs qu'ils produisent sont montrés aux élèves. Cette lecon
se termine par l'explication sommaire des principales préparations
des boites du type A que les élèves doivent étudier successivement.
2° conférence. — Technique bactériologique. — Coloration du sang
et des parasites qu'il peut contenir. — Examen des matières fécales,
leur importance en pathologie et en médecine légale.
3° conférence. — Amibes, Coccidies, Sarcosporides.
4° conférence. — Hémosporidies : action sur les hématies, mode de
transmission. à
5° conférence. — Prophylaxie du paludisme. Moustiques. Maladies
produites par les Flagellés ou flagelloses : maladie du sommeil, kala-
azar, bouton d'Orient.
6° conférence. — Généralités sur les Helminthes. — Cestodes,
Trématodes.
7° conférence. — Trématodes (suite), Nématodes, Hirudinées.
8° conférence. — Arthropodes : Arachnides, Insectes.
9 conférence. — Champignons parasites. Généralités sur le para-
sitisme des Champignons. Étude de quelques groupes.
10° conférence. — Champignons parasites (suite). — Classification
des Microbes.
COMPOSITION DES BOÎTES DE PRÉPARATIONS DU TYPE À.
1.— Coupe d’une ulcération dysentérique montrant denombreuses
Amibes.
2. — Coupe d’un estomac de Poulpe montrant tous les stades
évolutifs de la Coccidie de cet animal.
524 NOTES ET INFORMATIONS
3. — Coupe longitudinale d’un intestin grêle de Lapin montrant
divers stades évolutifs du Coccidium hominis.
4. — Coupe de tumeurs produites par le Coccidium cuniculi dans
le foie du Lapin.
5. — Coupe de rein d'individu mort de paludisme. Les corps en
rosace remplissent les capillaires.
6. — Coupe de pancréas du même individu. Les corps en rosace
sont aussi nombreux que dans la coupe précédente.
7. — Coupe de foie du même individu. Le pigment noir et le
pigment ocre abondent.
8. — Coupe de rate du même sujet. Le nt noir est très
abondant.
9. — Coupe d'un æœsophage de Mouton montrant des Sarcosporidies.
10. — Coupe de cervelet d’un Nègre mort de maladie du som-
meil. La lentoméningite est très marquée.
11. — Coupe de poumon avec un jeune kyste hydatique.
12. — Foie d’Annamite envahi par les Douves. La cirrhose et la
dégénérescence graisseuse sont extrêmement marquées.
13. — Coupe de poumon envahi par la Douve pulmonaire (Para-
gonimus Westermanni). Cette Douve produit l’hémoptysie parasitaire
de l’Extrême-Orient.
14. — Coupe d'un adénome rectal produit par les œufs de la
Bilharzie (Schistosomum hæmatobium), d'après le cas étudié par Letulle.
15. — Diaphragme de Souris montrant des Trichines enkystées.
16. — Coupe de tumeur humaine à ilaria voloulus.
17. — Coupe de tumeur actinomycosique.
18. — Coupe de mycétome à grains blancs produit par le Disco-
myces maduræ Vincent.
19. — Coupe de mycétome à grains noirs à Aspergillus Bouffardi.
20. — Coupe de mycétome à grains noirs à Madurella mycetomi.
. 21. — Coupe d’intestin de Lapin montrant divers stades évolutifs
du Coccidium hominis.
29, — Coupe de peau éléphantiasique (femme de la Guyane).
23. — Petite Douve {Dicrocælium lanceatum).
24. — Douve du foie de l'Homme (Clonorchis sinensis).
25. — Larve de Linquatula rlhinarrs.
26. — Oocystes de Coccidium cuniculi dans des matières fécales.
27. — OEufs de 7'ænia saginata.
28. — OEufs de Dibothriocephalus latus.
29. — OEufs de grande Douve (Fasciola hepatica).
30. — OEufs de petite Douve (Dicrocælium lanceatum).
31. — OEults de Clonorchis sinensts.
32. — O(Euts de Paragonimus Westermanni.
33. — OEufs d’Ascaris lumbricoides.
34. — OEufs de Zrichocephalus trichiurus.
RE —
NOTES ET INFORMATIONS 525
35. — OEufs d'Uncinaria duodenalis.
36. — OEufs d’£ustrongylus visceralis.
37. — OEufs d'Oxyurus vermicularis.
38. — OEufs de Gigantorrhynchus gigas.
39. — OEufs de ZLingualula rhinaris.
40. — Matières fécales avec œufs d’'Ascarides.
41. — Matières fécales avec œufs d’Anguillule intestinale.
49. — Matières fécales avec spores de Truffe, faciles à confondre
avec des œufs d'Helminthes.
43. — Coupe d’un ganglion tuberculeux de Cobaye.
4%. — Coupe de poumon tuberculeux de Cobaye.
45. — Coupe d'un embryon de Souris, pour montrer les hématies
nucléées remplissant l’appareil circulatoire.
46. — Coupe d'un abcès du foie amibien.
47. — Trichines adultes écloses dans l’intestin.
48. — Embryons d'Uncinaire.
49. — Larve de Culex et larve d’Anopheles.
50. — Tête de Culex femelle et tête d'Anopheles femelle.
COMPOSITION DES BOÎTES DE DÉMONSTRATION DU TYPE B.
_ 4. — Amibes de la dysenterie.
2. — Coccidies à divers stades de développement.
3. — Plasmodium malariæ (fièvre quarte).
4. — Plasmodium vivax (fièvre tierce).
5. — Plasmodium falciparum (fièvre estivo-automnale).
6. — Plasmodium falciparum, corps en rosace dans les capillaires
du rein.
1. — Halteridium, gamètes mâles et femelles.
8. — Hæmogregarina Stepanovi.
9. — Babesia bovis.
40. — Leishmania Donovani, frottis de rate d’un individu mort de
kala-azar.
11. — Trypanosoma Lewisi.
12. — Trypanosoma gambiense parasite de la maladie du sommeil.
-13. — Treponema pallidum parasite de la syphilis, dans le pou-
mon du nouveau-né.
14. — Spirochæta Duttoni de la fièvre des Tiques.
15. — Actinomycose colorée au Gram.
16. — Filaria nocturna, Microfilaire du sang de l'Homme.
17. — Corps en croissant (Plasmodium falciparum).
18. — Phagocytosedu 7rypanosoma inopinatum par des macro-
phages.
19. — Bacilles tuberculeux dans des coupes.
20. — Gonocoques dans un frottis de pus.
21. — Bacilles diphtériques d’une culture.
526 NOTES ET INFORMATIONS
École de Médecine tropicale de Lisbonne. — La loi du 24 avril 4902 a
créé à Lisbonne une École de Médecine tropicale (1). Cette Ecole est sous la
dépendance du Ministre du commerce, de la marine et des colonies, mais
ses ressources lui sont entièrement fournies par les colonies, pour les-
quelles c’est une dépense obligatoire.
L'École est annexée à l'Hôpital colonial, installé provisoirement dans
une ancienne corderie de la marine, tout près du Tage, entre Lisbonne et
Belem. Elle occupe le rez-de-chaussée et le premier étage. En bas, c’est
l'école proprement dite, avec ses laboratoires. En haut, trois salles : deux
infirmeries de 25 lits chacune, l’une pour les blancs, l’autre pour les noirs,
plus une petite salle pour les sous-officiers. On y peut étudier couramment
le paludisme, le béribéri, l’éléphantiasis des Arabes, diverses formes de
filariose {Filaria perstans, F. nocturna) et surtout la maladie du sommeil:
c'est dans cette clinique que le D’ Ayres Kopxe a fait ses belles études
sur le traitement de cette trypanosomose par l’atoxyl.
L'École dispose en outre de l'Hôpital de la marine, mais cet établisse-
ment est situé au Campo Sainte-Claire, à l’autre bout de la ville ; on
peut du moins y mener les élèves ou en faire venir des malades.
Le Directeur est le D' Rama pa Curro, ancien cheî du service de santé
à Angola, chef du service de santé au ministère de la marine et des colo-
nies. Les chaires sont seulement au nombre de trois, savoir :
1° Pathologie et clinique. — Professeur : dom Antonio LANcASTRE. Une
leçon clinique, deux outrois fois par semaine.
2° Hygiène et climatologie. — Professeur : D’ Francisco pa SILVA TELLES,
médecin de la marine, professeur de géographie à la Faculté des lettres.
Cours exclusivement théorique ; trois leçons d’une heure par semaine.
3° Bactériologie et Parasitologie. — Professeur : D'Ayres Kopke. Tous les
jours, de 3 à 4 heures, une leçon théorique, accompagnée de démonstra-
tions. Les élèves restent ensuite au laboratoire jusqu'à 6 heures ou
6 heures et demie; ils font eux-mêmes des préparations sur l’objet de la
leçon ; ils disposent d'un microscope Reichert pour deux élèves.
Les cours durent quatre mois, du 1‘ novembre à la fin de février. Les
examens ont lieu en mars. Les frais d'inscription sont de 5000 reis, soit
environ 26 francs, que tous les élèves, sans exception, doivent payer.
Les élèves sont de deux sortes:
i° Obligatoires. — Les docteurs en médecine sortant de l’une ou l’autre
des Facultés du Portugal (Coïmbre, Lisbonne et Porto) et prenant du ser-
vice dans la marine ou aux colonies ;
2° Facultatifs. — Tous les médecins civils ou militaires qui viennent
s'inscrire bénévolement ; tous les médecins entrés au service de la ma-
rine ou des colonies avant la création de l’École et qui viennent aussi
s'inscrire bénévolement.
La première session (novembre 1903-février 1904) n’a compté que 4 ou
(1) Regulamento da Escola de medicina tropical. Lisboa, Imprensa nacional,
in-8 de 12 p., 19083.
NOTES ET INFORMATIONS 227
5 élèves ; la deuxième session (1904-1905) en a eu 5 ou 6; la troisième (1905-
1906) n’en comptait que 4 ; la quatrième (1906-1907) en aréuni 15. L'École
est maintenant lancée et les bons résultats de son enseignement se font
déjà sentir. Elle n’a encore attiré aucun étranger. En outre des profes-
seurs dénommés ci-dessus, on y tronve comme chef de cliniquele D' Jose
DE MAGALHAES, diplômé de l'Institut de médecine coloniale de Paris (deu-
xième session, 1903).
Puisque nous nous occupons de l’enseignement de la médecine colo-
niale au Portugal, il n’est pas hors de propos de donner quelques brefs
renseignements sur l’organisation du corps de santé des colonies dans ce
même pays.
Au Congrès international de médecine vétérinaire, réuni à Budapest
en septembre 1905, puis au Congrès colonial français réuni à Paris en
juin 1906, j'ai présenté des vœux tendant pour chaque colonie ou chaque
groupe géographique de colonies dépendant d'un même pays, d'une part
à la création d’un Laboratoire central de Parasitologie, d'autre part à la
constitution d'un corps distinct et sédentaire de médecins coloniaux,
acquiérant sur place leur avancement et y parcourant toute leur
carrière (1). Ces vœux ont été adoptés à l’unanimité, ce qui en démontre
l'utilité, mais ce qui n'implique nullement que les administrations rou-
tinières aient jugé à propos d'en tenir compte.
Eu France, on a déjà organisé quelques laboratoires coloniaux (2), mais
en géneral leur action est trop restreinte, leur budget trop infime et leur
personnel numériquement insuffisant ; il reste beaucoup à faire dans cette
voie.
Quant aux médecins coloniaux, on continue à les promener tous les
deux ou trois ans d’un bout à l’autre du monde, du Congo à la Nouvelle-
Calédonie, de la Guyane au Tonkin, de Saint-Pierre et Miquelon au Séné-
gal ; ils doivent partir, juste au moment où ils commencent à connaître le
pays, totalement ignoré d'eux jusqu'alors, où il a plu à l'Administration de
les envoyer. On ne saurait rêver régime plus stérilisant, plus amollis-
sant : les réels eflorts accomplis par les médecins coloniaux ne donnent
que des résultats très insuffisants, car les meilleures volontés, soumises
à un tel régime, finissent par se lasser.
Que ce régime ait pu paraître nécessaire à un certain moment, je veux
bien l’admettre, encore que je n'en comprenne pas laraison, même au
point de vue administratif. Il est maintenant assez établi que les méde-
cins coloniaux ne sont pas de simples fonctionnaires de l’ordre médical,
mais leurs connaissances scientifiques sont assez solides pour qu'ils puis-
sent contribuer d’une façon sérieuse au progrès de la science. Ils sont
animés d'une ardeur à laquelle je me plais à rendre hommage, mais ils
ne peuvent utilement la mettre en œuvre qu’à la condition de faire un
(1) Archives de Parasitologie, X, p. 298 et 470, 1906.
(2) R. BLancraRD, La médecine coloniale. Archives de Parasitologie, IX, p. 95-
121, 1904; cf. p. 120.
DAS NOTES ET INFORMATIONS
séjour prolongé dans une même contrée. Leur désir est conforme à ces
considérations; je le sais, car j'ai maintes fois recueilli leurs doléances.
Quand donc l'administration les entendra-t-elle ?
Or, il est intéressant de noter (je l’ignorais à l’époque) que les deside-
rata formulés dans les deux vœux indiqués ci-dessus se trouvent déjà
réalisés au Portugal.
Les médécins coloniaux sont, depuis longtemps déjà, répartis en cinq
cadres : 1° Cap Vert; et Guinée; 2° Angola, Säo Thomé et Principe; 3° Mo-
çambique et Lourenço Marques; 4 Inde, avec une petite École de méde-
cine à Goa, pour les métis et les indigènes ; 5° Macao. Les médecins affec-
tés à l’un ou l’autre de ces cadres y accomplissent toute leur carrière ;
il est tout à fait exceptionnel qu’ils puissent passer d'un cadre à l’autre.
Le Portugal possède aussi des laboratoires coloniaux de Parasitologie à
Saint-Paul de Loanda, Säo Thomé et Säo Thiago (Cap Vert); on va pro-
chainement en créer un autre à Macao. Sauf le premier, qui existait
avant la création de l’École de médecine tropicale de Lisbonne, tous ces
laboratoires sont ou seront dirigés par des médecins coloniaux ayant le
diplôme de cette École. — R. BL.
École de Médecine tropicale de Bruxelles.— L'État Indépendant du
Congo a fondé récemment à Bruxelles une École de médecine tropicale,
aux besoins de laquelle il pourvoit entièrement. Les cours théoriques
et pratiques se font à l’ancien Observatoire, le cours clinique à la Villa
coloniale de Watermael, où l'École dispose de 17 lits, dont une dizaine
sont ordinairement occupés.
Le règlement et l'emploi du temps ont été établis comme suit :
1° Il y aura trois sessions annuelles, de deux mois et demi chacune,
savoir : 1” octobre-15 décembre; 1* janvier-15 mars; 1% mai-15 juillet.
2° Au commencement de chaque session, les heures des cours et clini-
ques seront affichées dans les locaux de l'École, place Quetelet (ancien
Observatoire).
3° La présence aux cours et cliniques est obligatoire. Toute absence
doit être justifiée par une lettre adressée au Professeur donnant la leçon
et, autant que possible, en temps utile pour parvenir avant la fin de la
Séance.
4° Les élèves malades devront faire constater leur état de santé par M.
le D' Van CamPENHouT, demeurant rue Marie-Thérese, 45. S'il y a lieu,
ce médecin délivrera une constatation aux malades.
9° Les élèves sont tenus de donner leur adresse dès le premier jour de
la session : 1° aux bureaux du personnel de l’État indépendant du Congo,
10, rue Bréderode; 2° à M. le D' VAN CAMPENHOUT, au siège de l'École.
6° Certaines séances pourront être consacrées par les Professeurs à des
examens sur les cours ou parties de cours.
1° Chaque élève devra fournir, pendant la durée de la session, des
travaux ou rapports dont l’objet sera indiqué par le professeur d'hygiène.
7
NOTES ET INFORMATIONS 529
8° À la fin de chaque session, les élèves subiront un examen sur les
branches enseignées.
9° L'élève est rendu responsable de toute dégradation survenue aux
instruments qui lui sont confiés.
10° Toutes demandes relatives à l'École doivent être adressées à M.
le D' VAN CAMPENHOUT.
EMPLOI DU TEMPS
MATIN APRÈS-MIDI
| 8 1/2 à 10 Clinique. de à
Lundi ' 4 à 5 1/2 Zoologie médicale.
0 à 111/2 | Travaux pratiques.
Mardi 9 1/2 à 11 Hygiène. 2 à 4 Pathologie.
: Travaux Examen des malades
Mercredi |10 à 12 1/2 Que
de laboratoire. et rapports.
Jeudi 10 à 12 1 ee 4 à 5 1/2 | Zoologi édical
eudi à 12 1/2 AN à 5 1/2 oologie médicale.
Ste 81/2 à 10 Clinique. Re OS .
; j a
re lg 11:/2 | Travaux pratiques 7e P00IOBICrMEMERe
S di |HOà121 ie 2aà4 Pathologi
HET ue de laboratoire. Ç USE
La 1‘* session s’est ouverte le 1” octobre 1906; elle a compté sept
élèves. La seconde, ouverte le 1° janvier 1907, en a compté six; pour
la troisième, qui doit commencer le 1° mai, sept élèves sont déjà inscrits
(24 avril). Ces élèves sont de nationalités diverses; on y trouve des
Belges, des Italiens, des Norvégiens et un Anglais.
Les élèves ayant contracté un engagement envers l'État du Congo ne
paient aucun minerval; ils reçoivent même une indemnité de séjour. Les
élèves libres ne sont admis qu'autant qu'il y a des places disponibles; ils
payent un minerval de 200 fr., qui leur est remboursé en cas d'engagement
ultérieur.
Le corps enseignant comprend quatre professeurs :
M. FirkeT, professeur à l’Université de Liége. — Pathologie exotique
530 NOTES ET INFORMATIONS
(cours exclusivement théorique) : # heures par semaine, soit 44 heures
pour 11 semaines.
M. JaAcQUÉ, sous-directeur de l’Institut sérothérapique de Bruxelles. —
Direction des travaux pratiques : théorie, 2 heures par semaine, soit 22
heures pour 11 semaines; pratique, 5 heures par semaine, soit 55 heures
pour 11 semaines.
M. SEVERIN, conservateur au Musée royal d'histoire naturelle.— Ento-
mologie théorique et pratique : théorie, 2 heures par semaine, soit 22
heures pour 11 semaines; pratique, 2heures et demie par semaine, soit 27
heures et demie pour 11 semaines.
M. Van CamPpENHouT. — Hygiène et clinique : hygiène (théorie), une
heure et demie par semaine, soit 17 heures pour 11 semaines; clinique,
4 heures par semaine, soit 44 heures pour 11 semaines.
Au total, 231 heures et demie de cours, travaux pratiques et démons-
trations cliniques, réparties sur 11 semaines.
Les élèves sont obligés de faire, sous la direction du professeur de
clinique, des travaux sur tel sujet d'hygiène ou de clinique qui leur sera
désigné.
Les malades admis à la clinique proviennent des pays tropicaux, à
l'exclusion de tous autres. A la date du 24 avril, on y comptait deux
cas de trypanosomose, un cas d'abcès du foie, deux cas de dysenterie,
un cas de polynévrite paludéenne, deux cas d'anémie paludéenne, un
cas d’hématurie vraie (bilharziose ?) et un cas de cure radicale de hernie
chez un convalescent d’anémie.
2.2 ee
Le « Dutton Memorial »; une nouvelle chaire à l’Ecole de Médecine tro-
picale de Liverpool. — En France, quand meurt un savant illustre, on
lui élève un buste dans la cour de son hôpital ou dans le grand Hall de
l'Ecole où il enseignait. En Allemagne et en Italie, pensée plus touchante,
ses élèves et ses amis publient un livre auquel chacun apporte comme
collaboration un travail scientifique personnel : le nom de celui à qui
l’on veut rendre hommage devient ainsi le titre inoubliable d’un recueil
. de travaux des plus intéressants, recueil digne d'occuper une place d’hon-
neur dans toutes les bibliothèques scientifiques. En Angleterre, ou rap-
pelle souvent le souvenir d'un mort en attachant son nom à une fon-
dation d'intérêt publique, bibliothèque, école ou hôpital,
Fidèle à cet usage, l'Ecole de Médecine tropicale de Liverpool entre-
prend de fonder en souvenir de Joseph Everett Durron, une chaire de
«recherches de pathologie tropicale ». Elle ne peut rendre un plus bel
hommage au jeune savant mort à 29 ans pour cette science qui lui doit tant.
Durron avait fait, pour le compte de l'Ecole de Liverpool, trois expé-
ditions scientifiques en Nigeria, en Gambie et en Sénégambie, expéditions
dont les résultats furent des plus importants, spécialement en ce qui
concerne lalutte contre le paludisme. Au cours de l’une d'elles, il découvrit
NOTES ET INFORMATIONS 531
et décrivit le Trypanosoma gambiense, qui cause la maladie du sommeil.
Un quatrième voyage le conduisit au Congo, où il allait étudier la (fièvre
des Tiques » (Tick fever) : il mourut de cette maladie, à Kasongo, dans
l'Afrique centrale, mais non sans avoir reconnu qu’elle était causée par
un Spirochète qui vit dans le sang et auquel son nom fut ultérieurement
attribué: Spirochæta Duttonri (Novy et Knap, 1906).
L'Ecole de médecine tropicale de Liverpool a besoin de 250.000 francs
pour fonder la chaire projetée et subvenir à ses besoins. Elle demande
cette somme à une souscription publique, c’est-à-dire aux généreux
donateurs dont les largesses lui ont déjà permis d'accomplir des mer-
veilles. Elle envoie à tous ceux qu'elle croit susceptibles de contribuer à
son œuvre une courte circulaire dans laquelle, après avoir retracé la
carrière de Durrow, elle rappelle en quelques lignes les immenses progrès
accomplis par la médecine et l'hygiène tropicales depuis quinze ans, c’est-
à-dire depuis qu'on s’est attaqué résolument à l'étude de la Parasitologie :
A Ismailia, ville de 6.000 habitants, presque tous employés du canal de
Suez, il y avait 2.250 cas de paludisme en 1900 et 2.000 en 1901. En
1903, on commence vigoureusement la lutte contre les Moustiques et la
morbidité tombe à 214 cas, puis à 90 en 1904 et à 37 en 1905 ;
La Havane avait 1385 cas de fièvre jaune en 1896, 745 en 1897 et 302 en
1900. Les Américains appliquent alors d'énergiques mesures pour la des-
truction des Moustiques et on ne relève plus que 5 cas en 1901 et pas un
seul en 1902 et 1903.
En octobre 1884, la Compagnie française du canal de Panama avait,
sur 19.000 ouvriers, 84 cas de fièvre jaune et 21 décès. En octobre 1905,
l'entreprise américaine ne compte pas un seul cas sur ses 22.000 em-
ployés. Quelle économie de vies humaines et d'argent!
L'Ecole de Liverpool trouvera les 250.000 francs qu'elle demande: elle
trouvera bien plus encore, quand cela lui sera nécessaire.
En France, à Paris, il existe un seul laboratoire de Parasitologie, auquel
on alloue 3500 francs par an et un Institut de Médecine coloniale, qui
fait de bonne besogne, mais dont les moyens financiers sont ridicu-
lement limités. Le gouvernement ne s'intéresse pas aux questions d'hy-
giène et de médecine tropicales et les particuliers non plus. Aussi, la
fièvre jaune, chassée de Cuba, s’est-elle réfugiée depuis deux ans au Sé-
négal et le paludisme, expulsé de Suez, colonise-t-il à son aise Mada-
gascar. — Marc BLATIN.
École de Médecine tropicale de Londres. — L'Ecole en est actuellement
à sa sixième année d'existence. Une nouvelle session vient de s'ouvrir
avec 38 élèves, sous une forme solennelle qui sera désormais renouvelée
chaque année et que justifie pleinement le succès toujours croissant de
cette utile et florissante institutiou. Jusqu'à ce jour, l'Ecole a donné
l'instruction théorique et pratique, relative aux maladies et à l'hygiène
des pays chauds, à plus de 600 docteurs en médecine, appartenant pour
532 NOTES ET INFORMATIONS
la plupart à la marine et au service médical des colonies anglaises, mais
parmi lesquels on compte aussi un certain nombre d'étrangers.
L'Ecole s’est agrandie considérablement par la construction de nouvelles
salles d'hôpital et de nouveaux laboratoires, dont la disposition confor-
table et pratique peut servir de modèle aux établissements similaires.
Maintenant, grâce aux importantes libéralités dont elle a bénéficié, son
installation est suffisante et répond à tous les besoins actuels; elle a donc
pu recevoir dignement, non seulement les médecins, mais aussi les dames
et hauts personnages du commerce, de la science et de l'administration
qui s'intéressent aux questions coloniales, et les convier à une conférence
d'un haut intérêt, faite par le colonel Mac Lrop, de l’armée des Indes,
ancien médecin du roi, actuellement Doyen de l'Ecole.
Le soir, maîtres et élèves se réunissaient au Cecil Hotel en un banquet
savoureux, auquel étaient conviés également diverses autorités et les
Mécènes que suscite en Angleterre toute œuvre d'intérêt général et
patriotique. Une invitation spéciale avait été adressée aussi au professeur
R. BLANCHARD, fondateur de l'Institut de Médecine coloniale de Paris.
Sir Wm Hood TREACHER, ancien gouverneur des colonies anglaises,
présidait en l’absence du duc de MarLBoRoUGH. Après le toast au roi, le
président a bu à la prospérité de l'Ecole de Médecine tropicale et de l'Ecole
de Médecine clinique, tout récemment créée, ces deux Ecoles étant sous
le patronage de la bienfaisante et puissante Société de l'Hôpital des marins:
Sir Patrick MaAxson, membre de la Société royale et membre associé de
l’Académie de Médecine de Paris, répond au nom de la première de ces
institutions dont, avec l’ancien ministre sir J. CHAMBEREAIN, il a été le
fondateur. Avec la grande autorité que lui donnent ses travaux scientifi-
ques et sa haute valeur morale, il expose l'œuvre accomplie par l'Ecole
de Médecine tropicale, non seulement comme éducatrice, mais aussi
comme foyer de recherches scientifiques. Il montre ce qu'il reste à faire,
les questions capitales qu'il est urgent de résoudre, les enseignements
qu'il importe de créer ou de perfectionner et il conclut, comme l'avait
déjà fait le colonel Mac Leon, à la nécessité de donner de nouvelles som-
mes à l'Ecole qui sait en faire un si bon usage. L'Ecole a reçu jusqu’à
ce jour, de diverses provenances et, notamment, de riches particuliers,
une somme totale de 40,000 liv. st. (1,000,000 de francs); une somme de
60,000 liv. st. (1,500,000 francs) lui est encore nécessaire ; il est certain
que cette somme considérable sera promptement souscrite.
Les applaudissements chaleureux qui accueillent le discours de sir
Parrick démontrent que ses paroles ont été comprises et qu'il n'adresse
pas un inutile appel à la générosité toujours en éveil de ses concitoyens.
Aussi bien, il a été le héros de la fête d'hier. Tous ont tenu à lui témoi-
gner de la facon la plus claire leur reconnaissance pour les services con-
sidérables qu'il a rendus à la métropoie et aux colonies, par la création
de l'Ecole de Médecine tropicale actuellement si florissante, ainsi que par
les découvertes qui lui ont valu une notoriété universelle et par l'impul-
NOTES ET INFORMATIONS 533
sion si active qu'il a su donner aux études portant sur les maladies des
pays chauds.
Après divers autres toasts, le professeur R. BLANCHARD prend la parole
Dans un discours très applaudi, il dit en quelle haute estime on tient à
l'étranger l'Ecole de Médecine tropicale et les travaux accomplis par
elle. En Angleterre comme en France, on enseigne depuis longtemps,
d'une façon plus ou moins complète, l’épidémiologie et l'hygiène des pays
chauds dans les Ecoles de Médecine navale ou militaire. Les progrès de
la colonisation, en fixant dans les pays nouveaux des colons, des indus-
triels ou des commerçants qui ne sont point soumis à l'autorité militaire
ou navale, ont créé l'obligation de fournir à ces populations nouvelles
des médecins civils qui fussent instruits des maladies qui sévissent parmi
elles. De là l’idée d'organiser un enseignement nouveau; de là la création
de l'Ecole de Médecine tropicale de Londres. Des Ecoles ou Instituts ana-
logues ont pris naissance dans différents pays et tel est le cas notamment
pour l'Institut de Médecine coloniale de Paris. Mais il est juste de dire
que ces créations se sont inspirées de l'Ecole de Médecine tropicale de
Londres. C'est donc dans un sentiment de juste déférence que le profes-
seur R. BLANCHARD apporte à l'Ecole de Londres le salut et l'hommage de
l'Institut de Médecine coloniale.
Bien que plus jeune de deux. années et surtout bien que disposant de
moyens extraordinairement réduits, puisque, en dehors d'une généreuse
subvention du Gouvernement général de l’Indo-Chine, il n’a rencontré
jusqu’à ce jour que l'indifférence la plus complète, l'Institut de Médecine
coloniale a fait, lui aussi, de la bonne besogne. Quand les pouvoirs publics
et les colonies voudront bien connaître et apprécier l'œuvre qu'il a déjà
accomplie et ce dont il est capable, et lui attribuer quelques subventions,
il n'est pas douteux que son activité scientifique ne devienne plus intense
et qu'il ne contribue, lui aussi, dans une plus large mesure à l'avancement
de nos connaissances. Les colonies, pour le bien desquelles il travaille,
ne peuvent lui marchander plus longtemps leur concours pécuniaire, si
restreint soit-il, et les Mécènes, qui ne manquent pas en France, voudront
témoigner leur intérêt à une institution qui n’a d'autre but que de travailler
au progrès de la science et à l'amélioration des conditions sanitaires
contre lesquelles ont à lutter ceux dé nos compatriotes qui s’en vont met-
tre en valeur les immenses territoires de l'empire colonial français.
L'inspecteur général H. M. Ezzrs, directeur général du corps de santé
de la marine, et le chirurgien général A. M. BrANroor, président du Conseil
médical du ministère de l'Inde, prennent ensuite la parole. Il nous suffit
de citer leurs noms pour montrer quelle importance on attache en haut
lieu à l'Ecole de Médecine tropicale. Les lecteurs de la Dépêche Coloniale,
au surplus, connaissent bien les brillantes découvertes qui en sont sorties
relativement au paludisme, à la filariose, au kala-azar et à nombre d'’au-
tres maladies qui, dans les pays chauds, déciment indigènes et Européens.
— R. W. Frencx, Dépêche Coloniale du 12 octobre 1906.
Ga, 0 NOTES ET IKFORMATIONS
Une chaire de Parasitologie à la Faculté de Médecine de Lyon. — A
l'exemple de la Faculté de Médecine de Paris, la Faculté de Lyon a émis
un vœu en faveur de la transformation de la chaire d'Histoire Naturelle
médicale en une chaire de Parasitologie et Histoire Naturelle médicale.
Un décret en date du 26 mars 1907 a rendu officielle cette transformation.
M le professeur GurarT (pl. X) prend donc le titre de Professeur de
Parasitologie.
Une nouvelle chaire à l'École de Médecine tropicale de Londres. —
Comme il a été dit plus haut, l'École de Médecine tropicale de Londres a
fondé récemment une chaire de Protozoologie et une chaire d'Helmin-
thologie. Voici maintenant qu'elle se prépare à fonder une chaire con-
sacrée à l'étude des animaux piqueurs, suceurs de sang et capables
d'inoculer des maladies parasitaires ou infectieuses. Lord ELGin,
ministre des colonies, a garanti la somme de 1000 livres nécessaire au
maintien de la nouvelle chaire pendant trois ans. Passé ce délai, on compte
sur la générosité publique pour assurer la permanence de cette utile
création, et l’on sait qu'en Angleterre un pareil appel est toujours entendu.
La chaire nouvelle, pour laquelle une désignation convenable n'a pas
encore été trouvée, répond à un vœu que j'ai fait voter par divers Congrès
scientifiques, sans que les pouvoirs publics aient d’ailleurs rien fait pour
le réaliser. Là-bas, on agit, et l'initiative éclairée de sir Patrick MansoN
se fait encore sentir en cette circonstance. — R. Br.
Est-ce la fin de l'I M. G.? — Le 4 juillet 1907, M. le Doyen DEBOvE a
communiqué au Conseil de la Faculté de Médecine de Paris une lettre du
Gouverneur général de l’Indo-Chine, annonçant que le crédit de 30.000
francs, inscrit depuis cinq années au budget de la colonie, en faveur de
l’Institut de Médecine Coloniale de Paris (1. M. C.) était désormais sup-
primé.
Est-ce la fin de l'I. M. C.? Quand je rendis visite, en compagnie de
M. BrouaARpneL, alors Doyen, à M. Paul DouMER, alors Gouverneur général
de l'Indo-Chine, l'éminent homme d'Etat fut très attentif à nos explica-
tions; puis, pour nous prouver à quel point il jugeait importante la fon-
dation de II. M. C.. il nous déclara spontanément qu'il inscrirait celui-ci
à son budget pour une période de cinq années et pour une somme de
30.000 francs par an (1). Ainsi fut fait : grâce à cette intelligente géné-
rosité, l'I.M.C. a traversé sans encombre les cinq premières années de
son existence. Mais nous voici arrivés à la fin de cette période bienfai-
sante et l'existence de l'Institut se trouve gravement compromise.
Chacun sait que cette utile institution a été fondée par mes soins, mal-
gré des difficultés qui, deux années durant, en ont retardé l’éclosion et
(1) R. BLancaarp, L'Institut de Médecine coloniale; histoire de sa fondation.
Archives de Parasilologie, VI, p. 586-603, 1902; cf. p. 593.
Archives de Parasitologie, XI, 1907. PIE
Dr JULES GUIART
Professeur de Parasitologie à la Faculté de Médecine de Lyon.
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NOTES ET INFORMATIONS De
dont la moindre n’a pas été l’inertie, le plus décourageant des obstacles. La
création une fois réalisée, M. BROUARDEL, alors descendu du décanat, se fit
attribuer la direction de l’'I. M. C. On pouvait espérer que les loisirs dont
il disposait alors lui permettraient de prouver sa sollicitude à la nouvelle
institution en lui attirant des subsides, en faisant pour elle une propagande
féconde, en parant à ses conditions précaires d'existence, en intéressant
à son sort les pouvoirs publics, l'Université, les diverses colonies et pays
de protectorat, les grandes sociétés de colonisation, de navigation, de ban-
que et d'affaires coloniales, etc., ainsi que les Mécènes dont notre pays
n'est pas encore totalement dépourvu et qui, trop souvent, ne savent pas
employer leur argent de la façon la plus judicieuse et la plus profitable à
l'intérêt général.
Par ses vastes relations, sa grande notoriété, les hautes fonctions dont il
avaitété si longtemps investi, M. BRouARDEL eût pu faire tout cela; lui seul
avait qualité pour le faire. Or, on ne saurait citer la moindre subvention
acquise par ses soins à l’I.M.C., pas même le moindre appui moral gagné
à l'institution. Les Anglais, qui suivaient avec intérêt le développement de
l'I.M.C., dans lequel ils savaient bien n'avoir pas un rival, mais un émule,
auquel d’ailleurs ils ont très courtoisement témoigné en toute circons-
tance leur amicale sympathie, n'ont pas tardé à constater combien était
stérile une telle direction et ils n’ont pas craint de nous le dire (1). Leur
appréciation quelque peu sévère, mais dont on ne saurait contester la jus-
tesse, est demeurée vraie jusqu’au bout.
A la mort du professeur BRoUARDEL, l'Institut de Médecine coloniale
n’était donc pas plus avancé que le jour même de sa fondation; il était
même moins avancé, puisqu'il avait derrière lui quatre années entière-
ment perdues, au point de vue financier s'entend, et n'avait plus l’exis-
tence assurée que pour un an.
Cette année est maintenant écoulée, et voici que l'existence même de
l’Institut est mise en question! Les services considérables qu’il a rendus
ne sont pourtant pas contestables ; la fermeture de cet établissement, qui
ne lui a jamais rien coûté et qui, en revanche, lui a rapporté de l'honneur
et de la considération, serait un amoindrissement pour la Faculté de Mé-
decine de Paris.
Depuis la mort de BROUARDEL, les choses sont restées en l’état ou elles
se trouvaient alors : la situation matérielle de l'I.M.C. n’a pas changé;
c’est dire qu'en fait elle a empiré. Il a été vaguement question d'élire
un nouveau Directeur, mais aussitôt des compétitions, tout au moins des
mauvais vouloirs se sont affirmés et rien n'a été fait. La situation actuelle
est donc des plus critiques.
Et pourtant, il n’est pas malaisé de relever l'I.M.C. de la ruine qui le
menace. Je lui connais des sympathies auxquelles on n’a jamais voulu faire
appel; il compte assez d'amis dévoués, son rôle utile, l'excellence des
(1) La Médecine tropicale en France. Archives de Parasitologie, VIII, p. 475,
1904.
536 NOTES ET INFORMATIONS
résultats acquis (1) sont assez appréciés pour qu'on puisse espérer le tirer
d'affaire. Il a des réserves suffisantes pour vivre un ou deux ans; c’est
plus qu'il n'en faut pour créer un mouvement d'opinion en sa faveur et
pour constituer le Comité de patronage que, dès le début, j'avais considéré
comme indispensable, mais dont, je ne sais pourquoi, on a préféré se
passer. C’est, j'en suis plus que jamais convaincu, dans la constitution
d'un tel Comité que se trouve le salut. — R. BL.
Hommage au professeur F. S. Monticelli. — Le 22 décembre 1906, a été
célébré le centenaire de la fondation de la chaire de zoologie de l'Univer-
sité de Naples. En cette circonstance solennelle, le professeur MoNTICELLI,
Le Professeur F. S. MoNTICELLI.
titulaire actuel de la chaire, a reçu l'hommage d'une foule de savants et
de Sociétés scientifiques. Il m'a été particulièrement agréable d'exprimer
mes plus cordiales félicitations à cet ami de longue date, à ce savantillus-
tre qui honore si hautement la Parasitologie. A cet effet, je lui ai fait
remettre une adresse dont nous donnons une reproduction (pl. VII);
l'original portait ma signature et celle de tous mes collaborateurs et
élèves. — R. BL.
(4) Cf. plus haut, p. 515.
Archives de Parasitologie, XI, 1907.
PI, VIII.
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NOTES ET INFORMATIONS 531
La lutte contre les maladies infectieuses (X, 300). — Maladie du som-
meil. — Du 10 au 15 juin 1907, doit se réunir à Londres la huitième:
Conférence internationale de la Croix-Rouge. Au nombre des questions
soumises à la discussion figure la suivante, présentée par l'Association
congolaise et africaine de la Croix-Rouge :
1° Types d'établissements hospitaliers et de lazarets pour personnes
atteintes de trypanosomose.
2° Emplacement de ces établissements.
A. — Faut-il les édifier en région indemne ou en région infectée ?
B. — Quels sont les endroits à choisir de préférence? Quelles mesures
convient-il de prendre pour les lazarets et leurs environs, au point de
vue du débroussement, du ravitaillement en eau (boisson, bain, etc.) et
d'éloignement des agglomérations ?
3° Y a-t-il avantage à faire la séparation des malades en diverses caté-
gories, suivant la gravité de leur état?
: 4° Quels seront les infirmiers à employer”? Choix d'infirmiers parmi les
malades les moins gravement atteints.
Tuberculose. — La lutte contre la tuberculose continue à revêtir les
formes les plus diverses. Nous n’en donnerons plus que quelques exem-
ples, pour ne pas insister outre mesure sur ce point.
La Compagnie des chemins de fer du sud de l'Autriche, dont nous
avons déjà signalé l’active et intelligente initiative (X, 301), multiplie les
affiches polyglottes, en allemand, en italien et en slovène. Voici la trans-
cription d'une affiche que nous avons copiée en cours de route, en sep-
tembre 1905 :
K. K. PRIV. SÜDBAHN-GESELLSCHAFT
Zur FÔRDERUNG DER
ÔFFENTLICHEN GESUNDHEITSPFLEGE
WIRD DRINGEND ERSUCHT,
IN DEN BAHNHOFRÂUMEN, AUF DEN BAHNSTEIGEN UND TREPPEN,
GLEICHWIE IN DEN ÉISENBAHNWAGEN
DAS AUSSPUCKEN ZU UNTERLASSEN.
La même formule se trouve affichée, en langues tchèque et allemande,
dans toutes les gares de la Bohême; la disposition typographique en est
simplement différente.
En plus d’un endroit, on fait la guerre à la poussière soulevée par la
traine des robes et diverses municipalités ont enjoint aux dames de
porter des robes courtes. L'administration de l'établissement thermal
d'Abbazia, dans le sud de l'Autriche. sans se préoccuper de déplaire à ses
Archives de Parasitologie, XI, n° 3, 1907. 35
538 NOTES ET INFORMATIONS
jolies clientes, a pris une décision toute semblable. A toutes les entrées
du jardin se dressent des plaques en fonte portant cette inscription :
Die P. T. DAMEN WERDEN
HIERMIT HÔFLICHST ERSUCHT,
DER GESUNDHEITSSCH À DLICHEN
STAUBENTWICKLUNG WEGEN,
AUF DER PROMENADE KEINE
SCHLEPPKLEIDER ZU TRAGEN
Die Cur-CoMMIisSIoN.
Toutes les dames se conforment à cette invitation. N'est-ce pas pour les
élégantes Viennoises une occasion inespérée de faire admirer leurs fines
attaches et de laisser soupçonner la rondeur savoureuse de leurs...
gastrocnémiens ?
Plus récemment, la municipalité de Nordhausen (Hanovre) a pris un
arrêté punissant d’une amende de 30 marks toute personne portant une
robe à traîne dans la rue.
Les Francais les plus illustres du XIX'‘ siècle. — Le Petit Parisien. a
demandé à ses lecteurs de bien vouloir indiquer quels étaient, à leur
avis, Les dix Français les plus illustres ayant vécu au dix-neuvième siècle.
Ce concours original comportait 500.000 francs de prix, dont un de
100.000 francs en espèces. Plus de 1.500.000 personnes ont répondu à la
question; {e dépouillement des feuilles de concours a donné les résul-
tats suivants :
Pasteur er RE 1958 225 VOIX
Victor A6 PEER Ne 1027 MORE
Gambetta tas M TETE TO SION
Napoléon ERP EN ARE RER ETS OSARE
TRIeRS AN EE ANTENNES OASIS
Pazare Carnot MERE RES 950.772 —
CUTLE ER ANSE CENT PR ee 851.107 —
DUMAS pere PARENT RE 850.602 —
Docteur RDA MEME EN 603.941 —
Panmentienr M MERCI 498.863 —
Le Cysticercus cellulosae chez les indigènes d'Angola. — BaMBALLA,
négresse de 6 à 7 ans, originaire de Dondo, meurt de la maladie du som-
meil à l'hôpital Maria Pia, à Saint-Paul de Loanda. L'autopsie montre
qu'elle était atteinte de cysticercose généralisée.
«Nous avons trouvé dans le cerveau, écrivent Bettencourt et ses collabo-
rateurs (1), un grand nombre de kystes; ceux-ci envahissaient, du reste,
(1) A Berrexcourr, A. Kopxe, G. DE REzENDE et C. MENDEs, La maladie du
sommieil. Lisbonne, in-4° de 280 p. et 24 pl., 1903; cf. p. 58 et 118-120.
NOTES ET INFORMATIONS D39
l'organisme entier, même le myocarde. Dans le jéjunum il y avait un
Tænia très grêle, réduit à un petit nombre d'anneaux. »
Revenant plus loin sur ce même cas, les quatre observateurs portugais
signalent encore la présence des kystes dans le cerveau, le cœur, le pou-
mon droit et surtout les muscles. « L'intestin gréle contient... un filament
qui mesure 75 millimètres de longueur, qui est un Tænia au début de
son développement. »
Pendant la vie, on avait observé dans les selles diarrhéiques, sans pré-
ciser davantage sa nature, € uu œuf elliptique, entouré par une mem-
brane renfermant une masse protoplasmique en voie de segmentation. »
A l’autopsie, on examine les matières fécales, sans y trouver ni Uncinaires,
ni œufs.
Que sont ces kystes et ce Ténia? La question n'était pas sans intérêt.
car nous sommes évidemment bien loin de connaitre tous les Helminthes
des nègres africains. Dans l'espoir de la trancher, j'ai prié le D' A. Bet-
tencourt, directeur de l'Institut bactériologique Camara Pestana, à Lis-
bonne, de m'envoyer quelques kystes etle Ténia. Ila eu la grande amabi-
lité de répondre à ma demande et de m'envoyer un fragment de cerveau
et un fragment de myocarde, conservés dans la liqueur de Kaiserling et
contenant chacun plusieurs kystes; quant au Ténia, il avait été laissé en
Afrique ou perdu pendant le voyage d'Angola au Portugal.
D'après Leuckarr | D'après Raizzier | Cas d ANGOLA
a ——— RE RC LT
Grand Petit Grand Petit | Grand | Grand
crochet | crochet | crochet | crochet ferochet crochet
= ——
Longueur totale........ 67 à 175110 à 130[160 à 1S0!110.a 1401 186 125,4
Distance rectiligne de
la pointe au sommet
de la garde ou racine
postérieure. ......... 90 à 100! 64 à 70 87,4 | 68,4
Distance de la garde à
l'extrémité du man-
che ou racine anté-
DCR CAE ES ares 90 à 100! 64 à 70 95 97
Les kystes sont des Cysticerques, qu'il a été facile d'identifier à Cysti-
cercus cellulosae. Le rostre porte 28 crochets allernativement grands et
petits ; leur forme et leurs dimensions sont celles des crochets de Tænia
solium, en tenant compte des variations ordinaires chez cette espèce. Le
tabeau suivant démontre d'ailleurs cette identilé; les dimensions y sont
indiquées en ».
Cyslicercus cellulosae est fréquent chez le Porc à la côte occidentale
d'Afrique, spécialement au Congo. Il n'y avait pas encore étésignalé dans
l'espèce humaine.
D40 NOTES ET INFORMATIONS
Les deux fragments de cœur et de cerveau reçus du D' Bettencourt ont
été conservés au Laboratoire de Parasitolologie (collection R. Blanchard,
n° 916). — R. Br.
Prix Adolphe Monbinne. — Dans sa séance générale annuelle, l’Aca-
démie de Médecine a décerné le prix Monbinne pour 1906 à M. le
D'E. Brumpr, chef des travaux pratiques de Parasitologie à la Faculté
de Médecine de Paris, pour sa mission scientifique au Congo français,
en 1903, à l'effet d'y étudier la maladie du sommeil.
Souscription universelle pour une statue de Lamarck. — Nous sommes
très heureux de signaler à l'attention de nos lecteurs la belle initiative
qu'avec l'approbation de M. Brianp, ministre de l'Instruction publique,
viennent de prendre les professeurs du Muséum national d'histoire natu-
relle pour réunir l'argent nécessaire à l'érection d’une statue à LAMARCK,
cet immortel naturaliste et philosophe qui est une de nos plus belles
gloires françaises. Tous les pays disséminés à la surface de notre planète
ont en effet contracté une véritable dette de reconnaissance envers le pen-
seur qui, le premier, a su appliquer d'une façon concrète la conception de
l'évelution à l'étude des phénomènes naturels.
Longtemps avant que Darwix n’eût expliqué l'existence des espèces
par le jeu de la sélection naturelle et rendu compte ainsi de la dispersion
et la vie terrestre, LAMARCK avait eu le sentiment profond de son unité
et montré, dans la diversité de ses réalisations, une seule matière vivante
se transiormant au cours des âges en nouvelles formes organiques. Ainsi,
l’auteur de la Philosophie zoologique, du Système des animaux sans ver-
tèbres, de la Flore française, des Fossiles des environs de Paris, du Sys-
tème des connaissances positives, de l’Hydrogéologie, etc., par une vue
d'ensemble véritablement géniale, déterminait tout le travail que es natu-
ralistes ont accompli depuis plus d'un siècle.
Cependant, tandis que DARwIN repose à côté de SHAKESPEARE dans:
l’abbaye de Westminster, ce Panthéon anglais, LAMARCK n'a pas même une
statue chez nous. Il en aura prochainement une au Jardin des Plantes.
L'initiative des savants professeurs du Muséum est donc l’acquittement
d'une dette de reconnaissance. On adressera les souscriptions à
M. le professeur L. JouBix, secrétaire du Comité, 55, rue de Buffon, Paris.
Les Archives de Parasitologie s'inscrivent pour 20 francs.
Prix Barbier. — L'Académie des sciences a décerné le prix Barbier
(2000 francs) à M. Adrien Lucer, vétérinaire à Courtenay (Loiret), pour
ses Recherches bactériclogiques sur la suppuration chez les animaux de
l'espèce bovine et pour ses Recherches sur les Moisissures pathogènes, faites
en collaboration avec M. le professeur COoSrANTIN.
La plupart des travaux récompensés ainsi par l'Académie des sciences
ont été publiés dans les Archives.
OUVRAGES REÇUS
Tous les ouvrages reçus sont annoncés.
Généralités.
Bulletin du laboratoire de bactériologie de l’Institut Pasteur de la Loire-
Inférieure. Nantes, in-8° de 52 p., 2 pl., 2 tableaux, 1905.
XV° Congrès international de médecine. Lisbonne, 1906. Section XVII, méde-
cine coloniale et navale. 1‘ fascicule, in-8° de 233 p., 1906.
Congrès de Lisbonne, 1906. Section de médecine coloniale et navale. Résumés
el communications. Lisbonne, in-8° de 13 p., 1906.
Exposition des Institutions el des œuvres inspirées, encouragées réalisées,
par la province de Hainaut. Instruction. Extrail : hygiène, prévoyance.
Frameries, in-8° de 69 p., 1905.
R. BLaNcHarp, Accidents causés par une Graminée américaine /Stipa Nee-
Siana). Archives de Purasilologie, X, p. 187-194, 1906.
J. Brauzr, L’épithélioma chez les mans musulmans d'Algérie. Janus, X,
in-8° de 4 p., 1605.
O. CASAGRANDI et P. BaARBAGALLO. Sulla trasmissibilita dell’infezione alteridica
per mezzo del sangue infetto. Atti Soc. per gli studi della malaria, VE, p. 39-54,
1905. |
A. CasreLLantr, Report of the Soysa bactériological Instituie for the year 1904
Colombo, in-4° de 10 p., 1905.
G. DELAMARE et LECENF, Sur la présence de cellules géantes dans les cancers
épithéliaux. Arch. de méd. expér., XNIIT, p. 102-108, pl. 1, 1906.
L. FEeINBERG, Die Erreger und der Bau der (reschiwulste insbesondere der
Krebsgeschwulste. Il. Band. Mikroskopischer Atlas, Berlin, Unger, in-4 de %5 pl,
1906.
Fontoynontr, La médecine à Madagascar. Archires de Parasitologie, X, p. 227-
237, 1606.
J. A. Forpycer, A case of undetermined tropical ulceration involving the nose,
pharynx and larynx, with histological findings. Journal of cut. diseases, in-8°
de 12 p., 6 pl., 1906. ‘
M. Lesreno, La Parasitologie à Cuba. Archives de Parasitologie, X, p. 150-159,
1906. ÿ
M. LereBvre, Le sung. Louvain, in-8° de 86 p., 1 pl., 1904.
B. Nocur, Ueber Schwarzwasserfieber. Verh. des deutsch. Kolomalkongresses,
p.218-225, 4 pl. 1905:
B. Nocur, Ueber Tropenkrankheiten im Sceverkechr. Ferh. des deutsch. Kolo-
nialkongresses, p. 305-316, 1905.
G. P. Praxa, Esame microscopico delle feci per la ricerca di Elminti. La Cli-
nica veterinaria, XXIX, in-8° de 21 p., 1905.
J. L. Sanre-Marie Dopeuir, Tuberculose el appendicite. Thèse de Paris, in-8°
de 163 p., 1906.
E. Scawazse, Die Entstehung der Geschwülste im Lichte der Teratologie.
Verh. d. matur hist.-mediz UN. Veréins zu Heidelberg, VIT, p. 337-354, 1906.
C. W. Srices, The international code of zoological nomenclature as applied to
medicine. Hygienic laboratory, Washington, But. 1° 27%, in-8° de 50 p., 1905.
Protozoaires
R. Dugois, Les vacuolides. Réponse à la note de M. J. Künstler sur la consti-
tution intime du protoplasma des Protozoaires. C, R. Soc. biol., LX, p. 526
529, 1906.
D42 OUVRAGES REÇUS
F. ScaauniN\, Neuere Forschungen über die Befruchtung bei Protozoen. Ver-
handl. d. deutsch. zool. Gesellschaft, p..16-35. pl. I, 1905.
M.Srpcecxt, Ueber die Bedeutung des Karyosomes. Bull. Acad. sc. Craco-
vie, classe des sc. math. et nat., p. 559-580, pl. XVI, 1905.
Rhizopodes
A. GaupucnEAU, Reproduction expérimentale de La dysenterie amibienne par
inoculation intraveineuse de pus d'abcès du foie. Hanoï, in-8° de 3 p., 1905.
Sporozoaires.
L. Brasir, Eleutheroschizon Duboscqi, Sporozoaire nouveau, parasite de Sco-
loplos armiger O.F. Müller. Archives de zoo. expér. el génér.,(4), IV, p. XVII-
XXII, 1906.
L. Lécer, Etude sur Tæniocystis mira Léger, Grégarine métamérique. Archiv
fur Protistenkunde, VIT, p. 307-329, pl. XII-XIIT, 1906.
L. LéGer et O. Dusosco, L'évolution des Eccrina des Glomeris. C.R. Acad. des
sc., in-4° de 3 p., 5 mars 1906.
L. LéGer et E. Hesse, Sur la structure de la paroi sporale des Myxosporidies.
C. R. Acad. des sc., in-4 de 3 p., 19 mars 1906.
Th. Mororr, Sur l’évolution des prétendues Coccidies des Céphalopodes. C. R.
Acad. des sc., in-4° de 3p., 12 mars 1906.
Hémosporidies
Suppression du paludisme à Ismailia. Note et planches. Compagnie universelle
du canal maritime de Suez, Paris, in-8° de 30 p., 2pl., 1906.
R. Boycr, Report lo the government of British Honduras upon the outbreak
of yellow fever in that colony in 1905, together with an account of the distribu-
lion of the Stegomyia fasciata in Belize, and the measures necessary to stamyp
out or prevent the recurrence of yellow fever. London, Waterlow, in-4° de IX-
105 p., XII pl.. 1 carte, 1906.
S. CorvoBA, El paräsito del paludismo y su manera de combatirlo. Rev. de la
Soc. Vargas de estudiantes de med., Caracas, 1, p. 4-13, 1906.
L. Ducroux, Sur une Hémogrégarine de £mys leprosa. C. R. Soc. biol., LVI, p.
504-565, 1904.
E. Duccoux, Sur une coccidiose intestinale du Bœuf en Tunisie. C. R. Soc. biol.,
LIX, p. 352-354, 1905.
E. Duccoux, Sur une piroplasmose bacilliforme du Bœuf en Tunisie. C. R.
. Soc. biol., LIX, p. 461-463, 1905.
F. Fagarpo, Étiologie et prophylaxie de la fièvre jaune. Congrès de Lisbonne,
1906, in-8°de 16 p., 1905.
J. R. Mourer, Tex as fever (otherwhise known as Tick fever, splenetic fever, or
southern Cattle fever), with methods for its prevention. U. S. Depart. of agric..
Bureau of animal industry, Bull. n° 7, in-$8° de 48 p., 3 pl., 1905.
C. Nicozze et C. Comre. Sur la signification des corps en anneau décrits par
MM. Sergent dans le sang des paludéens. C.R.Soc. biol., LVII, p. 760-762, 1905.
B. Nocur, Ueber Chinintherapie bei Malaria. Ferh. des deutsch. Kolomalkon-
gresses, p. 214-218, 1905.
Ed.et Et. SERGENT, Évolution des Hématozoaires de PAthene noctua. C. R. du
6° Congr. internat. de Zool. Berne, 190%, p. 384-38S, 1905.
Ed. et Et. SERGENT, Études épidémiologiques et prophylactiques du paludisme
en Algérie. en 1904. Ann. de l’L. P., XIX, p. 129-164, 1905.
Ed. et Et. SerGenr, Anopheles algeriensis et Myzomyia hispaniola convoient le
paludisme. C. R. Soc. biol., LIX, p. 499-500, 1£05.
EN
(0m
OUVRAGES REÇUS D43
Flagellés
R. BLANCHARD, Spirilles, Spirochètes et autres microorganismes à corps spiralé.
Semaine inéd., in-8° de 28 p., 1906.
R. BLancmarp, Les découvertes modernes Sur la propagation et la préserva-
tion des maladies, in-8° de 23 p., 1906.
A. BREINL, Pathological Report on the histology of sleeping sickness and try-
panosomiasis, with a comparison of the changes found in animals infecled with
T. gambiense and other Trypanosomata. Proc. Roy. Soc., LXXVII, p. 233-
236, 1905.
E. Brumpr, Sur quelques espèces nouvelles de Trypanosomes parasites des
Poissons d’eau douce : leur mode d'évolution. C. R. Soc. biol., LX, p. 160-162,
1906.
E. BrumPr, Mode de transmission etévolution des Trypanosomes des Poissons.
Description de quelques espèces de Trypanoplasmes des Poissons d'eau douce.
Trypanosome d’un Crapaud africain. C. R. Soc. biol., LX, p. 162-163, 1906.
E. Brumpr, La maladie du sommeil. La Nature, XXXIV, p. 339-343, 1906.
O. CasagRanpi e R. De Luca, Tentativi di profilassi eterapia antisifilitica coi fil-
trati amicrobici di manifestazioni sifilitiche e con siero di Cane trattato con i
filtrati stessi. Ann. d’ig. Sperim.,p. 49-66, 1906.
P. Van Dune, Contribution à l'étude des trypanosomoses. Répartition des
Trypanosomes dans les organes. Arch. de Parasitologie, X, p. 160-170, 1906.
O. GorgeL, Sur les propriétés osmotiques des Trypanosomes. Ann.Soc. de
méd. de Gand, LXXXVI, p. 11-18, 1906.
F. KrzyszraLowicz et M. Siepzecxi, Contribution à l’étude de la structure et
du cycle évolutif du Spirochæte pallida Schaud. Bull. Acad. sc. Cracovie, classe
des sc. math. et nat., p. 713-728, pl. XVIII, 1905.
F. Luxs, Trypanosoma Theileri in Transkaukasien. Archires de Parasitologie,
X, p. 171-186, 2 pl., 1906.
C. Nicozee et C. Core, Sur une nouvelle spirillose. C. R. Soc. biol., LIX,
p. 200-201, 1905.
D. Popovrrcu, Les Spirochètes en pathologie humaine. Thèse de Paris, in-8° de
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R. Ross, Note on a Flagellate parasite found in Culex fatigans. Journal of hyg.,
VI, p. 96-97, 1906.
W. Scxuzze, Das Verhalten des Cytorrhyctes Luis (Siegel) in der mit Syphilis
geimpften Kanincheniris. Beiträge zur pathol. Anat.und allg. Pathol., XXXIX,
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Ed. et Et. SERGENT, El-Debab. Trypanosomiase des Dromadaires de l'Afrique
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Ed. et Et. SERGENT, Sur un Flagellé nouveau de l'intestin des Culex et des Ste-
gomyia, Herpetomonas algeriense. Sur un autre Flagellé et sur des Spirochæle
de l'intestin des larves de Moustiques. C. R. Soc. biol., LX, p. 291-293, 1906.
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med. Wochenschrift, in-8° de 12 p., 1 pl., 1906.
Helminthologie.
G. DesauNaIsS de GuerMarQuER, L'appendicite purasilaire. Thèse de Paris, in-8°
de 86 p., 1906.
I. Goosmanorr, Helminthes intestinaux de l'Homme. Leur fréquence dans Le
eanton de Vaud. Manifestations pathologiques dues à leur présence. Thèse de
Lausanne, in-8° de 51 p., 1 pl., 1906.
O. von Lixsrow, Helminthes from the collection of the Colombo Museum.
Spolia seylanica, HT, XI, p. 463-188, pl. I-IIT, 1906.
W. S. MarsaaLz and N.C. Gizgerr, Notes on the food and parasites of some fresh-
044 QUVRAGES REÇUS
water Fishes from the lakes at Madison, Wis. Appendix to the Rep. of the Com-
missioner of fisheries to the Secretary of commerce and labor for the year
ending june 30, 1904. Washington, p. 513-522, 1905.
Crustacés
H. CouriÈëRe, Sur un type nouveau de Rhizocéphale, parasite des A/pheidue.
C. R. Acad. des SC., in-4° de 3 p., 1902.
H. CouriëRe, Sur la morphologie interne du genre Thylacoplethus, parasite
grégaire des Alpheidue. C.R. Acad des Sc., in-4° de 3 p., 14902.
H. CouriÈRE, Sur un nouveau type de Rhizocéphale grégaire parasite des Alphei-
düe (deuxième note). C. R. Soc. biol., in-8° de 2 p., 1902.
Linguatules.
Tarmoux, Un cas de Pentaslomum constrictum observé au Sénégal. C. R. Sec.
biol., LIX, p. 78-80, 1905.
(2
Acariens
M. Carpano, La rogna psoroptica nei Bovini della colonia Eritrea. Asmara,
Istituto siero-vaccinogeno eritreo, in-80 de 19 p., 4905.
F. LaniLe, Contribution à l'étude des Ixodidés de la République Argentine.
Anales del Ministero de agricultura, W, in-8 de 166 p., 43 pl., 1905.
PoENARU-CiPpLescu, Contributiuni la studiul scabiei in România. Rev. Spitalul,
in-8° de 25 p., 1905.
LI Tarcärpx, Monographie der arktischen Acariden. Inaug. Diss., Upsala, in-4°
de 78 p., 1 pl., 1904.
Bactériologie
L. BaRuCHELLO 6 H. Mori, Sulla eziologia del cosi detto tifo o febbre petecchiale
del Cavallo. Contributo allo studio della piroplasmosi equina. Rivista d'artigliera
e genio, I, in-8° de 16 p., 2 pl., 1905.
CALMETTE, L’assainissement des villes et les procédés modernes d'épuration des
eaux d’égout. Revue pratique d'hygiène municipale urbaine et rurale, T, p. 293-
332, 3 pl., 1905. ’
A. Cazmerre, Recherches Sur l’épuration biologique et chimique des eaux
d’égout effectuées à l'Institut Pasteur de Lille et à la Station expérimentale de
la Madeleine, I. Paris, Masson, in-8° de 194 p., 2 pl., 1905.
J. CANrTACUzÈNE et S. Irimesou, Recherches Sur la maladie toxique produite
par l’inoculation des Bacilles tuberculeux dégraissés. Congrès internat. de la
tuberculose, Paris, in-8° de 7 p., 4905. É
J. CanracuzëNE, Recherches sur l'infection expérimentale par les Bacilles para-
tuberculeux (Bacilles du Timothée). Congrès internat. de la tuberculose, Paris,
in-8° de 14 p., 1905.
E. Dscauxxowsky und J. Kurzis, Ueber die Bereitung des trockenen Antirinder-
pestserums. Centralblatt fur Bakteriol., Originale, XXXVI, p. 90-94, 1904.
R. Duron», Recherches sur la motilité et les organes moteurs des Bactéries.
Thèse de Nancy, in-8° de 191 p., 5 pl., 1905.
Furruxa, Etablissement de principes uniformes pour l'estimation de la réac-
tion de la tuberculine et de la malléine. VIII* Congrès internat. de méd. vétéri-
naire à Budapest, in-8° de 24 p., 1905.
A. Gaupucneau, Note sur l’épuration des eaux argileuses. Bull. économique de
l’Indo-Chine, in-4 de 5 p., 1905.
C. Gorescu, Action de l'iodure de potassium sur l'histozenèse du tubercule
expérimental provoqué par l’inoculalion de poudres inertes. Congrès internat.
de la tuberculose, Paris, in-8° de 5 p., 1905.
4 UN CLOUS 6, QT +
De RITES TE
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_ ASSELIN et HOUZEAU, Éditeurs
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Professeur à l'École vétérinaire d’Alfort, Membre de l'Académie de Médecine
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Le Recueil de Médecine vétérinaire paraît les 15 et 20 de chaque mois
Le numéro du 30 contient IN EXTENSO le Bulletin des séances de la Société centrale
de Médecine vétérinaire.
ABONNEMENT :
Paris et Départements : 30 fr. — Union postale: 32 fr. par volume,
Les Archives de Pur asilulogie publient des mémoires originaux écrits dans l’une ou.
l'autre des sept langües suivantes : français, allemand, anglais, espagnol, esperanto, ita-
lien et latin. Les auteurs doivent, autant que possible, “FOURNIR UN TEXTE DACTYLOGRAPHIÉ
{écrit & La machine), afin de réduire les corrections au minimum.
Ce texle doit être conforme aux règles suivantes :
1° On appliquera strictement les règles de la Nomenclature zoologique ou botanique
adoptées par les Congrès internationaux de zoologie et de botanique;
2° On fera usage, tant pour les noms d' auteurs que pour les indications bibliogra=
phiques, des abréviations adoptées par ces mêmes Congrès ou par le Zoo Record
de Londres ; :
3’ Les noms géographiques ou les noms propres empruntés à des langues qui n'ont
pas Palphabet latin seront transcrits conformément aux règles internationales adoptées
par les Congrès de zoologie ;
% Tout nom d'être vivant, animal ou plante, commencera par une prenMens lettre
capitale,
5° Tout nom scientilique lalin sera imprimé en italiques {souligné une fois sur le
manuscrit).
Dans l'intérêt de la publication et pour assurer le maximum de perfection dans la
reproduction des planches et figures, tout en supprimant des dépenses inutiles, nos
collaborateurs sont priés de se conformer aux règles suivantes :
4° Dessiner sur papier ou sur bristol bien blanc,
2 Ne rien écrire sur les dessins originaux.
3° Toutes les indications (lettres, chifires, explications de figures, etc.) seront placées .
sur un calque recouvrant la planche ou le dessin.
4° Abandonner le plus possible le crayon à la mine de plomb pour le crayon Wolf
ou l'encre de Chine.
Les auteurs d'articles insérés aux Archives sont instamment priés de renvoyer à
la Rédaction, dans un délai minimum de huil jours, les épreuves corrigées avec le
manuscrit où l'épreuve précédente.
Is recevront gratis 50 tirés à part de leur article. Ils sont invités à faire connaître
sans délai s'ils désirent en recevoir un plus grand nombre (50 au maximum), à leurs …
frais et conformément au tarif ci-dessous. Ce tarif ne vise que l impression typographique
ilne concerne point les planches, dont le prix peut varier considérablement. Toutefois,
il importe de dire que, pour les exemplaires d'auteurs, les planches seront comptées
strictement au prix de revient. Les tirés à part ne peur ent étre mis en vente.
TARIF DES TIRÉS A PART
Une feuille entière.
Trois quarts de feuille
Une demi-feuille . .
Un quart de feuille .
Un huitième de feuille
. Le Secrétaire de la rédaction, Gérant :
Dr MAURICE LANGERON.
École Professionnelle d’Imprimerie, à Noisy-le-Grand (Seine-et-Oise)
rt
ARCHIVES à
DE ‘ho
k PUBLIÉES PAR
RAPHAEL BLANCHARD
PROFESSEUR À LA FACULTÉ DE MÉDECINE D£ PARIS REX
i. MEMBRE DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE : ae
\ à
PARIS *
ASSELIN ET HOUZEAU, ÉDITEURS k
PLACE DE L'ÉCOLE DE MÉDECINE a
1907 |
Les Archives paraissent tous les trois mois |
dit SOMMAIRE + 0 0
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_ CaRLo TIRABOSCHI. — État actuel de la question du véhicule de la peste . . 545 ‘2
mn:
AcLEssANDRo SAnricomi. — Lesioni polmonari prodotte dagli Strongilidi. : . 621 “#R
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AVIS |
Les Archives de Parasitologie sont publiées
par MM. ASSELIN et HOUZEAU, Épireurs, Place de
l'École de Médecine, Paris (6°). dei
On est prié de s’adresser aux Editeurs pour tout ce qui
_ concerne l'administration (abonnements, achat des volu-
e
mes antérieurs, etc.). : ;
Les quatre premiers volumes ne sont plus représentés
en magasin que par un petit nombre d'exemplaires. Leur
prix sera prochainement élevé.
\ f
N.B. — 11 est déja paru quatre fascicules du tome X ; par
exception, cemême volume comprendra un cinquième et dernier
fascicule, renfermant la table générale des dix premiers volumes,
La confection de cette table exigeant un certain temps, nous
continuons la publication du tome XI, pour ne pas infliger trop
de retard aux travaux qui attendent leur tour de publication.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION
DU VÉHICULE DE LA PESTE
PAR
Le D: CARLO TIRABOSCHI
Assislant au Service de la Santé publique (Rome).
Il y a plus de trois ans, j'ai publié dans ces Archives (4)un long mé-
moire sur les Rats, les Souris et leurs parasites cutanés, dans leurs
rapports avec la propagation de la peste. Ce travail contenait :
1° une revue critique et historique, très sommaire, sur la question
des Rats et des Puces, considérés comme agents propagateurs de
la peste ; 2° la description des espèces de Rats répandues en Italie,
et des indications sur leur distribution et sur leurs mœurs, surtout
au point de vue de la dissémination de la peste; 3° la description dé-
taillée de la morphologie du squelette chitineux des Puces et notam-
ment de leur appareil buccal; 4° des notions biologiques sur les
Puces : développement, parasitisme, mode de sucer le sang, etc.:
examen des Puces; 5° la description des espèces de Puces observées
sur les Rats : description détaillée des espèces les plus répandues
et des espèces nouvelles découvertes par moi-même; leur distribu-
tion géographique, énumération des hôtes sur lesquels elles avaient
été rencontrées, expériences sur leur aptitude ou non à sucer
le sang de l'Homme; 6° la description des Pédiculidés et des
Acariens observés sur les Rats; notions morphologiques et biolo-
giques, etc.
La même année 190%, j'ai publié un autre mémoire (2), dans le-
quel je développais largement le point de vue historique, que j'avais
à peine indiqué dans mon mémoire précédent. Les conclusions que
l’on pouvait tirer de cette revue, étaient que le rôle des Rats dans la
diffusion de la peste avait été observé et constaté presque partout,
aussi bien à terre qu'à bord des navires, et que les affirmations
contraires, d’ailleurs très rares, devaient être attribuées, le plus
souvent au moins, à un défaut d'observation (1). Au contraire, la
(1) J'entends parler des épidémies de peste; cependant d’après Hankin, des épi-
démies importantes de peste pourraient se développer sans la collaboration des
Rats.
Archives de Parasitologie, XI, n° 4, 1907. 36
546 CARLO TIRABOSCHI
théorie qui considère les Puces comme de redoutables agents pro-
pagateurs de la maladie, avait été niée par la plupart des observa-
teurs; parmi les nombreuses expériences exécutées avec des Rats
et des Puces, celles de Simond et de Gauthier et Raybaud avaient
seules eu quelquefois un résultat positif. Ces expériences, celles de
Simond en particulier, ont été l'objet d’une critique peut-être trop
rigoureuse; on a voulu leur enlever toute valeur, en leur opposant
les essais infructueux de tous les autres expérimentateurs; mais
je faisais remarquer (1, p. 182) que (une expérience positive bien
faite (et telles étaient, à mon avis, quelques-unes des expériences
de Gauthier et Raybaud) vaut mieux que plusieurs négatives » et
j'en concluais que la possibilité de la transmission de la peste par
les Puces était démontrée.
Mais récemment l’Advisory Committee for Plague Investigation
in India vient de publier une relation très intéressante sur les ex-
périences exécutées à Bombay en 1905-1906, Ces expériences ont
été si nombreuses et si rigoureuses et leurs résultats si souvent po-
sitifs, que désormais le fait de la transmission de la peste par les
Puces ne peut plus être mis en doute.
D'ailleurs, ce côté de l'épidémiologie de la peste ne doit pas être
envisagé seulement au point de vue des expériences de laboratoire,
il faut prendre en considération les observations épidémiologiques,
la biologie des Puces, etc. D'après Simond (p.17), si quelques auteurs
« n’ont pas accordé une grande importance au rôle des Puces,
c'est qu'ils ont fondé leur opinion plutôt sur les recherches de labo-
ratoire que sur l'observation des faits épidémiologiques... L’évolu-
tion de toute épidémie importante de peste fourmille de faits dont
l'explication est facile et satisfait l'esprit, si l'on admet la Puce
comme intermédiaire entre les Rats et l'Homme, mais qui demeu-
rent mystérieux et inexplicables, si l’on essaie de les interpréter en
s'appuyant sur toute autre hypothèse ». Cette observation critique,
qui me parait très juste, a été répétée tout récemment par Thomp-
son (3); moi-même j'avais déjà remarqué ce fait (2), à propos des
travaux de Yersin, Wernitz. Lydston, Thompson, Tidswell, etc.
Après la publication de mes travaux, bien d’autres recherches
ont été faites dans tous ces champs d'observation, et je ne crois pas
inutile de soumettre les résultats obtenus à une revue critique, qui
peut servir de complément à mes travaux précédents.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION. DU VÉHICULE DE LA PESTE 547
I. — Les Rats et les Souris considérés
comme agents propagateurs de la peste.
A. — Les RATS ET LES Souris.
Il serait fastidieux et presque inutile de citer ici toutes les obser-
vations faites à ce propos, d'autant plus que la conclusion, qu'on
en pourrait tirer, serait exactement celle que j'ai tirée de mon pré-
cédent mémoire. Aussi me bornerai-je à citer les auteurs qui ont
étudié les diverses espèces de Rats et de Souris, au point de vue de
leur rôle plus ou moins important dans la transmission de la peste.
J'ai déjà remarqué que cette question avait été envisagée par un
tres petit nombre des premiers observateurs; malheureusement elle
a été négligée aussi par la plupart des derniers épidémiologistes.
Parmiles auteurs déjà cités, je dois mentionner iei Nime, qui, à
Formose, constata la présence du Bacillus pestis le plus souvent dans
les Rats domestiques et beaucoup plus rarement chez les Rats
d'égout, les Souris et les Musettes.
Mitchell dit qu’en 1903, à la ville du Cap, les Souris et aussi des
« Rats des champs » (Arvicanthus pumilio), qui pénètrent dans
les habitations, furent fréquemment trouvés atteints de peste.
D’après Baxter-Tyrie, dans le Queensland, en 190%, sur 11 479 Rats
examinés, on en trouva infectés 310, c’est-à-dire 2,70 pour cent,
(à Brisbane 7,30 pour cent), et sur 3276 Souris, seulement 3, c'est-
à-dire moins de 1 pour cent (à Brisbane 0,22 pour cent). Des
310 Rats trouvés atteints de peste, la plupart (249) étaient Mus decu-
manus, 58 Mus rattus (31 Mus alexandrinus et 27 Mus rattus s. str.) et
3 appartenaient à une espèce indéterminée.
Simond dit avoir vu des Mus decumanus morts de peste spontanée
en Chine, au Brésil et dans l'Inde, aussi bien à Bombay que dans
presque toutes les villes où il à suivi une épidémie pesteuse. (A
vrai dire, dans certaines de ces villes, la plupart des Rats frappés
par l'épizootie appartenaient à l'espèce Mus rattus, mais ce fait
parait venir de la prédominance de cette dernière espèce dans les
villes en question. »
Thompson écrit que, durant une période de neuf mois
(ler mars-3 décembre 1904), parmi 43 822 Rats de Sydney soumis à
D£S CARLO TIRABOSCHI
l'examen bactériologique, 243 ont été trouvés infectés, et que 108
étaient Mus decumanus, 13 Mus rattus, et 62 Mus musculus.
Le même Thompson (3) vient de résumer tout récemment les
observations déjà publiées à propos de quatre épidémies de peste à
Sydney (1900, 02, 03, 04). Les conclusions qu'il déduit de la grande
quantité de faits observés sont les suivantes (p. 539) : 1° la peste
ne doit pas sa forme épidémique au contact avec l'Homme malade;
2° la peste du Rat est un facteur nécessaire de l'épidémie; 3° un
être vivant intermédiaire (la Puce) est nécessaire pour communi-
quer l'infection du Rat à l'Homme.
Il nous est impossible de suivre l'auteur dans la discussion de
tous les faits qu'il rapporte. Il examine d'abord (p. 539-547) les phé-
nomènes de la peste épidémique et démontre que : 1° «the infec-
tion is not diffused by communication with the sick »; 20 « the in-
fection is associated in some way with locality »; 3° (incidence of
the disease on households iserratie » ; 4° Cepidemic plague is asso-
ciated with epizootic plague », ete. Et il conclut : (the infection of
plague exists in, and is disseminated with, the bodies of some spe-
cies of lower animal, wich is free to wander. »
Puis (p. 547-557) Thompson examine les phénomènes de la peste
épizootique et dit que trois espèces de Rats et de Souris sont victi-
mes, dans la nature, de la peste épizootique et ont des rapports avec
la peste humaine : Mus decumanus, Mus rattus avec la variété Mus
alexandrinus rufus, Mus musculus. Le Mus decumanus « can by itself
cause plague in Man, as we saw in the case of the troop-ship An-
tillean Which carried no other species, and on which two cases of
_plague occurred in port, but before pratique had been granted. We
have also found this species far from any town on the banks of a
river 300 miles north of Sydney where, no doubt, specimens had
been originally landed from Sydney cargo-boats. At the time of
examination they extended to premises inland, where they were
found in the village and on farms; there, also, they alone were the
cause of 12 cases of plague, of which 7 were fatal, and which occur-
red in 10 houses. Large numbers of Rats were examined; there were
but a half-dozen M. rattus among them, all of which were plague-
îree, while all the infected Rats of which there were many were
M. decumanus. » Quant au Mus rattus : («We have found M. rattus
alone in connection with plague in Man: we have also found itin
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 549
the same connection in conjunetion with infected Mus musculus
only, and apart from Ï]. decumanus. T1, too, can by itself cause plague
in Man. » Enfin le Wus musculus semble moins sensible non seule-
ment à l'infection artificielle, mais aussi à l'infection naturelle: en
1904, par exemple, les Rats furent trouvés infectés dans la propor-
tion de 0,99 pour cent, les Souris seulement dans la proportion
de 0,26.
D'ailleurs la proportion des Rats trouvés infectés est certaine-
ment inférieure à la vérité, car: 1° la plupart des Rats meurent de
peste dans leurs cachettes (1); 2° il est plus facile de capturer avec
des pièges des Rats sains (qui sont très voraces) que des Rats pes-
teux; 5° bien des Rats morts vraisemblablement de peste n’ont pas
été considérés comme pesteux, parce qu'ils avaient été trouvés en
putréfaction.
Thompson démontre ensuite : 1° (irregular infestation (par les
Rats) of buildings, which furnished an explanation of the erratic
incidence of plague on houses: 2 small number of plague-Rats
usually found ou single premises ; 3° slow progress of the disease
in hordes infesting any premises; 4° interval between epizoôtics and
(bridge » which connects them, » etc.
Enfin (p. 560-562) Thompson envisage la question de l'association
des épidémies et et des épizooties pesteuses et démontre : «1° there
is a relationship in time and place between plague in Rat and plague
in Man. 2° an interval elapses between the beginning of epizoôtics
and attack of Man ; 3° evidence that Rats must die before Man can be
attacked ; 4° seasonal incidence of plague. »
La Commission anglaise dans les Indes (1905-06) trouva que la
plupart des Rats atteints de peste à Bombay étaient Mus rattus
(p. 44), qui est l'espèce la plus répandue dans les Indes. Dans cette
relation on trouve aussi des observations intéressantes sur la
virulence du Bacillus pestis après passage par les Rats au moyen
d'inoculations cutanées et sous-cutanées, sans l'intermédiaire de
cultures (p. 496 et 502); sur l'immunité des Rats de Bombay à des
inoculations cutanées ou sous-cutanées de petites quantités de cul-
tures de peste (p. 506); sur le nombre des Bacilles pesteux dans le
sang, l'urine et les excréments des Rats morts de peste (p. 519):
(1) D’autres observateurs ont affirmé précisément le contraire.
590 CARLO TIRABOSCHI
sur l'existence de la peste chronique chez les Rats de localités
dans lesquelles la peste est endémique (p.530) (dans deux villages on
trouva, durant la période d’accalmie, 7 Rats atteints de peste chro-
nique (1), tous les 7 étant Mus rattus).
De tous ces rapports on peut donc tirer des conclusions identi-
ques à celles que j'ai déjà exposées dans mon mémoire précédent (2) :
«les Rats d'égout et les Rats domestiques jouent, ou pour mieux
dire peuvent jouer, le même rôle prépondérant dans la propaga-
tion de la peste; cela tient peut-être tout simplement à la prépondé-
rance de l’une ou de l’autre espèce; les observateurs des futures épi-
démies devront préciser ce point particulier... Quant aux Souris,
elles peuvent jouer un rôle actif dans la propagation de la peste,
mais le fait est beaucoup plus rare que pour les Rats. » Peut-être, le
rôle différent des diverses espèces de Rats et de Souris dans la diffu-
sion de la peste dépend-il aussi de la fréquence différente avec la-
quelle ces divers Rongeurs sont parasités par les Puces.
J'ai déjà dit (4, p. 170) que parmi les Rongeurs qu'on considère
comme étant des agents propagateurs de la peste bubonique, il y
en …à un qui mérite une mention spéciale, le Tarabagan ou Arcto-
mys bobac Schr. « Le Tarabagan est une espèce de Marmotte qui vit
dans la Mongolie et dans la Transbaïkalie et qui présente souvent
une maladie épizootique, qui paraît être une véritable peste bubo-
nique et se transmettre à l'Homme avec la plus grande facilité ;
dans ces régions donc, le Tarabagan remplacerait le Rat. »
(1) Ces Rats ne présentaient aucun symptôme de maladie, mais l’autopsie
révéla la présence d’abcès chroniques dus au B. peslis. La Commission a égale-
ment enregistré deux cas de peste chronique expérimentale chez des Rats infec-
tés par des Puces au laboratoire.
(2) TrrABoscui, 4, p. 137. Cependant ces conclusions ne correspondent pas à
celles formulées récemment par MEYER à la suite de ses observations et des ren-
seignements donnés par les médecins officiels de plusieurs districts de l’Inde
et publiés dans le n° 7de l’Indian Medical Gazette, XLVI, 1906 (BROWNING-SMITH,
p. 241-254; STEVENS, p. 254-270; Tucker, p. 270-274; Ross, p. 274-277; ELrior,
p. 277-285; Gizz, p. 286-288). Meyer vient à la conclusion que Mus rattus est un
agent propagateur de la peste bien plus dangereux et plus actif que Mus decuma-
nus et cela à*cause de son genre de vie. « Während H. raltus eng mit dem Men-
schen zusammenlebt, ist dies bei 4. decumanus viel weniger der Fall... In den
meisten Gegenden, besonders wo die Häuser noch primitiv und ohne Kanalisation
sind, findet sich 31. rattus und durch ihr enges Zuzammenleben mit den Mens-
chen erklären sich die Ausbrücke menschlicher Pest, wo unter den Ratten die
Seuche ausgebrochen ist. Besonders in dem Hauptpestherde Indiens, in Bombay,
soll überall 4. rattus herrschen, und man erklärt sich im Gegensatz die relative
Iamunität Kalkuttas — wo es nie zu einer allgemeinen Ausbreitung kam —
durch das Ucberwiegen von H. decumanus. »
=
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 991
Tout récemment le D' Kashkadamov vient de publier un mé-
moire sur la petite épidémie de peste de la Mandchourie, en automne
1905, épidémie qui dura un mois seulement et qui frappa 13 in-
dividus, dont 12 moururent. Voici les observations (faites par plu-
sieurs commissions de médecins) relatives au rôle du Tarabagan :
1° Dans quelques localités « wurden weder Erkrankungen unter
den Buriaten, noch eine Seuche der Tarabaganen gefunden » ;
2° dans d’autres localités où l’on observa la maladie parmi les Tara-
bagans, quelquefois on ne constata aucun cas de peste chez les
Hommes (fait que les observateurs expliquèrent par la circonstance
que les Hommes « sich vor der Tarabaganen hüteten »), d’autres
fois au contraire on observa quelques cas de peste humaine (( was
man durch den Verbrauch des Fleisches, bezw. durch die Bearbei-
tung der Felle der verendeten Nagetiere erklärt »). En conclusion
les commissions ont établi : 1° (die zweifellose Seuche der Tara-
baganen in der Richtung des grossen Weges von Chajlar nach
Zuruchatuj » ; 2° (eine zweifellose Pestepidemie lokalen Charak-
ters unter der Mongolen » ; 3° € der sehr wahrscheinliche Zusam-
menhang zwischen beiden. »
B. — Les Puces.
1. — OBSERVATIONS ÉPIDÉMIOLOGIQUES. — Üriarte dit (4, p. 709) que
les épidémies de pesteen Amérique (Buenos-Ayres, Rosario de Santa
Fé,etc.) ont confirmé l'importance du rôle, non seulement des Rats,
mais aussi de quelques-uns de leurs parasites, dans la diffusion de
Ja peste. Les Rats atteints étaient porteurs de plusieurs Puces (Pulex
ârritans?); «einige Untersuchungen bewiesen die externe Anstec-
kung dieser Insekten, ebenso wie das Vorhandensein virulenter
Pesthacillen in ihrem Blute »; « des Puces prises sur des Rats pes-
teux peuvent, par leur simple passage sur la gélose, déterminer
l'apparition de nombreuses colonies de peste et leur intestin est
rempli de Bacilles pesteux (2) ».
Au contraire Herzog, qui a étudié l'épidémie de Manille, 1904,
ne semble pas attribuer aux Puces une grande importance et décrit
un cas de peste, dans lequel la maladie fut très probablement ino-
culée par le Poux de tête.
Hankin, après avoir remarqué les mauvaises conditions hygiéni-
552 CARLO TIRABOSCHI
ques et la grande abondance de Puces dans les localités où la peste
estendémique (Garhwal, Yunnan, Beni-Cheir, Agra, Transbaïkalie,
etc.), rapporte un grand nombre de faits, qu'il a observés dans les
Indes et qui l'amènent à conclure que la transmission de la peste
n'est pas due à l'infection du sol ou desaliments, ni au contact acei-
dentel du microbe, ni à la piqûre des Moustiques, mais bien à la
piqûre des Puces. D’après lui (p. 79), «the true nidus of the plague
infection is some species of Flea, in which the microbe causes a
slowly developing infection, that at length renders the Insect capa-
ble of transmitting the disease, and in which Insect the virus can
retain or regainits virulence. If Simond's view were true, namely,
that the Flea merely retains the microbein its intestine and passes
it out with its dejecta, one would expect Fleas to be most virulent
immediately after, or soon aîter, ingesting the blood of infected
Rats. The theory now put forward is that the microbe developes (1)
in the Flea, and only after à lapse of time is in à position to reach
the proboseis in the act of biting. This theory obviously presuppo-
ses an interval between the time of reception of the virus by the
Flea and the development of its capacity to pass this virus on to
other animals. As explained above such an interval is usually ob-
served in outbreaks of plague. Changes in the habits of Fleas as
the Rat population dies off may explain cases in which Ratsappear
to play different parts in the spread ofthe disease at different
periods of the outbreack. Differences in the habits of Fleas in diffe-
rent localities may be the cause of abnormal outbreacks in which
certain susceptible species of animals temporarily or perma-
nently escape. The class of facts here referred to, and which have
been described in earlier paragraphs, are impossible to explain
on the theory that plague transmission is simply a chance passage
of the microbe from infected dejecta to accidental cuts or scratches
on the bodies of susceptible animals. »
(1) Pour démontrer que les Bacilles pesteux se multiplient dans le corps de la
Puce, Hankin (p. 81) captura une Puce vivante sur un Rat trouvé mort après le
premier cas de peste humaine; il la secoua fortement dans plusieurs tubes de
bouillon stérile, et en ayant extrait l’estomac par dissection aseptique, y trouva
des Bacilles semblables au Bacillus pestis, « arranged in clusters of about a
dozen individuals each, and embedded ‘in the tissues of the stomach wall. No:
Bacilli were observed in the liquid contents of the stomach. The arrangementof
the Bacilli in clusters obviously suggests that they were engaged in reproduction.
in situ». Zirozra et Lisron avaient déjà observé que les Bacilles de la peste peu-
vent se multiplier dans l’estomac des Puces.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 599
Donc, pour Hankin, la Puce ne transporterait pas la maladie avec
sa trompe pleine du sang pesteux qu'elle à sucé; la peste serait au
contraire une vraie maladie de la Puce, chez laquelle le Bacille se
généraliserait avec lenteur, et aurait besoin d'un certain temps
(10-20 jours?) pour arriver à la trompe et rendre ainsi la Puce in-
fectieuse. Je dois faire remarquer ici que quelques-unes des expé-
riences de la Commission anglaise dans les Indes ne semblent pas.
confirmer l'hypothèse de Hankin. En effet, des Rats sur lesquels se
transportèrent des Puces, placées auparavant sur d’autres Rats, ino-
culés de peste, moururent de cette maladie 6 jours seulement après
que les Puces eurent été placées sur le Rat inoculé (p. 437 et 443);
même en supposant que les Puces aient sucé du sang pesteux dès
le premier Jour et même en comptant deux jours seulement pour
le développement complet, jusqu'à la mort, de la maladie chez le
deuxième Rat, les Puces auraient été capables d'inoculer la peste
4 jours seulement après l’ingestion du sang pesteux. Comme consé-
quence de son hypothèse, Hankin dit (p. 50) que les voyageurs ou
les personnes qui fuient un foyer pesteux (pourraient être porteurs,
pendant longtemps, de Puces infectées, sans être contaminés par
elles et semer la maladie sur leur itinéraire en abandonnant leurs
parasites dans les logements où ils séjournent ».
Un autre fait épidémiologique sur lequel Hankin insiste (p. 80)
est celui de la coïncidence de la disparition des Puces et de la ces-
sation de l'épidémie. Au commencement du 1901, il put recueillir
en Agra grand nombre de Puces sur les Chiens et sur les Chats;
au commencement de la saison chaude, il trouva que les Puces
avaient totalement disparu des Chats du Laboratoire, et ayant fait
faire des recherches très soigneuses dans plusieurs quartiers de la
ville et dans les villages, il ne put avoir une seule Puce; la cessation
de la peste coïncida avec la disparition des Puces. Nous rappelle-
rons ici que Tidswell aussi aobservé que les Puces, et notamment
le Ctenocephalus serraticeps, très fréquentes sur les Rats durant l'épi-
zootie pesteuse de Sydney, avaient presque complètement disparu
après qu'elle eût cessé. D'autres observations analogues sur une
saison des Puces ont été faites par Simond dansles Indeseten Cochin-
chine, par Yersin en Annam, par Hill à Maritzburg (Natal), par
Vassal à Maurice et à la Réunion, par Liston à Bombay, ete. D'après
Thompson (3, p. 564), il y a aussi une season of Fleas et cette saison
594 CARLO TIRABOSCHI
est, pour Sydney, précisément l'automne, qui comprend, dans ces
régions, les mois de mars, avrilet mai, et qui est la season of danger,
parce qu'elle est la saison (when most people suffer and when Rats
most suffer » et comprend le temps pendant lequel il est difficile
d'arrêter l'épizootie pesteuse. Généralement, la saison des Puceset
du danger (1) est la saison chaude ; à Sydney elle coïnciderait avec
l'automne; à Bombay au contraire, d'après Hankin, la saisonchaude
serait précisément la saison de la disparition des Puces et de la ces-
sation du danger. Nous croyons qu'il sera très intéressant de pour-
suivre cesinvestigations dans toutes les localités où la peste esten-
démique ; c'est seulement d’un nombre très grand d'observations
qu'on pourra tirer des conclusions sûres et importantes.
Liston (1) a poursuivi pendant trois ans, dans les Indes, des re-
cherches très soigneuses sur la distribution et sur les mœurs des
diverses espèces de Rats et sur leurs parasites cutanés. Il conclut
que l’espèce de Puce la plus répandue sur les Rats des Indes est le
Pulex cheopis Roth, et que cette Puce, en l'absence de Rats, se porte
sur l'Homme et sur d’autres animaux, les pique et peut ainsileur
communiquer la peste. Plusieurs faits cités par Liston démontrent
la vérité de cette assertion. Ainsi, par exemple, au mois de mars
1903, une épizootie pesteuse ayant éclaté parmi les Cobayes du Jar-
din zoologique de Bombay, Liston observa que ces animaux, eten
particuiier les individus atteints de peste, étaient infestés par Pulex
cheopis, alors que les Cobayes en sont ordinairement tout à fait
€xempts. Tout près des cages où les Cobayes étaient renfermés,
Liston trouva des Rats morts. Ce fait l’amena à se servir des Cobayes
<omme de « pièges » pour capturer les Puces des Rats dans les maïi-
(1) D’après GorscaLics, il y aurait aussi une saison des Rats coïncidante avec
une saison du danger. Nous avons déjà vu (4, p. 167) que, suivant cet auteur,
les épidémies pesteuses du type estive ou bubonique sont dues à la contamina-
tion par les Rats et qu’elles surviennent l’été à cause de la reproduction de ces
animaux en cette saison. Gotschlich a confirmé ensuite cette manière de voir:
«das zeitliche Zusammenfallen der Rattenvermehrung und des Wiederauflebens
der Pest im Frühjahr steht ausser allem Zweifel ». Voilà l'explication de ce fait:
«der Rattenbestand in der seuchefreien Zeit besteht eben wahrscheinlich im
wesentlichen aus Individuen, die gegen die Pest eine gewisse Widerstandsfähig-
keit haben, da alle hochempfängliche Tiere durch die vorangegangene Seuchen-
periode hingerafit wurden. Sobald jedoch durch eine neue Wurfzeit massenhaft
neue hochempfängliche Generationen von Ratten auf den Plan gebracht sind, so
kann von einem einzigen latenten Fall aus eine neue akute Pestepizootie unter
den Ratten und damit gleichzeitig eine neue Pestepidemie unter den Menschen
<ntstehen. »
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 3)
sons infestées. Le 7 mars, on évacua une maison dans laquelle un
Homme avait été frappé par la peste; 9 jours plus tard, on trouva
dans une chambre un Rat mort de peste; on porta deux Cobayes
dans cette chambre, et quatre Cobayes dans deux autres chambres
indemnes de peste; de ces 4 Cobayes pas un ne contracta la maladie
et pas un ne présenta de Puces, tandis que sur les 2 Cobayes de la
chambre infestée on recueillit le matin suivant 10 Puces (dans
trois desquelles on trouva de nombreux Bacilles pesteux vivants
dans l'estomac) et l’un d'eux mourut de peste (1). «Aboutthe 6th or
7th of April, Rats began to die in large number in a chawl, or
block of tenement houses. Suddenly the deaths among Rats ceased,
and on April 1lth the people became troubled with Kleas. ‘The
Fleas were so numerous that they had to quit their rooms and sleep
outh in the verandah. While living in the verandah on April 17th
one of the inhabitants of the particular room in which the Fleas
were taken became infected with plague. Another case occurred on
the same day in a room adjoining. The people who inhabited the
room where the above case occurred were induced to collect some
of the Fleas from their persons which they said troubled them. »
Des 30 Puces ainsi recueillies, 14, c'est-à-dire la moitié, étaient P.
cheopis, tandis que sur 246 Puces capturées sur l'Homme en condi-
tions normales, une seulement était P. cheopis.
La conclusion de Liston, que les Puces peuvent jouer un rôle très
important dans la transmission de la peste, est fort intéressante,
parce que Liston vient à cette conclusion exclusivement par l'ob-
servation des faits épidémiologiques, malgré même les résultats
tout à fait négatifs (2) de ses essais de transporter la peste d'un
animal à l’autre par l'intermédiaire des Puces.
D'après cet observateur, (the Flea theory serves to explain the
(1) Dans le mémoire de MAYER je viens de lire que « Liston hat in einer Reiïhe
von Fällen in Räumen, in denen pestkranke Ratten oder Ratten kadaver gefun-
den worden, Meerschweinchen eingebracht und fand dann auf diesen jedesmal
Rattenflôhe, von denen sets ein Teil inficiert war, wodurch eine Anzahl der
Meerschweinchen an Pest starb.… Bei Kontrollversuchen in nichtinficierten
Räüumen wurden auf diese Weise keine Rattenflôhe erhalten. »
(2) Je n’ai pas eu à ma disposition le mémoire original de Liston, mais j'en ai
lu plusieurs pages citées par Bannermann, par Thompson et dans le rapport de
la Commission anglaise ; or, tandis que d’après cette dernière (p. 430), les expé-
riences de Liston auraient eu toujours un résultat négatif, d’après Thompson (3,
P- 566)une fois le résultat aurait été positif avec Pulex pallidus (P. cheopis). En
ce qui concerne les expériences exécutées avec LaMB, voir aux pages 559-560.
596 CARLO TIRABOSCHI
infectivity of clothes so often noticed. [It is probably the Fleasin the
clothes that are the danger, not the clothes themselves. It also ser-
ves to explain why there were as many buboes in the groin in the
booted Australians as among the barefooted Indians of Bombay.
for the legs are the places most often bitten by Fleas. If the plague
infection was derived from the soil the latter class of person ought
to develop more groin buboes than the former. but this is not so. »
Nous avons déjà vu que Thompson conclut à la nécessité d'un être
vivant intermédiaire entre l'Homme et le Rat. En effet (3, p. 563),
l'infection pesteuse a été trouvée, en dehors du corps humain,
seulement dans le corps des animaux inférieurs; l'Homme doit done
recevoir cette infection de la part du Rat ; mais le Rat mort ne peut
pas l’infecter, donc (the intermediation of some [nsect which has
the power of taking it from the Ratand of inoculating it into Man,
and which can retain the latter power ior a considerable time, is
the only means consonant with all the recognised phenomena which
can be imagined ». Pour démontrer que cet intermédiaire doit être
la Puce, Thompson examine les 12 cas de peste de 1902, «in which
solitary buboes, situated in the femoral chain (resultant, therefore,
from inoculation in the lower extremity) were exhibited by persons
who had certainly received the infection at their workplaces. There
they were all clothed. Their lower extremities were thoroughly
well-protected, at all events from casual contact with deposited
infection, by boots and socks or stockings, and by trousers or pet-
ticoats, while their hands, arms and faces, and sometimes their
chest too, no doubt, were fully exposed. Yet they were not inocu-
lated in those exposed partes, but in their protected parts. These
cases showed that inoculation must have been eflected by some
agent to which neither clothes nor the epithelium offered serious
obstacles; by some agent which could evade the one, and which
could penetrate the other without causing either noticeable pain or
a visible wound (1). It was perceived, of course, that the Flea alone
answered these requirements »..
Mayer, après avoir résumé les expériences de Liston et de Lamb
(voir p. 559), ajoute : (Für die Flohtheorie spräche praktisch auch
(1) Bannermann aussi (2) donne une grande valeur au fait que les bubons ingui-
naux sont également plus fréquents chez les Australiens chaussés que chez ceux
qui vont nu-pieds.
rase
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 997
die häufige Uebertragung von Mensch zu Mensch in den Behausun-
gen; besonders sollen nächtliche Besuche in solchen Räumen, also
zur Zeit, wo die Flühe besonders gern stechen (?), gefährlich sein.
Dagegen ist eine Uebertragung in den Hospitälern bei Bubonenpest
von Mensch zu Mensch recht selten, also unter Verhältnissen, wo
eine Uebertragung durch Flühe weniger in Betracht kommt; die
Flôühe lieben ja nich den Aufenthalt in hellen, luftigen Räumen. »
Avant de résumer les essais de transmission expérimentale de la
peste de Rat à Rat par les Puces, je rappellerai que Chantemesse,
Marchoux etHaury, ayant fait une enquête épidémiologique à l’oc-
casion d'une épidémie de suette miliaire qui avait sévi en mai et
juin dans la Charente, ont relevé un ensemble de faits qui leur a
suggéré l'hypothèse que la suette miliaire pourrait être une mala-
die des Campagnols transmissible à l'Homme par les Puces.
IT. — EXPÉRIENCES DE LABORATOIRE. — ( Nous tenons de Hafkine
que des médecins qui, à Bombay, ont répété les expériences de
Simond, auraient obtenu exceptionnellement quelque succès, dont
ils n’ont pas fait état parce qu'ils supposaient que ces Rats avaient
pu contracter l'infection spontanée avant leur capture. » Le même
fait est rapporté par Thompson (2), qui cite le nom du D'Elkington.
Simpson fit deux expériences avec deux Singes sains et des Rats
infestés par des Puces et inoculés de peste; il employa une cage
double, qui permettait aux Puces de se transporter d'une chambre
à l’autre, mais ne permettait pas aux Singes de venir en contact
avec les Rats. Ceux-ci furent déplacés lorsqu'ils moururent. Les
deux Singes tombèrent sérieusement malades (de peste?) (1) au
troisième ou quatrième jour, mais après ils guérirent.
Les expériences de Hill, qui sont très peu concluantes, ont été
faites dans des miniature granaries, dans lesquels il présumait
avoir éliminé toutesles Puces avec des fumigations d'acide sulfureux
et de paraformol ; il en conclut que l'infection peut avoir lieu sans
l'intermédiaire des Puces.
Hunter envisage à un point de vue général la question de la
diffusion de la peste et d’autres maladies infectieuses par les In-
sectes. [1 étudie les‘trois facteurs qu'il croit nécessaires pour l’in-
(1)Je n’ai pas lu l’article original de Simpson; les indications que j'ai données
ci-dessus sont cellesque j'ai trouvées dans le rapport de la Commission anglaise
(p. 429); suivant Hunter (p. 52, les résultats auraient été entièrement négatifs.
598 CARLO TIRABOSCHI
fection de l'Insecte, c'est-à-dire : arrivéedes germes à la surface du
corps del’Insecte, introduction desgermes dans l'intestin, virulence
des germes. Puis il considère le mécanisme de l'infection chez
les Insectes hématophages etchez les Insectes quinesucent pas de
sang, ainsi que les relations qui existent entre les diverses espèces
d'insectes et leurs hôtes, ete. Il conclut que : 1° les Insectes peuvent
héberger les Bacilles pesteux et les disséminer «over indefinite
areas » ; 2° le rôle joué par les Insectes suceurs (Puces, Punaises, etc.)
est le même que celui joué par les Insectes non suceurs, c'est-à-dire
le transport mécanique de l'infection d’une place à l’autre ; en
conséquence, le danger attribué à leur piqûre serait exagéré ; 3° le
dépôt, par les Insectes, de Bacilles pesteux sur les aliments, etc.
«is bound tooccurin plagueinfected areas » ; l'importanceépidémio-
logique de ce facteur est loin d’être négligeable.
Baxter-Tyrie. qui n’a pas fait d'expériences, affirme aussi que le
rôle des Puces dans la diffusion de la peste à été exagéré ; leur
rôle le plus important est celui de porteurs du virus (carriers of
infection), le mème rôle donc qui est joué par les Punaises, les.
Mouches, etc.
Noc (p. 303) a tenté de répéter les expériences de Gauthier et
Raybaud «dans des conditions telles que toute voie de propaga-
tion, autre que celle des Puces, fut rigoureusement écartée. Ces
expériences, interrompues pendant l'hiver, nous ont permis de
nous rendre compte des conditions difficiles où se place l'expéri-
mentateur. Ces conditions, très différentes de celles qu'on trouve
dans la nature, expliquent parfaitement les faits négatifs qu’on a
voulu opposer à la théorie de Simond : 1° Les Rats infectés par des.
cultures de peste ne présentent pas toujours (?) une infection pes-
teuse généralisée... ; au contraire, les Rats trouvés morts de peste
dans la nature ont leurs tissus littéralement bourrés de Bacilles
pesteux.….. 2° Les Rats sauvages se débarrassent de leurs Puces avec
la plus grande facilité... Il paraît nécessaire de s'adresser, pour une
bonne expérimentation, à de vieux Rats, qui, privés de leurs dents,
sont malhabiles à se débarrasser de leurs parasites. 3° Les espèces
de Puces qui existent sur les Rats sont très variables suivant les
climats et les latitudes... (1) »
(1) Suivant Simonp, « nous ignorons les conditions que doit présenter une Puce
pour être en mesure de communiquer la maladie; nous ignorons si c’est par la
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE D5®
Kister et Schumacher ont fait leurs expériences (p. 140) à l'Insti-
tut d'Hygiène de Hambourg. « In einem grossen cylindrischen,
mit durch Watte gedichteten Drahtdeckel versehenen Glaskäfig.…
wurde über einer dünnen Lage Torfstreu ein Drahteinsatz mit
weiten Maschen als Unterlage für die Versuchsratten eingebracht.
Auf diesem Drahteinsatz ruhte eine dichte Blechwand, durch wel-
che der Käfig in zwei Theile getheilt wurde... Auf die eine Seite.
wurde nun eine... gesauberte Ratte gesetzt, auf die andere eine
mit Pest inficirte Ratte, welche môglichst viel Flôühe (les auteurs
n'indiquent pas l'espèce) hatte.. Dass das Ueberwandern der Flôhe-
von einer Seite auf die andere stattfindet, hatten wir durch Vor-
versuche festgestellt... Im Ganzen wurden mit Pestratten 23 Ver-
suche angestellt. Starb die mit Pest inficirte Ratte, so wurde-
der Cadaver noch einen Tag liegen gelassen und so den Flühen
Gelegenheit gegeben, den erkalteten Cadaver zu verlassen...;
dann wurde eine neue mit Pest inficirte Ratte gesetzt. Die Käfige-
wurden während der ganzen Dauer der Versuche nichtgereinigt.…
Das Ergebniss dieser Versuche war ein absolut negatives... » On
transporta aussi, sur de jeunes Rats blancs, des Punaises (les-
quelles ?), qui, après un jeûne très long, avaient été placées, du-
rant un à trois jours, sur du matériel pesteux ; les expériences, au
nombre de 8, furent toutes négatives.
Je n'ai pas lu le mémoire de Bannermann, que j'ai vu cité dans.
le «Bulletin de l'Institut Pasteur », et où il dit que les Cobayes sont
capables d’être infectés par l'intermédiaire des Puces.
J'ai déjà signalé les expériences de Liston. Cependant je viens.
de lire dans le mémoire de Mayer que : « Liston stellte auch ge-
meinsam mit Lamb ausgedehnte Laboratoriumsversuche an, derart,
dass in einem langen Behälter ein Dutzend Ratten räumlich von
trompe qu’elle inoeule le virus sous la peau, ou si c’est en souillant la surface de-
l’'épiderme où siège la piqüre; s’il existe ou non une période d’incubation durant
laquelle elle ne peut transmettre le microbe. De plus, la Puce est un animal difi-
cilea manier; il est impossible d’avoir la certitude qu’elleest infectée. Enfin il y
a la question de l’espèce ou des espèces pestiferes, sur laquelle on ne peut
encore qu'émettre des suppositions. »
Une circonstance, qui pourrait, elle aussi, expliquer les échees de la plupart
des expérimentateurs et qui n’est pas envisagée par Noc, Simond, etc., est que:
la piqûre d’une seule Puce infectée ne suftit peut-être pas pour communiquer à
l'animal piqué la maladie et la mort; cette circonstance pourrait aussi expliquer
quelques-uns des faits épidémiologiques, qui semblent contredire la théorie de la
transmission de la peste par l'intermédiaire des Puces.
560 CARLO TIRABOSCHI
einander getrennt gehalten wurden; inficierten sie die erste mit
Pest, so ging trotz der räumlichen Trennung die Infektion von Ratte
zu Ratte weiter, und es konnte direkt häufig das Ueberwandern der
Flühe beobachtet werden, die die inficierten Tiere bald nach de-
ren Tode verliessen. In dem betreffenden Laboratoriumsraume
lässt man für den Fall, dass Flôhe aus den Behältern entschlüpfen,
Meerschweinchen frei umherlaufen, und nach den Angaben, die
uns Lamb machte, sterben sehr häufig solche Meerschweinchen an
Pest. » Je rappellerai ici que Liston et Lamb font partie, tous les
deux, de la Commission anglaise (voir ci-dessous).
En résumé, de toutes les expériences instituées par les nom-
breux observateurs qui se sont occupés de cette question, celles de
Simond, de Gauthier et Raybaud, de Simpson (?), de Elkington et
d’autres médecins de Bombay, de Liston (?) et de Bannermann ont
eu seules quelquefois un résultat positif. Mais récemment la ques-
tion a été définitivement résolue par la Commission anglaise dans
les Indes (1905-1906), qui a exécuté trois séries d'expérience, très
nombreuses et très rigoureuses, que je vais résumer.
A. — Transmission expérimentale de la peste d'un Rat à l'autre par
l'intermédiaire des Puces.
a. — Expériences faites avec des Rats placés l’un près de l’autre (mais
pas en contact) et en présence de Puces.
C'est là une répétition des expériences de Gauthier et Ravhaud :
on se servait de deux cages en treillis métallique, à mailles de
gun, éloignées l’une de l’autre de quelques centimètres et placées
dans une cuve de verre, couverte par du tulle; au fond des cages
on disposait du sable ou de la terre sèche, pour absorber l'urine
et la vapeur d’eau provenant de la respiration des Rats, maintenir
le fond sec et empêcher ainsi la mort des Puces. Dans une des
cages (1), on plaçait un Rat inoculé et des Puces (P. cheopis) re-
cueillies sur les Rats de Bombay; parfois on ajoutait après d'au-
tres Puces. À la mort du Rat inoculé, on mettait un Rat sain
dans l’autre cage et après 8 ou 12 heures le Rat mort était déplacé
et examiné, pour constater si son sang contenait des Bacilles pes-
(1) Chacune des deux cages était surmontée d’un large tube en fer blanc, dépas-
sant la hauteur de la cuve et se fermant par un couvercle ; par ce tube on intro-
duisait dans la cage les Rats et les aliments.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 56
teux. Lorsque le Rat sain mourait, on examinait soigneusement
s'ilétait mort vraiment de peste ; lorsqu'il ne mourait pas dans une
période de trois semaines, on le tuait pour voir s’il était atteint de
peste, aiguë ou chronique.
Dans une première série on expérimenta avec des Rats sauvages
de Bombay, dont 60 pour cent environ ont été trouvés réfractaires
à l'inoculation cutanée de petites quantités de Bacilles pesteux ; de
plus il n'y avait pas de sable au fond des cages et les Puces de-
meuraient collées au fond de la cage et mouraient vite; c'est sur-
tout par cette circonstance défavorable que la Commission explique
les échecs de toutes les expériences de cette première série.
Dans une deuxième série on se servit de Rats blancs, importés
d'Angleterre ; sur 16 expériences, 11, c’est-à-dire 69 pour cent,
eurent un résultat positif (1) et dans l'estomac des Puces recueil-
lies sur ces Rats on trouva souvent des Bacilles tout à fait sem-
blables au B. pestis; quelques-unes de ces Puces, transportées sur
deux Rats blanes sains, leur communiquèrent la peste.
Enfin, dans une troisième série de 50 expériences, on employa
des Rats de Bombay (35 Mus rattus et 15 Mus decumanus); 19 Rats
(13 Mus rattus et 6 Mus decumanus; la proportion est à peu près la
même pour les deux espèces), c'est-à-dire 38 pour cent (2) contrac-
tèrent la maladie. En résumé, sur les 66 expériences de la 2e et de
la 3me série, 30 eurent un résultat positif.
b. — Expériences faites avec des Puces recueillies sur des Rats morts
de septicémie pesteuse, et transportées sur des Rats sains gardés dans
des «Klea-proof cages ».
Dans une première série, sur 13 Rats blancs d'Angleterre, 8
(61 pour cent) moururent de peste et dans l'estomac de trois Puces
prises sur ces Rats on trouva des Bacilles semblables au B. pestis ;
dans une deuxième série, sur 25 Rats de Bombay (19 Mus rattus et
6 Mus decumanus), 13 (52 pour cent) contractèrent l'infection (3).
(1). Quelquefois la mort arriva le sixième jour; voir ce que j'ai dit à la p. 553.
(2) Selon toute probabilité quelques-uns des Rats étaient réfractaires à la peste ;
si cela avait été vérifié dans la proportion citée plus haut de 60 pour cent,
sur 50 Rats mis en expérience, 20 seulement auraient été sensibles et sur ces
20 Rats, 19, c’est-à-dire 95 pour cent, auraient été infectés par les Puces.
(3). Ici la proportion des Rats infectés serait un peu plus grande pour le Hus
decumanus (66 pour cent) que pour le Mus raltus (47 pour ceht), mais on ne
peut pas en tirer de conclusions, à cause du petit nombre des individus mis en
expérience.
Archives de Parasilologie, XI, n° #, 1907. 97
562 CARLO TIRABOSCHI
B. — Production expérimentale d'épidémies de peste chez les Cobayes.
Plusieurs séries d'expériences furent poursuivies, dans des petits
go-downs expressément construits, avec grand nombre de
Cobayes et avec 2 Singes; l'espèce de Puce dont on se servit,
P. cheopis, pique ces animaux en l'absence de son hôte véritable, le
Rat (Liston). Voici les résultats obtenus, dont j emprunte le résumé
à l'analyse de Simond publiée dans le Bulletin de l'Institut Pasteur.
Dans une cabine exempte de Puces, on a placé 50 Cobayes sains
et 10 Cobayes inoculés de peste et débarrassés de leurs Puces. Ces
10 Cobayes ont vécu librement jusqu'à leur mort au contact des
50 Cobayes sains.Aucun de ceux-cin'a contracté la peste. La même
expérience renouvelée a manifesté un cas de peste parmi les Cobayes
sains, mais on à constaté alors l'existence de Puces qui s'étaient
introduites dans la cabine en dépit des précautions prises.
D’autres expériences ont été faites avec addition de Puces en
abondance. En un cas, 49 Cobayes sains ont été placés dans, une
cabine avec 10 Cobayes inoculés et pourvus de Puces. Ces derniers
sont morts et chaque fois le cadavre n’a été retiré qu'au bout de
24 heures. Dans les 17 jours qui ontsuivi, tousles Cobayes sains ont
contracté une peste mortelle.
Dans un autre cas, 5 Cobayes inoculés et pourvus de Puces sont
placés dans une cabine. Après leur mort, on introduit dans la ca-
bine 26 Cobayes sains. L’épizootie se répand rapidement et tous
meurent de peste.
On a réussi également à déterminer l'épizootie par l'introduction
de Puces pesteuses dans une cabine où vivaient des animaux sains.
La cabine exempte de Puces contenait 49 Cobayes en bonne santé.
On y introduit un premier lot de 115 Puces provenant de Rats pes-
teux moribonds et le jour suivant un second lot de 106 Puces de
même provenance. Cinq jours après, un premier Cobaye meurt de
peste. On continue à introduire fréquemment des Puces et tous
les Cobayes en expérience meurent pesteux en l’espace de 40 jours.
En vue de vérifier que la contagion persiste dans le local et qu’elle
esten rapport avec la facilité plus ou moins grande qu'ont les Puces
de parasiter les animaux, on a fait une série d'expériences où les
Cobayes sont séparés en groupes, dans des conditions qui ne per-
mettent pas aux Puces de les atteindre avec une égale facilité.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 563
Dans une cabine infectée, où des Cobayes pesteux sont morts et
ont laissé des Puces, on a placé, le jour même où le dernier
Cobaye pesteux est mort, deux groupes de Cobayes sains. Les
4 Cobayes du groupe A sont libres sur le sol, tandis que legroupe B
est enfermé dans une cage, accessible aux Puces, suspendue à
» cent. au-dessus du sol. Après un séjour de 24 heures, les deux
groupes sont retirés et l'examen fait découvrir 95 Puces sur le
groupe À et 11 sur le groupe B. Chacun des Cobayes est isolé et
gardé en observation. Les 5 du groupe À meurent de peste, ainsi
que 2 du groupe B. L'expérience est répétée dans la même cabine,
8 jours après la mort du dernier Cobaye pesteux. On recueille,
au bout de 24 heures, 58 Puces chez le groupe A et uneseule parmi
le groupe B. Deux Cobayes du groupe A sont morts de peste, ceux
du groupe B sont restés en bonne santé.
Dans une cabine infectée, où le dernier Cobaye est mort depuis
8 jours, on place trois groupes de 4 Cobayes sains et exempts de
Puces (le groupe C est dans une cage suspendue à 60 cent. au-dessus
du sol). Le lendemain, on trouve 330 Puces chez le groupe A et 41
chez le groupe B. Ces Puces sont rejetées dans la cabine et les Co-
bayes A et B sont mis en observation isolément tandis que le grou-
pe C est laissé dans la cabine. Trois Cobayes A et deux B sont morts
de peste ; les 4 Cobayes C sont restés sains. L'expérience deux fois
répétée donne des résultats similaires.
Pour varier l'expérience, on a protégé un Singe, placé en cage
sur le sol d'une cabine infectée, au moyen d'une couche de tangle-
foot; ce Singe est resté bien portant, tandis qu'un Singe témoin
placé dans les mêmes conditions, mais dont la cage n'était pas en-
tourée de tangle-foot, a pris la peste.
On a placé 95 Puces, recueillies sur un Cobaye mourant de peste,
dans des tubes fermés au moyen de gaze; on a ensuite fait piquer
4 Cobayes sains par:ces Puces à travers la gaze. Trois Cobayes ont
contracté la peste.
Quatre femelles ayant mis bas alors qu'elles étaient infectées de
peste, ont allaité leurs petits durant la maladie; elles sont mortes
en quelques jours et les petits n’ont pas eu la peste.
Voici les conclusions :
1° Un contact intime et même très long (jusqu'à un mois en-
viron) des Cobayes infectés avec des animaux sains ne détermina
564 CARLO TIRABOSCHI
jamais une épizootie chez ces derniers, lorsque les Puces étaient
complètement éliminées. Il faut remarquer que les go-downs ne
furent jamais nettoyés et qu’en conséquence le contact s’étendit
aussi aux déjections, aux aliments infectés par ces déjections,
etc. (1). Le contact très intime (et même l'allaitement) de petits
Cobayes avec leurs mères infectées ne donna jamais lieu à des cas
de contagion. 2° En présence de Puces, l’épizootie, une fois décla-
rée, se propage d'animal à animal et ses progrès sont en raison
directe du nombre des Puces présentes. 3° Une épizootie pesteuse
peut survenir sans le contact direct des animaux sains (introduits.
dans le go-down après la mort et le déplacement des Cobayes in-
fectés) avec les animaux pesteux. 4° Des Puces, recueillies dans
des go-downs infectés, et transportées sur des Cobayes et des Rats
sains, leur donnèrent la peste. 5° L'infection peut avoir lieu même
en dehors du contact avec le sol infecté (Cobayes renfermés dans
des cages métalliques, placées à 5 cent. du sol). 6° L'infection ne
se produit pas par l'air. En effet, des Cobayes renfermés dans un
cage placée à 60 cent. du sol restèrent indemnes, tandis que
d'autres, qui étaient en liberté dans le même go-down où dans des
cages placées à 5 cent. du sol, contractèrent la peste.
— Expériences dans les maisons pesteuses de Bombay.
Pour ces expériences on a presque toujours choisi des chambres.
dans lesquelles deux ou plusieurs individus étaient atteints de
peste, ou dans lesquelles on avait trouvé des Rats infectés de peste,
(1) On a peut-être exagéré la facilité avec laquelle les Rats s’infectent ab in-
gestis. Suivant KLEIN, la transmission de la peste au Rat, exceptionnelle par les
Puces, s’exercerait surtout par les voies digestives; je n’ai pas lu le mémoire de:
Klein, mais seulement le résumé du Bulletin de l’Institut Pasteur et il me sem-
ble que les expériences de Klein ne démontrent point la facilité de l'infection ab
ingestis. D’après Kisrer et ScHuMACHER, (die Ratten reagiren nichtauf jede Einver-
leibung, insbesondere Futterung, auch v irulenten Pestmaterials ». En ce qui regarde
les Cobayes, les expériences de Lisrox et de la Commission anglaise ont été si
favorables à une infection par le tube digestif et elles ont été prolongées pendant
tant de temps, que si une contamination par cette voie peut avoir lieu, elle doit
être certainement très rare. J’ajouterai que GAUTHIER et RAYBAUD ont exécuté aussi
une vingtaine d'essais de transmission de la peste par simple contact, en plaçant
des animaux sains dans le même bocal où ils enfermaient les Rats ou les Souris
inoculés et privés de leurs Puces ; tous les essais, même ceux rendus plus rigou-
reux par la longue durée du contact, etc., furent négatifs. Simoxp, lui aussi, n’a
jamais réussi à infecter un Rat ni une Souris en le plaçant en contact d'animaux
inoculés et exempts de parasites; suivant le même Simond, les Souris sont abso-
lument réfractaires à la contamination par le tube digestif.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 969
ou dans lesquelles il y avait une « histoire de Rats morts ».
a. — Des Cobayes, qu'on laissa libres, pendant 18 à 40 heures,
dans des chambres pesteuses, attirèrent souvent sur leur corps un
nombre très grand de Puces (1) et moururent de peste dans 29 pour
cent des cas (2). La même proportion se vérifia dans des maisons
pesteuses, dont les parois et les planchers avaient été désinfectés
soigneusement, soit par le bichlorure de mercure, soit par l'acide
sulfureux, soit enfin par ces deux agents (3).
b.— Un Ratblancet3 Cobayes, enfermés dans des Flea-proof cages
et sur lesquels on porta des Puces recueillies sur des Rats sauvages,
trouvés morts ou mourants de peste, moururent de la même mala-
die. On obtint de même 20 pour cent de cas positifs avec des Puces
prises sur des Cobayes et des Rats blancs, qui avaient été mis en
liberté pendant 18 à 40 heures dans des chambres pesteuses.
ce. — On plaça dans des maisons pesteuses deux animaux (Cobayes.
Rats blancs, Singes), tous deux également protégés contre
l'infection du sol et contre l'infection par contact, tous deux égale-
ment exposés à l'infection aérienne (dans les cages), mais l’un pro-
tégé contre les Puces {« by means of a curtain made of fine wire
gauze »), l’autre non protégé. Pas un des animaux protégés ne con-
tracta l'infection, tandis que quelques-uns des autres (10 pour
cent) (4) moururent de peste.
d. — On obtint le même résultat, lorsqu'on protégea un des deux
animaux contre les Puces au moyen d’une couche de « tangle-foot »
(préparation résineuse usitée pour capturer les Mouches); 24 pour
cent des animaux non protégés (5 Rats blanes et 1 Singe) mouru-
(1). Une fois on captura sur deux Cobayes d’une chambre pesteuse 263 Puces;
da plupart des Puces étaient toujours Pulex cheopis. Voir ce que j'ai dit à p. 555.
(2). Si l’on considère seulement les Cobayes sur lesquels on trouva plus que
20 Puces, la proportion monte jusqu'à 50 pour cent.
(3) D’après MEYER, « bei der bisher üblichen Desinfektion mit Sublimatlüsung
oder Karbolpräparaten gelingtes bekanntlich nicht, Insekten zu tôten. Man be-
streicht daher jetzt Fussbüden und Wände mit Petroleumrückstand, einer zähen,
bräunlichen Masse, die in den Lehmboden und die Kalkwände sehr leicht ein-
dringt. Der Erfolg hat sich in einigen Fällen bereits gezeigt, indem nach der
Desinfektion von Räumen nach dieser Methode Meerschweinchen nicht am Pest
erkrankten, in Fällen von Sublimat-und Karboldesinfektion dagegen inficiert
“wurden. »
(4) Cette faible mortalité dépend, probablement, de ce que les animaux étaient
moins facilement accessibles aux Puces. En etfet, on recueillit au plus 27 de ces
parasites sur un seul Cobaye; la moyenne fut de 3 par maison, tandis que dans
les expériences des deux premières séries, la moyenne fut respectivement 20 et
40 et le maximum 116 et 263.
566 CARLO TIRABOSCHI
rent de peste. Sur le Ctangle-foot » on trouva de nombreuses Puces.
Des 247 Puces identifiées, 147 étaient des Puces de l'Homme, 84 des
Puces du Rat et 16 des Puces du Chat; sur 166 Puces examinées
(85 d'Homme, 77 de Rat, 4 de Chat), 24 (1 d'Homme et 23 de Rat)
furent trouvés infectées (Bacilles pesteux dans l'estomac) (1).
Dans la plupart des cas, le bubon des animaux atteints de peste
était placé dans la région cervicale; on a constaté que cette situa-
tion correspondait au siège favori de la Puce sur le Cobaye.
II. — Distribution et mœurs des Rats.
Nous avons déjà vu que le Mus decumanus et le Mus rattus sont
peut-être des agents propagateurs de la peste également redoutables
et que la prépondérance de l'une ou de l'autre espèce parmi les
Rats trouvés atteints de peste dépend probablement de leur plus
grande diffusion. Suivant Simond, Bannermann, la Commission
anglaise (1905-1906), etc., le Mus rattus est l'espèce la plus répan-
due dans les Indes en général: d’après Simond il est particulière-
ment abondant dans quelques villes et villages de l'Inde; d'après
Bannermann (2, p. 187) il est (the common Rat of India and the
one found in its houses » et le Mus decumanus (though certainly
not indigenous in India, is found now in all large towns, and along
the banks of the rivers and canals, having been introduced no doubt
by ships » (2). Le Mus rattus Qis a most nimble climber and when
it enters a house always takes up its quarters in the roof. But the
(1) La Commission n'insiste pas sur un point qui me parait d'un grand intérêt,
c’est-à-dire sur la proportion des Puces infectées ; pour le Pulex cheopis (du Rat)
elle monta à 30 pour cent, tandis que pour le Pulex irritans (de l'Homme) elle
fut environ de 1 pour cent. Et si l’on considère que dans le sang du Rat pesteux
on rencontre une énorme quantité de B. pestis et dans le sang de l'Homme on
n’en rencontre que rarement et en nombre beaucoup moindre, on voit par là
combien doit s’opérer rarement la contagion d'Homme à Homme par les Puces.
(2) ArrkeN, 1899. — Je rappellerai ici qu'autrefois le Mus rattus devait être
très abondant en Europe, mais que peu à peu il a dû abandonner un grand nom-
bre de localités devant les incessantes poursuites du Aus decumanus, qui, venu
plus tard, s’est répandu rapidement partout; peut-être le même fait va-t-il se
produire dans les Indes. En effet, je viens de lire dans le mémoire de Meyer que
« Mus rattus ist in Indien mit der fortschreitenden Civilisation fast ganz ver-
schwunden. In hygienisch gebauten Häusern mit dem Wegfall dunkler Boden-
und verwahrloster Kellerräume verschwand sie, wurde fast gänzlich verdrängt
von Mus decumanus. » Voir ce que j'ai dit à p. 550.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 567
majority do not live in houses at all but in trees. In the monsoon
they come into houses more than at other times for refuge from
the rain. When the monsoon is over they go out again and lead a
vagrant life, feeding on seeds and fruits and birds’eggs, and even
on birds, which they catch sleeping. They climb trees and do much
damage to young cocoanuts. To an animal of such habits, an Indian
village, with its thatched roofs to nestle in, and its stores of grain
to feed on, must offer every attraction, and we need not be surpri-
sed to hear of nearly 200 being found dead in a single house... »
Suivant Thompson (3, p. 549), le Mus decumanus et le Mus rattus
seraient à peu près également répandus à Sydney; le Mus decuma-
nus (lives in burrows, infestsewers, basements, and rights-of-way,
and feeds in garbage. » Le Mus rattus, qui comprend aussi la
variété Mus alexandrinus rufus, « prefers upper floors, roofs, some-
times the branches of climbing plants, and feeds on grain and
fruits ». Tandis que le Mus decumanus «cannot be tamed and in
captivity soon dies as à rule », le Mus rattus (is easily tamed, and
lives but will not breed in captivity ». L'un et l’autre, à Sydney,
« breed all the year round, but probably a little less freely in the
four colder months », tandis que à Brisbane, qui est 5 degrés plus
au Nord, ils se multiplient durant toute l’année sans variation (1).
En Angleterre, d’après Rothschild (2) et Bannermann (2, p.187) le
Mus rattus est rare; il a été trouvé à Manille, par Herzog, avec le
Mus decumanus, à Prétoria, etc.
Suivant quelques observateurs (voir Thompson), les Rats pesteux
meurent dans leurs cachettes; au contraire, selon Bannermann (2,
p. 189) ils «come out by day contrary to their usual habits, impel-
led by the fever-thirst to look for water; and that owing to this and
their pecular limping gait attention is directed to them. Probably
(1) Nous avons déjà dit que, d’après Gorscazicx, la reproduction des Rats est
bien plus intense en printemps et en été qu’en hiver. «€ Während der pestfreien
Wintermonate wurden in Alexandrien stets nur weniger als 2 Proz. der einge-
brachten Ratten als schwanger befunden; im Marz und in der ersten Hälfte des
April erfolgt ein langsames Ansteigen, worauf dann in der zweiten Aprilhälfte
die genannte Verhältniszahl auf 6 Proz. geht und sogar im Mai und bis mitte
Juni sich auf der Hôhe von 12 Proz. hält, um dann rasch abzufallen bis endlich
Anfangs Oktober der definitive Abfall auf 2 Proz. erfolgt. Das Diagramm der Rat-
tenvermehrung geht volkommen parallel mit den Diagrammen der Sommerepi-
demien » (Voir p. 594).
(2) Journal of hygiene, VI, p. 483, 1906.
568 CARLO TIRABOSCHI
they wander just as much when in health, but being shy animals
escape observation. »
Suivant Thompson (3, p. 550), « Rats eat each other in nature;
rather more than 8 per cent. of the carcases brought in have been
partly devoured, but sometimes so completely that nothing but the
head, paws, tail and skin remained. We have also ascertained that
Rats eat Mice in nature. » D'après Simond au contraire, « bien que
notre attention fut attirée sur ce point, nous n'avons jamais pu
constater un fait de ce genre, même au cours d’épidémies où il
était le plus facile d'observer des Rats morts ou malades, comme
celle de Kurachi en 1898. Le D' Mason nous a communiqué un ré-
sultat identique provenant de ses observations faites sur les épidé-
mies du Kattiwar. Nous croyons les Surmulots trop avisés pour
manger, en temps d'épizootie, leurs camarades malades ou morts...
Si dans une habitation infestée de Surmulots on dispose des appâts
vénéneux, quelques-uns se laissent tenter par la nourriture offerte,
tombent malades et meurent, et les autres non seulement ne s'aven-
turent pas à dévorer les malades, mais il se gardent aussi de
toucher aux appâts devenus suspects et s’enfuient... » Moi aussi,
jai vu quelque chose de semblable; à mon avis, les Rats man-
gent certainement leurs camarades, lorsqu'ils ne sont pas malades,
mais ils les mangent difficilement ou ne les mangent pas, lorsqu'ils
sont malades ou atteints de peste, etc. De plus, j'ai déjà remarqué.
(p. 564, note 1) qu'on a peut-être exagéré la facilité avec laquelle
les Rats s'infectent ab ingestis.
Plusieurs observateurs ont confirmé le fait des émigrations en
masse des Rats; je renvoie à ce propos aux mémoires de Simond,
Hankin, Bannermann (2), etc.
En ce qui concerne les mœurs du Tarabagan, j'emprunte les no-
tices suivantes au mémoire du Dr Kaschkadamoff. Les Tarabagans
vivent dans les localités montueuses, éloignées des fleuves, et se
nourrissent exclusivement de substances végétales. En hiver ils
dorment dans des tanières très larges et profondes, où ils se cachent
plus tôt ou plus tard suivant que l'automne est froid ou chaud.
Dans la seconde moitié de mars, ils quittent leurs tanières; c’est
alors qu'on commence à les chasser. Les Mongoles et les Buriates
les mangent volontiers et on emploie leur graisse pour oindre les
roues, etc.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 569
III. — Morphologie et biologie des Puces.
APPAREIL BUCCAL. — J'ai déjà donné dans mon mémoire précédent
une description détaillée de la morphologie des Puces et en parti-
culier de leur appareil buccal. Rothschild, dans son mémoire sur
les Sarcopsyllidés (11, p. 26-28) et plus encore la Commission
anglaise dans son rapport (p. 486-491) donnent une description de
l'appareil buccal qui confirme la mienne dans presque tous ses
détails (1).
Rothschild appelle rostrum l'ensemble de l’unpaired underlip,
qui correspond à ma «pièce basilaire impaire de la lèvre inférieu-
re » et des labial palpi; dans la famille des Pulicidae les articles
des palpes labiaux seraient ordinairement au nombre de 5
{moins de 5 «in true Pulex », 6 chez les Puülex de l'Amérique, plus
nombreux chez quelques «stationary Pulicidae like Vermipsylla »
et chez les Puces de l’Ours). Suivant la Commission anglaise, la
pièce que j'ai nommée (pièce basilaire impaire » et qu'elle nomme
unpaired portion (fig. 3 et 6, 6) est articulée avec une autre pièce
qui serait la véritable pièce basilaire (basal element, fig. 3 et 6, 7)
qui s'articule avec l’ € anneau périoral » (perioral ring, fig. 6, 29),
qui serait le contour de ce que j'ai désigné (4, p. 215) sous le nom
de (ouverture buccale », puisque par cette ouverture font saillie
au dehors les différentes pièces buccales. La Commission anglaise
garde le nom de « bouche » (fig. 3, 4 et 6, 26) à une ouverture bien
plus petite, située plus intérieurement et formant « the definitive
opening into the alimentary canal ».
D'après la Commission anglaise, chaque « mandibule » est, elle
aussi, articulée avec l'anneau périoral par le moyen d'une pièce
basilaire (fig. 3, 5 et 6, 8); de plus chaque mandibule « contains
on its mesial surface (fig. 5) a salivary groowe which proximally
widens ont into a trough and distally is nearly closed by the ap-
proximation ofitslips forming a practically closed canal » (canal
salivaire) (fig. 5, 28).
J'ai déjà indiqué (4, pag. 213) combien de noms on a introduits
pour désigner la pièce buccale que j'ai décrite sous le nom de lan-
(4) La description de la Commission anglaise est celle du Pulex cheopis Roth-
schild.
570 CARLO TIRABOSCHI
gue (fig. 3, # et 6, 3). Rothschild emprunte la dénomination de
Kraepelin et de Heymons (upperlip), la Commission anglaise celle
de Karsten (epipharynx), puisque cette pièce, et surtout sa paroi
ventrale, est le prolongement de la paroi dorsale du pharynx. Je
Fig. 1. — Pulex cheopis Roth., ©’, d’après Tiraboschi (Pulex murinus Tirab.).
conviens que le nom d'épipharynx (et par conséquent celui même
de lèvre supérieure) correspond à la position de cette pièce. Sui-
vant la Commission anglaise, l’'épipharynx est un organe pointu
et creux : (this hollow ends blindly at the distal extremity and
proximally is in communication with the hæmocoel; it has no
connection with the aspiratory canal. »
Une autre pièce, que je n'ai pas mentionnée dans ma description,
parce qu'elle ne fait pas saillie au dehors, est celle que la Commis-
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 71
sion anglaise décrit sous le nom de hypopharynx (1), car elle est
placée sous le pharynx aspirant (fig. 3, 4 et6, 10); elle est «a chiti-
nous plate concave downwards, extending backwards from the:
mandibulo-basal articulation to the subϾsophageal ganglion. It
supports the salivary pump (fig., 9), the muscles for operating
which occupy its concavity. The dorsal convex surface is in rela-
tion with the under site of the aspiratory pharynx from which it
is separated by a space; this
space is bridged by a liga-
ment (fig., 27), which divides
it into two parts, a posterior
(hœmocoel) and an anterior
(aspiratory canal). The ante-
rior margin at its centre is
prolonged into a pointed
process (fig. 4, 9), which
contains the exit duct of the
salivary pump. »
The salivary pump (fig. 3,
et 6, 9) is situated medially
at the anterior end of the
under surface of the hypo-
pharynx. It receives thesaliva
from he glands by means Mg 2, lues Phtippineneis Fons
of the salivary ducts (fig., 11) la ©, d’après Herzog.
and propels it through the
exit duct oi the pump into the salivary grooves in the mandibles.
(fig. # et 5) It is a hollow chitinous organ... Normally its cavity is.
obliterated by the spring-like action of the chitinous walls, but the
muscles attached to the posterior wall when contracted cause a
lumen to appear which then becomes full of salivary secretion. On
the muscles relaxing the elastic reaction of the walls closes the
lumen and the secretion is expelled through the exit duct. The:
opening of the salivary duct is in apposition with the salivary
canals in the mandibles (fig. # et 5), which canals extend down
the mandibles. »
(1) Ce nom a été employé d’une manière erronée par Gerstfeld et Grube pour-
désigner l’épipharynx.
DA CARLO TIRABOSCHI
«The aspiratory pharynx (fig. 3, # et 6, 12) extends from the
mouth to the œsophageal commissure.. Under the action of the
muscles (fig., 13) attached to its dorsal chitinous plate a lumen
appears, which on the relaxation of the muscles vanishes owing
to the elastic reaction of the walls. »
Chacune des quatre glandes salivaires (fig. 3, 16) Cis a simple aci-
nous gland lined with secretory cells resting on a basement mem-
16 16 13 1328 25
Fig. 3. — Diagramme d’une section longitudinale médiane de Pulex chkeopis
Roth., d’après la Commission anglaise. — 1, palpe maxillaire; 2, màächoire;
3, épipharynx (langue, lèvre supérieure); 4, mandibule; 5, palpes labiaux ;
6, lèvre inférieure (pièce impaire ; 7, pièce basilaire de la lèvre inférieure;
8, pièce basilaire d’une mandibule; 9, pompe salivaire; 19, hypopharynx;
11, conduits salivaires; 12, pharynx aspirant; 13, muscles du pharynx aspi-
rant; 14, ganglion sus-æsophagien; 15, ganglion sous-æsophagien ; 16, glandes
salivaires (une paire); 17, gosier; 18, estomac; 19, tubes de Malpighi; 20, rec-
tum; 21, glandes rectales; 22, tenaille du mâle; 23, pygidium ; 24, soie api-
cale; 26, bouche; 27, ligament.
brane. The ducts from each pair unite and the two ducts thus for-
med (fig., 11) run forward under the subϾsophageal ganglion...,
to open into the salivary pump. They are lined with a spirally ar-
ranged chitinous membrane and may be mistaken for tracheal tu-
bes, but the absence of air therein... makes recognition easy. »
En résumé, même d'après la Commission anglaise, il y a dans
l'appareil perforateur et suceur, constitué par les mandibules et
l'épipharynx (langue), deux canaux distincts, l’un efférent, le long
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 572
duquel la salive coule jusque dans la petite plaie de la piqûre et
l'autre afférent, le long duquel le sang est aspiré dans l'estomac de
la Puce; la différence entre la description de Wagner et de celle de
la Commission anglaise, est que pour Wagner le canal excréteur
de la salive est unique et creusé dans l’épipharynx, tandis que
pour la Commission anglaise, il est double et creusé à la surface in-
térieure des deux mandibules. En ce qui concerne le canal suceur,
voir Tiraboschi, 4, p. 214.
MÉCANISME DE LA SUCCION. — Rothschild (44, p. 26) partage ma ma-
nière de voir (4, p.212-214; 234); il considère les mandibules comme
Fig. # — Epipharynx (langue, lèvre supérieure) et hypopharvnx,
d’après la Commission anglaise. — Les chiffres comme à la fig. 3.
les véritables armes piquantes, s'enfonçant activement dans la peau
de l'hôte, tandis que la lèvre supérieure (langue), renfermée entre
les mandibules, pénètre dans la peau d'une manière tout à fait
passive. «(The mandibles are piercing organs penetratingthe skin of
the host, the upperlip serving as a sucking tube... The maxillae
protect the mandibles and upperlip, and push aside the hairs of the:
host. » D'après le même savant, les Puces ont deux organes princi-
paux de fixation : les pattes et l'appareil perforateur; le développe-
ment extrème de ces organes est représenté d'un côté parles Puces
du genre Malacopsylla (appareil perforateur faible et court, ongles
et soies des pattes très fortement développés) et de l’autre côté
par les Sarcopsyllidae (mandibules larges et fortes, soies et ongles
des pattes très faibles) ; parmi les ?ulicidae, l'espèce qui a les man-
dibules le plus développées et leur réunion la plus étroite, est le
Pulex irritans de l'Homme.
Les actes de la pénétration et de l'extraction de l'appareil perfora-
574 CARLO TIRABOSCHI
©
teur sont décrits à peu près comme dans mon mémoire (4, p. 236-
937). Je dirai donc seulement que, d’après Rothschild, les palpes
Jlabiaux sont dirigés toujours au dehors; (the deeper the upperlip
and mandibles penetrate into the skin, the further are the labial
palpi separated from one another, till they are finally quite apart,
Fig. 5. — Mandibule, d’après la Comm. anglaise. — (Les chiffres comme à la fig. dj
lying right and left on the skin, but assuming again their normal
position close to one another as soon as the Insect retracts the man-
.dibles and upperlip... The Flea, in the act of piercing the skin, has
to overcome the rigidity of the rostrum as well as the resistance of
*
13 12 10 27 26 9 3 Fe
SD RARES E ï- :
11 SN 7 29 6
Fig. 6. — Diagramme des pièces buccales, d’après la Comm. anglaise.
29, anneau périoral. — (Les autres chiffres comme à la fig. 3).
the skin of the host and, when sucking, has to use a certain amount
of force to counteract the spring-like action of the labial palpi. »
La rigidité des palpes labiaux peut diminuer ou par réduction de
Ja chitinisation (Sarcopsyllidae) ou par augmentation dela segmenta-
tion (Vermipsyllidae).
Au contraire, la Commission anglaise considère l'épipharynx
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE J4)
comme le véritable organe piquant : (The epipharynx makes a
way through the skin for the mandibles, and the mandibles enlarge
and lacerate the hole thus bored. » Cependant la pénétration de
l’épipharynx et des mandibules s’accomplit dans le même temps :
« The entire epipharynx-mandibles combination is
inserted by aspushing action of the whole body of
the Flea » et les mandibule peuvent exécuter des
mouvements indépendants : « Once inserted the
mandibles, owing to their basal element (fig. 3, 5
et 6, 8), are capable of independent action, sliding
up and down but maintaining their relative posi-
tions and preserving the lumen of the aspiratory
channel »... « A supply of saliva is introduced
into the wound. A minute drop of blood now
collects at the aperture through which the pricking
Fig. 7. — Jarn-
be et pre-
organs were inserted into the skin and this is drawn mier article
9 c £ d'uMRrarse
up into the pharynx by the action of the aspiratory LAnoN pile
muscles. » postérieure,
d’après Roth
Quant au phénomène (signalé par Zirolia et con- child
firmé par moi) du sang expulsé par la Puce sous
forme de jets, la Commission anglaise dit que ce phénomène a
été fréquemment observé et semble être « a common praclice »
chez les Insectes suceurs ; il a été observé aussi chez le Pou trouvé
communément sur le Mus de-
cumanus (Polyplax spinulosus ur L-
Burm. ?; voir p.610)etchezle
Pediculus capitis (Pou de tête,
de l'Homme) suçant avide-
ment le sang du Mus decu- s2 ‘at
‘Mmanus. Fig. 8. — Tenaille du mâle, d’après Roth-
schild. — 30, doigt mobile externe
è (anterior process); 31, doigt mobile
PARASITISME DES PUCES. — interne (second process);32, manubrium.
Dans mon mémoire précé-
dent, j'ai déjà dit (1, p. 230) que «chaque espèce de Puce recherche
de préférence les individus d’une espèce déterminée de Mammifère
ou d'Oiseau, que l’on peut désigner sous le nom de «véritable hôte».
En dehors de cet hôte, on ne la rencontre ordinairement, dans la
nature, que sur des individus d’une espèce voisine ou d'une espèce
576 CARLO TIRABOSCHI
qui à avec la première des rapports quelconques. Ces rapports.
peuvent être de deux sortes ; ou bien un animal devient la proie
d'un autre et alors les Puces du premier peuvent se transporter sur
le second (1); ou bien un animal pénètre dans la tanière d'un autre
et alors l'échange des Puces peut être réciproque. » Baker dit à peu
$ près les mêmes choses(1, p. 368)
RE nre et ajoute : « The caracter of the
hair and thickness of skin was
Fig. 9. — Bande ventrale du 9 segment at first considered as control-
abdominal du mâle, d’après Roth- ,- -
nl, ling the range of parasites, due
to the close relation these con-
ditions must have to the structure of the Flea, especially the
length of mouth parts and covering of bristles. Exceptions were
soon found to this rule, though in general such relations may be
said to exist. »
De même, j'ai déjà fait remarquer (4, p. 180 et250-251 ; 2, p. 546-
947) que sur les Rats des Indes, de l'Afrique, de
l'Australie, du port et des navires de Marseille,
Venise, Gênes, elc., en un mot sur les Rats des
régions chaudes ou des villes qui ont des rapports.
avec ces régions, on trouve très fréquemment
et parfois aussi (Bombay, etc.) presque exclusive-
ment des espèces de Puces (groupe du Pulex pal-
lidus) qui piquent l'Homme. Baker (2, p. 121) con-
Fig. 10. — Bande firme ce fait : (Rat Fleas of the Tropies were far
dorsale du # More nearly related to the Fleas of human beings.
segment abdo-
minal de la fe- than were those of temperate regions » (2), mais
re puis observe : (Tiraboschi does not emphasize,
this fact » (?)
Rothschild (44, p. 27) écrit : « A Pulex or Ceratophyllus if hungry
(1) Cependant, quelquefois, c’est précisément le contraire qui se vérifie, c’est-à-
dire que l’on rencontre les Puces qui sont particulières à une espèce ani-
male sur une autre espèce animale, qui est pourchassée par la première; c’est ce
qui arrive, par exemple, pour le Chat et le Rat; on a rencontré souvent et parfois.
aussi fréquemment sur les Rats la Puce qui a pour hôte véritable le Chat, c’est-à-
dire Ctenocephalus felis Bouché, tandis que jusqu’à présent on n’a jamais capturé
sur les Chats les espèces de Puces qui sont les plus fréquentes et les plus abon-
dantes sur les Rats et sur les Souris, c’est-à-dire Pulex cheopis Roth., Cerato-
phyllus fasciatus Bosc et Ctenopsylla musculi Dugès.
(2) Baker dit aussi (4, p. 368) : « In the United States the Cat, Dog and Rabbit
Fleas are closely related to Pulex irrilans and will readily attack the human
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 577
will generally take readily to Man, though a Bird or Rat Flea ap-
pears to be rather disgusted with a human host, retracting the pier-
cing organs hastily as a rule when the blood is first tasted, and not
sucking for so long a time as do Pulex irritans and Ctenocephalus
canis and felis under the same cireumstances. » Il ya ici une con-
fusion. Rothschild dit d’abord que les espèces des genres Pulex et
Ceratophyllus piquent facilement l'Homme; c’est vrai en ce qui
regarde le genre Puler, ou du moins les espèces mises jusqu'ici
en expérience ont presque toujours piqué l'Homme (1). Mais on
ne peut dire de même du genre Ceratophyllus ; en eftet, d’après mes
expériences et celles de Galli-Valerio, suivant Wagner, Nuttall, etc.,
le Ceratophyllus fasciatus ou quelques espèces voisines ne piquent
pas l'Homme (2) ; de plus Galli-Valerio n’a pas été piqué par C. hi-
rundinis (?), tandis que Lucet dit que le C. avium (?) pique l'Homme.
Rothschild dit ensuite que les Puces des Oiseaux et des Rats ne
sucent pas volontiers le sang de l'Homme; en ce qui concerne les
Puces des Oiseaux, cette affirmation est peut-être exacte, bien que
C. avium, d'après Lucet, non seulement pique l'Homme, mais
puisse lui faire de cruelles morsures; mais quant aux Puces des
Rats, l’assertion n'est pas exacte, puisque Pulex cheopis Roth. ou les
espèces voisines que l’on rencontre communément sur les Rats des
régions chaudes, piquent rapidement l'Homme et en sucent le
sang pendant longtemps; si l’assertion de Rothschild a trait aux
Puces, qui vivent habituellement sur les Rats et les Souris de la
plupart des pays tempérés, je dirai que d'après les résultats de
mes essais de transport sur l'Homme, non seulement elles « not
sucking for so long a time as do P. irritans and Ct. canis and felis »,
mais elles ne piquent point du tout l'Homme et n’en goûtent poini
le sang.
En ce qui concerne la question de l’existence d’une saison des
Puces, voir ce que j'ai dit à la page 553.
being, while the Mouse, Rat, Squirrel, Mole and Shrew Fleas are not closely
related to P. irritans and have never been known to bite the human being. »
C'est là une autre observation que j'avais déjà faite (1, p. 179, 232, etc.) pour les
Puces européennes, du Chien et du Chat d’un côté, et des Rats et des Souris de
l’autre.
(1) 11 faudrait excepter le Pulex philippinensis Herzog (— P.cheopis Roth. ?)
qui selon le même Herzog ne piquerait pas l'Homme.
(2) Au contraire, suivant Tidswell, Gauthier et Raybaud, elles piqueraient
l'Homme (Tiraboschi, 4, p. 179-180 ; 231 ; 266; 268.
Archives de Parasitologie, XI, n° %, 1907. 38
578 CARLO TIRABOSCHI
EXAMEN DES Puces. — Un procédé ingénieux de montage des
Insectes, qui en permet une longue et bonne conservation, a été
décrit tout récemment par Marchoux et Simond (p. 122-124) pour
les Moustiques et il pourrait être employé aussi pour les Puces.
La Commission anglaise a trouvé (p. 491-492) un procédé pour
avoir de belles dissections de Puces. On doit travailler sous le mi-
croscope stéréoscopique, dans une goutte de solution physiologique
avec des aiguilles très fines (1); on tient dans la main gauche une
aiguille à pointe obtuse, avec laquelle on transperce les fosses
antennales; puis, de la main droite, on enfonce obliquement une
aiguille très fine sous le bord du 3° ou 4° segment abdominal; les
segments abdominaux sont ainsi « peeled off much as a shrimp is
skinned ». Les organes intérieurs viennent alors à flotter dans la
goutte de liquide et on peut les séparer avec deux aiguilles très
fines, dont une peut même être crochue. On peut ainsi extraire
sans difficulté les glandes salivaires. La dissection de l'hypopha-
rynx est particulièrement difficile.
Les coupes histologiques de Puces sont très difficiles. Le procédé le
plus convenable est l'inclusion double dans le collodion et la paraf-
fine. « Prolonged soaking in celloiïdin is necessary to obtain pene-
tration and very slow tickening of the celloidin is essential. A mini-
mum exposure in the paraffin bath is advisable to prevent the chi-
tin becoming brittle. »
IV. — Espèces de Puces observées sur les Rats.
Le nombre des espèces de Puces, qui avaient été décrites lors
de la publication de mon premier mémoire, était à peu près 135
(1, p. 208); lorsque je publiai mon deuxième mémoire, il était
voisin de 200 (2, p. 546). Depuis cette époque il s’est accru considé-
rablement, jusqu’à dépasser plusieurs centaines, surtout à la suite
des travaux de Rothschild. Je n'ai pas à énumérer ici toutes ces es-
pèces, je me bornerai donc à celles qui parasitent les Rats, les
Souris et les Campagnols (2).
(1) « This is best done by arranging to revolve the needle rapidly its long
axis, the point the while pressing on a rapildy revolving emery wheel (revolvingin
the same direction). The inclination of the axis of the needle to the planeof the
emery wheel should be capable of being varied so as to get points of difterent
angles. »
(2) G. M. G. (Gizes ?) dans une petite note, publiée récemment dans le Journal
of tropical medicine, donne une clef analytique et les figures originales (dessi-
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 579
J'ai déjà exposé dans un tableau synoptique (1, p.243) mon essai
de classification des Aphaniptères et (p. 624) celui de Baker. Ce
savant a sensiblement modifié (2, p. 123) sa classification, qui
cependant a encore le défaut d'être combinée surtout pour les
Siphonaptères de l'Amérique; voici son nouvel essai de classifica-
tion :
Genre Rhynchoprion Oken
Famille des RHYNCHOPRIONIDAE — Argopsylla End.
— Echidnophaga Olifr.
= HECTOPSYLLIDAE — Hectopsylla Franenfeld.
or MALACOPSYLLIDAE — Malacopsylla Wey.
— LYCOPSYLLIDAE | — Lycopsylla Roth.
. Sous-famille des VERMIPSYLLINAE
ANOMIOPSYLLINAE
— PULICIDAE
— PULICINAE
— DOLICHOPSYLLINAE
c Nr Genre Ctenopsyllus Kol.
== TENOPSY :
— Stephanocircus Skuse
— HYSTRICHOPSYLLIDAE — Hystrichopsylla Tschb.
== CERATOPSYLLIDAE | — Ceratopsyllus Kol.
Rothschild (14, p. 17-19) partage les SYPHONAPTERA en trois
familles : 1° SARCOPSYLLIDAE, avec trois genres; 2 PULICIDAE, com-
prenant la plupart des Puces ; 3° CERATOPSYLLIDAE, Comprenant les
Puces parasites des Chiroptères.
Il n’est pas encore possible de donner une bonne classification
des Puces; c'est pour cela que je suivrai encore mon essai de clas-
sification, en plaçant près des genres dont ils sont les plus voisins
les genres nouveaux qui comprennent des espèces parasites des
Rats, ete. ; il faut pourtant remarquer qu'il règne encore une cer-
taine confusion dans la constitution et la dénomination des genres.
nées d’après des exemplaires pris par Liston et par l’auteur lui-même et iden-
tifiés par Rothschild) des 5 espèces de Puces que l’on rencontre le plus fréquera-
ment sur les Rats (Pulex irritans, P. cheopis, P. felis, Ceratophyllus fasciatus,
Cienopsylla musculi).
580 CARLO TIRABOSCHI
FAMILLE DES PULICIDAE Taschenberg.
Sous-famille des Pulicinae Tiraboschi.
GENRE PULEX sensu stricto Hilger.
Absence complète de peignes d'épines. Tête largement arrondie
en dessus et en avant; yeux grands, éloignés du bord inférieur de
la tête; soies de la série oculaire au nombre de 2 seulement (1 ocu-
laire et 1 submaxillaire); palpes labiaux à 4 articles. Pattes ro-
bustes; un peigne de denticules sur la surface interne des hanches
postérieures; soies latérales du dernier article des tarses posté-
rieurs au nombre de 4 paires, la distance entre la 3° et la 4e soie
étant plus grande. Une seule soie apicale par côté. Doigts mobiles
de l'appareil de fixation du mâle généralement au nombre de deux
par côté. .
Depuis 1903, des espèces nouvelles très nombreuses ont été dé-
crites dans ce genre par Baker et surtout par Rothschild; de plus
quelques-unes de ces espèces ont donné lieu à la création de genres
nouveaux qui ne nous intéressent pas. Nous considérons ici trois
ou quatre espèces seulement : Pulex irritans L., Pulex brasiliensis
Baker, P. cheopis Roth. (et P. philippinensis Herzog ?).
PULEX IRRITANS Linné.
Tiraboschi, 4, p. 246-249.
Véritable hôte : l'Homme. Hôtes accidentels : Chien, Chat, Cha-
cal, Renard, Lapin, Cheval, Poulet, etc. Cette Puce a été trouvée
aussi sur les Rats : Mus decumanus et Mus rattus-alerandrinus, par
Tiraboschi (4, p. 249; rarement sur les Surmulots et sur les Rats
domestiques d'Italie, un peu plus fréquemment sur ceux des na-
vires), par Erlanger et Neumann (sur les « gros Rats » d'Abyssi-
nie), par Wagner (sur les Rats d’Odessa, durant la peste de 1901-
1902), par Gauthier et Raybaud (sur un « Rat de navire » (1) à
Marseille), par Uriarte (sur les Surimulots atteints de peste
de l'Amérique méridionale : Buenos Aires, Rosario de Santa
(1) Ces auteurs n’ont jamais trouvé P.irritans chez les « Rats de terre »; nous
verrons que c’est précisément le contraire qui s’est vérifié pour le Ctenocephalus
serraliceps; les résultats de Gauthier et Raybaud correspondent aux miens.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 581
Fé, etc.) (1), par G. M. G. (sur les Rats des Indes). Cette espèce a
donc été trouvée sur les Rats en Europe, Amérique, Afrique, etc.
J'ai déjà dit dans mon mémoire précédent (1, p. 180, note 1) que
la Puce de l'Homme pique les Rats et en suce le sang.
PuLEx cxeopis Rothschild.
Pulex murinus : Tiraboschi, 1, p. 252, 1904.
Pulex pallidus : cité par Gauthier et Raybaud, Tidswell, Thomp-
son, etc.
Pulex philippinensis ? : Herzog, p. 273, 1904.
Pulex cheopis: Rothschild, 4, p. 85, 1903; Liston; Commission
anglaise, etc.
Dans le groupe du Pulex pallidus j'ai décrit en 1904 (4, p. 249)
sous le nom de Pulex murinus une espèce de Puce que j'ai rencon-
trée fréquemment sur les Rats ; mais cette espèce avait été déjà dé-
crite par Rothschild en 1903 sous le nom de Pulex cheopis; n'ayant
pas eu alors connaissance du: travail de Rothschild, je l'ai décrite
comme espèce nouvelle. Pulex murinus Tirab. est donc synonyme
de Pulex cheopis Roth.
Comme je l'ai dit plus haut ‘p. 576), Pulex cheopis est l'espèce
de Puce que l’on rencontre le plus communément sur les Rats des
pays chauds et sur ceux des villes qui ont des rapports avec ces
pays. Elle a été capturée la première fois, en 1900, par Winton, sur
Mus gentilis, près de Suez, puis en 1901 sur plusieurs animaux près
de Shendi; tous ces spécimens ont servi à Rothschild pour établir
sa nouvelle espèce.
En 1903, Gauthier et Raybaud rencontrèrent à Marseille, sur les
«Rats de terre» et plus fréquemment (dans 25 pour cent des cas) (2)
sur les « Rats de navires » de provenances très diverses, une espèce
de Puce qui se rapprochait beaucoup du Pulex pallidus ; des spéci-
(1) D’après UÜriarte, parmi les 86 Puces recueillies sur les Rats, 82 auraient élé
P. vrritans ; ce nombre me semble trop fort; peut-être s'agit-il ici de Pulex cheo-
pis Roth. ?
(2) Gauthier et Raybaud ont observé chez les « Rats de navires » 250 Ruces,
dont 64 étaient P. cheopis et 178 Ctenopsylla musculi; mais il faut remarquer
que 158 exemplaires de Ct. musculi avaient été recueillis sur un seul Rat et si
l’on ne tient pas compte de cette récolte tout à fait extraordinaire, la proportion
des spécimens de P. cheopis est de 64 pour 92, c’est-à-dire 70 pour cent.
582 CARLO TIRABOSCHI
mens de ces Puces furent envoyés à Rothschild, qui les identifia
avec Pulex cheopis.
La même année Tidswell, à Sydney et à Brisbane, sur les
Rats capturés durant une épidémie de peste, trouva dans une
proportion remarquable (81 pour cent) des Puces, qu'il donna
comme appartenant à l'espèce P. pallidus; Rothschild, qui en recut
des échantillons, les reconnut comme étant des P. cheopis. Thomp-
son aussi a observé très fréquemment (dans la proportion de
70 pour cent) sur les Rats de Sydney, pendant l'épidémie del'année
suivante, une espèce qu'il croyait être P. pallidus et qui évidemment
est la même que celle trouvée par Tidswell, c’est-à-dire P. cheopis.
En 1902, 1903 et 1904, j'aicapturé plusieursexemplaires de F. mu-
rinus Tirab. — PF. cheopis Roth. sur les Rats d'Italie (Mus decumanus
et Mus rattus-alexandrinus) et notamment (dans la proportion de
40 pour cent environ) sur les Rats des navires du port de Gênes
(4, p.253) et aussi sur les Rats du port et même sur ceux de la
ville.
En 1904, Herzog (p. 272) captura, sur 153 Rats (Mus rattus et Mus
decumanus) de Manille, 42 Puces, appartenant toutes à la mêmees-
pèce, qu'il éécrit comme uneespèce nouvelle sous le nom de P. phi-
lippinensis; Rothschild (1) ditque, d'après la description de Herzog,
il est evident » que P. philippinensis Herzog est identique à P. cheo-
pis Roth. (2).
Liston trouva que la Puce qui infeste communément les Rats des
Indes est une espèce très semblable au P. irritans; Rothschild
l'identifia avec P. cheopis (3).
G. M. G., ayant trouvé P. cheopis sur un Rat capturé en Angle-
terre, à Plymouth, et emporté, très problablement, par un navire
dans ce port qui est en communication constante avec tous les
(1) Journal of hygiene, VI, p. 484, 1906.
(2) Je ne trouve pas que la description de Herzog autorise à affirmer l’évidence
de l'identité du P. philippinensis et du P. cheopis; cette description en eftet est
trop insuffisante et ne donne pas les caractères différentiels; on peut seulement
soupconner la possibilité de l'identité, d'autant plus que, relativement au para-
silisme, le P. philippinensis se comporterait vis-à-vis de l'Homme, autrement que
le véritable P. cheopis Roth. Suivant Herzog, son P. philippinensis serait voisin
de Pulex (Hoplopsyllus) anomalus Baker, qui cependant a un peigne d’épines
au pronotum et appartient pour cela à un autre genre {/Hoplopsyllus Baker).
(3; Journal of hygiene, VI, p. 430, 1906. D’après Liston (cité par G. M. G.) le Mus
ratius parait être l’hôte le plus recherché par P. cheopis, tandis que Cer. fa-
Scialus parait être le parasite le plus fréquent du Mus decumannus.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 983
pays de la terre, dit que son observation démontre que P. cheopis
peut se maintenir dans des climats tempérés. J'ai déjà dit que
P. cheopis a été observé par Gauthier et Raybaud à Marseille,
par Tiraboschi à Gênes et dans plusieurs villes et régions
d'Italie. Il est donc certain que P. cheopis peut se maintenir
dans des climats tempérés, mais les observations de Gauthier
et Raybaud (qui ont trouvé P. cheopis plus fréquent sur les « Rats
de navires » que sur les « Rats de terre ») et surtout les miennes
(d'après lesquelles P. cheopis est très répandu sur les Rats de na-
vires du port de Gênes, moins répandu sur les Rats de la ville et
moins encore sur ceux d'autres localités d'Italie) démontreraient
que P. cheopis ne pourrait peut-être se multiplier dans nos régions
ou sur nos Rats.
Rothschild (1) dit que dans l'Amérique méridionale (2), près de
Valparaiso, on a constaté sûrement la présence d'un grandnombre
de P. cheopis. Cette même espèce a été observée aussi dans le Sou-
dan et sur le Mus rattus de Prétoria. D’après les échantillons qu'il
a reçus, Rothschild dit que le P. cheopis est l'espèce qui paraît être la
plus commune dans les Indes. Enfin la Commission anglaise
(p. 435, note 2) dit que 99 pour cent des Puces capturées sur les
Rats de Bombay (Mus rattus et Mus decumanus) ont été identifiées
avec P. cheopis Roth.
En résumé, P. cheopis a été rencontré sur les Rats de presque
tous les pays chauds et même des pays tempérés : exclusivement
ou presque exclusivement à Manille (Herzog, P. philippinensis) et
dans les Indes (Liston, Rothschild, Commission anglaise), très fré-
quemment à Sydney et à Brisbane (Tidswell, Thompson) et à
Valparaiso, etc., fréquemment dans le Soudan, à Prétoria, sur les
navires du port de Gênes (Tiraboschi) et de Marseille (Gauthier et
Raybaud), et enfin quelquefois en plusieurs régions d'Italie
(Tiraboschi) et une fois près de Suez (sur Mus gentilis; Roth-
schild) et à Plymouth (G. M. G.).
(1) Journal of hygiene, NI, p. 484, 1906.
(2) J'ai déjà dit (p. 581, note 1) que les Puces recueillies sur les Rats de Buenos-Ai-
res, etc. etindiquées par Uriarte comme étant P. irritans,étaient peut-être, elles
aussi, P. cheopis. À la même espèce peut-être, ou à une espèce du groupe
P. pallidus (P. brasuliensis Baker?), on peut rattacher aussi les Puces « more
nearly related to P. irritans, than even the Cat and Dog Flea » vivantes sur les
Rats, les Souris et autres Rongeurs au Sud des Etats-Unis, et les Puces observées
par le D: Lutzsur les Rats et sur les Souris du Brésil (Baker, 4, p. 368- 369).
58/4 CARLO TIRABOSCHI
Cette espèce de Puce, lorsqu'elle est transportée artificiellement
sur l'Homme et sur plusieurs animaux, les pique très facilement
et en suce le sang volontiers; elle a été rencontrée aussi dans la
nature sur l'Homme et sur des animaux autres que les Rats.
Il ressort de mes nombreuses expériences (4, p. 232) qu'elle peut
piquer l'Homme avec la plus grande facilité; d'après Gauthier et
Raybaud,un P. cheopis, mis en expérience après 24 heures de jeüne,
aurait piqué € pendant un temps assez court, laissant une seule
marque punetiforme, sans aréole périphérique ni pétéchies (1) »;
les échantillons mis en expérience par Tidswell après 4 heures de
jeûne sucaient le sang de l'Homme; de même les exemplaires de
P. irritans (P. cheopis ?) examinés par Uriarte piquaient l'Homme,
même lorsqu'ils n'étaient pas à jeun. Au contraire, suivant Herzog
(p. 272), le P. philippinensis, que Rothschild ditidentique au P. cheo-
pis, n'a pas piqué Herzog lui-même ni un indigène de Manille, même
après plusieurs heures de jeûne (2).
Que P. cheopis, dans la nature, en l'absence de Rats, puisse pas-
ser sur l'Homme (et le piquer), cela a été démontré par Liston, qui
trouva 44 P. cheopis parmi les 30 Puces recueillies sur des Hommes
dans les conditions que j'ai exposées (p. 555). Suivant la Commis.
sion anglaise dans les Indes, parmi 247 Puces capturées sur des
couches de tangle-foot dans des maisons pesteuses de Bombay, 84,
c'est-à-dire plus du tiers, étaient P. cheopis (p. #79).
Liston a même observé que P. cheopis se porte très facilement
sur les Cobayes et aussi sur les Singes, et ce fait a été confirmé
par la Commission anglaise (voir p. 562).
Les spécimens de P. cheopis envoyés à Rothschild et provenant
de Shendi (voir p. 581) avaient été capturés sur Gerbillus robustus
(20 échantillons), Arvicanthis testicularis (20), Acomys Witherbyi (3),
(4), 11 faut pourtant remarquer que ces observations ont été faites avec un
exemplaire de P. cheopis mêlé à trois exemplaires de Ceratophyllus fa-
sciatus.
(2) De plus « in dem verhältnissmässig engen Laboratoriumsraum, in dem ziem-
lich viele Thiere, wie Hunde, Kaninchen, Meerschweinchen, Tauben u.s.w. gehal-
ten und zahlreiche Ratten zur Untersuchung auf Pest eingeliefert wurden, wurden
auch gelegentlich Flôhe auf Menschen gefangen, jedoch nur P. irritans und P.
serraticeps, niemals P. philippinensis. » Toutes ces constatations, contraires à
celles des autres observateurs relativement au véritable P. cheapis, confirment
l'exactitude de la remarque que j'ai faite ci-dessus, c’est-à-dire que l’on ne peut
pas affirmer l'évidence de l'identité du P. philippinensis Herzog et du P. cheopis
Roth.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 395
Dipodillus Watersi (1), Dipus jaculus (1), Genetta dongolana (1), c'est-
à-dire sur plusieurs Rongeurs et sur un Carnivore.
Je rappellerai enfin que c'est précisément et exclusivement ou
presque exclusivement avec des exemplaires de P. cheopis, que la
Commission anglaise dans ies Indes a exécuté les expériences de
transmission de la peste, que j'ai résumées aux pages 560-566 et qui
eurent si souvent un résultat positif (1); de plus la proportion des
Puces trouvées infectées dans les expériences citées à la page 566,
pour le P. cheopis fut de 30 pour cent, tandis que pour le ?. irritans
elle futenviron de 1 pour cent. Ce serait donc précisément P. cheopis
et non Ctenocephalus serraticeps Tschb., comme le voudrait Simond
(p.29), qui mériterait davantage de retenir notre attention.
Dans mon précédent mémoire, j'ai placé le P. murinus dans un
groupe que j'ai nommé GROUPE DU PULEX PALLIDUS, et dans lequel
Wagner énumérait 9 espèces. Maintenant on en connait, peut-être,
jusqu'à 18 ou 19, qui sont : le véritable P. pallidus Tschb. (d'après
Wagner et Rothschild, P. Witherbyi Roth. est identique au P. palli-
dus Tschb.), P. æquisetosus End. (?), P. brasiliensis Baker (?), P. cheo-
pis Roth. (—P. murinus Tirab., — (?) P. philippinensis Herzog),
P. chersinus Roth., P. Cleopatrae Roth., P. conformis Wagner, P.
Creusae Roth.(?), P. eridos Roth., P. erilli Roth.(?), P. Isidis Roth. (?),
P. longispinus Wagner, P. mycerini Roth., P. nubicus Roth., P. pyra-
midis Roth., P. Ramesis Roth., P. regis Roth., P. Riggenbachi
Roth.(?).
La plupart de ces espèces ont été établies par Rothschild, d’après
des exemplaires qui avaient été capturés sur des Rongeurs (et par-
fois aussi sur d'autres animaux), dans l'Égypte, la Colonie du Cap,
l'Arabie, etc. Sur les Rats, on a trouvé seulement, jusqu'à présent :
(1) Gauthier et Raybaud n’ont pas précisé les espèces de Puces avec lesquelles
ils ont fait leurs 5 expériences, qui eurent toujours un résultat positif et dont
5 furent exécutées rigoureusement ; ils en ont donné seulement la provenance :
« Rats de navires »; j'ai déjà observé que 70 pour cent des Puces de cette prove-
nance étaient P. cheopis; donc, très probablement, même les expériences de
Gauthier et Raybaud furent exécutées avec P. cheopis.
Simond aussi n’a pas indiqué l'espèce de Puce dont il s’est servi pour ses
expériences; il dit tout simplement que la Puce que l’on rencontre communément
sur les Rats de l’Inde, transportée sur l'Homme ou sur le Chien, lesattaque im-
médiatement; vraisemblablement il s’agit de P. cheopis, mais il faut remarquer
que Simond, dans ses expériences, aux Puces qui se trouvaient sur les Rats
pesteux, ajouta des Puces d’un Chat (Ctenocephalus felis?).
586 CARLO TIRABOSCHI
Pulex cheopis Roth., (Pulex philippinensis Herzog ?), P. brasiliensis
Baker et P. pallidus Tschb. (sur Mus albipes, à Socotra ?).
Suivant Wagner, le Pulex pallidus et les espèces voisines sont
bien distinctes du P. irritans ; Voici les caractères du groupe :
Soie oculaire placée en avant de l'œil (1) (chez le P. irritans, elle
est en dessous de l'œil); doigts mobiles des tenailles du mâle très
peu développés.
Parmi ceux qui ont trouvé le P. cheopis Roth., Rothschild et Tira-
boschi en ont seuls donné une description (2); voici les caractères
les plus importants, d’après ces deux observateurs.
Description du PuLex cHEopis Roth.
Mächoires allongées; palpes maxillaires un peu plus courts que
les palpes labiaux et sensiblement plus courts que les hanches des
pattes antérieures (fig. 3); rapport de longueur des articles : 9, 12,
7, 13. Lamelle chitineuse des fossettes antennales bien accusée.
Derrière ces fossettes, une série de 2 à 3 soies; près du bord pos-
térieur de la tête. une autre série de 4 à 5 soies; les deux séries se
rencontrent à l'angle inféro-postérieur de la tête, où elles ont une
soie en commun ; le long du bord postérieur des fossettes anten-
nales, une série bien marquée de petits poils (fig. 4).
Les bandes dorsales des segments abdominaux ont une série de
6 à 7 soies par côté ; celle du 8 segment de la ® est représentée
dans la fig. 10 ; sur les bandes ventrales du 3° au 7° segment, 4 (chez
le S') ou 5 (chez la © ) soies par côté; dans le 8e segment, de nom-
breuses petites soies et deux longues soies par côté (fig. 4). Stig-
mates s’ouvrant dans l'intervalle entre la dernière et l’avant-der-
nière soies des bandes dorsales (fig. 1).
A la surface externe des hanches antérieures, nombreuses séries
de soies (fig. 4); sur celle des jambes postérieures (3), une longue
(1) D’après ce caractère il faudrait placer ici-même P. anomalus Baker et P.
Lynx Baker, qui cependant n’appartiennent pas au genre Pulex s. str. (ils ont un
peigne d’épines au pronotum) mais au genre Hoplopsyllus Baker (4, p. 381 et
383; 2, p. 130).
(2) La description du P.philippinensis Herzog esttrop insuffisante, n’envisage pas
les caractères différentiels du P. cheopis Roth. et s’applique peut-être à une
espèce différente du P. cheopis Roth.
(3). D’après Herzog, chez son P. philippinensis, « die längsten sind je sechs
am unteren Ende des Femur stehende »; peut-être il y a ici de la confusion
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 987
série de petites soies, se dédoublant près de l'extrémité inférieure
et se continuant sur le premier article du tarse (fig. 4 et 7); une
des soiïes apicales du 2° article des tarses postérieurs du mâle très
longue, touchart le 5° article (fig. 4). Longueur des articles des
tarses, mesurés chez une femelle longue de 2mm1 : pattes anté-
rieures : p 50-55-45-35-95; pattes moyenries : # 100-130-70-50-100 (1) ;
pattes postérieures : 290-190-100-65-125 (2).
Doigts mobiles des tenailles du mâle peu développés (fig. 1 et 8);
l'externe (fig. 8, 30), ou anterior process de Rothschild, est plus large,
comprimé, asymétrique, pourvu d'une dizaine de soies grandes
et Îortes, rangées le long de son bord supérieur qui est convexe;
le doigt interne ou second process de Rothschild (fig. 8, 31) est plus
mince, pourvu de poils très petits et très clairs, placés au sommet.
Le manubrium est bien développé (fig. 8, 32) et plus gros vers le
sommet. La bande dorsale du 9% segment (fig. 9) s'élargit graduel-
lement vers l'extrémité et porte de rares poils le long de son bord
inférieur et au sommet.
Longueur : 20m à 2nm31{(3). .
PULEX BRASILIENSIS Baker.
Baker 1p:319:2 p.129:
Les exemplaires qui ont servi à Baker pour établir cette espèce
avaient été capturés par le Dr Lutz sur Mus rattus et Mus decumanus
à Sao Paulo (Brésil). D'après Baker, cette espèce est très rapprochée
du P. irritans, dont elle se distingue facilement par les denticules
disposés en forme de peigne à la surface interne des hanches pos-
térieures; chez le P. irritans ces denticules sont nombreux et
irrégulièrement rangés, tandis que chez le P. brasiliensis ils sont
au nombre de six, formant une petite rangée transversale. Man-
dibules et palpes labiaux aussi longs que les hanches antérieures.
entre le Femur ou Schenkel (cuisse) et la Tibia ou Schiene (jambe); ces soies
de l'extrémité distale des jambes seraient longues de 0m15 (œ) à Or" 2
(4) D’après Rothschild, le 1% article est « rather less than two-thirds the
length of the second ».
(2) Suivant Rothschild, le 1° article est « about three-quarters as long again
as the second » et le 4 article est « half as long again as it is broad ».
(3) Suivant Herzog, la longueur de son P. philippinensis serait : 1" 16 à 1%"
78); Arr 80228 67 0)"
588 CARLO TIRABOSCHI
Soie oculaire placée en avant de l'extrémité supérieure de l'œil
(p. 586). Segments abdominaux avec une série de 7 soies par côté
sur les bandes dorsales, de 4 soies par côté sur les bandes ven-
trales. Cuisses postérieures avec une série longitudinale de 8 soies
bien développées. Rapport de longueur des articles des tarses
postérieurs : 28-18-9-5-11. Longueur de la Q; 5°" 5; du &
gmm à.
PuLex PALLIDUS Taschenberg.
P. Witherbyi Roth. : Rothschild, 1, p. 86 (1903).
D'après Baker (4, p. 369), le véritable l’ulex pallidus Tschb. (trouvé
par Taschenberg sur Herpestes ichneumon, en Égypte) aurait été cap-
turé sur Mus albipes, dans l’île de Socotra; Rothschild l’a observé
sur d’autres animaux. Je renvoie à la description et aux figures de
Rothschild.
Genre CTENOCEPHALUS Kolenati.
Beaucoup de caractères communs avec le genre Pulex (yeux bien
développés, série oculairede soies, pattes robustes (1), soies latérales
du dernier article des tarses postérieurs, soie apicale, etc.). Au bord
inférieur de la tête, de chaque côté, un peigne d’épines (uzeis, ztevis
et xv4)4) et un autre peigne au bord postérieur du pronotum. Tête
plus allongée que dans le genre Pulex.
Depuis 1903, une ou deux espèces nouvelles seulement ont été
décrites dans ce genre, que Rothschild considère aussi maintenant
(9, p. 175) comme un genre distinct du genre Pulex, comprenant,
d'après lui, deux espèces seulement : Cf. canis et Ct. felis, qui
d'ailleurs sont les seules qui nous intéressent.
CTENOCEPHALUS CANIS Curtis et CT. FELIS Bouché.
Pulex serraticevs : cité par Thompson, Tidswell, Galli-Valerio,
Zirolia, Nuttall, Zinno, Gauthier et Raybaud, etc.
Ctenocephalus serraticeps : Tiraboschi, Simond.
Dans mon précédent mémoire (4, p. 254-256) j'ai décrit le Ctenoce-
(1) Les Puces des espèces Ctenocephalus canis et Ct. felis sautent aussi faci-
lement et aussi haut que la Puce de l'Homme.
ÉTAT ACTUEL .DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 589
phalus serraticeps Tschb. comme étant une espèce unique compre-
nant une variété, que j'ai nommée Ct. serr. var. murina (1, p. 259).
Cela contrairement à l'opinion de Rothschild, qui dans l’ancienne
espèce de Taschenberg trouvait deux espèces distinctes, celle du
Chien (Pulex canis Curtis) et celle du Chat (P. felis Bouché); mais
les différences que le même Rothschild donnait pour ces espèces,
avaient trait seulement au mâle et elles me semblaient d'ailleurs
si peu visibles et si peu constantes (quelques-unes surtout), que je
ne pouvais pas partager l'opinion de Rothschild et je pensais qu'on
pouvait tout au plus parler de deux variétés. Je considérais même
comme étant une simple variété (var. murina) une forme de Ct.
serraticeps rencontrée par moi sur les Rats, pour laquelle cepen-
dant les différences étaient bien plus mombreuses que celles don-
nées par Rothschild pour P. canis et P. felis; de plus ces différences
avaient trait aussi aux femelles. Rothschild, auquel j'envoyai des
échantillons de ma varietas murina, trouva qu'ils n'étaient autre
chose que des exemplaires de son P. felis, il reconnut que les carac-
tères différentiels signalés par moi étaient réels et constants et en
ajouta d’autres (8, p. 192-193). Ayant examiné de nouveau des
spécimens de mon (t. serraticeps et de ma var. murina, j'ai trouvé
qu'entre les deux formesil y aeneftet des différences telles, qu'on est
maintenant autorisé à les regarder comme deux espèces distinctes.
Si l’on se place au point de vue du parasitisme de ces Puces, je
suis forcé de les considérer encore comme étant une seule espèce;
en effet les observations relatives à leur distribution géographique,
aux animaux qu'elles affectionnent, à la facilité avec laquelle elles
se portent sur l'Homme ou sur des animaux qui ne sont pas leurs
véritables hôtes, toutes ces observations ne se rapportent jamais ou
presque jamais à l’une ou à l’autre espèce séparément; d’ailleurs, il
paraît que sous le rapport du parasitisme il n'ya pas de grandes dif-
férences entre les deux espèces. Voici le résumé de ces observations.
Le Ct. serraticeps affectionne surtout le Chien (Ct. canis) et le
Chat (Ct. felis), mais il a été observé sur un grand nombre de
Carnivores (Tiraboschi, 4, p. 257-258) et aussi sur le Lièvre, surle
Lapin, Sur un Singe et enfin sur l'Homme et sur le Rat. Sur
l'Homme il a été constaté : en Hollande et à Java par Taschenberg,
en Danemark par Meinert, en France par Railliet, en Italie par
Tiraboschi et par Galli-Valerio, dans le grand-duché de Bade par
590 CARLO TIRABOSCHI
Hilger, qui sur 2 036 Pucesrecueillies sur l'Homme dans lesthéâtres,
écoles, maisons, casernes, hôpitaux, prisons, etc., trouva 1 071,
donc plus de la moitié, Ct. serraticeps. Il semble aussi, d’après
Baker (1, p. 384) que quelques cas d’infestation de maisons par les
Puces ont été occasionnés plutôt par Ct. serraticeps que par P. irri-
tans; d'après Simond (p. 29), le Ct. serraticeps pullule dans les
habitations en Asie plus encore qu'en Europe, tandis que suivant
la Commission anglaise dans les Indes, parmi 247 Puces prises sur
des couches de « tangle-foot » (voir p.566), dans des maisons pes-
teuses de Bombay, 16 seulement, c’est-à-dire moins de 7 pour
cent, étaient Ct. serraticeps (Ct. felis).
En ce qui concerne les Rats, j'ai déjà fait remarquer dans mon
précédent mémoire (1, p. 258-259) que « à l'exception de Thompson
{qui durant l'épidémie de peste de 1900 à Sydney, parmi les Puces
recueillies sur les Rats trouva dans deux cas sur neuf le Ct. serra--
ticeps) personne n'avait observé le Ct. serraticeps sur les Rats, même
en dépit de longues recherches (Galli-Valerio); pourtant j'en ai
pris de nombreux spécimens sur les Rats de plusieurs régions
d'Italie et surtout sur le Mus decumanus (dans la proportion de 25 &
90 pour cent environ). Il a échappé peut-être aux recherches des
autres observateurs parce que, doué d'une très grande agilité dans
le saut, il se déplace plus facilement et plus vite que les autres
espèces parasites des Rats; en effet, je l'ai recueilli presque exclu-
sivement sur les Rats que je tuais avec les vapeurs de chloroforme,
aussitôt qu'on me les livrait vivants au laboratoire. Il faut aussi
remarquer que les Rats capturés (morts par l'action de l'acide sul--
fureux et de l'acide carbonique) sur les navires du port de Gênes
n’ont jamais donné celte espèce de Puce » (1).
D’autres observateurs ont confirmé la présence du Cf. serraticeps
sur les Rats ou sur les Souris. Wagner en a trouvé des spécimens
parmi les Puces capturées sur les Rats d'Odessa pendant la peste;
Gauthier et Raybaud ont trouvé chez les « Rats de terre (1) », à Mar-
seille, sur 52 Puces, 2 Ct. serraticeps; Tidswell, chez les Rats de
Sydney, sur 100 Puces, 4 C5. serraticeps; Zinno, sur une Souris
capturée à Naples pendant la petite épidémie de peste de 1901, un
(1) Gauthier et Raybaud eux-mêmes n'ont jamais rencontré C{. serraliceps sur
les « Rats de navires »; voir ce que j'ai dit à la page 580, relativement à la dis-
tribution du P.irrilans et du Ci. Serraliceps sur les « Rats de terre » et les « Rats
de navires ».
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 991
Ct. serraticeps; Uriarte (1, p. 709), chez les Rats d’égout de Buenos-
Aires, sur 86 Puces, 4 Ct. serraticeps; Gonçalves Cruz et Lutz
(cités par Simond), au Brésil, et Hankin dans les Indes auraient
observé le Ci. serraticeps sur les « Rats d'habitation » ; d’après Roth-
schild (1), on a capturé 1 Ct. serraticeps (P. felis) sur Mus rattus à
Prétoria et quelques exemplaires aussi sur les Rats des Indes;
d’après G. M. G., on rencontre fréquemment, sur les Rats, P, felis;
enfin, suivant Simond (p. 29), « en Cochinchine, sur le cadavre (?)
d'un Rat abandonné dans une cave du laboratoire, les Puces se
sont multipliées au point d'envahir cette cave; la plupart étaient
Ct. serraticeps. »
Simond conclut aussi que cette espèce de Puce, en raison de son
cosmopolitisme (et aussi de ses mœurs), mérite davantage de rete-
nir l'attention comme véhicule de la peste (2); « grâce à la profu-
sion de Chiens et de Chats qui vivent dans les habitations hu-
maines, elle est partout en contact avec l'Homme et avec les Rats ».
Or il est vrai qu'elle a été trouvée sur les Rats par bien des obser-
vateurs et dans des régions différentes (Europe, Asie, Amérique,
Australie), mais toujours ou presque toujours en petit nombre
et parfois même exceptionnellement.
Le Ct. serraticeps, d'après les observations concordantes de Galli-
Valerio, Tiraboschi (3), etc., pique très facilement l'Homme ; suivant
Hilger (der auffallend hohe Prozentsatz (voir ci-dessus) scheint
dafür zu sprechen, dass der Mensch nicht nür vorübergehend Wirt
des Hundeflohs ist »; au contraire, suivant Baker (4, p. 368),
« while these Fleas (Cat, Dog and Rabbit Fleas) will remain on a
human being for some little time and bite frequently wilhe there,
still they do not habitually frequent that host and his clothing and
bed as does P. irritans. » J'ai déjà dit dans mon mémoire précé-
dent (1, p. 180, note 1) que le Cf. serraticeps pique aussi les Rats et
en suce le sang.
CTENOCEPHALUS CANIS Curtis.
Ctenocephalus serraticeps Tschb. : Tiraboschi, 4, p. 255-256.
(1) Journal of hygiene, VI, p. 485, 1906.
(2) Voir ce que j'ai dit à la page 585.
(3) Mes observations regardent non seulement le Cf. canis (Ct. serraticeps pro-
prement dit), mais aussi le C£. felis {C. Serr. var. murina).
592 CARLO TIRABOSCHI
Je renvoie à ma description du Ct. serraticeps, qui regarde prin-
cipalement le Cf. canis; pour les différences entre Ct. canis et
Ct. felis, voir ci-dessous.
CTENOCEPHALUS FELIS Bouché.
Ctenocephalus serraticeps Taschenberg, var. murina Tiraboschi,
4, p. 259-260.
Pulex felis Bouché : Rothschild, 8, p. 192-193.
Tête de la femelle (et un peu aussi celle du mâle) plus pointue
et beaucoup plus allongée que chez Ct. canis (fig. 14, A’etB'). Épine
A?
a.
Fig. 11. — Ctenocephalus canis Curtis (A et A’) et Clenocephalus felis Bouché
(B et B'), d’après Rothschild. — A et B, appareil de fixation du mâle; d on,
doigt mobile; #9, manubrium. — A et B', tête de la femelle.
terminale de la lamelle des fossettes antennales (1), première épine
du peigne de la tête (et épine inférieure du peigne du prothorax)
plus grandes et plus longues que chez Cf. canis (fig. 11, A’ et B°). Troi-
sième article des antennes, chez la femelle, pourvu d’incisions seu-
lement sur le côté dorsal (2).
Peigne du pronotum comprenant 17 à 18 épines, tandis que
(1) Rothschild appelle cette épine « the spine situated at the posterior angle
of the genal process ».
(2) D’après Rothschild, « the segments of the antennal club are, on the ventral
side, almost completely fused in the © of both species ».
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 593
celles-ci sont ordinairement au nombre de 16 à 17 chez C4. canis (1).
Stigmates abdominaux plus petits que chez Ct. canis. Bande
dorsale du Se segment abdominal de la femelle un peu plus arrondie
au sommet, que chez Ct. canis. À la surface interne des cuisses
postérieures une série de 7 à 10 soies, tandis que celles-ci sont au
nombre de 10 à 13 chez Ct. canis.
A la surface externe du doigt mobile (fig. 41, A et B, d m) des
tenailles du mâle, poils un peu plus nombreux que chez Ct. canis;
bord supérieur de ce doigt légèrement plus arrondi et bord infé-
rieur moins droit (un peu concave) que chez Ct. canis; manubrium
(fig. 41, A et B, m) à peu près de la même largeur dans toute sa
longueur (2).
Le Ctenocephalus felis a été sûrement observé sur les Rats : par moi
en Italie (sur Mus decumanus et Mus rattus-aiexandrinus), par.
Rothschild dans les Indes (Mus rattus et Mus decumanus?) et dans
l'Europe méridionale (?), à Prétoria (sur Mus rattus). D'après
mes observations, il pique l'Homme, etc., tout à fait comme
Ct. canis. En ce qui concerne la présence sur les Rats de cette
espèce de Puce, dont le véritable hôte est le Chat, je renvoie aux
remarques que j'ai faites à la page 576, note 1.
Genre C£ERATOPHYLLUS Curtis.
Jamais de peignes à la tête: toujours un peigne au bord posté-
rieur du pronotum (genre Ctenonotus de Kolenati). Forme de la tête
différente dans les deux sexes : chez la ©, la courbure du bord
supérieur de la tête commence presque à l'occiput; chez le &,
l'occiput s'étend presque horizontalement et le front descend à pic,
et ainsi il y a entre le sommet et le front une limite bien marquée,
puisqu'ils forment un angle arrondi, au-dessus duquel on aperçoit,
de chaque côté de la tête, un petit denticule chitineux, qui chez la ©
est ordinairement plus petit. Yeux bien développés, ovalaires, plus
ou moins rapprochés du bord inférieur de la tête. Petites pointes
chitineuses sur les bandes dorsales des 4 ou 6 premiers segments
abdominaux. Soies apicales, chez la ©, au nombre de 2 à 4, dont
(1) Cela d’après Rothschild; je n’ai pas constaté cette différence. à
(2) Chez le Cl. canis, le manubrium est considérablement élargi à son extré-
mité antérieure.
Archives de Parasitologie, XI, n° 4, 1907. 39
594 CARLO TIRABOSCHI
une au moins est bien développée. Pattes plus minces (1); soies la-
térales du dernier article des tarses postérieurs au nombre de 5
par côté, équidistantes et rangées sur une même ligne (parfois la
première est légèrement déplacée). Sur la saillie articulaire des
tenailles du c', deux soies très longues, dirigées en arrière et en
haut.
Depuis 1905, de très nombreuses espèces nouvelles ont été décrites
dans ce genre (qui en était déjà très riche) par Wabhlgren, etc., mais
surtout par Baker et plus encore peut-être par Rothschild; de plus
quelques-unes de ces espèces ont donné lieu à la création de nou-
veaux genres, dont deux seulement nous intéressent : Odontopsyllus
Baker et Pygiopsylla Roth. — Nous décrirons ici 17 espèces.
CERATOPHYLLUS FASCIATUS Bosc.
Pulex fasciatus : cité par Tidswell, Thompson, Galli-Valerio, Gau-
thier et Raybaud, etc.
Tandis que le Pulex cheopis Roth. paraît être l'espèce de Puce par-
ticulière aux Rats des pays chauds, le groupe du Ceratophyllus
fasciatus comprend les espèces de Puces qui affectionnent com-
munément les Rats de l’Europe et surtout de l'Europe centrale et
septentrionale.
Voici quelques-unes des espèces que l’on pourrait placer dans
ce groupe: C. fasciatus Bosc, C. æger Roth. (?), C. agilis Roth. (?), C.
consimilis Wagner, C. dubius Wagner, C. Henleyi Roth., C. italicus
Tirab. — Cer. londiniensis Roth., C. lagomys Wagner, C. mustelae
Wagner, C.nepos Roth. (?), C. penicilliger Grube, C. sexdentatus Ba-
ker (?), C. simplex Wagner, C. tesquorum Wagner, C. Walkeri Roth.,
C. Wickhami Baker (?).
De ces 13 espèces, 7 ont été observées plus ou moins fréquem-
ment sur les Rats ou sur les Souris. Les différences entre le véri-
table Cer. fasciatus et quelques-unes de ces espèces sont si faibles et
si difficilement appréciables que l’on peut bien douter si les Puces
signalées par quelques auteurs sous le nom de Pulex fasciatus ou
de Cer. fasciatus soient vraiment des Cer. fasciatus Bosc ou plutôt
(1) Le Ceratophyllus fasciatus Bosc et le C.italicus Tirab. ne sautent pas aussi
haut que Pulex irritans, Fulex cheopis, Clenocephalus canis et Cé. felis (Ti-
raboschi).
+
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 595
l’une ou l'autre des espèces voisines. Ceci pourrait peut-être expli-
quer les divergences entre les auteurs relativement à la possibilité
et à la facilité de piquer l'Homme et d'en sucer le sang. En ce qui
concerne le parasitisme, mes citations se rapportent donc aux espè-
ces du groupe Cer. fasciatus sensu lato.
Ces Puces ont été fréquemment observées sur les Rats (Mus decu-
manus et Mus rattus-alexandrinus) d'Europe : Hollande (Ritsema),
Halle (Taschenberg), Suisse (Galli-Valerio), Hongrie (Kohaut), Da-
nemark (Meinert), Bade (Hilger), Angleterre et Europe en général
(Rothschild) (1), Marseille (Gauthier et Raybaud) (2), Russie (Wa-
gner) (3), Italie (Galli-Valerio et Tiraboschi) (4). En dehors de l'Eu-
rope, le C. fasciatus (sensu lato!) a été trouvé à Sydney, sur les Rats,
par Thompson en 1900 (7 fois sur 9), par Tidswell en 1902 (10 pour
cent) et par Lydston en 1902; Rothschild dit (5) que les Rats de la
ville du Cap, dont quelques-uns seulement furent examinés, étaient
infestés par C. fasciatus, mais que cette espèce a été capturée
exceptionnellement sur les Rats des Indes; Baker n'a jamais pu la
rencontrer en Amérique, ni sur les Rats, ni sur d’autres animaux :
G. M. G. range le Cer. fasciatus parmi les 5 espèces de Puces les
plus fréquentes sur les Rats. Elle est donc particulière, mais non
absolument, à l'Europe, où elle a été observée aussi sur d’autres
Rongeurs : Mus musculus (Hollande, Italie, Danemark, Bade, Russie,
Angleterre), Mus silvaticus, Mus agrarius, Arvicola Savi, Microtus
agrestis, Myoxus nitela, Myoxus glis, Cricetus frumentarius, et en
dehors des Rongeurs, sur Talpa europæa, Mustela foina, M. putorius,
Canis lagopus, Crossarchus fasciatus. Les véritables hôtes seraient
- (1) Suivant Rothschild {in litt.), le véritable Cer. fasciatus Bosc serait en Eu-
rope beaucoup plus rare que Cer. consimilis Wagn., Cer. penicilliger Grube,
Cer. lagomys Wagn., Cer. mustelae Wagn., mais je n’ai jamais rencontré ces
espèces sur les Rats d'Italie.
(2) Ces auteurs ont trouvé 45 Cer. fasciatus sur 52 Puces, chez les « Rats de
terre » et 6 seulement sur 250 Puces chez les « Rats de navires ».
(3) Le véritable Cer. fasciatus « kann leicht, von der gewôhnlichen Maus oder
Hausratte gewonnen werden ».
(4) J’ai observé le véritable Cer. fasciatus Bosc ‘très fréquemment sur le Mus
decumanus dans toutes les provinces d'Italie (et aussi sur les navires du port de
Gênes); il représente l’espèce la plus répandue sur ces Rats. Je l’ai vu plus rare-
ment sur le Mus rattus-alexandrinus (presque partout, notamment dans la pro-
vince de Caserte, sur les navires, etc.) et sur l’Arvicola Savii (province de Ca-
serte), plus rarement encore sur le Mus musculus (Turin, etc.)et sur le Mus silva-
ticus (Come, etc.); en dehors des Rats, Souris etc. j'ai eu l’occasion de le rencon-
trer sur le Hyoxus glis.
(5) Journal of hygiene, VI, p.484-485, 1906.
596 CARLO TIRABOSCHI
donc Mus decumanus et Mus rattus, en particulier ceux de l’Europe;
d'après Liston, le Rat le plus parasité par Cer. fasciatus serait le
Mus decumanus.
D'après mes expériences et celles de Galli-Valerio, et suivant
aussi Wagner, Nuttall, etc., le C. fasciatus ne pique pas l'Homme:
au contraire, selon Gauthier et Raybaud et selon Tidswell, il peut
sucer le sang de l'Homme ; les deux premiers observateurs affir-
ment même que « un C. fasciatus a survécu 20 jours malgré son ré-
gime exclusivement humain » (1).
Pour la description du véritable Cer. fasciatus et des espèces
suivantes, je renvoie à mon mémoire précédent (4, p. 263-275).
CERATOPHYLLUS LONDINIENSIS Rothschild.
Ceratophyllus italicus Tiraboschi.
Sous le nom de C. italicus nova sp., j'ai décrit en 1904 (4, p. 266)
une Puce, très voisine du C. fasciatus Bosc, et que j'avais observée
assez fréquemment en Italie sur les mêmes Rongeurs que l'espèce
précédente, c'est-à-dire sur Mus decumanus, Mus rattus-alexandri-
nus, Mus musculus, Mus silvaticus, Arvicola Savii; maintenant je
vois que mon C. italicus est identique à C. londiniensis Roth.,
décrit par ce savant en 1903 et dont je n'avais pas connais-
sance lors de la publication de mon mémoire; je n'ai pas à ma
disposition des spécimens de Cer. londiniensis Roth., mais la
description et la figure (de l’appareil de fixation du mâle) don-
nées par Rothschild correspondent tellement aux miennes que
(1) Les différents exemplaires de Cer. fasciatus, mis en expérience par Gau-
thier et Raybaud, ne se sont pas comportés tous également ; 3 échantillons, pla-
cés sur l’avant-bras de À, ont piqué pendant un temps assez court, laissant une
seule marque punctiforme, sans aréole périphérique ni pétéchies; ils ont été
conservés en tubes respectivement 2, 4, 8 jours faisant chaque jour 1 à 2 repas,
dont la durée augmenta progressivement de 2 à 9 minutes; les piqûres qui dans
les premiers jours ne laissaient que des traces à peine perceptibles, détermi-
naient ensuite sur la peau des pétéchies très nettes et prurigineuses. Deux au-
tres échantillons, placés sur l’avant-bras de C après 48 heures de jeûne, ont pi-
qué immédiatement; avec la loupe on les vit rougir et se gonfler; la piqüre fut
nettement ressentie. Un autre spécimen, laissé à jeûn depuis 24 heures et placé
à la région interne de la jambe de B, fit ainsi plusieurs repas dans la journée
(4 applications, 4 piqüres). Enfin l’exemplaire qui a survécu 20 jours, nourri
d'ordinaire sur l’avant-bras de C, prit de temps en temps sans difficulté un repas
sur D; les marques des piqüres n'étaient pas constantes, toujours fort peu pru-
rigineuses, plus accentuées sur D que sur C.
D’après Tidswell, C. fasciatus piqua une seule fois un des assistants.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 997
je n'hésite pas à reconnaître que C. italicus Tirab. est synonyme
de C. londiniensis Roth. (1).
Cer. londiniensis Roth. a été capturé en grand nombre sur Mus
musculus, à Londres (South Kensington), en 1900.
D'après mes expériences, cette Puce ne pique pas l'Homme.
CERATOPHYLLUS CONSIMILIS Wagner, C. MUSTELAE Wagner,
C. Lacomys Wagner, C. PENICILLIGER Grube.
Suivant Rothschild (in litt.), toutes ces espèces, voisines du Cer.
fasciatus Bosc, représentent les espèces que l’on rencontre le plus
souvent en Europe sur le Mus decuma-
nus ; j'ai déjà dit que je ne les ai jamais
observées sur les Rats d'Italie. |
. di dm
* ni
CErarToPHYLLUSs WaLkeri Rothschild.
Cette espèce, très voisine du C. lagomys Fig.12.— Ceratophyllus Wal-
x7 RAR : : keri Roth.; appareil de fi-
Wagn., a été HOUNEE par Fais . nan otre
Angleterre : la première fois dans le nid schild. d à, doigt immobile;
, : : : d m, doigt mobile; m, ma-
d ue Souris), . Chattenden, puis SUT }priwm.
Arvicola amphibius et sur Evotomys gla-
reolus à Tring, etc. — Caractérisée par la structure des tenailles du
oc‘ et surtout par celle du doigt mobile (fig. 12, dm); très foncée et
longue de 3°".
CERATOPHYLLUS PINNATUS Wagner.
Capturé en 1906, à New-Alexandria, sur Mus sp. (Tiraboschi, 4,
D270)
CERATOPHYLLUS GALLINÆ SChrank.
Cette Puce, qui est particulière des Oiseaux, a été observée aussi
(près de Brighton, par Rothschild) sur la Noctule et sur le Hus sil-
vaticus. |
CERATOPHYLLUS SILANTIEWI Wagner.
Cette espèce, à vrai dire, n’a pas été observée sur les Rats, ni sur
(1) Je viens de recevoir une lettre de Rothschild, auquel j'avais envoyé des
spécimens de mon C. italicus et qui les a trouvés tout à fait identiques à ses
échantillons de C. londiniensis.
598 CARLO TIRABOSCHI
les Souris, ni sur les Campagnols, mais sur le Tarabagan (Arctomys
bobac Schreber) (1), en Russie (voir p. 550).
Nous citons encore : C. ABANTIS Roth., C. LucIFER Roth., et C.
POLLIONIS Roth., décrits par Rothschild (8, p.164,170,171) et trouvés
sur Microtus Drummondi dans le Canada ; C. AGILIS Roth. (8, p. 167),
trouvé aussi dans le Canada sur un Wood-rat; et enfin CER. CALIFOR-
nicus Baker, capturéen Californie sur un Campagnol des champs (2),
Genre OpontoPsyLzzius Baker.
D'après Baker (2, p. 129 et 131), ce genre est très voisin du genre
Ceratophyllus et s'en distingue par la présence de denticules à la
surface interne des hanches postérieures (comme chez le genre
Pulex; voir à la page 580). Baker décrit ici 4 espèces, dont une ou
deux seules nous intéressent.
ODONTOPSYLLUS CHARLOTTENSIS Baker.
Baker : 4, p. 390 et 2, p. 131; Rothschild : 8, p. 174 (Ceratophyllus
charl.).
Cette espèce a été trouvée la première fois (Baker) dans le nid
d'une Souris à Masset (Queen Charlotte Islands), puis (Rothschild)
sur d’autres Rongeurs, dans le Canada. Denticules des hanches
postérieures disposés dans une seule rangée. Voir la description et
les figures de Baker et de Rothschild.
Le CERATOPHYLLUS (ODONTOPSYLLUS) TELEGONI Roth. est très voisin
du Odontopsyllus charlottensis. Il a été décrit par Rothschild (8,
p. 172), et trouvé sur Microtus Drummondi dans le Canada.
Genre PyGropsyzia Rothschild.
D'après Rothschild (4, p. 221), ce genre est lui aussi très rappro-
ché du genre Ceratophyllus, duquel ilse distingue surtout par l’ab-
sence des tubercules frontaux (voir p.593) Des huit espèces placées
dans ce genre, une seule nous intéresse.
(1) Sur cette espèce d’Arctomys on a rencontré seulement le C. Silantiewi W.;
sur l’Arctomys monax, au contraire, on a observé : C. arctomys Baker, C.
pseudarctomys B., C. Wackhami (B.) W.; sur Arctomys flaviventer avarus : C. aca-
mantis Roth.
(2) Baker dit (4, p. 395) : sur un « Field Mouse » qui serait le Campagnol vul-
gaire (Microtus arvalis Pallas), mais dans l’« Host Index » il nomme le Microtus
californicus.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 999
PyGiopsyYLLA coLossus Rothschild.
On connaît de cette espèce un seul exemplaire ®, capturé à Ho-
bart (Tasmanie) sur un Tasmanian Rat (Mus sp. ?). — Longueur :
Anms,
Sous-famille des Typhlopsyllinae Tiraboschi.
Genre CrEexoPsyLLa Kolenati.
Tête paraissant comme un cône, ordinairement pourvue d'épines
et (dans la moitié postérieure) de nombreuses séries de soies ; fos-
settes antennales fermées à leur extrémité supérieure; yeux
absents, ou rudimentaires, ou incomplètement pigmentés. Jamais
de peignes sur le métathorax et sur les segments abdominaux.
Soies au bord postérieur des jambes rapprochées l’une de l’autre
et rangées en une série en forme de peigne; au dernierarticle des
tarses postérieurs, 4 paires de soies latérales et 1 paire de soies ac-
cessoires; soies unguiculaires très petites. Jamais de soies, parfois
quelques poils, à l'angle postéro-supérieur des tenailles ; pas de
saillie triangulaire au bord postérieur; parfois une soie impaire
en dessus de l'articulation du doigt mobile.
Depuis 1903, des espèces nouvelles ont été décrites ici par Baker
et par Rothschild, etc.; nous en décrivons 7.
CTENOPSYLLA MUSCULI Dugès.
Ctenopsyllus mexicanus Baker.
Typhlopsylla musculi : citée par Galli-Valerio, Tidswell, Nuttall,
Gauthier et Raybaud, etc.
Cette Puce a été rencontrée presque exclusivement sur les Rats
et sur les Souris. Son véritable hôte paraît être Mus musculus (et
peut-être aussi Mus rattus), chez lequel on l'a observée fréquem-
ment et abondamment dans plusieurs régions de l'Europe : Hollan-
de (Ritsema), Halle (Taschenberg), Danemark (Meinert), Bade
(Hilger), Suisse (Galli-Valerio), Angleterre (Rothschild), Italie (Ti-
raboschi). En Italie elle est l'espèce de Puce la plus répandue sur
le Mus musculus, soit sur les individus vivant en liberté (dans
toutes les provinces d'Italie), soit sur les Souris domestiques (je
600 CARLO TIRABOSCHI
l'ai observée en quantités inouïes sur les Souris blanches du labo-
ratoire).
Sur les Rats aussi (Mus decumanus et notamment Mus rattus-
alerandrinus) elle a été fréquemment et abondamment observée
en Europe, à peu près dans les mêmes régions que sur Mus muscu-
lus; d'après moi, elle représente l'espèce de Puce la plus répandue
chez le Mus rattus d'Italie, surtout chez la variété à ventre blanc;
je l'ai rencontrée sur des individus capturés dans toutes les régions
d'Italie, y compris les villes de Gênes, Venise, etc., etaussi sur ceux
pris dans les navires du port de Gênes; la même distribution a été
observée relativement au Mus decumanus ; seulement Ct. musculi
y est bien plus rare. Selon Gauthier et Raybaud (à Marseille), sur
160 Puces capturées sur un Rat (Mus sp.), 158 étaient Ct. musculi et
sur 250 Puces prises sur des « Rats de navires », 178 étaient Ct.
musculi; au contraire, sur 52 Puces, recueillies sur les « Rats de
terre », 2 seulement étaient Cf. musculi. Enfin, d’après Roth-
schild (1), en Angleterre et en Irlande Ct. musculi infeste parfois
les Rats (Mus decumanus seulement ?) en quantités considérables-
CT. musculi a été rencontrée sur les Rats, même en dehors de l'Eu-
rope, c'est-à-dire : en Amérique et plus particulièrement au Mexique
et aux États-Unis (Baker) (2), en Afrique (à Prétoria, sur Mus rattus:
un seul exemplaire, d'après Rothschild) (3), en Australie et plus
précisément à Sydney (Tidswell, qui l’a observée dans 8 pour cent
des cas, sur les «Rats de la ville »).
Enfin C€. musculi a été capturée : sur Mus silvaticus,en Italie, par
Tiraboschi; sur Mus agrarius, à Halle, par Taschenberg ; sur Micro-
tus arvalis, etc.
D'après les observations concordantes de Nuttall, Galli-Valerio,
Tiraboschi, Wagner (in litt.) et Tidswell, Ct. musculi ne pique pas
l'Homme ; Gauthier et Raybaud, touten disant que les Puces para-
sites des Rats et des Souris piquent toutes l'Homme sans difficulté,
ne désignent pas expressément Ct. musculi, que pourtant ils ont
trouvée très fréquente sur les «Rats de navires ».
(1) Journal of hygiene, VI, p. 483, 1906.
(2) Baker d’après des exemplaires provenant de Guanajuato (Mexique) et cap-
turés par le D' Dugès sur Mus rattus et Mus decumanus, établit une espèce nou-
velle /Clenopsyllus mexicanus), que maintenant (2, p. 156) lui aussi, suivant
Wagner et Tiraboschi (4, p. 278, note 1), considère commeidentique à Cé.museuli.
(3) Journal of hygiene, NI, p. 485, 1906.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 601:
Pour les caractères de Ct. musculi, je renvoie à ma description:
(4, p. 278-281).
CTENOPSYLLA SPECTABILIS Rothschild.
Capturée en 1898 sur Evotomys glareolus, à North Berwick (Tira-
boschi, 1, p. 282).
CTENOPSYLLA TASCHENBERGI Wagner.
Capturée sur us silvaticus (dans le Caucase) et sur d’autres Ron-
geurs (Tiraboschi, 1, p. 284).
CTENOPSYLLA AGANIPPES Rothschild.
Cette espèce nouvelle a été établie en 1904 par Rothschild, d'après
un seul exemplaire ©, pris
en 1902 sur Mus sp., à
Deelfontein (Coionie du
Cap). Pour les caractères
je renvoie à la description
et aux figures de Roth-
schild (7, p. 647).
CTENOPSYLLA ELLOBIUS
Rothschild.
Décrite en 1905, d'après
unexemplaire oc", recueilli
à Sibudeni, Zululand, en
1903, sur Mus sp., et 2 Fig. 13. — Stephanocircus Simsoni Roth, ; tête
a et1@ pris en 1904, de la femelle, d’après Rothschild. :
dans la Colonie du Cap, sur Crocidura flavescens (8, p. 490-491).
Nous citons encore : CTENOPSYLLA PECTINICEPS Wagner, trouvée
sur Microtus æconomus, dans la Transbaïkalie (Tiraboschi, 4, p. 283)
et CTENOPSYLLA SELENIS Roth., observée sur Microtus Drummondi et
d'autres Rongeurs, dans le Canada (Rothschild, 12, p. 322).
Genre STEPHANOCIRCUS Skuse.
=
Comme je l'ai déjà dit (4, p. 275), ce genre est voisin du genre
Ctenopsylla; Baker (2, p. 136) réunit les deux genres dans une fa-
mille : Ctenopsyllidae. Le genre Stephanocircus est très bien carac-
térisé par une couronne (57#pzx) d'épines sur la tête (fig. 13). Pour les
602 CARLO TIRABOSCHI
autres caractères et pour la description et les figures des espèces
citées ci-dessous, je renvoie à Baker (4, p. 430), à Rainbow et à
Rothschild (3, p. 60-62; 5, p. 545; 6, p. 318 et 319).
Ce genre comprend actuellement 5 espèces, dont 3 nous intéres-
sent : STEPHANOCIRCUS THOMASI Roth. (1) (1 ©, prise en 1901, sur
Mus ferculinus, en Australie), STEPHANOCIRGUS pASYUR1 Skuse et STE-
PHANOCIRCUS SIMSONI Roth., dont quelques spécimens ont élé cap-
turés sur Mus velutinus en Tasmanie.
Genre TyPHLOPSYLLA sensu stricto Wagner.
Genre Ctenophthalmus Kolenati.
Tête régulièrement arrondie en avant, pourvue d'épines sur les
joues. Série des soies oculaires comprenant ordinairement 3 soies
fortes, presque égales, équidistantes, la première étant placée sur
le bord antérieur des fossettes antennales; du sommet postérieur
de la tête jusqu’à l'insertion des palpes maxillaires, une longue sé-
rie de 10 soies, dont 5 en arrière des fossettes antennales et 5 (par-
fois 6) en avant, celles-ci décroissant en longueur. Yeux ordinaire-
ment rudimentaires. Un peigne au prothorax; jamais de peignes
sur les métathorax et sur les segments abdominaux. Soies au bord
postérieur des jambes rangées en couples. Soies latérales du der-
nier article des tarses postérieurs au nombre de trois, la 3° étant
plus éloignée de la 2e que celle-ci de la 1"; dans l'intervalle, un poil;
deux soies accessoires (subbasal spines de Baker) bien développées
et 2 soies unguiculaires (subapical spines de Baker). A l'angle
postéro-supérieur des tenailles du mâle, des broussailles de soies
longues et fortes ; au bord postérieur une saillie triangulaire jouant
le rôle de doigt immobile; en dessous de cette saillie, ordinaire-
ment, une soie impaire.
Depuis 1903, on a décrit ici (Baker, Rothschild, Kohaut, etc). des
espèces nouvelles. Les espèces qui nous intéressent sont 4 seule-
ment.
TYPHLOPSYLLA ASsIMILIS Taschenberg.
Cette espèce a été trouvée en Europe dans le nid d’une Souris et
sur : Mus silvaticus, Arvicola amphibius, Microtus arvalis, Microtus ni-
valis, Evotomys glareolus; de plus, sur Talpa europæa, etc. D'après
(4) Ne pas confondre avec Ceratophyllus Thomasi décrit par le même auteur
(7, p. 625).
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 603
Wagner, son véritable hôte serait Microtus arvalis. Pour la descrip-
tion, voir Tiraboschi, 1, p. 286-288.
T'YPHLOPSYLLA AGYRTES Heller.
Observée en Angleterre, par Rothschild, sur Mus musculus, Mus
silvaticus, Arvicola amphibius (sur ce Campagnol Rothschild a trouvé
aussi une variété nouvelle : T. agyrtes, subsp. nobilis), Evotomys
glareolus et sur d’autres animaux; par Wagner, sur Mus sp. et sur
Microtus arvalis. D'après Wagner, le véritable hôte serait Mus silva-
ticus ou Microtus arvalis. Pour la description, voir Tiraboschi, 1,
p. 289-291.
TYPHLOPSYLLA PSEUDAGYRTES Baker.
Ctenophthalmus pseudagyrtes : Baker, 1, p. 421 et Rothschild, 7,
p. 641.
Pour cette espèce, que j'ai déjà citée dans mon mémoire précé-
dent (1, p. 290), je renvoie à Baker et à Rothschild. Elle a été trou-
vée, par Rothschild, dans le Canada, sur Microtus Drummondi et
Microtus saturatus.
TYPHLOPSYLLA PROXIMA Wagner.
(Tiraboschi, 1, p. 292). Capturée dans le Caucase, sur Mus silvati-
cus et Sorex araneus.
Genre NEopsyLLa Wagner.
Très rapproché du genre précédent. Soies latérales du dernier
article des tarses postérieurs au nombre de 4; soies accessoires
absentes. Pas de saillie au bord postérieur des tenailles; soie im-
paire peu développée ou absente. Nous citons ici trois espèces.
NEOPSYLLA BIDENTATIFORMIS Wagner.
Observée par Wagner sur Mus decumanus en Crimée et sur Sper-
mophilus sp. en Sibérie et dans le Caucase (Tiraboschi, 1, p. 292).
NEOPSYLLA PENTACANTHUS Rothschild.
Observée par Rothschild, en Angleterre, sur : Mus silvaticus, Mi-
crotus agrestis, etc.; d'après Wagner, son véritable hôte serait Mus
silvaticus ou Microtus agrestis (Tiraboschi, 1, p. 293.).
NEOPSYLLA ISACANTHUS Rothschild.
Très rapprochée de N. pentacanthus ; espèce nouvelle, créée tout
récemment par Rothschild (4 bis) et capturée sur Evotomys glareolus.
604. CARLO TIRABOSCHI
Genre TypHLOCERAS Wagner.
D'après Wagner, ce genre serait rapproché d'un côté du genre
Ceratophyllus et de l’autre côté du genre Typhlopsylla, d'où le nom;
au contraire, suivant Rothschild, il est rapproché du genre Typhlo-
psylla et du genre Hystrichopsylla et c'est ici, en effet, que je l'avais
déjà placé (1, p. 295: voir
à cette page les caractè-
res du genre). Rothschild
décritiei2 espèces: T. Pop-
pei quiest laseule quinous
intéresse et T. Rosenbergi,
que Baker place dans le
genre Paiæopsylla (Tira-
boschi, 4, p. 294). |
TYPHLOCERAS PoPPEI
Wagner.
J'ai déjà résumé (1,
p. 295-296) la description
que de cette espèce a don-
née Wagner en 1902, d'après un seul exemplaire ® découvert
par Poppe en 1898, sur Mus silvaticus, à Vegesack, près de Brême;
Rothschild ayant reçu plusieurs spécimens et ®, capturés tous
sur Mus silvaticus, en 1900-1903, dans plusieurs localités de l’Angle-
terre, compléta (10) la description de Wagner (fig. 44). Le véri-
table hôte de cette Puce serait donc le Mulot, sur lequel exclusi-
vement elle a été observée jusqu'à présent.
Fig. 14. — Typhloceras Poppei Wagner. — Ap-
pareil de fixation du mâle, d’après Rothschild.
Sous-famille des Hystrichopsyllinae Tiraboschi.
Baker (2, p.136) a élevé cette sous-famille à la dignité de famille.
Au genre Hystrichopsylla il faut maintenant ajouter le genre Macro-
psylla Rothschild (et aussi le genre Uropsylla Roth.,qui par quelques
caractères ressemble au genre Macropsylla ?).
Genre HysrricHopsYLLaA Taschenberg.
Tête tronquée en avant. Yeux absents ou rudimentaires. Peignes
d'épines sur les joues et au bord postérieur du prothorax et de quel-
ques segments abdominaux. Tout le corps pourvu desoies et de poils
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 605
extraordinairement nombreux (ÿsraë, ÿsruyoc). Appareil de fixation
du œ pourvu ordinairement d’une pièce accessoire.
Cinq espèces, dont trois nous intéressent.
HYSTRICHOPSYLLA TRIPECTINATA Tiraboschi.
Observée par moi (1, p. 297-299), sur Mus musculus, à Rome. Le
seul exemplaire que j'ai mis en expérience et qui n’était pas à jeûün,
ne m'a pas piqué. à
HYSTRICHOPSYLLA TALPAE Curtis.
. Observée dans plusieurs régions de l’Europe et sur plusieurs ani-
maux (Tiraboschi, 4, p.301), dont je cite ici : Mus silcaticus, Microtus
arvalis, Microtus agrestis, Evotomys glareolus.
Fig. 15. — Macropsylla hercules Roth.; tête, d’après Rothschild.
HYsTRICHOPSYLLA NARBELI Galli-Valerio,
Observée par Galli-Valerio sur Microtus nivalis, en Suisse (Tira-
boschi, 4, p. 301).
606 CARLO TIRABOSCHI
GENRE MacroPsyzLa Rothschild.
Comprend jusqu'à présent une seule espèce, longue de 5mm2,
capturée en Tasmanie sur Mus velutinus et sur Mus sp. :
MACROPSYLLA HERCULES Rothschild.
Pour les caractères du genre et de l'espèce je renvoie à Rothschild
(8, p. 486).
FAMILLE DES SARCOPSYLLIDAE Taschenberg.
Rhynchoprionidae et Hectopsyllidae : Baker, 2, p. 124; Sarcopsyl-
lidae : Tiraboschi, 4, p. 302; Rothschild, 44.
Pas de peignes. Palpes labiaux plutôt longs, mais très faibles
et fragiles, pâles, peu chitinisés (voir p.574), résultant de 1 ou 2 ar-
ticles seulement; mâchoires petites, peu saïllantes; appareil perfo-
rateur très développé (voir p.573); mandibules larges, longues et
fortes. Extrémité génale de la tête toujours prolongée en bas et en
arrière dans un processus, placé derrière l'insertion des mâchoires.
Bandes dorsales des segments thoraciques plus courtes que celle du
premier segment abdominal.
Pour tout ce qui regarde cette famille (histoire, morphologie,
biologie, description des espèces, etc.) je renvoie au mémoire très
intéressant de Rothschild (41). Ce savant rassemble ici 14 espèces
partagées en trois genres, dont voici la clef analytique :
(a) Hind coxa with patch of spines on inner side, ÆEchidnophaga.
Hind coxa without such a patch of spines. . b
(b) Hind femur with large basal tooth-like pro-
jeCtON a DIN PNR ETC CT O DS y TIU
Hindemur simple ARE Rats
Genre DERMATOPHILUS (Guérin) Rothschild.
Sarcopsylla partim : Tiraboschi, 4, p. 302; Baker, 1, p. 374; Rhyn-
choprion : Baker, 2, p. 125; Dermatophilus : Rothschild, 14, p. 65. —
Deux espèces.
DERMATOPHILUS PENETRANS Linné.
Sarcopsylla penetrans etc. : Tiraboschi, 4, p. 307; Rothschild,
A1, p. 67.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 607
J'ai déjà dit que cette espèce attaque l'Homme et bien des ani-
maux, parmi lesquels on l’a observée aussi sur Microtus arvalis.
DERMATOPHILUS CÆCATA Enderlein.
Tiraboschi, 4, p. 306; Rothschild, 44, p.70. Cette Chique a été dé-
crite par Enderlein, d'après 17 exemplaires © capturés sur Mus
rattus à Piracicaba, Sao Paulo (Brésil).
Genre EcHipNopxAGaA (Olliff) Rothschild.
Sarcopsylla partim : Tiraboschi; Xestopsylla : Baker, 1,p. 174; Ar-
gopsylla et Echidnophaga : Baker, 2, p. 138; Echidnophaga : Rothschild
11, p. 43. Ce genre comprend 8 espèces, dont 2 seulement nous in-
téressent.
ECHIDNOPHAGA RHYNCHOPSYLLA Tiraboschi.
Sarcopsylla rhynchopsylla : Tiraboschi, 1, p. 309; Ech. muri-
na : Rothschild, 44, p. 55; Argopsylla rhynchopsylla : Baker, 2,
p. 125.
J'ai capturé cette espèce de Chique sur Mus rattus-alerandrinus
de quelques régions d'Italie; tous les spécimens que j'ai observés
(femelles), étaient solidement fixés par leur appareil perforateur
dans la peau de l'hôte (généralement sur le museau). Kohaut et
Wagner (in litt.), à qui j'en ai envoyé des échantillons, ontconfirmé
qu'il s’agit ici vraiment d’une espèce nouvelle. Rothschild, qui a
étudié les spécimens envoyés à Kohautest du même avis ; il nomme
(1906) cette espèce : Echidnophaga murina; à cause de la loi de la
priorité, il faut conserver le nom de Ech. rhynchopsylla, sous lequel
j'ai décrit la première fois (1904) cette espèce nouvelle. La création,
de la part de Rothschild d'un nom nouveau pour désigner une
espèce déjà pourvue de son nom spécifique, dépend peut-être de ce
qu'il donne comme synomyme de Ech. murina (= Sarcopsylla rhyn-
chopsylla Tirab. 1904) la Sarcopsylla gallinacea décrite par moi en
1902, 1903 et même en 1904. C'est là une erreur; en effet, j'ai déja
dit dans mon mémoire de 190% (4, p. 303-305 et 309-310) que j'ai
capturé sur le Mus rattus-alexandrinus d'Italie non seulement la
Sarcopsylla rhynchopsyllaTirab. (p. 309-310) maïs aussi la véritable
Sarcopsylla gallinacea Westwood (p. 303-305) ; je considérais d'abord
la Sarcopsylla rhynchopsylla comme étant une simple variété (var.
murina ou var. italica) de la S. gallinacea; cela a donné lieu à une
608 CARLO TIRABOSCHI
confusion, que j'avais déjà corrigée dans ma note rectificative (4,
p. 626), où je faisais remarquer qu'il fallait supprimer les 3 der-
nières lignes de la p. 305 et les 31 premières lignes de la page
306, qui contenaient la description de la S. rhynchopsylla, trans-
portée aux pages 309-310.
Rothschild a complété cette description, en y ajoutant des carac-
tères différentiels, dont la plupart sont dessinés dans ma figure.
11 y a une seule divergence: d'après moi, les bandes dorsales des
segments abdominaux ont une seule soie impaire; suivant Roth-
schild, elles en ont une par côté.
ECHIDNOPHAGA GALLINACEA WesTrwood.
Sarcopsylla gallinacea : Tiraboschi, 4, p. 303-305 ; Argopsylla gall. :
Baker, 2, p. 125; Echidnophaga gall : Rothschild, 44, p. 52.
J'ai capturé des échantillons de cette espèce sur le même hôte et
à peu près dans les mêmes conditions que les spécimens de l’es-
pèce précédente; à elles deux, elles représentent les deux seules
Chiques, que l’on a observées jusqu'à présent en Europe. De plus
j'ai trouvé Echidn. gallinacea bien au delà de la dernière limite de
latitude Nord, où on l'avait observée auparavant, et sur un hôte
nouveau, le Rat domestique. En ce qui regarde les autres hôtes et
les autres localités infestées par la Chique des Oiseaux. je renvoie
à la page 305 de mon premier mémoire (1); pour la description,
u
voir aussi Rothschild, 44, p. 52-54.
V. — Les Pédiculidés et les Acariens parasites
des Rats, etc.
J'ai déja observé dans mon mémoire précédent (1, p. 311) que si
l'on ne peut aflirmer d'une manière absolue que les Poux ne jouent
aucun rôle dans la propagation de la peste, on doitadmettre qu'ils
ne peuvent pas être des agents propagateurs aussi actifs que les
Puces. Aux observations relatives aux Pédiculidés, que j'ai déjà
résumées, il faut ajouter ici celles de Skinner et celles de Herzog.
Herzog, qui n’attribue pas aux Puces une grande importance
dans la diffusion de la peste, décrit (parmi les 20 cas de peste ob-
servés par lui à Manille en 1904) un cas dans lequel le transport de
l'infection fut accompli, selon toute probabilité, par le Poux de
tête, de l'Homme (Pediculus capitis. Nit z; (ce cas concerne un
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 609
enfant, frappé de véritable peste bubonique, et montrant des bu-
bons primaires dans la région cervicale ; à l’autopsie on observa
aussi que (in der behaarten Kopfhaut laufen ein Anzahl von Pedi-
culus capitis unruhig umbher ; drei derselben werden mit steriler
Pincette in leere sterile Rôhrchen und spâter in je 50 ccm. einer
leicht alkalischen Nährbouïillon eingebracht ». « Es gelang von
allen drei Pediculus capitis typische Pestculturen zu erlangen »
(p. 276-277).
Herzog rappelle aussi (p. 271) le fait (observé par la Commission
anglaise dans les Indes, 1901) de la très grande mortalité (S pour
cent environ, tandis que la mortalité générale fut de 2 pour
cent seulement) constatée à Bombay en 1896 parmi les individus
appartenant à la caste des (Janis », qui regardent comme sacrés tous
les animaux et sont fortement infestés par les Insectes parasites ;
d'après Herzog, cette circonstance « sicher (?) einigermaassen dafür
spricht, dass ue eine Rolle bei der Uebertragung der Pest
spielen künnen.
Je n'ai pas eu à ma disposition les notes ÉAubénee Skinner,mais
j'en ai lu le résumé de la Deutsche med. Wochenschrift, d'où j'ap-
prends que, suivant Skinner, le transport de la peste peut avoir
dieu par l'intermédiaire des Poux du bétail (Rindviehläuse), qui
peuvent infester non seulement les Hommes, mais aussi les
Rats.
Pour tout ce qui concerne la taxinomie, la morphologie, la bio-
logie et la classification des Pédiculidés, je renvoie à mon travail
précédent (1, p.312-314)etaux mémoires très intéressants de Ender-
lein(1); cet auteur a donné une descripuon très détaillée et très
exacte de la morphologie du corps des Poux et notamment de leur
appareil buceal.
Les Pédiculidés appartiennent à l’ordre des RHYNcHoTA: cet
«ordre comprend, d'après Enderlein, 5 sous-ordres, dont un
seulement nous intéresse, celui des AxoPLurA. Ce dernier, toujours
d'après Enderlein, comprend #% familles : celles qui nous intéres-
sent sont les familles des Pediculidae et des Hæmatopinidae. Voici
un tableau des genres comprenant des espèces parasites des Rats,
CIC
(4) Zoologischer Anzeiger, XXVHI, p. 121-147,220-233 et 626.638; XXIX, p. 192-
49%, 1905-1906.
Archives de Parasitologie, XI, n° 4, 1907. 40
610 CARLO TIRABOSCHI
Familles Sous-familles Genres
PEDICUEIDAE PEDICULINAE Pediculus L.
HÆMATOPININAE Hæmatopinus Leach.
yplax End.
| Hoplopleura End.
| TRICHAULINAE |
Le genre Pediculus L. comprend les deux espèces parasites de
l'Homme : P. vestimenti Nitzsch et P. capitis Nitzsch. Nous avons
vu ci-dessus que le Poux de tête a été accusé récemment par Her-
zog d'être un agent propagateur de la peste; chez cet Insect suceur
on a observé le phénomène, constaté aussi chez les Puces (voir p.575),
du sang expulsé par l'ouverture anale sous forme de jets; nous
dirons enfin que P. capitis, transporté sur les Rats (Mus decumanus),
les pique et en suce le sang.
On plaçaitjadis dansle genre Hæmatopinus Leach (de la sous-famille
des Hæmatopininae) toutes les espèces rencontrées sur les Rats;
cependant la plupart de ces espèces (que j'ai décrites, 4, p. 316-319)
ont été transportées par Enderlein dans le nouveau genre Polyplax
End., appartenant à une autre sous-famille : Trichaulinae. D'après
cet auteur, la forme typique du genre serait :
HÆMATOPINIDAE
POLYPLAX SPINULOSUS Burmeister.
J'ai déjà donné une description et des figures de cette espèce
(Hæmatopinus spinulosus Burm., 4, p.316), car elle avait été observée
par Piaget sur Mus decumanus. Plusieurs spécimens de cette espèce
ont été trouvés ensuite sur le même hôte, par Gast, près de Dessau,
en 1897, et puis d’autres sur les Rats blancs, par Rômer, à Frank-
furt a. M., et enfin, en 1904, par Enderlein, sur un Surmulot, qui
en était fortement infesté. J'ai rencontré aussi très fréquemment et
parfois très abondammentle Polyplax spinulosus sur les Rats d’égout
d'Italie et même sur les Rats domestiques; quelques individus de
Mus decumanus (Rome, etc.) en étaient littéralement envahis
(jusqu'à 300 Poux environ sur un seul Rat).
Polyplax spinulosus Burm. serait donc l'espèce de Poux la plus
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE (61
répandue sur le Surmulot; elle est peut-être l'espèce chez laquelle
j'ai dit qu'en a observé l'expulsion du sang sucé sous forme de
jets (voir p. 515).
En ce qui concerne le développement du Trypanosoma Leiwvisi
Kent dans le corps (estomac) du Polyplax spinulosus (qui est l'hôte
intermédiaire de ce parasite du sang des Rats), je renvoie aux
travaux de PROWAZEK.
D'autres espèces parasites des Rats, etc., appartenant jadis au
genre {æmatopinus et transportées maintenant dans le genre
Polyplax, sont : P.spixiaer Denny, observé sur Arvicola amphibius ;
P. sERRATUS Burm., capturé sur Mus musculus; P.ArrINIS Burm..
pris sur Mus silvaticus et sur Mus agrarius; P. SPIGULIFER Gervais,
capturé sur Mus barbatus; et probablement aussi P. PR&cisus Neu-
mann, trouvé sur Mus sp. — À ces espèces il fauten ajouter une autre :
P. MIACANTHA Speiser, récemment décrite par Speiser (1), qui l’a
rencontrée sur un petit Rat (Wus sp. ?) provenant de l’Abyssinie,
celte espèce serait rapprochée de P. præcisus Neum.
Enderlein plaçait aussi dans le genre Polyplax l'espèce que j'ai
déjà décrite sous le nom de Hæmatopinus acanthopus Denny
(1, p. 317); mais récemment il a transporté cette espèce dans un
genre nouveau : Hoplopleura End., rapproché du genre Polyplax et
appartenant à la même sous-famille. HOPLOPLEURA ACANTHOPUS à été
observé sur Mus decumanus, Mus musculus, Microtus agrestis, Mi-
crotus arvalis.
En ce qui concerne les Acariens, je dirai seulement que Skinner
que j'ai cité tout à l'heure, considère comme un véhicule de la
peste le Hyalomma ægyptium (un Ixodidé), dont il donne la deserip-
tion et la figure (n° 2337). Ce même auteur affirme (n° 2344) que la
peste est transportée par les Tiques (1xodinae), «die in der trockenen
lahreszeit auf Pflanzen hausen und von ihnen auf Menschen und
Tiere übergehen. Dies geschieht hauptsächlich während der Wei-
zenernte, die auch viele Ratten in die Felder lockt. Und so werden
die Ratten ebenfalls infiziert, gleichwie Menschen, Vieh u. s. w. ».
Je citerai enfin les observations de Simond relativement aux
Puxaises : « Tandis que la Puce ne séjourne que temporairement
(1) Centralblatt für Bakteriologie, Orig., XXXVIIL, p. 314-319,
612 CARLO TIRABOSCHI
pans les lits, la Punaise y élit domicile et ne s'en écarte pas. Si
elle était fréquerniment infectieuse, on devrait donc observer, pour
la peste, ce qui se présente pour le typhus récurrent, dont le Spiro-
chète est inoculé à l'Homme par la Punaise; c'est-à-dire que le lit,
où un individu a éprouvé la maladie, demeurerait source d'infection
pour ceux qui y couchent après lui. Or, pour contracter la peste,
il n’est pas besoin de coucher dans un lit d’une maison pestiférée;
il suffit de passer quelques heures, parfois quelques instants, dans
une telle habitation. De plus la Punaise n’est pas, comme la Puce,
un parasite habituel des Rats ou des animaux domestiques; elle
ne pourrait done servir d'intermédiaire ni entre les Rats, ni entre
le Rat et l'Homme... Tout au plus pourrait-on supposer qu'elle
sert, en quelques cas, de véhicule au Bacille pesteux pour le trans-
porter d'Homme à Homme, si des observations nouvelles étaient
apportées à l'appui de cette opinion. » Je rappelle que les expé-
riences de transmission expérimentale de la peste, exécutées avec
les Punaises, n'eurent jamais de succès : Nuttall en 1897, Kolle en
1897 eten 1899-1900, etc., et tout récemment Kister et Schumacher,
en 190% (voir p. 559).
Conclusions.
1° Les observations épidémiologiques de ces dernières années
ont confirmé le fait, déjà établi, du rôle prépondérant que tes Rats
(Mus decumanus et Mus rattus) et parfois aussi les Souris (Mus mus-
culus) jouent dans l'apparition et dans la propagation de la peste
bubonique. L'importance plus ou moins grande du rôle de Hus
decumanus où de Mus rattus dépend peut-être de la prépondérance
locale de l’une ou de l’autre espèce (p. 517-551).
20 Les investigations épidémiologiques de ces dernières années,
ajoutées à celles déjà publiées par Simond, Yersin, Blakmore,
Chalmers, Hankin, Wernitz, Lydston, Tidswell, Thompson, etc.,
ont établi l’importance que les Puces peuvent avoir, dans la nature,
relativement à la propagation de la peste de Rat à Rat, d'Homme à
Homme et du Rat à l'Homme. Parmi ces investigations, celles de
Hankin, de Liston et de Thompson sont les plus intéressantes et les
plus importantes (p. 551-557).
30 Les résultats des expériences de la Commission anglaise dans
les Indes en 1905-1906 ont définitivement résolu la question de la
“100
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 613
possibilité de la transmission de la peste de Rat à Rat par l'inter-
médiaire des Puces. Ces expériences, ajoutées à celles de Simond,
de Gauthier et Raybaud, de Elkington, de Bannermann, ont été si
nombreuses et si rigoureuses et leurs résultats si souvent positifs,
que désormais le fait de la transmission de la peste par les Puces
ne peut plus être mis en doute (p. 557-566).
40 Les recherches de dissection et d'histologie des Puces (exé-
cutées par la Commission anglaise) ont confirmé la présence, dans
l'appareil perforateur et suceur de ces Insectes, de deux canaux
distincts, l’un efférent, le long duquel la salive est convoyée dans la
petite plaie de la piqüre et l'autre afférent, le long duquel le sang
est aspiré dans l'estomac de la Puce. De même, les recherches de
la Commission anglaise et celles de Rohtschild ont confirmé dans
presque tous les détails le mécanisme de la succion tel que je l'ai
décrit; les observations de Baker ont confirmé ce que j'avais déjà
dit à propos du parasitisme des Puces (p. 569-578).
9° Parmi les nombreuses espèces de Puces que j'ai décrites ou
citées (p. 580-608), celles que l’on doit considérer comme lesvéhicules
les plus importants de la peste de Rat à Rat, sont, en raison de
leur plus grande diffusion sur ces Rongeurs: Pulex cheopis Roth. (et
peut-être aussi quelques-unes des espèces voisines), Ceratophyllus
fasciatus Bosc (et les espèces voisines), Ctenopsylla musculi Dugès,
Ctenocephalus felis Bouché et Ctenocephalus canis Curtis.
Celles que l’on peut regarder comme véhicules probables de la
peste du Rat à l'Homme sont, non seulement en raison de leur dif-
fusion, mais aussi de leur facilité à se transporter sur l'Homme et
à le piquer : Pulex cheopis Roth. (et les espèces voisines ?), Cteno-
cephalus felis Bouché, Pulex irritans L., Ctenocephalus canis Curtis,
et peut-être aussi Ceratophyllus fasciatus où quelques-unes des
espèces rapprochées de lui.
C’est donc le Pulex cheopis Roth. qui,à présent, mérite le plus de-
retenir l'attention comme le véhicule le plus important de la peste:
de Rat à Rat et aussi comme véhicule probable de l'infection du
Rat à l'Homme; cela en raison de sagrande diffusion sur les Rats (et
en particulier sur les Rats des régions chaudes infestées par la peste:
Indes, Australie, etc.), des résultats positifs (de transmission expéri-
mentale de Rat à Rat) obtenus par la Comission anglaise avec cette.
espèce de Puce, et enfin de la facilité avec laquelle Pulex cheopis se:
614 CARLO TIRABOSCHI
transporte, dans la nature, sur l'Homme, en l'absence de Rats
(Liston) et le pique (Tiraboschi, Tidswell, Gauthier et Raybaud,,
Liston).
Les Chiques (Sarcopsyllidae) sont naturellement hors de considé-
:ation, en raison de leur genre de vie.
Il en estde même aussi, en général, pour les Pédiculidés et pour les
Acariens, qui, bien qu'il ne soient pas liés à leur hôte comme les
Chiques, ne se déplacent pas aussi vite que les Puces proprement
dites. De même, les Punaises ne peuvent jouer ordinairement un
rôle important dans la diffusion de la peste.
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Hizz, Report on the Plaque in Natal, 1902-03, p. 40.
Hunter, Centralblatt fur Bakteriologie, Orig., XL, p. 43-55, 1905.
KascHKApAMOFFr, Hygienische Rundschau, XVI, p. 1305-1318, 1906.
Kisrer et Scaumacner, Zeitschrift für Hygiene, LI, p. 126-176, 1905.
KL, Report of the Medical Officer, 1904-1905, Londres.
4. Lisrox, Journal Bombay Nat. Hist. Soc., XVI, p. 253, 1904.
2. Lasron, Indian Medical Gazette, p. 43, 1905.
_ Mrrcuez, Journal of the roy. army med. corps, VI, 1906.
Marcuoux et Simonp, Ann. de l’Institut Pasteur, XX, p. 104-148, 1906.
Mayer, Hygienische Rundschau, XNI, p. 1369-1376, 1906.
Niue, Archiv fur Schiffs-und Tropenhygiene, 1904.
Noc, Archives de Parasitologie, IX, p. 300-304, 1905.
RaxBow, Records of Australian Museum, NV, p. 53-55, 1903.
4. Rorascuizn, The Entomologists Monthly Magazine, (2) XIV, p. 83-87, 1903.
2. Roruscizp, lbidem, (2) XII, p. 225, 1902.
3. Rorascuizo, 1biden, (2) XVI, p. 60-62, 1905.
(1) Naturellement je ne donne pas ici la bibliographie qui a été déjà citée dans
mes mémoires précédents; de même, j'omets les ouvrages qui ne sont pas men-
tionnés dans le texte.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 615
4. RorascniLp, Zbidem, (2) XVII, p. 221-224, 1906.
4 bis. RorascmiLp, Zbidem, (2) XNIII, 1907. 6
5. RornscniLp, Novitates zoologicue, NV, p- 533-545, 1898.
6. Rornscairn, Zbidem, X, p. 317-325, 1903.
7. Rorusomizn, Ibidem, XI, p. 602-653, 1904.
8. RorasciLo, Ibidem, XII, p. 153-174; 192-193; 479-491, 1905.
9. Rornscnicp, Ibidem, XII, p. 170-177, 1906.
10. Rorascmizp, The Entomologists Record and Journ. of variation, XV, n° 3
et 8, 1903.
11. Rorascnizp, Thompson, Yates and Johnston Laboratories Report, VI, p.
15-72, 1906.
42. Rorascnirp, The Canadian Entomologist, XXXVIIT, p. 321- 325, 1906.
Simpson, Report on the causes and continuance of Plague in Hong-Kong, p.
49-103, 1903.
SIMOND, Revue Médico-chirurgicale du Brésil et de l'Amérique latine, n°5,
4905.
SKINNER, British medical Journal, n° 2333, 2337, 2344. 1905. (Cité dans Deustche
med. Wochenschr. p. 1570, 1730, 2027. 1905).
4. Taompson, Report on a fourth Outbreack of Plaque at Syaäney, 1904.
2. Tuompsow, Medical Record, LXV, p. 338-339, 1904.
3. THoMpson, Journ. of hygiene, VI, p. 537-569, 1906.
TinsweLL, Report on ectoparasites of tlxe Rat, 1902.
1. TiraBoscur, Archives de Parasitologie, VIII, p. 161-349; p. 623-627, 1904.
2. TirABoscar, Zeitschrift fur Hygiene, XLVIII, p. 512-522, 1904.
4. Urrarre, Centralblatt fur Backteriologie, Referate, XXXNV, p. 705-709, 1904.
2. Urrarre, Comptes Rendus de la Société de Biologie, LVII, p. 255, 1904.
Vassar, Revue d'hygiène et de police sanitaire, XXVIIT, p. 279-292, 1906.
WAHLGREN, ATchiv fur Zoologie, 1, p. 181-196, 1905.
NOTE ADDITIONNELLE
La composition de ce mémoire était déjà achevée, lorsque j'ai vu parai-
tre dans le Gentralblatt für Bakteriologie une revue critique de GarLr-
VALERIO, qui donne une grande valeur aux expériences de la Commis-
sion anglaise et reconnait qu'elles ont démontré scientifiquement la pos-
sibilité de la transmission de la peste de Rat à Rat par l'intermédiaire
des Puces, mais il nie absolument la possibilité de cette transmission du
Rat à l'Homme.
616
CARLO TIRABOSCHI
TABLEAU SYNOPTIQUE DES ESPÈCES DE PUCES
OBSERVÉES SUR LES RATS, LES SOURIS ET LES CAMPAGNOLS.
FAMILLES
Tiraboschi
Tiraboschi
PULICIDAE Taschenbere.
EE À
PULICINAE
TYPHLOPSYLLINAE
RYSTRICHO-
PSYLLINAE
Tirab
SARCOP
LIDAE
Taschenberg.
ua
rQ
LE
USS-FAMILEES
GENRES
|
INPUuLEx Linné …. 0
CrenocepnALus Kolenati.
| CERATOPHYLLUS Curtis. .
: OponropsyLLus Baker. .
: PycropsyzLaA Rothschild.
’
|
CrenopsyLLA Kolenati. .
STEPHANOCIRCUS Skuse ,
TyYPHLOPSYLLA Wagner .
NeopsyLLza Wagner . .
\ TypnLoceras Wagner. .
| HysrricHoPsYLLA Tschb.
| MacroPpsyLLA Rothschild
\ DErMAToPHILUS Guérin .
| EcninoPnaGa OI. . .
\
Re RSS Se) TS
ESPÈCES
P.irritans L.
P. cheopis Roth.
(=? P. philippinensis Herzog).
P. brasiliensis Baker.
Ct. felis Bouché.
Ct. canis Curtis.
Cer. fasciatus Bosc. . .
Cer. londiniensis Roth.
(— Cer. italicus Tirab.)
Cer. consimilis Wagn..
Cer. mustelae Wagn. .
Cer. lagomys Wagn.. .
Ler. penicilliger Grube.
Cer. Walkeri Roth. . .
Cer. pinnatus Wagn.
Cer. gallinae Schrank.
Cer. abantis Roth.
Cer. lucifer Roth.
Cer. pollionis Roth.
Cer. agilis Roth.
Cer. californicus Bak.
Od. charlottensis Baker:
Od. telegoni Roth.
Pyg. colossus Roth.
Ct. musculi Dugès.
Ct. speclabilis Roth.
Ct. Taschenbergi Wagn.
Ct. aganippes Roth.
CT. ellobius Roth.
CL. pecliniceps Wagn.
CT. selenis Roth.
St. Thomasi Roth.
St. dasyuri Skuse.
St. Simsoni Roth.
Typhl. assimilis Tsehb.
Typhl. agyrtes Heller.
Typhl. pseudagyrtes Bak.
Typhl. proxima Wagn.
N. bidentatiformis W.
N. pentacanthus Roth.
N. isacanthus Roth.
Typhl. Poppei Wagn.
Hystr. tripectinata Tirab.
Hystr. talpae Curtis.
Hystr. Narbeli Galli-V.
Macr. hercules Roth.
Derm. penetrans L.
Derm. cæcata End.
Ech. rhynchopsylla Tirab.
Ech. gallinacea Westw.
Groupe du Cer, fasciatus
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DU VÉHICULE DE LA PESTE 617
INDEX DES RATS, DES SOURIS, ETC:ET DES. PUCES
LEURS PARASITES HABITUELS OÙ ACCIDENTELS.
HÔTES PUCES
Ceralophyllus Walkeri Roth.
Typhlopsylla agyrtes Heller.
T. ag. subsp. nobilis Roth.
T. assimilis Tschb.
Ceratophyllus fasciatus Bosc.
Typhlopsylla assimilis Tschp.
Neopsylla pentacanthus Roth.
Hystrichopsylla talpae Curtis.
Ctenopsylla musculi Dugès.
Typhlopsylla agyrtes Heller.
T. assimilis Tschb.
Hystrichopsylla talpae Curtis.
Dermatoplilus penetrans L.
Microtus cal:fornicus . . . . . | Ceratophyllus californicus Baker.
| Ceratophyllus abantis Roth.
|
Microtus amphibius. .
Microtus agrestis. . . . . 1 |
\
MicrotuS anvalis re Eee |
Cer. lucifer Roth.
Cer. pollionis Roth.
Odontopsyllus telegoni Roth.
Ctenopsylla selenis Roth.
Typhlopsylla pseudagyrtes Baker.
Typhlopsylla assimailis Tschb.
Hystrichopsylla Narbeli Galli-Val.
Microtus Drummondi . . . . .
Microtus nivalis. . . . . . . .
Microtus œconomus . . . . . | Clenopsylla pectiniceps Tschb.
Microtus saturatus . . . . . . | Typhlopsylla pseudagyrtes Bak.
Microtus subterraneus |[Savii, ( Ceratophyllus fasciatus Buse.
DE SNS en Re PR EE CT ES a EE | Cer. londiniensis Roth.
Microtus sp" ere . . | Ceratophyllus consimilis Wagn.
ç Ceralophyllus fasciatus Bosc.
| Clenopsylla musculi Dugès.
MUSRAIDIDeE SE EN RE .. | Pulex pallidus Tschb.
{ Pulex cheopis Roth.
|. P. irritans L.
| P. brasiliensis Baker.
Mus agrarius .
(P, philippinensis Herzog?).
Ctenocephalus felis Bouché.
Ct. canis Curtis.
| Ceratophyllus fasciatus Bose.
Mus decumanus- Cer. londiniensis Roth.
Cer. consimilis Wagn.
Cer. lagomys Wagn.
Cer. nrustelae Wagn.
Cer. penicilliger Grube.
Clenopsylla musculi Dugès.
Neopsylla bidentatiformis Wagn..
61S.
HÔTES
Mus ferculinus . . .
Mus gentilis
Mus musculus
:Mus rattus-alexandrinus
.Mus silvaticus
Mus velutinus. .
-Mus sp.
CARLO TIRABOSCHI
PUCES
Sltephanocireus Thomasi Roth.
Pulex cheopis Roth. à
Ceratophyllus fasciatus Bose.
Cer. londiniensis Roth.
Cer. Walkeri Roth. (?)
Odontopsyllus charlottensis Bak. (?)
Ctenocephalus Serraticeps Tschb.
Ctenopsylla musculi Dugès.
Typhlopsylla assimilis Tschb
T. agyrtes Heller.
Hystrichopsylla tripectinata Tirab.
Pulex cheopis Roth.
P. brasiliensis Baker.
P. irritans L.
(P. philippinensis Herzog ?)
Clenocephalus felis Bouché.
CL. canis Curtis.
Ceratophyllus fasciatus Bose.
Cer. londiniensis Roth.
Ctenopsylla nusculi Dugès.
Dermatophilus cæcata End.
Echidnophaga rhynchopsylla Tirab.
Ech. gallinacea Westwood.
Ceratophyllus fasciatus Bosc.
Cer. londiniensis Roth. J
Cer. gallinae Schrank.
Ctenopsylla musculi Dugès.
Ct. Taschenbergi Wagner.
Typhlopsylla agyrltes Heller.
T. assinilis Tschb.
T. proxima Wagn.
Neopsylla pentacanthus Roth.
Typhloceras Poppei Wagn. |
Hystrichopsylla lalpue Curtis.
Stephanocireus Dasyuri Skuse.
St. Simsoni Roth.
Macropsylla hercules Roth.
Ceratophyllus pinnatus Wagn.
Pygiopsylla colossus Roth.
Clenopsylla aganippes Roth.
Ct. ellobius Roth.
Typhlopsylla àgyrtes Keller.
Macropsylla hercules Roth.
ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION
DU VÉHICULE DE LA PESTE
INDEX DES ESPÈCES DE PUCES DÉCRITES OU CITÉES
SYNONYMES.
Pages.
Argopsylla Baker /Echidnopha-
ACC RENTE D VEN TRE
En li Curtis. :
DOTÉRTUUTSAR OEM NC :
Cer abantis Roth
Cer. californicus Bak. .
Cer. charlottensis lOdontosut-
DULSIIED AIRE
CER. CONSIMILIS Wagn.
CER. FASCIATUS Bosc
Cernaallinae Schrank
CORNOUNICOMNNEIDMERREMENON ONE
CHR LAGOMMSNWV A CNET ENT
CER. LONDINIENSIS RO... |
Cer. Lucifer Roth.
CER. MUSTELAE Wagn. te
Cer. nn Wagn.
Cer. pollionis Roth.
ICER. SILANTIEWI Wagn. . .
Cer. telegoni Roth. |Ouontopsut-
Lus 1.) ic tee
(CER. WALKERI Roth. .
Ctenocephalus Kol.
(CTACANISICUELISE RES EE EC
(Cr. FELIS Bouché
Ct. serraticeps Tschb.
Ct. serr. var. murina Tirab .
Re Kol. / or
psylla Wagn.) . : Se
Ctenopsylla ROIS EMA
Ct. aganippes Roth. . .
Ct. ellobius Roth.
Ct. mexicanus Baker . .
‘Cr. MuscuLI Dugès. . . . .
CT. pectiniceps Wagn.
CIS CLIENT SER OEM qe
Ct. spectabilis Roth. . . .
‘Cr. TASCHENBERGI Wagn.
Dermatophylus Guérin. .
DERSAICACATANEN TEEN NE
Derm. penetrans L.
Echidnophaga Olif.
Ech. gallinacea Westw. À
Os TOUTOND =; re ete le ere
— Ecx. RHYNCHOPSYLLA Tirab . .
Hystrichopsylla Tschb. . . .
H-NTRIPECTINATANTITAD EN UN NT
mile elfe) ot i-ee
607
093
598
298
598
598
597
59%
597
596
097
596
598
597
997
597
598
597
598
597
588
591
592
588
589
619
Pages.
HR PN EM CU IS RENE AT O0
HENTAI NA PARU 605
Macropsylla Roth. . . . . .. 605
Macr. hercules Roth. . C06
Neopsylla Wagon. Lie 603
N. BIDENTATIFORMIS Wagn. 603
N. isacanthus Roth. 60%
N° PENTACANTHUS Roth. . … . 603
Odontopsyllus Baker . . . . . 598
Od. charlottensis Baker . . . 598
Od. telegoni Roth. {C eratophyl-
DÉSERT ne EE ME 598
pulex NP 580
P. BRASILIENSIS Bak. : 91
P. canis Curt. [Ctenocephalus) oO
PcasoBis Roth NU Un 581
PB fase tus Bosc /Ceratophyllus
SN RE 094
P. felis Bouché [Ctenocephatus) 592
P. IRRITANS L. NAME OR 380
PNEUS MRITAD EME PER 581
P. pallidus Tschh. . . 588
P. pallidus (groupe du) . prb)
P. philippinensis Herzog . . . 582
P. serraticeps Tschpb. /Ctenoce-
DILONS NAS EEE IEEE 588
PAT EROURAROINA ER D88
PyGOPSVILA ROGERS 598
Py. colossus Roth. . . . 599
Rhynchoprion Baker | (Derma-
LODIVYLUSIEREREE 606
Sarcopsylla /Der matophilus et
Echidnophaga) DT EE LUE 607
Stephanocircus Skuse . . G0i
SÉRDHSUURURS LUS NME" 602
SULSUTS OUR OUEN NEO 602
St. Thomasi Roth. . . . 602
Typhloceras Wagn. 60%
TypaL. Popper Wagn. . . . . . 604
Typhlopsylla Wagn MONA TENNE de 602
PAGMEMESN NET ES 603
T. ag. Subsp. nobilis Roth. . 603
PASSIMIPISS SCD RE ER 602
T. musculi {Ctenopsylla) Dugès. 599
Tpseudagyntes Baker. MN" 605
LPO O LUNA DEEE ST 602
Xestopsylla Baker /£chidno-
DRÉGO)FEMESERTE ATARI TETE 607
620 ©. TIRABOSCHI — ÉTAT ACTUEL DU VÉHICULE DE LA PESTE
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION .
I. — Les RATS Er LES PUCES CONSIDÉRÉS COMME AGENTS PROPAGATEURS DE
LA PESTE.
A) Les Rats et 1 Sous
B\ Les Puces . rie ROME
a) Observations Didermoloe ques .
b) Expériences de laboratoire
IT. — DISTRIBUTION ET MOEURS DES RATS .
II. — MORPHOLOGIE ET BIOLOGIE DES PUCES.
IV. — Espèces DE PUCES OBSERVÉES SUR LES RATS .
V. — Les PÉDICULIDÉS ET LES ACARIENS PARASITES DES RATS.
CONCLUSIONS. à
Index bibliographique.
Tableau synoptique des espèces de Dites
Index des Rats, des Souris, etc. et des es ie asie 4
Index des espèces de Puces. Synonymes .
LESIONT POLMONARI
PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI ©
PER
il Dott. ALESSANDRO SANTICCHI
Rimaste troppo tempo nel dominio della pura Zoologia o della
pura Patologia non tutte le lesioni elmintiche furono' guardate
nell’intima loro natura e troppe questioni vi si riannodano, spesso
ingrossate senza reale motivo. Essendomi proposto il compito di
una revisione di alcune di queste, mi sia permesso di esporre nel
presente lavoro i risultati desunti da un coscenzioso studio della
letteratura, e le riflessioni che ho falto dopo che ho potuto diret-
tamente studiare dei casi di invasioni zooparassitarie. Mi limito
specialmente a riferire sulle modificazioni prodotte sui tessuti
degli Strongili, in specie nel polmone, facendo prima una esposi-
zione riassuntiva delle conoscenze desunte dalla letteratura con
qualche mia propria riflessione ed i risultati delle ricerche che ho
fatto direttamente anche su di aleuni casi.
Della strongilosi polmonare.
Sotto questo nome come sotto quello di polmonite verminosa, di
bronchite verminosa si indica la malattia dovuta a dei parassiti (Ne-
matodi) appartenenti al genere Strongylus : spesso, nei casi pit
gravi, Si aCCoMpagna à macie Oo à una vera cachessia. Si à creato
anzi l’appellativo di strongilosi a comprendere un quadro nosolo-
gico particolare indotto da questi parasiti. Moltissimi animali ven-
gono attaccati ed in modo particolare gli Ovini e Suini; in minor
erado i Bovini, Equini e Roditori. S'indicano come cause di diffu-
sione i pascoli umidi, le pioggie frequenti. Indubhiamente la ma-
lattia si propaga per dispersione delle uova eliminate dai Vermi :
vedremo che sulla maniera con la quale questa dispersione avviene
regna tutt'altro che accordo, anzi come avvenga non è noto con
(1) Dall'Istituto di Anatomia comparata e Zoologia dell’ Università di Perugia,
diretto dal prof. Vincenzo DIAMARE.
622 . A. SANTICCHI
sicurezza che per taluni speciali Strongilidi. Si pud credere che
l’espulsione delle uova avvenga mediante i colpi di tosse e che le
materie emesse dalle narici costituiscano quindi il mezzo di propa-
gazione, di diflusione. Ma vi sono osservatori contrari a questa
credenza. Quello che è sicuro è la presenza di Vermi adulti nell'appa-
rato bronchiale; le uova emesse da questi possono scendere fino ai
polmoni, negli alveoli, segmentarsi e dare origine a degli embrioni,
producendosi cosi processi morbosi più o meno gravi e modifica-
zioni istopatologiche differenti, nel polmone (bronchi, alveoli, tes-
suto interstiziale).
Ma quello che è piu, come apparirà da uno sguardo complessivo
e critico dei casi descritti dalla letteratura, e dalle mie personali,
osservazioni, Col variare della specie e dell'ospite e secondo il grado:
dell’invasione varia la sintomatologia, ossia la entità e la natura
delle modificazioni del tessuto, dell'apparecchio bronco-polmonare
come l’essenza stessa delle singole lesioni bronchiali e polmonari,
per cui potrà essere giustificato ora l’appellativo di polmonite o
bronco-polmonite verminosa o tisi verminosa, dato alla malattia.
Varie sono le specie di Strongili che noi troviamo nel polmone.
Le specie che atfliggono 1 nostri più comuni animali domestiei e che
quindi offrono uno speciale interesse dal punto di vista Veterinario
sono; per il Cavallo e l'Asino lo Strongylus Arnfieldi) :nei Bovini lo
Strongylus micrurus e meno frequente lo Strongylus pulmonalis :
negli Ovini lo Strongylus filaria che vive nel parenchima polmo-
nare; nei Suini lo Strongylus paradoxus; e meno frequente lo:
Str.rufescens ; nel Camello come negli Ovini lo Strongylus filaria ;
nei Cani lo Strongylus vasorum ; l'Ollulanus bicuspis nel Gatto come
pure lo Strongylus pusillus ; nel Coniglio e Lepre lo Strongylus com-
mutatus.
Riassunto della letteratura sulla entità delle
alterazioni polmonari.
La presenza ed i movimenti di questi embrioni e dei Vermiadulti
nei bronchi producono irritazione ed inflammazione negli alveoli
Avremo quindi maggiore secrezione di muco ed anche di pus per
concomitanti invasioni bacteriche (piogeni). Il tessuto in corrispon-
denza dei vermi ed embrioni viene impregnato da essudato che
determina auche la sua impermeabilità all'aria atmosferica.
LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 623:
Secondo Neumann all’autopsia noi troveremo tutte le lesioni
dell'asfissia congiunte à quelle della cachessia, nei casi avanzati :
nel pericardio troveremo sierosita. I bronchi (nella bronchite) pre-
senteranno dilatazioni sacciformi a volte considerevoli e raccolte di
sierosità più o meno purulente. Bugnion secondo la natura delle:
lesioni distinse in tre ordini le forme del processo di pneumonite
verminosa :
1° La pneumonite lobulare (dovuta a Strongili adulti nei bron-
chi).
29 La pneumonite diffusa (dovuta alle uova ed agli embrioni ris-
contrati nel parenchima polmonare e che realizzano quanto Bol-
linger aveva chiamato pneumonite essudativa.
3° La pneumonite nodulosa 6 pseudo tubercolare nella quale le
uova degli embrioni occupano punti circoseritti dal parenchima ;
questa forma è la più comune. Ë caratterizzata da focolai distinti
d'apparenza tubercolare ; questi focolai possono assumere il carat-
tere caseoso e subire l’infiltrazione cretacea. Ne sono occupati in
modo particolare i bordi del polmone. Le uova depos te dalle fem-
mine negli alveoli polmonari, danno origine a questi focolai, ed
a fenomeni infiammatori speciali, ad infiltrazione delle pareti degli
alveoli di elementi embrionari. Dopo la schiusa gli embrioni di-
venuti liberi provocano un'irritazione molto più viva ed una pneu-
monite miliare. Tale affezione quindi non va assomigliata alla tu-
bercolosi, come Colin aveva pensato, nè le va conservato il nome
di etisia verminosa che sovente le vien dato, poichè nè la sintoma-
tologia, ne l’anatomia patologica lo giustificano (Neumann).
E notevole ed interessante rilevare la molteplicità degli aspetti e
la diversa natura delle lesioni nei casi illustrati dalla letteratura.
Secondo gli animali, secondo la specie di Strongilo occorre un qua-
dro necroscopico talora assai diverso. E vedremo, sulla base di
uno sguardo d'insieme sulla letteratura che l'affermazione di Neu-
mann, per lo meno dal lato istopatologico potra essere in parte
troppo rigorosa.
| parassiti possono soffermarsi nelle prime vie, ossia rinvenirsi
forse in grado iniziale nei bronchi solamente. Cosi Frank-Nicholls
trovd all'autopsia la trachea ed i bronchi pieni di piccoli Vermi
aventi due pollici di lunghezza. Camper in una epizoozia di Vitelli,
osservû che mentre questi perivano, le Vacchi invece ed i Cavalli
524 A. SANTICCHI
che pascolavano negli stessi stessi prati erano rispettati. All'esame
necroscopico trovô la trachea quasi occupata completamente da
Strongili mentre non esistevano nelle vescicoli polmonari.
All'inverso Vigney trovo degli Strongili fino alle ultime ramifi-
cazioni dei bronchi. Morier riporta che in un cavallo il lato destro del
polmone aveva alla sua superficie, entro la pleura polmonore ed il
tessuto stesso di quest'organo, una quantita di piccoli Vermi fino
agli ultimi ramusco!hi dei bronchi : non esistevano nelle grosse
divisioni, nè nel tessuto stesso dei polmoni. La membrana mucosa
invasa da Strongili é sede di una viva infiammazione : la sua su-
perficie è qua e là rossa, punteggiata ecchimosata : il suo tessuto
è in dei punti ulcerato. Nella mucosa dei grandi bronchi esistono
anche dei rilievi, delle borse formate da nidi degli Strongili. In
fine, parti più o meno grandi di parenchima sono epatizzate ed i
polmoni sono in generale enfisematosi.
Chausset poi nei polmoni e bronchi di Porco, non trovo lesioni
patologiche notevoli. Modeer osservo Vermi dello stesso genere
(Strongylus paradoxus) nei bronchi del Porco : e soggiunge di averli
trovati allo stato sporadico. Ercolani dice che « non è raro trovare
in vecchie Pecore specialmente in estate vari tubercoli di sostanza
gipsea o calcare, molti dei quali sono cavi, e nei quali non si ha
piu traccia aleuna di Strongili ». Piot nel Camello trovo le lesioni
della bronco-polmonite.
Nei Bovini lealterazioni sono simili a quelle dei Montoni : visi ris-
contra lo Strongylus micrurus e meno ditrequente lo Srr. pulmonalis.
Di particolare interesse dal punto di vista speciale delle lesioni
prodotte dagli Strongili ed in generale per il parassitismo (ossia
dal punto di vista dei rapporti reattivi Îra ospite e parassita, quale
- esso sia) sono le osservazioni di neoplasie di granulomi e tuber coli
provocati da questi vermi.
Gia Vulpian vide un gran numero di Strongili (Strongylus para-
doxus) nei piccoli bronechi di un Maiale di sette mesi e nei polmoni
di questi numerosi tumori che defini epiteliomi. Gratia, nel Porco,
trovô parecchie volte la pneumonite verminosa sotto forma di
pseudo-tubercoli aventi la più grande analogia con quelli che
accompagnano nel Montone la presenza dello Strongylus rufescens ;
queste nodosità della bronco-polmonite sono essenzialmente costi-
tuite da endoalveolite e da endobronchite, in focolai limitati.
LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 625
Anche prima Osler parla di bronchite verminosa nel Cane con
carattere di tubercolosi : il parenchima gli stride sotto il coltello
quasi contenesse sabbia come nei casi di granulomi calcificati nell’
Uomo. Osilser perd non ha dato un esame istologico degno di
rilievo.
Nel Gatto fu poco studiato, se ne occuparono Bugnon e Müller
superficialemente. Ebstein e Nicolaier descrissero nel rene veri tu-
bercoli provocati da uova di Strongili. Ma Cadéac osservd nel pol-
mone di Gatto delle granulazioni bianco-giallastre della gros-
sezza di un grano di miglio a quella d’un pisello; tali neoforma-
zioni, egli dice, non hanno nulla di simile con la tubercolosi. Bou-
chard ed altri trovarono nell'Uomo larve di parassiti in trachea e
laringe : non determinarono la specie.
Ma venendo ai lavori piu recenti Laulanié osservd nel Cane
(Strongylus vasorum) che i polmoni, nella loro parte inferiore, pre-
sentano una zona di tessuto grigiastro, compatto, pesante, formato
da granulazioni che all'esame microscopico offrono la stessa strut-
tura di neoformazioni tubercolari costituite da tre strati :
1° Un inviluppo esterno dato da cellule embrionali.
20 Da uno strato mediano di cellule epitelioidi.
30 Di una cellula gigante centrale contenente un uovo ed un
embrione.
Laulanié rileva anche che il polmone presenta lesioni di bronco-
polmonite catarrale con trombosi arteriosa, In conclusione Laulanié
osserva la formazione di veri tubercoli, come nella tubercolosi
bacillare e distingue anzi due tipi formativi gia da Kiener distinti
nella tubercolosi bacillare, cioè esogeno ed endogeno rispetto ai
vasi sanguigni.
Il Brusasco trovd nella bronchite verminoa dei Bovini che il
parenchima polmonare è impregnato di sierosità e che dal lume
dei bronchi esce un muco spumoso sanguinolento, purulento.
Il Mazzanti dice di aver trovato nel Coniglio (Strongylus commu-
tatus Diesing) tratti di tessuto disseminati da embrioni liberi e
contenuti ancora nel guscio. Si rinvengono ai bordi e alla periferia
del polmone sotto forma di noduli. Érimarchevole che la parete
interalveolare interposta ai due contigui alveoli e racchiudente uova
subisce un certo grado di atrofia. I noduli sono più o meno estesi e
gli alveoli o bronchi sono iperemici e alla periferia vi è una fitta de
Archives de Parasilologie, XI, n° 4, 1907. Al
626 A. SANTICCHI
estesa areola infiltrata da elementi giovani di nuova formazione.
Mazzarelli, poi, nel Gatto trovd che nelle sezioni del polmone vi
erano lunghi tratti completamente infiltrati e gli alveoli ancora
esistenti erano ocupati da uova (uno per alveolo) in via di segmen-
tazione in tutti gli stati di sviluppo, e addirittura da embrioni. I
blastomeri erano in ottimo stato e con mitosi evidentissime. Gli
alveoli nei quali sono le uova non mostrano alcuna alterazione salvo
chè una maggiore dilatazione ed assottigliamento della parete
(atrofia da compressione)la quale perd non presenta alcuna traccia
di desquamazione come osservd anche il Mazzanti nella pneumo-
nite da Strongylus commutatus del Coniglio domestico. Se gli
embrioni sono piccoli gli alveoli si comportano analogamente
a quelli che contengano le uova. Se sono di dimensione maggiore
gli alveoli sono circondati da molti leucociti tra i quali predomi-
nano quelli a nucleo polimortfo. | leucociti poi con l'accrescersi
dei parassiti invadono l'alveolo e l'accumolo loro intorno ad esso
diventa notevole soprattutto quando il parassita comincia a spos-
tarsi per migrare verso il lume dei piccoli bronchi. Cid trova ris-
contro in quanto ha osservato il Mazzanti nel Coniglio.
Giunto ai piccoli bronchi il parassita si presenta circondato da
leucociti provenienti da un'attiva diapedesi e la sua cavità appare
riempita da un contenuto mucoso purulento, ricco di elementi in
degenerazione, i quali sono tanto leucociti che, insieme col Nema-
tode, hanno irrotto nel bronco stesso, quanto cellule derivate da
un'attivo processo di desquamazione dell'epitelio bronchiale.
Molti alveoli in seguito ai movimenti del parassita e special-
mente quelli dai quali i parassiti sono venuti fuori si trovano del
tutto infiltrati, e dove gli elementi non riempono le cavità si scorge
qualche traccia di essi : in tali punti vedremo masse quasi omo-
genee colorate in rosso-violaceo dal carmallume. Un gran numero
di leucociti li circonderà e formerà un focolaio che sta in continua-
zione coi rimanenti elementi che infiltrano la massa polmonare :
alcune volte contengono qualche uovo in segmentazione ed anche
qualche embrione, perd puo darsi anche il caso che non conten-
gano nè gli uni nè gli altri. I nuclei di questi elementi sono note-
volmente alterati; possiame trovarvi anche granuli di natura nu-
cleinica. Questi elementi non sono altro che leucociti in degenera-
zione ipercromatica. Si trovano anche piccole masse fra alveolo ed
LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 627
alveolo il significato delle quali é la loro origine non & facile a
dirsi.
Attenendosi a quanto dice il Laulanié a proposito di tubercoli
in degenerazione che si osservano nella Strongilosi del Cane (Str.
vasorum) Si tratterebbe di un essudato reattivo di natura probabil-
mente fibrinosa.
Ignotoé il ciclo dello Strongylus pusillus ma osservando le migra-
zioni che fanno gli embrioni verso il lume dei bronchi possiamo
ritenere analogamente a quanto lo Schegel ha affermato per lo
Strongylus capillaris della Capra, che per le vie respiratorie stesse
i giovani nematodi vengano assieme al muco rigettati fuori dal
loro ospite. Non sembra poi che essi quatunque risalgano per le
vie respiratorie che vengano eliminati per le vie nasali come a pro-
posito dello Strongylus filaria della Pecora, aveva ritenuto nel
1843 l'Ercolani. Ed infattiil Piana ed il Renzi nel mattatoio di
Imola mai ritrovarono embrioni nelle mucosità delle cavità nasali,
siebbene negli escrementi. Anche nel caso presente nell'autopsia
del Gatto studiato, inutilmentte il Piana cercd gli embrioni dello
Strongylus pusillus nelle mucosità della cavità nasale : furono invece
ritrovati nel retto.
Con le feci avverrebbe l’infezione nell'ambiente : e Mazzarelli
serive: « In questo reperto concordemente a quanto l'Ebstein ed il
Nicolaier affermano nulla fu ritrovato di quanto trovasi nella tu-
bercolosi bacterica e quindi non si hanno i cosi detti pseudo tu-
bercoli o tubercoli elmintici », essendo in ci d’accordo con Lau-
lanié il quale pure ossendo stato il primo a descrivere veri tuber-
oli nel Cane indica che nel Gatto non ha trovato altro che focolai
di polmonite purulenta miliare che non hanno somiglianza di
sorta con i tubercoli.
Mazzarelli soggiunge di non aver trovato cellule giganti ed ele-
menti epitelioidi nè attorno agli embrioni, nè attorno alle uova.
ma à torto crede che quanto è stato descritto per tubercolo tanto
nel Gatto'quanto in altri, non sia che una massa data dall’essudato
già notato e scambiato assieme agli elementi che contiene per
un'accumulo di cellule giganti, ed i leucociti che li circondano
per cellule epitelioidi.
628 A. SANTICCHI
Considerazioni critiche.
Si è fatta a bello studio questa relazione particolareggiata. Le
conclusioni che se ne ricavano sono:
1° Natura diversa delle alterazioni secondo le diverse specie e
secondo gli ospiti.
20 Diversa sintomatologia secondo i gradi dell'invasione e secon-
do infezioni bacteriche.
90 La tisi verminosa, in tutti i Casi, non è un espressione Cor-
retta anche quando le lesioni hanno apparenza di lesioni tuber-
colari. Trattasidi una cachessia, di una macie generale data anzitut-
to dalle condizioni deplorevoli delle funzioni respiratorie, ma
non & afflatto paragonabile all'avvelenamento'specifico del bacillo di
Koch. Ma quel che é più i focolai hanno una sola grossolana rasso-
miglianza con i focolai tubercolari, che l'esame accurato facil-
mente distrugge.
40 Ë questione perd grave ed importante se si debba credere op-
pure no che la strongilosi possa presentaïsi in differenti casi com
le note anatomo-patologiche della tubercolosi: se cioè esistano:
veri tubercoli da Strongili.
Su quest'ultimo caso é bene che mi soffermi:
La letteratura più recente tende ad escluderla; anzi abbiamo
veduto addirittura come si creda che siasi preso un granchio a secco-
scambiandosi‘zone necrotiche o essudato con nuclei con cellule gi-
ganti. Per trattare questa questione é necessario allargare alquanto-
1 limiti della nostra indagine.
Nella letteratura sui Vermi parassiti dei tessuti animali e spe-
. cialmente dell'Uomo si trovano osservazioni sufficentemente nume-
rose di tubercoli elmintici. Preziose notizie si trovano in proposito-
nello seritto di R. Blanchard (1895).
Dalle indagini di medici giapponesi Miura, Otani, lamagiva, su
lesioni riscontrate in individui affetti da distomatosi polmonare-
(Mesogonimus Westermanni) risulta anzitutto che la causa delle-
epilessie jaksoniane presentate dagli infermi sono cisti del cervello-
sulle cui pareti si trovano uova di parassiti in veri tubercoli con
cellule giganti riferibili alla forma fibrosa di Virchow : si trovano:-
anche nella sierosa dello spazic di Douglas. Kartulis li ha riscon-
LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 629
trati nel fegato di individui affetti da bilarziosi (Schistosomum hæ-
matobium).
Laulanié, come vedemmo, parla di veri tubercoli con uova di
Strongili, cosè Ebstein e Nicolaier. La questione se i Vermi
possono dar luogo a tubercoli fu ripresa da altri (Diamare) a pro-
posito di un caso di vera ed estesa tubercolizzazione di una Tarta-
ruga. Diamare descrive infatti nella sierosa intestinale, nel pan-
creas etc.,la presenza di formazioni nodulari con veri tubercoli
con uova di Distoma (Mesogonimus constrictus). Un esame poi
più accurato fece rilevare che i noduli erano dilatazioni aneurisma-
tiche dei vasi della sierosa intestinale e del pancreas : nel pancreas,
nella tonaca muscolare e submucosa dell’intestino i tubercoli erano
numerosi e davano l’aspetto di una tubercolosi miliare. L'autore
potè dimostrare che il Verme viveva nel cuore e che le lesioni
erano dovute a soffermamento di uova trasportate col sangue
nei vasi. Le tasche aneurismatiche erano gruppi di tubercoii
svoltisi nella parete vasale con partecipazione del tessuto con-
nettivo perivasale : i tubercoli miliari della tonaca muscolare,
dell'intestino e del pancreas si erano svolti in seguito alla totale
occlusione dei capillari: si erano sostituiti ai vasi. Le cellule
giganti erano molto sviluppate e spiegavano un’azione distrut-
trice evidente sugli embrioni e sulle uova, il cui guscio rima-
neva ridotto a minime goccioline: non mancava all'esterno
una zona linfogranulosa. Cid fu confermato dalla comparsa di
uno seritto di Park il quale vide tubercoli caratteristici, ed anche
prove di azione fagocitaria in tubercoli di Bovini ed Ovini affetti
contemporaneamente dalla Spiroptera reticulata, Discomyces e dal
Bacillo tubercolare. Da questi fatti risulta evidente che dei Vermi
endoparassiti possono provocare la formazione di veri tubercoli.
Miura, Otani, lamagiva parlano anche di fasi degenerative del
£Tranuloma : alcuni di degenerazione caseosa, che altri perd negano
{Ebstein e Nicolaier, Diamare).
Per quanto riguarda gli Strongili le figure e la descrizione di
Ebstein e Nicolaier non lasciano dubbio alcuno chesi tratti di pic-
coli tubercoli simili a quelli prodotti dal germe tubercolare, Ma
come del resto fu già da altri notato (Diamare) non deve recare
meraviglia che vermi possano indurre questa neoplasia giacchè si
possono ottenere tubercoli tipiei con le tre tipiche zone con ia
630 A. SANTICCHI
semplice introduzione di corpi stranieri nel circolo (V. Schrün)
e quandosi rifletta che questa neoplasia à semplicemente l'espressione di
una intensa reazione del tessuto verso l'agente invasore, qualunque
esso sia, Verme, Bacillo, frammento di sughero o di ostrica (Cornil e
Toupet).
Queste constatazioni collimano d'altro canto con legeniali dimos-
trazioni di Metshnikov circa la natura ed il significato delle cellule
giganti nel tubercolo e con quelli che gli studi di Ziegler e di altri
già posero in rilievo nel processo di riassorbimento dei corpi estra-
nei nell’organismo e dei tessuti stessi divenuti corpi stranieri per
necrosie necrobiosi. Ma la questione che si offre a noi è se proprio
nel polmone risulti possibile la formazione di tubercoli per opera
di Strongili.
Le osservazioni di Laulanié attestano che cid pu verificarsi e
propriamente nel Cane, dubbio che sorgeva già dalle osservazioni
di Osler. In tutti i casi devesi osservare che la Strougilosi del Cane
come ce l'ha descritta Laulanié è di origine vasale : ossia igiovani
parassiti e leuova invadono i canali vascolari ed i focolai tubercolari
si svolgono precisamente qui come nei casi citati di pseudo-tuber-
colosi zooparassitaria ematogena.
lo tenterei di spiegare il fatto nel senso che, imprigionati nel
letto chiuso dei vasi, agendo da emboli e coinvolti e dimoranti
lungo nei punti trombosati, durante il processo di risoluzione del
trombo, pud qui organizzarsi il tubercolo, senza dubbio favorito da
unaimmobilità dei parassiti, comea un dipressonella formazione di
altre neoplasie elmintiche (trichinosi, tricosomosi) (Diamare).
Viceversa questo non è possibile nel polmone in eui i vermi atti-
vissimi e mobili nelle dilatazioni terminali dei canali bronchiali
(alveoli) devono uscirne per raggiungere altra sede per completare
il loro sviluppo. Essi non possono che indurre qui solo alterazioni
alveolari ed un'’infiltramento più o meno spiceato che per noi rap-
presenta, in essenza, l’acme di un'infiammazione, la quale, solo
per una susseguente infezione di piogeni, traducesi in una bron-
chite purulenta.
Penetrando nel tessuto interstiziale per rottura di alveoli, se
eventualmente possa verificarsi la organizzazione del tubercolo, è a
discutersi.
Sembra perd che cid possa accadere solo di rado.
LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 631
Relazione riassuntiva su di alcuni casi osservati.
Per formarmi un concetto «de visu » dei rapporti fra gli Stron-
gili e polmone io ho direttamente esaminato dei casi tipici nei
seguenti animali : Delfino, Pecora, Porco, Lepre.
DELrINO (Delphinus tursio). — 11 Prof. Diamare, in un Delfino
sezionato a Napoli nell’estate dello scorso anno, ha trovato il pol-
Fig. 1. — Apparenza macroscopica del taglio traversale di lobo polmonare di
Delfino con chiazze ardesiache separate da esili tratti di tessuto polmonare
normale; le chiazze ardesiache sono lobuli infiltrati di leucociti e contenenti
embrioni (Diamare). -
mone iperemico, di color rosso intenso, duro, in massima parte
epatizzato. Sul taglio tutto il polmone, specialmente la metà si-
nistra, aveva un caratteristico aspetto : era marezzato da chiazze
rosse e grigio ardesiache (fig. 1). Si notava che le chiazze arde-
siache avevano per lo più una relazione con la sezione di un bron-
chiolino.
Nel cavo dei bronchi di medio calibro egli trovo molti Vermi
(Nematodi) identificati per Pseudalius. Come risulta da un accurato
esame della letteratura le lesioni provocate dallo Pseudalius (1)
(4) Pseudalius. — 11 genere Pseudalius Dujardin differisce dal genere Stenu-
rus, a cui è molto affine, per la coda corta e puntata della femmina, e la coda
bifida dei maschi i cui spicoli sono contornati ma non saldati. Sono Nematodi
vivipari.
632 A. SANTICCHI
(forma affine allo Strongilo) non sono stati studiati ancora da nes-
sun autore, per cui non sarà inutile l'espusizione in breve dei risul-
tati delle osservazioni fatte su questo caso dal prof. V. Diamare
tanto più che quanto egli ha osservato si riannoda cosi da vicino
alla questione della bronchite verminosa in generale, oggetto che
ora Ci preoccupa maggiormente. Riporto la relazione favoritami
dal prof. Diamare con le figure che egli stesso ha eseguite.
00. et
°e
Fig. 2. — Lesioni di un medio bronco dovute a parassiti adulti à mucosa infil-
trata, sollevata, desquamata, con epitelio quà e là necrotico : sottomucosa in
filtrata con piccoli vasi ectasici : leucociti nel lume, essendo passati anche
oltre l’epitelio {Diamare).
All'esame macroscopico come dissi, il polmone nel suo stato
totale gli siè mostrato molto alterato.
In alcuni punti appare enfisematoso, in pochi punti normale.
Sezionandolo, sulla superficie di taglio si trovano nei bronchi
dilatazioni sinuose con scarso essudato. Le aree grigiastre (fig. 1-3)
Sono territori polmonari fortemente infiltrati con neoformazione
di connettivo con pigmento : le aree rossastre sono dovute a tratti
di tessuto polmonare notevolmente iperemici, qua e là infiltrati.
LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 633
All'esame istologico gli alveoli sono notevolmente dilatati, la
parete di questi é talmente assotligliata che con difficoltà se ne
puù riconoscere l'epitelio; in altri il setto interalveolare è rotto.
Ma il fatto caratteristico è che essi sono notevolmente infiltrati
Fig. 3. — Struttura d’una delle chiazze ardesiache : sono lobuli infiltrati in rela
zione con un bronco di piccolo calibro in cui si trovano parassiti adulti e la
mucosa è turgida. Qua e là in seno all’area si trovano infundiboli dilatati am-
polliformi (Diamare).
riempiti di leucociti specialmente polinueleati (fig. 3e 4)e larve del
parassita, e percid colorabili intensamente : fra essi si trovano
alveoli enfisematosi, ancora più rari sono gli alveoli normali. Qui
infine si pud riassurmere dicendo che si tratta, èome osservarono
il Mazzanti nel Coniglio, il Mazzarelli nel Gatto di un fortissimo
infiltramento leucocitario con scomparsa di alveoli. Le enorme
infiltrazioni devonsi unicamente ai movimenti del parassita. È in
Go A. SANTICCHI
essenza un'intensa flogosi provocata da embrioni nei territori
alveolari in relazione con i bronchi in cui trovasi il parassita
adulto. |
La mucosa dei piccoli bronchi ove risiedono i parassiti era ipe-
remica e turgida all'esame macroscopico. All'esame microscopico si
nota una forte replezione dei vasi (fig 2) : quà e là l’epitelio è sfal-
dato, sollevato e necrotico (fig. 2 e 5). Nelle chiazze di epitelio ne-
crotico non è riuscita possibile colorazione di sorta nè del proto-
plasma nè del nucleo : sono attraversati da leucociti che spiecano:
)
Fig. 4. — Contenuto degli alveoli infiltrati (da un preparato per raschiamento) :
Embrioni di Pseudalius e leucociti specialmente polinucleati e cellule epite-
liali. Colorazione con carminio alcoolico di Grenacher (Diamare).
in essi : leucociti stanno pure nel lume (fig. 5). Infine Diamare:
rileva le note di una bronchite circoscritta, di una intensa flogosi
provocata da questi corpi estranei nei bronchi, e di una vera
prneumonite diffusa.
PEcoRA. — Il polmone dall'aspetto generale si mostra alterato.
Qua e là è enfisematoso, in molti punti è normale, in altri è di
colore bleu-scuro, ed anche grigio-sporco : il suo volume è aumen-
tato. Alla palpazione sentiamo noduli più o meno consistenti della.
grandezza d'un'avellana, aleuni dei quali sono calcificati, stridono,
sotto il coltello, altri si mostrano cavi. La presenza degli Strongili.
in questi noduli non si riscontra. I bronchi sono dilatati, for-
mano delle sinuosità, ed in questi troviamo veri gomitoli di vermi
(Strongylus filaria) mescolati a muco-pus. I focolai si presentano:
LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 635
in generale sotto forma più che di tubercoli, di noduli di varia:
grandezza : si trovano in modo particolare ai bordi del polmone, e-
sono piuttosto supertficiali.
All'esame istologico le alterazioni che noi riscostriamo sono si-
mili a quelle già state descritte per il Delfino. Solo perd mentre:
nel Delfino l'estensione è enorme in quanto tutto il polmone &
RAILS
à
&:
D
2
A
Fig. 5. — Tratto di mucosa bronchiale con enorme ectasia vasale e replezione
sanguigna ; sottomucosa infiltrata, epitelio alterato, desquamato (Diamare).
affetto, qui invece il processo è localizzato, e solo qua e là si ris-
contrano leggere invasioni nel parenchima. Negli alveoli troviamo:
notevole dilatazione, e rotture in molti punti si notano. Qua e là
uova ed embrioni del parassita, che danno luogo ad una spiccatis-
sima infiltrazione leucocitaria; in alcuni punti gli alveoli sono
conservati, ma le loro pareti sono sensibilmente assottigliate (fig. 6:
et 7). Nel lume di brochiolini si trova il parassita adulto, che visto
in sezione trasversale, presenta una cuticola fortemente colorata
all'interno, una più intensa rifrangente alla luce : sotto la cuticola
troviamo grandi cellule con dei prolungamenti a mo'’di ciglia vibra-
636 A. SANTICCH
tili e che costituiscono la ben nota muscolatura cutanea di questi
vermi (celomiaria). Intensa in tali punti è l'infiltrazione. Anche
ON
Ë 25
Fr 1
Fig. 6. — Apparenza microscopica di un lobulo di polmone di Pecora con bronco
di medio calibro : enorme infiltramento, invasione considerevoie di leucociti,
alveoli notevolmente sfiancati.
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28 ea
Fig. 7. — Lobulo di polmone di Pecora con estesa infiltrazione: presenza del
parassita in un alveolo ed in alcuni punti anche di embrioni.
qui queste lesioni si devono unicamente ai movimenti del paras-
sita. T bronchi in vari punti, e specialmente ove sono gli embrioni,
LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 637
sono ostruiti in modo completo da essudato fibrinoso. In alcuni
appariscono piccoli noduli come nella peribronchite nodosa : in
altri il bronco é dilatato venendo ad assumere forma di ampolla.
L'epitelio è qua e là sfaldato.
Porco. — A prima vista il polmone presenta noduli di colore
rosso-scuro più o meno duri localizzati in generale nei bordi del
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Fig. 8. — Lobulo di polmone di Porco con alveoli infiltrati,
presenza di numerosi leucoelti e parassiti aduiti.
polmone. Il volume è aumentato, il polmone è enfisematoso in vari
punti. Nei bronchi troviamo raggruppati, affastellati quasi, nume-
_rosiparassiti, checoniloro movimenti hanno prodotto una note-
vole infiltrazoine.
All'esame microscopico troviamo notevole dilatazione degli
alveoli; rottura in più parti del setto interalveolare: qui infiltra-
zione diffusa ed intensa specialmente se vi è il parassita (fig. 8).
Negli alveoli ove sono le uova le pareti sono sfiancate e l'infiltra
zione e solo in alcuni punti sensibile. Cid dimostra come in realta
non si verifichi un movimento molto attivo delle larve per cui
l'infiltramento parvicellulare non é intenso. Talora nel connettivo
esterno alla cartilagine di un bronco si rileva marcata infiltrazione.
‘638 . A. SANTICCHI
In uno stato più avanzato del processo la dilatazione del bronchiolo
terminale è più spiccata, e le pareti dell'ampolla che ne nasce sono
spesse : del resto anche qui è notevole lo sfaldamento dell’epitelio :
‘più intensi sono i fenomeni consecutivi alla notevole flogosi svilup
patasi nei bronchi ove stanno i parassiti adulti.
LEPRE. — All'esame macroscopico troviamo chiazze di forte
infiltramento. All'esame istologico troviamo gli alveoli notevol-
Fig. 9. — Apparenza microscopica di un lobulo di polmone di Lepre, .
con notevole infiltrazione e presenza di numerosi embrioni del parassita.
smente dilatati : in dei punti il setto interalveolare è del tutto scom-
parso. In quelle zone ove troviamo maggior numero di parassiti
(Stongylus commutatus Diesing ?) l'infiltrazione è notevole. In altri
punti ove è limitato il numero dei parassiti, la parete è assottigliata
-e qua e là leggermente desquamata. Nulla addirittura è l'infiltra-
zione negli alveoli dove si trovano le uova; soltanto laddove trovansi
le larve troviamo leucociti che hanno invaso l’alveolo (fig. 9). A pic-
colo ingrandimento gruppi di alveoli infestati danno l’apparenza
-di una massa compatta seminata d'embrioni.
Riepilogo.
lo mi propongo di continuare lo studio comparativo delle alte-
razioni che la presenza di (Strongilidi » induce nel polmone, e
LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 639
specialmente di estendere la ricerca sulla strongilosi polmonare
ematogena, in connessione dei fatti desunti già da altri in altre
invasioni zooparassitarie.
Riassumo ora quanto ho ricavato dall’esame critico della lette-
ratura e dalle mieosservazioni, seb bene non molto estese. Aggiun-
go inoltre in questo riepilogo qualche dato di fatto o constatazione
emergente dall'esposizione fatta innanzi :
1° Le lesioni indotte nel polmone dagli «Strongilidi», nei Bovini,
Equini e Roditori sono completamente di natura irritativa ; solo
infezioni secondarie bacteriche complicano l'andamento delle
lesioni stesse.
20 Secondo la specie di Strongilidi e specialmente secondo l'os-
pice varia la reazione infiammatoria e spesso anche l'aspetto gros-
solano della malattia.
30 In tesi generale in relazione con la forma adulta del parassita
stà una bronchite in specie dei medi, e piccoli bronchi più o me-
no estesa: in rapporto con le uova e gli embrioni stà una flogosi
del polmone, d'ordinario una polmonite lobulare talvolta diffusa.
Carateristica è la forma nodulare à grossi nodi con centro cretiti-
çcato o calcificato del bordo polmonare di Pecora.
40 Essenzialmente la lesione consiste in una flogosi notevole del
tessuto con suoi postumi. Negli alveoligradi vari di infiltramento,
formazione di focolai in eui osservasi confluenza di territori infil:
trati, quindi formazione di nodi che in seguito a ritrazione cicatri-
ziale assumono aspetto differente, persino di tumoretti (Pecora).
50 Negli alveoli la desquamazione dell'epitelio è un fatto secon-
dario mentre questa nei bronchi s’accompagna al turgore vasale.
Non mi consta che si verifichi ipertrofia dell'epitelio stesso : ciù
che caratterizza la lesione alveolare è un infiltramento notevole di
leucociti specialmente polinueleati, cid che giustifica la qualifica
da darsi alla Strongilosi di malattia essenzialmente di reazione.
6° Nel a Strongilosi polmonare dei nominati mammiferi Costan-
temente manca la formazione di veri tubercoli. Le forme nodulari
molto piccole possono essere solo grossolanamente scambiate per
tali.
19 L'espressione di «tisi verminosa » non sarebbe qualificata
percid né anatomo-patologicamente, nè dal punto di vista fisio-pa-
tologico.
640 A. SANTICCHI
La macie, la cachessia degli animali dipende dalle gravi condi-
zioni del sistema respiratorio, tanto più gravi per il secondario
attecchimento di Bacterii spec. piogeni, e non hanno nulla a che
vedere con la cachessia indotta dal germe tubercolare, nella stessa
guisa che i noduli ed 1 focolai nulla presentano che ricordi la
lesione specifica di questo Schizomicete.
8° Ma se questo puÿ dirsi circa i sunnominati mammiferi altret-
tanto non sarebbe giusto applicare in tesi generale. Indubbiamente
(in modo speciale nei Carnivori) possono svolgersi processi polmonari
per opera di Strongili, à quali hanno tutti icaratteri istologici di veri
tubercoli. Sono tubercoli zooparassitari identiei a quelliconstatati da
numerosi Autori inlorno a vermi, Oo uova, o embrioni di vermi ap-
partenenti a Trematodi o a stessi Nematodi.
90 Analogamente qui la tubercolinizzazione del polmone è di ori-
gine vasale: trattasi di Strongilidi emoparassiti le cui uova 0 i cui
embrioni nei capillari previa occlusione determinano la formazione
di neoplasie identiche alla neoplasia prodotta dal Bacillo di Koch.
Gli autori che escludono la forma tubercolare evidentemente
non sono al corrente di questi fatti.
10° Risulta dalle indagine di Diamare che lo Pseudalius, forma
affine agli Strongylus, di cui finora non furono studiate le lesioni che
produce, provoca nel polmone di Delfino un processo infiammato-
rio, ma non iperplastico nodulare. Nel caso avuto in esame l'inva-
sione era straordinariamente estesa a tutto il polmone. Con la
bronchite dei medii e piccoli bronchi coincideva uno stato infiama-
torio acuto di quasi tutto il polmone per opera degli embrioni. Le
numerosissime aree di pneumonitelobulare (corrispondenti al ter-
ritorio di distribuzione del ramo bronchiale, in cui vivevano 1 pa-
rassiti adulti) coincidevano più o meno tra loro, separate solo da
scarsi tratti normali, enfisematosi (enfisema vicariante) derivan-
done una vera pneumonite diffusa.
Ringrazio sentitamente il Professore Diamare che mi fu largo
di consiglio ed aiuto in questo mio studio.
LESIONI POLMONARI PRODOTTE DAGLI STRONGILIDI 641
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p. 103, 1888. — La strongilosi polmonare. Ercolani, Giornale di veterinaria,
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NICHOLLS, An account of Worms in aime bodies. Philos. Transactions, XLIX,
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GRaTiA, Des pseudo-tubercules chez les animaux domestiques. Annales de
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GuiTTaAND, Bronchite vermineuse. Progrès vétér., p. 54, 1900.
KarrTuis, Üeber das Vorkommen der Eier des Distomu m hæmatobium Bilh. in
Unterleibsorganen. Virchow’s Arch'iv, XCIX, 1895.
YAMAGIWA, Ueber Lungendistomenkrankheit in Japan. Virchow’s Archiv,
CXXVIL p. LL6 456.— Beitrag zur Jackson’schen Epilepsie. Zbidem, CXIX, 1890.
LAULANIÉ, Sur une tuberculose parasitaire, du Chien. C. R. Acad. des Sc., p. 495,
1882. — Sur quelques affections parasitaires du poumon et leurs rapports avec
la tuberculose, 1884. Archives de physiol. normale et pathol., p. 507, 1884.
MazzANTI, Pneumonite verminosa nel Coniglio domestico. Moderno Zooiatro,
p. 105, 1892.
MAzzARELLI G. Sul parassitismo delle ‘‘ Strongylidæ ”. Milano, 1904.
MerscaniKxorr, Ueber die phagocytäre Rolle des Tuberkel. Virchow’s Archiv,
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MinGazzini, Ricerche sul parassitismo. Ricerche faite nel lab. etc, Roma, II,
p- 205-219, 1898.
MiuraA, Fibrôse Tuberkel verursacht durch Pasiteneier. Virchow’s Archiv, CXVI,
p. 310 et 317, 1898.
MüLzer, Deutsche Zeitschrift für Thiermed., XVII, 1891.
Neumann, Traité des maladies parasitaires non microbiennes des animaux
domestiques, Faris, 2' éd., 1892; cf. p. 569, 673, 574.
Piotr, La bronchite vermineuse épizootique du Chameau. Institut Egyptien,
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Prana, Notices biographiques. — XII. Gian Battista Ercolani. Archives de Pa-
rasitologie, V, p. 504, 1902.
Revnar, Bronchite vermineuse. Nouveau Dictionnaire de méd. et chir. vét.,
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Park, Animal and vegetable parasites associated with the produclion of neo-
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ScLeGEL, Archiv für prakt. Thierheilkunde, XXV, 1889.
ViGNEY, Observations sur le développement des Vers filaires dans les bronches
et dans le poumon. Mém. de la Soc. vét. du Calvados, I, p. 99, 1830.
Archives de Parasitologie, XI, n° 4, 1907. 42
TABLE DES ESPÈCES NOUVELLES
DÉCRITES DANS LE TOME XI
CESTODES
Pages
TENTOIBIANChATATEP MOINE RE NN EEE RE 379
DIPTÈRES
TAbLONUS AB ESS SULCOULC RE EN ANT ANERNEEER EE R nr Nes TES ST RO 473
TBPlancharat SUrCOUL NE ENNEMI LENS ORDER RE ER 473
TABLE DES MATIÈRES
R. BLaAncHARD. — Le paludisme à Madagascar. . . . . . . . . à
R. BLANCHARD. — Parasitisme du Dipylidium caninum dans l'espèce hu-
maine, à propos d’un cas nouveau (avec 15 fig. dans le texte) .
R. BLancHaRD et M. BLariN. — Immunité de la Marmotte en hibernation à
l'égard des maladies parasitaires . . . . . . . se
M. Bzarnin et R. BLancHaRD, cf. R. Blanchard et M. Blatin.
G. Boupix. — Les variations morphologiques du Microbe de la tuberculose
(avec 14 fig. dans le texte) .‘. . . . . Rene DR A EN CT Le
B. Gazzi-VaALErI0. — Notices biographiques. — XVIII. Prospero Sonsino
(avec 2 portraits et un fac-simile dans le texte). . . . . . . . . . .
Fr. JANIN. — Recherches sur la Sarcosporidie du Mouton {avec 3 fig. dans
leite tete ip ID) ERREUR En EE A CAN TE SE
Ch. Joyeux. — Recherches sur le pouvoir antibactérien de l’extrait de Ces-
LOdES ND IEUE VAE LAVAL) DNS ART TRS ER PU D Pr ÉD EEE
M. LANGERON. — Notices biographiques. — XVII. Fritz Schaudinn, 1871-1906
(avec 1’fac-simile dans letexte et pl. NII) d'o 000 06 0
P. MoLa. — Osservazioni sul tegumento (ectoderma) dell’ Anchistrocepha-
USM OC RAT SRU AE) DIN EE EE
P. Mora. — Una nuova Tenia della Talpa (pl. IV) . . - . . . . . . . : .
P. Née. — État actuel de la question du favus humain. . . . . . . . . .
L. G. NEUMANN. — Notes sur les Ixodidés. — V (avec 14 fig. dans le texte).
Al. SanriccHi. — Lesioni polmonari prodotte dagli Strongilidi (avec S fig.
J'ANSMICILCXTIE) CR TR BD PAU STAR !
J. Surcour, — Note sur des Tabanides de la côte occidentale d'Afrique
CD RENE) Pr PAS ANNE PS A NE ER RE ete LE SN Le AS
C. TirABoscnr. — État actuel de la question du véhicule de la peste (avec
15 fig. dans le texte). . . . . . ACER EL OMR RE Ie
M. Trurri. — Hyphomycète du type Achorion déterminant chez l'Homme
deSRlÉSIONSEICNOPhVLOITES EE AN EEE
Revuelbibliographique 1:00 D NS Ce Em ent le
M. Braun, 475. — KR. Dœrr, 478. — E. Jeanselme, 476. — P. Kästner,
478. — A. Laveran, 477. — A. Layet, 480. — C. Mense, 475, — W. H. Park
and A. W. Williams, 476.
Pages
185
439
361
644
TABLE DES MATIÈRES
Notes et Informations... . . . . . . . . . . . .. 343, 4S1
R. BLANCHARD. — La chaire d'Histoire Naturelle médicale de la Faculté
de Médecine de Paris, 481. — La Parasitologie à la Faculté de Médecine
deParis, 492. — Institut de Médecine coloniale, 513. — Ecole de Médecine
tropicale de Lisbonne, 526. — Ecole de Médecine tropicale de Bruxelles,
528. — Une chaire de Parasitologie à la Faculté de Médecine de Lyon
(pl. X), 534. — Uné nouvelle chaire à l'Ecole de Médecine tropicale de
Londres, 534. — Est-ce la fin de l’I.M. C. ? 534. — Hommage au profes-
seur F. S. Monticelli (avec une fig. dans le texte et pl. VIII), 536. —
La lutte contreles maladies infectieuses, 537. — Prix Adolphe Mon-
binne, 540. — Souscription universelle pour une statue de Lamarck,
540. — Prix Barbier, 540.
R. BcancHarD. — Cysticercus cellulosae chez les indigènes d'Angola . .
M. BLariN. — Le Dulton Memorial ; une nouvelle chaire à l'Ecole de
Médecine tropicale de Liverpool. . . . . : . . . . RUE CT ARR
BouRNEvILLE. — La chaire de Parasitologie de la Faculté de Médecine
dePATIS ae RAR AN ES SE PE QE SPRL EE PLAN SE
R. W. FRENCH. — Ecole de Médecine-tropicale de Londres . .
P. J. Garcra. — La medicina tropical en la Republica Argentina; una
carta del Profesor Blanchard . . . . . .
Inauguration du monument de Nocard (pl. II). - . . . . . . . . ..
Les Français les plus illustres du XIX: siècle. . . . - . . . - . | 5 6
OÙùUvrages recus PME ERA LEE Me eue te ASS,
Table des Espèces nouvelles décrites dans le tome XI. . . ..
Table des Matières: : .::.. : 1... RAS OR ea
Le présent volume comprend 11 planches hors texte, dont une planche-fron-
tispice non numérotée, 3 portraits, 2 fac-simile d'écriture et 70 figures dans le
texte.
IL a été publié en quatre fascicules :
{er fasciculé, comprenant les pages 1 à 18%, paru le 15 décembre 196;
9» fascicule, pages 185 à 360, paru le 10 février 1907;
3e fascicule, pages 361 à 540, paru le 1° août 1907;
4° fascicule, pages 541 à 644, paru le 25 août 1007.
Le Secrétaire de là rédaction, Gérant :
DT MAURICE LANGERON.
Ecole Professionnelle d’Imprimerie, à Noisy-le-Grand (Seine-et-Oise).
| ASSELIN et HOUZEAU, Éditeurs
7 Place de l’École-de-Médecine, PARIS os
ne DE ZUOLOGIE MÉDICALE & AGRICOLE
A. RAILLIET
Professeur: à l'École vétérinaire d’Alfort, Membre de l'Académie de Médecine
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L-G. NEUMANN
Professeur à l'École vétérinaire de Toulouse
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Professeur à l'École vétérinaire d’AHort
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Avec le concours d’un grand nombre de Professeurs et de V étérinair es praticiens
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PRIX DE L ABONNEMENT \ Pour les autres Départements........... 46 »
partant toujours du 15 Janvier À Pour l'Union postale ...:................ 47 >
Le Recueil de Médecine vétérinaire parait les 15 et 30 de chaque mois
Le numéro du 30 contient IN EXTENSO le Bulletin des séances de la Société centrale
de Médecine vétérinaire.
ARCHIVES DE PARASITOLOGIE
RÉDACTION: 45, Rue de l'École de Médecine, PARIS, VIe
{
ABONNEMENT :
Paris et Départements : #30 fr. — Union postale : #32 fr. par volume.
Les Archives de Purasilologie publient des mémoires originaux écrits dans l’une ou
l’autre des sept langues suivantes : français, allemand, anglais, espagnol, esperanto,ita- |
lien et latin. Les auteurs doivent, autant que possible, FOURNIR UN TEXTE DACTYLOGRAPHIÉ
(écrit à la machine), afin de réduire les corrections au minimum.
Ce texte doit être conforme aux règles suivantes :
1° On appliquera strictement les règles de la Nomenclature zoologique ou botanique
adoptées par les Congrès internationaux de zoologie et de botanique; ÿ
2% On fera usage, tant pour les noms d'auteurs que pour les indications bibliogra-
phiques, des abréviations adoptées par ces mêmes Congrès ou par le Zoological Record
de Londres; ô
3 Les noms géographiques ou les noms propres empruntés à des langues qui n'ont
pas l’alphabet latin seront transerits conformément aux règles internationales adoptées
par les Congrès de zoologie ; #
% Tout nom d'être vivant, animal ou plante, commencera par une première lettre
capitale; |
5° Tout nom scientifique latin sera imprimé en italiques (souligné une fois sur le
manuscrit).
Dans l'intérêt de la publication et pour assurer le maximum de perfection dans la.
reproduction des planches et figures, tout en supprimant des dépenses inutiles, nos
collaborateurs sont priés de Se conformer aux règles suivantes :
1° Dessiner sur papier ou sur bristol bien blanc.
20 Ne rien écrire sur les dessins originaux.
3 Toutes les indications (lettres, chiffres, explications de figures, etc.) seront placées
sur un calque recouvrant la planche ou le dessin. \
4 Abandonner le plus possible le crayon à la mine de plomb pour le crayon Wolf
ou l'encre de Chine.
Les auteurs d’arlicles insérés aux {rchites sont instamment priés de renvoyer à
‘la Rédaction, dans an délai maininrunr de huit jours, les épreuves corrigées avec le
manuscrit ou l'épreuve précédente.
Ils recevront gratis 50 tirés à part de leur article. Ils sont invités à faire connaître
sans délai s’ils désirent en recevoir un plus grand nombre (50 au maximum), à leurs
frais et conformément au tarif ci-dessous. Ce tarif ne vise que l'impression typographique
il ne concerne point les planches, dont le prix peut varier considérablement. Toutefois,
il importe de dire que, pour les. exemplaires d'auteurs, les planches séront comptées
strictement au prix de revient. Les tirés à part ne peuvent être mis en vente. i]
TARIF DES TIRÉS A PART
Une feuille entière.
Trois quarts de feuille
Une demi-feuille
Un quart de feuille .
Un huitième ‘de feuille
Le Secrétaire de la rédaction, Gérant :
D' MAURICE LANGERON.
Professionnelle d’Imprimerie, à Noisy-le-Grand (Seine-et-Oise)
à
LL
Er
. à
3 2044 106 231