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ARCHIVES
DE
ZOOLOGIE EXPÉRIMENTALK
ET GÉNÉRALE
ARCHIVES
DE
ZOOLOIIIE KXFEniMENTALli;
ET GÉNÉRALE
HISTOIRE NATURELLE — MORPHOLOGIE — HISTOLOGIE
ÉVOLUTION DES ANIMAUX
FONDÉES PAR
HENRI de LACAZE-DUTHIERS
PUBLIEES SOUS LA DlBErilON DE
G. PRUVOT ET E.-G. RACOVITZA
PROFESSEUR A LA SORBONNE DOCTEUR ES SCIENCES
DIRECTEUR DU LABORATOIRE ARAOO SOUS- DIRECTEUR DU LABORATOIRE ARAOO
TOME 57
PARIS
LIBRAIRIE H. LE SOUDIEi^
174, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, I74
Tous droits réservés
1918
/ s^ôL r
TABLE DES MATIERES
du tome cinquante-septième
(654 pages, VIII planches, 240 figuus)
Notes et Revue
(2 numéros, 36 pages, 12 figures.)
Numéro 1
(Paru le 16 mai 1918. — Prix 1 fr. 50.)
I. — A. ALEXEIEFF. — Surun Flagellé coprozoïte, Alphamonas coprocola n. g., n. sp. (avec 3 fig.) p. 1
II. — L. CtJÉNOT. — Note rectificative à propos de la géonémie de Cyrtaspis seutata (Oiih.ïociist.). . . p. 12
III. — A. SotnJEK. — La croix et la rosette chez Protula Meilhaci (avec 1 fig.) p. 14
Numéro 2
(Paru le 5 novembre 1918 . — Prix 1 fr. 50).
IV. — A . Billard. — Note sur quelques Hydroïdes de l'expédition du •' Siboga » (avec 5 fig.) p. 21
V. — M. HEEiANT. — Un cas d'hermaphrodisme complet et fonctionnel chez Paracentrotus lividus
(avec 1 fig.) P- 28
VI. — E. Hesse. — Sur la présence dans le Dauphiné de V Anophèles nigripes Stucger (avec 2 fiy.) p. 32
Table spéciale des Notes et Revue du Tome 57 p. 36
Fascicule 1
(Paru le 10 juin 1918 . — Prix 6 francs.)
R.. Aîs'TnoîsY. — Recherches sur le développement de la circulation chez
l'Epinoche {Gosterosteus gymnurus Cuv.) {avec 31 iig. dans le texte et
la pi. 1) p. 1
Fascicule 2
(Paru le 20 juillet 1918. — Prix 25 francs.)
A. HvFKAGEL. — Recherches histologiques sur la métamorphose d"un
Lépidoptère {Hyponomeuta padella L.) {avec 104' fig. dans le texte et
les pi. n à V) -. p. 47
Fascicule 3
(Paru le 15 octobre 1918. — Prix 16 francs.)
R. Jeannel et E.G. Racovitza. — Enumération des grottes visitées. 1913-
1917 (6« série). Blospeologica XXXIX {avec 57 fig. dans le texte) p. 203
TABLE DES MATIÈRES
Fascicule 4
(Paru le 2 octobre 1918 . — Prix 5 francs.)
G. Tbégouboff. ■ — Etude monogrophique de Gonospom testicuU Trég.,
Grégarine parasite du testicule de Cerithium vulgntum Brug. (avec 2 fig.
dans h texte et les pi. VI à VIII) |). 471
Fascicule 5
(Paru le 2) novembre 1918. — Prix 2 francs.)
M. Heblaxt. — Comment agit la solution hypertonique dans la parthéno
genèse expérimentale (Méthode de Loeb). I. Origine et signification
des asters accessoires [avec 5 flg. dans le texte) p. 511
Fascicule 6
(Paru le 6 décembre 1918 . — Prix 7 francs.)
E. TopsENT. — Eponges de San Thomé. Essais sur les genres Spirasirella,
Donatia et Chondrila. (avec 29 fig. dans le texte) p. 535
Fontenay-aux-Roscs. — Imp. L. BellExNAND — 27.o50.
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DE
ZOOLOdIE EliPÉlillIEÏÏALE ET
FONDEES PAR
H. DE LACAZE-DUTHIERS
PUBLIÉES SOUS LA DIRECTION DE
G. PRUVOT ET E. G. RACOVITZA
Professeur à l;i Sorbonne Docteur es sciences
Directeur du Laboratoire Arago Sous-Directeur du Laboratoire Ara»(o
Tome 57. NOTES ET KEVLE Numéro 1.
SUR UN FLAGELLÉ COPROZOITE
ALPHAMONAS COPROCOLA N. G., N. SP.
PAR
A. ALEXEIEFF
Rt(u, U lit) Octobre 1016.
Le Flagellé dont il s'agit ici a été trouvé dans une macération de
crottin de cheval à Paris. La forme végétative et les kystes de multipli-
cation étaient particulièrement abondants vers le quatrième jour ; en-
suite, le Flagellé devenait de plus en plus rare, pour disparaître com-
plètement au bout de trois jours. Dans la culture en question se trouvaient
quelques rares Mona-s et Bodo.
Dans une macération des matières fécales de la Tortue mauresque
j'ai observé un Flagellé ({ui, sauf les dimensions plus petites, ressemblait
beaucoup au Flagellé du crottin. Là aussi, les Flagellés étaient très
nombreux vers le quatrième jour.
Notes et Rkvck. — T 57 — N» 1 A.
^OTES ET REVUE
Etat végétatif
Le corps de ce Flagellé est allongé et effilé aux deux extrémités ; il
présente souvent une double courbure à la manière d'un S italique à
courbures atténuées.
Fio. I. Alphumonas coprocolt. n. j^., n. sp. x 2250. A-D : individus dont la région postcneurc ne présento pa*
de globoïde ; E, I-N : individus à corps globoïdc bien développé ; L et M : la vacuole digestive
est presque remplie d'une proie ingérée ; O et P : jeunes individus bientôt après luie multipli-
cation par pseudokystes.
Ses dimensions moyennes sont : 8 à 14 ju de long sur 2 à 4 u. de laige,
mais on trouve de petites formes de 4-5 jx sur 2 /j..
Le flagelle antérieur part de l'extrémité antérieure au-dessous d'un
petit rostre, et est souvent rabattu en arrière ; ce flagelle est très
mince et difficile à observer, même sur des préparations colorées à
l'hématoxyline ferrique.
A. ALEXEIEFF 3
Le flagelle récurrent est encore plus mince que le flagelle antérieur
et souvent passe inaperçu.
A peu près à la limite du tiers antérieur se trouve un noyau du tyi)e
protocaryon ; la membrane nucléaire est, le plus souvent, très mince,
et la chromatine périphérique est très peu développée et semble même
faire défaut dans les individus très petits.
Le trait le plus saillant que présente l'organisation de ce Flagellé
consiste en une séparation du corps cytoplasmique en deux zones très
nettement séparées (fig. 1, I à K). L'étendue respective de ces deux
zones est très variable ; la zone antérieure peut représenter tantôt un
tiers, tantôt jusqu'à deux tiers de la longueur totale du corps protoplas-
mique ; cette zone est formée par le protoplasme grossièrement alvéolaire.
Le reste du corps protoplasmique se présente comme homogène, avec
quelques plages arrondies claires. Cette zone homogène renferme
parfois un corps sidérophile qui la remplit plus ou moins entière-
ment. Certains individus ne présentent pas cette séparation en deux
zones ; leur protoplasma est alvéolaire d'un bout à l'autre. La limite
entre les deux zones a la forme d'une coupole et se présente en
coupe optique, sous la forme d'une ligne courbe assez régulière, à
concavité dirigée en arrière ; ainsi, la zone postérieure a une forme ellip-
soïdale.
Le périplaste assez rigide du Flagellé présente assez souvent, à
l'endroit où se réumssent les deux zones, une fissure dont le bord anté-
rieur se prolonge en une sorte d'éperon (fig. 1, I et J).
On aurait pu croire que la zone postérieure homogène du corps
d'Alphamonas représente une sorte do corps de réserve non sans analogie
avec le corps de réserve des Blastocystis, où ce corps est constitué par une
substance voisine de celle des corpuscules métachromatiques. Cependant,
si l'emploi du rouge neutre permet de colorer en rose cette zone, on n'y
observe point la précipitation de la substance dissoute en sphérules comme
c'est le cas pour le corps de réserve de Blastocystis. En réalité, il s'agit ici
d'une vacuole disgestive dont le contt^nu ne se distingue guère sur le
vivant par suite de la réfringence considérable du plasma d'Alphamonas.
Par contre, sur les individus fixés et colorés, on observe les corpuscules
ingérés par ce Flagellé ; ces corpuscules sont souvent très volumineux
(fig. 1, L et M).
Avec le rouge neutre, les grains métachromatiques se colorent vitale-
ment en rouge foncé; le bleu de Nil les colore en bleu foncé. Ces grains
4 NOTES ET EEVVE
sont surtout nombreux près de l'extrémité antérieure du globoïde (vacuole
digestive).
Dans les préparations colorées à Thémalun, on met en évidence des
corpuscules métachromatiques de taille variée, localisés principalement
dans la zone antérieure protoplasmique; ces corpuscules se colorent, par
l'iiémalun, en rouge violacé.
Reproduction
Contrairement à ce qui s'observe chez les autres Flagellés, la mul-
tiplication par division binaire à l'état flagellé mobile paraît faire
com])lètement défaut ici. Le seul mode de multiplication que présente
ce Flagellé est la division en quatre
individus fils, division ayant lieu à
l'état immobile sans que, cepen-
dant, une paroi kystique bien nette,
soit présente.
Le début du processus consiste
/. j '^ en ce que le Flagellé résorbe ses
flagelles et s'arrondit. La zone anté-
Fuj. II. Aii>/un>,o>H^scoijrocui" u. K. s. sp. y. 2250. 1: rieure protoplasmiquc englobe de
individu dont la ri'gioii postérii'uri' présente un , i /zî « t ^ tttv i l
amas de sjramiles sidérophiles confluents; III pmS en plUS (fag. 3, 1 a IV) le glO-
et IV : dans la réuiou posté.ieure ae trouve un i ..j _ j. '.^ „ j. i • • „_• _
corps assez peu sMérophiie (prégiycogèn 0. boidc posteoeur et lui imprime une
forme sphéroïdale '.
Le noyau se divise en deux noyaux-fils qui s'écartent l'un de l'autre
(fig, 3, Y et V^I) et subissent une deuxième division ; les quatre noyaux
qui résultent de cette division, tout en restant dans la couche protoplas-
mique ])ériphérique. se placent de façon à être chacun à peu près au centre
d'un quartier de protoplasme qui s'isole par des cloisons allant jusqu'au
globoïde central (fig. 3, VII à IX).
Je n'ai pas observé la réapparition des flagelles. A en juger par l'as-
pect des stades pseudokystiques très avancés, la vacuole digestive ( = glo-
boïde) ne prend pas part à la formation des individus- fils et, après être
absorbée en grande partie par les individus-fils en voie de formation,
1. On se ri'présente aisément ipie c'est là un processus déterminé par des raisons d'ordre purement mécanique :
le globoïde semi-fluide étant absolument inerte et présentant une forme ellipsoïde, pour qu'il prenne une forme
sphérique, il faut qu'il soit sollicité par une force extérieure appliquée sur deux points opposés de son grand dia-
mètre. L'englobement du corps globoïde par la zone protoplasmique (seule active, seule possédant cette propriété
fondamentale du protoplasma «(ui est la contractilité) a pour résultat d'arrondir tout le corps du Flagellé.
f^ ^*^;
A. ALEX El EF F 5
devient le corps résiduel. Ce sont les individus sortant d'une récente
multiplication, au moyen des pseudokystes qui ne présentent pas de
séparation en deux zones ; ce n'est qu'ultérieurement que le globoïde
se constituera petit à petit. Je dois cependant ajouter que ce ne sont
l^as là, contrairement à ce qu'on devrait s attendre, les individus les plus
petits. Les individus qui présentent la taille très réduite (4-5 p. sur 2 ii),
possèdent, à la place du globoïde. une inclusion (fig. 2, T, ITT, IV), de
forme irrégalière gé-
néralement allongée, ^- ' "" "^
le plus souvent assez
sidéropliile (toujours
l)lus sidéropliile que
le globoïde).
Place dans la Systéma-
tique
11 s'agit ici d'une
Protomonadine qui
doit se placer près
du genre Ancyromo-
nas Kent. La forme
du corps, la longueur
du flagelle, rappellent
assez bien VAncyro-
iiionas sigmoîdes. Ce-
pendant, la différen-
ciation zonaire du
corjis et le mode de
multiplication par pseudo-kystes constituent des caractères très particu-
liers. S'il s'agit ici, comme je le pense ^, d'mie forme nouvelle, ce Flagellé
portera le nom de Alphamonas coprocola n. g., n. sp.
Il est assez probable que notre Flagellé appartient à l'espèce décrite
par Klebs sons le nom de Bodo celer. Le plasma de celui-ci est, d'après
Klebs, très réfringent ; de plus, dans la partie postérieure du corps,
Klebs a noté la présence d'une inclusion volumineuse (sa pi. XIII,
' ■^•i
K7/.
Kl.:. I
Mliliiiiiwiuix coprocolm. g., n. sp. x 2250. iliiHiijliiation
l'aitition) au iiioycii des pscuilokystis. I-IV : li> l'iagvllô
( it; IV : prophasL"! de la preinièro division nucléairi' ; V
stadiî il dfux noyaux ; VII-IX : stade à quatre noyaux i;
l)ro;;ressif des individus-flls.
zr
(quadri-
3'arron-
ct VI :
:olemc)it
1. .re n'ai pu faire de roeherrlies bibliograpliiquos complètes.
6 NOTES ET REVUE
fig. 6a-b, 1802). Le mode de mouvement est le même chez le Bodo celer
et chez notre Alphamonas^.
Les dimensions indiquées par Klebs ne diffèrent que très légèrement
de celles que j'ai donrét s plus haut (8 à 10 /ix sur 4 à 5, 5 au lieu de 8 à 14
sur 2 à 4). En somme, il est bien possible que notre Flagellé se rapporte à
l'espèc? de Klebs ; s'il en. est ainsi, cv Flagellé portera le nom d^Alpha-
monas celer (Klebs). Il est bien entendu qu'il n'a rien à faire avec le
genre Bodo : excepté la disposition des deux Flagellés, s-^s caractères sont
nettement distincts de ceux qui s'observent chez les représentants du
genre Bodo (absence de kir étoplaste et surtout multiplication par pseudo-
kystes).
Cet organisme ne peut pas être rapproché du curieux Flagellé copro-
zoïte Helkesimastix foecicola Woodcock et Lapage (1915), qui se mul-
tiplie par division binaire et présente des kystes sphériques de 3-3,5 (j.
de diamètre, formés à la suite d'une copulation. Par contre, il est bien
possible que la figure 37 de la pi. VI du mémoire de Martin et Lewin
(1914) ^, se rapporte à Alphamonas coprocola. Cette figure est interprétée
par Martin et Lewin, comme un stade de la division multi])le de Bodo
caudatus. Cependant, absence de kinetoplaste, présence d'un corps
résiduel central, position j^ériphérique qu'occupent les individus-fils
(au nombre de quatre), tous ces caractères rappellent les pseudo-kystes
à' Alphamonas coprocola. Même les caractères des noyaux (à gros caryo-
some et sans chromatine périphérique) sont ceux d'^. coprocola et ne
ressemblent nullement à ceux de Bodo caudatus (auquel se rapporte
la figure 35 de ces auteurs).
Alphamo7ias coprocola, jmr son mode de multiplication très par-
ticulier, apparaît comme une forme de transition entre les Bactéries à
spores endogènes et les Flagellés. En effet, ce qui caractérise les ascos-
pores des Ascomycètes et celles des Bactéries, ce n'est pas seulement leur
formation endogène (à l'intérieur de la membrane d'enveloppe de l'asque),
mais aussi l'existence d'une partie de protoplasme portant le nom d'épi-
plasme qui ne sera utilisé par les spores que plus tard, après leur indi-
vidualisation. Il est vrai qu'on pourrait admettre que ce n'est là qu'une
1. L'^/Mcworiff* en se déplaçant tourne autour (le son ;ixo lon<;ituiliiu>l : il i)rés(^iitc en même temps un mou-
vement de pendule. A propos de ce dernier mouvement on peut noter que l'oseillation de l'cxtréniité postérieure est
plus forts que celle de l'extrémité antérieure, ce qui revient à dire tiue le point fixe se trouve près de l'extrémité
tntérieure du corps. De temps en temps le Flagiaié tourne sur place en prenant comme point fixe le pôle antérieur
:1p son corps.
2. Some Notes on Soil Protozoa. in Phllosoph. Tramuct. J'oyut Sor. London, ser. lî, Vol. 205, P. 77-04.
A. ALEXEIEFF 7
ressemblance fortuite : c'est la présence d'une zone inactive (vacuole
alimentaire) qui détermine chez VAlphamonas coprocola le processus de
multiplication où la vacuole digestive persiste au moins en partie, sous
la forme d'un corps résiduel. Cependant, il y a d'autres caractères com-
muns aux Bactéries et à VAlphamonas, ce qui plaide en faveur de ce que
ce Flagellé peut être réellement considéré comme une forme de passage
entre les Bactéries et les Flagellés. Cette forme de passage pour laquelle
divers Protistes ont été tour à tour désignés et rejetés, est tout à fait
indispensable, quand on envisage les relations phylétiques des êtres
vivants.
A l'état actuel de nos connaissances, nous ne pouvons plus admettre
l'existence de la génération spontanée ; de même, nous sommes con-
duits à rejeter l'hypothèse ayant un caractère géocentrique et consistant
à penser que la vie a dû apparaître sur le globe terrestre. Ainsi, nous
.sommes amenés à accepter l'hypothèse de la panspermie, avec ou sans
correctifs apportés par Arrhenius. Nous dirons qu'il n'est pas impossible
que la vie soit étemelle au même titre que la matière et l'énergie. Si Ton
admet l'hypothèse d 'Arrhenius, les premiers êtres vivants arrivés sur
la terre devaient avoir les dimensions de l'ordre du dix-millième de milli-
mètre, pour que l'on puisse faire intervenir la pression de radiation C£ui
exerce une répulsion transportant les germes aux confins où commence
à s'exercer la force de gravitation ; il faut bien que ce soient les Bac-
téries, car ce sont les seuls êtres dont les spores peuvent présenter des
dimensions si petites.
Ainsi les Bactéries dites autotrophes qui sont capables d'assimiler
(c'est-à-dire transformer en substance organique vivante) les matières
minérales doivent être considérées comme les premiers habitants de notre
planète.
A partir des Bacilles endosporés, le tableau phylogénétique peut être
dressé assez facilement. Je m'arrêterai ailleurs avec plus de développe-
ment sur cette cj^uestion, ce sujet ne me retiendra ici que tant qu'il â
trait au Flagellé dont il s'agit dans cette note.
Les Bacilles endosporés conduisent à deux phylums très importants :
Levures et Flagellés. Parmi les Levures, le genre Schizosaccharomyces se
présente avec des caractères très primitifs : c'est en somme un Bacille
({ui présente une copulation avant la formation de l'ascpie. Même, en
ce qui concerne le nombre d'ascospores, on trouve des formes de tran-
sition entre les Bactéries et les Levures, ce (lui écarte l'objection possible
8 NOTES ET BEVUE
qu'on ne peut pas comparer 1 asque renfermant généralement de 4 à 8 as-
oospores chez les Ascomycètes et une seule spore chez les Bactéries ^.
Le curieux bacille Bacterioïdomonas sporifera Kunstler trouvé par
KuNSTLER (1884) dans le cœcum du Cobaye est très intéressant à cet
égard. Ce Proliste a été considéré par Kunstler comme une forme de
transition entre les Bactéries et les Flagellés.
Pour moi, l'intérêt de cette Bactérie est ailleurs.
D'après la description de Kunstler {Journal de Micrographie, T. VIII
1884), ce Protiste mesurant 24 u. de longaeur, présente un mouvement
rectiligne assez rapide, grâce à la présence d'un long flagelle très mince,
inséré à l'extrémité antérieure. Un noyau pourrait être mis en évidence
assez facilement, au moyen de vert de méthyle acétique. La particularité
remarquable que présente ce Bacterioïdomonas sporifera consiste en ce
qu'il forme des spores en nombre variable pouvant aller de 1 à 8. Pendant
la formation des spores (qui sont allongées en bâtonnet), il y a un reste
plasmatique non employé. Les spores passeraient pas un stade de spi-
rilles 2.
En somme, le Bacterioïdomonas sporifera pourrait être envisagé comme
une sorte de Schizosaccharomyces mobile et, en même temps, c'est un
bacille endosporé ayant perdu la faculté de multiplication par cloison-
nement transversal (cette perte étant compensée par l'augmentation du
nombre d'ascospores).
On ne peut pas adopter la manière de voir de Kunstler qui considère
le Bacterioïdomonas comme une forme de passage conduisant directement
des Bactéries aux Flagellés. La transition serait trop brusque et, d'ailleurs
le Basterioïdomonas est incontestablement un Bacille sans aucun carac-
tère flagellé (sauf la mobilité, au moyen d'un flagelle, ce qui est trop
vague).
Un autre Protiste, un vrai Flagellé, cette fois, a été aussi quelquefois
considéré comme réalisant cette transition si importante entre les Bac-
téries et les Flagellés. Monas vulgaris ( = Spumella vulgaris) (Cienkowsky)
a été donné comme le terme de transition présentant le caractère endo-
gène de formation des spores.
1. Parfois doux spores, mais alors, le plus souvent, une cloison au moins temporaire les sépare et fait de l'en-
semble plutôt deux asques.
2. Chatton et Perarp (C /?. .Soc. Biol. 1913). ont décrit, sous le nom de Melabucteriiim [lolyspora un Schizo-
pliyte du coecum du Cobaye. Cette Bactérie de 10-25 a de long sur 5/x de large, forme de 1 à 8 spores allongées
(10-25 // sur 2 //). Il est à présumer qu'il s'agit du môme organisme que dans le cas de Kuxstlek, quoique, selon
CHATTON et PKRAitD, leur organisme est immobile. Cette différence s'explictue probablement par une alternance
lies phases de mobilité et d'immobilité (jue présente ce Protiste.
A. ALEXEIEFF 9
EfEectivement, chez les leprésentants du genre Monas, il y a une
])ai'tie de cytoplasme C[\\\, pendant l'enkystement, reste extérieure à la
membrane kystique et finit par disparaître ; ce fait a été revu par les
observateurs récents (Prowazek, moi-même) ^. Mais on doit se deman-
der si Ion a le droit d'assimiler cette couche périphérique de i)roto-
plasme à 1 epiplasme de l'asque. De plus, l'enkystement chez les Monas
n'est pas à proprement parler un procédé de multiplication : il n'y a pas
de division sous kyste 2. En somme, les Monas, avec leur enkystement
rappellent plutôt certains Mycétozoaires où (p. ex. chez Guttulina
[Copromyxa] protea) pendant l'enkystement une couche de cytoplasme
périphérique est séjîarée au moyen d'une vacuole circulaire du reste de
cytoplasme. Quant à considérer les Monas comme constituant un terme
de passage entre les Bactéries et les Flagellés, cette manière de voir doit
être abandonnée définitivement.
Les Spirochètes ont été considérés par certains auteurs (en particulier
par Doflein), comme des Pro flagellâtes. A l'heure actuelle, il n'y a guère
de partisans de cette oi^inion.
Ainsi, on ne connaissait jusqu'ici aucune forme incontestablement
intermédiaire entre les Bactéries et les Flagellés. Alphamonas coprocola
me paraît combler cette lacune à un certain degré.
C'est, sans aucun doute, un Flagellé. Cependant, il présente les carac-
tères bactériens suivants : 1" Forme rigide et incurvée du corps (forme
spirillaire qui rappelle tout particulièrement celle de Paraspirillum vej-
dovskii Dobell, ce Sjiirille à noyau si net) ; 2° Flagelles très minces qui ne
semblent pas aboutir à un bléj)haroplaste ; 3° Formation des spores avec
1 epiplasme.
1 . D'après Cienkowsky, chez sa Spunielln ruItruU. !<■ kyste serait formé, à rintérieiir ilu Flagellé qui continue
à se déplacer ; la figure que cet auteur donne de ce pliénomènc est très curieuse : l'individu est encore en possession
de son flagelle, de la vacuole contractile et de la bandelette buccale ; les deux derniers organitcs se trouvent dans
la couche protoplasniique très développée, entourant le « kyste ». Ayant observé la même espèce, j'ai pu constater
que la formation sphérique volumineuse n'était point un kyste, mais que c'était en réalité un amas de leucosine
qui, constitué d'abord par des granules, devient extrêmement réfringent et acquiert alors cette apparence vitreuse
^parfois finement granuleuse), dont parle Ciknkowsky. La formation du kyste ost réellement endogène chez les
i/o>w«,mîis les observations de Cif.xkowsky doivent subir des corrections importantes sur ce point. Dv jihis, une
<• infusion avec les parasites (Sp/i' e -Un) est à craindre ; j'ai pu observer [ilusieurs fois des Moikik parasités.
2. Il est vrai qw c'est aussi le cas îles Bacilles nionosporcs.
10
NOTES ET BEVUE
Nous pouvons résumer toutes ces considérations phylétiques sous la
forme suivante :
Bactéries AUTOTRoniKs
Bacilles endosporés
Schizosaccharomyce-'
Bachrioïdomonas s par i fera
BlastocystifUei'
A 1 phamonas co procola
Saccharomyces
En(lomyc('<
Exoascées
ASCOMYCÈÏES SlirÉRIEURS
FlAO ELLES
Ainsi, à jiartir de Bâcler ioïdomonas sporifera (sans s'arrêter sur les
formes intermédiaires qui ne sont pas bien connues, mais qui doivent
exister car le passage n'est pas suffisamment gradué) trois phylums se
détacheraient : Les Schisosaccharomyces caractérisés par le cloisonne-
ment transversal (caractère bactérien) et par la formation de 8 (ou 4)
ascospores dans l'asque ; ce phylum nous conduira aux Ascomycètes
supérieurs et, par conséquent aux Métaphytes, d'une façon générale ^
1. ,1v sais bien que Guillikrmond dont l'autorité, diins tout ce qui concerne les Levures, est indiscutable, en
<!■ basant sur le phénomène de la « rétrogradation de la sexualité », considère les Levures comme descendant des
Ascomycètes, par voie régressive. Mais, à mon avis, c'est attribuer trop d'importance aux caractères tirés des
manifestations de sexualité. Il faut prendre en considération les caractères de la multiplication asexuée. Et, du
Teste, si l'on hésite sur le sens dans lequel il faut comprendre l'évolution (complication progres.sive conduisant
A. ALEXËIEFF 11
20 Blastocystidées que caractérise la division par étranglement et la for-
mation des spores au nombre multiple de 4 (jusqu'à 64 et davantage) ;
3" Les Flagellés enfin qui se reproduisent par division longitudinale
binaire, ou bien par la division en un plus grand nombre d 'individus- fils
(chez les Chlamydomonadines, Volvocinées).
Des Flagellés, on peut passer aux Métazoaires : en effet, les Choano-
flagellés nous conduisent aux Spongiaires. Par l'intermédiaire des Vol-
vocinées et de quelc^ues autres groupes, les Flagellés se rattachent aux
Algues. D'autre part, les Flagellés doivent être considérés comme un
groupe qui a donné naissance aux autres groupes de Protozoaires.
Ainsi nous avons déterminé la place qu'on peut assigner dans le ta-
bleau d'ensemble à VAlphamonas coprocola. On peut espérer que des
recherches sur les Flagellés saprozoïtes décèleront d'autres formes de
passage dans la série conduisant des Bactéries aux Flagellés.
Rôôs, Octobre 1916.
dos Levures aux Ascomycètes supérieurs, ou bien, tout au contraire, une dégradation aboutissant aux Levures
parthénogénétiques), l'argument décisif sera fourni par la nécessité d'accepter une solution qui cadre bien
avec l'ensemble des groupes naturels et leur évolution. Dans le cas présent, les Schizosaccharomyces sont plus
proches parents des Bactéries que les Sacchifromi/ceti et, à plus forte raison que les Ascomycètes supérieurs. Et,
comme, d'autre part, ce sont les Bactéries qui, pour des raisons que j'ai exposées plus haut, seules peuvent êtri-
envisagées comme les premiers habitants de la terre, c'est la voie d'évolution progressive qu'il faut admettre.
11 est vrai que l'on considère quelquefois les Bactéries comme des Protistes simplifiés secondairement, mais à mon
avis, cette manière de voir ne cadre pas avec la constitution nucléaire très primitive (noyau dilfns) des Bactéries.
12 XOTES ET BEVUE
II
XOÏE RECTIFICATIVE
A PROPOS DE LA
GÉONÉMIE DE CYBTASPIS SCUTATA (ORTH. LOCUST.)
PAR
L. CUÉXOT
riofcsscur ([q Zoologie à la Faculté des Scicncos Je Xiincy.
lîefut le 11 Janvier 1918.
J'ai publié en 1914^ une note sur un Locustaire très rarement signalé
en France, le Cyrtaspis scutata Charpentier, dans laquelle j'étudie en
particulier sa répartition géographique ; celle-ci est assez étendue (Algé-
rie, Sicile, côte méditerranéenne de France et d'Italie, côte et îles adria-
tiques, côte atlantique de Portugal, Espagne et France), ce qui est remar-
quable pour une espèce aptère.
Croyant que le Cyrtaspis était une forme strictement arboricole, j'avais
pensé que l'on pourrait tirer de sa géonémie des renseignements paléo-
géographiques intéressants, la dissémination active par le vol ou passive
par transport humain paraissant également impossibb ; j'avais supposé
que les locaUtés où on rencontre aujourd'hui cette espèce avaient dû
être reliées autrefois, non seulement par des connexions de terre ferme,
d'âge probablement pliocène, mais aussi par une ligne continue de forêts
constituées par des arbres autres que des Conifères. Je dois rectifier ces
conclusions, qui sont erronées.
(1) L CdéNOT. Le Cyrtaspis scutata (Orth. Locust.) Sa présence à Arcachon — Géonémie — Homoehro-
mie. (Areh. Zool. exp., 54, Notes et Revue, p. 75)
L. CUÊNOT 13
Dans la ville d'Ai'cacIion, où le Cyrtaspis est beaucoup plus abondant
que je ne le croyais, MM. Lienhart et Tempère ont découvert son véri-
table habitat, que je n'avais pas su trouver : l'espèce se rencontre nor-
malement dans les haies de Troènes {Ligvstrum vulgare) et de Fusains
du Japon {Evonymvs japonicus), très nombreuses dans les jardins des
villas. L'Insecte est toujours caché perdant le jour, mais dès la tombée
de la nuit, pendant le mois de septembre, une oreille attentive perçoit
dans les haies comme un faible tic-tac de montre, qui n'est autre que le
chant du mâle ; en projetant, au point où l'on entend le bfnit, le faisceau
lumineux d'une lampe électrique, on aperçoit presque à tout coup le
Cyrtaspis, qui cherche immédiatement à fuir. En captivité, on nourrit
facilement l'Orthoptère avec les feuilles des plantes précitées.
Or, les Troènes et les Fusains du Japon, plantes d'ornement, sont
vendus par les horticulteurs en gros pieds avec leur motte, et naturelle-
ment les Chrtaspis ou leurs pontes sont ainsi transportés dans des locali-
tés quelconques ; il y beaucoup de chances pour qu'Arcaehon ait été
peuplé en Cyrtaspis par ce procédé. Puisqu'il y a possibilité et même pro-
babilité de dissémination passive par l'Homme, il est évident que la géo,-
némie du Cyrtaspis n'a plus aucun intérêt paléogéographique.
J'ajouterai pour mémoire que la mutation gris-paille. signalée à
Niort par H. Gelin, n'est pas rare à Arcachon ; elle vit exactement dans
les mêmes conditions que le type vert clair.
14 NOTES ET REVUE
III
LA CROIX ET LA ROSETTE CHEZ PROTULA MEILHACI
PAR
A. SOULIER
l'roiossour -adjoint à la Faculté dos Sciences de Moiiti)ellitT
Reçue le 28 janvier.
Les premiers stades de la segmentation de Protula Meiïhaci et les
particularités que présente cette segmentation ont été étudiés ^ précé-
demment. L'origine, le rapport des cellules et le moment de leur appa-
rition ont pu être établis d'une façon précise jusqu'au stade 32. A partir
de ce stade, le nombre des blastomères s'accroît rapidement, l'observation
devient plus complexe et les particularités de la segmentation sont plus
difficiles à établir rigoureusement. Le moment où apparaissent les nou-
velles cellules est d'autant plus délicat à établir que leur nombre va en
augmentant sans cesse, que l'ordre d'apparition n'est pas toujours le
même, et qu'enfin, lors de la formation de certains éléments, le blas-
toderme prend un aspect spécial dû au changement de forme et à la
perte de contact de quelques cellules. Toutefois, la marche générale du
développement peut être étudiée dans ses grandes lignes, avec une
précision suffisante.
Dans le blastoderme composé de trente-quatre cellules l'apparition
de cinq nouveaux éléments élève à trente-neuf le nombre des sphères
de segmentation. Ces cinq nouveaux éléments sont x^ et quatre cellules
qui se forment aux dépens de a^, h^, c\ d'^, suivant une spirale enroulée
à gauche, à savoir les cellules a^^, b^'^, c^'-\ d^'^ (fig. ii). Elles prennent
1. Irrésulaiitcs de la segmentation chez Protida (Arch. de Zool. exp. et générale. 1911 [3]. T. \Il. (Sotes «(
Revue. ?;« 2). Le cin<(uiènii> stade de segmentation (trente-deux C(rllules) cluz Protula Meiïhaci (id. 1917. 1'. ô*i.
Soten et Revue. X" 4).
A. SOI LIER
15
naissance à peu près en même temps que x^. Peut-être ce dernier se
sépare-t-il de X un peu avant l'apparition de a^^-d^^. La formation de
ce dernier groupe cellulaire modifie profondément l'aspect de la région
supérieure du blastoderme (fig. i). En effet, les quatre cellules a^-d^
s'écartent tout d'abord l'une de l'autre et perdent leur contact réciproque.
fJl
FUI.
1 IV
Elles cessent par suite de se comprimer et reprennent leur forme sphé-
rique. Il se forme ainsi un espace libre entre deux cellules voisines du
groupe a}-d^. Les cellules intermédiaires a^M^^ se glissent partiellement,
en se déformant, dans cet espace libre : c^^ s'insinue partiellement entre
6^ et c^ et se déforme par suite de la compression exercée par ces deux
éléments, etc. C'est à la fois pendant que les cellules du groupe a}-d^
s'éloignent l'une de l'autre et dès que ce mouvement de séparation s'est
effectué, qu'apparaissent les quatre nouveaux éléments a'^-c?^^. La
cellule c^^ naît généralement la première, puis apparaissent d^^, a}^, b^^.
16 NOTES ET UEVVE
Sur la fig. I, c^^ est déjà formé et d^'^ sur le point de se former, ainsi que
l'indique le fuseau pleinement développé. Ce fuseau est encore à peine
indiqué chez a^ et h^. Dès que les quatre cellules a^^-iV^ se sont séparées
des cellules mères a^-d^ ces dernières reviennent à leur situation pre-
mière et reprennent leur contact réciproque.
Les cellules a^^-d^-^ sont caractérisées, d'abord, par leurs faibles dimen-
sions ; elles le sont aussi par la direction suivant laquelle s'effectue la
division, et cette direction indique la future position que les quatre
nouveaux blastomères vont occuper dans le blastoderme. Cette direc-
tion est du reste opposée à la direction suivant laquelle se sont effectuées
les divisions précédentes de a^-d^. En effet, les deux groupes de cellules
qui se sont successivement détachés de a'-d\ c'est-à-dire a^^-d^^ et a^--
d^~, se sont développés, (quelque fut le sens de leur spirale) en direction
équatoriale. Peu après, les quatre éléments a^^-rf^^ se sont divisés en
a^i^ a"2, 5111, 6"2, c"\ cii2, d^^\ d^'^ Ces huit cellules forment, avec
a'^"-d^^, une ceinture entourant a^, b^, c\ cZ\ (fig. 11) qui se trouvent ainsi
enclavés dans la région centrale de cette ceinture. Les éléments a^-d^
occupent en effet la région correspondant au pôle animal de l'œuf et
recouvrent partiellement les douze blastomères qui composent la ceinture.
Les quatre nouvelles cellules a^^-d^^ se développent, au contraire, en
direction apicale, vers le pôle animal, et se disposent de telle sorte qu'elles
sont en contact au niveau de ce pôle animal même, c'est-à-dire au point
cil se trouvent les globules polaires, qui subsistent parfois encore à ce
moment. Le sens spiral suivant lequel elles se développent et se déplacent
est particulièrement net et chacune des cellules nouvellement formées
s'établit définitivement au niveau de la ligne de séparation de l'élément
qui lui a donne naissance et de l'élément voisin ; ainsi a^^ s'intercale entre
a^ et d^, b^^ entre b^ et a^, etc. La disposition régulière présentée par ces
quatre cellules est connue sous le nom de rosette. Celle-ci forme une partie
de l'ébauche du cerveau larvaire.
C'est à peu près à ce moment que naît l'initiale mésodermique J/=d*.
Elle se forme aux dépens de D suivant une spirale enroulée à gauche.
Placée au dessous de X, cette cellule n'est pas visible dans les fig m etiv,
par suite de la position dans laquelle est dessiné le blastoderme dont le
pôle apical est placé en haut. Les contours de l'élément M sont cepen-
dant indiqués, en supposant transparentes les cellules qui recouvrent
l'initiale mésodermique.
L'ébauche du cerveau larvaire est complétée par quatre autres cellules.
A. SOULIER 17
a^*, 6^^, c^^ d^^, issues de aW\ cellules qui font leur apparition immé-
diatement après la formation de la rosette. Elles se forment dans le même
ordre que les éléments de la rosette : c^* se montre d'abord, puis rf^*, etc.
Ces quatre nouvelles cellules se développent toujours en direction api-
cale (fig. ni, iv) et se disposent autour du pôle apical d'une façon symé-
trique. En d'autres termes, elles ne se forment pas selon le mode spiral,
mais d'après le mode bilatéral. L'élément a^* s'intercale entre a^^ et 6^^,
de même 6^^ s'intercale entre b^^ et c^^, etc. Les quatre cellules a}*-d^^
sont ainsi en contact avec les éléments de la rosette et sont aussi en
contact les unes avec les autres. Mais, par suite de la formation de a^*-d^*,
les cellules a^-d^ perdent leur contact réciproque, s'écartent l'une de
l'autre comme les branches d'une croix et sont placées, en direction
équatoriale dans le prolongement de a^*-d^^. Elles laissent donc entre
elles quatre intervalles qui sont comblés par a^--d^'~. Au moment où
la cellule x^ s'est détachée de la cellule mère A'^, elle se trouve placée
au-dessous de d^^ (fig. i). Ce dernier élément, lors de la formation des
branches de la croix (fig. m, iv) s'intercale entre c^ et d^. La cellule x^
suit ce mouvement et entre par suite en contact avec c^^^ et d^^^. Elle
repousse, ou paraît repousser la cellule d^-. La région du blastoderme
correspondant au pôle animal de l'œuf présente à ce moment une dispo-
sition caractéristique due à l'arrangement régulier et symétrique des
divers éléments. Au centre, sont les cellules de la rosette, a^^-d^'-\ alter-
nant avec a^^-d^^ qui forment les points d'attache des bras de la croix.
L'espace compris entre deux bras voisins est occupé par l'une des quatre
cellules a^~-d^'^.
Les deux arrangements cellulaires qui viemient d'être décrits ont
été désignés sous le nom de rosette et de croix par Wilson qui les a
signalés le premier chez Nereis. Wilson appelle l'attention sur ce fait
que ces deux arrangements se retrouvent aussi chez les Polyclades et
les Mollusques : Selenka et Lang ont, en effet, déjà indiqué avant les
travaux de Wilson la présence de ces deux groupements cellulaires ;
de même Conklin l'indique chez Crepidula et Blochmann chez Neritina.
Postérieurement aux observations de W^elson, Eisig décrit la formation
de la rosette et de la croix chez Capitella et n'hésite pas à considérer ces
deux arrangements cellulaires comme homologues chez les Annélides et
les Mollusques.
D'après Wilson, l'ébauche du cerveau est représentée par les cellules
Notes et Revue. — T. 57. — N» i. B.
18 NOTES ET BEVUE
rayonnant du pôle apical vers l'équateur de l'œuf. Wilson constate
que les ganglions cérébroïdes se forment aux dépens de ces divers élé-
ments, et que, dans leur région centrale, on aperçoit la touffe ciliée de
l'organe apical. Ces cils, bien développés, se montrent de bonne heure sur
les cellules de la rosette. Eisig se range à cette opinion. Chez Capitella.
en effet, la rosette se forme normalement et présente une disposition
identique à celle que Wilson décrit chez Nereis, bien que les cils ne se
développent pas. La larve de Capitella ne se dépouille que tard (le troi-
sième jour) de sa membrane vitelline ; ce n'est qu'à ce moment que se
forme la cuticule et qu'apparaissent les cils de la couronne équatoriale,
mais aucune formation ciliée ne se développe aux dépens des cellules
de la rosette. Aussi, d'après Eisig, l'organe apical représente un organe
des sens primitivement indépendant et son association avec la plaque
céphalique est l'indication d'un état secondaire. Eisig se base sur ce
fait, que non seulement la touffe ciliée de Capitella ne se développe pas.
mais il constate de plus que les cellules de la rosette ne se divisent pas
et dégénèrent de bonne heure. L'ébauche larvaire avorte. D'autre part.
Eisig tient pour homologues l'ensemble constitué pai- la croix de la
rosette chez les Annélides et les Mollusques, aussi trouve-t-il un argu-
ment dans les conclusions de Conklin sur Crepiduki : La rosette et la
croix forment deux ébauches indépendantes et ne s'unissent que plus
tard par l'intermédiaire d'un cordon de cellules issu des ganglions céré-
broïdes formés aux dépens des cellules de la croix. L'organe apical repré-
senterait donc un organe indépendant, lequel ne s'agrégerait au cerveau
que secondairement. Eisig admet ainsi, comme conclusion, la dualité
de l'ébauche de l'organe apical et de l'ébauche du ceiveau chez Capitella.
mais il ne peut en donner de preuves directes.
Il ressort de la comparaison de l'embryologie de Profiila avec celle
de Nereis et de Capitella que les grandes lignes du développement sont
les mêmes chez ces trois annélides. La larvée de Protula. aussi bien que les
larves de Nereis et de Capitella, présente les arrangements caractéris-
tiques, croix et rosette; chez toutes les trois les cellules delà croix et de la
rosette se développent aux dépens des mêmes éléments, et l'ébauche des
ganglions cérébroïdes se forme de la même façon. L'unique différence est
due au moment de l'apparition de certaines cellules et à l'absence de
cils sur les cellules de la rosette de Capitella. Chez Protula. les cellules de
la rosette donnent de bonne heure naissance à la touffe ciliée, et, les
cellules de la croix en se multipliant forment l'ébauche des ganglions
.4. SOULIER 19
cérébroïdes. La suite du développement montre que le nombre des cellules
de cette ébauche s'accroît peu à peu et donne ainsi naissance à la plaque
céphalique. Dans la partie centrale de celle-ci, déjà composée de nom-
breux éléments, on aperçoit encore la touffe ciliée de l'organe apical.
Dès le moment o\\ ils apparaissent, les deux organes sont fusionnés en un
seul, mais, pas plus qu'EisiG pour Capitella, je n'ai pu établir si les deux
ébauches primitivement distinctes s'unissaient plus tard par l'inter-
médiaire d'un cordon cellulaire.
Les différences entre les premiers stades de développement de Protula
et ceux de Nereis et de Capitella sont des différences d'ordre secondaire,
telles que le moment d'apparition d'un certain nombre de cellules. La
cellule x^ se montre un peu plus tard chez Nereis que chez Capitella et
Protula. De même x~ n'apparaît qu'au stade 37 chez Nereis tandis qu'il
se forme au stade 26 chez Protula et Capitella. Les deux éléments a:^\
x^" se montrent à peu près en même temps chez Protula et Capitella.
Par contre, chez Nereis, x^ n'entre en division que beaucoup plus tard,
alors que sont déjà formées douze cellules issues de X et des descendants
de X, c'est à dire au cours du stade 128.
La cellule a;'' se montre beaucoup plus tôt chez Capitella, au stade 28 ;
elle naît au stade 35 (?) chez Protula et seulement au stade 41 chez
Nereis. Tl en est de même de l'initiale 31, qui se montre au stade 29 chez
Capitella, au stade 38 chez Nereis, et 40 environ chez Protula.
La rosette, chez Protula se montre au stade 39; chez Nereis, au stade
36. et, chez Capitella, au stade 47. Chez Protula la croix apparaît au stade
44. comme chez Nereis, et au stade 58 chez Capitella. Les cellules a^^-d^*
ne se développent donc que beaucoup plus tard chez ce dernier AnnéUde,
Le tableau suivant indique le moment d'apparition des diverees cel-
lules chez les trois Annélides et met en évidence les principales différences:
x' x' x'\x" x' M m. m' a''-d'^ a"-(i'*
Protula i: 2ti 27 35? 'iO 45 a6-:{9 ',1-44 ■
Mereis 21 37 ? '. 1 38 42 33-36 40-43 ( Slade
Capitella 17 26 l*8 28 29 33 ',4-47 55-58)
Chez Nereis, c'est au début du stade 64 que la segmentation spiralée
est remplacée par la segmentation bilatérale. Chez Capitella le mode
spiral persiste plus longtemps. Les cellules a'^'^-d^* se forment bilatéra-
lement au stade 55-58, mais A^-D'^ qui apparaissent au début du stade
20 NOTES ET BEVUE
128 se développent encore suivant une spirale enroulée à droite. Chez
Profnla,, la segmentation bilatérale s'établit comme chez Nereis au début
du stade 64. Les éléments a^^-d^^ se développent suivant une spirale
enroulée à gauche. Tl en est de même de l'initale M. A partir de ce moment
le mode de segmentation bilatéral s'établit définitive nent. La ceUule
x^ = d^^^^ apparaît dune façon prématurée puisqu'elle se forme au
début du stade 64 ; théoriquement elle ne devrait se former qu'au début
du stade 128, Elle naît sur la ligne médiane et ne tardera pas à se diviser
en deux cellules placées symétriquement à droite et à gauche de la ligne
médiane. On peut donc la regarder comme obéissant à la symétrie bila-
térafe D^autre part, les cellules de la croix a^*-d^*. et celles qui naîtront
ultérieurement se développent aussi selon le mode bilatéial.
FONDEES PAR
H. DE LACAZE-DUTHIERS
PUBLIÉES SOUS LA DIRECTION DE
G. PRUVOT ET E. G. RACOVITZA
Professeur à la Sorbonne Sous-Directeur du Laboratoire Arago
Directeur du Laboratoire Arago Docteur es sciences
Tome 57. NOTES ET REVUE Numéro 2.
IV
NOTES SUR QUELQUES ESPÈCES D'HYDOIDES
DE L'EXPÉDITION DU « SIBOGA »
A. BILLARD
Professeur à la Faculté des Sciences de Poitiers.
Reçue le 15 Mars 1918.
Dans cette courte note préliminaire je donnerai les diagnoses de cinq
espèces nouvelles d'Hydroïdes ainsi que des renseignements complémen-
taires sur une espèce de Plumulariidœ, antérieurement décrite par moi.
Toutes ces espèces ont été récoltées par l'expédition hollandaise du
« SIBOGA » dans la partie orientale de l'Archipel indien.
Zygophylax Sibogae. n. sp.
Hydrocaules polysiphoniques à ramification pennées ^. Rameaux
généralement polysiphoniques à la base, flexueux, nés à des inter-
valles irréguliers. Hydrothèques supportées par un long hydrantho
1. La plus grande colonie observée racs\ire 6 cm.
Notes et Revui:. — T. 57. — X» 2. * C.
22
NOTES ET REVUE
phore (fig. i), inséré sur mie apophyse ; cette apophyse supporte une
petite dactylothèque recourbée, fixée un peu latéralement. Souvent la
dactylothèque a été arrachée. Hydranthophores et leurs hydrothèques
disposés en deux rangées longitudinales, formant un dièdre aigu.
Hydrothèques séparées des hydranthophores par un diaphragme,
courbées sensiblement à angle droit dans leur tiers distal ; leur partie
proximale est renflée ventralement ; leur orifice est évasé et pourvu d'une
ou de deux stries d'accroissement. Hydranthes rétractés dans la partie
ventrue ; ils possèdent une douzaine de tentacules et ne
montrent pas d'attach ; latérale comme chez le Z. tizar-
densis Kirkpatrick ^ et le Z. grandis VanôhfPen ^.
Gonosome du type Coppinia qui présente de Nombreux
tubes ramifiés, pourvus de dactylothèques et entourant les
gonothèques sessiles, les unes simples, les autres composées.
Les gonothèques simples sont globuleuses, pourvues de
deux prolongements distaux recourbés et ouverts à leur
extrémité à maturité ; les gonothèques composées résultent
de la soudure de deux ou plusieurs gonothèques simples ;
elles ont les formes les plus variées et les plus irrégulières.
s^
HINCKSELLA n. g.
FiG. 1. Hydrothè-
que , hydran-
thophore et
dactylothèque
• de Zygophvlax
Siboçœ n. sp.
X 87.
Je propose de créer le genre Hincksella pour grou-
per certaines espèces antérieurement placées dans le
genre Sertularella et caractérisées par des hydrothèques
alternes dépourvues totalement d'opercule et présen-
tant un orifice arrondi entier. On peut placer dans ce
nouveau genre, outre l'espèce nouvelle décrite plus loin, le SyrUhe-
cium alternans Allman ^, le Sertularella cylindrica Baie ^, ainsi que
les Sertularella echinocarpa (Allman) ^, S. intégra (Allm.) ^, S. formosa
1. KiRKPATKlOK. — Report upon the Hydrozoa and Polyzo.i by P. W. Basset Smith Esq. Surgiou R. >'. etc.
{Ann. nat. Hist. [6], vol. V, 1890, p. 12, pi. IH, flg. 3).
2. Vanhoffen. — Hydroiden der Deutschen Sudpolar Expédition 1901-1903 {Deustche Sudpol. Exp. Bd. 11,
1910, p. 315, flg. 33 a-c).
3. Al,LM.\N. — Report on the Hydroida dredged by H. M. S. « Challenger », II. (Rep. Scient. Hesults Chall.
Zool., vol. XXIII, 1888, p. 80, pi. XXXVIII, fig. 2).
4. Bale. — On some new and rare Hydroida in the Australian Muséum collection (Proc. Linn. Soc. N. S.
ïraZes[2], vol. III, 1888, p. 765, pi. XVI, flg. 7). Voir aussi Ritchie ; Hydrozoa of the • Thetis ■» Expédition {Mem.
ot Austr. Mus., vol. IV, 1911, p. 847).
5. ALLMAN. — Ibidem, p. 57, pi. XXVIII, flg. 1.
6. Allman. — Diagnoses of new gênera and species of Hydroida (Journ. Linn. Soc. London., vol. XII, 1876,
p. 262, pi. XIII, flg. 3, 4).
A. BILLARD
23
Fewkes ^ et S. Hartlaubi Nutting ^, s'il est démontré que ces espèces ont
bien les caractères indiqués ; cette vérification s'impose à la suite des
observations de Levinsen ^ sur le S. magna Nutting *.
Hincksella Sibogae n. sp.
Tige polysiphonique à la base^. Tube principal divisé en articles
portant trois hydi-othèques ; de place en place les lignes d'articulation sont
peu marquées ou absentes. Rameaux régulièrement alternes naissant immé-
diatements au-desous de l'hydi'othèque supérieure de chaque article. Base
de chaque rameau présentant deux lignes
d'articulation obliques incomplètes. Rameaux
divisés en articles irréguhers comprenant,
soit une hydrothèque (fig. ii), soit deux, soit
plusieurs. Hydrothèques alternes, à bord cir-
culaire régulier, sans trace d'opercule ; adnées
sur la plus grande partie de leur hauteur,
se rétrécissant un peu vers la base ; cloison
de séparation c ont muée un peu au-dessous
du fond.
Les hydranthes conservés montrent une
vingtaine de tentacules entourant un hypos-
tome en forme de dôme, sans trace de cul-de-
sac abcaulinaire.
Gorothèque ayant la forme d'un cône à
bgjse déprimée et inséré par son sommet au-
d-^rfous do l'hydrothèque, mais latéralement.
Sertularella macrocarpa n. sp.
Hydrocaule monosiphonique de 2 à 3 cm.
Fig. II. Partie d'hydroclade du Hinct-
sella iSibogeen.s-p. x 51.
1. Fewkes. — Reports on the results of dredging... in the Carribean Sea etc. (Bvll. Mus. Comp. Zoo!.,
vol. VIII, 1881, p. 130). Voir aussi : Nutting : American Hydroids. P. II, The Sertularidae (Smithsort. Inst.
O. S. yat. Mus., Spec. Bull., 1904, p. 104, pi. XXVII, fig. 2, 4).
2. Nutting. — Ibidem, p. 104, pi. XXVII, fig. 5.
3. Levinsen. — Systematic studies on the Sertulariidae ( Ffdensfc. Medd. Ira den naturh. Foren Bd. 64, 1913
p. 277).
4. Nutting. — Ibidem, p. 103, pi. XXVII, fig. l.
5. Il s'agit de deux fragments dont l'un représente la partie basilairc et l'autre la partie terminale d'une même
colonie, leur ensemble atteint trois centimètres.
24
NOTES ET REVUE
environ; tige flexueuse, indistinctement articulée, dans certaines colonies,
à ent^'e-nœuds ^ égaux à trois hydrothèques dans d'autres, à entre-nœuds
inégaux, possédant alternativement en général une ou trois hydrothèques ;
cependant il existe des exceptions à cette règle et l'on compte quelquefois
d' ux ou quatre hydrothèques dans un entre-nœud ; parfois deux entre-
nœuds à une ou à trois hydrothèques se succèdent.
Hydroclades flexueux, naissant un peu au-dessous des hydrothèques ;
divisés en articles plus marqués
que pour la tige, chaque article ne
portant qu'une seule hydrothèque
(fig. m).
Hydrothèques alternes, sub-
cylindriques, adnées sur le tiers
environ de leur hauteur ; présen-
tant un orifice à trois dents : une
médiane ventrale et deux latérales,
l'opercule est en général absent,
mais il en subsiste des traces qui
font présager un opercule à trois
valves.
Gonothèques en forme d'am-
phore, à parois lisses, allongées,
pourvues d'un col étroit^ terminé
par un orifice.
Fia. III. Serttiliirclla mrieroc rpa n. sp. A. Partie d'iiyclrc-
claiic X 53 ; B. Gonothèque x 35.
Plumularia régressa n. sp.
Hydrocaule monosiphonique ^
divisée en articles hydrothécaux, sauf à l'extrémité oii il existe des arti-
cles intermédiaires, pourvus d'une d ictylothèque mobile. Dactylothèque
médiane inférieure fixe, bithalamique, largement échancrée ; dactylo-
thèques latérales mobiles courtement pédonculées, bithalamiques, à
chambre distale globuleuse, largement échancrée du côté de l'hydrothèque ;
enfin en l'absence d'article intermédiaire, il y a au-dessus de Thydrothèque
une dactylothèque mobile, bithalamique, à chambre distale échancrée.
Hydr»^ clades insérés sur une courte apophyse, latéralement à droite et
1. J'appellerai entre-nœud l'intervalle comprii? entre deux insertions consécutives d'iiydroelades.
2' Il s'agit d'un fragment de 0 cm. 5, représentant la partie distale d'une colonie.
BILLARD
25
à gauche, au niveau des hydrothèques ; ils débutent par un court article
basai suivi d'un plus long pourvu d'une ou de deux dactylothèques ;
puis vient une succession d'articles hydrothécaux et intermédiaires en
général, dont les dactylothèques possèdent respectivement les mêmes carac-
tères que celles de l'hydrocaule ; hj^drothèques de forme tronc-conique.
Espèce très voisine du P. huski Bale^, mais s'en distingup.nt par
l'absence de la dactylothèque postérieure
réduite ; peut-être y a-t-il persistance
d'un dactylotrème.
Halicornaria Sibogae n. sp.
Colonie de 4 cm. à hydrocaule mono-
siphonique, ramifiée en sympode héU-
coïde. Région hydrocladiale de la tige et
des branches divisée en articles par des
lignes d'articulation légèrement obliques ;
hj^droclades alternes, nés dans la partie
supérieure des articles, très près de la
ligne médiane, supportés par une courte
apophyse accompagnée de deux dac-ty-
lothèques axillaires et d'une dactylo-
thèque médiane située immédiatement
au-dessous. Chaque branche débute par
une longue apophyse pourvue d'une dac-
tylothèque ; le premier article hydrocla-
dial plus long est muni de deux dactylo-
thèques médianes inférieures.
Hydroclades divisés en articles pourvus d'une hydrothèque (fig. iv),
d'une dactylothèque médiane et de deux dactylothèques latérales. Hydro-
thèques allongées, montrant une forte courbure en S de sa face ventrale
et présentant distalement une courte partie hbre, fermée en arrière et
évasée ; bord de l'orifice muni d'une dent médiane très développée et
de trois dents latérales saillantes.
Dactylothèque médiane courte, muni d'un orifice terminal arrondi et
Fia. IV. Artidc hyiirothccal du Halkonuiiia
Sibo(,œ n. sp. x 70.
1. Bale. — Catalogm- of thc the australiaii hydroid Zoophytcs (Sydueij, 4", 1884, p. 125, pi. X, flg. 3;
p!. XtX, fit;. 34, 35). Voir aussi Bill.^RD : Les Hy<lrc! ic* do l'E.xpédition du Sil)Of;a I. Plunudariidœ (KésuU. des
EriAor. zool. bot. océan, et i/éol. l'i fwrd du « .Sibo'jtt '< l^ivr. LXX, p. 121, flfi. XI. et \t\. I, flg. 15).
26
NOTES ET REVUE
d'un orifice basai difficile à voir ; il existe aussi un petit orifice faisant
communiquer la cavité de l'hydrothèque et celle de la dactylothèque
médiane, au-dessous du point où celle-ci se sépare de l'hydrothèque.
Dactylothèques latérales courtes aussi, ovoïdes, restant bien au-dessous
du bord de l'hydrothèque et pourvues également de deux orifices : un
terminal et un basai difficile à voir.
Cladocarpus Sibogœ Billard. ^
FlG. V. Dactylothèque médiane du
Cladocarpus Sibogce Billard ;
A. Vue de profil, B. Vue de
trois quarts x 141.
J'ai eu l'occasion d'examiner, depuis la publication de mon mémoire
sur les Plumulariidœ du « Siboga » de nouveaux échantillons de cette
espèce, provenant de stations différentes. ^J'ai
observé un détail qui m'avait échappé lors de
l'examen de l'espèce type : toutes les dactylo-
thèques, qu'elles soient médianes inférieures,
latérales ou caulinaires possèdent, outre leur
orifice terminal en fente, un orifice basai (fig. v).
J'ai vérifié que ce caractère existe chez la forme-
type.
On trouve aussi chez le Cl. Sibogœ cette
petite languette intrathécale, située au-dessus
de l'orifice basilaire de l'hydrothèque (hydropore) et signalée par Ritchie
chez le Cl. bathyzonatus n. sp. ^, puis par Bale chez le Cladocarpella
muUiseptata n. sp. ®. Cette dernière espèce est pour moi identique au Cl.
^ibogœ, dont eUe possède tous les caractères ; la seule différence est que
les épaisissements internes des articles de l'hydroclade sont moins mar-
qués dans l'espèce du « Siboga » ; mais ce n'est pas là une différence
essentielle.
Les nouveaux échantillons examinés portent des gonothèques plus
âgées que dans le type : elles présentent à la base un court pédoncule et
elles sont légèrement courbées à leur extrémité distale, qui montre un
orifice ovalaire allongé.
Bale a créé pour son espèce un genre nouveau, le genre Cladocarpella^
1. Loc. cU. p. 71, flg. 57, 58 ; pi. IV, flg. 39.
2. Loc. cit. p. 861, pi. LXXXIX, flg. 2, 6, 11.
3. Bale. — VI. Report on the Hydroida collected in the Groat Australian Bight and other Localities (Biol.
Resuîts o1 the Fish. Experiments carried on by the F. I. S. « Endeavour », 1909-14, vol. III, 1915, p. 301, pi. XLVII
fig. 1, 5).
A. BILLARD 27
qu'il caractérise par ce fait que les phylactocarpes sont portés par plu-
sieurs articles proximaux de l'hydroclade, au lieu de l'être par le premier,
comme dans toutes les espèces jusqu'alors connues de Cladocarpus.
Mais il me semble qu'il vaut mieux laisser tout son sens à la définition du
genre Cladocarpus donnée par Allman ^, qui dit, sans restriction, que
les branches protectrices sont des appendices des hydroclades ; il n'y a
pas limitation quant à leur situation. Le genre CladocarpeUa est d'autant
moins justifié qu'il peut arriver, comme je l'ai observé, que certains hydro-
clades ne portent qu'une phylactogonie proximale.
Poitiers, le 9 mars 1918.
1. Allmax. — Report on the Hydroida dridgcd Ijy H. M. S. « ChallengtM- ". I. Plumularidce (Report scient.
lieculU Chall. ZooL, vol. VII, p. Ai-).
28 NOTES ET REVUE
V
UN CAS D'HERMAPHRODISME COMPLET
ET FONCTIONNEL CHEZ PABACENTROTUS LIVIDUS
PAR
MAURICE HERLANT
Eeçu le 14 août 1918.
L'hermaphrodisme semble être, chez les Echinides, une anomalie
extrêmement rare, Le seul cas qui, à ma connaissance, ait été signalé
jusqu'ici a été décrit par Viguier (00) chez Sphaerechinus granularis.
En ce qui me concerne personnellement je n'avais jamais rencontré un
seul hermaphrodite parmi les milliers d'exemplaires de Paracentrotus
qui me sont passés par les mains depuis plusieurs années, lorsqu'en
ouvi-ant un adulte de forte taille, péché le 20 mars 1918 dans la rade de
Villefranche, je fus frappé de l'aspect insolite de ses glandes génitales.
Cet individu, conservé au Musée de la Station zoologique russe, pos-
sède trois testicules normaux, turgescents, un testicule noirâtre, atrophié
et enfin une volumineuse glande mixte ; la moitié oraie de celle-ci est
un ovaire et tranche par sa coloration rosée sur la moitié aborale, qui
est un testicule : ces deux parties se continuent Tune dans l'autre sans
démarcation précise. Cette glande était remplie d'œufs mûrs et de sper-
matozoïdes très actifs et il m'a paru intéressant d'opérer F autofécon-
dation. Celle-ci réussit parfaitement et se produisit dès que les produits
génitaux furent mélangés dans l'eau de mer. Les œufs fécondés se sont
parfaitement développés jusqu'au stade pluteus, sans anomalie appré-
ciable ; les larves étaient très vigoureuses et ne se distinguaient en rien
de celles provenant de parents normaux. Il n'y avait ni tendance à la
polyspermie ni aucun indice d'un obstacle quelconque à l' autofécondation.
MAURICE HERLANT
29
Celle-ci toutefois ne se produisait qu'après que les produits génitaux
étaient sortis de la glande. La réaction d'agglutination de F. R. Lillie
etdeLoEB (13,14) présentait son aspect habituel, mais seulement en pré-
sence de l'eau de mer. Les œufs de la glande hermaphrodite étaient éga-
lement fécondables par les spermatozoïdes provenant des glandes pure-
ment mâles et par ceux d'autres individus ; de même, les spermatozoïdes
de la glande mixte étaient capables de féconder les œufs provenant de
femelles normales.
Des fragments des organes génitaux de cet oursin ont été fixés au
liquide de Bouin
et étudiés au
point de vue his-
tologique :
lo Glande
MIXTE. Sur la
plus grande par-
tie de leur trajet
les canaux cf et
9, bien que con-
tigus, sont dis-
tincts, ce qui
correspond à la
division macros-
copique bien nette de l'organe en une zone mâle et une zone
femelle. Mais en de nombreux points (fig. 1), ces deux structures se
continuent l'une dans l'autre et on voit des oogonies à différents stades
de développement et de nombreux œufs mûrs remplacer progressivement
les cellules de la lignée spermatique. Un même tube est ainsi successi-
vement purement mâle, puis mixte et enfin femelle. Aucun indice ne
permet de dire si l'une ou l'autre forme tend à s'étendre aux dépens de
l'autre.
20 Testicules normaux. Ces glandes ne présentent rien de parti-
culier.
30 Testicule atrophié. Cet organe, bien que contenant encore de
nombreux tubes séminifères en pleine activité, montre les traces indé-
niables de la présence d'un parasite ; malheureusement la fixation n'a
pas permis d'en déterminer la nature exacte, malgré le soin avec lequel
M. Tregouboff a bien voulu examiner mes préparations. Il convient
FlG. I. Coniii> (Ir
l'oi^îMiic hiiinaiihroditc dans la zone de transition entre la partie
nvlle et la partie femelle.
30 NOTES ET REVUE
donc, en attendant une occasion plus favorable, de ne pas insister sur
les rapports possibles, mais nullement démontrés, entre la présence de
ce parasite et le déterminisme de l'hermaphrodisme. Je ne mentiorme
le fait que pour que ma description soit complète.
*
* *
Il s'agit donc bien ici d'un cas d'hermaphrodisme complet et fonc-
tionnel chez un organisme à sexes normalement séparés. Il n'est pas
douteux que l'autofécondation, que j'ai réalisée expérimentalement,
se serait produite naturellement lors de l'évacuation- spontanée des
produits génitaux.
Des cas semblables d'hermaphrodisme accidentel ont été signalés
chez Asterias glacialis par Delage (02), Cuénot (98) et Buchner (11),
mais ces auteurs ne disent pas avoir fait l'épreuve de l'autofécondation.
L'origine de ces anomalies, qu'il serait d'un puissant intérêt pour la
théorie de la détermination du sexe d'exphquer clairement, est malheu-
reusement tout à fait inconnue. Je n'ai signalé la co existence d'im para-
site, dans le cas qui nous occupe, qu'à titre de simple indication. Il
semble toutefois aujourd'hui bien établi que le sexe n'est pas toujours
un caractère absolument fixe et que certains facteurs physiologiques,
ou peut-être pathologiques, même agissant très tardivement et sur des
organismes presque adultes, peuvent le modifier complètement. C'est
là un fait sur lequel Giard a déjà attiré l'attention dès 1888. Cuénot,
d'autre part (98), signale que chez certaines races locales ^d'Asterina
gibbosa il y a hermaphrodisme successif, les individus jeunes étant mâles
et devenant femelles à l'état adulte. Un phénomène semblable a été
décrit par Giard (00), chez Echinocardium cordatum,et par Gould (17),
chez Crepidula plana. Ce dernier auteur est même parvenu à saisir le
facteur probable de ce changement de sexe, dont le mécanisme se rappro-
cherait de celui découvert par Baltzer (14) chez Bonellia. Ces faits ne
sont d'ailleurs nullement en contradiction avec la théorie chromoso-
mienne de la détermination du sexe, à condition toutefois de lui laisser
une certaine élasticité que les formules de Goldschmidt (17) expriment
parfaitement.
Station zoologique russe, Ville franche-sur- 31 er.
MAURICE HERLANT 31
BIBLIOGRAPHIE
Baltzer (F.). Die Bestiminimg des Geschlechts nebst einer Analyse des Geschlechts-
dimorphismus bei Bonellia. (Mitt. Zool. St. Neapel, Bd. XXII, 1914, p. 1.)
Bx-ciiNER (P.). Uber hermaphrodite Seesterne. {Zool. Anz., Bd. XXXVIII, 1911,
p. 315.)
CuÉNOT (L.). L'hermaphrodisme protandrique d'Asterina gibbosa et ses variations
suivant les localités. {Zool. Anz., Bd. XXI, 1898, p. 273.)
Délace (Y.). Quelques expériences et observations sur les Astéries. {Arch. Zool.
exp. et gén., T. X, 1902, p. 237.)
GiAKD (A.). La castration parasitaire. Nouvelles recherches. {Bull. Scientifique,
1888, p. 12.)
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de Biologie, i août 1900.)
GoLDSCHMiDT (R.). A further contribution to the theory of sex. {Jour. exp. Zool.,
Vol. XXII, 1917, p. 593.)
GouLD (H. U.). Studies on sex in the hermaphrodite MoUusc Crepidula plana, I et IL
{Jour. exp. Zool, vol. XXIII, 1917, p. 1-70 et 225-250.)
LiLLiE (F. R.). Studies on fertilization V. {Jour. exp. Zool., vol. XIV, 1913.)
LoEB (J.). Cluster formation of spermatozoa caused by spécifie substances from
eggs. {Jour. exp. Zool., vol. XVII, 1914, p. 123.)
ViGuiER (G.). L'hermaphroditisnïe et la parthénogenèse chez les Echinodermes.
(C. R. Ac. des Se, 2 juillet 1900.)
32 NOTES ET REVUE
VI
SUR LA PRÉSENCE DANS LE DAUPHINÉ
DE i:anophele8 NIGRIPES STAEGER
PAR
EDMOND HESSE
Reçu le 15 Septembre 1918,
On sait qu'il existe en Europe trois espèces d'Anophèles : Anophèles
maculipennis Meig., Anophèles bifurcatus L., et enfin Anophèles nigripes
Staeger. Les deux premières espèces sont assez répandues en France ;
la troisième, décrite par Staeger (1839) sur un exemplaire de Danemark,
a été trouvée aussi en Scandinavie par Zetterstedt (1850) ; en Allema-
gne, par LoEW (1845) et Grûnberg (1910) (ce dernier l'indiquant comme
localisée sur les côtes) ; en Autriche, par Schiner (1864) (qui ne connais-
sait pas le mâle) et Strobl (1894) ; en Hollande, par Van der Wulp
(1877); enfin en Suisse par Galli-Valério (1913). Jusqu'ici, à notre con-
naissance du moins, elle n'a pas été signalée en France. Nous avons eu la
bonne fortune d'en capturer un certain nombre d'exemplaires des deux
sexes au cours de cette année ; ces exemplaires proviennent tous de
jardins, auvoisinage des habitations où les adultes pénètrent volontiers,
contrairement à l'assertion de Grûnberg (1910).
Le docteur Villeneuve, le diptérologue bien connu, nous signale qu'il
vient de recevoir un couple d'y! . nigripes capturé dans les Pyrénées par
Brolemann. Cette espèce existerait donc dans les deux massifs monta-
gneux principaux de notre pays. A Grenoble et dans les environs, elle
n'est pas rare et sans doute de nouvelles recherches la feront découvrir
dans d'autres locaHtés des Alpes et du reste de la France. Elle semble bien
avoir été vue déjà par Blanchard (1905), mais avec Ficalbi (1896) cet
EDMOND HESSE
33
auteur la considère comme une variété foncée et de petite taille de 1'^.
bifurcatus. L. Blanchard (1905) dit, en effet : « On trouve souvent des
individus beaucoup plus petits, d'un brun noirâtre, plus accentué ; les
plus gros spécimens tirent souvent un peu plus sur le jaune. »
Théobald (1901) en fait, au contraire, une espèce distincte, Galli-
Valério (1913) et Eysell (1912) se rangent à son avis, ce dernier auteur
la place même dans un genre distinct, le genre Cyclophorns. Sans aller
aussi loin, nous pensons qu'il s'agit là d'une « bonne espèce ».
Tous les observateurs ont noté sa taille plus petite, sa coloration plus
Fia. I. Aiopheles bifurcatus L. cT palpes
X 7. (L'extrémité rentlce des palpes
porte à sa base des poils longs et nom-
breux rassemblés en touffes. Los touffes
internes sont seules bien visibles ici.)
FlG. II. Atopheles higripes Stai ger o" palpes x 7. (Les poils
qui recouvrent la partie renflée des palpes soiït
courts et peu nombreux.
noire, l'accumulation des écailles le long des premières nervures longitudi-
nales du bord antérieur de l'aile, ce qui donne à ce bord une teinte foncée
nettement caractérisée. Aucun ne semble avoir remarqué les différences
manifestes de l'ornementation des palpes chez le mâle, sans doute parce
que ce mâle n'a été rencontré que rarement ; les anciens auteurs ne le
connaissaient pas ; Galli-Valério lui-même (1913), qui a décrit récem-
ment toute l'évolution de ce Culicide, déclare n'avoir étudié qu'un seul
mâle ; nous en avons examiné une vingtaine d'échantillons et nous avons
retrouvé dans tous les mêmes caractères différentiels des palpes.
Chez les deux espèces les palpes des mâles présentent à leur extrémité
un renflement en spatule qui affecte les deux derniers articles seulement ;
mais, tandis que dans VA. bifurcatus L., le premier des articles renflés
porte à sa base, du côté interne comme du côté externe, une touffe de
poils longs et serrés, nous ne retrouvons sur ce premier article, chez A.
34 NOTES ET REVUE
nigripes Staeger que des poils peu nombreux, largement espacés et
beaucoup plus courts. Chez les deux espèces, le dernier article du palpe
ne porte que de poils courts et rares. On peut voir nettement cette diffé-
rence sur les figures i et n qui sont la reproduction de photographies
d'après nature.
Chez les femelles on n'observe rien de semblable. Notons seulement
que les palpes sont légèrement plus renflés à leur extrémité chez A. ni-
gripes 9 que chez A. bifurcatus ç, en outre les écailles qui recouvrent
ces palpes sont plus serrées, plus denses pour la première espèce qui
semble ainsi avoir des palpes plus épais. Nous n'avons pas vu sur ces
palpes les petits amieaux gris blanc que Sergent (1909) indique comme
caractère différentiel de l'espèce.
Les recherches que nous poursuivons nous permettront peut-être de
découvrir les larves que nous n'avons pas observées jusqu'à présent ; nous
ne pensons pas qu'elles vivent à Grenoble, dans les creux des troncs
d'arbres comme l'a observé Galli-Valério dans le canton de Vaud ; les
jardins où nous avons capturé en assez grand nombre les adultes ren-
fermaient en effet des pièces d'eau, mais aucun arbre creux suceptible
de servir d'asile à leurs larves.
Grenoble, le l^r Septembre 1918.
INDEX BIBLIOGRAPHIQUE
1905. — ■ Blanchard (R.). Les Moustiques. Histoire naturelle et médicale. [Paris. R.
de Rudeval.)
1912. — Eysell (A.). Cyclophorus {Anophèles) nigripes Staeger (n. g.) (Archiv. fur
Schiffs-und Tropen-Hygien Bd. 16.)
1896. — FicALBi (E.). Revisione sistematica délie famiglia délie Culicidae europee.
{Firenze. M. Ricci.)
1913. — Galli-Valério (B.) und J. Rochaz de Jongh. Beobachtuugeu iiber Culici-
den. (Centralblatt fur Bakteriologie, Parasitenkunde und \Infektinskrankhei-
ten. Bd. 67. Erste Abtg. Originale.)
1910. — GrOnberg (K.). Diptera, Zweifliiger. {Die Susswasserfauna deutscfdands,
eine exkursionsfauna, von Dr. Brauer. Heft 2. A. Jena. Gustav Fischer.)
1845. — LoEw (H.). Dipterologische Beitrftge {Posen.)
1864. — ScHiNER (J.-R.). Fauna Austriaca. Die Fliegen (Diptera). {Wien. Varl
Gerold's Sohn.)
EDMOND HESSE 35
1909. — Sergent (Ed.). Les Insectes piqueurs et suçeuns. {Encyclopédie scientifique
du D'' Toulouse. Paris. O. Doin et Fils.)
1839. — Staeger (C). Systematik Fortegnelse over de hidtili Dauinark fiindne
Diptera. {Naturhistorisk Tidsskrift, II.)
1894. — Stkobl (G.). Die Dipteren von Steiermark. (Mittfi. Natur. Ver. f. Steiec-
mark. Bd. 21.)
1901. — Theobald (F.-W). a nionograph of the Culicidae or Mosquiloes (London).
1877. — WxjLP (F. -M. van der)- Diptera neerlandica ('s Gravenhague).
1850. — Zetterstedt (J.-O.). Diptera Scandinaviae disposita et descripta. (Lundae.)
TABLE SPÉCIALE DES NOTES ET REVUE
1917-1918. — Tome 57.
Articles originaux
Alexeieff (A.)- — Sur un Flagellé coprozoïte : Alphamnnas coprocola n. g., n. sp.
(avec 3 fig.), p. 1.
Billard (A.)- — Notes sur quelques espèces d'Hydroïdes de l'expédition du
« Siboga » {avec 5 fig.), p. 21.
CrÉNOT (L.)- — Note rectificative à propos de la géonémie de Cyrtaspis scutata
(Orth. locust), p. 12
Herlant (M.). — Un cas d'hermaphrodisme complet et fonctionnel chez Paracen-
trotus licidus {avec 1 fig-), p. 28-
Hesse (E.). — Sur la présence dans le Dauphiné de V Anophèles nigripes Staeger
{avec 2 fig.), p. 32.
Soui.TER (A.)- — La croix et la rosette chez Protula Meilhaci {avec 1 fig.), p. 14.
ARCHIVES DE ZOOLOGIE EXPÉRIMENTALE ET GÉNÉRALE
Tome 57, p. 1 à 45, pi. I
10 Juin 19 18
RECHERCHES SUR LE
DÉVELOPP^nilî^T IIE L\ CIRCOLATION
CHEZ
L'ÉPINOCHE
(Gasterosteus gymnurus Cuv.)
R. ANTHONY
Directeur-adjoint du Laboratoire maritime du Muséum d'Histoire nature
TABLE DES MA TIÈRES
I. Préliminaires 1
1. yiatériaux d'ôtudrs 1
2. Techuii|ue s\iivie 4
3. Bibliographie des prindpalis publications oil il est question du développement de la circulation
chez les Poissons téléostéius 7
II. Le développement de la circulation chez L'EPINOCHE 11
1. Données générales 11
2. Stades précirculatoires 14
S. Stades cardiaques 14
4. Première circulation 15
5. Deuxième circulation et ses complications successives 20
a. Les veines cardinales postérieures (p. 21). — a. Les vaisseaux céphalviues (p. 23). — y. Les
conduits (le Ciitier (p. 24). — S- Le réseau fasculaire vitellin (p. 26).
6. Les cliangements de position du cœur au cours du développement 34
7. La fréquence des battements cardiaques au cours du dé\ eloppement 36
«. Période des stades cardiaques (p. 36). — 8. Périodes des circulations primitiie et secondaire (p. 37) .
8. Aspects d'ensemble de la circulation après l'édosion 40
9. L'établissement de la circulation dans la nageoire caudali 41
III. Examen et discussion des principaux résultats outenus 43
Explication de la pi anche 45
I. PRÉLIMINAIRES
1. Matériaux d'études
Les recherches qui foni" l'objet de cette étude ont été effectuées durant
le printemps et l'été des années 1916 et 1917 à Maisons-Laffitte (Seine-
et-Oise).
L3 matériel, c'est-à-dire les Epinoches adultes qui ont servi aux féoon-
ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — T. r,7 . — F. 1. 1
2 R. ANTHONY
dations artificielles, en a été recueilli, pour l'année 1916, dans deux petit>
étangs situés dans des dépressions de terrain entre la Seine et la gare du
Champ de Courses sur le territoire de ce dernier. Ces étangs sont en com
munication d'une part l'un avec l'autre, d'autre part avec la Seine par
de larges canalisations en ciment fermées par des grilles de fer. IMais ces
communications ne sont c^ffectives qu'en hiver du fait de l'ascension du
niveau du fleuvs , en été, elles sont interrompues, et celui des deux étang?
qui se trouve en communication directe avec la Seine étant moins pro-
fond que l'autre se dessèche même complètement au moment des plus
grandes chaleurs. La faane de ces étangs est très riche et très variée
d'une façon générale ; les Epinoches qui y abondent appartiennent toutes
à l'espèce Gasterosteus gymiiurus Cuvier caractérisée surtout, comme l'on
sait, par l'absence de plaques osseuses dermiques dans la région caudale ^
Les femelles qui atteignent habituellement une taille plue forte que
les mâles ^ sont sensiblement plus nombreuses qu'eux ^.
Outre le Gasterosteus gymimirus, on rencontre encore dans ces étangs
les Poissons suivants :
Pungitius lœvis Cuvier *.
Esox lucius Linné.
Perça fluviatilis Linné.
Ahramis brama Linné.
Tinca vulgaris Cuvier.
1. Les espèces Gasterosteus aeitleattis Linné, semi armatus Cuv. et Val., gymnurus Cuv. proviennent vraisembla-
blement d'une espèce souche de laquelle elles se sont différenciées sous l'influence des conditions de milieu. Le*
espèces les plus cuirassées (forme aculeatus) abondent surtout, comme l'on sait, dans les eaux sauniâtres. II est
certain que les 8ubdi^^sions que l'on établ't parfois dans ces trois groupes ont une valeur beaucoup moindre au
point de vue de la Taxinomie.
2. La plus grosse Epinoche femelle que j'ai pu recueillir et qui était à l'état de maturité mesurait en longueur
totale 70 mlUim., et 55 millim. du centre de l'œil à la naissance de la queue. La longueur totale ne dépasse généra-
ement pas 60 à 65 millim. dans l'espèce G. gymnurus, à Maisons-LafiBtte.
3. Observation concordant avec celle de V. Fatio (Faune des Vertébrés de la Suisse, Vol. IV. Genève et Bfile
1882. Gasterosteus gymnurus, pages 93 et 95). D'une façon générale, partout où j'ai rc-cueilli des G. gymnurui, et
quelle que soit la saison, les femelles étaient plus nombre\ises que les mâles. Je ne veux parler ici que des récoltes
faites à l'épuisette ou à l'épervier.
4. V. Fatio (loco citato) considère l'Epinochette comme devant constituer un sous-genre spécial (Pungitius)
dans le genre Gasterosteus. Il me semble très légitime d'eu faire même un genre à part. Ce même autc\ir rapporte
(loco citato, page 61 , note 2) que certains observateurs nieraient que les Epinoches et les Epinochettes se rencon
trent ensemble aux mêmes stations. A vrai dire, les Epinochettes se trouvent généralement dans les endroits vaseux
et prennent souvent d'ailleurs de es fait une teinte noirâtre caractéristique) et les Epinoches dans les eaux claires.
Mais dans les étangs de Maisons-LaflBtte aussi bien que dans la Seine, on récolte à l'épervier ou à l'épuisette les unes
et les autres, les premières étant d'ailleurs de beaucoup les moins nombreuses. J'ai observé aussi l'association cons-
tante des Epinoches et des Epinochettes dans l'Oise et ses affluents (Creil, Beauvais, Clormont, Persan) où j'ai vu
parfois les secondes prédominer. J'ai obtenu très aisément des hybrides d'Epinoches et d'Epinochettes en fécon-
dant artificiellement des œufs de cette dernière espèce avec du sperme de la première. Les embryons ont été poussés
jusqu'au moment de l'éclosion et auraient pu l'être sans doute beaucoup plus loin aussi facilement que des embryons
d'Epinoches. L'œuf de l'Epinochette est sensiblement moins volumineux que celui de l'Epinoehe.
1
CIRCULAT 102^ CHEZ UEPINOGHE 3
Leu'ccicus rutilns Linnt.
Squalius cephalus Linné,
etc..
qui tous vivent également dans la Seine.
En 1917, j'ai surtout accompli mes pêches, d'une part dans un petit
étang caractérisé par une faune ichthy- 'logique sensiblement identique,
communiquant également avec la Seine, et, qui se trouve près le pont de
Sartrouville au voisinage de l'Hôtel Royal, d'autre part dans la Seine
elle-même aux environs du Champ de Courses.
J'ai trouvé, en 1916, les Epinoches à l'état de maturité dès le miheu
de Mars et j'ai rencontré encore à la fin de Juillet des femelles mûres.
En 1917, peut-être en rai; on de la longueur tt d ■ la rigueur de l'hiver, les
Epinoches ne vinrent à maturité qu'en mi-Avril, sans que la période de
reproduction se prolongeât pourtant au delà de la fin de Juillet.
Au moment de la maturité, les femelles d' Epinoches présentent de
chaque cô é du corps une volumineuse tumeur de forme allongée qui
débute au niveau de l'orifice génital (lequel fait fortement saillie) et se-
prolonge en s'élargissant presque jusqu'au point d'attache des nageoires
pectorales. L'ovaire qui constitue cette tumeur s'étend même générale-
ment un peu plus ava^i.t. Les organes viscéraux sont refoulés en avant
par la masse des œufs, et, il en résulte une forte saillie de la paroi ventrale
entre les deux ceintures thoracique et pelvienne. On reconnaît qu'une
femelle est à l'état de maturité complète lorsque cette tumeur est très
accusée ^, qu'elle est dure et ferme, et que les œufs paraissent à l'orifice
génital ^. Une compression légère les fait aisément sortir, et l'on s'aper-
çoit alors qu'ils sont tous égaux et bien transparents, d'une couleur légè-
rement ambrée. Le mélange d'œufs de tailles différentes, ainsi qu'un cer-
tain degré d'opacité de ces œufs, une très forte vascularisation des parois
1. En Juin 1917. j'ai recueilli dans l'étant; situé près le pont de Sartrouville d'assez nombreuses femelles pré-
sentant la double tumeur en question. maiS qui ne contenait que quelques œufs infécondables mélangés à un
quidc légèrement -visqueux et souvent trouble.
2. J'ai recueilli à Beauvais et à Clermont (Oise) des Epinoches à abdomen volumineux et qui, bien que la forme
de U tumeur abdominale ait été assez différente, auraient pu à première vue passer pour des femelles à maturité ;
eur cavité péritonéale contenait de volumineux métacestodes de Schistodaclylws. De m?me, j'ai recueilli à Cler-
mont (Oise) et près de Montataire, dans un ruisseau qui se jette dans l'Oise, des Rpinoclies dont le foie était bourré
de kystes de Triœnophorus ; ces kystes parfois très développés arrivaient à détruire le foie en très grande partie.
L'abdomen est également dans ce cas augmenté de volume et présente souvent îles bo.sselures particulières. J'ai
remarqué que dans ce dernier cas de parasitisme (qui s'observe d'ailleurs aussi bien sur des jeuneR que sur des
adultes, sur des mâles que sur des femelles) les produits génitaux des femelles ne mûrissent pas.
4 B. ANTHONY
ovariennes indiquent au contraire, à coup sûr. un état de maturité in-
complète. Il est dans ce cas inutile d'essayer la fécondation.
Je n'ai jamais observé (et mes constatations infirment sur ce point
celles de V. Fatio^) chez les mâles des Epinoches de Maisons- Lafïit te de
saillie comparable de la paroi abdominale ; les testicules restent relative-
ment peu volumineux tout en devenant, comme la dissection le montre,
durs et tendus. Les couleurs des mâles deviennent, on le sait, plus vives
et plus brillantes à l'époque de la reproduction ; je l'ai constaté, bien
entendu, sur les Epinoches de Maisons-Laffitte qui, au point de vue des
caractères sexuels secondaires, se comportent comme les Epinoches de
partout. Notons par parenihèses qu'il résulte de mes observations que
l'un des meilleurs de ces caractères sexuels secondaires serait l'aspect de
l'œil qui est vert émeraude chez le mâle seulement. Ce caractère était
toujours très net et très marqué pendant la période de reproduction chez
les spécimens que j'ai examinés, alors que les autres caractères sexuels
secondaires classiques l'étaient parfois plus faiblement.
2. Technique suivie
J'ai procédé pour faire ces recherches à des fécondations artificielles
que j'ai effectuées sur dix séries d'œufs :
Année 1916
Série du 20 Mars Fécondation 16 h.
— 1er Avril — 13 h. 30.
— 10 Av/il — î> h.
— 24 Avril — 11 h.
— 5 Mai — 22 h.
— 27 Mai — 22 h.
Année 1917
Série du 16 Avril Fécondation 16 h.
— 2 Mai — 20 h. 25.
• _ 13 Juin _ 16 h,
— 20 Juin — 17 h. ^
On opère de la façon qui suit :
On choisit une femelle bien mûre (et l'état de maturité se reconnaît
1. V. Fatio : loco citato, page 9ô.
2. Une dernière fécondation a été clTictuée lo 24 Juillet 1017 à 1 7 luures à l'aide d'exemplaires i-rovenant d'un
petit ruisseau qui se jette dans l'Oise au voisinage de son confluent avic le 'l'hérain (près Montataire).
I
CIRCULATION CHEZ UEPINOCHE 5
aux signes indiqués ci-dessus ^), et l'on provoque par légères pressions
latérales sur l'abdomen la sortie des œufs qui sont reçus à sec dans un
verre de montre. Si cette opération est faite avec soin la femelle n'est
nullement endommagée et peut continui^r à vivre. Les îteufs sortent agglu-
tinés par du mucus.
Prenant alors un mâle qu'il est nécessaire de sacrifier '^, car ses organes
génitaux ne sont jamais suffisamment gonflés pour que la sortie du sperme
puisse être provoquée par l'expression de l'abdomen, on lui ouvre le-
ventre aux ciseaux fins et on enlève à la pince les organes mâles. Ces der-
niers placés dans le verre de montre sont dilacérés à l'aide d'aiguilles et
exprimés à la pince. Après avoir eu le soin d'assurer le mélange du sperme
ainsi obtenu et des œufs, on ajoute après une minute environ un ou deux
centimètres cubes d'eau.
Cette méthode de fécondation à sec est celle que l'on appelle la méthode
russe. Henneguy ^ qui l'a employée pour la Truite remarque qu'elle donne
beaucoup plus d'œufs fécondés que la méthode qui consiste à mélanger
dans l'eau le sperme et les œufs, et, cela, en raison du fait que les sperma-
tozoïdes meurent rapidement au contac!) de l'eau. En ce qui concerne
l'Epinoche, j'ai également constaté la supériorité de la méthode russe,
car il est rare que parmi les œufs ainsi traités, il en reste un seul qui ne se
développe pas J'ai remarqué aussi que, lorsque l'on effectue la féconda-
tion dans l'eau, plus il y a d'eau, plus la proportion d'œufs non fécondés
est grande
Au contact de l'eau le mucus se durcit sans perdre sa transparence, et,
les œufs restent alor? réunis en grappe tels qu'on les trouve dans les nids .
Au bout d'un quart d'heure environ, on transporte les œufs ainsi
fécondés dans un petit cristallisoir préalablement rempli d'eau très pure.
Celle du puits artésien do Maisons-Laffitte que l'on trouve dans la
plupart des habitations de la ville convient d'une façon parfaite, car elle
est à peu près dépourvue d'organismes et de h' mon , l'emploi de l'eau des
étangs m'a paru devoir être rejetée, car outre qu'elle n'est ni claire, ni
propre, elle contient un grand nombre de petits Invertébrés susceptibles
d'attaquer les larves lorsque se produit l'éclosion. L'eau doit être changée
aussi souvent que possible au cours de l'incubation. Au moment de l'éclo-
1 . Voir ]):igos 0 L't 4.
2. On avait déjà fait cette constatation. (Voir J>EE rt IIKXNECUY : 'l'raitô ili s niéfhoJcs (icliiii<|tios de l"Anati)-
niie microscopique Paris. O. Doin 1896, page Z?A.)
3. L. IlKNNEGUY. Rechercties sur le déveloiiponirut dis l'oi-isons nsscn.x. Thrse Do t. ia Sciewejs. Paris Y. Alain.
1889. Introduction, pag» 3.
6 R. ANTHONY
sion , j 'a j outa' s qnelq[ueg végétaux aqua tiques recueillis dans les étangs et que
je lavais largement et soigneusement au préalable à l'eau du puits artésien
pour ne pas risquer d'introduire en même temps des organismes nuisibles.
Au moment de la résorption totale du vitellus, et même un peu aupa-
ravant, j'ai remplacé l'eau du puits artésien par de l'eau des étangs ayant
reposé et soigneusement filtrée au préalable sur une fine mousseline des-
tinée à éliminer les organismes les plus volumineux ; les organismes de
petite taille qui passaient à travers cette mousseline étant destinés au
contraire à servir à la nourriture des larves dont je complétais l'alimen-
tation généralement par un peu de sang.
Il est à noter aussi qu'il est préférable d'augmenter la quantité d'eau
à partir de l'éclosion. On en évite ainsi réchauffement rapide, et la pré-
sence des végétaux dispense de la changer souvent. Fréquemment, et
malgré les précautions prises, les œufs se recouvrent d'un dépôt qui les
obscurcit de plus en plus à mesure qu'ils avancent en âge. On les en débar-
ras?e facilement en les agitant fortement à l'aide d'un pinceau léger entre
les poils duquel on les force à passer.
Notons encore que le mucus durci qui les relie les uns aux autres
rend leur observation parfois difficile ; il est assez souvent nécessaire de
les séparer. Cette opération, dangereuse à effectuer au début du dévelop-
pement, le devient de moins en moins avec le temps, les œufs augmen-
tant progressivement de tension. Elle peut se faire d'un coup sec à l'aide
d'une aiguille recourbée montée sur un porte aiguille et que l'on introduit
Cintre d3ux œufs contigiis.
Mes élevages ont été effectués à la température moyenne de l'appar-
tement et avec une lumière d'intensité moyenne. Ils ont pu être pour-
^suivis jusqu'à l'acquisition de la forme adulte.
Je me suis borné dans ces recherches à des observations sut le matériel
vivant et ai eu surtout en vue de préciser les diverses phases successives,
du développement de la circulation depuis l'apparition du cœur jusqu'au
moment où commence à s'établir définitivement la circulation de la
nageoire caudale. J'a' cependant laissé de côté bien des points, notam-
ment celui du développement des systèmes portes hépatique et rénal.
Il est peu de questions embryologiques spéciales qui soient aussi con-
troversées que celle du développement de la circula ion chez les Poissons
téléostéens. Cela tient sans aucun doute à la grande difficulté pratique
de ce genre de recherches : dans ce domaine la méthode des coupes ne
saurait iuffire, car si. sur des coupes, on peut voir la place des vaisseaux
CIRCULATION CHEZ L' EPI N OC HE 7
par rapport aux autres organes et préciser leur origine, il est impossible
par contre de fixer d'autres détails, notamm3nt de préciser le sens du
courant sanguin, et, c'est évidemmeni; là un point essentiel. Seale l'obser-
vation du matériel vivant (œufs et embryon; éclos) peut renseigner à ce
égard. Cette observation, parfois impossible à réaliser lorsque l'œuf est
peu transparent, est toujours difficile, longue et pénible dans les cas qui
peuvent être considérés comme les plus favorables à cet examen (ceux
dôs œufs bien transparents du Gasterosteus ou du Belone par exemple).
Comme le fait remarquer très justement C. Vogt ', les yeux se fatiguent
SI rapidement à ce travail que l'on finit par croire qu'il se produit des
courants là où il n'y en a point en réalité, et, par ne plus pouvoir discerner
leur sens. Cette difficulté augmente à mesure que l'embryon avance en
âge, car il davient de plus en plus mobile, de moins en moins transparent.,
en même temps que les vaisseaux sont de plus en plus nombreux et se
croisent ou se recouvrent de plus en plus les uns lei autres.
Mes observations ont été faites à la loupe binoculaire stéréoscopique
sous de très forts grossissements.
:^. Bibliographie des principales publications où il est question du développement
de la circulation chez les Poissons téléostéens
Voici telle que j'ai pu l'établir la liste des principales contributions
antérieures et qui intéressent plus ou moins directement le point de vue
spécial auquel 33 me uiis placé, c'est-à-dire le développement de la cir-
culation, en d'autres termes du cours sanguin, chez les Poissons osseux^.
OBSERVATIONS RELATIVES A I.A NATDRE
DATES DE LA CONTRIBUTION
RÉFÉRENCES
1831 Indications relatives au Virprintis dobnlai^. . C. (i. Carus : Brlanterungstafel zur vergl. Aoat. Anal.
Heft. m Leipzig 1831
1832 Indications relati\e8 au Blennius (Zoarces) Kathke : Abhandlungen zur Blldungs und Entwick-
viviparui \.. lungsgesch. a. Mcnsclici' und iltT Thiere. 2 Th. 183:2
et 1833.
1835 K. E. VON Baer : Untersuchuiig^^n tlljer die Knt«rick-
lungsgesch. der Fische. Leipzig 1835.
1837 K. K. VON Baer : Entwickelungsgcschlchte der Ttuers
FI Thcil. Kœnig-it.rrg 1837.
1. C. VOOT : Bmljiyologie dos Salinones. in Histoire rutturelle des Po^nonii d'enu donre de V Europe eenlrûU
par L. Agassiz. Neufthâtel 1842.
2. Les travaux les plus imporf.ants et qu'il convient particulièrement de coiusulti-r sont marqués d'uu asté-
risque (•).
3 Le Cyprimus dobula l.. d. ." ancli'iis ajtfiurs s.-rait tnutOt U SqualiM leuciteus L. . e Squali»* esphiUv* L.
■et VVIdus melaTWtiii H( ek.
R. ANTHONY
OBSERVATIONS RELATIVES A lA NATURE
DE lA CONTRIBUTION
RÉFÉRENCES
1842 Coregonus palea Cuv. Etuilc rL'iiiarfjual)le au * C. VocJT : Embryologie des Salraones ; in Histoire natu-
point de vue de l'illustration. relie des Poissons d'eau douce de l'Europe centrale,
par L. Agassiz Neufchâtel 184...
1856 Esox lucius L.
1858
1861 Truite.
AUBERT : Beitrage zur Entwickclungsgeschichtc der Fis-
che. II. Die Entwickelung des Ilerzens und des Blutes
im Hechtei Zeitschr /. Wiss. Zool. Bd. VU. 1856.
K. B. Reichert : Beob. uber die ersten Blutgefàsse
Bildung sowie Uber die Bewegung des Blutes in den
selben bei Fischenibryonen Arb. des Phys. InttûuU zu
Breslau 1858.
Lereboullet : EoeherclTS sur le développement de
la Truite. Annales des Se. nnturelles. IV Série. Zoolo-
gie T. XVI. 1861.
Lereboullet : Ecchcrches d'embryologie comparée
sur le développement du Brochet, de la Perche et de
l'Ecrevisse. Mémoires des Savants étrangers. Académie
des Sciences 1862.
J. A. llYDER. A contribution to the Embryography of
osseous flshes with spécial référence to the dev. of
the C^od. Report of Commiss. of Fish and Figherie!<.
V. S. F. C. 1882.
Edw. E. Prince. On the Ncst and Development of G s-
terosteus spinachi'X at the St-Andrew's Marine Labora-
tory. The Annals and Mag. Nat. Hist. Vol. XVI. 18S:..
1885 Apeltes quadracus Mitch., C'iupea sapidissima J. A. Ryder : On the development of osseous flshes
Wilson, Ictnhmis alhidus Lcsuour. including marine aud frcshwator forms. Rep. of Com-
miss. of Fish and Fisheries. U. S. P. C. 1885.
Esox Ivcivs L.
Perça fluviatilis L.
Scardinius erythrophthalmus L.
tion caudale).
(Circula-
Gadus morrhua L-, Apeltes. Idus melanotus
Heck., Tylosurus, Salmo, Carassius, Siphonos-
toma, Gambusia. Cottas. Alosa.Ciibium, Pare-
hippus, EUiacate. Osmerus, Pomolobus. (Indi-
cations très sommaires.)
Spinaehia vulgaris Jlitch. (Brève et très insuf-
fisante description sans figure.)
1886 Perça fluviatilis L., Belone acus Risso, Blennins,
Syngnathus, Gobius (contient des renseigne-
ments importants).
1836
• F. Wenckebach. Bcitr. zur Entwickelungsgesch. der
Knochenfisehc. Arch. f. Mickr. Anal. Bd. XXVIII.
1886.
H. E. ZiEGLER : Uber die Enstehung der Blutkorpcr-
chen bei Knochenfischembryonen. Tagebl. 58 Vers. I).
Naturf. Aertze. 1886.
Perça fluviatilis L., Salmo salar L., Esox lucius * il. E. ZiEGLER : Die Enstehung des Blutes der Knockiii-
L., Belone acus Risso., Syngnathus acus fischenibryonen. Arch. Mickr. Anat. 30. 1887.
L. (contient des renseignements importants).
1888 Labrax, Vranoscopus.
1888 Revue générale.
Athtrina. (Circul. de la queue).
Avarrhichas lupus L. (PI. XX, XXI, XXH,
XXVI, XXVIl). Représentations de la
circulation de la nageoire caudale, du vitel-
lus, de l'intestin postérieur. Voir aussi (PI.
XIII) la circiUation caudale au début chez
le Cottus et chez le Gohius, (PI. XVI) la cir-
F. Raffaele. La uova gallegianti c le larve dei Teleos-
tci nel golfo di Xapoll. Mittheil. aus. d. zool. St. zu
Neripel 1888.
Hochstetter : Beitrage zur vergl. Anat. und Entw. des
venensystems der Amphibien und Fische. Morphol.
Jahrb. Bd. XIII. 1888.
F. Raffaele : Sulla spos. ixistcmbrionale délia cavita
alid. nei Teleostei. Mittheil. aus. d. zool. St. zu Neipel
1889-1891.
W. C. .Mac Intosh and Prince : On the development and
Life history of the Teleostean food and others flshes.
Trans. of the R. Soe. of Edinbiirgh. Vol. XXXV. Part
m n" 19. 1890.
CIRCULATION CHEZ UEPINOCHE
Q>
OBSERVATIONS RELATIVES A LA NATCRE
DATES DE I.A CONTRIBUTION
culation embryonnaire du Liparis, et (PI.
XXVIII) la circulation de la partie moyenne
du tronc et de la nageoire caudale chez l'em-
bryon du Salmo salar L.
(D'une façon générale les figures de ce
mémoire relatives à la disposition embryon-
naire des vaisseaux sont peu claires).
1891 Serranus atrarius.
(Cœur et Aorte au cours du développement).
1891 Aperçu général.
RÉFÉRENCES
1893 Aperçu général.
1894 Salmonidés.
1894 Salmonidé:*
1896
Salmonidés.
(Circulation
cardinale postérieure-Aorte).
H. V. WiLSON : The cmbryology of the Sca basa. Bull,
of the U. S. Fish Commission. Vol. IX. 1891.
HOCHSTETTER : EntwickiUingsgesschicktc des gcîils-
systems. Ergeb. Anat. und Enlwickelungi lehre Bd.
I. 1891.
C. H. EiGENMANN : On the viviparons flshes of the Paci-
fic coast of North America. Bull, of U. S. Fishes
Commission. Vol. XII. 1892.
F. HOCHSTETTER : Entwiekelung des Venen Systems der
Wirbeltiere. Ergebnisse ton Aniitomie und Enticick-
lung!:. Bd. III. 1893.
J. SOBOTTA : Uber Mesoderm. Tlerz. Gefâss und Bhirbil-
dung bel Salmonidcn. Verh. der Anat. ges. zu .Strass-
burg. 1894.
ZiEGENHAGEN. Ueber das Gefàsssystems bel Salmoni-
dembryonen. Verh. d. Anat ges. zu Slrassburg. 1894.
ZiEGENHAGEN : Ueber die Entwiekelung der Cirkula-
tion bei den Telcostiern insbesondere bei Belone.
Verh. der Anat. ges. zu Berlin, 1896.
M'. FÉLIX : Beitrage zur Eutwickelungsgesischtc d.r
Salnioniden. Anatom. Hefte Bd. VIII. 1897.
1902 Salmonidés.
1906 Revue générale.
190G Eevue générale.
1908 Carassius auratus L.
(Cette note contient d'importantes indica-
tions relatives à la circulation vitellinc),
1909 Résumé préliminaire du travail qui suit.
1910 Belone acus Eisso., Gobius capilo C. V., Syngna.
thu.f actts L., Cristieeps argenlatus Risse,
Exoceius volitans L., Uranoscopus scaber L.
(.Mémoire très important et (|ui corrige des
erreurs d'auteurs antérieurs).
J. SoBOTTA : Ueber die Entwiekelung des Blutes des
Herzens und der grossen Gefâss der Salmoniden.
Anat. Hefte Bd. XIX. H. 3. 1902.
S. MOLLIER ; Die Erste Entwiekelung des ilerzens der
Gefasse und Blutes (Tclcostier) in Handbueh >on
rergl. und e.rper. Entuickelungs lehre der Wirlbeltiere.
Ose. Hcrtwig. Vol. I. léna, 1906.
HOCHSTETTER : Die Entwiekelung des Blutegefasàsys-
tems (Teleostier) in Handbueh von Vergl. und eiper.
Entwickelungs lehre der Wirbeltiere. Ose. Hertwig. Vol.
III. léna, 1906.
* WiNTREBERT : Sur la première circulation veiaeuse du
Cyprin doré. C. li. Acad. d^s Hcienres. G Juillet 190^.
J. BORCEA : Quelques observations sur la circulation em-
bryonnaire chez les Téléostéens. Bull. Soc. Zoolojiqit*
de France, 1909.
• J. BORCEA : Observations sur la circulation embryon-
naire chez les Téléostéens. Ann. Scientif. de VCnirer.
.lité de Jassy, liUO.
10
R, ANTHONY
U3
PÛ|
tu
CIRCULATION CHEZ U EPI N OC HE
11
Nous possédons en ; omnie
qxielques indications très brèves
et très incomplètes relatives à
la circulation au cours du déve-
loppement chf^z la Spinachia
(Edw. E. Prince) et chez VApeltes
(Ryder). Mais le genre Gasteros-
ieus ne semble point, si nos infor-
mations sont exactes, avoir été
étudié sous ce rapport.
D'une manière générale les
travaux énumérés dans cette liste
ont trait à des descriptions de
stades isolés ; aucun auteur, sauf
C. VoGT dans quelque mesure,
ne semble avoir ccmp^ètenient
suivi les modifications du cours
circulatoire pendant la période
embryonnaire d'une forme dor-
née.
IL LE DÉVELOPPEMENT DE
LA CIRCULATION CHEZ
L'ÉPINOCHE
l. Données générales
Si l'on s'en rapporte à ce que
l'on cbf-ervo dans le genre Gas-
terosteus, il semble que l'on
puisse artificiellement admettre
trois périodes dans le développe-
ment de la circulation des Pois-
sons téléostéens.
a. La période des stades car-
diaques qui débute avec la pre-
mière apparition du cœur (du
3« au 7^ jour, suivant les cas,
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tant entre, d'une part, la rapidité du développement
chez l'Epinoche, et, d'autre part, la température et la
pression. J., Jours. — T., Températures. — P., Pres-
sions. — 20 M. 191f etc., indications des séries com-
plètes qui ont été utilisées pour établir ce grapfiique. —
/)., Durée du développement jusqu'à l'éclosion. — T.,
Température nioyent e pendant le développement. —
/'., Pression moyenne pendant le développement. Se
reporter au table^au pour la lecture de ce graphique
qtii est simplement approvimatif.
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CIRCULATION CHEZ UEPINOCHE
13
chez l'Epinoclie) et finit lorsqu 'apparaissent les premiers vaisseaux (du 6'=
au 11^ jour, suivant les cas, chez l'Epinoclie) qui sont ceux des arcs bran-
chiaux n° 1 et les racines de l'aorte.
(3. La période de la première circulation qui débute avec l'apparition
des premiers vaisseaux susindiqués et est caractérisée par la constitu-
tion d'un circuit sanguin complet, mais très simple, qui se compliquera
plus tard f)ar additions successives.
y. La période de la deuxième circulation qui débute lorsque se for-
ment les vaisseaux veineux du corps embryonnaire qui aboutissent à la
FiG. III. I. II. III. IV^. Derniers stades de la période précirculatoire. Région antérieure de l'embryon : V. o., Vési-
cule oculaire. — C, Cristallin. — F. a., Vésicule auditive. — V. ol., Vésicule olfactive. — C. a., Cer-
veau antérieur. — C. m., Cerveau moyen. — C. p., Cerveau postérieur. Denii schématique.
constitution des canaux de Cuvier. Elle conduit directement par ses
complications successives à la circulation de l'adulte.
Il est à noter d'une façon générale, et ainsi que le montrent les ta-
bleaux et les graphiques ci-joints que le développement de la circulation,
ainsi d'ailleurs que le développement d'une façon générale, est dans l'en-
semble d'autant plus rapide que la température est plus élevée. Ce rapport
paraît être plus net (voy. fig. i) pour les températures élevées que pour les
basses températures. Les variations de la pression ne suivant pas exacte-
ment, comme l'on sait, celles de la température, il s'ensuit qu'elles ne con-
cordent pas aussi bien avec les différences de rapidité du développement.
(Voy. le tableau ainsi que les grapliiques qui constituent les figures let ii^).
1. Les températures et pressions qui m'ont permis de dresser le tableau et d'établir les ur.iphi'iues m'ont été
fournies par M. Péroux, de Jraisons-I.affitte, qui a aimablement mis à ma disposition 5;:i précieux registres d'ob-
servations météorologiques.
14
R. ANTHONY
2. Stades précirculatoires
Je me bornerai en ce qui concerne la période précirculatoire, et à
seule fin de bien préciser le point de départ de mes observations, à repré-
senter (fig. m) quatre aspects successifs delà région antérieure de l'embryon
durant la période qui précède immédiatement la première apparition du
cœur. Pour la compréhension de cette figure la légende paraît devoir
suffire.
3. Stades cardiaques
La première ébauche du cœur se montre visible par transparence sur
la ligne médiane au niveau du cerveau postérieur et à peu près à mi-dis-
tance entre d'une part sa jonction avec le cerveau moyen et d'autre part
la vésicule auditive, entre le deuxième et le sixième jour après la féconda-
tion, suivant les cas. Elle se présente sous
l'aspect d'une tache sombre qu'on aper-
çoit mal définie d'abord, puis qui s'étend
à droite et à gauche pour finir par barrer
un peu obliquement d'habitude le tube
nerveux (Voy. fig. iv. I). de telle manière
que son extrémité gauche, la future oreil-
lette, est un peu plus antérieure que son
extrémité droite, le futur ventricule. Peu
après, l'ébauche du cœur présente l'aspect
d'un tube coudé à angle très obtus ouvert
vers l'arrière, et, dont le sommet coïncide
à peu près avec la ligne médiane de l'em-
bryon. Il ne sort pas encore à ce stade des
limites du système nerveux central (voy.
fig. IV. II) comme il fera plus tard. C'est à ce moment que j'ai perçu les
premiers battements.
Peu à peu le cœur se déplace vers le côté gauche, et, c'est à peu près
au moment où l'entrée de l'oreillette atteint le bord du corps de l'embryon
que l'on aperçoit les premières taches pigmentaires des téguments de
ce dernier; elles sont situées dans la région moyenne du corps, à partir
de la limite qui sépare le cerveau moyen du cerveau postérieur et sont
abondantes surtout au niveau des futures ébauches des nageoires pecto-
rales.
/. //
Fig. IV. I. II. Premiers stades cardiaques :
C, Cœur. — O., Oreillette. — F.,
Ventricule. Demi-scliématique.
CIRCULATION CHEZ UEPINOGHE
15
Dans un lot d'œiifs péchés le 23 Mai 1916, j'ai remarqué un individu
dont l'oreillette se trouvait à droite et le ventricule à gauche. Par la suite
la circulation embryonnaire fut renversé"'. Cette anomalie a son intérêt,
car elle reproduit la disposition observée normalement par J. A. Ryder
chez l'embryon d'un autre Gastérostéidé, VApdtes quadracus Mitch ^
Dans le stade représenté figure v et qui est caractérisé par l'appari-
tion d'ébauches nettement visibles de nageoires pectorales, le cœur a
augmenté de volume, et, s'est tellement
déplacé vers la gauche que l'extrémité
libre de son oreillette dépasse sensible-
ment les limites du corps embryonnaire
proprement dit. Des bords antérieurs
et postérieurs de l'ouverture auriculaire
on voit partir les parois péricardiques.
A l'entrée du cœur, les globules san-
guins animés d'un léger mouvement de
va et vient semblent obéir à ses pulsa-
tions.
La circulation va s'établir. C'est à ce
stade que l'on perçoit les premiers signes
de l'activité de l'embryon.
4. Première circulation
FiG. V. Dernier stadf cardiaque : 0., Oreillette.
— V., Ventricule. — P., Paroi péricar-
dique. Le pigment du corps embryonnaire
n'a pas été représenté. Demi-scliéina»
tique.
Les débuts de la circulation coïnci-
dent chez l'Epinoche avec l'apparition
du pigment dans l'œil et le resserre-
ment de l'inflexion qui sépare les cerveaux moyen et postérieur. Dans
le stade représenté figure vi la paroi postérieure du cerveau moyen et
la paroi antérieure du cerveau postérieur sont au contact. Le cœur s'est
porté davantage encore à gauche, de telle sorte que son angle de cou-
dure coïncide presque maintenant avec le bord du tube nerveux. A ce
moment le ventricule se prolonge par deux petits canaux transversaux bien
endigués situés au niveau de l'extrémité supérieure des vésicules audi-
tives ; ce sont les arcs vasculaires branchiaux n° 1 dont le développe-
ment précoce a été constaté chez tous les Téléostéens. Les globules san-
1. J. A. Ryder, 1882 et 1885.
16
H. ANTHONY
guins animés d'un mouvement très net de va-et-vient forment sur le
vitellus, à l'entrée du cœur, soit deux courants principaux, antérieur et
postérieur, soit trois courants, antérieur, moyen et postérieur. On peut
suivre le mouvement de va-et-vient des globules à l'intérieur même
du cœur et dans les arcs vasculaires branchiaux.
Ces derniers se continuent bientôt en arrière par deux petits canaux
qui se rapprochent à mesure qu'ils
s'éloignent du cœur et finiront par se
réunir. Ce sont les ébauches des bran-
ches d'origine de l'aorte. La constata-
tion de ces fajts de développement
corroborent les résultats obtenus par
les différents auteurs sur les divers
Téléostéens qu'ils ont étudiés. Le cir-
cuit sanguin primitif se constitue alors
rapidement.
Quand il y a trois courants sur le
vitellus à l'entrée du cœur, le moyen
s'accentue très fortement, l'antérieur
s'arrête bientôt (sauf dans les cas
analogues à celui que je mentionnerai
plus loin, voir fig. xi) et le po térieur
n'augmente guère, à ce moment du
moins, de vitesse. Quand il n'y a que
deux courants, l'antérieur se comporte
comme ci-dessus et le postérieur se
comporte comme le moyen du cas
précédent ; alors, c'est en fait le cou-
rant postérieur du premier cas qui
manque. Nous désignerons ces trois courants par les lettres a, (3
et Y.
Le courant (3 (moyen ou postérieur suivant les cas) correspond à la
terminaison d'une grosse veine de position asymétrique et qui parcourt à
gauche, en arc de cercle, la surface du vitellus. On peut, pour ce fait, l'appe-
ler veine vitelline, sans qu'il faille préciser davantage pour le moment du
moins. Non encore endiguée, elle part de l'extrémité postérieure du corps
de l'embryon et, à la surface du vitellus, elle est toujours très large. Elle
se dirige vers le cœur dans lequel elle se jette après avoir décrit un double
Fia. VI. Premiers débuts circulatoires : li. 1..
Vaissc<au de l'arc branchial 1. - O.A., Ori-
gine de l'aorte. A l'entrée du cœur, on voit
les globules disposés suivant trois cou-
rants. Le sens du courant sanguin est indi-
fiué par les flèches. Le pigment de l'œil
(mais non celui du corps embryonnaire) a
été représenté. Demi-schématique.
CIRCULATION CHEZ LE PI y OC HE
17
coude dont le premier, rentrant vers l'embryon, est parfois assez aigu
(voy. fig. viii). Au niveau de ces deux coudes (en dehors du coude antérieur
et en dedans du coude postérieur) on aperçoit parfois des lacs sanguins
plus ou moins mobiles qui paraissent devoir correspondre aux courants
primitifs y. et y (voy. fig. viii). En même temps les racines aortiques qui, à
ce moment, décrivent, par suite de leur allongement, au point de leur réu-
nion avec les arcs vasculaires branchiaux n.° 1, une boucle caractéristique
(voy. fig. viii) qu'elles ne formaient pas au
début, à ce qu'il m'a semblé, se réunissent;
V aorte se développe, et^ rebroussant chemin
à une certaine distance de l'extrémité cau-
dale du corps, se continue par la veine
CMudale. Comme l'intestin postérieur se déve-
loppe en même temps que cette circulation
primitive, la veine caudale se continue à son
tour par une veine sous-intestinale à laquelle
elle se relie par une veine anale qui m'a paru
entourer l'intestin postérieur à la manière
d'un anneau. Les sinuosités que décrivent
l'aorte et les veines caudale, anale et sous
intestinale d'abord peu accentuées s'accusent
progressivement, principalement du fait de
l'allo; g ment d'3 la portion, caudale du corps
(voy. fig. VII).
D'après BoeceaI. chez le Belone acus
Risso, et en raison du retard de dévelojîpement du bourgeon caudal,
l'aorte s'aboucherait directement d'abord dans la veine vitelline, les
veines caudale et sous -intestinale ne se développant que plus tard. L'au-
teur note que même lorsque cette nouvelle voie est établie, l'aorte n'en
conserve pas moins ses communications directes avec la veine vitelline
par l'intermédiaire d'un vaisseau qu'il dénomme l'artère anale.
Le circuit complet de cette première circulation est donc constitué
de la façon suivante :
Cœur.
Arcs vasculaires branchiaux i>" 1.
Racines aortiques.
Aorte.
vir. I. ot II. Li's ilisposition suc-
ccî.sivis (ks vciues de l'extréiTiitê
liostcricuru du corps : A., Aortu.—
V. c Veine caudale. — F. «.. Vrine
;niale. — V.s. L, Veine sous-intes-
tinale. — l'. v.. Veine vitelline. Les
llèches indi((uentle sens du courant
saii£tnin. Schématiiiue.
1 . BORCEA 1!>I1).
ARCH. IJE Zool,. EXP. ET GÉK.
18
R. ANTHONY
Veine caudale.
Veine anale.
Veine sous intestinale.
Veine vitelline.
Cœur.
(Voy. fig. viii).
Dans quelques cas, j'ai observé les dispositions exceptionnelles
suivantes :
1° Du point d'union de la veine
caudale à la veine anale part "un
vaisseau qui remonte en s'atté-
nuant vers la cou dure postérieure
de la veine vitelline (voy. fig. ix,y.).
Assez longtemps avant d'atteindre
cette coudure, ce vaisseau semble
ne plus exister, et, l'on ne voit
que quelques éléments sanguins
épars se diriger vers elle. On
pourrait penser que l'on se trouve
en présence d'un cas de dévelop-
pement précoce de la veine car-
dinale gauche. Je crois qu'il n'en
est point ainsi, car le vaisseau en
question se trouve trop éloigné de
l'axe du corps embryonnaire.
2° Le courant antérieur a exis-
tant à l'entrée du cœur persiste,
et l'on voit une assez grosse veine
(voy. fig. IX, x) qui, après avoir
fait le tour de la tête de l'em-
bryon sur le vitellus, se jette dans
la veine vitelline au niveau de sa
seconde coudure. Cette veine qui,
dans la plupart des cas, d epa-
raîtra par ^a suite laissant seulement parfois (vcy. fig xxvi, sinus s),
* comme nous le verrons plus loin, un vestige de sa terminaison, est
alimentée par un rameau provenant indirectement sans doute, de
l'aorte et présentant le trajet que montre la figure ix. Il s'agit vraisembla-
Fia. Tiii. Ensemble de la première circulation : 0., Oreil-
lette.— F., Ventricule continué par les vaisseaux
de l'arc branchial 1 continués eux-mêmes respec-
tivement par une branche d'origine de l'aorte. —
A., Aorte continuée parla veine caudale. — F., a.,
Veine anale continuée par la veine sous-intestinale.
— F., Veine vitelline avec ses deux coudes et les
restes des lacs sanguins a et y. Les flèches indi-
quent le sens du courant sanguin. Demi-schéma-
tique. Extrait des Comptes rendus de V Académie
dtê Seiencet (Note de R. Anthony, 8 Octobre 1917).
CIRCULATION CHEZ U EPI N OC HE
19
blement d'un rameau précoce d^ l'artère mésentérique dont il sera ques-
tion ultérieurement.
Il convient de rapprocher cette anomalie de ce que C. Voqt a appelé
chez le Coregonus pilea Cuvier les veines vitellaires antérieures et dont
il a noté l'existence transitoire.
J ai vu parfois ces deux dispositions exceptionnelles réunies sur la
même larve (voy. fig. ix).
En résumé, ce qui caractérise cette circulation primitive de l'Epi-
noche, c'est : P Qu'elle ne com-
port-e pas encore le réseau vitellin
qui n'apparaît que par la suite,
non plus que les veines cardinales
tant postérieure qu'antérieures ;
2*^ Sa remarquable asymétrie.
On a constaté d'ailleurs une
asymétrie analogue au cours du
développement de certains Salmo-
nidés; mais les descriptions des
auteurs ne pei'mettent pas de se
rendre compte s'il en est de même
d'une façon générale dans l'en-
semble des Téléostéens.
L'étude de la deuxième circu-
lation montrera que le dévelop-
pement de l'appareil circulatoire
se continue pendant un certain
temps suivant ce mode asymé-
trique, et, que ce n'est que par la suite que la symétrie se substitue à
l'asymétrie.
L'ensemble que constituent les veine? caudale, sous -intestinale et
vitelline se montre donc ici comme la voie primitive veineuse semblant
bien correspondre, comme l'ont pensé Bax,four, Ziegler et Borcea, au
vaisseau ventral des vertébrés primitifs.
Il convient de remarquer en efifet que la circulation embryonnaire
primitive de l'Epinoche reproduit très exactement le schéma de la cir-
culation de l'Amphioxus adulte, ainsi qu'il ressort de la comparaison des
figures VIII et x.
Chez l'Amph'oxus, on voit également une aorte naissant par deux
11''.. IX. Complications anormales de la première circula-
tion : X et y vaisseaux anormaux. Les flèches indi
qutnt le sens du courant sanguin. Schématique.
20
E. ANTHONY
racines et qu'alimentent les vaisseaux branchiaux. Cette aorte, rebrous-
sant chemin en. arrière, se continue par une veine ventrale qui donne, au
passage, naissance au système hépatique (lequel chez les Téléostéens
se con'îtituera plus tard, après la formation de l'artère mésentérique) et
ramène le sang aux branchies. Cette veine ventrale correspond donc exac-
tement à l'ensemble constitué par la veine caudale, la veine sous-intesti-
nale et la veine vitelline de l'Epinoche. La seule différence est que, chez
1(^;: Téléostéens, le coeur qui n'existe point chez l'Amphioxus, s'est diffé-
rencié au point C.
Il est à présumer que si nous connaissions parfaitement le dévelop-
pement de l'appareil circula-
toire de l'x4.mphioxus le rappro-
chement pourrait être encore
plus étroit. Personne n'ignore,
en (ff -t, que l'Amphioxus qui
conserve encore à l'état adulte
des traces non négligeables
d'asymétrie en présente une très
marquée à l'état de larve, et,
l'on sait comment Edmond Per-
rier, par exemple, a utilisé les
faits de son développement pour
expliquer le passage du type
Invertébré au type Vertébré.
Quoiqu'il en soit, la circulation primitive de l'Epinoche :
1° Est dans ses grandes lignes comparable à celle de l'Amphioxus
adulte ;
2° Est asymétrique, comme semble devoir l'être cell:' d:^ la levw d''
l'Amphioxus profondément asymétrique elle-même.
5. Deuxième circulation et ses. complications successives
FiG. X. Ui'pic'sriitatidu sfhématiqne de la circulation de l'Am-
])hioxus. ('.. il TiiiiT y.iiss ■■au brancliixl aflférent avec
son hullic (■oiitvactilQ'(6.). — e.. dernier vaisseau bran-
chial effércùt s.i jetant dans la racine aortiquc droite.
— ^4., Aorte. — .S',' /.. veine snus-iiitestinale. — V..
veine ventrale p,vvie, en C. la jilaee où existe le eceur
eliez l'embryon de, ïéléostéen. — /.. Intestin. — P..
Pharynx. -• F., Foie. Les flèches indiquent le sens du
courant sanguin. Extrait des Comptes re dus de
l'Ac'démie des Scieices. (Note de \\. Anthony. 8 Oe-
tobrelOlV).
Le système circulatoire primitif se complique tout d'abord du fait
de l'addition des vaisseaux cardinaux, des vaisseaux veineux et artériels
de la région céphalique, des conduits de Cuvier constitués par l'apport
des veines cardinales antérieures (jugulaires) et postérieures (cardinales
proprement dites) du réseau vasculaire vitellin.
Si l'on envisage seulement la circulation du corps embryonnaire,
CIRCVLATIOX CHEZ U EPI N OC HE 21
il semble que ce soient le plus souvent les veines cardinales, du moins
la veine cardinale droite, qui se développent tout d'abord ; dans quelques
cas cependant, j'ai constaté que c'étaient les veines jugulaires. L'ordre
d'apparition de vaisseaux du corps embryonnaire serait généralement le
suivant :
Veine cardinale droite.
Veines jugulaires.
Veine cardinale gauche.
Artères céphalique'%
Le réseau vitellin d'autre part commence à se former de très bonne
heure.
Nous étudierons successivement l'évolution des veines cardinales
poi-téri. u^'es, celle des vaisseaux céphaliques, celle des conduits de Cuvier
et celle du réseau vasculaire vitellin.
y.. Les veines cardinales postérieures
Les veines cardinales continuent la veine caudale, sans doute par l'in-
termédiaire d'un tronc veineux impair qu'il m'a été impossible de distin-
guer nettement, mais que les au'eurs qui se sont jusqu'ici occupés de
la question ont bien discerné chez d'autres poissons osseux [Stammveve
des embiyologistes allemands) ; de même, je n'ai pas non plus pu
préciser les rapports des veines cardinales à l'intérieur du corps de l'em-
bryon, comme l'a fait BorceaI pour l'œuf volumineux et bien transpa-
rent du Belone acus Risso.
La veine cardinale droite constitue avec la vc'ne jugulaire du même
côté le conduit de Cuvier droit qui barrant transversalement le corps
embryonnaire croise les racines aortiques par rapport auxquelles il occupe
une situation ventrale. La cardinale droite qui, surtout dans sa portion
antérieure, est d'un très gros calibre fournit l'apftort. principal du canal
de Cuvier droit (voy. fig. xii). Elle présente au point de sa terminai-
son une sinuosité très marquée à concavité interne par rapport à l'axe
do l'embryon. Située en avant de la nageoire pectorale cette sinuosité
empiète sur le corps vitellin. Lorscj^ue l'embryon est vu de dos, le sens
du courant sangu'n dans cette sinuosité est, comm? l'on conçoit, celui
1. 750RCKA. 19UI.
22
B. ANTHONY
des aiguilles d'une montre. Mais parfois on y voit un courant de sen?
inverse; c'est sans doute alors que la sinuosité au lieu d'être sur le trajet
de la veine cardinale est sur
11
J?C
celui de la veine jugulaire ou
cardinale antérieure. Parfois
aussi, on voit un tourbillon ;
c'est alors sans doute que la
veine cardinale et la veine
jugulaire ont chacune une si-
nuosité et que les deux sinuo-
sités se superposent (voy.
fig. XI).
L? veine cardinale gauche
de moindre calibre, et géné-
ralement de constitution plus
tardive que la droite, forme avec la veine jugulaire du même côté le
canal de Cuvier gauche (voy. fig. xii).
FlG. XI. De gauche à droite, les boucles de la veine cardiiialr
postérieure et de la veine jugulaire droite, et, enfin U
double boucle cardinale jugulaire : C, Veine cardinale
postérieure droite. — J., Veine jugulaire droite. —
D. C, Conduit de Cuvier droit. Les flèches indiqiient
le sens du courant .sanguin. Schématique.
t'i'î. xn, Lm vaisseaux de la deuxième circmation dans la région moyenne du corps riiibryonnaire : B.I., Vais.seau
de l'arc branchial 1. — 0. A., Origiuede l'aorte. — A. C. Artère carotide. — t'., Veine cardinale pos-
térieure. — J., Veine jugulaire. — b., Boucle de la veine cardinale droite où se jette une veine
symétrique aux conduits de Cuvier. — D. C. d.. Conduit de Cuvier droit. — D. C. g.. Conduit d&
Cu^^e^ gauche. — F. v., Veine vitelUnc. — R. v., Réseau vitellin (région antérieure). — O., Oreil-
lette. — V., Ventricule. Les flèches indiquent le sens du courant saniîuin. .Schématique.
Notons encore que, très- tardivement, la veinu caudale interrompt
ses relations avec la veine sous-intestinale (Voy. page 41 et fig. xxix et xxx).
CIRCULATION CHEZ UE PIN OC HE
23
D'après Borcea, chez le Belone acus Risso, cette interruption du cours
sanguin dans la veine anale se ferait dès aussitôt la formation des
veines cardinales.
Autant que j'ai pu m'en rendre compte, et cette constatation concorde
avec celles des différents auteurs relativement à d'autres Poissons osseux,
les veines cardinales toujours bien endiguées se présentent d'abord à
l'état de cordons pleins dans lesquels la circulation s'établit par la suite.
3. Les vaisseaux céphaliques
L'artère céphalique ou carotide, toujours étroite et sinueuse, part du
premier arc vasculaire branchial, s'opposant à la racine correspondante
de l'aorte et laissant, bien entendu, en dehors d'elle la boucle caractéris-
tique que nous avons décrite (voy.
fig. xii). Elle se dirige vers l'œil
qu'elle aborde par ca région anté-.
rieure. Son apparition est, comme
nous l'avons vu, tardive.
La veine jugulaire ou cardinale
antérieure partant de la région
moyenne et postérieure de l'œil es^
d'un plus gros calibre. Elle passe
en dehors de l'artère céphalique,
et, dépassant I3 niveau du cœur,
elle chemine en dehors aussi des
racines aortiques. Un peu plus
tard, chaque veine jugulaire se
divise en deux branches, les bran-
ches internes de chacune de es
veines étant réunies l'une à l'autre
■ par une anastomose transversale
située au niveau de la partie pos-
térieure du cerveau moyen, et, dans laquelle j'ai vu le sang cheminer
tantôt dans un sens, tantôt dans l'autre. La figure xiii représente la cir-
culation de la tête telle que j'ai pu la voir 8iir un embryon peu avant
l'éclosion. Ses complications ultérieures n'ont pas été suivies.
Fio. mi. CirculiiHon cêph.iliqiic peu avant l'éclosion :
C, Artère carotide. — J.. Veine jugulaire. Les
flèches indiquent le sens du courant sanguio. La
pigmentation n'est point indiquée. Denii-3chéma-
tique.
24
h\ ANTHONY
'. Les conduits de Cuvier
Les deux conduits de Cuvier sont donc respectivement constitués
par l'apport de la veine jugulaire et de la veine cardinale postérieure du
côté correspordant. En raisoJi. de la faible importance de la veine cardinale
gauche, le cordu^t de Cuvier gauche est plus réduit que le droit. Il est
aussi plus court en raison de la position particulière du cœur et de la
situation qu'affectent les conduits eux-mêmes, ainsi que nous allons le
voir. Ils sont tous doux placés sur le côté gauche de l'animal, sur le vitel-
us et l'un derrière l'autre, de telle sorte que l'antérieur est le conduit
droit et le posté-
rieur le conduit gau-
che. Us sont incur-
vés, à concavité
antérieure et in.-
terne, et, occupent
la place du lac san-
guin postérieur (v)
vu au début de la
première circula-
tion. A ce stade, les
canaux de Cuvier,
quoique non endi-
gués, sont nettement séparés, et, l'on suit même quelquefois cette sépa-
ration jusqu'à l'intérieur du cœur. L'snsemble des conduits de Cuvier qui
coulent près de leur terminaison parallèlement à la veine vitelline en est
également réparé, et, cette séparation se poursuit toujours au delà de la
précédente : il s'ensuit que l'on distingue assez souvent trois courants à
l'intérieur du cœur, du moins dans l'oreillette ; ces courants se confon-
dent peu à peu ; mais le courant vitellin et le courant cuviérien d'en-
semble restent toujours distincts assez longtemps (voy. fîg. xii). J'ai vu
dans quelques cas, notamment série du F^'x^vril 1916, le courant cuviérien
droit décomposé lui-même el^ deux courants correspondant l'un à la
veine cardinale po. térieure, l'autre à la veine jrgu^aire (voy. fig. xiv).
C<?tte disposition ne persiste pas au delà des débuts de la circulation
secondaire et cesse lorsque se forment les parois vasculaires, La même
particularité a été observée par Borcea chez VUranoscopus scaber L. ^
Fig. XIV. Schéma dcstiUL'à montrer la division l'xceptionnelle du conduit cuvié-
rien droit. Pour la signification des parties se reporter à la fiffure
XII. Les flèches indiquent le sens du courant sanguin. Schématiciue.
1. .T. BrmfKA. \9\().
CIRCULATION CHEZ UEPINOCHE
25
Fio. XV. Circulation vittllinc au début chez le Beloneacus : l>. C.
d., Conduit de Cu\ier droit. — S., Sinus veineux. — V.,
A'eine vitelline. — A., Aorte. Les flèches indiquent le
sens du courant sang\iin. Figure demi-schématique imi-
tée de BORCEA, 1910.
Les changements de posi-
tions ultérieurs des conduits
de Cuvier par rapport au
corps embryonnaire sont inti-
mement liés à ceux du cœur.
Nous étudierons par la suite
les uns et les autres dans un
sous-paragraphe spécial.
Mais il convient de noter
i mmédiatement ici la grande
différence de disposition que
présentent à ce moment les
canaux de Cuvier chez l'Epi-
noche et les autres Téléos-
téens. Chez le Belone aciis
Risso (d'après Wencke -
BACH 1, ZiEGENHAGEN " qui
les appellent veines latérales) chez le Gobnis ciiyito C. V., le Cristiceps
argentatus Risso,
1]^' I l'Exocetus volitans
•^'-^ \ /"^ lj.,VUranosco'pus
scaher L. (d'après
BoRCEA 2) chez la
Perça fliwiatilis L.
(d'après Ziegler ^),
etc., ils sont symé-
triques et confluent
avec la veine vitel-
line (v y. fig. XV,)
alors que chez l'Epi-
noche ils n'ont au-
cun rapport avec
elle et sont nettement asymétriques C'est là un fait qu'il était impor-
tant de consigner.
Début de la constitution d\i réseau vitellin (région postérieure de
l'embryon) : C. Veine caudale. — A., Veine anale. — S. i., Veiu ■
sous-intestinale. — b.. Branche de l'artère mésentérique. — T'..
Veine vitelline. Les flèches indiquent le sens du courant sanguin.
Bomi-schéma tique.
1. F. WEXcKEB.\Ctt, 188fi.
2. ZiEGENHAGEN, 1890.
.3. BORCEA, 1910.
4. IL K. ZiEia.EU, 1887.
26
E. ANTHONY
Le réseau vasculaire vttellin
En même temps que s'accomplissent les changements qui viennent
d'être décrits, on voit partir de la veine sous-intestinale et de la branche
descendante de la veine vitel-
line un lacis de vaisseaux anas-
tomosés qui rejoignent la partie
inférieure de la branche ascen-
dante de cette même veine vitel-
line. Le réseau purement vei-
neux que ces vaisseaux cons-
tituent, et qui est localisé dans
la région postérieure du champ
compris entre le corps embryon-
naire et la veine vitelline, se
complète bientôt de la manière
suivante : part de l'aorte, mais
d'une façon indirecte, par l'in-
termédiaire d'une artère mésen-
trique, un tronc artériel qui,
suivant le bord latéral gauche
de l'embryon, se dirige vers la
partie postérieure de la veine
vitelline dans laquelle il se jette
près de son point d'union avec
la veine sous-intestinale (voy.
fig. XVI et XVII, b.). Parfois la
violence de ce courant artériel dé-
termine sur la veine sous-intesti-
nale et sur un certain trajet, un
changement de direction du
cours du sang. Ce tronc artériel
se divise en plusieurs branches
anostomosées qui constituent, à
la surface du vitellus, un réseau
artériel communiquant d'une part avec le réseau postérieur entièrement
veineux que nous venons de décrire, et, d'autre part avec la veine vitelline.
Dans ce réseau vitellin, on perçoit nettement la succession des pulsations
Fig. xvti. Région postérii'ure du réseau vitellin : A., Aorte.—
V. c, Veine caudale. — V. a., Veine anale. — V. 3.
i.. Veine sous-intestlnale. — V. v.. Veine vitelline.
— b.. Branche [de l'artère raésentérique. — R v..
Réseau vitellin. Les flèches indiquent le sens du cou-
rant sanguin. Schématique.
CIRCULATION CHEZ UEPINOCHE
27
cardiaques, ce qui permet bien de se rendre compte de sa nature vérita-
blement artérielle. Peu à peu, le réseau vitellin, veineux par conséquent en
aiTière et artériel en avant, remplira l'espace compris entre le corps
embryonnaire et la veine vitelline, semblant d'une façon générale pro-
gresser d'arrière en avant. En principe, aucune branche de ce réseau ne
se jette dans les conduits de Cuvier, bien que pourtant, une fois, dans un
cas particulier et unique, j'ai observé l'abouchement de quelques rares
rifi. XVIII. Deux dispositions du double réseau vitellin (vues dorsiiles). Les tlèches indiquent le sens du courant
s;inguin. Les vaisseaux artériels sont en grisé, les vaisseaiix veineux en noir. Schématique.
vaisseaux dans le conduit de Cuvier gauche dont, comme on l'a dit,
la position est postérieure.
Chez le Belone acus Risso, d'après les auteurs, notamment Borcea i,
les canaux de Cuvier recevraient constamm^^nt des vaisseaux vitellins.
Le Cristiceps argentatus Risso et VExocetus volitans L. se comporteraient,
toujours d'après Borcea, comme le Belone acus Risso sous ce rapport ;
mais il n'en serait point de même de VUranoscopus scaber L. dont pour-
tant les conduits cuviériens sont symétriques comme dans les types pré-
cédents.
Lorsque l'on approche de l'éclosion le tronc artériel précité émet
de nombreuses branches au voisinage de son origine, et l'on voit alor^v
1. BOBCEA. 1010.
28 B. ANTHONY
comme un gros pa'quet d*^ vaisseaux qui semblent émerger du corps d*'
l'embryon en arrière des nageoires pectorales et perpendiculairement
à son axe (voy. fig. xviii).
Il y a lieu d'insister d'iine façon toute particulière sur la nature arté-
rielle (au m< ins en partie) du réseau vitellin de l'embryon de l'Epinoche.
WixTREBERT avait en 1908 attiré l'attention sur le même fait qu'il avait
observé chez l'embryon du Crasiius aurahish. En 1910 Borcea l'a éga-
lement constaté chez celui du Belone acus Risso ; et si l'on go reporte à l'an-
cienne étude de C. Vogt (voir par exemple planche 2, fig. 49), on se rend
compte que ce fait important avait été également noté par lui chez l'em-
bryon du Coregonus palea Cuv. Il s'ensuit que, très probablement, nous
sommes en présence d'un fait général e^ que tous les embryons des Pois-
sons téléostéens ont, au moment de leur circulation secondaire, un réseau
vasculaire vitellin en partie au moins artériel. Les Poissons osseux ne
font donc pas, comme on l'avait cru, exception sous ce rapport parmi les
Vertébrés^,
Du côté droit, on voit également partir u,ne branche artérielle de même
origine que la précédente^ mais occupant généralement une position plu^
postérieure. Elle se divise également pour former un lacis de vaisseaux
artériel ; qui recouvrent le vitellus sur le côté droit de l'embryon. Un collec-
teur de ces vaisseaux auquel on peut donner le nom de veine vitelline
secondaire ou accessoire ou encore de veine vitelline droite (par opposition
avec la veine vitelline gauche qui esj primitive et peut être dite princi-
pile) se constitue bientôt et prend ixne position symétrique à celle de la
veine vitelline jH'imitive, dans la branche descendante de laquelle il se
jette suivant un cours par conséquent ntéro-postérieur (voy. fig. xviii).
De ce même côté droit, par la suite, et un peu en avant du vaisseau
artériel précédemment indiqué, on voit également émerger, comme à
gauche, du bord de l'embryon, des vaisseaux perpendiculaires artériels
aussi, et, qui, d'origine mésentérique sans doute aussi, contribuent éga-
lement à constituer le réseau vasculaire vitellin droit. Les deux réseaux
vasculaires vitellins droit et gauche tendent ainsi à présenter sensible-
ment le même aspect. Et c'est le premier pas de la substitution de la
symétrie à l'asymétrie.
En même temps que ces deux réseaux se constituent progressant l'un
1. Notons, par parenthèses, et sans qu'il soit besoin d'iasistcr davantage, que les termes crtérid et veir.ettx
iir -auraient être pris ici txactemcnt dans le même sens que celui dans lequel on les comprend che7, les
a'iinnux adultes où la fonction respiratoire branchiale est éfablie.
rjEClLATION CHEZ LEPIXOCHE
2<>
et l'autre d'arrière en avant, les deux veines vitellines s'écartent de plus
en plus du corps embryonnaire, de telle sorte que l'aire vasculaire arrive
à recouvrir à peu près toute la surface vitelline, sauf dans sa région ven-
trale antérieure, laissant en cet endroit un espace libre qui d'ailleurs tend
progressivement à diminuer. Assez souvent, peut-être dans le tiers des
cas, j'ai observé que le sens du courant de la veine vitelline droite ou acces-
soire et secondaire au lieu d'être,
comme il a été décrit, antéro-pos-
térieur sur tout son trajet l'était
seulement en arrière, le courant
étant postéro antérieur à partir
d'un point a de position variable,
mais qui est toujours en avant de
la paruie moyenne de cette veine
(voy. fig. xviiT II). Dans ces cas, un
vaisseau collecteur que je désigne
par la lettre Z se jette dans le con-
duit do Cuvier droit avec les veines
cardinale et jugulaire (voy. fig. xii,
XIV, xviii, II et xix). Il en rési;lte
alors une disposition presque par-
faitement symétrique des gros vais-
seauxvoineux à la surface du
vitellus (voy. fig. xviii, II et xix).
On constate en somme à ce
moment, en effet, la présence sur
le vitellus d'une veiiie margi-
nale gauche (portion antérieure et
moyenne de la veine vitelline gauche primitive) d'un vaisseau marginal
droit qui peut être constitué, suivant les cas, ou bien par une branche
artérielle vraisemblablement issue de la mésentérique et par la veijie
vit Uine droite secondaire qui la continue, ou bien par la veine vit lline
droite Z (laquelle rejoint le cœur par l'intermédiaire du canal d*:'
Cuvier droit et occupe une position sensiblement plus antérieure que
celle de la branche artérielle précédemment indiquée, étant symétrique
à la veine marginale gauche) et par la veine vitelline droite secondaire,
enfin d'une veine vitelline médiane (portion postérieure de la veuie vitel-
line gauche primitive). J'ai qu<^^lquefois vu cette dernière se réduire au
XIX. Schéma destiné à f;iiri' comprendre la di-i>osi-
tion des y;ros vaisseaux vik'Uins lorsque le double
réseau est constitué. C. Cœur. — D. C. Conduit
de Cuvier droit. — /.. Vciue z. — M. <l.. Veine
marginale droite avi c y. point do rebroussemeut.
.lu courant sanguin. — .1/. g., Veine marginale
gauche. — T'. m., ^^ ine vitelline médiane. ï.es
llèches indiquent le s 'Us du courant sangiiiii. Vue
ventrale.
30
R. ANTHONY
point de se difEérencier difficilement des autres vaisseaux du réseau.
L'espace que limitent en avant les vaisseaux marginaux est rempli par le
réseau vasculaire vitellin d'origine veineuse dans sa région postérieure, d'ori-
gine artérielle dans ses régions moyenne et antérieure où il est alimenté
vraisemblablement par des branches do l'artère mésentérique (voy. fig. xix).
Peu^à peu, à mesure que le vitellus disparaît, les vaisseaux marginaux
perdent de
leur impor-
tance et se rac-
courcissent,
alors qu'au
contraire la
veine vitelline
médiane sem-
ble s'allonger,
comme si le
point de con-
fluence de ces
trois vaisseaux
se déplaçait
vers l'avant.
Finalement, il
ne reste plus
qu'une veine
ventrale qui
est en somme
la veine vitel-
line primitive.
Près de sa terminaison, elle incline à gauche pour se jeter dans le sinus vei-
neux. Parmi les nombreux vaisseaux qu'elle reçoit d'un côté et de l'autre,
il en est un à droite, le plus antérieur (à moins qu'il n'existe une veine Z
se rendant au canal de Cuvier droit) qui représente le vaisseau marginal
droit, sans se distinguer au surplus des autres vaisseaux par une diffé-
rence de calibre. Comment se fait le déplacement du point de confluence ?
C'est ce que je n'ai pu nettement préciser. Il semble en tous cas que
les procossus soient très variables suivant les individus.
Ces dernières modifications du réseau vasculaire vitellin commencent
à se produire peu avant l'éclosion.
FlQ. XX. Vue dorsale d'un embryon peu d'heures avant réclosion. (i Juin 1916, série du
27 Mai 1916.) F., Veine vitelline primitive devenue la veine marginale gau
che. ■ — Z., Veine Z .■ — D. C, Co.iduits de Cuvier. Tous les vaisseaux sont
en grisé. Les flèches indiquent le sens du courant sanguin.
Fio. XXI. Vue ventrale d'un embryon au 12» jour d'incubation, (!«' Avril 1916, série du 20 Mars 1916.) m. g.
Veine marginale gauche. ^ m. d., veine marginale droite. — V. m., Veine viteUine médiane. Tons
les vaisseaux sont en grisé. Les flèches indiquent le sens du courant sangiiin.
FiG. xxn. Vue ventrale de l'embryon représenté flg. xx. (4 Juin 1916, série du 27 Slai 1916. — m. a., Veine mar-
ginale gauche. — V. m., Veine vitelline médiane, mal différenciée. — m. d., Veine marginale droite
— Z., Veine Z. — a.. Point de reljroussement du courant sanguin. Tous les vaisseaux sont en grisé
Les flèches indiquent le sons du courant sanguin.
32
B. ANTHONY
lia. xxiii. Vue ventialo d'un embryon peu d'instants avant l'éclosion. (4 Juin 1016, série du 27 Mai [1916.)
F. m. Veine vitelline médiane bien différenciée. Les vaisseaux recouvrent à peu près complètement
le vitellus. Tous les vaisseaux sont en grisé. Les flèches indiquent le sens du courant sanguin.
lia. XXIV. Schéma destiné à faire eoniprendre les rapports de la veine vitelline primitive ou marginale gauche
(F.), des Conduits de Ciivier (I). C), de la Veine Z. avec le péricarde. Vue dorsale.
CIRCULATION CHEZ UEPINOCHE
33
FiG. XXV. Schéma Jestlné à f^ire comprendre 1(8 rapports de la veiue Z. avec le péricîtrde. C. Copur. — C. p.
Veim- cardinale postérieure. — J .. Veine jupilaire. — Vue latérale droite.
Fio. XXVI. Complications anormales de la circulation secondaire : V.^ Sinus S- — C, Cœur. — K., Veine vitcl-
line primitive ou marginale gauche. — Z.. Veine z. Les flèches indiquent le sens du courant sanguin
Schémati'jue.
ARCH. KB ZOOL. EXP. lit GÉK. — X. 57. — F. 1.
34
/.'. AXTHOXY
Notons enfin, à propos de la circiUation secondaire, la présence par-
fois constatée de l'anomalie qui suit. Au point où la veine vitelline gau-
che primitive cesse d'avoir une direction postéro-antérieure, on voit une
sorte de sinus S. (voy. fig. xxvi. I). Ce sinus qui disparaît par la suite est
un vestige de cette autre disposition exceptionnelle et transitoire que
nous avons décrite à propos de la circulation primitive et qui est, comme
nous l'avons vu, caractérisée par l'existence d'une veine qui, en relation
avec une artère issue vraisemblablement de la mésentérique, se jette,
après avoir fait le tour de la région céphalique de l'embryon, dans la veine
vitelline précisément à l'endroit où nous constatons maintenant la pré-
sence d'un sinus. Sur un exemplaire de la série du 10 Avril 1916, j'ai
vu cette dernière veine circulaire antérieure persister au cours de la cir-
culation secondaire,
}■' ,< cette anomalie se com-
binant avec la présence
d'une veine Z (voy.
fig. XXVI, II). Cette dis-
position rappelle un
peu celle observée par
C. VoGT 1 chez le Core-
gonus palea Cuv.
6. Les changements de
position du cœur au
cours du développe-
ment.
Nous avons vu qu'à
l'origine le cœur se pré-
sente sous l'aspect d'un
tube transversal (posi-
tion 1, 1', fig. XXVII ) et
qui, peu après, se coude de façon à présenter un angle ouvert à gauche et en
bas, sa partie supérieure presque transversale étant la future oreillette et
sa partie inférieure presque longitudinale le futur ventricule (position 2, 2').
Plus tard l'angle de coudure se déplace vers la gauche tout en s 'accen-
tuant (position 3, 3").
Fia. XXVII. Schéma destiné à faire comprendre les changements de position
du cœur. L'oreillette est représentée par un gros trait plein, le
ventricule par un trait interrompu.
1. C. VoQT, 1842.
CIRCULATION^ CHEZ UEPINOCHE db
Le même mouvement se continuant, l'embouchure de l'oreillette
arrive à dépasser sensiblement la limite du corps embryonnaire, en même
temps que l'extrémité du ventricule coïncide à peu près avec la ligne
médiane (position 4, 4", qui est celle du cœur pendant la circulation pri-
mitive).
A partir de ce moment, l'oreillette se rapproche peu à peu de la ligne
médiane en même temps que l'extrémité du ventricule se relève. Le cœur
paraît en somme tourner dans un plan coronal et suivant un axe qui
passe par son angle de coudure lequel en outre s'ouvre légèrement (posi-
tion 5, 5', qui est celle du cœur pendant la deuxième circulation).
L'ouverture de l'angle de coudure se continuant, le cœur affecte sen-
siblement dans les premiers jours qui suivent l'éclosion la position 6, 6'.
Enfin, le redressement devient complet et le cœur coïncide avec la
ligne médiane ; l'entrée de l'oreillette est devenue inférieure et la sortie
du ventricule supérieure (position 7, 7').
Les changements de position du cœur peuvent être résumés de la
façon qui suit :
i 1 Cœur transversal.
Stades cardiaques < 2 . Coudure du < œur s'accentuant
( .'- progressivement et déplacement du cœur
Stade de la première circulation i ) vers la gauche.
Stades de la \ / Redressement du cœur et son déplacement
, ■- • I ♦ \ éclosion/ , ,• -,•
deuxième circulation i V vers la ligne médiane.
Larve avancée 7 Cœur longitudinal.
Les canaux de Cuvier qui se forment à peu près entre les stades 4 et
6 semblent, au cours des stades 5, 6 et 7, modifier leur longueur, le conduit
droit se raccourcissant de plus en plus par rapport au conduit gauche.
Bref, une symétrie à peu près parfaite se substitue peu à peu à l'asymétrie.
Si l'on en juge d'après les figures de Wenckebach ^ et celles de
BoRCEA^, les positions sucessives du cœur seraient très différentes chez
le Belone acus Risso de celles qu'elles affectent chez l'Epmoche. Avant
l'éclosion l'axe du cœur s'écarterait peu de la ligne médiane, son oreil-
lette affectant une situation antérieure et ventrale. Il existe très certai-
nement une relation étroite entre la position du cœur à ce stade de l'évo-
lution embryogénique et le mode de développement des canaux de Cuvier.
1. F. Wenckebach, 1886.
2. BOROEA. 1910.
36
U. AyTHONY
7. La fréquence des battements cardiaques au cours du développement
X. PÉRIODE DES STADES CARDIAQUES
Le tableau I rend compte de la fréquence des battements cardiaques
en rapport avec la température et la pression atmosphérique au moment
où on les voit débuter.
Tableau I
NOMBRE DE PC.SATIOKS
cardiaques
A I,A MINriE
HEURE
TEMPÉRATURE
DU JOUR A
9 H.
PRESSION APRÈS
RÉDUCTION A 0»
Série du 20 Mars 191(1.
41,89. iO moyenne: 40
12 h 30
8.6
7508
Série du 1" Avril 1916.
3:;, moyenne : 33
23 h.
7.5
7560
Série du 24 Avril 1916.
33, moyenne: 33
22 h.
19.
7590
Série du 13 Juin 1917
43, 54, 64 moyenne : 53
22 h. 50
27.4
7615
Série du 20 Juin 1917.
35, moyenne : 3.5
17 h.
20.
7607
Moyenne générale de.s pulsations cardiaques à la minute : i2
N'ayant point noté la température de l'eau à l'heure même de mes
observations, je ne puis affirmer que la fréquence des battements car-
diaques suive exactement les variations de la température ; il ressort
pourtant de ces chiffres que c'est le jour où la température et la pression
aussi furent le plus élevées que les battements furent le plus rapides
Notons en outre que, si l'on admet que l'influence de la température soit
réelle, on doit tenir pour probable que dans les observations faites le soir
la chaleur de la lampe a également agi.
Au moment où apparaissent les premières tâches pigmentaires des
téguments, on compte les nombres de battements suivants (Tableau II)
Tableau II
NOMBRE DE PULSATIONS
TEMPÉRATURE
PRESSION APRÈS
cardiaque*
A LA MINUTE
HEURE
DU JOUR A
9 H.
RÉDUCTION A > »
Série du 20 Mars 1916.
44, moyenne : 44
14 h.
8.6
7508
Série du 1^' Avril 1916.
54, 50 moyenne : 52
23 h.
7.5
7560
Série du 20 Juin 1917.
44, moyenne: 44
17 h.
20.
7607
Moyenne géi
lérale des pulsations ca
fdiaques à
la minute :
i8.
En
comparant ce tableau au précédent, on peut noter pour toutes
CIRCULATIOS CHhZ LK FI SOC HE
:m
les séries une légère augmentation de rapidité dos battements eardiaques.
On voit également que les battements sont plus fréquents pour l'individu
observé le Boir à la lampe (23 h.) que pour les autres, bien que cet indi-
vidu appartienne à une série pendant le développement de laquelle la
t(>mpérature fut en moyenne peu élevée.
Le troisième tableau (Tableau III) rend compte de la fréquence des
battements cardiaques peu d'instants avant que ne commence la circu-
lation.
Tableau III
NOMBRE DE PtTI SATIONS
cardiaques
A LA MINUTE
HECRF.
TEMPÉRATURE
DU JOUR A
i) H.
PRESSION APRÈS
RÉDUCTION A O"
Série du 1-- Avril 1916.
Série du 10 Avril 1916.
75, .S0,94, moyeniit>:83
57 moyenne: 57
23 h.
1 h. 30
S.
8.6
7593
76:U
Moyenne générale des pulsations cardiaques à la minute : 76.
Son examen conduit encore à conclure que la chaleur de la lampe
augmente comme précédemment la rap'dité des battements. On note aussi
qu'à mesure que le développement avance, la fréquence des pulsations
cardiaques continu*^ à augmenter également.
(3. PÉRIODES DES CIRCULATIONS PRIMITIVE ET SECONDAIRE
Donc, d'une façon générale, pendant la période des stades cardiaques,
les battements du cœur augmentent à mesure C(ue le développement se
poursuit et, d'autre part, si l'on considère deux séries différentes, la rapi-
dité de ces battements se montre en rapport direct avec la température.
Il ( n est de même pendant la période de la circulation primitive, pen-
dant celle de la deuxième circulation, et aussi après l'éclosion.
Si l'on considère par exemple la série du 20 Mars 1916, on voit que
25 h. 30 après l'éclosion, c'est-à-dire le 4 Avril à 22 heures, le nombre des bat-
tements est de 1 15 à 120 d'une façon générale. 24 heures après, c'est-à-dire le
5 Avril à 22 heures, sur une même larve considérée et dont le vitellus est
à moitié régressé, on compte successivement les nombres de battements :
,16
] 1 () f
,.,_,' moyenne = 123.
1 \V,\
38
/.'. ANTHONÏ
"ô -B .ï
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ClHCriATlOS CHEZ L EPINOCHE
39
X
*=^
/ Si!
I
3 y.
'»►,
iVl.'^^'
40
JL ANTHONY
Il convient de remarquer que cette observation a été faite à la lampe.
Il semble donc que la chaleur de cette dernière augmente progressive-
ment le nombre des battement?. Chez une autre larve examinée au même
moment et qui a à peu près perdu son vitellu3 les battements cardiaques
successivement comptés sont :
128 1
132^ moyenne = 130.
130 )
Notons enfin (^iie le cœur d'une larve de la série du 20 Juin 1917 exa-
minée le 25 Juin à 21 h. 30, c'est-à-dire 10 h. 30 avant Téclosion (26 Juin
8 h.), ba^ à 134. La température moyenne de la série du 20 Juin 1917 est
180, 8. Celle de la série du 20 Mars 1916 est 8».
8o Les aspects d'ensemble de la circulation aux différents stades
de développement qui suivent l'éclosion
Nous n( us bornerons à représenter deux stades successifs d'une larve
appartenant à la se-
— > A
ï
rie du 20 Juin 1917.
a. Larve âgée de
8 jours 5 heures
après fécondation —
1 j. 14 h. après
éclosion — /28 Juin
22 h.).
Le cœur a pres-
que achevé son évo-
lution. Les vais-
seaux afférents et
efférents des arcs
branchiaux sont
nettement visibles.
Le vitellus encore
volumineux est re-
couvert de son réseau vaseulaire dont les branches se jettent dans une
veine ventrale qui représente la veine vitelline gauche primitive (veine
vitelline médiane).
L'aorte à son extrémité croise la veine caudale, mais les vaisseaux
Fio. XXX. Dét.ails flp la région de rintestin postérieur chez la larve roprésentéc
figure •2,'.i : A.. Aorte. — C, Veine caudale. — *'., Troue îles veines
cardinales postérieures. — S. i.. Veine sous-intestinale. — l. p.. In-
testin po.stérieur. Les relations entre la veine caudale et la veine sous-
intestinale n'existent plus. Les flèches inrliquent le sens du courant
sanguin.
CIRCULATION CHEZ UEPINOCHE 41
hypochoidaux n'ont pas encore commencé de se développer. De l'aorte
partent des artère-s qui après avoir suivi la limite dorsale des myotomes
se jettent dans la veitic caudale. Les arcs vasculaires ainsi constitués
s'anostomosent entre eux.
La veine caudale est également visible ainsi que l'anale et la sous-
intestinale que relie à l'aorte un vaisseau artériel important.
^. Larve âgée de 10 j. 5 h. après fécondation ; 3 j. 14 h. après éclosion
(30 Juin 22 h.), soit âgée de 2 jours de plus que la précédente.
Le bulbe artériel bien constitué est nettement dans le prolongement
du ventricule. La veine ventrale occupe une position plus voisine de la
ligne médiane. Les vaisseaux liypochordaux ont commencé de se dévelop-
per. Quant à la veine anale elle a complètement disparu.
En raison de l'opacité plus marquée de l'embryon les autres vaisseaux
n'ont pu être représentés.
9" L'établissement de la circulation dans la nageoire caudale
Jusqu'à ce (pie l'éclosion se produise, on voit l'aorte changeant de
direction se continuer par la veine caudale qui la suit parallèlement.
Après l'éclosion, quelquefois aussitôt, quelquefois seulement Cj[uelques
jours après, et ce délai est nécessairement variable puisque l'éclosion se
fait à un moment variable du développement, on voit l'aorte et la veine
caudale se croiser de telle sorte qu'en arrière leurs positions sont inversées
l'aorte étant inférieure et la veine caudale supérieure ; ce croisement par-
ticulier est représenté par Lereboullet i chez la Truite, (planche III, fig.
29) et par Mac Intosh et Prince -, (planche XX, fig. 2 et 4) ^^ chez VAnar-
rhichas lupus. La veine caudale passe du côté gauche et l'aorte du côté
droit dans tous les cas que j'ai pu observer à l'exception d'un seul appar-
tenant à la série du 20 Juin 1917. Chez la Tniite, d'après Lereboullet,
la veùie sous-caudale passerait au contraire du côté droit. Les figu'es
de Mac Intosh et de Prince sont assez indécises à cet égard.
Peu d'heures après, de la boucle ainsi formée, part un arc vasculaire
qui, dirigé ventralement, l'éunit l'aorte à la caudale.
Par suite de l'allongement des parties du corps situées de part et
d'autre du point de croisement, allongement qui est plus rapide pour les
parties du corps situées en avant du point de croisement, l'arc vasculaire
1. Lebeboullit, 1862.
2. Mac Intosh et Prince, 1890.
b. M.iis dans la figure 1 de la iii^me planche il n'est point figuré.
42
i?. ANTHONY
d'abord en arrière de ce point de croisement se trouve reporté en avant
de lui. Et, en même temps, il se double de la façon représentée sur la
figure 31. En avant de l'arc vasculaire doublé, la veine sous-caudale pré-
sente luie légère inflexion que Lereboullet a également figurée chez la
Truite. Sur la figure 19 de son mémoire, on voit même une branche
Fio. XXXI. Les stades successifs du premier développement de la circulation dans la nageoire caudale : A.. Aorte.
— C, Veine caudale. Les 6 rayons hypochordaux existant au dernier stade représenté sont rn grisé.
Lire cette figure de haut en bas. Les flèches indiquent le sens du courant sanguin.
de l'aorte rejoindre un rameau veineux au point de cette inflexion.
Par complications progressives et les rayons hypochordaux se
développant, on parvient au dernier stade représenté dans la figure xxxi
qui correspond à une larve qui a déjà 6 rayons hypochordaux légère-
ment pigmentés sur les bords ; les arcs vasculaires sont en forme d'*^ 1-
lipse et les rayons hypochordaux logés à l'intérieur de ces ellipses. A
remarquer qu'une branche artérielle relie le paquet vasculaire hypochor-
dal à l'aorte, en arrière du pomt de croisement, La disposition du
CIRCULATION CHEZ U EPI N OC HE 4*i
réseau circulatoire embryonnaire de la nageoire caudale de la Truite est
très voisine de celle qu'on observe chez l'Epinoche, ainsi que les figures
29 et 30 de Lereboullet permettent d'en juger,
III. EXAMEN ET DISCUSSION DES PRINCIPAUX RÉSULTATS OBTENUS
Les recherches des auteurs sur le développemsnt de la circulation
chez les Poissons teléostéens ont jusqu'ici été toujours incomplètes, et,
comme je l'ai dit, j? ne connais point d'exposé détaillé du développement
suivi pas à pas, si l'on peut dire, de la circulation embryonnaire dans une
espèce donnée de Téléostéen. Ceux qui ont le plus étudié cette ques-
tion se sont bornés le plus souvent à décrire des stades isolés sans pou-
voir habituellement les relier. Et, quand ils ont tenté de le faire, cela n'a
été que d'une façon extrêmement incomplète. C'est la constatation de
ce desideratum qui m'a donné l'idée d'entreprendre ce travail ; son prin-
cipal mérite, je crois, est d'être le résul^ at d'une longue observation atten-
tive et ininterrompue d'œufs et de larves que j'ai complètement élevés
sous les objectifs mêmes d'une loupe stéréoscopique à fort grossissement.
J'ai parfois suivi un même œuf depuis l'apparition du cœur jusqu'à un
moment plus ou moins éloigné de l'éclosion.
Cette étude comporte pourtant de nombreuses et importantes la-
cunes qui n'échapperont certainement pas au lecteur. Je n'ai étudié ni
les rapports et l'origine des veines cardinales, ni le mode de développe*
ment des branches de l'aorte, ni suffisamment du moins, les vaisseaux
céphaliques embryonnaires, ni la circulation de l'appareil exsecréteur
rénal, ni l'établissement de la circulation hépatique, ni la constitution ds
l'appareil vasculaire branchial après l'apparition des vaisseaux du pre-
mier arc. J'ai examiné surtout d'une part les débuts circulatoires, et,
d'autre part le développement de la circulation vitelline. Je crois que
sur ces points mon travail apporte des précisions aux données existantes,
les complète, et aboutira peut-être à attirer l'attention des embryolo-
gistes sur certaines questions qui n'ont été qu'effleurées et demandent
à être reprises.
Les résultats des auteurs qui m'ont précédés paraissent encore trop
peu nets, il règne une trop grande confusion sur ce sujet pour qu'il me
semble possible d'essayer de dresser un tableau d'ensemble de la circu-
lation embryonnaire des Teléostéens eti de dégager les faits fondamentaux *.
1. s. MOLLIER notait en 1906 qu'il nV-xistait encore aucune étude complète et utilisable de la circulation viti-1
ne (les embryons de Poissons ossoux.
44 H. AXTIIOXr
Je me bornerai donc à insister sur mes résultats propres.
Je crois avoir bien montré que, chez l'Epinoche du moins, la voie pri-
mitive de retour au cœur du sang venant de l'aorte est un simple et large
vaisseau veineux qui, alimenté par la suite des veines caudale, anale et
sous-intestinale, chemine à gauche sur le vitellus. Un circuit complet est
donc formé avant qu'un réseau vasculaire vitellin n'existe. La première
circulation vitelline est par conséquent purement veineuse chez l'Epinoche.
Mais, dès que le réseau vasculaire vitellin se constitue, la circulation vitel-
line devient au moins partiellement, et du fait du développement de l'ar-
tère mésentérique et de ses rameaux vitellins, d'origine artérielle. L'obser-
vation de P. WiNTREBERT relative au Carassius aurattis L. peut donc
s'appliquer aussi à l'Epinoche. Il serait même à examiner de près s'il
n'en est point ainsi chez tous les Téléostéens qui ne se distingueraient
plus alors à cet égard des autres Vertébrés.
Un autre fait intéressant, je crois, qui résulte de cette étude est le
mode de développement asymétrique qu'affectent la circulation vitel-
line et les conduits de Cuvier.
La symétrie ne s'établit qu'assez tardivement à mesure que la résorp-
tion du vitellus s'accomplit. D'autre part les conduits de Cuvier ne par-
ticipent en rien à la constitution du réseau vasculaire vitellin. Chez les
autres Téléostéens étudiés, au contraire, ce sont eux qui constituent les
veines marginales (veines latérales de Wenckebach et de Ziegen-
hagen), et les vaisseaux du réseau (quand réseau il y a, comme chez le
Belone acus Risso par exemple) communiquent avec ces conduits. Nous
avons vu comment une disposition analogue à celle du Beloiie acus Risso
se constitue tardivement chez l'Epinoche. Mais, chez cette espèce, les
vaisseaux marginaux sont complètement étrangers aux conduits de Cu-
vier.
Il me reste enfin à rappeler que la circulation primitive de l'Epinoche
est très comparable à celle de l'Amphioxus adulte. Et ce résultat est d'au-
tant plus intéressant que les Gasterosteidae sont, parmi les Téléostéens,
loin d'être des types archaïques. Peut être des recherches ultérieures per-
mettront-elles |d'étendre cette constatation à d'autres Poissons osseux
(^t d'en tirer des conclusions qu'il serait actuellement prématuré de
vouloir faire ressortir plus que je n'ai cru devoir le faire ici.
le^+ PAr^le
Arch deZool.Expl^etGén
Tome 57. PU.
my.p.
v.p.
AKa^r
DÉVELOPPEMENT DE L'ÉPINOCHE
JioisgorvUrv Iî'jUu
CIlicrLATIoy CHEZ lepixoche
45
LEGENDE DE LA PLANCHE I
¥Hi. 1. (Jiuï après 3 jours, 5 liouics (i'iiKubation Ci-'> Juin 1917, 22 li. série Ju 20 Juin l'JlT). Stade cardiaque. Le
pigment est développé seulement dans la région moyenne du cor])s.
J"l<(. 11. Œuf après 7 jours d'ineubation (2:{ Avril 1917, 16 li. série du 16 Avril 1917). Stade de la circulation pri.
niitive ; début de constitution du réseau vitellin. Le pigment de la résrion caudale n'a pas été repré-
senté.
Fio. III. Œuf après 8 jours 1 lieun- 2j minutes d'incubation (24 .\vril 1917, 17 h. 25. série du 16 Avril 1917).
Stade de la circulation iirimitive peu avant l'établi.ssenient définitif du réseau vasculaire vitellin.
KIO. IT. Œ.uf après 5 jours d"ine\ibatioii (2.") Juin 1917, 17 lieuri's, série du 20 Juin 1917), Stade de la circulation
secondaire.
Fl(i. v. Œuf après 7 jours 19 heures 30 minutes d'incubation (-4 Avril 1917. 12 h. 30, série du 16 Avril 1917).
Stade di- la circulation secomlaire.
SIGSIfICATIOS DES r KTÏRES
V. Vitelli.s.
&'. h. Globule huileux.
C. a. Cerveau antériejir.
V. M. Cerveau moyen.
C. p. Cerveau postérieur
V. 0. Vésicule optique.
V. ol. Vésicule olfactive.
V. a. Vésicule auditive.
-V. p. Nageoire pectorale
C. CflPur.
F. ï. i. Veine sous-intestinale.
'•. /). \\>inc vitellin"- priinitive. (seulement sa por-
tion moyenne dans la figure v).
m. Branche de l'.artère mésentériquo.
f. c. Késeau vitellin veineux (au début, dana la
figure II).
C. Conduits de Cuvier.
V. a. Réseau vitellin artériel,
r. s. Veine vitelline secondaire ou vitelline droite,
r. p. Veine vitelline primitive (sa portion posté-
rieure dans la figure v).
Ijcs flè>hPB indiquent le sens du courant. Les vaisseaux veineux sont en bleu et les vaisseaux artériels eu rouge.
ARCHIVES DE ZOOLOGIE EXPÉRIMENTALE ET GÉNÉRALE
Tome 57, p. 47 à 202, pi. II à V.
2o Juillet igiS
RKCl [ ERCHES HISTOLOGIQUES
SUR LA
IIÉT.llKlIil'IlOîiE ll'i LÉl'llIOPTÈIlE
^Hyponomeuta padella Lj
PAR
:\I»ie A. HUFNAGEL
TABLE DES MAT/ÈRES
l'ages
I. Introduction It*
Anatoniie soiiiinain; (11- la lurve (p. .'0) ; (iraïuis traits de la métamorphose (p. 52) ; Matériel et
technique (p. .'>:>).
II. Eléments sanguins î»!
III. Tissu .\dipkux j^
1. Tissu adipeux chez la larve (p. 50). — Prolifération des cellules au moment des mues (p. Gl)
Homologic originelle du tissu adipeux et du tissu sanguin (p. G2).
2. Métamorphose du tissu adipeux (p. 66). — Réserves albuminoïdes (p. 67) ; Corps gras chez l'imago
(p. 70); Corps gras entourant le testicule (p. 71); Expulsion des produits de dégéné-
rescence et rôle phagocytaire des cellules grasses (p. 71); Ressemblance entre les cellules
adipeuses et les éléments sanguins (p. 75) ; Phagocj-tose probable de quelques cellules grasses
(p. V6).
Résumé (p. 77).
IV. Œnocytes • "7
Œnocj-tes larvaires (p. 70) ; Œnocytes imaginaux (p. Si).
V. HYPODER.ME 85
Hypoderme proprement dit (p. >S5) ; Cellules de poils (p. 90) ; Cellules formatrices d'écaillés (p. 02) ;
Glandes des mues (p. 05).
VI. Glande ventrale f "
VII. Glande mandibclaire iOO
VIII. Appareil sÉRicftiÈNE 10-
Glande productrice (p. 105) ; Canaux évacuatcurs (p. 109).
IX. Tubes de Malpiohi 11-
Portion contournée des tubes de Malpighi (p. U5) ; Portion libre des tubes de Malpighi (p, 117).
X. Epithéucm de l'intestin moyen 121
XI. Epithélium de l'intestin antérieur 13*
XII. Epithélium de l'intestin postérieur 145
XIII. Organe péfjœsophagien 159
XIV. Muscles 162
1" Muscles de uéoformution 1^^
2» Muscles dispiiraissitit peiidui.t la métamorphose ICS
ARCH. de Zool. Exp. KT GéN. — T. 57. — F. 2. -t
48 Jl™" A. HUFNAGEL
3° Muscles rcmaiirs (p. 172) : n) Muscles abdominaux profonds (p. 174) ; '<) Muscles abdominaux
périphériques (p. 17(;) ; c) Muscles thoraciqucs à évolution tardive (p. 170) ; d) Muscles thoracicjues
à évolution précoce (muscles du vol, etc.) (p. 18:!).
Résumé (p. 189).
Insertions musculaires (p. irO).
XV. RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS I '.)1
Index bibliographique l'J.j
Explications des planches lOO
Ce travail a été fait au Laboratoire d'Evolution des Etres organisés
de la Faculté des Sciences de Paris. Je remercie vivement M. le Professeur
Caullery, directeur de ce laboratoire, pour son très bienveillant accueil
et ses encouragements.
Je dois une reconnaissance toute particulière a M. le Professeur
Ch. Pérez. C'est lui cpii m'a orienté vers l'étude de la métamorphose et
il ne m'a ménagé ni son temps, ni ses conseils précieux.
J'adresse mes remerciements sincères à M. Rabaud, Chargé d Cor' ;.
à la Faculté des Sciences, pour l'intérêt qu'il m'a porté pendant la
durée de mon travail,
M. E. Bordage m'a obligé en m'aidant dans mes recherches bibliogra-
phiq-i' ; .
Mon excellente amie, Mlle Marguerite Bernard, s'est chargée de la
tâche ingrate de revoir le français de mon mémoire. Je lui en garderai
un souvenir bien amical.
M. Keilin, mon camarade de laboratoire, m'a rendu souvent des
services dont je le remercie bien cordialement.
M. le Professeur Pruvot et M. le Docteur Racovitza m'ont grande-
ment obligé en publiant mon travail dans les Archives de Zoologie Expé-
rimentale. Je les prie d'accepter l'expression de ma vive gratitude.
Ce travail a été terminé au mois de Mars 1914, et son impression fut
aussitôt commencée. J'avais les premières épreuves lorsque la guerre
éclata. Les événements différèrent jusqu'ici l'achèveinent de sa publi-
cation. Maintenant ce travail paraît avec certaines modifications ;
quelques documents de second ordre me manquent que je n'ai pu par-
venir à reconstituer. Les planches de dessins qui y sont insérées ont dû
être refaites d'après les épreuves lithographiques. Malgré ces lacunes et
ces modifications de détail, je n'ai pas cru devoir attendre plus long-
temps pour mettre à jour les résultats essentiels de mes recherches sur
la métamorphose de Hyponomeuta padella.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA 49
INTRODUCTION
Il n"a point été fait jusqu'ici de travail d'ensemble sur la méta-
morphose des Lépidoptères.
Les travaux existants ne se rapportent qu'à des sujets particuliers.
Je citerai ici les ouvrages de Verson (1905) et de Deegener (1908) sur
les transformations de l'appareil digestif, celui de K. Samson (1908) sur
la métamorphose des tubes de Malpighi, ceux de Berlese (1899-1901),
de PosPiELOW (1911) sur la métamorphose du tissu adipeux, ceux de
KoROTNEFF (1892), Berlese, PospiELOW sur les muscles, etc.
Même sur ces points particuliers, il n'y a pas accord entre les auteurs.
Ainsi, par exemple, Korotneff, Berlese et Pqspielow interprètent
chacun d'une façon différente les phénomènes qui se passent dans les
muscles ; et le fait qu'ils ont étudié des espèces différentes ne paraît pas
suffisant à expliquer leurs opinions contradictoires.
Il y avait donc intérêt à reprendre l'examen de cette question, à voir
si, comme on l'a prétendu, la phagocytose ne joue pas un rôle dans la
métamorphose des Lépidoptères, et d'une façon générale, par une étude
assez complète des divers organes, d'avoir chez une espèce donnée un
aperçu d'ensemble des phénomènes métaboliques.
J'ai pris comme objet dans mes recherches les Hyponomeutes et
principalement Hyponomeuta padella L. {H. variahilis Z), papillon bien
connu par les dégâts qu'exercent ses chenilles sur le prunier, le prunellier
et l'aubépine.
Il y a, par an, une seule génération à'H. padella. Kaltenbach (1874)
a signalé en Allemagne une deuxième génération annuelle, mais ce fait
n'a pas été vérifié.
D'après les observations de Marchal (1902), la ponte a lieu au mois de
juillet, on peut compter dans chaque ponte jusqu'à quatre-vingts œufs ;
ils sont englobés 'dans une substance agglutinante jaune, qui, durcis-
sant à l'air, constitue une croûte. La ponte, Hsse et claire au début, se
ride et s'assombrit beaucoup, elle devient d'une couleur brun grisâtre
et alors se confond facilement avec l'écorce de la branche qui lui sert de
support.
Les chenilles éclosent au mois de septembre, mais restent pendant
l'automne et l'hiver dans cette sorte de nid dont les paro's sont formées
par le rameau d'une part, la surface extérieure de la ponte d'autre part.
50
il/»"- A. HVFNAGEL
Dans mes élevages, les chenilles sont sorties de leur retraite hivernale
vers le premier mai.
Elles subissent par la suite plusieurs mues.
Je les ai élevées dans des cages vitrées où je disposais des rameaux
feuillus d'aubépine ou de pnmier, dont elles se
nourrissaient indifféremment. C'est entre le 23 et
le 31 mai que les chenilles étaient le plus voraces.
Anatomie sommaire de la larve
Les chenilles de l'Hyponomeute se rattachent
au type de larves érucif ormes. Leur corps est cylin-
drique. Elles présentent un segment céphalique,
trois segments thoraciques et dix segments abdo-
minaux dont le dernier est un peu plus petit que
les autres. La tête porte deux antennes rudimen-
taires et des appendices buccaux qui sont du type
broyeur.
Les chenilles possèdent trois paires de pattes
thoraciques articulées et cinq paires d'appendices
abdominaux inarticulés.
Le tégument se compose d'une couche hypo-
dermique recouverte d'une cuticule pigmentée.
Celle-ci porte de nombreux poils ; il y en a des
petits et des grands.
Au niveau de l'orifice buccal et de l'anus, la
cuticule se réfléchit et constitue le revêtement de
l'intestin antérieur et postérieur.
Le tube digestif (fig. i) comprend : l'intestin
antérieur [a), moyen [i) et postérieur {p).
L'intestin antérieur ne dépasse pas le deuxième
segment thoracique ; il est constitué par une cavité
buccale, un pharynx et un volumineux œsophage,
dont la portion terminale s'enfonce dans l'intes-
tin moyen.
L'intestin moyen est un énorme sac ovoïde qui
occupe presque la moitié de la longueur de la larve. Il est suivi par
l'intestin postérieur. Celui-ci, dans sa portion antérieure, envoie latéra-
FlG.I. Schéma montrant la dis-
position clos organes. Coupe
longitudinale d'une larve
adulte. Le tube digestif est
désigné par un simple trait.
II. intestin intérieur; i, intes-
tin moyen ; p, intestin pos-
térieur; s, glande de la soie;
e, tubes de Walpighi ; m.
glande mandibulaire ; v.
glande ventrale ; rj, chaîne
glaiiglioniiaire.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA 51
lement deux caecums dans lesquels viennent aboutir par deux canaux
les tubes de Malpighi (e). Ces derniers sont au nombre de six. Dans leur
13ortion proximale, ils flottent librement dans la cavité générale. Dans
leur portion distale aveugle, ils s'entortillent intimement autour du
rectum.
La glande de la soie {s) est constituée par deux énormes boyaux qui
se terminent en cul-de-sac di-rs la portion abdominale de la larve; ils
s'ouvrent d'autre part à la base de la lèvre inférieure. Dans l'abdomen,
la glande est située dorsalement par rapport à l'intestin ; elle est très
épaisse, elle comprend un segment droit et un autre en forme de V.
Toute cette portion est sécrétrice. Un peu avant d'arriver dans le thorax
elle devient ventrale, s'amincit énormément et constitue le canal con-
ducteur.
Non loin de son ouverture celui-ci reçoit les produits de la glande
de Filipiîi.
On distingue encore d'autres glandes; parmi elles je citerai : La
glande mandibulaire (;//) ; elle suit l'intestin antérieur et vient b'ouvrir
extérieurement à la base de la mandibule. Son extrémité en cul-de-sac
se trouve dans le deuxième segment thoracique.
La glande pharyngienne est située sur la face ventrale du segment
céphalique qu'elle ne dépasse pas.
La glande ventrale longe la face ventrale du thorax, elle s'ouvre,
à la partie supérieure du premier segment.
Le système nerveux comprend une paire de ganglions cérébroïdes,
une paire de ganglions sous-œsophagiens, un petit ganglion frontal et
une chaîne ventrale de onze ganglions (gr), dont trois thoraciques et huit
abdominaux.
Le cœur occupe une position medio-dorsale, mais devient plus pro-
fond dans le segment céphalique.
Tout le long de l'abdomen il est accompagné par des cellules péri-
cardiales.
Le système respiratoire est du type péripneustique ; il y a une paire
de stigmates dans le prothorax, et une paire dans chaque segment abdo-
mmal.
Parmi les muscles tégumentaires, on reconnaît des longitudinaux
qui occupent une position latéro-dorsale et latéro- ventrale et d'autres
dorso- ventraux (obliques) dont la situation correspond à la hgne de
séparation de deux segments.
52 iVinie A. HVFNAGEL
Le tissu adipeux se présente sous forme de cordons ou de nappes.
On distingue un corps adipeux superficiel et un autre profond.
Sur les deux faces du corps on trouve, accolé au cordon gras périphé-
rique des segments thoraciques et abdominaux, xxn bourgeon dont l'as-
pect est différent de celui du tissu adipeux proprement dit. J'ai reconnu
dans ces amas des « foyers de formation d'éléments gras et sanguins ».
Grands traits de la métamorphose
Les premières manifestations de la métamorphose chez l'Hypono-
meute ont lieu à la fin de mai ou au commencement de j uin.
Dans mes élevages, c'est vers cette époque que les chenilles ont cessé
de manger. Elles quittaient les branches pour chercher une place favo-
rable pour s'immobiliser. Leurs mouvements allaient en se ralentissant.
Elles se dirigeaient vers les coins les plus obscurs du toit de la cage.
Dans les angles elles se ramassaient en paquets et commençaient à filer
leur cocon. Si, dans les premiers jours de leur repos, on modifiait la position
de la cage de façon à éclairer un peu leur groupement, on les voyait se
disperser pour gagner un autre endroit toujours dans la pénombre.
Les phénomènes internes de la métamorphose débutent à ce moment.
L'une des manifestations les plus précoces est l'augmentation des
éléments dans l'anneau imaginai antérieur, l'expulsion de l'intestin
moyen larvaire, l'individualisation des myoblastes dans les futurs muscles
du vol, la prohfération des cellules hj'podermiques.
Du moment où la chenille cesse de se nourrir juscju'àsachrysahdation,
on peut compter de sept à dix jours d'immobilité^. La mue nymphale
n'a lieu que un ou deux jours après que les larves ont fini de tisser leur
cocon ^.
Lorsque la chrysalide apparaît, on reconnaît déjà les appendices
définitifs appliqués contre la face ventrale du corps. Celui-ci est
blanc jaunâtre et mou. Au bout de quelques heures une tache brunâtre
apparaît à l'extrémité abdominale, sur la tête et au niveau du col ; plus
tard toute la cuticule s'assombrit et s'épaissit.
Les yeux se voient nettement le dixième jour.
1 . Pour faciliter cette observation un certain nombre de chenilles ont été isolée s dans des petits bocaux. Il n'est
pas impossible que les conditions anormales dans lesquelles elles se trouvaient aient un peu retardé leur mue.
2. Chez II . padella le cocon est d'un feutrage lâche et laisse voir par transparence la chenille. Chez II. mnlineUa.
que j'ai également eu l'occasion d'observer, le cocon est à parois épaisses et de couleur blanche.
MÉTAMORPHOSE DE HYPOXOMEUTA 53
Vers la neuvième-dixième journée, la plupart des organes et des tissus
ont atteint leur structure définitive.
Suivant l'année, l'évolution des Hyponomeutes peut être plus ou
moins avancée à la même époque. La durée de la métamorphose varie
également. La chrysalidation avait lieu entre le 5 et le 15 juin, elle durait
de treize à seize jours ^
On trouvera, à la fin de ce travail, un tableau résumant approxima-
tivement la concordance chronologique des principales manifestations
relatives à la métamorphose de Hyponomeuta.
Matériel et technique
J'ai étudié les principaux tissus et organes des Hyponomeutes à
l'exception du système nerveux, du cœur et des trachées qui demande-
raient une technique spéciale.
J'ai eu besoin pour mes observations d'un très grand nombre de
chenilles ; j 'en ai recueilli moi-même dans les environs de Paris ; plusieurs
pontes me furent envoyées de la région bordelaise, où cet insecte cause de
grands ravages.
Les chenilles de Hyponomeuta sont très souvent parasitées par les
Encyrtus fuscicoHs.
Le pourcentage des individus atteints était plus ou moins élevé sui-
vant l'année et l'endroit d'où provenait la ponte.
Dans une des pontes que j'ai eues, 75 % des chenilles ont été
parasitées.
J'ai fixé les larves à des stades très variés de leur vie active et de leur
repos. En venant à de fréquents intervalles dans la journée observer les
chenilles immobilisées, il m'a été possible de prélever des chrysalides
juste au moment de leur sortie de la peau larvaire. J'ai pu ainsi noter
l'heure précise des mues et plus tard fixer des nymphes dont je connais-
sais l'âge à peu près exact. C'est pendant l'immobifité de la larve et pen-
dant les quatre premiers jours de la nymphose que les transformations
sont les plus actives et c^u'il faut fixer le plus grand nombre d'individus.
Avant fixation, j 'immergeais les Hyponomeutes dans de l'eau portée à
60-70 cent. Ce procédé provoque la coagulation du sang et permet ensuite
l'incision des téguments. Après cela, je plongeais les individus dans le
fixateur,
1. Dans mes élevages j'ai conservé des papillons vivant pendant 5 semaines.
54 il/"»<^ A. HUFNAGEL
Comme fixateurs, j'ai employé le liquide de Gilson au sublimé, le picro-
formol alcoolique et le picroformol à l'eau de Bouin. Ce sont les fixateurs
au formol qui m'ont donné les meilleurs résultats.
J'ai coloré le plus souvent les coupes au glychémalun, puis diffé-
rencié par l'alcool à 70° acidulé de HGL et coloré à l'éosine ou à l'au-
rantia.
J'ai également employé l'hématoxyline au fer de Heidenhain et le
procédé de Mann.
Le liquide de Borrel m'a parfois servi comme fixateur pour l'étude du
tissu adipeux ; j'ai ensuite usé de la safranine ou du rouge Magenta, picro-
indigo carmin.
Les frottis furent fixés au sublimé acétique et coloré au glychémalun-
éosine.
Etant donnée la diversité des processus présentés pour un même
organe par les Insectes des différents ordres, je ne m'astreindrai pas à
faire l'historique complet de tous les travaux antérieurs. Je me bornerai
à rappeler les ouvrages qui ont trait aux Lépidoptères ; je ne ferai allusion
à d'autres travaux que s'il est utile de comparer leurs résultats avec
ceux que j'ai moi-même obtenus.
ÉLÉMENTS SANGUINS
Je décrirai d'abord les éléments de la cavité du corps, globules du
sang, dont la connaissance est nécessaire pour l'examen ultérieur des
phénomènes présentés pendant la métamorphose par les autres organes.
On distingue dans le liquide sanguin de la larve de Hyponomeuta
padella différents éléments. En voici les principaux :
P Proleucocytes ;
2° Leucocytes jeunes ;
3° Leucocytes âgés ou phagocytes ;
4° Leucocytes à inclusion grasse ;
50 Leucocytes à granules.
1° Proleucocytes (fig. 11 p) : Cellules plus ou moins arrondies, ovalaires
ou polygonales mesurant à peu près 5-9 a et dont le noyau occupe presque
tout l'espace cellulaire. Le fond du noyau est clair. Parmi les nombreux
grams chromatiques se trouve un nucléole ou deux (fig. 1 ]}rl). La chro-
matine peut également être compacte et le nucléole indistinct. La mince
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEIJTA
55
-F-
Flû. II. p, proleucoeyte ; J. jeune leucocyte à deux noyaux; les autre»
éléments présentent les dilïérentes formes de jeunes leuco-
cyte*. X 1260.
couche de cytoplasme entourant le noyau est fortement chromatophilCé.
Ces éléments se multiplient par caryocinèse.
Ils se rencontrent principalement au voisinage des foyers de formation
des globules sanguins. Ce
sont les leucocytes de ^•
T<?r ordre de Metalnikoff,
les proleucocytes de Hol-
LAND"^.
2° Leucocytes jeunes
(fig. Il) : Cellules mesurant
en moyenne 8-14 y. de lon-
gueur et présentant des
formes diverses ; elles sont
allongées, triangulaires, fu-
sif ormes, à ini ou deux
pseudopodes polaires. Le
noyau se présente de la même façon que celui des proleucocytes. Parfois
on rencontre deux noj^aux (/).
Dans le cytoplasme chromatophile se dessinent souvent quelques taches
claires ^ Ces éléments sont des proleucocytes accrus. Je les désignerai
comme des leucocytes
jeunes. Ils se rencontrent
chez la larve, chez la nym-
phe et chez l'imago, ils sont
réduits en nombre chez ce^
dernier. Par leur aspect, ces
cellules rappelent les phago-
cytes de Hollande, mais
chez Hyponomeuta padella,
1-.G. m. a, b, e, rf. leucocytes âgés ou phagocytes; e, f, leucocytes ^^Ur rôle m'a Semblé très TCS-
à inclusion grasse ; g. leucocyte granuleux, x 1260. trciut danS l'englobemeut
des débris histolysés.
3^ Leucocytes âgés ou phagocytes (fig. m et iv) : Cellules plus
ou moins sphériques, ovalaires ou polygonales au moment du repos
(fig. m a, b). Elles sont amiboïdes ou présentent un bout
allongé lorsqu'elles se déplacent (fig. iv b). Leurs dimensions sont
1, J'insiste sur la présence de vac\ioles dans les leucocytes libres répandus dans la cavité générale, carBERLESB:
décrit et figure ces éléments chez Hi/pouomeuta comme entièrement homogènes et dépourvus de vacuoles.
56
37 '"^' A. HUFNAGEL
variables, et en rapport avec les inclusions qu'elles contiennent p..
La podtion du noyau n'est pas constante; il est parfois central, par-
fois excentrique (fig. m c\ Les granulation^ chromatiques sont très
espacées, un nucléole peut exister ou non. Le suc nucléaire est très clair.
Le cytoplasme éosinophile contient quelques vacuoles (fig. ma). Il
enferme cjuclquefois de minuscules granulations éosinophiles poussié-
reuses. Ces cellules présentent un stade pins avancé des jeunes leuco-
cytes à cytoplasme chromatopliile (fig. ii). Elles sont très nombreuses :
on les trouve chez les jeunes larves, chez les larves âgées, chez les chry-
salides et chez les imagos.
Ces leucocytes peuvent se charger d'inclusions albuminoïdes ^ et
grasses (fig. m b. d). En même temps ils s'agrandissent énormément
et alors sont difficiles à distinguer de
certaines cellules adipeuses dont la
taille est plus petite cpie celle de leurs
congénères.
Les leucocytes âgés sont de vrais pha -
gocytes. Ce sont eux qui pendant la méta-
morphose se chargent des débris de des-
truction et se transforment en sphères de
granules - (fig. iv a, b; fig. xviii sg ;
fig. XXI phi; fig. XXII, XX VII s g]; ils peuvent alors augmenter beaucoup
de taille (comparer a et 6 de la fig. iv).
CuÉNOT (1891) ne croit pas que chez les Lépidoptères les
amibocytes puissent jouer un rôle actif dans la phagocytose. II
dit :
'( Les amibocytes étant tous bourrés d'albuminoïdes, se dissolvent
naturellement dans le liquide sanguin et ne peuvent servir que difficile-
ment à la désagrégation dep tissus ou phagocytose " ».
Fig. IV. «, sphère de granules; b, pha-
gocyte. X 12G0.
1. Le procédé de Mann permet de déceler dans le cytoplasme de certain^ de ces leucocytes des petites inclu-
«ions de forme cristalloïde.
2. ^YEISMANN(186&)le premier a remarciué les « Kiirnchenkugeln >• chez (tillipliorn. t'Hrs (1876) les a observés
«hez Sphinx ligustri. Ce n'est qne depuis Kowai.ewsky (1885-1887) et Van Ukes^( 1884-1838) que l'on sait que ces
formations sont des phagocytes bourrés de débris des tissus iju'ils digèrent.
Ch. Pérez (1908) a traduit « Kôrnchenkugeln » par le mot « sphères de granules ». C'est cette expression que
je vais employer.
3. CrÉ.N'or (18)1) en se basant sur les relations existantes entre ces deux sortes d'éléments place les Lép".-
doptères dans un gro\ipo à part où comme il dit, avec les amibocytes typiques, existent des am bocytes
remplis de substance albuminoïdes.
Il range dans un second groupe tous les autres Insectes, où les leucocytes ne contiennent ui inclusions albu-
jninoïdes, ni graisseuses et où par ce fait même la distinction entre ces éléments,
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA 57
Et plus loin :
« Au lieu de dévorer les tissus, il semble que ce sont eux qui ont été
absorbés à titre de matériaux nutritifs. »
Nous verrons plus tard que ces éléments peuvent en même temps
accumuler des réserves albuminoïdes et prendre part à la phagocytose
(voir p. 000).
40 Cellules à inclusion grasse (fig. m e, /) mesurant en moyenne de 9- 1 2 y. ;
elles présentent sur les coupes une très grande vacuole dont le con-
tenu noircit par l'acide osmique. Le noyau est toujours périphérique. Le
eytoplasme est éosinophile. Après la coloration au Mann, on distingu ^
dans celui-ci de même que dans les leucocytes âgés, quelques inclusions
rouges de forme cristalloïde (/. fig. m).
Ces éléments ne prennent que rarement part à la phagocytose.
Ils sont très fréquents au moment de la nymphose, et manquent chez
l'adulte. J'en ai trouvé de pareilles chez des jeunes chenilles (fig. 1 l. (jV.)
où elles n'ont pas été signalées jusqu'ici.
Ils rappellent certaines cellules adipeuses au moment de la métamor-
phose, dont les inclusions grasses peuvent également se réunir en un seul
amas (voir p. 75).
D'autre part, par leur conformation, leur taille et celle de leur noyau,
ils se rapprochent des leucocytes.
Il est probable que les éléments en question sont des leucocytes
modifiés et que cette modification a eu surtout lieu au moment de la
métamorphose ; elle consiste en ce que certains leucocytes se chargent
abondamment de gouttelettes grasses qui se réunissent en une seule et
repoussent le noyau à la périphérie.
On trouve des termes de passage entre les leucocytes âgés et les
cellules à inclusion grasse (comparer les éléments c, d, e, f de la fig. m).
En somme, ce sont des éléments qui par leur aspect général tieiment
à la fois de la cellule grasse et du leucocyte. Je reviendrai encore sur ce
sujet lorsque j'étudierai le tissu adipeux (voir p. 75).
Mayer (1896) a rencontré des cellules vacuolaires semblables dans
l'hémolymphe des cavités alaires chez Samia cecropia et Vanessa antiopa.
L'auteur les considère comme des corpuscules sanguins dégénérés^.
1. The9>> vacuolatc<l ivll-i appcar to be blooil corpuscles which are dr^enerating, for it i< certain that there
are no vacuolated bloo<i corpuscles to be met witli in ttie larva, or iii tlie older piipae.
Tout en admettant qu'il s'agit là des leucocytes modifiés, je dois cependant remarquer que l'auteur est trop
•exclusif en niant la présence des \acuoles dans les leticocytes des larves et des nymphes âgées. Ces vacuoles sont
petites mais elles existent.
58 .¥•»'■ :4. HUFNAGEL
Ces éléments coirespondent aux leacocjrtes granuleux modifiés d ■
Hollande (1913).
50 Leucocytes à granules (fig. iiig').Ce sont des cellules plus ou moins
arrondies dont le diamètre est environ de 12 a. Le noyau est toujours
central, les granulations chromatiques sont peu nombreuses et espacées,
un nucléole existe.
Souvent sur les coupes les granulations se montrent situées sur la
périphérie du noyau, quelques autres granulations occupent son centre
(fig. m).
Le cytoplasme ne contient généralement pas de vacuoles, mais il est
bourré d'assez grosses granulations arrondies prenant très fortement
l'éosine. Les affinités de ces inclusions pour l'éosine sont plus prononcées
que celles des inclusions albuminoïdes de la plupart de cellules grasses ;
les vacuoles font généralement défaut; lorsqu'elles existent, elles sont
très petites.
Les éléments à granules ne jouent pas le rôle de phagocytes. On les
trouve répandus dans la cavité générale pendant toute la vie de l'insecte.
Ils sont moins nombreux que les leucocytes jeunes et les leucocytes âgés
(phagocytes).
TISSU ADIPEUX
Berlese (1911) a étudié la métamorphose du tissu adipeux chez
Pieris brassicae, Sericarîa mori, Hyponomeuta malin ella.
Chez Pieris, l'auteur constate que les cellules adipeuses proviennent
directement des amœbocytes. Il a observé, chez les larves un peu avant
leur éclosion et chez les toutes jeunes chenilles, des leucocytes et des cel-
lules adipeuses libres ; de nombreux passages existent entre ces deux
sortes d'éléments. Chez les jeunes larves (quatre jours), l'accroissement
des nappes adipeuses se fait par la réunion à la nappe de nouveaux élé-
ments dérivant des leucocytes. Chez Sericaria, les cellules adipeuses se
multiplient pour leur propre compte .
En général, chez les Lépidoptères, le tissu adipeux de la larve passe
entièrement à l'imago.
Les cellules adipeuses sont de vrais trophocytes. Elles accumulent
les réserves grasses et albuminoïdes.
L'époque de l'apparition des inclusions albuminoïdes est en rapport
inverse avec la production de la soie. Dans les espèces qui, par exemple,
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA 59
comme Sericaria filent un riche cocon, raccumulation de ce? inclusions
a lieu chez la larve en train de filer.
Les réserves albuminoïdes postlarvaires représentent les produits
d'élaboration de la dernière nourriture ingérée ou de la destri ction de
l'épithélium larvaire du mésentérum.
Les substances albuminoïdes ne sont pas élaborées à l'intérieur même
des cellules grasses , elles s'y déposent sous forme de produits déjà élaborés
par le tube digestif.
Une digestion intracellulaire des réserves albuminoïdes a lieu et les
urates^ qui en proviennent persistent plus ou moins longtemps à l'inté-
rieur des cellules.
PospiELOw (1911) constate qu'au moment' des mues larvaires des
amibocytes se séparent des épai. ^issements épithéliaux des trachées et
d'autres foyers sanguins. Ils constituent le corps adipeux larvaire.
Au début de la nymphose, de nouvelles nappes adipeuses se forment
de la même manière. L'auteur distingue les corps gras : embryonnaire,
larvaire et nymphal. Avant la mue nymphale, des granulations éosino-
philes apparaissent dans les cellules adipeuses.
Dans certaines espèces, ces granulations se transforment en des corps
cristalloïdes particuliers. Il décrit de ces formations chez Vanessa poly-
chloros, Aporia crataegi, Agrotis segetum, dont les imagos présentent, au
moment de leur éclosion, des glandes génitales incomplètement déve-
loppées.
Chez les nymphes de Malacosoma castrense, les cellules grasses ne
contiemient pas de corps cristalloïdes ; par contre, les tubes de Malpighi
de cette espèce en sécrètent de spéciaux.
Enfin, l'auteur observe que certains Bombycides n'ont de cristalloïdes
ni dans les cellules grasses, ni dans les tubes de Malpighi.
Chez Vanessa, les imagos présentent à leur éclosion des nappes
adipeuses
Le corps gras n'existe guère chez les papillons de Malacosoma neusiria.
10 TISSU ADIPEUX CHEZ LA LARVE
Nous allons maintenant étudier le tissu adipeux chez Hyponomeuta.
Chez les chenilles à peine sorties de leur sommeil hivernal, le tissu
1. On pourrait se demander si les urates sont réellement dusi la digestion des produits albuminoïdes et s'ils
ne faudrait pas plutôt regarder les Unies adipeuses comme des organes excréteurs jouant ce rôle durant le non
fonctionnement des tubes de Malpighi.
60
J/me A. HUFNAGEL
h
^•?;
FiG. V. r, nappe des cellules adipeuses chez
une larve à peine sortie de son sommeil
hivernal, x 1575; ft, ccUule adipeuse pro-
venant du foyer d'origine d'éléments gras
et adipeux à un stade avancé de son évo-
lution ; fortement grossie. Larve demi-
adulte.
adipeux est constitué par des nappes correspondant à une seule assise
cellulaire (fig. i c, a), plus rarement à deux (fig. va).
Les limites cellulaires sont tantôt visibles, tantôt indietinctes, mais,
même lorsqu'elles existent, elles ne sont
jamais parfaitement nettes. Le noyau
est plus ou moins arrondi ou ovale.
Le cytoplasme est très chromato-
phile, il renferme de rares et petites
inclusions graisseuse?. Certaines cellules
n'en contiennent point.
A ce stade, les cellules adipeuses et
surtout celles qui sont encore dépour-
vues de gouttelettes grasses, rappellent
énormément, par leur aspect, les leuco-
cytes jeunes, également chromatophiles.
Nous aurons encore à revenir sur les
affinités qui existent entre ces deux
sortes d'éléments ; constatons pour le moment leur ressemblance.
Les cellules adipeuses grossissent rapidement, leurs inclusions
s'accroissent très vite en taille et en nombre et bientôt elles réduisent
le cytoplasme chromatophile à de minces trabécules déterminant un réseau
autour de ces gouttelettes grais-
seuses (fig. 1, 2 c. a.). Ces inclusions
noircissent par l'acide osmique,
mais sont dissoutes par les autres
réactifs et alors se présentent sur
les coupes comme des vacuoles de
dimension variée.
Il y en a des petites et des
grandes, certaines même sont plus
volumineuses que le noyau. On
peut trouver dans une même cel-
lule des gouttelettes de taille
variée. Mais il arrive aussi que les
petites ou les grandes vacuoles sont localisées dans différentes cellules.
La figure vi nous en montre un exemple.
Chez une larve demi-adulte, on distingue des nappes adipeuses péri-
phériques situées immédiatement au-dessous de l'hypoderme et d'autres
Fig. VI.
l?.
Deux cellules adipeuses de l'abdonien d'une
larve d'âge moyen, x 1130.
MÉTAMORPHOSE DE HYPOXOMEUTA
61
profondes, qui entourent l'intestin moyen et se trouvent intercalées entre
les organes.
Les cellules de chaque nappe sont entourées par une membrane con-
jonctive. Les limites entre les éléments sont assez nettes, mais parfois
elles peuvent être indistinctes. Les cellules sont ovalaires ou polygonales
(fig, VI a, b), leur taille varie entre 25 et 40 u. Les noyaux sont plus ou
moins arrondis, ovalaires quelquefois polygonaux lorsqu'ils sont com-
primés par les gouttelettes grasses (fig. vi, vu, fig. 1, 2, c. a.). Ils sont
tantôt centraux, tantôt excentriques, leur situation n'est pas constante.
Ils mesurent de 7 à 9 ;j..
Après fixation préalable au sublimé acétique et coloration à l'héma-
toxyline de fer et éosine, les noyaux apparaissent sur les préparations
comme des vésicules claires à membrane éosinopliile épaissie; la cliro-
matine condensée en deux ou trois gros amas est située au centre.
Sur les préiDarations des chenilles
fixées au formol picrique, et colorées
au glychémakin et éosine, la mem-
brane nucléaire est moins épaisse, les
granulations chromatiques sont dis-
persées et parmi elles se trouvent un
ou deux nucléoles (fig. 1, 2, c. a,
fig. VII).
Chez une chenille en train de
muer que j'ai eu l'occasion d'obser-
ver, les granulations chromatiques
occupaient la périphérie du noyau,
un ou plusieurs nucléoles se trou-
vaient au miHeu (fig. vu).
Prolifération des cellules au moment
des mues
Au moment des mues, les noyaux
Fig. VII. Nappe adipeuse chez une larve se prépa-
rant à la mue ; c, caryocinèse. x 700.
se multiplient activement, les divi-
sions caryocinétiques se rencontrent très fréquemment aussi bien dans
les couches périphériques que dans les couches profondes. La figure vu
nous en montre trois sur un espace relativement petit. La prolifération
indirecte des éléments adipeux au moment des mues semble être un fait
62 M^^ A. HUFNAGEL
assez général chez les Lépidoptères. Berlese la signale chez Sericari '
Mori et Pospielow chez différents Bombycides ^
La prolifération étant très active et les divisions cellulaires ne succé-
dant pas immédiatement à celle des noyaux, il en résulte des syncytiums.
A ce moment, les noyaux peuvent être très rapprochés et même réunis.
Ces couples de noyaux se rencontrent fréquemment chez une larve se
préparant à la mue. Plus tard, ils s'éloignent et les cloisons cellulaires se
forment. Dans certaines cellules, les noyaux restent rapprochés. On a
ainsi des éléments à plusieurs noyaux (fig. viii) ^.
Homologie originelle du tissu adipeux et des éléments sanguins
C. ScH/EPFER (1889) a trouvé chez Hyponomeuta eionymella, aux
environs des disques alaires, des formations particulières et les a nommé
« Blutbildungsherd » foyer de formation des éléments sanguins.
Pour Sch.î:ffee, ces foyers de formation des éléments sanguins ne
seraient aitre chose qu'une portion du tissu adipeux resté à l'état
embryonnaire et ayant conservé la faculté de produire des leucocytes.
J'ai moi-même trouvé chez les jeunes larves et jusqu'à un stade assez
avancé de leur vie active des formations analogues. Ce sont des amas
chromatiques fusionnés au corps gras externe et qui s'en distinguent
même à un faible grossissement, grâce aux affinités énormes qu'ils ont
pour les colorants basiques.
Je les ai observé chez Hyponomeuta padella, dans le thorax (fig. ix)
et en outre dans les différents segments abdominaux où ils n'ont pas
été signalés par Schiffer. Ils y sont situés dans les nappes périphériques
sur les faces latérales de la larve. Ils ne sont pas continus tout le long
de l'animal ; ils forment des masses distinctes dans chaque armeau.
Examinons un de ces amas abdominaux chez une larve adulte : sa des-
cription pourra aussi bien s'apphquer aux amas thoraciques. La figure ix
nous présente très schématiquement la coupe transversale d'une de ces
formations soudée à la nappe adipeuse.
1. POYARKOFF (191C) a observé la multiplication caryocinétique immédiatement avant la mue chez la Galé-
ruque de l'Orme. Cette prolifération n'a été observée ni chez les Hyménoptères, ni chez les Muscides.
2 L'aspect sjmcj'tial du tissu adipeux a été expliqué par des auteurs tels que Leydtg, Graber WIELOWIEJSKT,
comme une conséquence de la fusion complète des aniibocytes, et même lorsque les cellules gardent leur individua-
lité, ces auteurs pensent que ce fait est dû à ce que la fusion n'est pas encore terminée.
C'est Carnoy le premier qui a montré que l'état sjiicjiiial du corps adipeux pro\1ent d'une multiplication
rapide des noyaiLX non suivie de division cellulaire. N'ayant pas rencontré des caryoeinèses. il croyait qu'il
8'agissait d'une division directe.
MÉTAMORPHOSE DE HVPONOMEUTA
63
^J
\ m. Srlu'iiui il'iin «'riscniblo du corps gras et du foyer d'ori-
•_'iiic (rélénicnts gras ot adipeux. Los figures de détail se
fromnit dniis la plaucin- I. fig. 1 et 2.
Nous étudierons d'abord la portion de cet ensemble qui, sur le schéma,
est désigné par la lettre A . .
La figure 2 nous la montre à un plus fort grossissement.
L'aspect du tissu adipeux correspond à celui dont j'ai donné déjà la
description chez une larve
demi-adulte. Le bourgeon
qui lui est accolé se présente
à première vue comme un
amas de nombreux noyaux
baignant dans lui cyto-
plasme très chromatique. Ce
n'est qu'en regardant plus
attentivement et en variant
la mise au point qu'on dis-
tingue les limites cellulaires
et encore celles ci manquent-
elles souvent.
Suivons ce bourgeon sur la ligure 2. Les noyaux sont arrondis ou
ovalaires. Les granulations chromatic^ues sont dispersées sur le fond clair
de la substance nucléaire; il y a un ou deux nucléoles.
Nous voyons sur la figure une division caryocinéti(|ue. Ce mode de mul-
tiplication se rencontre
fréquemment sur d'au-
tres coupes. Le cyto-
plasme est très dense
et chromatophile , il
montre par-ci par-là
des petites vacuoles
graisseuses.
Sur certaines pré-
parations, on suit net-
tement le passage des éléments chromatiques aux cellules adipeuses pro-
prement dites. A la limite des deux masses, quelques cellules présentent
déjà des vacuoles caractéristiques du tissu gras, tout en conservant
encore un riche cytoplasme chromatophile.
Si maintenant nous comparons ce bourgeon chromatique avec le tissu
adipeux d'une chenille à peine sortie de son sommeil hivernal (voir p. 60),
nous voyons que tous deux présentent des caractères identiques. Les élé-
IX. Xappc adipeuse superficielle daus le thorax d'une larve d'âge
moyeu. </. corps gras ; /. foyer d'origine d'éléments gras et adi-
peux. >: ■iô').
Akc}i. de Zooi.. Ex?, kt Gén.
64 3/n^« A. HUFNAGEL
ments sont à peu près de la même dimension, les limites cellulaires
existent, mais se voient avec diffic ilté, les noyaux sont plus ou moins
arrondis ou ovalaires et remplis de granulations plus sombres que le suc
nucléaire. Le cytoplasme est très chromatopliile et enferme de rares gout-
telettes adipeuses. Si donc, dans le cas de la toute jeune chenille, nous
admettons qu'il s'agit d'un tissu adipeux ayant gardé ses caractères
embryonnaires et dont les réserves sont encore peu développées, ne
pouvons-nous pas appliquer la même définition au massif se trouvant en
continuité avec la nappe adipeuse définitive (fîg. 1) ?
Ceci me paraît vraisemblable et je le considérerai comme un corps
gras jeune dont[les éléments se différencieront par la suite ^.
Je ferai remarquer encore une particularité de cette masse ; elle con-
serve la faculté de proliférer jjendant toute la vie de la larve (fig. 2),
tandis que dans le corps adipeux parfaitement différencié, les multipli-
cations ne se produisent qu'au moment des mues (v. p. 61 et fig. vu).
Examinons, maintenant dans le même amas la portion voisine qui,
sur le schéma viii, est représentée par la lettre B. La figure 1 en est l'image
grossie. Elle est très différente de la région que nous venons de décrire.
Nous yjvoyons des éléments nombreux plus ou moins rapprochés, mais
même lorsqu'ils sont contigus, leurs limites cellulaires sont distinctes.
Plusieurs de ces éléments sont fusionnés aux cellules adipeuses, la plupart
en sont|éloignés. Leur forme est très variée. Ils sont polygonaux, ovalaires,
fusiformes, quadrangulaires ou triangulaires. Les noyaux sont ovalaires
ou arrondis, lesjgranulations chromatiques sont petites ; il y a un, deux ou
plusieurs nucléoles, le suc nucléaire est clair, le cytoplasme dense et chro-
matophile est généralement exempt de vacuoles.
Ces éléments prolifèrent activement. On peut en juger par le dessin 1 ,
nous|y voj^ons cinq caryocinèses.
Lesjcellules en train de se multiplier sont généralement arrondies ou
quadrangulaires, leur cytoplasme est un peu moins basophile que celui
de leurs congénères.
De ces éléments ceux (prî) dont le noyau occupe presque tout le corps
de la cellule sont identiques aux proleucocytes et ceux (/) dont le cytoplasme
est plus développé rappellent les leucocytes jeunes chromatiques que l'on
trouve dans la cavité du corps ; ils n'en diffèrent que par l'absence d'une
ou de plusieurs taches claires.
1. i"X(i. IV b nous inouï rc un Uf ces éléments à un stinli; |ilns avancé de son évolution.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA 65
Il faut en effet regarder ces cellules comme des éléments sanguins.
Je ferai remarquer que, si on suit Famas de leucocytes que nous
venons d'examiner {B sur le schéma xi et fig. 1) sur une série de coupes,
on voit qu'à \m certain moment il se trouve en continuité manifeste
avec la nappe adipeuse, il se présente alors de la même manière que le
massif que nous avons décrit précédemment ( .4 sur le schéma viiiet fig. 2).
An contraire, si on suit l'amas voisin {A sur le schéma viiTet fig. 2), on
le verra à certains niveaux émettre de nombreux leucocytes et on aura
alors l'aspect semblable à celui que nous voyons fig. 1. En d'autres
termes, le massif chromatique donne à la fois des cellules adipeuses et
de globules sanguins.
Je pense qu'il faudrait interpréter ce processus de la façon suivante.
Les cellules adipeuses et les globules sanguins ont la même origine
mesenchymateuse, mais tandis que certains éléments évoluent rapidement
en leucocytes ou en cellules adipeuses, d'autres, restés au contact du
corps gras, persistent longtemps sans différenciation, et constituent ces
foyers mixtes d'éléments gras et de leucocytes.
J'ai rencontré chez les larves à peine sorties de leur sommeil hivernal,
dans l'abdomen, au voisinage proche du corps gras périphérique des amas
leucocytaires semblables à ceux que je viens de décrire chez la larve demi-
adulte. Mais chez les très jeunes chenilles, il n'y a pas de différence entre
le tissu adipeux caractéristique e le tissu adipeux resté à l'état non
encore différencié. Tout le corps gras est constitué par des petits élé-
ments chromatophiles ne présentant que de très rares et mmuscules
gouttelettes.
Berlese (1901) et Pospielow (1911) ont également constate la ])ré-
sence des leucocytes se trouvant au voisinage du corps gras chez les
jeunes larves des Lépidoptères.
Ce sont pour ces auteurs des amibocytes qui se réunissent aux cellules
adipeuses préexistantes pour augmenter le nombre de leurs éléments.
Telle n'est pas mon opinion dans le cas de Hyponomeuta. Me basant sur
l'étude que j'ai faite des foyers mixtes d'éléments sanguins et adipeux,
je considère que les amas de leucocytes qui se trouvent au voisinage des
nappes adipeuses ne sont pas des globules venus du dehors et non encore
complètement fusionnés
Je regarde ces éléments comme naissant sur place et destinés à se
répandre dans la cavité générale.
66 37>"' A. HUFNAGEL
Il m'est arrivé d'observer parmi les proleucocytes et les jeunes leu-
cocytes un de ces éléments à vacuole (fig. 1, /. gr.) qui sont si abondants au
moment de la métamorphose et que je considère comme des leucocytes
chargés de substances grasses (voir p. 57).
Comment expliquer la présence d'un de ces éléments vacuolaires dans
la masse formatrice des globules blancs qui ont leur cytoplasme encore
parfaitement homogène ?
Ceci n'est-il pas une preuve de plus des affinités qui existent entre les
éléments sanguins et adipeux ?
Nous avons vu (p. 64) que les proleucocytes et les leucocytes jeunes, au
moment où ils se séparent de leur foyer d'origine, ne renferment généra- '
lement pas de vacuoles ni d'inclusions (fig. 1, prl. L), tandis que dans
les éléments provenant du même foyer, mais destinés à donner le tissu
adipeux, les petites logettes grasses commencent à apparaître (fig. 29).
On peut s'imaginer qu'à ce moment la différenciation des éléments
n'étant pas encore très accentuée, l'un d'eux contenant déjà quelques
inclusions se détache et donne un leucocyte à inclusion grasse. Ainsi un
élément mésenchymateux peut indifféremment évoluer en une cellule
adipeuse ou en un leucocyte.
2» MÉTAMORPHOSE DU TISSU ADIPEUX
La multiplication des cellules grasses définitives qui se produit au
moment des mues (fig. vn) et la différenciation des nouveaux élé-
ments dans le corps gras externe qui se poursuit pendant toute la vie lar-
vaire aboutissent à former dans le thorax et l'abdomen de la chenille un
tissu adipeux abondant. A partir de la dernière mue larvaire, les éléments
ne prolifèrent plus. On n'observe leur division ni chez la chenille au repos
ni chez la nymphe.
Des modifications apparaissent dans le corps gras au moment où la
larve cesse de prendre de la nourriture, les membranes entourant les
nappes adipeuses commencent à disi)araître et les cellules se libèrent.
Ceci a lieu dans le thorax, dan- les deux premiers et dans les deux der-
niers segments abdominaux
Les cellules isolées (fig. xi, xii, xiv, x\) sont arrondies ou ovo'ides;
elles ont le plus souvent un seul noyau, mais certaines en ont deux (fig. x)
et même trois (fig. xi), celles-ci sont généralement plus grandes.
Le noyau est arrondi, ovalaire ou polygonal, sa chromatme est un peu
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA
67
plus dense que chez la larve active, mais les granulations sont distinctes,
un nucléole existe. On trouve encore d'autres noyaux dont la membrane
nucléaire est particulièrement nette ; les granulations chromatiques sont
peu nombreuses, et situées surtout à la périphérie.
Dans la ])artie moyenne du corps, le tissu adipeux baigne dans le sang
qui sur les préparations se montre sous l'aspect d'un coagulum éosir.o-
phile.
Les cellules des nappes profondes restent iniies entre elles, et les limites
cellulaires s'évanouissant, elles forment de larges syncytiums. Les
vacuoles sont volumineuses et espacées. Dans le corps périphérique, un
grand nombre de cellules restent aussi acco-
lées, mais leurs cloisons ne disparaissant pas,
elles gardent leur individualité. Néanmoins,
on rencontre quelques rares cellules isolées,
dont le nombre s'accentuera chez la nymphe.
FiG. X. Cellule adipeuse à deux noyaux,
jeune nymphe, x 1700.
Réserves albuminoïdes
Chez la chenille qui a cessé de manger,
les cellules adipeuses commencent à élaborer
les réserves albuminoïdes ; celles-ci s'ac-
croissent en même temps que la graisse dimi-
nue.
Chez la larve qui a filé son cocon, ces
inclusions sont déjà très abondantes, mais leur aspect varie suivant la
région où elles se trouvent (fig. x, xi, xv).
Dans le thorax, ces granulations sont très petites et on peut diffici-
lement distinguer leur forme, il m'a cependant semblé qu'elles sont plus
ou moins sphériques, plus rarement allongées. Parmi ces minuscules
inclusions, on en rencontre parfois qui sont un peu plus grandes. Certaines
cellules sont complètement bourrées par ces granules, et ne montrent
plus aucune trace de goutte grasse (fig, xvc). Dans d'autres éléments, les
inclusions albuminoïdes sont disposées dans les intervalles qui séparent
les vacuoles (fig. xv a, b, d). Parmi les granulations, il y en a qui sont très
pâles, d'autres plus franchement éosinophiles ; les plus grosses présentent
parfois des affinités pour l'hémalun.
Je n'ai pas observé que les inclusions qui se trouvent autour du noyau
prennent intensivement l'hémalun comme l'a décrit Berlese, mais cepen-
6S
37^'- A. HUFNAGEL
dant quelques-unes disséminées dans la cellule se distinguent des autres
par leur teinte violacée ^
Dans labdonien les inclusions albuminoïdes sont beaucoup plus
grandes que dans le thorax, elles sont surtout volumineuses dans le
corps gras profond, au voisinage de l'intestin moyen.
La forme de ces inclusions est variée. Elles sont tantôt sphériques ou
sphéroïdales (fig. x, xi c), mais le plus souvent rectangulaires, allongées
et se présentent comme des corps
cristalloïdes (fig. xi, A). Souvent, ces
cristalloïdes se montrent logés dans
des vacuoles.
Quelle est la signification de ces
corps cristalloïdes si répandus chez
Hyponomeuta? Je ne les ai pas exa-
minés au point de vue chimique, je
ne puis donc les juger ciue d'après
leurs affinités pour les colorants. De
même que les petites inclusions sphé-
riques ou sphéroïdales, ils sont éosi-
nophiles. Le procédé de Mann les
teint en rose brillant. Ils preiuient
fortement l'hématoxyline et l'auran-
tia. Après fixation au Flemming et
coloration à la safranine, ils de-
viennent rouges. Ils ont donc les
mêmes affinités que les inclusions
albuminoïdes, et il faudrait les regar-
der comme des corps protéiques cpii ont pris cette forme régulière ; ils
rappellent par cette propriété les plaquettes vitellines.
PosPiELOW montre sur une préparation, chez Agrotis segetum (fig. 28
de r auteur), des corps cristalloïdes dont l'aspect est tout à fait sem-
blable à ceux que j'ai trouvés chez Hyporiomeuta. Par leur dissolution
dans les acides et leur fragmentation ces corpuscules rappellent les
Dotterkrrper des œufs des Sélaciens et des Amphibiens. Se basant sur
cette ressemblance, Pospielow suppose (1906) que les corps cristalloïdes
Fig. XI. A, cellule adipeuse se trouvant au voisinage
de l'intestin moyen, nymphe âgée de sept
jours ; C, cellule adipeuse :\ trois noyaux du
thorax d'une chrysalide de trois jours ; li,
cellule adipeuse appartenant à la nappe qui
entoure le testicule, larve immobilisée au
début de sa métamorphose, x 1130.
1. Je no discuterai pas ici l'opinion de Bf.rlese pour lequel les substances albuminoïdes se déposent dans les
(••■llulesgra.sses sous forme de produits déjà élaborés par le tube digestif. Cette interprétation est contraire aux
liiifions Vhy biologiques admises, elle a été depuis maintes fois démentie.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA 69
représentent une réserve temporaire de vitellus dans les cellules grasses,
avant son incorporation dans les œufs en formation. L'auteur trouve
dans les œufs de \ anessa poli/chloros (1911) des plaquettes vitellines ne
différant que par leurs dimensions, plus petites, des corps cristalloïdes
contenus .dans les éléments adipeux.
Krasil^chtchik (1908) rencontre dans les cellules grasses de cer-
tains Papillons des corps cristalloïdes, il les homologue aux pseudo-nuclei
de Berlese.
On a signalé dans les cellules grasses des Lépidoptères des cristaux
d'urates,
Berlese (1901) observe dans le corps gras de Pieris des cristaux
d'urates (il ne les a pas vus chez Hy ponomeuta) .
Chez Heterogenea limacodes, R. Samson (1908) a vu des cristaux d'urates
dans le corps gras d'une nymphe de trente jours dont les tubes de Malpighi
étaient déjà fonctionnels.
Les urates, comme on le sait, prennent les teintes chromatiques; il est
difficile de regarder comme tels les formations cristalloïdes de Hy pono-
meuta qui sont uniformément éosinophiles. Si ces corps renferment des
traces d'urates, en tout cas les procédés micro-chimiques employés mam-
tenant ne permettent pas de les déceler ^.
Voyons maintenant ce que sont devenues les inclusions albumi-
noïdes chez Hy ponomeuta. Chez la jeune nymphe elles se sont beau-
coup accrues. Ceci est particulièrement visible dans le thorax, où
elles étaient minuscules au début de la métamorphose. Des corps
cristalloïdes et des granulations sphéroïdales se rencontrent simultané-
ment ; ces dernières sont particulièrement répandues dans le thorax ;
dans l'abdomen, les deux sortes d'inclusions se trouvent aussi dans
les cellules grasses mais les cristalloïdes y sont plus abondants
(fig-xi^).
La forme de corps cristalloïdes est, maintenant, encore plus nette
(qu'elle ne l'était chez la larve. Ils prennent un peu plus fortement
l'éosine et ne sont jamais colorés par l'hématéine.
Parmi les granulations arrondies, on en trouve, assez fréquemment,
qui présentent une teinte violacée (hématéine).
1. CuÉNOT (ISOl) décrit dans le sang d'un Cossus ligniperda des amibocytcs contenant des corps incolores
réfringents de forme cristalline. Il s'agit là des cristaux protéiques incrustés d'une matière minérale et de l'acide
«rique.
70
Jfnie A. HUFNAGEL
Corps gras chez l'imago
Vers la fiii de la vie nympliale, la graisse réapparaît dans les cellules
adipeuses (fig. xii, fig. xiii b), mais beaucoup d'entre elles, chez la femelle,
à réclusion de Fimago, contiennent encore des inclusions albuminoïdes qui
Fig. xn. Cellules adipeuses de la couche sous-hypodermiciuo dans le thorax d'une jeune imago, x 1130.
se rencontrent relativement en petit nombre dans le thorax et dans Tab-
domen où elles sont logées entre les vacuoles graisseuses (tig. xxvii^4 a).
Ces inclusions ont diminué de taille, elles sont très pâles, un grand nombre
d'entre elles présentent la forme cristaUoïde caractéristique. Chez les
femelles, au voisinage de la glande génitale, les cellules présentent peu de
vacuoles graisseuses et beaucoup d'in-
clusions éosinophiles.
Chez les mâles, les réserves albumi-
noïdes persistent également, mais sont
moins nombreuses.
A l'état définitif, dans l'abdomen,
les cellules adipeuses sont réunies par
îlots et chacun de ceux-ci montre une
membrane chromatophile très nette.
Les limites cellulaires sont distinctes.
Certaines cellules restent isolées. Ces
dernières entrent dans le corps gras péri-
phérique en rapport intime avec les
œnocytes qui se moulent à leur surface
(fig. XXVII A).
Dans le thorax, certaines cellules et plus spécialement celles qui se
trouvent au-dessous de l'hypoderme, conservent leur grande taille et se
réunissent en nappes à une assise cellulaire (fig. xii). D'autres en se rape-
tissant et en s'aplatissant beaucoup s'alignent entre les faisceaux muscu-
laires. On rencontre également des cellules isolées (fig. xiri b). Celles-ci,
Fig. XIII. ('. Amas adipeux doutk's éléments ont
résorbé leurs inclusions grasses et albumi-
noïdes, jeune imago ; b, Cellule adipeuse
flottant dans la cavité générale, x 1130.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA 71
comme les éléments terminaux des nappes nnicellulaires (fig. xit),
présentent souvent des prolongements amiboïdes.
D'autres encore, après avoir complètement résorbé leurs réserves albu-
minoïdes et graisseuses, forment des syncytiums à cytoplasme chroma-
tophile présentant un fin réseau à noyaux petits et très rapprochés ; cer-
tains de ces derniers sont en chromatolyse (fig. xiii a).
En comparant les figures xii et xiii dessinées au même grossisement,
on peut se rendre comi)te des différences de dimensions que présentent
ces éléments dans le même animal.
Corps gras entourant le testicule
Je remarquerai encore c^ue. chez la larve immobilisée, on distingue
autour du testicule un tissu aj^ant un aspect tout à fait spécial (fig. xi B).
Les limites cellulaires tantôt existent, tantôt ne sont pas visibles. J&
n'ai jamais rencontré dans ces cellules de traces d'inclusion adipeuse.
Les éléments sont complètement bourrés d'inclusions cristalloïdes
qui m'ont paru présenter ici une affinité plus prononcée qu'ailleurs pour
les colorants éosinophiles.
Ce corps gras ne se modifie pas beaucoup durant la nymphose. Chez
limagOj les cellules sont remplies par les corps cristalloïdes, ceux-ci sont
peut-être seulement im peu moins réguliers. Dans le cytoplasme ne se
dessine aucune vacuole.
Expulsion de produits de dégénérescence et rôle phagocytaire de cellules grasses
Les cellules adipeuses présentent un phénomène particulier qui com-
mence chez les larves au repos et se poursuit pendant la nymphose. On
voit apparaître dans les noyaux de certaines de ces cellules des granula-
tions volumineuses (fig. xiv, xv a). 11 y en a souvent de semblables en
dehors du noyau ( fig. xi v, xv 6); elles présentent alors autour d'elles une zone
de cytoplasme chromatophile. Les figures xiv et xv nous montrent ces
différents aspects. On pourrait les interpréter de la façon suivante : à un
certain moment, il se forme au sein du noyau une o\i plusieurs granula-
tions plus grandes que les autres et f[ui semblent être dues à la réunion
de plusieurs d'entre eUes. A l'intérieur de ces formations, on voit parfois
des taches claires (fig. xiv), qui doivent être regardées comme provenant
de la fusion incomplète d'anciennes petites granulations. Les boules gagnent
72
M^<^ A. HUFNAGEL
la périphérie des noyaux (a), puis sont expulsées dans le cytoplasme (6)
et s'y entourent aussitôt d'un peu de protoplasme chromatophile. A partir
de ce moment, ces corps restent isolés ou bien se groupent. On peut en
trouver dans une même cellule plusieurs à des
stades différents de condensation, tandis que,
dans le noyau, de nouvelles boules continuent
à se former (fig. xiv, xv c).
Une boule chromatique après son expul-
sion du noyau reste cpielque temps au voisi-
nage de celui-ci, pui;^ s'en éloigne et arrive
jusqu'au l)ord de la cellule (fig. xiv) ; elle
est enfin re jetée dans la cavité générale et
englobée par un leucocyte.
En effet, de nombreux phagocytes cir-
culent parmi les cellules grasses et certaines
de leurs inclusions peuvent avoir leur origine
dans les boules émises par les éléments adi-
peux.
Mais il est également possible que ces
boules de dégénérescence soient digérées à l'intérieur même de la cellule
adipeuse. En effet, l'hématéine n'agit pas de la même façon sur toutes
les granulations chromatiques et il est probable que cette différence
de teinte est en rapport avec les différents stades de leur résorption.
. XIV. Cellule .adipeuse contenant
(les boules chromatiques dans le
noyau et dans le cytoplasme. N\ni-
phe de quatre jours, y 1700.
Fig. XV. a, h, c, cellules adipeuses contenant des boules de petits corpuscules chromatophiles de dégénérescence ;
d, Cellule adipeuse ayant englobé un amas d'une substance dégénérée, x 1000. (Explication
dans le texte. >
Dans ce cas, on pourrait admettre que la substance qui provient de
cette digestion abandonne sous forme soluble la cellule.
J'ai eu l'occasion d'observer, rarement il est vrai, dans certaines cel-
lules adipeuses, des amas chromatiques qui, vu leur dimension énorme, ne
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA 73
pouvaient provenir du noyau de la cellule même. La figure x^ d nous en
montre un exemple.
Dans ce cas, on ne peut considérer Tamas intracellulaire que comme
venant de l'extérieur et incorporé par la cellule.
En présence de ce fait, on peut se demander si toutes les boules chro-
matiques rencontrées dans les cellules adipeuses ne sont pas dues à un
englobement des débris chromatolysés. Je ne pense pas qu'il faille géné-
raliser tellement la propriété phagocy taire des éléments adipeux. Le fait
que l'on rencontre au sein même du noyau des boules chromatiques sem-
blables à celles qui se voient dans le cytoplasme permet de supposer qu'il
s'agit d'vuie « épuration » (Cf. Ch. Pérez). L^n phénomène analogue s'ob*
serve dans d'autres tissus de Hyponomeuta (voir hypoderme, intestin
moyen); on peut donc concevoir qu'il puisse se produire ici également.
Un fait d'un autre ordre vient à l'appiii de la théorie de l'épuration
chromatique -.
Les cellules contenant les petits corps chromatiques ne sont pas exclu-
sivement localisées au voisinage d'un organe en chromatolyse. Au con-
traire, on les trouve dispersées parmi d'autres cellules et même assez
éloignées les unes des autres. Ceci est surtout manifeste pour les larves
au repos chez lesquelles la destruction des différents tissus est encore peu
avancée. A ce stade, j'ai rencontré des cellules à boules en des points où
malgré des recherches minutieuses je ne pouvais observer de débris en
chromatolyse.
Les boules contenues dans les cellules adipeuses ne pouvaient non plus
provenir de l'hypoderme dont ces cellules étaient également éloignées.
Pour interpréter ces corpuscules comme dus à un englobement, il faudrait
admettre que les cellules grasses possèdent de grandes propriétés migra-
trices et qu'après avoir, en certains points du corps de l'animal, accaparé
des produits de dégénérescence, elles se disperseraient dans tout l'orga-
nisme où on les retrouve par l'examen des coupes à différents niveaux.
Or, les éléments adipeux bien mobiles ne le sont cependant pas à ce point
1. HOLLANDE (1914) (lit.... HCFXAGE[. (1911) (laiis sa not.' sur le tissu adiixMix dv U'jpo omeut i p;ddl '
a cuc-ore moutionné que la cellule adipeuse pré-ieutait :ï un moment donné une élimination de chromatin''
nueléaire dans le protoplasme, constituant « une épuration chromatique », suivant 1 "expression de l'auteur,
3r u'ai pu observer de semMatdes phénomènes chez Vaiessi lo et UitictB. Aussi je ne puis me baser sur une
telle émission <le chromatine pour émettre l'hypothèse que les substances ehrouu'tinoîdes du protoplasme en
puissent dériver.
Kn réalité, li's boules ehromatiiiiies que j'ai reneontrérs dans les e.Uules sjrasses chez II hponomeut i n'ont
rien de commun avec les substances chromatinoïdes dont parle Hollande. ( lu^z les Vat.ess i, ce sont des "ioutte-
lettes albumino'ides qui « d'abord faiblement basophiles le de\i.n!ient fortement au fur et à mesure qu'elles
grossissent et s'éloignent du noyau ». Chez Hi/po omeut t. ci- -ioiit des produits de dégénère sccnce.
74
J/me A. HUFNAGEL
et ne peuvent 1 "être vu le ralentissement du courant sanguin à ce moment.
D'autre part, supposer, comme le fait Enriquez^ que les phagocytes se
débarrassent de leurs inclusions au profit des cellules grasses ne me semble
pas plus admissible.
En résumé, je pense donc que chez Hyponomeuta il s'agit parfois
d'un englobement, parfois d'une émission par la cellule d'une partie de
sa substance.
Lorsqu'on rencontre une ou plusieurs boules dans le noyau même, on
peut dire qu'il s'agit d'une épuration ; lorsque la masse des inclusions
chromatiques est aussi
grande ou plus grande
que le noyau, on peut
spécifier qu'il y a phago-
cytose ; dans ces deux cas
extrêmes, les aspects sont
assez caractéristiques
pour que l'on attribue
le phénomène avec cer-
titude à l'un ou à l'au-
tre de ces deux pro-
cessus. Dans les cas in-
termédiaires, lorsqu'on
rencontre pas de boules dans le noyau et lorsque les inclusions
chromatiques contenues dans la cellule sont de petite dimension,
la distinction entre les deux processus est parfois très difficile à éta-
blir.
FiG. XVI. A, cclhilp adipeuse en traiud'absorbcr une boule de dégé-
nérescence provenant de la glande de la soie; B, cellule adi-
peuse ayant englobé des produits de dégénérescence de la
glande séricigènc ; Nymphe de Oracilaria Syringelln. x ll:.îO.
ne
Chez Gracilaria syringella, d'après mes observations, le rôle phagocy-
taire des cellules adipeuses est beaucoup plus net que chez Hyponomeuta
et ne permet aucim doute. J'ai rencontré, au voisinage de la glande de la
soie en destruction, de très nombreuses cellules grasses bourrées de boules
énormes de dégénérescence ou en train de les englober. La figure xvi nous
présente ces deux aspects. Ici la localisation de ces éléments au voisinage
de l'organe en chromatolyse, et l'aspect des produits absorbés ne laissent
1. Suivant Enriqcez (1 <0f) les cellules grasses des Mouches {Callipliora, Sarcophaqn, Piophihi) englobent les
sarcolytes abandonnés pai les phagocytes. Ces résultats n'ont pas été confirmés par CH. Pérez (1910) chez Cal-
liphora.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA 75
aucun doute sur leur provenance. Il s'agit là d'une phagocytose dans le
vrai sens de ce mot ^
Le rôle phagocytaire des aliments adipeux a été constaté chez tieux
artres insectes. Poyarkoff (1911) a trouvé chez la Galéruque des cel-
lules adipeuses absorbant des débris de différents tissus histolysés tels
que muscles, tubes de Malpighi, glandes salivaires. Elles englobent égale-
ment des œnocytes et quelques cellules à sphérules.
Ch, Pérez a observé chez Phytoiiomus (communication verbale) les
cellules grasses intervenant dans la phagocytose des éléments larvaires.
Ressemblance entre les cellules adipeuses et les éléments sanguins
Chez la larve immobilisée comme chez la jeune chrysalide, de très nom-
breux leucocytes circulent entre les cellules adipeuses. Pendant la nym-
phose, un certain nombre de ces dernières, après avoir résorbé leurs réserves,
arrivent à diminuer de taille dans ime proportion considérable ; leur noyau
en même temps devient plus petit. D'autre part, les phagocytes leucocy-
taires se chargent d'inclusions diverses, grossissent d'une façon considé-
rable. De tout cela, il résulte une ressemblance qui rend parfois impos-
sible l'attribution certaine des éléments que l'on observe, soit aux cellules
grasses, soit aux leucocytes.
C'est à ce moment que l'on rencontre en grand nombre de ces cellules
particuUères que j'ai décrites à propos des éléments sanguins (fig.iii); elles
sont reconnaissables à leur immense vacuole et à leur noyau périphériciue.
Vu leur aspect, on pourrait les confondre avec certaines cellules adi-
peuses dont les vacuoles graisseuses ont conflué.
Mayer a observé des corpuscules semblables chez Samia cecropia et
Vanessa antiopa. Ne trouvant pas de cellules grasses proprement dites
(true fat cells) dans l'haeniolymphe, il pense cpie ces corpuscules vacuo-
laires transitoires correspondent au tissu adipeux de Semper.
Hollande, qui a étudié ces mêmes éléments chez Hyponomeuta evony-
mell f, ne sait pas ce qu'ils deviennent après la nymphose ; il dit seulement
que les cellules du tissu adipeux de l'imago ressemblent à des leucocytes
granuleux dont le volume aurait augmenté.
Je ne crois pas que chez Hyponomeuta padella, ces leucocytes parti-
culiers donnent le corps adipeux de l'imago. Pour l'admettre, il faudrait
1. Vaney considèro dans sa première note les élémeuts adipeux chez Culet, Simula, Chironomm comme des
pliagocytes. Dans son travail définitif, l'auteur nie la propriété phagocytaire de ces cellules.
76 37'"'' A. HUFNAGEL
supposer que ce.s globules à inclusion grasse ne sont autre chose que des
cellules adipeuses modifiées et qui évolueraient de cette manière vers
leur structure définitive. Je ne le pense pas.
Si ces leucocytes devaient se transformer en des cellules grasses du
Papillon, que deviendrait tout cet immense corps adipeux si développé
chez la larve et que l'on rencontre encore chez la nymphe en même temps
que ces corpuscules énigmatiques.
Nous avons vu, précédemment, que ce sont les cellules grasses lar-
vaires persistantes qui donnent le corps gras définitif. Il est probable
que les leucocytes à inclusion grasse après avoir remph leur rôle nutritif
dans l'édification des tissus imaguiaux, disparaissent de la même manière
qu'un grand nombre d'autres globules blancs.
Phagocytose probable de quelques cellules grasses
On constate chez l'imago une diminution en nombre des cellules
grasses. Comment peut-on l'expHquer ?
J'ai rencontré chez les individus, au cours de la métamorphose, des
aspects qui permettent d'envisager une phagocytose probable de certains
de ces éléments.
On trouve chez les larves au repos et chez les nymphes, au contact
de certaines cellules adipeuses, des leucocytes en grand nombre. J'en ai
compté sur une coupe huit et même plus cernant une seule cellule qui à
ce moment est apparemment encore en bon état et contient des inclu-
sions grasses et albuminoïdes ^ Bien qu'assez souvent j'aie observé ce
phénomène, je n'ai jamais pu voir la pénétration d'un ou de plusieurs
phagocytes dans la cellule adipeuse.
D'autre part, parmi les éléments gras, on trouve de semblables agglo-
mérations de phagocytes et de leucocytes sans trace dans leur groupement
de cellules adipeuses. Il est possible que ce soit un stade plus avancé du
phénomène que nous avons décrit précédemment. La cellule adipeuse
aurait disjîaru incorporée par les globules blancs.
1. Du seul l'jiit qu'une eellule adipeu-e contient des réserves grasses et albuminoïdcs, on ue peut conclure qu'elle
est tout à fait normale. Ces inclusions, en effet, ne font plus partie do la cellule même, elles lui sont pour ainsi dire
étrangères, elles pein eut donc subsister, tandis qu'elle a subit certaines modificatious non perceptibles à nos yeux.
D'ailleurs, les modifications si infinies qu'elles soient, peuvent suffire pour changer l'état chimique de la
cellule et déterminer l'appel des leucocytes.
Les belles exiiériencps de Pfeffer nous ont révélé jusqu'à quel point est poussée la sensibilité de la
cellule. Il a constaté l'existence du cliimiotactisnies des Fougères à l'égard de l'acide nialique et a pu observer
que les anthérozoïdes nianiiesteraient encore leur tactisnie envers une solution d'acide malique à un cent miliôme.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEVTA 11
Résumé
La difterenciation des éléments adipeux et des leucocytes au dépens
des mêmes éléments mésenchymateux se poursuit jusqu 'à un stade avancé
de la vie larvaire.
Au moment des mues,- les cellules adipeuses se multiplient par voie
caryocinétique. Toute prolifération cesse après la dernière mue larvaire.
Durant la vie de la larve, les cellules accumulent des réserves grasses ;
au début de la métamorphose, elles se chargent d'inclusions albuminoïdes.
La plupart des cellules adipeuses passent de la larve à l'imago. Elles
sont en général associées chez la chenille et le papillon, tandis que chez
la chrysalide le tissu est disloqué par la libération d'un grand nombre
d'entre elles.
Pendant la métamorphose, quelques-unes d'entre elles subissent une
épuration en rejetant des produits de dégénérescence.
Il est probable que quelques cellules grasses disparaissent par phago-
cytose leucocytaire.
Les cellules adipeuses peuvent jouer le rôle de phagocytes.
ŒNOCYTES
C'est WiELOWiE JSKi (1886), le premier, qui a attiré l'attention sur lexis-
tence des œnocytes chez les différents Insectes
Depuis, un grand nombre de travaux ont été consacrés à l'étude de ces
éléments.
La question de la provenance des œnocytes imaginaux a donné
lieu à de nombreuses recherches.
L'origine hypodermique des œnocytes imaginaux a été constatée chez
l'Abeille (Koschevnikow 1900), chez Rlwdi'es rosae L. (Rossig 1904),
Torymus nigricornis Boh. (Weissenberg 1907), Polisies (Ferez 1911).
D'autre part, chez Lasius flaous (Karawaiew 1898), chez Formica rufa
(1903), Galerucella luteola (Poyarkoff), les œnocytes imaginaux sont
formés aux dépens des œnocytes larvaires.
Les Mouches (Ferez 1910) se rangent dans une catégorie spéciale. Les
œnocytes larvaires disparaissent et les œnocytes imaginaux n'ont aucun
rapport avec eux. Il sont formés par des cellules embryonnaires, situées
sous l'hypoderme.
TicHOMiRow (1882), BissoN et Verson (1891), Verson (1892) (1911),
78 iV/me A. HUFNAGEL
Stendell (1911), PospiELOW (1911) se sont occupés plus spécialement
des œnocytes des Lépidoptères.
TicHOMiRow considère les œnocytes chez Bombyx mûri comme des
glandes.
Verson et BissoN distinguent chez le ver à soie des glandes hypo-
stigmatiques et épigastriques^. Verson appelle ces dernières « glandes
postlarvaires » dans son travail le plus récent. Ces deux formations sont
indépendantes les unes des autres.
Les glandes hypostigmatiques d'origine hypodermique sont différen-
ciées déjà chez l'embryon. Elles persistent à l'état définitif sans augmenter
en nombre ; elles se sont seulement accrues en volume. Leurs noyaux sont
souvent ramifiés, leur forme et leur volume varient avec le fonctionnement
de la cellule.
Les glandes postlarvaires d'origine également hypodermique se ren-
contrent chez les nymphes. Elles se multiplient par voie directe.
Elles sont également sécrétrices. Leur noyau garde toujours une forme
arrondie.
Stendell (étudiant Ephestia KuchnieUa et comparativement quelques
Macrolépidoptères) confirme en partie les résultats de Verson. Les cel-
lules épigastriques ne peuvent pas être regardées comme une deuxième
génération de cellules hypostigmatiques. Les glandes larvaires atteignent
le maximum de leur volume, chez la jeune nymphe. Chez les nymphes
âgées, elles tombent en chromatolyse, elles ne se rencontrent plus chez
l'imago. La sécrétion de ces cellules ne se présente pas d'une façon aussi
régulière que le décrit Verson.
Quant aux cellules postlarvaires, elles apparaissent chez la larve
qui file son cocon, elles proviennent de l'hypoderme comme l'a décrit
Weissenberc! .
D'après Pospielow, chez Ocneria dispar et Vanessa polychloros, les
œnocytes larvaires bourgeonnent au moment des mues et pendant la nym-
phose de petits amœbocytes granuleux par un processus analog-ie à celui
que Ch. Pérez a révélé chez Formica rufa. En même temps, les
œnocytes viennent se placer sous l'hypoderme et là se maltiplient par
voie directe. Ils deviennent par leurs divisions répétées de plus en plus
petits pour donner, à la fin, des leucocytes rappelant les leucocytes pro-
1. Verson (iQlî) range dans la catégorie des glandes pûritrachéales et péricardialcs dos cellules glandulaires
de teinte vineuse qu'il homologue aux œnocytes décrits par d'autres auteurs, (odie un passcnd ouocytengonannt
wurden ».) Il me semble d'après sa description que ce sont plutôt les cellules hypostigmatiques qui correspondent
aux œnocytes larvaires.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA
79
prenient dits. Les œnocytes se divisant sous l'hypoderme correspondent
aux cellules sous-hypodermiques de Karawaïew,
Les œnocytes persistent chez les imagos des Papillons naissant avec
des glandes génitales incomplètement développées.
Chez les Papillons de la famille des Bombycides, les cellules sous-
hypodermiques ne se retrouvent pas chez l'Insecte ailé.
Œnocytes larvaires
Je passerai maintenant à l'étude des œnocytes chez Hyponomeuta.
Chez la larve, les œnocytes se rencontrent dans l'abdomen dans les
parties latérales de la face ventrale du corps. Sar les préparations, on en
trouve de un à cinq par segment, unis entre eux par une membrane
commune. Ils ne sont pas
situés au contact immédiat
des stigmates, mais se trou-
vent dans le voisinage des
troncs trachéens. Souvent,
dans la coupe, sur une des
faces, l'œnocjrte est déprimé
et dans cette concavité est
logée la section de la trachée.
Les œnocytes sont placés
entre les nappes adipeuses
superficielles et profondes,
mais n'entrent en contact
avec aucune d'elles.
Ces œnocytes larvaires
sont d'énormes cellules me-
surant 80 à 100 [j..
La forme du noyau est en rapport avec le fonctionnement de la cellule :
il peut être arrondi, ovalaire, ramifié (fig. 14) ; souvent il est très allongé,
de façon à occuper presque toute la longueur de la cellule (fig. xvii). Chez
les jeunes larves et après fixation au subHmé acétique, le noyau se rétracte
fortement et laisse un espace libre entre lui et le cytoplasme. Après fixa-
tion au formol, la chromatine rempht tout le noyau, elle est dispersée en
petites granulations (fig. xvii), le nucléole est surtout visible chez les
larves adultes (fig. 14).
AKCn. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — T. 57. — I". 2. 6
Fio. xvn. Division indirecte de l'œnocyte larvaire. Nymphe d'un
jour. X 400. Œnocyte cliez une larve d'âge moyen, x 40li
Les particularités du cytoplasme ne sont pas dessinées.
80
J/'»-^^ .4. HUFNAGEL
Dans le cytoplasme (fig. 14) éosinophile et granulé, se distinguent de
grandes vacuoles contenant des inclusions pâles ; il s'agit là de produits
de sécrétion accumulés dans ces sortes de canaux.
Chez les larves immobilisées et chez les jeunes nymphes, les vacuoles
sont localisées autour du noyau. Celui-ci est ramifié ou non, il est com-
pact et contient un nucléole.
J'ai observé chez les larves jeunes ou âgées et chez les nymphes une
particularité de ces œnocytes. Il m "est arrivé de voir une portion de
chromatine se détacher
du noyau digité et gagner
la périphérie de la cellule
(fig. 14 ??. 6.). Une déchi-
rure met en liberté le
nouvel élément. Un même
œnocyte peut libérer par
ce processus plusieurs
amibocytes.
Nous nous trouvons
ici en présence d'un phé-
nomène semblable à celui
que Ch. Pérez (1903) a
décrit chez Fcrmica ruja.
Mais, chez cette espèce^
le bourgeonnement des
œnocytes larvaires abou-
tit à la constitation des
œnoc3rtes définitifs. Chez
Hyponomeuta , les élé-
ments issus du bourgeonnement ne se transforment pas en des œnocytes
imaginaux; ce sont ici des cellules migratrices (m. fig. xviii). Avec ces
dernières, on rencontre, au contact même des œnocjrtes, des leucocytes
typiques {l) ; ils sont plus petits que les œnocytes migrateurs, leur cyto-
plasme contient des vacuoles caractéristiques^.
Les œnocytes larvaires présentent le phénomène de divisions directes
fréquentes. La figure xix nous en montre un exemple chez une nymphe
Fig. XVIII. Œnocyte larvaire chez une chenille iniuiobiliséo au début
de sa métamorphose, o, œnocyte ; m. éléments provenant du
bourgeonnement du noyau de l'œnoeyte ; l, leucocytes. Les
particularités du cytoplasme de l'œnoeyte ne .sont pas des-
sinées. X SOO.
1. La proximité de» globules sanguins et œnocytes a été signaiéc aussi chez d'autres Insectes. Chez Monodon'
lomeru» (Berlese) les œnocytes sont entourés par urt anneau de leucocytes. Chez Torymus nigricornis Boh (Weis-
RENBERQ) on rencontre |)resq>ie régulièrement des amas de leucocj-tes au voisinage des œnocytes.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMErTA
81
de un jour. Les deux noyaux sont déjà séparés, de nombreuses vacuoles
sont apparues au sein du cytoplasme ; en se rompant elles provoque-
ront la scission de la cellule ^
Quelquefois, les cellules se divisent par étranglement (fig. xvii).
Il résulte de ces nuiltiplications répétées une diminution notable de
leur taille.
Déjà chez les nymphes de quatre jours, certains œnocytes (surtout
ceux qui se trouvent à l'extrémité de
l'abdomen) changent d'aspect, leurs
noyaux deviennent très compacts, le
cytoplasme est homogène et fortement
éosinophile. J'ai rencontré quelques-
unes de ces cellules entourées de nom-
breux leucocytes.
Chez les nymphes de sept jours, la
dégénérescence des œnocytes larvaires
est déjà avancée. Ils présentent alors
sur la coupe un aspect particuher, les
fragments nucléaires occupent la péri-
phérie de la cellule et forment ainsi
une couronne à la masse cytoplasmique.
Je n'ai pas vu à ce moment de glo-
bules blancs infiltrés dans les œnocytes.
Les leucocytes sont même assez rares
au voisinage de ces formations en histo-
lyse. Il m'a fallu parfois observer atten-
tivement l'œnocyte atrophié sur plu-
sieurs coupes avant de trouver un leucocyte à sa proximité. Au contraire,
les phagocytes affluent lorsque la dislocation de la cellule est déjà très
avancée. Je pense donc que la dégénérescence de ces œnocytes larvaires
est spontanée et que les leucocytes n'ont ici qu'un rôle secondaire.
lu;. XIX. Division indirecte de rœnocyte lar-
vaire. Nymplio d'un jour, x ëOO.
Œnocytes imaginaux
Les œnocytes imaginaux apparaissent chez Hypjuomeuta pendant la
dernière mue larvaire. Chez la chenille au repos, on les rencontre dans les
1 . J'ai observé qu'il peut se produire Bimultauéincnt dans un œnocyte la division par voie directe et le bourgeon-
nement do leucoc\'tcs.
82
J/'»e A. HUFNAGEL
segments abdominaux de deux côtés de la face ventrale immédiatement
sous l'hypoderme. Certains tiennent encore à la basale de l'hypoderme,
d'autres en sont séparés.
Je n'ai pas eu l'occasion d'observer le stade auquel les œnocytes ima-
ginaux se trouvent encore à l'intérieur de l'hypoderme même; cependant,
par leur situation, on ne peut douter qu'ils en proviennent.
Ce sont des cellules (fig. 16, fig. xx) mesurant à peu près 15 à 20 u,
à noyaux arrondis, dans lesquels la cliromatine est répartie en granula-
tions bien distinctes. On voit nettement un ou plusieurs nucléoles. Parfois,
le noyau se montre sur la préparation comme une vésicule et la cliroma-
tine est condensée dans son centre.
Le cytoplasme est éosinophile et granuleux et enferme des vacuoles
contenant une subs-
tance éosinophile re-
présentant les produits
de la sécrétion de ces
cellules (fig. 16).
Dès leur apparition
chez la larve, les œno-
cytes commencent à
prohférer. Je n'ai ja-
mais vu de figures me permettant de croire à une division caryocinétique.
Leur multiplication a lieu par clivage (fig. xx). On rencontre fréquem-
ment des noyaux accouplés et non encore complètement séparés.
En variant la mise au point, on voit souvent deux noyaux bien formés
et superposés l'un à l'autre (fig. xx^); ils semblent se séparer ensuite
par une sorte de glissement. Les noyaux qui s'isolent ainsi ont une forme
. arrondie, ils constituent l'élément essentiel des nouvelles cellules qui s'ac-
croissent rapidement et recommencent à se multiplier par clivage. Sou-
vent, la division de la cellule ne suit pas directement celle du noyau et
on a ainsi des éléments à plusieurs noyaux (fig. xx).
Chez les nymphes de trois ou quatre jours, les œnocytes présentent
un aspect particulier en rapport avec leur mode de sécrétion. On remarque
alors dans les noyaux mêmes de très petites vacuoles (fig. xxi). Sou-
vent aussi on voit autour des noyaux une grande zone pâle (fig. 15);
dans le cytoplasme ambiant, les vacuoles sont minuscules ou manquent
complètement.
Déjà à ce moment, mais surtout chez les nymphes de six et sept jours.
Fig. XX. Œnocytes iinaginnux chez une larve immobilisée au début de sa
métamorphose. X 750.
METAMORPHOSE DE HYPONOMEITA
S3
on i^eiit observer un phénomène nouveau. Des fissures apparaissent
dans les noyaux, qui maintenant sont digités, ils sont en voie de multipli-
cation continuelle.
Nous avons vu qu'au début de la métamorphose, après chaque divi-
sion, le noyau reprenait sa forme arrondie (fig. xx). Maintenant, les cH-
vages se succèdent sans arrêt, on ne rencontre point de noyaux dont la
forme soit régulière. On peut voir sur la même coupe les différents stades
de cette division. La figure xxi nous en
montre quelques exemples. Souvent, plu-
sieurs nucléoles apparaissent et le noyau
se clive d'emblée en autant de parties qu 'il
y a de nucléoles (fig. 15).
Au même stade, j'ai observé une parti-
cularité de ces œnocytes. J'ai vu dans une
cellule un petit noyau qui provient certai-
nement du bourgeomiement du noyau
principal (fig. xxi J). J'ai également ren-
contré de ces petits éléments en dehors de
la cellule (C). Il s'agit là vraisemblable-
ment d'un phénomène analogue à celui
que j'ai décrit pour les œnocytes larvaires,
mais dans les œnocytes imaginaux le bour-
geonnement est moins intense.
Vers le neuvième ou le dixième jour de
la nymphose, les noyaux devenant ova-
laires acquièrent leur aspect définitif
(fig. XXII A, B, fig. 17 0). Quelques-uns
cependant persistent irréguhere.
A l'état imaginai, les œnocytes sont très nombreux, on en compte jus-
qu'à 20 sur la coupe d'un segment.
Les cellules sont isolées ou quelquefois rapprocliées par deux
(fig. XX n B). En général, elles ne se trouvent pas au voisinage de tra-
chées. Un grand nombre d'entre elles gardent leur place sous l'hypo-
derme, d'autres entrent en relation avec les cellules adipeuses et peuvent
alors présenter une très grande bizarrerie de formes.
Souvent, l'œnocyte offre une concavité dans laquelle est logée la cel-
lule grasse. Ceci est un des aspects les plus simples. Parfois, il émet deux
prolongements qui viennent s'apphquer contre la cellule adipeuse et
Fig. XXI. Oùiocytes imaginaux chez uue
uyniplie de si;pt jours; A, œnocyte
dont le noyau a bourgeonné un petit
élément, x 750.
84
l/ni« A. HVFNAGEL
^4.
peuvent même en se rejoignant l'envelopper complètement (fig. 17).
On le voit aussi envoyer plusieurs prolongements irréguliers vers des cel-
lules différentes (fig. xxii). Ces quelques exemples donnent déjà une idée
de la diversité d'aspects que l'on peut observer sur les préparations.
En rémtné,
^- chez Hypono-
.«^. /^ v^ 1 meuta, les œno-
cytes larvaires et
imaginaux sont
indépendants les
uns des autres.
Vs présentent
néanmoins deux
fonctions sem-
blables : sécré-
tion et bourgeonnement des petits éléments (ce dernier fait est peu
répandu dans les œnocytes imaginaux).
Fig. XXII A. Œnocytes enveloppant des cellules adipeuses, o, œnoc>-te ; a, cellule
adipeuse. Nymphe de douze jours, x 700; B, œnocytes imaginaux chez
une nymphe âgée, x 1130.
Je dirai encore quelques mots de certains phénomènes que j'ai observés
chez une nymphe de Lasiocampa^.
«i^
'^^
<e>
m
^
.^-^
l'iG. XXIII. Œnocytes chez une nymphe de Lasiocampa. La couche cellulaire qui se trouve clans la partie supé-
rieure du dessin représente l'hypoderme ; les éléments en train de se cliver sont des cenocj'te-s.
6, basale. x environ 800.
On trouve dans l'abdomen, à l'intérieur même de l'hypoderme, des
rangées d'œnocytes, en train de se cliver (fig. xxiii). Par-ci par-là, on
les voit refouler la basale et faire saillie dans la cavité du corps. On dis-
tingue alors très nettement, autour de ces éléments, la basale hypoder-
1. Les préparations de Lrwiocampa avaient été mis à ma di.sposition par M. Thompson ; je tiens à l'en
remercier.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA 85
miqiie bien dessinée. Par endroit, celle-ci fait défaut comme si elle s'était
rompue pour livrer passage à l'œnocyte.
N'ayant pu étudier qu'une nymphe seulement de Lasiocampa, je ne
peux rien dire sur le moment où apparaissent les œnocytes dans l'iiypo-
derme, ni sur leur évolution ultérieure. Cependant, ce que j'ai pu voir
chez Lasiocampa me paraît assez intéressant pour le noter ici.
Dans ce dernier cas, aucun doute ne peut exister sur l'origine hypoder-
mique des œnocytes nymphaux, qui sans doute sont en même temps imagi-
naux. Cette observation qui s'ajoute à celles que j'ai faites chez Hypono-
meuta et aux résultats obtenus par Verson et Stendell, permet de consi-
dérer l'origine hypodermique des œnocytes nymphaux comme un fait
assez général chez les Lépidoptères. Quant aux conclusions de Pospielow,
d'après lesquelles les œnocytes définitifs proviennent, par division directe,
des œnocytes larvaires, elles nout pas été confirmées c ez d'autres Lépi-
doptères. J'ai déjà dit que j'ai également observé une division répétée de
ces cellules qui néanmoins n'aboutit pas à la formation des éléments
imaginaux ^
LYPODERME
L'hypoderme chez Hyponomeata comprend : une assise de cellules
banales, les cellules des poils, les cellules formatrices des écailles (chez
la nymphe), les cellules tendineuses-, les glandes des mues.
On distingue, dès le plus jeune âge de la larve, les disques imaginaux
des ailes et des organes génitaux externes. Je ne m'occuperai ici ni de
l'origine ni de l'évolution de ces formations. L'étude en a été faite chez
d'autres Lépidoptères par Gonin (1894), Mercer (1900) Tannreuther
(1910), Cholodkowsky (1887), etc.
Hypoderme proprement dit
Chez les Diptères [Kowalewsky (1887), Van Rees (1889), de
Bruyne (1898), Vaney (1902), Pérez (1910)J, l'hypoderme de la larve
est phagocyté, l'hypoderme définitif se forme aux dépens des disques
imaginaux,
1. Je dirai ici qiu>Iqiies mots dos cellules pcrieardialcs. Chez Hyponomeutn, j'ai en occasion de voir une fois
à l'intérieur de la cellule un petit noyau, qui m'a paru s'être détaché du noyau péricardial. Chez la larve au repos
et pendant la nymphose, les cellules se miUtiplii-nt par clivage, de même que les noyaux. Ce processus rappelle celui
que l'on observe dans les œnocytes imaginaux. Durant la nymphose, les cellules péricardiales se présentent sous
l'aspect d'éléments plurinuelé s. A l'état définitif, certaines ont gardé cet aspect, d'autres se sont individualisées.
■1. J'étudierai les transformations des cellules tendineuses à la fin du chapitre ayant trait aux muscles.
86 Mm*- A. HUFNAGEL
Chez la Guêpe, d'après Anglas (1901), les noyaux seuls persistent,
tandis que le cytoplasme disparaît.
Chez la Galéruque (Poyarkoff, 1911), la plupart des cellules passent
à l'imago en subissant un remaniement sur j)lace. A^oici ce que dit
Fauteur :
« Nous voyons donc que les cellules aplaties larvaires ne deviennent
pas directement les cellules aplaties de l'imago, mais qu'elles passent
préalablement par un état de dédifférenciation ; elles présentent pen-
dant ce passage \me forme particulière allongée, déterminée par ]ei con-
ditions dans lesquelles s'accomplit ce passage ; elles prolifèrent et
rejettent une partie de leurs substances, elles se trouvent constamment
dans un état rajeuni analogue à un état embryonnaire. Le passage se
fait donc en un seul temps, il n'y a pas d'état spécialisé nymphal.
L'arrêt de la multiplication et de l'autotomie cellulaire au moment de la
sécrétion de la cuticule nymphale est purement physiologique ; les cellules
ne peuvent pas sécréter une cuticule et subir un autre processus com-
pliqué en même temps ^ ».
Les transformations de l'hypoderme proprement dit n'ont pas été
poursuivies jusqu'ici chez les Lépidoptères. Je vais en dire quelques mots.
L'hypoderme chez les larves actives de Hyponomeuta est formé j^ar
une seule couche de cellules (fig. xxviii, xxxiii, xxxiv h). En certams
points, les limites cellulaires ne sont pas bien distinctes ; ailleurs, les
cellules serrées les unes contre les autres sont larges et quadrangulaires.
Parfois, elles sont cylindriques et élancées. Il arrive aussi que les élé-
ments laissent entre eux de larges espaces (fig. xxviii). Au voisinage des
glandes de mues, les cellules' sont bombées au milieu et plus étroites vers
la base (fig. xxxiv h) ou même à leurs deux extrémités. Au moment des
mues, la basale existe toujours. Chez la chenille active, les éléments par
endroits peuvent présenter la basale ou en être dépourvus.
Les noyaux sont arrondis ou ovalaires ; parmi les granulations chro-
matiques peu nombreuses se distingue un ou deux nucléoles. Le cyto-
plasme est plus chromatique que les noyaux, il est dense et homogène,
parfois une petite vacuole est logée au-dessous du noyau. Les vacuoles ne
sont pas constantes, je ne les ai pas vues chez la chenille en train de muer.
]. Comme le fait justement remarquer Cn. Pérez(19U) « Cette impossibilité fût-elle établie, il resterait encore
à expliquer pourquoi à un moment donné l'hypoderme s'arrête dans la voie des transformation; conduisant à l'état
imaginai, et sécrète une nouvelle cuticule imparfaite, au Jieude continuer .à se rénover sous la protection de la.
cuticule larvaire. »
METAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA 87
Le cytoplasme cliroinato])hile est surmonté par une zone de substance
très pâle et finement granuleuse (fig. xxviii).
Cette couche est comnunie à toutes les cellules, elle est elle-même
recouverte par une mince cuticule dentelée portai\t des crochets. La zone
pcâle n'est autre chose que la matrice de la cuticule qu'elle suit d'ailleurs
en partie lorsque celle-ci est rejetée.
Elle perd alors sa structure granu-
leuse et elle devient chromatophile.
La métamorphose débute peu 0^?7^ ® ^ ^ é^ *^^ <•-,
après la dernière mue larvaire. Les ^t ^^V5'S^'fi'3i^3*Ô 0 Ct>*^
éléments hypodermiques se sont éti-
rés. Les noj'^aux se multiplient dune
manière intense (fig. xxiv). Pour se
j- • 1 ni; tj_ > Fig. XXIV. Hypodennc du tendon chez unc'nvniphe
diviser, la cellule s agrandit, s arron- d'imjour. x ww.
dit et vient se placer immédiatement
au-dessous de la cuticule (fig. xxvc. xxxic). Elle la repousse vers l'exté-
rieur et souvent semble faire saillie en dehors de l'hypoderme. Un exa-
men attentif de la préj^aration montre cependant qu'il n'y a pas eu
déchirure de la membrane chitineuse. Celle-ci étant seulement très fhae,
son contour se distingue à peine de celui de la cellule qu'elle recouvre
cependant. Les caryocinèses se rencontrent dans les différentes régions
de la tête et du thorax, dans les disques
__— — .-^■■' . ■ — imaginaux, dans les tendons, à la base
^ ^ 5' V^^ ^*^ @ ^ ® " ^^^ pattes ^ , des antennes . etc . Dans ces
fe #^(^ <^ -é'^é^Ê^^f iiires de multiphcation, les noyaux sont
/s*x^k^\SÏ^^5 ©®â petits et très serrés, ils sont disposés à
^,k^^^_>^ .* a * ' ^^ ■ des niveaux différents (fig. xxiv, xxv).
, Dans l'abdomen, les figures caryoci
Fio. xxv. Portion de l'hypoderme thoracique ^^étiqucs sc rcncontreiit, mais sont beau-
chcz une nymphe de trois jours, c, karyo- pQ^p pluS rareS qUC daUS le tllOraX. On
Kinèse ; a, boiue de dégénérescence ; /,
phagocytes. les trouvc daiis l'épi thélium aplati
(fig. xxxi) ou élevé.
En même temps que les figures caryocinétiques, un autre processus
peut s'observer. Il s'agit là d émission par [les éléments d'une portion de
leur substance. On rencontre fréquemment dans l'épithélium, près de sa
1. Chez Piens, d'après les observations de Gonin (i89i) la prolifération des cléments a également lieu à la
base de pattes. Chez la Galéruque de l'Orme, PoYAKKOrr (1910) a trouvé que la patte larvaire se transforme
entièrement en patte de l'imago.
88 M"'^ A. HLFNAGEL
base, des granules chromatiques entourés le plus souvent d'un peu de
cytoplasme chromatophile (fig. xxv, xxx, xxxi o). Ces corpuscules
sont de taille différente, mais généralement arrondis ; ils peuvent con
tenir une ou plusieurs granulations. Celles-ci peuvent rester isolées ou
se fusionner entre elles et former un seul gros amas.
Il n'y a pas de doute que ces granules chromatiques ne soient émis par
les noyaux ; arrivés dans le cytoplasme, ils individualisent autour d'eux
\\n peu de cette substance. Là où ces boules se rencontrent, les noyaux
sont le plus souvent nombreux, petits et denses, ils tranchent à peine
sur le fond également chromatophile du cytoplasme ; il est donc difficile
de suivre, dès son début, le processus de cette expulsion. On peut simple-
ment constater leur présence hors du noyau. En rapprochant ces faits
de ceux que Ch. Pérez a observés dans les papilles rectales de Caïli-
phora, je considère avec cet auteur le processus d'élimination par une
cellule d'une partie de leur substance, comme réalisant l'épuration de
cette cellule.
PoYARKOFF a décrit quelque chose d'analogue dans l'hypoderme de la
Oaléruque de l'Orme. Il a pu voir, à un moment donné, la formation de ces
corpuscules dans le sein même du noyau.
Les boules se trouvent généralement à l'intérieur même derh5rpo-
derme sérié (fig. xxv d), mais on les observe également dans les espa-
ces intercellulaires de l'hypoderme aplati (fig. xxxi)^. Ces corps sont
chez Hyponomeuta re jetés dans la cavité générale et englobés par les
phagocytes. Ces derniers, bourrés d'inclusions, abondent à ce moment au
voisinage de l'hypoderme (fig. IS*^/). Mais il arrive aussi de rencontrer,
à l'intérieur même de l'hypoderme, des leucocytes (fig. xxv /) ^ ; les
boules de dégénérescence sont alors englobées sur place.
Vers la fin du repos de la larve, la prolifération devient très peu intense
et s'arrête à la fin.
Les phénomènes d'épuration se manifestent un peu plus longtemps,
mais cesseront aussi bientôt.
La cuticule nymphale se forme. Les cellules offrent des aspects très
variés.
Elles sont généralement allongées (fi;^:. xxvi>, du moins dans le tho-
rax. A côté des cellules cylindriques, on en voit d'autres en forme d'am-
poules (fig. xxix).
1. La figure xxv se rapporte à l'hypodernio d'une chrysalide, mais peut également s'appliquer à celle
•d'un ' larve immobilisée.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA 89
Les cellules présentent souvent une extrémité effilée qui les réunit à la
basale (fig. xxvi). Sur les préparations, on peut voir se rompre ce mince
prolongement. Le noyau est généralement
logé dans la partie la plus large de la
cellule.
Dans les nombreux plis que présente
l'hypoderme, un certain nombre des cel-
lules s'irradient vers la basale, ce qui leur
donne un aspect d'éventail.
Dans l'abdomen, les cellules sont apla-
ties ou allongées, mais, dans ce dernier
cas, elles le sont toujours moins que dans i\ ' '. \
le thorax. - t - < »
Les noyaux sont souvent situés au-des- ^ ;,-- •■,v--t>-'>,^3..^^
sous de la cuticule, mais de place en place î'^*. xxn. quelques éléments hypoder-
miques de la face dorsale du thorax,
des prolongements CytOplaSmiqueS réunis- larve prête à se nymphoser. X 1000.
sent ces cellules à la basale (fig. xxvii).
La mue nymphale intervient. De nouvelles caryocinèses (fig. xxiv)
et une nouvelle émission des boules ont lieu ; ce dernier phénomène est
même pi as répandu que chez la larve immobilisée et il atteint son maxi-
mum d'intensité le troisième jour après la mue (fig. xxv, xxxi). C'est
alors aussi que j'ai rencontré de nombreux produits de dégénérescence
dans l'hypoderme des
ailes déjà formés en ce
moment.
Précisons que chez la
larve de Hyponomeuta,
les éléments qui donne-
ront les ailes se multi-
Fio. XXVII. Éléments hypodermiques de la face dorsale de l'abdo- t . i . /^i i
men, larve immobilisée, x 1000. plient Seulement. Lhcz la
nymphe, ils rejettent une
partie de leur substance non utilisable dans l'édification définitive.
Dans 1 > thorax et dans l'abdomen, la taille de certaines boules chroma-
tiques permet de supposer qu "il s'agit de la chromatolyse de noyaux entiers.
On trouve parfois des plages entières parsemées de minuscules gra-
nulations chromatiques et éosinophiles. Il est probable que dans ce cas
une ou plusieurs cellules disparaissent entièrement.
Chez une nymphe de cinq jours, les figures caryocinétiques et les
90 J/>ne j. HUFNAGEL
boules de dégénérescence se font rares, on ne les rencontre presque plus
chez une nymphe de sept jours. Alors la cuticule imaginale est déjà nette.
Duiant la nymphose, lepithélium' va en s 'aplatissant ; vers la septième
journée, il présente son aspect définitif ^
En 1 estimant mes observations je peux dire que chez Hyponomeuta
l'évolutioii de l'hypoderme se fait en deux temps : 1° chez la larve au
début de la métamorphose, 2° chez la nymphe. Pendant les doux pério
des certaines cellules rejettent une partie de leur substance et prolifèrent.
Je pense pouvoir considérer la phase de repos intercalée entre les deux
phases d activité comme correspondant à l'état nymphal. Par suite de
l'expulsion 'd'une parMe de leur substance, la structure intime des élé-
ments hypodermiques de la nymphe ne correspond pas à celle de la larve,
celle de l'imago ne correspond pas à celle de la nymphe ni de la larve.
Cellules des poils
Les poils sont nombreux dans le thorax et dans l'abdomen de la che-
nille de Hyponomeuta. Les cellules qui les forment sont de taille diffé-
rente, leur dimension est en rapport avec les j)oils auxquels elles donnent
naissance. Chaque élément formateur est constitué par deux cellules
dont l'une, plus petite, présente une légère concavité dans laquelle vient
se loger une partie de la grande cellule (fig. xxviii). Souvent, sur la coupe,
on ne voit par de cloisons cellulaires et les éléments semblent être formés
par un complexe à deux noyaux.
La grande cellule trichogène {t) envoie vers l'extérieur un prolongement
cylindrique et constitue ainsi le poil. La petite cellule compagne (c) forme le
bourrelet circulaire de la thèque. On peut s'en rendre compte en exami-
nant cet élément en coupe rasante. On voit alors la petite cellule entourer
en partie la cellule trichogène, elle est elle-même siu'montée par le bour-
relet chitineux ^.
Les cellules de poils de Hyponomeuta rappellent par leur aspect les
mêmes formations décrites par Holmgreen (1896) chez Acronycta Alni
Lin. Suivant Holmgreen, ces éléments jouent, en même temps que le
rôle formateur des poils, celui de glandes.
1. La métanioriihoso do l'hypoderme de Hypo. ornent i présente certaines analoi^ies avec celles de la Galé-
""uque (Poyarkoff). Dans les deux cas les éléments subissent nne épuration et ]>roliterint.
2. Chez les chenilles à'Ocneria (PiOTNlKOTr. 19C4) la celliUe de la thèque entoure en anneau la partie supérieure
de la cellule trichogène. Chez l'Hyponomeida les deux cellules se trouvent sur le même niveau. La cellule de la
thèque est intimement appliquée contre la cellule trichogène et elle l'entoure en partie seulement-
METAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA
91
J'ai pu le confirmer chez Hyponomeiita. En effet, dans la cellule tri-
cliogène, le cytoplasme éosinopliile contient des vacuoles de sécrétion :
il est possible que leur produit, de même que celui des glandes de Verson,
facilite la mue cuticulaire. Le noyau est grand, les granulations chroma-
tiques ne sont pas très serrées, il y a lui nucléole avec son nucléolule
(fig. XXVIII /).
Dans la cellule compagne, le noyau est plus petit et un peu plus dense
Fie. xxviii. Portion de rhypoderrae h chez une jeune larve en train de muer, a, ancienne cuticule ; n, cuticule
nouvellement formée ; p, couulie de cytoplasme commune à toutes les cellules ; r, couche de
cytoplasme expulsé en même temps que la cuticule ; f, cellule trichogène ; c, cellule compagne ; p,
poil. X 700.
(fig. XXVIII c), le cytoplasme est chromatophile et homogène, il est tou-
jours exempt de vacuoles.
Lorsque, au moment des mues, la cuticule ancienne est repoussée par
celle nouvellement formée, le poil s'en va aussi, les cellules qui l'ont formé
persistent entièrement, elles reconstituent un autre phanère. La figure
xxviii nous montre la cuticule de la mue précédente non encore rejetée,
tandis que le nouveau poil est déjà formé. Pendant la mue nymphale, les
cellules ne reconstituent i^lus de poil. Elles se contractent, leurs noyaux
deviennent très compacts. ])c à chez la larve immobilisée, au début de sa
métamorphose, on rencontre dans l'hypôderme thoracique et abdominal
de gros amas chromatiques entourés d'une portion de cytoplasme et
92
J/'»p A. HUFNAOEL
disposés par deux (tig. xxix) ; ils correspondent à l'ensemble de la cellule
trichogène et de la cellule de la thèque. Certaines de ces formations dispa-
raissent déjà chez la larve immobilisée, d'autres se voient encore chez la
jeune chrysalide. Ils se fragmentent à la fin et alors tombent dans la
cavité générale où ils deviendront la proie des phagocytes.
Il m'est arrivé d'observer, à l'intérieur même de l'hypoderme et au
contact de ces
"ï — ___ éléments atro-
phiés, des leu-
cocytes, mais
ceux-ci n'é-
taient jamais
très n o m -
breux.
Si la plu-
part de ces
complexes cel-
lulaires dispa-
raissent, il y en a cependant quelques-uns parmi les plus petits qui per-
sistent et donnent les poils de la nymphe ; ils dégénèrent chez la chrysa-
lide âgée. Les poils imaginaux sont formés par les cellules hypodermiques
ordinaires.
A
Fia. XXIX. Dégénérescence des cellules formatrices do poils, p, cellules formatrice
atrophiées ; h, cellules hypodermiques. Larve immobilisée depuis quelque
jours. X 1000.
EcaUles
Tandis que, chez la jeune nymphe, les éléments hypodermiques
rejettent une partie de leur substance et se multiplient, certains d'entre
eux commencent à se modifier. On peut bien observer ce phéno-
mène dans l'épithélium de la tête et dans celui des segments thora-
ciques.
Les cellules s'accroissent beaucoup, se renflent du côté de la basale
à laquelle elles sont réunies par un mince prolongement cytoplasmique
(fig. xxx). Celui-ci se rompt fréquemment, la cellule prend alors l'aspect
d'une bouteille dont le goulot est dirigé vers la cuticule. Le noyau qui s'est
beaucoup accru est situé dans la portion renflée d" la cellule (e). Sa chrojna-
tine sous forme de grosses granulations est surtout dispersée à sa péri-
phérie. Un nucléole se trouve au centre. Le cytoplasme contient une ou plu-
sieurs vacuoles au-dessous du noyau ; il est très dense et chromatophile. Ce
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEVTA
9$
N.
m-
^d.
sont les " Bildungszellen » de S ^.mpe-î \ les cellules formatrices des écailles.
Au deuxième jour après la mue nymphale, on voit ces cellules envoyer
vers l'extérieur un prolongement cyto-
plasmique pâle qui repousse la cuticule
et s'en coiffe. C'est ce prolongement qui
constitue l'écaillé (fig. xxx, 1).
Les noyaux hypodermiques {N) pro-
prement dits sont serrés dans les inter-
valles des cellules formatrices et le devien-
nent davantage au niveau même de celles-
ci ; on les rencontre toujours à la naissance
de l'écaillé et même à l'intérieur de la
cellule formatrice.
Remarquons que les noyaux (//) qui
sont ainsi en relation avec l'écaillé sont
souvent un f)eu plus petits que leurs voi-
sins. Leur situation n'est pas due à un pur
hasard, car on les retrouve à tous les
stades et dans toutes les coupes.
Sur la face ventrale de l'abdomen, on
voit également certains noyaux s'accroître
beaucoup et changer de structure. Ils (/) se
rencontrent alors vers la base de la cellule,
tandis que les noyaux hypodermiques pro-
prement dits sont localisés sous la cuti-
cule (fig. xxxi). La figure xxx, 2 provient
du même individu, mais peut, il me sem-
ble, être interprété comme un stade postérieur. De même que dans le
2.
•^^;
e^. ■
c:
©;€)
Fia. XXX. 1. Portion Je rhypoderme cûpha-
lique d'une nymphe de trois jours. N .
gros noyaux hypodermiques ; », petit»
noyaux hypodermiques ; e, cellule for-
matrices d'écaille ; rf, boule de dégéné-
rescence. — 2. Portion de l'hypoderme
abdominal d'une nymphe de trois jours.
«, cellule formatrice d'écaille. x 1000.
Fig. XXXI. Portion de rhypodermc abdominal de la face ventrale d'une nymphe de trois jours, c, caryocinèse
e, cellule agrandie qui donnera l'écaillé, rf boiili' de dégénérescence, x 1130.
thorax, la cellule [e) acquiert des vacuoles et envoie vers l'extérieur un
1. Semper (t857) le premier a montré que les écailles sont formées par des cellules hj^podermiques modifiées.
Ces observations ont été ensuite confirmées par L.^sdois (1871) ,Sch.\ffer ( 889) et autres.
94
il/ nie A. HUFNAOEL
prolongement cytoplasmiqiie dont la substance est beaucoup plus pâle
que celle de la cellule même.
Dans l'abdomen, cette formation est plus nette que dans le thorax
par suite de l'absence de petits noyaux qui dans ce dernier masquent
la naissance de l'écaillé.
Lorsque l'écaillé est définitivement constituée, le cytoplasme qui la
remplissait disparaît. La cellule qui lui a donné naissance s'en détache,
tombe à la base de Ihypoderme et dégénère. On rencontre, chez les
nymphes âgées et chez les imagos, de ces éléments à des stades diffé-
rents de leur atrophie. La
figure XXXII nous montre un
de ces aspects chez l'imago
à peine éclose.
A l'état définitif, les
écailles présentent deux pa-
rois chitineuses : les inté-
rieures sont réunies entre elles
par des sortes de ponts, ce
sont les u Chitinbriicken » de
Se3Iper, les « Chitinous pil-
îars » de Mayer.
Svir la figure xxxii, on
voit, à la base des écailles,
des petits noyaux (n). Nous
avons déjà trouvé de ces petits noyaux occupant la même position
chez la jeune nymphe. Je ne saurais dire quelle est leur signifi-
cation. Cependant, à cause de leur situation constante à la base de
l'écaillé, on peut croire qu'ils jouent un certain rôle par rapport à
cette formation. Ils n'ont pas été mentionnés chez d'autres Papil-
lons.
Mayer a constaté chez Danais phiippiis, cpie, après que l'écaillé s'est
débarrassée du cytoplasme qui la remplissait, un leucocyte pénètre dans
chacune de ces écailles.
Les leucocytes, en dégénérant ensuite, contribuent à la pigmentation
des écailles. Ce phénomène n'a pas été vu chez d'autres espèces. Je ne
l'ai pas non plus observé dans les écailles qui recouvrent le corps de Hypo-
nomeuia.
FiG. xxxn. Portion de l'hypoderme céphalique d'une jeune
imago, e, écaille ; ", petits noyaux; g, grands noyaux
iiypodermiques ; d, cellule formatrice d'écaillé dégéné-
rée. X 1130.
Mf:T.\M<H,'ri!()SK DE II YPOSOMEf'TA
9.-)
/??,
Glandes des mues
Les glandes des mues des Lépidoptères sont dénommées glandes de
Verson, en souvenir du savant italien qui les a le premier découvertes
chez Bombyx mori^.
J'ai étudié ces formations dans l'abdomen de H yponoiJieuta où elles
sont situées au nombre de deux par segment sur chaque côté de la
face du corps.
Ces glandes font saillie dans la cavité générale, elles débouchent à
l'extérieur entre les cellules
hjrpodermiques (fig. xxxiii/i).
La même basale entoure l'hy-
poderme et la glande. Dans
celle-ci, on distingue trois élé-
ments ; les cloisons de sépara-
tions ne sont pas très nettes
chez la jeune larve, mais se
voient chez la larve d'âge
moyen.
Dans la cellule {g) la plus
profonde qui est sécrétrice, le
noyau est volumineux et large.
La membrane nucléaire est peu
nette, le noyau est pauvre en
chromatine, les granulations
sont dispersées, un nucléole
avec son nucléolule se vuient
Fus. xxxiii. Glande de mue. g, cellule glandulaire ; »»i, cellule
moyenne, p, cellule la plus rai)prochéc di- Ihypo
derme. Larve active d'âge moyen, x 1000.
au c^-i'tre.
Le cytoplasme, très chromatophile, contient, à l'état de repos, de minus-
cules vacuoles.
Dans les deux autres cellules {>n. p). le cytoplasme chromatophile est
homogène. Dans la cellule moyenne (m) le noyau est ovalaire, il est plus
petit que celui de la cellule profonde et par sa structure n'en diffère pas.
1. Plotnikow ((904) a démontré que ces organes sont lorméa par trois cellules dont une sécrétrice et les deuv
Autres constituant le canal.
KtATT ( 8 8) a mis en évidence que les deux cellules du canal diffèrent entre elles. La cellule la plus rapprochée
de l'épiderme possède un canal cuticulaire, tandis que la cellule moyenne a un canal intracellulaire.
SCHtTLZE ( 91 ) a vérifié le même fait chez Fapilio machaon. Pupilio podaliiim et Deilephila eupftoibiae L.
L'auteur ajoute cependant que les cellules constituant le eaual smit éualinic iit secrétrices.
.\RCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN.
- K. :i.
96
M^*^ J. Hl'FNACŒL
Le noyau (/j) le plus rapproché de l'hypoderme ne varie que par sa
dimension un peu plus grande des éléments hypodermiques proprement
dits.
La cellule sécrétrice (y) sert en même temps, d'un côté, de paroi au
canal conducteur des produits sécrétés. Les deux autres cellules forment
.^.
\
'€i'.-
%^
0è^ :
la bordure du côté opposé.
Dans la cellule moyenne
(m), on voit nettement que
l'extrémité du canal touche au
noyau, il est donc intracellu-
laire.
La figure xxxiv nous pré-
sente la glande au moment
où la larve se prépare à la
mue : la nouvelle cuticule est
déjà sécrétée (elle n'est pas
présentée sur la figure). A ce
stade on voit généralement
sur les coupes la cellule
moyenne (m) coiffer la cellule
sécrétrice proprement dite.
La cellule glandulaire {g) a
notablement grossi, s^r ik y au
est irrt'guli r ; elle est remplie
par des vacuoles sécrétrices
qui réduisent le cytoplasme à
un fin réseau. Le cytoplasme
des ?av. res cellules n'a pas
changé, il est dense, chroma-
tophile et granuleux.
Chez les larves au repos et chez les jeunes nymphes, les glandes nous
offrent le même aspect que chez la larve en train de muer. Ces formations
persistent jusqu'à la fin du deuxième jour après la nymphose. Alors la
chromatine des noyaux, devenue très compacte, se fragmente. Le cyto-
plasme dégénère également. On rencontre alors ces glandes, réunies encore
à l'hypoderme et ayant conservé leur basale, remphes des ]iroduits
de dégénérescence (fig. xxxv).
Le noyau de la troisième cellule, la plus rapprochée de Ihypodernie,
-^-
XXXIV. Glande do mue chez une larve en train de muer,
la nouvelle cuticule est déjà l'ormée, elle n'est pas repré-
sentée sur le dessin, g, cellule glandulaire ; m, cellule
moyenne : /(, hypoderme. x K 00.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMETTA '.»7
persiste encore (fig. xxxv/>), mais plus tard disparaît également. Jai
vu sur différentes préparations les cellules hypodermiques voisines de la
glande présenter les mêmes
phénomènes de pycnose.
Je n'ai pas observé des
phagocytes au voisinage de
ces glandes dégénérées. Il est
probable que celles-ci se déta-
chent de Ihypoderme et tom-
bent dans la cavité générale
où elles seront phagocytées.
J'ai rencontré chez les
nymphes des glandes particu-
lières à trois noyaux. Ces
formations sont plus petites que celles décrites précédemment ; je ne les
ai pas vu chez les larves, il est donc probable qu'elles se sont différen-
ciées aux dépens de l'hypoderme nymphale.
FiG. XXXV. Glande de mue en dégénérescenci'. Nymphe de
48 heures, x 1(00.
GLANDK VENIR \LE
La glande ventrale a été décrite par Schaeffer (1889), chez la larve
de Hyponomeuta eionymdla L, comme un tube qui commence dans
le métathorax ,
longe la face ven-
trale de la che-
nille et vient s'ou-
vrir à l'extrémité
supérieure ven-
trale du protho
rax sur un bour-
relet présentant
deux muscles ré-
tracteurs.
On savait que
la glande ven-
in;, xxxvi. .1. OlluliS éiiitliéliaks de la jjortion pro.\imale de la glande vintrale. traie dlSparaiS-
Larvc irâiie iiuiycn. x ll:iO. — 7*. Ci'llulcs épithéliales do la portion dis- . . «
talc- de la gland. • vintralc Larve d\^<;c moyen, x 11:0. SVt, maiS Sa lUC-
98
J7'»« .4. HUFXAGEL
^-^•?!l
• ■•.
tamorphose n'a pas été étudiée. Je l'ai poursuivi Chez Hyponomeuta
padella.
La glande (tig. 1 1) présente deux portions différentes. Dans la proxi-
male (fig. xxxvia), les noyaux cellulaires allongés ou ovalaires sont sou-
vent rétractés à l'inté-
rieur de leur mem-
brane ou bien ils sont
déprimés par des va-
cuoles. Des vacuoles
semblables se voient
dans le cytoplasme
chromatophile et gre-
nu. L'intima (i) est
lisse.
Dans la portion di-
stale (fig. xxxviB), le
cytoplasme chromato-
phile et granulé est
dépourvu de vacuoles,
de même que le noyau .
L'intima (i) est
épaisse et hérissée de
gros crochets chiti-
neiix. Une basai e
existe.
Chez la larve au
repos, l'intima carac-
téristique se trouve
tout le long de la glande
Fio. XXXVII. Coujif louRitiiiliiiale il (' la illande ventrale chez une uyiiiplic SaUI QanS le C8BCUm
d'un jour, x 400. p, portion distale ; d, portion proxiniale ; b.
basale ; r élément en chroinatolyse ; l, leucocyte.
terminal. Il s'ensuit
que, dans cette por-
tion, les cellules des deux côtés se rapprochent, ne laissant qu'im très
faible espace entre elles. La transformation du cœcum diffère dans ses
détails de celle de la portion proximale de la glande. Je décrirai d'abord
la métamorphose de celle-ci.
Chez la larve prête à se nymphoser, l'intima a entièrement dis-
paru, la glande .s'est rétractée sur elle-même, le cytoplasme est éosino-
MËTAM<)I!l'li<>^^^ l>l-^ IfVrOXOMECTA 99
phile et granuleux, les noyaux présentent un début de chromatolyse.
Chez une nymphe fixée à la fin de la première journée après la mue,
la destruction de cette portion de la glande est très avancée (fig. xxxvn jy).
Les noyaux et le cytoplasme ont subi une dégénérescence granuleuse.
J'ai remarqué une particularité de la dégénérescence de cet organe. Les
granulations chromatoly tiques provenant des noyaux se disposent sou-
vent en couronne autour d'une petite portion de cytoplasme {/); chaque
ensemble ainsi formé correspond sans doute à une ancienne individualité
cellulaire.
Bien que la chromatolyse de l'épithéHum soit déjà très avancée, les
leucocytes sont relativement peu
nombreux dans son voisinage. Ce-
pendant un examen attentif per-
met d'en distinguer (fig. xxxvir,
XXXVIII /). Parfois, parmi eux, on
reconnaît quelques cellules grasses
également remplies de produits
(^'W»m chromatolytiques.
.^ Sur les figures xxxvir et
xxxviii nous voyons un fragment
xxxviii. l'ortion de l;i glaiulo venlralo on chroma
Su;:^nS:u:;iùal^:"r^i^5a''''"^'"''""""^- ^e la basale (6). Celle-ci n'est pa^
attaquée par les phagocytes dès
le début de la métamorphose comme ceci a Ueu par exemple pour la
glande de la soie (voir p. 107). Ici elle disparaît en même temps que
1 epithélium même.
Suivons maintenant les modifications qui sont survenues pendant ce
temps dans le caecum terminal {l). Nous avons vu que, chez la larve
au repos, les cellules se sont rapprochées par suite de la disparition de
l'intima. Vers la fin de la première journée, après la mue nymphale,
les cellules ont encore gardé leurs limites cellulaires ; le cytoplasme éosi-
nophile s'irradie vers le centre du cyecum (fig. xxxvji). Les noyaux
sont devenus irréguhers, certains ont l'air de se cliver. Dans la plupart
d'entre eux, la chromatLne est encore normale, un nucléole bien net se
distingue. Des boules chromatolytiques se rencontrent pourtant déjà
par-ci par-là.
Bientôt toute cette portion de la glande dégénérera, comme nous
l'avons vu précédemment pour la portion proximale.
Je dois ajouter que le ca'cum terminal de la glande ne se comiDorte
KiO
.1/"^^ ,4. HUFNACEL
pas de la même façon chez tous les individus ; ainsi je l'ai rencontré
chez une nymphe, vingt-quatre heures après la mue, encore parfaitement
indemne, tandis que chez une seule larve prête à se nymphoser, la dégé-
nérescence de ses éléments était déjà assez avancée et j 'ai trouvé dans son
voisinage des phagocytes et des sphères de granules.
La disparition de la glande ventrale se produit très rapidement. Etant
donnée cette rapidité, il est difficile de suivre toutes les étapes de sa
résorption.
Au début de la troisième journée après la mue nymphale il n'y en a
plus aucune trace.
Je ne crois pas que l'on puisse attribuer la brusque disparition de la
glande à une dissolution humorale ; la présence que j 'ai constatée des leuco-
cytes ( l) est une preuve en faveur de la théorie phagocy taire. Il est probable
qu'en dernier lieu il y a une invasion de nombreux phagocytes qui se
chargent d'évacuer dans la cavité générale les déchets de la destruction.
GLANDE MANDIBULAIRE
La glande mandibulaire (fîg. 1 v,) est formée par deux tubes qui
s'ouvrent extérieurement à la base de la mandibule. Ils viennent
d'autre part se terminer en
cfpcum dans le deuxième
segment thoracique.
La situation de la glande
mandibulaire, la forme de
ses noyaux (fig. xxxix) et
l'absence dans sa lumière du
peloton soyeux, permettent
de la distinguer du cîinal
conducteur de l'appareil sé-
ricigène avec lecpiel on pourrait la confondre sur les coupes.
L'évolution de la glande mandibulaire au cours de la métamorphose
n'avait pas été étudiée juscpià présent. J'en décrirai les principales
étapes.
Chez la larve, les limites cellulaires sont nettes. Les noyaux sont
volumineux. Les granulations chromatiques sont grandes et serrées, mais
distinctes. Un nucléole existe toujours.
J>"1(!. XXXIX. Coupe transversale de la ghiiiilc inaiidilmlnire chez
une jeune larve, x >*.")().
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA
XI,. Cclluk' do la glande mandibuluro chez uni' nymphe
de trontc-liuit heures. Coupe Iongitudin:ile. x UOO.
Le cytoplasme chroniatophile présente des vacuoles. L'intima porte
de petits crochets chitineux (fîg. xxxix). La baaale peu nette chez la jeune
chenille, l'est davantage chez
la larve adulte.
Chez la larve au repos et
chez la toute jeune nymphe,
l'épithélium glandulaire ne pré-
sente point de modifications
importantes. Chez la jeune
nymphe, on reconnaît, bordant la lumière, une membrane pâle et homo-
gène; celle-ci n'existe i)lus chez la nymphe âgée de 38 heures (fig. xli).
En suivant la glande, on se rend
compte C{u'elle n'offre pas partout le
même aspect; ainsi dans sa portion
distale et proximale elle présente
déjà un stade assez avancé de dégé-
nérescence, tandis que vers le miliea
elle est encore normale.
A cet endroit, les cellules sont
nettement délimitées entre elles ; le
cytoplasme chromatophile est vacuo-
laire, la basale est soudée à la surface
cellulaire, la lumière est très grande.
Là où la métamorphose a débtité
la glande se rétracte et se libère de
sa basale (fig. xli). Le cytoplasme
est légèrement chromatophile, il est
granulé et riche en vacuoles; on ren-
contre par endroit des boules de
volume varié un peu plus denses que
le protoplasme ambiant et qui sem-
blent représenter du cytoplasme con-
crétionné. La lumière est remplie par
une substance de même aspect que
le cytoplasme, mais qui est trè.-^
pâle, on y trouve aussi parfois des vacuoles et des boules concrétionnées.
Les noyaux, dans certaines cellules, sont encore tout à fait normaux :
dans d'autres, au contraire, ils sont déjà fragmentés. On voit aussi dans
l'IG. XI I. Coupe longitudinale de la glaude inandibu-
laire chez une nymphe de 38 heures, b, basale :
p, phagocyte. I )ans deux phagocytes les noyaux
n'étaient pas visibles sur cette coupe, mais se
\()yaient sur la coupe suivante, x 11;!0.
102 M^'^ A. HLFXAaEL
d'autres cellules (fig. xl) une partie du noyau se désagréger en
boules pycnotiques, tandis que la portion du noyau encore persistante
présente un aspect tout à fait normal. Ailleurs, tout le noyau ou même
la cellule entière a subi une dégénérescence granuleuse.
On trouve, circulant dans l'espace libre entre Fépithélium et la basale,
de nombreux phagocytes encore à jemi ou déjà bourrés de produits ingérés
qui sont à des stades diiSérents de condensation (fig. xiAp). La forme
de ces enclaves est généralement arrondie. Ces corps sont formés par une
masse chromatique entourée de cytoplasme ou par des amas protoplas-
miques ou chromatiques seuls. Dans ces derniers, les granulations sont
parfois distinctes, parfois complètement agglomérées.
Dès qu'une portion de glande est fragmentée, les particules sont englo-
bés par les phagocytes. Cette dégénérescence accompagnée de phagocytose,
continue ainsi et, au troisième jour après la mue nymphale, la glande a
entièrement disparu.
Dans la glande mandibulaire, comme nous venons de le voir, les pha-
gocytes (p) et les leucocytes circulent librement dans l'intervalle qui
sépare l'épithéUum de la basale (6). Nous nous trouvons ici en présence
dun fait particulier et qui ne se retrouve pas dans d'autres organes de
Hyponomeuta. Ainsi, par exemple, dans les tubes de Malpighi contournés
(voir p. 116), il y a également pénétration des leucocytes sous la basale;
on les rencontre au sein de la cellule même et fusionnés avec le cyto-
plasme de celle-ci.
Dans la glande mandibulaire nous voyons un processus différent. Les
leucocytes pénètrent au-dessous de la basale, mais non à l'intérieur de
l'épithéUum même.
Au fur et à mesure que les phagocytes ont englobé une portion
de la substance, ils gagnent de plus en plus la profondeur de la cellule
(fig. XLi) ; ceci est plutôt provoqué par la disparition même d'une
partie de l'épithéliuni que par une immigration dans celui-ci. Dans
la glande mandibulaire, les phagocytes ne perdent jamais leur indivi-
dualité, ils ne se fusionnent jamais avec le cytoplasme de la glande.
APPAREIL ^ÉRICIGÈNE
Chez les Muscides, lajdestruction des glandes salivaires a lieu par
phagocytose ; phagocytose qui intervient avant l'altération de lepithé-
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA lu3
lium glandulaire d'après Kowalewsky (1887) et Ch. Pérez (1910), et
après, selon Van Rees (1888).
Pour Henneguy (1904), les cellules se disloquent spontanément et
les fragments sont ensuite englobés par les phagocytes.
Berlese (1900) nie l'intervention des phagocytes.
Chez les Diptères inférieurs (Vaney 1902), les glandes dégénèrent
d'abord et sont ensuite, suivant le cas, englobées, ou non, par les phago-
cytes.
Il n'y a pas de phagocytose chez Lasius flavus, d'après Karawaiew
(1898) et chez la Guêpe, d'après Anglas (1900) ; les glandes se dissolvent
dans le sérum sanguin.
Chez Isosoma, d'après Docters van Leeuven (1908), il y a phagocy-
tose après dégénérescence de l'épithélium.
Chez la Galéruque (Poyarkoff 1910), le phagocîyte mêlant son proto-
plasme au cytoplasme de la cellule glandulaire provoque ainsi sa frag-
mentation en f)etites boules. Lenglobement n'a lieu qu'après cette espèce
d'émiettement.
Les connaissances sur la métamorphose de l'appareil séricigène des
Lépidoptères sont restreintes.
Les auteurs anciens, Hérold (1815) et Suckow (1829), se bornent à
constater la disparition de cet organe pendant la nymphose.
Par contre, de Filippi (1850) et Cornalia (1856) considèrent chez le
Papillon certaines formations comme des restes de l'appareil séricigène.
Pour DE Filippi, ce sont quelques glandes de couleur orange qui se
trouvent chez l'imago à côté de l'estomac et qui, croyait-il, seraient
douées d'une fonction spéciale.
Pour Cornalia, un ruban rougeàtre plissé et de consistance pâteuse
représente le résidu de la glande de soie.
Helm (1876) nie catégoriquement, sous quelque forme que ce soit, la
persistance chez l'imago de la glande séricigène. 11 ne s'expliquerait
d'ailleurs pas la persistance d'un organe dont la fonction cesse avecla vie
larvaire.
Helm, le premier, a étudié en détail la disparition de la glande chez
Bombyx mori :
A la cinquième mue, la tunica intima est rejetée, sans être remplacée»
les cellules s'écartent les unes des autres, la tunica propria (basale) n'étant
plus distendue par les cellules glandulaires se plisse et plus tard disparaît.
Les noyaux se fragmentent et se confondent avec le cytoplasme ambiant.
]04
J/>"^' A. HUFNAC.EL
Le cytoplasme lui-même subit une dégénérescence gra-
nulo-graisseuse. La destruction de la glande est com-
plète.
KoWALEWSKY (1887) pense que la destruction de
la glande chez les Lépidoptères se fait de la même façon
que chez les Muscides, c'est-à-dire par phagocytose.
KoWALEWSKY dit avoir trouvé chez les nymphes
de Hyponomeuta, à l'intérieur de cellules glandulaires,
des éléments minuscules, qu'il croit être des phagocytes
immigrés.
Je vais maintenant décrire l'appareil séricigène chez
la larve de Hyponomeuta (fi^?. xlti). I' est formé par
deux longs tubes qui s'étendent loin dans la cavité géné-
rale et s'y terminent en cul-de-sac. Ces tubes débou-
chent à la base de la lèvre supérieure. Un peu avant
de s'ouvrir à l'extérieur, ils reçoivent les produits de
deux glandes dites glandes de Filippi.
Chacun de ces tubes comprend dans l'abdomen une
partie rectiligne qui après un assez long trajet se replie
sur elle-même et forme une anse en V (fig. i).
Toute cette partie abdominale est fort épaisse, mais un peu
avant d'arriver dans le thorax, la glande devient subitement très
mince et eflfilée. ,__---___^__^^ ^.^-^^
lie. xril. 8théin:i
moiitj'ailt un tiiUc
iIl' la glande de soie.
C'est la partie rbdo-
minale du boyau qui
constitue la portion sé-
crétrice, tandis que la
portion thoracique est
purement conductrice.
Les deux portions dif-
fèrent aussi ))ien par leur
îispect général ({\\e par
leur structure histologi-
([ueet leur transfonnation
pendant la nymphose.
Nous allons les étu-
(liiM séparément.
iBn
,À&u
Fig. xuii. Appareil s!^rieigène. A, cellules épithélialcs de la portion
rectiligne de la glande ; B, Cellules épithélialc^ de la portion
en V ; b, basale ; Jeune larve, coupe longitudinale.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTJ
105
^ Glande productrice
Dans le segment rectiligne, la lumière est petite et les cellules qui
la délimitent sont hautes et volumineuses. Dans l'anse réfléchie la lumière
est très grande et les cellules deviennent immédiatement plates et petites.
La figure xliii montre, à la même échelle, l'aspect des cellules de ces deux
portions de la glande, et permet de juger de la différence de leur
dimension.
Sur les préparations, les noyaux apparaissent toujours dans une zone
vaciiolaire. Dans les pièces in toto, ils ont une forme de croissant dont
FiG. XI IV. Cellules épithéliiilos de la glande de soie chez »ine larve en train de fller son cocon. Coupe lonsiitu-
dinale. x 700.
la concavité regarde la basale.En coupe (fig. XLiTi),ces noyaux ont une
forme plus ou moins irrégulière, ils sont très compacts.
Le cytoplasme est basophile et granuleux, il est finement réticulé et
contient des filaments, longs, épais et espacés dans la partie rectiUgne(^),
petits et serrés dans l'anse en V {B). Comme l'a montré Gilson, pour
Bombyx mori, ces filaments ne sont pas des fibrilles isolées, mais des
portions régulières du reticulum général.
Dans les deux parties de la glande, une petite portion de cytoplasme
qui entoure le noyau est claire et ne contient pas de filaments, de même
que la portion qui se trouve immédiatement au dessous de l'intima.
C'est chez la larve en train de filer son cocon que le fonctionnement
de la glande atteint son maximum d'intensité. Les glandes sont turges-
centes. Les filaments, à ce moment, ont définitivement disparu et la
structure réticulaire du cytoplasme devient plus apparente (fig. xltv).
106
iM»'-^ A. HUFNAflEL
Le cytoplasme renferme][des vacuoles qui sont petites sur la face
basale, grandes du côté tourné \ers la lumière (fig. xliv). Ces dernières
contiennent des enclaves d'aspect hyalin qui ne sont autre chose que
de la soie non encore éliminée. Chez la larve se préparant à la mue, les
vacuoles peuvent confluer en des
cavités énormes toujours rempUes
du coagulum pâle. Les vacuoles
alors ne se trouvent pas seulement
du côté de la lumière, mais un peu
partout et elles déforment souvent
le noyau.
La métamorphose débute chez
la larve au repos. La portion termi-
nale en cul-de-sac de la glande a
perdu sa turgescence, elle est deve-
nue empâtée. Si on l'examine de
plus près, on voit, à côté de cellules
encore en bon état, d'autres cellule?
dont les noyaux sont complète-
ment fragmentés et dont le cyto-
plasme a également subi une atro-
phie granuleuse. La figure xlv nous
montre une portion de la glande à
ce stade. La cellule en dégénéres-
cence a maintenant l'aspect d'un
sac rempli de corps de teinte et de
volume différents, mais de forme
généralement arrondie. On y trouve
des boules éoginophiles, violacées
et franchement chromatiques, ces
dernières pouvant être ou non entourées du cytoplasme violacé (glyché-
malun).
Tout ceci a lieu sans que l'afflux des leucocytes soit plus intense à cet
endroit qu'ailleurs. Les leucocytes ne commencent à jouer leur rôle des-
tructeur que lorsque cette partie de la glande est complètement dégénérée-.
Ceci a lieu chez la nymphe. La phagocytose est donc postérieure à la dégé-
nérescence.
Dans le reste du segment longitudinal de la glande et dans la portion
J'Ki. x:.v. Coupe longitudinale du cœcuni terminal de
la glande sérieigène. Larve prête à se nympho-
ser. ■: 700.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEITA
107
en V, les modifications importantes ne commencent que chez la jeune
nymphe.
La glande se contracte en abandonnant la basale, qui, mince jusque-là,
se gonfle et se plisse fortement. Dans la portion de la glande que j'ai
représentée sur la figure xlvi, le plissement de la basale est beaucoup
moins accentué qu'ailleurs.
Des leucocytes affluent vers la basale, s'y accollent, la perforent, mais
respectent encore l'épithélium glan-
dulaire.
Vers la troisième journée après la
mue, la basale a disparu, la dégéné-
rescence de l'épithélium est avancée.
La figure xlvii q nous représente
la portion supérieure de la glande
chez une nymphe de quatre jours.
La lumière est oblitérée, le cyto-
plasme est resté chromatophile, les
noyaux sont très compacts. Certains
sont fragmentés en boules dont la
structure granuleuse n'est plus déce-
lable.
On rencontre, parmi les débris de
la glande, des leucocytes nombreux,
certains (Z) se trouvent à l'intérieur
même de l'épithélium et leurs limites
cellulaires sont très peu nettes ou même complètement évanouies, leur
cytoplasme s'étant confondu avec celui des cellules glandulaires mêmes.
Ce stade correspond sans doute à celui où Kowalewsky chez Hypo-
nomeuta a observé des phagocytes dans la glande de la soie.
Malgré l'abondance des leucocytes, oi en trouve à ce moment
peu ayant déjà englobé des produits de dégénérescence.
Plus tard, le nombre de leucocytes a encore augmenté, ils sont serrés
les uns contre les autres et leurs cloisons cellulaires sont indistinctes.
Ce n'est que très tardivement que les phagocytes s'individualisent de
nouveau ; ils sont devenus plus grands qu'ils ne l'étaient auparavant et
sont encombrés par les débris de la glande non encore entièrement
digérée.
Cette destruction est très lente et progressive. A la fin de la nymphose
Fia. XLVI. Coupe transversale de la glande de soie
Nymphe do 24 heures.
JO.S
i¥"ie A. HUFNAGEL
on trouve encore
sur les coupes à
la place de l'an-
cienne glard^i
une substance
dégénérée en-
vahie par des
leucocytes.
La portion
sécrétrice (g) de
l'appareil sérici-
gène disparaît
donc phagocytée,
mais cette pha-
gocytose n'a lieu
que lorsque la
glande a subi des
modifications
importantes.
Chez Graci-
Jaria syringella,
d'à} rès mes ob-
servations, la
glande est égale-
ment phagocy-
tée, mais cette
destruction, au
lieu d'être leuco-
cy taire comme
chez Hypono-
meuta, est j)ro-
duite par les cel-
- Iules grasses
ri(J. xi.vii. Coii])!' oiij.'itii(lin;ili .iiiiii poitioii i|i r:ii>pariil scrici}.'énc montrant (fig- XVl).
la 'jlaiidc sriTctrici» (/, rt li- i-aiial rvaciiatcur c: /. leucocyte. Nvmphc ^^ ,
de (|iiatrr jours. X .(H). " " CilCZ UUe
même nymphe
do Gwcilaria. l'épithélium est à des stades différents d'histolyse : tandis
que certaines cellules ont déjà subi une dégénérescence granuleuse, d'au-
MÉTAMOBPHOSE DE HYPOSOMEUTA 109
très, tout en présentant des signes pycnotiques, restent encore entières.
Dès que la fragmentation se produit, les cellules adipeuses accaparent
les produits de destruction (fig. xvi).
On trouve au voisinage de la glande de très nombreux éléments gras
bourrés de boules en dégénérescence et d'autres en train de les englober.
Nous avons vu que chez Hyponomeuta, les phagocytes se comportent
autrement vis-à-vis de la glande. Ils n'englobent pas les fragments de celle-
ci, mais s'infiltrent dans son épithélium et le digèrent sur place ( fig. xlvii /).
Je pense que la différence de processus phagocytaire chez Gracilaria
et Hyixynomeuta doit être attribuée dans une large mesure aux dimen-
sions des éléments qui y prennent part.
Les cellules adipeuses, vu leur taille, peuvent englober des boules
de dégénérescence relativement grandes et nombreuses, tandis que les
petits leucocytes, usant du même j^rocédé, ne sauraient assez vite venir
à bout de la volumineuse masse qu'est la glande de la soie ; en s unissant,
ils accélèrent ainsi sa disparition.
El résumé chez Hyponomeuta, l'épithélium présente des signes de
dégénérescence avant son envahissement par les leucocytes ; chez Graci-
laria, la glande se fragmente d'abord, les débris sont ensuite englobés
par les cellules grasses qui jouent le rôle des phagocytes.
Canaux évacuateurs
Sur le vivant, les canaux évacuateurs de 1 ap})areil séricigène, sont
plus transparents que la glande productrice ; ils sont filiformes et de
plus en plus fins en s'approchant de l'extérieur. Devix cellules suffisent
généralement à limiter la lumière (fig. 5). Les limites cellulaires se voient
bien sur une coupe longitudinale. La figure 5 nous montre une section
transversale d'un de ces canalicules dans sa jjoition moyenne.
La basale (6) est nette, le cytoplasme compact et chromatopliile est
fibrillaire, mais cette structure est beaucoup moins accusée que dans la
portion productrice de la glande.
Du côté opposé à la basale, le canalicule présente une zone jiàle et
enfin une intima {in) chitineuse.
Les noyaux sont ovalaires ; les granulations chromatiques forment des
grumeaux inégalement distribués tranchant sur le fond clair du noyau.
Dans la lumière on distingue un peloton de soie (/. s) : à un fort grossis-
sement chaque fil soyeux apjiaraît formé de deux ])arfies : l'écorce et
110
J/n>e A. HUFNAGEL
la soie proprement dite. Le peloton persiste pendant toute la nymphose
et sa présence permet toujours de distinguer le canal.
Dans la partie terminale du canal voisine de l'extérieur, les noyaux
sont plus serrés et le protoplasme des cellules devient vacuolaire.
Au début de la nymphose, le tube se contracte en abandonnant la
basale {ha), qui forme alors des plis nombreux. Vers la deuxième journée,
des leucocytes (/) affluent ; ils s'apphquent par leur bout effilé contre la '
basale comme pour tenter de la perforer. La figure 4 nous montre ce
stade en coupe longitudinale. Après avoir englobé la basale, les pha-
gocytes se dispersent.
Le début de la métamorphose est donc le même pour la glande et
pour son canal, mais ici les phagocytes se bor-
nent à la destruction de la basale et n'atteignent
jamais l'épithélium.
Pendant ce temps la lumière s'est rétrécie.
L'intima a disparu. La zone pâle n'existe plus.
Le cytoplasme chromatophile a perdu sa struc-
ture fibrillaire, il est maintenant granuleux.
Quelques vacuoles apparaissent. Les noyaux
deviennent uniformément compacts, le nucléole
disparaît, puis réapparaît à nouveau.
L'épithélium ne disparaît pas comme on
aurait pu le croire, il va évoluer et se différen-
cier pour donner un nouvel organe imaginai, ne rappelant en rien le
canal conducteur de la glande de soie. Un tractus de sécrétion soyeuse
qui, durant toute la nymphose, persiste dans la lumière du canal, permet
de le reconnaître malgré son aspect différent.
Les figures 3, 4, XLViii.nous montrent une portion du canal à la fin de
la deuxième journée. Les noyaux très chromatiques présentent sur la coupe
transversale (lviii) la forme d'un anneau tantôt ouvert, tantôt fermé et
à contour irrégulier. Mais- c'est surtout sur des coupes longitudinales
rasantes ([ue l'on peut se rendre compte des transformations que
les noyaux subissent. Ils s'allongent beaucoup, s'étranglent, mais les
deux portions ainsi formées ne se séparent point et s'étranglent de nou-
veau (fig. 3). Les noyaux preiment des aspects rameux et bourgeon-
nants.
Ils continuent à s'allonger et à s'étrangler durant toute la nym-
phose. Ils acquièrent des formes tout à fait différentes (fig. 7) de celles
Fio. XLViii. Coupe transversale
du conduit de l'appareil séri-
cigène. La basale s'est déjà
détachée. Nymphe de trente-
huit heures, x 8i:0.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA 111
que l'oli observe chez les larves actives et on ne se douterait pas qu'ils
puissent en provenir si on ne les avait suivis pas à pas.
Dans ces noyaux les granulations chromatiques sont clairsemées;
elles sont régulières et distinctes ; il existe un nucléole et un nucléolule
(fig LV).
Le cytoplasme se différencie également ; il perd de plus en plus ses
affinités pour les teintes basiques et devient éosinophile.
Au cinquième jour (fig. 6) après la mue nymphale,on voit apparaître
des prolongements partant
du cytoplasme et faisant
saillie dans la lumière main-
tenant agrandie. Ces expan-
sions se colorent de la même / ,»»»:!v'î>^
façon que le cytoplasme. / ^r'-t:^ \3>^ \
Elles ont l'aspect de paquets j 4^/^^>|
de soies agglutinées. Ces for- / ^*hïii^^ ^ ::; -, , ^f^C^i
mations sont spéciales à la \\ (£i^
nymphe ; elles n'existaient \ J i
pas chez la larve et elles \ ^^^yi-% I
disparaissent avant la fin de '\ ^^v'^* ^„^^ , /
la nymphose de telle sorte ^ç-j y'î.
qu'il n'y en a plus trace \, ^7!$ ^ "^^
chez l'imago. \ '** ?'^;*
Chez l'imago la glande
s'est beaucoup épaissie (com-
parer fig. xlvii et fig. xlix). i„,„„o. x «o...
Le cytoplasme est éosi-
nophile mais prend une teinte chromatique sur son pourtour, il est
finement granuleux et présente des stries radiaires visibles surtout sur
une coupe transversale. On rencontre dans le cytoplasme quelques rares
vacuoles. Les noyaux sont minces et ramifiés (fig. 7).
La lumière est très petite, virtuelle, à certams niveaux, mais la mince
intima qui la délimite décèle son emplacement (fig. xltx).
Une nouvelle basale s'est reformée (fig. 7 ha).
En résumé, le canal de la glande de la soie se débarrasse de sa basale,
puis en reforme une autre. Les noyaux s'allongent et se ramifient. Le
cytoplasme diminue apparemment par suite de la contraction de la glande,
puis s'accroît d'une manière intense (p\. fig. xLvni et xlix, dessinées
ARCH. HE /.nul.. Kxp. ET (;és. — T. 57. — !'. -J. 8
112 .¥•"«• .4. HVFNACEL
à la même échelle), et après être passé par un stade transitoire et pcarti-
culier à la nymphe (prolongements éosinophiles), il acquiert sa stnicture
définitive. La lumière devient plus petite, puis s'accroît et se rapetisse
définitivement chez l'imago.
On voit par ce qui précède que la portion sécrétrice de l'appareil seri-
cigène disparaît seule, tandis que la portion conductrice se différencie
pour donner une glande nouvelle.
La figure liv C{ui représente un fragment de l'appareil séricigène à
la limite de la glande et de son canal, permet de se rendre compte de cette
double transformation allant en deux sens inverses.
Cette particularité d'une glande imaginale, évoluant aux dépens des
canaux conducteurs de l'appareil séricigène, n'avait pas encore été
signalée par d'autres auteurs. Chez les autres Insectes déci'its jusqu'ici
cet organe disparaît entièrement.
TUPES DE M/ Li IGHl
La métamorphose des tubes de Malpighi a une très grande variabilité.
Chez Calliphora (Pérez, 1910), les tubes de Malpighi passent, sans subir
des modifications importantes, de la larve à l'imago.
Ils persistent également chez Cliironomiis , Psychoda, Simuli ni
(Vaney, 1902).
Ils sont détruits et formés à nouveau chez Eristalis (Vaney, 1902),
chez Lasius fia '- «(Karawaiew, 1898). chez la Guêpe et l'Abeille (Anglas,
1901), chez Fcrmica ruja (Pérez, 1902), chez Cynips (Berlese, 1901).
Chez Pheidole pallidula, Berlese n'a pu élucider si les tubes de Mal-
pighi passent de la larve à l'imago ou s'ils périssent.
Chez Anobium paniceurn (Karawaiew, 1899), les tubes persistent
dans leur région postérieure où ils sont enclavés dans la paroi du rectum.
Dans la portion antérieure libre, quelques cellules dégénèrent et sont en-
globées par leurs voisines qui persistent.
Il y a quekpie chose de semblable chez la Galéruque de l'Orme (Poyar-
KOFF, 1910) : la portion terminale persiste inaltérée. Dans la portion libre,
les cellules imaginales englobent le cytoplasme des cellules larvaires.
Lépidoptères. — Cholodkowsky (1887) a constaté que les imagos
de Tineola biselliella H'oinnel présentent deux tubes de Malpighi, tandis
que les larves en possèdent six comme les chenilles des autres Lépidop-
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA 113
tères. Lauteur se demande d"où proviennent les canaux urinaires de
l'adulte, \o\c\ les principaux résultats de ses recherches :
(( Les chrysalides dun jcrar ressemblent complètement aux chenilles
en ce qui concerne leurs tubes de Malpighi ». A la fin du second jour « les
tubes terminaux, au nombre de six, présentent des indices évidents de
dégénérescence graisseuse. Les contours des noyaux deviennent peu appa-
rents, tandis que leur protoplasme est parsemé de petites gouttelettes
graisseuses. La consistance de ces tubes est très faible.
« Au troisième join-. on ne réussit plus à constater l'existence « d'une
connexion organique quelconque entre le tronc basilaire (tronc commun
qui aboutit à l'intestin) et les tubes terminaux ».
K II est visible que les tubes terminaux disparaissent peu à ])eu par
histolyse, tandis que le tronc basilaire s'accroît au contraire de plus en
plus, comme j'ai pu le constater par l'examen comparatif de chrysalides
de plus en plus âgées. Ces troncs, tout en s'allongeant progressivement, ne
se ramifient pas ; ils deviennent, à la suite d'un allongement de plus en
plus considérable, les vaisseaux urinaires simples de l'adulte. »
Je crois qu'il serait intéressant de vérifier ces faits par une étude
microscopic£ue approfondie.
Les observations de Cholodkowsky mises à part, nous ne possédons
qu'un seul travail ayant trait à la métamorphose interne de l'appareil
excréteur chez les Lépidoptères, c'est celui de Katharina Samsox (1908).
L'auteur a suivi l'évolution des tubes de Malpighi chez H eterogenea lima-
codes Hnjn. Les tubes se débarrassent de leur basale qui est phagoc3-tée,
l'épithéhura entier est remanié sur place, il passe de la larve à l'imago en
traversant un stade oblitéré caractéristique.
Katharina Samsox voit dans cette perte temporaire de la struc-
ture dift'érenciée un phénomène d'atrophie.
Cependant, peut-on parler de la dégénérescence d'une formation qui
ne disparaît pas, qui, au contraire, persiste et redevient fonctionnelle ?
Je ne le pense pas.
Il me semble plus juste de considérer le stade de repos par lequel
passent les tubes comme un état « dédififérencié » correspondant à une
« période de non fonctionnement », comme le fait Ch. Pérez (1910) pour
les tubes de Malpighi de CallipJwra.
Comme le dit justement l'auteur, si l'on considérait ce stade comme
un phénomène de dégénérescence, il faudrait admettre « que les cellules
passent par une période de mauvais état, des altérations patholo-
114
i¥"'e A. HUFNAOEL
giques, et qu'ensuite elles guérissent et reviennent à leur _ aspect de
santé ».
Je pense sur ce point avec Berlese et Pérez que l'on ne peut] regarder
comme maladif un processus qui est général dans l'ontogénie d'une espèce
donnée.
Passons maintenant à l'étude des tubes de Malpiglii chez la larve de
Hyponomeuta padella. Ils sont au nombre de six; ils appartiennent donc
au type normal décrit par Schindler et Cholodkowsky. Ils s'ouvrent
23ar deux canaux dans l'intestin .i^ostérieur non loin de l'in-
testin moyen ou plus exactement encore dans les caecums
formés par les expansions latérales du sphincter (fig. lxxx).
Chaque canal se ramifie et les deux branches ainsi for-
mées se dirigent vers la partie antérieure du corps, puis
arrivées à une certaine hauteur de l'intestin moyen, ces
vaisseaux se recoiubent et à cet endroit, un d'entre eux se
divise encore une fois, tandis que l'autre ne subit aucune
modification. Il en résulte en tout six tubes disposés en
deux faisceaux de trois tubes de chaque côté de l'in-
testin (fig. l).
J'appellerai avec Cholodkowsky et Samson, tronc
primaire le canal qui s'ouvre dans le caecum intestinal,
tronc secondaire celui qui résulte de la bifurcation du pre-
mier.
Les canaux malpighiens s'appliquent dans leur partie
distale aveugle entre la musculature et l'épithélium du
rectum. Ils flottent librement dans la cavité générale sur
tout le reste de leur parcours.
Les tubes de Malpighi présentent donc d ux portions distinctes
qui diffèrent aussi bien par leur situation par rapport à la mus-
culature intestinale que par leur structure propre. Ils diffèrent
également par leur métamorphose comme nous le verrons par la
suite.
Il n'y a pas de musculature propre aux tubes de Malpighi ^. Une basale
nette existe.
riG. L. Schénui
montrant la ra-
niiflcatiou d'un
des deux ca-
naux mal i)i-
ghicns.
1. Une musculature propre aux tubes de Malpighi a été signalée chez QriUus et chez HydrophUus par Léqer
et DtJBOSQ : chez Eydrophiltis et Periplaneta par Schneider : chez Oalleria mellonella par Metalnikoff ; chez
Qalleruca par Poyarkoff.
MÉTAMonPhOSK m-: lIVrOXOMEUTA 115
Portion contournée des tubes de Malpighi
Nous allons d'abord étudier la portion do l'appareil excréteur qui est
comprise entr^ la musculature et l'épithélium du rectum.
Je la désignerai avec Metalnikoff comme tubes contomnés.
Dans cette portion, les tubes de Malpighi contournent le rectum et
l'entourent d'un manchon complet. Si l'on fait dans cette région une coupe
transversale, on voit la section du rectum entourée par une quantité de
petits canaux malpighiens ; il y en a jusqu'à vingt et même plus. La
figure Lxxxiii nous montre la disposition de ces tubes par rapport à
l'épithélium et la musculature de l'intestin.
En coupe transversale (fig. 12), on voit généralement un seul noyau par
tube, plus rarement deux. Ils sont arrondis ou ovalaires, leur membrane
nucléaire est nette, la chromatine sous forme de petites granulations
tranche sur le fond clair du noyau. Un nucléole existe toujours, parfois il
y a deux, et ils sont alors excentriques. Le cytoplasme {cyl) est chro-
matophile et finement grenu. Disposé en couche mince à la périphérie
du tube, il envoie de place en place, vers la lumière, des prolongements
digités qui souvent vont en s'élargissant et se dilatant. Souvent deux
ou plusieurs de ces digitations confluent en un seul amas protoplas-
mique (fig. 12). Une substance pâle {h. br.) et presque homogène, très
développée, remplit l'espace entre le cytoplasme et la lumière réduite.
11 s'agit ici probablement d'une bordure en brosse dont la structure
n'est pas très nette, elle n'est reconnaissable qu'au voisinage le plus
proche de la lumière.
En tout cas, cette bordure est tout à fait difl'érente de celle qui se
trouve dans les autres portions de tubes malpighiens.
Chez la larve, au début de sa mét^-morphose, la bordure en brosse a
disparu, le cytoplasme occupe sa place, enfin la lumière s'( st complètement
évanouie. Le cytoplasme remplit uniformément tout le tube ; il est fran-
chement éosinophile et contient d'assez grandes granulations. Les noyaux
sont devenus compacts. La basale n'est plus distendue par le tube main-
tenant rétréci, elle est fortement plissée.
Vers la fin du premier jour après la mue nymphale, on trouve de nom-
breux leucocytes au voisinage de la basale : ils pénètrent entre ses replis^
arrivent à la perforer et s'infiltrent dans la cellule (fig. 13 ti. ph.) ha.,
basale (ba) se reforme après leur passage. Les leucocytes étant souvent
intimement appliqués contre la basale plissée et très transparen'^e, il est
116 Mme ^4. HUFNAGEL
difficile de voir sils se trouvent à l'intérieur ou à l'extérieur par rapport
à elle.
Mais à côté de ces cas discutables, on rencontre des figures, pour les-
c{uelles on peut dire avec certitude que les leucocytes se trouvent à l'in-
térieur de la cellule du tube. A ce moment, les canaux ont déjà subi une
transformation, mais celle-ci n'est pas encore très accusée.
Dès que les leucocytes se sont faufilés à l'intérieur du tube, leurs
limites cellulaires disparaissent et leur cytoplasme se confond avec celui
de la cellule n alpighienne.
On peut trouver dans vine section d'un tube de nombreux noyaux
leucocytaires, cjui par leur structure particulière, se distinguent toujours
bien des noyaux malpighiens ou des fragments de ceux-ci (fig. 13).
Par suite de cet apport d'éléments étrangers, le tube s'accroît en dimen-
sion, ce qui entraîne le déploiement des replis de la basale c[ui s'applique
de nouveau intimement sur le tube, comme nous le voyons sur la figure 13.
Cette figure nous montre une coupe transversale d'un tube contenant
sept noyaux phagocytaires («. fh.). Puis à côté des noyaux malpighiens,
très denses, on voit des débris nucléaires accusant divers stades de
décomposition.
Ainsi, on trouve de petits fragments nucléaires où les granulations sont
fusionnées en des boules très compactes. D'autres sont homogènes et d'un
violet foncé (hematéïne). Certaines boules présentent des taches claires.
Les différents fragments peuvent être entourés d'une masse de substance
chromatophile.
La basale {ba) reformée après la pénétration des leucocytes n'est plus
de longue durée, elle disparaît bientôt définitivement. Cette disparition
facilite encore la pénétration dans le tube des phagocytes qui, ne trou-
vant plus aTicun obstacle sur leur chemin, envahissent en grand nombre
le cytoplasme malpighien.
A la fin, on trouve à la place des anciens tubes de Malpighi de très
nombreux sphérules de granules dans lesquels on peut toujours recomiaître
l'ancien noyau leucocytaire.
Cette destruction ne se produit pas partout au même moment et on
peut trouver tous les stades de dégénérescence sur une même prépara-
tion.
Au sixième jour après la mue nymphale, la résorption de cette partie
des tubes de Malpighi est complète et la disparition est définitive.
En résumé, la portion postérieure des tubes de Malpighi disparaît par
MÉTAMORPHOSE DE IlYPONOMEUTA
117
phagocytose. L'infiltration des leucocytes a lieu avant la dislocation du
tube même, mais après que celui-ci a subi certaines modifications struc-
turales.
Portion libre des tubes de Malpighi
Cette portion comprend deux parties, une ascendante et l'autre des-
cendante (fig. l). Chez la larve active, les vaisseaux de la branche mon-
tante sont formés par des tubes à surface régulière (fig. li) ; dans les
Fio. II. Tubes de Malpighi. Coupo loagituclinale
d'une branche montante. Jeune larve, x ?00.
lu;, in. Coupe longitudinale d'un eaual di^ceudant
des tubes de .Mulpiglii. Jeune larve, x lOO.
canaux descendants (fig. lu), les contours extérieurs et intérieurs sont
bosselés et chaque relief correspond à une cellule. Souvent celle-ci s'étire
beaucoup et parvient à atteindre le bord opposé du tube.
Dans les deux portions, les noyaux sont plus ou moins ovalaires. Chez
les toutes jeunes chenilles, leur membrane n'est pas très nette et la masse
118
J/n^e A. HUFNAOEL
nucléaire semble être plongée dans le cytoplasme même. Parmi les granu-
lations chromatiques se distingue un nucléole.
Le cytoplasme est granulé ; par place il présente un réseau à mailles
très fines (fig. li) par endroit il montre quelques vacuoles (fig. lu).
A un fort grossissement, on distingue
entre le cytoplasme chromatophile et
la basale une zone étroite légèrement
éosinophile sans structure différenciée.
Du côté de la lumière se trouve une
zone également pâle. La bordure en
brosse se voit bien. Les produits
d'excrétion sont des cristaux réfrin-
gents.
La métamorphose débute chez les
larves immobihsées et suit la même
marche dans les deux portions (mon-
tante et descendante) de l'appareil
excréteur.
Les tubes se contractent (fig. lui.
fig. 10) et il en résulte un phssement
très accusé de la basale. Ici les phé-
nomènes qui ont été décrits pour la
basale de la portion persistante des
glandes de la soie se répètent de la
même façon (v( ir p. 110). Il y a éga-
lement afflux de phagocytes (fi-i-. 10^)
fragmentation de la basale, et sa dis-
parition définitive. Ceci se passe chez,
les nymphes de deux et de trois jours.
Pendant ce temps, dans la por-
tion descendante de l'organe, la sur-
face des cellules reste bosselée du côté basai, elle est plate du
côté de la lumière (fig. lui, fig. 10). Les noyaux sont uniformément
denses .
Le cytoplasme chromatophile forme un réseau très net (fig. 10), dont
les mailles, par endroit, se réunissent et forment des cavités plus ou moin a
grandes. La lumière est remplie d'une substance pâle (/. o) dans laquelle
on peut décler la même structure que dans le cytoplasme même, seule-
FiG. iiii. Coupe longitudinale d'un tubo nialpi-
ghion chez une larvo prête à se nynipho-
ser. b, basale. x 700.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEVTA
119
QK ISO ^»
ment les mailles du réseau sont très petites i. Cependant cet état n"est que
passager.
Dans la portion descendante, la lumière commence à apparaître déjà
au lendemain de la unie nymphale ; dans la portion ascendante, ceci n'a
lieu q*u"un peu plus tard, vers le troisième jour à peu près. C'est aussi
vers cette époque que la bordure en brosse apparaît et que les tubes
deviennent fonctionnels .
A l'état définitif, ils présentent une basale nettement formée (fig. 1 1 ha) .
Leurs noyaux sont irréguliers et
souvent ont la forme d'une calotte
convexe vers la lumière (fig. liv).
Ils sont très chromatophiles, leurs
granulations sont denses. Un nu-
cléole existe.
Chez la jeune imago, le cyto-
plasme est éosinophile et con-
tient des vacuoles dans lesquelles
se trouvent des inclusions chro-
matiques (fig. 11).
Chez l'imago âgée, le cyto-
plasme est très chromatophile, les
vacuoles ne se distinguent plus,
mais les inclusions chromaticpies
sont nombreuses et grandes. A'ers
la périphérie du tube, elles sont
immenses, irrégulières, souvent en
forme de bâtonnets (fig. lx).
Les produits d'excrétion
(fig. Il €x) constituent des boules plus ou moins arrondies et qui sur les
préparations présentent une couleur brunâtre.
On trouve accolées (fig. liv. r) à la surface des tubes des cellules spé-
ciales sur l'origine et la signification desquelles il est difficile de se pro-
noncer -.
lie. iiv. Couije transversale d'un tube de Malpighi chez.
uni', imago âgée, x 350.
1. N> t'iiMili-ait-il pas voir dans cette siil>stanci' pâle une portion de eytOplasme rojeté ot qui s«ra résorbfr
ensuite ? On voit en effet la hiniière réapi)araître plus tard et on i)eut supposer que la substance qui \'&
oblitérée quelque temps, a été résorbée par les tubes mêmes. Cette expulsion présumée d'une partie de cyto-
plasme présente quelque analogie avec ce qui a été décrit cboz la Galéruque par Povakkoi r.
■-'. J'ai trouvé chi z nue Iar\e active des cellules semblables en petit noiiilire dans la portion des tubes qui
'ouvrent dan-^ l'intestin postérieur . lej. ■ \\\ i.
120 ^1/""^ ^-I. ni'FXAdEL
Certains auteurs ont décrit des éléments semblables chez c^uelq^es
espèces et les ont considérés comme des cellules conjonctives; mais cette
interprétation ne convient pas aux autres chercheurs qui nient l'existence
du tissu conjonctif chez les Insectes.
La signification de ces éléments reste encore à élucider.
En résumé, chez l'imago, les tubes de Malpighi sont au nombre de six,
ils correspondent à la portion supérieure libre du même appareil chez la
larve.
La portion persistante des tubes malpighiens après .>^"être débarrassée
de sa basale en reforme une autre ; lepithélium même est remanié sur
place et donne l'épithélium imaginai, ([ui est un peu différent de celui
de la larve. Le cytoplasme contient des inclusions chromatophiles qui
n'existaient pas chez la chenille.
Les noyaux sont irréguliers et compacts, tandis qu'ils étaient ova-
laires et pauvres en chromatine chez la larve.
Enfin, les produits d'excrétion qui présentaient la forme de cristaux
réfringents, se montrent chez l'imago sous l'aspect de boules d'une
substance compacte.
L'épithélium passe de l'état fonctionnel chez la larve à l'état fonc-
tionnel chez l'imago par une période de repos, pendant laquelle sa fonc-
tion eet complètement arrêtée et où sa stnicture caractéristique est
altérée.
L'organe présente à un moment donné lui as])ect semblable à celui
qu'offre, au début de sa métamorphose, la partie du même appareil des-
tinée à disparaître. Dans les deux cas, la basale plissée est envahie par
les leucocytes, l'épithélium est contracté, la bordure en brosse a disparu,
la lumière est oblitérée. Mais tandis que les tube contournés finissent
par d sparaître, ceux C(ui flottent librement dans la cavité générale per-
sistent et se différencient en un organe définitif.
-Je voudrais encore attirer l'attention sur la grande analogie qui
existe entre la métamorphose des tubes de Malpighi de Hyponomeuta et
celle de son appareil séricigène. Dans les deux cas, une portion du système
disparaît par phagocytose leucocytaire : celle qui persiste après avoir
rejeté sa basale se différencie en un organe imaginai.
Dans les portions destinées à disparaître, les leucocytes se comportent
de la même manière envers l'épithélium. ils s'infiltrent dans celui-ci et le
digèrent sur place.
MÉTAh'MOPHOSE DE IIYPOXOMEITA lil
ÉPITHÊLIUM DE LINTESTIX MOYEN
lépidoptères. D'après Frenzel (1886), l'intestin moyen de VEphestia
Kuhniella Loe ne subirait que des transformations très peu importantes.
Les cellules épithéliales présentent le même aspect chez la larve, la
nymphe et l'imago.
Suivant les observations de Ganin (1877). dans l'intestin moyen de
LithocoUetis populifera, les cellules glandulaires caractéristiques sont
rejetées. Leur réunion forme un corps allongé situé librement dans la
lumière intestmale et non entouré d'une membrane cystique. Les cellules
absorbantes persistent et réaUsent par leur multiplication le renouvelle-
ment de l'épithélium.
Ganin a confondii les cellules absorbantes avec les cellules imagi-
nales.
Casagrande (1888) a suivi l'évolution de l'intestin chez Sericaria
lïiori. Les observations de cet auteur sont complètement erronée?. Je ne
ferai pas ici la critique de son travail qui n'a d'intérêt qu'au point de vue
historique. Je dirai seulement que Casagrande arrive à la conclusion
que l'épithélium de l'intestin moyen larvaire rejeté est l'origine de l'in-
testin antérieur et postérieur. Voici d'ailleur? textuellement ce qu'il dit :
<' Frattantoho ragione di trarre dalle mie osservazioni questa conseguenza :
« Che cioe j'epitelio dell" esofago e dell' intestine posteriore deil' insetto
perfetta dérive del l'epitelio dell' intestino medio, ed in tal caso nell' insetto
a complète sviluppo l'epitelio esofageo e cj^uello deU'intestino posteriore
non sarebbero più produzioni ectoblastiche, come nella larva, ma sareb-
bero derivazioni del l'ipoblasto, come sappiano avvenire nell'embrione pel
mesenterore. i
Verson (1898) a étudié la métamorphose de l'intestin chez Bombyx
mufi.
Dans l'intestin moyen toutes les cellides possèdent la faculté de
sécréter.
Les cellules ne dépassent jamais une période larvaire. Une desquama-
tion épithéhale complète (vollstandige Abschuppung) a lieu pendant
chaque mue. L'épithéhum rejeté est remplacé par une assise nouvelle
née de la prolifération des lentilles iviaginahs situées à la base de l'ancien
épithélium.
Chez la larve prête à filer son cocon, l'épithélium sécrète d'une façon
122 J/"ie 4. HVFNAGEL
particulièrement intense. Les cellules qui disparaissent au cours de cette
sécrétion sont remplacées de la même façon que pendant la mue larvaire.
Au début de la nymphose, les lentilles imaginales reconstituent un
nouvel épithélium. ^^ersox voit la cause de cette dernière mue dans l'ac-
cumulation des jeunes éléments qui, recouverts par l'épithéliam, ne
peuvent gagner la surface pour y atteindre leur plein développement.
Chez Bombyx, le corps jaune n'est pas entouré par une enveloppe
kystique.
Deegener (1908) a fait une étude approfondie de la métamorphose de
rintestin chez Malacosoma custrense. L'auteur confirme en partie les
observations de Verson. Lépithélium larvaire est rejeté au début de la.
métamorphose, lépithélium nymphal se forme aux dépens des cellules
imaginales. Ce dernier n'est pas expulsé ; après quelques modifications de
sa structure cytologique, il se transforme directement en un épithélium
imaginai.
Les modifications observées ne sont pas de nature morphogénétique,
elles sont en relation avec le changement de l'état fonctionnel des cellules
épithéliales qui, périodiquement, entrent en sécrétion. Cette sécrétion se
répète plusieurs fois pendant la nymphose.
Voici comment s'exprime Deegener au sujet de l'absence de la
mue nymphale de l'épithélium intestinal^ :
« En supjîosant (ceci ne sappliquant pas à tous les Insectes) qu'une
rénovation ait lieu à chaque mue, on peut admettre que l'absence de cette
rénovation, telle qu'elle a été constatée chez Malacosoma casirense et
autres Insectes, soit un fait secondaire. «
Mais depuis, et à la suite des observations de Braux, Deegener a
changé d'opinion. Il s'exprime ainsi (1911) :
« La régénération périodique de l'épithélium intestinal fait ici {Deile-
phila) défaut. On ne peut donc conclure du seul fait de la double mue
cuticulaire de la nécessité d'une double mue épithéliale, cette dernière
n'intervenant point au moment des mues larvaires. L'absence d'un
épithélium nymphal n'est donc point ici un fait secondaire ^ ».
M. Braun (1912) a suivi l'intestin moyen chez Deilephila euphorbiaelj.
1. « Unter Vor ;u:S('tz>in}; dass bci joder Hautung die Enieun ng iKs Mittcldnrnupithels stattflndot (ciiic
Voraussotzung dif koinowegs fur aile Insekton zutrifft) innsste der Aiisfall oinor diiscr Alystossungen wie er
cei Mt/lacosoma custrense und anderen Insokte i konstatiert wiirdr, als socundar angrschon wcrden. »
2. « Die pcriodische Id'jieiipration des MitteldarmcintheN fehlt hier also, (uid dahcr wJr.ie al'.ein ans dtr Tat-
sache der zweiiiialigen Hautuiif.' des Korpers wahrend der Nymphose nicht folgen. dass cine zweimalige Abstossimg
des Mittcldarniepithels stattfinden masse, da eiiie solche hier ja an der Hoiid der Larvenhautung iibirliaupt nicht
brfolgt, das Fehleu der Puppenepithels ware dann hier natiirlich kein sekiindiircs. ».
MI-TAMOBPHOSK DE HYPONOMECTA 123
et Hyponomeuta evonymeUa Ti. L epithéliam n'est pas rejeté au inoineiit
des mues larvaires.
Je dirai encore quelques mots sur une particularité C{ui a été constatée
chez quelques Insectes autres C[ue les Lépidoptères .
Deegener (1904) a observé chez Cyhister Roeselii l'existence d'un
épithélium nym]ihal C(ui, suivant l'auteur, correspond à l'épithéliam
fonctionnel de la nymphe active de l'Insecte anctstral.
Russ (1908) a vu que chez AnahoUa laevis, à la suite d'une nuie nym-
phale typique, une partie de l'épithélium passeà lïmago, tandis qu'une
autre {^/s-'-js) est expulsée avec sa basale, sa musculature et son tissu
conjonctif. Rrss interprète cette portion rejetée comme un épithélium
nymphal .
PÉREZ (1910). chez Calliphora, interprète comme épithélium nym-
phal, le tissu réticulé c^ui s'insinue à la base de l'assise larvaire; celui-ci
est immédiatement rejeté par l'épithélium imaginai.
Chez les Fourmis, Pérez (1903). les cellules de remplacement donnent
naissance à un épithélium qui /ieviendra directement l'épithéliimi imagi-
nai, non sans avoir éliminé un grand nombre de ses cellules. L'auteur
considère avec Deegener ces chutes sporadiques comme un vestige de
l'ancienne mue nymphale.
Chez la Galeruque, d'après Poyarkoff (1910), l'épithélium larvaire
de l'intestm moyen est rejeté in toto, la basale comprise ; il se forme un
épithéhum nymphal provisoire aux dépens des cellules dérivées de la
face postérieure de la valvule œsophagienne ; cet épithéhum provisoire
est remplacé par un épithéhum imaginai définitif formé aux dépens d'une
partie des cellules ( dérivées de la valvule œsophagienne larvaire ». Poyar-
koff regarde l'épithélium nymphal comme une formation purement
cœnogénétique.
La question des cellules imaginales nous retiendra encore un
moment.
Ce sont pour Korotneff (1885) (qui plus tard a lui-même abandonné
cette opinion), Anglas (1898, 1900), Berlese (1899, 1901), Docters
VAN Leeuven (1908), des cellules migratrices qui, au cours de la vie
larvaire, viendraient, après avoir traversé la basale, s'annexer aux cellules
larvaires.
Ce sont, d'après Anglas (1904), les cellules trachéeinies qui vien-
draient s'insinuer à la base de l'épithélium et y constitueraient les
cellules imaginales.
124 .1/'"'" A. HVFNAGEL
Pour Ganin (1876), les petites cellules proviennent de la divdsion de
grandes cellules épithéliales (cellules absorbantes).
Pour Rbngel (1896), Karawaiew (1898), Cn. Pérez (1902, 1911),
Deegener (1900, 1904, 1907), Russ (1908), Poyarkoff (1910), Braun
(1912). ce sont des cellules sœurs des éléments de l'épithélium larvaire
restées à l'état embryonnaire.
Les adeptes de la théorie de l'origine épithéliale des cellules de rempla-
cement admettent la multiplication caryocinétique des imaginales, mais
il ne leur a pas été toujours donné de constater ce fait chez les jeunes
larves.
C'est ainsi que Deegener (1909), chez Deilephila euphorbiae , pendant
et après la mue, Dunnough (1909) (cité par Braun), chez Chrysopa perla,
après la jnue, constatent que les cellules imaginales sont beaucoup plus
nombreuses. Mais ces auteurs, de même que Verson, n'ont pu trouver
des figures caryocinétiques correspondant à cette multiplication.
Braun (1912) a trouvé des figures caryocinétiques au moment de la
première mue chez Deilephila euphorbiae, il n'a pu les constater chez Hypo-
nomeuta evo ymella.
Signalons que Docters van Leeuven (1908) a rencontré une cellule
imaginale en voie de division caryocinétique chez une jeune larve à'Iso-
soma graminicola Giraud, mais il croit qu'il s'agit là d'une cellule migra-
trice venue du dehors ^.
Je vais passer maintenant à la description de l'intestin moyen de la
larve de Hyponomeuta. padella. C'est un sac ovoïde (fig. li) occupant chez
les jemies individus à peu près la moitié du corps de l'animal. Il est cons-
titué par une couche épithéliale et une couche musculaire. La muscula-
ture est peu développée ; elle comprend des fibres annulaires intérieure-
ment et longitudinales extérieurement, réunies entre elles par un réseau
lâche.
L'intestin présente des plis longitudinaux et transversaux, ces derniers
fort prononcés. Il contient deux sortes d'éléments, les uns hauts et cylin-
driques, les autres évasés et caliciformes (fig. Lv).
S'agit-il ici d'un épithélium dimorphe ou simplement homomorphe,
dont les cellules se trouveraient à des stades différents de sécrétion ? Je
ne m'engagerai pas dans cette discussion, ceci n'ayant pas grande impor-
1. « Die imaginakn .Mittfldarrnzollen cntstchcn aus Vandcrzellrn, welche zwischen den Muskelzollcn hiudurch
kriechen und sicli an die larvalcn Zcllcn anschmicgcn. »
METAMORPHOSE DE IJYPONOMEUTA
125
tance au point de vue de cette étude ; je me bornerai ici à décrire
l'épithélium tel qu'il se présente chez une larve d'âge moyen.
Vers l'extérieur, l'épithélium possède une basale, cependant celle-ci
peut manquer par endroits (fig. lv). Il se peut que ceci provienne d'un
accident technique : sous l'influence des réactifs, l'intestin souvent se
rétracte et s'éloigne un peu de sa musculature qui entraîne avec elle la
basale. Là où la musculature touche l'épithélium, la basale est distincte.
Sur la face regardant la lumière, l'épithéhum porte un plateau strié ^
partant d'une ligne nettement chromatique.
Le cytoplasme des cellules (e) est très chromatopliJlc. Dense à la
base des cellules, il peut présenter une
structure fibrilaire ou parfois un réseau
à maiUes très serrées. Les mailles de-
viennent de plus en plus lâches au fin-
et à mesure que l'on s'éloigne de la
basale ; au voisinage du plateau elles
contiennent des gouttelettes d'une subs-
tance pâle.
Les noyaux , le plus souvent
ovoïdes, se trouvent vers le milieu de
la cellule. Sur les préparations, ils
se montrent entourés d'une vacuole
sans doute provoquée par les réactifs.
La chromatine nucléaire est très condensée : on ne perçoit pas de
nucléole.
Les cellules caliciformes (c) sont isolées ou groupées : on peut en
compter jusqu'à sept côte à côte.
Une vacuole immense contenant une substance claire remplit la
plus grande partie ou même presque la totalité de la cellule. Le noyau
plus petit que celui des cellules cylindriques, de forme triangulaire, est
logé profondément dans la cellule, juste au-dessous de la vacuole, parfois
il est repoussé par celle-ci et vient se placer sur un des côtés de la cellule.
Enclavés parmi les cellules de l'épithélium intestinal, se trouvent de
petits éléments chromatophiles (i). Ce sont les cellules imaginales qui
ultérieurement serviront à la régénération de l'intestin nymphal.
1. Anglas a méconnu la sigiiifirat ion du platrau strié. 11 dit :
« Sur ces dernières (Abeilles) ainsi ((\ic sur les Frelons, nous avons roniarqué une disposition particulière de la
chitine ; ce sont des stries perpendicualircs à la surface libre ; il semble que la rbitinc soit sillonnée de caua-
licules courts et nombreuse permettant mieux des échanges nutritifs ou excréteurs.
I \ . l'ellules é|iitlitli:ilis dr riiitcstiii luoyrir
chez une larve d'âge moyen, r, cellules cy-
lindriques ; r, cellules caliciformes ; /, cel-
lules imaginales. K DO.
12()
J/me A. HUFNAGEL
.1
La description que je viens de faire de Fintestin de la larve d'âge
moyen nous aidera à interpréter plus facilement les coupes chez la toute
jeune chenille où l'épithélium présente certaines complications. Cette
étude est pour nous, au point de vue où nous nous plaçons, d'un intérêt
tout particulier.
La figure lvi nous montre une portion d'épithélium intestinal d'une
larve un peu après sa sortie du sommeil hivernal, et n'ayant pris qu'une
faible quantité de nourriture.
La basale (6) très résistante à ce stade est d'une grande netteté et se
retrouve ton-
-^ jours continue
sur les prépa-
rations. Le pla-
teau strié n'est
pas distinct.
Le cytoplasme
présente des
saillies ir régu-
lières sur la
face avoisi-
nant la lu-
mière dont il
est séparé par
une cloison
épaisse qui est
la membrane péritrophique (cette dernière n'est pas représentée sur la
figure).
Les limites cellulaires ne sont pas visibles ; l'épithélium présente un
état syncytial dans lequel, cependant, on peut reconnaître les mêmes élé-
ments que dans l'épithélium en plein développement.
Le cytoplasme chromatophile, finement granuleux, présente de place
en place un réseau délicat. Il reriferme de volamineuses vacuoles remplies
d'une substance claire et appartenant aux éléments calicif ormes.
Les noyaux ovalaires et à chromatine très compacte, sont entourés
d'une vacuole et situés à des niveaux différents.
On rencontre en outre d'autres noyaux (i) dans le voisinage de la basale.
Ce sont des éléments embryonnaires que nous avons trouvés sous forme
de cellules individuaHsées dans l'épithélium de la larve adulte (fig. Lvi).
FiG. i.vi. Epithéliuin de l'intestin moyen chez une oheuille à peine sortie de sou som-
meil hivernal, b, basale ; l, noyau larvaire ; i, noyau de remplacement ; c,
caryoc'inèse. Coupe longitudinale, x ^00. Pour comparer les éléments
représentés sur cette figure avec ceux de fl<;. l.V. il faudrait tourner ce
dessin de manière que la basale (6) soit à li i)artir' iniérieuri- du dessin.
METAMORPHOSE DE llYPOSOMEUTA 127
Ces noyaux sont petits, mais parfois atteignent la même taille que les
noyaux larvaires, ils en diffèrent toujours par leur faible colorabilité :
Leur chromatine condensée en granulations j^etites et espacées, tranche
sur le fond légèrement éosinophile du suc nucléaire. Il existe un nucléole,
il y en a quelquefois deux. Ces éléments de remiDlacement se trouvent en
quantité chez les jeunes larves, ils sont isolés ou groupés. Ils se multiplient
activement. Les ligures caryocinétiques (tig. lvic) se rencontrent tout le
long de l'épithélium; elles sont cependant plus fréquentes aux deux
extrémités de l'intestin, c'est-à-dire au voisinage de l'intestin antérieur
et postérieur.
Deegener (1911) ne croit pas tjue l'intestin moyen puisse s'accroître
dans les intervalles des nuus. 11 dit : « Wolil ist es môglich dass das
Mitteldarm urspriinglich kontinuirlich von den Hâutungen wuchs. Aber
Vorder und Hinterdarm konnen nur nach Abstossung der Intima
wachsen und dies periodische Wachstum hat der Mitteldarm nachweiss-
lich angenommen. «
Or, un fait que j 'ai pu constater est celui-ci : les divisions indirectes des
imaginales se poursuivent non seulement au moment des mues, mais
également à l'état actif de la larve. La figure lm se rapporte justement à
un de ces cas.
J'ai trouvé des figures caryocinétiques chez une toute jeune larve
et chez une larve demi-adulte. Dans les deux cas l'intestin était rempli
de produits ingérés et la sécrétion de la nouvelle cuticule n'avait pas
encore commencé.
Ce fait montre que les déductions de Deegener ne s'apphquent point
à Hyponomeuta padella. Braun a également observé que chez Hypono-
meuta evonymeUa la i)rolifération a lieu dans les intervalles des mues.
Cependant il n'a jamais pu voir des figures caryocinétiques.
Le cas de Hyponomeuta peut se rapprocher de celui de Tenebrio
molitor (Rengel 1896)^. Mais chez Tenebrio la proUfération de petites
cellules a Ueu pendant toute la durée de la vie larvaire. Chez Hyponomeuta,
j'ai observé des caryocinèses au ])remier et deuxième stade larvaire. Peut-
être chez les chenilles plus âgées la j)rolifération est-elle exclusivement
localisée à la période des mues.
1. D'après Rexoei. les potites cellules qui corresiiorulcut aux cellules itièrea de l'épithélium (Mutt«Kellen de»
Epithels de Frenzel), prolifèrent toujours activement.
Des cellules filles qui résultent de cette multiplication, la plus distale devient elle-même une cellule mère, tandi*
ciup l'autre se transforme en cellule épithéliale proprenu-nt dite.
ARCll. 1>K ZOOI.. l'.Xl'. V.T f!f:N. — T. 57. — 1'. 2. 9
128 i¥me ^4. HUFNAGEL
Nous avons vu (p. 123) que si les auteurs sont d'accord sur le rôle
que jouent les petits éléments dans l'édification da futur épithélium
nymphal, ils ne le sont pas quant à lorigine de ces éléments.
En présence de ces opinions différentes, il me paraît intéressant de
préciser la situation des cellules de remplacement chez Hyponomeuta.
Chez les toutes jeunes larves, où il ne peut encore être question de méta-
morphose, on les (?) distingue à l'intérieur même de Tépithélium et nette-
ment isolées de l'extérieur par une basale rigide (fig. lvi 6). Vu la
présence de cette dernière, on ne peut admettre que des éléments
étrangers aient pu la traverser pour immigrer dans l'épithéhum. Aucun
doute ne peut donc exister quand à l'origine épithéliale de ces cellules.
Ce ne sont pas toutes les cellules de remplacement qui serviront à la
reconstitution de l'épithéhum nymphal ; un certain nombre d'entre elles
sont utilisées pendant la vie larvaire même. On trouve en effet parfois des
noyaux imaginaux au même niveau que les noyaux larvaires. J'ai pu
observer ce fait surtout chez les jeunes chenilles et aux endroits où tous
les noyaux sont plongésdansunsyncytiumcommun(fig. lvi '.Cette trans-
formation des éléments de remplacement en éléments fonctionnels
explique peut-être pourquo les imaginales se rencontrent chez des larves
d'âge moyen en nombre plus restreint que chez les jeunes chenilles.
J'ai voulu vérifier si un phénomène analogue à celui que Verson a
décrit chez Bombyx mori a lieu chez les Tinéïdes. Verson, comme nous
l'avons vu, a constaté chez la larve, peu avant chaque mue, l'usure com-
plète de l'épithélium intestinal et son expulsion périodique (voir p. 121).
J'ai eu l'occasion d'étudier à ce point de vue des larves d'Hypono-
meuta padella et de Gracilaria syringella, mais je n'ai pas pu constater
un rejet de l'épithéhum intestinal. On rencontre bien dans la lumière
intestinale des chenilles de Gracilaria des cellules épithéliales, mais leur
apparition ne coïncide pas avec la mue et doit être considérée comme un
simple mode de sécrétion épithéliale. signalé par Versox même et fréquent
chez un grand nombre d'Insectes.
Nous allons maintenant étudier la métamorphose de Vintesiin moyen
chez Hypjnoiifiila. Pendant la dernière mue larvaire, la poussée des
imaginales est très considérable et elle aboutit à la formation d'un man-
chon continu de cellules plates disposées à la base de l'épithélium. Peu
après la dislocation de l'épithélium commence. On voit apparaître à sa
.MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA
129
base, ou plutôt à la limite de la couche ancienne et de la nouvelle, de
nombreuses vacuoles de formes et de dimensions variées (fig. Lvii) ^
L'existence de ces vacuoles et la déchirure des parois qui les forment
facilitent I expulsion de l'épithéhum intestinal. Ce phénomène ne s'ef-
fectue pas en même temps aux différents niveaux de l'intestin et on peut
suivre les étapes successives sur le même animal. La figure lvii nous
montre justement le commencement de ce phénomène.
L'expulsion de l'intestin moyen se fait chez les Tinéïdes de la même
façon que chez Malacosoma cas-
trens : (Deegener)-; dans les deux
cas des vacuoles apparaissent à la
limite de l'intestin larvaire et nyni-
phal.
Pendant ce temps, "épithélium
larvaire a déjà perdu ses affinités
])our les teintes chromatiques, il est
devenu éosinophile. On remarque,
])ar-ci par-là, des interstices cellu-
laires {l\ Deux sortes de noyaux
se distinguent. Ceux qui se trouvent
du côté du plateau strié sont grands
et un i)eu déformés. Les noyaux
basilaires plus petits que les pré-
cédents sont en même temps plus
réguliers (-fis;, lvii).
Après l'expulsion complète de
l'intestin larvaire, celui-ci reste sé-
paré de l'épithéhum nouveau par une masse d'une substance homogène et
non colorable Je n'ai pas vu de membrane entourant l'intestin expulsé.
Durant la nymphose, l'intestin larvaire perd sa différenciation et se
transforme peu à peu en constituant la masse compacte du corps jaune.
Celui-ci sera expulsé par l'imago au moment de son éclosion.
Voyons maintenant ce qui se passe dans l'épithéhum nouveau. Chez
'. Chez tous los Insectes hooraétaboles étudiés, l'épithéliutn définitif résulte de la prolifération des petites
«■ellules imagiuales placées à la base des éléments larvaires.
Chez la Galéruque, POYARKOFF (1910) a décrit uu processus aberrant. Les cellules larvaires dégénèrent et sont
digérées par les cellules de remplacement qui, elles-mêmes, sont ensuite englobées par d'autres petites cellules
restées inactives jusqu'à ce moment. D y a ainsi une autodigestion.
2. C3icz Cybistfr, Tenebrio, Musca, Bombyx, clu'z li's Trichoptèrex, etc., l'expulsion de l'épithéhum lar\aire
est due seulement à la contraction de la couche musculaire.
Fig. lvii. Portion de l'iutcstin nioyrn cliez une larve
au début de la métamorphose. /, épithélium nou-
vellement formé : /, épithcliuiii larvaire en train
de se détacher. Coupe transversale, x 1000.
i3U
Ji"'^^ .4. HIFNAGEL
l'i«. i.viii. Quelques eollules épithéliales
d'une chrysalide ;i peine muée, r,
cellules au repoo ; a, b, cellules en
train de sécréter, x 11 •■.0.
la larve inactive et pendant les premières heures après la mue nym-
phale, les cellules gardent leurs vacuoles, puis celles-ci disparaissent.
Les cellules s'accroissent. Suivant leur état
fonctionnel, les cellules se présentent sous
des aspects différents. Au repos (fig. Lvmc),
elles sont rectangulaires et présentent un
plateau strié bien net. Les noyaux ovalaires
sont clairs, la chromatine est condensée en
un petit nombre de grosses granulations . Le
cytoplasme éosinophile est condensé à la
base de la cellule ; au-dessus du noyau il
jnontre des mailles plus ou moins lâches.
Avec ces cellules au repos, on en trouve
de nombreuses en sécrétion. Elles présentent
alors des formes variées. La figiire lviii nous
montre deux de ces cellules. Le cytoplasme
s'arrête à un certain niveau et la portion
enflée de la celhile est remplie par la substance sécrétée (-'). On ren-
contre dans la lumière des boules éosinopliiles, produits de sécrétion
des cellules épithéliales.
Au deuxième jour après la mue nymphale, la sécrétion cesse,
le plateau strié n'est plus distinct.
Les petites cellules imaginales
abritées à la base de l'épithéhum sont
encore peu nombreuses, elles com-
mencent à proliférer. J'ai trouvé des
figures caryocinétic|Ues chez les nym-
phes âgées de trois jours (fig. lix).
Les cellules de remplacement
augmentent beaucoup de nombre.
Chez les nymphes de six et sept jours
dont l'épithélium intestinal n'a pas
encore acquis sa nouvelle basale, elles
débordent dans la cavité générale
(fig. LXi). C'est ce stade qui pour-
rait paraître démonstratif aux parti-
sans de l'origine exogène de ces éléments et d'autant plus que l'on ren-
contre en ce moment de nombreux éléments migrateurs entre l'épithélium
Fig. iix. Coupe rasante de l'épitliélium intestinal
d'une nymphe «le trois jours, montrant une
earyotiuèse d'un élément de remplacement
et des boules d'épuration, x 1130.
METAMORPHOSE DE IIYPOXOMErTA
131
et la musculature. Cependant, après avoir suivi la multiplication de ces
cellules à lintéiieur même de l'épithélium, on ne peut regarder cette
relation avec la cavité générale que comme un fait secondaire et passager.
Un phénomène particulier s'observe encore dans l'épithélium intes-
tinal. Les noyaux des cellules épithéliales ont leur chromatine disposée
en granulations bien distinctes. Certaines de ces granulations sont plus
grandes que les autres ; elles proviennent de la réunion de plusieurs petites
( fig. Lix). Les boules chromaticpies sont re jetées vers la base de la cellule et
s'y entourent immédiatement d'une portion de cytoplasme cliromatophile
(fig. Lx\ On peut les observer plus rarement dans la portion supérieure
de la cellule. Ces amas se
i-encontrent dans tout l'épi-
thélium. C'est chez les nym- ' A /\
phes de trois jours qu'elles
sont le plus fréquentes, mais
on les trouve également,
quoique en nombre moindre,
jusqu'au septième jour delà
vie nymphale.
Les éléments re jetés sont
généralement sphériques et
de taille variable. Une boule
peut contenir plusieurs gra-
nulations, ou bien ces granulations peuvent se réunir en un seul gros
amas chromatique.
Ces corps sont rejetés hors de la cellule, dans l'interstice se trouvant
limité par l'épithélium et la musculature ; ils y sont phagocytés par les
leucocytes qui abondent à ce stade dans le voisinage de l'intestin.
Nous sommes ici encore une fois en présence d'un processus d'épu-
ration (voir p. 88).
Chez ime nymphe de trois jours que j"ai examinée, l'intestin avait une
disposition particulière. La figure lx nous montre une portion de cet
épithélium. Il présente des renflements dirigés vers la cavité générale. Le
cytoplasme assez dense dans les renflements s'évanouit prescj[ue en s'ap-
prochant de la lumière, celle-ci étant limitée par une mince bordure du
protoplasma finement granuleux. Les noyaux après coloration à
Ihéraatoxyline ferrique ont leur chromatine disposée en plusieurs gros
amas irréguhers.
! X. (.'ou]n- longitudiiialo. tlv l'ùintlirliuiu iiifostinal chez tui<;
nymphe de trois jours. (/, boules (l'épuration, x 1000.
132
3/>»e A. HUFNAGEL
C'est dans les saillies que se trouvent en masse les produits d'épuration.
J'y ai également rencontré des amas particulièrement gros. S'agit-il là
d'une dégénérescence des noyaux entiers ? Peut-être. En tout cas celle-ci
n'est pas très répandue. Je n'ai pas trouvé, chez d'autres nymphes,
d'aspects analogues.
A partir de la quatrième journée, l'épithélium commence à devenir
de plus en plus régulier. Les cellules s'accroissent en hauteur, elles
deviennent cylindriques. Vers la cinquième journée, on voit apparaître
dans la portion supérieure de la cellule des amas d'ime substance pâle
dans laquelle on distingue par-ci
par-là quelques granulations plus
fortement éosinophiles (fig. lxi).
Ces produits de sécrétion cellu-
laire seront re jetés dans la lumière
intestinale. Les périodes de sécré-
tion se renouvellent plusieurs fois.
Le plateau strié apparaît vers la
huitième journée ; à l'état imaginai
il est plus développé que chez la
larve. En même temps la basale se
reconstitue brusquement et l'épithé-
lium se met en rapport avec la nou-
velle musculature.
L'intestin se plisse transversalement. Dans l'épithélium les cellules
accolées les unes aux autres laissent entre elles de i^lace en place un
interstice (fig. Lxxiiim). Ces espaces intercellulaires disparaissent plus
tard pour réapparaître chez l'imago âgé.
Les cellules de remplacement se sont beaucoup multipliées. A l'état
définitif, on les rencontre nettement séparées de l'extérieur par une basale.
Elles se trouvent alors tout le long de l'épithélium rarement isolées, le
plus souvent par îlots formés de deux, trois, c[uatre. cinq, six. sept élé-
ments. Chez les nymphes âgées et chez les imagos, lorsc^u'un élément fonc-
tionnel est rejeté dans la lumière, on les voit venir occuper la place lais-
sée libre.
Chez r'mago, l'épithélium continue à sécréter.
En résumé : l'intestin moyen de Hyponomeuta et de Gracilaria ne
présente point de mues larvaires épithéliales consécutives aux mues
cuticulaires. Mes observations confirment à ce point de vue celles que
Kio. i.xi. Coupe lonjîitudinale de l'épithélium intes-
tinal chez une nymphe de sept jours. I,es cel-
lules cylindriques contiennent des amas d'une
.substance pâle. La basale n'est pas encorr
apparente. Les cellules de remplacement. /■.
font saillie dans la cavité générale, x 1000.
MÉTAMOBPHOSE DE HYPOXOMEUTA 133
Braun a fait pour Dèilephila et ])our Hyponomeuta evonymella. Les faits
décrits par \^erson (voir historique) restent donc encore isolés chez les
Lépidoptères.
Les ceUuIes de remplacement sont sœurs des cellules épithéliales fonc-
tionnelles de la larve restées à l'état embryonnaire. Les figures de la
division indirecte (fîg. lvi) rencontrées chez les toutes jeunes larves
montrent bien que ces éléments se multiplient pour leur propre compte,
La prolifération mitoti([ue se poursuit aussi bien au moment des mues
que dans leurs intervalles pendant la vie active de la larve.
Pendant la dernière mue larvaire, la prolifération est particu-
lièrement intense, elle aboutit à la formation d'un épithélium nym-
phal.
L'isolement de l'épithélium larvaire se fait par déchirure des parois
des vacuoles situées à la limite de l'intestin larvaire et nymphal.
La basale disparait : elle se reformera vers la fin de la nymphose.
Les cellules de remplacement prolifèrent pendant la nymphose, mais
elles ne reconstitueront point une assise continue. L'épithélium mnnphal
n'est pas rejeté.
Les cellules sécrètent pendant le premier jour de la nymphose, puis
cette sécrétion cesse pour reprendre vers le septième jour après la mue
nymphale.
Durant l'arrêt de la sécrétion, les cellules épithéliales expulsent une
portion de leur substance. Par suite de cette épuration, la structure
intime des éléments est changée.
La métamorphose de l'intestin moyen de Hyponomeuta présente
certaines analogies avec celle de Malacosoma castren.se (Deegener).
Cependant, chez cette dernière espèce, les modifications ne sont en
rapport qu'avec la fonction sécrétrice des cellules.
Deegener s'exprime ainsi en parlant de Malacosoma : « Die beobach-
tenden Verânderungen sind nicht morphogenetisclien Natur, sonder
stehen im Zusammenhang mit deni welehselndeu Fuiiktiou^/ustand der
Mitteldarmzellen... »
Il y a chez Hyponomeuta un degré de plus. Aux modifications pro-
venant de la fonction sécrétrice s'ajoute le rejet par les cellules
d'une portion de leur substance. Si le même épithélium persiste au
point de vue morphologique, sa constitution intime est cependant
modifiée par le fait même de cette expulsion. Nous trouvons ici \n\ fait
analogue à celui que nous avons constaté pour l'hypoderme de Hypo-
134
J/'"e A. HUFNAGEL
nomeuta. De même que Th^^oderme. 1 epithéliam' n'est pas absolument
identique avant et après son épuration.
On peut considérer Tépithélium intestinal avant son épuration comme
correspondant à l'intestin de la nymphe, et après, comme réalisant
l'intestin de l'imago.
ÊPITHÉLIUM DE L'INTESTIN ANTÉRIEUR
La métamorphose de l'mtestin antérieur a été décrite chez Bombyx
mort (Verson, 1905) et chez Malacosoma castrem-e (Deegener, 1908).
Chez ces deux Lépidoptères, l'épithéhum de
l'intestin antérieur de la larve persiste et se
transforme en l'épithélium définitif.
La prohfération est peu intense dans l'an-
neau imaginai chez Bombyx et chez Malaco-
soma où elle n'aboutit qu'à l'augmentation
du nombre d'éléments de la valvule même.
Le jabot suceur fait défaut chez Malacosoma.
Chez Bombyx mori (Verson), il est constitué
par l'épithéhum œsophagien préexistant.
Pendant les premiers jours de la nymphose,
la paroi dorsale de l'œsophage subit une dila-
tation progressive qui se traduit par une sorte
de hernie ; son épithéhum continue à s'amincir.
Les cellules, sans augmenter de nombre,
mais par le seul effet de leur élargissement,
suffisent à former la paroi du jabot suceur.
l'KJ. ixii. Schéma nioiitriiiit une coupe
loiigitiuiiiiale ilo l'intestin anté-
rieur, b. cavité buccale ; p, pha-
rynx; o, œsophage ; m, intestin
moyen ; i, anneau imaginai.
Voyons maintenant comment se présente
l'intestin antérieur de la larve de Hypono-
meuta padella. 11 est constitué de la façon
suivante (fig. lxii) :
A la cavité buccale (b) fait suite le pharynx (?;) prolongé par l'œso-
■*l)hage (o). Celui-ci, après avoir traversé le coUier nerveux, s'élargit énor-
mément et constitue une sorte de jabot. La portion terminale de l'œso-
phage pénètre assez profondément dans l'intestin moyen et après s'être
rephé sur elle-même, se réunit à l'épithéhum de celui-ci par son anse
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEITA
i:r>
a^scendante. A la limite de l'intestin antérieur et moyen se trouve un
anneau imaginai (<) qui jouera un rôle important dans l'évolution ulté-
rieure de l'intestin antérieur.
La cavité buccale a la forme d'un entonnoir; on y suit les passages
entre les cellules hypodermiques proprement dites et les cellules épithé-
liales.
La portion terminale de la cavité buccale présente en coupe trans-
versale une sec-
tion quadrangu- ^^
laire, la figure
LXiii nous en
montre un frag
ment.
La basale fait
défaut. Les cel-
lules sont bien
délimitées. Leur
surface regar-
dant la lumière
est plane, celle
qui est tournée
du côté de la ca-
vité générale est
bombée. Les
noyaux sont plus
ou moins arron-
dis, leur chromatine est assez dense. Le cytoplasme est légèrement chro-
matopliile, il manc^ue parfois sur une petite zone entourant le noyau.
L'intima (/) épaisse est formée de plusieurs couches, celle qui avoisme la
lamière est plus chromatophile c^ue les autres. L'insertion des muscles
dilatateurs du phar3rnx sur la couche externe de l'intima se voit très net-
tement sur les coupes.
Le pharynx (fig. lxiv) présente des plis longitudinaux ; ses éléments
sont plus hauts et plus volumineux que ceux de la cavité buccale (coni-
parer fig. LXiii A et fig. lxiv).
La ba-;ale nexiste pas. Les limites celhilaires sont bien nettes. Les
noyaux ovalaires se présentent sur la prépaiation comme des vésicules
claires à granulations dispersées ou plus souvent réunies au centre. Le
l'ic;, t.xiii. .1. Épitliélium de la partie postérieure de la cavité buccale. Coupe-traiis-
versali'. La^v^^ d'àîîc moyen, x iOO. — B, Épithélium de rœsophage
dune larve d'âge moyen, x 700.
13G
Jfme A. HUFNAaEL
cytoplasme est chroinatophile et dense. L'intimar épaisse porte des cro-
chets. La lumière est très petite; je l'ai toujours trouvée, vide de particules
alimentaires. La musculature est formée par des fibres longitudinales
internes et des fibres circulaires externes.
Dans l'œsophage, l'épithélium s'a])latit beaucoup. Les plis longitu-
dinaux et transversaux sont nombreux, mais peu accentués. 11 n'y a pas
de limites cellulaires ; les éléments sont très espacés, souvent ils débordent
dans la lumière. Les noyaux sont beaucoup plus petits que dans le
pharynx. L'intima est plus mince que dans le pharynx et ne porte pas de
crochets. La lu-
mière est énorme
(flg. LXIIl).
Il y a deux
couches muscu-
laires qui ici sont
pevi développées.
Les figures
Lxni-LXiv nous
montrent ces dif-
férentes portions
de l'épithélium
de l'intestin an-
térieur, dessinées à la même échelle et nous permettent de nous rendre
compte des différences de dimension de leurs éléments.
La portion terminale de l'œsophage est invaginée dans l'intestin
moyen ; elle est suivie de sa musculature.
Dans la valvule, les éléments sont moins espacés et un peu plus grands
que dans l'œsoj^hage. Enfin l'anneau imaginai est représenté par un
coussinet à noyaux très petits et baignants dans un cytoplasme commun.
Celui-ci est très chromatophile et montre ini réseau à mailles fines. La
basale existe.
Je remarquerai encore que, entre les re})lis de la valvule, on rencontre
si)oradiquement des leucocytes, mais ceux-ci n'ont aucune relation avec
l'éiiithélium même.
La métamorjihose débute jîar Taugmentation du nombre d'éléments de
Vanneau imaginai.
Le détachement de l'intima ne se fait pas partout simultanément.
Chez une chenille en train d'expulser son intestin moyen, l'intima est
FiCi. I XIV. Épit.liélinin iiliaiyrifiien chez une larve d'âge moyen. Coupe transversale.
X 700.
METAMORPHOSE DE UYFOXOMEf'TA
intacte dans la cavité buccale, dans le pharynx et dans l'anneau ima-
ginai, tandis que dans l'œsophage elle est déjà rejetée dans la lumière.
Chez la larve immobili- ^^
sée, les modifications surve-
nues dans la cavité buccale
et le phar\Tix sont de peu
d'importance.
L'épithélium a encore
gardé son plissement carac-
téristique, mais il est main-
tenant plus aplati qu'il ne
l'était chez la larve active.
Les noyaux sont moins régu-
liers et plus denses.
Dans l'œsophage les
changements sont plus con-
sidérables. L'épithélium s'est
beaucoup rétréci ; la section transversale de la lumière ne mesure plus que
le tiers de la dimension primitive.
Les limites cellulaires sont très nettes à présent (fig. lxv). La sur-
face des éléments était bombée vers la lumière, elle est plate maintenant
/j.
FlO. LXV. A, cellules épithéliales do IVrsophiigc. ],arvt> immobi-
lisée. X 1000.
FlO. l.xvi. B. cellules épithéliales de l'œsophage. Jeune nymphe.
X lOCO.
Fie;, ixvii. Portion d'une coupe transversale de la valvule œsophagienne chez nue larve immobilisée, x 400.
de ce côté, de plus les cellules envoient vers la cavité générale des expan-
sions nombreuses et irrégulières bordées d'une basale également plissce (6).
Deegener a rencontré un aspect analogue chez Malacosoma castrense.
138
J/nie A. HVFNAOEL
Sur une coupe longitudinale d'une larve prête à muer, j'ai trouvé, à
côté des cellules à surface externe irrégulière, d'autres cellules dont cette
surface était plane.
La valvule qui chez
la larve active se trou-
vait invaginée dans
l'intestin moyen s'est
dévaginée, elle est
située au voisinage
de l'intestin moyen,
mais en dehors de lui
(fig. Lxvimy.
Toute cette por-
tion est ramassée sur
elle-même. Elle forme
une sorte de bourrelet
qui obstrue en par-
tie la lumière. En
coupe transversale
(fig. Lxvii) elle montre
des digitations faisant
saillie dans la lumière,
chacune étant formée
de plusieurs cellules.
Dans ces sortes de
poches, les cellules sont
réunies par une couche
cy toplasmique c o m -
mune du côté de la lu-
mière et sont libres sur
leur face opposée. C'est
en somme la même dis-
position que Ton trouve dans l'œsophage proprement dit (fig. lxv) avec
cette différence qu'au lieu d'être isolés, les éléments sont groupés
(fig. ixvii). Les noyaux sont denses et de forme différente, souvent
irréguliers.
1. Cette figure se rapporte à une jeune nymphe, mais peut nous donner une idée, de la situation de la
valvule chez la larve immobilisée.
Fig. t.xviii. Coupe longitudinale d'une portion de l'épitliélium intestinal
pendant le premier jour après la mue nymphale. o, œsophage ; r.
valvule ; (, anneau imaginai ; r, caryoeinèse ; m, intestin moyen.
X 400.
MÉTAMORPHOSE DE II YPOXOM El TA
139
FlG. l.XlX. Coupe loiiLîitiulinalo île répitliéliiiiu pliaryuLïirii (-hcz iim- nyii
plie de trois jours. Los cellules se multiplient iiari:ir\i) inèse. ■: 700.
Dans l'anneau imaginai les noyaux se sont beauco\ip multipliés et ils
sont situés à des niveaux différents. L'anneau se trouve déjà en relation
avec l'épithélium de l'intestin moyen imaginai, mais un ruban [cytoplas-
mique mince et unicel-
hilaire le réunit encore
à l'intestin larvaire.
Cette réunion disi)araî-
tra chez la nymphe.
Un ]>eu avant la
mue. l'intima larvaire
s'est détachée tout le
long de l'intestin, elle est rejetée en dehors lorsque celle-ci se produit. A
ce moment l'intima nymphale est déjà formée, elle est très mince et ne
porte nulle part de crochets.
Chez la jeune nymphe, l'intestin s'est encore rétréci. Les différentes
régions de l'intestin antérieur sont encore bien distinctes.
Dans la cavité buccale, les cellules
font saillie vers la cavité générale. Les
noyaux chromatiques sont de foruie
variée, souvent quadrangulaires.
Le pharynx présente des plis qui,
cependant, sont beaucoup moins pro-
fonds que chez la larve. Les limites
cellulaires se sont estompées.
C'est encore dans l'œsophage que les
modifications sont les plus accentuées.
L'épithélium (fig. lxvi) est beaucoup
plus élevé qu'il ne l'était chez la larve
(comparer fig. lxv et fig. lxvi). Les cel-
lules ont presque entièrement rétracté
leurs expansions du côté de la cavité
générale (6); par contre elles débordent
irrégulièrement dans la lumière. Sur la
face regardant la lumière le cytoplasme est assez dense, dans le reste de
la cellule il présente un réseau à mailles lâches, il est vacuolaire ; les
noyaux mêmes sont parfois déformés par les vacuoles.
Dans la valvule nous pouvons noter encore quelques transformations.
Chez la larve la section transversale était plus ou moins arrondie, elle
Fig. IXX. Coupe transversale de l'épithéliuiu
œsophagien chez une nymphe de trente-
huit heures, r, noyau en ehromatolyse.
X ii:;o.
140
Jf"ie ^4. HIFNACEL
présente maintenant une forme irrégulière. Les cellules sont disposées en
une seule rangée, elles sont très hautes, sur la face opposée à la lumière,
elles sont irréguUères, et envoient des prolongements (fig. lxviii v) dans
la masse musculaire au début de sa désagrégation. Il est souvent diffi-
cile de dire où finit la cellule épithéliale et où commence le muscle.
Au fur et à mesure que l'on s'approche de l'anneau imaginai, les
cellules deviennent de plus en plus petites et quadrangulaires.
L'anneau imaginai (fig. lxviii) à ce moment s'est un peu invaginé
dans l'intestin moyen. Si l'on fait une coupe transversale à ce niveau, on
rencontrera trois couches successives ; dans la plus profonde, on trouve
de petites cellules quadrangulaires
Fk;
i.XXI. Portion dv l'amnnii iiiiairiiial chez imc nym-
phe de deux jours. Les élémcntiS rejettent des pro-
iluits de dcgéuéresceuce du côté de la basale. Coui>e
Ion.aitudinal(\ n- 1000.
situées à des niveaux différents et
autour d'une lumière à section
triangulaire. Ce sont là des cellules
de l'anneau imaginai qui se sont
individualisées. Cette partie est
recouverte par une autre dans la-
quelle les éléments baignent dans
un cytoplasme commun, on y ren-
contre des figures caryocinétiques.
Enfin le tout est entouré par l'épi -
thélium de l'intestin moyen.
Vers la moitié de la première
journée, l'intestin se rétrécit encore notablement ; ainsi le jabot ne mesure
plus que le sixième de son volume larvaire. Son épithélium s'est aplati, la
lumière est presque virtuelle.
Chez une nymphe de dix-huit heures, j 'ai trouvé l'intima séparée de l'épi-
théhum dans tout l'intestin. La lumière s'est un peu agrandie dans l'œso-
phage. Ses limites cellulaires disparaissent, l'épithélium par place proémine
encore dans la lumière (fig. Lxvtii o) et ailleurs il est déjà aplati (fig. lxx).
Dans la portion de l'intestin correspondant à la cavité buccale et au
pharynx de la larve, les limites cellulaires persistent. Chez la nymphe de
deux et trois jours, on rencontre dans cette portion de l'intestin des figures
caryocinétiques (fig. lxix).
La cellule qui se prépare à la division pénètre profondément dans ïé]n-
thélium, elle s'arrondit et s'agrandit.
Chez la chrysalide de trois jours, l'œsophage se présente comme un
tube à deux faces planes (fig. lxx).
MflTAMORFHOSE DE HYPOXOMEUTA
141
//.
Dans la portion antérieure de l'œsophage, les noyaux sont encore assez
espacés. Au fur et à mesure que l'on suit l'intestin, l'épithélium devient
de plus en plus plat et les noyaux sont plus serrés, souvent ils arrivent à
se toucher. Leur chromatine est disposée en granulations régulières, il
existe un nucléole avec son nucléolule (fig. lxx).
Le cytoplasme granuleux contient par-ci par-là une petite vacuole.
Des noyaux en chromatolyse (r) se trouvent tout le long de l'œsophage, ils
sont cependant moins fréquents que dans
l'intestin ])ostérieur. On rencontre parfois
au milieu d'une vacuole iine grosse boule
éosinophile, il s'agit là de la dégénérescence
cytoplasmi([ue.
Dans la valvule i)vlorique, les chroma-
tolyses sont peut-être un pevi plus fré-
quentes ([U 'ailleurs.
Dans l'anneau imaginai, un phénomène
nouveau s'observe. Des granulations pj^c-
notiques apparaissent en grande quantité
dans les mailles du réseau cytoplasmicpie,
elles se rencontrent généralement du côté
de la basale (fig. lxxi). Je n'ai rencontré
ces formations que pendant le deuxième
jour de la nymphose.
Deegener a constaté dans l'intestin
antérieur de Malocosoma castrense des
boules se colorant par fuchsine acide. Ces
formations ne sont pas visibles dans les
cellules mêmes, elles ne s'observent que
lorsqu'elles sont évacuées dans la lumière.
PoYARKOFF a obscrvé chez Galeruca
des boules plus ou moins grandes, très
chromatiques, qui apparaissent entre l'in-
tima et l'épithéhum.
Ch. Pérez a constaté chez Calliphoray
du côté basai (cœlomique) de l'intestin de
nombreuses dégénérescences pycnotiques
semble donc être un fait assez lépandu.
Examinons mainlenant l'intestin antérieur
/
^■y"
\%
I xxil. Figure schéniHtiinio d'une iioi-
tiou de l'intestin antérieur à la lin du
<lcuxiènie jour après la mue nympliale
(/, face dorsale de l'anneau imaginai.
i|ui contribuera à la formation du jabot
suceur du papillon ; o. ivsophage ; m.
intestin moyen.
L'élimination des boules
vers le dél)ut de la
142
Jl/nie A. HlFNAdEL
sence
deuxième journée après la muenymphale. On voit que l'anneau imaginai
ne se présente pas de la même manière sur les deux faces du corps
(fig. Lxxii). Du côté dorsal, on distingue un renflement dû à la pré-
d'un grand nombre d'éléments à ce niveau. Etudiés à un
fort grossisse-
ment, ces élé-
ments montrent
des cloisons cel-
lulaires nette-
ment dessinées.
Sur une coupé
transversale, on
se rend compte
de leur disposi-
tion en une seule
couche cellulaire.
C'est là l'indice
du futur jabot
suceur.
Les éléments
de la face ven-
trale et ceux de
la face dorsale,
qui sont rappro-
cbés de l'intestin
moyen, restent
non individua-
lisés (certains
d'entre eux con-
tinuent à se divi-
ser ; j 'ai rencon-
FIG. I.XXIII. Figuri; mi-sdiéniatique d'une portion de rintestiu aiitérionr à la fin du
deuxième jour après la mue nyniphacc ; d. face dorsale de l'anneau ima-
ginai, qui contribuera à la formi>tion du jaljot suceur du papillon ; o.
œsophage ; m, intestin moyen, x 225.
tré à ce moment
plus souvent les caryocinèses sur la paroi ventrale que sur la dorsale) ;
ils reformeront ultérieurement la valvule imaginale.
Pendant ce temps, les cellules de l'ancienne valvule changent d'aspect,
elles s'étalent et s'aplatissent.
Vers le commencement de la quatrième journée nymphale, les cellules
qui constituent l'épaississement dorsal se dévaginent brusquement en
MÉTAMORPHOSE DE llYEU^OMELTA
143
doigt de gant et dans ce mouvement elles entraînent
avec elles quelques éléments voisins de l'anciemie val-
vule (fîg. LXXIII).
Le caecum ainsi formé est situé sur la face dorsale
de l'intestin moyen qu'il suit dans toute sa longueur.
Dès qu'il est dévaginé, il se présente avec ses carac-
tères définitifs (fig. lxxiii j). L epithélium qui le
forme est très aplati, les limites cellulaires ne sont pas
visibles, les noyaux sont très petits, sauf ceux qui se
trouvent à la naissance du caecum du côté dorsal ; ce
sont justement les éléments qui proviennent des cel-
lules de la valvule. L'intima très mince n'est visible
qu'à un très fort grossissement (elle n'est pas des-
sinée sur la fig. lxxiii) ; elle porte des prolongements
hyalins. Extérieurement, l'épithélium est bordé par
une très mince couche musculaire ; les myoblastes qui
l'ont formé étaient déjà apparents à la surface de
l'anneau hnaginal, ils ont suivi le jabot dans sa déva-
gination. Chez l'imago, le caecum n'est pas un tube
réguHer, il présente de larges renflements auxquels
succèdent des parties rétrécies (fig. lxxiv).
Tous les éléments de la face dorsale de l'anneau
imaginai n'ont pas contribué à la constitution du jabot suceur ; ceux qui
persistent forment avec ceux de la face ventrale de l'anneau la valvule
imaginale (fig. Lxxni v).
Les cellules de l'ancienne valvule ne se distinguent plus des cellules
œsophagiennes ; toutes ont la
même forme, elles sont très
aplaties.
La figure lxxv présente
une section transversale de
l'œsophage chez une jeune
imago. L'épithélium est aplati,
les hmites cellulaires ne sont pas
distinctes, l'intima est mince et
porte de petits crochets chiti-
neux. La lumière est étoilée, elle
FlQ. LXXV. Coupe transversale de l'œsophage, e, épitlu'lium: , , . ,. i- i
m, musculature. Jeune imago, x 1050. prCSeUtC quatre dlVertlCUleS.
Arch. de Zool. Exp. KT GÉN. — T. .'.7. - - F. 2. 10
Fig. i.xxiv. Schéma mon-
trant le jabot suceur
chez un papillon âgé. Le
jabot présente de larges
renflements auxquels
succèdent des partie»
rétrécies.
.. &
144
J/n^e ^4. HVFNAGEL
En s'approchant de la valvule, la section transversale est toujours de
même forme, mais moins régulière.
Dans la valvule, les plis sont nombreux et peu profonds; à chaque
plissement corespond un seul noyau (fig. lxxvi). Enfin, dans la portion
terminale de la valvule, celle qui est en partie invaginée dans l'intestin
moyen, les plis deviennent plus profonds. On en compte six à huit sur
une coupe transversale, et à chacun correspondent de trois à cinq noyaux.
L'intima dans toute la valvule est épaisse (/) ; elle ne porte pas de
crochets.
En résumé, l'intestin antérieur définitif est plus court que celui de la
Fig. lxxvi. Epithélium de la vahiilc œsophagienne. Jeune imago, x lOôO.
larve et sa section transversale est plus petite. L'épithélium même ne
subit pas des modifications importantes, en ce sens qu'il ne disparaît pas
et n'est pas remplacé par un autre.
L'intestin antérieur subit une double mue de son intima, correspon-
dant au changement de forme de la larve à la chrysalide, de celle-ci à
l'imago.
L'intima est lisse chez la nymphe ; chez la larve et chez l'imago elle ast
par place lisse, par place elle porte des crochets.
Dans la portion sus-cervicale de l'épithéhum, les éléments prolifèrent
et les cellules qui se multiplient sont des anciennes cellules larvaires
rajeunies. Quelques cellules dégénèrent et tombent dans la cavité géné-
rale.
Dans l'œsophage, on constate également le phénomène de chroma-
tolyse, mais jamais de divisions caryocinétiques.
Dans l'anneau imaginai, les éléments rejettent des produits pycno-
METAMORPHOSE DE HYrOXOMElTA 145
tiques et se multiplient par voie caryocinétique. Cette prolifération est
intense et les éléments qui en résultent forment d'une part la valvule ima-
ginale, d'autre part, le jabot suceur.
L'évolution du jabot suceur de Hyponomeuta se rapproche de celle
de CaUiphora (Pérez). Dans les deux cas, ce sont les éléments issus
de la multiplication de l'anneau imaginai qui contribuent à former
cet organe. Chez CaUiphora l'évagination se fait progressivement. Chez
Hyponomeuta, elle a lieu brusquement.
ÉPITHËLIUM DE L'INTESTIN POSTÉRIEUR
Les transformations de l'intestin postérieur des Lépidoptères ont été
poursuivies chez Bombyx mori (Verson) et chez 3Ialacosoma castrense
(Deegener). Ici comme là l'épithéUum passe de la larve au Papillon.
L'anneau imaginai ne joue qu'un très faible rôle dans l'évolution de
l'intestin.
Voici comment évoluent les papilles rectales chez ces deux
espèces.
Chez Bombyx mori, d'après Verson (1905), les cellules géantes (adé-
noblastes) existent déjà chez les chenilles et servent de support aux
muscles circulaires. Au début de la métamorphose, les fibrilles muscu-
laires se désagrègent. Le sarcolemme persiste et se remplit bientôt d'amas
de minuscules éléments.
Verson n'a pas pu observer les relations qui existent entre ces élé-
ments et les noyaux larvaires. Mais ce qu'il croit certain, c'est que, chez
des nymphes âgées de quelques jours, à chaque cellule géante correspond
une sorte de kyste membraneux rempli depetitescellules. L'auteur admet
que le kyste s'ouvre un peu plus tard, car les petits éléments émigrent,
puis s'allongent, deviennent fusiformes, s'agencent entre eux et enfin
recouvrent la surface caecale.
Chez Malacosoma castrense, d'après Deegener (1908), rapparition
des cellules géantes n'a heu que chez la nymphe. Ces éléments se divisent
par caryocinése et donnent ainsi naissance aux adénoblastes et aux
cellules basales. L'auteur distingue encore des cellules polygonales ;
l'origine de celles-ci n'est pas certaine. Peut-être proviennent-elles par
division des adénoblastes, peut-être en sont-elles indépendantes et sont-
elles dues à la multiplication de cellules épithéliales indifférenciées. Les
140
ili»ie A. HUFNAGEL
cellules polygonales se transforment plus tard en des cellules épithéliales
ou bien prennent secondairement la forme et la structure de cellules
basales.
Pour Deegener, Verson re-
garde à tort comme myoblastes les
cellules basales et peut-être aussi
les cellules polygonales.
Chez Malacosoma. les papilles
rectales se forment dans la partie
de l'intestin auquel appartiennent
les caecums où viemient débou-
cher les tubes de Malpighi. Par
suite d'un accroissement énorme
de l'intestin, la portion qui con-
tient les papilles se trouvent chez
l'imago reculée vers la partie infé-
rieure de l'animal.
Je vais à présent décrire l'in-
testin postérieur de la larve de
Hypoiio7neuto . On y distingue plu-
sieurs portions (fig. Lxxvn). Ce
sont : le pylore (p), le sphincter
antérieur { ?. s. d), l'intestin grêle (g),
sphincter postérieur {s. p.) et le rec-
tum (r).
Le pylore fait suite à l'intestin
moyen. Il présente des plis trans-
versaux peu accentués. A sa base
ou plus exactement dans la portion
faisant immédiatement suite à l'in-
testin moyen, se trouve l'anneau
imaginai (i) formé par des noyaux minuscules baignant dans du cyto-
plasme chromatophile commun. Ces noyaux sont arrondis ou ovalaires
(fig. Lxxvm a).
Leurs divisions indirectes s'observent rarement; je n'ai trouvé qu'une
seule caryocinèse chez un individu jeime et en train de manger. Le rôle de
l'anneau imaginai dans la métamorphose de l'intestin postérieur est très
FlG. Lxxvii. Figure schématique de l'inteBlin posté-
rieur chez une larve d'âge moyen, i, anneau
imaginai ; p, pylore ; s. d, sphincter antérieur ;
g, intestin grêle ; s. p, sphincter postérieur : /■,
rectum.
M ETA MORPHOSE DE H YPOXOMEl " TA
147
limité. Il ne sert qu'à la mul-
tiplication du nombre des élé-
ments dans le pylore même,
il ne va pas au delà . Dans le
pylore proprement dit {p), les
noyaux sont plus grands, ils
sont ovalaires ou arrondis.
Aussi bien dans l'anneau
imaginai que dans le pylore
proprement dit, les noyaux
sont pauvres en chromatine ;
ils contiennent un nucléole.
Le cytoplasme chroma-
tophile a un réseau à mailles
très fines dans l'anneau ima-
ginai, plus grandes dans l'épi-
tliélium pylorique qui le suit.
L'intima est mince dans toute
cette portion. Sur la figure
r.xxviii, nous la voyons en
train de se détacher.
La musculature est ici très
mince, elle suit les replis du
pylore. Par contre, elle est
très développée dans la première partie du sphincter (,s) et le devient
plus encore dans la seconde (-. d, fig. lxxvii).
Le sphincter présente des phs longitudinaux accen-
tués dont Je nombre est difficile à fixer. La lumière
est réduite par suite de ce plissement de la paroi épithé-
liale. Elle e>t délimitée par une intima portant des cro-
chets.
Le si)hini ter nest jamais entièrement rempli de la nour-
riture, il ne la fait passer que petit à petit.
Dans cette portion, les cellules le plus souvent ont, sur
les ])réparations, l'aspect de vésicules à cytoplasme chro-
Fio. ixxix. , in- matophile condensé à la périphérie. Lorsqu'il rempht la
Icsliii inoyin; _
«r, <-.icnni: p, ccllulc, il présente une structure granuleuse. Les noyaux
int.jst.in rwsté- x i • . j c •/ i- '^
ri-.ur. (jfh.nia. «Ont volumuieux et de formes variées : arrondis, ova-
Kio. i.xxviii. Coupe longitudinale de l'auneau imaginai ■
pylore p. i, intima. Jeune larve.
t du
14.S
.l/"^f .1. HIFXAaEL
laires ou irréguliers ; sur la préparation, ils peuvent ou non être entou-
rés d'une vacuole.
Certaines granulations chromatiques peuvent être plus grandes que
les autres. En général, ces noyaux sont plus denses que ceux du pylore.
A peu près vers le milieu de sa
longueur, l'épithélium du sphincter
envoie deux caecums (t) dans lesquels
viennent déboucher les canaux de Mal-
pighi (fig. Lxxix).
L'épithélium caecal (c) se rapproche
beaucoup de celui du sphincter. Les
noyaux y sont un peu moins grands,
ils deviemient petits dans la portion
qui s'approche des tubes de Malpighi
(fig. LXXX).
Là où s'ouvrent ces canaux se
trouve une sorte d'anneau imaguial
(a) dans lequel les noyaux sont minus-
cules et situés à des niveaux différents.
Dans le caecum (c), les cellules sont
réunies extérieurement par une basale
conimune, intérieurement elles font
saillie dans la lumière par des surfaces
plus ou moins irrégulières. Le cyto-
plasme est chromatophile et homo-
gène. L'intima est faible, elle ne porte
pas de crochets. Les caecums ont une
musculature propre, prolongement de
la musculature du sphincter. Celle-ci
est peu développée dans les caecums ;
elle est formée par deux couches mus-
culaires.
L'intestin grêle est plissé longitudinalement, mais ces plis ne sont pas
en nombre constant. Ils sont en rapport avec la nourriture. L'épithéhum
est presque distendu là où la lumière est remphe d'aliments, il est phssé
lorsque la lumière est vide.
Les figures lxxxt et lxxxii nous montrent deux portions de
l'intestin grêle chez un même animal. Sur la figure lxxxi, l'épithé-
FiG. LXXX. Canal nialpighien débouchant dans le
cœcum. c. cœcuni; a, anneau imaginai;
i, intima; 3/, tubes de Malpighi. x 700.
META MOBPHOSE DE U YPONOME U TA
149
lium est presque plat, sur la figure lxxxh ses plis sont très accentués.
Les cellules de l'intestin grêle présentent deux régions distinctes. La
partie basale est formée par un cytoplasme dense, chromatophile, la
partie qui confine à la lumière est claire. Dans certains endroits, on
y décèle une texture fibrillaire radiale (fig. Lxxxii), Le noyau est situé
Fio. Lxxxi et Lxxxii. Deux portions de rintcstin grêle chez le même individu. ?, intima. Jeune Iffrve. Coupe
transversale, x 800.
dans la portion chromatopliilc, sur la préparation il peut ou non être
entouré d'une vacuole.
La musculature est mince.
En s'approchant da rectum, les plis de l'intestin grêle s'accentuent en
même temps que sa musculature s'accroît. C'est le sphincter postérieur.
Son épithéliiim est aplati. Sa surface externe est un peu moins irrégulière
que dans l'intestin grêle. Sur une c!Oupe transversale, les cellules'se pré-
sentent isolées OU bien réunies entre elles du côté de la lumière. I^e cyto-
1.30
Jfnie A. HUFNAGËL
plasme est homogène. L'intima est renforcée intérieurement par une
lamelle.
Enfin, dans le rectum (fig. Lxxxiii),répithélium est presque aplati, Une
présente que de place en place de petits plis longitudinaux. Les cellules
peuvent faire saillie aussi bien extérieurement qu'intérieurement. Les
noyaux sont ovalaires. La lumière est grande chez les individus en train de
manger. Je l'ai trouvée très petite chez ime chenille qai se préparait à la
mue.
Les minuscules canaux malphigiens (lxxxiii M) sont appliqués contre
Fig. lxxxiii. Les canaux du la portion terminale des tubes de .Malpihi M, sont situés entre l'épithélium rectal e;
et sa musculature vi. Larve d'âge moyen, (.'oupc transversale, x -100.
l'épithéhum qu'ils entourent intimement : ils sont recouverts par la mus-
culature rectale {m).
Chez la larve irmtiohilisée, le nombre de noyaux dans l'anneau imaginai
a augmenté sans que j'ai pu apercevoir de divisions caryocmétiques. Le
cjrtoplasme est chromatophile et vacuolaire. Après la libération de l'in-
tima, l'intestin s'est transformé en un tube uniforme à section transver-
sale arrondie. Les différentes régions de l'intestin ne sont reconnaissables
que grâce à leur musculature caractéristique.
Dans le sphicter antérieur, la lumière est devenue plus grande, elle est
remplie f>ar l'intima larvaire fortement plissée. Les cellules ne présentent
pas à leur base de limitante commune, les interstices cellulaires sont très-
MKTA MORPHOSE DE H YPONOMEUTA I r,]
fréquents. La surface des cellules regardant la lumière peut être bombée
ou irrégulière. Les gros noyaux sont de formes variées. Très rarement,
on en rencontre qui sont en chromatolyse. Le cytoplasme, suivant les
individus que j'ai examinés, a été dense ou vacuolaire.
A ce stade, l'épithélium étant plat extérieurement, on distingue très
nettement Tinsertion des libres musculaires sur les cellules épithéliales.
Les figures que Ton rencontre ne sont pas sans quelques analogies avec
les figures dessinées par Verson. Mais chez Bombyx tnori, il s'agit des
cellules géantes qui plus tard se transforment en papilles rectales. Chez
Hyponomeuta, les cellules servant de support aux fibres musculaires
n'ont rien à faire avec les futurs adénoblastes.
Dans la portion du sphincter se trouvant au-dessous des caecums se
dirigeant vers les canaux de Malpighi, la section du tube est un peu plus
grande, l'épithélium est i)lus aplati, les cellules plus nombreuses et serrées.
Elles sont réunies entre elles sur la face regardant la lumière. Basalement,
on distingue, mais pas toujours, de petits interstices cellulaires.
Les noyaux sont plus petits que dans la portion supérieure du
sphincter. Le cytoplasme est très chromatophile, de place en place il
renferme une vacuole.
Quant au csecum dans lequel débouchent les canaux malphigiens,.
il présente au voisinage de ceux-ci une section ovalaire, stu* une coupe
transversale la lumière est triangulaire : les petits noyaux se sont beaucoup
multipliés. Au voisinage du sphincter, la section transversale du caci m
et de sa lumière est arrondie. Les noyaux sont restés grands.
Dans l'intestin grêle, les cellules sont réunies entre elles du côté de
la lumière par luie large couche eytoplasmique. Extérieurement, elles
sont séparées. Leur surface libre est très irréguhère et présente de
nombreuses expansions. Là où le cytoplasme de la cellule est un
peu contracté, on distingue nettement la basale hyaline. A cet état,
par son aspect, l'épithélium ne diffère en rien de celui de l'œsophage au
même stade (fig lxv). Deeoener a constaté un fait semblable chez Mala-
cosoma.
Les no3'aux sont grands et aplatis, le cytopla:me, qui chez la larve
active, présentait deux zones différentes (fig. lxxxi) est maintenant homo-
gène.
J'ai rencontré dans la hnnière de l'intestin grêle des globules sanguins.
Dans la région correspondant à l'ancien sphincter postérieur, la sur-
face externe des cellules est moins irrégulière que dans l'intestin grêle.
152
ilfme A. HlFNAdEL
FIG
rxxxiv. Coupe transversale de l'épithélium de la portion antérieure du
sphincter. Xymphe de dix-huit heures, x 11:50.
Dans le rectum, les cellules aplaties, se sont accrues et sont devenues
cylindriques. Elles ne sont pas réunies entre elles par une membrane
commune. Leurs gros noyaux sont souvent irréguliers et présentent des
aspects bourgeonnants.
Dans la portion tout à fait terminale du rectum, les gros noyaux coiffent
_^ la surface interne des
ov^:^^^^- ■ : ^^ cellules comme d'une
sorte de calotte.
Chez la jeune
nymphe, l'intima s'est
reformée et l'épithé-
lium est de nouveau
plissé. La coupe
transversale présente
tout le long de l'in-
testin six plis longitudinaux profonds se touchant presque.
Chez une nymphe de dix-huit heures, l'intima nymphale est en partie
rejetée et l'intestin a la forme d'un tuyau fortement rétréci. Seulement,
le pylore a gardé son plissement transversal. Son cytoplasme vacuolaire
est rempU par des granulations chromatiques vraisemblablement émises
par les noyaux.
Dans le segment de l'intestin correspondant à la portion supérieure
du sphincter antérieur
(fig. Lxxxiv), les éléments
épithéliaux sont réunis
aussi bien du côté basa)
que du côté de la lumière.
Les hmites cellulaires ne
sont pas visibles sur la
coupe transversale. Les
noyaux sont aplatis. Leurs
granulations chromatiques
sont distinctes. Un nucléole et un nucléolule existent. On rencontre des
noyaux en pycnose. Le cytoplasme éosinophile et granulé est parsemé
de boules chromatiques provenant de la dégénérescence des noyaux.
Dans le segment qui correspond à la portion postérieure du sphincter
.antérieur et à l'intestin grêle, l'épithélium présente une disposition sui-
vante (fig. Lxxxv) : Les éléments sont nombreux, on en rencontre
\.
o
^7
I )
Q;
: xxxv. Épithélium de la portion antérieure de l'intestin grêle ;
noyau en chroniatol.. .se: ( aryo inésn. Nymphe de dix-huit
heure*. .11:0.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA
153
jusqu'à trente-deux sur une coupe transversale ; ils ne sont pas réunis par
une membrane commune, des fentes intercellulaires se voient. Les cellules
s'enveloppent les unes les autres comme les feuilles d'un bulbe
d'oignon. La granulation du cytoplasme est ici moins nette que dans la
portion supérieure du sphincter ; les noyaux sont ovalaires ou arrondis.
Les caryocinèses sont fréquentes. On en rencontre trois et même
davantage sur une coupe transversale. Les cellules qui se préparent à la
division pénètrent plus profondément dans l'épithélium, on les voit sou-
vent recouvertes par leurs voisines. On rencontre les chromatolyses ,
mai^ elles sont encore assez rares à ce stade dans cette portion de l'in-
testin postérieur.
La musculature est déjà en désagrégation. Seuls les gros noyaux de la
couche longitudinale, en-
tourés d'une petite por-
tion de cytoplasme éosi-
nophile . persistent encore.
Dans la portion sui-
vante de l'intestin qui
correspond à l'ancien
sphincter postérieur et à
une partie du rectum
l'épithélium est hétéro-
gène.
Déjà, chez la nymphe à peine éclose, on reconnaît dans cette portion
des cellules de tailles différentes. Celles qui bordent la partie supérieure des
phssements sont jjIus grandes que celles qui se trouvent à la base. Cepen-
dant, cette différence n'est pas encore accusée comme elle le sera plus tard.
En effet, environ dix-huit heures après, lorsque l'intima s'est séparée
de l'épithéhum et que l'intestin s'est complètement transformé en un tube,
les grandes cellules fortement accrues se distinguent nettement parmi les
cellules épithéliales [e) restées petites (fig. Lxxxvi).
On peut dire dès à présent que ces éléments très développés sont des
adénoblastes, futures papilles rectales.
Les adénoblastes, à ce moment, offrent l'aspect de formations pluii-
nucléaires. Des interstices marquant les limites cellulaires se rencon-
trent parfois.
Les noyaux sont grands, leur chromatine est disposée en granulations
régulières, un ou plusieurs nucléoles se voient. La forme des noyaux est
-//•/•
XXXVI. Épithélium de la portion postérieure de l'intestin grêle
(sphincter postérieur) chez une nymphe île dix-huit heiues.
Les gros éléments sont des adénoblastes; e, cellules épithé-
liales proprement dites; 6, cellules qui constitueront le bour-
relet basai ; m, myoblaate. x ÎOO.
154
J/"i^- A. HUFNAGEL
^-v
^^
variée. Ils se débitent souvent par clivage en lamelles tantôt régulières,
tantôt irrégulières.
Le cytoplasme est chromatique et homogène.
Les adénoblastes souvent a voisinent directement la lumière (/), quel-
quefois ils en sont séparés par une petite cellule épithéliale qui les
coiffe.
Les petites cellules épithéliales (e) n'ont pas extérieurement de mem-
brane commune ; les interstices cellulaires sont très fréquents, sinon de
règle. Les noyaux sont ovalaires et ne présentent point de nucléole. A ce
stade, de fréquentes divisions
caryocinétiques sont visibles
dans les cellules épithéliales.
Non loin des adénoblastes
se rencontrent de petits élé-
ments {b) différant notable-
ment par leur taille et leur
aspect des cellules épithéliales
(e), (fig. Lxxxvi). Ils ont plu-
tôt l'air des cellules mésen-
chymateuses migratrices et il
faut les regarder comme telles.
On trouve également des cel-
lules fusiformes qui sont sans
doute des myoblastes (m).
Dans la portion terminale
du rectum, la chromatolyse
est très répandue et elle se
manifeste d'une façon particulière. La cellule reste du côté de la
lumière accolée à ses voisines (fig. lxxxvii), tandis que son noyau et une
grande partie de son cytoplasme tombent sous forme de boules de dégé-
nérescence dans la cavité générale. Un grand nombre de cellules dispa-
raissent de cette manière. L'espace qui sépare l'intestin des tubes de Mal-
pighi non encore détruits est entièrement rempli par ces produits de dégé-
nérescence dont l'origine ne laisse aucun doute, car, comme je l'ai déjà
indiqué précédemment, la musculature intestinale est ici externe par rap-
port aux canaux excréteurs.
Sur la figure lxxxvii, on voit parmi les débris épithéliaux trois leuco-
cytes (/) ; leurs cloisons cellulaires sont masqiiées par les débris qui les
»•
Si
•©
Fl<
, I XXXVII
hoiirc;
Él>ithclium rectal eliiz iino nymphf di' (lix-tuiit
. l, iihagooytcs. Coupe transvcrsalo. x lir.O.
MKTAMOh'PlHhSJ'J Dt: UYPOSUMELTA
155
encombrent, nuiis daiff; les endroits où les boules sont plus parsemées,
on recomiaît nettement les sphères de granules.
Les transformations ultérieures sont peu importantes dans la portion
antérieure de l'intestin postérieur. Dans l'intestin grêle, la prolifération
continue et ou trouve encore des figures ( aryocinétiques chez les nymphes
de quatre jours. Tandis que certaines cellules prolifèrent, d'autres, après
avoir subi tnie chromatolyse. tombent dans la cavité générale.
La chronuxtolyse se poiirsiiit également dans la portion à laquelle
appartiennent les caecums
/a
dans lesquels débouchent
les tubes de Malpiglii,
mais là je n'ai pas observé
de nmltiplication cellu-
laire. Je n'ai pu non plus
la constater dans l'anneau
imaginai.
Je m'arrêterai un peu
plus longtemps sur la ré-
gion de l'intestin conte-
nant les futures papilles
rectales.
Chez une nymphe de
trente-huit heures (fig.
Lxxxviii), la difïérencia-
tion des adénoblastes {a)
est avancée, ils présentent une surface irréguUère du côté de la lumière.
Leurs volummeux noyaux continuent de se cliver.
Les celhdes épithéliales (f^) restées petites ont activement proliféré par
voie caryocinétique. Par suite de cette multiplication des éléments é])i-
théliaux, le diamètre de cette portion intestinale est devenu beaucoup
plus grand.
Les interstices celhilaires ont dis])aru, l'épithéliiun forme un manchon
à bord plats extérieurement et intérieurement. Les limites cellulaires
n'existent plus, les petits noyaux se distinguent à peme sur le fond très
sombre du cytoplasme. Seuls les éléments les plus proches des adéno-
blastes ont gardé leur individualité, ils continuent de proliférer (c). Les
cellules qui résultent de cette multi}>lication contribuent à augmenter le
nombre de celhdes épithéliales proprement dites.
Kk;. i XXXVIII. Portion d'une coupe transversale de la partie anté-
rieure du rectum, a, adénoblastes ; e, cellules épithéliales pro-
prement dites ; e, caryocinùsc d'une cellule épithéliale ; b,
bourrelet basai; /, rayoblaste; l, leucocyte. .N.Miiphc de
trente-six heures, x 700.
lôB
J/""^ A. HIFNAGEL
Comme nous l'avons vu (fig, lxxxvi ), les groupes adenoblastiques
chez les jeunes nymphes étaient assez rapprochés les uns des autres,
ils n'étaient séparés que par quelques petites cellules. Au stade où nous
nous trouvons (fig. lxxxviii), ils sont déjà très éloignés lés uns des
autres par suite de la multipUcation intense des cellules épithéliales.
Extérieurement à chaque groupe adénoblastique se trouve un bourrelet
formé par de petites cellules. Ce sont les mêmes éléments que nous avons
déjà vu chez la jeune chrysalide (fig. lxxxvi 6). Us se sont beaucoup
multipliés. Leur prohfération se poursuit assez longtemps. Les figures
«35»
^ «^y <^'' ;^ "-^
w \J
Fio. i.xxxix. Papille rectale chez une jeune imago, p, papille; e, épithélium proprement dit; m. r Hules
marginales ; 6, bourrelet basai ; i, intima, x 700.
caryocinétiques se rencontrent fréquemment ; on en trouve encore chez
une nymphe de sept jours.
Tout répithélium est entouré par un manchon formé de petits élé-
ments mesenchymateux, qui sont vraisemblablement des myoblastes (/).
Sur certaines préparations, on voit que ces petites cellules ne s'arrêtent
pas au voisinage du bourrelet (6) mais l'enveloppent de la même façon que
répithélium même. Aussi bien dans la masse des cellules basales que
dans le petit espace entre l'épithélium et l'enveloppe mésenchymateuse,
on rencontre des leucocytes (Z) et parfois de petites boules pycnotiques.
Ces dernières peuvent provenir aussi bien des muscles larvaires en histolyse
que de certains des petits éléments en évolution qui auraient dégénéré.
A l'état définitif (fig. T;Xxxix), l'épithéHum (e) rectal s'est beaucoup
aplati, les intervalles internucléaires se sont en même temps accrus. Une
intima commune à lepithéhum proprement dit et aux papilles s'est déve-
loppée. Les papilles (p) font saillie dans la lumière. Leur cytoplasme est
éosinophile, les noyaux sont assez irréguliers.
Sur les faces latérales d'une papille se voient des noyaux ovalaires ou
MfyrAMoniniosE de iiyponomevta
157
/7Ï*
allongés. L'origine de ces éléments marginaux {m) est la même que celle
des éléments qui bordent la paroi du rectum {e).
A l'état normal, on ne distingue pas de limites nettes entre les papilles
et les cellules marginales. Mais lorsque la papille est contractée, les cel-
hdes marginales .c trouvent éloi-
gnées de celle-ci et restent accolées
à l'intima. Cet aspect est fréquent
chez la nymphe âgée.
Les éléments que nous avons vus
chez la jeune nymphe situés à la base
des adénoblastes (fig. lxxxvi h),
après s'être multipliés se sont réunis
entre eux et constituent une sorte
de bourrelet dont les bords se sont
fusionnés avec l'épithélium même.
L'origine exogène de ces éléments
basaux ne laisse aucun doute.
Chez la nymphe de dix jours, l'in-
testin postérieur se présente avec
tous ses caractères histologiques
définitifs. Ses éléments sont plus
petits et plus aplatis qu'ils ne
l'étaient chez la larve.
A la suite de l'intestin moyen
(fig. xc m) vient la valvule pylo-
rique (v) où les noyaux sont petits
et serrés e où les limites cellulaires
ne sont pas visibles. Immédiatement
au-dessous se trouve la portion qui
envoie deux caecums où viennent
s'ouvrir les canaux de Malpighi. Aussi
bien dans les caecums que dans la partie de l'intestin qui lui donne nais-
sance, l'épithélium est aplati.
Un long tube {g) réunit la portion ventrale de l'intestin à celle qui se
trouve sur la face dorsale. Dans la partie supérieure de ce tube, l'épithé-
lium est phssé longitudinalement. Dans son cytoplasme, on distingue
deux zones, du côté basai (fig. xci), le cytoplasme est chromatophilc ;
sur la face regardant la lumière, il est très pâle. C'est une disposition
]"Ui. xc. Portion do l'intestin chez une nymphe de dix
jours, m, intestin moyen ; v, valvule pylori-
quc ; g, intestin grêle ; r, papille rectale. La
partie postérieure du rectum n'est pas repré-
sentée.
l.xS
iU'"^- .4. Hi'FNAGEL
semblable à celle que nous avons trouvée chez la larve active
{Cf. fig. LXXXl).
En devenant ventral, l'intestin cesse d'être plissé, il est en même temps
plus aplati (fig. xcii). En s'approchant du rectum, l'épithélium présente
de nouveau des plis, il constitue le
sphincter (.s) qui. avec sa muscula-
ture, fait saillie dans le rectum. Dans
la partie moyenne de celui-ci se
trouvent les papilles (r) dont j'ai déjà
eu l'occasion de parler (fig. xo). On
en trouve une à quatre sur une
coupe longitudmale et autant sur
une section transversale. L'épitlié-
Hum interpapillaire (fig. Lxxxixe) est
irrégulier, les cellules débordent sou-
vent dans la lumière. Dans la portion terminale du rectum, l'épithélium
est plissé. Dans le rectum'et dans la portion à laquelle appartiennent les
caecums, l'intima est lisse et hyaline; dans l'intestm grêle et dans le
sphincter, elle porte des crochets minuscules à ])eine distincts.
En résumé, l'intestin subit une double mue chitineuse. L'épithélium
est remanié sur place. L'anneau imaginai ne prend pas grand part dans
Fig. XCI. Epithéliura de la portion supérieure de
rintestin grêle, x 800.
Fig. xcu. i:pithéliuni de l'intestin grêlo chez un» jeune imago, x &00.
les processus de la métamorphose. Dans l'intestin grêle et dans le rectum,
les anciennes cellules larvaires prolifèrent activement.
La chromatolyse est très répandue tout le long de l'intestin et surtout
dans le rectum.
Les papilles se forment dans la portion terminale de l'intestin grêle
(sphincter postérieur) et dans une partie du rectum. Elles gardent chez
l'imago leur situation primitive.
Les adenoblastes apparaissent cliez la jeune nymphe, elles se difiEé-
METAJiMOPHOSE I)K IlVroXOMErTA 1.39
rencient aux dépens des anciennes cellules épithéliales de la larve. Elles
se multiplient })ar clivage.
Si l'on compare la figure lxxw i avec la figure ;U de Verson, on se
rend compte qu'il existe une grande analogie entre les éléments que
Tauteur désigne comme myoblastes et ceux qui. chez Hyponomeuta, for-
meront le bourrelet basai.
Précisons donc que les éléments que Versox désigne comme myo-
blastes chez Bombyx mari ont leur équivalent dans les cellules basales
chez Hyponomeuta.
Celles-ci ne sont i^oint les cellules sœurs des cellules épithéhales, comme
ceci a lieu chez Malacosoma d'après Deegener. A un stade où ces élé-
ments exogènes sont encore en petit nombre (fig. lxxxvi h) et où les
cellules épithéliales n'ont pas encore considérablement diminué de taille
comme cela a lieu plus tard (fig. lxxxix), on se rend compte que chez
Hyponomeuta elles n'ont rien de commun avec les cellules épithéliales.
Signalons que chez Anaholia laevis, d'après Russ, les cellules basales
se forment comme chez Hyponomeuta aux dépens des celljles qui sont
étrangères aux cellules épithéliales.
La métamorphose de l'intestin postérieur chez Hyponomeuta oflfre
une analogie avec celle de l'intestin antérieur chez la même espèce. Ici
comme là l'intestin subit une double mue chitineuse et présente une
intima propre à la chrysalide. L'épithéliuni perd au cours de la nymphose
sa structure différenciée, il la réacrpiiert ensuite.
ORGANE PERIŒSOPHAGÏEN
J'ai observé chez Gracilaria syringeUa F. et Hyponomeuta padelîa L.
un organe particuher qai me paraît avoir jusqu'ici échappé aux obser-
vateurs. Cet organe est situé au voisinage immédiat de l'œsophage, à la
hauteur de la hniite entre la tête et le premier segment thoracique. A l'état
définitif, il se présente, en coupe transversale, comme un anneau entou-
rant la section de l'intestm antérieur. Cet amieau est constitué, sans
limites cellulaires bien nettes, par un cytoplasme chromatique où sont
plongés des noyaux irréguhers, parfois digités.
J'ai pu suivre le développement de cet organe chez Hyponomeuta padella.
ARCH. Ui: Zooi.. EXP. KT GÉN. — T. 57. — F. 2. H
160
.!/'"■ .-I. //IFXAaEL
m M
y
Fio. xcili. Kvolution do l'organe périœsopha-
gien. A, x li:;0; £, x 800. Explication
dans le texte. Nymphe d'un jour.
Au début de la nymphose on voit
brusquement apparaître dans le cœlome,
au voisinage de l'œsophage, quelques
éléments nouveaux. Sur des coupes trans-
versales on trouve de chaque côté du
tube digestif un de ces éléments qui sur
la coupe montre tantôt un, tantôt deux
noyaux. Ces derniers peuvent être ova-
laires ou irréguhers ; ils montrent un
nucléole. Le cytoplasme est chromato-
phile et contient quelques rares vacuoles.
Sur la fig. xciii^, nous voyons une de
ces cellules chez une nymphe d'un jour.
Les noyaux proUfèrent par voie caryo-
cinétique (fig. xciii B) et bientôt arrivent
à former de part et d'autre de l'œso-
phage un amas important dont les éléments cellulaires par tous leurs carac-
tères, structure et colorabilité de leur cytoplasme, appareil chromatique
de leur noyau, nuOléole, etc., sont
identiques aux cellules épithéliales
même de l'œsophage (fig. xciv).
En se basant sur cette ressem-
blance, on serait tenté d'interpréter
ces cellules comme étant véritable-
ment d'anciennes cellules œsopha-
giennes, qui ont quitté leur rang épi-
théhal et ont émigré dans le cœlome.
C'est cette manière de voir que
j'ai adoptée dans ma note prélimi-
naire et elle m'a paru d'autant plus
admissible qu'à ce moment les amas
cellulaires se trouvent au contact
même de l'épithélium (la musculature
ayant déjà dégénéré) et que des
émigrations cellulaires ont été obser-
vées chez d'autres Insectes.
. ., . ,. . . . l'If'- xt'iv. Evolution de l'organe périœsophagien. 0,
Depuis 3 ai eu r occasion d exami- œsophage; ", futur anneau périœsophagien.
, , , , ' ■ i • X Coupe transversale. Nymphe de trente-huit
ner ces éléments emgmatiques a un iieurcs. too •
Oy.-
mi:tamorpiiosk dp: iiyposomeita
i(>i
stade où l'œsophage était encore entouré par son manchon musculaire,
stade auquel l'émission par l'épithélium œsophagien des cellules n'aurait
pu se faire sans rompre la continuité de la couche musculaire. Or ceci ne
paraît guère probable. 11 faut par conséquent écarter cette h3rpothèse.
Quelle est l'origine réelle de ces éléments ? Je ne saurais le dire ;
malgré l'examen attentif de mes préparations, je n'ai pas pu élucider
cette question. Je ne puis pour le moment qu'étudier leur évolution à
partir du moment où je les ai observés.
Pendant une première période, qui succède à leur apparition, ces
éléments commen-
cent à se multipher
par voie caryociné-
tique. Puis ces di-
visions indirectes
cessent, vers le com-
mencement du troi-
sième jour de la vie
nymphale ; et, à par-
tir de ce moment, les
noyaux qui se sont
beaucoup accrus
prennent des aspects
lobés et ne présentent
plus que des divisions directes, par chvage dans des plans différents
(fig. 8). Par suite de cette prolifération, les deux amas latéraux se déve-
loppent d'une façon considérable et, progressant l'un vers l'autre, ils
se rejoignent en un anneau qui entoure le tube œsophagien, devenu
maintenant très étroit (fig. 9 o e). Les limites cellulaires se sont presque
entièrement évanouies et les noyaux présentent des contours très irrégu-
liers. L'organe arrive ainsi à sa constitution imaginale.
Chez le Papillon, cette formation se présente, sur la coupe transversale,
sous l'asjiect d'un anneau ouvert du côté ventral, entourant la face dorsale
de l'œsophage (fig. xc\ ). Son volume a diminué. Le cytoplasme chromato-
phile présente une structure radiaire. Les noyaux sont restés irréguhers,
on voit plusieurs nucléoles. A la surface de l'organe sont souvent accolés
des leucocytes.
Quelle est la signification de cet organe ? Par son aspect histologique
et par sa situation au niveau du cou, cet organe énigmatique rappelle
l'iG. xcv. 7,'annijiii i» ricrsophagien " entoure eu partie l'u'sophago o : »i,
muscles ; c, cœur, x 12^0.
l()i> J/me A. HUFNAGEL
jusqu'à un certain point la formation comiue chez les Diptères sous le
nom d'cunieau de sontien du cœur. Cette formation a été pour la première
fois observé par Weismann (1864) chez les larves des Mascides. Kunckel
d'Herculais (1875) l'a décrite chez les Syrphides et Pantel (1898) chez
Th r ixio n haï idea nmn.
Enfin Dogiel (1877) a vu dans la larve de Corethra un manchon
péricardial qui, malgré son allure et sa situation spéciale, est considéré
par les auteurs comme correspondant à Tanneau de soutien du cœur.
Il ne faut pas perdre de vue que, chez les Lépidoptères que j 'ai étudiés,
l'organe en question tout en se trouvant au voisinage du cœur (fig. xcv)
forme un anneau autour de l'œsophage et non autour du cœur (fig. 9).
Si son homologie avec l'anneau de soutien du cœur devait par suite
se vérifier, on en devrait conclure que l'on s'est trop hâté de dénommer
l'anneau de Diptères d'après sa situation topographique et que la fonction
de cet organe reste encore à découvrir.
MUSCLES
La métamorphose mterne des muscles des Insectes a été une question
très étudiée et a entraîné des discussions variées.
Nombreux sont les auteurs qui s'en sont occupés : Weismann (1864),
Ganin (1876), Chun (1876), Vialk\nes (1882), Metchnikoff (1883),
Kowalewsky (1885-87), Korotneff (1892), Rengel (1896), De
Bruyne (1898), Karawaiew (1898), Noetzel (1898), Terre (1899),
Anglas (1900-04), Kellog (1901), Enriquez (1901), Berlese (1901),
PÉREZ (1902-11), Vaney (1902), Breed (1903), Janet (1898-1907),
Henneguy (1904), Mercier (1906), Hulst (1906), Poyarkoff (1910),
Nordenskjold (1910), Pospielow (1911).
Pour les uns, les muscles destinés à dégénérer subissent une dissolution
humorale, les phagocytes ne prennent pomt part à leur disparition.
Pour les autres, les phagocytes jouent un rôle actif dans la disparition
des muscles.
Parmi les auteurs qui admettent la phagocytose, l'accord est loin d'être
fait sur l'importance qu'il faut attacher à ce processus.
Pour les uns, les leucocytes n'entrent en jeu que lorsque les éléments
ont subi des altérations structurales : les phagocytes se bornent à faire
disparaître les déchets des tissus préalablement dégénérés.
Mf:TA MonriiosK de ii yposomei ta i (la
Pour les autres, l'intervention des phagocytes est préalable à la dégé-
nérescence. Les phagocytes insinuant leurs pseudopodes dans les tissus
provoquent leur émiettenient avant l'apparition d'un signe atrophique
décelable au microsco))e.
Une a\itre question à élucider est la manière dont se t'ait le remanie-
ment de la musculatiu-e.
La bibhographie (pii se rapporte à ces différents points a été faite en
détail par Ferez (1903), Henneguy (1904), Pospielow (1911) aux
travaux desquels il est facile de se reporter.
Je me bornerai donc à ne rappeler ici que les études aj^ant trait spécia-
lenïent aux Lépidoptères et je reviendrai aux autres toutes les fois qu'il
y aura heu d'en comparer les résultats avec ceux que j'ai obtenus chez
les Paj^illons.
Chux (1875) le premier étudie avec quelques détails Ihistolyse muscu-
laire chez Sphinx ligusfri.
Voici ce qu'il dit : « Les noyaux musculaires atteignent une dimension
étonnante. Bientôt ils se divisent et offrent ainsi l'aspect d'\ine prohféra-
tion de noyaux. C'est un processus analogue à celui que Leuckart a
décrit dans la trichinose... Tandis que les noyaux des muscles commencent
à se diviser, le sarcolemme se plisse et souvent d'une manière si régu-
hère, qu'il a un aspect si)iralé comme les trachées. En même temps la
substance contractile devient graisseuse, les noyaux sont mis en liberté
par suite de la disparition du sarcolemme. »
KoROTNEFF cliez Tinea arrive aux conclusions suivantes :
1'^ Absence de cellules mésenchymateuses spéciales chez la larve ; la
cavité générale ne contient que des leucocytes et des sphères des gra-
nules ;
2** Les leucocytes ne prennent aucune part h la dégénérescence des
tissus ;
3" Tous les muscles imaginaux proviennent des muscles larvaires ;
4" Dans le thorax ])lusieurs muscles disparaissent et ce n'est que les
trois muscles cités par \'an Rees qui donnent les nniscles ])ectoraux de
la mite.
La résorption se fait de la manière suivante : la partie fibrillaire du
muscle devient granuleuse et se contracte, les noyaux prolifèrent parti-
cuHèrement sur une des faces du muscle. Cette prolifération rapide rappelle
un processus fréquent en pathologie. A la fin le nnxscle est constitué par
une partie fibrillaire et par une traînée de noyaux (Kernstrang). Le
I(i4 .1/""^ A. HJ'FXACF.L
faisceau primitif se résorbe et se dissout dans le plasma sanguin sans qu'il
y ait eu action des leucocytes, lesquels, chez la mite, ne traversent jamais
le sarcolemme.
KoROTNEFF admet le concours des leucocytes dans la destitiction des
muscles chez les Muscides où la métamorphose est intense et rapide, où
il y a un processus inflammatoire. Mais chez Tinea où la métamorphose est
moins complète et dure plus longtemps, la destruction du myoplasme
larvaire se fait à l'aide d'un processus chimique se traduisant par une
résorption humorale.
Quant à l'histogenèse des muscles imagmaux, voici comment Fauteur
l'explique :
La traînée des noyaux (Kernstrang) se sépare bientôt du muscle et
commence à s'éloigner de sa surface. Tandis qu'elle est encore en connexion
avec le faisceau primitif , elle produit de nouvelles fibrilles qui, au début,
sont difficiles à distinguer, mais apparaissent plus tard comme des
formations rhomboïdales plongées dans le plasma parmi les noyaux.
Le tendon imaginai est formé par la division longitudinale de l'ancien
tendon larvaire.
Berlese, à la suite de ses travaux sur la métamorphose des muscles
chez Callipkora et différents autres Insectes, étudie le même phénomène
chez les Lépidoptères {Sericaria rnori, Hyponomeuta malinella).
L'auteur ne distingue qu'une seule catégorie de noyaux chez les jeunes
larves. Au moment des mues larvaires (deuxième et troisième mues chez
Sericaria), les noyaux musculaires par fragmentation ou bourgeonnement
donnent de petits noyaux qui, s'entourant d'un peu de cytoplasme et d'une
membrane limitante, forment des sarcocytes. Une partie de ces éléments
restent dans le muscle, s'y accroissent et serviront à la construction des
fibres remaniées sur place. Une autre partie se transformera en des
myocytes fusiformes qui donneront naissance aux muscles imaginaux du
Papillon. Pour aboutir à cette formation, les sarcocytes quittent le muscle
et se dirigent vers les disques imaginaux dont ils constitueront le mésen-
chyme.
Lorsqu'un muscle disparait totalement, par exemple, les fibres de la
portion postérieure du rectum chez Hyponomeuta, voici quelle est la
marche de sa destruction. Le myoplasme s'évanouit par fragmentation en
granules. Les noyaux larvaires se divisent en des sarcocytes qui ensuite
se transforment en des myocytes, éléments constructeurs de nouveaux
muscles. Dans le cas des muscles rectaux de Hyponomeuta, les myocytes
MÉTAMORPHOSE DE II Y J'OXOM El 'l'A Ki.-,
cheminent vers les disques iniaginaux de l'extrémité postérieure de
l'abdomen.
Le rôle des leucocytes dans la disparition d'un muscle est très res-
treint. Ils n'interviennent que « corne loro costume, ad appropriarsi
sostanza derivata dalla distruzione del sarcoplasmo cosi volentieri como
fanno sempre a proposito di sostanza albuminoide elaborata. »
Les sphères de granules différent beaucoup des amas correspondants
chez les Muscides ; ce sont chez les Lépidoptères des caryolytes et non de
sarcolytocytes^.
PosPiELOW (1911) a étudié la métamorphose des muscles thoraciques
chez Gastropacha neustria, Vanessa polychloros, Aporia crataegi, etc.
A l'intérieur d'vui muscle d'une larve adulte, outre les éléments
muscidaires proprement dits, l'auteur distingue des cellules mésenchy-
mateuses, qui ont pénétré dans les fibres en même temps que les trachées.
Il dit p. 331 : « A l'intérieur du muscle, une partie de ces cellules mésen-
chymateuses se divisent ])ar voie directe et forment des petites cellules
fusif ormes rappelant beaucoup les éléments fusif ormes que Berlfse
appelle myocytes, et une partie gardent leur aspect de grandes cellules
multipolaires à no3^au granulé et à expansions se prolongeant en minces
fibrilles. »
PospiELOw ne croit pas avec Berlese que les cellules f usiformes -
proviennent par bourgeonnemnet des gros noyaux larvaires et qu'elles
quittent la fibre pour se fixer sous l'hypoderme des disques imaginaux.
C'est le contraire qui a lieu. Les cellules provenant des épaississe-
ments des gros troncs trachéens se dirigent vers le muscle.
Page 332, l'auteur dit : « Les cellules fusif ormes une fois à l'intérieur
du muscle en partie se différencient en des cellules terminales des tra-
chées donnant naissance à des capillaires trachéaux, et en partie gardent
leur aspect indifférencié et persistent sous l'aspect de cellules mésen-
chymateuses situées sous le sarcolemme à travers la fibre musculaire. »
Les cellules mésenchymateuses que l'on rencontre à l'intérieur des
1. Berlf.se (listingiu; dans k's « Kornclienkugclu » de Weismami deux catégories d'éléments: \ci sarcolyto
■cytes, c'est-à-dire sarcolytes englobés par un leucocyte et les caryolytes ou sarcolytes associés à uu ancien noyau
musculaire.
2. La nature de ces éléments fusilormes a été beaucoup discutée. Kara\v.\IEW (1898), TERRE (1899), Bkrlese
1901), PÉREZ (1910), PoYAiîKOU' (1910) les considèrent comme des myoblastes imaginaux.
AXOLAS (19Ji) et PÉUKZ (1908) les ont d'abord décrits comme des phagocytes, ils ont ensuite changé de
açon de voir.
Ce sont pour Hulst (1906) dos phagocytes d'origine inésoderminue, mais qui différent des globules sanguins
proprement dits.
Enfin Breed (11.03) et Angi.as (19 Ji) les interpiétciit comme dis eellules trachéales.
If36 il/>"c ,-1. HIFNAOEL
muscles thoraciqiies de la larve correspondent aux cellules amiboïdes
granuleuses de Jaxet chez les Fourmis.
Comme, au moment des mues, il se produit à l'intérieur des fibres une
multiplication des noyaux musculaires, on rencontre sous le sarcolemme
des noyaux fils, de double origine, formés d'une part par les noyaux
musculaires et d'autre part par les cellules immigrées. La distinction de
ces éléments nouvellement formés de^^ent fort difficile. Les noyaux
musculaires ne dififèrent des cellules trachéales que par l'absence de la
portion chromatique fusiforme de cytoplasme.
De même il est difficile de distinguer au moment des mues les cellules
granuleuses de gros noyaux musculaires, chacune de ces deux catégories
d'éléments se multiphant à son tour.
PospiELOW croit que c'est cette difficulté dans la distinction des élé-
ments qui met en erreur Berlese lorsqu'il décrit les gros noyaux gra-
nuleux que l'on rencontre au moment des mues à la périphérie des fibres,
comme des noyaux musculaires venus de la profondeur du muscle.
PospiELOw va jusqu'à attribuer aux cellules mésenchymateuses
immigrées un rôle important dans la structure intime de la substance
musculaire. Il dit dans son résumé, p. 416 :
« Mit den Trachéen dringen in die Fasern Mesenchymzellen ein. Dièse
letzten gruppieren sich unter dem Sarcolemma als multipolâre Zellen
mit Fortsâtzen, welche sich làngs der Grundmembran als Querfasern
hinziehen. ... Bei derMuskelfasernhistolyse ziehen die Mesensch3nnzellen
ihre Fortzâtze ein, Avodxu'ch die Questreifung der Muskelfasern ver-
schwindet. )>
D'après l'auteur russe, au début de la métamorphose, les cellules
mésenchymateuses situées au-dessous du sarcolemme rétractent leurs
prolongements et provoquent ainsi la disparition de la striation transver-
sale. Il me paraît étonnant qu'un élément qui est en somme étranger au
muscle (les éléments mésenchymateux y pénétreraient en même temps
que les trachées) puisse jouer un aussi grand rôle dans le changement de
sa structure intime.
PospiELOW ne fait pas de distinction entre les grands et les petits
noyaux. Or, les éléments qu'il voit émettre des expansions longeant, sous
forme de fibres, les disques, ne sont pour moi autre chose que les gros
noyaux situés à l'intérieur du sarcojîlasme.
Les aspects irréguliers des gros noyaux se rencontrent souvent chez
les différents Insectes; je les ai moi-même observés chez Hyponomeuta.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA 1(57
PÉREZ a vu de ces noyaux iiréguliers chez Polistes. Voici ce qu'il en
dit :
« Les formes irrégulières, épineuses que présentent souvent ces noyaux,
avec pointes aiguës se dirigeant vers les disques minces du myoplasme,
doivent peut-être éveiller l'idée d'une plasmolyse anormale. De pareils
aspects montrent en tout cas combien le gros no3^au larvaire est solidaire
de l'architecture générale de la fibre striée. »
En effet, on conçoit bien q\ie la striation transversale parles disques Z,
se prolongeant dans le sarcoplasme. agisse sur la forme des noyaux qui y
sont plongés. Ils peuvent, étant comprimés, envoyer des prolongements
qui viennent s'applicpier contre la paroi de ces cloisons,
La rétraction de ces expansions est provoquée par la disparition de la
striation transversale ; elle ne la provoque pas.
C'est dans ce sens qu'il faudrait interpréter les relations existant
entre les cellules mésenchymateuses de Pospielow (en réalité noyaux
larvaires plongés dans du cytoplamse ambiant) et la striation du
muscle.
NoRDENSKJÔLD (1911), daus une note préliminaire, étudie sommaire-
ment la métamorphose des muscles chez Vanessa urticae. Dans les muscles
qui disparaissent (muscles de la tête) un rôle important est dévolu à
l'autolyse : les leucocytes interviennent en second lieu. Dans les muscles
remaniés sur place l'auteur n'a pas observé l'attache des myoblastes
libres.
Chez Vanessa urticae. d'après Nordensk.j"ld, la régénération de la
nîusculature a son origine dans certains noyatix qui, au milieu de la
dissolution des fibrilles et des noyaux larvaires, persistent en bon état.
1 " MUSCLES DE NÉOFORMATION
Chez Hy ponomeuta , comme chez les autres Insectes, les muscles
offrent différents modes d'évolution.
Le plus simple est celui du muscle entièrement formé aux dépens de
myoblastes embryonnaires ; c'est par lui que je commencerai.
Les muscles des organes génitaux externes entrent dans cette caté-
gorie. Leur évolution ne présente aucune particularité, elle est semblable
à celle observée chez d'autres Insectes et décrite en détail chez la Fourmi
par PÉREZ (1902).
Les myoblastes venant des disques imaginaux sont des éléments fusi-
108 J/»i<^ .4. HUFNAGEL
formes à cytoplasme chromatophile à noyau ovalaire dont la chromatine
est disposée en granulations fines.
Au début, ils sont peu distincts des leucocytes jeunes dont certains
sont comme eux effilés et chromatiques.
Chez la larve immobilisée, les myoblastes se divisent par voie caryo-
cinétique. Chez les jeunes nymphes on les trouve déjà agencés en fibres
étroitement accolées les unes aux autres.
Les noyaux myoblastiques une fois à l'intérieur de la fibre ne se divi-
sent plus désormais que par voie directe binaire ou multiple.
20 MUSCLES DISPARAISSANT PENDANT LA MÉTAMORPHOSE
Il existe chez Hyponoineuia des muscles exclusivement larvaires et
qui disparaissent au cours de la nymphose; tels sont par exemple les
muscles adducteurs de la mandibule. Ils s'insèrent d'une part sur le
tégument externe, d'autre part sur la mandibule et s'étalent réguhèrement
comme les lames d'un éventail. Chaque muscle est formé par une réunion
de fibres accolées entre elles et qui parfois s'épanouissent au niveau du
point d'insertion sur l'hypoderme. La double striation existe mais est un
peu moins nette que dans les muscles tégumentaires ; on la décèle cepen-
dant bien sur une préparation colorée par l'hématoxylme de fer. Les
muscles sont éosinophiles. Les noyaux sont de dimensions variées, mais
cette différence de taiUe ne m'a pas semblé très prononcée. Ils se pré-
sentent chez les jeunes larves comme des vésicules claires à chromatine
pauvre et dispersée, à un ou deux nucléoles. Pendant toute la durée
de la vie larvaire, ces noyaux se multiplient par voie directe. On les
rencontre souvent accouplés.
Au début de la métamorphose les muscles perdent tout indice de
striation transversale, tandis que la fribrillation longitudinale devient
très apparente (fig. 22). Au point de leur insertion, on aperçoit de bonne
heure quelques noyaux en chromatolyse. Dans le muscle même, la chro-
matine des noyaux est très dense et peut présenter de petites taches claires
(fig. xcvi). Les divisions nucléaires directes se succèdent sans interruption
et donnent naissance à des chapelets de noyaux rapprochés. Le même
aspect se rencontre encore au premier jour après la mue nymphale. La
figure 22 nous en donne un exemple. Le muscle garde encore sa fibrilla-
tion longitudinale, il est devenu légèrement basophile. Sur cette même
coupe on voit en un point {chr) \\n amas de granulations chromatiques
MÉTAMOh'PHOSE DE HYPONOMEUTA \m
et violettes (hémateïne). En suivant la même préparation sur plusieurs
sections, on se rend compte qu'il s'agit là de la chromatolyse d'un noyau.
Mais ce fait se produit assez rarement à ce stade.
Nous voyons encore deux amas nucléaires (awî ) plus gros que les autres.
On peut admettre cpi'ils proviennent de la fusion de plusieurs noyaux,
processus qui devient d'ailleurs de plus en plus manifeste à un stade
plus tardif.
Des leucocytes nombreux (/) ainsi cpie des sphères de granules {s(j)
circulent entre les fibres. Je dois signaler la présence assez fréquente
au voisinage des muscles en dégénérescence de globules sanguins
remplis de grosses granulations éosino-
philes.
Enfin, on voit souvent à ce stade,
parmi les noyaux musculaires chroma-
tiques et denses, des noyaux leucocytaires,
beaucoup plus clairs. On pourrait croire
C|ue ces noyaux se trouvent à l'intérieur
même de la masse musculaire. Mais en sui-
vant le même muscle sur plusieurs coupes,
on voit que ces leucocytes se trouvent
, . 1 n^ ' • l'K*- xcvi. Muscle adducteur de la inandi-
empnsonnes entre les hbres serrées, mais j.uie en voie de dégéuMrescenee. Nym-
„ _ V !•• , » • A j II . phe àaée de iiuaranti'-hnit heures.
non a 1 mterieur même de celles-ci. \, looo
Le muscle, à ce moment, par suite de
la multiplicité des noyaux et de son envahissement par les leucocytes, est
d'un aspect très compliqué.
Quel est le rôle de ces leucocytes ? Il est évident qu'ils ne s'attaquent
point aux muscles non encore désagrégés, mais en se frayant un chemin
entre les fibres, lâches à ce moment, ils contribuent en grande partie à leur
dislocation.
A la fin de la première et au commencement de la deuxième journée
de la nymphose, la fibrillation longitudinale n'existe plus. La structure
caractéristique du muscle disparaît au point de le rendre méconnaissable
(tig. 21).
Les fibres sont fragmentées. Le myoplasme affecte souvent une forme
plus ou moins circulaire. On rencontre alors à la place des anciens muscles,
de ces amas de taille différente, à cytoplasme granulé, à noyaux extrême-
ment denses, et présentant généralement une ou plusieurs vacuoles
(fig. xcvi).
170 J/"ic A. HVFNAdEL
Les noyaux tendent à se fusionner en de grosses niasses chromatiques.
La figure 21 nous en donne quelques exemples.
Ces agglomérations se présentent comme des plages sombres et irré-
gulières montrant par-ci par-là une tache claire. Quelquefois la chroma-
tine est condensée au centre et elle est entourée péripliérif(uement par un
réseau fin également chromatique.
Les amas chromatiques (fig. 21) affectent des formes très variées ;
souvent ils ne sont pas sans rappeler la figure 214 de Berlese relative
aux muscles périanaux.
Je ne puis cependant croire qu'il s'agisse dans le cas cpii nous occupe
de la fragmentation d'un noj^au larvaire en petits noyaux imaginaux,
comme le décrit l'auteur précité pour les muscles périanaux. Je pense
plutôt qu'il faut voir dans ces aspects des signes de dégénérescence. Nous
avons vu que les agglomérations chromatiques sont le résultat d'une fusion
de plusieurs noyaux larvaires. Sur la figure, à côté d'amas compacts, s'en
trouvent d'autres présentant des digitations (</). Ya-t-il dans ce cas fusion
incomplète ou déb\it de fragmentation des masses préalablement agglo-
mérées ? Les deux hypothèses sont vraisemblables. 11 est possible qu'une
fragmentation ait lieu, mais il est difficile d'admettre qu'elle puisse à ce
moment donner naissance à des myoblastes. En effet, la pycnose nucléaire
est déjà bien avancée et ce ne sont pas les noyaux dégénérés qui seraient
en état de construire des muscles imaginaux.
A la partie inférieure de la figure 21 (6), on voit à côté d'un amas
chromatique bien formé, deux petites masses chromatiques accolées à lui
en un point. A cause de leur structure, on doit les considérer comme des
noyaux larvaires n'ayant pas participé à la fusion.
En outre, sur la même figure se rencontrent de petits amas formés de
chromatine et entourés d'une portion de cytoplasme {s). Ces sarcolytes
peuvent être interprétés soit coin me des noyaux larvaires restés libres,
soit comme des produits de la fragmentation que nous avons admise.
On voit des corps semblables à l'intérieur des ])hagocytes ([\ii pullulent
à ce moment entre les muscles dégénérés. Sur la figure on voit que l'un
a presque complètement englobé la boule chromaticpie {ph. f), tandis que
les autres étirés en croissant s'accolent à leur proie (ph.e). Certauis d'entre
eux sont déjà bourrés de fragments musculaires en dégénérescence {ph. f).
Lorsqxie l'amas de chromatine fusionnée est important, comme on le
voit par exemple en a, un grand nombre de leucocytes viennent s'accoler
à sa surface et prennent part à sa destruction. La membrane du phagocyte
MÉTAMORPHOSE DE HYPOSOMEUTA 171
pevit devenir indistincte (o), son cytoplasme peut pendant nn cer-
tain temps se confondre avec celui de la masse dégénérée. Les phago-
cytes reprennent leiu- individualité lorsque l'incorporation est accom-
plie.
En résumé les muscles destinés à disparaître subissent spontanément
une altération. Les leucocytes n'interviennent que lorsque les fibres
présentent des modifications structurales appréciables au micros-
cope^.
Mes résultats concordent' avec ceux de Nordensk.tôld (1911) qui,
chez Vanessa urticae, a constaté cpie la dégénérescence musculaire précède
la phagocytose.
Chez Polistes, Ch. Pérez (1911) a également observé cpie le muscle
présente une dégénérescence intrinsèque très avancée avant que ses
débris soient englobés par les phagocytes.
Chez GaJeruca, d'après Poyarkoff (1910). les j)hagocytes commen-
cent à immigrer dans le muscle (nniscle adducteur de la mandibule)
lorsque celui-ci a déjà perdu sa striation transversale caractéristique ;
cependant l'auteiu- ne semble pas attribuer à cette modification ime
importance capitale. Il dit en effet :
« Il est possible que, si ce muscle était complètement privé des noyaux
mitotiques, il garderait sa structure normale au moment de l'attaque
phagocytaire comme cela a lieu chez les Mouches. »
En jugeant d'après nos connaissances actuelles, on peut dire que
l'ensemble des Lépidoptères, des Hyménoptères et des Coléoptères
s'opposent aux Muscides. Chez les premiers, la phagocjrtose est tardive,
elle a lieu lorsque les muscles ont perdu l'intégrité de leur structure. Chez
les Mouches, la phagocytose est précoce, les leucocytes s'attaquent aux
muscles, alors que ceux-ci conservent encore leur structiu'e caractéris-
tique^ (PÉREZ, 1910).
1. HiRSCULKit (190' ) t'-tiuliaut la régénération chez les pupes de Lépidoptères, après section de rextréiiiité
antérieure du corps, arrive à la conclusion que les muscles dégénèrent en partie sous l'inlluence réactionnelle du
sarcoplasme qui servirait à la formation de nouvelles flbre* musculaires. Ce processus concorde avec l'opinion
émise par .Metchnikoff (18. ) et SrDAKKwrrtH (189. ) d'après laquelle les cellules nuiseiilaires se comportent
comme de véritables phagocytes.
Si, dans ce cas particulier, les choses se passent en réalité conmie l'a décrit HII!SCH1,KK, encore ne laudrait-il
pas généraliser ce processus. Dans la métamorphose normale ce sont les phagocytes leucocytaires (et parfois les
cellules grasses) qui font disparaître les débris.
D'ailleurs, mCme dans le cas de dégénérescence musculaire provoquée e.xpérimentaleiiieiit. loiiinion de Hiksch-
LKR n'est pas la seule qui ait été émise.
B0RU.4GK (1905) dans ses reclunhis sur riiutoinniii.- et la régénération (li.v. Us ArtroptaUs :i oliMisé une
phagocytose des nui.scles due à des amibocytes et à des cellules de nature eonjonetive.
L'. D'après Mkrcier ( I9t6) l'altération musculaire précède chez les Muscides la phagoc.\tose.
172 3/">e A. HVFNAGEL
3° MUSCLES REMANIÉS
Chez Hyponomeuta, la plupart des muscles tégumentaires persistent
et donnent par remaniements des muscles imaginaux.
J'étudierai succesivement : a) les muscles abdominaux profonds ;
6) les muscles abdominaux superficiels ; c) les muscles thoraciques à
évolution tardive ; d) les muscles thoraciques à évolution précoce (muscles
du vol, muscles extrinsèques des pattes).
Avant d'aborder cette étude, il est nécessaire de décrire l'aspect offert
par les muscles de la chenille. Je prendrai comme
type un muscle abdominal et comme tous les
muscles de la larve sont à peu près semblables,
cette description s'appliquera aussi à ceux du
thorax.
Le muscle est formé par un certain nombre
de fibres associées sur toute leur longueur. La lar-
geur du muscle est en rapport avec son état de con-
traction.
On distingue facilement, même à un faible
grossissement, la double striation caractéristique
(fig. 20 fig. xcvii). Le sarcoplasme qui est réti-
culaire et chromatophile, recouvre le muscle et
pénètre entre les faisceaux. Il est lui-même enve-
Fio. xcvii. coiip^- longitndi- loppé d'uu fin sarcolemmc.
nalc d'un musclo abdominal
chezun('iarveaduik.xii30. H y a dcux sortes de noyaux : grands noyaux
larvaires et petits noyaux imaginaux.
Ces deux catégories de noyaux ont été observées chez un grand nombre
d'Insectes. Ils ont donné lieu a de nombreuses discussions^.
Chez Hyponomeuta, on rencontre les petits noyaux déjà chez des
toutes jeunes chenilles ayant à peine quitté leur repos hivernal; les mus-
cles sont alors encore loin d'avoir acquis leur plein développement larvaire
(fig. XLXVIIf/).
1. Karawaiew (18 8) les a signalés pour la première fois chez une Fourmi : Lasius flacus. Il est amené à
considérer les gros noyaux comme des m yoblastcs larvaires ayant perdu de bonne heur<! la faculté de multiplication.
Les petits noyaux représentent les myoblastes imaginaux se multipliant i)0ur leur ju-opre compte pendant la
vie larvaire et surtout au début de la nymphose.
Telle est aussi l'opinion de ïkrre (1899), de Pérez ( .90", 191^, la. ), de Poyarkoff (1910).
BerlÉse (189 .'-1901) et ANGLAS (1902) pensent au contraire que les petits noyaux 'm forment au moment de la
métamorphose par fragmentation ou bourgeonnement des gros noyaux larvaires.
MÉTAMORPHOSE DE NVrOSOMErrA
173
Fio. xcvii. Coupe transversale d'un muscle thoracique
uioutrant un grand et des petits noyaux. Larve
à peine sortie de son sommeil hivernal, x 1400.
Nous allons désigner les petits
noyaux comme des noyaux imagi-
naux, les gros comme des noyaux
larvaires.
Les noyaux se présentent diffé-
remment selon les réactifs em-
ployés. Chez une jeune chenille
fixée au sublimé et colorée à l'hé-
matoxyline ferrique, les grands et
les petits noyaux se présentent sous forme d'une vésicule à chromatine
condensée en trois ou quatre gros amas situés au centre de la cellule.
Sur des coupes traitées préalablement par des fixateurs à base de formol
et colorées ensuite au glychémalun-éosine, la chromatine des noj^aux est
généralement dispersée uniformément et il y a un nucléole chez les larves
acf ves. Les petits noyaux sont un peu plus chromatiques que les gros mais
cette différence n'est pas toujours très sensible.
Durant la vie larvaire les petits noyaux se
divisent par voie directe, les couples des
noyaux se rencontrent frécpemment (fig. -ION, i).
Au moment de la mue survient la mul-
tiplication caryocinétique (Hg. 20.).
Quant aux gros noyaux ils ne se divi-
sent que directement (fig. xcviii. N). La posi-
tion des noyaux est très variable. Sur la sec-
tion longitudinale d'un muscle (fig. xcviii), ils
sont placés dans des renflements du sarco-
lemme. Certams renflements contiemient à la
fois des gros et des petits noyaux, les autres
ne renferment que les noyaux imaginaux ou les
noyaux larvaires.
Lorsque les noyaux sont situés sur les
deux faces du muscle, il arrive parfois que
les noyaux allongés se trouvent sur le côté
regardant l'hypoderme, les petits sur le côté
tourné vers la cavité générale.
Fio. XI. VIII. Coupe lon-itudinair Quclqucfois aussi on rencontre des noyaux
d'un muselé al>doniinal cluz une
larve adult<^ N, noyau larv; en au miUeu du musclc, ils sout alors plus étirés
voie de division direete ;*/, novau . , ... , , . , , .
imaginai, x 1130. ©t moms chromatophilcs que les périphériques.
174 J/'"^' A. HUFNAdEL
Muscles abdominaux profonds
Berlèse (1901) a observé chez Sericaria mon' certains muscles abdo-
minatix persistant chez l'imago. Dans ce cas. jamais les noyaux n'indivi-
dualisent autour d'eux de sarcoplasme. ni ne présentent de division
caryocinétique.
PÉREZ (1911) a noté une évolution semblable pour quelciUes muscles
abdominaux de la Guêpe. Dans ce dernier cas, les muscles perdent au
cours de la nymphose leur striation transversale, ils gardent au contraire
la différenciation fibrillaire.
Chez Hyponomeuta, i n certain nombre de muscles passent également
de la larve à l'imago sans subir de modifications importantes. Tels sont
les muscles tégumentaires longitudinaux de la couche profonde de l'ab-
domen.
Chez la chenille, ces muscles ne diffèrent point des autres. Ils sont
éosinophiles. Leurs fibres sont
^^ «•.. ^ ..- ^ , intimement accolées sur toute
leur longueiu-, La double stria-
.^>» tion est nette. Les noyaux,
^^ aussi bien les gros que les petits,
^1 ont une situation périphérique.
^^! Ils sont arrondis ou ovalaires.
Leurs granulations chromati-
3^^ ques sont assez serrées.
Au début de la nymphose,
FiG. XCIX. a, &, c, d, Différents modes de division directe des , -, . .
noyaux larvaires. Explication dans le texte. CeS mUSCleS deviemieut plUS
courts et plus larges. Les
noyaux commencent à pénétrer dans la profondeur du muscle ; là, ils
s'étirent et, en même temps, changent d'aspect, leur chromatine, qui
était dense, se dispose en granulations petites, distinctes les unes des
autres et l'enlevant sur le fond clair des noyaux. Ceux-ci ne s'entourent
jamais du cytoplasme et ne se multiplient pas par caryocmèse.
Par contre, ils présentent de très nombreuses figures de division
directe, soit par bourgeonnement, soit par clivage. Dans ce dernier cas, on
voit apparaître au milieu du noyau une aire claire, exempte de chromatine.
C'est à cet endroit (|ue le clivage s'opérera (fig. xcrx r, d).
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA
175
Plusieurs nucléoles peuvent apparaître tlans un noyau (6) qui donnera
ensuite autant de petits noyaux C[u"il y avait de nucléoles.
La division terminée, les noyaux s'éloignent, s'accroissent et se nndti-
plient de nouveau.
11 est difficile de dire si ces noyaux émigrés dans la profondeur du
muscle sont des noyaux larvaires ou des noyaux imaginaux accrus. Ils
atteignent de grandes dimensions;
leur taille est beaucoup plus élevée
que celle des noyaux imaginaux
périphériques et celle des noyaux
larvaires périphériques (fig. c).
Dans les muscles où les transfor-
mations sont plus accentuées, ce
sont, d'ime façon générale, les
noyaux imaginaux qui pénètrent
dans la profondeur de la fibre ; dans
le cas qui nous occupe maintenant
et où il s'agit d'un faible remanie-
ment, il est moins facile de distin-
guer si les noyaux immigrés sont des
noyaux larvaires ou des noyaux
imaginaux notablement accrus.
Les noyaux périphériques, aussi
bien les gros que les petits, se mul-
tiplient également, mais, pas plus
que les noyaux profonds, ils ne
s'entourent de cytoplasme et comme
eux ils ne prolifèrent que par voie
directe. Ils sont devenus très chromatiques. Ils se divisent par étrangle-
ment ou par clivage. Parfois un gros noyau devient très irrégulier et
bourgeonne de petits noyaux.
A l'éclosion de l'imago (fig. c a), les muscles en question sont restés
larges, éosinophiles, striés. Les fibres ne sont pas aussi intimement accolées
les unes aux autres qu'elles l'étaient chez la larve et les disques transver-
saux sont souvent interrompus.
Les noyaux profonds sont clairs et allongés.
Les noyaux périphériques, aussi bien les gros que les petits, sont
très compacts.
u^.
ù.
Fui. c. ". Muscle abdominal profond chez iine jeune
iiiuiso ; h, même muscle chez une imago âgée.
Coupe lonjiitHdinale. x 700.
AucH. DE Zoor,. i:xp. KT (JÉs. — T. 57.
12
176 J/"H^ ^4. HUFNAOEL
Ces muscles ne sont cependant pas fonctionnels, et chez l'imago âgé,
ils sont en état de régression.
Ils ont beaucoup diminué de largeur (comparer a et 6 de la fig. c),
la fibriUation longitudinale et la striation transversale ont complètement
disparu. Le myoplasme même n'est plus visible, sauf au voisinage des
noyaux où il persiste {h). Ces derniers, aussi bien les profonds que les
périphériques, sont maintenant très petits.
Muscles abdominaux périphériques
Tandis que les muscles tégumentaires abdominaux profonds gardent
leur aspect larvaire chez l'adulte, ceux de la couche externe évoluent vers
la structure imaginale. Je prendrai comme type de ce remaniement sur
place un des muscles longitudinaux qui sont situés sur les deux côtés de la
face dorsale du deuxième segment abdominal de la larve. La figure 20
nous montre une section faite dans le sens de la longueur du muscle
chez une chenille immobilisée au début de la nymphose. La double stria-
tion transversale se dessine nettement. Les noyaux, les grands comme les
petits, sont situés de préférence dans des hernies latérales du sarcolemme.
A ce stade, une différence d'aspect est manifeste dans ces deux sortes
d'éléments. Dans les noyaux larvaires, les granulations chromatiques sont
très serrées et le fond même du noyau est chromatophile. Dans les noyaux
imaginaux, les granulations chromatiques sont espacées et le fond
nucléaire est clair.
Les divisions mitotiques des petits noyaux sont très fréquentes
(fig. 20). Un noyau s'accroît, individualise autour de lui une petite portion
de sarcoplasme assez chromatique et entre immédiatement en caryo-
cinèse. Les cellules myoblastiques à l'état de repos nucléaire sont très
rares, je n'en ai rencontré que deux. Généralement, les noyaux ne s'en-
tourent du cytoplasme qu'au moment de la division.
Nous voyons sur la figure 20 im myoblaste au stade de l'anaphase.
A côté se trouvent deux petits noyaux accouplés. Cette disposition par
paires de noyaux imaginaux est assez fréquente, elle est vraisemblable-
ment due à une division directe. Ainsi les deux modes de multiplication
se poursuivent simultanément chez la larve immobihsée.
Quant aux éléments larvaires, ils se divisent également mais toujours
par voie directe. On voit sur cette même figure un de ces noyaux au début
de son étranglement [N. L).
MÊTAM0HJ*I10SE DE HYPONOMEUTA
177
m^
Un autre phénomène s'observe encore chez la larve unmobilisée. Les
noyaux qui jusqu'à ce moment étaient de préférence distribués à la sur-
face extérieure du muscle commencent à pénétrer dans sa profondeur,
ils deviennent alors allongés. Nous avons déjà vu un fait semblable se
produire dans les muscles de la couche profonde et dans ce cas nous
avons observé que les noyaux qui se rencontrent à l'intérieur du muscle
sont très volumineux. 11 n'en est pas ainsi pour les muscles remaniés que
nous étudions à présent. Ici ce sont les petits
noyaux imaginaux qui s'enfoncent dans la pro-
fondeur.
La mue nymj^hale intervient et les phéno-
mènes décrits conthiuent à se manifester.
Dans la partie profonde du muscle, le
nombre des petits noyaux est considérable.
Vers la moitié de la première journée après la
mue nymphale et tandis que le muscle garde
encore sa striation transversale, les noyaux
imaginaux profonds s'enveloppent d'une couche
de cytoplasme légèrement chromatophile et se
transforment en des myoblastes effilés à leurs
deux extrémités. Sur les préparations, on les
rencontre isolés ou bien réunis entre eux par
leurs prolongements myoplasmiques (fig. dm).
Ils sont toujours situés jmrallèlcment à la lon-
gueur du muscle. Les dimensions de ces cellules
sont très variées, certaines sont plus petites que
les noyaux imaginaux restés périphériques.
La substance contractile disparaît au contact des myoblastes et le
muscle dès lors présente des crevasses (fig. ci).
Au deuxième jour après la mue nymphale, le muscle perd sa striation
transversale, tandis que la fibriUation longitudinale persiste encore
quelque temps. La figure 12 montre le muscle à ce stade (j'ai indiqué la
fibriUation longitudinale par quelques traits). Le muscle devient légè-
rement chromatophile. Les myoblastes prolifèrent.
Au début du troisième jour, on ne distingue plus le sarcolemme, en
même temps, la fibriUation longitudinale disparaît, le muscle devient fran-
chement chromatophile. En s'appropriant une partie du sarcoplasme
et en s'insinuant entre les fibrilles, les myoblastes provoquent la dislo-
Fio. CI. Coupe lougitudinak- il un
muscle abdominal superficiel.
m myoblaste. Nymphe de
vingt-quatre heures. X l]:îO.
178
il/"^e A. HUFNAGEL
cation du mviscle (fig. 23) qui se clive en colonnettes minces et serrées
figcii). La relation entre l'existence des cellules myoblastiques et le phé-
nomène de clivage est manifeste. Dans les muscles de la couche profonde
où les noyaux ne s'entourent jamais d'une portion de cytoplasme, le cli-
vage n'a pas lieu.
Les myoblastes libérés entre les colonnettes prolifèrent (fig. cii).
Leur multiphcation effectuée, ils se fusionnent avec les fibrilles, s'éclair-
cissent et à partir de ce moment ne se divisent plus que par voie directe,
soit binaire, soit multiple.
Cependant, tous les noyaux imaginaux ne se sont pas transformés
en cellules myoblastiques, certains persistent
à l'intérieur de colonnettes et se divisent sur
place amitotiquement.
Quant aux gros noyaux larvaires, certains
sont expulsés lors du clivage à l'extérieur de la
fibre où ils deviendront la proie des phago-
cytes. Cependant, ce n'est que la plus faible
partie d'entre eux qui subit une telle destruc-
tion.
Le plus grand nombre de ces éléments per-
siste ; on les trouve dans les colonnettes déjà
chvées et comme, d'autre part, on n'observe
jamais de chromatolyse à l'intérieur d'une
fibre, il faut croire que ces gros noyaux se
transforment en petits noyaux définitifs. Les
aspects variés que l'on rencontre rendent cette hypothèse très admis-
sible. Un gros noyau en se cHvant peut donner naissance à plusieurs
plus petits. Par exemple, sur la figure xcix (c. (L) nous en voyons un divisé
en deux parties, un autre en trois. On peut facilement s'imaginer que ce
clivage continuant et les noyaux devenant de plus en plus petits, il arri-
vera un moment où on ne pourra plus les distinguer des noyaux ima-
ginaux.
D'autre part, un gros noyau peut d'emblée se fragmenter en une série
de petits. On rencontre en effet dans certains noyaux (fig. xcix b) plu-
sieurs nucléoles (trois ou quatre par exemple) et autour de chacun d'eux
s'individualisera une portion de la chromatine. Ceci est semblable à ce
que nous avons décrit à propos des muscles profonds {Cf. p. 174).
C'est vers la neuvième ou dixième journée que commence à apparaître
Flfl. Cil. Coupe longitudinale d'un mus-
cle abdominal superficiel en voie
d'évolution. La striation transver-
sale et la flbrUlation longitudinale
ont disparu. Le muscle s'est clivé
en colonnettes parmi lesquelles
circulent les myoblastes. n, noyau
imaginai; c. caryocinèse. Nymphe
de trois jours, x 1400.
MÊTAMOBPHOSE DE HYPONOMEUTA 179
la stnictiire fibrillaire et la striation transversale. Les fibres ne s'accroissent
plus beaucoup, elles restent minces à l'état imaginai.
Le muscle devient éosinophile, son sarcoplasme se dessine.
Quant aux noyaux, certains sont déjà devenus profonds tandis que
beaucoup d'entre eux sont encore superficiels. Ils continuent de se diviser
par étranglement.
Ce processus de remaniement Cj[ue nous venons de décrire est général
pour tous les muscles tégumentaires abdominaux de la couche externe ;
cependant, chacun d'eux pourra présenter au cours de sa métamorphose
des variations individuelles. Ainsi, pour n'en citer qu'un exemple, on ren-
contre au voisinage des muscles longitudinaux du premier segment abdo-
minal de très nombreuses sphères de granules ; peut-être dans ces muscles
les gros noyaux larvaires disparaissent-ils en plus grand nombre.
Muscles thoraciques à évolution tardive
Chez Hyponomeuta, les muscles thoraciques n'évoluent x>as tous de la
même façon ni dans le même temps. Les muscles tégumentaires périphé-
riques et quelques muscles profonds commencent à se différencier de bonne
heure. La plupart de ceux qui se trouvent situés plus profondément
gardent leur caractère larvaire jusqu'au deuxième jour après la mue nym-
phale.
C'est par les muscles à évolution tardive que je commencerai cette
étude ; elle nous sera facilitée par celle que nous avons faite au préalable
des muscles abdominaux périphériques.
Chez la larve, sur la face ventrale du deuxième segment thoracique,
il y a de chaque côté du corps un groupe de six muscles longitudinaux.
Ils présentent la double striation transversale et les deux catégories de
noyaux caractéristiques.
Chez la jeune nymphe, tout le corps se rétracte et de ce fait les muscles
se trouvent plus rapprochés de la chaîne nerveuse. Sur une coupe trans-
versale, on voit qu'ils sont situés latéralement par rapport au ganglion
nerveux, dans une position tantôt un peu dorsale par rapport à lui, tantôt
au même niveau. Leur situation permet de les reconnaître à des stades
différents de leur évolution.
Sur la coupe transversale, on distingue dans chaque groupe quatre
muscles dont la situation est profonde et deux autres qui sont un peu plus-
superficiels.
180
if me A. HUFNAOEL
Les différents muscles, tout en étant rapprochés entre eux, gardent
leur individualité pendant un certain temps, puis finissent par se confondre.
La figure cm nous montre la coupe longitudinale d'un des muscles
profonds vers la fin de la première journée après la mue nymphale. La
striation transversale se dessine encore, mais avec peu de netteté. Les
disques sont plus rapprochés qu'ils ne l'étaient chez la larve. La fibrillation
longitudinale est devenue très nette. (Je n'ai pas représenté toutes ces
particularités sur mon schéma. Les gros
noyaux larvaires (N.) y sont rares, par
contre les noyaux imaginaux {)i.) sont
nombreux et situés de jjréférence sur
l'une des faces du muscle, certains sont
en train de se multiplier (c).
Dans les muscles superficiels, les
gros noyaux larvaires se rencontrent
plus fréquemment.
Vers la fin de la deuxième journée,
après la mue nymphale, les muscles ont
perdu leur striation transversale, ils
sont devenus chromatophiles ; les mus-
cles superficiels le sont un peu moins
que ceux situés profondément. Dans les
uns et les autres, les myoblastes com-
mencent à s'individualiser, quelques-
uns prolifèrent. La figure 23 de la plan-
che V qui représente la coupe d'un
muscle abdominal peut également s'ap-
pliquer aux muscles thoraciques qui
nous occupent maintenant. La figure civ montre une portion d'un
muscle superficiel thoracique. Nous y voyons trois myoblastes (m), le
iiiyoplasme a disparu à leur contact.
On distingue sur la même figure plusieurs noyaux larvaires (N), l'un
d'eux s'est transformé en un paquet de petits noyaux imaginaux {N. i.)
Chez la nymphe de trois jours, les muscles profonds se sont chvés en
libérant les myoblastes (fig. 28).
^.-.r
1^:^^
Fig. cm. Coupe longitudinale d'un muscle tho-
racique à évolution tardive. Les petits
noyaux myoblastiques sont très nombreux
/ . ; un d'eux est en train de se diviser
par voie caryocinétique. :•: 1130.
1. Si l'on compare ces myoblastes avec les cellules que Pospielow interprète comme des cellules trachéales,
(voir flg. 09 de PospiEi.ow) on arrive à cette conclusion qu'il s'agit là d'éléments analogues. TI est donc possible
que l'évolution des muscles des Bomhycides ne diffère pas sensiblement de celle d'Hi/iionomeuUi.
METAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA
181
r/v.
Dans les muscles superficiels, l'individualisation des myoblastes ne
joue qu'un faible rôle. Nous avons déjà vu que les gros noyaux larvaires
étaient particulièrement abondants dans ces muscles ; on les retrouve en
grand nombre à l'intérievir des fibres clivées. Ils présentent des aspects
très variés. Certains d'entre eux semblent bourgeonner activement et
donner de petits noyaux plus ou moins nombreux (fig, 24, 25 et 26).
Sur la figure 26 les petits noyaux sont encore réunis entre eux. Le bas
de la figure 25 présente de nombreux noyaux
distincts les uns des autres ; ils proviennent sans
doute de la dislocation d'un groupement ana-
logue à celui que j'ai décrit précédemment
(fig. 26). Ceci peut être un stade ultérieur du
bourgeonnement .
Les petits noyaux résultant du bourgeonne-
ment d'un noyau larvaire ne s'individualisent
pas en des cellules myoblastiques ; ils persistent
à l'intérieur de la fibre en donnant directement
les noyaux imaginaux ^
Si quelques-uns des noyaux larvaires échap-
pent ainsi à la destruction, un grand nombre
d'entre eux cependant disparaissent définitive-
ment. Sur les figures 24 {chr.) et 25 {a) de la
planche V, nous voyons parmi les noyaux pré-
sentant un aspect normal, d'autres dont l'état
pycnotique ne laisse aucun doute.
La dégénérescence des noyaux et d'une por-
tion de la substance musculaire même devient
encore plus évidente sur d'autres coupes.
Ext.mironr, une coupe longitudinale d'une nymphe âgée de trois
jours. Sur la portion gauche de cette figure (27), nous voyons des frag-
ments des muscles superficiels atrophiés et de nombreux phagocytes
{ph., p., ph. /., s g.) qui circulent parmi eux. Ils sont de tailles variables,
en rapport avec le nombre et le volume de leurs inclusions. Celles-ci
sont formées par des amas de chromatine plus ou moins condensée,
entourée ou non d'une substance se colorant en violet par l'hématéïne.
Fio. Civ. Coupe longitudinale d'un
muscle thoracique à évolu-
tion tardive, m, myoblaste.
Nymphe âgée de quarante-huit
heures, x 1130.
1. Il y a ici sans doute quelque chose d'analogue à ce que Anolas a observé chez la Guêpe. « Les noyaux lar-
vaires produisent également par division directe (fragmentation ou bourgeonnement), des éléments nucléaires
Ix^aucoup plus petits, qui ne quittent point la fibre et constitueront les noyaux imaginaux. »
182 J/'"^ A. HUFNAGEL
Sur la même figure on voit un phagocyte en forme de croissant {p)
englobant une énorme portion de substance dégénérée, tandis qu'au-
dessus de lui un phagocyte voism {pk. /.) s'est complètement replié sur
lui-même en enfermant son inclusion.
Pendant ce temps, les différents muscles du même groupe se sont
beaucoup rapprochés.
On peut rencontrer côte à côte des fragments miisculaires en dégé-
nérescence appartenant aux muscles superficiels du groupe et des ébauches
musculaires qui se sont formées aux dépens des muscles profonds du
groupe (fig. 27, pi. V, 7i. i.).
En présence de cette différence d'aspect, on serait tenté de considérer
les colonnettes chromatophiles {n. i) comme des fibres de néoformation
évoluant à partir des myoblastes embryonnaires.
L'alternance des phénomènes d'histolyse et d'histogenèse, que nous
avons constaté, a pu induire les auteurs en erreur, et leur faire croire à la
disparition entière des muscles de la larve.
Cependant, en explorant attentivement les colonnettes chromato-
philes, on retrouve toujours des gros ntyaux attestant qu'il s'agit bien
des muscles larvaires en voie de remaniement (fig. 27, 28).
Les myoblastes qui, lors du chvagé du muscle, ont été mis en Uberté
dans les espaces interfibriUaires, se multiplient activement (fig. 28). Plus
tard, ils s'accollent aux fibres.
Les colonnettes qui, au début, étaient très serrées ne laissant que peu
d'espace hbre entre elles, s'écartent de plus en plus, livrant ainsi passage
aux leucocytes et aux phagocytes ; le rôle principal de ces derniers paraît
être surtout d'amener les substances nutritives aux fibres en évolution.
Mais ils englobent également les boules de dégénérescence provenant des
gros noyaux larvaires.
Les colonnettes ne se fusionnent pas entre elles ; elles persistent telles
quelles en s'épaississant et se transforment en autant de fibres imaginales
qu'il y avait de fuseaux. Elles n'atteignent jamais la taille des muscles
pectoraux. A l'état définitif, ils ont l'aspect d'un cylmdre nettement strié
et dont les noyaux sont en partie axilaires, en partie périphériques. Ils
continuent à se multiplier chez l'imago.
En ce qui concerne les gros noyaux larvaires, ceux qui appartiennent
aux fibres profondes du groupe se comportent de la même manière que les
noyaux des muscles abdominaux que nous avons déjà étudiés, c'est-à-dire
en se clivant (fig. xcix c,d), ils se transforment en des noyaux définitifs ;
MÉ TA MORPHOSE DE H YPONOMEUTA 1 8:^
quelques-uns tombent lors du clivage du muscle dans la cavité générale
et là sont phagocytés.
Pour les fibres superficielles du groupe, il est certain qu'une grande
partie de no^^aux larvaires disparaissent en même temps que le myo-
plasme même.
A en juger d'après les préparations des njnnphes de trois jours, on peut
admettre que certains de ces noyaux, par un bourgeomiement actif , se
transforment en un paquet de noyaux imaginaux et échappent ainsi à la
mort (fig. 25, 26). Je m'empresse cependant d'ajouter que, dans bien des
cas, on pourrait interpréter ces aspects irréguliers des gros noyaux non
comme un débat de fragmentation en de petits noyaux, mais comme
un début de chromatolyse du gros noyau même.
Nous nous trouvons ici dans un cas analogue à celui que Ch. Pérez
(1911) a décrit pour certains muscles de PoH<itefi. Il dit, p. 75 : « ... Dans
l'une des colonnes de myoplasme, on voit un ancien noyau qui prend
une forme bourgeonnante. Peut-être ce noyau se divise-t-il ensuite direc-
tement en petits noyaux imaginaux. Peut-être aussi n'est-ce là que l'an-
nonce d'une dégénérescence... »
En somme, l'évolution de ces muscles rappelle dans ses traits généraux
celle des muscles abdominaux de la couche externe. Ici cependant, l'alter-
nance des fibres (riches en noyaux imaginaux) qui persistent en évo-
luant et d'autres (pauvres en lu^yaux imaginaux) C{ui disparaissent pres-
que entièrement, rend plus difficile la compréhension de leur métamor-
phose.
Muscles thoraciques à évolution précoce
J'étudierai maintenant les muscles thoraciques à transformation tar-
dive. Les muscles du vol et les muscles extrinsèques des pattes nous servi-
ront comme types. Je prendrai comme point de départ un des muscles qui
chez l'imago donneront les muscles vibrateurs longitudinaux. Chez la
jeune larve, ils ne diffèrent pas beaucoup de ceux. profonds, dont le rema-
niement est plus tardif. Ils présentent comme ceux-ci de gros et de petits-
noyaux ; ces derniers sont peut-être seulement un peu plus nombreux que
dans les autres muscles du corps. Chez la larve âgée, lorsqu'elle a cessé
de manger et au moment où elle rejette son 'intestin, on voit apparaître
dans ces muscles des cellules particulières à cytoplasme dense et chro-
matic^ue, à noyaUx volumineux.
L'aspect de ces cellules et levu' évolution ultérieure permettent d'ad-
184 il/'»e A. HUFNAGEL
mettre qu'il s'agit ici des myoblastes. Cependant, par leur forme et leur
situation par rapport au muscle, ils diffèrent beaucoup des myoblastes
que l'on rencontre dans les muscles abdominaux et dans les muscles thora-
ciques que nous avons étudiés précédemment (v. fig. 23 m, fig. ci).
Nous avons vu que dans ces derniers les myoblastes sont toujours
parallèles au muscle. Le contraire a lieu ici ; les myoblastes sont disposés
transversalement au muscle. Ceci se voit bien sur la figure 29 qui représente
une coupe mi-rasante du futur muscle vibrateur longitudinal. Cette figure
rappelle celle (fig. 231) de Beelese relative au PoUstes.
La situation perpendiculaire des myoblastes (sarcocytes) par rapport
au muscle est semblable dans les deux cas.
Dans les deux cas aussi, il s'agit des éléments qui ont pris naissance
à l'intérieur même du muscle. Seulement Berlese croit à tort qu'ils se
sont tous formés aux dépens des gros noyaux larvaires c[ui se seraient
fragmentés. J'ai eu déjà l'occasion de signaler l'existence de petits noyaux
imaginaux chez les toutes jeunes larves (v. fig. xcvii).
Pour PospiELOW, les cellules qu'il rencontre dans le muscle, chez la
larve âgée, ont une signification tout à fait autre. Ce sont des cellules
mésenchymateuses, des cellules trachéales, des cellules à noyaux granu-
leux. Ne serait-il pas possible que, sous ces différentes dénominations,
PospiELOW confonde les myoblastes ? On pourrait le croire d'après ses
figures 56 et 58.
Revenons maintenant à la figure 29. Elle nous montre que les
myoblastes sont situés principalement sur une des faces du muscle strié.
Leur réunion correspond au « Kernstrang » de Korotneff. Cependant,
la substance musculaire (faisceau primitif) ne se résorbe pas comme
le pense Korotneff, elle est utilisée dans l'édification des muscles nou-
veaux.
Les myoblastes (fig. 29 et fig. 31), aussi bien ceux qui se trouvent à la
périphérie que ceux qui sont situés profondément dans le muscle, pro-
lifèrent activement. En même temps, ils s'insinuent entre les fibres et
provoquent leur clivage. A ce moment, le muscle est encore éosinophile
et a conservé sa striation transversale (fig. 29) ; celle-ci est particulièrement
nette au voisinage de l'insertion du muscle sur l'hypoderme. Elle s'atté-
nue lorsqu'on s'en éloigne. Les grands et les petits noyaux se voient
nettement. La figure 31 ne nous montre que ceux de la deuxième caté-
gorie, mais les gros noyaux se voient distinctement sur les coupes sui-
vantes.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA 185
Chez la larve prête à se nymphoser, la striation a complètement dis-
paru, le muscle est séparé en. de minces traînées chromatophiles (fig. 30)
contenant des noyaux pauvres en chromatine («, i.). Il est difficile de dire
si ce sont des noyaux n'ayant pas quitté la fibre ou des noyaux pro-
venant des myoblastes qui lui sont fusionnés. On trouve en effet déjà à
ce moment des myoblastes (m) accolés aux colonnettes. D'autres errent
entre les fibrilles et continuent à se multiplier.
A ce moment, les ébauches musculaires sont très différentes des anciens
muscles de la chenille. Cependant, leur insertion sur l'hypoderme et les
gros noyaux (i\". /.) qui persistent de place en place permettent de
déceler leur provenance. A ce stade d'évolution, la complication d'as-
pect des coupes a pu en faciliter une fausse interprétation et faire consi-
dérer ces muscles comme dus à une néoformation complète. Nous avons
vu qu'il n'en est rien.
On pourrait peut-être objecter que les gros noyaux se rencontrent
trop rarement pour servir de preuve à l'origine larvaire de ces formations.
Maisi si l'on considère que, par suite de la multiplication intense et conti-
nuelle des myoblastes, les ébauches des futurs muscles du Papillon sont
déjà énormes par rapport à ceux de la chenille, on conviendra que le
nombre de noyaux larvaires ne peut être que très minime par rapport
aux autres, imaginaux.
La mue nymphale intervient. Chez la jeune nymphe, les massifs mus-
culaires occupent déjà la position qu'ils auront chez l'adulte.
Ainsi, on reconnaît très tôt les futurs muscles longitudinaux vibrateurs
et les dorso-ventraux extrinsèques des pattes dont l'insertion larvaire
sur l'hypoderme est encore restée intacte.
La prolifération des raiyoblastes continue, elle atteint son maximum
d'intensité chez les nymphes de trois jours. La figure 32 nous en donne
un exemple ; elle représente une portion du futur muscle dorso-ventral
du troisième segment thoracique. Nous y voyons sur un espace relati-
vement petit six caryocinèses.
En même temps, d'autres myoblastes (m) ayant déjà achevé leurs divi-
sions répétées s'appUquent contre les colonnettes. Une fois fusionnés
avec elles, leurs noyaux changent d'aspect ; par suite d'une disposition
différente de la chromatine, ils sont devenus plus clairs qu'ils ne l'étaient
à l'état libre.
On distingue alors dans les fibres des noyaux peu chromatic^ues, très
finement granuleux (fig. 18 n. i.) et situés le plus souvent sur une des faces
186 ■ J/'"e A. HUFNAGEL
de la fibre (fig. 32 n. t.). Ces noyaux sont isolés ou bien disposés par couples,
ou par lignées de plusieurs noyaux. Mais très souvent on voit de longues
traînées parsemées de fines granulations et dans lesquelles il devient
impossible de distinguer des limites nucléaires (fig. 32). Il s'agit ici
probablement d'un noyau myoblastique qui s'est ainsi accru pour se
diviser ensuite d'une manière multiple et donner d'emblée \ine lignée de
petits noyaux.
A partir de la troisième journée après la mue nympliale, les colonnettes
jusqu'alors très serrées entre elles, s'écartent un peu et permettent ainsi
l'afflux des phagocytes. Ces derniers jouent d'une part un rôle nutritif en
apportant les substances nécessaires à l'accroissement des fibres en évolu-
tion, d'autre part un rôle évacuateur en englobant les déchets divers
provenant de ces mêmes fibres. En efifet, jusqu'à ce moment les produits
de dégénérescence se rencontraient rarement. Ce n'est que lorsque l'évo-
lution musculaire est déjà avancée que les produits non utilisés sont éli-
minés. Sur la figure 32 qui représente une portion des muscles dorso-ven-
traux chez une nymphe de trois jours, on voit de volumineux amas d'une
substance éosinoj)hile granuleuse, contenant des boules chromatiques de
formes variées (s). Des aspects similaires se rencontrent dans les muscles
longitudinaux vibrateurs.
Ces amas en voie de destruction se rencontrent jusqu'à un stade assez
avancé, ils sont encore très fréquents chez les nymphes de six et sept
jours. Sur la figure 10 {s), nous voyons parmi les fibres une de ces forma-
tions où la chromatine en pycnose est éparpillée dans la substance éosi-
nophile même.
Sur le dessin de la coupe, on voit seulement deux leucocytes (/) attenant
à la masse cytoplasmique. mais sur les couj)es suivantes, leur nombre est
beaucoup plus considérable autour de la substance dégénérée. Parfois
aussi des noyaux leucocytaires se rencontrent à l'intérieur même des
déchets musculaires. En dernier lieu, les phagocytes bourrés de corps
éosinophiles et chromatophiles se transforment en des sphères de gra-
nules (fig, 18 sg.). Il est probable que la substance nutritive provenant
des déchets musculaires élaborés par les phagocytes est ensuite réem-
ployée par les muscles en accroissement.
Pendant ce temps, les ébauches musculaires, elles-mêmes, se sont
transformées. Vers la quatrième journée après la mue nymphale, les
divisions indirectes des myoblastesMe viennent plus rares. On ne les ren-
contre plus au cinquième jour. L'accolement des myoblastes se poursuit
y^
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA 187
toujours. Vers le septième jour, leur réunion arec les fibrilles s'étant
effectuée, il n'y a plus de niyoblastes libres entre les colonnettes (fig. 19).
Celles-ci ont beaucoup augmenté de taille par suite de leur fusion avec les
myoblastes. Leur croissance continue encore longtemps après cette fusion.
A partir du sei)tième jour, les ramifications trachéennes commencent
à envahir les fibres. Leur pénétration a heu par des prolongements cj^toplas-
miques, venant s'insinuer au-dessous du sarcolenime. Les cellules termi-
nales des trachées restent toujours externes par rapport à lui.
Vers le dixième jour de la nymphose, la striation transversale apparaît,
les fibres se sont notablement éloignées les unes des autres et dans ces
espaces intermusculaires cheminent les leucocytes et les cellules grasses.
Les noyaux musculaires petits et peu chromatiques sont d'abord tout à
fait périphériques et soulèvent le sarcolemme, puis pénètrent plus pro-
fondément ; à partir du treizième jour, la surface de fibres musculaires
devient uniformément lisse. Les divisions directes des noyaux imaginaux
continuent même chez l'imago et les noyaux accouplés sont très fréquents.
On peut aussi trouver au centre de la fibre une longue traînée nucléaire
dans laquelle les limites nucléaires restent indistinctes. C'est en somme une
disposition de noyaux analogue à celle que nous avons vue dans la fibre
non encore différenciée (fig. 32j.
Un point doit encore nous retenir. Que sont devenus les gros
noyaux larvaires ?
Il est encore plus délicat de répondre à cette question pour les
muscles thoraciques à évolution précoce, cpie pour les muscles abdomi-
naux et les muscles thoraciques à évolution tardive. En effet, dans ces
derniers, nous avons vu les gros noyaux se cliver (fig. xcix) ou bien bour-
geonner brusquement vm grand nombre de petits noyaux (fig. 25, 26).
Dans les muscles thoraciques à évolution précoce, je n'ai pas rencontré
d'aspect aussi net.
Il est possible cpi'un certain nombre de ces gros noyaux dégénèrent.
Mais il est probable qu'ils ne disparaissent pas tous de cette façon au
cours de la métamorphose.
Revenons pour un moment à la figure 30 représentant une portion
d'un muscle chez une larve immobihsée depuis plusieurs jours. Nous voyons
le chvage intéresser non seulement les fibres, mais aussi un gros noyau
qui est en partie déjà divisé dans sa longueur [N. /.\ Les fragments des
noyaux entourés d'une zone de cytoplasme peuvent à la suite d'un ch-
vage sembable glisser entre les colonnettes et là tomber en dégénérescence.
188 .¥'"'' A. HUFNAGEL
Cependant, chez les larves au repos et chez les toutes jeunes nymphes
(première journée), les boules de dégénérescence se rencontrent peu fré-
quemment parmi les colonnettes. Comme d'autre part les gros noyaux lar-
vaires sont de plus en plus rares ( j 'en ai trouvé par hasard chez une nymphe
de trois jours . fig. 1 8 A^. /.) , et à la fin disparaissent complètement, on pourrait
supposer qu'ils se transforment parfois eux-mêmes en noyaux imaginaux.
Il faudrait alors admettre que les gros noyaux larvaires changent
d'aspect, que leurs granulations chromatiques s'éclaircissent au Ueu de
rester serrées entre elles, que le fond des noyaux devient pâle au Heu d'être
chromatophile. Ces noyaux ainsi transformés se diviseraient ensuite en
petits noyaux définitifs.
Il est en effet souvent difficile de dire si une traînée nucléaire, comme
on en rencontre fréquemment dans les fibres en évolution, représente un
ancien noyau larvaire fragmenté ou un myoblaste fortement accru et non
encore divisé. Comme on le voit, la question est difficile à résoudre. Ici
aussi un rapprochement peut être étabU entre Hyponomeuta et la Guêpe.
Voici ce que dit Pérez de ces gros noyaux (p. 78) : « Que deviennent
les gros noyaux larvaires ? Ici encore je n'apporterai point une solution
complète et définitive, en raison de la variété extrême de tailles des
noyaux en voie de division directe que Ton trouve au sein des plages mus-
culaires, et de l'impossibilité où Ton se trouve par suite, de décider sans
ambiguïté si l'on est en présence d'un noyau larvaire ou d'un noyau myo-
blastique démesurément accru.
« En effet, une fois que les myoblastes imaginaux se sont iusionnés
avec les plages musculaires, ils peuvent présenter un accroissement
extraordinaire avant de se diviser ; ainsi ils s'étirent en longues traînées
(fig. 74, 96) dont il est difficile de fixer le maximum de taille, car on les
voit souvent sortir de l'épaisseur de la coupe avant d'avoir atteint leur
terminaison naturelle.
« Aussi, en présence d'un large noyau en voie de division multiple,
et qui va donner simultanément tout un essaim de petits noyaux
(fig. 75, 97), on est en droit de se demander s'il s'agit vraiment d'un cas
extrême du phénomène précédent, ou tout simplement de la division
multiple d'un noyau larvaire^. »
1. Chez la Galéruquc de l'Orme, Poyarkoff (1911) n'admet pas la division des gros noyaux larvaires en petits
noyaux imaginaux.
Dans ce cas les noyaux imaginaux se fragmentent au moyen de vacuoles, tandis que les noyaux larvaires
se divisent par étranglement. L'auteur ne croit pas que les noyaux amitotiqucs (larvaires) puissent changer leur
mode de division. Ceci lui permet d'affirmer que les muscles imaginaux sont formés uniquement aux dépens des
noyaux mitotiques et que tous les noyaux amitotiqucs sont englobés par les phagocytes.
MÉTAMORPHOSE DE H Y FOX OM EUT A 18Î)
Résumé
Quelques muscles chez Hyponomeiita disparaissent pendant la
métamorphose (p. ex. les muscles adducteurs de la mandibule).
La plupart d'entre eux passent à l'imago.
Dans les muscles remaniés qui nous ont servi de tjrpe (muscles du
vol, muscles thoraciques profonds, muscles abdominaux superficiels et
aussi dans les muscles adducteurs du pharynx), l'évolution suit une
même loi générale. Les petits noyaux imaginaux s'individualisent et
constituent des myoblastes qui, s'insinuant entre les fibrilles du muscle,
provoquent sa dislocation en colonnettes. Les myoblastes prolifèrent
caryocinétiquement puis se fusionnent avec les fibres. A partir de ce
moment, ils ne se divisent plus que par voie directe.
Comme nous l'avons vu, la question des gros noyaux larvaires est très
compliquée et difficile à élucider. Une partie de ces gros noyaux disparaît
par dégénérescence. Certains d'entre eux persistent et, par division directe,
domient naissance à des noyaux imaginaux. Il ne faut pas cependant
attribuer à cette fragmentation le sens exclusif que lui donne Berlese.
Comme je l'ai déjà dit, d'après cet auteur, tous les noyaux imaginaux
tirent leur origine des noyaux larvaires, tandis qu'il résulte de ce que j'ai
pu observer que les petits noyaux ont, dès le début de la vie larvaire, une
individuahté très nette. Dans la formation des noyaux imaginaux, les
gros noyaux n'interviemient que pour une faible part.
La métamorphose des muscles chez les Lépidoptères {Hyponomeuta)
se rapproche particulièrement de celle de la Guêpe (Pérez, 1911) ; elle pré-
sente d'autre part des analogies avec celle des Hyménoptères (Pérez,
1903, 1911) et des Coléoptères (Galéruque, Poyarkoff, 1910) en ce sens
que l'origine des myoblastes est interne par rapport au muscle larvaire.
Les Muscides (Pérez, 1910) forment une catégorie à part, les myo-
blastes sont extérieurs au muscle larvaire.
Un fait général se dégage de l'étude des muscles remaniés dans les
différents groupes d'Insectes que je viens d'énumérer.
Dans les muscles, la substance contractile perd d'une manière tran-
sitoire sa striation^ caractéristique, elle la réacquiert ensuite. Le muscle
passe par un état de non fonctionnement auquel correspond la dédifïé-
renciation de sa structure.
1. Les muscles abdominaux profonds de Hf/po/îonifî/fa font ici exception. Leur striation persiste durant toute
la nymphose.
100 J/'"^' A. HUFNAGEL
Insertions musculaires
Les insertions musculaires ont été étudiées récemment par Ch. Pérez
(1910) chez CalUphora.
Chez Hyponomeuta comme chez les autres Insectes, l'insertion des
muscles se fait selon deux modes : s'ils sont du type associé, ils s'insèrent
sur la cuticule au moyen d'un tendon ; s'ils sont isolés, le passage des mus-
cles à la cuticule se fait par l'intermédiaire des cellules tendineuses.
Je ne noterai ici que quelques remarques que j 'ai faites au cours de la
nymphose :
Les cellules tendineuses appartenant aux muscles histolysés dégé-
nèrent ; leurs fragments sont phagocytés après être tombés dans la cavité
générale. La chromatolyse de ces cellules a lieu, tandis que, dans les fibres
mêmes, les modifications survenues sont encore très peu importantes
(exemple : muscles adducteurs de la mandibule).
Lorsqu'il s'agit des muscles remaniés sur place, les cellules se com-
portent différemment. J'ai plus spécialement observé les insertions des
muscles dorso-ventraux extrinsèques des pattes, et des muscles longitudi-
naux vibrateurs.
Au début de la métamorphose, les cellules tendineuses s'allongent énor-
mément, leurs noyaux se disposent à des niveaux différents (fig. 18 c. /.).
Pendant la première journée, après la mue nymphale, la différencia-
tion de l'ancien muscle larvaire est déjà très avancée ; cependant son inser-
tion fixe sur l'hypoderme persiste intacte. Pendant la deuxième et la
troisième journées (fig. 18), les liens qui réunissent les fibres aux cellules
tendineuses se rompent, les tractus filamenteux partant de l'hypo-
derme {h) ne se rattachent plus aux fibres. On voit apparaître à la limite
de l'hypoderme et des muscles une zone dans laquelle les particules du
cytoplasme déchiqueté présentent un aspect craquelé {z. r.). Des boules
de dégénérescence {s.) abondent dans toute cette région. Elles sont de
volume et de teintes différentes allant du rose pâle au violet sombre
(éosine-glychémalun). Souvent ces boules cytoplasmiques se rencontrent
seules, mais généralement elles contiemient une ou plusieurs granula-
tions chromatiques; ces dernières peuvent également être condensées.
Les boules se trouvent aussi entre les fibres musculaires, il est donc
probable que des noyaux et un peu de myoplasme disparaissent de cette
sorte. Des phagocytes repus, bourrés de produits de dégénérescence, se
trouvent un peu partout {s g).
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA ]i»l
Pendant ce temps, les myoblastes continuent à proliférer, les fibres
s'accroissent et se dift'érencient. \'ers la septième journée après la mue
nymph aie, elles viennent s'anastomoser avec l'épithélium de l'hypoderme,
maintenant aplati.
RÉSUME ET ( '( )X( 'LU8I0NS
Résumé
Je résumerai dans ce chapitre les principaux résultats de mon travail.
Tissu adipeux. — Chez la larve, les cellules grasses se multiplient au
moment des mues. Le tissu adipeux passe presc^ue entièrement de la
larve à l'imago. Quelques cellules disparaissent au cours de la nymphose.
Affinités entre les éléments gras et les éléments sayigimis. — La parenté
embryonnaire entre le? éléments du sang et ceux du tissu adipeux se
manifeste d'une façon durable pendant toute la vie larvaire. On rencontre
en effet, jusqu'à la dernière mue de la chenille, dans les segments thora-
ciques et abdominaux des foyers mixtes de cellules adipeuses et de leuco-
cytes.
Les affinités entre ces éléments ne se bornent pas à leur origine.
Les leucocytes, de même que les cellules adipeuses, peuvent se gorger
de réserves grasses et albuminoïdes. Les cellules grasses comme les leuco-
cytes peuvent prendre part à la phagocytose.
Œnocytes. — Il y a deux générations d'œnocytes. Les œnocytes lar-
vaires se divisent par voie directe et diminuent ainsi de taille. Ils dégé-
nèrent vers le milieu de la vie nymphale.
Les œnocytes imaginaux apparaissent pendant le dernier âge larvaire ;
ils se forment aux dépens de l'hypoderme. Ils se multiplient activement
par chvage.
Les œnocytes (larvaires et imaginaux) sécrètent un produit spécial.
Dans les œnocytes imaginaux la fonction sécrétrice est particulièrement
intense aii début de la métamorphose ; elle s'atténue chez la chrysalide
âgée.
Les œnocytes (surtout les œnocytes larvaires) bourgeonnent de petits
amibocytes, qui peuvent être envisagés -comme des œnocytes migrateurs.
Hypjdernie. — L'hypoderme est remanié sur place. Au début de la
métamorphose, les éléments éhminent des produits de dégénérescence
AKCH. DE ZOOI,. KXP. ET GÉN. — T. 07. - F. '_'. 10
192 • J/'"'' A. HUFNAOEL
(sous forme de sphères), ils subissent ainsi une épuration et proli-
fèrent en même temps.
Ce double processus cesse quelque temps avant la mue nymphale,
puis reprend chez la jeune chrysalide. On peut considérer ce stade d'arrêt,
intercalé entre deux temps d'activité cellulaire, comme correspondant à
une période d'état caractérisant un stade morphologique nymphal.
Les cellules formatrices des poils, les glandes de mue disparaissent au
cours de la métamorphose, leur dégénérescence est spontanée, les frag-
ments, après être tombés dans la cavité générale, deviennent la proie des
phagocytes.
Les cellules qui donnent naissance aux écailles commencent à s'in-
dividualiser vers la fin de la première journée après la mue nymphale.
La Glande ventrale s'atrophie chez la jeune nymphe, les phagocytes
n'interviennent que très tardivement.
La Glande mandibulaire disparaît pendant la métamorphose. Les
leucocytes pénètrent sous sa basale à un moment, où certaines cellules
sont déjà chromatolysées, où d'autres présentent encore un aspect nor-
mal. Dès qu'un élément est fragmenté, ses particules sont immédiatement
englobées par les phagocytes.
Appareil séricigène. — La portion sécrétrice de l'organe est phagocytée
au cours de la nymphose. Le conduit persiste, rejette sa basale, en reforme
une autre. Les noyaux bourgeonnent activement et se ramifient, le cyto-
plasme s'accroît et se différencie. Une nouvelle glande se forme aux dépens
de l'ancien canal évacuateur de l'appareil séricigène.
Tubes de Malpighi. — La portion des tubes de Malpighi contournée
autour du rectum disparaît par phagocytose pendant la métamorphose.
Les six canaux, qiii flottent librement dans la cavité générale , passent de
la larve à l'imago après s'être débarrassés de leur ancienne basale et avoir
reconstitué une nouvelle.
Êpithélium de l'intestiîi moyen. [ — L'intestin moyen ne présente pas
de rénovations épithéliales consécutives aux mues larvaires (contraire-
ment à ce que Verson a décrit chez Bombyx). Au début de la métamor-
phose, les cellules imaginales sœurs de cellules épithéliales fonctionnelles
reconstituent un épithéUum nouveau. Pendant la nymphose, les éléments
rejettent des boules de dégénérescence et subissent ainsi une épuration
(cf. hypoderme). Si au point d© vue morphologique le même êpithé-
lium persiste chez la nymphe et chez l'imago, sa constitution intime
est cependant modifiée par le fait même de cette épuration.
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEl'TA 193
On peut interpréter l'épithélium avant son épuration comme réalisant
un intestin nymphal, après son épuration comme intestin imaginai.
Épithélium de l'intestin antérieur et postérieur. — Dans Tintestin anté-
rieur et postérieur, l'épithélium passe de la larve à l'imago et est remanié
sur place. Il subit une double mue chitineuse et présente une intima propre
à la nymphe.
Organe périœsophagien. — J'ai été amené à signaler sous le nom
d'organe périœsophagien une formation particulière qui avait, semble-
t-il, échappé jusqu'ici aux auteurs qui se sont occupés des Lépidoptères.
Les éléments qui contribuent à former cet organe apparaissent en petit
nombre chez la jeune chrysalide au voisinage de l'appareil digestif. Ils
se multiplient d'abord par caryocinèse puis par clivage. En s'accroissant,
ils finissent par former un anneau qui entoure en partie l'œsophage.
Muscles. — Un petit nombre de muscles disparaissent au cours de la
nymphose. Ils s'atrophient d'abord et sont ensuite phagocytés. La majo-
rité des muscles passent à l'imago et, fait important pour la métamor-
phose, les muscles du vol s'édifient aux dépens de fibres larvaires.
Bien qu'il y ait de grandes différences d'évolution dans les détails,
le remaniement des muscles (muscles tégumentaires abdominaux, tho-
raciques, muscles du vol, etc.) se fait suivant un type général. Il se produit
aux dépens de myoblastes qui, dès l'âge embryonnaire, sont plongés
dans le sarcoplasme à côté des noyaux larvaires. Chez Hyponomeuta (et il
en est sans doute de même chez tous les Lépidoptères) ainsi que chez les
Coléoptères (Poyarkoff) et les Hyménoptères (Ch. Pérez), les myo-
blastes sont des éléments appartenant aux muscles de la larve.
Les Muscides (Ch. Pérez) forment une catégorie à part, où les myo-
blastes sont d'origine extérieure aux muscles larvaires.
Conclusions
Nous venons de voir (^u'un assez grand nombre d'organes et de tissus
passent de la larve à l'imago en subissant un simple remaniement. Ce
processus est souvent caractérisé par une pn-fe transitoire de In structure
histolojiqne diffère hciée. Je citerai ici quelques exemples :
Les muscles présentent chez la larve et l'imago une striation transver-
sale et une fibrillation longitudinale ; ils sont homogènes chez la nymphe.
Dans les tubes de Malpighi, l'épithélium rejette sa basale, la bordure
en brosse s'évanouit, la lumière s "oblitère à un certain moment de la meta-
1U4 .¥•"*- .4. HVFNAGEL
morphose ; l'épithélium acquiert ensuite son aspect caractéristique.
Dans l'épithélium de l'intestin postérieur, le cytoplasme présente
deux zones différentes chez la chenille et chez l'imago, il est homogène
chez la nymphe.
Le tissu adipeux est aggloméré chez la larve et chez l'imago, il est dis-
socié chez la chrysalide.
Ces exemples nous montent que :
Entre la structure différenciée de la larve et celle de l'imago se trouve
intercalé un stade où le tissu ne présente pas de structure différenciée
caractéristique.
Les éléments destinés à être remaniés peuvent rejeter une partie de
leur substance et subir ainsi une épuration cellulaire. Ce phénomène
s'observe dans des tissus très divers de Hypotiomeuta : on le rencontre
dans l'hypoderme, dans l'intestin moyen, dans les anneaux imaginaux de
l'intestin antérieur et postérieur, dans les cellules adipeuses. Bien que
n'ayant pas fait une étude détaillée de la métamorphose du système ner-
veux, je puis ajouter ici que le même phénomène d'épuration s'observe
dans les ganglions nerveux.
Ch. Pérez (1910-11) a constaté des processus analogues de « dédif-
férenciation I (Mouche, Guêpe) et d' « épuration partielle " (Mouche).
PoYARKOFF (1910) les a observé chez la Galéruque de l'Orme.
Je pense avec Ch. Ferez que ces processus de dédifférenciation et
d'épuration doivent être assez généraux et qu'ils ont probablement lieu
dans un grand nombre d'Insectes à métamorphose partielle.
Malgré l'opinion de différents auteurs, je peux affirmer que la phago-
cytose intervient chez les Lépidoptères.
L'existence dans la cavité générale des sphères de gramdes ne laisse
aucun doute à ce sujet. Les tissus qui dégénèrent au cours de la métamor-
phose disparaissent toujours par phagocytose.
Les tissus, au moment où ils sont attaqués par les phagocytes, ont déjà
subi certaines modifications décelables par les procédés histologiques ; celles-ci
suivant les cas, peuvent être plus ou moins accentuées (voir muscles de la
cavité céphalique, différentes formations glandulaires, œnocytes larvaires,
etc.). Seul le fait de l'accolement des leucocytes aux cellules grasses ap])a-
remment encore en bon état fait ici exception (voir remarque ' de la
p. 76).
Le début de l'histogenèse précède celui de Vhistolyse {Cf. Ferez, Foyar-
koff).
MÉTAMORPHOSE DE H Y l'OlSOM ElTA li».-)
Dans les muscles, ce sont les myoblastes q\ii prolifèrent d'abord, ce
n'est que lorsque la différenciation de la fibre est déjà avancée, que des
portions de chromatine et de cytoplasme, non employées dans l'édification
du muscle nouveau, tombent en chromatolyse.
Dans les ganglions nerveux, dans l'anneau imaginai, dans l'hypoderme,
la prolifération a lieu avant la chromatolyse. Un cas particulièrement
démonstratif nous a été fourni par l'hypoderme des ailes.
En résumé, je crois avoir montré que la métamorphose débute par l'his-
togenèse des organes les plus spéciaux de l'imago ; c'est seulement ensuite
que se déclanche l'histolyse des formations les plus spéciales à l'organisme
larvaire. Leur atrophie comporte l'intervention de la phagocytose dont
l'existence chez les Lépidoptères avait été contestée. La majorité des
organes passent directement de la larve à l'imago en subissant un simple
remaniement caractérisé par la dédifférenciation cellulaire, l'épuration
partielle, etc.
Il apparaît comme de plus en plus vraisemblable que des processus
analogues ont une extension très générale dans la métamorphose des
Insectes métaboles.
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EXPLICATION DES PLANCHES
Tablcou do oorri'-litiim cliionolot'iquc liis priuoip ai\ i.iits ilf la niorainorphosi- (h./. H ponomenla .
IM.ANHUK m
.Tic. 1. Montrant l'ensemble d'nne nappe adipeuse et du foyer d'origine des éléineuts gras et sanguins. C. a.,
cellule adipeuse ; ', leucocyte jeune ; prl. proleucocyte : '. f7c.. leucocyte à inclusion gras-se:
** faryoïinèses de.s leucocytes. Larve d'âge moyen, x 1000.
FIG. 2. Foyer d'origine d'éléments gras et sanguins soudé ^ la nappe adipeuse, t'et ensem1)le se trouve sur la coupe
réuni à celui nui est représenté sur la figure 1 C. a., cellules adipeuses différenciées; C. g. e., cellules
grasses restées à l'état embryonnaire. * ( aryoanése d'une cellule gras^ie embryonnaire. 1000.
FlO. 3. Coupe longitxidinale mi-rasante du conduit évucuateur de l'appareil séricigéne. Les noyaux sont en train
de bourgeonner. /. x., tractus de sécrétion soyeuse qui persiste durant toute la nymphose et permet
de reconnaître l'organe malgré son aspect différent. >'ymphe de deux jours. ;•: 1000.
Kio. 4. Coupe longitudinale du conduit é\acuateur. L'épithélium s'est contracté en abandonnant la basale. Bes
leucocytes (/) viennent s'accoler contre celle-ci. fi'»., basale ; f. ■<.. filament so.veux. Nymphe de deux
jours. X 10(10.
l'IG. 5. Coupe transversale du canal évaeuateur dr l'app.^ii'il sérieigéne. ut., intima ; /. s., tUumeut de soie ; hn.,
ba.sale. .TiMuie larve, y W-V.
MKTAnMOFllOXE DE II Y POS'Ô \l E' ' TA 201
FIG. 0. Coiipo transvorsale de l'uiKii n canal évaPuatiMir de l'appareil séricigèiii- clu-z une nymphe île se])t jouf''.
Le cytoplasme envoie vers la lumiùre des prolonsienients éosiuophiles. /. .<.. fllament de soie, x 11; 0.
FlO. 7. Cellule de la filande imaginale formée aux dépens du conduit évacuateur de l'appareil séricigéne de la
larve. Jeune imago, x 1I:.0.
FiG. 8. .Amas cellulaire ipii donnera l'organe périoesophagien. Les luiyaux ont jiris d( s .ispi'cts loliés. ils se multi-
plient par clivage. Nymphe âgée de sept jours. > 11:0.
FlG. 9. Coupe transversale de l'organe périœsophagien. a, formant ini anneau autour de l(esophage : oe. Nymplie
âgée. X ÎOO.
1M..\NCIIE IV
FIG. 10. Coupe transversale d'un tube de jMalpiglli en voie de remaniement. La lumière est remplie d'une subs •
tance pâle, dans laquelle on peut déceler la même structure que dans le cytoplasme même. L'épithé-
Ihim s'est débarrassé de sa basale ba.. Des leucocytes l. affluent vers la basah-. XymiOie d'mi jour.
X ii;;o.
Fio. 11. Coupe transversale d'un tnbe de Malpighi chez une jeune imago. Le cytoplasme éosinophile contient
des vacuoles dans lesquelles ^e trouvent d(S inchisions basopliiles. ba., basale; b. hr., Iwrdure en
brosse ; ^r., produits d'excrétion. >; 11:!0.
FlG. 12. Coupe transversale d'un tube de Malpighi destiné à disparaître i)endant la nymphose. C';/'., cytoplasme.
b. br., bordure en brosse ; bas., basale. Larve d'âge moyen, x IIGO.
FiG. 13. Coupe transversale B'un tube de Malpighi en train de dégénérer. Des ]>hagocytes se sont infiltrés dans
la cellule, leur cytoplasme s'est confondu avec celui de la cellule n alpigliienne. >i. ph.. noyaux phago-
cytaires ; ba., basale. Nymphe de quatre jours, x ll:iO.
FlG. 14. Œnocyte larvaire en voie de sécréter, n. b., petit noyau issu du bourgeonnement du noyau de Tcenoej-te.
x 100.
FlG. 15. Œnocyte imaginai dont le noyau est en train de se cliver. Les produits de sécrétion sont amassés autour
du noyau. :. "00.
Fio. IC. Œnocyte imaginai chez une nymphe d'un jour, x 11:;0.
FlO. 17. Œnocyte œn imaginai entourant une cellule grasse c. a. Nymphe de douze jours, x li;,0.
FiG. 18. Coupe longitudinale des nuisclts dorsaux ventraux extrinsèques des pattes au voisinage de leur ancienne
insertion sur l'hypoderme. //., hypoderme ; et., cellules tendineuses ; z. r,, zone de renumiement ; m.,
myoblastes ; n. i., noyaux imaginaux ; JV, /., noyaux larvaires ; s., sarcolytes ; xy., sjihère de gra-
nules ; *, (aryocinèse d'un myoblaste. Nymphe de trois jours, x 1000.
FiG. 19. Coupe transversale des nmcles longitudinaux vibrateurs. /. m., flbre musculaire : .«.. sarcolyte ; /., leuco-
cyte. Nymphe de sept jours, x 1000.
FiG. 20. Coupe longitudinale d'un muscle tegumentaire abdominal. A'. /., noyau larvaire ; A. *'., noyau imaginai;
* (aryodnèse d'un élément imaginai. Larve immobilisée au début de sa métamorphose, x 10^0.
rL.\NCHK V
Fio. 21, Histolyse avancée du muscle adducteur de la mandibule, d., amas de chromatine digitée
/., leucocyte à jeun ; l'h. e., ph. /., ph. b., différents stades d'englobement des r>roduits de dégénéres-
cence par les phagocytes. Explication dans le texte. Nymphe de deux jours, x 1030.
Fio. 22. Début d'histolyse du muscle adducteur de la mandibule. Coupe longitudinale. /., leucocyte à jeun ; sy.,
sphère de granules. Explication dans le texte. Nymphe d'un jour, x 1000.
FiG. 23. Coupe longitudinale d'un muscle abdominal tegumentaire de la couche .superfleielle. n. i.. noyau imagi-
nai ; A'. /., noyau larvaire ; vi., myoblaste ; * * <aryo(inèse d'un myoblaste. : 11; 0.
FiG. 24, 25, 20. Fibres appartenant aux muscles thoraciques :\ évolution tardive dans lisquellis rindi\iduali-
sation des myoblastes ne joue qu'un faible rôle.
Les flgurts 24 et 25 montrent côte à côte des noyaux normaux et d'autres en chromatolyse. Sur
la figure 20 les petits nojaux issus du boxirgeonnenient d'un grcs noyau larvaire sont encore
réunis entre eux. Sur la figure 25, on voit également un petit paquet de petits noyaux non encore
disloqués. Dans la partie inférieure de la figure 25 {b\ les ijctits noyaux sont distincts les uns des
autres. Nymphe de trois jours, x IlOO.
FlO. 27. Coupe longitudinale d'un muscle thoracique à évolution tardive. X. /., noyau larvaire ; ». t., noyau
imaginai ; ph., p., ph. }., sg., phagocytes ; p., phagocyte en train d'englober un amas cytoplasmique :
ph. /., phagocyte qui s'est replié sur lui même en enfermant son inclusion. Nymjihe |de (luarante-
huit heures, x lOôO.
FlG. 28. Coupe longitudinale d'un muscle thoracique à évolution tardive montrant un uoya\i larvaire, des noyaux
imaginaux et deux divisions lar.voiinétiques des myoblastes. >. 1200.
Fio. 29. Coupe longitudinale d'un futur muscle vibrateur longitudinal (muscle thoracique à évolution in-.'coce'».
N. f., noyau larvaire ; n. i., noyau imaginai ; m., myoblaste : * (aryoduèse d'un myoblaste l.uve
en train d'expulser son intestin moyen, x 1200.
202 .l/'"<^ A. in'FNA('EL
riG. 30. C'oiii)c longitudinale d'un futur muscle vibrateur longitudinal (stade uu peu plus avancé que sur la figure
■i!i). X. 1; noyau larvaire en partie clivé ; m., niyoblaste ; * division caryo-iiiétique d'un myoblaste.
Larve immobilisée, x 1130,
FiG. 31. Coupe transversale d'un muscle en évolution précoce, n. /., noyau imaginai ; »»., myoblaste. Même stade
que figure 20. x 1200.
FiG. 32. Portion d'une coupe longitudinale d'un muscle dorso- ventral, iV. L, noyau imaginai ; m., myoblaste :.
s, sarcolytc ; * division earyo -inétique d'un n\yoblistc. Nymphe de trois jours, x 10,')0.
Arch. de Zool. Exp" et gén"
- l)6pfnérrsc«ncc complète
Tome 57. PI. II
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MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA PADELLA L.
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MÉTAMORPHOSE DE HYPOKOMEUTA PADELLA
MÉTAMORPHOSE DE HYPONOMEUTA PADELLA L.
ARCHIVES DE ZOOLOGIE EXPÉRIMENTALE ET GÉNÉRALE
Tome 57, p. 203 à 470.
15 (),-l„brr 1918
BIOSPEOLOGICA
XXXIX"»
ÉNUMÉMTION DES GROTTES VISITÉES
1913-1917
(SIXIÈME SÉRIE)
R. JEANNEL et E.-G. RACOVITZA
TABLE DES MATIERES
Introduction. — Programme des Enumérations (p. 206). — Rédaction des Enumérations (p. 207). — Nom de
la grotte (p. 208). — Situation (p. 208). — Altitude (p. 208). — Roche (p. 208). — Date (p. 208). — Matériaux
(p. 208). — Numéro (p. 210). — Synonymie (p. 210). — Bibliographie (p. 210). — Caractères et histoire phy
aique (p. 210). — Dimension totale (p. 211). — Descriptions des cavités (p. 211). — Agitation del'air (p. 211).
Température (p. 211). — Humidité relative (p. 212). — Ressources aUmentairea (p. 212). — Biotes (p. 212.)
— Plans et signes conventionnels (p. 213) — Observations sur les signes conventionnels (p. 215). — Index
(p. 215). — Rechercher eztensives et intensii'es (p. 215). — Campagnes spiologiques : Cabardès et Minervoig
(p. 217). — Cévennes (p. 218). — Carniole (p. 220). — Huesca (p. 222). — Jura (p. 223). — Notes sur les
Chauves-souris et leurs dijeciions (p. 223). — Relevé st itittique et giogr iphique des grottes visitées (p. 226). — Colla •
borateuf' (p. 227). — Index bibliogr.iphique général (p. 468),
ALGÉRIE
Dép. d'Alger.
751. Anou Azoukor 460
749. — Boussouïl 459
753. — Tahalouaut 462
754. — Tala n'Tahalouaiit 462
752. — t'Azerou ibou bon u'Iaya 461
747. — Tenechiji 454
748. — Terga Roumi 457
— Terga Roumi II 458
750. — Toursoutt 459
' 742. Azerou bou-Adhfel '. 450
741. ]fri bou-Adhfel 448
737. — bou-Amano 442
736. — bou-Anou 441
738. — bou-Tighersit 444
743. — Dzimin 450
734. — Khalouu 438
744. If ri n'Tarzout 451
739. — n'Tazerout n'Ahmed ou Amar 446
740. — n'Tazert 446
745. — n'Terga Roumi 452
-46. — n'Thamrarth 453
735. — Semedane 439
Inkher bou-Anou 454
760. Lonadj Amar ou->Iaasour 467
7.''8. Tessereft Agouni Tamkiyet 466
7f7. — el-Hadj ou Kaci 465
759. — Guiril 466
755. — Tabort Boutrichen 463
756. — Tissoukdel 464
Dép. d'Orsn.
659. Caverne de l'Aïdour 336
658. Grotte de la Tour Combes 33
1. Voir pour Biospeoi.oqica I à X^XVIII, ces Archives, tomes VI, VII, VIII et IX de la 4* série, tomes I»
n, IV. V, VI VII, VIII, IX et X de la 5« série et tomes 52, 53, 54. 55 et 56.
Arch. de Zool. Exp. et CtiN. — T. 57 . — F. 3. 14
204
R. JEANNEL ET E.-G. BACOVITZA
AUTRICHE
Prov. Krain.
629. Cnia jama ^i'6
633. Drd BrUder H ôlile 306
627. Grotte d'Aiiclsbcrp 289
628. — de Luega ''■>!
632. Liicova jama.
304
630. Mrzla jama 301
634. Podpec Hôhlc 307
631 . Volcja jama 302
Prov. Kiisten and.
635. Kronprinz Kiidol: Grotte 310
ESPAGNE
703. —
704. —
702. —
Prov. de Alcante.
C'ila Figuieras 392
700. Cueva de las Calavcras 389
— del Chiulador. 392
— del Escoll 392
— de las Kstacas 393
— de la Fil-tnera 394
— de la Fustera 395
— . grande 393
— horadada 391
— delalsla 392
— del Lobo marine 1 392
— del Lobo marino II 393
— de los Orcanos 393
— de las Palomas I 392
— de las Palomas II 394
de las Palomas de Calpe 395
de la Punta de Benimaqiiia 396
de la Punta de Ifach 395
de las Ratas 394
— sans nom I et II 391
— sans nom III et IV 392
— sans nom V à VII 392
— sans nom VIII et IX ;.. . . 393
— sans nom X à XIII 394
— sans nom XIV 394
— de la Sendra 394
— de la Solana 392
— del Tabaco I 391
— del Tabaco II 392
701. — tallada 390
Prov. de Ba'eares (Ibiza).
606. Cueva Argentera 386
— avec Figuier 287
— de las Frailes 387
667. — del Régals 386
— de los Remédies 386
— San Carlos 386
665. — Santa de Ibiza * 385
664. -- deSanraIn(^s 385
Prov. de Cadiz.
624. Cueva del Argar 287
666. — dclBerrucco 335
657. — grande del Berrueco 335
Prov. de Ciudad Real.
681. Cueva de los Murcielagos de Almaden 377
Prov. de Granada.
62 I . Cueva de las Grajas 285
Source de la Pedreguera 286
715.
71<.
712.
700.
710.
708.
706.
705.
714.
707.
Prov. d3 Guipùzco .
Aven de Jan 407
— du Monte Hernio 407
Cueva de Aitzulupe 407
— de Arrobieta 405
— de Arrobieta pequ ni 406
— de Austokieta 404
— de Birauné 402
— de Hcrnialde 402
— de Iturmendi 401
— del Kur.saal 399
— de Landarbastro 397
— de Mendicute 406
— del Monte Hernio 407
— de Oriamendi 400
Prov. dj Huesca.
Cova de Buchaquero 316
636. Cueva de Bujaruelo 312
638. — del Cantal 316
— del Cantal de ariba 317
— de Espata 322
— de i'orcala 322
— de la Grallera 316
639. — de las Guixas 317
— de Hecho 321
641. — del Orso de Ansô 322
— del Palomar 322
637. Dragonera de Santa Helena 314
Gruta de la Gloriosa 315
Sima de Forcala 322
640. Tessercfts du Collerada 320
Prov. d3 Léon.
646. Cueva de Valporqueros 327
Mina de la Sierra de las Cabras 327
Prov. de Madrid.
682. Cueva de Reguerillo 377
Prov. de Malaga.
625. Cueva del Cerro de la Pileta 288
— del Gato 287
626. — de los Organos 288
623. — dePepe 286
— del Suque 287
Prov. de Navarre.
716. Cueva Akelar 408
717. — de Martinchurito 1 409
718. — de Martinchurito II 410
GROTTES VISITÉES
205
Prov. de Oviedo.
647. Caverna de San Boniàn de Candano 328
650. Cueva de Cebellin 330
651. — de Mazaculos II 331
648. Cuevas de Quintanal 329
649. Toscal de Cueto de la Mina 329
Prov. de Salamanca.
Cueva de la Mora 330
Prov. de Tarragona.
643. Cova Cambra 324
— pinteda 326
— voisine de la pintada 326
642. — den Kubi 323
644. Cova Terrera 325
645. — Yerrct ,">25
Lujeros del Viento 326
Prov. de VElencia.
Couloir artificiel de l'Ermitage 41I
099. Cova del's Colom's de Kibarroja 388
098. Cueva de las Maravillas de Alcira 388
— de las Palomas de Jativa 411
— del Pernil 411
— de la Polaca 41 1
719. — de las Katas de .Fatixa 410
Prov. de Vizcaya.
711. Cueva de Basondo 404
FRANCE
Dép. des A1pe:-Marit mes.
678. Baliiic Pat.is 373
Dép. de l'Ardëche.
608. La Coquelière 270
611. Grotte de l'Assiette 274
609. — de Banne 272
618. — du Château d'Ebbou 284
612. — du Cui\Te 276
— du Curé 273
617. — de Peyroche 283
610. — de Kemène 282
677. — (le Saint-Marcel d'Ardèche 373
610. — du Saut-du-Bœuf 273
615. — du Soldat 280
614. • — nouvelle de Vallon 278
613. — de Voidon 277
Dép. de î'Aiiége.
664. Grotte de Peyort 344
665. — de Portel 346
Dép. de l'Aude.
583. Grotte du Cimetière de Sallèles 232
584. — de Gazel 233
— de las Cazals .■ 233
581. — de Limouzis 228
— de la Muscalle 232
582. — de Villanière 231
Terr. de Belfort.
720. Grotte de Cravanehe 411
Dép. de la Côte-d'Or.
690. Carrière de Ladoix-Serrigny 383
683. — de Vry 378
688. Galerie artificielle de la Rente neuve 382
687. Grotte d'Anthcuil 381
686. Puits Groseille 381
684. — Martin 380
691. — artificiel de Perrigny-les-Dijon 384
689. Source de la Fortelle 383
685. — du lavoir inférieur de Magny-les-
'^'illers 380
653.
654.
730.
672.
669.
727.
724.
729.
667.
671.
670.
668.
676.
728.
723.
674.
731.
721.
722.
726.
675.
725.
601.
606.
600.
605.
598.
604.
602.
Dép. de la Dordogne.
Grotte de Bénivet 331
— des Blaireaux de Mazardie 333
— du Château de Comarque 332
— de Xancy 331
— du Pilier de Beyssac 332
— grande de Vicl-Mouly 332
Grottes du Souci 333
Dép. du Doubs.
Baume Archée (Grande Grotte) 362
Gouffre de Granges-Mathieu 431
Grotte petite Baume-Archée 363
— de la Baume de Bournois 351
— de Beiire 424
— des Cavottes 416
— de Chenecey 428
— de Clerval 347
— des Faux-Monnayeurs 354
— de Fourbanne 352
— de Gondenans-Montby 348
— de Gonsans 371
— de Maillot 425
— de Mémont 415,
— des Orcières 367
— d'Osselle 432
— • de Plaisirfontaine 413
— Sainte-Catherine 414
— de Saint-Léonard supérieure 423
— du Sibiot 370
Source Bergeret 420
— du Pontet 355
Trou aux Chiens 367
Dép. du Gard.
Baume de Gour 259
— des Italiens 268
Grotte de Bégué-Ponchon 257
— de la Calmette 266
— du Goulsou 254
— du Pont de Salindre 265
— de Kedollet 268
— du Salpêtre de Corconne 261
206
R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
596. Grotte de la Salpêtrière 251
607. — de Tharaux 269
603. — de Trabuc 262
Dép. de la Haute-Garonne.
661. Goueil di Her 340
663. Grotte de l'Espugne 342
662. — de Gourgue 342
660. Poudac gran 340
Dép. de l'Hérault.
586. Balma del Cingle 236
593. Baume Cellier 246
— de Roquemaoule 249
594. Grotte du Bois de Delon 248
597. — du Bois de Madame 252
599. — de Cesteragne 256
587. — delaCoquiUe ._.. 237
588. — deFauzans 239
585. — de la Fontaine-Froide 235
— deGaillou 251
691. — del'Hortus 244
— de Larret 251
690. — du Mas de Londres 242
Grotte des Mines de la Société des Cévennes 254
.';89. — du Rendez-vous de Chasse 241
— de Rieussec 237
595. — de Rives 249
592. — du Sergent 245
Dép. du Jura.
733. Grotte de Baume-les-Mossienrs 435
732. — de Revigny 434
Dép. d.'S Hautes-Pyrénées.
693. Grotte de Castel-Mouly 334
Dép. des Pyrénées-Orientales.
680. Grotte de Can-Pey 376
679. — de Montbollo 374
Dép. de la Haute-Saône.
673. Grotte de Gonvillars 363
666. Puits de Brévilliers 347
Dép. du Var.
620. Grotte des Fées d'Hyères 285
619. — du Saint-Trou 284
ITALIE
Prov. de Salerno.
602. Grotta di Civale 384
INTRODUCTION
Dans l'introduction de la première « Énumération » nous nous sommes
expliqués sur le but et l'utiUté de cette partie de Biospeologica et nous
avons signalé dans les introductions des « Énumérations » suivantes les
modifications et additions successivement introduites. Il nous semble
utile et pratique de résumer, de compléter et de systématiser toutes
ces données en tête de cette nouvelle « Enumération ».
Programme des Énumérations. — Biospeologica, œuvre collective et,
dans notre intention, permanente, se propose comme but l'Histoire
naturelle du Doma'.ne souterrain, prise dans l'acceptation surtout biolo-
gique de ce terme. Découvrir des espèces nouvelles ou faire des cata-
logues de cavernicoles est bien au-dessous de nos ambitions. La décou-
verte d'une espèce rare ou nouvelle ne nous satisfait que médiocrement
s'il n'en peut être déduit quelques conséquences phylogénét'ques ou
biogéographiques ; le matériel cavernicole ne présente donc pour nous
aucune valeur s'il n'est pas accompagné des données bionomiques
GROTTES VISITÉES 207
indispensables pour le rendre utilisable pour le but que nous nous sommes
proposés. Nous voulons que chaque Biote puisse être situé dans son
milieu exact et dans l'association vitale dont il fait partie ; nous voulons
que les contingences qui déterminent son évolution individuelle et celle
de sa lign'^e puissent être scrutées comme il convient.
Cet ambitieux programme est plus facile à formuler qu'à exécuter
et chacun comprendra que dans la pratique on ne puisse pas toujours
s'y conformer. Ce qu'il importe, cependant, c'est que l'organisation de
l'entreprise réponde aux directives et que son activité s'exerce bien dans
le sens du programme ; les 38 fascicules déjà publiés de Biospeologica,
nous semblent démontrer qu'il en est bien ainsi.
Malgré leur aspect «géographique» ces « Énumérations » constituent
donc une partie indispensable et très importante de notre publication ;
leur intérêt augmentera même au fur et à mesure du perfectionne-
ment des méthodes d'investigation de la bionomie ; elles se développeront
parallèlement aux besoins des autres sciences en données de plus en
plus précises et détaillées sur le milieu souterrain. On peut donc résu-
mer le but que se proposent nos « Enumérations » de la façon sui-
vante :
A. — Fixer avec précision Videntité des grottes ayant fourni du maté-
riel biologique.
B. — Fournir toutes les données permettant de caractériser les condi-
tions d'existence que présente chaque grotte. Il est impossible de remplir
actuellement, de façon complète, ce point du programme. Des recherches
préliminaires intensives sont nécessaires et une instrumentation spéciale
est à créer, nécessités qui font l'objet de nos préoccupations et que nous
comptons bientôt satisfaire.
C. — Accessoirement, signaler les faits qui peuvent intéresser d'autres
sciences. Nous ne manquons pas de noter ce qui peut attirer l'attention
des spéologistes géographes, préhistoriens, etc.
D. — Accessoirement aussi, dominer aux spéologistes tous rensei-
gnements utiles pour leur faciliter les recherches dans les régions par nous
explorées. C'est dans cette intention que nous publions les notes recueillies
sur les grottes que nous n'avons pas visitées.
Rédaction des Énumérations. — Aucune récolte n'est incorporée dans
notre matériel d'étude si elle n'est pas accompagnée du minimum de
renseignements que contiennent les lignes en exergue qui précèdent les
descriptions détaillées de grottes. Ces renseignements sont très sommaires,
208 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
mais ils fixent néanmoins l'identité de la grotte et permettent par consé-
quent une réexploration éventuelle.
Une description détaillée de grotte, que nous réclamons toujours
de nos collaborateurs, mais souvent sans succès, doit porter sur un cer-
tain nombre de points que nous allons maintenant passer en revue.
Nom de la grotte. — Toute nomenclature doit être précise, claire,
invariable et uninominale ; nous nous guidons sur ces principes en spéo-
nomologie. Les noms inscrits sur les cartes officielles ou publiés dans les
ouvrages sérieux sont acceptés, sauf erreurs par trop grossières. A défaut
de ces indications, nous adoptons les noms donnés par les gens du pays.
Les grottes sans état civil sont baptisées par nous d'après le nom des
lieux dits oii elles sont situées. Quand une grotte porte plusieurs noms,
nous ne lui en conservons qu'un seul, le plus connu ou le plus légitime.
Le nom local, en patois, avec l'orthographe originelle, est adopté de pré-
férence, car les noms de grottes sont peu variés et on évite ainsi plus
facilement les homonymes. Pour le même motif, un nom de localité
est toujours accolé à certains noms trop souvent employés en nomen-
clature spéologique populaire, comme : Grotte des Fées, des Chauves-
Souris, des Merveilles, etc.
Situation. — Pour toutes les grottes la situation est fixée par le
nom de la commune, du canton et du département. Pour celles qui sont
peu connues on ajoute le nom du lieu dit et, si utiles, d'autres détails
topographiques.
Altitude au-dessus du niveau de la mer. — Cette donnée est très
importante et même des chiffres approximatifs sont utilisables. Elle peut
être déterminée par nos observations barométriques directes ou être
extraite des meilleures cartes de la région ; mais s'il subsiste des doutes sur
la rigueur des chiffres, l'abréviation env. est ajoutée. Quand le rensei-
gnement provient d'un mémoire, la source est toujours mentionnée.
Roche. — La nature lithologique des parois de la grotte est toujours
indiquée, car le renseignement est important, mais l'âge de la roche est
secondaire, aussi n'est-il pas fait de longues recherches pour le connaître.
Si le renseignement est pris dans un mémoire, la source est citée. Le plus
souvent il est déduit d'observations personnelles ou pris sur les cartes
géologiques et son exactitude n'est pas garantie.
Date de l'exploration. — Renseignement important pour la solution
de nombre de questions éthologiques et bionomiques.
Matériaux. — Seuls sont cités les grands groupes de Biotes recueillis
GROTTES VISITÉES 209
dans chaque grotte ; c'est un simple bordereau de chasse qui a une grande
utiUté pratique pour la direction de Biospeologica, mais qui ne donne
aucun renseignement au lecteur. La liste complète des espèces pourrait
seule satisfaire ce dernier, mais semblable liste ne pourra être dressée que
lorsque tous les groupes auront été étudiés par les spécialistes. Nous
comptons d'ailleurs publier des mises à point synthétiques de spéologie
régionale, avec Hstes spécifiques de Biotes, dès que cela nous sera possible.
Tous les Biotes sans exception sont recueillis, et cela depuis l'entrée
des grottes. C'est s'exposer à des erreurs certaines que de vouloir faire
sur place un choix parmi les êtres capturés, que de rejeter un tel parce
qu'on le croit accidentel ou tel autre parce qu'il appartient à un groupe
qu'on s'imagine ne pouvoir coloniser le domaine souterrain. On est
beaucoup plus près de la vérité en proclamant : Il ny a pas d'hôtes acci-
dentels dans les grottes, que lorsqu'on soutient l'avis contraire. Notre
expérience déjà longue nous a montré que le Biote entré par pur hasard
dans le domaine souterrain est l'exception rarissime. Pour fixer les idées
nous pouvons dire que sur 100 chasses à peine 5 ou G fourniront une telle
capture.
Les compagnons d'habitat des Troglobies et Troglophiles, les
Trogloxènes proprement dits, sont représentés toujours par un petit
nombre d'espèces, les mêmes partout, ce qui montre que leur présence
n'est pas due au hasard. Ils entrent dans les grottes pour des raisons
variées ; en général ils y sont attirés par des tactismes utiles dans la vie
normale, mais qui dans ce cas spécial entraîne leur perte certaine sans
profit pour leur espèce, mais avec grand bénéfice pour les Troglobies
qui se repaissent de leurs cadavres.
L^n bon exemple à cet égard nous est fourni par les Lépidoptères. Au
début nous ne récoltions pas ces Insectes, nous bornant à citer leur pré-
sence quand ils couvraient en'grand nombre les parois des entrées de grottes.
Qui aurait osé prétendre qu'ils puissent jouer un rôle en spéologie !
H en est ainsi cependant. Nous avons d'abord constaté leur présence
presque constante et souvent leur nombre considérable ; nous avons
remarqué ensuite que c'étaient toujours les mêmes espèces qui étaient
représentées. Pour tirer l'affaire au clair, nous les avons systématiquement
recueillis. Notre collaborateur Le Cerf exposera, avec sa compétence
reconnue, les résultats que lui aura fourni l'étude de notre matériel et l'on
trouvera dans son mémoire tous les détails désirables. Mais ce qu'un
simple coup d'œil sur nos collections permet d'affirmer, c'est qu'il n'y a
210 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
pas de Lépidoptère accidentel dans les grottes. Toutes les captures se
rapportent à quelques espèces qui fréquentent régulièrement les entrées
de grottes dans toute l'aire de leur habitat.
La grotte joue donc un rôle dans la biologie de ces espèces et ces
espèces jouent certainement un rôle important dans la bionomie du
domaine souterrain, ne fût-ce que par l'appoint de nourriture que leurs
cadavres fournissent aux autres Biotes, comme nous avons pu l'observer
à maintes reprises.
Ces considérations s'appliquent également à d'autres groupes tro-
gloxènes comme les Trichoptères, Sciarides, etc., et nous justifient de
vouloir soumettre tous les hôtes du domaine souterrain à une enquête
approfondie.
Les Chauves-Souris sont systématiquement recueillies aussi. Le rôle
que leurs déjections joue en Biosp-: ologie est considérable. Leurs crottes
éparses sont souvent l'unique source de nourriture discernable et leur
guano a introduit dans le Domaine souterrain une faune spéciale qui vit
exclusivement ou accessoirement de, et dans, cette substance, faune qui
non seulement s'ajoute aux Spéobiotes d'autre origine, mais qui a
été la souche de Troglobies qui ont rompu le lien qui les attachait à cette
matière. Nos collections seront également importantes pour l'étude de la
bionomie et de l'éthologie des Chauves-Souris elles-mêmes, étude très
négligée jusqu'à présent. Comme chaque exemplaire est recueilli dans
un sac, on pourra résoudre la question de la spécificité de leurs ectopa-
rasites.
NuMÉTio. — Ces chiffres reproduisent les numéros inscrits sur les
étiquettes qui identifient les échantillons soumis aux spécialistes.
Les rubriques précédentes composent l'alinéa placé en exergue ; nous
allons passer maintenant en revue les points que doit mentionner une
description normale et cela dans l'ordre que nous avons adopté pour
rendre ces descriptions comparables et faciles à consulter.
Synonymie. — Énumération des noms donnés par les diverses publi-
cations ou employés dans le pays, avec les raisons qui nous ont fait choisir
le nom unique adopté.
Bibliographie. — Il n'est pas fait de recherches pour donner la
bibliographie complète et, en général, seuls les travaux importants et
de référence sont cités.
Caractères et Histoire physique. — Désignation du groupe dans
GROTTES VISITÉES 211
lequel peut être classée la caverne (Aven, Goule, Exsurgence, Grotte
endogène, etc.) et exposé de l'histoire de sa formation telle qu'elle résulte
de sa structure.
Dimension totale. — Estimation de la somme des longueurs de tous
les couloirs ou cavités. Cette donnée est importante quoique les chiffres
indiqués soient toujours très approximatifs et ne doivent, par conséquent,
être employés qu'avec prudence. Une grotte décrite comme ayant de
faibles dimensions peut n'être en réalité que le début de vastes caverne-
ments non encore découverts.
Description des cavités. — Cette description, sauf cas exceptionnel,
sera toujours très succinte surtout si un plan lui est adjoint. Figurent
dans la description les points suivants qui ont une importance bionomique.
A. — La limite de pénétration de la lumière du jour.
B. — L'extension et la nature des incrustations.
C. — La nature du plancher et l'extension des dépôts (argiles, sables,
graviers, éboulis, poussières, etc.).
D. — L'humidité des parois et la présence ou l'absence de suinte-
ments.
E. — La présence et la situation des bassins aquifères (flaques, lacs,
gours, rivières, etc.).
L'agitation de l'air. — L'air qui remplit les cavernes se renouvelle
constamment, car il s'y produit des courants dont l'amplitude et la direc-
tion sont très variables et dépendent de la température extérieure comme
de la configuration de la grotte. Cette circulation de l'air peut s'effectuer
avec une lenteur non discernable à nos sens, ni à ceux plus aiguisés de
certains Troglobies ; nous signalons le fait par les mots : atmosphère
calme. D'autres fois, des courants d'air plus ou moins forts parcourent la
grotte en totalité ou en partie ; nous ne manquons pas de les signaler,
car ils jouent un rôle bionomique important et donnent souvent la clef
des anomalies thermiques ou fauniques.
La température. — Est toujours donnée en degrés centigrades avec
estimation des dixièmes. Nous nous servons de thermomètres Baudin
très exactement corrigés. La température de l'air est prise avec un ther-
momètre fronde et, sauf avis contraire, dans une région calme du fond
des grottes. Celle de l'eau est prise dans les bassins situés dans les régions
profondes et n'est jamais négligée car elle est plus importante que celle
de l'air. Elle est, en effet, moins influencée par les variations accidentelles
et peu importantes ; elle donne par conséquent une valeur plus approchée
212 B. JEANNEL ET E.-G. BACOVITZA
de la température moyenne annuelle du lieu. Dans les grottes à conditions
« normales », elle est généralement d'un degré inférieure à celle de l'air.
Humidité relative, — Est déterminée dans une région profonde et
calme, au moyen d'un même thermomètre qui est frondé d'abord à sec {t)
et ensuite gainé dans un étui mouillé (/'). L'humidité relative est calculée
au moyen du Tableau IX B d'ANGOT (1903, p. 154), La pression baro-
métrique, prise à l'entrée de la grotte, est indiquée pour permettre le
calcul de la correction de pression, qui n'est cependant pas effectuée
lorsque / — f est une fraction, car elle est si faible, de quelques dixièmes
à peine, qu'elle ne dépasse pas l'erreur d'observation et ne peut avoir d'im-
portance bionomique. Nous distinguons d'ailleurs par les mots : {sans
corr. de press.) les chiffres non corrigés de ceux qui le sont.
Ressources alimentaires. — La nourriture habituelle, pour ainsi
dire normale, des Troglobies saprophages est fournie par des substances
organiques qui peuvent être groupées en cinq grandes catégories :
A. — Débris végétaux variés, feuilles, paille, fragments ligneux, etc.
B. — Cadavres de Trogloxènes : Noctuelles, Trichoptères, Sciarides,
etc., etc.
C. — Déjections des Chauves-Souris et petits Rongeurs.
La présence et l'emplacement de ces produits sont utiles à signaler.
Plus importante encore est la mention des amas de guano de Chauves-
Souris, dépôts qui influent sur la composition de la faune et qui signalent
la présence, dans une région, des Chauves-Souris grégaires. Il y a lieu
de distinguer entre le guano frais et le guano ancien ou fossilisé.
D. — Racines qui pénètrent à travers les plafonds minces des grottes
situées dans les garrigues ou forêts. Le. cas se présente rarement, mais est
important à noter, car les racines vivantes ou mortes constituent une
ressource notable de nourriture et, de plus, provoquent la colonisation
du domaine souterrain par certains Radicicoles.
E. — Les Champignons, qui sont d'ailleurs signalés avec les autres
Biotes. Souvent ils prennent un grand développement, mais au point
de vue aUmentaire ils jouent un rôle moins important qu'on ne pourrait
l'imaginer a priori. Les Moisissures, très fréquentes, ne semblent pas être
consommées et même les Hyménomycètes ne portent généralement pas
de traces d'attaque par les Mycophages. Sur les Champignons, nous n'avons
observé jusqu'à présent qu'un petit nombre de Collemboles, Acariens
ou Trichoniscides.
Biotes. — Les Chauves-Souris sont toujours signalées, puis les Tro-
GROTTES VISITEES ?13
gloxènes ou Troglophiles de l'entrée et enfin les habitants des régions
profondes, lorsqu'il y a lieu de consigner des observations utiles sur leur
présence ou sur leur éthologie.
. Plans de grottes. — Nous disions (p. 490 de l'aÉnumération» pe sé-
rie) : « Une grotte dont il n'existe pas de plan orienté et coté ne peut pas
être considérée comme suffisamment décrite. Nous sommes très convain-
cus de cette vérité. Mais pour lever un plan il faut du temps, et nous avons
pensé qu'il valait mieux employer en totalité le nôtre à la recherche des
cavernicoles. »
Cependant (p. 329 de r« Enumération» 5^ série) nous faisions les
remarques suivantes : « Étant donné le nombre de « Plans» de grottes dont
on constatera l'insertion plus loin, on pourrait croire que nous avons
changé d'avis et de méthode. Il n'en est rien cependant. Nous continuons
à consacrer notre temps aux recherches biologiques et nous n'en dis-
trayons qu'une très faible partie pour le lever rapide, au pas et à la bous-
sole, de « Croquis schématiques ».
« Ce ne sont donc pas des plans définitifs, cotés et soigneusement levés,
que nous publions ici et que nous publierons désormais. Nous les nom-
mons « Croquis "schématiques » pour qu'on ne se méprenne point sur leur
valeur topographique. Mais tels qu'ils sont, ils répondent bien au but
que nous nous proposons en les faisant : nous éviter des descriptions
longues et fastidieuses ; nous faciliter l'explication de structures compli-
quées, difficiles à faire comprendre ; nous permettre d'indiquer la situa-
tion des endroits remarquables au point de vue de la structure de la
grotte, des conditions d'existence (température, humidité, ressources
alimentaires, etc.) et de l'habitat des Biotes. Ces avantages nous semblent
compenser largement la faible perte de temps qui en résulte. »
« Nous sommes d'ailleurs forcés de constater que la plupart des « Plans »
de grottes publiés jusqu'à présent ne sont en réalité que des « Croquis
schématiques » comme les nôtres et, osons le déclarer, trop souvent
hélas ! des figurations abominablement fausses. »
Nous n'avons rien à retrancher de ce qui précède ; nous ajouterons
que les « Croquis schématiques » nous paraissant de plus en plus utiles,
cela nous a amenés à compléter leur figuration par l'adoption d'un certain
nombre de signes conventionnels. Le tableau de la p. 214 les énu-
mère.
H nous serait agréable de recevoir les critiques et conseils des confrères
compétents sur cette figuration nouvelle que nous proposons aux spéo-
214
B. JEANNEL ET E.-G. BACOVITZA
Entrée de grotte hnri-
rontalp (a) et verticaU-
(puits, aven) (6).
Limite de pénétration
de la lumière du jour.
Pente dont l'allnre est
représentée par des eoiir-
bes de niveaux, la di-
rection descendante par
des flèches et la dénivel-
lation par le nombre de
mètres
Hauteur du plafimd
{h) estimée en mètres.
Température de len-
di'oit en degrés centi-
grades, pour 1 air et pour
l'eau.
Cheminées du plafond
(a) et puits ou avens du
plancher (6).
Ëboulis formés par de
gros rochers ou de gran-
des pierres
Argiles : A.
Sables ■ .'^.
Graviers : G.
^C
R-égion à pierres pla-
tes reposant sur l'ar-
gile.
Racines : Y
Guano : X
Débris végétau.x
Parois nues (a) ; cou-
vertes d'enduit stalag-
mitique (b) ; incrustées
de cônctétions variées (r)
et très fortement m-
crustées (d).
Pilieis • # •
Bornes : O O
Massifs stalagmiti-
que,^ isolés (a) et sou-
dés aux paroLs (6).
Coulées stalag m iti-
fjues argileuses ou de
tuf
Cours vides (a)et pleins
d eau (6).
Bassins aquifères di-
vers autres que les gours.
Eaux courantes le
sens de l'écoulement est
indiqué par une flèche
de forme spéciale
W0
Annotations topogiapliiques et relatives aux objets inanimés ; En caractères droits, genre imprimerie ;
exemple : Salle cies vasûLtes ,El)ou.Us.
Noms de Biotes : En caractères penchés manuscrits ; exemple ; Uvc^/rlOTlyUS CLUC ,
Gîtes restreints de Biotes: Unglettrede renvoi encerclée; exemple -(Ty^ Trichoniscus .(LJ'= Leptoneta.
Signes spéciaux invariables :\CS/ = Chauves-Souris ; (X^ = Troglobies nombreux et variés.
GROTTES VISITÉES 215
logistes. Si nous avons pris Tinitiative décomposer un semblable tableau,
ce ne doit être considéré que comme un moyen pratique d'amorcer la
discussion. L'approbation des intéressés est indispensable pour que notre
initiative puisse faciliter la collaboration de ceux qui se vouent à l'étude
du Domaine souterrain.
Observations sur les signes conventionnels. — 1. — L'explication
écrite est à préférer au signe conventionnel, qui ne doit être considéré
que comme une abréviation à employer quand l'espace disponible est
trop restreint. Le but de toute figuration doit être clarté et lecture facile.
2. — L^n signe spécial est proposé pour les régions à pierres plates
reposant sur l'argile, parce que ces régions sont parmi les plus peuplées ;
beaucoup de Biotes recherchent ces pierres à l'exclusion de tout autre
gîte.
3. — Les incrustations sont figurées par un trait d'autant plus large
que leur épaisseur, complexité ou richesse, sont plus considérables. La
largeur du trait ne doit pas être prise sur la largeur de la caverne, mais
en dehors des traits-limites des parois. Pour mieux nous faire comprendre,
prenons un exemple. Une longue galerie à parois parallèles de 10 mètres
de largeur, d'abord nue, puis de plus en plus incrustée, sera figurée au
1.000^ par deux traits parallèles distants de 1 cm., d'abord fins, puis
s'épaississant de plus en plus, mais la lumière de la galerie restera sur
toute sa longueur large de 1 cm., car l'épaisseur des traits sera prise en
dehors.
Les niches, orgues, draperies, massifs appliqués aux parois, rideaux,
etc. ne sont jamais figurés sur un croquis à petite échelle, mais seulement
schématisés par l'épaisseur et les sinuosités du trait. Mais sont figurées
les cloisons stalagmitiques ou rangées de piliers qui délimitent des pas-
sages ou des salles de proportions suffisantes pour l'échelle adoptée.
Index. — L'index général des cinq premières « Enumérations »
a été publié dans la cinquième « Énumération ». La dixième « Enuméra-
tion » contiendra l'Index général des dix « Enumérations » précédentes.
Le classement des grottes par départements, adopté dans ces Index,
nous a semblé le seul pratique.
Recherches extensives et intensives. — Cette « Énumération » est le
39^ mémoire de Biospeologica ; plus de 700 grottes ont été explorées ;
un certain nombre de groupes importants de Cavernicoles ont été étudiés ;
quelques régions naturelles ont été plusieurs fois visitées. On pourrait
216 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
conclure de ce qui précède que la période de « recherches extensives »
est dépassée pour l'occident de l'Europe, qu'il n'est plus ni nécessaire
ni fructueux de fouiller rapidement beaucoup de grottes et de parcourir
de vastes régions avec l'allure d'explorateurs en pays exotiques inconnus.
Cette conclusion est cependant illégitime !
La Biospiologie n'est pas encore entrée dans le stade de maturité
scientifique. L'enquête préliminaire, permettant d'établir des plans de
recherches intensives et des inventaires détaillés des richesses spéolo-
giques n'est pas achevée, même pour les régions qui semblent les mieux
connues. Les essais de synthèse effectués pour les groupes les plus ancien-
nement recueillis et les mieux étudiés n'ont pas fourni des conclusions
assez certaines et n'ont pas justifié nos espoirs. Certes, ces essais furent
légitimes et sont indispensables pour la bonne marche des recherches
ultérieures, mais il ne faut pas actuellement leur demander plus qu'ils
ne peuvent fournir. Ce ne sont encore que des mises au point et que
des bases pour asseoir des hypothèses de travail, mais rien autre. Ils
fournissent bien moins de réponses aux questions anciennes qu'ils n'en
suscitent de nouvelles.
Les Synthèses de Biospéologie régionale sont encore moins réah-
sables. Nombre de groupes importants n'ont pas été étudiés et aucune
région n'est assez fouillée pour se prêter à de semblables monographies.
Les spéobiotes sont très nombreux, très variés, d'origines très diverses,
d'âges très différents et parmi eux les relictes abondent. La démonstra-
tion de cette grandeur, variété et complexité du monde vivant souterrain
ne fut pas un des résultats les moins surprenants de Biospeologica.
On n'aurait pas osé l'affirmer avant ces recherches, et d'ailleurs l'avis
unanime des spéologistes anciens était que le Domaine souterrain était
un des moins peuplés et des moins importants de la terre.
Et les publications des anciens spéologistes ne sont que rarement
utilisables. Les espèces furent mal établies, insuffisamment étudiées, et
le plus souvent leur provenance précise n'est pas indiquée.
La doctrine spéologique n'était que vague assemblage d'affirmations
hasardées, de généralisations prématurées, de résultats expérimentaux
faux, de théories injustifiées, mélange chaotique à erreurs prédominantes
parmi lesquelles il s'est agi de faire le sauvetage de quelques rares vérités.
Pour chaque groupe de Biotes, comme pour chaque groupe de faits, il
fallut procéder à des révisions pénibles et à des critiques méticuleuses,
et ces observations préliminaires et indispensables sont loin d'être ache-
GROTTES VISITÉES 217
vées. Ces circonstances contraires ont naturellement retardé la maturité
scientifique de la Biospéologie.
Si Ion doit en conclure que les recherches extensives sont encore
utiles partout et qu'elles seront encore longtemps fructueuses, il n'en
résulte point que certaines recherches intensives ne puissent pas être
entreprises. L'étude détaillée de l'éthologie de quelques Biotes suffisam-
ment connus et l'étude intensive des conditions d'existence qu'offre
le Domaine souterrain sont l'objet de nos constantes préoccupations.
Nous cherchions le moyen de surmonter les difficultés considérables
auxquelles se heurte le programme, même modeste, de semblables recher-
ches, lorsque la guerre nous força à en remettre la réalisation à des temps
meilleurs.
Il faut créer pour ce genre d'études un outillage d'enregistreurs et
d'instruments spéciaux, qu'il n'est pas difficile d'imaginer, mais qui
sera très coûteux à réaliser. Un certain nombre de recherches pourront
être faites, et ont déjà été tentées, avec des Spéobiotes en captivité et
à l'aide d'installations artificielles imitant plus ou moins bien les condi-
tions d'existence du milieu souterrain, mais ce ne sont pas semblables
expériences qui nous tentent beaucoup. Nous cherchons à réaliser l'ins-
tallation, au moins temporaire, d'un laboratoire dans une grotte naturelle,
bien choisie, où nous puissions expérimenter avec les Troglobies dans
leur miheu naturel, ou du moins maintenus captifs dans ce milieu. Sem-
blable laboratoire, même s'il ne fonctionnait que deux ou trois ans,
fournirait non seulement des renseignements précieux sur l'éthologie
des Spéobiotes, mais constituerait l'unique moyen pour étudier sérieu-
sement et minutieusement la bionomie du Domaine souterrain. Sa réali-
sation est le but principal que Biospeologica se propose désormais.
Campagnes spéologiques. — Il nous semble utile de consigner ici
quelques observations générales sur nos diverses campagnes spéologiques.
Cabardès et MiNERVOis (Grottes nos 531 ^ 588). — Racovitza a
abordé l'étude de cette région pour contrôler, de ce côté, l'extension de
la faune souterraine pyrénéenne. La puissante barrière que forme la
vallée de l'Aude sépare actuellement des Corbières ces régions calcaires.
Les Troglobies pyrénéens ne peuvent traverser la vaste plaine d'alluvions
ou de terrains qui ne peuvent leur fournir des voies de dispersion. Il n'en
a pas été de même aux époques antérieures et, comme l'histoire géolo-
gique de la région est assez bien connue, il pourrait en résulter des conclu-
sions importantes pour l'histoire naturelle des Troglobies communs aux
218 i?. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
deux régions, s'il en existe de semblables. D'autre part, Cabardès et Miner-
vois sont actuellement assez isolés de la région des Causses et leurs rela-
tions fauniques avec cette région sont également importantes à connaître.
Il nous a semblé, et ce ne peut être qu'une simple impression, que la
faune assez riche recueillie forme une association autochtone et plus
voisine de celle des Causses que de celle des Pyrénées. Seule l'étude détaillée
du matériel, non encore entreprise, pourra nous fixer à cet égard.
CÉVENNES (Grottes nos589 à 618). — Nous avons exploré cette région
depuis les Monts Garrigues jusqu'à Vallon (Ardèche). Sur toute cette
étendue, les massifs calcaires se touchent plus ou moins et nulle barrière
ne semble limiter la dispersion des Troglobies. Il ne faudrait pas en con-
clure que la faune soit uniforme. Nous rapportons de nos chasses l'impres-
sion très nette qu'il y a une différence marquée entre la région ardéchoise
et celle des massifs du Gard et de l'Hérault. Si l'étude du matériel con-
firme notre impression première, il est possible que la raison de cette
divergence doive être cherchée dans les vicissitudes géologiques de la
région et non parmi les causes actuelles. L'Ardèche héberge des relictes
très anciens qui ne se rencontrent pas ailleurs.
Notre campagne s'effectua en plein hiver 1913-1914, hiver qui fut
exceptionnellement froid ( — 15° C). Comme cela se passait dans un pays
méridional, où il doit faire chaud par définition et où les habitants n'ont
pas prévu qu'il puisse faire autre température, nous fûmes singulière-
ment maltraités par la froidure dans nos chambres d'auberge non chauf-
fées et sans carreaux aux fenêtres. Le matin, nous avions hâte de fuir
les gîtes des humains pour envahir ceux des Troglobies, dont les + IÇP
à 120 C nous semblaient délectables.
Si ces vicissitudes climatériques ne sont pas négligeables dans la vie
des spéologistes, elles jouent un bien plus grand rôle dans la bionomie du
Domaine souterrain ; nous avons pu très nettement le constater. Toutes
les grottes à région antérieure en pente descendante présentaient des
anomalies notables de température et d'humidité relative ; elles étaient
plus froides et plus sèches que les grottes horizontales ou que celles qui
débutaient par une pente ascendante. L'air glacé du dehors, plus lourd,
s'engouffre dans les puits et coule le long des pentes descendantes, pro-
voquant un contre-courant supérieur ; ces divers courants étaient sou-
vent très forts et toujours faciles à discerner près de l'entrée. Or, cet air
froid est en même temps très sec.
Dans toute la région, l'entrée des grottes est très fréquentée par
GROTTES VISITÉES 219
des Noctuelles et Tinéides, par des Sciarides et Limnobiides, souvent
en nombre prodigieux. Maintes fois, nous avons constaté la présence de
Culicides parmi ces Trogloxènes ; ces Diptères sont excessivement rares dans
les autres régions, du moins aux saisons où eurent lieu nos explorations.
Non sans surprise, nous constatâmes pour la première fois la présence
de Gryllomorphes (Orth.) dans les grottes, et cela dans le commence-
ment de la zone d'obscurité complète. Leur présence n'est pas acciden-
telle ; ils constituent un élément constant de la faune de ces régions. Nous
pouvons les signaler dans toutes les régions visitées de l'Hérault et sou-
vent en grand nombre ; ils sont plus rares dans le Gard et l'Ardèche.
Nous n'avions pas encore rencontré ce joli Grillon dans les grottes médi-
terranéennes, et pourtant c'est un Obscuricole très commun dans toute
la zone de l'olivier. Est-ce seulement l'hiver qu'il envahit les grottes ?
Nous l'ignorons. La même question se pose d'ailleurs pour le Scutigère
qui mène vie analogue et fréquente à peu près les mêmes pays ; pour
la première fois, dans ces grottes des Cévennes, nous avons rencontré ce
MjTiapode si souvent et aussi nombreux. Il est possible que ces animaux
méridionaux ne pénètrent dans les grottes que dans les régions les
plus septentrionales de leur aire de dispersion et cela pour se soustra're
aux baisses considérables de température.
Les Coléoptères troglobies du sud des Cévennes diffèrent de ceux qui
habitent les grottes de l'Ardèche. Il en est de même pour d'autres groupes.
Androniscus (Isop.) est fréquent dans l'Hérault ; il l'est moins dans le
Gard et semble manquer dans les grottes ardéchoises où il est remplacé
par un Trichoniscide de même taille, mais très différent. Nous n'avons
trouvé de Spélaeoglomérides (Myriap.) que dans le Gard et leur fré-
quence s'accrut en Ardèche. Il faut laisser aux travaux spéciaux, les
seuls quahfiés, le soin de préciser ou infirmer ces indications.
Plus fréquentes qu'ailleurs sont les grottes « à racines .« Le fin chevelu
que forment dans les cavernes ces organes végétaux attirent surtout les
Hyalinia (Gastrop.), Trichoniscides (Isop.) et Polydesmides. Les Gryllo-
morphes chassent autour, quand ces formations ne sont pas trop pro-
fondément situées.
Des pontes nombreuses d'Aranéides furent observées (en janvier),
ce qui montre que la saison n'influe plus sur la reproduction de ces ani-
maux. Les petits Rongeurs des Cévennes sont des visiteurs ass dus des
grottes. Plus fréquemment qu'ai leurs, nous y avons i encontre leurs
déjections, souvent concentrées sur un petit espace.
Arch. de Zool. Exp. et GÉN. — T. 57. — V. 3. 15
220 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Carniole (Grottes nos 627 à 635). — Ce que la Mecque, la ville sainte
de l'Islam, est pour le musulman, la Carniole l'est pour le spéologiste
et l'on ne peut devenir hadji es science souterraine sans avoir fait un
pèlerinage dans ses célèbres cavernes. La Carniole n'est pas seulement
le berceau de la science spéologique, c'est la patrie du Protée, du Lep-
odirus, du Titanethes, de la Stalita, du Troglocfviris et d'autres géants
du monde souterrain. Comment résister au désir de contempler ces êtres
extraordinaires dans leur milieu originel, de les voir accomplir les rites
fatidiques de leur vie, de les poursuivre soi-même dans leurs demeures
mystérieuses ! Nous n'opposâmes aucune résistance à cette nostalgie et,
fin avril 1914, nous débarquâmes avec notre équipement dans la capitale
spéologique de la Carniole, la gentille petite ville de Postojna que les
Autrichiens de langue allemande baptisèrent Adelsberg sans raison
valable.
Nous n'eûmes point à regretter ce voyage. En une dizaine de jours
nous visitâmes neuf belles grottes choisies exprès parmi les plus connues.
Non seulement tout ce que nous nous proposions de faire fut accompli
en entier, c'est-à-dire : visiter des régions classiques au point de vue
spéologique, observer tous les Troglobies remarquables dans leur milieu,
recueillir un matériel de comparaison avec nos faunes occidentales, mais
nous dépassâmes notre programme et nos espérances en découvrant des
Troglobies nouveaux et fort intéressants.
Les premiers spéologistes, originaires de pays herbus à glèbes fer-
tiles et grasses, s'effarèrent à la vue du sol rocailleux de la Carniole et
du Karst. Comparé à l'ininterrompu tapis végétal de leur pays originel,
celui-ci, zébré du gris des masses rocheuses nues, leur parut l'image même
du pays désertique, et cette impression exagérée fut docilement transmise
par tous leur successeurs. C'est sous l'effet de cette suggestion livresque
que nous abordâmes la Carniole et notre surprise en face de la réalité ne
fut pas mince !
Le Karst proprement dit est évidemment un peu gris, la teinte de la
roche domine dans la couleur générale du paysage, mais des garrigues,
tantôt claires, tantôt touffues, couvrent de vastes espaces et encerclent
des champs cultivés et des petits bois. Quand à la Carniole, c'est un magni-
fique pays à végétation opulente oîi le vert foncé d'immenses forêts borde
le vert clair de vastes dépressions cultivées, et c'est à peine si par place
pointe la silhouette nue et grise d'une masse rocheuse. L'abondance des
pluies explique fort bien cet état de choses, mais quel contraste avec le
GROTTES VISITÉES 221
théâtre habituel de nos exploits ! Nous n'avons rencontré nulle part sur
notre route pays de nudité rocheuse comparable aux surfaces vérita-
blement désertiques de nombre de régions karstiques d'Espagne et même
de France.
La magnificence du Domaine souterrain dépassa notre attente. Certes
le gouffre de Padirac et les cavernes des Baléares sont d'admirables mer-
veilles, mais la grotte d'Adelsberg n'a rien à leur envier. Cette caverne
est non seulement gigantesque et complexe, avec ses galeries vastes
et ses dômes élevés, avec ses rivières et ses lacs considérables, mais c'est
encore une des plus incrustées ; sur des kilomètres de longueur se mani-
feste la fantaisie échevelée des cristallisations calcaires.
Dans ce pays, le nombre des cavernes et leur densité ne sont pas
exceptionnels, mais certainement leurs dimensions le sont, comme le
sont aussi la multitude des eaux courantes qui les parcourent et la gran-
deur des lacs qu'elles contiennent. Le Domaine souterrain possède ici
des surfaces habitables immenses et nulle part ailleurs il n'offre de
meilleures conditions d'existence. La pluviosité de la région et l'épaisse
végétation y entretiennent une humidité considérable et constante, et
partout les forêts et garrigues susjacentes fournissent copieuses res-
sources alimentaires. Mainte région épigée pourrait envier le pullule-
ment de Troglobies que nous avons souvent constaté.
Mais ce qui nous procura plaisir de choix et satisfaction toute nou-
velle, c'est la fréquentation des cavernicoles de la région, races de géants,
inconnus ailleurs. Habitués à recueillir, à la pointe d'un mince pinceau,
des créatures minuscules et fragiles, nous regardions émerveillés les
Leptodirus, Titanethes, Stalita et autres colons de ces souterrains pri-
vilégiés ; ils déambulaient, gros, gras, puissants, comme dans n'importe
quel domaine épigé et souvent aussi nombreux.
Le Protée semble être moins commun, mais ce n'est qu'une apparence.
Dans des régions difficilement accessibles il a été vu en grand nombre, et
très considérables doivent être encore les bassins inexplorés où il est à
l'abri des convoitises humaines. M. Perko nous a dit avoir vu, dans une
de ses explorations, un lac à parois argileuses grouiller de centaines de
Protées et Troglocharides. Le Protée est cependant difficile à voir pour
un visiteur pressé, car il manque dans les galeries d'accès facile.
La tête de ce pauvre Urodèle est mise à prix, et à bon prix. Non seule-
ment les touristes en acquièrent volontiers, surtout les touristes alle-
mands grands amateurs d'« aquariums de salon», mais les laboratoirea
222 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
zoologiques en réclament, car cette merveilleuse bête est renommée pour
la beauté et la grandeur de ses éléments histologiques. La profession de
chasseur de Protées rapporte donc des profits non négligeables.
Comme tous les Troglobies aquatiques que nous avons bien étudiés,
le Protée évite également les eaux torrentielles ; il se tient dans les biefs
tranquilles ou dans les lacs affluents des eaux courantes. Pendant les
crues, et elles sont très puissantes en Carniole, biefs latéraux et lacs
affluents prennent d'énormes extensions. Les galeries basses sont envahies
par les eaux calmes et les Protées se livrent à des explorations lointaines,
à de véritables migrations. Quand les eaux se retirent, elles laissent der-
rière de nombreux lacs où les aquatiques sont emprisonnés jusqu'à la
crue suivante. Quelques-uns de ces lacs sont facilement accessibles,
notamment dans la Crna Jama, et c'est dans ces bassins que les chasseurs
de Protées vont faire leur pêche et capturent tout ce que chaque crue
apporte. Ce sont d'ailleurs les seules pêches fructueuses. Il y a bien aussi
quelques petits bassins en communication permanente avec les réserves
inaccessibles, mais les Protées ne s'y introduisent qu'isolément et en
petit nombre.
L'existence de gros Troglobies aquatiques, comme Troglocharis,
Monolistra, Asellus, Niphargus, et leur nombre souvent considérable,
permettent de comprendre comment un gros et vorace Batracien peut vivre
et prospérer dans ce Domaine souterrain. Et la présence simultanée de
tous ces animaux n'est possible que s'il existe de vastes bassins hydro-
graphiques communiquant. Ces conditions ne sont réahsées dans aucun
des bassins souterrains de France ou d'Espagne.
Nous n'avons trouvé que peu de Chauves-Souris et seulement de
très faibles accumulations de guano. Noctuelles et Gc'ométrides étaient
rares dans les entrées de grottes. Peut-être est-ce dû à la saison (mai),
peut-être aussi à la présence d'un Orthoptère très entreprenant et abon-
dant, le Troglophile, dont nous avons pu constater les méfaits.
Notons, sans essayer de l'expliquer, que toutes les températures
données par Schmidl (1854) pour les grottes que nous avons visitées
furent trouvées plus hautes de 1° à S^C, tandis que celles de Hochstetter
(1881) concordent bien avec les nôtres.
Hfesca (Espagne) (Grottes n^s 636 à 641), — Ayant exploré les Py-
rénées espagnoles depuis la Méditerranée jusqu'au rio Ara, nous nous
sommes proposés d'en compléter l'exploration jusqu'à l'Océan. Nous lon-
geâmes donc, à partir de Torla, la chaîne centrale vers l'ouest, voyageant
GROTTES VISITÉES 223
sur riiorrible Flish aux tristes et mornes paysages et faisant des crochets
vers la bande crétacée aux belles crêtes ruinif ormes, dont l'aspect
« grottifère » nous donnait bon espoir. Hélas ! le résultat de notre enquête
fut lamentablement négatif, même dans le beau massif que traverse le
majestueux canon du Castillo de Ansô, même dans la merveilleuse haute
vallée de Bellabare. Les quelques cavernes que nous avons pu trouver sont
de simples trous plus ou moins profonds, mais qui ne peuvent servir de
gîte aux Troglobies. Elles sont très éloignées des villages, et pour y accéder
il faut, le plus souvent, se livrer à des gymnastiques scabreuses.
Nous étions à Isaba, nous préparant à poursuivre notre course en
Navarre, quand les journaux espagnols nous mirent au courant du com-
plot austro-allemand contre la Serbie et la paix du monde, ce qui nous
força à rentrer en France.
Jura (Grottes n^s 666 à 676). — Nous n'avions que peu de données sur
la Biospéologie de cette région, aussi Jeannel profita de quelques loisirs
que lui laissait son service dans les ambulances du front d" Alsace pour
explorer quelques grottes. Un bon matériel a été recueilli ; la faune paraît
moins riche et moins variée que dans les régions plus méridionales ou
occidentales.
Ce matériel a été utilement complété et notablement enrichi par les
chasses de notre nouveau collaborateur M. Sollaud.
Notes sur les Chauves-Souris et leurs déjections. — Nous avons déjà
fait allusion ailleurs (p. 210) au rôle important que jouent les déjections
des Chauves-Souris en bionomie souterraine. Tous les Saprophages se
repaissent, en effet, de cette manne qui leur tombe du plafond ; nous avons
vu même des Niphargus (Amphip.) s'emparer de crottes tombant dans
leurs flaques et les emporter en lieu sûr. Les bassins aquifères situés sous
les gîtes de Chauves-Souris grouillent généralement d'Amphipodes et
autres Biotes aquatiques, tandis que les bassins voisins ne contiennent que
de rares habitants. Cette observation, maintes fois renouvelée, montre que
les Biotes aquatiques exploitent cette nourriture comme les terrestres.
Les déjections des Chauves-Souris se présentent sous deux moda-
lités, qu'il faut distinguer car leur effet bionomique est très différent.
A. — Les amas plus ou moins considérables, pouvant atteindre plu-
sieurs mètres d'épaisseur sur des dizaines de mètres de longueur, amas
qui avec le temps se fossilisent en se transformant en une sorte d'argile
plus ou moins bitumineuse, de couleur, consistance et odeur caracté-
ristiques. C'est ce qu'on nomme « guano de Chauves-Souris ».
224 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Les Chauves-Souris choisissent comme gîte des coins à atmosphère
stagnante, par conséquent humides et situés assez profondément. Leur
guano se dépose donc très souvent sur des planchers détrempés. Comme
il est, de plus, spongieux et qu'il retient Feau, il forme généralement une
masse boueuse, entourée de rigoles de purin et émettant une forte odeur
ammoniacale. Quand tous ces caractères sont bien prononcés, le guano
constitue un milieu dont les conditions d'existence sont très pàrticuHères et
très différentes de celles du miheu souterrain normal ; aussi héberge-t-il une
faune spéciale qui n'est entrée dans le Domaine souterrain que parce que le
guano s'y trouve. A ces « Guanobies exclusifs » viennent s'adjoindre quel-
ques Cavernicoles guanophiles et des carnassiers qui chassent ces deux
catégories de mangeurs de guano. Il se constitue ainsi une « association
du guano» dont la composition est très constante pour les grottes de
vastes régions. L'aire occupée par une association du guano est, en effet,
beaucoup plus grande que les aires de distribution des associations de
Spéobiotes francs.
Les Troglobies vrais ne font pas partie de l'association du guano.
Leur répulsion pour ces stations est d'autant plus grande que leur adap-
tation troglobie est plus complète et que les caractères que nous avons
assignés au guano typique sont plus prononcés. Ils fréquentent volon-
tiers les alentours des petits tas de guano plus ou moins secs ; ils évitent
le voisinage des grands amas boueux et manquent complètement dans les
galeries trop envahies par les dépôts frais.
B. — Les crottes isolées se rencontrent dans toutes sortes de grottes
et à toutes les profondeurs. A celles provenant des Chauves-Souris, il
faut ajouter celles beaucoup plus rares dues aux petits Rongeurs, mais
qui sont tout aussi activement exploitées par les Cavernicoles. Il est rare
de trouver une grotte oii l'on ne puisse pas constater leur présence ; elles
jouent donc un rôle important dans la bionomie souterraine et capital
dans la vie des Troglobies saprophages. Souvent elles constituent l'unique
source de nourriture discernable pour ces Spéobiotes à adaptation étroite
Ayant ainsi défini les produits, il nous reste à nous expliquer sur leur&
fabricants et à montrer qu'entre ceux-ci il faut également établir une dis-
tinction. Les producteurs de guano sont les Vespertilionides, Chauves-
Souris à mœurs grégaires, et les déposants de crottes isolées sont pre que
toujours les Rhinolophides, Chauves-Souris individualistes par excel-
lence.
Que les Rhinolophes soient grands ou petits (type : R. jerrum-
GROTTES VISITÉES 225
equinum ou type : R. hipposiderus), leur répugnance à accepter le contact
d'un camarade est la même. On les trouvera bien, de temps en temps,
logés à plusieurs dans la même excavation, mais toujours à certaine
distance les uns des autres. Le plus souvent ils sont si éparpillés qu'il
n'est pas possible de les considérer comme compagnons d'une même
bande. Il n'est pas rare d'en trouver un seul par caverne. Il semble donc
que ces Chauves-Souris soient dépourvues de tout instinct de sociabilité
et qu'on doive attribuer au hasard la présence simultanée de plusieurs
exemplaires dans la même grotte. Ces mœurs individualistes influent sur
leur caractère ; ce sont des bêtes hargneuses et méchantes. Impossible d'en
enfermer plusieurs dans un même sac ou dans une même cage étroite sans
qu'ils se déchirent ou se tuent ; et gare au doigt téméraire qui ne les a
pas saisis au bon endroit !
Ils sont moins regardants pour la sélection du gîte que les Vesperti-
lionides ; aucun choix réel ne semble intervenir pour fixer l'endroit où
ils s'accrocheront pour hiverner ou se reposer pendant le jour. Maintes fois
nous les trouvâmes tout près des entrées de grottes, exposés aux courants
d'air et aux condensations que provoquent les changements brusques
de température, grelottant misérablement sous une couche de poussière
et de fines gouttelettes liquides. Ils paraissent plus profondément endormis
que les autres pendant le sommeil hivernal ; pour les amener à s'envoler
il faut une excitation notable. Il nous est arrivé d'en décrocher de leur
place, puis de les raccrocher sans les réveiller ; souvent on les fait tomber
sans qu'ils s'envolent tout de suite.
Les Rhinolophes ont l'envergure très puissante ; ils s'enveloppent
au repos complètement dans leurs ailes ; les membranes alaires font une
protection continue à tout le corps. Les petits Vespertilionides ne pren-
nent pas cette attitude ; leurs ailes serrée? ne couvrent que les flancs.
Peut-être faut-il chercher dans cette divergence la raison de leur diver-
sité de mœurs.
Quoiqu'il en soit, les amas de guano sont produits par les Vesperti-
lionides grégaires. Ces Chauves-Souris choisissent toujours soigneuse-
ment l'emplacement de leurs colonies. Il leur faut une atmosphère
calme et un gîte assez éloigné de l'entrée pour être soustrait aux
variations extérieures. Il leur faut, dans un plafond élevé, une dépres-
sion pas trop accidentée mais en même temps rugueuse pour que l'accro-
chage soit facile. Dans le gîte ainsi choisi, ils se tiennent les uns contre le
autres, le plus serrés possible. Ceux de la périphérie font de constants efforts
226 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
pour se faufiler au centre, d'où cris et disputes continuels, mais tou s'ar-
range sans dommages, car la vie sociale leur a créé caractère affable
et douceur de mœurs. Ce qui prouve que leur sociabilité est bien réelle,
c'est ce que nous avons vu dans une grotte pyrénéenne : serrés dans un
même tas étaient les représentants de plusieurs espèces, de tailles très
diverses et d'âges très différents ; jeunes, vieux, mâles, femelles avec leurs
nourrissons tout nus, formaient une masse bruyante, mais paisible. Ils
étaient si serrés que leurs crottes s'accumulaient parmi leur corps et
que les Phorides venaient y pondre ; la riche vermine qui les habite avait
beau jeu pour se répandre.
Les Minioptères ne semblent pas former de ces agglomérations serrées.
Ils sont très sociables et forment de grandes colonies, mais ils se tiennent
de préférence accrochés par les quatre membres, la face ventrale appli-
quée contre la pierre, le dos protégé par les membranes alaires. Cette
attitude ne permet pas de (( serrer les rangs » ; les bêtes ne se touchent
pas et la colonie occupe naturellement une grande surface de parois.
Relevé statistique et géographique des grottes visitées. — Cette 6^
« Enumération » traite des grottes numérotées 581 à 760 ; elle contient par
conséquent la description ou le bordereau d'exploration de 180 cavernes.
Sur ce nombre, 36 ont déjà été citées ou décrites dans les « Énumérations »
précédentes, mais 144 sont décrites ici pour la première fois. De plus,
sont signalées à titre de renseignement 77 grottes qui n'ont pas fourni
de matériel ou qu'on nous a nommées sans que nous ayons pu les visiter.
Nous avons personnellement exploré 73 grottes ; d'obligeants con-
frères et amis qui seront cités plus loin ont exploré les 107 autres.
Plusieurs (18) de ces grottes ont été visitées à deux (11), trois (4) ou
quatre (3) reprises. Il en résulte que au moins 208 explorations ont été
effectuées en ne comptant que celles qui ont fourni des Biotes. Le maté-
riel recueilli, et trié par spécialistes, nous a fourni 1.461 tubes contenant
les représentants de 39 groupes. A ce matériel, il faut ajouter 31 séries
de Lépidoptères, 12 de Diptères, 8 de Trichoptères et 3 d'Orthoptères,
conservées à sec, plus 48 Chauves-Souris.
Au point de vue géographique, nos 1 80 grottes ayant fourni du maté-
riel se repartissent de la façon suivante :
Algérie. — Départements : Alger (27 grottes), Oran (2) ; en tout 29.
Autriche. — Provinces : Carniole (8 grottes), Kiistenland (1) ; en
tout 9.
Espagne. — Provinces : Alicante (5 grottes), Baléares Ibiza (4),
GROTTES VISITÉES 227
Cadiz (3), Ciudad Real (1), Granada (2), Guipûzcoa (10), Huesca (6),
Léon (1), Madrid (1), Malaga (3), Navarra (3), Oviedo (5), Tarragona
(4), Valencia (3), Vizcaya (1) ; en tout 52.
France. — Départements : Alpes-Maritimes (1), Ardèche (12),
Ariège (2), Aude (4), Belfort (1), Côte-d'Or (9), Dordogne (4), Doubs
(20), Gard (10), Haute-Garonne (4), Hérault (13), Jura (2), Hautes-
Pyrénées (1), Pyrénées-Orientales (2), Haute-Saône (2), Var (2) ; en
tout 89.
Italie. — Province : Salerno (1).
Collaborateurs. — Cette « Énumération » a profité, comme ses devan-
cières, du zèle et du désintéressement de nombreux collaborateurs. Nous
relevons avec joie l'accroissement du nombre des amis de Biospeologica,
œuvre collective par excellence, qui ne peut prospérer que par les efforts
combinés de nombreux spéologistes. C'est avec un vif plaisir que nous
adressons ici un souvenir reconnaissant à tous ceux qui nous ont fait
don de matériel, à tous ceux qui nous ont fourni des descriptions de grottes,
à tous ceux qui nous ont aidés dans nos explorations, qui nous ont fourni
des renseignements et nous ont assistés dans nos recherches. Nous allons
les énumérer en les priant d'agréer nos plus sincères remerciements.
M. le Professeur H. Breuil a poursuivi activement ses recherches
d'archéologie spéologique en Espagne. Comme d'habitude il nous a fait
don du matériel qu'il a récolté et a enriclii cette Énumération de la des-
cription des 50 grottes (n^s 621 à 626, 642 à 657, 681 et 682. 694 à 719)
qu'il a explorées avec succès.
M. le lieutenant Decary a profité d'un séjour de convalescence à
Amélie-les-Bains pour explorer deux grottes (n^s 679 et 680) à notre
intention.
M. L. Page nous aida dans l'exploration de 38 grottes (n^s 581 à 618)
et en explora deux autres (no» 692 et 693) pour Biospeologica.
M. Ch. Fagniez collabora à l'exploration de 17 grottes (n^^ 602 à 618) et
nous fit profiter de son auto rapide et confortable. Il nous fit don, en plus,
du matériel de deux autres grottes (n^s 619 et 620).
M. le commandant Magdelaine, en traitement pour blessure de
guerre, ne put résister à l'attraction qu'exerçaient les grottes voisines de
l'hôpital où on le soignait ; il nous remit le matériel des trois cavernes
(nos 677 à 679) explorées, avec leurs descriptions.
M. le professeur Maire aida notre collaborateur Peyerimhoff dans
l'exploration du massif Kabyle et rédigea pour cette « Enumération »
228 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
une suite (n^s 734 à 750) aux précieuses Notes botaniques parues dans
r« Énumération » précédente.
M. P. Paris se propose de faire des recherches sur la Biospéologie des
environs de Dijon. Ses premières explorations de neuf grottes ou sources
(n^s 683 à 691) lui ont fourni des matériaux intéressants dont il nous fait
bénéficier.
M. P. de Peyerimhoff a parcouru de nouveau le Djurdjura, cette
fois jusqu'à l'extrémité orientale ; à l'étude des nombreux « tessereft »
occidentaux, il ajouta celle des « anou » orientaux, ainsi qu'un certain
nombre de grottes nouvelles. La description des 27 unités souterraines
(nos 734 à 760) est imprimée plus loin et la majeure partie du matériel
récolté est incorporée à nos collections d'étude.
M. E. SoLLAUD, devant séjourner à Besançon, n'a pas manqué l'oc-
casion de faire de la spéologie dans cette région si riche en cavernes. Il
nous a confié les descriptions et le matériel de 15 grottes (n^s 671 et 672,
721 à 733) accompagnés d'intéressantes observations bionomiques.
M. Haijcke (nos 627 à 631) et M. Moroder (no 698) nous ont également
fait don de matériel.
Les personnes suivantes nous ont aidés ou ont aidé nos collaborateurs
dans l'exploration des grottes et la récolte du matériel : MM. Aram-
BOURG (no 659), Comte Begouen et ses fils (n^s 660 à 665), Brandt
(no 629), Dr Brumpt (n^s 668, 673 et 674), J. David (n^s 581 à 588),
Estrabaut (nos 586 à 587), Gennevaux (nos 589 et 590), Hafck (no 630),
Perko (nos 627 et 630), Siever et Mme Siever (n» 630), Vandel (no 671).
Nous ont fourni de précieux renseignements MM. Arambourg (no 658) ,
Netjvian (no 597), Rabou (mont de la Seranne), Seif (no 628).
Énumération des Grottes
581. Grotte de Limouzis.
(FIQ. 1)
Située à 500 m. au N.-O. du hameau de Marmorières, commune de
Limouzis, canton de Conques, département de l'Aude, France. — Alti-
tude : 420 m. — Roche : Calcaires siluriens? — Date : 24 novembre 1913.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Thysanoures, Collemboles, Myria-
podes, Aranéides, Chernètes, Isopodes, Mollusques, Oligochètes, Cham-
pignons. — Numéro : 724.
GROTTES VISITÉES
229
M, J. David nous a aidés dans l'exploration de
cette grotte, ainsi que dans les recherches effectuées
dans les sept grottes suivantes.
L'emplacement de l'entrée est indiqué sur la carte
au lOO.OOOe. SiCARD (1900, p. 41) la cite en lui attri-
buant, à tort, seulement 200 ni. de longueur. La com-
mune deLimouzis^ en est propriétaire et, après l'avoir
aménagée, fait payer une entrée aux visiteurs.
A partir du hameau de Marmorières, on suit un
thalweg à sec sur lequel, au bout de 500 m. env.,
s'ouvre latéralement la grotte qui n'est qu'un ancien
affluent de la rive droite, présentant tous les carac-
tères d'une caverne de faille, typique. La grotte, en
effet, est formée par une galerie unique, presque
rectiligne et presque horizontale, légèrement ascen-
dante seulement vers le fond, à sol pourvu d'inéga-
htés, collines et dépressions, de faible importance.
Les parois montrent des traces d'érosion par cou-
rants peu actifs. De fortes masses argileuses, surtout
développées à 200 m. de l'entrée, indiquent qu'il y
eut une période de remblaiement. Actuellement, la
grotte se trouve dans la phase de comblement stalag-
mitique ; des massifs très beaux et très nombreux
encombrent la galerie et, en plusieurs endroits, ces
incrustations forment des cloisons complètes qu'on
traverse par des chatières.
Nous n'avons visité la grotte que sur 325 m.
env., mais on nous a affirmé que la galerie se con-
tinuait sur une distance presque égale. En élargis-
sant un trou à vent derrière la passerelle, on aurait
découvert une région nouvelle que les explorateurs
qualifient de « merveilleuse et incomparable ». La
structure de la grotte nous incite à penser que la
nouvelle partie n est que la continuation pure et
simple de l'ancienne, c'est-à-dire une galerie tout
aussi rectiligne et plus ou moins stalagmitée. Malgré
notre insistance, nous n'avons pas pu obtenir l'auto-
risation d'y pénétrer.
jf
1/
c a
230 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Dans la partie visitée, le sol est ou argileux ou couvert d'éboulis
stalagmites. Les flaques d'eaux sont nombreuses et les suintements
abondants. Trois bassins aquifères sont plus importants : celui de la
rampe, celui du trottoir et celui de la passerelle qui a jusqu'à 2 m. de
profondeur. Les berges des trois bassins montrent des signes évidents de
crues périodiques.
Température de l'air à 115 m. de l'entrée : 13° C. ; température de
l'eau à 115 m. de l'entrée : 1207 C. ; au trottoir : 12o6 C. ; du lac du fond :
1202 C. ; à 115 m. de l'entrée, thermomètre sec : 13^ C ; thermomètre
humide : 12o8 C. ; baromètre : 730,4 mm. ; humidité : 98 % (sans corr.
de press.).
L'air froid de l'extérieur pénétrait dans la grotte, mais le courant ne
se faisait plus sentir à partir de 50 m. env. Au fond, un faible courant
venait des nouvelles galeries. Aux chatières le courant était très faible.
Partout ailleurs le calme était complet.
Pas de Chauves-Souris, pas de guano, pas de petits débris végétaux,
mais beaucoup de planches et madriers.
Les conditions d'existence paraissent bonnes et les animaux terrestres
sont abondants, quoique peu variés. Nous n'avons rien trouvé dans
l'eau. Les pièges terrestres n'ont pas attiré de cavernicoles, mais ont
été dévorés par des petits rongeurs qui, auprès de chaque piège atta-
qué, ont déposé des crottes très caractéristiques, formées par deux
masses ovoïdes, à sommet conique, et reliées par une sorte de mem-
brane plissée. Sous les pierres voisines furent capturés des Leptinus
(Coléopt.) qui sont probablement introduits dans les grottes par les
Rongeurs sur lesquels on croit qu'ils se tiennent au moins une grande
partie de leur existence. Les Canipodea de grande taille étaient rares,
sauf sur une planche pourrie et sur un Agaricinée (Champignon) intro-
duit par le gardien depuis trois jours seulement. Un petit Aranéide
était fréquent partout ; ses toiles lâches, aux fils peu nombreux, fixées
dans les interstices de la base des massifs stalagmitiques, portaient
souvent des cocons sphériques, blancs, à trame lâche contenant quatre
œufs. Un Trichoniscide blanc est très abondant partout ; il couvre les
excréments humains frais.
Fage et Racovitza.
GROTTES VISITÉES
231
582. Grotte de Villanière.
(FIG. 2)
Située au lieu dit Las Trillos ou La Fontaine, commune de Villanière,
canton de Mas-Cabardès, département de l'Aude, France. — Altitude :
307 m. env. — Roche: Calcaires éocènes? — Date : 23 novembre 1913.
Matériaux : Lépidoptères, Diptères, Thysanoures, Collemboles, My-
riapodes, Aranéides, Isopodes, Mollusques. — Numéro : 725.
Ce nom est donné dans le pays à une grotte située au sud et à 10 mi-
nutes du village. Dans une vigne, au pied d'une petite falaise, un orifice
étroit donne accès dans un couloir bas, suivi d'un vestibule assez clair,
FiQ. 2. Croquis schématique de la Grotte de Villanière'Cn" 582) ; longueur
totale : 100 mètres environ.
puis dune galerie sèche. On descend ensuite un talus raide par des
marches taillées dans l'argile, pour pénétrer dans une vaste salle stalag-
mitée, humide, qui se continue par une galerie plus sèche. La longueur
totale atteint 100 m. env.
La région médiane est seule incrustée et les suintements y sont
abondants, mais nous n'avons vu qu'une seule flaque d'eau qui paraît
permanente. Le sol est argileux en général, mais par place couvert
d'ébouhs.
Le plan montre que la moitié antérieure de la grotte s'étend parallè-
lement au bord de la falaise, tandis que sa région profonde s'enfonce obli-
quement dans le massif. L'épaisseur de la paroi externe est faible, et il
est facile de constater l'existence d'une seconde entrée obstruée qui
aboutissait au pied du talus médian. Aussi la température de la grotte,
influencée par le climat épigé, est-elle au-dessus de la normale.
Dans la salle médiane, température de l'air : 14^6 C. ; thermomètre
232 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
sec : 14^6 C. ; therm. hum. : 14^5 ; baromètre : 740,3 mm. ; humidité :
99 % (sans corr. de press.). Atmosphère calme.
Pas de Chauves-Souris, pas de guano, pas de débris ligneux, donc pas
de sources abondantes de nourriture, mais autres conditions d'existence
favorables. Dans le vestibule gîtent de très nombreuses Noctuelles et
Culicides. Nombreux Trichoniscides dans toute la grotte et quelques
Araignées tissant des toiles lâches, souvent garnies de cocons sphériques.
D'assez nombreuses Philoscies (Isopodes) décolorées, jusqu'au milieu de
la grotte. Les autres animaux sont plus rares.
Grotte de la Muscalle située à une heure de marche de Villanière et
sur son territoire, au lieu dit de la Muscalle. Les villageois nous la si-
gnalent comme grande. C'est probablement celle que Sicard (1900,
p. 58) quahfie de fort vaste et très curieuse à visiter, et qui fut fouillée
par Esparseil.
F AGE et Racovitza.
583. Grotte du Cimetière de Sallèles.
(FIQ. 3)
Située contre le cimetière, sous le vieux château, commune de Sal-
lèles-Cabardès, canton de Conques, département de l'Aude, France. —
Altitude : 282 m. env. — Roche : Calcaires siluriens ? — Date : 23 no-
vembre 1914.
Matériaux : Coléoptères, Lépidoptères, Diptères, CoUemboles, Myria-
podes, Aranéides, Isopodes, Mollusques, Champignons. — Numéro : 726.
On trouvera dans Sicard (1900, p. 52) un résumé des recherches
effectuées par les archéologues dans cette grotte qui fut aussi bouleversée
par l'exploitation des phosphates.
La grotte est formée par une série de couloirs et de salles constituant
un lacis assez compliqué et non entièrement exploré. Le plan en
indique la disposition générale sur les 120 m. env. que nous avons visités.
La moitié antérieure est sèche, en pente descendante très forte et le
plancher est couvert d'éboulis. La région profonde a un sol plus
argileux, des suintements et même quelques petites flaques d'eau. Les
incrustations sont très localisées et peu nombreuses. Le [cavernement
est plutôt dû à l'érosion qu'à la corrosion.
GROTTES VISITÉES
233
Au « monticule », température de Tair : 12° C. ; thermomètre sec :
12° C. ; therm. hum. : lO^S C. ; baromètre : 742,8 mm. ; humidité :
86 % (sans corr. de press.).
L'air froid de l'extérieur provoque un courant assez fort dans le
vestibule, courant qui se fait sentir dans toute la moitié antérieure, mais
le fond est calme.
Pas de Chauves-Souris, pas de guano, pas de débris ligneux ; manque
presque complet de nourriture discernable. Mais très nombreux sont
les Culicides et les Noctuelles, bien vivants et actifs jusqu'au milieu de
la grotte ; le sol est couvert de leurs débris et cadavres dans toute la
région antérieure. Ce sont ces Insectes qui doivent constituer la principale
FiG. 3. Croquis schématique de la Grotte du Cimetière de Sallèles (n» 583) ; longueur totale : 120 mètres environ.
source alimentaire pour la faune terrestre [cavernicole assez abondante.
Près d'une paroi, sous une pierre reposant sur l'argile, gîtaient des
Gervaisiidés (Myriapodes). Sur les parois, des larves de Mj^cétophilides.
De très nombreux Trichoniscides exploitaient des crottes de Rongeurs
au « Monticule ».
Grotte de Las Cazals. — On nous l'indique comme grande. Sicard
(1900, p. 41) la cite à tort parmi les grottes de Limouzis car, quoique
voisine du hameau de Marmorières, elle est sur le territoire de Sallèles.
Fage et Racovitza.
584. Grotte de Gazel.
(FiG. 4)
Située en face le village, côté est, commune de Sallèles-Cabardès,
canton de Conques, département de l'Aude, France. — Altitude : 242 m.
env. — Roche : Calcaires siluriens ? — Date : 23 novembre 1913.
234
B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Matériaux : Chéiroptères, Lépidoptères, Diptères, Trichoptères,
Aranéides, Isopodes, Champignons ; Parasites des Chéiroptères :
Pupipares sur Chéiroptères 727c, Acariens sur Chéiroptères 727c.
Numéro : 727.
iVt>|
Grotte fouillée par les archéologues, dont les travaux sont résumés dans
SiCARD (1900, p. 52), et exploitée pour le phosphate. Elle est très irré-
gulière et présente
^ ^ — ' des salles et couloirs
sur plusieurs ni-
veaux . Nous n 'avons
exploré qu'une lon-
gueur de 120 m.
env. Le vestibule
est constitué par
une vaste salle claire
et sèche, dont le
fond s'abaisse en
une fosse au delà de
laquelle on trouve, à
gauche, un couloir
encombré d'ébouhs,
incrusté dans sa
moitié profonde' et
un peu humide, et,
à droite, un couloir
qui aboutit à une
grande salle irrégulière, dont le sol est occupé par des bancs d'argile et
qui, dans la paroi de droite, présente un vaste puits, profond de 10 m. env.,
donnant sur une longue galerie argileuse que nous n'avons pas explorée.
Toute la moitié antérieure est sèche et est parcourue par un courant
d'air sensible. Le fond de la galerie de gauche et un diverticule de la
salle argileuse de droite, sont incrustés, mais les suintements sont peu
abondants. Dans ces régions l'air est calme.
Une douzaine de Chauves-Souris (1 grand et 10 petits Rhinolophes,
1 Minioptère) hibernantes sont accrochées aux parois de la salle argi-
leuse. C'est dans cette salle aussi que sont concentrés de très nombreux
Culicides et de très nombreuses Noctuelles ; ces Insectes manquent
G. 4. Croquis schématique de la Grotte de Gazel (n" 584) ; longueur totale
120 mètres environ.
GROTTES VISITÉES 235
complètement dans le vestibule, trop ouvert aux variations extérieures.
Seuls des Trichoniscides sont abondants ; les autres cavernicoles sont
très rares dans cette grotte qui présente de médiocres conditions
d'existence. La nourriture est presque entièrement constituée par
quelques crottes de Chauves-Souris et des cadavres de Diptères et Papil-
lons.
Fage et Racovitza.
585. Grotte de la Fontaine froide.
(Seconde mention, voir Biospeologica XXXIII, p. 386)
Située au-dessus de la « Fontaine froide », dans le nouveau village,
commune de la Caunette, canton d'Olonzac, département de l'Hérault,
France. — Altitude : 160 m. env. — Roche : Calcaires éocènes. — Date :
24 novembre 1913.
Matériaux : Coléoptères, Lépidoptères, Diptères, Trichoptères, Col-
lemboles, Myriapodes, Aranéides, Chernètes, Isopodes. — Numéro : 728.
M. Estrabaut, de la Caunette, nous a servi de guide pour la visite de
cette grotte et de la suivante.
De nombreux Troglobies habitent cette grotte dont l'étendue totale
ne dépasse pas 60 m. et qui se présente de la façon suivante : un court
et bas couloir sec, suivi d'une haute diaclase légèrement incrustée et peu
humide, débouchant au milieu d'une petite salle oblongue, assez haute,
avec quelques incrustations, une borne stalagmitique à gauche, un massif
à droite, derrière lequel, au moyen d'un petit ressaut, on passe dans un
court couloir, très bas de plafond. La région terminale est humide ; elle
présente des suintements et une petite flaque d'eau. Le sol est argileux
mais couvert de petites pierres éparses.
Température de l'eau au fond : 13^2 C. Atmosphère calme.
Pas de Chauves-Souris, pas de guano. Quelques vieux papiers et
des crottes de Rongeurs constituent toute la nourriture perceptible,
mais sur les murs secs de l'entrée gîtent de nombreuses Noctuelles
et Phiyganes. Sous les pierres qui reposent sur l'argile, dans les
régions profondes, on trouve de très nombreux et agiles T rechus
Simoni Ab. (Coléopt.) et de gros Chernètes, et cela même sur un sol
presque sec.
Sur les incrustations se tiennent, nombreux, des Trichoniscides et des
Aroh. de Zool. Exp, et Gén. — T. 57. ^ F. 3. 16
236 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Typhloblaniulus et sur la borne abondent les Collemboles. A terre, sur de
vagues débris ligneux, des Gervaisiidés (Myriapodes). Une Pliiloscie
(Isopode) très vive et en partie décolorée pénètre jusqu'au fond.
Fage et Racovitza.
586. Balma del Cingle.
(Seconde mention, voir Biospeologica XXXIII. p. 387)
Située au lieu dit El Cingle, sous le village neuf, commune de la
Caunette, canton d'Olonzac, département de l'Hérault, France. —
Altitude : 140 m. env. — Roche : Calcaires éocènes. — Date : 24 no-
vembre 1913.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Collemboles, Aranéides, Chernètes,
Isopodes, Mollusques, Oligochètes. — Numéro : 729.
L'entrée est sous le village neuf, sur la rive gauche de la Cesse, à
la base de la falaise. Nous n'avons parcouru que 150 m. env. qui pré-
sentent les particularités suivantes : un vestibule clair, haut et sec, à
sol couvert d'éboulis, suivi d'une salle obscure, haute, humide, occupée
par une colline d'éboulis et des bancs argileux. Par une fente, située
à droite, on pénètre dans une longue galerie rectiligne, affluent endogé
de la Cesse. Les parois ne sont pas incrustées et la hauteur varie entre
2 et 3 m. Le sol est d'abord couvert d'éboulis que remplacent ensuite l'ar-
gile et finalement le gravier et le sable. On arrive ainsi à une grande
flaque d'eau pérenne, peu profonde, « la fontaine », au delà de laquelle
la galerie bifurque.
Température de l'eau à « la fontaine » : IS^S C. Atmosphère calme.
Quelques Chauves-Souris (grands et petits Rhinolophes) dans la
salle obscure, mais aucune dans la galerie inférieure. Pas de guano, mais
des crottes éparses. Aucune autre source alimentaire discernable. De
rares Diptères et Noctuelles qui ne pénètrent pas dans la galerie infé-
rieure.
Le T rechus Simoni Ab. est commun partout où des pierres
plates reposent sur de l'argile humide. Il est plus rare dans le gravier
de « la fontaine ». Il paraît qu'en été on ne le trouve qu'autour de cette
flaque d'eau. La faune semble d'ailleurs identique à celle de la Grotte
de la Fontaine froide et les diverses espèces paraissent réparties de la
même façon.
GROTTES VISITÉES
237
Grottes de Rieussec. — M. Estrabaut nous signale qu'à 10 km. au
nord de la Caunette, dans les environs de Rieussec, il y aurait deux belles
grottes à stalactites.
Fage et Racovitza,
587. Grotte de la Coquille.
(ru;. -.)
(Seconde mention, voir BlospEOLOtiiCA YI, p. 330)
Située sur la rive droite de la Cesse, à mi-falaise, commune de Ces-
seras, canton d'Olonzac, département de l'Hérault, France. — Altitude :
270 m. env. — Roche : Calcaires éocènes. — Date : 25 novembre 1913.
Matériaux : Chéiroptères, Coléoptères, Diptères, Thysanoures, Myria-
podes, Aranéides, Chernètes, Acariens, Isopodes, Amphipodes, Champi-
FiG. 5. Moitié antérieure de la Grotte de la Coquille (n» 587) d'après le plan de BOUSQUET et nos annotations;
longueur des couloirs représentés : 450 mètres environ.
gnons ; Parasites des Chéiroptères : Pupipares sur Chéiroptères
730 et 730a, Acariens sur Chéiroptères 730 et 730a ; Parasites des
Pupipares : Laboulbéniacées sur Pupipares 730. — ■ Numéro : 730.
La situation de la grotte est indiquée sur la carte au 100.000^.
LucANTE (1880, p. 128) la cite probablement deux fois : sous le nom de
Grotte d'Aldène qui lui fut effectivement attribué quelquefois et sous
celui de Grotte de Cesseras, de la Minerve ou Baume de la Coquille.
C'est le dernier nom qui est usité dans le pays ; il dérive de l'ancien « mou-
lin de la Coquille » voisin. Ferrasse (1901, p. 101-103, 1 plan) a accompagné
d'une description insuffisante, un bon plan levé par Bousquet. Plus
238 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
tard, Ferrasse (1906, p. 90-94, 1 plan) a publié une description plus
détaillée, accompagnée du même plan. On trouvera dans ce dernier mé-
moire quelques indications bibliographiques sur les nombreux travaux
des archéologues qui ont pratiqué des fouilles fructueuses.
Ferrasse considère la grotte comme une goule ayant absorbé pério-
diquement les violentes crues de la Cesse pleistocène et explique de cette
façon les vastes dépôts d'argile qui s'y trouvent accumulés.
Le trop court séjour que nous avons fait dans la région ne nous
permet pas de nous prononcer sur la valeur de cette interprétation, mais
il est néanmoins certain que Ferrasse n'a pas étayé sa manière de voir
par des preuves suffisantes et que l'hypothèse inverse, la grotte affluent
de la Cesse, peut toujours être envisagée.
La grotte s'ouvre dans la falaise de la rive droite (et non gauche comme
le dit Ferrasse) de la Cesse, à 50 m. env. au-dessus du niveau actuel
de la rivière. On y accède soit en passant par une cheminée facile de la
falaise, au nord de l'usine à phosphate et en suivant un bon sentier vers
l'ouest, soit en descendant de l'usine directement dans la « salle de danse »
de la grotte, par des échelles verticales (50 m.) en état douteux;, placées
dans un puits vertical artificiel.
La longueur totale des couloirs est de L900 m. d'après Bousquet.
La figure 5 ci- jointe reproduit la région de son plan qui nous intéresse
le plus au point de vue de la faune.
A partir de l'entrée, très vaste, on peut distinguer trois régions au
point de vue des conditions d'existence.
1. — Environ 250 m. d'une très large galerie de 10 à 15 m. de haut,
non incrustée, horizontale, sèche, à sol bouleversé par les fouilles des
archéologues et des mineurs. La circulation de l'air y est active et faci-
htée par le puits d'exploitation.
2. — -La région moyenne formant carrefour, dans laquelle on pénètre
en escaladant un haut talus argileux et qui est formée par une très vaste
salle irrégulière (salles du pilier et du chaos). On peut lui ajouter la galerie
du lac. Cette partie se caractérise ainsi : présence d'incrustations, de
suintements, de flaques d'eau et même d'un lac ; sol couvert d'argile
humide. Atmosphère calme.
3. — Les deux galeries terminales qui sont sèches, non incrustées,
souvent poussiéreuses ; atmosphère calme.
Ferrasse trouve que les eaux du lac sont « glacées » -f 1 P C. Nous
avons constaté au lac, température de l'air : 12^7 C. ; température de
GROTTES VISITÉES 239
l'eau 12^5 ; thermomètre sec : \'2P1 C. ; therm. hum. : 12^6 ; baromètre :
746,5 mm. ; humidité : 99 % (sans corr. de press.)
La première région faunique est habitée par les animaux qu'attire
le guano de Chauves-Souris. De vastes colonies de Minioptères y ont en
effet élu domicile. La cité permanente de ces Chauves-Souris doit être
celle qui est installée dans un cul-de-sac, au fond du vestibule et dans
sa paroi de droite ; de gros amas de guano, aussi bien récent que très
ancien, s'y trouvent accumulés. Mais comme l'air froid y pénètre trop
facilement, de nombreuses petites colonies se sont logées dans la «salle
de danse », peut-être seulement pour l'hiver ; aucune n'a formé d'amas de
guano. Le ]\Iinioptère ne forme pas de colonies serrées comme d'autres
espèces ; les divers individus ne se touchent pas, et au lieu de se suspendre
tous par les pieds, ils préfèrent s'appliquer contre le plafond par la face
ventrale en s'accrochant par les quatre membres.
La faune habituelle du guano grouille dans cette première région de
la grotte : Sphodrides, Diptères variés, larves de Mycétophilides,
Lithobius, Aranéides, Acariens, etc.
Quelques Diptères et Noctuelles gîtent sur les parois du vestibule.
La seconde région faunique présente de bonnes conditions d'exis-
tence sauf en ce qui concerne la nourriture qui paraît rare : quelques
fragments ligneux et quelques crottes de Chauves-Souris. Les Tricho-
niscides sont assez communs, surtout dans la galerie du lac, les autres
Troglobies terrestres sont rares. De très petits Niphargus sont abondants
sur les planches immergées dans le lac.
La troisième région est complètement azoïque. Dans la «galerie des
Tribunes » quelques petits Rhinolophes étaient accrochés aux parois
€t comme toujours, très éloignés les uns des autres.
Fage et Racovitza.
588. Grotte de Fauzan.
Située sur la r ve droite de la Cesse, sur le chemin de Fauzan au
moulin de Monsieur, commune de Cesseras, canton d'Olonzac, départe-
ment de l'Hérault, France. — Altitude : 300 m. env. — Roche : Calcaires
éocènes. — Da'e : 25 novembre 1913.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Collemboles, Myriapodes, Aranéides,
Ixodes, Acariens, Isopodes. — Numéro : 731.
240 R. JEANNEL ET E.-G. BACOVITZA
Les gens du pays n'ont pas donné de nom spécial à cette grotte.
Ferrasse (1901, p. 103, et 1906, p. 104) la nomme « Petite grotte».
Cet auteur accompagne ses deux descriptions de plans différents mais
également schématiques et certainement inexacts. Il place son entrée
à 500 m. seulement à l'ouest de la grotte de la Coquille tandis qu'en
réalité cette distance mesure près de 1.500 m.
La grotte s'ouvre près du sommet de la falaise, rive droite de la Cesse,
au nord-ouest de Fauzan, sur le chemin qui va au « pré » unique de ce
hameau et au moulin de Monsieur.
Un court couloir très bas (on rampe), sec, clair, débouche dans une
salle transversale, oblongue, irrégulière, incrustée, avec suintements
sur les parois et flaques d'eau sur le plancher. En face de l'entrée est un
grand massif stalagmitique qu'on traverse par une chatière pour péné-
trer dans une seconde salle, très incrustée, humide, à sol d'éboulis ou
argileux. A gauche, en grimpant sur des éboulis, on pénètre dans une troi-
sième salle plus petite, d'un niveau plus élevé, mais très humide et in-
crustée.
La longueur totale visitée est de 80 m. env.
Cette grotte est d'origine endogée et dans son histoire les éboulis ont
joué primitivement un grand rôle ; actuellement elle se trouve dans la
phase d'incrustation. Nous n'avons pas constaté la présence des éboulis
récents que signale Ferrasse.
Dans la seconde salle, température de l'air : 12^5 C. ; temp. de l'eau :
1P7 C. ; thermomètre sec : 12^5 C. ; therm. hum. : ]2o3 C. ; baromètre :
744 mm. ; humidité : 98 % (sans corr. de press.). Atmosphère calme.
Pas de Chauves-Souris, mais quelques crottes éparses indiquent
qu'elles y viennent. Pas de débris végétaux. Ressources alimentaires
non discernables et pourtant la faune est riche.
Le couloir d'entrée héberge de rares Noctuelles, Némocères et Por-
cellio dilatatus Br. La première salle n'a donné que quelques rares Tro-
globies et un Eschatocephalus vespertilioriis Koch bien vivant et actif
qui déambulait sur une stalactite. La seconde sa' le est, par contre, très
habitée. De minces TyjMohlaniulus sont très abondants sur toutes les
parois incrustées. A la base des massifs, dans les intervalles des rangées
de stalactites, Leptoneta infuscata E. Simon tisse ses toiles lâches garnies
de cocons sphériques. Sur une paroi stalagmitée des Anurides complète-
ment blancs dévoraient des débris de crottes de Chauves-Souris. De
nombreuses toiles de larves de Mycétophilides garnissaient les fentes
GROTTES VISITÉES
241
rocheuses, mais les tisserands avaient disparu. Un Bythinus et quelques
Atheta furent capturés.
La troisième salle était habitée par de très rares exemplaires des mêmes
Troglobies,
Fage et Racovitza.
589. Grotte du Rendez-vous de Chasse.
(FIG. 6)
Située au lieu dit Le Rendez-vous de Chasse, à droite de la route de
Montpellier à Ganges, près la borne km. 27,2, commune et canton des
Matelles, département de l'Hérault, France. — Altitude : 225 m. — Roche :
Calcaires kimmeridgiens. — Date : 25 décembre 1913.
Matériaux : Chéiroptères, Coléoptères, Diptères, Thysanoures, Col-
lemboles. Myriapodes,
Aranéides , Opilionides ,
Chernètes, Acariens, Iso-
podes. Mollusques, Néma-
todes , Phanérogames ;
Parasites des Chéi-
roptères : Ixodes sur
Chéiroptères 732, Acarien
sur Chéiroptères 732. —
Numéro : 732.
Cette grotte de 60 m.
env. de longueur est dé-
crite dans Gennevaux et
Mauche (1908, p. 11,
fig. 7, plan). L'entrée est
en forme d'aven. On des-
cend une forte pente sur
des ébouhs secs pour arriver dans la grande salle qui est claire et sèche.
A gauche, en montant sur une coulée stalagmitique, on peut visiter une
petite chapelle humide et obscure, avec sol et parois incrustés et garnis de
racines et de guano. Le fond de la grande salle est sec, mais dans la sale des
ossements il fait moins sec ; l'argile qui forme le sol est très remaniée et
assez humide. Les parois sont incrustées, mais il n'y a pas de suintements
wTj^^^^^'^'"
Fig. 6. Plan de la Grotte du Kendez-vous de Chasse (n° 589) d'après
GENNEVA0X et Mauche et nos annotations ; longueur
totale : 60 mètres environ.
242 E. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Dans la salle des ossements, température de l'air : 9^4 C. ; thermo-
mètre sec : 904 C. ; therm. hum, : 9^2 C. ; baromètre 744 mm. ; humidité
97 % (sans corr. de press.).
L'air froid de l'extérieur tombe dans la grotte et, vu la disposition
de celle-ci, pénètre jusqu'au fond. Cela provoque, en hiver seulement,
un faible courant d'air et explique la température constatée qui est
trop basse pour cette altitude et cette latitude.
Pas de Noctuelles ni de Diptères à l'entrée. Malgré l'abondance du
guano dans la petite chapelle, aucune Chauve-Souris. Il faut attribuer
ces absences à l'inclinaison défavorable de la grotte qui se remplit en
hiver d'air froid. Par contre, en été, ces animaux ne doivent pas manquer.
Pourtant deux grands Rhinolophes, étrangement couverts de poussière,
et un petit, hivernaient dans le fond de la salle des ossements.
Les racines de la chapelle avaient attiré de nombreux Trichoniscides,
tandis que le guano hébergeait comme de coutume Sphodrides, Sta-
phylins, Lithobius, Meta, Polydesmides, etc. La grande salle est presque
azoïque, mais la salle des ossements contenait quelques Troglobies ;
les Trichoniscides et Collemboles y étaient les plus nombreux.
Page, Gennevaux, Jeannel et Racovitza.
590. Grotte du Mas-de-Londres.
(FIQ. 7)
Située à 2 km. au sud du village, non loin du chemin de Londres à
Cazevielle, commune du Mas-de-Londres, canton de Saint-Martin-de
Londres, département de l'Hérault, France. — Altitude : 280 m. env. —
Roche : Calcaires coralligènes du tithonique supérieur. — Date : 25 dé-
cembre 1913.
Matériaux : Chéiroptères, Lépidoptères, Collemboles, Myriapodes,
Isopodes, Amphipodes, Oligochètes, Mollusques ; Parasites des Chéi-
roptères : Pupipares sur Chéiroptères 733 a, Ixodes sur Chéirop-
tères 733 et 733 a, Acariens sur Chéiroptères 733 a. — Numéro : 733.
Une description détaillée avec plans et coupes a été publiée par Gen-
NEVAUX et Mauche (1908, p. 20-21). L'entrée est très difficile à trouver
dans le bois de chênes verts situé à l'est de la ferme de la Pourcaresse.
Il faut descendre dans un aven à parois verticales de 4 m. (corde utile),
suivi d'un talus raide de même longueur, pour pénétrer dans un vesti-
GROTTES VISITÉES
bule clair et sec à sol couvert d'éboulis.
On suit un lit de rivière souterraine, à
parois sèches et non incrustées, montrant
en section transversale !a disposition en
8 caractéristique des érosions torrentielles
à débit variable. Après un coude à angle
droit, la grotte suit une faille rectiligne et sa
hauteur est par place considérable. Le lit de
rivière aboutit à un vaste talus argileux
qu'il faut descendre pour parcourir une gale-
rie souvent rétrécie, très humide, argileuse,
mais par place incrustée. L'eau ruisselle
par endroits et forme des flaques sur le sol.
Nous n'avons pas visité la « deuxième
galerie » .
La longueur totale de cette grotte, qui
est une goule absorbant une partie des
eaux du versant sud du pic Saint-Loup,
est de 400 m. env.
Dans la « grande salle », température
de l'air : 12o9 C. ; thermomètre sec : 12o9 C. ;
therm. hum. : 12^7 C. ; baromètre :
739,3 mm. ; humidité : 98 % (sans corr.
de press.).
L'air froid s'engouffre par l'aven d'en-
trée, ce qui provoque un courant qui se fait
sentir jusqu'au coude de la rivière souter-
raine.
Pas de guano, mais des crottes isolées.
Quelques Rhinolophes grands et petits hi-
vernent dans le lit de la rivière souterraine.
Seulement quelques Noctuelles à l'entrée.
Dans les régions profondes, sur les débris
hgneux, les Trichoniscides et les Typhlobla-
niulus abondent. Les flaques d'eau sont
habitées par de nombreux Niphargus.
Fage, Gennevaux, Jeannel
et Racovitza.
243
244
R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
591. Grotte de l'Hortus.
(Fia. 8)
Située en face de la ferme de la Plaine, au pied de l'escarpement de
l'Hortus, commune de Valflaunès, canton de Claret, département de
l'Hérault, France. — Altitude : 380 m. env. — Boche : Calcaires crétaciques.
— Date : 26 décembre 1913.
Matériaux : Chéiroptères, Lépidoptères, Diptères, Trichoptères,
Thysanoures, CoUemboles, Myriapodes, Aranéides, Cliernètes, Opilio-
FiG. 8. Plan de la galerie ouest delà Grotte de l'Hortus (n" 591)d'aprèsGENNEVA0XetMAUCHEetnosannotatioas
longueur totale figurée : 125 mètres environ.
nides, Isopodes, Amphipodes, Oligochètes, Champignons ; Parasites
des Chéiroptères : Pupipares sur Chéiroptères 734, Ixodes sur Chéi-
roptères 734. — Numéro : 734.
Gennevaux et Mauche (1908, p. 27-31) ont publié une description
accompagnée de plans détaillés de cette grotte qui leur a fourni d'inté-
ressants documents préhistoriques. Elle s'étend parallèlement à la paroi
sud de la falaise de l'Hortus et possède deux entrées. Toute la région
comprise entre l'entrée 0. et l'entrée E. n'offre pas d'intérêt biolo-
gique, car elle est parcourue par un courant d'air assez fort qui l'a
desséchée complètement et a transformé l'argile en amas de poussière ;
aussi est-elle complètement azoïque.
La « grande saUe», dans laquelle débouche le couloir de l'entrée E,,
GROTTES VISITÉES 245
est également sèche et poussiéreuse. Mais la galerie qui s'étend vers l'E.
est, par place, humide, suintante, incrustée, à sol argileux compact et
même pourvu de flaques d'eau dans la u salle de la cascade » .
La longueur totale atteint 300 m. env. ; celle de la galerie Est 125 m.
env.
A la « cascade», température de l'air : IS^G C. ; temp. de l'eau : IS^l C. ;
thermomètre sec : IS^B C. ; therm. hum. : IS^S C. ; baromètre : 741, 3 mm. ;
humidité : 96,5 p. % (sans corr. de press.). Atmosphère calme.
Pas de guano, très peu de débris végétaux, mais partout des crottes
éparses de Chauves-Souris.
Malgré le courant d'air froid qui circulait dans le couloir d'entrée,
de grands Rhinolophes s'y étaient établis, et des Noctuelles nombreuses
et variées gîtaient sur les parois en compagnie de Culicides, de Meta
et de Nesticus. Dans la grande salle, beaucoup moins éventée, les grands
Rhinolophes étaient plus nombreux, mais les Insectes et Aranéides rares.
Les Trichoniscides et Typhloblaniules sont communs partout dans la
région humide. De grandes Campodea et des Chernètes de belle taille
habitent les stalactites du fond avec des Leptonètes.
Fage, Jeannel et Racovitza.
592. Grotte du Sergent.
(Seconde exploration, voir BIOSPEOLOGICA XVI, p. 116)
Située au pied du Roc de la Vigne, commune de Saint-Guilhem-le.
Désert, canton d'Aniane, département de l'Hérault, France. — Alti-
tude : 200 m. env. (210 m. Martel). — Roche : Calcaires jurassiques.
— Date : 27 décembre 1913.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Thysanoures, CoUemboles, My-
riapodes, Isopodes. — Numéro : 735.
Nous n'allons ajouter que quelques notes à la description de Martel
(1894, p. 149-151, plan) et aux observations que nous avons publiées
antérieurement. Cette grotte, dont l'entrée est le début d'un thalweg
parfaitement caractérisé, vomit après orages un fort courant presque tous
les ans et même plusieurs fois par an. Elle possède d'ailleurs tous les carac-
tères des trop-pleins. Les incrustations sont très localisées, formées de
calcaire très impur ; les massifs compacts et les bornes dominent. De
vastes régions sont complètement nues, à parois polies par l'érosion.
246 B. JEANNEL ET E.-G. BACOVITZA
Le sol jusqu'à la région marquée E sur le plan très schématique de Mar-
tel est pierreux, incrusté par place ou couvert d'argile sableuse ; puis
apparaît un sable siliceux, blanc, très pur, qui forme des bancs consi-
dérables dans la grande salle du fond (/).
Les suintements sont rares et même les parties stalagmitées sont en
général sèches ; seulement vers le fond quelques massifs ruissellent.
Les flaques d'eau sont rares et toujours leur fond est sableux.
Martel donne les températures suivantes : air : 14^5 C. ; eau : 14^ C.
Nous avons trouvé, eau de la salle E : 13^5 C. ; salle / du grand
pilier, therm. sec : 14oi C. ; therm. hum. : 13o9 C. ; baromètre : 755,5 mm. ;
humidité : 98 % (sans corr. de press.)
L'air froid de l'extérieur s'engouffrait et descendait les pentes jus-
qu'à la salle E en produisant un courant sensible. Au fond l'atmosphère
est calme.
Pas de Chauves-Souris ni de guano ; de rares crottes éparses. Pas de
débris végétaux. Pas de Noctuelles ni de Diptères dans le vestibule. Si
les autres conditions d'existence ne sont pas mauvaises, les ressources
alimentaires sont fort maigres. Les gouttes de stéarine tombées des bou-
gies des visiteurs sont activement exploitées par les CoUemboles et
les Trichoniscides.
Quatre espèces de CoUemboles troglobies se rencontrent dans toute la
grotte. Un grand Collembole sauteur, blanc, brillant, erre partout sur les
stalactites, tandis qu'un autre tout petit, très allongé, très vif et bondis-
sant, vit sur les bornes (surtout salles B et D) en compagnie d'un Smin-
thuride blanc très agile. Un gros Anuride blanc erre partout sur les in-
crustations avec des Ty phloblaniulus , qui montrent des préférences pour
les bornes, et quelques Androniscus (?) (Isopodes) roses.
Page, Jeannel et Racovitza.
593. Baume Cellier.
(FIU. 9)
Située à 500 m. au N. de la ferme de l'Arbousier, commune de Saint-
Guilhem-le-Désert, canton d'Aniane, département de l'Hérault, France.
— Altitude : 365 m. env. — Eoche : Calcaires jurassiques. — Date : 27 dé-
cembre 1913.
Matériaux : Chéiroptères, Diptères, CoUemboles, Myriapodes, Ara-
néides, Opilionides, Chernètes, Ixodes, Isopodes, Mollusques, Oligochètes,
GROTTES VISITEES
247
Champignons ; Parasites des Chéi-
roptères : Pupipares sur Chéiroptères
736, Ixodes sur Chéiroptères 736. —
Numéro : 736.
LucANTE (1880, p. 46) la mentionne
sous le nom de Grotte de Saint-Guilhem-
le-Désert en signalant le « rocher » déta-
ché de la voûte, formant arcade natu-
relle, ce qui permet de l'identifier. Son
emplacement est indiqué sur la carte au
100.0006, et les touristes la visitent beau-
coup en été. Elle s'ouvre, au milieu d'une
garrigue de chênes verts, à la naissance
d'un thalweg fossile qui indique que la
grotte a joué le rôle d'évent et qu'elle
est due à une rivière souterraine.
Un vestibule étroit, fermé par un
mur, précède une vaste galerie rectiligne,
descendante et non complètement obs-
cure. On passe sous une énorme colonne
stalagmitique tombée en travers du che-
min pour pénétrer dans la « salle des
piliers», vaste, à sol d'abord descendant,
puis fortement ascendant, jusqu'à un
massif stalagmitique puissant qu'on tra-
verse par une chatière artificielle pour
aboutir à une petite salle anfractueuse
où se trouve un lac de 5 m. de long et
1,5 m. de profondeur.
A gauche de la colonne effondrée
s'étend la «salle basse», également éten-
due. La longueur totale atteint 250 m.
env.
Presque toute la grotte est incrustée;
on y remarque de nombreux pihers et
massifs, des coulées avec des gours pleins
d'eau.
248 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
La salle claire est sèche, mais le fond est assez humide et suintant.
Le sol est pierreux ou incrusté, l'argile est rare.
Au milieu de la « salle claire », température de l'eau : 8^6 C. Au fond
dela« salle des piliers » , thermomètre sec : lO^S C. ; therm. hum. : 9^8 C. ;
baromètre : 740,3 mm. ; humidité : 91 % (sans corr. de press.)
On constate la chute de l'air extérieur froid dans toute la région
descendante de la grotte. Cet air est non seulement froid, mais sec.
Le sens de l'inclinaison des grottes influe beaucoup sur leur température
et leur état hygrométique. Ainsi la grotte qui nous occupe est anormale-
ment froide et sèche en hiver, et pendant cette saison les variations de
température doivent être fortes.
Ces mauvaises conditions d'existence expliquent l'absence complète
de Noctuelles et Diptères à l'entrée. Les Chauves-Souris ne l'ont pas
choisie comme lieu d'hivernage, ni d'estivation d'ailleurs, car le guano
manque complètement. Des crottes éparses et des débris organiques rares
constituent les ressources alimentaires visibles. Deux gros Rhinolophes,
couverts de poussière et de fragments de concrétions calcaires, hiver-
naient dans une encoignure bien abritée.
Les animaux sont strictement localisés dans les régions suintantes.
Un Androniscus (Trichoniscide) rose, un gros Anuride et un petit Collem-
bole blanc, se trouvent partout, mais le Typhlohlaniulus, très abondant
pourtant, n'habite que le grand massif du fond de la (( salle des piliers ».
Fage, Jeannel et Racovitza.
594. Grotte du Bois de Delon.
(Fio. 10)
Située à 500 m. au sud-est du gouffre de Rabanel, commune de Bris-
sac, canton de Ganges, département de l'Hérault, France. — Altitude :
290 m. env. — Roche : Calcaires secondaires. — Date : 28 décembre 1913.
Matériaux : Chéiroptères, Coléoptères, Lépidoptères, Diptères, Or-
thoptères, CoUemboles, Myriapodes, Aranéides, Opilionides, Chernètes,
Isopodes, Mollusques, Oligochètes, Champignons; Parasites des Chéi-
roptères : Pupipares sur Chéiroptères 737. — Numéro : 737.
Cette grotte, dont l'entrée cachée dans une garrigue de chênes verts,
est difficile à trouver, est formée par une galerie unique de 70 m. env.
de longueur, de belles proportions, avec des incrustations très localisées.
GROTTES VISITÉES
249
Jusqu'au milieu de la grotte, le sol est descendant, pierreux et très
sec ; vers le fond, l'argile apparaît, mais les suintements sont rares.
Au fond, thermomètre sec : 8^6 C. ; therm.
hum. : 704 C. ; baromètre : 729,4 mm. ; humi-
dité : 83 % (sans corr. de press.).
L'inclinaison de la grotte provoque une chute
d'air froid, qui se fait sentir jusqu'au delà du
milieu, ce qui abaisse anormalement sa tem-
pérature et l'assèche.
Quelques Noctuelles et Gryllomorphes dans
un diverticule bien abrité du vestibule ; un
grand et un petit Rhinolophe au fond. Pas de
guano ; beaucoup de débris ligneux, mais très
secs.
Sur les incrustations, les Collemboles habi-
tuels de la région avec quelques Leptoneta
(Aranéides) ; sous les pierres, de grands Cher-
nètes et des TyphlohlaniuliLS ; un peu partout,
au fond, VAndronùcus rose accompagné d'un
autre Trichoniscide blanc.
FiG. 10. Croquis schématique de la
Grotte du Bois Delon (n» 594);
longueur totale : 70 mètres en-
viron.
Baume de Roquemaoule. — Petite grotte
obscure avec incrustations qui, suivant M. De-
lon, de Coupiac, est située dans le bois de
Mme Vigier, au-dessus des abîmes de Brissac, commune de Brissac
Page, Jeannel et Racovitza.
595. Grotte des Rives.
(FIO. 11)
Située à 1 km. au N. du mas des Rives, commune de Saint-André-
de-Buèges, canton de Saint-Martin-de-Londres, département de l'Hé-
rault, France. — Altitude : 360 m. env. — Roche : Calcaires jurassiques.
Date : 29 décembre 1913. — Matériaux : Chéiroptères, Coléoptères,
Lépidoptères, Diptères, Orthoptères, Collemboles, Myriapodes, Ara-
néides, Opilionides, Acariens, Isopodes, Mollusques, Champignons ;
Parasites des Chéiroptères: Ixodes sur Chéiroptères 738. — Numéro:
738.
250
R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Date : 11 janvier 1914, — Matériaux. — Coléoptères, Diptères, Col-
lemboles, Myriapodes, Aranéides, Opilionides, Isopodes, Mollusques.
— Numéro : 763.
Est difficile à trouver dans un taillis de chênes verts, guide nécessaire.
Est formée par une salle unique de 25 m. de longueur, dans laquelle on
pénètre par un couloir court, en pente descendante, sec et pierreux. Une
petite chapelle incrustée et
sèche à droite ; à gauche,
une vaste cloison stalag-
mitique délimite une cha-
pelle sèche suivie d'une
autre plus humide complè-
tement tapissée de racines.
Le fond de la grotte se
relève et est occupé par
une coulée stalagmitique
garnie de piliers et de
bornes.
Dans « la salle des ra-
cines», therm. sec : IPl C;
therm. hum. : 10^2 C. ; baro-
mètre : 718,6 mm. ; humi-
dité : 89 % (sans corr. de
press.).
L'influence de l'air froid
extérieur se fait sentir jus-
qu'au milieu, mais le cou-
rant est très faible, comme la pente qui contribue à le provoquer. Le
fond, ascendant, est une région cà&me et plus chaude que la saUe des
racines.
Un grand et deux petits Rhinolophes hivernent dans la région chaude
du fond. Pas de guano, des crottes éparses et beaucoup de débris végé-
taux, mais en général secs.
Très grand nombre de Noctuelles variées, Culicides et Sciarides, Meta
et Tégénaires énormes, Neslicus, Gryllomorphes, jusqu'au milieu de la
grotte. Sur les débris ligneux du fond, surtout des Collemboles variés et
des Trichoniscides.
(X) = Mu^tcrna. jLcfyùméie.^
^S) -- Q-uxncU d- JicUts
FiG. 11. Croquis schématique de la Grotte des Rives (n° 595)
longueur totale : 25 mètres environ.
GROTTES VISITÉES 251
La faune de la « salle des racines » est très riche. Sur toutes les régions
unies du plafond se tiennent de nombreux Gryllomorphes dont l'attitude
rappelle celle des Dolichopodes, mais ils sont moins agiles et beaucoup
moins sensibles. Les Hyalinia sont massées dans les racines et dans le
terreau. Les gros Polydesmides s'y tiennent également ainsi que des
Androhiscus roses que nous surprenons en train de ronger les fines radi-
celles. Des Leptonètes ont tendu de grandes toiles lâches dans les inter-
valles des stalactites.
M. Léopold Rabou, limonadier à Pégairolles-de-Buèges, nous renseigne
sur les grottes suivantes :
Grotte de Larret, à 1 h. 15 de PégairoUes, sur le plateau de la Seranne,
près de la cabane de Larret ; un chemin muletier passe devant l'entrée.
C'est probablement la Grotte de Cesteragne (n^ 599) décrite plus loin.
Grotte de Gaillou, non loin de la précédente et, dit-on, communiquant
avec elle.
Page, Jeannel et Racovitza.
596. Grotte de la Salpêtrière.
(Fio. 12)
Située sur la rive droite de la Vis, en face l'usine de triage, commune
de Saint-Laurent-le-Minier, canton de Sumène, département du Gard,
France. — Altitude : 186 m. — Roche : Calcaires jurassiques. — Date:
29 décembre 1913.
Matériaux : Chéiroptères, Lépidoptères, Diptères, Collemboles,
Aranéides, Isopodes ; Parasites des Chéiroptères : Pupipares, Ixodes
et Acariens sur Chéiroptères 739. — Numéro 739.
Les gens du pays la désignent sous le nom de grotte de l'Ours, mais
LucANTE (1880, p. 47) la nomme grotte de la Salpêtrière et Mazauric
(1899, p. 214, plan) la décrit et figure sous le même nom. Elle est bien
connue des géologues par le nombre considérable d'ossements d'Ours
des cavernes qu'elle contient.
C'est un lit de rivière souterraine à section en forme de 8, long de
250 m. env., affluent de la Vis et de parcours si rectiligne que du fond
on aperçoit le jour de l'entrée. Les parois sont presque partout sèches et
nues. A mi-longueur, un filet d'eau se répand sur un massif formé prin-
Arch. de Zool. Exp. et Oén. — T. 57. — F. 3. 17
252
E. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
cipalement de dais stalagmitiques. Le sol est argileux mais sec, et très
éventré par les fouilles. Atmosphère calme.
Température du filet d'eau : 905 C. ; thermomètre sec : ll^S C. ;
therm. hum. : 11° C. ; baromètre : 733,4 mm. ; humidité : 90% (sanscorr.
de press.).
Près de l'entrée, Diptères et Némocères très nombreux et variés et
quelques Gryllomorphes.
Vu un seul grand Rhinolophe, mais la grotte doit être habitée en été
par des Chauves-Souris grégaires, car il existe de petits amas de guano
qui ne peut pas cependant servir de nourriture, car il est très sec. Les
Sec
H.kt.viArLo tinjt^. •
FiG. 12. Plan de la Grotte de la Salpêtrière (n" 596) d'après MAZAUEIC et nos annotations ; longueur totale :
250 mètres environ.
débris hgneux sont rares et secs. En somme très mauvaises conditions
d'existence à cause de la sécheresse.
Quelques Collemboles rongeaient, au fond, l'étui en papier d'un feu de
Bengale .
Page, Jeannel et Racovitza.
597. Grotte du Bois de Madame.
(FiG. 13)
Située dans le bois de Madame, commune et canton de Ganges, dépar-
tement de l'Hérault, France. — Altitude : 418 m. env. — Roche : Calcaires
jurassiques. — Date : 30 décembre 1913.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Orthoptères, CoUemboles, Myria-
podes, Aranéides, Opilionides, Acariens, Isopodes, Amphipodes, Mollus-
ques, Champignons. — Numéro : 740.
M, Neuvian, directeur des mines de la Société des Cévennes, nous a
donné des renseignements utiles et nous a facilité la visite de cette grotte.
Mazauric (1899, p. 213, plan) l'a décrite sous le nom de grotte des Mines
de Ganges. Elle est très difficile à trouver et un guide est indispensable.
GROTTES VISITÉES
253
L'entrée est située au second tiers de hauteur de la falaise du bois de
Madame, au-dessous mais un peu à l'est du rocher en forme de tour qui
couronne la crête. Une porte en fer, actuellement démolie, défendait
l'entrée. Quelques marches et un court couloir conduisent dans une grande
salle irrégulière qui, à droite, présente quelques bornes stalagmitiques
et des parois incrustées. A gauche, trois énormes « piliers suspendus » (P),
c'est-à-dire faisant corps avec la roche du plafond mais n'arrivant pas
Fio. 13. Plan de la Grotte du Bois de Madame (n° 597) d'après MAZAURIO et nos annotations ; longueur totale:
250 mètres environ.
jusqu'au plancher. Une solution de continuité de longueur variable existe
en effet ; et chaque pilier se termine en une pointe irrégulière plus ou moins
mousse et creusée de gouttières et de cavités d'érosion torrentielle. Cette
grotte est manifestement le lit d'un ancien lac souterrain dans lequel
devait se manifester par temps de crues un fort tourbillon qui a sculpté
ces anciens « piliers suspendus ». Nous avons constaté la présence de pihers
semblables dans les grottes marines de la côte de l'Estartit (province
de Gerona, Espagne).
Le fond de la salle est occupé par une grande cloison stalagmitique,
derrière laquelle un lac pérenne de 20 cm. de profondeur est formé par
un ruisselet intermittent qui coule, en temps de crues, dans un étroit
254 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
couloir en partie incrusté et pourvu de flaques d'eau. La longueur totale
des salles et couloirs atteint 250 m.
Au lac, température de l'air : 12° C. ; de l'eau : 12^ C. Aux bornes
près l'entrée, therm. sec : IPS C ; therm. hum. : 11^5 C. ; baromètre :
715,7 mm. ; humidité : 96 % (sans corr. de press.). Atmosphère calme sauf
près de l'entrée.
Pas de Chauves-Souris ni de guano ; pas de débris végétaux ; quelques
rares Noctuelles, Diptères et Gryllomorphes près l'entrée. Sur la coulée
stalagmitique garnie de bornes à droite de l'entrée, très nombreuses
crottes de Rongeurs à tous les niveaux ; beaucoup sont couvertes de
folies moisissures, d'autres sont toutes fraîches. Nous n'en avons pas
observé ailleurs. S'agit-il d'une sorte de « latrine commune » comme en
établissent les Guanacos dans les plaines de Patagonie, ou les Blaireaux
et Renards dans les grottes de nos pays ?
Quoiqu'il en soit, ces matières sont activement exploitées par une
jaune variée et populeuse de Silphides, Acariens, Trichoniscides, Litho-
bies, Collemboles. On trouve même des Puces perdues par les Rongeurs
mentionnés.
Dans le reste de la grotte les animaux sont rares. Dans les
flaques du fond nombreux étaient les Niphargus sur des fragments de
torche.
Grotte sans nom des mines de la société des Cévennes. Petit couloir des-
cendant de 15 m. de longueur, très incrusté au fond et complètement
sec. En été, il serait humide. Thermomètre sec : 10° C. ; therm. hum. :
705 C. ; baromètre : 733,4 mm. ; humidité : 68 % (sans corr. de press.).
Quelques Noctuelles gîtaient à l'entrée.
F AGE, Jeannel et Racovitza.
598. Grotte du Goulsou.
(FIO. 14)
Située sous la maison de M. Nougarède, au lieu dit Goulsou, commune
d'Avèze, canton du Vigan, département du Gard, France. — Altitude :
286 m. env. — Roche : Calcaires jurassiques. — Date : 30 décembre 1913^
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Thysanoures, Collemboles, My-
riapodes, Aranéides, Isopodes, Amphipodes, Mollusques, Oligochètes.
— Numéro : 741.
GROTTES VISITÉES
255
Cette grotte n'est pas dans la « montagne » comme le dit Lucaxte
(1880, p. 53), mais dans les vergers du village, à 1 km. du Vigan. Elle fut
découverte en 1753, quand on construisit la maison établie sur son ves-
tibule, et aménagée en 1805.
Le vestibule a été séparé du reste de la grotte par un mur et sert
d'étable, mais une trappe dans le cellier permet de passer derrière ce mur.
La grotte est constituée par un couloir en forme de S,
ayant 90 m.
de long, avec de
belles concré -
tions localisées.
Un trou creusé
à la mine a fait
découvrir un
petit réduit sta-
lagmite qui ter-
mine la partie
accessible, mais
la grotte se
continue par
une fente très
étroite.
Des ef flores-
cences de sal-
pêtre couvrent
les parois par
endroits. Les
suintements
sont abondants ; le sol argileux est creusé de petites flaques d'eau .
Au milieu, température de l'eau : 12oi C. ; thermomètre sec : 12^8 C;
therm. hum. 12^5 C. ; baromètre : 729,4 mm. ; humidité : 97 % (sans
corr. de press.).
Pas de courant d'air sensible, sauf dans le vestibule, mais l'odeur
d'écurie est forte jusqu'au fond, ce qui indique un déplacement d'air
continu.
Pas de Chauves-Souris ni de guano, quelques débris végétaux. De rares
Némocères gîtent sur les parois jusqu'à une certaine distance de l'entrée,
mais pas de Noctuelles.
Fio. 14. Croquis schématique de la Grotte du Goulsou ;n° 598) ; longueur totale
90 mètres environ.
256 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Les Troglobies sont nombreux, mais localisés près de l'entrée, sur
les incrustations, ou dans le petit réduit terminal. Les gros Campodées
se tiennent de préférence sur l'argile du fond. L'^ri(/ronï,scM5 rose et un
autre Trichoniscide blanc se trouvent aussi bien près de l'entrée qu'au
fond.
Dans la grande flaque d'eau pérenne vivent des Niphargus. Sur une
cruche complètement entourée d'eau se tenait un Polydesmide qui, à
moins d'être tombé du plafond, avait dû s'immerger profondément pour y
parvenir. Ce ne serait d'ailleurs pas le premier exemple d'un Troglobie
terrestre traversant volontairement une nappe d'eau.
Fage, Jeannel et Racovitza.
599. Grotte de Cesteragne.
(Fis. l.*;)
Située à 300 m. au N.-O. de la cabane de Larret, sur le plateau de
la Seranne, commune de PégairoUes-de-Buèges, canton de Saint-Martin-
de-Londres, département de l'Hérault, France. — Altitude : 660 m. env.
— Roche : Calcaires jurassiques.
Date : 31 décembre 1913. — Matériaux : Diptères, Thysanoures, Col-
lemboles, Myriapodes, Aranéides, Opilionides, Chernètes, Acariens,
Isopodes, Amphipodes, Mollusques, Champignons. — Numéro : 742.
Date : 11 janvier 1914. — Matériaux : Diptères, Collemboles, MjTia-
podes, Acariens, Isopodes, Mollusques. — Numéro : 762.
Difficile à trouver dans la garrigue de chênes verts, car l'entrée très
basse est cachée par les arbustes. La grotte est formée par une vaste
galerie de 120 m. env. de longueur. Le vestibule clair est tapissé d'algues
et de mousses. On descend sur des pierrailles jusqu'au milieu occupé par
un puissant massif couvert de bornes et de piliers, puis le sol se relève
jusqu'au fond, oii un autre grand massif dresse ses piliers et ses bornes.
Par derrière, une fente impénétrable continue la grotte.
Les massifs sont très humides. Un gour plein occupe le milieu du
massif central, mais les autres régions de la grotte sont sèches. Le sol
est pierreux ou incrusté, mais avec emplacements argUeux ; au fond, des
amas d'argile plastique,
La grotte est d'origine endogée et se trouve dans la phase de comble-
ment stalagmitique.
GROTTES VISITÉES
257
Température de l'eau à la flaque centrale : 9^5 C. Au fond, thermo-
mètre sec : 11° C. ; therm. hum. : lO^S C. ; baromètre : 702,9 mm. ; humi-
dité : 97 % (sans corr. de press.). Atmosphère calme, sauf près de l'entrée
oii la chute de l'air froid provoque un faible courant.
Pas de Chauves-Souris, ni de guano ; beaucoup de débris ligneux en
partie brûlés et pourris. Ni Noctuelles, ni Némocères, ni Gryllomorphes
à l'entrée. Des tapis de mousses dans le vestibule formant une zone
convexe du côté de la lumière, zone doublée vers l'intérieur par une aire
couverte d'algues. Dans les régions profondes et humides, nombreux
Trichoniscides, Collemboles, Polydesmides sur le bois pourri. Certains
Eîitfi
f IG. 1 . Croquis schématique de la Grotte de Cesteragne (n° 599) ; longueur totale : 120 mètres environ.
branchages sont littéralement couverts de minuscules crottes produites
certainement par les Trichoniscides et peut-être aussi par les Collemboles.
Sur les incrustations sèches se tiennent de gros Anurides. Les très gros
Chernètes préfèrent les surfaces argileuses. Les bois sont inspectés par des
Aranéides agiles. En quelques endroits, les racines qui percent le plafond
ont attiré des Mollusques variés.
Les appâts ont attiré seulement de très nombreux Typhloblaniulus.
Fage, Jeannel et Racovitza.
600. Grotte de Bégué-Ponchon.
(l'IO. 16)
Située au lieu dit l'Avent, commune de Pompignan, canton de Saint-
Hippolyte-du-Fort, département du Gard, France. — Altitude : 190 m.
— Roche : Calcaires jurassiques. — Date : l^^ janvier 1914.
Matériaux : Chéiroptères, Diptères, Thysanoures, Collemboles,
258
Jî. JEANNEL ET E.-G. EACOVITZA
Myriapodes, Isopodes, Champignons ;
Parasites des Chéiroptères : Ixodes
sur Chéiroptères 743. — Numéro : 743.
On trouvera l'histoire de la décou-
verte de cette grotte dans le B dleli i de
la Société de Spéléjlogie, t. VII, p. 330.
On paye pour la visiter ; des aménage-
ments ont rendu le parcours souterrain,
facile.
La grotte s'ouvre au pied du mont
Mounier, dans une plaine horizontale,
sans trace de thalweg, au centre d'une
faible dépression creusée dans le joint
de stratification d'un vaste banc cal-
caire horizontal dénudé. A l'orifice
aboutissent des stries de ruissellement
rayonnantes qui, avec d'autres stries
concentriques, ont transformé la sur-
face rocheuse en un dallage d'une remar-
quable régularité. C'est, à notre con-
naissance, le seul orifice d'aven qui
présente cette disposition d'une façon
>\'.^-::^ ri aussi nette.
Par un aven vertical de 4 m., ayant
au fond un trou d'homme, on arrive à
un puits de 25 m. de profondeur muni
de crampons. Le fond sert de carrefour
à deux galeries, plus ou moins tor-
tueuses, dont le développement compte
350 m. env.
Nous n'avons visité que la galerie
de droite, la plus longue. Elle est irré-
gulière, assez étroite, très haute par
place, à plancher très inégal, présentant
des régions effondrées, ou encombrées
d'éboulis ou complètement incrustées. Les incrustations sont d'ailleurs
abondantes partout et bien développées surtout au plafond où les dra-
GROTTES VISITÉES 259
peries dominent. Les bornes sont nombreuses mais localisées, et les gours
sont pour la plupart vides. Toutes les parois, plafond compris, sont cou-
vertes de vase argileuse très fine. A l'époque des crues, la grotte doit
se remplir complètement d'eau.
La grotte est très humide, et son sol est garni de flaques à fond argilo-
sableux ; au fond, un bassin de 6 à 7 m. de diamètre ferme la grotte par
une voûte mouillante.
Au fond, température de l'eau : 14^ C. ; de l'air : U»? C. Dans la
«salle du puits», thermomètre sec : 14o C. ; therm. hum. : 14° C. ; baro-
mètre : 749 mm. ; humidité : 100 %.
La chute d'air par l'entrée ne se fait pas sentir au delà de la «salle du
puits ».
Un seul petit Rhinolophe hivernait près de l'entrée ; pas de guano,
pas de crottes éparses ; ni Noctuelles, ni Sciarides dans le vestibule,
seulement quelques Culicides. Pas d'autres comestibles discernables
que les gouttes de stéarine tombées des bougies des visiteurs et exploitées
par deux espèces de Collemboles sauteurs et par un Anuride.
Un Typhloblaniulide est commun partout, mais montre une préfé-
rence marquée pour les bornes où il voisine avec des Trichoniscides plus
rares.
Fage, Jeannel et Racovitza.
601. Baume de Gour.
(FiG. 17)
Sitnée au pied du mont Mounier, commune de Pompignan, canton
de Saint-Hippolyte-du-Fort, département du Gard, France. — Alti-
tude : 190 m. env. — Roche : Calcaires jurassiques. — Date : 1^^ janvier
1914.
Matériaux : Chéiroptères, Coléoptères, Collemboles, Myriapodes,
Aranéides, Chernètes, Acariens, Isopodes, Amphipodes, Oligochètes,
Champignons; Parasites des Chéiroptères : Ixodes sur Chéiroptères
744. — Numéro : 744.
La grotte est située à env. 500 m. à l'ouest du km. 4 de la route de
Saint-Hippolyte à Pompignan, dans la même plaine que la grotte précé-
dente. L'entrée en forme de voûte basse s'ouvre, comme celle de la grotte
deBégué-Ponchon, au centre d'une dépression qui présente, quoique moins
260 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
prononcées, les mêmes stries de ruissellement et le même dallage régulier.
La grotte est formée par une salle de 40 m. env. de longueur, cuvette
d'un ancien lac souterrain, présentant deux diverticules secs et, au fond,
à droite, une vaste coulée stalagmitique formant au sommet une plate-
forme élevée pourvue de gours pleins. Du plafond pendent quelques dra-
peries et un gigantesque « pilier suspendu » (fig. 17, a-6) semblable à ceux
Reste <ic. piller.
Entrée
'0 iS ZOrr^.
*«- ■: Jbicuié^diJ , JJût>oeLt4 ■
Fig. 17. Croquis schématique de la Baume de Gour (n» 601) ; longueur totale : 100 mètres environ, a-b : plan et
roufo du « pilier suspendu «.
signalés dans la grotte du Bois de Madame (n^ 597, p. 253) qui est aussi
le fond d'un ancien lac.
Le sol est formé d'éboulis, sauf sur la coulée stalagmitique qui est
revêtue d'argile mêlée d'humus.
A la plate-forme des gours, température de l'eau : 8^6 C. ; thermo-
mètre sec : 7^8 C. ; therm. hum. : 5^4 C. ; baromètre : 747 mm. ; humi-
dité : 67 % (sans corr. de press.)
Cette faible humidité s'explique par la disposition et la forme de la
grotte, dans laquelle tombe l'air froid et sec de l'extérieur provoquant un
courant sensible jusqu'au fond. En été, au contraire, l'atmosphère doit
être calme et l'humidité considérable.
GROTTES VISITÉES
261
Un petit Rhinolophe hivernait dans une encoignure. Pas de guano,
ni de crottes isolées. Pas de Noctuelles ni de Diptères, ^Nombreux débris
ligneux; mais secs.
Dans l'humus et les débris ligneux de la coulée, nombreux petits
Trichoniscides et Aranéides et quelques Spelaeoglomérides, mangeurs de
bois très actifs, à en juger par les amas
de petites crottes en forme d'olive qui
remplacent les débris ligneux qu'ils ont
attaqués.
Fage, Jeannel et Racovitza.
602. Grotte du Salpêtre de Corconne.
(FIG. 18) "
Située dans le bois de Pied de Bou-
quet, commune de Corconne, canton de
Quissac, département du Gard, France.
— Altitude : 250 m. env. "(?) — Roche :
Calcaires secondaires. — Date : 2 jan-
vier 1914.
Matériaux : Lépidoptères, Diptères,
CoUemboles, Myriapodes, Aranéides,
Chemètes, Acariens, Isopodes, Amphi-
podes, Oligochètes, Champignon-. —
Numéro : 745.
Très difficile à trouver. En sortant
de Corconne on fait 1,5 km. sur la route
de Quissac, on prend à gauche une piste
carrossable qu'on suit au nord pendant
1,5 km., jusqu'à confluence de deux
ravins. On suit celui de gauche pendant
300 m., puis on monte à gauche 100 m.
de pente raide.
L'entrée, une voûte basse, donne
accès dans un long couloir rectiligne, bas de plafond, encombré d'éboulis,
sec et clair. On tourne à droite pour pénétrer dans une salle haute, occu-
pée par une vaste coulée stalagmitique et suivie d'une salle plus petite
18. Croquis schématique de !a Grotte du
Salpêtre de Corconne (n" 602); longueur
totale : 125 mètres environ.
262 F. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
au fond de laquelle, en montant sur une falaise rocheuse, on peut par-
courir un couloir élevé qui se termine par une fente impraticable.
Les deux salles sont le produit du travail tourbillonnant des eaux ;
la grande salle n'est qu'un vaste chaudron. Les parois sont creusées de
rigoles hélicoïdales, de marmites, de cloches dans les plafonds, etc. Actuel-
lement le creusement a complètement cessé par suite de l'abaissement du
niveau piézometrique.
Les suintements sont encore abondants dans la grande salle, et plu-
sieurs flaques d'eau pérennes existent sur le sol argileux.
Dans la grande salle, température de l'eau : IS^S C. ; thermomètre
sec : 140 C. ; therm. hum. : 13°9 C. ; baromètre : 744,5 mm. ; humidité '•
99 % (sans corr. de press.).
La chute de l'air froid provoque un léger courant dans le couloir
d'entrée, mais dans les salles l'atmosphère est calme.
Pas de Chauves-Souris, ni de guano, mais beaucoup de débris végétaux
partout. Noctuelles nombreuses à l'entrée, avec des Sciarides et quel-
ques Culicides, et pénétrant jusqu'au bout du couloir.
Dans la grande salle, sur la coulée stalagmitique, parmi les amas de
débris végétaux, se tient une énorme population de Troglobies. Sont
surtout abondants les CoUemboles (Anurides, Sminthurides et Sauteurs),
les Spélaeoglomérides dont les crottes ovoïdes, mais coniques aux deux
bouts, couvrent par endroit le sol, les Aranéides (Leptonètes tisseuses
de toiles et une autre forme, errante), les gros Chernètes, les Trichonis-
cides, les Oligochètes creusant leurs galeries dans le bois pourri.
Page, Fagniez, Jeannel et Racovitza.
603. Grotte de Trabuc.
(FIG. 19)
Située à proximité de la ferme de Trabuc, commune de Mialet, can-
ton de Saint-Jean-du-Gard, département du Gard, France, — Alti-
tude : 190 m. env. — Boche : Calcaires liasiques. — Date : 3 janvier 1914.
Matériaux : Chéiroptères, Coléoptères, Lépidoptères, Diptères,
Copcognathes, Orthoptères, Thysanoures, CoUemboles, Myriapodes,^
Aranéides, Chernètes, Acariens, Isopodes, Amphipodes, Mollusques, Oli-
gochètes, Phanérogames, Champignons; Parasites des Chéiroptères:
Pupipares sur Chéiroptères 746 et 746 a, Ixodes sur Chéiroptères 746
et 746 a. Acariens sur Chéiroptères 746 et 746 a. — Numéro : 746.
GROTTES VISITÉES
263
Cette grotte, citée dans Lucante (1880, p. 50), a été souvent visitée
par les géologues, archéologues et entomologistes, et la bibliographie
des mémoires qui y font
allusion est assez copieuse.
On trouvera dans Mazauric
(1889, p. 186-193, plan, et
1910, p. 78-81, plan) des des-
criptions détaillées et
des plans ; il résulte
de ces études que la
longueur totale des
couloirs de cette
grotte, aménagée et à
entrée payante, est
de 2.800 m. env. Nous
n'avons visité que les
salles des « vasques »
et du « chaos » avec
les couloirs « longs » et
de r « estrangladou ».
Le massif dans
lequel elle est creusée
est formé de calcaires
impurs, argileux, di-
visés en petits bancs
et très fissurés. La structure de la grotte répond bien à cette circonstance
Comme dans toutes les cavernes de ces sortes de calcaires, on observe
FIQ. 19. Région visitée de la Grotte de Trabuc (n" 603) d'après le plan de
Mazaitbjo (1899) et nos annotations ; longueur totale de la grotte :
2.800 mètres environ.
264 F. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
des couloirs à section carrée dont le plafond est formé par un joint de
stratification, des effondrements considérables donnant lieu à la forma-
tion de hautes salles remplies de collines d'éboulis, ou de salles très éten-
dues, mais basses, à plafond tabulaire, de vastes amas d'argile impure,
des sols couverts de cailloux anguleux. Ces sortes de grottes sont presque
toujours très sèches parce que leurs parois sont très fissurées, ce qui
provoque des courants et une aération active ; l'argile, qui y est tou-
jours abondante, se dessèche et produit des accumulations de poussière
complètement azoïques. C'est sous cette forme que se présente la « région
désertique » du domaine souterrain.
La région intéressante au point de vue biologique est celle qui va de
l'entrée à la « salle des vasques ». C'est la seule qui soit relativement
humide, incrustée et qui offre de bonnes conditions d'existence. Dans la
« salle des vasques », il y a des massifs stalagmitiques, des gours rempKs
d'eau et des ruissellements notables; il est vrai que notre visite eut lieu
en plein hiver.
Dans la « salle des vasques » la température de l'eau est de 13^3 C.
Dans la « salle du chaos », thermomètre sec : 14^ C; therm. hum. : 13o7 C. ;
baromètre : 753 mm. ; humidité : 97 % (sans corr. de press. ).
Un léger courant d'air est provoqué dans le couloir d'entrée par la
chute de l'air glacé, mais à partir de la « salle de la coupole » l'atmos-
phère est calme.
Plusieurs grands Rhinolophes hivernaient dans cette salle se tenant,
comme c'est leur habitude, isolés dans les encoignures.
Pas de guano, ni de crottes éparses, mais un peu partout de rares
débris ligneux, des gouttes de stéarine et des déchets divers.
Dans le couloir et jusque dans la « salle de la coupole », Noctuelles,
Némocères variés, Culicides et Gryllomorphes, mais peu nombreux.
Depuis la « salle de la coupole » jusqu'à celle « des vasques », des Lep-
tonètes en nombre considérable tissent leurs toiles dans les soubassements
anfractueux des massifs stalagmitiques. Ce sont des locataires carac-
térisés des rez-de-chaussées. Des Lithobies clairs, à très longues pattes,
leur tiennent compagnie. Partout où il y a un peu d'humidité, vit un
Trichoniscide rose (Androniscus ?) et un abondant Campodéide qui ne
dédaigne même pas les endroits plus secs.
Nous eûmes la surprise de recueillir assez abondants des Bathysciola
Linderimialetensis Ab. (Col. sUph.) au sommet de la colline d'éboulis
qui occupe la « salle du chaos » malgré le peu d'humidité de l'argile sur
GROTTES VISITÉES 265
laquelle ils couraient. Les Niphargus sont abondants dans les gours.
Nous n'avons pas retrouvé les petits Gastéropodes, que Mazauric
(1899, p. 193) dit avoir vus assemblés par milliers dans les trous des parois
de la (( galerie des siphons ». En revanche nous avons recueilli de
grosses Hyalinia.
Fage, Fagniez, Jeannel et Racovitza,
604. Grotte du Pont de Salindre.
Située en face et à 100 m, de la magnanerie du pont de Salindre,
commune de Corbès, canton de Saint- Jean-du-Gard, département du
Gard, France. — Altitude : 160 m. env. — Roche : Calcaires jurassiques. —
Date : 3 janvier 1914.
Matériaux : Coléoptères, Aranéides, Chernètes, Isopodes, Mollusques.
— Numéro : 747.
Juste en face de la magnanerie du pont de Salindre débouche un petit
ruisseau. En le remontant sur 100m. env., on arrive à une petite cascade,
au pied de laquelle, à gauche, s'ouvre la grotte. Par temps de crue, la
grotte vomit de l'eau, de sorte que le ruisseau est formé par la confluence
d'un bras superficiel pérenne de niveau plus élevé avec le bras souter-
rain intermittent. L'hydrologie des calcaires offre de nombreux exemples
de dispositions en apparence paradoxales.
La grotte, que nous avons visitée sur 135 m. de longueur, est un lit
typique de rivière souterraine presque rectihgne. Le couloir d'entrée est
bas et sec, mais celui qui fait suite débute par un élargissement à sol
argileux et humide et se continue avec des parois rocheuses nues ou in-
crustées ; les draperies surtout sont bien développées. Le sol est rocheux
avec des cuvettes pleines d'eau profondes de 50 cm. ou très plates, mais
toujours garnies d'incrustations en forme de choux-fleurs. Puis on
traverse un couloir descendant argileux et plus sec, et par une chatière
on passe dans un autre couloir humide à cuvettes incrustées sur le plan-
cher.
Le plafond ne doit pas être bien épais, puisqu'en deux endroits des
racines passant par le canal central de longues stalactites poussent
chacune un long prolongement qui atteint le plancher.
Au milieu, température de l'eau : 14^5 C. ; thermomètre sec : 14^9 C. ;
266 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
therm. hum. : 1405 C. ; baromètre : 756 mm. ; humidité : 96 % (sans
corr. de press.).
La chute de l'air froid par l'entrée n'est sensible que sur 20 m. env.
Pas de Chauves-Souris, ni de guano, ni de débris végétaux. Pas de Noc-
tuelles à l'entrée, mais quelques Némocères. L'eau n'est pas habitée.
Sur terre quelques Bathysciola et des Trichoniscides plus communs. Des
Nesticus avaient pénétré presque jusqu'au fond.
Fage, Fagniez, Jeannel et Racovitza.
605. Grotte de la Calmette.
(FIG. 20)
Située à 1.500 m. à l'est du mas de Calmette, commune d'Allègre,
canton de Saint- Ambroix, département du Gard, France. — Altitude :
FlG. 20. La Grotte de la Calmette (n" 605) d'après le plan de ilAZAURic et nos annotations ; longueur totale
100 mètres environ.
270 m. env. — Roche : Calcaires crétaciques. — Date : 4 janvier 1914.
Matériaux : Coléoptères, Lépidoptères, Diptères, Thysanoures, Col-
lemboles, Myriapodes, Aranéides, Chernètes, Acariens, Isopodes, Mol-
lusques, Champignons. — Numéro : 748.
D'Allègre on suit la route de Lussan pendant 2 km. jusqu'à un grand
GROTTES VISITÉES 267
coude, puis une piste à l'est pendant 1.500 m. jusqu'au mas de Calmette
(le 100.000^ écrit: Cannette), finalement encore 1.500 m. dans l'est pour
trouver l'entrée dans un ravin, rive gauche, à 20 m. au-dessus du thalweg
d'un petit ruisseau. Mazauric (1904, p. 182, plan) en fait une courte men-
tion accompagnée d'un plan.
Entrée petite, on rampe dans un couloir sec pourvu d'une chambre
incrustée et l'on pénètre dans une vaste galerie coudée à angle droit, haute
de plafond, de laquelle partent : à droite, un couloir montant sec ; au coude,
une galerie descendante sèche, et au fond, un diverticule argileux, humide,
dont l'atmosphère était normale, sans trace de l'acide carbonique signalé
par Mazauric. La longueur totale de la grotte atteint 100 m. env.
Une grande coulée, pourvue de nombreuses bornes, occupe du côté
de l'entrée le début de la galerie (la « grande salle »). D'autres incrus-
tations ornent cette région ainsi que le couloir du coude ; le plafond est
aussi très stalagmite. Une grande coulée humide occupe le fond (salle
(( de la coulée»). Mais les suintements sont rares et il n'y a pas de flaques
d'eau. Le sol est pierreux, incrusté ou argileux. Le plafond est garni
de racines.
Dans la grande salle, thermomètre sec : 1405 C. ; therm. hum. : 14^2 C. ;
baromètre : 746 mm. ; humidité : 97 % (sans corr. de press.). Atmosphère
calme partout.
Pas de Chauves-Souris mais des amas de guano relativement frais
dans les grandes salles, ce qui démontre que les Chauves-Souris grégaires
doivent, au moins en été, fréquenter cette grotte. Rares débris végétaux.
Dans la chambre du couloir d'entrée, un petit Rhinolophe et de très nom-
breuses grandes Scutigères, grosses Araignées {Meta, Nesticus, etc.),
Némocères variés, Culicides, Noctuelles, Ornéodes, animaux qui se ren-
contrent moins nombreux dans tout le couloir et à l'entrée même de la
grande salle, mais pas au delà.
Dans toute la grotte, mais surtout très abondants sur la coulée de la
grande salle, sur du guano sec, sont les Spélaeoglomérides (qui s'attaquent
aussi au guano frais) dont les crottes couvrent les incrustations, les
Trichoniscides, les Campodéides, des minuscules Diptères, les Leptoné-
tides et autres formes plus rares.
Tout au fond du couloir du coude, les racines ont pénétré et des
Porcellio dilatatus Br. y ont élu domicile. La présence de ce Cloporte dans
une région très éloignée de l'entrée indique toujours qu'à cet endroit la
paroi est mince et qu'il existe des fissures communiquant avec l'extérieur.
Arch. de Zool. Exp. et GÉS. — T. 57. — F. 3. 18
268
F. JEANNEL ET E.-G. RACOVlTZA
On nous a signalé beaucoup de grottes dans la région ; la plupart sont
mentionnées par Mazauric (1904). Notons seulement la suivante qu'il
ne paraît pas avoir connue :
Grotte de Redollet, commune de Navacelle. Entrée en gueule de four
environ 30 m. de longueur. Stalactites.
Fage, Fagniez, Jeannel et Racovitza.
- Gu-a.n o
2o iim
606. Baume des Italiens.
(FIG. 21)
Située sur la rive droite de la Cèze, à 1 km. du mas Pernelle, commune
de Méjeannes-le-Clap, canton de Barjac, département du Gard, France.
— Altitude : 280 m. env. — Roche •
^ Calcaires crétaciques. — Date :
5 janvier 1914.
Matériaux : Coléoptères, Lépi-
doptères, Diptères, Thysanoures,
Myriapodes, Aranéides, Chernètes,
Isopodes, Mollusques, Champi-
gnons. — Numéro : 749.
Impossible à trouver sans
guide. S'ouvre à mi-falaise, dans
l'escarpement formant la rive
droite de la Cèze. Une première
salle allongée est claire et sèche,
mais à partir de l'étroit passage
qui se trouve au fond l'humidité
est considérable. A cet endroit
commencent aussi les incrusta-
tions. La belle salle découverte
par Mazauric (1904, p. 154) pos-
sède trois puissants massifs stalag-
mitiques garnis de bornes et de
gours plein d'eau. Les parois sont
Fio. 21. La Baume des Italiens pg^ inCrUStécS, mais IcS plafonds
(n» 606) d'après le plan de ^ ' ^ _
MAZAtjRic et nos annote- sont gamis de CCS belles draperies
tiens; [longueur totele :
iTo^mètres environ.; si fréquentes dans les grottes du
GROTTES VISITEES 269
bassin de la Cèze. Le sol est incrusté ou argileux. La longueur totale
atteint 250 m. env.
Dans la grande salle, thermomètre sec : 1205 C. ; therm. hum. : 12^4 C. ;
baromètre : 747 mm. ; humidité : 99 % (sans corr. de press.). Un calme
complet règne dans la grande salle.
Un petit Rliinolophe hivernait dans le passage étroit, mais les amas
de guano assez récents distribués dans la « salle Mazauric » indiquent
que la grotte est visitée par des Chauves-Souris grégaires au moins en
été. Les débris ligneux sont rares. Dans la première salle, de nombreux
Noctuelles et Némocères se tiennent sur les parois.
Les Troglobies ne se tiennent que dans la « salle Mazauric » et ils
sont nombreux. Les amas de guano sont activement exploités par les
Spélaeoglomérides et les Trichoniscides. Sur les stalactites les Diaprysius
Mazaurici V. May. sont communs sur le guano, les Bathysciola Linderi Ab.
plus rares ; un seul Tnchus Mayeti Ab. fut capturé au fond. De petits
Aranéides étaient accompagnés de leurs pontes.
Dans le guano furent recueillis de nombreux œufs, pourvus de coques
épaisses mais flexibles, appartenant probablement à des Diplopodes.
Fage, Fagniez, Jeannel et Racovitza.
607. Grotte de Tharaux.
(Troisième exploration, voir Biospeologica XVI, p. 132 et XXXIII, p. 423)
Située dans un ravin affluent de la Cèze, à proximité du village, com-
mune de Tharaux, canton de Barjac, département du Gard, France. —
Altitude : 150 m. — Roche : Calcaires crétaciques. — Date : 5 janvier 1914
Matériaux : Coléoptères, Lépidoptères, Diptères, Collemboles, Myria-
podes, Aranéides, Chernètes, Isopodes, Mollusques, Champignons. —
Numéro : 750.
La grotte était plus humide que lors de notre première exploration
(Biospeologica XVI, p. 132), fait expUcable par la différence de saison.
Les flaques d'eau étaient cette fois nombreuses et en beaucoup d'endroits
les incrustations ruisselaient. Notons l'abondance des draperies comme
dans nombre de grottes de la région. Sa longueur totale d'après Mazauric
(1894) est de 1.200 m. env.
Dans le couloir d'entrée on sent un léger courant d'air, mais dès qu'on
l'a dépassé, l'atmosphère est calme. Ainsi s'explique la remarquable
270 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
constance de la température pendant toute l'année. Nous avons trouvé
dans la « grande salle », température de l'eau : 12^5 C. ; le 26 août 1909 :
1207 C. Température de l'air : IS^l C. ; le 5 juin 1912 (Argod- Vallon) :
130c.
Thermomètre sec : IS^l C. ; tlierm. hum. : 13^ C. ; baromètre : 752 mm. ;
humidité : 99 % (sans corr, de press.).
Non loin de l'entrée hivernaient quelques Noctuelles et Sciarides,
un grand et un petit Rhinolophes, mais pas d'autres Chauves-Souris.
En août nous en avions vu, ce qui montre bien que les grottes de la région
sont fréquentées par les espèces grégaires seulement en été. D'ailleurs,
les petits amas de guano, fréquents dans les régions antérieures de la
grotte, l'indiquent bien. Les débris ligneux sont rares, mais les visiteurs
sèment beaucoup de petites branches de buis pour se guider dans le
dédale des couloirs.
Sur ce buis à peine flétri, les Collemboles sont fort nombreux comme
les Chernètes et les petits Aranéides qui les poursuivent. Sur le guano
se tiennent les Spélaeoglomérides et les Trichoniscides, tandis que Dia-
prysius Mazaurici V. May. préfère les stalactites et Trechus Mayeti
Ab. les bancs d'argile très fine, bien développés dans cette grotte.
Fage, Fagniez, Jeannel et Racovitza.
608. La Coquelière.
Située à 2 km. à l'ouest de Chadouillet, commune de Saint-André-
de-Cruzières, canton des Vans, département de l'Ardèche, France. —
Altitude : 140 m. env. — Roche : Calcaires jurassiques. — Date : 6 janvier
1914.
Matériaux : Coléoptères, Lépidoptères, Diptères, Collemboles, Myria-
podes, Aranéides, Chernètes, Isopodes, Oligochètes, Phanérogames,
Laboulbéniacées (sur Trechus Mayeti Ab.). — Numéro : 751.
La très curieuse hydrographie du causse de Chadouillet et de Saint-
André-de-Cruzières attend toujours une étude approfondie. Les inté-
ressantes notes de Gaupillat publiées par Martel (1894, p. 126-133)
sont trop incomplètes pour fournir autre chose qu'mi énoncé sommaire
des problèmes qui sont à résoudre.
Nous avons abordé le lit de la rivière souterraine par l'aven de la
GROTTES VISITÉES 271
Coqiielière (ou Coqualière), facile à descendre si l'on s'aide d'une corde.
La partie sud est un lit typique de rivière souterraine rapide, encore fonc-
tionnelle par temps de crues. Les parois sont nues, striées verticalement
tout le long du couloir unique, plus ou moins contourné, qui forme la
grotte sur les 1.000 m. env. que nous avons visités. Quand la direction est
rectiligne, les parois sont sensiblement parallèles ; aux coudes, des tour-
billons ont creusé des salles situées souvent d'un seul côté de l'axe des
galeries. Dans les régions rétrécies, des marmites et chaudrons magni-
fiques creusent les parois et le sol. Le sol est couvert de gravier et d'é-
normes masses de sable, sauf dans les biefs latéraux où l'argile s'est
déposée. La violence et la hauteur des crues sont attestées par les branches,
graines, châtaignes et autres débris végétaux collés au plafond.
Les incrustations sont très rares et localisées ; les draperies des plafonds
sont par endroits très développées et fort belles. Ces sortes de stalactites
se forment suivant de longues fissures rectilignes et horizontales, et leur
fréquence dans la région s'explique par l'horizontalité des bancs peu
épais dans lesquels sont creusées les grottes.
Les suintements sont abondants, les parois ruisselantes fréquentes,
mais le sol est sec car du sable absorbant le recouvre. Quelques chaudrons
étaient pleins d'eau.
On remarque sur les parois polies par l'eau que les joints de strati-
fications des bancs forment des lignes zigzagantes qui rappellent les
sutures crâniennes.
La galerie nord, parcourue par un courant d'air violent, est complè-
tement sèche.
Gaupillat a parcouru environ 1.920 m. de galeries dans cette rivière
souterraine.
A 500 m. env. de la Coquelière, température de l'eau : 12° 1 C. ; à 300 m.,
thermomètre sec : 11^1 C. ; therm. hum. : lO^T C. ; baromètre : 746 mm. ;
humidité : 95 % (sans corr. de press.).
Entrée peuplée de Culicides et autres Ncmocères avec quelques
Noctuelles. Pas de'Chauves-Souris, ni de [guano. A l'intérieur vit la faune
troglobie de la région, mais représentée par très peu d'individus. Un seul
exemplaire du Diaprysius Fagei Jeannel, n. sp. a été recuelli sur une
stalactite à une centaine de m. de l'entrée. Trechus Mayeti Ab. était assez
commun sur le gravier recouvert d'une mince couche d'argile, dans les
régions profondes de la grotte. Quelques Bathysciola Linderi Ab. furent
également capturés.
272
B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Les Trichoniscides se rencontrent un peu partout avec de rares Col-
lemboles et de petits Polydesmides blancs. Des graines avaient germé à
l'obscurité complète, très loin de l'entrée, et produit une longue plantule
étiolée, mais inclinée vers l'entrée. Des Diptères venaient à nos lumières.
Fage, Fagniez, Jeannel et Racovitza.
609. Grotte de Banne.
(FIG. 22)
p^ Située sous le vieux château, dans le village, commune de Banne,
canton des Vans, département de l'Ardèche, France. — Altitude : 227 m.
env. — Roche : Calcaires crétaciques.
— Date : 6 janvier 1914.
Matériaux : Coléoptères, CoUem-
boles, Aranéides, Chernètes, Iso-
podes, Champignons. — Numéro :
752.
Cette grotte, citée dans Spe-
LUNCA (4e année, p. 42, 1898), est
la propriété de M. Bécamel, de
Banne, qui la fait visiter volontiers
pour une petite rémunération. Elle
est formée dans une diaclase de
60 m. env. de longueur, très incli-
née et rectiligne qui, par deux étran-
glements produits par des éboulis
et des incrustations, est divisée en
trois salles dont la médiane est la
plus considérable.
Les parois sont garnies d'incrus-
tations variées : massifs, coulées,
bornes ; le plafond est tapissé de
draperies et de stalactites. Le sol
est occupé par des éboulis couverts
JFIG. 22. Croquis schéma-
tique de la Grotte de
Banne (n° 609) ; lon-
gueur totale : 00 mè-
tres en\iron.
d'argile et d'incrustations. Les suintements sont très abondants et, par
place, des parois ruissellent, mais les flaques d'eau sont rares.
La lumière du jour pénètre au delà du milieu.
GROTTES VISITÉES
273
Au fond, thermomètre sec : 13° C. ; therm. hum. : 12o5 C. ; baromètre :
735,3 mm. ; humidité : 97 % (sans corr. de press.).
Le courant provoqué par la chute de l'air froid est faible et n'est plus
sensible au fond.
Pas de Chauves-Souris, pas de guano, pas de Noctuelles ni de
Diptères à l'entrée. Quelques débris organiques.
Les Troglobies habitent surtout la salle médiane. Sur les bornes.
t ntref
Trichoniscides voisinant avec Collemboles.
Sur une planche pourrie furent capturés
30 Diaprysius Sernllazi Peyer. parmi des
Aranéides et des Collemboles. T rechus Mayeti
Ab. est plus rare. Des Leptonctides avaient
suspendu, par une fil, leur ponte sphérique
dans leur toile lâche.
Grotte du Curé, commune de Banne, est un
aven de 5 m. à pic aboutissant à une grotte
assez vaste. Le curé de Banne s'y cacha,
paraît-il, pendant la Révolution.
. Fage, Fagniez, Jeannel et Racovitza.
610. Grotte du Saut-du-Bœuf.
(Fio. 23)
(Seconde exploration, voir Biospeologica XXXHI, p. 422)
Située dans le bois de Païolive, sur la rive
droite du Chassezac, commune de Banne, can-
ton des Vans, département de l'Ardèche,
France. — Altitude : 175 m. env. — Roche :
Calcaires jurassiques. — Date : 7 janvier 1914.
Matériaux : Coléoptères, Lépidoptères,
Diptères, Aranéides, Opilionides, Acariens,
Isopodes, Mollusques. — Numéro : 753.
FiG. 23. Croquis schématique de la Grotte
Impossible à trouver sans guide ; mais pour An saut-du-Bœuf (n°.6io) ; longueur
, - 1 • 1 T-« 1 • totale : 65 mètres environ.
toutes les grottes du « bois de Païolive » on
peut utiliser les services de M. Aubert, le jguide officiel de cette belle
région karstique.
raa.gn
274 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
La grotte est formée par un couloir de 65 m. env. de longueur, qui
commence par un défilé rocheux, se poursuit par une partie couverte
brusquement interrompue par un eiffondrement de plafond qui a produit
un petit aven, se continue par une région fortement descendante et élargie,
pourvue d'un petit diverticule à droite, et se termine par un rétrécis-
sement remontant qui seul est complètement obscur, humide et argileux,
le sol par ailleurs étant couvert d'éboulis secs. Les incrustations sont
rares, sèches et localisées.
La chute de lair froid provoque un courant qui ne cesse complè-
tement qu'au fond. Ce fait explique les considérables variations de tem-
pérature. Argod-Vallon a trouvé pour l'air : 12° C. le 31 mai 1912. Nous
avons constaté dans le cul-de-sac terminal, thermomètre sec : 7^2 C; therm.
hum. : 5° C. ; baromètre : 746 mm. ; hum : 69 % (sans corr. de press.).
Il est manifeste que la forme et l'inclinaison de la grotte sont cause
que pendant l'hiver elle se refroidit et se dessèche ; les autres saisons
sont seules à recommander aux biospéologistes désireux de faire des
chasses fructueuses.
Pas de Chauves-Souris, mais des crottes éparses indiquent que les
Rhinolophes doivent la visiter. Débris ligneux rares. Nombreuses Noc-
tuelles dans le couloir qui précède l'aven, mais non ailleurs. Culicides
et Sciarides jusqu'au milieu.
Malgré des conditions d'existence en apparence peu favorables, les
Troglobies sont assez bien représentés. Les Diaprysius Serullazi Peyer.
se tiennent sur les bornes dans la région sèche et éclairée du milieu ; il
est vrai qu'ils sont beaucoup plus abondants sur la pente argileuse ter-
minale où ils voisinent avec T)echu^ Mayeii Ab., Trichoniscides, Col-
lemboles, Chernètes, Leptonctides, S'c^Lolemo i (Opihon.), Rhagidia
(Acarien) et Hijalinia.
La faune estivale doit être très riche.
Fage, Fagniez, Jeannel et Racovitza.
611. Grotte de l'Assiette.
(FIG. 24)
(Seconde mention, voir Biospeologica XXXUl, p. 422)
Située dans le bois de Païolive, sur la rive droite du Chassezac, commune
de Chassagne, canton des Vans, département de l'Ardèche, France. — Alti-
tude : 200 m. env. — Roche : Calcaires crétaciques. — Date : 7 janvier 1914.
GROTTES VISITÉES
275
Matériaux : Chéiroptères, Coléoptères, Lépidoptères, Diptères, Col-
lemboles, Aranéides, Opilionides, Acariens, Isopodes, Mollusques ;
Parasites des Chéiroptères: Ixodes et Acariens sur Cheiroptère 754.
— Numéro : 754.
L'entrée est au fond dun petit aven facile à descendre. On parcourt
une grande galerie descendante, claire, sèche, pleine d'éboulis. A droite
petite salle sèche et claire ; à gauche, une chatière qui conduit dans une
Fio. 24. Croquis schématique de la Grotte de l'Assiette (n" 611) ; longueur totale : 100 mètres environ.
« salle obscure », basse, pourvue de massifs stalagmitiques, bornes et parois
incrustées. A côté d'un gros rocher, est un puits étroit qui conduit dans
un couloir étroit que nous avons suivi sur une soixantaine de mètres.
Au-dessus du puits s'embranche un couloir supérieur plus court.
La « salle obscure » a un sol argileux, des suintements abondants et
une petite flaque d'eau ; le couloir inférieur est argileux et humide. La
longueur totale des galeries et couloirs dépasse 100 m.
Dans la « salle obscure », thermomètre sec : 9<'2 C. ; therm. hum. :
8^6 C. ; baromètre : 744 mm. ; humidité : 92 % (sans corr. de press.).
Le courant provoqué par la chute de l'air froid extérieur se fait encore
faiblement sentir au milieu de la « salle obscure ».
Dans le couloir inférieur, deux grands Rhinolophes hivernent, mais
276
R. JE ANNEE ET E.-G. RACOVITZA
pas d'autres Chauves-Souris et pas d'amas de guano ; des crottes éparses
et des débris ligneux.
Peu de Noctuelles et de Diptères et seulement dans les régions claires.
Les Troglobies habituels de la région se tiennent surtout sur les massifs
de la salle obscure. Le Diaprysius Serullazi est très commun.
Fage, Fagniez, Jeannel et Racovitza.
612. Grotte du Cuivre.
(FIO. 25)
Située sur la rive droite du Chassezac, dans le bois de Païolive, com-
mune de Chassagne, canton des Vans, département de l'Ardèche, France.
— Altitude : 150 m. env. — Roche : Calcaires crétaciques. — Date :
7 janvier 1914.
Matériaux : Coléoptères, Lépidoptères, Diptères, Hémiptères, Ara-
FiG. -l'i. Croquis schématique de la grotte du Cuivre (n» 612) ; longueur totale 30 mètres environ.
néides, Opilionides, Chernètes, Isopodes, Mollusques, Oligochètes, Cham-
pignons, Laboulbéniacées (sur Trechus Mayeti Ab.). — Numéro : 755.
Cette grotte est citée dans Malbos (c/ Martel 1894 p. 124). Elle
s'ouvre entre deux grandes roches. Une salle oblongue, claire, nue, à
sol argUo-humique, sèche, forme vestibule. Par une chatière située au
fond, on passe dans une salle tortueuse dans laquelle débouche une che-
minée ouverte à l'extérieur. Au delà, les parois s'incrustent et deviennent
humides, le sol est formé d'un mélange d'argile et d'humus, et des racines
pendent du plafond. Les suintements sont faibles.
Au fond, thermomètre sec : IP C. ; therm. hum. : 9^7 C. ; baromètre :
748 mm. ; humidité : 84 % (sans corr. de press.).
GROTTES VISiTÉES ■ 277
Cette grotte, étant horizontale, aurait une atmosphère calme si l'air
froid tombant par la cheminée ne provoquait un léger courant, suffi-
sant cependant pour abaisser la température et le degré hygrométrique.
Pas de Chauves-Souris, ni de guano. Crottes isolées et débris ligneux,
racines et humus. Beaucoup de Noctuelles à l'entrée mais seulement de
rares Sciarides. Au fond de la « salle claire», sous les pierres reposant sur
l'argile, des Bathysciola Linderi Ab., de gros Polydesmes et des Poicdlio,
avec des Champignons à longs stipes fixés sur des racines, mais poussant
sous la pierre.
Sur les racines du fond, nombreuses H/^alinia dont c'est la station
favorite, et petits et minces Polydesmes. Sous les enduits stalagmitiques,
qu'on peut enlever par grandes dalles à cause des racines qui les ont
soulevés, nombreux tout petits Trichoniscides blancs. La station des
autres Troglobies n'offre rien à noter. Diaprysius Serullazi Peyer. est
abondant, mais Trechus Mayeti Ab. rare.
Fage, Fagniez, Jeannel et Racovitza.
613. Grottes de Voidon.
Situées dans la collinede Voidon, dans la falaise de la rive droite du
Chassezac, commune de Grospierres, canton de Joyeuse, département de
l'Ardèche, France. — Altitude : 110 m. env. — Boche : Calcaires créta-
ciques. — Date : 8 janvier 1914.
Matériaux : Lépidoptères, Collemboles, Myriapodes, Ixodes, Iso-
podes. — Numéro : 756.
Ces grottes sont situées à 500 m. env. à l'ouest du Mas neuf, dans la
falaise de la rive droite du Chassezac. A mi-falaise sont les grottes supé-
rieures sèches et au pied les grottes inférieures. En réalité, ce ne sont pas
de vraies grottes, mais des sortes de rascles formées par de courtes gale-
ries parallèles se coupant à angle droit et s'ouvrant à l'extérieur.
Le sol argilo-humique est presque sec partout. Quelques rares incrus-
tations avortées. Courant d'air sensible mais faible. Température de
l'air : 1205 C.
Quelques Noctuelles à l'entrée. Sur une borne un peu plus humide
que les autres, Sminthurides et Collemboles ; sur l'argile, Ascospermo-
phores et Trichoniscides rares.
Fage, Fagniez, Jeannel et Racovitza.
278 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
614. Grotte nouvelle de Vallon.
(FIG. 26)
(Seconde mention, voir BiOSPEOLOGiCA VI, p. 402)
Située sur la rive gauche de l'Ardèche, commune et canton de Vallon,
département de l'Ardèche, France. — Altitude : 250 m. env. — Roche :
Calcaires crétaciques. — Date : 8 janvier 1914.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Trichoptères, Thysanoures, Col-
le mboles, Myriapodes, Aranéides, Chernètes, Isopodes, Mollusques
Oligochètes, Champignons (sur Diajyrysius caudatissimus Ab,). —
Numéro : 757.
La découverte de cette grotte, dont l'emplacement est indiqué sur
la carte au 100. 000^, remonte à 75 ans env. L'entrée primitive était un
orifice très étroit, horizontal, que rien ne distinguait des petites fentes ou
trous voisins de la lande calcaire. L'orifice fut agrandi et la grotte amé-
nagée.
Une descente roide aboutit à un vestibule incliné, incomplètement
obscur, au fond duquel un puits vertical, pourvu d'une échelle, conduit
dans une très vaste salle oblongue, limitée au sud par une paroi verticale
unie qui n'est que le mur intact de la faille qui a présidé à la formation
de la caverne. Cette faille peut être suivie vers l'est, toujours rectiligne,
dans un long couloir stalagmite, à sol couvert d'éboulis, qui aboutit à un
orifice d'aven, en forme de fente allongée et à direction ouest-est comme
la faille. Le guide nous assure que cet aven de 30 à 40 m. de profondeur à
pic, conduit dans une salle exactement semblable à la « grande salle ».
L'autre lèvre de la faille a été évidée et forme la « grande salle » dont
toute la paroi nord est merveilleusement incrustée. D'énormes coulées
stalagmitiques garnies de pihers, de bornes et de gours, se déversent vers
le sud. De vastes massifs avec de formidables piliers déHmitent des niches
et des chapelles.
Les suintements sont abondants et les flaques d'eau sont nombreuses
sur le sol entièrement couvert d'éboulis stalagmites ; les régions argi-
leuses sont rares. La longueur totale explorée est de 200 m. env.
Cette caverne est en somme un aven d'origine endogée à trois plates-
formes étagées, formé le long d'une faille et ouvert postérieurement à sa
formation par le hasard d'un éboulement. Actuellement, il est dans la
phase de comblement stalagmitique. ,
GROTTES VISITÉES
279
A la colonne renversée, thermomètre sec : 12^7 C. ; therm. hum. :
12^2 C. ; baromètre : 750 mm. ; humidité : 94% (sans corr, de press.).
Un faible courant d'air descend dans l'aven mais n'est plus percep-
tible dans la grande salle.
Pas de Chauves-Souris, pas de guano ; débris ligneux nombreux et
déchets laissés par les visiteurs.
De nombreuses Pliryganes garnissent les parois du couloir d'entrée.
Elles sont attaquées par un Champignon noir ; leurs cadavres couvrent
xifi.
a
ive^
Fia. 26. Croquis schématique de la Grotte nouvelle de Vallon (n° 614) ; longueur figurée : 200 mitres environ
le sol. Dans la « salle supérieure », des Trichoniscides et Spélaeoglomérides
sur le bois pourri.
Les parois de l'aven aux échelles sont fréquentées par les Trichonis-
cides, Au pied de l'échelle, sur la stalagmite, d'énormes foules de Collem-
boles variés, des Tr échus Mayeti Ab. et des Trichoniscides.
280 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Dans toute la « grande salle » les Troglôbies sont d'ailleurs communs ;
très grands Campodéides, Hyalinies, Chernètes, Diaprysius Cauda-
tissimus Ab.; les Bathysciola sont plus rares. Très nombreuses sont les
Leptonétides avec leurs pontes. On en trouve aussi dans la « salle supé-
rieure » avec un Thôridiide ayant également pondu.
Fage, Fagniez, Jeannel et Racovitza.
615. Grotte du Soldat.
(FIG. 27)
(Seconde mention, voir Biospeologica XXXHI, p. 421)
Située sur la rive gauche de la Beaume, à 100 m. au-dessous de la
ferme du Soldat, commune de Labeaume, canton de Joyeuse, départe-
ment de l'Ardèche, France. — Altitude : 145 m. env. — Roche : Calcaires
oxfordiens. — Date : 9 janvier 1914.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, CoUemboles, Aranéides, Ixodes,
Isopodes, Mollusques, Champignons. — Numéro : 758.
L'entrée est à quelques mètres seulement au-dessus du niveau actuel
de la rivière et sur la berge. Ce doit être une ancienne perte de la
Beaume qui a creusé dans l'intervalle d'un joint de stratification
horizontal. Nous l'avons explorée sur 200 m. env. de longueur.
A la suite d'un court couloir vient un ressaut au-dessus duquel com-
mence une galerie de 1 à 1,5 m. de hauteur, dont le plafond horizontal est
entièrement incrusté. Presque toute la galerie est occupée par une « forêt »
de piliers stalagmitiques et de stalagmites. Vers le fond, il fait humide et
l'on pénètre dans un couloir qui manifestement représente dans sa partie
nord un point d'absorption occupé par des masses argileuses. A gauche,
on parcourt un couloir stalagmite et l'on débouche dans un carrefour :
à droite, petite salle argileuse ; en face, une fente impraticable ; à gauche,
autre point d'absorption, dans une salle fortement descendante, à plan-
cher stalagmitique effondré et remplie d'argile. Deux « piliers suspendus »
très grands, semblables à ceux signalés dans la grotte du Bois de Madame
(p. 253) et dans la Baume de Gour (p. 260), occupent une bonne partie delà
salle ; la disposition des lieux indique que cette salle a été le siège d'un
violent mouvement tourbillonnaire. Il est probable qu'actuellement
encore l'eau y pénètre lors de l'élévation du niveau piézométrique.
Le 8 mai 1912, Argod-Vallon avait trouvé pour la température de
GROTTES VISITÉES
281
P -. Restes d
l'air : 1407 C. Nous avons trouvé dans la « salle des gours », thermo-
mètre sec : 903 C. ; therm. hum. : 704 C. ; baromètre : 758,5 mm. ;
humidité : 75 % (sans corr. de press.). Il faut probablement attri-
buer cette différence au courant d'air faible, mais sensible partout,
qui régnait dans la grotte et qui introduisait, lors de notre visite, un
air extérieur glacial.
Pas de Chauves- A^i
Souris, mais des pe-
tits amas de guano
jusqu'au fond, ce
qui indique que les
Chauves-Souris gré-
gaires vien-
nent l'habiter,
probablement
quand la tem-
pérature nor-
male se réta-
blit.
Dans la
« salle des
gours » , un
amas de paille
pourtant sè-
che hébergeait nombre de Tri-
choniscides, d'Aranéides et de
Bathysciola Linderi Ab. Des Culi-
cides assez nombreux gîtaient sur
les parois près l'entrée. Des Phora,
des Trichoniscides et des Dia-
prysius Serullazi Piraudi Jeann.
étaient répandus jusqu'au fond ; des larves de Silphides dévoraient des
masses de nature indéterminée , probablement des Champignons. Quelques
Trechus Mayeti Ab. furent capturés. Très nombreux sont des Nesti-
cides, qui fixent leurs toiles même au plafond qui d'ailleurs est plus
humide que les parois ; souvent le cf et la 9 sont réunis dans le même
coin.
Fage, Fagniez, Jeannel et Racovitza.
®
®
Fio. 27. Croquis schéma-
tiqud de la Grotte du
Soldat (no 615) ; lon-
gueur explorée : 200 mè-
tres environ.
282
B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
616. Grotte de Remène.
(FIG. 28)
(Seconde mention, voir Biospeoi.ogica XXXIII, p. 362)
Située à 800 m. env. au nord-est des fermes de la Vernède, commune
de Rozières, canton de Joyeuse, département de l'Ardèche, France.
— Altitude : 290 m. env. — Roche : Cal-
caires jurassiques. — Date : 9 janvier 1914.
Matériaux : Coléoptères, Lépidoptères,
Diptères, Orthoptères, Collemboles, Myria-
podes, Aranéides, Isopodes, Champignons.
— Numéro : 759.
Cette grotte fait partie d'un système
hydrographique très complexe qui méri-
terait d'être étudié. Elle donne sur un
thalweg sec, affluent d'autres thalwegs
également secs, qui ne fonctionnent que
par temps de fortes crues et
qui reçoivent d'autres ruis-
seaux temporaires et sou-
terrains ayant déposés une
très grande masse de tuf.
La grotte est formée par
un couloir étroit et bas, ht
typique de rivière souter-
raine intermittente, suivi
par une galerie remplie
d'énormes éboulis minés par
une rivière souterraine qu'on
entend couler en dessous. A
droite, une chapelle stalag-
mitée fortement ascendante.
(2) t jbùlfsl'Ué^VUâ
Fia. 28. Croquis schématique de la grotte
de Remène (n" 616) ; longueur explo-
rée : 100 mètres environ.
La longueur explorée atteint 100 m. env. Parois usées par l'eau courante,
par place incrustées cependant ; sol d'éboulis recouvert de sable ou argile.
Argod-Vallon trouva, le 24 mai 1911, la température de l'air à 14° C.
et le 25 mai, à 14^2. Nous avons constaté : thermomètre sec : 905 C. ; therm.
hum. : 902 C. ; baromètre : 749 mm. ; humidité : 96 % (sans corr. de press.).
GROTTES VISITÉES 283
Le courant d'air faible, mais sensible partout, doit être la cause de la
température anormalement basse que nous avons trouvée.
Pas de Chauves-Souris ; il fait trop froid. Mais Argod-Vallon en a
trouvé en mai. D'ailleurs de petits amas de guano existent en divers
endroits, preuve que la grotte est visitée par des grégaires, mais unique-
ment, à ce qu'il semble, pendant les autres saisons.
Près de l'entrée, très nombreux Culicides, Sciarides, Noctuelles et
Phryganes. Beaucoup de ces dernières sont accrochées mortes aux parois
et attaquées par les Champignons. Des Scutigères et des Gryllomorphes
avancent assez loin dans la grotte.
Nombreux Nesticus portant leur ponte, ainsi que des Leptonotides
avec la ponte fixée sur la toile. Des débris de Diaprysius Serullazi
Argodi Jeann. étaient accrochés à une de ces toiles, preuve que ces petites
Araignées peuvent maîtriser le Coléoptère. Trichoniscides partout avec
les Baihysciola Linderi Ab. ; les Spélaeoglomérides ota'ent localisés sur
le guano.
Fage, Fagniez, Jeannel et Racovitza.
617. Grottes de Peyroche.
(Seconde exploration, voir Biospeologica XXXHI, p. 420)
Situées sur la rive droite de la Beaume, commune d'AurioUes, canton
de Joyeuse, département de l'Ardèche, France. — Altitude : 120 m. env. —
Boche : Calcaires oxfordiens. — Date : 10 janvier 1914.
Matériaux : Chéiroptères, Coléoptères, Lépidoptères, Diptères, Col-
lemboles. Myriapodes, Aranéides, Isopodes, Oligochètes ; Parasites
des Chéiroptères : Ixodes sur Chéiroptères 760 6, Acariens sur Chéi-
roptères 760 et 760 a. — Numéro : 760.
La rive droite de la Beaume, au pont de la route d'Auriolles à Ruoms,
est formée par une falaise de calcaires en bancs épais criblée de trous, dont
deux seulement sont des entrées de grottes profondes ; ce sont ceux qui
sont les plus voisins du pont.
Première grotte a l'est du pont. — Il faut une échelle de 4 m. pour
l'atteindre. Entrée étroite divisée par un piUer rocheux ; couloir très
étroit et bas ; grande salle terminale remplie d'éboulis. Le tout est sec.
Quelques grands Rhinolophes au fond. Des Diaprysius, des Bathys-'
ciola Linderi Ab. et un Trechus Mayeii Ab. sont les seuls Troglobies
rencontrés.
ARCH. DE ZOOL. EXP. ET OÉN. — T. 57. — F. 3. 19
284 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Seconde grotte a l'est du pont, — Un court couloir sec tourne à
gauche, puis à gauche s'abouche avec un couloir qui revient à l'extérieur;
mais à droite il conduit dans une salle remplie d'éboulis avec, au fond,
un cul-de-sac supérieur stalagmite et un autre cul-de-sac inférieur,
également incrusté. Ces diverticules sont seuls un peu humides et à peu
près obscurs.
Au fond, thermomètre sec : 6^8 C. ; therm. hum. : 6^2 C. ; baromètre :
756 mm. ; humidité : 91 % (sans corr. de press.). L'influence de l'air
extérieur se manifeste partout.
Deux grands Rhinolophes et deux Vespertilionides étaient accrochés
aux parois. Quelques petits amas de guano et des crottes isolées..
Très nombreuses sont les Noctuelles à l'entrée, en compagnie de nom-
breux Culicides et de Sciarides. Dans les coins humides, nombreux Dia-
prysius Serullazi Mulleri Jeann., Ascospermophores (?), Aranéides
minuscules, Anurides, Collemboles sauteurs, Trichoniscides et Philos-
cies, ainsi que de rares Trechus Mayeti Ab,
Fage, Fagniez, Jeannel et Racovitza.
618. Grotte du Château d'Ebbou.
(Troisième mention, voir Biospeûlogica XVI, p. 137, et XXXIH, p. 428)
Située à côté des ruines du château d'Ebbou, sur la rive droite de
l'Ardèche, commune et canton de Vallon, département de l'Ardèche,
France. — Altitude : 80 m. env. — Roche : Calcaires crétaciques. — Date :
10 janvier 1914.
Matériaux recueilKs par MM. Fage, Fagniez et Jeannel : Coléop-
tères, Diptères, Myriapodes, Aranéides, Ixodes, Isopodes, Champignons.
— Numéro .: 761.
619. Grotte du Saint-Trou.
Située à près de 3 km. du hameau du Broussan, commune d'Evenos,
canton d'Ollioules, département du Var, France. — Altitude : 400 m. env.
— Boche : Calcaires secondaires. — Date : 24 janvier 1913.
Matériaux : Orthoptères, Thysanoures, CoUemboles, Myriapodes,
Aranéides, Acariens, Isopodes, Mollusques, Oligoohètes. — Numéro : 764.
L'entrée, orientée au nord, donne accès à un couloir fortement des-
GROTTES VISITÉES 285
cendant qui au bout de 10 m. env. débouche dans une salle de 20 m. de
large sur 40 à 50 m. de long. La longueur totale atteint 60 m. env.
Pas de guano, mais des crottes isolées ; débris végétaux épars. C'est
principalement dans la salle du fond, qui est très humide, que se tiennent
les Troglobies. Sur les parois stalagmitées et humides se tient Speodiae-
tus galloprovincialis et le Tr échus Auberti n'est pas rare sous les nom-
breuses pierres qui reposent sur un sol argileux.
Les Troglophiles sont représentés par des Gryllomorphes, des Cy-
listicus décolorés, des Limaces.
Fagniez.
620. Grotte des Fées d'Hyères.
Située au quartier de Costebelle, commune et canton d'Hyères, dépar-
tement du Var, France. — Altitude : 220 m. env. — Roche : Calcaires
jurassiques. — Date : 26 janvier 1913.
Matériaux : Diptères, Myriapodes, Aranéides, Isopodes, Mollusques.
— Numéro : 765.
Cette grotte, d'une soixantaine de mètres de 'ongueur, est située à
1.500 m, de la gare d'Hyères. On traverse la Hgne du chemin de fer, on
suit la route de l'Ermitage sur 300 m., pour prendre ime route à droite
conduisant à une carrière qu'on longe en suivant un sentier grimpant
au sommet de la colline où se trouve, sur le versant sud-ouest, l'entrée
de la grotte. Un trou d'un mètre carré, à fleur de terre et profond de
2 m., donne accès à un couloir d'abord très étroit et à pente descendante
très rapide, qui débouche dans deux salles de médiocre étendue, très
inclinées et dont le fond est occupé par des éboulis.
La grotte est plutôt sèche. Débris végétaux nombreux et crottes
isolées un peu partout. Sous les pierres se tient le Trechus Raymondi
Del. (Col.) qui est rare, car il est activement pourchassé par les ento-
mologistes qui hivernent à Hyères.
Fagniez.
621. Cueva de las Grajas.
Située dans le cerro Gordo, entre Topares et Almaciles, termino muni-
cipal de Puebla de D. Fabrique, partido de Huescar, provincia de Gra-
286 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
nada, Espagne. — Altitude : 1.200 m. env. — Roche : Calcaires créta-
ciques. — Date : 28 avril 1913.
Matériaux : Coléoptères, — Numéro : 766.
C est une large grotte claire qui sert d'abri aux chèvres. Sa profondeur
est de 50 m. environ. Une large entrée au ras du sol donne accès à
une vaste salle descendant en pente rapide sous le versant du cerro
Gordo. Le plafond de la caverne est par suite peu épais ; une lucarne arti-
ficielle a été ouverte à gauche vers le fond. A droite s'amorce un petit
couloir obscur et très humide dont le sol est recouvert de terreau. Une
épaisse couche de cendres et de crottins de chèvre s'étend dans toute la
grotte.
De nombreux Sphodrides (Col.) se tenaient sous les pierres.
Breuil.
622. Source de Pedreguera.
Située dans le cerro Gordo, entre Topares et Almaciles, termino
municipal de Puebla de D. Fabrique, partido de Huescar, provincia
de Granada, Espagne. — Altitude : 1.000 m. env. — Roche : Calcaires
crétaciques. — Date : 28 avril 1913.
Matériaux : Trichoptères, Amphipodes. — Numéro : 767.
Cette source avait été aménagée à l'époque romaine. Au-dessus de la
source, un petit puits, profond de 6 m., donne accès à une chambre à
sol sableux et occupée par un lac assez profond. Un petit couloir à droite
et l'écoulement du lac vers la source avaient été murés jadis. Vers l'amont,
au delà de la nappe d'eau, s'ouvre, à gauche, une galerie inaccessible.
Des Crustacés aquatiques ont été recueillis dans le lac.
Breuel.
623. Cueva de Pepe.
Située en haut de l'oliveraie qui se trouve au-dessus de la gare de
Benaojan, termino municipal de Benaojan, partido de Ronda, provincia
de Malaga, Espagne. — Altitude : 500 m. env. — Roche : Calcaires juras-
siques. — Date : 9 janvier 1914.
Matériaux : Coléoptères, Aranéides. — Numéro : 768.
GROTTES VISITÉES 287
Trois orifices donnent accès à trois couloirs qui sont réunis par des
passages transversaux au bout d'une vingtaine de mètres. A gauche se
trouve un boyau qui se termine en cul-de-sac à une quarantaine de mètres
de l'entrée. A droite, une fente étroite donne accès à une salle arrondie où
s'amorce un petit couloir montant en pente très raide et dangereuse jus-
qu'à une cheminée. Le développement total de la grotte atteint 100 mètres.
Toute la grotte est sèche ; il existait seulement un peu d'humidité
en un point du boyau de gauche oîi quelques animaux ont été recueillis.
Cueva de! Gato. — Sur les pentes de la colline qui domine la gare de
Benaojan jaillissent plusieurs grosses résurgences qui vraisemblablement
ramènent au jour les eaux du rio de Martejaque, engouffrées dans une
grotte impénétrable. La cueva del Gato s'ouvre à l'une de ces résurgences,
non loin de la cueva de Pepe, dans la direction de Ronda. On remonte sous
terre le lit du torrent del Gato pendant une centaine de mètres jusqu'à
un lac qu'on peut, paraît-il, dépasser en saison sèche. A gauche, dans la
galerie parcourue par le torrent, s'ouvre un couloir ascendant, stalagmite,
mais sec. Il y existe des amas de guano sec, mais aucun animal n'y a été
recueilli.
Cueva del Suque. — Située près de Benaojan, sur ce termino muni-
cipal. C'est une vaste salle arrondie, d'une quinzaine de mètres de lar-
geur, à laquelle on accède par un petit aven qui débouche vers le miUeu
du plafond. Une échelle de corde de 8 mètres est nécessaire. Cette salle
est occupée par un cône d'éboulis recouvert d'un monceau infect de hardes
et de détritus jetés là en temps d'épidémie. Les bas côtés de la salle sont
stalagmites, humides ; la température y semble très basse. Toute faune
semble cependant y faire défaut.
Breuil.
624. Cueva del Argar.
Située à l'extrémité orientale d'une « llana » entre Vejer et Casas
Viejas, à 20 km. env. au nord-est de Vejer, termino municipal de Vejer
de la Frontera, partido de Chiclana de la Frontera, provincia de Cadiz,
Espagne. — Altitude : 300 m. env. — Roche : Calcaires éocènes et mio-
cènes. — Date : 24 janvier 1914.
Matériaux : Coléoptères, Trichoptères, Myriapodes, Aranéides, Aca-
riens, Isopodes. — Numéro : 769.
283 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
C'est une ancienne carrière. L'entrée étroite se trouve près de la
ligne de crête, dans une petite dépression. Elle donne accès à une série
de salles élevées, entièrement artificielles et communiquant avec l'ex-
térieur par de petits soupiraux. L'atmosphère, quoique agitée d'un léger
courant d'air, est froide et très humide ; il n'existe sur les parois ni
infiltrations, ni concrétions. Le sol est recouvert d'une couche assez
abondante de guano, avec des cadavres de Chauves-Souris et d'animaux
jetés par les soupiraux.
Sur le guano se tenaient en très grand nombre des Isopodes et des
Sphodrides (Col.), avec quelques iluhdes. Des Trichoptères voletaient sur
le guano sec.
Breuil.
625. Cueva del Cerro de la Pileta.
(Seconde exploration, voir Biospeologica XXXIII, p. 348)
Située dans la sierra de Libar, termino municipal de Benaojan,
partido de Ronda, provincia de Malaga, Espagne. — Altitude : 700 m.
env. — Roche : Calcaires jurassiques. — Date : 27 février 1914.
Matériaux : Coléoptères, Mjrriapodes, Aranéides. — Numéro : 770.
Quelques Sphodi'ides (Col.) se tenaient sous les pierres au pied de
l'échelle de descente, dans la partie éclairée. Plus loin, en bas du grand
puits oblique, j'ai'pu prendre après de longues recherches dans les éboulis
un exemplaire du Trechus Breuili Jeann. (Col.). La salle argileuse du
fond, où en 1912 j'avais découvert c&\Trechus et recueilli un Ceuthosphodrus
Ledereri Schauf. (Col.), était en février 1914 transformée en un lac.
Breuil.
626. Cueva de los Organos.
Située dans la sierra Camorra, à 12 km. à l'est de Fuentepiedra, ter-
mino municipal et partido de Antequera, provincia de Malaga, Espagne.
Altitude : 550 m. env. — Roche : Calcaires jurassiques. — Date : 28 février
1914.
Matériaux : Coléoptères, Copéognathes, Myriapodes, Aranéides,
Isopodes. — Numéro : 771.
Cette grotte est placée sur le termino municipal de Mollina par PuiQ
GROTTES VISITÉES 289
Y Larraz (1896. p. 209). Un petit aven, dans lequel un, escalier a été
taillé, donne accès en haut d'une vaste galerie, très haute de plafond,
longue de 350 m. env., mais divisée en deux parties par un passage très
rétréci vers le milieu de sa longueur. La première partie descend en pente
régulière ; le sol est sec, sauf dans un recoin, au fond et à gauche, où se
trouvent des suintements. La deuxième partie de la grotte, encombrée
d'éboulis, prend peu à peu la forme d'une profonde fente plongeant à
gauche et aboutissant vers le fond à un véritable gouffre. L'humidité
dans cette deuxième partie n'est pas plus grande que dans la première.
Quelques Sphodrides ont été recueillis à l'entrée de la deuxième
salle, sur du guano sec. Les recoins humides du fond de la première partie
de la grotte étaient habités par quelques Myriapodes et Isopodes.
Breuil.
627. Grotte d'Adelsberg.
Située à un quart d'heure de la ville, commune d'Adelsberg (Pos-
tojna), Bezirk Adelsberg, Provinz Krain, Autriche. — Altitude : 530 m.
— Roche : Calcaires crétaciques supérieurs. — Date : 25 avril 1914.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Orthoptères, Collemboles, Myria-
podes, Aranéides, Chernètes, Acariens, Isopodes, Amphipodes, Mollus-
ques, Champignons, Laboulbéniacées {sur A niisphodr ils). — Numéro : 772.
Matériaux recueiUis en juin 1914 par M. Haucke, de Planina : Coléop-
tères, Collemboles, Myriapodes, Isopodes. — Numéro : 772.
Le spéologiste bien connu G. A. Perko, directeur des ser\âces de la
grotte (Grotten-Sekretàr) nous a reçus de la plus amicale façon ; il nous
a accordé toutes autorisations utiles et nous a accompagnés deux fois
dans nos chasses aux Cavernicoles. Nous tenons à lui exprimer ici nos
sincères remerciements. Le matin du 24 avril, nous avons suivi par curio-
sité la « Gasttour », visite de touristes qui parcourt 4.300 m. L'après-
midi, avec M. Perko, nous avons chassé et mis des pièges dans deux
grottes latérales non visitées par les touristes, et le 25 avril, nous avons
continué nos chasses. Le 27 avril, nous avons inspecté nos pièges avec
M. Perko.
La grotte nommée « d'Adelsberg » par l'administration autrichienne,
mais qu'en réalité les gens du pays nomment « Postoinske jame », est l'œuvre
290 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
de la rivière Pivka et de ses affluents. Elle fait partie d'un complexe
de cavernes continues, dont la longueur totale serait, d'après Perko
(1910, p. 25), de 20 km. 5 explorés et 4 km. 5 inexplorés. Les galeries
supérieures, actuellement en voie de comblement stalagmitique, sont
merveilleusement incrustées et rares sont les régions à parois nues. Par
son étendue, son ornementation, la variété et l'intérêt spéologique de sa
structure, comme par la richesse de sa faune, c'est une des plus remar-
quables grottes du monde entier et l'on ne peut que faire des vœux pour
la réalisation du projet de création d'un musée et laboratoire interna-
tional de spéologie auprès de cette merveille du Domaine souterrain.
Nous allons nous borner à consigner ici les notes biologiques prises
pendant nos chasses ; on pourra utilement suivre nos explications sur les
plans publiés par Martel (1894), Kraus (1894) et Perko (1910).
Les galeries qu'on fait voir aux touristes sont pratiquement azoïques
et cela se conçoit facilement quand on a vu ce qui se passe dans ces régions
de la grotte. Non seulement des centaines de personnes y circulent jour-
nellement, et des milliers assistent aux fêtes d'été où les musiques font
rage et où des dizaines de tonneaux de bière sont mis en perce, mais l'amé-
nagement de la grotte rend nécessaires et permanents de considérables tra-
vaux qui sont la cause principale de la disparition des Troglobies. Le sol,
si important pour la vie de ces êtres, a été égalisé et asséché par d'énormes
masses de sable apportées du dehors. Toutes les excavations propices,
toutes les flaques d'eau, ont été noyées sous ce matériel «désertique».
Des équipes de balayeurs font la propreté des chemins et ramassent
soigneusement tous les déchets que jettent les touristes, déchets qui sont
si recherchés par les Cavernicoles. Le seul endroit où l'on rencontre de
rares animaux est celui occupé par les nombreux cabinets d'aisance.
Les Champignons ont poussé sur leurs parois en planches, et sur ces
Cryptogames se tiennent quelques Collemboles. Un Troglophilus y fut
capturé. En différents endroits détrempés de la galerie Kaiser-Ferdinand,
au pied et tout contre les parois, on observe une végétation abondante
ressemblant aux racines des arbres lorsqu'elles percent les parois des
grottes et se développent hbrement dans leur cavité. Ce sont des cordons
rhizomorphes qui commencent par une mince « radicelle » enfoncée dans
le sable, mais partant toujours d'un support Ugneux. La « radicelle »
s'épaissit au fur et à mesure qu'elle s'allonge à la surface du sable et donne
des rameaux. De place en place des crampons fixent au sol toute la végé-
tation ainsi formée. Tous les rameaux sont noirs, sauf 1" extrémité
GROTTES VISITÉES 291
bourgeonnante de l'axe principal qui est brunâtre. Nous n'avons pas
remarqué de plantes vertes autour des lampes électriques ; il est vrai
que l'éclairage est distribué en courts secteurs qui ne sont allumés que
pendant le passage de la caravane des touristes.
Il paraît qu'on voit de temps en temps des Chauves-Souris. Nous
n'en avons pas rencontré et elles doivent certainement être très rares.
Avant le sablage des chemins, il y avait quelques amas de guano. Actuel-
lement on n'en voit plus trace, et même des crottes éparses manquent.
Par contre, les Rats et Souris doivent être abondants d'après les traces
diverses que nous avons constaté.
Namenhalle. — C'est une galerie irrégulière, très incrustée, avec sol
argileux par place, de 200 m. de longueur. Température de Teau : 8o2 C. ;
thermomètre sec : 8^5 C. ; therm. hum. : S^S C. ; baromètre : 724 mm. ;
humidité : 97 % (sans corr. de press.).
Cette galerie est située très près de l'entrée et les touristes n'y pénè-
trent pas. Elle pourrait donc être affectée au futur laboratoire spéolo-
gique. Nous avons examiné avec M. Perko si les autres conditions
sont favorables à semblable destination. Notre enquête, quoique som-
maire, fut nettement négative. Nous avons constaté l'existence d'un
léger courant d'air. Il y a des suintements, mais encore trop de régions
sèches malgré l'époque favorable aux infiltrations. Sa température n'est
pas celle des parties profonde de la grotte et il y existe une différence
entre la température de l'eau et celle de l'air, ce qui indique que cette
galerie n'est pas soustraite complètement aux influences extérieures. De
plus, la faune n'est pas variée et est bien plus pauvre que dans les autres
régions non aménagées. Sur l'argile nous avons capturé des Antispho-
drus très décolorés et garnis de Laboulbéniacées. Un peu partout de rares
Brachydesmus et Collemboles. Les THanethes étaient, par contre, nom-
breux ; sur les bornes stalagmitiques du fond leurs crottes formaient
un revêtement continu, comme on l'observe dans le Baoumo dou Cat
(BiosPEOLOGiCA XVI, p. 72) pour les crottes de Trichoniscus {Alpionis-
cus) disper&us Racov. Ces deux Isopodes ont d'ailleurs des mœurs très
semblables.
Erzherzog-Johann Grotte. — C'est cette galerie, non aménagée, qui
devait être affectée au laboratoire international. Le seul inconvénient,
et il est minime, c'est la distance de l'entrée : 1.300 m. env. Mais en
revanche on ne peut souhaiter un laboratoire souterrain plus parfait.
Ses dimensions sont respectables : 770 m. env. ; de nombreux petits
292 B. JEANNEL ET E.-G. EACOVITZA
diverticules pourraient aisément constituer des sections spéciales. Presque
toute la galerie est incrustée, et considérable est la variété des incrus-
tations : coulées, massifs, rideaux, draperies, piliers, bornes avec toute
la gamme des petites formations. Le sol est soit incrusté, soit argileux. L'hu-
midité y est considérable ; les suintements par place si abondants qu'il
serait facile d'en capter pour avoir de l'eau pour des aquariums. Nombreuses
sont les flaques d'eau de toutes dimensions. Les régions plus sèches ne
manquent pas cependant. La température de l'eau est de : T^Q C. et celle
de l'air également de 7^9 C, ce qui indique un parfait équilibre thermique
et une atmosphère calme ; nous n'avons d'ailleurs constaté aucun cou-
rant d'air. A ces conditions d'existence parfaites correspond naturel-
lement une faune aussi riche que variée.
Le fond de la grotte montre les signes évidents d'un bouleversement
catastrophique. Toutes les colonnes sont fendues, beaucoup sont ren-
versées, des stalactites de plafond gisent à terre. Le bouleversement
n'est pas récent, car sur les masses effondrées de puissantes stalagmites
se sont formées et, d'autre part, il semble qu'une seule catastrophe eut
heu et non plusieurs séparées par de longs intervalles. La cause doit en
être cherchée dans un tassement local et non dans un séisme généralisé.
La nourriture est abondante car partout gisent planches, fragments
ligneux, vieux pièges, chiffons, papiers, etc. Le carton est curieusement
rongé ; seules les fibres fines ont été dévorées, aussi ne reste-t-il qu'une
trame de gros filaments. Ce minutieux travail a dû être effectué par les
Trichoniscides.
Les Stenopelmatides (Orth.) cavernicoles se tiennent à l'entrée des
grottes. Il n'en est pas de même pour les Troglophilus que nous avons
trouvés cachés dans les encoignures jusqu'au fond de la galerie. Les taches
claires qui ornent leurs cuisses sont dues aux insertions musculaires. Ce fait
est d'ailleurs général, le pigment ne pouvant se déposer dans les régions
que la traction exercée par les muscles a tranformées plus ou moins en
« tendons ». Troglophilus est beaucoup moins « sensible » et vif que les
Sténopelmatides pyrénéens.
Malgré la chasse active qu'on lui a faite, Leptodirus Hohenwarti
ScHMiDT (Col.) est encore commun. Comme tous les Silphides, il vient
sur les appâts, mais il n'y reste pas après avoir satisfait son appétit. On le
voit, bedonnant et balourd, grimper lentement, en oscillant, sur les parois
stalagmitiques ; la pointe de son abdomen traîne par terre. La chaleur de la
bougie et même celle de la main lui sont très désagréables et il cherche, sans
GROTTES VISITÉES 293
beaucoup de succès d'ailleurs, à mettre plus de vitesse dans son allure,
mais il ne fait pas le mort et ne se laisse pas tomber volontairement ; la
fuite paraît être son seul moyen de défense. Mais il sait si bien se cacher
dans les petits trous que c'est pur hasard de l'y dénicher. Pour constater
sa présence dans une grotte, il faut nécessairement employer l'appât,
car autrement on risque fort, malgré son abondance éventuelle, de ne pas
rencontrer un seul exemplaire : c'est un casanier invétéré.
Un Antisphodrus (Col.) fut aussi capturé sur un piège ; mais il est rare
dans les régions profondes.
Les grandes Phora (Dipt.) sont communes ; elles viennent en nombre
sur les appâts. Elles ne volent ni ne sautent, mais courent sur le sol avec
une remarquable vélocité.
On trouve les Stalita (Aran.) sous les pierres, mais on les rencontre
aussi chassant sur les stalagmites. Les petites et moyennes capturent
certainement les gros Anurides ; les grosses sont de taille à s'attaquer à
tous les autres habitants,, mais nous n'avons pas pu le constater. Il est
certain que les Stalita ne tissent pas de toiles et ne possèdent pas de
demeure permanente.
Les très gros Lipura itillicidi (Sch.) (Anurides) se rencontrent par
tout, mais principalement autour des flaques d'eau et même agglomérés
à la surface de l'eau. Il se peut que cette dernière station ne soit pas
choisie volontairement par l'animal. A plusieurs reprises nous avons
vu des Lipura rassemblés^au bord des flaques (et cette station paraît
bien être volontaire), être projetés à la surface de l'eau par les gouttes de
suintement tombant du plafond. Une fois tombés à l'eau, ils sont agglo-
mérés par la tension capillaire provoquée par leur poids et leurs mouve-
ments, et forment de petits radeaux qui ne peuvent plus aborder étant
toujours repoussés par cette tension.
Ces Lipura sont exploités activement par les Blothrus (Chernètes)
qui, d'ailleurs, doivent s'attaquer aussi à d'autres proies plus considé-
rables. Ce sont des animaux vifs et rageurs, explorant inlassablement les
parois incrustées. Courageusement ils font face au danger ; verticalement
dressés sur leurs longues pattes, ils font des gestes violents et commi-
natoires avec leurs pinces démesurées.
Les plus communs des gros Troglobies sont certainement les Tiianethes
(Isopodes). Partout oîi il y a quelque chose à ronger on les trouve assem-
blés, jeunes ou vieux. A un vieux sac détrempé besognaient des centaines,
rassemblés en une masse grouillante. De leurs mœurs, nous ne citerons
29) R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
que ce trait, qui semblera extraordinaire aux éthologistes en chambre
qui ne jurent que par l'expérience et qui méprisent l'observation dans la
nature, mais qui ne provoquera aucune émotion chez les biospsologistes
qui fréquentent les grottes : nous avons trouvé plusieurs Ti{an?{hes
au repos, sur le fond de flaques d'eau ayant jusqu'à 50 cm. de profon-
deur ; nous en avons vus qui délibérément franchissaient les flaques
d'eau profondes en courant sur le fond ; ils passaient de l'air à l'eau sans
paraître s'apercevoir du changement, tant leur attitude et comporte-
ment étaient invariables lors du passage du bord encore émergé, dans l'eau
et de l'eau, au bord opposé. Peyerimhoff {cf Jeannel et Racovitza
1910, p. 535) a observé des mœurs semblables chez un Trichoniscide
de rifri Maareb, en Algérie. Or, il paraît qu'un expérimentateur notoire
parvint, à l'aide d'installations compliquées et après avoir dépensé des
trésors de patience et d'ingéniosité, à faire vivre pendant quelque temps
le Titanethes d'Adelsberg, cet Isopode que la classification qualifie de
terrestre, complètement immergé ! Nous nous promettons une agréable
distraction de la lecture du mémoire relatant cette décisive expéri-
mentation.
Sur les autres très nombreux Troglobies capturés, nous reviendrons
dans la description des autres grottes de la région.
Jeannel et Racovitza.
628. Grotte de Luegg.
Située sous le château de Luegg (Predjama), commune de Bukovje,
Bezirk Adelsberg (Postojna), Provinz Krain, Autriche. — Altitude :
507 m. — Roche : Calcaires crétaciques. — Date : 26 avril 1914.
Matériaux : Chéiroptères, Coléoptères, Diptères, Orthoptères, Thysa-
noures, Collemboles, Myriapodes, Aranéides, Opilionides, Ixodes, Iso-
podes, Amphipodes, Mollusques, Oligochètes, Champignons, Laboul-
béniacées (sur Trichoniscides) ; Parasites des Chéiroptères :
Pupipares sur Chéiroptères 773 a, h, c et d, Acariens sur Chéiroptères
773 a, b, cetd. — Numéro : 773.
Matériaux recueilUs en juin 1914 par M. Hafcke, de Planina : Coléop-
tères. — Numéro : 773.
Contre la haute falaise crétacique de Luegg (ou mieux « Predjama »,
GROTTES VISITEES 295
nom local) s'appuie une plaine ondulée de flish éocène imperméable.
Le ruisseau Lovka, qui draine une partie de la plaine, se perd actuelle-
ment au pied de la falaise dans une grotte qui n'est accessible que sur
une faible parcours. Mais antérieurement la Lovka abordait la falaise
à des niveaux bien supérieurs et ses anciens lits souterrains sont facile-
ment accessibles. Nous n'avons visité que la « grande grotte » dont on trou-
vera une description détaillée avec plan et coupe dans Schmidl (1854,
p. 1 19-123, pi. VII). Nous tenons à remercier M. FOberfôrster Seif qui nous
a donné les autorisations nécessaires pour cette visite et qui nous a pro-
curé un guide.
Notons que si le complexe des grottes d'Adelsberg est l'œuvre de
la Pivka qui appartient au bassin du Danube, la Lovka réapparaîtrait
à 15 km. de sa perte, à Wippach, et ferait partie du bassin de l'Isonzo
adriatique. Mais la démonstration de cette vue théorique n'a pas été
encore fournie.
La « grande grotte » est formée par une galerie presque rectiligne
et presque horizontale, très haute de plafond par places, à parois arrondies
et polies par les eaux courantes, à section transversale de tunnel régulier.
A sa jonction avec les galeries supérieures, des effondrements ont provoqué
la formation de salles plus vastes. Nous avons suivi la galerie sur env.
1.300 m., jusqu'au trou-à-vent, au delà duquel s'étend, paraît-il, une
autre galerie. La région visitée est un lit typique de rivière souterraine
n'offrant rien de spécial ni de remarquable. Les incrustations sont rares
et très localisées ; à 500 m. de Feutrée, de belles bornes, ayant plusieurs
mètres de hauteur, forment des massifs pourvus de petits bassins qui
reçoivent des petits filets d'eau tombant du plafond. Le sol est argileux
partout ; l'argile forme souvent des bancs épais.
Schmidl (1854, p. 174) trouva au fond de la grande grotte, le 24 août
1852 : 7^6 R., soit: 9*>5 C. Au même endroit nous avons trouvé : eau :
5^6 C. ; thermomètre sec : 6^3 C. ; therm. hum. : 6^3 C. ; baromètre :
724, 6 mm. : humidité 100 %.
Un courant d'air sensible règne jusqu'au débouché de la galerie supé-
rieure, courant qui s'atténue et disparaît vers le milieu. Au fond, nous
avons déjà signalé le trou-à-vent dont l'action ne s'étend pas très loin.
Dans la partie éclairée de l'entrée nichent des Columba livia L. et leur
guano couvre le sol. Dans les régions plus obscures nous avons trouvé un
petit Rhinolophe et des Minioptères accrochés par leurs quatre membres
au plafond ;un cadavre momifié de ces Chauves-Souris demeurait accroché
296 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
de la même façon. Sur le sol des amas de guano frais et ancien, exploités
par des Sphodrides, et des Lithobies ; un Eschatocephalus (Ixode)
gorgé de sang, se promenait par terre. Sur les parois, de très rares Némo-
cères, mais pas de Noctuelles ; de gros Épeirides tissent leurs grandes
toiles, tandis que de petits Troglophilus (Orth.) se cachent dans les fentes.
Un peu plus loin, l'obscurité augmente et sur le sol argileux mêlé de guano
apparaissent les Trichoniscides, Titanèthes, Lithobies, Sphodrides, etc.
Au voisinage, mais au delà du passage étroit, dans un banc d'argile très
pure et complètement détrempée, Trechus Schmidii Sturm voisine avec
Titaneihes, Trichoniscides et Lithobies.
Dans le reste de la grotte, nombreux débris ligneux et nombreux Tro-
globies jusqu'au fond, mais les territoires peuplés sont séparés par de
vastes espaces déserts. Les environs des massifs stalagmitiques pourvus
de bassins aquifères sont tous très fréquentés, mais nous n'avons rien
trouvé sur les bornes. Très nombreux sont les Titanèthes, Trichoniscides,
Phorides, Brachydesmides, Collemboles. Les flaques d'eau sont habitées
par des Niphargus. Trechus Biliîneki Sturm fut trouvé sous des planches
pourries. Dans une grande flaque d'eau, un chevelu de cordons rhizo-
morphes poussant vigoureusement' à partir d'un morceau de bois où
ils prenaient leur origine. Un verre à boire enterré, vieux piège oublié,
contenait deux cadavres de Leptodirus Hohenwarti Schmidt, de nombreux
Titanèthes et un Bathyscimorphus vivant. Pourtant de nombreux Lep-
todirus furent capturés en juin par Haucke et cela conformément aux pré-
visions qu'il nous exposa en avril. Les rondins de bois non écorcés pa-
raissent attirer de préférence les Titanèthes. Les Campodéides de cette
grotte perdent les antennes aussi facilement que d'habitude, mais les
cerques sont plus solides.
Jeannel et Racovitza.
629. Crna jama.
(FIO. 29)
Située sur le plateau de Gora, à 4 km. env. au N. d'Adelsberg, com-
mune d'Adelsberg (Postojna), Bezirk Adelsberg, Provinz Krain, Autriche.
— Altitude : 550 m. env. — Roche : Calcaires du crétacique supérieur. —
Date : 27 avril 1914.
Matériaux : Poissons, Coléoptères, Diptères, Sialides, Ephémérides,
Orthoptères, Thysanoures, CoUemboles, Myriapodes, Aranéides, Opi-
GROTTES VISITEES - 297
lionides, Acariens, Décapodes, Isopodes, Amphipodes, Copépodes, Hiru-
dinés, Oligochètes, Planaires, Nématodes, Algues. — Numéro : 774.
Matériaux recueillis en mai 1914 par M. Hatjcke de Planina: Col'O-
ptères. Diptères, Myriapodes, Chernètes. — Numéro : 774.
Nous avons visité cette grotte une première fois le 27 avril en y lais-
sant des pièges ; nous y sommes retournés en compagnie de M. Brandt,
professeur au lycée de Munich, le 4 mai. Tout notre temjDS a été consacré
à recueillir la faune et nous avons prêté peu d'attention à la structure
de la caverne, la croyant très bien connue, car, d'accès facile, elle fut sou-
vent visitée par les spéologistes. Pourtant la comparaison de nos notes
avec les descriptions publiées nous a prouvé qu'il reste encore beaucoup
à faire au point de vue spéophysique. Le plan publié par Schmidl (1854)
est par trop schématique et la grotte est si intéressante à tous les points
de vues qu'un levé détaillé serait fort utile ; nous sommes d'ailleurs
convaincus que ceux qui entreprendraient ce travail trouveraient leur
récompense dans d'importantes découvertes topographiques.
Pour abréger la description, nous avons établi un plan d'après les
travaux de Schmidl (1854, p. 106-110), Martel (1894, p. 449-450)
et Kraus (1894), plan qui ne doit être considéré que comme un croquis
très schématique.
Pour pénétrer dans la grotte, il faut d'abord descendre au fond d'une
grande doline à parois inclinées, sauf au sud oti une falaise verticale la
limite. L'entrée, grande voûte surbaissée, est au pied de la falaise. Dès
qu'on l'a dépassée, on se trouve sur une plate-forme, sommet d'un vaste
cône d'éboulis. En face, au sud, on a le « dôme », immense salle sèche,
incrustée, incomplètement obscure. A droite, on descend fortement par
« la galerie de droite », très incrustée, qui tourne au nord, puis devient
horizontale, tandis que les incrustations disparaissent et que l'argile en bancs
épais envahit tout. La galerie tourne ensuite au sud et l'on se trouve arrêté
à la rive nord d'une nappe d'eau pérenne, (c le lac de jonction ».
A gauche de l'entrée, on descend également le cône d'éboulis pour par-
courir la « galerie de gauche » qui tourne au nord, est sensiblement horizon-
tale, complètement argileuse, d'abord double, avec un des couloirs barré par
le grand « lac clair », et qui se termine à la rive sud du <( lac de jonction ».
La grotte actuellement explorée est donc formée par une galerie
unique, annulaire, pourvue de quelques diverticules. Schmidl lui donne
environ 500 m. d'étendue, mais M. Perko estime que sa longueur dépasse
29S
B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
3-^
800 m. n est d'autre part certain qu'actuellement c'est une dérivation de
la Pivka, un trop-plein qui fonctionne dès que la crue de cette rivière atteint
un certain niveau. Kraus et Martel ont vu sourdre à l'entrée de la « ga-
^. lerie de gauche », à travers les
l»î éboulis, « une rivière entière »,
après plusieurs journées de fortes
pluies. Cette rivière parcourt cer-
tainement toutes les galeries basses
dans le sens qu'indiquent les flè-
ches ailées du plan. Martel et
Kraus pensent qu'elle s'écoule
par les deux diverticules ouest, ce
qui est fort probable, mais non
expérimentalement démontré ;
quoiqu'il en soit, la région déli-
mitée par les flèches ailées est un
Ut typique de rivière souterraine
non torrentielle, car la nature et
la disposition des sédiments,
comme l'aspect de la galerie, dé-
notent seulement le travail d'un
écoulement tranquille et lent.
La crue, en disparaissant, laisse
sur le sol de nombreux bassins
aquifères dont quatre de la « gale-
rie de gauche » sont importants et
permanents. Il va sans dire que
leur étendue varie ; sur la carte
de ScHMiDL ils représentent pro-
bablement le stade de contrac-
FlG. 29. Croquis schématique de la Crna jama (n» 629) . . 1^4-
d'après Schmidl et les observations de Kkaus et tlOn maXimum, Cai lOFS (16 nOtrC
Martel, avec nos annotations ; longueur totale : • -j. m x i.* _i
800 mètres environ. visite ils nous Ont paru bien plus
considérables.
La région incrustée de la « galerie de droite » est assez sèche ; les suin-
tements sont assez rares ; partout gisent des débris Kgneux variés, mais
pas très humides. La faune est pauvre. Un seul Leptodirus Hohenwarti
ScHMiDT est venu sur nos pièges,mais Haucke qui nous avait d'ailleurs
ssauré que cette espèce et Aphaobius Milleri Schmidt étaient communs
OROTTES VISITEES 299
en d'autres saisons, les a recueillis en nombre fin mai 1914, c'est-à-dire
un mois plus tard. Les autres Troglobies habituels du pays sont très rares.
La région argileuse qui fait suite est plus habitée ; Titanethes et Phora y
sont très communs ainsi que Bracliydesmus.
La grande mare à fond d'argile fine, profonde de 1 à 2 m., qu'on ren-
contre ensuite, contenait de nombreux Troglocharis, ce qui lui a valu le
nom inscrit sur la carte. Ces beaux Crustacés se comportent comme les
Palaemons ; même attitude en nageant ou au repos, même saut en arrière
quand leurs longues antemies leur signalent un danger. Seulement ils
sont beaucoup moins vifs que les Crevettes épigées, et moins sensibles. On
les prend facilement à la main en ayant soin de ne pas agiter l'eau. De
gros Asellus leur tiennent compagnie, animaux également lents qui se
tiennent de préférence sous les pierres. Les Nijjhargus sont rares.
Le « lac de jonction » est difficile à explorer sans canot. Schmidl décrit
deux couloirs qui permettent de passer dans la moitié du lac à laquelle
aboutit la « galerie de gauche ». Du bord, nous avons péché quelques
Asellus, des Nij)h%rgus, de petits Entomostracés, une larve de Diptèi-e
transparente et nous avons vu un Poisson oculé de 5 à 6 cm., mais pas
un seul Troglocharis.
Dans la « galerie de gauche », le premier bassin qu'on rencontre est
en même temps le plus grand de la grotte. Nous l'avons nommé « lac
clair » parce qu'on aperçoit la lumière du jour même de son extrémité
nord. Nous y avons d'ailleurs péché des algues vertes. La faune y est
très riche mais formée en majeure partie d'animaux épigés. Il doit rece-
voir, en effet, les ruissellements superficiels que les pluies provoquent
dans la dohne, et qui, par l'entrée, se déversent sur le cône d'éboulis,
entraînant les feuilles, l'humus et les débris ligneux qui garnissent son
fond et les animaux épigés qui le peuplent. Les bords sont vaseux et
l'eau est moins claire que celle des autres lacs. Des bandes de petits
poissons oculés, mais peu pigmentés, exploitent la grande quantité
d' Entomostracés, d'Hydrachnides, de larves de Diptères et autres petits
animaux qu'on y observe. De rares Aselles troglobies se mêlent aux
Aselles épigég et l'on trouve côte à côte des Planaires blanches et d'autres
colorées. Les Hirudinés y sont communs. Le 27 avril, près de la rive
nord, les animaux grouillaient comme dans une mare épigée très peuplée,,
mais le 4 mai cette rive était presque déserte ; nous ne nous expliquons
pas la raison de ce changement.
Plus loin, le sol est occupé par de petites flaques d'eau où abondent les
Arch. de Zool. Exp. et GÉS. — T. 57. — F. 3. -0
300 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Planaires blanches. Elles accourent quand on immerge un appât ; elles
rampent ou reposent étalées sur le fond, ou bien nagent renversées sur le
dos, la face ventrale au niveau même de la surface de l'eau pour profiter
de l'appui que leur offre la tension superficielle. U Asellus troglobie
fréquente les mêmes mares, ainsi que les Hirudinés. On ne voit jamais
nager l'Aselle, quelques inquiétudes qu'on lui inspire. On le trouve aussi
80US les pierres reposant sur l'argile humide, assez loin de l'eau, en com-
pagnie de Trechus {Anophthalmus) spectahilis Joseph.
Le bord sud du lac de jonction héberge la faune déjà signalée à l'autre
extrémité. L'absence du Trogloclmris a été constatée de nouveau.
Un petit couloir latéral fortement descendant, s'ouvrant dans la
paroi de gauche de la «galerie de gauche», conduit dans une petite chambre
argileuse occupée par le « lac des Protées ». Le niveau de ce lac semble
être plus bas que celui des trois lacs déjà mentionnés ; il doit représenter
le niveau de la Pivka à l'étiage. Une communication directe et facile doit
exister avec cette rivière et, en temps de crue, l'eau doit jaillir par le
couloir, fonctionnant comme évent supplémentaire, pour contribuer
à former le courant qui parcourt les galeries. L'un de nous a vu en effet
trois Protées qui, effrayés, ont disparu sous la paroi nord, rocheuse, du lac.
D'ailleurs, les nombreux débris de haveneaux épars sur le fond montrent
que c'est dans ce lac que les chasseurs de Protées opèrent. On nous a
assuré que des Protées se rencontrent dans les autres lacs seulement
après les fortes crues ; mais une fois ces exemplaires capturés, il n'en peut
plus venir jusqu'à la crue suivante ; dans le lac des Protées on les
trouve en permanence. Il est donc légitime de conclure que les grands
lacs ont une cuvette étanche et que ce sont de simples résidus de crues,
mais que le lac des Protées est un évent direct de la Pivka.
L'atmosphère de la grotte n'est pas calme ; on perçoit un courant
très net, surtout dans la galerie de droite, où il circule du « lac de jonc-
tion » vers la sortie.
Au « lac de jonction », température de l'eau : &^\ C. (Schmidl trouva
le 16 septembre 1850 : 509 R., soit 7038 C.) ; thermomètre sec : 5^6 C. ;
therm. hum. : 5P\ C. ; baromètre : 724,6 mm. ; humidité : 93 % (sans
corr. de press.). Schmidl donne : 5^6 R., soit 7° C, pour la température de
l'air. Il constate donc également que la température de Teau est supé-
rieure à celle de l'air, anomalie que nous signalons sans hasarder une
explication.
Jeannel et Racovitza.
GROTTES VISITÉES 301
630. Mrzla jama.
Située à 2 km. au sud du village, commune de Blaska Poliza, Bezirk
Loitsch (Logatec), Provinz Krain, Autriche, — Altitude : 675 m. — Roche :
Calcaires triasiques supérieurs. — Date : 28 avril 1914.
Matériaux : Chéiroptères, Coléoptères, Orthoptères, Collemboles,
Myriapodes, Aranéides, Opilionides, Acariens, Isopodes, Amphipodes,
Copépodes, Mollusques, Oligochètes, Champignons ; Parasites des
Chéiroptères : Ixodes sur Cheiroptère 775, Acariens sur Cheiroptère 775.
— Numéro : 775.
Matériaux recueillis en juin 1914 par M. Haucke, de Planina: Coléop-
tères, Collemboles, Myriapodes, Aranéides, Chernètes, Mollusques,
Champignons. — Numéro : 775.
On trouvera la description détaillée de cette belle et intéressante
grotte dans Hochstetter (1881). Pour situer nos observations fau-
niques, nous renvoyons au plan qui accompagne ce mémoire, plan qui
nous a semblé très exact mais incomplet dans certaines parties. Il y a
encore des découvertes topographiques à faire dans cette grotte et les
1.650 m. levés par les collaborateurs de Hochstetter seront notable-
ment dépassés.
Mme Siever, MIVI. Perko, Haucke et Siever nous ont accompagnés et
aidés à recueillir la faune de la grotte.
Un courant d'air froid sort de la grotte, mais l'atmosphère est pra-
tiquement calme à partir du « grand dôme ». Hochstetter a trouvé
l'eau stagnante de la « galerie F » à 6° C. et la rivière à 9° C. Nous avons
trouvé dans le « Szombathy Gang » voisin : 5^6 C. pour l'air comme pour
l'eau stagnante.
Jusqu'au « Zôrrer Dom », le vaste vestibule est clair, sec, encombré
d'éboulis et semble bien fournir un gîte approprié pour les Noctuelles,
Némocères et Trichoptères troglophiles. Pourtant nous n'avons rencontré
aucun de ces animaux.
Le couloir de la « Perucke » et la « Schultz-Spalte » situés non loin de
l'entrée sont très incrustés, mais peu humides, et incomplètement obscurs.
De très nombreux Troglophilus (Orth.) de toutes tailles se groupent dans
les fentes, tandis que les Opilionides se tiennent isolés sur les parois.
Dans la « Kittl's Bârenhôhle », un des pomts les plus hauts de la
grotte, du guano ancien est éparpillé et est activement exploité par des
302 i?. JE ANNEE ET E.-G. BACOVITZA
nuées de Collemboles variés et de nombreux Brachydesmus. Quelques
flaques d'eau hébergent de petits Niphargues. Sur la grande coulée
stalagmitique furent capturés quelques Anophth aimes.
Dans le grand Dôme et ses environs, l'humidité est considérable et
de vastes bancs argileux occupent le sol, alternant avec des régions
incrustées et des gours. C'est dans ces parages que les Troglobies habi-
tuels du pays sont assez communs. Les couloirs des « Gothische Portale »
sont fréquentés par les Trechus Bilimeki et les Bathyscimorphus.
Dans la « galerie F », nous avons capturé trois petits Rhinolophes,
mais les gours pleins d'eau qui occupent le sol de cette galerie ne nous ont
rien fourni.
HocHSTETTER a signalé dans un diverticule du « Szombathy Gang >■>
la présence du Carichium Frauenfeldi Freyer. Nous avons retrouvé ce
petit Gastéropode, 35 ans après, exactement à l'endi'oit indiqué sur la
carte. Plus de la moitié des exemplaires étaient vides. Trechus Bilimeki
vit dans les mêmes parages.
La « Deschmann's Halle » ne nous a fourni que quelques Titanèthes.
Toute la « Bàrengrotte » s'est montrée très pauvre, mais tous les Tro-
globies s'y rencontrent. Le lac « Tiberias » nous a semblé azoïque.
Sauf quelques Niphargus de petite taille, nous n'avons pas vu d'autres
animaux dans le grand lac terminal. Il est vrai que cette vaste nappe
d'eau ne peut être utilement explorée qu'avec des pièges et en canot.
La galerie H est fréquentée par les Chauves-Souris grégaires à en
juger par le guano accumulé, mais peu habitée par les Troglophiles. Dans
une flaque située au sommet de la coulée qui encombre cette galerie,
nous avons trouvé de gros Oligochètes à moitié enfoncés dans l'argile
claire qui tapissait le fond.
Les visiteurs apportent des brassées de branches de sapin qu'ils
sèment dans la grotte pour retrouver leur chemin. Ces branches sont
envahies par les moisissures, mais rongées aussi par les Brachydesmus.
Jeannel et Racovitza.
631. Volcja jama.
Située sur le plateau oriental du Nanos, à 8 km. env. au N.-O. du
village, commune deSankt Michael, Bezirk Adelsberg(?), Provinz Krain,
Autriche. — Altitude : 1.075 m. env. — Roche : Calcaires crétaciques. —
Date : 29 avril 1914.
GROTTES VISITÉES 303
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Myriapodes, Opilionides, Chernètes,
Acariens. — Numéro : IIQ.
Matériaux (sous les pierres près de l'entrée) : ColéoxDtères,
Diptères, Myriapodes, Mollusques. — Numéro : 776 A,
Matériaux recueillis en juin 1914 par M. Haucke, de Planina : Cher-
nètes. — Numéro : 776.
Cette grotte, dont les dimensions ne dépassent pas 200 m. en longueur,
est célèbre parmi les entomologistes pour les Coléoptères troglobies qu'elle
héberge. Elle n'offre rien autre de remarquable et peut être qualifiée de
« vilain trou » au point de vue touristique. Joseph (1882, p. 41) en donne
une description un peu dramatisée.
De Sankt-Michael (ait. 600 m.) il nous a fallu 2 heures 15 pour arrive
à cette grotte (ait. 1.075 m. env. ; Joseph donne 1.109 m.). Elle s'ouvre
dans le flanc et à mi-hauteur d'un grand entonnoir carstique parfaite-
ment régulier. L'orifice en forme de voûte basse était encore encombré
de neige. Le couloir qui fait suite est clair, sec et encombré d'éboulis.
Puis l'on descend dans un couloir très fortement incliné et encombré d'é-
normes rochers. Dans cette région plus humide et obscure, se tiennent les
Astagobius angustatus Schmidt qui viennent volontiers sur les appâts.
Un gouffre profond de 15 m. env, barre le passage, mais un couloir laté-
ral, avec quelques incrustations et à sol couvert de petits éboulis, permet
d'aborder le gouffre par son autre bord. En rampant, en effet, dans une
fente on parvient à un point où le fond du gouffre n'est qu'à 5 m. env.
C'est là, paraît-il, que vivent les Trechus ( Anophthalmus) Severi Gangl.
dans l'argile détrempée en partie recouverte d'éboulis. Nous n'avons
trouvé dans ce gouffre qu'un Bloihrus.
M. Haucke a trouvé en juin Leptodirus Hohenwarti Schmidt assez
commun ; malgré la pose d'appâts, nous n'avions pas trouvé, en avril,
un seul exemplaire de cette espèce.
Notre récolte dans le reste de la grotte fut également maigre. Jo-
seph publie une longue liste d'animaux qu'il y aurait capturé ; nous pro-
fessons un certain scepticisme au sujet des exploits cynégétiques de ce
biospéologiste. Comment d'ailleurs aurait-il fait pour capturer Mono-
listra coeca dans une grotte où manquent complètement les bassins
aquifères et même les traces discernables d'inondations périodiques.
La Volcja jama est en réalité un aven avec paliers superposés pro-
duit par des effondrements multiples.
304 7?. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Dans la galerie de gauche, thermomètre sec : 2^8 C. ; therm. hum.
208 C. ; baromètre : 678,1 mm. ; humidité : 100 %.
Jeannel et Racovitza.
632. Lucova jama.
(Fm. 30)
Située à 1 km. au S. de Sdihovo (Ober Skrill), commune de Mozelj
(Ober Môsel), Bezirk Gottschee, Provinz Krain, Autriche. — Altitude :
505 m. env. — Roche : Calcaires triasiques. — Date : 1^^" mai 1914.
Matériaux : Coléoptères, Lépidoptères, Orthoptères, Thysanoures,
Collemboles, Myriapodes, Aranéides, Palpigrades, Isopodes, Amphi-
podes, Champignons. — Numéro : 777.
La lecture du récit dramatique de Joseph (1882, p. 52-53) sur les
dangers qu'on doit affronter pour arriver à cette grotte fit que ce n'est
pas sans une certaine émotion que nous nous hasardâmes à la visiter.
Nous fûmes agréablement surpris de constater que le récit de ce spéolo-
giste était purement imaginaire et que l'accès de Lucova jama est très
facile et ne présente pas le moindre danger.
De Kocevje (Gottschee) à Morava (Mrauen) il faut compter 2 heures
de voiture ; de Morava à Sdihovo (Ober Skrill), 1 heure à pied ; de ce
village à la grotte, 15 minutes. Inutile de se renseigner auprès des villa-
geois sur « God jama », nom employé par Joseph, ou sur « Jagdloch, »
nom qu'emploient les spéologistes de langue allemande. Personne ne vous
comprendra. La grotte en effet se nomme Lucova jama.
Elle s'ouvre près du sommet d'une falaise, que la carte autrichienne
désigne comme Mauersteinwand, et qui forme la rive gauche d'une petit
affluent de la Kulpa. Entrée vaste, suivie d'un couloir clair où de gros
Aranéides tissent leurs toiles, tandis que dans les fentes se tiennent de
très nombreux Troglophilus de toutes tailles. Ces Orthoptères se laissent
prendre à la main et n'autotomisent que très difficilement leurs pattes
postérieures. Leur lourdeur et leur peu de sensibilité frappera tous ceux
qui ont pu constater l'extrême vivacité des Sténopelmatides pyrénéens.
Sous les pierres, des Trichoniscides oculés et colorés, mais aussi de grands
Collemboles sauteurs blancs. Deux Noctuelles attaquées par les Cham-
pignons gisaient sur le sol.
Le couloir qui fait suite est plus humide. De l'argile d'abord noire
GROTTES VISITÉES
305
couvre le sol, mais graduellement les impuretés humiques disparaissent
et l'on arrive à une région à patois toujours nues, mais à sol d'argile pure
et détrempée. Dans une flaque d'eau nagent de nombreux Niphargus.
Après un ressaut de 3 m., on pénètre dans une région incrustée.
Sur une coulée de stalagmite impure, garnie de gours vides, du guano
est éparpillé. C'est
l'endroit le plus
riche en Troglo-
bies. Nous avons
capturé un Kaene-
nia, de nombreux
Collemboles {Tri-
tomurus et autres
sauteurs), des Li-
thobius décolorés,
des Campodea à
cerques très allon-
gés, des Titanè-
thes, une Stalite et
un Brachydesmus.
(K) •■ ^ot^t*via^ .
oloJCiux-
♦ '• (À u M, d n o
L'nTret-
FiG. 30. Croquis schématique de la Lucova jama (n» 632) ; longueur totale :
200 mètres environ.
Les Coléoptères sont variés, mais rares ; Bathyscia, Leptodifus Hohen-
ivarti ScHMiDT, Trechus Bilimeki Sturm et Parapropus sericeus Schmidt.
Ces derniers sont très agiles et se laissent brusquement tomber lorsqu'on
les inquiète.
La grotte se termine à 200 m. env. de l'entrée par un couloir ascen-
dant, dans lequel nous avons trouvé Stalita, Parapropus et Titanethes
sur la stalactite.
Cette grotte doit être un ancien lit de ruisseau souterrain d'origine
306
B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
endogée, en partie comblé vers l'entrée par des dépôts argileux anciens,
qui doivent se former encore actuellement, au fond, quand le ruissel-
lement se produit.
L'atmosphère est calme. A la flaque aux Niphargus, la température
de l'eau est de 10° C. et celle
de l'air IO04 C.
Jeannel et Racovitza.
;^-- Débris ligneux 6.1-
feuilles
FlG. 31. Croquis schématique de la Dn i
brUilor Hôhle (ii° G33) ; loufiucur
totale : 200 mètres environ.
633. Dreibruder Hôhle
(FiG. 31)
Située dans le Friederich-
steinerwald,à l'ouest de la ville,
commune et Bezirk de Gott-
schee, Provinz Krain, Autri-
che. — Altitude : 900 m. env.
— Roche : Calcaires triasiques.
—Date : 2 mai 1914.
Matériaux : Coléoptères,
Lépidoptères, Diptères, Tri-
choptères, Orthoptères, Thy-
sanoures, Collemboles, Myria-
podes, Aranéides, Isopodes,
Mollusques. — Numéro : 778.
La carte au 75.000^ indique
l'emplacement de cette grotte
qu'on atteint de Kocevje
(Gottschee) en 75 minutes.
C'est une caverne d'effondre-
ment de 200 m. env. de lon-
gueur, formée par l'action de
plusieurs points d'absorption.
Par une entrée carrée, on pé-
nètre dans un vestibule clair
envahi par la terre végétale
sur laquelle reposent des
troncs pourris. Une vieille cloi-
GROTTES VISITÉES 307
son en planches le sépare d'un second vestibule clair, sec, à sol couvert
d'éboulis. Dans une niche à gauche, nous trouvons un amas d'ailes de
Noctuelles (surtout de Scoliopteryx) mais pas un seul Papillon entier. Les
auteurs de ce massacre doivent être les Troglophilus.
La grande galerie qui fait suite est encombrée d'éboulis secs, et le
jour y pénètre par un aven qui perce son plafond. Sous l'aven, dans les
débris végétaux tombés par son orifice, on trouve quelques animaux,
mais le reste de la galerie paraît azoïque.
On continue par une galerie fortement ascendante, toujours sèche,
dans laquelle débouche un couloir élevé qui pourrait bien être l'amorce
d'un aven colmaté.
Le fond de la grotte est constitué par une dernière galerie également
ascendante, très incrustée, humide, à sol argileux ou stalagmite, dans
laquelle l'atmosphère est calme. Cette région est habitée par les Troglobies.
Un Stalita de forte taille déambule sur la stalactite. Sa démarche est
lente, tâtonnante, hésitante. Si on le touche, il s'arrête brusquement
et se met en position de défense, puis il continue sa lente exploration. On
lui procure une bien plus vive émotion en soufflant dessus : les mouvements
deviennent brusques et désordonnés et l'Araignée s'enfuit aussi vite que
le lui permet sa lenteur congénitale. Les Leptodirus Hohenwarti Schmidt
sont tout aussi sensibles au souffle, ébranlement de l'air combiné
avec changement de température. La fuite est leur seul moyen de défense
et ils ne se laissent pas tomber en cas de danger comme le font certains
autres Coléoptères troglobies. D'ailleurs, cette fuite est loin d'être rapide,
l'animal ne pouvant exécuter que des mouvements très lents.
Sur une borne, une toile tendue entre trois pointes rocheuses con-
tenait un Aranéide et sa mue, et sous la toile un Troglophilus tenait
compagnie à un Blothrus.
Dans les débris Hgneux, quelques Titanethes et Collemboles.
Dans la salle du fond, région supérieure, température de l'eau : 5^2 C. ;
dans le bas fond, température de l'air : 3^6 C. ^ ^
Jeannel et Racovitza.
634. Podpeô Hôhle.
(Fia. 32)
Située dans le village de Podpec, commune de Widem, Bezirk
Gottschee, Provinz Krain, Autriche. — Altitude : 440 m. — Roche : Cal-
caires triasiques. — Date : 3 mai 1914.
30d
JR. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Fia. 32. Croquis schématique de la Grotte de
Podpec (n» 634) ; longueur totale des
galeries figurées: 250 mètres environ.
Matériaux : Coléoptètee, Diptères, Collemboles, Myriapodes, Ara-
néides, Acariens, Isopodes, Amphipodes, Ostracodes, Copépodes, Mollus-
ques, Oligochètes, Hirudinés, Planaires, Nématodes, Protistes, Algues,
Bactéries, Cham-
pignons. — Nu-
méro : 779.
L'emplace-
ment de cette
grotte, située au
pied de la colline
sur laquelle est
bâtie l'église de
Podpec, n'a pas
besoin d^être au-
trement précisée.
C'est d'ailleurs à
la rivière sou-
terraine que s'a-
breuvent bêtes et
gens.
On passe sous
une large voûte
surbaissée pour
pénétrer dans un
imposant vesti-
bule clair et sec,
à sol rocheux couvert des fientes que laisse le bétail en
venant boire, car un abreuvoir est installé contre la
paroi de gauche. Joseph (1882, p. 51) dit avoir vu d'in-
nombrables Chauves-Souris dans ce vestibule, ce qui
est certainement faux, car il n'y a pas trace de guano
sur le sol et l'endroit ne conviendrait pas à semblable colonisation. La
description de cet auteur est d'ailleurs inexacte sur plusieurs autres points ;
il est manifeste que, pour cette grotte comme pour beaucoup d'autres, la
rédaction fut faite de mémoire et non d'après des notes prises sur place.
Deux galeries s'ouvrent au fond du vestibule, comme le montre notre
croquis.
GROTTES VISITÉES 309
La galerie de gauche, assez imposante, se coude vers le sud à angle
droit. Sa région gauche est occupée par des bancs rocheux fortement
corrodés par l'eau courante et par des amas d'éboulis formant une pente
raide. Une rivière pérenne, mais sujette à d'importantes variations sai-
sonnières, sort de la région sud. Pour l'endiguer, on a barré la galerie et
l'eau se déverse par-dessus le barrage en une grosse cascade. Depuis ces
travaux, l'eau est tellement profonde dans la « galerie de la rivière » que
même à l'étiage il est difficile d'y circuler. On nous a dit que cette galerie
se prolonge sous forme de tunnel régulier pendant plusieurs centaines
de mètres.
La rivière suit la paroi ouest et se jette dans le « lac des Niphargues »,
bassin aquifère assez profond qui se continue par une fente paraissant
impénétrable. De la digue part le tuyau d'adduction qui suit la paroi E.
et va aboutir à l'abreuvoir, dont le trop-plein forme un ruisselet qui
retourne dans la grotte, longe la paroi nord et se déverse également dans
le u lac des Niphargues » en entraînant la fiente déposée dans le vestibule.
Le « lac des Niphargues », dont le fond argileux est favorable au dévelop-
pement de la vie animale, est donc rempli de ce produit éminemment
nutritif. Son eau est un véritable milieu de culture, aussi n'est-il pas
étonnant d'y constater un extraordinaire grouillement d'êtres divers. Les
Amphipodes dominent ; ils couvrent littéralement les morceaux de fiente.
Nous en avons capturé plusieurs espèces dont des Niphargus. Les fientes
immergées sont aussi creusées par plusieurs espèces d'OHgochètes.
La rivière est également très riche près de son embouchure. Sous
les pierres qui garnissent son Ut, nous avons recueilli des Hydrobies, des
Hirudinés et des Monolistra.
Les pentes rocheuses sont couvertes d'amas de paille sous lesquels
sont très communs les Lithobies, Brachydesmes, Collemboles, Aranéides,
Titanèthes et Phorides.
Nous pouvons signaler un nouvel exemple de Troglobies, faisant partie
de groupes franchement terrestres, qui vont à l'eau volontairement.
Nous avons trouvé sur le fond de flaques d'eau profondes de 20 à 30 cm.
un Titanèthes et même un Brachydesmus au repos ; ces animaux étaient
parfaitement vivants. Les ayant touchés, ils s'enfuirent et se comportèrent
exactement comme sur la terre ferme.
La température de la rivière est de 9^2 C.
La « galerie des mares », à droite du vestibule, est basse ; les parois
sont à peine incrustées par place ; le sol est sableux sur les bords, argileux
310 i?. JEANNEL ET E.-G. BACOVITZA
au milieu et pourvu tle nombreuses flaques d'eau peu profondes. Des
Aranéides ont installé leurs toiles dans les anfractuosités des parois ; sous
Jes pierres, dans les débris de paille, très nombreux CoUemboles et quelques
Trechus Bilimeki Sturm.
Près de la grande « mare du tronc », peu profonde, vaseuse et inhabitée
est un gros tronc d'arbre. Les cordons rhizomorphes déjà signalés ail-
leurs y prennent origine et couvrent de leur chevelu le sol argilo-sableux
des environs.
Le «lac des Monolistres » occupe toute la largeur de la galerie. Au delà,
on aperçoit à gauche une fente aquifère, à droite un couloir occupé par
un autre lac. La fente est certainement un évent qui vomit l'eau des
crues. Le fond du lac est argileux et des débris ligneux garnissent le fond.
Dans une botte de paille, des Monolistra de toutes les tailles grouillaient.
Les Ni'phargus et des petits Entomostracés étaient également nombreux.
L'atmosphère de la grotte est agitée partout, mais faiblement ; le
courant d'air est plus sensible dans la <( galerie de la rivière >>.
Le régime hydrographique de la grotte est complexe. Il est probable
que primitivement c'était une goule et il est possible qu'elle absorbe encore
de l'eau par les grandes inondations. La rivière pérenne actuelle n'est
qu'un affluent de l'ancienne goule et la « galerie des mares « un second
affluent temporaire.
Jeannel et Racovitza.
635. Kronprinz-Rudolf Grotte.
Située à 1.500 m. au S.-E. de Divaca, commune de Naklo, Bezirk
Sezana, Provinz Kiistenland, Autriche. — Altitude : 440 m. env. — Roche :
Calcaires crétaciques. — Date : 5 mai 1914.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Thysanoures, CoUemboles, Myria-
podes, Aranéides, Palpigrades, Chernètes, Acariens, Isopodes, Champi-
gnons. — Numéro : 780.
L'emplacement de cette très belle grotte est indiqué sur la carte au
75.000^ ; elle est d'ailleurs aménagée et l'entrée en est payante. Sa dé-
couverte est relativement récente (1884) ; on ne connaissait que le « trou
du Diable », aven de 25 m. précédé d'un court couloir qui en constitue le
début.
C'est une caverne très compHquée, formée par 600 m. env. de vastes
GROTTES VISITÉES 311
galeries et de salles imposantes dans lesquelles de grands monticules
d'éboulis stalagmites occupent le sol. Des puits font communiquer les
divers étages, et des diverticules nombreux partent des galeries princi-
pales.
Les parois ne décèlent plus le travail de l'eau courante, car la grotte
se trouve actuellement dans un stade avancé de comblement stalagmitique.
Les parois, comme le plafond et comme le sol, sont presque entièrement
incrustées ; les di"aperies sont très nombreuses et les piliers, bornes, mas-
sifs et coulées bien développés et parfois très beaux.
Le sol est rocheux ou incrusté, mais aussi argileux sur de longs par-
cours. Pour égaliser et assécher les routes, on a eu la très mauvaise idée
d'eniployer le mâchefer, qui sous les pieds des touristes s'est transformé
en poussière ou boue noire qui souille toutes les incrustations jusqu'à
2 m. de hauteur et diminue notablement la puissance de l'éclairage.
L'emploi du mâchefer doit donc être complètement proscrit dans les
les grottes pour l'aménagement des chemins ; ce qui convient le mieux
c'est le calcaire concassé ou à défaut du sable blanc.
Les suintements sont peu abondants et les flaques d'eau ou gours
pleins sont rares. Un courant d'air assez fort parcourt les premières
galeries ; il s'atténue dans le reste de la grotte sans disparaître complè-
.tement. L'atmosphère n'est complètement calme que dans les culs-de-
sac et tout à fait au fond.
Nous n'avons pas vu de Chauves-Souris, mais il y a du guano ancien
par place et des crottes isolées, ainsi que de rares débris ligneux. Le guide
nous affirme que les Chauves-Souris étaient très nombreuses au début
et qu'en hiver on en voit encore. Il raconte également que très nombreuses
aussi étaient des Mouches rouges de la taille de la Mouche domestique ;
par centaines, elles entouraient les bougies des visiteurs et s'y brûlaient,
ce qui en provoqua la complète disparition. Il s'agit probablement dans
ce récit d'une Heteromiella.
Au fond, une très puissante coulée prend son origine dans une petite
salle élevée, entièrement incrustée, très humide « le ciel (Himmel) ».
La température de l'eau des gours de là salle est de lO^S C. ; l'eau au
pied de la coulée est à lO^ C. et celle du point le plus bas de la grotte
à 908 C.
C'est le (i ciel » qui est la région la plus peuplée de la grotte ; des milHers
de Bathyscia (Col.) courent sur la stalagmite et on n'en trouve que là. Le
Titanèthe y est aussi abondant, mais cet Isopode est répandu dans toute
312 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
la grotte ; on le trouve aussi bien sur l'argile, le bois, les champignons,
mais c'est la stalagmite détrempée qui a ses préférences. Stalita (Aran.)
et Blothrus (Chernète) sont rares. Les poutres du pont de la (( petite
grotte » sont couvertes par un Champignon piliforme sur lequel se
tiennent de petits Trichoniscides et une petite Araignée tisseuse de toile.
Nous avons vu une de ces Araignées capturer et ligoter un de ces petits
Trichoniscides.
Un autre Aranéide, à habitus de Leptonète, tisse ses toiles dans les
intervalles des stalagmites. Au pied des stalagmites, dans la pierraille
humide mêlée d'argile furent capturés deux Kaenenia. Brachydesmus est
très commun partout jusqu'à l'entrée ; nous en avons observé beaucoup de
paires accouplées. Des Campodéides et CoUemboles variés se rencontrent
dans toute la grotte.
Jeannel et Racovitza.
636. Cueva de Bujaruelo.
(Fia. 33)
Située dans la falaise, au-dessus et à 300 m. env. du pont de Buja-
ruelo, termino municipal de Torla, partido de Boltana, provincia de
Huesca, Espagne. — Roche : Calcaires crétacés à Hippurites. — Alti-
liide : 1.379 m. — Date : 17 juillet 1914.
Matériaux : Diptères, CoUemboles, Isopodes, Planaires. — Numéro : 781.
L'entrée de la grotte est presque au sommet de la falaise ; un thalweg
la précède. Après de fortes pluies, un ruisseau sort de la grotte et se dé-
verse en cascade sur la falaise.
Par une voûte ogivale, on pénètre dans un vestibule clair, d'une tren-
taine de m. de longueur, haut de plafond, mais presque entièrement occupé
par une vaste coulée de tuf. Une galerie basse s'amorce à angle droit à
droite.
Le sol est couvert de sable mêlé d'argile. De gros blocs rocheux for-
tement roulés et polis sont éparpillés. Très peu sont formés par le cal-
caire dans lequel est creusée la grotte ; la plupart sont formés par une
roche syénitique, un certain nombre par des schistes sombres. Ces blocs,
d'origine glaciaire, supportent souvent des incrustations.
La galerie se coude de nouveau à angle droit ; on descend un ressaut
formé par la roche polie et striée par les eaux et l'on pénètre dans une
GROTTES VISITÉES
313
salle basse et très inclinée. A gauche, d'une fente impénétrable sort un
ruisseau qui se bifurque pour se jeter dans un petit lac siphonant à fond
sableux.
Cette région inférieure est tapissée jusqu'au plafond par de l'argile
sableuse qui, ramassée par les suintements, forme des stalactites creuses,
argileuses et friables. Il est visible que, par temps de crues, elle doit être
complètement remplie d'eau.
La longueur totale des galeries ne dépasse pas 80 m. env.
Les incrustations sont rares ; de
petites flaques d'eau couvrent le sol.
Un courant d'air sensible parcourt toute
la grotte.
FiG. 33. Schéma de la Grotte de Bujaruelo (n" 036) ; longueur totale : 80 mètns environ.
Au fond, température de l'eau du ruisseau : 403 V. ; thermomètre
sQp : 8» Q. ; therm. hum. : 8^ C. ; baromètre : 649,1 mm. ; humidité :
100%.
La forte différence entre la température de l'eau et celle de l'air
s'explique par l'aspiration de l'air extérieur provoquée par l'écoulement
du torrent souterrain dans des fentes étroites.
Près de l'entrée gîtaient quelques Némocères. Pas de Chauves-Sou-
ris, mais des crottes éparses dans la galerie médiane. Un petit Tricho-
niscide rose, de nombreux Collemboles blancs sur les rochers enduits
d'argile, sont les seuls animaux terrestres capturés. Sur le fond d'une
petite flaque rampait une seule Planaire blanche.
Jeanne i. et Racovitza.
314
B. JEANNEL ET E.-G. BACOVITZA
637. La Dragonera de Santa Helena
(FIG. 34)
Située en face le couvent de Santa Helena, à 300 m. de la route, sur
la rive droite du rio Gallego, termino municipal de Biescas, partido
de Jaca, provincia de Huesca, Espagne. — Altitiide : 1.049 m. env. —
Boche : Calcaires du crétacique supérieur. — Date : 19 juillet 1914.
Matériaux : Lépidoptères, Diptères, Hyménoptères, CoUemboles,
Mollusques. — Numéro : 782.
\j3-C
Cette petite grotte (60 m. env. de longueur) est le trop-plein d'une forte
exsurgence qui sort près du pont du Gallego, presqu'au niveau de la
rivière. On nous assure qu'en
temps de crues un fort courant
jaillit par l'orifice qui effective-
ment forme l'origine d'un thal-
weg torrentiel considérable, en-
combré d'éboulis polis et érodés.
On peut suivre ce lit sur plus
de 300 m. ; sa direction est
parallèle à celle du torrent le
Merduzero dans lequel finale-
ment il s'abouche.
Par l'entrée ronde, on arrive,
après descente d'un ressaut de
1.5 m., dans un couloir forte-
ment descendant, à section cir-
culaire, encombré d'éboulis rou-
lés. Ensuite, à gauche, par deux
orifices on peut entrer dans une
petite salle, pourvue de quel-
ques incrustations et d'un bas-fond sableux. Le reste est envahi par des
bancs d'argile et même le plafond est enduit de cette substance. Les suin-
tements sont abondants dans cette région.
Le couloir continue, toujours incUné, pour se couder finalement à
gauche et se terminer dans une petite chambre occupée par un bassin
aquifère qui se prolonge dans une fente impénétrable par laquelle doivent
arriver les eaux de crues.
JTlO. 34. Croquis schématique de la Dragonera de Santa Helena
(n" 637); longueur totale : 60 mètres environ.
GROTTES VISITÉES 315
Température de l'eau du lac : 6^2 C. Atmosphère calme.
Notre entrée dans la grotte fit lever des nuées de Sciarides posés sur
les parois. Leur nombre était si considérable que leur bourdonnement
produisait un bruit continu comme celui d'une petite cascade. Le nombre
de ces Diptères diminuait vers le fond, mais nous en avons trouvé jusque
dans la chambre du lac. Leurs cadavres couvrent le sol et sont attaqués
par une Moisissure.
Nous avons aussi trouvé, au fond, quelques CoUemboles troglobies
et deux gros Hyménoptères bien vivants.,
Gruta de la Gloriosa. — En face de la Dragonera, sur la rive gauche du
Gallego, le Couvent de Santa Helena est perché sur un rocher escarpé et
contre la Gruta de la Gloriosa d'où sort une rivière intermittente fort
curieuse. Primitivement l'orifice de la grotte devait être une voûte consi-
déra ble ; actuellement il est réduit à une faible ouverture car l'église du
couvent est en partie bâtie dans la grotte. Pour parcourir le lit souter-
rain, accessible sur quelques dizaines de mètres, nous a-t-on dit, il faut
pénétrer par la sacristie et nous n'avions pas les clefs nécessaires. Nous
n'avons donc exploré que le vestibule clair occupé par une mare profonde
et un cul-de-sac à droite de faible dimension. A\x fond du vestibule, à
gauche, s'abouche le ht de la rivière souterraine, fortement rétréci par
le mur de l'église et occupé par un bief profond à l'étiage. Quand la ri-
vière coule (les fidèles disent : sale la Gloriosa), l'eau s'élève fortement et
l'entrée est presque entièrement occupée par la rivière. Comme Puig
Y Larraz (1896, p. 168) déclare que les éruptions sont très irrégulières,
il est prudent de ne se hasarder dans les couloirs intérieurs qu'à bon escient.
La température de l'eau dans le bief de l'entrée est de 9^9 C.
Voici ce que nous avons observé pendant notre séjour à la grotte :-
9 h. 30 m. Fin d'une éruption.
12 h. 23 m. Brusquement l'éruption se produit de nouveau.
12 h. 26 m. Le niveau maximum est atteint.
12 h. 35 m. Le niveau commence nettement à baisser.
13 h. 10 m. Fin de l'écoulement.
A 16 h. 10 m. nous sommes partis sans qu'il se soit produit de nou-
velle éruption.
L'altitude de la grotte est de 1.044 m. env. L'eau est d'une limpidité
parfaite et ne se trouble, paraît-il, jamais ; elle dépose du tuf très acti-
vement.
Arc», de Zool. Exp. et Gén. — T. 57. — F. :J. 21
316 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Nous n'avons pas trouvé d'animaux dans la partie visitée, sauf
quelques larves de Salamandres dans le bief du vestibule.
Cueva de la Grallera. C'est une grande baume située dans la haute
vallée du Merduzero ; son fond donne accès à des couloirs qui. selon
les uns, seraient clairs et, selon d'autres, obscurs et humides. Cette baume
s'ouvrirait près du sommet du Plan de Sabas.
Jeannel et Racovitza.
638. Cueva del Cantal.
Située dans la pena del Cantal, termino municipal de x4cumuer.
partido de Jaca, provincia de Huesca, Espagne. — Altitude : 1.981 m.
env. — Roche : Calcaires du crétacique supérieur. — Date : 21 juil-
let 1914.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Thysanoures, CoUemboles, Myria-
podes, Aranéides, Acariens, Oligochètes, Champignons. — Numéro : 783.
D'Acumuer on remonte la vallée de l'Aurin jusqu'à l'endroit marqué
« cirque » sur la carte des Pyrénées au 150. 000^ et où se rencontrent trois
torrents. On suit celui qui vient de l'est presque jusqu'à sa source.
Une belle falaise s'étend au nord ; c'est la section transversale d'un plis
couché de nummulitique avec noyau de danien, formant la pena del
Cantal, et le vaste orifice de la grotte se voit de loin, mais pour y par-
venir il faut effectuer une ascension longue et pénible.
La grotte, longue de 50 m. env., est formée par une première très
grande salle claire, à sol remontant verdi par les algues, et par une petite
chambre, à droite, incrustée, avec un mince filet d'eau au fond, ruisse-
lant sur une coulée de stalagmite argileuse. Là température de l'eau est
à 5^8 C. ; l'atmosphère est calme.
Pas de Chauves- Souris, pas traces de guano, pas de Lépidoptères.
Tout le fond de la grotte est rempli de crottes de chèvres en couches
épaisses ; près de l'entrée c'est le fumier de mouton qui couvre le sol.
Sur les parois, partout, gîtent de nombreux Sciarides (Dipt.) et sous les
pierres enfoncées dans le fumier grouillent des Aranéides, CoUemboles,
Julides, Campodéides, Acariens. Des Phorides courent sur le sol.
Cova de Buchaquero. danslaEspata de Villanûa, brèche située sur la
GROTTES VISITÉES 317
rive droite de l'Aurin au sud du pic Pala de los Rayos. D'après les dires
des bergers ce serait un aven profond.
Cueva del Cantal de Ariba, au-dessus de la cu.eva del Cantal. Ce serait
plutôt un abri sous roche.
Jeannel et Racovitza.
639. Cueva de las Guixas.
(FIG. 35)
(Seconde exploration, voir BIOSPEOLOGICA I, p. 610)
Située à la limite nord 'du village, termino municipal de Villanûa.
partido de Jaca. provincia de Huesca, Espagne. — Altitude. : 949 m. env.
— Roche : Calcaires du crétacique supérieur. — Date : 23 juillet 1914.
Matériaux : Chéiroptères, Coléoptères, Diptères, Thysanoures, Col-
lemboles, Myriapodes, Aranéides, Opilionides, Isopodes, Mollusques.
Champignons; Parasites des Chéiroptères : Ixodes sur Chéiroptères
784, a et b, Acariens sur Chéiroptères 784, a et h. — ■ Numéro : 784.
En 1905, nous n'avions visité que la région médiane de la grotte ;
cette fois nous l'avons explorée beaucoup plus soigneusement. Nous
avons pu établir un plan qui nous dispensera d'une longue description.
Cette grotte compliquée, de près de 500 m. de longueur, est l'œuvre
d'une rivière souterraine, affluent de la rive gauche de l'Aragon. Le cours
de cette rivière, comme la galerie principale de la grotte, est parallèle
à la petite falaise qui commence en amont du pont de Villanûa, pour
s'étendre en direction ouest-est, perpendiculairement à la vallée de l'Ara-
gon, sur le flanc du Collerada. Six orifices de grottes trouent la falaise
à des niveaux de plus en plus bas. Ils représentent les évents successifs
de la rivière souterraine dont le niveau piézométrique a occupé ainsi six
étages différents. La cueva de las Guixas est donc un des exemples les
plus caractéristiques de la descente par « crans » des Uts de rivières sou-
terraines à l'intérieur des massifs calcaires.
L'entrée A, la plus élevée, et son couloir en pente, comme les deux
couloirs supérieurs qui y aboutissent, sont des lits de rivières fossiles, très
anciens et se trouvent dans la phase de comblement stalagmitique, du
moins dans les parties profondes où le ruissellement est encore quelque
peu actif. De fortes coulées de stalagmite argileuse garnies de gours ont
envahi les deux couloirs terminaux. Dans le « couloir des ossements »
318 7?. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
nous avons trouvé de nombreux ossements humains accumulés dans
les gours par le ruissellement ; souvent les os sont recouverts d'incrusta-
tions ou fixés au bord des gours par la stalagmite.
Est également fossile toute la région du lit souterrain qui s'étend
jusqu'au «gouffre», ainsi que l'entrée B qui y mène par un long couloir.
Le comblement stalagmitique n'a pu que partiellement s'y effectuer, car
la présence de deux orifices provoque des courants d'air qui assèchent
les parois, d'ailleurs peu suintantes. Le sol du couloir de l'entrée B est
très argileux, mais disparaît d'abord sous de fortes masses d'éboulis ;
quant à la galerie principale, elle est bien incrustée dans cette région et
par place, montre de grandes accumulations argileuses.
A partir du gouffre nous pénétrons dans une région encore fonction-
nelle. La « galerie supérieure » est dans la phase de comblement stalag-
mitique, mais la « galerie inférieure » qui lui est parallèle et le fond du
« gouffre » sont régulièrement inondés en temps de crue. Ces régions qui
étaient sèches en 1905 étaient actuellement occupées par une vaste nappe
d'eau. D'ailleurs nous avons trouvé près du gouffre un petit couloir
fortement descendant, rempli de sable et aboutissant à une nappe d'eau
siphonnante. On entend un bruit de torrent dès qu'on pénètre dans ce
couloir et le bruit est très violent lorsqu'on arrive au fond. Il est certain
que les crues de ce torrent se déversent par le couloir dans la « galerie
inférieure » et de là s'écoulent par la longue partie de la galerie princi-
pale qui aboutit à une flaque d'eau siphonnante et sableuse, au delà de
l'entrée D. Entre la <c galerie inférieure » et l'entrée C la pente est peu
accentuée ; le sol est couvert de petits cailloux roulés.
L'entrée C est étroite et n'est qu'une perforation de la paroi d'un petit
aven situé dans le plafond de la galerie. L'eau ne doit plus s'écouler par
cet orifice, même par fortes crues, mais doit s'engouffrer dans la conti-
nuation de la galerie dont les parois portent les stigmates de violentes
actions torrentielles. De très gros rochers polis par les eaux, dispersés
parmi les bancs de sable et de gravier, occupent toute cette région, très
inclinée et basse de plafond. Des gours sont en train de se former par-
tout, ce qui indique une diminution de violence dans les crues.
Le couloir de l'entrée D est très incliné, tortueux et tubulaire ;
ses parois sont complètement polies par les eaux. Nous ne pensons
pas qu'il fonctionne encore comme évent. Les crues doivent trouver
actuellement une issue plus facile par le fond de la galerie. Un petit
diverticule ascendant, très incrusté, est creusé dans la paroi de
GROTTES VISITEES
319
droite ; nous y avons trouvé un tronc d'arbre que les crues ont
réussi à faire pénétrer malgré l'étroitesse des couloirs.
Entrée C
FlQ. 35. Croquis schématiciuc do la Ciicva dn las fiuixas (n" C39) ; longueur totalo : ^
500 mètres environ. cC
Deux orifices trouent encore la falaise. Par l'inférieur ou sixième
sort actuellement le torrent souterrain ; il est entièrement occupé par
320 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
l'eau. Le supérieur ou cinquième sert d'évent actuel aux moindres
crues. Il coulait fortement pendant notre seconde visite et nous n'avons
pas essayé d'y pénétrer. Son exploration à l'étiage devrait être tentée,
car il est fort possible qu'on puisse par cette voie arriver au lit actuel
du torrent souterrain.
Toute la région de la grotte comprise entre les entrées A et D est
parcourue par des courants d'air, qui sont très violents dans les régions
rétrécies. Dans le (c couloir des ossements « la température de l'eau était
de IPT C. et celle de Fair de 12P C. ; dans la « galerie inférieure » l'eau était
de 90 C.
Dans un creux du plafond de l'entrée B, en pleine lumière, se te-
naient de gros Rhinolophes. Contrairement à leur habitude, ils étaient
serrés les uns contre les autres. Il est vrai que c'étaient des femelles
avec leurs jeunes ; ces derniers volaient encore très mal. A côté, dans un
autre creux, étaient entassés des Myotis nombreux. Nous n'avons pas
vu d'autres Chauves-Souris dans la grotte, mais le guano qui y est épars
montre que presque tous les couloirs sont fréquentés par ces animaux.
Les Némocères sont rares dans les couloirs d'entrée et les Noctuelles
manquent complètement. Les Troglobies de la région se rencontrent un
peu partout, mais sont toujours peu nombreux. Les couloirs des entrées
supérieures sont fréquentés par de nombreux Oniscus asellus L. (Isop.).
Jeannel et Racovitza.
640. Tesserefts du Collerada.
(Seconde exploration, voir Biospeolouica I, p. 509)
Situés sur le mont Collerada, au lieu dit Puerto del Collerada, ter-
mino municipal de Villanûa, partido de Jaca, provincia de Huesca,
Espagne. — Altitude : 2.000 m. env. ■ — Roche : Calcaires du crétacique
supérieur. — Date : 24 juillet 1914.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Hyménoptères, Orthoptères,
Collemboles, Myriapodes, Aranéides, Opilionides, Acariens, Isopodes.
— Numéro : 785.
Les études publiées par Peyerimhoff (1912, p. 536, et 1914, p. 539)
sur les « trous à neige » du Haïdzer de Kabylie ont montré tout l'intérêt
qui s'attache à ces formations carstiques et la nécessité de les distinguer
des autres dépressions creusées dans les pays calcaires. Les Kabyles
GROTTES VISITÉES 321
eur donnent le nom spécial de Tessereft et nous croyons que ce nom
mérite d'être adopté pour désigner ces entités géographiques parfai-
tement caractérisées. Nous définirons donc les Tesserefts comme suit :
des dépressions des surfaces carstiques de hautes altitudes, de dimensions
variables, mais plus profondes que larges, où les neiges et l'air froid
s'accumulent en hiver et persistent presque jusqu'aux neiges suivantes,
formées généralement suivant les joints de stratification des bancs redres-
sés ou dans les diaclases à fond argileux incomplètement étanche per-
mettant seulement une lente filtration des eaux.
Ces Tesserefts sont fort nombreux sur le Collerada et nous les avions
déjà visités en 1905. Ils sont bien développés sur le versant sud de la
montagne, au Puerto del Collerada, de part et d'autre de la bergerie. A
cet endroit les tranches des bancs calcaires redressés presque verticale-
ment ont formé un lapiaz très caractérisé. Des barres saillantes limitent
des sortes de couloirs plus ou moins profonds et c'est dans ces couloirs
qu'on trouve surtout les Tesserefts. Leurs dimensions sont très variables
et nous en avons visité un qui avait au moins 50 m. de diamètre. En gé-
néral, la paroi du côté montagne est à pic et est formée par un joint ou une
diaclase ; celle du côté vallée est inclinée et formée par un cône d'éboulis.
Les formes allongées sont naturellement plus fréquentes que les arron-
dies. Les petits étaient le plus souvent vides, tandis que les plus vastes
et profonds contenaient encore beaucoup de neige.
Tous les fonds découverts montrent un colmatage par l'argile, mais
en nombre de cas on pouvait voir un trou d'absorption placé de préfé-
rence contre la paroi verticale.
Une faune très riche gîte sous les pierres près de la neige, mais ' il
ne semble pas qu'elle ait des caractères spéciaux comme celle décou-
verte par Peyerimhoff en Kabylie.
Cuevas de Hecho, partido de Jaca, provincia de Huesca. On nous
signale au nord de ce village, à 4 heures de marche dans la haute vallée
du rio Subordan, six grottes dont deux claires et quatre obscures, mais
probablement peu profondes. L'une est située sous la Collada del Fora-
ton, deux près du Castillo viejo et deux à Techeros.
Les grottes de la vallée de Fago, termine municipal de Ans6, partido
de Jaca, provincia de Huesca, que mentionne Puig y Larraz (1896,
p. 168), ne présentent aucun intérêt biospéologique.
322 7?. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Sima de Forcala au col de ce nom. Aven de 5 m. de profondeur.
Une doline existe à 100 m. de F aven.
Cuevas de Forcala. Au lieu dit « Cuco » il y a un petit cirque de médiocres
falaises avec plusieurs abris sous roches et des trous circulaires inacces-
sibles.
Cuevas de Espata sont au nombre d'une dizaine, mais toutes des
baumes claires.
Cueva del Palomar est une baume claire.
Jeannel et Racovitza.
641. Cueva del Orso de Ansô.
Située au pied des Canteras de Alanô, termino municipal de Ansô,
partido de Jaca, provincia de Huesca, Espagne. — Altitude : 1.514 m,
env. — Roche : Calcaires du crétacique supérieur. — Date : 29 juillet
1914. .
Matériaux : Diptères, Lépidoptères, Trichoptères, Thysanoures,
CoUemboles, Myriapodes, Aranéides, Opilionides, Acariens, Isopodes,
Oligochètes, Champignons. — Numéro : 786.
Il faut remonter le barranco de Marcon jusqu'à sa source qui sort
de la grotte, ce qui nécessite à partir d'Ansô une longue course.
L'entrée est une vaste voûte surbaissée sous laquelle s'ouvrent deux
grottes.
Celle de gauche a environ 40 m. de longueur. Elle est ascendante,
à peine obscure au fond, à voûte basse soutenue par des pihers rocheux,
et se continuant par deux fissures impénétrables desquelles sort un cou-
rant d'air violent. Presque pas d'incrustations ; sol couvert de pierrailles
plates, d'humus détrempé et de crottes de moutons et de chèvres.
L'eau de suintement est à 6^8 C. Sous les pierres vivent de nombreux
CoUemboles, Acariens, Trichoniscides, Myriapodes, Campodéides. Les
parois sont couvertes de Diptères en nombre considérable, surtout des
Sciarides et des Limnobiides. Heteromiella est aussi fort commune. Un petit
moucheron est prodigieusement abondant ; c'est près de l'entrée qu'il se
tient de préférence ; sur le plafond on voit des taches noires de la grandeur
d'une pièce de 5 francs qui sont formées par ces minuscules Diptères
serrés étroitement les uns contre les autres à la manière des essaims
GROTTES VISITEES 323
d'Abeilles. De nombreuses Araignées exploitent ces gisements et des
Gyas titanus (Opilionides), perchés sur leurs pattes démesurées, piquaient
de leurs longues fourchettes dans Tinépuisable amas.
La grotte de droite est formée par un vestibule clair dont le sol est
tapissé de Muscmées et d'Algues. Au fond s'ouvre un couloir tortueux
parcouru par un ruisseau dont la température est de 6^2 C. Le couloir
devient très bas et, pour suivre le ruisseau, il faudrait ramper dans Teau.
Comme le calme atmosphérique est complet, il est très probable qu'un
bief siphonnant intercepte le passage.
Jeannel et Racovitza.
642. Cova den Rubi.
Située près de la casa de los Chacos, termino municipal et partido
de Tortosa, provincia de Tarragona, Espagne. — Altitude : 360 m. env.
— Roche : Calcaires crétaciques. — Date : 20 mai 1914.
Matériavx : Coléoptères, Diptères, Thysanoures, Myriapodes, Ara-
néides. — Numéro : 1^1.
Cette grotte est mentionnée et décrite dans Puig y Larraz (1896,
p. 314). Elle est située à 2 heures de Tortosa, entre le barranco de Bitem
et celui den Rubi, et s'étend parallèlement à la falaise qui borde le pre-
mier de ces barrancos. Elle est constituée par une galerie ouest-est de
150 m. env. de longueur, presque rectiligne. Au fond et à droite, un couloir
aboutit à un puits récemment effondré ; à gauche, un autre couloir se
termine également par une région effondrée. Près du carrefour, une série
de petits puits qui aboutiraient, m'a-t-on dit, à un court couloir inférieur.
Les incrustations sont peu nombreuses et sèches. Des fentes et sou-
piraux percent les parois du fond de la grotte, ce qui provoque un courant
d'air sensible qui dessèche les suintements des parois et empêche la for-
mation de flaques d'eau sur le sol.
De nombreuses Chauves-Souris gîtent dans les régions médianes.
Le guano est abondant et les débris ligneux se rencontrent partout.
Sur les parois, près de l'entrée, sont installées de grosses Meta dans
leurs toiles. Dans le guano et sous les pierres environnantes abondent les
Sphodrides, les Atheta et les Collemboles.
Brtouil.
324
B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
PuvN
643. Cova Cambra.
(Fl(i. 3li)
Située au sommet de la Mola de Cati, termine municipal deTortosa( ?),
partido de Tortosa, provincia de Tarragona, Espagne. — Altitude :
1.370 m. env. — Roche : Calcaires
infraliasiques. — Date : 23 mai 1914.
Matériaux : Coléoptères, Dip-
tères, Trichoptères, Collemboles,
MjT^riapodes. — Numéro : 788.
Cette grotte est à 8 heures de
marche de Tortosa et à 6 heures
d'Alfara, dans le bois épais de pins
qui couvre la partie plane du som-
met de la Mola de Cati ; guide
indispensable. Elle est constituée
par une galerie unique à direction
N.E.-S.W, ouverte dans sa région
médiane par un aven d'effondre-
ment ovoïde, de 40 m. sur 20 m.
env. Pmc. y Larraz (1896, p. 315-
316) décrit la région nord sous le
nom de Cova Cambra et la région
sud sous le nom de Cova petita.
La galerie vers le sud commence
par un vestibule clair en entonnoir,
jonché de blocs moussus. Suit une
galerie sèche, non incrustée, à sol
argileux couvert de rochers éboulés,
dans laquelle je n'ai pas trouvé
d'animaux. C'est à tort qu'on y a
signalé des peintures et gravures
préhistoriques.
CDUPÎ
PLW
Fio. 36. Croquis et coupe schématiques de la Cova Cam-
bra (n" 643) ; longueur totale : 200 mètres environ.
La galerie vers le nord débute par un vestibule humide à terreau noir
où Sphodrides et Lithobies sont communs sous les pierres. Vient
ensuite un couloir de 40 m. env. à sol également humique habité par des
nuées de Sciarides. Une descente à pic de 4 m. env. conduit dans une
GROTTES VISITÉES 325
salle vaguement circulaire de 25 m. de diam. env., inclinée de gauche à
droite, avec une source à gauche qui forme des flaques d'eau sur le sol.
Les incrustations sont nombreuses sur les parois et même sur le sol, sauf à
droite où l'argile rouge forme des bancs. Le fond de la salle est formé
par un massif stalagmitique à nombreuses bornes et colonnes, avec flaques
d'eau abondantes visitées par des Anurides. Un Paraphaenops Breuili
Jeann. n. sp. fut trouvé également à cet endroit. De l'autre côté du massif
est un diverticule bas, inondé, pourvu d'une chatière donnant dans un
cul-de-sac très incliné. La longueur totale de cette galerie est de 100 m. env.
L'agitation de l'air est faible partout. Le sol est jonché de débris de
torches, mais pas d'autres débris ligneux. Ni Chauves-Souris, ni guano.
La céramique qu'on y trouve, et cj^ue divers auteurs ont considérée
comme néolithique, est purement moderne et provient des bergers qui
vont chercher l'eau à boire ; la grotte fut d'ailleurs utilisée comme
bergerie il y a quelques années.
644. Cova Terrera.
Située a l'entrée du massif de la Mola de Cati, termino municipal
de Alfara, partido de Tortosa, provincia de Tarragona, Espagne. — Alti-
tude : 1.300 m. env. — Roche : Calcaire liasique. — Date : 23 mai 1915.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Collemboles. — Numéro : 789.
L'entrée en voûte surbaissée, s'ouvre à l'ouest ; elle est fermée par
un mur. L'unique couloir qui constitue la grotte a 5 m. de large et
50 m. env. de longueur ; il est rectiligne, horizontal, sec, à sol argileux
couvert de crottin, car il sert de bergerie. Au fond, une fente donne sur
un puits de 3 m. 5 env. (échelle nécessaire) donnant dans un diverticule
de 5 m. env., très incrusté, mais peu humide, à sol couvert de pierrailles.
C'est dans ce réduit terminal que furent recueillis les animaux.
L'atmosphère est calme. Pas de Chauves-Souris ni de guano.
Breuil.
645. Cova Yerret.
Située au lieu dit Caïda del Clôt, termino municipal de Alfara, par-
tido de Tortosa, provincia de Tarragona, Espagne. — Altitude : 1.270 m.
env. — Roche : Calcaires liasiques. — Date : 23 mai 1914.
326 B. JE AN N EL ET E.-G. RACOVITZA
Matériaux : Diptères, Collemboles, Myriapodes, Aranéides, Cham-
pignons. — Numéro : 790.
La grotte, située au fond et en haut d'un cirque, s'ouvre vers l'est.
Le vestibule en forme de portique à quatre absidioles est haut, à sol des-
cendant couvert de rochers moussus, à parois incrustées ; sa largeur
est de 25 m. env. L'absidiole de gauche, à sol descendant, conduit après
10 m. env. à un à-pic de 10 m. env. assez difficile à descendre à l'aide de
troncs pourris dressés contre la paroi. On pénètre dans une grande salle,
haute de 20 m. env., à sol incrusté et pourvu de flaques d'eau nombre vises.
Une région horizontale, de 50 m. env. de longueur sur 15, 20 et 25 m.
env. de largeur, précède une haute rampe terminale inclinée à 45° env.,
stalagmitée et pierreuse, sur laquelle l'eau ruisselle, coulant sur un massif
stalagmitique et sortant d'une ouverture à 2 m. au-dessus du sommet de la
rampe, ouverture inaccessible sans échelle rigide et que je n'ai pas
explorée.
L'atmosphère est calme sauf dans le couloir d'entrée. Pas de Chauves-
Souris, ni de guano, mais quelques élytres d'msectes capturés par ces ani-
maux. Des débris de bois de pin jonchent le sol ainsi que quelques sque-
lettes anciens de moutons. Sur une flaque d'eau nageait le cadavre
d'un Hanneton couvert de Champignons. Sur les os et le bois pourri, des
Collemboles sauteurs, des Anurides et des Diplopodes.
Cova pintada située au fond du barranco del Toscal (ou Toscar),
termino municipal de Alfara, n'est qu'un vaste abri sous roche creusé
par des chutes sur le trajet d'un torrent hivernal. Elle ne renferme aucune
peinture ; le nom lui vient des bariolages produits par des algues de cou-
leurs variées.
PuiG Y Larraz (1896, p. 314) la place à tort dans la commune de
Pauls.
Grotte voisine de la Cueva pintada. A quelques centaines de mètres
plus haut, on voit l'ouverture d'une grotte qui sert de bergerie et qui
possède une salle demi-obscure sans faune troglobie.
Lucheros (ou Lujeros) del Viento, plus bas que la Cueva pintada, sont
des ouvertures étroites par où sort un vent violent.
Quelques trous de grottes, probablement peu profondes, s'observent
sur le versant opposé.
Breuii..
GROTTES VISITÉES 327
646. Cueva de Valporquero.
Située à 250 m. du village de Valporquero, termino municipal de
Vegacervera, partido de la Vecilla, provincia de Léon, Espagne. — Alti-
tude : 1.800 m. env. — Roche : Calcaires dévoniens. — Date : 23 mai 1915.
Matériaux : Coléoptères, Hémiptères, Perlides, Collemboles, Myria-
podes, Aranéides, Opilionides, Acariens, Isopodes. — Numéro : 791.
De la station de Matallana on suit la carretera pendant 6 km. jusqu'à
Felmin, d"où un sentier mène en 1 h. 15 m. à la cueva. On se trouve en
présence d'une vaste doline ovalaire. A une extrémité sort de terre un
fort ruisseau qui s'engouffre à l'autre extrémité dans une grotte dont
rentrée a 50 m. env. de large. Le ruisseau suit une galerie, encom-
brée de rochers effondrés, rectiligne, fortement é rodée par les crues, que
jai suivie sur 400 m. env. Dans la paroi de gauche, une ouverture donne
accès dans une salle irrégulière de 300 m. env. de longueur, haute de pla-
fond et difficile à parcourir à cause des rochers qui l'encombrent, et de
l'eau qui inonde le sol. Sur la di'oite est un grand massif stalagmitique
que je n'ai pas exploré.
Les gens du pays prétendent qu'il faut 6 à 7 heures pour explorer les
galeries de cette grotte ; ils croient que la sortie du ruisseau se fait à
3 km. plus loin et à 400 ou 500 m. plus bas, par la cueva Fusfulga qui serait
impénétrable.
L'agitation de l'air est notable dans la galerie de la rivière. Pas
de Chauves-Souris ni de guano. Débris ligneux entraînés par les crues et
déposés le long des parois. Beaucoup d'Insectes lucicoles ont été recueillis,
ainsi que des animaux aquatiques non troglobies, qu'ont entraînés les
crues de la rivière.
Mina de la Sierra de las Cabras. Cette soi-disant cueva est située à la
cime de la sierra de las Cabras, termmo municipal de Agramon, partido
de Hellin, provincia de Albacete, Espagne. Ce sont en réahté des galeries
de mines creusées dans les grès triasiques et peu importantes à en juger
par les déblais accumulés à l'entrée. Les habitants des villages voisins
racontent sur ces cavités mille histoires invraisemblables, trésors cachés,
réservoirs d'eau, etc. Je doute qu'on puisse avancer de plus de 20 m. dans
les galeries effondrées.
Breijil.
328 R. JEANNEL ET E.-G. BACOVITZA
647. Caverna de San Roman de Candamô.
Située au sommet du « cerro de la Pefia >> qui domine le village de
►San Roman, termine municipal de Candamô, partido de Pravia, pro-
vincia de Oviedo, Espagne. — Altitude : 60 m. env. — Roche : Calcaires
dévoniens. — Date : 29 mai 1915.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Trichoptères, CoUemboles, Myria-
podes, Aranéides, Opilionides, Isopodes, Ostracodes, Mollusques. —
Numéro : 792.
Des peintures préhistoriques ont été découvertes par le Professeur
Pacheco dans cette grotte que Puig y Larraz (1896, p. 257) cite
dans son catalogue. L'entrée étroite, cachée par les broussailles,
s'ouvre à l'ouest. Un couloir descendant suit, pourvu à gauche d'une
petite salle sèche mais avec flaques d'eau sur le sol. Des Oniscus asellus L.
et des Bathysciinés l'habitent. A droite, une descente raide mène dans une
salle encombrée de rochers éboulés et de pierrailles sèches, salle dont un
diverticule revient vers la surface et aboutit à une ancienne issue bouchée .
A droite également, un puits donne accès dans une petite chambre que
je n'ai pas explorée.
Le couloir principal, assez haut près de l'entrée, forme un coude
élargi à droite, puis tourne à gauche et franchit une rampe stalagmi-
tique. On pénètre ainsi dans une salle oblongue de 20 m. sur 30 m. env.
avec une colonne stalagmitique et des bornes à gauche et une dépression
à fond argileux à droite ; au fond, à gauche, sont des massifs stalagmitiques
peu accessibles. Les Bathysciinés sont communs depuis la rampe stalag-
mitique et abondent dans toute la salle, surtout à gauche.
Un passage étroit, élargi à la mine, s'ouvre au fond ; il conduit dans
un diverticule court, étroit et bas, où les Bathysciinés sont nombreux
sous les pierrailles.
L'air est calme partout. Débris végétaux et un peu de guano. Des
débris de noix étaient couverts de Bathysciinés. De grosses Meta gîtaient
près de l'entrée ; les Troglobies proviennent de la salle profonde.
De l'autre côté de la Pena, il y a un puits qui probablement est en
rapport avec la grotte.
Breuil.
GROTTES VISITÉES 329
648. Cuevas de Quintanal.
(Seconde exploration, voir Biospeologica XXIV, p. 594)
Situées au lieu dit Balmori, près du hameau de Quintanal, termino
municipal et partido de Lianes, provincia de Oviedo, Espagne. — Alti-
tude : 30 à 40 m. env. — Roche : Calcaires carbonifères. — Date : 31 mai
1915.
Matériaux : Coléoptères, Myriapodes, Aranéides, Ixodes, Isopodes. —
Numéro : 793.
Sous ce nom j'ai réuni trois petites grottes très voisines dont la faune
est certainement identique. D'ailleurs, les grottes sont si nombreuses
à l'ouest de Lianes, dans la région de Posada, que le massif calcaire est
une véritable « éponge ». L'orientation de la vallée du Sella vers Oviedo
a dû faciliter la diffusion de la faune qui doit être très uniforme dans toute
la région à l'ouest de Lianes.
J'ai exploré cette fois aussi une grotte à l'ouest des deux précédem-
ment décrites. C'est une caverne formée par trois couloirs parallèles
réunis par des couloirs transversaux. Le couloir médian communique
avec l'extérieur, les autres ont leur entrée bouchée. La faune est la même
que celle des deux autres grottes.
Breuil.
649. Toscal de Cueto de la Mina.
Située au lieu dit Cueto de la Mina, près de la grotte de ce nom, à
Posada, termino municipal et partido de Lianes, provincia de Oviedo-,
Espagne. — Altitude : 35 m. env. — Roche : Calcaires crétaciques (?).
— Date : 31 mai 1915.
Matériaux : Coléoptères, Trichoptères, Myriapodes, Aranéides,
Opilionides, Mollusques. — Numéro : 794.
On pénètre dans la grotte par un trou situé au bord du plateau. Des-
cente fa.cile si l'on dispose d'une corde de 5 m. Au fond du trou, il y avait
une issue donnant sur la tranche du plateau ; cet orifice est comblé
par des dépôts préhistoriques.
Une salle de 25 m. env. de diam., claire, est la première cavité qu'on
330 7?. JEANNEL ET E.-G. BACOVITZA
rencontre. Cette salle présente les diverticules suivants de gauche à
droite :
Un couloir horizontal sec de 30 à 40 m. env.
Un couloir de 30 m. env. très descendant, encombré de blocs de grès
et à sol sableux, aboutissant à un torrent qui doit l'envahir par temps de
crue. Les Araignées et les Phryganes y sont très nombreuses.
Un couloir accidenté, ascendant, un peu ramifié, de 50 m. env., en
général sec et sans ressources alimentaires. Quelques bornes stalagmi-
tiques sont humides. Recueilli un Bathysciiné et une larve de Coléoptère.
Enfin un quatrième couloir, large, ascendant, de 50 m. env., aboutis-
sant à un amas de coquilles préhistoriques obstruant une ancienne sortie .
Ce couloir peu humide héberge des Araignées et des Lithobies.
Pas de Chauves-Souris ni de guano.
Breuil.
650. Cueva de Cebellin.
Situez au lieu dit Burcia, aldea de Posada, monte la Liera, termino
municipal et partido de Lianes, provincia de Oviedo, Espagne. — Alti-
tude : 45 m. env. ■ — Roche : Calcaires crétaciques ( ?). — Date : 31 mai 1915.
Matériaux : Coléoptères, Myriapodes, Isopodes, Mollusques, Laboul-
béniacées (sur Coléoptères). — Numéro : 795.
Dans une dohne, dont le fond est occupé par une prairie, l'entrée s'ouvre
très vaste, ce qui fait que la première salle, de 30 m, env., est claire
et abrite des Saxifrages et des Fougères. A gauche, un étroit couloir
récurrent n'a pas été exploré. Au fond, à gauche, un couloir obscur,
ascendant, coudé ensuite, à sol boueux et couvert de pierres et de bouses
de vaches, s'étend sur 50 m. env. De nombreux Ceuthosphodrus y
furent recueillis ainsi que quelques Lithobies.
Au fond à droite, une large galerie mène à l'extérieur. Les pierres
reposant sur sol humide abritent des Trichoniscides.
A droite s'étend un couloir sec peu profond.
Cueva La Mora, située au sommet de la sierra del Castillo, sur le ter-
mino municipal de Herguijuela de la Sierra, partido de Segueros, provincia
de Salamanca. C'est une petite caverne (20 m. de longueur) creusée dans
des quartzites, vers 1.200 m. env. d'altitude. Des millions de petits mou-
GROTTES VISITÉES 331
cherons étaient posés sur les parois ; ils s'envolèrent lorsque je pénétrai
dans la grotte et le tourbillonnement de leurs troupes serrées me rendit
le séjour dans la grotte impossible.
Breuil.
651. Cueva de Masaculos II.
(Seconde exploration, voir Biospeologica XXIV, p. 595)
Située dans le vallon même qui aboutit à la plage de la Franca, ter-
mine municipal de Pimiango, partido de Lianes, provincia de Oviedo,
Espagne. — Altitude : 25 m. env. — Roche : Calcaires, carbonifères. —
Date : l^r juin 1915.
Matériaux recueillis par M. H. Breuil : Coléoptères. — Numéro 796.
652. Grotte de Nancy.
Située à l'angle du vallon du Boulet, près de Viel-Mouly, commune de
Sireuil, canton de Saint- Cyprien, département de la Dordogne, France.
— Altitude: ( ?) m. — Roche: Calcaires crétaciques. — Date : 11 août 1915.
Matériaux : Aranéides. — Numéro : 797.
L'entrée donne accès dans un vestibule clair au fond duquel débouche
un couloir étroit et bas qui aboutit dans une salle à sol fortement ascen-
dant et argileux, à plafond incrusté, d'où l'eau ruisselle. La longueur totale
est d'environ 50 m.
De nombreuses Meta (Aran.) étaient installées dans le vestibule.
Breuil.
653. Grotte de Bénivet.
Située au lieu dit Bénivet, commune de Sireuil (?), canton de Saint-
Cyprien, département de la Dordogne, France. — Altitude : (?) m. — Roche :
Calcaires crétaciques. — Date : 14 août 1915.
Matériaux : Trichoptères, Myriapodes, Mollusques, — Numéro : 798
Grotte très compliquée, à plusieurs issues, et formée par les cavités
suivantes : Un couloir ascendant depuis l'entrée, s'ouvrant au pied d'une
ARCH. de ZoOL. Exp. et GÉN. — ï. 57. — 1'. 3. 22
332 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
petite falaise, qui se continue par un couloir dont les quatre ramifications
mènent à l'extérieur par des orifices plus ou moins accessibles.
Un couloir descendant d'un trou du plateau, aboutissant à un à-pic
de 6 ni; ëiiv. (corde nécessaire) au delà duquel on trouve une salle arron-
die où débouche un couloir accidenté à remplissage argilo-sableux et une
petite salle en contre-bas, humide, argileuse et incrustée. C'est de cette
dernière que proviennent les animaux récoltés.
Pas de Chauves-Souris ni de guano, mais des crottes isolées.
Standè Gï'btté de Vifel-Mbuly. Située âU liëû dît Viel-Môu!y, commune
de SifeUil. t3'est uhe grotte de ât)t)m. env., formée par un couloir jîï'încî-
pal ouvert aux deux bouts, ce qui provoque un courant d'air Violeiit, et
pài^ un couloir latéral rempli d'eàù jpeu profonde.
Grotte du pilier de Beyssac. Je donne ce nom à une grotte située un peu
en amont du château de Beyssac, commune de Sireuil, grotte qui
possède une triple entrée dont la plus vaste est marquée par un grand
pilier rocheux. Un couloir de 100 m. env. de longueur s'étend parallè-
lement au bord de la falaise et possède trois autres entrées sur la
falaise. Il en résulte des courants d'air qui assèchent complètement la
grotte.
Il existe plusieurs grottes sans noms entre la grotte précédente et le
château de Beyssac. L'une, avec sol argileux, va assez loin ; je l'ai suivie
sur 50 m. env. et j'ai été arrêté par un détroit. La plupart de ces cavernes
sont accessibles par en bas ; l'une ne l'est que par le haut. ]Presque toutes
sont très sèclies et sans faune.
En aval du château de Beyssac, il existe encore plusieurs galeries,
dont l'une de 40 m. env., mais également sèches et sans faune.
Lés falaises en face, entre le moulin de Cardène et la région en face
Viel-Mouly, possèdent plusieurs cavernes masquées par le bois, dont
quelques-unes de 20 à 40 m. de longueur. Elles sont sèches, habitées par
de grosses Araignées, mais ne possèdent pas de Troglobies.
Grotte du château de Ciomarque, commune de Sireuil, située sous ce
château ruiné et s'ouvrant dans le grand abri sous roche. C'est une petite
caverne tortueuse, de 24 m. env., ornée de sculptures paléolithiques et qui
fut habitée au moyen âge. Dans le même abri s'ouvre un petit couloir.
De l'autre côté du vallon, il y a une grotte accessible sur 15 m. env.
d'où sort un petit ruisseau.
Breuil.
GROTTES VISITÉES 333
654. Grotte des Blaireaux de la Mazardie.
Située dans le rocher, entre la Mazardie et la Jaumarie, commune de
Cubjac, canton de Savignac-les-Églises, département de la Dordogne,
France. — Altitude : (?) m. — Roche : Calcaires crétacés (1). — Date :
28 août 1915.
Matériaux : Aranéides, Mollusques. — Numéro : 799.
Je nomme ainsi une petite grotte qui possède à flanc de falaise une
entrée basse, en partie obstruée par les fouilles des Blaireaux et une autre
entrée sur le plateau, qui est un puits de 15 m. de profondeur. Une salle
allongée constitue la grotte ; le sol argileux est bouleversé par les Blaireaux
et couvert d'ossements d'animaux domestiques.
Une autre grotte peu profonde existe en aval de la Mazardie ; elle
est incrustée mais sèche et n'a pas fourni de Troglobies.
Breuil.
655. Grottes du Souci.
Situées au lieu dit château de Puyol-Faure, commune de Cubjac,
canton de Savignac-les-ÉgHses, département de la Dordogne, France.
— Altitude : (?) m. — Roche : Calcaires crétaeiques. — Date : 28 août 1915.
Matériaux : Coléoptères, Lépidoptères, Diptères, Trichoptères, Thy-
sanoures, Myriapodes, Aranéides, Opilionides, Isopodes, Amphipodes, Mol-
lusques, Oligochètes, Hirudinés, Planaires, Champignons. — Numéro : 800.
Il y a trois grottes voisines de la grille de la propriété du Puyol-Fam-e ;
1. La grotte supérieure dans le parc, voisine du kiosque rustique.
C'est une galerie large, sèche, non ramifiée, aboutissant à un puits de 6 m-
env. de profondeur dans lequel on jette des détritus végétaux. Sa
longueur est de 30 m. env. et l'obscurité n'est nulle part complète.
2. La grotte moyenne se trouve au niveau de la route. Son entrée
divisée entre les propriétés Pouyadou et Breuil est utilisée comme cave
et fermée à clef. Le vestibule peut avoir une dizaine de m. de la^ige sm* 20 m.
de profondeur et son sol est jonché de débris de verre et de tuiles qui
reposent sur de l'argile peu humide. A gauche et au centre, s'amorcent
plusieurs couloirs peu profonds ; à droite, galerie avec diverticule récur-
rent allant vers une ouverture colmatée.
334 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Dès rentrée, les petits bouts de bois flottés en temps d'inondation,
épais et peu nombreux, attirent les Glomérides, Hyalines et Campodéides.
Les Aranéides sont rares ainsi que les Lithobies.
La galerie s'enfonce par sa branche non récurrente sur 75 m. env.,
en général étroite et basse, mais par place élargie. Le sol est argileux,
assez humide et couvert de débris végétaux.
3. La grotte inférieure est une goule, perte partielle de l'Auvé-
zèn, et n'est accessible qu'aux très basses eaux. Un moulin était anté-
rieurement installé sur le ruisseau. On prétend que la résurgence se fait
à 4 km. plus loin, à Saint- Vincent.
On pénètre dans la grotte, soit par la rivière sur une arche maçonnée
soit par l'escalier intérieur de l'ancien moulin, domicile de M. Roland.
Quoiqu'il en soit, il faut passer dans l'eau de la saignée, qui est rapide
mais peu profonde. On avance avec de l'eau à mi-jambe dans une
vasque garnie de blocs constituant un défilé rétréci. On passe, devant
quelques diverticules de la paroi de droite qui sont récurrents, sur une
autre perte qui ne fonctionnait pas ce jour-là. Parmi les flaques d'eau
rencontrées plus loin, de nombreux débris Ugneux. Puis la galerie s'élar-
git jusqu'à 10 m. env. de large et 4 m. env. de haut ; on peut constater
que le niveau des hautes eaux dépasse 3 m. 5.
Ensuite la galerie tourne à gauche. En face, un grand amas de brancha-
ges et de matériaux ligneux divers forment bouchon dans un diverticule.
Un peu plus loin, se trouvent des vasques profondes et poissonneuses.
La galerie tourne de plus en plus à gauche, le plafond s'abaisse ; on avance
sur les genoux sur une litière de débris végétaux ; des arbres, des madriers,
des ustensiles de cuisine ont été également entraînés par les crues. Le
long de la paroi de droite, de très petites cuvettes sont habitées par de
nombreux aquatiques.
Un diverticule terminé par un point d'absorption creuse la paroi de
droite et, toujours tom'nant à gauche, on aboutit à un orifice externe
impénétrable par où l'eau doit entrer aussi en temps de crue.
L'agitation de l'air est faible. Ni Chauves-Souris ni guano. Débris
végétaux en énorme quantité. Sur un cadavre de porc je n'ai rien trouvé.
Dans la région de la première vasque gîtent de nombreuses Araignées
et des Némocères. Dans les débris végétaux les animaux sont très nom-
breux et variés, mais presque tous des lucicoles entraînés par les crues.
Breuil.
GROTTES VISITÉES 335
656. Cueva del Berrueco,
(Seconde exploration, voir niOSPEOLOCUCA XXXIII, p. 357)
Située sur le versant sud-est du cerro Berrueco, termino municipal
de Ubrique, partido de Grazalema, provincia de Cadiz, Espagne. — Alti-
tude : 700 m. env, — Boche : Calcaires jurassiques. — Dafe : 13 avril 1916.
Matériaux : Coléoptères, Myriapodes, Aranéides, Acariens, Isopodes,
Mollusques, Laboulbéniacées (sur Trechtis fulvus Dej.). — Numéro : 801.
Le Berrueco, cerro calcaire isolé, prolongement de la sierra de Libar,
paraît creusé de nombreuses grottes plus ou moins colmatées. Au voisi-
nage de la cueva del Berrueco, au pied du cerro, il y a des puits bouchés
par des broussailles qu'on y a jetées. Il paraît qu'après de grandes pluies
l'eau en surgit temporairement.
Il y a des Chauves->Souris et du guano dans la galerie de droite.
Les Armadillides furent trouvés au pied de l'échelle d'entrée et sous
les pierres voisines. Avec d'autres Troglobies, dans les débris et le guano
qui jonchent le sol de la galerie de droite, vivent quelques Trechus fulvus
Dej. et une espèce microphthalme du genre Choleva représentée par un
très grand nombre d'individus qui semblent avoir le même comportement
que les Bathysciinés.
Breuil.
657. Grande Caverne du Berrueco.
Située sur le versant est du cerro Berrueco, termino municipal de
Ubrique, partido de Grazalema, provincia de Cadiz, Espagne. — Alti-
tude : 750 m. env. — Roche : Calcaires jurassiques. — ■ Date : 13 avril
1916.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Aranéides, Isopodes. — Numéro :
802.
L'entrée s'ouvre dans une paroi verticale ; elle a été rendue accessible
par un chercheur de trésors de Ronda qui y a placé un arbre. Le vesti-
bule est petit et rond ; le guano à moitié sec qu'on y trouve héberge de
nombreux Staphylins et Cloportes. Ensuite le sol dévale vers un gouffre
oblique oii les pierres roulent 8 à 10 secondes et paraissent tomber sur la
terre molle. A droite, on a placé deux troncs d'arbres qui facilitent l'accèti
336 i?. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
d'un couloir latéral sec, plusieurs fois coudé, avec à-pic de 2 m. à chaque
bout et qui se continue par un couloir parallèle à l'entrée, fortement des-
cendant à gauche vers un second abîme oblique, pourvu à droite d'un
puits vertical. J'ai attaché une corde de 45 m. à une borne rocheuse et
j'ai exploré le gouffre sur cette profondeur. Au delà du point où je me suis
arrêté, le gouffre paraît continuer sur 40 m. env. de profondeur; les pierres
tombent sur de la terre molle. Je crois que les deux gouffres communi-
quent par leur région inférieure.
Pas de flaques d'eau. Nombreuses Chauves-Souris et beaucoup de
guano. Atmosphère calme. -r.
^ ^ BREuni.
658. Grotte de la Tour Combes.
Située à l'est de la route d'Oran à Misserghin, au lieu dit « la Tour
Combes », commune de Misserghin, département d'Oran, Algérie. —
Altitude : 100 m. env. — Roche : Calcaires (?). — Date : 12 juin 1914,
Matériaux : Coléoptères, Copéognathes, Isopodes. — Numéro : 803.
La grotte s'ouvre par un orifice au ras du sol, masqué par un figuier,
à 100 m. environ au nord de la Tour Combes. On descend facilement par
un petit cône d'éboulis dans une salle arrondie, large de 25 m. à 30 m.,
à sol inégal et toute encombrée de blocs et de massifs stalagmitiques.
Cette salle est produite par un tassement local et peut-être fort ancien
des strates. On y a exploité un gisement de minervite.
La grotte est éclairée presque entièrement et sèche ; l'air y est calme.
Pas de Chauves-Souris ; ni Lépidoptères, ni Diptères sur les parois. Dans
un petit bas-fond à droite, quelques débris végétaux gisaient sur l'argile
sèche et craquelée couverte de cailloutis. Ici se tenaient quelques ani-
maux : Staphylinides, Carabiques, grands Isopodes, Copéognathes. Les
Psoques, aptères ou ailés, couraient sur les débris végétaux et les petits
cailloux en très grand nombre.
® Jeannel.
659. Caverne de TAIdour.
(Fifi. 37)
Située à 200 m. des Bains de la Reine et à 10 m. au-dessus de la route
de Mers-el-Kébir, commune d'Oran, département d'Oran, Algérie. —
Altitude : 35 m. — Roche : Dolomies liasiques. — Date : 14 juin 1914.
GROTTES VISITÉES
337
Matériaux : Diptères, Pupipares, Trichoptères, Copéognathes, Myria-
podes, Acariens. — Numéro : 864.
Découverte en décembre 1911 par les carriers de ^ainte-Clotilde ,
cette curieuse grotte a été Tobjet d'une étude approfondie au point de
vue physique et géologique par 0. Aramboueo (1012, p. 403-409, pi.
Pio. 37. Croquis de la Caverne de l'Aïdour (n» 659) d'après le plan d'AKAMBdSRa et nos annotations; longueur
totale : 200 mètres environ.
XXXV et XXX vi), étude à laquelle je ferai de larges emprunts dans la
description qui va suivre. C'est d'ailleurs accompagné de M. C. Arambourg
que j'ai eu la bonne fortune de visiter la caverne de l'Aidour.
La grottp s'quvi'e à 3 km. 500 d'Oran, à 10 m. au-dessus de la route
de Mers-el-Kébir, dans une carrière. Une première entrée fut murée peu
après son ouverture en décembre 1911 ; la nouvelle entrée, ouverte en
1912, donne accès par une descente de 6 m. 50 à pic dans une vaste salle
(A), longue d'une quarantaine de mètres et orientée N.-S. Cette salle est
338 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
très concrétionnée et en partie occupée par de grands éboulis terreux. Au
nord se détache un petit boyau descendant ; à l'ouest, au pied de l'orifice
obstrué de la première entrée se trouvait en 1912 un petit bassin plein
d'eau, mais absolument asséché en 1914.
Au sud, la salle A se continue par un couloir stalagmite qui donne
accès aux deux salles profondes (B et G) ; de grosses colonnes dont plu-
sieurs sont brisées encombrent ce couloir.
Le sol des deux salles B et C présente une pente générale d'environ
30», à plongement sud ; leur voûte s'abaisse rapidement vers le fond où
ces deux salles prennent la forme d'étroites fentes obliques, encore incom-
plètement explorées. Une quatrième chambre (D), ascendante, fait suite
à la salle C, à l'ouest. Toutes les parois des salles B et C sont tapissées
de concrétions d'une blancheur étincelante et leur sol est recouvert d'un
dépôt pulvérulent, blanc comme neige, sur lequel je reviendrai plus loin.
Le développement total de la grotte est de 200 m. environ.
Dans les salles B et C on s'enfonce à une profondeur verticale assez
grande ; le point le plus bas de la salle C, d'après C. Arambourg, se trouve
à 8 m. seulement au-dessus du niveau de la mer. De plus, il existe dans ces
salles B et C et particulièrement dans les fentes terminales plusieurs cre-
vasses qui communiquent librement avec le système des eaux thermales
alimentant les Bains de la Reine. De la vapeur d'eau chaude s'élève par ces
crevasses et entretient dans toute la grotte une température très élevée.
Deux de ces évents seraient pénétrables, s'il était possible d'affronter la
température élevée des vapeurs qui s'en échappent. Quoiqu'il en soit une
sonde a pu être descendue de 6 m. par C. Arambourg dans un évent de la
partie la plus basse de la salle C, c'est-à-dire à 2 m. seulement au-dessus du
niveau de la mer. On sait que le niveau hydrostatique de l'eau thermale à
l'émergence des Bains de la Reine est un peu inférieur au niveau de la mer.
Une des particularités très remarquables de la caverne de l'Aïdour
est donc sa température élevée. Celle-ci devait être plus considérable
encore lorsque la grotte était fermée ; elle a d'ailleurs notablement
diminué depuis son ouverture.
Le 18 août 1912, c'est-à-dire peu après l'ouverture de la deuxième
entrée, C. Arambourg a observé les températures suivantes :
A l'entrée 33° C.
En haut de la salle B 36^0.
En bas de la salle B 37» C.
Au point le plus bas de la salle C 42» C.
GROTTES VISITÉES 339
Le l^'" septembre 1912, d'après le même auteur, ces températures
avaient déjà baissé de 1» C, sauf auprès des évents.
Le 14 juin 1914 j'ai observé les températures suivantes :
A l'entrée 24o C.
Dans la salle A 26° C.
En haut delà salle B 28° 5 C.
En bas de la salle B SP C.
Comme on le voit, en deux années la température a baissé beaucoup
dans toute la grotte.
Il est probable que l'humidité de l'air a de même considérablement
diminué depuis que la grotte communique avec l'extérieur ; il existe en
phisieurs endroits de la salle A des bassins stalagmites aujourd'hui assé-
chés, mais où se voient nettement les niveaux d'anciennes nappes d'eau
dont plusieures ont dû être importantes.
Les concrétions qui revêtent les parois de la grotte de l'Aïdour se
sont formées dans des conditions physiques très spéciales et par suite
revêtent des caractères assez extraordinaires. C'est ainsi qu'on observe
des stalactites en limonite et des revêtements d'aragonite en très beaux
prismes hyalins « terminés ». C. Arambourg (1912, p. 407) a fait de
ces concrétions une étude minéralogique détaillée, ainsi que, du curieux
dépôt pulvérulent d'un blanc de neige qui couvre le sol des salles
B et C ; ce dépôt serait constitué par une dolomie très magnésienne,
résidu des solutions des carbonates après cristallisation de l'aragonite ;
il tombe de la voûte à l'état de poudre grumeleuse et s'accumule sur le
sol.
Aucun être vivant n'existait probablement dans la caverne de l'Aïdour
avant son ouverture, lorsque la température y dépassait peut-être 50° C.
En juin 1914 quelques Chauves-Souris habitaient la caverne et sem-
blaient s'accommoder très bien d'une température de 28° C.
Dans la salle A, des Copéognathes erraient sur les pierres et de petits
Diptères se tenaient accrochés aux stalactites. Ces Diptères étaient sur-
tout abondants dans le couloir stalagmite, à 26P et 28" C.
Enfin dans la salle B, jusque dans ses parties les plus chaudes, les
stalactites de la voûte étaient parsemées de coques de Nyctéribies, bru-
nâtres et à surface brillante. J'ai recueilli d'ailleurs plusieures jeunes Nyc-
téribies venant d'éclore.
Jeannel.
B4Q B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
660. Poudac gran.
(Troisiônic exploration, voir BIOSPEOLOGICA XVI, p. 91 ot XXXTII, p. 408)
Situé au lieu dit Bidaugé, commune d'Arbas, canton d'Aspet,
département de la Haute-Garonne, France. — Altitude : 725 m. env.
— Roche : Calcaire jurassique. — Date : 4 juillet 1914.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Trichoptères, Collemboles, Myria-
podes, Aranéides, ûpilionides, Isopodes, Mollusques. — ^ Numéro : 805.
Les animaux ont été recueillis surtout dans les débris ligneux en bas
de la première salle. Des Stenasellus se tenaient sur les morceaux de bois
immergés dans les goura de la grande salle stalagrnitée.
Jeannel.
6Q1. Qù^e\\ ai Her
(Sjifiême visite, voir BiQSP|!Q;,pçi;cA XYI, p. 86, XXIV, p. 545, et XXXHI p. 403)
Situé au lieu dit Gourgue, commune d'Arbas, canton d'Aspet, dépar-
tement de la Haute-Garonne, France. — Altitucje ; 470 m, e^v. — Boche :
Calcaires liasiques, ■ — Date : 5 juillet 1914.
Matériaux : Coléoptères, Laboulbéniaoées (sur A.pihO'enQfa Ehlersi
As.)- — Numéro : 806.
J'ai eu la chance de laire cette visite fiu Goueil di Her, ayec \& copite
Begouen et ses fils, immédiatement après une éruption ; nous avons pu
de la sorte faire diverses observa-tioTis qui jetterit uiie pleine lumière sur
le mode de fonctionriement de cette curieuse résurgence intermitte^ite.
Le Goueil a coulé très fort le 3 et le 4 juillet et a cessé de couler dans la
nuit du 4 au 5 ; nous Fftvous visité dans la matinée du 5 juillet.
Dans le thalweg devant la grotte, les traces du niveau 4p l'ef^li étiaient
bien visibles au-dessus du bord supérieur de l'orifice, preuve que l'eau
a coulé remplissant complètement cet orifice et qu'elle doit jaillir paf là
et non entre les rochers du thalweg, comme je l'avais supposé aw cours
de précédentes explorations.
Au pied de l'échelle, la petite salle en coutreTbas était pleine d'eau.
Toute la galerie inférieure avait manifestement été fempUe d'eau
jusqu'à la voûte, comme en témoignaient les dépôts de mousse torren-
tielle sur le plafond ; mais cette eau avait été calme et nullement
GROTTES VISITÉES 341
sous pression, car tout était en place et les masses d'argile avaient gardé
leurs anciennes formes. Il existait encore sur le sol de grandes flaques
d'eau qui se vidaient avec rapidité ; l'une d'elles contenait un mètre cube
d'eau et s'est complètement vidée sous nos yeux en deux heures.
L'escarpement franchi pour accéder à la galerie supérieure, nous avons
été vite arrêtés par un lac profond, barrant le passage et remplissant la
galerie à mi-hauteur. Ce lac se vidait lentement par les fentes en produi-
sant des bruits sonores. L'eau avait dû peu auparavant mouiller la voûte ;
elle y avait d'ailleurs laissé des dépôts.
Dès notre entrée dans la galerie inférieure nous avions été frappés
par un bruit violent de cascade vers le fond de la grotte ; nous entendions
la chute des eaux dans la grande glissière du fond, eaux qui dévalaient
dans les galeries nouvelles et dans le lac de la galerie supérieure. Nous
avons assisté au brusque arrêt de cet écoulement, arrêt qui a dû être
suivi du vidage du lac et de la baisse de tous les niveaux d'eau. En effet,
pendant la matinée, nous n'avons pas constaté de baisse sensible au pied
de l'écheUe (oii l'eau donne manifestement le niveau de la rivière souter-
raine) ni dans le lao supérieur ; mais l'après-midi, vers 16 heures, ces deux
niveaux avaient baissé d'un mètre.
Il résulte donc de ce qui précède que les galeries du Goueil di Her se
remplissent bien d'eau en entier, jusqu'à la voûte et jusqu'au niveau de
l'orifice de la grotte. Mais c'est un remplissage progressif par des eaux
calmes, sans courant et nullement sous pression. Il en résulte que la très
riche faune de Troglobies qui peuplent le Goueil a le temps de fuir en
s'élevant dans les cheminées et les fentes sans risquer d'être projetés
au dehors par les eaux. Dès la fin de la crue ils redescendent le long des
parois à la recherche des nombreux débris que les eaux y ont déposés.
C'est ainsi que nous avons recueilli des AyTiaeno^ps (Col.), des Trichoniscus
(Tsop.), des Collemboles et des TyjMoblaniulus (Diplop.) ; ces deux der-
niers groupes étaient cependant moins abondants que d'habitude.
Un fait intéressant à noter est que les cinq Aphaenops recueillis
appartiennent à l'espèce A. Ehlersi Ab. ; or les A. Cerberus Dieck et A.
Proserpina Jeann. habitent aussi le Goueil et même se trouvent en temps
ordinaire bien plus communément ; ils faisaient complètement défaut
après la crue. On sait d'ailleurs que VA. Ehlersi appartient à un petit
groupe d'espèces pubesoentes, toutes très rares, qui paraissent habiter
seulement les régions souterraines soumises à des inondations périodiques.
Jeannel.
342 E. JEANNEL ET E,-G. RACOVITZA
662. Grotte de Gourgue.
(Cinquiènifi visite, voirBiosPEOLOGiCA XVI, p. 88, XXIV, p. 546, et XXXIII, p. 407)
Située au lieu dit Gourgue, commune d'Arbas, canton d'Aspet, dépar-
tement de la Haute-Garonne, France. — Altitude : 496 m. env. — Roche :
Calcaires liasiques. — Date : 5 juillet 1914.
Matériaux : Coléoptères, Myriapodes, Chernètes. — Numéro : 807.
Cette petite grotte avait été bouleversée à coups de pioche peu avant
notre visite, vraisemblablement par un entomologiste à la recherche des
intéressants Psélaphides (Col.) que j'y avais signalés. Leur station sera
peut-être détruite pour plusieurs années !
Jeannel,
663. Grotte de l' Espagne.
(FiG. 38)
(Seconde exploration, voir Biospeologica VI, p. 343)
Située à une demi-heure au S. du village, dans le ravin qui s'ouvre
derrière la chapelle, commune de Saleich, canton de Salies-du-Salat,
département de la Haute-Garonne, France. — Altitude : 540 m. env. —
Roche : Calcaires crétaciques supérieurs. — Date : 6 juillet 1914.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Pupipares, Trichoptères, Thysa-
noures, CoUemboles, Myriapodes, Aranéides, Opilionides, Acariens,
Isopodes, Mollusques, Oligochètes. — Numéro : 808.
M. le comte Begouen et ses fils m'ont aidé dans l'exploration de cette
grotte et des deux suivantes.
La grotte commence par un vaste vestibule clair dont l'entrée est
barrée par des buissons. Le sol y est uni, formé d'humus, avec de grosses
pierres, A droite, l'escalade d'une pente stalagmitique conduit dans un
couloir encore éclairé par la lumière du jour ; dans sa paroi gauche s'ouvre
la chatière qui donne accès aux salles profondes et obscures, formant
deux étages superposés.
On descend d'abord par une coulée stalagmitique dans une salle
ronde, très concrétionnée, où il a été recueilli de nombreux ossements
d'Ours des cavernes et de Renne. Le sol est argileux, détrempé, avec de
nombreuses pierres, A l'opposé de la chatière, la salle ronde se continue
par un couloir stalagmite ou plutôt une crevasse perçant le plafond de
GROTTES VISITÉES
343
4C]Mf
l'étage inférieur ; cette crevasse est facile à franchir en s'aidant des bornes
stalagmitiques. Au delà on atteint une vaste galerie encombrée d'éboulis
secs et qui ter-
mine l'étage su-
périeur de ' la
grotte.
Près de l'ori-
gine de cette ga-
lerie et à gauche,
s'ouvre l'entrée
de l'étage infé-
rieur. On descend
peu à peu sur un
sol argileux et
humide, on passe
sous la crevasse
et on arrive à une
salle concrétion-
née en bas de la-
quelle coule mi
ruisselet. Ce ruis-
selet se perd dans
une fente et ga-
gne une cham-
bre entièrement
pleine d'eau que
j'avais pu attein-
dre dans une pré-
cédente visite,
mais à laquelle on
ne peut accéder
aujourd'hui à
cause du niveau
élevé des eaux.
La coulée stalagmitique qui contenait trois squelettes humains a
été démolie à coups de pic depuis ma première visite.
Le développement total de la grotte atteint 150 m.
La température de l'air dans l'étage inférieur est de 1 1°5 C.
ce inkncur
i : Fentt jauant corrimuniaufi
?e saper Leur
Fio. 38. Croquis schématique de la Grotte do l'Espugae (a° 663) ; longueur tatea i
150 mètres environ.
344 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Les Chauves-Souris grégaires étaient abondantes à la voûte dans la
grande galerie, devant l'entrée de l'étage inférieur, et avaient déposé
en cet endroit, sur l'argile humide, d'épaisses couches de guano.
Sous les pierres du vestibule se tenaient des Laetuostenus (Col.).
Dans la salle ronde, sous les pierres reposant dans la boue, ont été recueillis
des Aphaenops (Col.), des Collemboles^ des Thysanoures et de rares
Opilionides. Aphaenops Tiresias La Brul, errait sur les stalagmites dans
la crevasse.
Dans la grande galerie le guano déposé sur l'argile détrempée renfer-
mait une faune d'une grande richesse : Aphaenops, Speonomus infernus
DiECK (Col.), Collemboles, Typhloblaniulus (Diplop.), Chilopodes, Tri-
choniscus (Isop.), Aranéides tissant des toiles lâches, tous en très grand
nombre.
Enfin les Coléoptères abondaient encore sous les pierres et sur les
stalagmites de l'étage inférieur.
Une flaque d'eau communiquant avec le ruisselet de l'extrême fond
de la grotte était habitée par quelques Stenasellus.
Jeannel.
664. Grotte de Peyort.
(Fin. 39)
(Dêtixiôme citation, voirBrosPEOLOGiCA VI, p. 331)
Située au hameau de Peyort, entre Prat et Cazavet, commune de
Prat-et-Bonrepaux, canton de Saint-Lizier, département de l'Ariège,
France. — Altitude : 500 m. env. — Roche : Calcaires indéterminées. —
Date : 6 juillet 1914.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Thysanoures, Collemboles, Myria-
podes, Aranéides, Opilionides, Isopodes, Oligochètes, Laboulbéniàeéea
(sur Aphaenops). — Numéro : 809.
La grotte s'ouvre à 10 m. du ruisseau, sur sa rive droite et à peine
au-dessus du niveau de son lit. Elle est constituée par une longue galerie
de 200 m., parallèle au ruisseau, certainement ancienne dérivation sou-
terraine de son cours.
Une petite entrée basse conduit dans une salle où «e trouvent de
nombreux terriers de blaireaux et au fond de laquelle une pente stalag-
mitée donne accès, à droite, à travers un rideau de stalactites, à la galerie
qui constitue toute la grotte.
GROTTES VISITÉES
345
..?
Une première partie de cette galerie est stalagniitée, assez haute de
plafond, avec des bassins pleins d'eau sur le sol. Il existe ici sur la voûte
des taches rouges indistinctes qui pourraient paraître à première vue des
traces de peintures préhistoriques. Un
examen attentif nous a fait penser qu'il
s'agissait là de dépôts naturels ; la cou-
leur rouge s'étend surtout dans les dia-
clases et si l'on gratte ces taclies on
trouve toujours en dessous le point de
suintement.
Dans une deuxième partie non stalag-
mitée la galerie est à demi obstruée par
de grandes accumulations d'argile; en
certains endroits la voûte est très basse.
Dans une troisième partie enfin, la
galerie se coude ; les parois sont de nou-
veau concrétionnées. Il existe ici un
petit couloir dans une étroite diaclase
et on est arrêté par de larges bassins
pleins d'eau au delà desquels la galei ie
se continue encore, mais très basse de
plafond.
La température de l'air dans cette
troisième partie était de l?P'2 C.
Près de l'entrée, dans la première
salle, Anophtkahtms Orpheus Dieck
habite sous les grosses pierres.
Dans la première partie stalagmitée
un Bafhysciola (Col.) et des Anurides
ont été recueillis sur des crottes de
Chauves-Souris.
Les Apliaeno'ps et les CoUemboles
étaient nombreux autour des bassins
du fond de la grotte {A. E hier si Ab. et
A. Cerherus Dieck); A. Tiresias LaBrul. faisait défaut; j'en ai cepen-
dant recueilli deux exemplaires trouvés morts, debout sur le sol. Un
A. Cerherus Dieck tenait dans ses mandibules un gros Collembole ; d'ail-
leurs les Aphaenops se trouvent toujours là où abondent les CoUemboles.
JBôtkuitiûla.
ncantyis
(X) : nnofalirtiûfrnMs Or|ot»cus
Trous i3l<
FiG. 39. Croquis schémàtîqtfc aie îatïfdtto àe
Pi-yort (u" 604) ; longueur exploréo :
200 mètres en\iron.
346 7?. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Dans les bassins d'eau de la première partie et du fond se tenaient
de nombreux Stenasellus. Dans une flaque à sol argileux du fond de la
grotte, des Oligochètes étaient à demi enfoncés dans la vase ; à la moindre
alerte la partie de leur corps qui se trouvait libre dans l'eau rentrait
brusquement dans le sol.
Jeannel.
665. Grotte de Portai.
(NouvcUevisite, voirBlOSPEOLOGiCA VI. p. 392et 407, XVI, p. 79, et XXXIII, p. 482)
Située sur la crête du Plantaurel, à 200 m. à l'est de la route de Poix
à Varilhes, commune de Loubens, canton de Varilhes, département de
l'Ariège, France. — Altitude : 520 m. env. — Roche : Calcaires créta-
ciques. — Date : 7 juillet 1914.
Matériaux : Coléoptères. Myriapodes, Laboulbéniacées (sur Aphaenops
cerberus Dieck). — Numéro : 810.
Une chercheur de Coléoptères, peut-être à la poursuite de VAnoph-
tlialmus Vulcanus Ab., avait systématiquement bouleversé cette grotte
peu de temps avant notre visite. Toutes les pierres avaient été retournées
et, chose plus grave, soigneusement empilées les unes sur les autres sur les
coulées de stalagmite, de façon qu'aucune ne gisait plus sur l'argile et
que toutes les stations de V Anophthalmus se trouvaient supprimées.
On ne saurait trop s'élever contre une telle pratique ! Quoiqu'il en soit,
nous avons consacré presque toute la durée de notre visite à remettre les
pierres en place sur l'argile humide.
Sur les stalagmites, les Speonomus abondaient, comme d'habitude,
mais il n'y avait pas à' Antrocharis. Cette espèce semble disparaître de la
grotte de Portel en été, malgré l'humidité ; tandis que je l'y ai toujours
trouvée en abondance en hiver et au printemps. De semblables varia-
tions saisonnières dans la composition de la faune troglobie avaient déjà
été signalées dans les grottes d'Aurouze (Jeannel et Racovitza, 1908,
p. 405.). D'autre part, une récente campagne en Carniole nous a montré que
ces variations saisonnières étaient encore plus générales dans les grottes
du Karst où certaines espèces ne se trouvent en abondance que pendant
certains mois de l'année.
Jeannel.
GROTTES VISITÉES 347
666. Puits de Brévilliers.
Situé dans le ^dllage, au coin de la route de Châtenois, commune de
Brévilliers, canton d'Héricourt, département de la Haute-Saône, France.
— Altitude : 380 m. env. — Roche : Calcaires jurassiques. — Date :
7 avril 1916.
Matériaux : Isopodes, Amphipodes, Hirudinés. — Numéro : 811.
L'eau qui alimente Brévilliers provient d'une source qui se trouve au
pied du versant nord-ouest de « La Côte », à près d'un km. du village.
Cette source a été complètement recouverte et captée dans des conduites
souterraines qui amènent l'eau jusqu'aux fontaines. Au coin de la route de
Châtenois, qui se trouve déjà haut dans le village, l'eau n'a pu être amenée
qu'au fond d'un puits d'où elle est élevée par une pompe.
Ce puits est maçonné, fermé par une porte de fer et par suite obscur ;
il a environ six mètres de profondeur. L'eau y est peu profonde et cou
rante ; sa température est de \(P2 C.
LTne balance laissée dans le puits pendant toute une nuit a ramené
une centaine d'Amphipodes, une Sangsue et un Isopode terrestre.
Jeannel.
667. Grottes de Clerval.
Situées à 1 km. au sud-est du village, sur la rive gauche du Doubs,
commune et canton de Clerval, département du Doubs, France. — Alti-
tude : 350 m. env. — Roche : Calcaires bathoniens. — Date : 18 avril 1916.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Collemboles, Aranéides, Isopodes,
Mollusques. — Numéro : 812.
Deux grottes se voient dans la falaise au-dessous de la route d'An-
teuil, au-dessus de celle qui suit le bord du Doubs ; on les atteint faci-
lement par cette dernière. Elles ont été fouillées par E. FouRXfEic (1907a,
p. 19) qui les a trouvées remplies d'alluvions quaternaires avec fragments
de poteries de l'âge du bronze.
La première des deux grottes que l'on rencontre en venant de Clerval
est une baume claire remplie d'alluvions sableuses.
La deuxième est constituée par un vestibule haut et large de 5 à
ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉ\. — ï. 57. — F. 3. 23
348 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
6 mètres auquel fait suite à gauche un petit boyau étroit et très bas où
l'on ne peut cheminer qu'en rampant ; sa longueur n'atteint pas 20 mètres
Le sol en est argileux, très humide, avec des pierres et quelques débris
végétaux.
Les Collemboles abondaient dans des débris de paille brûlée à l'entrée
du boyau ; les Trichoniscus se tenaient sous les pierres dans les endroits
humides et dans les fentes de retrait de l'argile au pied des parois.
Jeannel.
668. Grotte de Gondenans-Montby.
(FIG. 40)
Située à 120 m. au sud d'une ancienne tuilerie, à 1 Icm. env. au nord
de Gondenans, commune de Gondenans-Montby, canton de Rougemont,
département du Doubs, France. — Altitude : 400 m. env. — Roche :
Calcaires jurassiques.
Date : 20 avril 1916. — Matériaux : Coléoptères, Diptères, Thysanoures,
Collemboles, Myriapodes, Amphipodes. — Numéro : 813.
Date : 14 mai 1916. — Matériaux : Diptères, Thysanoures, Collem-
boles, Myriapodes, Amphipodes. — Numéro : 814.
Cette grotte, qui présente 350 m. de développement total, a été décrite
par E. FouRNiER (1904, p. 11-14 ; 1905, p.- 8-10, avec plan p. 9 ; 1907a,
p. 20). C'est une grotte à deux étages superposés, l'un constitué par des
galeries sèches, l'autre en-dessous, parcouru par une rivière souterraine
qui se divise err deux branches.
Une expérience de coloration à la fluorescéine a montré à Fournibr
(1905, p. 8) que l'eau de la branche gauche de la rivière souterraine vient
réapparaître à la résurgence du moulin de Montby, à 1 km. env. plus au
nord ; la destination de' l'eau de la branche droite est inconnue. D'après
gon plan (1905, p. 9) le sens du courant dans la grotte se trouvait donc
opposé à celui de la résurgence ; la rivière souterraine devait avoir une
circulation étagée, décrivant une boucle et repassant sous son propre
lit. En réalité il n'en est rien. Si Fournier a été conduit à supposer l'exis-
tence de cette circulation étagée, c'est à cause d'une erreur dans ses levés
topographiques qui certainement n'ont pas été exécutés à la boussole.
Comme l'indique le croquis schématique ci- joint (fig. 40), la galerie
sèche ne conserve pas sa direction première comme le croyait Fournier,
GROTTES VISITÉES
349
mais après les sinuosités du couloir d'entrée elle tourne vers le sud, décri-
vant un angle de 120°, de façon que la rivière souterraine que Fournier
croyait couler dans la grotte du nord au sud, coule en réalité du sud-est
au nord-ouest, c'est-à-dire dans la direction du moulin de Montby.
Fia. 40. Croquis schématique de la Orotte de Gondenaus-Montby (n" GG3); longueur totale 500 niûtres envi-
ron. — Le levé personnel figuré en traits pleins est complété par les levés de FouRNIER qui ont été
figurés en traits interrompus.
Il résulte encore de ceci que ce n'est pas au sud, à Clerval ou à Hyèvre-
Paroisse, qu'il faudra chercher la résurgence encore inconnue des eaux de
la branche droite, mais bien aussi dans la direction du nord, du côté du
moulin de Montby.
J'ai visité deux fois la grotte de Gondenans-Montby, la deuxième
350 B. JEANNEL ET E.-G. BACOVITZA
fois avec l'aide de M. le professeur agrégé E. Brumpt. On pénètre par un
couloir étroit et bas, sinueux, mais de direction générale S.O.-N.E. Les
parois sont peu concrétionnées, sèches ; le sol est argileux, assez humide,
avec quelques pierres. Il y souffle un courant d'air assez intense. Ce
couloir s'élargit peu à peu, formant de petites chambres stalagmitées,
puis débouche dans une grande galerie rectihgné, orientée N.-S., longue
d'une centaine de mètres et prolongée au sud par d'étroits boyaux et de
petites chambres pleines d'éboulis et de cailloutis. Les concrétions sont
assez abondantes dans la grande galerie ; le sol en est argileux, très hu-
mide, avec des gours ou des flaques d'eau.
Vers le milieu de la galerie et dans sa paroi orientale, en arrière d'un
massif stalagmitique, s'amorce un couloir étroit et bas qui donne accès
à l'étage inférieur. Il y soufflait, le 20 avril, un très violent courant d'air
qui avait notablement diminué d'intensité le 14 mai. Ce couloir aboutit
en haut d'une diaclase par laquelle on gagne sans peine une grande salle
arrondie, ornée de belles concrétions et où coule la rivière souterraine
(salle de la Pendeloque). Faute d'agrès nécessaires, nous n'avons pas pu
atteindre le fond de cette salle, ni par conséquent le lit de la rivière sou-
terraine.
La température de l'air dans la grande galerie supérieure est de
80 C.
Les conditions d'existence seraient partout très favorables s'il n'exis-
tait pas de courant d'air. Le sol est argileux, humide, avec des débris
ligneux et même par place des crottes de Chauves-Souris. Quelques
Chauves-Souris hivernaient encore en avril, mais elles avaient disparu en
mai.
La faune est très pauvre. Dans le couloir d'entrée des Quedius (Col.),
Liihohius et Polydesmus (Myr.) se tenaient sous les pierres. Un Campodea
(Thysan.) est abondant dans la grande galerie et quelques petits CoUem-
boles habitent les crottes de Chauves-Souris.
Le 20 mai, E. Brumpt a recueilli au plafond de la grande galerie un
Eschatocephalus (Ixode), à l'état de nymphe gorgée ; il se trouvait
immobile sur une petite stalactite oii une Chauve-Souris avait hiverné et
était encore accrochée le 20 avril, à ma première visite.
Dans les flaques d'eau à fond argileux, et surtout dans celles qui se
trouvent à l'entrée du couloir conduisant à l'étage inférieur, nous avons
recueilli de nombreux petits Amphipodes.
Jeannel.
GROTTES VISITÉES
351
669. Grotte de la Baume de Bournois.
(Fia. 41)
Située à 1 km. env. au nord-est de la ferme de la Vaurauche, commune
de Bournois, canton de l'Isle-sur-le-Doubs, département du Doubs,
France. — Altitude : 420 m. env.
— Roche : Calcaires jurassiques.
— Date : 20 avril 1916.
Matériaux : Coléoptères, Dip-
tères, Myriapodes, Aranéides, Opi-
lionides, Ixodes, Oligochètes. —
Numéro : 815.
</)
/lire»^,
La ferme de la Vaurauche se
trouve sur le territoire de la com-
mune d'Uzelle, mais la grotte
s'ouvre sur celui de Bournois.
L'entrée est difficile à trouver sans
guide ; c'est un aven dissimulé
dans un bosquet, sur le revers
sud-est du coteau des Pouezets.
Une échelle de 7 à 8 m. est néces-
saire pour atteindre le fond.
La grotte dans son ensemble
est constituée par une longue ga-
lerie rectiligne, orientée N.E.-S.O.,
large de 10 m. env., et que j'ai
explorée sur près de 400 m. Sa
voûte s'est effondrée vers le milieu
pour former l'aven qui donne
accès. Partant de l'aven on peut .
donc distinguer une galerie nord-
est et une galerie sud-ouest.
Galerie xord-est. — Elle est
large, haute, peu stalagmitée pen-
dant une centaine de mètres ; le sol est recouvert d'éboulis puis d'argile
humide et de pierres. Ensuite elle est brusquement rétrécie et à demi
obstruée par d'énormes piliers stalagmitiques et des rideaux qao l'on
'f îO tr.-.v
FiG. 41. Croquis schématique do la Baume de Bournois
(n" 669); longueur figurée : 400 mètres environ.
352 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
franchit aisément grâce à quelques crampons de fer qui y ont été placés.
11 existe dans cette région quelques gours pleins d'eau. Puis le sol est
effondré de façon que la galerie se continue au-dessus d'un à-pic, tandis
qu'au-dessous et à droite s'ouvre une galerie inférieure, sous-jacente
à la première. Je n'ai pas eu le temps d'explorer la galerie supérieure,
d'ailleurs facUe d'accès. La galerie inférieure descend en pente très raide
jusqu'à une petite salle ; son sol est concrétionné, humide, avec de nom-
breuses bornes.
Galerie sud-ouest, — A cinquante mètres de l'entrée s'ouvre un
deuxième petit aven dans la paroi de droite. Au delà apparaissent bientôt
les formations stalagmitiques qui, comme dans la galerie nord-est, ont
ici encore à peu près obstrué la caverne ; nombreux sont les piliers et les
bornes stalagmitiques ; des gours pleins d'eau occupent le sol ; de larges,
coulées de stalagmite arrivent presque au niveau de la voûte,
La température de l'air au fond de la galerie nord-est est de 9°? C
Les conditions d'existence semblent partout excellentes. L'air est
calme et très humide, le sol est couvert de nombreux débris ; les Chauves-
Souris habitent la grotte. Mais la faune est d'une incroyable pauvreté.
Tous les animaux recueillis proviennent de la galerie nord-est. Dans
la première partie, de grands morceaux de bois pourri étaient habités par
quelques Myriapodes ; des Opihonides se tenaient sur les parois. Sur les
grandes masses stalagmitiques humides et paraissant très favorables,
ce n'est qu'à grand'peine que j'ai pu recueillir une larve de Mycétophihde
(Dipt.) dans sa toile, une petite Araignée et un Eschatocephalus (Ixode).
Jeannel.
670. Grotte de Fourbanne.
(FIG. 42)
Située dans un escarpement, à 40 m. env, au-dessus de la voie ferrée,
au niveau du coude qu'elle décrit au nord-est de Fourbanne, commune
de Fourbanne, canton de Baume-les-Dames, département du Doubs,
France, — Altitude : 300 m. env. — Boche : Calcaires jurassiques.
Date : 22 avril 1916, — Matériaux : Thysanoures, Collemboles,
Myriapodes, Aranéides, Cliernètes, Isopodes, Amphipodes, — Numéro :
816.
Date : 2 juin 1916. — Matériaux : Coléoptères, Diptères, Collemboles,
Myriapodes, Isopodes, Champignons. — Numéro : 817.
I
GROTTES VISITÉES
353
TnTrcy;"
Fio. 42. Croquis schématique de la
Grotte de Fourbanne (n" 670) ;
longticur totale : 300 mètres
environ.
L'entrée de cette grotte serait difficile à trouver sans guide ; on
l'atteint par un petit sentier escarpé qui descend du haut de la falaise.
La grotte, d'apparence assez compliquée, est formée d'une série
de galeries et de salles réunies par des passages bas et étroits, mais
toutes disposées suivant deux directions de diaclases perpendiculaires.
Son développe-
ment total est
de près de 300
mètres.
On descend
d'abord par un
cône d'éboulis
dans une pre-
mière galerie re-
lativement sèche.
En bas et au fond,
une voûte sur-
baissée donne
accès à une série
de trois salles
réunies par des
passages bas. Les
deux premières
sont sèches , à
parois nues, creu-
sées de marmites;
la troisième est
stalagmitée et
renfermait en
avril un lac pro-
fond formé d'eaux d'infiltration (température de l'eau : 9^ C).
Dans la deuxième salle s'ouvre à gauche un petit boyau qui permet
de descendre par une pente d'argile dans une grande galerie inférieure,
de direction à peu près perpendiculaire à celle des galeries supérieures.
Cette galerie inférieure se trouve à un niveau bien plus bas que les
précédentes ; elle doit être au même niveau que la voie ferrée (40 m.
en dessous de Tentrée) ou même au-dessous, car on y entend très distinc-
tement circuler les trains. A gauche la galerie était barrée le 22 avili
^àc UiTOi-nal
254 R JEANNEL ET E.-Q. RACOVITZA
par un iac peu profond étendu sur une grande nappe d'argile. La tempé-
rature de ce lac est plus basse que celle du lac supérieur : 705 C. A droite,
la galerie aboutit, au bout d'une centaine de mètres, à une salle terminale
en bas de laquelle se trouvait en avril un troisième petit lac. Le sol de
toute la galerie inférieure est recouvert de grandes nappes d'argile très
humide ; ses parois sont peu stalagmitées, sauf en certains points.
Le 2 juin, le lac supérieur et le lac terminal étaient complètement à
sec ; le lac de la branche gauche de la galerie inférieure était réduit à
l'état de simple flaque au point le plus déclive de la nappe d'argile.
La température de l'air dans la galerie inférieure est de 9^ C.
Pas de courant d'air sauf aux passages rétrécis des salles supérieures.
Les ressources alimentaires sont assez pauvres dans toute la grotte. Les
Chauves-Souris habitaient la galerie d'entrée en avril et quelques débris
ligneux gisent dans cette galerie au pied d'un massif stalagmitique.
C'est là, d'ailleurs, que la plupart des Animaux ont été recueillis : Dip-
tères, Quedius (Col.), Collemboles, Thysanoures, Polydesmus (DipL),
Trichoniscus (Isop.).
Dans la galerie inférieure et surtout dans le boyau qui y donne accès,
de rares Tricho%iscus erraient sur les parois stalagmitées et sur l'argile.
De petits Aranéides ont été pris dans les petites toiles très lâches qu'ils
tissent entre les stalagmites et un Chernète sous une pierre près du grand
lac. En somme la faune terrestre est encore très pauvre dans cette
grotte.
Aucune faune ne paraissait exister dans les lacs en avril ; les balances
n'y ont rien pris. Quelques petits Niphargus se tenaient au contraire dans
les flaques d'eau à fond argileux de la galerie inférieure.
Jeannel.
671. Grotte des Faux Monnayeurs.
(Fia. -13 et 44)
Située sur la rive droite de la Loue, à 2 km. en amont de Mouthier,
commune de Mouthier-Hautepierre, canton d'Ornans, département du
Doubs, France. — Altitude : 463 m. (d'après Martel, in Fournier
1902, p. 34, fig. 12). — Boche : Calcaires jurassiques.
Date : 27 avril 1916. — Matériaux recueilhs par MM. Jeannel et
SoLLAUD : Coléoptères, Diptères, Thysanoures, Collemboles, Aranéides,
Acariens Isopodes Amphipodes, Champignons. — Numéro : 818.
GROTTES VISITÉES
355
Date : 31 juillet 1917. — Matériaux recueillis par M. Jeannel :
Coléoptères, Diptères, Thysanoures, Collemboles, Myriapodes, Acariens,
Isopocles, Aniphipodes. — Numéro : 874.
Dates : 23 septembre et 5 octobre 1915 ; 15 août 1916 ; 28 septembre
1917. — Matériaux recueillis par M. Sollaud : Coléoptères, Diptères,
Thysanoures, Collemboles, Myriapodes, Aranéides, Acariens, Isopodes,
Aniphipodes, Copépodes, Mollusques. — Numéro : 875.
Date : 28 septembre 1917. ■ — Matériaux recueillis (à l'entrée de la
grotte) par M. Sollaud : Diptères, Collemboles. — Numéro : 876.
Route d.» Pontarlier
Ouverture cU la cCfuminée s
Entrae ^Je
A 2 km. en amont de Mouthier, sur la rive droite de la Loue, la route
de Pontarlier traverse en tunnel une grande barre rocheuse formée par les
couches calcaires rauraciennes, redressées presque jusqu'à la verticale.
De la rive opposée, on voit nettement ces strates, à peu près horizontales
au niveau de la Loue, se relever brus-
quement pour aller former au-dessus
de Moutliier, avec les roches de Hau-
tepierre, la voûte du grand pli-faille
dont la coupe apparaît si nettement
sur le flanc de la vallée. Au-dessous
du tunnel de la route on aperçoit
dans cet éperon rocheux trois orifices
qui occupent des niveaux bien diffé-
rents mais s'ouvrent dans le même
joint de stratification (fig. 43). L'ori-
fice inférieur donne issue à une grosse
résurgence dite « Source du Pontet »,
pénétrable sur 35 m. seulement.
L'orifice médian, situé à une qua-
rantaine de mètres plus haut, est l'en-
trée de la grotte des Faux Monnayeurs (« grotte de la Vieille-Roche » sur
les poteaux du Touring-Club), accessible grâce à une échelle de fer de
7 à 8 mètres scellée dans la roche : c'est l'ancien exutoire du Pontet
souterrain. L'orifice le plus élevé, inaccessible du dehors, qui s'ouvre
40 m. plus haut encore, est le débouché d'un étroit couloir ascendant qui
prend naissance dans la grotte et qui est connu dans la région sous le
nom de « La Cheminée » ; il représente un évent encore plus ancien du
même système hydrographique souterrain.
nie.L
l'"Iii. 43. Vue schéxuatiquc indiquant l'eniiilacemont
des trois évents du système hydrographique
souterrain : Faus-Monnayeurs-Pontet.
366
R. JEANNEL ET E.-G. JRACOVITZA
En dehors de la « Cheminée «, la grotte des Faux Monnayeurs no com-
prend qu'un grand couloir de 300 m. environ, qui s'enfonce vers le N.-E.,
®
Caxzo^JLaiXotfUL.
I Cu-nitiodeo-
55 . VuÂxriUJiCui
FiQ. 44. Croquis schématique ^de la Grotte des Faux-Monnayeurs (n° 671) ; longueur figurée : 400 mètres
environ.
suivant la direction des couches : l'allure des strates, qui plongent avec
une forte inclinaison vers le S.-E., apparaît nettement sur toute la
longueur de la galerie ; ces strates se « décollent » de la voûte, le
plus souvent par gros blocs qui encombrent d'éboulis une grande
GROTTES VISITÉES 357
partie de la grotte (fig. 44, coupe c d). L'entrée est à 463 m. d'altitude^.
A 60 m. de l'ouverture, la grotte était barrée au moment de notre
visite (27 avril 1916) par un lac (tempér. de l'eau : 7° C.) qui n'apparaît
que dans les périodes de fortes pluies. Un peu plus loin un gros escarpe-
ment obstrue d'une façon presque complète la partie inférieure de la
galerie qui se trouve brusquement réduite à une fente étroite (fig. 44,
coupe a h) ; c'est un peu au-dessus de cet abrupt (altit. : 476 m.), à une
centaine de mètres de l'entrée, que prend naissance « la Cheminée », qui
va s'ouvrir dans la paroi du rocher, à 503 m. d'altitude.
A 140 m. de l'entrée, le sol devient argileux et humide, la galerie se
rétrécit et forme une petite chambre où coule un mince filet d'eau. Au
delà la grotte reprend sèche jusqu'à un petit lac (altit. : 468 m.) au niveau
duquel elle se coude sur la droite, en profitant sans doute d'une des dia-
clases, bien visibles extérieurement, qui entaillent les calcaires rauraciens ;
ici encore quelques suintements et un léger revêtement stalagmitiquc.
Après une forte montée à travers les blocs éboulés, le couloir reprend
sa direction première et atteint son point culminant (483 m.) ; puis ï\
s'élargit en une vaste galerie de coupe triangulaire (fig, 44, coupe c d)
encore occupée par de gros éboulis secs ; on descend en pente de plus en
plus raide et on arrive bientôt à la partie terminale de la grotte, inondée
en temps de crue. Là, les parois et les blocs qui recouvi'ent le sol sont
tapissés d'un épais dépôt argileux ; de larges flaques s'étendent entre les
éboulis et on voit sur les parois de nombreux débris déposés par l'eau
et de petites masses de mousse torrentielle. La grotte se termine par un
petit lac (altit : 468 m. ; tempér. de l'eau : 8^2 C.) qui est sans doute un
diverticule du Pontet souterrain ; on entend, en effet, derrière la paroj
de droite, le bruit de la rivière souterraine, et la surface du bassin est
animée d'un léger courant giratoire indiquant une communication directg
avec le cours d'eau. La température du Pontet, à sa résurgence, était à
peu près la même que celle du lac (8^5 C).
La température de l'air, au fond de la grotte, était de 9° 2 C.
La température de l'eau variait suivant les lieux :
Lac temporaire à 60 m. de l'entrée 7^ C.
Ruissellement de la paroi vers le fond 9°
Lac terminal 8^2
Résurgence du Pontet 8^5
1, Toutes les altitudes mcntionaécs dans cette description ont ct6 i)rises au baromètre altiniétriqne par
Martel. (Voir I'ourniee, 1902, coupe et phot.)
35S B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
L'atmosphère est calme au delà de « la Cheminée », mais un courant
d'air se fait sentir au niveau de la bifurcation des deux galeries. Dans la
plus grande partie de la grotte il existe peu de ressources alimentaires,
si ce n'est çà et là quelques crottes de Chauves-Souris. Dans le fond,
l'épais enduit argileux déposé par les crues doit être riche en débris orga-
niques, d'autant plus que le bassin d'alimentation du Pontet (région
s'étendant de Hautepierre à Passonfontaine et Longemaison) comprend
une série de combes oxfordiennes souvent marécageuses et tourbeuses.
Visite du 27 avril 1916 (Jeannel et Sollaud), — Dans la petite
chambre argileuse et humide située à 140 m. de l'entrée se tenaient en
o-rand nombre des Collemboles, des Thysanoures et des Trichoniscus
(Isopodes) ; ces derniers se retrouvaient peu nombrevix dans quelques
endroits humides. Mais c'est surtout à l'extrême fond, dans la région
fréquemment inondée et couverte de vase, que se tenaient les Troglobies.
De grands Trichaphaenops (Col.) à démarche lente erraient sur les
sommets des blocs d'argile ; l'un d'eux donnait la chasse à un gros Acarien.
Des Trichoniscus et des Campodea (Thysan.) habitent la même région.
Le lac du fond et les flaques d'eau voisines sont peuplés de grands
NipTiargus ; nous avons vainement cherché des Caecosphaeroma.
VisiTK DU 31 JUILLET 1917 (Jeannel). — Le lac de l'entrée
était à sec, mais toute la partie profonde était aussi humide que l'année
précédente. Cependant il semblait bien que depuis longtemps le lac
du fond de la grotte n'avait point débordé et inondé les salles terminales.
L'argile alluviale qui recouvre les parois était relativement sèche, cra-
quelée et non onctueuse, comme on l'observe immédiatement après les
crues.
Aussi aucun Trichaphaenops n'a-t-il pu être recueilli malgré quatre
heures de recherches laborieuses. Les autres espèces. Acariens, Collemboles,
Trichoniscides, Ca7np)odea, étaient au contraire extraordinairement abon-
dantes. Il semble bien que le TricTiaphaenops Sollaudi Jeann. (1916, 1917)
n'apparaisse dans la grotte qu'après les crues de la rivière souterraine,
dans la zone périodiquement inondée. Il présenterait ainsi des mœurs
identiques à celles des Aphaenops Ehlersi Ab. et autres espèces pubes-
centes des Pyrénées.
Dans l'eau du lac terminal se tenaient, en juillet 1917, quelques
Niphargus, mais aucun Caecosphaeroma n'a pu être aperçu.
Notes FAUNiQUE s (Sollaud). ■ — Ayant eu l'occasion de visiter la
grotte des Faux Monnayeurs à différentes reprises, avant et après l'eX'-
GROTTES VISITÉES 359
ploration faite en commun avec Jeannel, je crois pouvoir donner
quelques renseignements complémentaires utiles sur les stations et les
conditions de vie des différents Biotes qui peuplent cette caverne^.
En septembre 1917, je me suis attaché à étudier les variations de la
faune dans les différents points, à partir de l'ouverture même de la grotte.
Tout au voisinage de l'entrée, le sol est formé par la roche compacte,
polie par les eaux et creusée de belles marmites. La végétation n'y est repré-
sentée que par quelques rares Mousses et Hépatiques, et surtout par un
mince enduit d'Algues unicellulaires. Là sautaient de nombreux Collem-
boles, se distinguant nettement par leur coloration foncée (dessins noirs
sur fond jaune-brun) de leurs congénères capturés plus profondément ;
de plus en plus rares à mesure que l'on s'enfonce dans la grotte et que les
éboulis succèdent à la roche compacte, les derniers ont été trouvés dans
des anfractuosités de la paroi, dans une obscurité relative, à une tren-
taine de mètres de l'entrée. Sur les parois, quelques Diptères (Némocères
et Brachycères).
Puis vient une partie à peu près azoïque où je n'ai vu que des débris
d'ailes de Lépidoptères. C'est seulement au pied du grand abrupt, à une
centaine de mètres de l'ouverture, que j'ai rencontré à nouveau, sur l'ar-
gile terreuse qui çà et là recouvre la roche, des Collemboles, ceux-ci
complètement décolorés ; parmi eux de très rares Anurides, observés
une seule fois en août 1916 ; notons que nous sommes encore en deçà de
la limite de pénétration de la lumière.
Au sommet de l'escarpement, infmédiatement au-dessous de la
« Cheminée », existe un talus d'argile apportée par les eaux pluviales qui
ruissellent par ce couloir ; le courant d'air est assez sensible et je n'y ai
jamais observé aucun Biote. En août 1916, j'ai exploré la « Cheminée » elle-
même, au bas de laquelle s'observe un placage de poudingue formé de
galets roulés, solidement agglomérés par un ciment calcaire ; le sol de
cette galerie ascendante, longue d'une centaine de mètres, est argileux
et humide, mais il y règne un fort courant d'air, et l'unique capture que
j'ai faite est un gros Collembole blanc, trouvé vers le milieu du parcours.
La première station où l'on observe une faune abondante et plus
variée est la petite chambre située à 140 m. de l'entrée, au delà de la
1. Jo n'ai malheureu3ome:it pas séparé les récoltes faites à des époques diftéreiites. 11 en est do même pour les
matériaux de fiuel'iucs autres grottes mentionnées dans cette « Énuniération v L'inconvénient qui peut en résulter
sera en partie atténué du lait que j'ai relevé, après chaque exploration, la liste des Biotes capturés ; cela me permet
d'inliciu !r, lorsqu'il y a lieu, les variations qui ont pu êtrj observées dans la constitution de la faune, au cours des
visites successives faites à une même grotte.
:]60 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
limite ultime de pénétration de la lumière ; le sol y est formé d'argile très
humide, même un peu boueuse. Les CoUemboles constituent encore l'élé-
ment prédominant et se pressent en véritables essaims autour des mor-
ceaux de fromage disposés comme appâts (ils ne joueront plus qu'un rôle
effacé dans les parties plus profondes) ; c'est là seulement qu'apparaissent
les premiers Camj^odea, encore peu nombreux, et les premiers Trichoniscus
[Trichoniscoides] mixtus Racov., déjà assez abondants, mais beau-
coup moins que dans le fond de la grotte. J'y ai recueilli en outre, le
15 août 1916 une larve de Coléoptère ; en septembre 1917 quelques
Aranéides ; en octobre 1915 un Polydesmide, le seul Myriapode que j'ai
vu dans la grotte. Un peu plus loin l'argile devient sèche et un peu sableuse
et toute faune disparaît.
Dans le long parcours que l'on fait ensuite sur les éboulis secs, la
faune terrestre est généralement pauvre ; quelques Trichoniscus et
Campodea çà et là, lorsque le sol argileux apparaît entre les blocs. Un
placage de guano de Chauves-Souris sur un gros bloc s'était montré
azoïque à mes visites antérieures, ce guano étant d'ailleurs complète-
ment desséché ; en septembre 1917, une partie du bloc était recouverte
d'une mince couche de guano frais qui hébergeait des CoUemboles et de
nombreuses larves de Diptères.
Peu avant la zone argileuse terminale, la paroi de gauche est cons-
tituée par une vaste surface plane (fig. 44, coupe cd) formée par une
même strate qui s'élève à une grande hauteur ; sur cette surface rocheuse,
toujours maintenue humide par les suintements, courent de nombreux
Campodea et quelques rares Trichoniscus.
Le fond de la grotte est de beaucoup la partie la plus riche et la plus
intéressante. Le sol est encore couvert de gros blocs tombés de la voûte,
mais dans les 70 derniers mètres ces éboulis, de même que les parois, sont
entièrement tapissés d'un enduit très épais d'argile molle amenée par les
crues du Pontet, et qui semble offrir des conditions éminemment favo-
rables aux Troglobies limivores. Là, c'est d'ordinaire un véritable grouille-
ment de Cainpodea et surtout de Trichoniscus ; j'ai constaté nettement
que, le 27 avril 1916, immédiatement après une crue, ils étaient nota-
blement moins nombreux qu'à toutes mes autres visites, faites en période
sèche. C'est à cette même date, par contre, que les Trechus {Trichaphae-
nops) Sollaudi Jeannel ont été observés en plus grand nombre (4 indi-
vidus) ; ils semblent ne se montrer qu'exceptionnellement dans la galerie
en période sèche : un unique spécimen avait été capturé en cotobre
GROTTES VISITÉES 361
1915 ; je n'en ai vu aucun en août 1916 ; en septembre 1917, un seul
exemplaire a été trouvé, après de longues et patientes recherches, par
mon ami Vandel, licencié ès-sciences naturelles, qui m'accompagnait
à cette excursion. Ces Coléoptères paraissent localisés dans les 20 à 30
derniers mètres.
Les Collemboles sont relativement peu nombreux sur l'argile du fond.
Les Acariens, plutôt rares (capturés en avril et août 1916 et en sep-
tembre 1917), semblent y être localisés. Des Lartefia (Prosobranches)
ont été observés à proximité du bassin terminal, sur des blocs couverts
d'argile (avril 1916 et septembre 1917).
Des Diptères némocères (Mycétophylides ?) (capturés en septembre
1915, août 1916, septembre 1917) volent dans l'extrême fond de la grotte
et se distinguent à première vue de leurs congénères capturés moins
profondément par leur abdomen plus long et leur teinte générale d'un
brun plus clair.
En août 1916, une pêche au filet fin dans le bassin terminal m'a pro-
curé quelques petits Copépodes.
La faune aquatique est surtout représentée par le Niphargus Virei
Chevr., assez abondant dans le lac terminal et les flaques qui le précèdent ;
quelques exemplaires ont été pris également dans le petit lac situé à
170 m. de l'entrée. Une femelle ovigère de 21 mm., portant 39 œufs,
a été capturée le 15 août 1916, dans la première flaque de la zone argi-
leuse terminale ; au même point, en septembre 1915, de tout jeunes
individus, récemment éclos, avaient été trouvés étroitement appliqués
dans les anfractuosités de quelques grosses pierres que j'avais retirées
du fond de l'eau.
C'est dans la même flaque que j'ai recueilli, le 23 septembre 1915,
l'unique exemplaire de Caecosphaeroma Virei Dollfus trouvé dans la ■
grotte ; c'était un mâle de grande taille, qui se tenait accroché à la paroi
tout près de la surface de l'eau et avait sans doute été amené par la der-
nière crue du Pontet ; ces Sphéromiens sont peut-être fréquents dans la
rivière souterraine.
J'ai constaté à diverses reprises combien les Troglobies aveugles qui
peuplent en si grand nombre la partie terminale de la grotte sont peu
sensibles, sinon insensibles, à la lumière des bougies.
Les Trichoniscus qui courent à la surface de l'argile ne paraissaient
en aucune façon modifier leur allure ; ceux qui étaient trouvés immobiles,
appliqués contre le substratum, ne se dérangeaient nullement à mon
362 B. JEANNEL ET E.-G. BACOVITZA
approche ; c'est seulement lorsque la bougie n'était plus qu'à une faible
distance de leur corps qu'ils semblaient se réveiller en sursaut, puis
s'enfuyaient précipitamment ; mais ici c'ept manifestement l'action calo-
rifique de la flamme qui entrait en jeu. Les Campodea sont plus sensibles
mais fuient eux aussi probablement la chaleur plutôt que la lumière.
Plusieurs fois je me suis approché doucement, avec ma bougie, de flaques
où des Ni'phargus se tenaient immobiles, couchés sur le flanc : je n'ai
jamais observé de réaction immédiate ; c'est seulement au bout d'un cer-
tain temps, au plus tôt au bout de 4 ou 5 secondes, généralement après
un temps plus long, qu'ils se mettaient à agiter leurs pléopodes, puis s'en
allaient se réfugier, très lentement, dans quelque anfractuosité obscure.
Cette action ne se produisait d'une façon certaine que si la bougie était
amenée à une faible distance de la surface de l'eau ; mais, comme elle a été
observée sur des NipJiargus situés à une profondeur de 15 à 20 cm., il
est probable que les radiations lumineuses entrent bien en jeu.
Le 28 septembre 1917, j'ai relevé les températures suivantes, qu'il peut
être intéressant de comparer avec celles notées par Jeannel en avril 1916 :
Température extérieure 2ÇP C. env.
Température de l'air au pied du grand escarpement à
100 m. de l'entrée 1P2 —
Air au fond de la grotte 9° —
Eau du petit lac à 170 m. de l'entrée S^S —
Eau du lac terminal 8^8 —
Résurgence du Pontet 9^ —
Grande grotte Baume- Archée, commune de Mouthier-Hautepierre
(Doubs), s'ouvre à 50 m. env. au-dessus de la Loue, un peu en aval de la
source du Pontet mais sur la rive gauche dans une barre formée par de
grands bancs très inclinés. On l'appelle encore «grotte de Beau Marché »
ou « grotte de Beaumarchais ». Son véritable nom est « Baume-Archée »,
probablement à cause du vaste portique que forme son entrée.
Cette grotte, d'où sort en temps de crue une rivière torrentielle,
consiste presque uniquement en une immense salle bien éclairée. Au fond
de la salle prend naissance une galerie dont l'entrée est occupée par un
lac de 3 m. de profondeur et qui, après un faible parcours, se termine
au-dessus d'un gouffre d'une vingtaine de mètres (Fournier et Maré-
chal 1901, p. 146, plan et phot.). Nous n'avons pas exploré cette galerie.
Jeannel et Sollaud.
GROTTES VISITÉES 363
672. Petite grotte Baume-Archée.
Située sur la rive gauche de la Loue, à 1 km. en amont de Mou-
thier, commune de Mouthier-Hautepierre, canton d'Ornans, département
du Doubs, France (les grottes Baume-Archée sont indiquées sur la carte
du Ministère de l'Intérieur, feuille Besançon). — Altitude : 430 m. env.
— Roche : Calcaires jurassiques. ■ — Date : 27 avril 1916.
Matériaux : Diptères, CoUemboles, Myriapodes, Aranéides, Opilio-
nides, Ixodes, Isopodes, Mollusques, Champignons. — Numéro : 819.
Cette grotte s'ouvre à peu de distance de la grande grotte Baume-
Archée, à un niveau légèrement plus élevé.
C'est un simple couloir ascendant, d'une centaine de mètres, oii sol
et parois sont presque entièrement recouverts par les concrétions. Un
léger courant d'air se fait sentir sur toute sa longueur. La faune, plutôt
pauvre, comprend comme éléments essentiels de gros Isopodes lucifuges
(Oniscus) et des coquilles de jy?/aïm'ia (Gastéropodes). Nous avons vu en
outre une larve de Mycétophilide, un Campodea, quelques petits Ara-
néides roses, etc. ; çà et là des cadavres de grosses Araignées couverts de
Moisissures.
JeANNEL et SOLLAUD.
673. Grottes de Gonvillars.
(Fia. 45 et 40)
Situées à 200 m. au sud du moulin de la Baume, à 1 km. env. au sud
de Villers-sur-Saulnot, commune de Gonvillars, canton d'Héricourt,
département de la Haute-Saône, France. — Altitude : 350 m. env. —
Roche : Calcaires bajociens. — Date : 16 mai 1916 et 5 juin 1916.
Grotte supérieure. — Matériaux : Coléoptères, Diptères, Trichop-
tères, CoUemboles, Myriapodes, Aranéides, Acariens, Mollusques, Iso-
podes. — Numéro : 820.
Rivière souterraine. — Matériaux : Poissons, Diptères, Trichop-
tères, Ephéméridcs, Thysanoures, CoUemboles, Aranéides, Opilionides,
Acariens, Décapodes, Amphipodes, Oligochètes, Phanérogames, Cham-
pignons. — Numéro : 821.
A un km. au sud de Villers-sur-Saulnot, le ruisseau de Baume se
Arch. de Zooi.. Exp. et GÉN. — ï. 57. — F. 3. 24
364
M. JEANNEL ET E.-G. RAGOVITZA
perd dans une vaste doline pour réapparaître (d'après E. Fournier,
1907 a, p. 21) à 1 1 km. plus au sud dans la grosse résurgence de Lougres, sur
les bords du Doubs. Au-dessus de la perte impénétrable du ruisseau de
Baume, se trouve dans la falaise la vaste ouverture d'une grotte peu pro-
fonde, connue depuis longtemps sôus le nom de « caverne préhistorique
de Gonvillars » ou « du moulin de Baume » (E, Fournier, 1904, p. 14-
15). Le déblaiement d'un étroit orifice dans le vestibule de cette grotte
et la découverte d'une série de salles et de petits couloirs a permis à un
groupe de spéologues de Montbéliard de descendre jusqu'à la rivière
Grotte supcieufe
^ Ruissedu JouterrAvix
FiG. 45. Coupe schématique des Grottes de Gonvillars (n» 673).
souterraine qu'ils explorèrent, disent-ils, sur 2 km. 500 de longueur (voir
E. Fournier, 1912, p. 22-27, avec plans dressés par E. Sabler). Comme on
le verra plus loin, ce chiffre est très exagéré, car le développement total
de la galerie figurée sur le plan de Sabler ne doit pas dépasser 600 m.
J'ai visité la rivière souterraine de Gonvillars avec l'aide de M. le
professeur agrégé E. Brumpt.
Grotte supérieure. — Le vestibule de la grotte préhistorique pré-
sente encore les traces d'ancien remplissage par des dépots bréchoïdes.
Au fond, au-dessus d'un ressaut formé par l'effondrement d'un ancien
plancher stalagmite, la grotte se continue par deux petites chambres
obscures, assez humides et à parois concrétionnées.
Sur le sol, des débris végétaux et de petites accumulations de guano
frais étaient peuplés de Collemboles en très grand nombre (Podurelles
GROTTES VISITÉES
365
^àMiàe
Jji.pkxx<iu5
et Anurides). Deux Es-
chatocephalus adultes
(Ixodes) ont été re-
cueillis sur les stalac-
tites de la voûte.
Rivière souter-
raine. — Dans la paroi
orientale du vestibule
de la grotte préhisto-
rique, un étroit orifice
déblayé au ras du sol
donne accès à une pre-
mière salle dans la-
quelle on descend en
pente raide sur des
éboulis. Au fond, un
premier à -pic de 5 m.
(corde nécessaire) con-
duit dans un réseau
assez compliqué de
petites chambres et
d'étroits boyaux des-
cendant en hélice, qui
finissent par aboutir
en haut d'un deuxième
à-pic de 5 m. env. et
surplombant la rivière
souterraine. Depuis
l'entrée jusqu'à ce
point, on s'enfonce bien
de 50 m. en profondeur.
Toutes ces chambres et
boyaux, assez difficiles
à" parcourir, sont rem-
plis d'une argile grasse et humide ; dans les environs du premier à-pic
cette argile est recouverte d'un dépôt d'ancien guano déliquescent.
La galerie où coule la rivière souterraine est sensiblement rectihgne
et peut être divisée en deux parties.
5alU
s uper veure
FiG. 46. Croquis schématique des
Grottes de Gonvillars (n" G73)
longueur flguriJe : 400 mètres
environ.
366 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
La première partie s'étend depuis la cascade impénétrable, par laquelle
arrivent les eaux, jusqu'à leur disparition sous de grands éboulis. Cette
première partie, à laquelle E. Sabler attribue 1 km. de longueur, n'a en
réalité que 250 mètres. Les berges du ruisseau sont d'abord formées de
cailloutis, puis de rochers et de grandes masses d'argile. Au fond et à
droite s'ouvre une salle supérieure, haute de plafond, et dont le sol très
inégal est recouvert de grandes accumulations d'argile très glissante ;
quelques concrétions occupent à droite le bas-côté de cette salle ; on y
observe aussi des stalagmites enracinées dans l'argile.
Au delà des grands éboulis que Ton franchit par un petit passage entre
les blocs, se retrouve le ruisseau coulant, dans la deuxième partie de la
galerie, entre les rochers et des berges argileuses. Nous l'avons suivi pen-
dant 150 m. jusqu'à une plate-forme immergée indiquée sur le plan de
E. Sahler ; au delà s'étendait un lac infranchissable sans bateau pendant
les hautes eaux. Cette plate-forme doit se trouver à peu près à mi-chemin
des éboulis au lac terminal ; c'est donc compter largement en estimant à
200 m. le chemin qui restait à parcourir pour atteindre ce lac, et ce chiffre
porte à 600 m. à peine la longueur totale de la rivière souterraine connue.
Dans la deuxième partie de la galerie, le 16 mai 1916, la température
de l'air était de 11^5 C. ; celle de l'eau de la rivière, 12» C.
Le 16 mai, après les pluies des jours précédents, les eaux de la rivière
souterraine étaient très hautes et très troubles ; le courant était rapide
et des quantités de débris végétaux flottaient à la surface ou se dépo-
saient sur les berges. Le 5 juin, les eaux avaient notablement baissé ;
elles étaient plus calmes et claires.
La faune aquatique de la rivière souterrame nous a paru principa-
lement formée d'espèces épigées vivant dans le ruisseau de Baume et
entraînées sous terre par le courant. Des larves de Trichoptères dans leur
fourreau errent sur le fond ; des larves de Perlides en très grand nombre
et des Amphipodes se trouvent à la face inférieure des pierres plates.
Quelques Poissons {Gohio fluviatilis Cuv. et Val.)^ dorment dans le
courant entre lés pierres et des Ecrevisses se rencontrent errant dans les
endroits calmes ou tapies sous les grosses pierres. Tous les exemplaires
que nous avons vus étaient de petite taille et semblaient souffrir d'ina-
nition ; leur coloration est grisâtre, plus pâle que celle des Ecrevisses
vivant dans les ruisseaux épigés.
1. Détermination dt- notre collaborateur JI. I,. Fage.
GROTTES VISITÉES 3G7
Les flaques d'eau isolées de la rivière étaient habitées par d'assez
nombreux petits NipJmrgus (Amphipodes).
Sur les parois de la galerie et à plusieurs mètres au-dessus du niveau
de l'eau, des Algues (?) noires et grisâtres formaient des amas arrondis
sur chaque aspérité de la roche.
Dans les boyaux argileux de la descente, principalement dans le
boyau en hélice, se tenaient de nombreux Thysanoures, des Collemboles
et quelques Trichoptères adultes. Enfin, près de l'entrée, des Diptères
et de grands Aranéides étaient accrochés à la voûte dans la pénombre.
Trou aux Chiens. Situé entre Gonvillars et Arcey, sur la commune
d'Arcey, canton de l'Isle-sur-le-Doubs, département du Doubs. C'est
un aven ouvert dans les prairies, au fond d'une très vaste doline ; sa pro-
fondeur est d'une quinzaine de mètres et il paraît donner accès à une
très grande salle.
Il est possible que le « Trou aux Chiens » se trouve sur le trajet de la
rivière souterraine de Gonvillars, qui paraît d'ailleurs jalonnée sur le
plateau par une série d'effondrements. Mais il ne correspondcertainement
pas à la partie terminale de la rivière souterraine explorée (E. Fotjrnier,
1912, p. 27) qui doit se trouver bien plus au nord.
Jeannel.
674. Grotte des Orcières.
(FIG. 47)
Située à 1 km. au sud de Montivernace, commune de Montivernace,
canton de Baume-les-Dames, département du Doubs, France. — Alii-
tude : 480 !m. env. — Rcche : Calcaires du bathonien moyen, — Date :
18 mai 1916.
Matérianx : Coléoptères, Diptères, Aphaniptères, Trichoptères,
Thysanoures, Collemboles, Myriapodes, Aranéides, Acariens, Isopodes,
Amphipodes, Oligochètes, Ossements de Rats. — Numéro : 822.
Cette grotte, que j'ai visitée avec M. le professeur agrégé E. Brumpt,
est constituée par une galerie horizontale, sinueuse, longue de 700 m.
env., à laquelle on accède par un petit aven qui perce sa voûte. Toute
cette galerie s'étend à peu de distance de la surface du sol, sous les strates
horizontaux qui forment le plateau. L'aven, en forme de fente allongée
368
R. JÉANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Fio. 47. Croquis schématique do la Grotte
des Orcières (n" 674); longueur totale :
700 mètres environ.
dans la direction N.-S., s'ouvre dans un champ ; sa profondeur est d'une
dizaine de mètres, mais il est facile d'y descendre sans l'aide d'aucun agrès.
Au fond de l'aven s'ouvrent les deux tronçons de la galerie : l'un, le
_j plus long, vers le nord;
l'autre vers le sud.
Galerie nord. —
La galerie nord se dé-
veloppe sur une lon-
gueur de plus de 500
mètres. Son entrée très
basse était autrefois à
demi comblée par des
dépôts argileux dans
lesquels une profonde
tranchée a été creusée
qui rend l'accès facile.
Puis la galerie, d'abord
sèche et nue, devient
bientôt humide et très
concrétionnée. Partout
les stalagmites abon-
dent, souvent très hu-
mides, avec des gours
et des flaques d'eau.
Le sol est en général
stalagmite , mais il
existe par places quel-
ques amas d'argile ou de petites accumula-
tions de terre végétale tombée des JBssures de
la voûte. La galerie se termine par un bou-
chon d'argile.
Galerie sud. — La partie sud n'a guère
que 150 m. de longueur et se termine par une petite salle d'éboulis. Près
de l'entrée se trouvent quelques piliers stalagmitiques au pied desquels
s'étendent des gours asesz vastes et pleins d'eau à la température
de 80 C.
La température de l'air, vers le fond de la galerie nord, est de 9o5 C.
Dans toute la grotte, l'atmosphère est calme et humide. D n'y avait
GROTTES VISITÉES 369
pas de Chauves-Souris, mais quelques petits amas de guano sur le sol
et la présence de quelques Eschatocephalus adultes sur les parois témoi-
gnent qu'elles fréquentent cette caverne.
D'autre part, cette grotte est souvent visitée par des touristes venus
de Guillon-les-Bains, petite ville d'eaux des environs ; il en résulte un
apport fréquent de petits débris de toutes sortes qui contribuent certai-
nement à faire pulluler les animaux. .
Un Trichoniscus (Isop.), un Cam'podea (Thys.) et des Collemboles
abondent dans toute l'étendue de la grotte, sur le sol et sur les parois
stalagmitées. Dans des amas de guano les Collemboles se trouvaient par
milliers avec des Trichoniscus, quelques Myriapodes, des Acariens et
des Quedi'us (Col.) à l'état de larve et dïmago.
Dans l'eau des flaques, et surtout sur des débris ligneux immergés
dans les gours de la galerie sud, se tenaient de nombreux Amphipodes
et quelques Oligochètes.
La présence du Leptinus testaceus Mûll. (Col.) dans la grotte des
Orcières a plusieurs fois été signalée par Magnin (1899) ; malgré d'ac-
tivés recherches nous ne l'avons pas trouvé. Cela d'ailleurs n'a rien de
surprenant, car nous savons que, si le Leptinus a été déjà rencontré dans
un grand nombre de grottes d'Europe, il n'est cependant pas un hôte
habituel des cavernes.
Leptinus testaceus en effet est parasite de certains Rats dans les nids
desquels il se rencontre. Toutefois, comme il n'a jamais été trouvé sur les
Rats eux-mêmes, mais dans les nids, on peut se demander comment il
est amené dans les grottes oîi on le trouve trottinant maladroitement
sur le sol. En tous cas c'est à coup sûr à la suite des Rats qu'il pénètre
dans les cavernes.
On n'est malheureusement pas fixé sur les espèces de Rats qui fré-
quentent les grottes et dévorent parfois les appâts placés par les spéo-
logistes pour attirer les animaux cavernicoles. En attendant d'avoir pu
les prendre vivants, nous avons recueilli dans la grotte des Orcières
des ossements de Rats qui gisaient dans de petits recoins des parois ;
leur détermination sera peut-être intéressante.
Enfin une grande Puce, vraisemblablement une espèce parasite des
Rongeurs, a été trouvée sur une flaque d'eau à l'entrée de la galerie
nord.
Jeannel.
370
R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
675. Grottes du Sibiot.
(FiG. 48)
Situées dans une clairière, à 1 km. env. à l'est du Chénot, commune
d'Ougney-Douvot, canton de Roulans, département du Doubs, France.
Altitude : 300 m. env. — Roche
Petll: Sil^^cl
Fie. 48. Croquis schématique des Grottes du Silsiot (ii<^ 675) ; longueur
totale : 100 mètres environ.
Calcaire bathonien. — Date :
2 juin 1916.
Matériaux : Dip -
tères, Trichoptères, Thy-
sanoures, CoUemboles,
Myriapodes , Acariens ,
Oligochètes ; Parasite
de Diptère : Aca-
rien sur Heteromiella ( ?)
no 823. — Numéro : 823.
Les grottes du grand
et du petit Sibiot sont
citées par E. Fournier
(1907, p. 16-17, plan
p. 16). à l'occasion du
gouffre du petit Sibiot
ou « gouffre Busson » qui
se trouve dans le bois, à
100 m. env. au nord-est
des grottes qui nous
occupent.
Les deux grottes du
Sibiot s'ouvrent au fond
d'un large aven (le Si-
biot), profond de 25 mètres, mais facilement accessible par un sentier
du côté nord. L'aven est ovalaire, long de 50 m. env., large d'une ving-
taine et orienté N.-O. au S.-E. Son sol est en pente raide du N.-O. au S.-E.,
de façon que l'entrée de la grotte du petit Sibiot, qui occupe l'extrémité
N.-O., se trouve à une altitude plus élevée d'une vingtaine de mètres que
l'entrée de la grotte du grand Sibiot, à l'extrémité S.-E.
. La grotte du petit Sibiot n'est qu'un petit couloir, long de 20 m. env.,
obscur et stalagmite au fond,, mais absolument sec.
GROTTES VISITÉES 371
La grotte du grand Sibiot est plus importante. C'est une haute et
large galerie, longue de 70 m. env., qui dès l'entrée tourne vers la droite.
La première moitié de la galerie est éclairée par la lumière du jour ;
son sol est formé d'éboulis secs qui descendent en pente raide jusqu'à plus
de 10 m. de profondeur.
Dans la deuxième moitié de la galerie, le sol remonte vers le fond à peu
près de la même quantité. Ici l'obscurité est complète. Les parois sont
concrétionnées et de nombreuses bornes et coulées stalagmitiques humides
recouvrent la masse d'argile qui occupe le fond. La galerie se termine
par de petits diaclases,
La température de l'air dans la grotte du grand Sibiot est de 6^7 C ;
cette température froide s'explique par la forme de la grotte et la position
de son entrée au point le plus déclive de l'aven, conditions qui favorisent
l'accumulation de l'air froid.
Des Renards fréquentent le fond du grand Sibiot et y laissent des
traces nombreuses (déjections et ossements). Les déjections des Renards
sont habitées par des larves de Diptères, des Collemboles et des Acariens.
Sur les bornes stalagmitiques abondent les Collemboles et les Thysa-
noures ; par places de petits Diptères courent en assez grand nombre sur
la stalagmite et ne s'envolent pas lorsqu'on les poursuit.
Dans la partie éclairée, de grands Diptères et quelques Phryganes
se tenaient accrochés aux parois.
Jeannel.
676. Grotte de Gonsans.
(FIG. 49)
Située à 1 km. à l'est de Gonsans, commune de Gonsans, canton de
Roulans, département du Doubs, France. — Altitude : 580 m. env. —
Roche : Calcaires jurassiques. — Date : 7 juin 1916.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Trichoptères, Thysanoures, Col-
lemboles, Myriapodes, Aranéides, Opilionides, Acariens, Isopodes, Amphi-
podes. Mollusques, Oligochètes, Champignons. — Numéro : 824.
Dans le bois d'Onchaux, au sud-ouest et tout près de la route de
Gonsans à Magny-Châtelard, s'ouvre la grotte de Gonsans au fond d'une
petite dohne.
On descend d'abord en pente raide dans une grande salle dont le sol
372
R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
est formé d'une couche d'argile humide et visqueuse. A gauche un petit
couloir encombré d'éboulis continue à descendre vers deux petites
chambres stalagmitées, dans le sol
de chacune desquelles s'ouvre un
gouffre profond de 15 à 20 mètres.
La grande salle se contmue par
une longue galerie qui s'enfonce en
descendant vers le N.-E. jusqu'à
260 m. env. de l'entrée. Les 40 pre-
miers mètres de cette galerie sont
très humides ; les parois en sont
concrétionnées et il existe quelques
belles colonnes stalagmitiques dont
certaines, brisées, gisent à terre.
Le sol est argileux, détrempé, avec
quelques flaques d'eau ; ailleurs il
est formé de larges coulées stalag-
mitiques humides.
Au delà de ces 40 premiers
mètres, la galerie devient brusque-
ment d'une sécheresse complète.
Quelques stalagmites sèches se ren-
contrent tout d'abord, mais presque
partout les parois sont nues, sans
concrétions. Le sol est recouvert
d'une épaisse couche de poussière
jusqu'à l'extrême fond où se trou-
vent les restes effrités de quelques
vieux gours. Cette partie profonde
de la grotte a dû servir d'habita-
tion ; son entrée a été barrée par
un mvir dont il reste des ruines.
L'air est calme dans toute la
grotte ; sa température dans la
partie humide est de 1^1 C.
Les conditions d'existence sont essentiellement défavorables dans la
partie profonde de la galerie, beaucoup trop sèche et d'ailleurs azoïque.
Au contraire, la première partie de la grotte, stalagmitée, argileuse
Fio. 49. Croquis schématique de la Grotte de Gonsaus
(n" 676) ; longueur totale : 300 mètres environ.
GROTTES VISITÉES 37.3
et humide, se trouve très favorable et renferme en abondance des res-
sources alimentaires. Les Chauves-Souris fréquentent la grotte. De
nombreux débris ligneux gisent sur le sol, et même des troncs d'arbres
sur lesquels poussent des Champignons. Sur la stalagmite se trouvent en
très grand nombre des cadavres de grands Opilionides recouverts de moi-
sissures blanches.
Aussi la faune est-elle relativement riche. Partout abondent des
Collemboles. Çà et là des Trichoniscus (Isop.), des Thysanoures, des
Acariens et des Anurides errent sur la stalagmite. Les morceaux de bois
en décomposition étaient habités par des Collemboles, des Myriapodes
et de petits Diptères.
De petits Aranéides sont assez abondants sous les pierres ou dans les
petites toiles lâches qu'ils tissent au pied des stalagmites.
Des Diptères noirs couraient avec rapidité sur le sol humide ou sur
les flaques d'eau, passant de l'un aux autres sans ralentir leur course ;
ils paraissaient tout à fait incapables de se servir de leurs ailes.
Enfin quelques petits Amphipodes ont été recueilHs sous des pierres
reposant dans l'argile détrempée d'un bas-fond.
Jeannel.
677. Grotte de Saint-Marcel d'Ardèche.
Située au débouché de la Combe du Pouzat, rive gauche de l'Ardèche,
commune de Saint-Marcel d'Ardèche, canton de Bourg-Saint- Andéol,
département de l'Ardèche, France. — Altitude : 150 m. env. — Roche :
Calcaires crétaciques. — Date : 8 janvier 1913.
Matériaux recueillis par M. A. Magdelaine : Myriapodes, Aranéides,
Chernètes, Ixodes. — Numéro : 825.
678. Balme Patas.
Située sur la route de Beuil à Touet-de-Beuil, à 300 m. env. du village,
commune de Beuil, canton de Guillaumes, département des Alpes-Mari-
times, France. — Altitude : 1.400 m. env. — Roche : Calcaires secondaires.
— Date : 21 mai 1914.
Matériaux recueillis par M. A. Magdelaine : Coléoptères, Myria-
podes, Opilionides. — Numéro : 826.
374 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
La grotte s'ouvre au nord de la route et à 4 ou 5 m. de distance,
exactement à l'endroit où le ruisseau du village débouche du canal
souterrain qui lui fait traverser la route. Elle est formée par une chambre
irrégulière ayant 5 m. env. de diamètre maximum. Par l'entrée qui a
2 m. env. de hauteur la lumière pénètre suffisamment pour qu'on puisse
distinguer au fond les détritus et pierres qui s'y trouvent.
Le sol est formé par un terreau noir et un peu humide, mêlé de fumier
de mouton, car la grotte sert temporairement de bergerie. De nombreux
Vers de terre y habitent. Les parois sont sèches et ne présentent pas
trace d'incrustations. Outre le fumier, de nombreux débris organiques
jonchent le sol.
Les Tr échus {Duvalius) Magdelainei Jeann. se tiennent enfoncés dans
le terreau. Ce sont des Carabiques très agiles. Pour les trouver, il faut
piocher jusqu'à 20 cm. de profondeur et éparpiller sur le sol les mottes
ainsi détachées. Un Laemostenus augustatus a été trouvé également
enterré, ainsi que quelques larves de Coléoptères.
Magdelaine.
679. Grotte de Montbolo.
(FlG. 50)
Située près du village, commune de Montbolo, canton d'Arles-sur-
Tech, département des Pyrénées- Orientales, France. — Altitude : 630 m.
env. — Roche : Calcaires dévoniens. — Date : 15 octobre 1915.
Matériaux : Diptères, Hyménoptères, Trichoptères, Orthoptères,
Myriapodes, Aranéides, Ixodes, Isopodes. — Numéro : 827.
Pour parvenir à la grotte, il faut prendre le chemin de la métairie
« d'En Sars », passer derrière la métairie et continuer à monter pendant
10 minutes env. On suit ensuite un sentier étroit et horizontal qui
s'amorce à droite pendant 1 minute jusqu'à un ravin à dalles de pierre
polie qu'on descend pendant une quinzaine de minutes.
L'entrée s'ouvre au sud et est obstruée par une masse d'éboulis ter-
reux et rocheux que les ruissellements ont entraîné dans la grotte. Une
salle centrale a son sol vaseux exhaussé par des dépôts de crues. A gauche
comme à droite, s'ouvre une galerie étroite et peu profonde ; celle de
droite est sèche, pierreuse et située à 2 m. au-dessus du sol de la salle ;
celle de gauche s'ouvre au niveau du plancher et son sol est humide et
GROTTES VISITÉES
375
boueux. Une troisième galerie incomplètement explorée s'ouvre au fond
de la salle, à 3 m. 5 de hauteur. La longueur totale doit dépasser 20 m.
Les parois sont incrustées de draperies bien développées, surtout au
fond. Les stalactites ne dépassent pas 5 cm. de longueur. Au fond, à
droite, des coulées stalagmitiques. Toutes les incrustations sont sèches
et les suintements sont nuls. Il ne doit pas en être de même en temps de
crues ; l'eau du ravin doit même envahir la grotte.
Des coquilles terrestres et des débris végétaux fixés sur les parois
Fia. 50. Coupes longitudinale et trcansvcrsalc de la Grotte de Montbolo (n" 079) ; longueur totale : 25 mètres
environ.
indiquent que la crue peut dépasser 2 m, et que l'eau doit remplir toute la
galerie de gauche ne laissant à sec qu'une partie de celle de droite.
Température de Tair à 13 h, 30, extérieur : 18^ C ; près du sol,
à 11 m. de l'entrée : 15P5 C. ; à 1 m. de l'orifice des galeries : \5P C.
Atmosphère calme.
Nombreux débris végétaux amenés par les eaux ainsi que des frag-
ments ligneux pourris. Une seule Chauve-Souris mais pas de guano.
La première chasse ne donna pas de résultats. Les galeries furent alors
appâtées, ce qui amena la capture d'une trentaine de cavernicoles dans la
galerie de gauche et d'un seul dans celle de droite. D'autres Biotes furent
trouvés dans un renfoncement de la paroi du fond rempli de terre et de
feuilles sèches, à 1 m. 50 au-dessus du sol et incomplètement obscur. Les
376
B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Coléoptères étaient représentés par Laemostenus oblongus Dej., Aiheta
subcavicola Ch. Bris, et Speonomus Delarouzeei Fairm.
Des Noctuelles gîtaient sur les parois et deux Scorpions furent
capturés.
Decary et Magdelaine.
680. Grotte de Can Pey.
(FIG. 51)
(Secoûde exploration, voir Biospeologica VI, p. 334)
Située près de la métairie de Can Pey, rive droite de la Fou, commune
de Montf errer, canton d'Arles-sur-Tech, département des Pyrénées-
Orientales, France. — Altitude : 660 m. env. — Roche : Calcaires dévo-
niens. — Date : 7 novembre 1915.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Trichoptères, Myriapodes, Ara-
néides, Isopodes. — Numéro : 828.
Voici quelques renseignements destinés à compléter la description
publiée antérieurement dans Biospeologica. La grotte est constituée
par une galerie de 41 m. de longueur sur 1 à 2 m. de largeur, coudée à
FlG. 51. Coupe longitudinale dv la Grottu de Can Pey (n" 680) ; longueur totale : 41 mètres.
angle droit aux 12^ et 18^ m.. Vers le fond elle s'élargit en une salle oii se
sont formés les incrustations les plus épaisses. Les stalactites ont été
presque toutes brisées, il ne reste guère que les masses concrétionnées
qui adhèrent aux parois et qui forment un certain nombre d'anfractuo-
sités dans lesquelles s'est accumulé un assez abondant guano de Chauves-
Souris. Les suintements sont nuls par temps sec, mais très abondants
après les pluies; l'eau ne s'accumule cependant pas sur le sol, car elle
GROTTES VISITÉES 311
se perd dans les fissures. L'humidité n'est d'ailleurs marquée que dans
la salle du fond. L'atmosphère de la grotte est calme partout.
Le guano est assez abondant, mais après les pluies, les dépressions
oii il est entassé se remplissent d'eau. Les cavernicoles assez nombreux
qui habitent la grotte se réfugient dans ces circonstances sur les parois,
parfois à plus de 2 m. de hauteur. _^
^ ^ Decary.
681. Cueva de los Murcielagos de Almadén.
Située à la Solana de la sierra de Nostra Signora del Castillo, ter-
mino municipal et partido de Almadén, provincia de Ciudad-Real,
Espagne. — Altitude : (?). — Roche : Quartzites siluriens (?). — Date :
30 mai 1916.
Matériaux : Coléoptères. — Numéro : 829.
Les quartzites redressés jusqu'à la verticale de la sierra de N. S. del
Castillo, sont parcourus en plusieurs endroits par des couloirs très pro-
fonds et très effondrés, creusés dans des joints de stratification ou des
cUaclases. Quelques-unes de ces anfractuosités sont plus ou moins obscures.
Il y fait toujours une température fraîche et il y règne une certaine
humidité qui provoque dans la zone éclairée un développement notable
de Fougères et d'Hépatiques. Une de ces cavités est située entre les deux
roches peintes, au pied de la chapelle de N. S. del Castillo, sur le versant
sud. Sa forme est celle d'un T, dont la tige verticale aurait une quinzaine
de m. de longueur. L'entrée basse et étroite, donne accès à une zone de
pénombre assez sèche, garnie de petits cailloux, qui aboutit à un carrefour
assez haut de plafond, où du guano peu abondant voisine avec des petits
cailloux reposant sur sol humide. Des Coléoptères {Trechus) y habitent,
ainsi que des Collemboles. Le couloir de gauche n'est qu'un recoin insi-
gnifiant ; celui de droite se rétrécit rapidement.
Dans une cavité voisine, plus petite et à demi-obscure, pourvue d'une
entrée élevée, j 'ai capturé un Carabique. -r.
682. Cueva del Reguerillo.
Située à 1 km. env. à l'ouest du barrage de la Oliva, termino muni-
cipal de Patones, partido de Torrelaguna, provincia de Madrid, Espagne.
378 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
— Altitude : 850 m. env. — Roche : Calcaires crétaciques. — Date :
5 août 1916.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Trichoptères, Pupipares, CoUem-
boles, Myriapodes, Aranéides, Acariens, Isopodes. — Nuînéro : 830.
Cette grotte, très visitée, a été plusieurs fois décrite comme l'indique
PuiG Y Larraz (1896, p. 206). C'est très probablement la goule fossile
d'une ancienne lagune. EUe s'ouvre au sud-ouest dans un barranco transver-
sal à la petite bande crétacée située entre la montagne granitique et la
plaine miocène. L'entrée domine la route de 20 m. env. On descend légè-
rement pour pénétrer dans un vestibule arrondi de 20 m. env. de dia-
mètre, sec, faiblement éclairé, utilisé comme bergerie, avec poteries
d'âge néolithique. Le reste de la grotte est formé par une grande galerie
rectiligne d'environ 400 m. de longueur. La paroi gauche est formée par
un talus fortement incrusté de cascades stalagmitiques, bornes, colonnes,
etc. Mais les concrétions sont en général sales. L'humidité est forte par-
tout, les suintements abondants, le sol est souvent boueux, mais, il n'y
a pas de flaques d'eau. Le plafond est horizontal partout et s'élève gra-
duellement jusqu'à 15 m. env. Trois élargissements forment de belles
salles munies d'élégantes colonnes. Une galerie circulaire munie de culs-
de-sac ramifiés termine la grotte.
L'atmosphère est calme. Les ressources alimentaires sont nombreuses ;
le guano est soit accumulé soit dispersé ; les débris végétaux abondent.
De grosses Chauves-Souris gîtaient vers le fond. Sur les parois étaient
accrochés de nombreux cadavres de Phryganes couverts de Champignons.
Dans le guano habitent de nombreux Acariens, d'innombrables larves
de Diptères, des Staphylins et Sphodrides, des Diptères variés.
Sous les pierres, nombreux Myriapodes, Isopodes(Porc-'//w), Sphodrides.
Les Bathysciinés sont communs partout dans les régions pas trop
envahies par le guano. Il en est de même des Collemboles. Les Aranéides
préfèrent les bornes.
Breuil.
683. Carrière de Vry.
(FIQ. 52)
Située sur le côté droit de la route de Ladoix-Serrigny à Magny-les-
Villers, à 1 km. de ce dernier village, commune de Magny-les-Villers,
canton de Nuits-Saint-Georges, département de la Côte-d'Or, France.
GROTTES VISITÉES
379
831.
833.
Altitude : 300 m. env. — Roche : Calcaires du bathonien moyen.
Date : 3 avril 1915. — Matériaux : Isopodes, Amphipodes. — Numéro :
Date : P^ mai 1915. — Matériaux : Isopodes. — Numéro : 832.
Date : Id avril 1916. — Matériaux : Isopodes, Amphipodes. — Numéro:
>
Date : 13 juin 1916. — Matériaux : Isopodes, Copépodes.— Numéro : 834.
Cette carrière, dont le grand axe est parallèle à la route et fait par suite
face au sud, est exploitée activement. La masse rocheuse y est débitée
par les joints et de petites diaclases en gros parallélipipèdes. Dans plusieurs
de ces fentes, de l'eau circule que l'on entend couler.
En 1915, dans le côté gauche de la carrière, existait un petit écoule-
Fio. 52. Les deux Sources de la Carrière de Vry (n" 683).
ment d'eau (fig. A), sortant d'une fissure de quelques centimètres de
largeur, à environ 1 mètre de hauteur. Cette eau, conduite par un morceau
de tuyau posé par les carriers, tombait dans une petite vasque de deux ou
trois centimètres de profondeur et de là s'écoulait dans une petite mare.
Dans le tuyau d'écoulement, mais surtout sur le sable du fond de la vasque
et sous Içs feuilles des quelques pieds de cresson bordant cette dernière,
j'ai recueilli de très nombreux Niphargus Virel (détermination de M. Che-
vreux) et Cœcospha.eroma.
En 1916 cette petite fontaine était asséchée par l'exploitation de la
AUCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — T. 57. — F. 3. 25
380 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
carrière, mais à quelques mètres sur la droite, l'extraction de la pierre
avait mis à nu un autre filet d'eau sortant de deux fissures placées à
angle droit, et se perdant dans une autre fente rocheuse à environ 1 mètre
plus loin, après s'être un peu élargi et n'ayant plus qu'un courant très
faible (fig. B). La température de cette eau, au 13 juin, était de 9^5 C.
A la sortie de ce filet et surtout dans les débris d'étoffes bourrés en
vain par les carriers dans les fentes pour arrêter cet écoulement et le faire
revenir à celui de 1915, j'ai rencontré de très nombreux Cœcosijhaewma
et, dans les parties les moins humides de ces chiffons, des Isopodes ter-
restres. J'ai en outre récolté dans cette eau quelques Niphargus, des
Copépodes, des Ilyocypris Bradyi et des Alona rectangula 9 , avec plusieurs
larves de Salamandra maculosa et d'Alytes ohstetricans. La dernière explora-
tion (17 juillet) ne m'a plus donné aucun cavernicole. La partie la plus basse
du ruisselet était encombrée d'Algues vertes, Spirogyres, Clostériés, etc.
Paris.
684. Puits Martin.
Situé rue des" Petites-Roches à Dijon, département de la Côte-d'Or,
France. — Altitude : 230 m. env. — Roche : Alluvions oligocènes. — Date :
20 mai 1915.
Matériaux : Collemboles, Amphipodes. — Numéro : 835.
Ce puits est foré sur l'emplacement d'un ancien marais. Il est cou-
vert et son réservoir inférieur est cimenté. La profondeur est de 7 à 8 m.
La pompe à chapelet qui l'exploite est fréquemment utilisée. Par grande
sécheresse l'eau tarit complètement.
Une balance amorcée de viande, tendue pendant une nuit, ramena
avec de très nombreux Niphargus Plateaui robustus (détermination de
M. Chevreux), un Collembole rosé à appendices violacés. p
685. Source du Lavoir inférieur de Magny-les-Villers.
Située à 600 m. env. du village, commune de Magny-les-Villers, canton
de Nuits-Saint-Georges, département de la Côte-d'Or, France. — Altitude :
300 m. env. — Roche: Calcaires du bathonien moyen. — Date :11 avril 1915.
Matériaux : Isopodes. — Nmnéro : 836.
GROTTES VISITÉES 381
Sortant d'une petite diaclase, cette source de faible débit forme à sa
sortie une petite mare de quelques mètres carrés, qui reçoit aussi l'eau
de ruissellement de la route. Dans cette mare à fond vaseux, nombreux
animaux de surface (larves de Salamandra maculosa, Nepa cinerea,
Gammarus pulex et nombreuses coquilles vides d'Ancylus et de petits
Sphaerium), un Cœcosphœroma bien vivant. Cette eau pourrait bien être
en rapport avec celle de la carrière de Vry située à peu de distance, à
la même altitude et dans le même massif calcaire.
Paris.
686. Puits Groseille.
Situé dans la vallée à 2.5 km. à l'ouest du village, commune d'Ar-
cenant, canton de Nuits-Saint-Georges, département de la Côte-d'Or,
France. — Altitude : 400 m. env. — Roche: Calcaires compacts du batho-
nien. — Date : 18 avril 1915.
Matériaux : Isopodes, Amphipodes. — Numéro : 837.
Cette grotte a été citée par Curtel et Drioton (1911, p. 117) qui
en ont donné un plan.
Elle est située non loin de la Douix du Raccordon et fonctionne
comme trop-plein deux heures après des pluies abondantes. Une descente
de quelques mètres conduit à une galerie longue d'environ 90 m,
qui, d'abord étroite, s'élargit à 50 m. de l'entrée jusqu'à 5 à 6 m.,
tout en restant basse de plafond (1 m. 30). Cette galerie, dans sa partie
large, CvSt ornée de stalactites nombreuses, mamillaires, et de stalagmites,
et se termine par un puits vertical d'une quinzaine de mètres avec au
fond une hauteur d'eau variable.
Dans les flaques de la galerie j'ai récolté quelques Crustacés.
Paris.
687. Grotte d'Antheuil.
Située au milieu d'abrupts, à 100 m. au nord du village, commune d'An-
theuil, canton de Bligny-sur-Ouche, département de la Côte-d'Or, France.
— Altitude : 400 m. env. — Roche : Calcaires compacts bajociens. —
Date : 13 juin 1915.
382 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Matériaux : Diptères, Trichoptères, Amphipodes, Champignons. —
Numéro : 838.
Cette grotte longue d'environ 200 m. est formée d'une série de salles
assez vastes, hautes de 10 à 15 m., faiblement ornées de stalactites et
réunies par d'étroits couloirs. Non loin de l'entrée, fermée imparfaitement
par une porte en bois, existe sur le côté droit une fente très élevée dans la
paroi, avec cône d'éboulis contenant des racines d'arbres. Au fond, un
escalier d'une vingtaine de marches conduit à un ruisseau à courant
rapide venant du fond rétréci et impénétrable de la galerie et s'enfon-
çant au bout de quelques mètres sous les éboulis. Ce ruisseau donne nais-
sance, dans une diaclase assez largement ouverte sur quelques mètres,
à une belle source jaillissant à une dizaine de mètres en contre-bas de la
grotte et formant une série de cascadettes tufeuses.
Cette grotte humide, avec de nombreuses flaques, ne m'a donné aucun
cavernicole. Au milieu de son parcours, j'ai rencontré contre les parois
de nombreux Diptères.
Le garde forestier qui m'accompagnait m'a dit qu'en hiver de nom-
breuses Chauves-Souris s'abritaient dans cette grotte.
La source à sa sortie m'a donné quelques beaux Nijikargus.
Paeis.
688. Galerie artificielle de la Rente-Neuve.
Située au pied de la butte de la ferme de la Rente-Neuve, commune
de Couchey, canton de Gevrey-Chambertin, département de la Côte-
d'Or, France. — Altitude : 550 m. — Roche : Marnes de l'oxfordien. —
Date : 29 juin 1915.
Matériaux : Amphipodes. — Numéro : 839.
Galerie creusée pour recueillir l'eau de la butte, elle débute par une
salle quadrangulaire de quelques mètres de côté, fermée par une porte
à laquelle on accède par un escalier de quelques marches. Dans cette
salle où les fermiers entreposent leur laitage, il y a environ 20 cm. de
hauteur d'eau. Cette eau, qui s'écoule par un conduit dans une mare
située à une vingtaine de m., contenait de nombreux animaux de surface :
Velia currens, Gyrinus natator et même une Ra7ia jusca.
GROTTES VISITÉES 383
De l'angle gauche du fond de cette salle, part la galerie proprement dite,
s'enfonçant obliquement par rapport à la salle, en se courbant un peu.
Entièrement maçonnée, elle est haute d'environ 1 m. 20 sur 1 m. de lar-
geur et a environ 80 m. de longueur. Il y coule quelques centimètres de
hauteur seulement d'une eau très calcaire formant des concrétions sphé-
riques ressemblant à des choux- fleurs et variant de la grosseur d'une noix
à celle du poing. Sous les débris de bois, dans cette galerie, des Niphargus
à intestin coloré en bleu noir.
Paris.
689. Source de la Fortelle,
Située au-dessus de la combe de Brochon, à droite du chemin de
Fixin à Chambœuf, commune de Brochon, canton de Gevrey-Cham-
bertin, département de la Côte-d'Or, France. — Altitude : 460 m. env. —
Boche : Calcaires du bathonien supérieur. — Date : 23 janvier 1916.
Matériaux : Amphipodes. — Numéro : 840.
Cette petite source aménagée et voûtée sort d'une petite faille et se
perd dans une mare qui occupe une petite doline colmatée.
Dans l'émissaire de cette source, sous les cailloux et les feuilles mortes,
de nombreux petits Nijohargus.
Paris.
690. Carrière de Ladoix-Serrigny.
Située au-dessous du hameau de Ladoix, commune de Serrigny,
canton de Beaune, département de la Côte-d'Or, France. — Altitude :
300 m. env. — Roche : Calcaires du bathonien supérieur. — Date :
4 avril 1916.
Matériaux : Amphipodes. — Numéro : 841.
Dans cette carrière, un escalier de quelques marches conduit à une
excavation couverte où l'eau se montre sur un peu plus d'un mètre entre
deux fentes de rochers. Sous les pierres, dans cette eau, j'ai recueilli
quelques Niphargus.
Paris.
384 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
691. Puits artificiel à Perrigny-les-Dijon.
Situé dans la commune de Perrigny-les-Dijon, canton de Dijon-sud,
département de la Côte-d'Or, France. — Altitude : 250 m. env. — Roche :
Alluvions pliocènes. — Date : 20 juin 1916.
Matériaux : Amphipodes, Copépodes, Hirudinés. — Numéro : 842.
Puits ouvert sous un hangar. Profondeur 6 m. avant la surface de
l'eau haute d'environ 2 m.
Une balance amorcée de viande tendue la veille m'a donné des
Niphargus, des Copépodes, un petit Ostracode {Cypria ophthahnica cf),
un Hirudiné.
Paris.
692. Grotta di Civale.
Située dans la presqu'île de Sorrente, commune de Ravello, arron-
dissement d'Amalfi, province de Salerno, Italie. — Altitude : 300 m. env.
— Roche : Calcaires crétaciques. — Date : 17 mai 1917.
Matériaux : Diptères, Orthoptères, CoUemboles, Isopodes, OUgochètes,
Champignons. — Numéro : 843.
Cette grotte est propriété de M. Civale et son entrée se trouve au-
dessous du village de Ravello, dans le ravin que longe la route d'Amalfi
à Ravello.
D'une longueur totale de 50 m. env., elle est formée par un couloir
assez bas, humide, sans incrustations, s'élargissant vers le fond en une
petite salle encombrée d'éboulis, mais bien incrustée sur les parois. On
perçoit dans cette saUe un bruit de torrent, mais le cours d'eau qui le
produit n'est pas accessible.
Faune pauvre, non troglobie.
Fage.
693. Grotte de Castel-Mouly.
(Quatrième mention, voir Biospeolohica XXIV, p. 157, et XXXIII, p. 479)
Située au pied du flanc est du mont Castel-Mouly, commune et canton
de Bagnères-de-Bigorre, département des Hautes-Pyrénées, France. —
GROTTES VISITÉES ' 385
Altitude : 700 m. env. — Roches : Calcaires secondaires. — Date : 10 août
1917.
Matériaux recueillis par M. L. Fage : Coléoptères, Trichoptères,
Myriapodes, Aranéides, Champignons. — Numéro : 844.
694. Cueva de Santa Inès.
Située près du village, termino municipal de San Antonio Abad, partido
de Ibiza, provincia de Baléares, Espagne. — Altitude : 50 m. env. — Roche :
Calcaires crétaciques. — Date : 12 mars 1917.
Matériaux : Aranéides. — Numéro : 845.
Cette grotte fut aménagée au haut moyen âge en ermitage ; plusieurs
parois artificielles la divisent en cellules, actuellement remplies d'éboulis
modernes. Elle a été fouillée récemment et les travaux ont fait disparaître
une flaque d'eau qui existait dans la chambre où se voient une arcade
construite et des débris de l'autel. Toutes les autres cavités sont sèches.
Pas de courant d'air, ressources alimentaires nulles, pas de Chauves-
Souris, ni de guano. Des Araignées furent les seuls biotes rencontrés.
La dimension totale atteint 40 m. env.
Cuevas Marça et La Orengue me sont signalées près de San Miguel,
même termino municipal de San Antonio Abad.
Breuil.
695. Cueva santa de Ibiza.
Située près des ruines d'un ermitia, termino municipal et partido
de Ibiza, provincia de Baléares, Espagne. — Altitude : 200 m. env. —
Roche : Calcaires crétaciques. — Date : 14 mars 1917.
Matériaux : Myriapodes, Aranéides. — Numéro : 846.
Sur le chemin d'Ibiza à San José, à 7 km, d'Ibiza, sur le flanc d'une
colline voisine du chemin, s'ouvre cette grotte citée par PcriG y Larraz
(1896, p. 38). Elle est formée par une salle irrégulière de 50 m. env. pour-
vue d'un certain nombre de petits culs-de-sac ascendants, dont l'un
sert d'entrée et trois autres, actuellement bouchés, furent également des
ouvertures. Le milieu de la salle est par conséquent en forme de cuvette
et c'est la seule région un peu humide.
386 * B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Pas de courant d'air. Quelques morceaux de bois pourris. Pas de
Chavives- Souris ni deguano. LesBiotes furent recueillis sous les pierres, près
de l'entrée qui a la forme d'un puits de 2 m. 50 à marches entaillées dans
la roclie. _.
Breull.
696. Cueva Argentera.
Située près de la mina Argentera, termine municipal de Santa Eulâlia
partido de Ibiza, provincia de Baléares, Espagne. — Altitude : 50 m.
env. — Roche : Calcaires crétaciques. — Date : 15 mars 1917.
Matériaux : Aranéides, Isopodes, Champignons. — Numéro : 847.
La grotte s'ouvre sur le flanc nord de la montagne, entre le village de
Santa Eulâlia et la mina Argentera, à 1 km. des bâtiments de cette der-
nière. Tout le terrain est criblé de galeries de mines et de puits abondonnés
qui communiquent souvent avec la grotte ou passent sous son plancher
qui est percé de puits dangereux.
On entre par un puits de 15 m. env. de profondeur et l'on parcourt
les cavernes suivantes que j'ai explorées sur 80 m. env.
Une salle très haute à sol très incliné et légèrement humide. Sur un
tronc d'arbre s'étaient développés des Champignons.
Une galerie droite, très irrégulière, de parcours difficile, haute, étroite,
barrée de seuils très élevés.
Une salle terminale, basse, ornée comme la galerie d'incrustations
variées, souvent très aiguës et fort belles, mais saccagées.
En général la grotte est sèche. Pas de courant d'air. Ressources ali-
mentaires nulles sauf près l'entrée. Pas de Chauves-Souris ni de guano.
Cuevas de San Carlos et de Los Remedios (?) me sont signalées dans
les environs.
Breuil.
697. Cueva de! Régals.
Située à l'aldea de Jésus, termino municipal de Santa Eulâlia, partido
de Ibiza, provincia de Baléares, Espagne. — Altitude : 40 m. env. —
Roche : Calcaires crétaciques. — Date : 17 mars 1917.
Matériaux : Thysanoures, Myriapodes, Aranéides. — Numéro : 848,
GROTTES VISITÉES 387
A une petite heure à pied, après avoir traversé la baie d'Ibiza, en
marchant vers le nord, on trouve cette grotte à flanc de coteau. L'entrée
est constituée par un double portique bas avec un gros pilier stalagmitique
central. Toute la grotte est incrustée ; les cascades, massifs, colonnes
abondent et sont assez beaux, mais sont noircis par des foyers très anciens,
comme l'indiquent les céramiques préhistoriques abondantes.
J'ai exploré env. "80 m. des cavernes suivantes :
Un vestibule clair et sec, de 20 m. sur 20 m. env., avec très nombreuses
colonnes et bornes sèches et nombreux puits peu profonds au centre.
Vers le fond s'opère un rétrécissement à droite, puis un coude brusque
à gauche suivi par un boyau étroit et bas de 10 m. env. , aboutissant à un
à-pic de 3 m. env. qu'on descend sur un tronc entaillé.
On pénètre ainsi dans une salle assez vaste de 25 m. env. de dia-
mètre, très irrégulière, à nombreux recoins et dénivellations dus aux
empâtements des incrustations. Plusieurs puits peu profonds commu-
niquent avec un étage inférieur. A gauche, dans un bas-fond, se trouve
l'amorce d'une grande galerie sèche que je n'ai pas explorée complè-
tement.
Le fond de la salle est un peu humide, et même une flaque d'eau existe
en son miheu.
Après un détroit humide vient une petite salle, humide par places,
très encombrée de bornes et de colonnes souvent sèches. Elle se termine
par un barrage de colonnettes, avec chatières étroites et haut placées
que je n'ai pas franchies, mais j'ai pu voir au travers que la grotte continue
en s'élargissant, tandis que le plancher présente un ressaut de 10 m.
e)iv. nécessitant l'aide de la corde. L'humidité semble augmenter dans
cette région.
L'atmosphère est calme partout. Pas de Chauves-Souris, mais des
crottes éparses. Quelques débris ligneux.
Des Campodéides à appendices très allongés couraient sur les sta-
lactites humides.
Cueva de los Frailes, qu'on me signale dans les environs, semble être
un abri sous roche avec les ruines d'un ermitage.
Cueva avec figuier à l'entrée serait une autre grotte voisine, peut-être
obstruée.
Breuil.
388 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
698. Cueva de las Maravillas de Alcira.
(Seconde exploration, voir Biospeologica XXXIII, p. 498)
Située près de Carcagente, termine municipal et partido de Alcira, pro-
vincia de Valencia, Espagne, — Altitude : 30 m. — Roche : Calcaires
crétaciques. — Date : 23 mars 1917.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Orthoptères, Thysanoures, Col-
lemboles, Myriapodes, Aranéides, Chernètes, Oligochètes, Mollusques,
Champignons. — Numéro : 849.
J'ai trouvé cette fois la grotte très humide et habitée par de très
nombreux Biotes dont beaucoup de Troglobies.
En haut de l'escalier de l'entrée, c'est-à-dire dans la pénombre, j'ai
capturé deux Gryllides. Dans la grande salle se tenaient des milliers
d'Anillochlamys et de Tachys avec des Staphylins plus rares sur les
matières organiques en décomposition et sur des branches de pin assez
fraîches.
M. Emilio Morader, de Valence, m'a remis du matériel capturé par lui
au mois d'avril.
Breuil.
699. Cova dels Colom's de Ribarroja.
Située à 5 km. de la station, termine municipal de Ribarroja, partido
de Liria, provincia de Valencia, Espagne. — Altitude : 200 m. env. —
Roche : Calcaires triasiques (?). — Date : 25 mars 1917.
Matériaux : Myriapodes, Isopodes. — Numéro : 850.
La grotte est située à 5 km. de la station de Ribarroja, à la nais-
sance d'un petit vallon et à mi-côte. Elle est formée par une galerie sen-
siblement rectiligne de 40 m. env., sèche, très haute au miUeu, à sol
d'abord descendant, puis horizontal, mais creusé de points d'absorption
profonds, et finalement fortement ascendante. Elle se termine par une
petite chambre élevée, incrustée et pourvue d'une petite flaque d'eau.
Atmosphère calme ; pas de Chauves-Souris, mais quelques crottes
éparses au fond, oii furent capturés un Liihohiiis et deux PorczUio.
Breuil.
GROTTES VISITÉES
700. Cueva de las Calaveras.
(Seconde exploration, voir Biospeologica XXXIII, p. 505)
Située sur le versant nord du mont Sigili, termino municipal de Beni-
doleig, partido de Dénia, provincia de Alicante, Espagne. — Altitude :
100 m. — Roche : Calcaires crétaciques. — Date : 9 avril 1917.
Matériaux : Coléoptères, Myriapodes, Aranéides, Oligochètes, Cham-
pignons. — Numéro : 851.
J'ai signalé précédemment que les travaux effectués pour la cap-
tation de la source qui jaillit au fond de la grotte avaient bouleversé le
sol. Maintenant que les travaux sont achevés, la chasse redevient fruc-
tueuse. Le chenal étroit de la galerie de droite est en partie pavé de blocs
non cimentés, mais cela exclut néanmoins toute recherche dans cette
région. Dans la région non bouleversée, sous les pierres reposant sur
l'argile humide, deux Carabiques furent capturés. Les Diplopodes furent
recueillis au bord du lac.
Breuil.
GROTTES DE LA COTE ENTRE DENIA ET CALPE,
province d' Alicante, Espagne.
La côte entre Dénia et Calpe a un profil très accidenté, formé d'une
série d'éperons montagneux perpendiculaires à la mer et se terminant
par de grands à-pics, et d'autre part de plusieurs larges concavités cor-
respondant aux « vegas » de Dénia, Javea, Moraira, Benisa et Calpe.
Les vagues de la mer ont creusé dans ces falaises, durant les temps
géologiques, des cavités situées principalement à deux niveaux : Les
unes se trouvent à un niveau supérieur dominant la mer de 50 mètres
environ ; beaucoup de ces cavités sont complètement inaccessibles ;
d'autres, quoique difficiles d'accès, peuvent être atteintes par des gens
très habitués aux terrains très accidentés.
Plusieurs d'entre elles, et quelques petites cavités creusées par le
vent à un niveau intermédiaire, ont été aménagées par des pêcheurs qui
se risquent à descendre jusqu'au niveau de la mer en s'aidant par des
mains courantes de corde ou de fil de fer et par de petites échelles clouées
dans le rocher.
390 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Ces observations s'appliquent principalement à la partie de la côte
comprise entre le cap de la Nao et le cap de Almoraira.
Exceptionnellement un petit nombre de grottes de ce niveau supé-
rieur forme des antres très accessibles, spécialement dans le territoire
de Benitachell, à l'ouest du «barranco del Morats». Là, au pied même du
ravin, il y a une petite anse dominée de quelques mètres seulement à
l'est par un large abri. A gauche, à quelques centaines de mètres seulement
se trouvent diverses cavités voisines les unes des autres, d'oii sort un
important courant d'eau douce. A une centaine de mètres d'altitude au-
dessus, se trouve une falaise dans laquelle s'incruste une maison complè-
tement isolée au voisinage de laquelle il y a deux grottes assez spacieuses.
Toutes les autres grottes ou cavernes que nous avons visitées se trou-
vent au niveau de la mer. En voici la description détaillée, en suivant la
côte depuis Dénia jusqu'à Calpe. Aucune n'est accessible par voie de
terre ; il est même nécessaire de jouir d'une mer favorable pour pouvoir
y aborder. (Voir les grottes suivantes n^ 701 à 703.)
701. Cueva Tallada.
Située à 3 km. au sud-est du village, termiuo municipal et partido de
Dénia, provincia de Alicante, Espagne. — Altitude : Niveau de la mer. —
Roche : Calcaires miocènes. — Date : 10 avril 1917.
Matériaux : Trichoptères, Myriapodes, Aranéides, Isopodes, Cham-
pignons. — Numéro : 852.
Il semble que cette grotte soit citée par Puig y Larraz (1896, p. 20)
sous le nom de cova Cortada. Elle est située à 3 km. de Dénia, dans la
direction du cap Saint- Antoine, à la limite des « terminos )> de Dénia
et de Javea, au pied du versant nord du Mongô.
Par un petit ravin situé à l'ouest on peut descendre, de la tour qui domine,
sur la banquette rocheuse oii brisent les vagues et en tournant vers
l'est, à condition que le temps soit très calme, on peut atteindre une
lucarne qui donne dans la grande salle servant de vestibule à la grotte.
Par mer, l'accès est assez facile et l'on pénètre par la partie occidentale
du vestibule, sous un large porche. Le vestibule ou grande salle d'entrée
se compose de deux parties. Le côté oriental, très élevé comme voûte
et entièrement clair, est un lieu de rendez-vous de nombreuses excursions
GROTTES VISITÉES 391
de vacances et de réjouissances. Vers l'est, la voûte s'abaisse' beaucoup et
le sol n'est plus à l'abri de la grosse mer. Cette partie du vestibule est
entièrement taillée par d'anciens travaux d'extraction de pierres à
bâtir. Plusieurs piliers laissés en avant par les carriers diminuent de
beaucoup la quantité de lumière qui y pénètre. La dimension de cette
grande saUe, de l'est à l'ouest, doit être d'environ une centaine de mètres
pour une profondeur nord-sud d'une vingtaine de mètres. Vers le milieu
du vestibule, pénètre une galerie de carrière à pente montant rapidement
et à sol sec et inégal, entièrement à l'abri de la mer. Les parois de cette
galerie sont entaillées à droite et à gauche de chambres latérales ; vers
le fond, en tournant un peu à droite, on atteint l'extrémité d'anciennes
galeries de cavernes que l'exploitation à suivies. Il y a dans cette partie
deux cuves de ciment recueillant l'eau douce de plusieurs gouttières ;
Tune d'elles est ruinée et l'autre peut contenir une quarantaine de litres.
On accède au même point en venant de l'extrémité orientale du vesti-
bule par une autre galerie ascendante moins protégée de la mer, donnant
également accès à plusieurs chambres latérales.
Atmosphère calme. Quelques Chauves-Souris et un peu de guano
sec. ainsi que des débris végétaux. Sur le guano, de nombreux petits
Trichoptères et quelques Philoscies (Isopodes) sur un sac pourri, dans le
fond de la galerie terminale. Sous les pierres, des Lithobies jaunes
clairs se tenaient.
Cueva Horadada. Assez près de la Tallada, entièrement occupée
par l'eau peu profonde, très transparente, calme en tout temps.
Le nom Horadada est donné !en réalité au ravin est de la cueva Tal-
lada, ravin qui est limité à l'est par le single de la cova Negra, indiquée
sur la carte au 25.0006et qui a une ouverture béante, noire, visible à une
grande hauteur.
Cueva del Tabaco î. Petite anfractuosité de 9 à 10 m. de profondeur
avec, au fond, un goulet donnant accès à un recoin de 1 m. 50.
Cueva sans nom L A 30 m. de la grotte suivante, autre grotte plus petite
avec fente rebordée par une crête de rocher formant corniche.
Cueva sans nom IL A l'ouest de la grotte de los Palomos. A 10 m. au-
dessus de la mer ; profondeur de 15 m. ; ouverture à F entrée 5 ou 6 m.
Forme triangulaire. Petit dépôt d'eau douce sur une corniche. Sol ro-
cheux formé de blocs tombés, cependant horizontal. Intérieur non visible
de la mer.
392 R. JEANNEL ET E.-G. RAGOVITZA
Cueva del Escoll (Écueil). Signalée par un rocher à l'entrée, entière-
ment occupée par Feau.
Cueva de los Palomos I. Large auvent très élevé, avec des trous entre
des pendentifs de stalactites qui ont pu servir autrefois à des pigeons.
Cueva del Lobo marino I. Entièrement occupée par la mer ; eau extrê-
mement tranquille ; profondeur de la grotte : 25 m., de l'eau : 3 m.,
celle-ci très calme en tout temps et parfaitement transparente.
Cueva del Chiulador (Siffleur). Élevée, mais peu vaste ; ainsi nommée
par suite d'un trou sifïlant sous l'action des vagues.
Cueva de la Isla. Dans l'île du Portichol, à l'angle N.-O., au sud de
Javea comme les suivantes. A 15 m. de long. ; l'eau est claire et profonde.
Cueva del Tabaco IL A l'angle sud-ouest de l'espace de la côte .concave,
entre l'île du Portichol et le cap de la Nao. A deux étages : une cavité
inférieure marine occupée par l'eau profonde et au-dessus, à 4 ou 5 m. à
droite, une galerie supérieure d'un accès médiocrement facile (largeur
à l'entrée : 4 m. ; longueur environ 40 m.).
Cette grotte se trouve à 100 m. d'un arc de pierre, nommé le Porti-
chol, situé au niveau de la mer.
Cueva sans nom III. A 20 ou 30 m. à l'est de cet arc, grotte d'environ
25 mètres de large à seuil formé d'une lame rocheuse avec ébréchure
centrale facilitant l'accès. Salle se dirigeant vers la gauche en entrant.
Le centre est occupé par une flaque d'eau marine.
Cueva de la Solana del Cabo Negro. Au sud du cabo Negro. Ouverture
élevée, peu large, donnant accès à une fente très haute, large d'au plus
2 m., en arrière d'une lame de roches en voie de détachement. Nous
n'avons pas pu visiter cette grotte à cause des vagues. Son signalement
coïncide peut-être avec une autre signalée par Puig y Lareaz (1896,
p. 21) sous le nom de cueva del Agua Dulce. En effet, l'une et l'autre ont
un trou communiquant à l'extérieur. La cueva del Agua Dulce aurait
70 m. de long et contiendrait de l'eau douce. LTne inscription y rappelle
la visite de Felipe III. Comme nous n'avons rencontré cette inscription
dans aucune grotte, par exclusion, nous supposons que c'est à elle que
se rapporte le texte espagnol.
Cueva sans nom IV. Grotte du même genre, à 100 m. de la précédente,
non visitée à cause de l'état de la mer.
Cala Figueras. Située à égale distance entre le cabo Negro et le cap
de la Nao. Diverses grottes occupées par l'eau marine.
Cuevas sans nom V à VII. Entre la punta de Planes et le cap de la
GROTTES VISITEES 393
Nao se trouvent au niveau du plateau trois grottes juxtaposées, orientées
au sud-est, accessibles grâce à un vaste plate-forme.
Cueva de los Organos, citée par Puig y Larraz (1896, p. 22), con-
fondue souvent avec la suivante, sa voisine, qu'on nomme également
cueva del Agua. Très grande caverne claire située ainsi que la suivante entre
la punta de Planes et le cap de la Nao, plus près de celui-ci. Ouverture
rectangulaire de 15 à 20 m. de large, en partie occupée par la mer. Le
premier tiers est occupé par la mer ; les vagues peuvent balayer en très
gros temps toute la surface inférieure de la salle, moins l'extrême fond
et les larges corniches très accessibles de la partie gauche. Dimensions
de la grotte : 80 m. de long sur 40 de large. Plancher couvert de galets.
Paroi droite verticale très élevée, entièrement couverte de draperies
stalagmitiques de très bel effet.
Cueva grande citée par Puig y Larraz (1896, p. 22). On lui donne
parfois par erreur le nom de cueva de los Organos ; séparée de la précé-
dente par une simple pointe rocheuse. Ouverture plus vaste et plus élevée,
profondeur 70 m., largeur 30 m. sans compter l'enfoncement obscur
de gauche. La mer occupe tout le vestibule et la partie droite de la salle,
sauf à l'extrémité de ce côté un petit recoin circulaire demi-obscur.
Toute la partie gauche présente de grandes masses rocheuses, en grande
partie à l'abri des vagues, par lesquelles on peut accéder, comme par des
gradins irréguliers, à une plate-forme sablonneuse. Entre la masse des
rochers et la paroi de gauche, pénètre un bras de mer d'environ 3 m. de
profondeur sur une largeur de 5 à 6 m. Cette partie de la grotte forme un
renfoncement assez obscur
Cueva de las Estacas. Immédiatement à l'est du cap de la Nao, à
2 ou 300 m.. Moyennement grande, se continuant à l'est par quelques
corniches rocheuses dominant la mer.
Cueva sans nom VIII. A 300 m. à l'ouest du cap de la Nao, abri sous
roche accessible par mer.
Cueva sans nom IX. A l'est de File del Embolo, grotte à 20 m. au-
dessus de la mer, inaccessible.
Cueva del Lobo marine II. Après avoir dépassé vers l'ouest l'île del
Embolo. Elle peut être à 250 m. de l'île, au nord. Entièrement occupée
par la mer, 25 à 30 m. de profondeur, 15 m. de large à l'entrée, le
double vers le milieu. Se continue par trois couloirs inaccessibles, s'écar-
tant en éventail. Vers la droite, demi-obscure, elle se termine par une
cheminée.
394 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Cuevas sans nom X et XI. Deux autres grottes après l'angle rentrant
de la côte, sans indications particulières.
Cuevas sans nom XII et XIII. Mêmes observations pour deux petits
trous situés au voisinage de la Granadella.
Cueva de la Filanera. A l'ouest de la tour et du cap de la Granadella,
plusieurs cavités dans les cinq premiers hectomètres. La principale est
la Cueva de la Filanera. Fente parallèle à la côte, à l'arrière d'un grand
rocher. Large de 10 m. à l'entrée, se rétrécissant vers le fond; longueuï
50 m., entièrement occupée par la mer; profondeur de l'eau de 3 à 4 m.
Cueva de los Palomos II. A peu de distance vers l'ouest, 20 m. sur 30.
Pour le reste, eau très peu profonde.
Cueva sans nom XÎV. Grotte multiple avec sortie d'eau douce, près
du barranco del Morats.
Cueva de la Sendra (voir Biospeologica XXXIII, p. 508), déjà
décrite, se place ici dans cette série de grottes, et n'est citée que pour
mémoire.
Breuil.
702. Cueva de los Ratas de Almoraira.
Située au cabo Almoraira, termino municipal de Teulada, partido de
Dénia, provincia de Alicante, Espagne. — Altitude : 20 m. env. — Roche :
Calcaires miocènes. — Date 13 avril 1917.
Matériaux : Trichoptères, Myriapodes, Aranéides, Isopodes, Mol-
lusques. — Numéro : 853.
Située dans la partie occidentale du cap de Almoraira, à moins de
500 m. du port. Ouverture dominant la mer de 15 m. env., trou rond et
noir mesurant 3 m. env. de large sur moins de 2 m. de haut. Accès par
une surface rocheuse à déclivité rapide, cependant assez facile. Vestibule
peu important à fond encombré de grands rochers, à droite et à gauche
desquels se trouvent, masqués par eux, deux passages vers l'intérieur ;
celui de droite plus étroit, mais moins accidenté, celui de gauche plus
large, mais nécessitant une escalade entre des rocs. Ces deux couloirs
donnent dans la paroi droite d'une très grande salle allongée, mais mé-
diocrement élevée. Elle bombe vers le premier tiers de sa longueur ; à
gauche, le sol descend en pente assez rapide vers un diverticule de plus
en plus bas dont le sol est sec. Vers la droite, on accède à une partie
GROTTES VISITÉES 395
moyenne relativement plane, d'une longueur d'environ 30 à 40 m. pour
une largeur de 20 m. Le sol y devient de plus en plus humide, glissant
et couvert de guano. La galerie s'élargit dans ce sens; elle aboutit à des
convexités descendant très rapidement en gradins fort glissants sur un
couloir transversal. Celui-ci vers la gauche est assez étroit, 3 à 4 m. de
largeur à l'entrée, et se rétrécit vers le fond situé à 20 m. env. Au centre
est un groupe assez pittoresque de colonnes stalagmitiques. Vers la droite,
ce couloir s'élargit beaucoup, mais il aboutit presque aussitôt à une pente
lisse à 450, impossible à descendre sans cordes. Cette sorte d'abîme oblique
peut avoir 30 m. env. de profondeur ; il est formé par la disjonction des
lits de stratification de la roche calcaire, dont les bancs paraissent se
coincer vers le bas, par le rapprochement du plafond et du sol descendant
par une courbe analogue.
L"humidité est considérable dans le fond de la grande galerie, où se
sont même formées deux flaques d'eau. L'atmosphère est calme.
Il y a quelques Chauves-Souris et beaucoup de guano vieux et récent,
sur lequel sont nombreux les Armadillidés (Isop. terr.), Myriapodes,
Acariens, Collemboles et Diptères, mais je n'ai pas vu de Bathysciinés,
Cueva de la Fustera. Entre Moraira et Calpe, la côte s'abaisse beaucoup
et la roche des falaises devient très friable. Une seule grotte est visible,
la Cueva de la Fustera, auvent sans profondeur, d'après les dires des
pêcheurs.
Cuevas de la punta de Ifach. On me signale plusieurs petites grottes
au niveau de la mer et une très grande, mais très difficile d'accès, dans le
haut du Rocher.
Breuil.
703. Cueva de las Palomas de Calpe.
Située au sud du cabo Toix, termino municipal de Calpe, partido de
Dénia, provincia de Alicante, Espagne. — Altitude : Niveau de la mer. —
Roche: Calcaires miocènes. — Date : 16 avril 1917.
Matériaux : Thysanoures, Aranéides, Isopodes, Champignons. —
Numéro : 854.
A 600 ou 700 m. au-delà du cap Toix, grand vestibule élevé dont la
mer occupe la partie inférieure. A gauche, une terrasse de rochers oor-
Akch. de Zool. Exp. F.T GÉN-. — T. 57. — F. 3. 26
396 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
rodés par les vkgues domine de 2 ou 3 m. De là, on peut gagner l'intérieur
de la grotte en faisant une ascension d'environ 20 m. On peut également
atteindre le fond du vestibule en débarquant à droite au pied d'une grande
fente oblique résultant du déclenchement partiel d'une grande masse
rocheuse, occupant la plus grande partie de la droite du vestibule. Cette
fente contourne cette masse en arrière et, en se hissant de roc en roc, on
peut la traverser entièrement.
Là, on se trouve dans un large couloir, d'environ 25 m., sec et se
continuant dans une galerie éclairée d'environ 60 m., au miUeu de laquelle
il y a une dépression où l'eau de mer s'infiltre par très gros temps.
A la hauteur de cette dépression, dans la paroi droite, s'ouvre per-
pendiculairement à la galerie principale une vaste cavité, grand dôme
de forme ovale, à voûte soutenue par 4 grandes colonnes stalagmitiques
du plus bel effet. Le sol en est assez irrégulier et composé d'une série
de cuvettes d'où les indigènes ont enlevé la terre ; dans les recoins et sur
le pourtour se trouvent des banquettes à sol plus uni et surélevé. Dans le
fond à droite, existe l'amorce d'un couloir ascendant dans la direction
de la mer. En plusieurs points, la lumière filtre par des fentes de ce côté.
En revenant à la dépression qui est au centre de la galerie principale,
pour atteindre le fond de celle-ci, on remonte un talus rapide de terre
meuble ; au delà, on redescend très brusquement et la voûte retombe
également. On atteint ici une diaclase ouverte dont le fond, situé au
niveau de la mer, est rempli d'eau transparente, immobile et modéré-
ment salée.
Dans l'extrême fond, à gauche, se trouve un couloir surbaissé dessi-
nant un arc de cercle et dont l'autre issue donne dans la paroi gauche de
la galerie principale et à peu de distance du fond.
Atmosphère calme. Quelques Chauves-Souris sont accrochées dans la
salle de droite où se trouvent aussi deux petits tas de guano. Tous les
animaux capturés se tenaient sur le guano ou dans les environs immédiats
du guano.
Breuil.
704. Cueva de la Punta de Benimaquia.
(Seconde exploration, voir Biospeologica XXXIII, p. 507)
Située au-dessus d'une carrière, près de la ligne d'Alicante, termino
municipal et partido de Dénia, provincia de Alicante. Espagne. — Alti-
tude : 70 m. env. — Roche : Calcaires crétaciques. — Date 15 avril 1917.
GROTTES VISITÉES 397
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Pupipares, Collemboles, Myria-
podes, Aranéides, Opilionides, Isopodes, Mollusques. — Numéro : 855.
Pour trouver cette grotte, il faut suivre la voie du chemin de fer
d'Alicante et quand cette voie commence à contourner la pointe de
Benimaquia, avant de passer en vue de l'aldea de Jésus pobre, on passe
le passage à niveau, en regard duquel est une petite carrière. La grotte
s'ouvre au-dessus de la carrière, à 50 m. env. de la voie.
J'ai pu cette fois explorer aussi la galerie de droite qui est très basse.
Elle réunit deux diaclases parallèles à la grande galerie qui est assez
sèche, sans ressources alimentaires, à sol rocailleux.
L'atmosphère est calme. Les Chauves-Souris sont très nombreuses
et le guano abondant. Les Bathysciinés étaient moins abondants, mais
en revanche les larves de Coléoptères étaient très norûbreuses ainsi que
les Staphylins.
Breuil.
705. Cuevas de Landarbastro.
Situées près de la aldea de Oyarzun, dans le mont Aitzbitarte, termino
municipal de Renteria, partido de San Sébastian, provincia de Guipûzcoa,
Espagne. — Altitude : 150 m. env. — Roche : Calcaires infracrétaciquesj
— Date : 28 juillet 1917.
Matériaux de la grotte A : Coléoptères, Thysanoures, Aranéides, Iso-
podes, Mollusques. — Numéro : 856.
Matériaux de la grotte C : Coléoptères, Diptères, Thysanoures, Myria-
podes, Isopodes, Amphipodes, Mollusques, Champignons. — Numéro : 857.
Matériaux de la grotte D. : Coléoptères, Thysanoures, Myriapodes,
Aranéides, Isopodes, Oligochètes, Mollusques. — Numéro : 858.
Sous le nom de Cuevas de Aitzbitarte sont citées dans Puig y Laeraz
(1896, p. 155) quatre grottes numérotées de 1 à 4. J'ai également visité
quatre cavernes étagées dans le fond d'un ravin d'où jaillit un petit
torrent des ébouUs couverts de verdure qui sont au pied des grottes. La
grotte 1 de Puig correspond probablement à celle que je nomme A ;
il ne cite pas ma grotte B ; sa grotte 2 est ma C et sa 3 ma D. Je n'ai
pas visité sa grotte 4. Il semble d'ailleurs qu'il y a encore d'autres grottes
dans cet escarpement.
398 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Grotte A (Grotte 1 de Puig ?). Contre le ruisseau. Entrée par un
petit porche de 3 m. env. de large et de haut, donnant accès à une petite
galerie montante de 20 m. env., se rétrécissant, à fond obscur et un peu
humide. Tout au fond, de grosses Araignées étaient installées dans une
niche du plafond, des Oniscus asellus L. couraient sur les parois où gî-
taient de grosses Noctuelles. Sur le sol Lithobies et gros Carabiques noirs.
Grotte B. A quelques mètres en contre-bas et à droite de la grotte C.
Entrée par une cheminée avec éboulis terreux et descente de 10 m. env.,
donnant accès dans une galerie de 50 m. env., rectiligne, fente élargie
avec diverticules latéraux ascendants ou descendants. Un ruisseau y
circule encore par temps de crues ; en beaucoup d'endroits il y a du gra-
vier schisteux alternant avec de l'argile très plastique accumulée dans les
dépressions. Semble être azoïque.
Grotte C (Grotte 2 de Puig) dont l'auvent éveille l'attention. Située
à 15 m. env. au-dessus de la sortie du ruisseau et s'étendant sur 180 m.
env. de longueur. Vestibule de 15 m. de long, 16 m. de large et 8 m. de haut.
On y cultive des Champignons, ce qui a dû modifier beaucoup l'aspect de
la grotte depuis les visites de ceux qui l'ont décrite ; ma description ne
tiendra donc pas compte des publications antérieures.
Le vestibule est séparé de la salle par un mur artificiel avec porte
latéralement placée, donnant très peu de jour à l'intérieur. Le sol de cette
salle a été nivelé lors de l'installation de la champignonnière, aujourd'hui
abandonnée ; sa largeur, supérieure à celle du vestibule, est de 40 m. env.,
avec souvent moins de 2 m. de hauteur. Vers le fond s'amorcent
diverses galeries : à gauche, petite galerie descendante, revenant en
arrière sous le plancher de la salle, à fond colmaté par de la terre remuée ;
à droite, une galerie basse et fangeuse qui au début est divisée en deux
couloirs par une masse d'éboulis qui obstrue son milieu. Enfin perpendi-
culairement au couloir de droite une amorce de galerie que je n'ai pas suivie.
Après la jonction des deux couloirs de la galerie de droite, la caverne
continue avec sol argileux parfois stalagmite et des petites salles à rares
colonnes, réunies par des couloirs très bas et à plusieurs reprises par des
chatières. On y voit quelques flaques d'eau habitées par des Niphurgus,
également présents dans la belle vasque située près de la paroi de droite
de la grande salle. Des griffades d'ours et d'autres animaux s'observent sur
quelques panneaux rocheux anciens. Les incrustations sont peu nom-
breuses. L'atmosphère est calme. Pas de Chauves-Souris, pas de guano,
mais des débris ligneux abondants.
GROTTES VISITÉES 399
Sous les pierres et lames de fer-blanc éparses on trouve des Lithobius et
de Typhloblaniules, ces derniers rongeant les moisissures qui couvrent
les gouttes de stéarine. Sur le bois, divers Champignons et Thysanoures.
Trichoniscides dans les endroits humides et Oniscus aselhis en quelques
endroits qui probablement communiquent directement avec l'extérieur.
Au fond de la grotte, courant très vite le long de la paroi, un Spho-
dride très décoloré.
Grotte D (Grotte 3 de Puig). Immédiatement au-dessus et à droite
de la précédente, à 30 m. env. au-dessus du ruisseau. Est formée par deux
galeries s'ouvrant dans le même large vestibule, 7 m. de haut, 25 m. de
long, 18 m. de large.
La galerie de gauche, de 40 m. env. de long sur presque autant de
large, a une entrée étroite en partie murée pour l'installation d'une cham-
pignonnière, ce qui en augmente l'obscurité. On escalade un talus argileux
jonché de feuilles de fer-blanc et de planches pourries qui hébergent des
Tréchides et des Lithobies.
La galerie de droite, qui ne doit pas mesurer les 254 m. que lui attri-
bue Puig, commence par un couloir assez sec, se divisant bientôt en deux
bras qui se rejoignent au bout de 40 m. env. en un point qui est muré.
On oblique ensuite à droite pour descendre dans une salle assez vaste,
à sol incliné, dont la région gauche est occupée par de vastes massifs
stalagmitiques. Quelques flaques s'étalent sur le sol, où nagent de rares
Niph^rgus. Au centre, il existe une fente de 2 m. de largeur et de 6 m.
env. de profondeur. Vers le fond, le plancher remonte un peu et se con-
tinue par un couloir bas et étroit qui se termine par une boucle.
En général, la grotte est sèche, sauf dans la grande salle oti il y a quel-
ques flaques. Les ressources alimentaires sont maigres et la faune pauvre
en individus.
Breuil.
706. Cueva de! Kursaal.
Située au lieu dit Martutena, termino municipal de Alza, partido de
San Sébastian, provincia de Guipûzcoa, Espagne. — Altitude : 5 m. env.
■ — Roche : Calcaires crétaciques. — Date : 16 août 1917.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Lépidoptères, Collemboles, Myria-
podes, Aranéides, Opilionides, Acariens, Isopodes, Mollusques, Oligo-
chètes. Champignons. — Numéro : 859.
400 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Martutena est une halte du train sur route pour Hernani. La grotte,
découverte il y a une dizaine d'années en exploitant une carrière, se
trouve près du Kursaal, contre la voie ferrée de Madrid, sur le bord de
rUrumea et à 5 m. env. au-dessus des marées. Elle a été aménagée et
éclairée à l'électricité. Ce n'est que l'exutoire des eaux qui sont absorbées
à 7 ou 800 m. de là, dans un vallon voisin, par un aven obstrué.
J'ai exploré sur 80 m. env. une galerie élevée, assez étroite, qui,
après un rétrécissement, se continue, paraît-il, jusqu'à un ruisseau débor-
dant par temps de crues à travers la grotte. Les incrustations sont rares ,
le sol argileux et très humide avait été creusé sur 5 m. env. mais, depuis
l'abandon des visites, a été envahi de nouveau par les dépôts.
L'atmosphère est calme. Pas de Chauves-Souris ni de guano, mais
beaucoup de débris végétaux ; une partie de la galerie est boisée.
Les appâts ont attiré de nombreux petits Diptères, des Trichonis-
cides et des Staphylins.
Une visite ultérieure m'a permis de constater que les appâts avaient
été consommés, probablement par des Rongeurs et par des larves de
Diptères que j'ai prises sur le fait. Les fruits avaient attiré des Oniscus
asellus L. et des Collemboles. J'ai capturé des Tréchides en soulevant des
plaques d'argile fendillée et encore molle, ainsi que sur les appâts. Des
Chauves-Souris étaient cette fois installées. Des Oligochètes étaient fré-
quents dans l'argile.
Après une forte pluie, j'ai pu constater que la grotte était complè-
tement inondée.
- Breuil.
707. Cueva de Oriamendi.
Située au lieu dit Oriamendi, termino municipal de Hernani, partido
de San Sébastian, provincia de Guipûzcoa, Espagne. — Altitude : 30 m.
env. — Roche : Calcaires crétaciques. — Date : 27 a^ût 1917.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Myriapodes, Aranéides, Isopodes,
Ampliipodes, Mollusques, Champignons. — Numéro : 860.
Cette caverne de 110 m. env. de longueur, se trouve à 1 km. de la ville,
à l'opposé de Santa Barbara. L'entrée, qui regarde à l'ouest, est un ancien
aven recoupé par un couloir à ciel ouvert. Le vestibule clair conduit dans
deux galeries horizontales.
GROTTES VISITÉES 401
La galerie de droite était utilisée comme champignonnière. Elle forme
deux salles suivies d'un couloir plus étroit. La hauteur qui est d'abord
notable s'abaisse dans le couloir qui se termine par une cheminée natu-
relle aménagée en vue de l'aération. Le tout est assez sec.
La galerie de gauche est plus étroite, plus humide, possède plusieurs
bassins cimentés, et a servi également de champignonnière, sauf dans son
dernier tiers, très rétréci et irrégulier. Vers son milieu, à gauche, une fente
montante aboutit à une cheminée colmatée. La salle qui suit contient
beaucoup de guano. Ensuite le plafond s'abaisse et le sol se relève en
pente brusque jusqu'à deux cheminées colmatées par de l'argile con-
tenant des ossements anciens {Bos ?). A gauche, un petit couloir bas en
forme de T aboutit à deux orifices de puits presque remplis d'argile.
Le bas des parois, dans la région aménagée, est blanchi à la chaux.
Les suintements pérennes ont été captés et alimentent des bassins cimen-
tés. L'agitation de l'air est faible ou nulle.
Au fond de la galerie de gauche, dans une vaste fente du plafond,
gîtent de nombreuses Chauves-Souris. En plusieurs endroit, le guano
est abondant ainsi que divers débris ligneux.
Nombreux Sphodrides sur le guano, avec des Staphylins et des
Phorides. Des Niphargues nagent dans les bassins cimentés de gauche.
Breuil.
708. Cuevas de Iturmendi.
Situées près du caserio de Iturmendi, termino municipal de Hernani,
partido de San Sébastian, provincia de Guipûzcoa, Espagne. — Alti-
tude : ? . — Roche : Calcaires crétaciques. — Date : 3 septembre 1917.
Matériaux : Coléoptères, Myriapodes, Aranéides, Opilionides, Isopodes,
Amphipodes, Mollusques, Oligochètes, Champignons. — Numéro : 861.
Sous ce nom sont désignées trois cavernes faisant partie du régime
hydrographique du même petit ruisseau souterrain.
A mi-côte, un petit trou souffleur par où sort de l'air froid, trou caché
par un petit abri et obstrué par des gros blocs.
Au-dessous, une exsurgence, accessible sur 25 m. env. par une repta-
tion pénible sur blocs anguleux qui finissent par obstruer le passage. Ce cou-
loir, très humide, héberge beaucoup d'Araignées et de gros Opilionides.
402 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
A 50 m. env. plus loin, une goule absorbe le ruisseau mais est impé-
nétrable à cause d'un bassin profond.
La résurgence s'effectue non loin, mais je ne l'ai pas visitée.
Breuil.
709. Cueva de Birauné.
Située au lieu ditTerreno de Tillaetxe, termino municipal deBerastegui,
partido de Tolosa, provincia de Guipûzcoa, Espagne. — Altitude : 150 m.
env, — Roche : Calcaires crétaciques. — Date : 6 septembre 1917.
Matériaux : Thysanoures, Myriapodes, Aranéides, Chernètes, Mol-
lusques, Oligochètes. — Numéro : 862.
La grotte se trouve à 3 km. env. du village, à 500 m. env. de la route
de Tolosa à Berastegui et à 150 m. env. des maisons de Tillaetxe. Il y
avait certainement, en amont du barrage calcaire où se trouve la grotte,
un lac à l'époque quaternaire ancienne, drainé par des avens et des dolines
actuellement colmatés. Puis les eaux creusèrent une gorge latérale qui
vida le lac et qui fonctionne actuellement.
La grotte s'ouvre à 30 m. env. au-dessus des dolines, par une petite
entrée masquée par des buissons. On descend une pente rapide d'éboulis
pour arriver dans une belle salle (25 m. sur 30 m. env.) très incrustée,
où colonnes, bornes et massifs stalagmitiques sont abondants, mais
où l'argile manque. Quelques vasques avec de l'eau et un peu de guano.
A gauche, pente rapide de pierrailles aboutissant à une cascade stalag-
mitique très inclinée que j"ai descendue sur 30 m. env. Les pierres roulent
plus loin pendant 10 secondes, ce qui donne une longueur de pente oblique
de plus de 50 m.
L'atmosphère est calme. Quelques Chauves-Souris et très peu de
guano et de débris ligneux. Les animaux furent recueillis autour du guano.
Breuil.
710. Cueva de Hernialde.
Située au-dessus du village, termino municipal de Hernialde, partido de
"Tolosa, provincia de Guipûzcoa, Espagne. — Altitude : 650 m. env. —
Roche : Calcaires crétaciques. — Date : 10 septembre 1917.
GROTTES VISITÉES 403
Matériaux : Coléoptères, Lépidoptères, Thysanoures, Collemboles,
Mj^'iapodes, Aranéides, Opilionides, Mollusques. — Numéro : 863.
Le vestibule est transformé en remise et magasin, et dans sa paroi
gauche s'ouvre un couloir étroit et bas, pourvu d'un étranglement et se
terminant par une petite salle dans laquelle s'ouvre une cheminée col-
matée ; le tout mesure 30 m, env. J'y ai recueilli des Araignées, des Litho-
hius et un Ceuthosphodrus mort, faune que je n'ai pas rencontrée dans le
reste de la grotte.
Après avoir dépassé le mur qui limite le vestibule, on trouve à droite
une galerie récurrente, assez étroite, faiblement descendante, un peu
humide par endroits, où habitent des Campodea de grande taille. Puis
vient, après un coude à angle aigu, un très étroit couloir, tantôt rocheux,
tantôt incrusté, en général sec avec suintements par place. Faune très
pauvre ; j'ai trouvé un Bathysciiné, de grande taille, sur un fragment
de bois et un cadavre du même. Ensuite le couloir se dédouble sur une
petite longueur et aboutit à une chambre allongée, à sol incliné vers la
droite et présentant au centre une fente très étroite qui donne dans le
plafond d'un grand aven profond ; la chute des pierres dure 3 à 4 secondes.
Eclairé au moyen de journaux enflammés, il se montre cylindrique
avec deux paliers et fond sec couvert d'ébouhs. Au deLà de l'aven, la
galerie remonte brusquement en formant une cheminée de plus en plus
étroite. La longueur totale de cette région atteint 150 m. env.
Au centre du vestibule, la voûte est très élevée et aboutit à un aven
ouvert à l'extérieur, de 20 m. env. de diam. sur 15 m. env. de profon-
deur.
A gauche, et continuant la descente, s'amorce une large galerie, à
sol argileux, où j'ai trouvé des Campodea et des Glomérides aveugles et
décolorés sur des fragments ligneux. On contourne le grand aven et
on descend une pente douce à sol argileux avec par place des massifs
et bornes stalagmitiques humides, et des parois couvertes de stalactites
en ergot formées sous l'eau au quaternaire, mais très dégradées par les
visiteurs. Après une descente qui a un puits peu profond au milieu et des
parois recouvertes d'un placage d'anciens graviers noyés dans l'argile,
la galerie se resserre. Une autre descente rapide mène à un gour à fond
argileux présentant des traces de Crustacés que je n'ai pu découvrir.
Nouvelle descente qui aboutit à une salle ronde, à sol en entonnoir peu
concave qui termine cette galerie de 250 m. env.
404 B. JEANNEL ET E.-G. BACOVITZA
L'atmosphère est calme, sauf à l'étranglement de la galerie de droite.
Les Chauves-Souris sont rares et le guano peu abondant et éparpillé ;
rares débris ligneux.
Breuil.
711. Cueva de Basondo.
Située à 200 m. de l'Ermita de San Marnes, termino municipal de Cor-
tezubi, partido de Guernica y Luno, provincia de Vizcaya, Espagne. —
Altitude : 80 m. env. — Roche : Calcaires crétaciques. — Date : 16 sep-
tembre 1917.
Matériaux ; Coléoptères, Diptères, Myriapodes, Aranéides, Mollusques.
— Numéro : 864.
Du caserio de Lezika (nom qui signifie « à côté de la grotte », car
Leizia = grotte) il y a 300 m. env. jusqu'à cette grotte qui compte 130 m.
env. de galeries. L'entrée large donne sur la pente descendante modérée
d'un cône d'éboulis, puis sur une région horizontale du vestibule qui a
40 m. env. de long. Un couloir étroit, oii il faut ramper, suit sur 15 m. env.
et aboutit à une salle en contre-bas, vaguement elliptique, humide, avec
pierrailles sur son sol de terreau et un massif stalagmitique le long de sa
paroi de droite, tandis qu'à gauche la paroi élevée de 10 m. env. est cou-
verte de concrétions et draperies derrière lesquelles se trouve une petite
salle incrustée, pourvue de gours, de vasques pleines d'eau et avec de remar-
quables peintures préhistoriques. Au fond de la salle s'amorce une longue
fente rectiligne, étroite, élevée, qui possède une annexe latérale, petite
chambre ronde à superbes draperies cristallines ; toute la pente est d'ail-
leurs tapissée de concrétions scintillantes et elle aboutit à deux fentes
verticales que je n'ai pas explorées.
Atmosphère calme. Pas de Chauves-Souris, mais un peu de guano
épars. Rares débris ligneux. Les Bathyscimés étaient très abondants
partout. _,
^ , Breuil.
712. Cueva Austokieta.
Située dans le mont Otsabio, termino municipal de Lizarza, partido de
Tolosa, provincia de Guipûzcoa, Espagne. — Altitude : 750 m. env. —
Roches : Calcaires marneux schisteux. — Date : 4 octobre 1917.
GROTTES VISITÉES 405
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Trichoptères, Myriapodes, Ara-
néides, Isopodes, Mollusques, Oligochètes, Champignons. — Numéro ;
865.
Très difficile à trouver sans guide dans la forêt du mont Otsabio, à
1 h. 30 de marche de Lizarza, au-dessus d'Isalin. L'entrée étroite a l'as-
pect d'une bouche artificielle de mine, et ses parois sont formées par un
calcaire marneux à structure schisteuse. On avance sur un cône d'ébou-
lis, jonché de feuilles mortes et d'argile terreuse où habitent des Oli-
gochètes blancs, des Trichoniscides, Typhloblaniulides, Lithobies et de
rares Aranéides. On arrive ainsi au milieu d'une grande salle, haute
de 40 m. env., de 80 m. env. de longueur, dont le milieu est occupé par
un éboulis de gros blocs d'aspect récent, et dont le fond est incrusté, un peu
humide, mais les rares stalagmites et stalactites sont presque sèches et
scintillantes. Il semble que la caverne soit due à un effondrement. Les gens
du pays ont très peur de la grotte, qui servirait de gîte à un grand taureau
rouge très féroce.
Atmosphère calme. Pas de Chauves-Souris, ni de guano. La faune se
tient surtout dans les feuilles mortes près l'entrée.
Breuil.
713. Cueva de Arrobieta.
Située au lieu dit Arrobieta, termine municipal de Anoeta, partido de
Tolosa, provincia de Guipûzcoa, Espagne. — Altitude : 170 m. env. —
Roche : Calcaires crétaciques. — Date : 4 octobre 1917.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Thysanoures, Collemboles, Ara-
néides, Mollusques. — Numéro : 866.
Le caserio de Bideondo est à 3 km. d'Anoeta, par Irura, en prenant
le chemin de Montequiva à Asteasu. La grotte se trouve non loin de ce
caserio dans un bois épais, à peu de distance de la crête ; elle est diffi-
cile à trouver sans guide. L'entrée est une fente étroite avec descente
sur une paroi de 4 m. env. où la corde serait utile. On passe sur un cône
d'éboulis, d'abord pierreux puis plus ou moins terreux, pour pénétrer
dans une salle oblongue de 35 m. env., avec parois encroûtées de stalag-
mite et avec colonnes et bornes à gauche, où existe aussi un divertie ule
récurrent à sol formé de pierres reposant sur une argile plus ou moins
400 B. JEANNEL ET E.-G. BACOVITZA
terreuse. A droite, le plafond s'abaisse vers un recoin avec belle vasque
d'eau claire. Au centre, par divers passages étroits et irréguliers, les uns
par en haut, les autres par en bas, on accède à un couloir désagréable
à parcourir, formé de petites cavités à passages multiples et peu
incrustées.
Cette grotte a été utilisée comme dépôt funéraire éniolithique (vases
noirs polis, grattoirs en silex, fragments d'os humains).
Atmosphère calme. Humidité modérée ; quelques parois seulement
sont suintantes. Pas de Chauves-Souris, pas de guano. Rares débris végé-
taux.
Les Bathysciinés ont été recueillis sur les bornes et les parois stalag-
mitées, les CoUemboles sur le bois, les grosses Araignées près de l'entrée.
Cueva de Arrobieta pequena. A 200 m. de la précédente, dans la prairie
voisine du caserio de Bideondo. C'est un couloir de 30 m. env. avec
entrée à demi-comblée, sol complètement noyé sous les pierrailles, et
parois incrustées, un peu humides. Je n'y ai vu que de grosses Araignées
et des CoUemboles.
Breuil.
714. Cueva de Mendicute.
^Située sur le monte de Mendicute ou Agudo, termine municipal de Al-
bistur, partido de Tolosa, provincia de Guipûzcoa, Espagne. — Alti-
tude : 750 m. env. — Boche : Calcaires crétaciques. — Date : 9 octobre 1917.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Lépidoptères, Thysanoures,
CoUemboles, Myriapodes, Aranéides, Mollusques, Champignons. —
Numéro : 867.
Cette grotte est citée dans Puig y Larraz (1896, p. 158) mais sans
indication de localité précise. Elle est à 2 heures env. d'ascension de
Tolosa, près des caserios de Garostegui et Intehaurbi, dans la limite
d'une prairie en pente rapide broussailleuse du sommet du monte Men-
dicute, à droite, en montant, de six vieux frênes bien en vue. Entrée haute
de 2 m., large de 0 m. 60, en forme de fente, donnant accès par une petite
pente terreuse dans un vestibule de 8 m. sur 20 m., bas, comblé par de
la terre assez sèche mêlée de pierres et de débris végétaux, habité par
de nombreuses Araignées et grosses Noctuelles, A droite, s'amorce un
GROTTES VISITÉES 407
couloir ample, donnant dans une petite salle ; puis après un coude à angle
droit, un passage étroit entre des colonnes conduit dans une longue
galerie de 80 m. env., ample, propre, avec quelques vasques d'eau à fond
argileux criblé de petits trous. Les massifs stalagmitiques sont nombreux
et le sol est incrusté ou argileux, l'humidité est médiocre. Au bout de la
galerie est un diverticule de 6 m. env., terminé par une fente obstruée de
glaise et d'incrustations. A gauche, une descente brusque de 10 m. sur des
blocs effondrés conduit dans une salle allongée de 40 m. sur 15 m. env.,
encombrée de roches récemment éboulées qui, à droite, ont obstrué un
puits en forme de fente. Derrière la paroi de gauche s'ouvre un couloir
formé par le décollement des strates prêtes à s'effondrer. Au fond, court
diverticule à plafond élevé. D'ailleurs, au-dessus des éboulis, le plafond
de la salle forme un dôme très élevé.
Atmosphère calme. Pas de Chauves-Souris, mais quelques petits amas
de guano vieux. Nombreux débris végétaux près l'entrée, qui diminuent
plus au fond. De très nombreuses Noctuelles gîtent dans le vestibule
et leurs cadavres couvrent le sol près de l'entrée de la galerie.
Dans la galerie, sur les stalactites, nombreux Bathysciinés souvent atta-
qués par des Champignons filamenteux ; nombre de cadavres aussi sur
le bord argileux d'une vasque, peut-être des individus tombés à l'eau
et flottés. Des Lithobies décolorés furent trouvés sous une pierre ainsi
qu'un Campodéide de grande taille.
Aven de lan (lan'go leizia) à 600 m. env. de la cueva de Mendicute,
sur un cerro à sommet plat occupé par une prairie. Orifice de 3 m. sur
5 m. env. Les roches qui y sont jetées heurtent à 10 m. env. un palier,
puis heurtent un autre palier après 5 à 6 secondes pour rouler ensuite pen-
dant 10 à 1 5 secondes. D'autres fois les pierres rebondissent un grand nombre
de fois sans marquer de grandes chutes. J'estime la profondeur à 200 m.
Aven et grotte du Monte Hernio. Seraient une grande caverne et un
aven encore plus profond d'après les dires du guide, _
^ ^ ^ ^ Breuil.
715. Cuevas de Aitzulupe.
Situées au lieu dit Aitzulupe, termino miinicipal de Leaburu, partido
de Tolosa, provincia de Guipûzcoa, Espagne. — Altitude : 600 m. env.
— Roche : Calcaires crétaciques. — Date : 7 novembre 1917.
408 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Matériaux : Diptères, Lépidoptères, Thysanoures, Collemboles,
Aranéides, Isopodes, Mollusques, Oligochètes, Champignons. — Numé-
ro : 868.
Il faut monter pendant 6 km. de Tolosa pour arriver à Aitzulupe
(= Rocher percé, en basque), nom que porte un petit plateau traversé
sur son bord à pic par un système de cavernes qui communiquent.
Grotte supérieure. — Sur le bord du plateau, une entrée en forme de
puits de 3 m. env. conduit par un talus de pierres et d'argile recouvert
de feuilles mortes dans une salle ronde, à droite avec dôme élevé et sol
argileux couvert de pierres et d'rm peu de guano. A gauche, une salle irré-
gulière, encombrée de gros éboulis obstruant le passage dans la grotte
suivante.
Grotte inférieure. — Sur une banquette de la falaise est l'entrée en
partie murée. Le vestibule clair, de 5 m. env. de longueur, se prolonge
à gauche par des galeries étroites aboutissant à des trous de renards
habités et, à droite, par un talus rapide de 3 m. env. qui conduit dans
une salle surélevée, irrégulière, dont le fond est obstrué par des incrus-
tations variées, des colonnes et des cristallisations farineuses.
La longueur des deux grottes réunies est de 50 m. env.
Pas de courant d'air appréciable malgré la communication certaine
entre les deux grottes. Pas de Chauves-Souris ; un peu de guano sec.
Débris végétaux abondants et crottes de renards. Nombreuses Phalènes
et rares Noctuelles, nombreuses grosses Araignées ainsi que des Cam-
podéides.
Breuel.
716. Cueva Akelar.
Située à 200 m. env. d'Alli, termine municipal de Larraun (Lecum-
berri), partido de Pamplona, provincia de Navarra, Espagne. — Altitude :
500 m. env. — Roche : Calcaires crétaciques. — Date: 9 novembre 1917.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Collemboles, Myriapodes, Cham
pignons. — Numéro : 869.
Il semble que Puig y Larraz (1896, p. 233) ait cité cette grotte sous
nom de « Cueva de Alli » sans la décrire du reste. Akelar signifie en
basque « Sorcière », mais on la nomme aussi «Leizita», c'est-à-dire « la
GROTTES VISITÉES 409
Grotte )\ Elle s'ouvre dans un pré à côté d'Allî par un trou de 20 m. cnv.
de large sur 30 de profondeur qu'on descend sur un talus d'éboulis cou-
vert de débris végétaux. Une galerie de 150 m. env. commence, d'abord
étroite et horizontale, qui s'élargit ensuite en vastes salles à sol tantôt
montant et tantôt descendant surplombées de grands dômes très élevés.
Sauf quelques endroits argileux, tout le reste est incrusté de stalac-
tites et stalagmites variées. Les suintements sont très abondants et l'eau
remplit de nombreux vasques et gours.
Après une descente plus forte de 25 m. env. sur un massif stalagmi-
tique, on contourne un vaste éboulis et, redescendu de l'autre côté, on se
trouve au pied d'une grande coulée stalagmitique au-dessus de laquelle
la galerie semble se continuer, mais faute d'agrès je n'ai pas pu le véri-
fier. Je pense d'ailleurs que la fin de la grotte n'est pas loin et que la
galerie remonte vers des dolines voisines.
Atmosphère calme. Pas de Chauves-Souris ni de guano. Rares débris
ligneux fréquentés par les CoUemboles et Polydesmides. Les Carabiques
furent capturés dans les régions profondes.
Breuil.
717. Cueva de Martinchurito I.
Située sur le plateau de Martinchurito, termine municipal de Larraun
(Lecumberri), partido de Pamplona, provincia de Navarra, Espagne.
— Altitude : 650 m. env. — Roche : Calcaires crétaciques. — Date :
9 novembre 1917.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, CoUemboles, Opilionides, Cher-
nètes. Champignons. — Numéro : 870.
Le plateau couvert de hêtres de Martinchurito se trouve à une heure
de marche d'Alli. L'entrée, de 10 m. env. de large, située sur une petite
falaise à 15 m. env. à droite d'un abri sous roche, donne sur la des-
cente d'un cône d'éboulis couvert de feuilles, qui conduit dans une vaste
salle ovale de 80 m. env. s'étendant sur la droite. Des ossements de
bœuf jonchent le sol. A gauche, rampe stalagmitique très ascendante
aboutissant à un double diverticule, et placages d'argile. Presque toute la
grotte est incrustée et nombreuses sont les colonnes, bornes, pendentifs,
etc., le plus souvent très blancs. Les suintements sont nombreux, des
410 • R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
bornes très mouillées et quelques flaques garnissent le plancher, mais en
été il semble qu'elles s'assèchent.
Atmosphère calme. Pas de Chauves-Souris ni de guano ; des débris
végétaux abondants. Les Bathysciinés se tiennent sur les concrétions
de préférence. _.
Breuil.
718. Cueva de Martinchurito II.
Située à 60 m. et à l'O. de la c. de Martinchurito I, sur le territoire
d'Astiz, termino municipal de Larraun (Lecumberri), partido de Pam-
plona, provincia de Navarra, Espagne. — Altitude : 650 m. env. —
Roche: Calcaires crétaciques. — Date : 9 novembre 1917.
Matériaux : Coléoptères, Lépidoptères, Thysanoures, Collemboles,
Aranéides, Chernètes. — Numéro : 871.
Une entrée large de 15 m. env. donne sur une pente rapide de 20 m.
env., se continuant à droite par un massif stalagmitique qui domine une
paroi verticale colonisée par de grosses Araignées. La salle unique qui
forme la grotte est presque complètement incrusté ; nombreuses sont
les colonnes et les bornes, surtout petites et nombreuses au fond qu'elles
obstruent. A droite, court couloir moins incrusté, aboutissant à un
massif stalagmitique obstruant, mais laissant à droite un étroit passage
que je n'ai pas suivi. A droite de l'entrée est une fenêtre ouverte et une
autre obstruée. L'humidité est partout considérable, des flaques occupent
le sol, les bornes sont très mouillées.
Atmosphère calme. Pas de Chauves-Souris vivantes, mais vu un
cadavre ; pas de guano. Abondants débris végétaux près de l'entrée.
Sur les stalactites couraient des Bathysciinés et de grands Chernètes.
Breuil.
719. Cueva de las Ratas de Jâtiva.
>§iÏMéesousleCastillo, termino municipal et partido de Jâtiva, provincia
de Valencia, Espagne. — Altitude : 150 m. env. — Roche : Calcaires
crétaciques. — Date : 6 nars 1917.
Matériaux : Coléoptères, Myriapodes, Aranéides, Opilionides, Cher-
nètes, Isopodes, Mollusques. — Numéro : 872.
GROTTES VISITÉES 411
Grotte très basse, à entrée étroite, de 30 m. env. de longueur, presque
sèche, à sol argileux, humide seulement par endroits, avec rares concré-
tions.
Quelques Chauves-Souris et du guano épars.
Plusieurs grottes sont citées par Puig y Larraz (1896, p. 338) comme
existant sur le territoire de Jâtiva, J'ai visité également plusieurs ca-
vernes énumérées ci-dessous, mais les noms qu'on m'a donnés sont dif-
férents et les descriptions de Puig sont trop sommaires pour qu'on
puisse établir une synonymie certaine.
Cueva de las Palomas de Jâtiva. Très large abri clair qui domine la
ville, à pente descendante très forte. Recoin obscur au fond et petit cou-
loir obscur à gauche.
Cuevas de la Polaca. A un km. de la ville, près du caserio de ce nom,
il y a trois cavernes :
I. — Un abri sous roche, très sombre, derrière le caserio.
II. — Une petite grotte obscure, d'aspect naturel, fermée par une
porte et un mur, remplie d'argile humide d'origine endogée.
III. — Une grotte de 30 m. env., à entrée étroite, également remplie
d'argile humide.
Les deux dernières cavités semblent être les issues de cavités plus
importantes actuellement colmatées.
Couloir artificiel de l'Ermitage. Près de l'ermitage qui domine immé-
diatement Jâtiva, est un couloir horizontal de 50 m. env., s'incurvant
à droite, un peu élargi au fond, pourvu de deux étroits couloirs latéraux
très courts dont celui de droite se termine par un puits rempli de pierres,
ancienne captation de source.
Cueva del Pernil, creusée dans les calcaires marno-gréseux de l'entrée
de la ville, à côté du Calvario. C'est une caverne de 25 m. env. servant de
refuge aux mendiants, remplie de détritus et ayant deux diverticules
au fond, qui seuls sont obscurs.
Breuil.
720. Grotte de Cravanche.
Située aux vieilles carrières de Cravanche, commune de Cravanche,
canton de Belfort, territoire de Belfort, France. — Altitude :
400 m. env. — Roche : Calcaires jurassiques, — Date : 10 août 1917.
AncH. DE ZOOL. EXP. ET GÉ.V. — T. 57. — r. 3. 27
412 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Matériaux : Diptères, Collemboles, Aranéides, Acariens, Mollusques.
— Numéro : 873.
Cette grotte, décrite par A. Lucante (1882, p. 67) sous le nom de
grotte sépulcrale de Cravanche semble n'avoir pas eu d'entrée naturelle
et avoir été ouverte pendant l'exploitation des vieilles carrières. De
nombreux ossements humains en ont été extraits et quelques spécimens
se trouvent encore exposés à la curiosité des visiteurs dans une vieille
armoire installée dans la grotte.
Une petite entrée, fermée par une grille de fer, s'ouvre dans un es-
carpement formé de strates calcaires horizontaux. Elle donne accès
à une vaste salle, longue de plus de 30 m., large de 15 à 20 m. et
haute de 20 m. On descend dans le fond de la salle par un escalier de
pierres.
Dans la voûte étayée par trois gros piliers de maçonnerie, s'ouvre une
cheminée par où s'écoule de la terre végétale, endiguée par une palissade
de bois actuellement vermoulue et s'efïondrant sur le sol.
Plusieurs couloirs ou galeries débouchent dans la grande salle.
A droite et au fond, en haut d'un escalier de pierres, on accède à une
petite chambre encombrée de gros éboulis stalagmites. En bas et en face
de l'entrée débouche un étroit boyau descendant en pente raide et dont
les parois sont très concrétionnées. A gauche enfin, s'ouvrent deux galeries
communiquant entre elles et dont le fond est occupé par quelques sta-
lactites et stalagmites en grande partie brisées.
Dans son ensemble, cette caverne est une grotte endogène, produite
par tassement dans des stratifications horizontales.
La faune y est excessivement pauvre. Ç'à et là, quelques Collemboles
errent sur les marches argileuses des escaliers ou sur les débris ligneux .
Un Anuride et de petites Araignées ont été recueillis sur les fragments
effondrés de la palissade en bois. Des larves de Mycétophilides assez
nombreuses tissaient des toiles lâches sur les parois faiblement éclai-
rées.
Au fond de la galerie de droite de petits amas de guano étaient ha-
bités par quelques Phora.
Quelques Némocères se tenaient sur les parois de la grande salle,
dans la pénombre.
Jeannel.
I
GROTTES VISITÉES 413
721. Grotte de Plaisirfontaine.
Située au fond de la vallée de Plaisirfontaine, commune de Bonnevaux,
canton d'Ornans, département du Doubs, France (indiquée sur la carte
de l'état-major, feuille d'Ornans, N.-O.). — Altitude : 400 m. env. —
Roche : Calcaires jurassiques. — • Date : 29 septembre 1917.
Matériaux : Diptères, Thysanoures, Aranéides, Isopodes. — Nu-
méro : 877.
Un schéma de cette grotte a été donné par Fournier {in Fournier
et Mangin 1900, p. 24). Elle s'ouvre au pied d'un banc puissant de
calcaire rauracien par une entrée grandiose, d'où sort une rivière tor-
rentielle, affluent de droite de la Brème ; c'est la résurgence des eaux
absorbées par les gouffres et entonnoirs du plateau, dans la région
d'Etalans et du Vaklahon. Au cours de la rapide visite que j'y ai
faite, j'ai exploré seulement la large galerie de gauche, mais non celle
de la rivière souterraine ni le petit couloir de droite.
La galerie visitée, longue d'une centaine de mètres, est l'ancien lit du
cours d'eau, qui coule actuellement dans une galerie occupant un niveau
légèrement inférieur. Elle s'ouvre sur la gauche, au fond de l'immense
vestibule de la grotte, long à lui seul de 40 m. ; après s'être dirigée vers
le nord, elle se coude à angle droit, vers le milieu de son parcours, pour
se diriger finalement vers l'est ; cette dernière partie seule est complète-
ment obscure. Le sol est en grande partie occupé par des gours, les uns
plein d'eau, les autres vides ; je n"ai trouvé aucun Biote aquatique dans
les gours pleins, d'ailleurs situés en deçà de la limite de pénétration de
la lumière. La faune terrestre est assez pauvre : un seul Trichoniscus
{T. mixtus Racov.) a été recueilli sur l'argile au bord d'une flaque, à
la limite de la région éclairée. Dans la partie obscure vivent, parmi les
gours vides, quelques Campodea et de petits Aranéides. Sur l'argile de la
petite salle terminale, des Côllemboles se pressaient autour d'un bout de
cigare !
HiLLiER (1913, p. 99), le distingué bryologue bisontin, à étudié
rintéressante flore de Mousses et Hépatiques qui croît à l'entrée de la
grotte, soit sur les parois, soit sur les pierres immergées ou les gros blocs
plus ou moins émergés du lit du cours d'eau.
SOLLAUD.
414 R. JEANNEL ET E.-G. BACOVITZA
722. Grotte Sainte- Catherine.
Située dans la vallée du Dessoubre, rive gauche, à 2 km, en aval de
Consolation, commune de Laval, canton du Russey, département du
Doubs, France. — Altitude : 510 m. (Petitlaurent, 1910, p. 45). —
Roche : Calcaires jurassiques. — Date : 5 août 1916.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Thysanoures, Collemboles, Iso-
podes, Amphipodes. — Nu7néro : 878.
Cette grotte (quelquefois appelée « grotte de Maurepos »), située au
bas de la Roche Sainte-Catherine, donne issue, en période de grandes
eaux, à un torrent de fort débit ; en temps normal, la résurgence des
eaux se fait bien au-dessous, à un niveau peu supérieur à celui du Des-
soubre. Le couloir d'entrée, au bout de 17 m., vient déboucher presque
à angle droit dans une grande salle allongée ; sur la gauche, un talus
d'éboulis permet d'accéder à une « fenêtre », qui devait jadis fonctionner
comme trop-plein en temps de crue ; sur la droite, la salle se rétrécit
peu à peu et se continue par une galerie-diaclase de grande hauteur, qui
va se terminer à 120 m. environ de l'entrée. Vers le milieu de ce parcours
on doit gravir un premier escarpement haut de 5 m. ; puis, 20 m. plus
loin, on arrive au pied d'un second abrupt de 7 m. env., que je n'ai point
dépassé lors de la visite assez rapide que j'ai faite à cette grotte. Au bas
de ce dernier escarpement, on voit s'ouvrir à gauche une autre galerie,
dont l'entrée est malheureusement occupée par un lac assez profond,
d'une quinzaine de mètres de longueur ; les gens du pays affirment que
la' galerie se poursuit, au delà du lac, sur près de 1 km. ; Martel l'a
explorée sur 300 m. seulement (d'après Petitlaurent, 1910, p. 46).
Tous les matériaux ont été recueillis dans l'intervalle de 20 m. qui
sépare les deux abrupts mentionnés plus haut. Cet espace, qui se trouve
encore en deçà de la limite de pénétration de la lumière, est remarquable
avant tout par l'abondance extrême des Chauves-Souris ; les suinte-
ments y étant nombreux, le sol, les blocs éboulés, les parois, sont recou-
verts d'un épais enduit visqueux de guano délayé, plus ou moins mélangé
d'argile; çà et là des flaques minuscules d'un liquide infect, où des larves
amphibies de Brachycères se vautrent avec délice. Les pupes vides,
à déhiscence cyclorhaphes, de ces Diptères sont nombreuses contre la
paroi de droite où elles occupent une position curieuse : elles ne sont pas
GROTTES VISITÉES 415
appliquées suivant leur longueur contre le substratum, mais fichées
dans l'enduit visqueux de guano par leur extrémité postérieure qui s'y
enfonce de 2 ou 3 mm., de sorte qu'elles forment avec la paroi un angle
plus ou moins voisin d'un angle droit ; on les trouve en abondance dans
cette situation, même sur les surfaces presque horizontales de petites
voûtes en surplomb, oii la nymphe se tenait donc dans une position à peu
près verticale, la tête en bas. Les imagos volent en véritables essaims
dans la galerie. Çà et là sautent quelques Collemboles.
J'ai observé au bord du lac, sur l'argile, les animaux suivants : de
tout petits Brachycères noirs, qui, dans leurs mouvements de fuite,
décrivent avec une grande rapidité des arcs de cercle à la surface du sol ;
de rares Cainpodea, et un seul Trichoniscus {T. nnixtus Racov.) de petite
taille ; ces Biotes sont sans doute abondants dans les parties plus profondes
et complètement obscures. Un Niphargus {N. Virei Chevr.) a été cap-
turé à la main dans l'eau du lac.
Viré (1896, p. 14) dit avoir récolté à la grotte Sainte-Catherine, dans
un petit bassin, un « Aséllus cavaticus. »
SOLLAUD.
723. Grotte de Mémont.
Située sur le territoire de la commune de Mémont, canton du Russey,
département du Doubs, France. — Altitude : 980 m. env. — Boche :
Calcaires jurassiques. — Date : 4 août 1916.
Matériaux : Diptères, Thysanoures, Collemboles. — Numéro : 879.
Cette grotte s'ouvre, à 600 m. à l'ouest du village de Mémont, dans
les calcaires rauraciens qui forment une crête continue autour d'une
combe oxfordienne marneuse, elliptique. Elle fonctionnait autrefois
comme goule et servait d'exutoire aux eaux tombées dans cette dépres-
sion, eaux qui vont se perdre aujourd'hui dans les calcaires bathoniens
qui occupent le centre de la cuvette et forment le noyau du brachyan-
ticlinal classique de Mémont.
La grotte mesure environ 150 m. de longueur et descend en pente
assez forte. Elle est d'abord sèche, et sur les parois, revêtues d'un enduit
blanc pulvérulent, on ne voit guère que quelques Némocères ; des Lé-
pidoptères ont été également observés jusqu'à une trentaine de mètres
de l'entrée. Puis, à partir d'un petit ressaut couvert d'un léger enduit
416 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
stalagmitique, la galerie devient plus humide, et sur le sol sautent de
nombreux petits Collemboles ; çà et là, des agglomérations denses d'A-
nurides, surtout sur de petits placages d'argile terreuse qui recouvrent
la roche. Après un ressaut de 3 m., on arrive dans la partie terminale de
la grotte, où le sol, moins incliné, devient assez boueux, et oîi les parois
sont recouvertes de concrétions lisses et mouillées par les suintements ;
sur le sol et surtout sur les parois courent d'assez nombreux Campodea,
qui manquent dans les parties moins profondes.
SOLLAUD.
724. Grotte des Cavottes.
(FIG. 53)
Située sur le territoire de la commune de Montrond, canton de Quingey,
département du Doubs, France. — Altitude : 450 m. env. — Roche :
Calcaires jurassiques. — Dates : 28 septembre 1916, 4 janvier et 18 no-
vembre 1917.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Thysanoures, Collemboles, Myria-
podes, Aranéides, Opilionides, Acariens, Isopodes, Amphipodes, Mollus-
ques, Oligochètes, Champignons. — Numéro : 880.
L'entrée de cette grotte, appelée aussi (( grotte des Caveaux » ou
«grotte de Montrond », se trouve à 1.200 m. au sud-est du village de Mont-
rond, au fond d'un entonnoir de 20 à 25 m. de diamètre qui se creuse
à la surface du plateau dans les calcaires bathoniens.^ Les hachures
indiquent, sur le croquis de la figure A, la partie de la grotte qui était
seule connue jusqu'à ces derniers temps (Fournier et Magnin 1899,
p. 34, plan). Le 6 avril 1916, des jeunes gens de Besançon, en s'engageant
dans une étroite fissure, ont découvert tout un nouveau système souter-
rain ; j'en ai achevé l'exploration, avec quelques-uns d'entre eux, le
23 septembre de la même année. Le développement total des galeries
connues s'est trouvé porté de 450 m. env. à plus de 2.000 m. ; la grotte
des Cavottes est donc l'une des plus vastes de Franche-Comté.
Les galeries correspondent presque toujours à des diaclases et par
suite sont généralement étroites, mais très élevées, la hauteur pouvant
atteindre 30 ou 40 m. Un schéma d'ensemble (fig. 53, A) met bien en évi-
dence l'alignement de ces galeries suivant quelques directions prédo-
minantes : ce sont les directions des grandes cassures qui entaillent la
GROTTES VISITÉES
417
masse rigide des calcaires mésojurassiques, à peu près horizontaux, du
plateau de Montrond. Dans la partie occidentale prédomine nettement
l'alignement 0. S.-O., E. N.-E. ; plus à l'est, le rôle principal est dévolu
aux cassures orientées E.-O. et N.-S.
A peu de distance de l'ouverture se détache sur la droite une galerie
Fio. 63. Croquis schématique de la Grotte des Cavottes (n" 724) ; A. Ensemble des galeries; longueur totale :
2.000 mètres environ. — B. Galerie Sud-Ouest ; longueur totale : 150 mètres environ. — Les con-
crétions n'ont pas été indiquées.
de 150 m., sur laquelle je reviendrai.tout à l'heure. Plus loin, après deux
bifurcations successives, un petit couloir rétrograde permet d'accéder
à une grande salle, remplie de blocs éboulés, la « salle du Chaos », située
à peu de distance de l'entonnoir d'entrée, mais à un niveau notablement
inférieur ; on n'observe guère dans ces galeries que des Opilionides,
qui viennent y chercher abri pendant la mauvaise saison ; nombreux en
janvier ils manquaient totalement en septembre et en novembre. C'est
418 R. JEANNEL ET E.-G. BACOVITZA
dans la salle du Chaos que s'ouvre la fissure étroite, mais très haute,
qui conduit dans les parties les plus profondes de la grotte. On pénètre
d'abord dans une grande galerie-diaclase, la « galerie du Guano », qui se
dirige vers l'E. N.-E. ; en deux points de son parcours on enfonce assez
profondément dans des amas de guano de Chauves-Souris desséché et
pulvérulent ; entre ces deux points, passage assez dangereux sur une
étroite corniche, au bord d'un gouffre d'une douzaine de mètres. Le sol
et les parois de la galerie sont essentiellement secs ; même en période
pluvieuse, aucune trace de suintements ; cependant d'assez nombreuses
Moisissures témoignent de l'humidité de l'atmosphère ; en dehors de ces
Champignons, je n'ai vu d'autres Biotes que de rares Chauves- Souris,
Les parois sont recouvertes de concrétions d'allure inusitée : çà et là;
s'observe un enduit d'un blanc neigeux et très friable ; de grandes sur-
faces sont tapissées d'innombrables petits crochets cannelés de quelques
centimètres de long, recourbés en divers sens, parfois spirales et plus ou
moins ramifiés, dans lesquels M. Fournier, à l'analyse, a reconnu le gypse.
Les mêmes concrétions gypseuses avaient d'ailleurs été déjà observées
dans les galeries, également sèches, qui précèdent la salle du Chaos ;
en quelques points, surtout dans le petit boyau rectiligne qui prolonge
directement le couloir d'entrée, des cristaux d'epsomite (sulfate de
magnésie hydraté) apparaissent, au milieu des concrétions de carbonate
de chaux et carbonate de magnésie (Fournier et Magnin 1899,
p. 35).
Vers l'extrémité de la galerie du Guano, à 175 m. de la salle du Chaos,
on doit descendre à la corde un à-pic d'une douzaine de mètres ; du pied
de l'escarpement, on peut poursuivre sa route dans deux directions dif-
férentes. »Sur la gauche se détache une grande galerie qui va se terminer,
dans la direction de l'est, après un parcours de 440 m. ; elle mesure en
réalité près de 750 m. si l'on fait entrer en ligne de compte les diverti-
cules latéraux correspondant aux diaclases transversales. On progresse,
avec la plus grande aisance, sur un sol couvert d'une argile un peu sa-
bleuse et peu humide ; la faune se réduit à de rares Collemboles et Cam-
'podea. Le 4 janvier 1917 a été rencontré un petit amas de guano frais qui
n'existait pas auparavant ; de nombreuses C^iauves-Souris étaient ras-
semblées à la voûte ; à la surface même et surtout à la périphérie du guano
sautaient de nombreux Collemboles ; aux alentours ont été recueillis
quelques Campodea, quelques Typhlohlaniulus (Diplopodes) de petite
taille et des pupes vides de Diptères, mais p^icun Diptère ad\dte. Plus
GROTTES VISITÉES 419
profondément la galerie devient plus humide, des suintements appa-
raissent sur les parois qui se tapissent de concrétions stalagmitiques, et
l'on trouve même ini peu d'eau ; la faune y est pourtant pauvre : à peine
quelques Campodea, quelques gros Collemboles et de très rares TricJio-
niscus (T. [Trichojiiscoides] mixfus Racov.).
Au bas de l'escarpement de 12 m. se branche un autre système de
galeries, dont on peut atteindre le fond après un parcours de 300 m.
env,, mais qui mesure près de 700 m. de développement total. Après
s'être dirigé d'abord vers le sud, à travers d'immenses diaclases remplies
d'éboulis, on arrive à une salle argileuse oii courent quelques Campodea.
A partir de ce point, on se rapproche de l'entrée de la grotte, mais en
descendant très fortement, sur un sol argileux de plus en plus humide et
bientôt boueux ; çà et là se montrent quelques rideaux, stalactites et
stalagmites ; dans l'argile boueuse j'ai recueilli quelques fossiles de
l'oxfordien ou du rauracien (notamment de& Rhynckonella Thurmanni) et
des concrétions de pyrite (des marnes oxfordiennes) provenant de la
surface du plateau, et entraînés par les eaux pluviales dans les fissures
des calcaires bathoniens. Sur la gauche apparaît un ruisselet, qui creuse
son lit dans l'argile, et dont les eaux hébergent quelques Niphargus
{N. Virei Cheve.) Finalement on débouche à la partie supérieure d'une
immense salle, de 50 m. de long, d'une hauteur supérieure à 30 m., et
dans le fond de laquelle on peut descendre sur un talus argileux très in-
cliné. Cette grande salle terminale se trouve à peine plus au nord que la
salle du chaos et l'entonnoir d'entrée, mais beaucoup plus bas ; on doit
être à près de 90 m. au-dessous de la surface du plateau. A gauche, le
ruisseau va se perdre dans une fissure impénétrable ; à (Jroite, on observe
un gros amas de galets roulés noyés dans un ciment argileux.
La majeure partie des eaux qui circulaient autrefois dans ces galeries
coule actuellement à un niveau inférieur ; elles forment une rivière sou-
terraine que l'on rencontre à peu de distance de là, au fond du Puits de
la Belle-Louise (115 m. de profondeur). D'après Fournier (1902 a, p. 33 ;
1914, p. 5, carte), ces eaux alimentent les résurgences qui débouchent sur
la rive droite de la Loue dans la région de Cléron.
Préoccupé par la reconnaissance topographique de ce nouveau sys-
tème de galeries, je n'ai pas apporté aux recherches faunistiques toute
l'attention désirable. Je puis affirmer néanmoins que, dans son ensemble,
la grotte des Gavottes contraste, par la pauvreté relative de sa faune, avec
ce qu'on observe àBaume-les-Messieurs, à Osselle ou aux Faux-Monnayeurs.
420 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
La branche S.-O. (fig. B), longue de 150 m., qui prend naissance sur
la droite, tout près de l'entrée, a été explorée en détail le 18 novembre
1917 ; la faune y est plus abondante et plus variée que dans tout le reste
de la grotte. Après avoir descendu, en pente raide, un talus d'éboulis,
on se trouve dans une petite salle oii pénètre encore un peu de lumière,
et où de grosses pierres sont éparses sur le sol argileux ; sous ces pierres
j'ai recueilli de nombreux Collemboles, de petits Aranéides, des Aca-
riens, un Oligochète. Puis on circule très commodément entre de hautes
parois verticales, sur un sol argileux humide, souvent boueux, presque
constamment plat. Non loin du fond, une flaque de faible profondeur,
au milieu de l'argile détrempée, renfermait de très petits Niphargus,
de 5 à 6 mm. Sur le sol, des Collemboles, des Campodea, quelques Tri-
choniscus ; sous les pierres, des Typhloblaniulus, de plus rares Polydes-
mides, quelques Gastropodes {Hyalinia et Pyramidula).
La température est assez basse dans cette galerie. J'ai noté, le 18
novembre 1917, 7^2 C. au pied du talus d'éboulis à moins de 30 m. de
l'entrée ; 7°8 C, plus profondément (la température extérieure était de 6°
env.). Dans la salle du chaos, le même jour, la température était de 9°2.
SOLLAUD.
725. Source Bergeret.
(Fia. 54)
Située sur le territoire de la commune d'Arcier, canton de Besançon-
nord, département du Doubs, France. — Altitude : 270 m. env, — Roche :
Calcaires jurassiques. — Dates : 21 octobre 1915, 11 août 1916, 3 octobre
1917.
Matériaux : Diptères, Thysanoures, Collemboles, Isopodes, Amphi-
podes, Hirudinés, Oligochètes. — Numéro : 881.
Matériaux (recueillis à l'entrée de la grotte) : Amphipodes. —
Numéro : 882.
La surface des plateaux situés au sud-est et à l'est de Besançon forme
une série de bassins fermés, dont les eaux s'écoulent souterrainement.
Comme l'ont établi de nombreuses observations et expériences (voir
notamment Magnin (1902, Bibliogr.) etFouRNiER (1902 a, p. 21, coupe
géol. ; 1905 ; 1914, p. 3, carte), une partie de ces eaux vient réapparaître
sur la rive gauche du Doubs, dans le fond de la vallée, notamment à
GROTTES VISITÉES
421
l'importante résurgence d'Arcier, située à 10 km. en amont de Besançon,
et qui alimente la ville en eau qualifiée potable. Quelques centaines
de mètres plus en amont, une résurgence moins importante, connue sous
le nom de « Source Bergeret », sort d'une petite grotte pénétrable sur une
trentaine de mètres en basses eaux ; à un niveau supérieur se creuse dans
le rocher une vaste chambre qui marque le point d'émergence du cours
d'eau à une époque antérieure ; suivant une disposition des plus fréquentes
fènèbre.
Grotte siiperieure.
(antunne résurgeKca-j
9--
EiuAC'î
A'ir-.IO'S
FiG. 54. Croquis schématique de la Source Bergeret (q" 725) ; longueur totale : 35 mètres environ.
dans la région (fig. 54), cette chambre est munie d'une « fenêtre », qui
jadis fonctionnait comme trop-plein.
En période sèche, le ruisseau n'emprunte pas le couloir de la grotte ;
on le voit déboucher sur la gauche, immédiatement après l'entrée, en
formant de petits rapides. Sous la voûte d'entrée vivaient, en août comme
en octobre, d'innombrables Gammarus {G. Delehecquei Chevr.) de colo-
ration très foncée, presque noire ; en août 1916, j'ai trouvé au même point
un Niphargus {N. Virei Chevr.) d'assez grande taille, qui semblait faire
de vains efforts pour remonter le courant et regagner son domaine habi-
tuel. A 8 m. de l'entrée, on rencontre un petit bassin en communication
avec le cours d'eau souterrain, et dans lequel vivent des NipJmrgus, bien
422 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
que sa surface soit encore faiblement éclairée ; si ces Amphipodes fuient
manifestement la lumière du jour, comme je l'ai observé nettement sur
des individus conservés quelque temps en aquarium, une lumière faible
ne paraît nullement les incommoder. Vingt mètres plus loin, après avoir
parcouru, sur des éboulis, un petit couloir bas et étroit, on est arrêté
par un lac profond, au delà duquel ne semble pas exister de galerie péné-
trable. Dans un piège posé dans ce bassin terminal, en août 1916, j'ai
trouvé, en compagnie des iVij^^rg'w*, une Sangsue {Haemopis sanguisuga
(L.)) ; cette espèce est très abondante dans les ruisseaux et marais du
bassin d'alimentation des sources d'Arcier, et sa présence au fond de
la grotte témoigne du degré de filtration que subissent, dans leur par-
cours souterrain, les eaux offertes aux habitants de Besançon. En oc-
tobre 1915, oii les eaux étaient extrêmement basses, les NipJiargus
étaient plus nombreux qu'en août 1916 et octobre 1917, oîi les eaux du
lac s'avançaient plus avant dans la galerie ; de plus, ceux d'octobre 1915
étaient de teinte rosée, tandis que tous les individus observés à mes
deux visites suivantes étaient blancs.
Un peu au delà de la limite de pénétration de la lumière, on trouve au
bas de la paroi de droite une mince bande d'argile humide, où vivent des
Collemboles et déjà quelques Trichoniscus {T. [Trichoniscoides] mixtus
Racov.), pas encore de Campodea ; en août 1916, la surface lisse de l'ar-
gile était creusée de petits trous ronds forés par des Oligochètes.
Dans la salle terminale on peut grimper quelque peu au-dessus du
lac, contre la paroi de droite, qui offre quelques surfaces argileuses,
peuplées de Collemboles et de nombreux Trichoniscus ; sur des surfaces
faiblement incrustées courent de rares Campodea.
De très nombreux Opilionides se tenaient sur les parois, le 21 octobre
1915, dans toute la longueur de la grotte ; aucun n'a été vu aux deux
autres visites. Le 3 octobre 1917, nombreux Culex (C pipiens L.) jus-
qu'à une vingtaine de mètres de l'ouverture.
Températures prises le 3 octobre 1917.
Eau du ruisseau à l'entrée de la grotte . . 10^2 C.
Eau du lac terminal 10^2 -
Air au fond de la grotte 10°5 -
SOLLAUD.
GROTTES VISITÉES 423
726. Grotte Saint-Léonard supérieure.
Située à 2 km. en amont de Besançon, presque au sommet du grand
escarpement rocheux qui domine la rive gauche du Doubs, commune de
Besançon, canton de Besançon-sud, département du Doubs, France.
— Altitude : 365 m. (Fournier et Magnin 1899, p. 10, plan). — Roche :
Calcaires jurassiques. — Dates : 15 août 1913, 15 avril 1914, 11 avril
et 30 juin 1916.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Trichoptères, Thysanoures, Col-
lemboles, Myriapodes, Aranéides, Opilionides, Isopodes, Oligochètes,
Champignons. — Numéro : 883.
Bien connue et très fréquentée des Bisontins, la plus élevée des deux
grottes Saint-Léonard est un simple couloir uniforme d'une centaine
de mètres, qui descend en pente raide suivant le plongement des couches
(calcaires blancs compacts de l'astartien). Sol argileux et humide avec
quelques pierres ; concrétions très rares. La faune est assez riche, ce qui
peut être dû en partie aux débris, ligneux ou autres, laissés par les nom-
breux visiteurs, mais elle comprend plus de Trogloxènes et Troglophiles
que de véritables Troblobies.
J'ai retrouvé à peu près les mêmes éléments à chacune de mes visites.
Signalons pourtant que les Porcellio n'ont été vus qu'en avril et juin
1916 (une femelle ovigère en juin), sous les pierres, vers le fond de la
grotte. Je n'ai pas vu de Trichoptères en avril 1914 et 1916 ; en juin
1916, et surtout en août 1913, ils se tenaient immobiles contre la roche
presque sur toute la longueur de la galerie. En avril 1916 s'observaient
dans les anfractuosités des parois d'innombrables cadavres d'Opilio-
nides, entièrement recouverts d'une Moisissure blanche.
Les Diptères brachycères sont abondants, surtout dans les parties
profondes, où les Araignées en font une large consommation. Polydesmides
fréquents sous les pierres (un Lithobius en avril 1914). Nombreux Col-
lemboles et Campodea sur le sol argileux.
Des Chauves-Souris, nombreuses en avril, sont suspendues à la voûte
près de l'entrée et semblent appartenir à deux espèces distinctes ; j"ai
aisément reconnu parmi elles le Rliinoloplius jerrum-equinum Schreib..
Olivier (1882, p. 83) a trouvé dans les grottes Saint-Léonard plusieurs
individus du Miniopterus Schreibersi Natt., Cheiroptère de l'Europe
424 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
méridionale signalé par lui pour la première fois en France (trouvé
auparavant par Fatio dans le Jura suisse, à la grotte de Motiers, près de
Neuchâtel) ; un des individus capturés « était couvert, sur ses ailes,
de petits Acariens {Pteroptus vespertUionis Dur.) et avait dans sa four-
rure quelques exemplaires d'un curieux genre de Diptères sans ailes, le
Nycteribia vespertilionis Meig. ))^,
Magnin {in Fournier et Magnin 1899, p. 11) a relevé dans la grotte
Saint-Léonard supérieure les températures suivantes :
12 décembre 15 mars 27 mai 5 février
1895 1896 1897 1899
Entrée 4P 6^ 14P8 15o
Vers le milieu 9^5 905 lO^S
Fond 1005 1005 120 - 905
Vingt-cinq mètres plus bas s'ouvre une autre grotte (Fournier et
Magnin 1899, p. 11, plan) que je n'ai pas encore explorée au point de
vue biospéologique.
SOLLAUD.
727. Grotte de Heure.
Située au sommet de l'escarpement rauracien qui domine, au N.-E,
la petite plaine alluviale de Beure, commune de Beure, canton de Be-
sançon-sud, département du Doubs, France. — Altitude : 440 m. env.
— Roche : Calcaires jurassiques. — Date : 30 avril 1916.
Matériaux : Diptères, Trichoptères, Thysanoures, Collemboles,
Myriapodes, Aranéides, Acariens, Oligocliètes, Mollusques. — Numéro : 884.
La galerie principale, qui mesure 300 m. env., est assez spacieuse et
encombrée, sur presque toute sa longueur, par un amas chaotique de blocs
éboulés de la voûte. Malgré ces conditions assez défavorables de prime
abord, la faune est assez riche à cause de l'abondance des Chauves-
Souris dont les ossements jonchent le sol un peu partout. A la surface
des amas de guano frais pullulent Campodea, Collemboles et Acariens ; de
petits Aranéides roses y édifient leurs toiles. Sur le même guano j'ai
1. Outre cette espèce, OlîVÎEB signale dansles grottes du département du Doubs. particulièrement des environs
de Besançon : Ehinolophus ferrum-equinum Sclir., R. hipposideros Beclist., Plecotus auritus L., Sy7iottis barbastellus
Schr., Vesperugo noctula Schr.
GROTTES VISITÉES 425
observé de petits Brachycères, des larves de Némocères, des pupes
orthorhaphes et cyclorhaphes, quelques Oligochètes et Gastropodes,
Çà et là le plancher argileux apparaît entre les éboulis, laissant voir
quelques Campodea. A l'extrémité de la galerie, de nombreux CoUemboles
et un Typhloblaniulus (Diplopode) capturés sur un morceau de bois.
A 80 m. du fond, un couloir latéral étroit se détache sur la droite, long
d'une soixantaine de mètres ; sur son sol argileux courent des Campodea.
Quelques Trichoptères se tenaient contre les parois au voisinage de
l'entrée.
SOLLAUD.
728. Grotte de Maillot.
(FIO. 55)
Située près du lieu dit Maillot, à gauche du chemin de Beure à Maillot,
commune de Beure, canton de Besançon-sud, département du Doubs,
France. — Altitude : 310 m. env. — Roche : Calcaires jurassiques. —
Dates : 13 septembre 1916, 15 et 22 décembre 1917.
Matériaux : Coléoptères, Lépidoptères, Diptères, Thysanoures,
CoUemboles, Myriapodes, Aranéides, Isopodes, Champignons. — Nu-
méro : 885.
Au niveau du village de Beure, à 5 km. en aval de Besançon, le ver-
sant gauche de la vallée du Doubs est profondément entaillé par une cluse,
qui se termine par une reculée rocheuse connue sous le nom de « Bout-
du-Monde » ; du haut des rochers se précipite un ruisseau, le « Mercureau »,
affluent du Doubs. Plus haut que la reculée, avant de former la cascade
du Bout-du-Monde, le Mercureau coule dans une vallée anticlinale, où
affleurent surtout des marnes triasiques et liasiques. Cette comhe marneuse
constituait autrefois un petit bassin fermé, privé d'exutoire superficiel ; l'an-
cien Mercureau se perdait dans des fissures des calcaires jurassiques
et allait réapparaître, sous forme d'une résurgence, dans le fond de la
vallée du Doubs, au voisinage de Beure. La petite grotte de Maillot, qui
s'ouvre un peu au-dessus des rochers du Bout-du-Monde, est une partie
de la galerie que suivait alors le cours d'eau dans son trajet souterrain.
Cette grotte est un simple couloir étroit, de 55 m. de long, qui s'en-
fonce vers le N.-E., à peu près suivant la direction des couches (calcaires
blancs compacts de l'astartien). Elle s'ouvre presque au niveau de la
charnière synclinale, bien visible un peu au-dessous, dans les rochers du
426
R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Bout-du-Monde, et sur laquelle chevauche l'anticlinal de la vallée du
Mercureau ; il en résulte que la coupe de la galerie se présente souvent
sous la forme d'un arc de cercle (fig. 55, coupe ah). Dans la première
10*3
B
; TkjuÂÀ>ttX,ULU
Fia. 55. Croquis sdicmatiquc de la Grotte de Maillot (u" 738) ; longueur totale : 55 mètres environ.
moitié de la grotte, la voûte est assez élevé (5 à 6 m.), et la base des parois
présente les traces manifestes d'une active érosion par des eaux animées
de mouvements tourbillonnaires ; cette partie se termine, à 28 m. de
l'ouverture, par une petite chambre qui est formée de la réunion d'un
certain nombre de marmites. Plus profondément la hauteur diminue.
GROTTES VISITÉES 427
le plancher de la grotte, envahi par l'argile, se rapprochant peu à peu
de la voûte. A 40 m. de l'entrée, la galerie s'élargit en une nouvelle salle ;
au delà elle se réduit à un boyau bas et étroit, long d'une quinzaine de
mètres, où il faut ramper sur le sol boueux avant d'atteindre une der-
nière petite salle au-dessus d'un talus d'argile. Une lumière faible, ré-
fléchie par les parois, arrive jusqu'à la deuxième chambre. Il existe peu
de concrétions.
De nombreux Trogloxènes, Lépidoptères et Diptères, se tenaient sur
les parois, en décembre, dans la première partie de la grotte ; ils étaient
abondants surtout dans la deuxième chambre, mais ne pénétraient pas
plus profondément. Dans la même chambre ont été rencontrés les pre-
miers TricJioniscus {Andronisciis sp.) sous des pierres reposant sur un
sol terreux, un peu graveleux (assez communs dans cette station en sep-
tembre 1916, beaucoup plus rares en décembre 1917, où un seul individu
a été trouvé le 15, aucun le 22). On les observe en bien plus grand nombre
cachés sous les pierres de la deuxième chambre, ou courant sur l'argile
détrempée dans le petit couloir qui lui fait suite. On trouve côte à côte
des individus d'un blanc à peine rosé, d'autres d'un rose violacé plus ou
moins intense, le contenu du tube digestif dessinant généralement une
bande médiane sombre. Il m'a semblé que les individus recueillis dans la
première chambre, pourtant moins obscure, étaient tous de teinte plu-
tôt claire ; ces différences de coloration doivent être liées essentielle-
ment à des modes d'alimentation différents. D'autres Isopodes, Oniscics
et Porcellio, étaient mélangés aux Trichoniscus dans la deuxième chambre,
en septembre 1916 ; aucun n'a été vu dans la grotte en décembre 1917.
Des LitJwhius ont été trouvés sous les pierres dans la deuxième
chambre et sur des débris ligneux dans la chambre terminale ; ils étaient
plus nombreux en septembre 1916 qu'en décembre 1917.
J'ai constaté en décembre 1917 que les premiers Collemboles appa-
raissaient, sur les concrétions pariétales et surtout sur le sol argileux,
immédiatement après la première chambre ; les Campodea commençaient
à se montrer seulement un peu plus loin, avant la deuxième chambre ;
de même que les Collemboles, ils deviennent très abondants sur l'argile
humide du fond de la grotte.
Le 22 décembre 1917 ont été recueillis trois larves de Diptères à
corps transparent comme du cristal, tous les organes internes apparais-
sant avec la plus grande netteté. Les deux plus petits individus se tenaient
à l'entrée de la première chambre, à la surface d'un léger enduit stalag-
ARCH. de Zool. Exp. et GÉN. — T. 57. — F. 3. 28
428 R. JEANNEL ET E. G. RACOVITZA
mitique ; le troisième, de plus grande taille, a été trouvé sous une pierre
qui reposait sur l'argile détrempée du petit couloir terminal.
Les températures suivantes ont été relevées en décembre 1917 :
15 décembre 22 décembre
Température extérieure près de la grotte + 1°4 G. — 5^9
Entrée de la grotte + 2P2 — 407
Première chambre + 6^1 + 3*^6
Au milieu du couloir rémiissant les première et deu-
xième chambres + 905
Deuxième chambre + lO^S + l(P2
Chambre terminale " + IO03 + lO^S
Un fort courant d'air froid, venant de l'extérieur, circulait au ras du
soi dans la première chambre, mais n'était pas sensible plus profondé-
ment.
SOLLAUD.
729. Grotte de Chenecey.
(FIQ. 56)
Située dans la vallée de la Loue, rive droite, à 600 m. en amont du
village de Chenecey, commune de Chenecey-Buillon, canton de Quingey,
département du Doubs, France (indiquée sur la carte de l'état-major,
feuille de Besançon, N.-E., et sur la carte du Ministère de l'Intérieur,
feuille de Besançon). — Altitude : 315 m. env. — Boche : Calcaires ju-
rassiques. — Date : 23 décembre 1917,
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Thysanoures, CoUemboles, Myria-
podes, Aranéides, Acariens, Isopodes, Mollusques, Oligochètes. — Nu-
méro : 886.
A quelques kilomètres au sud de Besançon existent de petits bassins
fermés (régions de Fontain, Pugey, etc.), dont les eaux s'écoulent sou-
terrainement, d'abord vers le sud-ouest, puis à peu près vers le sud, confor-
mément à la direction des failles et des diaclases ; elles réapparaissent
dans la vallée de la Loue, sous la forme d'une importante résurgence, au
contact de la faille de Chenecey (Fournier et Magnin 1899, p. 44, plan ;
FouRNiER 1902a, p. 17 ; 1914, p. 3, carte). La grotte de Chenecey, qui
s'ouvre à une trentaine de mètres au-dessus de la résurgence, représente
GROTTES VISITÉES
429
certainement un
ancien lit du
cours d'eau sou-
terrain. Sa lon-
gueur totale n'at-
teint pas 150 m.,
mais elle est re-
marquable par
l'abondance de ses concrétions,
ce qui fait qu'elle est connue
depuis longtemps des touristes.
Après avoir franchi trois
petites salles, séparées par des
voûtes très surbaissées, on
pénètre, à travers un massif
stalagmitique, dans les parties
obscures de la grotte. Dès lors
la voûte se maintient constam-
ment élevée ; les stalactites,
piliers, bornes et massifs stalag-
mitiques abondent, et il est peu
de points où les parois laissent
voir la roche à nu.
A 40 m. de l'entrée, une ga-
lerie se détache sur la droite et
se termine au bout d'une ving-
taine de mètres ; bien que le
sol en soit argileux et assez
humide, la faune y est pauvre ;
en dehors des Collemboles, atti-
rés en grand nombre par les
morceaux de fromage disposés
comme appâts, j'ai tout juste
capturé un Quedius sur une
borne et un Typhloblaniulus
(Diplopode) sous une pierre.
FIO. 56. Croquis schématique
de la Grotte de Chenecey
(n» 729) ; longueur totale :
140 mètres environ.
(g) _ }{^„luUA.
Entrée.
A 40 m. de la bifurcation, la galerie principale est presque entière-
ment barrée par une belle colonnade, au delà de laquelle on accède dans
430 R. JEANNEL ET E. G. RACOVITZA
la portion terminale de la grotte, la plus intéressante au point de vue de
la faune. Un étroit couloir inférieur s'ouvre à ses deux extrémités dans
la grande galerie, sous les massifs stalagmitiques, par deux puits pro-
fonds de 3 m. env.. Après avoir traversé une série de gours secs, on ren-
contre un sol argileux, humide, avec quelques flaques ; la présence des
gours est encore reconnaissable çà et là sous le revêtement argileux.
Au fond de la grotte macérait un cadavre de Chauve-Souris en partie
immergé dans une petite flaque ; d'innombrables CoUemboles, et avec
eux un Typhlohlaniulus, se délectaient non aux dépens du cadavre lui-
même, mais aux dépens d'une argile noirâtre tout imprégnée du liquide
de macération. Les Campodea sont nombreux, aussi bien sur l'argile que
sur les surfaces incrustées, même rugueuses et sèches ; trois ou quatre
d'entre eux ont été observés sur l'eau d'une flaque (au pied d'un pilier
d'où ils étaient probablement tombés), oîi ils se livraient à de vains efforts
pour regagner la rive.
Les Typhlohlaniulus sont assez fréquents dans les parties profondes ;
quelques-uns rampent sur l'argile, d'autres se tiennent cachés sous les
pierres ; mais la plupart ont été rencontrés sur les concrétions, généra-
lement sur des parties humides et lisses, où j'ai vu aussi un assez grand
nombre de leurs exuvies. La coloration de ces Myriapodes varie dans
d'assez larges limites : les uns sont d'un blanc à peine jaunâtre, avec une
série de taches jaune orangé de chaque côté du corps ; d'autres sont d'un
rose plus ou moins intense, parfois presque lie de vin, et les taches appa-
raissent en plus foncé.
Quelques Trichoniscus {Androniscus sp.) ont été capturés dans l'ex-
trême fond, soit à la surface de l'argile, soit sous les pierres, jamais sur les
concrétions ; la coloration de ces Isopodes est à peu près la même que
celle des Typhlohlaniulus et varie dans les mêmes limites.
Entre les cannelures des piliers ou des concrétions pariétales, de minus-
cules Aranéides roses tissent de petites toiles, sur lesquelles l'humidité
vient se condenser sous forme de fines gouttelettes. Des Aranéides roses
de plus grande taille erraient sur des fragments de bois pourri, parmi
quelques Collembolés, auxquels ils donnaient probablement la chasse.
Quelques Acariens çà et là, au milieu des Collembolés, sur des morceaux
de bois, plus rarement sur les concrétions. Un Oligochète se tenait sur
la paroi verticale d'un pilier, à 2 m. au-dessus du sol.
Il existe quelques amas de guano frais ; l'amas observé à une ving-
taine de mètres de l'ouverture, à peine au delà de la limite de la région
I
GROTTES VISITÉES 431
éclairée, était le plus peuplé : outre les inévitables Collemboles, petits
Brachycères, pupes vides, Aranéides. Hyalinia (Gastropodes). Les Culex
étaient nombreux sur les parois, à une certaine distance de Tentrée, mais
ne pénétraient pas dans les parties obscures de la grotte.
La température extérieure, au voisinage de l'ouverture, était de
— 205 C. Dans les trois petites chambres successives du début, j'ai noté :
+ 1°3, + 207 et + 1^5 ; quelques mètres plus loin, à la limite de péné-
tration de la lumière : IPS. Plus profondément, à la bifurcation des deux
galeries et au fond de la galerie de droite : 1P8. Dans la partie terminale
de la grotte, température légèrement inférieure : 11°4, ce qui est peut-
être dû à une circulation d'air dans le petit couloir inférieur.
SOLLAUD.
730. Gouffre des Granges-Mathieu.
Situé au hameau des Granges-Mathieu, commune de Chenecey-
Buillon, canton de Quingey, département du Doubs, France. — Alti-
tude : 380 m. env. — Roche : Calcaires jurassiques. — Date : 12 mars 1917.
Matériaux : Thysanoures, Myriapodes. — Numéro : 887.
Un bon schéma de ce gouffre-grotte a été donné par Fournier (1907,
p. 15). L'orifice du goufifre est situé à la surface du plateau qui borde la
rive droite de la Loue, au-dessus du village de Chenecey. Il s'ouvre sur
une grande galerie diaclase de 400 m. de longueur, orientée du N. N.-E.
au S. S.-O. Après une descente à pic de 30 m. à la corde, on met pied sur
un immense talus d'éboulis, le long duquel il faut encore s'abaisser d'une
trentaine de mètres pour atteindre le fond de la galerie ; on se trouve alors
à peu près au même niveau que la grotte de Chenecey (Voir ci-dessus,
p. 428), située à 1 km. à peine au S. S.-O., dans le prolongement de la
diaclase. Il paraît que, par les fortes pluies, les eaux circulent encore
dans cette galerie, qui appartient manifestement au système hydrogra-
phique souterrain dont l'exutoire actuel est la résurgence de Chenecey.
Arrivé au pied du talus d'éboulis, j'avais à peine commencé ma chasse
lorsque je dus l'interrompre à la suite d'un accident survenu à l'un des
excursionnistes. J'ai pu néanmoins constater l'existence, sur Targile, d'assez
nombreux Campodea (Thysan.) et Typhloblaniulus (Diplopodes).
SoLLAUD.
432 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
731. Grotte d'Osselle.
Situez sur la rive gauche du Doubs, en face du village d'Osselle, sur
le territoire de la commune de Rozet-Fluans, canton de Boussières, dépar-
tement du Doubs, France (indiquée sur la carte de l'état-major, feuille
Besançon, N.-E.). — Altitude : 235 m. env. — Roche : Calcaires juras-
siques. — Dates : 28 mai et 26 septembre 1916.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Hyménoptères, Trichoptères ,
Thysanoures, Collemboles, Myriapodes, Aranéides, Opilionides, Cher-
nètes. Acariens, Amphipodes, Mollusques. — Numéro : 888.
Très visitée par les touristes, cette grotte est depuis longtemps ex-
ploitée ; elle a été aménagée et dotée d'iui éclairage électrique. Le plan
en a été levé en 1826 par Rochon, géomètre du cadastre (reproduit sché-
matiquement par Fournier et Magnin 1899, p. 54). C'est une grande
galerie de 750 à 800 m. de longueur, dans laquelle on n'accède que par
une ouverture étroite. Le petit couloir d'entrée débouche, au bout de
quelques mètres, dans une salle assez vaste dont le plafond est percé
de quelques orifices qui s'ouvrent sur le flanc du coteau ; par là pénè-
trent un peu de lumière et des débris divers entraînés par les eaux de
ruissellement. Des Chauves-Souris habitent cette salle ; elles sont plu-
tôt rares dans tout le reste de la grotte, où je n'ai pas observé de dépôts
de guano.
On peut distinguer assez nettement dans cette grotte deux parties
de longueurs à peu près égales reliées, à 400 m. env. de l'entrée, par un
couloir bas et étroit. La première est remarquable par la richesse et la
beauté de ses concrétions, qui forment çà et là d'importants massifs
auxquels ont été attribuées des dénominations diverses ; vers le milieu
du parcours existent quelques petits lacs, déterminés parmi les piliers et
massifs stalagmitiques par les suintements et les gouttières. La deuxième
partie est moins riche en concrétions et devient de plus en plus argileuse ;
le sol y est presque partout recouvert d'une couche d'argile de grande
épaisseur, d'oti l'on a retiré d'innombrables ossements à'Ursus spelaeus.
A 600 m. de l'entrée, un pont en maçonnerie permet de franchir un ravin
au fond duquel coule un ruisseau souterrain ; ce cours d'eau réapparaît
à la résurgence de la Froidière, sur la rive gauche du Doubs, un peu en
amont de l'entrée de la grotte (Fournier 1902a, p. 32, carte).
GROTTES VISITÉES 433
Dans les 100 premiers mètres de la grotte volent quelques Insectes :
Diptères, petits Hyménoptères noirs ; en mai a été capturé un Trichop-
tère venant d'éclore, remarquable par ses palpes maxillaires très allongés
et plumeux et par son corps entièrement blanc ; les Diptères seuls pé-
nètrent plus profondément. Les coquilles vides de Gastropodes (Hya-
lini-T,) sont nombreuses, parfois déjà recouvertes en partie par les con
crétions ; leur nombre décroît à mesure que Ton avance dans la galerie
une petite coquille a pourtant encore été rencontrée, en septembre, à
400 m. de l'entrée, sur les parois du couloir bas qui réunit les deux parties
de la grotte.
Les Collemboles sont nombreux à la surface de l'eau des lacs et sur-
tout des petites cuvettes stalagmitiques ; dans les pièces d'eau de très
faibles dimensions, on les trouve généralement groupés en amas au centre
du bassin ; ce sont presque exclusivement de petits Anurides blancs ;
avec eux de rares Collemboles sauteurs également décolorés, plus rare-
ment encore des Podurides colorés et oculés, enfin un unique Sm3mtliu-
ride (capturé en mai). Des T yphlohlaniulus (Diplopodes) tranchent par
leur teinte claire sur les stalagmites dont la couleur est généralement d'un
gris très foncé.
Un peu au delà des lacs, à plus de 200 m. de l'entrée, mon attention
s'est portée, en septembre 1916, sur une petite borne stalagmitique de»
60 cm. env, de hauteur et de coloration presque noire, qui offrait un
spectacle des plus curieux : il y avait là, se détachant comme des points
blancs sur un fond sombre, une extraordinaire afïluence d'Anurides, et
la surface de la borne était presque entièrement recouverte par les exuvies
de ces Insectes ; de petits Aranéides de teinte rosée et un Chernète d'assez
grande taille (le seul que j'ai trouvé jusqu'à présent dans les grottes du
Jura) s'y livraient à une chasse des plus fructueuses. Aux alentours
volaient de nombreux Diptères, Némocères et surtout Brachycères, très
actifs et fort difhciles à capturer ; non loin de là une larve de Mycéto-
philide se tenait au milieu d'une toile assez analogue à celle que repré-
sente la figure 35 de la précédente « Énumération » (1914, p. 467), mais
de bien plus vaste envergure.
Sur l'argile de la deuxième partie de la grotte, surtout dans l'ex-
trême fond, où le sol est plus humide, deux espèces de Biotes sont très
abondamment représentées : ce sont, d'une part, d'innombrables petits
Anurides blancs, semblables à ceux qui flottaient sur l'eau des cuvettes
stalagmitiques ; par leur allure, par leur large abdomen mou qui s'incurve
434 R. JEANNEL ET E.-G. BACOVITZA
à droite ou à gauche et se contracte au moindre attouchement, ils donnent
tout à fait l'impression de petites Planaires blanches rampant lente-
ment sur le substratum. Ce sont, d'autre part, de très nombreux Typhlo-
hlaniulus, bien plus abondants ici, sur l'argile humide, que sur les con-
crétions stalagmitiques de la première partie de la grotte.
Sur les barrières de bois couvertes de Champignons, un peu avant le
pont qui franchit le cours d'eau souterrain, rampent des Podurides
oculés, les uns colorés en rouge brun, les autres à corps gris cendré ponctué
de noir, tous munis d'un appareil saltatoire réduit et infonctionnel.
A noter l'extrême rareté des Campodea, si fréquents d'habitude dans
nos grottes ; deux seulement ont été capturés, en mai, courant sur des
surfaces stalagmitiques ; aucun n'a été vu en septembre ! A noter aussi
l'absence des TricJioniscus. L'abondance des Typhloblaniulus et surtout
des Anurides est la caractéristique essentielle de cette grotte.
Je n'ai pas vu de Niphargus dans les lacs ; trois individus {N. Virei
Chevr.) ont été pris, le 28 mai 1916, dans le cours d'eau souterrain, sous le
pont en maçonnerie, au moyen d'un piège relevé au bout de quelques
minutes seulement ; le ruisseau coule là entre des berges et sur un fond
d'argile molle dans laquelle on enfonce profondément.
Li'AnmLaire du Douhs de 1839 donne (p. 211) les résultats d'une
analyse de l'air de la grotte : Az 79 %, 0 17 "o, CO^ 4 %.
Magnin (mFouRNiER etMAGNiNl899, p. 55) donne les températures
suivantes :
15 juillet 26 a\Til 9 mai
1895 1896 1897
Température extérieure 21° C. 19'^
Air vers le milieu de la grotte IP 11° 12»
Eau d'un des lacs II05 11» II09
Eau du cours d'eau souterrain .... II04
Résurgence de la Froidière II04 IO08
SOLLAUD.
732. Grottes de Revigny.
Situées au fond de la vallée de la Vallière, commune de Revigny,
canton de Conliège, département du Jura, France. — Altitude : 530 m.
env. — Roche : Calcaires jurassiques. — Date : 22 juillet 1916.
GROTTES VISITÉES 435
Matériaiix : Lépidoptères, Diptères, Trichoptères, Collemboles,
Aranéides, Isopodes, — Numéro : 889.
Les deux grottes de Revigny s'ouvrent dans un escarpement de cal-
caire bajocien, à une grande hauteur au-dessus de la résurgence actuelle
de la Vallière, peu au-dessous de la surface du plateau. Viré (1896, p. 15)
les cite au nombre des grottes totalement azoïques. Je n'ai en effet observé
aucun Biote dans la grotte supérieure, qui comprend un système de cou-
loirs s'ouvrant par trois ouvertures successives sur la même corniche ;
ces galeries sont essentiellement sèches, et le sol y est couvert d'une
argile rouge sableuse, où l'on trouve des silex taillés,
La grotte inférieure par contre, simple couloir d'une trentaine de
mètres, est quelque peu humide. En dehors de nombreux Trogloxènes,
localisés au voisinage de l'entrée, j'ai observé dans la partie obscure
quelques Collemboles et de rares Trichoniscus {T. mixtus Racov.).
SOLLAUD.
733. Grotte de Baume-les-Messieurs.
(Seconde mention, voir BIOSPKOLOQICA VI, p. 396)
Située au commencement de la vallée du Dard, commune de Baume-
les-Messieurs, canton de Voiteur, département du Jura, France. —
Altitude : 417 m.^ — Roche : Calcaires jurassiques. — Dates : 20 et 25 juil-
let 1916.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Thysanoures, Collemboles, Ara-
néides, Acariens, Isopodes, Amphipodes, Mollusques, Laboulbéniacées
(sur Coléoptères). — Numéro : 890.
Matériaux recueillis sur les boisages de la galerie aménagée:
Diptères, Collemboles, Aranéides, Acariens. — Numéro : 891.
Matériaux recueillis sur guano de Chauves-Souris : Diptères,
Collemboles, Acariens, OUgochètes, Champignons. — Numéro : 892.
Je n'ai pas exploré la « galerie des Lacs », mais seulement la grande
galerie aménagée qui aboutit à la <( salle du Catafalque », et la galerie
méridionale qui aboutit au Dard souterrain^. Dans cette dernière on doit
1. Prise au baromètre altimétrique par Girardot (1812, p. 812), qui désigne la grotte sous le nom de « Grotte
du Dard » et donne une coupe géologique détaillée des calcaires bajociens dans lesquels elle est creusée.
2. Voir le plan donné par Rbnauld (1836).
436 B. JEANNEL ET E.-G. BACOVITZA
d'abord traverser une partie azoïque, occupée par des éboulis secs ;
puis, immédiatement avant la descente vers la rivière souterraine, les
parois et les blocs se recouvrent d'une argile humide où l'on voit courir
des Campodea et des Trichoniscus ; à cela se réduit à peu près toute la
faune terrestre dans cette partie de la grotte. La plupart des matériaux
récoltés, énumérés plus haut, proviennent de la galerie aménagée, où
les vastes surfaces argileuses, les dépôts de guano et les boiseries couvertes
de Champignons offrent des conditions tout à fait propices au dévelop-
pement d'une faune terrestre abondante et variée.
La colonie de Trichoniscus qui peuple la grotte de Baume-les-Mes-
sieurs a servi de type pour l'établissement d'une nouvelle espèce, le
T. (Trichoniscoides) mixtus Racovitza (1908, p. 321, pi. XII-XIII,
fîg. 158-180), qui n'avait pas encore été signalée dans d'autres stations.
Cette espèce doit être largement répandue dans le Jura ; en dehors de
Baume-les-Messieurs, je l'ai retrouvée dans les grottes (voir la présente
« Énumération ») de Revigny (département du Jura), Sainte-Catherine,
des Faux-Monnayeurs, de Plaisirfontaine, des Cavottes, de la source
Bergeret (département du Doubs). J'ai constaté l'existence, dans la
région, d'un autre Trichoniscus, [Androniscus sp.), rencontré dans deux
grottes des environs de Besançon, celles de Maillot et de Chenecey ;
je ne connais pas jusqu'à présent de grotte qui héberge à la fois les
deux espèces. Il sera intéressant d'établir la distribution relative de
chacun de ces deux Trichoniscus, et les conditions, actuelles ou passées,
dont elle est le résultat ; il est possible que les limites du domaine
habité par le T. mixtus coïncident avec celles des régions qui ont été
soumises plus ou moins directement à l'influence des phénomènes gla-
ciaires.
Les Cœcosphœroma Virei Dollfus ont été trouvés en grand nombre
à l'extrémité de la galerie méridionale, dans les marmites où pénètrent
les eaux de la rivière. Ce Sphéromien, inconnu jusqu'à présent en dehors
de la grotte de Baume-les-Messieurs, a été retrouvé (un seul exemplaire)
à la grotte des Faux-Monnayeurs (département du Doubs). (Voir ci-
dessus, p. 361.)
Les Ni'phargus Virei Chevreux sont nombreux dans les mêmes mar-
mites, où l'on en recueille des exemplaires de toutes tailles ; par contre,
dans les lacs de la grande galerie, où ils sont plus nombreux encore, j'ai
capturé à peu près exclusivement des exemplaires de grandes dimensions,
si ce n'est une quinzaine de tout jeunes individus qui venaient d'éclore
GROTTES VISITÉES 437
et ont été mis en liberté par une femelle au moment où elle se débattait
dans le tube à alcool.
Ayant recueilli ces Amphipodes dans deux tubes différents, réservés
l'un aux individus qui vivaient dans les lacs de la galerie aménagée, l'autre
aux individus qui vivaient dans les marmites de la galerie méridionale,
j'ai été frappé de voir que ceux du premier lot se distinguaient nette-
ment par leur teinte rosée. En outre, un certain nombre d'entre eux,
12 p. 100 environ, présentaient dans la région antérieure du corps, géné-
ralement d'un seul côté, une tache rouge orangé qu'on est tenté de
prendre, à un premier examen superficiel, pour un œil rudimentaire
(Viré 1896, p. 7) ; cette tache correspond en réalité à la glande anten-
naire (Viré 1899, p. 39) située dans l'article basilaire de l'antenne II,
et dont le canal excréteur va déboucher à l'extrémité d'un gros tuber-
cule conique porté par le deuxième article. D'autre part, chez presque
tous les individus de ce premier lot, d'autres taches, d'un rouge brun,
s'observaient çà et là sous les téguments. Ces taches ne sont pas si « irré-
gulièrement disséminées » que le prétend Viré ; les plus importantes et
les plus constantes dessinent des bandes étroites et allongées sous les
pleurons des segments thoraciques, au voisinage immédiat de leur arti-
culation avec les plaques coxales ; eUes marquent probablement la trace
des « glandes coxales ». Enfin quelques taches irrégulières s'observent
parfois en d'autres points du corps ou sur les appendices et correspondent
sans doute à autant d'amas de néphrocytes. Je ne vois donc nullement
la nécessité de recourir à une hypothèse du genre de celle de Viré (1899,
p. 39), pour qui ces taches sont peut-être « un résidu de la coloration
normale du type ancestral ou des tendances individuelles au retour à ce
type ». Pour ma part, j'y vois essentiellement le résultat de causes actuelles,
la conséquence directe d'un métabolisme spécial s'exerçant dans des
conditions déterminées, métabolisme qui se traduit par la production
et l'accumulation, dans certains tissus et organes, de substances excré-
mentielles particulières. Il est certain que, dans la galerie fréquentée
par les touristes, ces Amphipodes trouvent une nourriture facile et abon-
dante qui provient, non pas tant des débris divers laissés par les visi-
teurs, mais surtout des boiseries qui pourrissent au contact de l'eau, des
innombrables champignons qui se développent avec exubérance sur ces
boiseries, sans doute aussi de la microfaune qui, grâce à ces conditions
spéciales, a pu se développer dans les lacs.
Par contre, dans les marmites de la branche méridionale, les res-
438 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
sources alimentaires doivent être assez restreintes. Les Niphargus qui
vivent là sont blancs, aucun ne montre la tache orangée de la base de l'an-
tenne, et c'est à peine si les bandes coxales se dessinent d'une façon
discrète chez quelques-uns d'entre eux.
Le Niphargus Virei Chevr. (dont la forme type est la colonie de
Baume-les-Messieurs) paraît être abondant dans toutes les eaux sou-
terraines du Jura franc-comtois. En dehors du rayon que j'ai exploré,
mon ami Vandel a constaté sa présence dans la vallée supérieure du Doubs,
en amont et en aval de Pontarlier^. Il existe également dans la zone des
collines préjurassiennes, entre les vallées du Doubs et de l'Ognon ; j'ai
en effet capturé un individu de cette espèce, rejeté accidentellement dans
le bassin d'une fontaine, à la ferme de la Vaureuge, près d'Uzelle (can-
ton de Rougemont, département du Doubs). On sait (Chevreux 1909,
p. 40) qu'il a été signalé à Fontaine-Française (département de la Côte-
d'Or), par conséquent dans des eaux tributaires de la rive droite de la
Saône. Il est donc probable que la limite septentrionale de son domaine
coïncide avec celle du bassin hydrographique de la Saône et du Doubs.
Plus au nord, il est remplacé par N. aquilex Schiodte, à l'ouest par N.
Plateaui robustus Chevr., à l'est par N. putaneus (de la Valette) (?) qui
existerait déjà sur le versant suisse du Jura (Steinmann 1907, p. 55),
notamment à la source de l'Areuse, à peu de distance de Pontarlier.
Sollaud.
734. Ifri Khaloua.
(Quatrième mention, voir Biospeologica VI ,p. 366, XXIV, p. 525, et XXXIII, p. 528)
Situé près de la crête du Haïzer, douar Aït-Koufïî, commune mixte
de Dra-el-Mizan, département d'Alger, Algérie. — Altitude: un peu plus
de 2.000 m. — Roche : Calcaires basiques. — Date : 29 août 1915.]
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Trichoptères, Myriapodes. —
Numéro : 893.
L'ensemble de la grotte est humide, bien que l'eau, tarie par les pré-
lèvements des pèlerins et des bergers, ait disparu de la dépression ter-
minale. Jj' Apteraphaenops longiceps (Col.) se tient comme d'habitude
1. Notamment dans les grottes du Trésor et de Kemonot (commune des Combes, canton de Morteau, départe
mont du Doubs), et dans une petite résurgence près d'Oye-et-Palet (canton de Pontarlier), à plus de 850 mètres-
d'altitude.
GROTTES VISITÉES 4)39
sous la pierraille, dans les gours à demi secs ; un individu circule sur la
paroi humide qui domine le bas-fond. Diptères abondants, y compris
des larves recueillies en terre, et que je rattache à un grêle Nématocère
coprophile, mêlé aux Exechia sur les parois de la roche, mais bien moins
agile. Le Trichoptère habituel se tient dans les replis des rideaux stalag-
mitiques. Nombreux Medetera truncorum tout à l'entrée.
P. DE PeYERIMHOFF.
735. Ifri Semedane.
(Troisième mention, voir Biospeologica VI, p. 368, et XXIV, p. 526)
Situé près d'Aït Abd-el-Ali, au pied d'Azerou-Taltatt, douar Aoug-
del, commune mixte de Michelet-Djurdjura, département d'Alger,
Algérie. — Altitude : 940 m. — Roche : Calcaires liasiques. — Date : 12 et
13 juillet 1914.
Matériaux : Lépidoptères, Trichoptères, Thysanoures, Myriapodes,
Aranéides, Acariens, Isopodes. — Numéro : 894.
En combinant les données barométriques aux indications de la carte
d'État-major au 1 /50.000e, M. MaireI g^, ^q[ pensons que la cote 850,
primitivement attribuée à cette grotte, est un peu trop basse et doit être
portée à 940.
Il est bon de noter que la grande salle est accessible par une chatière
en S, très surbaissée, située un peu avant l'à-pic et permettant (aux per-
sonnes peu corpulentes) de visiter la grotte sans se munir de cordes ou
d'échelles.
Le courant d'air est toujours extrêmement violent dans le couloir
initial, et c'est sans doute pour ce motif que la grotte semble délaissée
par les Chauve-Souris. Pourtant, les Lépidoptères [Atnphipyra effusa
Bd. et TripJiosa) abondent aussi bien dans ce couloir éventé que dans
les réduits secondaires et dans la grande salle. Le Cordyceps tuherculata
(Leb.)= 6*. 8'phingum (Tul.) Sacc. {Cf. Biospeologica XXXII, p. 282)
décime la Noctuelle, dont nombre d'individus sont fixés aux parois,
hérissés des fructifications souvent fripées du Pyrénomycète. A deux
1. M. R. Maire et moi avons exploré en partie le Djurdjura central pendant la première quinzaine de juillet
1914. Mon savant ami a Ijien voulu rédiger, pour les grottes ou abîmes qu'il a visités avec moi, les notices bota-
niques qu'on lira plus loin. Il a déjà consigné, dans un de ses récents travaux (Deuxième contribution à l'étude
de la Flore du Djurdjura, in Bull. Soc. Eist. tut. Afr. du Nord, VII, 1916, p. 49-61), les faits les plus Importants
à ce point de vue réunis pendant l'exploration.
440 B. JEANNEL ET E.-G. BACOVITZA
reprises, j'ai surpris cf et ç de l'insecte, le mâle vivant, la femelle morte
et déjà envahie par le Champignon. Il est probable que l'individu atteint
contamine à la longue son compagnon, et j'ai recueilli effectivement un
couple mort, mais encore uni, dont les deux conjoints se montraient
couverts de périthèces. De minuscules Acariens se tenaient en grand
nombre sur un autre spécimen 0.' Amphipyra, envahi par le parasite.
M. le Prof. Ant. Berlese, qui a bien voulu les examiner, les rapporte à
une forme voisine de Damœosoma tricarinatum Paoli. Ces Acariens
jouent probablement un rôle dans la dissémination du Champignon
entomophyte, tout comme les Cepheus, genre également fungivore, dont
ils ont d'ailleurs l'aspect et sur lequel Heim et Oudemans (Bull. Soc.
eut. France, 1913, p. 313) ont appelé déjà l'attention à ce point de vue.
Un grand Camjjodea erre sur les roches humides. Le Spiloniscus
Gachxssini (Giard) est toujours fréquent, notamment sur les bois putré-
fiés. Le Typhloblaniulus Drehoni Giard abonde aussi : j'ai remarqué
toute une réunion de ce Diplopode se préparant à dévorer une Amphipyra
effusa encore vivant.
L'incrustation des débris organiques est rapide : j'ai observé un ca-
davre de Trichoptère et un autre de Diptère Nématocère déjà fixés dans
la stalactite, et ce fait est à rapprocher de la découverte mentionnée
par R. Jeannel (Biospeologica X, p. 457), dans la même grotte et dans
les mêmes conditions, des débris d'un Trechus encore inconnu. Ce der-
nier est resté introuvable, malgré la pose d'appâts laissés pendant douze
heures en divers points. Une balance appâtée, disposée dans un bief du
ruisseau, n'a pas davantage attiré d'animaux aquatiques, expérience
déjà tentée sans succès par Jeannel et Racovitza lors de la première
visite biospéologique de l'if ri Semedane.
Notes botaniques. — Les fentes] du rocher présentent dans l'entrée
de la grotte une végétation assez abondante : Galium Perr aider ianum,
Hyoseris radiata, Saxifraga glohiilifera, Ficus carica, Asplenium Tri-
cJiomanes, Sedum dasyphyllum. Le sol, légèrement fumé par les bestiaux,
porte : Urtica dioica, Stellaria média, Bellis annua, Geraniuîn lucidum,
G. Rohertia7ium var. purpureum, Scrofularia laevigata, Mnimn undu-
latuni, Homalia lusitaiiica, Reboulia hœmisphœrica, Bryum Donianum,
Trichostomum crispulmn (ces cinq dernières espèces déjà récoltées par
M. G. Lapie).
Cette flore est celle des lieux ombragés des basses montagnes et est
en rapport avec le peu d'humidité de cette orée de grotte, oii seul le
GROTTES VISITÉES 441
Mnium undulatum met peut-être une note un peu plus hygrophile et le
Galium Perralderianum une note subalpine.
L'intérieur de la grotte constitue une station constante pour le Cor-
diceps tuberculata (Lebert) = C. Sphingwn Sacc, qui y a été récolté
par Jeannel et Racovitza et retrouvé par nous en assez grande quantité.
Ce Champignon de l'Ifri Semedane, qui a été décrit et figuré par Lagarde
dans BiospEOLOGiCA XXXII, p. 282, est constamment assez différent
de forme du type figuré par les auteurs. Les périthèces, disposés en un
long épi plus ou moins lâche dans le type, sont ici agglomérés en une
masse compacte subglobulèuse et subterminale {Cf. R. IVIaire, Cham-
pignons Nord-Africains nouveaux ou peu connus, in Bull. Soc. Hist.
7iat. Afr. du Nord, VIII, 1917, p. 1C5). [Dr R. Maire].
P. DE PeYERIMHOFF.
736. Ifri bou-Anou.
(Troisième mention, voir Biospeologica XXIV, p. 527, et XXXIII, p. 529)
Situé dans la forêt d'Aït-Ouâbane, douar Iboudrarène, commune
mixte de Michel et-Djurdjura, département d'Alger, Algérie. — Alti-
tude : 1.570 m. — Boche : Calcaires liasiques.
Date : 30 mai 1914. - — Matériaux : Diptères, Trichoptères, Collem-
boles. Myriapodes, Aranéides, Isopodes, Oligochètes. — Nuynéro : 895.
Date : 23 mai 1915. — Matériaux : Diptères. — Numéro : 896.
Date: 23 mai 1915. — Matériaux recueillis dans la forêt d'Aït-
Ouâbane (faune nivicole) : Myriapodes, Aranéides, Chernètes,
Isopodes. — Numéro : 897.
On verra plus loin que le mot « anou », dans le Djurdjura central, est
exactement synonyme du mot (( tessereft », usité dans le Djurdjura
occidental (Haïzer). Il désigne d'habitude les glacières profondes ; mais
on l'étend aussi aux simples cavernes en pente rapide. Au cas présent,
« Ifri bou Anou » est une sorte de doublet ou de pléonasme, accouplant
les deux appellations sous lesquelles les Kabyles de la région dénomment
les cavités souterraines.
La grotte est toujours très humide. L'eau de la cuvette terminale
est, lors de l'une et l'autre visite, à 7° C, l'air à 7^5 C. Il y a de nombreux
suintements actifs. La faune est abondante et comprend à peu près toutes
les espèces précédemment citées : Collemboles divers et Isopodes, Para-
442 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
leptusa cavatica Peyrh., Atheta siminina Peyrh. (ce dernier à l'état
d'imagos ayant manifestement hiverné), un Diplopode, quelques Dip-
tères, dont un grand Exechia (?) à ailes tachées, capturé près de l'entrée ;
çà et là des Hyalinia ; des Oligochètes blancs dans les débris de crottes
de Singes ; une petite Araignée tissant sa toile au-dessus de la cuvette ;
des larves de Mycétophilides se tenant sur leurs fils dans quelques points
abrités. J'ai entrevu, sans pouvoir la capturer, une larve de Grylloînorpha
sautillant dans les coulées sèches des stalactites. Une balance appâtée,
laissée par acquit de conscience pendant plus d'une heure dans la vasque
d'eau, n'a rien attiré.
Un élytre de Nehria a encore été recueilli vers le fond de l'Ifri. Depuis
la découverte (voir plus loin) de Spelœonebria initiaîis Peyrh. {Bull.
jSoc. ent. Fmncz, 1914, p. 460), j'ai acquis la conviction qu'il s'agissait
de cet insecte, et non pas, comme je l'ai indiqué précédemment (Bios-
PEOLOGICA XXXIII, p. 530), «d'un Alpaeus ercwZPEYRH. de très grande
taille ».
Champignons (déterminés par M. R. Maire) : Oînjjhalia gracillima
et Ozonium auricomum (forme mycéhenne de Coprinus radians), tous
deux croissant sur les branches putréfiées qui gisent au fond de l'Ifri.
Mousses (également déterminées par M. R. Maire) et récoltées par lui,
à l'entrée de la grotte, le 28 juillet 1913 : Homalia lusitanica, Mniu7n
stellare.
Des recherches effectuées sous les neiges fondantes, au voisinage de
de la grotte, ont fourni une série d'endogés qui pourront servir de points
de comparaison.
P. de Peyerimhoff.
737. Ifri bou-Amane.
(Seconde mention, voir Biospeologica XXXIII, p. 534)
Située dans l'Azerou Tidjer, douar Béni bou-Youcef (?), commune
mixte de Michelet-Djurdjura, département d'Alger, Algérie. — Alti-
tude : 1.320 m. — Roche : Calcaires liasiques. — Dates : 29 mai et 2 juin 1914.
Matériaux : Lépidoptères, Diptères, Trichoptères, Thysanoures,
CoUemboles, Myriapodes, Aranéides, Chernètes, Acariens, Isopodes. —
Numéro : 898.
Matériaux de la fosse d'entrée de la grotte : Diptères, CoUem-
boles, Aranéides, Isopodes. — Numéro : 899.
GROTTES VISITÉES 443
Par suite de la saison et de l'abondance, cette année, des précipi-
tations du printemps, la grotte semble être dans son maximum d'humi-
dité. La source voisine est active. Tous les gours et mares de l'intérieur
sont pleins et les suintements abondent.
Température de la source extérieure : 9^5 C.
— de l'eau au fond de la grotte : 9^5 C.
— de l'air (id.) au thermomètre sec : 10^ C.
— de l'air (id.) au thermomètre mouillé : 908 C.
Humidité relative au fond de la grotte : 98 o/o.
Le Troglorrhynchus Mairei Peyrh. se retrouve, avec les Glomeris
déjà signalés, dans les débris de bois gisant sur la pente qui fait suite
au trou d'entrée ; un autre est recueilli sous les feuilles mortes de la fosse
qui précède, ce qui rend vraisemblable l'entraînement mécanique de
l'insecte dans la caverne, oii il a pu coloniser ensuite. Du reste, ce Cur-
culionide aveugle a été retrouvé (en juin 1914) en pleine forêt d'Aït-
Ouâbane, c'est-à-dire à 10 km. au sud-est, sous une grosse pierre d'un
ravin et ce fait démontre encore qu'il s'agit d'un endogé occasionnelle-
ment cavernicole.
Les Typhloblaniulus broutent les vieilles gouttes de stéarine, témoins
d'anciennes visites. Les Spiloniscus sont peu abondants .; l'un d'eux est
recueilli au jour, dans la fosse d'entrée. Un grand Ohisium (probable-
ment 0. algericiim Ellings.) erre sur la stalactite. Les Hyalinia circulent
partout, depuis le plein air de la fosse jusqu'à l'orgue du fond. Quelques
Exechia vivants, outre un assez grand nombre d'individus morts,
fixés aux parois, près de l'entrée, par le mycélium d'un Isaria (échantil-
lons perdus). Lépidoptères [Trijjliosa et Noctuelles) abondants, dont
quelques-uns iyi copula. Un Scolopendrella, un Lithobius et des Campodea
ont été capturés sur la pente initiale.
Une balance appâtée, laissée deux heures seulement dans la mare
boueuse située tout au fond à côté de l'orgue, capture trois Asellus
oculés, mais décolorés, troglobies complètement nouveaux pour la région.
Au bout de 48 heures, l'appareil en recueille deux autres individus.
Par contre, des appâts laissés pendant le même laps de temps aux
points oii ils avaient attiré {Cf. Biospeologica XXXIII, p. 536), en juillet
1913, V Aphaenops Ihlis Peyrh., ne sont visités cette fois que par des
Spiloniscus et des Typhloblaniulus, d'ailleurs en nombre. Je présume
que V Aphaenops a émigré dans les fentes plus rapprochées du sol, encore
suffisamment humides et où, sans doute, les ressources alimentaires sont
Arch. de ZOOt. Kxp. ET GÉN. — T. 57. — F. 3. 29
444 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
plus abondantes. J'ai déjà signalé, à propos de cet ifri même (loc. cit.,
p. 535) et à propos de l'ifri Maareb qui en est voisin (id., p. 532), l'ab-
sence de cet insecte après les grandes pluies d'automne et sa réappari-
tion dans les grandes cavités, lorsque la diminution des suintements
annonce l'assèchement superficiel. J'en conclus qu'il ne fréquente le
plancher ou les stalactites des grottes que lorsque la sécheresse des fentes
supérieures l'y contraint et que, pratiquement, la vraie saison de sa
récolte est le plein été.
Le Mucor précédemment signalé s'est développé et tend à envahir
tous les points de la caverne où la roche est constamment humectée.
Mousses recueillies par M. R. Maire, le 26 juillet 1913, à l'entrée de
rifri et nommées par lui : Euclaclium verticillatum, Fissidens crassipes,
Thamnium alopecurum, Homalia lusitanica, Lunularia cruciata, Reboulia
hœmisphœrica, Distichium capillaceum.
P. DE PeYERIMHOFF.
738. Ifri bou-Tigherset.
Situé sur le flanc ouest de la masse rocheuse appelée Djemaa bou-Sero,
douar Beni-Mendès, commune mixte de Dra-el-Mizan, département
d'Alger, Algérie. — Altitude : 1.200 m. env. — Roche: Calcaires liasiques.
— Date : 31 août 1915.
Matériaux : Diptères, Lépidoptères, Collemboles, Myriapodes, Ara-
néides, Opilionides, Chernètes, Isopodes. — Nutnéro : 900.
Cette caverne doit son nom («Tigherset» =Houx) à un houx, aujour-
d'hui disparu, qui s'élevait autrefois, paraît-il, devant l'entrée. Elle est
accessible, soit par l'amont, en descendant les sentiers forestiers du can-
ton Beni-Mendès, soit par l'aval, en partant du village de Mahabane et
en traversant les gorges de l'acif des Beni-Mendès (un peu plus d'une
heure). Elle s'ouvre à l'ouest, dans les premiers escarpements calcaires
de la montagne. On y parvient et on la parcourt sans aucune difficulté.
L'entrée est un tunnel rectiligne sur 30 mètres environ, de 4 à 5 mètres
de large sur 3 de haut, dirigé vers l'est. Au fond, le plancher parsemé de
pierres devient boueux et l'humidité y est entretenue par quelques suin-
tements du plafond. Un peu avant, un passage à angle droit mène sur la
droite (sud) à une succession de chambres et de galeries progressivement
GROTTES VISITEES 445
redressées vers l'est, tantôt ascendantes, tantôt descendantes, à plancher
terreux parfois incrusté de calcaire ou parsemé de pierres. Quelques
bornes et rideaux stalagmitiques. Au bout d'une cinquantaine de mètres
à partir du coude, la cavité se ferme au-dessous d'une cheminée.
L'eau est rare et tombe goutte à goutte, formant en terre des trous
cylindriques. Elle n'est rassemblée nulle part et ne devient pas sensi-
blement plus abondante à mesure qu'on s'enfonce dans le sol. Il n'y a
pas trace de ruissellement. L'air semble naturellement stagnant ; sa
température vers le fond est de 1405 C.
Les Chauve-Souris sont innombrables et leur vol bruyant remplit
les dernières cavités de la grotte. Leur guano s'accumule çà et là, sans
toutefois former de bancs volumineux. Un petit Collembole blanc y est
très abondant. Deux espèces de Lithohius y circulent, ainsi qu'un Cher-
nète. Sous les pierres, un très petit Isopode décoloré à démarche lente.
Dans les fentes de la roche, ou au-dessus des cuvettes, un Aranéide rou-
geâtre de faible taille, très agile, tend des toiles lâches au milieu desquelles,
à la face inférieure, il se tient à l'affût. Sur les parois, un Diptère Brachy-
cère, quelques Lépidoptères dont un Géomètre (Triphosa) et une Noc-
tuelle {Amphipyra effusa), hôtes habituels des cavernes de Kabylie.
Au point où la grotte se coude, des racines de Pistacia Terehinthus,
reconnaissables à leur odeur forte, s'étalent sur la roche. C'est aussi en
ce point que j'ai recueilli, sous une croûte calcaire à demi soulevée, un
Opilionide du genre Nemastoma. Mais l'animal de beaucoup le plus
commun ici est un Hyalinia dont les coquilles, vivantes ou vides,
abondent d'un bout à l'autre de la cavité. Il m'a bien paru se nourrir
de guano.
Les parois du couloir initial sont couvertes de Diptères Brachycères
de petite taille, dont Medetera truncorum en foule, de Nématocères
variés {Culicidae, Exechia, etc.), de Lépidoptères {Orneodes). De grosses
Meta (Aranéides) se dissimulent dans les cavités de la roche.
Je n'ai pu consacrer qu'une heure et demie environ à l'exploration
de cette caverne. Située dans un massif presque indépendant de la chaîne
principale et à altitude relativement basse, sa comj)osition faunique est
également très différente de celle des cavités souterraines du Haut-
Djurdjura. L'absence des Spiloniscus et des Typlilohlaniulus, notamment,
Cvst caractéristique.
P. DE Peyerimhoff.
446 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
739. Ifri n'Tazerout n' Ahmed ou-Amar.
Situé à un km. au sud-est d'Aït-el-Kacem, au-dessus du sentier menant
au Tamda ou-Goulmine, dans une masse rocheuse, à la base du Tarzous
bou-Arous, douar Béni bou-Addou, commune mixte de Dra-el-Mizan,
département d'Alger, Algérie. — Altitude : 950 m. env. — Roche : Cal-
caires liasiques. — Date : 23 octobre 1915.
Matériaux : Diptères, Lépidoptères, Collemboles, Aranéides. — Nu-
méro : 901.
Cavité ouverte au nord-est, sous la forme d'une voûte écrasée, à
laquelle on accède facilement par une courte corniche. Cette voûte mène
à une salle sèche et claire, de 10 m. de long sur 5 m. de large. Un couloir
un peu surbaissé la prolonge pendant une quinzaine de mètres vers le
sud-ouest. Un passage, puis un ressaut situés à angle droit (nord-ouest),
viennent recouper une deuxième galerie N.E.-S.O., irrégulière, d'une
vingtaine de m. de parcours, qui représente la partie la plus profonde de la
cavité. On y observe à peine un ou deux suintements très maigres.
Quelques draperies et stalagmites anciennes. Plancher terreux. Çà et là
quelques taches clairsemées de guano de Chauve-Souris, avec crottes
récentes d'un animal plus gros ( ? porc-épic). Aucun de ces mammifères
ne s'est montré.
Quelques Catops meridionalis (Col. Silph.) dans une tache de guano.
Un petit Collembole blanc, d'ailleurs très rare, sur les crottes fraîches.
Ni Diplopodes, ni Isopodes. Sur les parois, Lépidoptères abondants
(Noctuelles, Triphosa, Depressaria, Orneodes, ce dernier surtout commun
dans les premières galeries), mêlés à quelques rares Diptères Némato-
cères. De nombreuses Meta à tous les âges sont plaquées sur la roche,
ou se tiennent sur des fils irréguliers.
En résumé, grotte à peu près complètement sèche et ne semblant
abriter aucun Troglobie.
P. DE PeYERIMHOFF,
740. Ifri n'Tazert.
Situé à 1 km. au sud d'Ibadissen, dans un étroit contrefort méri-
dional, coté 1.434 m., du Tarzous bou-Arous, douar Béni bou-Addou,
commune mixte de Dra-el-Mizan, département d'Alger, Algérie. — Al-
GROTTES VISITÉES 447
titude : 1.350 m. env. — Boche: Calcaires liasiques. — Date: 12 août 1914.
Matériaux : Diptères, CoUemboles. — Numéro : 902.
L'ifri n'Tazert (grotte des Figues) s'ouvre au nord-est dans une masse
rocheuse abrupte et offre l'apparence d'une chambre de 5 m. de large,
autant de hauteur et 10 m. de profondeur, légèrement infléchie vers le
sud. A angle droit et à gauche, c'est-à-dire vers le sud-est, une baie percée
près de l'entrée donne accès à une galerie S.E.-N.O., à peu près parallèle
à la falaise, d'une quinzaine de mètres, obscure et descendante, sur-
baissée au fond, oii le passage, obstrué par des pierres et de la terre, se
continue certainement. D'ailleurs les bergers prétendent que ce travail
d'obstruction a été fait de main d'homme.
La cavité tout entière est colmatée par une épaisse couche de fumier
de chèvre et de mouton, parsemée de quelques pierres. Pas d'incrusta-
tions ni de stalactites. Eau rare : quelques suintements entretiennent à
peine un peu d'humidité au fond de la galerie. Air stagnant. Température
à 5 m. du fond : 13o C.
Dans la galerie, le fumier a formé champignonnière et nourrit de
nombreux exemplaires du vulgaire champignon de couches, Agaricus
campestris Fr. (détermination de M. R. Maire), dont le mycélium im-
prègne toute la masse humide. Beaucoup de Coléoptères fréquentent les
débris putréfiés de ces Agarics : Phyllodrepa floralis Payk., .Stapliylinide
commun en Europe, surtout dans les poulaillers, très rare en Algérie ;
— Homalium Allardi Fairm., à mœurs identiques, encore plus étroites
peut-être ; — Atheta divisa Mark., espèce dont on ne connaissait en Bar-
barie qu'un seul spécimen, récolté à Alger; — Atheta Linderi Bris.,
espèce méridionale, presque exclusivement cavernicole, et généralement
propre au guano des Chéiroptères (c'est à cet insecte que je rapporte
des larves d" Atheta recueillies) ; — Aleochara diversa Sahlb., dont j'ai
remarqué déjà, en Algérie comme en Provence, les tendances cavicoles ;
— Philonthus concinnus Grav., carnassier banal, mais dont l'unique
spécimen était abondamment parasité par le Rhachomyces philonthinus
Thaxt., Laboulbéniale nommée par M. R. Maire; — Ptenidium laevi-
gatum Er., Ptiliide déjà rencontré dans des grottes en Sardaigne (A.
DoDERO !) ; — larves de Laemostenus. On rencontre avec eux des Diptères
(larves et imagos) et trois espèces de CoUemboles. Bref, toute une faune
fimicole, à dominante pholéophile, avec un élément {Atheta Linderi)
nettement troglophile.
448 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Sur les parois de la galerie, on voit plaqués d'innombrables Diptères
du genre Limonia, avec quelques Exechia. J'ai vu voler aussi un Micro-
lépidoptère qui m'a semblé être VAcrolepia granitella. La Meta, grosse
Arachnide qui hante toutes les grottes kabyles à moyenne altitude, se
tient dans les anfractuosités de la roche. Dans la pénombre d'entrée de
la galerie, le Medetera truncorum couvre les parois. La chambre initiale
est fréquentée par des Calliphorines et autres Mouches.
Faune troglobie nulle, comme il était à prévoir dans une cavité aussi
peu profonde, et oii les conditions d'existence sont totalement modifiées
par la présence du fumier. Ici encore, je n'ai vu ni Isopodes, ni Diplopodes.
P. DE PeYERIMHOFF.
741. If ri bou-Adhfel.
Sikié vers l'extrémité est de l'Azerou n'Aït-Zikki, douar Aït-Zikki,
commune mixte du Haut-Sebaou (Azazga), département d'Alger, Algé-
rie.— Altitude: 1.550 m. — Roche: Calcaires liasiques. — Date : 15 juil-
let 1914.
Matériaux : Diptères, CoUemboles, Myi'iapodes, Acariens. — Numéro :
903.
La mince crête des Aït-Zikki, où le point culminant dépasse à peine
1.700 m., est le dernier effort oriental du Djurdjura dont elle reproduit,
bien diminués, les imposants profils. Une quinzaine de kilomètres de
terrains non calcaires, depuis l'Azerou n'Tohor, l'en isolent complète-
ment.
Théoriquement, cet isolement pouvait entraîner, dans ce petit massif,
la présence de formes endémiques intéressantes, et de toutes façons, une
pareille extension vers l'est de la faune souterraine du Djurdjura eût
été, par exemple, un fait de répartition considérable. C'est donc avec
beaucoup de curiosité que M. Maire et moi avons entrepris l'exploration
de la glacière signalée sur le sommet de cette crête. Malheureusement
pour ma part, je n'y ai rencontré aucun des Coléoptères endogés, qui
confèrent à la grande chaîne une physionomie faunique si particulière,
et tout au moins en ce qui concerne l'ordre d'Insectes envisagé, le massif
des Aït-Zikki ne semble avoir été colonisé par aucun de ces éléments
anciens.
GROTTES VISITÉES 449
L'ifri bou-Adhfel (grotte de la Neige) est un « tessereft » (ou « anou »)
typique, constitué par un vaste entonnoir elliptique, dont le grand axe
est exactement dans la direction E.-O. Il s'ouvre presque au sommet
de la crête, tout près du piton coté 1.572, et se termine par une étroite
doline dont le plancher est à 30 m. env. de profondeur. On y accède aisé-
ment par le chemin muletier qui traverse la crête, et la descente dans la
glacière, qui s'opère par l'est, n'offre pas non plus de difificultés. La masse
neigeuse qui en occupe le fond est régulièrement exploitée par les Aït-
Zikki et vendue sur les marchés.
De petits Diptères brachycères fourmillent sous les pierres, accom-
pagnés de Collemboles variés, dont une grande espèce d'un gris de fer,
blanche en dessous, non sauteuse. Nombreux Bembidium nitidulum-
africanum, avec un seul individu de B. fasciolatum v. coeruleum. Les
matières végétales décomposées attirent des saprophages banals, ainsi
que des Staphylinides carnassiers {Philonthus hesperius, Quedius declivus).
Un seul Diplopode rougeâtre, de petite taille, qui m'a semblé engourdi
par le froid. Un Chilopode, parfaitement vif, mais probablement occa-
sionnel. Ni Typhlohlaniulus, ni Spiloniscus.
Notes botaniques. — Cet if ri constitue une station botanique extrê-
mement intéressante. Situé sur une montagne relativement peu élevée,
isolée, très sèche, dont la flore (association du Quercus Ilex) est en géné-
ral pauvre et très xérophile, il représente une station privilégiée où l'ombre
et l'accumulation de la neige hivernale maintiennent une température
basse et une humidité considérable, en même temps qu'elles raccour-
cissent considérablement la période de végétation.
Aussi, dès l'entrée dans le cirque où s'ouvre l'ifri, aperçoit-on de
beaux exemplaires de Taxus baccata, de Crataegus laciniata, d'Acer
monspessulanum, type et var. Martini. Dans l'ifri même croissent sur
les rochers : Rhamnus alpina, Ribes petraeum (chlorotique dans les rochers
supérieurs trop ensoleillés où il croît à côté d' Athamanta sicula, normal
à mi-ombre, macrophylle et stérile dans les parties profondes), Rhamnus
myrtifolia, Prunus jyrostrata, Hedera Hélix, Sambucus Ebulus, Seli-
nopsis montana, Hyoseris radiata, Dryopteris aculeata, Pkyllitis Scolo-
pendrium, Asplenium Trichomanes. A terre vivent : Cystopteris fragilis,
Leontodon Djurdjurae, Solidago virgaurea, Viola odorata, Lamium
flexuosum. Géranium Robertianum (type), Melica uniflora, Lactuca muralis,
Rumex tuberosus, Brassica Gravinae, Balansaea Fontanesii, Arabis
albida, Calaminiha alpina var. granatensis.
450 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Parmi ces plantes, Rihes 'petraenm, Sanibucus Ehulus, Phyllitis
Scolopendrium, Solidago virgaurea, Géranium Rohertianum, Melica
uniflora, Lactuca muralis, sont des espèces la plupart ordinairement
silvicoles, exigeantes sous le rapport de l'humidité et de l'ombre, et tout
à fait étrangères à la flore normale de l'Azerou n'Aït-Zikki. [D^" R. Maire] .
P. DE PeYERIMHOFF.
742. Azerou bou-Adhfel.
Situé vers l'extrémité est de l'Azerou n'Aït-Zikki, à quelques di-
zaines de mètres au nord-est d'Ifri bou-Adhfel, douar Aït-Zikki, com-
mune mixte du Haut-Sebaou (Azazga) département d'Alger, Algérie.
— Altitude : 1.550 m. env. — Roche : Calcaires liasiques. — Date : 15 juil-
let 1914.
Matériaux : Diptères, Thysanoures, Myriapodes. — Numéro : 904.
Sur la face nord-est du piton (Azerou bou-Adhfel ou Rocher de la
Neige) contenant la glacière, les akchiches (jeunes bergers) m'ont conduit
à une haute grotte peu profonde, entièrement éclairée, presque sèche,
où nichent des pigeons, dont le guano est massé sur un point. Au bout
de 20 m. à peine, la diaclase se rétrécit et des blocs éboulés la comblent
finalement.
Sous les pierres, quelques Diptères brachycères, un grand Camyodea
et un Géophilide, sans doute occasionnel.
A l'entrée, tout un jardin de Lamium longiflorum (t. R. Matre),
Labiée caractéristique des hautes régions, et dont il semble que ce soit
la seule station dans tout le massif des Aït-Zikld.
P. DE PeYERIMHOFF.
743. Ifri Dzimin.
Situé dans le rocher abrupt qui se dresse à l'est du village de Ber-
kaïss, douar Aït-Zilîiki, commune mixte du Haut-Sebaou (Azazga), dé-
partement d'Alger, Algérie. — Altitude : 950 m. — Roche : Calcaires lia
siques. — Date : 15 juillet 1914.
Matériaux : Lépidoptères, Diptères, Myi'iapodes. — Numéro : 905.
GROTTES VISITÉES 451
Cette grotte, souvent visitée, paraît-il, par les touristes et que les
habitants de Berkaiss montrent complaisamment, n'est qu'une vaste
chambre ouverte à l'est, où l'on accède par un couloir contournant un
immense rocher. Elle mesure environ 15 m. de profondeur. A peine quel-
ques suintements tombent du plafond.
Medetera truncorum et un Orneodes sur les parois, Lithohius sous les
pierres, Akis spino-'ia (Col. ténébrionide) errant sur le sol. La faune tro-
globie est nulle.
P. DE PeYERIMHOFF.
744. Ifri n'Tarzout.
Situé au pied du pan est de la pyramide de Lalla-Kredidja et sur la
rive droite de l'oued Tarzout (nom donné par les indigènes et ne figurant
pas sur la carte d'état-major), douar Béni bou-Ouakour, commune mixte
de Beni-Mansour Maillot, département d'Alger, Algérie. — Altitude :
1.450 m. — Roche : Calcaires liasiques. — Date : 8 juillet 1914.
Matériaux : Coléoptères, Diptères, Myriapodes, Aranéides, Chernètes,
Isopodes. — Numéro : 906.
Abri sous roche ouvert en plein nord, utilisé comme bergerie, et
auquel fait suite une poche elliptique de 8 m. sur 5 m., en voie d'effon-
drement, notamment au sud-est. Le plafond est formé d'une brèche rela-
tivement récente. Les parois portent quelques ornements stalagmi-
tiques, mais l'incrustation paraît lente. Le fond, peu humide, est jonché
de pierres. La lumière du jour a partout accès.
La faune, surtout composée d'Isopodes, de Glomérides et d'Ara-
chnides, semble dépourvue de tout caractère troglobie. Le Beynbidium
nitidulum-ajricanum circule sous les pierres et le Medetera truncorum
se tient sur les parois sèches.
A part l'Azerou Madène et les pentes d'Aït-Ouâbane, cette insigni-
fiante cavité est actuellement la seule connue dans tout le massif de
Lalla-Kredidja, dont la structure, il est vrai, ne semble guère se prêter
à des phénomènes karstiques de quelque importance.
Notes botaniques. — Cette cavité, largement ouverte et bien éclairée,
héberge une" végétation abondante, rendue luxuriante sur le sol par la
fumure due au séjour estival des troupeaux.
452 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
Les fissures des rochers nourrissent : Asplenium Trichomanes, Ficus
carica, Saxifraga globvUfera, Stachys cîrcinata, Arabis alhida, Selinopsis
montana. A terre abondent : TJrtica dioica, Géranium molle, Calamintha
baborensis, Lamium longiflorum, au milieu desquels sont disséminés :
Stachys circinata, Umbilicus Jiorizontalis, Arabis j^seudo-turritis, Rumex
tuberosus, Trisetum flavescens, Brassica Gravinae, Hyoseris radiafa.
Le CalamintJia baborensis n'avait pas été signalé dans le Djurdjura ;
nous l'avons trouvé dans cette grotte et dans les parties ombreuses et
riches en humus de la forêt d'Aït-Ouâbane ; c'est l'une des nombreuses
espèces qui, dans les montagnes algériennes, sont à la fois silvicoles et
cavernicoles. [D^. R. Maire].
P. DE PeYERIMHOFF.
745. Ifri n'Terga Roumi.
Situé vers l'extrémité nord et sur la face sud de la crête Terga M'ta
Roumi, douar M'chdalla, commune mixte de Beni-Mansour Maillot,
département d'Alger, Algérie. — Altitude: 1.850 m. — Roche: Calcaires
liasiques. — Date : 9 juillet 1914.
Matériaux : Diptères, Isopodes. — Numéro : 907.
On accède à la grotte, soit par l'aval de la crête, en gravissant le
massif rocheux, soit par l'amont, en descendant une large corniche
(« terga »= séguia) écharpant le rocher. Il faut ensuite escalader 20 m.
env. d'une cheminée presque verticale qui mène à la bouche de l'If ri,
ouverte au sud-est.
Un couloir bas et sec, de direction nord, se prolonge pendant une
vingtaine de mètres jusqu'à une petite salle encombrée de matériaux
détachés du plafond, sur lesquels tombent quelques suintements. Un
peu avant, dans la direction est, s'ouvre un effondrement de 3 m. de pro-
fondeur. Le calcaire est chargé de concrétions sèches, en forme de cham-
pignons. L'air est stagnant. Sa température prise au fond est de 9° C.
Ressources alimentaires à peu près nulles, au moins dans la partie pro-
fonde.
A 15 m. de l'entrée, on rencontre quelques tas de guano sec, et j'ai
entrevu une Chauve-Souris. Dans ce premier parcours, le Medetera trun-
corum abonde sur le plafond. Dans la partie la plus profonde, je n'ai
recueilli qu'un Exechia et un Isopode blanchâtre.
GROTTES VISITÉES 453
Des ossements de grand félin (panthère ou lion) et notamment un
demi-maxillaire gisaient tout au fond de l'Ifri.
Notes botaniques. — L'entrée, très sèche, de cette grotte présente
une végétation très pauvre : le sol porte quelques pieds de Scrofularia
laevigafa, de Galium aparine var. spurium et de Gerannim lucidum, les
fissures des rochers quelques touffes d' Asplenium Trichomanes.
8ur la (( terga )\ au voisinage d'abris sous roche utilisés par le bétail,
la terre, abondamment fumée, est couverte de Lappa minor introduits
par les moutons. Mais ce versant sud aride est impropre au développe-
ment de cette plante, qui produit seulement quelques petites feuilles
radicales, dont la maigreur contraste vivement avec la luxuriance de
la même plante à l'entrée de la grotte suivante. [D^ R. Maire].
P. DE PeYERIMHOFF.
746. Ifri n'Thamrarth.
Situé sur le versant nord-est de l'Azerou ou-Gougane, au lieu dit
« Lekhalia », douar Aougdel, commune mixte de Michelet-Durdjura,
département d'Alger, Algérie. — Altitude: 1.550 m. — Roche: Calcaires
liasiques. — Date : 10 juillet 1914.
Matériaux : Isopodes. — Numéro : 908,
Ifri n'Thamrarth signifie « grotte de la vieille », nom qui fait allusion
à une légende, d'ailleurs insignifiante. Une diaclase, dirigée vers le sud-
ouest, s'ouvre par un vaste portique sous lequel une magnifique végé-
tation s'est développée. Le vestibule qui lui fait suite est utilisé comme
bergerie et le sol y est colmaté par du fumier de mouton et de chèvre.
Au delà et pendant une trentaine de mètres, de gros matériaux d'ébou-
lement sont recouverts d'une terre glissante. On rencontre ensuite, à
côté d'une cuvette d'eau, une chatière en m menant à une dernière cavité
qui se termine par un effondrement rapide, mais peu profond, surmonté
d'une draperie de calcaire blanc.
Faune pauvre, limitée à quelques Isopodes. Peut-être y aurait-il
intérêt à appâter aux points humides.
Notes botaniques. — L'entrée de cette grotte constitue une station
riche en humus, abondamment fumée, relativement humide et ombra-
gée. Aussi héberge-t-elle une admirable végétation, composée en grande
454 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
partie de plantes à tendances humicoles et sciophiles, dont la plupart
sont ordinairement silvicoles. A terre croissent : Lappa minor, dont les
feuilles atteignent 50 cm. de longueur et qui fleurit abondamment.
Physospermum actœijolium, Alliaria offlcinalis, Artemisia Absinthium,
Lamimn longiflorum, Urtica dioica, Stellaria média. Sur les rochers :
Ilex aquijolium, Rhamnus alpina, Asplenium Trichomanes, A. Adian-
tum-nigrum, Ceterach offlcinarum, Arahis albida, A. Doumetii. JJ Alliaria
offlcinalis a ses siliques déformées par un Thysanoptère, comme le Bras-
sica Gravinœ et le Sinajns puhescens dans des stations analogues. Le
Physospernum actœijolium, luxuriant, est parasité par Puccinia Phy-
sospermi. [D^*. R. Maire].
Inkher bou-Anou. En contre-bas de cette grotte, les bergers parlent
encore d'une petite cavité surbaissée, sans profondeur, du plafond de
laquelle tombent des suintements. Cette grotte, appelée « Inkher bou-
Anou », n'a pas été visitée.
P. DE PeYERIMHOFF.
747. Anou Tenechiji.
Situé sur le versant nord-est (lieu dit « Lekhalia ») de l'Azerou ou-
Gougane, douar Aougdel, commune mixte de Michelet-Djurdjura, dé-
partement d'Alger, Algérie. — Altitude : 1.700 m. — Roche : Calcaires
liasiques. — Date : 10 juillet 1914.
Matériaux : Trichoptères, Myriapodes. — Numéro : 909.
Accès facile par l'Agouni Boussouïl supérieur, qui mène directement
au lapiaz de Lekhalia et, en trois quarts d'heure environ, à l'orée de cette
grotte. On y domine, un peu au nord-ouest et à 150 m. d'amont, l'Ifri
n'Thamrarth décrit plus haut.
Une galerie elliptique de 10 m. de hauteur sur 8 m. de largeur, ouverte
au sud-est, sinueusement incurvée vers le N.N.-O., s'enfonce par une
pente extrêmement raide et glissante, coupée d'à-pics. Après 60 m.
env. d'un parcours pénible et dangereux sans agrès, cette galerie recoupe
une allée de direction E.-O., tantôt ascendante, tantôt descendante.
La partie E. est la plus longue (env. 150 m. de parcours), de dimen-
sions variables, ayant au maximum 20 m, de hauteur sur 15 de largeur,
souvent encombrée d'énormes matériaux d'effondrements. Beaucoup de
GROTTES VISITÉES 455
stalactites, de rideaux, de bornes, mais disséminés. Souvent des masses
calcaires molles et blanches, développées sur le plancher humide. Parfois
quelques dépôts terreux foncés, provenant sans doute de l'entraînement
mécanique du sol superficiel par l'effet des infiltrations. L'eau circule çà
et là sous un minuscule débit et se rassemble dans quelques cuvettes.
Celle d'une mare située au point de recoupement est à 4° C. seulement,
preuve qu'elle s'alimente par la fusion de neiges sans doute cachées
dans le lapiaz supérieur. Vers le fond de la grotte, la température de l'air
est de 7*^C. Cet air est stagnant. Ressources alimentaires précaires, semble-
t-il, malgré de nombreux ossements de Chauve-Souris entraînés par le
ruissellement et en train de se pétrifier un peu partout. Pas d'Isopodes.
Quelques rares Typhlohlaniulus auprès des eaux. Une Phrygane posée
sur la paroi.
L'allée ouest représente une large pente de 50 m. env. de dévelop-
pement, terminée par des effondrements étroits où se perdent des ruis-
selets. Sous mes yeux, le Kabyle qui m'accompagnait y a capturé un
Spelaeonebria initialis Peyrh. (voir l'article suivant) courant sur le sol
auprès d'un point d'eau, et c'est la preuve que cet insecte, normalement
nivicole, peut devenir cavernicole le cas échéant. Plus loin, je recueille
des débris de cette espèce. Beaucoup d'ossements plus ou moins pétri-
fiés sur cette pente, dont un vertex de Mouflon {Ammoiragus lerviay
portant encore des cornes mutilées.
Je n'ai pu consacrer que trois heures à peine à cette belle caverne,
analogue à l'ifri Maareb (Biospeologica XXIV, p. 533) par ses dimen-
sions et l'apparence du milieu. Il y aurait certainement intérêt à la visiter
longuement, en disposant des appâts et en concentrant les recherches.
J'ai l'impression que si des Aphaenops peuvent exister dans cette partie
du Djurdjura, ils doivent fréquenter ici.
Malgré les dénégations de mon guide kabyle, ancien berger connais-
sant minutieusement la région, qui m'a certifié que personne au monde
n'était descendu avant nous dans cette cavité, je suis persuadé que l'Anou
Tenechiji a dû être visité autrefois. J'y ai remarqué, à diverses reprises,
des morceaux de charbon, provenant peut-être de foyers d'éclairage,
mais actuellement réduits à l'état de masses molles complètement désor-
ganisées.
Notes botaniques. — L'orée de l'Anou Tenechiji paraît peu visitée
1. Espèce disparue depuis longtemps de l'Alpe kabyle iietuellemeut vivante dans les réglons montagneuses
du sud des Hauts-Plateaux et du Sahara, dans l'Atlas marocain et en Egypte.
456 R. JEANNEL ET E.-G. JRACOVITZA
par les troupeaux ; elle est moins riche en humus que celle de l'Ifri n'Tham-
rarth voisin, mais l'humidité y est suffisante pour entretenir néanmoins
une végétation qui, pour être moins luxuriante qu'à l'ifri n'Thamrarth,
n'en est pas moins abondante. Les rochers portent : Amelanchier vul-
garis, Asplenium Trichoînanes luxuriant, Phyllitis Scolopendrium, Seli-
nopsis montana, Saxîfraga globulifera, Galium Perralderianum. A terre
croissent : Berberis hispanica, Daphne laureola, Lonicera kahylica, Sca-
hiosa Djurdjurae, Geum urbanum, Anthriscus silvestris var. mollis, Rumex
tuberosus, Cystopteris fragilis, Ficaria ranunculoides var., Ranuncuhis
aurasiacus, Viola Munbyana, Myosotis macrocalycina. [D^* R. Maire].
Malgré la dénomination que les indigènes lui ont imposée, l'a Anou »
Tenechiji n'est nullement une glacière, mais une véritable caverne où la
neige n'a pas directement accès.
P. DE PeYERIMHOFP.
LES ANOU DU DJURDJURA CENTRAL
Les hautes crêtes hachées et tourmentées qui s'étendent de l'ouest
à l'est, entre le Tizi n'Cennad et le Tizi n'Tirkabine présentent fréquem-
ment, sur le versant nord comme sur le versant sud, de vastes lapiaz.
Les diaclases compliquées qui les constituent se prêtent aisément à l'accu-
mulation et à la préservation des neiges. Ce sont, alors, exactement les
tessereft du Haïzer, avec cette différence que leur cote d'altitude (1.700 à
1.800 m.) est sensiblement plus basse que la cote moyenne (2.000 m.) des
glacières occidentales. Il est donc probable a priori que la neige y persiste
moins longtemps.
Mais le mot « tessereft » n'est pas usité dans le Djurdjura central, et
les indigènes ne connaissent et ne désignent ces cavités que sous le nom
d'« anou ». Ils étendent même ce mot à toute excavation en pente rapide,
réservant le mot « if ri « aux cavernes horizontales. Ces anou, bien entendu,
sont absolument introuvables sans le concours de bergers. Plusieurs sont
d'une exploration difficile. Tous ceux qui vont être cités ont été visités
sans agrès. Mais, après expérience faite, je conseillerai vivement de se
munir, sinon d'échelles, tout au moins de cordes.
La faune des anou est très remarquable. A peu près chacun d'eux
m'a fourni, au moins sous forme de débris, deux Coléoptères endogés
d'un grand intérêt : 1° Trechopsis Lapiei Peyrh., déjà connu du Haïzer,
GROTTES VISITÉES 457
c'est-à-dire à 15 km. vers l'ouest, et qui tend à prendre ici des caractères
chétotaxiques spéciaux (Cf. Bull. Soc. eut. France, 1915, p. 128) ;
2° Spelœonehrîa nudicollis subsp. initialis Peyrh. (loc. cit. 1914, p. 460),
magnifique insecte pouvant atteindre 20 mm. de longueur, confiné dans
le Djurdjura central, où il représente, pour ainsi dire, le prototype du
domaine souterrain. A noter également une riche faune de Collemboles,
souvent étroitement localisée au voisinage immédiat des neiges.
La flore qui se développe à l'entrée de ces glacières a également un
caractère très particulier. Les notices insérées ici par M. le J)^ R. Maire
montrent notamment combien ces localités, privilégiées au point de vue
de l'humidité constante et de l'abaissement de la température, sont
intéressantes au point de vue de l'écologie des végétaux hygrophiles ou
silvicoles.
748. Anou Terga Roumi.
Situé à l'extrémité et sur le flanc nord de la crête Terga M'Ta Roumi,
au-dessus de l'agouni Boussouïl, douar M'chdalla, commune mixte de
Beni-Mansour Maillot, département d'Alger, Algérie. — Altitude : 1.800
m. — Boche : Calcaires liasiques. — Date : 9 juillet 1914.
Matériaux : Diptères, Collemboles, Myriapodes, Aranéides, Isopodes.
— Numéro : 910.
On accède aisément à la cavité par une profonde gerçure tranchant
la masse rocheuse du N.O. au S.E. L'anou forme une double poche, dont
le fond est à 30 m. au moins au-dessous de la surface du sol. On y descend
en se glissant dans les cannelures ou sous' les blocs coincés. Lors de cette
visite, la poche ouest était libre de toute neige et encombrée de blocs
humides, sous lesquels, outre un fourmillement de petits Diptères bra-
chycères, se tenaient des Collemboles et le Trechopsis Lapiei. Un Dip-
tère nématocère à très longues pattes, pourvu d'une tarière, pondait
dans un excrément.
La poche E., par contre, contenait encore quelques mètres cubes de
neige. Sous les pierres du pourtour, j'ai récolté Spelœonebria initialis
(vivant), Trechopsis Lapiei (dont plusieurs spécimens porteurs de Bha-
chomyces Peyerimhoffl), Bembidium nitidulum-ajricanum, B. hypocrita,
même Agahus dilatatus Gory, insecte normalement aquatique, quelques
Isopodes, un Typhloblaniulus, des Collemboles sauteurs d'un blanc rosé
458 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
enfin d'innombrables Diptères brachycères de petite taille avoisinant
la neige. Sur les parois sèches, quelques Diptères du genre Hyadina.
Notes botaniques. — La végétation est luxuriante. A terre abondent :
Cystopteris fragilis, Mnium mispidatum, M. affine var. elatum, Senecio
nehrodensis, S. Perralderianus, Ranunculus aurasiacus, Myosotis macro-
calycina, Sinapis puhescens, Lamium longiflorum. Physospermum actœi-
foliu7n, Brachypodium silvaticum, Agropyrum panormitanum, Lactuca
muralis, Poa alpina var. Djurdjurœ, Rumex tuherosus, Smyrnium olusa-
trum, Solidago virgaurea sont plus disséminés. Sur les rochers croissent :
Dryopteris aculeata, ty^pe et var. Djurdjurœ, D. pallida, Phyllitis Scolo-
pendrium, Sedum majellense, Mattia gymnandra, Prunus prostrata,
Lonicera kabylica, Berberis hispanica, Hedera Hélix, Alsine verna var.
kabylica, Silène mollissima, Linaria decipiens, Stachys circinata, Seli-
nopsis montana, Acer monspessulmmm, Cotoneaster Fontanesii, Evo-
nymus latifolius. Dans les fissures ombreuses et profondes des lapiaz
voisins abondent Daphne laureola et Ilex aquifolium ; on y rencontre
aussi de beaux buissons de Ribes petraeum.
Parmi ces plantes, Ribes petraeum, Physospermum actœifolium,
Agropyrum panormitanum, Evonymus latifolius sont des espèces silvi-
coles qui retrouvent ici les conditions d'ombre et d'humidité que leur
offre la forêt. Sedum majellense est un chasmophyte sciophile très fré-
quent dans le Haïzer, mais manquant dans le Djurdjura oriental, oii les
lapiaz paraissent rares ; il était jusqu'à présent inconnu dans le Djurdjura
central. Mniu7n cuspidatum Hedw. est une Mousse nouvelle pour la
flore du Nord de l'Afrique. [Dr. R. Maire].
Dans une cavité libre de neige et située à 15 m. au-dessus du fond, la
température n'était que de 205 C. Il est vrai qu'il en sortait un courant
d'air pouvant, par évaporation des parois humides, abaisser notable-
ment le degré thermique. J'y ai recueilli un Catops fuscus Pz., Coléop-
tère Silphide commensal des petits mammifères et souvent cavernicole.
Anou Terga Roumi II. A quelques dizaines de mètres vers l'est,
les akchiches (bergers) nous conduisent à un autre anou, pareillement dési-
gné par eux sous le nom de Terga Roumi, mais en forme d'un profond
aven vertical inabordable sans agrès.
Notes botaniques. — On y trouve sous une voûte le Géranium
Robertianum (type) et le Solidago virgaurea. [D^ R. Maire].
P. DE PeYERIMHOFF.
GROTTES VISITÉES 459
749. Anou Boussouïl.
Situé à quelques mètres au sud-ouest de lanou Teiga Roumi. douar
M'clidalla, commune mixte de Beni-Mansour Maillot, département
d'Alger, Algérie. — Altitude : 1.740 m. — Date : 9 juillet 1914.
Matériaux : Hémiptères. — Numéro : 911.
La totalité du bassin de réception de Fagouni Boussouïl, y compris
l'acif (ruisseau) qui descend du Tizi Boussouïl, est drainée par un émis-
saire dirigé vers le sud-est, c'est-à-dire droit dans la masse rocheuse, où
les eaux se précipitent par un puits vertical de 5 à 6 m. de diamètre et
d'une profondeur inconnue. C'est lanou Boussouïl.
J'ai visité le premier ressaut de cet aven ; il est eritièrement éclairé,
plein de sable et de gravier, avec quelques pierres éparses, sous lesquelles
des Velia et des Bembidium nitidulum-africanum se tenaient en foules
pressées, avec quelques Lathrobium anale (Col. 8taphylinide ripicole).
D'après les indigènes, du son projeté lors des hautes eaux dans cet
anou serait ressorti par des sources situées à la fois sur le versant sud et
sur le versant nord de la chaîne. Ce ne sont là que des racontars qui
demandent vérification. Mais à tous points de vue, cette importante cavité
mériterait une exploration méthodique. C'est d'ailleurs, à ma connais-
sance, le seul (( abîme )^ encore actif de toute la région du Djurdjura.
P. DE PeYERIMHOFF.
750. Anou Toursoutt.
Situé sur la face nord du contrefort occidental Azerou Toursoutt de
l'Azerou Taltatt, douar Aougdel, commune mixte de Michelet-Djurdjura,
département d'Alger, Algérie. — Altitude : 1.790 m. — Boche : Calcaires
liasiques. — Date : 12 juillet 1914.
Matériaux : Diptères, Collemboles, Myriapodes, Aranéides. — Nu-
méro : 912.
Une vaste doline N.E.-S.O. est recoupée par une diaclase de direction
1. Au seus rostreint que MARTEL (L'EtoMio i soiUerrd'ie. 1908. p. 162) donne à ce mot : « marmites de géant
formées de haiit en lias par l'action chimiciue et mécanique d'eaux violemment engouffrées dans do (grandes dia-
clascs verticales. »
.\iu'ii. i)i-: Zooi.. K.\p. Kï OÉN. — T. 07. — l'". 3. 30
460 E. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
N.S., brusquement béante sous la forme d'un puits elliptique de 15 m.
de profondeur. Des cordes sont sinon indispensables, au moins très
utiles, pour le visiter. Le fond de l'anou est occupé par une haute tour de
neige entourée de pierrailles et d'humus.
Diptères, Collemboles et Typhlohlaniulus très abondants ; quelques
Trechopsis Lapiei, nombreux débris de Spelœonehria initialis, mais pas
un individu vivant, ni une larve. Plusieurs insectes (larve de Lampy-
ride, Ocypus olens...), tombés dans ce puits, y restent engourdis de froid.
Un Hélix vivant est recueilli sur le sol.
L'anou Tour sou tt est certainement l'un des gîtes souterrains les
plus vivants de la régions.
Notes botaniques. — La végétation est abondante et formée uni-
quement de chasmophj^tes : Sorbus Aria, Prunus prostrata, Amelanchier
vulgaris, Cotoneaster Fontanesi, Dr y opter is pallida, Asplenium Tricho-
inanes, Hyoseris radiata, Galiuni Perralderianum, Silenë mollissima,
Stachys circinata, Hedera Hélix, Campanula macrorrhiza, Mattia gym-
nandra, Sedum micranfhum, Sinapis piibescens. [D^" R. Maire].
P. DE PeYERIMHOFF.
751. Anou Azoukor.
Situé sur le versant nord de la crête appelée Azoukor (nom donné par
les indigènes et ne figurant pas sur la carte d'état-major), entre Tabort
Amellalt et Tabort bou-Sguer, douar Béni bou-Ikache, commune mixte de
Michelet-Djurdjura, département d'Alger, Algérie. — Altitude : 1.715 m.
— Roche : Calcaires basiques. — Date : 11 juillet 1914.
Matériaux : Diptères, Collemboles, Acariens. — Numéro : 913.
C'est une longue doline de 30 m. de long sur 20 de profondeur, de
direction S.E.-N.O. et, en ce point, presque parallèle à la chaîne. Elle
s'ouvre à peu de distance de la crête, au niveau d'une petite échancrure,
à peine passage de chèvres, désignée par les indigènes sous le nom de
Tabort bou-F'lane (porte de la Férule). On y pénètre par le sud. Des
cordes sont très utiles pour la descente.
Le fond de la cavité est occupé par une forte masse de neige. Faune
riche et variée : nombreux Collemboles et deux individus d'Atheta simi-
nina Peyhr. (cavicole jusqu'ici propre à l'ifri bou-Anou), auprès du névé.
GROTTES VISITÉES 461
Sous les pierres, Trechopsis Lapiei et un spécimen de sa larve. Çà et là,
débris de Spelœonebria initialis. Petits Diptères brachycères extrême-
ment abondants en terre, sous la neige ou sous les moindres débris. Au
delà de la masse neigeuse, se trouve une accumulation de branches et
de feuilles mortes très humides, où se tiennent des Acariens, des CoUem-
boles et des Staphylinides saprophages. Rien sur les parois de la cavité,
qui ruissellent d'eau.
L'exploration de cet anou est égaleinent intéressante et permet une
abondante récolte.
P. DE PeYERIMHOFF.
752. Anou t'Azerou ibou bou n'Taya.
Situé à 80 m. en contre-bas du sommet et sur le versant sud d'Adrar
Timesouïne, douar Aït-Boudrar, commune mixte de Michelet-Djurdjura,
département d'Alger, Algérie. — Altitude : 1.798 m. — Roche : Calcaires
liasiques. — Date : 11 juillet 1914.
Matériaux : Diptères, Mjaiapodes, Aranéides, Isopodes, Oligochètes.
— Numéro : 914.
L'emplacement de cet anou est jalonné par une aiguille de pierre,
sectionnée transversalement et figurant deux blocs superposés. D'où
son nom qui signifie « l'anou des rochers placés l'un sur l'autre ».
C'est une doline comblée, dirigée à peu près de l'est à l'ouest, dans
laquelle on pénètre sous les blocs effondrés. Presque dès l'entrée, le cou-
loir se coude à angle droit et l'on passe dans une petite grotte, dirigée
vers le sud, où le vent projette et amasse ordinairement la neige. Lors
de ma visite, cette neige avait entièrement disparu, mais le fond assez
clair de la cavité restait très humide.
Faune variée, mais peu abondante : quelques Isopodes et TypJilo-
hlaniulus, pas de Collemboles, des Aranéides rougeâtres se tenant sur
leurs toiles (dont <3 et 9 in copula), un Trechopsis Lapiei dans la pier-
raille et des élytres de Spelœonebria initialis gisant sur le sol. De petits
Diptères brachycères sautillent sous les pierres ; quelques Hyadina isolés
se tiennent sur les parois, face au jour.
La température de l'air, vers le fond, était de 7° C.
P. DE PeYERIMHOFF,
462 R. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
753. Anou Tahalouant
Situé à l'est et à peu de distance de l'anou t'Azerou ibou bon n'Taya,
douar Aït-Boudrar, commune mixte de Michelet-Djurdjura, département
d'Alger, Algérie. — Altitude : 1.800 m. — Roche : Calcaires liasiques. —
Date : 11 juillet 1914.
Matériaux : Diptères, Thysanoures, Myriapodes, Aranéides, Isopodes,
Mollusques. — Numéro : 915.
Tahalouant est l'appellation locale (non inscrite sur la carte d'état-
major) du versant sud de la crête située entre l'Adrar Timesouïne et le Tizi
n'Tirkabine. L'anou est constitué par une doline de direction S.O.-N.E..
.presque parallèle, par conséquent, à l'axe de la crête, d'abord comblée,
puis libre sur une vingtaine de mètres de longueur. Il figure alors une
fosse de 3 à 4 m. de large sur 15 m. de haut, contenant encore, à la date
indiquée, une masse de neige considérable. L'entrée est une petite chambre
basse, d'oii pousse, sous le rocher qui la plafonne, le tronc d'un très vieil
if, partagé en trois branches, dont chacune sort d'un interstice différent
de la roche.
Autour de la neige, dans le sol et sous la pierraille humide, se tiennent
Trechopsis Lapiei, des Isopodes, des Arachnides, de petits Diptères
brachycères, ceux-ci également abondants sur les parois humides de la
cavité. L^n Campodea circule sous les pierres. Ni Collemboles, ni trace de
Spelœonehria.
P. DE PeYERIMHOFF.
754. Anou Tala n'Tahalouant.
Situé droit en aval, donc au sud de anou Tahalouant, douar Aït-
Boudrar, commune mixte de Michelet-Djurdjura, département d'Alger,
Algérie. - — Altitude : 1.690 m, — Roche : Calcaires liasiques. — Date :
13 juillet 1916.
Matériaux nivicoles recueillis aux environs immédiats: Myria-
podes, Chernètes, Isopodes. — Numéro : 916.
Glacière cachée sous des blocs de calcaire éboulés et contenant un
volumineux prisme de neige. Toute la partie accessible est rocheuse et
GROTTES VISITÉES 463
sèche. La faune est à peu près nulle (Hyadina sur les parois, dans la
pénombre).
Cet anou emprunte son nom à une forte source, Tala n'Tahalouant,
qui sort en contre-bas.
A peu de distance, au pied de la falaise calcaire, j'ai récolté, autour
d'une tache de neige, quelques ni\'icoles (Diptères, Isopodes, Diplopodes,
(.'hernètes) qui pourront ser\àr de points de comparaison. L'un des
Diptères. Leptocera fontinalis Fall. (détermination de M. le Professeur
M. Bezzi ), portait une Laboulbéniale encore inédite, appartenant au genre
Stigmaiornyces et qui sera décrite par M. R. Maire.
P. DE PeYERIMHOFF.
LES TESSEREFT OU TROUS A NEIGE DU HAIZER
Troisième mention, voir Biospkologica XXIV, p. 5:57, et XXXHI, p. 542)
755. Tessereft Tabort Boufrichen.
(Seconde mention, voir BIOSPEOLOGICA XXXIII, p. 539)
Situé à l'extrémité est (Tachgagalt) du Haïzer, douar Béni bou-
Ghardane (ou Amlouline). commune mixte de Dra-el-Mizan, départe-
ment d'Alger, Algérie. — Altitude : 2.090 m. — Roche : Calcaires lia-
siques.
Date : 28 août 1915. — Matériaux : Diptères, Collemboles, Myriapodes,
Aranéides. — Numéro : 917.
Date : 28 août 1915. — Matériaux recueillis dans la fosse à neige
de l'entrée : Diptères, Collemboles, Myriapodes. — Numéro : 918.
Date : 11 août 1916. — Matériaux : Diptères, Collemboles, Myria-
podes, Aranéides. — Numéro : 919.
En 1915,1a grande fosse, encore remplie de neige, est en pleine exploi-
tation par les Kabyles des Béni bou-Ghardane. Mais la chambre terminale
ne renferme plus qu'un minuscule fragment de névé. Le thermomètre-
fronde y accuse 4^5 C. Nombreux Diptères brachycères {Leptocera,
Cypselus...) et quelques Nématocères {Exechia). Typhlohlaniulus et
Collemboles abondants. Pas trace de TrecJiopsis Lapiei ni à.' Apteraj)hœ-
nops lojigiceps. Débris d'un Spelœonehria nudicollis récemment dévoré.
Un cadavre moisi de Chauve-Souris. Sur le ressaut qui sépare cette
chambre de la fosse à neige, la faune, surtout celle des Collemboles, est
464 R. JEANNEL ET E.-G. BACOVITZA
en partie différente et d'apparence moins endogée. Même aspect à l'entrée,
auprès de la masse neigeuse.
En 1916, où la chute de neige paraît avoir été beaucoup plus forte,
la chambre terminale elle-même est encore encombrée d'un bloc de névé
de 2 à 3 me. Pas trace de Spelœonebria. Un couple d' Apteraphœnops
longiceps. Très nombreux Collemboles âjenit l'aspect des Onychiunis,
quelques Acariens et des Typhloblanmlus. Sur les parois, des Exechia
engourdis par le froid et, sous les pierres, quelques Lepfocera. Les Hyadina
ne se tiennent guère que vers l'entrée de la grande poche neigeuse, sur les
parois bien éclairées. Les Lepfocera fourmillent toujours à la limite de la
neige, sous les pierres et en terre.
Cette cavité est intéressante, non seulement en soi et par les espèces
variées qu'on y rencontre, mais parce qu'elle représente le point de
contact de deux faunes : celle du Djurdjura occidental (Haïzer), carac-
térisée par les Apteraphœnops [et par V Alpœus exul, qui manque ici],
et celle des anou du Djurdjura central, caractérisée par les Spelœonebria.
La colonie de Trechopsis Lapiei qu'elle abrite renferme aussi des indi-
vidus à chétotaxie aberrante (Cf. Bull. Soc. ent. France, 1915, p. 130),
dont la signification théorique a de l'importance.
P. DE PeYERIMHOFF.
756. Tessereft Tissoukdel.
(Troisième mention, voir EIOSPEOIOGICA XXIV, p. 536, et XXXHI, p. 542)
Situé auprès de l'Agouni Tissoukdel que traverse le sentier menant
d'Aït-Ali au marabout de Haïzer, douar Amlouline, commune de Dra-
el-Mizan, département d'Alger, Algérie. — Altitude : 2.000 m. — Roche :
Calcaires liasiques. — Date : 22 octobre 1915.
Matériaux : Diptères, Myriapodes, Isopodes. — Numéro : 920.
En août, la coulée terminale, seule, contient encore une tache de neige.
Le reste de la cavité est peu humide. LTne larve d' Alpœus exul circule sous
la grande dalle. Les Leptocera sont extrêmement abondants, mêlés à
quelques Asaphidion Rossii et Bembidium nitidulum-ajricanum. Les
Hyadina se tiennent immobiles dans les cannelnres sèches.
En octobre, toute trace de neige a disparu. Mais les premières pluies
d'automne ont considérablement humidifié le milieu et provoqué l'appa-
rition d'une faune abondante, où les éléments superficiels {Hélix, Limaces,
GROTTES VISITÉES 465
Diplopodcs Julides...) se mélangent aux endogés, représentés par Tre-
chopsis Lapiei (parasité par Rhachomyces Peyerimhoffi), Oreocjs Bedeli
(parasité par Lahoulhenia abyssalis Maire, précisément décrit de cette
récolte in BuU. Soc. Hist. nat. Afr. du Nord, VII, 1916, p. 21), des Iso-
podes, un Diplopode rougeâtre que je rencontre pour la première fois,
et aux hygrophiles banals, tels qii' A saphidion Rossi et Bemhidium
nitidulum-ajricanuiH (parasité par Lahoulhenia vulgaris Peyr., cf. R.
Maire, loc. cit., p. 21).
C'est aussi lors de cette visite que j'ai trouvé, courant sur la roche tout
au fond du tessereft, un Chironomide brachyptère dont les seules affi-
nités actuellement connues sont avec des formes du littoral maritime
arctique, localisées au Spitzberg et dans la Nouvelle-Zemble. Ce Diptère
a été décrit par M. le Prof. M. Bezzi (Bidl. Soc. Hist. nat. Afr. du Nord,
VII, 1916, p. 90, pi. III) sous le nom de Calaliptus Peyerimhoffi. Je l'ai
retrouvé ensuite, mais en petit nombre, sur le causse même du Haïzer,
le long des crevasses.
P. DE PeYERIMHOFF.
757. Tessereft el-Hadj ou-Kaci.
(Troisiôme mention, voir BlosPEOtocaCA XXIV, p. 538, et XXXIII, p. 544)
Sifué à 1 km. à l'est du tessereft Tissoukdel, auprès de l'Agouni
Tamkiyet traversé par le sentier menant d'Aït-Ali au lac Agoulmine,
douar Amlouline, commune de Dra-el-Mizan, département d'Alger, Al-
gérie. — Altitude : 2.000 m. env. — Date : 28 août 1915.
Matériaux : Diptères, Myiiapodes, Isopodes. — Numéro : 921.
Tout au fond, il existe encore un peu de neige, autour de laquelle se
tiennent deux ou trois larves à.' Alpœus exul. Pas trace de l'imago.
Typhlohlaniulus dans la terre humide. Sur le ressaut de la mi-hauteur
Asaphidion Rossi, Bemhidium nifidulum-africanum, Trechopsis Lapiei.
Les Leptocera {Limoslna) en foule sautillent sous chaque pierre soulevée.
luHyadina, en plaques denses, couvre les parois du puits et les replis des
cannelures.
Le véritable tessereft el-Hadj ou-Kaci, cest-à-dire la glacière exploi-
tée par les montagnards est, paraît-il, situé à l'est et séparé de cette cavité-
ci par une masse rocheuse de quelques mètres d'épaisseur. Il est impos-
sible d'y descendre sans agrès. Ces deux tessereft, qui forment les côtés
466 7?. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
d'un angle aigu, se rejoignent manifestement par un système de fissures
d'ailleurs impénétrables.
P. DE PeYERIMHOFF.
758. Tessereft Agouni Tamkiyet.
(Troisième mention, voir Biospeologica XXIV. p. 53y, it XXXIII, \\. 544)
Situé à 150 m. au sud-est du tessereft el Hadj ou-Kaci, dans la masse
rocheuse tourmentée qui domine l'Agouni Tamkiyet, douar Amlouline.
commune de Dra-el-Mizan, département d'Alger, Algérie. — Altitude :
2.050 m. env. — Roche : Calcaires liasiques. — Date : 28 août 1915.
Matériaux : Diptères, Aranéides. — Niunéro : 922.
La fosse est toute pleine de neige. Çà et là des larves à' Alpœus exul.
Pas trace de l'imago. Les Leptocera fourmillent sous la pierraille et les
débris. Dans la fente ouest, faune abondante de Diptères plaqués sur la
roche, dont une grosse Mouche bleuâtre, lourde et lente, des Execkia
assez vifs et quelques Hyadina isolées. Vn Aranéide de forte taille se tient
sur une toile horizontale.
P. DE PeYERIMHOFF.
759. Tessereft Guiril.
(Troisième mention, voir BIOSPEOLOGICA XXIV, p. 540, et XXXIII. p. âil)
Situé sur la crête, près de la falaise sud du Haïzer, entre les cotes
2019 et 1956 de la carte au 50.000^ à 200 m. à l'ouest de Lonadj
louaranène, douar Béni Kouiïi, commune de Dra-el-Mizan, département
d'Alger, Algérie. — Altitude : 2.000 m. env. — Roche : Calcaires liasiques.
Date : 29 août 1915. — Matériaux : Diptères, Collemboles, Acariens,
Oligochètes. — Numéro : 923.
Date : 11 août 1916. — - Matériaux : Myriapodes. — Numéro : 924.
En août 1915, la fosse initiale est libre de neigC; mais il y en avait
encore, disent les bergers, dans la deuxième quinzaine de juillet. Le cou-
loir, très humide, est parcouru par un courant d'air froid. Dans l'aven
terminal, une tour de neige de 4 à 5 m. de haut. Pas trace à' AlpcEus
exul (sauf un débris de l'adulte), ni de Trechopsis Lapiei. Diptères bra-
chycères {Leptocera et Cypselus) en nombre prodigieux. Hyadina assez
abondants dans les parties les moins froides et même dans les « chapelles »
GROTTES VISITÉES 467
à 1 air libre. Dans le couloir même, faune de Collemboles extraordinai-
rement riche , plus qu'à aucune autre des cinq explorations précédentes :
les Onj/ckiurus d'un blanc de lait, souvent par groupes d'une dizaine
sous les pierres adhérentes au sol, les Podurides d'un rose pâle, près de la
neige, circulant sur les morceaux de bois pourri ou autres débris végé-
taux. Jai récolté à nouveau deux spécimens d'un- Acarien à téguments
très pâles et à membres allongés, dont notre savant collaborateur le
Dr. Ivar Tragardh m'avait précédemment signalé l'intérêt. Si mes
souvenirs ne me trompent pas, cette espèce se rencontre aussi, mais plus
rarement, dans l'ifri Khaloua et le tessereft Tabort Boufrichen.
En 1916, par contre, et bien que l'exploration soit de dix-huit jours seu-
lement plus précoce, la neige remplit encore la totalité de la caverne, dont
elle empêche l'accès. Il s'en trouve même un banc d'au moins 20 me.
dans la fosse, aux abords de l'entrée. Sous cette neige extérieure, se
tiennent des larves d'Alpœus exul, de très nombreux Leptocera, des
Onychiurus, des Trechopsis Lapiei (parasités par leur Rhachomyces) ;
bref, presque toute la faune réfugiée d'habitude dans la partie souterraine
du tessereft. Les rapports entre les conditions de la vie nivicole et de la
vie cavernicole sont ici saisissants.
P. DE PeYERIMHOFF.
760. Lonadj Amar ou-Mansour.
( Dcuxièiiu' iiuntion, voir Biospeologica XXXIH- p. 545)
Situé entre les pics Tachgagalt et Haïzer, douar Béni Koufifi, commune
de Dra-el-Mizan, département d'Alger, Algérie. — Altitude : 2.000 m. —
Roche : Calcaires liasiques. — Date : 11 août 1916.
Matériaux : Diptères. — Numéro : 925.
Forte masse de neige en pleine fusion. Les petits Diptères brachy-
cères sont très nombreux sous le névé et la pierraille humide.
P. DE PeYERIMHOFF.
468 B. JEANNEL ET E.-G. RACOVITZA
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GROTTES VISITÉES 469
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ARCHIVES DE ZOOLOGIE EXPÉRIMENTALE ET GÉNÉRALE
T. 57, p. 471 à 50?, pi. VI à VUI.
2 Octobre 1918.
ÉTyilE IIONOIIIIAI'IIIIJI^E
DE GONOSPORA TESTICULI TRÉG.,
Grégarine parasite du testicule de Gerithium
vulgatum Brug.
G. TREGOUBOFF
Assistant i\ la Statio:i Zoologi )ue Russe de Villefranche-sur-Mor
TABLE DES MATIÈRES
Pages
I. Introduction 471
II. MnUriel et technique 473
III. Siège de li Grég irine et structure de l'org me pirjsité 474
IV. Evolution végét dive. — 1. Stades jeunes intra- et extra-épithéliaux et leur structure (p. 475). — 2. Stades
adultes et leur structure (p. 477). — 3. Modifications nucléolaires au cours de la vie végétative
(p. 478). — 4. Mouvements des Qrégarines (p. 481). — 5. Accouplement et formation des kystes
normaux (p. 482).
V. Action p ithogène sur l'hôte 484
VI. Evolution sexuée. — 1. Etat actuel de nos connaissances sur la sexualité chez les Kugrégarines Mono-
cystidées parasites des animaux marins (p. 485). — 2. Evolution sexuée normale (p. 488).
VII. Evolution anorm'de des kystes 493
VIII. Affinités de Gonospora testiculi et sa position tystém'itiqu,e 502
IX. Index bibliographique 506
X. Explicitioi des plniches 508
I. INTRODUCTION
Dans mie note à la Société de Biologie (1916) j'ai fait connaître, sous
le nom de Cystobia testiculi n. sp., une Grégarine monocystidée nouvelle
parasite d'un Mollusque Gastéropode Prosobranche, Gerithium vulgatum
Brug. {=Cerithium tuberculatum L.). Il ne m'a pas été possible dans cette
communication préliminaire, forcément limitée, d'insister sur les détails
de l'évolution de cette Grégarine et de discuter ses affinités ; provisoire-
AUCH. VE ZoOL EXP. ET GÉ.'J. — T. 57. — F. 4 3X
472 G. TRËGOVBOFF
ment je l'ai faite rentrer dans le genre Cystohia, compris dans le sens très
large que lui attribue Dogiel (1909), tout en faisant des réserves sur la
valeur réeUe de ce genre.
Une étude plus approfondie m'a permis de préciser certaines parti-
cularités dans le cycle évolutif de cette Grégarine et de constater chez
elle l'existence d'affinités très étroites avec les Gonosporides sensu stricto ;
c'est pour cette dernière raison que je la désigne dans ce travail sous le
nom plus approprié de Gonospora testiculi.
En exposant dans cette étude monographique les résultats de mes re-
cherches sur l'évolution de Gonospora testiculi, j'espère apporter en même
temps une contribution à la systématique des Eugrégarines monocys-
tidées parasites des animaux marins. Cette dernière à l'heure actuelle
est assez confuse. La majorité des genres faisant partie de ce groupe doit
être révisée ; quelques-uns parmi eux sont destinés à disparaître totale-
ment, par exemple les genres Kalpidorhynchus, Diplodina et probable-
ment Cystohia. C'est dans cette voie d'aiUeurs que s'est engagée récem-
ment Mme H. Pixell-Goodrich (1915) qui, après avoir étudié les Gré-
garines parasites des Spatangoïdes, a corrigé les diagnoses des genres
Lithocystis et Urospora.
Comme je le faisais remarquer dans ma note préliminaire ^ la Grégarine
de Cerithium présente un intérêt particulier en sa qualité de parasite
d'un Mollusque Gastéropode. En fait de Grégarines chez les Mollusques
(à part les Porosporides = Nematopsides des Lamellibranches qui sont
des Schizogrégarines), on ne connaissait jusqu'à maintenant qu'une
seule Grégarine polycystidée, signalée brièvement par Stuart (1871)
dans la cavité générale de Pterotrachea sous le nom de Zygocystis ptero-
tracheae, et que Labbé (1899) a placée parmi les Cephalina incertae
sedis 1.
La nature de l'organe parasité mérite aussi d'être retenue. Les cas
d'infection des testicules par les Grégarines sont plutôt rares, puisque
dans toute la série des Invertébrés qui hébergent ces parasites on ne
trouve que celui des Monocystidées des Oligochètes.
1. La description donnée par Stuart étant tout à fait insufllsante, l'étude de cette Grégarine reste encore à
faire. Je l'ai retrouvée dans les deux espèces de Plerotrachea-P . coronata Forsk. et P. mutica Les., assez communes
à Villefranchc-sur-Mer, mais toujours à l'état végétatif et en trop petite quantité pour permettre une étude suivie.
Cette dernière présente d'ailleurs de grandes difficultés dues principalement aux conditions de vie spéciales des
hôtes ; les mêmes difficultés existent dans le cas d'un certain nombre d'autres Grégarines polycystidécs, les unes
signalées par les anciens auteurs, les autres non décrites encore, observées par moi dans beaucoup d'animaux
pélagiques (Tuniciers, Crustacés Annélides Mollusques), faisant partie du riche macroplancton d'hiver de Ville-
fanche-sur-Mer.
GONOSPORA TESTWVLI 473
II. Matériel et Technique
IVIatériel. — Malgré un grand nombre de travaux publiés sur la
spermatogenèse de divers Mollusques Gastéropodes Prosobranches, y
compris Cerithium vulgatum Brug., la présence de la Grégarine dans les
testicules de ce dernier a passé inaperçue. Elle n'est pas pourtant très
rare. Je l'ai rencontrée pour la première fois, il y a quelques années,
pendant un séjour fait au Laboratoire Arago de Banynls-sur-Mer. A
illefranche-sur-Mer elle est plus commune : environ 10 p. 100 des
Cerithium mâles sont parasités ^. A l'époque favorable, celle qui corres-
pond à la maturité sexuelle de l'hôte (mes recherches ont été faites prin-
cipalement aux mois d'avril-mai- juin), les testicules sont bourrés de
Grégarines jeunes et adultes ainsi que de kystes à tous les stades de leur
évolution. A ce moment le testicule parasité est reconnaissable même à
l'œil nu : au lieu de présenter la teinte jaune légèrement rougeâtre, ca-
ractéristique de la glande indemne, il est de couleur rouge-brique et se
montre parsemé de taches blanchâtres, indiquant les follicules envahis
par les Grégarines.
Cerithium vulgatum Brug. n'est sans doute pas le seul Mollusque Gas-
téropode qui héberge des Grégarines, A Banyuls-sur-Mer j'ai constaté
la présence, en même temps que celle de Gonospora des Cerithium, des
formes végétatives d'une autre Grégarine monocystidée, assez semblable,
dans les Turritella communis R., mais sans avoir pu étudier son évolution.
Technique. — Dans mes recherches j'ai suivi la méthode habituelle
pour l'étude des Sporozoaires. L'examen des kystes et des stades de la
gamétogenèse in vivo est très difficile, sinon impossible, étant donné d'un
côté la petite taille des kystes (ils dépassent rarement 80 f/ de dia-
mètre) et de l'autre — le revêtement très dense formé par les spermato-
zoïdes de l'hôte, qui viennent se fixer à leur périphérie dès la formation
de la membrane kystique, en les rendant complètement opaques.
Parmi les fixateurs employés — Bouin, Bouin alcoolique, Flem-
MiNG, Hermann, Benda et les deux mélanges de Champy, les meilleurs
résultats m'ont été donnés par le Bouin alcoolique et par les fixateurs
à base d'acide osmique — Hermann et Champy (ce dernier sans l'azotate
d'uranyle, simple modification de la formule d'ALTMANN). Après la fixa-
1. Mon attention sur l'abondance de cette Grégarine dans les Cérites de VllIefranche-sur-Mor a été attirée par
mon ami V. Schitz qui l'a observée pendant ses recherches sur la spermatogenèse des Mollusques Gastéropodes
Prosobranches.
474 G. TRÉGOUBOFF
tion par l'acide osmique le blanchiment cytoplasmique suivant la mé-
thode de Pal, modifiée légèrement par Rubaschkin (1910), m'a rendu
de bons services. Les fixateurs mitochondriaux — Benda et surtout celui
de Champy, quoique n'ayant pas révélé la présence de mitochondries
chez les Grégarines pendant leur évolution sexuée, m'ont fourni néan-
moins de belles images des mitoses, des centrosomes et des gamètes.
L'emploi de ces fixateurs peu pénétrants et par conséquent peu propres
à la fixation des kystes, a du être grandement facilité dans le cas présent
par la petite taille des kystes ainsi que par l'absence de toute enveloppe
gélatineuse protectrice autour d'eux.
Les coupes et les frottis ont été colorés de préférence à l'hématoxyline
ferrique de Heidenhain avec ou sans colorations plasmatiques usuelles,
par la méthode de contrôle de Mann ou suivant les formules indiquées
pour la recherche des mitochondries. Le colorant de ]\L\llory. qui a
donné de si beaux résultats à Léger et Duboscq (1909) chez Nina de
la Scolopendre, dans le cas de Gonospora de Cerithium, ne m'a pas révélé
chez les conjoints des différences d'ordre sexuel bien marquées.
m. Siège de la Grégarine et Structure de l'organe parasité
L'évolution complète de la Grégarine, végétative et sexuée, se passe
entièrement dans les follicules testiculaires de Cerithium. Les Grégarines
adultes passent dans les conduits spermatiques, dans lesquels ont lieu
leurs accouplements et enkystements, et oii s'accomplit toute l'évolution
des kystes ; très souvent la déhiscence de ces derniers se produit déjà dans
les conduits spermatiques, et les spores mûres libérées, quelquefois encore
les sporocystes, sont évacuées pêle-mêle avec les spermatozoïdes de l'hôte.
Le mode de vie du parasite étant déterminé par la structure de l'or-
gane parasité de l'hôte, il me semble utile avant de commencer l'étude
de l'évolution végétative de Gonospora de donner une esquisse rapide de
la constitution du testicule de Cerithium.
La structure de la glande génitale mâle chez les Mollusques Proso-
branches est bien connue par les travaux de nombreux zoologistes qui se
sont occupés de la question du dimorphisme des spermatozoïdes chez ces
Mollusques i. Chez Cerithium vulgnfum Brug. elle ne diffère guère du
schéma habituel. Sur les coupes le testicule se montre divisé en nombreux
1. La bibliographie complète sur la spermatogenèse et la spenuiogenèse des Mollusques Gastéropodes Proso-
branchcs est indiquée dans le mémoire de Kuschakewitsch (1913).
GONOSPOBA TESTICULI 475
compartiments par des cloisons revêtues d'une mince gaine du tissu
conjoiictif avec noyaux allongés caractéristiques. Au-dessous du tissu
conjonctif se trouve l'épithélium germinatif . Il se présente sous forme d'une
couche continue de cytoplasme d'épaisseur variable (fig. 1 et 2, pi. VI),
dans laquelle on distingue deux sortes d'éléments : 1» les noyaux isolés,
petits, ovales ou arrondis ; 2" les vraies cellules., nettement délimitées,
de taille relativement grande, peu nombreuses, disséminées çà et là dans
le cytoplasme germinatif ; leurs noyaux sont gros, clairs et vésiculeux,
et elles sont remplies de granulations de nature graisseuse (fig. 2, pi. VI) ;
ce sont les cellules nourricières ou nutritives. Quant aux éléments de
première catégorie, sans champs cytoplasmiques nettement limités autour
d'eux, les cytologistes les regardent aujourd'hui comme les éléments
indifférents, souches des spermatogonies des deux types et des cellules
nourricières. Le cytoplasme germmatif contient encore une grande quan-
tité d'inclusions constituant par endroits de véritables amas, qui repré-
sentent sans aucun doute les dépôts nutritifs. Elles ne sont bien visibles
qu'après les fixateurs à base d'acide osmique ; les unes ont l'aspect des
petits grains sphériques, colorables en noir par l'acide osmique, et sont
de nature franchement graisseuse ; les autres se présentent sous forme
de sphérules plus grandes que les premières et se colorent en brun ver-
dâtre par la méthode de Benda et en gris plus ou moins foncé par l'Héma-
toxyline ferrique de Hetdenhain (fig. 2, pi. VI). A la périphérie de l'épi-
thélium germinatif sont placés les spermatogonies, les spermatocytes et
les spermatides des deux rangées — typique et atj^ique, la partie centrale
de chaque compartiment étant remplie par les spermatozoïdes mûrs.
La gravité de l'action pathogène exercée par le parasite sur son hôte
se trouve en rapport étroit avec pareille structure du testicule ; je revien-
drai sur cette question importante à la fin de l'étude de l'évolution végéta-
tive de la Grégarine.
IV. Evolution végétative
1. Stades jeunes intra- et extra-épithéliaux et leur structure.
Dans cette partie de l'évolution de [Gonosporn testiculi, malgré la
grande abondance du matériel et l'intensité de l'infection, il m'a été
impossible de trouver les stades de début et d'observer notamment la
pénétration du sporozoïte ainsi que ses transformations au commence-
ment de la croissance. Les stades les plus jeunes rencontrés dans mes
476 G. TRÉGOUBOFF
préparations mesurent déjà 8-10 tJ- de diamètre. Us sont sphériques,
entourés d'une mince membrane et pourvus d'un noyau avec un seul
nucléole volumineux et homogène ; leur cytoplasme est finement gra-
nuleux à structure alvéolaire (fig. 3, 5, 6, pi. VI). Après les fixateurs à
base d'acide osmique le corps cytoplasmique se montre bourré de grains
et de sphérules, colorables en noir par l'acide osmique et en brun ou gris
plus ou moins foncé par l'hématoxyline ferrique (fig. 4 et 8, pi. VI). Par
leur aspect et structure, ces inclusions paraissent être identiques à celles
de l'épithélium germinatif et des cellules nourricières et représentent
certainement les résidus des matières alimentaires absorbées par les
Grégarines. La plupart des jeunes parasites observés se trouvaient libres,
mêlés aux éléments sexuels de l'hôte ; mais un certain nombre parmi les
plus petits m'a fourni des indications précieuses sur le début du développe-
ment de Gonospora. En effet, à côté des formes libres on en rencontre
d'autres qui sont nettement intraépithéliales ; les unes sont simplement
plongées dans l'épithélium germinatif, tandis que les autres se trouvent
logées à l'intérieur des cellules nourricières. Dans le dernier cas les plus
petites occupent seulement une partie de ces grandes cellules, dont la
structure à ce moment ne paraît pas être bien modifiée (fig. 1 et 3, pi. VI) ;
mais quand elles deviennent plus grandes elles remplissent presque com-
plètement les cellules hôtes et les distendent, en refoulant à une extrémité
leurs noyaux et les inclusions cytoplasmiques (fig. 4, pi. VI). Ainsi
distendues, les cellules nourricières font saillie hors de l'épithélium ger-
minatif (fig. 1, pi. VI) et finalement tombent, avec les parasites qu'elles
contiennent, dans la cavité folliculaire. A ce stad& les deux membranes,
celle du parasite et celle de la ceUule hôte, sont si étroitement appliquées
l'une contre l'autre sur une grande partie du corps de la jeune Grégarine,
qu'il est souvent impossible de les distinguer. Tout ce qui reste de la
cellule nourricière apparaît alors sous forme d'une hémisphère ou d'un
croissant étroit accolés à un pôle de la Grégarine ; dans leur intérieur on
peut identifier encore quelques inclusions cytoplasmiques ainsi que les
noyaux plus ou moins altérés (fig. 4, pi. VI). Cette sorte de calotte ap-
pliquée contre la surface de la Grégarine persiste d'ailleurs assez longtemps ;
on l'observe même chez les jeunes parasites sphériques devenus libres
dans la cavité testiculaire après la rupture de la membrane de la cellule
hôte.
La pénétration des jeunes Gonospora à l'intérieur des cellules nourri-
cières ne doit pas être en tout cas obligatoire, comme le prouve l'existence
GONOSPORA TESTICULI 477
de jeunes stades plongés simplement dans le cytoplasme germinatif ; il
est à présumer que dans le cas d'une infection intense, le nombre des
cellules nourricières étant relativement restreint, les jeunes Grégarines
puisent tous les éléments nutritifs nécessaires à leur développement
directement dans le cytoplasme de l'épithélium germinatif, lequel en est
abondamment pourvu et s'y prête bien par sa nature syncytiale.
De tous les éléments constitutifs du testicule de Ceritklum c'est unique-
ment l'épithélium germinatif qui se montre directement atteint par les
parasites ; les spermatogonies et les spermatocytes restent toujours
indemnes.
L'évolution végétative de la Grégarine comprend ainsi deux phases :
intraépithéliale (et même intracellulaire) au début du développement,
extraépithéliale ensuite, pendant laquelle les Grégarines en croissance se
trouvent libres dans la cavité testiculaire, mêlées aux éléments sexuejs
de rhôte.
Les jeunes Grégarines sphériques ont une tendance à s'accoler et
même à former des chaînes. A cet effet la membrane de chaque individu
se soulève légèrement en s'amincissant à l'endroit où aura lieu le contact ;
les Grégarines se touchent par ces becs et forment ainsi un couple ou
un chapelet (fig. 5 et 6, pi. VI). Cet accouplement précoce n'a aucun rap-
port avec le véritable accouplement d'ordre sexuel ; c'est plutôt un phéno-
mène de tliigmotactisme, tout à fait provisoire ; dans la suite, au cours de
la croissance, les Grégarines se séparent très facilement ; les Gonospora
adultes se montrent toujours solitaires ; leur véritable accouplement est
tardif et précède immédiatement l'enkystement.
2. Stades adultes et leur structure. — En grandissant, les Gré-
garines deviennent pirif ormes ou ovales ; les individus adultes sont très
allongés et dépassent quelquefois 250 [j. de longueur. Déjà dans les
Grégarines de forme ovale on reconnaît nettement la polarisation ; leur
extrémité antérieure est renflée et arrondie en forme de massue, tandis
que l'extrémité postérieure est, au contraire, effilée, mais sans se terminer
en pointe (fig. 7, pi. VI). Il n'existe aucun appareil de fixation pendant
toute l'évolution de la Grégarine.
La cuticule présente de très nombreuses côtes longitudinales, peu
saillantes, séparées par des intervalles très étroits (fig. 8, pi. VI), devenant
de plus en plus serrés vers l'extrémité postérieure. Après la fixation par
l'acide osmique on distingue sur les coupes la présence sous la cuticule
de filaments longitudinaux qui paraissent appartenir au sarcocyte.
478 G. TRÉGOVBOFF
Le cytoplasme est fin, plus dense et homogène à l'extrémité antérieure
où il forme une sorte de calotte (fig. 7, pi. VI) ; dans le reste du corps
de la Grégarine il est alvéolaire, rempli de grains sidérophiles et d'in-
clusions, représentant les résidus des matières nutritives absorbées par
le parasite. Dans les préparations fixées au Bouin alcoolique et traitées
après l'hématoxyline terrique par les colorants plasmatiques-Orange G,
Eosine ou Prenant, ces inclusions prennent vivement ces derniers et
donnent ainsi une apparence tachetée à la Grégarine ; après les fixateurs
à base d'acide osmique elles se colorent en noir ou en gris verdâtre par
rhématoxyline de Heidenhatn.
Le noyau est généralement ovalaire et mesure 16 fji de longueur en
moyenne. Il est limité par une membrane nette, à double contour^ et
montre pendant toute la vie végétative de la Grégarine un nucléole
unique et volumineux.
3. Modifications nucléolaires au cours de la vie végétative.
On sait que chez les Grégarines le nucléole du noyau présente au cours
de la vie végétative une évolution très compliquée et des aspects morpho-
logiques très variés. L'étude de ces transformations nucléolaires, et sur-
tout leur interprétation, ont donné lieu à de nombreuses discussions sur
lesquelles je n'iiisisterai pas dans ce travail. Je me contenterai de décrire
celles que j'ai observées dans mes préparations de Gonospora de Cerithivm.
particulièrement intéressante à ce point de vue.
En examinant les frottis fixés on est frappé par la diversité d'aspects
sous lesquels se présente le nucléole ; il apparaît tantôt plein et homogène,
tantôt creux, en anneau plus ou moins épais, ou en croissant (fig. 9-12, pi. VI).
Ces aspects, propres aux Grégarines en croissance ou adultes, s'expliquent
par la faculté que possède le nucléole de se comporter comme une vacuole
pulsatile. On constate sur le vivant que le nucléole, massif à un moment
donné, se vacuolise de plus en plus jusqu'à n'avoir plus qu'une paroi très
mince ; il se remplit en même temps d'un liquide clair, dans lequel on
observe quelquefois de tout petits grains fortement réfringents ; finale-
ment ce liquide intranucléolaire s'écoule brusquement, en quelques
secondes, dans le suc nucléaire environnant, par une sorte de micropyle
pratiqué dans la paroi du nucléole (dans les préparations durables, le
noyau ayant été saisi par le fixateur au moment favorable, on peut même
observer quelquefois une petite vésicule claire faisant saillie par l'ou-
verture du micropyle (fig. 12, pi. VI). Aussitôt l'émission faite, l'ouver-
ture du micropyle se ferme et le nucléole reprend de nouveau son aspect
GONOSPOBA TESTICULI 479
homogène en repassant par les mêmes stades, mais en sens inverse. Dans
les préparations fixées et colorées les traces de cette expulsion du liquide
intranucléolaire et des fines granulations réfringentes se montrent sous
forme d'un petit grumeau placé en face de l'ouverture du micropyle,
d'une couleur foncée qui tranche nettement sur le suc nucléaire environ-
nant beaucoup plus clair. Ce grumeau paraît être constitué par de fines
granulations, dont l'agencement n"est pas analysable même aux plus
forts grossissements ; quelques grains plus gros et plus sidérophiles sont
visibles dans cet îlot aux contours indécis et qui persiste pendant toute la
vie végétative de la Grégarine.
Une particularité attire l'attention dans les noj'aux subissant la
vacuolisation : c'est l'excentricité constante du nucléole. En effet, le
suc nucléaire dans lequel se trouve plongé le nucléole est rempli de gra-
nulations chromatiques situées svir un réseau de linine très fin ; les mailles
de ce réseau sont si serrées que sur les frottis, et surtout aux faibles grossis-
sements, tout l'ensemble apparaît sous l'aspect d'une couche homogène
appliquée étroitement contre la membrane nucléaire ; cette « couche » se
montre toujours plus épaisse du côté qui se trouve en face du micropyle
du nucléole, plus mince du côté opposé ; le nucléole est ainsi constam-
ment excentrique, plus rapproché de la membrane nucléaire par son côté
opposé au micropyle. Cette excentricité du nucléole dans un sens si nette-
ment déterminé pourrait être expliquée à mon avis par des raisons d'ordre
physico-chimique, résultant du fait même du phénomène de la pulsation
et de l'expulsion consécutive du liquide intranucléolaire.
L'interprétation des modifications nucléolaires de cette catégorie,
dues à l'action pulsatile du nucléole et propres aux Gonospora en crois-
sance ou adultes, est relativement aisée ; elle correspond d'ailleurs dans
ses grandes lignes à celle donnée pour les Porosporides, Porospora gigantea
et Porospora portuniâarum par Léger et Duboscq (1911) qui, les pre-
miers, ont suivi la marche de ce phénomène et expliqué en même temps
la nature du grumeau, observé encore par E. va:n^ Beneden (1869) i.
Les modifications nucléolaires de la deuxième catégorie sont très
fréquentes dans les noyaux des Grégarines âgées, de grande taille. Leur
interprétation est plus difficile, étant donné que par leur nature même
1. Il est probable que des phénomènes de même nature ont lieu ohez beaueoup d'autres Grégarines dont les
noyaux possèdent un nucléole unique. Certiiins auteurs. Dogiel (1807) par exemple chez Schizoci/stis sipunculi,
ont constaté l'excentricité des nucléoles et donné des imapes de noyaux absolument semblables à celles qu'on observe
chez les Porosporides et chez (lonosporn testiculi, mais sans avoir cherehé à les expliquer par une étude comparative
sur le vivant.
480 G. TREGOUBOFF
elles échappent à l'observation sur le matériel vivant et qu'on est réduit
à les étudier uniquement sur les préparations fixées. Elles consistent en
une régression progressive du nucléole et aboutissent, après sa résorption
complète, à la formation d'un organite intranucléaire spécial. La marche
de ce phénomène, dont les principaux stades sont représentés sur les
figures 13-23 de la planche VI, paraît être la suivante.
Dès le début, le nucléole cesse de se comporter comme une vacuole
pulsatile ; devenu homogène, il se contracte légèrement et son volume
diminue ; sa chromaticité s'atténue également. Pendant un certain temps
la partie centrale continue encore à fixer fortement la laque ferrique,
mais bientôt tout le nucléole devient achromatique et se présente sous
l'aspect d'une tache grise, quelquefois à contours irréguliers (fig. 15, pi. VI).
Aux stades plus avancés (fig. 16-23, pi. VI) toute trace du nucléole a
disparue. A ce moment le noyau de la Grégarine montre la structure sui-
vante : son volume a légèrement augmenté ; la membrane nucléaire est
toujours très nette, à double contour ; le réseau de linine à l'intérieur du
noyau a conservé son aspect normal ; le suc nucléaire achromatique
contient quelques grains sidérophiles ; ces grains apparaissent tantôt
isolés, tantôt agencés en une sorte de petit filament chromatique plus
ou moins recroquevillé. Le plus souvent ce petit filament se trouve au
voisinage du grumeau formé pendant l'action pulsatile du nucléole ; quel-
quefois, au contraire, il en est éloigné (fig. 18, pi. VI). Le grumeau, qui
persiste pendant toute la durée des modifications nucléolaires et paraît
jouer un rôle important dans la formation de l'organite intranucléaire,
leur produit final, n'a pas subi au cours de la résorption du nucléole de
transformations notables ; c'est toujours le même petit îlot avec quelques
petits grains plus sidéropliiles disséminés dans son intérieur, sans limites
nettes ; ces dernières ressortent mieux quand le petit filament sidéro-
phile se montre étroitement appliqué contre lui (fig. 17 et 20, pi. VI).
Au stade final de cette modification nucléaire le grumeau et le petit
filament chromatique finissent par constituer un organite nettement
défini. Ce dernier ^apparaît sous forme d'une petite vésicule claire et
sphérique de 3-4 [x de diamètre, entourée d'une fine membrane contre
laquelle sont appliquées quelques plaques de chromatine ; un petit nombre
de grams^chromatiques isolés est visible à l'intérieur de la vésicule (fig. 23,
pi. VI). Cette vésicule représente l'unique formation définie qu'on observe
dans les noyaux des Grégarines âgées.
La description que je viens d.e donner de cette catégorie de modifica-
GONOSPORA TESTICULI 481
lions nucléolaires n'est pas complète. Faite uniquement d'après l'étude
des préparations fixées, elle permet de tracer leurs principales étapes,
mais ne renseigne nullement sur la marche intime du phénomène. Ainsi
il ne m'a pas été possible de constater l'émission de grains chromatiques
au cours de la résorption du nucléole ; elle doit avoir lieu pourtant, puis-
qu'on observe la présence de ces grains dans le noyau après la disparition
du nucléole tantôt à l'état isolé, tantôt déjà agencés en un filament. Les
détails de la formation de la petite vésicule claire aux dépens de l'îlot
et du filament chromatique m'ont échappé également.
Quant à la valeur qu'on doit attribuer à cette formation intranucléaire
il est difficile de se prononcer avec certitude. Il ne semble pas que la résorp-
tion du nucléole chez les Grégarines âgées soit un fait morbide. Les Gré-
garines « anucléolées « gardent leur aspect général tout à fait normal ; leurs
accouplements et enkystements [ne présentent aucune particularité. On
est tenté de supposer qu'il s'agit ici plutôt d'im phénomène d'épuration
nucléaire dans le genre de ceux qui se produisent, comme l'admet actuelle-
ment la majorité des Protistologues, chez toutes les Eugrégarines avant
la première mitose dans les kystes et qui aboutissent à la formation de
véritables micronnclei aux dépens de l'idiochromatine et d'une partie
de la trophochromatine des noyaux primaires. J'ai observé assez souvent
ce micronucleus dans les jeunes kystes des Gonospora et je dois reconnaître
que sa ressemblance avec la formation intranucléaire des individus âgés
non enkystés est frappante. J'aurai l'occasion au cours de l'étude de
l'évolution des kystes de faire une comparaison plus détaillée de ces deux
formations et de discuter leur analogie. Pour l'instant je ferai remarquer
que l'existence de cette épuration dans les Grégarines solitaires non
enkystées n'aurait rien d'étonnant, étant donné qu'elle a lieu uniquement
chez les individus âgés et par conséquent déjà certamement différenciés
au point de vue sexuel. Je dois avouer cependant que je n'ai pas réussi
à déterminer le sexe des Gonospora « anucléolées » et de constater chez
elles de différences certaines d'ordre sexuel.
4. Mouvements des Grégarines. — Les Gonospora adultes sont
peu mobiles. Les mouvements de déplacement d'ensemble sont difficiles
à constater. Par contre, on observe fréquemment leur progression par
une sorte de reptation accompagnée de déformations du corps et due cer-
tainement à la contraction des myonèmes. La direction de la progression
se trouve toujours indiquée par l'extrémité plus large du corps de la Gré-
gariiie, celle qui possède la calotte. Le mouvement se manifeste par le
482
G. TRÉGOVBOFF
renflement de la partie antérieure ou de la partie adjacente, suivi de
l'attraction de l'extrémité postérieure. Le noyau participe à ce mouvement,
se déplace à l'intérieur du corps de la Grégarine et subit eu suivant le
a^.
c
^.
^' " . ' ■>'
e^.
Fia. I. Los aijp.cts (les Gonospora testiculi en progression. x450. (Fix. BouiN alcooli((uo, Héniatoxyline forriquo,
Orange 0.)
courant cytoplasmique toute une série de déformations. Quelques croquis
montrant les aspects bizarres des Grégarines en progression permettent
de se rendre mieux compte de la nature de cette reptation (fig. i, a-/).
5. Accouplement et formation des kystes. — Les Grégarines
adultes passent, mêlées aux spermatozoïdes mûrs de l'hôte, dans les
GONOSPORA TESTICULI
483
'A
conduits séminaux, où s'accomplit leur accouplement. Je n'ai jamais
rencontré de Grégarines en syzygie avant l'enkystement ; ainsi l'accouple-
ment est tardif et précède immédiatement ce dernier ; il se fait toujours
par les extrémités antérieures des deux conjoints, dont l'un rentre dans
l'autre en « doigt 'de gant » (fîg. il, a), comme cela a lieu généralement
chez les Oonosporides, par exemple chez Gonospora ghjcerae d'après les
observations de
Mme PiXELL-
Goodrich(1916).
Après l'accou-
plement les Gré-
garines se ren-
flent et s'épais-
sissent dans les
parties anté-
rieures du corps,
en gardant géné-
ralement le con-
tact seulement
par leurs têtes
(fig. II, h) ; mais
quelquefois après
l'accouplement
terminal elles
s'appliquent
l'une contre l'au-
tre latéralement.
Les enkyste-
ments solitaires sont fréquents chez Gonospora testiculi ; par contre,
je n'ai pas eu l'occasion d'observer d'enkystements multiples. Les
kystes normaux à deux conjoints sont sphériques et dépassent rare-
ment 80 u de diamètre. Ils sont entourés d'une mince membrane, sans
enveloppe gélatineuse protectrice. Dès la formation de la membrane
kystique les spermatozoïdes mûrs de Cerithium (fait curieux, ce sont tou-
jours ceux de la lignée typique) se fixent sur elle en grand nombre et
donnent ainsi un aspect chevelu aux kystes (fig. ii, c). Le revêtement
formé par les spermatozoïdes est tellement dense que les kystes devien-
nent complètement opaques : de ce fait l'étude de la gamétogenèse in
au
c.
Fig. II. rt, accouplement terminal des Gonospora testiculi ; 6, l'enkystement ; c,
coupe d'un jeune kyste normal entouré <le spcrmatoztldes typiques
de Cerithium. x 450. (Fix. BotJlN alcoolique, Hématoxyline ferrique.
Orange G.)
484 G. TRÉGOUBOFF
vivo est difficile, sinon impossible. Mais, comme l'évolution intrakystique
de Gonospora testiculi s'accomplit sur place, dans les conduits sperma-
tiques de l'hôte, cet inconvénient est largement compensé par la facilité
avec laquelle on peut se procurer tout le matériel nécessaire pour l'étude
du cycle sexuel. Ainsi sur certaines de mes coupes ne dépassant pas
0,4 cm. de diamètre j'ai compté jusqu'à 50 kystes aux différents stades
de l'évolution sexuée.
V. Action pathogène sur l'hôte
J'intercale ici quelques considérations relatives à l'action pathogène
qu'exerce le parasite sur son hôte.
La présence des Gonospora dans les testicules des Cerithium ne se
manifeste chez ces Mollusques par aucun signe extérieur distinctif. La
conformation générale des organes génitaux n'est pas modifiée davantage
comme on s'en rend compte après la dissection. La seule différence qu'on
constate entre les testicules sains et parasités, et encore seulement dans
les cas d'infection intense, est celle de leur coloration. Dans les testicules
parasités, au lieu d'être jaune-rougeâtre, presque 'orange, teinte carac-
téristique des glandes indemnes, elle devient plus foncée, voisine du rouge
brique, avec des taches blanchâtres, mdiquant les follicules envahis par
les Grégarines.
Il n'est pas de même pour la structure interne du testicule parasité.
Les Grégarines produisent dans la glande des ravages considérables, dont
l'intensité est en rapport étroit avec les deux phases de leur vie végétative.
I On comprend aisément que l'action pathogène est de beaucoup plus
pernicieuse pendant la première période, durant laquelle les jeunes Gonos-
pora intraépithéhales ou même intracellulaires s'attaquent directement
à la source même des éléments sexuels de Cerithium, en détournant à leur
profit de leur destination naturelle une partie des réserves accumulées
dans l'épithélium germinatif et dans les cellules nourricières. Pendant ce
stade, l'action pathogène a certainement un caractère double ; d'un côté
elle est directe et se traduit par la destruction etl'absorption des substances
nutritives destinées aux éléments sexuels de l'hôte ; de l'autre côté elle
est indirecte et se manifeste par une compression plus ou moins considé-
rable exercée sur les éléments environnants. C'est ainsi qu'on doit expli-
quer les images qu'on observe dans les testicules des Cerithium parasités,
chez lesquels, en cas d'infection intense, l'épithéhum germinatif de cer-
GONOSPORA TESTICULI 485
tains follicules se montre tout disloqué sur une grande étendue ; parfois
totalement absorbé par les Grégarines, il est le plus souvent réduit à
quelques minces lambeaux attachés à la gaine du tissu conjonctif, dans
lesquels on aperçoit çà et là des cellules nourricières échappées à cette
destruction. Quant aux éléments sexuels de l'hôte — spermatogonies et
spermatocytes — ils ne sont jamais directement atteints par les Gréga-
rines. Sans doute, l'action des parasites devenus libres à l'intérieur des
follicules testiculaires pendant la deuxième période de leur vie végéta-
tive s'exerce sur eux aussi. Mais elle paraît être indirecte et consister
principalement dans une compression d'ordre mécanique ; la structure
microscopique de ces éléments n'est pas modifiée, et la comparaison des
coupes des organes sains et parasités ne m'a pas révélé chez eux, même
après les fixateurs mitochondriaux, d'altérations d'aucune sorte impu-
tables à l'action des parasites. De même, étant donné que dans le tes-
ticule les éléments des deux hgnées — typique et atypique — de l'évo-
lution du spermatozoïde n'ont pas d'emplacement déterminé, mais se
trouvent mêlés les uns aux autres, l'action des parasites ne paraît pas
être dirigée de préférence contre les éléments d'une de ces deux lignées ;
exercée contre leur source commune, elle les frappe indifféremment les
uns et les autres.
En résumé, les Gonospora produisent une véritable castration directe
chez les Cerithium ; mais, comme cela a lieu chez les Oligochètes, seul
exemple connu du parasitisme des organes génitaux par des Grégarines,
cette castration est toujours partielle et incomplète. La fécondité de
l'hôte se trouve atteinte seulement en partie, puisqu'à côté de régions
envahies et détruites même totalement par les parasites, il en subsiste
beaucoup qui demeurent intactes et produisent des éléments génitaux
en nombre suffisant.
VI. Evolution sexuée
1. Etat actuel de nos connaissances sur la sexualité chez les
eugrégarines monocystidées parasites des animaux marins . lcs
grandes lignes de l'évolution sexuée chez les Eugrégarines sont actuelle-
ment bien connues. Léger et Duboscq (1909) dans leur travail d'ensemble
sur la sexualité chez les Grégarines, après avoir fait l'aperçu historique
de la question, ont établi les principaux stades de cette partie de l'évo-
lution ; ils ont précisé en même temps les modalités de la gamétogenèse
486 G. TRÉGOUBOFF
et de la sporogenèse dans plusieurs familles des Grégarines polycystidées.
Pour les Grégarines monocystidées, sans s'être occupés spécialement de
leur évolution, ils ont donné une mise au point des résultats des recherches
de divers auteurs, en insistant tout particulièrement sur le désaccord qui
se manifeste entre ces derniers dans une question aussi importante que
la différenciation des gamètes. Pourtant l'étude minutieuse de la confor-
mation des gamètes et des spores est d'un intérêt capital, puisque c'est
seulement grâce à elle qu'on arrive à préciser les affinités des Grégarines
et à établir leur systématique rationnelle.
Avant d'exposer les résultats de mes recherches sur l'évolution sexuée
de Oonospora de Cerithium je passerai rapidement en revue les princi-
paux travaux ayant trait à la question de la gamétogenèse chez les Eugré-
garines monocystidées parasites des animaux marins, étant donné sur-
tout que depuis l'apparition du mémoire de Léger et Duboscq un cer-
tain nombre de publications plus récentes a apporté un peu de clarté
dans cette question. Pour ne pas allonger inutilement cet aperçu histo-
rique je ne citerai parmi ces dernières que les travaux dans lesquels on
trouve les indications relatives aux gamètes ; sur les autres, concernant
les diverses modalités de l'évolution intrakystique, j'aurai l'occasion de
revenir au cours de l'étude de l'évolution sexuée du parasite de Cerithium.
On sait que c'est précisément chez une Grégarine monocystidée
parasite d'un Tunicier, Lankesteria ascidiœ, qu'ont été distingués pour la
première fois par Siedlecki (1899) les véritables gamètes des Grégarines
et établis avec certitude les phénomènes de la copulation et de la féconda-
tion. Par suite d'un défaut d'observation plus que probable, Siedlecki
a conclu à la similitude des gamètes de Lankesteria et a admis l'isogamie
comme caractère différentiel des Grégarines, en l'opposant à l'hétéroga-
mie des Coccidies. Aux mêmes conclusions sont arrivés ensuite Cuénot
(1901), Prowazek (1902) et Cecconi (1902) pour les Monocystidées des
Oligochètes, et dans sa note préliminaire Woodcock (1904) pour les
Cystohia des Holothuries-C. irregularis et C. minchini. Brasil dans plu-
sieurs mémoires (1904, 1905, a, h et c), après avoir soumis à une critique
sévère les résultats annoncés par ces auteurs, a démontré l'existence de
l'anisogamie nette, mais plus ou moins prononcée, tant chez les Mono-
cysiis des Lombrics que chez les Gonospora ^ et Urospora, parasites des
1. Afin d'é\ntcr toute confusion je conserve dans la partie descriptive de ce travail les noms donnés par les
auteurs aux Grégarines étudiées par eux ; leurs noms plus appropriés, proposées par Dochel (1909) et Mme Pixell-
GOODRICH (1915, 1916) à la suite d'études comparatives, seront indiqués dan< le dernlLT chapitre sur les affinités
de la Grégarine de Cerithium.
GONOSPORA TESTICULI 487
Annélides Polychètes. L'existence de l'anisogamie chez ces deux der-
nières Grégarines présentait un intérêt tout particulier, étant donné
leurs affinités étroites avec Cystobia. Les résultats de belles recherches
de Brasil n'ont pas empêché Woodcock (1906) d'admettre définitive-
ment l'isogamie chez les Cystobia des Holothuries, dans sa thèse parue
l'année suivante. Dogiel (1906) a suivi Woodcock dans la même voie
en proclamant l'isogamie des gamètes chez Cystobia chiridotœ. Cunnin-
GHAM, en 1907 décrit son Kalpidorhynchus arenicolae , -psirsisite d' Arenicola
ecaudata et, quoique ayant constaté au cours de l'évolution intrakystique
l'existence de différences d'ordre sexuel tant cytoplasmiques que nu-
cléaires chez les deux conjoints, figure chez cette Grégarine des gamètes
isogames. Brasel (1909) en critiquant les résultats de Cunningham
signale les mêmes différences d'ordre sexuel chez un Doliocystis (D. legeri),
mais sans avoir pu observer ses gamètes. Miss Robinson reprend en 1910
l'étude de Kalpidorhynchus arenicolae ; dans son intéressant travail elle
démontre l'anisogamie certaine et bien marquée des gamètes de cette
Grégarine, pressentie déjà par Brasil et que Cunningham n'a pas su
mettre en évidence. Par contre, la même année, Swarczewsky (1910)
dans son mémoire sur le cycle évolutif d'une Lankesteria des Planaires
du Lac Baïcal désigne les gamètes de cette Grégarine sous le nom de
« primitive Anisogameten » et trouve la seule différence entre eux dans
leurs dimensions ; d'après -lui les gamètes femelles sont sphériques de
10-12 u. de diamètre, tandis que les gamètes mâles, sphériques égale-
ment, n'ont que 6-8 f/. ; quant aux différences dans la structure il dit
que : « âusser der Grosse sind keine Unterschiede zwischen cf und ç
zu finden » (p. 654). Ensuite, l'isogamie chez les Grégarines mono-
cystidées est de nouveau soutenue par Dogiel (1910) dans son étude
sur Urospora travisiae ; il déclare qu'après la multiplication nucléaire
dans les kystes : « der weitere Verlauf der Entwicklung, bis zur BUdung
der Sporocysten, bietet kein besonderes Interesse. Die aus beiden Conju-
ganten hervorgehenden Gameten sehen einander ausserordentlich
âhnlich, so dass ich ihre Kopulation kaum fiir eine Anisogamie ansehen
kann » (p. 73). Je ne cite que pour mémoire le travail de Ssokoloff (1913).
L'auteur a décrit l'évolution d'une Grégarine monocystidée parasite du
tube digestif de Glycera {Rhynchobolus) siphonosfoma, découverte par
Dogiel à Naples. Cette Grégarine est particulièrement intéressante et
possède certainement beaucoup d'affinités avec Gonospora de Cerithium.
Malheureusement, la description et les figm-es données par Ssokoloff
Arch. de Zool. Exp. et G*n. — T. 57. — F. 4. 32
488 G. TRÊGOUBOFF
sont défectueuses et on ne peut se faire une idée bien nette presque d'au-
cun stade de l'évolution sexuée de sa Cystohia intestinalis. Ainsi la des-
cription de la gamétogenèse tient entièrement dans les lignes suivantes :
«... leder Kern mit dem umgebenden Plasmabezirk wird spâter zu einer
Gamète verwandelt, welche dann paarweise verschmelzen und somit
Sporoblasten bilden » (p. 225). Enfin, les deux derniers travaux, impor-
tants d'ailleurs, sont dus à Mme H. Pixell-Goodkich (1915, 1916).
Dans le premier, consacré à l'étude des Sporozoaires des Spatangoïdes,
l'auteur corrige les diagnosesdes genres Lithocystis et Urospora et démontre
l'existence de l'anisogamie dans quelques espèces appartenant à ces deux
genres ; cette anisogamie, légère chez Lithocystis, est même très prononcée
chez Urospora, dont te gamète mâle mobile posséderait un flagelle. Le
deuxième travail, sur les Grégarines de Glycera siphonostoma, traite sur-
tout la question de la systématique des Gonosporides, la gamétogenèse
n'ayant pu être suivie en détail par l'auteur.
Mes recherches sur l'évolution sexuée de Gonospora de Cerithium
apportent une nouvelle confirmation de l'existence de l'anisogamie chez
les Eugrégarines monocystidées parasites des animaux marins, annoncée
pour la première fois par Brasil et soutenue ensuite par Miss Robinson
et Mme Pixell-Goodrich.
2. Evolution sexuée normale. — Dans cette partie de l'évolution
il m'a été possible de distinguer 7 stades parfaitement distincts.
Stade I. — Le premier stade de l'évolution normale du kyste corres-
pond au repos des noyaux primaires des deux conjoints, et en passant
par la formation de leurs micronuclei, se termine à la première mitose de
ces derniers.
La majorité des Protistologues est actuellement d'accord sur la nature
du phénomène important qui a lieu pendant ce stade — la formation
du micronucleus dans chaque conjoint aux dépens de l'idiochromatine
et d'une partie de la trophochromatine du noyau primaire. J'ai constaté
l'existence du même phénomène d'épuration nucléaire dans les jeunes
kystes de Gonospora testiculi. Le micronucleus se forme à l'intérieur du
noyau primaire ; sa structure est semblable à celles décrites par divers
auteurs pour les formations analogues chez les Grégarines monocystidées
et polycystidées. Mais, comme c'est arrivé à la plupart des auteurs et
probablement pour la même raison, c'est-à-dire à cause de la rapidité
avec laquelle s'accomplit cette épuration, il ne m'a pas été possible de
suivre pas à pas l'évolution du micronucleus. En effet, si les jeunes kystes,
GONOSPORA TESTICULI 489
dans lesquels les noyaux des deux conjoints n'ont pas encore subi de
modifications notables, sont fréquents, ceux qui montrent les formations
micronucléaires sont très rares ; ainsi sur plusieurs centaines de kystes
étudiés je les ai observées en tout une dizaine de fois et uniquement à deux
stades : tantôt le micronucleus au repos à l'intérieur du noyau primaire,
tantôt en train de subir la première mitose après la désagrégation de
ce dernier.
Au début du premier stade les Grégarines complètement enkystées
restent un certain temps au repos et leurs noyaux sont semblables à ceux
des Grégarines adultes solitaires. Presque toujours, déjà dans ces jeunes
kystes le sexe des deux conjoints est reconnaissable d'après l'aspect du
corps cytoplasmique. Celui du mâle, plus opaque que le cytoplasme de
la femelle, est plus colorable par les colorants acides ; les mailles de son
réseau sont beaucoup plus petites. Ces différences cytoplasmiques d'ordre
sexuel persistent dans les kystes jusqu'au stade de la formation des ga-
mètes. Elles ont été décrites si souvent (Léger et Duboscq (1909)
notamment en ont fait une étude minutieuse chez Nina) qu'il serait
fastidieux d'insister sur elles davantage. J'ajoute seulement, qu'à part
ces différences de coloration, il ne m'a pas été possible, même après les
fixateurs mitochondriaux, de mettre en évidence d'autres caractères
d'ordre sexuel dans les corps cytoplasmiques des deux conjoints.
Dans les kystes plus avancés on constate que des modifications pro-
fondes se sont produites dans les noyaux primaires. Leur volume a con-
sidérablement augmenté ; le réseau régulier de linine à l'intérieur des
noyaux n'existe plus ; le suc nucléaire est devenu plus abondant, et les
granulations chromatiques se sont rassemblées en petites sphérules de
taille différente. A la place du grumeau formé précédemment pendant la
vie végétative de la Grégarine, grâce à l'action pulsatile du nucléole, on
observe une petite vésicule claire (fig. 24 et 29, pi. VII) de 4 f/ de dia-
mètre, limitée par une membrane mince, mais nette ; dans son intérieur
on distingue un réseau très délicat avec de fins grains chromatiques,
ainsi que quelques plaques chromatiques plus colorables, appliquées
contre la membrane (fig. 29, pi. VII). Il s'agit ici certainement d'un mi-
cronucleus formé à l'intérieur du noyau primaire, comparable à ceux
observés, par exemple, par Cuénot (1901) et Prowazek (1902) chez les
3Ionocystis des Oligochètes, très nettement par Schellack (1907) chez
Echinomera, et avec quelque doute par Léger et Duboscq (1909) chez
Nina de la Scolopendre. Plus net que celui de Nina, étant parfaitement
490 G. TRÊGOVBOFF
limité, il se distingue du micronucleus d'Echinomera figuré par Schellack
par l'absence de cône centrosomien. Je suppose qu'à ce stade le centro-
some, dont je constate ensuite la présence pendant la première mitose,
se trouve intimement confondu avec la membrane du micronucleus,
comme l'a observé Brasil (1905, c) chez les Monocystis des Lombrics,
et par conséquent très difficile à mettre en évidence. Un détail particulier
attire l'attention dans les noyaux primaires montrant les formations
micronucléaires : c'est l'aspect presque normal des nucléoles. A part une
légère diminution de volume, le gros nucléole unique si caractéristique
pour Gonospora de Cerithium, ne paraît pas subir d'autres modifications
pendant l'épuration nucléaire (fig. 24, 29 et 30, pi. VII) ; je n'ai jamais
observé sa vacuolisation, suivie de fragmentation, comme cela se produit
presque toujours dans les noyaux primaires des Grégarines au début de
l'évolution intrakystique ; c'est d'ailleurs sous le même aspect compact
et homogène qu'on le retrouve pendant la première division du micro-
nucleus (fig. 24 et 30, pi. Vil) et même quelquefois à la fin du stade de
la multiplication nucléaire.
Cette particularité dans le comportement du nucléole au cours de
l'épuration nucléaire, ainsi que le fait que le micronucleus en quelque
sorte « remplace » l'îlot intranucléaire, encore nettement visible au début
de l'évolution, suggèrent l'idée que l'idiochromatine et la trophochro-
matine du micronucleus pourraient être élaborées et expulsées du nucléole
même avant l'enkystement des Grégarines. Cette hypothèse est d'autant
plus séduisante qu'elle facilite l'interprétation de la ressemblance indé-
niable existant entre les formations intranucléaires des Gonospora âgées,
solitaires, et les vrais micronuclei des Grégarines enkystées. En effet, dans
les deux cas, comme le montre la comparaison des figures 23 et 24, c'est
la même petite vésicule claire, [nettement limitée par une mince membrane,
avec de fins grains chromatiques à l'intérieur et quelques plaques chro-
matiques périphériques appliquées contre la membrane. Je me borne
à la simple constatation de cette ressemblance entre les deux formations ;
il ne m'est pas possible d'affirmer leur homologie. Bien qu'ayant souvent
observé des kystes dans lesquels un des deux conjoints était « anucléolé »,
l'évolution initiale de ce dernier m'a échappée ; son étude seule aurait
permis d'établir avec certitude la nature de la formation intranucléaire
des Gonospora âgées.
Le stade suivant de l'évolution du micronucleus que je trouve
dans mes préparations est celui de la première mitose ; je l'ai
GONOSPORA TESTICULI 491
observé à l'état de plaque écLuatoriale 'et une fois pendant l'anaphase.
Après la résorption de la membrane, le noyau primaire se désagrège
en formant une sorte de chromidium ; ce dernier est constitué par des
grains chromatiques et des sphérules de grosseur variable, disséminés
dans une sorte de plage à contours irréguliers, fortement acidophile, pro-
venant de la dissolution du suc nucléaire et du réseau achromatique du
noyau, qui se sont répandus dans le cytoplasme environnant (fig. 24
et 30, pi. VII). A côté du nucléole non modifié se trouve le premier fuseau ;
il est petit, mesure 8 p de longueur, et se montre légèrement asymé-
trique à cause de l'écartement non complet des centrosomes (fig. 30, pl.VII) .
Les centrosomes ou plutôt les centrocônes, suivant la terminologie pro-
posée par LÉGER et Duboscq (1909), sont surmontés des centrioles déjà
dédoublés à ce stade, souvent légèrement écartés l'un de l'autre fig. 24,
pi. VII). Les irradiations des asters sont généralement assez nettes.
LTne image de la première mitose (fig. 30, pi. VII) m'a montré que les
centrioles, au lieu de surmonter directement les sommets des centro-
cônes, étaient situés au centre des petites sphères homogènes ; dans ce
cas les irradiations des asters prenaient naissance à la périphérie de ces
dernières. Le fuseau est formé par des fibres émanées des centrocônes ;
bien visibles dans la partie équatoriale, elles deviennent moins distinctes
vers les pôles pour se perdre finalement dans les appareils centrosomiens ;
une parmi elles, plus colorable, va d'un pôle à l'autre et correspond
certainement au chromosome axial ou impair des auteurs. La chromatine
de la plaque équatoriale se présente sous forme de nombreux grains chro-
matiques non agencés en chromosomes ; c'est d'ailleurs sous le même as-
pect que je l'ai observée à l'anaphase glisser le long des fibres du fuseau
vers les centrocônes (fig. 24, pi. VII). Je n'ai pas eu l'occasion de suivre
la reconstitution des noyaux issus de cette première mitose, n'ayant
rencontré que des noyaux déjà complètement reformés et prêts à entrer
de nouveau en division, ou même en train de la subir. Us ont 4 f/ de
diamètre et sont entourés d'une fine membrane. Le réseau achromatique
à l'intérieur de ces noyaux est constitué par des travées qui ne m'ont pas
paru avoir une orientation bien définie (fig. 31-34, pi. VII). La chroma-
tine est disséminée sur ces travées en grains fins, quelquefois en amas
(fig. 31), bien colorables par l'hématoxyline ferriques; quelques sphérules
plus grosses, représentant probablement les karyosomes, sont visibles
tantôt sur les travées du réseau, tantôt en dehors d'elles. Le centrocône
est quelquefois assez haut (fig. 32) et peut atteindre jusqu'à la moitié
492 G. TRËGOUBOFF
du diamètre du noyau. Son sommet est surmonté des deux centrioles
géminés, desquels partent les irradiations de l'aster. Je n'ai pas observé
à la base du centrocône les grains de la « couronne centrosomiénne «, bien
visibles dans les noyaux de cette catégorie chez certaines Grégarines
polycystidées. Les centrocônes se divisent et en glissant sur la membrane
du noyau se placent sensiblement l'un en face de l'autre, mais sans se
trouver aux extrémités d'un même axe de symétrie du noyau (fig. 33
et 34, pi. VII). Pendant la division des centrocônes et leur écartement on
observe dans leur intérieur l'apparition des fibres qui vont pénétrer en-
suite dans le noyau et constituer le fuseau pour la prochaine division
mitotique.
Stade II. — Le deuxième stade de l'évolution du kyste est caracté-
risé par la multiplication des noyaux dans les deux conjoints et par leur
dispersion à travers tout le kyste (fig. 25, pi. VII).
Il ne présente rien de particulièrement intéressant, tant au point de
vue des caractères distinctifs d'ordre sexuel chez les conjoints qu'à celui
des mitoses. D'ailleurs Gonospora de Cerithium est loin d'être un matériel
de choix pour l'étude minutieuse de ces dernières ; les figures mitotiques
sont généralement très petites, et la chromatine se présente sous forme
de grains, sans s'agencer en véritables chromosomes. Dans quelques
kystes à ce stade j'ai observé une grande diversité d'aspects et de dimen-
sions des mitoses chez le même conjoint (fig. 25, pi. VII) ; à côté des fu-
seaux petits et globuleux (fig. 35, pi. VII), on en remarque d'autres dont
la longueur est double et quelquefois même triple (fig. 36 et 37, pi. VII) ;
c'est dans ces fuseaux très étirés qu'on distingue le mieux le chromosome
axial ainsi que les centrocônes et les centrioles dédoublés dès l'anaphase ;
dans certains cas (fig. 37, pi. VII) les centrocônes se montrent même très
divergents.
A la fin du deuxième stade on trouve dans les deux conjoints parmi
les petits noyaux ordinaires un certain nombre d'autres un peu plus
grands et remarquablement pauvres en substance chromatique. Ils se
divisent par une mitose, dont la modalité est différente de celle qu'on
observe chez les noyaux ordinaires. Toute la matière chromatique dans
ces noyaux se condense au centre en quelques grosses sphérules, le plus
souvent au nombre de 4. A la périphérie, étroitement appliqué contre la
membrane nucléaire, se trouve un centrocône très bas avec un centriole
simple au stade de repos, duquel partent quelques courtes irradiations.
Le centriole et le centrocône ne tardent pas à se diviser ; les deux cen-
GONOSPORA TESTICULJ 493
trocônes glissent le long de la membrane nucléaire (fig. 38, pi. VII) et
se placent aux deux pôles du noyau (fig. 39, pi. VII). Pendant cette
translation les corps des centrocônes envoient de fines fibrilles radiaires
vers le centre du noyau, lesquelles formeront finalement le fuseau intra-
nucléaire non continu ; les centrioles et les centrocônes restent en dehors
de la membrane nucléaire. Les quatre sphérules chromatiques qui si-
mulent la plaque équatoriale en se plaçant entre les deux cônes fibril-
laires ne représentent probablement pas les chromosomes individualisés,
puisque pendant l'anaphase la chromatine remontant le long des fibres
du fuseau se montre sous forme de tout petits grains étroitement tassés
(fig. 40, pi. VII). La membrane nucléaire ne disparaît qu'au moment de
la reconstitution des noj^aux-fils. Des mitoses semblables ont été observés
par Brash. (1905 h) chez Urospora lagidis et par Miss Robinson (1910)
chez Kalpidorhynchus arenicolae, proches parentes de Gonospora de Ceri-
thium. La signification de ces noyaux n'est pas douteuse : ce sont des
noyaux retardataires ; à la fin du deuxième stade tous les noyaux dans
chaque conjoint se montrent absolument semblables entre eux.
Stade III. — Ce stade est caractérisé par la structure légèrement
différente des noyaux des deux conjoints ainsi que par leur distribution
non identique chez le mâle et chez la femelle. C'est pendant ce stade qu'ap-
paraissent pour la première fois dans les kystes les différences nucléaires
d'ordre sexuel (fig. 26, pi. VII).
Les noyaux. des deux conjoints sont très petits, et leur étude minu-
tieuse n'est pas possible. Chez le mâle ils se présentent sous l'aspect de
petites vésicules fortement chargées de chromatine et surmontées d'un
centrosome étroitement accolé contre la membrane. Ils sont distribués
en réseau régulier dans tout le corps cytoplasmique. Aux forts grossisse-
ments on se rend compte qu'ils sont situés par files sur des travées relative-
ment étroites, constituées par un cytoplasme très dense et homogène ;
des travées très nombreuses s'anastomosent et forment ainsi un réseau
qui parcourt tout le corps du mâle. Chez la femelle les noyaux sont un peu
plus grands et plus clairs ; leur chromatine en quantité moindre est appli-
quée contre la membrane nucléaire, le plus souvent du côté opposé au
centrosome ; ce dernier se présente sous le même aspect que dans les
noyaux du mâle. Au début de ce stade, chez la femelle le cytoplasme
germinatif constitue des plages, à peine anastomosées entre elles, dans
lesquelles sont plongés de nombreux noyaux ; ces agglomérations nu-
cléaires (fig. 26, pi. VII) sont très caractéristiques pour la femelle ; il ne
494 G. TRÊGOUBOFF
m'a pas été possible de constater leur existence chez le mâle à aucun stade
de l'évolution. Ce n'est que vers la fin du troisième stade que le cytoplasme
germinatif de la femelle s'agence en un réseau comparable à celui du mâle ;
les noyaux des deux conjoints disséminés dans tout le kyste restent en-
suite un temps au repos.
Stade IV. — Le commencement du quatrième stade est marqué par
des véritables crises mitotiques qui se manifestent dans les noyaux des
deux conjoints, et sa fin — par l'agencement des noyaux définitivement
formés des futurs gamètes en vue de la différenciation de ces derniers.
Les mitoses, généralement simultanées dans tous les noyaux d'un
conjoint, sont quelquefois synchrones dans les deux ; mais le plus souvent
c'est le mâle qui est légèrement en avance (fig. 27, pi. VII). Elles sont
très petites (6 p. de longueur), ce qui rend impossible leur étude détaillée ;
on ne constate aucune différence notable entre elles chez les deux con-
joints, à laquelle on pouvait s'attendre étant donné la structure non
identique des noyaux avant les divisions. Chez les deux conjoints la
chromatine au stade de la plaque équatoriale se présente comme une
masse compacte et inanalysable. Si le phénomène de la réduction chroma-
tique a lieu pendant ces dernières divisions qui précèdent la formation
des gamètes, dans ce cas il m'a totalement échappé.
Pendant les crises mitotiques le corps cytoplasmique des Grégarines
commence à se découper en lobes ; des fentes d'abord étroites se forment
dans son intérieur, sur les bords desquelles sont placés les noyaux en
division (fig. 27, pi. VII). La fin des crises mitotiques correspond générale-
ment à ceUe du découpage du corps cytoplasmique. Les noyaux issus des
dernières mitoses se portent à la périphérie des lobes. Au début ils sont
excessivement petits et leur structure est indistincte. Mais au fur et à
mesure de leur accroissement apparaissent des différences fondamentales
entre les noyaux des futurs gamètes. Chez le mâle les noyaux sont petits
et hyperchromatiques ; ils sont surmontés d'un cône allongé et étroit,
dirigé vers la lumière des fentes (fig. 28, pi. VII), à la base duquel, au
voisinage immédiat de la membrane nucléaire, on constate la présence
d'un centriole en forme de grain (fig. 41, pi. VII). Les noyaux de la femelle
sont presque deux fois plus grands que ceux du mâle ; ils apparaissent
clairs et vésiculeux, leur chromatine en quantité bien moindre que chez
le mâle étant périphérique, appliquée contre la membrane sous forme de
plaques (fig. 28, pi. VII) ; quelques fins grains de poussière chromatique
sont visibles à l'intérieur de ces noyaux. Ils sont surmontés également
GONOSPORA TE8TICULI 495
d'un centrocône tourné vers l'extérieur, mais plus large et plus bas que
dans les noyaux du mâle; un centriole se trouve à la base du centrocône
(fig. 42, pi. VII).
Stade V. — Le cinquième stade comprend la formation des gamètes.
Son début correspond au stade classique de perlage. Légèrement en
avance chez le mâle, il s'accomplit chez les deux conjoints suivant le
même processus bien connu : d'abord par l'isolement autour de chaque
noyau d'une partie de cytoplasme, ensuite par l'étirement du corps cyto-
plasmique et finalement par son détachement. Après l'individualisation
des gamètes il ne reste généralement dans les kystes aucun reliquat, tout
le cytoplasme paraissant être employé pour la formation des gamètes. Les
kystes avec les gamètes différenciés sont assez fréquents ; il est probable
que les gamètes une fois formés restent un certain temps au repos avant
d'entrer en copulation. Je ne suis pas parvenu à les voir en mouvement.
J'ai obtenu des images réellement bonnes des gamètes seulement
après les fixateurs à base d'acide osmique, en particulier après ceux de
Hermann et de Champy ; les fixateurs non osmiques agissent trop brutale-
ment et ratatinent presque toujours les noyaux.
Les gamètes sont nettement anisogames ; les différences se manifestent
non seulement dans la structure des noyaux, mais aussi dans leur confor-
mation extérieure. Le gamète femelle (fig. 44, pi. VII) est ovalaire et
mesure environ 6 y. de longueur ; son noyau situé à une extrémité du
corps est clair, peu chromatique ; la chromatine est condensée en plaques
périphériques appliquées contre la membrane ; de plus, quelques fins
grains chromatiques sont visibles à l'intérieur du noyau. Un centrosome
en forme de grain se trouve à proximité du pôle supérieur du noyau. Le
cjrtoplasme sans inclusions d'aucune sorte est alvéolaire, plus dense et
homogène au voisinage immédiat du noyau.
Le gamète mâle est plus différencié (fig. 43, pi. VII). Il est caractérisé
par la présence d'un petit rostre pointu de 1 \). 5 de longueur environ,
surmontant le corps ovalaire, légèrement acuminé vers l'arrière. Avec le
rostre, il mesure près de 6 \j. de longueur. La partie antérieure du corps,
celle qui supporte le rostre, n'est pas arrondie, mais se montre comprimée
en forme de cône surbaissé. Le rostre se colore plus foncément que le reste
du corps ; à sa base on constate la présence d'un centrosome granuhforme
situé au-dessus du noyau hj^erchromatique, plus petit que celui du
gamète femelle. La strucutre du cytoplasme du spermatozoïde est iden-'
tique à celle de l'œuf.
496 G. TRÉGOUBOFF
Stade VI. — Pendant ce stade ont lieu les phénomènes de la copu-
lation des gamètes et de la fécondation des œufs ; sa fin est marquée par
la formation des copula ou zygotes qui subissent ensuite un certain temps
d'arrêt dans l'évolution.
La période des copulations dure peu de temps. Le gamète mâle
s'accoUe à l'œuf en enfonçant son rostre dans celui-ci. A l'endroit oii le
rostre du spermatozoïde pénètre dans l'œuf il se forme dans ce dernier
une sorte de bec destiné probablement à faciliter la copulation (fig. 45,
pi. VII). Les noyaux des deux gamètes se montrent pendant l'accouple-
ment légèrement aplatis sur les côtés situés en face des centrosomes. Cet
aplatissement est nettement visible dans le stade de prozygote (suivant
le terme proposé récemment par Mme Pixell-Goodrich (1915), pendant
lequel les deux noyaux sexués restent encore indépendants, tandis que
s'est opérée déjà la fusion complète des corps cytoplasmiques des deux
gamètes (fig. 46, pi. VII). Dans tous les cas observés par moi la pénétra-
tion du spermatozoïde se faisait par le pôle nucléé de l'œuf. Il est possible
cependant qu'elle se fasse aussi ailleurs, puisqu'on constate souvent
dans les prozygotes l'écartement notable des deux pronuclei flanqués de
leurs centrosomes (fig. 46 et 47, pi. VII). Les deux noyaux sexués finale-
ment, se rapprochent ; le noyau du spermatozoïde, parfaitement recon-
naissable grâce à son hyperchromaticité et à sa taille plus petite, s'applique
étroitement contre le noyau de l'œuf (fig. 49, pi. VII). La membrane de
ce dernier devient indistincte ; elle l'est encore au stade suivant de syn-
caryon (fig. 50, pi. VII), pendant lequel la chromatine s'agence en quel-
ques gros grumeaux disposés périphériquement, ce qui donne une appa-
rence plus ou moins sphérique à ce gros noyau mal limité. Les deux cen-
trosomes des noyaux sexués fusionnent également ; on les aperçoit sous
forme d'un gros grain unique, quelquefois bacilliforme, à proximité du
noyau. Le stade de syncaryon, très fugace, ne tarde pas à se transformer
en celui de zygote ou de copula, plus durable et très caractéristique pour
Gonospora testiculi. La copula est ovalaire et mesure 7 /z de longueur en
moyenne. Son noyau sans karyosome bien distinct se montre piriforme
ou sphérique ; il est nettement limité par une membrane mince et se trouve
rattaché au centrosome apical par un centrocône très étroit, presque
filiforme, fortement colorable par l'hématoxyline ferrique, et plus ou
moins long suivant la place du noyau dans la copula (fig. 51, pi. VII).
Très souvent au pôle opposé du noyau on observe la présence d'un gros
grain chromatique accolé extérieurement contre la membrane nucléaire.
GONOSPORA TESTICULI 497
Il est probable que ce grain correspond au centrosome déjà divisé en vue
de la première mitose dans la copula. La fig. 52 de la planche VII le
montre déjà bien éloigné du noyau et rattaché à ce dernier par un centro-
cône comparable à celui du centrosome apical.
Stade VII. — Pendant ce dernier stade s'accomplit l'évolution des
œufs fécondés qui aboutit à la formation des spores mûres.
La première division dans la copula est difficile à étudier en détail ;
la chromatine ne s'agence pas en chromosomes et se présente pendant
toute la division sous forme de grains isolés. Annoncée par la division
préalable des centrosomes (fig. 52, pi. VII), la première mitose se montre
sous l'aspect d'un fuseau fortement colorable, tantôt globuleux et court
(fig. 53, pi. VII), tantôt étroit et allongé (fig. 56, pi. VII); disposé quel-
quefois suivant le grand axe de la copula, le fuseau forme le plus souvant
un angle plus ou moins aigu avec ce dernier. De nombreux grains chro-
matiques sont situés sur presque toute la longueur du fuseau. Son aspect
est ainsi très particulier et rappelle vivement les images données pour
cette division par Woodcock (1906) chez les Cystohia des Holothuries
et par Miss Robinson (1910) chez Kalpidorhynchus arenicolae. La recons-
titution des noyaux issus de cette division paraît se faire suivant deux
types différents. Quelquefois elle a lieu déjà dans la région équatoriale
(fig. 54 et 57, pi. VII), et dans ce cas les deux noyaux très chromatiques
apparaissent surmontés de cônes foncés plus ou moins étirés, aux som-
mets desquels on distingue les centrosomes. Mais le plus souvent elle
s'accomplit au voisinage immédiat de ces derniers, et les deux noyaux
restent reliés pendant un certain temps par une centrodesmose (fig. 55
et 58, pi. VII). Hyperchromatiques au stade de la reconstitution, les
noyaux au repos apparaissent dans les sporocystes comme des vésicules
claires, à chromatine périphérique, surmontés d'un centrosome net (fig. 58
et 60, pi. VII). Après les deux divisions mitotiques successives, souvent non
synchrones, les huit noyaux, disséminés au début sans aucun ordre appa-
rent, se placent dans la région équatoriale. C'est à ce moment que je
perds la trace du centrosome, dont j'ai pu mettre en évidence l'existence
pendant toute l'évolution du kyste à partir de la mitose du micronucleus ;
je ne le retrouve pas non plus dans les noyaux des sporozoïtes de la spore
mûre.
La spore mûre de Gonospora testiculi rappelle vivement celles de
Cystohia irregularis et de Kalpidorliynchus arenicolae. Elle est ovalaire
et mesure 8-10 u de longueur. L'épispore (apparue très tard, pas avant
498 G. TRÉGOUBOFF
le stade du sporocyste à 8 noyaux) se prolonge au sommet en un col à
pourtour lisse, sans dents ni pointes ; son orifice est peu visible (fig. 61,
pi. VII). L'endospore contient huit sporozoïtes falciformes, longs de 5 [j.
environ (fig. 62, pi. VII), disposés en barillet. Aucun reliquat ne se trouve
à l'intérieur de la spore.
Le kyste mûr ne montre que rarement un reliquat du cytoplasme non
utUisé pour la formation des spores. Sa déhiscence par simple rupture
de la membrane s'effectue très souvent dans les conduits spermatiques
de Cerithium. EUe peut avoir lieu encore avant sa maturité complète,
étant donné qu'on observe dans les coupes parmi les spermatozoïdes de
l'hôte une quantité prodigieuse des sporocystes isolées à 2-8 noyaux.
VII. Evolution anormale des kystes
Au cours de mes recherches sur l'évolution sexuée de Gonospora
testiculi j'ai rencontré un certain nombre de kystes anormaux de cette
Grégarine formés par un seul individu. Il ne m'a pas été possible de suivre
d'un bout à l'autre l'évolution de ces kystes solitaires ; néanmoins,
l'étude de quelques principaux stades me permet d'apporter certaines
précisions sur cette importante question, qui a donné heu à de nombreuses
discussions.
Je n'insisterai pas sur tous les cas signalés par les divers auteurs,
concernant l'évolution anormale des Grégarines. Schellack (1908) a
donné une excellente mise au point de nos connaissances encore bien
incomplètes sur l'évolution des kystes soHtaires des Grégarines poly-
cystidées et monocystidées. Quelques travaux parus ultérieurement à
son étude seront cités au cours de la brève description de cette évolu-
tion chez la Grégarine parasite de Cerithiu7n.
Le début de l'évolution des kystes solitaires de Gonospora testiculi
m'a totalement échappé. Il doit présenter certainement un grand intérêt
au point de vue de la multiplication nucléaire, à en juger d'après l'aspect
très particulier des petits noyaux déjà très nombreux que j'ai observés
dans ces kystes. Le plus jeune kyste solitaire rencontré est représenté à
la figure 64, planche VIII. Il provient d'un frottis fixé auBouiN alcoolique
et coloré à l'hématoxyline de Heidenhaiîs". Le kyste entier, légèrement
aplati par la lamelle, est entouré d'une mince membrane. Dans son inté-
rieur on distingue nettement les contours d'une Grégarine repliée sur
elle-même ; la cuticule a disparu sur toute la périphérie du corps, mais
GONOSPORA TESTICULI 499
reste bien visible dans la partie centrale du kyste où elle forme un repli,
ce qui donne à ce kyste solitaire une vague apparence d'un kyste double.
Le corps cytoplasmique à structure alvéolaire, compact dans la partie
centrale, est divisé à la périphérie en rubans monilif ormes plus ou moins
épais. Un grand nombre de petits noyaux est disséminé dans tout le
cytoplasme ; Us n'ont pas tous la même structure et sont de taUle diffé-
rente. Certains, parmi les plus petits, n'ont pas de limites nettes et ont
plutôt l'aspect d'agglomérations constituées par des grains chromatiques
peu nombreux. Les autres, principalement ceux des rubans plasmatiques,
sont un peu plus grands ; leur structure est mieux définie et ils apparais-
sent comme des vésicules claires, à chromatine périphérique. La figure 65,
planche VIII, représente à un plus fort grossissement un des rubans plasma-
tiques et montre la structure et la différence des dimensions des noyaux
situés à sa périphérie. Enfin, un certain nombre de gros grumeaux chro-
matiques mal définis est visible dans le corps cytoplasmique de la Gré-
garine. Dans la partie caudale de la Grégarine la dissociation cytoplas-
mique est plus avancée ; on distingue déjà les petits éléments isolés. Sur la
figure 66, planche VIII, sont représentés quelques-uns de ces éléments pro-
venant du frottis d'un kyste solitaire au stade un peu plus avancé. Ils se
montrent sphériques ou ovalaires ; leurs dimensions oscillent entre 4-15 ^v.
de diamètre. Les plus petits sont uninucléés ; leurs noyaux généralement
excentriques sont bien délimités, à chromatine périphérique ; le cyto-
plasme est alvéolaire, sans inclusions. Les éléments plus grands contien-
nent tantôt un seul noyau volumineux, tantôt deux de taille inégale ; il est
certain que ces derniers éléments sont destinés à subir encore une frag-
mentation et représentent simplement les portions plurinucléées des
rubans cytoplasmiques. Je n'ai pas observé de divisions nucléaires d'au-
cune sorte, ni dans les kystes au stade antérieur à cette sorte de perlage
de la Grégarine solitaire, ni dans les éléments binucléés issus des rubans
plasmatiques. Il est rare de trouver des kystes dans lesquels à la fin de
la dissociation cytoplasmique tous les éléments soient uninucléés et de
même taille ; le plus souvent cette uniformité n'est pas atteinte, la disso-
ciation n'étant pas simultanée ; presque toujours d'aUleurs tout le cyto-
plasme n'est pas utilisé pour la formation des éléments uninucléés ; une
partie persiste autour de gros grumeaux chromatiques, tantôt au centre,
tantôt à la périphérie des kystes, sous forme de gros lobes multinucléés.
Je viens de dire que c'est à ce stade de perlage que j'ai observé le
plus jeune kyste solitaire de Gonospora testiculi. Je dois ajouter cepen-
500 G. TRÉGOUGOFF
dant que dans quatre cas sur quelques milliers de Grégarines étudiées,
j'ai rencontré les mêmes images nucléaires chez des individus non enkystés,
libres dans la cavité testiculaire de Cerithium, ce qui semble indiquer la
possibilité de cette évolution anormale en dehors de l'enkystement. Ces
quatre cas ont été observés dans les testicules de Cerithium très peu parasi-
tés, dans lesquels, à part quelques rares individus adultes, tous les autres
stades de l'évolution de la Grégarine étaient absents. La figure 63, plan-
che VIII, représente la coupe transversale d'une de ces Grégarines. La cuti-
cule apparaît nette, mais sans striation visible. Dans le cytoplasme alvéo-
laire on constate la présence de formations nucléaires identiques à celles
des kystes solitaires, c'est-à-dire de nombreuses petites agglomérations des
grains chromatiques simulant les noyaux sans limites nettes et de quel-
ques gros grumeaux chromatiques de forme irrégulière. Ce stade correspond
exactement à celui de « chromidium germinatif » de certains auteurs,
d'après lesquels il résulterait de la destruction du noyau primaire de
la Grégarine et précéderait la reconstruction des noyaux secondaires.
Je me borne à cette simple constatation de ressemblance, puisqu'il ne m'a
pas été donné d'observer la formation de ce « chromidium ».
Quelle valeur doit-on attribuer aux éléments uninucléés issus de la
dissociation du corps cytoplasmique des Grégarines dans les kystes soli-
taires ? Il ne s'agit certainement pas ici de gamètes différenciés au point
de vue sexuel, même destinés à copuler en dehors du kyste, comme l'a
cru constater Cecconi (1902) chez les Monocystis des Lombrics ; une
simple comparaison avec les images de perlage et de la conformation
des gamètes des kystes normaux interdit tout rapprochement de ce côté.
En arrêtant l'étude des kystes solitaires à ce stade, l'idée la plus simple
qui vient à l'esprit est celle de la schizogonie. C'est à cette conclusion
qu'est arrivé en particulier Swarczewsky (1910) pour Lankesteria
sp. des Planaires du Lac Baïcal. Swarczewsky a observé l'évolution
des kystes solitaires presque d'un bout à l'autre. Il a décrit longuement
la dégénérescence du noyau primaire de la Grégarine, la formation du
chromidium dans le cytoplasme, la reconstruction ultérieure des noyaux
secondaires et enfin la dissociation du corps cytoplasmique en éléments
uninucléés. Il a attribué à ces derniers la valeur des schizozoites et, fait
à retenir, les a figurés dans certains cas (voir ses fig. 55 et 56, pi. IIL)
dans les kystes parmi les sporocystes à 8 noyaux et les spores mûres
« normales ». Pour expliquer cette anomalie Swarczewsky s'est vu dans
l'obligation d'admettre la possibilité de la schizogonie de sa Lankesteria
GONOSPORA TESTICVLJ 501
même dans les kystes normaux à 2 conjoints ; il dit à ce sujet : « In
den Fâllen, in welchen ich eine Schizogonie bei Lankesteria sp. zu finden
glaube, kann mann sowolil in normalen Cysten, d. h. in den Fâllen,
wo zwei Gregarine zusammen sich encystieren, wie auch in Solitâren
eine solche beobachten ». (1910, p. 659), Les stades de l'évolution
anormale observés par moi chez Gonospora testiculi présentent une
ressemblance frappante avec les images que donne Swarczewsky pour
Lankesteria. Il ne m"cst pas possible pourtant d'accepter les conclusions
de cet auteur pour cette raison que l'examen des kystes aux stades plus
avancés démontre la possibilité de l'évolution ultérieure toute parti-
culière de ces soi-disant scliizozoites, et non leur simple accroissement,
comme le suppose Swarczewsky. En effet, chez Gonospora testiculi
cette évolution aboutit à la formation de gymnospores sphériques ou
légèrement ovalaires de 4 ^ de diamètre renfermant quatre sporozoïtes
recourbés (fig. 68, e, pi. VIII).
Comme je le disais plus haut, les kystes dans lesquels tout le corps
cytoplasmique de la Gregarine se dissocie simultanément en éléments
uninucléés égaux entre eux, sont rares. Le cas le plus fréquent de la
dissociation est représenté sur la figure 67, planche VIII. Elle montre un
kyste solitaire dans lequel le démembrement du corps de la Gregarine en
éléments d'abord plurinucléés et ensuite uninucléés est accompagné en
même temps de la transformation de ces derniers en véritables sporo-
cystes à 2, 3 et 4 noyaux. Les principaux stades de l'évolution des sporo-
cystes sont représentés sur la figure 68, a-rf, de la planche VIII. On ne peut
pas songer à les étudier en détail. Les noyaux sont très petits et à chro-
matine massive. Je n'ai pas pu me rendre bien compte si leurs divisions
se font par mitoses ou par amitoses ; en tout cas les noyaux issus des
divisions restent reliés pendant quelque temps par une centrodesmose
(fig. 68 6, c, pi. VIII), comme cela a heu dans les sporocystes normaux.
La structure des noyaux est plus distincte dans les sporocystes à 4 noyaux ;
à ce moment ils deviennent plus clairs, leur chromatine se portant à la
périphérie. Les quatres sporozoïtes d'abord courts, trapus et virgulifor-
mes (fig. 68 d, pi, VIII), s'étirent ensuite et à l'état parfait mesurent envi-
ron 4 |tx de longueur ; ils se montrent légèrement recourbés et le plus
souvent occupent ime position quelconque dans la spore (fig. 68 d,
pi. VIII). Toutes les gymnospores observées par moi chez Gonospora
testiculi étaient tetrazoïques. Il ne semble pas pourtant que le nombre
des sporozoïtes dans ce genre de spores soit limité à quatre chez toutes les
502 G. TEÉGOUBOFF
Grégarines. Ainsi, par exemple, chez Monocystis pareudrili Cognetti
DE Martiis (1911) a observé dans les kystes solitaires des sporocystes
à 8 noyaux. Les spores de Lankesteria figurées par Swarczewsky à
côté des éléments uninucléés, et qui ont certainement la même origine
que celle de Gonospora, contierment également huit sporozoïtes. D'autre
part, chez une Grégarine non décrite, voisine de Cystohia holothuriae,
parasite de Stichopus regalis, j'ai observé la formation des gymnospores
dans les kystes solitaires tantôt tetrazoïques, tantôt octozoïques. Aucune
confusion avec les spores d'un autre parasite, toujours à redouter dans
les cas d'une infection multiple, n'était possible, la Grégarine de Stichopus,
comme c'est d'aiUeurs le cas de Gonospora de Cerithium, étant parasite
unique. Il est probable ainsi que l'évolution anormale puisse suivre des
règles moins rigoureuses que l'évolution sexuée normale.
Quoiqu'il en soit, il n'est pas douteux que l'évolution des kystes
solitaires chez Gonospora testiculi aboutit à la formation des gymnos-
pores parthénogénétiques. Quant à leur destination il ne m'est pas pos-
sible de la préciser ; leur sort m'est resté inconnu. Tout ce que je peux
dire, c'est les avoir observées souvent en liberté dans les conduits sper-
matiques de Cerithium mêlées aux sporocystes et aux spores normaux,
et par conséquent destinées à être évacuées avec ces derniers.
Pour finir avec l'évolution anormale de Gonospora, je dois signaler
encore un cas très curieux observé par moi en tout trois fois. Il s'agit,
comme le montre la figure 69, planche VIII, d'un kyste normal à 2 conjoints
dans lequel le mâle arrivé 'au stade des rubans a dégénéré. Dans ce cas
chez la femelle, à la place des œufs normaux, j'ai constaté la présence
d'éléments uninucléés et de portions de rubans multinucléés (fig. 70,
pi. VIII) absolument semblables à ceux qu'on observe dans les kystes soH-
taires. Cette anomalie semblerait indiquer la possibilité d'un changement
radical dans l'évolution de la femelle dans le cas de la dégénérescence
prématurée du mâle.
VIII. Affinités de Gonospora testiculi et sa position systématique
Dans ma note préliminaire (1916) j'ai décrit la Grégarine de Cerithium
sous le nom de Cystohia testiculi en la faisant rentrer provisoirement dans
le genre Cystohia, tel qu'il a été défini par Dogiel (1909) dans son étude
sur les sporocystes des Grégarines monocystidées cœlomiques. Dans cet
intéressant essai de la classification de ces Grégarines Dogiel, en se basant
GONOSPORA TESTICULl 508
uniquement sur la conformation des spores, a proposé de réunir dans le
genre Cystobia toutes les formes dont les spores à pôles dissemblables
(hétéropolaires) et à section transversale circulaire possèdent une épis-
pore (ou exospore) arrondie à l'extrémité postérieure et étirée en forme
de cupule ou d'entonnoir à l'extrémité antérieure. Ainsi défini, ce genre
devait comprendre : Cystobia irregularis Mestchin, Gonospora varia Léger,
Gonospora sparsa Léger et Kalpidorhynchus arenicolae Cunningham.
Quant au genre Gonospora sensu stricto, créé par Schneider, d'après
Dogiel, il devait être maintenu pour une seule espèce — Gonospora tere-
bellae Kolliker et être rattaché aux Schizogrégarines — Selenidiidées ,
avec lesquelles cette espèce présente des affinités certaines.
Récemment Mme Pixell-Goodrich (1916) a fait remarquer avec
juste raison que Schneider (1875) a créé le genre Gonospora avant tout
pour une Eugrégarine monocystidée parasite d'Audouinia laniarckii ;
ayant cru la retrouver dans les Terebelles et admis, quoique avec beau-
coup de doute ^ son identité avec Monocystis {Gregarina) terebella'^ de
Kôlliker, Schneider a eue la malencontreuse inspiration de désigner
la Grégarine d'Andouinia sous le nom de Gonospora terebellae. La simple
comparaison des figures de Kôlliker (1848, f. 6) avec celles de Schneider
(1875, fig. 14-16, pi. XIX) démontre que la diagnose du genre Gonospora
et la description de l'espèce donnée par Schneider ne s'appliquent en
aucune façon à la Grégarine observée par Kôlliker dans les Terebelles,
laquelle est certainement un Sélénidien. Dans ces conditions il est pré-
férable, suivant la proposition de Mme Pixell-Goodrich (1916), de
maintenir le genre Gonospora dans les Eugrégarines monocystidées pour
lesquelles il a été créé et d'admettre comme première espèce sûre de ce
genre : Gonospora varia du cœlome d' Audouiyiia décrite en 1892 par Léger
et reétudiée plus tard par Brasil (1905 b) ; elle est d'ailleurs probable-
ment identique à celle observée par Schneider chez Audouinia lamarckii
de Roscofï. Le genre Gonospora de Schneider (1875) a ainsi la priorité
sur celui de Cystobia de Mingazzini (1891) ; ce dernier, dont la création
a été jugée inutile par Léger déjà en 1897, est destiné probablement à
disparaître de la systématique ; sa suppression paraît d'être d'autant plus
justifiée que le nom de Cystobia a été proposé par Mingazzini pour
Cystobia holothuriœ, parasite de Holothuria tubulosa, dont les spores pos-
1. Voici, en effet, ce que dit Schneider (1875. p. 598) à ce sujet : « Je crois que cette Grégarine correspoiul
à celle que M. Koelliker a décrite sous le nom de Monocystis terehellœ, mais je n'oserais pourtant l'affirmer. La
ressemblance des Monocystidées est extrême et, en l'absence d' m dessin très exact de la spore, leur classification
est absolument impossible. »
Arch. de Zool. Exp. et Oén. — T. 57. — F. 4. 33
50 4 G. TRÉ GO UBOFF
sèdent un prolongement caudal et que Dogiel (1909) lui-même fait
rentrer dans son genre Urospora {sensu lato).
Cette rectification nécessaire admise, il est certain que la classification
proposée par Dogiel (1809) rien que sur la base de la conformation des
spores permet de grouper les Grégarines en familles naturelles et bien
délimitées. Quant à la valeur des genres, tels qu'ils ont été définis par
cet auteur, on est tenu à faire quelques réserves, étant donné qu'à de
rares exceptions près l'évolution détaillée de diverses formes rattachées
à ces genres ne nous est pas bien connue. Ainsi le genre Urospora, qui
devait, d'après Dogiel, englober toutes les Grégarines monocystidées
cœlomiques dont les spores possèdent un prolongement caudal simple,
semble devoir subir déjà un démembrement. Les recherches très précises
de Mme Pixell-Goodeich (1915) sur les Grégarines des Spatangoïdes
ont démontré l'existence de différences réelles dans l'évolution sexuée,
ainsi que le degré de l'anisogamie très différent dans les deux types ex-
trêmes étudiés : Lithocystis et Urospora ; l'anisogamie très légère chez
Lithocystis est, par contre, très prononcée chez Urospora sensu stricto,
dont le gamète mâle serait flagellé. Ces différences jointes à celles relatives
à la conformation des spores semblent justifier le maintien des deux genres
distincts : Lithocystis de Giard (1876) et Urospora de Schneider (1875).
Il serait prématuré daffirmer actuellement que le genre Gonospora
(Cystobia) sensu Dogiel doit subir le même sort. Il n'est pas possible non
plus de donner pour le moment sa diagnose précise et complète, cer-
taines espèces étant encore mal connues. En conservant celle de Dogiel
et en tenant compte des formes décrites ultérieurement à son travail,
le genre Gonospora comprendrait actuellement les espèces suivantes :
1. Gonospora varia Léger (1892), parasite du cœlome à' Audouinia.
2. Gonospora sparsa Léger (1892), du cœlome de Phyllodoce et de Glycera.
3. Gonospora glycerœ Pixell-Goodrich (1916), parasite cœlomique de
Glycera sipJionostoma D. Ch.
4. Gonospora {Kalpidorhynchus) arenicolae (Cunningham, 1907), du
cœlome d'Arenicola ecaudata.
5. Gonospora testiculi Trégouboff (1916). parasite du testicule de Ceri-
thium vulgatum Brug.
6. Gonospora {Cystobia) intestinalis (Ssokoloff) (1913), parasite de
l'intestin de Glycera {Rhynchobolus) siphonosfoma D. Ch.
7. Gonospora longissima Caullery et Mesnil (1898), du cœlome de
Dodecaceria concharmn O'Erst.
GONOSPORA TESTICVLI 505
8. Gonospora {Cystobia, Diplodina) irregularis (Minchin 1893, Woodcock
1906), parasite des vaisseaux sanguins de Holothuria forskali.
9. Gonospora {Cystobia, Diplodina) minchini (Woodcock 1906), du cœlome
et des poumons des Cucumaria pentactes et Cucumaria planci ^
C'est avec intention que j'ai disposé dans cette liste les espèces dans un
ordre non chronologique. En effet, parmi ces neuf espèces les quatre pre-
mières constituent certainement un ensemble homogène. Leurs affinités
certaines ont été mises suffisamment en évidence encore par Dogiel (1909)
et ensuite surtout par Mme Pixell-Goodrich (1916), ce qui me dispense
d'une étude comparative plus détaillée. C'est à elles, et en particulier à
Gonospora {KalpicJorhynchus) arenicolae, qu'on doit rattacher la Grégarine
parasite du testicule de Cerithium. Les grandes lignes de la diagnose de
Gonospora testiculi, que je donne à la fin de ce travail, peuvent être appli-
quées indistinctement à toutes ces espèces. D'un autre côté, il n'est pas
douteux que Gonospora {Cystobia) intestinalis de Ssckoloff est aussi
une très proche parente de Gonospora testiculi, avec laquelle elle possède
le caractère biologique commun d'être parasite des tissus et non cœlo-
mique, comme toutes les autres espèces du genre. Malheureusement, un
rapprochement plus étroit est impossible par le fait de l'insuffisance de
la description donnée par Ssckoloff.
La même réserve s'impose pour les trois dernières espèces, quoique pas
pour les mêmes raisons. Gonospora longissima, dont les spores mêmes
n'ont pas été figurées avec la clarté nécessaire, est trop mal connue pour
permettre un rapprochement quelconque. Quant aux Gonospora {Cys-
tobia, Diplodina) des Holothuries, leur cycle évolutif doit être reétudié au
moins en ce qui concerne la gamétogenèse ; l'isogamie parfaite des gamètes
préconisée par Woodcock n'existe certainement pas, d'après quelques
données que je possède sur l'évolution sexuée de Gonospora {Diplodina)
irregularis ainsi que sur celle d'une autre forme voisine, non décrite,
parasite de Stichopus regalis.
La diagnose de la Grégarine parasite du testicule de Cerithium vul-
gatum Brug. est la suivante :
Gen. Gonospora Schneider (1875), emend. Pixell-Goodrich (1916).
Spec. G. testiculi Trégouboff.
1. Je n'ai pas mentionné dans cotte liste la Grégarine parasite du tissu conjonctif lacunaire de l'intestin de
Synapta digitata. décrite par CcÉNOT (1912) sous le nom de Gonospora mercUri. Cette Grégarine est encore connue
d'une manière très imparfaite ; par la conformation de ses spores (l'épispore mince et flottante dépassant l'en
dospore en arrière, où elle forme une sorte de capuchon plus ou moins pointu), cette Grégarine semble se rapprocher
plutôt des Urospora sensu stricto.
506 G. TRÉGOUBOFF
Les formes jeunes sphériques sont intraépithéliales ou intracellulaires
dans l'épithélium germinatif. Les individus adultes, libres dans la cavité
testiculaire, peu mobiles, sont allongés, de 250 jj. de longueur au maxi-
mum., arrondis à l'extrémité antérieure, effilés à l'extrémité postérieure.
L'accouplement tardif est terminal, par les extrémités antérieures. Les
kystes normaux sphériques de 60-100 p. de diamètre sont entourés d'une
mince membrane, sans enveloppe gélatineuse ; la déhiscence des kystes se
fait par simple rupture. Les gamètes sont anisogames, les spermatozoïdes
possèdent un rostre. Les spores normales, à 8 sporozoïtes, de 8-10 [x de
longueur sont hétéropolaires ; l'épispore, arrondie à l'extrémité postérieure,
est étirée au pôle supérieur en un col à pourtour lisse. Les kystes solitaires
aboutissent à la formation de gymnospores anormales sphériques de
4 ij. de diamètre, contenant 4 sporozoïtes.
Villefranche-sur-Mer, décembre 1917.
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EXPLICATION DES PLANCHES
PLANCHE VI
Évolution végétative de Gonospora testiculi
Fig. 1, 2 et 8 X 950; flg. 7 x 450; flg. 3-6, 9-23 x 1100
FlG. 1. Coupe du testicule de Cerithium vulgatum'&'SiVQ.XJne jeune Gonospora à l'intérieur de la cellule nourriciérp
de l'épithélium sjerminatif fait saillie dans la cavité du follicule. (Fix. Bons alcoolique, Hématoxy-
line de HEIDENHAIN, Orange G.)
Fig. 2. Une portion de l'épithélium germinatif sain montrant les cellules nourricières, les noyaux des éléments
indifférents et les inclusions de nature graisseuse. (Fix. Champy, Héraatoxyline ferrique.)
Fig. 3. Jeune Oonospora à l'intérieur de la cellule nourricière. (Frottis fixé au BotnN alcoolique, Hématoxyline
ferrique, Orange G.)
FlO. 4. Coupe d'une jeune Gonoapora h l'intérieur de la cellule nourricière, libre dans la ca\-itè testiculaire. (Fix.
Champy, Hématoxyline ferrique.)
Fig. 5 et 6. Jeunes Gonospora formant un couple et un chapelet. (Frottis fixé au BoriN alcoolique, Hématoxy-
line ferrique. Orange G.)
Fig. 7. Gonospora testiculi adulte. (Frottis fixé au BouiN alcoolique, Hénwtoxyline ferrique, Orange G.)
Fig. 8. Coupe transversale d'une jeime Gonospora. (Fix. Champy Hématoxyline ferrique).
Fio. 9 à 12. Aspects des nucléoles des Gonospora adultes pendant la pulsation des nucléoles. (Frottis fixés au
BouiN alcoolique, Héinatoxyline ferrique, Orange 6.)
FiG. 13 à 23. Modifications nucléolaires chez des Gonospora âgées aboutissant après la résorption du nucléole à
la formation d'un organite intranucléaire. (Frottis fixés au BouiN alcoolique. Hématoxyline fer-
rique. Orange G.)
PLANCHE VII
Évolution sexuée normale de Gonospora testiculi
Fig. 24-28 X 1000 ; flg. 29-30 x 2000 ; flg. 31-62 x 3000 enxiron
Cette planche représente des préparations (sauf les flgures 43, 44 et 45) fixées au Bouin alcoolique et colorées
à. r Hématoxyline ferrique et Orange G.
Fig. 24. Jeune kyste de Gonospora ; micronucleus intranucléaire chez la Ç, premier fuseau chez le Cf après la
désagrégation du noyau primaire (Stade I).
Fig. 25. Début de la multiplication nucléaire chez les deux conjoints ; différences dans les mitoses chez le même
conjoint (Stade II).
Fig. 26. Stade des plages et des agglomérations nucléaires chez la Ç ; noyaux en réseau régulier chez le d" :
différences nucléaires chez les conjoints (Stade III).
GONOSFORA TESTICVLl 509
Fio. 27. Crise mitotiqup chez le o". préparation aux dernières mitoses chez, la Ç (Stade IV).
Kio. 28. Début de perlage ; différences nucléaires chez les deux conjoints.
Frt). 29. Micronucleus intranucléaire aros.<i (même kyste que celui de la flg;. 24).
1"IG. 30. Premier fuseau dans le kyste ; les centrioles sont situés :"i l'intérieur des petites sphères distinctes de?
centrocônes.
Fin. 31 à 34. Noyaux issus de la première mitose du micronucleus ; division des centrioles et des centroeônes.
FiG. 35 à 37. Diverses formes de mitoses chez le même conjoint au liébut de la multiplication nucléaire dans les
kystes.
Fio. 38 à 40. Mitoses intranudéaires dans les noyaux retardataires 'à la fin de la multiplication nucléaire.
1-lii. 41. Début de perlage des gamètes mâle.= .
Vu:. 42. Noyaux des pamètes femelles au stade précédant immédiatement le perlaye.
Fl<i. 43 à 45. Gamètes et copulation. (Fixation par Champy. color. à l'Hématoxyline ferrique) ; flg. 43 — ma-
mète Cf : fis;. 44 — gamète femelle ; fig. 45 — copulation des gamètes.
Fk;. 4f> à 49. Stades de prozygote.
Fl(i. 50. Stade de sjTicaryon.
Fio. 51. Copula ou zygote.
Fio. 52 à 58. .Modalités de la première division dans les copula.
Fig. 59 k 60. Sporocystes à 4 et 8 noyaux.
Fio. 61. Spore rafire normale ;\ 8 sporozoïtes.
Fio. 62. Sporozolte
PLANCHE VIII
Évolution anormale de Gonospora testiculi
Fig. 63, 64. 67 et 69 x 1000 environ ; Fig. 65, 66 et 67 X 2000 environ ; Fig. 68 x .300 environ
Cette planche représente des préparations fixées au BouiN alcoolique et colorées à l'Hématoxyliin' tiTri(|iir 1 1
Orange G.
Fio. ($3. Coupe transversale d'une Gonospora non enkystée au .stade dit de « chromidium gerininatif '.
Fio. 64. Kyste solitaire de Gonoapora, entier, légèrement comprimé, au début de la dissociation cytoijlnsmiqu '.
Fig. 65. Portion d'un ruban cytoplasmique du même kyste a un plus fort grossissement.
Fig. 66. Eléments uuinuclées et multinucléé,s provenant de la dissociation cytoplasmique d'un kyste solitaire de
Gonospora k, la fin de perlage.
Fk;. 67. Coupe d'un kyste solitaire de Gonospora montrant la dissociation du corps cytoplasmique en élément-^
nninuclées et la transformation de ces derniers en sporocystes à 2-4 noyaux.
FlG. 68. Evolution des sporocystes parthénogénétiques ; a. élément uninucléé ; 6, c. sporocystes à 2 et 4 noyaux :
rf, formation des sporozoïtes dans les sporocystes à 4 noyaux ; e, gymnospore parthénogénéti(iue a
4 sporozoïtes définitivement formée.
Fig. f(). Un kyste anormal de Gonospora ; le mâle a dégénéré au stade des rubans ; le corps cytophi'iinique de la
femelle s'est dissocié en éléments multinucléés et uniuucléés.
Fio. 70. f,es éléments nninuclées et multinucléés de la femelle du même kyste a un plus fort grossissement.
Arch. de Zool Exp'- et Gén^^
Tome 57. FI. V;
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GONOSPORA TESTICULI. Evolution anormale.
ARCHIVES DE ZOOLOGIE EXPÉRIMENTALE ET GÉNÉRALE
Tome 57, p. 511 à 533.
25 Novembre 1918
COMMENT AGIT
LA SOLUTION HYPERTONIQUE Ml LA
PARTHÉNOGENÈSE EXPÉRIMENTALE
(MÉTHODE DE LOEB)
I.
Origine et signification des asters accessoires
PAR
MAURICE HERLANT
SOMMAIRE:
Pages
Introduction 511
1. Théorie de Loeb. — 2. Théorie de R. S. Lillie.
Observations PERSONNELLES 515
1. Qiiel est le facteur qui assure la segmentation de l'œuf activé 1 515
2. Les facteurs de la polycentrie 518
a. Influence de la concentration de la solution liypertonique 520
6. Influence de la composition des solutions hypcrtoniques 521
§ 1. Rôle des sels de l'eau de mer. — } 2. Influence de l'alcalinité et de l'acidité. — § 3. Action
des anesthésiques.
c. Influence du milieu après le traitement hypertonique 528
d. Influence du milieu avant le traitement hypertonique 524
3. Polycentrie et perméabilité 524
4. Le micanitme de la formation des asters accessoires et leur aiqnifieation 529
INTRODUCTION
Les méthodes de parthénogenèse expérimentale qui comportent
l'action successive de deux facteurs différents ont l'avantage de permettre
de dissocier les éléments du problème et de faciliter ainsi leur analyse.
Le procédé découvert par J. Loeb et qui consiste à traiter l'œuf d'abord
par un acide gras, puis ensuite par une solution hypertonique donne,
comme on sait, des résultats particuhèrement beaux chez l'Oursin.
Cette méthode réalise le type le plus complet de la parthénogenèse à
Aech. de Zool. Exp. et GÉn. — T. 57. — F. 5. 34
512 MAURICE HERLANT
deux temps : le premier traitement produit l'activation, le deuxième
assure la segmentation.
Je laisserai ici complètement de côté le mécanisme physico-chimique
de l'activation pour ne considérer que l'œuf activé et l'influence exercée
sur lui par le traitement complémentaire à l'eau de mer hyperto-
nique.
1, Théorie de Loeb. — Pour Loeb, l'effet essentiel de la solution
hypertonique est d'arrêter à temps la cytolyse produite par le premier
traitement ^ : l'œuf, guéri de l'action de l'acide gras, peut ensuite se
développer par cela seul qu'il est activé. Cet effet, qui est donc en majeure
partie antagoniste, dépend d'une série de facteurs dont les à^voi plus
importants sont une concentration suffisante de la solution hypertonique
et la présence d'oxygène. En outre le coefficient de température indique
qu'il s'agit d'un phénomène chimique : il y a donc quelque chose de plus
qu'une simple déshydratation.
Loeb se base sur ces données pour admettre que la solution hyper-
tonique agit grâce à des processus d'oxydation. Il se" heurte ainsi à de
sérieuses difficultés. En effet, il a pu, dans une autre méthode de parthé-
nogenèse, remplacer la solution hypertonique par un traitement prolongé
par le cyanure de potassium et par d'autres procédés qui, précisément,
empêchent les oxydations. Il y a là une contradiction évidente, et Loeb
lui-même et Wasteneys l'ont encore rendue plus flagrante en montrant^
que la solution hypertonique n'augmente pas le taux des oxydations de
l'œuf activé.
Loeb s'efforce d'expHquer ce paradoxe en admettant que la solution
hypertonique provoque des oxydations « spéciales « qui, mieux encore
que la suppression des oxydations par KCN ou le manque d'O, per-
mettraient « la formation des substances qui contrebalancent l'effet
nocif de la formation de la membrane ^ ».
Les objections qu'on peut faire à cette interprétation ne manquent
pas. J'en ai, après Delage et Goldsmith *, formulé une série dans un
autre travail ^ et n'y reviendrai pas ici. Remarquons simplement que
l'hypothèse de Loeb n'explique pas pourquoi l'effet exercé par les so-
1. Loeb. La fécondation chimique. (Paris, 1911, chap. X.)
2. Loeb et Wasteneys. Tlie influence of hypertonic solution upon tlie rate of oxydations in fertilizid and
unfurtilized cggs. (Journ. of biol. Chem., vol. XIV, 1913, p. 469.)
3. Loeb, loc cit., p. 143.
4. Delaqe et Goldsmith. La Parthénogenèse naturelle et expérimentale. (Paris, 1913.)
5. Herlant. Le mécanisme do la parthénogenèse expérimentale chez les Amphibiens et les Echinodermes.
Bull. scienHI., t. L, 1917.)
PARTHÉNOGENÈSE EXPÉRIMENTALE 513
lutions hypertoniques ne se fait sentir qu'après le retour des œufs dans
l'eau de mer.
2. Théorie de R. S. Lillie. — Jusque dans ses derniers travaux, R. S.
LiLLiE, qui a montré ^ que l'activation peut être produite par une aug-
mentation artificielle de la perméabilité de la membrane plasmatique
de l'œuf vierge, admettait que la solution hypertonique a pour effet de
rétablir cette perméabilité à son taux normal : Tœuf est ainsi protégé de la
cytolyse qui résulterait d'une altération trop prolongée des propriétés
physico-chimiques de sa membrane. Lillie supposait donc, comme Loeb,
que le deuxième temps de la parthénogenèse expérimentale est antago-
niste du premier et sert à en atténuer les effets nocifs. Mais il a récemment
modifié cette façon de voir ^ : les deux traitements seraient bien réelle-
ment co7nplé7nentaires, le second ajoutant simplement ses effets à ceux
du premier. Par des expériences sur les œufs d'Astérie il montre qu'on
peut, par exemple, obtenir le développement en prolongeant suffisam-
ment l'action du premier facteur, ou en la complétant par l'intervention
d'mi autre traitement qui, lui aussi, est activant : leurs actions s'ajoutent
et on peut les interchanger.
Lillie reconnaît que cette méthode, bomie pour l'œuf d'Astérie, ne
permet pas d'obtenir le développement parthénogénétique de l'œuf
d'Oursin : ici la solution hypertonique semble absolument nécessane.
Mais il fait remarquer que Loeb lui-même et Delage ont montré que la
solution hypertonique est à elle seule capable de provoquer la parthéno-
genèse ; d'autre part, son action peut, dans certaines conditions, aussi
bien précéder que suivre le traitement activant. Il est donc fort peu pro-
bable qu'entre les deux temps de la méthode de Loeb existe un antago-
nisme aussi absolu que l'admet ce dernier auteur.
Pour R. S. Lillie, le développement d'un œuf nécessiterait la formation
et la présence, en certains points du protoplasme, d'une quantité minima
de substances hypothétiques indispensables : cette condition serait
réaUsée ou bien par une action prolongée de l'agent activant, on bien
par une action complémentaire ayant le même effet. Je ne puis mieux faire
que citer ici ce qu'il a dit lui-même^ «... What is essential in the effect
1. il. s. Lillie. X\w physiology of ccll division. II. (Amer. Journ. of ij/t'jsiol., vol. XXVI, 1910 et suiv.)
2. B. S. Lillie. On the condition of activation of unfertilized Starflsli eggs under tlie influence of lùgh tempé-
ratures and fatty acid solutions. (Biol. BuU., vol. XXVIII. 1915, p. 2G0.)
3. R. S. Lillie. ïhe conditions determining tlie rate of entrance of water into fertilizi-d and unfertilized,
Arbacia eggs. aud the gênerai relation of changes of permcability to activation. (^/««z. Journ. ot Physiol., vol.
XLm, 1917, p. 43.)
514 MAURICE HERLANT
of the hypertonic treatment is not that it should follow or précède the
membrane-forming treatment, but that it should rectify a deficiency in
the supply of certain structure-forming materials in the egg, which are
required for the reconstitution of the plasma membrane » (p. 54).
Lillie fait également une hypothèse intéressante sur le mécanisme
physico-chimique de la formation de ces substances indispensables. Le
facteur essentiel serait la déshydratation qui, en resserrant en quelque
sorte les matériaux du protoplasme, augmenterait les contacts et facilite-
rait certaines réactions diastasiques, telles que des « déshydrolyses ».
La théorie de Lillie est incontestablement plus séduisante que celle
de Loeb et serre les faits de plus près. Elle a toutefois avec elle deux
points communs qui, tous deux, sont des points faibles : elle nécessite
l'intervention obscure de substances purement hypothétiques et ne nous
explique pas davantage pourquoi il faut attendre le retour des œufs dans
l'eau de mer pour voir se produire les effets de la solution hypertonique.
En outre, le traitement hypertonique ne modifie pas de façon appré-
ciable la perméabilité de l'œuf activé ; ainsi que je l'ai montré ^, celle-ci
présente exactement les mêmes particularités et la même périodicité
que chez l'œuf fécondé ; les variations de la perméabilité qui, chez ce
dernier, accompagnent la division cellulaire, accompagnent chez l'œuf
activé les cycles monastériens successifs ; physiologiquement et morpho-
logiquement ceux-ci ont la signification exacte de véritables mitoses :
une cause mécanique seule, la monocentrie, les empêche d'être effectives.
L'hypothèse de Lillie, que la solution hypertonique contribue à rétablir
la perméabilité normale de la membrane est donc inutile.
La question du mécanisme de l'action exercée par la solution hyper-
tonique sur l'œuf activé reste donc ouverte et j'ai essayé d'en entre-
prendre l'étude systématique, tant au point de vue cytologique qu'au
point de vue physico-chimique.
Ces recherches n'ont été possibles que grâce au généreux appui de
la Faculté des Sciences de l'Université de Paris : je lui exprime ici ma pro-
fonde gratitude. D'autre part, M. le Professeur Davidoff a bien voulu
m'accorder la plus large hospitalité au Laboratoire russe de zoologie, à
Villefranche-sur-Mer. Avec une inlassable complaisance et dans des
conditions particulièrement délicates, il m'a procuré les plus grandes
facilités de travail et un matériel de tout premier ordre. Je ne pourrais
1. rTF^f ' 'T. S Variations cycliques de la permétabilité chez l'oeuf activé. (C. R. Soc. de Biol.. 23 février 1918
PARTHÉNOGENÈSE EXPÉRIMENTALE 515
assez le remercier de sa bienveillance à mon égard. Je remercie aussi très
vivement M. le docteur Trégoubofï de son amabilité et des innombrables
et précieux services qu'il m'a rendus.
OBSERVATIONS PERSONNELLES
1. Quel est le facteur qui assure la segmentation de l'œuf activé?
Le premier point qu'il m'a paru essentiel d'élucider est celui-ci :
parmi les multiples effets que la solution hypertonique exerce sur l'œuf
activé, quel est celui qui, réellement, est la condition de son efficacité,
quel est, en d'autres termes, le facteur qui assure la segmentation ?
Avant de passer à l'expérimentation et aux considérations physico-
chimiques, il est nécessaire, pour répondre à cette question autrement que
par des hypothèses, de s'orienter par une observation attentive des faits.
J'ai déjà publié ailleurs (en attendant le travail détaillé dont les circons-
tances ont retardé la publication) les principaux résultats de cette étude ^
et je puis donc être très bref. Elle montre, de la façon la plus nette, que
la solution hypertonique permet la segmentation et assure, par le fait
même, le développement, en fournissant à Vœuf le ynoyen mécanique de
transformer une mitose monocentrique, fatalement abortive, en une mitose
bipolaire efficace. Cet effet est obtenu par la formation de novo d'asters
accessoires (cytasters) et par les connections secondaires qui s'établissent
entre eux et l'aster développé autour du pronucleus femelle.
L'étude cytologique de l'action de la solution hjrpertonique oriente
donc nettement les recherches vers le mécanisme de la formation des
asters accessoires, dont elle montre la nécessité pour que l'œuf activé
puisse se développer.
Mais une série d'expériences permettent de préciser encore cette
conclusion.
La formation des asters accessoires est en effet soumise à certaines
conditions. L'une de celles-ci est que l'œuf doit subir le traitement hjrper-
tonique à un moment bien déterminé de son évolution ^. En faisant varier
méthodiquement l'intervalle qui sépare le traitement activant du traite-
1. IlEur.ANT. Le mécanismo do. la parthénogenèse expérimentale chez les Amphibiens et les Echinoderme?.
(Bull. tScientif. de la France et de la Belgique, t. L, 1917, p. 381.)
2. Herlast. Sur l'existence d'un rythme périodique dans le déterminisme des premiers phénomènes du déve«
loppement parthénogénétique expérimental cher l'Oursin. (C R. Ac. de^ Se., t. CLVni, 1914, p. 1631.)
516
MAURICE HEBLANT
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ment complémentaire, on arrive à faire
varier la polycentrie dans de larges
limites, ce qui permet de bien en saisir
l'influence sur le développement.
Le diagramme I réalise une expé-
rience de ce genre. H a été établi de la
façon suivante :
Après avoir été activés par l'acide butyrique, les œufs sont
placés par lots successifs, de cinq en cinq minutes, dans une
■ série de cristallisoirs renfermant une solution hypcrtoniquc de
composition uniforme, formée, par exemple, de 50 ce. d'eau de
mer+8cc. 5 de solution 2 1/2 M de KaCl. Chaque lot est
remis dans l'eau de mer au bout d'un même temps, variable
selon la température. Toutes les conditions sont donc égales,
sauf la durée de l'intervalle entre le traitement activant et le
traitement hypertonique. Au bout d'une heure et demie en-
viron, lorsque les œufs vont se segmenter, on note l'intensité
de la polycentrie; pour abréger, je distingue dans celle-ci cinq
degrés différents entre lesquels existent, bien entendu, toutes
les transitions. A signifie la formation d'un ou deux c^i/as-
ters, B de trois ou quatre, C de cinq à dix, D de plus de dix
et E un degré de polycentrie tel que l'œuf est complètement
bourré d'asters. On note aussi, un peu plus tard, le pourcen-
tage des œufs segmentés et enfin, le lendemain, celui des
blastulas bien constituées.
L'ensemble de courbes que l'on
obtient ainsi est particulièrement frap-
pant.
On voit que la polycentrie (trait
plein), nulle dans le premier lot, aug-
mente ensuite progressivement et
atteint un maximum quand les œufs
sont traités 30 minutes environ après
l'activât ion ; puis elle diminue et est
très faible ou nulle dans les lots traités
par la solution hypertonique après un
intervalle de'45 à 50 minutes. La courbe
se relève ensuite rapidement ; mais il
importe de remarquer que la polycen-
trie, quoique considérable, ne se ren-
contre plus, à partir de ce moment,
que chez un nombre de plus en plus
restreint d'œufs. L'effet vraiment carac-
PARTHÉNOGENÈSE EXPÉRIMENTALE 517
téristique et uniforme exercé par la solution hjrpertonique est surtout
manifeste pendant les cinquante premières minutes qui suivent l'acti-
vation et cette partie de la courbe est de beaucoup la plus intéressante,
comme on le verra plus loin.
Si on examine la courbe des segmentations (traits), on constate
qu'elle suit sensiblement le même tracé que la courbe de polycentrie,
c'est-à-dire que là où il n'y a 'pas d'asters accessoires il n'y a pas non plus
de segmentations. Toutefois le pourcentage maximum des segmenta-
tions (a) est plus rapidement atteint que l'intensité raaxima de la poly-
centrie (b), ce qui s'explique puisqu'il suffit d'un seul cytaster pour assurer
la segmentation. Enfin on observe un fléchissement accusé des segmen-
tations en ce même point b : il résulte des obstacles qu'une polycentrie
exagérée apporte à la segmentation ; ces œufs se cytolysent dans les
mêmes délais et avec les mêmes caractères que les œufs simplement
activés. La courbe des segmentations, qui a accompagné celle de la poly-
centrie dans sa chute, vers cinquante minutes après l'activation, se relève
ensuite, mais pour redescendre bientôt, ce qui coïncide avec le nombre
de plus en plus réduit des œufs polycentriques.
La courbe des blastulas (points) complète celle des segmentations et
permet, en somme, d'en apprécier la qualité. Elle est partout inférieure
à la courbe des segmentations et ne la rejoint qu'en trois points, a, c et d,
qui sont précisément ceux correspondants à une polycentrie faible. Ce
fait est une conséquence du danger que présentent toujours les asters
accessoires. En effet, s'il est vrai qu'il faut un cytaster pour que l'œuf
activé se divise, il faut aussi qu'il n'y en ait pas deux, trois ou davantage,
sans quoi la division cessera de se faire régulièrement, en deux blasto-
mères seulement : il y aura formation simultanée de trois cellules au moins,
avec partage inégal des chromosomes. Un œuf qui se divise de cette
manière peut être comparé à un œuf dispermique et, comme l'a montré
BovERi ^ ne peut donner naissance à une larve normale.
Dans l'appréciation d'un procédé de parthénogenèse, le nombre d'œufs
qui se divisent importe moins que la façon dont ils se divisent.
On retrouve, dans la courbe des blastulas, les trois points a, c et d,
qui indiquent respectivement les trois intervalles les plus favorables
pour l'application du traitement hypertonique après l'activation : j'avais
déjà signalé ces trois points dans ma note préliminaire ^. Les temps indi-
1. BOTEEI. Zellenstudien. VI. (Jena, 1907.)
2. Hkbxant. Sur l'existence d'un rythme, etc. (C. B. Ae. des Se, t. CLVIII, 1914, p. 1531.)
518 MAVRICE HERLANT
qués ici sont un peu différents, ce qui tient à la température plus élevée
à laquelle a été faite l'expérience qui est relatée ici. Ces trois mêmes
points critiques ont été retrouvés depuis par A. R. Moore ^ dans des
expériences analogues sur les œufs à'Arhacia. Mais il n'a pu en fournir
aucune explication parce que, n'ayant pas étudié ses œufs au point de
vue cytologique, le rôle essentiel des asters accessoires dans la parthéno-
genèse expérimentale par la méthode de Loeb lui a complètement échappé.
Les critiques qu'il m'adresse à ce propos ne reposent sur aucun fait précis.
Je crois, au contraire, avoir montré que les moindres particularités
qu'on relève dans les résultats obtenus, dont le diagramme I n'est
qu'un exemple, s'expliquent parfaitement dès qu'on se rend compte
de l'importance des cytasters dans la réalisation de la parthénogenèse :
ce sont eux qui, après l'activation, la rendent possible ; ce sont eux
aussi qui lui donnent son caractère si fréquemment pathologique et qui
sont responsables de la formation des larves anormales.
Il y a d'ailleurs une autre manière encore de mettre ce fait en évidence.
Ainsi que l'a montré Loeb, une solution hypertonique n'est active que
si elle contient de Foxygène et des ions 0 H. Si on y ajoute du cyanure
de potassium, qui empêche les oxydations, si on la neutralise ou, a for-
tiori, si on l'acidifie, elle devient inopérante. Or, j'ai pu m'assurer que
ni dans l'un ni dans l'autre cas il n'y a formation d'asters accessoires.
L'efficacité d'une solution hypertonique peut encore être supprimée par
d'autres moyens, qui sont examinés plus loin : chaque fois on peut cons-
tater l'absence d'asters accessoires.
De l'ensemble de mes observations cytologiques et de mes expériences,
je déduis donc que la 'présence ou Vabsence des cytasters accompagnent
invariablement l'efficacité ou l'inefficacité de la solution hypertonique comme
second facteur de la parthénogenèse. Nous sommes donc amenés à chercher
l'origine des asters accessoires ou, en d'autres termes, les facteurs de la
polycentrie.
2. Les facteurs de la polycentrie
La question de l'origine des asters accessoires peut s'étudier aussi bien
chez l'œuf fécondé que chez l'œuf parthénogénétique. Tous deux réagis-
sent de la même façon : au point de vue physiologique, l'activation est une
et peu importe la nature de l'agent qui l'a produite, spermatozoïde ou
1. A.R. Moore. On the rythmical susceptibility of developing Sea Urchln eggs to hypertonic sea water. (Biol
Bull., vol. XXVin, 1915, p. 253.)
PARTHÉNOGENÈSE EXPÉRIMENTALE
519
agent chimique. L'œuf fécondé présente toutefois l'avantage que tout
phénomène naturel possède par rapport à son imitation expérimentale,
c'est-à-dire une plus grande régu-
^**^?p9^r>»^
"^ '7'/^^
i
^
Yn
^)
Oq
X
^
^^
^
'K
larité de réaction.
Dans le cas spécial qui nous
occupe, l'œuf fécondé présente
encore cet avantage que, chez lui,
toute formation d'asters acces-
soires, fût-ce d'un seul, a forcé-
ment des effets défavorables : les
cultures ont ainsi plus d'unité.
En effet, contrairement à l'œuf
activé artificiellement, l'œuf fé-
condé édifie par lui-même une
mitose bipolaire : toute inter-
vention de cytaster ne pourra
donc que troubler la division et
amener une segmentation défec-
tueuse.
Le diagramme II montre ce
fait de la façon la plus nette. Dès
que la courbe de polycentrie
s'élève, la courbe des blastulas
(points), que l'on pourrait aussi
appeler la courbe des segmen-
tatioi\s normales, tombe rapide-
ment à un chiffre très bas et ne
se relève qu'après la disparition
des asters accessoires, disparition
qui, chez l'œuf fécondé, est gé-
néralement définitive après cin-
quante minutes.
La comparaison des dia-
grammes I et II montre de façon
saisissante le contraste entre l'œuf
parthénogénétique, qui a besoin d'asters accessoires, et l'œuf fécondé,
qui doit les éviter : toute notre interprétation du mécanisme de la par
thénogenèse tient dans ce rapprochement.
520 MAURICE HERLANT
Laissons maintenant de côté l'influence des asters accessoires sur la
segmentation pour ne nous occuper que du mécanisme de leur formation .
Remarquons d'abord que la lecture de ces diagrammes montre que
l'un au moins des facteurs de la polycentrie est interne, puisque nous le
voyons varier avec le stade atteint par l'œuf activé. D'autre part, ce
que nous savons de la nécessité d'une certaine concentration de la solu-
tion hypertonique, de la présence d'oxygène, d'ions OH, etc., montre que
les effets de ce facteur interne se combinent avec ceux d'une série de
facteurs externes. Nous étudierons d'abord ceux-ci.
a) Influence de la concentration , moléculaire de la solution
HYPERTONIQUE.
Ainsi que l'a montré Loeb, l'action favorable de la solution hyper-
tonique après l'activation ne se manifeste qu'à partir d'une certaine
concentration, qu'il fixe à 4 ce. de NaCl 2 1 /2 M + 50 ce. d'eau de mer.
J'ai pu constater que c'est aussi le seuil de concentration nécessaire pour
obtenir la formation d'asters accessoires, et, par conséquent, la segmen-
tation. Au-dessus de ce point, et toutes les autres conditions restant
les mêmes, le nombre des asters accessoires croît en proportion de la
concentration jusqu'à ce qu'on atteigne la dose de 12 à 14 ce. de solution
2 1 /2 M de NaCl + 50 ce. d'eau de mer. Toutefois la phase de sensibilité
de l'œuf se raccourcit considérablement : dans une solution formée de
12 ce. de NaCl 2 1 /2 M + 50 ce. d'eau de mer, par exemple, les œufs
traités trente minutes après l'activation ne forment plus de cytasters.
Si on augmente encore la concentration, on observe ce fait paradoxal
que les solutions hjrpertoniques deviennent de moins en moins actives
à mesure qu'elle sont plus concentrées. Les solutions « trop fortes » sont
inefficaces au même titre que les solutions « trop faibles » : l'œuf activé
n'y forme pas de cytasters, ne peut se diviser et meurt.
Ce fait est surtout frappant si on étudie l'action exercée sur l'œuf
fécondé par des solutions de plus en plus concentrées. Ainsi que je l'ai
dit plus haut, toute formation d'asters accessoires, fût-ce d'un seul, est
ici très nuisible en troublant la segmentation. Le diagramme III donne
le pourcentage des blastulas normales formées par des œufs fécondés
qui ont subi, vingt minutes après la fécondation et pendant une durée
uniforme de trente minutes, un traitement par les solutions hyperto-
niques dont le titre en NaCl 2 1 /2 M est indiqué sur l'abcisse.
On voit que seules les solutions hypertoniques de concentration
PARTHÉNOGENÈSE EXPÉRIMENTALE
521
moyenne sont susceptibles de déterminer la formation d'asters accessoires :
elles seules sont donc efficaces pour la parthénogenèse et nuisibles four le
développement de Vœuf fécondé.
bj Influence de la composition des solutions hypertoniques.
§ 1. Rôle des sels de l'eau de mer.
On peut, sans sortir du groupe des principaux sels de l'eau de mer,
réaliser toute une gamme de solutions hypertoniques différentes, chacune
pouvant ensuite être étudiée à diverses concentrations. J'ai réalisé un
._ ^^ /<î /f A» /£ fr Su £f Su
ec. eufu ai i/iM.
DiAGR. III. Œufs fécondés. Explication dans le texte. Les ordonnées expriment le nombre^des blastulas^normales
très grand nombre d'expériences de ce genre et en donnerai rapidement
les principaux résultats.
La solution hypertonique dont je me sers habituellement pour obtenir
la parthénogenèse expérimentale se compose de 50 ce. d'eau de mer + 8
à 9 ce. de NaCl 2 1 /2 M.
J'ai d'abord cherché à supprimer cet excès de NaCl en ajoutant, à
50 ce. d'eau de mer, 8 ce. d'une solution 2 1 /2 M équilibrée, c'est-à-dire
contenant NaCl, KCl, CaCP et MgCl^ dans les proportions moléculaires
où ces sels se trouvent dans l'eau de mer. A pression osmotique égale,
cette solution est un peu moins active que la solution ordinaire. Cette
différence disparaît si on élimine MgCl^. Il n'y a en tous cas aucun avan-
tage appréciable à s'en servir pour la parthénogenèse.
Le remplacement de NaCl par KCl dans une solution à base d'eau
de mer n'apporte pas de modification sensible à la polycentrie produite.
Des solutions hypertoniques de NaCl pur, de KCl pur sont également
actives, mais les résultats sont troublés par leur toxicité élevée.
Par contre, si, à 50 ce. d'eau de mer, on ajoute une quantité quelconque
de CaCl- ou de MgCP à la concentration 2 1/2 M, on n'obtient pas de
522 MAURICE HERLANT
polycentrie : ces solutions sont complètement inefficaces pour la parthé-
nogenèse et, par contre, — et précisément à cause de cela — ne troublent
en rien le développement des œufs fécondés. Les solutions hypertoniques
de CaCP pur ou de MgCl^ pur se comportent de même i. L'action
inhibitrice de ces deux sels sur la formation des asters accessoires est
d'ailleurs des plus nettes : ainsi, tandis qu'une solution formée de 50 ce.
d'eau de mer +9 ce. de NaCl 2 1 /2 M produit une polycentrie intense,
une solution formée de 40 ce. d'eau de mer + 10 ce. de CaCP isotonique
+ 9 ce. de NaCl 2 1 /2 M est complètement inactive, bien que sa pression
osmotique fût la même.
La 'présence de NaCl ou de KCl dans la solution hypertonique est
donc nécessaire à la production de la polycentrie. CaCP- et MgCP sont
inutiles et, s'ils sont en excès, exercent une action inhibitrice.
§ 2. Influence de V alcalinité et de Vacidité.
Ainsi que l'a montré Loeb, une solution hypertonique alcaline est
beaucoup plus active qu'une solution neutre ou acide. J'ai pu m'assurer
que, corrélativement, les ions OH favorisent fortement la production
d'asters accessoires.
L'expérience suivante est tout à fait démonstrative. On prépare une
solution hypertonique neutre, formée de 500 ce. d'un mélange équilibré
de NaCl, KCl et CaCP, isotonique à l'eau de mer, + 80 ce. de NaCl 2 1/2
M. Cette solution est divisée en trois portions : la première est laissée
telle quelle ; la seconde est alcalinisée par adjonction de 20 gouttes de
M
NaOH • — pour 100 ce. ; la troisième est acidifiée par adjonction de
M
20 gouttes d'acide acétique — pour 100 ce. Chaque solution est ensuite
versée par portions égales dans une série de cristallisoirs, où on transporte
les œufs de 5 en 5 minutes après la fécondation ; on les y laisse pendant
un temps fixe, puis on les remet dans l'eau de mer.
Dans la première solution (neutre), la polycentrie est d'intensité
moyenne. Dans la solution alcaline, elle est beaucoup plus forte ; en outre
elle se prolonge jusque dans les lots traités 80 à 90 minutes après la
1. Cps résultats ne conconli nt pas avec ceux de Loeb, qui dit .ivoir obtenu le développement d'œufs actives
par l'acide butyrique et traités ensuite par des solutions hypertoniques de ces sels purs. Malgré de nombreux
essais et l'emploi de toute une gamme de concentrations différentes, je n'ai pu obtenir un seul développement par-
thénogénétique à l'aide de ces solutions, ni la formation d'un seul cytaster. Je ne puis que constater cette contra-
diction.
PARTHÉNOGENÈSE EXPÉRIMENTALE 523
fécondation (ou l'activation artificielle), alors que dans la solution neutre
elle ne se manifeste que chez les œufs moins âgés (10 à 40 minutes).
Enfin, dans la série acide, il ne se forme pas un seul C3i:aster.
J'ai étudié l'action comparée de quelques bases et acides sur la for-
mation des asters accessoires. NaOH et KOH sont tous deux très actifs,
NH^OH l'est beaucoup moins. Par contre, les acides forts, tels que HCl,
ont une action inhibitrice moins marquée que les acides faibles, acétique
ou butyrique ; ce dernier est particulièrement actif.
Ces expériences montrent donc que les ions OH favorisent, et que les
ions H empêchent la polycentrie.
§ 3. Action des anesthésiques et du KCN.
J'ai déjà dit que KCN, qui rend les solutions hypertoniques ineffi-
caces pour la parthénogenèse et inoffensives pour les œufs fécondés,
empêche la formation des asters accessoires. J'ai constaté que l'éther, le
chloral, le phényl-uréthane, l'alcool éthylique ont la même action : il
suffit d'en ajouter des quantités très minimes (par exemple 0,6 0/0
d'éther, 0,2 0/0 de chloral, etc.) pour supprimer la polycentrie, toutes
les autres conditions étant égales.
c) Influence du milieu après le traitement hypertonique.
Dans les expériences dont il a été question jusqu'ici, les œufs étaient
toujours reportés directement de la solution hypertonique dans l'eau de
mer. Mais j'ai constaté qu'on peut aussi agir sur la polycentrie et détruire
es effets du traitement hypertonique en faisant passer les œufs par un
milieu intermédiaire de telle ou telle composition.
J'ai essayé les solutions indiquées ci-après. Au sortir de la solution
hypertonique ordinaire, les œufs y séjournent pendant une durée uni-
forme de 15 minutes, puis ils sont remis dans l'eau de mer. On les com-
pare ensuite aux témoins, qui ont été transférés directement dans celle-
ci.
1) NaCl' polycentrie normale.
2) KCl — —
3) NaCl + KCl -^ —
4) CaCF pas de polycentrie.
5) MgCl2 polycentrie très faible.
1. Toutes ces solutions Eont isotoniques à l'eau de met.
524 MAURICE HERLANT
6) NaCl + CaCP polycentrie normale.
7) Eau de mer + KCN polycentrie plus faible.
8) Eau de mer diluée pas de polycentrie.
On voit que, parmi ceux que j'ai essayés, les milieux qui peuvent
détruire l'effet de la solution hypertonique sont, par ordre d'efficacité
décroissante, l'eau de mer diluée (50 p. eau de mer + 50 p. eau distillée),
CaCP, MgCP et eau de mer avec KCN.
d) Influence du milieu avant le traitement hypertonique.
Ce facteur est plus difficile à mettre en évidence parce que les œufs
poursuivent généralement plus ou nioins leur évolution dans le milieu
<îlioisi et sont donc soumis à l'action de la solution hypertonique à un
stade en réalité plus avancé. Toutefois on obtient une forte diminution
de la polycentrie en traitant préalablement les œufs par KCN, même
si on les lave énergiquement (à la centrifugeuse) avant de les placer dans
la solution hypertonique. CaCP et MgCl^ sont ici sans action nette ;
mais il ne faut pas oublier que les œufs y poursuivent leur développe-
ment.
3. Polycentrie et perméabilité
Les recherches que je viens de résumer montrent qu'on peut analyser
toute une série de facteurs externes susceptibles d'exercer une influence
sur la polycentrie. Mais leur action ne sera vraiment intéressante que si
nous parvenons à saisir le Uen qui les unit au facteur interne dont les
courbes de polycentrie (diagr. I et II) nous démontrent l'importance.
Le seul examen de ces tracés montre, en effet, que la sensibilité de l'œuf
activé à l'action des solutions hypertoniques est hée à un état physio-
logique et morphologique déterminé, qui n'est atteint qu'à mi certain
stade et dure jusqu'à un autre stade.
A quoi correspond cette période ?
Une étude chronologique des premières étapes du développement nous
permettra de répondre à cette question.
Chez l'œuf fécondé (diagr. IV), la sensibilité à la solution hyperto-
nique (trait plein) suit exactement le développement de l'aster mâle :
lui aussi croît, atteint un maximum de netteté et d'étendue environ
trente minutes après la fécondation, puis s'estompe ; ce qu'on voit en-
suite appartient déjà à la préparation de la mitose.
PARTHÉNOGENÈSE EXPÉRIMENTALE
525
Chez l'œuf parthénogénétique il n'y a
encore, pendant la phase de sensibilité,
aucun aster visible, du moins chez l'espèce
que j'ai étudiée {Paracentrotus lividus
Lmk.). Mais j'ai constaté, d'autre part^, que
l'accroissement du volume du pronucleus
femelle se fait en deux phases, séparées par
une période de décroissance. J'ai tracé ces
variations de volume sur le diagramme IV
(trait pointillé) ; on voit qu'elles sont exac-
tement parallèles à la courbe de polycen-
trie et coïncident également avec l'évolu-
tion de l'aster spermatique.
Mais des faits plus intéressants encore
montrent une remarquable concordance
entre tous ces phénomènes et les variations
cycliques de la perméabilité de Vœuf activé.
J'ai montré, dans une note présentée
récemment à la Société de Biologie ^, qu'on
peut mettre ces variations en évidence
d'une façon très simple. Les œufs, fécondés
ou activés par l'acide butyrique, sont trans-
portés, par lots successifs de 5 en 5 minutes,
dans des cristallisoirs renfermant une quan-
tité fixe de solution hypertonique ; on les
y laisse 45 à 60 minutes, et, au bout de ce
temps, on examine leur aspect dans chaque
culture. On constate ainsi que la plasmolyse
ne se produit que chez les œufs traités par
la solution hypertonique à partir d'un cer-
tain temps après l'activation (40 à 50 mi-
nutes, par exemple).
Ce fait montre que la membrane, qui
était perméable, au début, se transforme
progressivement en membrane hémiper-
(
4
ftQ
1. Herlant. Siir les variations du volume du noyau de l'œuf activé (C. B.. Ac. des Se, t. cr.xiv, 1017, p. 412.)
2. Herlant. Variations cycliques de la perméabilitô chez l'oeuf activé. (C. li. Soc. liiuL, 23 février 1918.)
Un travail plus complet sera publié ultérieurement.
526 MAURICE HERLANT
méable, ne laissant plus passer les sels. Si on emploie des solutions suffi-
samment concentrées, cette transformation des propriétés physico-chi-
miques de la membrane plasmatique est rendue plus évidente encore
par la disparition des œufs cytolysés dès qu'on atteint le stade oîi la
plasmolyse peut se produire.
Voici la copie d'un protocole d'expérience (Tableau I). Les œufs
d'un oursin ont été placés, de 5 en 5 minutes après la fécondation, dans
des cristallisoirs contenant une solution formée de 60 ce. d'eau de mer
+ 40 ce. de NaCl 2 1 /2 M.
N" des lots
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
Nous pouvons traduire ce résultat en traçant (diagr. V) une courbe
(trait pointillé) donnant le pourcentage des œufs cytolysés et qui
exprime évidemment la perméabilité de l'œuf pour les sels, car la cyto-
lyse qui se produit pendant cette période ne peut s'expliquer que par
leur pénétration excessive à l'intérieur du protoplasme.
Or si, sur ce même diagramme, nous reportons ^ la courbe de poly-
centrie figurée au diagramme I, nous constatons qu'elle concorde d'une
façon frappante avec la courbe de perméabilité aux sels de la solution
hypertonique. En d'autres termes, Vœuf n'est capable de former des asters
1. Trait plein.
Tableau
I
Minutes après
ŒUFS
l'activation
CYTOLYSÉS
5'
10 %
10'
50 %
15'
75 %
20'
100 %
25'
100 %
30'
80 %
35'
30 %
40'
10 %
45'
10 %
50'
2 %
55'
0
60'
0
65'
0
70'
0
75'
0
80'
0
ŒUFS
PLASMOLYSÉS
5
%
0
0
0
0
20
%
50
%
80
%
80
%
85
%
100
%
100
%
100
%
100
%
100
%
100
%
PARTHÉNOGENÈSE EXPÉRIMENTALE
527
accessoires que sHl subit le traitement hypertonique fendant la période du
développement où la membrane plasmatique est perméable aux sels, et il
s'en forme d'autant plus que la perméabilité est plus grande.
Il semble donc que la solution hypertonique n'est active qu'à condition
que les sels puissent pénétrer à l'intérieur de l'œuf. Ce serait donc cette
pénétration qui jouerait le rôle essentiel et non la déshydratation.
Cette déduction est susceptible d'une vérification expérimentale.
En effet, si la polycentrie dépend réellement de la perméabilité, tout ce qui
augmentera ou diminuera celle-ci augmentera ou diminuera parallèlement
celle-là : or, c'est précisément ce que montrent mes expériences.
Ainsi que je l'ai montré récemment ^, l'étude de la plasmolyse de l'œuf
9*U^K<.Ui-, a,^t^<^ f
DIAGR. V. Explication dans le texte.
activé permet de constater d'une façon très simple et très directe que
NaCl et KCl augmentent, et que CaCl^ et MgCP diminuent la perméa-
bilité. Ces résultats sont d'ailleurs conformes à ceux que R. S. Lillie,
OsTERHOUT, Clowes, Mac Clendon, Brooks 2, etc., ont obtenus par
d'autres méthodes. Or, on l'a vu plus haut, NaCl et KCl favorisent la
polycentrie et CaCl'^ et MgCP tendent à l'empêcher.
J'ai pu constater par la même méthode que les ions OH augmentent
la perméabilité : ils augmentent aussi fortement la polycentrie et en
outre, en reculant le moment où la membrane devient imperméable aux
1. Herlant. (C. n. Soc. de BloL, 13-27 avril 1918.)
2. K. S. LlLI.IE. Autagonism betwocn salts and anaesthetics. II. (Am'r. Jotirn. of Physiol., vol. XXX, 1912, et
nombreux autres travaux similaires.)
OSXERHOUT. The pénétration of balanced solutions and the theory of antagonism. (Science, vol. XLIV, 1916, et
nombreux autres travaux.)
Clowes. Protoplasniic equilibriuni. I. (Journ. of phys. Chem., vol. XX, 1916.)
Mac Clendon. On the hydrogen ion concentration of sea water, and the physiological effects of the ions of sea
watcr. (Froc. Nat. Ac. of Se, vol. II, 1916.)
Brooks. New déterminations of perraeability. (Proc. Nat. Ac. of. Se, vol. II, 1916.)
Arch. de Zool. Exp. et Gèn.
T. 57.
F. 5.
35
528 MAURICE HERLANT
sels, augmentent d'autant la période où l'œuf est sensible à l'action des
solutions hypertoniques. Les ions H, qui diminuent la perméabilité,
ont un effet exactement opposé et, raccourcissant ou supprimant com-
plètement cette période, affaiblissent ou suppriment la polycentrie. Il
en est de même pour les anesthésiques, qui diminuent également la per-
méabilité.
L'action paradoxale des solutions hypertoniques très fortes qui, comme
je l'ai dit, ne provoquent pas la polycentrie, est, à première vue plus
difficile à comprendre. Mais il est un fait certain, c'est que la plasmolyse
se produit à des stades de plus en plus précoces à mesure que la concen-
tration s'élève, du moins jusqu'à une certaine limite au delà de laquelle
il y a cytolyse immédiate des œufs. Les solutions fortement hyperto-
niques semblent donc favoriser la transformation de la membrane per-
méable en membrane hémiperméable. Nous avons vu qu'elles raccour-
cissent d'abord puis finalement suppriment la phase de sensibilité de
l'œuf au traitement hypertonique. La formation des asters accessoires
nous apparaît ainsi comme étant fonction : 1^ d'un certain degré de
perméabilité de la membrane et 2^ d'une certaine tension des sels du
milieu extérieur : ces deux conditions ne se trouvent réunies que dans
les solutions hypertoniques de concentration moyenne.
L'inefficacité des solutions très fortement hypertoniques est encore
intéressante à un autre point de vue : elle montre, en effet, que ce n'est
pas la déshydratation, réalisée ici au maximum, qui joue le rôle princi-
pal dans le traitement complémentaire de la méthode de Loeb. L'étude
de l'action des solutions moyennes conduit d'ailleurs à la même conclusion,
puisque la polycentrie ne se manifeste que chez les œufs non encore
parvenus à la phase hémiperméable et oii la déshydi'atation est par
conséquent moins forte. Enfin, la comparaison des cultures traitées par
une même solution hypertonique, selon qu'elle est neutre, acide ou
alcaline, montre combien la théorie de la déshydratation s'adapte mal à
la réalité des faits. En effet, si elle était exacte, la polycentrie devrait
être plus intense dans la solution acide que dans la solution neutre et
dans celle-ci que dans la solution alcaline, puisque cette dernière est celle
qui retarde le plus et affaiblit la plasmol^^se. Or, on l'a vu, c'est exacte-
ment le contraire qui a lieu.
D'ailleurs, si la soustraction d'eau suffisait à produire les effets carac-
téristiques de la solution hypertonique, on pourrait s'attendre à obtenir
les mêmes résultats par une dessication méthodique des œufs. Tous les
PARTHÉNOGENÈSE EXPÉRIMENTALE 529
essais que j'ai faits dans ce but ont été négatifs et je ne sache pas que
d'autres expérimentateurs aient obtenu par ce moyen la formation
d'asters accessoires.
4. Le mécanisme de la formation des asters accessoires et leur signification
Un solide ensemble de faits conduit donc à admettre que la formation
des asters accessoires est due à la pénétration des sels de la solution hy-
pertonique à Tintérieur du protoplasme. Mais comment ces deux phé-
nomènes se relient-ils l'un à Tautre ?
Cette question touche aux points les plus obscurs de la physico-
cliimie de la cellule. Je n'ai nullement la prétention d'y répondre, ni
même d'en faire ici un examen approfondi. C'est, en effet, toute la théorie
du centrosome qu'il faudrait passer en revue et cela nous entraînerait
beaucoup trop loin. Je voudrais simplement esquisser rapidement quel-
ques idées générales qui me semblent découler directement des faits
eux-mêmes et qui pourront peut-être faciliter des recherches ultérieures.
Un premier point à noter, et qui semble particulièrement important
pour aborder l'étude de ces questions dans de bonnes conditions, c'est
qu'il ne faut pas s'hypnotiser sur les définitions étroites et quelque peu
artificielles des cytologistes descripteurs. Ce qui est important pour la
physiologie de l'œuf, c'est l'ensemble dynamique formé par la sphère cen-
trale et par l'irradiation du protoplasme, c'est, en un mot, Yénergide,
qui affirme l'individualité de la cellule. Que le centrosome qu'on découvre
à grand'peine au centre de cette énergide soit <( mâle », « femelle » ou formé
« de novo », est un fait d'importance bien moindre ; il est certain que,
dans un cas comme dans l'autre, l'aster, lui, est toujours « femelle » et
est l'expression d'un même phénomène physico-chimique. Comme l'a
fait très justement observer Brachet ^, les conditions nécessaires à la
production de l'aster doivent être cherchées bien plus dans un état phy-
siologique particulier et périodique du protoplasme que dans un état
« actif » ou « passif » du centrosome.
Mais pour connaître ces conditions, il faudrait d'abord savoir ce qu'est
l'aster au point de vue physico-chimique.
Il semble qu'ici nous puissions maintenant donner une réponse pré-
cise. Tout paraît, en effet, indiquer que l'aster, de son apparition à sa
1. Brachet. L'<put' et les facteurs de l'ontogenèse. (Paris, 1917, p. 15.3.)
530 31 A URICE HERLANT
disparition, participe à la fois de phénomènes de coagulation et de phé-
nomènes de liquéfaction des colloïdes protoplasmiques : il s'agirait,
en d'autres termes, d'un gel réversible. Cette idée a été maintes fois
émise sous une forme purement théorique, notamment par Fischer et
OsTWALD 1, par Delage 2, qui la met à la base de sa théorie de la parthé-
nogenèse expérimentale, et par d'autres encore ^. Mais c'est incontes-
tablement KiTE ^ et Chambers ^ qui en ont fourni la première démons-
tration véritable. Ce dernier, notamment, est parvenu à reconnaître que
le centre de l'aster (sphère) et les raj^^ons qui en émanent sont à l'état de
sol, tandis que les cônes protoplasmiques intercalés entre ceux-ci sont,
au contraire, à l'état de gel et se comportent presque comme des corps
solides.
Cette rigidité relative des travées protoplasmiques pendant la phase
d'irradiation de Faster s'afïirme encore dans les travaux de Heilbrunn ®
et de CoNKLiN ^.
L'aster nous apparaît donc comme caractérisant une période de la
vie cellulaire où les deux phases, dispersée et continue, du protoplasme
tendent plus ou moins à se séparer transitoirement et à partir d'un
centre, où domine la phase liquide (sphère) tandis que la phase plus solide
domine à la périphérie. Il semble y avoir à ce moment une rupiure de
V équilibre colloïdal du protoplasme.
Quels peuvent être les facteurs de cette rupture ?
On peut d'abord admettre que certaines causes internes jouent pro-
bablement un rôle important : telle, par exemple, une accumulation à
l'intérieur du protoplasme de certains produits de désassimilation. Il
est à remarquer que la période qui, chez l'œuf activé, précède l'apparition
de l'aster, est caractérisée par une très faible perméabilité de la mem-
brane ^ et réalise par conséquent, des conditions favorables à la rétention
1. l'ISCHEK et OsTWALD. Zur pliysikalisch-ditiuischen Thoorie der Bcfnichtung (Arch. f. d. ces. Physiol.,
Bd. CVI, 1905, p. 229.)
2. Delage. Les vrais faetoursde la parthénogenèse expérimciitiiU'. (.lrc/(. iToo?. f.rp. et yen., s. 4, t. VU, 1908,
p. 445.)
3. Voir la bibliograpliie de cette question dans : Prenant. Théories et int^-rprétations physiques de la mitose.
{Joum. de l'Anal, et Physiol., t. XLVI, 1910), et JlEEK. The problem of mitosis. (Quart. Journ. of miscroc. ISc, vol.
LVni, 1913.)
4. L. KiTE. Studies on the physical properties of protoplasm. < Amer. Journ. of Physiol., vol. XXXII, 191?.)
5. CHAMBEEti. Jlicrodisscction studies. II. The cell aster : a réversible gelation phenonienon. (Journ. of exp.
Zool., vol. XXm. 1917, p. 483.)
6. Heilbkunn. Studies in artiflcial paithenogenesis. 11. Physical elianges in the egg of Arbacia. (Biol. Bull.,
vol. XXIX, 1915. p. 149.)
7. CONKUN. Elfecta of centrifugal force on the structure and devclopment of the eggs of Crepidula. (Journ.
of exp. Zool., vol. XXII, 1917, p. .311.)
8. llERLANT. Variations cydiciues de la perméabilité chez l'u'uf activé. (V. lî. !Sor. Biol., 2i février 1918. :
PARTHÉNOGENÈSE EXPÉRIMENTALE 531
temporaire de certaines de ces substances. Il n'y a rien d'impossible à ce
que cet état amène une certaine fragilité physique de l'édifice colloïdal,
et il est de fait qu'on ne peut provoquer la formation d'un aster à un
moment quelconque de la vie de la cellule : « le terrain » doit être préparé.
Mais dès que l'aster est formé et évolue, on sait que la perméabilité
à l'eau (R. S. Lillie i) et aux sels augmente. L'aster est caractéristique
d'une période où la cellule s'ouvre en quelque sorte au monde extérieur
et en laisse pénétrer certains éléments à l'intérieur de son protoplasme.
Il est fort probable que cette irruption d'eau et de sels ne va pas sans
. amener de profondes modifications dans l'état physico-chimique des
colloïdes protoplasmiques, et il est difficile de croire que ces éléments ne
prennent pas une part directe à la formation et à l'évolution de l'aster.
En tous cas, ce que l'on peut affirmer, c'est qu'à ce moment de la vie
cellulah-e où la membrane redevient perméable, les causes de rupture
de l'équilibre colloïdal ne manquent pas, bien qu'il soit encore très diffi-
cile de préciser le mécanisme de leur action.
Or, ce qui ditt'érencie surtout un œuf fécondé ou activé d'un œuf
traité par la solution hypertonique, c'est que cette rupture se produit
en un point seulement dans le premier cas, en plusieurs points dans le
deuxième. Chez l'œuf fécondé ou activé, c'est autour du noyau (mâle
ou femelle) que l'aster se forme ; chez l'œuf polycentrique c'est autour
de quelque chose qui doit exercer sur V équilibre colloïdal une action analogue
à celle du noyau.
De quoi s'agit-il ?
En ce qui concerne le noyau, il est à noter qu'il subit, chez l'œuf
activé, et immédiatement avant l'apparition de l'aster, un accroissement
de volume considérable ^ ; on peut donc le considérer à ce stade comme un
point d'appel d'eau, et cela précisément à un moment où celle-ci pénètre
plus facilement à travers la membrane plasmatique : si cette pénétration
est bien la cause, ou l'une des causes, de la rupture d'équilibre colloïdal
dont l'aster est l'expression, il n'y a rien d'étonnant à ce que celui-ci
se forme autour du pronucleus femelle. Chez l'œuf fécondé, Delage ^
a fait remarquer depuis longtemps que le gonflement de la tête du sperma-
tozoïde, au cours de sa transformation en pronucleus mâle, doit s'ac-
1. K. S. Lirj.iK. The PhysioIot?y of ccll <li\isioii. VI. Rliytliiuical changes in the résistance of the dividing
Sea Tirchin cgg to hypotonie sea water and thiir pliysiologieal signiticance. {Journ. ot exp. ZooL, vol. XXI, 1916.
p 369.)
2. Herlanï. Surles variations du vohime du noyaudd'truf active. (C. 7?. Ac. des Se, t. CLXIV, 1917, p. 412.)
.3. Del.ige. Les théories de la fécondation. (('. /?. Con'jr. inteni. ZooL, Berlin, 1901.)
532 MA URICE HERLANT
compagner d'un déplacement d'eau et avoir des conséquences directes
sur l'économie du protoplasme. Or, à ce moment, le pronucleus femelle
ne s'accroît pas, ou très peu, et on s'expliquerait ainsi que la rupture
de l'équilibre colloïdal se fasse, ici, autour du noyau spermatique comme
centre.
En ce qui concerne T origine des asters accessoires, les faits décrits
dans ce travail m'ont conduit à formuler l'hypothèse suivante : à la suite
du traitement par la solution hypertonique pendant la période où la
membrane est perméable aux sels, ceux-ci vont s'accumuler en certains
endroits du protoplasme ; il est, en effet, fort probable que le protoplasme,
n'est pas suffisamment homogène pour que toutes ses parties aient une
égale affinité, même purement physique, pour les sels. Lors du retour des
œufs dans l'eau de mer normale, ces points « salés » vont être autant de
centres d'attraction pour l'ea^u extérieure et il y aura ainsi autant de
points où se trouveront réunies les conditions susceptibles de provoquer
une rupture de l'équilibre colloïdal du protoplasme. Au lieu d'un aster,
nous en aurons plusieurs, chaque point de salinité élevée jouant, au point
de vue de la répartition de l'eau, le rôle physique d'un noyau en voie de
croissance.
Cette hypothèse sur la formation des asters accessoires a probable-
ment le défaut de donner une explication trop simple de phénomènes
en réalité fort complexes. Mais je pense que, sous cette forme essentielle-
ment provisoire, elle reste plus étroitement en contact avec les faits et
se prête mieux à servir de point de départ pour de nouvelles recherches.
Elle a en tous cas, sur les théories de Loeb et de R. S. Lillie, l'avantage
non négligeable de se passer de la formation hypothétique de « substances »
plus ou moins mystérieuses et, surtout, d'expliquer pourquoi Veffet de
la solution hypertonique ne se fait sentir qu'après le retour des œufs dans
Veau de mer.
Il semble, enfin, que certaines des expériences décrites plus haut
constituent un commencement de démonstration de son exactitude. En
effet, si mon hypothèse est juste, il faut, pour qu'il y ait formation d'asters
accessoires, non seulement que les sels de la solution hypertonique puissent
pénétrer à l'intérieur de l'œuf, mais encore qu'ils y restent et que l'eau,
appelée du dehors par leur présence, puisse franchir facilement la mem-
brane.
Or, il y a précisément deux moyens de supprimer ces conditions :
P le traitement rapide des œufs par l'eau de mer diluée, qui réalise un
PARTHÉNOGENÈSE EXPÉRIMENTALE 533
lavage énergic[ue et provoque la diffusion immédiate des sels accumulés
dans le protoplasme ; 2° le passage des œufs, préalablement à leur retour
dans Teau de mer, dans des solutions qui entravent la pénétration de
l'eau : solution de CaCP, MgCP, KCN, etc., toutes substances qui dimi-
nuent la perméabilité. Dans ces deux groupes d'expériences et conformé-
ment à la théorie, la polycentrie est supprimée.
Station zoologique russe, Villefr anche- sur -Mer.
ARCHIVES DE ZOOLOGIE EXPÉRIMENTALE ET GÉNÉRALE
Tome 57, p. 535 à 618.
6 Décembre 1918
ÉPONGES DE SAN THOME
ESSAI SDR LES GENRES
SPIUSTRELLA, DOMTIA ET CIIOPRILLA
E. TOPSENT
Professeur à la Faculté des Sciences de Dijon.
M. Ch. GrRAViER a rapporté d'un voyage d'études à l'île San Thome, en
juillet-août 1906, un petit lot d'Épongés, dont les siliceuses font l'objet de ce
mémoire. Le surplus ne comprenait qu'une Calcaire et deux Monocératines.
De ces deux dernières, l'une, tronçon sans oscules, noir à la surface,
jaunâtre intérieurement, coupé à mer basse à l'Dlia das Cabras, m'a paru
appartenir au genre Euspongia et, en ce cas, être une Euspongia offi-
cinalis adriatica, variété qu'on sait vivre non seulement dans la Méditer-
ranée mais aussi dans l'Atlantique, à la Havane ; pourtant, je ne garantis
nullement l'exactitude d'mie détermination faite d'après un spécimen aussi
défectueux. L'autre est une Spongelia, brun foncé avec conules plus clairs,
sur le vif, entièrement décolorée dans l'alcool, en plaque longue de 80 mm.,
large de 35 mm., d'où s'élèvent une douzaine de digitations de 10 mm.
à 20 mm. de hauteur, percées d'un oscule au bout ou sur le côté ; à s'en
tenir aux descriptions de Lendenfeld, il faudrait, pour ses fibres connec-
tives minces et généralement libres de corps étrangers, pour la grandeur
de ses corbeilles vibratiles (0 mm. 085 x 0 mm. 07) et pour les Thallo-
phytes dits Oscillaria Spongeliœ qui y foisonnent, la considérei;. comme une
Spongelia elastica lohosa, mais la lâcheté de son réseau connectif , la fragilité
de tout son squelette, le peu de hauteur de ses conules (moins de 1 mm.),
et même l'étendue de sa base me la feraient plutôt prendre pour une
S, fragilis irregularis.
Arch. de Zool. Exp. et Gèn. — T. &7. — F. 6. 36
536 E. T0P8ENT
Monaxoxiida
I. HALICHONDRINA
Reniera neens n. sp.
Plage de Fernào Dias, 17 juillet 1906. Un spécimen fixé sur un bloc
de basalte de la côte.
Praia das Conchas, 3 août 1906. Un spécimen vivant dans l'intérieur
d'un Porite tout rongé rejeté à la côte.
Les deux spécimens, que le hasard a fait recueillir l'un et l'autre en
compagnie d'un spécimen de Oeodia gibberosa, sont de fort petites Éponges,
dont la plus grande dimension n'atteint pas 10 mm. Elles sont informes,
massives, autant que le permet leur taille, blanches dans l'alcool et
molles. On n'y distingue pas d'oscules ; d'étroites taches sombres, çà et
là visibles à la loupe, correspondent peut-être aux orifices exhalants.
L'inhalation s'accomplit par la surface générale du corps, à travers d'in-
nombrables stomions microscopiques dont l'ectosome est criblé. Celui-ci
est une membrane mince, non détachable isolément, tendue directement
sur les maiUes tangentielles qui limitent en dehors le réseau squelettique.
Ce réseau, dans toute son étendue, se montre unispiculé, sans qu'il
soit possible d'y reconnaître des lignes primaires et secondaires. Chacun
de ses nœuds s'empâte d'un lien de spongine incolore qui ne s'étend
jamais loin sur les bouts des spicules entre-croisés. Des nœuds superficiels
s'élèvent solitaires des spicules qui, en raison de leur brièveté, ne déter-
minent cependant pas une hispidation apparente.
L'espèce n'est digne d'intérêt que par la nature de son système con-
jonctif et par la forme et la taille de ses spicules.
Elle possède des cellules sphéruleuses douées du pouvoir de sécréter
chacune un petit nodule de substance élastique et qui, se disposant en de
longues files et étirant leurs nodules jusqu'à les unir bout à bout, consti-
tuent ainsi des cordons conjonctifs fins, ordinairement fascicules. C'est
une formation identique à celle observée déjà dans quelques Haplosclé-
rides, telles que Reniera elegans (Bowerbank), Chalinula Montagui
(Bowerbank), Acervochalina finitima Ridley, Chalina similis Topsent.
Il existe, en outre, des cellules sphéruleuses d'une seconde sorte, assez
petites, brillantes, indépendantes.
ÉPONGES DE SAN THOME 537
Spiculation, — Typiquement, les spicules sont des oxes, mais à
partir d'une certaine taille, ils se modifient tous plus ou moins en stron-
gyles. Ainsi, bien développés, ils se montrent lisses, faiblement courbés et,
en grande majorité, isodiamétriques, sauf en leurs extrémités, qui s'amin-
cissent un peu avant de s'arrondir. Les moins modifiés conservent des
pointes obtuses et assez brèves. Les spicules grêles, probablement des
jeunes, ont les pointes à peine plus minces que leur centre et difficiles à
voir nettement dans le baume.
Les spicules achevés du spécimen de la plage de Fernào Dias mesurent
surtout de 0 mm. 093 à 0 mm. 103 de longueur sur 0 mm. 003 à 0 mm. 0043
d'épaisseur. Ceux de l'autre spécimen, un peu plus courts et plus minces,
oscillent surtout entre 0 mm. 077 et 0 mm. 087 sur 0 mm. 0033. Même
en tenant compte de ces variations individuelles, on trouve chez peu de
Reniera des spicules aussi petits.
Reniera cœrulescens n. sp,
Sào Joâo dos Angolares, 12 août 1906. Un spécimen, à la face interne
d'un fragment de coquille.
La coloration bleuâtre sombre qui a été notée sur le vif, s'est main-
tenue dans l'alcool avec assez d'intensité pour laisser à l'Eponge en ques-
tion un aspect très singulier. Le bleu est rare chez les Spongiaii'es. C'est
d'habitude {Terpios fugax, Azorica Pfeifferœ) une couleur due à des végé-
taux parasites, dont il n'existe nulle trace ici. Elle s'étend à toutes les
parties du corps, même profondes, au moyen de granules très fuis dont
tous les éléments sont chargés. Les corbeilles vibratiles qui, contractées,
ont 0 mm. 023 de diamètre, se montrent, par suite même de l'entasse-
ment de leurs choanocytes, nettement bleuâtres au microscope. J'admets,
d'après cette intéressante particularité, cette Reniera comme le type
d'une espèce, mais sous cette réserve, tant il reste à dire des Reniera les
plus communes, que peut-être elle représente simplement une curieuse
variété d'une espèce déjà connue. Je lui trouve, par exemple, beaucoup
de ressemblance avec R. cinerea de nos côtes océaniques.
Elle se présente sous forme d'une plaque longue de 25 mm., large de
15 mm., épaisse au plus de 4 mm., do contom" irrégulier, manifestement
composée d'une quinzaine de petits lobes qui sont soudés dans sa partie
centrale mais encore dégagés sur ses bords. Ceux des lobes dont la con-
crescence est devenue totale demeurent encore assez distincts parce qu'ils
538 E. TOPSENT
sont légèrement coniques avec un oscule apical dont le diamètre peut
atteindre 0 mm. 8. Ses pores, partout où l'ectosome est intact, apparais-
sent en sombre par transparence de cette membrane ; ils reçoivent l'eau
tamisée par des stomions microscopiques. La charpente, réticulée, a des
lignes primaires nettes mais faibles, ne comprenant que deux, rarement
trois spicules de front et souvent réduites à une simple alignée de spicules.
Leur terminaison dépasse légèrement la surface et lui donne une hispi-
dation si courte qu'une forte loupe est nécessaire pom' la mettre en évi-
dence. Les lignes secondaires sont unispiculées. Un lien de spongine inco-
lore s'établit à chaque nœud du réseau. La consistance est molle. La chair
renferme des cellules sphéruleuses de 0 mm. 01 de diamètre, à sphérules
assez brillantes mais petites et serrées.
Spiculation. — Les spicules sont des oxes doucement courbés, peu
fusif ormes, à pointes acérées. Leur longueur oscille le plus souvent entre
0 mm. 127 et 0 mm. 14, pour une épaisseur de 0 mm. 005, quelquefois de
0 mm. 0058; elle s'abaisse cependant jusqu'à 0 mm. 117 et même 0 mm. 113,
l'épaisseur pouvant alors se réduire à 0 mm. 004 e^. même 0 mm. 0035.
Le spécimen ne contient pas de spicules grêles.
Gellîus abbreviatus n. sp.
Praia das Conchas, 3 août 1906. Dans les Porites rejetés à la côte.
On connaît actuellement toute une série de Gellius ne posséda-nt
d'autres microsclères que des toxes.
Le premier décrit, G. pumiceus Fristedt (1885), avait été placé à
tort dans le genre Desmacella. Puis vinrent G. toxius Topsent (1897),
G. primitivus et G. proximus Lundbeck (1902), G. toxophorus et G. toxotes
Hentschel (1912), enfin G. arcuarius Topsent (1913).
Chose curieuse, tout ce qu'on en a recueilli se réduit à de très petits
spécimens ou à des fragments pour la plupart mesurables en millimètres
seulement et tous informes. Ce sont toutes des Éponges littorales, mais
de provenances très différentes : G, pumiceus, G. primitivus, G. proximus
vivent dans les eaux du Nord de l'Europe, G. toxius, G. toxopJiorus et
G. toxotes dans l'Archipel Malais et G. arcumrius aux Orcades du Sud.
C'est aux G. toxius, G. primitivus et G.proximus que le nouveau Gellius
ressemble le plus, aussi bien par sa structure, reniéroïde, que par la taille
approximative et la forme générale de ses spicules.
Il est représenté, lui aussi, par de très petits spécimens, dont le plus
ÉPONGES DE SAN THOME 539
grand mesure 10 mm. de longueur, 6 mm. de largeur moyenne et de
1 mm. à 2 mm. d'épaisseur, et le plus petit un peu plus d'épaisseur avec
un peu moins d'étendue. Ils sont blancs et paraissent lisses, la très fine
hispidation causée par les courts spicules qui se dressent solitaires aux
nœuds superficiels de leur réseau squelettique n'étant pas perceptible à
l'œil nu. Très peu charnus, comme s'ils avaient subi une macération par-
tielle, et soutenus par un réseau unispiculé d'une grande régularité, ils
sont mous et généralement translucides en raison de leur minceur. Leurs
orifices aquifères, étroits, se voient en plus clair que le reste ; il n'y a pas
d'oscules distincts. Le réseau" squelettique est consolidé par des liens assez
forts de spongine en chacun de ses nœuds. Il ne constitue pas de lignes
primaires polyspiculées, les mégasclères qui ont leur taille définitive se
disposant toujours en un réseau d'une simplicité parfaite. Toutefois, à la
surface du corps, s'établissent des alignées plurispiculées de mégasclères
plus grêles, auxquels se mêlent les microsclères, à peu près localisés à ce
niveau.
Spiculation. — I. Mégasclères. Les spicules qui composent la char-
pente réticulée sont uniquement des strongyles, beaucoup avec les bouts
tronqués sans amincissement préalable, mais davantage encore avec les
bouts plus ou moins amincis avant de s'émousser. Ce sont évidemment
des oxes modifiés, mais tous ont subi cette transformation. Ils sont dou-
cement courbés. Ils mesurent de 0 mm. 09 à 0 mm. 127 de longueur et
0 mm. 005 à 0 mm. 007 d'épaisseur, leurs dimensions oscillant surtout
entre 0 mm. 1 à 0 mm. 11 sur 0 mm. 0055 et 0 mm. 006. Les plus courts
sont d'habitude les plus gros et se présentent en même temps comme les
strongyles les plus purs.
Des oxes plus minces, peut-être plus jeunes, à pointes variables, tan-
tôt aiguës mais tantôt émoussées, entrent, en se plaçant dans le même
sens, par deux à quatre de front, dans la constitution de ces alignées de
spicules, généralement longues, qui m'ont paru toutes s'étendre à la
surface de l'Éponge et s'y anastomoser. Ils sont longs de 0 rnm. 065 à
0 mm. 12 et épais seulement de 0 mm. 0013 à 0 mm. 003. Leur courbure
varie beaucoup ; celle des plus courts d'entre eux est parfois assez accusée
pour les faire considérer comme formant le passage aux toxes.
II. Microsclères. Ce sont uniquement des toxes. Ils se localisent presque
tous dans les bandes plurispiculées, s'ajoutant, en proportion souvent supé-
rieure, à leurs éléments et s'orientant comme eux. Ils mesurent couram-
ment de 0 mm. 056 d'envergure sur 0 mm. 0017 au centre à 0 mm. 07 sur
540 E. TOPSENT
0 mm. 0024 et, par ces dimensions, semblent assez bien dériver des oxes
grêles ; mais il y en a de beaucoup plus petits et plus fins, longs, par
exemple, de 0 mm. 02 et épais de 0 mm. 0008, avec des intermédiaires,
auxquels ne correspond aucune taille d'oxes grêles. Ceux qu'on trouve
épars dans l'Eponge sont généralement très petits. La courbure des toxes
est fort variable ; leurs pointes sont acérées et récurvées, à l'occasion
émoussées sur les plus gros d'entre eux.
Oéllius proximus a des oxes d'un tiers au moins plus grands et plus
gros que les strongyles de G. ahhreviahis. Les mégasclères de G. jyrimi-
tivus s'en rapprochent davantage par leurs dimensions et sont sujets aux
mêmes variations de taille, mais ce sont des oxes véritables, dont les
pointes, assez brèves, sont cependant constantes ; ses toxes, d'autre part,
demeurent beaucoup plus fins que ceux de G. ahhreviatus. En somme, le
GelJius de San Thome diffère plus de ses congénères septentrionaux
qu'eux-mêmes ne diffèrent entre eux.
IL HADROMERINA
Pseudosuberites sulphureus (Beau) Topsent.
Sào Joào dos Angolares, 11 août 1906. — Éponge jaune brun assez
vif, sur un encroûtement d'Algues calcaires.
Il n'a été recueilli qu'un fragment du spécimen, sous forme d'une pla-
que sensiblement carrée, d'environ 18 mm. de côté, sans oscule distinct.
EUe est plus épaisse que les représentants de cette espèce observés dans
les mers du Nord, sa cassure, d'un côté, atteignant 9 mm. de hauteur.
La coloration paraît avoir été un peu plus foncée, puisque M. Gravier
l'a notée comme tirant au brun ; elle a disparu dans l'alcool et l'Éponge
y est grise. La surface est glabre, limitée, suivant la caractéristique du
genre, par un ectosome détachable. Il laisse, par transparence, parfai-
tement voir en sombre les pores sous-jacents, au niveau desquels il subit,
d'ailleurs, un léger enfoncement. Il a pour squelette, comme d'habitude,
un réticulum grossier, polyspiculé, dont les mailles irrégulières se montrent
criblées de stomions microscopiques. Le choanosome se déchire très faci-
lement ; sa charpente n'affecte aucune régularité. Pas de cellules sphéru-
leuses notables.
Spiculation. — L'examen des tylostyles confirme la détermination
m rendaient probable les caractères extérieurs de l'Éponge. Comme dans
ÉPONGES DE SAN THOME 541
les spécimens que j'ai vus de Rosoofï, ils sont, tant dans l'ectosome que
dans le choanosome, d'une inégalité tout à fait frappante, toutes les tailles
se mélangeant, sans prédominance aucune, depuis les plus petits qui, très
grêles, n'ont pas beaucoup plus de 0 mm. 1 de longueur, jusqu'aux plus
grands, qui ne dépassent guère 0 mm, 35 sur 0 mm. 007 à 0 mm. 008 d'épais-
seur. Leur pointe est acérée ; leur tige, courbée, est fusiforme avec son
maximum d'épaisseur en son centre et souvent au delà ; toutefois, sur
les plus robustes, la tête tend à effacer son mucron et présente rarement
un© dilatation visible du canal axial.
Rhabderemia minutula (Carter) Topsent.
iSào Joào dos Angolares, 11 août 1906. — Dans des perforations d'un
conglomérat de Mélobésiées.
Le morceau de conglomérat qui porte à sa surface un spécimen de
Pseudosuherites sulphureus se montre tout creusé de galeries lobulées de
Clionides, les unes encore occupées par leur auteur, les autres contenant,
sous forme d'une chair grisâtre et molle, une Rhabderemia minutula.
Ayant vu de cette curieuse Eponge des spécimens de diverses prove-
nances, j'ai pu noter une assez grande variabilité de sa spiculation.
C'est ainsi qu'une R. minutula du Banc de Campêche m'a présenté
des rhabdostyles solitaires, épais de 0 mm. 004 à 0 mm. 005, c'est-à-dire
assez robustes, mais de longueur inégale, depuis 0 mm. 07 jusqu'à 0 mm. 2.
Ses microstyles, entremêlés, étaient, pour la plupart, longs de 0 mm. 11,
épais de 0 mm. 0016 ; parmi eux et en quantité moindre s'en ajoutaient
de beaucoup plus petits et plus minces, longs seulement de 0 mm. 06.
Les sigmaspires, petites, étaient très grêles, bien plus grêles que les micro-
styles les plus grands.
Une R. minutula de Banyuls (Golfe du Lion) possédait des rhabdo-
styles isolés, debout sur le support, longs de 0 mm. 06 seulement, épais
de 0 mm. 004, des microstyles à peu près aussi longs qu'eux mais très fins,
ne formant pas deux catégories distinctes, quoique les plus fins fussent
souvent groupés en dragmates, enfin des sigmaspires abondantes, grandes
et nettement plus épaisses que la base même des miorostyles. La taille
de ces microsclères permet de se rendre compte aisément que leurs extré-
mités ne se renflent ni l'une ni l'autre.
Dans ces deux Éponges, les rhabdostyles avaient leur base très tordue.
Mais des R. minutula d'eau profonde des Açores m'ont donné des rbab-
542 E. TOPSENT
dostyles bien plus forts, longs d'environ 0 mm. 5, épais de 0 mm. 008,
à pointe plus ou moins obtuse et à base non plus spiralée comme dans les
cas précédents, mais simplement coudée plus ou moins obliquement. Les
microstyles, nettement d'une seule catégorie, longs assez uniformément
de 0 mm. 12, étaient plus robustes que ceux des spécimens précédents,
avec une base graduellement renflée, épaisse de 0 mm. 025, et paraissaient
très finement raboteux de ce côté. Les sigmaspires, assez grandes, étaient
au contraire très grêles, à bouts non renflés.
Dans le spécimen de San Thome, les microstyles sont de deux caté-
gories. Les plus grands, solitaires, dispersés, assez nombreux quand même,
ont au voisinage de 0 mm. 1 de longueur et sont encore plus gros (0 mm. 028)
que ceux des spécimens des Açores ; les autres, faisant contraste par leur
gracilité et longs seulement de 0 mm. 053 à 0 mm. 067, rappellent les mi-
crostyles de seconde catégorie du spécimen du Banc de Campêche, mais
ils existent ici en nombre bien plus considérable que ceux de la première,
entrecroisés dans toute la chair, et souvent (peut-être quand ils sont
jeunes encore) groupés en de petits faisceaux comme en contient le spéci-
men de Banyuls. Les sigmaspires sont abondantes et grêles, de l'épaisseur
à peu près des microstyles de seconde catégorie.
Je n'ai pas pu découvrir les rhabdostyles de cette Éponge quoique
j'aie décalcifié les parois de plusieurs chambres remplies par elle pour
m'.assurer si je ne les y trouverais pas implantés. Je suppose que, dans ces
abris étroits, Rhahderemia minutula, qui s'étendait peut-être, comme d'ha-
bitude, en plaque sur un morceau que je n'ai pas eu du conglomérat, a
senti la possibilité de se passer d'eux et les a remplacés par ses micro-
styles de première catégorie, les épaississant un peu, mais les clairsemant
quand même dans la masse des autres. C'est là, si je ne m'abuse, un exemple
intéressant d'adaptation d'une Éponge normalement revêtante à un état
massif en lieu clos.
Spirastrella cunctatrix O. Schmidt.
Sào Joào dos Angolares, 12 août 1906. — Eponge d'un beau rouge
brique.
Il m'en a été remis trois plaques en forme de lanières, dont la plus
grande mesure 60 mm. de longueur sur 10 mm. de largeur. Ce sont vrai-
semblablement des fragments d'un même spécimen encroûtant, obtenus
en raclant au plus près le support, une roche dont des fragments adhèrent
ÉPONGES DE SAN THOME
543
à la face inférieure de l'un d'eux. Leur épaisseur est partout moindre que
1 mm. Leur consistance est coriace. Leur surface est glabre, mais marquée
de rides perpendiculaires à leur longueur, sans doute provoquées par le
raclage.
Les mégasclères sont des tylostyles droits, pointus, longs au plus de
0 mm. 44, à tête elliptique, large de 0 mm. 012, où le canal axial s'avance
loin, sans se dilater. Ils tendent à s'orienter la pointe en haut. Cela est
surtout net pour ceux de la base, qui appuient leur tête au support, et
pour ceux de la surface, verticaux mais à peine saillants au dehors ; les
intermédiaires sont plus penchés et s'entrecroisent.
Les microsclères sont des spirasters^, extrêmement abondantes et très
inégales (fig. i).
Les plus petites -^V-^ "^^r-^-c^ ^V
n'ont pas plus de ^~^
0 mm. 0045 de
longueur et 0 mm.
002 d'épaisseur,
abstraction faite
des épines, ou
0 mm. 0035 en
les comptant. La
longueur des
grandes dépasse 0 mm. 04 et leur tige, épaisse de 0 mm. 006, porte des
épines longues de 0 mm. 012. Il existe à la surface du corps, sur une
certaine épaisseur, une accumulation dense des petites spirasters.
Les grosses spirasters se trouvent surtout à l'intérieur, mêlées à des
petites ainsi qu'à des spirasters de taille intermédiaire ; leur densité aug-
mente beaucoup au voisinage du support.
Ces microsclères sont loin d'être tous nettement spirales ; les petits
se montrent le plus souvent simplement courbés avec un groupe d'épines
à chacune de leurs extrémités et un autre sur leur partie convexe ; et de
très petits, rares, il est vrai, trop courts peut-être pour présenter cette
flexion, passent à l'état d'amphiasters, d'autant mieux que le groupe
médian d'épines s'y réduit à une seule épine ou avorte.
Fio. I. Spirasirella eunctatrix O. Schmidt. Spécimen de San Thome. Microsclères
X 400 environ.
1. VOSMAEK a repris en le modifiant légèrement le nom de spiuispirules que Carter donnait aux spiculesde
cette sorte et les a appelés spinispires. Ces deux désignations sont défectueuses puisqu'on connaît des Éponges,
telles que Clioia vermiferi Hancock et C. levispird Topsent, où ces microsclères forment une spire parfaitement
lisse. Dans tous les cas où le nom de spirasters, plus employé, se trouve injustifié, le spicule restant plus ou moins
droit ou tendant vers une forme globuleuse, la terminaison spire ou spirule devient tout aussi inexacte.
544 E. T0P8ENT
La conversion de spirasters en amphiasters chez cette Spirastrella
n'est pas un fait exceptionnel. Elle s'opère chez nombre de Spirastrellides.
Je l'ai notée sur les petites spirasters de Gliona Garteri Ridley (61, p. 90) ;
ce peut être une sorte de spirasters ainsi modifiées que représentent les
petites amphiasters des papilles de Cliona levispira et de Dotona pul-
chella (63, pi. XII, fig. 1 et 2) ; enfin, le genre Spirastrella lui-même offre
des exemples d'Épongés où cette conversion est fréquente et s'étend à des
microsclères parmi les plus gros.
Je nomme la Spirastrella de San Thome Spirastrella cunctatrix Schmidt
et non S. purpurea Lamarck, comme l'aurait désiré Vosmaer, parce que
le laborieux travail consacré par le regretté spongologiste à la descrip-
tion de Spirastrella purpurea (71) ne me paraît pas aboutir à des conclu-
sions indiscutables. On me permettra de rappeler que, frappé de la varia-
bilité des Spongiaires dès le début de mes études, je l'ai proclamée à
maintes reprises ; j'ai proposé de fusionner ensemble bien des espèces
considérées comme distinctes et, dans celles que j'ai décrites, certains
auteurs ont été d'avis qu'on en eût pu distinguer davantage. Le présent
travail contient lui-même plus d'une fois l'expression de mes convictions.
C'est dire combien je suis disposé en faveur d'une réduction du nombre
des Spirastrella décrites. Mais, conscient à son tour de la variabilité des
Éponges, Vosmaer, à mon avis, a dépassé la mesure : ses dernières publi-
cations manifestent de sa part une tendance excessive à réduire le nombre
des espèces connues. J'ai déjà fourni des arguments contre l'identifica-
tion de Cliona celata Grant et de G. viridis 0. Schmidt (66). La synony-
mie de Mycale œgagropila Johnston mériterait une révision. Il me sera
facile de montrer quelque jour que Hymeniacidon caruncula Bowerbank
avec ses synonymes est une Éponge bien différente de Suherites cramhe
Schmidt avec les siens (72). Pour le moment, je ne m'occuperai que des
Spirastrella.
Vosmaer a fondu une trentaine d'espèces en une seule. Il l'a appelée
Spirastrella picrpurea (Lamarck) Ridley, du nom de celle qu'il admettait
comme la plus ancienne, sans souci de VAlcyonium vesparium de Lamarck
(23, p. 78), un peu antérieur à A. purpureum (23, p. 332), et qui, en tant
que Spirastrella (65, p. 572), pourrait, d'après sa manière de voir, ne pas
se distinguer du reste.
Une mesure aussi radicale s'imposait-elle dans l'état de nos connais-
sances ? Par son adoption sans réserves ne s'exposerait-on pas à arrêter
tous progrès dans la connaissance des Spirastrella ? Du fait de l'existence
ÉPONGES DE SAN THOME
545
FIQ. II. Spirastrella nmctatrix O. Schmidt. Spécimen du
Golfe (le Gabès. Microsclèrcs x 400 environ.
d'Épongés à spiculation si dissemblable, se trouvera-t-on suffisamment
éclairé par la simple déclaration de présence de « 8. purpurea » en mi lieu
donné ? Serait-il, d'ailleurs, permis, par exemple, de signaler sur les côtes
du Calvados Spirasirella purpurea (Lamarcîk) pour y avoir rencontré ce
que j'ai appelé S. minax ? Puis-
qu'on doit reconnaître l'existence
de Cliona nombreuses, pourquoi
refuser d'admettre une certaine
abondance de Spirastrella ? A
comparer entre elles celles que
j'ai vues, celles dont Vosmaer a
donné des dessins à l'appui de sa
thèse et quelques autres encore,
j'avoue ne pas acquérir la convic-
tion que ces Spirastrelles repré-
sentent une seule et même espèce.
Ce que je constate surtout, c'est que la plupart sont à peine connues.
Je m'astreins à donner des figures soignées des microsclères de celles que
j'ai étudiées. Il sera désormais indispensable de procéder de la sorte
pour jeter quelque lumière sur le sujet.
La Spirastrella de San Thome est, à n'en pas douter, spécifiquement
pareille à celle du Golfe de Gabès que j'ai déterminée S. cunctatrix O.
Schmidt, en 1894 (56). Ce sont des plaques
pourvues de spirasters très inégales ; les
grandes, épaisses, avec des épines fortes
et longues, se confinent à l'intérieur ; les
petites, encore plus abondantes, non seu-
lement se mêlent aux grandes et passent
à elles par des intermédiaires, mais s'accu-
mulent en une croûte dense à la surface du
corps (fig. II). La proportion descelles qui
se transforment en amphiasters reste très
faible.
J'ai fait remarquer ailleurs (58, p. 512) que Chondrilla phyllodes
0. Schmidt, des Antilles (38, p. 26, pi. VI, fig. 1), pourvue de tylostyles'
et de spirasters est une Spirastrella. Elle possède aussi, d'après les dessins
originaux, des spirasters très inégales, pareilles à celles des deux Eponges
précitées, et l'Éponge du Banc de Campêche que j'ai appelée, d'après
Fia. III. Spirastrella cunctatrix O. Schmidt.
Spécimen d'Amboine. Microsclères
X 400 environ.
546 E. TOPSENT
ScHMiDT, Chondrilla phyllodes, en 1889 (51, p. 36), est tout à fait sem-
blable aux Spirastrelles de San Thome et du Golfe de Gabès. Je leur ai
comparé encore la Spirastrella d'Amboine (59, p. 440) que, d'après la
description d'un spécimen dragué par le Challenger aux Philippines
(34, p. 229), j'avais pu appeler S. decumbens, sans y trouver autre chose
qu'une ornementation un peu plus riche des petites spirasters (fig. m).
Ces Éponges identiques, de provenance si variée, doivent évidemment
recevoir im même nom. Celui de Spirastrella cunctatrix me paraît leur
appartenir puisque Schmidt a créé pour ses spirasters ce type d'un genre
nouveau (37, p. 17, pi. III, fig. 8). Il semble, d'aiUeurs, avoir constaté
leur transformation possible en amphiasters
rappelant celles de son Suberites bistellatus.
VosMAER est cependant d'avis que tout
cela se confond avec Spirastrella purpurea
(Lamarck). a proprement parler, on ne con-
naît de cette espèce que les spécimens du
Muséum de Paris, dont des échantillons
figurent dans plusieurs musées de l'étranger.
Je n'insisterai pas sur leur coloration, qui
riG. IV. Spirastrella purpurea (La- n'est pourtant^pas négligeable, mais, d'après
MARCK). Spécimen du Muséum de i j • •? ' • /n \
Paris. Microsclères X 400 environ. l^S dcSSmS qUC ] CU ai pOS (fig. IV) COmmC
d'après ceux qui en avaient été donnés
déjà (71, pi. VIII, fig. 7 et pi. XII, fig. 11), je ferai observer que leurs
spirasters sont notablement moins développés que dans tous les cas pré-
cédents et qu'elles affectent une tendance plus grande vers la forme
amphiaster. Ce sont là des différences qui peuvent avoir de la valeur.
Puisque les Spirastrella ne possèdent que deux sortes de spicules, leurs
mégasclères paraissant généralement impropres à les caractériser, les
particularités de leurs microsclères doivent être observées de très près^
Spirastrella Bonneti Topsent n'est connue que d'après un spécimen
unique de Geelong (65). Ses spirasters, avec une tendance au moins
aussi marquée à la forme amphiaster, affectent une allure un peu diffé-
rente de celles de S. purpurea. Toutefois, si sa couleur, sa structure, son
écorce sans couche de microsclères et la forme de ses mégasclères ne méri-
1. Je suis surpris que dans sa liste des synonymes supposés de S. purpurea, Vosmaer ait écrit « HarduicHa
purpurea (i.mk.) Topsent ». En citant le nom de Hardwickia trouvé dans des notes manuscrites, je me suis pro-
osé d'établir un petit fait de l'histoire des Alcyonium de Lamakck et de montrer que Valencienne avait su dis-
tinguer parmi eux ce que nous appelons des Spirastrella, mais j'ai fait remarquer que le nom qu'il leur réservait n'a
lamais été publié et je me défends d'en avoir fait usage.
ÉPONOES LE SAN THOME 547
tent pas qu'on la distingue de S. purpurea, les spirasters (fig. v), au lieu
de mieux servir à séparer ces Éponges, sont plutôt de nature à les faire
mettre ensemble en opposition aux ,,,. ^^
Spirastrella cunctatrix ici passées en l:-
revue avant elles. i^ //^ y._ /^l
J'ai encore vu une autre Éponge . "«^ y^ A ^i^ ,^\} </v^
purpurine, que j'ai décrite sous le ' ^ ^^
nom de Gliona Jullieni (52, p. 573, ^^v^ ^ ^-'>;-
pi. XXII, fig. 9). Je l'ai trouvée dans .; <==^ ' ^!^=^ ^^
un petit morceau de pierre tout creusé v^/" ^ i-ph y
de galeries de Clionides, tapissant v?-^' \ i . s./
et colorant avec intensité la majeure "^^^"^
.. j 1 . . 1 / îlG. V. SpiraslreUa Bonneti TOPSENT. Spécimen
partie de ces galeries. A la reexa- jypg Microscièrcs x 4oo environ.
miner, je deviens moins certain de
sa nature perforante. Il est vrai qu'elle ne s'étend pas à la surface de la
pierre, mais il aurait pu y avoir place pour une ou deux de ses papilles, et
le fait que les galeries non occupées par elle sont incolores me porte
moins à croire qu'elle en a disparu après les avoir creusées, comme cela
se produit souvent pour des portions plus ou moins étendues de Cliones,
qu'à la considérer comme s'étant infiltrée dans des galeries vides de
leur auteur. Elle n'y forme qu'mie couche mince, mais ce peut être un
reste de ce que la cassure a libéré. Son étude, en somme, est à reprendre
sur du matériel convenable. Les spirasters, dont sa chair est assez riche-
ment parsemée, sont intéressantes en ce que la majorité d'entre elles,
minces, sinueuses, à longues épines, se rap-
prochent beaucoup de celles de certaines
Cliona telles, par exemple, que G. suhulata ;
mais il en est d'assez trapues et j 'y rencontre
aussi la forme ampliiaster (fig. vi). Les
tylostyles, plus fusiformes que le graveur
/-W Jj^P^ '^l\ ^^ ^ reproduit mon dessin (52, pi. XXII,
no.vi. «wna(?)j«^;ie/uTopsENT.spé- fig- «) Hc l'a moiitré, ont une tête globu-
cimentype. Microsclèrcs x 400 en- j^^^^ ^^^_, ^^^^^^ ^^ diffèrent CU Ccla bcau-
coup des mégasclères de Spirastrella pur-
purea et de 8. Bonneti ; les spicules grêles ont une grosse massue rabo-
teuse au lieu d'une tête mucronée comme chez 8. purpurea ou d'une
base tronquée sans s'épaissir comme chez S. Bonneti. Cela dit, si Cliona
Jullieni était une 8pirastrella, devrait-on tenir simplement pour des
548
E. T0P8ENT
particularités individuelles les différences que j'ai signalées entre les
trois Eponges purpurines ? C'est une question à laquelle il me paraî-
trait téméraire de répondre actuellement par l'affirmative. Je ne trouve
pas non plus de passage évident entre aucune d'elles et les Éponges si
semblables entre elles que j'appelle S. cunctatrix. Leur seul caractère
commun est de produire avec des spirasters des amphiasters en proportion
variable.
J'arrive à un second groupe d'Épongés où j'ai trouvé des amphiasters
plus ou moins condensées en diplasters mais pas de spirasters. Telles sont
l'iG. VII. JDiplastrella bUtellata (Schmidt). A gauche, spécimen de Banyuls ; à droite, ' spécimen de la C'iota';.
JMicrosclèrcs x 400 environ.
d'abord celles, provenant de deux points éloignés des côtes méditerra-
néennes de France, de la Ciotat et de Banjmls, que j'ai longtemps appelées
Hymedesmia bistellata (O. Sohmidt) (61, p. 125, pi. III, fig. 13 et 16).
N'existe-t-il pas une différence saisissante entre leurs microsclères (fig. vu)
et ceux des SjnrastreUa du golfe de Gabès et d'ailleurs que j'ai prises
comme point de départ ? N'est-il pas naturel qu'ils aient suggéré à Schmidt
l'idée de créer une espèce « Tethya bistellata » ? La diagnose « Tethya
stellis gemellis et aciculis capitatis » et la description détaillée des spicules
insistent bien sur le caractère particulier de ces microsclères. J'ai expliqué
ailleurs pourquoi Schmidt a pu les supposer quelquefois simples. Je ferai
remarquer, en outre, que s'il a, à juste titre, signalé chez Spirastrella
cunctatrix des spirasters modifiées en amphiasters, il n'a nulle part fait
mention de spirasters parmi les amphiasters et diplasters de Tethya
bistellata ou Suberites bistellatus. Il y a donc les meilleures raisons pour
ÉPONGES DE SAN THOME 549
que ma détermination soit exacte. Je demeure convaincu que Lenden-
FELD a pris pour cette espèce Spirastrella cunctairix Schmidt ; ses dessins
en font foi (27, pi. VI, fig. 59) ; ils représentent les spirasters très iné-
gales de Spirastrella cunctairix {ou de son synonyme Chondrilla phyllodes),
avec une petite amphiaster, sans qu'aucun d'eux rappelle la diplaster
figurée par Schmidt et, a fortiori, suggère l'idée d'asters simples en appa-
rence. VosMAER, qui a pris parti pour Lendenfeld, est tombé dans la
même erreur que lui pour s'être fié à une étiquette du Musée de Graz
supposée concerner un original de Suberites histellatus Schmidt. Est-il
possible, à l'examen des dessins que Vosmaer a donnés de ce spécimen
(71, pi. XII, fig. 9) de s'imaginer qu'en pré-
sence de cette Éponge, O. Schmidt aurait
écrit et figuré ce qui a trait dans ses ouvrages
à T. bisteUata et S. histellatus, alors précisé-
ment que vit en Méditerranée une autre
Éponge qui répond si bien à ses descriptions ?
Sans s'arrêter à cette invraisemblance, Vos-
maer a exécuté d'une de mes Hymedesmia
bisteUata de Banyuls quelques croquis (71,
pi. XII, fig. 8) qui semblent représenter sur-
tout des spicules vus obliquement et non de
profil ; même mal orientés, ne donnent-ils pas
par leur ensemble une impression différente de ceux de ce prétendu ori-
ginal de S. histellatus, bien plus semblables, au contraire, à ceux de la
plupart des Spirastrella cunctatrix et S. decumbens esquissés par Vosmaer?
Pour moi, l'absence de spirasters véritables chez Tefhya bisteUata crée
entre elle et les SpirasireUa une différence si radicale que, ne pouvant la
laisser dans aucun des genres Tethya, Suberites ni Hymedesmia, je propose
de la considérer comme le type d'un genre nouveau, le genre Diplastrella .
Je rapporte à ce genre une autre Éponge, Diplastrella Gardineri
n. sp. des Maldives. C'est, sur un petit support informe, de nature cal-
caire, dragué près de l'île Mahlos par 23 brasses de profondeur, une croûte
lisse, décolorée par l'alcool, munie de plusiem's petits oscules un peu
surélevés. La consistance est ferme en raison de l'abondance des spicules
dans toute l'épaisseur de la plaque et de la nature remarquablement
coriace de sa peau. Les mégasclères sont des tylostyles à base renflée,
elliptique. Quant aux asters (fig. viii), elles ont pour la plupart la même
taille, assez petite, et diffèrent alors de celles de D. bisteUata par la rami-
#
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Jk.
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FIO. VIII. Diplastrella Gardineri n. sp.
Spécimen type, des Maldives. Mi-
crosclères x
400 environ.
%■'
if %
i
550 E. TOPSENT
fication de leurs épines principales, ainsi que le montre bien l'un de ces
microsclères dessiné par mi de ses pôles. Il arrive souvent que ces rameaux
s'individualisent ; les épines augmentent alors de nombre et paraissent
simplement coniques, et le spicule tend vers la forme sphérique. On trouve
ainsi, très clairsemées parmi les autres et
se distinguant d'elles par leur volume un
peu supérieur, des asters qui simulent à s'y
méprendre des sphérasters de Chondrilla.
^ J'ai étudié enfin un certain nombre de
y^ Spirastrelles qui ne m'ont montré que des
FiG. IX. spirastreiia vesparia (Lamarck;. spirastcrs. A s'cn tenir aux dessins un peu
Spécimen du Muséum de Paris. Mi- -^ *■
croscières x 400 environ. rudimcntaircs que VosMAER a exécutés
d'après elle, VHymeniacidon angulata de Bo-
WERBANK paraît être dans ce cas. Un spécimen d'Alcyonium vesparium
Lamarck, haut de 17 centimètres, s'y trouve, en toute certitude : grêles
(ou jeunes) ou bien développés, ses microsclères sont tous spirales (fig. ix) ;
leur axe, relativement épais, porte des épines nombreuses, émoussées,
parfois même presque tylotes. Il semble, d'après les rapprochements
qu'il a effectués, que Vosmaer n'aurait pas manqué d'absorber dans cette
espèce, s'il l'avait connue, Spirastrella purpurea Lamarck avec tous les
synonymes qu'il lui a attribués. Les mégasclères, tylostyles à tête ellip-
tique, à pointe émoussée, ne lui auraient
pas été un obstacle à cette fusion, et je ^^^^5;^^:^%^
doute que la forme du corps et la taille des
plus beaux sujets l'eussent conduit, comme
pour Cliona paiera, à proposer un genre à A?"^^ v<^î^^î
part. Le spécimen en question d' Alcyonium ^^T
vesparium est massif, dressé, orangé pâle, .J^-yU -V^x^
à écorce épaisse, sans papilles, mais percée
d'orifices béants, étroits, disposés en
FlQ. X. Spirastrella vagabundail), \a,T.ara-
groupes irréguliers ; il porte au milieu de bica topsent. spédmen type, du ooife
, . , . , • n 1 ^6 Tadjoura. Microsclères x 400 env;-
son plateau apical trois larges orinces, ter- ron.
minaison de grands canaux composés,
grâce auxquels la masse interne est caverneuse. Les spirasters ne forment
pas de croûte à la surface du corps. Comme le Muséum de Paris possède
d'autres spécimens de cette Éponge, je compte avoir l'occasion de m'as-
surer du degré de constance de leur spiculation.
J'ai décrit, du golfe de Tadjoura, sous le nom de Sjnrastrélla vaga-
ÉPONGES DE SAN THOME
551
%
^
\
C^
FlO. XI. Spiraifretla puncluluta
lliDLEY. Spécimen du Golfe de
Tadjoura. Microsclères x 400
environ.
hunda var. arabica (55, p. 177), une Éponge que Vosmaer a omis de citer.
Il est possible, comme je le disais alors, que Spirastrella congenera ne repré-
sente qu'une variété de 8. vagahunda ; il se peut aussi que toutes ces
Éponges aient des liens étroits de parenté avec
S. angulata. Faute d'éléments pour discuter ces
affinités, je me borne à fournir ainsi un autre
exemple de Spirastrella produisant uniquement
des spirasters (fig. x).
On en peut voir encore un autre dans ma Spi-
rastrella punctulata Ridley du golfe de Tadjoura.
Comme d'ordinaire, des épines divergent aux
extrémités de ses spirasters ; parfois elles n'exis-
tent que là et parfois elles y acquièrent un grand développement (fig, xi).
A cette série se rattache, si je ne me
trompe, Spirastrella solida Ridley et
Dendy, des Philippines (34, p. 231). Je la
connais d'Amboine (59, p. 440), avec ses
spirasters de deux sortes : les unes, nom-
breuses, petites, relativement épaisses, plus
souvent verruqueuses qu'épineuses ; les
autres, plus localisées, longues, relative-
ment minces, à plusieurs tours de spire
(fig. XII ). J'y ai trouvé en plus une spiras-
ter de grosseur exceptionnelle et je re-
marque que Vosmaer a observé dans le
type quelque chose d'analogue (71, pi. XII, fig. 5).
Spirastrella carnosa Topsent, d'Amboire, a des
microsclères si rares qu'il m'est difficile, d'après
l'unique préparation que j'en ai conservée, d'en fixer
les rapports (fig. xiii).
Il est, en revanche, une Spirastrella que sa pré-
sence sur les côtes de France m'a permis de mieux
étudier, qui ne produit pas du tout d'amphiasters et
qu'il n'est pas possible de confondre un instant avec
Diplastrella histellata ni avec Spirastrella cunctatrix : je
veux parler de ma Spirastrella 7ninax. Vosmaer ne l'a pas vue. Pour
n'avoir pas à tenir compte de l'uniformité de ses spicules, il a allégué que
chez S. cunctatrix, le nombre des grandes spirasters peut se réduire beau-
Fio. xii. Spirastrella solida Kidley et
Dendy. Spécimen d'Amboine. Mi-
crosclères X 400 environ.
:^
^
FlQ. XIII. Spirastrella cri^-
nosa Topsent. Spéci-
men type, d'Amboine.
Microsclères x 400 en-
viron.
ArCH. de ZOOl. EXP. ET GÉS. — T. 57. — P. 6.
37
552 E. TOPSENT
coup ; l'argument est faible et, pour le fepousser, il suffit de faire remar-
quer que les petites spirasters de S. cunctatrix ne ressemblent pas du
tout aux spirasters de 8. minax. Ce sont des spicules cassés que j'ai
d'abord figurés de S. minax (50, pi, III, fig. 8), mais mes dessins de
1900 (61, pi. III, fig. 8), comparés à ceux que je donnais de Diplastrella
Fig. XIV, Spirastrella minax Topsent. A gauche, spécimen de Banyuls (Pyrénées-Orientales) ; h droite, spécimen
de Luc (Calvados). Microsclères x 400 environ.
histellata (61, pi. III, fig. 13), n'étaient ils pas de nature à guider un travail
de révision opéré sans idée préconçue ? Il y a, naturellement, des varia-
tions individuelles dans la spiculation de S. minax, mais elles ne con-
duisent pas à celle de 8. cunctatrix. A côté des spirasters d'un spécimen
de Banyuls, je figure (fig. xiv) celles d'un spécimen de Luc où la spire
se montre généralement plus serrée. Il semble qu'une condensation de
ces microsclères à un degré supérieur puisse leur donner l'aspect d'étoiles
triples et j'en arrive à considérer maintenant Hymedesmia tristellata Top-
sent (61, p. 129)
" V^ ?=^^ 3^% ^0' ^K^ comme une 8piras-
%A? '^^^ i^ ^^ ^^^ trella et à me de
^^ ^;^ ^I mander si elle ne
^v^ ,4, ^^ représente pas une
•^ H^ forme de 8. minax
(fig. XV).
Fig. XV. Spirastrella tristellata Topsent, peut-être variété de S. minax. A gau- ^^ VOlt par tOUt
che, spécimen de Banyuls ; à droite, spécimen des Açores recueilli par ^p Ciu\ Dl'éppdp flllP
la Princesse-Alice. Jlicrosclères x 400 environ. M xr 4. '
dans sa tentative
23our ramener tant d'espèces décrites à une seule, Vosmaer a laissé de
côté des détails importants, soit qu'il en ait méconnu la valeur, soit
aussi qu'ils aient échappé à son attention. Une question se pose à présent :
les planches par lui consacrées à la spiculation de ce qui serait la Spira-
strella purpurea protée contiennent-elles des figures établissant incontes-
tablement le passage entre elles de toutes les Spirastrelles dont il a
ÉPONGES DE SAN THOME 553
proposé la fusion ou bien permettent-elles de distinguer encore un cer-
tain nombre d'espèces ?
En dehors de celles ayant trait à des Éponges recueillies par la Sihoga,
des figures n'ont été données ( 71) que pour une douzaine des espèces qu'il
s'agissait de supprimer. Toutes celles de la planche XIII se rapportent à
Spirastrella angulata (Bowerbank) qui, d'après elles, paraît posséder
uniquement des spirasters assez grêles ; cependant, leur exécution laisse des
doutes sur la conformation exacte des microsclères les plus courts.
Les six premières figures de la planche VIII concernent des S. cunctatrix
{8. decumbens en est synonyme) avec de grosses spirasters, de petites
spirasters courtes (les amphiasters sont à peu près méconnaissables) et
leurs intermédiaires ; la septième, qu'aux spirasters assez épaisses mais
courtes on voit de suite différer des précédentes, est dessinée d'après un
spécimen de Spirastrella. purjmrea appartenant à la collection Lamarck
du British Muséum : le passage fréquent de la spiraster à l'amphiaster
s'y devine mais n'a pas été mis en évidence.
Certaines réserves faites au sujet de la figure 7, où, préoccupé surtout
de justifier, en montrant de grosses spirasters, la suppression de Spiras-
trella cunctatrix Schmidt au profit de Suberites bistellatus Schmidt,
VosMAER n'a pas dessiné de spirasters de petite taille, sans toutefois les
déclarer absentes, toutes celles de la planche X se rapportent, de l'avis
même de l'auteur, à des S. cunctatrix au sens de Schmidt et de Carter, à
l'exception toutefois de la figure 5, donnée d'après un co-type de S. Wilsoni
Carter. Nous avons affaire là à une Éponge de la série des Spirastrelles
purpurines, bien mal connues et, pour le moment, particulièrement dif-
ficiles à débrouiller ; les dessins de cette figure 5 sont de simples silhouettes
de spirasters généralement assez grandes et assez épaisses à la fois, de
taiUe assez uniforme, visiblement différentes de celles de S. cunctatrix,
difficilement assimilables, autant qu'on en peut juger, à celles de VAlcyo-
îiium purpureum Lamarck, du British Muséum, de la figure 7, plan-
che VIII, mais, au contraire, bien semblables d'allure aux grandes spiras-
ters d'une Éponge du Muséum de Leyde (pi. XII, fig. 11) considérée par
VosMAER comme un type de VAlcyonium purpureum de Lamarck, et de
même taille qu'elles, à l'exception d'une seule qui, plus grêle, est un peu
plus longue. Il est regrettable que Vosmaer n'ait pas fourni quelques rensei-
gnements au sujet de la Spirast relie du Muséum de Leyde : il eût été inté-
ressant de la comparer, d'une part, à 8. purpurea du British Muséum et
du Muséum de Paris, qui sont identiques, et, d'autre part, à *S'. Wilsoiii ;
554 E. TOPSENT
si tout cela constitue, comme il semble, une seule espèce, S. purpurea
Lamarck, sa connaissance aussi entière que possible aurait avantageu-
sement servi de point de départ d'une étude sur les Spirastrella.
Il est difficile de distinguer les Éponges dont les microsclères sont repré-
sentés dans la planche XI (à l'exception des fig. 3 et 4), non pas de S. pur-
purea ni de S. cunctatrix mais de S. angulata telle que la planche XIII la fait
^îonnaître ; le même doute plane sur la véritable forme des plus petits de leurs
microsclères. Quant aux figures 3 et 4, la première seule contient, avec par-
cimonie, des microsclères et, quoique donnés comme provenant du type de
« Spongia Dysoni Carter », ils ne ressemblent pas du tout à ceux que Carter
a décrits et figurés lui-même (8, p. 350, pi. XII, fig. 25) ; ils rappellent plu-
tôt les miscrosclères de S. cunctatrix. Vosmaer déclare qu'il existe des
différences légères entre les spicules de Spongia Dysoni et ceux de Hymenia-
cidon pulvinatus Bowerbank, mais, comme il s'est contenté de dessiner
les tylostyles de cette dernière Éponge, on ne sait s'il faut lui attribuer
ou non les spirasters décrites par Carter, qui rappellent tant celles de
8. angidata : on en arrive ainsi à se demander si le nom Hymeniacidon
pulvinatus publié par Bowerbank en 1872 ne s'applique pas, contraire-
ment à l'opinion de Carter, à autre chose qu'à ce qu'il avait étiqueté
Spongia Dysoni en 1862. Il y a là une question qui, d'ailleurs, ne paraît
pas toucher Spirastrella purpurea Lamarck,
La planche XII du travail de Vosmaer présente le plus de variété. La
figure 1 est consacrée aux spicules du type de Spirastrella congenera
RiDLEY, dont Ridley lui-même a signalé (33, p. 470) la ressemblance avec
sa S. vagahunda et qui n'est peut-être qu'une variété de cette dernière
ou, mieux peut-être, par enchaînement, de S. angulata. La figure 2 ne
reproduit que des mégasclères du type de Suherites inconstans var. glohosa
Dendy. Thiele a exprimé l'avis (47, p. 71) que Spirastrella inconstans
(Dendy) se confond avec S. vagahunda Ridley, et Vosmaer la croit iden-
tique à S. angulata. Comme il y a des chances, ainsi que je l'ai dit plus
haut, pour que S. vagahunda ne diffère pas de S. angulata, les deux auteurs
peuvent avoir abouti isolément aux mêmes conclusions. Les microsclères
qui composent la figure 3 sont donnés comme appartenant au type de
Suherites JVilsoni alhidus Carter. Cette Éponge avait été décrite incolore
et sans microsclères ; Vosmaer déclare que des observations soignées
lui ont permis d'y voir des traces de coloration rouge, et, comme chez
S. Wilsoni, il y a trouvé des spirasters ; mais la comparaison de ses
microsclères avec ceux du type de S. Wilsoni (71, pi. X, fig. 5, et pi. XII,
ÉPONGES DE SAN THOME 555
fig. 3) conduit à se demander si Carter n'a pas agi à la légère en la consi-
dérant comme une variété de S. Wilsoni. La différence entre ces spicules
est considérable ; malheureusement, les croquis en sont imparfaits et
ceux de 8. Wilsoni alhidus, en particulier, ne permettent pas de décider
si les plus petits sont ou non des amphiasters et de juger si l'Éponge peut
être rapprochée de S. angulata ou de S. Jullieni, au cas où cette dernière
serait une Spirastrelle. Les microsclères de la figure 4 diffèrent aussi radica-
lement de ceux de S. Wilsoni alhidus ; par leur forme trapue et par leur
tendance très accusée à se modifier en amphiasters, ils semblent appartenir à
une Éponge intimement alliée à 8. purpurea. J'ai déjà fait allusion à la
figure 5, à propos de Spirastrella solida Ridley et Dendy, qu'il me semble
avoir trouvée conforme au type dans une collection d'Épongés d'Amboine.
Spirastrella transitoria Ridley (71, pi. XII, fig. 6) est une Spirastrella
à spirasters extrêmement concentrées, comme le dit son auteur, sinon une
Diplastrella ; elle n'a pas été étudiée à ce dernier point de vue. Les figures
7 et 12 sont très semblables entre elles, et, puisque la figure 7 provient
du type de Suberites inconstans digitata Dendy, si S. inconstans se confond
avec S. angulata, elles représenteraient l'une et l'autre les microsclères
d'une variété de ;S^. angulata. En ce qui concerne la figure 8, consacrée
à Diplastrella bistellata Schmidt, on sait comment j'explique qu'elle
diffère tant de mes dessins. J'ai aussi dit pourquoi, à mon avis, la figure 9
se rapporte non à Suberites bistellatus Schmidt mais à Spirastrella cunc-
iatrix Schmidt. Rien n'empêche d'attribuer les spicules delà figure 10 à
quelque Spirastrella vagabunda angulata. Quant à la figure 11, j'y ai
fait allusion plus haut à propos des spicules du co-type de Suberites
Wilsoni Carter (pi. X, fig. 5).
Tout bien considéré, il me semble que, des Spirastrelles dont Vosmaer
a figuré la spiculation, certaines restant insuffisamment connues, plu-
sieurs possèdent des caractères dignes d'attention et qui, au lieu de con-
duire à les fusionner dans Spirastrella purpurea, permettent de les répartir
en trois groupes. En retraçant l'histoire des synonymes supposés de Spi-
rastrella purpurea ( Lamarck) , Vosmaer a proclamé Spirastrella carnosa
identique à S. vagabunda et à S. solida ; S. cylindrica identique à ;S^. vaga-
bunda et à S. inconstans ; S. congenera, S. punctidata, S. solida et S. trinco-
maliensis identiques à S. vagabunda ; enfin ^S*. vagabunda et S. inconstans
identiques à S. angulata. De même, il a déclaré S. capensis, S. papillosa
et S. panis identiques à S. cunctatrix. Mais il n'a pas fourni de raisons de
fusionner entre eux ces chefs de file, S. angidata et S. cunctatrix, ni de les
556 E. TOPSENT
tenir l'un et l'autre pour identiques à S. purpurea. Quant à l'idée
qu'il s'est faite d'un troisième type de groupe, de Diplastrella bistel-
lata (Schmidt), nous avons vu qu'elle résulte probablement d'une
méprise.
Enfin, sans prétendre déterminer les Spirastrelles de la Siboga
d'après les spicules qui en ont été donnés, ne m'est-il pas permis de faire
remarquer que, sauf étude plus minutieuse, celles des figures 3, 5, 6 de la
planche VIII (71), 6 de la planche IX et 1 de la planche X semblent assez
se rapporter à Spirastrella cunctatrix, celles des figures 2 des planches IX
et XI, 10 et 12 de la planche XII et 4 de la planche XIII à des variétés
de S. angulata, enfin celles des figures 1, 3, 4, 5, 7, 8 et 9 de la planche IX
à S. solida, dont elles possèdent à la fois les spirasters courtes, les spiras-
ters longues et grêles et les spiras-
ters robustes ?
Thiele (48, p. 293), avant Vos-
MAER, avait avec raison rejeté du
'^-h^V^^A^ iX. I genre Spirastrella S . vidua ScnmiDr
w^rX/'s/P' jC (^^' P- ^^^)' •iui possède des acan-
thostyles. Je me suis assuré que
'PiG. x-n. Spirorhabdia vidva {O.HcnmuT). S-pédmen ,
des Açores décrit sous iGUom de SpirasireKaacM. iSpirastrella aCUleata iOPSENT (53,
Z«a<a TOPSENT. ' Spirorhabdes à divers états de -,^r^\ ±. • u i
développement x 400 environ. p. 127) eu cst aussi pourvuc ; 1 abon-
dance de ses microsclères me les
avait d'abord cachés. Ces Éponges sont identiques, le spécimen des Açores
ne différant du type du voisinage du Bukenf jord que parce que ses tor-
notes sont un peu polytylotes. L'existence de ces mégasclères diactinaux
n'a plus rien de surprenant ; leur association à des acanthostyles dressés
sur le support marque même désormais les affinités de l'espèce ; mais ses
microsclères sont d'un type tout à fait inattendu, et, si Ton réserve dans les
Ectyoninœ, comme je l'ai proposé récemment (69, p. 50), le genre Hyme-
desmia Bowerbank aux formes encroûtantes pourvues de chèles, le genre
Leptosia Topsent aux formes pourvues d'ancres et le gem:e Stylopus
Fristedt aux formes sans microsclères, force est bien de placer S. vidua
Schmidt dans un genre à part, le genre SpirorJiabdia n. g., caractérisé
par la production de spirorhabdes en fait de microsclères (fig. xvi). J'ai
examiné avec soin les formes grêles de ces microsclères, cherchant s'ils
n'auraient pas une communauté d'origine avec les chèles ou les ancres ; mais
ce sont des baguettes plates, épaissies aux doux bouts, phssées, puis fran-
gées et spiralées, dont les états successifs m'ont surtout rappelé ceux des
ÉPONGES DE SAN THOME 557
discorlmhdes^ des Latrunculia, tels que je les ai figurés d'après L, hrevis
(68, p. 41, fig. 5). Comme les discorliabdes, ces microsclères se tiennent
debout en une assise continue à la surface du corps ; ne disposant pas
leurs épines en verticilles, ils leur ressemblent moins qu'aux spicules
caractéristiques de Sceptrintiis iiicJiardi Topsent (63,pl. XII, fig. 4), mais
ils appartiennent à un même type de spicules et je les nomme spirorhabdes
pour indiquer leurs affinités.
Enfin, Vosmaer s'est demandé (71, p. 3) s'il y a lieu de maintenir
Suberites coronarius Carter et S. spinispirulifer Carter dans le genre
Spirastrella ou s'il conviendrait de les rattacher à un genre distinct. Son
idée que ces deux Eponges sont peut-être identiques, suggérée encore par
sa tendance excessive à fusionner des espèces,
ne résiste pas à la comparaison des dessins ori- "v^f^^jJ^ ^"-^^
ginaux de leurs microsclères. Je ne connais pas ^i
personnellement >S^. spinispirulifer, mais j'ai eu ^^7? f>,
la bonne fortune d'étudier S. coronarius, du banc fp*,^ ^ ' K-:?
de Campêclie (51, p. 35). Ses microsclères '^
(fig. xvii), arqués à des degrés divers, jamais ^ ^a.>^.^^ i(
spirales, portent sur leurs extrémités et le long '"-v
de leur convexité des excroissances tylotes ou Fia.xvn. Anthosigmeiiacoronam
•^ (CARTER.)SpécimenduBancde
bifurquées ; sur la tige, ces excroissances se campêche. Anthosigmesxéoo
environ.
placent en alternance irrégulière de part et
d'autre du grand axe ; elles sont plus développées aux deux bouts,
surtout quand elles s'y localisent. Il ne s'agit évidemment pas d'une
Spirastrella. Tout au plus peut-on la laisser dans les Spirastrellidœ. Je
propose d'admettre pour elle un genre nouveau, g. Anthosigmella, carac-
térisé par la production de ces microsclères très particuliers, auxquels le
nom d'anthosigmes me paraît convenir. Rares dans l'écorce épaisse et
feutrée de tylostyles, les anthosigmes se répandent en abondance dans la
chair molle d'^. coronaria.
D'après Dendy (12, p. 132), Suberites coronarius Carter devrait
prendre place dans le genre Cliona, car il s'agirait d'une Éponge perfo-
rante. Outre que ses anthosigmes empêchent de la noyer dans le genre
Cliona, qui produit des microsclères tout différents, je ne considère pas
comme démontrée sa nature perforante. Carter et Dendy n'en ont
décrit ni les galeries ni les papilles se faisant jour dans des parois calcaires.
1. C'est le nom dont DENDY se sert pour corriger l'ancienne dénomination de dùcaslert (13, p. 232).
558 E. TOPSENT
et ce qu'ils en ont dit me porte plutôt à voir en elle une Éponge détriti-
cole, capable de remplir des cavités pré-existantes et de revêtir et cimen-
ter les corps avoisinants avant de devenir massive.
Cliona lobata Hancock,
Sào Joào dos Angolares, 11 août 1906. — Perforant un conglomérat
de Mélobésiées.
Cette Clione a creusé des galeries étroites dans le conglomérat qui
porte un spécimen de Pseudosuberites sulphureus. Je l'ai rencontrée en
décalcifiant des fragments de la masse calcaire pour y chercher des rhab-
dostyles de Rhahderemia minutula.
Un certain intérêt s'attache à elle de ce fait que ses tylostyles, longs
de 0 mm. 155 à 0 mm. 233, mais surtout.de 0 mm, 19 à 0 mm. 2, dévelop-
pent presque tous ce renflement secondaire qui, dans l'esprit de Hancock,
caractérisait sa Cliona Howsei. Je répète qu'il ne faut voir en cela que
l'accentuation exagérée d'une tendance qui s'observe avec une fréquence
variable sur les tylostyles de C. lobata.
Les spirasters prouvent qu'il s'agit bien d'une seule et même espèce.
La chair en contient de grandes, coudées six à huit fois et longues de
0 mm. 04 à 0 mm. 053, parmi de plus courtes, bien épineuses aussi, à
coudes moins nombreux et à bouts tronqués. Ces spirasters de 0 mm. 01
à 0 mm. 02 s'accumulent en outre dans les papilles et forment une croûte
dense sur leur plateau.
Commune sur les côtes de l'Europe occidentale, Cliona lobata jouit
d'une vaste distribution géographique et même bathymétrique. Tulnves-
tigator, en effet, l'a recueillie au voisinage de Ceylan dans une coquille
vide de Xenophora pallidula, par une prof ondeur de 703 brasses, précisé-
ment sous cette forme Howsei dont la description précède. Annandale,
qui, la prenant pour une espèce nouvelle, l'a nommée Cliona annulifera
(1), y a observé des gemmules que je n'avais jamais trouvées et que pro-
tègent des spirasters d'une longueur exceptionnelle (0 mm. 126 et davan-
tage).
Cliona lobata est le chef de file d'im groupe d'espèces qui ne produisent
que des mégasclères monactinaux avec des microsclères. Je saisis ici
l'occasion d'affirmer qu'à ce groupe appartient bien ma Cliona indica
(52, p. 574), m'étonnant que, à propos de sa Cliona concharum qui, pour
moi, ne diffère pas de Cliona vastifica Hancock (61, p. 70), Thiele ait
ÉPONGES DE SAN THOME 559
pu (46, p. 42) supposer une homologie des spirasters droites et grêles, à
bouts tronqués, longues de 0 mm. 015 de mon Éponge et des acanthoxes
de la sienne.
Pour ce groupe, en revanche, la Cliona chUensis de Thiele (49, p. 409)
est à négliger, car elle tombe en synonymie de ma Cliona thoosina (50,
p. 80). J'ai insisté (52, p. 572) sur ses spirasters si caractéristiques ; longues
de moins de 0 mm. 02, épaisses de 0 mm. 005, sans compter leurs grosses
épines arrondies, elles m'ont suggéré le nom de l'espèce, rappelant leur
vague ressemblance avec les microsclères des Thoosa. Les tytostyles du
spécimen type n'atteignent pas les dimensions mesurées par Thiele ;
ils oscillent entre 0 mm. 17 de longueur sur 0 mm. 007 d'épaisseur et
0 mm. 27 sur 0 mm. 012, mais cette différence de taille n'a aucune im-
portance en comparaison de leur forme qui est exactement la même de
part et d'autre. Je les ai décrits robustes, à base prolongée en cône. Je
regrette que le graveur ait si mal rendu le dessin qui devait les montrer
fusiformes comme ils le sont en réalité.
Cliona Carpenteri Hancock.
Sào Joào dos Angolares (Ribeira Peixe), 11 août 1906. — Éponge per-
forante jaune orangé, dans les encroûtements d'Algues calcaires.
Tylostyles droits, non fusiformes, à tête bien dégagée, un peu variable,
presque ronde ou à bout légèrement conique, longs de 0 mm. 25-0 mm. 285,
épais de 0 mm. 006 un peu au-dessous de la tête. Acanthoxes nettement
épineux, inégaux, atteignant 0 mm. 11 de longueur et 0 mm. 006-0 mm. 008
d'épaisseur. Microsclères : bâtonnets droits, fusiformes, grêles, finement
épineux, longs de 0 mm. 016-0 mm. 018. ,
Cliona vastiflca Hancock.
Sâo Joâo dos Angolares, 11 août 1906, — Éponge perforante, jaune
orangé, dans les encroûtements d'Algues calcaires.
Thoosa armata Topsent.
Soà Joào dos Angolares, 12 août 1906. — Galeries dans l'épaisseur
du fragment de coquille qui porte Reniera cœrulescens.
Les premiers spécimens que j'ai vus de Thoosa armata étaient secs,
dans des perforations de coquilles étiquetées, l'une, Ostrea du Gabon (50,
560 E. TOPSENT
p. 81), et l'autre, Méléagrine de Ceylan (52, p. 582), sans autres indications.
Le second m'avait paru représenter une espèce distincte, Thoosa Fischeri,
comme possédant des tylostyles à la place des oxes du premier. En réalité,
ces mégasclères, inclus par places seulement dans leur chair, ne leur
appartenaient en propre ni à l'un ni à l'autre. Une étude de Thoosa armata
faite sur un spécimen perforant un polypier des Açores, recueilli par
599 mètres de profondeur et conservé dans l'alcool, me montra (63, p. 109)
que l'Éponge produit des mégasclères, sous forme de styles longs et
minces, à l'état larvaire, mais les supprime ensuite de sa spiculation. La
rencontre par M. Gravier de Thoosa armata à la grève même, à T'île San
Thome, permet désormais d'espérer que mes observations pourront être
complétées sur des Thoosa vivantes.
Comme il faut s'y attendre, surtout de la part d'une Éponge à spicu-
lation compliquée, T. armata est sujette à des variations individuelles.
Je crois donc utile de noter celles que j'ai déjà constatées.
Le spécimen tjrpe, découvert dans une Ostrm du Gabon, possède :
10 Des amphiasters noduleuses, c'est-à-dire à actines courtes termi-
nées par un gros bouton couvert de fines épines. Elles atteignent couram-
ment 0 mm, 023 de longueur sur 0 mm. 017 de largeur, quelquefois un
peu plus, mais souvent moins, et il en existe une assez forte proportion
de petites pouvant descendre jusqu'à 0 mm. 012 sur 0 mm. 005 seulement.
De ces petites amphiasters, les unes sont des formes jeunes et portent sur
un axe déjà épais des actines coniques à renflement terminal encore
absent ou en élaboration ; les autres, moins nombreuses, sont des formes
naines, portant sur un axe grêle des actines bacillaires à bouton terminal
très accusé ;
2° De grandes amphiasters, longues de 0 mm. 05 à 0 mm. 063, à actines
longues de 0 mm. 017 à 0 mm. 023 et épaisses de 0 mm. 0038 à 0 mm. 005,
lisses jusqu'à une couronne d'épines au delà de laquelle elles se terminent
en une pointe conique. Ces asters, assez nombreuses par places, sont, en
général, très clairsemées parmi les précédentes ;
30 Des amphiasters grandes mais grêles, longues de 0 mm. 06 environ,
à actines longues partant d'un axe court, presque cylindriques, épaisses
de 0 mm. 002 à la base, rugueuses et terminées par un petit bouton épi-
neux. Elles aussi sont clairsemées ;
40 Des corps elliptiques un peu aplatis, finement verruqueux, assez
irréguliers, que j'ai appelés des pseudosterrasters et qui n'ont ni hile, ni
eanal axial visible ; ils mesurent 0 mm. 021 de longueur sur 0 mm. 012
ÉPONGES DE SAN THOME 561
de largeur. La chair n'en contient que par places et en petit nombre ;
50 Des oxyasters réduites à un nodule d'oii émanent le plus souvent
deux actines gracieusement réourvées, épaisses de 0 mm. 0017 à 0 mm. 0028
à la base, doucement amincies puis, vers leur extrémité, subitement
étirées en pointe ; leur envergure est de 0 mm. 1 environ ; d'autres ont
trois actines, longues de 0 mm. 045 à 0 mm. 05, à pointe habituellement
récurvée aussi, mais, dans l'ensemble, assez raides. Exceptionnellement,
il n'y a que deux actines directement opposées, ou bien le nombre s'en
élève à quatre. Les oxyasters réduites abondent par toute la chair.
Chez la Thoosa dont j'avais fait Thoosa Fischeri, les amphiasters nodu-
leusea ont sensiblement les dimensions de celles du type et n'en diffèrent
qu'en ce que l'une des épines de leurs boutons s'érige d'habitude en une
pointe apicale apparente. Les asters jeunes existent en quantité assez faible.
Je n'ai pas trouvé de grandes amphiasters.
Les amphiasters à actines grêles et raboteuses, clairsemées, ont sur leur
bouton épineux une pointe apicale plus ou moins apparente.
Les pseudosterrasters, présentes seulement par places et en petit
nombre, sont plus plates que dans le type, de contour plus irrégulier, plus
finement verruqueuses et plus grandes (0 mm, 027 à 0 mm. 03 de longueur
8ur 0 mm. 014 à 0 mm. 015 de largeur).
Quant aux oxyasters réduites, conformées exactement comme dans
le type, elles ont seulement, d'habitude, les actines un peu plus fines
(0 mm. 001 à 0 mm. 002 à la base) . Celles à deux actines prédominent aussi
de beaucoup sur celles à trois actines. Il se rencontre de rares oxyasters
à quatre actines.
La Thoosa annata des Açores a une spiculation particulièrement
robuste. Ses amphiasters noduleuses, à boutons épineux surmontés ou
non d'une épine apicale, ont couramment 0 mm. 027 de longueur sur
0 mm. 02 de largeur et fréquemment 0 mm. 035 sur 0 mm. 027. Les formes
grêles y sont rares.
Les grandes amphiasters du type y sont assez nombreuses mais n'y
dépassent guère 0 mm. 042 sur 0 mm. 038 et ne se distinguent des am-
phiasters noduleuses ordinaires que par leurs actines plus épaisses à
épines moins nombreuses et disposées en une couronne que surmonte une
pointe conique.
Les amphiasters à actines grêles et raboteuses, longues de 0 mm. 043,
ont un axe extrêmement raccourci ; les actines, cylindriques, épaisses de
0 mm. 0028, ont un petit bouton épineux, conique.
562 E. TOPSENT
Les pseudosterrasters, lenticulaires, finement verruqueuses, longues
de 0 mm. 025, larges de 0 mm. 015, épaisses de 0 mm. 009, sont très abon-
dantes par places et s'entassent dans les parois des papilles et au niveau des
communications interlobaires.
Quant aux oxy asters réduites, elles ont, en général ,4eurs actines plus
raides que dans les autres spécimens ; celles à deux actines se trouvent
encore en grande majorité, mais le nombre de celles à trois actines se
montre plus élevé et il s'en rencontre quelques-unes à quatre, cinq et
même six actines. Suivant la règle, les actines se développent en longueur
et en épaisseur en raison inverse de leur nombre. Quand le centrum n'en
porte que deux, leur épaisseur peut être de 0 mm. 004 à la base. Douce-
ment amincies, elles sont toujours, vers leur extrémité, subitement
étirées en pointe fine.
Enfin, dans la Thoosa armata de San Thome, les amphiasters nodu-
leuses sont de dimensions plus faibles que dans le type et, par conséquent,
que dans tous les spécimens précédents. Les plus belles n'atteignent que
G mm. 017 à 0 mm. 02 de longueur sur 0 mm. 013 à 0 mm. 014 de largeur
et il y en a un grand nombre de petites dont certaines avec les actines
encore à l'état d'ébauche. Les boutons des plus parfaites sont épineux avec
une courte pointe apicale.
Les grandes amphiasters, clairsemées, ont seulement 0 mm. 03 à
0 mm. 04 de longueur et des actines longues de 0 mm. 013 à 0 mm. 015,
à pointe conique précédée d'un verticille d'épines raides.
Les amphiasters à actines grêles et raboteuses, qui peuvent mesurer
de 0 mm. 03 à 0 mm. 045, clairsemées mais plutôt fréquentes, portant sur
leur axe deux verticilles d'actines assez écartés, offrent mieux la forme
amphiaster que dans les cas précédents. Leurs actines, épaisses au plus
de 0 mm. 0013, ont un bouton terminal quelquefois pointu.
Je n'ai pas pu découvrir de pseudosterrasters.
Quant aux oxyasters réduites, à centrum noduleux, à actines toujours
brusquement amincies en pointe fine, elles sont aussi plus faibles que dans
le type. Celles à deux actines, toujours en large prédominance sur les
autres, mesurent 0 mm. 07 à 0 mm. 08 d'envergure et ont des actines élé-
gamment récurvées, épaisses de 0 mm. 0018 à la base. Les actines sont,
d'ailleurs, généralement récurvées ici même quand leur nombre est plus
élevé ; il est assez souvent de trois, rarement de quatre, et j'ai même vu
une petite oxyaster à six actines. Comme d'ordinaire, les oxyasters
réduites abondent dans la chair.
ÉPONGES DE SAN THOME 563
Donatia lyncurium (Linné).
Praya das Conchas, 3 août 1906. — Un spécimen de petite taille
vivant dans un Porite. Taches brun foncé à la surface. Intérieur jaune.
Donatia diploderma (Schmidt).
Plage de Bella Vista, 23 août 1906. — Cinq spécimens. Deux sont
notés jaune à la surface et deux jaune d'or extérieurement ; pas d'indica-
tion de couleur pour la cinquième.
Plage de Bella Vista, 25 août 1906. — Un spécimen, blanc rosé.
L'examen minutieux de la spiculation de ces six individus et sa compa-
raison avec celle d'Epongés de la Province Indo-Pacifique m'ayant montré
l'impossibilité de séparer en tant qu'espèce i)owafia seychellensis (Wright)
de D. diploderma (Schmidt), dont D. maza (Selenka) est sjrnonyme, je
me suis décidé à étendre mon étude critique aux autres Donatia décrites.
Le nombre des espèces introduites dans ce genre dépasse la trentaine
avec une dizaine de variétés^ Il apparaît au premier coup d'œil trop élevé
par rapport au matériel étudié jusqu'à présent, mais l'insuffisance de la
plupart des descriptions rend difficile la tâche de le réduire à de plus justes
proportions, et à peu près impossible ceUe de dresser des Donatia une
liste admissible sans objection par tous les spéciahstes.
Je crois, cependant, qu'il serait utile de récapituler ce qu'on sait des
diverses Donatia, de montrer ce qu'on en ignore, de tenter des rapproche-
ments même provisoires et de fixer, pour l'avenir, les caractères qu'il sera
toujours indispensable de considérer dans la détermination et de préciser
dans la description des espèces,
A vrai dire, il n'en est pas de négligeable, mais, comme les observa-
tions faites sur la Donatia commune des mers d'Europe, D. lyncurium,
ont révélé la variabilité de tous dans une certaine mesure, il s'agit de
mettre en relief ceux des caractères qui, pour chaque espèce, semblent
devoir être les guides les moins infidèles.
On a souvent trop accordé d'attention à l'aspect des papilles et à l'état
des orifices de ces Eponges si contractiles et si aptes au bourgeonnement ;
on a supposé trop constantes la structure de leur écorce et la disposition
de leurs sphérasters ; on s'est étonné de voir parfois émoussée la pointe
1. Je compte 34 espèces et environ 10 variétés ayant reçu un nom.
564 E. TOPSENT
ou dilatée la base de leurs mégasclères ; on a méconnu que la tailîe des
sphérasters puisse varier d'un individu à l'autre, suivant son âge. Quant à
la forme absolue de ces microsclères, si elle mérite ordinairement considé-
ration, rappelons aussi que, dès 1868, O. Schmidt abandonnait l'espèce
Tethya morum et les variétés de T. lyncurium qu'il avait créées d'après
elle. Par contre, on est loin d'avoir toujours fait un examen assez méticu-
leux de ces petites asters, d'origine différente des sphérasters, d'après Maas,
formées d'emblée par une cellule-mère et qu'on peut, d'un terme général,
appeler des micrasters. Certainement, leur taille et les détails de leur orne-
mentation sont loin d'offrir toute la fixité désirable ; je donnerai même
plus loin des exemples de leurs variations chez quelques espèces dont j'ai
personnellement examiné plusieurs représentants, mais je me suis con-
vaincu que, d'une façon générale, on ne les a pas étudiées d'assez près,
qu'on n'a pas suffisamment essayé, parmi leurs variations, d'en dégager
la caractéristique et que le peu de soin avec lequel on les a décrites dans
la plupart des cas est la principale cause du chaos qui règne actuellement
dans la spécification des Donatia.
Je crois intéressant de présenter ici, par ordre chronologique, à partir
de l'époque où l'on a commencé à publier des figures reconnaissables
des micrasters, la liste des Donatia et de leurs variétés décrites ou citées
par les spongologistes, au moins quand ces citations ont eu quelque
valeur documentaire pour la question qui nous occujîe ou bien ont été
accompagnées de critiques.
1815. Tethya lyncurium Lamarck, Europe.
1862. Tethya morum Schmidt, Adriatique.
1862. Tethya lyncurium var. nodulosa Schmidt, Adriatique.
1862. Tethya lyncurium var. contorta Schmidt, Adriatique.
1866-1874. Tethea lyncurium Boweebank, Côtes anglaises.
1867. Stelletta nux Selenka, Iles Samoa.
1868. Tethya lyncurium Schmidt, Alger et Cette.
1869. Tethya (Donatia) lyncurium Carter, Budleigh-Salterton.
1870. Columnitis squamata Schmidt, Antilles.
1870. Cometella stellata Schmidt, Cuba.
1870. Tethya ? innocens Schmidt, Floride.
1870. Tethya repens Schmidt, Floride.
1870. Tethya diploderma Schmidt, Antilles.
1872. Tethea Ingalli Boweebank, Freemantle.
1872. Tethea norvagica Bowerbank, Drontheim, Cap Nord.
1873. Tethea robusta Bowerbank, Australie.
1873. Tethea Cliftoni Bowerbank, Australie.
ÉPONGES DE SAN THOME 565
i879. Tethya norvegica Merejkowsky, Mer Blanche.
1880. Tethya maza Selenka, Rio Janeiro.
1881. ^Zemo seyc/je/fensts E. -P. Wright, Mahé.
1882. Tethya lyncurium var. obtusum Vosmaer, Océan Arctique.
1882. Donatia multifida Carter, Acapulco.
1882. Donatia sp. Carter, Le Cap.
1882. Donatia sp. Carter, Ile Maurice.
1884. Tethya Cliftoni Ridley, Séchelles.
1885. Tethya lyncurium Vosmaer, Océan Arctique.
1886. Donatia lyncurium Carter, Archipel Mergui.
1888. Tethya faponica Sollas, Manille.
1888. Tethya multistella Lendenfeld, Australie.
1888. Tethya corticata Lendenfeld, Austrahe.
1888. Tethya fissurata Lendenfeld, Australie.
1888. Tethya inflata Lendenfeld, Australie.
1888. Tethya philippensis Lendenfeld, Australie.
1888. Tethya Isevis Lendenfeld, Australie.
1891. Tethya seychellensis Keller, Mer Rouge.
1893. Tethya Cliftoni Topsent, Mahé.
1893. Tethya seychellensis Topsent, Golfe de Tadjoura.
1896. Tethya lyncurium Lendenfeld, Adriatique.
1897. Tethya Ingalli Topsent, Amboine.
1897. Tethya globostellata Lendenfeld, Zanzibar.
1898. Tethya deformis Thiele, Enoshima.
1898. Tethya amamensis Thiele, Amami-Oshima.
1898. Tethya faponica Lindgren, Java.
1898. Tethya Ingalli Lindgren, Java.
1900. Tethya nux Thiele, Teruate.
1900. Tethya seychellensis Thiele, Ternate.
1900. Tethya Ingalli Kirkpatrick, Christmas Ishuul.
1900. Techya seychellensis Kirkpatrick, Christmas Islaud.
1900. Tethya affînis Kirkpatrick, Christmas Islaud.
1900. Tethya lyncurium Topsent, Côtes de France.
1901. Tethya hispida Kingsley» Gasco Bay (Maine) ^.
1902. Tethya Ingalli Igerna Sollas, Great Redang (Malaisic).
1902. Tethya maza Igerna Sollas, Pulau Bidang.
1902. Tethya seychellensis Wilson, Porto-Rico.
1902. Tethya lyncurium Wilson, Porto -Rico.
1903. Tethya magna Kirkpatrick, Natal.
1905. Tethya lyncurium var. a Dendy, Coylan.
1905. Tethya lyncurium var. b Dendy, Geylan.
1905. Tethya lyncurium var. c Dendy, Ceylan.
1905. Donatia papiUosa Thiele, Calbuco (Gliili).
1. J'ai eu le regret de ne pouvoir prendre connaissance de cette espèce.
566 E. TOPSENT
1906. Donatia japonica Topsent, Iles Musha (Mer Rouge).
1906. Donatia Ingaîli Topsent, Djibouti.
1906. Donatia arabica Topsent, Djibouti.
1906. Donatia viridis Baer, Papeete.
1906. Donatia pari>istella Baeb, Zanzibar.
1909. Donatia Ingalli var. maxima Hentschel, S. W. Australie.
1909. Donatia japonica var. nucleata Hentschel, S. W. Australie.
1909. Donatia japonica var. globosa Hentschel, S. W. Australie.
1909. Donatia japonica var. albanensis Hentschel, S. W. Australie.
1909. Donatia fissurata var. extensa Hentschel, S. W. Australie.
1911. Tethya seychellensis Row, Mer Rouge.
1911. Tethya lyncurium var. a Row, Mer Rouge.
1912. Donatia Ingalli Hentschel, Iles Arou et Ki.
1912. Donatia tylota Hentschel, Iles Arou et Ki.
1916. Donatia lyncurium Dendy, Océan Indien.
1916. Donatia japonica Dendy, Océan Indien.
1916. Donatia Ingalli Dendy, Océan Indien.
1916. Donatia seychellensis Dendy, Océan Indien.
1916. Donatia Stella grandis Dendy, Océan Indien.
Tentant de classer les Tethya, Lindgren, en 1898 (30, p. 358), a
proposé de les répartir en trois groupes d'après la possession, avec les
sphérasters, d'oxyasters de 0 mm. 012 à 0 mm. 02, ou de chiasters tylotes
de 0 mm. 006 à 0 mm. 016 et d'oxyasters de 0 mm. 02 à 0 mm, 052, ou
enfin de chiasters tylotes de 0 mm. 008 à 0 mm. 016. Hentschel a
réprouvé cet essai (17, p. 317) pour avoir trouvé, avec un degré variable
de fréquence, des oxyasters chez quelques Donatia du S. W. de l'Australie
qu'il avait d'abord prises pour des variétés de D. japonica. Nous verrons
à propos deDonatia globostellata (Lend.), comme dans l'espèce quia embar-
rassé Hentschel (si tant est qu'elles diffèrent), le développement des
oxyasters dans le choanosome dépendre de l'âge et de la grosseur des
sujets. Mais il n'y aurait là, en somme, qu'mie difficulté plus ou moins
grande à constater une particularité pourtant réelle, comme on en ren-
contre parfois chez d'autres Éponges, telles que Ficulina ficus, par
exemple, quand il s'agit de découvrir leurs microsclères caractéristiques.
Les raisons pour lesquelles le groupement de Lindgren n'est pas
admissible consistent, d'une part, en ce que les micrasters de Donatia
lyncurium, unique représentant de son premier groupe, ne sont pas,
contrairement à ce qu'il a pensé, des oxyasters, et, d'autre part, en ce que
dans la plupart des espèces, au moins, où le choanosome contient des
asters qualifiées d'oxyasters, ces spicules dérivent des micrasters somi-
ÉPONGES DE SAN THOME 567
ques par différenciation plus ou moins accentuée. Tel est nettement le
cas chez les Donatia glohosteïlata (Lend.) et D. arabica Topsent, où le
nombre et la force des oxyasters varient d'un spécimen à l'autre, et même,
si l'on y regarde de près, chez D. dijdoderma (Schmidt) , où les oxyasters
choanosomiques atteignent le plus haut degré de complication. Donatia
nux ( Selenka) est la seule où existeraient des micrasters choanosomiques
nettement différentes des micrasters ectosomiques, mais la connaissance
qu'on a de cette espèce, d'après une description de Thiele, est réellement
insuffisante.
Pour grouper les Donatia, on pourrait tout au plus opposer aux formes
précitées celles où règne une certaine uniformité des micrasters, comme
D. japonica (Sollas), D. ^55wrato(LENDENFELD),Z). f?e/on/u5 (Thiele), si
toutefois laD. nux de Ternate signalée parTniELE en est spécifiquement dis-
tincte, peut-être mêmeZ). lyncurium (Linné), dont les micrasters, quelles
que soient leurs variations, n'élèvent jamais sensiblement leur taille et
ne s'écartent que très exceptiormellement beaucoup de leur forme typique.
Je placerais encore parmi ces dernières cette Donatia de Dendy (11, p. 262,
pi. XL VIII, fig. 1) que je considère provisoirement comme une D. japo-
nica var. peracuta, puisque ses tylasters devenant couramment des
oxyasters, même dans l'écorce, il ne peut être question chez elle de micras-
ters choanosomiques différenciées. Mais ces distinctions, ces hésitations
montrent comme peu naturelle une classification dont le nombre restreint
des espèces à conserver n'impose d'ailleurs plus la nécessité.
CRITIQUE DES ESPÈCES ET DES VARIÉTÉS
Tethya lyncurium (Linné) Lamarck.
Inscrite par Lamarck (23, p. 71) au cinquième rang dans son genre
hétérogène Tethya, cette Éponge, l'Orange de mer, commune sur les côtes
d'Europe, est le type du genre Donatia établi pour elle par Nardo, en
1833. Elle a été à plusieurs reprises l'objet de descriptions plus ou moins
détaillées, et, malgré tout, ses micrasters sont encore imparfaitement
caractérisées. Dès 1869, Carter les a décrites et figurées (6, p. 8 et pi. II,
fig. 6) comme formées d'un centrum globuleux d'où émanent en nombre
variable des rayons rugueux, subépineux. De môme, plus tard, Sollas
les a déclarées ordinanement pourvues de centrum (44, p. 436). Mais des
indications contraires ne manquent pas. Le dessin, rudimentaire, il est
Arch. de Zool. Exp. et GÉn. — T. 57. — F. 6. 38 .
668 E. TOPSENT
vriài, de la monographie de Bowerbank (3, vol. III, pi. XV, fig. 22),
celui qu'a donné Vosmaer d'une micraster de Tethya lyncurium var.
ohtusum (70, pi. IV, fig. 125) et tous ceux de Lendenfeld (27, pi. VI,
fig. 56 a-f) sont, dans un sens opposé, d'une netteté absolue ; ceux, trop
petits, où j'ai surtout essayé de montrer les variations des rayons en leurs
extrémités (61, pi. VIII, fig. 9 c), le sont moins ; mais je reconnais avoir
commis une généralisation maladroite en disant que ces rayons ne cons-
tituent pas de centrum par leur réunion. Couramment, coniques ou non,
ils s'unissent par leurs bases à une certaine distance du centre réel de l'aster
et composent de la sorte un centrum plus ou moins accusé qui, dans les
cas de large concrescence, peut même paraître globuleux. Je tiens pour
'W -T^
M-
^.
Fig. XVIII, Donatia lyncurium, micrâsters. K, d'après un spécimen de Eoscolï à sphérâsters fougueuses ; P,
d'après uu individu du Portel. x 620.
certain que les dessins des travaux précités de Bow^rbank et de Vosmaer,
pris sur des spicules de spécimens septentrionaux de Donatia lyncurium,
sont inexacts, et j'explique l'allure do ceux du mémoire de Lendenfeld
par un choix de formes -hiieux compal'ables opéré chez des individus
provenant de l'Adriatique. Il semble exister, en effet, dans la spiculation
de l'espèce qui nous occupe, des variations, sur lesquelles je teviendrai
bientôt, en relation avec son habitat.
D'une façon générale, les micrâsters de Donatia lyncuriîim ont des
rayons assez nombreux (9-15), cylindriques ou un peu coniques, compo-
sant d'ordinaire un petit centrum, ôtnés d'épines faibles sur leur longueur
bu seuletnent vers leur extrémité où leur accumulation forme fréquemment
un renflement ^^lus ou moins prononcé. Souvent très variables d'aspect
dans un même individu, par raccourcissement ou étirement, épaississe-
ment ou amincissement de leurs rayons et dispersion ou condensation de
letirs épines, elles y restent quand même toutes à peu ^rès de même taille
et ne se xiifféreiteient pas en oxy asters pûtes. Par suite des variations
ÉPONGES DE SAN THOME 569
qu'elles présentent, les noms de chiasters, de strongyglasters ou de tylas-
ters ne leur conviennent pas rigoureusement.
Ces données suffisent, nous le verrons, à distinguer les raicrasters de
D. lyncurium de celles des autres Donatia. Certes, il leur arrive quelquefois
de revêtir une forme aberrante rappelant celle qui caractérise une autre
espèce, telle, par exemple, la micraster dessinée par Lendenfeld (27,
fig. 56 /), qu'on croirait appartenir à uneD. glohostellata, telles aussi celles
que j'ai trouvées dans une D. lyncurimn de Monaco (fig. xix B) et qui,
grandeur à part, ressemblent aux oxyasters choanosomiques de D. dijÀO'
derma ; mais ces micrasters anormales se rencontrent, parmi la jmultitude
des autres, à titre d'exceptions résultant de l'exagération dans mi sens
M
I''IG. XIX. Donatia lyncurium, micrasters. M, d'après un spécimen de Monaco ; 6, d'après un spécimen du Golfe
de Gabès ; B, micrasters uxceptiounellus d'un spécimen de Monaco, x C20.
ou dans l'autre des détails de leur conformation, d'une ramification du
bout des rayons, dans le premier exemj)le donné, d'un dévclojjpement
excessif de l'ornementation des rayons, dans le second. Et tout cela
s'explique très bien du fait que, ckez toutes les Danatia, les détails de
spieulation qui caractérisent les espèces ne sont que différences établies
sur un type commun de spieulation.
Je puis cependant consigner quelques remarques au sujet des varia-
tions habituelles des micrasters de Donatia lyjicurium. Ainsi, leur spina-
tion me semble, en général, un peu plus accentuée dans les spécimens des
eôtes méditerranéennes de France que dans ceux de la Manche. De même,
leur diamètre me paraît être ordinairement un peu plus élevé chez les
premiers que chez les seconds : je lui trouve, au plus, 0 mm. 015, quelque-
fois seulement 0 mm. 014 et même 0 mm. 013 chez des Éponges du Porte!,
de Luc et de Roscoff, alors qu'il atteint 0 mna. 017, 0 mm. 018 et même
0 mm. 02 chez d'autres provenant de Banyuls, de Monaco et de Gabès
(Tunisie). Cette inégaUté de taille peut contribuer à rendi'e la spination
570 E. TOPSENT
plus ou moins évidente, mais les dififérences tiennent plutôt à la force
relative des rayons. Or, j'ai relevé sur le nombre de ces rayons et, par
suite, sur leur grosseur, d'intéressantes variations. Il y en a typiquement
douze et, souvent, la micraster les montre en quatre verticilles super-
posés de trois, ou bien elle se présente avec deux rayons dressés aux pôles
d'un centrum globuleux qui en porte deux verticilles de cinq. Mais leur
nombre s'élève souvent à treize, quatorze et quinze dans les individus
de la Manche, alors qu'il descend à onze, dix et même neuf dans ceux que
j'ai observés de la Méditerranée. J'ai vu cette diminution plus forte chez
des sujets dragués au large de Monaco que chez d'autres de Banyuls et
plus encore chez une Éponge du golfe de Gabès, où, sur trente micras-
ters, j'en compte six à douze rayons, quatre à onze, sept à dix et treize
à neuf seulement. D'après cela, Donatia lyncurium aurait ses micrasters
plus grosses, à rayons plus épineux, mais moins nombreux dans la Médi-
terranée que dans la Manche.
J'ai été amené à m'assurer que, tant dans le Pas-de-Calais qu'au large
de Monaco, les micrasters des bourgeons n'ont pas moins de rayons que
celles des parents et n'en diffèrent pas par les proportions de leur cen-
trum. J'étais surpris, en effet, de ne trouver dans les figures consacrées
par 0. IMaas (31) au développement des bourgeons de Donatia lyncu-
rium que des micrasters (tylasters sans centrum) n'ayant que de cinq à
sept rayons seulement. Mais Deszô, dans ses mémoires sur des D. lyncu-
rium de Trieste (14 et 15), n'avait déjà dessiné que des tylasters sans
centrum à huit rayons et Lendenfeld (27), d'après des spécimens pro-
veuant de Trieste et de Lésina, n'avait décrit et figuré que des strongy-
lasters avec six à huit rayons. Sachant que les matériaux d'étude de
Maas provenaient de Chypre, on en arrive à supposer que, dans l'Adria-
tique et dans la Méditerranée orientale, Donatia lyncuriurn tendrait, plus
encore qu'à Gabès, à diminuer le nombre des rayons de ses micrasters
et à réduire leur base d'union. De nouvelles recherches établiront la
valeur de ces remarques ; peut-être atténueront-elles ce que l'hypothèse
amsi formulée a de trop absolu, mais déjà, en rapprochant les détails qui
vi nnent d'être rappelés de ceux donnés plus loin au sujet de sa forme
nordique, dite Tethea norvagica, on acquiert la conviction que D. lyncu-
cium fait subir, suivant les régions, d'importantes variations à ses mi-
rrasters.
On sait depuis longtemps que ses sphérasters sont sujettes aussi à des
variations. Dès 1862, 0. Schmidt en a fait comiaître plusieurs, observées
ÉPONGES DE SAN THOME
571
toutes dans l'Adriatique, si accentuées qu'elles le conduisirent à distin-
guer pour un temps une espèce nouvelle, Tethya morum (36, p. 44, pi. III,
fig. 20), et deux variétés de T. lyncurium, var. nodulosa (36, p. 45, pi. IV,
fig. 1 h, i, l') et var. conforta (36, p. 45, pi. IV, fig. 1 m, ii, q). Dans les
mers arctiques, les sphérasters de Donatia lyncurium sont de forme tra-
pue (fîg. xxv). Je les trouve assez massives dans l'unique spécimen recueilli
Fig. XX. Donatia lyncurium, sphérasters do spécimens provenant :P, du Portel (en bourgeonnement) ; L, de Luc;
R, de Roscoff ; G, du Golfe de Gabôs ; B, B", de Banyuls ; M, M', de Monaco (M' en bourgeonnement), x 370.
dans l'Atlantique oriental, sous l'Equateur, à San Thome (fig. xxi).
Sur les côtes océaniques de France, elles présentent une assez grande varia-
bilité, mais ce n'est que dans des individus de nos côtes méditerranéennes
que je les trouve, avec des rayons longs et pointus, plus ou moins sem-
blables (61, pi. VIII, fig. 9 6} et fig. XX B, M, de ce texte) à celles dessinées
par ScHMiDT (36, pi. IV, fig. 1, d, g, q) et par Lendenfeld (27, pi. VI,
fig. 56 h, i). Ces formes, déliées, généralement grandes, sont, d'ailleurs,
loin de caractériser toujours les D. lyncurium méditerranéennes ainsi
qu'en témoignent l'ancienne Tethya morum de Schmidt, mon spécimen de
572 E. TOPSENT
D. lyncurium de Gabès (fîg. xx G) et plusieurs autres que j'ai observés
provenant de la côte française. Massives ou déliées (fig. xx R et xx M, M'),
les sphérasters peuvent orner d'épines leurs rayons et parfois les diviser.
D'habitude, chez les individus à sphérasters ainsi fougueuses, les micras-
ters exagèrent leur spination, et c'est chez l'un d'eux, de Monaco, que
j'en ai vu la pousser à l'extrême (fîg. xix B) et diviser quelques-uns de
leurs rayons vers le bout ou remplacer leurs fines épines par quelques
pointes effilées.
Le spécimen de Donatia lyncurium recueilli par M, Gravier à San
Thome est, en raison de sa provenance, intéressant à considérer sous le
rapport de la spiculation. Ce ne sont pas les caractères des Éponges médi-
terranéennes qu'il présente mais ceux des spécimens de la Manche. Il a
(fig. xxi) des sphérasters massives à
rayons courts, de 0 mm. 07 de dia-
mètre et des micrasters à centrum
bien marqué, à rayons au nombre de
dix à douze, et mesurant 0 mm. 01 à
?^^
.<r
tAS"^ 0 mm. 015 de diamètre. Beaucoup de
Fig. XXI. Donatia Ujncunum. Microsclères d'un SCS stylcS OUt, à dcS dcgrés dlvCrS,
spécimon de San Thome. Une sphéraster (à . i v / xj. i ' •
gauche) X 370, et trois micrasters X 670. souveut trcs marqucc, ccttc abrévia-
tion de leur pointe qui avait paru à
VoSMAER caractériser comme variété des spécimens de l'océan Arctique,
mais qui se retrouve avec plus ou moins de fréquence chez des individus
de la Manche (Le Portel, Luc, Roscoff), comme aussi de la Méditerranée.
Teihya morum O. Schmidt 1862 (36, p. 44, pi. III, fig. 26).
0. Schmidt a de lui-même abandonné cette espèce en 1868 (37, p. 31).
Tethya lyncurium var. nodulosa 0. Schmidt [1862 (36, p. 45, pi. IV,
fig. 1 h, i, k).
Cette variété a été établie sans nécessité pour une des nombreuses
variations que présentent les sphérasters corticales des D. lyncurium
méditerranéennes et Schmidt s'est abstenu d'y faire allusion, en 1868, à
propos des sphérasters un peu moins fougueuses seulement qu'il a retrou-
vées dans une collection d'Épongés d'Algérie (37, p. 22, pi. IV, fig. 8).
Tethya lyncurium var. contorta O. Schmidt 1862 (36, p. 45, pi. IV,
fig. 1 m, n, q). \
Ni la forme des sphérasters ni la torsion des lignes epiculeuses
ÉPONGES DE SAN THOME 573
ne constitucaient à cette prétendue variété des çavactères valables.
StélUtta nux Selenka 1867 (42, p. 569, pi. XXXV, fig. 11-13).
SoLLAS, induit en erreur par une préparation renfermant des sterras-
ters, a cru devoir rapporter au genre Cydonium (44, p. 260) cette espèce,
des îles Samoa.
RiDLEY avait eu raison de supposer (33, p. 472, en îiote) qu'il s'agis-
sait d'une Tethya et que des dichotriaenea associés à gçs spicules lui étaient
en réalité étrangers.
D'après le type, cojiservé à Gottingen, Thïble m a rpt^pftné Ja (des-
cription (47, p. 61, en note).
H y a distingué deux sortes de micrasteys : 1° des tylasters ectosomiques
de 0 mm. 015 de diamètre, à centrum épais (47, pi. IJI, fig. 16&), à neuf-
douze rayons courts, repflés au bout et a^ssi, tout au moins les plus gros
d'entre eux, ornés d'épines en ce point ; 2° des oxyasters choanosomiques,
que n'avait pas vues Sollas, de 0 mm. 015 à 0 mm. 018 de diamètre, à
centrum, avec une douzaine de rayons coniques, pointus, souvent rugueux
et même épineux (pi. III, fig. 16 c).
Le type spécimen avait des mégasclères pour la plupart arrondis aux
deux bouts et des sphérasters de 0 mm. 08 à 0 mm. 1 de diamètre.
Cette description aurait gagné beaucoup à être plus détaillée et à être
accompagnée de dessins plus nombreux. Elle laisse supposer l'existence
chez Donatia nux de micrasters choanosomiques nettement différentes
des ectosomiques et sans intermédiaires. Ce serait là, s'il était établi, un
caractère excellent, je puis même dire exceptiomiel, car les oxyasters
présentes chez les Donatia sont, d'habitude, des tylasters modifiées, même
chez D. diploderma où elles atteignent le plus haut degré de différenciation.
Malheureusement, Thiele ne s'est pas montré aussi catégorique au sujet
des deux sortes de micrasters de cett& Donatia de Ternate qu'il a appelée
aussi Tethya nux (47, p. 63) et dont les strongylo-tylasters sans épines
rappellent tant celles de sa T. deformis. Cela ôte la certitude de bien con-
naître les micrasters de Donatia nux et pose la question de l'identité de
cette Éponge et de quelque Donatia postérieurement décrite.
Columnitis squamata 0. Schmidt 1870 (38, p. 25, pi. V, fig. 3 et 4).
CAi^TE&a suggéré l'idée (7, p. 27) d'un rapprochement de cette Éponge
avec les Tethya. J'en suis tout à fait partisan pour avoir souvent recueilli
sur nos côtes des Donatia lyncurium sous la forme déprimée qui a surpris
O, Schmidt et pour y avoir, à l'occasion, trouvé 4es ffagm^ilt§ f]^ coquilles
574 E. TOPSENT
incorporés dans l'écorce. Le genre Columnitis est inutile. Mais ce qui a
été dit de ses spicules ne permet pas de décider si C. squamata se rapporte
ou non à l'une des espèces connues du genre Donatia.
Cometella stéllata 0. Schmidt 1870 (38, p. 49, pi. IV, fig. 10).
Aussi bien sous le nom primitif de Cometella stéllata que sous celui de
Tethya comètes qu'il lui a appliqué en 1880 (40, p. 78), 0. Schmidt n'a
donné qu'une idée vague de cette intéressante Éponge qu'il avait pour-
tant la possibilité de faire bien connaître. Sollas (44, p. 440) ne l'a
admise qu'avec doute, surtout, probablement, parce qu'elle est pédon-
culée, au nombre des espèces du genre Tethya. C'est ce qui m'a conduit
moi-même à proposer pour elle, en 1898 (60, p. 112), le genre Halicometes.
Ses caractères et ses affinités restent, en somme, à élucider,
Tethya ? innocens 0. Schmidt 1870 (38, p. 51).
H est impossible actuellement de faire cas de cette Tethya ? innocens
de la Floride dont Schmidt regrettait lui-même de ne pas avoir une
connaissance suffisante.
Tethya repens 0. Schmidt 1870 (38, p. 51).
Sollas s'est demandé (44, p. 439) s'il ne s'agit pas d'une Columnitis.
Nous avons vu plus haut ce qu'il faut penser de ce genre. T. repens est
sans doute simplement un spécimen encroûtant de quelque Donatia,
mais il restera spécifiquement méconnaissable au peu qui a été dit de sa
spiculation.
Tethya diploderma 0. Schmidt 1870 (38, p. 52, pi. IV, fig. 11).
D'après la description générale, on devrait tenir T. diploderma pour
une Donatia à micrasters d'une seule sorte et de petite taille (0 mm. 0085).
Leurs rayons, déclarés tylotes, souvent courbés et marqués de nodosités,
sont en nombre restreint (six à neuf) et, d'après la figure incomplète
d'un de ces spicul^g, ne forment pas de centrum.
Mais O. Schmidt, en 1880 (40, p. 78, en note) a revendiqué la priorité
de sa T. diploderma des Antilles sur T. maza Selenka de Rio Janeiro, et
cette réclamation, qui surprend un peu quand on se reporte, dans le
mémoire de Selenka (43), à la description et aux figures des micrasters,
et qui, par conséquent, n'a point été suscitée par la simple lecture de ce
mémoire, paraît cependant fondée. En effet, après examen de spécimens
typiques, Sollas a redécrit T, maza, en 1888 (44, p. 440) et a découvert
qu'elle possède, en réalité, comme T. seychellensis, deux sortes de micras-
ÉPONGES DE SAN THOME 575
ters. Dès lors, à son avis, la distinction entre T. maza et T. seijchellensis
reposerait entièrement sur la différence de forme de leurs asters choano-
somiques.
Puisqu'il est démontré que Selenka a figuré seulement les micras-
ters somiques de sa T. maza, on est en droit d'admettre que, de son côté,
ScHMiDT a complètement omis de citer les micrasters choanosomiques de
sa T. diploderma. La connaissance que j'ai prise de six Doriatia de San
Thome pourvues de micrasters de deux sortes a établi ma conviction à ce
sujet : on y voit des micrasters somiques petites, sans centrum, à rayons
peu nombreux, tylotes, rugueux ou verruqueux, souvent tordus et par-
fois rameux, rappelant ceux de la T. diploderma de Schmidt, et, en même
temps, ces micrasters choanosomiques, notablement plus grandes, sans
centrum, à six rayons plutôt rugueux qu'épineux et rarement divisés,
que SoLLAS a décrites comme caractéristiques de T. maza. Pour moi,
les deux espèces n'en font qu'une seule à laquelle revient, conformé-
ment à la revendication de Schmidt, le nom de Donafia diploderma
(Schmidt).
Bien plus, comme les micrasters choanosomiques de l'une de ces six
Éponges ont souvent les bouts divisés au point qu'on peut, d'après cela, la
considérer comme une Donatia sei/chellensis {Wb.igkt) , je me suis demandé
si la distinction retenue par Sollas entre ces deux prétendues espèces
est naturelle ou si l'on n'appelle pas D. seychellensis des D. diploderma
dont les rayons des micrasters choanosomiques n'ont, en somme, qu'une
tendance plus forte à se ramifier. Une comparaison rigoureuse de ces
Donatia de San Thome entre elles et avec des Donatia de la Mer Rouge
et des Moluques va, je pense, établir l'identité spécifique deZ>. seychellensis
et de D. diploderma.
Disons d'abord que quatre des Donatia en question de San Thome
(B, D, E, F) ont une écorce extrêmement lacuneuse, souple quoique résis-
tante, à verrucosités assez grandes, irrégulières, inégalement larges et
inégalement saillantes, assez espacées, sans bourgeons. Le spécimen
blanc rosé (C) n'en diffère que par ses verrucosités plus plates, plus égales
et plus serrées. Quant au spécimen (A), au sujet duquel l'indication de
couleur fait défaut, il se distingue nettement des autres par son écorce
plus compacte, à verrucosités petites, serrées et, pour la plupart, surmon-
tées d'un filament grêle, facile à reconnaître comme un pédicelle de
bourgeon.
J'ai trouvé chez tous les mêmes cellules sphéruleuses.
576
E. TOPSENT
Chez tous, les grands mégasclères sont droits, à base amincie et à
pointe obtuse, souvent abrégée à des degrés divers. Les styles grêles
restent pointus.
Je donne (fig. xxii) des dessins de leurs spliérasters pour faire remar-
quer combien elles ressemblent à celles de D. seychellensis figurées par
Dendy (11, pi. XLVIII, fig. 4) et à celles des Donatia de la mer Rouge et
des Moluques que je suis à même de leur comparer. Je tiens surtout à
établir que celles du spécimen A ne diffèrent pas de celles d'autres spéoi'
mens de San Thome. Elles atteignent 0 mm. 045 à 0 mm. 05 de diamètre
chez D, E, F, A, 0 mm. 06 chez C et 0 mm. 065 chez B, qui est le plus grand
Fig. xxn. Donatia diploderma (O. Schmidt), sphérasters. A-F, d'après des spécimens de San Thome ; TT', d'après
des spécimens du Golfe de Tadjoura ; B, de Djibouti, et M, d'Amboine. x 370.
de tous. Je leur trouve 0 mm. 045 dans deux spécimens de Tadjoura,
0 mm. 06 chez celui de Djibouti que j'ai appelé Donatia IngalU (Bow.)
en 1906 (64, p. 567) et 0 mm. 07 chez d'autres d'Amboine.
Les micrasters somiques sont des tylasters régulières à renflements
terminaux finement épineux, ordinairement sans centrum, et presque
toujours à six rayons, chez C, D, E, F. Leur taille est faible et plus ou
moins variable suivant les individus: 0mm. 008-0 mm. OU chez C, 0 mm, 01-
0 mm. 013 chez D, 0 mm. 08-0 mm. 01 et quelquefois 0 mm. 012 chez E,
0 mm. 01 assez uniformément chez F.
Les tylasters de B sont quelquefois aussi des hexasters régulières ^
quelquefois le nombre de leurs rayons devient supérieur à six ; il peut
s'élever jusqu'à dix (fig. xxiii, B). Le principal intérêt de ces micrasters
consiste en ce que la très grande majorité d'entre elles se montrent très
irrégulières, variqueuses et même ramifiées. On en peut juger d'après les
ÉPONGES DE SAN THOME
577
hexasters que j'ai choisies, vues dans le prolongement d'un de leurs axes.
Elles évoquent inévitablement le souvenir des spicules correspondants de
T. diploderma qui sevds, dans toutes les Donatia, leur sont comparables.
Leur diamètre, dans ce spécimen do San Thome, atteint 0 mm. 013.
Enfin, les micrasters somiques de A (fig. xxiv) sont remarquables à
un autre point de vue : quelquefois tylasters régulières sexradiées, elles
n'ont le plus souvent que cinq, quatre (cas le plus fréquent) et même trois
rayons, et se montrent alors plus ou moins irrégulières, surtout en ce qui
concerne leurs
D
B
^-:~
bouts, qui ten-
dent manifeste-
ment à se lober.
Leur diamètre
est compris entre
0 mm. 008 et
0 mm. 011.
Les micras-
ters choanosomi-
ques de ces
Éponges présen-
tent, elles aussi,
des variations.
ChezB,C,D,E,ce
aont des oxyas-
ters, sans cen-
trum, à rayons *
droits ou plus ou moins tordus, très finement épineux, plutôt rugueux
qu'épineux, dans la dernière moitié de leur longueur, coniques mais
à bouts obtus et souvent même un peu renflés, comme il convient à ces
dérivés évidents de ^^tylasters. Leurs rayons sont le plus souvent au
nombre de six ; mais il n'est pas rare d'en compter sept ou huit, surtout
chez B et E ; j'ai vu exceptionnellement, chez E, une oxyaster à dix
rayons. Dans les spécimens en question, les rayons des oxyasters sont ordi-
nairement tous simples, mais il arrive quelquefois que l'un d'eux porte
comme un court rameau se détachant loin de son extrémité. Le diamètre
de ces spicules est de 0 mm. 03 à 0 mm. 033.
Chez F, les oxyasters sont, pour la plupart, semblables à ce que je
viens de décrire et qui, pour Sollas, permettait de distinguer T. maza
.^
FiQ. 5XIII. f)on(Uia diffo^emaiQ. Schmjpt), micrasters aps spéciipsns B. I>, F, de
San Thome. x 670.
578
E. TOPSENT
'r<
fe*5Q''
A
f^
de T. seycheUensis, mais il s'en trouve beaucoup dont la portion épineuse
d'un rayon ou de plusieurs se divise, parfois même à plusieurs degrés
(fig. xxni, F). C'est un acheminement vers la forme que prennent beau-
coup de ces spicules chez le spécimen A, où leur taille peut dépasser
0 mm. 035. Là, les oxyasters ont (fig. xxiv) l'allure qui passe pour carac-
tériser l'espèce D. seycheUensis. Je me refuse, pour ma part, à rapporter
ce spécimen à D. seycheUensis et les cinq autres à D. diploderma. La forme
si curieuse de ses micrasters somiques n'est pas pour moi une raison d'éta-
blir cette séparation, car, tandis que les Donatia du golfe de Tadjoura,
que j'ai appelées Tethya seycheUensis (55, p. 177), possèdent, avec des
oxyasters choano-
^' -^"^ somiques exacte-
ment pareilles aux
siennes (leur dia-
mètre atteint 0 mm.
04), également des
tylasters somiques
pour la plupart ré-
duites à quatre et
même trois rayons
à bouts lobés, une
autre, de Djibouti
(64,p. 567), à oxyas-
ters choanosomiques encore plus cladeuses et plus grandes (0 mm. 05),
a des tylasters somiques plus fréquemment régulières, et d'autres,
d'Amboine (59, p. 439), ne possèdent guère que des tylasters typiquement
régulières et sexradiées, comme Wright, Sollas, Keller, Dendy et
autres auteurs en ont décrit et figuré.
Je ne suis pas non plus embarrassé par l'écorce du spécimen bourgeon-
nant A, plus compacte que celle des autres spécimens, parce que les
Donatia de Tadjoura, en plein bourgeonnement aussi, qui se trouvent
avoir tout à fait la même spiculation que lui, ont, au contraire, l'écorce
lacuneuse des autres spécimens de San Thome. J'avais déjà fait remarquer
(59) combien il est difficile d'accorder une valeur spécifique à des diffé-
rences structurales de l'écorce des Donatia ; l'observation précédente
prouve que la distinction retenue par Sollas entre Tethya Ingalli (Bow.)
et T. seycheUensis (Wright) ne repose sur rien de sérieux : ces noms d'es-
pèces tombent, comme celui de T, maza, en synonymie de Donatia diplo-
FlO. XXIV. Donatia [diploderma (O. Schmidt), micrasters du spécimen A de
San Thome. x 670.
ÉPONGES DE SAN THOME 579
derma (Schmidt) . Nous verrons qu'il en est probablement de même de
ceux de Tethea Cliftoni Bowerbank, Donatia muUifida Carter, Tethya
philippensis Lendenfeld, T. lœvis Lendenfeld, Donatia viridis
Baer et D. parvistella Baer. Ainsi comprise, D. diploderma est de toutes
les espèces de Donatia celle qu'on a le plus souvent signalée : elle jouit,
en effet, d'une distribution géographique très vaste. Elle a été rencontrée
en de nombreux points de la mer Rouge, de l'océan Indien et de la Malai-
sie, et, dans le Pacifique, jusque sur sa côte orientale,- puisque D. mul-
tifida Carter provenait d'Acapulco. On la connaît, par Bowerbank et
par Lendenfeld, du sud de l'Australie. Carter (8, p. 361) fait mention
d'une Donatia du Cap qui, d'après ses petites micrasters sexradiées, de
0 mm. 012, et ses oxyasters de 0 mm. 05 à rayons flexueux et épineux,
se rapporte sans doute à la même espèce. Dans l'Atlantique, Schmidt
et Selenka l'avaient découverte dans sa partie occidentale, aux Antilles
et à Rio Janeiro, et Wilson l'a revue à Porto-Rico (73, p. 388) ; enfin,
l'occasion s'offre à moi d'établir son existence sur le côté africain de cet
océan, la récolte qu'en a faite M. Gravier prouvant même son abondance
à l'île de San Thome.
Donatia diploderma Schmidt est caractérisée par ses micrasters de
deux sortes, typiquement sexradiées et sans centrum. Mais le nombre de
leurs rayons, si souvent propre à guider la détermination, n'est nulle-
ment fixe ; aux exemples que j'ai donnés plus haut de ses variations, bien
d'autres pourraient s'ajouter. Selon les individus, ses micrasters choano-
somiques existent en quantité variable ; leur taille oscille entre 0 mm. 03
et 0 mm. 05 ; leurs rayons, avec des degrés divers de fréquence, se mon-
trent droits ou flexueux, simples ou plus ou moins divisés.
Tethea Ingalli Bowerbank 1872 (4, p. 119, pi. V, fig. 11-17).
La description originale de Tethea Ingalli est si peu précise qu'il faut
recourir à ce qui a été dit récemment des spécimens types de cette Eponge
pour essayer de l'interpréter.
Pour SoLLAS, qui en a jugé de visu (44, p. 431), Tethtja Ingalli possède
une spiculation très semblable à celle de T. seychellensis, les deux espèces
ne se distinguant guère que par des détails de structure de leur écorce.
Nous venons de voir que ce caractère est sans valeur, de sorte que T. In-
galli tombe avec T. seychellensis au nombre des synonymes de Donatia
diploderma (Schmidt) .
D'autre part, Dendy (11, p. 264) a nommé Donatia Ingalli (Bow.) des
580 E. TOPSENT
Éponges de l'océan Indien dont la spiculation s'écarte assez de ce qu'on
a l'habitude de voir chez D. diploderma largo sensu. Les sphérasters figu-
rées sont plus volumineuses et ont davantage de rayons {11, pi. XL VIII,
comp. fig. 3 et 4) ; les micrasters somiques sont bien des tylasters, mais
elles comptent habituellement plus de six rayons et leur taille s'élève jus-
qu'à 0 mm. 016. Par contre, les oxyasters n'excèdent pas 0 mm. 02 de
diamètre ; dérivant ici très manifestement des tylasters, elles dévelop-
pent autant de rayons qu'elles ; elles les gardent simples, comme dans la
forme T. maza. Il existe là un ensemble de variations qui serait capable
de dérouter un peu si Dendy, après étude de l'un des spécimens de
BowERBANK n'ajoutait que, dans les types australiens de D. Ingalli, les
oxyasters choanosomiques ont des rayons plus longs et plus épineux,
dont la forme typique semble approcher celle de D, seychellensis.
Tethea norvagica Bowerbank 1872 (4, p. 121, pi. V, fig. 18-25).
C'est la forme septentrionale de Donatia lyncurium. Bowerbank en a
pris connaissance sur un certain nombre de spécimens provenant de la
côte de Norvège, entre Trondhjem et le cap Nord, par des profondeurs
de 20 à 200 brasses. Le Rév. A.-M. Norman l'a également recueillie dans
le fjord de Trondhjem. Merejkowsky en a obtenu par dragages dix indivi-
dus dans la mer Blanche, inais uniquement dans sa partie occidentale, au
S. de la ville de Kern, en deux ou trois points de la baie d'Onega (32,
p. 429). Vosmaer en a vu deux, de la collection du Willem Barents, obte-
nus dans l'océan Arctique, par 71» 12' 5" lat. N. et 20° 30' Ig. E. et par 135
brasses de profondeur (70, p. 25, pi. IV, fig. 123-126). Enfin, dans sa
campagne scientifique de 1898, S. A. le prince de Monaco en a dragué un
entre la Norvège et l'île aux Ours, par 72° 37' lat. N. et 20^ 00' Ig. E., et
par 394 m. de profondeur (67, p. 27).
Sur la question de savoir s'il s'agit d'une espèce à part, Merejkowsky
a posé en principe (32, p. 425) que la Tethya de la mer Blanche est une véri-
table Tethya lyncurimn, puis, se contredisant quelques lignes plus loin,
a cru possible de conserver l'espèce de Bowerbank. Aucun spongolo-
giste n'a partagé ce dernier avis. Vosmaeb, sans penser à T. norvagica,
a considéré ses spécimens comme représentant une variété ohtusum de
Tethya lyncurium à cause de la pointe souvent émoussée de leurs mégas-
clères, Sollas (44, p. 435 et 438) n'a voulu prendre T. norvagica que pour
une variété « norvégienne » de T. lyncurium. C'est le cas que nous en avons
fait, Lendeneeld (27, p. 17) et moi (61, p. 295, et 67, p. 27).
ÉPONGES DE SAN THOME 581
Sans coiislîtù'er une espèce à part, cette forme nordique se distingue
cependant des Donatia lyncurium de la forme commune sur nos côtes
océaniques par plusieurs caractères notables. Les individus sont de petite
taille ; ils ont l'écorce mince ; ils bourgeonnent avec une vigueur extraor-
dinaire. Ni Merejkowsky ni Sollas, qui a étudié la spiculation d'un des
types de Bowerbank, ne mentionnent rien de particulier au sujet des
mégasclères, mais Vosmaer a remarqué, nous le savons, que, dans ses
spécimens, ils ont souvent la pointe obtuse, et je trouve aussi, dans le
Spécimen appartenant à S. A. le prince de Monaco, tous les gros spicules
ainsi transformés plus ou moins en de faux strongyles. Cela n'offre
nullement l'intérêt que Vosmaer y attachait, puisque, comme je l'ai
établi précédemment
<p. 572), l'abrévia- \J^^^J_ ,-. '1
tion des grands mé- <^f ' ^ / ^S^ '^,'î^ c ^
gasclères est fré- X>//^ Z^^j\ -^^^^ >h %%>
quente à des degrés l/V :^. ..n """^^
divers dans les Dona- dZ^'V —7 r^/V. - K/^ /
tia lyncurium de ré- <\ ^-n/ (—y n 7 » ...^ '
gions très diverses. L-^j S^--^ ^r^' ^'^ ^^-^
Les mégasclères ^^"^
^, - , . FiG. XXV. Donatia lyncurium, microsclêres d'un spécimen de l'océan Àrc-
grelêS UU spécimen tique. Quatre sphérastcrs (à ganchc) x 370, et cinq micrastcTs x 620.
que j'ai examiné sont
pointus ; leur base se renfle proportionnellement davantage que celle des
mégasclères épais, mais je ne la vois jamais trilobée à la façon que Vos-
maer a dessinée. Pour les sphérasters corticales, que Merejkowsky a
jugé ne différer en rien de celles dé Téthya lyncurium, Sollas les a vues
petites ( 0 mm, 04 seulement de diamètre) et Vosmaer, leur trouvant les
rayons beaucoup plus courts et plus épais que chez les T. lyncurium
typiques, a noté leur ressemblanee avec celles de ce que Schmidt avait
appelé T. morum ; elles sont également trapues (fig. xxv), avec un dia-
mètre de 0 mm. 033 à 0 mm. 053, dans le spécimen mis à ma disposition.
Ce sont les micrasters qui présentent le plus d'intérêt : Merejkowsky a
remarqué que, dans les Éponges de la mer Blanche, elles ont le centrum
plus épais que les rayons ne sont longs, ce qui les rend plus massives que
dans T. lyncurium, avec « plutôt l'apparence de globules à la surface des-
quels sont placés des rayons courts et coniques » ; Sollas, après avoir
fixé à 0 mm. 012 leur diamètie dans le type de Bowerbank en question,
signale de leur part une curieuse tendance à passer à l'état de globule
582 E. TOPSENT
avec une surface quelque peu noueuse, cela résultant, dit-il, plutôt de la
réduction des rayons que du développement du centrum, quoique ces
deux causes entrent en jeu ; Vosmaer, lui, trop sobre de détails au sujet
de ces petites étoiles « with blunt-ended short radii », n'en a dessiné
qu'une (70, fig. 125), à centrum indistinct. Dans le spécimen que j'ai
étudié, les micrasters ont 0 mm. 01 à 0 mm. 016 de diamètre, le plus
souvent 0 mm. 012-0 mm. 013. Leurs rayons, ordinairement au nombre
de douze, forment toujours par l'union de leurs bases un centrum encore
plus marqué qu'il ne le devient d'habitude sur les micrasters des Donatia
lyncurium de la Manche. Ces actines sont, la plupart du temps, cyhndro-
coniques, assez élancées quand même, finement épineuses, au moins en
leur extrémité, où un groupement d'épines constitue un petit bouton ;
souvent, elles demeurent assez brèves, mais, par compensation, s'épais-
sissent ; enfin, mais rarement, elles figurent de courts mamelons à la
surface d'un centrum volumineux. Je ne puis mieux en donner une idée
qu'en les disant très abondantes sous la forme a, a' (fig. xxv), communes
à l'état de h et aussi de c, mais assez rares sous l'aspect de d. De telle sorte
que les descriptions de Merejkowsky et de Sollas sont loin de s'appli-
quer aux micrasters du spécimen en question. Cette constatation a son
importance : elle établit l'existence de variations individuelles dans la
forme nordique de Donatia lyncuriuin, variations auxquelles on pouvait, ,
d'ailleurs, s'attendre, et qu'on verra sans doute se multiplier quand on
étudiera de près les D. lyncurium vivant entre le N. de la Norvège et la
Manche.
Tethea robusta Bowerbank 1873 (5, p. 10, pi. II, fig. 12-17).
Cette Éponge d'Australie n'est guère connue que par la description
que Bowerbank en a tracée. Ses sphérasters corticales ont été déclarées
très grosses quoique, en réalité, leur plus grand diamètre indiqué (0 mm. 054)
soit souvent dépassé chez ses congénères ; le texte original présente donc
sur ce point une certaine contradiction. Ses micrasters seraient de deux
sortes, abondantes et mélangées par quantités égales dans le choano-
some. Les unes seraient des sortes de tylasters, d'une taille bien petite
puisqu'elles n'excéderaient pas 0 mm. 0071 de diamètre, et les autres,
un peu plus grosses quoique atteignant seulement 0 mm. 0118 de diamètre,
des strongylasters à rayons quelquefois coniques (attenuate). Mais les
extrémités des rayons des deux micrasters figurées ont été dessinées sans
pj.écision.
ÉPONGES DE SAN THOME 583
La taille véritablement faible de ces micrasters et le fait qu'elles pré-
sentent un centrum me font révoquer en doute l'identité de T. rohusta
Bow. et de T. Ingalli Bow. Sollas l'a admise (44, p. 431), il est vrai,
mais sans en donner de raison. Son autorité a conduit Ltndgren (30,
p. 317) à procéder de même. Je crains fort qu'elle ne m'ait égaré (61,
p. 296).
L'opinion de Ridley (33, p. 624) que T. rohusta ne serait guère qu'une
variété de T. lyncurium d'Europe est-elle plus soutenable ? Etait-elle
fondée sur l'observation directe ? Ridley^ remarquons-le, sans dire avoir
examiné le type de T. rohusta, attribue cependant aux mégasclères de
cette Éponge une épaisseur (0 mm. 045) presque double de celle expres-
sément indiquée par Bowerbank. Lendenfeld, lui aussi, a pris T. rohusta
comme synonyme de T. lyncurium (27, p. 15), mais cela ne peut guider
l'opinion puisqu'il a agi de la sorte sans la moindre discussion.
Outre que les deux sortes de micrasters de T. rohusta diffèrent peu
de taille, on pourrait, en faveur de la conception de Ridley, faire obser-
ver qu'elles paraissent avoir une douzaine de rayons et un centrum plus
ou moins distinct. Mais il n'est pas certain que ces spicules ressemblent
à ceux de Donatia lyncurium par l'ornementation des bouts de leurs
rayons, et la possibilité de les reconnaître ainsi de deux sortes et en quan-
tité à peu près égale dans le choanosome nuit au rapprochement de
ces espèces. Leur identification devient à peu près impossible quand on
compare leurs sphérasters. Avec raison, Bowerbank a déclaré celles de
T. rohusta très remarquables ; elles le sont, en effet, par le volume de leur
centrum et le nombre de leurs rayons ; elles rappellent, à cet égard, celles
de ces Éponges de Zanzibar qu'à cause d'elles, précisément, Lendenfeld
a appelées Tethya glohostellata en 1897 (28, p. 104), ainsi que celles de ma
Donatia arabica, au sujet de laquelle je fournirai plus loin de nouveaux
détails. Laissant de côté Donatia lyncurium, c'est à ces deux espèces
qu'il conviendrait, je crois, de comparer, s'il est possible, le type de
Tethea rohusta Bowerbank. Dans un cas comme dans l'autre, les dimen-
sions absolues des microsclères, telles que les a notées Bowerbank, se
trouveraient sensiblement inférieures à la réalité.
Tethea Cliftoni Bowerbank 1873 (5, p. 16, pi. III, fig. 16-18).
Une solution de continuité dans la couche des sphérasters corticales
pouvant difficilement passer pour un caractère spécifique, ce qu'il serait
important de connaître de Tethea Cliftoni, ce sont les détails de sa spicu-
Arch. de Zool. Exp. ex GÉN. — T. 57. — 1-'. 6. 39
584 E. T0P8ENT
lation. Malheureusement, les figures de la description originale man-
quent de précision et la correspondance ne s'établit pas entre les mesures
des spicules domiées dans le texte et la taille de ceux représentés au
grossissement indiqué.
RiDLEY (33, p. 624), suivi plus tard sans observation par Lendenfeld
(27, p. 15), a proposé d'identifier T. Cliftoni à T. lyncurium. C'est une
opinion qui ne me paraît pas soutenable à cause de l'écart trop considé-
rable de taille noté par Bowerbank entre les plus petites (0 mm. 008) et
les plus grandes (0 mm. 029-0 mm. 03) des micrasters de Tethea Clijtoni.
Et si, comme l'a suggéré Sollas (44, p. 432), l'Éponge de VAlert prove-
nant des îles Séchelles que Ridley a appelée Tethya Clijtoni se confondait
réellement avec T. seychellensis (Wright) , il est bien difficile de comprendre
que Ridley n'y ait vu qu'une variété de T. lyncurium.
Comme Sollas a eu en main les types de T. Clijtoni et de T. Ingalli
et que, les comparant entre eux, il n'y a pas découvert de différence, on
peut, sur son témoignage, tenir T. Clijtoni pour un synonyme de plus de
Donatia diploderma (Schmidt). Cette manière de voir semble corroborée
par les micrasters en petit nombre, de 0 mm. 03 de diamètre, dont Bo-
werbank s'est borné à signaler l'existence. Elle aurait contre elle, à vrai
dire, jusqu'à plus ample informé, la description originale des tylasters
somiques, déclarées si variables de forme et de taille et considérées par
Bowerbank comme contribuant le plus à caractériser son espèce.
Tethya maza Selenka 1880 (43, p. 472, pi. XXVIII).
Guidé par ce que Sollas a dit des micrasters de T. maza (44, p. 440),
j'ai montré plus haut l'exactitude probable de l'assertion d'O. Schmidt
(40, p. 78) que l'Éponge de Selenka est un pur synonyme de T. dijilo-
derma.
Il semble que la Donatia de Pulau Bidang décrite par Ig. Sollas (45,
p. 216) sous le nom de Tethya maza Sel. ait été correctement déterminée
et qu'il suffise de changer ce nom en celui de D. diploderma (Schmidt) .
Alemo seychellensis E.-P. Wright 1881 (74, p. 13, pi. I).
Je pense avoir suffisamment démontré à propos de Donatia diploderma
(Schmidt) que cette espèce n'en peut être séparée. Son nom a le plus sou-
vent été appliqué à des individus pourvus de micrasters choanosomiques
à rayons très divisés. Trop d'intermédiaires existent entre eux et les indi-
vidus à micrasters choanosomiques simples pour qu'on puisse les dis-
tinguer, même au titre de variété méritant un nom.
ÉPONGES DE SAN THOME 585
Donatia multifida Carter 1882 (8, p. 358, pi. XII, fig. 22).
Carter n'avait pas connaissance d'Aleyno seychellensis Wright,
alors récemment décrite, puisque les oxyasters choanosomiques de sa
Donatia multifida et d'une Donatia du Cap lui parurent quelque chose
de nouveau.
SoLLAS a très justement remarqué, au contraire (44, p. 441), que la
spiculation de Donatia multifida ressemble à celle de Tethya seychellensis.
En dépit de leur conformation bizarre, il n'est pas douteux, à leurs sphé-
rasters assez petites (0 mm. 044), à leurs tylasters somiques sexradiées
de 0 mm. 012 de diamètre et à leurs oxyasters choanosomiques de trois
à six rayons sans centrum, droits ou flexueux, branchus ou épineux, et
de 0 mm. 041 de diamètre, que les Éponges d'Acapulco ne doivent être
rapportées à l'espèce Donatia diploderma (Schmidt).
Malgré des sphérasters et des oxyasters plus grandes, la Donatia du
Cap dont Carter a parlé à leur propos (8, p. 361, pi. XII, fig. 23) semble,
à ses micrasters somiques sexradiées, n'en pas différer non plus spéci-
fiquement.
Quant à celle de Maurice à laquelle il fit aussi allusion, ses micrasters
choanosomiques me rappellent par leur diamètre (0 mm. 021) ma Dmiatia
arabica. Mais comment risquer une détermination sur cette simple donnée?
La taille médiocre de ces micrasters, que Carter jugea d'après cela inter-
médiaires entre celles de D. lyncurium et des Eponges précédentes, dimi-
nua à ses yeux l'intérêt de sa propre D. multifida à ce point qu'en 1886
(9, p. 77), par un rapprochement inopportun, il en vint à appeler Donatia
lyncurium des Éponges de l'archipel Mergui pourvues cependant, d'après
ses propres déclarations, des mêmes micrasters choanosomiques que ses
Donatia multifida d'Acapulco, et désormais attribuables à D. diploderma.
Tethya lyncurium var. ohtusum Vosmaer 1882 (70, p. 25).
La faculté pour les mégasclères les plus grands d'abréger et d'émousser
leur pointe paraît s'exercer fréquemment chez les Donatia lyncurium des
eaux boréales (v. p. 581); mais elle est commune aux individus de cette
espèce distribués dans d'autres mers et ne mérite dès lors pas qu'on s'y
arrête.
Tethya japonica Sollas 1888 (44, p. 430, pi. XLIV, fig. 7-14).
La description originale de Tethya japonica, d'après deux spécimens
dragués par petite profondeur au large de Manille, est malheureusement
586 E. TOPSENT
succinte et sans figures consacrées spécialement à ses spicules. Ce qui du
texte a trait à ses micrasters se réduit à ceci : « 3 Sonial and choanosotnal
chiaster, similar, actines cylindrical, tylote ; 0 mm. 0118 in diameter ».
Il en est représenté six dans une portion de coupe de bourgeon externe
(44', fig. 14) ; elles ont peu de rayons et pas de centrum, mais, malgré le
faible grossissement auquel on les a dessinées, elles montrent des renfle-
ments terminaux bien accusés. Sollas avait déclaré (44, p. 428) Tetliya
maza, T. seychellensis, T. jajponica et T. Ingaïli indubitablement très
proches parentes, s'avouant même enclin à considérer les trois premières
comme de simples variations d'une seule espèce, et, comme il a pris soin
d'afïirmer l'absence d'asters à rayons rameux chez T. japonica, le rappro-
chement qu'il établit si intime entre cette dernière et T. maza et T. sey-
chellensis est probablement fondé sur une grande ressemblance de leurs
tylasters.
Depuis, il a été peu question de Donatia japonica. Lindgren (30,
p. 317) a dit en avoir vu trois petits spécimens provenant de la mer de
Java, mais, sans décrire leurs spicules, il s'est borné à en indiquer la
taille : des micrasters, dites par lui chiasters, il a donné comme mesure
unique 0 mm. 008. Il s'agissait bien de tylasters puisque, tentant de répar-
tir en trois groupes les Tetliya alors connues, il a choisi T. japonica comme
chef de file du troisième groupe, où des chiasters tylotes accompagnent
seules les sphérasters.
Dendy a rapporté, en 1916, à l'espèce Donatia japonica (11, p. 262)
des Éponges qu'il avait considérées, en 1905 (10, p. 113), comme une
variété (var. a) de Tethya lyncurium. Il a retenu comme caractères spéci-
fiques la rareté des sphérasters dans l'écorce, l'absence d'oxyasters et
la simihtude des chiasters corticales et choanosomiques, qui sont tylotes.
Dans le détail de ses descriptions on voit que ces micrasters n'ont pas de
centrum, que leurs rayons peuvent, au moins chez certains individus,
rester le plus souvent au nombre de six, mais que, d'habitude, il y en a
davantage ; enfin, que le renflement terminal des rayons, susceptible de
s'atténuer par exception, est d'ordinaire très accusé.
J'ai moi-même appelé Donatia japonica Sollas une Éponge draguée
par M. Gravier aux îles Musha, dans la mer Rouge, par 20 m. de profon-
deur (64, p. 566). Ses micrasters, d'un diamètre de 0 mm. 008 à 0 mm. 012,
un peu plus grandes dans le choanosome que dans l'écorce, sans centrum
du tout, ont des rayons, le plus souvent au nombre de huit ou neuf, rare-
ment moins, fréquemment davantage, grêles, cylindriques, avec un ren'
ÉPONGE 8 DE SAN THOME 587
flement terminal soudain. Ce bouton, Dendy l'a toujours figuré lisse et
je n'ai pas réussi à le voir épineux ni même nettement rugueux. Les sphé-
rasters corticales de mon spécimen ne dépassent pas 0 mm. 028 de dia-
mètre, mais il s'agit d'un jeune individu.
Tout ce qui précède démontre l'existence, aux Philippines, dans l'océan
Indien, ailleurs, sans doute, d'une Donatia qui ne produit des micrasters
que d'une sorte, comme D. lyncurium, mais plus fixes dans la forme, tou-
jours sans centrum, à rayons souvent moins nombreux, plus constamment
cylindriques grêles et à bouton terminal mieux dégagé quoique non visi-
blement épineux. Telle serait Donatia japonica (Sollas).
LiNDGREN, Thiele, Kirkpatrick ctHENTSCHEL ont fait à cette espèce
des allusions que nous aurons l'occasion de discuter par la suite.
Tethya midtisteUa Lendenfeld 1888 (25, p. 46).
Lendenfeld a créé, en»1888, six nouvelles espèces australiennes de
Tethya. C'était beaucoup à la fois, surtout en l'absence de toute compa-
raison entre elles et les espèces plus anciennes, notamment les T. Ingaïli,
T. rohusta et T. Clijtoni de Bowerbank, dont les types proviennent aussi
d'Australie. LmDGRENa même jugé (30, p. 360) qu'aucune d'elles ne méri-
terait d'être conservée : les quatre premières seraient de simples variétés de
T. japonica Sollas et les deux dernières, confondues en une seule, se rap-
porteraient à T. Ingalli Bowerbank. Je doute également de la valeur
spécifique de la plupart d'entre elles, malgré la difficulté d'identifier des
Donatia dont les microsclères ne sont ni figurés ni décrits en détail.
A Tethya multistella, Lendenfeld a attribué des micrasters d'une seule
sorte et de petite taille (0 mm. 01) ; leurs rayons sont cylindriques, à
bouton terminal. Ce sont donc des tylasters et le rapprochement établi
par LiNDGREN entre cette Éponge et T. japonica peut être exact. Cepen-
dant, il y aurait intérêt à connaître le nombre habituel des raj^ons de ces
tylasters et à savoir s'ils forment un centrum ou non. Et puis, leurs bou-
tons terminaux doivent être bien développés puisque, contrairement à
l'habitude, quelques épines crochues ont pu y être observées.
Le diamètre indiqué des sphérasters est faible (0 mm. 03 environ, en
additionnant la largeur du centrum et la longueur de deux rayons oppo-
sés) ; je l'ai trouvé moindre encore, il est vrai, chez une D. japonica de
la mer Rouge.
S'il s'agit bien de Donatia japonica Sollas, nous noterons qu'à Fétat
vivant, elle peut être rouge clair, chair ou rose. Cette coloration ne lui est^
583 E. TOP SENT
d'ailleurs, pas spéciale. Keller (19, p. 329) a dépeint comme rougeâtres
les T. seychellensis vivantes de la mer Rouge et Dendy a cité (11, p. 265)
une Donatia rouge, commune dans les parages de Port-Phillip,et qui pos-
sède de grandes oxyasters très semblables à celles de D. seychellensis.
D'après Lendenfeld (27, p. 15), sa T. corticata, dont l'écorce est rouge
clair aussi, serait, en réalité, T. lyncurium. Sous réserve de cette dernière
identification, je pense qu'en général, il ne faut pas accorder trop d'im-
portance à la couleur des Donatia. M. Gravier a trouvé variable, rosée,
blanche, verte plus ou moins foncée, celle des Donatia arabica Topsent
qu'il recueillait vivantes dans la baie de Djibouti (64, p. 568), et surtout
jaune, mais aussi blanc rosé, celle desDo?m/ia(Z*p^oc?erma(ScHMiDT)deSan
Thome.
Tethya corticata Lendenfeld 1888 (25, p. 48).
Rien dans sa description ne caractérise Tetp,ya muUistella comme espèce
nouvelle. La même remarque s'applique à T. corticata dont, à part leur
taille un peu plus forte (0 mm. 016), les micrasters sont décrites à peu
près dans les mêmes termes. Lindqren l'a supposée (30, p. 360) identique
à T. japonica, mais son propre auteur, en 1897 (27, p. 15) Fa fondue parmi
les sjTionymes de T. lyncurium. Cet abandon de T. corticata s'est malheu-
reusement fait sans explications, et, pour le considérer comme péremp-
toire, il faudrait oublier que, dans le même ouvrage, T. Ingalli, T. rohusta
et T. Cliftoni ont été de la part de Lendenfeld traitées de la même
manière.
Tethya flssurata Lendenfeld 1888 (25, p. 48).
Au sujet de Tethya flssurata, Lindgren ne peut être suivi : ce n'est
pas une variété de Donatia japonica mais réellement une espèce distincte.
Ses sphérasters, bien plus grosses que chez les autres Donatia, contribuent
pour beaucoup à la caractériser. L'indication de leurs dimensions est,
d'ailleurs, ce qu'il y a surtout à retenir de la description originale. Cepen-
dant, on peut se faire à présent une idée assez nette de Donatia flssurata
(Lendenfeld) parce qu'il en a été question à plusieurs reprises.
En 1909, Hentschel a proposé (16, p. 374), inutilement, selon moi,
une variété extensa pour deux D. flssurata du S. W. de l'Australie. Deux
Éponges des îles Arou dont il a fait, en 1902, Donatia tylota n. sp. (17,
p. 316), n'en diffèrent pas spécifiquement et Dendy n'avait pas méconnu
la ressemblance avec elles de sa Donatia stellagrandis des Amirautés
(11, p. 266). Ayant eu personnellement l'avantage d'étudier une Donatia
ÉPONGES DE SAN THOME 589
fissurata recueillie aux Maldives (N. Maie) par M. Stanley Gardiner, en
1903, je me trouve à même de contribuer à la connaissance de cette inté-
ressante espèce.
Je n'insisterai pas sur la forme ni l'aspect de ces Eponges, comme
leurs congénères sujettes à varier à cet égard. Il suffit de dire, pour jus-'
tifier un peu leur nom, que souvent les verrucosités corticales, oii se loca-
lisent et s'entassent les mégasclères périphériques, sont séparées les unes
des autres par d'assez larges intervalles plus ou moins déprimés. Dans ces
intervalles, que revêt une croûte superficielle de micrasters, les sphéras-
ters abondent. L'écorce est peu fibreuse.
Les grands mégasclères, dont la taille, sans fixité, dépend vraisem-
blablement de la grosseur des individus, sont droits et légèrement fusi-
f ormes, mais leur portion basilaire, au contraire de ce qu'on voit chez
la plupart des Donatia, s'amincit peu et s'arrondit simplement ou se renfle
diversement à son extrémité. Il se fait, de la sorte, un mélange de styles,
de subtylostyles et même de tylostyles où, suivant les individus, une forme
peut devenir prédominante. Tel paraît être le cas pour les tylostyles chez
les D. tylota de Hentschel, alors que chez ses D. fissurata extensa, le ren-
flement basilaire des mégasclères serait faible ou nul. Dendy a signalé ce
mélange chez sa D. sfellagrandis ; je le retrouve, en proportions à peu près
égales, dans la D. fissurata des Maldives. La pointe de ces spicules est
très souvent abrégée et arrondie ; tout le monde est d'accord sur ce point.
Son raccourcissement peut, naturellement, s'exagérer sur quelques spi-
cules au point d'en faire des strongyles. Lendenfeld a déclaré, sans d'ail-
leurs y ajouter beaucoup d'importance, que ces grands mégasclères auraient
leur pointe centripète. Cette disposition qu'on ne trouve nulle part, et
qui serait, fait plus extraordinaire encore, inverse de celle des styles cor-
ticaux, est invraisemblable. Il est probable, comme Fa déjà supposé
Hentschel, que Lendenfeld aura sur ce point commis une méprise.
Les petits mégasclères sont fréquemment un peu courbés ; la forme
de leur base n'a non plus rien de fixe.
Je tiens pour des malformations les sphères que Hentschel a cru
caractériser Dow a/fa tylota quoiqu'elles manquent dans l'un des spécimens
et qu'elles demeurent assez rares dans Tautre. On trouve de ces mons-
truosités chez des Éponges de genres très différents.
Les sphérasters, inégales, atteignent souvent 0 mm. 2 de diamètre.
Beaucoup, dans le spécimen des Maldives, ont 0 mm. 21 et quelques-unes
mesurent jusqu'à 0mm.2G. Leurs rayons ne sont pas nombreux : vingt
590 E. T0P8ENT
environ, au compte de Lendenfeld et de Hentschel, seize à dix-huit dans
le spécimen des Maldives, A l'exception de Lendenfeld, tout le monde a
remarqué leur tendance à se diviser. Comme dans le spécimen étudié par
Dendy, je la vois se manifester uniquement sur les grosses sphéras-
ters, dont un certain nombre présentent une longue bifurcation de la
pointe d'un ou de deux de leurs rayons seulement. Je n'ai point observé
de complication plus grande mais Hentschel et Dendy en ont ren-
contré.
Quant aux micrasters, ce sont, typiquement, des strongylasters sans
centrum, à rayons raboteux, Dendy les a bien figurés (11, pi, XLVIII,
fig. 5 c, 5 eZ) telles que je les vois. Je leur trouve quelquefois six mais habi-
tuellement neuf ou dix rayons, relativenient épais, et un diamètre de
0 mm. 012 à 0 mm. 017. H ne paraît pas exister de micrasters choanoso-
miques différenciées. Des variations des micrasters sont possibles, sinon
chez les individus d'une même région, du moins chez ceux de régions diffé-
rentes car Hentschel décrit celles de D. tylota, à laquelle ressemblent
tant les Donatia des îles Amirautés et Maldives, comme des tylasters
à centrum. Celles de sa D. fissurata extensa, par contre, sont pour la
plupart sans centrum et passent à la forme strongylaster,
Dendy a fait mention (11, p, 265) d'une préparation étiquetée Tethya
-fissurata Lend, et qui a été, en réalité, prélevée sur une Donatia Ingalli
Bow, Il s'agit probablement d'une erreur d'étiquette.
Tethya inflata Lendenfeld 1888 (25, p. 49),
Quelques prolongements peut-être radiciformes de la surface ne peu-
vent caractériser spécifiquement des Donatia, et, colorée de même et parais-
sant posséder les mêmes spicules que T. multistella, Tethya inflata se
confond vraisemblablement avec elle et peut-être, comme le pense Lind-
GREN (30, p, 360), avec Donatia japonica Sollas.
Tethya fhilippensis Lendenfeld 1888 (25, p. 50).
Ici, Lendenfeld a distingué clairement deux sortes de micrasters,
de petites tylasters somiques et de grandes oxyasters choanosomiques
sans centrum et à rayons épineux. Lindgren (30, p, 360) pense qu'on
pourrait fusionner cette espèce avec T. Ingalli. Le rapprochement est
très soutenable et conduit à Donatia diplodenna Schmidt. On en eût,
peut-être mieux apprécié la justesse si Lendenfeld n'avait négligé d'in-
diquer le nombre habituel des rayons des microsclères. La coloration
qu'il a notée n'infirme pas l'hypothèse faite au sujet de ces Éponges, si
ÉPONGES DE SAN THOME 591
l'on tient compte des déclarations de Keller et de Dendy que j'ai rappe-
lées à propos de T. multistella.
Tethya lœvis Lendenfeld 1888 (25, p. 51).
Je ne vois pas ce qui a pu porter Lindgren à considérer les T. philip-
pensis comme des formes jeunes de T. lœvis, mais, à part cela, nous
sommes d'accord pour regarder ces Éponges comme appartenant à une
même espèce, qu'il faudrait, à mon avis, appeler Donatia diploderma
(Schmidt).
Tethya glohostellata Lendenfeld 1897 (28, p. 104, pi. IX, fig. 54-67).
A la condition qu'elle ne se confonde avec aucune des espèces plus
anciennes, telles que Tethea robusta Bow., je considère Donatia globos-
telîata comme une espèce à retenir. Ce sont surtout ses micrasters qui la
caractérisent : leurs rayons ne se renflent pas en bouton mais se dilatent
à leur extrémité en un plateau chargé d'épines. Puis, ses sphérasters cor-
ticales, capables d'atteindre une taille assez forte, ont des rayons nom
breux qui les rendent massives. Enfin, avec une fréquence extrême dans
tous les spécimens étudiés, ses mégasclères choanosomiques abrègent et
émoussent leur pointe.
On possède déjà de Donatia glohostellata un nombre assez élevé de
spécimens provenant tous de l'océan Indien : ceux trouvés à basse mer
à Bawi, près de Zanzibar, que Lendenfeld a décrits ; puis, les trois spé-
cimens dragués par 34 brasses de profondeur sur la côte de Natal, dont
KiRKPATRiCK, en 1903 (22, p. 240), a cru pouvoir faire les types d'une
espèce nouvelle, Tethya magna ; enfin, trois spécimens qui m'ont été
confiés par M. Stanley Gardiner et recueillis par lui, en juillet 1903,
aux Maldives (Hulule Maie Atoll). Ces derniers, jaune pâle dans l'alcool,
globuleux, contractés, sans bourgeons, à verrues plates, serrées, mesurent
respectivement 21 mm., 16 mm. et 11 mm. de diamètre ; le parenchyme
du plus grand est rempli d'œufs encore asegmentés.
Les styles choanosomiques, à pointe généralement très raccourcie
et ronde, sont de longueur variable selon, à ce qu'il semble, la grosseur
des spécimens : 1 mm. à 2 mm. 1 (Zanzibar) ; 1 mm. 4 (Maldives) ; 4 mm. 805
(Natal, d'où proviennent des individus de 40 à 70 mm. de diamètre).
KiRKPATRiCK ne mentionne pas de petits styles. Lendenfeld déclare
leur présence non constante. Les trois spécimens des Maldives en possè-
dent, d'une longueur de 0 mm. 28 à 0 mm. 46.
Les sphérasters atteignent 0 mm. 1 (Zanzibar, Maldives) et 0 mm. 11
592
E. T0P8ENT
(Natal) de diamètre. Elles sont, d'ailleurs, de taille inégale ; Lbndbnfeld
et KiRKPATRiCK les disent varier à partir de 0 mm. 06. Elles descendent
bien au-dessous de cette taille dans les individus des Maldives, quoique,
dans l'écorce, elles mesurent, pour la plupart, 0 mm. 06 à 0 mm. 07.
Leur forme a surtout retenu l'attention de Lendenfeld et lui a inspiré
le nom de l'espèce. Elle est, en réalité, peu différente de celle des sphé-
rasters de Donatia diploderma ainsi que de l'énigmatique Tethea robusta
BowERBANK. Mais leur taille paraît toujours s'élever davantage.
Quant aux micrasters, elles sont partout de même type, mais on leur
a trouvé des variantes propres à bien faire connaître l'espèce. Lendenfeld
les a décrites à centrum, à six-huit rayons, et d'une grosseur de 0 mm. 009
à 0 mm. 012. Outre des
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FiG. XXVI. Donatia (jloboslellata (Le^vesfeld), microsclères d'un spécimen
dea Maldives. Une sphéraster (à gauohc) x 370, et cinq micrasters
X 670.
micrasters semblables,
à centrum, à six-huit
rayons (d'après les fi-
gures), mais mesurant
de 0 mm. 012 à 0 mm.
017 de diamètre, Kirk-
PATRICK a trouvé dans
le choanosome de ses
grandes <( Tethya ma-
gna )) des micrasters de
0 mm. 035 à 0 mm. 045
de diamètre, dont il a omis d'indiquer le degré de fréquence, et dont les six
ou sept rayons ne forment plus qu'un centrum insignifiant par rapport à
leur longueur et se modifient assez profondément : ils deviennent grêles,
plus coniques et moins raides, et leur spination terminale tend à s'effacer
tandis que, par compensation, de petites épines les parsèment et les
rendent raboteux dans leur tiers distal.
Dans les trois Donatia globostellata des Maldives, les micrasters ont
un nombre plus grand de rayons : neuf, dix et, le plus souvent, douze. Leur
taille oscille généralement entre 0 mm. 01 et 0 mm. 013. Pour achever leur
signalement et établir leur ressemblance avec celles des Éponges de la
côte orientale d'Afrique, ajoutons un centrum distinct et des rayons cylin-
driques épais, à plateau terminal manifestement orné d'épines divergentes
(fîg. xxvi). Telles elles sont pour la plupart. Mais il s'en trouve de clair-
semées parmi elles, dans le choanosome, qui, à n'en pas douter, corres-
pondent en diminutif aux grandes miorasters signalées par Kibkpatbick.
ÉPONGES DE SAN THOME 593
Le centrum s'atténue ; les rayons s'étirent ; les épines terminales se rédui-
sent en nombre, jusqu'à trois ou deux seulement, ou même elles devien-
nent tout à fait indistinctes sur un renflement à peine marqué, tandis que
d'autres, fort petites, rares, à vrai dire, peuvent apparaître sur la longueur
même du rayon. Seulement, je n'ai jamais trouvé le diamètre de ces
micrasters supérieur à 0 mm. 021. Comme tous les passages s'observent
entre ces dernières et les micrasters les plus abondantes, Donafia globos-
téllata se montre proche parente de Z>. arabica. La ressemblance s'affirme
quand on compare les sphérasters de ces deux espèces. Elle porte même,
dans une certaine mesure, sur les styles, dont les plus grands ont souvent,
chez les D. arabica que j'ai vues, une tendance à émousser aussi leur pointe.
Mais l'ornementation des bouts de ses micrasters ordinaires paraît actuel-
lement suffire à distinguer D. globostellata.
Tethya deforînis Thiele 1898 (46, p. 29).
La forme bizarre de l'unique spécimen obtenu ne peut être retenue
comme caractère spécifique : il s'agit, à n'en pas douter, d'un individu mal
conformé. Or, sa spiculation ressemble tant à celle de T. amamensis
que je me crois autorisé à discuter d'un seul coup la valeur des deux
espèces.
Tethya amamensis Thiele 1898 (46, p. 30).
C'est, semble-t-il, seulement pour des raisons de dénomination et de
provenance que Thiele a comparé T. japonica Sollas à T. amamensis.
Mais la comparaison devait s'étendre aussi à T. deformis, car les deux
Donatia japonaises possèdent en commun des micrasters de 0 mm. 01
à 0 mm. 012 de diamètre, d'une toute autre forme que celles de D. japo-
nica de Manille, des micrasters à centrum, dont les rayons, au nombre de
neuf à douze, se terminent par un renflement insignifiant ou nul, La ressem-
blance des sphérasters de T. deformis et de T. amamensis est tout aussi frap-
pante, même en ce qui concerne leur taille : elle est certainement bien plus
importante à considérer que leur abondance relative chez deux sujets dont
l'un est notoirement anormal. Quant aux mégasclères, ce sont, dans les
deux cas, des styles fusif ormes à base légèrement renflée et, sans doute
par hasard, presque de même taille. Le fait que, dans l'écorce mieux cons-
tituée de T. amamensis, se dressent des styles plus petits n'a rien qui gâte
réellement dans toute cette spiculation une similitude portant jusque sur
les moindres détails.
Nous ne sommes donc pas en présence de deux espèces mais d'une
59i E. TOPSENT
seule oii nous verrons même plus loin se fondre une troisième espèce de
Thiele, sa Donatia papillosa (49, p. 408) de la côte du Chili,
Cette Donatia deformis (Thiele), comme il faudrait l'appeler en consé-
quence du déplorable fait qu'un individu informe en a été décrit tout
d'abord, représente-t-elle réellement une espèce distincte, répandue,
comme on le voit, sur les deux rives du Pacifique ? Ou bien n'est-elle
qu'une variété de Donatia lyncurium ? Si je m'en tiens présentement à la
première hypothèse, c'est surtout parce que, malgré sa vaste dispersion,
D. deformis paraît, aux descriptions de Thiele, posséder constamment
des strongylo-tylasters sans épines du tout, et un peu aussi parce que je
trouve les micrasters dites ectosomiques de la Tethya nux de Ternate
(47, p. 63, pi. III, fig. 17 b) si semblables aux micrasters de D. deformis
qu'un soupçon me vient de la possibilité pour cette Éponge du Pacifique
de différencier à l'occasion des oxyasters dans son choanosome.
Tethya afjinis Kirkpatrick 1900 (21, p. 133, pi. XII, fig. 1, et pi. XIII,
fig. 3 a-d).
Il s'agit à n'en pas douter àe Donatia japonica (Sollas). Les particu-
larités qui, faisant hésiter Kirkpatrick à rapporter son Éponge à cette
espèce, l'ont conduit à en proposer une nouvelle, ne méritaient pas de
l'arrêter. Sur nos grèves, Donatia lyncurium se montre fréquemment sur-
baissée, encroûtante, et il n'y a aucune raison de prêter à D. japonica
plus de constance dans sa forme. L'état de contraction ou d'épanouisse-
ment de ces animaux fait beaucoup varier l'aspect de leurs orifices exha-
lants. Enfin, c'est l'habitude chez les Donatia que les micrasters somiques
deviennent plus grandes dans le choanosome que dans l'écorce ^
Tethya magna Kirkpatrick 1903 (22, p. 240, pi. V, fig. 6, et pi. VI,
fig. 6 a-d).
J'ai montré plus haut que cette espèce se confond avec D. glohostellata
Lendenfeld. Les beaux spécimens obtenus à Cône Point, sur la côte de
Natal, par 34 brasses de profondeur, ont des spicules plus forts que ceux
de Zanzibar, et Kirkpatrick a trouvé dans leur choanosome de grandes
micrasters grêles dont Lendenfeld n'avait pas vu l'équivalent,
Donatia papillosa Thiele 1905 (49, p. 408, fig. 24 et 35).
Aucun trait de sa spiculation ne distingue l'Éponge de Calbuco des
1. J'ai eu le regret de ne pouvoir me procurer, pour prendre connaissance de Tethya hispida Kinosley»
l'ouvrage où cette espèce a été décrite {Preliminary Catalogue of tht Marine Invertehrata oj Casco Bay, Maine, in
P. Portland Soc, II, 5, p. 161, 1901.)
ÉPONGES DE SAN THOME
595
Donatia du Japon appelées par Thiele, en 1898 (46, p. 29 et 30), Tethya
def orrais et T. amamensis. Ce sont, de part et d'autre, comme taille et
comme forme, mêmes sphérasters et mêmes micrasters à la fois. Il s'agit
certainement d'une seule et même espèce, dont le hasard a procuré à
Thiele des spécimens provenant des deux bords opposés du Pacifique.
Elle ressemble à Donatia lyncurium, sauf par l'absence de toute orne-
mentation sur les rayons des micrasters. C'est mi caractère négatif dont
la constance mériterait vérification.
Donatia arabica Topsent 1906 (64, p. 567).
J'ai créé cette espèce d'après cinq spécimens, diversement colorés,
Fio. xx\7i. Donatia arabica TopsENT, sphérasters de spécimens D de Djibouti, M de Malié et T de Tadjoura.
X 370.
recueillis par M. Ch. Gravier dans la baie de Djibouti. Je la connais, en
outre, par un spécimen obtenu à Mahé par M. Ch. Alluaud et que j'ai
nommé Tethya Cliftoni Bowerbank, en 1893 (54, p. 175), et par trois spé-
cimens rapportés du golfe de Tadjoura par M. L. Faurot.
Chez tous, les grands mégasclères ont la base amincie, simple, et la
pointe très abrégée.
Les sphérasters, partout semblables (fig. xxvii), ont un gros centrum
porteur de rayons coniques nombreux. Elles atteignent 0 mm. 08 de
diamètre dans les individus de Djibouti et de Mahé et 0 mm. 085 à 0 mm. 09
dans ceux de Tadjoura. Mais leur taille est inégale et partout il s'en trouve,
dans la chair au-dessous de l'écorce, beaucoup de petites, à rayons
d'autant plus grêles, pointus et serrés, qu'elles s'écartent davantage de la
taille moyenne, jusqu'à ne mesurer pas 0 mm. 015 de diamètre.
596
E. T0P8ENT
Les micrasters somiques, de 0 mm. 08 à 0 mm. 012 de diamètre, ont
de neuf à douze rayons, très rarement moins. Ils sont cylindriques et ne
portent habituellement d'épines que vers leur extrémité où s'en trouve
une accumulation ; les plus inférieures, en divergeant, accentuent un ren-
flement distal qui, sans elles, serait à peine sensible. Il n'est pas rare
d'observer aussi des épines éparses au-dessous du groupe apical, surtout
quand les rayons s'allongent un peu. La façon dont les rayons s'unissent
par leur base est sujette à variations. J'ai noté dans la description origi-
nale de D. arabica que ces micrasters n'ont pas de centrum ; je dois décla-
rer qu'il n'en est
pas toujours
ainsi. Même par-
mi les spécimens
de Djibouti, il
s'en trouve dont
les micrasters
présentent sou-
vent un petit cen-
trum ; on le voit,
faible aussi sur
beaucoup de mi-
M
T
^^
Fia. xxvm. Donatia arabica Topsent, micrasters de spécimeus de Djibouti (A et crastcrS du Spéci-
B),de Mahé (M) et de Tadjoura (T.) x 670. ^
men de Mahé ;
il devient constant et assez fort sur celles des spécimens de Tadjoura
(fig. xxviii).
Dans la chair, les micrasters deviennent généralement plus grandes,
allongent et atténuent leurs rayons, effacent leur centrum et, par tous
les intermédiaires possibles, passent à des micrasters de 0 mm. 02 et
quelquefois 0 mm. 025 de diamètre, qui tendent vers la forme oxyaster.
Cette tendance s'accuse surtout dans les spécimens de Djibouti et de Mahé.
Leur choanosome, en effet, contient en abondance de ces grandes micras-
ters à rayons effilés, mais l'extrémité de ces rayons porte, d'habitude, un
bouquet d'épines parfaitement distinct et, sur les plus grêles, une vague
indication de renflement qui fait douter de l'existence d'oxyasters par-
faites. Indépendamment des épines terminales, les rayons peuvent, d'ail-
leurs, en avoir d'autres, assez denses ou clairsemées, assez fortes ou à
peine marquées, sur le dernier tiers ou sur la seconde moitié de leur lon-
gueur ; elles ne disparaissent guère que sur les micrasters grêles. L'allure
ÉPONGES DE SAN THOME 597
des micrasters les plus grandes est souvent intéressante : de leurs rayons,
habituellement au nombre de neuf à douze, fréquemment quelques-uns
se tordent et se montrent plus ou moins flexueux. Cela se produit surtout
sur les individus de Djibouti et y devient frappant. Il arrive quelquefois,
en outre, que l'un des rayons ou plusieurs émettent quelque part sur leur
longueur un court rameau latéral.
Ces complications possibles, quelquefois fréquentes, des micrasters
choanosomiques de Donatia arabica, qui ne sont, à tout prendre, que des
anomalies, imitent en plus petit les micrasters choanosomiques de beau-
coup de Donatia dvploderma. Les deux espèces ont des sphérasters de
même type, mais leurs micrasters somiques servent à les distinguer faci-
lement.
Donatia arabica a plus de ressemblance avec D. lyncurium, mais elle
s'en distingue aisément, d'une part, par ses sphérasters à centrum plus gros
et à rayons plus nombreux, et, d'autre part, par ses micrasters qui, sans
prédominance d'une taille ni d'un aspect, se montrent beaucoup plus
polymorphes que les siennes et arrivent couramment à un état supérieur
de différenciation.
Les sphérasters de Donatia arabica ressemblent surtout à celles de
D. globostellata dont nous savons les micrasters affectées aussi d'une ten-
dance à se développer en oxyasters ; la localisation des épines en un bou-
quet divergent tout au bout des rayons des micrasters somiques sert à
caractériser D. globostellata. Enfin, les sphérasters de D. arabica rappel-
lent beaucoup également celles de Tethya robusta, et, n'était la taille indi-
quée des micrasters de la dernière, j'éprouverais quelque soupçon de l'iden-
dité de ces deux espèces.
Donatia viridis Baer 1906 (2, p. 30, pi. II, fig. 8, et pi. V, fig. 31-34).
Baer lui-même a reconnu les affinités de son Éponge : il s'agit, à n'en
pas douter, d'une Donatia diploderma. Sa couleur ne peut être prise en
sérieuse considération puisqu'on sait les Donatia sujettes à varier sous ce
rapport. Ses sphérasters ont la forme habituelle (v. fig. xxii) et atteignent
la taille que je leur ai trouvée chez plusieurs D. dvploderma. Comme chez
plusieurs D. diploderma de ma connaissance, aussi bien de l'Atlantique que
de l'océan Indien, ses tylasters somiques peuvent avoir moins de six
rayons. Enfin, ses oxyasters choanosomiques, de près de 0 mm. 03 de
diamètre, sexradiées et sans centrum, ont des rayons non divisés, mais nous
avons vu le cas se présenter chez des D. diploderma.
593 E. TOPSENT
Donatia parvistellaBABU 1906 (2, p. 31, pi. II, fig. 9, et pi. V, fig. 35-38).
On ne peut qu'être frappé de la similitude des spicules figurés par Baer
des deux espèces qu'il supposait nouvelles. Du spécimen, unique aussi, de
D. parvistella, il est très probable qu'il n'a pas vu les micrasters choanoso-
miques. Nous savons par Row (35, p. 304) qu'elles peuvent n'exister
qu'en nombre très restreint chez certains individus. Baer a noté la res-
semblance de sa D. parvistella et de Tethya maza Selenka, c'est-à-dire de
Donatia diploderma {Scbmi-dt). Il n'y avait vraisemblablement pas lieu de
l'en séparer.
Donatia Ingalli (Bow). var. maxima Hentschel 1909 (16, p. 372).
En 1909, Hentschel a dénommé cinq variétés australiennes de
Donafm qu'il a rapportées, la première kV espèce D. Ingalli (Bow.), les trois
suivantes à D. japonica (Soll.) et la cinquième kD. fissurata (Lend.).
On peut se demander si sa Donatia Ingalli var. maxima est réelle-
ment uneD. Ingalli ou, comme il faudrait dire, une D. diploderma{ScimiDT) ,
car il s'est borné à en énumérer les spicules et à en noter les dimensions.
Or, par leur taille, les sphérasters de ses Éponges ne correspondent pas
à celles que produit d'ordinaire D. diploderma, mais bien à celles qui
ont été observées chez toutes les D. globostellata (Lend.) S'il s'agissait
de cette espèce, on s'expliquerait que Hentschel y ait trouvé des oxyas-
ters puisque, d'après la grandeur de leurs mégasclères, ce sont certaine-
ment de beaux spécimens qu'il a examinés. Malheureusement, l'absence
de tout détail au sujet des micrasters somiques, qui seraient des tylasters,
laisse le doute causé par les sphérasters sans étayer la supposition qu'elles
suggèrent.
Donatia japonica (Soll.) var. nucleata et Donatia japonica (Soll.)
var. globosa Hentschel 1909 (16, p. 372).
Hentschel est revenu en 1912 (17, p. 317) sur les Éponges qu'il avait
ainsi nommées. Un nouvel examen lui ayant révélé que certaines d'entre
elles possèdent des oxyasters qui font défaut aux autres, il s'est déclaré
d'avis de les rapporter à Donatia Ingalli (nous dirions D. diploderma) et
non plus à D. japonica, à laquelle il est évident qu'il n'y a pas Heu de
songer.
Mais, si l'on tient compte du fait qu'il a pu considérer comme une
forme jeune de Donatia japonica var. nucleata sa D. japonica var. alha-
nensis, cependant pourvue des micrasters caractérisques de Donatia glo-
ÉPONGES DE SAN THOME 599
bostellafa ; si l'on remarque que les micrasters de ses var. nucleata et var.
glohosa, telles qu'il les a décrites et figurées, ne ressemblent pas aux tylas-
ters ordinairement sexradiées sans centrum de Donatia diploderma ; si
l'on note, enfin, que, chez l'une au moins de ces Éponges, les sphérasters
atteignaient la taille de celles de Donatia glohostellata, on est conduit à
admettre que Hentschel s'est trouvé en présence de Donatia apparte-
nant peut-être à plusieurs espèces, mais parmi lesquelles se trouvaient
probablement des Donatia gîobostellata. Cette supposition même explique
l'existence d'oxyasters chez certains individus, notamment chez le pré-
tendu représentant de la variété glohosa, à grosses sphérasters, et leur
absence chez d'autres, puisque nous avons vu des D. glohostellata produire
ou non, suivant leur âge ou leur grosseur, des micrasters choanosomiques
différenciées.
Donatia japonica (Soll.) var. albanensis Hentschel 1909 (16,
p. 374).
A ses strongylasters à centrum et à rayons terminés par un plateau
hérissé d'épines, il est facile de reconnaître en cette Eponge non pas une
Donatia jaj^onica mais une D. glohostellata (Lend.) Le spécimen était très
petit, gros comme un pois, et cela me paraît expliquer que Hentschel
n'ait pas vu de grandes micrasters dans son choanosome.
Donatia fissurata {Le^b .) var. exfensa Hentschel 1909 (16, p. 374).
A la taille des sphérasters on reconnaît qu'il s'agit bien de D. fissu-
rata, mais je ne vois pas de raison sérieuse de distinguer et de dénom-
mer cette prétendue variété.
Tetkya lyncurium Linn. Row 1911 (35, p. 304).
Ce n'est pas Donatia lyncurium mais D. japonica que Row a eUe sous
les yeux, puisqu'il précise que la spiculation et les mesures des spicules se
trouvent exactement conformes avec ce que Dendy a décrit de sa T. lyn-
curium var. a de Ceylan (10, p. 113) et que Dendy, en 1916 (11, p. 262),
a corrigé sa propre détermination.
Donatia tylota Hentschel 1912 (17, p. 317, pi. XVII, fig. 6).
Je suis convaincu que cette espèce se confond avec D. fissurata Lbn-
DENFELD. Scs sphères ne sont que des spicules tératologiques et ses mégas-
clères exagèrent simplement une tendance qu'ont, à des degrés divers,
chez d'autres spécimens, les styles à renfler leur base.
ARCH. DE ZOOL. EXP. ET GÉN. — T. 57. — F. 6. 40
600 E. TOPSENT
Donatia lyncurium auct. Dendy 1916 (11, p. 262, pi. XL VIII, fig. 1).
Je ne partage pas l'opinion de Dendy au sujet de la petite
Éponge de l'océan Indien qu'il a appelée i)o?ia^ia lyncurium. Ses mégasclères
et ses spliérasters, semblables aux spicules correspondants de plusieurs
espèces de Donatia, ne peuvent pas servir à la déterminer. Au contraire,
indépendamment de leur distribution dans le corps, dont la constance est
à établir, ses micrasters sont très particulières. Elles diffèrent radicale-
ment de celles des D. lyncurium de l'Atlantique à la fois par le manque
absolu de centrum et par l'absence totale d'épines sur leurs rayons. La
proportion des oxyasters parmi elles, considérable, à en juger d'après
les dessins, est certainement caractéristique de cette Eponge ; or, ce
sont des oxyasters pures, non comparables, par conséquent, aux micras-
ters à rayons allongés et amincis mais non parfaitement pointus qu'on
rencontre clairsemées chez des D. lyncurium et qui n'y perdent pas toute
trace d'ornementation. Quant aux strongylasters faiblement tylotes,
elles rappellent de toute évidence les micrasters de D. japonica.
Ce n'est donc pas, à mon avis, une Donatia lyncurium que Dendy a
décrite mais peut-être une variété (sinon une monstruosité) de Donatia
japonica, que la perfection de ses oxyasters me conduit à appeler var.
peracuta.
Donatia stellagrandis D'ENDY 1916 (11, p. 266, pi. XLIV fig. 8 et
pi. XLVIII, fig. 5).
Dendy a remarqué lui-même la ressemblance des spliérasters de cette
Éponge avec celles de D. tylota Hentsch. Il a indiqué aussi et figuré des-
tylostyles parmi ses mégasclères. Peut-être est-ce pour avoir cru les mi-
crasters typiquement différentes de part et d'autre qu'il a proposé une
nouvelle espèce, mais les détails fournis par Hentschel au sujet de sa
T. fissurata var. extensa dénoncent une certaine variabilité de ces micros-
clères qui autorise à faire de tous ces noms des synonymes de Donatia
fissurata (Lendenfeld).
Comme je devais m'y attendre, la révision des Donatia décrites ne
m'a pas toujours conduit à des conclusions certaines. Cependant, je crois
posséder maintenant une connaissance meilleure des espèces suivantes :
Donatia lyncurium (L.), comprenant T'e^^ea worvagrico. Bowerbank e';
Tethya lyncurium var. ohtusum Vosmaer ;
Donatia diploderma {Scbmidt) , avec de nombreux synonymes: Tethea
ÉPONGES DE SAN THOME 601
Ingalli Bowerbank, Tethea Clijtoni Bowerbank, Tethya maza Selenka,
Alemo seychellensis E.-P. Wright, Donatia multifida Carter, Tethea
jyhilippensis Lendenfeld, Tethya lœvis Lendenfeld. Donatia viridis
Baer et D. parvistella Baer ;
Donatia japonica (Sollas), avec son synonyme Tethya affinis Kjrk-
PATRICK et la variété nouvelle D. j. peracuta que je lui attribue, s'il ne
s'agit pas d'une monstruosité, pour une Donatia de l'océan Indien obser-
vée par Dendy ;
Donatia fissurata (Lendenfeld) , comprenant D. fissurata var. extensa
Hentschel, Donatia tylota Hentschel et Donatia stellagrandis Dendy ;
Donatia glohosteUata (Lendenfeld), avec laquelle se confondent Tethya
magna Kirkpatrick, Donatia japonica var. albanensis Hentschel,
probablement D. japonica var. globosa Hentschel, une partie au moins
de D. japonica var. nucleata Hentschel et peut-être même D, Ingalli
var. maxima Hentschel ;
Donatia arabica Topsent enfin, qui, avec des caractères propres,
tient à la fois de D. lyncurium et de D. glohosteUata, et à laquelle se rappor-
tent peut-être aussi une partie des Donatia de Hentschel. J'appelle
l'attention sur la ressemblance que je trouve de D. arabica à Tethea
robusta Bowerbank, en faveur de qui, si un nouvel examen en est possible,
pourrait bien s'exercer un jour le droit de priorité.
L'insuffisance des détails qui ont été fournis au sujet de Donatia nux
(Selenka) me permet à peine d'en discuter la valeur.
L'identité de Donatia deformis (Thiele), D. amamensis (Thiele) et
D. papiïlosa Thiele ne me semble pas douteuse ; c'est une espèce qu'il y
aurait intérêt à bien caractériser en la comparant à ses congénères.
Enfin, si je tiens, suivant l'avis de Lindgren, Tethya multistella
Lendenfeld, T. corticata Lendenfeld et T. inflata Lendenfeld pour
synonymes de Donatia jap)onica (Sollas) , je ne prends ce parti que sous
réserves, car leurs microsclères n'ont pas été figurés du tout et il manque
précisément à leur description les détails les plus propres à fixer l'opinion,
Garnosa
Chondrilla nucula O. Schmidt.
Sâo Joào dos Angolares, 12 août 1906. — Éponge vivant toujours à
côté des Palithoa. Jaune brun foncé, à surface veloutée.
M. Gravier m'en a remis, conservés dans l'alcool, deux spécimens en
E. T0P8ENT
forme de plaques : Tune, longue de 45 mm., large de 20 à 23 mm. sur la
majeure partie de sa longueur, épaisse de 3 mm. 3, marbrée de brun et de
hlanc ; l'autre, irrégulière, longue de 60 mm., large de 25 mm. ou de
10 mm. seulement, suivant les points, épaisse au plus de 1 mm. 5, teintée
de marron avec plages plus sombres. Elles dressent plusieurs petites
paptlks exhalantes à oscule étroit. Elles ont dû n'adkérer à leurs supports
que par quelques points de leur f aee inférieure, qui est en majeure partie
intacte et unie.
Je ne reprendrai pas ce qui a été dit de la structure de Chondrilla
nucula. Aussi mal partagé que mes devanciers, je n'ai rien vu de sa repro-
tion.
Les spicules, d'une seule sorte, sont des sphérasters, qui se disposent
au voisinage des deux surfaces et, dans la chair, au pourtour des canaux
aqmfères les plus spacieux ; elles sont plus abondantes dans l'écorce infé-
rieure que dans la supérieure, où l'on pourrait presque le& dire assez
clairsemées.
Avec leurs actines coniques, courtes et larges, au nombre d'environ
vingt-quatre, elles mesurent de 0 mm. 008 à 0 mm. 04 de diamètre ; mais
it y em a surtout des grosses et des moyemies, entre 0 mm. 04 et 0 mm. 02â.
Thible (47, p. 65) a déclaré s'être assuré que les sphérasters de Chondrilla
nucula ne dépassent pas 0 mm. 027 de diamètre, la plus grande taille
indiquée par 0. Schmidt. Lendenfeld a trouvé (27, p. 37) leur gros-
seur comprise entre 0 mm. 013 et 0 mm. 028. Elle s'élèverait, d'après
WiLSOisr (73, p. 387), à 0 mm. 032 dans des spécimens de Porto-Rico.
F.-E.. SeHULZE (41, p. 28) et Keller (19, p. 327), par contre, ne leur ont
reconnu que 0 mm. 01 à 0 mm. 02. De sorte que les spécimens de San
Thome se distinguent de tous ceux étudiés jusqu'ici par la belle taille
de leurs spicules. La différence n'est cependant pas assez importante pour
compter comme spécifique.
Chondrilla nucula est une Éponge cosmopohte. On l'a signalée en
Méditerranée, sur les deux versants de l'Atlantique, dans la mer Rouge,
l'océan Indien et l'Insulinde. C'est, à ce qu'il semble, une forme littorale,
à qui ne conviennent pas de basses températures.
Les mesures des sphérasters de spécimens de C. nucula données par
F.-E. ScHXJLZE et Keller me portent à penser que l'Éponge de la côte
S. W. d'Austrahe notée par Hentschel (16, p. 378) comme Chondrilla
sp.i brune et pourvue seulement de sphérasters» pourrait bien être, en
ÉPONGES DE SAN THOME ms
réalité, encore une C. nucnla. Seulement, ses spicules, de 0 mifi. 011 à
0 mm. 015 de diamètre, auraient en moins de la taille moyenne à peu près
ce que les spicules des spécimens de San Thome ont en plus.
A ne posséder que des sphérasters, il n'y aurait plus alors à distinguer,
parmi les nombreuses espèces rapportées au genre ChondriUa^, que
C. sacciformis Carter, où ces spicules, d'après DehDy (11, p. 269), me-
surent de 0 mm. 04 à 0 mm. 14 de diamètre. Leur taille et l'ornementa-
tion de leurs actines caractérisent très bien l'espèce, aussi Dendy n'a pas
eu de peine à démontrer que C. grandistellata Thiele (47, p, 65) en est un
synonyme. L'Éponge vit dans l'océan Indien et aux Moluques.
Toutes les autres produisent deux sortes d'asters, des sphérasters plus
particulièrement corticales et des oxyast^rs plus particulièrement choa-
nosomiques, sans que, d'habitude, leur localisation soit absolue. Comme,
entre sphérasters et oxyasters, l'absence de formes intermédiaires,
remarquée par F.-E. Schulze chez ses C. mixta et C. distincta, a été cons-
tatée chez toutes, j'estime ce caractère commun suffisant pour grouper
ces espèces en un genre distinct, auquel le nom de Chondrillastra me paraît
convenir.
Au premier abord, ces ChondrillaMra semblent nombreuses. J'en
compte douze, savoir: G. australensis (Carter 1873), C. mixta (F.-E.
Schulze, 1877), C. distincta (F.-E. Schulze 1877), C. secunda (Lenden-
FELD 1885); G. pajjillata (Lendenfeld 1885) , G . corticata (Lendenfeld
1885), G. glohulifera (Keller 1891), G. nuda (Lendenfeld 1897), G. ter-
natensis (Thiele 1900) , G. jinensis (Hentschel 1912) , G. média (HentscHel
1912) et G. agglutinans (Dendy 1916).
Elles sont exclusivement originaires de la région austrahenne, de
l'océan Indien et de la mer Rouge, mais il ne faut pas oubUer que O.
ScHMiDT en 1870 (38, p. 26) a signalé la fréquence aux Antilles et à la
Floride de « Ghondrilla 7mcula » possédant les deux sortes d'asters.
Leur nombre, quand on les connaîtra mieux, subira probablement une
forte réduction. J'en soupçonne plusieurs d'avoir été établies siir des varia-
tions de minime importance ou même sur des particularités individuelles.
La critique de ces espèces serait vraisemblablement bien difficile
si l'on se trouvait à même de procéder, en matière de révision, à l'étude
directe du matériel déjà réuni, somme toute peu abondant et de provenance
très variée. Elle l'est encore bien davantage d'après de simples textes.
1. On sait que C. embolophora ScHMiDT st- confond avec C. nucula et que C. phyliode» SCHMIDT est une
Spîr iStreU r
604
E. T0P8ENT
Je crois utile néanmoins de consigner à leur propos quelques réflexions
qui pourront guider les discussions sur des récoltes ultérieures.
Chondrillastra australiensis (Carter 1873). — Cette espèce s'impose
par droit de priorité. Les observations de Lendenfeld (24, p. 153), de
LiNDGREN (30, p. 320), de Hentschel (17, p. 320) et de Dendy (11,
p. 267) s'accordent à la présenter comme une Éponge de couleur claire,
dont les oxyasters ont les actines plus ou moins épineuses et quelquefois
divisées.
Dendy, qui a le plus soigneusement noté la distribution des asters,
dit les sphérasters surtout corticales et les oxyasters surtout choanoso-
miques, mais avec mélanges possibles.
Les mesures suivantes ont été données de ces spicules :
Sphérasters
0 mm. 025
0 mm. 026
0 mm. 036
0 mm. 03
0 mm. 028
0 mîn 022-0 ûim 033
0 mm 019-0 mm 036
0 mm. 03
Habitat. — Côtes
océan Indien.
Oxyasters
0 mm. 02
0 mm. 022
0 mm. 02
0 mm. 023
0 mm. 028
0 mm 02-0 mm 025
OmiB 02-0 mm 028
moins de 0 mm 03
RiDLEY (33, p. 602).
Lendenfeld (25, p. 71).
LiNDGREN (30, p. 320).
Thiele (47, p. 66).
Dendy (10 1, p. 132).
Hentschel (16, p. 377).
Hentschel (17, p. 320).
Dendy (11, p. 267).
d'Australie ; îles Arou ; côtes de Cochinchine
Chondrillastra mixta (F. E. Schulze 1877). — Décrite sans mention de
la précédente. Ridley (33, p. 602), Lindgren (30, p. 319"), Kirkpatrick
(20, p. 349) et Dendy (11, p. 268) ont pensé l'avoir retrouvée. Mais,
comme l'ont fait remarquer Lindgren et Dendy, on peut supposer que
le petit spécimen brun pâle à oxyasters à actines souvent divisées de
VAlert se rapportait plutôt à l'espèce C. australiensis.
Résumant ses caractères, Dendy tend à considérer cette Éponge
comme une variété, de couleur foncée et à oxyasters à actines simples et
lisses, de G. australiensis. Le même auteur a noté des G. australiensis à
oxyasters presque lisses et, à cet égard, difficiles à distinguer de G. mixta.
D'autre part, il a quelquefois vu l'écorce de C mïxto presque sans spicules.
1. D'aprè ; des types originaux de Caiit£r.
ÉPONGES DE SAN THOME 603
Par leur taille, les asters de G. mixta ne s'écartent pas sensiblement de
celles de C. australie7isis. Voici les mesures qui en ont été données :
Sphérasters Oxyasters
(0 mm. 032) (0 mm. 025) Ridley.
0 m«' 006-0 mm 028 (0 mm. 028 Lindgren.
0 mm 025-0 mm 03 0 mm 024-0 mm 028 KiRKPATRICK.
0 mm. 042 0 mm. 037 Thielb.
0 mm. 03 0 mm. 03 Dendy.
Habitat. — Mer Rouge ; océan Indien ; Java.
Chondrillastra distincta (F.-E. Schulze 1877). — Décrite en compa-
raison seulement de C. mixta, dont elle ne différerait que par une localisa-
tion plus nette des sphérasters dans l'écorce et des oxyasters dans la
chair. Elle est aussi de coloration foncée et à oxyasters lisses.
H n'en a été vu que deux spécimens, Thiele ayant eu à décrire le second,
des Moluques, qu'il a reconnu tout à fait conforme au type, des Carolines.
Les deux sortes de spicules se sont trouvées à chaque fois de même
grosseur ( 0 mm. 03 dans le spécimen type, 0 mm. 025 dans le spécimen
de Ternate), comme cela s'est rencontré parfois chez C. mixta et chez
C. australiensis. Leur taille est, d'ailleurs, sensiblement égale à la taille
moyenne des spicules de ces deux CJiondrillastra.
Il est probable que si Lindgren n'avait pas observé des oxyasters
dans les papilles et Kirkpatrick de très rares oxyasters dans l'ecto-
some, ces auteurs auraient été fort embarrassés pour rapporter leurs
Éponges à C. mixta plutôt qu'à C. distincta. La très grande rareté des
oxyasters dans la Chondrillastra de Funafuti m'est une raison de plus de
douter de la valeur du caractère invoqué par F.-E. Schtjlze pour établir
deux espèces, et, pour me résumer, je crois qu'il est plus difficile d'ad-
mettre une séparation naturelle entre C. distincta et C. mixta qu'entre
C. mixta et C. australiensis. La provenance bien différente des types de
ses C. mixta et C. distincta a pu influencer F.-E. Schulze, ignorant alors
de l'existence de C. australiensis et, naturellement, incapable de prévoir
que C. mixta, de la mer Rouge, serait retrouvée dans l'océan Indien et à
Java.
Habitat. — Ponapé ; Ternate.
Chondrillastra secunda (Lendeneeld 1885). — Il en a été recueilli un
606 E. T0P8ENT
certain nombre de spécimens, revêtants ou massifs, clairs ou foncés,
variant du gris jaunâtre au noir bleuâtre. Leurs oscules sont remarqua-
blement grands (2-3 mm.). Les deux sortes d'asters se mélangent par
tout le corps. Les sphérasters ont 0 mm. 064 de diamètre, au dire de
Lendenfeld,ou 0mm. 07, d'après les mensurations de Thiele (47, p. 66),
et les oxyasters seulement 0 mm, 012, d'après Lendenfeld, ou 0 mm. 02-
0 mm. 025, d'après Thiele.
Une affirmation de la constance de ces dimensions che^ les divers
individus eût laissé moins de doutes sur une espèce qui vaut surtout
d'être prise en considération — si toutefois il ne s'agit pas d'une varia-
tion locale d'une espèce plus anciennement connue — pour la taille des
sphérasters, réellement beaucoup plus grandes que ce qu'on a vu chez la
plupart des Chondrillastra, et pour une différence de taille entre elles et
les oxyasters, telle qu'il n'en a été constaté nulle part ailleurs.
Habitat. — Seule localité connue : Port-Phillip (S. Australie).
Chondrittastra 'papillata (Lendenfeld 1885). — Comme C. austra-
liensis, cette Eponge est de coloration pâle ; comme elle, elle produit
des oxyasters épineuses ; comme elle, enfin, autant qu'on puisse invoquer
ce caractère, elle mêle ses deux sortes d'asters dans toutes ses parties.
Les dimensions de ces spicules demeurent, il est vrai, assez faibles, leur
diamètre à toutes atteignant 0 mm. 02 seulement, d'après les corrections
de Thiele (47, p. 66). Malgré cela, j'ai peine à voir dans cette Éponge
autre chose qu'une variation de C. australiensis.
Habitat. — Seule locaUté connue : Port-Jackson (E. Australie),
où C. australiensis, au dire de Lendenfeld, paraît être très abondante.
Chondrillastra corticata (Lendenfeld 1885). — Une accumulation de
sphérasters dans la partie externe de son écorce, voilà ce qui, d'après
son auteur, caractériserait cette Éponge. Comme il a été déjà relevé des
variations individuelles de quantité des spicules dans l'écorce de cer-
taines Chondrillastra, notamment par Dendy chez C. mixta (11, p. 268),
prendre cette particularité comme spécifique, c'est, je le crains, risquer
de lui attribuer une importance excessive.
Les dimensions, rectifiées par Thiele, des sphérasters ( 0 mm. 022)
et des oxyasters (0 mm. 02) sont sensiblement les mêmes que chez G. pa-
pillata. Peut-être s'agit-il encore d'une variation de C. australiensis ?
La coloration générale brun clair de l'Éponge et la rareté relative mais
ÉPONGES DE SAN THOME 607
non le manque d'épines sur les axîtines de ses oxyasters militent fort en
faveur de cette hypothèse.
Habitat. — Seule locaUté connue : encore Port-: Jackson.
Chondrillastra globuUfera (Keller 1891). — La création de cette
espèce est fondée sur la supposition qu'elle posséderait trois sortes d'asters
au lieu de deux. Or, les sphères qui lui ont valu son nom sont, de toute
évidence, des sphérasters mal conformées, comme Dendy en a trouvé
dans des C. australiensis de l'océan Indien (10, p. 133). Et c'est un fait
très naturel que la répétition de ces malformations chez de nombreux
individus d'une même localité. L'hérédité et l'influence inexpUcable du
milieu s'exercent évidemment sur eux. C'est ainsi qu'en certaines régions,
comme les côtes d'Algérie, beaucoup d'Epongés subissent iiabituelle'
ment des altérations de leur spiculation (62, p. 346).
Keller n'a pas signalé d'épines sur les oxyasters. Cela gêne pour
proposer la fusion de C. globuUfera avec G. australiensis, dont elle a la
coloration. Répétons pourtant que Dendy a vu des G. australiensis à
oxyasters presque lisses. Il est douteux, en tout cas, que, sans sa prétendue
caractéristique, G. globuUfera constitue réellement une espèce distincte.
Elle fait penser aussi à G. mixta, découverte auparavant dans la mer
Rouge, et que Dendy tient pour une variété de G. australiensis.
Keller déclare ses différentes sortes de spicules représentées à un
même grossissement (19, pi. XVIII, fig. 35). Les dimensions qu'il en donne
dans son texte paraissent alors inexactes, car, si les sphères ont 0 mm. 015
de diamètre, l'oxyaster figurée doit en avoir davantage et la plus belle
des sphérasters, avec s&% actines, en mesure bien le double. Dans ces con-
ditions, il n'existe entre les asters complètes et celles des autres ChondriU
lastra en question même pas la différence de taille qui impose une cer-
taine réserve quand on songe à rapprocher G. papiUata et G. corticafa de
G. australiensis.
Habitat. — Mer Rouge (Souakim).
Ghondrillastra nuda (Lendenfeld 1897). - — La couleur est foncée.
Les oxyasters sont lisses. Les deux sortes d'asters se rencontrent dans les
diverses parties du corps.
Existe-t-il donc un caractère important permettant de séparer spéci-
fiquement cette Éponge de G. mixta ?
Lendenfeld donne aux oxyasters 0 mm. 012 à 0 mm. 022 de dia-
603 E. TOPSENT
mètre et aux sphérasters seulement 0 mm. 01 à 0 mm. 012 ; mais les figures
de ces spicules, à un même grossissement (28, pi. X, fig. 72-77), n'accusent
pas une telle inégalité.
Les mesures notées par Kirkpateick (21, p. 130) n'ont, d'autre part,
rien de déconcertant : oxyasters, 0 mm. 03 ; sphérasters, 0 mm. 025.
Ce sont là des dimensions fréquentes des asters de C. mixta et affines.
Seulement, si sphérasters et oxyasters sont, d'habitude, sensiblement
égales, ou si la taille des premières l'emporte généralement un peu sur
celle des secondes, c'est l'inverse qui se produirait ici. Kirkpatrick, par
erreur, j'imagine, tend à accentuer cette particularité, difficile à prendre
pour un caractère spécifique, en assignant aux oxyasters de la Chondril-
lastra de Zanzibar un diamètre de 0 mm. 022-0 mm. 03, c'est-à-dire des
dimensions doubles et triples de celles des sphérasters et ne correspon-
dant plus du tout aux dessins de Lendenfeld. Tout cela a besoin de
vérification et de précision.
Les bandes de cellules pigmentées en bordure des chones inhalants
de l'écorce sont normales chez une Éponge aussi foncée. Quant à la rareté
des asters dans la portion externe de l'écorce, notée par Lendenfeld,
on ne saurait en faire grand cas puisque, d'après Dendy (11, p. 268),
C. mixta est sujette à supprimer complètement ses spicules corticaux.
Habitat. — Zanzibar ; île Christmas (océan Indien).
Chondrillastra ternatensis (Thiele 1900) . — Il s'agit vraisemblable-
ment de C. australiensis, avec sa coloration claire et ses oxyasters épi-
neuses. Un peu plus grosses que de coutume (0 mm. 042), les sphérasters
ornent de petites papilles le bout de leur actines ; les oxyasters sont de
taille assez ordinaire (0 mm. 025).
Habitat. — Ternate (îles Moluques).
Chondrillastra jinensis (Hentschel 1912). — L'auteur a de lui-même
résumé les raisons pour lesquelles l'unique échantillon recueilli semble
représenter une espèce nouvelle (17, p. 321). Ses asters ont des dimensions
supérieures à ce qu'on a coutume de voir, non seulement les sphérasters
(0 mm. 048-0 mm. 056), comme c'est le cas chez C. secunda, mais aussi
les oxyasters qui, même, deviennent encore plus grandes (0 mm. 045-
0 mm. 08). En outre, les sphérasters ont des actines épineuses et les
oxyasters ne développent^ que quatre à six actines lisses, longues et
grêles.
ÉPONGES DE SAN THOME 609
Dans l'état de nos connaissances, il se rencontre là un ensemble de
particularités dont il est sage de tenir compte.
Habitat. — Iles Arou (mer d'Arafura).
Chondrillastra média (Hentschel 1912). — Éponge de coloration fon-
cée, allant jusqu'au brun violet dans l'alcool. Oxyasters (probablement)
lisses. Ce sont là les caractères essentiels de C. mixta. Le peu de densité
des sphérasters dans l'écorce lui convient aussi. Les sphérasters (0 mm. 019-
0 mm. 025) et les oxyasters (0 mm. 023-0 mm. 028) ont sensiblement le
même diamètre, les oxyasters l'emportant sur les sphérasters juste assez
pour augmenter la croyance à l'identité de G. nuda et de C. mixta.
L'auteur a lui-même formulé des réserves au sujet de la validité de cette
espèce, créée d'après un seul spécimen, et qu'il estime voisine de G. corticata
et de G. nuda par sa spiculation. Le second rapprochement doit être plus
exact que le premier, la description laissant supposer les oxyasters non
épineuses ; il conduit par un intermédiaire à G. mixta.
Ghondrillastra agglutinans (Dendy 1916). — Brun chocolat dans
l'alcool, avec deux sortes d'asters très semblables, de l'avis même de
Dendy (12, p. 102), à celles de G. mixta, cette Éponge, pour être agglu-
tinante, ne diffère pas spécifiquement de G. mixta.
En résumé, exception faite de G. secunda Lendenfeld et de G. jinen-
ais Hentschel, qu'il est prudent de réserver, la plupart des Ghondril-
lastra décrites paraissent se rapporter soit à G. australieiisis , soit à G. mixta.
Dendy considère G. mixta comme une simple variété de G. australiensis.
Son opinion a des chances d'être juste ; toutefois on doit remarquer
que, sauf G. globulifera, dont il faudrait reprendre l'étude, nous avons
généralement trouvé dans la présente révision des Éponges claires à
oxyasters épineuses et des Éponges foncées à oxyasters lisses.
Chondrosia reniformis Nardo.
Sào Joào dos Angolares, 12 août 1906.
Un petit spécimen, long de 19 mm., épais de 4 mm., mais large seu-
lement de 2 à 5 mm., à deux oscules, à plateau très noir et à flancs clairs,
a été récolté avec des Chondrilla nucula.
Plage de Bella Vista, 24 août 1906.
éib E. TOPSENT
Cinq spécimens, tous petits et, sauf un, attachés par une faible partie
de leur face inférieure. Trois d'entre eux, en plaques longues au plus de
21 mm., larges de 7 à 15 mm. et épaisses de 2 à 3 mm., sont noirâtres en-
dessus, uniformément ou par marbrures. Un quatrième, plus massif,
lono" de 17 mm., large de 12 mm., épais de 7 mm., a rejeté son oscule à
l'une de ses extrémités et ne possède que sur lui et en son voisinage une
pigmentation cendrée ; le reste de sa masse est demeuré d'mi blanc pur.
Le cinquième enfin, en forme de pastille ronde de 8 mm. de diamètre et
2 mm. d'épaisseur au plus, est entièrement et parfaitement blanc.
Chdhdrosia pièbëjk O. Schmidt.
Plage de Bella Vista, 23 août 1916. Un spécimen.
J'oppose la blancheur absolue, partielle ou totale, de deux des spé-
cimens, probablement venus à l'obscurité plus ou moins complète, de
CJiondrosia renifornis à celle, bien différente et imparfaite, du spécimen
en question.
C'est une plaque assez grande, puisqu'elle mesure environ 60 inm.
de longueur, 30 à 40 mm. de largeur et 4 à 5 mm. d'épaisseur. Étiquetée,
sur le vif, « Éponge blanche ou grise agglutinant des pierres », elle est,
dans l'alcool, blanche, mais avec une nuance gris rosé, uniforme, qui,
malgré sa taille, se répand sur toute l'étendue de ses deux faces, et qui se
retrouve aussi dans sa chair.
Cette Chondrosia se fait remarquer, en outre, par sa forme irrégulière.
Ses bords se découpent en digitations épaisses, diversement tordues,
rampantes ou dressées, et sa portion médiane toute bossuée se creuse
d'anfractuosités ou se soulève eii des prolongements. L'un d'eux, bifur-
qué, suspend au-dessus du corps, attaché à l'une de ses pointes, un caillou
de la grosseur d'une noisette.
D'après sa teinte spéciale et sur la remarque spontanément faite par
M. Gravier de son pouvoir agglutinant, je pense, quoiqu'elle n'ait plus
d'autre corps étranger adhérent et que, malgré son allure tourmentée,
tout le reste de sa surface soit lisse, avoir affaire à une Chondrosia plebeja.
On doit, en effet, pouvoir admettre que l'incorporation de corps étran-
gers, chez ces Éponges, s'opère d'une façon facultative à des degrés
divers, et ne répond pas à une nécessité absolue.
Le spécimen ne possède pas un seul oscule distinct. Une bonne partie
de sa face inférieure était libre, l'adhérence au support s'établissant sur-
ÉPONGES DE SAN THOME 611
tout suivant deux plages voisines des extrémités. Sa consistance, semi-
cartilagineuse, est notablement moins ferme que celle de C. reniformis.
Pourtant, l'écorce atteint souvent près de 1 mm. d'épaisseur. Les cor-
beilles vibratiles, rarement sphériques, mesurent de 0 mm. 02 sur 0 mm. 023
à 0 mm, 023 sur 0 mra. 03 de diamètre. Sauf le manque, facile à prévoir,
des grains de pigment noir dans des cellules de l'écorce, les coupes ne
m'ont rien révélé qui distinguât la structure de celle de C. reniformis.
Tetractinellida
Geodia gibberosa Lamarck.
Plage de Fernào Dias, 17 juillet 1906. — Un petit spécimen et un frag-
ment sur les blocs de basalte de la côte.
Praia das Conchas, 3 août 1906. — Un spécimen vivant dans l'inté-
rieur d'un Porite tout rongé, rejeté à la côte.
La plus ancienne des espèces du genre Geodia n'est pas G. gibberosa
Lamarcï^ mais G. cydonium (Mûller ou Jameson). D'après Lendenfeld
(26, p. 138), ce serait une Geodia que O.-F. Mûller aurait décrite, en
1796, sous le nom à'Alcyonium cy^o-j^mm, mais, s'il faut admettre, avec
JoHNSTON (18, p. 87), que ce que Mûller a nommé de la sorte n'est autre
chose que la variété colorée d'Alcyonium digitatum, on ne peut oublier
que Jameson, en 1811, a appliqué le nom, libre, par conséquent, d'Alcyo-
nium cydonium à une Éponge véritable, de l'île Fulah and Unst, Éponge
qui a eu une histoire, puisque Fleming, Johnston et Bowerbank l'ont
successivement étudiée. Ainsi, de toute façon, Fleming n'était pas auto-
risé à substituer au nom d'AIcyonium cydonium celui de Cydonium MuUeri,
pas plus que Johnston, qui eut cependant le mérite de fixer la place de
cette Éponge dans le genre Geodia de Lamarck, n'eut raison de créer pour
elle la nouvelle dénomination spécifique de G. zetlandica, sous laquelle
BowERBANK l'a redécrite.
Ce sont des Éponges aussi que Lamarck a appelées Alcyoriium cydo-
nium, en 1815 (23, p. 77). J'en ai actuellement vu trois, de la collection
du Muséum. L'une, montée sur un socle, est étiquetée de l'écriture de
Lamarck : « Alcyonium cydonium — moitié d'un petit individu ». Les
deux autres ont été réexaminées par Valenciennes qui, d'après les éti-
quettes rajoutées, semble s'être proposé de \e& redécrire sous le nom bien
612 E. TOP SENT
mutile de Cydonella cotonea. Toutes trois sont des Géodies décortiquées,
ce qui explique le qualificatif auquel Valenciennes avait songé.
De la première, les microsclères sont rigoureusement les mêmes que
ceux du type de Lamarck de Geoclia gibberosa (23, p. 334), du cabinet
de M. TuRGOT, et d'une autre Geodia gibberosa de la collection Lamarck,
rapportée des Antilles par M. Maxjgé, au cours de l'expédition Baudin, en
1799. Des deux autres, de provenance non indiquée, les microsclères
(sterrasters petites et micrasters choanosomiques inégales, fortement épi-
neuses) ressemblent, au contraire, à ceux de Geodia de nos côtes méditer-
ranéennes que j'ai appelées Cydonium gigas (Schmidt), en 1894 (57,
p. 330). L'absence d'écorce avait empêché Lamarck de reconnaître en
ces trois spécimens des représentants de son genre Geodia.
L'étude attentive des mi-
/^, ' ^. fi// \^ // crosclères, plus particulière-
p^v^ ^<:^r^^ Av\ ment des micrasters de ces
g,c> If // \ Eponges peut seule permettre
FiG. XXIX. Geodia gibberosa 'La^iab.CK. — a, deux oxyasters dy dlStmgUCr dCUX eSpCCCS.
de l'cctochrote ; b, oxyaster subcorticale; c, deux -pii , nrmivé l'irlpnfifp qnp-
oxyasters choanosomiques. x 670. ^^^^ "^ ^ prOUVC 1 IQentlte Spé-
cifique des deux Geodia gibbe-
rosa de la collection Lamarck, du spécimen précité, monté sur socle,
di Alcyonium cydonium de Lamarck, de la seule que j'aie conservée des
Geodia du Banc de Campêche rapportées par_moi-même à l'espèce G. gibbe-
rosa Lamarck, en 1889 (51, p. 34), enfin des trois spécimens ou fragments
de Geodia de San Thome que j'avais à déterminer. D'après ces sept indi-
vidus, l'imiformité des micrasters choanosomiques me paraît caractériser
Geodia gibberosa.
Le ty^Q de Geodia gibberosa de Lamarck possède en fait de micros-
clères : \^ des sterrasters, rondes de face, un peu déprimées de profil,
atteignant couramment 0 mm. 1 de diamètre ; 2° des oxyasters somiques
(fig. XXIX a), nombreuses dans l'ectochrote, de très petite taille (0 mm. 005-
0 mm. 007), ayant dix à douze rayons grossièrement coniques, courts,
garnis de fines épines au bout et formant souvent un centrum ; 3° des
oxyasters subcorticales (fig. xxix b), en petite quantité, de 0 mm. 01
de diamètre environ, ayant un nombre supérieur de rayons peu pointus,
épineux au bout et formant ou non un centrum ; 4fi enfin, en abondance,
des oxyasters choanosomiques (fig. xxix c), à sept à douze rayons seule-
ment, ne composant pas de centrum, car ils sont longs, grêles, dégagés,
presque cylindriques, chargés de faibles épines qui les font paraître rabo-
ÉPONGES DE SAN THOME 615
teux sur la majeure partie de leur longueur, à partir de leur extrémité,
qui est conique, courte et où ces épines, par leur groupement, donnent
parfois l'impression d'un léger renflement subterminal. Leur diamètre
est généralement compris entre 0 mm. 02 et 0 mm. 027 ; c'est à peine si,
sur quelques-unes un peu plus robustes, il atteint ici 0 mm. 03.
Dans la Geodia gibberosa .de Matjgé et dans VAlcyonium cydonium
sur socle, de Lamarck, mêmes microsclères, sous les mêmes formes et
avec la même taille. Les oxyasters choanosomiques sont également très
nombreuses ; elles se tiennent toutes entre 0 mm. 02 et 0 mm. 026 de
diamètre. Naturellement, comme il est privé de son écorce, VAlcyonium
cydonium a relativement peu d'oxyasters somiques.
Ma Geodia gibberosa du Banc de Campêche ne diffère sensiblement des
précédentes que par ses sterrasters, dont le diamètre ne dépasse guère
0 mm. 05. Les oxyasters à rayons grêles, au nombre de sept à douze et
sans centrum, abondent aussi dans le choanosome et y mesurent de
0 mm. 023 à 0 mm. 027.
Chez les Geodia de la plage de Fernào Dias, à San Thome, se retrou-
vent aussi les quatre sortes de microsclères, mais les sterrasters, rondes de
face, un peu déprimées de profil, atteignent au plus 0 mm. 053 de dia-
mètre, et les oxyasters du choanosome, toujours de même forme, et mesu-
rant surtout 0 mm. 02 à 0 mm. 023, rarement 0 mm. 026, se montrent
clairsemées dans la chair.
Enfin, la même rareté des oxyasters choanosomiques s'observe, avec
la même uniformité de leur taille (0 mm. 02 environ), chez la Geodia de
la Praia das Couchas, dont les sterrasters ont couramment 0 mm. 07 de
diamètre.
Les variations les plus frappantes des microsclères de ces Éponges,
dont six au moins proviennent des deux rives de l'Atlantique dans sa
partie chaude, sont, en somme, celles qui portent sur la taille des sterras-
ters, capable de se réduire de moitié par rapport au type, et sur l'abon-
dance relative des micrasters choanosomiques.
Les mégasclères que j'ai trouvés sont des oxes un peu courbés, des
orthotrisenes, des anisoxes corticaux (strongyloxes) et quelquefois des
protrisenes, surtout à l'état de mésopromonsenes.
L'uniformité des micrasters choanosomiques de Geodia gibberosa con-
traste avec la variabihté des microsclères correspondants de Geodia cydo-
nium, depuis longtemps signalée jpar Bowerbank (3, vol. II, p. 45)
d'après la « Geodia zetlandica » de l'île Fulah and Unst. Les dimensions
614 E. T0P8ENT
et léâ détails de forme de ces derniers, notés par Sollas (44, p. 255),
coiivieîinent aux deux autres Alcyonium cydonium de Lamaeck que j'ai
examinés, ainsi qu'à des Éponges de Banyuls et de PorqueroUes auxquelles
j'ai donné (57, p. 330) le nom de Cydonium grigras (Schmidt), tombé en
synonymie^ de Oeodia cydonium (29, p. 113). Possédant des sterrasters
doiit la grande taille atteint, suivant les individus, de 0 mm. 05 à 0 mm. 075,
elles contiennent toutes, en effet, dans leur choanosome un riche mélange
de micrasters petites et grandes, pauciradiées et multiradiées, parmi les-
quelles les plus grandes, à rayons coniques, forts, épineux, élèvent leur
taille |usqu*^à 0 mm. 043 et même 0 mm. 05.
INDEX BIBLIOGRAPHIQUE
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Indian Muséum, Vol. XI, P. I, n^ 1. Calcutta, 1915.)
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ÉPONGES DE SAN THOME 615
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