Skip to main content

Full text of "Archives néerlandaises des sciences exactes et naturelles"

See other formats


:'^:;:' v^. 


*.^&# 


flf^l^' 


^:<^- 


S*'^1î-«iî 


mm& 


*.^^/^v"-^^>^i: 


n^-i 


3<?<?^ 


/^^^ 


"^ïhxïïï^  oî  tljf  p;«scum 


OP 


COMPARATIVE    ZOOLOGY, 

AT  HARVARD  COLLEGE,  CAMBRIDGE,  ËASS. 
jFounUe'O  ïjg  prffaate  suïjscrfptfon,  în  1861. 


ARCHIVES  NÉERLANDAISES 


DES 


SCIENCES 

EXACTES  ET  lATUMllES 


PUBLIEES    PAR 


LA  SOCIÉTÉ  HOLLANDAISE  DES  SCIENCES  A  HARLEM, 

ET    RODIGÉES    PAR 

E.   H.   VON    BAUMHAUER 

Secrétaire  de  la  Société, 

AVEC     LA     COLLABORATION     DE 

MM.  R.  van  Rees,  0.  Bierens  de  Haan,  C.  A.  J.  A.  Oudemans,  W.  Koster 
et  J.  A.  Herkiots. 


TOME  CINGIUIÈME. 


LA  HAYE, 
MARTINUS   NIJHOFF, 

<Svl870. 


TABLE  DES  MATIÈRES. 


Programma  de  la  Société  Hollandaise  des  Sciences   à  Harlem 

pour  l'année  1870 Pag.  i — vu 

J.  A.  Groshans  ,  Sur  la  chaleur  de  vaporisation  et  les  chaleurs 

spécifiques  des  corps  solides  et  liquides Pag.     1 

F.  J.  Stamkart  ,    Sur  une  méthode  simple  pour  la  comparaison 

exacte  des  mesures   de  longueur //      15, 

F.  J.  Stamkart,  Sur  la  détermination  de  petites  différences  de 
longueur ,  la  mesure  de  faibles  épaisseurs  dans  les  petits  objets . 

et  l'observation  de  faibles  déplacements  dans  les  grands  objets.      "      24, 

Emil  Selenka  ,  Sur  la  morphologie  des  muscles  de  l'épaule  chez 

les   oiseaux //      48 , 

P.    C.    DoNDERwS,    Les  mouvements  de  l'œil  éclairés  à  l'aide  du 

phénophthalmotrope: //      55 . 

P.  A.  W.  MiQUEL,  Nouveaux  matériaux  pour  servir  à  la  con- 
naissance des  Cycadées //      74. 

P.  A.  W.  MiQFEL,    Contributions  à  la  Plore  du  Japon //      89. 

E.  H.  VON  Baumhauer,  Sur  la  densité  de  l'alcool  et  des  mélanges 
d'alcool  et  d'eau //      97 . 

W.  P.  R.  SuRiNGAR,  Une  nouvelle  espèce  d'argostemma,  con- 
tribution à  la  Plore  de  l'Inde  Néerlandaise /    116. 

J.  A.  Herklots,  Deux  nouveaux  genres  de  crustacés  vivant  en 

parasites  sur  des  poissons,  —  epictliys  et  ichthyoxenos //    120. 

N.    W.    P.    Rauwenhoff,    Observations    sur    les  caractères   et  la 

formation   du   liège  dans  les  dicotylédones //    138. 

H.  Vogelsang,  Sur  les  cristallites.  Etudes  cristallogénétiques.  .       v    156. 

.T.  A.  Groshans,    Sur   les   chaleurs   spécifiques  des  corps  solides 

et  liquides y    193. 

C.    K.    Hoffmann    et    H.    Weyenbergh   Jr.  ,    Sur  la  place  du 

Chyromys  dans  la  méthode    naturelle "    214. 

G.  P.  W.  Baehr,  Notesur  les  résultats  d'une  étude  mathématique 

des  mouvements  de  l'œil //    233 . 

H.  Hartogh  Heys  van  Zouteveen,  La  forêt  pétrifiée  du  Caire , 

les    collines    de    tessons    de   poterie   de   la  Basse-Egypte  et  la 

première  cataracte  du  Nil -/    238 . 

H.  Hartogh  Heys  van  Zouteteen  ,  Sur  la  synthèse   du   sulfo- 

cyanate  d'ammonium  (rliodan-ammonium) //    240. 


T  A  ]î  L  E      DES     MATIÈRE 


V.    S.    M.    VAN    DEK    WiLLiGEN,  Obscrvatious  sur  la  niacliiiie 

électrique  de  Holtz Pag.  212 . 

A,    C.    OuDEMANs  Jk..  ,    Sur  le  dosage  vohiinétrique  du  fer  par 

riiyposulliie  de  soud(! u      248 . 

H.  Weyenbeugh  Jk.  ,  Quelques  observations  de  parthénogenèse 

chez  les  lépidoptères //      258 . 

C,  RiTSEMA  Cz. .  Sur  l'origine  et  le  développement  du  periphyllus 

testudo  V.  d.  H //      265 . 

J.  VAN  Geuns  et  E.  H.  von  Baumhauer,  Extrait  d'un  rapport 

sur  la  purilication  de  l'air  des  hôpitaux  par  la  combustion  des 

germes   organiques //      270 . 

P.  J.  VAN  Kerckhofe,  Sur  la  constitution  de  quelques  carbures 

d'hydrogène //      273 . 

P.   J.    A^AN   Kerckhofe,    Quclqucs  essais  concernant  le  titrage 

des  alcoloïdes  du  quinquina i'      284 . 

A.  Nyland  ,  Sur  la  durée  et  la  marche  des  courants  galvaniques 

d'induction //      292 . 

A.    W.   M.    VAN    Hasselt,    Etudes  sur  le  pholcus  opilionoïdes 

Schrank //      340 . 

P.  A.  Bergsma  ,    Sur  la  variation  diurne  de  l'inclinaison  luag- 

nétique  à  Batavia "      357 . 

W.  Marshall  ,  Notes  pour  servir  a  la  connaissance  du  presbytes 

albigena .  Gray "      364 . 

F.  Seelheim  ,  Matériaux  pour  la  connaissance  du  basalte //      369 . 

Hugo  de  Vries  ,  Matériaux  pour  la  connaissance  de  l'influence 

de  la  température  sur  les  plantes //      385 . 

W.  Marshall,  Quelques  observations  sur  la  splanchnologie  du 

rhinochaetes  jubatus ,  Ver.  et  Desm //      402. 

J.  A.  Herklots,  Sur  quelques  monstruosités  observées  chez  des 

Crustacés "      410. 

H.  Weyenbergh  Jr.  ,    Sur   la   manière  de  vivre  de  l'eurytoma 

longipennis  Walk //      420 . 

A.    Heynsius  ,    La    preuve    directe    que    les    globules    du  sang 

fournissent  de  la  fibrine //      428 . 

H.    Hartogh   Heys    van    Zol^teveen,    Nouveaux   résultats  de 

mesures  par  le  planimètre  polaire  d' Amsler //      440 . 

H.  J.  VAN  Ankum,  Note  sur  la  nidification  de  vespa  germanica  Eabr.      //      443 . 

D.  BiERENS    de    Haan,    Sur    quelques    nouvelles    formules    de 
réduction  dans  la  théorie  des  intégrales  définies //      447. 

A.  Adriaansz  ,  Sur  le  dosage  de  l'acide  phosphorique  en  présence 

de  l'oxyde  de  fer  et  de  l'alumine //      471. 


ARCHIVES  NÉERLANDAISES 

DES 

Sciences  exactes  et  naturelles, 


SUR  LA  CHALEUR  DE  A/APORISATION  ET  LES  CHALEURS 
SPÉCIFIQUES  DES  CORPS  SOLIDES  ET  LIQUIDES , 


J.    A.    GROSHANS. 


1.  J'ai  communiqué  dans  ce  journal  (T  II,  1867)  un  extrait 
d'une  brochure  publiée  sous  le  titre  de  Etudes  et  considérations 
sur  la  nature  des  Elé^nents  {corps  non-décomposés)  de  la  chimie, 
où  j'ai  traité  de  quelques  propriétés  physiques  des  corps ,  points 
d'ébullition  et  volumes  spécifiques,  dans  leurs  relations  avec  la 
composition  atomique. 

2.  Dans  cette  brochure  j'ai  donné  une  liste  de  28  corps, 
Cp  Hy  Or,  qui  s'accordent  en  la  propriété  que  les  densités 
d  de  vapeur,  à  0'",76  et  aux  points  d'ébullition,  sont  exactement 
proportionnelles  aux  nombres  p  -^  q  -^  r  ^=.  n. 

3.  De  ces  28  corps  j'en  mentionnerai  ici  trois;  —  je  calculerai 
la  densité  d  par  la  formule 

rf=:  62,167 


273  -h  s 
dans  laquelle  a  est  le  poids  atomique  (moléculaire)  des  corps. 

as  d       n 

1.  Ether C4  HjoO       74     34,9  Kopp.  .  .  .  14,94  15 

2.  Ether  propionique  C,  HjoO,   102  100     Pierre   ...  17        17 

3.  Ether  oxalique  .  .CgHjoO^   146  180     Mitscherlich   20,04  20 
Archives  Néerlandaises,  T.  V.  1 


2        .T.    A.    GROSHANS.    SUR    LA    CHALEUR    DE     VAPORISATION    ET    LES 

4.  J'ai  montré  dans  la  brochure,  qu'on  pouvait  admettre  pour 
tous  les  corps,  composés  de  C,  de  H  et  de  0,  la  propriété 
énoncée  par  la  formule: 

d'  _  n'     x' 

dF  '^  V' '  'ôc' 

les   nombres  x  étant  des  constantes,  que  j'ai  appelées  déviations ^ 
et  dont  j'ai  donné  les  valeurs. 

5.  Il  résulte  de  cette  propriété,  qui  doit  être  la  même  à  toutes 
les  pressions,  qu'on  peut  admettre  pour  deux  corps  quelconques: 

273  4-  /'  _  273  +  s' 
273  +  ('  "~  273  -h  s" 

(V  et  t'  étant  des  températures  correspondant  à  une  pression  p, 
autre  que  0'«,760.) 

6.  Il  résulte  de  la  dernière  formule,  que  quand  on  admet: 

/>  =  F  (T) 
(T  étant  la  température  d'une  vapeur  saturée,  augmentée  de  273), 

on    a      ^  ,  Tz=  Constante,  pour  toutes  les  vapeurs  sous  la  même 

pression  /?;  la  constante  elle-même  variant  avec  la  valeur  de  p. 

7.  Quoique  cette  dernière  formule  ne  se  vérifie  pas  exactement 
pour  tous  les  corps,  les  différences  entre  les  résultats  du  calcul 
et  ceux  de  l'observation  ne  peuvent  être  attribuées  qu'à  l'action 
des  forces  moléculaires. 

8.  La  formule  _?.  T  z=:  Constante  (pour  toutes  les  vapeurs  sous 

dr 

la  même  pression)  contient  la  preuve  de  la  vérité  d'une  proposi- 
tion importante  en  physique,  qui  a  été  énoncée  pour  la  première 
fois  par  Despretz,  et  qui  se  trouve  dans  plusieurs  Traités  de  physique  : 
„que,  sous  la  même  pression,  la  chaleur  de  vaporisation  varie 
en  raison  inverse  de  la  densité  de  la  vapeur." 

Cette  proposition  a  été  souvent  combattue,  et  elle  n'est  pas 
encore  généralement  admise.  M.  Zeuner ,  dans  son  ouvrage  :  Théorie 
mécanique  de  la  chaleur,  observe  que  quand  on  prend  pour  base 
des  calculs  les  dernières  expériences   de  M.  Regnault,  cette  pra- 


CHALEURS    SPECIFIQUES    DES    CORPS    SOLIDES    ET    LIQUIDES.  6 

position  ue  se  vérifie  nullement;  et  il  conclut,  „que  ces  nombres 
(trouvés  par  M.  Kegnault)  diffèrent  cependant  assez  peu  les  uns 
des  autres,  pour  qu'on  puisse  dire,  au  moins,  que  la  chaleur  de 
vaporisation  de  l'unité  de  volume  de  la  vapeur  est  approxima- 
tivement la  même  pour  toutes  les  vapeurs  sous  la  même  pression." 

9.  En  admettant  donc  cette  proposition  et,  en  même  temps,  que 
les  différences  entre  les  résultats  du  calcul  et  ceux  de  l'obser- 
vation peuvent  être  attribuées  à  l'action  encore  peu  connue  des 
forces  moléculaires,  on  peut  tirer  de  cette  proposition  des  consé- 
quences très-importantes,  entre  autres  les  lois  des  chaleurs  spéci- 
fiques des  corps  solides  et  liquides. 

10.  Il  me  faut  recourir  pour  cela  au  phénomène  des  volumes 
réduits  égaux,  que  j'ai  signalé  dans  la  brochure;  je  rappel- 
lerai ici   que  j'ai    nommé   volume  réduit  le  volume  observé  à  la 

273 

température  de  l'ébullition  s,    multiplié  par  la  fraction 


vr  ^  V  s. 


273 
273 


273 


Je  mentionnerai  ici  les  volumes  réduits  des  trois  corps  du 
paragraphe  3. 

vs  s  vr 

1.  Ether C,  H^o  0     106,1  Kopp     35  94,0 

2.  Ether  propionique  .  C5H,o02   125,8  Kopp  100  92,1 

3.  Ether  oxalique.  .  .  C^E^^O^   166,8  Kopp  180  100,5 

11.  Nous  avons  de  fortes  raisons  pour  croire  que  les  volumes 
spécifiques  sont  comparables  aux  points  d'ébullition,  et  le  phéno- 
mène des  volumes  réduits  égaux  est  une  de  ces  raisons;  —  il 
s'ensuit  de  cette  hypothèse  qu'il  faut  admettre:  „que  tous  les 
liquides,  en  passant  d'une  tension  de  760'«''*  à  celle  de  (760 +jy), 
se  dilatent  ou  se  contractent  d'une  quantité  égale." 

12.  Il  n'est  pas  difficile  de  faire  des  observations  à  ce  sujet; 
on  est  en  possession  de  tables  exactes  de  dilatation  pour  un  grand 
nombre  de  liquides,  et,  d'autre  part,  on  sait  (paragraphe  5)  que  quand 
deux  corps  ont  leur  point  d'ébullition  à  s'  et  /,  on  a  des  températures 

1* 


J.    A.    GROSHAINS.    SUR    LA    CHALEUR    DE    VAPORISATIOiX    ET    LES 


m 


correspondantes    en    prenant    les    températures    —  (273  +  .s')  et 


m 


_  (273  +  s"). 
n 
18.  En   faisant   des   observations    pareilles^    on   peut  constater 

que  pour  un  grand  nombre  de  liquides  les  dilatations,  sans  être 

égales,  ont  cependant  une  certaine  ressemblance. 

14.  Pour  les  deux  corps  suivants  on  a  à  peu  près  l'égalité. 

Pour  ces  deux  corps,  qui  donnent: 

cl  z=r  n, 
les  points  d'él^Uition  observés  s'accordent  avec  les  points  d'ébul- 

lition  calculés. 

s  cale. 

1.  Ether  méthyl-benzoïque  .  .  .  .  Cg  H«    0,  196,7 

2.  Ether  propionique C^  H^o  O2  100 

A  la  température  0°  de  l'éther  propionique  correspond /  =  70^,7 
de  l'éther  méthyl-benzoïque;  j'ai  calculé,  d'après  les  expériences 
de  M.  Kopp,  la  dilatation  de  l'éther  méthyl-benzoïque  del2%6en 
12°,6,  intervalle  correspondant  à  10  degrés  pour  l'éther  propionique, 
en  prenant  pour  unité  le  volume  de  l'éther  méthyl-benzoïque  à 
70", 7;  il  en  est  résulté  le  tableau  suivant: 

Comparaison  des  dilaialions  de  l'éther  inélhyl-henzoïque  et  des 
deux  éthers  isomères  entre  eux,  V ether  méthyl-butyrique  et  r ether 
propionique  j  à  des  températuree  correspondantes. 


ETHER  Méthyl-benzoïque. 


ETHERS    C5  H,„  O, 


Vol.  0^ 


Vol.  70^7::=:  1 


Methyl-butyrique.  i      Propionique. 


70°,7 
83  ,3 
95  ,9 
108  ,5 
121  ,1 
133  ,7 
146  ,3 
158  ,9 
171  ,5 
181  ,1 
196  ,7 


1,0684 
1,0819 
1,0959 
1,1103 
1,1254 
1,1410 
1,1572 
1,1740 
1,1915 
1,2097 
1,2286 


1 

1,0127 
1,0257 
1,0392 
1,0534 
1,0680 
1,0832 
1,0989 
1,1152 
1,1323 
1,1509 


0 
10 
20 
30 
40 
50 
60 
70 
80 
90 
100 


1 

1 

1,0122 

1,0130 

1,0247 

1,0261 

1,0378 

1,0396 

1,0514 

1,0533 

1,0655 

1,0678 

1,0804 

1,0828 

1,0959 

1,0984 

1,1123 

1,1151 

1,1294 

1,1325 

1,1475 

1,1510 

CHALEURS    SPECIFIQUES    DES    CORPS    SOLIDES    ET    LIQUIDES.  5 

15.  Cependant,  quelquefois  il  n'y  a  pas  même  de  ressemblance , 
et  il  serait  facile  d'indiquer  des  liquides,  dont  on  peut  être 
assuré  parfaitement  que  les  volumes  ne  sont  pas  comparables, 
dans  l'état  actuel  de  la  science,  ni  à  la  pression  de  0,76,  ni  à 
toute  pression  moindre. 

16.  Ce  seraient  par  exemple: 

Le  mercure ,  dont  le  volume  de  0^  à  350°  se  dilate  de  6J  pour  cent  ; 
L'eau,  dont  le  volume  de  0^  à  100""  se  dilate  de  4  pour  cent; 
L'acide   formique,   dont  le  volume  de  0°  à  105"^  se  dilate  de 
12  pour  cent. 

17.  J'admettrai  ici,  que  les  volumes  des  trois  corps  mentionnés 
dans  les  paragraphes  3  et  10  se  dilatent  d'une  égale  quantité, 
quand  la  pression  change  de  760'^'»^   à  (760  -h  /?). 

18.  De  ce  qu'on  a  pour  ces  corps: 

1^  __  273  +  s' 

v7'  ~"  273  -h  s" 
il  s'ensuit:  qu'un  centimètre  cube  de  chaque  liquide,  à  s° ,  étant 
réduit   en  vapeur  par  la   chaleur,  donnera  un  nombre  égal  v  de 
centimètres  cubes  de  vapeur  k  s^  et  k  0'",76. 

19.  D'après  la  proposition  de  Despretz,  ces  v  centimètres  de 
vapeur  contiennent  pour  chaque  liquide  une  quantité  égale  de 
chaleur  de  vaporisation  =  q. 

20.  En  fournissant  donc  à  un  centimètre  cube  de  chaque  liquide 
une  quantité  égale  de  chaleur  q  (qu'on  peut  se  représenter 
comme  très-petite) ,  et  en  empêchant  la  vapeur  de  se  former ,  ces 
centimètres  cubes  s'échaufferont  de  i'  et  r"  degrés,  la  pression 
deviendra  (760  -\-  p)  et  la  dilatation  sera  égale  pour  chaque  corps. 

21.  Les  quantités  q  peuvent  donc  être  regardées  comme  les 
chaleurs  spécifiques  pour  un  centimètre  cube  de  liquide  et  pour 
un  nombre  de  degrés  capable  d'augmenter  la  pression  de  760»'»^ 
à  (760  H-  p). 

22.  Il  est  maintenant  facile  de  calculer  les  chaleurs  spécifiques 
pour  Vunilè  de  poids  et  pour  un  degré  centigrade. 

23.  Les  poids  spécifiques  des  trois  liquides  sont  respectivement 
■=.n' ^lï'  et  n'^' y  oU;  en  nombres,  =  15;  17;  et  20. 


6        J.    A.    GROSHANS.    SUR    LA    CHALEUR    DE    VAPORISATION    ET    LES 

24.  On  a  donc,  pour   deux   liquides   A  et  B,  en  appelant  les 
chaleurs  spécifiques  de  l'unité  de  poids  c'  et  c": 

n'     n"' 

25.  Cette  expression  se  rapporte  aux  nombres  de  degrés  t' et  r"  ; 

les  chaleurs   spécifiques   pour   un  degré  sont  inverses  à  ^^  et  t", 

et  comme,  pour  celles-ci, 

a' 

T^  _  273  +  5'  ___  n' 

7'  ~"  273  +  s"  ■"  7'' 

on  a  pour  les  chaleurs  spécifiques  de  l'unité  de  poids,  pour  un  degré  : 


^ 

n 

c' 

7' 

9 

X 

7  __  a" 

7^      7 

^11 

n" 

d'où  &  a'  =  c"  a". 

26.  Il  est  donc  bien  établi  :  que  les  chaleurs  spécifiques  a'  c'  et 
a"  c"  sont  égales  pour  deux  corps  qui  ont  la  même  déviation  et 
le  même  volume  réduit. 

27.  M.  Kopp  a  trouvé  par  la  voie  expérimentale,  que  deux  corps 
isomères,  ayant  des  caractères  chimiques  distincts  et  des  points 
d'ébullition  différents,  par  exemple,  l'acide  butyrique  et  l'éther 
acétique,  qui  ont  tous  deux  la  formule  chimique  C  4 Hg  0 2,  ont  la  même 
chaleur  spécifique  ;  il  est  facile  de  prouver  cette  loi  par  la  théorie. 

28.  Il  faut  se  rappeler  que  ces  deux  corps  ont  le  même 
volume  à  leurs  points  d'ébullition  respectifs;  admettons  que 
les  points  d'ébullition  sont  pour  l'éther  =  74°  et  pour  l'acide 
=:  156^;  alors  les  quantités  de  vapeur,  mesurées  en  centimè- 
tres cubes,  produites  par  un  centimètre  de  chaque  liquide^ 
seront  entre  elles  comme  (273  +  74)  et  (273  +  156),  ou  comme  347 
et  429;  par  conséquent,  les  quantités  de  chaleur  q  seront  dans 
le  même  rapport;  on  aura    donc,   pour    les  températures  T'et^", 


c    :  c   ■=.  a'    :   q" 


et  pour  un  seul  degré. 


CHALEURS    SPECIFIQUES     DES    CORPS    SOLIDES    ET    LIQUIDES.  7 

il    est    facile    de     voir    que     ^     =    -i     =     1  ;    car    on    a  : 

q'  :  q"  =  347  :  424 
et 

x'    :    t"  =  347  :  424. 

29.  La  loi  du  paragraphe  26  peut  donc  être  étendue  de  la 
manière  suivante: 

„Les  chaleurs  spécifiques,  a' c'  et  a"  c' ,  sont  égales  pour  tous 
les  corps  du  même  rang." 

30.  Il  sera  nécessaire  ici  de  rappeler  ce  qu'on  doit  entendre 
par  le  rang  des  corps. 

31.  Le  rang  des  corps  indique  le  degré  de  simplicité  des  com- 
binaisons de  la  chimie;  les  corps  suivants  appartiennent  tous  au 
premier  rang  et  doivent  avoir  les  mêmes  chaleurs  spécifiques: 

1.  Eau H^  0 

2.  Carbure  de  soufre  C     S 2 

3.  Brome Br^ 

4.  Acide  formique.  .  C     H,  Oo    0,536  Kopp  de  24°  à 45°  46  24,6 

On  voit  que,  pour  ces  quatre  corps,  les  résultats  du  calcul  et 
ceux  de  l'observation  coïncident  à  peu  près. 

32.  En  ajoutant  à  H-  0  un  atome  de  C  et  2  atomes  de  H,  on 
obtiendrait  C  H^  0,  formule  de  l'alcool  méthylique,  ou  d'un 
isomère;  ce  corps  aurait  le  deuxième  rang. 

33.  En  ajoutant  pareillement  C  H^  à  l'acide  formique,  on  ob 
tiendrait  C^  H4  Oo,  formule  de  l'acide  acétique  ou  d'un  isomère; 
ce  corps  aurait  aussi  le  deuxième  rang. 

34.  En  continuant  de  la  sorte,  on  obtiendrait  les  corps  du 
troisième  rang,  C^  Hg  0  et  C3  Hg  O2. 

35.  Il  y  a  beaucoup  de  corps  pour  lesquels  on  ne  connaît  pas 
de  combinaison  avec  C  Ho  ou  (CHJ«;  ces  corps,  qui  compren- 
nent en  général  les  métaux ,  les  oxydes ,  les  sulfures  .  . . ,  ap- 
partiennent tous  au  premier  rang;  ce  rang  contient  aussi  les  mé- 
talloïdes, N^;  H^;  0=^;  S^  CP  ;  Br^  ;  I^  ;  etc. 


c 

a 

c  a 

1,013  à  100°  Regn. 

18 

18,2 

0,243  à    48°  Regn. 

76 

18,5 

1,07    Andrews  à?. 

160 

17,1 

8        J.    A.    GROSHANS.    SUR    LA    CHALEUR    DE    VAPORISATION    ET    LES 

36.  Il  faudra  encore  beaucoup  d'études  sur  le  rang  des  corps, 
lequel  constitue  une  idée  scientifique  nouvelle;  il  est  quelquefois 
difficile  d'assigner  le  rang  auquel  appartient  quelque  substance  ;  pour 
les  corps  qui  contiennent  de  l'hydrogène,  le  rang  (m)  est  souvent 
donné  par  une  des  formules  suivantes,  dans  lesquelles  q  indique 
le  nombre  des  atomes  d'hydrogène: 

q  q  -\-2 

2  2 

On  peut  assimiler  les  atomes  de  Cl,  Br  et  I  aux  atomes  de  l'hy- 
drogène, de  manière  que  q  signifiera  le  nombre  des  atomes  de 
l'hydrogène  -h  les  atomes  de  chlore,  brome,  etc. 

37.  Quant  aux  produits  a'  c'  et  a"  c"  de  corps  de  rangs  m 
différents,  on  peut  commencer  par  admettre  les  formules 

a'  c'  __  x^ 

et 

X- 

38.  La  forme  de  la  dernière  fonction  doit  être  facile  à  trouver; 

nous  avons  déjà  plusieurs  exemples  de  fonctions  analogues  ;  ainsi , 

pour   les   corps   d'une   série  complète,    on  a  pour  les  densités  cl 

de  vapeur: 

d'         n'     x' 

formule  dans  laquelle: 

x'         ^m 


1  =/(-'). 


"         n"'  X'' 


x"         l^m" 
Pour  les  volumes  spécifiques  de  corps  de  rangs  différents  (vo- 
lumes qui  sont  indépendants  des  points  d'ébullition  et  des  dévia- 
tions), on  a: 

vs'  a'     n"  x' 

vs'  à'  '  n '  x' 

formule  où: 

x'  m' 

^'  ~~  m!'' 


CHALEURS    SPECIFIQUES    DES    CORPS    SOLIDES    ET    LIQUIDES.  9 

On    peut    admettre    d'avance   que    pour   les    chaleurs    spécifiques 
on  aura  : 

c'  a    m  ^m 


c'  a"         m"  l^^^^' 

et  les  résultats  de  l'expérience  devront  permettre  de  choisir  avec 
certitude  entre  ces  deux  formules. 

39.  En  calculant  les  nombres  relatifs  de  centimètres  cubes  de 
vapeur,  que  donne  un  centimètre  de  liquide  à  s^ ,  pour  les  corps 
d'une  série  homologue  complète ,  on  trouve: 

m         centimètres  de  vapeur. 


1. 

1; 

_     1 

2. 

0,7071 

___  1 
^2 

3. 

0,5774 

_  1 
V/3 

4. 

0,50 

__      1 

1/4 

Les  quantités  i'  de  vapeur  développées  par  un  centimètre  cube 
de  liquide  sont  donc: 


V    *^  m 


m 

40.  En  consultant  les  résultats  des  expériences  pour  les  liqui 
des   aux  points   d'ébullition ,  lesquelles   expériences   sont  en  petit 
nombre,  j'ai  cru  pouvoir  admettre  provisoirement  comme  probable 
la  formule  : 

x'  ^m' 


^  ^^m 


On  pourrait  donc  conclure: 

les   produits   a  c  sont  proportionnels    aux   racines   carrées  des 
rangs  m,  c'est-à-dire. 


c'  a'  ^ m' 


^m" 


10       J.    A.    GROSHANS.    SUR    LA    CHALEUR    DE    VAPORISATION    ET    LES 

Ce   rapport  est  le  même  que  celui  des  volumes  réduits,  dans 
les  séries  homologues  complètes: 

vr'   ^m' . 


d'à" 

vr" 

c'  a'  vs' 

273  H-  s' 
273  +  s' 

vr"         \y^„ 
on  a  donc  pour  ces  séries: 

c'  a'         vr' 


et 


Les   deux   dernières  formules  sont  aussi  applicables  aux  corps 
de  même  rang,  ayant  des  volumes  réduits  égaux. 
41.  Si  l'on  avait: 

s'   Z=   5" 

c'est-à-dire,  si  les  points  d'ébullition  étaient  égaux,  ce  qui  serait 
possible  pour  des  corps  appartenant  à  des  séries  différentes, 
on  aurait: 


42.  Voici  quelques  exemples  pour  faire  voir  le  degré  de  con- 
cordance entre  les  résultats  du  calcul  et  ceux  de  T observation. 
Il  résulte  de  la  formule 

c'  a'  ^ m' 


c"a'          l/^. 

cette  autre  formule 

: 

—                —  riormtante 

\^m'         ^m' 

Série  C«H(2«  +  2)  0 

C  a 

m.  0  c  a  — ^ 

1.  Eau H^    0  1,013     à  100'^  Regn.  18,24  18,24 

2.  Aie.  méth.  .  C    H,    0  0,645     à       ?  Kopp.  20,64  14,60 

3.  Aie.  éth.  .  .  C,H«    0 

4.  C3H3    0  0,7641  à     78°  Regn.  35,15  20,30 

5.  Ether.  .  .  .  C,  H^o  0  0,5500  à     35°  Regn.  40,70  18,20 


CHALEURS    SPÉCIFIQUES    DES    CORPS    SOLIDES    ET    LIQUIDES.  11 

Corps  du  même  rang  (m  :=  3) 

c  ac 

Alcool C,  Hg  0     0,7641  à  78°  R.  35,15 

lodure  d'éthyle  .  .  C^  H^  1  0,1732  à  70  R.  27,22 
Liq.  des  Holl  .  .  .  C,  H^  Cl^  0,3293  à  84  R.  32,60 
Acétone C4  H^  0     0,5505  à  55  R.  31,93 


Moyenne.  .  .  .  31,72 


ac 


'^  =  18,31; 


1^3 
la  lettre  R  signifie  Regnault. 

m  =z  b 

1.  Ether C^  H^o  0  0,5500  à  35°      R.  40,70 

2.  Sulfure  d'éthyle.  .  .  C^Hj^S  0,4788  Moyenne  R.  43,10 

Moyenne.  .  .  .  41,90 

1^^  =  18,73. 

43.  De  ces  considérations  il  résulte,  quant  aux  chaleurs  spé- 
cifiques, des  manières  de  voir  dont  quelques-unes  diffèrent  essen- 
tiellement de  celles  qui  ont  cours  ;  ainsi  il  en  découle ,  que 
les  chaleurs  spécifiques  ne  sont  comparables  qu'aux  points  d'ébul- 
lition  ou  à  des  températures  correspondantes;  et  encore,  que  ces 
chaleurs  sont  inversement  proportionnelles  aux  poids  atomiques 
(ou  plutôt  moléculaires). 

44.  Depuis  quelques  années,  on  s'est  écarté  du  chemin  qui 
semblait  indiqué  d'une  manière  si  claire  par  la  loi  de  Dulong  et 
Petit  et  par  celle  de  Neumann ,  lesquelles  admettaient  toutes  les  deux 
que  les  chaleurs  spécifiques  sont  (toutes  choses  égales  d'ailleurs) 
inversement  proportionnelles  aux  poids  atomiques  (moléculaires); 
il  résulte  des  considérations  précédentes  que  le  rapport  indiqué 
a  lieu  dans  tous  les  cas. 

45.  Si,  après  avoir  lu  ces  considérations,  on  consulte  les 
données  de  l'expérience  concernant  les  chaleurs  spécifiques  d'un 
grand  nombre  de  corps  solides,  comprenant  entre  autres  des  mé- 
taux, des  sulfures,  des  oxydes,  des  chlorures  etc.  métalliques,  il 


12       J.    A.     GROSHANS.    SUR    LA    CHALEUR    DE    VAPORISATION    ET    LES 

faut  d'abord  réfléchir  que  ces  expériences  n'ont  pas  été  faites  à 
des  températures  correspondantes;  on  peut  supposer  cependant, 
qu'à  de  grandes  distances  des  points  d'ébullition  les  chaleurs 
spécifiques  ne  varient  que  lentement  avec  la  température. 

Comme  les  métaux,  leurs  oxydes,  sulfures,  chlorures,  bromu- 
res et  iodures  appartiennent  en  général  au  même  rang  (le 
premier),  il  s'ensuit  que  tous  ces  corps  doivent  avoir  la  même 
chaleur  spécifique,  ca.  Or  les  expériences  pour  des  températu- 
res de  0"^  à  lOC^  donnent  des  valeurs  différentes,  comprises  en 
général  entre  6  et  20. 

46.  M.  Kopp  ayant  observé: 

1.  que  pour  un  grand  nombre  de  métaux  (et  autres  corps 
simples)  le  produit  a  c  est  en  moyenne  environ  =:  6,4  ; 

2.  que  pour  les  corps  R  Cl ,  R  Br ,  RI  le  produit  a  c  est  en 
moyenne  1=:  le  double  de  6,4;  et  enfin 

3.  que  pour  les  corps  RCU,  RBr^  et  Rio  le  produit  ac  est 
en  moyenne  environ  le  triple  de  6,4; 

conclut  que  a  c  est  proportionnel  au  nombre  d'atomes  simples. 

Cette  règle  ne  serait  cependant  pas  applicable  à  des  corps  ren- 
fermant de  l'hydrogène,  de  l'oxygène,  du  carbone,  du  soufre, 
du  silicium  et  quelques  autres  corps. 

47.  D'après  les  considérations  que  j'ai  développées,  les  produits 
a  c  n'auraient  aucun  rapport  avec  les  nombres  des  atomes  des  corps, 
et,  pour  tous  les  corps  des  trois  catégories  mentionnées,  les  pro- 
duits a  c  devraient  être  égaux  (à  des  températures  correspondantes). 

48.  Je  ferai  remarquer  d'abord ,  que  les  rapports  simples  observés 
par  M.  Kopp  se  rapportent  aux  poids  atomiques,  tandis  qu'il  aurait 
fallu  employer  les  poids  moléculaires;  ensuite,  il  me  paraît  peu 
utile  d'établir  une  règle  générale  et  d'admettre  en  même  temps 
un  si  grand  nombre  d'exceptions. 

49.  Il  me  semble  que  l'apparence  de  proportionnalité,  qui  a 
lieu  quand  le  nombre  des  atomes  n'est  que  de  1 ,  2  ou  3 ,  s'évanouit 
entièrement  lorsque  le  nombre  des  atomes  devient  =  4,  5,  etc. 

Enfin,  la  mesure  commune  elle-même,  la  moyenne  ==  6,4,  varie 
de  5,2  (soufre)  à  6,9  (iode  et  molybdène). 


CHALEURS    SPECIFIQUES    DES    CORPS    SOLIDES    ET    LIQUIDES.  13 

50.  En  tenant  compte  de  la  nécessité  de  faire  les  expériences 
à  des  températures  correspondantes ,  il  est  permis ,  ce  me  semble , 
de  conclure  des  expériences  relatives  aux  chaleurs  spécifiques  des 
corps  solides,  que  la  température  ordinaire  peut  être  regardée, 
en  un  certain  sens  et  par  approximation,  comme  température 
correspondante  pour  les  métaux  entre  eux,  pour  les  oxydes  et 
les  sulfures  entre  eux,  et  pour  les  chlorures,  bromures ,  etc. 
entre  eux;  mais  que  les  résultats  ne  sont  pas  comparables  pour 
les  métaux,  d'une  part,  et  les  chlorures  etc.,  d'autre  part. 

51.  Nous  savons  d'ailleurs  que  le  produit  c  a  peut  varier  pour 
certains  corps  du  simple  au  double  avant  la  fusion  et  après 
la  fusion;  tandis  que  pour  d'autres  corps  la  fusion  n'a  que  peu 
d'influence  sur  ce  produit. 

52.  Je  rappellerai  ici  que  les  chaleurs  spécifiques  de  l'eau  et  du 
brome  sont  comparables  dans  l'état  liquide;  tandis  qu'elles  ne  le 
sont  pas  pour  ces  corps  à  l'état  solide. 

53.  En  résumé,  on  ne  saurait  dorénavant  négliger  tout-à-fait 
l'indication  de  faire  des  expériences  à  des  températures  comparables. 


APPENDICE. 

54.  Ceux  qui  s'intéressent  à  l'étude  des  propriétés  physiques 
des  corps,  s'accordent  généralement  en  ceci,  que  toutes  ces  pro- 
priétés (points  d'ébuUition ,  volumes  spécifiques  et  chaleurs  spécifi- 
ques) doivent  être  expliquées  d'une  manière  analogue. 

55.  Ce  que  j'ai  dit  (paragraphe  44)  des  lois  de  Dulong  et 
Petit  et  de  Neumann,  pourrait  être  répété  quant  aux  lois  de 
Mariotte,  d'Avogadro  et  de  Gay-Lussac;  toutes  ces  lois  sont 
simples  et  générales,  et  indiquent  les  rapports  qui  existent  entre 
les  propriétés  (points  d'ébuUition  et  volumes  spécifiques)  et  la  com- 
position atomique. 

56.  Les  points  d'ébuUition  (augmentés  de  273)  représentent  les 
volumes  spécifiques  des  vapeurs;  les  deux  espèces  de  volumes, 
ceux  des   vapeurs  sous   la   même  pression   et  ceux   des   liquides 


14        J.    A.    GROSHANS.    SUR    LA    CHALEUR    DE    VAPORISATION    ETC. 

SOUS    la    même    tension,  sont   d'abord   proportionnels    aux    poids 

atomiques;  c'est  la  signification  de  la  formule  connue: 

a 
vs  ^  — . 
D 

En  adoptant  cette  hypothèse  sans  réserve,  on  aurait  trouvé  pour 

ainsi   dire   la    moitié    de    la   loi  cherchée;  resterait  à  trouver  la 

signification    de    D;    quant    à   moi,    il   m'a   semblé  extrêmement 

probable  que  D  signifiait  le  nombre  d'atomes;  ce  qui  s'est  trouvé 

d'accord  avec  la  vérité. 

57.  M.  de  Tchermack  était  arrivé,  de  son  côté,  à  la  même  con- 
clusion; mais  il  regardait  comme  températures  comparables  les 
points  de  fusion,  au  lieu  des  points  d'ébullition. 

58.  Ainsi,  les  points  d'ébullition  et  les  volumes  spécifiques  sont 
proportionnels  aux  poids  atomiques  et  inversement  proportionnels 
aux  nombres  d'atomes;  avec  cette  donnée,  on  peut  composer  des 
groupes  étendus  de  corps  dont  les  propriétés  s'accordent  entre 
eux  parfaitement. 

Enfin,  pour  lier  entre  eux  les  groupes  différents,  il  y  a  encore 
de  certaines  constantes,  que  j'ai  réussi  à  trouver. 

L'époque  à  laquelle  nous  vivons  exige  souvent ,  et  principalement 
dans  les  sciences  de  la  physique  et  de  la  chimie,  qu'on  exprime, 
en  aussi  peu  de  mots  que  possible,  des  idées  dont  le  développe- 
ment aurait  occupé  autrefois  plusieurs  pages;  en  me  conformant 
donc  à  cette  nécessité,  je  dirai  que  la  manière  dont  M.  Kopp, 
partageant  les  idées  de  MM.  Schroder  et  Woestijn,  a  traité 
les  questions  concernant  les  propriétés  physiques  des  corps,  points 
d'ébullition  et  volumes  et  chaleurs  spécifiques,  me  rappelle  la 
philosophie  qui  inventait  les  cycles  et  les  épicycles,  pour  expli- 
quer les  phénomènes  astronomiques;  tandis  que  la  philosophie  qui 
a  inspiré  le  système  de  Copernic  et  les  lois  de  Kepler  et  de  Newton , 
me  semblé  représentée,  en  physique,  par  Mariotte,  Gay-Lussac, 
Avogadro ,  Dulong  et  Petit ,  et  Neumann. 

ROTTERDAM,  16  Décembre  1869. 


SUR  UNE  METHODE  SIMPLE 

POUR  LA.  COMPARAISON  EXACTE  DES  MESURES 
DE  LONGUEUR, 

PAR 

P.    J.    STAMKART, 

Vérificateur    des    Poids    et    Mesures    à    Amsterdam. 
{Algemeene  Konsi-  en   Letterbode ,  août  1839.)   ') 


Pour  la  comparaison  ou  la  vérification  des  mesures  de  longueur , 
il  existe  différents  instruments,  connus  sous  le  nom  de  compara- 
teurs. Ceux  dont  les  bureaux  de  vérification  des  poids  et  mesures 
sont  pourvus  de  la  part  de  l'Etat,  appartiennent  au  modèle  le 
moins  composé,  et  ne  donnent  la  différence  des  mesures  de  longueur 
que  jusque  dans  les  dixièmes  de  millimètre;  d'autres,  construits 
avec  plus  de  soin,  et  surtout  ceux  qui  sortent  des  mains  d'ar- 
tistes habiles,  peuvent  indiquer  les   différences  de  longueur  avec 

')  Mr.  le  Dr.  F.  J.  Stamkart,  actuellement  professeur  à  l'école  polytechnique  de 
Delft  en  Hollande ,  a  inventé ,  il  y  a  plus  de  trente  ans ,  un  appareil  très-simple 
pour  la  comparaison  mutuelle  exacte  d'étalons  linéaires.  Une  desciiption  détaillée 
de  son  comparateur  à  miroir,  avec  des  recherches  qui  en  démontrent  la  valeur, 
fut  publiée  par  M.  Stamkart  en  1839,  et  en  1851  il  donna  la  description 
d'une  multitude  d'applications,  qu'il  avait  faites  de  son  appareil  depuis  cette 
première  époque.  Ces  deux  petits  traités,  écrits  dans  la  langue  hollandaise  et 
publiés  dans  des  journaux  hollandais,  comme  la  plupart  des  autres  travaux  de  ce 
savant  distingué ,  sont  restés  tout  à  fait  inconnus  à  l'étranger  et  aussi  au  célèbre 
physicien  de  Munich,  M.  le  Conseiller  de  Steinheil,  qui,  plusieurs  années  après 
M.  Stamkart,  conçut  presque  la  même  idée.  Lorsque,  dans  la  séance  de  la 
commission  permaaente  de  la  conférence  géodésique  internationale,  tenue  à  Elo- 
rence  le  27  Septembre  1869,  M.  Bauemfeind  décrivit  et  loua  le  comparateur  à 
miroirs  de  M.  de  Steinheil,  je  me  crus  obligé  de  réclamer  la  priorité  de  l'invention 
pour  M.  Stamkart,  sans  vouloir  contester  à  aucun  égard  les  mérites  éminents 
de    M.    de    Steinheil,    dont   j'admire    le   génie    et  respecte  ie   noble  caractère. 


16  F.    .T.    STAMKART.    SUR    UNE    MÉTHODE    SIMPLE    POUR    LA 

une  précision  considérablement  plus  grande.  Le  moyen,  propre  à 
conduire  au  même  but,  que  je  désire  faire  connaître  ici,  est  une 
nouvelle  application  de  Finvention  aussi  simple  qu'heureuse  de 
l'illustre  Gauss,  à  l'aide  de  laquelle  on  peut  observer  aujourd'hui, 
avec  une  exactitude  inconnue  jadis,  les  variations  qui  se  mani- 
festent dans  la  déviation  de  l'aiguille  magnétique.  Comme  on  le 
sait,  cette  invention  consiste  à  fixer  à  l'extrémité  du  barreau 
aimanté  un  petit  miroir,  dans  lequel,  par  la  réflexion  des  rayons 
lumineux,  on  peut  lire  les  divisions  d'une  échelle  placée  à  une 
certaine  distance,  auprès  de  l'observateur.  Le  plus  petit  change- 
ment de  direction  qu'éprouvent  le  barreau  aimanté  et,  par  con- 
séquent, le  miroir,  se  trouve,  de  cette  manière,  amplifié  un 
grand  nombre  de  fois  et  rendu  visible  ;  un  simple  calcul  trigonomé- 
trique  fait  ensuite  connaître  la  valeur  angulaire  de  ce  changement  en 
secondes.  Il  est  clair  que,  dans  cette  manière  d'opérer,  la  per- 
pendiculaire au  plan  du  miroir,  laquelle  occupe  toujours  le  milieu 
entre  les  rayons  incidents  et  les  rayons  réfléchis ,  peut  être  regardée 
comme  un  prolongement  du  barreau  aimanté;  de  plus,  lorsqu'un 
point ,  ou  plutôt  une  droite  située  dans  le  plan  du  miroir  conserve 
une  position  invariable,  ou  que  le  miroir,  comme  dans  les  sex- 
tants, tourne  autour  d'un  axe  fixe,  cette  même  perpendiculaire 
peut  être  considérée  comme  le  long  bras  d'un  levier  coudé,  dont 
le  miroir  lui-même  constituerait  le  bras  court.  C'est  cette  idée 
qui  m'a  conduit,  au  mois  de  septembre  de  l'année  précédente 
(1838)  à  construire  le  comparateur  suivant. 

AB  (Voyez  PI.  I,  fig.  1)  est  une   forte   pièce   de   bois,   pour 
laquelle    on    a    utilisé,    dans    le   cas   présent,  le  corps  d'un  des 

Maintenant  qu'il  s'agit  de  fixer  le  prototype  du  mètre  et  de  le  multiplier  par 
des  copies  exactes,  je  crois  qu'il  pourrait  être  utile  de  connaître  l'appareil  de 
M.  Stamkart,  non-seulement  à  cause  de  la  priorité  de  son  invention,  mais  sur- 
tout à  cause  de  sa  simplicité  extrême  et  des  applications  nombreuses  imaginées 
par  son  auteur.  C'est  à  ma  prière  que  la  Rédaction  des  Archives  Néerlandaises 
a  bien  voulu  reproduire  les  deux  mémoires  de  M.  Stamkart,  après  les  avoir 
fait  traduire  en  français,  et  j'espère  que  cette  reproduction  sera  accueillie  avec 
intérêt  par  les  personnes  qui  s'occupent  de  cette  question. 

Le  Y  DE,  le  12  Janvier  1870.  F.  Kaiser. 


COMPARAISON    EXACTE    DES    MESURES    DE    LONGUEUR.  17 

deux  comparateurs  qui  se  trouvent  au  Bureau  de  vérification  d'Am- 
sterdam^ mais  pour  laquelle  on  peut  prendre  tout  autre  bois  bien 
sec,  d'une  épaisseur  convenable.  Sur  ce  madrier  A  B,  est  fixé  solide- 
ment un  morceau  de  bois  eu  forme  de  parallélépipède  c  d,  d'une  hau- 
teur d'environ  15  à  20  millimètres,  et  sur  le  plan  c  de  ce  parallélé- 
pipède est  attaché ,  avec  de  la  poix  ordinaire ,  un  morceau  de  verre  à 
glace,  dans  une  position  aussi  exactement  que  possible  perpen- 
diculaire à  la  direction  de  A  B.  La  surface  de  ce  fragment  de 
verre  est  recouverte  de  papier  appliqué  à  la  colle,  mais  dans 
lequel  on  a  découpé  une  petite  ouverture,  d'un  millimètre  carré 
au  plus,  destinée  à  servir  de  point  d'appui. 

Un  autre  morceau  de  bois  dur  e f ki,  qui  est  entièrement  libre 
et  peut  être  placé  sur  le  madrier  A  B  ou  enlevé  à  volonté ,  porte 
deux  petites  chevilles  en  acier  fc  et  ea,  de  longueur  égale  et 
fixées  à  la  même  hauteur  au-dessus  de  AB.  Les  extrémités  c  et 
a  de  ces  chevilles  sont  façonnées  en  pointe  légèrement  arrondie, 
dont  le  rayon  de  courbure  peut  être  évalué  approximativement 
à  I  de  millimètre.  Le  petit  bloc  efik  repose  lui-même  sur  une 
lame  de  verre  plane ,  fixée  sur  A  B  ;  et ,  afin  que  cette  pièce 
mobile  conserve  toujours  exactement  la  même  position  par  rapport 
à  la  face  supérieure  du  madrier  A  B ,  on  a  enfoncé  dans  sa 
face  inférieure  trois  petits  clous  en  cuivre;  de  manière  que, 
reposant  sur  les  têtes  arrondies  de  ces  clous,  la  pièce  ne 
s'appuie  que  par  trois  points  sur  la  plaque  de  verre  fixe.  Enfin, 
le  petit  bloc  mobile  porte  encore  un  miroir  vertical  g  h,  qui, 
de  même  que  le  miroir  fixe  d'un  sextant,  n'est  étamé  que  sur 
sa  moitié  inférieure.  C'est  ce  miroir  g  h  qui  doit  jouer  un  rôle 
analogue  à  celui  du  miroir  des  appareils  magnétiques. 

Un  second  point  d'appui  fixe  est  fourni  par  la  pièce  m  l,  qui 
est  également  pourvue  d'une  cheville  en  acier  /6,  fixée  dans  une 
position  telle  que  la  ligne  qui  joint  les  points  a  Qi  h  soit  paral- 
lèle à  AB,  au  moins  à  très  peu  près.  L'extrémité  h  de  cette 
cheville  n'est  pas  arrondie,  comme  les  pointes  a  et  c;  elle  est 
au  contraire  taillée  suivant  une  surface  plane,  d'une  étendue 
d'environ  un  millimètre  carré,   afin  que  les  mesures  de  longueur 

Archives  Néerlandaises,  T.  V.  2 


18  F.    J.    STAMKART.    SUR     UNE     METHODE    SIMPLE     POUR    LA 

puissent  être  pressées  contre  elle  sans  crainte  de  détérioration. 
Pour  la  pièce  d'appui  m  /  on  a  pris  le  talon  mobile  du  compa- 
rateur, lequel,  au  moyen  d'une  vis  de  serrage,  peut  être  fixé 
sur  le  madrier  à  une  distance  quelconque  de  A. 

Perpendiculairement  à  la  direction  A  B ,  et  à  quelques  mètres 
de  distance  du  miroir,  se  trouve  placée  l'échelle  CD,  divisée 
en  centimètres ,  et  sur  laquelle  peut  glisser  le  curseur  pqr. 
La  partie  supérieure  rs  de  ce  curseur  est  taillée  en  biseau, 
à  la  manière  des  verniers  ordinaires,  et  le  bord  s  est  divisé 
en  millimètres,  ce  qui  équivaut  à  une  division  en  millimè- 
tres de  l'échelle  C  D  elle-même ,  dans  toute  son  étendue,  p  q 
est  une  petite  planchette  attachée  verticalement  au  curseur,  et 
recouverte  d'un  papier  blanc ,  sur  lequel  est  tracée ,  vers  le  milieu 
P,  une  ligne  noire  verticale.  Une  ligne  verticale  analogue,  mais 
ayant  une  largeur  environ  moitié  moindre,  est  tracée  en  Q  sur 
le  mur  opposé  de  la  chambre.  Enfin,  exactement  en  face  de  ce 
dernier  point,  en  E,  on  a  disposé  une  petite  lunette. 

Le  madrier  AB,  l'échelle  CD  et  la  lunette  doivent  garder 
une  position  invariable  l'un  par  rapport  à  l'autre,  ainsi  que  par 
rapport  à  la  ligne  tracée  sur  le  mur. 

Pour  comparer  maintenant  au  moyen  de  cet  appareil  deux 
mesures  de  longueur,  deux  mètres  par  exemple,  on  prend 
l'une  d'elles,  que  je  nommerai  la  première,  et  on  l'applique 
sur  le  madrier  AB,  dans  la  position  abj  en  pressant  l'un 
des  bouts  contre  la  cheville  /  b  ;  ensuite  on  place  la  pièce 
mobile  e  f  k  i,  de  telle  sorte ,  que  la  pointe  c  de  la  che- 
ville fc  touche  le  point  d'appui  fixe  c,  et  que  l'extrémité 
a  de  l'autre  cheville  e  a  soit  en  contact  avec  le  bout  a  de  la 
mesure  de  longueur  ab,  A  l'aide  de  la  lunette,  et  à  travers  la 
partie  supérieure ,  non  étamée ,  du  miroir  g  h,  on  vise  alors  la  ligne 
verticale  tracée  sur  le  mur  en  Q,  et  on  fait  glisser  le  curseur 
pqr,  jusqu'à  ce  que  l'image  réfléchie  de  la  ligne  verticale  P  soit 
vue  ,  dans  le  miroir  qh,  exactement  dans  le  prolongement  de  la 
trace  Q,  après  quoi  on  note  la  position  que  le  curseur  occupe 
sur  l'échelle  C  D.  Pour  plus  de  sécurité,  il  est  bon  de  déranger 


COMPARAISON    EXACTE    DES    MESURES    DE    LONGUEUR.  19 

le  curseur  de  sa  position ,  d'auiener  de  nouveau  les  lignes  P  et  Q  en 
coïncidence ,  et  de  faire  une  nouvelle  lecture  ;  en  tout ,  il  est  bon  de 
répéter  cette  opération  un  nombre  pair  de  fois .  par  exemple  quatre 
fois,  en  faisant  glisser  le  curseur  deux  fois  de  droite  à  gauche  et 
deux  fois  de  gauche  à  droite ,  jusqu'à  ce  que  les  lignes  se  mon- 
trent dans  le  prolongement  l'une  de  l'autre.  Ordinairement  on 
trouvera  une  légère  différence,  ce  qui  tient  à  ce  que  la  vision 
se  fait  d'une  manière  plus  ou  moins  distincte,  à  ce  que  le  miroir 
g  h  offre  plus  ou  moins  de  netteté ,  et  peut-être  à  d'autres  cir- 
constances encore;  la  moyenne  des  quatre  lectures  approchera 
toutefois  beaucoup  de  la  vérité.  —  Cela  fait ,  on  enlève  avec  pré- 
caution la  mesure  de  longueur  ab,  et  on  la  remplace  par  celle 
qu'il  s'agit  de  lui  comparer;  puis,  on  effectue  sur  celle-ci  exac- 
tement la  même  série  d'opérations  qui  vient  d'être  décrite.  Il  est 
clair  que,  s'il  existe  une  petite  différence  de  longueur  entre  les 
deux  mesures,  cette  différence  s'accusera,  amplifiée  un  grand 
nombre  de  fois ,  par  les  positions  différentes  du  curseur  p  q  r  sur 
l'échelle  C  D.  L'amplification  en  question  est  au  moins  le  double 
du  nombre  de  fois  que  la  distance  des  points  a  et  c  est  comprise 
dans  la  distance  de  l'échelle  C  D  au  miroir  g  h.  Cette  valeur 
double  est  atteinte  exactement  lorsque  le  curseur  est  venu  se 
placer  près  de  la  lunette;  quand  le  curseur  est  plus  rapproché 
des  extrémités  C  ou  D,  l'amplification  est  encore  un  peu  plus 
considérable,  comme  il  est  facile  de  le  reconnaître  par  un  calcul 
trigonométrique. 

Après  que  la  mesure  de  la  seconde  règle  est  terminée,  il  est 
nécessaire  de  mesurer  encore  une  fois  la  première,  tant  pour 
constater  qu'il  n'est  survenu  aucun  changement  dans  l'appareil, 
que  pour  s'assurer  qu'aucune  erreur  n'a  été  commise  la  première 
fois;  il  faudra  ensuite  reprendre  de  même  la  mesure  de  la 
seconde  règle,  et  effectuer  par  conséquent,  en  tout,  quatre  mesures 
distinctes.  Des  répétitions  fréquentes,  se  succédant  sans  intervalles , 
auraient  peut-être  peu  d'utilité,  vu  qu'il  pourrait  arriver ,  au  moins 
si  les  règles  sont  en  métal,  qu'une  petite  différence  de  tempéra- 
ture s'établît  entre   elles    par   le   fait   même    des    manipulation^. 

2* 


20  p.    J.    STAMKART.    SUR    UNE    iMETHODE    SIMPLE    POUR    LA 

Lorsque,  dans  l'appareil  qui  vient  d'être  décrit,  le  curseur  se 
trouve  au-dessus  de  la  lunette ,  et  le  miroir  g  h  perpendiculaire  à 
la  direction  de  A  B ,  la  distance  de  P  au  point  milieu  entre  les 
faces  antérieure  et  postérieure  de  la  glace  s'élève  à  6,765  mètres; 
la  distance  entre  les  points  a  et  c  a  été  mesurée  aussi  exactement 
que  possible  par  un  de  mes  collègues  et  moi,  et  a  été  trouvée 
sensiblement  égale  à  19,63  millimètres.  D'après  cela,  l'amplifi- 
cation  la  plus   faible  est  zz:  2  x  =  689,2  fois,  ce  qui 

1963 

revient  à  dire  que  chaque  millimètre   de  déplacement  du  curseur 

correspond   à   une  différence  de  longueur  de =  0,0014509 

^  ^  689,2 

millimètre.    Quand   le   curseur   se  trouve  à  une  certaine  distance 

de   E,    ce   nombre,   ainsi    qu'il   a  été   dit,  devient  un  peu  plus 

petit,  savoir: 


à  une  distance  de  2  décimètres  .  .  . 

.  0,0014495  millim. 

4 

.  0,0014452       „ 

n      )■)            )i           »     "              >7            ... 

.  0,0014382       „ 

etc. 

A  la  rigueur,  comme  le  point  d'appui  c  est  éloigné  de  18  milli- 
mètres de  la  ligne  A  B ,  ces  nombres  doivent  varier  légèrement , 
suivant  que  le  curseur  est  placé  à  droite  ou  à  gauche  de  E; 
mais  la  différence  est  tout  à  fait  négligeable,  et  il  en  est  de 
même  de  l'influence  qu'exerce  sur  ces  nombres  la  distance  de  a 
ou  c  au  miroir,  distance  qui  est  de  28  millimètres. 

La  perpendicularité  du  miroir  au  plan  du  madrier  A  B  et  de 
l'échelle  peut  être  obtenue  facilement,  avec  une  exactitude  suffi- 
sante, par  un  procédé  à  peu  près  semblable  à  celui  qu'on  em- 
ploie ordinairement  pour  rendre  le  grand  miroir  d'un  sextant 
perpendiculaire  au  plan  de  cet  instrument.  Dans  le  cas  présent, 
on  commence  par  s'assurer,  au  moyen  d'un  niveau  ou  de  toute 
autre  manière,  que  la  face  supérieure  du  verre,  sur  lequel  doit 
reposer  la  pièce  mobile  e  f  i  k ,  est  sensiblement  parallèle  au  plan 
A  B  C  D.  Nous  supposons  que  la  lunette  soit  placée  un  peu  plus 


COMPARAISON  EXACTE  DES  MESURES  DE  LONGUEUR.       21 

bas  que  le  milieu  du  miroir  g  h ,  par  exemple  de  deux  centimè- 
tres environ ,  et  que  sur  la  planchette  p  q ,  en  un  point  situé ,  de 
la  même  quantité;  plus  haut  que  le  milieu  en  question,  on  ait 
fait  une  marque  visible.  On  tourne  maintenant  e  fi  k  de  telle 
sorte ,  que  le  miroir  g  h  devienne  à  peu  près  perpendiculaire  à 
la  ligue  A  B ,  puis ,  regardant  par  la  lunette  en  0 ,  on  fait  glis- 
ser p  qr  jusqu'à  ce  que  la  planchette  se  voie  dans  le  miroir.  Si 
cela  n'arrive  pas,  quelle  que  soit  la  position  donnée  au  curseur, 
c'est  un  signe  que  le  miroir  penche  plus  ou  moins  en  avant  ou 
en  arrière ,  et  il  faut  alors  le  redresser  un  peu  sur  son  petit  bloc  ^ 
en  sens  opposé,  jusqu'à  ce  que  l'image  de  la  marque  faite  sur 
la  planchette  p  q  se  montre  à  peu  près  au  milieu  du  miroir. 
Lorsque,  après  quelques  tâtonnements,  on  y  est  parvenu,  on 
dérange  légèrement  la  pièce  e  fi  k,  de  façon  que  le  miroir  g  h 
cesse  d'être  perpendiculaire  à  A  B ,  et  ensuite  on  déplace  le  cur- 
seur de  la  quantité  nécessaire  pour  que,  en  observant  par  la 
lunette,  on  aperçoive  de  nouveau  dans  le  miroir  la  planchette 
p  q.  Si  alors  la  marque  se  voit  à  la  même  hauteur  que  précé- 
demment (à  la  rigueur  un  peu  plus  bas,  mais  la  différence 
est  insensible),  et  s'il  en  est  encore  ainsi  dans  toutes  les 
autres  positions  corrélatives  du  miroir  et  du  curseur,  le  miroir 
g  h  est  perpendiculaire  au  plan  sur  lequel  glisse  e  fi  k,  et , 
en  outre ,  ce  plan  est  parallèle  au  plan  A  B  C  D.  Une  légère 
déviation,  sous  l'un  ou  l'autre  rapport,  est  d'ailleurs  incapable 
d'exercer,  d'une  manière  appréciable,  quelque  influence  nuisible, 
et  cela  d'autant  plus  que  les  longueurs  à  comparer  différent  moins 
entre  elles. 

Pour  qu'on  puisse  juger  du  degré  d'exactitude  que  permet 
d'atteindre  ce  comparateur,  dans  la  construction  réalisée,  je  rap- 
porterai ici  le  résultat  de  la  comparaison  entre  deux  mètres  en 
fer,  numérotés  88  et  90,  qui  appartiennent  au  Bureau  de  Vérifi- 
cation d'Amsterdam,  et  dont  le  premier  est  le  mètre  étalon. 

Le  25  mai  dernier ,  le  thermomètre  Fahrenheit  marquant  50°^  , 
le  mètre  W.  90  fut  placé  sur  le  comparateur;  son  côté  étroit, 
celui   qui   portait   le   numéro,   était   tourné   en  dessous ,  et,  dans 


22  F.    3.    STAMKART.    SUR    UNE    METHODE    SIMPLE    POUR    LA 

cette  position ,  le  contact  des  chevilles  se  faisait  un  peu  au-dessous 
du   centre   des    extrémités  de  la  verge.  On  trouva  que  la  coïnci- 
dence des  deux  traces  P  et  Q  avait  lieu  lorsque  le  curseur  était 
placé  entre  E  et  D,  à  une  distance  de  E  =r  .  .  4-  403,7  millim. 
N".  88,  placé  de  la  même  manière,  donna  +  415,7      „ 

N".  90,  une  seconde  fois 4-  404,0      „ 

N«.  88,    „  „         „ +415,0      „ 

La  distance  était  donc,  en  moyenne,  pour  le  N**.  88,  =:  +  415,35 , 
et  pour  le  N^  90,  =  +  403,85  millimètres;  la  différence  est  de 
11,5  millimètres,  quantité  qui,  multipliée  par  le  facteur  0,001445, 
donne  pour  l'excès  de  longueur  de  N".  88  sur  N^  90,  0,01662 
millimètre. 

Le  talon  mobile  m  l  ayant  été  successivement  déplacé  de  petites 
quantités,  on  trouva  encore: 

28  mai,  température  61^  N**.  88  —  N^  90,  sur  l'échelle 
_l_  34^50  —  23,55  =  10,95  mill.  facteur  0,0014509. . .  0,01589  mill. 
30  mai,  température  67%  N«.  88  —  N".  90,  sur  l'échelle 
— 160,50  +  17 1,00  =10,50  mill.  facteur  0,0014496. . .  0,01522  mill. 
2  juin,   température  64°,   N".  88  —  N^  90,  sur  l'échelle 
—  181,29 +  193,05=11,76  mill.facteur0,0014496...  0,01704  mill. 
Différence  moyenne  des  deux  mètres  0,01619  mill. 

Le  1er  octobre  de  l'année  précédente,  alors  que  le  même  com- 
parateur avait  encore  une  disposition  un  peu  différente,  l'échelle 
C  D  se  trouvant,  entre  autres,  plus  rapprochée,  nous  avions 
obtenu  pour  la  différence  des  deux  mêmes  mètres,  mais  mesurés 
précisément  au  centre  des  extrémités ,  la  valeur  0,0154  millimètre. 

Il  résulte  de  ce  qui  précède,  que  les  mesures  séparées  se  sont 
écartées  de  la  moyenne  de  toutes   les  opérations,  d'une  quantité 

qui    approche    bien    de    —  -   de   millimètre ,    mais   qui   toutefois 

n'atteint  pas  cette  valeur.  Or,  si  l'on  prend  en  considération  que 
le  miroir  n'était  formé  que  d'un  morceau  de  verre  à  glace  ordi- 
naire, de  sorte  que  l'image  réfléchie  de  la  trace  P  ne  se  voyait 
pas  avec  une  entière  netteté  et  paraissait  avancer  par  petits  bonds 


COMPARAISON  EXACTE  DES  MESURES  DE  LONGUEUR.       23 

lorsqu'on   faisait   mouvoir   le  curseur,    ce  qui  pourrait  être  évité 
en  employant  un  verre  mieux  taillé  ;  et  si  l'on  réfléchit ,  en  outre , 

qu'une   différence   de   longueur,    en  plus  ou  en  moins,  de 


1000 

de  millimétré  peut  déjà  résulter  d'une  inégalité  de  tempéra- 
ture de  -  de  degré  Fahrenheit  entre  les  deux  mètres,  on  recon- 

6 

naîtra  que  les  résultats  communiqués  ci -dessus  doivent  être  jugés 
satisfaisants,  ou,  du  moins,  que  l'équivalent  n'a  jamais  été  obtenu 
jusqu'ici  avec  un  comparateur  d'une  construction  aussi  simple  et 
aussi  peu  coûteuse. 

11  va  sans  dire  que  lorsqu'il  s'agira  de  comparer  des  mesures 
à  traits,  entre  elles  ou  avec  des  mesures  à  60W/5,  l'appareil  devra 
subir  quelques  modifications,  de  même  que  dans  d'autres  cir- 
constances spéciales.  Mon  but  était  seulement  de  faire  voir  que 
le  principe  de  la  réflexion,  qui,  dans  son  application  à  l'aiguille 
aimantée,  a  déjà  conduit  à  de  si  belles  découvertes,  peut  aussi 
servir  avec  avantage  à  la  détermination  de  très  petites  différen- 
ces de  longueur. 


SUR  LA 

DÉTERMINATION  DE  PETITES  DIFFÉRENCES  DE  LONGUEUR, 
LA  MESURE  DE  FAIBLES  ÉPAISSEURS  DANS  LES  PETITS  OBJETS, 

ET   l'observation 

DE  FAIBLES  DÉPLACEMENTS  DANS  LES  GRANDS  OBJETS; 

PATI 

P.    J.    STAMKART. 

{Tijdschrift    voor   de    Wis-  en  NatuurJcundige    Wetenschappen,   uitg.  door  de  Eerste 
Masse  van  ket  Kon.  Ned.  Inst.  1851,  T.  IV,  p.  21.) 


La  détermination  d'une  petite  différence  de  longueur  est  un 
problème  qui  se  présente  continuellement  dans  les  applications  de 
la  géométrie;  et  cela  est  tout  naturel,  car  l'exactitude  de  la 
mesure,  soit  des  lignes,  soit  des  arcs  ou  des  angles,  dépend, 
pour  une  grande  partie,  de  la  précision  avec  laquelle  peut  être 
trouvée  une  faible  différence  de  longueur.  Aussi  voit-on  l'exacti- 
tude des  mesures  suivre,  pour  ainsi  dire,  pas  à  pas  l'art  de 
déterminer,  entre  des  limites  de  plus  en  plus  étroites,  ces  mini- 
mes différences.  Les  moyens  dont  on  s'est  servi  pour  mesurer  les 
lignes  avec  précision  sont  essentiellement  au  nombre  de  trois: 
d'abord,  les  transversales ,  qui  figurent  encore  aujourd'hui  sur  les 
échelles  de  nos  étuis  de  mathématiques;  en  second  lieu,  les 
verniers ,  et  en  dernier  lieu ,  les  vis  micrométriques.  Ces  dernières , 
construites  par  des  artistes  habiles,  et  combinées  avec  des  mi- 
croscopes de  lecture,  donnent  actuellement  une  précision  de  me- 
sure, qui  ne  semble  plus  laisser  grand'chose  à  désirer.  Les  ver- 
niers viennent   après   les   vis   micrométriques   sous  le  rapport  de 


F.  J.  STAMKART.  SUR  LA  DETERMINATION  DE  PETITES  ETC.   25 

l'exactitude  qu'ils  permettent  d'atteindre ,  mais  ils  sont  d'un  usage 
plus  étendu,  à  cause  de  la  facilité  des  lectures.  Ils  demandent 
également  d'être  construits  avec  soin.  Les  transversales  ont  dis- 
paru depuis  longtemps  de  nos  instruments  de  précision. 

Un  quatrième  procédé  pour  mesurer  de  petites  différences  de 
longueur  est  celui  que  je  crois  avoir  trouvé  le  premier,  il  y  a 
plus  de  dix  ans,  et  que  j'ai  fait  connaître  dans  le  Konst  en 
Leiterhodej  1839,  N".  36.  Ce  procédé  est  fondé  sur  une  applica- 
tion, modifiée  conformément  à  la  différence  de  but,  du  principe 
de  réflexion,  dont  Gauss  s'est  servi  avec  tant  de  succès  pour  la 
mesure  des  déviations  de  l'aiguille  aimantée.  La  précision  que 
ma  méthode  comporte  est,  j'en  ai  la  confiance,  au  moins  égale 
à  celle  que  donnent  les  vis  micrométriques,  à  condition  que  les 
différences  à  mesurer  soient  très  petites.  De  plus,  l'appareil  ne 
dépend  pas,  au  même  degré,  de  l'habileté  de  la  construction,  ce 
qui  le  rend  moins  coûteux.  Dans  les  années  qui  se  sont  écoulées 
depuis  ma  première  Note,  j'ai  eu  fréquemment  l'occasion  de  faire 
usage  de  cette  méthode  pour  la  comparaison  de  mesures  de  lon- 
gueur, d'y  apporter,  suivant  l'occurrence,  de  légères  modifica- 
tions, et  aussi  de  l'appliquer  à  des  fils  suspendus  verticalement 
ou  fils  à  plomb;  de  sorte  que  je  crois  avoir  des  motifs  suffisants 
pour  revenir  aujourd'hui  sur  ce  sujet.  J'aurais  toutefois  tardé 
encore  à  faire  cette  communication,  si  les  Astronomische  Nachrich- 
ten,  N".  684,  n'avaient  publié  la  description  d'un  nouveau  cercle 
méridien,  de  l'invention  de  M.  Steinheil,  description  d'où  il  ré- 
sulte que  M.  Steinheil  a  également  conçu  l'idée  de  déterminer 
les  petites  différences  de  longueur  au  moyen  d'un  miroir.  M.  Stein- 
heil donne  à  ce  miroir  le  nom  très  convenable  de  Fûhlspiegel 
(miroir  palpeur)  et  dit  qu'il  a  aussi  appliqué  le  principe  à  la 
comparaison  des  mesures  à  bouts,  sur  laquelle  il  promet  une  com- 
munication ultérieure.  Cette  communication  toutefois,  si  elle  a 
paru,  n'est  pas  encore  venue  à  ma  connaissance.  La  Classe 
voudra  donc  bien  me  permettre  de  lui  exposer  brièvement,  à  ce 
sujet,  quelques  idées  qui  me  sont  propres. 

On   sait  comment,   dans   les   octants  et   les   sextants,   l'angle 


26  F.  J.  STAMKART.  SUR  LA  DÉTERMINATION  DE  PETITES 

compris  entre  deux  objets  se  mesure  par  le  double  de  l'angle  que 
font  entre  eux  les  deux  miroirs.  L'un  de  ceux-ci,  celui  qu'on 
appelle  le  petit  miroir,  est  fixé  sur  l'instrument,  tandis  que 
l'autre  tourne  autour  d'un  axe.  Chaque  point  de  ce  dernier 
miroir,  le  grand,  décrit  dans  ce  mouvement  un  arc  d'un  même 
nombre  de  degrés,  mais  qui,  sous  le  rapport  de  l'étendue,  est 
plus  long  ou  plus  court  suivant  la  distance  du  point  à  l'axe  de 
rotation.  Toutefois,  comme  le  miroir  lui-même  est  petit,  les  lon- 
gueurs des  arcs  parcourus  par  ses  différents  points  restent  aussi 
toujours  petites,  et  il  en  est  de  même  de  leurs  sinus.  Si  l'on 
suppose  maintenant  que  l'angle,  mesuré  par  l'octant  ou  le  sex- 
tant, soit  connu  de  quelque  autre  manière,  il  est  facile  de 
calculer  aussi  la  longueur  de  l'arc  qui  a  été  décrit  par  un  point 
quelconque  du  miroir,  situé  à  une  distance  connue  de  l'axe. 
Dans  les  magnétomètres ,  le  miroir  est  fixé  sur  le  barreau  aimanté  ; 
on  connaît  la  distance  du  miroir  à  l'échelle,  et  les  divisions  de 
cette  échelle  se  lisent  dans  le  miroir.  Par  là,  se  trouve  déterminé 
l'angle  que  le  miroir  décrit  autour  de  l'axe,  ainsi  que  les  arcs 
que  décrivent  autour  de  ce  même  axe  les  divers  points  du  miroir. 
Faire  servir  les  sinus  de  ces  arcs  comme  mesures  des  petites 
différences  de  longueur,  tel  est,  en  peu  de  mots,  le  principe  de 
la  méthode  que  j'ai  appliquée  à  l'évaluation  de  ces  différences. 

Le  procédé  donné  en  1839,  dans  le  Konst-  en  Lelterbode ,  pour 
comparer  deux  mètres,  ou,  en  général,  deux  mesures  de  lon- 
gueur différant  peu  entre  elles,  se  réduit  à  ceci:  Soit  E  (PL  I 
fig.  2)  un  point  d'appui  fixe;  EB  une  mesure  à  bouts  y  en  contact 
avec  ce  point  fixe;  A  un  petit  plan  d'environ  1  millimètre  carré , 
perpendiculaire  à  la  direction  E  B,  et  servant  également  de 
point  d'appui;  F  G  H  I  un  parallélépipède  de  bois,  qui  repose,  par  trois 
points  d'appui  arrondis  (non  figurés)  sur  un  plan  horizontal,  a 
la  surface  duquel  il  peut  se  déplacer.  En  avant,  cette  pièce  est 
garnie  de  deux  pointes  d'acier  ou  de  cuivre  FA  et  G  B ,  et  en 
dessus  elle  porte  un  petit  miroir  vertical  C  D. 

Pour  comparer  une  mesure  de  longueur  E  B  avec  une  autre 
mesure   de  longueur   EB',  on  les  applique,  l'une  après  l'autre, 


DIFFÉRENCES    DE     LONGUEUR,    LA    MESURE    DE     FAIBLES    ETC.       27 

contre  le  point  d'appui  E ,  et  on  fait  glisser  la  pièce  G  F  H I 
de  manière  que  les  pointes  FA  et  G B  viennent  toucher  respec- 
tivement le  petit  plan  A  et  l'extrémité  B  ou  B'  de  la  mesure  de 
longueur.  Il  est  clair  que,  si  les  deux  mesures  ont  une  longueur 
égale  y  le  miroir  C  D  prendra  dans  les  deux  cas  une  même  direc- 
tion ;  mais  que ,  à  la  moindre  différence  B  B'  des  mesures  de 
longueur,  les  deux  positions  du  miroir  feront  un  angle  entre 
elles.  Si  maintenant,  comme  dans  les  magnétomètres ,  ces  posi- 
tions du  miroir  ont  été  observées  chaque  fois  sur  une  échelle,  on 
pourra  calculer  l'angle  qu'elles  comprennent  entre  elles.  Soit  cet 
angle  B  A  B'  =  « ,  et  la  distance  des  pointes  A  B  et  A  B'  =i  r, 
on  aura  pour  la  différence  des  mesures  de  longueur  B  B'  =  r  sin  «. 
On  peut  se  faire  une  idée  plus  ou  moins  exacte  de  la  précision 
que  comporte  cet  appareil  si  simple,  à  l'aide  des  mesures  rap- 
portées dans  le  numéro  cité  du  Konst-  en  Lelterbode.  D'après  ces 
données ,  on  a  trouvé  pour  la  différence  entre  deux  mètres  étalons  : 

le  25  mai  1839 0,01662  mm. 

„  28     „        „      0,01589     „ 

„  30     „        „      0,01522     „ 

„     2  juin      „      ,  .  .  .  0,01704     „ 

Moyenne.  .  .  0,01619  mm..     Erreur 
prob.  =  ±  0,00027  mm. 

Un  second  procédé  de  comparaison  de  deux  mesures  de  lon- 
gueur est  représenté  dans  la  figure  3.  Ici,  A  et  B  sont  deux 
points  d'appui  fixes,  contre  lesquels  on  applique  alternativement 
les  mesures  A  B  et  CD;  F  E  indique  la  position  du  miroir 
quand  A  C  s'appuie  contre  A  et  B  D  contre  B;  E'  F'  est  la 
position  du  miroir  lorsque  les  mesures  ont  été  substituées  l'une 
à  l'autre,  c'est-à-dire,  lorsque  AC  occupe  la  position  BC,  et 
B  D  la  position  AD'.  Il  est  évident  que  l'angle  formé  par  les 
deux  directions  E  F  et  E  F'  du  miroir  doit  maintenant  être  le 
double  de  celui  qu'on  obtenait  dans  la  première  méthode  de 
comparaison,  représentée  par  la  figure  2.  Par  conséquent,  si  r 
exprime   de  nouveau  la  distance  des  pointes  A  et  B  de  la  pièce 


28  F.    J.    STAMKART.    SUR    LA     DÉTERMINATI0]V    DE    PETITES 

de   bois,   fig.   2,   et  «  l'angle   entre   les   deux  directions  EF  et 
E' F',  fig.  3,  on  aura  dans  le  cas  actuel: 

Différence   des  mesures  de  longueur  =zr  x  sin  -  «. 

Cette  méthode  paraît  mériter  la  préférence  sur  celle  qui  a  été 
décrite  en  premier  lieu,  mais  je  n'en  ai  pas  encore  fait  l'essai. 
Chacune  de  ces  deux  méthodes  de  comparaison  exige  le  rempla- 
cement des  mesures ,  ce  qui  doit  naturellement  se  faire  en  évitant 
le  contact  immédiat  avec  les  doigts,  afin  de  ne  pas  donner  lieu 
à  une  dilatation  inégale  par  la  chaleur.  Le  moyen  le  plus  simple 
consiste  à  saisir  les  règles  avec  un  linge.  Il  est  facile  aussi  d'im- 
merger tout  l'appareil,  savoir,  les  règles,  les  points  d'appui  fixes 
et  la  pièce  qui  porte  le  miroir,  dans  un  liquide,  par  exemple 
dans  l'eau  5  le  miroir  seul  doit  alors  rester  en  dehors  du  liquide. 
Pour  assurer  la  permanence  du  contact,  tant  contre  les  points 
d'appui  fixes  qu'entre  les  pointes  de  la  pièce  mobile  et  les  extrémités 
des  règles,  on  peut,  si  l'on  veut,  faire  usage  de  ressorts  à  pres- 
sion légère;  toutefois,  les  résultats  communiqués  ci-dessus,  et 
obtenus  sans  l'emploi  de  ressorts,  paraissent  indiquer  que,  même 
en  l'absence  de  cette  précaution,  les  contacts  peuvent  être  main- 
tenus d'une  manière  satisfaisante. 

La  figure  4  représente  un  mode  de  comparaison  dans  lequel  les 
mesures  de  longueur  restent  invariablement  en  place,  sans  qu'il 
y  ait  à  y  toucher,  tandis  que  le  miroir  est  appliqué  successive- 
ment ,  par  les  pointes  saillantes  de  la  pièce  qui  le  porte ,  contre  les 
extrémités  A  et  C  et  contre  les  extrémités  B  et  D.  Dans  cette  manière 
d'opérer,  les  points  d'appui  fixes  des  deux  figures  précédentes 
disparaissent  complètement.  Il  est  évident  que,  si  les  mesures  de 
longueur  A  B  et  C  D  sont  égales  entre  elles,  les  droites  qu'on 
peut  mener  de  A  en  C  et  de  B  en  D  seront  parallèles,  mais 
que  ces  droites  devront  former  un  certain  angle,  pour  peu  que 
les  deux  mesures  diffèrent. 

Soit  maintenant  N  M  une  ligne  droite ,  parallèle  à  la  direction 
des  deux  règles ,  et  plaçons ,  aussi  bien  du  côté  de  N  que  du  côté  de 
M,  une  lunette  et  une  échelle  divisée:  la  première  lunette  tournée  vers 


DIFFÉRENCES    DE    LONGUEUR,     LA     MESURE    DE    FAIBLES    ETC.       29 

M  et  la  seconde  vers  N,  de  manière  qu'elles  se  regardent  réci- 
proquement. On  commence  par  déterminer ,  dans  la  lunette  placée 
en  N,  l'angle  de  la  ligne  N  M  avec  la  perpendiculaire  au 
plan  réfléchissant  F  E.  Ensuite ,  on  enlève  la  pièce  F  E  H  G , 
on  l'applique  contre  les  extrémités  B  et  D,  dans  la  position 
F'E'H'G',  et  on  détermine,  par  observation  dans  la  lunette  en 
M,  l'angle  que  fait  avec  la  même  droite  N  M  la  perpendiculaire 
au  plan  E' F'.  Si  les  deux  angles  ainsi  obtenus  sont  égaux,  et 
si,  dans  les  deux  cas,  les  perpendiculaires  s'écartent  de  la  direction 
NM  vers  le  même  côté  de  l'observateur,  il  est  clair  que  les  plans 
F  E  et  F'  E'  sont  parallèles  et  que  les  mesures  de  longueur  A  B 
et  G  D  sont  égales.  Mais ,  supposons  que  le  premier  angle  soit 
=  « ,  le  second  =  «%  et  la  distance  A  G  =  B  D  des  pointes  saillan- 
tes fixées  à  la  pièce  mobile ,  comme  précédemment ,  =  r  ;  on  a  alors  : 

Différence  des  mesures  de   longueur  =  r  (sin.  ^'  —  sin  «). 

Une  condition  nécessaire,  dans  cette  manière  d'opérer,  est  que 
les  directions,  suivant  lesquelles  on  vise  de  N  vers  M  et  vice- 
versâ  de  M  vers  N,  soient  directement  opposées.  A  cet  effet, 
on  pourra  disposer  dans  le  prolongement  de  N  M,  aux  deux 
extrémités,  des  signes  méridiens,  tels  que  des  fils  verticaux 
noircis,  se  projetant  sur  un  fond  blanc.  Les  distances  de  ces 
signes  aux  lunettes  devront  être  égales  aux  chemins  que  les 
rayons  lumineux  ont  à  parcourir  des  échelles  divisées  aux  lunet- 
tes. Si  alors  on  tend  un  mince  fil  métallique  de  N  en  M,  entre 
ces  signes  méridiens,  les  centres  des  objectifs  des  deux  lunettes 
devront  tomber  verticalement  au-dessous  de  ce  fil  tendu,  ce  qui 
peut  s'obtenir  avec  une  précision  suffisante. 

La  circonstance  qu'on  n'a  plus  à  toucher  aux  mesures  à  com- 
parer, une  fois  qu'elles  sont  en  place,  fait  que  la  méthode  décrite 
en  dernier  lieu  convient  particulièrement  quand  il  s'agit  de  con- 
fronter de  longues  règles,  de  celles,  par  exemple,  qui  ont  5 
mètres  de  longueur.  De  pareilles  règles,  pour  offrir  la  solidité 
nécessaire,  ont  besoin  aussi  d'avoir  une  plus  grande  épaisseur 
et,  par  conséquent,  un  plus  grand  poids,  ce  qui  rend  la  substitu- 


30         F.  J.  stamkart.  sur  la  détermination  de  petites 

tion  de  Tune  à  l'autre,  telle  que  l'exigent  les  deux  premières 
méthodes,  peu  commode,  et  surtout  gênante  lorsqu'on  veut  répé- 
ter la  comparaison  un  certain  nombre  de  fois.  Pour  mettre  de  la 
diversité  dans  les  mesures  suivant  la  figure  4,  on  peut  faire 
glisser  un  peu  dans  la  direction  NM  l'une  des  règles,  ce  qui 
donne  nécessairement  une  autre  valeur  à  chacun  des  angles  "  et  «' , 
sans  apporter  aucun  changement  à  la  différence  sin  «  —  sin  <i\ 
Même  alors  toutefois,  après  qu'on  a  fait  un  nombre  suffisant  de 
comparaisons  dans  la  position  indiquée  par  la  figure,  il  est  bon 
d'échanger  les  règles  une  fois ,  de  mettre  A  B  à  la  place  de  C  D 
et  vice-versâ,  puis  de  répéter  les  comparaisons.  Par  là,  on  élimine 
aussi  les  légères  erreurs  qui  pourraient  provenir  de  ce  que  les 
lunettes  ne  se  dirigeraient  pas  avec  une  exactitude  absolue  sui- 
vant une  même  ligne  N  M ,  ou  de  ce  que  le  plan  du  miroir  F  E 
ne  serait  pas  parfaitement  ou  suffisamment  parallèle  à  la  ligne 
AC,  qui  joint  les  points  A  et  C,  parallélisme  que  nous  avons 
supposé  exister,  au  moins  d'une  manière  approchée.  En  général, 
la  substitution  réciproque  des  règles  (quand  on  prend  ensuite  le 
résultat  moyen),  fait  disparaître  toutes  ces  petites  erreurs  qui 
tendraient  à  leur  attribuer  une  inégalité  purement  apparente. 

Au  mois  de  juillet  1843,  j'ai  comparé  par  ce  procédé,  pour 
notre  savant  collègue  M.  F.  Kaiser,  deux  règles  en  fer  de  cinq 
mètres,  tant  entre  elles  qu'avec  une  longueur  composée  de 
5  mètres  placés  bout  à  bout.  Ces  règles,  construites  par  M.  E. 
Wenckebach,  d'Amsterdam,  se  trouvent  maintenant  à  l'observa- 
toire de  Leyde. 

Jusqu'ici  il  n'a  été  question  que  de  la  comparaison  de  deux 
mesures,  toutes  deux  à  bouts -^  pour  la  comparaison  d'une  mesure 
à  bouts  avec  une  autre  à  traits,  le  principe  de  la  réflexion  s'ap- 
plique avec  le  même  succès,  seulement  avec  le  secours  addi- 
tionne] d'un  microscope  fixe,  pourvu  de  fils  au  foyer.  Voici,  par 
exemple ,  comment  on  pourra  procéder.  Soient ,  figure  5 ,  A  B 
une  mesure  à  bouts ,  E  F  une  autre  à  traits ,  C  et  D  les  traits 
qui  sur  cette  dernière  indiquent  les  extrémités  de  la  mesure,  et 
G  H  le  microscope.  On  placera  les  deux  règles  A  B  et  F  E  bout 


DIFFÉRENCES    UE    LONGUEUR,    LA     MESURE    DE    FAIBLES    ETC.       31 

à  bout,  et  de  façon  que  le  trait  limite  D  se  voie  exactement 
sous  l'un  des  fils  du  microscope.  Cela  peut  se  faire  aisément,  en 
appuyant  les  deux  mesures  en  F  contre  l'extrémité  d'une  vis  de 
rappel ,  de  telle  sorte  que  le  trait  D  tombe  originellement  un 
peu  à  gauche  du  microscope.  Il  suffit  alors  de  tourner  la  vis, 
pour  que  les  deux  mesures  avancent  simultanément  et  que  le  trait 
D  arrive  sous  le  microscope.  Cela  obtenu,  on  étudie  à  l'aide 
du  miroir,  de  la  manière  indiquée  en  premier  lieu,  fig.  2,  la 
position  de  l'extrémité  B.  Ensuite,  on  enlève  la  mesure  A  B, 
et  on  déplace  la  mesure  E  F ,  de  façon  que  le  trait  limite  C 
vienne  sous  le  microscope;  au  cas  où  les  mesures  sont  parfaite- 
ment égales,  l'extrémité  E  doit  alors  tomber  exactement  en  B. 
On  détermine  de  nouveau  à  l'aide  du  miroir  la  position  de  E, 
et  de  la  différence  entre  les  deux  indications  du  miroir  se  déduira 
la  différence  des  deux  mesures  de  longueur.  Il  va  sans  dire  qu'il 
faudra  recommencer  ensuite  la  première  opération  de  mesure. 

La  comparaison  de  deux  mesures  à  traits  peut  être  effectuée 
de  la  manière  suivante  :  G  H  et  E  F ,  fig.  6 ,  représenteront  les 
règles,  A  et  B,  C  et  D  les  traits  qui  marquent  les  extrémités 
des  mesures.  On  dispose  de  nouveau  les  règles  bout  à  bout,  puis 
on  dirige  un  microscope  sur  le  trait  limite  D,  un  autre  sur  le 
trait  limite  B:  ces  deux  microscopes  doivent  être  fixés  dans  cette 
position  d'une  manière  invariable.  On  déplace  ensuite  les  deux 
règles  de  façon  à  amener  le  trait  limite  C  sous  le  premier  mi- 
croscope en  C;  en  cas  d'égalité  absolue,  le  trait  limite  A  tom- 
bera alors  sous  le  second  microscope  S'il  n'en  est  pas  ainsi,  si 
A  tombe  en  A',  un  peu  à  gauche,  on  ajuste  le  petit  miroir 
contre  une  des  extrémités  F'  ou  H',  C  restant  sous  le  premier 
microscope,  et  on  note  la  position  du  miroir.  Ensuite,  on  amène 
A'  exactement  sous  le  second  microscope  en  A",  et  on  étudie  de 
nouveau,  à  l'aide  du  miroir,  la  position  de  F'  ou  de  H':  la 
différence  entre  les  deux  indications  fera  connaître  la  différence 
des  mesures.  Au  lieu  d'opérer  comme  il  vient  d'être  dit,  il  sera 
peut-être  plus  simple  de  diriger  les  microscopes  sur  les  deux 
traits   limites,    par   exemple   C    et    D,    d'une    des  mesures,  puis 


32  p.    J.    STAMKART.    SUR    LA    DETERMINATION    DE    PETITES 

d'enlever  cette  mesure  et  de  mettre  l'autre  à  sa  place.  Si  l'on 
éprouvait  quelque  difficulté  à  pointer  simultanément,  avec  une 
exactitude  suffisante,  chacun  des  deux  microscopes  sur  un  des 
traits  limites,  on  pourrait  déterminer  au  moyen  du  miroir  la 
différence  restante,  et  c'est  peut-être  là  le  procédé  le  plus  con- 
venable de  tous.  On  ne  glisse  alors  qu'un  des  traits  limites  sous 
le  microscope ,  et  on  prend  l'indication  du  miroir  ;  puis  on  amène 
l'autre  trait  limite  sous  le  second  microscope,  et  on  consulte  de 
nouveau  le  miroir.  Il  est  clair  qu'on  peut  aussi,  de  cette  manière , 
étudier  l'égalité  des  divisions  d'une  règle  graduée. 

Ce  qui  vient  d'être  dit  suffit  pour  montrer  comment  on  par- 
viendra, dans  chaque  cas,  à  déterminer  de  petites  différences  de 
longueur  par  l'application  du  principe  de  réflexion.  Je  veux 
maintenant  exposer  encore  une  méthode  propre  à  faire  connaître, 
en  général,  la  différence  entre  deux  mesures  de  longueur,  et 
cela  sans  emploi  obligé  de  règles  exactement  graduées  ou  de 
longues  vis  micrométriques,  mais  uniquement  à  l'aide  du  miroir 
et  de  quelques  petites  règles,  qui,  à  leur  tour,  peuvent  être 
étudiées,  chacune  à  part,  et  une  fois  pour  toutes,  au  moyen 
du  miroir. 

Le  miroir  ne  se  prête  naturellement  qu'à  la  détermination  de 
petites  différences  de  longueur,  que  nous  admettrons  devoir  at- 
teindre tout  au  plus  1,1  à  1,2  mm.  Supposons  maintenant  qu'il 
s'agisse  de  comparer  deux  mesures  ayant  une  différence  de  lon- 
gueur notablement  plus  grande,  par  exemple,  une  mesure  prus- 
sienne de  3  pieds  et  un  mètre,  mesures  que  nous  supposerons 
être  toutes  deux  à  bouts.  Si ,  à  la  plus  courte  des  deux  mesures , 
dans  le  cas  actuel  à  la  mesure  prussienne  de  3  pieds,  on  jux- 
tapose bout  à  bout  une  longueur  connue,  choisie  de  telle  sorte 
que  l'ensemble  soit  égal,  à  lii  1  mm.  près,  à  la  mesure  la  plus 
longue,  c'est-à-dire  au  mètre,  la  différence  restante  pourra 
être  déterminée  au  moyen  du  miroir;  ou,  d'une  manière  plus 
générale,  si  à  l'une  et  à  l'autre  mesure  on  ajoute  des  rallonges, 
dont  la  différence  soit  exactement  connue  et  s'accorde,  à  moins 
de  1  mm.  près,   avec   la  différence  des  mesures,  —  la  rallonge 


DIFFÉRENCES    DE    LONGUEUR,    LA    MESURE    DE    FAIBLES   ETC.       33 

la  plus  courte  s'ajoutant  à  la  mesure  la  plus  longue  et  vice- 
versâ,  —  on  peut  ensuite  trouver,  à  l'aide  du  miroir,  la  petite 
différence  qui  subsiste  entre  ces  mesures  allongées.  La  question 
se  trouve  donc  réduite  à  savoir  réaliser,  dans  tous  les  cas  qui 
peuvent  se  présenter,  les  rallonges  nécessaires.  Pour  cela,  j'ai 
fait  confectionner,  ou  ai  confectionné  en  partie  moi-même,  les 
règles  suivantes: 

1  °.  Une  règle  de  5  décimètres =  0,5  mètre 

^"'         ?7  11  11      ^  11  ^^  ^1^         11 

3".  Trois  règles,  chacune  de  1  décimètre,  ensemble  =  0,3     „ 
Lesquelles,  ajoutées  bout  à  bout,  font  une  longueur  de  1,00  mètre. 

Ensuite,  un  décimètre  divisé  de  la  même  manière,  et  composé 
par  conséquent  de: 

4".  Une  règle  de  5  centimètres =  0,05  mètre 

^^'11        11       11    ^  11         ^^  ^fi^     11 

6^  Trois  règles,  chacune  de  1  centimètre,  ensemble  =  0,03     „ 
Lesquelles,  ajoutées  bout  à  bout,  font  une  longueur  de  0,10  mètre. 

Enfin,   la   même   longueur   de   un   décimètre,  mais  divisée  en 
neuf  parties,  et  composée  de: 

7".  Deux  règles,  chacune  de  335- mm.  de  long, 

ensemble =  0,066|  mètre 

8".  Trois  règles,  chacune  de  11 J  mm.  de  long, 

ensemble  • =  0,0334-      „ 

Lesquelles,    ajoutées    bout    à    bout,    font    de 

nouveau  une  longueur  de =:  0,100    mètre. 

Toutes  ces  règles,  grandes  et  petites,  peuvent,  à  l'aide  du 
miroir,  être  comparées  entre  elles  et  avec  le  mètre.  On  com- 
mence, par  exemple,  par  les  trois  règles  de  1  décimètre,  qu'on 
compare  entre  elles;  puis,  on  compare  le  double  décimètre  avec 
deux  décimètres  juxtaposés  ;  ensuite ,  la  règle  de  5  décimètres  est 
comparée  avec  trois  décimètres  et  le  double  décimètre,  unis  bout 
à  bout;  enfin,  la  série  0,5  +  0,2  +  3x0,1  est  comparée  avec 
Archives  Néerlandaises,  T.  V.  3 


34  F.    J.    STAMKAUT.    SUR    LA    DETERMINATION    DE    PETITES 

le  mètre  entier:  on  peut  alors  calculer,  pour  chacune  des  sub- 
divisions séparément,  l'erreur  qui  l'aifecte. 

On  procède  de  la  même  manière  à  l'égard  des  règles  de  plus 
petite  dimension,  qui  sont  comparées  entre  elles,  et  dont  l'assem- 
blage est  comparé  avec  un  des  décimètres.  La  subdivison  de 
l'unité,  mètre  ou  décimètre,  en  dixièmes  et  en  neuvièmes  y  au 
moyen  de  règles,  aurait  aussi  pu  se  faire  d'une  autre  manière  *). 

Pour  comparer  maintenant  avec  le  mètre  la  longueur  d'une 
règle  quelconque ,  que  nous  supposerons  plus  courte  que  le  métré , 
il  est  clair  d'abord  qu'on  peut  assembler  autant  de  décimètres, 
ou  autant  plus  un,  que  la  règle  en  compte  en  nombres  ronds, 
ce  qui  donne  une  règle  composée,  différant  de  moins  de  100  mm., 
en  plus  ou  en  moins,  de  la  règle  proposée.  Soit  la  différence  x 
intermédiaire  entre  a  Qi  a -\-  1mm.:  il  faut  alors  composer ,  avec 
des  9èmes  et  des  lO^mes  parties  de  décimètre,  une  rallonge  com- 
prise entre  ces  limites.  A  cet  effet,  réduisons  la  différence  x  en 
QOèmes  ^e  décimètre,  et  soit 

X  >  — L L  et  <  — ^ ^ décimètres , 

90  90 

p  et  q  représentant  des  nombres  entiers  ^9.  On  a  alors,  S 
étant  un  nombre  entier  quelconque: 

-^^*  =  (/>  + Î-SS)  X  1  +  (10S-?)x  i 

En  remplaçant ,  dans  cette  formule ,  p  et  q  par  leurs  valeurs  numé- 
riques, et  donnant  ensuite  à  S  une  valeur  telle,  que  p  +  q  —  9  S 


1)  Ce  qu'il  y  aurait  de  plus  rationuel,  ce  serait  de  réaliser  la  division  en  10 

..,.,,  -     1       2       3       4       5       6       7       8       9 

parties  par  9  reg.es,  d  une  longueur  ^e  -  ,  ^ .  ^  .  -  >  ^  ,  ^  ,  -^^  ,  -^-  ,  ^^  , 

avec  addition  d'une  seconde  règle  de  _  -  ^  pour  la  vérification  de  toutes  les  autres  ; 

12  8 

et  pareillement ,    la  division    en  9  parties ,  par  8  règles  =  ^  .   ïï  "  "  '  "  "q  -    ^^^^ 

encore    une    =  —      De    cette  manière,  on  n'aurait  jamais  à  assembler  plus  de 
deux  règles,  ce  qui  est  certainement  un  avantage. 


DIFFÉRENCES    DE     LONGUEUR^    LA     MESURE    DE    FAIBLES    ETC.       35 

reste  <  9  et  10  S  —  q  <10  7    ce   qui   est   toujours   possible^   on 

trouve   le   nombre   de  O^mes  et  de  lO^^ii^s  ^n  décimètre,  qui,  pris 

ensemble,  constituent^  à  moins  de  ih  ly^  mm.  près ,  une  rallonge 

de  X  mm.,  ou  bien,  dont  la  différence  s'élève  à  jo  mm. 

Prenons,   comme   exemple,    une    règle   de   3  pieds  de  Prusse: 

désignant  cette  longueur  par  «,  on  a 

a  =  0,94156  mètre. 

Cette   longueur   peut  être  comparée  soit  avec  une  longueur  de  9 

décimètres,  soit  avec  le  mètre  :  dans  le  premier  cas,  x  =  41,56  mm. 

37,4    ,,  .  37     ,        38     ^,  , 

z=  - — ^   decim.   >    —  et  <  —    Nous  avons  donc: 
90  90  90* 

10.  ;^zi:3,(?  =  7et^>  (10—9  S)  X  ^  +  (lOS— 7)x-i-décim., 

2'.  p=:3,q  =  Setx<,  (11—9  S)  X  -  -h  (lOS— 8)  x  —   décim. 

Dans  l'un  et  l'autre  cas,  on  ne  peut  prendre  que  S  n=  1,  ce  qui  donne  : 

1  3     .,  . 

ip  >  -    H-    —  decim. 
9  10 

X  <:       H-   —  décim. 
9  10 

On   peut   donc   comparer   le  triple  pied  de  Prusse,  au  moyen 

du  miroir,  avec  une  longueur  de: 

(9+  1  +    —)  décim.  zz:  0,94111  mètre. 
V         9  10/ 

(2  2  \ 

9  H —  4-   —  I  décim.  :=  0,94222  mètre. 
9         10/ 

Si  l'on   veut  comparer   la   mesure   de  3  pieds  de  Prusse  avec 

le  mètre  lui-même,  celui-ci  est  la  règle  la  plus  longue,  et  l'on  a* 

X  =  58,44  mm.  =z  — —  décim. ,  c.-à-d.  >  et  <  —  décim. , 

90  '  90  90 

par  conséquent: 

V,  p  =  6,q^2eix:>(l  —  9^)x  ^  +  (lOS  — 2)x  -décim. 

2».  /?=:5,^=:3eta?<(8~9S)x  1  4-(10S  — 3)  X  —  décim. 

3* 


36  F.    J.    STAMKART.    SUR    LA    DETERMINATION    DE    PETITES 

Dans  ces  deux  cas ,  on  peut  faire  S  =  0  et  S  =  1  ;  on  obtient 
ainsi  : 

n        2  3        8^    ,         /8       3  1        7x  ,,  . 

x>  \     —  —  = h       \eta;<     -  —  —  = — -  +  —  \  decim. 

V9        10  9  ^  lOJ  V9      10  9  ^  10 j 

On  comparera  donc: 
7 
a_i décim.  =  1,01934  mètre  1 

^9  '  ( 

avec  lm.+-l       „        =1,02000     „     j 

ou    a-\ décim.  =  1,02156      „ 

avec  lm.4-?.      „        =1,02222      „ 
y 

OU    a-{ décim.  =  1,03045     „ 

avec  Im.+A      „        =1,03000     „     \ 

7         . 

ou  enfin    a -4 décim.  :=  1,01156      ,.     j 

^10  ( 

avec  Im.  4--        „        =1,01111 

Dans  chacun  de  ces  quatre  cas,  de  même  que  dans  les  deux 
précédents,  la  différence  des  règles  qu'il  s'agit  de  comparer  est 
inférieure  à  1  mm.,  et  cette  différence  peut  être  déterminée  ex- 
actement au  moyen  du  miroir;  d'ailleurs,  il  reste  une  lati- 
tude suffisante  pour  qu'on  puisse  varier  les  épreuves  expéri- 
mentales autant  qu'il  est  nécessaire  pour  se  prémunir  contre  les 
chances  d'erreur. 

Un  point  essentiel,  dans  cette  manière  d'opérer,  est  que  les 
contacts  entre  toutes  les  règles,  grandes  et  petites,  qui  doivent 
être  juxtaposées,  soient  bien  intimes  et  qu'ils  se  fassent  toujours 
dans  les  mêmes  points.  A  cet  effet,  les  subdivisions  du  mètre,  jus- 
qu'au décimètre  inclusivement,  sont  taillées  à  l'un  des  bouts  en 
plan  perpendiculaire  à  la  direction  longitudinale ,  et  à  l'autre 
bout  en  calotte  sphérique.  Les  règles  plus  petites,  ou  subdivisions 


i 


DIFFÉRENCES    DE    LONGUEUR,    LA    MESURE    DE    FAIBLES    ETC.       37 

du  décimètre,  sont  cylindriques,  faites  de  fil  d'acier  d'une  épais- 
seur de  4  mm.  Leurs  extrémités  pourraient  être  taillées  de  même 
en  surface  plane  et  en  surface  sphérique.  Mais,  en  réalité,  j'ai 
donné  à  ces  extrémités  la  forme  de  coins  tronqués,  disposés  de 
telle  sorte  que  les  arêtes  des  faces  terminales  se  croisent  à  angle 
droit.  Pour  assembler  ces  petites  règles ,  on  peut  les  placer  entre 
deux  plans  inclinés,  formant  une  espèce  de  gouttière,  qui  les 
élèvent  à  la  hauteur  de  l'axe  des  grandes  règles  qu'elles  doivent 
prolonger,  ou  des  points  d'appui  contre  lesquels  elles  doivent 
buter.  On  fera  faire,  par  exemple,  9  petits  blocs  de  bois,  de  la 
forme  indiquée  dans  la  fig.  7,  pour  porter  les  divisions  décimales 
du  décimètre,  et  8  autres  petits  blocs  destinés  aux  divisions 
novénaires.  La  longueur  A  B  de  chacun  de  ces  petits  blocs  doit 
naturellement  être  un  peu  moindre  que  la  longueur  de  la  règle 
simple  ou  composée  qu'il  doit  recevoir,  afin  que  les  extrémités 
de  la  règle  dépassent  un  peu  le  support.  De  cette  manière,  ces 
règles  pourront  être  placées ,  par  exemple ,  entre  les  points  d'appui 
fixes  A  et  B  (fig.  3)  et  les  mesures  de  longueur  qu'il  s'agit  de 
comparer,  ou  bien  contre  le  point  d'appui  E,  fig.  2.  Du  reste, 
la  forme  à  donner  aux  supports  des  petites  règles  est  chose  acces- 
soire, et  l'on  pourra  adopter  d'autres  dispositions  si  on  le  juge 
préférable.  Mon  seul  but  a  été  ici  d'indiquer  le  principe  à  l'aide 
duquel  on  peut,  sans  règles  divisées,  combiner  un  comparateur 
qui  convienne  pour  toutes  les  longueurs  quelconques. 

Une  autre  application  du  miroir ,  comme  instrument  de  mesure , 
consiste  dans  la  détermination  d'une  petite  épaisseur , -psiY  exemple , 
du  diamètre  d'un  fil  métallique  délié.  La  manière  dont  je  m'y 
suis  pris  est  représentée  dans  la  fig.  8.  E  est  encore  une  pièce 
de  bois,  portant  un  petit  miroir  E  F.  Cette  pièce  repose  sur  trois 
petits  pieds  minces  d'acier  G,  G'  et  H,  pour  lesquels  on  a  pris 
des  aiguilles  ordinaires,  épaisses  de  0,7  mm.,  qui  ont  été 
cassées  au  bout,  puis  usées  suivant  une  surface  plane.  Les  sur- 
faces terminales  G  et  G'  sont  des  rectangles,  dont  les  côtés  longs 
se   trouvent   dans   le   prolongement   l'un   de   l'autre.    La  surface 


38     p.  J.  STAMKART.  SUR  LA  DETERMINATION  DE  PETITES 

terminale  de  H  est  un  segment  de  cercle,  dont  l'arc  mesure  en- 
viron 300".  C  est  une  autre  pièce  de  bois ,  reposant  sur  trois  pointes 
arrondies.  Cette  pièce  porte  également  un  petit  miroir  ^  mais  qui 
est  environ  trois  fois  plus  étroit  que  le  miroir  E  F ,  de  sorte  que , 
vu  de  0 ,  CD  ne  couvre  que  l  de  E  F.  Les  deux  pièces  re- 
posent sur  une  plaque  de  verre  KL  —  0  A  B  est  une  échelle 
verticale,  le  long  de  laquelle  peuvent  monter  et  descendre  deux 
règles  L  et  M,  perpendiculaires  à  0  A  B.  Sur  Tun  des  côtés  plats 
de  chacune  de  ces  règles  est  collé  un  papier  blanc,  qui  porte  en 
son  milieu  une  ligne  noire  horizontale.  Les  côtés  recouverts  de 
papier  et  présentant  les  traces  rectilignes  sont  tournés  vers  les 
miroirs.  Latéralement  à  l'échelle  AB,  la  règle  inférieure  est 
percée  de  plusieurs  ouvertures,  d'une  largeur  suffisante  pour  qu'on 
puisse  y  fixer  une  lunette,  qui  alors  est  portée  par  la  règle  et 
monte  et  descend  avec  elle.  Pour  mesurer  au  moyen  de  cet  ap- 
pareil l'épaisseur  d'un  objet,  on  commence,  les  pièces  qui  portent 
les  miroirs  étant  mises  en  place  sur  le  verre  K  I ,  par  élever  ou 
abaisser  la  règle  L  avec  sa  lunette,  jusqu'à  ce  que  l'image  de  la 
ligne  noire  L  se  voie  dans  le  miroir  C  D.  Le  point  0 ,  où  cela 
a  lieu ,  appartient  alors  à  une  perpendiculaire  au  plan  C  D.  En- 
suite, on  déplace  la  règle  M,  jusqu'à  ce  que  l'image  de  la  trace 
noire  M ,  dans  le  miroir  E  F ,  paraisse  en  coïncidence  avec  l'image 
de  la  trace  L  dans  le  miroir  C  D.  Pour  que  cela  arrive ,  il  faut , 
lorsque  M  se  trouve  un  peu  au-dessus  de  0,  par  exemple  en  A, 
que  le  miroir  E  F  penche  un  peu  en  arrière ,  ou  C  D  un  peu  en 
avant.  Après  avoir  noté  sur  l'échelle  la  distance  0  A ,  on  place 
l'objet  dont  on  veut  mesurer  Tépaisseur  sous  le  pied  H,  ce  qui 
fait  incliner  le  miroir  E  F  plus  ou  moins  en  arrière.  On  élève 
alors  la  règle  M,  jusqu'à  ce  que  l'image  de  la  ligne  M  se  montre 
de  nouveau  en  coïncidence  avec  l'image  de  la  ligne  L,  et  on 
mesure  sur  l'échelle  la  distance  0  B. 

Soient  0  A^=x,  OBz^-z;',  la  distance  de  0  à  F  E  =  /?? ,  et 
l'angle  de  soulèvement  du  point  H  au-dessus  de  Kl,  décrit  d'un 
point  de  l'axe  GG',  =  '^,  on  aura  d'une  manière  approchée: 

I  '\  2m   )  V  2m  /     ■ 


sin.  (f  •=.  — 

2m 


DIFFERENCES    DE    LONGUEUR,    LA    MESURE     DE    FAIBLES    ETC.       39 

Si;    de   plus,    r  désigne   la   perpendiculaire   abaissée   de   H   sur 
G  G',    c'est-à-dire,    sur  la  droite  qui  joint  les  côtés  éloignés  des 
rectangics  G,  G',  on  a  pour  réi)aisseur  cherchée: 
épaisseur  zz:  r  sin  ç. 

La  perpendiculaire  r  doit  être  comptée  du  point  où  a  lieu  le 
contact  entre  l'objet  et  le  pied  H,  jusqu'à  la  droite  G  G',  telle 
qu'elle  vient  d'être  définie.  Si  l'objet  est  plat,  le  contact  se  fait 
sur  la  corde  du  segment  H;  s'il  est  convexe  en  dessus,  comme 
lorsqu'il  s'agit  par  exemple  d'un  grain  de  sable,  on  doit  tâcher 
d'estimer  en  quel  point  du  plan  H  s'établit  le  contact.  Un  fil 
métallique  peut  être  placé  sous  le  pied  H  de  façon  que  le  con- 
tact ait  de  nouveau  lieu  sur  la  corde  ;  il  suffit  pour  cela  de  don- 
ner au  fil  la  direction  de  H  vers  G  G'.  S'il  s'agissait  de  mesurer 
uniquement  l'épaisseur  d'objets  plats,  on  pourrait  donner  au  des- 
sous du  pied  H  une  forme  légèrement  sphérique,  ce  qui  ferait 
tomber  le  contact  toujours  au  milieu  de  la  petite  surface  H. 

Pour  déterminer  la  longueur  de  la  perpendiculaire  abaissée  de 
H  sur  G  G',  j'ai  procédé  de  la  manière  suivante.  Les  pieds  de 
la  pièce  reposant  sur  une  glace,  dont  la  surface  avait  été  ternie 
par  un  peu  d'huile,  je  la  fis  glisser  le  long  d'une  règle.  Il  se 
forma  ainsi  deux  ou  trois  lignes  brillantes,  sur  le  verre  terni: 
deux ,  lorsque  les  traces  des  pieds  G  et  G'  se  confondaient ,  trois , 
lorsque  cela  n'avait  pas  lieu.  En  mesurant  la  distance  de  ces 
lignes  brillantes ,  ainsi  que  leurs  largeurs ,  il  était  facile  de  trouver 
la  valeur  de  la  perpendiculaire  r  et  les  largeurs  des  petits  plans 
G,  G'  et  H,  —  soit  directement,  soit  à  l'aide  d'un  petit  calcul, 
quand  les  lignes  tracées  étaient  au  nombre  de  trois.  Ce  dernier 
cas  est  le  plus  favorable,  à  condition  que  les  traces  de  G  et  de 
G'  soient  très  rapprochées  l'une  de  l'autre.  On  a  trouvé  ainsi: 

Largeur  des  petits  plans  G  et  G'  dans  la 

direction  de  la  perpendiculaire =:    0,18  mm. 

Rayon  du  segment  de  cercle  H =    0,36    „ 

Distance  du  côté  éloigné  G  G'  au  centre  de  H  =  10,76    „ 
Distance  du  côté  éloigné  G  G'  à  la  corde.  :=  10,66    „ 


40  F.    J.    STAMKART.    SUR    LA    DETERxMINATION    DE    PETITES 

J'ai  mesuré,  entre  autres,  avec  cet  appareil,  l'épaisseur  de 
quelques  échantillons  de  fil  de  cuivre,  tel  qu'on  le  trouve  dans 
le  commerce,  enroulé  sur  des  bobines;  savoir: 

Fil  d'une  bobine  marquée  N".  5  zn  0,3125  mm. 
„        „         „  „        N«.  7  =0,2625    „ 

„        „         „  „         N».  9  =0,1855    „ 

Lorsque  les  épaisseurs  à  mesurer  sont  inférieures  à  0,1  mm.,  il 
est  plus  simple,  et  en  même  temps  plus  facile,  d'employer,  au 
lieu  d'un  miroir,  un  niveau,  comme  le  montre  la  fig.  9.  E  est  de 
nouveau  un  parallélépipède  de  bois ,  reposant  sur  trois  petits  pieds 
en  acier,  tout  comme  la  pièce  E  de  la  fig.  8.  Sur  ce  petit  bloc 
est  fixé,  dans  une  entaille,  un  niveau  CD,  qui  permet  de  me- 
surer un  petit  angle  de  soulèvement  du  pied  H.  L'emploi  de  ce 
petit  appareil  est  suffisamment  clair,  d'après  ce  qui  précède:  on 
note  la  position  de  la  bulle  d'air,  avant  et  après  que  l'objet  a 
été  placé  sous  le  pied  H.  L'espace  parcouru  par  la  bulle  donne 
l'angle  de  soulèvement  (p,  et  ensuite  V épaisseur  de  l'objet  qui  se 
trouve  sous  H,  =rsîn.(p. 
Les  mesures  effectuées  sur  la  pièce  E  m'ont  donné: 
Perpendiculaire  abaissée  du  centre  du  plan  H 

au  côté  éloigné  G  G'  des  petits  rectangles  r.  =  10,35  mm. 
Largeur  des  petits  rectangles  G  et  G'.  .  .  .=   0,1 7  J    „ 

Rayon  du  petit  plan  H :=    0,36      ,, 

On  a  laissé  ici  à  ce  petit  plan  H  la  forme  d'une  cercle  entier. 
Les  divisions  du  niveau  ont  chacune  une  longueur  de  2  mm., 
et  représentent  une  valeur  angulaire  de  45',8.  Il  suit  de  là  que 
chaque  division  du  niveau  correspond  à  une  épaisseur  de  10,35  x  sin. 
45 ',8  zz:  0,00229  mm.,  savoir,  quand  l'objet  est  placé  sous  le 
centre  du  petit  plan  H.  Il  vaudrait  peut-être  mieux  prendre  le 
rayon  r  plus  grand  et  le  niveau  plus  sensible:  par  là,  l'influence 
de  la  diversité  de  position  du  point  de  contact,  à  la  base  du 
pied  H,  deviendrait  proportionnellement  plus  faible. 

Comme  exemple  de  l'emploi  de  ce  petit  appareil,  je  citerai  la 
mesure  que  j'ai  faite,  le  9  décembre  1849,  de  l'épaisseur  d'un 
cheveu    d'un   enfant   de  12  ans; 


DIFFÉRENCES    DE    LONGUEUR^    LA    MESURE    DE    FAIBLES    ETC.       41 

Position  du  milieu  de 
la  bulle  d'air. 

Rien  sous  le  pied  H 33,30 

Le  cheveu     „     „      „      „ 7^35 

Rien     „     „      „      „ 33,30 

Le  cheveu    •„     „      „      „ 7,75 

i^ien     „     „      „      „ 32,95 

Par  conséquent  :  Déplacement  de  la  bulle  1  "  33,30  —  7,35    =:  25,95 

2«  33,13  — 7,75    =25,38 
Moyenne.  .  .  =25,66 
Epaisseur  du  cheveu  =  25,66  X  0,00229  =  0,0588  mm. 

J'ai  trouvé  de  la  même  manière: 

Epaisseur  d'un  cheveu  d'un  autre  enfant, 

âgé  de  16  ans =:  0,0563  mm. 

Poil  de  chat =:  0,0307  „ 

Poil  de  souris =0,0136  „ 

Fil  de  verre =  0,0382  „ 

Plomb  en  feuille,  enveloppant  des  bonbons.  =  0,0146  „ 

Or  battu  faux,  pour  doreurs =0,0015  „ 

Or  battu  fin =  0,0008  „ 

L'erreur  probable  de  cette  dernière 

détermination  est =  +  0,000076  „ 


En  dernier  lieu,  j'ai  appliqué  le  principe  de  réflexion  à  des 
fils  suspendus  verticalement ,  ou  fils  à  plomb ,  afin  de  rendre  visible 
l'indication,  par  ces  fils,  de  très  petits  changements  de  position 
éprouvés  par  des  objets  verticaux.  Soit  AE,  fig.  10,  un  fil  de 
cuivre  suspendu  verticalement,  tendu  par  un  poids  ou  plomb  E, 
et  auquel  est  adapté,  à  une  certaine  hauteur  au-dessus  du  poids, 
un  petit  miroir.  Cette  adaptation  peut  se  faire  en  enchâssant  le 
miroir  dans  une  petite  boîte  de  bois  ou  de  cuivre,  qui  se  fixe 
par  des  vis  de  pression  au  fil,  lequel  passe  alors  soit  devant, 
soit  derrière  le  miroir.  Le  fil  doit  se  trouver  serré  assez  forte- 
ment pour  qu'il  se  torde  ^  lorsqu'on  imprime  au  miroir  un  mouve- 
vement  de  rotation  autour  du  fil   considéré  comme  axe  vertical, 


42  F.    J.    STAMKART.    SUR    LA    DÉTERMINATION    DE    PETITES 

Derrière  le  miroir,  dans  la  boîte  qui  l'enchâsse,  est  fixée  l'extré- 
mité inférieure  ou  aiguë  d'une  aiguille  B  C ,  de  telle  sorte ,  que 
la  pointe  fasse  saillie  en  arrière.  Lorsque  le  fil ,  chargé  du  miroir 
et  du  poids,  vient  d'être  suspendu  au  point  fixe  A,  et  qu'on 
l'abandonne  à  lui-même,  il  possède  ordinairement  encore  une 
certaine  torsion,  par  suite  de  laquelle  le  miroir  et  le  poids  subis- 
sent une  rotation  d'un  ou  plusieurs  tours  ou  d'une  fraction  de 
tour,  puis  oscillent  pendant  quelque  temps,  avant  de  s'arrêter 
dans  une  position  fixe.  Quand  cette  position  est  atteinte,  la 
torsion  du  fil  est  détruite.  Si  alors  on  force  le  miroir  à  tourner 
d'une  circonférence  entière  ou  d'une  partie  de  circonférence,  de 
manière  à  donner  à  la  partie  supérieure  du  fil  une  torsion  qui 
tende  à  mouvoir  en  avant  la  pointe  B  de  l'aiguille,  mais  qu'en 
même  temps  on  empêche  ce  mouvement  de  se  produire,  en  oppo- 
sant à  la  pointe  un  plan  fixe  B,  le  miroir  prendra  de  nouveau 
une  certaine  position  déterminée.  Le  plan  fixe  B  sera,  par  exemple,  la 
tête  dressée  d'un  clou,  assujetti,  derrière  le  miroir,  dans  le  mur 
auquel  est  fixé  également  le  point  de  suspension  A.  La  position 
du  miroir  est  maintenant  déterminée  par  la  force  de  torsion  dans 
la  partie  du  fil  située  au-dessus  du  miroir,  par  la  pesanteur, 
qui  tire  de  haut  en  bas  le  poids  E,  le  miroir  et  le  fil,  et  par 
la  situation  relative  des  points  A  et  B.  L'effet  de  la  force  de 
torsion  est  de  presser  la  pointe  de  l'aiguille  contre  le  plan  B, 
mais,  en  même  temps,  d'écarter  un  peu  de  la  direction  verticale, 
en  avant,  la  portion  du  fil  au-dessus  du  miroir.  La  pesan- 
teur du  poids  E,  du  miroir  et  du  fil  tendent  à  ramener  le 
fil  dans  la  direction  verticale,  et  entre  ces  diverses  forces  il 
s'établit  un  équilibre,  grâce  auquel  le  miroir  reste  en  repos, 
bien  entendu,  aussi  longtemps  que  les  points  A  et  B  demeu- 
rent invariables.  Supposons,  au  contraire,  que,  par  une  cause 
quelconque,  le  mur  auquel  sont  liés  les  points  A  et  B  prenne 
une  légère  inclinaison  en  avant  ou  en  arrière,  il  est  clair 
qu'alors  la  position  du  miroir  devra  immédiatement  changer.  Dans 
le.  premier  cas ,  en  effet ,  le  point  A  avancerait  relativement  au 
point  B,  et  par  conséquent  l'arête  D  du  miroir  éprouverait  aussi 


DIFFÉREiNCES    DE     LOx^GUEUR,    LA    MESURE    DE    FAIBLES    ETC.       43 

un  déplacement  en  avant.  Dans  le  second  cas,  A  reculerait  par 
rapport  à  B^  et  par  suite  l'arête  D  du  miroir  subirait  une  rota- 
tion rétrograde.  Dans  ces  mouvements^  B  est  toujours  le  centre 
autour  duquel  le  miroir  tourne.  Or,  comme  la  rotation  du  miroir 
peut  être  observée  sur  une  échelle  éloignée ,  on  a  ainsi  le  moyen 
de  mesurer  avec  exactitude  le  plus  petit  déplacement  relatif  de 
A  et  B,  et  par  conséquent  la  plus  légère  déviation  du  mur  par 
rapport  à  sa  position  initiale. 

Soient:  la  longueur  du  fil,  depuis  le  point  de  suspen- 
sion A  jusqu'à  la  hauteur  de  l'aiguille  C, =  /, 

la  distance  du  point  C  au  fil =z  r , 

la  distance  du  miroir  à  l'échelle  qui  lui  est  opposée  .=zm, 

1    déplacement  noté  sur  cette  échelle zzrA, 

et  le   changement   survenu   dans  la  position  verticale 

du  mur ^=  "  ?    * 

on  a,  à  très  peu  près: 

r  II  f 

a  -  X  sm.  V  = ,  et  par  conséquent  «  =r  X  h. 

l  2  m  2  hn  sin.  1" 

Prenons,  comme   exemple: 

/     =  4  mètres ■=  4000  mm. 

r    =  1  centimètre =:      10 


m  :=  5  mètres z=  5000 


n 


n 


il  vient,  en  secondes: 

«=  ^ ,  X  h  =0,103  X  h. 

2000000  sin.  1" 

Dans  ce  cas,  chaque  millimètre  sur  l'échelle  divisée  corres- 
pondra donc  environ  à  0',!  de  changement  dans  la  position  du  mur. 

Depuis  l'année  1841,  un  fil  à  plomb,  de  la  nature  de  celui 
qui  vient  d'être  décrit,  est  suspendu  au  mur  nord  du  Bureau  de 
vérification  d'Amsterdam,  et  indique  régulièrement  les  variations 
d'inclinaison  de  ce  mur.  On  distingue  avec  évidence,  dans  ces 
variations,  une  période  diurne  et  une  période  annuelle.  Un  second 
fil  à  plomb,  de  construction  semblable,  a  été  fixé  dernièrement 
au  mur  est  du  même  bâtiment. 


44     F.  .1.  STAMKART.  SUR  LA  DETERMINATION  DE  PETITES 

L'emploi  des  fils  à  plomb  à  miroir  n'est  pas  borné  exclusive- 
ment à  l'indication  des  changements  de  position  de  murs  verticaux  : 
il  me  semble  qu'ils  pourraient  aussi  être  adaptés  avec  fruit  à 
quelques  instruments  astronomiques  ^  par  exemple  ^  aux  lunettes 
zénithales.  Qu'on  se  figure  un  rectangle  dont  les  côtés  longs  aient 
une  direction  verticale.  Un  de  ces  côtés  représentera  un  axe  ver- 
tical, l'autre  une  lunette  zénithale  pouvant  tourner  autour  de  cet 
axe.  A  l'anneau  de  cuivre  qui  enchâsse  l'objectif  de  la  lunette 
sera  suspendu  directement  un  fil  à  plomb  à  miroir,  ou,  mieux 
encore,  deux  de  ces  fils,  l'un  au  nord  ou  au  midi,  l'autre  à 
l'est  ou  à  l'ouest.  Si  alors  on  prend  les  points  d'appui  fixes  des 
miroirs  sur  quelque  partie  dé  l'appareil  auquel  sont  attachés  les 
fils  immobiles  qui  occupent  le  foyer  de  la  lunette,  les  fils  à 
plomb  feront  connaître  les  changements  de  position  relative  qui 
se  produiront  entre  l'objectif  et  le  réticule,  abstraction  faite  de 
toutes  les  autres  parties  entrant  dans  la  construction  de  la 
lunette.  Mais,  comme  la  lunette  est  supposée  mobile  autour  de 
l'axe  vertical,  et  que  les  fils  à  plomb  sont  nécessairement  entraî- 
nés dans  cette  rotation ,  il  faudrait  aussi  que  l'échelle  sur  laquelle 
se  lit  la  position  des  miroirs  pût  partager  ce  même  mouvement , 
ce  qui,  bien  que  possible  à  la  rigueur,  susciterait  de  graves  em- 
barras. Pour  parer  à  cette  difficulté ,  on  pourra  fixer  à  la  lunette , 
derrière  le  miroir  d'un  des  fils  à  plomb  (et  le  dépassant  soit  en 
dessus,  soit  en  dessous),  un  autre  miroir,  dont  la  normale  indi- 
quera le  zéro  de  l'échelle.  Ce  zéro  et  ensuite  l'angle  des  deux 
miroirs,  le  miroir  fixe  et  le  miroir  suspendu,  peuvent  être  déter- 
minés de  la  manière  marquée  dans  la  fig.  8.  On  pourrait  aussi 
adopter  une  disposition  analogue  à  celle  des  sextants,  tourner 
l'une  vers  l'autre  les  faces  réfléchissantes  du  miroir  fixe  et  du 
miroir  suspendu,  et  observer  l'angle  que  ces  faces  font  entre  elles , 
en  visant,  dans  une  petite  lunette,  au  voisinage  immédiat  de 
l'oculaire  de  la  lunette  zénithale,  les  divisions  d'une  échelle, 
tant  directement  qu'après  une  double  réflexion.  Cette  disposition 
aurait  l'avantage  qu'il  suffirait  d'un  petit  déplacement  de  l'œil 
pour  que  l'observateur  pût  reconnaître  de  suite  la  position  du  fil 


DIFFÉRENCES    DE    LONGUEUR,    LA    MESURE    DE    FAIBLES    ETC.       45 

à  plomb.  La  lunette,  Taxe,  les  fils  à  plomb  et  les  miroirs  peu- 
vent d'ailleurs  être  entourés  d'une  enveloppe  de  matière  peu  conduc- 
trice —  ne  laissant  que  les  ouvertures  nécessaires,  fermées  par 
des  disques  de  verre  —  tant  afin  de  prévenir  les  brusques  chan- 
gements de  température,  que  pour  mettre  les  miroirs  à  l'abri  des 
courants  d'air.  Il  faudra  aussi,  ce  qu'il  est  facile  d'obtenir,  que 
les  fils  à  plomb  puissent  être  immobilisés  sans  secousses ,  afin  qu'ils 
n'éprouvent  pas  d'oscillations  quand  la  lunette  doit  tourner  autour 
de  l'axe.  Pour  observer  avec  cet  appareil  la  déclinaison  d'une 
étoile  qui  traverse  le  méridien  très  près,  du  zénith,  on  pro- 
cédera, j'imagine,  de  la  manière  suivante.  Peu  de  temps  avant 
le  passage  de  l'étoile,  on  tournera  l'un  des  miroirs  au  nord  ou 
au  sud  et  on  notera  sa  position  ;  ensuite  on  mesurera ,  à  l'aide 
du  fil  mobile  du  micromètre,  la  distance  de  l'étoile  au  zénith, 
jusqu'à  ce  que  l'étoile  soit  arrivée  très  près  du  passage.  La  lunette 
sera  alors  tournée  de  180°  autour  de  l'axe  et,  immédiatement 
après,  les  mesures  de  la  distance  seront  reprises  et  continuées 
aussi  longtemps  que  possible.  Pour  terminer ,  on  notera  de  nouveau 
la  position  du  miroir,  qui,  maintenant,  se  dirigera  vers  le  sud 
ou  vers  le  nord.  Je  n'ai  malheureusement  pas  l'occasion  de  mettre 
à  l'essai  le  moyen  que  je  viens  d'exposer,  et  je  ne  puis  donc 
décider  s'il  offrirait  réellement  le  degré  d'exactitude  dont  il  me 
paraît  susceptible.  Comme  simple  projet,  il  me  semble  d'une 
exécution  plus  facile  et  moins  coûteuse  que  celui  communiqué  par 
M.  Faye  dans  les  Comptes  rendus  (joj.  N^*  12  et  14,  17  sept,  et 
1  oct.  1849),  tout  en  présentant,  comme  celui-ci,  l'avantage  de 
laisser  l'objectif  tout  entier  disponible  pour  l'observation  de  l'étoile. 
Les  fils  à  plomb  pourvus  d'un  miroir  peuvent  aussi  être  utilisés 
pour  rendre  sensibles  de  très  petits  changements  azimutaux,  dans 
la  supposition,  bien  entendu,  que  le  sol  lui-même  n'en  éprouve 
pas  de  pareils.  Soient  A  et  B ,  fig.  11,  deux  points  —  tels ,  par 
exemple,  que  les  extrémités  d'une  lunette  ordinaire  ou  les  extré- 
mités de  l'axe  d'une  lunette  méridienne  —  dont  on  demande  de 
trouver  les  petits  déplacements  azimutaux  relatifs.  Figurons  par 
C  D  un  fil  métallique,    aussi  long  que  possible,   disposé  horizon- 


46     F.  J.  STAMKART.  SUR  LA  DETERMINATION  DE  PETITES 

talement  au-dessus  du  sol;  et  tendu  avec  force;  et  par  A  E  et 
BF  deux  fils  à  plomb  à  miroir,  suspendus  aux  points  A  et  B. 
Si  alors  les  bords  G  et  H  des  deux  miroirs  ou  des  montures  qui 
les  maintiennent  sont  bien  rectilignes ,  et  si  les  fils  A  E  et  B  F 
ont  une  torsion  telle  que  ces  bords  appuient  contre  le  fil  métal- 
lique tendu  CD;  il  est  clair  que  tout  déplacement  horizontal, 
perpendiculaire  à  la  direction  C  D ,  que  subira  A  ou  B ,  sera 
accusé  par  les  miroirs.  De  la  différence  de  ces  déplacements, 
combinée  avec  la  distance  A  B,  on  déduira  immédiatement  la 
valeur  du  changement  azimutal  de  A  par  rapport  à  B.  J'ai  ap- 
pliqué ce  moyen  avec  succès  à  une  lunette  qui  était  placée  dans 
le  premier  vertical,  pour  l'observation  de  passages  d'étoiles,  des- 
tinés à  donner  la  latitude. 

Le  fil  à  plomb  à  miroir  pourrait  encore,  ce  me  semble,  inter- 
venir avec  avantage  dans  la  détermination  de  la  dilatation  par 
la  chaleur.  Si,  aux  deux  extrémités  de  la  barre  dont  il  s'agit 
d'étudier  la  dilatation,  sont  suspendus  des  fils  à  plomb,  tordus 
dans  le  même  sens,  et  dont  les  miroirs  arrêtent  contre  des  appuis 
fixes,  la  différence  des  rotations  subies  par  les  miroirs,  dans  le 
même  sens,  fera  connaître  la  dilatation  ou  le  raccourcissement 
de  la  barre.  Par  appuis  fixes,  j'entends  seulement  ceux  qui  sont 
soustraits  à  l'influence  de  l'augmentation  ou  de  la  diminution  de 
chaleur  appliquée  à  la  barre,  et  qui,  par  conséquent,  sont  fixes 
l'un  par  rapport  à  l'autre.  Comme  tels,  je  pense  qu'on  pourrait 
de  nouveau  employer  convenablement  deux  fils  métalliques  tendus 
avec  force,  horizontaux  et  parallèles,  qui  seraient  attachés,  par 
exemple,  à  droite  et  à  gauche,  aux  murs  d'une  chambre.  Si  on 
le  juge  utile,  on  peut  même,  à  chaque  mur,  relier  entre  eux  les 
points  d'attache  des  fils  métalliques,  par  des  tiges  de  verre  par 
exemple,  et  suspendre  à  cet  endroit  des  thermomètres,  afin  de 
tenir  compte  de  petites  variations  de  température  qui  pourraient 
modifier  légèrement  l'éloignement  mutuel  de  ces  points  d'application. 
La  barre  à  étudier  étant  maintenant  plongée  dans  un  bain  réchauf- 
fant ou  refroidissant,  vers  le  milieu  de  la  chambre  et  au-dessus 
des  fils  métalliques  tendus ,  et  chacun  des  deux  miroirs  appuyant , 


47 

de  même  que  dans  la  fig.  11,  contre  un  de  ces  fils  tendus,  la 
dilatation  ou  la  contraction  de  la  barre  pourra  être  observée  com- 
modément et  avec  exactitude.  Pour  que  les  fils  à  plomb  puissent 
pendre  librement  aux  extrémités  de  la  barre,  il  conviendra  que 
celles-ci  fassent  légèrement  saillie  en  dehors  de  l'auge  qui  contient 
le  liquide  réchauffant  ou  réfrigérant,  saillie  qui  du  reste  n'aura 
pas  besoin  de  dépasser  1  mm.,  par  exemple.  Il  serait  possible, 
en  outre ,  que  la  chaleur  du  bain  occasionnât  quelque  changement 
dans  la  force  de  torsion  de  la  partie  supérieure  des  fils  aplomb; 
mais  il  n'en  résultera  aucun  effet  nuisible,  si  l'on  a  eu  soin  de 
prendre  pour  les  deux  fils  à  plomb  des  portions  d'un  même  fil 
métallique,  et  de  leur  donner  à  chacun  la  même  torsion;  car, 
dans  ce  cas,  l'influence  éventuelle,  exercée  par  la  chaleur  sur 
l'énergie  avec  laquelle  les  fils  tendent  à  se  détordre,  serait  égale 
et  de  même  signe  pour  chacun  de  ces  fils,  et  disparaîtrait  par 
conséquent  du  résultat  final.  De  même  que  plusieurs  des  idées  pré- 
cédentes,  celle-ci   n'a   pas   encore  reçu  d'application. 

En  général,  je  suis  porté  à  croire  qu'il  y  a  dans  la  géométrie 
pratique  des  cas  assez  nombreux  où  les  miroirs  et  les  fils  à  plomb 
à  miroir  trouveraient  un  emploi  avantageux.  Ainsi,  pour  citer 
encore  un  exemple,  le  miroir  fig.  8  peut  utilement  servir  à 
mesurer  de  petites  flexions ,  produites  par  une  légère  augmentation 
de  charge.  On  n'a,  pour  cela,  qu'à  faire  reposer  les  pieds  G  et  G' 
sur  un  plan  fixe,  et  le  pied  H  sur  un  point  de  la  barre  qui 
fléchit.  A  l'aide  des  miroirs,  il  serait  facile  aussi  de  constater  si 
des  barres  de  fer  deviennent  un  peu  plus  longues  ou  plus  courtes 
sous  l'influence  d'une  aimantation  temporaire,  et,  de  même,  si 
des  barres  d'acier  éprouvent  quelque  changement  appréciable  dans 
leurs  dimensions,  quand  on  leur  communique  une  force  magné- 
tique permanente. 

Si,  parmi  les  idées  que  je  viens  d'esquisser,  et  dont  beaucoup 
sont  restées  à  l'état  de  simple  projet,  quelques-unes  pouvaient 
trouver  une  application  utile,  le  but  de  la  présente  communica- 
tion serait  largement  atteint. 


SUR  LA 


MORPHOLOGIE  DES  MUSCLES  DE  L^ÊPAULE 
CHEZ  LES  OISEAUX, 


EMIL    SELENKA, 

Professeur   à   l'Université   de    Leide. 


Dans  la  myologie  comparée  des  animaux  vertébrés ,  il  ne  s'agit 
pas  de  paralléliser  tous  les  muscles  de  même  fonction,  ou  de 
même  forme  et  situation,  ou  de  même  innervation:  il  importe 
plutôt  de  tenir  compte  de  tous  ces  points  de  vue  à  la  fois,  pour 
ramener  les  muscles  de  structure  compliquée  aux  muscles  plus 
simples,  et,  dans  l'accomplissement  de  cette  tâche,  c'est  non-seule- 
ment le  scalpel,  mais  aussi  la  manière  différente  de  vivre  et  le 
développement  du  squelette ,  qui  doivent  servir  de  guides. 

C'est  ainsi,  par  exemple,  que  la  myologie  comparée  nous  a 
appris  que  le  musculus  reclus  abdominis  des  Mammifères  et  des 
Oiseaux  doit  être  rattaché,  morphologiquement,  aux  muscles  in- 
tercostaux: tous  les  deux,  en  effet,  sont  situés  au  même  niveau, 
tous  les  deux  se  confondent  chez  les  vertébrés  inférieurs,  où  les 
côtes  manquent  ou  deviennent  rudimentaires ,  tous  les  deux ,  enfin , 
sont  innervés  de  la  même  manière.  C'est  ainsi  encore ,  que  les 
muscles  de  la  main  de  l'Oiseau  ne  diffèrent  pas  beaucoup,  au 
point  de  vue  morphologique,  des  muscles  de  la  main  du  Mam- 
mifère, bien  que,  sous  le  rapport  fonctionnel,  il  existe  une  dif- 
férence très  grande:  car  les  points  d'insertion  peuvent  subir  des 
déplacements  notables  et  tels  que  tous  les  mouvements  de  la  main 
de  l'Oiseau  sont  réduits,  presque  exclusivement ,  à  l'abduction  et  à 


E.  SELENKA.  SUR  LA  MORPHOLOGIE  DES  MUSCLES  ETC.     49 

radduction.  La  conformation  des  articulations  et  les  passages  d'un 
type  à  un  autre  doivent  donner  ici  l'explication  des  faits. 

L'accroissement  énorme  que  reçoivent  chez  l'Oiseau  les  muscles 
de  l'épaule  va  de  pair  avec  le  développement  considérable  de  la 
ceinture  osseuse  de  cette  partie.  Et,  de  même  que  l'os  coracoï- 
dien,  la  fourchette  et  l'appareil  épisternal  des  Oiseaux  peuvent 
être  ramenés  à  l'apophyse  coracoïde  de  l'omoplate,  à  la  clavicule 
et  à  l'épisternum  d'autres  animaux  vertébrés,  de  même  on  par- 
vient à  retrouver  les  muscles  de  l'aile  des  Oiseaux,  si  puissam- 
ment développés,  dans  les  faibles  muscles  de  l'épaule  d'autres 
animaux,  notamment  des  Reptiles. 

Je  me  propose  de  donner  ici  quelques  indications  au  sujet  de 

différents  muscles  dont  la  signification  a  été  mal  comprise  jusqu'à 

présent. 

Pectoralis   maior   et   minor. 

Comme  muscles  de  la  poitrine  on  trouve  cités ,  dans  les  auteurs , 
sept  muscles  différents.  Néanmoins,  ainsi  que  M.  Rolleston  l'a  montré 
le  premier,  l'Oiseau  ne  possède  que  deux  muscles  pectoraux ,  qui 
correspondent  au  grand  et  au  petit  pectoral  des  classes  animales 
voisines.  Tous  les  autres  muscles,  décrits  comme  muscles  pecto- 
raux, sont  des  homologues  des  muscles  sous-clavier,  coraco-bra- 
chial  et  deltoïde  d'autres  vertébrés. 

Ce  qu'on  a  appelé  jusqu'ici  grand  pectoral,  est  un  muscle 
composé.  La  partie  superficielle,  plus  forte,  est  le  grand  pectoral 
véritable,  la  partie  plus  profonde  est  le  petit  pectoral. 

Il  est  vrai  que  presque  toujours  ces  deux  muscles  se  confon- 
dent partiellement  entre  eux.  La  preuve  que  la  masse  musculaire 
est  composée  d'un  muscle  grand  pectoral  et  d'un  muscle  petit 
pectoral  proprement  dits,  est  fournie  par  les  faits  suivants. 

1  ^  Chez  les  embryons  il  n'y  a  pas  encore  de  soudure  ;  les  deux 
muscles  sont  distincts,  et  ce  n'est  qu'à  mesure  des  progrès  du 
développement,  que  leurs  bords  se  soudent  de  plus  en  plus  in- 
timement. Toutefois,  la  soudure  ne  paraît  jamais  s'étendre  à  la 
surface  entière  par  laquelle  les  deux  muscles  se  touchent.  Du 
moins,  chez  un  grand  nombre  d'Oiseaux,  j'ai  toujours  trouvé  un 

Archives  Néerlandaises  T.  V.  4 


50 


E.  SELENKA.  SUR  LA  MORPHOLOGIE  DES  MUSCLES 


endroit  où  les  deux  pectoraux  glissaient  encore  l'un  sur  l'autre, 
sans  avoir  contracté  d'union. 

2".  Chez  le  Pélican,  il  n'y  a  qu'un  petit  nombre  de  fibres 
marginales  du  petit  pectoral  qui  se  soudent  avec  le  grand  pec- 
toral ,  mais  les  tendons  qui  terminent  les  deux  muscles  se  réunis- 
sent à  peu  de  distance  de  l'insertion  sur  l'humérus.  Un  fait  que 
j'ai  observé  drns  cet  animal,  et  qui  m'a  paru  nouveau,  c'est 
l'existence  d'une  scissure  profonde  du  muscle  petit  pectoral, 
scissure  dont  on  voit  une  représentation  fidèle  PL  IL  Néan- 
moins, dans  ce  cas  encore,  l'union  des  tendons  terminaux 
des  deux  muscles  pectoraux  se  fait  d'une  manière  très  intime , 
car  les  fibres  tendineuses  du  petit  pectoral  passent,  tout  à  fait 
irrégulièrement,  dans  les  deux  tendons  terminaux  du  grand  pec- 
toral, qui  se  montrent  sous  leur  forme  typique. 

Ramifications  des  nerfs  du 
plexus  brachial  du  Canard  domes- 
tique, prises  au  côté  gauche  et 
vues  de  la  face  ventrale  de  l'animal. 

Les  chiffres  placés  à  côté  des 
nerfs  indiquent  les  muscles  que 
ces  nerfs  innervent  :  1 .  Pectoralis 
major.  2.  Pectoralis  minor.  3.  Bi- 
ceps et  antebrachium.  4.  Triceps. 
5.  Antebrachium  et  membrana 
anterior  alae.  6.  Latissimus  dorsi. 
7.  Deltoides.  8.  Teres  maior.  9. 
Subclavius.  10.  Coracobrachialis 
brevis.ll.Coracobrachialislongus. 

Le  nerf  du  sous-clavier,  qui 
perce  la  chair  du  court  coraco- 
brachial,  envoie  également  un 
rameau  très  faible  à  ce  dernier 
muscle. 

3».  L'innervation  des  deux  muscles  pectoraux  se  fait  chez  les 
Oiseaux  de  la  même  manière  que  dans  les  classes  voisines:  du 
plexus  nerveux  situé  près  du  creux  de  l'aisselle,  part  un  nerf 
dichotome,  dont  l'une  des  branches  se  rend  au  muscle  grand 
pectoral,  et  l'autre  au  muscle  petit  pectoral. 

4».  La  soudure  des  deux  muscles  pectoraux  s'observe  aussi  dans 
d'autres  classes  d'animaux,  par  exemple,  chez  le  Mus decumanus. 


DE  l'Épaule  chez  les  oiseaux.  51 

Subclavius. 

On  doit  désigner  sons  le  nom  de  sous-clavier  un  muscle 
qui  est  situé  au-dessous  du  grand  pectoral ,  qui  prend  son  origine 
à  l'angle  du  sternum  et  aussi  à  la  membrane  coraco-claviculaire, 
s'élève  le  long  de  l'os  coracoïdien ,  dont  souvent  il  reçoit  aussi 
des  fibres  ;  traverse  ensuite^  à  l'état  de  tendon  (et  en  donnant 
lieu  à  la  formation  d'une  bourse  muqueuse),  le  foramen  tri-osseum , 
fait  en  ce  point  un  léger  coude,  passe  sur  la  capsule  articulaire 
de  l'épaule,  et  s'insère  enfin  à  l'humérus.  L'action  du  tendon  de 
ce  muscle  consiste  dans  la  rotation  de  l'aile,  quand  celle-ci  est 
repliée;  quand  elle  est  étendue,  l'effet  produit  est  l'adduction  ou, 
si  celle-ci  est  empêchée,  l'élévation  de  l'aile. 

Ce  muscle  est  ce  que  les  auteurs  appelaient  le  second  pec- 
toral. Il  est  certain  que  lorsqu'on  compare  sa  surface  d'origine 
chez  les  Oiseaux  avec  celle  qu'il  présente  chez  les  Reptiles  et 
les  Mammifères,  ou  est  frappé  de  sa  large  insertion  sur  le  ster- 
num. Mais  cela  ne  constitue  pas  une  difficulté  sérieuse  ;  car  chez 
l'Emeu,  la  portion  sternale  du  sous-clavier  est  déjà  très  petite, 
et  chez  l'Autruche,  où  du  reste  le  sous-clavier  existe  encore  très 
distinctement,  cette  portion  sternale  manque  tout  à  fait.  Déplus, 
M.  RoUeston  a  fait  voir  que  le  nerf  qui  se  ramifie  dans  le  sous- 
clavier  est  formé  d'une  manière  homologue  chez  les  Oiseaux  et  chez 
les  Mammifères.  Enfin,  on  doit  se  rappeler  que  nous  avons  déjà, 
ci-dessus ,  assigné  sa  place  au  second,  pectoral. 

Le  sous-clavier  des  Oiseaux  est,  à  très  peu  d'exceptions  près, 
un  muscle  penniforme  ;  des  fibres  musculaires  s'insèrent  de  part 
et  d'autre  à  un  tendon  moyen,  qu'elles  recouvrent  de  leur  sub- 
stance. D'après  cela,  le  raccourcissement  que  le  muscle  total 
éprouve  dans  la  direction  longitudinale,  à  la  suite  d'une  con- 
traction ,  est  moins  considérable  que  si  ses  fibres  marchaient  dans 
le  même  sens  que  le  tendon  terminal;  mais,  en  revanche,  la 
traction  exercée  par  le  tendon  sous-clavier,  qui  doit  élever  l'aile 
entière,  est  beaucoup  plus  énergique. 

C'est  chez  le  Didunculus  strigirostris  que  j'ai  trouvé  le  muscle 

sous-clavier  le  plus  fortement  développé;  viennent  ensuite  le  Pin- 

4* 


52        E.  SELENKA.  SUR  LA  MORPHOLOGIE  DES  MUSCLES 

gouin,  les  Pigeons,  les  Gallinacés ,  les  Canards  ;  les  Perroquets. 
Chez  les  Oiseaux  de  proie  il  est  passablement  petit. 

Il  est  également  court,  mais  pourtant  fortement  développé, 
chez  le  Pélican.  Il  prend  ici  naissance:  1".  sur  le  sternum,  entre 
la  crête  et  le  bouclier  sternal;  2».  pour  la  partie  la  plus  grande, 
sur  la  membrane  coraco-furculaire ,  dont  il  recouvre  presque  en- 
tièrement la  face  extérieure;  3".  par  un  faisceau  spécial,  tout  à 
fait  isolé  à  l'origine,  sur  le  bord  médian  de  l'os   coracoïdien. 

Coracobrachialis   longus. 

Les  données  concernant  ce  muscle  varient  d'une  manière  re- 
marquable. Il  part,  en  général,  du  bord  abdomino-latéral  de  l'os 
coracoïdien,  et  s'insère,  par  un  tendon  robuste,  sur  le  tuberculiim 
inferius  s.  mains  liumeri.  Le  muscle  peut  tirer  le  bras  en  arrière, 
mais  il  paraît  que  c'est  dans  la  rotation  du  bras  autour  de  son 
axe  longitudinal  qu'il  exerce  son  effet  principal. 

Il  n'est  pas  rare  de  voir  aussi  quelques  fibres  musculaires 
prendre  naissance  sur  la  lame  sternale. 

Ce  muscle  ne  doit  pas  être  pris,  comme  on  l'a  fait  ordinaire- 
ment, pour  un  muscle  pectoral  véritable,  et  ce  n'est  que  la  con- 
sidération superficielle  de  sa  position  au-dessous  du  pectoral  pro- 
prement dit ,  qui  a  pu  lui  faire  attribuer  cette  signification.  Meckel 
le  regarde  comme  le  coraco-brachial ,  opinion  à  laquelle  Retzius 
objecte  qu'il  pénètre  dans  la  fosse  sous-claviculaire ,  entre  la 
clavicule  et  l'os  coracoïdien;  d'après  cela,  il  serait  l'homologue 
du  sous-clavier  de  l'Homme,  et  si  son  insertion  est  différente  de 
ce  qu'elle  est  chez  l'Homme,  il  y  a  plusieurs  autres  Mammifères, 
rOrnithorhynque  par  exemple,  chez  qui  il  s'attache  également  à 
l'extrémité  antérieure  de  l'humérus.  Ce  raisonnement  est  loin 
toutefois  de  prouver  l'homologie  présumée,  et,  en  faisant  même 
abstraction  de  la  circonstance  que  le  sous-clavier  a  déjà  été 
reconnu  plus  haut,  la  manière  dont  le  nerf  pénètre  dans  le 
muscle  en  question  le  détermine  indubitablement  comme  muscle 
coraco-brachial.  En  outre,  l'origine  et  l'attache  terminale  du 
muscle  conduisent  directement  à  lui  appliquer  ce  nom. 


DE  l'Épaule  chez  les  oiseaux.  53 

Des  auteurs  anciens  désignent  notre  muscle  sous  le  nom  de 
allollens  humeri  ou  de  depressor  humeri.  Les  mêmes  divergences 
existent  dans  les  détails  donnés  au  sujet  du  trajet  du  muscle, 
bien  que  le  muscle  ne  varie  que  d'une  manière  très  secondaire 
chez  les  différentes  espèces.  On  éprouve  réellement  de  l'embarras 
à  rapporter  à  un  seul  et  même  muscle  toutes  les  descriptions 
qui  en  ont  été  faites  jusqu'ici.  La  réunion  partielle  avec  le  court 
coraco-brachial  et  les  dénominations  diverses  dont  notre  muscle 
a  été  gratifié  ont  mis  le  comble  à  la  confusion  qui  règne  à 
cet  égard. 

Coracobrachialis   brevis. 

Les  descriptions  anciennes  de  ce  muscle  sont  également  toutes 
défectueuses  et  embrouillées,  et  beaucoup  de  travaux,  du  reste 
très  détaillés,  ne  le  nomment  même  pas.  Cuvier  ne  parle  que 
d'une  manière  générale  de  deux  muscles  qui  partent  de  l'os  cora- 
coïdien  et  s'insèrent  à  la  tête  de  l'humérus:  ce  sont  ceux  que 
nous  décrivons  ici  comme  coraco-brachiaux.  Tiedemann  cite  un 
deltoïdeus  minor  et  un  levator  scapulae,  qui  répondent,  au  moins 
en  partie,  au  coracobrachialis  brevis.  Gurlt,  Wiedemann,  Mer- 
rem,  Aldrovandi  n'en  font  aucune  mention. 

Le  muscle  court  coraco-brachial  peut  prendre  naissance  en  quatre 
portions  différentes,  partant  de  l'omoplate ,  du  coracoïdien,  du  bord 
supérieur  du  sternum  et  du  ligament  sterno-furculaire.  Ces  quatre 
ventres  musculaires  se  réunissent  ensuite  en  un  muscle  unique, 
qui  s'insère  à  la  tête  de  l'humérus;  ou  bien  la  portion  sternale 
se  rend  isolément  à  l'humérus  et  s'y  fixe  par  un  tendon  propre. 

La  masse  principale  du  muscle  ne  se  montre  que  lorsque  le 
sternum  avec  ses  dépendances  est  séparé  du  tronc  et  qu'on  l'examine 
du  côté  interne.  On  voit  alors  le  muscle  prendre  naissance  au 
bord  extérieur  du  sternum,  et  se  diriger  obliquement  en  haut  et 
en  dehors,  en  se  renforçant  de  fibres  parties  du  ligament  sterno- 
furculaire  et  de  l'os  coracoïdien.  Dans  son  trajet  ultérieur,  il 
reçoit  une  seconde  portion  de  fibres,  moins  considérable,  venue 
du  coracoïdien,  et  enfin  une  troisième  portion  originaire  du  bord 


54     E.  SELENKA.  SUR  LA  MORPHOLOGIE  DES  MUSCLES  ETC. 

extérieur  de  l'omoplate.  Le  tendon  d'insertion  peut,  comme  il  a 
été  dit  plus  haut,  être  simple  ou  double. 

L'action  du  muscle  se  confond  avec  celle  du  coraco-brachialis 
long  us. 

Je  terminerai  cette  Note  en  annonçant  que  je  donnerai  bientôt, 
dans  l'ouvrage  paraissant  sous  le  titre  de  „Bronn,  Klassen  imd 
Ordnungen  des  Thierreichs ,  Ahlheihinq:  Vôgel/'  un  aperçu  systé- 
matique des  formes  principales  des  muscles  dont  il  vient  d'être 
question. 


Explication   de  la  Planche  IL 


Muscles  de  l'épaule  et  du  bras  du  Pelecanus  onocrolalus,  en 
demi  grandeur  naturelle. 

Au  côté  gauche,  le  muscle  grand  pectoral  a  été  coupé,  et  on 
n'en  a  laissé  subsister  que  le  tendon  terminal  ;  de  cette  manière , 
on  a  mis  à  nu  le  petit  pectoral,  dont  le  tendon  terminal  est 
double  chez  le  Pélican. 

Au   côté  droit,   on   a  enlevé  les  muscles  grand   et   petit    pec- 
toral,  ce   qui  laisse  à  découvert  le  muscle  sous  clavier.   La   tête 
inférieure  de  l'humérus  n'a  pas  été  dessinée  ici. 
X.  Origine  du  grand  pectoral. 
y.  Origine  du  petit  pectoral. 
^.  Sternum. 
a.  La   partie   du  bouclier  sternal  non   couverte   par  les 

muscles. 
H.  Humérus. 
F.  Fourchette. 
C.  Os  coracoïdien. 


LES  MOUYEMEJNTS  DE  L^ŒIL 
ÉCLAIRÉS  À  L'AIDE  DU  PHÉNOPHTHALMOÏROPE 


p.    C.   DONDER 


Les  mouvements  de  l'œil  ont  été  étudiés  avec  beaucoup  de 
soin,  de  sorte  que  leur  mécanisme  passablement  compliqué  est, 
en  général,  élucidé  d'une  manière  satisfaisante.  Nous  connaissons 
les  lois  suivant  lesquelles  ces  mouvements  s'exécutent,  et  nous 
savons  en  outre  dans  quelles  conditions  se  présentent  certaines 
déviations  à  ces  lois,  déviationi;  légères  d'ailleurs  et  qui  ne  sont 
pas  tout  à  fait  semblables  pour  des  yeux  différents.  Mais,  en 
dépit  de  cette  perfection  relative  de  nos  connaissances,  ce  point 
de  doctrine  est  resté  une  pierre  d'achoppement  pour  beaucoup 
d'ophthalmologistes.  Dans  nos  livres,  on  ne  saurait  le  nier,  il 
règne  à  cet  égard,  et  surtout  au  sujet  de  ce  qu'on  appelle  le 
mouvement  de  roue,  une  certaine  confusion,  et  dans  l'enseigne- 
ment, on  voit  les  efforts  les  plus  consciencieux  pour  donner  une 
idée  claire  du  mécanisme  en  question,  échouer  auprès  d'un  grand 
nombre  d'auditeurs. 

A  diverses  reprises,  on  a  essayé  de  venir  en  aide  à  la  faculté 
de  représentation,  au  moyen  de  certains  instruments  qu'on  a 
appelés  ophthalmotropes.  D'une  manière  générale,  ces  appareils 
ont  pour  but  de  rendre  visible  l'action  des  muscles  de  l'œil. 
Mais,  ce  qui  importe  avant  tout,  c'est  qu'on  se  fasse  une  idée 
exacte  des  mouvements  eux-mêmes.  C'est  en  cela  que  paraît 
résider  la  difficulté  principale  pour  la  plupart  des  personnes.  Une 
fois  qu'elles  se  rendent  nettement  compte  des  mouvements,  elles 


56  F.    C.    DONDERS.    LES    MOUVEMENTS    DE    l'œIL  , 

reconnaissent  sans  peine  quels  sont,  dans  la  production  de  ces 
mouvements,  les  muscles  qui  se  raccourcissent  activement,  et 
quels  sont  ceux  qui  s'allongent  d'une  manière  passive.  Pour  ce 
motif,  il  m'a  semblé  utile  de  construire  un  instrument  qui  rendît 
sensibles,  en  premier  lieu,  les  mouvements.  On  pourrait  le  distin- 
guer des  oplithalmotropes  déjà  connus,  par  le  nom  de  phénoph- 
thalmotrope  (de  (pnii'ot  rendre  visible,  offdaino,  œil  et  rocVr//  action 
de  tourner).  Pour  faire  comprendre  ses  usages,  nous  passerons 
en  revue  les  mouvements  de  l'œil,  en  les  rattachant  à  la  des- 
cription de  l'instrument. 

11  fut  un  temps  où  l'on  partait  des  muscles  de  l'œil,  pour 
chercher  à  remonter  de  ceux-ci  aux  mouvements  du  globe  oculaire. 
Les  quatre  muscles  droits  de  l'œil  étaient  alors  regardés  comme 
suffisants  pour  donner  toutes  les  directions  voulues  à  la  ligne  de 
fixation,  passant  par  le  point  de  rotation  et  le  point  de  mire 
dans  l'espace,  et  l'on  croyait  que  de  cette  manière  toutes  les 
conditions  du  problème  étaient  satisfaites.  Il  fallait  donc  trouver 
une  autre  fonction  aux  muscles  obliques  de  l'œil.  Au  lieu  d'une, 
on  en  découvrit  deux.  La  cause  du  pouvoir  d'accommodation 
n'était  pas  connue:  on  se  demanda  si  les  muscles  obliques  de 
l'œil  ne  seraient  pas  capables,  par  pression  sur  le  globe  oculaire , 
d'allonger  l'axe  visuel  et  de  pourvoir  ainsi  à  l'accommodation. 
Sans  preuve  aucune,  on  se  contenta  de  cette  solution  réciproque 
de  deux  inconnues.  Dans  l'effet  supposé,  les  muscles  agissaient 
de  concert.  Mais  on  sut  aussi  assigner  une  tâche  à  leur  action 
isolée.  De  la  direction  des  muscles  obliques  on  conclut  qu'ils 
devaient  être  en  état  de  faire  tourner  l'œil  autour  de  l'axe  op- 
tique, et,  effectivement,  M.  Hueck  crut  avoir  reconnu  une  pareille 
rotation  pendant  les  mouvements  d'inclination  latérale  de  la  tête  : 
jusqu'à  concurrence  de  25  à  28%  l'inclination  de  la  tête  serait 
compensée,  de  chaque  côté,  par  une  rotation  autour  de  l'axe 
optique,  de  sorte  que  les  méridiens  verticaux  ne  cesseraient  pas 
de  rester  verticaux.  Le  premier  rôle  attribué  aux  muscles  obli- 
ques de  l'œil  tomba  de  lui  même  avec  la  découverte  de  la  cause 
de  l'accommodation,  et  la  rotation  autour  de  l'axe  visuel  ne  put 


ÉCLAIRÉS  à  l'aide   DU   phénophthalmotrope.  57 

se  soutenir  en  présence  du  fait,  facile  à  constater,  qu'en  incli- 
nant la  tête  sur  le  côté,  les  images  consécutives  formées  sur  la 
rétine  se  déplacent  dans  la  même  direction  et,  certainement,  à 
à  peu  près  de  la  même  quantité.  L'idée  heureuse  de  consulter 
les  images  consécutives  pour  se  rendre  compte  de  la  position  de 
l'œil,  est  due  à  M.  Ruete,  qui  sut  également  assigner  bientôt 
leur  signification  véritable  aux  muscles  obliques.  Il  trouva,  en 
effet,  que  le  méridien  vertical  conserve  sa  position  verticale,  tant 
lorsque  l'œil,  tournant  autour  de  Taxe  transversal,  se  dirige 
directement  en  haut  ou  en  bas,  que  lorsque,  tournant  autour  de 
l'axe  vertical,  il  se  meut  à  droite  ou  à  gauche  dans  un  plan 
horizontal;  mais  qu'au  contraire,  quand  l'œil  se  dirige  en  haut 
de  côté,  le  méridien  vertical  s'incline  de  ce  même  côté,  tandis 
que  si  l'œil  se  porte  en  bas  de  côté,  ce  méridien  penche  du 
côté  opposé.  Or,  il  est  clair  que  si,  en  regardant  directement  en 
haut  ou  en  bas ,  les  seuls  muscles  actifs  étaient  les  muscles  droits 
supérieur  et  inférieur,  dont  la  direction  fait  un  angle  d'environ 
20°  avec  l'axe  optique,  le  méridien  prendrait  une  position  obli- 
que, et  que  cette  obliquité  ne  peut  être  compensée  que  par  le 
concours  du  muscle  oblique  inférieur  avec  le  droit  supérieur  et 
du  muscle  oblique  supérieur  avec  le  droit  inférieur.  Dans  l'un 
et  dans  l'autre  cas,  deux  muscles  agissent  de  concert  et  se  sou- 
tiennent mutuellement  sur  l'axe  transversal,  tandis  qu'ils  se  neu- 
tralisent sur  l'axe  visuel,  et  ce  n'est  que  de  cette  manière  que 
le  méridien  vertical  peut  garder  sa  position  verticale  quand  les 
lignes  de  fixation  se  dirigent  droit  en  haut  ou  droit  en  bas. 

Dans  cette  méthode,  comme  on  le  voit,  on  commença  par 
déterminer  le  mouvement  de  l'œil,  pour  en  déduire  ensuite  l'ac- 
tion des  muscles.  C'est  là,  ainsi  que  je  l'ai  fait  remarquer,  la 
seule  voie  pouvant  conduire  à  dévoiler  le  mécanisme  d'un  mou- 
vement. Permis  à  l'anatomiste  de  se  demander,  en  faisant  la 
description  d'un  muscle,  quel  mouvement  résulterait  de  la  con- 
traction de  ce  muscle  s'il  se  présentait  réellement  isolé  ;  —  la  tâche 
du  physiologiste  est  d'étudier  les  mouvements  eux-mêmes,  pour 
rechercher  ensuite  quels  sont,  dans  le  nouvel  état  d'équilibre,  les 


58  G.  C.  DONDERS.  LES  MOUVEMENTS  DE  l'œIL, 

muscles  allongés  ou  raccourcis,  et  à  quelle  tension  ils  se  trouvent 
soumis.  M.  Hueck  avait  cru  s'être  assuré  de  l'existence  du  mou- 
vement de  roue,  dans  l'inclination  latérale  de  la  tête,  par  le 
changement  de  direction  des  vaisseaux  visibles  de  la  conjonctive. 
A  cela  j'objectai  que,  dans  les  expériences  de  M.  Hueck,  les 
lignes  de  fixation,  pour  continuer  à  se  porter  sur  un  même  point 
rapproché  de  l'observateur,  devaient  changer  de  direction  par 
rapport  à  la  tête,  et  que  l'inclination  qui  en  résultait  pour  les 
méridiens  verticaux  pouvait  simuler  un  mouvement  de  roue.  Une 
expérience  qui  me  semble  tout  à  fait  décisive,  est  celle  où  l'œil 
se  contemple  lui-même  dans  un  petit  miroir  tenu  entre  les  dents, 
et  voit  alors,  à  chaque  mouvement  de  la  tête,  les  vaisseaux  de 
la  conjonctive  et  les  points  visibles  de  l'iris  conserver  invariable- 
ment la  même  position  par  rapport  aux  paupières,  aux  angles 
de  l'œil  et  aux  lignes  du  visage.  Je  reconnus  en  outre ,  en  faisant 
usage  des  images  consécutives  d'un  ruban  vertical,  que,  pour 
chaque  direction  déterminée  de  la  ligne  de  fixation,  relativement 
à  la  tête  en  position  verticale,  et  quels  que  fussent  les  détours 
employés  pour  arriver  à  cette  direction,  la  situation  du  méridien 
vertical,  et  par  conséquent  celle  de  l'œil  tout  entier,  restait  in- 
variablement la  même. 

La  loi  ainsi  trouvée  est  formulée  par  M.  Helmholtz,  qui  lui 
donne  le  nom  de  loi  de  Donders ,  de  la  manière  suivante  : 
„L'angle  du  mouvement  de  roue  de  chaque  œil  n'est,  en  cas  de 
parallélisme  des  lignes  visuelles,  fonction  que  de  l'angle  ascen- 
sionnel et  de  l'angle  de  déplacement  latéral." 

On  voit  que  M.  Helmholtz,  pour  déterminer  la  position  de 
l'œil,  introduit  un  angle  de  mouvement  de  roue.  Plus  loin  nous 
reconnaîtrons  ce  que  M.  Helmholtz  entend  par  cette  expression. 
Quant  à  moi,  je  crus  devoir  l'éviter,  parce  que  le  mouvement 
de  roue  ne  me  paraissait  pas  démontré,  —  et,  en  effet,  d'après 
la  loi  de  Listing,  il  ne  peut  être  question  d'un  véritable  mouve- 
ment de  ce  genre  dans  le  passage  de  la  position  primaire  à  une 
position  secondaire,  quelle  que  soit  celle-ci.  Il  me  sembla  que 
par  l'inclinaison   du  méridien  vertical  primitif,  dans  la  situation 


ÉCLAIRÉS  à  l'aide    DU   phénophthalmotrope.  59 

normale  de  la  tête ,  la  position  de  l'œil  était  déterminée  tout  aussi 
bien,  et  en  accord  avec  la  direction  des  images  consécutives. 
Dans  mon  Mémoire,  j'arrivai  à  la  conclusion  que  les  méridiens 
verticaux  s'inclinent  d'autant  plus  que,  pour  une  même  élévation 
ou  un  même  abaissement,  le  regard  se  porte  plus  de  côté,  et 
aussi  d'autant  plus  que,  pour  une  même  déviation  latérale,  le 
regard  se  meut  davantage  vers  le  haut  ou  vers  le  bas.  Plus  tard 
j'exécutai,  d'après  une  méthode  que  j'avais  développée  dans  mon 
Mémoire  '  ) ,  un  grand  nombre  de  mesures  de  l'écart  de  la  posi- 
tion verticale,  tel  qu'il  correspond  à  chaque  direction  de  la  ligne 
de  fixation;  mais,  comme  je  ne  réussis  pas  à  ramener  ces  écarts 
à  une  loi  déterminée,  cette  seconde  partie  de  mon  travail  ne  fut 
pas  publiée.  D'autres  ne  furent  pas  plus  heureux  que  moi  dans 
leurs  tentatives.  C'est  par  une  voie  différente  que  la  vérité  se 
fit  jour:  une  loi  fut  énoncée  à  priori;  il  ne  fut  pas  difficile  de 
la  soumettre  au  contrôle  de  l'expérience,  et  il  se  trouva  heureu- 
sement   qu'elle  résistait  à  cette  épreuve. 

Le  principe  posé  hypothétiquement  par  M.  Listing  ^)  s'énonce 
ainsi:  „Lorsque  l'œil  passe  de  la  position  normale  (primaire)  à 
une  position  secondaire  quelconque,  on  peut  se  représenter  ce 
changement  de  position  comme  le  résultat  d'une  rotation  autour 
d'un  axe  déterminé,  lequel,  passant  par  le  centre  de  l'œil,  serait 
toujours  à  la  fois  perpendiculaire  à  la  direction  primaire  et  à  la 
direction  secondaire  de  l'axe  optique;  par  conséquent,  chaque 
position  secondaire  se  trouve  par  rapport  à  la  position  primaire 
dans  la  relation  en  vertu  de  laquelle  la  rotation  projetée  sur  l'axe 
optique  est  =z  0." 

M.  Meissner  trouva  les  résultats  de  ses  recherches  conformes 
à  cette  loi;  mais  c'est  de  nouveau  à  M.  Helmholtz  que  nous 
devons  l'expérience  simple  par  laquelle  chacun  peut  se  convaincre 
de  l'exactitude  du  principe.   Cette  expérience  repose  sur  l'emploi 


^)  Uollàndische  Beitràge  zu  den  anatomischen  und  physiologischen  Wissenschaf- 
ten,  1846,  T.  I,  p.  135. 

*)  Communiqué  d'abord  par  M.  Ruete,  Lehrbuch  der  OpMhalmologie  ^^Qéàii,, 
Braunschweig ,  1853,  T.  I,  p.  36. 


60 

des  images  consécutives.  Nous  avons  vu  plus  haut  que  l'image 
consécutive  d'un  ruban  vertical  reste  verticale  lorsque,  la  tête 
conservant  la  position  normale,  nous  élevons  et  abaissons  le 
regard  dans  un  plan  vertical,  c'est-à-dire,  dans  la  direction  du 
ruban.  Or  ceci  est  vrai,  non-seulement  d'un  ruban  vertical, 
mais  aussi  d'un  ruban  ayant  une  autre  direction  quelcon- 
que: il  suffit  qu'on  fasse  mouvoir  l'œil  de  telle  sorte,  que  la 
ligne  de  fixation  et  le  ruban  tendu  se  trouvent  dans  le  même 
plan.  En  traçant  sur  un  mur  des  rayons,  partant  d'un  centre 
autour  duquel  peut  tourner  un  ruban  de  couleur  claire ,  on  pourra 
faire  coïncider  celui-ci  successivement  avec  chacun  des  rayons: 
après  avoir  fixé  le  ruban  de  l'œil,  dans  la  position  verticale  de 
la  tête,  on  verra  alors,  chaque  fois,  l'image  consécutive  suivre 
le  rayon  lorsque  le  regard  se  meut  suivant  sa  direction,  tandis 
que,  si  le  regard  se  promène  le  long  d'un  autre  rayon,  l'image 
s'en  écartera  constamment.  Ce  résultat  implique  l'exactitude  de 
la  loi  de  Listing.  L'expérience  montre  en  effet,  que  le  méridien 
dans  lequel  est  situé  le  ruban  conserve  sa  direction  quand  la 
ligne  de  fixation  se  meut  dans  le  plan  de  ce  méridien.  Ce  mé- 
ridien tourne  donc,  dans  ce  cas,  autour  d'un  axe  qui  le  coupe 
perpendiculairement,  savoir,  au  centre  de  rotation  lui-même.  En 
d'autres  termes,  l'œil,  en  passant  de  la  position  primaire  à  la 
position  secondaire,  tourne  autour  d'un  axe  perpendiculaire  au 
plan  qui  comprend  les  lignes  de  fixation  primaire  et  secondaire: 
c'est  là  la  loi  de  Listing. 

C'est  cette  loi  qu'il  faut  maintenant,  en  premier  lieu,  rendre 
sensible  par  le  phénophthalmotrope. 

Dans  cet  instrument  (PI.  III,  fig.  i ,  vu  de  côté,  en  perspec- 
tive) ,  le  globe  oculaire  0  tourne  avec  l'anneau  R  R  (dont  il  sera 
question  plus  loin)  dans  l'anneau  E.';  dans  la  position  figurée, 
l'axe  autour  duquel  se  fait  cette  rotation  est  horizontal  et  montre 
une  de  ses  extrémités  en  a'.  La  ligne  de  fixation  se  meut  donc 
dans  un  plan  vertical,  en  s'élevant  ou  s'abaissant.  L'axe  a'  porte 
un  petit  disque  circulaire  pourvu  d'un  arc  gradué  g' \  l'index  i' , 
qui  dans  la  figure  marque  0^,  est  fixé  sur  l'anneau  R'  par  deux 


ÉCLAIRÉS    à    l'aide    DU    PHÉNOPHTHALiMOTROPE.  61 

vis  s  y  s'.  Lorsque  le  globe  oculaire  tourne  autour  de  Taxe  a',  on 
peut  donc  lire  sur  g'  la  valeur  angulaire  de  cette  rotation. 

Dans  l'anneau  r ,  placé  en  avant  du  globe  occulaire^  peuvent 
être  vissées  deux  tiges  minces  k  k  ;  elles  sont  mobiles  avec  l'an- 
neau r  autour  de  la  ligne  de  fixation,  et  l'index  /^  indique  sur 
le  limbe  divisé  g'^  de  combien  elles  ont  tourné.  Dans  la  position 
que  l'instrument  occupe  ici,  la  direction  verticale  des  tiges  cor- 
respond à  0°.  Ces  tiges  représentent  le  méridien  vertical.  Quand 
l'œil  tourne  autour  de  l'axe  transversal  a' ,  le  méridien  conserve 
sa  position  verticale.  Ainsi  la  ligne  de  fixation  se  meut  dans  un 
plan  vertical,  quand  l'œil  se  porte  directement  en  haut  ou  direc- 
tement en  bas.  Cela  ne  demande  aucune  autre  explication. 

On  peut  maintenant  donner  à  l'instrument  une  position  diffé- 
rente. Dans  la  figure  1 ,  la  poignée  S ,  qui  est  assujettie  à  l'anneau 
R',  est  placée  tout  en  haut.  Mais,  à  l'aide  de  cette  poignée,  on 
peut  donner  à  l'anneau  R'  toute  autre  direction  dans  le  plan 
vertical  de  l'anneau  R".  L'index  i"  marque  alors  sur  le  bord 
gradué  g"  la  quantité  de  cette  rotation,  laquelle,  dans  la  fig.  2, 
s'élève  à  45°.  Il  est  clair  que  l'axe  a  a'  est  entraîné  dans  le 
mouvement  de  l'anneau  R';  la  figure  2  montre  le  phénophthal- 
motrope  après  que  ce  mouvement  a  eu  lieu ,  et  lorsque ,  en  outre , 
l'œil  a  déjà  tourné  autour  de  l'axe  à'  a'  dans  sa  nouvelle  position. 
Avant  cette  rotation,  les  tiges  kkj  qui  avaient  suivi  l'inclina- 
tion de  la  poignée  S,  ont  été  placées  de  nouveau  verticalement, 
ce  qui  a  eu  pour  effet  de  faire  marquer  à  l'index  i°  le  même 
nombre  de  degrés  que  marquait  l'index  i" .  La  position  des  tiges 
représente  celle  du  méridien  vertical  de  l'œil.  L'œil  peut  donc 
être  considéré  comme  s'il  n'avait  pas  été  tourné,  à  l'aide  de  la 
poignée  S,  dans  l'anneau  extérieur:  tout  se  passe  comme  si 
l'œil  vivant,  resté  dans  la  position  primaire,  se  disposait  seu- 
lement à  regarder  obliquement  en  haut  ou  obliquement  en  bas. 
Dans  la  figure  2,  comme  il  a  été  dit,  ce  mouvement  est  déjà 
exécuté ,  et ,  par  suite  de  la  rotation  autour  de  l'axe  a'  a' ,  la 
ligne  de  fixation  s'est  dirigée  à  droite  et  en  haut.  La  quantité 
dont   elle   a   tourné   autour   de  cet  axe  est  de  nouveau  marquée 


62 

par  l'index  ^%  et  s'élève,  dans  la  figure  2,  à  45°.  Dans  le  cas 
que  nous  avons  choisi  pour  exemple,  l'œil  a  donc  tourné  de  45° 
vers  le  haut ,  autour  d'un  axe  a'  a'  incliné  de  45°  sur  Taxe  hori- 
zontal. En  tournant  la  poignée  S,  on  peut  donner  à  cet  axe  a'  a' 
toutes  les  inclinaisons  qu'on  désire  et,  par  suite,  faire  mouvoir 
la  ligne  de  fixation,  de  sa  position  primaire,  dans  toutes  les 
directions,  toujours  autour  d'axes  invariablement  situés  dans  le 
plan  de  l'anneau  R^',  lequel  coïncide  à  peu  près  avec  l'équateur 
de  l'œil  '  ).  Telle  est  l'illustration  de  la  loi  de  Listing. 

En  partant  de  la  position  primaire,  qu'on  établit  chaque 
fois  de  nouveau  en  plaçant  les  tiges  verticalement,  nous  faisons 
toujours  mouvoir  la  ligne  de  fixation  de  telle  sorte  qu'elle  se 
rapproche  ou  s'éloigne  directement  de  la  poignée  S ,  laquelle  reste 
par  conséquent,  avec  les  positions  primaire  et  secondaire  de  la 
ligne  de  fixation,  dans  le  méridien  qui,  durant  cette  rotation, 
conserve  invariablement  sa  situation  primitive.  Les  images  consé- 
cutives de  lignes  situées  dans  ce  méridien  doivent  donc  aussi, 
évidemment,  rester  en  coïncidence,  pendant  la  rotation,  avec  les 
images  directes  d'objets  placés  dans  ce  même  méridien.  C'est  ainsi 
que  le  phénophthalmotrope  éclaire  la  démonstration  donnée  par  M. 
Helmholtz  de  l'exactitude  de  la  loi  de  Listing.  Si  nous  avions 
laissé  aux  tiges  la  direction  de  la  poignée ,  elles  seraient  restées , 
durant  la  rotation,  dans  le  méridien  immobile. 

Mais  le  méridien  vertical ,  est-il  aussi  resté  vertical  pendant  cette 
rotation?  C'est  précisément  pour  pouvoir  en  juger  que  nous 
avons  mis,  avant  la  rotation,  les  tiges  dans  la  position  verti- 
cale; or,  le  résultat  de  l'expérience  montre  que  ce  méridien  a 
réellement  cessé  d'être  vertical,  qu'il  incline  visiblement  du  côté 
droit,  —  tout  comme  l'image  accidentelle  d'un  ruban  vertical, 
lorsque  nous  regardons  en  haut  à  droite.  Le  phénophthalmotrope 
nous  permet  donc  encore  de  retrouver  le  changement  de  position 


^)  Le  centre  du  mouvement  (le  point  de  rotation)  est  situé  un  peu  en  arrière 
du  centre  de  l'œil;  l'anneau  R^  se  trouve  donc  un  peu  derrière  l'équateur,  dans 
un  plan  parallèle  à  celui-ci. 


ÉCLAIRÉS  à  l'aide   DU   phénophthalmotrope.  63 

du  méridien  vertical,  tel  qu'on  l'avait  constaté  par  l'observation 
des  images  consécutives. 

Il  est  facile,  en  outre,  d'évaluer  en  degrés  l'inclinaison  qu'a 
prise  le  méridien  vertical:  pour  cela,  on  n'a  qu'à  chercher  de 
combien  de  degrés  se  déplace  l'index  i° ,  lorsque  les  tiges  k  k 
sont  ramenées  dans  un  seul  et  même  plan  vertical  avec  la  ligne 
de  fixation.  Cette  opération  peut  s'exécuter  avec  précision,  en 
munissant  d'un  réticule  le  canal  axial  du  globe  oculaire,  puis 
visant  par  ce  canal  un  fil  vertical  suspendu,  avec  lequel  on  fait 
coïncider  les  tiges. 

Pour  arriver,  dans  ces  expériences,  à  bien  se  rendre  compte 
du  mouvement  de  son  propre  organe,  il  est  bon  de  placer  l'un 
ou  l'autre  de  ses  yeux  directement  derrière  le  phénophthalmo- 
trope, après  avoir  préalablement  disposé  celui-ci  à  la  hauteur 
convenable.  Il  est  aisé  alors  de  suivre  tous  les  mouvements,  de 
se  représenter  clairement  les  positions  correspondantes  de  l'axe 
de  rotation,  et  de  saisir  les  rapports  entre  ces  mouvements  et 
les  expériences  relatives  aux  images  consécutives. 

Rappelons  encore  une  fois,  que  tous  les  axes  autour  desquels 
Tceil  tourne,  lorsqu'il  passe  de  la  position  primaire  à  la  position 
secondaire,  s'obtiennent  par  la  rotation  de  l'anneau  R'  dans  R', 
et  que  tous  par  conséquent  sont  situés  dans  l'équateur.  Tous  ces 
axes  sont  donc  perpendiculaires  à  la  ligne  de  fixation  ;  par  suite , 
il  ne  peut  être  question  ici  d'une  rotation  autour  de  la  ligne  de 
fixation,  d'un  mouvement  de  roue.  C'est,  comme  l'exprime  la 
formule  donnée  par  M.  Ruete  à  la  loi  de  Listing:  „une  relation 
en  vertu  de  laquelle  la  rotation  projetée  sur  l'axe  optique  est  z=  0." 

On  doit  donc  se  demander:  en  quel  sens  M.  Helmholtz  parle- 
t-il  ici  de  mouvement  de  roue?  Or,  cette  question  aussi  est  par- 
faitement élucidée  par  le  phénophthalmotrope.  M.  Helmholtz  part , 
dans  l'analyse  des  mouvements  oculaires,  d'un  plan  fixe  situé 
dans  l'œil,  V horizon  rétinien,  lequel,  pour  la  position  normale 
de  la  tête,  coïncide  avec  le  plan  de  fixation  dirigé  sur  l'horizon 
infiniment  éloigné:  c'est  donc  le  méridien  horizontal  du  phénoph- 
thalmotrope, lorsque  tous  les  index  sont  pointés  sur  0°  (fig.  1). 


64  F.    C.    DONDERS. 

La  direction  que  la  ligne  de  fixation  a  obtenue  en  réalité  par 
rotation  autour  d'un  axe  oblique  (l'axe  a' a'  dans  la  fig.  2), 
M.  Helmholtz  la  fait  résulter  —  le  point  de  départ  étant  la  posi- 
tion primaire  —  de  deux  rotations  différentes,  réalisables  toutes 
les  deux  dans  le  phénophthalmotrope ,  savoir:  P.  une  rotation 
autour  de  l'axe  transversal  a'  a'  (angle  ascensionnel  de  M.  Helm- 
holtz) par  laquelle  la  ligne  visuelle  est  portée  en  haut  ou  en  bas, 
2°.  une  rotation  autour  de  l'axe  a  a  (angle  de  déplacement  latéral 
de  M.  Helmholtz)  par  laquelle  la  ligne  visuelle  est  dirigée  de 
côté.  Ce  second  axe  «  a  se  trouve  sur  l'anneau  R,  et  l'angle 
latéral  se  lit  sur  le  limbe  gradué  g ,  de  même  que  l'angle  ascen- 
sionnel sur  le  limbe  g':  remarquons  que  l'axe  a  a,  qui  est  per- 
pendiculaire à  l'horizon  rétinien,  change  de  direction  avec  cet 
horizon  lors  de  la  rotation  préalable  autour  de  l'axe  a' a' ,  mais 
en  restant  toujours  dans  le  même  plan  vertical.  Lorsque  mainte- 
nant ,  par  rotation  autour  des  axes  a  a  et  a'  a' ,  on  a  donné  à  la 
ligne  de  fixation  une  direction  identique  à  celle  qui,  dans  la 
figure  2,  a  été  obtenue,  suivant  la  loi  de  Listing,  par  rotation 
autour  de  l'axe  a'  a' ,  incliné  de  45°,  on  trouve  que  le  méridien 
vertical  a  pris  une  inclinaison  différente.  Il  penche  encore  plus 
vers  le  côté  droit.  Pour  arriver  à  la  position  que  l'œil,  en  tour- 
nant d'après  la  loi  de  Listing,  prend  effectivement,  il  faut  donc 
ajouter  encore  un  troisième  mouvement,  savoir,  une  rotation 
autour  de  l'axe  visuel,  un  mouvement  de  roue,  —  de  droite  à 
gauche  dans  le  cas  supposé. 

Cette  analyse  détermine  rigoureusement  la  position  des  yeux 
et  des  lignes  de  fixation  par  rapport  à  la  tête,  et  elle  se  prête 
très  bien  à  l'application  du  calcul.  Mais  on  doit  la  considérer 
comme  une  fiction  mathématique,  non  comme  une  réalité  physio- 
logique. Dans  la  rotation  autour  d'un  axe  oblique,  selon  la  loi 
de  Listing  (fig.  2),  il  n'y  a  pas  plus  de  mouvement  de  roue, 
c'est-à-dire  de  rotation  autour  de  l'axe  de  fixation,  que  dans  les 
rotations  successives  autour  des  axes  a  a  et  a'  a'  (en  partant  de 
la  position  représentée  fig.  1):  toutes  ces  rotations,  en  effet, 
s'exécutent  autour  d'un   axe  perpendiculaire  à  l'axe  de  fixation. 


ÉCLAIRÉS    A    l'aide    DU    PHENOPHTHALMOTROPE.  65 

Nous   n'avons   à   admettre   un   mouvement  de  roue  que  dans  les 
cas  où  l'œil  s'écarte  des  lois  de  Donders  et  de  Listing. 

Du  reste,  le  phénophthalmotrope  nous  permet  de  rendre  visible 
et  de  mesurer  en  degrés,  pour  chaque  position,  le  mouvement 
de  roue,  au  sens  qu'y  attache  M.  Helmholtz.  En  faisant  tourner 
la  poignée  S ,  on  donnera  à  l'axe  a'  a'  une  direction  quelconque 
(marquée  sur  ^  ') ,  puis  on  placera  k  k  verticalement  et  on  impri- 
mera à  l'œil  une  rotation  arbitraire  autour  de  a'  a'  (marquée  sur 
g').  On  déterminera  alors  (V.  page  63)  de  combien  de  degrés  le 
méridien  vertical  s'est  incliné  à  droite  ou  à  gauche  par  suite  de 
cette  rotation  conforme  à  la  loi  de  Listing,  et,  visant  par  le 
canal  axial,  on  notera  le  point  de  l'espace  sur  lequel  la  ligne 
de  fixation  se  trouve  dirigée.  Ensuite,  on  ramènera  l'œil  dans 
la  position  primaire,  la  poignée  placée  tout  en  haut,  et  l'axe 
a'  a'  par  conséquent  horizontal  ;  on  rendra  la  ligne  k  k  de  nouveau 
verticale,  puis,  visant  par  le  canal  axial  et  faisant  tourner  à  la 
fois  autour  des  axes  a  a  et  a' a' ,  on  dirigera  la  ligne  de  fixation 
sur  le  même  point  de  l'espace  auquel  elle  répondait  dans  l'ex- 
périence précédente.  On  s'apercevra  immédiatement  que  k  k  s'est 
éloignée  de  la  position  verticale  plus  que  dans  le  premier  cas, 
et  on  déterminera  de  nouveau  l'inclinaison,  en  ramenant  dans  le 
plan  vertical  et  prenant  l'indication  du  cadran  g°.  La  différence 
d'inclinaison,  qu'on  aura  trouvée  ainsi  entre  les  deux  cas,  est 
le  mouvement  de  roue  de  M.  Helmholtz:  les  chiffres  s'accordent 
avec  ceux  du  tableau  donné  par  ce  savant  ').  Ceci  éclaircit 
en  outre  un  point  qui  était  resté  obscur  aux  yeux  de  beaucoup 
de  personnes,  savoir,  comment  M.  Helmholtz  pouvait  parler,  par 
exemple,  d'un  mouvement  de  roue  de  droite  à  gauche  lorsqu'on 
fixe  à  droite  en  haut,  bien  que,  dans  ce  cas,  le  méridien  ver- 
tical s'incline  à  droite,  ainsi  que  le  prouve  l'observation  de 
l'image  consécutive  ;  c'est  que ,  comme  nous  l'apprend  la  compa- 
raison des  deux  expériences  décrites  ci-dessus,  le  méridien  ver- 
tical aurait  pris  une  inclinaison  à  droite  encore  plus  considérable, 


*)  Physiologische  Optik,  p.  467. 
Archives  Néerlandaises,  T.  V. 


66  F.    C.    DONDERS.    LES    iMOUVEMEINTS    DE    LŒIL, 

si  la  direction   secondaire  de  Taxe  de  fixation  avait  été  obtenue 
par  rotation  autour  des  seuls  axes  a  a  et  a'  a'. 

Nous  avons  maintenant  encore  à  examiner  comment  M.  Helm- 
holtz  détermina  directement,  à  l'aide  des  images  consécutives, 
le  mouvement  de  roue  qu'il  introduisait  dans  son  analyse  du 
phénomène.  La  signification  et  la  légitimité  de  cette  analyse  res- 
sortiront  alors  d'une  manière  encore  plus  évidente. 

M.  Helmholtz  part,  comme  nous  l'avons  déjà  dit,  d'un  plan 
fixe  dans  l'œil,  l'horizon  rétinien.  Un  ruban  horizontal,  tendu 
dans  ce  même  plan  sur  une  paroi  verticale,  forme  son  image 
rétinienne  dans  cet  horizon.  Quand  l'horizon  rétinien  pivote  autour 
de  l'axe  a'  a' ,  il  continue  à  couper  la  paroi  suivant  des  lignes 
horizontales,  et  l'image  consécutive,  à  quelque  hauteur  qu'elle 
se  transporte,  continue  par  conséquent  à  coïncider  avec  des  lig- 
nes horizontales  tracées  sur  la  paroi:  le  phénophthalmotrope  met 
cela  immédiatement  en  évidence,  lorsqu'on  a  tourné  l'anneau  rde 
manière  à  donner  aux  tiges  k'  k'  une  direction  horizontale.  Mais 
que  l'on  fasse  pivoter  maintenant  autour  de  l'axe  a  a  (angle  de 
déplacement  latéral)  :  les  tiges  k'  k'  abandonnent  alors  la  position 
horizontale  (si  l'angle  ascensionnel  pouvait  atteindre  90°,  elles 
tourneraient  même  dans  un  plan  vertical ,  de  manière  à  s'écarter 
d'un  degré  entier  de  la  direction  horizontale  pour  chaque  degré  de 
rotation);  mais,  en  regardant  par  le  canal  axial,  on  reconnaît 
que,  projetées  sur  la  paroi,  elles  continuent  à  coïncider  parfaite- 
ment avee  les  lignes  horizontales  qui  y  sont  tracées.  Cela  pro- 
vient de  ce  que,  dans  la  rotation  autour  de  aa,  l'horizon  rétinien 
reste  exactement  dans  le  même  plan,  vu  qu'il  est  perpendiculaire 
à  rt  rt  ;  il  doit  donc  continuer  à  passer  par  le  prolongement  de 
la  ligne  horizontale,  qui  est  aussi  située  dans  ce  même  plan.  Le 
phénophthalmotrope  nous  fait  voir  cela  très  clairement.  Mais, 
d'un  autre  côté,  on  trouve  que  l'image  consécutive  d'un  ruban 
horizontal  ne  continue  pas,  quand  le  regard  se  porte  latéralement 
vers  le  haut  ou  vers  le  bas,  à  coïncider  avec  des  lignes  hori- 
zontales tracées  sur  la  paroi;  par  rapport  à  celles-ci,  l'horizon 
rétinien,  quand  on  regarde  vers  le  haut,  a  tourné  en  sens  opposé. 


ÉCLAIRÉS    A    l'aide    DU    PÉHNOPHTHALMOTROPE.  67 

Il  y  a  donc  eu,  dit  M.  Helmholtz,  un  mouvement  de  roue  en 
sens  opposé,  et  c'est  là  précisément  le  mouvement  de  roue  que 
son  analyse  demande. 

Il  est  facile  en  effet  de  se  convaincre  que  si,  lorsqu'on  regarde 
obliquement  en  haut,  l'image  consécutive  d'un  ruban  vertical 
s'écarte  du  même  côté  par  rapport  à  des  lignes  verticales,  l'image 
consécutive  d'un  ruban  horizontal  dévie  au  contraire  en  sens 
opposé   par   rapport   à   des  lignes   horizontales.    Les  deux  lignes 

pleines  perpendiculaires  entre  elles  c  v 
et  ch  (iig.  1),  qui  représentent  deux 
;'  rubans  de  couleur  claire  tendus  sur  la 

paroi ,  étant  fixées  par  l'œil  dans  la  po- 
sition primaire  au  point  c ,  compris  dans 
l'horizon  rétinien,  montrent,  lorsqu'on 

-" '"  les   projette   à  droite   en   haut,   leurs 

^T^ '  fi     ima^-es  consécutives  dans  la  direction 

c  FIG.     1.  ^ 

des  deux  lignes  pointillées  cv'  et  c  h'  : 
dans  ce  mouvement  ascensionnel  de  l'œil,  l'image  consécutive 
du  ruban  vertical  a  donc  dévié  du  même  côté;  celle  du  ruban 
horizontal,  du  côté  opposé.  Il  n'est  pas  nécessaire  de  chercher 
beaucoup  pour  trouver  l'explication  de  ce  fait.  Une  ligne  verticale 
coïncide  avec  toute  autre  ligne  verticale  sur  laquelle  on  la  pro- 
jette, quelle  que  soit  d'ailleurs  la  place  que  ces  deux  lignes  oc- 
cupent l'une  par  rapport  à  l'autre  ou  par  rapport  à  l'œil.  Mais, 
pour  les  lignes  horizontales,  il  en  est  tout  autrement:  une  ligne 
horizontale,  qui  s'éloigne  de  nous,  est  vue  montante  quand  elle 
est  située  plus  haut  que  notre  œil,  descendante,  quand  elle  est 
située  plus  bas.  Dans  une  projection  du  champ  visuel,  —  chaque 
dessin,  chaque  photographie  peut  nous  l'apprendre,  — toutes  les 
lignes  verticales  restent  verticales ,  et  toutes  les  lignes  horizon- 
tales prennent  une  inclinaison,  dépendante  de  la  direction  et  de 
la  hauteur  que  les  lignes  affectent  dans  l'espace,  relativement  à 
l'œil.  D'après  cela,  une  ligne  horizontale,  tracée  à  un  niveau 
supérieur  à  celui  de  notre  œil,  sur  une  paroi  verticale  et  paral- 
lèle au   plan   de  notre  visage  ;  est  vue  descendante,  et  c'est  par 

5* 


68  F.    C.    nONDRRS.    LES    MOUVEMENTS    DE    l'œIL 


rapport  à  cette  projection  que  Timage  consécutive  d'une  ligne 
horizontale  ;  qui  avait  été  vue  dans  le  plan  de  la  position  pri- 
maire et  par  conséquent  non  descendante,  montre  une  déviation 
de  h  en  h' ,  fig.  1 ,  —  opposée  à  celle  qui  déplace  de  v  en  v'  l'image 
consécutive  d'un  ruban  vertical.  Qu'on  projette  l'image  consécutive 
d'une  ligne  horizontale  sur  une  surface  telle  que  tous  les  points 
d'une  ligne  horizontale  s'y  trouvent  placés  à  la  même  distance 
de  l'œil,  et  la  différence  de  déviation  des  images  consécutives 
horizontales  et  verticales  aura  disparu.  Cette  condition  serait 
remplie  dans  tous  les  cas,  si  l'œil  était  situé  au  centre  d'une 
sphère  ou  sur  l'axe  d'une  chambre  de  forme  cylindrique,  et  s'il 
projetait  sur  la  paroi  de  cette  sphère  ou  de  cette  chambre  '). 
Mais  il  suffit  déjà  que  le  plan  vertical,  dans  lequel  se  trouve  la 

ligne  visuelle  lors  de  la  projection , 
soit  perpendiculaire  à  la  paroi. 
Donc,  si  l'on  a  deux  parois  ver- 
ticales, dont  w  et  w'  (fig.  2)  soient 
les  sections,  et  si  l'œil  o,  dans  sa 
position  primaire ,  fixe  sur  la  paroi 
w  le  point  de  croisement  c  des 
rubans  y  et  A,  la  projection  des 
images  consécutives  sur  la  paroi  iv' ,  perpendiculaire  au  plan  qui 
passe  par  la  ligne  de  fixation  o  w',  montrera  ces  images  déviées 
toutes  les  deux  dans  le  même  sens  (fig.  3).  Et  si  l'on  se  trouve 

dans  une  chambre  carrée,  de  sorte  que 
V    v' 

l'angle  x  soit  un  angle  droit,  la  pro- 
jection sur  w' ,  au  voisinage  de  l'angle 
X,  donnera  à  h  une  déviation  non-seu- 
lement de  même  sens ,  mais  encore  plus 
grande  que  celle  de  v,  parce  que  des 
lignes  horizontales,  tracées  sur  w' y  se 
rapprochent  de  l'œil  à  partir  de  l'angle 


h    X.  L'expérience  est  très  frappante  lorsque 

FiQ.  3.  l'image  consécutive  d'un  assez  long  ru- 

')  Les  génératrices  et  les  lignes  horizontales  d'un  cylindre,  dont  l'axe  passe 
par  le  centre  d'une  sphère,  coïncident,  vues  de  ce  centre,  avec  les  méridiens 
et  les  parallèles  de  la  sphère 


ÉCLAIRÉS    A    l'aide    DU    PHENOPHTHALMOTROPE.  69 

ban  horizontal,  dont  l'œil  a  fixé  le  milieu  dans  la  position  pri- 
maire^ est  projetée,  dans  une  pareille  chambre  carrée,  sur  l'angle 
X,  de  façon  qu'elle  tombe  en  partie  sur  w  et  en  partie  sur  w  : 
en  w  l'image  consécutive  s'élève  alors  relativement  à  la  ligne 
horizontale,  tandis  qu'en  iv'  elle  s'abaisse  fortement. 

Ce  que  les  images  consécutives  viennent  de  nous  montrer,  on 
peut  l'imiter  facilement  à  l'aide  du  phénophthalmotrope.  Les  ex- 
périences peuvent  se  faire,  soit  séparément  avec  des  tiges  verti- 
cales k  k  et  avec  des  tiges  horizontales  k'  k' ,  soit  simultanément , 
en  vissant  des  tiges  égales  en  u  et  u' ,  d'où  résulte  une  croix 
(comme  dans  la  fig.  2) ,  ou  en  se  bornant  à  deux  tiges  k  k' , 
placées  à  angle  droit  l'une  par  rapport  à  l'autre.  Si  on  regarde 
alors  par  le  canal  axial,  on  voit  ces  tiges  se  projeter,  sur  une 
paroi  quelconque,  dans  la  même  direction  où  s'y  montrent  les 
images  consécutives. 

Le  lecteur  aura  sans  doute  reconnu  que,  pour  se  représenter 
les  mouvements  de  l'œil,  on  peut  à  volonté  partir,  avec  M. 
Helmholtz,  de  l'horizon  rétinien,  ou,  avec  moi,  du  méridien  ver- 
tical. Le  méridien  vertical  me  semble  préférable  en  ce  sens  que, 
toutes  les  lignes  verticales  se  projetant  rigoureusement  l'une  sur 
l'autre,  quelle  que  soit  leur  situation  par  rr.pport  à  l'œil,  il  rend 
peut-être  la  représentation  plus  simple  et  plus  facile. 

J'ai  encore  à  ajouter  quelques  détails  au  sujet  du  phénoph- 
thalmotrope considéré  comme  instrument.  Il  est  exécuté  '  )  en 
grand  et  en  petit  modèle;  le  premier  convient  particulièrement 
pour  les  démonstrations. 

Tout  l'instrument  est  en  cuivre;  dans  le  petit  modèle  seule- 
ment, le  globe  oculaire  proprement  dit  est  fait  de  bois  de  buis. 
Il  est  soutenu  sur  une  colonne  en  cuivre  D,  qu'un  tirage  permet 
d'allonger  ou  de  raccourcir,  pour  amener  l'appareil  à  la  hauteur 
de  l'œil  de  l'observateur,  quand  on  veut  regarder  par  le  canal 
axial;  le  tout  repose  sur  un  large  pied.  A  la  place  du  canal 
axial,    on    peut    adapter   en   avant  une  lentille  et  en  arrière  un 

')  Par  M.  Olland,  mécanicien  à  Utrecht. 


70  P.    C.    DONDERS.    LES    MOUVEMENTS    DE    l'œIL  / 

verre  dépoli ,  sur  lequel  est  dessiné  une  croix  ;  on  peut  alors 
comparer  avec  cette  croix  la  position  des  images  dioptriques  que 
forment  sur  le  verre  dépoli  des  lignes  verticales  et  horizontales 
vues  dans  diverses  directions. 

On  construit  aussi  des  phénophthalmotropes  plus  simples,  aux- 
quels manque  la  rotation  autour  de  l'axe  a  a,  de  sorte  qu'ils 
reproduisent  seulement  les  mouvements  d'après  la  loi  de  Listing, 
mais  non  l'analyse  de  ces  mouvements  d'après  Helmholtz.  Cette 
simplification  offre  l'avantage  que  le  globe  oculaire  devient  alors 
mobile,  dans  l'anneau  interne  R,  autour  de  l'axe  de  fixation; 
on  peut  donc,  après  avoir  fait  tourner  la  poignée  S,  ramener 
toujours  dans  la  position  verticale  un  seul  et  même  méridien  fixe 
du  globe  oculaire,  ce  qui  permet  d'assigner  aussi,  sur  ce  globe, 
des  points  d'insertion  fixes  aux  muscles.  Cela  peut  servir,  en  cas 
de  besoin,  à  mieux  se  représenter,  pour  chaque  position  de 
l'œil,  la  situation  des  muscles  et,  par  suite,  la  part  qu'ils  ont 
prise  au  mouvement. 

Le  phénophthalmotrope  donne  les  mouvements  tels  qu'ils  résul- 
tent des  lois  de  Donders  et  de  Listing.  Mais ,  comme  nous  l'avons 
déjà  fait  remarquer  en  commençant,  l'œil  n'obéit  pas  à  ces  lois 
d'une  manière  parfaite. 

En  premier  lieu,  il  est  connu  que,  même  dans  la  position 
primaire,  les  images  de  lignes  verticales,  formées  sur  les  deux 
rétines,  ne  sont  pas  projetées  au  dehors  exactement  l'une  sur 
l'autre  ;  d'où  il  suit  que ,  dans  cette  position  ,  les  méridiens  verticaux 
ne  coupent  pas  les  deux  rétines  en  des  points  rigoureusement 
correspondants.  On  n'a  pas  besoin  d'appareils  compliqués  pour 
se  convaincre  de  ce  fait.  Il  suffit  d'un  prisme,  qu'on  tient,  l'angle 
tourné  en  haut,  devant  l'un  des  deux  yeux:  une  ligne  verticale 
montre  alors  un  léger  coude  au  point  où  la  vision  par  l'un  des 
yeux  passe  à  la  vision  par  l'autre.  Mais  il  n'est  pas  même 
nécessaire  de  recourir  à  un  prisme.  Quand  les  yeux  se  fixent 
dans  la  position  primaire  sur  un  fil  vertical,  même  suspendu  à 
une  grande  distance,  on  remarque  très  distinctement  que  vers  le 
haut  et  vers  le  bas  il  se  sépare  en  images  doubles.  Si  alors,  les 


ÉCLAIRES    A    L  AIDE    DU    PHENOPHTHALMOTROPE.  71 

yeux  étant  tenus  constamment  ouverts,  on  fait  glisser  un  petit 
écran  noir  (au  besoin,  la  main)  alternativement  devant  l'un  et 
devant  l'autre  œil ,  on  constate  que  les  images  inclinent  l'une 
vers  l'autre.  En  alternant  avec  prestesse,  et  jetant  aussi  de  temps 
en  temps  un  rapide  coup  d'œil  avec  les  deux  yeux  à  la  fois, 
on  obtient  facilement  que  l'œil  caché  derrière  l'écran  reste  bien 
fixé,  de  manière  qu'il  n'ait  pas  à  se  déplacer  latéralement  au 
moment  où  on  le  découvre,  ce  qui  rendrait  le  jugement  moins 
net.  Cette  difficulté  est  levée  complètement  si,  les  deux  yeux 
étant  fixés  sur  le  fil,  on  se  borne  à  en  couvrir  un  seul;  bien 
que  l'effet  soit  alors  moitié  moindre  qu'en  interceptant  alternati- 
vement la  vue  des  deux  yeux,  on  voit  clairement  le  fil  incliner 
un  peu  vers  le  côté  opposé,  —  et  cette  apparence,  une  fois  pro- 
duite, ne  se  dissipe  même  pas  très  facilement.  Dans  la  vision 
binoculaire,  nous  combinons  en  une  image  verticale  les  deux 
images  également  inclinées  l'une  vers  l'autre.  Pour  cette  raison, 
les  expériences  concernant  les  images  consécutives,  bien  que  pou- 
vant se  faire  binoculairement ,  réussissent  pourtant  mieux,  surtout 
en  cas  de  convergence,  lorsqu'un  des  yeux  est  tenu  couvert.  Par 
l'effet  de  cette  convergence,  ainsi  que  MM.  Meissner  et  Volk- 
mann  l'ont  fait  voir,  l'inclaison  réciproque  des  images  verticales 
s'accuse  davantage  :  c'est  là  une  première  dérogation  aux  lois  géné- 
rales. En  outre,  comme  nous  l'a  appris  M.  Helmholtz,  ces  lois 
ne  sont  pas  rigoureusement  applicables  aux  limites  extrêmes 
du  champ  de  fixation,  où  les  irrégularités  ne  manquent  pas. 
Enfin,  dernièrement,  M.  Javal  a  observé  chez  des  astigma- 
tiques,  en  cas  d'inclination  latérale  de  la  tête,  une  petite 
rotation  autour  de  l'axe  visuel  „de  sorte  que,"  comme  s'exprime 
M.  Helmholtz,  „la  position  de  l'œil  n'est  pas  indépendante  de 
celle  de  la  tête  aussi  rigoureusement  que  l'affirme  la  loi  de 
Donders  ^)." 


•)  Voyez:  Helmholtz,  Optique  ^physiologique ,  p.  671.  Paris,  1867,  trad.  par 
E.  Javal  et  N.  W.  Klein.  En  un  autre  endroit  (Astigmatisme.  Voyez  Wecker, 
Traité  théorique  et  pratique  des  maladies  des  yeux,  T.  II,  p.  828,  Paris,  1869), 


72 

Toutes  ces  anomalies  doivent  trouver  leur  solution  et  leur  ex- 
plication dans  le  problème  si  compliqué  de  la  transformation  de 
nos  impressions  en  perceptions  dans  la  vision  binoculaire. 

Il  a  encore  été  reconnu  que  la  myopie,  —  laquelle  constitue, 
il  est  vrai,  une  condition  pathologique  de  l'œil,  —  amène  sous 
le  rapport  des  lois  dont  nous  traitons,  comme  sous  beaucoup 
d'autres  rapports,  de  petites  déviations,  qui  méritent  toute  notre 
attention,  surtout  au  point  de  vue  de  l'accommodation  des  orga- 
nes à  l'usage  que  les  nécessités  leur  imposent. 

Pour  finir,  encore  un  mot  sur  l'étude  des  mouvements  de  l'œil 
en  cas  de  troubles  paralytiques  des  muscles.  Nous  mettons  ici  le 
pied  sur  un  terrain  où  l'esprit  créateur  de  M.  Albert  de  Graefe  ^) 
s'est  exercé  de  préférence  et  où  il  a  laissé  peu  de  chose  à  faire 
à  ses  successeurs.  Des  anomalies  du  mouvement  et  de  la  posi- 
tion des  images  doubles,  observées  rigoureusement  et  analysées 
avec  sagacité ,  M.  de  Graefe  a  su  déduire  le  diagnostic ,  —  déter- 
miner avec  précision  la  nature  et  le  degré  de  chaque  trouble. 
Dans  les  cas  ordinaires,  ces  méthodes  d'examen  atteignent  par- 
faitement leur  but.  Mais  il  y  a  deux  circonstances  où  elles  nous 
laissent  plus  ou  moins  en  défaut.  L'une  se  présente  quand  les 
phénomènes  paralytiques  affectent  les  deux  yeux  à  la  fois ,  ce  qui 
n'est  pas  extrêmement  rare;  l'autre,  quand  un  seul  œil  a  con- 
servé sa  faculté  visuelle.  Dans  le  dernier  cas,  la  comparaison 
d'images  doubles  nous  échappe  d'elle-même;  dans  le  premier,  la 
complication  des  phénomènes  en  rend  l'analyse  difficile,  sinon 
impossible.    Or,    dans    ces    cas,   je   crois    pouvoir    recommander 


M.  Javal ,  se  fondant  sur  l'observation  d'une  légère  torsion ,  a  cru  devoir  ressusciter 
la  théorie  de  Hueck;  je  dois  lui  rappeler  que,  d'après  cette  théorie ,  les  méridiens 
verticaux  conserveraient  invariablement  leur  direction  jusqu'à  une  inclinaison  de  25° 
à  28°,  la  torsion  donnant  lieu  à  une  compensation  parfaite;  je  l'engagerai,  en 
outre ,  à  vouloir  bien  se  donner  la  peine  de  répéter  les  expériences  qui ,  il  y  a 
nombre  d'années  déjà,  ont  amené  la  chute  de  cette  théorie  {HoUàndische  Bei- 
tràgs,  1846,  p.  105  et  suiv. ,  et  surtout  p.  33-1). 

'  )  Voir  ses  mémoires  classiques  dans  VArchiv  fur  OpMhalmologie ,  et  sa  Sym- 
ptomerJehre  der  Augenmuskellàhmungen ,  Berlin,  1867. 


ÉCLAIRÉS    A    l'aide    DU    PHÉNOPHTHALMOTROPE.  73 

l'étude  des  images  consécutives,  étude  qui,  du  reste,  n'est  jamais 
à  négliger.  C'est  particulièrement  l'expérience  décrite  ci-dessus 
(p.  59),  par  laquelle  M.  Helmholtz  a  démontré  la  loi  de  Listing, 
qui  mérite  d'être  prise  ici  en  considération.  Si,  dans  la  position 
normale  de  la  tête,  l'image  consécutive  ne  suit  pas  exactement 
le  ruban  tendu ,  la  loi  de  Listing  n'est  pas  satisfaite  :  il  y  a 
mouvement  de  roue,  et  le  côté  vers  lequel  l'image  dévie  indique 
immédiatement  le  sens  de  ce  mouvement.  On  peut  répéter  l'expé- 
rience pour  toutes  les  directions  du  ruban,  et  projeter  les  images 
consécutives  tant  vers  le  bas  que  vers  le  haut,  en  suivant  les 
directions  marquées  par  des  lignes  noires.  On  obtient  ainsi  une 
série  d'indications  qui,  combinées  avec  les  désordres  que  peuvent 
manifester  les  mouveaients,  suffisent  amplement  à  établir  le 
diagnostic. 

Il  est  vrai  qu'en  cas  de  paralysie  musculaire  bilatérale  ou  de 
cécité  du  second  œil,  les  moyens  nous  manquent  de  donner  à  la 
tête  exactement  la  position  qu'exige  l'examen  des  images  consé- 
cutives. Mais  je  me  suis  assuré  que  la  petite  erreur  qui  peut  en 
résulter  ne  fait  aucun  tort  sensible  à  la  valeur  des  indications 
fournies,  d'autant  moins,  que  la  conclusion  ne  se  déduit  pas  de 
la  déviation  relative  à  une  seule  direction  du  ruban,  mais  de  la 
comparaison  des  différentes  déviations,  suivant  différentes  direc- 
tions, qui  sont  nécessairement  liées  à  l'existence  des  troubles 
paralytiques. 


NOUVEAUX  MATÉRIAUX 

POUR  SERVIR  À  LA  CONNAISSANCE  DES  CYCADÉE8, 

PAR 

F.  A.  W.  MIQUEL  0. 


Sixième   partie. 

REVISION.  —  CLASSIFICATION. 

Cycas. 

Lorsque  je  donnai,  dans  la  première  partie  de  ces  Matériaux, 
une  revue  du  genre  Cycas,  je  n'étais  pas  à  même  de  comparer 
quelques  espèces  décrites  par  Griffith,  vu  qu'il  m'avait  été  im- 
possible de  me  procurer  les  Nolulae  ad  Plantas  Asiaticas  ^  ^ivMiées 
à  Calcutta.  Cela  m'ayant  enfin  réussi  tout  récemment,  je  puis 
aujourd'hui  combler  la  lacune  qui   était  restée  dans  mon  travail. 

La  compilation,  faite  avec  soin,  dont  le  genre  Cycas  a  été 
l'objet  de  la  part  de  M.  A.  De  Candolle  (DC.  Prodr.  Vol.  XYl), 
fut  exécutée  d'une  manière  tout  à  fait  indépendante  de  mon 
travail.  Par  suite  de  circonstances  particulières,  l'auteur  avait 
été  obligé  de  se  hâter.  On  trouvera  plus  loin  l'indication  de 
quelques  points  de  différence  entre  nos  vues  respectives.  Il 
faut  sans  doute  attribuer  à  un  lapsus  calami  l'assertion  que  le 
rachis  des  feuilles  a  une  „praefoliatio  stricta",  que  les  folioles 
seules  ont  la  préfoliaison  circinale,  et  que  le  cône  mâle  provient 
d'un  bourgeon  latéral.  Bien   que,  à  l'égard  de  ce  dernier  point, 


)  Voyez,  Arch.  Néerl.  T.  III,  p.  403. 


F.    A.    W.    MIQUEL.    NOUVEAUX    MATERIAUX    POUR    ETC.  75 

il  n'existe  pas  de  recherches  organog-éniqnes  spéciales,  la  circon- 
stance qu'après  la  chute  du  cône  mâle  le  sommet  de  la  plante  se 
ramifie,  plaide  pourtant  en  faveur  de  l'opinion  opposée. 

En  ce  qui  concerne  les  espèces,  je  relèverai  ci-dessous  quel- 
ques inexactitudes  de  moindre  importance. 

Les  Cycas  décrits  et  figurés  par  Griffith  diffèrent  sous  beaucoup 
de  rapports  des  espèces  connues  jusqu'à  présent;  j'ai  essayé  de 
les  caractériser  par  les  diagnoses  suivantes: 

1.  C.  Jenkinsiana  Griff.  Notulae  ad  Plantas  asiaticas  (a°.  1854) 
p.  9,  tab.  360,  fig.  1  et  2,  et  tab.  362,  fig.  1  (carpophylla). 
Truncus  saepe  ramosus;  folia  quadripedalia  petiolo  lateribus  spi- 
nuloso  longo  suffulta,  foliolis  coriaceis  linearibus  falcatis  costâ 
utrinque  prominente;  carpophylla  brevia  (vix  5  poil,  longa)  rubi- 
gineo-tomentosa,  lamina  sterili  partem  reliquam  aequante  lato- 
cordato-triangulari  crasse  cuspidatâ  pectinato-pinnatifidâ ,  seg- 
mentis  parti  indivisae  |  trans verse  aequilongis  apicibus  cum 
laminae  facie  interiore  glabris;  ovulis  in  superiore  carpophylli 
parte  fertili  utrinque  1 — 5  (numéro  in  carpellis  exterioribus  mi- 
nori).  —  Truncus  diametro  usque  tripedali;  foliola  7 — 8  poil, 
longa,  3[  lin.  lata.  Semina  matura  ellipsoidea  leviter  compressa, 
18  Im.  longa,  12  et  16  lata,  e  fusco  flavescentia.  —  Crescit  in 
Assam  inferiorey  circa  Gowahatty,  ubi  detexit  Jenkins.  —  Ab  hac 
specie  non  diversa  videtur: 

C.  pectinala  (Griff.)  /.  c.  p.  10,  tab.  cit.  fig.  3,  cuius  carpo- 
phylla fere  matura  seminibus  ideo  magnis  globoso-ellipsoideis 
flavescentibus  instructa,  lamina  sterili  iisdem  sursum  magis  re- 
pulsâ.  An  sit  diversa  ab  homonyma  supra  enumerata,  in  Horto 
Calcuttensi  culta  et  ab  Hamilton  ita  dicta,  ultro  inquiretur.  Si 
conspecifica  sit,  nomen  ab  Hamilton  datum  servari  oportet. 

2.  C.  dilalata  Griff.  /.  c.  p.  15.  Folia  cum  petiolo  circiter  4 
pedes  longa,  petiolo  canaliculato-convexo  lateribus  spinuloso; 
foliola  7  —  8  poil,  longa,  "d^  lin.  lata,  basi  decurrenti-inserta, 
valde  coriacea;  carpophylla  ferrugineo-tomentosa,  lamina  sterili 
subcordatâ,   lateribus  pectinatâ,    segmentis   subulatis  subpungen- 


76  F.    A.    W.     MIQUEL.    NOUVEAUX    MATERIAUX    POUR 

tibus    viridibus,    apice    latiore    subulato-acuminatâ ,    parte   fertili 
panciovulatâ.  —  Locus  natalis  non  adnotatus. 

3.  Cycas  macrocarpa  Griff.  /.  c.  p.  11  et  p.  13;  tab.  360: 
figura  ad  sinistrum  absque  numéro;  tab.  362,  fi^.  IL  Truncus 
10 — 12-pedalis;  folia  usque  8-pedalia,  petiolo  subtetragono  an- 
gulis  lateralibus  spinulosis;  foliola  numerosissima  subopposita 
decurrenti-inserta  linearia  subfalcata  in  acumen  subpungens  sensim 
attenuata,  marginibus  ochroleucis  recurvata,  10 — 16  poil,  longa^ 
\  lata;  conus  masc.  breviter  pedunculatus  13 — 14  poil,  altus, 
androphyllis  rubiginoso-tomentosis  cuneatis,  (excepto  acumine 
subulato  refracto-arrecto  semipollicari)  9  lin.  longis,  6  apice  latis; 
carpophylla  brunneo-tomentosa  elongata  gracilia  (iisque  10 — 12 
poil,  longa),  lamina  sterili  parvâ  triangulari  basi  intégra  caeterum 
subspinoso-pauci-pectinatâ  (segmentis  glabris  centrali  multo  maiori), 
pluri-  (usque  8-)  ovulata;  semina  matura  ellipsoidea  leviter  com- 
pressa, 2 — 3  poil,  longa.  —  Prope  Ayer  Pumius  et  Tabong  [Malacca], 
ubi  probabiliter  plantata. 

Observ.  Cycadis  species  sexla  Griff.  /.  c.  p.  16  et  prob.  tab. 
377,  absque  nomiue  descripta,  in  Mergul  détecta,  in  littoribus 
maris  umbrosis  prope  Cliedea  copiose  proveniens,  videtur  eadem 
ac  C,  Rumphii, 

La  valeur  de  ces  espèces,  qui  du  reste  paraissent  être  très 
caractérisées,  ne  pourra  être  jugée  que  par  une  comparaison 
ultérieure  avec  les  échantillons  originaux.  Ce  n'est  qu'à  l'égard 
de  quelques-unes  de  ses  espèces  que  Griffith  déclare  les  avoir 
comparées  à  d'autres  pour  fixer  les  différences.  En  outre,  il  faut 
tenir  compte  de  ce  que  les  descriptions  datent  d'époques  diverses 
de  la  vie  active  de  l'auteur,  et  qu'elles  ont  tous  les  caractères 
de  simples  annotations  préliminaires.  —  En  comparant  ses  figures 
de  C.  Jenkinsiana  et  de  C.  pectinala  (sans  autorité),  il  m'a  été 
impossible  de  saisir  une  différence  entre  ces  deux  espèces.  Or  il 
est  très  probable  qu'il  a  connu  le  Cycas  pectinata  Ham.,  et  par 
suite  il  est  permis  de  supposer  que  le  nom  de  Jenkinsiana  n'était 


SERVIR    A     LA    CONNAISSANCE    DES    CYCADEES.  77 

que  provisoire.  Si  Griffith  les  avait  réellement  regardées  comme 
des  espèces  distinctes,  il  aurait  indubitablement  fait  mention  de 
leur  ressemblance  prononcée  et  de  la  manière  dont  elles  diffè- 
rent. —  J'ai  décrit  précédemment  un  cône  mâle  de  C.  pecfinafa 
qui  m'a  été  communiqué  du  jardin  botanique  de  Calcutta. 
Aussi  longtemps  toutefois  que  l'identité  du  C.  pectinala  Ham.  avec 
\e  C.  pectinatadeB  Notulae  de  Griffith,  et  de  celui-ci  avec  le  C  Jew- 
kinsiana  Griff.  ne  sera  pas  démontrée ,  ce  qu'il  y  a  de  mieux  à 
faire,  c'est  de  ne  rien  changer  aux  noms  actuels. 

Je  n'ose  décider  si  le  C,  circinalis  que  Griffith  mentionne, 
/.  c.  p.  2  et  5,  est  l'espèce  véritable,  fondée  sur  les  figures  de 
VHorius  Malabaricus ,  ou  bien  le  C.  Rumphii ,  qui  porte  le  nom 
de  C.  circinalis  dans  le  jardin  botanique  de  Calcutta  et  dans  les 
ouvrages  de  Roxburgh.  La  description  du  carpophylle,  qui  se 
trouve  p.  5,  ne  s'accorde  pas  avec  C,  Rumphii.  C'est  avec  plus 
de  confiance  que  je  rapporte  à  cette  dernière  espèce,  d'après  la 
forme  du  carpophylle,  que  Griffith  décrit  clairement,  son  Cycas 
W.  6  {Notulae  p.   16). 

De  la  remarquable  espèce  sans  épines  de  la  Nouvelle-Calédonie, 
Cycas  Armstronyii  Miq.,  j'ai  reçu  de  l'établissement  de  M.  van 
Houtte,  à  Gand,  une  feuille  qui  évidemment  a  appartenu  à  une 
plante  plus  âgée  que  la  feuille  de  Kew  dont  il  a  été  question 
plus  haut;  toutes  deux  proviennent  du  reste  de  la  même  espèce, 
mais  elles  diffèrent  un  peu,  par  des  folioles  plus  longues,  de  la 
feuille  rapportée  de  Port  Essington.  —  La  feuille  entière  (de  van 
Houtte)  est  longue  de  plus  de  2  pieds:  pétiole  entièrement  dé- 
pourvu d'aiguillons,  cylindrique-triquètre,  d'un  vert  foncé;  folioles 
conformes  à  la  description  donnée  précédemment,  mais  au  nombre 
de  20  à  chaque  côté,  les  plus  grandes  longues  de  8  pouces, 
larges  de  5  lignes,  les  inférieures  longues  de  5|  pouces. 

Encephalartos.  —  Macrozamia. 

Je  n'ai  que  peu  de  chose  à  ajouter  au  sujet  des  genres 
Encephalartos  et  Macrozamia, 

De  VE.    Ghellinckii   Lem.    {Zamia    Hort.) ,  rapporté  à  VE.  cy- 


78  F.    A.     W.    MIQUEL.    NOUVEAUX    MATERIAUX    POUR 

cadifoliusj  j'ai  reçn  un  exemplaire  original,  d'un  âge  peu 
avancé.  Tronc  ovoïde ,  à  laine  épaisse  ;  cinq  feuilles ,  mesurant  en 
longueur,  avec  leur  court  pétiole,  2  pieds,  et  en  largeur  4 — 2^ 
pouces;  folioles  très  nombreuses,  linéaires-étroites,  insérées  presque 
horizontalement,  longues  de  2 — 1|  pouces,  convexes  en  dessus, 
concaves  et  de  couleur  pâle  en  dessous  ;  pétioles  et  rachis  laineux 
et  quadrangulaires-comprimés. 

Sous  le  nom  de  Zamia  cycadifolia,  M.  Verschaffelt  a  envoyé  au 
jardin  botanique  d'Utrecht  le  rare  E.  caffer;  feuilles,  y  compris 
le  pétiole  (qui  mesure  [ — |  de  pied) ,  longues  d'environ  2  pieds  ; 
folioles  au  nombre  de  50 — 56  à  chaque  côté,  les  moyennes  lon- 
gues de  3  pouces  et  larges  de  3  lignes,  du  reste  répondant  sous 
tous  les  rapports  à  la  description  donnée  antérieurement. 

Du  Macrozamia  Pauli  Gmlielmi ,  M.  van  Houtte  m'a  envoyé  des 
feuilles  de  trois  pieds  de  longueur,  comptant  170  folioles  à 
chaque  côté;  je  dois  aussi  à  la  bienveillance  de  MM.  Haage  et 
Schmidt  d'Erfurt  (dans  le  célèbre  établissement  desquels  cette 
espèce,  introduite  d'Australie  sous  le  nom  à'E.  villosus,  a  fleuri 
au  mois  d'octobre  1868)  communication  d'une  figure  du  cône 
mâle  en  fleur.  —  J'ai  reçu  encore  de  M.  van  Houtte  des  feuilles 
du  M.  teriui/olia  Horl.  Kew.,  lesquelles  m'inspirent  quelques  dou- 
tes au  sujet  de  la  réunion  de  cette  espèce  avec  le  M,  Pauli 
Gulielmi. 

Zamia.  —  Ceratozamia. 

Le  genre  Zamia,  tel  qu'il  est  circonscrit  aujourd'hui,  forme 
un  groupe  très  naturel,  surtout  depuis  que  M.  Brongniart  en  a 
séparé  le  genre  Ceratozamia.  En  ce  qui  concerne  les  caractères 
tirés  des  androphylles ,  je  dois  toutefois  répéter  la  remarque  déjà 
faite  antérieurement,  que,  dans  aucune  espèce,  ces  androphylles 
ne  sont  exactement  peltés,  mais  qu'ils  inclinent  toujours  plus  ou 
moins  vers  la  forme  en  coin,  de  sorte  qu'il  n'existe  pas  de 
limite  fixe  entre  le  stipe  et  le  pelta.  Entre  les  degrés  extrêmes 
de  cette  modification  il  y  a  un  passage  continu  d'une  espèce  à 
l'autre.   C'est   pour   ne  pas   avoir   connu    cette  circonstance,  que 


SERVIR  A  LA  CONNAISSANCE  DES  CYCADEES.  79 

j'avais  cru  autrefois  pouvoir  diviser  le  genre  Zamia  en  sections 
d'après  cette  différence,  et  que  j'avais  proposé  comme  type  d'une 
de  ces  sections,  Microcycas ,  le  Z.  calocoma,  qui  à  cette  époque 
se  trouvait  encore  très  isolé.  Mais  l'étude  d'un  plus  grand  nombre 
d'espèces  me  convainquit  bientôt  que  cette  classification  ne  pou- 
vait se  soutenir.  Dans  les  Z.  Brongniartii  et  Z.  Poeppigiana,  qui 
du  reste  diffèrent  tant  de  l'espèce  que  je  viens  de  citer,  on  trouve 
la  même  tendance  à  affecter  la  forme  en  coin,  fait  sur  lequel 
M.  Grisebach  (Catal.  PL  Cubens.,  p.  217)  a  encore  attiré  l'atten- 
tion tout  récemment,  et  que  j'avais  déjà  signalé  dans  le  Prodr. 
Syst.  Cycad.y  p.  23.  Pour  ces  raisons,  je  ne  puis  en  aucune 
façon  suivre  M.  A.  De  Candolle,  qui  reconnaît  à  cette  section 
Microcycas  une  valeur  encore  plus  grande  et  qui  l'élève  (Prodr. 
XVI,  p.  538)  au  rang  de  genre  distinct.  J'attribue  ce  résultat  à 
la  circonstance  que  l'auteur,  sur  les  26  espèces  mentionnées  par 
lui,  n'en  a  vu  que  6,  et  encore  seulement  en  échantillons  des- 
séchés et  incomplets.  —  La  distribution  des  espèces  en  groupes 
est,  dans  le  genre  Zamia  comme  dans  tous  les  genres  naturels, 
chose  difficile.  M.  De  Candolle  propose  deux  groupes,  nommés 
l'un  Chiqua,  l'autre  Euzamia;  le  premier  à  „peltae  masculae 
heptagonae",  (c'est-à-dire  à  six  faces  latérales  et  une  face  ex- 
terne, avec  stipe  large);  le  second  à  „peltae  superne  vix  inflatae 
subconvexae  plus  minus  hexagonae,  faciebus  lateralibus  nuUis 
aut  vix  distinctis,  stipite  angusto".  Mais  cette  classification  est 
artificielle,  ne  fournit  pas  de  ligne  de  démarcation  et  repose  sur 
une  appréciation  morphologique  inexacte  des  androphylles,  les- 
quels, tous  construits  sur  un  même  modèle,  ne  subissent  que  des 
modifications  légères.  Et  en  effet,  dans  l'application  de  cette  mé- 
thode, les  espèces  les  plus  disparates  se  trouvent  rapprochées 
l'une  de  l'autre,  tandis  que  des  espèces  analogues  sous  tous  les 
rapports  sont  séparées  par  de  grands  intervalles. 

Entre  les  genres  Zamia  et  Ceralo zamia  il  existe  une  différence 
plus  profonde  que  ne  l'indiquerait  le  fait  seul  d'avoir  des  peltae 
inermes  ou  pourvues  de  deux  cornes.  Aux  caractères  que  j'avais 
signalés  autrefois,  on  en  ajouté  plus  tard  d'autres,  empruntés  à 


80  F.    A.     W.    MIQUEL.    NOUVEAUX    MATERIAUX    POUR 

la  structure  anatomique  de  la  tige  et  des  feuilles  ^  et  dont  j'ai 
fait  mention  plus  haut.  —  Quant  au  Lepidozamia  de  Regel,  dès 
1862  je  l'avais  fait  connaître  comme  espèce  de  Macrozamia  ^  de 
sorte  que  ce  genre  doit  être  entièrement  supprimé. 

Dans  la  détermination  des  espèces  du  genre  Zamia  et,  l'on  peut 
dire,  de  toutes  les  Cycadées,  on  rencontre  des  difficultés  assez 
sérieuses.  Rarement  on  est  embarrassé  de  distinguer  le  genre, 
même  quand  il  s'agit  d'exemplaires  stériles.  Mais  l'espèce  ne 
s'offre  ordinairement  à  nous  que  dans  un  seul  exemplaire,  et 
des  différences  d'âge  ainsi  que  des  modifications  individuelles 
assez  notables  viennent  compliquer  l'appréciation.  Il  est  à  noter 
en  effet,  que  chez  les  Cycadées  les  caractères  individuels  s'ac- 
cusent tellement,  que  des  pieds  de  la  même  espèce,  parvenus  au 
même  âge,  montrent  encore  des  différences  manifestes.  Des  exem- 
plaires complets,  avec  tige  et  feuilles,  ne  se  trouvent  en  général 
que  dans  les  jardins  botaniques,  tandis  que  les  exemplaires  sau- 
vages ne  sont  représentés  dans  les  herbiers  que  par  leurs  feuilles 
et,  quelquefois  seulement,  par  leurs  cônes.  Les  Cycadées  éprou- 
vent aussi  des  changements  frappants  par  la  culture.  Pour  s'en 
convaincre,  on  n'a  qu'à  comparer  par  exemple  des  pieds  diffé- 
rents de  Zamia  integrifolia  dans  les  jardins  botaniques.  En  regar- 
dant la  figure  du  Botanical  Magazine  (tab.  1850)  comme  l'image 
du  type  vrai  et  invariable  de  l'espèce,  on  serait  conduit  à  édifier 
toute  une  série  d'espèces  distinctes.  Le  Cijcas  revohita  existe  dans 
nos  jardins  avec  des  pétioles  tantôt  longs,  tantôt  courts,  avec 
des  folioles  longues  ou  courtes,  rapprochées  ou  distantes,  étroites 
et  plus  ou  moins  enroulées  ou  larges  et  planes.  Les  folioles  du 
Cycas  Rumphii  et  des  espèces  voisines  deviennent  d'autant  plus 
étroites  que  la  température  est  plus  basse.  Le  Cycas  siamensis 
développe  dans  nos  serres  des  feuilles  qui  diffèrent,  sous  une 
foule  de  rapports,  de  celles  que  portaient  les  mêmes  exemplaires 
lors  de  leur  introduction  de  Siam  en  Europe.  Ces  variations 
toutefois  ne  dépendent  pas  uniquement  des  influences  extérieures , 
elles  sont  aussi  en  partie  individuelles. 

Dans  quelques  groupes  ces  difficultés   se  font  sentir  à  un  très 


SERVIR    À    LA    CONNAISSANCE    DE    CYCADEES.  81 

haut  degré;  en  ce  qui  concerne  le  genre  Zamia,  ce  sont  les  petites 
espèces  à  folioles  étroites  {migiistifolia,  Yalesii,  strictay  etc.),  qui, 
déjà  très  semblables  entre  elles,  varient  considérablement  suivant 
l'âge,  la  culture,  etc.  Le  nombre  des  folioles,  par  exemple, 
augmente  continuellement  avec  l'âge,  et  leur  longueur  ainsi  que 
leurs  nervures  subissent  des  changements  remarquables.  —  Des 
exemplaires  reçus  récemment  de  plusieurs  jardins  belges  m'ont 
permis  de  faire  à  ce  sujet  quelques  observations,  que  je  vais 
faire  connaître  en  même  temps  que  la  description  d'une  espèce 
nouvelle. 

Zamia  Yatesii.  —  Juvenilis  sed  iam  fructifera  profert  folia  petiolis 
elongatis ,  lamina  brevi  dense  foliolatâ ,  foliolis  utrinque  v.  c.  10  ; 
adultior  foliis  ratione  laminae  brevius  (|  ped.)  petiolatis,  lamina 
longiore  (1|  pedali),  foliolis  densis  vel  distantioribus  15 — 22 
utrinque,  usque  7^  poil,  longis,  2 — 7  nerviis.  Compage  foliolo- 
rum  flaccidiore  iisque  apice  pauci-serratis  caeterum  inter  affines 
distincta,  cum  Z.  anguslifolia  Jacq.  quatenus  ex  eius  icône  et 
exemplari  auth.  a  me  antea  explorato  constat,  haud  coniungi 
posse  videtur. 

Zamia  angiistissima.  Exemplaris  provectioris  folia  hic  describam  : 
petioli  ima  basi  valde  dilatati  caeterum  subsemiteretes ,  3 — 4J 
poil,  longi;  rhachis  pedalis  vel  longior,  foliolis  utrinque  24 — 32 
subaequilongis ,  6} — 8  poil,  longis,  rhachi  antice  planiusculae 
insertis,  inferioribus  oppositis,  superioribus  fere  vel  omnino  alter- 
nis,  basi  parum  augustatis,  versus  apicem  pedetentim  attenuatis, 
in  apicem  integerrimum  extremo  subteretiusculum  acutum  termi 
natis,  in  universum  valde  angustatis,  vix  1  lin.  latis,  marginibus 
leviter  incrassatis  et  subrevolutis ,  supra  in  vivo  planis  vel  leviter 
convexis ,  subtus  nervis  prominulis  3 ,  quorum  médius  centricus 
vel  leviter  excentricus,  passim  subquinquenerviis ,  laterali  nervo 
tum  utrinque  sub  margine  recondito;  siccatorum  nervi  supra  dis- 
tinctiores  evadunt  et  hac  in  re  ex  aetate  et  compage  differentiae 
observantur.  —  Haec  Z.  strictae  certe  perquam  affinis,  apice 
foliolorum   integerrimo   in   his   provectioribus  etiam  ita  observato 

Archives  Néerlandaises,  T.  V.  6 


82  F.    A.    W.    MIQUEL.    NOUVEAUX    MATÉRIAUX    POUR 

ab   ea   constanter   differre   videtur.  —   Probabiliter    hue   pertinet 
Z.  mullifoliolala  A.  DC.   Frodr.,  L  c.  p.  545. 

Sous  le  nom  de  Zamia  Potemkini  on  trouve  depuis  quelque 
temps  une  espèce  dont  je  n'ai  vu  que  des  exemplaires  jeunes, 
lesquels    pourraient    peut-être    appartenir    au     Z.    Loddigesii.   — 

Truncus  ellipsoideus ,  perulis  e  basi  latâ  abrupte  lanceolatis 
cuspidatis;  petiolus  aculeatus;  foliola  elliptico-oblonga ,  superiora 
et  foliorum  aliorum  magis  lanceolata,  ab  l-  longitudinis  ab  apice 
inde  serrulata,  utrinque  attenuata. 

Zamia  floridana  A.  DC.  /.  c.  p.  544  est  le  vrai  Z.  pumila  de 
Linné.  Pursh  l'avait  trouvé  dans  la  Floride:  „Z.  integrifolia"  ; 
des  échantillons  recueillis  plus  tard  par  M.  Torrey,  dans  le 
même  pays,  m'ont  été  communiqués  par  M.  Asa  Gray,  et  c'est 
de  la  même  source  que  provient  l'espèce  décrite  par  M.  De  Can- 
dolle.  Dans  sa  Flora  Americae  Sept.  II,  p.  648,  Pursh  dit: 
„dans  la  Floride  orientale;  cette  espèce  ne  se  trouve  qu'en  Flo- 
ride, car  toutes  les  recherches  que  j'ai  faites  pour  la  découvrir 
en  Géorgie  sont  restées  sans  succès."  —  Or  M.  De  Candolle  cite , 
au  sujet  du  Z.  pumila:  „Florida  (Torrey)";  et  il  est  évident  que 
dans  les  deux  cas  il  s'agit  de  la  même  plante. 

Zamia  Versc/ia/f'ellii  n.  sp.  Petioli  aculeati  teretiusculi  apice 
tetragoni  ;  rhachis  dorso  convexa  antice  bifacialis  ;  foliola  pauci- 
iuga  basi  lata  rhachi  antice  inserta  (basibus  oppositorum  prorsus 
contiguis)  lato-oblongove-lanceolata  sensira  acuminata,  basi  nunc 
supra  nunc  infra  convexiora,  in  margine  superiore  rectiore  ad  \ 
ab  apice,  in  inferiore  ad  j  spinoso-serrulata ,  coriacea,  lucida, 
nervis  30 — 35  simplicibus  paucioribusque  bifidis  pellucidis  utrinque 
prominulis  striulata. 

A  Z.  muricata  differt  :  foliolis  crassioribus ,  ratione  folii  maioribus  ,  basi  lata 
magis  in  antica  rhacheos  facie  quam  in  lateribus  insertis  (ita  ut,  ubi  opposita 
sunt  foliola ,  insertioues  plane  sint  contiguae) ,  supra  basin  vix  constrictis .  per 
totam  longitudinem  magis  aequilatis  nec  ad  formani  ellipticain  tendentibus , 
nervis  utrinque  prominentibus  striatis,  petioli  dense  aculeati  forma,  denique 
patriâ.  —  Plantae  adultioris  truncus  subconicus  semipedem  altus,  inferne  ^  pedis 


SERVIR  A  LA  CONNAISSANCE  DES  CYCADEES.  83 

crassus,  desquamatus.  Folia  pauca  tantum  adsunt.  Peiiokis  propriiis  10 — 14  poli, 
longus  ex  olivaceo  pallide  fusculus,  aculeis  teretiusculis  tenuibus  apice  pallidis 
patentibus  vel  leviter  decurvis ,  rectis  vel  leviter  arcuatis  praesertim  in  parte  i  in- 
feriore  petioli  confertis  armatus ,  ima  basi  substipulaceo-dilatatus ,  caeterum 
praeter  supremam  partem  obtuso-tetragonam  teretiuscuius ,  pennam  olorinam 
crassus.  Rhachis  tenuior  inter  suprema  foliola  in  apiculum  mucroniformem  rigi- 
dum  acutum  excurrens ,  dorso  convexa ,  antice  bifacialis ,  acie  obtusa  interiecta , 
ubique  inermis.  j  pedem  longa,  sed  probabiliter  etiam  longior,  viridis.  Foliola 
fere  opposita  vel  subopposita  vel  fere  alterna,  sed  propter  insertionem  latam  et 
antice  sitam  opposita  contigua,  5-iuga  vel  iugis  paullo  numerosioribus ,  crasse 
coriacea,  sed  flexibilia,  supra  saturate  viridia  lucida,  subtus  pallide  gramineo- 
viridia,  marginibus  laevibus  leviter  incurva,  supra  basin  insertionis  i  pollicem 
perpendiculariter  latam  non  nisi  leviter  angustata,  aequilato-lanceolata  sursum 
sensim  angustata  in  acumen  acutum,  serraturis  versus  apicem  pedetentim  con- 
fertioribus  demum  confertissimis ,  recta  vel  laeviter  falcata,  basi  nunc  supera 
nunc  infera  convexiore,  in  universum  margine  superiore  rectiore,  inferiore  (nec 
constanter)  leviter  convexiore,  nervis  in  medio  foliolo  30 — 35,  aliquibus,  et 
infra  4  folioli  longitudinem ,  bifîdis  striulata,  9- -12  poil,  longa,  l-J. — 1|  vulgo 
paullo  infra  médium  lata. 

Ex  imperio  Mexicano  introduxit  A.  Verschaffelt,  qui  in  Catalogis  Z.  fuscam 
latifoliam  dixit. 

Système. 

D'après  les  principes  aujourd'hui  admis,  le  groupement  des 
genres  suivant  leurs  affinités  mutuelles  repose  sur  les  caractères 
morphologiques,  estimés  selon  leur  valeur  relative.  Dans  le  cas 
présent,  il  est  impossible  de  prendre  en  considération  l'élément 
paléontologique ,  l'affinité  d'après  la  généalogie,  vu  que  nous  ne 
connaissons  pas  suffisamment  les  relations  des  Cycadées  de  la 
période  actuelle  avec  celles  des  époques  précédentes. 

M.  A.  De  Candolle  a  fait  à  la  classification  que  j'avais  suivie 
dans  le  Prodromiis  Syst.  Cycad.  quelques  modifications,  qui,  tout 
en  paraissant  de  peu  d'importance  au  premier  abord,  sont  pour- 
tant le  résultat  d'une  appréciation  des  caractères  à  laquelle  je  ne 
puis  me  rallier.  — Ce  n'est  peut-être  qu'un  changement  superflu 
d'avoir  remplacé  le  nom  de  ma  première  tribu,  Cycadinae,  par 
celui  de  ,^Cycadeae''  (pour  la  famille  entière  c'est  le  terme 
,^Cycadaceae"  qui  a  été  choisi).  —  Mais  il  en  est  autrement  lorsque 
le  savant  auteur   réunit  mes  2e  et  3e  tribus,    Stangerieae  et  En- 

6* 


84  F.    A.    W.    MIQUEL.    NOUVEAUX    MATERIAUX    POUR 

cephalarteae ,  en  une  seule  „Encephalarteae'' ,  qu'il  partage  en- 
suite en  deux  sous-tribus  (  „Stangerieae  et  Encephalarleae''  ).  La 
différence  entre  ces  deux  groupes  est  si  essentielle ^  que  j'applau- 
dirais plutôt  à  un  changement  destiné  à  marquer  une  opposition 
plus  tranchée,  qu'au  changement  en  sens  inverse  dont  il  est  ici 
question.  —  Placer  le  genre  Dioon  dans  la  tribu  des  Encephalar- 
teae  me  paraît  un  classement  très  inexact,  tant  à  cause  de  l'in- 
sertion des  folioles,  laquelle  est  plutôt  articulée  que  non  arti- 
culée, qu'à  cause  de  la  forme  des  androphylles,  qui  sont  construits 
d'après  le  type  de  plusieurs  espèces  de  Zamia  (par  ex.  des  Z. 
Lindleyi,  Brongniartii ,  etc.).  Il  faut  ajouter  à  cela  le  mode  diffé- 
rent de  croissance  des  tiges,  et  l'absence  des  interruptions  carac- 
téristiques dans  la  couche  du  cambium,  par  laquelle  toutes  les 
Cycadées  américaines  se  distinguent  des  Encep/ialarleae,  et  dont 
j'ai  fait  mention  dans  la  cinquième  partie  de  ces  Matériaux.  11 
en  est  de  même  des  cellules  spéciales,  semblables  à  des  cellules 
libériennes,  de  l'épiderme  des  feuilles,  lesquelles  sont  propres 
aux  genres  américains. 

Je  fais  suivre   ici  un  tableau  de  toutes  les  Cycadées,  rangées 
d'après  les  affinités  naturelles. 

Ord.    CYCADEAE. 
Trib.  I.  CYCADINAE. 
I.   Cycas  LINN. 
§  1.  ovulis  tomentosis  emersis. 

1.  C.  revoluta  thunb.  —  Ludens:  '«  planifolia,  ^  brevifrons,  ;  inermis  (C.  iner- 
mis  MIQ,.  in  Cat.  Hort.  Amstel.  excl.  syn.  lour.). 

§  2.  ovulis  glabris,  carpophylli  marginibus  basi  immersis. 
a.  petiolo  lateribus  spinuloso. 

2.  C.  siamensis  miq,. 

3.  C.  dilatata  ghiff. 

4.  C.  Jenkinsiaua  guiff. 

5.  C.  pectinata  ham.  ,  cum  praeced.  ultro  conferenda. 

6.  C.  circinalis  linn. 

7.  C.  média  r   bu, 

8.  C.  angulata  u.  bu. 

9.  C.  macrocarpa  griff. 

10.  C.  gracilis  miq. 

11.  C.  spkaerica  roxb. 


SERVIR  A  LA  CONNAISSANCE  DES  CYCADEES.  85 

12.  C.  Rumphii  miq. 

13.  C.  Thouarsii  r.  br. 

14.  C.  Riuminiana  hort.  mosqd. 

Dubiae,  stériles,  supra  (in  parte  I)  enumeratae  hic  omissae. 
b.  petiolo  inermi. 

15.  C.  Armstrongii  miq. 

Trib.  II.  STANGERIEAE. 

II.  Slangeria  th.  moore. 
1.  St.  paradoxa  ejusd. 

Trib.  III.  ENCEPHALARTEAE.. 

III.  Macrozamia  miq,. 
§  I.  Genuinae. 

1.  M.  Eraseri  miq. 

2.  M.  Miquelii  fr.  muell. 

3.  M.  spiralis  miq. 

4.  M.  Macdonelli  F.  muell. 

5.  M.  Oldfieldii  miq. 

6.  M.  Macleayi  miq. 

§  2.  Parazamia  miq, 

7.  M.  Pauli  Guilielmi  hill  et  f.  muell. 

§  3.  Lepidozamia  miq. 

8.  M.  Peroifskyana  miq. 

IV.  Bowenia  hook.  fil. 
1.  B.  spectabilis  ejjsd. 

V.  Encephalartos  lehm. 

§  1.  foliolis  linearibus. 

1.  E.  cycadifolius  lehm. 

2.  E.  pungens  lehm. 

3.  E.  tridentatus  lehm. 

§  2.  foliolis  lanceolatis. 

4.  E.  eloDgatus  lehm. 

5.  E.  Lehmanni  eckl.  , 

6.  E.  longifolius  lehm. 

7.  E.  lanuginosus  lehm. 

8.  E.  caffer  miq. 

§  3.  foliolis   ellipticis  oblongisve .  ■utplurimum  utroque  margine  spinulose 
dentatis 

9.  E.    villoSUS    LEMAIRE. 

10.  E.  Altensteinii  lehm.  —  ^  semidentatus ,  —  /'  eriocephalus. 


86  F.    A.    W.    MIQUEL.    NOUVEAUX    MATERIAUX    POUR 

§  4.  foliolis  latis  glaucis  praesertim  margine  inferiore  lobatodentaiis. 

11.  E.  liorridus  lehm.  —  ^  Hallianns  —  /  aquifolius. 

12.  E.  latifrons  lehm. 

Trib.  IV.  ZAMIEAE. 
VI.  Dioon  LiNDL. 
1.  D.  edule  lindl.  —  s  imbricatum  —  y  angustifolium. 
VII.  Ceratozamia  ad.  bhongn. 
§  1.  genuinae,  petiolis  aculeatis,  foliolis  praesertim  iuveniliuin  latiusculis. 

1.  C.  mexicana  a.  buot^ign.  —  Pro  aetate  valde  di versa. 

2.  C.  Miqueliana  h   wendl. 

§  2.  Species  petiolo  inermi  foliolis  lineari-angustis  insignis. 

3.  C.  Kuesteriana  regel. 

VIII.  Zamia  linn.  excl.  sp. 
§  1.  petiolis  aculeatis,  foliolis  magnis. 

a.  glabris. 

1.  Z.  Skinneri  warcz. 

2.  Z.  muricata  willd. 

3.  Z.  Loddigesii  miq. 

b.  subtus  furfuraceis. 

4.  Z.  furfuracea  ait. 

c.  multiiugis  angustis. 

5.  Z.  Lindleyi  waticz. 

6.  Z.  spartea  a.  dc.  Prod/r. 

§  2.  petiolis  inermibus. 

a.  foliolis  latis  vel  latiusculis. 

t  apice  obtuso  irregulariier   serrnlatis. 

7.  Z.  integrifolia  ait. 

8.  Z.  debilis  willd. 

9.  Z.  média  linn. 

10.  Z.  pumila  linn. 

t  f  apice  obtuso  vcl  acuio  aut  anuminato  magis  distincte  serrulatis , 
serraturis  quandoque  et  in  margines  descendentibus. 

11.  Z.  Poeppigiana  mart.  et  eichl. 

12.  Z.  Eischeri  miq. 

13.  Z.  Kickxii  miq. 

14.  Z.  Ottonis  miq. 

15.  i.  pygmaea  sims. 


SERVIR  à  LA  CONNAISSANCE  DES  CYCADEES.  87 

è.  foliolis  lanceolatis. 
t  iniegerrimis. 

16.  Z.  calocoma  miq. 

17.  Z.  pseudoparasitica  yates. 

f  f  serrulaiis. 

18.  Z.  Brongniartii  wedd. 

19.  Z.  tenuis  willd. 

c.  foliolis  anguste  linearibus. 

20.  Z.  Yatesii  miq. 

21.  Z    angustifolia  jacq. 

22.  Z.  stricta  miq. 

23.  Z.  angustissima  miq. 

Le  Dombre  total  des  espèces  aujourd'hui  connues,  et  distribuées 
en  huit  genres,  s'élève  donc  à: 
Zamia 23 

•^      ^  j  Somme  des  espèces  vivantes:  64,  dont: 

Encephalartos 12  i 

Macrozamia sf  Amérique 27 

Ceratozamia 3[  Afrique  ') 13 

Dioon il  ^sie'') 11 

Bowenia 1  !  Nouvelle- Hollande  ....  13 

Stangeria. 1  ' 

En  comparant  cette  classification  avec  le  tableau  donné  dans 
le  Prodromus  DC,  on  remarque  plusieurs  différences,  dont  quelques- 
unes  ont  déjà  été  signalées  ci-dessus  ou  bien  sont  suffisamment 
intelligibles  d'elles-mêmes;  mais  il  y  en  a  d'autres  au  sujet  des- 
quelles je  veux  donner  quelques  mots  d'explication,  pour  autant 
qu'elles  ont  rapport  à  la  synonymie  et  à  la  nomenclature  ou 
qu'elles  sont  de  nature  purement  systématique.  Je  n'entre  dans 
aucun  détail  morphologique  ou  anatomique,  ces  sujets  n'étant  pas 
traités  dans  le  Prodromus  DC. 

Cycas  celebica  Miq.  Commentar,  phytogr.  p.  126  fait  partie  des 
synonymes  de  C.  Rumphii.  Il  en  est  de  même  de  C.  circinalis 
^  javana.  —  C.  Thouarsii  K.  Br.  est  regardé  comme  douteux  par 
M.    DC.   Mais   il    y   a   d'autant   moins   lieu  de  supposer  que  Du 


')  Sans  Cycas. 

')  Y  compris  le  Cycas  Thouarsii. 


88  F.    A.    W.    MIQUEL.    NOUVEAUX    MATERIAUX   POUR    ETC. 

Petit  Thouars  n'aurait  vu  à  Madagascar  que  des  exemplaires 
cultivés,  que  Ton  a  aussi  trouvé  un  Cycas  à  rUe  Maurice,  pro- 
bablement le  même  que  celui  qui  est  indubitablement  indigène 
aux  Iles  Comores.  La  figure  que  Du  Petit  Thouars  a  donnée  du 
carpophylle  fait  connaître  cette  partie  comme  si  bien  caractérisée, 
si  différente  de  ce  qu'elle  est  dans  toutes  les  autres  espèces ,  que , 
à  moins  de  soupçonner  cet  auteur  d'une  inexactitude  grossière, 
il  n'y   a   pas   de  motifs  de  rejeter  le    C.  Thouarsii  de  R.  Brown. 

Le  C.  inermis  décrit  par  Loureiro  doit,  d'après  la  communica- 
tion de  M.  Caruthers  relative  à  l'exemplaire  stérile  du  British 
Muséum ,  disparaître  comme  espèce ,  ainsi  que  M.  A.  De  Candolle 
avait  eu  la  bonté  de  me  le  faire  savoir. 

De  VEncephalartos  longifolius  il  faut  exclure  les  deux  variétés 
que  j'y  avais  rapportées;  la  varietas  Hookeri  DC.  est  le  vrai 
représentant  de  l'espèce.  —  A  1'^*.  ca/fer  appartient,  non  comme 
variété  mais  comme  simple  synonyme,  VE.  brachyphyllus, 

Dioon  strobilaceum  Lem.  est  le  même  que  D.  edule. 

Le  nom  de  Zamia  Chigua  Seem.  doit,  en  toute  justice ,  s'effa- 
cer devant  celui  de  Z.  Lindleyi,  —  Z.  spartea  DC.  est  une  des 
rares  Cycadées  que  je  n'ai  vues  ni  à  l'état  vivant,  ni  à  l'état 
desséché;  mais,  d'après  la  description  détaillée,  je  la  regarde 
comme  une  espèce  bien  distincte.  —  Z.  latifolia  Lodd. ,  dont  je 
n'ai  vu  que  des  folioles  et  dont  la  plante  mère  a  disparu,  n'est 
pas ,  suivant  toute  probabilité ,  une  espèce ,  mais  un  jeune  état  du 
Z.  furfuracea.  —  Z.  mexicana  Miq.,  adopté  par  DC,  est  une  des 
jeunes  formes  de  l'espèce  si  variable  Z.  Loddigesii.  —  Z.  Galeotli 
De  Vriese  n'est  autre  chose  que  le  Ceratozamia  mexicana  Brongn. 

Les  espèces  de  Ceratozamia  que  j'avais  admises  antérieurement 
sont  placées  par  M.  A.  DC.  parmi  les  espèces  douteuses.  Comme 
les  caractères  que  j'avais  mentionnés  ne  se  sont  pas  montrés 
constants,  j'ai  ramené  ces  espèces  au  C.  mexicana.  Par  rapport 
aux  deux  autres  espèces ,  elles  offrent  de  grandes  différences.  Il 
reste  d'ailleurs  toujours  incertain  si  la  connaissance  des  organes 
de  la  fructification  ne  conduirait  pas  à  distinguer  un  plus  grand 
nombre  d'espèces. 


CONTRIBUTIONS  A  LA  FLORE  I)U  JAPON, 


PAR 


F.  A.  W.  MIQUÈL. 

(Y.  Arch.  des  se.  ex.  et  nat.  T.  IV ,  p.  219.) 


IL   MELANTHACEES. 

Ce  groupe  est  fortement  représenté  au  Japon,  de  même  qu'il 
l'est  dans  l'Amérique  du  Nord.  Aux  découvertes  de  Thunberg ,  de 
Siebold  et  de  Buerger,  beaucoup  d'espèces  intéressantes  ont  été 
ajoutées  par  les  voyageurs  américains  ainsi  que  par  MM.  Maxi- 
mowicz  et  Tschonosky.  Au  moment  où  je  donnai  dans  le  Prolusio 
Florae  Japonicae  un  aperçu  de  la  végétation  de  ce  pays,  les  dé- 
couvertes des  deux  botanistes  nommés  en  dernier  lieu  ne  m'étaient 
encore  connues  que  partiellement;  mais,  peu  de  temps  après, 
l'herbier  de  l'Etat,  à  Leyde,  reçut  de  l'herbier  de  St.  Pétersbourg 
un  envoi  important,  ce  qui  me  met  ajourd'hui  à  même  de  jeter 
quelque  jour  sur  différents  points  demeurés  obscurs. 

Parmi  les  Mélanthacées  japonaises  le  Chamaelirium  luteum  avait 
attiré  spécialement  mon  attention ,  parce  que  le  Melanthium  luteum 
de  Thunberg,  espèce  si  longtemps  méconnue,  en  recevait  enfin 
de  l'éclaircissement,  et  que  je  reconnus  en  outre  que  cette  plante 
est  identique  à  l'espèce  nord-américaine  (Ch.  Carolinianum  W.), 
avec  cette  particularité  qu'elle  est  hermaphrodite  au  Japon,  dioï- 
que  en  Amérique  (Prolus.j  p.  308).  —  M.  Maximow^icz ,  à  qui 
ces  observations  étaient  encore  inconnues ,  bien  que  présumant  déjà 
l'identité  de  la  plante  avec  celle  de  Thunberg,  la  regarda  comme 


90        F.    A.     W.    iMIQUEL.    CONTRIBUTIONS    A    LA    FLORE    DU    JAPON. 

formant  un  genre  distinct  (Chionographis  japonica,  Bullet  Acad. 
St.  Pèlersh.  XI,  p.  210).  Je  suis  porté  à  croire  que  les  fleurs 
examinées  par  lui  n'étaient  pas  tout  à  fait  à  l'état  normal,  mais, 
en  ce  qui  concerne  l'identité  de  sa  plante  avec  celle  que  nous 
devons  à  Siebold,  l'étude  des  échantillons  qui  nous  ont  été  com- 
muniqués par  M.  Maximowicz  lui-même  ne  laisse  aucune  incer- 
titude. Sa  description  confirme  d'ailleurs  que  le  fruit  est  une  cap- 
sule, et  que  les  fleurs  ont  la  couleur  blanche  (comme  en  Amérique) 
et  ne  deviennent  jaunes  que  par  suite  de  la  dessiccation.  Il  trouva 
cette  plante  le  long  de  petits  ruisseaux  dans  les  forêts  de  Kiousiou 
et  sur  les  montagnes  de  Koundsho-San. 

L'idée  que  j'avais  émise  (Prolus.,  p.  310)  que  mon  Zygade- 
nus  japonicus  (Versl.  en  Med.  2e  Sér. ,  II,  p.  88)  pouvait 
être  le  Verafrum  Maackii  Regel  {FI.  Ussur.  p.  154)  a  été  plei- 
nement confirmée  par  M.  Maximowicz.  Mais  j'hésite  à  adopter 
l'opinion  beaucoup  plus  radicale  de  ce  savant,  d'après  laquelle 
l'espèce  en  question  devrait  être  rangée  parmi  les  formes  du 
Verafrum  nigrum.  Ses  feuilles  linéaires  étroites,  entre  autres 
caractères,  forment  un  contraste  si  frappant  avec  les  feuilles  lar- 
gement ovales  de  cette  espèce,  que,  à  moins  d'une  série  complète 
de  formes  intermédiaires ,  la  réunion  me  paraît  trop  hasardée.  — 
M.  Maximowicz  a  découvert  cette  plante  près  de  Yokohama,  avec 
des  fleurs  tantôt  pourpres  tantôt  blanches. 

Le  Veratrum  nigrum  Linn.  avait  déjà  été  récolté  antérieurement 
par  M.  Small:  M.  Maximowicz  en  a  trouvé,  près  de  Hakodade, 
une  variété,  ^  var.  intermedium,  qui  toutefois  ne  s'écarte  que 
peu  de  l'espèce. 

Le  Veratrum  album  Linn.  présente  au  Japon  des  formes  très  diver- 
gentes ,  en  plus  grand  nombre  que  dans  aucun  autre  pays ,  et  s'éloig- 
nant  davantage  du  type  de  l'espèce  que,  par  exemple,  le  V.  Lobelia- 
num  dans  notre  continent.  M.  Maximowicz  nous  a  fait  part  de 
deux  formes  qui  diffèrent  beaucoup  entre  elles;  ('■  var.  grandifto- 
rum,  récoltée  près  de  Hakodade,  plante  robuste,  à  feuilles  gran- 
des et  très  larges,  à  fleurs  grandes,  longues  de  4  lignes  ou  même 
davantage;  —  ^  var.  parviflorum^   recueillie  par  M.  Tschonosky 


F.    A.    W.    MIQUEL.    CONTRIBUTIONS    A    LA    FLORE    DU    JAPON.         91 

dans  la  province  Nambou  de  l'île  Nippon,  et  qui  s'éloigne  consi- 
dérablement de  la  variété  précédente.  Toute  la  plante  a  un  aspect 
délicat;  les  feuilles  intérieures  sont  elliptiques,  les  supérieures 
lancéolées,  les  grappes  composées  et  chargées  de  poils  gris,  les 
fleurs  remarquablement  petites,  longues  de  1^  ligne.  Je  n'ai 
toutefois  pu  découvrir  d'autres  différences  essentielles  sur  les 
échantillons  desséchés. 

Il  m'est  impossible  de  partager  l'opinion  de  M.  Maximowicz 
que  le  genre  Sugerokia  peut  être  réuni  avec  le  genre  Helmwpsis. 
Les  capsules  de  ce  dernier  genre,  que  j'ai  reçues  de  M.  Asa  Gray, 
présentent  de  grandes  différences  quant  au  nombre ,  à  la  forme  et 
à  la  structure  des  graines,  différences  qui  sont  généralement 
regardées  comme  de  première  valeur  pour  l'établissement  des 
genres  dans  ce  groupe.  Si  l'on  rejette  ce  caractère,  toute  la 
méthode  de  classification  des  Mélanthacées  tombe  d'elle-même.  — 
Eelionopsis  breviscapa  Maxim,  (paiiciflora  olinij  non  A.  Gray) 
n'est,  d'après  les  échantillons  authentiques,  qu'une  forme  plus 
petite  de  Sugerokia  japonica. 

CONSPECTUS    MELANTHACEARUM    JAPONICARUM. 

Tofjeldia  huds. 

1.  T.  nulans  W.  —  In  prov.  Nambu  legit  tschonosky. 

2.  T.  sordida  iMaxim.  Bull.  St.  Pélersb.  XI,  p.  212.  —  In  mon- 
tibus  circa  Jedo  leg.  maxiimowicz. 

3.  T.  japonica  miq.   Prol.  p.  365  et  368.  In  Nippon  leg.  keiske 
et  in  regione  circa  Mikawa  kaiso. 

Chamaelirium  willd. 

1.  Ch.  liiteum  a.  gray  Manual  éd.  1.  p.  478.  >iiq.  Prolus.  p. 
308.  368.  Melanthium  luteum  thunb.  —  M.  Japonicum  willd.  — 
Helonias  japonica  R.  S.  —  Chionographis  japonica  mâx.  (Eelonias 
lutea  ait. — H.  dioica  pursh.  H.  pumila  jacq. —  Melanthium  Dioicum 
WALT.  —  M.  densum  lam.  —  Veratrum  luteum  linn.).  —  In 
Nippon  siebold;  in  Kiusiu  m.  Kundsho-San  secus  rivulos,  in 
Kumamoto  in  sylvis  Cryptomeriae  maximowicz. 


92        F.    A.    W.    MIQUEL.    CONTRIBUTIONS    A    LA    FLORE    DU    JAPON. 

Sugerokia  miq. 

1.  S.  japonica  iMiq.  Frol.  p.  309.  —  Scilla  japonica  th.  Helio- 
nopsis  japonica  et  H.  breviscapa  (pauciflora  olim)  maxim.  In  ins. 
Kiusiu  m.  Wunzen  et  in  ins.  Nippon  prov.  Sennano  et  Nambu 
iegerunt  iMAXiMowicz  et  tschonosky,  antea  in  iisdem  regionibus 
legerunt  sugerok,  keiske  ,  siebold. 

Helionopsis  a.  gray. 

1.  H.  pauciflora  a.  gray.  —  miq.  Prol.  p.  310,  excl.  pi.  maxi- 
Mowiczii  homonyma. 

Verairum  linn. 

1.  V.  Maackii  regel  FI.  Ussur.  p.  154.  Zygadenus  japonicus  miq. 
Prolus.  p.  310. 

2.  V.  nigrum  linn.  —  In  ins.  Jeso  leg.  small. 

3.  V.  album  linn.  —  var.  qrandiflorum  maxim.  (cf.  supra);  var. 
parviflonim  maxim.  (cf.  supra). 

Streptopus  l.  g.  rich.  (michx). 

1.  S,  amplexifolius  dc.  —  In  promontorio  Sova  leg.  wright. 

2.  S.  roseus  michx.  —  In  ora  Ochotsk  et  in  ins.  Aleuticis. 

Disponim  salisb. 

1.  /).  sessile  don,  et  var.  (?  minus  miq.  Prolus.  p.  311.  —  In 
Nippon,  in  Kiusiu  prope  Kokuro  legit  buerger  —  .^  in  m. 
Wunzen  keiske. 

2.  D.pullum  skLiSB.  —  Variis  locis  leg.  siebold,  buerger,  mohnike. 

3.  D.  smilacinum  a.  gray.  —  In  Simoda,  prope  Hakodade  in 
pinetis  leg.  collectores  americani. 

Sept  genres  au  Japon  contre  douze  dans  TAraérique  du  Nord; 
deux  genres  japonais  qui  manquent  en  Amérique  (Helionopsis  et 
Sugerokia),  sept  genres  américains  qui  ne  se  trouvent  pas  au 
Japon.  —  Parmi  les  espèces  japonaises  il  y  en  a  5 ,  peut-être  6 , 
qui  croissent  aussi  en  Amérique. 


F.    A.    W.    MIQUEL.    CONTRIBUTIONS    A    LA    FLORE     DU    JAPON.        93 

m.   VALÉRIANÉES. 

Dan  mon  aperçu  de  la  flore  du  Japon  (Prolusio  Florae  Japo- 
nicae)  j'avais  mentionné  neuf  espèces  de  Valérianées,  auxquelles 
M.  Maximowicz  eu  ajouta  plus  tard  encore  deux  autres.  Bien 
que  ses  recherches  eussent  en  général  fourni  des  résultats  sem- 
blables aux  miens,  je  reconnus  pourtant,  en  étudiant  les  échan- 
tillons que  ce  savant  voyageur  a  communiqués  dernièrement  à 
l'Herbier  de  l'Etat,  que  nos  déterminations ,  par  suite  de  la  condition 
plus  ou  moins  parfaite  des  échantillons  dont  nous  avions  disposé, 
offraient  de  certaines  différences  et  que  nos  résultats  pouvaient 
se  compléter  réciproquement.  Cela  est  applicable  surtout  à  quel- 
ques espèces  de  Valeriana  et  de  Palrinia,  que  j'avais  déterminées 
sans  fruits  mûrs.  C'est  ainsi,  jjar  exemple,  que  ma  conjecture, 
que  plusieurs  espèces  placées  dans  le  genre  Valeriana  pouvaient 
appartenir  au  genre  Palrinia,  s'est  trouvée  confirmée  par  les 
échantillons  fructifères  qui  nous  ont  été  envoyés  par  M.  Maximo- 
wicz. —  Pour  cette  raison,  je  donne  ici  un  aperçu  corrigé  des 
espèces  de  ces  deux  genres. 

I.  Valeriana  linn. 

1.  Valeriana  dioica  miq.  Prolus.  p.  378. 

2.  Valeriana  o/ficinalis  linn.  —  miq.  /.  c.  —  Cette  espèce  si 
largement  répandue  paraît  varier  encore  plus  au  Japon  qu'en 
Europe.  Une  variété  remarquable,  que  j'ai  décrite  à  l'endroit  cité 
sous  le  nom  de  ,^^  lalifolia,  a  été  trouvée  aussi  par  M.  Maximo- 
wicz dans  le  pays  de  l'Amour,  et  une  autre,  avec  trois  paires 
de  folioles  lancéolées  et  dentées  en  scie,  près  de  Nagasaki  et 
sur  le  mont  Kigo  San;  ces  deux  formes,  que  M.  Maximowicz 
compare  au  V.  sambucifolia^  furent  recueillies,  de  même  que 
nos  exemplaires,  sur  la  montagne  d'Obama  et  le  long  de 
ruisseaux  et  de  rivières  dans  les  îles  de  Nippon  et  de  Kiousiou. 
Chez  toutes,  le  nombre  des  folioles  est  beaucoup  plus  petit  que 
dans  les  formes  ordinaires  du  V.  officinalis,  et  ces  formes  japonaises 


94        F.    A..    W.     MIQUEL.    CONTRIBUTIONS    A    LA    FLORE    DU    JAPON. 

se  lient  très  intimement  à  l'espèce  voisine  V,  sambucifolia  Mik., 
bien  que  je  n'y  aie  pas  observé  de  stolons,  un  des  caractères 
de  cette  dernière  espèce.  On  pourrait  donc  conclure  des  formes 
japonaises,  que  le  V".  sambucifolia  doit  être  regardé  comme  une 
forme  locale  du  Y.  officinalis.  —  On  est  fortifié  dans  cette  ma- 
nière de  voir  quand  on  compare  le  V.  officinalis  des  flores  de 
différents  pays  ;  on  acquiert  alors  la  conviction ,  que  beaucoup 
de  contrées  donnent  naissance  à  des  modifications  particulières, 
de  nature  à  augmenter  temporairement  le  nombre  des  espèces 
insoutenables. 

3.  Valeriana  flaccidissima  Maxim.  Mélang  biolog.  l.  c.  (  V,  Hard- 
wickii  Wallich  var.  leiocarpa  Miq.  /.  c.  p.  279).  Cette  espèce  est 
si  rapprochée  de  l'espèce  citée  de  Wallich  que  je  ne  l'en  avais 
distinguée  que  comme  variété.  L'espèce  japonaise  produit,  d'après 
l'observation  de  M.  Maximowicz,  des  stolons,  lesquels  man- 
quaient toutefois  à  nos  échantillons.  De  Candolle  attribue  à 
la  plante  indienne  de  Wallich  une  „radix  estonolosa",  mais  il 
n'avait  vu  qu'un  exemplaire  imparfait.  Pourtant,  des  échantillons 
du  Khasia,  que  j'ai  examinés  postérieurement,  ne  possédaient 
pas  non  plus  de  stolons,  ce  qui  semble  confirmer  la  différence. 
Ce  caractère,  joint  aux  particularités  que  j'avais  déjà  signa- 
lées dans  l'espèce  japonaise,  paraît  bien  légitimer  sa  distinc- 
tion d'avec  l'espèce  indienne.  Les  stolons  sont  très  grêles,  fili- 
formes, portant  des  feuilles  rondes  extrêmement  petites;  les 
feuilles  radicales  sont  deux  fois  plus  courtes  que  le  pétiole, 
ovées,  très  obtuses,  légèrement  cordiformes  à  la  base,  cré- 
nelées en  scie,  longues  de  6 — 8  lignes;  les  feuilles  caulinaires 
inférieures  sont  pinnatipartites-lyrées  ;  lobes  disposés  en  deux 
paires,  avec  un  lobe  terminal  beaucoup  plus  grand,  les  lobes 
latéraux  inférieurs  très  réduits;  vers  le  haut  les  feuilles  se  par 
tagent  en  moins  de  lobes,  et  les  feuilles  supérieures  sont  simple- 
ment lancéolées.  —  Keiske  a  découvert  cette  espèce  dans  les 
forêts  de  Nippon,  Maximowicz  près  de  Nagasaki. 


F.    A.    W.    MIQUEL.    CONTRIBUTIONS    A    LA     FLORE    DU    JAPOM.       95 

4.  Valeriana  diversifolia  Miq.  /.  c.  —  Espèce  bien  distincte  ^ 
caractérisée  par  des  feuilles  à  pétioles  remarquablement  longs, 
mais  dont  la  place  dans  ce  genre  est  encore  un  peu  douteuse, 
vu  que  le  fruit  est  inconnu  jusqu'à  ce  jour. 

IL  Patrinia  juss. 

1.  Patrinia  scahiosaefolia  Link.  —  Miq.  /.  c.  —  Commun  au 
Japon  et  dans  les  parties  voisines  du  continent  asiatique. 

2.  Patrinia  villosa  Juss.  —  Miq.  /.  c.  p.  280.  Un  examen  plus 
attentif  m'a  fait  reconnaître  l'inexactitude  de  l'observation  que 
j'avais  faite,  à  l'endroit  cité,  au  sujet  de  l'origine  de  la  paillette. 
La  „palea  ad  fructum  adnata"  est,  en  réalité,  une  bractéole 
agrandie ,  mais  qui ,  dans  cette  espèce ,  se  trouve  tellement  serrée 
par  sa  face  supérieure  convexe  contre  le  fruit,  qu'elle  y  paraît 
en  quelque  sorte  soudée.  On  peut  toutefois  séparer  les  deux  parties , 
sans  aucune  déchirure  des  tissus.  —  Cette  espèce  est  d'ailleurs 
une  de  celles  qui  sont  le  plus  répandues  au  Japon. 

3.  Patrinia  gibbosa  Maxim.  Mélang.  bioL  VI,  p.  276. 
Praecedenti   non   absimilis,    sed  folia  praeter  pilos   subtus  in 

nervis  adpressos  glabra,  in  petiolum  brevem  magis  minusve  de- 
currentia,  varie  gradu  pinnatiloba,  inferiora  rotundata,  reliqua 
ovalia,  suprema  ovato-lanceolata  et  tantum  duplicate  grosse  ser- 
rata.  Flores  majores  quam  in  P.  villosa,  gibbere  valde  evoluto. 
Bracteolae  lanceolatae  calycem  excedentes  et  ei  appressae.  Calycis 
glabri  limbus  5-crenatus.  Caulis  superne  et  praesertim  inter  in- 
florescentiam  bifacialiter  pubescens.  Corollae  faux  glabra.  —  Prope 
Hakodade  detexit  auctor. 

4.  Patrinia  triloba  Miq.  /.  c.  p.  279  sub  Valeriana.  Patrinia 
palmatifida  Maxim.  /.  c.  —  Calcar  in  floribus  bene  evolutis  co- 
rolla  duplo  brevius,  in  nostris  alabastriferis  uon  nisi  gibberis 
instar  efformatum  ;  bracteola  (palea)  rotundata  fructui  non  adnata , 
sed  eum  tantum  suffulciens. 


96        F.'  A.    W.    MIQUEL.    CONTRIBUTIONS    A    LA    FLORE    DU    JAPON. 

Cette  espèce  très  reconnaissable  a  été  découverte  par  Siebold. 
En  l'absence  de  fleurs  et  de  fruits  parfaitement  développés ^  je 
l'avais  regardée,  à  tort,  comme  une  Valériane.  M.  Maximowicz 
nous  en  a  communiqué  des  échantillons  très  complets,  pourvus 
de  fruits.  Il  Ta  trouvée  à  Nippon,  dans  les  provinces  de  Sénano 
et  de  Nambou. 

5.  Patrmia  japonica  Miq.  /.  c.  sub  Valeriana.  —  Bracteola 
lanceolata  calyci  florenti  appressa  eoque  longior;  corolla  lato  cam- 
paniformis  basi  leviter  inaequalis;  calicis  limbus  brevissimus; 
cymae  pauciflorae;  folia  caulina  vix  1  lin.  lata. 

Les  échantillons,  en  somme  assez  imparfaits,  rapportés  par 
Siebold,  sans  mention  spéciale  de  localité,  s'éloignent  tellement 
de  toutes  les  Valérianées  japonaises,  par  leurs  feuilles  étroites 
et  en  général  petites  et  presque  sessiles,  que  cette  espèce  doit 
être  regardée  comme  encore  très  douteuse.  La  position  de  la 
bractéole,  immédiatement  au-dessous  du  calice,  conduit  à  la 
rapporter  plutôt  au  genre  Patrinia  qu'au  genre  Valeriana. 

Aux  détails  donnés,  à  l'endroit  cité,  sur  le  Valerianella  olitoria 
Mônch,  je  n'ai  rien  à  ajouter,  si  ce  n'est  que  M.  Maximowicz 
a  aussi  récolté  la  plante  près  de  Nagasaki. 


/'// 


•^ 


-    ;fa^ 


'Dr' 
£  E' 


FUi.  'l 


Fiij.i. 


Fur  ^ 


Fùf.  A'. 


LJ     I     I    I-    IZE 


'"'</ 


^'  'f^^. 


^ 

6t=^ 

^H4 

1 

\ 

ffl^M 

A 

— 

F]'' 

r 

;  LfiT 

Fy..J. 

c 

iTfru 

n 

^ 

■"'■ 

1= 

c 

r/r„t 

Fu/.  G 

1/ 

^_ 

Z^H 

Fia.  9. 


F,,,.  I 


^=^ 


TT-r 


EX3 


js^ 


r 


PI.  Il, 


1^- 

^ 

^^ 

^    ^ 
5^-^ 

^ 


^1 


PL  m 


ARCHIVES  NÉERLANDAISES 

DES 

Sciences  exactes  et  naturelles. 

SUR  LA 

DENSITÉ  DE  L'ALCOOL  ET  DES  MÉLANGES 
D'ALCOOL  ET  D'EAU, 

PAB 

E.  H.  VON  BAUMHAUER. 


Il  y  a  maintenant  dix  ans  que  j'ai  présenté  à  la  Classe  phy- 
sique de.  l'Académie  royale  des  Sciences  d'Amsterdam  les  résultats 
d'un  travail  considérable,  que  j'avais  exécuté  avec  M.  F.  H.  van 
Moorsel,  pour  rechercher  jusqu'à  quel  point  les  déterminations 
existantes  de  la  densité  des  mélanges  d'alcool  et  d'eau  à  diffé- 
rentes températures,  — surtout  celles  faites  de  1790  à  1794  par 
Gilpin  et  calculées  de  nouveau  en  1811  par  Tralles,  et  celles 
faites  en  1816  et  1822  par  Gay-Lussac,  —  offraient  un  caractère 
suffisant  de  certitude,  pour  pouvoir  servir  de  base  à  la  construc- 
tion de  tables  alcoométriques,  dans  la  nouvelle  loi  sur  les  bois- 
sons distillées,  qu'on  préparait  à  cette  époque  dans  notre  pays. 
Ces  recherches  ont  été  communiquées  dans  mon  Mémoire  sur  la 
densilé,  la  dilatation,  le  point  d'ébullition  et  la  force  élastique  de  vapeur 
de  l'alcool  et  des  mélanges  d'alcool  et  d'eau,  qui  a  paru  en  1860 
dans  le  Tome  IX  des  Mémoires  de  l'Académie  royale  des  Sciences. 
La  loi  du  20  juin  1862  (Journal  officiel  des  Pays-Bas,  n°.  62), 
contenant  des  dispositions  relatives  à  l'accise  sur  les  produits  dis- 
tillés indigènes,  et  l'arrêté  royal  dn  20  aviillS^S  (Journal  officieh 

Archives  Néerlandaises,  T.  V.  7 


100    E.  H.  VON  BAUMHAUER.  SUR  LA  DENSITE  DE  L  ALCOOL 

connaît  la  richesse,  et  réciproquement.  Quant  à  ce  dernier  point, 
il  reconnaît  lui-même  (p.  275)  que,  malgré  toute  l'exactitude  de 
ses  déterminations,  il  n'a  pas  été  plus  heureux  que  ses  prédé- 
cesseurs, et  qu'il  n'est  pas  parvenu  à  trouver  la  loi  en  question. 
Ses  recherches,  qui  ont  été  faites  avec  un  degré  extraordinaire 
de  précision,  en  observant  toutes  les  précautions  imaginables,  et 
où  l'auteur  a  appelé  à  son  secours  toutes  les  ressources  des  ma- 
thématiques, pour  le  calcul  des  erreurs  possibles,  des  corrections 
et  de  l'interpolation,  — ses  recherches,  non-seulement  confirment 
entièrement  les  résultats  de  ses  devanciers,  mais  démontrent 
encore  que  l'exactitude  à  laquelle  on  peut  prétendre,  dans  la 
détermination  de  la  densité  des  mélanges  d'alcool  et  d'eau  à 
différentes  températures,  a  une  limite,  due  à  toutes  sortes  d'in- 
fluences perturbatrices,  et  par  suite  de  laquelle  il  est  impossible 
de  trouver  la  proportion  d'alcool  dans  un  mélange  à  moins  de 
ih  un  dixième  pour  cent  près. 

Je  ne  mentionnerai  qu'en  passant,  comme  ayant  peu  d'impor- 
tance pratique,  la  discussion  étendue  à  laquelle  M.  Mendelejeff 
s'est  livré  concernant  les  plus  grandes  erreurs  probables  qui  affec- 
tent les  résultats  de  chacun  des  expérimentateurs;  je  me  bornerai 
à  relever  les  inexactitudes  qu'il  a  commises  à  propos  de  nos 
expériences. 

Les  griefs  que  M.  Mendelejeff  articule  contre  ces  expériences 
sont:  d'abord,  que  nous  avons  employé  la  pesée  hydrostatique, 
au  lieu  de  la  pesée  au  matras,  cette  méthode  devant,  d'après 
l'auteur,  donner  lieu  à  une  diminution  de  la  richesse  alcoolique 
des  mélanges;  ensuite,  que  le  cône  en  verre  dont  nous  avons 
fait  usage  pour  cette  détermination  n'avait  qu'un  volume  de 
12,865  gr.  (lis.  CC).  Cette  dernière  allégation  est  vraie  en  ce 
qui  concerne  la  détermination  de  la  densité  des  mélanges  d'alcool 
et  d'eau,  mais  elle  ne  l'est  pas  pour  la  détermination  de  la  den- 
sité de  l'alcool  absolu,  densité  dont  l'exactitude,  ainsi  que  je 
l'ai  dit,  a,  au  point  de  vue  scientifique,  une  importance  prépon- 
dérante. Pour  celle-ci,  nous  nous  sommes  servis  d'un  cône  de 
verre  d'environ  54  CC,  et,  en  outre,  nous  avons  fait  une  déter- 


ET    DES    MÉLANGES    d'aLCOOL    ET    d'eAU.  101 

mination  dans  un  petit  matras  fermé  et  pourvu  d'un  thermomètre, 
d'une  manière  analogue  à  celle  dont  M.  Mendelejeff  lui-même  a 
procédé.  Les  résultats  obtenus  par  ces  deux  méthodes,  0,79407 
et  0,79428,  bien  que  différant  peu  entre  eux,  montrent  pourtant 
que  la  pesée  hydrostatique  a  donné  une  densité  plus  faible  que 
la  pesée  dans  le  matras  fermé,  ce  qui  ne  devrait  pas  être  si, 
pendant  l'exposition  à  l'air,  l'alcool  avait  absorbé  de  l'eau.  Ayant 
négligé,  dans  le  compte  rendu  de  nos  expériences,  d'énumérer, 
comme  M.  Mendelejeff,  toutes  les  mesures  de  précaution  qui  ont 
été  prises,  je  dois  faire  remarquer  ici,  que  la  manière  dont  nous 
avons  exécuté  la  pesée  hydrostatique  réduisait  à  bien  peu  de  chose 
le  danger  de  variation  du  liquide,  vu  que  le  temps  nécessaire 
pour  verser  l'alcool  dans  le  verre  et  pour  achever  la  pesée  ne 
s'est  jamais  élevé  à  une  minute  entière.  Voici  comment  ce  résultat 
s'obtient  :  après  que  le  verre  a  été  rincé  à  plusieurs  reprises  avec 
le  liquide ,  puis  rempli ,  on  fait  une  pesée  hydrostatique  provisoire , 
dans  laquelle  on  se  contente  d'une  exactitude  de  1  à  2  milli- 
grammes; les  poids  demeurant  sur  la  balance,  on  vide  le  verre, 
on  le  remplit  de  nouveau  d'alcool  de  la  même  espèce  et  on  le 
replace  sur  la  balance,  qui  peut  alors  rester  fermée,  attendu 
que,  pour  compléter  la  pesée,  on  n'a  plus  qu'à  manœuvrer  le 
petit  cavalier  représentant  le  milligramme.  Lorsqu'on  a  une  bonne 
balance  (telle  que  la  balance  d'Oertling,  de  Berlin,  qui  m'a  tou- 
jours servi),  dont  l'aiguille  ne  donne  jamais  d'indications  fausses , 
et  qu'on  ne  poursuit  pas  une  exactitude  supérieure  à  celle  d'un 
demi-milligramme,  la  pesée  entière  est  terminée  en  moins  d'une 
minute.  Immédiatement  après  la  pesée,  on  consultait  de  nouveau 
le  thermomètre,  et  la  détermination  n'était  regardée  comme  bonne 
que  si  cet  instrument  continuait  à  marquer  15°  C,  température 
à  laquelle  le  liquide  avait  été  amené  avant  l'opération.  L'exacti- 
tude des  pesées  a  été  dans  nos  expériences  de  ±  0,0005  mgr. , 
et  non  de  ±  0,001  mgr. ,  comme  le  dit  M.  Mendelejeff.  La  surface 
des  appareils  sur  lesquels  on  opère  étant  sans  cesse  modifiée, 
ainsi  que  l'ont  montré  MM.  Kegnault  et  Stas,  par  toutes  sortes 
d'influences   qui   nous  sont  encore  imparfaitement  connues,  telles 


102  F.    H.    VON    BAUMHAUER.    SUR    LA    DENSITE    DE    l'aLCOOL 

que  rélectricité^  la  condensation  des  gaz,  etc.,  une  pesée  mérite, 
à  mon  avis,  d'autant  plus  de  confiance  qu'elle  a  été  faite  eu 
moins  de  temps.  La  détermination  des  fractions  du  milligramme 
par  le  procédé  qu'a  employé  M.  Mendelejeff,  c'est-à-dire,  par  les 
oscillations  de  l'aiguille,  observées  à  l'aide  d'une  lunette,  est 
plutôt,  ce  me  semble,  de  nature  à  diminuer  qu'à  accroître  le 
degré  d'exactitude.  On  ne  peut  attacher  quelque  valeur  à  ce  pro- 
cédé que  lorsque,  à  l'exemple  des  deux  savants  cités  plus  haut, 
on  dispose  sur  les  deux  plateaux  de  la  balance  des  appareils 
formés  de  la  même  matière  et  présentant  des  surfaces  égales, 
sur  lesquels  les  influences  inconnues  s'exercent  alors  de  la  même 
manière.  Cette  précaution  n'a  pas  été  observée  par  M.  Mendelejeff, 
qui  a  pesé  des  appareils  en  verre  avec  des  poids  en  cuivre. 
M.  Mendelejeff,  qui  dit  avoir  poussé  l'exactitude  dans  la  mesure 

5 
des  températures  jusqu'à  — L—  d'un  degré  centigrade,  nous  reproche 

naturellement  le  peu  de  précision  de  nos  propres  mesures,  qui 
s'arrêtent  aux  dixièmes  du  degré.  J'admire  certainement  cette 
grande   exactitude,   obtenue   d'ailleurs  en   dirigeant   le  fil  de  la 

lunette  à  -  de  la  hauteur  du  ménisque,  à  partir  du  sommet,  et 

en  appliquant  des  corrections  pour  la  mince  colonne  de  mercure 
contenue  dans  la  partie  du  thermomètre  qui  s'élève  au-dessus  du 
liquide.  Mais,  tout  en  l'admirant,  je  ne  puis  y  attacher  que  bien 
peu  d'importance,  quand  je  vois  en  même  temps  que  les  degrés 
•des  thermomètres  employés,  thermomètres  qui  ne  pouvaient  aller 
de  0°  jusqu'à  100^  C,  ont  été  déterminés  par  comparaison  avec 
un  thermomètre  étalon,  et  que  celui-ci  marquait,  en  1859,  -{-  0,08 
au  point  0  et  100,103  au  point  100,  et,  en  1864,  -h  0,500 
au  point  0;  le  point  100  ne  paraît  pas  avoir  été  déterminé  à 
cette  dernière  époque.  M.  Mendelejeff  ajoute  que  le  zéro  de  son 
thermomètre  étalon,  qui  se  trouvait  à  0,08  en  1859,  s'éleva  peu 
à  peu  jusqu'à  0,500  en  1862,  et  que  depuis  lors  il  resta  con- 
stamment à  la  même  hauteur.  Quant  à  cette  dernière  circonstance, 
je   me   permets   de   la   révoquer   en  doute  d'après  le  résultat   de 


ET    DES    MÉLANGES    d'aLCOOL    ET    d'eAU.  103 

mon  expérience.  Nous  avons  fait  usage  pour  nos  observations 
d'un  thermomètre  étalon  n^  381  de  Fastré  aîné,  de  Paris,  avec 
une  division  arbitraire,  mais  uniforme,  en  745  parties;  les  indi- 
cations données  par  M.  Fastré  au  sujet  de  ce  thermomètre,  en 
juin  1854,  étaient  les  suivantes  :  B  =z  756,  T  =:  12,50,  ^  =  755,05, 
P=:  99,80,  le  point  99,80  =z  683,0,  le  point  0  =  22,0;  le  vrai 
point  100  était  donc  à  cette  époque,  à  760^"!,  =:  684,3.  En  1858  , 
ayant  examiné  ce  thermomètre  moi-même,  je  retrouvai  le  point 
0  ==  22,0  ;  quant  au  vrai  point  100,  le  thermomètre  entier  étant  placé 
dans  une  double  enveloppe  de  vapeur,  j'obtins  à  160^^  z=z  685,0. 
Le  26  décembre  1869,  j'ai  contrôlé  ce  thermomètre  de  nouveau, 
et  trouvé  le  point  0  =r:  25  ;  le  29  décembre  suivant  eut  lieu  la 
détermination  du  point  100,  lequel,  à  764mm^8  et  2^,4  C,  fut 
trouvé  =  687,5,  ce  qui  donne  le  vrai  point  100  =:  686,24.  Comme 
chaque  degré  du  thermomètre  est  égal  à  6,6224  divisions  (environ 
3,78  millimètres),  le  point  0  était  donc  de  0,45  degré  plus 
élevé  qu'en  1854  et  1859,  et  le  point  100  de  0,25  plus  élevé 
qu'en  1854  et  de  0,19  qu'en  1859.  Lorsque,  le  même  29  décembre, 
quelques  heures  plus  tard,  je  déterminai  de  nouveau  le  point  0, 
je  le  trouvai,  non  plus  à  25,  mais  à  24,  c'est-à-dire  à  0,15 
degré  plus  bas  qu'avant  l'introduction  du  thermomètre  dans  la 
vapeur.  Du  reste,  c'est  un  fait  généraletnent  connu  que,  dans  les 
thermomètres  très  sensibles,  le  point  0  ne  reste  pas  constant 
quand  l'instrument  est  porté  à  de  hautes  températures. 

Le  25  lévrier  et  le  20  mars  1870  on  constata  que  le  point  0 
s'était  maintenu  à  24;  dans  l'intervalle  écoulé  depuis  le  29  dé- 
cembre 1869,  le  thermomètre  n'avait  pas  été  exposé  à  une  tem- 
pérature élevée. 

J'ai  vérifié  de  même  un  thermomètre  étalon  de  Salleron ,  de 
Paris,  également  à  division  arbitraire,  et  qui  se  trouvait  déjà  en 
ma  prossession  depuis  une  dizaine  d'années.  Le  29  décembre 
1869  le  point  0  fut  trouvée  =  156,0  et  le  point  d'ébullition, 
à  764"in^8  et  2  ,4  C. ,  =  714,0;  par  conséquent  le  point  100 
à  760'ïi'"  ::^  712,84.  Une  heure  après  on  constata  que  le  point 
0  correspondait  à  153,0;    en  partant  de  ces  dernier  nombre,  on 


i04    E.  H.  VON  BAUMHAUER.  SUR  LA  DENSITE  DE  L  ALCOOL 

trouve  pour  la  longueur  de  chaque  degré  5,5984  divisions,  et 
pour  la  valeur  de  chaque  division  0°,178.  Le  déplacement  du 
point  0  s'élevait  donc  à  0,534  degré. 

Après  la  date  indiquée  la  thermomètre  ne  fut  plus  employé  à 
une  température  élevée.  Le  25  février  1870  et  le  20  mars  suivant 
on  procéda  à  une  nouvelle  détermination  du  point  0;  la  première 
fois  on  le  trouva  à  154,5  et  la  seconde  à  155^0. 

En  faut-il  davantage  pour  prouver  qu'un  thermomètre  à  mercure, 
en  verre ,  n'est  pas  un  instrument  avec  lequel  on  puisse  obtenir  dans 
la  mesure  des  températures  une  exactitude  d'un  centième  de  degré  ? 

En  présence  de  ces  résultats,  on  ne  sera  pas  surpris  si  je 
n'attribue  que  peu  de  valeur  à  la  détermination  de  demi-centièmes 
de  degré,  et  si  je  continue  à  me  contenter  des  dixièmes  de 
degré  dans  la  mesure  des  différences  de  température,  de  même 
que  je  me  contente  des  demi-milligrammes  dans  les  pesées  où  il 
s'agit  de  comparer  entre  elles  des  matières  hétérogènes,  par 
exemple  des  appareils  en  verre  avec  des  poids  en  cuivre. 

Finalement,  M.  Mendelejeff  dit  encore  que  si  l'on  détermine  la 
dilatation  d'un  liquide  à  l'aide  d'un  dilatoraètre  placé  dans  un  vase 
rempli  d'eau  chaude  qui  se  refroidit,  l'erreur  dans  la  détermina- 
tion de  la  température  peut  s'élever  à  0°,5  C.  Je  l'accorde, 
si  le  volume  du  liquide  à  examiner  est  très  grand  et  celui 
de  l'eau  ambiante  relativement  petit;  mais,  de  la  manière  dont 
nos  expériences  ont  été  faites,  dans  un  cylindre  de  verre  qui 
contenait  plusieurs  litres  d'eau  et  où,  pour  maintenir  une  tempé- 
rature uniforme ,  l'eau  était  continuellement  agitée  par  un  courant 
d'air,  la  plus  grande  erreur  ne  peut,  à  mon  avis,  dépasser  0'',1  C, 
ce  qui  donne  pour  la  densité  une  erreur,  non  pas  de  0,0004  à 
0,0005,  mais  tout  au  plus  de  0,0001. 


Mais  tournons-nous  plutôt  du  côté  des  résultats  des  recherches, 
et  comparons  ceux  qui  ont  été  obtenus  par  M.  van  Moorsel  et 
moi,  tant  avec  ceux  de  M.  Mendelejeff,  qu'avec  ceux  de  nos  pré- 
décesseurs,   Gilpin,    Gay-Lussac,  Drinkwater,  Fownes  et  autres. 

En  premier  lieu,  nous  devons  nous  occuper  de  l'alcool  absolu. 


ET    DES    MÉLANGES    d'aLCOOL    ET    d'eAU.  105 

puisque  c'est  de  la  détermination  exacte  de  sa  densité  que  dépend 
la  valeur  de  tout  le  travail;  pour  éviter  les  développements  trop 
étendus^  je  suis  forcé  de  renvoyer  à  mon  Mémoire  pour  tout  ce 
qui  concerne  les  détails. 

Avant  tout,  je  dois  présenter  une  observation  qui,  dans  l'ap- 
préciation de  cette  question,  n'est  pas  dépourvue  d'importance. 
Nous  n'avons  aucun  moyen  certain  de  nous  assurer  que  ce  que  nous 
nommons  de  l'alcool  absolu  est  de  l'alcool  éthylique  chimiquement 
pur.  Par  des  distillations  successives  sur  des  substances  avides  d'eau , 
distillations  répétées  jusqu'à  ce  que  la  densité  du  produit  ne 
diminue  plus,  nous  obtenons  un  liquide  qui  peut  être  regardé, 
avec  grande  probabilité,  comme  entièrement  privé  d'eau.  Mais  il 
n'est  nullement  prouvé  que  ce  liquide,  cet  alcool  éthylique,  ne 
renferme  pas  un  autre  alcool,  d'une  densité  plus  grande  ou  plus 
faible,  un  éther,  un  aldéhyde,  ou  quelque  autre  matière  volatile, 
dont  le  point  d'ébullition  diffère  peu  de  celui  de  l'alcool  éthylique. 
Le  traitement  répété  par  la  chaux  vive  éloigne  la  probabilité  de 
la  présence  d'acides  volatils;  mais  quelle  est  l'action  de  cette 
chaux  vive  sur  l'alcool,  surtout  à  des  températures  un  peu  élevées  ? 
Quand  on  distille  l'alcool  sur  la  chaux  vive,  à  une  température 
de  80'^  à  90^^  C,  le  résidu  de  la  distillation  est  presque  incolore , 
et  on  peut  supposer  d'après  cela  qu'il  n'y  a  pas  eu  de  décom- 
position. Il  en  est  autrement  avec  la  baryte  caustique,  qui  a  été 
emplo}ée  par  M.  Mendelejeff  en  même  temps  que  la  chaux  vive; 
la  baryte  caustique  ne  colore  pas  l'alcool  hydraté ,  mais  elle  donne 
à  l'alcool  anhydre,  même  à  la  température  ordinaire,  une  teinte 
jaunâtre,  qui  par  la  chaleur  passe  à  l'orangé;  il  est  plus  que 
probable  qu'il  se  fait  ici  une  décomposition,  bien  que  nous  ne 
sachions  pas  quels  en  sont  les  produits. 

On  ne  doit  pas  oublier,  en  outre,  que  les  liquides  alcooliques 
retirés  de  différentes  matières  premières  contiennent  différents 
autres  alcools,  dont  on  ne  parvient  à  les  débarrasser,  et  encore 
imparfaitement,  qu'avec  beaucoup  de  peine,  par  des  distillations 
fractionnées  et  des  traitements  par  divers  agents.  La  cerlilucle 
d'avoir  affaire  à   de   l'alcool  éthylique  chimiquemenl  pur  ne  peut 


106  E.    H.    VON     BAUMHAUER.    SUR    LA    DENSITE    DE    l'aLCOOL 

être  acquise  par  aucun  moyen,  et  je  ne  comprends  pas  comment 
M.  Mendelejeff,  qui  n'a  opéré  que  sur  une  seule  et  même  espèce 
d'alcool,  a  pu  donner  „comme  preuve  suffisante  de  la  pureté  de 
l'alcool  préparé  par  la  chaux,  le  fait  qu'en  mélangeant  cet  alcool 
avec  de  l'eau ,  il  obtenait  des  liquides  ayant  les  mêmes  propriétés 
que  lorsqu'il  emp  oyait,  pour  composer  les  mélanges,  de  l'alcool 
moins  concentré."  Quant  à  nous,  pour  le  motif  qui  vient  d'être 
indiqué,  nous  avons  fait  usage  dans  nos  recherches  de  deux 
espèces  d'alcool  de  provenance  tout  à  fait  différente;  l'un  de  ces 
alcools  avait,  sans  aucun  doute,  été  extrait  de  l'eau-de-vie  de 
grains;  l'autre,  à  ce  qu'on  m'assura,  était  un  produit  de  la  vigne. 
Tous  les  deux  avaient  été  livrés  sous  le  nom  d'alcool  absolu,  et 
contenaient  un  peu  plus  de  1  pour  cent  d'eau.  Cet  alcool  ne 
perdit  les  dernières  traces  d'eau  qu'après  une  distillation  sur  du 
carbonate  de  potasse  fortement  desséché  et  cinq  distillations  suc- 
cessives sur  de  la  chaux  vive;  avant  chacune  de  ces  opérations, 
on  laissait  l'alcool  pendant  plusieurs  jours  en  contact  avec  l'agent 
de  déshydratation,  dans  un  endroit  chaud,  en  ayant  soin  d'agiter 
de  temps  en  temps.  Le  liquide  qui  passait  en  premier  à  la  dis- 
tillation n'était  pas  employé  aux  expériences,  mais  servait  à 
rincer  trois  fois  de  suite  les  récipients  préalablement  sèches  (des 
matras  de  200  CC.)  ;  la  distillation ,  qui  avait  toujours  lieu  au 
bain-marie,  était  arrêtée  aussitôt  que  les  deux  tiers  environ  de 
l'alcool  avaient  passé.  Pour  les  expériences,  on  ne  fit  donc  usage 
ni  des  premières  portions  distillées,  ni  des  dernières;  la  remarque 
de  M.  Mendelejeff,  que  probablement,  par  suite  de  l'ignorance  du 
fait  de  la  densité  supérieure  des  premiers  produits  distillés,  ses 
précécesseurs  ont  trouvé  pour  l'alcool  absolu  une  densité  trop 
forte,  cette  remarque  n'est  par  conséquent  pas  applicable  à  nos 
expériences.  Je  répète  ici,  d'après  mon  Mémoire,  que  l'alcool 
n'était  regardé  comme  absolu  que  lorsqu'il  continuait  à  présenter 
la  même  densité  après  deux  distillations  successives,  avant  chacune 
desquelles  le  produit  de  la  distillation  précédente  était  resté  pen- 
dant plusieurs  jours,  à  une  douce  chaleur,  dans  une  cornue  fermée 
avec  des  bouchons  de  caoutchouc  et  remplie  de  chaux  récemment 


ET  DES  iMÉLANGES  d'aLCOOL  ET  d'eAU.  107 

calcinée.  Les  nombres  obtenus  dans  une  de  ces  opérations,  àlo^C. 
et  par  rapport  à  l'eau  également  à  15°  C,  furent: 

Alcool  avant  la  distillation 0,7990 

Après  la  distillation  sur  le  carbonate  de  potasse.  0,7982 
Après  la  1^^*^  distillation  sur  la  chaux.  .....  0,7979 

«      «    2^  „  „     «       „     0,7970 

n       «    3®  n  >'      «        «      0,7958 

>j       ??     4^  r>  75      r         «      0,7953 

,,      5,    5e  „  „     „       „     0,7947 

.      „    6e  „  „     „       „     0,7947. 

On  ne  peut  pas  non  plus  appliquer  à  nos  expériences  une  autre 
observation  de  M.  Mendelejeff  (p.  242),  savoir,  que  l'excès  de 
densité  trouvé  par  ses  devanciers  doit  être  attribué  en  partie  à 
ce  qu'ils  n'ont  pas  eu  égard  à  l'absorption  de  l'humidité  de  l'air, 
ni  à  celle  de  l'air  sec  lui-même,  pendant  la  distillation  et  pen- 
dant la  conservation  de  l'alcool  absolu.  Dans  nos  expériences, 
l'extrémité  recourbée  du  tube  de  verre  du  réfrigérateur  de  Liebig 
bouchait  presque  complètement  le  col  des  matras  de  verre,  où 
il  pénétrait  de  quelques  centimètres;  ces  matras,  d'une  capacité 
de  200  ce,  se  remplissaient  en  peu  de  minutes  jusqu'à  une 
assez  grande  hauteur  dans  le  col;  ils  étaient  alors  immédiatement 
fermés  avec  des  bouchons  de  caoutchouc  préalablement  bouillis 
dans  une  lessive  de  potasse,  dans  l'eau  et  enfin  dans  l'alcool, 
de  sorte  qu'il  ne  restait  tout  au  plus  dans  les  matras  qu'une 
couple  de  centimètres  cubes  d'air.  Il  serait  difficile  de  comprendre 
comment  de  l'alcool  ainsi  préparé  et  conservé  aurait  pu  enlever 
de  l'humidité  à  l'air,  ou  absorber  plus  d'air  que  dans  les  expé- 
riences de  M.  Mendelejeff,  qui,  en  définitive,  a  également  distillé 
dans  l'air.  Le  fait  de  l'absorption  de  l'air  par  l'alcool  absolu  ne 
m'était  d'ailleurs  pas  inconnu,  ainsi  qu'on  peut  le  voir  dans  la 
cinquième  section  de  mon  Mémoire,  où  je  traite  de  la  force  élas- 
tique de  la  vapeur  de  l'alcuol. 

Comparons  maintenant  les  résultats  des  différents  observateurs 
concernant  la  densité  de  l'alcool  absolu.  Dans  le  tableau  suivant, 


108  E.    H.    VOIS    BAUMHAUER.    SUR    LA    DENSITE    DE    L  ALCOOL 

je  donne  non-seulement  les  résultats  calculés  par  moi  pour  la 
température  de  15^ C;  mais  aussi  ceux  que  M.  Mendelejeff  lui- 
même  a  calculés  pour  20^  C,  et  cela^  à  cause  du  reproche  qu'il 
m'adresse  (p.  118;  note),  sans  le  motiver  toutefois,  d'avoir  com- 
mis mainte  erreur  dans  les  réductions  et  les  corrections  que  j'ai 
fait  subir  aux  expériences  de  Fownes.  J'ajoute  également  les 
chiffres  obtenus  par  M.  le  professeur  R.  S.  Me.  Culloh,  lequel  a 
fait,  en  1848,  des  recherches  considérables  pour  le  gouvernement 
des  Etats  Unis  de  l'Amérique  du  Nord;  ces  chiffres,  qui  m'étaient 
inconnus  à  l'époque  de  mon  travail,  ont  été  communiqués  dans  les 
Reports  from  tfie  Secretary  of  the  Treasury  of  scietUi/icinvestigadons  ^ 
30  et  31,  Congress,  Washington,  1848  et  1851.  Les  recherches  de 
M.  Me.  Culloh  sont  également  peu  exactes,  suivant  M.  Mendelejeff 
(p.  119);  il  ne  leur  fait  même  pas  l'honneur  d'un  jugement  en  règle. 

Observateurs.           Densité  réduite  à  15°  C. ,     Densité  réduite  à  20^  C. ,  d'après 
d'après  mon  calcul.            le  calcul  de  M.  Mendelejeff. 
Lowitz 0,7940 0,7899 

Richter 0,7950 0,7909 

Meissner 0,7940 0,7899 

Muncke  et  Gmelin.  .  0,7940 0,7895 

De  Saussure 0,7950 0,7909 

Gay-Lussac(;i816)  .  .  0,7941     

„         (1822)  .  .  0,7940     0,7898 

De  Gouvenain   ....  0,7976     0,79348 

Delezenne 0,7984     0,79361 

Dumas  et  Boullay  .  .  .  0,7931     

Kopp 0,7970     0,79277 

Connell 0,7936     

Pierre 0,8029     0,79777 

Drinkwater 0,7938     0,78958 

Fownes 0,7938     0,78959 

Me.  Culloh 0,7944 

Wackenroder 0,7941 

PoniUet 0,7940     0,7898 

Mendelejeff 0,79367 0,78945 

Von  Baumhauer  et.  .  (  0,79406  \  q  1S99 

VanMoorsel (  0,79415  ( ' 


109 

Je  crois  que  ces  chiffres  et  les  noms  des  observateurs  qui  les 
ont  obtenus  justifient  ce  que  j'ai  dit  dans  mon  Mémoire  fp.  11): 
„I1  ne  peut  exister  de  doute  sur  la  densité  de  l'alcool  absolu  ; 
elle  ne  peut  différer  notablement  de  0,7940  à  15°  C,  comparée 
à  l'eau  au  maximum."  Cette  conclusion  est  d'ailleurs  en  parfait 
accord  avec  celle  de  Pouillet  (p.  21  de  son  Mémoire  sur  la 
densité  de  l'alcool):  „ Après  cette  longue  discussion  et  les  expé- 
riences qui  la  terminent,  je  conclus  avec  la  plus  entière  con- 
viction que  les  expérimentateurs  qui  ne  retombent  pas  sur  les 
nombres  de  Lovvitz  et  de  Gay-Lussac  (tous  les  deux  0,7940 
à  15°  C.)  pour  la  densité  de  l'alcool,  doivent  supposer  hardi- 
ment qu'ils  se  trompent,  qu'il  y  a  quelque  méprise  sur  la 
nature  du  liquide  ou  quelque  cause  d'erreur  dans  la  méthode 
d'observation." 

Aussi  longtemps  que  d'autres  expériences,  d'une  exactitude 
égale  ou  supérieure,  ne  seront  pas  venues  démontrer  le  contraire, 
je  continuerai  à  croire  que,  par  la  déshydratation  seule,  la  den- 
sité de  l'alcool  éthylique,  à  15'' C.  et  comparée  à  celle  de  l'eau 
au  maximum  de  condensation,  ne  peut  être  abaissée  au-dessous 
de  0,7940,  et  que  les  valeurs  plus  faibles,  trouvées  par  MM.  Men- 
delejeff,  Connel,  Fownes,  Drinkwater  et  Dumas  et  Boullay,  doi- 
vent être  attribuées  à  des  impuretés  de  l'alcool  ou  à  une  décompo- 
sition partielle  subie  pendant  l'opération  de  la  déshydratation.  A 
ce  sujet,  j'appellerai  encore  l'attention  sur  ce  que  dit  M.  Mendelejeff 
(p.  248):  „Je  dois  faire  observer  que  l'alcool  absolu,  obtenu  à 
l'aide  de  la  chaux,  possède  une  légère  odeur  éthérée,  qui  va  en 
s'affaiblissant  à  mesure  qu'on  multiplie  les  distillations;  cette  cir- 
constance n'exerce  d'ailleurs  aucune  influence  sur  la  densité  de 
l'alcool,  ainsi  que  je  m'en  suis  assuré  expérimentalement."  Je 
n'ai  jamais  remarqué  cette  odeur  d'éther  à  l'alcool  préparé  par 
nous,  et  je  ne  pense  pas  qu'elle  puisse  se  présenter  dans  l'alcool 
parfaitement  pur. 


110        E.    H.    VON    BAUMHAUER.    SUR    LA     DENSITE    DE    l'aLCOOL 

Le  point  d'ébullition  de  l'alcool  absolu  a  été  fixé  par  différents 
observateurs  aux  températures  suivantes: 

Gay-Lussac  (1816) 78^41  C.  à  160^^. 

Dumas  et  BouUay 76  ,6     „    „       „ 

Yelin 77  ,3     „    „       „ 

Pierre 78  ,4     „    „       „ 

Fownes 80  ,7     „    ,.       „ 

Kopp 78  ,4     „    „       „ 

Mendelejeff. 78  ,300  à  78,307 

Von  Baumhauer  i  -q    qq 

et  Van   Moorsel  ) 

On  voit  que  M.  Mendelejeff  trouve  de  nouveau  une  valeur  un 
peu  plus  faible  que  Gay-Lussac,  MM.  Pierre,  Kopp  et  nous, 
dont  les  résultats  convergent  tous  vers  78°,4. 


Pour  la  dilatation  de  l'alcool  absolu,  voici  les  nombres  obte- 
nus par  divers  savants,  tous  ces  nombres  étant  rapportés  au 
volume  à  0°  C,  pris  pour  unité: 

Temp.     Gay-Lussac.  Muncke.  Kopp.  Mendelejeff.    v.  Baumliauer 

^     ^'*-  -^■'  — -  ^  -        "'— ■ — - -— "—        -^  et  V.  Moorsel. 

1816  1822  I.  II.  I.  If.  111. 

5«  1,00506  1,005022  1,005150  1,00517  1,00521  1,00530  1,00521  1,0052 

10»  1,01016  1,010164  1,010441  1,01043  1,01047  1,01065  1,01049  1,0103 

15°  1,01533  1,01472  1,015414  1,015857  1,01574  1,01578  1,01604  1,01585  1,0156 

20»  1,02060  1,020749  1,021884  1,02115  1,02118  1,02151  1,02128  1,0210 

25°  1,02600  1,026163  1,027007  1,02666  1,02668  1,02706  1,02678  1,0265 

30»  1,03151  1,03094  1,031647  1,032713  1,03229  1,03227  1,03270  1,03238  1,0321. 

M.  Mendelejeff  attache  un  grand  prix  à  l'accord  intime  qui  se  ma- 
nifeste entre  ses  résultats  et  la  moyenne  des  trois  séries  données 
par  M.  Kopp,  bien  qu'il  reconnaisse  lui-même  que  l'alcool  de 
M.  Kopp  n'était  pas  absolu.  Mais,  en  comparant  ces  trois  séries, 
on  voit  clairement  que  les  deux  premières  possèdent  un  plus 
haut  degré  de  probabilité  que  la  troisième,  qui  s'écarte  assez 
notablement   des   deux  autres.  Par  rapport  à  la  moyenne  de  ces 


ET    DES    MÉLANGES    d'aLCOOL    ET    d'eAU.  111 

deux  premières  séries  de  M.  Kopp,  nos  résultats  n'offrent  guère 
ele  plus  grandes  différences  que  ceux  de  M.  Mendelejeff;  ils  sont 
intermédiaires  d'ailleurs  entre  ces  derniers  et  ceux  de  Gay-Lussac. 


Enfin,  en  ce  qui  concerne  la  contraction  qu'on  observe  dans 
le  mélange  de  l'alcool  avec  l'eau,  M.  Mendelejeff  parvient  à  la 
même  conclusion  qui  résultait  de  nos  expériences  et  de  celles  de 
nos  prédécesseurs,  savoir:  que  le  maximum  de  contraction  a  lieu 
quand  les  proportions  de  l'alcool  et  de  l'eau  sont  celles  de  1 
molécule  0^  H'^  G  pour  3  molécules  H-  O,  c'est-à-dire,  en  poids, 
dans  le  mélange  de  46  pour  cent  d'alcool  et  54  pour  cent  d'eau. 
La  valeur  de  cette  contraction,  à  15'^  C,  serait,  d'après  M. 
Mendelejeff,  3,7S40,  et  d'après  nos  expériences  3,762;  en  d'autres 
termes,  53,703  volumes  d'alcool  et  50,060  volumes  d'eau  se 
contractent  de  manière  à  ne  plus  occuper  que  100  volumes. 
Pouillet  a  calculé  la  contraction  d'après  les  expériences  de  Gay- 
Lussac  et  trouvé  le  nombre  3,77;  ce  résultat  tombe  entre  la 
détermination  de  M.  Mendelejeff  et  la  nôtre. 


Ce  qui  précède  peut  suffire  pour  la  partie  scientifique  de  la 
question,  sur  laquelle,  en  ce  qui  concerne  les  résultats,  les 
recherches  de  M.  Mendelejeff  ne  me  paraissent  avoir  jeté  aucun 
jour  nouveau.  Sa  méthode  est  sans  contredit  plus  exacte  que  celle 
de  ses  devanciers ,  mais  elle  n'a  conduit  à  aucune  différence  de 
quelque  valeur;  d'un  autre  côté,  pour  ce  qui  regarde  la  densité, 
ses  chiffres  peuvent,  à  mon  avis,  faire  naître  des  doutes  sur  la 
pureté  de  l'alcool  absolu  dont  il  s'est  servi. 


Si  nous  considérons  maintenant  la  question  au  point  de  vue 
pratique,  nous  devrons  formuler  la  même  conclusion:  les  expérien- 
ces exécutées  par  M.  Mendelejeff  ont  une  grande  valeur,  mais 
surtout  pour  avoir  levé  tous  les  doutes  qui  auraient  pu  subsister 


112    E.  H.  VON  BAUMHAUER.  SUR  LA  DENSITE  DE  L  ALCOOL 

encore  relativement  à  la  base  sur  laquelle  repose  l'alcoométrie 
dans  les  divers  pays.  Cette  base,  nous  la  devons  principalement 
aux  recherches  de  Gilpin,  dans  le  siècle  précédent,  et  aux 
recherches  postérieures  de  Gay-Lussac;  les  résultats  de  ces  deux 
expérimentateurs  ne  diffèrent  entre  eux  que  de  ±  un  dixième 
pour  cent  d'alcool  (en  volume)  pour  les  mélanges  à  15°  C.  ou 
15°,55  C.  (60°  F.),  température  à  laquelle  les  expériences  ont 
été  faites,  tandis  que,  à  0^  C.  et  30°  C,  ces  différences  s'élè- 
vent tout  au  plus  à  deux  dixièmes  pour  cent.  A  cet  égard  nous 
avons  acquis  une  certitude  complète,  depuis  que,  —  grâce  à  une 
communication  à  laquelle  la  publication  de  notre  travail,  en  1860, 
n'a  probablement  pas  été  étrangère,  —  nous  sommes  entrés  en 
possession  des  chiffres  officiels  d'après  lesquels  Gay-Lussac  avait 
calculé  les  valeurs  de  son  histruclion  pour  Vusaqe  de  V alcoomètre 
centésimal  y  chiffres  dont  on  ne  connaissait  jusqu'alors  que  quel- 
ques uns ,  cités  par  Berzelius  dans  la  seconde  édition  de  son 
Traité  de  Chimie  (1828).  La  communication  à  laquelle  je  fais 
allusion  est  celle  que  M.  Collardeau  a  adressée  à  l'Académie  des 
Sciences  de  Paris,  dans  la  séance  du  18  novembre  1861,  et  où 
il  donne  les  densités  des  mélanges  d'alcool  et  d'eau  à  15°  C. 
(l'eau  à  15°  C.=:l)  pour  chaque  centième  en  volume  d'alcool, 
densités  empruntées  à  la  table  officielle  de  Gay-Lussac.  Comme  Ber- 
zelius, auquel  Gay-Lussac  avait  certainement  communiqué  les  chiffres 
en  question ,  ne  parle  que  des  mélanges  renfermant  30  à  100  pour 
cent  d'alcool  en  volume,  on  peut  toutefois  se  demander  si  Gay- 
Lussac  a  bien  expérimenté  sur  des  mélanges  plus  pauvres,  et  si, 
au-dessous  de  30  pour  cent,  il  n'a  pas  déduit  ses  chiffres  des 
expériences  de  ses  devanciers.  M.  Mendelejeff  non  plus  n'a  pas 
fait  de  déterminations  au-dessous  de  32  pour  cent  en  volume, 
sauf  une,  à  environ  12  pour  cent,  qui  confirme  les  résultats  de 
Gilpim,  de  Drinkwater  et  les  nôtres. 

Pour  nos  recherches,  deux  séries  de  mélanges  ont  été  faites, 
à  l'aide  des  deux  espèces  d'alcool  dont  j'ai  parlé  ci-dessus.  Les 
19  mélanges  qui  composaient  chaque  série,  et  dont  la  richesse 
augmentait  progressivement  d'environ  5  pour  cent,  furent  préparés 


ET     DES    MÉLANGES    d'aLCOOL    ET    d'eAU.  113 

le  même  jour^  à  la  suite  les  uns  des  autres ,  et  par  conséquent 
dans  les  mêmes  conditions.  Voici  comment  on  s'y  prit.  Un  flacon 
rempli  d'alcool  absolu  était  placé  dans  de  l'eau  maintenue  à 
15^  C;  ce  flacon  était  fermé  par  un  bouchon  de  caoutchouc 
percé  de  deux  ouvertures,  dans  l'une  desquelles  était  fixé  un 
tube  à  chlorure  de  calcium,  pour  préserver  l'alcool  de  l'humidité 
de  l'air,  tandis  que  l'autre  livrait  passage  à  un  siphon,  qui  com- 
muniquait avec  une  pipette  dont  la  capacité  avait  été  exactement 
divisée  au  moyen  du  mercure.  A  l'aide  de  cet  appareil ,  on  mesura 
successivement  95,  90  à  5  C.C,  d'alcool,  dans  des  matras  d'une 
contenance  d'au  moins  100  CC,  qui  avaient  été  préalablement 
bien  séchés,  fermés  avec  des  bouchons  de  caoutchouc  et  pesés 
exactement;  aussitôt  après  l'introduction  du  liquide,  ces  matras 
étaient  rebouchés  et  soumis  à  une  nouvelle  pesée.  Le  flacon  d'al- 
cool fut  alors  remplacé  par  un  flacon  rempli  d'eau  distillée,  bien 
bouillie,  puis  refroidie  dans  le  vide,  flacon  qu'on  maintint  éga- 
lement à  une  température  de  15°  C.  pendant  toute  la  durée  de 
l'opération.  On  introduisit  ensuite,  de  la  même  manière  que  ci- 
dessus,  5,  10  à  95  d'eau  dans  les  matras,  et,  ceux-ci  ayant  été 
bouchés  immédiatement,  on  en  détermina  de  nouveau  le  poids 
avec  soin.  Ce  ne  fut  que  le  jour  suivant,  après  que  les  matras 
avaient  été  secoués  toutes  les  demi-heures,  que  nous  commen- 
çâmes les  déterminations  de  densité;  comme  nous  ne  visions  pas 
à  une  exactitude  plus  grande  que  celle  de  la  quatrième  décimale , 
le  grand  cône  de  verre  dont  nous  nous  étions  servis  pour  la 
détermination  de  la  densité  de  l'alcool  absolu,  fut  remplacé  ici 
par  un  cône  plus  petit,  mesurant  environ  13  CC.  Les  résultats 
directs  de  nos  pesées  ont  été  communiqués  dans  mon  Mémoire. 
C'est  à  dessein  que  nous  n'avons  pas  exécuté  nous-mêmes  les 
calculs  auxquels  ces  résultats  donnaient  lieu:  nous  devons  ces 
calculs  et  les  interpolations  nécessaires  à  la  complaisance  de  M. 
le  Dr.  H.  C.  Dibbits,  aujourd'hui  professeur  à  l'Ecole  moyenne 
du  degré  supérieur  d'Amsterdam.  Qu'une  erreur  ait  pu  se  glisser 
dans  l'une  ou  l'autre  des  152  pesées  que  comprennent  nos  38 
déterminations,  c'est  ce  que  je  ne  veux  certainement  pas  contes- 
Archives  Néerlandaises,  T.  V.  8 


114         E.    H.    VON    BAUMHAUER.    SUR    LA    DENSITÉ     DE     l'alGOOL 

ter.  Mais,  si  Ton  compare  nos  résultats  avec  ceux  des  autres 
observateurs  et  avec  ceux  de  M.  Mendelejeff  lui-même,  qui  a 
poussé  l'exactitude  des  déterminations  beaucoup  plus  loin  que 
nous  ne  l'avions  jugé  nécessaire,  on  voit  qu'il  existe  le  plus 
souvent  un  accord  parfait  ;  dans  un  petit  nombre  de  cas  on  trouve 
une  différence  de  un  dixième  pour  cent  en  volume,  et  une  fois 
seulement,  savoir,  pour  le  mélange  d'environ  46  pour  cent  d'alool 
en  volume  ou  39  pour  cent  en  poids,  cette  différence  s'élève  à 
deux  dixièmes  d'un  pour  cent  d'alcool  en  volume.  Un  degré  su- 
périeur d'exactitude,  non-seulement  n'est  pas  exigé,  mais  encore  je 
pense  qu'il  sera  difficilement  atteint  dans  des  recherches  ultérieures. 

J'accorde  volontiers  à  M.  Mendelejeff  la  satisfaction  d'avoir 
obtenu  des  résultats  plus  rapprochés  de  ceux  de  Gilpin  que  ceux 
de  Gay-Lussac  et  les  nôtres  (p.  274);  mais  je  lui  conteste  le 
droit  de  comparer,  ainsi  qu'il  le  fait  à  l'endroit  cité,  ses  nombres 
avec  ceux  de  Gilpin,  de  Drinkwater  et  de  Gay-Lussac  dans  la 
supposition  que  l'alcool  normal  de  Gilpin  contenait,  non  89,2 
pour  cent,  comme  l'avait  calculé  Tralles,  mais  89,06  pour  cent 
en  poids  d'alcool  absolu ,  et  que  l'alcool  de  Gay-Lussac  renfer- 
mait 0,11,  celui  de  Drinkwater  0,047  pour  cent  en  poids  d'eau, 
et  n'étaient  donc  pas  anhydres  comme  nous  l'avons  admis  précé- 
demment. 

Une  preuve  tout  à  fait  concluante  eu  faveur  de  l'opinion  que 
je  soutiens,  savoir,  que  la  poursuite  d'une  exactitude  extrême 
dans  la  détermination  des  densités  des  mélanges  d'alcool  et  d'eau 
ne  conduit  à  aucun  résultat,  est  fournie  par  M.  Mendelejeff  lui- 
même  ,  à  la  dernière  page  de  son  Mémoire ,  où ,  après  avoir  donné 
un  tableau  de  la  densité  des  mélanges  de  5  en  5  pour  cent  à 
O'',  10^,  20°  et  30°  C,  il  ajoute:  „A  l'aide  de  ces  chiffres, 
déduits  directement  de  l'expérience ,  on  a  calculé  par  interpolation 
le  tableau  suivant."  Or,  que  voit-on  en  comparant  ces  deux 
tableaux?  Que  les  différences  entre  les  chiffres  trouvés  et  les 
chiffres  calculés  dépassent  plus  d'une  fois  0,0001  et  même  0,0002 , 
comme  pour  le  mélange  de  40  pour  cent  en  poids  à  20°  C,  où 
l'on  a  trouvé  0^93511   et  calculé  0,93536,  différence  de  plus  de 


ET    DES    MÉLAiXGES    u'aLCOOL    ET    d'eAU.  115 

2 

—  pour  cent  en  volume.  Une  fois  même,  la  différence  s'élève  à 

plus  de  0,0003,  savoir  pour  le  mélange  de  30  pour  cent  àO'^C., 

où  Texpérieuce   a  donné  0,96540  et  le  calcul  0,96508,  résultats 

3 
dont   la   différence   équivaut  presque   à  —  pour  cent  en  volume. 

Quant  à  la  grande  différence  qui  correspond  au  mélange  de  80 
pour  cent  à  10^  C,  savoir  0,82515  à  0,85210,  elle  doit  être 
attribuée  à  une  faute  d'impression,  qui  se  rencontre  aussi  bien 
dans  le  mémoire  russe  de  M.  Mendelejeft'  (p.  115),  que  dans 
l'extrait  donné  par  les  Annales  de  Poggendorff  (p.  279). 

En  résumé,  de  tout  ce  qui  précède  je  crois  pouvoir  conclure 
que  les  recherches  de  M.  Mendelejeff,  bien  qu'ayant  une  grande 
valeur  intrinsèque  et  méritant  toute  notre  reconnaissance,  n'ont 
fait  que  confirmer  les  résultats  de  ses  devanciers,  et  qu'il  n'existe 
par  conséquent  aucun  motif  d'apporter  quelque  changement  aux 
'tables  que  j'ai  construites  dans  le  temps  pour  l'administration 
néerlandaise.  Au  sujet  de  l'emploi  de  ces  tables  à  l'étranger,  je 
répéterai  ici  ce  que  j'ai  dit  dans  l'avant-propos  de  l'édition  officielle 
(p.  15):  „En  France,  en  Belgique  et  en  Allemagne,  pour  la 
perception  de  l'accise,  la  force  des  liquides  alcooliques  est  cal- 
culée, de  même  que  dans  les  tables  suivantes,  en  centièmes  de 
volume  d'alcool  pur:  en  France  et  en  Belgique  d'après  l'alcoolo- 
mètre  de  Gay-Lussac  et  à  la  température  normale  de  15^0.,  en 
Allemagne   d'après   l'alcoolomètre  de  Tralles  et  à  la  température 

4  5 

normale  de    12"^-  R.    (15°-  C).  Bien  que  les  densités  d'où  l'on 

est  parti  dans  la  construction  de  ces  alcoolomètres  diffèrent  légè- 
rement, dans  quelques  cas,  de  celles  qui  ont  servi  de  base  au 
calcul  de  nos  tables,  la  plus  grande  différence  ne  s'élève  pour- 
tant, et  encore  ça  et  là  seulement,  qu'à  2  —  3  dixièmes  pour 
cent;  on  peut  donc,  au  moins  pour  les  calculs  ordinaires,  regar- 
der les  indications  de  ces  alcoolomètres  comme  égales  à  celles 
de  nos  tables,  les  unes  et  les  autres  à  la  température  de  15''C." 


8 


UNE  NOUVELLE  ESPÈCE  D'ARGOSTEMMA , 


CONTRIBUTION    A    LA 


FLORE  DE  L'INDE  NÉERLANDAISE 

PAR 

M   W.  F.  R.  SURINGAR. 

(Lu  à  la  séance  de  l'Académie  Royale  des  Sciences,  du  30  Janvier  1869.) 


ARGOSTEMMA  COENOSCIADICUM. 

Descr:  caulis  herbaceus  11  decim.  altus  basiradicans  suberectus 
teres  praesertim  superne  pilosus.  Folia  par  paria  7  —  8  opposita 
inter  se  aeqnalia,  longiuscule  (aà.  2  cm)  pedicellata  ovalo-lanceolata , 
longitudine  (4  —  6  cm)  latitudinem  bis  superante ,  infima  minora 
caduca,  suprema  approximaia  breviter  pedicellata  basi  rotundata, 
omnia  in  pagina  superiore  et  subtus  in  nervis  dense  hirsuia,  pilis 
erectis  plus  minus  incurvis  rigidiusculis  albis;  stipulae  interpetio- 
lares  e  basi  dilatata  cum  pedicellis  cohaerente  laie  ovatae,  saepius 
acutiusculae  s.  breviter  acuminatae  latitudiue  longitudinem  subae- 
quante  glabrae  cilialae.  Umbella  terminalis  sessilis  definita  com- 
posita  mulliflora  foliis  (hoc  loco  minoribus)  et  stipulis  (hoc  loco 
majoribus)  involucrata  4:-radiata,  radiis  2^  cm  longis  umbellidis 
itidem  definitis  4 — 8  floris ,  terminali  majore,  involucellorum  foliolis 
parvis  (2  mm.)  late  ovato-acuminatis  v.  acutis,  pedunculis  3 — 5 
mm.  longis.  Flores  pentameri.  Gklw  cum  pendunculis  dense  lanaio- 
pilosuSy  pilis  longis  cripulis  patentissimis ,  lobis  parvis  late  ovafis 
acutis  vel  acutiusculis.  Corolla  rotato-infiindibuliformis  qiiinquefida 
alba,  laciniis  ovato-lanceolalis  aculiuscuHs  extus  sparse  pilosis. 
Stamina  imo  fundo  corollae  inserta,  filamentis  brevibus,  antheris 
in  conum  concretis  rostratis  basi  rimis  longitudinalibus  introrsum 
dehiscentibus.  Discus  planus.  Stylus  filiformis  tubo  antherarum 
inclusus,  stigmate  vix  exserto  capitato.  Ovarium  inferum  2-locu- 
lare  placentis  reniformibus  carnosis  septi  superiori  parti  affixis  multi- 


W.    F.    R.    SURINGAR.    UNE    NOUVELLE     ESPECE    ETC.  117 

ovulatis;  ovulis  hemitropis.  (Fructus  ante  maturitatem  deciderunt), 
Floruit  in  Horto  Lugduno-Batavo  ubi  sponte  provenerat  e  terra 
cum  aliis  plantis  ex  horto  Bogoriensi  insuiae  Javae  allata. 


L'espèce  qui  vient  d'être  décrite  appartient  à  un  genre  peu 
nombreux  mais  remarquable  de  la  famille  des  Cinchonacées ,  com- 
posé de  petites  plantes  herbacées ,  et  dont  les  feuilles  opposées 
montrent  dans  certaines  espèces  la  même  particularité  qui  est 
propre  aux  Mélastomacées ,  savoir  l'inégalité  de  grandeur  des  feuil- 
les de  la  même  paire,  tandis  que  les  fleurs  largement  ouvertes 
et  les  anthères  conniventes  en  cône  et  parfois  soudées  entre  elles 
rappellent  le  genre  Solanum.  L'inflorescence,  qui  constitue  en 
général  une  cyme,  s'allonge  parfois  sous  forme  d'épi,  mais,  le 
plus  ordinairement ,  se  contracte  en  forme  d'ombelle  ou  de  corymbe. 
Dans  notre  espèce  on  trouve  une  ombelle  composée,  dont  l'om- 
bellule  centrale  se  développe  avant  les  autres,  de  même  que, 
dans  chaque  ombellule  considérée  à  part,  c'est  la  fleur  centrale 
ou  terminale  qui  s'ouvre  la  première;  l'inflorescence  est  donc  une 
ombelle  définie  composée,  caractère  auquel  est  emprunté  le  nom 
spécifique  coenosciadicum. 

Lorsque  Wallich  établit,  en  1824,  le  genre  Argostemma,  il  en 
décrivit  quatre  espèces,  auxquelles  Blume  ne  tarda  pas  à  en 
ajouter  quatre  autres,  originaires  de  Java.  En  1838,  Bennet  fit 
une  nouvelle  étude  du  genre:  21  espèces  furent  énumérées,  dont 
une  de  la  côte  occidentale  de  l'Afrique  tropicale,  et  toutes  les 
autres  de  l'Inde.  Parmi  celles-ci,  le  nombre  des  espèces  javanai- 
ses s'était  accru  d'une  unité;  cinq  autres  espèces  avaient  été 
découvertes,  également  par  Horsfield,  à  Sumatra;  une,  par  Al. 
Brovs^n,  à  Bornéo.  Dans  la  Flora  van  NeerL  Indie  de  M.  Miquel 
se  trouvent  encore  décrites  trois  espèces  nouvelles,  toutes  de 
Sumatra,  et  dont  deux  recueillies  par  Junghuhn,  une  par  Kort- 
hals;  en  outre,  ce  dernier  explorateur  avait  déjà  décrit  lui-même , 
antérieurement,  une  autre  espèce  qu'il  avait  observée  dans  le 
même  pays.  Nos  possessions  des  Indes  orientales  ont  donc  fourni 
la  majorité  des  espèces:  Sumatra  seule  en  compte  14,  d'après 
l'ouvrage   de   M.   Miquel,   cité   ci-dessus.   Elles  croissent  pour  la 


118       W.    F.    R.    SURINGAR.    UNE    NOUVELLE     ESPECE    d'aRGOSïEMMâ 

plupart,  ainsi  que  Horsfield  l'a  fait  remarquer,  dans  les  forêts 
des  montagnes,  à  une  altitude  de  5  à  7  mille  pieds  au-dessus 
du  niveau  de  la  mer. 

Parmi  les  espèces  déjà  décrites,  VA.  coenosciadicum  doit  venir 
se  placer  auprès  de  celle  qui  a  été  recueillie  à  Java  par  Blume, 
Horsfield  et  Keinwardt,  et  que  le  premier  de  ces  savants  a  fait 
connaître  sous  le  nom  de  A.  montanum  ^).  Il  s'en  distingue  avant 
tout  par  l'ombelle,  qui  est  composée  et  riche  en  fleurs  (non  simple , 
à  4  —  6  fleurs) ,  et  par  le  défaut  de  développement  des  articles 
supérieurs  de  la  tige,  ce  qui  a  pour  résultat  que  les  feuilles  su- 
périeures sont  très  rapprochées  et  que  l'inflorescence  (sessile) 
succède  immédiatement  aux  feuilles.  Ensuite,  les  feuilles  sont  en 
général  plus  grandes,  plus  larges  relativement  à  leur  longueur, 
plus  ovées  et,  surtout  les  supérieures,  arrondies  à  la  base.  Les 
stipules  sont  dans  l'A.  montanum  bl.  plus  oblongues  et  plus  ob- 
tuses; dans  VA.  coenosciadicum  plus  larges,  parfois  aussi  larges 
que  longues,  et,  près  des  feuilles  médianes,  presque  aiguës  ou 
acuminées.  Dans  cette  dernière  espèce  les  fleurs  sont  un  peu  plus 
petites ,  les  lobes  du  calice  relativement  plus  larges ,  presque  deux 
fois  plus  courts;  en  outre,  le  bec  des  anthères,  qui  dans  VA. 
montanum  bl.  forme  environ  la  moitié  de  la  longueur  totale  de 
l'anthère,  est  ici  habituellement  un  peu  plus  court,  égal  à  ^  de 
l'anthère.  Sous  certains  rapports,  il  y  a  donc  plus  d'analogie 
avec  VA.  pauciflorum  bl.,  qui  doit  en  effet  être  regardé  comme 
s'en  rapprochant  le  plus,  bien  que  son  inflorescence  très  pauvre 
(1 — 3  fleurs)  et  ses  feuilles  membraneuses  et  transparentes  lui 
donnent  un  aspect  tout  difterent. 

En  ce  qui  concerne  les  poils,  les  feuilles  de  VA.  montanum 'rl. 
ont  été  décrites  (Bennet,  dans  Horsfield  PI.  jav.  rar.,  p.  92, 
tab.  22)  comme  à  poils  écartés,  et  la  figure  n'en  montre  même 
pas  du  tout  sur  les  feuilles  ;  tandis  que  notre  plante  se  fait 
remarquer  au  premier  coup  d'œil  par  ses  poils  serrés  et  dressés. 
Toutefois,  j'ai   reconnu  que  les  différents  échantillons  à' A.  mon- 

•  )  UA.  horagineum  bl.  se  distingue  immédiatement  par  l'inflorescence ,  qui 
n'est  pas  en  cyme  ombeWforme  mais  en  cyme  corymbijorme ,  ensuite  par  la  forme 
et  la  grandeur  des  teuilles,  etc. 


CONTRIBUTION    A    LA    FLORE     DE    l'iNDE    NEERLANDAISE.  119 

tanum  s'éloignent  assez  notablement  les  uns  des  autres  quant  à 
la  proximité  plus  ou  moins  grande  des  poils,  et  que  plusieurs  se 
rapprochent  même  beaucoup,  sous  ce  rapport,  de  VA.  coenoscia- 
diciini]  en  outre,  dans  la  figure  citée  de  VA.  montmium ,  les  pé- 
doncules et  le  calice  sont  représentés,  il  est  vrai,  avec  des  poils 
couchés;  mais,  en  réalité,  les  échantillons  que  j'ai  consultés  étaient 
pourvus,  de  même  que  V A.  coenosciadicum ,  de  poils  longs ,  dressés , 
un  peu  crépus.  Etudiés  isolément,  au  microscope,  les  poils  n'offrent 
aussi  aucune  différence  de  l'une  à  l'autre  des  deux  espèces.  Dans 
l'A.  pauciflorum  au  contraire  (où  la  feuille  est  en  outre  plus  mem- 
braneuse et  plus  transparente)  les  poils  se  distinguent  par  un  plus 
grand  diamètre,  tandis  que  dans  VA.  Teysmanniamum  miq.,  par 
exemple,  ils  ne  sont  pas  seulement  plus  courts  et  plus  minces,  mais 
aussi,  au  lieu  d'être  élargis  à  la  base,  un  peu  rétrécis  en  ce  point. 

Explication   de   la   Planche   IV. 

1.  Port  de  la  plante,  grandeur  naturelle. 

2.  Une  partie  de  la  tige,  avec  une  couple  de  feuilles  et  de  sti- 
pules :  les  stipules,  dirigées  en  avant,  ont,  à  dessein ,  été  redres- 
sées légèrement,  afin  d'en  faire  voir  la  forme. 

3.  Poils  de  la  feuille,  grossis  20  fois. 

4.  Fleur  vue  de  côté,  avec  bractéoles. 

5.  //         //     en  dessus. 

6.  Calice  vu  en  dessus,  avec  le  disque. 

7.  Corolle  coupée  verticalement,  avec  l'insertion  des  étamines. 

8.  Coupe  longitudinale  du  calice  et  de  l'ovaire. 

9.  //  //  trois  fois  grossie,  perpendiculaire  à  la  cloison. 

10.  //  //  parallèle  à  la  cloison. 

11.  Coupe  transversale  de  l'ovaire. 

12.  Colonne  des  étamines;  en  haut,  le  stigmate  fait  saillie. 

13.  Etamine  vue  en  dedans. 

14.  '/  //     de  côté. 

15.  Deux  étamines  unies,  vues  en  dedans. 

16.  Ovules  grossis  70  fois. 

Fig.  1,  2,  4 — 8  grandeur  naturelle.  Fig.  9 — 15  grossies  trois  fois. 


DEUX  NOUVEAUX  GENRES 


DE 


CRUSTACÉS  YIVANT  EN  PARASITES  SUR  DES  POISSONS, 

EPICHTHYS     et     ICHTHYOXENOS   


PAR 


J.  A.  HERKLOTS. 


Un  des  groupes  les  plus  remarquables  des  Crustacés  est  sans 
contredit  celui  que  forment  les  genres  parasites  des  Cymothoadiens. 
Leur  histoire  biologique  a  été  peu  ou  point  étudiée^  et,  quant 
à  leur  manière  de  vivre,  nos  connaissances  se  réduisent  presque 
à  savoir  qu'ils  habitent  sur  des  poissons,  fixés  à  la  peau  ou  aux 
branchies ,  ou ,  très  rarement ,  dans  la  cavité  buccale. 

Cette  existence  parasite,  uniquement  et  exclusivement  sur  des 
poissons,  jointe  à  une  analogie  singulière  d'aspect  et  d'organisa- 
tion extérieure ,  fait  de  ces  animaux  un  groupe  des  plus  naturels. 

Les  caractères  tirés  des  dimensions  du  thorax  et  de  l'abdomen, 
de  la  forme  du  front ,  de  la  conformation  des  pattes  et  du  rapport 
entre  la  longueur  et  la  largeur  du  dernier  segment,  ont  suffi 
jusqu'ici  pour  réunir  les  formes  relativement  peu  nombreuses  en 
genres  nettement  limités. 

La  distribution  de  Leach,  —  qui  le  premier  assigna  aux  Lso- 
podes,  rapportés  avant  lui  aux  Insectes,  leur  place  parmi  les 
Crustacés,  —  fondée  sur  ces  caractères ,  a  passé  dans  tous  les  systè- 
mes postérieurs ,  le  plus  souvent  modifiée  seulement  par  la  réunion  ou 
la   séparation   de   certains   genres;   M.   Milne  Edwards  et,  après 


J.    A.    HERKLOTS.    DEUX   xNOUVEAUX   GENRES   DE  CRUSTACES  ETC.      121 

lui,  M.  Bleeker  furent  les  seuls  qui  ajoutèrent  chacun  un  nou- 
veau genre  à  ceux  qui  étaient  déjà  connus. 

Là  où  se  rencontre  une  pareille  stabilité  de  la  classification, 
on  doit  l'attribuer  à  une  de  ces  deux  causes:  ou  bien  la  majorité 
des  formes  existantes  est  connue,  ou  bien  il  y  a  arrêt  dans  les 
recherches.  Dans  le  cas  actuel,  je  pense  que  la  dernière  cause 
est  la  véritable. 

En  effet,  après  M.  Milne  Edwards,  on  n'a  décrit  qu'un  petit 
nombre  d'espèces  ;  une  série  de  quinze  espèces  nouvelles ,  telle  que 
celle  dont  nous  devons  la  connaissance  à  notre  savant  compatriote, 
M.  Bleeker,  est  un  fait  absolument  unique. 

Mais ,  ce  qui  est  encore  plus  significatif  que  le  nombre  presque 
stationnaire  des  espèces,  c'est  le  résultat  auquel  on  arrive  quand 
on  étudie  les  échantillons  non  déterminés  qui  se  trouvent  déjà 
dans  les  collections.  A  chaque  pas ,  on  rencontre  des  formes  qui , 
tout  en  présentant  la  plupart  des  caractères  d'un  certain  genre, 
en  diffèrent  complètement  sous  d'autres  rapports. 

Ce  résultat  indique  en  outre  la  nécessité  de  modifier  les  dia- 
gnoses  des  genres  existants  ;  mais ,  pour  ce  travail ,  les  matériaux 
recueillis,  du  moins  ceux  qui  ont  été  rendus  accessibles,  ne  suf- 
fisent pas  encore. 

Comme  preuve  de  ce  qui  vient  d'être  dit,  et  peut-être  aussi 
comme  pouvant  avoir  quelque  utilité  pour  le  changement  reconnu 
nécessaire  dans  la  classification,  je  me  propose  de  donner  ici  la 
description  d'une  couple  de  Cymothoadiens ,  faisant  partie  de  la 
collection  du  Musée  de  l'Etat,  à  Leyde. 

Le  tableau  que  donne  M.  Milne  Edwards  de  la  distribution  de 
ses  Isopodes  Cymothoadiens  parasites  —  qu'il  ne  faut  pas  con- 
fondre avec  les  Isopodes  parasites  de  M.  Harting  —  sépare  d'abord 
les  formes  où  les  segments  abdominaux  sont  fixés  ou  soudés  entre 
eux  et  par  conséquent  immobiles.  Son  genre  Ourozeukles ,  qui  ne 
comprend  que  V  Ourozeukies  Owenii,  est  isolé  par  ce  caractère. 

Tous  les  autres  genres  ont  les  segments  de  l'abdomen  parfaite- 
ment distincts  et  mobiles.  A  cette  catégorie  appartient  aussi  un 
de  nos  échantillons. 


122   J.  A.  HERKLOTS.  DEUX  NOUVEAUX  GENRES  DE  CRUSTACES 

Il  a,  de  pins,  la  base  de  l'abdomen  presque  aussi  large  que 
l'extrémité  postérieure  du  thorax,  et  est  dépourvu  de  prolonge- 
ments spiniformes  sous  les  angles  latéraux  des  anneaux  de  l'ab- 
domen. Le  front  est  reployé  en  dessous  et  forme  un  écusson  entre 
la  base  des  antennes.  L'abdomen  est  assez  grand  et  ne  se  rétrécit 
que  peu  vers  l'extrémité  postérieure. 

D'après  ces  caractères  nous  aurions  affaire  à  une  espèce  du 
genre  Anilocra  de  Leach,  et,  comme  les  appendices  abdomi- 
naux postérieurs  sont  à  peu  près  d'égale  grandeur ,  elle  appartien- 
drait au  genre  Canolira  du  même  auteur,  qui  toutefois  n'est  pas 
adopté  comme  tel  par  M.  Milne  Edwards,  mais  seulement 
comme  section. 

Mais  la  comparaison  des  autres  caractères  génériques  montre 
tant  de  différences,  qu'il  n'est  pas  possible  de  réunir  cette  espèce 
avec  les  autres  Anilocres  sous  une  seule  et  même  diagnose  géné- 
rique. La  description  détaillée  de  l'échantillon  mettra  ces  diffé- 
rences en  pleine  lumière  et  justifiera  l'établissement  d'un  nou- 
veau genre,  bien  qu'il  soit  impossible,  l'espèce  étant  unique,  de 
séparer  les  caractères  génériques  et  spécifiques,  et,  par  consé- 
quent, de  formuler  une  diagnose  générique. 

Epichthys    giganteus. 

Le  corps  de  ce  plus  grand  de  tous  les  Cymothoadiens  connus 
est  très  allongé,  à  bords  latéraux  très  légèrement  arqués;  la 
plus  grande  largeur  tombe  sur  le  cinquième  anneau  thoracique 
et  n'atteint  pas  même  le  tiers  de  la  longueur,  tandis  que  cette 
largeur  ne  diffère  que  peu,  eu  égard  à  la  longueur,  de  celle  du 
premier  anneau  thoracique  et  de  celle  de  l'abdomen  mesuré  dans 
sa  partie  la  plus  étroite.  Par  contre,  le  corps  est  fortement  con- 
vexe, car  la  plus  grande  hauteur,  qui  tombe  également  sur  le 
cinquième  anneau  thoracique,  est  égale  à  un  peu  plus  de  la 
moitié  de  la  largeur,  sur  une  longueur  quatre  fois  et  demie  plus 
grande,  non  compris  le  dernier  segment  abdominal. 

Le  tête  est  large,  mesurant  à   sa   base   presque   la  moitié   de 


VIVAiM     EI\    PARASITES    SUR    DES    POISSONS    ETC.  123 

la  largeur  du  premier  segment,  sur  une  longueur  égale  aux 
trois  quarts  de  sa  largeur;  elle  est  arrondie  aux  côtés,  réguliè- 
rement convexe,  avec  une  éminence  transversale  sur  le  vertex 
et  des  yeux  très  grands,  ronds,  à  cornée  lisse  chez  les  individus 
adultes.  En  avant  des  yeux  le  bord  céphalique  s'infléchit  en  dedans, 
au-dessus  des  larges  antennes,  puis,  se  continuant  dans  le 
bord  frontal,  il  se  dirige  de  nouveau  en  dehors.  Le  front,  vu 
en  dessus,  se  termine  par  un  bord  ou  une  crête  bien  distincte 
et  légèrement  échancrée  au  milieu;  sa  face  plane  montre  une 
légère  impression;  en  dessous  il  se  prolonge,  entre  les  anten- 
nes, en  une  languette  triangulaire;  c'est  l'écusson  triangulaire 
ordinaire,  qui  a  ici  une  largeur  égale  au  tiers  de  celle  de  la 
base  de  la  tête  et  une  longueur  égale  aux  deux  tiers  de  sa  lar- 
geur, et  qui  s'étend  jusque  sur  le  bord  antérieur  du  premier 
article  des  antennes  de  la  seconde  paire. 

Les  antennes  de  la  première  paire  ont  leur  base  cachée 
sous  la  partie  réfléchie  du  front.  Elles  sont  courtes  et  n'atteig- 
nent pas,  le  long  des  côtés,  le  bord  postérieur  du  premier 
segment  thoracique.  Elles  se  composent  de  huit  articles ,  dont  le 
second  et  le  troisième  sont  élargis  en  dedans,  c'est  à-dire  en 
avant,  et  arrondis  au  bord  antéro-interne.  Ces  deux  articles, 
joints  au  premier  qui,  bien  que  non  élargi,  a  la  même  épaisseur 
que  les  deux  suivants,  forment  en  quelque  sorte  une  tige,  sur 
laquelle  sont  implantés  les  cinq  autres  articles,  plus  minces,  plus 
arrondis  et  de  grandeur  régulièrement  décroissante. 

Les  antennes  de  la  seconde  paire  sont  beaucoup  plus  longues 
et  atteignent,  étendues  le  long  des  côtés  du  thorax,  le  milieu 
du  deuxième  segment  thoracique.  Elles  se  composent  de  dix  arti- 
cles, dont  les  quatre  premiers  sont  très  élargis,  et  dont  les  autres 
deviennent  successivement  plus  étroits  et  décroissent  régulièrement 
en  longueur. 

Les  parties  de  la  bouche  sont,  pour  autant  que  j'ai  pu  les 
étudier,  conformes  à  celles  du  genre  Cymothoa;  extérieurement, 
les  pattes-mâchoires  se  présentent  sous  forme  de  lames  rectangu- 
laires recouvrant  la  cavité  buccale  et  s' appliquant  contre  la  lèvre 


124   J.  A.  HERKLOTS.  DEUX  NOUVEAUX  GENRES  DE  CRUSTACES 

supérieure,  qui  est  grande,  saillante  et  semi -circulaire ,  tandis 
que  les  côtés  sont  occupés  par  les  grands  palpes  tri-articulés  des 
mandibules. 

Le  premier  anneau  du  thorax  est  aussi  long  que  les  deux 
autres  pris  ensemble;  il  a  le  bord  antérieur  un  peu  échancré  au 
milieu,  et  des  deux  côtés,  le  long  de  la  tête,  il  se  prolonge  en 
lobes  qui  s'avancent  jusque  vers  le  milieu  des  yeux;  ses  bords 
latéraux  se  dirigent,  avec  une  courbure  rapide  à  la  hauteur  des 
lobes  et  ensuite  plus  douce,  vers  le  bord  postérieur  fortement 
courbé  et  un  peu  échancré  au  milieu,  avec  lequel  ils  forment  des 
angles  aigus  à  sommet  arrondi.  Le  deuxième  anneau  thoracique 
est  le  plus  court;  les  suivants  sont  successivement  plus  grands 
jusqu'au  sixième,  qui  est  le  plus  grand  de  tous  et  mesure  plus 
du  double  de  la  longueur  du  septième  ou  dernier. 

Les  boucliers  dorsaux  des  deux  premiers  segments  sont  coupés 
postérieurement  à  angle  droit,  ceux  des  trois  suivants  sont  suc- 
cessivement plus  arrondis,  à  bord  latéral  s'écartant  en  arrière 
et  en  dehors;  le  sixième  a  le  bord  latéral  plus  droit  et  l'angle 
postérieur  droit  et  arrondi,  tandis  que  dans  le  septième  une  in- 
cision le  partage  en  deux  parties,  dont  celle  de  derrière  forme 
avec  le  bord  postérieur  recourbé  en  arrière,  un  angle  aigu,  en 
donnant  ainsi  naissance  à  un  prolongement  pointu. 

Le  bord  postérieur  du  second  et  du  troisième  segment  est  aussi 
légèrement  échancré  sur  le  dos;  le  quatrième  jusqu'au  sixième 
segment  ont  le  bord  postérieur  droit;  dans  le  dernier  segment, 
ce  bord,  arrivé  aux  côtés,  se  recourbe  en  arrière  sous  forme 
de  pointe. 

Les  épimères  sont  grands:  celui  du  second  segment  s'étend 
en  arrière  plus  loin  que  le  bord  latéral  de  ce  segment;  ceux  des 
troisième,  quatrième  et  cinquième  segments  se  prolongent  de 
moins  eu  moins  loin,  de  sorte  que  le  bord  latéral  du  cinquième 
segment  reste  à  moitié  découvert. 

Les  épimères  de  ces  segments  s'avancent  toutefois  chacun 
d'autant  plus  en  avant,  que  celui  qui  précède  se  prolonge  moins 
en  arrière,  de  sorte  qu'ils  forment  à  eux  seuls  le  bord  du  thorax. 


VIVANT    EN    PARASITES    SUR    DES    POISSONS    ETC.  125 

La  forme  des  deux  premiers  est  en  languette  allongée,  à  bord 
postérieur  large  et  obtus;  le  troisième  devient  déjà  plus  pointu  à 
l'extrémité,  et  cette  forme  s'accuse  de  plus  en  plus  dans  les 
épimères  suivants. 

L'abdomen  est  relativement  court  et  n'atteint  pas  la  longueur 
des  sixième  et  septième  segments  tlioraciques  réunis.  Il  se  montre 
comme  partagé  en  quatre  régions  ;  le  milieu  s'élève  en  une  carène 
large,  obtuse  et  arrondie,  sur  laquelle  le  bord  postérieur  des 
cinq  premiers  segments  est  légèrement  échancré;  de  chaque  côté, 
le  bord  postérieur  se  dirige  un  peu  obliquement  en  arrière ,  puis 
il .  s'infléchit  pour  passer  dans  les  pièces  latérales  descendantes , 
et  cette  inflexion  forme  de  nouveau  une  espèce  de  carène. 

Le  premier  anneau ,  caché  presque  entièrement  sous  le  thorax , 
est  régulièrement  arrondi  au  bord  postérieur  sur  toute  la  face 
dorsale,  et  ne  s'étend,  sur  les  côtés,  que  peu  en  dehors  et  en 
dessous.  Les  segments  suivants  ont  des  pièces  latérales  de  plus 
en  plus  longues,  sauf  le  cinquième,  qui  est  coupé  presque  en 
ligne  droite  sur  la  face  dorsale  et  ne  descend  que  peu  sur  les 
côtés.  Le  dernier  segment  consiste  en  un  anneau  bien  distinct ,  qui 
s'élargit  aux  côtés  pour  l'insertion  des  appendices  latéraux,  et 
auquel  est  attaché  le  pygidium,  dont  un  sillon  profond  le  sépare. 
La  lamelle  est  ovoïde  pointue,  sa  largeur  dépasse  le  tiers 
de  sa  longueur,  et  son  milieu  est  occupé  par  une  carène  qui, 
large  à  l'origine,  s'eiïace  avant  d'avoir  atteint  l'extrémité.  Elle 
se  compose  d'une  partie  antérieure^  dont  l'aspect  ressemble  tout 
à  fait  à  celui  des  téguments  du  corps ,  et  qui  se  termine  en  arrière , 
sur  la  ligne  médiane,  par  une  pointe  obtuse;  et  d'une  partie 
postérieure,  qui  est  plus  membraneuse  et  a  de  l'analogie  avec 
les  fausses  pattes. 

Les  pattes  sont  toutes  ancreuses  et  toutes  de  même  forme.  Le 
fémur  est  comprimé  latéralement ,  et  au  côté  externe  il  est  pourvu 
d'un  bord  relevé  ou  crête,  un  peu  courbé  d'arrière  en  avant,  le 
long  duquel  s'étend,  au  côté  postérieur,  un  sillon  plus  ou  moins 
profond,  dans  lequel  se  retire  le  tarse.  La  hauteur  de  cette  crête , 
ainsi   que   la   largeur  et  la  profondeur  du  sillon,  augmentent  de 


126   J.  A.  HERKLOTS,  DEUX  NOUVEAUX  GENRES  DE  CRUSTACES 

la  première  à  la  dernière  paire  de  pattes,  de  sorte  que  déjà 
les  cuisses  de  la  quatrième  paire  possèdent  un  troisième  côté 
et  sont  triquètres.  Le  bord  antérieur  relevé  du  sillon  forme 
dans  les  trois  dernières  paires  de  pattes  une  saillie,  petite 
dans  les  cinquième  et  sixième  paires,  grande  et  inclinée  en 
avant  dans  la  dernière. 

Les  pattes  augmentent  successivement  de  longueur,  mais  la 
dernière  paire  dépasse  les  autres  de  plus  d'un  tiers;  cet  accrois- 
sement porte  presque  entièrement  sur  le  tibia  et  le  tarse ,  la  lon- 
gueur du  fémur  étant  presque  la  même  que  dans  les  paires  pré- 
cédentes. 

Des  pattes  abdominales;  celles  des  cinq  premières  paires  sont 
grandes ,  ovales ,  celles  de  la  cinquième  paire  froncées  sur  la  face 
supérieure.  Les  fausses  pattes  de  la  sixième  paire  sont  très  gran- 
des, implantées  au  bord  antérieur  du  segment,  et  terminées  en 
deux  appendices  longs  et  étroits ,  dont  l'extérieur  est  falciforme , 
tandis  que  l'intérieur,  qui  est  le  plus  long,  a  une  forme  ovale 
très  allongée.  Ils  dépassent,  bien  que  de  très  peu,  le  bord  pos- 
térieur du  dernier  article. 

Les  deux  individus  qui  se  trouvent  au  Musée  de  Leyde  sont 
du  sexe  femelle.  Leur  poche  incubatrice  est  formée  par  de  très 
grands  appendices  ovales  des  cinq  premières  pattes  thoraciques: 
la  lame  la  plus  externe,  qui  naît  en  avant  des  pattes  de  la 
sixième  paire,  s'étend  en  largeur  jusqu'à  la  moitié  des  pattes 
repliées,  du  côté  opposé,  en  longueur  jusqu'en  avant  des  pattes 
de  la  cinquième  paire  et  jusqu'au  bord  antérieur  des  appendices 
abdominaux. 

La  poche  incubatrice  était  occupée  par  de  jeunes  individus, 
chez  lesquels  on  observe,  de  même  que  dans  d'autres  Cymothoa- 
diens,  une  forme  larvaire;  la  ressemblance  avec  les  Anilocres 
est  ici  moins  frappante,  à  cause  de  la  plus  grande  largeur  du 
thorax.  Nos  connaissances  relativement  aux  larves  observées  sont 
si  restreintes  et  si  imparfaites,  que  je  ne  suis  pas  à  même  de 
faire  ressortir,  par  une  description  comparative,  les  caractères 
précis   qui   distinguent    les  jeunes   de    V  Epiclithys   giganteus.    Je 


VIVANT    EN    PARASITES    SUR    UES    POISSONS    ETC.  127 

dois  donc  me  borner,  pour  le  moment,  à  une  courte  descrip- 
tion isolée. 

La  tête  est  très  grande,  avec  des  yeux  agglomérés,  réunis 
en  taches  oculaires  ovales;  les  antennes  sont  plus  longues  que 
chez  les  individus  adultes  et  composées  d'articles  non  élargis. 
Le  thorax  est  très  large  et  compte  six  anneaux,  dont  le  deu- 
xième est  le  plus  large  et  dont  les  suivants  diminuent  peu  a 
peu  en  largeur,  de  sorte  que  l'ensemble  du  thorax  et  de  la  tète 
a  une  forme  ovale  élargie. 

L'abdomen  compte  six  articles,  de  longueur  à  peu  près  égale; 
en  largeur  il  concorde  avec  le  dernier  segment  thoracique,  et  il 
conserve  cette  dimension  transversale  sur  toute  sa  longueur.  Le 
dernier  article  est  onguiforme,  de  grandeur  moyenne,  et  a  des 
appendices  étroits,  plus  de  deux  fois  aussi  longs  que  l'article 
lui-même.  Les  pattes  sont  très  longues,  minces,  nulle  part  élar- 
gies ou  épaissies,  pourvues  d'ongles  longs  et  peu  courbés,  et 
ne  montrant  pas  encore  les  caractères  de  pattes  ancreuses.  La 
tête  et  les  bords  latéraux  du  thorax  et  de  l'abdomen  sont  colorés 
en  violet  foncé,  et  la  même  couleur,  en  teinte  claire,  recouvre 
le  corps  entier. 

La  patrie  de  cette  espèce  ne  m'est  pas  connue  avec  certitude, 
pas  plus  que  l'espèce  de  poisson  sur  laquelle  elle  vit;  il  est 
probable  toutefois  qu'elle  habite  l'archipel  des  Indes. 

Ses  dimensions  sont  les  suivantes: 

longueur   totale 95''' 

„         de  la  tête 9'" 


„         du  thorax 49 

„         de  l'abdomen 36 

„         du  dernier  segment  abdominal  ...  24 

largeur  au  cinquième  anneau  thoracique  ...  29 

„         „    sixième  anneau  abdominal   ....  19' 


128       J.    A.    HERKLOTS.    DEUX    NOUVEAUX    GENRES    DE    CRUSTACES 

Si  VEpichlhys ,  qui  vient  d'être  décrit,  paraissait  au  premier 
abord,  par  beaucoup  de  ses  caractères,  appartenir  aux  Anilocres, 
l'autre  espèce  que  nous  avons  maintenant  à  considérer  se  rap- 
proche le  plus  du  genre  Ourozeukles  M.  Edw\ ,  le  seul  de  la  divi- 
sion à  segments  abdominaux  soudés. 

Ce  n'est  pas,  il  est  vrai,  dans  les  caractères  propres  à  ce 
genre  que  l'analogie  se  manifeste  principalement  ;  mais  tout  l'aspect 
extérieur  indique  clairement  une  affinité  plus  étroite  avec  ce 
groupe  générique  qu'avec  tous  les  autres,  et  la  description  mon- 
trera qu'on  peut  en  effet  saisir,  entre  les  deux  formes,  bien  des 
traits  de  famille. 

M.  Milne  Edwards  n'avait  pour  sa  description  que  des  indivi- 
dus femelles;  ayant  eu  à  ma  disposition  l'un  et  l'autre  sexe,  je 
pourrai  donner  une  caractéristique  plus  complète. 

Ichtliyoxenos    Jellinghausii. 

Chez  les  individus  mâles  le  corps  est  très  légèrement  convexe, 
ovale-allongé 5  la  largeur  est  assez  considérable,  relativement  à 
la  longueur,  vu  qu'elle  s'élève  à  un  peu  plus  de  la  moitié  de 
cette  dernière.  La  tête  est  petite,  triangulaire-élargie,  longue  des 
deux  tiers  de  sa  largeur;  le  front  s'étend  en  avant  et  recouvre 
les  premiers  articles  des  antennes;  il  est  un  peu  défléchi,  mais 
non  reployé. 

Les  antennes  sont  courtes  et  subulées  ;  la  paire  antérieure ,  qui 
est  un  peu  plus  courte  que  l'autre  et  atteint  à  peine  le  bord 
postérieur  des  yeux,  se  compose  de  huit  articles  cylindriques, 
courts  et  épais  ;  la  seconde  paire  est  plus  déliée ,  s'étend  à  environ 
un  tiers  du  bord  latéral  du  premier  anneau  thoracique  et  montre 
dix  articles.  Les  yeux  sont  très  visibles,  ovales,  granulés  et  situés , 
à  une  grande  distance  l'un  de  l'autre,  aux  côtés  de  la  tête. 

Le  thorax  est  ovale,  sa  plus  grande  largeur  est  égale  à  la 
distance  de  l'extrémité  antérieure  de  la  tète  à  son  bord  postérieur , 
mesurée  sur  la  ligne  médiane.  Sur  la  face  dorsale  le  premier 
anneau  thoracique   est   le  plus  long;  les  suivants  diminuent  suc- 


VIVANT    EN    PARASITES    SUR    DES    POISSONS    ETC.  129 

cessivement  de  longueur.  En  largeur ,  il  y  a  accroissement  du  pre- 
mier au  troisième  anneau,  de  sorte  que  les  anneaux  forment  un 
arc  continu  et  que  la  plus  grande  largeur  du  corps  correspond 
au  troisième;  au-delà,  les  anneaux  diminuent  un  peu  de  largeur, 
de  façon  que  le  dernier  anneau  tboracique  n'a  plus  qu'environ 
les  deux  tiers  du  troisième. 

Le  bord  antérieur  du  premier  anneau  présente  au  milieu  une 
échancrure  profonde,  dans  laquelle  est  logée  la  tête,  et  comme 
l'anneau  entoure  aussi  les  côtés  de  la  tête ,  jusqu'au  delà  du  bord 
postérieur  des  yeux,  il  est  plus  ou  moins  courbé  en  fer  àcbeval: 
le  bord  postérieur  forme  un  arc  de  cercle,  qui,  sur  la  ligne 
médiane,  se  prolonge  en  pointe  plus  ou  moins  distincte.  Le  deu- 
xième anneau  a  un  bord  postérieur  qui  n'est  que  peu  courbé  à 
la  surface  du  dos,  et  un  bord  latéral  qui  se  dirige  en  avant 
avec  une  faible  arqûre.  Dans  le  troisième,  le  bord  postérieur  est 
droit  ou  même  un  peu  infléchi  en  avant  au  milieu,  avec  des 
angles  latéraux  arrondis. 

Dans  les  anneaux  suivants  cette  inflexion  du  bord  postérieur 
se  prononce  davantage ,  de  sorte  que  le  sinus  sur  le  dos  devient  de 
plus  en  plus  grand  et  que  les  anneaux  s'élargissent  de  plus  en  plus 
sur  les  côtés;  Téchancrure  du  dernier  anneau  mesure  un  tiers  de 
la  distance  des  extrémités  de  cet  anneau,  et  elle  enveloppe  plus 
de  la  moitié  de  Tabdomen,  l'article  terminal  non  compris. 

Les  épimères  du  second  et  du  troisième  anneau  forment  de 
simples  bordures,  qui  sont  étroites  et  occupent  tout  le  côté  de 
l'anneau:  aux  anneaux  suivants,  ils  se  montrent  sous  forme  de 
tubercules,  dans  les  incisions  qui  séparent  les  segments,  au  bord 
antérieur  du  segment  auquel  ils  appartiennent. 

L'abdomen,  bien  que  se  détachant  distinctement,  n'est  pas 
beaucoup  plus  étroit  que  le  dernier  anneau  tboracique;  il  a  les 
bords  presque  parallèles  et  ne  se  rétrécit  pas  vers  l'extrémité. 
Son  premier  anneau  est  recouvert  sur  les  côtés  par  les  parties 
latérales,  rejetées  en  arrière,  du  dernier  anneau  tboracique;  les 
autres  anneaux  sont  tout  à  fait  libres.  Ils  sont  courts,  régulière- 
ment infléchis  en  arrière  sur  les  côtés,  et  à  sinus  dorsal  de  plus 

Archives  Néerlandaises,  T.  V.  9 


130       J.    A.    HERKLOTS.    DEUX    NOUVEAUX    GENRES    DE    CRUSTACES 

en  plus  effacé.  Sur  la  partie  médiane  de  la  face  dorsale  des 
segments  abdominaux  s'élève  une  carène  bien  distincte,  qui,  sur 
le  premier  article,  occupe  toute  la  largeur  entre  les  ailes  latérales 
du  dernier  segment  thoracique,  et,  sur  le  dernier  article,  se 
termine  en  une  espèce  de  tubercule.  Le  dernier  anneau  abdominal 
a  le  bouclier  dorsal  onguiforme  et  les  bords  libres  un  peu  rabat- 
tus, ce  qui  le  fait  paraître  cordiforme. 

A  la  face  inférieure  on  voit  les  pattes,  qui  sont  de  grandeur 
moyenne  et  toutes  pourvues  d'ongles  en  crochet;  le  premier  article 
du  tarse  est  plus  grand  et  plus  épais  que  les  autres,  mais  non 
élargi.  Repliées,  c'est-à-dire  amenées  dans  leur  position  naturelle, 
les  pattes  ne  laissent  voir  qu'une  très  petite  partie  des  anneaux 
thoraciques  ;  de  ceux-ci ,  le  troisième  et  le  quatrième  sont  les  plus 
longs,  et  le  dernier  possède  deux  appendices  en  forme  de  mame- 
lons, qui  sont  partagés  sur  ia  ligne  médiane  par  une  scissure 
distincte,  s'étendant  à  une  profondeur  égale  aux  deux  tiers  de 
la  longueur  de  l'organe. 

Les  appendices  foliacés  des  pattes  abdominales  sont  entièrement 
recouverts  par  les  deux  appendices  juxtaposés  du  premier  anneau  ; 
ils  sont  oblongs,  terminés  en  pointe  arrondie;  la  membrane  de 
l'avant-dernier  anneau  n'est  pas  froncée. 

Les  appendices  du  dernier  article  sont  de  même  longueur,  dé- 
passant un  peu  le  bouclier,  lancéolés-aigus. 

Les  individus  femelles  ont  presque  le  double  de  la  taille  des 
mâles.  La  largeur  du  corps  est  égale  aux  deux  tiers  de  sa  lon- 
gueur; il  a  une  forme  assez  régulièrement  ovoïde  et  est  plus 
convexe  sur  le  dos. 

La  tête ,  proportion  gardée ,  est  semblable  à  celle  du  cf  ;  les 
antennes  sont  plus  courtes,  les  antérieures  atteignent  la  moitié 
des  yeux,  les  postérieures  dépassent  les  yeux  très  légèrement; 
leurs  premiers  articles  sont  cachés  par  la  saillie  du  front. 

Les  parties  de  la  bouche  sont  situées  plus  en  avant,  mais 
du  reste  conformées  d'après  le  type  fondamental  des  Cymo- 
thoadiens. 


VIVANT    EN    PARASITES    SUR    DES    POISSONS    ETC.  131 

Les  anneaux  du  thorax  ont  sur  la  ligne  médiane  du  corps  les 
mêmes  rapports  de  longueur  que  chez  le  ^  ,  mais ,  quant  à  la 
forme,  elle  n'est  semblable  que  pour  le  dernier  anneau. 

Le  premier,  large  et  cernant  entre  ses  prolongements  tronqués 
la  tête  jusqu'au  bord  inférieur  des  yeux,  a  les  bords  latéraux 
droits,  et  le  bord  postérieur  presque  droit  ou  courbé  très  légère- 
ment en  arrière.  Le  bord  postérieur  du  second  anneau  est  droit; 
le  troisième  montre  une  faible  courbure  en  arrière,  et  les  sui- 
vants sont  de  plus  en  plus  courbés  en  ce  sens,  de  même  que 
chez  le  c? ,  niais  avec  un  développement  plus  prononcé  des  pièces 
latérales,  de  sorte  que  les  prolongements  latéraux  du  dernier 
segment  thoracique  ne  recouvrent  pas  seulement  le  premier  anneau 
abdominal,  mais  s'étendent  jusque  sur  le  troisième. 

Les  épimères  sont  tous  analogues  à  ceux  des  quatre  derniers 
segments  thoraciques  chez  le  d^  ;  ils  constituent  des  épaississements 
tuberculeux  au  bord  antérieur  de  leurs  segments  respectifs;  ceux 
du  deuxième  et  du  troisième  forment  des  prolongements,  qui  en- 
cadrent les  côtés  du  segment  précédent.  En  grandeur,  les  épimè- 
res décroissent  régulièrement. 

L'abdomen  est  aussi  large  à  sa  base  que  le  dernier  anneau 
thoracique  sans  les  épimères;  sa  longueur,  le  pygidium  non 
compris,  est  égale  à  la  distance  des  pièces  latérales  du  dernier 
segment  thoracique.  Les  anneaux  sont  courts,  de  longueur  crois- 
sante, de  sorte  que  l'avant-dernier  est  le  plus  long.  Leur  bord 
postérieur  est  régulièrement  courbé,  sauf  dans  l'avant-dernier 
anneau,  où  le  bord  est  droit,  les  pièces  latérales  seules  étant 
courbées  en  arrière  et  en  dehors.  La  carène,  sur  le  milieu  de  la 
face  dorsale  de  l'abdomen,  est  plus  large  et  moins  prononcée 
que  chez  le  mâle.  Le  dernier  segment  abdominal  a  la  même 
forme  que  chez  celui-ci. 

Les  pattes  sont  toutes  des  pattes  ancreuses  et  augmentent  en 
grandeur,  bien  que  faiblement,  de  la  première  à  la  dernière 
paire.  Le  premier  article  du  tarse  s'élargit  régulièrement,  du  côté 
interne,  dans  les  paires  successives,  et  est  surtout  développé,  et 
de  plus  fortement  comprimé,  dans  la  dernière  paire. 

9* 


132   J.  A.  HERKLOTS.  DEUX  NOUVEAUX  GENRES  DE  CRUSTACES 

Les  appendices  abdominaux  sont  oblongs,  à  bord  interne  pas- 
sablement droit ,  et  allongés  en  pointe  ;  ceux  du  dernier  article 
sont  étroits  et  terminés  en  pointe  aiguë,  de  grandeur  égale,  et 
ne  dépassant  que  de  très  peu  la  pointe  du  pygidium. 

A  la  face  inférieure  du  thorax  se  voit,  entourée  comme  d'une 
couronne  par  les  courtes  pattes,  la  poche  incubatrice,  qui  est 
très  gonflée  dans  tous  les  individus  et  fait  même,  chez  la  plu- 
part, saillie  au-delà  des  pattes,  ce  qui  doit  être  attribué  au 
développement  plus  avancé  des  jeunes.  La  couverture  de  cette 
cavité  se  compose  de  membranes  squamiformes ,  rondes,  dont 
chacune  des  suivantes  recouvre  partiellement  celle  qui  la  précède, 
tandis  que  celles  d'un  côté  recouvrent  aussi  en  partie  celles  de 
l'autre.  Chez  un  individu  où  cette  poche  incubatrice  était  très 
dilatée  et  où  je  la  débarrassai  de  la  couvée  qu'elle  renfermait, 
les  membranes  en  question  gardèrent  une  position  telle  qu'il  res- 
tait une  ouverture  entre  les  deux  avant-derniers  appendices  des 
deux  côtés. 

Les  jeunes  individus  offrent,  quant  à  la  forme  générale,  beau- 
coup de  rapports  avec  les  adultes  du  genre  Anilocre,  mais  non 
avec  la  larve  d'une  espèce,  figurée  par  M.  Milne  Edwards.  Ils 
montrent  les  caractères  ordinaires  des  larves,  une  grande  tête  et 
de  grands  yeux,  des  antennes  subulées  à  articles  de  même  lar- 
geur ,  des  segments  dont  les  bords  suivent  des  directions  parallèles. 
Le  dernier  segment  abdominal  est  proportionnellement  court,  en 
forme  de  bouclier;  il  a  des  appendices  lancéolés,  qui  sont  de 
moitié  plus  longs  que  le  bouclier  lui-même,  et  qui,  tout  comme 
celui-ci,  sont  couverts  de  longs  poils. 

Tout  le  corps,  ainsi  que  les  pattes,  est  couvert  de  dessins 
noirs,  ramifiés  et  étoiles,  qui  sont  surtout  alignés  le  long  des 
bords  postérieur  et  latéral  des  segments ,  plus  entassés  sur  le  corps 
du  dernier  segment. 

Ces  petites  étoiles  s'observent  aussi  sur  les  individus  adultes; 
mais  ordinairement  ce  ne  sont  alors  que  des  points  noirs,  dissé- 
minés parcimonieusement  sur  tout  le  bouclier  dorsal,  nombreux 
surtout  à  la  surface  de  la  tête. 


VIVANT    EN    PARASITES    SUR    DES    POISSONS    ETC.  l33 

Les  dimensions  sont  les  suivantes: 

cf         * 

longueur  totale 10  '  ^'  19  ''' 

„        de  la  tête l/^'5    2  "' 

„        du  thorax b'"       ^,'"b 

„        de  l'abdomen 3/'^5     l/"b 

„        du   dernier  segm.  abdom.  .  .     2  '''      4 

largeur  au  troisième  anneau  thor.  ...     6  '''  12 

sixième  anneau  abdom.  .  .     2/''5     4/''5 


jj       j? 


Le  parasite  dont  la  description  précède  est  le  même  que  celui 
dont  j'avais  signalé  au  mois  de  décembre  de  Tannée  passée,  dans 
une  communication  préliminaire,  i)  le  genre  de  vie  et  l'habitat, 
ignorant  que  M.  Bleeker  eût  déjà  attiré  l'attention  sur  ces  faits 
longtemps  auparavant.  La  particularité  que  l'espèce  présente  par 
rapport  à  son  séjour  me  paraît  exiger  que  l'histoire  soit  rap- 
portée ici  en  son  entier. 

Dès  1860,  2)  M.  Jellinghaus,  alors  Résident-adjoint  de  Sou- 
madang ,  écrivait  à  la  Société  physique  des  Indes  néerlandaises  : 

„Dans  la  petite  rivière  de  Tjikerang,  district  de  Tjilokotot, 
régence  de  Bandong,  on  trouve  des  poissons  qui  ont  dans  le 
ventre  un  trou,  dans  lequel  est  logé  un  petit  animal  paraissant 
appartenir  au  genre  des  Crustacés. 

„A  ma  prière,  un  grand  nombre  de  ces  poissons  furent  pris 
en  cet  endroit,  et  tous  sans  distinction,  grands  et  petits,  mon- 
traient la  même  particularité,  tandis  que,  à  ce  que  m'ont  assuré 
les  indigènes,  cela  n'est  pas  le  cas  dans  la  rivière  voisine,  où 
cette  espèce  de  poissons  se  rencontre  également. 

„ D'après  les  renseignements  des  indigènes,  le  nom  du  poisson 
est  B enter  y  et  celui  de  l'animal  en  question  Songkeat." 


*)  Proces-verhual  van  de  gewone  vergadering  der  afdeeling  Natuurkunde  van 
de  Koninkl.  Akad.  van  Wetensch.  1868  —  1869,  No.  6. 

*)  Natuurkundig  Tijdschrift  voor  Nederlandsch  Indie,  publié  par  la  Société 
physique  des  Indes  néerlandaises,  T.  XXII,  p.  378,  dans  le  Compte  rendu  de 
la  réunion  du  Conseil  du  28  juin  1860. 


134   J.  A.  HERKLOTS.  DEUX  NOUVEAUX  GENRES  DE  CRUSTACES 

A  cette  lettre  étaient  joints  des  exemplaires  du  poisson^  qui 
furent  reconnus  par  M.  Bleeker  comme  appartenant  au  genre 
Sijstomus  (Barbodes) ,  mais  sur  lesquels  on  ne  trouva  pas  la  par- 
ticularité signalée.  Le  Conseil  de  la  Société  invita  M.  Jellinghaus 
à  envoyer  de  nouveaux  exemplaires  ;  les  comptes  rendus  ne  nous 
apprennent  pas  s'il  fut  satisfait  à  cette  demande. 

L'ancien  Gouverneur  général  de  l'Inde  néerlandaise,  M.  L.  A. 
J.  W.  Sloet  van  de  Beelen,  pendant  un  voyage  qu'il  fit  à  l'in- 
térieur de  Java,  eut  connaissance  de  la  particularité  dont  il  s'agit, 
et,  grâce  au  bienveillant  intérêt  de  son  Excellence,  le  Musée 
d'histoire  naturelle  de  Leyde  entra  en  possession  de  différents 
exemplaires,  tant  du  poisson  que  du  crustacé. 

D'après  les  étiquettes  qui  accompagnaient  ces  objets,  ils  avaient 
été  recueillis  par  M.  Jellinghaus,  dans  la  rivière  déjà  mentionnée 
par  sa  lettre,  et  ils  portent  dans  le  pays  les  noms  de  Benter 
et  de  Songkeat.  M.  Bleeker  donna  au  poisson  le  nom  de  Puntius 
(subg.  Barhodes)  maculatus.  L'envoi  dont  je  viens  de  parler  ayant 
remis  le  fait  lui-même  en  mémoire  à  M.  Bleeker,  ce  savant  trouva 
dans  sa  collection  deux  exemplaires  du  poisson,  sur  lesquels  se 
rencontrait  le  Songkeat,  exemplaires  qu'il  soumit  à  TAcadémie 
royale  d'Amsterdam  dans  une  de  ses  séances.  ') 

Le  fait  existe  chez  tous  les  exemplaires  du  poisson  reçus  par 
le  Musée  de  Leyde,  exemplaires  qui  diffèrent  d'ailleurs  notable- 
ment sous  le  rapport  de  la  taille  et  par  conséquent  de  l'âge,  le 
plus  petit  ayant  cinq  centimètres  de  longueur,  tandis  que  le 
plus  grand  en  mesure  huit  et  demi. 

Les  téguments  extérieurs  du  poisson  sont  percés  d'une  ouver- 
ture transversale,  au-dessous  où  immédiatement  en  arrière  des 
nageoires  ventrales.  Relativement  à  l'individu  cette  ouverture  est 
considérable,  mais  par  rapport  au  parasite  elle  est  insignifiante, 
vu  qu'elle  atteint  tout  au  plus  un  quart  de  la  largeur  de  la  femelle. 

Elle  conduit  dans  une  cavité  en  forme  de  poche,  qui  monte 
obliquement   en   se  dirigeant  vers  l'extrémité  antérieure  du  pois- 


)  Proces-verbaal  etc.  1862  —  63. 


VIVANT    EN    PARASITES    SUR    DES    POISSONS    ETC.  135 

son,   et   qui  est  formée   simplement  par  écartement  des  parties 
internes,  car  on  n'observe  aucune  déchirure  des  membranes. 

Chez  un  de  nos  exemplaires  il  existe,  immédiatement  derrière 
les  nageoires  ventrales  et  sur  la  ligne  médiane  du  corps,  une 
seconde  ouverture,  qui  a  une  direction  longitudinale,  et  qui  ne 
paraît  être  due  qu'à  un  déchirement  accidentel,  occasionné  par 
la  distension  assez  forte  de  la  peau.  Elle  aboutit  dans  la  même 
cavité  où  conduit  l'ouverture  transversale. 

Mais  il  y  a  un  autre  individu  qui  présente  de  chaque  côté  de 
la  ligne  médiane  une  ouverture  donnant  dans  une  poche  distincte , 
et  chez  lequel  ces  deux  poches,  entièrement  séparées  par  une 
cloison  membraneuse,  sont  occupées  chacune  par  des  parasites. 

Chaque  cavité  contient  un  couple  de  ces  parasites,  mâle  et 
femelle.  La  femelle  a  le  dos  tourné  vers  la  paroi  extérieure,  et 
le  mâle  est  placé  au-dessus  d'elle;  dans  tous  les  échantillons  que 
j'ai  vus,  ce  dernier  était  appliqué  par  le  dos  sur  la  face  ventrale 
de  la  femelle,  les  extrémités  postérieures  des  deux  individus  se 
trouvant  à  la  même  hauteur,  immédiatement  au-dessus  de  la 
surface  de  la  peau  du  poisson. 

Un  pareil  habitat  est  jusqu'à  présent  un  fait  absolument  isolé 
chez  ces  parasites. 

La  plupart  des  Cymothoadiens  vivent  en  parasites  sur  la  peau 
des  poissons,  Cxjmoîhoa  Stromalei  Bleeker  vit  dans  la  cavité  buc- 
cale du  Stromatus  niger  y  mais  je  ne  connais  aucun  autre  exemple 
d'une  espèce  de  ce  groupe,  perforant  les  téguments  de  son  hôte 
et  y  demeurant  constamment  à  l'état  d'accouplement. 

Du  rapport  entre  le  diamètre  de  l'ouverture  et  la  largeur  beau- 
coup plus  considérable  de  la  femelle,  on  doit  conclure  que  c'est 
dans  le  jeune  âge  que  celle-cî  vient  occuper  sa  demeure.  La 
taille  moindre  du  mâle  lui  permettrait  à  la  rigueur  d'entrer  et 
de  sortir,  vu  l'élasticiié  de  la  peau  du  poisson  à  l'état  vivant, 
et  l'on  pourrait  supposer  d'après  cela  qu'il  ne  visite  le  séjour  de 
la  femelle  que  pour  s'accoupler.  Mais  ce  qui  prouve  que  tel  n'est 
pas  le  cas,  c'est  d'abord  la  place  que  le  mâle  occupe  dans  îa 
cavité,  derrière  ou  au-dessus  de  la  femelle,  et  ensuite  la  circon- 


136      J.    A.    HERKLOTS.    DEUX    NOUVEAUX    GENRES    DE    CRUSTACÉS 

stance  que  la  plupart  des  femelles  ont  la  poche  incubatrice  en- 
tièrement remplie  d'œufs  ou  d'embryons,  —  on  en  a  compté 
quatre-vingt-quatre  chez  une  seule  femelle ,  —  ce  qui  leur  fait 
prendre  un  tel  accroissement  qu'on  ne  peut  guère  se  figurer  la 
possibilité  d'un  mouvement  dans  la  cavité. 

Il  est  à  remarquer  que  le  poisson  ainsi  habité  appartient  aux 
poissons  d'eau  douce,  *)  parmi  lesquels  il  n'est  encore  que  la 
seconde  espèce  chez  qui  on  ait  observé  des  parasites  de  ce 
groupe,  ceux-ci  ne  se  trouvant  en  général  que  dans  la  mer. 

Quant  aux  relations  entre  les  deux  nouveaux  genres  et  ceux 
qui  étaient  déjà  connus,  ainsi  qu'à  la  place  qu'ils  devraient  prendre 
dans  la  série  systématique,  c'est  un  sujet  auquel  je  crois  ne  pas 
devoir  toucher  pour  le  moment.  L'étude  d'autres  représentants  du 
groupe,  qui  existent  dans  notre  Musée  ou  que  j'espère  pouvoir 
y  réunir,  ouvrira  certainement  de  nouveaux  points  de  vue  et 
rendra  les  rapports  entre  les  différentes  formes  plus  clairs  qu'ils 
ne  le  sont  encore  actuellement.  Ailleurs  également,  des  espèces 
et  des  genres  inconnus  seront  rassemblés  et  décrits,  et  c'est  ainsi 
que  nous  arriverons  à  la  connaissance  de  la  majorité  des  formes 
existantes,  seule  base  possible  d'une  classification  stable. 


1)  M.  le  Dr.  E.  von  Martens  a  traité  dernièrement  (Troschel's  Archiv  f.  Na- 
turgescUchte ,  T.  XXXIV,  1868)  des  animaux  marins  qui  se  rencontrent  dans 
l'eau  douce.  Il  cite  un  grand  nombre  d'exemples  dans  différentes  classes  anima- 
les ,  entre  autres ,  dans  celle  des  Crustacés.  Dans  la  section  des  Isopodes  nageurs 
il  mentionne  la  famille  des  Sphaeromacés ,  dont  une  espèce  a  été  trouvée  au 
Japon,  et  les  deux  tribus  de  la  famille  des  Cymothoadiens  ;  de  la  première  de  ces 
tribus ,  celle  des  Errants ,  il  nomme  une  espèce  à'Aega ,  découverte  par  lui  dans 
la  rivière  Capouas ,  à  l'intérieur  de  Bornéo ,  tandis  que  la  seconde  tribu ,  celle 
des  Parasites ,  n'est  représentée  que  par  le  Cymothoa  amurensis  Gerstfeld ,  observé 
sur  le  Cyprinus  lacustris  dans  la  rivière  Amour.  A  cet  exemple,  l'observation  de 
M.  Jellinghaus  est  venue  en  ajouter  un  second. 


VIVANT    EN    PARASITES    SUR    DES    POISSONS    ETC.  137 

EXPLICATION   DE   LA   PLANCHE. 
(Voyez  planche  V.) 


Epichthys   giganteus. 

Fig.  1.  Femelle,  grand,  nat. 
„     2.  Front,  vu  en  dessous,  f. 
„     3.  Antenne  gauche  de  la  première  paire,  |. 
„     4.         „  „       de  la  seconde  paire,  f. 

„     5.  Patte  droite  de  la  troisième  paire,  \. 
„     6.      „  „       de  la  cinquième  paire,  f. 

„     7.      „  „       de  la  septième  paire,  ^. 

„     8.  Appendice  gauche  du  dernier  article,   vu  du  côté 

supéro-intérieur ,  grand,  nat. 
„     9.  Le  même,  vu  du  côté  externe,  grand,  nat. 

Ichthyoxenos   Jellinghausii. 

Fig.  10.  Mâle,  vu  en  dessus,  4- 
„     11.  Femelle,  vue  en  dessus,  |. 
„     12.  La  même,  vue  en  dessous,  }. 


13.  Antenne  gauche  de  la  première  paire,    j 


25 

T 

14.  ,,  „       de  la  seconde  paire,  \^. 

15.  Patte  droite  de  la  troisième  paire,  |. 

16.  „  ,.      de  la  cinquième  paire,  y. 

17.  „  „      de  la  septième  paire,  f. 

18.  Appendice    gauche    du    dernier    article,    vu    en 
dessus ,    \. 


OBSERVATIONS  SUR  LES 

CARACTERES  ET  LA  FORMATION  DU  LIÈGE 
DANS  LES  DICOTYLÉDONES , 


N.  W.  P.  RAUWENHOPF. 


Il  n'y  a  aucun  organe  sur  lequel  les  recherches  soient  demeu- 
rées aussi  incomplètes  que  sur  le  liber:  voilà  ce  qu'écrivait,  il  y 
a  quelques  années,  M.  Hugo  de  Mohl,  dans  un  mémoire  où  il 
nous  faisait  connaître  mainte  particularité  importante  concernant 
cette  partie  de  la  plante  ^).  Il  aurait  pu  hardiment,  à  cette 
époque,  généraliser  davantage  cet  énoncé  et  l'appliquer  à  l'écorce 
tout  entière. 

Depuis  ce  temps,  plusieurs  botanistes  ont  publié  des  travaux 
de  grand  mérite,  qui  ont  notablement  augmenté  les  connaissan- 
ces que  nous  possédions  sur  ce  sujet. 

Mais,  même  après  ces  recherches  des  dernières  années,  il  s'en 
faut  encore  de  beaucoup  que  nous  ayons  une  intelligence  com- 
plète de  la  composition  de  l'écorce,  de  son  développement  et  des 
changements  qu'elle  subit. 

Je  pense  donc  que  ce  ne  sera  pas  répéter  purement  des  choses 
connues,  que  de  communiquer  ici  quelques-uns  des  résultats  de 
mes  observations  sur  le  liège,  partie  de  l'écorce  dont  l'étude 
m'occupe  depuis  longtemps. 

Rappelons  d'abord,  en  quelques  mots,  l'historique  de  la  question. 


')  Einige  Ândeutungen  ûber  den  Bau  des  Bastes,  dans:  5o^.  ^e;V.  1855  ,  p.  873. 


N.    W.    P.    RAUWENHOFF.    OBSERVATIONS    SUR    LES    ETC.  139 

Anciennement,  on  a  émis  bien  des  opinions  différentes  sur  la 
nature  et  la  signification  du  liège  et  du  liber.  Mais  il  est 
tout  à  fait  superflu  de  mentionner  ici  ces  opinions,  soit  parce 
que  les  observations  sur  lesquelles  elles  reposent,  datent  d'une 
époque  où  la  connaissance  anatomique  des  plantes  était  encore 
très  imparfaite,  soit  parce  que  M.  Hugo  de  Mobl,  dans  un  ex- 
cellent travail  publié  en  1836,  a  déjà  donné  un  aperçu  de  ces 
théories  anciennes. 

Ce  travail  est  devenu  le  point  de  départ  de  toutes  les  recher- 
ches postérieures,  et  beaucoup  des  résultats  fournis  par  ces 
recherches  ne  sont  que  la  confirmation  de  ce  que  M.  de  Mohl 
avait  déjà  trouvé. 

M.  de  Mohl  distingue  quatre  couches  dans  l'écorce  de  la  branche 
d'un  an:  Vépiderme,  la  couche  subéreuse j  composée  de  3  —  5 
rangées  de  cellules  à  parois  minces,  incolores,  sans  contenu  gra- 
nuleux; la  couche  parenchijmateuse y  formée  d'un  nombre  plus  ou 
moins  grand  de  cellules  à  parois  minces,  renfermant  de  la  chlo- 
rophylle; le  liber  j  qui  contient  les  fibres  allongées ,  et  qui,  à  un  âge 
plus  avancé ,  se  compose  de  couches  distinctes,  disposées  en  feuillets. 

Cette  division,  empruntée  à  la  structure  du  chêne-liége,  a  été 
suivie  par  la  plupart  des  auteurs  postérieurs.  Nous  pouvons 
l'adopter  également,  avec  une  légère  modification.  Si  l'on  étudie, 
en  effet,  un  état  de  développement  moins  avancé  que  celui  décrit 
par  M.  de  Mohl,  on  ne  trouve  pas  de  liège  sous  l'épiderme, 
mais  quelques  couches  de  cellules  parenchymateuses  d'une  forme 
différente  de  celles  qui  composent  la  couche  de  parenchyme  avec 
chlorophylle  de  M.  de  Mohl;  dans  beaucoup  de  cas  c'est  du  col- 
lenchyme,  qui  touche  alors  à  l'épiderme.  Lorsque  la  couche  su- 
béreuse décrite  par  M.  de  Mohl  est  déjà  développée,  l'épiderme 
n'existe  souvent  plus  qu'en  partie,  çà  et  là,  et,  en  tout  cas, 
ses  fonctions  ont  cessé.  Pour  que  nous  puissions  nous  rallier  à 
la  division  de  M.  de  Mohl,  il  faut  donc  comprendre  par  couche 
subéreuse  la  couche  qui ,  plus  tard ,  donne  fréquemment  naissance 
à  du  liège. 

Après  la  publication  de  ce  chef-d'œuvre,  il  se  passa  un  temps 


140     N.     W.    p.    RAUWENHOFF.    OBSERVATIONS    SUR    LES    CARACTERES 

assez  long  avant  que  le  sujet  donnât  lieu  à  de  nouvelles  recher- 
ches spéciales.  Dans  la  description  de  plantes  ou  de  familles 
particulières  on  fit  bien  mention  également  du  liège:  c'est  ainsi 
que  M.  Schleiden  parle  de  cette  partie  dans  son  Anatomie  des 
Cactées,  et  que  MM.  Hartig  et  Schacht  communiquent  aussi  dif- 
férentes observations  qui  la  concernent.  Mais,  en  général,  on 
s'en  tint  aux  résultats  des  recherches  de  M.  de  Mohl,  lesquel- 
les, comme  la  plupart  des  autres  travaux  du  même  maître,  ne 
peuvent  être  étudiées  sans  rappeler,  suivant  les  paroles  de 
M.  Schleiden,  les  larmes  d'Alexandre. 

Le  travail  le  plus  important  qui  a  paru  sur  le  liège,  depuis  le 
mémoire  de  M.  de  Mohl ,  est  celui  que  M.  Hanstein  a  publié  sous 
le  titre  de:  Untersuchungen  ûber  den  Bau  und  die  Entwickelung 
der  Baumrinde,  1853.  Prenant  pour  point  de  départ  les  recher- 
ches de  M.  de  Mohl,  avec  lequel  il  est  d'accord  dans  la  plupart 
des  cas,  M.  Hanstein  cherche  surtout  à  faire  mieux  connaître 
l'histoire  du  développement  du  liège.  A  cet  effet,  il  a  étudié  et 
décrit  avec  détail  17  espèces  différentes  d'arbres,  et  il  a  éclairé 
ses  observations  par  d'excellentes  figures.  Les  vues  générales  aux- 
quelles il  a  été  conduit  peuvent  se  résumer  ainsi: 

Pendant  que  le  tronc  continue  de  s'accroître  par  la  formation 
de  tissus  secondaires  aux  deux  côtés  du  cambium,  l'écorce  pri- 
maire a  allongé  et  multiplié  ses  cellules  dans  la  direction  pé- 
riphérique. Dans  la  direction  du  rayon  elle  ne  '  donne ,  en  gé- 
néral, lieu  à  aucun  développement;  elle  laisse  ce  soin  à  l'écorce 
secondaire. 

L'épiderme,  cessant  bientôt  de  pouvoir  suivre  la  croissance  du 
tronc,  se  déchire.  Du  liège  vient  le  remplacer.  Les  cellules  exté- 
rieures du  parenchyme ,  en  se  multipliant ,  ont  formé  un  tissu  propre 
à  protéger  les  parties  vivantes  contre  les  influences  du  dehors.  Ces 
cellules  ne  se  prêtent  pas  à  l'échange  osmotique  des  liquides.  Par 
suite,  elles  ne  restent  que  peu  de  temps  en  vie.  Cette  enveloppe 
subéreuse  contient  des  cellules  parenchymateuses  de  formes  très 
diverses,  mais  toujours  elle  est  caractérisée  par  la  matière  par- 
ticulière qui  constitue  ces  cellules,  par  leur  mode  de  développe- 


ET    LA    FORMATION    DU    LIEGE    DANS    LES    DICOTYLEDONES.       141 

ment  et  par  leur  disposition  régulière.  M.  Hanstein  appelle  ce 
tissu  périderme,  nom  que  M.  de  Mohl  avait  employé  dans  un 
sens  plus  restreint  ^  pour  indiquer  spécialement  les  cellules  subé- 
reuses tabulaires. 

Avec  les  progrès  de  l'âge,  la  première  couche  de  périderme 
ne  peut  plus,  dans  beaucoup  de  plantes,  suivre  le  développe- 
ment du  tronc.  Au  commencement,  le  périderme  se  renouvelle  à 
la  face  interne  à  mesure  qu'il  se  détruit  au  côté  externe;  mais 
bientôt  du  périderme  se  forme  dans  des  couches  plus  profondes, 
et  celui  qui  est  situé  en  dehors  se  dessèche  et  meurt. 

Après  cette  description ,  en  général  exacte ,  bien  que  demandant 
çà  et  là  à  être  confirmée  et  étendue,  les  études  sur  le  liège  ont 
de  nouveau  subi  un  temps  d'arrêt  assez  long,  savoir,  jusqu'au 
travail  développé  que  M.  Sanio  lui  a  consacré  il  y  a  peu 
d'années  (Pringsheim's  Jahrh.,  II,  p.  39).  Ce  savant  s'est  surtout 
proposé  d'observer,  dans  différentes  plantes,  les  premières  phases 
de  la  formation  du  liège  ;  il  en  a  étudié  avec  beaucoup  de  soin 
les  états  les  plus  jeunes,  et,  sous  ce  rapport,  il  a  notablement 
étendu  notre  horizon.  Mais  il  ne  s'est  pas  occupé  de  Fécorce  de 
plantes  plus  âgées. 

Ce  travail  est  le  dernier  de  quelque  importance  qui  me  soit 
connu.  Moi-même  j'ai  suivi  cette  question  avec  intérêt  depuis  plu- 
sieurs années,  et  j'ai  répété  la  plupart  des  recherches  auxquelles 
elle  a  donné  lieu.  Le  plus  souvent  j'ai  trouvé  ainsi  la  confirma- 
tion de  ce  que  d'autres  avaient  fait  connaître;  dans  quelques  cas 
toutefois,  mes  observations  indiquaient  des  inexactitudes  et  des 
lacunes  que  j'ai  cherché  alors,  autant  que  possible,  à  redresser 
ou  à  combler.  Je  me  suis  convaincu  surtout  que  nous  aurions, 
en  général,  une  idée  plus  complète  de  la  partie  en  question,  si 
l'on  avait  toujours  suivi  son  développement  depuis  les  états  les 
plus  jeunes  jusqu'aux  plus  avancés.  En  1859,  j'ai  essayé  de 
donner  un  aperçu  de  ce  développement  successif  de  l'écorce  pour 
le  Rohinia  Pseudo- Acacia  (Ned.  Kruidk.  Archief,  T.  V,  p.  1 — 28). 
Postérieurement,  j'ai  étudié  de  la  même  manière  un  grand  nom- 
bre d'autres   plantes.    J  espère  pouvoir   faire  connaître  plus  tard 


142     N.    W.    p.    RAUWENHOFF.    OBSERVATIONS    SUR    LES    CARACTERES 

ces  observations  avec  tous  leurs  détails.  En  ce  moment  je  veux 
présenter  seulement,  comme  résultats  provisoires  de  mes  recher- 
ches, quelques  remarques  sur: 

1°.  les  formes  des  cellules  du  liège, 
2^.  leur  mode  de  multiplication, 

3^  la  place  où  le  liège  prend  naissance  normalement, 
4".  les  changements  qui  interviennent,  sous  ce  rapport,  à 
un  âge  plus  avancé  de  la  plante. 

I.   Formes   des   cellules   du   liège. 

Il  y  a,  comme  M.  de  Mohl  en  a  déjà  fait  l'observation,  deux 
formes  principales,  deux  types  de  cellules  subéreuses;  l'un  est 
celui  des  cellules  cubiques^  l'autre  celui  des  cellules  tabulaires. 

Les  cellules  cubiques  sont  ordinairement  à  parois  minces ,  trans- 
parentes, à  contours  foncés,  par  suite  de  la  grande  force  réfrin- 
gente des  parois.  Le  contenu  est  de  l'air.  Souvent  les  parois, 
surtout  dans  la  direction  radiale,  sont  ondulées  ou  sinueuses. 

On  les  trouve  avec  ces  caractères  chez  nombre  de  plantes 
telles  que:  Sambucus  nigra,  Aesculus  Hippocastanum ^  Lonicera 
Caprifolium,  Quercus  suber ,  Morus  nigra,  Rhus  Colinus  y  Rhus 
typhiniim.  Toutefois,  il  y  a  encore  des  différences  considérables 
dans  l'épaisseur  des  parois  de  cette  forme  de  cellules;  on  n'a 
qu'à  comparer,  par  exemple,  sous  ce  rapport,  Iq  Syringa  vulgaris 
et  le  Morus  nigra.  Dans  cette  dernière  espèce  les  cellules  se  rap- 
prochent souvent  du  type  tabulaire. 

Chez  les  Syringa,  Larix ,  Rerberis,  Philadelphus ,  les  cellules 
continuent  encore  longtemps  à  croître  dans  la  direction  du  rayon 
et  deviennent  ainsi  allongées  radialement ,  avec  des  parois  sinueu- 
ses. Ce  n'est  que  chez  un  petit  nombre  de  plantes  qu'elles  con- 
servent leur  forme  cubique  à  un  âge  plus  avancé.  Le  plus  sou- 
vent, l'accroissement  du  tronc  est  cause  que  les  cellules  se 
développent  principalement  dans  la  direction  périphérique,  pour 
qu'elles  puissent  continuer  à  embrasser  la  circonférence  agrandie. 

Les  modifications  qu'on  rencontre  dans   ce   cas   sont   d'autant 


ET    LA    FORMATION    DU    LIEGE    DANS    LES    DICOTYLEDONES.       143 

plus  considérables  que  les  parois  des  cellules  sont  plus  minces 
et  plus  extensibles.  C'est  ainsi  que  les  cellules  subéreuses  du 
Vilis  vinifera,  du  Philadelphus  coroiiarius ,  du  Ribes  rubrum , 
d'abord  cubiques  ou  même  allongées  radialement^  deviennent 
peu  à  peu  allongées  dans  le  sens  périphérique. 

Bien  que  les  cellules  cubiques,  comme  il  a  été  dit,  aient  en 
général  des  parois  minces,  on  trouve  pourtant  des  exceptions  à 
cette  règle,  par  exemple,  chez  le  Morus  nigra  et  surtout  dans  la 
vieille  écorce  de  VAbies  excelsa.  Parfois,  il  arrive  aussi  que  la 
paroi  n'est  épaissie  que  d'un  côté;  on  en  voit  un  exemple  re- 
marquable dans  le  Larix  europaea,  où  la  paroi  supérieure  ou 
inférieure  offre  seule  une  épaisseur  considérable  et  montre  de 
plus  des  canaux  ponctués. 

Les  cellules  cubiques  épaissies  et  allongées  périphériquement 
forment  la  transition  au  second  type  principal,  celui  des  cellules 
tabulaires.  Ici  les  parois  sont  presque  toujours  épaissies,  parfois 
à  un  très  haut  degré,  et  alors  souvent  colorées  en  jaune.  Dans 
les  cellules  on  trouve  en  ce  cas  un  contenu  brun ,  opaque ,  trouble. 
Les  cellules  subéreuses  tabulaires ,  dont  la  plus  grande  dimension 
est  toujours  parallèle  à  la  surface  de  la  plante,  forment  quelque- 
fois, chez  des  plantes  déjà  âgées,  une  couche  dense  qu'on  ap- 
pelle périderme. 

Il  y  a  du  reste,  ici  également,  une  grande  différence  dans  le 
rapport  des  deux  dimensions:  presque  cubiques  chez  le  Cytisus 
Laburnum^  les  cellules  sont  plates  dans  le  Querciis  pedunculata  ^ 
le  Q.  siiber  à  l'état  de  jeunesse,  le  Larix,  le  Betula;  très  plates 
dans  le  Tilia  grandi folia ,  le  Populus  tremula  et  surtout  dans  le 
Fagus  silvaiica.  Les  cellules  très  plates  sont  souvent  convexes  au 
côté  extérieur,  et  alors  reconnaissables  surtout  à  leur  contenu 
obscur;  c'est  ce  qu'on  voit  d'une  manière  très  nette  dans  Fécorce 
âgée  du  Fagus  silvatica  et  de  la  racine  de  Ratanhia. 

Les  deux  formes  principales  de  cellules  du  liège  se  rencontrent 
très  fréquemment  dans  la  même  plante  en  couches  alternatives, 
composées  en  majeure  partie  tantôt  de  l'une,  tantôt  de  l'autre 
espèce.   M.  de  Mohl  et  M.  Schacht  ont  même  puisé  dans  ce  fait 


144     N.    W.    p.    RAUWENHOFF.    OBSERVATIONS    SUR    LES    CARACTERES 

des  caractères  propres  à  distinguer  Fécorce  d'un  arbre  de  celle 
d'un  autre,  et  tous  les  deux  ont  fondé  en  grande  partie  leur 
distribution  des  arbres  qui  produisent  du  liège  ^  sur  la  présence 
des  deux  espèces  de  cellules  et  sur  leur  proportion  relative.  Bien 
que  l'observation  soit  exacte,  comme  on  peut  s'en  assurer  chez 
le  Belulaj  le  Quercus ,  etc.,  les  deux  formes  passent  pourtant  l'une 
à  l'autre  d'une  manière  trop  insensible,  pour  qu'on  puisse  y  trou- 
ver une  base  fixe  de  classification.  Cela  devient  surtout  évident 
quand  on  examine  l'écorce  d'arbres  âgés,  par  exemple  celle  du 
Pinus  sylvestris.  Dans  les  couches  subéreuses  qui  contribuent  à 
former  ces  vieilles  ècorces,  on  trouve  souvent  des  formes  diffé- 
rentes de  celles  qui  sont  propres  à  la  jeune  branche.  La  distinc- 
tion est  donc  extrêmement  difficile.  En  général,  les  cellules 
tabulaires  paraissent  prendre  naissance  quand  le  développement 
des  cellules  cubiques  s'arrête,  de  sorte  qu'une  couche  de  liège, 
composée  de  cellules  de  cette  dernière  espèce,  est  ordinairement 
limitée  à  l'intérieur  par  des  cellules  tabulaires.  Il  est  possible  que 
ce  changement  dans  la  forme  des  cellules  soit  dû  à  la  même 
cause  à  laquelle  M.  Sachs  [Lehrb.  cl.  Bofanik,  p.  409)  est  porté 
à  attribuer  la  différence  de  forme  des  cellules  du  bois  printanier 
et  du  bois  autumnal,  savoir,  à  ce  que  les  tissus  qui  prennent 
naissance  à  l'automne  sont  soumis,  dans  la  direction  radiale,  à 
une  pression  plus  forte  que  ceux  dont  la  formation  a  lieu  au 
printemps. 

En  ce  qui  concerne  la  nature  chimique  des  parois  des  cellules 
du  liège,  on  les  a  regardées  autrefois  comme  composées  d'une 
matière  particulière ,  appelée  subérine.  Cette  matière  semblait  dis- 
tinguée de  la  cellulose  par  l'action  différente  que  font  éprouver 
aux  deux  substances  l'acide  sulfurique  et  l'acide  nitrique. 

Quelques-uns  admettaient  même  dans  la  subérine  la  présence 
de  l'azote.  D'après  les  recherches  postérieures  toutefois,  la  paroi  des 
cellules  du  liège  doit  être  regardée  comme  consistant  en  cellulose 
pénétrée  de  graisse,  de  cire,  de  résine  ou  de  lignine.  Cette 
opinion  trouve  surtout  un  appui  dans  la  circonstance  que  l'acide 
subérique,    qui   se   forme   par   l'action   de  l'acide  nitrique  sur  le 


ET    LA    FORMATION    DU     LIEGE     DANS    LES    DICOTYLEDONES.       145 

liège,    prend   également   naissance  dans  l'oxydation  des  matières 
grasses  sous  l'influence  de  l'acide  nitrique. 

Cette  manière  de  voir  est  aussi  confirmée  par  une  observation 
que  j'ai  faite  sur  le  liège  frais  du  Quercus  suber,  où  un  certain 
nombre  de  rangées  des  cellules  subéreuses  les  plus  jeunes  deve- 
naient rouge  violet  par  l'action  du  mélange  de  chlorure  de  zinc 
d'iode  et  d'iodure  de  potassium,  tandis  que  toutes  les  autres 
cellules  prenaient,  comme  d'ordinaire,  une  teinte  jaune  brunâtre. 
Les  premières  contenaient  aussi  encore  de  l'humidité,  et  se  dis- 
tinguaient sur  une  coupe  fraîche,  même  à  l'œil  nu,  comme  une 
couche  différemment  colorée. 

IL   Mode   de   naissance   et  de  multiplication  des 
cellules   du   liège. 

La  manière  dont  les  cellules  du  liège  prennent  naissance  est 
demeurée  longtemps  inconnue  et  ce  n'est  que  dans  les  derniers 
temps  qu'elle  a  été  èclaircie.  Il  est  vrai  qu'elle  n'est  pas  toujours 
facile  à  observer. 

M.  de  Mohl  n'a  pas  traité  ce  point  dans  son  travail  classique; 
il  s'est  borné  a  l'étude  de  plantes  dans  lesquelles  la  première 
apparition  du  liège  avait  déjà  eu  lieu.  M.  Hanstein  ne  s'est 
également  occupé  que  du  développement  et  des  modifications  ulté- 
rieures des  couches  subéreuses,  bien  que,  en  quelques  endroits 
de  son  mémoire,  il  parle  de  la  multiplication  cellulaire  qui  donne 
naissance  aux  cellules  du  liège  et  lui  assigne  pour  siège  la  rangée 
de  cellules  située  sous  l'épiderme.  M.  Schleiden,  qui  a  examiné 
la  question  de  l'origine  des  cellules,  déclare  ne  pas  être  parvenu 
à  l'élucider  complètement.  Il  met  cette  origine  en  connexion  avec 
l'accumulation  supposée  d'une  masse  mucilagineuse  jaunâtre  dans 
les  cellules  épidermiques ,  laquelle  finirait  par  faire  éclater  les 
parois  latérales  de  ces  cellules,  en  soulevant  les  parois  supérieu- 
res réunies  sous  forme  de  membrane  continue.  En  même  temps, 
des  cellules  subéreuses  prendraient  naissance  dans  cette  matière. 
Ces  vues  ne  seront  probablement  plus  défendues  par  personne. 
Une  idée  plus  exacte  du  phénomème  a  été  donnée  par  M.  de  Mohl , 

Archives  Néerlandaises,  T.  V.  10 


146     N.    W.    p.    RAUWENHOFF.    OBSERVATIONS    SUR    LES    CARACTERES 

dans  une  figure  représentant  la  formation  du  liège  chez  le  Cereus 
periivianus  (Vegetab.  Zelle,  p.  58).  M.  Schacht  a  décrit  cette  for- 
mation chez  deux  autres  Cactées  (Die  Pflanzenzelle,  p.  239, 
Anal.  il.  Phys.  der  Gew.  I.  p.  287);  elle  aurait  lieu,  d'après  lui, 
dans  les  cellules  de  l'épiderme. 

Mais  le  sujet  a  été  étudié  pour  la  première  fois  d'une  manière 
exacte  et  approfondie  par  M.  Sanio,  en  1859  (Pringsheim's /aArè. 
/.  wiss.  Bot.  II;  Livr.  1,  p,  38 — 108).  Selon  cet  observateur, 
la  cellule  subéreuse  prend  toujours  naissance  par  une  multiplica- 
tion, une  division,  due  à  l'apparition  de  cloisons  placées  dans 
le  sens  tangentiel.  Faisant  usage  d'un  procédé  très  heureux  pour 
obtenir  des  coupes  minces,  et  débarrassant  par  un  lavage  les 
cellules  de  leur  contenu,  il  est  parvenu  à  découvrir  la  naissance 
première  et  la  multiplication  des  cellules  subéreuses,  ce  qui 
n'avait  réussi  à  aucun  de  ses  devanciers.  Dans  la  division  en 
question  il  signale  les  variétés  suivantes: 

a.  Elle  peut  être  purement  centripète ^  c'est-à-dire,  que  lors- 
qu'une cellule  a  subi  une  division,  la  cellule-fille  inférieure  se 
partage  de  nouveau  en  deux  autres  cellules,  dont  la  supérieure 
devient  subéreuse;  et  ainsi  de  suite. 

t).  Elle  peut  être  purement  centrifuge,  quand,  des  deux  cellules- 
filles  formées  en  premier  lieu,  c'est  l'extérieure  qui  se  divise  de 
nouveau;  le  même  phénomène  se  répétant  continuellement. 

c.  Entre  ces  deux  modes  fondamentaux  on  observe  en  outre, 
d'après  M.  Sanio,  plusieurs  modes  intermédiaires,  savoir: 

Une  division  centripète-intermédiaire ,  dans  laquelle  les  deux 
premiers  partages  sont  centripètes ,  tandis  que  le  troisième  se  fait 
dans  la  plus  extérieure  des  deux  celluli^-fiUes  formées  en  dernier 
lieu.  Les  deux  divisions  suivantes  sont  alors  de  nouveau  centripètes. 

d.  Une  division  centrifuge-réciproque ,  quand,  de  la  direction  cen- 
trifuge, la  division  saute  pour  ainsi  dire  dans  la  direction  cen- 
tripète. Il  se  forme  d'abord,  en  direction  centrifuge,  3,  4  à  5 
cellules-filles,  après  quoi  le  partage  cesse  et  les  cellules-filles 
extérieures ,  au  nombre  de  1 ,  2  ou  3 ,  commencent  à  se  changer 
en  liège.  La  cellule  interne  ou  les  deux  cellules  internes  devien- 


ET    LA     FORMATION    DU    LIEGE     DANS    LES    DICOTYLEDONES.       147 

nent  alors  du  parenchyme  cortical  (Korkrîndenzellen) ,  et  la  cel- 
lule-fille située  eiitre  elles  et  les  cellules  subéreuses  continue  plus 
tard  la  division  dans  la  direction  centripète. 

e.  Enfin,  nue  division  cenfrifuge-intermêdiaire ,  qui  diffère  peu  de 
la  précédente.  Ici,  le  second  partage  se  fait  dans  la  cellule-fille 
externe;  des  deux  cellules-filles  auxquelles  il  donne  naissance, 
l'externe  devient  subéreuse  et  Tinterne  continue  la  division  dans 
la  direction  centripète,  tandis  que  la  plus  intérieure  des  cellules 
formées  en  premier  lieu  devient  du  parenchyme  cortical. 

J'ai  répété  les  recherches  dont  il  vient  d'être  question,  et  j'ai 
trouvé  d'un  excellent  usage  la  méthode  qui  y  est  indiquée.  Le 
résultat  de  M.  Sanio,  que  les  cellules  du  liège  prennent  toujours 
naissance  par  division  de  cellules-mères,  a  été  entièrement  con- 
firmé par  mes  observations.  Aucune  exception  ne  m'est  encore 
connue,  de  sorte  que  je  diffère  complètement  d'avis,  à  cet  égard, 
avec  M.  Cas.  de  CandoUe,  qui,  dans  un  écrit  publié  en  1860, 
soutient  l'opinion  que  le  premier  liège  de  bonne  qualité  (dit  liège 
femelle)  naîtrait  par  formation  cellulaire  libre. 

Pour  ce  qui  regarde  toutefois  les  divers  modes  de  division 
admis  par  M.  Sanio,  leur  distinction  me  paraît  un  peu  trop  sub- 
tile, et,  avec  tout  le  soin  possible,  je  n'ai  pas  réussi  à  les  re- 
trouver toujours  tels  qu'il  les  a  décrits.  J'ai  bien  vu,  par  exemple 
chez  Betula  alba,  Berheris  vulgaris ,  Rhus  Cotinus  et  typhinum, 
des  divisions  répétées  dans  la  direction  centrifuge ,  et  chez  Daphne 
Mezereum  et  Sorbus  aucuparia  une  division  centripète;  mais  je 
n'ai  pu  saisir  distinctement  les  modes  intermédiaires.  Je  dois 
avouer  aussi  que  je  n'attache  pas  une  très  grande  importance  à  ce 
que  la  3^  ou  4^  cellule-fille  soit  la  plus  intérieure  ou  la  plus  ex- 
térieure, parce  que  cette  différence  ne  me  semble  pas  être  suffi- 
samment constante.  M.  Sanio  lui-même  fait  remarquer  que,  sui- 
vant les  circonstances ,  l'ordre  de  division  des  cellules  peut  varier. 
Il  cite  comme  exemple  le  Viburnum  Opulus ,  qui  présente  trois 
modes  différents,  selon  qu'on  l'examine  à  différentes  époques  de 
l'été.  La  division  centripète,  qui  donne  lieu  immédiatement  à 
une  couche  de  liège,  se  produit  en  automne,  tandis  qu'en  Juillet 

10* 


148     N.    W.    p.    RAUWENHOFF.    OBSERVATIONS    SUR    LES    CARACTERES 

se  montrerait  la  division  centrifuge-réciproque,  laquelle  n'est 
suivie  que  plus  tard  de  la  formation  de  liège.  Il  est  clair  que 
la  même  chose  se  retrouvera  dans  d'autres  plantes,  de  sorte  que 
la  connaissance  de  ces  variétés  de  division  ne  me  semble  pas 
avoir  une  importance  proportionnée  aux  difficultés  de  leur  étude. 
En  outre,  après  les  premières  divisions  de  cellules,  toutes  les 
suivantes  sont  centripètes;  il  n'y  a  d'ailleurs  jamais,  à  un  mo- 
ment donné,  qu'une  seule  rangée  de  cellules  en  voie  de  mul- 
tiplication. 

Pas  plus  que  M.  Sanio,  je  ne  suis  parvenu  à  découvrir  les 
cloisons  des  cellules-filles  avant  que  leur  formation  soit  complète. 
Il  m'est  bien  arrivé  de  voir  le  contenu  des  cellules  partagé  en 
deux,  sans  qu'il  existât  déjà  de  cloison  apparente;  mais  partout 
où  cette  dernière  se  montrait,  même  à  l'état  de  ligne  à  peine 
visible,  elle  parcourait  la  cellule  tout  entière,  d'une  extrémité  à 
l'autre.  Dans  quelques-unes  de  mes  préparations ,  conservées  dans 
la  dissolution  récemment  recommandée  d'acétate  de  potasse,  ces 
parois  minces  des  cellules  sont  restées  plus  visibles  qu'en  faisant 
usage  de  la  glycérine,  laquelle  donne  à  toutes  les  parties  une 
transparence  extrême.  Plusieurs  de  ces  préparations  sont  encore 
en  fort  bon  état  après  un  laps  de  temps  de  six  années. 

III.   Place   où   naissent   les   premières 
cellules   subéreuses. 

La  place  où  apparaissent,  à  l'état  normal,  les  cellules  subé- 
reuses n'est  pas  moins  importante  à  connaître  que  leur  mode  de 
multiplication.  Sur  ce  point  également,  on  est  resté  longtemps 
dans  le  doute.  M.  Schleiden  croyait  que  le  liège  se  forme  dans 
l'épiderme.  MM.  Schacht ,  de  Mohl  et  Hanstein  regardèrent  comme 
le  siège  de  cette  formation  la  rangée  de  cellules  située  immédia- 
tement au-dessous  de  l'épiderme.  Le  dernier  de  ces  auteurs  fit 
connaître  en  outre  pour  quelques  plantes,  telles  que  Vitis  vini- 
feray  Ribes  grossidaria,  Caprifolium  italicum ,  une  production  de 
liège  à  une  profondeur  plus  grande  dans  l'écorce.  C'est  encore 
M.   Sanio   qui   a   étudié   ce    point   de   la  manière  la  plus  appro- 


ET    LA    FORMATION    DU    LIEGE    DANS    LES    DICOTYLEDONES.       149 

fondie.  Il  a  montré  que  le  liège  peut  se  former  à  tous  les  en- 
droits mentionnés^  en  des  points  différents  chez  des  plantes 
différentes^  mais  toujours  au  même  point  chez  une  même  plante  ^). 
Dans  sa  description  du  liège  il  partage  même  les  plantes  d'après 
ce  caractère,  quoiqu'il  reconnaisse  que  pour  l'étude  de  l'état 
adulte  et  de  la  vieillesse  de  la  plante  et  pour  donner  un  tableau 
aussi  complet  que  possible  du  développement  du  liège,  la  divi- 
sion la  plus  naturelle  est  celle  en  arbres  qui  ne  forment 
qu'une  seule  fois  du  liège  et  en  arbres  qui  en  produisent  indé- 
finiment. 

J'ai  examiné  les  faits  avec  soin  dans  un  grand  nombre  de 
plantes,  et  je  suis  heureux  de  pouvoir  confirmer  presque  toujours 
bs  résultats  de  M.  Sanio. 

Ainsi  que  lui,  j'ai  vu  les  premières  cellules  subéreuses  dans 
l'épiderme  lui-même  chez  plusieurs  Pomacées,  telles  que  Sorbus 
aucuparia,  Pyrus  commiinis,  P.  Malus  y  chez  le  Viburnum  Lantana 
et  chez  le  Daphne  Mezereum. 

Mais,    dans  la   grande   majorité   des   plantes,  j'ai   trouvé   les 


*)  M.  Duchartre  ne  s'exprime  pas  d'une  manière  tout  à  fait  exacte  lorsqu'il 
dit  {Eléments  de  botanique,  le  partie,  p.  155)  que  MM.  Schacht  et  Sanio  ont 
fait  connaître  la  formation  première  des  cellules  subéreuses,  et  ont  montré  que 
le  plus  souvent  les  cellules  de  l'épiderme  se  divisent  à  cet  effet  chacune  en  deux  par 
une  cloison  parallèle  à  la  surface  externe  de  la  tige;  mais  que  parfois,  d'après 
M.  Sanio,  la  rangée  extérieure  de  cellules  de  l'enveloppe  cellulaire  se  divise 
également  de  la  manière  indiquée.  Si  l'on  consulte  les  deux  auteurs  cités,  on 
trouve  chez  M.  Sachs  {Fflanzmzelle ,  p.  239).  „Le  liège  se  forme  primitivement 
dana  l'épiderme  ou  au-dessous^'  et  M.  Sanio  dit  en  termes  formels,  (Prings- 
heim's  Jahrb.  II,  p.  42).  „Ce  n'est  que  dans  des  cas  relativement  assez  rares 
que  le  liège  se  développe  dans  l'épiderme.  Il  est  beaucoup  plus  fréquent  de  le 
voir  naître  dans  l'enveloppe  cellulaire,  et  alors,  chez  la  très  grande  majorité  des 
plantes ,  dans  la  rangée  la  plus  externe  des  cellules  de  cette  partie  de  l'écorce. 
Chez  un  petit  nombre  d'espèces ,  au  contraire ,  il  prend  naissance  dans  la  seconde 
ou  la  troisième  rangée  des  dites  cellules ,  ou  même  encore  plus  profondément ,  etc." 
Ces  passages  ne  s'accordent  ni  l'un  ni  l'autre  avec  la  manière  dont  M.  Duchartre 
présente  les  opinions  des  deux  auteurs.  Ce  que  l'on  trouve  sur  ce  sujet  dans  le 
traité  de  M.  Oudemans  {Leerboek  der  plantenkunde ,  T.  II,  p.  421),  est  em- 
prunté presque  littéralement  à  M.  Duchartre,  avec  les  mêmes  inexactitudes. 


150     N.    W.    p.    RAUWENHOFF.    OBSERVATIONS    SUR    LES    CARACTERES 

premières  cellules  du  liège  dans  la  rangée  la  plus  externe  de 
cellules  de  l'enveloppe  cellulaire,  situées  immédiatement  sous 
l'épiderme.  C'est  ce  que  m'ont  offert  entre  autres  les  espèces 
suivantes:  Beliila  alha,  Fagus  sylvalicay  Alnus  gliilinosa,  Rhiis 
Cotinus,  R.  lyphinum  y  Tilia  grandi folia,  Popuhis  Iremula^  Ilex 
aquifolium,  Morus  nigra,  Aesculus  Hippocaslanum ,  Syringa  vul- 
garis,  Viburnum  opuhis ,  Quercus  pedunculala,  Q.  Ilex,  Q.  cas- 
tanea,  Q.  suher ,  Calycanlhus  floridus ,  Platanus  occidentalis , 
Corylus  avellana ,  Sambucus  nigra. 

Dans  quelques  cas,  comme  chez  la  plante  nommée  en  dernier 
lieu,  les  cellules-mères  sont  passablement  grandes  et  leur  pre- 
mière division  est  facile  à  constater  ;  ailleurs  au  contraire ,  comme 
dans  le  genre  Quercus,  le  phénomène  échappe  facilement  à 
l'observation. 

Chez  certaines  plantes,  qui  ont  une  cuticule  épaisse ,  telles  que 
Ilex  aquifolium,  la  formation  du  liège  commence  tard,  de  sorte 
que  plusieurs  naturalistes  (par  ex.  Schacht,  Anat.  u.  Phys.  d.  Gew., 
I,  291),  se  trompant  à  cet  égard,  ont  annoncé  à  tort  qu'il  ne  s'en  déve- 
loppe pas  du  tout.  Chez  d'autres  végétaux,  tels  que  Aesculus  Hippo- 
caslanum, on  ne  saurait  arriver  trop  tôt,  si  l'on  veut  épier  les  pre- 
mières phases  de  la  production  subéreuse.  Longtemps  avant  que 
le  nouveau  jet,  formé  au  printemps,  ait  atteint  toute  sa  longueur , 
il  s'est  développé  une  couche  de  liège  composée  de  plusieurs 
rangées  de  cellules. 

Dans  quelques  cas  peu  nombreux,  le  liège  apparaît  à  une 
plus  grande  profondeur  dans  le  tissu  de  l'enveloppe  cellulaire.  Les 
Légumineuses  semblent  être  particulièrement  remarquables  sous 
ce  rapport.  M.  Sanio  a  observé  le  phénomène  chez  le  Robinia 
Pseudo- Acacia,  le  Cytisus  Laburnum  et  le  Gleditschia  triacanlhos. 
En  ce  qui  concerne  le  Robinia,  j'ai  montré  ailleurs  {Kruidk. 
Archief,  1859,  T.  V,  p.  1—28)  avec  détail,  que  la  division  se 
fait  dans  la  2e  rangée  de  cellules,  et  dans  la  3e  ou  4e  rangée, 
là  où  existent  les  côtes  saillantes  de  la  tige.  Plus  tard,  j'ai 
trouvé  exactement  la  même  chose  dans  le  Glycine  chinensis.  Chez 
le    Cytisus   Laburnum   au   contraire,    qui   ne  possède  pas  de  ces 


ET    LA    FORMATION    DU     LIEGE    DANS    LES    DICOTYLEDONES.       151 

côtes,   les   cellules   subéreuses  naissent,  sur  toute  la  périphérie, 
dans  la  2e  rangée. 

Parfois  même  le  siège  de  la  première  formation  du  liège  s'en- 
fonce encore  plus  profondément  dans  le  tissu  de  la  plante;  c'est 
ainsi  qu'il  se  trouve  à  la  limite  interne  de  Fécorce  primaire, 
immédiatement  au-dedans  d'une  rangée  de  grandes  cellules  polyé- 
driques à  parois  épaisses ,  chez  le  Berheris  vulgaris,  le  Ribes  rubrum 
et  le  Lonicera  Caprifolimn  ,  ou  immédiatement  contre  les  faisceaux 
libériens,  comme  dans  le  Rubus  Idaeus. 

Enfin ,  il  arrive  aussi  que  le  premier  liège  se  forme  dans  l'écorce 
secondaire,  par  exemple  chez  le  Philadelphus  coronarius  et  le 
Vitis  vinifera;  pour  cette  dernière  plante,  le  fait  a  été  décrit  et 
figuré  exactement  et  dans  tous  ses  détails  par  M.  Hanstein. 
(Unters.  û.  d.  Bau  u.  d.   Entw.  d.  Baumrindey  p.  61 — 71). 

Une  circonstance  qui  mérite  encore  d'être  signalée,  c'est 
rinègalitè  d'origine  des  cellules  subéreuses  dans  les  tiges  à 
côtes  saillantes.  Chez  les  autres  plantes  on  voit  constamment, 
sur  toute  la  circonférence,  le  liège  prendre  naissance  à  la  même 
distance  sous  l'épiderme  ou  dans  l'épiderme  lui-même,  quoiqu'il 
ne  soit  pas  rare  que  la  formation  du  liège  commence  à  un 
côté  de  la  tige  plus  tôt  qu'à  l'autre.  Dans  les  végétaux  à  côtes 
saillantes,  il  n'en  est  plus  de  même.  J'ai  déjà  fait  remarquer 
tout  à  l'heure  que,  chez  le  Robinîa  Pseudo-Acacia ^  la  formation 
du  liège  commence,  au-dessous  des  côtes,  à  une  plus  grande 
profondeur  que  dans  les  points  situés  à  côté.  La  chose  se  voit 
encore  beaucoup  mieux  chez  le  Larix  europaea ,  où  les  côtes  sont 
plus  proéminentes.  Ici  le  liège  apparaît,  au-dessous  des  côtes, 
dans  la  4e  ^u  5e  rangée  de  cellules,  et,  à  la  limite  des  côtes, 
dans  la  le  rangée,  de  sorte  que  l'anneau  des  cellules  subéreuses 
forme  un  cercle  qui  finit  par  isoler  toute  la  série  des  côtes.  Un 
fait  analogue  a  été  observé  et  décrit  par  M.  Sanio  chez  le 
Casuarina  torulosa,  et  j'ai  retrouvé  la  même  disposition  dans  les 
Casuarina  quadrivalvis  et  stricia.  Quelques  faisceaux  libériens ,  qui 
chez  ces  plantes  se  trouvent  dans  les  côtes,  sont  isolés  de  cette 
manière  par  les  premières  couches  subéreuses. 


152     N.    W.    p.    RAUWENHOFF.    OBSERVATIONS    SUR    LES    CARACTERES 

Tout  ce  qui  vient  d'être  dit  s'applique  exclusivement  aux  cel- 
lules subéreuses  qui  se  forment  en  premier  lieu  et  qui  se  rencontrent 
dans  la  tige  d'une  manière  normale.  Dans  des  circonstances  anor- 
males et  à  un  âge  plus  ou  moins  avancé,  la  plante  produit  du 
liège  aux  points  les  plus  divers. 

Pour  ce  qui  regarde  les  progrès  de  l'âge ,  on  sait  comment  les 
couches  subéreuses  meurent  successivement  au  côté  externe,  et 
s'accroissent  à  l'intérieur  par  la  formation  de  nouvelles  cellules. 
Chez  quelques  arbres,  tels  que  le  Fagus  silvaticaj  cela  continue 
ainsi  pendant  très  longtemps;  mais,  finalement,  il  se  forme  aussi 
de  nouvelles  couches  de  liège  plus  à  l'intérieur  du  tissu,  analo- 
gues à  celles  qui  apparaissent  dans  un  temps  beaucoup  plus 
court  chez  le  Chêne,  le  Peuplier  et  d'autres  arbres.  D'après  cette 
considération,  M.  de  Mohl  les  avait  déjà  distinguées  sous  le  nom 
de  Borke  ou  rhijtidome.  Ces  nouvelles  couches  subéreuses  se  relient 
aux  premières  par  leurs  extrémités,  et  de  cette  manière  elles 
isolent  une  partie  de  Técorce  qui  alors  se  dessèche  rapidement 
et  éprouve  des  altérations  chimiques,  par  suite  desquelles,  entre 
autres ,  la  réaction  de  la  cellulose  cesse  de  pouvoir  être  observée. 
Successivement,  des  couches  de  liège  se  forment  en  des  points 
de  plus  en  plus  profonds  de  l'écorce  primaire ,  puis  elles  envahis- 
sent l'écorce  secondaire,  de  sorte  que,  finalement,  une  partie  des 
fibres  libériennes  est  également  rejetée  en  dehors;  à  l'extérieur, 
les  parties  plus  anciennes  se  fendent  et  se  déchirent,  et  donnent 
à  la  surface  des  arbres  leur  aspect  rugueux  bien  connu  (Schup- 
penhorhe).  Ou  bien,  il  se  forme  de  temps  en  temps,  à  l'intérieur , 
de  nouveaux  anneaux  de  liège,  indépendants  des  couches  plus 
extérieures,  et  chaque  fois  tout  un  anneau  de  parties  libériennes 
est  séparé  du  reste  de  l'écorce;  c'est  ce  qui  se  voit  par  exemple 
chez  la  Vigne  (Ringelborke,  Hanstein). 

Les  modifications  remarquables  que  subissent  les  parties  ainsi 
isolées  de  l'écorce,  surtout  celles  de  l'écorce  secondaire ,  méritent 
aussi  de  fixer  l'attention.  Ces  modifications  n'ont  pas  toujours 
été  appréciées  exactement  et  elles  ont  donné  lieu  à  des  erreurs. 
C'est  ainsi  que  M.  Wigand,  dans  un  mémoire  d'ailleurs  fort  inté- 


ET    LA    FORMATION    DU    LIEGE    DANS    LES    DICOTYLEDONES.       153 

ressant  (Ueber  die  Desorganisation  der  Pffansenzelle:  voir  Prings- 
heim's  Jahrh.j  IIÏ,  p.  115 — 182),  a  décrit  sous  le  nom  de //orw- 
hasi  ou  Hornprosenchym  (prosenchyme  corné)  un  tissu  prétendue- 
ment  nouveau.  M.  Oudemans  a  réclamé  (Bot.  Zeit.,  1862,  p.  43) 
la  priorité  de  cette  découverte,  en  rappelant  qu'il  avait  décrit  et 
figuré  les  particularités  de  ce  tissu  à  l'article  du  Cortex  canellae  albae, 
dans  ses  Aanteekeningen  op  de  Pharmacop.  Neerlandica  ;  mais  qu'il 
n'avait  pas  jugé  nécessaire  de  donner  à  ce  tissu  un  nom  spécial , 
parce  qu'il  devait  être  rapporté  aux  fibres  libériennes.  M.  Oude- 
mans demande  à  M.  Wigand  quels  seront  les  caractères  de  ce 
prosenchyme  corné ,  attendu  que ,  parmi  ceux  qui  ont  été  indiqués ,  les 
uns  manquent  dans  certaines  plantes  et  les  autres  dans  d'autres  plantes. 

Mais  il  paraît  avoir  échappé  aux  deux  auteurs  qu'on  n'a  nul- 
lement afi'aire  ici  à  un  tissu  nouveau,  non  encore  décrit,  mais 
à  une  modification  des  cellules  grillagées  de  l'écorce  secondaire, 
modification  qui  se  produit,  avec  plus  ou  moins  de  rapidité,  par 
l'effet  de  la  pression  à  laquelle  ces  cellules  sont  soumises  durant 
et  après  leur  croissance,  eu  égard  d'ailleurs  à  la  solidité  des 
parois  et  à  la  quantité  du  contenu  liquide.  Dans  l'écorce  se- 
condaire à  groupes  irrégulièrement  placés  de  fibres  libériennes 
épaissies,  l'assemblage  de  parois  rapprochées  entre  elles,  plissées 
et  parfois  plus  ou  moins  soudées,  affectera  une  disposition  irré- 
gulière, comme  on  le  voit  chez  beaucoup  d'espèces  de  Prunus. 
C'est  pourquoi,  dans  les  couches  anciennes  du  liber,  l'origine  de 
ce  prétendu  prosenchyme  corné  n'est  pas  toujours  facile  à  recon- 
naître; mais  si  l'on  choisit  une  écorce  à  cellules  et  à  fibres  pla- 
cées en  couphes  régulières,  et  si  l'on  examine  le  liber  tant  dans 
ses  parties  les  plus  jeunes  que  dans  les  plus  âgées,  on  aperçoit 
aisément  que  ce  que  M.  Wigand  a  signalé  comme  un  tissu  nouveau 
se  compose  simplement  de  cellules  treillisées  et  d'autres  cellules 
allongées. 

Déjà  en  1859,  j'ai  fait  connaître  ce  tissu  dans  ma  description 
de  l'écorce  du  Robinia  Pseudo- Acacia,  citée  ci-dessus.  Qu'on  me 
permette  de  reproduire  ici  le  passage  suivant  de  ce  mémoire  {Ned. 
Kruidk.  Archief ,  T.  V,  p.  23),  à  ce  qu'il  parait,  peu  connu: 


154     N.    W.    p.    RAUWENHOFF.    OBSERVATIONS    SUR    LES    CARACTERES 

„Daiis  les  couches  les  plus  âgées  ou  les  plus  extérieures  de 
cette  partie  (l'écorce)  on  trouve^  entre  les  cellules  parenchyma- 
teuses  qui  joignent  immédiatement  le  faisceau  libérien,  une  ou 
plusieurs  raies  incolores,  qui  ont  l'aspect  de  cellules  serrées  Tune 
sur  l'autre,  dont  le  contenu  aurait  disparu  et  dont  les  parois  for- 
tement pressées  se  seraient  plus  ou  moins  soudées  entre  elles.  A 
mesure  qu'on  examine  des  couches  plus  jeunes,  ces  aggloméra- 
tions se  disjoignent  et  laissent  déjà  çà  et  là  des  ouvertures  entre 
leurs  éléments.  Si  Ton  arrive  dans  des  parties  encore  plus  récen- 
tes ,  on  voit  les  amas  en  question  se  résoudre  peu  à  peu  en  parois 
d'une  forme  légèrement  irrégulière  et  sinueuse.  Enfin,  entre  les 
troisième,  quatrième  et  cinquième  rangées  de  faisceaux  libériens, 
comptées  à  partir  de  l'intérieur,  on  reconnaît  un  tissu  de  cellu- 
les larges,  à  parois  minces,  parmi  lesquelles  se  trouvent  d'autres 
cellules  également  à  parois  minces,  mais  plus  étroites.  C'est  dans 
la  troisième  rangée  que  ces  cellules  se  voient  le  plus  distincte- 
ment, et  elles  y  ont  un  contenu  jaune  clair,  coagulé  en  une 
masse  unique. 

Si  l'on  étudie  ensuite  cette  même  partie  de  l'écorce  sur  une 
coupe  longitudinale  radiale,  on  rencontre,  dans  les  couches  les 
plus  anciennes ,  les  mêmes  amas  d'éléments  confondus  et  non  dis- 
cernables. Dans  les  parties  plus  jeunes  ces  amas  deviennent 
moins  serrés,  et  dans  les  troisième  et  quatrième  rangées,  désig- 
nées ci-dessus,  on  voit  clairement  que  les  amas  sont  formés  des 
cellules  treillisées  de  M.  de  Mohl  ou  tubes  cribreux  deM.  Hartig, 
dont  le  fin  treillissage  se  distingue  surtout  aux  extrémités. 

En  suivant  ainsi  le  développement  des  éléments  à  parois  min- 
ces du  liber ,  et  les  étudiant  dans  leurs  états  successifs ,  il  devient 
donc  évident  que  les  raies  énigmatiques ,  jaunes  ou  parfois  jaune - 
brunâtres,  qu'on  rencontre  dans  la  vieille  écorce  du  Robinia, 
ne  peuvent  être  auti-e  chose  que  les  restes,  chimiquement  et 
physiquement  modifiés,  des  parois  des  tubes  cribreux  et  des  fibres 
séveuses. 

J'insiste  un  peu  sur  ce  point  parce  que  M.  Hartig,  le  seul  qui 
à   ma  connaissance   ait  fait   mention   de   ces  raies,  en  a  donné 


ET    LA    FORMATION     DU    LIEGE    DANS    LES    DICOTYLEDONES.       155 

une  interprétation  fausse.  Dans  ses  écrits  il  professe  que  les  raies 
en  question  (dont  il  a  aussi  très  bien  reconnu  l'existence  dans 
les  genres  Piniis  et  Acer)  doivent  être  regardées  comme  les  cel- 
lules-mères d'une  couche  de  liège,  bien  que  sa  description  elle- 
même  l'ait  presque  conduit  à  la  vérité.  Il  les  décrit  en  effet 
comme:  „des  stratifications  verticales,  irrégulières,  d'une  masse 
ayant  l'apparence  de  membranes  soudées  entre  elles";  mais,  chose 
assez  singulière,  il  les  appelle  „ couche  génératrice  du  liège". 
D'après  l'ensemble  de  mes  observations  toutefois,  les  minces 
couches  subéreuses  du  liber,  dans  le  Robinia  et  dans  d'autres 
espèces  ligneuses,  naissent  constamment  de  cellules  parenchyma- 
teuses,  tandis  que  les  amas  membraneux  jaunes  ne  sont  rien 
autre  chose  que  les  parois  affaissées  des  cellules  treillisées,  qui 
n'ont  qu'une  faible  consistance." 

Voilà  ce  que  j'écrivais  en  1859.  Après  avoir  étudié  ces  jours-ci 
la  question  de  nouveau,  et  avoir  comparé  avec  soin  mes  prépa- 
rations de  cette  époque  et  celles  d'une  date  postérieure,  j'ai  trouvé 
mes  vues  d'alors  entièrement  confirmées. 

Janvier  1870. 


SUR  LES  CRISTALLITES 

ETUDES   CUISTALLOGENÉTIQUES , 


H.  VOGBLSANG. 


Introduction. 

Les  recherches  et  »les  considérations  théoriques  dont  il  sera 
question  dans  ce  Mémoire  et  dans  quelques  autres  qui  le  suivront, 
touchent  un  sujet  pour  lequel  il  est  à  peine  nécessaire  d'invoquer 
spécialement  l'intérêt  du  naturaliste  philosophe.  Comprendre  le 
mode  de  naissance  et  de  développement  des  cristaux,  et  fixer  les 
lois  empiriques  auxquelles  les  individus  inorganiques,  dans  leurs 
innombrables  transformations,  ne  cessent  d'obéir,  ce  sont  là 
des  problèmes  qui,  en  signification  profonde  pour  les  sciences 
naturelles,  ne  le  cèdent  guère  qu'aux  questions  concernant  l'ori- 
gine et  l'évolution  de  la  vie  à  la  surface  du  globe.  Mais,  si  le 
problème  lui-même  peut  se  passer  de  recommandation,  il  en  est 
tout  autrement  de  chaque  nouvelle  tentative  faite  pour  en  obtenir 
la  solution.  D'une  part,  en  effet,  on  doit  reconnaître  que  les 
travaux  consciencieux  et  pénibles  d'un  grand  nombre  de  savants 
distingués  n'ont  fourni  que  bien  peu  de  points  d'appui  fixes  pour 
ces  questions  importantes;  et,  d'autre  part,  on  ne  saurait  oublier 
les  résultats  malheureux  de  tous  les  essais  ayant  eu  pour  but  de 
fonder  une  théorie  satisfaisante  sur  des  combinaisons  spéculatives 
hasardées.  Ce  double  insuccès  a  produit,  chez  la  plupart  des  na- 
turalistes qui  font  entrer  la  cristallographie  dans  le  cercle  de 
leurs  études,  une  certaine  froideur  et  une  défiance  légitime  à 
l'égard  de  toutes  les  tentatives  théoriques  de  ce  genre. 


H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRIST ALLITES.  157 

Ce  que  j'ai  à  craindre  toutefois  pour  mes  recherches,  ce  n'est 
pas  qu'on  les  accueille  avec  trop  de  défiance,  mais  plutôt  qu'elles 
ne  donnent  lieu  à  une  attente  exagérée;  car  les  observations 
auxquelles  m'a  conduit  un  heureux  hasard  pourraient  de  prime- 
abord;  par  leur  caractère  frappant  de  simplicité,  faire  naître  des 
espérances  dont  on  chercherait  en  vain  la  réalisation  dans  la  suite 
de  mon  travail. 

J'espère  échapper  à  ce  danger  en  indiquant  brièvement  le 
point  de  départ  et  la  direction  de  mes  recherches.  Tous  les 
travaux  relatifs  à  la  théorie  de  la  formation  des  cristaux , 
pour  autant  qu'ils  ne  tombaient  pas  dans  le  domaine  de  la 
cristallographie  descriptive,  ont  suivi  essentiellement  une  double 
voie.  Ou  bien  on  a  considéré  les  cristaux  dans  leur  ensemble, 
sans  égard  à  leur  développement  individuel,  et  on  a  cher- 
ché à  expliquer  les  conditions  et  les  limites  de  la  cristallisa- 
tion en  général,  la  possibilité  ou  la  nécessité  théorique  des  diffé- 
rents systèmes  cristallins,  et  les  lois  remarquables  que  la  cristal- 
lographie descriptive  a  découvertes  dans  les  relations  des  axes  et 
des  paramètres  ;  ou  bien ,  s'attachant  à  la  considération  des  indi- 
vidus cristallins  eux-mêmes ,  on  s'est  appliqué  à  saisir  les  rapports 
entre  leurs  attributs  les  plus  importants ,  la  forme  cristalline  et 
la  composition  chimique,  et  on  s'est  proposé  de  construire  en 
quelque  sorte  une  formule  de  cristallisation,  dont  les  divers  ter- 
mes devaient  représenter  des  propriétés  caractéristiques  déterminées , 
et  qui,  dans  sa  forme  la  plus  générale,  devait  aussi  fournir 
l'expression  du  principe  même  de  la  cristallisation.  Comme  ré- 
sultat essentiel  des  recherches  poursuivies  dans  cette  voie  induc- 
tive,  on  doit  regarder  la  doctrine  de  l'isomorphisme.  Les  études 
qui  suivaient  la  première  direction  partaient  d'hypothèses  philo- 
sophiques générales,  et  se  mouvaient  de  préférence  sur  le  terrain 
de  l'abstraction  mathématique  ;  beaucoup  plus  rarement  elles  s'adres- 
saient à  l'expérience  et  cherchaient  à  ouvrir  de  nouveaux  points 
de  vue  dans  le  domaine  des  faits.  Or,  bien  que  les  déductions 
mathématiques  sur  le  groupement  régulier  des  points  matériels 
soient   de    la   plus   haute   importance   pour   l'explication    des  lois 


158  H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES. 

cristallographiques  et  pour  la  délimitation  des  différents  systèmes, 
bien  que  d'autres  théories  cristallogénétiques  ne  puissent  évidem- 
ment trouver  leur  expression  complète  et  définitive  que  dans  les 
formes  abstraites  de  la  mécanique  analytique,  il  est  certain  que 
tous  les  travaux  qui  ont  pour  but  de  fixer  les  démarcations  entre 
les  individus  cristallins,  d'approfondir  les  relations  réciproques 
entre  les  propriétés  morphologiques,  physiques  et  chimiques,  de- 
vront continuer  à  s'attacher  à  l'étude  objective  comme  à  leur 
base  nécessaire.  C'est  seulement  par  l'observation  matérielle,  que 
nos  vues  sur  la  signification  physico-chimique  des  plus  petites 
particules  cristallines  ou  sur  les  conditions  et  modifications  de 
la  naissance,  de  l'accroissement  et  du  groupement  régulier  des 
cristaux,  pourront  s'élever  au  dessus  de  la  condition  d'hypothèses 
précaires.  Jusqu'ici  toutefois,  les  expériences  et  les  observations 
ont  été  extrêmement  rares,  et,  en  présentant  mes  propres  recher- 
ches, je  crois  devoir  faire  remarquer  expressément  qu'elles  n'ont 
aucun  rapport  avec  les  travaux  antérieurs  sur  le  même  sujet,  et 
qu'elles  ne  doivent  nullement  leur  origine,  comme  la  plupart  de 
ceux-ci,  à  des  considérations  et  des  tendances  théoriques. 

La  plupart  des  recherches  cristallogénétiques  expérimentales 
partent  de  la  supposition  que  les  premiers  groupements  et  trans- 
formations des  plus  petites  parties  cristallines  ne  sont  pas  acces- 
sibles à  l'observation  directe;  elles  s'en  tiennent  donc  toujours  aux 
cristaux  déjà  achevés,  et  elles  étudient  les  modifications  de  la 
croissance  et  des  combinaisons  dans  leurs  rapports  avec  la  nature 
physico-chimique  du  dissolvant.  Mon  travail  renferme  une  série 
d'observations  par  lesquelles  l'hypothèse  en  question ,  dans  sa  forme 
générale,  se  trouve  réfutée;  il  a  essentiellement  pour  but  de 
suivre  dans  ses  phases  successives,  dans  son  origine  et  dans  son 
développement,  un  état  préliminaire  remarquable  de  la  forme 
cristalline,  que  le  hasard  m'a  fait  connaître. 

D'après  cela,  je  crois  pouvoir  me  dispenser  de  parler  des  tra- 
vaux antérieurs,  vu  qu'ils  appartiennent  à  un  tout  autre  ordre 
de  recherches.  Je  n'en  mentionnerai  qu'un  seul,  dans  lequel  le 
sujet  a  été'  considéré  à  un  point  de  vue  analogue  au  mien  ;  c'est 


R.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES.  159 

un  Mémoire  peu  étendu  de  H.  F.  Link  :  Ueber  die  erste  Entstehung 
der  Kry stalle;  Poggendorff's  Annal. ^  XLVI,  1839.  Link  a  observé 
sous  le  microscope  ;  au  moment  de  leur  formation,  des  précipités 
chimiques  de  carbonate  de  chaux  et  d'autres  combinaisons;  il  est 
parvenu  de  cette  manière  aux  résultats  suivants: 

P.  Que  tous  les  précipités,  qu'ils  passent  ultérieurement  à 
l'état  cristallin  ou  non,  se  composent  primitivement  de  corpus- 
cules sphériques. 

2°.  Que  ces  corpuscules  sphériques  ne  sont  nullement  solides, 
mais  qu'ils  se  réunissent  et  se  confondent  manifestement  entre  eux. 

3°.  Que  c'est  seulement  après  cette  fusion  en  masses  plus 
grandes,  que  la  force  de  cristallisation  propre  à  la  substance 
s'éveille  et  donne  naissance  à  un  corps  solide,  symétrique. 

Je  donne  ces  conclusions  telles  que  je  les  trouve;  jusqu'à  un 
certain  point  elles  sont  confirmées  par  mes  propres  résultats, 
comme  on  le  verra  dans  la  suite.  Du  reste,  les  recherches  de 
Link  étaient  loin  de  pouvoir  justifier  l'admission  de  conclusions 
aussi  générales;  aussi  M.  Frankenheim,  dans  son  dernier  grand 
Mémoire  (Poggend.  Ann.,  XXI,  1860)  les  a-t-il  critiquées  avec 
raison,  bien  qu'il  ne  les  ait  pas  réfutées  sur  tous  les  points.  En 
tout  cas,  les  observations  de  Link  sont  insuffisantes,  et  son  as- 
sertion, que  les  globules  en  question  sont  des  vésicules  creuses 
„comme  des  bulles  de  savon"  n'est  nullement  motivée  et,  de 
plus,  nullement  nécessaire  pour  sa  théorie. 

Les  recherches  expérimentales  de  M.  Frankenheim  concernent 
presque  uniquement  la  croissance  et  le  groupement  de  cristaux 
déjà  formés.  L'auteur  appelle  le  microscope  à  son  aide,  et,  dans 
le  Mémoire  qui  vient  d'être  cité,  il  rapporte  aussi  quelques  obser- 
vations qui,  au  premier  abord,  paraissent  se  rapprocher  des 
miennes;  il  opère  en  effet,  comme  moi,  sur  des  dissolutions  de 
soufre  et  de  phosphore.  Mais  il  n'a  d'autre  but  que  de  montrer 
la  formation  de  gouttes  sursaturées;  il  ne  s'est  pas  attaché  à 
entraver  ou  à  ralentir  la  cristallisation,  et,  pas  plus  chez  lui 
que  chez  Link,  il  n'est  question  d'une  tendance  à  l'individuali- 
sation  de   ces   éléments  sphériques,  ni  de  leur  groupement  régu- 


160  H.    VOGELSANG.    SUR    LES    GRISTALLITES. 

lier.  Je  reviendrai  plus  tard  sur  quelques-uns  des  points  touchés  dans 
ce  Mémoire.  En  somme,  il  n'offre  avec  mon  travail  qu'un  rapport 
éloigné  et  superficiel,  et  ce  rapport  je  ne  l'ai  aperçu  qu'après 
coup,  lorsqu'une  autre  voie  m'eut  conduit  aux  mêmes  observations. 
En  insistant  ainsi  sur  l'indépendance  de  mes  recherches ,  je 
n'entends  d'ailleurs  élever  aucune  prétention  au  sujet  de  l'origi- 
nalité des  idées  théoriques  auxquelles  elles  m'ont  conduit  et  aux- 
quelles elles  doivent  servir  d'appui.  Le  principe  si  simple,  que  la 
formation  des  cristaux  dépend  d'une  action  mécanique  réciproque  des 
plus  petites  parties ,  a  déjà  été  invoqué  si  souvent  et  pour  des  con- 
sidérations théoriques  si  diverses,  qu'il  serait  difficile  de  remonter 
jusqu'à  l'origine  première  de  cette  théorie,  qui  se  perd  dans 
les  ténèbres  des  spéculations  métaphysiques.  Quant  aux  vues  mo 
dernes  relatives  à  ce  sujet,  j'aurai  l'occasion  de  les  rappeler  à 
la  fin  de  mon  travail,  dans  la  section  qui  traitera  des  consé- 
quences théoriques. 

On  peut  appeler  cnstalliies  toutes  les  productions  inorganiques 
dans  lesquelles  on  reconnaît  un  agencement  ou  un  groupement  régu- 
lier ,  mais  qui  ne  montrent  du  reste ,  ni  dans  leur  ensemble  ni  dans 
leurs  parties  isolées,  les  caractères  généraux  des  corps  cristallisés 
notamment  des  contours  polyédriques  réguliers. 

Les  cristallites  ne  doivent  donc  pas  être  regardés  comme  des 
cristaux  imparfaitement  limités,  déformés  ou  rudimentaires ,  tels 
qu'on  les  rencontre  si  fréquemment  parmi  les  produits  naturels 
ou  artificiels.  Dans  ceux-ci,  il  est  vrai,  la  forme  extérieure  n'offre 
souvent  presque  plus  de  trace  de  régularité;  mais  alors  le  clivage , 
les  caractères  de  l'élasticité,  nous  autorisent  encore  à  regarder 
ces  irrégularités  comme  des  altérations  secondaires  de  la  forme, 
ou  à  y  voir  le  résultat  de  combinaisons  oscillatoires,  de  groupe- 
ments réguliers  ou  irréguliers,  etc.  Un  fragment  de  clivage  d'un 
cristal  oblitéré  de  galène,  une  lamelle  d'un  cristal  arrondi  de 
gypse  ne  présentent  dans  leurs  caractères  physiques,  dans  leur 
structure  moléculaire,  rien  qui  les  distingue  d'autres  fragments 
tirés  de  cristaux  à  contours  parfaitement  réguliers. 


H.    VOGELSANG.    SUR    LES    GRISTALLITES.  161 

Nous  savons  qu'on  éprouve  quelque  embarras  à  formuler  une 
bonne  définition  positive  de  l'état  d'agrégation  amorphe,  vu  que 
le  développement  polyédrique  de  la  forme  extérieure^  le  clivage 
distinct,  l'inégalité  de  l'élasticité  suivant  différentes  directions;  sont 
bien  des  attributs  habituels,  mais  non  pas  absolument  nécessaires 
des  cristaux.  Néanmoins,  s'il  est  impossible  d'établir  sous  ce 
rapport,  même  à  l'aide  des  propriétés  optiques,  une  distinction 
tranchée,  personne  n'a  pourtant  jamais  hésité  à  appeler  amorphe 
un  corps  auquel  manquaient  tous  les  attributs  énumérés,  surtout 
quand  la  même  substance  n'était  pas  connue  en  cristaux  réguliers , 
ou  même,  en  général,  quand  on  ne  pouvait  pas  y  constater  une 
composition  stœchiométrique  constante.  Je  crois  devoir  prévenir 
que  ce  n'est  que  dans  ce  sens  strictement  exact  que  j'emploierai 
ce  mot,  sans  y  rattacher  aucune  idée  déterminée  concernant  la 
forme  ou  l'arrangement  des  plus  petites  parties  chimiques  ^  c'est- 
à-dire,  des  molécules  ou  des  atomes. 

De  même  que  les  résultats  de  l'expérience,  d'accord  avec  les 
théories  régnantes,  n'imposent  pas  une  limite  inférieure  déter- 
minée aux  dimensions  des  cristaux  proprement  dits,  de  même  le 
volume  des  cristallites  n'est  pas,  à  la  rigueur,  assujetti  à  une 
limite  supérieure;  néanmoins,  l'instabilité  des  conditions  requises 
dans  les  liquides  pour  que  les  cristallites  puissent  y  prendre  nais- 
sance et  s'y  développer,  aura  en  général  pour  effet  de  restreindre 
les  formes  à  des  dimensions  purement  microscopiques. 

On  ne  saurait  nier  toutefois  qu'il  ne  se  présente  ici  une  diffi- 
culté très  sérieuse.  Dans  la  constatation  des  propriétés  générales 
des  corps,  comme  dans  celle  de  leurs  formes  particulières,  nous 
sommes  bornés  par  les  limites  de  nos  facultés  perceptives,  et  la 
caractérisation  des  individus  devient  naturellement  d'autant  plus 
difficile  et  plus  incertaine  que  nous  nous  rapprochons  davantage 
de  ces  limites.  Pour  la  détermination  de  l'état  d'agrégation,  cette 
difficulté  n'a  pas  une  grande  importance  aussi  longtemps  qu'on  s'en 
tient  à  la  simple  opposition  de  cristallin  et  d'amorphe.  Mais  dès 
qu'entre  ces  deux  termes  extrêmes  on  veut  en  intercaler  un  ou 
plusieurs  autres,  destinés  à  marquer  certains  stades  de  transition, 

Archives  Néerlandaises,  T.  V.  11 


162  H.    VOGELSANG.    SUR    LES    GRISTALLITES. 

certains  degrés  de  développement  de  l'état  cristallin,  la  première 
condition  à  remplir  c'est  de  limiter  exactement,  d'un  côté  comme 
de  l'autre,  ces  termes  intermédiaires.  Or  si,  dans  maintes  cir- 
constances, l'état  de  développement  est  facile  à  reconnaître,  de 
sorte  qu'il  ne  reste  pas  de  doute  si  l'on  a  affaire  à  des  cristaux  ^ 
à  des  agrégats  cristallins  ou  à  des  cristallites ,  dans  beaucoup 
d'autres  cas  ce  doute  subsiste  bien  réellement,  et  doit  d'autant 
plus  être  pris  en  considération  que,  d'après  toutes  les  analogies 
naturelles,  on  ne  saurait  admettre  ici  à  priori  une  démarcation 
tranchée,  ni  par  conséquent  s'abstenir  de  la  constater  expérimen- 
talement. Les  cristallites  doivent  être  regardés  comme  des  cris- 
taux non  développés  y  embryonnaires  ;  quant  à  savoir  à  quel  point 
précis  de  l'évolution  nous  devons  abandonner  l'un  des  deux 
termes,  pour  nous  servir  de  l'autre,  c'est  une  question  qui  peut 
rester  indécise  provisoirement.  En  transportant  à  la  nature  nos 
distinctions  traditionnelles,  appropriées  aux  besoins  journaliers, 
nous  ne  faisons  qu'imposer  des  entraves  inutiles  au  libre  essor 
de  l'esprit. 

Du  reste,  l'incertitude  en  pareil  cas  ne  dépend  pas  directement 
de  doutes  laissés  par  l'observation;  il  ne  s'agit  pas  de  savoir  si 
les  formes  en  question  ont  ou  n'ont  pas  des  contours  nettement 
polyédriques,  et  encore  beaucoup  moins  si  elles  appartiennent  à 
tel  ou  tel  système  cristallin.  Nous  voyons  avec  pleine  évidence 
que  ces  caractères  décisifs  des  cristaux  entièrement  développés 
font  défaut,  et,  d'un  autre  côté,  nous  pourrons  constater,  d'une 
manière  indubitable,  que  des  formes  sphéroïdes,  conoïdes  ou  cy- 
lindroïdes  se  rencontrent  dans  les  vrais  cristallites.  Mais  cela  ne 
nous  autorise  nullement  à  conclure  que  partout  où  nous  trouvons 
des  configurations  arrondies,  indéterminées,  nous  ayons  affaire 
à  des  cristaux  imparfaitement  développés,  dans  le  sens  des 
cristallites;  de  même  qu'il  n'est  pas  permis  d'exclure  un  corps 
de  la  classe  des  cristallites,  par  cela  seul  qu'on  y  aura  observé 
par  exemple  des  joints  linéaires  ou  des  contours  aciculaires.  Les 
recherches  dont  j'ai  à  rendre  compte  tendent  plutôt  à  établir 
qu'il   n'existe   pas   et   qu'on  ne  doit  donc  pas  vouloir  tracer  une 


H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES.  163 

démarcation  tranchée  entre  les  cristallites  et  les  cristaux;  plus 
j'ai  étudié  les  phénomènes  dont  il  s'agit^  plus  j'ai  acquis  la  con- 
viction qu'ils  promettent  de  combler  peu  à  peu  l'intervalle  qui 
paraissait  séparer  les  divers  états  d'agrégation,  de  manière  à 
faire  apparaître  de  plus  en  plus,  ici  comme  partout  ailleurs;  la 
simplicité  de  la  marche  évolutive  de  la  nature. 

I.   Cristallites   du  soufre. 

Depuis  que  l'examen  microscopique  m'a  fait  découvrir ,  il  y  a  quel- 
ques années,  dans  une  scorie  de  haut-fourneau,  ces  productions 
remarquables  qui  se  présentent  comme  des  groupements  réguliers 
de  corpuscules  ayant  chacun  séparément  une  forme  sphéroïdale, 
mon  attention  a  été  constamment  tournée  vers  les  cristallites,  et 
j'ai  cherché  à  rassembler  de  nouveaux  faits  pour  donner  une  base 
suffisante  à  la  solution  des  graves  questions  auxquelles  ces  pro- 
ductions donnaient  lieu.  L'étude  de  nombreux  échantillons  de 
scories  et  de  verres  m'a  sans  doute  fourni  l'occasion  d'observer 
d'intéressantes  modifications  des  cristallites;  mais  il  était  presque 
impossible  de  cette  manière  d'arriver  à  des  notions  précises  sur 
leur  origine  et  leur  développement,  vu  que  les  matières  scoria- 
cées et  vitreuses,  comme  on  a  à  peine  besoin  de  le  dire,  ne  se 
prêtent  à  ces  recherches  minutieuses  qu'après  leur  entière  solidi- 
fication. Il  fallait  donc  avoir  recours  à  des  cristallisations  qui, 
se  faisant  en  l'absence  de  températures  élevées,  rendissent  pos- 
sibles les  observations  génétiques,  et  chercher  à  introduire  dans 
ces  cristallisations  les  conditions  auxquelles  était  due,  dans  les 
verres,  la  production  des  cristallites;  ce  ne  fut  qu'après  des 
recherches  longues  et  laborieuses  que  je  parvins  à  un  résultat 
satisfaisant.  Comme  les  observations  faites  dans  cette  nouvelle 
direction  facilitent  l'intelligence  de  ce  qui  se  passe  dans  les 
matières  siliciées,  et  comme  elles  ouvrent  des  points  de  vue 
particuliers  pour  la  formation  des  cristaux  en  général,  je  vais 
en  rendre  compte  avant  de  donner  la  description  des  cristallites 
qui   prennent  naissance  au  sein  des  verres  naturels  et  artificiels. 

L'étude   des   cristallites   des   scories   ne    m'avait  laissé    aucun 

11* 


164  H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES. 

doute  qu'ils  ne  dussent  principalement  leur  origine  à  ce  que  la 
séparation  d'une  combinaison  chimique  déterminée,  la  différenci- 
ation du  magme  total ,  était  accompagnée  de  la  solidification  pro- 
gressive de  ce  magma  dans  toutes  ses  parties ,  à  ce  que  le  milieu 
ambiant  amorphe  passait  de  l'état  liquide  à  l'état  solide  en  même 
temps  que  la  matière  cristallisante.  Le  milieu  amorphe  opposant 
par  ce  passage  une  certaine  résistance  à  la  manifestation  de  la 
forme  et  au  groupement  des  plus  petites  particules,  la  formation 
des  cristaux  pourra  être  arrêtée  et  fixée  dans  ses  divers  stades, 
et  le  degré  de  développement  auquel  les  individus  inorganiques 
s'offriront  à  l'observation  dépendra,  en  général,  du  rapport  entre 
la  force  de  cristallisation  de  la  substance  qui  se  sépare  et  la 
résistance  du  milieu  qui  l'entoure.  La  grandeur  de  cette  résis- 
tance est  déterminée  par  la  constitution  physico-chimique  du 
milieu;  il  y  a  à  tenir  compte  en  première  ligne  de  son  état 
d'agrégation  et  de  sa  densité;  mais  sa  nature  chimique,  l'apti- 
tude de  la  substance  à  cristalliser,  la  température  etc.  ont  aussi 
les  relations  les  plus  intimes  avec  la  grandeur  de  la  résistance. 
Le  problème  qui  s'imposait  à  l'étude  synthétique  du  sujet  était 
donc  celui-ci:  faire  cristalliser  une  substance  par  la  voie  humide, 
—  la  seule  qui  rende  possible  l'observation  des  phénomènes,  — 
en  lui  offrant,  sous  la  forme  d'un  corps  qui  se  solidifie  peu  à 
peu,  une  résistance  qui  puisse  ralentir  et  arrêter  dans  leur  libre 
cours  la  formation  et  le  groupement  des  plus  petites  parties  de 
la  substance  cristallisante.  Je  pensai  d'abord  que  la  manière  la 
plus  simple  d'atteindre  le  but  serait  de  mêler  des  dissolutions 
salines  avec  des  matières  colloïdales,  c'est-à-dire  avec  des  ma- 
tières n'ayant  pas  la  propriété  de  cristalliser;  mais  j'eus  beau 
essayer  les  substances  les  plus  diverses,  faire  varier  les  propor- 
tions et  la  température,  je  ne  parvins  de  cette  façon  à  aucun 
résultat  satisfaisant.  J'obtins  bien,  dans  les  cas  les  plus  favo- 
rables, des  productions  semblables  à  des  cristallites,  mais  toujours 
elles  étaient  déjà  à  un  état  de  développement  plus  avancé  et 
devaient  être  regardées ,  au  fond ,  comme  des  agrégats  de  cristaux. 
Le  plus  souvent,  la  séparation  et  la  solidification  du  sel  se  pro- 


H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES.  165 

duisaient  à  si  peu  d'intervalle  Fune  de  l'autre  ;  que  les  phéno- 
mènes de  cristallisation  ne  montraient  aucune  différence  essen- 
tielle avec  ceux  qu'on  observe  dans  les  dissolutions  aqueuses 
ordinaires.  Ces  résultats  négatifs  semblaient  indiquer  que  les 
phases  de  solidification  amenées  par  Tévaporation  de  l'eau  étaient, 
à  un  même  moment ,  trop  différentes  pour  la  combinaison  cristalli- 
sante d'une  part  et  pour  la  substance  colloïdale  de  l'autre;  de 
sorte  que  la  résistance  due  à  la  consistance  pectineuse  du  milieu 
était  y  au  moment  de  la  séparation ,  encore  excessivement  petite 
par  rapport  à  la  force  de  cristallisation  du  sel  employé.  Peut-être 
aussi  l'évaporation  de  l'eau,  à  la  température  ordinaire,  consti- 
tuait-elle pour  le  sel  séparé  un  mode  de  solidification  trop  lent, 
de  sorte  que  les  parties  pouvaient  se  grouper  régulièrement  avant 
l'isolement  complet  du  sel  et  que,  lors  de  la  disparition  des  der- 
nières traces  du  dissolvant,  la  séparation,  la  formation  et  le 
groupement  des  particules  cristallines  semblaient,  pour  l'observa- 
teur, avoir  lieu  dans  un  seul  et  même  instant.  En  donnant  cette 
explication,  j'anticipe  sur  certaines  vues  qui  ne  trouveront  leur 
justification  que  dans  les  expériences  qui  seront  décrites  plus  tard. 
J'étais  donc  conduit  à  faire  choix  de  substances  telles  que, 
l'évaporation  du  liquide  dissolvant  se  faisant  avec  plus  de  rapi- 
dité, l'agent  enrayeur  conservât  pourtant  la  consistance  convenable. 
Il  est  inutile  de  rappeler  tous  les  essais  infructueux  auxquels  je 
me  livrai.  Si  la  patience  ne  m'abandonna  pas ,  il  faut  l'attribuer 
en  partie  à  l'attrait  spécial  que  présente  l'observation  des  phé- 
nomènes si  variés  de  la  cristallisation,  en  partie  aussi  à  la  con- 
viction dont  j'étais  animé  q'il  s'agissait  de  réaliser  un  état  anormal, 
difficile  à  saisir.  Finalement,  je  trouvai  dans  la  dissolution  du 
soufre  dans  le  sulfure  de  carbone,  avec  une  matière  résineuse 
(baume  du  Canada)  pour  agent  de  résistance ,  le  mélange  désiré. 
Les  autres  corps  solubles  dans  le  sulfure  de  carbone,  notamment 
le  phosphore  et  l'iode,  n'offrirent  pas  autant  d'avantages  que  le 
soufre.  Tous  les  deux  possèdent  une  force  de  cristallisation  beau- 
coup moindre  ;  avec  le  phosphore ,  les  manipulations  sont  en  outre 
trop   incommodes.   Sous  d'autres  rapports,  il  sera  peut-être  utile 


166  H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES. 

plus  tard  de  comparer  entre  elles  des  substances  différentes.  Mais 
ici,  où  il  ne  s'agit  que  d'apprendre  à  connaître,  sur  un  corps 
quelconque  bien  cristallisable ,  l'influence  d'un  agent  de  résistance , 
je  me  borne  à  décrire,  dans  toutes  les  modifications  que  j'ai  ob- 
servées, le  cas  spécial  indiqué  ci-dessus.  Je  ne  puis  qu'engager 
le  lecteur  à  exécuter  une  couple  d'essais  très  simples ,  pour  prendre 
une  idée  nette  des  phénomènes.  A  cette  fin,  je  donnerai  aussi 
exactement  que  possible  la  manière  de  composer  le  mélange,  de 
sorte  qu'on  pourra  être  passablement  sûr  d'obtenir,  sans  beaucoup  de 
peine ,  des  préparations  très  instructives.  Il  y  a  deux  points  prin- 
cipaux auxquels  ou  doit  avoir  égard ,  savoir,  le  degré  de  consistance 
ou  de  viscosité  du  baume  du  Canada  et  la  proportion  du  soufre 
relativement  à  celle  de  cet  agent  de  résistance;  le  rapport  entre 
la  quantité  de  sulfure  de  carbone  et  celle  des  deux  autres  éléments 
est  de  moindre  importance.  Jusqu'à  un  certain  point,  on  est  tou- 
jours réduit  à  faire  des  essais  successifs;  le  mieux  sera,  d'après 
mon  expérience,  de  procéder  de  la  manière  suivante. 

Dans  un  petit  vase  pouvant  être  couvert  —  un  petit  creuset  de 
porcelaine,  auquel  on  a  donné  de  la  stabilité  en  le  mastiquant 
sur  une  planchette,  convient  très  bien  —  on  met  environ  un 
demi-centimètre  cube  de  baume  du  Canada  avec  un  volume 
double  de  sulfure  de  carbone ,  et  on  mélange  les  deux  substances 
intimement  à  l'aide  d'une  baguette  de  verre.  On  obtient  ainsi 
un  liquide  parfaitement  limpide  et  sans  viscosité.  D'autre  part, 
on  dissout  un  fragment  de  soufre,  de  la  grosseur  d'un  petit  pois, 
dans  trois  ou  quatre  fois  son  volume  de  sulfure  de  carbone, 
et  on  verse  cette  dissolution  dans  le  liquide  précédent.  Le  mélange 
ainsi  préparé,  on  en  porte,  à  l'aide  d'une  baguette  de  verre  bien 
propre,  quelques  gouttes  sur  un  porte-objet,  pour  les  observer  au 
microscope,  sous  un  grossissement  de  100  à  200  fois.  Après  chaque 
essai,  la  baguette  de  verre  doit  être  nettoyée,  afin  que  le  soufre 
qui  s'y  est  déposé  ne  vienne  pas  en  contact  avec  le  liquide;  ce 
nettoyage  s'opère  facilement  lorsque,  entre  les  essais,  la  baguette 
est  maintenue  dans  un  petit  flacon  rempli  d'alcool  ;  on  peut  alors 
l'essuyer  commodément  avec  un  linge.  Pour  corriger  le  mélange, 


H.     VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES.  167 

quand  cela  est  reconnu  nécessaire ,  on  se  sert ,  non  pas  directement 
du  soufre  ou  du  baume  du  Canada  ^  mais  de  leur  dissolution  ou 
mélange  avec  le  sulfure  de  carbone.  Si  la  cristallisation  marche 
trop  rapidement,  de  sorte  qu'on  ne  peut  en  suivre  les  stades 
successifs  et  qu'il  ne  se  forme  que  de  vrais  cristaux  ou  agrégats 
de  cristaux  7  on  ajoute  peu  à  peu  du  mélange  de  baume  du 
Canada  ;  si  au  contraire  la  cristallisaton  s'arrête  dans  le  premier 
stade ,  de  façon  qu'il  ne  se  produit  aucune  espèce  de  groupement 
ou  de  transformation ,  on  ajoute  goutte  à  goutte  de  la  dissolution 
de  soufre;  lorsque  le  baume  du  Canada  est  trop  épais,  on  peut 
l'étendre  d'un  peu  d'essence  de  térébenthine.  Une  fois  qu'on  a 
atteint  le  point  convenable,  on  peut  se  servir  du  mélange  pen- 
dant longtemps  et  dans  des  conditions  toujours  uniformes  ;  sauf 
à  remplacer  de  temps  en  temps,  avant  que  des  cristaux  ne  se 
montrent  dans   le   liquide,   le  sulfure  de  carbone  qui  s'évapore. 

Pour  l'intelligence  de  la  description  qui  va  suivre,  je  renvoie 
à  la  planche  VI,  dont  les  nombreux  détails  sont  presque  tous 
empruntés  à  une  seule  préparation,  particulièrement  heureuse. 

Portée  sous  le  microscope,  une  goutte  du  mélange  s'y  montre 
d'abord  claire,  homogène,  et  sans  mouvement,  lorsque  sa  surface 
n'est  pas  couverte  de  fines  particules  de  poussière  qu'agite  le 
mouvement  moléculaire  interne.  Peu  à  peu  se  manifeste  au  bord 
de  la  goutte  la  séparation  de  petites  sphères  jaunes  mobi- 
les. On  les  voit  se  diriger  en  courant  rapide  du  bord  vers 
le  centre,  où,  dans  les  premiers  moments,  elles  sont  dissoutes 
de  nouveau  par  le  sulfure  de  carbone  en  excès.  Mais,  il  s'en 
forme  toujours  de  nouvelles,  elles  sont  toujours  en  plus  grand 
nombre,  elles  pénètrent  toujours  plus  loin  dans  l'intérieur,  jusqu'à 
ce  que  le  mouvement  se  soit  étendu  sur  la  surface  entière  ;  après 
quoi,  l'évaporation  continuant  à  faire  des  progrès ,  ce  mouvement 
se  ralentit  et  finit  par  s'arrêter  complètement. 

Les  globules  jaunes,  aussi  longtemps  qu'ils  apparaissent  à 
l'état  de  sphéroïdes  liquides,  ne  sont  pas  simplement  du  soufre, 
qui  n'est  pas  liquide  à  la  température  ordinaire;  ce  sont  des 
gouttes  d'une  dissolution  sursaturée  de  soufre  dans  le  sulfure  de 


168  H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES. 

carbone.  Comme  telles,  elles  possèdent  toutes  les  propriétés  géné- 
rales des  lames  liquides.  Leur  surface  est  constituée  par  une 
pellicule  liquide,  qui  est  douée  d'une  certaine  élasticité  et  d'un 
certain  pouvoir  de  résistance.  A  proprement  dire,  cette  pellicule 
est  double:  il  y  en  a  une  interne,  qui  appartient  à  la  goutte, 
et  une  externe  qui  est  formée  par  le  milieu  ambiant.  La  pellicule 
met  à  la  réunion  rapide  des  gouttelettes  un  obstacle  de  plus  en 
plus  grand  à  mesure  que  l'évaporation  fait  des  progrès.  A  l'ori- 
gine, le  contact  est  suivi  presque  immédiatement  de  la  réunion 
et  par  suite  de  l'accroissement  des  gouttelettes;  plus  tard,  les 
petits  sphéroïdes  viennent  bien  se  juxtaposer  et  s'aligner,  mais 
le  contact  doit  se  prolonger  pendant  un  temps  plus  ou  moins  long , 
avant  que  le  mouvement  moléculaire  interne  ait  rompu  la  pelli- 
cule et  par  là  rendu  possible  la  réunion.  Cette  réunion ,  cette 
fusion  de  plusieurs  sphéroïdes  entre  eux ,  paraît  être  le  seul  mode 
de  croissance  de  ces  productions;  un  accroissement  direct,  molé- 
culaire, ne  s'y  observe  pas.  Lorsque,  accidentellement,  la  cris- 
tallisation se  déclare  en  un  point  dès  le  commencement  et 
qu'une  aiguille  cristalline  vient  à  flotter  dans  le  liquide,  cette 
aiguille  grandit,  aussi  longtemps  que  la  résistance  du  milieu 
reste  faible,  exactement  de  la  même  manière  que  nous  l'observons 
dans  une  dissolution  aqueuse  ordinaire;  mais,  dans  le  même 
liquide  où  l'aiguille  de  soufre  croît  rapidement,  par  voie  molé- 
culaire, les  gouttes  liquides  nagent  sans  éprouver  un  changement 
quelconque  dans  leur  forme  ou  dans  leur  grosseur. 

Les  sphéroïdes  qui  apparaissent  au  sein  du  liquide  sont  donc 
indubitablement  des  gouttes  sursaturées.  Mais  lorsque ,  au  moment 
où  le  dernier  reste  du  dissolvant  s'échappe,  le  milieu  ambiant  a 
acquis  la  consistance  convenable,  la  résistance  qui  en  résulte 
empêche  définitivement  la  transformation  ou  le  groupement  des 
sphéroïdes  et  le  soufre  se  solidifie  sous  la  même  forme,  à  l'état 
de  globules  transparents  et  isotropes. 

Nous  donnerons  à  l'avenir  le  nom  de  globulites  à  ces  petits  sphé- 
roïdes ,  qui  nous  présentent  la  forme  primitive  sous  laquelle  un  corps 
cristallisable  se  sépare  d'un  milieu  qui  lui  offre  une  certaine  résistance. 


H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES.  169 

Avant  d'aller  plus  loin ,  je  présenterai  quelques  remarques  qui 
se  rattachent  aux  travaux  déjà  cités  de  Link  et  de  Frankenheim. 
J'ai  dit  que  dans  mes  expériences  les  gouttelettes  se  figeaient 
sous  la  forme  sphérique,  qu'elles  se  changeaient  en  globules 
solides  7  isotropes.  La  meilleure  preuve  qu'on  puisse  donner  de 
ce  changement  d'état  est  celle  qui  résulte  de  la  connexion  des 
phénomènes  avec  ceux  dont  nous  aurons  à  parler  plus  loin  ;  car , 
dans  les  silicates  par  exemple,  où  Ton  observe  des  productions 
tout  à  fait  analogues  ;  il  ne  peut  guère  être  question  de  leur 
attribuer  l'état  liquide.  Dans  les  préparations  microscopiques  faites 
avec  le  soufre,  le  baume  du  Canada  est  complètement  durci  au 
bout  d'un  petit  nombre  d'heures  ;  je  conserve  quelques-unes  de  ces 
préparations  depuis  plus  d'un  an  déjà,  et  pourtant  les  globules 
sont  encore  aussi  diaphanes  qu'au  moment  de  leur  formation, 
quoique  sans  aucune  espèce  d'action  sur  l'appareil  de  polarisation. 
Dans  ces  conditions,  et  eu  égard  aux  propriétés  générales  des 
corps  employés,  ce  serait,  non  pas  l'existence  de  l'état  solide/ 
mais  celle  de  l'état  fluide,  qui  exigerait  une  preuve  spéciale. 
M.  Frankenheim  a  opéré  simplement  avec  des  dissolutions  de 
soufre  dans  l'essence  de  térébenthine  ou  dans  le  sulfure  de  carbone. 
Il  se  forme  alors  également  des  gouttes  sursaturées,  mais  qui, 
en  se  solidifiant,  donnent,  sans  exception,  des  cristaux  ou  des 
agrégats  de  cristaux,  précisément  parce  que  la  faculté  de  résis- 
tance fait  défaut  au  milieu.  Du  reste ,  au  point  de  vue  du  grou- 
pement régulier ,  de  la  formation  des  cristallites  proprement  dits , 
l'état  d'agrégation  des  globules  n'est,  à  vrai  dire,  qu'un  point 
accessoire;  la  tendance  à  l'individualisation  existe  déjà,  en  tout 
cas,  dans  les  gouttelettes  liquides.  On  peut  donc  aussi  très  bien 
parler  de  globulites  liquides,  et,  à  l'occasion,  j'emploierai  le 
mot  dans  ce  sens. 

L'opinion  de  Link,  que  les  globules  de  ce  genre  sont  des  vé- 
sicules creuses,  n'est  motivée  par  rien  et  se  réfute  facilement.  Il 
suffit  de  chaufi'er  une  préparation  sous  le  microscope  :  on  ne  verra 
les  globules  ni  crever,  ni  éprouver  une  dilatation  sensible.  Je 
ne  veux  toutefois  pas  décider  si  les  productions  sphéroïdales  ob- 


170  H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES. 

servées  par  Link  étaient  bien  réellement  des  globulites.  J'ai  mo- 
difié les  expériences  de  cet  auteur,  en  ce  que  j'ai  ajouté  une 
dissolution  de  gélatine  aux  liquides  dans  lesquels  j'observais  la 
formation  de  précipités  chimiques.  Je  mentionnerai  ici  une  de 
ces  expériences,  parce  que,  sous  un  autre  rapport,  elle  présente 
un  intérêt  plus  général.  Lorsqu'on  mêle  une  dissolution  assez 
étendue  de  gélatine  avec  de  l'eau  de  chaux,  et  qu'on  laisse  se 
dessécher  lentement  à  l'air  une  goutte  du  mélange,  le  carbonate 
de  chaux  se  sépare  sous  forme  de  petites  sphères,  et  celles-ci 
se  groupent  d'une  manière  caractéristique.  En  ajoutant  du 
carbonate  d'ammoniaque  étendu,  j'ai  obtenu  aussi  des  groupe- 
ments dendritiques  et  rayonnes  délicats.  Ces  formes  me  rappelè- 
rent immédiatement  les  productions  singulières  et  souvent  discutées 
qu'on  a  trouvées  dans  certains  calcaires  anciens ,  et  qui  ont  été 
décrites,  sous  le  nom  à'Ëozoon,  comme  les  foraminifères  les  plus 
anciens.  Je  signale  ici  simplement  cette  ressemblance,  laissant  à 
des  juges  plus  compétents  le  soin  d'en  apprécier  la  valeur.  Ce 
que  j'ai  vu  moi-même,  sous  le  nom  à' Eozoon  canadense,  ne  mon- 
trait que  des  formes  beaucoup  plus  imparfaites  que  celles  de 
mes  précipités  artificiels. 

Tous  ces  précipités  agissaient  du  reste  sur  la  lumière  polarisée , 
de  sorte  qu'on  ne  peut  pas  les  placer,  sans  réserve,  sur  la  même 
ligne  que  les  globulites  de  soufre,  bien  que  la  double  réfraction, 
comme  on  sait,  soit  loin  d'être  exclusivement  propre  aux  sub- 
stances cristallines  proprement  dites. 

Je  reviens  maintenant  à  la  description  de  mon  expérience  fon- 
damentale, à  la  production  des  cristallites. 

Il  n'est  guère  possible  de  décider,  vu  l'imperfection  des  moyens 
de  mesure ,  si  la  forme  primitive  des  plus  petits  globulites  revient 
effectivement,  suivant  les  apparences,  à  celle  d'une  sphère  par- 
faite, ou  si  elle  est  plus  ou  moins  ellipsoïdale. 

Lorsque  le  baume  du  Canada  exerce  une  résistance  suffisante, 
tout  le  soufre  se  solidifie  sous  forme  de  globulites.  Lorsque  au 
contraire  on  n'a  ajouté  que  du  baume  d'une  consistance  fluide, 
et   en   petite   quantité^    la   cristallisation   s'établit  rapidement,  et 


H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES.  171 

ce  n'est  ordinairement  qu'au  bord  de  la  goutte  que  des  globuli- 
tes  persistent  sous  leur  forme  initiale.  Entre  ces  deux  limites  se 
trouvent  les  différents  stades  d'un  groupement  lent,  d'une  trans- 
formation lente  des  éléments  sphéroïdaux  ^). 

Les  petits  globulites  restent,  d'une  manière  permanente ,  clairs , 
jaunâtres,  transparents,  et  ils  sont  optiquement  isotropes,  car  ils 
ne  manifestent  aucune  action  dans  l'appareil  de  polarisation.  Les 
gouttes  de  dimensions  plus  grandes  montrent  ordinairement  à 
l'intérieur,  au  moment  de  la  solidification,  une  condensation  ou 
un  groupement  régulier,  qui  fait  apparaître  une  croix  foncée  ou 
un  rectangle  au  milieu  du  disque,  dont  la  forme  extérieure  cir- 
culaire n'est  du  reste  pas  modifiée.  Dans  cet  état  le  disque 
reste  à  réfraction  simple,  et  pendant  quelques  instants  il  con- 
serve sa  transparence ,  probablement  à  cause  des  traces  de  sulfure 
de  carbone  qui  sont  encore  emprisonnées  entre  les  particules 
solides  du  soufre.  Au  moment  où  ces  dernières  traces  s'échap- 
pent, la  sphère  devient  opaque,  d'un  jaune  blanchâtre,  tout  à 
fait  amorphe  en  apparence. 

En  ce  qui  regarde  maintenant  le  groupement  des  globulites, 
il  faut  distinguer  la  disposition  en  files  ou  en  amas,  qui  est  dé- 
terminée principalement  par  les  courants  extérieurs  ou ,  en  général , 
par  le  mouvement  moléculaire  du  magma  ou  dissolvant,  de  l'ar- 
rangement qui  est  dû  spécialement  à  l'activité  moléculaire  in- 
terne des  globulites ,  —  dans  notre  cas ,  à  la  force  de  cristallisa- 
tion du  soufre. 

En  général ,  il  n'est  peut-être  pas  possible  de  séparer  nettement 
les  effets  de  ces  deux  actions  mécaniques  dans  la  formation  des 
cristaux;  pour  l'explication  des  formes  cristallines  spécifiques  ou 
l'interprétation  du  polymorphisme,  le  rapport  variable  entre  l'ac- 
tivité moléculaire  externe  et  interne  peut  avoir  une  importance 
majeure,  mais,  jusqu'ici,  l'observation  n'a  pas  encore  fourni  des 


')  Quand,  au  lieu  de  soufre,  on  prend  du  phosphore,  on  parvient  à  peine 
à  un  groupement  régulier  de  globulites;  quant  à  la  cristallisation,  je  n'ai  pas 
encore  réussi  à  l'obtenir. 


172  H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES. 

jalons  suffisants  pour  qu'on  puisse  suivre  cette  direction  avec 
fruit.  Lorsque  nous  parlons  par  exemple  de  la  force  de  cristalli- 
sation du  soufre ,  il  demeure  incertain  quelle  influence  le  sulfure 
de  carbone,  employé  comme  dissolvant,  a  pu  exercer  sur  la 
forme  spécifique  rhomboïdale  des  cristaux  du  soufre;  quant  au 
baume  du  Canada,  avec  sa  consistance  pectineuse,  on  peut  sup- 
poser qu'il  ne  joue  d'autre  rôle  dans  le  groupement  et  la  trans- 
formation des  globulites  du  soufre  que  celui  d'un  agent  de  résis- 
tance, opérant  à  l'extérieur  d'une  manière  symétrique. 

Par  l'effet  du  courant  moléculaire  du  magma  et  par  celui  de 
l'attraction  et  de  l'adhésion  réciproques  des  globulites,  ceux-ci 
se  groupent  ou  se  réunissent  dès  le  moment  où  ils  commencent 
à  se  séparer  du  liquide.  L'alignement  et  le  mouvement  des  glo- 
bulites se  font  en  général  dans  le  sens  des  rayons,  de  sorte 
qu'il  se  forme  au  bord  de  la  goutte  des  groupes  qui  convergent 
vers  l'intérieur,  et  du  sommet  desquels  partent  de  simples  cor- 
dons de  globulites  plus  gros,  qui  s'avancent  vers  le  centre.  Un 
pareil  groupement  montre  donc  toujours  un  rapport  déterminé  avec 
la  forme  générale  de  la  goutte  ;  mais  il  n'y  a  pas  à  douter  que , 
à  lui  seul,  le  travail  moléculaire  interne  des  globulites  tend 
aussi  à  leur  donner  et  leur  donne  en  effet,  dans  le  cas  le  plus 
simple,  un  arrangement  sériaire. 

Pour  faire  cette  observation,  on  doit  chercher  à  obtenir,  en 
augmentant  la  proportion  de  baume  du  Canada,  un  mélange  qui, 
après  l'évaporation  du  sulfure  de  carbone,  apparaisse  comme  un 
champ  plus  ou  moins  étendu  semé  en  quelque  sorte  de  globulites 
de  la  plus  petite  dimension.  On  voit  alors,  quand  déjà  le  liquide 
extérieur  est  entré  tout  à  fait  en  repos,  et  souvent  même  encore 
longtemps  après,  un  mouvement  particulier  dans  l'amas  de  glo- 
bulites ,  mouvement  qui  imprime  aux  sphérules  isolées  un  balance- 
ment lent  et  alternatif,  et  finit  par  les  rapprocher  l'une  de  l'autre 
suivant  certaines  directions.  Tous  les  globulites  ne  prennent  pas 
part  au  mouvement,  les  efforts  moléculaires  se  neutralisant  pro- 
bablement pour  beaucoup  d'entre  eux;  mais,  finalement,  on  voit 
pourtant  un  grand  nombre  de  petits  chapelets ,  les  uns  droits ,  les 


H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES.  173 

autres  courbes,  disséminés  entre  les  formes  isolées,  comme  le 
représente  notre  PL  VI  dans  la  partie  gauche  supérieure  du  champ. 
Ainsi  qu'il  a  été  dit,  les  mouvements  persistent  encore ,  ou  plutôt 
ils  commencent  seulement  dans  la  forme  indiquée,  quand  déjà 
tout  le  sulfure  de  carbone  s'est  volatilisé  et  que  les  gouttes 
les  plus  grosses  sont  depuis  longtemps  arrivées,  de  la  manière 
décrite  ci-dessus,  à  l'état  solide  et  cristallin.  Lorsque  la  cristal- 
lisation proproment  dite  s'empare  de  la  préparation  microscopique , 
il  reste  encore  fréquemment,  près  du  bord,  une  large  zone  à 
petits  globulites  ;  mais  ici  la  couche  est  ordinairement  trop  mince , 
et  l'adhésion  au  verre  et  à  la  surface  supérieure  du  baume  du 
Canada  met  obstacle  à  la  liberté  des  mouvements.  Néanmoins, 
on  voit  encore  parfois  se  former  dans  cette  zone  des  petits  cha- 
pelets semblables  à  ceux  dont  il  a  été  question  plus  haut. 

Ces  globulites  enchaînés  suivant  une  seule  direction  constituent 
donc  la  forme  la  plus  simple  des  cristallites  composés.  Si  l'on 
veut  donner  à  ces  formes  un  nom  particulier,  on  peut  choisir 
convenablement  celui  de  manjariies,  à  cause  de  la  ressemblance 
avec  un  collier  de  perles.  Les  cristallites  des  roches  naturelles 
seront  décrits  plus  tard ,  dans  un  chapitre  spécial  ;  nous  mention- 
nerons pourtant,  dès  â  présent,  qu'on  trouve  fréquemment  dans 
les  roches  vitreuses,  et  surtout  dans  les  perlites  de  la  Hon- 
grie, des  matières  silicatées  microscopiques  dont  la  forme  res- 
semble exactement  à  celle  des  margarites  de  soufre  dont  il  vient 
d'être  parlé. 

En  dépit  du  mode  caractéristique  de  formation,  tel  que  nous 
avons  appris  à  le  connaître  dans  le  cas  particulier  qui  nous 
occupe,'  on  se  déciderait  difficilement  à  voir  dans  le  simple  en- 
chaînement linéaire  un  degré  particulier  d'individualisation,  si 
ces  formes  ne  se  liaient  pas  de  la  manière  la  plus  intime,  par 
des  passages,  au  degré  immédiatement  supérieur,  dans  lequel 
apparaît  un  agencement  axonal  bien  déterminé. 

Ce  degré  supérieur  de  développement  des  cristallites  est  carac- 
térisé par  la  circonstance  que  les  globulites  s'unissent  régulière- 
ment entre   eux  non   plus   suivant   une   direction   unique,    mais 


174  H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES. 

suivant  des  directions  différentes ,  qui  se  coupent  sous  des  angles 
déterminés.  De  cette  manière  il  se  forme  dans  le  baume  du  Ca- 
nada^ quand  le  mélange  a  la  composition  convenable,  des  grou- 
pements semblables  à  ceux  qui  sont  figurés  PI.  VI ,  dans  la  partie 
moyenne  gauche  du  champ. 

La  forme  la  plus  élevée,  qui  s'avance  à  gauche  vers  l'intérieur, 
est  la  plus  régulière,  et  constitue  un  réseau  d'axes  dans  lequel 
les  globulites  sont  groupés  manifestement  suivant  deux  directions 
perpendiculaires  entre  elles;  une  troisième  direction,  perpendicu- 
laire aux  deux  premières,  n'a  pu  être  reconnue  avec  certitude; 
en  tout  cas,  les  deux  directions  situées  dans  le  plan  d'étalement 
de  la  goutte  paraissent  toujours  rester  prédominantes  dans  le 
groupement. 

Les  cristallites  tout  à  fait  réguliers,  comme  le  précédent,  et 
dans  lesquels  les  globulites  constituants  ont  aussi  à  peu  près  la 
même  grandeur,  sont  rares;  mais,  si  l'on  tient  compte  des  con- 
ditions défavorables ,  ils  paraîtront  encore  assez  fréquents.  On  com- 
prend en  effet,  que  la  séparation  successive  et  irrégulière  des 
globulites  et  l'attraction  des  surfaces  doivent,  dans  une  couche 
liquide  aussi  mince,  entraver  la  production  de  formes  régulières. 
Mais  les  formes  de  transition,  telles  qu'on  les  voit  au  milieu  et 
dans  la  partie  gauche  de  la  figure,  ont  aussi  un  grand  intérêt 
théorique,  parce  qu'elles  nous  dévoilent  clairement,  même  sans 
l'observation  de  la  marche  successive  du  phénomème,  la  manière 
dont  elles  ont  pris  naissance.  On  reconnaît  en  effet  que  ces  cris- 
tallites sont  le  produit  de  l'attraction  réciproque  des  globulites, 
car  jusqu'à  une  certaine  distance,  qui  représente  le  rayon  de  la 
sphère  d'attraction  pour  le  cas  considéré,  on  ne  voit  pas  de 
globulites  isolés,  ces  globulites  étant  tous  entrés,  comme  maté- 
riaux, dans  la  masse  des  cristallites.  Dans  les  formes  du  milieu 
de  la  figure,  on  remarque  en  outre  que  les  petits  globulites  se 
sont  d'abord  réunis  en  globulites  plus  grands,  mais  que,  par 
suite  de  la  résistance  croissante,  le  groupement  n'a  pu  se  faire 
que  d'une  manière  imparfaite.  Le  caractère  optique  de  ces  cris- 
tallites est  très   remarquable.   Les  globulites  isolés  restent  tous 


H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES.  175 

isotropes ,  comme  il  a  été  dit.  Avec  le  groupement  apparaît  aussi , 
en  général^  la  double  réfraction;  mais,  plus  les  cristallites  sont 
imparfaits,  plus  Faction  est  faible  dans  l'appareil  de  polarisation. 
Les  formes  semblables  à  celles  qui  occupent  le  milieu  de  la 
PI.  VI  n'agissent  pas  sur  la  lumière  polarisée  ou  n'agissent  que 
très  peu;  mais  les  formes  plus  régulières  qu'on  voit  en  haut  et 
à  gauche  de  la  planche  montrent  très  distinctement  la  double 
réfraction,  bien  qu'on  n'y  observe  rien  qui  ressemble  à  une  cir- 
conscription régulière  des  individus  séparés. 

Des  faits  qui  précèdent  il  résulte  que  l'attraction  des  globu- 
lites  du  soufre,  lorsque  l'agent  de  résistance  extérieur  ne  s'y 
oppose  pas,  s'exerce  principalement  suivant  deux  directions  per- 
pendiculaires entre  elles.  L'effacement  de  la  troisième  direction, 
la  forme  simplement  linéaire  des  margarites  décrits  ci-dessus, 
enfin  la  circonstance  que  chez  les  cristallites,  comme  chez  les 
cristaux,  l'accroissement  se  fait  toujours  avec  beaucoup  plus  de 
rapidité  dans  l'une  des  deux  directions  principales  que  dans 
l'autre,  tous  ces  faits  pourraient  autoriser  peut-être  à  conclure 
que  la  force  d'attraction  des  globulites  agit  essentiellement  selon 
trois  directions  perpendiculaires  entre  elles,  mais  avec  une  inten- 
sité inégale.  On  voit  que  nous  sommes  ici  sur  la  voie  d'une 
théorie  sur  le  caractère  fondamental  du  système  cristallin  rhomboïdal. 

Nous  avons  expliqué  plus  haut  comment  les  globules  s'accrois- 
sent par  confluence.  Dans  ce  cas  le  globulite  qui  s'est  accru 
reprend  toujours,  aussi  longtemps  que  la  résistance  extérieure  est 
trop  faible  pour  s'y  opposer,  la  forme  de  l'équilibre  parfait, 
c'est-à-dire  la  forme  sphérique.  Mais  lors  qu'une  pareille  fusion 
se  fait  entre  des  éléments  qui  ont  déjà  commencé  à  se  grouper 
en  cristallites,  ou  après  que  le  groupement  est  achevé,  il  en 
résulte  naturellement  des  formes  unitaires  dont  la  circonscription 
est  tantôt  plus  ou  moins  onduleuse,  tantôt  cylindrique,  tantôt  en 
cône  aigu.  La  PI.  VI  montre  dans  sa  partie  inférieure  des  for- 
mes de  ce  genre,  pour  lesquelles  on  a  pu  constater  bien  réelle- 
ment le  mode  de  production  indiqué.  J'ai  aussi  obtenu  quelquefois 
des  formes   régulièrement  cylindriques   ou   en   cône   aigu,   et  la 


176  H.    VOGELSANG.    SUR    LES    GRISTALLITES. 

réunion  des  globalités  en  aiguilles  semblables  n'a  pas  lieu  de 
nous  surprendre  après  les  observations  qui  ont  été  communiquées. 

Cette  transformation  de  formes  sphéroïdales  en  formes  allon- 
gées ;  qui  toutefois  continuent  à  ne  pas  montrer  de  contours  polyé- 
driques, est  de  la  plus  grande  importance  pour  l'explication  des 
cristallites.  Dorénavant  j'appellerai  longulites  ces  aiguilles  à  sur- 
face non  anguleuse  mais  arrondie,  qui  par  leurs  caractères 
appartiennent  aux  cristallites. 

Nous  avons  donc  appris  à  connaître  les  globulites  et  les  lon- 
gulites comme  des  cristallites  simples,  ou  comme  les  éléments 
constituants  des  cristallites  composés,  articulés;  il  existe  entre 
ces  formes  simples  et  les  formes  composées  exactement  la  même 
relation  qu'entre  les  cristaux  isolés  et  les  squelettes  cristallins, 
qui  nous  montrent  des  groupements  réguliers,  à  axes  parallèles, 
d'un  grand  nombre  d'individus. 

Une  mention  spéciale  est  due  maintenant  aux  formes  plates, 
tabulaires,  qui  sont  représentées  dans  notre  figure  en  haut  à 
gauche,  à  côté  des  cristallites  dont  il  vient  d'être  question.  La 
production  de  ces  tables  se  fait  beaucoup  plus  rapidement  que 
celle  des  formes  décrites  précédemment;  elles  ne  prennent  nais- 
sance que  rarement,  et  je  ne  saurais  dire  dans  quelles  con- 
ditions spéciales.  Les  tables  sont  hexagonales,  mais  du  système 
rhombique,  et  elles  montrent  à  la  surface  un  dessin  d'apparence 
cellulaire;  on  n'a  pu  reconnaître  si  ce  dessin  était  formé  par  des 
limites  de  densités  ou  par  de  véritables  fissures.  Le  plus  souvent 
toutefois  ces  tables  sont  traversées  distinctement  par  des  axes 
corporels,  et  parfois,  lorsque  la  matière  s'est  trouvée  en  quantité 
insuffisante ,  on  y  observe  une  structure  articulée  tout  à  fait  sem- 
blable à  celle  des  cristallites;  les  axes  ne  sont  pas  perpendicu- 
laires entre  eux,  mais  leurs  angles  ne  peuvent  être  donnés  avec 
certitude. 

La  place  que  ces  tables  occupent  dans  la  série  des  degrés  de 
développement  des  cristaux  est  douteuse.  Je  crois  pourtant  que, 
en  dépit  de  leurs  contours  rectilignes,  on  ne  doit  par  les  regar- 
der comme   des   tables  cristallines  proprement  dites;  il  est  plus 


H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES.  177 

probable  qu'elles  consistent  en  un  assemblage  de  très  petits  lon- 
gulites  et  globulites^  assemblage  prenant  naissance  lors  d'une 
séparation  rapide  et  régulière  du  soufre.  Nous  reparlerons  plus 
loin  de  formes  analogues. 

Le  phénomène  le  plus  remarquable  auquel  donne  lieu  la  sé- 
paration du  soufre  ;  dans  les  conditions  spécifiées  ^  est  finalement 
la  transformation  des  globulites  en  cristaux  véritables.  Lors^  en 
effet,  que  le  mouvement  moléculaire  intérieur  des  globulites  peut 
encore  vaincre  suffisamment  la  résistance  extérieure  du  baume 
du  Canada,  la  gouttelette  sphérique  se  change,  au  moment  de 
la  solidification,  en  la  pyramide  à  contours  tranchés  qui  est  la 
forme  primitive  du  soufre  rhombique.  Ordinairement  on  voit  se 
former,  autour  d'un  cristal  déjà  séparé,  un  squelette  cristal- 
lin, tel  que  le  représente  la  PL  VI  dans  la  partie  inférieure 
à  droite;  les  globulites  sont  amenés  successivement  par  le 
courant  moléculaire,  et,  au  moment  du  contact,  ils  se  solidi- 
fient subitement,  en  passant  à  l'état  cristallin.  Les  nouvelles 
pyramides  se  placent  de  manière  que  leurs  axes  soient  parallèles 
à  ceux  des  précédentes,  auxquelles  elles  se  joignent  tantôt  par 
le  sommet  tantôt  par  les  arêtes  latérales,  quoique,  en  général, 
plus  souvent  dans  la  direction  de  l'axe  le  plus  long  ou  des 
angles  aigus  que  dans  la  direction  perpendiculaire.  C'est  ainsi, 
par  exemple,  qu'on  voit  naître  fréquemment  des  formes  sembla- 
bles à  la  seconde  et  à  la  troisième  des  longues  aiguilles  qui 
s'avancent  à  gauche  dans  le  champ  de  la  figure. 

Pour  que  la  transformation  des  globulites  s'opère,  il  faut  qu'ils 
se  trouvent  à  un  degré  bien  déterminé  de  développement  ou  de 
sursaturation,  comme  il  résulte  déjà  du  fait  qu'ils  nagent  quelque- 
fois entre  les  cristaux,  et  les  touchent  même,  sans  subir  la 
métamorphose,  tandis  qu'un  peu  plus  tard,  à  un  autre  endroit, 
ils  se  changent  subitement  en  octaèdres  au  moment  du  contact. 
Quant  à  savoir  quel  est  le  rôle  que  jouent  dans  ce  phénomène 
les  cristaux  déjà  formés;  si  la  solidification  est  peut-être  en 
rapport  avec  une  rupture  de  la  pellicule  à  l'instant  du  choc;  si 
un   mouvement    moléculaire    conforme,    encore    existant   dans    le 

Archives  Néerlandaises,  T.  V.  12 


178  H.    VOGELSAWG.    SUR    LES    CRISTALLITES. 

cristal  solide,  détermine  l'orientation  parallèle  du  cristal  nou- 
veau, —  ce  sont  là  des  questions  qui  restent  sans  réponse.  On 
constate  toutefois  que,  par  l'adjonction  et  la  transformation  suc- 
cessives de  globulites,  il  se  forme  finalement  des  squelettes  ana- 
logues à  ceux  des  cristallites,  et  qui,  en  vertu  du  parallélisme 
universel  des  axes,  peuvent  être  considérés  comme  un  cristal 
simple,  au  sens  cristallographique. 

Il  est  intéressant  d'observer  comment  la  résistance  du  magma 
extérieur  devient  peu  à  peu  trop  grande,  et  comment  alors 
il  ne  se  forme  plus  de  cristaux  mais  des  cristallites ,  tels  qu'ils 
ont  été  décrits  précédemment  et  qu'ils  sont  figurés  dans  la  partie 
inférieure  de  la  PL  VI  (le  groupe  entier  représenté  par  cette 
planche,  avec  les  divers  stades  des  cristaux  et  des  cristallites, 
est  emprunté  à  une  seule  préparation).  Dans  cette  phase,  si  quelques 
globulites  isolés  sont  encore  entraînés  vers  les  cristaux  proprement 
dits,  ils  y  restent  bien  attachés,  mais  ils  ne  changent  plus 
de  forme. 

La  rapide  cristallisation  des  formes  aciculaires  relativement 
grandes,  que  l'on  peut  observer  d'ailleurs  dans  la  plupart  des 
expériences,  n'offre  pas  un  grand  intérêt.  Ce  sont  ordinairement  des 
aiguilles  qui  sont  constituées  par  un  assemblage  d'octaèdres,  et 
dont  notre  planche  représente  différentes  modifications.  Fréquem- 
ment on  voit  des  formes,  comme  celle  du  bas  de  la  planche, 
qui,  par  suite  d'une  croissance  inégale  suivant  les  différentes 
directions,  sont  devenues  spiculaires.  Elles  montrent  en  outre, 
de  distance  en  distance,  des  angles  rentrants,  et,  à  l'inté- 
rieur, des  assemblages  rhombiques  de  joints  ou  de  stries.  La 
plupart  des  aiguilles  peuvent  se  comparer  à  des  épées  dente- 
lées ou  à  des  scies  doubles,  et  toujours  l'angle  obtus  de  la 
pyramide  occupe  le  côté  de  l'aiguille,  tandis  que  l'angle  aigu 
est  dans  la  direction  longitudinale.  La  formation  et  la  croissance 
de  ces  aiguilles  cristallines  se  font  ordinairement  avec  trop  de 
rapidité  pour  qu'on  puisse  en  suivre  les  détails;  quelquefois 
pourtant  j'ai  vu  des  cristaux  de  ce  genre  s'accroître  très  dis- 
tinctement par  l'accession  et  la  transformation  de  globulites. 


H.    VOGELSANG.    SUR    LES    GRISTALLITES.  179 


IL  Cristallites   dans    des   verres   artificiels. 

Les  observations  sur  la  formation  des  cristallites  de  soufre , 
dont  il  a  été  question  dans  le  chapitre  I ,  ont  notablement  avancé 
nos  connaissances  au  sujet  du  mode  de  naissance  de  ces  produc- 
tions cristallines  embryonnaires.  Nous  savons  que  leur  formation 
repose  sur  un  rapport  spécial  entre  la  force  intérieure  de  cristal- 
lisation de  la  substance  qui  se  sépare  et  la  résistance  mécanique 
du  milieu  ambiant.  Dans  un  mélange  aussi  hétérogène  que  celui 
constitué  par  la  dissolution  de  soufre  et  le  baume  du  Canada, 
en  présence  de  conditions  d'espace  et  de  masse  aussi  défavora- 
bles et  d'états  de  solidification  aussi  inégaux  que  nous  les  offrent 
des  préparations  microscopiques,  nous  ne  pouvons  pas  espérer 
de  rencontrer  les  cristallites  à  leur  état  de  développement  le  plus 
net  et  le  plus  parfait.  Les  conditions  sont  fréquemment  plus  fa- 
vorables dans  de  grandes  masses  de  silicates  en  voie  de  solidi- 
fication, au  sein  desquelles  se  sépare  une  combinaison  chimique 
déterminée,  dont  la  complète  individualisation  est  contrariée  par 
le  magma  environnant,  qui  tend  également  à  passer  à  l'état 
solide.  Dans  les  verres  artificiels  les  cristallites  sont  loin  d'être 
rares  et,  sans  aucun  doute,  on  aurait  encore  beaucoup  plus 
souvent  l'occasion  de  les  observer,  si  les  produits  troubles  et 
opaques  n'étaient  pas  contraires  à  l'intérêt  des  fabricants  de  verre. 
Les  scories  de  forge  sont  à  l'abri  de  considérations  de  cette 
nature;  aussi  les  productions  cristallitiques  y  sont-elles  géné- 
ralement répandues  ;  mais ,  on  comprend  que  même  ici  les  con- 
ditions de  solidification  soient  rarement  assez  favorables,  pour 
qu'on  puisse  étudier  les  diiférents  degrés  de  développement  dans 
une  seule  et  même  scorie.  Nous  allons  faire  connaître  en  détail 
quelques-uns  de  ces  cas  rares,  en  ayant  soin  d'éclairer  la  des- 
cription des  faits  au  moyen  de  bonnes  figures. 

Les  Planches  VII  et  VIII  sont  des  vues  microscopiques  d'un 
laitier  de  haut  fourneau  de  la  forge  Frédéric-Guillaume  près  de 
Siegburg ,  par  lequel  mon  attention  a  été  attirée  pour  la  première 

12^^ 


180  H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES. 

fois  sur  les  cristallites.  J'ai  déjà  décrit  ce  laitier  dans  une  occa- 
sion antérieure  (Poggcnd.  AnnaL  ,  CXXI,  pag.  101).  Il  ne  présente 
rien  de  particulier  dans  sa  composition  chimique;  sa  couleur  est 
le  vert  poireau  foncé ,  nuancé  de  vert  olive  et  de  noirâtre  ;  sa 
cassure  est  parfaitement  conchoïdC;  son  éclat  vitreux  mat.  Il 
n'est  pas  rare  d'y  rencontrer  des  concrétions  cristallines ,  de  couleur 
claire,  bleuâtre  ou  jaunâtre,  et  qui  atteignent  parfois  un  diamètre 
de  deux  centimètres.  Quant  à  la  masse  foncée  principale ,  la  pâte 
du  laitier,  elle  se  résout  sous  le  microscope,  à  un  grossissement 
de  500  fois,  en  images  semblables  à  celles  que  reproduisent  les 
Planches  VII  et VIII.  Sur  un  espace  restreint,  l'état  de  dévelop- 
pement présente  une  certaine  uniformité  ;  on  voit  rassemblées  par 
exemple,  soit  des  formes  analogues  à  celles  de  la  PI.  VII,  soit 
des  cristallites  en  feuille  de  fougère  semblables  à  ceux  de  la 
PI.  VIII.  Toutefois ,  dans  la  plupart  des  préparations  ayant  environ 
2  centimètres  carrés  de  surface,  on  peut  trouver  tous  les  degrés 
de  développement  que  nous  avons  figurés. 

Pour  Fintelligence  complète  des  figures,  je  dois  prévenir  qu'elles 
se  rapportent  à  des  lames  taillées,  minces,  d'une  épaisseur  de 
0,05  à  0,08  mm.  D'après  cela,  non-seulement  des  productions 
d'apparence  rudimentaire  se  montreront  aux  surfaces  qui  limi- 
tent la  préparation ,  mais  encore  aucune  forme  allongée ,  à  moins 
qu'elle  ne  soit  par  hasard  située  précisément  dans  le  plan  de  la 
préparation,  ne  pourra  être  vue  dans  toute  son  étendue,  même 
si  nous  projetons  les  différents  niveaux  de  la  préparation  sur  le 
plan  du  dessin.  Le  plus  souvent  nous  n'avons  donc  pas  devant 
nous  les  formes  complètes,  puisque  celles-ci  ont  été  mises  en 
pièces.  Ensuite  on  ne  doit  pas  supposer  que  les  cristallites  mon- 
trent toujours  la  même  forme,  la  même  position  et  le  même 
groupement  qu'ils  avaient  au  moment  où  ils  ont  pris  naissance; 
ils  peuvent  croître,  se  réunir  ou  aussi  s'endommager  réciproque- 
ment, pendant  qu'ils  se  meuvent  avec  et  dans  la  masse  vitreuse 
liquide.  Dans  le  cas  spécial  qui  nous  occupe ,  les  phénomènes  de 
ce  genre  ne  jouent  toutefois  pas  un  grand  rôle,  de  sorte  que 
nous  ne  nous  appesantirons  pas  davantage  sur  ce  sujet. 


H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES.  181 

Sur  la  PL  VII  on  reconnaît  de  suite  les  globulites  et  les  lon- 
gulites,  tels  qu'ils  ont  été  décrits  et  figurés  d'après  les  observa- 
tions faites  sur  la  séparation  du  soufre.  Les  globulites  individuels 
ont  des  diamètres  qui  vont  jusqu'à  0^08  mm.,  et  leur  forme, 
pour  autant  qu'on  peut  en  juger  par  des  observations  microsco- 
piques, est  celle  d'une  sphère  parfaite.  Assez  souvent  les  globu- 
lites sont  accumulés  irrégulièrement,  mais,  en  général,  on  les 
voit  groupés,  au  nombre  de  quatre  ou  de  huit,  dans  un  même 
plan,  autour  d'un  centre  commun  ou  autour  d'une  sphère  cen- 
trale. Lorsque  la  sphère  centrale  est  couverte  d'autres  globulites 
sur  toute  sa  surface,  on  ne  peut  guère  reconnaître  de  régularité 
dans  le  groupement;  mais  de  pareils  agrégats  sont  rares  chez 
ces  globulites  de  grande  dimension;  le  groupement  en  un  plan 
est  de  beaucoup  le  plus  fréquent. 

Il  n'est  pas  rare  que  le  groupement  des  globulites  soit  accom- 
pagné de  leur  union  partielle  ou  totale,  et  on  a  surtout  fréquemment 
l'occasion  d'observer  des  formes  dans  lesquelles  on  saisit  un  passage 
entre  les  groupes  à  huit  sphères  distinctes  et  des  corps  tétragonaux  à 
contours  rectilignes ,  qui  ressemblent  tout  particulièrement  à  des  tra- 
pézoèdres.  Les  formes  sont  trop  petites  pour  permettre  une  détermina- 
tion exacte ,  et  il  est  impossible  de  savoir  avec  certitude  s'il  s'agit 
réellement  d'une  cristallisation  régulière.  En  tout  cas,  il  s'est  fait 
ici  une  réunion  de  plusieurs  globulites  en  une  forme  d'ensemble^ 
à  laquelle  nous  ne  pouvons  refuser  les  caractères  morphologiques 
généraux  des  cristaux  véritables.  Toutes  ces  formes  sont  absolu- 
ment sans  action  sur  l'appareil  de  polarisation. 

Le  groupement  ou  plutôt  l'union  simplement  linéaire  des  glo- 
bulites se  rencontre  aussi  fréquemment.  Je  n'ai  pas  observé  de 
margarites  proprement  dits,  mais,  par  leurs  étranglements  et 
leurs  divisions  transversales ,  les  formes  allongées  laissent  encore 
facilement  reconnaître  les  globulites  individuels  dont  l'assemblage 
les  a  constituées.  Ces  formes  ne  présentent  pas  toujours  une  direc- 
tion rectiligne  suivant  leur  longueur,  soit  que  le  groupement  ait 
manqué  de  régularité  dès  l'origine,  soit  que  les  formes  aient 
subi  plus  tard  une  incurvation. 


182  H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRIST ALLITES. 

On  ne  voit  que  rarement  des  formes  semblables  à  celle  qui 
est  représentée  sur  la  PI.  VII,  en  haut  à  droite,  c'est-à-dire  des 
formes  qui  manifestent  un  agencement  régulier,  ordmairement 
rectangulaire,  quoique  le  cristallite  entier  se  montre  composé  de 
globulites  de  grande  dimension. 

Du  reste,  la  plupart  des  longulites,  et  en  particulier  toutes 
les  aiguilles  en  cône  aigu,  que  nous  remarquons  sur  la  planche, 
ne  doivent  pas  leur  origine,  ou  ne  la  doivent  qu'en  partie,  au 
simple  groupement  linéaire  des  globulites.  Ces  aiguilles  sont  tou- 
jours énantiomorphes  ;  à  l'une  des  extrémités  elles  se  terminent 
en  une  pointe  extrêmement  fine,  qui  parfois  porte  encore  une 
petite  étoile  très  déliée;  à  l'autre  extrémité  elles  s'épaississent, 
montrent  fréquemment  une  division  transversale  simple,  et  se 
terminent  ordinairement  en  bouton,  soit  par  un  gros  globulite, 
soit  par  un  groupe  stelliforme.  Dans  cette  dernière  direction, 
l'aiguille  paraît  s'être  accrue  par  simple  enchaînement  linéaire  de 
globulites  de  grande  dimension.  Au  côté  aigu,  au  contraire,  on 
peut  souvent  reconnaître  que  les  aiguilles  ne  se  sont  pas  formées, 
dans  cette  partie,  par  simple  jonction  sériaire,  comme  oela  est 
le  cas  pour  les  margarites,  mais  que  les  éléments  sphériques,  de 
la  plus  petite  espèce,  ont  aussi  convergé  latéralement  de  diver- 
ses directions,  pour  venir  se  réunir  en  longulites.  Là  où  une 
aiguille  se  montre  ainsi  composée  de  globulites  de  la  plus  petite 
dimension,  ceux-ci  sont  toujours  situés  de  manière  à  alterner  entre 
eux  latéralement.  On  observe  d'ailleurs  tous  les  degrés  différents 
d'union  des  globulites,  depuis  la  simple  juxtaposition,  qui  les 
laisse  voir  isolément,  surtout  à  la  surface  de  taille  de  la  prépa- 
ration (PL  VII,  en  haut  à  gauche),  jusqu'à  une  union  assez  in- 
time pour  ne  plus  se  dénoter  que  par  de  faibles  indices  d'articu- 
lation transversale.  Le  plus  souvent  toutefois,  les  aiguilles  sont 
si  lisses  et  à  bords  rectilignes  si  nets,  que,  sans  les  formes 
intermédiaires  susdites,  il  serait  impossible  de  deviner  leur  mode 
de  formation.  Il  arrive  pourtant  quelquefois  que  ces  aiguilles 
lisses  sont  chargées  latéralement  de  séries  alternes  de  globulites 
de  la  plus  petite  espèce,  et  à  la  pointe  on  voit  fréquemment  une 


H.    VOGELSAi\G.    SUR    LES    CRISTALLITES.  183 

étoile  très  menue,  résultat  du  groupement  des  plus  petits  globu- 
lites  après  que  leur  réunion  en  longulites  s'est  trouvée  arrêtée 
par  la  résistance  du  magma  (PI.  VII,  à  droite).  Dans  les  cas 
dont  il  vient  d'être  question,  les  globulites  de  la  plus  petite 
espèce  mesurent  tout  au  plus  0,0005  mm. 

Il  est  probable  que  cette  formation  de  longulites  par  rappro- 
chement latéral  de  globulites  a  aussi  eu  pour  point  de  départ 
un  groupement  quaternaire  ou  octonaire;  malheureusement  cela 
n'a  pu  être  constaté  par  l'observation  directe.  A  un  grossissement 
tel  qu'il  est  nécessaire  pour  ces  objets  (1000  fois),  de  pareilles 
déterminations  deviennent  incertaines;  la  disposition  alterne  des 
globulites  sur  chaque  côté  de  l'aiguille  a  seule  pu  être  re- 
connue d'une  manière  indubitable.  Dans  quelques  cas  parti- 
culiers, du  reste,  la  constitution  ternaire  de  l'aiguille  m'a  paru  la 
plus  probable. 

D'autres  particularités,  dont  l'importance  pour  la  connaissance 
du  mode  de  groupement  n'est  pas  moindre,  ont  pu  être  observées 
avec  plus  de  certitude.  Les  formes  de  transition,  dans  lesquelles 
les  globulites  ne  s'étaient  unis  que  partiellement,  ne  montraient 
pas,  en  effet,  chez  ces  aiguilles  aiguës  et  fines,  une  division 
transversale  analogue  à  celle  des  aiguilles  plus  épaisses;  mais 
les  lignes  de  séparation  suivaient  une  direction  diagonale  uniforme , 
qui  mettait  en  pleine  évidence  le  fait  d'un  arrangement  spiral 
des  moléculites.  Quelquefois  on  ne  voyait  que  ces  fines  stries 
spirales  sur  la  surface  conique  aiguë  de  l'aiguille,  mais,  dans  la 
plupart  des  cas,  l'aiguille  elle-même  se  tordait  en  spirale.  Cela 
était  facile  à  constater  nettement,  vu  que,  dans  la  position 
horizontale  de  l'aiguille,  il  n'y  avait  que  les  sections  équivalentes 
des  spires  successives,  qui  se  trouvassent  simultanément  au  foyer. 
La  spirale  était  toujours  assez  allongée,  mais  du  reste  l'angle 
d'inclinaison  n'avait  pas  une  valeur  tout  à  fait  constante  dans 
une  même  aiguille;  au  gros  bout  les  circonvolutions  étaient  les 
plus  rapides,  vers  la  pointe  l'angle  d'inclinaison  diminuait  en 
même  temps  que  le  rayon.  Je  n'ai  observé  que  des  spirales  tour- 
nant  à   droite    (spirales   lambda).   La   forme   hélicoïde   s'accusait 


184  H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES. 

avec  le  plus  de  netteté  chez  quelques  aiguilles  qui  se  présentaient, 
non  comme  des  cônes  enroulés  à  section  circulaire,  mais  comme 
des  rubans  spiraux.  Ces  formes,  qui  peuvent  être  comparées  à 
un  brin  d'herbe  tordu,  se  résolvaient  en  général  distinctement 
en  leurs  globulites  élémentaires,  lesquels,  dans  ce  plan  enroulé, 
étaient  placés  l'un  à  côté  de  l'autre  en  position  alterne.  La 
Planche  VII  montre  quelques  indications  de  pareilles  aiguilles 
spirales;  on  ne  pouvait  les  représenter  plus  distinctement,  si 
l'on  voulait  faire  ressortir  leur  rapport  de  grandeur  avec  les  autres 
formes,  car  ce  ne  sont  que  les  plus  déliés  de  ces  longulites  qui 
montrent  un  enroulement  spiral.  Avec  un  bon  grossissement  (800 — 
1000  fois)  le  phénomène  peut  être  facilement  observé  dans  tous 
ses  détails. 

Un  groupement  régulier  des  longulites  mêmes  est  rare  dans 
le  laitier  que  nous  examinons.  Quelquefois,  à  une  aiguille  plus 
longue,  sont  attachés  latéralement,  à  angle  droit,  des  articles 
plus  courts ,  ainsi  que  le  représente  la  PI.  VII  dans  sa  partie  in- 
férieure. Karement  on  voit  une  croix  rectangulaire  simple,  formée 
par  quatre  grands  longulites.  Le  plus  souvent,  les  formes  allon- 
gées semblent  jetées  tout  à  fait  irrégulièrement  les  unes  à  travers 
les  autres,  comme  un  tas  d'algues.  Reste  à  savoir  si  elles  n'ont 
pas  affecté  primitivement  une  disposition  plus  régulière ,  qui  aurait 
été  bouleversée  par  les  mouvements  de  la  masse.  Pour  le  cas  de 
notre  laitier  toutefois,  il  est  difficile  d'admettre  qu'une  pareille 
action  ait  exercé  une  grande  influence. 

Ainsi  qu'il  a  été  dit,  on  peut  souvent  suivre,  sur  un  espace 
restreint,  le  passage  des  formes  sphériques  et  aciculaires  simples 
de  la  PI.  VII  aux  agrégats  complexes  reproduits  dans  la  PL  VIII. 
Je  dois  toutefois  remarquer  expressément,  qu'il  n'est  question  ici 
que  d'un  passage  en  ce  qui  concerne  l'accumulation  relative  de 
l'une  ou  de  l'autre  espèce  de  formes,  et  non  d'un  progrès  du 
développement,  en  vertu  duquel  les  aiguilles  et  les  sphères  devraient 
être  regardés,  en  général,  comme  des  degrés  préliminaires  con- 
duisant au  groupement  filiciforme  de  la  PI.  VIII.  Nous  revien- 
drons  sur  ce  point  tout  à  l'heure.  Faisons   d'abord  une  connais- 


H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES.  185 

sance  un  peu  plus  intime  avec  la  forme  extérieure  de  ces  cris- 
tallites  remarquables. 

Les  troncs  ou  axes  principaux  ne  sont  pas  toujours  parfaite- 
ment rectilignes  dans  toute  leur  étendue^  et,  par  suite,  les 
angles  ne  sont  pas  absolument  constants.  En  général,  toutefois, 
c'est  à  angle  droit  que  partent  de  l'axe  (ou  rachis)  les  divisions 
secondaires  (les  pinnae,  si  nous  voulons  poursuivre  la  comparaison 
avec  une  feuille  de  fougère) ,  et  celles-ci  forment  à  leur  tour  avec 
les  divisions  de  second  ordre  (les  pinnules)  des  angles,  soit  de 
45,  soit  de  nouveau  de  90  degrés.  Dans  la  plupart  des  formes 
étendues  eu  ligne  droite,  la  terminaison ,  pour  autant  qu'elle  est 
comprise  entre  les  surfaces  limites  de  la  préparation,  paraît  se 
faire  par  une  sorte  d'étoile  corolliforme  ;  de  pareils  groupes 
rayonnes  d'axes  se  voient  d'ailleurs  aussi,  fréquemment,  sans 
aucune  espèce  de  pédoncule,  développés  symétriquement  dans 
toutes  les  directions.  Les  différents  axes  ne  sont  donc  pas  tous 
situés  dans  un  même  plan,  comme  la  figure  pourrait  le  faire 
croire  ;  néanmoins ,  la  croissance  en  un  plan  semble  avoir  été 
spécialement  favorisée,  même  dans  les  formes  à  groupement  cen- 
tral. Les  formes  allongées  montrent  ordinairement  une  ramification 
suivant  deux  plans  perpendiculaires  entre  eux  ;  dans  les  étoiles , 
avec  leurs  divisions  multiples ,  les  angles  de  45  ou  de  90°  restent 
encore  prédominants.  Ces  dernières  formes  constituent  pour  ainsi 
dire  un  squelette  d'axes  orthoédrique ,  dans  lequel  se  sont  déve- 
loppés surtout  les  axes  principaux  et  les  axes  intermédiaires 
formant  avec  les  premiers  un  angle  de  45°. 

Si  nous  considérons  séparément  un  de  ces  plans  d'axes,  — 
et,  comme  nous  l'avons  dit,  il  y  en  a  ordinairement  un  qui  se 
distingue  par  l'étendue  et  l'uniformité  de  développement,  — 
nous  voyons  huit  troncs  qui  convergent  au  centre  sous  des  angles 
égaux,  de  45°.  De  ces  huit  troncs,  ceux  qui  sont  placés  l'un  à 
côté  de  l'autre  présentent  un  développement  inégal ,  ceux  de  rang 
alterne  sont  de  même  grandeur,  de  sorte  que  nous  pouvons  dis- 
tinguer une  croix  principale  et  une  croix  accessoire,  ou  plutôt 
une  croix  de  premier  ordre  et  une  croix  de  second  ordre.  Chacun 


186  H.    VOGELSAi\G.    SUR    LES    CRISTALLITES. 

des  quatre  bras  de  la  première  constitue,  à  son  tour,  un  squelette 
d'axes  dirigés  dans  deux  plans  perpendiculaires  entre  eux  ;  quant 
à  la  croix  de  second  ordre,  chacun  de  ses  bras  est  formé  d'un 
axe  longitudinal,  d'apparence  cylindrique,  qui  émet  des  deux 
côtés,  sous  des  angles  de  45°,  des  branches  plus  longues.  Ces 
branches  sont  donc  de  nouveau  parallèles  aux  divisions  de  premier 
ordre,  et  elles  montrent  aussi,  en  petit,  exactement  la  même  forme 
et  la  même  subdivision  orthogonale.  D'après  cela,  l'étoile  est 
entièrement  composée  de  branches  à  ramification  rectangulaire, 
dont  les  quatre  plus  grandes,  représentant  les  axes  principaux, 
se  coupent  au  centre,  tandis  que  les  autres,  plus  petites,  se 
rencontrent  sur  la  ligne  des  axes  intermédiaires ,  l'intersection  des 
unes  comme  des  autres  se  faisant  d'ailleurs  à  angle  droit. 

Si,  poursuivant  notre  analyse,  nous  cherchons  maintenant  à 
résoudre  chaque  branche  en  ses  derniers  éléments  simples,  nous 
voyons  bien ,  dans  les  cristallites  tout  à  fait  intacts ,  que  les  bords 
et  les  pointes  extrêmes  sont  toujours  formés  de  petits  globulites , 
mais  le  milieu  des  cônes  et  des  aiguilles  est  trop  dense  et  trop 
opaque  pour  qu'on  .puisse ,  sans  autre  précaution ,  en  reconnaître 
la  structure  intérieure.  Nous  atteignons  toutefois  très  bien  notre 
but  en  étudiant  les  surfaces  limites  de  la  préparation,  où,  par 
la  taille,  les  formes  ont  en  quelque  sorte  subi  une  dissection 
anatomique.  De  cette  manière ,  on  peut  constater  en  toute  évidence 
que  les  diverses  branches ,  aussi  bien  celles  du  premier  ordre  que 
celles  du  second,  sont  composées  dans  toute  leur  épaisseur  de 
petits  globulites ,  et  que  jamais  les  axes  ne  sont  formés  de  longu- 
lites  unitaires,  cylindriques  ou  coniques.  Partout  où  de  pareils 
axes  corporels  se  présentent,  ils  ont  tout  au  plus  la  valeur  de 
ceux  des  longulites,  décrits  ci-dessus,  que  nous  avons  aussi  pu 
résoudre  entièrement  en  globulites  groupés  latéralement.  Pour 
plusieurs  des  formes  représentées,  spécialement  pour  celles  qui 
se  trouvent  au  milieu  de  la  PL  VIII,  on  a  cherché  a  reproduire 
des  sections  du  genre  de  celles  dont  il  s'agit  ici. 

Dans  les  formes  allongées ,  à  grandes  divisions  latérales ,  chaque 
division  a  une  structure  analogue  à  celle  des  branches  des  étoiles  : 


H.    VOGELSAIVG.    SUR    LES    CRISTALLITES.  187 

l'axe  se  compose  aussi  le  plus  souvent  de  globulites  distincts, 
mais  fréquemment  il  montre  une  section  analogue  aux  formes  de 
transition  qui  ont  été  signalées  précédemment  et  qui  s'expliquent 
par  la  juxtaposition  de  4  ou  8  globulites  de  grande  dimension. 

L'extension  et  la  ramification  ultérieure  des  branches  sont^  à 
part  la  division  à  angle  droit,  très  inégales;  dans  les  étoiles 
toutefois ,  les  branches  de  même  ordre  montrent  souvent  une  con- 
formité remarquable,  qui  se  manifeste  par  l'analogie  et  la  symétrie 
de  la  ramification ,  par  l'égalité  de  développement ,  d'élargissement 
ou  de  rétrécissement  des  différentes  parties.  Les  formes  allongées 
se  font  parfois  remarquer,  sous  ce  rapport,  par  une  interruption 
caractéristique;  à  des  distances  régulières  on  voit  l'axe  donner 
naissance  à  de  grandes  branches ,  entre  lesquelles  ne  se  sont  dé- 
veloppés que    des  ramuscules  courts  et  simples. 

Les  différentes  branches,  dont  les  rameaux,  d'après  ce  qui 
précède,  convergent  les  uns  vers  les  autres  sous  des  angles  de 
45,  de  90  ou  de  180  degrés,  n'arrivent  pourtant  jamais  en  con- 
tact immédiat;  jamais  on  ne  voit  d'entrelacements  en  forme  de 
treillis.  Ce  n'est  que  sur  l'axe  ou  au  centre  que  les  divisions  des 
divers  ordres  se  rencontrent;  partout  ailleurs  il  reste  entre  elles 
un  espace  bien  distinct,  quoique  souvent  très  étroit,  espace  qui 
est  occupé  par  la  matière  vitreuse. 

En  ce  qui  concerne  les  propriétés  optiques  des  cristallites  de 
ce  laitier,  nous  avons  déjà  dit  plus  haut  qu'ils  se  montrent  com- 
plètement isotropes,  sans  la  moindre  action  sur  l'appareil  de 
polarisation.  Mais,  de  cette  circonstance  seule,  il  serait  hasardé 
de  tirer  la  conclusion  que  nous  avons  affaire  à  des  formes  régulières 
ou  à  des  rudiments  de  cristaux  réguliers. 

En  beaucoup  d'endroits  le  fond  clair  du  laitier  est  encore  par- 
semé de  cristallites  extrêmement  petits,  qui  ont  la  forme  de 
simples  groupes  d'axes  étoiles,  et  qui  sont  composés,  conformé- 
ment à  ce  qui  a  lieu  dans  les  cristallites  plus  grands,  soit  de 
quatre,  soit  de  six  globulites. 

Si  nous  examinons  maintenant  la  planche  VIII  dans  ses  rapports 
avec  la  planche  VII,  en  tenant  compte  des  notions  acquises  par  l'étude 


188  H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES. 

de  la  cristallisation  du  soufre,  il  ne  pourra  rester  aucun  doute 
au  sujet  de  la  signification  des  différentes  formes.  Pour  les  cris- 
tallites  de  la  PL  YIl,  le  mouvement  moléculaire  interne,  tant 
celui  des  globulites  formés  que  celui  du  magma  ambiant,  était 
encore  si  considérable,  et  la  résistance  due  à  la  pellicule  des 
globalités  et  à  l'état  d'agrégation  du  magma  était  si  faible,  que 
le  groupement  régulier,  auquel  les  globulites  tendaient  en  vertu 
du  travail  de  cristallisation  intérieur,  a  pu  être  accompagné  ordi- 
nairement de  la  réunion,  de  la  fusion  de  ces  globulites  en  formes 
unitaires.  Toutes  les  formes  relativement  grandes  et  d'apparence 
simple  ont  pris  naissance  de  cette  manière ,  par  la  réunion  de  petits 
globulites.  Même  la  différence  remarquable  qui  existe  entre  les 
formes  arrondies  et  les  formes  allongées  est  peut-être  aussi  due, 
comme  pour  le  soufre,  à  de  pareilles  modifications  mécaniques, 
au  lieu  de  reposer  sur  une  diversité  réelle,  substantielle. 

La  résistance  du  milieu  venant  à  augmenter,  il  en  résulta 
d'abord  que  les  globulites  ne  purent  plus  conserver  la  forme 
d'équilibre  la  plus  simple,  mais  que,  suivant  les  directions  dans 
lesquelles  ils  se  joignaient,  il  dut  se  produire  des  arêtes,  des 
angles  et  des  étranglements,  jusqu'à  ce  qu'enfin,  la  condensation 
devenant  tout  à  fait  impossible,  il  ne  resta  plus  aux  globulites 
que  la  faculté  de  se  grouper  en  série  linéaire  ou  en  étoile.  C'est 
ainsi  que  s'expliquent  les  formes  leucitoédriques  et  les  autres 
formes  intermédiaires. 

La  planche  VIII  ne  nous  montre  que  des  groupements  régu- 
liers de  globulites  de  la  plus  petite  espèce,  mais  ce  sont  précisé- 
ment ces  formes  qui  démontrent  le  mieux  que  déjà  dans  ces 
plus  petits  globulites  il  existe  une  certaine  polarité  du  mouvement , 
qui  appelle  et  favorise  l'attraction,  le  groupement  et  la  réunion 
suivant  des  directions  axonométriques  déterminées.  Et  comme  les 
petits  globulites  qui  composent  ces  formes  en  feuilles  de  fougère 
se  trouvent,  sous  le  rapport  de  l'individualisation,  au  même  degré 
que  les  sphères  beaucoup  plus  grosses  de  la  Planche  VII,  nous 
pouvons  aussi  construire  par  la  pensée,  à  l'aide  de  ces  sphères 
et   des   longulites   unitaires,   les  cristallites  richement  développés 


H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES.  189 

de  la  Planche  VIII ,  et  par  là  nous  faire  une  idée ,  non-seulement 
de  la  nature  et  du  mode  de  leur  croissance  exogène ,  mais  pro- 
bablement aussi  des  directions  du  mouvement  moléculaire  inté- 
rieur. En  admettant  des  conditions  physiques  partout  égales^  ou 
du  moins  variables  avec  uniformité,  pour  le  magma  de  silicates, 
et  en  même  temps  une  certaine  durée  de  temps  pour  la  sépara- 
tion des  plus  petits  globulites,  les  cristallites  de  la  PL  VII  seraient 
les  plus  anciens,  les  premiers  séparés,  ceux  qui,  en  un  certain 
sens,  se  rapprochent  davantage  d'un  degré  d'individualisation  plus 
élevé.  Mais  les  cristallites  pourraient  aussi  s'être  séparés  simul- 
tanément, et  dans  ce  cas  leurs  degrés  différents  de  développe- 
ment s'expliqueraient  par  des  différences  locales,  par  des  inéga- 
lités dans  les  conditions  physico-chimiques,  la  température,  la 
fusibilité ,  etc  ;  irrégularités  qui  doivent  nécessairement  se  produire 
dans  une  masse  de  laitier  en  voie  de  solidification. 

Dans  aucun  autre  produit  métallurgique  je  n'ai  rencontré  des 
cristallites  aussi  grands  et  de  formes  aussi  diverses  que  dans  le  laitier 
de  Siegburg;  mais,  sous  de  plus  petites  dimensions  et  avec  des 
formes  ordinairement  plus  irrégulières,  on  les  trouve  probablement 
dans  tous  les  laitiers  verts,  dont  ils  constituent  tout  spéciale- 
ment le  principe  colorant.  Je  ne  puis  mentionner  ici  les  nom- 
breuses modifications  que  j'ai  observées,  et  dont  quelques  unes 
ont  déjà  été  décrites  et  reproduites  antérieurement.  Comme 
d'un  intérêt  spécial,  on  peut  citer  les  formes  irrégulières,  den- 
dritiques,  bryoïdes,  dans  lesquelles  le  groupement  régulier  des 
globulites  a  été  empêché  probablement  par  le  mouvement  de  la 
masse  ou  par  quelque  autre  cristallisation  concomitante  ^).  Des 
formes  analogues  se  trouvent  aussi  dans  beaucoup  de  roches 
cristallines. 

Il  n'est  nullement  certain  que  dans  tous  ces  cas  les  cristallites 
représentent  une  seule  et  même  combinaison  chimique.  Ils  peuvent, 
en  qualité  de  silicates  d'oxydule  de  fer,  ne  pas  s'éloigner  beau- 


»)  V.  H.  Vogelsang,  Philosophie  der  Géologie  und  mikroskopische  Gesieinsstu- 
dien,  PL  Y,  fig.  1. 


190  H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES. 

coup  de  la  composition  de  l'augite  ou  de  l'olivine  ;  mais ,  abstrac- 
tion faite  du  manque  de  moyens  exacts  de  détermination,  l'im- 
perfection même  de  leur  individualisation  nous  défend  de  les 
identifier  avec  l'un  ou  l'autre  de  ces  minéraux.  Il  est  très  pos- 
sible que  dans  un  seul  et  même  laitier,  et  même  dans  un  seul 
cristallite,  la  nature  et  le  groupement  des  atomes  ne  soient  pas 
exactement  les  mêmes  pour  tous  les  globulites.  En  effet,  les  con- 
ditions générales  d'un  pareil  groupement  régulier  embrassent  très 
probablement  des  systèmes  cristallins  tout  entiers,  et  par  suite 
exigent  bien  dans  les  divers  globulites  constituants  un  certain 
isomorphisme,  mais  non  pas  une  similitude  complète  de  compo- 
sition chimique.  Au  reste,  ces  vues  purement  théoriques  échappent 
encore  aujourd'hui  au  contrôle  de  l'observation  directe,  de  sorte 
que  nous  pouvons  nous  en  tenir  provisoirement  à  l'idée  la  plus 
simple,  savoir  que,  au  moins  dans  un  seul  et  même  laitier,  les 
cristallites  représentent  une  combinaison  chimique  déterminée, 
identique  dans  leurs  diverses  parties. 

J'attache  pour  le  moment  plus  d'importance  à  l'observation 
que,  lorsqu'un  magma  de  silicates  est  à  l'état  liquide,  une  diffé- 
renciation peut  s'y  déclarer  sans  que  la  cristallisation  progresse 
régulièrement  avec  la  solidification,  avec  le  déeroissement  de  la 
température.  Nous  ne  faisons  qu'appliquer  par  analogie  les  résultats 
expérimentaux  de  l'étude  de  la  formation  des  cristaux  dans  les 
solutions  aqueuses,  quand  nous  demandons,  comme  première 
condition  de  la  cristallisation  dans  les  magmas  de  silicates ,  une 
mobilité  des  particules  aussi  grande  possible,  un  degré  déterminé 
de  fluidité  de  la  masse.  Ce  n'est  que  lorsque  cet  état  est  atteint, 
que  les  réactions  physico-chimiques,  par  exemple  l'abaissement 
de  la  température,  peuvent  donner  lieu  à  un  groupement  régulier 
de  molécules  homogènes.  Nous  aurons  encore  plusieurs  fois  l'oc- 
casion ,  dans  la  suite ,  de  revenir  sur  cette  considération  si  simple , 
qu'on  a  trop  souvent  perdue  de  vue  en  traitant  de  la  formation 
des  cristaux  dans  les  magmas  de  silicates  à  l'état  de  fusion  ignée. 

Pour  terminer,  nous  décrirons  encore  un  laitier  qui  est  propre 
à  démontrer  jusqu'à  un  certain  point,  précisément  pour  le  degré 


H.    VOGELSANG.    SUR    LES    CRISTALLITES.  191 

de  développement  des  cristallites  que  nous  avons  appris  à  con- 
naître dans  le  laitier  de  Siegburg,  la  justesse  de  la  considération 
théorique  qui  vient  d'être  rappelée. 

Fig.  1 ,  PL  IX  est  l'imag-e  microscopique  d'un  laitier  de  haut 
fourneau  de  la  Konigshùtie  en  Silésie.  Ce  laitier  a  l'aspect  d'un 
émail,  sa  couleur  est  d'un  vert  vif,  avec  des  raies  plus  claires 
et  plus  foncées,  où  l'on  reconnaît  distinctement  la  direction  du 
mouveaient  de  la  masse,  un  dessin  fluidal.  Sous  le  microscope, 
la  pâte  se  montre  comme  un  verre  très  clair,  presque  incolore, 
dans  lequel  d'innombrables  cristallites  sont  disposés  parallèlement 
à  la  direction  du  courant.  Ce  sont  tous  des  aiguilles  longues  et 
aiguës,  dont  le  gros  bout  porte  un  bouton  étoile,  et  qui  ressem- 
blent par  conséquent  tout  à  fait  aux  cristallites  énantiomorphes 
que  nous  avons  décrits  et  figurés  dans  le  laitier  de  Siegburg. 
Les  aiguilles  sont  pour  la  plupart  des  lougulites  unitaires,  mais 
chez  un  grand  nombre  d'entre  elles  la  fusion  des  globulites  n'a 
pas  été  complète;  à  l'aide  d'un  fort  grossissement  elles  se  résol- 
vent, en  tout  ou  en  partie,  en  globulites  distincts.  Il  est  rare 
que  les  longulites  viennent  à  se  grouper;  du  reste,  en  admettant 
même  que  la  tendance  au  groupement  ait  existé,  elle  a  dû  être 
contrariée  par  le  mouvement  de  la  masse.  Dans  les  raies  fluida- 
les  claires  les  cristallites  sont  en  petit  nombre,  mais  de  grande 
dimension;  dans  les  parties  foncées  ils  sont  nombreux,  mais 
petits.  Tous,  comme  nous  l'avons  dit,  sont  situés,  d'une  manière 
générale,  dans  la  direction  du  courant;  parfois  on  remarque  un 
amoncellement  des  aiguilles,  et  il  n'y  a  pas  à  douter  que  leur 
séparation  n'ait  eu  lieu  ou  du  moins  n'ait  commencé  pendant 
que  la  masse  vitreuse  liquide  était  en  mouvement.  Considérés 
sous  le  rapport  de  la  position  de  la  pointe  et  du  bouton,  les 
cristallites  ne  sont  du  reste  pas  orientés  de  la  même  manière, 
ainsi  que  le  montre  la  figure  ;  parfois ,  une  étoile  forme  le  milieu 
de  deux  cristallites  placés  symétriquement.  Fréquemment  on  voit 
de  ces  petits  cristallites  étoiles  sans  aiguille,  mais  jamais  je  n'ai 
vu  d'aiguille  sans  étoile,  à  moins  que  celle-ci  n'eût  été  enlevée 
par   l'opération  de  la  taille.  Les  étoiles  montrent  de  nouveau  un 


192  H.    VOGELSAIN'G.    SUR    LES    CRISTALLITES. 

groupement  quaternaire  ou  octonaire^  qui  toutefois  n'est  que  peu 
prononcé  dans  la  plupart  des  petites  formes  arrondies.  Les  aiguilles 
les  plus  grandes  ont  une  longueur  d'environ  0,2  mm,^  avec  un 
diamètre  de  0^006  mm.  au  gros  bout  ;  l'étoile  qui  surmonte  celui-ci , 
mesure  environ  0,01  mm.  dans  son  plus  grand  diamètre.  La 
grande  majorité  des  cristallites  reste  toutefois  beaucoup  au-dessous 
de  ces  dimensions.  Les  longues  aiguilles  montrent  aussi  quelque- 
fois un  enroulement  bélicoïde ,  et ,  en  général ,  on  retrouve  ici  presque 
toutes  les  particularités  qui  ont  été  décrites  en  détail  à  l'occasion 
du  laitier  de  Siegburg.  La  figure  2,  PI.  IX,  sera  décrite  dans  le 
chapitre  suivant. 


PI.  IV. 


Pl.V. 


\  • 


3     r--^^^i 


€-^ 


-■m 


7     /< 


,f^rx^.- 


i 
■^ 


/ 


15 

0 


16 


17 


/f 


Epichtliys  giganteus    Ei§M-9.    Iclitkyoxenos  Jellmghausii  Fig.  10^18 


A.J.W  adnat  et  m  lap   del 


F¥M  T  impr 


nvL 


AldwvBnLâiJinnciun. 


PIW. 


Pl\^ 


I 


ARCHIVES  NÉERLANDAISES 

DES 

Sciences  exactes  et  naturelles. 

SUR  LES 

CHALEURS  SPÉCIFIQUES  DES  CORPS 
SOLIDES  ET  LIQUIDES 

PAB, 
J.  A.  GROSHANS. 


1.  Il  résulte  des  considérations  que  j'ai  communiquées  dans 
ces  Archives ,  Tome  V ,  page  1 ,  que  les  chaleurs  spécifiques  des 
corps  (à  l'état  liquide)  sont  comparables  entre  elles,  aux  points 
d'ébullition,  ou  à  des  températures  correspondantes,  et  qu'il  est 
nécessaire  de  rapporter  ces  chaleurs  aux  poids  moléculaires ,  et  non 
aux  poids  atomiques,  qu'on  a  employés  pour  cela  jusqu'aujourd'hui. 

2.  On  trouve  alors,  que  les  chaleurs  atomiques  des  éléments 
sont  égales  aux  chaleurs  atomiques  de  l'eau  H2  0,  du  carbure 
de  soufre   C  S^ ,  et  de  l'acide  formique    CH2O2. 

3.  Ces  chaleurs  atomiques  (des  éléments)  sont  aussi  les  mêmes 
que  celles  d'un  très-grand  nombre  de  combinaisons  simples  métal- 
liques ,  telles  que  des  oxydes ,  des  sulfures ,  des  chlorures , 
bromures  et  iodures  des  formules  RCl  et  R^Cl^,  RBretR2Bi'2J 
RI  et  R2I2;  ainsi  que  d'un  grand  nombre  de  sels  métalli- 
ques j  carbonates ,  nitrates ,  arséniates ,  phosphates ,  etc. 

4.  Tous  ceux  qui  traiteront  des  chaleurs  spécifiques  (des  corps 
solides  et  liquides)  trouveront  de  grandes  ressources  dans  les  deux 
mémoires  étendus  de  M.  H.  Kopp  [Annalen  der  Cliemie  und  Phar- 
macie,  3r  Supplementband ,  1864  et  1865). 

5.  Dans  ces  deux  mémoires,  qui  occupent  ensemble  179  pages, 
M.  Kopp  a  exposé  l'histoire  et  l'état  général  de  la  science ,  en  ce  qui 

Archives  Néerlandaises,  T.  V.  13 


194      J.  A.  GROSHANS.  SUR  LES  CHALEURS  SPECIFIQUES 

concerne  les  chaleurs  spécifiques  ;  il  y  a  rassemblé  les  résultats 
d'un  très  grand  nombre  d'observations  de  M.  Regnault  et  d'autres 
physiciens;  à  quoi  il  a  ajouté  le  détail  d'un  nombre  considérable 
d'expériences  exécutées  par  lui-même  ;  il  y  a  énuméré  les  opinions 
des  principaux  savants  qui  se  sont  occupés  de  ce  sujet,  et  enfin 
il  a  coordonné  tous  les  résultats  connus  dans  une  théorie  qui  lui  est 
propre ,  quoique  reposant  pour  une  grande  partie  sur  les  opinions 
de  MM.  Schroeder  et  Woestyn. 

6.  En  exposant  mes  vues ,  qui  sont  quelquefois  opposées  à  celles 
de  M.  Kopp ,  il  me  sera  nécessaire  de  revenir  de  temps  en  temps 
sur  les  opinions  de  ce  savant  et  de  présenter  les  modifications 
qu'elles  me  paraissent  devoir  subir. 

7.  Par  exemple;  M.  Kopp  considère  comme  une  erreur  l'opi- 
nion ancienne  d'après  laquelle  les  corps  solides  seraient  en  général 
comparables  aux  corps  liquides  (lorsque  les  formules  chimiques 
des  uns  et  des  autres  sont  analogues  ou  ressemblantes)  ^  quant 
aux  rapports  entre  la  chaleur  spécifique  et  le  poids  atomique. 

C'est  ainsi  qu'on  croyait  que  l'oxyde  Cu^O,  dont  la  chaleur 
atomique  est  =  15^6;  pouvait  être  comparé  avec  l'eau  liquide  H2  0, 
dont  la  chaleur  atomique  est  z=z  18. 

Selon  M.  Kopp ,  il  faudrait  dans  ce  cas  comparer  avec  le  corps 
solide  Cu^O,  l'eau  H2  0  à  l'état  de  glace ,  dont  la  chaleur 
atomique  est  =  8,  6. 

8.  C'est  cette  opinion  de  M.  Kopp  que  je  crois  susceptible  de 
modification. 

On  pourrait  citer  un  nombre  considérable  de  savants,  qui  ont 
cru  reconnaître  dans  les  chaleurs  atomiques,  15,6  et  18,  des  deux 
corps  Cu^  0  et  H^  0,  dont  les  formules  se  ressemblent,  un  cas 
de  la  loi  de  Neumann ,  et  il  faut  avoir  de  fortes  raisons ,  pour  se 
refuser  à  cette  espèce  d'évidence  et  maintenir  l'opinion  contraire, 
celle  qui  consiste  à  vouloir  plutôt  comparer  les  nombres  15,6  et 
8,6.  Avant  tout,  il  faut  consulter  les  résultats  de  l'expérience,  quant 
aux  chaleurs  atomiques  de  corps  possédant  des  formules  chimiques 
analogues  et  dont  les  uns  soient  solides  et  les  autres  liquides 
à  la  température  ordinaire. 


DES    CORPS    SOLIDES    ET    LIQUIDES. 


195 


9.  Je  prendrai  pour  premier  exemple  H2SO4,  l'acide  sulfu- 
rique ,  corps  liquide ,  que  je  comparerai  aux  corps  solides  K  H  S  O4 , 
K.,  S  O4  et  Na2  S  O4 ,  qui  ont  tous  la  même  formule  que  H^  S  O4  ; 
voici  les  résultats  de  cette  comparaison  (les  expériences  sont 
toutes  de  M.  Kopp  lui-même): 

formules,      chaleurs  spéc.       poids  atomiques,     chaleurs  atomiques. 

corps  liquide. 
H,S04        0,343  98  33,6 

corps  solides. 
KHSO4       0,244  136,1  33,2 

K,S04        0,196  174,2  34,1 

Na,S04      0,227  142  32,2 

On  voit   que  ces  quatre  corps  ont  une  chaleur  atomique  égale. 

10.  Pour  second  exemple  je  prendrai  le  mercure  ;  M.  Regnault 
a  trouvé  pour  ce  corps  à  l'état  solide  la  chaleur  atomique  =  6,4 
et  à  l'état  liquide  =  6,6;  ces  deux  valeurs  diffèrent  assez  peu 
l'une  de  l'autre ,  pour  qu'il  soit  permis  de  dire  que  la  chaleur  atomique 
du  mercure  peut  être  comparée,  tant  dans  l'état  liquide,  que 
dans  l'état  solide,  à  celle  de  la  généralité  des  autres  éléments. 

11.  A  ces  deux  exemples  on  peut  maintenant  ajouter  les  chaleurs 
atomiques  des  corps  Cuj  0  =  15,6,  et  H^  0  (à  l'état  liquide)  =  18. 

12.  Il  résulte  de  ces  trois  exemples,  que  des  corps  solides  et 
des  corps  liquides  (quand  les  formules  chimiques  sont  sembla- 
bles) peuvent  avoir  des  chaleurs  atomiques  égales.  L'opinion  de 
M.  Kopp  n'est  donc  pas  vraie  d'une  manière  absolue. 

13.  On  ne  doit  cependant  pas  admettre  qu'on  puisse,  en 
général ,  comparer  les  chaleurs  atomiques  de  corps  solides  à  celles 
de  corps  liquides  (les  formules  chimiques  étant  semblables)  ;  on 
sait  que  l'eau,  dans  les  deux  états  de  liquidité  et  de  solidité, 
a  des  chaleurs  atomiques  différentes  ;  et  il  en  est  de  même  pour 
le  brome  et  l'iode;  cela  tient  à  l'action  des  forces  moléculaires, 
qu'on  n'a  pu  assujettir  jusqu'aujourd'hui  au  calcul;  mais  il  m'a 
semblé  important  de  constater  que  cette  action  des  forces  molé- 
culaires n'est  pas  liée  nécessairement  aux  deux  états  de  liquidité 
et   de   solidité;    en    outre,   j'ai  voulu  montrer   que  la  théorie  de 

13* 


196  J.    A.    GROSHANS.    SUR    LES    CHALEURS    SPECIFIQUES 

M.  Kopp^  qui  repose  pour  une  grande  partie  sur  la  chaleur  atomique 
de  l'eau  à  l'état  de  glace,  chaleur  atomique  qui  paraît  (d'après 
les  exemples  cités)  être  plus  anomale  que  celle  de  l'eau  à  l'état 
liquide,  a  besoin  d'être  discutée    avant  d'être  acceptée. 

14.  Aux  trois  exemples  cités  on  peut  en  ajouter  encore  d'autres, 
qui  sont  d'une  nature  moins  directe.  M.  Regnault  a  trouvé  pour 
les  deux  corps  liquides  suivants: 

chai.  spéc.  a  chai.  at. 

SnCl^  0,1476  260  38,37 

TiCl,   0,1914  192  36,75; 

et  d'un  autre  côté  on  a  pour  les  corps  solides  suivants  (expériences 
de  M.  Regnault,  citées  par  M.  Kopp): 

chai.  spéc.  a  chai.  at. 

SnCl^  0,1016  189  19,2 

PbCl^  0,0664  278  18,5 

Si  l'on  considère  maintenant  que  Sn  et  Pb  sont  des  métaux 
tétratomiques ,  on  voit  qu'il  faut  doubler  les  formules  et  les  poids 
atomiques,  ce  qui  donne: 

chai.  spéc.  a  chai.  at. 

Sn^Cl^  0,1016  378  38,4. 

Pb^CU  0,0664  556  37,0; 

et  Ton  constate  alors  que ,  pour  ce  cas  encore ,  l'accord  entre  les  deux 
corps  solides  et  les  deux  corps  liquides  est  aussi  précis  qu'on 
aurait  pu  le  souhaiter. 

15.  J'ai  appelé  ces  derniers  exemples  d'une  nature  moins  directe  ; 
non-seulement  parce  qu'il  faut  admettre  pour  les  corps  Sn2Cl4  et 
Pb^  Cl 4  une  densité  de  vapeur  qui,  quoique  probable,  manque  cepen- 
dant du  contrôle  nécessaire  de  l'expérience;  mais  aussi  parce  qu'il 
se  présente  ici  un  cas  nouveau,  celui  de  corps  R  CI4  et 
R2  Cl 4,  ayant  des  chaleurs  atomiques  égales;  on  voit  bien  que 
ces  deux  formules  ont  une  certaine  ressemblance,  chacune 
renfermant  4  atomes  de  chlore;  mais  ce  n'est  pas  une 
ressemblance  dans  l'esprit  de  la  loi  de  Neumann.  Suivant 
mon  opinion,  que  j'ai  déjà  communiquée  dans  ce  journal, 
les    lois    de    Dulong    et     Petit    et     de    Neumann     ne     seraient 


DES    CORPS    SOLIDES    ET    LIQUIDES.  197 

toutes  deux  que  des  cas  particuliers  d'une  loi  nouvelle ,  qu'on  peut 
énoncer  ainsi: 

Les  chaleurs  atomiques  sont  égales  pour  des  corps  qui  ont  le 
même  rang. 

16.  Quand  on  admet  les  formules  doubles  pour  SnCl2  et  Pb 
Cl  2;  il  faut  doubler  nécessairement  les  formules  pour  les  bromures 
et  les  iodures  analogues;  et  même  faire  cette  opération  pour  les 
chlorures,  bromures  et  iodures,  RCU  ,  des  corps  suivants:  Ba,  Ca, 
Mg,  Mn ,  Sr ,  dont  les  chaleurs  atomiques  sont  de  même  ■=z  18  ou  19. 

17.  J'ai  déjà  dit  que,  d'après  ma  manière  de  voir,  les  chaleurs 
spécifiques  sont  comparables  aux  points  d'ébullition  ou  à  des  tem- 
pératures correspondantes.  Il  est  vrai  que  la  comparaison  à  ces  tem- 
pératures donnerait  lieu,  pour  beaucoup  de  corps,  à  des  difficultés 
insurmontables  ;  mais ,  en  consultant  les  résultats  de  l'expérience ,  on 
peut  admettre  que,  pour  des  corps  qui  bouillent  à  des  tempé- 
ratures très  élevées,  la  comparaison  peut  se  faire  aussi  à  la  tem- 
pérature ordinaire.  On  peut  faire  au  moins  à  cette  température 
beaucoup  d'observations  intéressantes;  seulement  il  faut  songer 
que,  dans  beaucoup  de  cas,  on  observerait,  à  des  températures 
élevées,  des  phénomènes  nouveaux,  qui  demeurent  cachés  quand 
on  opère  à  la  température  ordinaire  ;  —  c'est  ainsi,  par  exemple, 
que  la  chaleur  atomique  de  l'iode  liquide  est  double  de  celle  de 
l'iode  solide  (expériences  de  MM.  Favre  et  Silbermann). 

1 8.  Je  vais  traiter  maintenant  de  la  question  des  poids  moléculaires  ; 
on  sait  que  les  deux  notions  de  poids  moléculaires  et  de  poids 
atomiques  n'ont  été  généralement  séparées  que  depuis  un  petit 
nombre  d'années. 

19.  Je  commencerai  par  rappeler  quelques  idées  déjà  anciennes 
sur  les  rapports  entre  les  chaleurs  spécifiques  et  les  poids  atomi- 
ques; j'emprunterai  pour  cela  une  partie  de  deux  tableaux  de 
l'ouvrage  de  MM.  H.  Buff,  H.  Kopp  et  F.  Zamminer,  intitulé: 
Lehrbuch  der  Physik  und  theoretische  Chemie ,    Brunswick,   1857. 

Tableau  I. 

chai.  spéc.  a  chai.  at. 

Al  0,2143  13,7  2,94 

S     0,2026  16  3,24 


198  J.    A.    GROSHANS.    SUR    LES    CHALEURS    SPECIFIQUES 

chai.  spéc.  a  chai.  at. 

Fe  0,1138  28  3,19 

Cu  0,0952  31,7  3,02 

Cd  0,0567  56  3,18 

Sn  0,0562  58  3,26 

Tableau  II. 

P     0,1887  31  5,85 

As  0,0814  75  6,10 

Ag  0,0570  108,1  6,16 

I      0,0541  127,1  6,88 

Sb   0,0508  120,3  6,11 

Au  0,0324  197  6,38 

20.  On  voit  qu'en  1857  on  admettait  que  les  chaleurs  atomi- 
ques des  éléments  sont  égales  entre  elles,  ou  dans  un  rapport 
simple,  comme  1  à  2;  on  sait  d'ailleurs  que  plusieurs  chimistes 
avaient  proposé  de  changer  les  nombres  adoptés  pour  les  poids 
atomiques,  de  manière  à  obtenir  des  valeurs  égales  pour  les 
chaleurs  atomiques  de  tous  les  corps;  ainsi  M.  Regnault  intro- 
duisit l'uniformité  à  cet  égard  en  faisant  (le  poids  atomique 
du  fer  étant  =  28)  le  poids  atomique  de  l'argent  =:  54.  On 
peut  dire  que  les  progrès  de  la  science  ont  donné  raison  à 
M.  Regnault;  seulement  ce  n'est  pas  le  poids  atomique  de  l'ar- 
gent qu'on  a  diminué  de  moitié,  c'est  le  poids  atomique  du 
fer,  qui  a  été  doublé;  ce  qui  revient  en  quelque  sorte  au  même. 

21.  Voici  maintenant  qu'en  1864,  sept  années  après  la  pu- 
blication de  ces  deux  tableaux,  M.  Kopp  donne  un  autre  tableau 
(dans  les  mémoires  cités  plus  haut),  dont  je  ferai  ici  un  extrait 
pour  les  corps  des  deux  tableaux  du  paragraphe  19: 


chai  spéc. 

a 

chai.  at. 

Al    0,2143 

27,4 

5,87 

S      0,2026 

32 

6,48 

Fe   0,1138 

56 

6,38 

Cu   0,0952 

63,4 

6,04 

Cd   0,0567 

112 

6,36 

DES    CORPS    SOLIDES    ET    LIQUIDES.  199 


chai.  spéc. 

a 

chai.  at. 

Sn   0,0562 

118 

6,53 

P     0,1887 

31 

5,85 

As    0,0814 

75 

6,10 

Ag  0,0570 

108 

6,16 

I      0,0541 

127 

6,88 

Sb   0,0508 

122 

6,11 

Au  0,0324 

197 

6,38 

22.  En  voyant  cette  uniformité  admirable,  que  les  chimistes 
avaient  souhaitée  si  longtemps,  sans  pouvoir  l'atteindre,  on  aurait 
pu  croire  que  la  question  était  définitivement  résolue;  ou  qu'au 
moins  de  grands  changements  dans  les  nombres  du  dernier  tableau 
ne  seraient  nécessaires  qu'après  un  temps  plus  ou  moins  long. 

23.  Tel  n'est  cependant  pas  le  cas  ;  l'introduction  nécessaire  des 
poids  moléculaires,  qui  remplaceront  les  poids  atomiques,  aura 
pour  résultat  que  tous  les  nombres  du  dernier  tableau  seront 
doublés ,  et  il  pourrait  même  arriver  que  les  rapports  simples  entre 
les  chaleurs  atomiques  (moléculaires)  des  éléments,  dont  on  se 
croyait  débarrassé,  reparaîtront  en  plus  grand  nombre. 

24.  Avant  de  traiter  le  cas  général  des  poids  moléculaires,  je 
prendrai  pour  exemple  particulier  le  soufre. 

La  chaleur  atomique  du  soufre ,  rapportée  au  poids  atomique  32 , 
est  en  moyenne  5,9.  Celle  de  plusieurs  combinaisons  ES  est  en 
moyenne  11,9. 

25.  Si  ces  deux  nombres  5,9  et  11,9  sont  en  raison  de 
1  à  2 ,  c'est  bien  évidemment  parce  qu'on  a  employé  pour  la  chaleur 
atomique  du  soufre  la  moitié  du  nombre  qu'il  aurait  fallu  prendre. 

26.  On  peut  faire  la  même  observation  pour  les  corps  suivants: 

formules  atomiques  formules  moléculaires. 

Br  BrBr       RBr 

I  I   I        RI 

Mais  je  crois  inutile  d'insister  sur  ce  point;  on  peut  admettre 
que  ceux  qui  traiteront  à  l'avenir  des  chaleurs  spécifiques  (même 
sans  avoir  pris  connaissance  de  mon  travail) ,  reconnaîtront  qu'il  n'y 
a  pas  de  différence  essentielle  entre  les  chaleurs  atomiques  (à  la 


200  J.    A.    GROSHANS.    SUR    LES    CHALEURS    SPECIFIQUES 

température  ordinaire)  des  éléments  SS,  BrBr  et  II,  d'une  part, 
et  des  combinaisons  RS,  RBr  et  RI,  d'autre  part;  —  il  n'y  a 
vraiment  aucune  raison  pour  ne  pas  substituer  dans  la  théorie  des 
chaleurs  spécifiques  les  poids  moléculaires  aux  poids  atomiques, 
comme  on  l'a  fait  déjà  depuis  longtemps  dans  d'autres  parties  de 
la  science,  par  exemple,  quant  aux  volumes  de  vapeur,  où  l'on 
compare  ClCl,  BrBr  et  II  à  HCl,  HBr  et  HI. 

27.  La  nécessité  de  cette  substitution  me  semble  résulter ,  entre 
autres,  de  la  considération  que  par  là  les  éléments  sortiront  enfin  de  la 
classe  exceptionnelle,  tout  à  fait  distincte  de  celles  des 
corps  composés,  dans  laquelle  ils  ont  été  à  tort  placés  jusqu'au- 
jourd'hui; aussi  longtemps  qu'on  a  pu  croire  que  les  élé- 
ments avaient  une  chaleur  atomique,  =  3  ou  6,  plus  petite  que 
celles  des  combinaisons  les  plus  simples ,  il  a  été  permis  de  voir  dans 
ce  fait  un  indice  que  les  éléments  (corps  non  décomposés)  pourraient 
bien  être  des  corps  réellement  simples,  ou  à  peu  près  ;  mais  cette 
hypothèse  perdrait  par  la  substitution  des  poids  moléculaires  aux 
poids  atomiques  son  unique  fondement. 

En  faisant  donc  cette  substitution,  les  produits  des  chaleurs 
spécifiques  par  les  poids  moléculaires ,  pour  les  corps ,  S ,  Se ,  Br 
et  I,  deviendront  environ  i=  13,  à  la  température  ordinaire  ;  puis, 
quand  on  comparera  ces  produits,  à  des  températures  correspon- 
dantes, avec  la  chaleur  atomique  de  l'eau,  on  trouvera  probablement 
que  les  chaleurs  atomiques  de  ces  quatre  corps  approcheront  de  celle 
de  l'eau  =z  18.  On  sait  déjà  qu'il  en  est  ainsi  pour  le  brome  ;  quant 
à  l'iode,  ce  corps  double  sa  capacité  calorifique  en  se  fondant, 
ce  qui  donne  environ  27,  nombre  beaucoup  plus  grand  que  18;  je 
reviendrai  plus  loin  sur  cette  circonstance. 

28.  On  pourrait  croire,  au  premier  abord ,  que,  par  l'introduction 
générale  -des  poids  moléculaires,  les  nombres  pour  les  chaleurs 
atomiques  passeront  tous ,  ou  presque  tous ,  d'une  valeur  comprise 
entre  6  et  7 ,  à  la  valeur  13  environ  ;  tel  serait  en  effet  le  cas  si 
la  formule  moléculaire  d'un  élément  quelconque  R  était  =  RR; 
mais  ce  n'est  pas  là  l'opinion  des  chimistes. 

29.  On  sait  qu'il  y  a  des  éléments  métalliques   dont    on  con- 


DES    CORPS    SOLIDES    ET    LIQUIDES.  201 

naît  la  densité  de  vapeur;  ce  sont,  premièrement,  le  mercure,  le 
zinc  et  le  cadmium; —  pour  ces  corps,  on  admet  que  les  formu- 
les moléculaires  sont  égales  aux  formules  atomiques  et,  par  con- 
séquent ,  les  poids  moléculaires  égaux  aux  poids  atomiques  ;  en  sorte 
que,  par  la  substitution  proposée ,  la  constante  6,4  ne  changerait 
pas  pour  Hg,  Zn  et  Cd. 

30.  En   outre,    on  admet  les  formules  moléculaires  suivantes: 

Arsenic As  As  As  As 

Phosphore P    P    P    P 

Pour  ces  deux  corps  la  constante  6,4  serait  quadruplée ,  ce  qui 
donnerait  environ  25. 

31.  Il  semblerait  donc  que  la  substitution  des  poids  molécu- 
laires aux  poids  atomiques  aura  pour  premier  effet  de 
détruire  l'uniformité  agréable  du  dernier  tableau  de  M.  Kopp. 

32.  Je  ne  crois  pas  que  cette  crainte  doive  nécessairement 
se  réaliser;  mais,  dût  même  l'uniformité  en  question  disparaître, 
elle  ne  mériterait  certes  pas  d'être  conservée  si  elle  n'était 
plus  d'accord  avec  les  faits,  et,  en  tout  cas,  elle  doit  pouvoir 
supporter  la  discussion. 

33.  En  traitant  maintenant  du  cas  général  de  la  substitution 
des  poids  moléculaires  aux  poids  atomiques ,  je  diviserai  tous 
les  éléments  en  cinq  classes. 

La  première  contiendra  les  corps    S ,  Se ,  Br  et  I. 

La  seconde  se  composera  des  métaux  Hg,  Zu  et  Cd,  dont  on 
connaît  la  densité  de  vapeur. 

La  troisième  classe  renfermera  les  corps  As  et  P ,  pour  lesquels 
on  admet  les  formules  moléculaires  As 4  et  P^. 

La  quatrième  classe  comprendra  les  métaux  Ag,  Cu,  Fe,  Na, 
K,  et  généralement  tous  les  éléments  dont  on  ne  connaît  pas  la 
densité  de  vapeur. 

La  cinquième  classe  ce  composera  des  corps  C,  Si  et  B,  qui 
forment   des    exceptions   apparentes   à   la  loi  de  Dulong  et  Petit. 

34.  Quant  aux  corps  de  la  première  classe,  je  n'ai  plus  rien 
à  ajouter. 

35.  Les  corps  de  la  seconde  classe  contiennent  le  mercure,  le 


202      J.  A.  GROSHANS.  SUR  LUS  CHALEURS  SPÉCIFIQUES 

zinc  et  le  cadmium;  on  admet,  pour  ces  corps,  que  les  poids 
atomiques  et  les  poids  moléculaires  sont  égaux,  et  on  se  fonde 
sur  ce  que  les  poids  atomiques  forment  deux  volumes, 
comme  pour  Feau  H^O;  c'est  cette  opinion  que  je  désire  dis- 
cuter; toutefois  je  me  bornerai  à  parler  du  mercure  seul. 

36.  J'emprunterai  au  traité  connu  de  M.  Kékulé  la  citation  suivante: 
„La  diatomicité  du  mercure  est  prouvée,  tant  par  la  densité 
de  vapeur  de  ses  combinaisons  volatiles,  que  par  son  caractère 
chimique  général.  On  a  Hg"  ==:  200  =  1  atome  =  1  molécule.  La 
molécule  de  vapeur  du  mercure  consiste  en  un  seul  atome  ;  en  cela  le 
mercure  présente  une  exception  par  rapport  à  la  plupart  des  éléments, 
pour  lesquels  on  connaît  la  grandeur  relative  de  la  molécule  gazeuse  ; 
il  montre  une  certaine  analogie  avec  ces  carbures  d'hydrogène,  qui 
jouent  le  rôle  de  radicaux  diatomiques. 

,,Les  densités  connues  des  combinaisons  du  mercure  sont: 

formule  moléculaire.  densité  de  vapeur. 


calculée. 

observée. 

Mercure  Hg" 

6,92 

7,03 

Chloride  de  m. 

Hg' 

'Cl, 

9,38 

9,8 

Bromide  de  m. 

V 

Br, 

12,46 

12,16 

lodide  de  m. 

J7 

I. 

15,7 

15,9 

Éthylure  de  m. 

J7 

(C.H3), 

8,58 

9,97 

Chlorure  de  m. 

r 

Cl 

8,15 

8,35 

„Oependant,  quant  au  chlorure  de  mercure,  il  paraît  plus  pro- 
bable que  la  formule  moléculaire  est  Hg''2Cl2,  et  que  ce  qu'on 
appelle  sa  vapeur  est  un  mélange  des  produits  de  décomposi- 
tion :  le  chloride  de  mercure  et  le  mercure.  Au  moins  on  trouve 
pour  les  sels  qui  correspondent  au  chlorure  du  mercure ,  l'expres- 
sion la  plus  simple,  en  admettant  que  2  atomes  de  mercure 
s'unissent  en  un  radical  composé  (Hg^)." 

37.  L'hésitation  de  M.  Kékulé  est  manifeste  ;  premièrement,  après 
avoir  dit  :  on  a  Hg"  =:  200=:  1  atome  :=  1  molécule,  il  convient  qu'en 
cela  le  mercure  présente  une  exception  relativement  à  la  plupart  des 
éléments  pour  lesquels  on  connaît  la  grandeur  relative  de  la  molécule 
gazeuze;     ensuite,     tout     en     affirmant     que     les    densités     de 


DES    CORPS    SOLIDES    ET    LIQUIDES.  203 

vapeur  prouvent  que  la  molécule  du  mercure,  dans  ses  com- 
binaisons, est=:l  atome,  il  dit  qu'il  est  cependant  plus  probable 
que  le  chlorure  de  mercure  Hg'' Cl  est  en  effet  =:  Hg''2  CI2,  et 
cela  nonobstant  la  densité  de  vapeur;  ou  peut  conclure  de  là, 
que  la  densité  de  vapeur  est  à  elle  seule  insuffisante  pour  déter- 
miner la  grandeur  de  la  molécule. 

38.  Après  ce  que  j'ai  dit  dans  les  paragraphes  14  et  suivants  de 
la  chaleur  atomique  des  corps  RCl^,  il  me  semble  nécessaire 
d'étendre  Texception ,  admise  par  M.  Kékulé  pour  Hg"  Cl,  aux  corps 
Hg"Cl2,  Hg"  Br^  et  Hg'  lo,  et  d'écrire  ces  formules  Hg^  Cl^ , 
Hg.Br,  et  Hg^  Ï4. 

39.  J'irai  même  plus  loin ,  et  je  dirai  que  la  densité  de  vapeur 
du  mercure  lui-même  ne  peut  donner  la  mesure  de  sa  molécule, 
et  qu'elle  n'exclut  pas  la  formule  moléculaire  HgHg  et  le  poids 
moléculaire  =:  400. 

40.  En  effet,  quoique  la  très-grande  majorité  des  corps  connus, 
dont  on  a  pu  déterminer  la  densité  de  vapeur ,  donnent  2  volumes , 
comme  l'eau  H.,  0,  il  n'en  existe  pas  moins  un  nombre  relati- 
vement grand  d'exceptions  à  cette  règle,  c'est-à-dire  de  vapeurs  qui 
donnent  4  volumes  ;  et  ce  nombre  tend  à  augmenter  successivement. 

41.  M.  Kékulé  attribue  la  densité  de  vapeur  apparente  du  chlo- 
rure de  mercure  Hg  Cl  à  une  décomposition  ;  —  pour  le  mercure 
on  ne  peut  pas  admettre,  il  est  vrai,  une  décomposition;  du 
reste  il  n'est  pas  prouvé  que  le  phénomène  des  4  volumes,  quand 
on  s'attendait  à  2,  puisse  dans  tous  les  cas  être  attrilnié  à  une 
décomposition. 

42.  En  comparant  entre  elles  les  formules: 

0  (C,H,), 
S  (C,H,), 
Hg  (C,H,), 
Zn  (C,H,), 
il   me  semble  probable   que  les  molécules    des    corps   0,  S,  Hg 
et   Zn  ont  tous  la  même  grandeur,  et  qu'il  faut  les  écrire: 
00,  SS,  Hg  Hg  et  Zn  Zn. 

43.  C'est  ici  le  lieu  d'examiner  ce  qu'on  entend  par  poids 
moléculaire. 


204  .1.    A.    GROSHANS.    SUR    LES    CHALEURS    SPECIFIQUES 

M.  Kékulé  donne  les  définitions  suivantes: 

„La  considération  des  métamorphoses  chimiques  nous  conduit  à 
admettre  deux  plus  peliles  quantités  différentes ,  qu'il  faut  séparer 
nettement  par  la  pensée  et  que  nous  appelons  atome  et  molécule/' 

„Par  atome  nous  désignons  la  quantité  la  plus  petite  de 
matière,  qui  est  chimiquement  indivisible,  et  que  nous  admettons 
en  combinaison  avec  d'autres  parties  de  matière. 

Nous  appelons  molécule  la  quantité  la  plus  petite  de  substance , 
qui  peut  exister  à  l'état  libres  et  qtii  comme  telle  entre  en  action 
dans  les  métamorphoses  chimiques." 

44.  Il  est  à  remarquer  qu'on  n'a  pas  réussi,  au  moyen  de 
cette  définition,  à  fixer  la  grandeur  de  la  molécule  des  éléments 
dont  on  n'a  pu  déterminer  la  densité  de  vapeur. 

45.  Peut-être  pourrait-on  admettre  la  définition  suivante: 

Les  poids  moléculaires  des  éléments  sont  ceux  qui,  étant  mul- 
tipliés par  les  chaleurs  spécifiques  des  corps  à  l'état  solide,  don- 
nent une  constante  qui  est  environ  =  13. 

46.  Cette  définition  serait  applicable  à  tous  les  éléments  connus , 
en  exceptant  le  carbone,  le  silicium  et  le  bore. 

47.  Quant  à  ces  trois  derniers  corps,  il  ne  me  semble  pas 
utile  de  faire  à  leur  égard  une  hypothèse  particulière  ;  l'exception 
qu'ils  présentent  relativement  à  la  loi  de  Dulong  et  Petit  n'est 
certainement  qu'apparente;  nous  nous  trouvons,  quant  à  cette 
exception ,  dans  un  embarras  analogue  à  celui  dans  lequel  on 
était ,  il  y  a  quelques  années ,  par  rapport  à  la  densité  anomale 
de  la  vapeur  du  soufre,  laquelle,  suivant  un  auteur 
spirituel,    faisait    depuis    longtemps    le    désespoir    des    chimistes. 

48.  On  peut  admettre  que  dans  un  avenir  plus  ou  moins  éloigné , 
lorsque  la  science  aura  fait  de  nouveaux  progrès ,  cette  exception 
apparente  à  la  loi  de  Dulong  et  Petit  disparaîtra  ;  —  et ,  quoiqu'il  ne 
soit  pas  possible  d'indiquer,  même  d'une  manière  générale,  comment 
et  de  quelle  manière  ces  corps  rentreront  dans  le  cas  général ,  on 
peut  au  moins  comparer  leur  cas  particulier  à  la  difficulté  que  nous 
aurions  à  expliquer  la  chaleur  atomique  de  l'eau ,  H^  0 ,  en  supposant 
que  ce  corps  ne  nous  fût  connu  qu'à  l'état  solide ,  celui  de  glace  ; 


DES    CORPS    SOLIDES    ET    LIQUIDES.  205 

car,  bien  que  la  chaleur  atomique  de  l'eau  liquide  nous  paraisse 
très-régulière,  quand  nous  la  comparons  à  celles  du  brome  Br^ 
et  du  carbure  de  soufre  CS2,  la  chaleur  atomique  de  la  glace, 
H^  0  =  8,6,  ne  semble  pas  avoir  le  moindre  rapport ,  ni  avec  cel- 
le des  éléments ,  ni  avec  celle  d'aucune  combinaison. 

49.  Dans  la  suite  de  ce  mémoire  je  me  servirai  de  l'expression  , 
chaleur  spécifique  moléculaire  ou  chaleur  moléculaire,  au  lieu 
de  chaleur  atomique. 

50  Je  vais  maintenant  appliquer  à  des  cas  particuliers  les  prin- 
cipes établis  dans  les  paragraphes  précédents. 

Je  commencerai  par  former  un  tableau  de  corps  (éléments  et 
combinaisons)  dont  les  chaleurs  moléculaires  sont  environ  izz  12 
à  14  ;  je  rapporterai  un  petit  nombre  des  observations  rassemblées 
par  M.  Kopp  pour  chaque  espèce  de  corps. 

Je  désignerai  dans  ce  tableau  les  noms  des  observateurs  par 
des  lettres:  K.  Regnault;  Kp.  Kopp;  N.  Neumann. 


formules  moléculaires. 

chaleur  spéc. 

a 

chaleur  moléculaire. 

Al  Al 

0,2143  R 

54,8 

11,74 

SS 

0,163  Kp 

64 

10,44 

FeFe 

0,1138R 

112 

12,74 

CuCu 

0,0952  R 

126,8 

12,08 

CdCd 

0,0542  Kp 

224 

12,14 

SnSn 

0,0562  R 

236 

13,26 

PP 

0,0202  Kp 

62 

12,52 

As  As 

0,0814  R 

150 

12,22 

AgAg 

0,0570  R 

216 

12,32 

II 

0,0541  R 

256 

13,74 

SbSb 

0,0508  R 

244 

12,40 

Au  Au 

0,0324  R 

394 

12,76 

Sulfures  et  Arséuiures, 

AsS 

0,1111  N 

107 

11,9 

CoS 

0,1251  R 

90,8 

11,4 

FeS 

0,1357  R 

88 

11,9 

HgS 

0,0512  R 

232 

11,9 

SnS 

0,0837  R 

150 

12,6 

142,8 

15,9 

79,4 

11,3 

216 

11,2 

223 

11,4 

87 

13,8 

60 

11,5 

150 

14,0 

82 

14,0 

206  J.    A.    GROSIIANS.    SUR    LES    CHALEURS    SPECIFIQUES 

Oxydes. 

Cu.  0  0,111  Kp 

CuO  0,1420R 

HgO  0,051 8  R 

PbO  0,0512  R 

MnO^  0,159Kp 

SiO^  0,1913R 

SnO,  0,0933  R 

TiO^  0,1703R 

J'observerai  que  plusieurs  de  ces  corps  ont  probablement  une  formule 
double  ;  p.  e.  Sn  S  et  Pb  0  ;  les  chaleurs  moléculaires  se  rappro- 
chent alors  de  celles  des  sels  RCO3,  dont  je  parlerai  plus  loin. 

Chlorures,  Bromures  et  lodures. 

AgCl  0,0911  R 

CuCl  0,1383  R 

KCl  0,1 730  R 

LiCl  0,2821  R 

NaCl  0,2140  R 

AgBr  0,0739  R 

KBr  0,1 132  R 

Agi  0,0616  R 

Cul  0,0687  R 

Kl  0,0819  R 

51.  S'il  était  possible  maintenant  de  comparer  les  chaleurs 
moléculaires  de  tous  ces  corps  (éléments  et  combinaisons)  aux 
points  d'ébullition ,  on  peut  admettre  que,  pour  tous,  les  nombres 
exprimant  les  chaleurs  moléculaires  deviendraient  plus  grands; 
quelques  nombres  s'élèveraient  jusqu'à  15,  16  et  17;  d'autres 
s'approcheraient  beaucoup  du  nombre  18,3 ,  chaleur  moléculaire 
de  l'eau.  Ho  0;  d'autres  encore  dépasseraient  18,3  de  plusieurs 
unités  et  pourraient  bien  aller  jusqu'à  28  et  même  un  peu  au-delà. 

52.  L'objection  se  présente  assez  naturellement,  que  des 
nombres  aussi  différents  entre  eux  ne  peuvent  être  assimilés  à  un 
seul  nombre  18,3 ,  chaleur  moléculaire  de  l'eau  au  point  d'ébullition. 


143,5 

13,1 

98,9 

13,7 

74,6 

12,9 

42,5 

12,0 

58,5 

12,5 

188 

13,9 

119,1 

13,5 

235 

14,5 

190,1 

13,1 

166,1 

13,6 

DES    CORPS    SOLIDES    ET    LIQUIDES.  207 

53.  C'est  ici  le  lieu  de  faire  une  petite  digression  au  sujet  de 
Inaction  des  forces  moléculaires. 

54.  La  proposition ,  que  les  chaleurs  moléculaires  des  corps  des 
derniers  tableaux  sont  égales  entre  elles  à  des  températures  corres- 
pondantes ,  est  un  exemple  de  ces  expressions  abrégées ,  comme  on 
a  rhabitude  d'en  employer  dans  les  sciences;  —  il  faut  sous- 
entendre ,  que  ces  chaleurs  moléculaires  seraient  égales  s'il  n'y  avait 
pas  l'action  des  forces  moléculaires;  ou  si  l'on  était  en  état 
de  calculer  les  corrections  nécessaires  résultant  de  cette  action; 
ou  encore  si  cette  action  avait  lieu  pour  tous  les  corps  dans  le 
même  sens. 

55.  Tant  qu'on  n'attribuera  pas  une  large  influence  à  cette 
action  des  forces  moléculaires^  on  ne  pourra  découvrir  ou  recon- 
naître dans  la  chimie  beaucoup  de  lois  importantes ,  dont  les  effets 
sont  souvent  masqués  par  cette  action. 

56.  Il  me  semble  utile  de  rappeler  quelques  exemples  connus , 
qui  peuvent  être  rapportés  à  l'action  des  forces  moléculaires. 

La  chaleur  moléculaire  change  ordinairement  par  le  passage 
d'un  corps  de  l'état  solide  à  l'état  liquide,  par  la  fusion. 
Jusqu'à  présent  on  a  observé  un  accroissement  dans  tous  les 
cas;  mais  cet  accroissement  diffère  d'un  corps  à  l'autre:  il 
est  considérable  pour  l'eau,  l'iode  et  le  brome,  et  très-petit  pour 
le  mercure.  A  l'état  solide  les  chaleurs  moléculaires  du  brome, 
BrBr,  et  de  l'iode,  JJ,  sont  environ  =  13  à  14;  —  à  l'état 
liquide  elles  deviennent  18  et  27;  cependant  ces  deux  derniers 
nombres  doivent  être  considérés  comme  égaux ,  comme  ne  présentant 
de   différence   que   par    suite   de  l'action  des  forces  moléculaires. 

57.  Dans  un  autre  ordre  d'idées,  on  a  observé  que  des  corps 
qui  se  suivent  dans  une  série  homologue,  ont  ordinairement  des  points 
de  fusion  qui  s'élèvent  à  peu  près  régulièrement  d'un  certain 
nombre  de  degrés ,  environ  20 ,  pour  chaque  groupe  C  H  o .  Il 
y  a  toutefois  de  nombreuses  exceptions,  qui  indiquent  de  gran- 
des différences  dans  les  états  moléculaires;  ainsi  l'éther  méthyl- 
oxalique,  C^HeO^,  fond  à  51^,  tandis  que  son  homologue, 
l'éther  éthyi-oxalique,  GgHjo04,  reste  liquide  au-dessous  de  0°. 


208  J.    A.    GROSIIANS.    SUR    LKS    CHALEURS    SPECIFIQUES 

58.  On  peut  encore  attribuer  à  cette  action  la  densité  de  vapeur 
anormale  de  quelques  corps,  par  exemple ,  celle  du  soufre  entre 
400°  et  500° 

59.  Ce  qu'on  appelle  en  chimie  l'action  des  forces  moléculaires 
se  rencontre,  comme  l'on  sait,  dans  tous  les  sujets  de  recherche; 
ce  sont  des  causes  particulières,  nombreuses,  la  plupart  inconnues 
ou  peu  connues,  agissant  en  même  temps  que  les  lois  qui, 
par  leur  simplicité  et  leur  généralité ,  ont  pu  être  constatées  ou  admi- 
ses ;  leur  action  finale  est  quelquefois  minime,  et  quelquefois  assez 
considérable   pour  efîacer  ou  masquer  les  effets  des  lois  connues. 

60.  Ce  sont  ces  causes  qui  modifient  les  formes  des  individus 
d'une  espèce ,  formes  qui ,  sans  elles ,  seraient  identiquement  égales. 
Quand  nous  voyons  un  animal  de  l'espèce  de  nos  chiens  domestiques , 
nous  le  reconnaissons  sans  peine  pour  ce  qu'il  est,  quoique  les 
individus,  qui  constituent  cette  espèce,  soient  très-différents  de 
grandeur  et  de  formes.  De  même,  on  reconnaît  dans  l'étude  des 
langues ,  les  formes  :  digitus ,  doigt ,  dedo ,  dito  pour  des  transfor- 
mations différentes  du  même  mot. 

61.  En  admettant  donc  que  tous  les  corps  des  derniers  ta- 
bleaux ont  essentiellement  la  même  chaleur  moléculaire ,  et  que  les 
nombres  qui  expriment  cette  chaleur  sont  compris  entre  18  et 
28,  tandis  que  pour  quelques  corps  ils  peuvent  descendre  un 
peu  au-dessous  de  18,  et  pour  d'autres  s'élever  un  peu  au-dessus 
de  28,  on  pourra  augmenter  cette  classe  de  corps  d'un  grand 
nombre  de  sulfures,  d'oxydes  et  spécialement  de  sels:  RCO3 
RSiOs,  RBO.,,  RASO3,  RPO3,  RCIO3,  RNO3  etc. 

62.  Seulement  il  est  utile  d'observer  que,  plus  il  y  aura  de  res- 
semblance entre  les  formules  chimiques  de  deux  corps ,  plus  petite 
aussi  sera  la  différence  entre  les  deux  chaleurs  moléculaires,  qui 
pourront  se  rapprocher  presque  jusqu'à  l'égalité;  c'est  cette  cir- 
constance qui  a  été  la  cause  de  la  découverte  des  lois  de  Dulong 
et  Petit  et  de  Neumann. 

63.  Ainsi  un  très-grand  nombre  de  corps  ont  la  même  chaleur 
moléculaire  que  l'eau.  Il  y  en  a  ensuite  d'autres  qui  ont  la 
chaleur   moléculaire  convenant  aux  corps  du  deuxième  rang;    ce 


DES    CORPS    SOLIDES    ET    LtQUIDES.  209 

sont  entre  autres  (voyez  paragraphe  14  et  suivants) ,  les  substances 
représentées  par  les  formules: 

RCI4  et  R,  Cl, 

RBr^  et  R^  Br^ 

RI,     et  R,  I, 

64.  Il  pourra  être  souvent  difficile  de  savoir  à  laquelle  des  deux 
espèces  de  corps  appartient  un  composé  donné  ;  il  faudra  pour  cela 
des  études  nouvelles.  Si  les  chaleurs  moléculaires  des  corps 
du  premier  rang  et  du  deuxième  rang  pouvaient  être  exprimées 
par  des  nombres  déterminés  (en  supposant  nulle  l'action  des  forces 
moléculaires) ,  ces  nombres  c  .  a  et  c' .  a'  seraient  liés  entre  eux  par 
la  formule 

c  .  a  c'  .  a'         ^. 

nrr-   =  m-  =    ConSt.  , 

constante  qui^  calculée  pour  l'eau,  est  =  18,3;  mais,  par  suite  de 
l'action  des  forces  moléculaires,  la  formule  n'est  applicable  qu'aux 
moyennes  fournies  par  un  grand  nombre  de  corps  des  deux 
espèces. 

65.  Il  doit  donc  être  encore  plus  difficile  de  reconnaître  les 
chaleurs  moléculaires  des  corps  des  rangs  supérieurs. 

66.  Cependant,  en  admettant  pour  les  corps  de  la  formule  RS  0^ 
le  premier  rang;  et  ensuite  (selon  l'observation)  que  les  rangs 
augmentent  d'une  unité  pour  chaque  groupe  CH^,  H^,  ou 
H^O,  j'ai  fait  le  calcul  suivant: 

Chaleur  at.  Constante. 

9fi  1 

RSO,  26,1  moyenne  ^  z=  26,1 


^1 


CuSO.  H-H.  0  35,8 


35,8  Pape        v^  2 


'—  =  25,3 


44  6 
CuSO,  +  2  H,  0       44,6  Kopp       L:-  =  25,8 

50  9 
FeSO,  -h  3H,0       50,9  Pape ^  =  25,4 

Archives  Néerlandaises,  T.  V.  14 


210  J.    A.    GROSHANS.    SUR    LES    CHALEURS    SPECIFIQUES 

67.  Je  terminerai  ce  mémoire  par  une  courte  appréciation  de 
la  méthode  d'explication  des  chaleurs  moléculaires  (atomiques)  de  M. 
Kopp.  Il  sera  nécessaire  pour  cela  de  mentionner  quelques  opinions 
de  M.  Kopp;  qui  ont  eu  une  grande  influence  sur  sa  manière 
d'expliquer  les  rapports  entre  les  propriétés  physiques  des  corps  et 
leur  composition  atomique;  ces  propriétés  sont  les  points  d'ébuUition , 
les  volumes  liquides  et  les  chaleurs  moléculaires  (atomiques);  j'ai  déjà 
observé  qu'on  est  généralement  d'accord  que  la  même  méthode 
doit  être  suivie  pour  toutes  ces  propriétés. 

68.  Mais,  comme  l'on  sait,  il  existe  dans  les  sciences  de  la  physique 
et  de  la  chimie  deux  manières  de  se  représenter  les  faits ,  lesquelles 
conduisent  quelquefois  à  des  résultats  entièrement  différents.  Ces 
manières  de  penser  existent,  sous  des  formes  modifiées ,  dans  les 
recherches  scientifiques  en  général,  mais  je  me  bornerai  ici  à  l'ap- 
plication qui  s'en  fait  en  physique  et  en  chimie. 

69.  L'opinion  de  M.  Kopp  (et  de  tous  ceux  qui  pensent  de 
même)  est  que,  quand  un  élément  fait  partie  d'une  combinaison , 
il  conserve  ses  propriétés  individuelles  ;  par  suite ,  M.  Kopp ,  dans 
un  liquide  Cp  Rq  Or ,  distingue  parfaitement  (en  quelque  sorte 
par  un  effort  d'imagination)  les  atomes  de  carbone  (C  =  6) 
des  atomes  d'hydrogène,  quoique  (suivant  lui)  ils  aient  les  uns  et 
les  autres  le  même  volume  :=.  5,5  ;  il  distingue  aussi  les  atomes 
d'oxygène  (0  =  8),  et  s'aperçoit  aisément  que,  souvent  dans  le 
même  liquide,  il  s'en  trouve  de  deux  espèces,  ceux  qui  ont  un 
volume  m  6,1  et  ceux  dont  le  volume  est  izz:  3,9.  On  retrouve  les 
mêmes  idées  dans  sa  théorie  des  chaleurs  atomiques  ;  les  chaleurs 
de  C,  de  H  et  de  0  (C  =  12,  H=l,  0=16)  sont  suivant  lui 
respectivement  1,8,  2,3  et  4.  Toutes  ces  valeurs  (pour  les  volumes 
et  les  chaleurs  atomiques)  ont  été  déterminées  par  ce  que  M.  Kopp 
appelle  la  méthode  indirecte;  j'ai  déjà  observé  que  toute  vérifi- 
cation par  l'expérience  serait  impossible. 

70.  Par  suite  des  mêmes  idées,  M.  Kopp  affirme  que  l'eau  de 
cristallisation  est  contenue  dans  les  sels  à  l'état  de  glace ,  et  par 
conséqueut  avec  la  chaleur  atomique  8,6  pour  chaque  atome  d'eau. 

71.  Que  cette  manière  de  penser  n'est  pas  exclusivement  propre 


DES    CORPS    SOLIDES    ET    LIQUIDES.  211 

à  M.  Kopp,  mais  qu'elle  est  partagée  par  un  grand  nombre  de 
savants,  c'est  ce  qui  peut  être  inféré  de  plusieurs  écrits  publiés  sur  les 
propriétés  physiques  des  corps;  je  me  rappelle  un  mémoire  sur  les 
volumes  liquides,  dans  lequel  Fauteur  affirmait  que  les  atomes 
de  carbone  de  l'alcool,  s'y  trouvent  à  l'état  de  diamant  et 
non  pas  à  l'état  de  graphite. 

72.  A  cette  manière  de  penser  est  opposée  directement  l'opinion 
qui  admet  qu'un  élément  (ou  groupe  atomique),  dès  qu'il  fait 
partie  d'une  combinaison ,  perd  ses  propriétés  individuelles ,  et  que 
les  combinaisons  sont  soumises  à  des  lois  générales.  C'est  ainsi 
que  les  corps  CpRgOr  ont  deux  volumes  de  vapeur,  quel  que 
soit  le  nombre  des  atomes;  et  que  les  densités  des  vapeurs 
(à  0°^,76  et  aux  points  d'ébullition)  sont  proportionnelles  aux  nom- 
bres d'atomes;  ce  qui  est  aussi  le  cas  pour  les  pesanteurs  spéci- 
fiques de  ces  corps,  à  l'état  liquide  et  aux  points  d'ébullition. 

73.  En  général,  la  théorie  contraire  à  celle  de  M.  Kopp  conduit 
à  s'occuper  ,  en  premier  lieu  ,  de  la  recherche  des  lois  générales 
et  des  propriétés  des  combinaisons. 

74.  Il  y  a  encore  une  opinion  de  M.  Kopp,  qui  a  influé  sur 
sa  méthode  et  qui  ne  me  paraît  pas  non  plus  parfaitement  fondée  ; 
c'est  celle-ci:  „quand  on  a  observé  en  beaucoup  de  cas  une  cer- 
taine régularité  dans  les  propriétés  j^hysiques  des  corps,  et  qu'on 
a  constaté  en  même  temps  un  cas  dans  lequel  cette  régularité  n'a 
pas  lieu,  sans  qu'on  puisse  voir  la  cause  probable  de  cette  excep- 
tion ,  il  faut  conclure  que  la  régularité  observée  ne  constitue  pas 
une  loi  de  la  nature." 

75.  Par  suite  de  cette  opinion,  la  loi  de  Dulong  et  Petit 
ne  semble  pas  généralement  vraie  à  M.  Kopp,  parce  que  le  car- 
bone ,  le  silicium  et  le  bore  constituent  des  exceptions  à  cette  loi. 

76.  Pour  moi,  il  me  semble  que  si  une  personne  entendait 
énoncer  cette  loi  pour  la  première  fois,  et  qu'on  produisît  comme 
confirmation  expérimentale  les  résultats  suivants: 


14* 


212  J.    A.    GROSHANS.    SUh    LES    CHALEURS    SPECIFIQUES 


Corps 

chaleur  spéc. 

poids  atom. 

chai,  at, 

P 

0,202  Kp 

31 

6,3 

K 

0,1655  R 

39,1 

6,5 

Fe 

0,1138R 

28 

6,4 

Co 

0,1067  R 

58,8 

6,3 

Ni 

0,1092R 

58,8 

6,4 

Pd 

0,0593  R 

106,6 

6,3 

Sn 

0,0562  R 

118 

6,6 

Sb 

0,0508  R 

122 

6,2 

Au 

0,0324  R 

197 

6,4 

Hg 

0,0319  R 

200 

6,4 

Pb 

0,0314  R 

207 

6,5 

Bi 

0,0308  R 

210 

6,5 

il  devrait  se  produire  chez  cette  personne  une  conviction  si  grande  de 
l'exactitude  générale  de  la  loi,  que  cette  conviction  ne  pourrait 
pins  être  ébranlée  par  l'exception  que  semble  offrir  le  carbone; 
cette  personne  conclurait,  je  crois,  que  l'exception  n'est  pro- 
bablement qu'apparente  et  que,  la  loi  demeurant  intacte,  il  faut 
attendre  la  solution  de  l'énigme  des  progrès  futurs  de  la  science. 

77.  Cette  conviction  naîtrait,  suivant  moi ,  de  plusieurs  considé- 
rations; premièrement,  du  caractère  mathématique  de  la  loi  pro- 
posée, caractère  commun  à  un  grand  nombre  de  lois  de  la 
nature,  dont  la  forme  générale  peut  être  énoncée  de  la  manière 
suivante  :  telle  propriété  des  corps  est  proportionnelle  ou  inverse- 
ment proportionelle  à  telle  autre  propriété,  ou  au  carré  de  cette 
propriété,  ou  à  la  racine  carrée.  Ensuite,  en  observant  les 
valeurs  différentes  inscrites  dans  les  colonnes  2  et  3  du  tableau 
précédent  et  les  concordances  de  la  quatrième  colonne,  on  trou- 
verait facilement  des  considérations,  tirées  de  la  théorie  des  pro- 
babilités ,  qui  seraient  suffisantes  pour  produire  la  foi  presque  absolue 
à  l'idée  que  la  régularité  observée  est  bien  réellement  une  loi  de 
la  nature. 

78.  Une  loi  qui  possède  ce  caractère  mathématique  n'exige 
ordinairement  qu'un  petit  nombre  d'exemples,  pourvu  que  ces 
exemples  aient  la  précision  nécessaire;    selon  moi,  la  moitié  des 


DES   CORPS    SOLIDES    ET    LIQUIDES.  213 

exemples  du  dernier  tableau ,  et  même  un  nombre  plus  petit ,  eût 


été  SI] 

iffisant;  p. 

e.  : 

Corps 

chaleur  spéc. 

poids  at. 

chai.  at. 

P 

0,202 

31 

6,3 

Co 

0,1067 

58,8 

6,3 

Pd 

0,0593 

106,6 

6,3 

Hg 

0,0319 

200 

6,4 

car  on  ne  pourrait  guère  attribuer  au  hasard  des  concordances 
aussi  frappantes.  L'application  de  la  théorie  des  probabilités  à  des 
recherches  de  cette  nature  me  semble  tout  à  fait  nécessaire. 


79.  M.  Kopp  trouve,  tant  dans  sa  théorie  des  volumes  liqui- 
des ,  que  dans  sa  théorie  des  chaleurs  moléculaires ,  que  sa  méthode 
donne  l'explication  d'un  nombre  considérable  de  faits,  et  cela  avec 
ce  qu'il  appelle  des  moyens  très-simples  ;  —  je  ne  saurais  par- 
tager cette  opinion  ;  on  ne  peut  contester  certainement  l'accord 
entre  les  résultats  du  calcul  et  ceux  de  l'expérience  ;  mais  il  est 
plus  difficile  de  reconnaître  la  simplicité  des  moyens. 

80.  Toutes  les  explications  de  M.  Kopp  reposent  sur  un  très- 
grand  nombre  de  constantes,  qui  paraissent  un  peu  arbitraires; 
ces  constantes  ne  semblent  pas  avoir  une  existence  plus  réelle 
que  les  constantes  a ,  6  et  c  de  la  formule  servant  à  représenter 
la  dilatation  d'un  liquide, 

vzizl  +  a  t  +  b  r^  ^  c  t^ , 
avec  lesquelles  elles  ont  d'ailleurs  la  plus  grande  analogie. 

81.  La  véritable  et  unique  utilité  de  ces  constantes  et  des  hy- 
pothèses qui  les  combinent  entre  elles,  utilité  d'ailleurs  très  grande , 
me  paraît  consister  en  ceci:  qu'elles  ont  inspiré  à  M.  Kopp  le 
courage  pour  entreprendre  et  la  patience  pour  exécuter  tant  de 
belles  et  laborieuses  expériences,  par  lesquelles  il  a  grandement 
enrichi  la  science  et  s'est  acquis  des  droits  à  la  reconnaissance 
de  tous  ceux  qui  s'intéressent  aux  sujets  qu'il  a  traités. 

Rotterdam,  Avril  1870. 


SUR  LA  PLACE  DU  CHIROMYS  DANS  LA 
MÉTHODE  NATURELLE, 


C.  K.  HOFFMANN  et  H.  WEIJENBEIIGH  Jr. 


Parmi  les  questions  mises  au  concours,  en  1867,  par  la  Société 
Hollandaise  des  Sciences,  il  en  était  une  qui  demandait  de  dé- 
crire et  de  figurer  exactement  les  os  et  les  muscles  du  Scmriis 
vulgaris ,  de  les  comparer  à  ceux  des  Lémurîdés  et  du  Cliirormjs , 
pour  autant  que  ces  derniers  sont  connus ,  et  de  déduire  de  cette 
comparaison  la  place  qui  revient  au  Chiromys  dans  la  classifica- 
tion naturelle.  Un  travail  adressé  par  nous  en  réponse  à  cette 
question,  a  été  couronné  par  la  Société  dans  sa  réunion  du  15  mai 
1869,  et  vient  d'être  publié  dans  le  Tome  I  troisième  série  de  ses 
Mémoires.  Nous  nous  proposons  de  faire  connaître  ici  les  résultats 
essentiels  de  ce  travail,  en  renvoyant  au  Mémoire  lui-même  ^) 
pour  tout  ce  que  nous  avons  dû  emprunter  aux  recherches  d'au- 
tres observateurs  (Chap.  II,  Sur  les  Lémuridés,  et  Chap.  III, 
Sur  le  Chiromys),  et  même  pour  les  détails  de  nos  propres  étu- 
des sur  Fostéologie  et  la  myologie  de  l'Ecureuil  (Chap.  I),  vu 
qu'il  eût  été  presque  impossible  d'en  donner  un  résumé  à  la  fois 
court  et  intelligible, 

A   l'extérieur   le  Chiromys  ressemble  le  plus  aux  animaux  du 


)  Dr.  C.  K.  HofFmann  und  H.  Weijenbergh  Jr. ,  Die  Osteologie  und  Myologie  von 
i  ulgans  L.,  verglichen  mit  der  Anatomie  der  Lemuriden  und  des  Chiromys , 
und  liber  die  Stelliing  des  letzteren  im  naliirlichen  Système,  Harlem,  Héritiers 
Loosjes,  1870,  in— 4°. 


C.  K.  HOFFMANN  ET  H.  WEIJENBERGH.  SUR  LA  PLACE  ETC.  215 

genre  Galago,  notamment  aux  G.  crassicaudatus  etAlleniy  sur- 
tout en  ce  qui  concerne  le  pelage,  la  queue,  la  largeur  de  la 
tête  et  les  oreilles  larges  et  nues ,  tandis  que ,  par  la  brièveté  du 
museau ,  il  se  rapproche  davantage  du  genre  Tarsius.  Le  premier 
orteil  a  un  ongle  plat,  comme  chez  tous  les  Lémuridés ,  et  le  tarse 
est  court,  comme  dans  les  genres  Lichanolus  et  Lemur.  Le  mu- 
seau est  plus  court  que  chez  aucun  Rongeur;  chez  ceux-ci,  les 
yeux  sont  aussi  situés  plus  en  arrière  et  de  côté,  l'os  inter- 
maxillaire est  plus  grand  et  la  tête  plus  plate.  La  lèvre  supé- 
rieure du  Chiromys  n'est  par  fendue  comme  chez  les  Ecureuils, 
et  ne  couvre  pas  les  dents  aussi  complètement  que  chez  la  plu- 
part des  Rongeurs.  Bien  que  l'ouverture  de  la  bouche  soit  moins 
large  que  chez  les  Makis ,  elle  est  pourtant  plus  grande  que  chez 
aucun  Rongeur  de  la  même  taille. 

Le  Chiromys  a,  de  même  que  le  Tarsier,  quelques  longs  poils 
aux  lèvres  et  aux  sourcils.  La  poitrine  est  plus  large  que  chez 
la  plupart  des  Rongeurs,  et  le  pelage  de  l'Aye-Aye  ne  ressemble 
pas  non  plus  à  celui  des  animaux  de  cet  ordre;  les  poils  de  sa 
queue  n' affectent  pas  autant  la  disposition  en  plume  que  chez 
les  Ecureuils;  ils  sont  répartis  un  peu  plus  uniformément  tout 
autour  de  la  queue,  comme  chez  les  Galagos. 

L'Aye-Aye  montre,  plus  clairement  que  tout  autre  mammifère, 
qu'on  ne  peut  attribuer,  dans  la  classification,  qu'une  valeur 
relative  à  la  conformation  des  dents  et  des  membres  ;  car ,  suivant 
qu'on  accorde  à  celles-là  ou  à  ceux-ci  une  importance  taxinomi- 
que  exclusive  ou  prépondérante ,  on  est  conduit  nécessairement  à  le 
comprendre  parmi  les  Rongeurs  ou  parmi  les  Quadrumanes.  En 
ce  qui  regarde  le  rapport  de  la  longueur  des  membres  antérieurs 
à  celle  des  membres  postérieurs ,  ainsi  que  la  conformation  des 
doigts  et  leur  différence  de  longueur,  le  Chiromys  se  rapproche 
tout  à  fait  des  Galagos. 

Déjà  à  un  degré  plus  élevé  de  la  série  des  Quadrumanes ,  savoir 
dans  le  genre  Atèle ,  nous  voyons  le  quatrième  doigt  acquérir  la 
plus  grande  longueur  ;  cette  particularité  se  prononce  ensuite  de  plus 
en  plus  à  mesure  qu'on  descend  plus  bas  dans  l'ordre  des  Qua- 


216  C.    K.    HOFFMANN    ET    H.    WEIJENBERGH.    SUR    LA    PLACE 

drumanes,  elle  devient  un  caractère  général  pour  les  Lémuridés 
(à  l'exception  du  Tarsier)^  et  atteint  son  maximum  chez  le  Chi- 
romys.  Parallèlement  à  l'allongement  du  quatrième  doigt,  on  observe 
un  raccourcissement  progressif  du  doigt  indicateur,  quand  on  descend 
dans  l'ordre  des  Quadrumanes;  ce  raccourcissement,  déjà  sensible 
chez  les  Atèles ,  est  plus  prononcé  chez  la  plupart  des  Lémuridés 
que  chez  le  Chiromys  (dans  le  genre  Perodicticiis  l'index  est  tout 
à  fait  rudimentaire). 

Tandis  que,  chez  beaucoup  de  Rongeurs  et  surtout  chez  les 
Sciuridés ,  le  pouce  est  très  peu  développé ,  l' Aye-Aye  se  rapproche 
entièrement  des  Lémuridés  sous  ce  rapport,  et  présente  un  pouce 
court,  gros,  opposable  et  très  mobile.  La  forme  du  doigt  du 
milieu  peut  être  regardée  comme  un  caractère  propre  au  Chiromys. 

Le  Chiromys  a  les  mamelles  placées,  il  est  vrai,  aux  deux 
côtés  de  l'ombilic;  mais  aussi  il  n'en  a  qu'une  seule  paire  (sans 
aucune  trace  de  mamelles  pectorales),  tandis  que  les  Rongeurs 
montrent  trois  paires  de  mamelles ,  ou  davantage ,  sous  le  ventre  ^  ). 

Au  premier  abord ,  le  système  dentaire  de  l' Aye-Aye  ressemble 
incontestablement  à  celui  d'un  animal  de  l'ordre  des  Rongeurs; 
mais  il  ne  faut  pas  oublier  que  d'autres  Lémuridés  se  rapprochent 
également  des  Rongeurs  sous  ce  rapport;  c'est  ainsi,  par  exemple, 
que  le  genre  Lichanohis  n'a  qa'une  seule  paire  d'incisives  à  la 
mâchoire  inférieure ,  et  que ,  des  deux  paires  de  la  mâchoire  supé- 
rieure ,  la  médiane  est  la  plus  grande ,  caractères  qui  se  retrouvent 
chez  le  Tarsius  et  surtout  chez  le  Propithecus.  La  division  bien 
distincte  de  l'incisive  supérieure  de  l' Aye-Aye  en  une  partie  anté- 
rieure, plus  épaisse,  garnie  d'émail,  et  une  partie  postérieure 
qui  se  rétrécit  brusquement,  pourrait  faire  naître  l'idée  que 
cette  dent  est  l'homologue  de  deux  incisives  soudées  entre  elles; 
mais  les  larges  incisives  antérieures  du  Propithecus,  qui  occu- 
pent presque  tout  l'os  intermaxillaire,  nous  donnent  seules  l'ex- 
plication  véritable    de   la   nature   des   incisives  du  Chiromys,  et 


^)  Tarsius   et   Stenops   ont   des  mamelles  non  seulement  au  ventre,  mais  aussi 
au  creux  de  l'aisselle. 


DU    CHIROMYS    DANS    LA    MÉTHODE    NATURELLE.  217 

montrent  que  celles-ci  nous  autorisent  tout  aussi  peu  à  ranger 
l'animal  parmi  les  Rongeurs ,  que  les  dents  du  Wombat  ne  suffisent 
à  le  faire  entrer  dans  le  même  ordre. 

Bien  que^  par  leur  grandeur ^  leur  courbure,  la  profondeur  de 
leur  implantation  et  leur  structure,  les  incisives  ressemblent 
beaucoup  à  celles  des  Rongeurs,  elles  sont  pourtant,  proportionel- 
lement  à  leur  longueur ,  notablement  plus  étroites  que  chez  aucune 
espèce  de  cet  ordre  ;  en  somme ,  la  ressemblance  avec  les  incisives 
supérieures  du  Propilhecus  et  avec  les  canines  des  Lemur  est  encore 
plus  grande  qu'avec  celles  des  Rongeurs.  Le  Wombat  montre, 
sous  ce  rapport,  plus  d'analogie  avec  les  Rongeurs  que  l'Aye-Aye. 
Néanmoins ,  chez  le  Wombat  comme  chez  l'Aye-Aye ,  les  incisives  des 
deux  mâchoires  se  projettent  plus  en  avant  et  ont  une  position 
plus  oblique  que  chez  les  vrais  Rongeurs.  Les  molaires  sont  aussi 
placées  plus  verticalement  l'une  au-dessus  de  l'autre,  et  leur  calotte 
d'émail  simple  les  éloigne  évidemment  du  type  propre  aux  Ron- 
geurs ,  pour  les  rapprocher  de  celui  qui  caractérise  les  Quadrumanes. 

Le  nombre  peu  considérable  des  dents  et  leur  petitesse  chez 
l'Aye-Aye  font  exception  parmi  les  Lemuridés,  et  indiquent  que 
l'animal  se  nourrit  de  matières  faciles  à  triturer. 

L'Aye-Aye  nous  fournit  un  nouvel  exemple  de  l'importance  que 
présente  l'étude  du  système  dentaire  dans  son  développement  suc 
cessif,  durant  la  vie  fœtale  et  pendant  les  premiers  temps  après 
la  naissance. 

Les  recherches  de  M.  Peters  ont  appris,  en  effet,  que  la  dispo- 
sition des  dents  de  lait  est,  chez  le  CA/rom?/5,  tout  autre  que  celle 
des  dents  de  remplacement,  et  qu'elle  indique  d'un  côté  un  rap- 
prochement vers  les  Soricidés,  de  l'autre  vers  les  Prosimiens. 

Sous  le  rapport  du  nombre  des  vraies  vertèbres,  on  peut  dire 
que  le  Chîromys  s'accorde  aussi  bien  avec  les  Makis  et  les  Tar- 
siers qu'avec  les  Ecureuils.  Dans  la  structure  des  vertèbres ,  l'Aye- 
Aye  montre  une  affinité  spéciale  avec  les  agiles  Ecureuils,  qui 
se  meuvent  sur  le  sol  par  bonds,  en  imprimant  à  leur  épine 
dorsale  des  courbures  notables. 

Les   diapophyses   des  vertèbres  sont  bien  développées  chez  les 


218  C.    K.    HOFFMANN    ET    H.    WEIJENBERG.    SUR    LA    PLACE 

Sciuridés ,  surtout  à  la  neuvième  vertèbre  dorsale  chez  les  Scinrus 
et  à  la  dixième  chez  les  Anomalurus  ;  chez  le  C/iiromys  au  contraire , 
de  même  que  chez  les  autres  Quadrumanes,  les  diapophyses  ont 
un  développement  moindre  aux  deux  dernières  vertèbres  dorsales. 
Les  apophyses  transverses  sont,  chez  les  Sciuridés,  plus  longues 
et  plus  dirigées  en  avant  que  chez  le  Chiromys  et  les  Lémuridés. 

La  partie  des  apophyses  transverses  des  vertèbres  cervicales, 
qu'on  appelle  pleurapophyse ,  est  plus  développée  chez  les  5c2:Mn^5 , 
de  la  troisième  à  la  sixième  vertèbre ,  que  chez  le  Chiromys,  Les 
hémapophyses  sont  bornées  chez  le  Chiromys ,  commQ  chez  les 
Lémuridés  à  longue  queue,  aux  espaces  entre  les  troisième  et 
quatrième  et  entre  les  quatrième  et  cinquième  vertèbres  lombaires  ; 
chez  les  Ecureuils  et  autres  Rongeurs  à  longue  queue,  on  trouve 
des  traces  des  arcs  hémaux  sur  une  beaucoup  plus  grande  lon- 
gueur de  la  région  caudale. 

Quand  on  compare  la  tête  de  FAye-Aye  à  celles  de  l'Ecureuil 
ou  de  quelque  autre  Kongeur  de  même  taille,  on  remarque  de 
suite  que  la  cavité  crânienne  a  chez  FAye-Aye,  aussi  bien  re- 
lativement qu'absolument,  une  plus  grande  capacité,  surtout 
dans  la  partie  qui  est  formée  par  les  os  frontaux  et  pariétaux , 
partie  que  est  abaissée  et  plate  chez  les  Sciuridés ,  voûtée  et  pour 
ainsi  dire  en  forme  de  dôme  chez  le  Chiromys. 

Le  grand  trou  occipital  est,  proportionnellement  à  la  cavité 
crânienne ,  plus  large  chez  les  Rongeurs  que  chez  FAye-Aye  ;  chez 
les  premiers  il  est  placé  verticalement,  de  manière  à  regarder 
directement  en  arrière,  et  l'os  occipital  supérieur  ne  forme  pas 
postérieurement  de  saillie  au-dessus  de  lui,  comme  cela  a  lieu 
chez  le  Chiromys ,  où  le  plan  de  cette  ouverture  est  aussi  tourné 
encore  plus  en  dessous  que  chez  d'autres  Lémuridés. 

Ni  chez  Chiromys ,  ni  chez  Sciurus ,  on  ne  voit  de  tente  osseuse  ; 
dont  Meckel  a  observé  un  faible  rudiment  chez  le  Sienops  graci- 
lis  y  tandis  que  van  Campen  n'en  a  pas  trouvé  trace  chez  le  Potto. 

Le  trou  rond,  que  W.  Vrolik  décrit  comme  fissure  orbitaire 
supérieure  chez  les  Sienops  tardigradus  et  javanicus ,  et  que  la 
seconde  édition  des  Leçons  d'anatomie  comparée  de  Cuvier  indique 


DU    CHIROMYS    DANS    LA    MÉTHODE    NATURELLE.  219 

aussi  comme  se  réunissant  à  la  fissure  orbitaire  supérieure  chez 
le  Lichanoliis  Avahi,  se  montre  isolé  chez  l'Aye-Aye. 

Chez  les  Rongeurs  les  ailes  du  sphénoïde  n'atteignent  pas  les 
os  pariétaux,  mais  chez  TAye-Aye  elles  s'élèvent  jusqu'à  la 
hauteur  de  l'os  écailleux.  Chez  l'Aye-Aye  l'anneau  osseux  de 
la  cavité  orbitaire  est  entièrement  fermé,  ce  qui  n'est  jamais  le 
cas  chez  les  Eongeurs;  même  quand  il  existe  chez  eux  une  apo- 
physe post-orbitaire ,  celle-ci  est  toujours  libre  à  son  extrémité. 
Sous  ce  rapport,  le  Chiromys  montre  donc  encore  une  analogie 
évidente  avec  les  Quadrumanes,  tandis  que  l'absence  de  cloison 
entre  la  fosse  orbitaire  et  la  fosse  temporale  indique  à  quelle 
division  il  appartient. 

Il  se  manifeste  également  une  grande  différence  dans  la  direc- 
tion des  orbites ,  celles-ci  regardant  tout  à  fait  en  dehors  chez  les 
Rougeurs ,  et  étant  dirigées  plus  en  avant  et  en  haut  chez  le  Chi' 
romijs.  La  portion  zygomatique  du  temporal  commence  chez  l'Aye- 
Aye  à  la  suture  lambdoïde  et  se  dirige  en  avant,  tandis  que 
chez  les  Rongeurs  elle  commence  bien  au  devant  de  cette  suture  et 
se  recourbe  en  avant  et  en  dessous.  L'os  jugal,  par  sa  largeur 
et  son  union  avec  le  frontal  et  la  portion  écailleuse  du  temporal, 
plaide  en  faveur  de  l'affinité  de  l'Aye-Aye  avec  les  Lémuridés 
et  contre  son  rapprochement  avec  les  Rongeurs  ;  de  même  que 
chez  les  Lémuridés,  cet  os  ne  se  joint  pas  aux  grandes  ailes 
du  sphénoïde,  ainsi  qu'il  arrive  chez  les  Quadrumanes  supérieurs. 

Chez  les  Rongeurs,  la  lame  postérieure  de  l'os  écailleux  est 
longue  et  étroite,  et  fixe  l'os  tympanique  et  l'os  mastoïde  aux 
côtés  du  crâne;  l'Aye-Aye  ne  montre  pas  trace  d'une  pareille 
disposition. 

La  lame  faciale  de  la  mâchoire  supérieure  est  creusée  chez  les 
Ecureuils  d'un  canal  vertical  profond ,  et  aucun  Rongeur  ne  montre 
la  fosse  lacrymale  et  le  trou  lacrymal  sur  la  lame  faciale  en  de- 
hors du  cercle  de  l'orbite,  ainsi  qu'on  le  voit  chez  l'Aye-Aye; 
c'est  là  un  signe  important  de  l'affinité  étroite  qui  lie  le  Chiromys 
aux  Lémuridés,  chez  lesquels  l'ouverture  du  canal  lacrymal  est 
toujours  située  en  dehors  de  la  fosse  orbitaire. 


220  C.    K.    HOFFMANN     ET    H.    WEIJENBERGH.    SUR    LA     PLACE 

L'intercalation  de  l'os  inter- maxillaire  entre  les  os  nasaux  et 
la  mâchoire  supérieure  constitue  une  des  plus  grandes  différences , 
sinon  la  plus  grande,  entre  TAye-Aye  et  les  Lémuridés;  cette 
déviation  est  sans  doute  en  rapport  avec  le  grand  développement 
des  dents  incisives. 

La  cloison  du  nez  se  prolonge  jusqu'à  l'ouverture  inférieure 
chez  le  Chiromys  et  les  Lémuridés  ^  tandis  que  chez  les  Sciuridés 
elle  n'atteint  pas  cette  ouverture ,  à  beaucoup  près.  Les  ptérygoïdiens 
ne  montrent  pas  trace,  chez  l'Aye-Aye,  de  canal  pour  l'artère 
carotide  externe,  canal  qui  existe  si  généralement  chez  les  Ecu- 
reuils et  autres  Rongeurs. 

Il  n'est  pas  sans  intérêt  non  plus  de  voir  que  les  sinus  fron- 
taux, qui  existent  dans  les  Quadrumanes  supérieurs  mais  man- 
quent toujours  aux  inférieurs,  reparaissent  chez  le  Chiromys. 

Les  rangées  d'alvéoles  de  la  mâchoire  supérieure  convergent  plus 
ou  moins  en  avant  dans  tous  les  Rongeurs,  caractère  qui  ne  s'observe 
pas  chez  l'Aye-Aye.  Chez  celui-ci,  l'espace  dépourvu  de  dents  est 
plus  ou  moins  tranchant  et  situé  en  grande  partie  à  la  mâchoire 
supérieure;  chez  les  Sciuridés  il  est  large  et  correspond  surtout 
à  l'intermaxillaire. 

L'os  écailleux  est  long  et  à  bord  supérieur  droit  dans  les  Ron- 
geurs; l'origine  de  l'apophyse  zygomatique  y  est  longue  et  la 
surface  articulaire  pour  la  mâchoire  inférieure  est  longitudinale 
et  profonde;  tous  caractères  qui  font  défaut  chez  le  Chiromys  y 
dont  l'os  écailleux  ressemble  au  contraire  à  celui  des  Lémuridés. 

La  partie  intermaxillaire  du  palais  osseux  est  plus  longue  chez 
les  Rongeurs  que  chez  l'Aye-Aye  ;  sous  le  rapport  de  la  largeur ,  il 
y  a  plus  d'égalité  dans  les  deux  cas. 

L'apophyse  condyloïdienne  de  la  mâchoire  inférieure  du  Chi- 
romys se  rapproche,  par  la  forme  et  la  situation  longitudinale, 
de  celle  des  Rongeurs.  Chez  tous  les  animaux  de  cet  ordre  le 
condyle  est  situé  plus  haut  que  les  molaires,  l'angle  de  la  mâ- 
choire s'étend  plus  ou  moins  sous  le  condyle  en  arrière,  et  l'apo- 
physe coronoïde  est  longue,  étroite  et  fortement  infléchie  en 
arrière  ;  la  mâchoire  inférieure  du  Chiromys  ne  possède  aucun  de 


\ 


DU    CHIROIMYS    DANS    LA    METHODE    NATURELLE.  221 

ces  caractères ,  tandis  que  la  position  avancée  du  condyle  est  une 
particularité  qui  nous  rappelle  les  Quadrumanes. 

L'omoplate  de  l'Aye-Aye  diffère  de  celle  des  Rongeurs  et  res- 
semble à  celle  des  Makis  par  le  rapport  entre  la  fosse  sus-épineuse 
et  la  fosse  sous-épineuse;  sa  face  antérieure  ne  montre  pas  les 
lignes  musculaires,  qui  sont  ordinairement  si  bien  accusées  chez 
les  Rongeurs  ;  son  bord  inférieur  n'est  pas  non  plus  recourbé  aussi 
fortement  que  chez  les  Ecureuils. 

L'existence  d'une  ouverture  au-dessus  du  condyle  interne  de  l'hu- 
mérus est  la  règle  chez  les  Lémuridés,  l'exception  chez  les  Ron- 
geurs, et  la  perforation  entre  les  deux  condyles,  qui  est  assez 
générale  chez  les  Rongeurs  (bien  qu'elle  manque  chez  les  Ecu- 
reuils) ,  ne  se  trouve  pas  dans  les  Lémuridés. 

Sous  le  rapport  de  la  longueur  de  l'humérus,  comparée  à  celle 
du  thorax,  il  y  accord  entre  le  Chiromys  et  les  genres  Lemur  et 
Nycticebus,  tandis  que  chez  les  Sciurus  cet  os  est  relativement 
plus  court.  Le  bord  extérieur  droit  de  la  ligue  deltoïde  est  aussi 
un  caractère  des  Lémuridés,  et  l'affinité  du  Chiromys  avec  ce 
groupe  et  avec  celui  des  Platyrrhinés  se  trahit  en  outre ,  tant  dans 
la  composition  de  l'articulation  cubitale,  que  dans  la  structure 
compliquée  du  carpe. 

L'os  central  existe  dans  l'Aye-Aye,  de  même  que  l'os  sésamoïde 
accessoire  (scapho-trapézio-sésamoïde).  L'os  scaphoïde  montre  le 
rapport  de  longueur  par  lequel  les  Lémuridés  se  rapprochent  plus 
des  Carnivores  que  des  Quadrumanes  ordinaires.  Les  Ecureuils 
possèdent  bien  un  os  central,  et  aussi  l'os  sésamoïde  en  question . 
mais  l'os  lunaire  est  confondu  avec  le  scaphoïde.  D'autres  Ron- 
geurs s'éloignent  encore  plus,  quant  à  la  structure  du  carpe,  du 
type  des  Lémuridés,  type  qui  se  retrouve  au  contraire  dans 
le   Chiromys. 

Le  bassin  de  l'Aye-Aye  rappelle  tout  à  fait  celui  des  Lému- 
ridés, tant  par  l'étendue  de  l'os  iliaque,  et  l'aspect  uni  de  sa 
face  externe ,  que  par  le  développement  médiocre  de  la  tubérositè 
ischiatique.  L'angle  ilio-pubien,  qui  est  de  110°  dans  l'Aye-Aye 
et   de    145^    dans    les  Ecureuils,  éloigne  positivement  le  premier 


222  C.    K.    HOFFMANN    ET    H.    WEIJENBERGH.    SUR    LA    PLAGE 

de  ces  animaux  des  seconds.  Chez  la  plupart  des  Rongeurs  les 
os  iliaques  sont  courbés  en  dehors  ^  épais  et  rugueux  à  l'extrémité 
supérieure^  et  leur  face  externe  montre  une  ligne  longitudinale; 
d'un  autre  côté,  les  tubérosités  ischiatiques  ne  sont  par  tournées 
en  dehors  chez  les  Rongeurs ,  comme  c'est  lecsisahezle  Chirotnys 
et  chez  les  Quadrumanes.  Les  trous  obturateurs  sont  aussi  pro- 
portionellement  beaucoup  plus  grands  dans  les  Rongeurs  que  dans 
le  Chiromys  et  dans  les  Lémuridés. 

Le  fémur ,  dont  la  longueur  est  égale  à  celle  des  dix  dernières 
vraies  vertèbres,  offre  par  là  plus  d'analogie  avec  celui  des  Lémuridés 
qu'avec  celui  des  Rongeurs.  Chez  ces  derniers,  le  troisième  tro- 
chanter  est  aussi  ordinairement  mieux  prononcé  que  dans  l'Aye- 
Aye.  La  même  affinité  se  manifeste  dans  les  condyles  du  fémur. 

Le  tibia  fait  aussi  ressortir  le  type  quadrumane  chez  le  Chiromys , 
en  ce  qu'il  est  presque  de  même  longueur  que  le  fémur.  Chez  les 
Rongeurs  le  tibia  est  plus  long  que  le  fémur,  tandis  que  dans 
les  Quadrumanes  il  n'y  a  guère  que  le  Tarsius  et  l' Otolicnus  Peli 
où  le  premier  de  ces  os  surpasse  le  second.  Le  péroné ,  qui  dans 
les  Sciuridés  est  uni  au  tibia  par  ankylose,  reste  plus  libre  et 
est   situé   plus   en  arrière  chez  l'Aye  Aye  et  chez  les  Lémuridés. 

Parmi  les  Rongeurs  à  cinq  doigts,  les  Ecureuils  sont  ceux  où 
la  structure  du  tarse  ressemble  le  plus  à  celle  qu'on  trouve  dans 
l'Aye-Aye;  toutefois,  la  partie  interne  de  l'os  naviculaire,  qui 
est  articulé  avec  l'os  ento-cunéiforme ,  devient  un  os  séparé  dans 
les  Ecureuils  et  autres  genres. 

Par  la  conformation  du  pouce  et  des  articulations  mé^acar- 
po-phalangiennes ,  le  Chiromys  ressemble  aux  Quadrumanes, 
et  au  point  de  vue  du  rapport  entre  la  longueur  du  tarse  et  celle 
de  la  jambe  et  du  pied,  il  se  rapproche  le  plus  de  Lichanotus 
et  de  Propilhecus. 

L'étude  des  muscles  conduit  à  des  résultats  de  même  nature 
que  la  considération  du  squelette. 

Le  muscle  masséter  est  très  fortement  développé  dans  l'Aye- 
Aye  ,  mais ,  de  même  que  chez  les  Lémuridés ,  on  n'y  trouve  pas 


DU    CHIROMYS    DANS    LA    METHODE    NATURELLE.  223 

le  faisceau  oblique  de  l'épine  et  de  la  fosse  maxillaire  supérieure , 
lequel  existe  chez  tous  les  Rongeurs. 

Au  cou,  la  présence  d'un  plafysma  />iy/o*'f/e.<f  et  d'un  sterno-clido- 
mastoïdien  à  double  attache  attire  de  suite  notre  attention,  vu 
que,  chez  les  Sciuridés,  le  premier  manque  et  le  second  n'a 
qu'une  origine  unique  (sur  la  clavicule).  Chez  beaucoup  de 
Singes  c'est  au  contraire  la  portion  claviculaire  du  m.  sterno- 
clido-mastoïdien  qui  manque ,  mais  on  la  trouve  dans  les  Stenops 
tardigradus  et  javanicus.  Chez  VOtolicnus  Peli  et  chez  le  Tarsius 
ces   deux  branches  sont  entièrement  séparées. 

Le  m.  omo-hyoïdien  manque  chez  beaucoup  de  grands  Mam- 
mifères ,  mais  existe  dans  les  Singes ,  et  dans  quelques  Carnivores 
et  Marsupiaux.  M.  Owen  ne  parle  pas  de  ce  muscle  dans  sa  des- 
cription du  Chiromys.  Le  muscle  digastrique  possède  deux  ven- 
tres chez  l'AyeAye,  comme  chez  le  Potto  et  les  Stenops  tar- 
digradus et  javanicus.  Les  Singes  ont  ordinairement  trois  musles 
scalènes,  et  il  en  est  de  même  du  Tarsius-^  Lemur ,  Stenops  et 
Chiromys  n'en  ont  que  deux. 

Si  nous  étudions  les  extrémités,  nous  trouvons  des  diffé- 
rences très  notables  entre  Chiromys  ^  Sciurus  et  les  Lémuridés. 
Le  m.  petit  rond  est  un  muscle  distinct  chez  le  Chiromys  et  chez 
les  Lémuridés,  tandis  que  chez  l'Ecureuil  il  est  si  peu  développé 
qu'on  ne  peut  y  voir  que  quelques  faisceaux  isolés  du  m.  sous- 
épineux.  Un  sixième  anconé,  muscle  que  M.  Owen  a  décrit  dans 
l'Aye-Aye  et  M.  Burmeister  dans  le  Tarsier,  ne  se  trouve  pas 
chez   l'Ecureuil. 

Le  muscle  abaisseur  de  l'épaule,  que  M.  Burmeister  a 
rencontré  dans  le  Tarsier  et  M.  Kingsma  dans  VOtolicnus  Peli, 
manq  e  chez  le  Potto.  Le  biceps  du  bras  présente  d'après 
Vrolik  deux  têtes  chez  le  Stenops  javanicus  y  d'après  Meckel  une 
seule  chez  les  autres  espèces  de  Stenops,  d'après  M.  Kingsma 
deux  chez  VOtolicnus  Peli,  enfin  d'après  M.  Burmeister  deux 
également  chez  le  Tarsius  et  chez  le  Chiromys  {?).  Le  fléchisseur 
du  bras  n'a  qu'une  tête  chez  l'Ecureuil,  il  en  a  deux  chez 
l'Aye-Aye  et  chez  les  Lémuridés  (Stenops ^   Tarsius,  etc.) 


224  G.    K.    HOFFMANN    ET    H.    WEIJENBERGH.    SUR    LA    PLAGE 

Le  m.  carré  pronateur ,  qui  existe  dans  tous  les  Lémuridés ,  se 
trouve  aussi  chez  l'Aye-Aye^   mais  manque  dans  rEcureuil. 

L'état  rudimentaire  du  pouce  chez  T Ecureuil  indique  déjà,  à 
priori ,  que  les  muscles  de  cette  partie  doivent  être  aussi  beaucoup 
moins  développés  que  chez  TAye-Aye  et  les  Lémuridés,  où  nous 
trouvons  un  pouce  au  moins  partiellement  opposable.  Le  m.  long 
extenseur  du  pouce,  qui  existe  dans  Stenops ,  Tarsius  et  autres 
genres,  et  qui  se  rencontre-également  dans  le  ChiromySj  ne  se 
trouve  pas  chez  Sciurus.  Ce  dernier  genre  montre  un  faisceau 
tout  à  fait  interne  du  m.  brachial  antérieur,  qu'on  ne  voit  pas 
dans  Stenops  et   Tarsius,  ni  dans  Chiromys. 

L'examen  de  l'extrémité  inférieure  nous  apprend  de  suite  que 
dans  les  Lémuridés  (0/o/icm(5,  Stenops,  Tarsius),  de  même  que 
dans  le  Chiromys,  le  système  des  muscles  abducteurs  est  beau- 
coup plus  fortement  développé  que  celui  des  adducteurs;  chez 
l'Ecureuil,  c'est  tout  le  contraire. 

Le  tenseur  du  fascia  lata  paraît  manquer  dans  les  Lémuridés; 
du  moins  Meckel,  Burmeister  et  van  Campen  l'ont  cherché  en 
vain.  M.  Owen  n'en  fait  pas  mention  chez  le  Chiromys.  Chez  le 
Potto,  comme  chez  les  autres  espèces  de  Stenops,  le  m.  biceps 
crural  n'a  qu'une  seule  tête;  il  en  est  de  même  de  V Otolicnus 
Peli  et  du  Chiromys.  Chez  le  Chimpanzé,  l'Orang  et  d'autres 
Singes ,  Schroeder  van  der  Kolk  a  trouvé  au  contraire  une  double 
origine  à  ce  muscle,  ce  que  Meckel  avait  constaté  également 
dans   les   genres  Ateles  et  Stentor. 

Le  m.  pectine  possède  chez  l'Ecureuil,  comme  en  général  chez 
tous  les  Rongeurs,  deux  ventres  entièrement  séparés,  et,  de  son 
côté,  le  m.  long  adducteur  naît  par  deux  faisceaux  distincts; 
chez  l'Aye-Aye  et  chez  les  Lémuridés  ces  muscles  sont  beaucoup 
moins  développés. 

Le  m.  long  plantaire  ne  se  voit  pas  chez  l'Ecureuil,  mais 
bien  chez  Chiromys  et,  parmi  les  Lémuridés,  chez  Otolicnus  et 
Tarsius  (non  chez  Stenops). 

Le  m.  court  extenseur  du  gros  orteil ,  qui  manque  chez  l'Ecu- 
reuil ,  existe  dans  les  genres  Chiromys ,  Stenops  et   Tarsius.  Il  en 


DU    CHIROMYS    DANS    LA     METHODE    NATURELLE.  225 

est  de  même  du  m.  long  fléchisseur  du  gros  orteil  ^  qui^  absent 
chez  l'Ecureuil,  est  très  fortement  développé  dans  les  Lémuridés 
et  dans  FAye-Aye.  La  disposition  des  tendons  de  ces  muscles  est 
d'ailleurs,  chez  Chiromys ,   la  même  que  chez  les  Lémuridés. 

Le  cerveau  du  Chiromys  se  reconnaît  de  suite  comme  étant 
celui  d'un  animal  de  la  division  des  Gyrencéphalés ,  et, 
pas  le  nombre  des  circonvolutions,  leur  forme  générale  et  leurs 
rapports ,  il  ressemble  tout  à  fait  à  celui  des  Lemur  :  le  cerveau 
proprement  dit  s'étend  aussi  au-dessus  du  cervelet,  ce  qui  n'est 
par  le  cas  chez  les  Rongeurs. 

Le  floccidus  cerebelli  (dans  lequel  Foville  a  constaté  l'origine 
du  nerf  auditif)  existe  aussi  bien  chez  beaucoup  de  Rongeurs 
que  chez  Stenops  et  Tarsius,  deux  genres  entre  lesquels  Chiromys 
tient  pour  ainsi  dire  le  milieu. 

De  même  que  dans  les  Lémuridés  supérieurs  et  dans  les  autres 
Quadrumanes,  les  lobes  olfactifs  sont  recouverts  par  le  cerveau 
chez  le  Chiromys,  ce  qui  n'a  jamais  lieu  chez  les  Rongeurs  (et  ne 
paraît  même  pas  être  le  cas  chez  le  Tarsier). 

Le  canal  intestinal  du  Chiromys  montre  aussi  plus  de 
ressemblance  avec  celui  des  Lémuridés  qu'avec  celui  de 
l'Ecureuil;  le  cœcum,  par  exemple,  présente  de  grandes 
différences  :  chez  les  Sciuridés ,  il  est  le  plus  étroit  là  où  il  se 
continue  avec  l'iléon,  et  plus  bas  il  devient  très  large  et  très 
ample;  chez  les  Lémuridés  on  observe  tout  le  contraire.  Or, 
sous  ce  rapport,  le  Chiromys  se  range  tout  à  fait  du  côté  des 
Lémuridés,  de  même  qu'en  ce  qui  concerne  la  longueur  relative 
du  canal  intestinal  et  les  proportions  des  lobes  du  foie. 

La  langue  des  Sciuridés,  et  des  Rongeurs  en  général,  est 
courte  et  épaisse,  surtout  entre  les  molaires,  et  montre  ordinaire- 
ment en  ce  point  les  empreintes  des  replis  palatins.  La  langue 
de  l'Aye-Aye  n'a  aucun  de  ces  caractères,  et  ressemble  à  celle 
des  Lémuridés  et  des  Quadrumanes  en  général. 

En  négligeant  beaucoup  d'autres  analogies  (de  moindre  im- 
portance)  entre    le    Chiromys   et    les  Lémuridés,    on  peut  encore 

Archives  Néerlandaises,  T.  V.  15 


226  C.    K.    HOFFMANN    ET    H.    WEIJENBERCxH.    SUR    LA    PLACE 

mentionner  le  système  vasciilaire  et  surtout  la  structure  des  or- 
ganes de  la  génération.  Chez  tous  les  Rongeurs,  les  testicules 
peuvent  rentrer  dans  la  cavité  abdominale,  pour  n'en  sortir 
qu'à  l'époque  du  rut;  chez  le  Chiromys,  pas  plus  que  chez  les 
Quadrumanes,  on  n'observe  un  pareil  phénomène.  L'absence  de 
vésicules  séminales  éloigne  aussi  l'Aye-Aye  des  Rongeurs,  tandis 
que  la  grandeur  et  la  forme  de  la  prostate  et  des  glandes  de 
Cowper  le  rapprochent  des  Lémuridés.  La  verge  est  pendante, 
comme  chez  tous  les  Quadrumanes ,  et  non ,  comme  chez  l'Ecureuil , 
renfermée  dans  un  prépuce  s'ouvrant  à  proximité  de  l'anus. 

La  manière  de  vivre  et  surtout  la  nourriture  du  Chiromys 
sont,  en  général,  assez  conformes  à  celles  des  Slenops,  Tarsius 
et  Galago;  et,  quoique  cela  ne  constitue  pas  une  preuve,  on 
peut  bien  rappeler  que  sa  patrie  (l'île  de  Madagascar)  est  appelée 
tout  spécialement  le  pays  des  Makis. 


Après  tout  ce  qui  vient  d'être  dit,  il  ne  peut  plus  y  avoir  de 
doute,  à  notre  avis,  sur  la  question  de  savoir  si  le  Chiromys 
doit  être  rangé  parmi  les  Prosimiens  ou  parmi  les  Rongeurs;  le 
classement  dans  la  première  de  ces  divisions,  proposé  par  de 
Blainville  et  par  M.  Owen,  nous  paraît  pleinement  justifié. 

C'est  uniquement  au  point  de  vue  du  système  dentaire  qu'on 
pourrait  encore  élever  des  objections  contre  cette  manière  de  voir. 
Mais  nous  avons  déjà  fait  remarquer  qu'on  ne  doit  accorder  dans 
la  classification  qu'une  valeur  relative  aux  caractères  tirés  des 
dents.  Si  l'importance  de  ces  parties  croît  à  mesure  que  l'unifor- 
mité de  leur  disposition  s'étend  sur  un  groupe  plus  nombreux ,  il 
n'est  pas  permis  de  leur  attribuer  une  valeur  prépondérante  dans 
la  considération  de  chaque  espèce  particulière.  Pour  arriver  à  une 
classification  exacte ,  il  est  nécessaire ,  en  eifet ,  de  ne  pas  attacher 
une  trop  grande  importance  aux  organes  qui  sont  le  plus  exposés 
à  subir  des  modifications  par  suite  de  changements  dans  les  con- 
ditions d'existence,  mais  de  mettre  au  contraire  en  première  ligne 
les  organes  ou  parties  qui  ne  participent  qu'à  un  moindre  degré 


DU    CHIROMYS    DANS    LA    METHODE     NATURELLE.  227 

à  ces  modifications.  Ce  sont  ceux-là  qui  indiquent  le  plus  sûre- 
ment la  voie  à  suivre  pour  trouver  les  alliés  primitifs  des  espèces 
dont  la  forme  s'est  modifiée.  Quand  même  les  premiers  ancêtres 
de  ces  espèces  devraient  nous  rester  à  jamais  inconnus ,  nous 
avons  au  moins  la  chance  de  découvrir  les  animaux  dont  elles 
présentaient ,  à  une  époque  plus  ou  moins  reculée ,  les  formes  fonda- 
mentales,   et    qui  ont  eu  par  conséquent  la  même  origine  qu'elles. 

Nous  croyons  pouvoir  regarder  comme  une  vérité  aujourd'hui 
généralement  reconnue,  qu'une  classification  qui  rapproche  les  ani- 
maux d'après  leurs  rapports  d'origine  et  de  descendance  est  de 
beaucoup  préférable  à  celle  qui  s'en  tient  exclusivement  à  la  simi- 
litude des  organes,  quelque  importants  que  ceux-ci  puissent  être 
d'ailleurs  pour  l'animal  lui-même.  Plus  un  organe  déterminé  a 
d'importance  pour  l'animal  au  point  de  vue  des  besoins  biologi- 
ques ,  plus  s'y  accuseront  les  changements  et  modifications  de  struc- 
ture qui  deviennent  nécessaires  par  suite  d'un  nouveau  genre 
de  vie  imposé  à  cet  animal;  en  d'autres  termes,  dans  la  diffé- 
renciation des  espèces,  les  modifications  porteront  principalement 
sur  les  organes  qui  sont  le  plus  exposés  à  l'influence  de  l'usage, 
du  défaut  d'usage  et  de  la  sélection  naturelle. 

11  est  clair  aussi  que  ce  sont  surtout  ces  modifications  d'une 
si  grande  utilité  pour  l'animal,  qui  se  transmettront  d'une  géné- 
ration à  l'autre  sous  cette  influence  sans  cesse  croissante  de  l'usage 
et  de  l'absence  d'usage. 

Parmi  les  organes  qui ,  par  leur  liaison  intime  avec  la  manière 
de  vivre,  sont  surtout  exposés  à  subir  des  changements  et  des 
modifications ,  il  faut  placer  en  première  ligne  l'appareil  entier 
de  la  'digestion  (dents,  intestins,  muscles  servant  à  la  mastica- 
tion,   etc)    et    les  organes  de  la  locomotion  (membres  et  queue). 

Pour  la  classification ,  nous  voudrions  voir  accorder  une  impor- 
tance plus  grande  aux  organes  qui  n'éprouvent  pas  aussi  direc- 
tement cette  influence  du  genre  de  vie ,  par  exemple ,  dans  le  cas 
de  l'Aye-Aye,  à  la  structure  du  crâne. 

Sous  le  rapport  de  la  nourriture,  les  Lémuridés,  surtout  Ste- 
nopsy    Tarsiiis  et  Galaqo,  sont  de  vrais  Insectivores,  et  ils  mon- 

15* 


228  C.    K.    HOFFMANN    ET    H.    WEI.TENBKRGH.    SUR    LA    PLACE 

trent  en  conséquence  dans  leur  appareil  dentaire,  plus  ou 
moins  diversifié  du  reste  suivant  la  manière  de  vivre  des  diffé- 
rentes espèces,  des  analogies  remarquables  avec  les  animaux 
de  cet  ordre;  sous  le  rapport  de  la  conformation  des  mem- 
bres au  contraire,  les  mêmes  Lémuridés,  grimpeurs  agiles  et 
habitants  des  arbres,  se  rapprochent  beaucoup  des  Singes.  Par 
leurs  incisives,  quelques-uns  d'entre  eux  (en  particulier  le  Chi- 
romys)  rappellent  la  famille  des  Sciuridés,  et  l'analogie  n'existe 
pas  seulement  dans  la  structure  de  ces  organes ,  mais  aussi  dans 
l'usage  que  les  animaux  en  font. 

Si,  chez  les  Sciuridés,  la  queue  est  devenue,  par  la  disposi- 
tion caractéristique  des  poils ,  un  instrument  excellent  pour  diriger 
les  mouvements,  nous  retrouvons  un  instrument  tout  pareil,  ser- 
vant au  même  usage,  chez  certains  Lémuridés  (particulièrement 
chez  les  Galago).  Les  mêmes  particularités  de  conformation  de 
la  queue  et  d'aspect  général  s'observent  encore  dans  une  famille 
d'un  autre  ordre,  dont  les  espèces  ressemblent  aux  précédentes 
par  la  manière  de  vivre;  nous  voulons  parler  de  la  famille  des 
Grimpeurs  (ordre  des  Insectivores),  et  spécialement  des  genres 
Ptilocerciis  et  Cladohales. 

Pour  prouver  que,  chez  les  Didelphes  également,  un  même 
genre  de  vie  entraîne  des  modifications  semblables  dans  les  mêmes 
organes,  nous  n'avons  qu'à  rappeler  le  Wombat,  dont  le  système 

dentaire  se  rapproche  de  celui  des  Rongeurs  (--— — —- 1 ,  et 

les  Pédimanes  qui,  en  leur  qualité  d'insectivores  quadrumanes, 
sont  en  quelque  sorte  parallèles  aux  Lémuridés  parmi  les  Mam- 
mifères monodelphes. 

Que  de  pareils  changements  dans  la  structure  des  organes ,  en 
connexion  avec  le  genre  de  vie,  se  produisent  réellement,  c'est 
ce  qu'il  est  difficile  de  nier;  mais,  quant  à  la  manière  dont  ces 
changements  s'effectuent ,  bien  que  quelques-uns  puissent  être  expli- 
qués, on  ne  peut  que  répéter  avec  M.  Owen  :  „autre  chose  est  la 
conception  de  l'origine  des  espèces  par  l'action  continue  d'une 
cause  ou  loi  secondaire,  autre  chose  la  connaissance  de  la  nature 
et  du  mode  d'action  de  cette  cause." 


DU    CHIROMYS    DANS    LA    METHODE     NATURELLE.  229 

Nous  ne  hasarderons  donc  aucune  hypothèse  pour  essayer  d'ex- 
pliquer comment  des  incisives  à  racine  fermée  peuvent  se  trans- 
former en  incisives  à  racine  non  fermée ,  telles  qu'on  les  rencontre 
chez  les  Rongeurs. 

La  nourriture  du  Chiromys  se  compose  de  larves  d'insectes,  qui 
vivent  dans  le  bois  souvent  très  dur  des  arbres  des  forêts  de  Ma- 
dagascar. Pour  la  recherche  de  ces  larves,  ses  grandes  oreilles 
lui  sont  d'une  utilité  spéciale.  Lorsque  l'animal  a  acquis  la  con- 
viction qu'une  branche  recèle  une  de  ces  proies  qu'il  convoite ,  il 
doit  en  ronger  le  bois  vert,  mais  dur,  jusqu'à  ce  qu'il  ait  atteint 
la  galerie  où  la  larve  se  cache;  et  dès  que  cette  galerie  est 
ouverte,  il  doit  en  extraire  la  larve  aussi  rapidement  que  pos- 
sible, pour  ne  pas  lui  laisser  le  temps  de  se  retirer  dans  une 
autre  partie  de  son  conduit.  Pour  opérer  cette  extraction ,  aussitôt 
qu'une  petite  ouverture  a  été  pratiquée  à  la  galerie,  l'animal  se 
sert  de  son  doigt  médian,  long,  mince  et  armé  d'un  ongle  aigu. 

Une  première  conséquence  de  cette  manière  de  se  procurer  sa 
nourriture  doit  être  le  grand  développement  des  muscles  de  la 
mastication,  qui,  à  leur  tour,  entraînent  des  modifications  dans  la 
forme,  la  croissance  et  la  grandeur  des  mâchoires  (par  exemple ,  en  ce 
qui  concerne  l'apophyse  coudyloïdienne  de  la  mâchoire  inférieure).  Le 
travail  de  ronger  le  bois,  qui  incombe  aux  dents  incisives,  doit 
activer  dans  celles-ci  le  mouvement  de  rénovation  moléculaire,  y 
augmenter  la  dépense  et  par  suite  aussi  l'afflux  des  matières  nutri- 
tives. Ce  sont  surtout  les  incisives  antérieures  qui  se  chargent  de 
la  besogne;  la  paire  latérale,  qui  s'exerce  moins,  reçoit  moins  de 
nourriture,  s'atrophie,  disparaît  même  entièrement.  Les  canines 
subissent  le  même  sort  que  les  incisives  latérales.  Il  est  évident 
d'ailleurs  que  ces  changements,  suite  de  l'activité  ou  de  l'inertie 
des  parties,  ne  peuvent  devenir  sensibles  qu'après  une  série  de 
générations.  Les  recherches  déjà  citées  de  M.  Peters  sur  la  première 
dentition  du  Chiromys  viennent  à  l'appui  de  la  justesse  de  ce 
raisonnement,  car  elles  nous  apprennent  que  dans  ses  premiers 
rudiments  l'appareil  dentaire  de  cet  animal  ressemble  effectivement 
à  celui  des  Lémuridés,  mais  qu'avec  les  progrès  de  l'âge ,  par  suite 


230  C.    K.    HOFFMANN    ET    H.    WEIJENBERGH.    SUR    LA    PLAGE 

du  rôle  passif  auquel  sont  condamnées  quelques-unes  de  ses  par- 
ties, il  se  rapproche  de  ce  qu'on  observe  chez  les  Rongeurs. 

On  comprend  de  même  que,  par  l'introduction  incessante  du 
doigt  médian  dans  les  trous  pratiqués  dans  le  bois,  ce  doigt  a 
dû  devenir  peu  à  peu ,  à  travers  une  suite  de  générations ,  un  in- 
strument de  mieux  en  mieux  approprié  à  l'opération  dont  il  est  chargé. 
„L'hérédité  conserve  et  perfectionne  les  formes  organisées"  dit  avec 
raison  M.  A.  Laugel  (Revue  des  Deux  Mondes,  1  Mars  1858, 
p.  130—156). 

Du  reste,  quand  même  le  raisonnement  qui  précède  serait  à 
l'abri  de  toute  objection,  il  est  clair  que  nous  n'aurions  pas  encore 
la  solution  complète  du  problème  déjà  signalé  ci-dessus  :  comment 
les  modifications  dont  il  s'agit  peuvent-elles  donner  lieu  à  la  trans- 
formation d'une  incisive  à  racine  fermée  en  incisive  de  Rongeur^ 
à  racine  non  fermée? 

Une  autre  question,  qu'il  nous  reste  à  examiner ,  est  celle-ci  :  Si 
le  Chiromijs  fait  parti  des  Lémuridés,  quelle  est  la  place  qu'il 
doit  prendre  dans  ce  sous-ordre? 

En  général,  les  animaux  de  ce  groupe  paraissent  avoir  une 
grande  tendance  à  éprouver  des  modifications  dans  la  forme  des 
membres,  témoin  le  long  tarse  des  Tarsius  et  des  Galago ,  l'index 
rudimentaire  et  jusqu'ici  inexplicable  du  Perodicticus  et  le  médius 
grêle  du  Chiromijs.  Pour  la  distribution  des  genres,  on  peut 
donc,  à  l'exemple  de  Van  der  Hoeven,  emprunter  les  caractères 
tant  aux  membres  qu'à  l'appareil  dentaire. 

Avec  les  grands  Lémuridés  (Lichanotus,  Lemur ,  etc.),  à 
yeux  dirigés  latéralement,  TAye-Aye  présente  des  diiférences 
trop  considérables;  et,  d'un  autre  côté,  on  ne  peut  songer 
non  plus  à  le  rapprocher  du  genre  Stenops ,  qui  s'accorde  avec 
Lemur  par  le  système  dentaire  et  qui  n'a  pas  de  queue  ou  n'en 
possède  qu'une  très-courte.  Aussi  bien  par  l'aspect  général  que 
par  le  genre  de  vie  et  la  nature  des  aliments,  c'est  avec  les 
genres  composant  la  famille  des  Macrolarsi  que  le  Chiromys  a 
le  plus  de  rapports.  Comparé  au  Tarsius  toutefois,  il  montre 
encore    trop    de   différences   pour   pouvoir   prendre   place   à  côté 


DU    CHIROxMYS    DANS    LA    iMETHODE    NATURELLE.  231 

de  lui  dans  le  système;  avec  le  genre  Otolicnus  (Galago  Geoffr.) 
les  analogies  sont  plus  nombreuses,  par  exemple ^  le  tarse  moins 
allongé  (plus  court  que  chez  le  Tarsius)  et  la  queue  plumeuse. 
L'admission  des  Microcebus  (à  tarse  encore  plus  réduit)  dans  le 
genre  Galago,  à  titre  de  sous-genre,  confirme  le  droit  que  nous 
avons  de  placer  le  Chiromys  dans  le  voisinage  de  ce  genre  Olo- 
licnus  (Galago),    bien  qu'il  ne  possède  pas  un  tarse  allongé. 

En  résumant  et  pesant  toutes  les  analogies  et  les  différences, 
nous  croyons  ne  pas  agir  tout  à  fait  arbitrairement  en  ajoutant 
au  sous-ordre  des  Prosimiens  une  quatrième  famille ,  sous  le  nom 
de  Macrotarsi ,  et  en  y  admettant  les  genres  :  1  "  Microcebus  Geoffr. 
et  2"  Chiromys  Cuv. 

Dans  le  Manuel  de  Zoologie  de  Van  der  Hoeven,  le  genre 
Microcebus  se  trouve  caractérisé  de  cette  manière  :  „species  parvae 
„ab  Otolicno  diversae  auriculis  pilosioribus,  vibrissis  facialibus, 
,^incisivis  superioribus  latioribus.''  Or,  dans  ces  caractères,  surtout 
dans  celui  qui  est  exprimé  en  dernier,  nous  croyons  voir  un 
rapprochement  entre  les  Microcebus  et  les  Chiromys. 

La  disposition  systématique  pourrait  alors  être  établie  de  la 
manière  suivante: 

MAMMALIA. 

Ordre    IL    QUADKUMANA. 

Sous-Ordre  IL  Prosimiae. 

Famille  1  Lemurini.  —  Fam.  2  Nycticebini.  —  Fam.  3  Ma- 
crotarsi. —  Fam.  4  Microtarsi. 

Cette  4me  famille  serait  distinguée  par  des  tarses  peu  ou  point 
allongés ,  et  par  des  différences  dans  le  système  dentaire ,  surtout 
dans  la  forme  des  incisives;  elle  aurait  en  commun  avec  les 
Macrotarsi  la  longue  queue ,  les  grands  yeux  dirigés  en  avant  et 
les  grandes  oreilles.  Nourriture  composée   d'insectes  ^). 


')  Après  avoir  écrit  ce  qui  précède,  nous  avons  eu  connaissance  de  ce  qui 
concerne  ces  animaux  dans  le  Manuel  de  Zoologie  de  Carus  et  Gerstàcker. 
Dans   cet   ouvrage,  le  Chiromys   est  également  rapporté  aux  Prosimiens,    où  il 


232    C.    K.    HOFFMAiNN    ET    H.    WEIJENBERGH.    SUR    LA    PLACE    ETC. 

Genre  1.  Microcelms  Geoffr.  Species  parvae  auriculis  pilosiori- 
bus,  vibrissis  facialibus,  incisivis  superioribus  latiori- 
l3Ug.  —  Deux  espèces,  de  Madagascar:  M.  murinus 
Wagn.  et  M.  myoxinus  Peters. 

Genre  2.  Chiromys  Cuv.  Dentés  incisivi  compressi,  acuminati; 

1-1-3 
molares    lemurini m ,obducti,  tuberculata,  corona 

1  +  3 
detrita  plani.  Pedes  pentadactyli ,  pollice  amoto 
(praecipue  postici) ,  ungue  piano ,  digitis  longis ,  quarto 
longissimo;  cauda  elongata,  villosa;  structura  uni- 
versa  lemurina.  —  Une  espèce,  de  Madagascar: 
Ch.  madagascariensis  Dm. 

L'espèce  unique  de  ce  genre  pourrait  être  carac- 
térisée ainsi: 

Ch.  madagascariensis  Dm.  (Aye-Aye)  Synon.  Lemur 
Psilodactyhis  de  Blainv.  Chiromys  manus  digito  me- 
dio  gracili,  ungue  aliquomodo  cuspidato,  oculis 
magnis,  auriculis  nudis  et  magnis. 


forme,  à  lui  seul,  une  quatrième  famille,  sous  le  nom  de  Gliromorpha  (=  Lepto- 
dadyla    III.    =    Bauhentonia    Gray  =   Glirisimiae  Dahl  :=   Chiromyida  Bonap.) 

Cette  famille  est  définie  ainsi  par  les  auteurs:  .,Gebiss  /-,   c   ,   r-,  m-   (Milch- 

^  10       0       3 

2       12.. 

gebiss    e-,    c,   p-).    Die  Schneidezâline  gross,    comprimirt,  nagezahn-àhnlich , 

/i  \J  /i 

wurzellos.  die  untern  riickwàrts  bis  unter  den  Kronfortsatz  reichend;  dann 
folgen  auf  eine  weite  Liicke  (die  von  den  Milchzâlinen  ,ausgefûllt  wird)  die 
Backenzàhne.  —  Einger  und  Zehen  frei;  liinter  und  vorn  der  vierte  der 
làngste.  Vorderdaumen  breit ,  dritter  Finger  selir  diinn  ;  aile  Einger  ausser  dem 
Dauraen  mit  krallenartigen  Nàgeln.  Scliwanz  lang ,  mit  starren  Haaren.  Zwei 
inguinale  Zitsen.  —  Einzige  Gattung,  Chiromys  Cuv.  (Aye-Aye).  Art.  Chiromys 
madagascariensis  Dm.  etc." 

Il  y  a  donc,  entre  M.  Carus  et  nous,  accord  quant  au  point  principal, 
l'établissement  d'une  quatrième  famiUe  pour  le  Chiromys.  Mais,  sans  nous 
dissimuler  les  différenes  qui  existent  entre  les  Microcekis  et  le  Chiromys,  nous 
croyons  devoir  persister  à  rapprocher  ces  deux  genres  et  à  désigner  cette  qua- 
trième famille  sous  le  nom  de  Microtarsi. 


NOTE  SUR  LES 

RÉSULTATS  D'UNE  ÉTUDE  MATHÉMATIQUE 

DES  MOUVEMENTS  DE  L'ŒIL, 


G.   F.   W.   BAEHR. 

(lue  à  l'Académie  des  Sciences  d'Amsterdam,    le    29  Avril  1870.) 


Le  mouvement  continu  de  l'œiL  de  même  qu'en  général  le 
mouvement  de  rotation  autour  d'un  point  fixe,  se  fait  comme 
si  une  surface  conique,  ayant  son  sommet  au  centre  de 
rotation  et  à  laquelle  le  globe  oculaire  serait  invariablement 
lié,  roulait,  sans  glisser,  sur  une  autre  surface  conique  ayant  le 
même  sommet  et  gardant  une  position  fixe  par  rapport  à  la  tète. 
La  position  et  les  dimensions  du  cône  fixe  sont  déterminées 
immédiatement  par  la  surface  conique  que  doit  parcourir  la  ligne 
de  regard  oi:  l'axe  optique  de  l'œil,  ligne  dont  la  direction 
détermine  à  son  tour,  d'après  les  lois  de  Donders  et  de  Listing, 
à  chaque  instant,  la  position  du  globe  oculaire. 

Ceci  posé ,  le  caractère  particulier  du  mouvement  de  l'œil  est 
que  les  deux  surfaces  coniques  en  question  sont,  dans  ious  les  cas  y 
égales  et  semblables ^  et  qu^ elles  ont ,  pendant  toute  la  durée  du  mouve- 
ment,  une  position  symétrique  par  rapport  au  plan  tangent  commun. 

Quand  la  ligne  de  regard  doit  décrire  un  plan  passant  par  la 
droite  qui  joint  les  centres  de  rotation  des  deux  yeux,  de  sorte 
que,  pour  la  position  horizontale  de  cette  droite,  le  point  de 
regard  parcourrait  une  ligne  horizontale  sur  un  plan  vertical  qui  lui 
est  parallèle,  les  deux  surfaces  coniques  sont  des  cônes  circulaires  droits, 
dont  V angle  au  sommet  est  un  angle  droit.  Le  cône  fixe  est  divisé 


234  BAEHR.    NOTE    SUR    LES     RÉSULTATS    d'uNE    ETUDE 

en  deux  parties  égales  par  le  plan  vertical;  son  ouverture  est 
tournée  vers  le  côté  postérieur  de  la  tête,  et  l'angle  que  son 
axe  fait  avec  la  position  primaire  de  la  ligne  de  regard  est  égal 
à  la  moitié  du  complément  de  l'élévation  de  cette  ligne.  D'après 
cela,  lorsque  la  ligne  de  regard,  fixe  dans  le  globe  oculaire ,  suit 
le  roulement  du  cône  mobile,  son  élévation  reste  constante, 
et  elle  décrit  par  conséquent  le  plan  indiqué. 

Si  la  ligne  de  regard  doit  décrire  un  plan  perpendiculaire  au 
plan  passant  par  la  position  primaire  de  la  ligne  de  regard  et  la  droite 
qui  joint  les  centres  de  rotation  des  deux  yeux,  de  sorte  que, 
pour  la  position  horizontale  de  cette  droite,  le  point  de  regard 
parcourrait  une  ligne  verticale  sur  un  mur  vertical,  les  deux 
cônes  sont  encore  circulaires  droits,  et  leur  angle  au  sommet 
est  un  angle  droit.  Le  cône  fixe  est  maintenant  divisé  en  deux  par- 
ties égales  par  le  plan  horizontal  5  son  ouverture  est  tournée  vers 
le  côté  antérieur  de  la  tête,  et  l'angle  que  son  axe  fait  avec  la 
position  primaire  de  la  ligne  de  regard  est  égal  à  la  moitié  du 
complément  de  la  déviation  initiale  de  cette  ligne.  Quand  alors 
la  ligne  de  regard  suit  le  mouvement  du  cône  roulant,  sa 
déviation  latérale  et  son  élévation  changent  simultanément,  de 
manière  que  son  extrémité  parcourt  sur  un  mur  vertical  une 
ligne  verticale. 

Si  la  ligne  de  regard  doit  décrire  un  cône  droit,  dont  le  pro- 
longement de  sa  direction  primaire  soit  une  des  génératrices, 
de  sorte  que  l'extrémité  de  la  ligne  de  regard  décrirait  sur  le  globe 
oculaire ,  supposé  sphérique ,  un  cercle  passant  par  le  point  occipital , 
l'œil  tourne  autour  d'un  axe  fixe  qui  est  perpendiculaire  au  plan 
de  ce  cercle.  L'extrémité  de  la  ligne  de  regard  parcourt  alors 
sur  une  paroi  verticale,  qui  est  en  même  temps  perpendiculaire 
à  la  position  primaire  de  cette  ligne,  les  hyperboles  tangen- 
tiellement  auxquelles  peuvent  être  déplacées  les  images  persistantes 
quelconques  formées  dans  la  position  primaire. 

Mais  lorsque  la  ligne  de  regard  doit  décrire  un  cône  circulaire 
droit  autour  d'une  ligne  quelconque  prise  pour  axe,  de  sorte  que  son 
extrémité  décrirait  sur  le  globe  oculaire,  supposé  sphérique,  un  cercle 


MATHÉMATIQUE    DES    iMOUVEMENTS    DE    l'œIL.  235 

quelconque,  les  deux  cônes  sont  bien  encore  du  second  degré, 
mais  ils  ne  sont  plus  circulaires  droits.  Si  l'on  mène  un  plan 
par  la  position  primaire  de  la  ligne  de  regard  et  l'axe  du  cône 
que  cette  ligne  doit  décrire ,  ce  plan  est  un  plan  principal ,  et  la 
bissectrice  de  l'angle  de  ces  deux  droites  un  axe  principal 
du  cône  fixe ,  de  sorte  que  les  sections  perpendiculaires  à  cet  axe 
sont  des  ellipses.  En  prenant,  dans  un  système  de  coordonnées 
rectangulaires,  cet  axe  principal  pour  axe  des  x  et  ce  plan 
principal  pour  plan  des  x  z ,  l'équation  du  cône  fixe  serait  : 
(1  H-  C05  v)  icos  f-  H-  COS  i/  )  x'^  —  (1  —  cos'^  >!')  1/- 
—  (1  —  cos  *;  )  {cos  '■'■  +  cos  ',")  ^  -  =  0  , 

dans  laquelle  c  est  l'angle  compris  entre  la  position  primaire 
de  la  ligne  de  regard  et  l'axe  du  cône  qu'elle  doit  décrire,  et 
y  le  demi-angle  au  sommet  de  ce  cône.  Si  maintenant  on  écarte 
la  ligne  de  regard  de  sa  position  primaire,  de  manière 
que,  restant  dans  le  plan  xz,  elle  fasse  un  angle  v  avec  l'axe 
du  cône  donné ,  elle  décrira  la  surface  de  ce  cône  quand  elle  suivra 
dans  son  mouvement  le  cône  roulant. 

Il  y  a  encore  à  faire  la  remarque  suivante.  Une  image  persistante 
horizontale,  formée  dans  la  position  primaire,  ne  coïncide 
plus  avec  la  ligne  horizontale ,  lorsque  l'œil ,  quittant  sa  position , 
se  porte  sur  quelque  autre  point  d'une  paroi  verticale,  qui  est 
en  même  temps  perpendiculaire  à  la  direction  primaire  de  la 
ligne  de  regard.  On  conclut  de  là  que  l'horizon  rétinien  a  tourné 
d'un  certain  angle.  De  même,  de  ce  que  l'image  persistante 
verticale,  produite  dans  la  position  primaire,  dévie  de  la  ligne 
verticale,  on  tire  la  conséquence  que  le  méridien  vertical  pri- 
maire a  fait  une  rotation.  Les  déviations  en  question  ne  sont 
toutefois  pas  égales  aux  angles  de  rotation  de  ces  plans.  Elles 
présentent  cette  propriété  remarquable ,  que  la  déviation  de  l'image 
persistante  horizontale  est  précisément  égale  à  l'angle  de  rotation 
du  méridien  primaire,  et,  réciproquement ,  la  déviation  de  l'image 
persistante  verticale  précisément  égale  à  l'angle  de  rotation  de 
l'horizon  rétinien.  Il  ne  paraît  pas  que  cette  circonstance  ait  été  re- 
marquée dans  Jes  expériences  faites  pour  contrôler  la  loi  de  Listing. 


LA  FORÊT  PÉTRIFIÉE  DU  CAIRE, 

LES  COLLINES   DE  TESSONS  DE  POTERIE  DE  LA  BASSE-EGYPTE  ET  LA 
PREMIÈRE  CATARACTE  DU  NIL. 


H.  HARTOGH  HEYS  VAN  ZOUTEVEEN. 


Pendant  un  voyage  en  Egypte,  entrepris  dans  les 
mois  de  Novembre  et  de  Décembre  1869,  j'ai  fait  quelques 
observations,  qui  ne  me  semblent  pas  tout  à  fait  dénuées  d'in- 
térêt. La  première  se  rapporte  à  la  forêt  pétrifiée  du 
Caire.  Comme  on  sait,  ce  gisement  se  compose  de  millions 
de  morceaux  de  bois  pétrifié ,  (jui  sont  mêlés  au  sable  du  désert , 
de  la  même  manière  que  les  cailloux  sont  mêlés  au  sable  de 
notre  diluvium  caillouteux.  Ces  fragments  de  bois  pétrifié  se  com- 
posent de  silice,  et  non  pas  de  carbonate  de  chaux  ;  ils  ne  mon- 
trent pas  de  vestiges  d'avoir  été  roulés,  car  leurs  arêtes  sont 
aiguës.  Ils  sont  de  grandeur  différente  ;  il  y  en  a  de  deux  pieds 
de  longueur  et  d'un  demi-pied  de  largeur.  Les  espèces  les  plus 
répandues  sont  le  dattier  (?)  et  le  sycomore.  Je  crois  pouvoir 
affirmer,  que  ces  morceaux  de  bois  étaient  déjà  pétrifiés  lorsquHls 
ont  été  apportés  dans  ces  lieux.  La  preuve  en  est  fournie,  entre  autres, 
par  un  morceau  du  troue  d'une  plante  monocotylédone ,  dont  j'ai 
fait  cadeau  à  la  collection  géologique  de  l'école  polytechnique 
de  Delft.  Ce  morceau  est  couvert  en  grande  partie  d'une  boue 
noire,  parsemée  de  petits  cailloux,  et  qui  a,  pour  ainsi  dire, 
été  pétrifiée  aussi,  car  la  croûte  forme  avec  le  bois  une 
seule  masse  pierreuse.  Cette  boue  et  ces  cailloux 
diffèrent  notablement  par  leur  aspect  du  sable  du  désert  envi- 
ronnant ,  ce  qui  |)rouve  avec  évidence ,  à  mon  avis ,  qu'ils  étaient 
déjà  fixés  au  bois  et  que  par  conséquent  ce  dernier  avait  déjà  été 


H.  HARÏOGH  HEYS  VAN  ZOUTEVEEN.  LA  FORET  ETC.     237 

pétrifié,  avant  qu'il  fût  apporté  dans  ces  lieux.  Quand  on 
adopte  ce  point  de  vue,  il  n'en  devient  que  plus  étrange  que  les 
morceaux  ne  montrent  pas  de  traces  d'une  action  violente  des 
eaux,  qu'ils  possèdent  des  arêtes  aiguës  et  n'aient  pas  été  brisés 
après  leur  pétrification  (ce  dernier  point  résulte  de  la  différence 
d'aspect  entre  l'extérieur  du  bois  et  l'intérieur,  différence  qui  devient 
visible  quand  on  casse  un  morceau).  On  pourrait  expliquer  le  fait 
en  supposant  que  le  bois  fut  transporté,  flottant  sur  les  eaux, 
avant  d'avoir  été  pétrifié,  et  qu'il  resta  sur  le  sol  après  l'écoule- 
ment des  eaux  ;  mais  cette  hypothèse  n'est  plus  admissible  après 
l'inspection  du  fragment  rapporté  par  moi. 

En  second  lieu  je  veux  fixer  l'attention  sur  de  grandes 
collines,  composées  d'une  terre  noirâtre  mêlée  d'innom- 
brables tessons  de  poterie,  qu'on  trouve  près  du  Caire,  près  d'Alexan- 
drie et  dans  d'autres  localités  de  la  Basse-Egypte.  Aucune  plante 
ne  croît  sur  ces  collines,  probablement  parce  qu'elles  s'élè- 
vent au-dessus  du  niveau  de  l'eau  du  Nil  pendant  l'inondation. 
Les  tessons  de  poterie  prouvent  que  l'homme  a  eu  part  à  leur  forma- 
tion. Les  Egyptologues  ne  paraissent  pas  savoir  les  expliquer. 
Dans  ces  derniers  temps,  on  a  découvert  que  la  terre  noirâtre 
qui  se  trouve  entre  les  tessons  de  poterie  était  un  engrais  excellent , 
ce  qui  me  rappelle  les  terramares  de  l'Italie.  Ces  collines  n'in- 
diqueraient-elles pas  des  stations  humaines  des  temps  préhis- 
toriques ? 

Ma  troisième  observation  se  rapporte  à  la  première  cataracte 
du  Nil  et  à  l'île  de  Philae.  Comme  on  sait,  cette  première 
cataracte  n'est,  à  vrai  dire,  qu'une  succession  de  rapides,  com- 
mençant déjà  plus  ou  moins  près  de  Philae  et  ne  finissant  tout 
à  fait  que  près  d'Eléphantine.  Au  milieu  de  ces  rapides  s'élèvent 
partout  du  sein  de  l'eau  d'énormes  blocs  de  granité  (le  granité 
de  Syène  n'est  pas  de  la  syénite,  ce  qu'on  a  cru  être  de  la 
hornblende  n'étant  que  du  mica  noir).  Par-ci  et  par-là  ce  granité 
est  couvert  d'une  autre  espèce  de  pierre,   noire,    offrant  l'aspect 


238        H.  HARTOGH  HEYS  VAN  ZOUTEVEEN.  LA  FORET 

du  basalte  ;  et  que  l'on  dirait  avoir  été  coulée  sur  le  granité  à 
l'état  fluide.  Par  l'action  de  l'eau ,  la  surface  de  cette  pierre  a 
été  parfaitement  polie;  quand  on  la  casse  elle  présente  une 
surface  mate  et  grisâtre.  Le  professeur  Vogelsang,  de  Delft^  s'occupe 
en  ce  moment  d'un  examen  microscopique  et  chimique  de  cette 
pierre  ;  dont  je  lui  ai  rapporté  un  morceau. 

Quand  on  se  trouve  à  l'île  de  Philae^  on  voit  dans  les  bras 
du  fleuve  qui  l'entourent,  et  sur  l'île  elle  même,  d'énormes 
rochers  de  granité.  Les  bords  du  Nil ,  du  côté  de  l'intérieur  du  conti- 
nent, nous  font  voir  aussi  des  rochers,  formés  de  morceaux  de 
granité  amoncelés,  arrondis  par  l'action  des  eaux.  En  observant 
ces  rochers,  l'hypothèse  se  présenta  immédiatement  à  mon 
esprit,  qu'ils  ne  sont  que  les  débris  d'une  digue  naturelle,  qui 
autrefois  retenait  ici  les  eaux  du  Nil.  Celles-ci,  s'élançant  au- 
dessus  de  cet  obstacle,  retombaient  de  l'autre  côté,  et  for- 
maient ainsi  sans  doute  une  véritable  cataracte.  Après  que,  par  un 
travail  séculaire ,  le  fleuve  eut  brisé  ses  entraves ,  cette  cataracte 
de  Philae  disparut,  et  fut  remplacée  par  la  série  de  rapides 
qu'on  voit  aujourd'hui  entre  Philae  et  Eléphantine.  D'après  cette 
hypothèse,  la  cataracte  se  serait  donc  déplacée  en  aval  dans 
le  cours  des  siècles,  juste  à  l'inverse  du  Niagara,  qui  se 
déplace  en  amont.  Avant  la  rupture  de  la  chaîne  de  rochers  de 
Philae ,  le  niveau  du  fleuve ,  entre  la  première  et  la  seconde  cata- 
racte, devait  être  de  plusieurs  mètres  plus  élevé  qu'aujourd'hui. 

J'avais  fait  cette  observation,  cette  hypothèse,  lorsque ,  en  lisant 
l'aperçu  de  l'histoire  ancienne  d'Egypte  par  A.  Mariette-bey ,  je 
fus  frappé  par  les  mots  suivants,  qu'on  y  trouve  à  la  page  25: 

„I1  existe  au-dessus  de  Ouady  Halfa,  près  du  village  de 
Semneh,  des  rochers  situés  à  pic  sur  le  fleuve,  et  qui  portent  à 
7  mètres  au-dessus  des  plus  hautes  eaux  actuelles  des  inscrip- 
tions hiéroglyphiques.  Or,  de  la  traduction  de  ces  inscriptions, 
il  résulte  que,  sous  la  Xll^ie  et  la  XlII^ne  dynastie,  le  Nil, 
dans  sa  plus  grande  hauteur,  s'élevait  jusqu'au  point  où  ces 
légendes  sont  tracées.  11  y  a  40  siècles,  le  Nil  montait  donc,  à 
la  deuxième   cataracte,  à  environ    7  mètres  plus    haut    qu'il  ne 


PÉTRIFIÉE    DU    CAIRE.  239 

monte  aujourd'hui.  Il  y  a  là  un  problème  digne  cV attention  et  que 
la  science  na  pas  encore  résolu.  Le  chaugement  de  niveau  du 
Nil  à  la  seconde  cataracte  est-il  dû  aux  grands  travaux  hydrau- 
liques entrepris  par  les  rois  du  Moyen-Empire ,  dans  le  but ,  soit 
de  régulariser  les  inondations  de  ce  fleuve  impétueux  ^  soit 
d'élever  un  rempart  naturel  entre  l'Egypte  et  ses  plus  redoutables 
ennemis ,  en  rendant  cette  cataracte  impraticable  aux  navires  qui 
descendaient  du  Soudan?  C'est  ce  que  je  ne  pourrais  dire." 

Je  crois  que  la  solution  du  problème  se  trouve  dans  la 
destruction  de  la  digue  naturelle ,  qui  autrefois  retenait  les 
eaux  du  Nil  à  Philae.  La  destruction  de  cette  chaîne  de  rochers 
n'a  pas  été  l'œuvre  de  la  main  de  l'homme,  mais  celle  du  fleuve 
lui-même,  qui  y  a  employé  une  série  de  siècles. 


SUR  LA  SYNl^HÈSE  DU  SULFOCYANATE 
D'AMMONIUM 

(r  H  0  D  A  N  -  A  M  M  0  IV  I  U  m). 

PAR 

H.  HARTOGH  HEYS  VAN  ZOUTEVEEN. 


On  lit  dans  le  Jahresherichl  ûher  die  Forlschritte  der  Chemie , 
publié  par  M.  A.  Strecker  pour  1868,  Prem.  fasc,  15  Février 
1870,  pag.  160: 

„M.  Berthelot  hat  die  Existenz  des  Kolilenoxysulfides  bestatigt 
und  einige  weitere  Angaben  liber  dasselbe  gemacht.  Wâhrend 
Schwefelkohlenstoff  bei  gewobnlicher  Temperatur  auf  Ammoniak- 
fllissigkeit  nur  langsam  und  auf  gasfornaiges  Ammouiak  selbst 
bei  mebrstlindigem  Contact  uicht  einwirkt,  verbindet  sicb  das 
Oxysùlfid  mit  demselben  leicht  und  zwar  mit  dem  Gase  zu  krystalli- 
niscbem  oxysulfocarbamins.  Ammonium  nacb  der  Gleichung: 
€ô^  +  2NH3=€SNH,  (NH^)©.  Dureb  Erbitzung  ihrer 
wâsserigen  Lôsung  in  gescblossenen  Gefassen  gebt  dièse  Verbin- 
dung  in  Scbwefelcyanammonium  uber." 

Suivant  M.  Berthelot,  le  sulfure  de  carbone  ne  réagirait  donc 
pas  à  la  température  ordinaire  sur  l'ammoniaque  gazeuse.  Ceci 
est  en  contradiction  directe  avec  une  expérience  faite  par  moi 
en  Décembre  1866  et  que  je  n'ai  pas  encore  publiée.  Je 
faisais  traverser  du  sulfure  de  carbone  par  un  courant  d'ammo- 
niaque gazeuse  bien  sécbée  au  moyen  de  la  potasse  caustique.  Le 
sulfure  de  carbone  se  colora  en  jaune,  et  bientôt  il  se  déposa 
un  précipité  rouge  brique ,  tandis  que  le  liquide  se  décolorait.  Ce 
précipité  rouge  fut  dissous  dans  l'eau.  En  faisant  évaporer 
cette  solution  au-dessus  d'une  lampe  de  Bunsen  jusqu'à  la  moitié 


H.  HARTOGH  HEYS  VAN  ZOUTEVEEN.  SUR  LA  SYNTHESE    241 

de  son  volume,  elle  se  décolora  en  répandant  des  vapeurs  de 
sulfure  de  carbone  et  de  sulfure  d'ammonium,  tandis  qu'un  peu 
de  soufre  se  déposa.  Ce  qui  restait,  était  une  solution  de  sulfo 
cyanate  d'ammonium ,  très  reconnaissable  à  sa  réaction  sur  le 
chlorure  de  fer.  La  réaction  du  sulfure  de  carbone  sur  l'ammo- 
niaque gazeuse  avait  donc  été  la  suivante.  D'abord  ils  s'étaient 
unis  en  formant  du  sulfocarbaminate  d'ammonium  : 

0^2  -h2NH,=:CâNH,  (iSIH^)^,   tout  comme 
aOS-h2NH3=OSNH,  (NHJQ. 
Le  sulfocarbaminate  d'ammonium  s'était  partagé,  par  l'action  de 
la  chaleur  sur  sa  dissolution   aqueuse,    en    sulfure    de    carbone, 
sulfure  d'ammonium  et  sulfocyanate  d'ammonium: 

2eSNH,(NH,)S=GS,+(NH,),S+  ^^[^ 

Je  crois  que  cette  méthode  de  synthèse  du  sulfocyanate 
d'ammonium  (corps  organique,  contenant  de  l'azote  et  faisant 
partie  de  la  salive  de  plusieurs  animaux)  est  nouvelle. 

On  pourrait  aussi  se  figurer  la  réaction  comme  il  suit.  D'abord 
le  sulfure  de  carbone  et  l'ammoniaque  forment  ensemble  du  sulfo- 
carbouate  d'ammonium  et  de  la  sulfocarbamide  : 

0§     \  ^^1 


20S,+4NH3=^^  HJ,r^  +  ^M.^ 


2  ? 


H, 


tout  comme  l'acide  carbonique  forme  avec  l'ammoniaque  gazeuse 
du  carbonate  d'ammoniaque  et  de  la  carbamide  : 

GO      /  ^^j 

2GQ,  -h4NH3=  .^  g  .    JO,  +H,    N,. 

En  faisant  bouillir  ce  mélange,  le  sulfocarbonate  d'ammonium 
se  décompose ,  et  il  ne  reste  que  de  la  sulfocarbamide ,  qui  n'est 
autre  que  le  sulfocyanate  d'ammonium,  car: 

h/      

Archives  Néerlandaises,  T.  V.  16 


OBSERVATIONS 

SUR  LA  MACHINE  ÉLECTRIQUE  HE  HOLTZ, 

PAR 
V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN. 


1.  Les  observations  que  j'ai  à  communiquer  sur  la  machine  de 
Holtz^  bien  que  n'ayant  peut-être  pas  une  grande  importance ,  ne 
sont  pourtant  pas,  me  semble-t-il^  tout  à  fait  dépourvues  d'intérêt. 
Je  me  suis  servi  pour  mes  expériences  d'une  machine  dite  à  quatre 
éléments,  construite  par  Borchardt,  d'après  le  modèle  décrit  et 
figuré  dans  les  Annales  de  Poggendorff,  tome  CXXVII;  p.  320. 
Il  est  connu  que  lorsqu'on  éloigne  les  conducteurs  l'un  de  l'autre 
à  une  distance  assez  grande  pour  que  l'étincelle  cesse  de  jaillir 
entre  eux ,  et  qu'ensuite  on  les  rapproche  de  nouveau ,  le  courant 
se  trouve  ordinairement  renversé;  d'un  autre  côté,  la  manière 
dont  les  éléments  en  papier  sont  continuellement  alimentés  n'est 
pas  toujours  expliquée  d'une  manière  satisfaisante.  Ce  sont  sur- 
tout ces  deux  points  que  je  me  propose  d'élucider. 

2.  D'abord  je  demanderai  qu'on  se  débarrasse  entièrement  de 
toutes  les  notions  plus  ou  moins  claires  de  courants  de  charge  et 
de  décharge ,  et  de  deux  courants  positifs  et  deux  négatifs  qui  se 
mouvraient  simultanément  dans  le  conducteur.  L'explication  de 
l'appareil  et  de  son  mode  de  fonctionnement  n'a  réellement  pas 
besoin  d'être  aussi  compliquée.  Je  m'en  tiendrai  simplement  aux 
termes  et  aux  idées  qui  ont  cours  relativement  à  l'électricité  posi- 
tive et  négative  et  à  l'influence  ou  induction. 

Lorsque  la  lame  d'ébonite  frottée  est  tenue  exactement  devant 
l'ouverture,  on  observe,  en  faisant  tourner  la  machine ,  de  petites 
étincelles  qui  se  succèdent  entre  les  conducteurs,  mais  la  charge 
n'augmente  pas;  le  phénomène  persiste  aussi  longtemps  que  la 
plaque  d'ébonite  conserve  de  l'électricité.  Cette  plaque,  en  effet, 
remplit  ici  tout  à  fait  le  rôle  d'un  élément  de  papier;  seulement, 


V.    s.    31.    VAN    DER    WILLIGEN.    OBSERVATIONS,    ETC.  243 

comme   elle  n'est  pas  alimentée,  sa  tension  s'affaiblit  peu  à  peu 
par  l'influence  de  l'air,  etc. ,  et ,  par  suite ,  l'action  finit  par  s'arrêter. 

Lorsque  la  lame  d'ébonite  est  placée  devant  l'élément  de  papier , 
ou  même  en  contact  avec  lui,  l'électricité  négative  de  la  lame 
dissimule  l'électricité  positive  du  papier,  tandis  qu'elle  repousse 
l'électricité  négative  mise  en  liberté;  celle-ci,  ne  pouvant,  à  travers 
le  papier ,  se  frayer  facilement  un  chemin  au  dehors ,  se  porte  sur 
le  verre  du  disque  fixe,  et,  y  pénétrant  de  plus  en  plus  profon- 
dément, elle  exerce  à  son  tour  de  l'influence  sur  le  disque 
tournant,  dont  elle  dissimule  l'électricité  positive  et  refoule 
l'électricité  négative,  qui  s'écoule  dans  le  conducteur.  Le  plateau 
doit  déjà  être  en  mouvement  avant  qu'on  applique  la  lame 
d'ébonite,  car,  sans  cela,  l'électricité  positive  de  ce  plateau  ne 
tarderait  pas  à  se  combiner ,  à  travers  la  mince  couche  d'air , 
avec  l'électricité  négative  devenue  libre  sur  le  papier. 

11  y  a,  naturellement,  un  grand  avantage  à  rendre  les  deux 
disques  très  voisins  l'un  de  l'autre,  et  même  on  peut  hardiment 
replier  les  pointes  de  carton  en  dedans ,  de  façon  qu'elles  touchent  le 
plateau  tournant.  M.  Holtz  recommande  seulement  de  rapprocher  ces 
pointes  autant  que  possible  du  disque  mobile,  mais  je  me  suis  toujours 
bien  trouvé  de  les  laisser  traîner  littéralement  à  la  surface  de  ce  disque. 

Aussitôt  que  le  segment  du  disque  tournant  échappe  à  l'influ- 
ence du  premier  élément  de  papier ,  l'électricité  positive  qui  y  était 
dissimulée  devient  libre,  et,  pour  autant  qu'elle  se  trouve  à  la 
face  interne  du  segment,  elle  passe,  par  la  pointe  traînante  du 
second  élément,  dans  le  papier;  celle  qui  se  trouve  à  la  face 
externe  du  verre  est  recueillie  par  le  conducteur. 

De  cette  manière ,  le  second  élément  est  chargé  à  son  tour  ;  le 
papier  agit  par  influence,  à  travers  le  verre  du  disque  fixe ,  sur  le 
plateau  tournant,  c'est-à-dire,  qu'il  y  dissimule  de  l'électricité  négative 
et  chasse  une  nouvelle  quantité  d'électricité  positive  dans  le  conducteur. 

L'électricité  négative,  dissimulée  pendant  un  instant,  devient 
libre  dès  que  la  partie  du  disque  mobile  sur  laquelle  elle  se  trouve 
est  soustraite  à  l'influence  du  second  élément;  cette  électricité 
va  alors  charger  négativement  le  troisième  élément. 

16* 


244  V.    s.    M.    VAN    DER    WILLIGEN.    OBSERVATIONS 

Par  une  action  tout  à  fait  analogue,  le  troisième  élément  com- 
munique une  charge  positive  au  quatrième,  et  de  cette  manière, 
en  un  temps  très  court,  les  quatre  armatures  de  papier  sont 
chargées  alternativement  d'électricité  négative  et  d'électricité  posi- 
tive, et  l'appareil  est  prêt  à  fonctionner.  A  mesure  qu'on  tourne 
plus  rapidement ,  le  même  segment  du  disque  mobile  passera ,  dans 
le  même  temps ,  de  plus  en  plus  fréquemment  devant  les  éléments 
de  papier  et  les  peignes  des  conducteurs  ;  mais ,  d'un  autre  côté , 
il  restera  à  l'électricité  momentanément  dissimulée  sur  le  plateau 
tournant  de  moins  en  moins  de  temps  pour  se  porter ,  à  travers  la 
couche  d'air,  sur  l'électricité  contraire  des  papiers.  A  mesure  que 
la  tension  s'élève  dans  l'appareil,  j'attends  donc  moins  d'avantages 
d'un  très  grand  rapprochement  des  deux  disques,  vu  que  par 
là  ce  transport  devient  de  plus  en  plus  facile. 

Une  preuve  de  la  réalité  de  l'explication  précédente ,  c'est  que ,  ait 
bout  de  très  peu  de  temps,  on  peut  recueillir,  à  l'aide  du  plan 
d'épreuve,  de  l'électricité  positive  sur  tout  le  quadrant  du  disque 
mobile  venant  à  la  suite  d'un  conducteur  qui  a  soutiré  de  l'élec- 
tricité négative.  De  même,  sur  les  quadrants  qui  se  trouvent 
derrière  un  peigne  positif,  on  recueille  partout  de  l'électricité  libre 
négative,  jusque  tout  près  de  ce  peigne  lui-même. 

Notre  manière  de  voir  est  aussi  confirmée  par  les  phénomènes 
lumineux  qu'on  observe  dans  l'obscurité.  En  effet,  on  trouve  des 
aigrettes  positives  aux  pointes  des  conducteurs  qui,  selon  cette 
manière  de  voir,  sont  censés  soutirer  de  l'électricité  négative;  une 
pareille  aigrette  positive  se  voit  aussi  à  la  pointe  de  carton  qui 
termine  le  premier  élément  de  papier,  celui  qu'on  charge  direc- 
tement. Lorsque  l'élément  de  papier,  où  l'électricité  se  meut  avec 
tant  de  peine ,  acquiert  une  charge  suffisamment  forte ,  on  finit  par 
voir  de  temps  en  temps  au  côté  opposé ,  là  où  le  carton  est  à  bord 
arrondi ,  une  auréole  négative ,  dirigée ,  comme  le  montre  l'aigrette 
positive  qui  s'y  rattache ,  vers  les  pointes  du  conducteur  ;  cela  prouve 
qu'il  s'échappe  dans  ce  cas  de  l'électricité  négative  ,  qui  se  combine 
avec  l'électricité  positive  devenue  subitement  libre  en  face  des  peig- 
nes. On  constate  donc  réellement  ici  l'effet  nuisible  dont  j'ai  parlé  plus 


SUR  LA  MACHINE  ÉLECTRIQUE  DE  HOLTZ.  245 

haut,  savoir,  le  transport  à  travers  Tair  de  l'électricité  accumulée. 

3.  Naturellement,  l'électricité  positive  de  deux  des  bras  du  conduc- 
teur s'écoule  continuellement  vers  l'électricité  négative  des  deux  autres 
bras;  mais  je  ne  vois  aucune  raison,  comme  je  l'ai  dit,  d'obscurcir  cette 
notion  si  simple  par  l'admission  de  courants  de  charge  et  de  décharge. 

Il  est  facile  de  comprendre  maintenant  comment  le  courant 
peut  se  renverser  dans  le  conducteur,  d'une  manière  en  apparence 
tout  à  fait  capricieuse.  Ce  renversement  se  produira  aussitôt  —  mais 
seulement  alors  —  qu'un  quadrant  du  plateau  passera  du  peigne 
A  au  peigne  B  avec  de  l'électricité  libre  négative ,  au  lieu  de  passer 
avec  de  l'électricité  positive;  ou  vice-versâ.  Or,  cela  arrive  dès 
que  les  conducteurs  sont  écartés  suffisamment  pour  que  l'étincelle 
ne  puisse  plus  jaillir  de  l'un  à  l'autre;  l'électricité,  tant  positive 
que  négative,  déjà  recueillie  se  rejette  alors  sur  le  verre,  et  un 
quadrant  déterminé,  au  lieu  de  continuer  à  tourner  avec  de  l'élec- 
tricité libre  négative,  tourne  avec  l'électricité  libre  positive  reçue 
du  conducteur;  ou  réciproquement.  J'ai  pu  très  bien  observer  ce 
phénomène  avec  une  jolie  machine  à  deux  éléments ,  construite  par 
Ruhmkorff  et  appartenant  à  mon  ami  M.  Hanekuik;  lorsque  j'écar- 
tais les  conducteurs  au-delà  de  la  distance  explosive,  et  que  je 
faisais  continuer  la  rotation  de  l'appareil,  j'entendais  immédiatement 
le  bruit  crépitant  de  la  décharge  sur  le  verre;  mais  lorsque  je 
faisais  arrêter  brusquement,  je  prévenais  l'excès  de  tension  et  la 
décharge  sur  le  verre  et  je  ne  percevais  plus  aucun  bruit. 

Le  moyeu  indiqué  par  M.  Holtz  (Poggendorff's  Annalen,  T.  CXXX, 
p.  171)  pour  empêcher  ce  renversement  spontané  du  courant,  moyen 
appliqué  aujourd'hui  dans  la  construction  des  machines  de  Borchardt, 
consiste  simplement  dans  l'emploi  d'un  conducteur  secondaire  à  peig- 
nes, qui  donne  aux  électricités  repoussées  l'occasion  de  se  réunir  très  faci- 
lement, avant  que  la  rotation  les  ait  amenées  devant  l'élément  suivant* 

4.  Avec  mon  appareil  à  quatre  éléments,  j'ai  un  moyen  très 
simple  de  renverser  le  courant  aussi  souvent  que  je  le  désire, 
tout  en  maintenant  les  conducteurs  à  la  distance  ordinaire.  Je  n'ai 
besoin  pour  cela  que  de  tourner  un  instant  le  plateau  à  contre- 
gens;  aussitôt  que  je  me  remets  alors  à  tourner  dans  le  sens  habi- 


246  V.    s.    M.    VAi\    DER    WILLIGEN.    OBSERVATIONS 

tnel;   je    trouve   le  courant  renversé;  en  peu  de  minutes  je  puis 
ainsi  produire  l'inversion  un  grand  nombre  de  fois. 

L'explication  est  facile:  un  papier  à  charge  négative  met  de 
l'électricité  positive  en  liberté  sur  le  plateau  tournant  ;  au  lieu  de 
laisser  celle-ci  s'écouler,  comme  d'habitude^  sur  les  peignes  des 
conducteurs,  je  la  fais  rétrograder  et  la  transporte,  en  partie  sur 
la  branche  immédiatement  précédente  du  conducteur,  en  partie 
sur  l'élément  de  papier  immédiatement  précédent,  élément  dont  la 
pointe  traîne  sur  la  face  interne  du  plateau;  en  un  instant,  cet 
élément,  qui  jusqu'alors  avait  une  charge  positive,  est  chargé  néga- 
tivement. De  cette  manière,  les  charges  de  tous  les  éléments  se 
trouvent  renversées  simultanément;  la  partie  de  l'électricité,  qui  s'est 
portée  sur  le  conducteur,  contribue  à  l'action,  en  ce  qu'elle  rend  libre 
de  Télectricité  positive  pour  le  second  élément  précédent.  Si  l'on  recom- 
mence alors  à  tourner  dans  le  sens  normal ,  le  courant  est  renversé. 
La  seule  précaution  à  observer  est  de  ne  pas  prolonger  assez  long- 
temps la  rotation  à  rebours  pour  que  toute  l'électricité  libre  se  perde. 

5.  Lorsqu'on  présente  le  doigt  ou  un  fil  de  cuivre  à  la  fenêtre 
d'un  des  éléments,  et  qu'on  le  rapproche  de  plus  en  plus  de  la 
face  interne  du  plateau  tournant,  le  bout  du  doigt  ou  la  pointe 
du  fil  deviennent  fortement  lumineux,  preuve  qu'ils  s'emparent 
aussi  d'une  partie  de  l'électricité  dégagée.  Si  le  peigne  placé  vis- 
à-vis  du  doigt,  de  l'autre  côté  du  plateau,  recueille  de  l'électricité 
négative,  il  est  clair  que  l'électricité  qui  s'écoule  dans  le  doigt 
doit  aussi  être  négative;  et,  en  effet,  on  voit  alors  une  aigrette 
positive  jaillir  du  doigt.  Les  dents  du  peigne,  la  pointe  du  bord  en 
carton  de  l'élément  de  papier,  et  l'extrémité  du  doigt  ou  du  fil  de 
cuivre  qu'on  tient,  à  côté  de  la  pointe  en  carton ,  près  du  plateau 
tournant ,  toutes  montrent  à  la  fois  des  aigrettes  positives.  Il  ne  me 
paraissait  pas  bien  évident  que  l'électricité  soutirée  par  le  doigt  dût 
entrer  en  défalcation  de  celle  que  reçoit  le  conducteur ,  car ,  pour 
arriver  jusqu'aux  peignes,  elle  aurait  à  traverser  d'abord  toute 
l'épaisseur  du  verre;  d'un  autre  côté,  M.  leDr.  Kayser,  de  Leyde, 
construit  des  machines  composées  d'un  disque  fixe  et  de  deux  disques 
tournants,  et  il  obtient  ainsi  une  action  beaucoup  plus  intense.  Je 


SUK    LA    iMACHINE    ÉLECTRIQUE    DE    HOLTZ.  247 

pensai,  d'après  cela,  qu'on  parviendrait  peut-être  à  augmentera 
quantité  d'électricité  recueillie  en  transportant  aussi  sur  le  conducteur 
l'électricité  de  la  face  interne  du  plateau.  Je  fis  donc  construire  quatre 
branches  courbes  et  creuses ,  qui  pouvaient  s'adapter  aux  cylindres  à 
peignes  du  conducteur  malgré  la  présence  des  dents ,  ces  branches 
étant  fendues  dans  toute  l'étendue  nécessaire;  au-delà,  elles  pas- 
saient librement  par  dessus  le  bord  des  disques  et  arrivaient ,  par 
une  partie  droite,  juste  en  face  des  fenêtres  des  éléments ,  où  elles 
étaient  garnies  de  peignes.  Par  cette  disposition  Je  recueillais  réel- 
lement  sur  le  conducteur  l'électricité  de  la  face  interne  et  de  la 
face  externe   du   plateau;    mais,    à   ma  grande  surprise,  si  une 
ou   deux   branches    n'exerçaient   pas  beaucoup  d'influence,  l'effet 
se   trouvait   prodigieusement   affaibli   quand   on  faisait  usage  des 
quatre  branches   à   la   fois.    Je   m'étais   donc   fourvoyé,    et   mon 
essai  avait  échoué,  pour  la  raison ,  facile  à  reconnaître  à  posteriori , 
que  j'avais  privé  les  éléments  de  papier  et  leurs  pointes  en  carton 
de   l'alimentation   nécessaire,    détournée  au  profit  du  conducteur. 
Cette  tentative  infructueuse  m'a  pourtant  appris  quelque  chose. 
Je   voulais   essayer   encore   une  fois  de  renverser  le  courant,  en 
tournant  la  manivelle  en  sens  contraire,  mais  il  me  fut  impossible 
d'y  parvenir,  bien  que,  peu  de  semaines  auparavant,  j'eusse  répété 
la  même   expérience    avec  succès  des  centaines  de  fois  peut-être. 
Je   remarquai   alors   qu'une   des   branches   recourbées  était  restée 
adaptée  au  conducteur;  or,  cette  branche  avait  recueilli  en  faveur 
du   conducteur   l'électricité   contraire  qui  arrivait  en  ce  point,  et 
avait  ainsi  préservé  de  son  action  la  pointe  en  carton  voisine  ;  un 
élément  de  papier,  au  moins,  avait  donc  conservé  sa  charge  nor- 
male, et,  aussitôt  que  la  rotation  reprenait  son  sens  habituel,  le 
courant  ne  tardait  pas  à  se  rétablir  dans  son  intensité  primitive. 
Toutes   les   machines  électriques  de  Borchardt  sont  soumises  à 
une  épreuve  avant  d'être  livrées;  la  mienne  a  certainement  atteint 
entre  mes  mains  la  force  qu'on  lui  avait  trouvée  a  Berlin,  ce  qu'on  peut 
inférer  de  la  circonstance  que  j'ai  déjà  perforé  et  brisé,  dans  le  cours  de 
mes  recherches,  le  condensateur  en  bâton  qui  accompagnait  l'appareil. 


SUR   LE 

DOSAGE  VOLUMÉTlIiaUE  DU  PEli 

PAR  L'MYPOSULFITE  DE  SOUDE, 

PAR 

A.  C.  OUDEMANS  Jr. 


Il  y  a  trois  ans  environ,  ys^ii^YOï^oBé  {Zeitsclirift  fur  analylische 
Chemiej  VI,  129;  Archives  Néerlandaises,  ÏY,  55)  une  méthode 
de  dosage  du  fer  dans  les  sels  ferriqiies,  méthode  fondée  sur  ce 
que  ces  sels,  en  présence  d'une  petite  quantité  d'un  sel  cuivrique, 
subissent,  sous  l'influence  de  l'hyposulfite  de  soude,  une  réduc- 
tion facile  et  rapide,  dont  la  fin  est  indiquée  par  la  disparition 
de  la  coloration  communiquée  à  la  liqueur  par  une  addition  de 
rhodanure  de  potassium. 

Dans  la  troisième  édition  de  son  Lehrbuch  der  chemisch- 
anahjtischen  Tilrirmelhode,  M.  F.  Mohr  vient  de  soumettre  cette 
méthode  à  une  critique,  dont  la  conclusion  est  qu'elle  ne  peut 
rendre  aucun  service. 

Je  ne  puis  garder  le  silence  sur  cette  appréciation,  d'une 
part,  parce  que  je  ne  veux  pas  laisser  croire  que  j'accepte  la 
condamnation  prononcée  par  M.  Mohr,  et,  d'autre  part,  parce 
que  les  raisons  qu'il  invoque  sont  en  grande  partie  dénuées  de 
tout  fondement  et  fournissent  la  preuve  qu'il  n'a  pas  lu  ou  n'a 
lu  que  très  superficiellement  mon  Mémoire  original  et,  en  tout 
cas,  qu'il  n'a  pas  compris  le  principe  sur  lequel  la  méthode 
repose. 


A.  C.  OUDEMANS  JR.  SUR  LE  DOSAGE  VOLUMETRIQUE  ETC.  249 

„J'ai  trouvé  cette  méthode",  ainsi  commence  la  critique  de 
M.  Mohr  (/.  c.  p.  291),  „tout  à  fait  impropre,  car,  vers  la  fin, 
la  liqueur  est  toujours  troublée  par  un  précipité  de  rbodanure 
cuivreux,  qui  ne  permet  plus  de  rien  distinguer.  Si,  en  dépit 
du  précipité,  on  enlève  par  Thyposulfite  de  soude  toute  trace 
de  coloration,  et  qu'on  ajoute  alors  encore  quelques  gouttes  de 
solution  cuivrique,  le  précipité  augmente  considérablement  et  la 
couleur  rouge  du  rbodanure  de  fer  se  montre  de  nouveau.  La 
quantité  d'byposulfite  nécessaire  dépend  donc  de  la  quantité  de 
vitriol  de  cuivre  qu'on  a  ajoutée." 

Ce  que  M.  Mobr  avance  dans  la  première  phrase  de  ce  passage 
n'est  pas  tout  à  fait  exact.  Lorsque  dans  l'addition  du  rbodanure 
de  potassium  et  du  sel  de  cuivre  on  dépasse  certaines  limites, 
il  se  forme  en  effet  toujours  un  précipité;  mais  lorsque  la  quantité 
d'un  de  ces  deux  réactifs  n'est  que  très  petite,  la  liqueur  reste 
claire,  et  sa  coloration,  de  plus  en  plus  affaiblie  à  mesure  de 
l'arrivée  de  l'byposulfite  de  soude,  finit  par  s'effacer  complète- 
ment. Dans  mon  Mémoire  j'avais  recommandé  d'ajouter  à  la  disso- 
lution férrique  acide  une  ou  deux  gouttes  d'une  solution  assez 
concentrée  de  vitriol  de  cuivre  et  2 — 5  CC.  d'une  solution  à  1  p.  c. 
de  rbodanure  de  potassium.  J'avais  fait  de  cette  manière  un 
grand  nombre  d'analyses,  dont  les  résultats  laissaient  peu  de 
chose  à  désirer  ^). 

Postérieurement,  j'ai  trouvé  qu'il  valait  mieux  employer  un  peu 
plus  de  sel  de  cuivre  et,  par  contre,  beaucoup  moins  de  rbodanure 
de  potassium.  Comme  la  réussite  de  l'expérience  dépend  des  quan- 
tités des  réactifs  ajoutés,  je  crois  qu'il  ne  sera  pas  inutile  de 
donner  à  ce  sujet  des  indications  précises.  J'ajoute  à  la  dissolution 
férrique,  peu  importe  qu'elle  soit  plus  ou  moins  concentrée,  3  CC. 


')  Comme  contre-partie  de  la  critique  donnée  par  M.  Mohr,  je  me  permettrai 
de  citer  ici  un  Mémoire  de  M.  C.  Balling  {Oesterreich.  Zeitschr.  f.  Berg-  mid 
llïdtenwe^:en .  1869,  No.  19;  Dingler's  Fol.  Journ.,  t.  192,  p.  410;  Fresenius, 
Zeitschr.  f.  analyt.  Chemie ,  t.  IX,  p.  99),  dans  lequel  ce  savant  exprime  sa 
satisfaction  au  sujet  de  ma  méthode  et  déclare  qu'elle  ne  lui  a  pas  fait  com- 
mettre d'erreurs  plus  grandes  que  0,8  p.  c, 


250     A.  C,  OUDEMANS  JR.  SUR  LE  DOSAGE  VOLUMETRIQUE 

d'une  solution  de  vitriol  de  cuivre  à  1  p.  c.,  puis  2  CC.  d'acide 
chlorhydrique  concentré ,  et  enfin  ^  pour  chaque  100  CC.  de  liqueur 
ferrique,  1  CC.  de  solution  de  rliodanure  de  potassium  (1  p.  c). 
L'acide  chlorhydrique  libre ^  bien  loin  de  nuire,  exerce  plutôt 
une  influence  favorable  sur  la  réaction,  à  condition  seulement 
qu'on  n'élève  pas  trop  la  température.  Il  s'oppose  en  outre  à  la 
formation  du  rhodanure  de  cuivre. 

J'ai  reconnu  aussi  qu'il  est  bon  de  ne  pas  étendre  des  disso- 
lutions concentrées  (pourvu  qu'elles  ne  renferment  pas  un  trop 
grand  excès  d'acide  libre),  mais  d'y  laisser  couler  immédiatement? 
après  l'addition  de  KRn  et  Cu  SO4,  la  solution  d'hyposulfite, 
d'abord  sous  forme  de  filet ,  ensuite  goutte  à  goutte  ;  pendant  cette 
opération  la  liqueur  doit  être  maintenue  constamment  en  agitation. 

Pour  ce  qui  est  maintenant  de  l'assertion  contenue  dans  la 
2e  et  la  3e  phrase  du  passage  cité  de  M.  Mohr,  j'y  donne  mon 
plein  acquiescement.  Dès  qu'il  se  forme  un  précipité,  Fessai  est 
perdu;  mais  c'est  précisément  à  prévenir  cette  formation 
qu'on  doit  s'appliquer.  Or  rien  n'est  plus  facile,  comme  chacun 
pourra  s'en  assurer,  s'il  consent  à  suivre  fidèlement  la  marche 
prescrite  ci-dessus. 

Mais,  écoutons  de  nouveau  M.  Mohr: 

„ Cette  méthode  est  réellement  la  première  où  l'on  propose  de 
faire  intervenir  deux  indicateurs.  Toutefois,  le  sulfate  de  cuivre 
n'est  pas  un  indicateur  proprement  dit;  il  joue  lui-même  un  rôle 
dans  la  décomposition  et  détruit  une  partie  de  l'hyposulfite  de 
soude ,  laquelle  est  ensuite  portée  au  compte  de  l'oxyde  de  fer. 
Lorsqu'on  mêle  du  sulfate  de  cuivre  et  de  l'hyposulfite  de  soude, 
qu'on  chauffe  légèrement,  puis  qu'on  ajoute  du  rhodanure  de  potas- 
sium, on  obtient  le  précipité  gris-bleuâtre  semblable  par  l'aspect 
à  l'iodure  de  cuivre.  Il  va  sans  dire  qu'une  partie  de  l'hyposulfite 
a  été  employée  à  la  production  de  ce  précipité;  or  c'est  là  un 
défaut  dans  un  indicateur." 

Les  phénomènes  dont  il  est  question  dans  les  deux  dernières 
phrases  sont  trop  connus  pour  qu'il  y  ait  lieu  de  s'y  arrêter.  Mais 
M.  Mohr  les  met,  bien  à  tort,  en  rapport  avec  la  réaction  fonda- 


DU    FER    PAR    l'hYPOSULFITE    DE    SOUDE.  251 

mentale  de  ma  méthode,  et  il  donne  une  idée  tout  à  fait  fausse 
de  ce  que  je  me  suis  proposé  et  de  ce  que  j'ai  écrit. 

En  effet,  ce  n'est  pas  comme  indicateur  que  j'emploie  le  sel 
de  cuivre ,  mais  comme  moyen  d'accélérer  la  réduction  du  sel  de 
fer  par  Thyposulfite.  Le  rhodanure  de  potassium  seul  est  ici  indi- 
cateur; le  sel  de  cuivre,  qui  est  transformé  alternativement  en 
sel  cuivreux  sous  l'influence  de  l'hyposulfite  et  en  sel  cuivrique 
sous  l'influence  du  sel  ferrique,  joue  un  rôle  analogue  à  celui 
des  matières  dites  de  contact  (Fresenius,  ZeilschriftYI,  p.  131 — 131). 

L'assertion  de  M.  Mohr,  que  le  sel  de  cuivre  décompose  une 
partie  de  l'hyposulfite,  est  tout  à  fait  inexacte;  car,  lorsque  le 
dosage  est  terminé  et  qu'on  a  ajouté  tout  juste  assez  d'hyposulfite 
pour  décolorer  entièrement  le  liquide,  mais  rien  de  plus,  le  sel 
de  cuivre  se  trouve  finalement  dans  la  liqueur  à  l'état  de  com- 
binaison cuivrique.  Si  alors  on  ajoute  encore  plus  de  réactif,  il 
commence  à  se  former  du  sel  cuivreux  qui  persiste  comme  tel ,  et 
cela  parce  qu'il  ne  rencontre  plus  de  matières  capables  de  le  trans- 
former en  combinaison  cuivrique. 

Tout  cela  avait  déjà  été  dit  en  1867  (Zeitschr.  f.  anal.  Chem. , 
VI,  p.  131  et  suiv.),  mais  il  fallait  bien  l'exposer  encore  une 
fois  ici,  avec  plus  de  détails,  puisqu'il  paraît  que  ma  première 
explication  n'était  pas  suffisamment  claire  ou  du  moins  n'a  pas 
été  comprise  par  M.  Mohr.  Mais  peut-être  est-ce  moi  qui  n'ai  pas 
bien  saisi  l'idée  de  M.  Mohr;  peut-être  pense-t-il  que  l'hyposulfite  réduit 
d'abord  d'une  manière  permanente  le  sel  de  cuivre  ajouté,  et 
ensuite  seulement  le  sel  de  fer.  Tel  toutefois  ne  peut  être  le  cas , 
comme  il  résulte  suffisamment  de  tout  ce  que  nous  savons  au  sujet 
de  l'action  que  les  dissolutions  acides  de  sels  d'oxydule  de  cuivre 
exercent  sur  les  dissolutions  de  sels  de  peroxyde  de  fer  ;  cette  action , 
pour  la  résumer  en  peu  de  mots,  consiste  eu  ce  que  les  sels 
ferriques  sont  réduits  par  les  sels  cuivreux  suivant  la  formule 
générale 

Cu,  Ro  +  Fe,  Re  ~  2  (Cu  R,)  -h  (Fe  R,  : , 
aussi  longtemps  que  manquent  les   conditions  nécessaires  pour  la 


252  A.    C.    OUDEMANS    JR.    SUR    LE    DOSAGE    VOLUMETRIQUE 

formation  d'un  composé  cuivreux  insoluble.  La  nature  de  ces  con- 
ditions ne  saurait  être  indiquée  d'un  seul  mot;  mais  il  est  certain 
qu'elles  dépendent  de  la  concentration  des  liquides ,  de  la  présence 
ou  de  l'absence  d'acides  libres,  etc. 

La  fausseté  de  l'hypothèse  émise  ci  dessus  ressort  d'ailleurs  encore 

des  faits  suivants: 

1»  La  quantité  plus  ou  moins  grande  du  sulfate  de  cuivre  ne 
change  rien  (pourvu  qu'il  ne  se  forme  pas  de  précipité  de 
rhodanure  de  cuivre)  à  la  quantité  d'hyposnlfite  qu'exige  la  déco- 
loration d'une  quantité  déterminée  de  combinaison  fernque  addi- 
tionnée de  rhodanure  de  potassium. 

2»  La  détermination  du  fer  dans  une  dissolution  exempte  de 
cuivre  par  le  procédé  de  M.  Mohr  (chauffer  avec  Kl  et  doser 
par  l'hyposumte  l'iode  mis  en  liberté)  fournit  des  résultats  par- 
faitement d'accord  avec  ceux  que  donne  nw.  méthode,  appliquée 
à  la  même  solution  ferrique,  avec  addition  de  quantités  mnaft/e. 
de  sulfate  de  cuivre;  or,  cela  serait  impossible  si  le  sel  de  cuivre 
exerçait  une  influence  perturbatrice. 

M.  Mohr  termine  sa  critique  par  les  mots  suivants  : 
Du  reste,  la  modification  proposée  ne  répond  à  aucun  besoin , 
puisqu'il  existe  déjà  des  méthodes  beaucoup  plus  précises.  La 
difficulté  de  saisir  la  fin  de  l'opération  est  bien  plus  grande 
dans  le  procédé  de  M.  Oudemans  que  dans  tous  les  autres. 
L'auteur  recommande,  il  est  vrai,  de  n'employer  qu'une  petite 
quantité  de  solution  cuivrique,  mais  comme,  d'un  autre  cote 
il  ignore  combien  d'oxyde  de  fer  se  trouve  dans  la  liqueur,  U 
introduit  dans  le  travail  un  élément  tout  à  fait  arbitraire. 

Après  ce  qui  a  été  dit  plus  haut,  il  sera  inutile  d'insister  sur 
le  peu  de  fondement  de  la  dernière  de  ces  assertions. 

Il  ne  me  reste  donc  qu'à  répondre  au  reproche  contenu  dans  les 
deux  premières  phrases  de  ce  passage. 

Je  reconnais  volontiers  qu'on  possède  des  méthodes  très-exactes 

pour  la  détermination  du  fer  dans  les  sels  de  peroxyde;  mais  a 

nl„part  sont  d'une  exécution  trop  longue.  La  réduction  des   sels 

érriques  par  le  zinc  (pour  pouvoir  titrer  ensuite  par  le  caméléon) 


DU    FER    PAR    l'hYPOSULFITE    DE    SOUDE.  253 

demande  beaucoup  de  temps  ;  le  dosage  par  la  méthode  de  M.  Mohr 
exige,  selon  les  prescriptions  données  par  l'auteur,  J-  heure,  et  ou  n'est 
jamais  sûr  qu'après  ce  temps  la  réduction  est  e/î^/èreme?/Y  achevée  ; 
la  détermination  par  le  bichromate  de  potasse  (après  une  réduction 
fastidieuse)  est  désagréable,  parce  que  le  liquide  reste  coloré  et 
qu'on  ne  peut  arriver  à  connaître  la  fin  de  la  réaction  que  par 
l'essai  d'une  goutte  de  la  liqueur  par  le  ferricyanure  de  potas- 
sium; la  réduction  des  sels  de  peroxyde  de  fer  par  le  bichlo- 
rure  d'étain  prend  de  nouveau  un  temps  considérable ,  vu  que  le 
réactif  doit  être  ajouté  peu  à  peu  au  liquide  bouillant  et  qu'il 
faut  toujours  déterminer  préalablement  le  titre  de  ce  réactif. 

A  ces  griefs  on  peut  encore  ajouter  que,  dans  la  méthode  de 
M.  Marguerite,  l'opérateur  dépend  de  la  pureté  du  zinc  employé 
à  la  réduction ,  et  que  la  solution  réduite  doit  ordinairement  être 
filtrée  pour  séparer  un  résidu  de  carbone  ou  de  métal  (plomb 
provenant  du  zinc,  etc.),  ce  qui  donne  de  nouveau  occasion  à 
la  production  de  sel  ferrique;  —  que,  dans  la  méthode  de 
M.  Mohr,  l'exactitude  du  résultat  dépend  de  la  pureté  de  l'iodure 
de  potassium  employé;  que  le  poids  atomique  du  chrome  et  par 
conséquent  aussi  le  poids  moléculaire  du  bichromate  de  potasse 
sont  incertains,  etc. 

Les  défauts  que  je  viens  de  signaler  dans  les  méthodes  connues 
pour  la  détermination  du  fer  dans  les  sels  de  peroxyde,  sont 
assez  sensibles  pour  que  personne  ne  soit  surpris  que  j'aie  cherché 
un  procédé  commode,  permettant  d'exécuter  en  peu  de  temps  un 
grand  nombre  de  dosages  du  fer.  Je  croyais  avoir  découvert 
ce  procédé  dans  la  réaction  de  l'hyposulfite  de  soude  sur  les 
sels  de  peroxyde  de  fer,  lorsque  je  reconnus  que  j'avais  été 
devancé,  et  que  MM.  Scherer,  Landolt  et  Kremer  s'étaient  déjà 
servis  de  l'hyposulfite  dans  le  même  but. 

En  étudiant  les  phénomènes  qui  se  passent  dans  l'action  de 
l'hyposulfite  de  soude  sur  les  sels  de  peroxyde  de  fer,  je  remar- 
quai par  hasard  que  la  réduction  de  ces  sels  était  singulièrement 
accélérée  par  la  présence  des  sels  de  cuivre,  et  c'est  ainsi  que 
je  fus  conduit  à  adopter  la  méthode  communiquée  primitivement 


254  A.    C.    OUDEMANS.    .IR.    SÛR    LE    DOSAGE    VOLUMETRTQIIE 

dans  le  Zeilsclirifl  f.  anal.  Chemiej  méthode  qui  m'a  toujours 
donné  des  résultats  très  satisfaisants  et  que  d'autres  chimistes 
ont  également  jugée  acceptable  (Voir  le  Mémoire  de  M.  Balling, 
cité  ci-dessus  p.  275). 

La  fin  de  la  réaction  n'est  vraiment  pas  aussi  difficile  à  saisir 
que  M.  Mohr  le  donne  à  entendre  ;  il  ne  s'agit  ici  que  d'avoir  acquis 
un  peu  d'habitude.  D'un  autre  côté,  la  décoloration  graduelle  du 
liquide,  en  permettant  d'apprécier  à  chaque  instant  les  progrès 
de  la  transformation,  offre  un  avantage  qu'on  ne  retrouve,  au 
même  degré,  dans  aucune  des  autres  méthodes. 

Néanmoins,  j'ai  cherché  à  lever  la  difficulté  signalée  par 
M.  Mohr,  en  apportant  à  ma  méthode  une  légère  modiiication ,  qui , 
sans  nuire  à  la  rapidité  du  travail,  permet  d'atteindre  une 
exactitude  plus  grande.  Voici  en  quoi  consiste  ce  changement.  Je 
procède  de  la  manière  décrite  ci-dessus,  à  cela  prés  qu'au  lieu 
d'attendre  anxieusement  le  moment  où  la  liqueur  a  reçu  tout 
juste  assez  d'hyposuîfite  pour  se  trouver  décolorée,  j'ajoute 
en  une  fois  une  quantité  telle  de  réactif  qu'il  ne  puisse 
rester  aucun  doute  concernant  la  disparition  de  la  couleur  jaune. 
En  opérant  ainsi,  on  ajoute  un  peu  trop  d'iiyposulfite ;  cet  excès, 
on  le  détermine  (après  addition  d'eau  d'amidon)  à  l'aide  d'une 
solution  décime  d'iode.  Avec  un  peu  d'habitude,  il  est 
facile  de  ne  pas  dépasser  beaucoup  le  point  où  la  réaction  est 
complète,  de  sorte  que  le  dosage  par  reste  ne  demande  qu'une 
petite  quantité  de  solution  d'iode  et  qu'une  erreur  dans  le  titre 
de  celle-ci  ne  peut  exercer  qu'une  influence  très  faible. 

On  voit  que,  ainsi  améliorée,  ma  méthode  revient  au  fond  à 
celle  qui  a  été  proposée  par  MM.  Landolt  et  Kremer;  toutefois, 
elle  a  sur  celle-ci  l'avantage  de  conduire  beaucoup  plus  rapide- 
ment au  but,  et  de  donner  de  bons  résultats  même  en  présence 
d'une  grande  quantité  d'acide  chlorhydrique  libre  ou  dans  des 
dissolutions  très  étendues. 

Pour  être  en  droit  de  proposer  la  modification  que  je  viens  de 
décrire,  il  fallait  naturellement  s'assurer  d'abord  que  le  sel  de 
cuivre  et  le  rhodanure  de  potassium  n'apportaient  aucune  influence 


DU    FER    PAR    l'fIYPOSULFITë     DE    SOUDE.  255 

perturbatrice  dans  le  dosage  par  reste;  d'autant  plus  que,  par 
l'addition  d'un  excès  d'hyposulfite ,  une  partie  du  sel  cuivrique 
est  eJBfectivement  réduite  à  l'état  de  sel  cuivreux. 

A  cet  effet,  j'ai  exécuté  l'essai  suivant.  Des  volumes  égaux 
de  solution  décime  d'hyposulfite  reçurent  des  quantités  diffé- 
rentes de  sulfate  de  cuivre;  à  chaque  mélange  on  ajouta  de 
l'acide  chlorhydrique  et  de  l'eau  d'amidon ,  et  ensuite  de  la  solu- 
tion décime  normale  d'iode  jusqu'à  l'apparition  de  la  couleur  bleue 
de  l'iodure  d'amidon. 

Je  trouvai  ainsi  que,  à  la  seule  condition  de  pouvoir  éviter  la  formation 

ij  II 

d'un  précipité  de  Cu^  lo   ou  de  Cu^  Rn^ ,  les  solutions  d'hyposulfite 

et  d'iode  correspondaient  parfaitement  l'une  à  l'autre,  soit  que  le 
sel  de  cuivre  fut  eu  quantité  plus  forte  ou  plus  faible.  J'ai  même 
pu  mêler  10  CC.  d'hyposulfite  avec  8  CC.  de  dissolution  de  sul- 
fate de  cuivre  (=  80  milligrammes  de  sulfate  cristallisé) ,  6  CC. 
d'acide  chlorhydrique  concentré  et  400  CC.  d'eau,  puis  titrer  le 
mélange  par  la  solution  d'iode,  sans  qu'il  se  formât  immédiate- 
ment un  précipité,  et  dans  ce  cas  j'ai  vu  qu'il  fallait  aussi 
précisément  10  CC.  de  solution  d'iode  pour  donner  naissance  à 
la  coloration  bleue  de  l'iodure  d'amidon. 

Il  résulte  de  là  que ,  à  la  fin  de  l'essai ,  le  sel  cuivreux  formé 
sous  l'influence  de  l'hyposulfite  est  de  nouveau  transformé  en 
sel  cuivrique  sous  l'influence  de  l'iode,  et  que  la  coloration 
de  l'amidon  ne  se  produit  pas  avant  que  tout  le  sel  de  cui- 
vre ne  soit  revenu  à  l'état  primitif  de  combinaison  cuivrique. 
Ceci  est  du  reste  en  parfait  accord  avec  le  fait  qu'une  dissolution 
de  chlorure  cuivreux  dans  l'acide  chlorhydrique  décolore  l'iodure 

d'amidon  aussi  longtemps   qu'il  ne  se  forme  pas  de  précipité  de 

II 
Cu2  J2    (phénomène    qui    peut  être  prévenu  par  l'addition  d'une 

grande  quantité  d'acide  chlorhydrique). 

Quant  au  rhodanure  de  potassium,  je  n'ai  également  pu 
découvrir  aucun  effet  nuisible  résultant  de  sa  présence. 

Je  vais  donner  maintenant  les  résultats  de  quelques  analyses 
exécutées  suivant  la  méthode  modifiée. 


256 


A.  C.  OUDEMANS  JR.  SUR  LE  DOSAGE  VOLUMETRIQUE 


La  solution  d'iode  fut  obtenue  en  dissolvant  12,6533  grammes 
J  dans  un  litre  d'eau   '  ). 

La  force  de  la  dissolution  d'hyposulfite  fut  déterminée  au 
moyen  de  cette  liqueur  iodifère. 

Les  dissolutions  de  rhodanure  de  potassium  et  de  sulfate  de 
cuivre  contenaient  1  p.  c,  de  sel  cristallisé. 

le    SÉRIE. 

8.517  grammes  de  cordes  de  piano  (99.7  p.  c.  Fe)  furent  dis. 
sous,  en  observant  les  précautions  nécessaires,  dans  l'acide  chlor- 
hydrique  additionné  de  KO.,  Cl ,  et  la  liqueur  fut  amenée  au  volume 
de  1  litre.  La  dissolution  d'hyposulfite  avait  une  concentration 
telle  qu'elle  indiquait,  par  centimètre  cube,  10.985  milligr.  de  fer. 


Volume   mesuré   de 

Hyposulfite 

Jode 

Fe 

Fe 

dissolution  ferrique. 

ajouté. 

ajouté. 

trouvé. 

calculé. 

1)    25  ce. 

20.0  ce. 

0.7     ce. 

0.2120  Gr. 

0.2127  Gr. 

2)    25     // 

20.2     // 

0.9       // 

0.2120    ./ 

0.2127    // 

3)    50     // 

39.0     // 

0:35     // 

0.1240    // 

0.4254    // 

4)    35     // 

28.0     // 

0.9       // 

0.2977    // 

0.2978    /. 

5)    20     // 

16.7     // 

1.2       // 

0.1702    " 

0.1702    // 

6)    20     // 

15.9     // 

0.45     // 

0.1697    '/ 

0.1702    // 

Un  essai  par  la  méthode  de  M.  Mohr  exigea  pour  25  CC.  de 
dissolution  ferrique  19,4  C.C.  Hyposulfite  1=  0,2131  gr.  Fe. 

2e  SÉRIE. 

13,719   g;rammes   d'alun   ferri-ammonique  en  grands  cristaux, 
dissous  dans  200  C.C.  d'eau. 


Dissolution  d'hyposulfite  à 


y'(j  de  titre  normal. 


'  )  Je  dois  faire  observer  que  M.  Mohr ,  dans  la  dernière  édition  de  son  Traité , 
continue  à  prendre  pour  le  poids  atomique  de  l'iode  le  nombre  127,  au  lieu  du 
nombre  126.533  obtenu  per  M.  Stas  et,  suivant  toute  probabilité,  plusexact.il 
est  clair  qu'en  employant  de  l'hyposulfite  dont  le  titre  a  été  déterminé  au  moyen 
de  l'iode,  on  doit  commettre  des  erreurs  de  0.4  p.  c. ,  si  l'on  part  du  premier 
nombre  et  que  le  second  représente  la  valeur  réelle. 


DU  FER  PAR  L  HYPOSULFITE  DE  SOUDE. 


257 


Volume    mesuré 

de  dissolution 

ferrique. 


^^o-  IhyposuI-!  ^   , 

dau.de.       g^^  Jode 

P""^-   :    ajouté.  «^io^té. 
ajoute.  I 


Fe 


Ee 


trouvé.       calculé. 


1)  25  ce. 

2)  25      // 

3)  25      // 

4)  25      // 

5)  25      // 

6)  25      // 

7)  1      . 
(150  ce.  eau) 

8)  1      // 
(500  e.e.  eau) 


3  ce. 

le.e. 

le.e. 

37.6  e.e. 

0.9  e.e. 

0.2022  Gr. 

3    // 

3    // 

i  // 

36.1      ,/ 

0.45  // 

0.1996  // 

3    // 

5    // 

1   // 

37.1      // 

1.5     // 

0.1994  // 

6    // 

1    // 

i   // 

35.8      // 

0.3     // 

0  1988  // 

12    // 

1    // 

è      // 

36.2      // 

0.6     // 

0.1994  // 

6    // 

1    // 

4     " 

36.2     // 

0.6     // 

0.1994  u 

4    // 

1    // 

1        // 

2.0     /' 

0.6     // 

0.9978  // 

6    // 

1    // 

1        // 

.0      // 

14     // 

0.0099  // 

0.1993  Gr. 
0.1993  // 
0.1993  // 
0.1993  // 
0.1993  // 
0.1993  // 

0.0079  >f 
.0.0079  // 


A  l'essai  n°.  6  on  avait  ajouté  \  graDime  de  sulfate  de  nickel 
et  I  gramme  de  sulfate  de  cobalt. 

3e  Série. 

0,9548    gramme    de   cordes   de  piano  (99,7  Fe)  dissous  dans 
l'acide  chlorhydrique  avec  KO 3  Cl  et  amenés  à  200  C.C. 


Volume    mesuré 

de  dissolution 

ferrique. 

Sel      Acide 

^^^-  Ichlorh. 
wique  |  .     , , 

.  ^ , ,  aioute. 
ajoute  1  ' 

Rho- 
dan.  de 

pot. 
ajouté. 

Hyposul- 

fite 
ajouté. 

Jode 
ajouté. 

Ee 
trouvé. 

Ee 

calculé. 

1)    25  e.e. 

3  e.e. 

le.c 

i  e.e. 

22.0  e.e. 

0.6  e.e. 

0.1198Gr. 

0.1190  Gr. 

2)      50      // 

3  // 

1  // 

i  " 

42.6     // 

0.45  // 

0.2360  // 

0.2380  // 

3)      50      // 

3  // 

1  // 

\  " 

43.4     // 

0.8     // 

0.2386  // 

0.2380  // 

4)      45      // 

3  // 

1  . 

\  " 

39.0      // 

0.8     // 

0.2139  // 

0.2142  // 

4e  Série. 

Essais  sur  des  portions  séparées  d'alun  ferri-ammonique.  (Le 
même  produit  que  ci-dessus). 

A  chaque  essai  ajouté  3  C.C.  de  sel  de  cuivre,  1  C.C  d'acide 
chlorhydrique,  |  C.C.  de  rhodanure  de  potassium. 

Archives  Néerla?<daises,  T.  V.  17 


258     A.    C.    OUDEMANS    JR.    SUR    LE    DOSAGE    VOLUMETRIQUE    ETC. 


Poids  d'alun 
ferri-ammonique. 

Hyposuifite 
ajouté. 

Jode 
ajouté. 

V,o  N. 

Ee 
trouvé. 

Fe 

calculé. 

1)     1.M19  gram. 

30.1  ce. 

0.2  ce. 

0.1674  Gr. 

0.1675  Gr. 

2)     2.1748     // 

45.7     / 

0.4     // 

0.2537    // 

0.2527     // 

3)     3.0812     // 

64.4     / 

0.6     // 

0.3573     // 

0.3580     // 

4)     2.3524     // 

49.1     / 

0.5     // 

0.2721    // 

0.2734    // 

5)     2.0420     // 

43.0     / 

0.8     // 

0.2363    // 

0.2373     // 

6)     1.6960     // 

35.4     / 

0.2     // 

0.1971     // 

0.1971    /' 

7.     2.8841     // 

61.0     , 

0.9     „ 

0.3366    // 

0.3351     // 

QUELQUES  OBSERVATIONS 


DE 


PARTHÉNOGENÈSE  CHEZ  LES  LÉPIDOPTÈRES, 


H.  WEIJENBERGH  Jr. 


A  l'automne  de  1866^  je  trouvai  sur  une  clôture  en  bois  de 
mon  jardin,  à  Harlem ,  deux  individus  de  Liparis  dispar  L.  en 
copulation,  et  quelques  jours  après  je  vis  au  même  endroit  un 
petit  tas  d'œufs  (environ  500)  de  ce  papillon.  La  femelle  de  cette 
espèce,  n'étant  pas  apte  à  voler,  ne  s'éloigne  pendant  toute  sa 
vie  que  très  peu  de  l'endroit  où  elle  est  sortie  de  la  chrysalide; 
par  des  battements  d'ailes  et  par  d'autres  moyens,  dont  on  ne 
connaît  pas  encore  au  juste  la  nature  (Voy.  Snellen  van  Vollen- 
hoven,  Gelede  dieren  van  Nederland,  p.  102),  elle  attire  le  mâle 
près  d'elle,  et,  après  un  accouplement  assez  prolongé,  elle  pond 
une   multitude  d'œufs,  rassemblés  ordinairement  en  un  seul  tas, 


H.    WEIJENBERGH    JR.    QUELQUES    OBSERVATIONS    DE,     ETC.       259 

sur  un  mur,  un  tronc  d'arbre  etc. ,  là  où  les  jeunes  pourront  trouver 
leur  nourriture  à  proximité.  La  femelle  recouvre  les  œufs  du  duvet 
de  son  abdomen,  pour  les  garantir  du  froid  de  l'hiver,  et,  au 
printemps  suivant,  ces  œufs  éclosent. 

Je  formai  le  projet  d'élever  les  larves  qui  proviendraient  des  œufs 
trouvés  dans  mon  jardin,  et  de  faire  avec  cette  couvée,  sur  une 
grande  échelle,  une  étude  de  la  parthénogenèse  de  cette  espèce. 
La  parthénogenèse  est,  comme  l'on  sait,  la  production  par  un 
individu-mère,  sans  accouplement  préalable,  d' œufs  doués  de  vita- 
lité, ou  de  jeunes  vivants  ^).  Pour  ne  pas  hâter  l'éclosion  des  œufs 
et  la  faire  arriver  à  une  époque  où  la  nourriture  manquerait  encore , 
je  les  laissai  à  l'air  libre  pendant  tout  l'hiver  et  ne  les  portai  à 
l'intérieur  de  la  maison  qu'au  commencement  d'avril  1867. 

Dans  la  seconde  moitié  de  ce  mois  les  larves  sortirent  succes- 
sivement. Je  leur  donnai  leur  nourriture  habituelle,  savoir  des 
feuilles  de  saule  et  de  poirier  ;  mais  elles  mangeaient  presque  avec 
la  même  avidité  des  feuilles  de  tilleul  et  d'autres  arbres;  cette 
espèce  est,  pour  ainsi  dire,  omnivore.  Le  terme  de  la  croissance 
était  atteint  dans  la  première  quinzaine  de  juin,  et  vers  le  milieu 
de  juillet  apparurent  les  papillons.  Comme  il  est  facile,  avec  un 
peu  d'habitude,  de  distinguer  les  sexes  dès  l'état  de  chenille, 
j'avais  enlevé,  avant  leur  transformation  en  chrysalides,  tous  les 
individus  mâles;  quant  aux  chrysalides  femelles,  après  les 
avoir  encore  une  fois  examinées,  pour  voir  s'il  ne  s'y  cachait 
pas  de  mâle,  je  les  avais  placées  dans  une  caisse  parfaitement 
fermée.  Je  reconnus  plus  tard  que  je  n'avais  commis  qu'une  seule 
erreur  dans  ce  triage;  un  jour,  en  effet,  je  trouvai  dans  la  caisse 
un  papillon  mâle  qui  venait  de  quitter  son  enveloppe.  Comme 
toutes  les  femelles,  au  fur  et  à  mesure  de  leur  apparition ,  avaient 
été  transportées  immédiatement  dans  une  autre  caisse ,  également 
bien  fermée,  j'étais  sûr  qu'aucune  ne  pouvait  être  fécondée,  à 
l'exception,  tout  au  plus,  de  trois  femelles  qui  étaient  sorties  en 


ï)  Voy.    V.    Siebold.   Wahre    Parthenogenem    hei  Schmetterlinge    und    Bienen, 
Leipzig,  1856. 

17* 


260  H.    WEIJENBERGII  JR.    QUELQUES    OBSERVATIONS    DE 

même  temps  que  le  mâle  dont  je  viens  de  parler  ;  ces  trois  femelles 
furent  sacrifiées.  En  tout;  j'avais  obtenu  150  insectes  parfaits ^  dont 
65  femelles.  A  l'égard  des  60  femelles  que  je  conservai  dans  la 
caisse ,  il  ne  me  restait  aucun  doute  ;  pour  elles ,  la  possibilité 
d'accouplement  n'avait  pas  existé. 

Il  arrive  fréquemment  que  des  insectes  femelles ,  qui  n'ont  pas 
reçu  le  mâle,  pondent  des  œufs;  mais,  en  général,  ces  œufs  sont 
privés  de  la  faculté  de  se  développer,  ils  ne  renferment  pas  de 
germe  viable;  aussi  finissent-ils  ordinairement  par  se  rider  et  se 
dessécher  complètement.  L'éclosion  de  pareils  œufs,  c'est  à-dire 
l'existence  d'une  véritable  parthénogenèse ,  est  encore  au  nombre 
des  faits  rarement  observés.  Mes  femelles  vierges  de  L.  dispar 
pondirent  également  des  œufs ,  les  unes  plus ,  les  autres  moins ,  et 
le    printemps    suivant    devait    les    voir    éclore    ou    se    dessécher. 

La  privation  d'accouplement  paraît  exercer  une  influence  dépri- 
mante sur  l'émission  des  œufs,  car  mes  60  femelles  vierges  pon- 
dirent ensemble  à  peine  autant  d'œufs  que  leur  mère  fécondée 
en  avait  donné  à  elle  seule ,  l'année  précédente.  Les  œufs  étaient 
bien  contenus  en  même  quantité  dans  les  ovaires,  mais  il  n'étaient 
pas  expulsés.  Un  tiers  des  papillons  ne  pondit  pas  d'œufs  du  tout  ; 
des  40  autres ,  la  plupart  ne  donnèrent  que  1 ,  2  ou  3  œufs , 
quelques-uns  10  à  20,  et  celui  qui  en  pondit  le  plus  n'atteignit 
que  le  quart  environ  du  nombre  qu'avait  fourni  sa  mère.  A  la  fin 
de  juillet  tous  les  papillons  étaient  déjà  morts. 

Les  œufs  recueillis  furent  mis  tous  ensemble  dans  une  boîte  de 
carton.  Pendant  l'automne  ils  n'éprouvèrent  aucun  changement 
(bien  que  cette  espèce  donne  parfois  deux  génération  en  une 
année);  mais  lorsque,  le  13  avril  1868,  j'ouvris  de  nouveau  la 
boîte  pour  la  première  fois,  j'eus  la  surprise  d'y  voir  ramper  un 
grand  nombre  de  petites  chenilles,  que  je  plaçai  immédiatement 
sur  des  feuilles  de  saule  dans  un  bocal  de  verre.  Il  fut  facile  de 
constater  toutefois,  que  les  œufs  et  les  larves  ainsi  obtenus  par 
parthénogenèse  avaient  une  vitalité  moins  énergique  que  dans  le 
cas  ordinaire,  où  la  fécondation  a  eu  lieu.  En  effet,  je  n'obtins 
que   50   chenilles   environ,    dont   40  seulement   survécurent   à  la 


PARTHÉNOGENÈSE    CHEZ    LES    LÉPIDOPTÈRES.  261 

première  mue.  Au  total,  cette  éducation  ne  me  donna ,  à  la  fin 
de  juillet,  que  27  papillons,  dont  14  étaient  des  femelles.  La 
moitié  seulement  de  ces  femelles,  restées  de  nouveau  sans  fécon- 
dation ,  donna  des  œufs ,  en  nombre  moyen.  Ces  œufs ,  pondus  au 
mois  d'août,  passèrent  Thiver,  et  en  avril  1869  il  en  sortit  de 
jeunes  chenilles. 

Cette  couvée  parut  être  de  nouveau  plus  forte  que  la  précé- 
dente: aussi  bien  les  chenilles  obtenues,  que  les  papillons  qui 
en  provinrent,  étaient  en  plus  grand  nombre  que  l'année  d'aupa- 
ravant- Dans  la  proportion  entre  le  nombre  des  femelles  et  celui 
des  mâles  je  ne  trouvai  pas  de  différence.  La  récolte  d'œufs 
fut  plus  abondante  que  celles  des  deux  générations  antérieures 
obtenues  par  parthénogenèse;  quelques  papillons  pondirent  même 
autant  d'œufs  que  la  femelle  de  1866,  leur  bisaïeule. 

Ces  œufs  passèrent  l'hiver  au  même  endroit  et  dans  les  mêmes 
conditions  que  ceux  des  années  précédentes;  mais,  au  printemps 
de  1870,  j'attendis  en  vain  l'apparition  des  jeunes  chenilles. 
Les  œufs  se  desséchèrent,  pas  un  seul  ne  vint  à  éclosion,  et  il 
était  ainsi  mis  fin  à  mon  expérience. 

En  résumé ,  le  résultat  a  été  celui-ci  :  œufs  fécondés  de  l'automne 
de  1866,  éclos  en  avril  1867,  papillons  en  août  1867;  de  ceux- 
ci,  sans  fécondation,  œufs  éclos  en  avril  1868,  papillons  en  août 
1868;  de  ceux-ci,  sans  fécondation,  œufs  éclos  en  avril  1869, 
papillons  en  août  1869;  de  ceux-ci.  sans  fécondation,  œufs  ?ion 
éclos  au  printemps  de  1870,  mais  desséchés. 

Les  observations  de  parthénogenèse  chez  les  Lépidoptères  sont 
encore  assez  peu  nombreuses  ;  voici  la  liste  de  celles  qui  me 
sont  connues: 

Sphinx  ligustri  L. ,   1  fois  (Treviranus). 

Smerinlhus  popuHL.,  4  fois  (v.  Nordmann ,  Brown,  Newnham, 
Kipp). 

Smerinthus  ocellatus  L.,  1  fois  (Johnston). 

Ewprepia  caja  L. ,  5  fois  (Brown,  Lehocq,  Robinson,  Schlapp, 
Barthélémy). 


262  H.    WEIJENBERGH   JR.    QUELQUES    OBSERVATIONS    DE 

Eîiprepia  villica  L.,   1  fois  (Stowell). 

Saturnia  polyphemiLs ,  2  fois  (Curtis,  de  Filippi). 

Gastropacha  pini  L.,  3  fois  (Scopoli,  Suckow,  Lacordaire). 

Gastropacha  quercifolia  L. ,  1  fois  (Basler). 

Gastropacha  polaioria  L. ,  1  fois  (Burmeister). 

Gastropacha  quercus  L.,   1  fois  (Plieninger). 

Liparis  dispar  h.,  2  fois  (Carlier,  Tardy). 

Liparis  ochropoda,   1  fois  (Popoff.). 

Orgyia  pudibunda,   1  fois  (Werneburg). 

Psyché  apiformis ,  1  fois  (Kossi). 

Bombyx  mort  L. ,  bien  des  fois  (v.  v.  Siebold  /.  c.) 

Il  y  a  peu  de  remarques  à  faire  au  sujet  de  ces  observations  ; 
toutes  ont  fourni  aussi  bien  des  femelles  que  des  mâles,  ordi- 
nairement dans  la  proportion  de  2  à  3.  M.  Westwood^  qui 
rapporte  l'observation  de  M.  Tardy  sur  le  Liparis  dispar  L., 
ajoute  seulement  que  cet  observateur  a  poursuivi  la  parthéno- 
genèse jusque  dans  la  troisième  génération,  et  qu'alors  il  n'a 
plus  obtenu  que  des  mâles.  L'observation  de  M.  Tardy  diifère 
donc  sous  un  rapport  essentiel  de  la  mienne ,  quoique  le  résultat 
final  ait  été  le  même,   savoir,  l'extinction. 

La  parthénogenèse  existe  encore,  comme  mode  très  ordinaire 
de  reproduction,  chez  les  espèces  suivantes  de  Lépidoptères: 

Psyché  hélix  v.  Sieb.    (mâles  encore  inconnus)  (v.  Siebold). 

Solenobia  lichenella  L.  (v.  Siebold). 

Solenobia  triquetrella  F  R.  (v.  Siebold,  Weyenbergh,  etc.). 

De  ces  deux  dernières  espèces  on  connaît,  il  est  vrai,  les 
mâles;  mais  les  individus  nés  par  parthénogenèse  sont  tous,  et 
toujours,  des  femelles. 


J'ai  aussi  à  communiquer  une  observation  à  l'appui  de  la 
parthénogenèse  chez  le   Gastropacha  polatoria  L. 

Dans  le  courant  de  l'été  de  1868,  je  recueillis  une  chenille 
de  cette  espèce,  qui,  à  en  juger  par  la  taille,  me  parut  être 
une  femelle;  cette  présomption  se  trouva  effectivement  confirmée 


PARTHENOGENESE    CHEZ    LES    LEPIDOPTERES.  263 

lors  de  la  métamorphose ,  qui  eut  lieu  en  automne.  L'insecte , 
tenu  dans  une  boîte  bien  fermée ,  à  l'abri  de  tout  rapprochement 
avec  un  mâle,  n'en  donna  pas  moins  des  œufs,  mais  en  petit 
nombre,  tout  au  plus  une  trentaine.  La  boîte,  dans  laquelle 
j'avais  déposé  aussi  une  annotation  concernant  l'origine  des 
œufs,  s'égara,  et  ce  ne  fut  qu'à  la  fin  du  mois  de  mai  de 
l'année  suivante  qu'elle  me  tomba  de  nouveau  sous  la  main.  Je 
reconnus  alors  que  trois  œufs  seulement  étaient  éclos,  tous  les 
autres  se  montraient  desséchés.  Malheureusement,  les  trois  petites 
chenilles  étaient  déjà  mortes  d'inanition. 


Dans  l'automne  de  la  même  année,  je  trouvai  une  chrysalide 
de  Liparis  monacha  L.,  qui  me  donna  un  papillon  femelle.  Ce 
papillon  pondit  aussi  quelques  œufs  (cinq),  mais  dont  aucun 
n'est  venu  à  éclosion.  Chez  cette  espèce,  très  voisine  de  Liparis 
dispar  L.,    la  parthénogenèse  n'est  donc  pas  encore  constatée. 


J'ai  fait  connaître  ailleurs  (Nederlandsch  Tijdschrift  voor  Ento- 
mologie^ t.  XI,  p.  90,  1868)  une  observation  relative  à  la 
parthénogenèse  chez  le  Solenohia  triquetrella  FE,. ,  observation 
que  je  reproduis  ici  brièvement. 

Il  est  généralement  connu  que  cette  espèce,  outre  le  mode 
de  reproduction  ordinaire,  présente  aussi  la  multiplication  par 
voie  de  parthénogenèse.  J'ai  été  à  même  de  vérifier  les  obser- 
vations déjà  faites  à  cet  égard. 

Les  individus  sur  lesquels  j'ai  expérimenté,  développés  au 
commencement  de  juin,  et  tous  du  sexe  femelle,  ne  vécurent 
qu'une  couple  de  jours,  et  laissèrent  alors  le  sac  qui  leur  avait 
servi  de  demeure  rempli  d'œufs.  Ces  œufs,  assez  grands  propor- 
tionnellement à  la  taille  de  l'insecte,  étaient  de  forme  ovale  et 
de  couleur  jaune.  Environ  un  mois  après  que  les  œufs  eurent 
été  pondus,  les  jeunes  chenilles  sortirent  du  sac,  et  s'entourèrent 


264  H.    WEIJENBERG    JR.    QUELQUES    OBSERVATIONS,    ETC. 

immédiatement  d'une  petite  poche  construite  avec  des  filaments 
détachés  du  sac  maternel.  Ces  jeunes  chenilles,  qui  avaient 
environ  1  millimètre  de  longueur,  étaient  d'une  couleur  blanc 
sale;  la  tête  seule  était  noire,  et  sur  le  dos  des  deux  premiers 
anneaux  on  voyait  une  trace  noire  nébuleuse.  L'éclosion  des  œufs 
eut  lieu  régulièrement  le  matin.  Je  réussis  à  élever  les  chenilles 
avec  différentes  espèces  d'herbes,  mais  leur  croissance  fut 
extrêmement  lente.  L'année  suivante  apparurent  les  insectes 
parfaits,  tous  du  sexe  femelle,  et  l'espèce  se  propagea  de  nou- 
veau de  la  même  manière.  Le  génération  qui  suivit  se  composait 
encore  exclusivement  de  femelles,  dont  les  œufs  non  fécondés 
donnèrent  de  nouveau  naissance  à  des  chenilles;  mais  celles-ci 
périrent  par  négligence  de  ma  part. 

J'avais  donc  acquis  la  certitude  que  trois  générations  succes- 
sives s'étaient  produites  par  parthénogenèse,  et  que  les  deux  pre- 
mières n'avaient  fourni  que  des  femelles. 

Il  y  aurait  de  l'intérêt  à  continuer  l'éducation  de  ces  insectes 
pendant  une  série  d'années,  pour  tâcher  d'obtenir  une  réponse 
aux  questions  suivantes: 

Pendant  combien  de  générations  l'espèce  peut- elle  se  reproduire 
par  parthénogenèse,  et  à  quelle  génération  la  fécondation  ordi- 
naire par  le  mâle  devient-elle  nécessaire  pour  prévenir  l'extinction 
de  Fespèce  ?  Apparaît-il  finalement  une  génération  qui  fournit  d'elle- 
même  des  mâles,  et,  en  cas  d'affirmative,  à  quel  terme  de  la  série 
ce  phénomène  se  manifeste-t-il  ?  Ou  bien ,  les  œufs  issus  d'une  vierge 
ne  donnent-ils  toujours  naissance,  de  génération  en  génération, 
qu'à  des  femelles?  Comment  ce  fait,  supposé  reconnu ,  pourrait-il 
s'expliquer,  alors  que  chez  les  Abeilles  les  œufs  non  fécondés 
produisent,  tout  à  l'inverse,  exlusivement  des  mâles,  et  que  chez 
les  autres  Lépidoptères  où  l'on  a  observé  la  parthénogenèse,  les 
œufs  non  fécondés  donnent  aussi  bien  des  individus  mâles  que 
des  individus  femelles? 


SUE  L'ORIGINE 

ET    LE 

DÉVELOPPEMENT  DU  PERIPHYLLU8  TESTUDO  v.  d.  H. , 

PAK 

C.  RITSEMA  Cz. 

(Présenté   à   l'Académie   des    sciences   d'Amsterdam,  dans  sa  séance  du  29  Janv.    1870). 


Dans  le  tome  sixième  (anuée  1863)  du  Nederlandsch  Tijdschrift 
voor  Entomologie,  le  professeur  J.  van  der  Hoeven  fixa  l'attention 
sur  un  petit  Hémiptère  qu'on  trouve  en  abondance  sur  les  feuilles 
de  VAcer  campestris  et  de  VAcer  Pseudo-plalanus,  et  il  le  désigna 
sous  le  nom  de  Periphyllus  Tesludo. 

Cet  insecte  avait  été  observé  en  1852  par  M.  J.  Thornton ,  qui 
lui  avait  donné  le  nom  de  Phyllophorus  tesludinatus  et  le  consi- 
dérait comme  la  larve  d'une  nouvelle  espèce  d'Aphide ,  pour  laquelle 
on  serait  même  obligé  probablement  de  créer  un  genre  nouveau  ^  j. 
Plus  tard  (1858)  M.  Lane  Clarke  paria  de  ce  même  animalcule 
sous  le  nom  de  Chelymorpha  phyllophora,  et  le  regarda  comme 
la  larve  d'une  espèce  intermédiaire  entre  les  genres  Aphis  et  Coc- 
cus  ^).  Ces  deux  auteurs  ne  firent  toutefois  à  son  sujet  qu'une 
communication  très  courte.  Il  fut  ensuite  figuré  et  décrit  avec  plus 
de    détails    sous    le    nom    de    Periphyllus    Tesludo    ^) ,    par  van 


1)  Voyez:  Transactions  of  the  Entomoloyical  Society ,  1852.  noiiv.  série,  t.  II, 
Proceedings ,  p.  78. 

*)  Voyez:  Ohjects  for  the  3Iicroscope ,  being  a  popular  description  of  the  most 
instructioe  and  beautiful  subjecls  for  exhibition ,  par  L.  Lane  Clarke ,  Londres , 
1858;  en  1863  il  a  paru  une  seconde  édition  de  ce  petit  ouvrage. 

^)  Van  der  Hoeven,  en  rejetant  les  noms  génériques  imaginés  par  MM.  Tliornton 
et  Lane  Clarke,  donne  pour  motif  que  ces  noms  avaient  déjà  été  employés  anté- 
rieurement: celui  de  Phyllophora  avait  été  appliqué  successivement  à  un  genre 
de  Crustacés,  de  Coléoptères,  d'Orthoptères  et  de  Diptères,  tandis  que,  dès 
1834,  M.  Chevrolat  avait  érigé  un  genre  C,4e/y;;^or/)/i«  dans  l'ordre  des  Coléoptères. 
Il  est  plus  difficile  de  savoir  pourquoi  van  der  Hoeven  changea  le  nom  spéci- 
fique de  testudinatus ,  donné  par  M.  Thornton ,  en  celui  de  Testudo ,  et  je  crois 
même  qu'il  n'existait  pas  de  raison  pour  faire  ce  changement.  Toutefois ,  comme 
on  a  désigné   ici   sous  un  nom  spécial  ce  qui  n'est   qu'une  forme  larvaire  d'un 


266  G.    RITSEMA    CZ.    SUR    l'oRIGINE    ET    LE 

der  Hoeven  (/.  c).  Ce  zoologiste  le  regarda  comme  appartenant  aux 
Hémiptères  liomoptères,  mais  n'osa  décider  s'il  fallait  le  rapporter 
aux  Aphides  ou  aux  Coccides,  tout  en  étant  d'avis  qu'on  pou- 
vait difficilement  le  réunir  aux  premières. 

Ce   n'est   qu'en    1867    qu'on   apprit   quelque  chose   concernant 
l'origine  de  cet  élégant  insecte ,  grâce  à  une  communication  adressée 
par  MM.  Balbiani  et  Signoret  à  l'Académie  des  Siences  de  Paris, 
sous  le  titre  de  „Note  sur  le  développement  du  Puceron  brun  de 
l'Érable"  (Compter;  rendus,  17  Juin  1867)  ^).  Le  résultat  des  recher- 
ches de  ces  deux  savants  est  que  le  Periphyllus  Tesludo  v.  d.  H , 
loin   de   constituer  une  espèce  distincte  ou  même  un  genre  nou- 
veau, n'est  autre  chose  qu'une  forme  anormale,  stérile  Ae  V Aphis 
Aceris    L.,    forme    provenant    d'individus    identiques   à  ceux  qui 
donnent   naissance  à  des  larves  normales,  aptes  à  se  développer 
et  à  se  reproduire;  quelquefois  même,  les  auteurs  ont  pu  s'assurer 
qu'une   seule  et  même  mère  engendrait  les  deux  formes.  D'après 
eux ,  on  ne  peut  considérer  les  Periphyllus  que  comme  une  modi- 
fication constante  du  type  spécifique,  produite  par  les  générations 
normales.    Ils   font  remarquer,    en  terminant,  l'application  qu'on 
pourrait    faire    au    cas    actuel    des    observations    de    M.  Landois 
sur  la  loi  du  développement  sexuel  des  insectes  -  ) ,  loi  qui  nous 
apprend   que   chez   ces  animaux  les  sexes  dépendent  simplement 
des  conditions  d'alimentation  auxquelles  les  larves  sont  soumises. 
De  ce  que  les  Pucerons  anormaux  (les  Periphyllus)  sont  actuelle 
ment  dépourvus  de  la  faculté  de  se  reproduire ,  soit  par  génération 
sexuelle,  soit  de  toute  autre  manière,  il  ne  faudrait  pas  conclure 
que  les  conditions  d'alimentation  ne  puissent  se  modifier  un  jour 

insecte  connu  et  décrit  depuis  longtemps,  de  sorte  que  ce  nom  est  condamné  à 
disparaître,  j'ai  cru  devoir  m'écarter  des  règles  rigoureuses  du  droit  de  priorité 
et  m'en  tenir  au  nom  proposé  par  van  der  Hoeven,  plntôt  que  d'augmenter  encore 
le  nombre  des  synonymes. 

>)  Cette  Note  a  été  traduite  en  anglais  dans;  The  Armais  and  Magazine  of 
Natural  Rhtory ,  lie  Sér.,  18G7,  t.  XX,  p.  149-152,  d'où  elle  a  passé  sans 
changement,  mais  avec  addition  d'une  ligure  du  Periphi/llus  Testudo  A^^&^^i'à- 
wicke's  Scie?ice-Gossip  du  mois  de  septembre  de  la  même  année. 

2)  Voyez:  Comptes  rendus  de  V Académie  des  Sciences,  4  févr.  1867. 


DÉVELOPPEMENT    DU     PER[PHYLLUS    TESTUDO    V.    D.    H.  267 

de  manière  à  leur  faire  acquérir,  avec  les  attributs  du  sexe,  la 
faculté  de  se  propager  directement  d'une  manière  indéfinie  ;  ces 
individus  anormaux  deviendraient  alors  à  leur  tour  l'origine  d'une 
espèce  nouvelle,  produite  par  déviation  d'un  type  spécifique  antérieur. 

Au  printemps  de  1867,  n'ayant  pas  encore  connaissance  des 
recherches  qui  viennent  d'être  résumées,  j'avais  fait  moi-même 
quelques  observations  sur  ce  sujet.  Ce  sont  les  résultats  de  ces 
observations,  répétées  et  complétées  en  1869,  que  je  vais  faire 
connaître. 

Dès  les  premiers  jours  de  février,  je  remarquai  sur  un  petit 
pied  à' Acer  Pseudo-platanus  L.  de  jeunes  larves  d'une  espèce  de 
Pucerons,  et,  en  examinant  une  branche  de  plus  près,  je  décou- 
vris aussi  sur  l'écorce,  principalement  à  l'aisselle  et  à  la  base 
des  bourgeons,  les  petits  œufs  noirs,  brillants  et  de  forme  ovale , 
d'oii  ces  larves  sortaient. 

Ces  larves  étaient  longues  d'environ  0.5  mm.,  et  d'une  couleur 
vert  foncé,  presque  noire.  Après  avoir  mué  cinq  fois,  elles  étaient 
parvenues  dans  les  derniers  jours  de  mars  à  l'état  de  nourrices 
non  ailées,  longues  de  près  de  3  mm.,  fortement  renflées,  vert 
foncé  ou  brunes,  lesquelles  ne  tardèrent  pas  à  donner  naissance 
à  des  larves  vert  clair,  qui  elles-mêmes  atteignirent  leur  déve- 
loppement complet  dans  la  seconde  moitié  d'avril,  après  avoir 
subi  quatre  mues  seulement.  Dans  cet  état,  quelques-unes  étaient 
ailées,  d'autres  aptères. 

Dès  la  première  génération,  à  l'aide  des  „ Descriptions  of  Aphides" 
de  M.  Walker,  insérées  dans  The  Annals  and  Magazine  of  Na- 
tural  Historij j  2e  Série,  t.  I  et  suiv. ,  j'avais  pu  déterminer 
l'espèce  et  y  reconnaître  V Aphis  Aceris  L.,  détermination  qui  se 
trouva  confirmée  par  la  comparaison  des  individus  ailés  de  la 
seconde  génération  avec  la  description  que  MM.  Kaltenbach  et 
Koch  ont  donnée  de  cette  espèce. 

Après  que  les  nourrices  de  la  seconde  génération  eurent  produit 
beaucoup  de  jeunes  qui  ressemblaient  exactement  au  premier  âge 
de  leurs  mères,  je  vis  naître,  conformément  aux  observations  de 
MM.  Balbiani  et  Signoret ,  des  individus  dans  lesquels  je  reconnus 


268  C.    RITSEMA    CZ.    SUR    l'oRIGINE     ET    LE 

immédiatement  le  Periphyllus  Testudo.  Les  larves  ordinaires  con- 
tinuèrent à  se  développer,  et  étaient  devenues  vers  la  fin  de 
mai  des  nourrices,  les  unes  pourvues,  les  autres  privées  d'ailes , 
tandis  que  les  Periphyllus  n'avaient  subi  aucun  changement. 

La  troisième  génération  engendra  à  son  tour,  d'abord  des 
larves  ordinaires,  et  ensuite  des  Periphyllus,  ces  derniers  toute- 
fois en  plus  grand  nombre  que  dans  la  génération  précédente. 
Mais  ce  qui  me  surprit  particulièrement ,  ce  fut  de  trouver  parmi 
ces  larves  des  individus  qui  établissaient  évidemment  une  transi- 
tion entre  les  deux  formes,  celle  des  larves  ordinaires  et  celle 
des  Periphyllus]  chez  ces  individus,  en  effet,  les  appendices  foli- 
acés étaient  moins  nombreux,  avaient  une  forme  lancéolée  plus 
étroite,  et  parfois  même  constituaient  un  passage  aux  poils  or- 
dinaires. Aucune  de  ces  formes  intermédiaires  ne  montrait  les 
dessins  réguliers  qui  ornent  le  dos  des  Periphyllus,  mais  toutes 
possédaient  les  deux  rangées  de  tubercules  garnis  de  soies  et  les 
deux  tuyaux  mellifères,  qu'on  trouve  sur  la  face  dorsale  des  lar- 
ves ordinaires,  mais  qui  manquent  chez  les  Periphyllus.  Ces  indi- 
vidus  avancèrent  en  développement,  et  après  la  première  mue  ils 
étaient  tout  à  fait  semblables  aux  larves  ordinaires. 

Les  membres  de  cette  quatrième  génération,  à  l'exception  des 
Periphyllus ,  étaient  devenus  dans  les  derniers  jours  de  mai  des 
nourrices  adultes ,  et  commencèrent  dès  lors  à  se  reproduire  ;  mais , 
à  l'inverse  des  deux  générations  précédentes,  qui  avaient  fourni 
d'abord  des  larves  ordinaires  et  ensnite  des  Periphyllus ,  les  mem- 
bres de  la  quatrième  génération  donnèrent  d'abord  une  multitude 
de  Periphyllus ,  puis  quelques  formes  intermédiaires ,  et  finalement 
un  nombre  comparativement  petit  de  larves  ordinaires. 

Malheureusement,  par  suite  d'une  négligence  de  ma  part,  ces 
larves  moururent,  de  sorte  que  je  ne  pus  acquérir  de  certitude 
au  sujet  d'une  présomption  qui  s'était  formée  dans  mon  esprit, 
savoir,  que  les  nourrices  de  cette  cinquième  génération  se  repro- 
duiraient uniquement  par  des  Periphyllus. 

Je  continuai  néanmoins  à  observer  attentivement  les  Periphyllus 
des  différentes  générations.  Jusqu'aux  derniers  jours  d'août  je  ne 


DÉVELOPPEMENT    DU    PERIPHYLLUS    TESTUDO    V.    D.    H.  269 

pus  remarquer  chez  eux  aucun  changement  appréciable.  Mais,  à 
ce  moment,  leur  corps  devint  plus  gros  et  commença  à  laisser 
apercevoir  faiblement,  aux  deux  côtés  du  dos,  un  contenu  opaque. 
Un  peu  plus  tard,  dans  les  premiers  jours  de  septembre,  je 
trouvai  des  Periphyllus  occupés  à  changer  de  peau. 

Après  cette  première  mue  ils  ressemblaient  déjà  parfaitement 
au  second  âge  des  larves  ordinaires,  et  moins  de  quinze  jours 
après  ils  avaient  atteint  leur  développement  complet,  état  dans 
lequel  tous  étaient  aptères.  Ces  nourrices  commencèrent  immédiate- 
ment à  se  reproduire  par  des  larves  ordinaires  d'un  jaune  pâle, 
qui  elles-mêmes  changèrent  de  peau  pour  la  dernière  fois  à  la 
fin  de  septembre ,  et  restèrent  privées  d'ailes  comme  leurs  mères. 
Les  larves  qui  provinrent  de  ces  nourrices  ressemblaient  à  peu 
près  à  celles  de  la  génération  précédente,  et  avant  même  le 
milieu  d'octobre  elles  se  changèrent  en  insectes  parfaits,  ailés, 
mâles  et  femelles  ;  ceux-ci  s'accouplèrent  aussitôt ,  après  quoi  les 
femelles  pondirent  environ  huit  œufs  d'un  jaune  brunâtre,  qu'elles 
fixèrent  sur  l'écorce  du  petit  Erable.  Ces  œufs  devinrent  peu  à 
peu  complètement  noirs;  au  commencement  de  février  1870  il  en 
sortira   de    nouveau    la  première  génération  de  VAphis  Aceris  L. 

Arrivé  à  la  fin  de  ma  communication  ;  je  résumerai  brièvement 
les  résultats  qui  se  déduisent  de  mes  recherches.  Il  a  été  constaté  : 

P.  Que  le  Periphyllus  Tesfiulo  v.  d.  H.  n'est  pas  une  espèce 
distincte,  mais  le  premier  âge  d'une  forme  larvaire  spéciale 
de  VAphis  Aceris  L. 

2°.  Que  cette  forme  de  larve  n'est  pas,  comme  on  l'avait  cru 
jusqu'ici,  inapte  à  tout  développement  ultérieur,  mais  qu'elle  est 
seulement  soumise,  dans  son  premier  âge,  à  un  arrêt  de  déve- 
loppement prolongé,  ce  qui  restreint  considérablement  la  multi- 
plication de  l'espèce. 

3°.  Qu'elle  est  engendrée  seulement  par  les  générations  qui 
comprennent  à  la  fois  des  individus  ailés  et  des  individus  aptères. 

4".  Qu'elle  naît  aussi  bien  des  nourrices  ailées  que  de  celles 
qui  n'ont  pas  d'ailes,  conjointement  avec  les  larves  ordinaires, 
à  développement  rapide,  et  avec  des  individus  qui  forment  le 
passage  de  Tune  aux  autres. 


270  C.    RITSEMA    CZ.    SUR    l'oRIGINE     ET    LE    ETC. 

5".  Que,  dans  les  générations  successives,  les  Periphyllus 
deviennent  chaque  fois  plus  abondants ,  tandis  que  le  nombre  des 
larves  ordinaires  diminue  de  plus  en  plus,  de  telle  sorte  que  la 
quatrième  génération  (c'est-à-dire  la  troisième  de  celles  qui 
produisent  des  Periphyllus)  ne  donne  plus  que  très  peu  de 
larves  normales.  Je  crois  pouvoir  inférer  de  là  que  la  cin- 
quième génération,  qui  à  mon  grand  regret  a  péri  dans  mes 
expériences,  engendre  seulement  des  Periphyllus.  Si  tel  est 
effectivement  le  cas,  il  en  résulte  uu  obstacle  puissant  à  la 
multiplication  excessive  de  l'espèce  dans  le  courant  de  l'été. 


EXTRAIT  D'UN  RAPPORT 

SUR  LA  PURIFICATION  DE  L'AIR    DES  HÔPITAUX  PAR  LA 

COMBUSTION  DES  GERMES  ORGANIQUES , 

PAR 

J.  VAN  GEUNS  et  E.  H.  VON  BAUMHAUER. 


M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  du  royaume  des  Pays-Bas  ayant 
consulté  l'Académie  des  Sciences  au  sujet  d'une  communication  de 
M.  C.  Woestyn,  de  Paris,  qui  proposait  de  purifier  l'air  des 
salles  d'hôpitaux  par  la  combustion  des  germes  organiques  avant 
de  le  rejeter  dans  l'atmosphère,  l'Académie  avait  chargé  deux 
de  ses  membres  de  lui  adresser  un  rapport  sur  ce  projet. 

Ce  rapport  a  été  présenté  à  l'Académie  dans  sa  séance  du 
29  avril  1870;  nous  en  extrayons  les  passages  suivants. 

Il  y  a  ici  deux  choses  à  distinguer: 

V.  les  questions  qui  se  rattachent  immédiatement  au  principe 
en  général; 

2°.  les  résultats  qu'on  peut  attendre  de  l'application. 


J.  VAN  GEUNS  ET  E.  H.  VON  BAUMHAUER.  EXTRAIT  d'uN  RAPPORT,  ETC.  271 

P.  Quelque  plausible  que  paraisse  l'opinion  qui  voit  dans  les 
germes  organiques  la  cause  de  Finfection,  ce  n'est  pourtant  jus- 
qu'ici qu'une  hypothèse  ;  en  l'admettant  sous  cette  réserve , 
resterait  encore  à  résoudre  la  question  de  savoir  si  l'appareil  de 
M.  Woestyn  détruira  complètement  les  propriétés  vitales  de 
ces  germes. 

Le  passage  de  l'air  dans  des  cheminées  d'appel  disposées 
comme  le  recommande  M.  Woestyn,  ne  peut  être  mis,  quant  à 
l'effet  produit,  sur  la  même  ligne  que  le  passage  à  travers  des 
tubes  chauffés  au  rouge ,  selon  la  méthode  usitée  par  les  chimistes 
et  les  physiologistes.  Le  fait  rapporté  par  M.  Woestyn ,  que  l'air 
qui  s'échappe  de  la  cheminée  d'une  lampe  en  combustion  est 
privé  de  particules  organiques,  peut  difficilement  être  regardé 
comme  bien  concluant  en  faveur  du  moyen  qu'il  propose;  il  est 
permis  au  contraire  de  conserver  des  doutes  relativement  à 
l'efficacité   de    ce  moyen  pour  la  destruction  totale  des  miasmes. 

En  tout  cas,  l'auteur  n'a  pas  jugé  à  propos  de  fournir  la 
preuve  expérimentale  qui  pourrait  sembler  nécessaire. 

2°.  M.  Woestyn  paraît  attacher  une  grande  importance  à  ce 
que  l'air  des  salles  de  malades  soit  purifié  avant  d'être  versé 
dans  l'atmosphère.  Si  l'expérience  "avait  mis  hors  de  doute  les 
effets  nuisibles  de  ce  mélange ,  il  y  aurait  certainement  un  grand 
intérêt  à  opérer  la  purification  de  l'air  vicié.  Mais  nos  connais- 
sances positives  ne  permettent  encore  de  rien  affirmer  à  cet 
égard  ;  il  ne  serait  même  pas  difficile  de  citer  une  série  de  faits 
rendant  extrêmement  problématique  l'existence  de  cette  infection 
répandue  dans  l'air  qui  émane  des  hôpitaux  et  s'étendant  avec 
lui  sur  tout  ou  partie  de  la  ville.  C'est  ainsi,  par  exemple, 
qu'à  Amsterdam,  où  l'hôpital  intérieur  est  entouré  de  différents 
côtés  de  maisons  particulières,  on  n'a  jamais  constaté,  que  nous 
sachions,  d'influence  fâcheuse  exercée  sur  les  habitants  de  ces 
maisons.  Nous  ne  prétendons  pas,  toutefois,  qu'à  un  point  de 
vue  hygiénique  général,  il  ne  soit  prudent  de  débarrasser  l'air 
des  salles  de  malades  des  matières  nuisibles  qu'il  peut  contenir. 
Si  l'on   croit  devoir   combattre    par  la  destruction  des  germes  la 


272  j.  van  geuns  et  e.  h.  von  baumhauer.  extrait  d'un  rapport,etc. 

propagation  des  maladies  miasmatiques  ou  contagieuses,  la 
première  condition  est  évidemment  d'employer  des  procédés  offrant 
la  garantie  que  le  but  sera  atteint  aussi  complètement  que 
possible.  Ce  qui  se  présente  alors  en  premier  lieu,  c'est  la 
désinfection  à  l'intérieur  des  salles,  non-seulement  de  l'air,  mais 
de  tout  ce  qui  s'y  trouve,  des  objets  de  pansement,  des  eifets 
d'habillement  et,  avant  tout,  des  déjections. 

On  doit  donc  continuer  à  attacher  une  importance  prépondé- 
rante aux  agents  de  désinfection  proprement  dits,  tels  que 
l'acide  phénique ,  le  chlorure  de  chaux ,  le  sulfate  de  protoxyde 
de  fer,  etc. 

Accessoirement ,  on  pourra  alors  s'occuper  de  la  purification  de 
l'air  à  sa  sortie  des  salles.  Mais,  pour  cet  objet,  la  méthode 
de  M.  Woestyn  se  recommande-t-elle  bien  spécialement? 

Il  résulte  déjà  de  ce  qui  précède  que  cette  méthode  ne  contient 
rien  de  neuf;  mais,  en  outre,  nous  croyons  pouvoir  dire  que  le 
système  est  encore  très  incomplet  et  que,  comparé  à  d'autres 
dispositions  du  même  genre,  il  leur  est  évidemment  inférieur.  Il 
y  a  environ  dix  ans,  nous  avons  établi  dans  une  des  salles  de 
l'hôpital  intérieur  d'Amsterdam  un  système  de  chauffage  et  de 
ventilation  qui  satisfait  dans  une  plus  large  mesure  aux  exigences 
de  la  purification  de  l'air.  Non-seulement  il  y  a  un  appareil  de 
ventilation  pour  entraîner  l'air  par  une  cheminée  d'appel,  mais 
les  poêles  à  gaz  sont  construits  de  telle  sorte  que  l'air  frais  du 
dehors  vient  d'abord  s'échauffer  à  leur  contact  avant  de  se  répan- 
dre dans  la  salle.  En  outre,  l'air  qui  quitte  la  salle  traverse 
également  le  poêle;  au  moyen  d'une  disposition  particulière,  cet 
air  est  d'abord  mélangé  avec  le  gaz  destiné  à  la  combustion, 
lequel  s'allume  ensuite  au-dessus  d'une  grille  de  gaze  métallique  ; 
de  cette  manière,  il  n'y  a  aucun  danger  que  quelques-unes  des 
molécules  organiques  de  l'air  vicié  échappent  à  la  combustion, 
ce  qui  n'est  au  contraire  que  trop  à  craindre  dans  le  système  de 
M.  Woestyn. 


ARCHIVES  NÉERLANDAISES 

DES 

Sciences  exactes  et  naturelles. 


SUE  LA  CONSTITUTION 

DE  QUELQUES  CARBURES  D'HYDROGENE, 

PAR 

P.  J.  VAN  KERCKHOPP. 

(lu  à  l'Académie  des  sciences  d'Amsterdam  dans  la  se'ance  du  19  Mars  1870). 


Les  carbures  d'hydrogène  que  je  veux  examiner,  dans  leurs 
rapports  avec  le  benzol ,  sont  :  le  styrol ,  la  naphtaline  et  Tanthra- 
cène.  Dans  cette  étude  je  partirai  de  la  supposition  qu'on  regarde 
comme  fixée  la  formule  du  benzol.  Il  est  vrai  qu'il  règne  encore 
des  divergences  à  cet  égard.  Parmi  les  nombreuses  formules  de 
constitution  qui  ont  été  proposées,  la  formule  de  M.  Kolbe  est 
celle  qui,  en  apparence,  s'écarte  le  plus  des  autres;  toutefois, 
elle  peut  y  être  ramenée ,  attendu  que  M.  Kolbe  lui-même  attribue 
à  ses  radicaux  substituants  une  valeur  de  combinaison  ou  valence. 
Bien  qu'il  s'efforce  de  repousser  à  l'arrière-plan  la  valence  des 
atomes,  il  l'admet  pourtant  en  réalité.  En  effet,  lorsque  le  groupe 
CH3  ou  C2  H5  etc.  entre  dans  une  combinaison  en  qualité  de 
substituant,  il  prend  la  place  de  1  atome  H;  de  même  CH^, 
C._,H^  etc.  prennent  la  place  de  2  atomes  H,  et  C H,  C 2  H.,  etc. 
celle  de  3  atomes  H.  Or,  la  valence  de  ces  groupes  ne  peut  guère 
être  dérivée  que  de  la  quadrivalence  de  l'atome  C  et  de  l'uni- 
valence  de  l'atome  H. 

En  ce  sens ,  la  théorie  de  M.  Kolbe  ne  s'éloigne  donc  pas  autant 
qu'on  pourrait  le  croire  de  la  manière  de  voir  qui  est  le  plus 
généralement  adoptée. 

Archives  NéerlaiNDaises,  T.  V.  18 


274  p.    .T.    VAN    KERKHOFF.    SUR    LA    CONSTITUTION 

M.  Kolbe  regarde  chacun  de  ces  groupes  comme  un  seul  tout, 
agissant  comme  tel;  mais  il  ne  s'explique  pas  au  sujet  de  l'origine 
de  leur  valeur  de  substitution;  or,  ce  n'est  sans  doute  pas  dans 
les  atomes  H,  mais  uniquement  dans  les  atomes  C,  que  cette 
origine  doit  être  cherchée.  Du  reste,  la  différence  d'opinion  qui 
peut  exister  à  l'égard  de  la  constitution  du  benzol?  n'a  aucune 
importance  dans  le  cas  actuel.  De  quelque  manière  qu'on  se  repré- 
sente l'union  mutuelle  des  6  atomes  C  et  des  6  atomes  H  du  ben- 
zol, il  n'en  reste  pas  moins  certain  que  c'est  une  matière  dans 
laquelle  se  trouvent  6  atomes  H  susceptibles  de  substitution,  et 
où  les  atomes  C  sont  unis  en  une  chaîne  fermée ,  dont  quelques- 
uns  des  anneaux  sont  toujours  liés  entre  eux  par  plus  d'une  valence. 
Après  l'explication  lumineuse  donnée  à  ce  sujet  par  M.  Kekulé 
(Ber.  Ch.  Ges.  1869,  p.  362),  je  crois  qu'il  est  inutile  d'entrer 
dans  plus  de  développements  sur  la  constitution  du  benzol,  d'autant 
plus  que  c'est  un  point  d'importance  secondaire  pour  la  considé- 
ration du  rapport  qui  existe  entre  cette  matière  et  les  trois  sub- 
stances nommées  en  commençant. 

Néanmoins,  pour  se  représenter  le  choses  plus  clairement,  il 
est  bon  de  s'appuyer  sur  une  des  formules  de  constitution  qui  ont 
été  proposées  pour  le  benzol;  je  choisis  à  cet  effet  la  formule  de 
M.  Kekulé,    qui,    bien   que   non  démontrée,  a  en  sa  faveur  une 

grande  probabilité. 

Eig.  1. 

H       H 

C=C 

/         \ 
HC  CH 

\         / 
C  — C 

H       H 

Les  trois  carbures  en  question,  le  styrol,  la  naphtaline  et 
l'anthracène ,  se  distinguent,  par  de  tout  autres  propriétés  et 
une  stabilité  beaucoup  plus  grande  sous  l'action  de  la  chaleur, 
de  ceux  des  produits  substitués  du  benzol  où  l'on  trouve  une  ou 
plusieurs  chaînes  latérales ,  qui  sont  bien  en  rapport  par  le  noyau 


DE    QUELQUES    CARBURES    d'hYDROGÈNE.  275 

benzolique    mais    Don   liées   directement  entre    elles;  tel  est    par 
exemple  le  phényl-acétylène 

CgH,  (C^H)         ou         C,H(C6H,) 

Acétényl-beuzol.  Phényl-acétylène. 

G laser 

dont  il  existe  probablement  un  isomère^  savoir: 

Ce  H,  (C,  HO         ou         C,H,  (C,HO 

Acétylène-benzol.  Phénylène-acétylène. 

D'après  la  considération  que  le  styrol  peut  être  obtenu  par 
synthèse  (sans  élimination  de  quelque  autre  produit)  à  l'aide  du 
benzol  et  de  l'acétylène  ^  et  aussi  par  simple  condensation  de 
4  molécules  d'acétylène ,  on  serait  conduit ,  si  l'on  s'en  tenait  exclu- 
sivement à  ce  point  de  vue^  à  regarder  comme  la  formule  de 
constitution  la  plus  probable 

Fig.  2. 

H       H 
Ci=C 

/  \ 

HC  CH 

Il  II 

HC  CH 

.        \         / 

c— C 

H       H 

Mais  le  styrol  se  forme  aussi,  avec  séparation  de  2  atomes 
H,  par  l'action  réciproque  du  benzol  et  de  l'éthylène,  et  d'après 
cela  il  pourrait  être  représenté  par 

Fig.  8. 


H 

H 

c=c 

/ 

\ 

H 

.cîi 

c 

C- 

-C= 

\ 

// 

H 

c- 

-C 

H 

H 

18  = 


276  p.    J.    VAN    KERCKIIOFF.    SUR    LA    CONSTITUTION 

OU  par 

Fig.  4. 
H        H 

/ 
HC  CH 

\         / 

c  — c 

1    I 

HC  — CH 
H       H 

On  sait  déjà  aujourd'hui,  grâce  à  M.  Berthelot,  que  lestyrol, 
obtenu  par  des  voies  différentes,  ne  possède  pas  toujours  les  mêmes 
propriétés  ;  il  y  a  donc  au  moins  deux  modifications  isomériques , 
et  peut-être  davantage. 

Le  styrol ,  en  particulier ,  qui  a  été  obtenu  par  M.  Berthelot  au 
moyen  du  benzol  et  de  Féthylène  sous  l'influence  de  la  chaleur, 
et  qui  par  l'action  ultérieure  de  l'éthylène  peut  se  changer  en 
naphtaline,  ce  styrol,  précisément  parce  qu'il  se  forme  de  cette 
manière  et  parce  qu'il  peut  donner  naissance  à  la  naphtaline,  a 
pour  formule  de  constitution  la  plus  probable  celle  qui  a  été  donnée 
en  dernier  lieu. 

Dans  cette  constitution,  l'anneau  benzolique  primitif  est  conservé, 
ce  qui  est  d'accord  avec  l'apparition  de  combinaisons  du  benzol 
lorsque  le  styrol  est  attaqué  par  des  agents  énergiques  donnant 
lieu  à  des  produits  de  dédoublement. 

A  l'égard  de  la  naphtaline,  deux  principales  formules  de  con- 
stitution ont  été  proposées  :  la  première  par  M.  Erlenmeyer  et  ensuite 
par  MM.  Graebe  et  Liebermann,  qui  regardent  cette  matière 
comme  formée  de  deux  molécules  de  benzol  réunies  en  un  seul 
tout,  avec  élimination  de  C^H^;  la  seconde  par  M.  Kolbe,qui, 
partant  de  l'hypothèse  que  le  benzol  est  un  tricarbol  C3  Hj  2 ,  dans 
lequel  le  groupe  C  H  s'introduit  trois  fois  à  la  place  de  3  ato- 
mes H,  fait  ensuite  dériver  la  naphtaline  du  benzol  par  la  sub- 
stitution de  C4  H5  aux  trois  autres  atomes  H. 


DE  QUELQUES  CARBURES  d'hYDROGÈNE.  277 

A  chacune  de  ces  deux  manières  de  voir  on  peut  faire  de  graves 
objections. 

Bien  que  la  formule  de  MM.  Graebe  et  Liebermann  soit,  en 
beaucoup  de  cas,  assez  bien  d'accord  avec  les  produits  d'altération 
que  la  naphtaline  fournit  par  l'oxydation  ou  par  l'action  du  chlore, 
tels,  par  exemple,  que  le  bichlornaphtaquinone  et  la  pentachlor- 
naphtaline ,  cette  formule  ne  rend  pas  compte  de  la  manière  dont 
la  naphtaline  se  déduit  expérimentalement  d'autres  hydrogènes 
carbonés. 

Elle  n'offre  d'ailleurs  aucun  avantage  particulier  pour  expliquer 
la  formation  de  l'acide  phtalique. 

La  formule  de  M.  Kolbe  a  une  probabilité  encore  moindre,  vu 
qu'elle  ne  donne  pas  d'explication  simple  des  produits  de  dédou- 
blement, et  qu'elle  laisse  sans  explication  aucune  la  production 
de  la  naphtaline,  telle  qu'on  l'observe  expérimentalement. 

En  proposant  ces  formules  de  constitution,  on  a  un  peu  trop 
perdu  de  vue  les  importantes  recherches  de  M.  Berthelot,  dans 
lesquelles  ce  savant  a  réussi  à  produire  les  carbures  d'hydrogène 
dont  il  est  ici  question ,  ainsi  que  beaucoup  d'autres ,  au  moyen  de 
composés  hydrogénés  moins  riches  en  carbone.  M.  Berthelot  donne 
à  ces  actions ,  qui  ont  lieu  à  une  température  élevée ,  le  nom  de 
condensation.  Toutefois ,  elles  sont  de  deux  genres  différents  :  celles 
où  un  hydrogène  carboné  est  polymérisé,  c'est-à-dire  où  il  se 
forme,  par  simple  union  et  sans  élimination  d'une  autre  matière , 
un  nouveau  carbure ,  dont  les  atomes  sont  en  nombre  absolu  plus 
grand  mais  du  reste  dans  le  même  rapport;  et  celles  où  deux 
hydrogènes  carbonés  s'unissent  en  une  combinaison  plus  élevée, 
avec  élimination  d'hydrogène. 

De  même  qu'on  emploie  les  produits  de  décomposition  des  corps 
comme  données  pour  parvenir  à  la  connaissance  des  formules  de 
constitution,  on  peut,  avec  tout  autant  de  droit,  prendre  la  for- 
mation synthétique  comme  critérium  propre  à  fixer  cette 
constitution.  C'est  aussi  ce  qu'a  fait  M.  Berthelot,  mais  d'une 
manière  qui  lui  est  propre.  En  effet,  il  néglige  entièrement  la 
valence  des  atomes  élémentaires  et  le  mode  d'union  qu'ils  affectent 


278  p.    J.    VAN    KERKHOFF.    SUR    LA    CONSTITUTION 

entre  eux.  Ses  formules,  bien  que  n'étant  pas  tout  à  fait  empi- 
riques, mais  jusqu'à  un  certain  point  rationelles,  sont  pourtant 
plutôt  synoptiques,  et  en  tout  cas  elles  ne  donnent  pas  la  con 
stitution  dans  ses  détails.  Le  plus  souvent  toutefois  elles  peuvent 
très  bien,  comme  j'espère  le  montrer,  être  mises  d'accord  avec 
des  formules  de  constitution. 

Si  nous  fixons  maintenant  notre  attention  en  premier  lieu  sur 
la  manière  dont  le  styrol  a  été  obtenu  par  M.  Berthelot,  nous 
trouvons  que  la  production  la  plus  abondante  de  cette  matière 
se  fait  aux  dépens  de  molécules  égales  de  benzol  et  d'éthylène, 
avec  dégagement  d'hydrogène,  ce  que  M.  Berthelot  exprime  par 
l'équation 

^6^6  -i-CoH4=:C  6  H4  (C2  H^)  -hB.^. 
Ainsi  que  je  l'ai  déjà  fait  remarquer  plus  haut ,  cette  équation , 
dans   le   cas   actuel   et   en  tenant  compte  de  la  formation  de  la 
naphtaline  au  moyen  du  benzol  et  de  l'éthylène ,  paraît  plus  pro- 
bable que  la  suivante 

Ce  He  H-  C^  H4  =C  6  H.,  (C2  H3)  H-  H2, 
qui  servira  peut-être  pour  un  isomère  du  styrol. 

D'une  manière  graphique,  le  styrol  peut  être  représenté,  en 
conformité  avec  l'opinion  de  M.  Berthelot,  par  la  Fig.  4. 

Lorsque  la  production  du  styrol  résulte  de  l'action  réciproque 
du  benzol  et  de  l'acétylène ,  ce  qui  a  aussi  été  réalisé  par  M.  Ber- 
thelot, bien  que  plus  difficilement,  on  doit  admettre  que  l'acé- 
tylène, qui,  comme  on  sait,  s'annexe  si  facilement  une  molécule 
H,  s'en  empare  aux  dépens  du  benzol,  et  que  l'éthylène  ainsi 
formé  sature  immédiatement  les  deux  valences  devenues  libres  du 
benzol.  On  arrive  alors  à  la  même  formule  de  constitution  que 
ci-dessus. 

Dans  cette  formule  on  suppose  que  l'union  des  deux  molécules, 
avec  ou  sans  élimination  d'hydrogène,  se  fait  de  telle  sorte  que 
deux  atomes  C  d'une  des  molécules  entrent  respectivement  en 
rapport  avec  deux  atomes  C  de  l'autre  molécule ,  et  qu'il  se  forme 
par  conséquent  une  double  chaîne  fermée.  Si  la  combinaison  s'effec- 


DE  QUELQUES  CARBURES  d'hYDROGÈNE.  279 

tuait  d'une  autre  manière,  c'est-à-dire,  si  un  atome  C  de  la  première 
molécule  se  liait  à  un  atome  C  de  la  seconde,  avec  élimination 
d'hydrogène,  on  obtiendrait  une  chaîne  fermée  avec  une  chaîne  laté- 
rale ,  et  par  conséquent  une  matière  autrement  constituée ,  isomère 
mais  non  identique,  savoir  CqB.^  (C^Hg). 

La  manière  dont  le  styrol  se  comporte  sous  l'influence  des  agents 
d'oxydation,  tels  que  l'acide  nitrique,  conduit  à  regarder  cette 
dernière  constitution  comme  peu  probable. 

devenons  maintenant  à  la  naphtaline.  Elle  a  été  produite  par 
M.  Berthelot  en  soumettant  à  l'action  d'une  température  élevée  un 
mélange,  soit  de  styrol  et  d'éthylène,  soit  de  benzol  et  d'éthy- 
lène,  soit  de  styrol  et  d'acétylène: 


Ce  H,  (C,  H  J  +  C,  H,  =Ce  H,  (C,  H,  [C,  H,])  +  2  H^ 
CeH,+2C,H,  ==  „  +3H^ 


2 
2 

Cg  H.i  (C^  H4)  +  C2  H^  =  „  +     H2. 

On   peut,  d'après  cela,  admettre  pour  la  naphtaline  la  consti- 
tution suivante 

Fig.  5. 


H 

H 

C: 

\ 
c- 

1 

=C 
\ 
CH 

-/ 

I 

1 

HC- 

1 

1 

-CH 

1 

1 

HC: 

=  {)H 

Une  confirmation  de  cette  manière  de  voir  se  trouve  dans  l'action 
de  l'acide  iodhydrique  sur  la  naphtaline;  il  en  résulte  différentes 
combinaisons  plus  hydrogénées,  dont  la  formation  se  déduit  très 
simplement  de  notre  formule  de  constitution. 

Un  autre  fait,  qui  non-seulement  n'est  pas  en  opposition  avec 
elle,    mais    lui  donne  même  un   plus   haut  degré  de  probabilité, 


280  p.    J.    VAN    KERKHOFF.    SUR    LA    CONSTITUTION 

c'est  la  présence  de  l'acide  phtalique,  à  côté  de  l'acide  oxalique , 
parmi  les  produits  d'oxydation  de  la  naphtaline. 

Si  la  vraie  formule  du  styrol  était  Cg  H5  (C2H3),  il  faudrait 

i    C    H 
admettre  pour  la  naphtaline  la  formule  Cg  H^       n^  tt%  parce  que 

cette  matière  prend  naissance,  avec  élimination  de  2  atomes  H, 
par  l'action  de  l'acétylène  sur  le  styrol.  —  Mais  une  pareille  con- 
stitution de  la  naphtaline  offre  bien  peu  de  probabilité;  elle 
représenterait  un  benzol  avec  deux  chaînes  latérales ,  qui  donnerait 
des  produits  tout  différents  de  ceux  de  la  naphtaline,  et  qui 
n'aurait  pas,  à  une  température  élevée,  la  stabilité  propre,  en 
général,  aux  carbures  d'hydrogène  constitués  en  chaînes  fermées. 
En  effet,  des  combinaisons  benzoliques  de  ce  genre,  qui  com- 
prennent un  ou  plusieurs  carbures  d'hydrogène  en  chaînes  laté- 
rales, sont  ordinairement  transformées  par  la  chaleur  en  d'au- 
tres combinaisons,  telles  que  la  naphtaline,  l'anthracène  et  le 
chrysène. 

L'anthracène  a  été  obtenu  par  M.  Berthelot  de  différentes  ma- 
nières, par  l'action  d'une  température  élevée,  P.  sur  un  mélange 
de  styrol  et  de  benzol,  2°.  sur  un  mélange  de  benzol  et  d'éthylène, 
3".  sur  un  mélange  de  benzol  et  d'acétylène.  L'auteur  exprime 
ces  réactions  ]iar  les  équations  suivantes: 


1  C6H6  4-CgH4(C2H4)=rCj4H,o-|-2H2, 
^CeHg-hC^H^  =C,  4  H,  0  H- 3  H2 , 


Dans  tous  ces  cas  nous  voyons  l'anthracène  naître  de  sub- 
stances qui,  ensemble,  renferment  au  moins  deux  restes  ben- 
zoliques Cg  H4.  Il  y  a  donc  de  fortes  raisons  pour  admettre 
dans  l'anthracène  deux  de  ces  restes  benzoliques.  C'est  ce  qu'ex- 
prime    la    formule    C6H4   (C^H^    [C(jH4]),    qu'on    peut    aussi 

Sri     "LT 
^^.  La  constitution  graphique  devient  alors 
O6H4 


DE    QUELQUES    CARBURES    d'hYDROGÈNE.  281 

Fig.  6. 


H 

H 

C= 

=C 

/ 
HC 

CH 

C- 

1 

1 

1 

HC- 

1 

1 

-CH 

1 

1 
C- 

1 
-C 

h/ 

\ 
CH 

\ 

Cz 

/ 
=C 

H 

H 

Cette  constitution  est  en  parfaite  harmonie  avec  celles  du  styrol 
et  de  la  naphtaline.  Elle  indique  que  la  synthèse  de  Tanthra- 
cène  ,  par  l'action  de  la  naphtaline  sur  le  benzol ,  ne  peut  se  faire 
sans  élimination  de  carbone  ou  de  carbures  d'hydrogène;  d'un 
autre  côté,  elle  rend  très  bien  compte  des  modes  de  production 
découverts  par  M.  Berthelot,  Elle  n'est  pas  non  plus  en  contra- 
diction avec  la  dérivation  de  l'anthracéne  du  chlorure  de  benzyle. 

Elle  diffère  essentiellement  de  la  constitution  qui  a  été  proposée 
pour  l'anthracéne  par  MM.  Graebe  et  Liebermann,  laquelle  part 
de  l'hypothèse  que  trois  molécules  de  benzol  sont  unies  en  une 
chaîne  triple,  après  élimination,  non-seulement  d'hydrogène,  mais 
aussi  de  carbone.  Elle  ne  suppose  que  deux  anneaux  benzoliques , 
reliés  entre  eux  par  l'intermédiaire  du  groupe  C^H^,  mais  non 
pas  directement,  comme  l'admettent  MM.  Graebe  et  Liebermann. 

Cette  constitution  est-elle  maintenant  la  plus  probable  pour  tout 
hydrogène  carboné  de  la  formule  empirique  C  j ,,  H  ^  „  ?  A  cette 
question  on  doit  répondre  négativement.  On  connaît  en  effet ,  d'après 
les  recherches  de  M.  Glaser,  un  phényl-acétylène  dont  la  consti- 
tution est  très  probablement 

C  6  H  5  —  c  —  c  —  H , 


282  p.    J.    VAN    KERKHOFF.    SUR    LA    CONSTITUTION 

et  un  di-acétényl-phényle 

C„H,-C  EC-C  =C-C,H,; 
or,    le   premier  de  ces  composés  pourrait,  par  la  substitution  de 
CgHr,  à  l'atome  H,  donner  une  combinaison 

C,H,-C  EC-CeH,, 
qui  aurait  par  conséquent  aussi  pour  formule  empirique  C ,  4  H  ^  ^ , 
mais  qui,  si  la  formule  que  j'ai  attribuée  à  l'anthracène  d'après 
les  expériences  de  M.  Berthelot  est  exacte,  serait  isomère  mais 
non  identique  avec  cette  dernière  substance.  Effectivement,  le 
tolane,  découvert  par  MM.  Limpricht  et  Scliwanert,  qui  répond 
à  la  formule  C  ^  4  H  j  0  et  présente  des  caractères  (un  point  de 
fusion  par  exemple)  tout  autres  que  l'anthracène,  peut  être  regardé 
comme  possédant  réellement  la  constitution  écrite  en  dernier  lieu , 
surtout  quand  on  considère  qu'il  tire  son  origine  du  toluylène  (stilbène) 
et  qu'on  tient  compte  de  la  constitution  de  ce  corps  ainsi  que  de 
celle  du  ditolyle. 

Bien  que  les  formules  de  constitution  qui  viennent  d'être  pro- 
posées soient  fondées  sur  les  importantes  recherches  de  M.  Berthelot 
et  aient  par  conséquent  la  probabilité  en  leur  faveur,  il  ne  sera 
permis  de  les  tenir  pour  vraies  que  lorsqu'une  étude  plus  complète 
aura  tranché  la  question.  D'autres  modes  de  synthèse  devront 
être  essayés,  les  produits  de  substitition  et  de  dédoublement  devront 
être  analysés  en  détail,  et  en  outre  on  aura  à  rechercher  s'il 
n'existerait  pas  encore  d'autres  isomères  de  ces  carbures  d'hydrogène. 

Si  l'on  réussit  à  isoler  le  carbure  C4  H^ ,  le  diacétylène,  ce  que 
les  expénences  de  M.  Berthelot  et  les  considérations  théoriques 
de  M.  Limpricht  donnent  lieu  d'espérer,  il  sera  possible  de  trouver 
dans  les  résultats  de  l'action  de  C^  H4  sur  le  benzol,  etc.,  des 
arguments  pour  ou  contre  la  constitution  proposée. 

En  terminant ,  je  ferai  remarquer  que  des  carbures  des  formules 
CjoHg,  CJ4H10,  CjgH^,  (chrysène)  pourraient  consister  en 
une  chaîne  fermée  unique. 

Ces  carbures  seraient  alors  dans  un  rapport  intime  avec  des 
polymères  plus  condensés  de  l'acétylène,  et  ils  se  déduiraient  de 


DE    QUELQUES    CARBURES    d'hYDROGÈNE.  283 

ceux-ci  par  élimination  d'hydrogène  et  établissement  d'une  liaison 
double  entre  certains  atomes  C. 

Dans  le  benzol  ^  d'après  M.  Kekulé,  la  liaison  entre  les  atomes 
C  successifs  est  alternativement  double  ou  simple ,  et  par  conséquent 
représentée  par  les  chiffres  2.  1.  2.  1.  2.  1.  Si  la  même  chose 
existait  dans  les  polymères  plus  élevés  de  l'acétylène ,  C  i  q  H  ^  o 
donnerait  naissance  à  CjoHg  par  l'élimination  de  2  atomes  H, 
en  même  temps  que  deux  atomes  C ,  unis  jusqu'alors  par  un  lien 
simple,  contracteraient  une  liaison  double. 

La  liaison 

2.  1.  2.  1.  2.  1.  2.  1.  2.  1.  de  CjoH^o 
deviendrait  alors 

2.  1.  2.  1.  2.  2.  2.  1.  2.  1 

au 
lieu  de  1. 
De  la  même  manière,  Cj^  H,  4,  venant  à  perdre  deux  fois  H ^ , 
donnerait   naissance   à  C  j  4  H  j  0 ,    où   les   liaisons   mutuelles  des 
atomes  C  seraient  exprimées  par  le  schéma  suivant 
2.  1.  2.  1.  2.  2.  2.  1.  2.  1.  2.  2.  2.  1 

au  au 

lieu  de  1.  lieu  de  1. 

Ainsi  encore ,  au  nonacétylène  C  j  g  H  ^  g  pourrait  se  rattacher 
génétiquement  le  chrysène  C  ^  0  H  j  ^  ?  dont  les  atomes  C  seraient 
liés  entre  eux  conformément  au  schéma 

2.  1.  2.  2.  2.  1.  2.  1.  2.  2.  2.  1.  2.  i.  2.  2.  2.  1. 

au  au  au 

lieu  de  1.  lieu  de  1.  lieu  de  1. 


QUELQUES    ESSAIS 

CONCERNANT  LE 

TITRAGE  DES  ALCALOÏDES  DU  QUINQUINA , 

PAR 

P.   J.  VAN  KERCKHOFF. 

(lu  à  l'Académie  des  Sciences  d'Amsterdam  dans  sa  séance  du  30  janv.  1869.) 


Ce  n'est  pas  mou  intention  de  parler  des  nombreuses  méthodes 
qui  ont  été  proposées  pour  le  dosage  des  alcaloïdes  en  général 
ou  pour  celui  des  alcaloïdes  des  écorces  de  quinquina  en  parti- 
culier. La  plupart  de  ces  méthodes  ont  leurs  avantages  et  leurs 
inconvénients  spéciaux.  Je  ne  m'occuperai  que  d'un  seul  point, 
celui  de  savoir  s'il  existe  pour  les  alcaloïdes  du  quinquina  une 
bonne  méthode  de  titrage. 

C'est  à  MM.  Glénard  et  Guillermond  que  nous  devons  le 
premier  procédé  de  détermination,  par  voie  de  titrage,  de  la 
quinine  de  l'écorce  de  quinquina.  La  méthode  qu'ils  ont  décrite 
est  en  eiïet  très  simple  ^).  Elle  consiste  à  pulvériser  l'écorce, 
à  en  peser  10  gr. ,  à  humecter  avec  de  l'eau,  mélanger  avec  du 
lait  de  chaux,  sécher,  réduire  en  poudre,  faire  digérer  pendant 
I  d'heure  avec  de  l'éther  exempt  d'eau  et  d'alcool  (100  C.C), 
décanter  l'éther  clair,  en  mêler  20  C.C.  avec  un  volume  déter- 
miné d'acide  sulfurique  ou  oxalique  titrés,  et  doser,  après  addi- 
tion de  teinture  de  bois  de  Ste-Marthe,  avec  de  l'ammoniaque  titrée. 

Dans  ce  procédé,  la  quinine  seule  est  déterminée;  il  n'est 
tenu  aucun  compte  de  la  présence  des  autres  alcaloïdes.  En 
outre ,  différentes  objections  ont  été  faites  à  cette  méthode  par 
M.  Faget  et  par  MM.  Thomas  et  Taillandier;  pour  une  bonne 
partie,  on  peut  remédier  aux  défauts  signalés.  Mais  la  grande 
difficulté    réside,    d'abord    dans   l'emploi,    pour   des    poudres    si 


')  Répertoire  de  Chim.  appliq.  T.  1.,  p.  132  ;  T.  2,  p.  61  ;  T.  4,  p.  58. 


p.  J.  VAN  KEKGKHOFF.  QUELQUES  ESSAIS  CONCERNANT  ETC.   285 

fines  et  si  hygroscopiques  ;  d'éther  qui  doit  être  absolument  exempt 
d'eau  et  d'alcool;  ensuite,  et  surtout,  dans  le  mesurage  de 
volumes  exacts  d'un  liquide  aussi  volatil  et  aussi  dilatable  que 
l'éther.  L'erreur  qui  en  résulte  ne  peut  être  évitée  entièrement, 
même  en  faisant  usage  d'appareils  clos ,  et  elle  exerce  une  influence 
notable,  vu  qu'on  n'opère  que  sur  une  fraction  de  l'éther  employé. 

En  suite  de  l'idée  émise  par  MM.  Glénard  et  Guillermond, 
mais  en  m'écartant  assez  notablement  de  leur  méthode,  j'ai 
exécuté  quelques  essais  de  titrage,  dont  je  prends  la  liberté  de 
soumettre  à  l'Académie  la  marche  et  les  résultats. 

J'ai  cru  devoir  éviter,  non  pas  précisément  l'emploi  de  l'éther, 
mais  le  mesurage  de  cet  éther;  en  outre,  il  m'a  paru  désirable 
de  doser  aussi,  au  moins  approximativement,  les  autres  alca- 
loïdes de  l'écorce,  tout  en  m'opposant,  autant  que  possible,  à 
l'entrée  en  dissolution  d'autres  principes  constituants.  A  cet  effet, 
je  me  suis  servi  de  l'excellent  dissolvant  de  la  plupart  des 
alcaloïdes  indiqué  par  MM.  Uslar  et  Erdmann  i),  savoir  de 
l'alcool  amylique,  sans  toutefois  m'astreindre  à  la  méthode  de 
ces  savants  pour  l'extraction  des  alcaloïdes  des  matières  premières. 
J'ai  cru  surtout  devoir  éviter  l'emploi  de  l'ammoniaque,  qui  est 
prescrit  dans  les  deux  méthodes  que  je  viens  de  rappeler,  dans 
la  dernière  pour  la  mise  en  liberté  des  alcaloïdes,  dans  l'autre 
pour  le  dosage  par  reste. 

Voici  la  marche  que  j'ai  suivie  dans  l'analyse. 

MARCHE    DE    l'aNALYSE. 

Piler  l'écorce,  triturer  et  bien  mélanger  la  poudre. 

Sécher  la  poudre  à  100%  la  laisser  refroidir  dans  l'exsiccateur , 
puis  peser. 

Humecter  la  poudre  avec  de  l'eau,  puis  la  mêler  avec  un 
excès  d'eau  de  chaux  récemment  préparée. 

Sécher  le  mélange  à  100"  dans  une  étuve. 

Faire  digérer  la  matière  sèche,  dans  un  matras  et  à  chaud, 
avec  de  l'alcool  amylique  pur. 


')  Annal,  d.  Ch.  u.  Pharm.  T.  CXX ,  p.  121. 


286   p.  J.  VAN  KERGKHOFF.  QUELQUES  ESSAIS  CONCERNANT  LE 

Porter  la  masse  sur  un  filtre,  et  laver  le  résidu  sur  le  filtre 
avec  de  Talcool  amylique  chaud,  à  différentes  reprises. 

Ajouter  à  la  dissolution  amyl-alcoolique ,  reçue  dans  un  matras , 
un  volume  déterminé  d'acide  chlorhydrique  étendu  et  titré,  qui 
se  rassemble  au-dessous  de  l'alcool  amylique;  ensuite,  chauffer 
doucement,  boucher  le  matras  et  secouer. 

Séparer  la  dissolution  chlorhydrique  de  l'alcool  amylique,  à 
l'aide  d'un  entonnoir  à  robinet. 

Secouer  l'alcool  amylique  dans  l'entonnoir  avec  un  nouveau 
volume  déterminé  d'acide  titré,  puis  séparer  les  liquides.  Répéter 
cette  opération  une  troisième  fois.  —  Ensuite,  laver  l'alcool 
amylique  dans  l'entonnoir  avec  de  l'eau  distillée. 

Réunir  les  diverses  liqueurs  acides  et  les  eaux  de  lavage, 
ajouter  un  peu  de  teinture  de  bois  de  Ste-Marthe,  puis  titrer 
au  violet  avec  la  soude  caustique. 

Ajouter  à  la  dissolution  neutre  assez  de  soude  caustique  pour 
précipiter  les  alcaloïdes. 

Recueillir  le  précipité  sur  un  filtre,  le  laver  plusieurs  fois 
avec  de  l'eau  froide  et  le  sécher  au-dessous  de   100". 

Épuiser  le  contenu  du  filtre  et  le  filtre  lui-même  avec  de  l'éther 
anhydre ,  et  répéter  cette  opération  avec  de  petites  quantités  d'éther. 

Mêler  à  la  dissolution  éthérée  un  volume  déterminé  d'acide 
oxalique  titré,  ajouter  un  peu  de  teinture  de  bois  de  Ste-Marthe, 
puis  titrer  en  retour  par  la  soude  caustique  jusqu'au  rose  faible. 

EGLAIRAISSEMENTS    SUR    QUELQUES    POINTS. 

L'alcool  amylique  doit  être  pur  et  surtout  parfaitement  neutre. 

Le  traitement  par  ce  liquide  doit  se  faire  dans  une  cage  bien  ven- 
tilée ,  à  cause  de  l'action  désagréable  et  nuisible  de  l'alcool  amylique. 

Le  titrage  de  l'acide  chlorhydrique  se  fait  avec  plus  de  précision 
à  une  douce  chaleur,  et,  en  opérant  sur  un  acide  si  faible,  il 
n'y  a  pas  à  craindre  qu'il  s'en  volatilise  une  partie. 

La  teinture  de  bois  de  Ste-Marthe ,  à  raison  de  la  rapidité  du  passage 
d'une  teinte  à  l'autre,  est  beaucoup  plus  sensible  que  celle  de  cam- 
pêche  ou  de  tournesol.  Quand  on  emploie  des  alcalis  caustiques ,  elle 
ne  laisse  rien  à  désirer.  —  Le  passage  au  rose  est  le  point  juste. 


TITRAGE     DES    ALCALOÏDES    DU    QUINQUINA. 


287 


Dans  le  dosage  de  la  quinine  seule  on  n'a  à  se  préoccuper 
que  de  la  teinte  de  passage,  non  de  la  formation  d'un  précipité, 
dont  l'apparition  a  lieu  quelquefois  plus  tôt,  à  cause  du  peu  de 
solubilité  de  l'oxalate   de  quinine. 

On  ne  peut  nier  qu'une  erreur  dans  le  titrage  ne  se  reporte 
agrandie  sur  la  richesse  en  alcaloïdes.  Pour  ce  motif,  il  est 
absolument  nécessaire  d'employer  des  liqueurs  de  titrage  étendues 
et  d'opérer  avec  tous  les  soins  possibles. 

PREMIÈRE    ESPÈCE     DE    QUINQUINA. 


I. 

IL 

m. 

Poids    de    l'écorce    pilée    et 

séchée 

8.4108  Gr 

7  2961   Gr 

!0  5042  Gr 

Alcool   amylique   employé... 

120  ce. 

12i)  ce. 

170  ce. 

x\cide  chlorhyclrique  employé. 

75      // 

75      // 

75      /, 

Eorce  de  l'acide  chlorhydrique 

en   ce.   de    dissolution  de 

soude  caustique 

1  ce.  de  dissolution  de  soude 

75CC=32.5CC. 

75Ce  =  32.5eC. 

75  CCr:r32.5('C. 

caustique  contient  0,031  Gr. 

m,  0.  _ 

Titré  au  violet. 

Dissolution  de  soude  employée. 

31.1G  ce. 

31.204  ce. 

30.462  ce. 

(en  partie  décime). 

Alcaloïdes  exprimés  en  disso- 

lution de  soude 

1.340     // 

1.296     // 

2.038      // 

Idem    idem     en  Na^  0. .  . 

0.04127  Gr. 

0.03992  Gr. 

0.06277  Gr. 

Idem    idem     en  Na^  0  % 

de  l'écorce * 

0.489 

0.549 

0.597 

Acide  oxalique  décime  employé 

21.75  ce. 

20.00  ce. 

25.00  ce. 

Titré  par  reste  avec  dissolution 

de  soude 

15.62     // 

15.34     // 

18.13     // 

Equivalent  à  acide    oxalique 

décime . 

15.93     // 

15.65     // 

18.49     // 

Donc,  poids  d'acide  oxalique 

cristallisé   pour  la  quinine. 

0.0367  Gr. 

0.0274  Gr. 

0.0410  Gr. 

Comme  on  a  :  oxalate  de  chi- 

, 

nine  =  2C,„H,,N,0,, 

C   H   0  ..    ..      .        .      . 

0.1887     '/ 

0.1409     /' 

.2     -^^2     V-r^.   ....... 

il  Vient  pour  la  qumme 

0.2109     // 

ou  en  %  de  l'écorce 

2.23 

1.93 

2.01 

correspondant  à  Na^  0  en  % . 

0.213 

0.185 

0.192 

Ueste  donc  pour  les  autres  al- 

caloïdes en  '/■  Na^  0 

0.276 

0.364 

0.405 

Calculé  %  cinchonine 

2.74 

3.61 

4.02 

Moyenne  en  % 

Quinine   

^^"'^97       ~" 

Cinchonine 

3.81 

288       p.    J.    VAN    KERCKIIOFF.    QUELQUES    ESSAIS    CONCERNANT    LE 


DEUXIÈME    ESPÈCE    DE    QUINQUINA    (CaltSCiya). 


I. 

II. 

1 

III. 

Poids   de    l'écorce  pulvérisée 

et  séchée  à  lOQo 

12.7399  Gr. 

8  6386  Civ 

16.1241   Gr. 

265  ce. 

Alcool  araylique  employé 

185  ce. 

D.lJ»J(JvJ      VJIl. 

185  ce. 

Acide  chlorliydrique  employé. 
Iforce  de  l'acide  chlorliydrique 

100     // 

100     // 

100    // 

eu   ce.   de  dissolution  de 

soude  caustique 

10CCr=4.55eC. 

|Ar;r;_4  KKnn 

10Cerr4.55CC. 

1  ce.  de  dissolution  de  soude 

-l  \J  V-V  V-/  — ^    12,  tf  o  KJ KJ  , 

caustique  contient  0,02619 

Gr.  Na,  0. 

1  ce.  de  dissolution  sodique 

décime     =     0.00263     Gr. 

Na,  0. 

Titré  au  bleu-violet. 

Dissolution  sodique  employée. 

39  ce. 

40  ce. 

39  ce. 

Dissolution     sodique    décime 

employée 

30.50  // 

29.00  // 

15.95  // 

Alcaloïdes  exprimés  en  Na^  0. 

0.09001  Gr. 

0.06776  Gr. 

0.12828  Gr. 

Idem  idem  en  Na.^  0  >    de 

l'écorce 

0.741 

0.784 

0.794 

Acide    oxalique    décime    em- 

ployé   

60  ce. 

35  ce. 

60  ce. 

Force  de  l'acide  oxalique  dé- 

cime en  dissolution  sodique 

décime 

10  =  11.785  ce. 

]o  =  11.785  ce. 

10  =  11.785  ce. 

Acide    oxalique    décime  ^  em- 

ployé ,    exprimé   en    dissol. 

sodiqne  décime 

70.71  ce. 

41.25  ce. 

70.71  ce. 

Titré    par    reste  avec   dissol. 

sodique  décime 

57.95 

34.20 

55.40 

Donc,    quinine    exprimée   en 
dissol.  sodique  décime 

12.76 

7.50 

15.31 

Quinine  exprimée  en  Na^  0. 

0.0335639  Gr. 

0.0185443  Gr. 

0.0402714  Gr. 

Quinine  exprimée  en  Na,  0  % 

de  l'écorce 

0.276 

0.215 

0.249 

On   ajouta  ensuite  dissol.  so- 

dique décime 

12.76  ce. 

7.05  ce. 

15.21  ce. 

d'oii  résulta  dans  les  trois 

essais  un  précipité  qui  n'aug- 
menta pas  par  une  nouvelle 

goutte    de   dissol.    sodique 

décime . 

Pour  s'assurer  si  l'augmenta- 

tion de  la  quantité  d'acide 

oxalique   et  de  soude  dans 

la  liqueur  avait  quelque  influ- 

ence, on  ajouta,  aux  liqueurs 

maintenant  troubles ,  acide 

oxalique  décime 

25  ce. 

25  ce. 

TITRAGE    DES    ALCALOÏDES    DU    QUINQUINA. 


289 


II. 


III. 


ce  qui  donna,  en  chauffant 

légèrement ,  des  dissolutions 

limpides . 

Cet    acide    oxalique    décime 

correspond  à  dissol.  sodique 

décime 

29.46  ce. 

29.46  ce. 

Titré    par    reste   avec  dissol. 

sodique  décime 

16.25 

13.70 

Donc ,    quinine    exprimée    en 

dissol.  sodique  décime.  .    . 

13.21 

15.76 

Quinine  exprimée  en  Na..  0. 

0.0347476  Gr. 

0.0414551  Gr. 

Quinine  exprimée  en  N a. ^  0  % 

de  l'écorce 

0.286 

0.257 

Comme    62    parties    Na^    0 

équivalent  à  618  parties  de 

quinine,  on  a  quinine  en  %  de 

l'écorce  d'après  le  1er  dosage 

2.881 

2.217 

2.602 

//         //  2e        // 

2.989 

2.686 

En  retrancliant  des  alcaloïdes 

exprimés  en  dissol.  sodique 

0.711  y^ 

0.784  % 

0.794  % 

décime  la  quantité  de  qui- 

nine   du    premier     dosage 

exprimée  en  dissol.  sodique 
décime,    il   reste   pour   les 

0.276 

0.215 

0.249 

autres    alcoloïdes   exprimés 

en  dissol.  sodique  décime. 

0.465 

0.569 

0.585 

Dans  la  supposition  que  tout 

le  reste  fût  de  la  cinchonine , 

on  calculerait  pour 

Cinchonine  en  %  de  l'écorce. 

4.62  % 

5.65  % 

5.85  % 

EXAMEN    COMPARATIF    DE    DEUX    ESPECES    DE    QUINQUINA, 


A 

B 

Calisaya. 

Huanuco. 

I.       1 

II. 

Poids    de  l'écorce   pulvérisée 

et  séchée  à  100^ 

7.3683  Gr. 

15.9552  Gr. 

8.0181  Gr. 

Alcool  amylique  employé 

170  ce. 

210  ce. 

145  ce. 

Acide  chlorhydrique  employé 

100     // 

103     // 

100     » 

Force  de  l'acide  chlorhydrique 

en  ce.  de  dissol.  de  soude. 

ioee.=:4.55ec. 

ioee=4.55ee. 

ioee.==4.55ce. 

1  ce.  de  dissol.  de  soude  con- 

tient 0,02619  Na'O. 

1     ce.  de  dissol.  sod.  décime 

contient  0.00263  Na3    0. 

Titré  au  violet. 

Dissolution  de  soude  employée. 

40  ce. 

40  ce. 

40  ce. 

Archives  Néerlandaises,  T.  V. 


19 


290       p.    .T.    VAN    KERCKHOFF.    QUELQUES    ESSAIS    CONCERNANT    LE 


B 

Huanuco. 


II. 


Dissol.  sodique  décime  em- 
ployée   

Alcaloïdes  exprimés  en  Na^  O. 
Idem  idem  en  Na^  O  %  de 
l'écorce 

Acide  oxaliq^^e  décime  em- 
ployé  

qui  exigeraient  en  dissol. 
sodique  décime 

Titré  par  reste  avec  dissol. 
sodique  décime 

Donc,  quinine  exprimée  en 
dissol.  sodique  décime.  .  .  . 

Quinine  exprimée  en  Na^  O. 
Idem  idem  en  Na.^  0  % 
de  l'écorce 

Quinine  en  %  de  l'écorce.  .  . 


31.60  ce. 
0.060924  Gr. 

0.820 

35  ce. 

41.25  // 

35.85 

5.40  ce. 
0.0142092  Gr, 

0.193 
2.017 


1.30  ce. 

0.176375  Gr. 
1.105 

25  ce. 

29.46  // 
26.50. 


2.96  ce. 

0.007786  Gr. 

0.048 
0.501 


15.65  ce. 

0.102870  Gr, 
1.283 

25  ce. 

29.46  // 
26.60 


2.86  ce. 

0.007523  Gr, 

0.093 

0.972 


Le  précipité  produit  par  un  excès  de  dissolution  de  soude 
n'était  pas  floconneux.  Celui  de  A  donnait  une  forte  réaction  de 
quinine ,  celui  de  B  n'en  donnait  qu'une  faible.  La  petite  quantité 
de  matière  que  le  Huanuco  abandonne  à  l'éther  consiste  donc 
essentiellement  en  cinchonicine ,  et  peut-être  aussi  en  quinidine, 
substances  qui  sont  un  peu  solubles  dans  l'éther.  En  effet ,  d'après 
les  expériences  de  MM.  Thomas  et  Taillandier,  100  CC.  d'éther 
dissoudraient  0,244  gr.  de  quinidine  et  0,040  gr.  de  cinchouicine. 

RÉSUMÉ. 


Première  espèce  de  quinquina. 

Deuxième    //       //         // 

Troisième    //       //         '/ 
Quatrième    f       »         " 


2.23% 

2.88 
2.99 

2.02 

0.50 


Richesse  en  quinine. 


II. 


1.93% 
2.25 


0.97 


III. 


2.01% 

2.60 
2.69 


TITRAGE    DRS    ALCALOÏDES    DU    QUINQUINA.  291 

Il  résulte  de  ce  qui  précède: 

P.  que  l'emploi  de  Téther  comme  liquide  volumétro-analytique 
(proposé  par  MM.  Grlénard  et  Guillerraond)  peut  être 
entièrement  évité; 

2^  que  le  dosage  proposé^  exécuté  avec  soin,  donne  des 
résultats  très  satisfaisants; 

^^.  qu'en  faisant  par  cette  méthode  des  essais  comparatifs  sur  le 
même  quinquina ,  on  obtient  des  chiffres  bien  concordants  ; 

4".  que  la  méthode  se  recommande  par  la  facilité  avec 
laquelle  ou  se  débarrasse  des  autres  matières  contenues 
dans  l'écorce  et  on  obtient  une  dissolution  incolore; 

5".  que  d'un  côté,  il  est  vrai,  elle  tend  à  donner  une 
proportion  de  quinine  un  peu  trop  forte ,  parce  que  la 
quinidine  (si  celle-ci  existe  réellement  dans  l'écorce)  et  la 
cinchonine  ne  sont  pas  tout  à  fait  insolubles  dans  l'éther; 
mais  que  cette  erreur  est  contre-balancée  par  une  autre  agis- 
sant en  sens  contraire ,  qui  provient  de  ce  que  la  quinine 
n'est  pas  absolument  insoluble  dans  l'eau; 

G^.  que  la  méthode  ne  devient  propre  à  faire  connaître  la 
proportion  de  quinidine  et  de  cinchonine,  que  si  la  partie 
insoluble  dans  l'éther  est  soumise  à  un  traitement  ultérieur, 
traitement  auquel  la  méthode  de  M.  De  Vrij  paraît  pouvoir 
s'appliquer  avec  succès.  Dans  les  essais  dont  je  viens  de 
rendre  compte,  je  n'ai  pas  effectué  cette  séparation. 


19* 


SUR  LA  DUREE  ET  LA  MARCHE 


COURANTS  GALVANIQUES  D'INDUCTION, 


A.  NYLAND. 


Des  expériences,  faites  il  y  a  quelques  années,  avaient  appris 
à  M.  le  professeur  Donders  que  l'électricité ,  qui  jaillit  entre  les 
extrémités  de  l'hélice  secondaire  lors  de  l'ouverture  du  courant 
primaire,  se  compose  de  plus  d'une  étincelle.  Ce  savant  s'était 
servi ,  selon  la  méthode  qui  a  été  suivie  également  par  M.  Fedder- 
sen  dans  ses  observations  sur  la  décharge  de  la  bouteille  de  Leyde 
(Pogg.  Ann.j  CXIII  et  CXIV),  d'un  miroir  tournant  à  rotation 
relativement  lente.  Ce  n'est  que  lorsque  les  extrémités  de  l'hélice 
secondaire  étaient  à  peu  près  éloignées  l'une  de  l'autre  à  la  limite 
de  la  distance  explosive,  qu'on  voyait  dans  le  miroir  une  étincelle 
unique  (Voir  Nederl.  Archief  voor  Genees-  en  Natuurkunde ,  1865, 
II,  p.  332). 

L'emploi  fréquent  des  étincelles  d'induction,  pour  la  détermina- 
tion du  temps  physiologique,  fit  naître  chez  M.  Donders  le  désir 
d'étudier  ces  étincelles  avec  plus  de  soin.  Dans  le  courant  de  l'année 
1868  il  exécuta  différentes  expériences  d'après  une  méthode  de 
beaucoup  supérieure  à  la  première  et  que  je  ferai  connaître  plus 
loin.  Ses  résultats  ont  été  communiqués  à  l'Académie  royale  des 
Sciences,    et    on    en    trouve    un    résumé  dans  les  Onderzoelanqen 


A.  NYLAND.  SUR  LA  DUREE  ET  LA  MARCHE  ETC.       293 

gedaan  in  fiel  Physiologisc/i  Laboratoriwn  der  iJtrechtsche  Hooge- 
school,  II,  1868 — 69,  p.  316 — 318.  M.  Donders  fit  observer  à 
bon  droit  que  les  résultats  déjà  obtenus  étaient  d'un  grand  intérêt 
pour  la  théorie  de  Télectricité  d'induction,  et  que  la  méthode 
employée  promettait  de  donner  encore  beaucoup  plus  si  l'on  avait 
le  temps  de  l'appliquer  d'une  manière  suivie  et  complète. 

Grâce  à  l'entremise  de  M.  le  professeur  Grinwis,  M.  Donders 
a  bien  voulu  m'autoriser  à  continuer  les  recherches  commencées 
par  lui ,  et  il  a  même  eu  la  bienveillance  de  mettre  à  cet  effet  à 
ma  disposition  une  des  salles  du  Laboratoire  physiologique  de 
l'université.  De  son  côté,  M.  le  professeur  Buijs  Ballot  m'a  permis 
de  faire  usage  de  tous  les  instruments  du  Cabinet  de  physique 
dont  je  pouvais  avoir  besoin. 

C'est  d'après  leurs  conseils  que  j'ai  entrepris  ce  travail,  et  si 
je  n'ai  épargné  ni  temps  ni  peine  pour  multiplier  les  expériences 
et  leur  donner  le  degré  de  précision  nécessaire,  je  me  plais  à 
reconnaître  que  mon  zèle  a  été  animé  et  soutenu  par  l'appui 
qu'ils  ont  bien  voulu  me  prêter. 

§  1.    MÉTHODE. 

La  plupart  de  mes  expériences  ont  été  faites  avec  le  grand 
i  n  d  u  c  t  e  u  r  de  Ruhmkorff  du  Cabinet  de  physique  de  l'Université. 
Avec  cet  appareil,  en  employant  comme  batterie  inductrice  6  à 
10  éléments  de  Grove,  on  obtenait  il  y  a  quelques  années  des 
étincelles  de  25  centimètres  de  longueur.  Depuis  lors,  par  une 
cause  inconnue,  il  a  perdu  de  son  énergie,  et,  pendant  toute  la 
durée  de  mes  recherches,  sa  force,  maintenant  constante,  s'est 
traduite  par  des  étincelles  de  8  à  10  centimètres.  Je  ne  me  suis 
toutefois  pas  servi  de  l'inducteur  complet  dans  toutes  les  expé- 
riences ,  car  une  étude  rationnelle  des  courants  galvaniques  induits 
doit  partir  de  la  disposition  la  plus  simple,  composée  uniquement 
d'une  hélice  inductrice  et  d'une  hélice  induite.  Pour  obtenir  dans 
cette  expérience  délicate  une  action  assez  intense  pour  pouvoir 
être  mesurée  par  la  méthode  employée,  ou  a  besoin  d'une  hélice 
secondaire  très  longue,  et  c'est  aussi  ce  que  je  trouvais  dans  mon 


294  A.  NYLAND.  SUR  LA  DUREE  ET  LA  MARCHE 

appareil  de  Rulimkorff  lorsque  T hélice  primaire  intérieure  et  le 
noyau  eu  étaient  enlevés. 

11  ne  sera  donc  pas  inutile  de  donner  d'abord  la  description 
de  cet  inducteur^  qu'on  voit  iiguré  dans  la  planche  I. 

Au  centre  se  trouve  un  faisceau  de  quelques  centaines  de  fils 
de  fer  mou,  chassés  dans  un  cylindre  mince  de  bois.  C'est  ce 
qu'on  appelle  le  noyau  magnétique.  Ce  noyau  est  recouvert  de 
300  tours  d'un  fil  de  cuivre  de  2  mm.  d'épaisseur,  entouré  de 
soie;  le  fil  est  enroulé  avec  assez  de  force  pour  serrer  le  bois, 
de  sorte  que  le  faisceau  et  l'hélice  forment  une  masse  unique, 
qu'on  peut  retirer  de  l'appareil  après  avoir  enlevé  les  deux  dis- 
ques épais  de  gutta-percha  qui  se  trouvent  aux  extrémités  et  dont 
l'un  est  visible  dans  la  figure.  Cette  hélice  primaire,  que 
traverse  le  courant  de  la  pile,  constitue  avec  le  noyau  magné- 
tique la  partie  inductrice  de  l'appareil.  Les  extrémités  de  l'hélice 
primaire  aboutissent  en  B  et  C. 

Autour  de  cette  hélice  se  trouve  un  cylindre  de  caoutchouc  durci, 
sur  lequel  est  enroulé  le  fil  induit.  Celui-ci  est  un  fil  de  cuivre 
entouré  de  soie ,  beaucoup  plus  mince  que  le  précédent ,  épais  de 
%  mm.  et  long  de  100,000  mètres.  Dans  notre  inducteur  les  tours 
de  spire  ne  sont  pas  encore  partagés  en  groupes,  comme  dans 
les  „machines  cloisonnées"  construites  d'après  les  indications  de 
M.  Poggendorft',  mais  ils  s'étendent  sur  toute  la  longueur,  en 
formant  plusieurs  couches  séparées  entre  elles  par  des  couches 
minces  de  caoutchouc.  Les  extrémités  de  cette  hélice  secon- 
daire se  trouvent  en  a  et  h. 

Dans  le  support  de  l'appareil  est  logé  le  condensateur,  qui 
consiste  en  deux  feuilles  d'étain  d'une  grande  surface,  pliées  et 
séparées  par  un  morceau  plié  de  taffetas.  Avec  ces  feuilles  d'étain 
communiquent  les  boutons  A  et  D. 

Sur  ces  feuilles  métalliques  peut  se  répandre  le  courant  primaire 
lorsque  son  circuit  est  ouvert.  L'extra-courant  de  riiélice  primaire, 
le  courant  induit  de  l'hélice  secondaire  et  les  courants  magnéti- 
ques induits  du  noyau  contrecarrent  le  courant  primaire  lors  de 
la  fermeture,  et  à  l'ouverture  ils  accélèrent  par  conséquent  le  cou- 


DES    GOURANTS    GALVANIQUES    d'iNDUCTIOIV.  295 

rant  primaire,  qui  trouve  alors  une  issue  dans  le  condensateur. 
L'étincelle  d'ouverture  du  courant  primaire  est  en  effet  beaucoup 
plus  faible  quand  on  fait  usage  du  condensateur. 

L'inducteur  complet  comprend  encore  un  iuterrujDteur  de  Foucault , 
mais  je  ne  me  suis  jamais  servi  de  cette  partie  de  l'appareil,  vu 
que  mon  étude  exigeait  de  tenir  les  courants  d'ouverture  et  de 
fermeture  séparés  les  uns  des  autres  et  de  pouvoir  déterminer 
exactement  le  temps  du  renversement  du  courant.  C'est  pourquoi 
je  ne  ferai  pas  autrement  mention  de  cet  interrupteur. 

Pour  étudier  maintenant  le  courant  induit  obtenu  à  Taide  de 
cet  inducteur,  on  laisse  s'enregistrer  son  action  sur  un  cylindre 
qui  tourne  rapidement. 

Ce  cylindre  (v.  planche  I)  est  en  laiton,  et  a  un  diamètre  de 
19  cm.  et  une  longueur  de  25  cm.  L'axe  est  pourvu  à  l'une  de 
ses  extrémités  de  pas  de  vis  qui  s'engagent  dans  un  écrou  fixe, 
de  sorte  que  le  cylindre  prend  un  mouvement  progressif  lorsqu'on 
fait  tourner  la  manivelle  adaptée  à  l'autre  extrémité  de  l'axe.  Ce 
cylindre  est  recouvert  bien  uniformément  de  papier  noirci  à  la 
fumée  d'une  lampe  à  pétrole.  En  avant  du  cylindre ,  sur  un  pied 
isolant,  se  trouve  un  diapason,  dont  l'une  des  branches  porte  une 
pointe  d'acier  qui  s'applique  avec  une  légère  pression  contre  le 
papier  du  cylindre,  tandis  que  l'autre  branche  est  garnie ,  comme 
contre-poids ,  d'une  petite  pièce  métallique  équivalente.  Si  l'on  relie 
maintenant  une  des  extrémités  a  de  l'hélice  secondaire  avec  le 
cylindre  en  G ,  et  l'autre  b  avec  le  diapason  S ,  le  courant  induit 
trouve  un  passage  qui  n'est  interrompu  qu'entre  la  pointe  d'acier 
et  le  cylindre,  c'est-à-dire  sur  l'épaisseur  du  papier.  En  ce  point 
le  courant,  sous  forme  d'étincelle,  percera  donc  le  papier  et  laissera 
une  trace. 

Sur  du  papier  ordinaire  on  voit  les  ouvertures  percées;  sur  du 
papier  enfumé  on  voit  des  ouvertures  entourées  d'un  espace  blanc, 
qui  est  dû  à  la  dispersion  de  la  suie.  En  imprimant  au  cylindre 
un  mouvement  de  rotation  rapide,  après  avoir  mis  le  diapason 
en  vibration ,  les  marques  des  étincelles  se  trouveront  sur  la  sinusoïde 


296         A.  INYLAND.  SUR  LA  DUREE  ET  LA  iMARGHE 

chronoscopique    que    la   pointe  du  diapason  trace  sur  le  cylindre. 

Le  grand  avantage  de  cette  méthode  consiste  en  ce  qu'on  peut 
faire  tourner  le  cylindre  librement,  à  la  main,  attendu  que  les 
vibrations  du  diapason  fournissent  des  unités  chronoscopiques ,  qui 
mesurent  exactement  la  durée  de  chaque  rotation  ainsi  que  celle 
de  deux  étincelles  successives. 

Pendant  une  rotation,  le  courant  primaire  est  deux  fois  fermé 
et  deux  fois  ouvert.  A  cet  effet,  le  courant  primaire  va  du  pôle 
zinc  de  la  pile  au  bouton  B,  traverse  ensuite  l'hélice  primaire 
et  ressort  de  nouveau  en  C,  puis  passe  au  bouton  F  et  de  là 
dans  la  petite  tige  de  cuivre  qui  est  en  rapport  avec  lui.  Le 
pôle  platine  de  la  pile  communique  avec  le  bouton  E  et 
par  conséquent  avec  l'autre  tige  de  cuivre.  Les  deux  tiges 
de  cuivre  s'appuient  fortement,  par  ressort,  sur  un  anneau, 
qui  est  isolé  du  cylindre  par  des  lames  de  caoutchouc 
durci,  mais  qui  y  est  fixé  solidement  et  tourne  par 
conséquent  autour  du  même  axe.  Cet  anneau  est  divisé 
en  quatre  parties  et  formé  moitié  de  cuivre,  moitié  d'ivoire. 
Pendant  une  révolution  du  cylindre ,  le  courant  primaire  est  donc 
fermé  quand  les  deux  tiges  appuient  sur  le  cuivre,  ouvert  quand 
elles  passent  sur  Tivoire,  puis  de  nouveau  fermé  et  ouvert  suc- 
cessivement dans  le  passage  sur  le  second  quadrant  de  cuivre 
et  sur  le  second  quadrant  d'ivoire.  Les  tiges  de  cuivre  sont 
d'ailleurs  supportées  par  un  pied  isolant,  fixé  à  une  planche  qui 
partage  le  mouvement  progressif  du  cylindre,  de  sorte  que  les 
tiges  ne  cessent  pas  de  glisser  sur  l'anneau.  Pour  que  l'ouver- 
ture et  la  fermeture  du  courant  se  fassent  régulièrement  et  in 
stantanément ,  il  est  nécessaire  que  la  séparation  du  cuivre  et  de 
l'ivoire  reste  bien  nette  et,  pour  cela,  que  l'anneau  entier  soit 
fréquemment  frotté  avec  du  papier  à  Fémeri  fin  et  essuyé  avec 
un  linge.  Mais,  en  outre,  une  disposition  essentielle  est  que  les  tiges 
de  cuivre  ne  frottent  pas  sur  l'anneau  directement,  mais  par 
l'intermédiaire  de  petits  couteaux  tranchants  d'argent,  vissés  à 
l'extrémité  des  tiges  et  perpendiculaires  à  la  surface  de  l'anneau  ; 
ces  couteaux  interrompent  le  courant  primaire  au  moment  où  ils 


DES    COURANTS    GALVANIQUES    d'iNDUCTION.  297 

glissent  sur  la  fine  ligne  de  séparation  du  cuivre  et  de  l'ivoire. 
Les  pointes  de  platine,  dont  M.  Donders  s'était  servi  antérieure- 
ment^ donnaient  un  résultat  moins  satisfaisant,  parce  que  leur 
forme  s'altérait  par  l'usure  due  au  frottement  et  aux  nettoyages, 
et  parce  que  le  platine  est  moins  bon  conducteur  que  l'argent. 
Avec  ces  couteaux,  on  peut  ouvrir  et  fermer  le  circuit  des  cen- 
taines de  fois  de  suite,  sans  que  la  moindre  irrégularité  se  fasse 
remarquer.  Je  crois  pouvoir  affirmer,  d'après  mon  expérience 
personnelle,  que  cette  manière  de  fermer  et  d'ouvrir  le  courant 
mérite  la  préférence  sur  toutes  les  méthodes  connues  jusqu'à  présent. 

Lorsque  le  cylindre  a  été  tourné  une  fois,  de  sorte  que  la 
manivelle  se  retrouve  au  même  point,  on  a  donc  obtenu,  sur 
cette  sinusoïde  unique,  deux  décharges  à  la  fermeture  du  courant 
et  deux  à  l'ouverture.  Sur  le  même  rouleau  de  papier  on  peut 
enregistrer  ainsi  plus  de  20  expériences. 

Le  diapason  employé  faisait  246  vibrations  par  seconde,  et, 
à  l'aide  de  l'instrument  de  mesure  que  M.  le  Dr.  Engelmann 
mit  à  ma  disposition,  il  était  facile  d'évaluer  sur  le  papier  les 
vingtièmes  parties  de  chaque  vibration ,  de  sorte  que  cette  méthode 
permettait  de  déterminer  les  cinq-millièmes  de  seconde.  Le  nombre 
des  vibrations  du  diapason  fut  trouvé  en  enregistrant  simultané- 
ment, et  ces  vibrations,  et  les  indications  d'une  horloge,  intro 
duite  dans  le  circuit  primaire  de  façon  que  son  pendule,  qui 
battait  les  secondes,  ouvrît  et  fermât  le  courant  primaire.  La 
faible  influence  de  la  température  avait  été  déterminée  par  M. 
Donders,  au  moyen  du  changement  du  nombre  des  battements 
obtenus  avec  un  autre  diapason  maintenu  à  une  température 
invariable.  A  la  fin  de  l'expérience,  la  pointe  du  diapason  et 
les  deux  tiges  de  cuivre  E  et  F  étaient  détachées  du  cylindre  et 
de  l'anneau,  à  l'aide  de  petits  leviers  que  la  figure  ne  montre 
pas;  on  enlevait  alors  le  papier  du  cylindre,  on  numérotait  les 
expériences,  on  inscrivait  auprès  de  chacune  d'elles  les  observations 
nécessaires,  et  enfin  on  passait  le  papier  dans  une  dissolution 
alcoolique  de  vernis ,    pour  fixer  le  noir  de  fumée. 

La  seule  résistance  que  les  courants  galvaniques  induits  aient 


298         A.  NYLAND.  SUR  LA  DUREE  ET  LA  MARCHE 

à  vaincre  dans  ces  expériences  est,  outre  celle  du  circuit,  la 
résistance  d'un  papier  fin.  Selon  que  les  expériences  l'exigeaient, 
j'ai  fait  usage  de  différentes  espèces  de  papier:  pour  les  courants 
très  faibles,  de  papier  brouillard  très  mince,  appelé  papier  à 
fleurs,  dont  la  résistance  peut  bien  être  regardée  comme  un 
minimum;  pour  des  courants  plus  forts,  de  papier  de  poste  très 
fin,  dit  m  ail  papier,  et  de  papier  vélin  lustré  d'un  côté.  Le 
papier  préparé  chimiquement,  par  imbibition  avec  du  prussiate 
jaune  de  potasse  et  du  nitrate  d'ammoniaque  (ce  dernier  sel 
ayant  pour  but  de  maintenir  le  papier  humide),  tel  qu'on  l'emploie 
pour  les  télégraphes  écrivants,  donne  aussi  un  tracé  net  du 
courant,  mais  satisfait  moins  bien  que  le  mailpapier  ou  le  papier 
à  fleurs.  Le  Dr.  Hoorweg  et  M.  Donders  ont  expérimenté  avec  ce 
papier.  Tout  courant  induit,  qui  est  physiologiquement  percevable, 
peut  aussi  être  enregistré  sur  le  papier  à  fleurs;  c'est  là,  ce  me 
semble,  une  preuve  de  la  sensibilité  du  procédé. 

Par  cette  méthode  le  courant  induit  est  donc  enregistré;  il  ne 
reste  plus  qu'un  problème  à  résoudre,  celui  d'enregistrer  avec 
une  exactitude  égale,  à  côté  de  chaque  expérience,  l'instant  de 
l'ouverture  et  de  la  fermeture  du  courant  primaire. 

Il  faut  quelque  habitude  de  l'expérimentation  pour  apprécier 
convenablement  la  difficulté  de  ce  problème  et  par  conséquent 
la  valeur  de  la  solution,  car  une  exactitude  poussée  jusqu'aux 
millièmes  de  seconde  est  une  condition  nécessaire.  Aussi  ne  pourrai-je 
faire  connaître  de  quelle  manière  je  suis  parvenu  à  atteindre 
complètement  le  but,  qu'après  avoir  communiqué  un  certain  nombre 
de  résultats.  Un  point  qui  doit  encore  être  pris  en  sérieuse  con- 
sidération dans  ces  recherches,  est  le  suivant.  Si  l'on  veut 
recueillir  en  totalité  des  courants  induits  énergiques,  il  est 
nécessaire  que  les  divers  conducteurs  de  ces  courants  soient  isolés 
aussi  parfaitement  que  possible;  tous  les  fils  conducteurs  doivent 
être  en  fil  de  cuivre  épais,  recouvert  d'une  couche  de  gutta- 
percha,  et  l'appareil  entier  qui  sert  aux  mesures  doit  reposer 
sur  une  table  bien  isolée,  soit  par  des  pieds  de  verre,  soit  d'une 


DES    COURANTS    GALVANIQUES    d'iNDUCTION.  299 

autre  manière.  Un  isolement  absolu,  pendant  une  longue  durée, 
est  impossible  5  mais  aussi  cette  condition  ne  peut-elle  être  exigée 
que  lorsqu'on  cherche  à  déterminer  des  chiffres  absolus.  Bien 
que  j'aie  procédé  comme  s'il  s'agissait  d'obtenir  ce  degré 
d'exactitude,  je  n'entends  pourtant  faire  valoir  mes  résultats  que 
comme  des  grandeurs  relatives,  et  si  je  cite  quelques  chiffres 
absolus,  par  exemple  pour  la  vitesse  de  l'électricité  induite, 
cela  n'a  lieu  qu'  afin  de  faire  apprécier  la  méthode. 

Quant  à  savoir  si  ces  chiffres  peuvent  être  mis  à  côté  ou  au- 
dessus  de  ceux  d'autres  observateurs,  c'est  un  point  que  j'aban- 
donne au  jugement  du  lecteur. 

Pour  avoir  une  idée  claire  de  l'enregistrement  du  moment  de 
l'ouverture  et  de  la  fermeture  du  courant  primaire,  on  peut  con- 
sulter, comme  type  de  mes  expériences,  une  série  de  décharges 
d'ouverture  et  de  fermeture  du  Ruhmkorff  complet,  figurée  sur 
les  planches  II  et  III.  Le  courant  inducteur  était  fourni  par  une 
pile  de  10  éléments  de  Grove,  et  le  cylindre  était  recouvert  de 
mailpapier.  D'après  la  méthode  décrite,  nous  obtenons  sur  la  sinu- 
soïde ;  après  une  rotation  du  cylindre,  deux  expériences  d'ouver- 
ture et  deux  de  fermeture.  La  décharge  de  fermeture,  aussi  bien 
que  celle  d'ouverture,  donne  une  série  de  plus  décent  étincelles, 
qui,  d'abord  assez  éloignées  entre  elles,  se  rapprochent  ensuite 
très  près  l'une  de  l'autre,  et  dont  l'ensemble  dure  pendant  12, 
13  ou  14  vibrations.  Plus  tard  nous  reviendrons  avec  détail  sur 
ces  décharges;  occupons-nous  maintenant  de  l'enregistration  du 
courant  primaire. 

A  quel  instant  le  courant  primaire  est -il  ouvert 
ou  fermé  ? 

Naturellement,  à  l'instant  où  les  couteaux  des  tiges  E  et  F 
(v.  PI.  I)  glissent  sur  la  séparation  de  l'ivoire  et  du  cuivre.  Rien 
ne  serait  donc  plus  simple  que  de  détacher  du  cylindre  et  de 
l'anneau  la  pointe  du  diapason  et  les  tiges  E  et  F ,  de  faire  rétro- 
grader le  cylindre  jusqu'à  ce  que  les  couteaux ,  passant  de  nouveau 
sur  la  séparation,  reproduisent  l'étincelle,  puis  d'abaisser  la  pointe 
du  diapason  et  de  lui  donner  un  petit  choc,  de  manière  à  impri- 


300  A.    I\YLAi>D.    SUR     LA     DUREE     ET    LA     MARCHE 

mer  sur  le  cylindre  le  point  marqué.  Le  point  ainsi  obtenu, 
immédiatement  avant  la  première  étincelle  des  décharges  ou  pres- 
que en  coïncidence  avec  elle,  indiquerait  alors  le  moment  de 
l'ouverture  ou  de  la  fermeture.  Mais  il  est  facile  de  voir  que  ce 
mode  d'enregistration  n'est  pas  le  meilleur  dont  on  puisse  faire 
choix.  Même  en  employant  une  forte  loupe  pour  reconnaître  la 
position  des  couteaux,  et  en  opérant  avec  toute  la  précision  possible,  le 
résultat  reste  dépendant  du  degré  d'exercice  de  la  main  et  de  l'œil,  et 
c'est  ce  que  montrent  en  effet  les  expériences  exécutées  de  cette  manière. 

Il  vaut  infiniment  mieux  laisser  l'électricité  s'enre- 
gistrer elle-même.  Mais  on  ne  peut  demander  aucun  effet 
mécanique  à  Tétincelle  de  fermeture  du  courant  primaire ,  car  elle 
est  trop  faible;  et  quant  à  l'étincelle  d'ouverture,  bien  qu'elle 
soit  plus  forte,  on  ne  peut  pas  davantage  la  charger  de  percer 
du  papier,  attendu  que  la  moindre  résistance  empêche  la  ferme- 
ture, qui  pourtant  doit  nécessairement  précéder  la  rupture  du 
courant.  Pour  ce  motif,  j'ai  enregistré  de  la  manière  suivante. 

Après  achèvement  de  l'expérience,  dans  laquelle  le  cylindre  a 
été  tourné  à  la  main  aussi  rapidement  que  possible ,  par  exemple 
en  %  de  seconde,  on  interrompt  pour  un  instant  le  contact  de 
la  pointe  du  diapason  et  des  couteaux  avec  le  cylindre  et  l'an- 
neau ,  on  fait  rebrousser  le  cylindre  jusqu'au  point  d'où  l'on  était 
parti,  puis  on  laisse  retomber  la  pointe  et  les  couteaux  dans  la 
position  d'appui.  On  recommence  alors,  sans  passer  préalablement 
l'archet  sur  le  diapason,  le  mouvement  direct  du  cylindre,  en 
tournant  très  lentement,  surtout  aux  points  de  séparation  entre 
l'ivoire  et  le  cuivre  ;  la  pointe  du  diapason  trace  alors  une  ligne 
droite  s' étendant  sur  le  milieu  de  la  sinusoïde.  A  l'instant  de 
l'ouverture  et  de  la  fermeture  du  courant  primaire  il  passe  de 
nouveau  des  étincelles  entre  la  pointe  du  diapason  et  le  cylindre , 
mais  toute  la  série  de  ces  étincelles ,  au  nombre  de  plusieurs  cen- 
taines, coïncide  en  apparence  et  forme  sur  la  ligne  droite  un  seul 
trou,  qui  maintenant  indique  le  moment  précis  de  l'ouverture  et 
de  la  fermeture  (v.  PL  II).  Quand  on  tourne  avec  beaucoup  de 
lenteur,  la  coïncidence  s'obtient  très  nettement. 


DES    GOURANTS    GALVANIQUES    d'iNDUGTION.  301 

Dans  cette  manière  de  procéder;  voici ,  évidemment,  comment 
les  choses  se  passent. 

Supposons  que  la  première  étincelle  de  la  décharge  arrive  x 
vibrations  après  Tinstant  où  le  courant  primaire  a  été  fermé  (ou 
ouvert),  de  sorte  que  tout  le  courant  d'étincelles  ait  été  déplacé 
de  X  vibrations.  Si  alors  on  tourne  assez  lentement  pour  que  le 
courant  soit  réduit  à  une  seule  étincelle,  il  s'agit  de  savoir  de 
combien  cette  étincelle  arrive  en  retard. 

D'autres  expériences,  que  j'ai  faites,  il  résulte  que  la  rapidité 
d'ouverture  et  de  fermeture  est  sans  influence  sur  la  durée  de  la 
décharge  du  courant  induit.  Mais  la  décharge  entière  est  main- 
tenant, par  suite  de  la  lenteur  de  la  rotation,  réduite  à  une  étin- 
celle unique  ;  désignant  donc  par  v  la  vitesse  de  rotation  dans  la 
première  expérience,  par  /  la  durée  totale  du  courant  induit  et 
par  /'  le  retard;  de  même  par  v'  la  vitesse  de  rotation  de  la 
seconde  expérience,  dans  laquelle  la  durée  du  courant  induit  est 
restée  la  même  et  où  le  retard  sur  le  papier  est  de  :r' vibrations, 
nous  avons: 

dans  la  le  expérience  une  durée  de  décharge  z=z  14  vibrations  =  v  t. 

et  un  retard  x  :=zvl', 

dans  la  2e  expérience  une  durée  de  décharge  =:    1  étincelle    =:  v'  t. 

et  un  retard  x'  z=v'  l'. 

Comme  14  vibrations  sont  maintenant  réduites  à  1  étincelle  ou 
à  moins  de  ^-o  ^^  vibration,  on  a  v'  <2èô^  ^^  par  conséquent 
aussi  x'  <  y|^  X  ;  en  mesurant  donc  la  distance  entre  l'étincelle 
unique  de  l'enregistration  du  courant  primaire  et  la  première 
étincelle  de  la  décharge,  l'erreur  ne  peut  dans  ce  cas  atteindre 
.jijf  de  la  valeur.  Si  cette  distance  est,  par  exemple,  de  3*^  de 
vibration,  le  retard  est  3V  X  0 le^  sec.  =  0,000136  seconde,  valeur 
qui  ne  peut  être  en  défaut  de  ^  millionième.  Il  va  sans  dire  que 
la  mesure  des  trentièmes  de  vibration  offre  des  difficultés  entraînant 
des  erreurs  plus  grandes  que  celle  qui  vient  d'être  évaluée  ;  mais , 
ici,   il  ne  s'agit  que  d'apprécier  l'exactitude  de  la  méthode. 

Le  lecteur  attentif  aura  remarqué  que,  dans  la  pratique,  cette 
méthode  revient  simplement  à  faire  chaque  expérience  deux  fois: 


302    "    A.  NYLAND.  SUR  TA  DUREE  ET  LA  MARCHE 

d'abord  très  rapidement  et  ensuite  très  lentement, 
ce  qui  a  pour  résultat  d'éliminer  le  temps. 

Cette  méthode  m'a  servi  à  étudier  différents  points^  dont  je 
traiterai  dans  l'ordre  suivant.  En  premier  lieU;  l'induction 
volt  aï  que  pure,  ou  l'action  de  deux  spirales  Tune  sur  l'autre; 
ensuite  l'induction  due  à  une  spirale  dans  laquelle  on  introduit 
différents  noyaux  de  fer,  et  celle  de  l'inducteur  de  Ruhm - 
korff.  Puis:  l'influence  qu'une  résistance  et  une  bouteille 
de  L  e  y  d  e  ont  sur  le  courant  induit  ;  l'influence  que  les  courants 
d'ouverture  et  de  fermeture  exercent  les  uns  sur  les 
autres  en  cas  d'ouverture  et  de  fermeture  rapides  ;  enfin  ,  l'induc- 
tion unipolaire.  Une  modification  de  la  méthode  nous  donnera 
les  images  de  la  décharge. 

§  2.  INDUCTION  VOLTAÏQUE  PURE. 

Le  cas  le  plus  simple  qui  se  présente  dans  l'induction,  est 
l'action  produite  sur  une  spirale  secondaire  par  une  spirale 
primaire  qu'on  y  introduit. 

Pour  faire  cette  expérience,  rien  n'eût  été  plus  facile  que  de 
retirer  le  noyau  de  fils  de  fer  de  l'inducteur  de  Ruhmkorff,  et 
d'expérimenter  ensuite  avec  les  deux  spirales  restantes;  mais, 
dans  l'inducteur  que  j'avais  à  ma  disposition,  ce  noyau  était 
fixé  si  solidement  à  l'intérieur  de  la  spirale  primaire ,  que  je 
dus  les  enlever  ensemble  et  introduire  à  leur  place  une  autre 
spirale  primaire.  Celle-ci  consistait  en  une  seule  couche  de  circon- 
volutions, formées  par  un  fil  de  cuivre,  recouvert  de  soie,  long 
de  30  mètres  et  épais  de  21  millimètres.  A  priori,  avec  une 
spirale  primaire  de  ces  dimensions,  une  spirale  secondaire  telle 
que  celle  qui  enveloppait  l'inducteur,  de  100,000  mètres  de 
longueur,  et  10  bons  éléments  de  Grove  comme  batterie  induc- 
trice, on  s'attendrait  à  obtenir  une  action  passablement  énergique. 
Mais  cette  action  est  au  contraire  extrêmement  faible  et,  physio- 
logiquement,  à  peine  sensible.  Malgré  cela,  j'ai  parfaitement 
réussi  à  enregistrer  les  décharges  de  ces  courants  induits  sur  le 


DES    COURANTS    GALVANIQUES    d'iNDUCTION.  303 

papier  à  fleurs  et  sur  le  mailpapier.  Je  donne  ici  les  résultats 
moyens  de  plusieurs  centaines  d'expériences. 

Sur  le  papier  à  fleurs  on  obtient  une  décharge  de  ferme- 
ture qui  dure  \  vibration  et  se  compose  de  10  à  12  étincelles 
distinctes.  La  première  étincelle  est  faible,  la  deuxième  et  la 
troisième  sont  bien  visibles ,  les  suivantes  vont  de  nouveau  en 
décroissant.  Sur  le  mailpapier  on  obtient  une  décharge  qui 
consiste  en  2 ,  3  ou  4  étincelles  bien  visibles  et  qui  dure  environ 
\  de  vibration.  La  décharge  d'ouverture  a  une  durée  plus 
courte:  sur  le  papier  à  fleurs,  -\  de  vibration,  partagé  en  7  ou 
8  étincelles,  dont  la  première  est  la  plus  forte;  sur  le  mail- 
papier,  l  de  vibration,  avec  3  ou  4  étincelles  parfaitement 
visibles  à  l'œil  nu. 

Si  l'on  enregistre  aussi  le  courant  primaire ,  on  voit  que  chaque 
décharge  est  un  peu  retardée,  celle  d'ouverture  de  2V  ^  2V  de 
vibration.  Ce  retard  correspond  au  temps  que  l'électricité  emploie 
à  parcourir  tout  le  circuit  secondaire  et  à  accroître  sa  force 
jusqu'au  point  où  elle  est  capable  de  percer  le  papier.  Sur  du 
papier  plus  épais  le  retard  est  toujours  un  peu  plus  long,  et  à 
la  décharge  de  fermeture  il  est  aussi  un  peu  plus  grand  qu'à  la 
décharge  d'ouvertuie.  La  première  étincelle  de  fermeture  étant 
faible,  et  la  distance  à  l'étincelle  d'enregistration  du  courant 
primaire  devenant  par  suite  incertaine,  je  me  borne  à  donner 
le  retard  constaté  lors  de  l'ouverture. 

Des  données  qui  précèdent  il  résulte  donc  que,  sur  le  papier 
à  fleurs,  la  décharge  de  fermeture  dure  presque  0,002 
seconde  (1  vibration  ■=  ^{jr  8ec.)'^\si  décharge  d'ouverture 
est  plus  courte  et  ne  persiste  que  pendant  environ  0,0013  seconde; 
l'une  et  l'autre  sont  composées  d'étincelles  distinctes,  qui  sont 
plus  fortes  pour  la  décharge  d'ouverture.  M.  Beetz  a  obtenu  une 
décharge  de  fermeture  de  0,012  sec.  et  une  décharge  d'ouverture 
de  0,003  seconde. 

Il  en  résulte  encore  que  le  courant  d'induction,  qui,  selon 
tous  les  physiciens,  prend  naissance  en  même  temps  que  le 
courant  primaire,   met  -j'o  X  24-6  sec.  rzr^g'^y  sec.  à  parcourir  les 


304  A.    NYLAiND.    SUR    LA    DUREE    ET     LA    MARCHE 

50,000  mètres  du  circuit  secondaire ,  et  à  s'élever  à  une  intensité 
suffisante  pour  pouvoir  percer  du  papier  à   fleurs  :   cela  équivau 
drait  à  une  vitesse  de  246,000  kilomètres  par  seconde. 
Nous  reviendrons  plus  tard  sur  ce  dernier  point. 

§   3.    SPIRALE    PRIMAIRE    RENFORCEE 
PAR    DES     NOYAUX    DE    FER. 

Le  premier  noyau  essayé  était  un  barreau  de  fer  mou  de 
82  centimètres  de  longueur  et  22  millimètres  d'épaisseur.  En 
employant  comme  batterie  inductrice,  de  même  que  dans  les 
expériences  précédentes,  10  éléments  de  Grove,  on  obtint  les 
résultats  suivants,  qui,  comparés  à  ceux  du  paragraphe  2, 
montrent  l'influence  considérable  qu'un  noyau  exerce  sur  le 
courant  induit. 

La  décharge  de  fermeture  dure  sur  le  papier  à  fleurs  10  vibrations. 

„     „  mailpapîer         2^      „ 
„    „  papier  vélin      2%      „ 

La  décharge  d'ouverture  dure  „    „  papier  à  fleurs  lOj^      „ 

„     „   mailpapier         4c         „ 
„    „  papier  vélin      3         ,, 

La  décharge  de  fermeture  commence  par  une  étincelle  faible, 
qui  est  en  retard  d'environ  y'^  de  vibration. 

La  décharge  d'ouverture  commence  par  une  étincelle  forte 
en  retard  de  .y'o  ^^  vibration.  Ainsi  qu'il  résulte  des  chiffres 
ci-dessus,  cette  décharge  dure  un  peu  plus  longtemps  que  celle 
de  fermeture;  ses  étincelles,  à  en  juger  par  l'aspect,  sont  aussi 
plus  fortes.  Nous  verrons  d'ailleurs  plus  tard  que  la  décharge 
d'ouverture  est  capable  de  vaincre  la  résistance  d'une  couche 
d'air  de  14  mm.  d'épaisseur,  ou,  eu  d'autres  termes,  de  donner 
des  étincelles  de  cette  longueur,  tandis  que  la  décharge  de 
fermeture  ne  peut  donner  d'étincelles  dépassant  6  mm. 

La  décharge  d'ouverture  présente  donc  à  la  fois  une  durée 
plus  longue  et  une  action  mécanique  plus  forte. 

Les  étincelles  obtenues  sur  mailpapier  ont  les  mêmes  caractères 
que  celles  sur  papier  vélin  de  la  PI.  II,  mais  elles  ne  montrent 


DES    COURANTS    GALVANIQUES    d'iNRUCTION.  305 

pas  d'interruptions;  on  en  compte  environ  20  par  vibration.  Les 
étincelles  sur  papier  à  fleurs  ne  diffèrent  que  très  peu  des 
précédentes. 

D'autres  expériences  furent  faites  avec  un  noyau  composé  d'un 
faisceau  de  45  fils  de  fer  mou,  longs  de  53'^  cm.  et  épais 
de  1  mm.,  de  sorte  que  la  faisceau  avait  une  épaisseur  totale 
d'environ  11  mm.  Ces  fils  avaient  été  rougis,  et  se  trouvaient 
par  suite  recouverts  d'une  couche  d'oxyde,  qui  les  isolait  suffi- 
samment. 

En  comparant  la  masse  de  fer  de  ce  faisceau  à  celle  du  barreau , 
on  voit  qu'elle  est  beaucoup  moins  considérable.  Aussi  les  courants 
d'induction  obtenus  eurent-ils  une  durée  beaucoup  plus  courte. 

La  décharge  de  fermeture  dura  sur  le  papier  à  fleurs  1%  vibrations. 

„    „  mail  papier  M         „ 

„    „  papier  vélin       ^L         „ 

La  décharge  d'ouverture  dura  „    „  papier  à  fleurs  l'i         „ 

„    „  mailpapier  %         „ 

„    „  papier  vélin       Va         v 

Les  décharges  ressemblent  beaucoup  à  celles  du  barreau ,  à  cela 
près  qu'elles  s'achèvent  en  un  temps  beaucoup  plus  court.  Les 
étincelles  de  fermeture  s'accusent  presque  avec  la  même  force  que 
les  étincelles  d'ouverture,  mais  le  retard  est  un  peu  plus  grand 
pour  les  premières. 

Des  données  qui  précèdent ,  et  qui  sont  de  nouveau  les  moyennes 
d'un  grand  nombre  d'expériences,  il  résulte  donc  que  la  décharge 
d'ouverture,  sauf  sur  le  papier  vélin,  dure  aussi  longtemps 
que  la  décharge  de  fermeture,  mais  que  son  retard  est  moindre. 

Des  expériences  ultérieures,  avec  éléments  de  résistance,  nous 
apprendrons  que  les  décharges  peuvent  donner,  à  l'ouverture,  des 
étincelles  de  6  mm.,  et,  à  la  fermeture,  des  étincelles  de  5  mm. 

Au  sujet  de  ces  résultats  il  convient  encore  de  faire  la  remar- 
que suivante. 

L'assertion  ordinaire,  que  la  décharge  d'ouverture  donnerait  des 
étincelles  plus  fortes  parce  qu'elle  a  une  duréepluscourte  que 
la    décharge    de    fermeture,    ne    paraît    pas    se    vérifier    ici.    Je 
Archives  Néerlandaises,  T.  V.  20 


306         A.  NYLANI).  SUR  LA  DUREE  ET  LA  MARCHE 

regarde  comme  beaucoup  plus  probable  que  la  cause  doit  être 
clierchée  dans  l'acroissemeut  plus  rapide  du  courant 
j  u s q u'  à  un  maximum  d' i u t e n s i  t é ^  car  la  durée  totale  a 
peu  ou  point  d'influence:  les  résultats  obtenus  avec  le  barreau 
conduiraient  même  à  la  conséquence  que  la  cause  réside  dans  la 
durée  plus  longue.  La  durée  totale  a  peu  d'influence^  mais 
la  faiblesse  du  retard  et  la  vivacité  de  la  première 
étincelle  sont  en  rapport,  je  pense,  avec  l'énergie  de  l'action. 

A  ce  cas  d'induction  se  rapporte  aussi  l'effet  de  notre  inducteur 
complet  de  Ruhmkorff,  où  le  faisceau  se  compose  de  plusieurs 
centaines  de  fils  minces  de  fer  mou,  tandis  que  la  spirale  pri- 
maire, beaucoup  plus  longue  que  celle  employée  d'abord,  forme 
trois  couches  de  circonvolutions. 

Nous  allons  étudier  avec  soin  ces  courants  d'induction  énergiques , 
parce  que  beaucoup  des  particularités  qu'ils  offrent  se  rencontrent 
aussi  dans  les  autres  cas. 

Commençons  par  enregistrer  sur  mailpapier  l'induction  produite 
par  une  batterie  de  10  éléments  de  Grove.  Dans  ces  expériences 
nous  n'employons  pas  de  condensateur  et  nous  relions  le  bouton 
a  au  diapason  et  b  au  cylindre. 

La  décharge  de  fermeture  commence  par  quelques  étin- 
celles faibles ,  mais ,  après  4  de  vibration  environ ,  se  montrent 
déjà  des  étincelles  mieux  accusées.  La  décharge  se  transforme  alors 
complètement:  il  vient  de  fortes  étincelles,  qui  se  suivent  avec 
des  interruptions  de  une  vibration  environ;  quelques  unes 
d'entre  elles  ne  sont  pas  entourées  d'un  espace  blanc;  mais ,  en  regar- 
dant contre  le  jour,  on  voit,  à  des  distances  régulières ,  les  ouver- 
tures passablement  grandes.  Après  6,  7  ou  8  de  ces  étincelles, 
apparaît ,  sur  une  longueur  de  4 ,  5 ,  6  ou  7  vibrations ,  une  série 
d'étincelles  se  succédant  rapidement,  d'abord  au  nombre  de  12 
environ  par  vibration,  ensuite  plus  nombreuses  et,  dans  quelques 
expériences,  montant  jusqu'à  30  par  vibration.  Ces  étincelles  décrois- 
sent régulièrement  en  intensité  vers  la  fin  et  se  suivent  de  plus 
en  plus  rapidement.  La  durée  totale  de  la  décharge  est  de  13  à 


DES    COURANTS    GALVAiMQUES    d'iNDUCTION.  307 

14  vibrations  ou  de  ^W  ^  ivtï  ^^  seconde.  On  distingue  ici  claire- 
ment trois  périodes:  la  première ,  s'étendant  sur  \  de  vibration 
et  composée  de  petites  étincelles  accroissantes;  la  seconde,  com- 
prenant 6^  7  ou  8  vibrations  et  dans  laquelle  les  étincelles  se 
suivent  avec  des  interruptions  d'environ  1  vibration,  enfin  la 
troisième,  d'une  longueur  de  4  à  7  vibrations  et  qui  consiste  en 
une  succession  rapide  d'étincelles  décroissantes.  Le  courant  d'in- 
duction correspondant  à  la  fermeture  s'élève  donc  en  i  de  vibration 
jusqu'à  une  certaine  intensité,  la  conserve  pendant  6  à  8  vibra- 
tions, puis  va  de  nouveau  en  s'affaiblissant. 

Il  faut  noter  ici  que ,  dans  la  seconde  période ,  parmi  les  étin- 
celles séparées,  il  peut  s'en  rencontrer  quelques-unes  qui 'soient 
remplacées  par  3  ou  4  petites  étincelles. 

Le  retard  s'élève  à  j'q  de  vibration  environ. 

La  décharge  d'ouverture,  qui  succède  à  celle  que  nous 
venons  d'étudier,  montre  un  autre  caractère,  car  elle  n'a  que  deux 
périodes;  en  outre,  toutes  les  étincelles  sont  plus  vigoureusement 
marquées  que  celles  de  la  décharge  de  fermeture.  La  première 
étincelle  est  ici  la  plus  forte,  la  seconde  ne  vient  qu'après 
une  interruption  de  plus  d'une  vibration,  la  troisième  après  une 
interruption  un  peu  plus  courte,  et  à  la  quatrième  ou  cinquième 
commence  la  décharge  régulière.  Celle-ci  donne  d'abord  6  ou  7 
étincelles  par  vibration,  puis  environ  12,  et,  vers  la  fin,  jusqu'à 
30.  Tout  le  courant  d'étincelles,  depuis  la  première  jusqu'à  la 
dernière,  est  décroissant,  quant  à  la  grandeur  des  étincelles  et 
quant  à  la  durée  des  interruptions.  On  pourrait  admettre  ici,  presque 
à  tout  aussi  bon  droit,  une  période  unique,  car  la  période  d'in- 
terruptions n'est  pas  limitée  nettement. 

Le  décharge  totale  dure  14  à  15  vibrations  et  donne  une  figure 
élégante,  —  semblable  à  un  collier  de  perles  ondulé. 

Le  retard ,  dans  cette  décharge ,  est  plus  petit ,  mais  susceptible 
d'une  détermination  plus  rigoureuse ,  parce  que  la  première  étincelle 
est  forte  ;  il  s'élève ,  dans  la  plupart  des  expériences ,  à  ^V  ^^  vibration. 

La  seconde  décharge  de  fermeture  est  de  tout  point  semblable 

20* 


308         A.  NYLANI).  SUR  LA  DUREE  ET  LA  MARCHE 

à  la  première,  et  il  en  est  de  même  quant  aux  décharges  d'ou- 
verture successives. 

La  description  qui  précède  est  applicable  à  25  expériences, 
exécutées,  dans  l'espace  d'une  heure  environ,  sur  une  même  feuille 
de  papier.  La  registration  du  courant  primaire,  destinée  à  déter- 
miner le  retard,  a  eu  lieu  directement  après  chaque  expérience. 
Sur  cliaque  feuille  d'expériences  ces  étincelles  de  repère  sont  situées 
exactement  sur  une  même  ligne  droite,  ainsi  qu'il  convient.  Les 
Planches  II  et  III  rendent  fidèlement  toutes  ces  particularités, 
mais  les  interruptions,  qui  sont  si  nombreuses  et  si  bien 
dessinées  sur  la  PI.  III,  semblent  contredire  ce  que  j'ai  dit  ci-des- 
sus de  celles  des  décharges  de  fermeture.  Cela  tient  à  ce 
que,  dans  l'une  comme  dans  l'autre  série  d'expériences  que 
reproduisent  les  deux  planches,  la  communication  a  été  établie 
entre  a  et  le  cylindre  et  entre  b  et  le  diapason.  J'avertirai, 
par  anticipation,  que  les  interruptions  ne  caractérisent  pas  les 
décharges  d'ouverture  ou  de  fermeture,  mais  qu'elles  sont  mo- 
difiées par  le  mode  de  liaison.  Ce  fait  ressortirait  avec 
évidence  de  la  comparaison  d'un  plus  grand  nombre  de  figures 
de  décharges,  relatives  tant  à  l'un  qu'à  l'autre  mode  de 
liaison. 

Après  avoir  communiqué  cette  expérience  sur  mailpapier  y  qui 
a  déjà  servi  de  type  antérieurement,  nous  allons  rechercher  quelles 
sont,  parmi  les  particularités  citées,  celles  qui  peuvent  être 
regardées  comme  constantes.  A  cet  effet,  nous  nous  appuierons 
sur  différentes  expériences  faites  d'une  autre  manière  et  dans  d'au- 
tres conditions. 

a.  Examinons  d'abord  ce  qui  a  rapport  à  la  durée.  Il  ne  faut 
pas  perdre  de  vue  que  le  papier  qui  enveloppe  le  cylindre  agit 
comme  résistance,  et  qu'il  y  a  par  conséquent  à  tenir  grand  compte 
de  la  nature  du  papier  employé.  Plus  celui-ci  est  mince ,  plus  les 
décharges  du  courant  induit  persistent  longtemps,  et  cela  pour 
deux  raisons:  d'abord,  avec  du  papier  plus  mince,  les  dernières 
petites  étincelles  de  la  décharge  seront  encore  visibles;  ensuite, 
et   surtout,    la  résistance  moindre  du  papier  mince  prolongera  la 


DES    COURAiNTS    GALVAMQUES    d'iISDUCTIOxN.  309 

durée    du    courant,    ce    dont  on  donnera  plus  loin  des  preuves 
frappantes. 

C'est  p:râce  à  ces  deux  circonstances  que ,  sur  le  papier  à  fleurs, 
toutes  les  autres  conditions  restant  les  mêmes ,  on  obtient  un  courant 
de  fermeture  qui  se  prolonge  pendant  1 7  vibrations  et  un  courant 
d'ouverture  d'une  durée  de  18  vibrations. 

Sur  le  papier  vélin  glacé,  qui  est  plus  épah  que  le  mai  (papier , 
la  décharge  de  fermeture  dure  pendant  5  vibrations  et  la  décharge 
d'ouverture  pendant  8  vibrations.  Mais  il  ne  faut  pas  croire  que , 
sur  ce  papier  plus  épais ,  la  queue  tout  entière  des  décharges  fasse 
défaut  parce  que  les  dernières  étincelles ,  qui  sont  toujours  les  plus 
faibles,  n'ont  pas  eu  assez  d'intensité  pour  percer  le  papier.  La 
durée  totale  a  été  raccourcie  par  suite  de  la  résistance , 
comme  nous  le  verrons  plus  tard. 

L'emploi  du  condensateur  n'a  pas  d'influence  sur  la 
durée  des  décharges.  Comme  il  était  facile  d'opérer  alternativement 
avec  ou  sans  condensateur,  j'ai  chaque  fois  examiné  l'effet  qui 
en  résultait  sur  la  durée,  mais  sans  jamais  trouver  une  action 
appréciable. 

La  rapidité  d'ouverture  et  de  fermeture  n'apporte 
pas  non  plus  de  changement  dans  la  durée,  pourvu  que  cette 
rapidité  ne  soit  pas  assez  grande  pour  que  les  décharges  de  fermeture 
et  d'ouverture  réagissent  l'une  sur  l'autre.  Je  pouvais  faire  tourner 
le  cylindre  1  ou  4  fois  par  seconde  :  le  nombre  de  vibrations  qui 
exprimait  la  durée  des  décharges  n'en  restait  pas  moins  le  même 
dans  les  deux  cas. 

Il  va  sans  dire  que  la  force  de  la  batterie  a  de  l'influ- 
ence ,  mais  la  durée  des  décharges  ne  croît  pas  proportionnellement 
au  nombre  des  éléments. 

Il  est  aussi  très  important  de  remarquer  que  la  durée  de  la 
décharge  de  fermeture  est  presque  toujours  plus  petite  que  celle 
de  la  décharge  d'ouverture;  avec  une  batterie  énergique ,  les  deux 
décharges  sont  pareilles  sous  ce  rapport.  A  l'appui  de  ces  deux 
faits  je  citerai  quelques  observations  comparatives  faites  avec  une 
batterie  de  1 — 10  éléments  de  Grove. 


310         A.  NYLAND.  SUR  LA  DUREE  ET  LA  MARCHE 

Durée  de  la  décliarge  de  fermeture.      Durée  de  la  décharge  d'ouverture. 


Nombre 

Papier  à 

Papier 

Papier  à 

Papier 

d'élémentj 

i.  Heurs. 

Mailpapicr. 

véliu. 

fleurs. 

MailpaiÀer. 

.    vélin. 

1 

3  vibr. 

0  vibr. 

0  vibr. 

6  vibr. 

2%  vibr. 

1  %  vibr, 

2 

6     // 

21/4    " 

0     // 

9     // 

6%   /' 

4       // 

3 

9     // 

5       // 

0     // 

11     // 

7%   // 

5       // 

4 

10     // 

7      // 

2     // 

12     // 

8%  // 

5%   // 

5 

13     ./ 

81/2    // 

214// 

14     // 

10      // 

6%   // 

6 

14     // 

10      // 

3     // 

14     // 

11       // 

7       // 

7 

14     // 

11      // 

3    // 

13     // 

11%  // 

7      // 

8 

14%. 

121/2   " 

31/2// 

15     // 

12%  // 

7%  // 

9 

15     // 

131/2   // 

31/2'/ 

16     „ 

13      //     - 

8      // 

10 

16%. 

14      // 

41/2// 

17%// 

15       // 

8%   // 

Je  n'ai  jamais  employé  plus  de  10  éléments,  et  dans  les  expé- 
riences avec  résistance  jamais  plus  de  4,  parce  que  je  craignais 
de  surcharger  l'inducteur.  Les  chiffres  rapportés  n'indiquent  d'ail- 
leurs pas  la  nécessité  d'aller  plus  loin. 

Pour  maintenir  la  batterie  autant  que  possible  constante,  les 
lames  de  zinc  doivent  être  bien  amalgamées,  de  manière  que 
lorsqu'on  démonte  les  éléments,  ces  lames  sortent  de  l'acide  sul- 
furique  étendu  avec  une  surface  métallique  parfaitement  nette; 
dans  ce  cas,  la  batterie  reste  suffisamment  constante  pendant  plu- 
sieurs heures. 

Le  mode  d'union  des  éléments  n'est  pas  indifférent.  Pour 
vaincre  une  forte  résistance  extérieure  à  la  batterie,  il  faut  dis- 
poser les  éléments  à  la  suite  les  uns  des  autres,  le  zinc  du 
2e  élément  relié  au  platine  du  1er,  le  zinc  du  3e  au  platine  du 
2e,  etc.  Ce  mode  d'union  était  celui  qui  convenait  le  mieux  pom- 
mes expériences,  car  en  plaçant  les  éléments  à  côté  l'un  de 
l'autre,  de  manière  à  combiner  entre  eux  tous  les  pôles  zinc  et 
de  même  tous  les  pôles  platine,  l'action  obtenue  était  moins 
énergique. 

Dans  les  expériences  relatives  à  l'induction  voltaïque,  où  la 
spirale  primaire  était  plus  courte,  les  deux  modes  d'union  produi- 
saient le  même  effet. 

Le  mode  de  liaison  {a  avec  le  diapason  et  b  avec  le  cylin- 


DES    COL'BAMS    GALVAMQCES    d'lNDUCTIO.N.  311 

dre,  ou  a  avec  le  cylindre  et  h  avec  le  diapason)  n'a  d'influence 
que  sur  les  interruptions  ^  comme  on  le  verra  plus  loin. 

h.  Les  interruptions,  dont  il  a  déjà  été  dit  quelques  mots 
ci-dessus,  méritent  bien  de  faire  l'objet  d'un  examen  spécial. 

Ainsi  que  nous  l'avons  indiqué,  elles  sont  surtout  nombreuses 
dans  la  2c^t-  période  de  la  décharge  de  fermeture,  lorsque 
b  est  relié  au  cylindre  et  a  au  diapason.  Quand  on  se  sert  de 
papier  vélin ,  sur  lequel  les  interruptions  sont  très  longues  (quel- 
ques-unes de  3  vibrations) ,  on  voit  distinctement ,  pendant  l'expé- 
rience, de  la  lumière  électrique  voltiger  à  la  surface  du  papier, 
ce  qui  ne  serait  pas  possible  si  l'électricité  choisissait  le  chemin 
le  plus  court  entre  la  pointe  du  diapason  et  le  cylindre.  De  plus, — 
et  ce  fait  est  en  relation  évidente  avec  le  premier,  —  il  n'est  pas 
rare  de  trouver  en  pareil  cas-,  sur  le  noir  de  fumée,  une  ligne 
ou  trace  granuleuse  et  mate ,  visible  sous  une  incidence  oblique 
de  la  lumière,  et  s'étendant  sur  une  partie  plus  ou  moins  consi- 
dérable de  riuterruptiou,  jusqu'à  l'endroit  de  l'étincelle  précédente, 
surtout  lorsque  celle-ci  a  percé  dans  le  papier  un  trou  relativement 
grand.  La  trace  mate  a  le  même  aspect  que  si,  jusqu'à  une  cer- 
taine distance,  de  l'électricité  avait  afflué  de  chaque  point  de  la 
sinusoïde  vers  le  trou  :  partout  elle  part  manifestement ,  en  se  diri- 
geant à  peu  près  par  le  chemin  le  plus  court ,  du  côté  des  vibra- 
tions tourné  vers  le  trou. 

Quand  on  renverse  le  courant  induit,  en  reliant  le  bouton 
h  au  diapason  et  a  au  cylindre,  ce  sont  les  décharges  d'ou- 
verture qui  offrent  le  plus  d'interruptions  {v.  PI.  III),  tandis 
que  dans  le  cas  précédent  elles  se  montraient  surtout  dans  la 
décharge  de  fermeture.  La  décharge  figurée  sur  la  PI.  III  peut 
donc ,  en  ce  qui  concerne  les  interruptions,  passer  aussi 
bien  pour  une  décharge  d'ouverture  que  pour  une  décharge  de 
fermeture.  Or  on  sait,  d'autre  source,  que  le  courant  d'induction 
auquel  donne  lieu  la  fermeture  a  une  direction  opposée  à  celle  du 
courant  induit  à  l'ouverture  du  circuit  primaire,  de  sorte  qu'il  est 
certain  que  la  décharge  présente  d'autres  interruptions  lorsque 
Télectricité   se  rend  de  a,  à  travers  le  cylindre,  vers  le  diapason , 


312         A.  NYLAND.  SUR  LA  DUREE  ET  LA  MARCHE 

que  lorsqu'elle  prend  le  chemin  opposé.  Il  est  d'ailleurs  aisé  de 
comprendre  que  le  cylindre ,  vu  la  grande  étendue  de  sa  surface , 
doit  exercer  une  certaine  influence.  Après  avoir  façonné  en  pointe 
aiguë  les  extrémités  G  et  S  des  deux  conducteurs  d'égale  lon- 
gueur a  G  et  h  S,  je  les  mis  en  contact  avec  le  cylindre  entier. 
En  d'autres  termes:  je  laissai  enregistrer  les  deux  élec- 
trodes a  et  b.  A  la  fermeture  du  courant  primaire,  on  obtient 
alors  deux  tracés  à  côté  l'un  de  l'autre,  et  de  même  à  l'ouver- 
ture (v.  PL  IV).  Or,  entre  le  tracé  de  a  et  celui  de  hj  on  ne 
distingue,  quant  à  l'aspect  des  étincelles,  absolument  aucune 
difîerence;  les  interruptions  seules  sont  dissemblables.  L'électrode 
a  donne  lors  de  la  fermeture  moins  d'interruptions  que  h ,  mais 
elle  en  donne  plus  que  b  lors  de  l'ouverture.  La  différence  de 
chemin  et  par  conséquent  l'influence  du  cylindre  se  manifestent 
ici  avec  pleine  évidence.  Du  reste ,  le  fait  qu'il  se  produit  de  très 
belles  interruptions,  d'aussi  longue  durée  que  dans  la  méthode 
ordinaire ,  —  mais  un  peu  moins  nombreuses,  parce  que  la  décharge 
entière,  à  cause  de  la  double  résistance  du  papier ,  est  plus  courte 
(à  côté  on  enregistrait  par  la  méthode  ordinaire) ,  —  ce  fait  prouve 
que  le  cylindre,  qui  n'est  ici  traversé  que  sur  une  très  petite 
partie,  n'est  pas  la  cause  unique  des  interruptions.  C'est  ce  que 
confirment  des  expériences  postérieures  (v.  §  8). 

L'épaisseur  du  papier,  ainsi  que  nous  l'avons  déjà  dit,  a  une 
grande  influence  sur  la  durée  des  interruptions ,  celles  ci  étant  plus 
longues  sur  le  papier  vélin  que  sur  le  mailpapier,  tandis  que  sur 
le  papier  à  fleurs  elles  sont  encore  plus  courtes  que  sur  le  tnail- 
papier.  Dans  quelques  expériences  même ,  je  n'ai  pas  obtenu  une 
seule  interruption  sur  le  papier  à  fleurs  ;  mais  alors  on  voit ,  à  des 
distances  d'une  vibration  entière  ou  d'une  demi- vibration,  des  étin- 
celles plus  fortes,  tranchant  sur  les  étincelles  plus  faibles  qui 
les  précèdent  et  les  suivent ,  de  sorte  que  les  espaces  vides  sont 
ici  remplis  par  de  petites  étincelles,  ce  qui  est  également  une 
preuve  de  périodicité. 

L'influence  de  la  force  de  la  batterie  ressort  des  chiffres  sui- 
vants ,    relatifs  à  la   durée    de  la  première  interruption 


DES    COURANTS    GALV4IVIQUES    D  INDUCTION. 


313 


lors  de  la  décharge  d'ouverture,  dans  4  expériences  sur 
papier  vélin,  où  l'on  employait  1  à  10  éléments  de  Grove  comme 
batterie  inductrice  (v.  PI.  V,  sur  laquelle  sont  figurées  deux  de 
ces  expériences). 

Durée  de  la  première  interruption  à  l'ouverture, 
lèie  expér.  2e  expér,  3^  expér.  4e  expér. 

1  élément  0    vibr.  0    vibr.  0    vibr.  0    vibr. 


2 

4 
5 
6 
7 
8 
9 
10 


U 

11 
2 

2îi 
2V4. 
2V4. 
211 


1 
H 

11 

m 
ii 

3 


li  „ 

1^4 

3/4     „ 

l'A 

l'A    " 

2^ 

2      // 

2î^ 

2       // 

21 

2       // 

234 

2      // 

2% 

2è     '^ 

2J 

3       // 

3 

On  voit  clairement  que  la  durée  de  la  première  inter- 
ruption est  plus  grande  à  mesure  que  la  batterie  est 
plus  forte. 

Ces  quatre  expériences  ont  été  exécutées  (deux  à  deux)  direc- 
tement l'une  après  l'autre. 

Si  les  chiffres  obtenus  dans  ces  quatre  expériences  ne  sont  pas 
exactement  les  mêmes,  il  faut  en  accuser  probablement  le  défaut 
d'homogénéité  du  papier  ;  mais  la  régularité  de  leur  accroissement , 
à  une  exception  près,  démontre  complètement  le  fait  avancé. 

A  la  fermeture,  l'interruption  est,  dans  ces  mêmes  expériences , 
plus  grande  avec  10  éléments  qu'avec  tout  autre  nombre  plus 
faible ,  mais  l'accroissement  n'est  pas  aussi  régulier.  On  doit  aussi 
tenir  compte  ici  de  ce  que  la  décharge  de  fermeture  ne  devient 
bien  visible  sur  ce  papier  qu'avec  une  batterie  de  5  éléments,  et 
de  ce  que  les  premières  et  faibles  étincelles  (i'.  plus  haut)  ne 
limitent  pas  nettement  les  interruptions. 

c.  L'étude  des  étincelles,  à  part  les  interruptions,  ne  nous 
apprend  pas  grand'chose. 

Le  nombre  des  étincelles  à  la  fin  de  la  décharge,  sur  papier 
vélin,  est  ordinairement  de  16  par  vibration,  tant  à  l'ouverture 
qu'à  la  fermeture  ;  sur  mailpapier  il  est  de  25  à  30 ,  et  sur  papier 


314         A.  NYLAND.  SUR  LA  DUREE  ET  LA  MARCHE 

à  fleurs  encore  plus  grand.  Au  milieu,  ce  nombre  est  plus  petit, 
de  sorte  qu'il  est  parfois  impossible  de  savoir  où  les  interruptions 
cessent.  Dans  la  plupart  des  expériences  toutefois ,  après  la  décharge 
en  étincelles  éloignées  l'une  de  l'autre  de  3,  2  ou  1  vibrations, 
commence  brusquement  la  décharge  en  étincelles  de  20  par  vibration. 
L'examen  microscopique  des  différentes  étincelles  montre  que 
l'ouverture  percée  dans  le  papier  est  assez  grande  pour  les  premières 
étincelles  de  la  décharge,  plus  petite  pour  les  suivantes,  surtout 
pour  celles  de  la  dernière  période.  Quelquefois  les  trous  sont  per- 
cés obliquement ,  quelquefois  des  fibres  du  papier  ou  des  particu- 
les charbonneuses  sont  restées  adhérer  à  l'intérieur  ;  dans  les  der- 
nières étincelles  les  trous  sont  douteux ,  mais  on  continue  à  obser- 
ver les  espaces  blancs  qui  se  voient  aussi  autour  des  ouvertures , 
grandes  ou  petites,  et  qui  sont  dus  à  ce  que  les  particules  de 
noir  de  fumée  ont  été  projetées  et  réunies  en  particules  plus  gros- 
ses ,  de  sorte  que  la  surface  blanche  du  papier  est  devenue  appa- 
rente. Le  bord  des  ouvertures  est  roussi  par  combustion;  cette 
partie  roussie  est  visible  à  l'envers  du  papier,  et  toujours  la  décharge 
transporte  à  travers  le  papier  des  particules  charbonneuses,  qu'on 
retrouve  sur  le  cylindre  après  en  avoir  enlevé  le  papier.  Contre 
la  luQiière  les  ouvertures  se  voient  facilement.  Entre  deux  étincelles 
voisines  on  ne  peut  observer  aucune  différence  de  forme;  il  est 
aussi  impossible  de  distinguer  dans  quelle  direction  l'électricité 
a  traversé  le  papier.  Si  l'on  retourne  le  papier  sur  le  cylindre, 
de  ffiçon  que  la  pointe  du  diapason  écrive  sur  la  face  blanche, 
il  n'en  vient  pas  moins  des  ouvertures  entourées  d'une  zone  blanche 
sur  la  face  noircie. 

§    4.    IiN'FLUEIS'CE    d'une    RESISTANCE. 

La  méthode  que  nous  suivons  dans  notre  étude  expérimentale 
consiste,  au  fond,  à  offrir  au  courant  induit  la  résistance  d'un 
papier  mince  et  à  conclure,  de  l'action  produite  sur  celui-ci,  la 
durée  et  la  marche  du  courant.  Pour  savoir  quelle  est  cette  durée 
lorsqu'il  n'y  a  aucune  résistance  autre  que  celle  des  conduc- 
teurs,  il   faudrait  employer  une  méthode  n'apportant  absolument 


DES    COURANTS    GALVANIQUES    d'iNDUCTION.  315 

aucun  obstacle  à  la  propagation  du  courant.  M.  le  professeur 
Donders  a  pu  réaliser  cette  condition  à  l'aide  d'un  artifice  que 
j'ai  appliqué  également,  avec  une  légère  modification.  M.  Donders 
dit  (Onderzoekitigen  gedaan  op  het  Physiol.  Labor.  te  Utrecht,  II, 
1868—69,  p.  317):  ,,Lorsque,  la  pointe  du  diapason  vibrant 
étant  en  contact  avec  du  métal,  l'électricité  d'induction  peut  s'écou- 
ler immédiatement  et  d'une  manière  continue,  la  décharge  dure 
beaucoup  plus  longtemps ,  et,  0,1  sec.  (24  vibrations)  après  l'ouver- 
ture, il  se  décharge  encore  des  étincelles  lorsque  la  pointe  vient 
à  passer  du  métal  sur  le  papier." 

Les  expériences  de  M.  Donders  furent  effectuées  en  enveloppant 
le  cylindre  d'une  feuille  de  tain,  recouvrant  celui-ci  de  papier, 
et  découpant  dans  le  papier,  à  l'endroit  où  devaient  se  faire  les 
décharges  d'ouverture  et  de  fermeture,  un  triangle  rectangle,  de 
manière  à  fournir  à  la  pointe  traçante  un  contact  métallique. 
Dans  tous  les  tours,  les  premières  étincelles  des  décharges 
d'ouverture  et  de  fermeture  se  trouvaient,  sur  une  ligne  parallèle 
à  l'un  des  côtés  de  l'angle  droit,  à  une  petite  distance  en  avant 
ou  à  l'intérieur  des  triangles  respectifs^  et  la  pointe  quittait  le 
triangle  du  côté  de  l'hypothénuse,  après  un  contact  métallique 
dont  l'étendue  augmentait  successivement,  depuis  le  premier 
tour,  qui  correspondait  au  sommet  de  l'angle  aigu,  jusqu'au 
dernier. 

Afin  de  pouvoir  faire  photographier  l'expérience,  j'ai  supprimé 
le  tain ,  qui  devait  servir  à  rendre  les  vibrations  visibles ,  et  je 
me  suis  borné  à  découper,  à  l'aide  d'un  couteau  bien  tranchant  ; 
des  triangles  dans  le  papier  enfumé,  aux  endroits  indiqués 
ci-dessus.  La  pointe  aiguë  du  diapason,  tout  eu  continuant 
d'appuyer,  passait  alors  du  papier  sur  le  cuivre  et  repassait  ensuite 
sur  le  papier,  sans  déchirer  celui-ci.  Même  sur  le  papier  à  fleurs 
l'expérience  réussissait  toujours  très  bien. 

Le  résultat  de  cette  trouée  faite  dans  le  papier  est  donc  que, 
lors  de  la  décharge  et  pendant  un  temps  plus  ou  moins  long ,  le 
courant  n'éprouve  aucune  résistance.  Le  plus  sûr  est  de  laisser 
tomber  sur  le  papier  au  moins  les  premières  et  les  dernières  étin- 


316  A.    IVYLAND.     SUR     LA    DUREE    ET    LA     MARCHE 

celles;  alors  il  n'y  a  pas  de  doute  relativement  à  la  durée ^  car^ 
à  Taide  des  vibrations  qui  précèdent  et  qui  suivent ,  on  peut  déter- 
miner, avec  un  degré  suffisant  de  précision,  le  nombre  des  vibra- 
tions invisibles  que  la  pointe  du  diapason  a  exécutées  sur  le  cuivre. 
L'expérience  est  figurée,  avec  ses  résultats,  sur  la  PI.  VI. 

Dans  le  cas  du  courant  induit  de  4  bons  éléments  de  Grove, 
lequel,  sur  papier  vélin,  à  l'ouverture  du  circuit  primaire,  dure 
pendant  6^  vibrations,  le  contact  métallique  produit  l'effet  suivant: 

Décharges   d'ouverture. 

vibr.  sui' métal  4  y2  vibr.  sur  papier,  ensemble    7       vibr. 

H  II  II  4  ^l<^  Il  II  II  II            8  ^l'z  II 

Il  II  II  3  ^4  "  "  "  "  12  " 

Il  II  II  3  //  //  //  //  12  // 

//  //  //  3  //  //  //  //  13  // 

//  //  //  2%     //  //  //  //  14  // 

//  //  //  11^  //  //  //  //  21  !4  // 

//  //  //  1  //  //  //  //  24  // 

//  //  //        y^  "  "  "  "  29'/^  // 

//  //  //        1/2  //  //  //  //  26%  '/ 


% 

vibr. 

sur 

papier 

2 

% 

Il 

// 

'/ 

31/2 

% 

II 

// 

II 

8 

% 

II 

// 

II 

8% 

% 

" 

'/ 

II 

9 14 

% 

II 

// 

II 

11 

% 

r 

// 

II 

19 

1 

II 

//. 

II 

22 

1 

II 

// 

II 

28 

1 

II 

// 

II 

25 

1 

II 

// 

II 

27 

28% 


11  résulte  de  ces  expériences,  surtout  des  dernières,  que  le 
courant,  là  où  il  est  sans  résistance,  dure  presque  5  lois 
aussi  longtemps. 

Sur  papier  à  fleurs,  où  l'expérience  fut  appliquée  tant  aux 
décharges  d'ouverture  que  de  fermeture,  la  durée  de  la  décharge 
était,  dans  les  deux  cas,  de  16  vibrations,  et  le  contact  métallique 
avait  l'effet  suivant: 

Décharges  de  fermeture.  Décharges  d'ouverture. 

Siu-  papier.     Sur  métal.     Sm-  papier.     Ensemble.       Sur  papier.    Siu-  métal.     Siu'  papier.    Ensemble. 
1      vibr.    2  Va  vibr.    13  vibr.  16 1/2  vibr,     1      vibr.    1      vibr.  1 1  Ya  vibr.  1 6  y^  vibr. 


Va 

//       6 

// 

12      / 

18% 

// 

% 

II 

3% 

// 

12 

Il   m^ 

y2 

//     10 

'/ 

10      / 

'      20% 

// 

% 

II 

7 

// 

10 

"  im 

% 

//     10% 

II 

10 

/      21 

II 

% 

II 

9 

// 

9 

Il     18% 

% 

//     12 

II 

7 

'      19% 

II 

% 

II 

14 

// 

6 

//     203^ 

¥2 

»     15 

II 

6      / 

21% 

II 

% 

II 

17% 

// 

5 

//  2314 

% 

//     16 

II 

5      / 

/      21% 

II 

% 

II 

18 

'/ 

5 

//  2334 

DES    COURANTS    GALVANIQUES    D  INDUCTION. 


317 


Une  autre  série  crexpérieiices  sur  papier  vélin,  où  le  triangle 
était  coupé  de  telle  sorte  que ,  dans  les  premières  expériences ,  la 
1ère  étincelle  tombait  sur  cuivre,  et  dans  les  suivantes  sur  papier , 
me  donna  les  résultats  suivants: 


Décharges  d'ouverture. 


Sur  papier. 

Siu- 

métal. 

Sur 

papier. 

Ensemble. 

0       vibrations. 

r4   vibrations. 

51/2   vibrations. 

5% 

vibrations, 

0 

1% 

If 

51/4 

Il 

^^3/i 

■ 

0 

2% 

II 

5 

II 

7y2 

II 

0 

3'/3 

II 

4 

II 

7X 

» 

0 

4y2 

II 

4 

II 

8% 

II 

0 

7 

II 

31/2 

II 

ioy2 

II 

0 

8 

II 

3% 

II 

11% 

II 

Sur  le  bord. 

9% 

II 

3 

II 

121/2 

,1 

%  vibrations. 

91/2 

II 

2% 

II 

1214 

„ 

Va 

18 

i> 

2 

II 

20% 

II 

% 

151/2 

il 

2 

II 

18 

II 

1                // 

15 

II 

2 

II 

18 

II 

1                // 

17 

II 

2 

II 

20 

II 

11^ 

20 

II 

2 

II 

2314 

II 

114 

21% 

// 

1% 

II 

2414 

II 

1% 

25 

1' 

% 

II 

27 

II 

Ces  expériences  nous  apprennent  deux  faits: 

P.  Lorsque  la  résistance  esti=0  le  courant 
dure  plus  longtemps:  5  fois  aussi  longtemps  qu'avec  la 
résistance  du  papier  vélin,  et  au  moins  1%  fois  aussi  longtemps 
qu'avec  la  résistance  du  papier  à  fleurs.  Ce  fait  pouvait  être  prévu , 
car  nous  savions  déjà  que  le  même  courant  de  4  éléments  dure 
6^^  vibrations  sur  papier  vélin  et  16  vibrations  sur  papier  à  fleurs. 

2".  Le  courant  d'ouverture  et  celui  de  ferme- 
ture ont  la  même  durée.  C'est  ce  qu'indiquaient  déjà  toutes 
les  décharges,  mais  l'expérience  actuelle  sur  papier  à  fleurs ,  avec 
résistance  nulle,  le  démontre  de  nouveau. 

Ces  deux  faits  soulèvent  naturellement  les  questions  suivantes  : 

Quelle  idée  doit-on  se  faire  de  la  décharge  pour  expliquer  le 
premier  fait  et ,  en  même  temps ,  cet  autre ,  trouvé  précédemment , 


318         A.  NYLAND.  SUR  LA  DUREE  ET  LA  MARCHE 

que  la  première  interruption  est  plus  longue  à  mesure  que  la  bat- 
terie devient  plus  forte? 

Comment  le  second  fait  peut-il  s'accorder  avec  la  théorie  ordi- 
naire^ d'après  laquelle  toute  Faction  du  courant  induit  à  l'ouver- 
ture est  plus  énergique  que  celle  du  courant  de  fermeture  ^  p  a  r  c  e 
que  la  durée  est  plus  courte? 

Je  ne  hasarderai  pas  d'hypothèses  relativement  à  la  première 
question  ;  attendu  que  cela  a  été  fait  avant  moi  par  d'autres; 
c'est  un   point  sur  lequel  nous  reviendrons  dans  nos  conclusions. 

La  réponse  à  la  seconde  question  a  déjà  été  donnée  ci-dessus. 
(v,  p,  306.) 

A  côté  de  ces  expériences  se  place  la  suivante  de  M.  Donders , 
dans  laquelle  la  résistance  zéro  est  remplacée  par  celle  du  mica. 
Quand  on  colle  sur  le  papier  des  triangles  de  mica,  de  manière 
que  la  pointe  du  diapason  glisse  sur  le  mica  pendant  une  fraction 
de  plus  en  plus  grande  de  la  décharge,  le  courant  s'abrège  à 
mesure  que  la  résistance  du  mica  dure  plus  longtemps.  Dans  une 
expérience  sur  papier  vélin,  où  la  décharge  d'ouverture  de  4  élé- 
ments de  Grove  durait  pendant  7  vibrations ,  3  vibrations  sur  mica 
étaient  suffisantes  pour  supprimer  le  reste  de  la  décharge. 

La  résistance  ordinaire  dont  j'ai  fait  usage  est  la  r  é  s  i  s  t  a n  c  e 
de  l'air  entre  les  deux  pointes  d'un  micromètre  à  étincelles, 
introduit  dans  le  fil  conducteur  qui  relie  a  ou  b  au  diapason.  Avec 
cette  résistance  il  a  été  fait  un  grand  nombre  d'expériences,  qui 
ont  fait  ressortir  clairement  trois  faits  principaux,  savoir: 

Inaction  mécanique  plus  intense  de  la  décharge 
d'ouverture;2"un  retard  qui  croît  avecla  résistance; 
3**  l'influence    du    condensateur. 

On  a  employé  ici  le  Euhmkorff  complet,  quoique  d'abord  sans 
condensateur,  et  4  éléments  de  Grove.  Le  micromètre  à 
étincelles  était  introduit  dans  le  fil  conducteur  allant  de  b  au 
diapason.  L'instant  de  l'ouverture  ou  de  la  fermeture  du  cou- 
rant primaire  était  toujours  enregistré  avec  une  distance  micromé- 
trique =  zéro. 


DES    COURANTS    GALVANIQUES    F)  L\I>U(yriOIV. 


319 


Pour  les  décharges  d'ouvert  u  r  e  on  obtint  sur  papier  vélin 
les  chiffres  suivants: 


Distance  des  pohites.     Durée  de  la  décharge.  Retard. 

6.4  vibrations.  0,05  vibrations. 

4.8  //  0,05 

4.5  //  0,05  // 
4              /'  0,05  // 
4,3           //  0,05 
3.2           //  0,05 
3,2           //  0,06           // 
2              //  0,06 
2,5           "  0,12 
2,5           "  0,15  ff 

1.5  //  0.32  // 

1.9  //  0,33 
1,8           //  0,35 

1.6  //  0,44 
1,5           //  0,51 
1,2           /'  0,60 
0,5           //  0,72 
0,25         //  0,68 
0,50         //  0,74  // 
1  étincelle.  0,74           // 
0,2  vibration.  0,74           // 
1  étincelle.  0,70           // 
1         //  0,70 
rien.                                       —  // 


0 

millim 

1 

// 

2 

II 

3 

II 

4 

II 

5 

If 

6 

II 

7 

>' 

8 

1' 

9 

II 

10 

» 

11 

II 

12 

II 

13 

II 

14 

II 

15 

II 

16 

II 

17 

II 

18 

II 

19 

II 

20 

II 

21 

II 

22 

II 

23 

II 

La  durée  des  décharges  croît  donc  à  mesure  que 
la  résistance  augmente,  mais  non  pas  dans  le  même  rap- 
port. Si  l'on  prend  les  résistances  pour  abscisses  et  les  durées 
pour  ordonnées,  on  obtient  une  ligne  de  forme  parabolique. 

Le  retard  croît  avec  la  résistance  jusqu'à  un  maximum 
d'environ  ^  de  vibration,  après  quoi  il  ne  paraît  pas  augmenter 
davantage ,  comme  on  peut  le  voir  plus  haut  et  comme  il  résulte 
d'ailleurs  de  toutes  les  autres  expériences.  On  pourrait  croire  qu'il 
s'agit  ici,  au  lieu  d'un  retard,  de  la  non-observation  de  la  première 
étincelle;  mais,  pour  la  décharge  d'ouverture,  cela  n'est  pas  pos- 
sible, vu  qu'ici  la  première  étincelle  est  la  plus  forte  et  la  seule 


320  A.    NYLAIVn.    SUR    LA     DUREE     ET    LA     MARCHE 

qui  passe  jusqu'à  ce  que  la  résistance  atteigne  23  millimètres  d'air. 

Kelativement  à  ces  résultats^  on  ne  doit  pas  oublier  que  la 
résistance  se  compose  ici  d'une  partie  croissante,  due  à  l'air,  et 
d'une  partie  constante,  due  au  papier  (en  négligeant  la  résistance 
habituelle,  celle  du  fil  conducteur). 

Les  décharges  qu'on  obtient  en  introduisant  cette  résistance  res- 
semblent parfaitement  aux  décharges  ordinaires,  pour  ce  qui  con- 
cerne les  interruptions,  le  nombre  des  étincelles,  etc. 

Lorsque  le  micromètre  à  étincelles  est  placé  entre  b  et  le  cylin- 
dre, on  n'observe  d'abord  aucune  différence ,  mais ,  avec  une  résis- 
tance plus  grande,  on  conserve  la  décharge  unipolaire  constante 
de  a  (v.  plus  loin),  ce  qui  était  à  prévoir. 

La  décharge  de  fermeture,  qui,  sur  ce  papier  vélin, 
avec  une  distance  microraétrique  =  0,  dure  pendant  trois  vibra- 
tions,   est    déjà    entièrement    supprimée    par    une    résistance    de 

2  millimètres.  Avec  1  millimètre  de  résistance  j'obtenais  encore, 
parfois,  une  étincelle  unique.  C'est  là  une  différence  capitale  avec 
la  décharge  d'ouverture,  qui  est  en  état  de  vaincre  une  résistance 
d'air  de  22  millimètres. 

Mais  il  ne  suffit  pas  d'avoir  reconnu  le  fait  de  la  prompte 
cessation  des  décharges  de  fermeture,  il  faut  encore  voir  quelles 
sont  les  étincelles  qui  disparaissent  les  premières,  afin  d'en  tirer 
des  conclusions  relativement  à  la  marche  du  phénomène. 

A  cet  effet,  portons  le  micromètre  à  étincelles  à  des  distances 
plus  petites  que  1  et  expérimentons  sur  le  papier  à  fleurs.  Avec 

3  éléments  de  Grove  on  obtient  alors  les  résultats  suivants: 

Décharges    d'ouverture.  Décharges  de  fermeture. 
Distance 

des  pointes.         Durée.    ^  Retard. 

0  millim.  8  Va  vibrât.  1/20  vibrât. 

14.     //  41/2      "  1/20      " 

2/4   //  4         //  1/20      /' 

^ I ',  "  4'         //  1/20      "  "  — 

'^  /  4  //  3         //  ^  1 2  0      "  "  

De  ces  expériences  et  de  beaucoup  d'autres  il  résulte  donc 
que   la   décharge  de  fermeture,   longue  de  une  vibration,  qui  se 


Durée. 

Retard. 

8  f,i  vibrât. 

1/20  vibrât. 

1 
rien. 

1/3    „ 

nES    COURANTS    GALVANIQUES    d'iNDUCTION.  321 

produit  encore  avec  %,  de  millim.  de  résistance  d'air,  est  répartie 
sur  la  première  et  sur  le  commencement  de  la  seconde  vibration, 
d'où  Ton  peut  conclure  que  la  décharge  ordinaire  de  S%  vibra- 
tions a  atteint  son  maximum  après  une  demi-vibration  environ, 
ainsi  que  nous  l'avons  déjà  avancé  précédemment,  (v.  p.  307.) 

Les  décharges  d'ouverture  commencent  ici,  comme  partout, 
par  une  forte  étincelle. 

Ces  expériences  avec  3  éléments  de  Grove  montrent  les  décharges 
d'ouverture  comme  très  faibles,  mais,  quant  à  la  durée,  en 
cas  de  distance  micrométrique  zéro,  comme  aussi 
longues    que    les    décharges    d'ouverture. 

Avec  10  éléments  de  Grove  elles  sont  plus  intenses  et  peuvent 
déjà  vaincre  une  résistance  d'air  de  5  millimètres. 

Voici  les  résultats  sur  papier  à  fleurs: 


Décharg 

es  d'ouverture. 

Décharges  c 

le  fermeture. 

Distance 

des  pointes. 

Durée. 

Retard. 

Durée. 

Retard. 

1  milliin. 

15 

vibrât. 

W20 

vibrât. 

13  vibrât. 

1/20   vibrât. 

2       // 

10 

Il 

'/20 

Il 

71/2    /' 

2/2  0       " 

3       // 

10 

II 

^'  2  0 

II 

7      " 

3/20        " 

4       /' 

9 

it 

M20 

>' 

7      " 

*/2  0          " 

5  f 

6  /' 

8 
8 

II 

^/20 

II 

0%  // 
rien 

V20          " 

II 

*/io 

II 

1        "  1       "  ^1 10        "  "  ■ ~ 

On  voit  que  la  décharge  de  fermeture,  qui  avec  5  millim.  de 
résistance  d'air  s'étend  encore  sur  Q%  vibrations,  s'arrête  brus- 
quement pour  une  résistance  plus  grande;  c'est  là  un  fait  très 
caractéristique. 

En  outre,  cette  décharge,  qui,  étudiée  sans  résistance  d'air, 
ne  montre  pas  d'interruptions  proprement  dites ,  mais  des  étincelles 
périodiquement  plus  fortes,  commence,  en  cas  de  résistance  de 
1,  2,  3,  4  et  5  millim.  d'air,  par  5^  vibration  d'étincelles  faibles  et 
croissantes,  et  offre  alors,  pendant  4  vibrations,  des  interruptions 
telles  qu'on  ne  trouve  qu'une  couple  d'étincelles  par  vibration  ; 
ensuite,  il  vient  encore,  sur  une  longueur  de  2  à  2%  vibrations, 
des  étincelles  serrées  les  unes  contre  les  autres,  d'environ  20  par 
Archives  Néerlandaises.  ï.  V.  21 


322 


NYLAND.  SUR  LA  DUREE  ET  LA  MARCHE 


vibration.  Ces  deux  faits  corroborent  ce  que  nous  avons  dit  antérieure- 
ment   de    la    division    du   courant   de   fermeture    en    3    périodes. 

Lorsqu'on   exécute   les  mêmes  expériences  avec  le  conden 
sateur^    on   observe  deux  grandes  différences.  D'abord  on  peut 
pousser   la   résistance    beaucoup    plus    loin    lors    de    la  décharge 
d'ouverture,  et  ensuite  le  retard  est  beaucoup  plus  petit. 

Pour  introduire  le  condensateur  dans  le  circuit  primaire,  on  a 
relié  le  bouton  de  cuivre  C  avec  D,  et  B  avec  A. 

Avec  une  batterie  de  4  éléments  de  Grove  j'ai  fait,  à  une  demi - 
heure  d'intervalle,  les  deux  expériences  suivantes  sur  papier  à 
fleurs;  à  ce  moment,  la  batterie  était  déjà  en  action  depuis  5 
heures,  de  sorte  que  sa  force  ne  peut  avoir  varié  beaucoup  pen- 
dant ces  deux  expériences. 

Décharges    d'ouverture. 


Sans  condensateur. 

Avec  ( 

îonden 

Lsateur. 

Distance 
des  pointes. 

0  millim. 

Durée. 
13       vibr. 

Retard. 
0,05  vibr. 

Distance 
des  pointes. 

0  millim. 

Durée, 
13       vibr. 

Retard. 
0,05  vibr. 

2 

Il 

5% 

Il 

0,05 

II 

2 

II 

5% 

II 

//          // 

4 

II 

4 

II 

0,07 

'1 

4 

II 

4% 

II 

//          // 

6 

II 

31/2 

II 

0,10 

II 

6 

II 

31/2 

II 

//          // 

8 

II 

3 

II 

0,14 

II 

8 

II 

3 

II 

//          // 

10 

ti 

2% 

II 

0,10 

II 

10 

II 

22/. 

" 

//          // 

12 

II 

2 

II 

— 

II 

12 

II 

2 

II 

// 

14 

II 

1% 

II 

0,13 

II 

14 

" 

1% 

II 

//          // 

16 

II 

1 

II 

0,!2 

II 

16 

II 

1% 

II 

//          // 

18 

II 

1 

II 

0,20 

II 

18 

II 

1% 

II 

//          // 

20 

II 

% 

II 

0,27 

H 

20 

" 

1% 

II 

//          // 

22 

II 

'/« 

II 

0,42 

II 

22 

II 

Mi 

II 

//          // 

21 

II 

une  étinc. 

0,48 

II 

24 

II 

1^/4 

II 

//          // 

26 

II 

rien. 

II 

26 
28 
30 
32 
34 
36 
38 
40 

II 
II 
II 
II 
II 
II 

1 
1 

% 
% 
% 

y^ 

Va 
'/s 

II 

II 
II 
II 
II 
II 
II 

//          // 
0,09       // 

—        Il 
0,09       // 
0,10       // 
0,10       II 
0,10       // 

42 

II 

une    étinc. 

0,10       // 

44 

II 

Il 

—        // 

DES    COURANTS    GALVÂ.MQUES    I)  INDUCTION. 


823 


Le  condensateur  accélère  donc  le  courant 
d'ouverture,  prolonge  sa  durée  et  lui  fait  vaincre 
une    plus    grande    résistance. 

Les  décharges  de  fermeture  cessèrent  complètement,  dans  les 
deux  cas,  pour  une  résistance  de  2  millimètres. 

Sur    papier    vélin,    avec    4    éléments    plus    forts,    j'obtins   les 

nombres  suivants  : 

Décharfres    d'ouverture. 


Sans  condensateur. 

A^ 

rec 

condensateur. 

Distance 

Distance 

des    pointes. 

Durée. 

Retard. 

des 

pointes. 

Durée. 

Retard. 

25  millim. 

une  étinc. 

0.62  ribr. 

25 

millim. 

1 

vibr. 

0,17  vibr. 

30       // 

rien. 

—      // 

30 

Il 

2 

étinc. 

0,14     1' 

35       /' 

Il 

—      // 

35 

II 

Il 

—      // 

40 

II 

II 

0,20     // 

45 

II 

II 

0,22     /' 

50 

„ 

II 

0,20     /' 

55 

II 

II 

0,21     1' 

60 

II 

II 

0,20     // 

65 

II 

,1 

0,25     /' 

nombres    d'où    les    conclusions    tirées    plus   haut   ressortant  avec 
encore  plus  de  force. 

§  5.  COURANTS  d'induction  RENFORCES 
PAR  UNE  BOUTEILLE  DE  LEYDE  (voir  PI.  YIII). 

Le  renforcement  des  décharges  des  courants  d'induction  par 
une  bouteille  de  Leyde  est  un  fait  connu. 

Dans  mes  expériences,  la  bouteille  était  placée  entre  a  et  h 
{y.  PI.  I),  de  telle  sorte  que  (/  communiquait  avec  l'armature 
extérieure  de  la  bouteille  et  h  avec  l'armature  intérieure,  ou 
vice-versâ,  ce  qui  n'amène  aucune  différence. 

L'électricité  induite  qui  vient  des  extrémités  a  et  h  de  la  spirale 
secondaire  se  répand  alors  sur  les  armatures  de  la  bouteille,  — 
celle  de  a  sur  l'armature  extérieure,  celle  de  h  sur  l'armature 
intérieure ,  —  où  elle  se  condense  :  mais  immédiatement  après 
elle  se  décharge ,  par  les  conducteurs  a  G  et  /^  S ,  entre  la  pointe 
du  diapason  et  le  cylindre.  Elle  ne  retourne  pas  dans  la 
spirale   secondaire;    c'est   ce    qu'établissent  les  expériences. 

21* 


324         A.  NYLANI).  SUR  LA  DUREE  ET  LA  MARCHE 

Ces  décharges  sont  beaucoup  plus  fortes  que  les  décharges 
ordinaires^  bien  qu'elles  aient  une  durée  au  moins  égale.  Les 
étincelles  individuelles  ont  un  autre  aspect:  elles  sont  plus 
irrégulières,  et  les  espaces  blancs  autour  des  ouvertures  sont 
beaucoup  plus  larges  et  se  confondent  entre  eux.  Les  ouvertures 
ont  aussi  un  tout  autre  caractère  :  si ,  précédemment ,  elles 
paraissaient  comme  brûlées ,  maintenant  elles  ressemblent  à  des 
trous  percés  dans  le  papier  au  moyen  d'une  pointe  aiguë,  et 
autour  desquels  le  papier  montrerait  un  bord  relevé;  ce  bord  est 
relevé  aussi  bien  à  l'ouverture  qu'à  la  fermeture  du  courant 
primaire  et  soit  que  a  ou  h  communique  avec  le  diapason ,  de 
sorte  qu'on  serait  conduit  à  penser  que  l'électricité  a  toujours 
marché  du  cylindre,  à  travers  le  papier,  vers  la  pointe  du 
diapason ,  ce  qui  pourtant  ne  peut  avoir  été  le  cas.  Mais  on  doit 
être  prudent  dans  les  inductions  sur  la  direction,  car  il  y  a  ici 
encore  autre  chose  à  voir.  Les  étincelles  sont  liées  entre  elles; 
on  dirait  que  chaque  étincelle  a  une  queue  qui  l'unit  à  la  suivante, 
parfois  à  une  suivante  qui  n'a  pas  percé  de  trou;  de  sorte  qu'il 
semblerait  que  l'électricité  qui  arrive  perce  une  ouverture  et  que  celle 
qui  marche  en  sens  opposé  prend  son  chemin  par  cette  même 
ouverture. 

Le  nombre  des  étincelles  est,  sur  papier  vélin,  plus  petit  que 
dans  les  décharges  sans  bouteille  de  Leyde,  mais  nous  avons 
ici  une  autre  distribution.  D'abord,  il  n'y  a  pas  d'interrup- 
tions, de  sorte  que  la  décharge  sur  mailpapier,  par  exemple, 
commence  immédiatement  par  des  étincelles  au  nombre  d'une 
vingtaine  sur  chaque  vibration  ;  ce  nombre  devient  plus  petit 
vers  la  fin  de  la  décharge,  et  les  dernières  vibrations  ne  comptent 
que  6  ou  8  étincelles,  ou  moins  encore.  Au  contraire,  sans 
bouteille  dans  le  circuit,  les  décharges  montrent,  dans  le  même 
cas,  beaucoup  d'interruptions  et  un  nombre  d'étincelles  qui  croît 
vers  la  fin. 

Le  papier  à  fleurs,  sur  lequel  j'enregistrai  avec  et  sans  bouteille 
de  Leyde,  au  moyen  de  5  éléments  de  Grove,  accusait  aussi 
cette  différence  très-distinctement: 


DES    COURANTS    GALVA.MQUES    d'iNDUCTION.  325 

Décharges  d'ouverture. 

Avec  bouteille  de  Leyde.  Sans  bouteille  de  Leyde. 

Durée  totale.     Nombre   d'étincelles.  Durée  totale.  Nombre  d'étincelles. 

14 Va  vibr.       sur  la     1^     vibr.  24i  18  vibr.       sur  la     le  vibr.  10 

//      //       3e         //       21  //      //       3e       ,/       12 

//      //      7e        //       20  //      //       7e      ,/       20 

//      //     12e          „       12  ,/      „     12e       „       24- 

//     //  dernière  //        8 

Décharges  de    fermeture. 

Avec  bouteille  de  Leyde.  Sans  bouteille  de  Leyde. 

Durée  totale.    Nombre  d'étincelles.  Durée  totale.         Nombre   d'étincelles. 

13  vibr.    sur  la     le  vibr.  30  environ.  12^^  vibr.    sur  la     le  vibr.  30  environ. 


3e      ,/      30 

7e     //      30 

12e      .      12 


3e      //      30 

7e      //      30 

12e     „     40 


Dans  les  décharges  d'ouverture  sans  bouteille  de  Leyde  ou 
voit  en  outre  quelques  étincelles  plus  grandes  que  les  autres, 
mais  dans  celles  avec  bouteille  de  Leyde  les  étincelles  décroissent 
régulièrement  en  grandeur  et  en  nombre. 

Le  retard  est  à  peu  près  le  même  dans  les  deux  cas. 

La  durée  totale  des  décharges  est,  avec  bouteille  de  Leyde, 
un  peu  plus  longue,  ainsi  qu'il  ressort  des  chiffres  ci-dessus. 

Lorsqu'on  introduit  un  micromètre  à  étincelles  dans  la  partie  b  S 
du  circuit,  les  décharges  de  fermeture  s'arrêtent.  La  décharge 
d'ouverture  donne  un  coup  intense  et  marque  sur  le  papier  un 
petit  nombre  d'étincelles,  entourées  de  larges  espaces  d'un  blanc 
mat;  avec  25  millimètres  de  distance  des  pointes  et  sans  con- 
densateur, il  ne  passe  plus  qu'une  seule  de  ces  étincelles,  qui 
est  en  retard  de  ^ .  de  vibration.  Cette  décharge  est  incapable 
de  vaincre  une  résistance  plus  grande,  tandis  que  la  décharge 
sans  bouteille  de  Leyde  pouvait  surmonter ,  dans  ce  cas ,  une 
résistance  de  40  mm.  d'air  et  avait  alors  le  même  retard. 

En  résumant  les  résultats ,  nous  voyons  que  les  décharges  avec 
bouteille  de  Leyde  dans  le  circuit  sont  plus  intenses,  qu'elles 
n'ont  pas  d'interruptions,  qu'elles  sont  un  peu  plus 
longues  que  les  décharges  ordinaires ,  que  le  nombre  d'étincelles 


326         A.  NYLANU.  SUH  LA  DUHÉK  ET  LA  MARCHE 

est   plus   petit  et   diminue   vers  la  fin  de  la  décharge,    et  que 
celle-ci  est  moins  apte  à  vaincre  la  résistance  de  l'air. 

11  n'y  a  d'ailleurs  rien  d'étonnant  à  ce  que  ces  décharges  s'éloignent 
tant  des  décharges  ordinaires,  car  nous  avons  affaire  ici  à  un  phéno- 
mène tout  différent  :  l'électricité  s'accumule  d'abord  sur  les  armatures 
de  la  bouteille  de  Leyde,  et  ce  n'est  qu'ensuite  qu'elle  se  décharge. 

§6.  influence  reciproque  des  courants 
d'ouverture  et  de  fermeture. 

La  méthode  suivie  dans  nos  recherches  est  combinée  de  manière 
à  maintenir  toujours  séparées  les  décharges  d'ouverture  et  de 
fermeture,  afin  de  pouvoir  les  étudier  chacune  à  part.  Quant  à 
ce  qui  doit  arriver  lorsque  les  deux  courants  peuvent  agir  l'un 
sur  l'autre,  il  est  possible  de  le  prévoir  jusqu'à  un  certain  point  ; 
car,  de  quelque  manière  qu'on  se  représente  les  actions  d'induc- 
tion, celles  qui  se  manifestent  à  l'ouverture  du  courant  primaire 
doivent  toujours  être  en  sens  contraire  de  celles  auxquelles 
donne  lieu  la  fermeture  de  ce  courant,  de  sorte  qu'on  peut 
s'attendre,  dans  ces  expériences,  à  une  neutralisation  ou  un 
renversement  réciproque.  Lorsqu'on  ferme  par  exemple  le  circuit 
primaire,  le  noyau  devient  magnétique  et  induit  un  courant  dans 
la  spirale  secondaire;  si  alors  on  ouvre  le  circuit  avant  que  le 
noyau  ait  pris  le  maximum  de  magnétisme,  il  se  produit  un 
renversement  on  une  destruction  totale  ou  partielle  du  magnétisme 
et  par  conséquent  aussi  du  courant  induit.  La  question  est  seule- 
ment de  savoir  avec  quelle  rapidité  ce  renversement  ou  cette 
destruction  de  courants  peut  se  faire. 

En  collant  des  bandelettes  de  papier  sur  le  cuivre ,  ou  de  tain 
sur  l'ivoire  de  l'anneau  du  cylindre,  je  réussis  aisément  à  faire  se 
succéder  l'ouverture  et  la  fermeture  en  un  temps  moindre  que  celui 
qui  est  nécessaire  aux  courants  pour  s'écouler.  La  décharge 
ordinaire  d'ouverture  de  10  éléments  de  Grove,  de  force  médiocre , 
durait  sur  mailpapier  8  vibrations,  et  la  décharge  de  fermeture 
6  vibrations,  tandis  que  l'ouverture  avait  lieu  parfois  moins  d'une 
vibration  après  la  fermeture. 


DES    COURANTS    GALVANIQUES    u'iNDUCTION.  327 

Lorsque  la  rupture  du  circuit  primaire  s'effectuait  y^  vibration 
après  la  fermeture,  la  fin  de  la  décharge  de  fermeture  et  toute 
la  décharge  d'ouverture  étaient  perdues;  lorsque  la  rupture  s'opérait 
après  ^  de  vibration,  j'obtenais  pendant^  vibration  des  étincelles 
d'ouverture.  Il  en  était  de  même  dans  le  cas  opposé:  en  fermant 
de  nouveau,  2  vibrations  après  l'ouverture  du  circuit  primaire, 
rien  ne  se  produisait  sur  le  papier;  en  fermant  après  3  vibra- 
tions, j'obtenais  pendant  2  vibrations  des  étincelles  de  fermeture, 
qui  apparaissaient  très  rapidement.  Les  étincelles  d'ouverture 
décroissent  rapidement  par  le  renversement,  et  V20  ^^  vibra 
tion  après  la  dernière  et  très  petite  étincelle 
d'ouverture  se  montre  déjà  la  première  étincelle  de  ferme- 
ture, de  sorte  que  le  passage  d'une  décharge  à  l'autre  a  lieu 
en   V20  cle  vibration. 

Le  tableau  suivant  présente  une  série  passablement  régulière 
(ce  qui  du  reste  ne    s'obtient  pas  à  volonté  par  cette  méthode)  : 

ï'ermer  après  une  dccLarge  d'ouverture  de  2  vibr.  donne      rien. 

//  //      //         //  //  //  3     //        //  2  vibr.  de  déch.  de  ferm. 

//  //      //         //  //  //  3  y<i  II        II  2  ^/2  I'  I'       "  "      " 

Il  II      II         II  II  II  4     //         '/  3     //  //       //  //      // 

//  //       '/  //  //  Il  ^     Il        II  4     //  //       //  '/      '/ 

La  première  ligne  de  ce  tableau  ne  prouve  pas  encore  directe- 
ment qu'il  y  a  eu  destruction  ;  mais  j'ai  mis  le  fait  hors  de  doute 
par  une  expérience  postérieure.  En  effet ,  quand ,  après  3  vibrations , 
j'ouvrais  de  nouveau,  le  courant  produit  avait  sa  durée  normale 
de  8  vibrations,  ce  qui  eût  été  impossible  s'il  était  encore  resté 
quelque  action  confuse. 

Ces  expériences  mettent  de  nouveau  en  lumière  la  vitesse  pro- 
digieuse de  l'électricité,  puisque  le  renversement  du  courant  peut, 
dans  le  temps  excessivement  court  de  V20  de  vibration  ou  V'4920 
de  seconde,  se  propager  jusqu'à  l'extrémité  de  la  spirale  secon- 
daire longue  de  100,000  mètres. 

Pour  certaines  expériences  physiologiques,  ces  résultats  ont  de 
Fintérêt  sous  un  autre  rapport:  lorsqu'on  introduit  un  micromètre 
à  étincelles  dans  le  circuit   induit,    et  qu'on  place  les  pointes  à 


328         A.  NYLANU.  SUR  LA  DUREK  ET  LA  MARCHE 

une  distance  telle  qu'il  ne  passe  qu'une  seule  étincelle ,  on  peut, 
en  fermant  immédiatement  après,  obtenir,  au  bout  de  '/-(,  de 
seconde ,  une  seconde  étincelle  d'ouverture ,  de  même  force  que 
la  première. 

§  7.    INDUCTION     UNIPOLAIRE. 

Jusqu'à  présent  nous  avons  toujours  réuni  les  deux  extrémités 
de  la  spirale  secondaire,  ou  au  moins  nous  les  avons  placées  à 
une  distance  assez  petite  pour  que  l'étincelle  de  décharge  du 
courant  d'induction  pût  jaillir  de  l'une  à  l'autre.  Maintenant  il 
s'agit  d'examiner  si  l'on  observe  aussi  une  action  d'induction  aux 
extrémités  de  la  spirale  secondaire  non  fermée.  Nous  savons 
déjà  d'autre  source  qu'il  en  est  réellement  ainsi.  M.  Du  Bois- 
Reymond  (Jahresbericlite ,  1845)  désigne  ces  phénomènes  de  tension 
sous  le  nom  d'induction  unipolaire,  induction  qu'il  ne  faut  pas 
confondre  avec  celle  de  même  nom ,  qui  prend  naissance  par  la 
rotation  d'un  aimant  autour  de  son  axe  et  qui  a  été  étudiée  par 
M.  Weber. 

Pour  enregistrer  les  décharges  unipolaires,  je  reliais  l'un  des 
boutons  a  ou  b  avec  le  diapason,  tandis  que  l'autre  restait  isolé. 

Ces  décharges  durent  peu  de  temps,  mais  elles  se  composent 
également  d'étincelles  distinctes. 

Avec  10  éléments  de  Grove  j'obtins  sur  mailpapiery  a  commu- 
niquant avec  le  diapason  et  h  étant  isolé,  une  décharge 
de  fermeture  très  faible,  de  Y^  de  vibration  et  de  4  étincelles; 
mais,  par  contre,  une  décharge  d'ouverture  de  V/2  vibration. 
Lorsque  b  communiquait  avec  le  diapason  et  que  a  était 
isolé,  la  décharge  de  fermeture  durait  1%  vibration  et  celle  d'ou- 
verture 1%  vibration. 

Quand,  l'une  des  électrodes  communiquant  avec  le  diapason, 
l'autre  est  rattachée  à  une  conduite  de  gaz,  les  décharges 
sont  déjà  beaucoup  plus  énergiques: 

a  donne  alors  à  la  fermeture  une  décharge  de  2^  vibrations. 
„  l'ouverture       „  „  „  4%         „ 

b  donne  alors  à  la  fermeture    „  „  „  5'^  „ 

„  l'ouverture       „  „  „  4  „ 


X 


DES    COURANTS    GALVANIQUES    D  INDUCTION. 


329 


Une  particularité  qui  paraît  appartenir  exclusivement  aux  décharges 
unipolaires  est  la  suivante.  Les  décharges;  qui  se  font  sans  com- 
munication de  a  ou  //  avec  la  conduite  de  gaz,  se  composent 
manifestement  de  deux  parties:  la  It'ic  commence  par  une 
étincelle  assez  forte;  les  étincelles  suivantes  décroissent,  jusqu'à 
ce  que  la  décharge  ait  duré  environ  une  demi-vibration  ;  alors  vient 
une  interruption,  et  ensuite  la  2àe  partie,  qui  est  tout-à-fait 
semblable  à  la  première,  sauf  que  ses  étincelles  sont  un  peu 
plus  fortes. 

Les  expériences  avec  résistance  montrent  que  les  décharges 
unipolaires  ne  sont  pas  aussi  faibles  qu'elles  le  paraissent;  et 
dans  ces  expériences  la  particularité  précédente  apparaît  de  nouveau, 
sous  une  autre  forme. 

Lorsque  j'introduisis,  en  effet,  un  micromètre  à  étincelles  dans 
le  circuit  entre  a  et  le  diapason,  h  restant  isolé,  et  ensuite  dans 
le  circuit  entre  h  et  le  diapason,  a  restant  isolé,  j'obtins  avec 
des  résistances  croissantes,  sur  maitpapier,  les  résultats  suivants: 

Décharges    d'ouverture. 
De    a.  De    L 


Distance 

Distance 

des 

pointes. 

Durée. 

Retard. 

des 

pointes. 

D 

urée. 

Retard. 

0 

millim. 

1  vibr. 

1/20 

^àhr. 

0 

millim. 

1 

vibr. 

1/20  vibr. 

2 

Il 

1     // 

2/20 

// 

2 

Il 

1 

Il 

2/20    " 

4 

// 

1     // 

V20 

// 

4 

II 

% 

II 

3/20    " 

6 

II 

¥2        " 

•0/20 

// 

6 

II 

% 

II 

3/20    '' 

8 

II 

14   // 

11/20 

i> 

8 

II 

'A 

II 

1^/20    " 

10 

II 

%   // 

1  1/20 

II 

10 

II 

'k 

II 

1^/20    " 

12 

Il      une 

étincelle 

1-^/2  0 

II 

12 

II 

'A 

II 

1^/20    " 

14 

//        // 

II 

13/20 

II 

11 

Il      une 

étincelle 

lij.^Q          II 

16 

//        // 

II 

13/20 

II 

16 

//        // 

II 

15/20           » 

18 

II 

rien 



18 

// 

rien 



La  décharge  de  r/fait,  entre  4  et  6  millimètres  de  distance  des 
pointes ,  un  saut  en  durée  et  en  retard ,  ce  qui  est  dû  à  ce  que 
la  1ère  partie  (voir  ci-dessus)  disparaît  à  ce  moment,  après  avoir 
déjà  subi  une  rédaction  dans  les  décharges  précédentes.  La  même 
chose  a  lieu  pour  la  décharge  de  b  lorsque  la  distance  des  pointes 
passe  de  6  à  8  millimètres. 


330         A.  NYLAIND.  SUR  LA  DUREE  ET  LA  MARCHE 

Avec  le  condensateur,  l'induction  unipolaire  est  capable 
de  vaincre  une  résistance  de  38  millimètres.  On  voit  alors  se 
reproduire  les  propriétés  du  condensateur  dont  il  a  été  parlé  p.  322. 

§8.    IMAGES    UES    ÉÏIJNCELLES    DE    DECHARGE. 

(Voir  PI.  IX  et  X). 

Par  une  légère  modification  de  la  méthode  habituelle,  je  suis 
parvenu  à  obtenir  sur  le  papier  de  très  belles  images  des  diffé- 
rentes étincelles  de  la  décharge  des  courants  d'induction,  images 
qui  offrent  de  l'intérêt,  comme  formant  la  contre-partie  de  celles 
de  Feddersen. 

Lorsqu'on  laisse  écrire  sur  le  cylindre,  ainsi  que  nous  l'avons 
déjà  fait  au  §36,  les  deux  extrémités ,  terminées  en  pointe  aiguë , 
de  la  spirale  induite,  le  courant  est  enregistré  par  une  double 
série  d'étincelles.  Le  courant  passe  alors  d'une  des  électrodes,  par 
le  papier,  par  une  partie  du  cylindre  et  de  nouveau  par  le  papier , 
dans  l'autre  électrode,   ou  vice-versâ. 

Mais  lorsque  les  extrémités  sont  assez  rap- 
prochées pour  que  l'électricité  préfère  cheminer 
au-dessus  du  papier  plutôt  que  de  le  traverser  deux 
fois,  alors ,  surtout  si  les  électrodes  ont  leurs  pointes  tournées  l'une 
vers  l'autre,  l'électricité  s'écoule  entre  elles  en  rasant  la  surface 
du  papier,  et  elle  est  forcée  d'imprimer  sa  route  dans  le  noir 
de  fumée.  Chaque  étincelle  marque  ainsi  sa  trace,  et  la  décharge 
entière  se  traduit  par  une  série  d'images. 

Cette  trace  est  composée  de  trois  parties.  La  partie  moyenne 
figure  une  ligue  noire  très  fine,  formée  par  de  la  suie  restée  en 
place,  ainsi  qu'on  le  reconnaît  facilement  au  microscope;  départ 
et  d'autre  de  cette  ligne,  et  perpendiculairement  à  sa  direction, 
la  suie  a  été  chassée,  de  sorte  que  deux  bords  blancs  limitent 
la  ligne  noire.  On  dirait,  d'après  cet  aspect,  que  l'étincelle  elle- 
même  est  sans  action  mécanique,  mais  que  celle-ci  est  due  à 
l'air  échauffé,  qui  s'échappe  des  deux  côtés,  en  enlevant  la  suie. 
Quand  on  tourne  très  rapidement,  chaque  décharge  d'ouverture 
et  de  fermeture  est  analysée  en  une  série  de  ces  images  d'étincelles. 

Les    décharges,  qui  se   font   sans    bouteille  de  Leyde  dans  le 


DES    COURANTS    GALVANIQUES    d'iNDUCTION.  331 

circuit  induit^  commencent  par  une  étincelle  unique;  vient  alors 
une  interruption  de  quelques  vibrations ,  puis  une  série  de  plusieurs 
étincelles  très  rapprochées.  Ces  longues  interruptions  doivent  être 
attribuées  en  partie  à  des  étincelles  qu'on  voit  jaillir  à  une  certaine 
distance  du  papier,  entre  d'autres  points  que  les  extrémités  des 
électrodes,  en  dépit  de  ce  que  celles-ci  offrent  à  l'électricité  le 
chemin  le  plus  court. 

Lorsqu'on  place  les  électrodes  écrivantes  à  une  distance  telle 
que  la  résistance  à  travers  le  papier  et  le  cylindre  soit  égale  à 
la  résistance  à  travers  la  suie  qui  recouvre  le  papier,  on  obtient 
des  décharges  alternatives.  Celles  qui  traversent  le  papier  sont 
marquées,  de  même  que  plus  haut  au  §36,  par  de  petits  trous, 
entourés  chacun  d'un  espace  blanc  et  disposés  sur  les  lignes 
droites  que  tracent  les  électrodes;  les  décharges  qui  rasent  le 
papier  sont  indiquées  par  les  trois  parties  décrites  ci-dessus.  On 
peut  de  cette  manière  obtenir  des  alternatives  dans  une  seule  et 
même  décharge,  et  alors  on  reconnaît  bientôt  que  la  ligne  noire 
remplace  le  trou ,  tandis  que  les  bords  blancs  représentent  la  zone 
blanche  circulaire  qui  entoure  le  trou. 

Quand  on  introduit  une  bouteille  de  Leyde  dans  le  circuit 
induit,  les  étincelles  deviennent  beaucoup  plus  fortes,  mais  elles 
donnent  du  reste  les  mêmes  images.  Ces  décharges  consistent  en 
étincelles  sans  interruptions  (Voir  p.  324) ,  de  sorte  qu'elles  se 
montrent  très  régulières,  sous  forme  d'une  série  de  figures  ellip- 
tiques, qui  se  dessinent  surtout  nettement  lorsque  les  pointes 
écrivantes  ne  font  que  toucher  légèrement  le  papier.  Quand  les 
pointes  n'écrivent  pas,  mais  sont  à  une  très  petite  distance  de  la 
surface  enfumée  qui  tourne  au-dessous  d'elles,  on  obtient,  au  lieu 
d'ellipses,  des  bandes  d'un  blanc  mat,  qui  ressemblent  parfaite 
ment  aux  figures  données  par  M.  Feddersen  de  la  décharge  d'une 
bouteille  de  Leyde  chargée  d'électricité  statique  (Voir  PL  VII, 
fig.  20,  dans  Poqg.  Ann.  CXIII).  Si  l'on  place  les  pointes  très 
près  l'une  de  l'autre  sur  le  cylindre ,  on  obtient ,  en  tournant  très 
rapidement ,  des  figures  plus  circulaires ,  parce  que  la  ligne  noire 
et  les  bords  blancs  s'élargissent. 


332  A.    NYLAiND.     SUR    LA     DUREE     ET    LA    MARCHE 

Pour  avoir  des  images  bien  belles  et  bien  grandes,  je  fis  par- 
courir à  rélectricité  des  chemins  plus  longs.  A  cet  effet ,  je  recou- 
vris le  cylindre  de  papier  épais,  de  façon  que,  même  en  écartant 
beaucoup  plus  les  électrodes  entre  elles  (à  1  centimètre),  l'élec- 
tricité n'en  passât  pas  moins  à  la  surface  du  papier,  au  lieu 
de  le  traverser.  La  durée  des  décharges  diminue  dans  ce  cas, 
et  de  même  le  nombre  des  étincelles ,  mais  celles-ci  sont  beaucoup 
plus  longues  et  plus  larges.  Tantôt  l'image  de  chaque  étincelle 
composée  de  trois  parties  parallèles,  reste  entière  et  forme 
une  ligne  en  zigzag,  une  ligne  ramifiée  ou  une  ligne  courbe; 
tantôt  elle  se  résout  en  deux  portions  symétriques,  ou  parfois 
non  symétriques,  qui  représentent  deux  flammes  dirigées  l'une 
vers  l'autre. 

Quelque  belles  et  détaillées  que  soient  ces  figures,  il  m'est 
impossible  d'indiquer,  dès  à  présent,  les  faits  qui  peuvent  être 
regardés  comme  constants.  La  forme  des  électrodes ,  leur  distance 
mutuelle,  leur  pression  plus  ou  moins  forte  sur  le  papier,  etc. 
ont  une  trop  grande  influence ,  pour  qu'on  puisse  esquisser  l'image 
dans  ses  traits  généraux.  Les  figures  des  PI.  IX  et  X  ne  font 
connaître  que  quelques  formes  particulières. 

Il  est  certain  que  ces  images  ne  le  cèdent  en  rien  à  celles  de 
Feddersen  en  finesse  de  détails,  de  sorte  que  j'ai  l'intention 
d'exécuter  par  la  même  méthode,  mais  avec  des  appareils  per- 
fectionnés, toute    une  nouvelle  série  d'expériences. 

Observation  générale.  Le  lecteur  pourrait  objecter  que 
tous  les  faits  énumérés  jusqu'ici  traduisent  peut-être  très  exactement 
les  propriétés  du  grand  inducteur  de  Ruhmkorff  dont  j'ai  fait 
usage,  mais  non  les  propriétés  des  courants  galvaniques  induits 
en  général.  Pour  le  tranquilliser,  je  dirai  que  j'ai  aussi  expéri- 
menté avec  un  plus  petit  inducteur  de  Ruhmkorff  et  avec  l'appa- 
reil à  traîneau  de  du  Bois-Reymond ,  et  que  ces  expériences  ont 
fourni  des  résultats  analogues;  mais  ces  inducteurs  avaient  une 
action  trop  faible  pour  que  les  courants  pussent  être  étudiés 
convenablement  dans  toutes  les  circonstances. 


DES    COURANTS    GALVANIQUES    d'iNDUCTION.  333 

RÉSUMÉ  ET  CONCLUSIONS. 

En  renvoyant  pour  les  nombreux  détails  aux  pages  précédentes , 
je  rappellerai  ici  brièvement  les  faits  principaux  qui  ont  été  mis 
au  jour. 

l'^.  Les  courants  dus  à  l'induction  voltaïque  pure 
sont  très  faibles  (à  peine  sensibles  pbysiologiquement) ,  et  durent , 
sur  papier  à  fleurs,  0,002  seconde  à  la  fermeture  et  0,0013  seconde 
à  l'ouverture.  Dans  ces  expériences,  la  batterie  inductrice  se 
composait  de  10  éléments  de  Orove,  la  spirale  primaire  de  30 
mètres  de  fil  de  cuivre  épais  de  2\  millim.  et  recouvert  de  soie; 
la  spirale  secondaire  était  celle  du  grand  inducteur  de  Rubmkorff. 

Ces  décharges  se  composent ,  de  même  que  toutes  les  suivantes  , 
d'étincelles  séparées;  le  retard  de  la  décharge,  c'est-à-dire  le 
temps  qui  s'écoule  entre  l'ouverture  ou  la  fermeture  du  courant 
primaire  et  la  première  étincelle  du  courant  d'induction,  est  un 
peu  moindre  à  l'ouverture  qu'a  la  fermeture,  —  inférieur ,  dans  les 
deux  cas,  à  ^V  ^®  vibration  (1   vibration  =  ^iu  ^e  seconde). 

2°.  Lorsqu'on  introduit  des  noyaux  de  fer  dans  cette 
spirale  primaire,  les  courants  induits  deviennent  beaucoup 
plus  énergiques  et  de  plus  longue  durée.  Un  barreau  de  82 
centim.  de  longueur  et  2,2  centim.  d'épaisseur  donne,  avec  la 
même  batterie  inductrice,  des  courants  qui,  sur  papier  à  fleurs, 
durent  10  vibrations  à  la  fermeture  et  10^  vibrations  à  l'ouverture. 
Le  retard  de  la  décharge  est  de  nouveau  plus  court  lors  de  l'ou- 
verture que  lors  de  la  fermeture.  Les  courants  d'ouverture  peuvent 
traverser  une  couche  d'air  de  14  millim.,  ceux  de  fermeture  une 
couche  de  6  millim.  seulement.  Si,  à  la  place  du  barreau,  on 
introduit  dans  la  spirale  primaire  un  faisceau  de  45  fils  de  fer 
longs  de  53 .V  centim.  et  épais  de  1  millim. ,  on  obtient  des  courants 
induits  de  plus  courte  durée  qu'avec  le  barreau,  mais  qui  repro- 
duisent, du  reste,  les  mêmes  particularités. 

3^  Le  Ruhmkorff  complet  donne  les  courants  les  plus  éner- 
giques et  nous  apprend  les  faits  suivants: 


334         A.  NYLAND.  SUR  LA  DUREE  ET  LA  MARCHE 

a.  Les  décbarges  se  composent  de  centaines  d'étincelles 
distinctes,  qui ,  d'abord  séparées  par  des  interruptions  ,  se  suivent 
ensuite  régulièrement,  en  augmentant  en  nombre  et  dimi- 
nuant en  g r a n d e u r.  Dans  les  décbarges  d'ouverture  c'est 
la  première  étincelle  qui  est  la  plus  forte,  dans  les 
décharges  de  fermeture  ce  sont  les  étincelles  de  la  2t'me 
vibration. 

h,  La  durée  des  décbarges  d'ouverture  et  de  fermeture  est  la 
même,  au  moins  quand  la  résistance  est  faible;  sur  papier  à 
fleurs,  par  exemple,  elles  durent  l'une  et  l'autre  17  à  18  vibra- 
tions. Une  plus  grande  rapidité  d'ouverture  ou  de  fermeture  n'a 
pas  d'influence  appréciable  sur  la  durée.  La  durée  des  décbarges 
croît  avec  le  nombre  des  éléments  de  la  batterie ,  mais  non  dans 
le  même  rapport. 

c.  Les  interruptions  entre  les  étincelles  sont  tantôt  plus  nom- 
breuses dans  les  décharges  de  fermeture  et  tantôt  dans  les  dé- 
charges d'ouverture,  suivant  que  l'électrode  r/ communique  avec  le 
diapason  ou  avec  le  cylindre.  Toutefois,  quand  on  laisse  les 
deux  électrodes  écrire  sur  le  cylindre,  on  n'en  trouve 
pas  moins  des  interruptions  dans  le  tracé  double  de  chacune 
des  décharges,  de  sorte  que  ces  interruptions  doivent  être  une 
conséquence  du  mouvement  de  l'électricité  dans  les  conducteurs. 
La  première  interruption  des  décharges  d'ouverture 
croît  régulièrement  avec  la  force  de  la  batterie, 
celle  des  décharges  de  fermeture  croît  aussi,  mais  moins  régu- 
lièrement. 

d.  Le  retard  des  décharges  d'ouverture  est  de  ^^y  de  vibration 
ou  moindre  ;  celui  des  décharges  de  fermeture  est  de  J^  de  vibration 
ou  moindre. 

e.  Les  expériences  sans  résistance  (les  extrémités  de  la 
spirale  secondaire  étant  en  contact  métallique)  apprennent  que, 
dans  ce  cas ,  toutes  les  décharges  durent  beaucoup  plus  long- 
temps; réciproquement ,  une  grande  résistance ,  par  exemple  celle 
du  mica,  raccourcit  la  durée. 

/.  Lorsque  les  décharges  ont  à  vaincre  une  couche 


DES    COURANTS    GALVANIQUES    d'iNDUCTION.  335 

d'air  entre  les  pointes  d'un  micromètre  à  étincelles, 
les  décharges  de  fermeture  disparaissent  déjà  entièrement, 
même  avec  les  courants  les  plus  énergiques,  pour  une  distance 
de  5  millim.  entre  les  pointes.  A  mesure  que  la  résistance  de 
l'air  augmente,  la  décharge  d'ouverture  décroît  régu- 
lièrement en  durée  et  montre  un  retard  croissant. 
L'influence  du  condensateur  est  ici  très  appréciable: 
des  courants  d'ouverture  qui ,  pour  une  distance  des  pointes  égale 
à  24  mm.,  sont  réduits  à  une  seule  étincelle  et  ont  un  retard 
de  0,48  vibration,  peuvent,  avec  le  secours  du  condensateur, 
franchir  une  distance  de  42  mm.  entre  les  pointes,  en  n'accusant 
qu'un  retard  de  0,1  vibration. 

çj.  Une  bouteille  de  Leyde,  introduite  dans  le 
circuit  secondaire,  renforce  en  apparence  les  décharges ,  qui 
alors  font  plus  de  bruit  et  impriment  leurs  étincelles  plus  forte- 
ment sur  le  papier;  mais  ces  décharges  ne  peuvent  vaincre  une 
aussi  grande  résistance  que  les  décharges  ordinaires.  Les 
étincelles  diminuent  en  nombre  vers  la  fin  des  déchar- 
ges   et    elles    se    succèdent    sans    interruptions. 

h.  Si  la  succession  des  ouvertures  et  des  ferme- 
tures est  assez  rapide  pour  que  les  courants  d'induction 
n'aient  pas  le  temps  de  s'écouler  régulièrement,  on  obtient  une 
destruction  totale  ou  partielle  de  l'action ,  et  un  passage  brusque 
(en  2^0  ^^  vibration)  d'une  des  décharges  à  l'autre. 

i.  Les  décharges  unipolaires  sont  de  courte  durée 
{1%  vibration),  se  composent  aussi  d'étincelles  séparées  et  peuvent 
vaincre  des  résistances  presque  aussi  grandes  que  les  décharges 
ordinaires.  Les  deux  extrémités  de  la  spirale  secondaire  donnent 
les  mêmes  décharges.  On  peut  prolonger  la  durée  de  la  décharge 
à  l'une  des  deux  extrémités  en  faisant  communiquer  l'autre  avec 
la  terre. 

k.  Les  images  des  décharges,  qui  peuvent  être  regar- 
dées comme  une  analyse  ultérieure  des  étincelles,  ne  nous  ont 
appris  jusqu'ici,  outre  les  choses  déjà  trouvées,  qu'un  seul  fait 
nouveau  concernant  le  mode  de  décharge,    savoir,    que   ce  n'est 


336  A.  NYLAND.  SUR  LA  DUREE  ET  LA  MARCHE 

pas  Tétin celle  elle-même,  mais  l'air  qu'elle  traverse,  qui 
paraît    exercer    l'action    mécanique. 

Quelques-uns  des  faits  que  nous  avons  constatés  tendent  à 
confirmer  la  théorie  mathématique  par  laquelle  on  a  cherché  à  relier 
entre  eux  les  phénomènes  de  l'induction  voltaïque  pure.  Les  résultats 
relatifs  à  cette  induction  s'accordent  assez  bien  avec  ceux  qui 
ont  été  obtenus  par  M.  Beetz,  bien  que  notre  méthode  ne  soit 
pas  la  meilleure  pour  l'observation  de  ces  courants  faibles.  Les  calculs 
de  M.  du  Bois-Reymond  sont  aussi  confirmés  par  nos  expériences. 

Plusieurs  faits  nouveaux  se  trouvent  toutefois  complètement 
isolés  et  pourront  servir  à  l'édification  d'une  théorie  des  décharges 
électriques,  pour  laquelle  d'autres  matériaux  ont  déjà  été  fournis. 

Parmi  ces  faits  nouveaux  je  citerai: 

P.  La  décharge  en  étincelles  distinctes,  qui  se  montre  aussi 
dans  les  images  du  §  8. 

2".  L'accroissement  du  nombre  de  ces  étincelles  vers  la  fin  des 
décharges. 

3".  L'égalité  de  durée  des  décharges  d'ouverture  et  de  ferme- 
ture ,  en  cas  de  résistance  nulle  ou  faible ,  bien  que  les  décharges 
d'ouverture  puissent  vaincre  une  résistance  beaucoup  plus  grande. 

4".  Les  interruptions,  —  et  spécialement  l'accroissement  de  la 
première  interruption  à  mesure  que  la  force  de  la  batterie  augmente. 

5".  La  prolongation  des  décharges  par  le  contact  métallique 
des  électrodes,  et  leur  raccourcissement  par  une  résistance,  telle 
que  celle  du  mica  par  exemple. 

6".  L'accroissement  du  retard  à  mesure  que  la  résistance  augmente. 

Au  sujet  de  ces  faits  je  présenterai  encore  les  observations 
suivantes. 

Isious  apprenons  à  connaître  les  courants  d'induction  par  leurs 
effets.  Parmi  ceux-ci,  les  phénomènes  de  lumière  et  de  chaleur, 
les  actions  physiologiques  et  magnétiques  ont  déjà  été  bien  étudiés. 
Je  me  suis  servi  exclusivement  d'une  méthode  propre  surtout  à 
faire  connaître  les  actions  mécaniques,  et  il  n'est  donc  pas  étonnant 
que  nous  ayons  trouvé  des  faits  donnant  de  la  décharge  mécanique 


DES    COURANTS    GALVANIQUES    d'iNPUCTIOjN.  337 

une  notion  à  laquelle  la  plupart  des  autres  méthodes  ne  pouvaient 
conduire. 

Cette    notion    est    celle    de    la    décharge    oscillante. 

Ce  caractère  d'oscillation  se  trouve  aussi  dans  la  décharge  d'une 
bouteille  de  Leyde  chargée  d'électricité  statique,  ainsi  qu'il  a  été 
prouvé  par  M.  Feddersen  (Poyg.  Ann.,  CXIII  et  CXVI),  qui,  à 
l'aide  d'un  miroir  animé  d'une  rotation  rapide,  a  projeté  l'image 
de  l'étincelle  sur  une  plaque  préparée  photographiquement  et  a 
obtenu  ainsi  une  représentation  qui  indiquait  des  mouvements  de 
va-et-vient  de  l'électricité. 

Pour  les  décharges  des  courants  galvaniques  induits  je  rappellerai, 
comme  ayant  montré  des  faits  analogues ,  les  expériences  récentes 
de  M.  Helmholtz,  dont  on  trouve  un  résumé,  sous  le  titre  de 
„Ueber  die  electrische  Oscillationen",  dans  les  Verhandlungen  des 
nalurhisiorischenmedizinischen  Vereinszu Heidelberg^  1869. M. Helm- 
holtz a  pu  observer  sur  un  nerf  de  grenouille  45  maxima  et 
minima  de  la  décharge  entre  les  armatures  d'une  bouteille  de 
Leyde,  et  les  mêmes  oscillations  se  sont  manifestées  dans  les 
décharges  unipolaires  sans  bouteille  de  Leyde. 

Les  indications  qui  précèdent  ont  uniquement  pour  but  de  pro- 
voquer un  examen  approfondi  des  faits  que  j'ai  observés,  car  je 
sais  parfaitement  qu'il  appartient  à  des  juges  plus  compétents  de 
décider  si  mes  expériences  peuvent  réellement  contribuer  en  quelque 
chose  à  la  connaissance  des  phénomènes  encore  si  énigmatiques 
de  l'électricité. 


Archives  Néerlandaises,  T.  V.  22 


338  A.    NYLAND.    SUR    LA    DURÉK     ET    LA    iMARCHE 

REMARQUES 
CONCERNANT  LES  PHOTOGRAPHIES. 

Neuf  expériences ,  choisies  dans  ma  riche  collection ,  seront  suffi- 
santes pour  rendre  intelligible  le  langage  des  vibrations  et  faire 
connaître  en  même  temps  quelques-unes  des  principales  décharges , 
telles  qu'elles  se  montrent  en  réalité.  Dans  ce  choix  j'ai  été  guidé 
par  les  considérations  suivantes: 

1".  Le  papier  vélin  et  le  mailpapier  étaient  les  seuls  qui  se 
prêtassent  aux  manipulations  photographiques,  de  sorte  qu'on  n'a 
pu  reproduire  aucune  des  expériences  délicates  sur  papier  à  fleurs. 

2^  Certains  courants  s'enregistraient  si  faiblement ,  par  exemple 
ceux  de  l'induction  voltaïque  pure  et  de  l'induction  unipolaire, 
que  la  description  satisfaisait  mieux  que  la  représentation. 

3".  Quelques  faits  se  montraient  uniquement  sous  le  microscope 
et  disparaissaient  dans  la  photographie. 

4^^.  D'autres  faits  ne  ressortaient  qu'après  élimination  des  cir- 
constances accessoires,  par  la  comparaison  d'expériences  variées, 
qui,  chacune  séparément,  n'apprenaient  rien. 

Pour  la  parfaite  intelligence  de  la  méthode,  il  ne  faut  pas 
perdre  de  vue  que  les  photographies  sont  des  images  négatives, 
car  les  expériences  originales  forment  des  dessins  blancs  sur  fond 
noir.  Dans  ces  photographies  toutes  les  décharges  vont  de  gauche 
à  droite. 

Les  décharges  déréglées  ou  intempestives,  qui  se  trouvent  sur 
la  Planche  II  en  bas  et  dans  la  sixième  registration  à  partir  du 
bas ,  sur  la  Planche  IV  en  bas  à  gauche ,  et  sur  la  Planche  VIII 
au  milieu,  proviennent  de  légères  traces  d'impuretés  qui  se  for- 
maient de  temps  en  temps  sur  l'anneau  du  cylindre. 

Au  sujet  de  chaque  planche  en  particulier,  j'ai  à  faire  les 
remarques  suivantes: 

Les  Planches  II  et  III  donnent  les  décharges  ordinaires  sur 
mailpapier  quand  h  communique  avec  le  diapason  et  a  avec  le 
cylindre  (voir  §  36).  L'étincelle  sur  la  ligne  droite  indique  l'instant 
de  l'ouverture  ou  de  la  fermeture  du  courant  primaire.    Avec  ce 


DES    COURANTS    GALVANIQUES    u'iNDUGTION.  339 

mode  de  communication ,  les  interruptions  les  plus  nombreuses  se 
tiouveut  dans  les  décharges  de  fermeture  ;  si  a  avait  été  relié  au 
diapason  et  b  au  cylindre  ^  ce  seraient  les  décharges  d'ouverture 
qui  montreraient  ces  interruptions  multipliées. 

La  Planche  IV  donne  les  décharges  à  l'ouverture;  les  petits 
arcs  de  cercle  unissent  les  décharges  qui  sonrt  en  rapport  entre  elles 
(voir  §  36). 

La  Planche  V  reproduit  deux  des  quatre  expériences  décrites. 
Les  chiffres  renversés  indiquent  le  nombre  d'éléments  de  la  batterie. 
Il  faut  fixer  son  attention  sur  la  première  étincelle  à  gauche  et 
mesurer  la  distance  qui  la  sépare  de  la  seconde  étincelle  vers 
la  droite. 

Sur  la  Planche  VI  le  triangle  noir  est  le  cuivre  du  cylindre, 
avec  lequel  la  pointe  du  diapason  vient  en  contact. 

Sur  la  Planche  VII  les  chiffres  renversés  indiquent  la  distance 
des  pointes  en  millimètres.  La  ligne  droite  verticale,  menée  par 
toutes  les  étincelles  de  registration  du  courant  primaire,  m'a 
servi,  conjointement  avec  les  petites  lignes  passant  par  la  première 
étincelle  du  courant  secondaire,  à  mesurer  le  retard. 

Sur  la  Planche  VIII  le  courant  primaire  n'a  pas  été  enregistré , 
afin  de  conserver  aux  figures  toute  leur  pureté. 

Les  Planches  IX  et  X  donnent  des  images  des  étincelles  de 
décharge,  pour  le  cas  d'une  faible  distance  des  électrodes  écri- 
vantes. Beaucoup  d'autres  figures,  relatives  aussi  au  cas  d'une 
distance  plus  grande  des  électrodes ,  ont  dû  être  omises  ;  en  outre , 
ces  deux  planches  ne  reproduisent  pas  les  détails  délicats. 

Comme,  sur  la  Planche  II  ainsi  que  sur  les  Planches 
III ,  IV  VIII ,  la  même  expérience  se  répète  un  grand  nombre  de 
fois,  le  lecteur  peut  juger  de  l'exactitude  de  la  méthode,  qui 
nous  rend  les  mêmes  courants  sous  une  forme  toujours  la  même. 

En  terminant,  je  me  plais  à  reconnaître  que  les  photographies 
ont  été  exécutées  avec  beaucoup  de  soin  par  M.  W.  C.  van  Dijk, 
d'Utrecht. 


22' 


ÉTUDES  SUR  LE 

PHOLCUS  ()P[L[ONOri)ES  SCHRANK 

PAR 

A.  W.  M.  VAN  HASSELT. 


Lorsqu'un  entomologiste,  dans  une  période  d'explorations  d'en- 
viron 15  années,  ne  rencontre  aucune  trace  d'un  insecte  qui  est 
commun  ailleurs ,  qui  n'appartient  nullement  aux  espèces  de  petite 
taille,  mais  qui  se  reconnaît  au  contraire  facilement  par  des  traits 
caractéristiques,  il  est  assez  naturellement  tenté  de  conclure  que 
ce  résultat  négatif  fournit  la  preuve  de  la  non-existence  de  l'ani- 
mal dans  l'étendue  du  champ  d'exploration. 

C'est  là  du  moins  ce  qui  m'était  arrivé  par  rapport  à  l'araignée 
dont  il  est  ici  question;  j'avais  renoncé  à  l'espoir  de  l'inscrire 
dans  notre  Faune,  même  après  que,  il  y  a  six  ans,  un  exem- 
plaire unique  d'une  espèce  très  voisine,  plus  méridionale,  eut  fixé 
de  nouveau  mon  attention  sur  ce  sujet. 

Ce  n'est  que  l'année  passée  que  J'ai  appris  à  la  connaître  comme 
très  probablement  indigène.  En  effet,  de  18G8  jusque  dans  l'été 
de  1869,  je  reçus,  en  quelque  sorte  coup  sur  coup,  plusieurs 
individus  vivants,  trouvés  en  différentes  occasions  et  sur  différents 
points  de  notre  pays. 

Cette  dernière  particularité,  en  contraste  avec  l'absence  antéri- 
eure de  l'espèce,  est  elle-même  des  plus  remarquables,  car  il 
est  certain  que  le  Pholcus  doit  continuer  à  être  regardé  comme 
„rare"  chez  nous,  ce  qu'on  peut  inférer,  entre  autres,  de  la  circon- 


A.    W.    M.    VAN    HASSELT.    ÉTUDES    SUR    LE,    ETC.  341 

stance  que  dans  mes  innombrables  excursions,  tant  au  loin  que 
dans  mon  voisinage  immédiat,  je  ne  l'ai  jamais  rencontré  moi- 
même.  Sous  ce  rapport,  le  proverbe  „ qui  cherche,  trouve"  ne  s'est 
pas  encore  vérifié  en  ma  faveur. 

Le  premier  Pholcus  vivant  que  j'eus  l'occasion  de  voir,  me 
fut  donné  en  1863  par  M.  van  den  Brink,  jardinier  en  chef  du 
jardin  botanique  de  l'Université  d'Utrecht.  Il  avait  été  trouvé  dans 
une  grande  caisse  en  bois,  qui  avait  servi  au  transport  de  „ plan- 
tes des  ludes."  C'était  un  beau  c/' ,  parfaitement  conservé,  mais 
beaucoup  plus  petit  que  le  Pholcus  ordinaire  ou  commun  de  l'Eu- 
rope, que  j'appris  à  connaître  plus  tard;  il  était  aussi  marqué 
d'un  dessin  beaucoup  plus  élégant,  très  analogue,  ainsi  que  je  le 
constatai  postérieurement,  à  celui  des  Pholcus  méridionaux  ou 
tropicaux,  surtout  du  rivulalus  et  de  Velongatus.  Vu  les  conditions 
dans  lesquelles  il  avait  été  trouvé,  je  ne  crus  pas  devoir  le  regar- 
der comme  indigène,  et  aujourd'hui  encore  je  persiste  dans  cette 
idée,  au  moins  pour  l'individu  en  question.  Mon  opinion  se  forti- 
fiait d'un  doute  exprimé  par  un  savant  suédois,  M.  Westring, 
quL  avait  aussi  trouvé  à  Gothembourg  une  espèce  de  Pholcus  (recon- 
nue toutefois,  depuis^  identique  à  notre  espèce  „ ordinaire") ,  mais 
seulement  „un  petit  nombre  de  fois"  et  dans  ^certaines  années," 
une  fois  sur  un  montant  de  porte  de  la  „ maison  des  Indes  orien- 
tales" (Osl  hidiska  huset) ,  une  autre  fois  dans  le  bâtiment  de  la 
douane  du  port  (Curia  Portorii).  En  décrivant  cette  espèce  dans 
les  Araneae  Suecicaej  p.  297,  M.  Westring  se  demandait  à  cette 
époque  (1861)  :  „An  re  verd  ad  Faunam  Sueciae  perlinens"  ?  Je  con- 
tinuai à  me  poser  la  même  question,  —  avec  raison,  à  ce  que  je 
crois ,  —  pour  mon  exemplaire ,  le  regardant  comme  une  rareté 
étrangère  ou  comme  un  voyageur  égaré  loin  de  son  pays. 

Cinq  ans  après,  au  commencement  de  1868,  ma  fille  k.  me 
rapporta  un  second  individu  mâle  vivant  de  Pholcus ,  qu'elle  avait 
aperçu  dans  un  magasin  de  quincaillerie,  à  Utrecht,  au  moment  où 
il  descendait  du  plafond  au  milieu  de  quelques  articles  de  luxe. 
Cette  araignée  toutefois  différait  considérablement  de  la  précédente , 
tant    par    la   taille   que   par    les  ornements,  et  je  m'assurai  que 


342  A.    W.    M.    VAPJ    HASSELT.    ÉTUDES    SUR    LE 

c'était  le  vrai  Pholcus  opilionoïdes  de  l'Europe  centrale  et  méridi- 
onale. Mais,  ici  encore,  l'endroit  où  la  découverte  avait  eu  lieu 
n'était-il  pas  suspect  ?  Avait-on  bien  affaire  à  un  animal  indigène  ? 
Ne  pouvait-il  avoir  été  apporté  simplement  de  France  ou  de  quelque 
autre  contrée  du  sud  de  l'Europe,  caché  dans  l'emballage  d'ar- 
ticles de  mode?  Le  doute  concernant  ^l'indigénat"  subsistait  donc 
toujours  dans  mon  esprit,  d'autant  plus  que  l'animal  construisit 
bien  à  deux  reprises  un  cocon,  mais  composé  d'œufs  stériles ,  qui 
se  desséchaient  et  que  la  mère  détruisait  elle-même. 

Je  ne  dois  pas  oublier  de  faire  remarquer  que  ce  doute  puisait 
une  grande  force  dans  la  circonstance,  que  jamais ,  à  ma  connais- 
sance, un  individu  de  ce  genre  ne  s'était  présenté  à  aucun  des 
autres  entomologistes  de  notre  pays ,  pas  même  à  notre  compatriote 
M.  G.  A.  Six,  qui,  après  s'être  distingué  jadis  comme  aranéolo- 
gue  des  plus  zélés,  n'a  pas  fait  figurer  le  P/io/a/^  sur  les  „Listes 
d'araignées"  qu'il  a  insérées  dans  les  Bouwsto/fen  voor  de  Fauna 
van  Nederland j  tome  II,  et  dans  le  Nederl.  Tijdschr.  voor  Ent., 
tome  VI. 

Ce  fut  seulement  au  printemps  de  1868  que  j'acquis  la  connais- 
sance que  le  Ph.  opilionoïdes  fait  partie  de  la  Faune  des  Pays- 
Bas,  ou  que  du  moins  il  peut,  dans  certaines  circonstances ,  vivre 
et  se  reproduire  chez  nous.  Ma  respectable  amie,  Mn^e.  y.  V.  d'Am- 
sterdam ,  me  communiqua  à  cette  époque ,  en  une  seule  fois ,  plu- 
sieurs individus  (/  et  ?,  les  uns  encore  très  jeunes,  les  autres 
adultes,  tous  provenant  d'un  réduit  à  tourbes  ^)  situé  au  rez-de- 
chaussée  de  sa  maison. 

Ces  individus  appartenaient  tous,  incontestablement,  à  l'espèce 
ordinaire  de  l'Europe  centrale. 

Par  un  hasard  des  plus  singuliers,  la  même  dame,  ayant  fait 
dans  l'été  de  la  même  année  une  visite  à  sa  famille ,  à  Dordrecht , 


*)  Au  sujet  de  la  possibilité  d'une  origine  étrangère  pour  cette  colonie  amster- 
dammoise  de  Pholcus,  je  ne  dois  pas  laisser  ignorer  que  le  même  endroit  servait 
aussi  de  décharge  pour  des  kranjangs ,  nattes  des  Indes  orientales  employées  à 
emballer  le  sucre.  On  n'a  d'ailleurs  plus  trouvé  d'autres  Pholcus  en  cet  endroit , 
postérieurement  à  la  première  découverte. 


PHOLCUS    OPILIONOÏDES    SCHRANK.  343 

me  rapporta  de  cette  localité  deux  nouveaux  exemplaires  vivants , 
dont  un  cT  extrêmement  grand  ^  exemplaires  qui  avaient  été  cap- 
turés dans  un  angle  obscur  d'un  corridor ,  au  second  étage  d'une 
maison  de  rentier  touchant  immédiatement,  d'un  côté  à  la  „rivière" , 
et  de  l'autre  au  „port"  ').  U  y  avait  en  cet  endroit  un  grand 
nombre  de  ces  araignées ,  —  selon  qu'il  me  fut  rapporté ,  „ au  moins 
quarante,  grandes  et  petites",  —  au  moment  où  Mme.  y.  V.  les  décou- 
vrit, mais  la  propreté  hollandaise,  représentée  par  le  balai  de  la 
servante,  avait  pris  les  devants  et  avait  anéanti  tout  espoir  d'une 
capture  plus  importante. 

Un  peu  plus  tard,  toujours  dans  l'été  de  la  même  année,  je 
reçus  encore,  de  Delft,  avec  d'autres  araignées  très  communes, 
que  feu  notre  bibliologue  entomologiste ,  M.  Hartog  He js  van  de 
Lier ,  avait  eu  la  bonté  de  recueillir  pour  moi ,  un  individu  conservé 
dans  l'alcool,  qui  avait  été  pris  sur  le  plafond  d'un  „cabinet 
d'aisances",  à  l'intérieur  de  la  maison-). 

Enfin,  au  mois  de  Septembre  de  cette  année,  étant  occupé, 
avec  mon  savant,  ami  M.  van  Vollenhoven,  à  examiner  la  collection 
d'Arachnides  du  Musée  de  Leyde,  je  remarquai,  parmi  quelques 
autres  araignées  non  déterminées ,  un  flacon  sans  date ,  mais  por- 
tant l'étiquette:  Ex  horlo  holanico  ^)  Lugduno  Batavo ,à2i\i^\Qqwç\ 
se  trouvait  un  Pholcus  ordinaire  cT  ,  qui  avait  sans  doute  été  pris 
jadis  par  notre  confrère  M.  Herklots,  ou  reçu  par  lui  de  quelque 
autre  personne. 

De  ces  diverses  observations  il  résulte  avec  certitude ,  que  l'araig- 
née en  question  peut  vivre  dans  notre  pays  (Utrecht ,  Delft ,  Leyde) 
et  s'y  reproduire  (Amsterdam,  Dordrecht) ,  bien  que  peut-être 
seulement  à  l'état  d'exception  ou  sous  forme  de  colonie.  La  haute 


^)  On  remarquera  de  nouveau  que  cette  trouvaille  a  été  faite  près  d'un  endroit 
ou  sont  amarrés  ordinairement  plusieurs  bâtiments  des  Indes  orientales. 

*)  Se  pourrait-il,  vu  que  mon  ami  recevait  fréquemment  des  caisses  ou  des 
paquets  de  livres  de  l'étranger,  que  cet  individu,  analogue  à  l'individu  unique 
de  la  boutique  de  quincaillerie  d' Utrecht,  eût  été  un  voyageur  français  ou  allemand? 

^)  Je  dois  rappeler  toutefois,  à  cette  occasion,  ce  qui  a  été  dit  ci-dessus  con- 
cernant les  doutes  attachés  à  une  découverte  faite,  dans  un  lieu  analogue,  à  Utrecht. 


344  A.    W.    M.    VAN    HASSELT.    ÉTUDES    SUR    LE 

température  qui  a  caractérisé^  comme  l'on  sait,  l'été  de  1868, 
a-t-elle  contribué  à  rendre  possibles  l'existence  et  surtout  la  repro- 
duction de  l'espèce?  Ou  bien  celle-ci,  tout  en  étant  extrêmement 
rare,  appartient-elle,  re  verà,  à  la  Faune  de  la  Néerlande  ?  Je 
crois  que  cette  dernière  hypothèse  est  conforme  à  la  vérité  ;  mais , 
pour  obtenir  une  certitude  absolue,  il  faudra  de  nouvelles  obser- 
vations, que  la  connaissance  des  lieux  où  la  découverte  a  déjà 
été  faite,  rendra  plus  facile.  (  Voir  la  Note  à  la  fin  de  ce  Mémoire). 
Quoi  qu'il  en  soit,  la  possession  répétée  d'exemplaires  de  cette 
araignée,  —  que  je  maintins  en  vie  pendant  des  semaines  et  des 
mois  entiers,  de  la  manière  ordinaire,  en  les  plaçant  dans  de 
grands  bocaux  de  verre  à  plafond  de  bois  et  en  les  nourrissant 
de  mouches,  —  m'a  permis  de  soumettre  le  Pholcus  ^)  à  une 
étude  dont  je  vais  faire  connaître  quelques-uns  des  résultats. 

Le  Pholcus  opilionoïdes  Schrank  ou  phalanqoïdes  Walck. ,  — 
ainsi  appelé  à  cause  d'une  vague  ressemblance  extérieure  avec 
certaines  espèces  du  genre  bien  connu  des  „ Faucheurs" ,  —  ap- 
partient à  une  „ Famille"  .extrêmement  restreinte,  celle  des  Phol- 
cides  Koch,  qui  mérite  à  peine  le  nom  de  famille ,  vu  qu'elle  n'est 
représentée  que  par  le  seul  genre  désigné  ci-dessus,  lequel  com- 
prend huit  espèces  nominales,  réductibles,  à  mon  avis,  à  cinq 
ou,  tout  au  plus,  à  six. 

Ces  araignées  sont  très  facilement  reconnaissables ,  non-seulement 
à  la  disposition  caractéristique  de  leurs  yeux  latéraux,  réunis  de 
chaque   côté    au  nombre  de  trois  en  un  petit  groupe,  —  ce  qui 

M  L'étymologie  de  ce  nom  donne  lieu  de  relever  un  singulier  lapsus  graecus , 
commis  par  M.  Vinson  dans  ses:  Aranéides  de  Madagascar ,  etc.  Cet  auteur 
dit  avec  raison  que  le  nom  Pholcus  dérive  du  grec  cpoXy.o; ,  mais  il  traduit  ce 
mot  à  tort  par  nu,  et  met  cette  étymologie  en  connexion  „évidente"  avec  les  ovules 
nus  {Voir  plus  loin)  de  cette  araignée.  Mon  vieux  Hedericus  m'a  de  nouveau 
appris  qu'il  est  toujours  prudent  de  contrôler,  en  remontant  aux  sources,  ces 
assertions  philologico-entomologiques  ;  en  effet,  (foly.oz  ne  signifie  pas  «?<6??^5  (nu)  , 
mais  strahus  (louche).  Cette  dernière  significaton  trouve  d'ailleurs  ici  une  appli- 
cation beaucoup  plus  juste,  à  cause  de  l'obliquité  caractéristique  de  la  position 
des  yeux  dans  ce  genre. 


PHOLCUS    OPILIONOÏDES    SCHRANK.  345 

ne  se  voit  chez  aucune  autre  Aranéide,  —  mais  i)lus  encore ,  et 
au  premier  coup-d'œil,  à  leurs  pâlies,  qui  sont  très  longues  et 
minces,  chez  quelques  espèces  même  filiformes,  garnies  de  poils 
très  réguliers  et  excessivement  fins,  et  pourvues  aux  fémurs  et 
aux  tibias  de  jolis  anneaux  blancs  et  noirs.  La  longueur  des  pattes 
est  telle,  que  la  paire  la  plus  longue  (la  première)  est  environ 
6  fois  plus  longue  que  le  corps  ^  )  ;  on  cite  même  une  espèce  de 
Pholcus  de  la  Grèce,  chez  qui  les  pattes  dépasseraient  8  ou  9 
fois  la  longueur  du  corps! 

A  Texception  de  deux  espèces,  —  le  Ph.  caudalus  Dufour, 
d'Espagne,  dont  l'abdomen  se  termine  en  pointe  conique,  comme 
chez  notre  Epeira  conica  ;  et  le  Pli,  sisyphoïdes  Doleschall ,  d' Am- 
boine,  qui  possède  (de  même  que  le  Ph.  Borbonicus  Vinson,  de 
l'île  Bourbon,  lequel  me  paraît  n'en  différer  que  peu  ou  point)  un 
abdomen  sphérique,  comme  celui  des  Therididae;  —  les  autres, 
aussi  bien  les  espèces  tropicales  que  celles  d'Europe,  tout  en 
offrant  quelques  différences  de  grandeur,  se  ressemblent  parfaite- 
ment par  leur  corps  plus  allongé  et  de  forme  cylindrique,  sem- 
blable à  celui  des  Tétragnathes  ordinaires. 

Ces  espèces  sont:  le  Ph.  rivulatus  Savigny,  d'Egypte  et  d'Ita- 
lie, —  le  Ph.  elongalus  Vinson,  de  Maurice,  — \e  Ph.  inipressus 
Schuch,  le  Ph.  nemaslomoïdes  Schuch ,  tous  deux  de  la  Grèce, — 
et  le  Ph.  opilioîioides ,  du  sud,  du  centre  et,  passim,  du  nord  ^) 
de  l'Europe,  mais  qui  prospère  aussi  parfaitement  dans  nos  colo- 
nies des  Indes  orientales. 


')  Le  plus  grand  individu  de  ma  collection  possède,  avec  une  longueur  de 
corps  de  1  centimètre,  des  pattes  antérieures  longues  d'environ  6  centimètres. 

*)  Je  regarde  tous  les  individus  trouvés  dans  le  nord  de  notre  continent  (à 
l'exception  d'un  des  miens ,  capturé  dans  une  caisse  de  plantes  des  Indes  orien- 
tales) comme  appartenant  au  Ph.  opiliono'ides  ou  à  ses  variétés.  La  différence 
que  M.  Siemaschko  croit  avoir  constatée  sur  son  exemplaire  trouvé  à  St.  Péters- 
bourg,  ne  me  paraît  pas  assez  importante  pour  qu'on  doive  le  rapporter  à  une 
autre  espèce,  ce  que  du  reste  M.  S.  lui-même  ne  propose  pas.  Voir  son  Mémoire , 
Ferzeichniss  der  in  der  Umgegend  von  St.  Petersburg  vorkommenden  Arachniden  , 
publié  dans  les  Horae  Societatis  Entomologicae  Rossicae ,  Eascic.  I,  1861, 
p.  129 ,  mémoire  sui-  lequel  mon  attention  a  été  attirée  par  notre  confrère  M.  Ritsema. 


346  A.    W.    M.    VAN    HASSELT.    ÉTUDES    SUR    LE 

Parmi  ces  espèces,  il  me  semble  toutefois,  après  une  compa- 
raison attentive  des  descriptions  et  de  quelques  figures,  que  le 
rivulatus ,  Veloiufalus  et  même  Vimpressus  ne  s'éloignent  que  très 
peu  l'un  de  l'autre,  — Qt  qn^Quire  le  nemaslomoïdes  etVopilionoïdes 
il  n'existe  pas  non  plus  de  différence  bien  caractéristique. 

Leur  dessin  présente ,  —  sauf  quelques  diversités  dans  la  couleur 
du  fond  (blanchâtre,  grisâtre  ou  gris  de  souris,  brunâtre)  et  dans 
les  taches  accessoires  ^  ) ,  —  une  grande  uniformité.  Ordinairement 
il  se  compose  d'une  ligne  longitudinale,  simple,  bifurquée  ou 
double,  brune  ou  noire,  sur  le  milieu  du  céphalothorax:  d'une 
ligne ,  également  brune  ou  noire ,  ramiforme  ou  même  foliiforme ,  — 
ayant,  chez  les  plus  belles  espèces,  l'aspect  d'une  feuille  com- 
posée, —  sur  la  face  dorsale  de  V abdomen:  enfin,  de  quelques 
petites  taches  foncées  le  long  des  côtés.  J'ai  reconnu  toutefois 
que  ce  dessin,  qui  est  le  plus  élégant  chez  le  rivulatus  QiVelon- 
gatus ,  mais  beaucoup  moins  beau  et  moins  fin  chez  les  autres, 
peut  varier  considérablement  dans  la  même  espèce ,  à  tel  point  que 
chez  certains  individus  il  ne  reste  plus  qu'une  ligne  médiane, 
entière  ou  interrompue,  sur  le  dos',  et  que  chez  d'autres  même 
on  ne  distingue  presque  plus  aucune  trace  de  dessin,  au  moins 
sur  l'abdomen.  Koch  ne  paraît  pas  avoir  observé  ce  changement 
ou  cette  perte  de  coloration  chez  certaines  variétés,  et  dans  sa 
description  du  phalangioïdes  avec  dessin  dorsal,  il  manifeste  quelque 
surprise  au  sujet  de  la  figure  de  cette  même  espèce  donnée  par 
son  collaborateur  et  prédécesseur  Hahn,  laquelle  est  sans  aucune 
sorte  de  dessin.  M.  Vinson,  au  contraire,  a  fait  la  même  ob- 
servation que  moi  -),  car  il  dit:  „Si  le  Pholcus  a  séjourné  long- 
temps dans  un  lieu  très  obscur,  il  est  très  brun,  et  les  dessins 
décrits  se  confondent  dans  la   couleur   générale,"  pag.  137. 


*)  Par  ex.:  un  sternum  noir  ou  rayé  de  noir,  une  tache  ««r^^/e  ovale  et  jaunâtre 
au-dessus  des  filières ,  un  abdomen  à  face  ventrale  noire  ou  rayée  de  noir ,    etc. 

2)  Voyez,  sur  la  variation  de  couleur  chez  une  même  espèce,  mon  observation 
relative  au  Latrodectiis  {Necl.  Tyds.  v.  Entom.,  t.  III,  p.  56),  ainsi  qae  celle  de 
M.  Six  {Ibid.,  t.  I,  p.  186),  exemples  auxquels  il  ne  serait  pas  difficile  d'en 
ajouter  encore  d'autres. 


PHOLCUS    OPILIONOÏDES    SCHRANK.  347 

Par  là  s'explique  aussi  comment  il  se  fait  que  quelques  aranéologues 
figurent  ces  araignées  autrement  qu'ils  ne  les  décrivent,  ce  qui  arrive, 
par  exemple,  à  Blackwall  et  aussi,  dans  une  certaine  mesure,  à 
Walckenaar  ^  ),  pour  V opilionoïdes,  à  Koch  pour  le  nemastomoides,  etc. 

Les  Pholcus  en  général,  et  Vopilionoïdes  en  particulier,  mènent 
un  genre  de  vie  assez  uniforme.  Ils  habitent  volontiers  des  maisons 
solitaires,  des  caves  et  des  réduits,  et  préfèrent  les  recoins  les 
plus  écartés,  à  la  partie  supérieure  des  murs,  sous  les  toits  ou 
sous  les  plafonds,  dans  des  endroits  où  la  lumière  du  jour  ne 
pénètre  que  peu  ou  point.  C'est  là  sans  doute  une  des  raisons  pour 
lesquelles  cette  araignée  est  restée  si  longtemps  inaperçue  chez 
nous.  En  ce  qui  me  concerne,  il  est  aussi  très  possible  que  ma 
vue  basse  m'ait  empêché ,  çà  et  là ,  de  la  découvrir  dans  ses  retraites 
élevées  et  obscures,  ou  qu'elle  m'ait  échappé  à  cause  de  sa  res- 
semblance avec  les  ^faucheurs,"  dont  je  ne  fais  pas  une  étude 
spéciale. 

Elle  ne  construit  d'ailleurs  pas  de  toiles  remarquables  par  leurs 
dimensions  ou  par  quelque  autre  particularité.  Se  contentant  d'un 
petit  nombre  de  fils  lâchement  tendus,  disposés  irrégulièrement, 
mais  très  gluants,  elle  s'y  tient  au  centre  de  la  face  inférieure, 
dans  une  situation  renversée,  à  la  manière  des  Linyphies.  Des 
qu'on  touche  à  sa  toile,  l'animal,  à  ce  qu'on  raconte  générale- 
ment, commence  à  sautiller  ou  à  se  trémousser,  comme  le  font 
certains  Cousins,  et  comme  on  peut  le  voir  journellement  chez 
notre  Epéire  diadème  ;  de  là  le  nom  de  Zitterspinnen  que  les 
aranéologues  allemands  donnent  à  ces  araignées. 

Bien  qu'il  me  soit  arrivé  maintes  fois  d'observer  pendant  long- 
temps un  ou  plusieurs  individus  dans  mes  bocaux,  je  n'ai  jamais 
vu  un  seul  d'entre  eux  exécuter  ces  mouvements  si  caractéristi- 
ques. Je  n'ai  pu  constater  non  plus  ce  que  M.  Simon  et  d'autres 
ont  dit  du  Ph.  opilionoïdes ,  à  savoir,  qu'après  avoir  sucé  sa  proie 
il  la  rejette  immédiatement  de  sa  toile;  mes  individus  ne  s'occu- 


*)  Comparez,  entre  autres,  la  „description"  dans  ses  ^/j^tVe^avecla ,, planche" 
dans  son  Hist.  nat.  d.  araignées. 


348  A.  W.  M.  VAN  HASSELT.  ÉTUDES  SUR  LE 

paient  pas  de  ce  soin ,  mais  laissaient  pendre  les  mouches  à  l'en- 
droit où  ils  les  avaient  tuées,  tout  autour  de  leur  siège  habituel. 
Par  contre,  j'ai  bien  vu  qu'au  moyen  des  crochets  tarsaux  de 
leurs  pattes  antérieures,  ils  savaient  attirer  à  eux,  de  la  péri- 
phérie de  la  toile  jusqu'au  centre  où  ils  se  tiennent  ordinairement, 
les  mouches  capturées  et  enveloppées;  une  fois  même,  j'ai  observé 
l'usage  très  remarquable  que,  dans  cette  manœuvre ,  mon  araignée 
faisait  de  ses  mandibules ,  s'en  servant  en  guise  de  ciseaux,  pour 
détacher  ses  premiers  lacs,  placés  à  une  distance  trop  grande  '). 
J'ai  aussi  été  plus  d'une  fois  témoin  de  l'adresse  vraiment  mer- 
veilleuse, et  que  M.  Simon  nous  a  si  bien  fait  connaître,  avec 
laquelle  elle  enveloppe  une  mouche  prise  dans  ses  filets.  Il  est 
bien  connu  qu'elle  enlace  sa  proie  uniquement  à  l'aide  de  ses 
deux  pattes  postérieures,  qu'elle  passe  alternativement  le  long 
des  filières;  mais,  ce  qu'on  doit  voir  pour  y  croire,  c'est  que  ces 
pattes,  il  est  vrai  très  minces,  exécutent  leurs  mouvements  avec 
tant  d'agililéj  que  l'œil  ne  peut  souvent  suivre  leurs  déplacements 
rapides,  et  que  même,  par  moments,  on  ne  distingue  plus  rien 
ni  des  pattes  ni  des  fils,  rien,  si  ce  n'est  leur  effet  sur  la  mouche. 

Comme  le  Pholcus  J  montre  à  découvert  un  appareil  génital 
remarquablement  bien  développé,  j'avais  nourri  l'espoir  d'ajouter 
une  observation  intéressante  au  grand  nombre  de  celles  que  j'ai 
déjà  faites  concernant  la  manière  dont  les  parties  des  palpes 
agissent  dans  l'accouplement  des  araignées.  Mais,  à  cet  égard, 
j'ai  été  extrêmement  malheureux.  Je  suis  bien  parvenu  deux  fois , 
avec  grand'peine,  à  réunir  un  couple  de  Pholcus,  mais,  dans 
les  deux  cas,  l'aventure  a  pris  une  fin  tragique! 

La  première  fois,  je  gardais  déjà  depuis  un  mois  dans  un  de 
mes  bocaux  une  $  entièrement  développée  et  assez  grande ,  lorsque 
je  devins  maître  d'un  c/  également  adulte.  Celui-ci,  introduit 
dans  le  même  verre,  essaya,  avec  un  empressement  extraordinaire 
(comme  je  l'ai  observé  dans  une  infinité  d'autres  expériences  du 


')  On    trouvera,   à  ce  sujet,    une    description    un    peu  plus  détaillée  dans  le 
Tijdsvhr.  v.  Eniom.,  t.  lY,  p.  27. 


PHOLCUS    OPILIONOIDES    SCHRANK.  349 

même  gem*e);  à  se  rapprocher  de  la  femelle;  mais,  dès  ses  pre- 
mières tentatives;  il  fut  repoussé  avec  fureur ,  de  sorte  qu'il  alla 
se  réfugier  au  fond  du  bocal ,  où  il  tissa  une  petite  toile ,  tandis 
que  la  i^  resta  fixée  au  plafond  artificiel  du  bocal ,  sa  place  ha- 
bituelle. Le  second  jour,  je  vis  le  d"  risquer  de  nouveau,  à  diffé- 
rentes reprises,  quelques  tentatives  très  prudentes,  mais  chaque 
fois  en  vain;  le  soir,  les  deux  adversaires  se  tenaient  parfaitement 
tranquilles  à  leurs  places  respectives.  Comme  j'avais  eu  soin, 
pendant  ces  deux  jours,  de  leur  fournir  une  abondante  provision 
de  mouches  vivantes,  dont  je  les  avais  vus  se  nourrir  tous  les 
deux,  la  faim  ne  pouvait  les  avoir  armés  l'un  contre  l'autre;  et 
pourtant  ....  le  troisième  matin,  —  le  mâle  s'étant  sans  doute , 
pendant  la  nuit,  approché  trop  témérairement,  —  je  trouvai  son 
corps  épuisé  de  sucs  suspendu  par  ses  longues  pattes ,  rassemblées 
en  faisceau,  au  centre  de  la  partie  supérieure  du  bocal,  à  côté 
du  siège  de  la  femelle  i).  Ce  jour-là,  la  femelle  ne  s'empara 
d'aucune  mouche,  et  le  matin  du  cinquième  jour  de  cette  union 
forcée,  je  la  trouvai  elle-même  morte  dans  sa  toile,  accrochée 
par  l'une  des  pattes  de  derrière. 

Peu  de  temps  après,  je  me  vis  de  nouveau  en  possession  d'un 
'Pholcus  vivant,  mais  cette  fois  d'un  beau  cT  de  forte  taille ,  qui, 
en  sa  qualité  de  premier  occupant,  alla  s'établir  à  l'étage  supé- 
rieur de  mon  bocal.  Après  qu'il  y  fut  resté  plusieurs  jours  dans 
la  solitude,  le  hasard  me  fournit  l'occasion  de  lui  adjoindre 
une  $,  qui,  bien  qu'à  peine  adulte,  ne  lui  cédait  que  peu  ou 
point  en  taille  et  en  développement.  Cela  se  fit  le  soir ,  et ,  après 
une  heure  d'observation,  durant  laquelle  il  ne  se  passa  rien  de 
particulier,  si  ce  n'est  que  ce  fut  maintenant  la  $  qui  se  con- 
struisit une  retraite  au  fond  du  verre,  —  je  quittai  mon  nouveau 
couple  sans  appréhension,  convaincu  que  ce  r^  ne  courait  aucun 
danger   d'être   accablé   par   sa  jeune  et   évidemment  plus  faible 


')  M.  Simon  dit  doue  à  tort:  „elle  ne  lui  fait  point  de  mal" ,  mais  il  ajoute 
avec  plus  de  vérité:  „cependant  il  n'ose  s'approcher  d'elle  et  semble  la  redouter 
beaucoup." 


350  A.    W.    M.    VAN    IIASSELT.    ÉTUDKS    SUR    LE 

compagne,  et  rempli  d'ailleurs  de  confiance  dans  la  galanterie 
éprouvée  des  araignées  mâles,  en  général,  à  l'égard  de  leurs 
femelles.  Jamais,  en  effet,  je  n'avais  eu  d'exemple  d'une  ?  nu- 
bile tuée  par  un  r^  de  la  même  espèce,  même  en  cas  de  jeûne 
prolongé  et  d'une  grande  supériorité  de  force  chez  ce  dernier  ^). 
Grande  fut  donc  ma  déception,  ma  stupéfaction  même,  en 
reconnaissant,  le  lendemain  matin,  qu'il  fallait  renoncer,  non- 
seulement  à  mon  nouvel  espoir  d'observer  les  amours  d'un  couple 
de  Pholcus,  mais  aussi  à  mes  illusions  au  sujet  de  la  courtoisie 
des  araignées  mâles.  Le  Pholcus  mâle,  sans  motif  apparent  (car 
lui  aussi  avait  eu  de  la  nourriture  en  abondance) ,  avait  tué  sa 
femelle  !  Mais ,  chose  singulière ,  ici  comme  dans  le  cas  du  couple 
précédent,  le  meurtrier  ne  survécut  pas  longtemps  à  son  crime; 
je  soir  même,  je  trouvai  le  cf  privé  de  vie. 

D'où  vient  que,  dans  les  deux  cas ,  la  veuve  du  premier  mariage 
et  le  veuf  du  second  aient  succombé  si  peu  de  temps  après  la 
mort  de  leurs  conjoints  respectifs  ?  Je  présume  que  dans  la  lutte , 
soutenue  avec  des  armes  suffisamment  égales  chez  les  deux  sexes , 
le  vainqueur  aura  aussi  reçu ,  chaque  fois ,  une  blessure  mortelle. 
J'ai ,  en  effet ,  souvent  remarqué  combien  les  araignées  en  général 
supportent  mal  les  morsures  qu'elles  se  font  mutuellement.  Il  est 
très  probable  que  l'humeur  venimeuse  de  leurs  crochets  mandi- 
bul aires  joue  ici  un  rôle.  Maintes  fois  j'ai  vu  l'Epéire  diadème 
f/,  blessé  très  légèrement  à  l'abdomen  par  la  femelle,  puis 
aussitôt  soustrait ,  avant  tout  enlacement ,  aux  étreintes  mortelles  de 
cette  dernière ,  n'en  succomber  pas  moins  au  bout  de  peu  de  minutes. 

Depuis  les  essais  dont  je  viens  de  rendre  compte,  je  n'ai  plus 
eu  l'occasion  de  mettre  en  présence  l'un  de  l'autre  des  Pholcus 
vivants  des  deux  sexes,  ce  qui  m'aurait  pourtant  intéressé  encore 
sous  un  autre  rapport ,  savoir ,  pour  la  continuation  des  mes  études 
sur  le  développpement  du  cocon  des  Pholcus.  J'ai  bien  eu  trois 
fois  en  ma  possession,    à  diverses  époques,   une   ?  avec  cocon, 


')  Voyez,    eutre    autres,    ma    communication  relative  à  V Argyroneta  aquatica 
{Ned.  Tijdschr.  v.  Entom.,  t.  II,  p.  20). 


PHOLCUS    OPILIONOÏDES    SCHRANK.  351 

mais  dans  aucun  de  ces  cas  les  jeunes  ne  sont  éclos.  Chez  une 
de  ces  araignées ^  le  cocon  a  disparu  après  14  jours  au  moins, 
sans  laisser  aucune  trace,  et  cela  jusqu'à  deux  fois  de  suite. 
Quant  au  cocon  de  l'autre  araignée,  après  l'avoir  observé  pendant 
un  mois,  je  l'ai  mis  en  temps  opportun  dans  l'alcool,  pour 
compléter  ma  collection.  Il  est  généralement  connu,  et  les /'/m/? /a 
et  autres  Icbneumonides  nous  en  offrent  de  fréquents  exemples , 
que  certains  insectes  font  servir  les  cocons  d'araignées  à  l'ali- 
mentation de  leurs  larves.  Mais  que  des  araignées  elles-mêmes 
dévorent  les  œufs  des  cocons  d'autres  espèces  d'araignées,  c'est 
là  un  fait  rapporté  seulement ,  à  ma  connaissance ,  par  Walckenaer, 
qui  déclare  l'avoir  observé  chez  le  Cluhiona  holosericea  et  qui 
ajoute,  comme  son  opinion  personnelle:  „que  beaucoup  d'autres 
araignées  font  la  même  chose."  Quant  à  moi,  je  ne  l'ai  jamais 
constaté;  mais,  par  contre,  j'ai  bien  vu  quelquefois ,  tout  comme 
M.  Menge,  que  des  araignées  tenues  en  captivité  et  à  jeun  suçaient 
de  petits  morceaux  de  viande  crue  qu'on  leur  jetait.  Quoi  qu'il 
en  soit,  à  deux  reprises  différentes,  un  de  mescocons  de  Pholcus, 
au  lieu  d'être  seulement  sucé,  disparut  complètement;  je  suis 
donc  obligé  d'admettre  que  la  mère  elle-même  a  mangé  ses 
propres  cocons  ').  L'appétit  ne  devait  d'ailleurs  pas  lui  manquer 
pour  cela,  à  en  juger  par  la  circonstance  que,  en  quatorze  jours, 
je  ne  l'avais  pas  vue  lâcher  une  seule  fois  son  cocon.  Néanmoins, 
elle  n'a  pu  être  contrainte  par  la  faim  seule ,  car  je  ne  cessai 
pas  de  lui  fournir  de  temps  en  temps  une  mouche  vivante,  à 
laquelle  toutefois  elle  paraissait  ne  faire  aucune  attention.  Il  est 
possible  que  la  mère  se  soit  aperçue  que  ses  œufs  étaient  stériles  ; 
ceux-ci,  en  effet,  restaient  toujours  également  petits,  tandis  que 
mon  troisième  cocon  de  Pholcus,  que  la  mère  avait  épargné  pen- 
dant près  d'un  mois,  laissait  voir  clairement  l'augmentation  de 
volume   et   le  changement  de  couleur  des  œufis.  Pour  la  parfaite 


')  Peut-être  cela  n'arrive-l-il  que  clans  l'état  de  captivité,  tout  comme  chez 
certains  vertébrés,  entre  autres  chez  la  souris  ordinaire,  que  j'ai  vue  plus  d'une 
fois  dévorer  tous  ses  petits. 


352  A.    W.    M.    VAN    HASSELT.    ÉTUDES    SUR    LE 

intelligence  de  ce  qui  précède ,  je  rappellerai  que  les  Pholcus ,  — 
de  même  que  les  Dolo^nedes ,  les  Ocyale,  les  Scy Iodes  et  quelques 
autres ,  —  ne  déposent  pas  librement  leur  cocon  globuleux,  ou  ne  le 
traînent  pas  après  eux  fixé  à  l'abdomen,  à  la  manière  des  L?/co5a, 
mais  que ,  pendant  plusieurs  semaines ,  ils  le  portent  constamment 
près  de  la  bouche,  maintenu  entre  les  mandibules  ^  )  et  en  partie  sou- 
tenu par  les  palpes.  Je  n'ai  pu  m'assurer  si ,  comme  quelques  auteurs 
l'ajoutent,  le  cocon  est  en  même  temps  „collé  plus  ou  moins  sternum." 

Une  autre  observation  relative  à  l'ovulation  des  Pholcides  con- 
cerne la  question  de  savoir  s'il  est  bien  exact  de  dire,  avec 
plusieurs  aranéologues ,  „que  le  Pholcus  ne  fait  pas  de  cocow  pro- 
prement dit,  mais  laisse  la  masse  de  ses  œufs  entièrement 
à  nu."  On  sait  que  non-seulement  ces  œufs  sont  assez  grands, 
comparés  à  ceux  d'autres  espèces,  mais  qu'ils  se  voient  aussi 
parfaitement  chacun  à  part,  ce  dont  M.  Claparède  a  si  bien 
profité  pour  ses  célèbres  observations  microscopiques  Sur  révolu- 
tion des  araignées;  les  Pholcus,  en  effet ,  sont ,  à  ma  connaissance , 
le  seul  genre  d'araignées  qui  construise  un  cocon  dans  lequel 
les  œufs,  au  lieu  d'être  complètement  recouverts  de  fils,  comme 
c'est  le  cas  ordinaire,  restent  en  apparence  tout  à  fait  nus  et  sont 
directement  observables.  Mais  une  autre  question  est  de  savoir, 
si  l'assertion  de  Walckenaer,  —  adoptée  sans  réserves  par  son 
compatriote  M.  Simon,  ainsi  que  par  M.  Vinson,  —  ^qu'elle 
agglutine  ses  œufs  en  une  masse  ronde  (sic)  et  niiCj  qu'aucun 
tissu  ne  recouvre  j"  si  cette  assertion  est  bien  conforme  à  la  vérité. 

Bien  que  je  n'aie  eu  que  trois  fois  l'occasion  d'examiner  avec 
soin  un  cocon  de  Pholcus,  et  bien  que  je  n'en  possède  qu'un 
seul  dans  ma  collection,  cela  m'a  suffi  pour  reconnaître  claire- 
ment que  les  œufs  sont  non-seulement  „agglutinés"  entre  eux, 
mais  recouverts  en  outre  d'un  tissu ^   qui,  il  est  vrai,  est  extrê- 

»)  M.  Siemascliko  paraît  avoir  ignoré  cette  circonstance.  Du  moins  il  écrit, 
à  l'occasion  de  la  capture  d'une  $,  qu'elle  ,,n  abandonna  pas  son  cocon,  mais 
l'emporta  entre  ses  mandibules."  On  peut  inférer  en  outre  de  sa  relation  que, 
tout  comme  nous  à  Utreclit,  il  n'a  rencontré  que  rarement  le  Pholcus  à 
St.  Pétersbourg. 


PHOLCUS    OPILIONOÏDES    SCHRANK.  353 

mement  lâche  et  mince.  La  chose  devint  surtout  bien  évidente 
lorsque  j'eus  laissé  le  cocon  immergé  pendant  quelque  temps  dans 
une  dissolution  de  carmin.  Du  reste,  le  fait  que  j'annonce  n'a 
absolument  rien  de  nouveau,  car  d'autres  aranéologues  l'avaient 
observé  avant  moi,  Koch,  Blackwall  et  surtout  M.  Claparède, 
juge  si  compétent  en  cette  matière,  disent  en  termes  presque 
identiques:  „que  les  œufs  de  Pholcus  sont  recouverts  d'une  en- 
veloppe de  fils  très  mince,  transparente  (d'un  tissu  extrême- 
ment délicat,  Blakw.)".  Cela  s'accorde  d'ailleurs  très  bien  avec 
le  fait,  que  cette  araignée  ne  construit  qu'une  petite  toile  insi- 
gnifiante et  que  ses  fils  sont  en  général  excessivement  minces ,  de 
sorte  que  la  première  couche  dont  elle  enveloppe  sa  proie  se 
distingue  à  peine  et  que  la  mouche,  quelle  que  soit  la  rapidité 
de  l'opération,  reste  longtemps  visible  en  entier,  à  travers  son 
linceul  transparent. 

Pour  terminer,  je  dirai  encore  un  mot  de  la  distribution  géo- 
graphique de  cette  remarquable  araignée,  ne  fût-ce  qu'en  souvenir 
d'une  visite  que  j'eus  l'honneur  de  recevoir,  il  y  a  quelques  an- 
nées, à  Utrecht,  de  la  part  de  M.  A.  E.  Griibe,  professeur  de 
zoologie  à  Breslau ,  visite  dans  laquelle  ce  savant  parut  s'intéresser 
tout  spécialement ,  et  jusque  dans  les  détails ,  à  notre  faune  arach- 
nologique;  ces  remarques  pourront  servir  d'ailleurs  à  rectifier 
une  conclusion  légèrement  inexacte  que  M.  Griibe  a  formulée  au 
sujet  de  la  distribution  de  ces  Aranéides,  dans  son  Verzeichniss 
der  Arachnoïden  Liv- ,  Kur-  und  Estlilands  (Arc/i.  f.  d.  Naturkunde , 
2e  Sér.  t.  I,  Dorpat,  1859),  dont  il  eut  la  bonté  de  m'envoyer 
un  exemplaire  au  moment  de  la  publication. 

A  la  page  19  de  son  Mémoire,  M.  Griibe  dit:  „ Puisque  les 
genres   U,    L,    E,    Pholcus ^    S,    A  '),  —  dont  on  ne  rencontre 

•)  Je  me  suis  borné  à  indiquer  par  leur  initiale,  comme  n'ayant  aucun  rapport 
à  la  question  qui  nous  occupe,  les  autres  genres  d'araignées  mentionnés  par  M. 
Gr.  A  l'égard  du  dernier  seulement,  A  {Ati/jjus) ,  je  rappellerai  ici  que  ce  genre 
habite  également  notre  pays,  un  bel  exemplaire  ^  de  AUjpus  Sidzeri  ayant  été 
trouvé  par  ma  femme  dans  le  bois  de  Zeist  près  d' Utrecht  {Ned.  Tydaohr.  v. 
Entom.,  1869,  t.  XII.  p.  25). 

Archives  Néerlandaises,  T.  V.  23 


354  A.    W.    M.    VAN    HASSELT.    ETUDES    SUR    LE 

ordinairement  que  des  représentants  isolée  dans  l'Allemagne  du 
sud  et  en  Angleterre,  —  ne  se  montrent  même  plus  dans  les 
environs  si  favorisés  de  Dantzig,  on  doit  en  conclure  qu'il  n'y 
a  aucun  espoir  de  les  trouver  dans  la  Livonie  etc." 

A  l'époque  où  il  écrivait  (1859),  M.  Grlibe  était  parfaitement 
autorisé  à  admettre  l'absence  des  Pbolcides  dans  la  région  septen- 
trionale en  question  5  mais ,  depuis  lors ,  nos  connaissances  ont 
de  nouveau  fait  un  pas  en  avant. 

Ce  qui  m'est  connu  jusqu'à  ce  jour  au  sujet  des  rapports  géo- 
graphiques du  genre  Pholcus  en  général  et  de  notre  opilioiwïdes 
ou  phalangoides  en  particulier ,  revient  essentiellement  à  ce  qui  suit  : 

Ce  genre  d'araignées  paraît  vivre  de  préférence  dans  les  pays 
chauds,  ou  du  moins  dans  des  contrées  plus  méridionales  que 
celles  qui  appartiennent  à  notre  climat.  Dans  la  zone  tropicale 
(surtout  en  Asie  et  en  Afrique),  la  famille  qu'il  constitue  est 
représentée,  en  effet,  par  des  espèces,  peu  nombreuses  il  est 
vrai,  qui  se  distinguent  plus  ou  moins  nettement  entre  elles 
(Borboniciis ,  sisyphoïdes,  elongatus ,  rivulaius);  la  même  chose 
s'observe  dans  les  parties  méridionales  ou  chaudes  de  l'Europe, 
telles  que  l'Espagne,  l'Italie,  la  Grèce  (caudatiis ,  nemaslomoïdes , 
impressus).  Aussi,  rien  qu'à  cause  de  ce  fait  général,  je 
ne  fus  pas  peu  surpris  de  voir  émettre  par  un  aranéologue 
expérimenté,  le  regrettable  Doleschall,  la  conjecture:  „que  le 
Ph.  phalangoides  aurait  probablement  été  transporté  de  l'Europe 
dans  ce  pays-ci,  —  c.  à.  d.  aux  Indes  orientales,  —  avec  des 
meubles,  etc."  (Doleschall ,  2tle  Bijdrage  toi  de  kennis  der  Arach- 
niden  van  den  Indischen  Archipel).  En  effet,  de  ce  que  la  famille 
en  général  prospère  mieux  dans  les  climats  chauds ,  et  de  ce  que 
le  nombre  des  espèces,  même  celui  des  individus,  diminue  à 
mesure  qu'on  approche  de  pays  plus  froids ,  on  est  plutôt  en  droit 
de  conclure  précisément  l'inverse  de  la  ^conjecture"  précitée, 
c'est-à-dire,  d'admettre  que  notre  Pholcus  a  été  transporté  des 
contrées  tropicales  en  Europe.  C'est  d'ailleurs  à  quoi  j'ai  déjà 
fait  plusieurs  fois  allusion  dans  l'introduction  de  ce  travail.  La 
grande  majorité  des  lieux  de  découverte,  à  moi  connus,  dans  la 


PHOLCUS    OPILIONOÏDES    SCHRANK.  355 

partie  septentrionale  de  l'Europe ,  témoigne  aussi  en  faveur 
de  cette  opinion  :  ce  sont  en  effet ,  ou  bien  des  poris  de  mer ,  en 
relation  avec  les  Indes  orientales^  ou  bien  des  endroits  où  une 
introduction  accidentelle  des  pays  tropicaux  ou  sud-européens  est 
facilement  admissible  (jardins  botaniques ,  magasin  de  quincaillerie , 
dépôt  de  nattes  à  sucre  ou  „kranjangs"  etc.)  En  outre,  lorsque 
les  auteurs  indiquent ,  dans  les  zones  chaudes  ci-dessus  désignées , 
l'existence  de  Pholcides,  soit  d'espèces  différentes  de  la  nôtre, 
soit  surtout  de  celle-ci,  ils  ajoutent  fréquemment  qu'elles  y  sont 
„ abondantes,"  ou  „ universellement  répandues,"  ou  „très  communes" 
(voy .  entre  autres ,  pour  Java ,  Doleschall  ;  pour  l'Afrique ,  Vinson , 
etc.).  11  en  est  tout  à  fait  de  même  pour  l'Europe  méridionale 
et  centrale  jusque  vers  50'^  de  latitude.  (Voy.  entre  autres:  Cla- 
parède  pour  la  Suisse,  46°;  Doleschall  pour  la  Hongrie,  47^; 
idem  pour  les  environs  de  Vienne ,  48°  ;  même  Walckenaer  pour 
Paris,  49°,  et  Hahn  et  Koch  pour  Nuremberg  et  Ratisbonne, 
49°  à  50°).  Par  contre,  il  est  très  remarquable  que,  dès  qu'on 
s'avance  un  peu  plus  vers  le  nord,  au-delà  de  50°  L.  N. ,  la 
présence  du  Pholcus  dans  notre  continent,  —  ainsi  que  M.  Grtibe 
l'avait  déjà  déduit  des  données  alors  connues,  —  commence  à 
devenir  très  rare;  que  même,  jusqu'à  ce  jour,  notre  araignée  n'a 
pas  encore  été  trouvée  partout  à  cette  latitude ,  et  que  là  où  son 
existence  a  été  constatée,  on  ne  l'a  rencontrée  ordinairement 
qu'en  un  petit  nombre  d'exemplaires  et  dans  quelques  localités 
isolées. 

Pour  les  localités  qui  me  sont  actuellement  connues  dans  l'Europe 
septentrionale,  entre  les  longitudes  5°  0.  et  30°  E.,  le  rayon 
géographique  est,  en  allant  du  sud  au  nord: 

Ile  de  Wight  Blackwall  (1861)  ....  environ  50°  L.  N. 

Pays-Bas   (Amsterdam,    IJtrecht,    Dor- 

drecht)  van  Hasselt  (1868—69).  .  .        „        52°  „     „ 

Angleterre  (Liverpool)  Blackwall  (1861)        „        53°  „     „ 

Suède  (Gothembourg)  Westring  (1861)        „        55°  „     „ 

Russie     (St.-Pétersbourg)     Siemaschko 

(1861) „        60°  „     „ 

23* 


356  A.    W.    M.    VAN    HASSELT.     ETUDES. 

La  dernière  de  ces  localités  constitue  la  limite  septentrionale 
de  l'aire  du  Pholcus,  telle  que  je  la  connais  aujourd'hui. 

Comme  preuve  toutefois  de  ce  qui  a  été  dit  ci-dessus  concernant 
la  rareté  du  Pholcus  entre  50"  et  60%  je  donnerai  la  liste  sui- 
vante d  aranéologues  qui  paraissent  ne  pas  l'avoir  rencontré 
jusqu'ici:  Reuss  pour  Francfort  s.lM.  (50'),  Griibe  pour  Breslau 
(51°),  Ohlert  pour  Konigsbergen  (53°j ,  Menge  pour  Dantzig 
(54°),  Grube  pour  la  Livonie  etc.  (58°  à  59°),  Thorell  pour 
Upsal  (60°). 

Amsterdam,  décembre  1869. 

N.B.  Pendant  l'impression  de  ce  travail ,  mes  présomptions  con- 
cernant l'indig-énat  reçoivent  un  très  fort  soutien,  vu  que  j'ai 
trouvé  ce  matin  (14  avril  1870),  dans  une  chambre  de  ma  maison 
(Amsterdam,  Prinsengracht),  qui  communique  avec  le  jardin,  un 
nouvel  exemplaire  vivant  (?  pulliis)  de  Pholcus,  bien  que  je  sois 
certain  qu'aucun  de  mes  hôtes  de  l'année  dernière  ne  s'est  échappé. 

V.  H. 


SUR  LA  VARIATION  DIURNE 

DE  L'INCLINAISON  MAGNÉTIQUE  À  BATAVIA, 


PAR 

P.    A.    BERGSMA. 


Les  observations  dont  les  résultats  seront  communiqués  dans  ce 
Mémoire  ont  toutes  été  faites  au  même  endroit,  à  l'Observatoire 
magnétique  de  Batavia.  Cet  observatoire  est  un  bâtiment  en  bois , 
dans  la  construction  duquel  il  n'est  entré  aucune  pièce  de  fer; 
il  est  situé  dans  un  jardin  privé ,  à  une  distance  d'environ  quarante 
mètres  du  plus  rapproché  des  édifices  environnants.  La  position 
géographique  de  cet  observatoire  est:  Latitude  6^  IT  0'^  sud, 
Longitude  7^  7"^  19s  est  de  Greenwich. 

L'instrument  avec  lequel  les  observations  ont  été  faites  est  un 
cercle  d'inclinaison  de  Barrow,  de  3  pouces  de  diamètre;  pour 
toutes  les  observations  on  s'est  servi  de  la  même  aiguille.  Chaque 
observation  d'inclinaison  au  moyen  de  cet  instrument  demande 
environ  quarante  minutes.  L'observation  commençait  à  vingt  minutes 
avant  l'heure  entière  et  finissait  à  environ  vingt  minutes 
après  l'heure  entière  ;  le  résultat  donné  par  cette  observation  était 
alors  accepté  pour  valeur  de  l'inclinaison  à  l'heure  entière  exacte. 

Trois  séries  différentes  d'observations  ont  été  exécutées. 

La  première  série  s'étend  du  29  mai  LS68  au  22  août  1868; 
elle  comprend  des  observations  faites  à  douze  jours  différents, 
d'heure  en  heure,  depuis  7  h.  avant  midi  jusqu'à  5  h.  après 
midi;  dans  ces  observations  on  a  donc  obtenu  pour  chaque  jour 
onze  valeurs  de  l'inclinaison.  En  commençant  cette  série,  je  m'étais 
proposé  de  la  continuer  au  moins  pendant  un  an  ;  mais  au  bout 
de  trois  mois  je  fus  obligé  de  m'arrêter,  l'observation  devenant 
trop  fatigante  pour  la  vue. 


358 


p.    A.    BERGSMA.    SUR    LA    VARIATION    DIURNE 


La  seconde  série  comprend  des  observations  faites  à  10  heures 
du  matin  et  à  4  et  10  heures  du  soir,  pendant  21  jours,  distri- 
bués entre  le  26  août  1868  et  le  3  novembre  1868.  Au  com- 
mencement de  novembre  je  tombai  sérieusement  malade,  de  sorte 
qu'il  me  fut  impossible  de  me  livrer  à  aucune  observation  ;  ce  ne 
fut  qu'au  mois  de  décembre  que  je  me  trouvai  assez  bien  rétabli 
pour  pouvoir  me  remettre  à  la  besogne. 

La  troisième  série  est  composée  d'observations  faites  à  10  heures 
du  matin  et  à  4  heures  du  soir,  pendant  103  jours,  répartis  entre 
le  1er  décembre  1868  et  le  30  novembre  1869;  ces  observations 
eurent  lieu  autant  que  possible  deux  jours  par  semaine,  de  manière 
à  obtenir  8  ou  9  jours  d'observation  dans  chaque  mois. 

La  table  I  renferme  la  première  série  d'observations.  L'inclinaison 
est:  sud  21°  -h  les  nombres  de  la  table;  ces  nombres  indiquent 
des  minutes. 

TABLE   L 


Batavia 
Temps  moyen. 


7  h. 
mat. 


8  h. 
mat. 


9  h. 
mat. 


lot, 

mat. 


Uh 
mat. 


Midi. 


h.  I 


2  h.      3  h. 


soir.      soir.   |  soir. 

I  I 


4  h. 
soir. 


5  h. 
soir. 


Mai  29 

Juin  4 

Juin   12 

Juin  19 

Juin  25 

Juillet   2 

Juillet    9 

Juillet  16 

Juillet  23 

Juillet  30 

Août  13 

Août  22 

Moyen,  horair. 


22'.o4 
20.05 
19.58 
19.16 
19.04 
17.58 
20.32 
21.72 
20.37 
17.88 
20,73 
22.04 
20.08 


20/.56 
20.23 
19.82 
17.31 
19.58 
19.67 
18.94 
20.30 
18.42 
18.64 
22.03 
20  58 
19.67 


.17 

18M;3 

19'.94 

2r.5l 

19^94 

53 

19.20 

18.37 

18  68 

18.84 

79 

18.55 

17.71 

19.12 

19.25 

33 

18.81 

19.37 

20.04 

20.25 

78 

18.84 

18.93 

19.44 

18.82 

04 

17.73 

16.97 

18.42 

19.82 

71 

20.27 

19.03 

19.97 

22.19 

17 

18.03 

20.41 

20.34 

20.99 

93 

19.03 

19.80 

21 .  08 

20,74 

19 

19.00 

19.07 

18.97 

18.93 

10 

21.67 

20.67 

20.14 

22.01 

49 

19.06 

18  42 

19.92 

19.36 

60 

19.07 

19.06 

19.80 

20.10 

22.05 
20.48 
23.64 
20.60 
20.29 
19.29 
24.89 
20.88 
23.42 
21.48 
21.76 
20.84 
21.64 


Les  moyennes  horaires  déduites  de  ces  observations  montrent 
que  l'inclinaison  sud  à  Batavia  décroît  depuis  7  h.  du  matin 
jusqu'à  10  h.  du  matin,  où  elle  est  un  minimum,  et  qu'ensuite 
elle  croît  depuis  10  h.  du  matin  jusqu'à  5  h.  du  soir. 


DE    l'inclinaison    MAGNETIQUE    à    BATAVIA. 


359 


La  table  II  donne  les  différences  qu'on  trouve  en  retranchant 
la  valeur  de  l'inclinaison  à  10  h.  du  matin  de  la  valeur  de 
l'inclinaison  aux  autres  heures. 

TABLE    IL 


Batavia 
Temps   moyen. 

7  h.       8  h.      9  h. 
mat.      mat.    i  mat. 

lOli.    11  h.                  1  h. 
mat.     mat.     ^^^-    soir. 

2  h. 
soir. 

3  h.      4  h.   I   5  h. 
soir.      soir,      soir 

Différences..  .  . 

1' .48  1' .07  0' .57  0' .00  0' .47  0' .46  1' .20  1    .50  2' .03  2' .56'3'.04 

'                                               i 

Le  décroissement  de  l'inclinaison  de  7  h.  du  matin  à  10  h.  du 
matin  et  l'accroissement  de  10  h.  du  matin  à  5  h.  du  soir  sont 
assez  réguliers  ;  la  seule  irrégularité  est  celle  que  montre  la  diffé- 
rence obtenue  pour  l'heure  de  midi. 

La  table  III  comprend  la  deuxième  série  d'observations. 
TABLE    m. 


Batavia 
Temps  moyen 


10  h.  matin, 


4  h.  soir. 


10  h.  soir. 


Août  26 

Août  29 

Septembre  1 

Septembre  4 

Septembre  8 

Septembre  12 

Septembre  15 

Septembre  18 

Septembre  21 

Septembre  25 

Septembre  29 

Octobre  7 

Octobre  9 

Octobre  11 

Octobre  20 

Octobre  22 

Octobre  23 

Octobre  27 

Octobre  29 

Octobre  30 

Novembre  3 

Moyennes   lioraires 


27° 

27 
27 
27 
27 

27 
27 
27 

27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 


18^39 
18.65 
22  24 
19.52 
1 9 .  82 
18.14 
20.44 
21.12 
23.21 
19.98 
20.43 
21.25 
21.98 
20.33 
22.33 
18.04 
23.18 
20.08 
18.01 
14.41 
18.88 
20.02 


27* 

27 

27 

27 

27 

27 

27 

27 

27 

27 

27 

27 

27 

27 

27 

27 

27 

27 

27 

27 

27 

27 


20'.04 
21.24 

23.18 
22.78 
22.55 
21.56 
19.18 
22.73 
27.22 
22.21 
25.67 
23.98 
24.^)5 
24.47 
25.07 
21.76 
27.24 
27.1:3 
19.62 
22.10 
23 .  39 
23.19 


27° 

27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 
27 


21 '.76 
21.02 
22.96 
22.39 
23.48 
22.24 
25.20 
22.94 
27.39 
22.14 
24.74 
23.93 
24.19 
26 .  20 
22.17 
24.73 
25.10 
20.68 
21.22 
23.04 
19.11 
23.17 


360 


p.    A.    BERGSMA.    SUR    LA     VARIATION    DIURNE 


Les  moyennes  horaires  déduites  de  ces  observations  apprennent 
que  l'inclinaison  a  la  même  valeur  à  4  h.  du  soir  qu'à  10  h.  du 
soir.  Ce  résultat,  combiné  avec  l'accroissement  régulier  de  l'incli- 
naison de  10  h.  du  matin  à  5  h.  du  soir,  tel  qu'il  résulte  de  la 
première  série  d'observations,  indique  que  l'inclinaison  est  un 
maximum  vers  7  h.  du  soir. 

La  table  IV  fait  connaître  les  résultats  de  la  troisième  série 
d'observations.  Il  serait  trop  long  de  donner  toutes  les  observations 
particulières  ;  pour  ce  motif,  je  ne  communique  que  les  moyennes 
horaires  pour  chaque  mois  et  pour  l'année  entière.  La  cinquième  colonne 
de  cette  table  IV  renferme  les  différences  qu'on  obtient  en  retran- 
chant la  valeur  de  l'inclinaison  à  10  h.  du  matin  de  celle  à  4  h. 
du  soir. 

TABLE  IV. 


Nombre  des 

1 

jours 

10  h.  matin. 

4  h.  soir. 

Diôerences. 

d'observation. 

Décembre  1868. 

9 

27-^ 

19'.49 

27° 

22^52 

3'.03 

Janvier       1869. 

9 

27 

18.82 

27 

22.59 

3.77 

Février           // 

8 

27 

19.00 

27 

22.50 

3.50 

Mars              // 

9 

27 

20.76 

27 

24.56 

3.80 

Avril              // 

8 

27 

22.23 

27 

25.18 

2.95 

Mai               // 

9 

27 

21.61 

27 

24.06 

2.45 

Juin               // 

9 

27 

22.08 

27 

25.32 

3.24 

Juillet            // 

9 

27 

21.51 

27 

25.27 

3.76 

Août              // 

9 

27 

23.19 

27 

25.58 

2.39 

Septembre      // 

8 

27 

22.68 

27 

25.69 

3.01 

Octobre          // 

8 

27 

23.02 

27 

25.02 

2.00 

Novembre      '/ 

8 

27 

23.53 

27 

24.90 

1.37 

Moyennes  annuelles. 

27 

21.46 

27 

24.42 

2.96 

Ces  observations  montrent  que  pendant  toute  l'année  l'inclinaison 
sud  à  Batavia  est  plus  grande  à  4  h.  du  soir  qu'à  10  h.  du  matin. 
Sur  les  103  jours  où  l'inclinaison  a  été  observée  à  10  h.  du  matin 
et  à  4  h.  du  soir,  il  y  en  a  eu  96  où  elle  était  plus  grande  au 
second  de  ces  instants  qu'au  premier. 


DE    l'inclinaison    MAGNETIQUE    A    BATAVIA.  361 

La  différence  moyenne  entre  l'inclinaison  à  10  h.  du  matin  et 
celle  à  4  h.  du  soir,  dans  l'année  commençant  le  1er  décembre 
1868  et  finissant  le  30  novembre  1869,  est  de  2',96.  La  table 
IV  indique  que  cette  différence  varie  dans  les  différents  mois  ;  des 
observations  continuées  pendant  plus  longtemps  montreront  peut- 
être  que  cette  différence  est  assujétie  à  une  variation  annuelle 
régulière. 

La  variation  diurne  de  l'inclinaison  dans  l'hémisphère  sud  n'a, 
pour  autant  que  je  sache,  jamais  été  déduite  d'observations  faites 
au  cercle  d'inclinaison.  Le  général  Sabine  a  déduit  la  variation 
diurne  de  l'inclinaison  à  Ste. -Hélène  (latitude  15^  56' 41",2  sud, 
longitude  0^  22m  41s,9  ouest  de  Greenwich)  des  variations  diurnes 
de  la  force  horizontale  et  de  la  force  verticale,  observées  depuis 
le  1er  janvier  1843  jusqu'au  31  décembre  1846.  Comme  Ste.- 
Hélène  est,  de  tous  les  points  de  l'hémisphère  sud  où  la  variation 
diurne  de  l'inclinaison  est  connue,  celui  dont  la  latitude  se  rap- 
proche le  plus  de  celle  de  Batavia,  je  transcris  dans  la  table  V 
(  Voir  à  la  page  suivante)  les  résultats  du  général  Sabine  (E.  Sabine , 
Observations  al  St.  ffelena,  t.  II,  p.  LXI). 

Ces  résultats  présentent  un  accord  remarquable  avec  ceux  qui 
se  déduisent  de  mes  observations.  Dans  la  demi-année  d'avril  à 
septembre,  qui  est  celle  où  fut  faite  la  plus  grande  partie  de  ma 
première  et  de  ma  seconde  série  d'observations,  l'inclinaison  dé- 
croît de  7  h.  du  matin  à  10  h.  du  matin,  est  un  minimum  à 
10  h.  du  matin,  croît  de  10  h.  du  matin  à  7  h.  du  soir,  est  un 
maximum  à  7  h.  du  soir,  et  atteint  à  10  h.  du  soir  à  peu  près 
la  même  valeur  qu'à  4  h.  du  soir. 

La  différence  entre  les  moyennes  annuelles  pour  10  h.  du  matin 
et  4  h.  du  soir  est ,  à  Ste. -Hélène ,  de  2',05  ;  la  différence  entre 
les  moyennes  annuelles  pour  ces  mêmes  heures,  à  Batavia,  est 
de  2', 96.  D'après  cela,  il  est  probable  que  l'amplitude  de  la  va- 
riation diurne,  dans  les  moyennes  annuelles,  est  plus  grande 
à  Batavia  qu'à  Ste. -Hélène.  Ce  fait  serait  d'accord  avec  les 
résultats  déduits  par  le  général  Sabine  des  variations  de  la  force 
horizontale   et   de   la   force   verticale   à   Ste. -Hélène,  au  Cap  de 


362 


p.    A.    BERGSMA.    SUR    LA    VARIATION    DIURNE 


TABLE   V. 


INCLINAISON    SUD    à 

STE. 

-HÉLÈNE. 

Ste.-Hélène 

Moyennes    semi-annuelles.           j 

Temps  moyen. 

Avril  à 
Septembre. 

Octobre  à 
Mars. 

annuelles. 

Minuit. 

22^ 

0'.38 

22^ 

0'.52 

22" 

0'.45 

1  h.  du  mat. 

22 

0.28 

22 

0.38 

22 

0.33 

2  h.  du  mat. 

22 

0.17 

22 

0.25 

22 

0.20 

3  h.  du  naat. 

22 

0.03 

22 

0.17 

22 

0.10 

4  h.  du  mat. 

21 

59.98 

22 

0.05 

22 

0.02 

5  h.  du  mat. 

21 

59.85 

21 

59.98 

21 

59.92 

G  11.  du  mat. 

21 

59.68 

21 

59.92 

21 

59.80 

7  11.  du  mat. 

21 

59.52 

21 

59.63 

21 

59.58 

8  h.  du  mat. 

21 

59.17 

21 

59.17 

21 

59.17 

9  h.  du  mat. 

21 

58.88 

21 

58.85 

21 

58.87 

10  11.  du  mat. 

21 

58.48 

21 

58.62 

21 

58.55 

11  h.  du  mat. 

21 

58.57 

21 

58.53 

21 

58.55 

Midi. 

21 

58.75 

21 

58.62 

21 

58.G8 

1  h.  du  soir 

21 

59.38 

21 

59.02 

21 

59.20 

2  h.  du  soir 

21 

59.98 

21 

59.62 

21 

59.80 

3  h.  du  soir 

22 

0.42 

22 

0.12 

22 

0.27 

4  h.  du  soir 

22 

0.58 

22 

0.62 

22 

0.60 

5  h.  du  soir 

22 

0.78 

22 

0.85 

22 

0.82 

G  11.  du  soir 

22 

1.02 

22 

1.05 

22 

].03 

7  h.  du  soir 

22 

1.13 

22 

1.10 

22 

1.12 

8  h,  du  soir 

22 

0.92 

22 

0.88 

22 

0.90 

9  h.  du  soir 

22 

0.82 

22 

0.90 

22 

0.87 

10  h.  du  soir 

22 

0.70 

22 

0.73 

22 

0.72 

11  h.  du  soir 

22 

0.52 

22 

0.68 

22 

0.60 

Bonne-Espérance  (Voir:  E.  Sabine,  Observations  at  Si.  Helena^ 
t.  II,  p.  C.)  et  à  Hobarton  (Voir:  E.  Sabine,  Observations  at  Ho- 
barlon ,  t.  II,  p.  XLV.);  la  table  suivante  fait  connaître  ces 
résultats  : 


DE    L  INCLINAISON    MAGNETIQUE    A    BATAVIA. 


363 


TABLE   VI. 


Latitude  sud. 


!  Différences  entre  les 
_  valeurs  des  moyennes 
annuelles  de  l'inclinai- 
son sud  aux  lieures  du 
maximum  et  du 
minimum. 


Ste.-Hélèue 

Cap  de  Bonne-Espérance. 
Hobarton 


15^56' 
83    56 

42    48 


2^57 
1.50 
1.26 


Ces  résultats  indiquent  un  décroissement  de  l'amplitude  de  la  va- 
riation diurne  de  l'inclinaison,  dans  les  moyennes  annuelles,  à 
mesure  que  la  latitude  s'élève. 

Je  me  propose  de  continuer  mes  observations  d'inclinaison 
à  10  h.  du  matin  et  à  4  h.  du  soir  deux  fois  par  semaine.  L'objet 
principal  que  j'ai  en  vue  par  là,  est  d'acquérir  une  connaissance 
parfaite  de  la  différence  entre  les  inclinaisons  à  deux  heures  diffé- 
rentes du  jour.  J'espère  trouver  ainsi  un  moyen  de  contrôler  les 
résultats  que  je  serai  peut-être  un  jour  à  même  d'obtenir,  au 
moyen  des  magnétograplies ,  pour  chacune  des  vingt-quatre  heures 
de  la  journée.  Jusqu'à  présent  il  a  été  impossible  de  faire  fonctionner 
les  magnétographes ,  faute  d'un  local  approprié. 

Batavia,  24  décembre  1869. 


NOTES  POUR  SERVIR  A  LA  CONNAISSANCE 

DU  PRESBYTES  ALBIGEKA,  GRAY, 


W.  MARSHALL. 


Dans  le  courant  de  l'année  1869,  le  Musée  d'histoire  naturelle 
de  Leyde  reçut  du  Jardin  zoologique  de  Rotterdam  deux  indi- 
vidus morts  d'un  singe  rare,  le  Presbytes  alhigena  Gray.  Le  ssiYs.nt 
chef  du  Musée,  M.  le  Directeur  Schlegel,  m'invita  à  faire  l'étude 
anatomique  de  ces  animaux  ;  cette  étude  a  conduit  à  quelques 
résultats  que  je  crois  devoir  faire  connaître,  en  les  comparant 
successivement  avec  ce  qui  a  été  observé  chez  les  singes  des 
genres  les  plus  voisins,  les  Semnopithèques  et  les  Cercopithèques. 

Chez  les  Semnopithèques,  —  groupe  dans  lequel  je  comprends 
les  genres  :  Semnopiihecus  F.  Cuv.  avec  ses  sous-genres ,  Nasalis 
E.  Geoffr. ,  Vetulus  Rchb.  et  Colohiis  Illig. ,  —  la  partie  neurale 
du  crâne  est  arrondie,  brachycéphale ,  et  la  partie  viscérale  est 
peu  saillante.  L'angle  facial  s'élevait,  en  moyenne,  chez  les  in- 
dividus jeunes  (3  crânes)  à  78°  55',  chez  les  vieux  (9  crânes)  à 
50°  38';  un  crâne  très  jeune  de  Nasalis  y  dont  les  fontanelles 
n'étaient  pas  encore  fermées,  mesurait  83°  30'  ;  un  très  vieux,  45°. 

Chez  les  Colohus  la  mesure  de  5  crânes  adultes  donna  pour 
l'angle  facial  une  valeur  moyenne  de  46"  24'. 

Dans  le  genre  Cercopithecus  et  ses  sous-genres,  où  le  crâne 
est    beaucoup    plus    allongé   ^)    et    où    sa  partie  faciale  fait  une 

^)  Il  n'est  pas  sans  intérêt  de  remarquer  que  le  crâne  des  Semnopithèques, 
groupe  essentiellement  asiatique ,  est  brachycépliale ,  celui  des  Cercopithèques , 
qui  appartiennent  à  l'Afrique,  dolichocéphale;  uii  phénomène  pareil  est  offert, 
comme  l'on  sait,  par  les  Anthropomorphes  dasypyges ,  car  l'Orang-outan .  espèce 
asiatique,  est  brachycéphale,  tandis  que  le  Chimpansé  et  le  Gorille,  propres  à 
l'Afrique,  sont  dolichocéphales. 


W.    MARSHALL.    NOTES    POUR    SERVIR    A    LA,    ETC.  365 

saillie  bien  plus  forte,  je  trouvai,  après  mensuration  de  12  crânes, 
un  angle  moyen  de  30°  45';  le  crâne  du  Presb.  albigena  avait 
exactement  39°. 

Un  examen  superficiel  des  crânes  suffit  déjà  à  faire  reconnaître 
que  chez  les  Semnopitbèques  les  yeux  sont  beaucoup  plus  écartés 
entre  eux  que  chez  les  Cercopithèques.  Chez  les  premiers ,  d'après 
des  mesures  prises  sur  19  crânes,  le  plus  grand  diamètre  des 
orbites  était  de  21,5  mm.  et  leur  distance  mutuelle  de  9  mm.; 
chez  les  Cercopithèques  je  trouvai,  d'après  12  crânes,  un  diamètre 
maximum  de  21,7  mm.  et  une  distance  de  3,7  mm.;  chez  le 
Pr.  albigena  enûn,  le  diamètre  mesurait  21mm.,  la  distance  4  mm. 

Chez  les  Semnopitbèques  et  les  Cercopithèques  les  fosses  maxillaires 
sont  en  général  peu  développées,  ce  n'est  que  chez  les  Cerc. 
aethiops  et  fuliyinosus ,  singes  appartenant  au  sous-genre  Cerco- 
cebus ,  qu'elles  forment  une  impression  profonde;  la  même  chose 
s'observe,  à  un  degré  encore  beaucoup  plus  prononcé,  chez  le 
Pr.  albigena  y  en  sorte  que  le  bord  infra-orbitaire  y  fait  une 
forte  saillie.  Je  n'ai  pas  remarqué  que  le  muscle  canin  fût  par- 
ticulièrement développé,  ce  qui  toutefois  peut  devoir  être  attribué 
à  ce  que  cette  région  avait  été  plus  ou  moins  endommagée 
pendant  la  préparation  de  la  peau. 

Les  facettes  articulaires  de  la  mâchoire  inférieure  sont,  chez 
les  Semnopitbèques,  longues  et  étroites,  les  diamètres  transver- 
saux n'ayant  que  le  tiers  de  la  longueur  des  diamètres  longitu- 
dinaux ;  ceux-ci  convergent  fortement  en  arrière  ;  le  bord  posté- 
rieur de  l'apophyse  condyloïde  est  légèrement  concave,  le  bord 
antérieur  est  convexe.  Chez  les  Cercopithèques,  les  diamètres 
diffèrent  peu  entre  eux,  de  sorte  que  la  facette  articulaire  est 
presque  arrondie;  j'ai  trouvé  qu'il  en  est  de  même  chez  le 
Presbytes  albigena. 

Il  y  a  encore  d'autres  différences  ostéologiques ,  qui  concernent 
surtout  les  proportions  relatives  du  tronc  et  des  extrémités ,  celles 
des  extrémités  entre  elles  et  celles  des  divers  doigts.  Le  tableau 
suivant  résume  les  résultats  des  mesures  que  j'ai  effectuées  sur 
5  squelettes: 


366 


W.  MARSHALL.  NOTES  POUR  SERVIR  A  LA 


Tableau  des  dimensions  des  différentes  parties  du  squelette 
en   millimètres. 


Semno- 

pithecus 

en  tell  us , 

Wagn. 

Nasalis 

larvatus , 

Geoflfr. 

Colobus 

pcrsonatus 

Temiu. 

Cerco- 
pitbecus 
r  liber , 
liinné. 

Presbytes 

albigena, 

Gray. 

Tronc 

310 

589 

117 

132 

76 

31 

157 

143 

92 

47 

470 
550 
181 
209 
122 

47 
216 
185 
136 

72 

445 

850 
153 
163 
107 
6 
198 
180 
129 
55 

295 

510 

108 

116 

61 

26 

120 

116 

76 

42 

305 

540 

Bras    

112 

Avant- bras 

127 

Doigt   médian 

Pouce 

85 

42 

Cuisse 

Jambe         

145 
140^ 

Orteil  médian 

Gros  orteil 

92 
51 

Je  ne  puis  malheureusement  donner  aucun  renseignement  sur 
la  dernière  molaire,  cette  dent  n'ayant  encore  percé  dans  aucun 
de  nos  deux  individus  '). 

Tous  les  os  creux  du  Fr.  albigena  avaient  la  forme  ramassée 
de  ceux  des  Cercopithèques. 

En  ce  qui  concerne  le  système  viscéral,  on  sait,  —  et  cette 
particularité  constitue  même  un  des  caractères  génériques  du 
groupe,  —  que  les  Cercopithèques  sont  toujours  pourvus  d'aba- 
joues; ces  poches  sont  aussi  très  apparentes  chez  le  Pr.  albigena. 

')  On  a  souvent  attribué  une  valeur  exagérée  aux  caractères  des  dents,  ainsi 

que  devront  l'avouer  tous  ceux  qui  connaissent  les  nombreuses  variations  que  ces 

organes  présentent,  sous  le  rapport  du  nombre  des  tubercules,  etc.,  chez  l'être 

le    mieux    connu,    savoir    chez    l'homme.    La  môme  chose  peut  arriver  chez  les 

singes   en  question  ;    c'est  ce  que  montre ,  entre  autres ,  un  crâne  de  Colobm  ou 

de  Semnopithecus ,  récemment  acquis  par  notre  Musée,    qui    présente    la  formule 

dentaire  suivante; 

2.1.3.4. 

2  n  .  3  .  4^ 

par  conséquent,  un  excès  de  8  dents. 


CON>AISS\NCE    DU    PRESBYTES    ALBIGENA  ,    GRAY.  367 

La  langue  montre ,  à  la  partie  antérieure ,  de  nombreuses  papilles 
fongiformeS;  de  couleur  blanche;  les  papilles  caliciformes  sont  au 
nombre  de  3  et,  de  même  que  chez  plusieurs  Cercopithèques, 
elles  sont  placées  en  triangle  à  la  base  de  la  langue  ;  leur  diamètre 
est  de  plus  de  2  mm.  L'œsophage  n'offre  rien  de  bien  caractéristique. 

L'estomac ,  qu'avant  la  dissection  je  m'étais  attendu  à  trouver 
composé  comme  chez  les  Semnopithèques,  et  que  je  me  proposais 
d'étudier  sous  le  microscope,  était  simple  comme  chez  les 
Cercopithèques.  Sa  forme  était  arrondie,  le  fond  à  peine 
développé;  le  cardia  et  le  pylore  étaient  très  rapprochés,  de 
sorte  que  la  grande  courbure  mesurait  202  mm. ,  la  petite  seule- 
ment 60  mm.  L'intestin  grêle  était  peu  distinct  au  pylore;  son 
calibre  intérieur  était  faible,  sa  longueur  égale  à  1,13  mètre.  Le 
cœcum  était  fortement  développé ,  avait  la  forme  d'un  cône  tronqué  et 
une  longueur  de  35  mm.  Le  gros  intestin  était  long  de  5,8  déci- 
mètres ;  les  ligaments  du  côlon  étaient  fortement  prononcés ,  solides , 
et  larges  de  5  mm.;  les  appendices  épiploïques ,  que  je  n'ai  encore 
trouvés  chez  aucun  singe  ,  manquaient  également  dans  le  cas  actuel. 

La  disposition  du  côlon  était  très  remarquable:  en  effet,  il 
n'y  avait  pas  de  côlon  ascendant,  le  cœcum  était  situé  dans 
l'hypochondre  droit,  sous  le  bord  du  foie,  et  de  là  le  côlon  se 
dirigeait;  en  pente  assez  rapide,  vers  le  côté  gauche  du  bassin, 
de  sorte  qu'il  n'était  pas  question  non  plus  d'un  côlon  transverse 
proprement  dit.  A  l'S  du  côlon  et  au  rectum  il  n'y  avait  rien 
de  particulier  à  observer. 

Le  foie  avait  3  divisions  antérieures,  plus  grandes,  et  trois  postéri- 
eures ,  plus  petites  ;  la  plus  volumineuse  de  ces  dernières  était  située 
au  côté  gauche  et  faisait  partie  du  lobe  gauche,  les  deux  autres 
étaient  des  lobules  de  Spiegel.  La  vésicule  du  fiel  avait  la  même 
forme  que  chez  l'homme,  et  il  en  était  de  même  du  pancréas  et  de 
la  rate;    seulement,    cette  dernière  était  relativement  plus  petite. 

Au  larynx  je  ne  pus  rien  découvrir  d'analogue  aux  poches  laryn- 
giennes des  Semnopithèques.  Le  poumon  droit  était  3-lobé,  le 
gauche  2-lobé. 

Le  système  utogénital  ne  montrait  rien  de  particulier. 


368  W.    M/VRSFIALL.    NOTES    POUR    SERVIR    A     LA,    ETC. 

D'après  ce  qui  précède ,  il  me  semble  qu'il  ne  peut  guère  rester  de 
doute  que  le  singe  en  question  n'appartient  ni  au  genre  Presbytes, 
comme  le  veut  Gray,  ni  au  groupe  des  vrais  Semnopithèques ,  à 
la  tête  desquels  le  place  Reichenbach.  A  mon  avis,  c'est  un 
véritable  Cercopithèque,  qui,  il  est  vrai ,  par  son  aspect  extérieur , 
rappelle  fortement  les  Semnopithèques. 

Il  ne  me  Paraît  pas  inutile  d'en  donner  encore  une  fois  une 
courte  diagnose. 

Cercopilhecus  albigena. 

Presbytes  albigena  Grray,  Proc.  zool.  Soc.  Lond.  1850,  p.  77. 
Semnopithecus  alb.  Reichenbach,  Vollstànd.  Naturg.  der 
A/feu,  p.  93,  n.  226. 

Couleur  générale  d'un  noir  mat  ;  à  la  gorge ,  aux  côtés  du  cou 
et  surtout  aux  joues,  des  poils  plus  longs  et  grisâtres;  au-dessus 
de  chaque  œil  une  touffe  dirigée  en  avant;  sur  le  sommet  de  la 
tête  une  touffe  semblable ,  plus  grande ,  qui  se  perd  vers  la  nuque  ; 
aux  côtés  du  tronc  une  crinière,  dont  les  poils  sont  légèrement 
teintés  de  roux  à  l'extrémité. 

Face  et  mains  noires,  à  poils  très  fins;  callosités  ischiatiques 
petites,  jaunâtres;  yeux  d'un  brun  clair.  Les  dimensions  des  diffé- 
rentes parties  se  déduisent  du  tableau  ci-dessus. 

Trois  individus  au  Musée  de  Leyde,  deux  adultes  (qui  ont  servi  pour 
la  présente  étude),  etuu  jeune,  sans  lieu  d'origine,  reçu  de  M.  Schaufuss. 

Par  une  communication  verbale  de  mon  ami  M.  van  Bemmelen , 
directeur  du  Jardin  zoologique  de  Rotterdam,  j'ai  appris  que  ce 
singe,  dont  l'établissement  en  question  a  reçu  successivement 
5  exemplaires,  provient  du  royaume  de  Loango,  sur  la  côte 
occidentale  de  l'Afrique. 

Dans  l'établissement  ils  étaient  nourris  avec  du  maïs,  du  pain 
et  des  choux  blancs;  ils  recevaient  en  outre,  chaque  jour,  un 
peu  de  viande  crue  et  quelques  œufs.  Malheureusement  on  n'a 
pas  réussi  jusqu'ici  à  conserver  ces  animaux  longtemps  en  vie. 

Dans  les  individus  que  j'ai  étudiés  les  poumons  étaient  tuber- 
culeux à  un  haut  degré. 
Leyde,  Septembre  1870. 


PJ I 


INDUCTEURdeRUHMKORFF  avecAPPAREIL   d'enrégistration, 


PI.  II*. 


Grand  Ruhmkorff,  sans  condensateur;  10  éléments  de  Grove. 

Décharges  de  fermeture.  (Mailpapier). 

Peu  d'interruptions ,  parce  que  b  communiquait  avec  le  diapason  et  a  avec  le  cylindre. 


PI.  m*. 


* 


« 


v^î^v/^ 


/^A/wv 


Grand  Kuhmkorff,  sans  condensateur;  10  éléments  de  Grove. 

Décharches  d'ouverture.  {Papier  vélin}. 

Beaucoup    d'interruptions ,    parce    que    b    communiquait    avec    le    diapason    et 

a   avec   le    cylindre. 


PI.  IV*. 


iW/KÈH, 


v^     yy    ^^ 


/  \/  ^/:        V  V        ^-.i.^./». 


émàtmiémirieit: 


^ — — ; •<-♦- *h-« — tw    mimoiiwni-- ' 


jT"~  :zz: 


— r-> 


17Z 


"««^IsS"- 


■>  —  »»«■*«■"*—«'* 


Grand  Ruhmkorff,  sans  condensateur;   10  éléments  de  Grove. 
Les  deux  électrodes  écrivant  à  la  lois.  [Maiipapier). 


PI.  Y' 


xV.A.^.,A/ 


A^'V--. 


A.''^'V^y^•..y'\/%/^ 


Grand  Ruhmkorfî  ,  sans  condensateur;  1  —  10  éléments  de  Grove. 
Durée  de  la  première  interruption  à  l'ouverture.  {Papier  vélin). 


Grand  Ruhmkorff,  sans  condensateur;  8  éléments  de  Grove. 

Durée   de   la   décharge   d'ouverture,    croissant  avec  l'étendue  du 

contact  métallique.  (Papier  vélin). 


PI.  VIP. 


V    \ 


Grand  Ruhmkorff,  sans  condensateur;  4  éléments  de  Grove. 
Décharges  d'ouverture  avec  micromètre  à  étincelles.  (Papier  vélin), 


PI.  VIII*. 


|VV\/\yWVV^/v\A;A^i^ 


Wi#V%^- 


,A 


y\ 


-^V/^v.'^^.^^ 


^%^\ 


•y  V 


Grand  Ruhmkorff,   10  éléments  de  Grove. 
Décharges  d'ouverture  avec  bouteille  de  Leyde.  {Papier  vélin). 


PI.  IX*. 


ï^^. 


^» 


MRfîr: 


Tsm 


im- 


^W 


^ 


^ir 


3«fe 


Grand  Ruhmkorff,  10  éléments  de  Grove. 

Images  des  étincelles  de  la  décharge  de  fermeture,  avec  bouteille 
de  Leyde.  {Papier  vélin). 


ARCHIVES  NÉERLANDAISES 

DES 

Sciences  exactes  et  naturelles, 


MATÉRIAUX  POUR  LA  COINNAISSANCE  DU  BASALTE 


F.    SEELHEIM. 


Les  recherches  dont  je  vais  rendre  compte  doivent  leur  origine 
première  à  une  question  purement  pratique^  dont  la  solution 
toutefois  entraînait  nécessairement  dans  des  considérations  intimement 
liées  à  la  composition  et  au  mode  de  formation  du  basalte.  Comme, 
sur  ces  deux  points,  il  règne  encore  toujours  des  incertitudes  et 
des  divergences  d'opinion,  je  crois  devoir  communiquer  les  résultats 
obtenus,  d'autant  plus  qu'ils  ont  conduit  à  une  vue  bien  déter- 
minée relativement  à  la  genèse  de  la  roche  en  question. 

Parmi  les  prismes  de  basalte  employés,  à  Middelbourg,  dans 
la  construction  d'un  quai  de  déchargement,  au  port  du  nouveau 
canal,  il  s'en  trouvait  un  grand  nombre  qui  donnaient  lieu 
d'observer  un  phénomène  particulier  :  les  prismes  bien  constitués , 
à  cinq  ou  à  six  pans,  parfaitement  intacts,  éclataient  d'eux- 
mêmes,  comme  on  disait,  en  une  foule  de  petits  fragments.  Après 
être  restés  exposés  quelque  temps  à  l'influence  des  agents  atmos- 
phériques, les  prismes  montraient  un  grand  nombre  de  fentes 
longitudinales  et  transversales ,  qui  les  divisaient  en  parties  irré- 
gulières, de  la  grandeur  de  la  main;  dans  quelques-uns  même 
la  désagrégation  était  poussée  si  loin,  qu'on  pouvait  les  réduire 
Archives  Néerlandaises,  T.  V.  24 


370  F.    SEELÏIEIiM.    MATÉRIAUX    POUR    LA 

SOUS  les  doigts  en  grains  de  la  grosseur  d'un  pois.  Comme  ce 
phénomène  n'était  pas  borné  à  quelques  cas  isolés,  mais  se 
manifestait  sur  des  centaines  de  prismes ,  je  fus  prié  de  chercher 
un  caractère  qui  permît  de  distinguer  ces  pierres,  impropres  à 
tout  service ,  de  celles  qui  avaient  la  solidité  requise. 

Les  prismes  où  la  décrépitation  se  prononçait  le  plus  fortement 
provenaient  de  la  carrière  du  Romerichkopf;  près  de  Linz,  sur 
la  rive  droite  du  Rhin.  Dans  cette  carrière  même  je  reconnus 
également  le  fait  dont  il  s'agit,  tant  sur  des  fragments  détachés , 
éparpillés  sur  le  sol,  que,  çà  et  là,  sur  les  prismes  en  place, 
surtout  sur  ceux  qui  étaient  rapprochés  des  pentes,  tandis  que, 
plus  vers  le  centre  de  la  montagne ,  la  roche ,  dressée  en  colonnes 
élancées ,  à  angles  obtus ,  reliées  entre  elles  par  de  minces  couches 
d'argile  ,  paraissait  de  qualité  irréprochable.  A  la  surface  les  prismes 
montraient,  sur  l'épaisseur  d'une  feuille  de  papier,  la  couche  altérée 
bien  connue ,  de  couleur  grise;  à  l'intérieur  ils  étaient  noirs,  à  cassure 
inégale  et  très  grenue ,  parsemés  de  grains  d'olivine,  et  sans  autre 
trace  d'altération  qu'une  teinte  rougeâtre  répandue  quelquefois  sur 
ces  grains  d'olivine  jusqu'à  une  profondeur  de  1  centimètre. 
Poids  spécifique  =:  3,006. 

Mon  premier  soin  fut  maintenant  de  chercher  la  cause  de  la 
rupture.  Il  ne  fallait  pas  songer  ici  à  un  effet  de  dessiccation ,  vu  que 
des  petits  fragments  de  basalte  frais,  laissés  pendant  plusieurs 
semaines  dans  l'exsiccatenr,  en  présence  de  l'acide  sulfurique,  ne 
perdaient  rien  de  leur  poids  ;  il  ne  pouvait  être  question  davan 
tage  d'une  pénétration  d'humidité,  car  lorsque  les  fragments, 
immergés  dans  l'eau ,  étaient  portés  sous  le  récipient  de  la 
machine  pneumatique  et  maintenus  pendant  longtemps  dans  le 
vide,  il  ne  s'en  séparait  d'autres  bulles  que  celles  qui  provenaient  de 
la  couche  d'air  adhérente  à  la  surface,  tandis  que  le  poids  des 
fragments ,  essuyés  à  la  surface ,  ne  dénotait  aucune  variation , 
et  que  l'intérieur  ne  laissait  voir  aucune  trace  de  pénétration 
d'humidité. 

Lorsqu'au  contraire  on  exposait  les  fragments,  dans  une  étuve 
à  air   ou   à   eau   chaude,    à  une  température  de  50*^  seulement. 


CONNAISSANCE    DU    BASALTE.  371 

ils  ne  tardaient  pas  à  se  remplir  de  fissures ,  devenaient  friables , 
et  montraient  à  la  surface,  ainsi  que  dans  toute  la  masse,  une 
quantité  de  points  étoiles,  d'un  gris  clair ,  particularité  qui  s'obser- 
vait aussi  sur  les  fragments  éclatés  spontanément  et  dans  beaucoup 
de  morceaux  encore  compactes,  à  la  surface  de  la  cassure. 

Le  même  phénomène  ne  se  produisait  pas  quand  les  fragments 
étaient  introduits  dans  un  mélange  réfrigérant  de  sel  de  Glauber 
et  d'acide  chlorbydrique ,  et  qu'ils  restaient  pendant  douze  heures 
dans  ce  mélange  plusieurs  fois  renouvelé  et  donnant  lieu  à  un 
froid  d'au  moins   lé''. 

D'après  cela,  le  signe  auquel  on  pouvait  reconnaître  la  propriété 
d'éclater,  savoir,  l'effet  d'un  échauffement  modéré,  était  trouvé: 
car  toutes  les  autres  variétés  de  basalte ,  à  cassure  unie  ou  moins 
grenue,  traitées  de  la  même  manière,  ou  même  chauffées  jusqu'à 
100°  et  au-delà,  gardaient  leur   cohérence. 

Une  autre  question  était  de  savoir  de  quelle  manière  réchauffe- 
ment occasionnait  la  rupture.  En  cherchant  la  réponse  à  cette 
question ,  je  songeai  d'abord  à  l'assertion  de  M.  Mohr  '  ) ,  d'après 
laquelle  le  basalte  renfermerait  une  petite  quantité  d'eau ,  contenue 
dans  des  cellules  capillaires  closes  de  toutes  parts:  dans  le  cas 
où  cette  eau  remplirait  toute  la  capacité  des  cellules,  sa 
dilatation  par  la  chaleur  pouvait  donner  l'explication  du 
phénomène. 

Mais ,  en  admettant  même  la  réalité  de  l'existence  de  ces  cellules , 
on  devrait  s'attendre  à  voir  la  dilatation  due  à  la  congélation  de 
l'eau  produire  le  même  effet  que  réchauffement;  or,  comme  cela 
n'avait  pas  lieu,  je  renonçai  à  cette  explication,  bien  qu'il  ne 
soit  pas  impossible  que  la  cause  indiquée  contribue  au  résultat. 

J'instituai  maintenant  une  expérience  à  l'effet  de  constater  si 
l'un  ou  l'autre  gaz  à  l'état  libre,  par  exemple  de  l'acide  carboni- 
que ,  pouvait  se  trouver  emprisonné  dans  de  semblables  pores  du 
basalte.  Un  grand  morceau  de  basalte  ayant  été  placé  dans  un 
vase  de  cuivre  susceptible  d'être  fermé  hermétiquement,  on  fit  le 


')  F.  Mohr,  GescUchte  der  Erde. 

24* 


372  F.    SEELHEIM.    MATÉRIAUX    POUR    LA 

vide  dans  ce  vase  au  moyen  de  la  pompe  pneumatique  à  mercure 
de  Geissler.  Après  que  le  mercure  du  manomètre  se  fut  maintenu 
pendant  un  demi-jour  au  même  niveau  dans  les  deux  branches  ^ 
on  chauffa  le  vase  à  une  température  de  100^.  La  rupture  eut 
lieu  successivement,  avec  un  bruit  de  crépitation ,  et  il  se  forma 
un  enduit  d'humidité  dans  le  tube  qui  reliait  le  vase  à  la  pompe 
pneumatique;  mais,  lorsque  cette  humidité  eut  été  absorbée 
par  le  chlorure  de  calcium  de  l'appareil  de  dessiccation ,  le  mercure 
du  manomètre  ne  montra  qu'une  différence  de  niveau  très  insi- 
gnifiante y  et  bien  que  ,  en  faisant  fonctionner  de  nouveau  la  pompe , 
de  l'eau  de  baryte  interposée  se  troubla  légèrement,  ce  trouble 
était  trop  faible  pour  qu'il  y  eût  lieu  d'en  tenir  compte.  Il  n'y 
avait  donc  pas  non  plus  de  gaz  emprisonné  dans  le  basalte. 

Le  poids  spécifique  n'est  pas  changé  après  la  décrépitation. 
C'est  donc  la  dilatation  passagère,  due  à  réchauffement,  qui 
produit  la  rupture.  Or,  lorsqu'un  corps  solide  homogène  est  soumis 
à  un  échauffement  uniforme,  son  volume  total  peut  bien  aug- 
menter, mais  il  est  tout  à  fait  impossible  qu'il  se  brise.  Par 
conséquent  il  faut,  ou  bien  que  réchauffement  ne  soit  pas  uni- 
forme, ou  bien  que  la  masse  ne  soit  pas  homogène.  Si  c'était  le 
défaut  d'égalité  dans  réchauffement  qui  occasionnait  la  rupture, 
le  phénomène  devrait  s'observer  également  dans  les  autres  sortes 
de  basalte;  comme  il  ne  se  manifeste  toutefois,  même  après 
une  application  prolongée  de  la  chaleur ,  que  chez  la  seule  variété 
dont  il  est  ici  question,  il  ne  reste  d'autre  alternative  que  de 
l'attribuer  à  une  inégalité  de  dilatation  due  à  l'inégalité  de  structure 
de  l'agrégat  minéral,  et  par  suite  de  laquelle  les  points  où  la 
tension  est  la  plus  forte  se  réunissent  par  des  fissures.  Ainsi 
s'explique  aussi  pourquoi  la  dislocation  atteint  tout  spécialement 
les  basaltes  qui  présentent  une  cassure  à  gros  grains,  car  il  est 
probable  que  chez  ceux-là  l'hétérogénéité  de  structure  est  plus 
grande  que  chez  les  basaltes  à  cassure  unie,  lesquels,  toutefois, 
ne  sont  pas  entièrement  à  l'abri  du  phénomène.  Au  Domkopf  près 
d'Unkelbach  sur  le  Rhin,  au  Meissner  en  Hesse,  et  dans  d'autres 
localités,  j'ai  vu  de  ces  masses  réduites  en  fragments ,  —  souvent 


CONNAISSANCE    DU    BASALTE.  373 

cimentés  de  nouveau  par  de  l'oxyde  de  fer  et  du  carbonate  de 
chaux,  —  parmi  les  prismes  détachés  et  épars  sur  le  sol;  à 
l'intérieur  des  montagnes  basaltiques,  là  où  la  roche  en  place 
est  préservée  de  l'influence  des  rayons  solaires,  je  n'ai  jamais 
rien  remarqué  de  semblable.  Les  petites  taches  étoilées,  d'un  gris 
clair,  que  montre  le  basalte  éclaté,  sont  les  particules  de  la 
pâte  qui  ont  été  rompues  violemment  lors  de  la  division  de  la 
masse,  et  qui  paraissent  plus  claires  parce  qu'elles  réfléchissent 
plus  de  lumière. 

Le  phénomène  dont  il  s'agit  ici  est  donc  entièrement  différent 
de  celui  de  la  division  du  basalte  en  prismes,  lequel,  comme 
M.  Mohr  l'a  prouvé  clairement,  est  dû  au  retrait  occasionné  par 
la  transformation  du  carbonate  de  fer  en  oxyde  magnétique. 

Pour  contribuer  à  la  connaissance  de  la  nature  du  basalte ,  sur 
laquelle  on  ne  possède  pas  encore  des  recherches  suffisamment 
complètes,  je  donne  ici  les  résultats  de  l'analyse  détaillée  que 
j'ai  faite  d'un  échantillon. 

Le  basalte  réduit  en  poudre  extrêmement  fine ,  privée  de  toute 
humidité  dans  l'exsiccateur,  fut  digéré  pendant  longtemps  avec 
un  grand  excès  d'acide  chlorhydrique  pur  et  concentré  ;  on  évapora 
alors  à  siccité,  on  procéda  comme  pour  les  silicates  solubles 
ordinaires,  et  on  s'empara  de  l'acide  silicique  soluble  par  une  ébulli- 
tion  prolongée  et  répétée  avec  du  carbonate  de  soude.  La  masse  qui 
avait  résisté  à  l'action  de  ces  agents  fut  fondue  avec  du  bisulfate 
de  potasse;  à  ce  sujet,  je  remarquerai  que  le  traitement  par 
l'acide  sulfurique  concentré  suffit  également,  lorsqu'on  le  continue 
pendant  longtemps.  L'acide  silicique  fut  extrait  par  une  dissolution 
faible  de  soude.  Enfin  le  résidu  insoluble  fut  attaqué  et  analysé 
ultérieurement  par  les  méthodes  connues.  L'acide  carbonique  fut 
déterminé,  sur  50  grammes  de  matière,  en  faisant  absorber  le 
gaz  par  l'eau  de  baryte;  le  dosage  de  l'oxyde  de  fer  eut  lieu 
par  la  méthode  iodoraétrique  de  M.  Mohr. 


374  F.    SEELHEIM.    MATÉRIAUX    POUR    LA 

L'analyse  donna  en  100  parties: 

En  équivalents. 

/  Acide   silicique 25,72  0,838 i 

l  Alumine 4,20  0,0819 

Partie    insoluble  \  Chaux 4,01  0,1432 

40,64             j  Magnésie 2,18  0,1090 

Soude  et  un  peu  de  potasse 1.82  0,0587 

Oxydule  de  fer 2,71  0,0753 

Partie  attaquable      Acide  silicique 1,89  0,0613 

par  le  bisulfate     \  Alumine .  .  1.72  0,0335 

de  potasse         j      (renfermant  une  très  petite 
3,61  \  quantité  de  fer). 


Partie  attaquable 

par  l'acide 

chlorhydrique 

55,47 


Acide  silicique 20,43  0,6630 

Alumine 11,80  0,2302 

Chaux 5,32  (—  0,44)  0,1743 

Magnésie 2,00  0,1000 

Potassse 0,36  0,0076 

Soude 2,50  0,0806 

Oxyde  de  fer 3,49  0,0436 

Oxydule   de  fer 6,67  0,1853 

Acide  carbonique 0,12 

Acide  phosphorique 0,25 

Eau 2,53 


99,72 
Des  résultats  de  cette  analyse  on  peut  déduire ,  avec  un  degré 
suffisant  de  certitude,  la  composition  minéralogique  du  basalte. 
0,4914  SiO,  -4- 0,0819  AI2O3  H- 0;Ô587NaO"-H~0^2 Ca 0 

donnent  le  rapport  6:1:1,  ou  la  formule 
RO,  AI2O3,  esio^, 
c'est-à-dire  du  feldspath  normal,   dans  lequel  RO  est  représenté 
par  de  la  soude,  de  la  chaux  et  très  peu  de  potasse. 

0,3434 Si 0 ,  +  0,Ï200CaO  -f"^Î090MiO~H-  0,Ô753FeO 
donnent  approximativement  le  rapport  1:1,  ou  la  formule 

RO,    SiO^, 
qui    est    celle    du    pyroxène,    RO  comprenant,    comme  éléments 
vicariants ,  les  monoxydes  chaux ,  magnésie  et  oxydule  de  fer. 
Le  silicate  d'alumine,  la  partie  attaquable  par  le  bisulfate  de 

potasse,  présente  le  rapport  1:2,   c'est-à-dire  la  formule 

Al,03,2SiO,. 


CONNAISSANCE    DU    BASALTE.  375 

Pour  ce  qui  regarde  la  partie  soluble^  il  est  probable  que  les 
petites  quantités  d'acide  carbonique  et  d'acide  phosphorique  sont 
unies  à  de  la  cbaux.  On  obtient  ensuite: 

0,0436  Fe^Og  +  0,0436  FeO  =  FeO  ;  Fe.Og  , 
ou  du  fer  oxydé  magnétique  ;   puis 

0j417F?O-r^Î000 MgO  -h  0,1208  SiO^  , 
ou  le  rapport  2  :  1  z=  2  RO  ,  SiO^  , 

c'est-à-dire  la  composition  de  l'olivine.  Comme  les  analyses  de 
l'olivine  montrent  toujours  très  exactement  le  rapport  1  :  1  entre 
les  quantités  d'oxygène,  on  peut  faire  ce  calcul  avec  une  entière 
certitude. 

Vient  alors  un  silicate  d'alumine  et  de  chaux,  savoir 
0,1743  CaO  +  0,1743  AUO.  +  0,3486  SiO.,  , 
donnant  le  rapport  1:1:2,  ou  la  formule 
CaO,  AI2O3  ,  2810^  , 
qui  est  celle  de  l'anortbite; 

0,1677  SiO,  +  0,0559  AI2O3  +  0,0559  NaO, 
correspondant  à  la  formule 

AUO3,  2SiO,  +^^^jSiO,, 

qui  représente  la  natrolite;  enfin, 

0,0259  SiOo  +  0,0247  NaO  -f-  0,0076  KO, 
fournissant  un  résidu  de  silicate  alcalin. 

D'après  cela,  la  composition  minéralogique  du  basalte  analysé 
peut  être  exprimée  de  la  manière  suivante: 

NaJ 
Eeldspath  K     O,  Al,03,6  SiO, 2], 82  p%. 

Ca' 

CaJ 
Pyroxène        Mg     0,  SiO, 18,83 

Argile  AUO3,  2  SiO, 3,62 

Auorthite         Ca  O,  Al^Og,  2  SiO, 24,56 

Natrolite         Na  0,  A\^0„  3  SiO, 9,76 

Olivine  2  ^^^  j  O,  SiO, 10,83 

M       Fev  oxydé  magnétique 5,06 

Carbonate  de  chaux 0,27 

Phosphate  de  chaux  CasPhOg 0,54 

Silicate  alcalin    (Résidu) 1,90 

Eau 2,53 

~99;r2" 


376  F.    SEELHEIM.    MATERIAUX    POUR    LA 

Ce  qu'il  y  a  de  plus  remarquable  dans  cette  composition ,  c'est 
la  présence  d'un  élément  argileux.  Est-ce  de  l'argile  véritable  ^  — 
auquel  cas  il  faudrait  lui  rapporter  aussi  une  partie  de  l'eau ,  — 
ou  bien  quelque  autre  silicate  alumineux  ?  J'opine  pour  la  première 
hypothèse,  attendu  que  la  présence  de  cet  élément  se  laisse  aussi 
constater  par  simple  lévigation  :  il  suffit  même  de  concasser  en 
gros  grains,  sous  l'eau,  quelques  petits  morceaux  de  basalte,  pour 
que  l'eau  se  trouble  fortement  par  de  l'argile  mise  en  suspension 
et  qui  ne  se  dépose  qu'après  un  repos  prolongé.  Cette  argile  ne 
peut  d'ailleurs  être  regardée  comme  un  produit  de  décomposition 
du  basalte,  car  la  roche  analysée  était  parfaitement  intacte  et 
inaltérée.  Nous  verrons  plus  bas  quelle  est  la  signification  qu'on 
doit  y  attacher. 

Le  silicate  alcalin  figure  ici  naturellement  comme  simple  résultat 
de  calcul,  comme  reste,  dans  lequel  se  concentrent  les  erreurs 
de  détermination  des  autres  éléments.  Néanmoins ,  il  paraît  exister 
réellement  un  peu  de  silicate  alcalin  libre  dans  le  basalte:  en 
effet,  quand  on  fait  bouillir  dans  l'eau  la  matière  pulvérisée,  on 
obtient  une  solution  à  réaction  fortement  alcaline  et  qui  renferme 
une  petite  quantité  de  silicate  alcalin. 

Je  m'abstiens  de  tout  calcul  ultérieur  relativement  à  la  distribution 
de  l'eau,  afin  de  n'obscurcir  l'analyse  par  aucune  interprétation 
arbitraire. 

J'aborde  maintenant  la  question  de  la  formation  du  basalte  par 
la  voie  humide ,  —  car ,  après  les  arguments  et  les  preuves  que 
M.  Mohr  a  fait  valoir  contre  l'admission  d'une  origine  ignée, 
celle-ci  ne  peut  plus  guère  se  soutenir.  Il  est  vrai  que ,  en  dépit 
de  cette  démonstration,  les  partisans  de  l'hypothèse  plutoniste 
continuent  à  prétendre  que  certains  basaltes,  tels  par  exemple 
que  celui  du  Meissner,  dans  la  Hesse,  ont  produit  sur  les  roches 
avoisinantes  des  métamorphoses  qui  ne  peuvent  s'expliquer  que 
par  une  température  élevée;  mais,  au  moins  en  ce  qui  concerne 
le  basalte  qui  vient  d'être  cité,  je  suis  en  mesure  de  contester 
cette  assertion.  Le  lignite  bacillaire  noir  qu'on  trouve  au  Meissner 


I 


CONNAISSANCE    DU    BASALTE.  377 

n'est  pas  du  lignite  brun  altéré  par  la  chaleur;  c'est  ce  que 
M.  Bischof  avait  déjà  remarqué  et  ce  dont  il  est  facile  de  s'assurer, 
sur  les  lieux ,  par  la  simple  inspection.  Le  lignite  bacillaire  noir 
étant  situé  en  couches  au-dessus  du  lignite  conchoïde  brun,  il 
serait  impossible  qu'il  eût  été  modifié  par  une  action  calorifique, 
émanant  du  basalte,  sans  que  la  masse  ligniteuse  sous-jacente 
eût  éprouvé  un  effet  analogue,  puisqu'elle  se  trouve  également 
en  contact  avec  la  roche  basaltique.  Le  fait  seul,  que  les  deux 
variétés  sont  fortement  bitumineuses,  prouve  qu'elles  n'ont  pas 
été  exposées  à  une  haute  température.  Entre  le  basalte  et  le 
lignite,  s'interpose  une  couche  mince  d'argile,  qui,  là  où  elle 
arrive  au  jour,  montre  une  structure  bacillaire  et  feuilletée  et 
une  couleur  rouge.  L'argile  offre  souvent  une  cassure  lisse,  ainsi 
qu'une  cohérence  et  une  imperméabilité  remarquables.  En  ce  qui 
concerne  cette  matière,  M.  Bischof  lui-même  paraît  porté  à  croire 
qu'elle  a  dû  sa  structure  bacillaire  à  l'influence  d'une  forte  chaleur. 
D'autres,  à  cause  de  sa  couleur  rouge  et  de  sa  grande  cohérence ,  — 
que  du  reste  elle  n'acquiert  que  lorsqu'elle  est  restée  pendant 
longtemps  dans  un  lieu  sec,  —  la  regardent  comme  de  l'argile 
calcinée  ou  du  jaspe-porcelaine.  Mais  d'abord,  d'une  manière 
générale,  ce  que  l'on  appelle  jaspe-porcelaine  est  le  plus  souvent, 
non  de  l'argile  calcinée,  mais  de  l'argile  qui  a  été  pénétrée  par 
de  l'acide  silicique  et  des  silicates,  et  dont  le  poids  spécifique, 
ordinairement  égal  à  2,5 — 2,6,  ne  s'accorde  pas  avec  l'hypothèse 
qui  attribue  à  la  calcination  l'aspect  de  la  masse.  Ensuite,  dans  le 
cas  actuel,  on  voit  très  clairement  que  la  matière  n'est  pas  autre 
chose  qu'un  produit  de  décomposition  du  basalte;  car,  lorsqu'on 
casse  de  gros  morceaux,  il  n'est  pas  rare  d'y  trouver  un  noyau 
de  basalte  à  gros  grain,  montrant,  de  dedans  en  dehors,  des 
traces  de  plus  en  plus  prononcées  d'altération  et  de  transforma- 
tion en  argile  rouge ,  de  sorte  que  le  passage  insensible  du  basalte 
au  jaspe-porcelaine  est  incontestable.  Il  faut  ajouter  que  l'argile 
renferme  de  l'eau,  qu'elle  abandonne  par  la  calcination.  La  couleur 
rouge,  qui  s'observe  surtout  aux  surfaces  exposées  à  l'air,  n'a 
besoin  d'aucune  explication ,  attendu  que  le  peroxyde  de  fer  doit 


378  F.    SEELHEIM.    MATERIAUX    POUR    LA 

nécessairement  faire  partie  des  produits  de  la  décomposition  du 
basalte;  d'un  autre  côté,  la  décoloration,  qui  se  voit  ailleurs, 
est  un  effet  de  réduction  dû  au  lignite.  Il  résulte  donc  de  ce  qui 
précède,  que  le  basalte  n'a  joué,  par  rapport  au  lignite,  qu'un 
rôle  purement  passif,  et  que  c'est  plutôt  ce  dernier  qui,  avec  le 
concours  de  l'atmosphère ,  a  déterminé  la  métamorphose  du  basalte 
en  argile. 

Si  l'hypothèse  de  l'origine  ignée  du  basalte  peut  être  considérée 
aujourd'hui  comme  appartenant  à  l'histoire  de  la  géologie,  on 
doit  reconnaître  pourtant  que  la  simple  affirmation  de  la  production 
par  la  voie  humide  ne  constitue  pas  une  explication  suffisante, 
et  que  la  nature  mystérieuse  du  phénomène  demande  encore  à 
être  èclaircie.  M.  Mohr  dit  à  ce  sujet:  „Nous  restons  dans  le 
doute ,  si  le  basalte  doit  être  regardé  simplement  comme  le  résultat 
de  l'infiltration,  dans  des  terrains  calcaires,  de  liquides  chargés 
de  silice  et  d'alumine,  ou  si,  dans  certains  cas,  tous  les  éléments 
de  la  roche  ont  pu  se  trouver  en  dissolution  et  se  déposer  simul- 
tanément." En  supposant  l'infiltration  dans  une  roche  calcaire,  il 
faudrait,  pour  donner  naissance  à  du  basalte,  qu'environ  90  pour 
cent  du  calcaire  eussent  été  emportés  et  remplacés  par  une  quantité 
équivalente  d'autres  éléments  basaltiques,  de  sorte  que,  au  fond, 
il  n'y  aurait  pas  grande  différence  entre  une  infiltration  de  ce 
genre  et  une  formation  de  toutes  pièces  au  sein  d'une  dissolution. 
Une  pareille  formation  par  cristallisation,  au  milieu  des  terrains 
stratifiés,  auxquels  le  basalte  appartient  exclusivement,  consti- 
tuerait toutefois  une  énigme  beaucoup  plus  obscure  que  celle 
qu'elle  serait  destinée  à  expliquer. 

Au  sujet  des  vues  de  MM.  Grandjean  et  Bischof,  qui  font 
dériver  le  basalte  de  l'argile,  —  vues  qui  ont  été  développées, 
mais  non  établies  avec  évidence ,  dans  le  Traité  de  M.  Bischof,  — 
M.  Mohr  fait  la  remarque  suivante:  „L'argile  est  un  produit  de 
la  décomposition  du  basalte,  elle  n'est  pas  sa  matière  première. 
Nulle  part  on  ne  trouve  des  masses  d'argile  telles  qu'elles  seraient 
nécessaires  pour  rendre  compte  des  prodigieux  dépôts  de  basalte 
qui   existent  dans   la  nature.  Les  vues  de  M.  Bischof  ou  de  M. 


CONNAISSANCE    DU    BASALTE.  379 

Grandjean  ne  reposent  par  conséquent  sur  aucune  base  scientifique 
ou  positive." 

De  pareilles  masses  d'argile  sont  toutefois  beaucoup  plus  faciles 
à  trouver  que  les  matériaux  qu'exigerait  la  production  du  basalte 
au  sein  d'une  dissolution.  C'est  ainsi  qu'à  peu  de  distance  d'ici ,  dans 
la  cour  de  la  prison  de  Goes  (île  de  Sud-Béveland) ,  on  fore  un  puits 
artésien,  qui  a  déjà  pénétré  à  une  profondeur  de  170  mètres 
dans  une  couche  d'argile,  —  que  j'ai  suivie  de  pied  en  pied  et 
sur  laquelle  je  communiquerai  peut-être  plus  tard  quelques 
détails,  —  sans  l'avoir  traversée.  Si  cette  argile  était  employée 
à  former  du  basalte ,  elle  pourrait  donner  naissance  à  une  montagne 
qui  n'aurait  pas  trop  à  rougir  devant  ses  sœurs  plus  anciennes. 
D'ailleurs,  les  schistes  argileux  anciens,  dont  les  dépôts  sont 
beaucoup  plus  puissants,  ne  doivent-ils  pas  aussi,  incontestable- 
ment, leur  origine  à  des  argiles?  L'objection  tirée  de  la  masse 
du  basalte  ne  semble  donc  pas  avoir  un  bien  grand  poids. 

Une  autre  question  est  de  savoir  si  la  formation  du  basalte  aux 
dépens  de  l'argile  rentre  dans  les  possibilités  chimiques  et  géolo- 
giques. Pour  décider  cette  question ,  il  est  nécessaire  de  comparer 
la  composition  des  argiles  avec  celle  du  basalte,  et,  à  ceteifet, 
je  prendrai  pour  exemple  le  résultat  d'une  analyse  d'argile, 
que  j'ai  exécutée  il  y  a  quelque  temps: 

Argile  diluvienne  de  Westervreyhe. 

Acide  carbonique 12,37 

Chaux 11,03 

Partie  l  Acide  silicique 2,26 

soluble    dans      I  Alumine 3,42 

l'acide  i  Oxyde  de  fer 3,55 

chlorhydrique.     f  Magnésie 2,01 

'  Potasse 0,50 

\  Soude 3,39 

Eau 5,70 

Matière    organique 0,77 

(  Alumine 6,39 

f  Acide  silicique 12,51 

Partie  insoluble, 

essentiellement:  Acide  silicique 33,01 

100,06 


380  F.    SEELHEIM.    MATERIAUX    POUR    LA 

On  voit  que  l'argile  renferme  tous  les  éléments  nécessaires 
pour  la  formation  du  basalte,  et  qu'on  n'a  pas  besoin  de  recourir 
à  une  infiltration  préalable  de  principes  étrangers  ;  la  seule  réaction 
mutuelle  des  matières  en  présence,  principalement  celle  du  car- 
bonate de  cbaux  et  du  silicate  alcalin  sur  l'argile  et  sur  la  partie 
insoluble,  ainsi  que  la  réduction  de  l'oxyde  de  fer  par  la  matière 
organique,  suffisent  pour  faire  concevoir  la  possibilité  de  la 
transformation  en  basalte. 

Mais,  j'ai  aussi  à  donner  un  argument  chimique  positif  en 
faveur  de  cette  origine  du  basalte ,  savoir  la  production  artificielle , 
au  moyen  de  l'argile,  par  la  voie  humide,  de  silicates,  et 
précisément  de  silicates  qui  se  trouvent  réellement  dans  le  basalte. 
Je  me  suis  servi  d'un  kaolin  pur,  qui  fut  d'abord  mis  en  digestion 
dans  l'acide  chlorhydrique ,  ramené  à  siccité,  humecté  avec  de 
l'acide  chlorhydrique  concentré,  puis  lavé;  l'acide  silicique  mis 
en  liberté  fut  alors  extrait  au  moyen  de  l'ébullition  avec  du 
carbonate  de  soude.  L'argile  purifiée  fut  soumise  une  seconde 
fois  à  la  même  série  d'opérations,  de  sorte  qu'elle  ne  pouvait 
plus  rien  contenir  de  soluble.  Cette  argile  fut  alors  mélangée 
avec  une  dissolution  de  silicate  de  soude,  et  le  mélange  liquide 
fut  introduit  dans  un  tube  de  cuivre  forgé,  qui  se  fermait  à  l'aide 
d'un  bouton  à  vis  et  qui  était  capable  de  supporter  une  très 
forte  pression.  Le  tube  ainsi  rempli  fut  chauffé  pendant  huit 
heures,  dans  un  bain  d'air,  à  une  température  de  200 — 300^. 
Après  le  refroidissement,  le  tube  ayant  été  ouvert,  le  contenu 
se  présenta  sous  forme  d'un  liquide  clair,  tenant  en  mélange 
une  poudre  grenue ,  cristalline ,  qui  se  laissait  facilement  séparer 
par  lévigation  et  qui  se  déposait  immédiatement  au  fond  du  vase. 
Examinée  sous  le  microscope,  cette  poudre  se  montra  composée 
de  magnifiques  groupes  cristallins,  d'une  forme  sphéroïdale  et 
d'une  structure  bacillaire-radiée  et  concentrique,  exactement 
comme  ou  le  voit  dans  la  wavellite  et  la  natrolite.  Les  grains 
cristallins  furent  lavés  par  le  procédé  de  Bunsen,  puis  sèches 
en  les  pressant  d'abord  entre  du  papier  brouillard  et  les  laissant 
ensuite  séjourner  quelque  temps  dans  l'exsiccateur.  Leur  analyse,  — 


CONNAISSANCE    DU    BASALTE.  381 

ils  formaient  un  silicate  attaquable  par  l'acide  chlorhydriqiie  ^  — 
donna ^  après  déduction  d'un  reste  d'argile  non  transformée,  les 
résultats  suivants  : 

Acide  silicique 47,68 

Alumine 24,11 

Soude 18,86 

Eau 9,35 

~  100.00 
résultats  qui  permettent  d'établir,  avec  une  assurance  suffisante, 
la  formule 

AI2O3,  2810^  4-NaO,  SiO,  +  2H0, 
montrant  que  le  corps   cristallin   qui   a   pris   naissance  est  de  la 
natrolite. 

Or  l'analyse  du  basalte  a  conduit,  de  la  manière  la  plus 
naturelle,  à  y  reconnaître  la  présence  de  la  natrolite,  de  sorte 
qu'on  peut  regarder  comme  démontrée ,  analytiquement  et  synthéti- 
quement,  la  formation  de  la  natrolite  basaltique  au  moyen  de 
l'argile,  par  la  voie  humide.  L'existence,  dans  le  basalte,  d'une 
certaine  quantité  d'argile  non  altérée  et  ayant  échappé  jusqu'ici 
à  la  transformation,  fournit  un  nouvel  appui  à  l'opinion  qui  fait 
dériver  le  basalte  de  l'argile.  En  renfermant  dans  mon  tube  de 
cuivre  de  la  chaux  carbonatée  cristallisée ,  du  kaolin  et  de  l'eau , 
j'ai  également  obtenu  un  silicate  alumino-calcique  attaquable  par 
l'acide  chlorhydrique ,  sur  lequel  je  me  propose  de  revenir  ulté- 
rieurement, de  même  que  sur  l'action  que  l'argile  éprouve,  par 
la  méthode  indiquée,  de  divers  autres  agents.  Dès  à  présent 
toutefois,  je  crois  pouvoir  regarder  comme  prouvée ,  sous  le  rapport 
chimique,  la  transformation  de  l'argile  en  basalte. 

Les  considérations  géologiques,  de  leur  côté,  ne  contredisent 
pas  cette  opinion,  mais  tendent  plutôt  à  la  confirmer.  Le 
basalte  se  présente  dans  la  nature  sous  forme  de  nappes,  de 
dômes  et  de  filons.  Les  nappes  se  reconnaissent  pour  des 
couches  soulevées:  tel  est,  par  exemple,  le  Meissner,  qui  a 
un  versant  rapide  et  un  autre  moins  incliné,  et  qui  est  placé 
entre  des  couches  également  soulevées  de  muschelkalk ,  de  keuper 
et  de  grès  bigarré.  Les  dômes  et  les  cônes  montrent  ordinairement 


382  F.    SEELHEIM.    MATERIAUX    POUR    LA 

le  mieux  la  division  prismatique,  dans  le  sens  vertical  et  à 
partir  des  surfaces  de  contact.  Or,  comme  la  division  pris- 
matique est  due  à  la  résistance  que  le  basalte  a  éprouvée  dans 
son  retrait,  par  suite  du  frottement  sur  les  faces  de  contact,  il 
a  dû  arriver  que  là  où  ce  frottement  était  le  plus  considérable, 
c'est-à-dire  sur  la  base  horizontale ,  les  vides  ont  été  plus  grands 
qu'à  la  partie  supérieure;  il  a  pu  en  résulter  dans  les  prismes 
une  tendance  à  l'obliquité  vers  un  axe  central,  et  ainsi 
s'expliquerait,  jusqu'à  un  certain  point,  la  structure  voûtée 
des  cônes  basaltiques.  Je  n'attache  toutefois  qu'une  médiocre 
importance  à  cette  remarque,  attendu  que  c'est  certainement  la 
désagrégation  par  les  agents  atmosphériques  qui  a  le  plus  contribué 
à  produire  la  forme  en  dôme.  Aux  surfaces  de  contact  la  roche 
est  ordinairement  altérée.  J'ai  observé  un  très  beau  contact, 
presque  vertical,  entre  le  basalte  et  le  schiste  argileux ,  à  l'entrée 
de  la  carrière  de  basalte  d'Unkelbach:  les  prismes  étaient  dirigés 
perpendiculairement  aux  joints  du  schiste,  et  j'en  remarquai 
quelques-uns,  en  place  dans  leur  position  naturelle,  qui  étaient 
tout  à  fait  intacts  à  une  de  leurs  extrémités,  tandis  qu'à  l'autre 
ils  montraient  un  passage  insensible  à  une  argile  schistoïde 
renfermant  des  paillettes  de  mica;  ces  prismes  consistaient  donc 
à  un  de  leurs  bouts  en  schiste  altéré,  lequel  passait  successive- 
ment au  basalte.  En  général,  beaucoup  de  basaltes,  lorsqu'ils 
sont  en  voie  de  décomposition,  offrent  clairement  une  division 
par  joints  parallèles,  de  sorte  que  les  prismes  se  transforment 
plus  ou  moins  en  plaques.  J'en  ai  vu  un  bel  exemple  au  Meissner. 
Quant  à  la  question  de  savoir  pourquoi  une  argile  se  métamorphose , 
totalement  ou  partiellement ,  tantôt  en  basalte ,  tantôt  en  schiste  ar- 
gileux, je  ne  hasarderai  aucune  explication  à  ce  sujet;  peut-être 
le  phénomène  est-il  en  connexion  avec  la  formation  du  mica  sous 
haute  pression  (voyez  Mohr,   Geschichte  der  Erde). 

La  forme  de  filon ,  que  le  basalte  affecte  souvent ,  est  tout 
à  fait  analogue  à  celle  des  filons  d'argile.  J'ai  eu  l'occasion 
d'observer,  entre  autres,  un  très  beau  filon  d'argile  dans  la  tourbe 
de  l'île  de  Walcheren,  près  de  Middelbourg. 


CONNAISSANCE     DU    BASALTE.  383 

Les  matières  étrangères  que  le  basalte  renferme  quelquefois 
fournissent  une  nouvelle  preuve  de  l'origine  que  nous  lui  attri- 
buons. J'ai  trouvé  un  prisme  de  basalte,  provenant  du  Romerich , 
qui  contient j  enclavé  dans  la  pâte,  un  fragment  irrégulièrement 
arrondi  de  schiste  siliceux  à  veines  noires.  Le  prisme  ayant  été 
cassé  en  trois  morceaux,  le  fragment  étranger  peut  être  extrait 
de  sa  cavité,  ou  y  être  replacé,  à  volonté.  La  masse  basaltique 
s'est  adaptée  exactement  à  chaque  inégalité  du  fragment  ;  dans 
les  joints  on  trouve  un  peu  de  carbonate  de  chaux.  On  ne  peut 
expliquer  ce  fait,  qu'en  admettant  que  le  fragment  a  pénétré 
dans  la  masse  argileuse,  qui  plus  tard  a  donné  naissance  au 
basalte,  à  l'époque  où  elle  était  encore  molle  ;  pendant  la  transfor- 
mation, le  fragment  lui  même  a  d'ailleurs  dû  rester  intact,  car, 
autrement,  il  aurait  contracté  une  adhérence  plus  intime  avec  la 
pâte   basaltique. 

On  peut  maintenant  se  représenter  à  peu  près  de  la  manière 
suivante  la  formation  du  basalte  et  les  changements  successifs 
qu'il  subit.  Dans  la  première  période  on  a  une  masse  argileuse 
plus  ou  moins  plastique ,  dans  laquelle  l'eau  peut  se  diffuser 
suivant  toutes  les  directions.  Les  divers  éléments  en  présence  com- 
mencent à  agir  les  uns  sur  les  autres.  Le  peroxyde  de  fer  est 
réduit  par  les  matières  organiques.  Les  carbonates  de  fer,  de 
chaux  et  de  magnésie,  les  silicates  alcalins,  etc.  réagissent  sur 
l'acide  silicique  et  sur  l'argile.  La  masse  commence  à  se  remplir  de 
productions  cristallines,  qui  se  groupent  autour  de  centres  distincts 
et  donnent  naissance  à  la  structure  grenue.  L'acide  carbonique 
mis  en  liberté  peut  s'échapper  lentement,  avec  l'eau,  entre  les 
particules  argileuses  qui  ne  sont  pas  encore  entièrement  décom- 
posées. La  matière  prenant  une  dureté  cristalline,  tout  en  étant 
encore  pénétrée  de  particules  argileuses  non  attaquées,  il  s'établit 
nécessairement  à  l'intérieur  un  état  de  cohérence  très  inégale.  La 
masse  montre,  au  moindre  changement  de  température,  le  phéno- 
mène de  la  décrépitation,  ou  est  sujette  à  éclater ,  sous  l'influence 
d'un  pareil  changement,  en  grains  anguleux  marqués  de  points 
étoiles.  Si ,  dans  ce  stade  de  durcissement  progressif,  il  se  fait  un 


384  p.    SEELFIEIM.    MATÉRIAUX    POUR    LA 

échange  d'acide  carbonique  contre  de  l'oxygène ,  on  une  formation 
de  fer  oxydé  magnétique,  d'après  la  théorie  de  Mohr ,  la  division 
prismatique  s'opère  dans  la  masse  parvenue  au  degré  extrême 
de  fragilité.  Enfin,  il  vient  un  moment  où,  la  transformation 
étant  achevée ,  il  s'établit  un  état  de  stabilité ,  dans  lequel  la 
masse  est  devenue  partout  compacte  et  imperméable  et  où  les 
communications  entre  les  éléments  ont  cessé.  C'est  là  la  seconde 
période ,  de  laquelle  le  basalte  passe ,  quand  les  circonstances  sont 
favorables  ;  dans  un  troisième  stade.  Les  parties  de  fer  oxydé 
magnétique  qui,  étant  rapprochées  de  la  surface  des  prismes, 
sont  exposées  à  l'influence  de  l'air,  commencent  à  s'oxyder. 
L'oxyde  de  fer,  qui  sert,  comme  l'on  sait,  de  véhicule  à  l'oxygène , 
transmet  cet  élément,  d'atome  en  atome,  aux  parties  intérieures , 
et  les  prismes  s'entourent,  de  dehors  en  dedans,  d'une  couche 
colorée  en  rouge ,  qu'on  trouve,  par  exemple,  très  bien  caractérisée 
dans  les  prismes  du  Minderberg.  Comme  l'oxydation,  dans  sa 
marche  progressive  vers  l'intérieur,  est  directement  proportionnelle 
à  la  surface  de  la  partie  attaquée  et  inversement  proportionnelle 
à  son  volume,  elle  avancera  plus  rapidement  à  partir  des  angles , 
où  le  quotient  de  la  surface  par  le  volume  est  plus  grand,  et 
la  limite  d'oxydation  se  rapprochera  de  la  forme  sphéroïdale  ou 
ellipsoïdale.  Simultanément,  la  modification  chimique  détermine 
un  changement  de  structure  et^  par  suite,  une  tendance  à  la 
formation  de  sphéroïdes,  ou  même  une  division  formelle  des 
prismes  en  sphéroïdes.  Lorsque  enfin,  —  et  c'est  là  la 
quatrième  et  dernière  période,  —  l'oxyde  de  fer  est  réduit  et 
entraîné  par  les  agents  extérieurs,  la  roche  devient  poreuse,  l'eau 
s'y  infiltre,  l'altération  commence,  et,  dans  la  dernière  phase 
de  cette  période,  le  basalte  retombe  à  l'état  d'argile;  d'autres 
fois,  peut-être,  il-subit  une  transformation  en  trachyte. 

En  terminant  ces  considérations,  j'ai  à  peine  besoin  de  dire 
que  je  ne  les  donne  que  comme  une  simple  tentative  pour  approcher 
peu  à  peu  de  la  connaissance  de  la  nature  du  basalte. 

MiDDELBouRG,  juillet  1870. 


MATERIAUX 

POUR    LA     CONNAISSANCE    DE    l'iNFLUENCE 

DE     LA 

TEMPËRATUKE  SUR  LES  PLANTES,') 

PAR 

HUGO  DE  VRIES. 


Le  but  de  ia  physiologie  est  d'expliquer  les  phénomènes  de  la 
vie  par  des  lois  physiques  et  chimiques.  La  conviction  de  la 
vérité  de  cette  proposition  a  conduit  à  une  méthode  d'investigation 
qui  est  déjà  depuis  longtemps  généralement  adoptée  dans  la 
physiologie  du  corps  humain,  où  elle  donne  journellement  d'im- 
portants résultats.  Dans  la  physiologie  végétale,  au  contraire, 
elle  n'a  pas  encore  été  suivie  d'une  manière  aussi  complète,  et 
cela  par  suite  de  l'extrême  imperfection  de  notre  connaissance 
des  lois  physiques  et  chimiques  qui  devraient  servir  à  rendre 
compte  des  phénomènes  vitaux  des  plantes. 

Dans  le  Mémoire  dont  le  titre  est  cité  ci-dessous,  en  note,  j'ai  essayé 
de  faire  à  une  partie  de  la  physiologie  végétale ,  pour  autant  que  le 
permettaient  les  observations  déjà  recueillies,  l'application  de  cette 
méthode.  Le  résultat  aurait  été  plus  satisfaisant  si  un  plus  grand 
nombre  de  faits  avaient  pu  être  traités  de  la  même  manière. 
Mais  mon  travail  m'a  donné  l'occasion  de  constater  que  notre 
connaissance    des    faits,    en    ce    qui    concerne    l'influence    de  la 

1)  Extrait  d'un  Mémoire  ])ublié  sous  le  titre  de:  De  invloecl  der  iemjperatnnr 
cp  de  leven.sverschijitsele/i  der  plant  en,  par  Hugo  de  Yries ,  La  Haye.  Nijhoff,  1870. 

Archives  Néerlandaises,  T.  V.  25 


386  HUGO    DE    VRIES.     MATERIAUX    POUR    LA    CON?^AISSAISCE 

température  sur  les  plantes,  laisse  encore  beaucoup  à  désirer. 
J'ai  donc  entrepris  quelques  recberches  pour  contribuer  à  combler 
cette  lacune,  et  ce  sont  les  résultats  de  ces  recbercbes  que  je 
vais  faire  connaître. 


I.  Limite    supérieure   de   température   pour  la 
vie  végétale. 


Relativement  à  cette  limite,  M.  Sacbs  *)  a  trouvé  qu'elle  est 
située  dans  l'air  vers  50 — 52^,  et  dans  l'eau  vers  45 — 47"",  mais 
qu'elle  est  susceptible  de  varier  légèrement  suivant  l'âge  de  la 
partie  étudiée.  D'après  cela,  et  aussi  d'après  le  fait  que  beaucoup 
d'algues  vivent,  dans  des  sources  thermales,  à  une  température 
beaucoup  plus  élevée ,  il  était  permis  de  supposer  qu'en  étendant 
davantage  les  expériences  on  trouverait  des  écarts  plus  ou  moins 
considérables  des  limites  assignées. 

Mes  recherches  ont  confirmé  cette  présomption.  Renvoyant  à 
mon  Mémoire  original  pour  la  méthode  d'exécution ,  qui  ne 
diffère  que  dans  les  détails  de  celle  suivie  par  M.  Sachs,  je  me 
contenterai  ici  d'en  communiquer,  sous  forme  de  tableaux,  les 
principaux  résultats.  Les  colonnes  A  donnent  les  plus  hautes 
températures  ^)  inoffensives  qui  ont  été  observées  ;  les  colonnes  B , 
les  plus  basses  températures  mortelles  observées;  la  température- 
limite  est  donc  située  entre  ces  deux;  la  durée  du  séjour  dans 
l'enceinte  à  température  constante  était  de    15  à  30  minutes. 

Les  expériences  du  premier  tableau  ont  eu  lieu  sur  des  plantes 
cultivées  en  pots. 

Pour  celles  des  expériences  du  tableau  II  qui  ont  été 
faites  dans  l'air,  j'ai  pris  des  plantes  en  pots;  pour  celles  qui 
ont  eu  lieu  dans  l'eau,  je  me  suis  servi  de  feuilles  radicales  ou  de 
branches  feuillées  coupées. 


1)  Sachs,     Ueher    die    obère    Temperaturgrenze    der    Végétation ,     <    Flora, 
1864,  p.  5. 

2)  La  température  sera  constamment  donnée  en  degrés  centigrades. 


DE  L  INFLUENCE  DE  LA  TEMPERATURE  SUR  LES  PLANTES. 


387 


I.  Phanérogames. 


ESPECES. 


K  a  c  i  n  e  s 


I       Dans  l'eau. 
I       A.  B. 


Dans  la  terre 

sèche. 
A.  B. 


Tig 
feuil 

dans 

A. 


es 
lées 

'eau. 

B. 


Zea  Maïs 

Tropaeolum  majus 

Citrus  Auraiitium 

Phaseolus  vulgaris 

Calendula  officiualis 

Cannabis   sativa 

Aquilegia  vulgaris 

Petroselinum  sativum , .  .  . 

Campanula   latifolia 

Rosa  sp 

Brassica  Napus 

Cytisus  Laburnum 

Lupinus   luteus 

Secale  Céréale 

Agrostemma   Githago .  , ,  . 

Lupinus  albus 

Phaseolus  haematocarpus . 

Helianthus   annuus 

Convolvulus  tricolor 

Polygonum  Eagopyrura. .  . 


45,5" 

45,5 

47,8 

45,5 

45,5 

45,0 
45,0 
45.0 
45,0 
45,5 


47,0' 
47,0 
50,5 
47,0 
47.0 

47.5 

47.5 
47,5 
47,5 

47,0 


50,1' 

50,5 

50,0 
46,2 
52,0 


47,9 
48,0 
50,5 


52,2° 
52,0 

51,5 

50.3 


52,8 
51,0 
51,8 


46,0° 

44,1 

50,3 


44,1 


46,5 
44,1 
44,1 
44,1 
44,1 
44,1 
44,1 


46,8° 

45,8 

52,5 


45,^ 


48,5 
45,8 
45,8 
45,8 
45,8 
45,8 
45,8 


IL  Phanérogames. 


ESPÈCES. 


Partie  étudiée. 


Daus  l'eau. 
A.  B. 


Daus  l'air. 
A.  B. 


Lis  florentiua 

//  // 

Iris  sambucina.  .  .  . 

Antheric.  ramosum . 

//             // 
Viuca  minor 

//         // 
Erica  carnea 

//          // 
Taxus  baccata 

//            // 
Funkia  japonica.  .  , 
Saxifraga  umbrosa, 
Salisburia  acliantif. , 
Hedera  Hélix 


SoDimet  de  la  feuille  radicale 

Base  de  la  môme 

Sommet  de  la  feuille  radicale 

Base  de  la  même 

Sommet  de  la  feuille  radicale 

Base  de  la  même 

Jeunes  feuilles 

Vieilles  feuilles 

Jeunes  feuilles 

Vieilles  feuilles 

Jeunes  feuilles 

Bases  de  vieilles  feuilles.  .  . 

Feuille  radicale 

Vieille   feuille 

Feuille  adulte 

Feuille  adulte 


49,0o 

49,7 

50,1 

52,1 

50,1 

51,5 

46,2 

47,8 

48,5 

52,0 

50,6 

52,0 

48,2 

50,6 

48,5 

48,5 


49,7^^ 

53,2- 

51,5 

55,0 

52,1 

53,0 

55,0 

51,5 

51,7 

53,0 

47,8 

50,1 

53,3 

50,6 

52,0 

50,1 

52,0— 

52,0 

55,0 

50,6 
52,0 

55,0° 
57,3(?) 
55,0 
57,0 
53,0 
54,0 
53,3 


17,2 


2b'-^- 


388 


HUGO    DE    VRIES.     MATERIAUX    POUR    LA     CONNAISSANCE 


III.  Cryptogames. 
(Plantes  entières  dans  l'eau). 


ESPÈCES. 

A. 

B. 

ESPÈCES. 

A. 

B. 

Physcoinitriuni    pyrifornie . 

46,4' 

47,50 

Hydrodictyon  utriculatum . 

44,2'^ 

46,0^^ 

Fimaria   hygrometrica.  .  .  . 

40,2 

43,4 

Nostoc  rufescens 

30,2 

42,2 

Dicranum    scoparium 

43,4 

Oscillaria  Frohlichii 

43,4 

45,1 

Marchantia  polymorplia. .  , 

44,9 

46,4 

auguina 

43,4 

45,1 

Lunularia  vulgaris 

43,4 

46,4 

"          chlorina 

43,4 

45,1 

Oedogonium  sp 

42,2 

44,2 

Spiruliiia  .Teitiieri    

43,4 

45,1 

40,5 

44,2 

Il  résulte  de  ces  tableaux  que,  pour  la  majorité  des  espèces 
observées,  la  température-limite  de  la  vie  se  trouve,  dans  l'eau, 
entre  45  et  47°,  et  dans  l'air  (ou  dans  la  terre  sèche),  entre 
50  et  52°;  mais  que,  pour  certaines  espèces,  cette  limite  est 
située  plus  haut ,  et  pour  d'autres  plus  bas.  Si  l'on  tient  compte , 
en  outre,  des  algues  qui  végètent  dans  les  sources  thermales, 
on  voit  qu'il  n'est  pas  encore  possible  d'indiquer  une  température- 
limite  absolue  pour  la  vie  végétale  en  général.  Mes  expériences 
confirment  d'ailleurs  que,  dans  les  cas  étudiés,  la  limite  est 
située  plus  bas  pour  les  feuilles  jeunes  que  pour  les  feuilles  plus 
âgées ,  et  plus  bas  aussi  pour  le  sommet  des  feuilles  allongées 
que  pour  leur  extrémité  inférieure.  Les  expériences  relatives  au 
Citrus  Aurantium  prouvent,  en  outre,  que  la  température-limite 
peut  aussi  être  différente  pour  des  organes  différents  de  la  même 
plante. 

II.  Refroidissement   des   plantes  jusqu'à  0''. 

L'observation  de  M.  Bierkander  '),  que  les  Cucumis  salivas ^ 
C.  Melo  j  Cxicurhita  Pepo ,  Impatiens  Balsamina,  Ocymum  basilicum, 
Portulaca  oleracea  et  Solaniim  tuberosum  ont  péri  dans  des  nuits 
de  septembre,  à  une  température  de  1 — 2'  au-dessus  du  point 
de  congélation  de  l'eau,  a  donné  lieu  de  supposer  que  ce  degré 
de  température  serait  directement  nuisible  aux  plantes  en  question. 
Pour   décider    si   cette   conjecture  est  fondée,  j'ai  pris  des  pieds 


1)  Voyez:  Goppert,  Die  JVàrme-Enfwickelung ,   1830,  p.  124. 


DE  l'influence  DE  LA  TEMPERATURE  SUR  LES  PLANTES.  389 

vigoureux,  cultivés  en  pots,  de  ces  plantes  (sauf  du  6'.  Melo ,  de 
nnipaliens  et  du  Solanum ,  que  je  n'avais  pas  sous  la  main), 
et  je  les  ai  plongés,  avec  leurs  tiges  et  leurs  feuilles,  dans  un 
mélange  d'eau  et  de  glace,  où  ils  ont  été  maintenus  pendant  un 
quart  d'heure.  Comme  tous  les  organes  de  ces  plantes  sont  suffi- 
samment minces,  ils  avaient  eu  tout  le  temps  de  s'abaisser 
exactement  jusqu'à  la  température  de  0".  Or,  ni  immédiatement  après 
l'expérience,  ni  pendant  les  trois  semaines  qui  la  suivirent,  on  ne  put 
constater  aucun  effet  nuisible.  L'observation  de  M.  Bierkander  ne 
prouve  donc  rien  pour  la  nocuité  de  températures  entre  0^  et  2°. 

Le  seul  autre  fait  qui  semble  plaider  en  faveur  d'une  influence 
nuisible  directe,  exercée  sur  les  plantes  par  de  basses  tempéra- 
tures au-dessus  de  0"",  est  celui  rapporté  par  M.  Hardy.  ')  Cet 
observateur  a  vu,  en  Algérie,  un  grand  nombre  de  jeunes 
arbres  des  pays  tropicaux  périr,  en  automne,  à  des  températures 
de  H-  1  à  -h  5  degrés.  Je  n'ai  pu  soumettre  à  l'expérience  que 
deux  des  espèces  mentionnées  par  M.  Hardy,  savoir,  le  Bixa 
Orellana ,  qui,  d'après  lui,  était  mort  à -f- 3^,  et  le  Crescentia 
Cujete ,  qui  était  mort  à -4- 5".  De  ces  deux  espèces ,  des  feuilles 
ayant  tout  leur  développement  ont  été  immergées  pendant  15 
minutes  dans  la  glace  fondante.  Ni  dans  les  premiers  instants 
après  l'expérience,  ni  pendant  tout  le  mois  suivant,  on  n'a  pu 
reconnaître  que  les  feuilles  eussent  souffert  de  ce  traitement. 

Des  essais  tout  semblables,  exécutés  sur  quantité  d'autres 
végétaux  tropicaux,   m'ont  donné  le  même  résultat. 

Pour  les  plantes  de  M.  Bierkander  il  est  donc  prouvé ,  et  pour 

celles    de    M.    Hardy    il  est  très  probable  qu'elles  rentrent  dans 

cette  règle  générale:  que  les  plantes  peuvent,  sans  inconvénient 

pour  leur  vie,    être  refroidies  pendant  peu  de  temps  jusqu'à  0^. 

IIL    Innocuité,   pour  la  vie   végétale,   de 

changements     brusques     de     température. 

C'est  un  fait  universellement  connu  que  le  dégel  rapide  d'organes 
végétaux  gelés ,  c'est-à-dire  un  changement  brusque  de  température 

J)  Voyez:  Bot.  Zeitung ,  1854,  p.  202. 


390  HUGO    DE    VRIES.     iMATÉRIAUX    TOUR    LA    CONNAISSANCE 

aux  environs  de  0°,  entraîne  ordinairement  la  mort  de  ces  parties.  M. 
Karsten ,  se  fondant  sur  ce  fait ,  a  énoncé  la  proposition  suivante  ^  )  : 
„Les  variations  de  température  subites  et  fortes  sont  nuisibles  aux 
plantes  et  peuvent  les  rendre  malades  ou  les  tuer,  même  à  des 
degrés  de  réclielle  qui,  en  eux-mêmes,  ne  font  courir  aucun 
danger  à  la  santé  ou  à  la  vie  des  plantes." 

La  loi  générale  ainsi  formulée,  bien  que  n'ayant  reçu  aucune 
démonstration ,  a  trouvé  accès  dans  plusieurs  Traités  élémentaires , 
et  la  mort  par  congélation  se  trouve  toujours  citée  pour  exemple. 
Mais  il  est  évidemment  illogique  de  vouloir  tirer,  des  phénomènes 
observés  lors  du  dégel  rapide,  des  conclusions  relativement  à 
l'influence  des  changements  brusques  de  température  en  général. 
Il  m'a  donc  paru  utile  d'éclaircir  ce  point  expérimentalement. 

Le  plus  grand  changement  de  température  qu'une  plante  puisse 
subir,  entre  la  limite  supérieure  de  sa  vie  et  le  point  de  congé- 
lation de  ses  sucs,  est,  pour  la  plupart  des  Phanérogames,  de 
de  0 — 50°  dans  l'air  et  de  0 — 44°  dans  l'eau,  puisque,  le  plus 
souvent,  la  limite  de  la  vie  n'est  elle-même  située  qu'un 
peu  plus  haut.  Par  conséquent,  si  l'on  maintient  une  plante 
à  0°  jusqu'à  ce  qu'elle  ait  pris  cette  température,  et  qu'on  la 
transporte  ensuite  dans  de  l'eau  à  44°  ou  de  l'air  à  50°,  le 
résultat  de  cette  expérience  décidera  si  les  changements  brusques 
de  température  sont  nuisibles  ou  non.  Dans  l'air,  le  changement 
sera  plus  grand ,  mais  moins  rapide ,  vu  que ,  au  moment  de 
l'introduction  de  la  plante  dans  l'enceinte  chauffée,  celle  ci  se 
refroidit,  par  suite  de  l'air  chaud  qui  s'en  échappe  et  de  l'air 
froid  qui  y  pénètre.  En  outre,  l'air  n'ayant  qu'une  très  faible 
capacité  calorifique,  il  se  refroidira  d'une  manière  appréciable  en 
cédant  de  la  chaleur  à  la  plante.  Dans  l'eau,  la  variation  est 
plus  petite,  mais  plus  brusque,  parce  que  l'immersion  de  la 
plante  froide  n'abaisse  pas  sensiblement  la  température  du  bain 
chaud ,  quand  celui-ci  présente  un  volume  un  peu  considérable.  Pour 
ce  motif,   j'ai    donné    la  préférence   à  la  seconde  méthode,    par 

1)  Bot.  Zeitung,  1861,  p.   289;  Pogg.  Amalen,  t.  115,  p.  159. 


DE  l'iINFLUEiNCE  DE  LA  TEiMPEKATURE  SUR  LES  PLANTES.  391 

laquelle  j'ai  étudié  plusieurs  espèces.  Pour  que  l'influence 
morbifique  supposée  par  M.  Karsteu  pût  mieux  s'accuser, 
le  changement  brusque  de  température  a  toujours  été  répété 
plusieurs  fois. 

I.  Des  plantes  croissant  depuis  longtemps  en  pots  furent  soumises 
à  l'expérience  suivante  —  après  que  les  pots,  qui  devaient  rester 
retournés  durant  Texpérience,  eurent  été  pourvus  d'un  couvercle 
composé  de  deux  moitiés  et  solidement  fixé:  Les  tiges  feuillées 
des  plantes  annuelles  ou  les  feuilles  radicales  des  espèces  vivaces 
étaient  d'abord  maintenues  pendant  4  minutes  dans  de  l'eau  à 
43 — 44^,  et  ensuite  plongées  subitement  dans  de  l'eau  ramenée  à 
0°  par  de  la  glace  fondante.  Après  y  être  restées  pendant  4 
minutes  et  avoir  pris  par  conséquent  la  température  0°,  elles 
étaient  de  nouveau  immergées  subitement  dans  l'eau  à  43 — 44"^, 
puis  l'opération  tout  entière  était  répétée  une  seconde  fois  ;  la  tempé- 
rature de  l'air  était  de  IQ"".  Les  variations  successives  étaient 
donc:  1^,  19—44°,  2^.  44—0^,  3^.0—44°,  4^.  44— 0%  5e.  0—44°, 
()C.  44 — 19^.  Les  plantes  ainsi  étudiées  étaient  les  suivantes: 

A.  Tiges  feuillées:  Iberis  wuhellaia ,  Agrostemma  Githago , 
Phaseokis  vulqaris ,  Ph.  haematocarpiis ,  Pisum  sadvum,  Laihyrus 
odorafus,  Cylisiis  Laburnum  ,  Lamiiim  purpureum  (enûenr) ,  Vinca 
minor ,  Cannabis  saliva,  Secale  Céréale,  Zea  Maïs. 

B.  Feuilles  radicales:  Aquilegia  vulgaris,  Fragariasp.,  Funkia 
japonica,  Iris  sambucina,  1.  /lorentina,  Anthericum  ramosum. 

Pendant  l'expérience,  immédiatement  après,  et  dans  les  semaines 
suivantes,  jusqu'au  moment  où  les  observations  furent  arrêtées, 
les  plantes  restèrent  vigoureuses  et  bien  portantes.  Aucune  action 
nuisible  n'a  donc  pu  être  constatée. 

IL  Les  racines  des  plantes  terrestres  suivantes ,  cultivées  dans 
l'eau,  avec  exclusion  de  terre,  furent  soumises  à  la  même 
expérience  que  ci-dessus,  sous  le  numéro  I: 

Phascolus  vulgaris,  Aijroslemma   Gilhago,  Secale  Céréale. 

Il  ne  se  manifesta  de  nouveau  aucun  changement  dans  la 
croissance  normale  des  plantes,  ni  dans  les  premiers  moments 
après  l'opération,  ni  dans  les  deux  semaines  qui  suivirent. 


892  HUGO     DE     VRIES.      MATÉHIAUX    l'OUIl     LA    COiN  NAlSSAiNCK 

III.  Des  branches  des  plantes  aquatiques  suivantes  furent 
traitées  de  la  môme  manière: 

Myriophyllum  spicatinn ,  Ceralophyllum  submersum,  Volaitwfjelon 
crispus  y   P.  perfolialus. 

Plus  d'une  semaine  après,  elles  étaient  parfaitement  saines ,  et 
l'examen  microscopique  lui-même  n'y  dévoilait  aucune  moditication. 

IV.  Hydrodiclyon  ulricukUum  (exemplaires jeunes),  Oedogoniiun 
et  Spirocjyra  subirent  le  même  traitement,  avec  cette  différence, 
que  la  température  de  l'eau  chaude  n'était  plus  que  de  40°  chaque 
fois.  Quatre  jours  après  l'expérience,  les  plantes  ayant  été  exposées 
à  la  lumière  solaire,  l' Hydrodiclyon  et  l' Oedogonium ,  dégagèrent 
de  l'oxygène  en  abondance.  Pour  le  Spirogym  le  fait  ne  put  être 
constaté,  attendu  que  ses  filaments  étaient  relativement  peu  nom- 
breux et  entremêlés  avec  les  autres;  toutefois,  même  au  bout 
d'une  semaine,  ils  se  montraient,  sous  le  microscope,  frais  et 
turgescents,  de  même  que  ceux  des  deux  autres  espèces. 

Ces  recherches  conduisent  toutes  à  la  conclusion,  que 
les  changements  de  température,  quelque  grands  et  rapides  qu'ils 
soient,  pourvu  qu'ils  restent  en  dessous  de  la  limite  supérieure 
trouvée  pour  les  vie,  et  au-dessus  du  point  de  congélation, 
n'ont  directement  pas  d'influence  nuisible  sur  la  vie  des  plantes. 
La  loi  de  M.  Karsten,  rappelée  ci-dessus,  se  trouve  donc  réfutée 
par  mes  recherches. 

IV.    Influence    des    changements    rapides   de 
température  sur  les  mouvements  du  proto plasma. 

Il  résulte  des  recherches  de  M.  Hofmeister  i  )  que  réchauffement 
ou  le  refroidissement  rapides  de  cellules  végétales  dont  le 
protoplasma  est  en  mouvement ,  peut  occasionner  la  cessation 
de  ce  mouvement,  même  dans  le  cas  où  réchauffement  ou  le 
refroidissement  lents,  jusqu'aux  mêmes  degrés,  ne  produiraient 
pas  un  pareil  arrêt.  Ce  résultat  rend  probable  que  des 
variations  de  température  moins  rapides  donneront  lieu,  non  à 
un  arrêt,  mais  à  un  ralentissement  des  mouvements  protoplas- 
matiques.    La    grande    irrégularité  du  mouvement  dans  les  poils 

1)  Hofineister ,  Die  Lehre  von  cler  Pjianzenzelle ,  1867,  p.  53— 35. 


DE  l'lNFLUëNCE  de  LA  TEMPERATURE  SUR  LES  PLANTES.  393 

des  plantes  terrestres  empêchait  de  chercher  chez  celles-ci  la 
solution  expérimentale  du  problème  ;  mais  y  avec  les  poils  radicaux 
de  njydrocharis  Morsus  Raitae,  je  réussis  à  mettre  le  ralentisse- 
ment du  mouvement  en  évidence.  Un  fragment  de  racine  étant 
placé  dans  Teau,  entre  la  lame  porte-objet  et  un  autre  verre 
luté  sur  le  premier ,  on  nota  un  de  ses  poils,  et  on  s'arrangea 
de  manière  à  pouvoir  retrouver  promptement  ce  poil  sous  le 
microscope,  à  l'aide  d'une  position  déterminée  donnée  à  la  coulisse 
de  la  platine;  après  quoi  on  mesura  la  vitesse  du  mouvement  à 
la  température  de  Tappartement.  L'objet,  toujours  placé  entre  les 
deux  lames  de  verre,  fut  ensuite  porté  dans  de  l'eau  chaude, 
où  on  le  tint  tout  près  du  réservoir  d'un  thermomètre  qui  indiquait 
la  température  de  l'eau.  Au  bout  de  quelques  minutes,  le  porte- 
objet  fut  rapidement  essuyé,  puis  on  détermina  de  nouveau  la 
vitesse  du  mouvement.  Lorsque  la  préparation  eut  pris  la  tempé- 
rature de  l'appartement  et  que  la  vitesse  initiale  se  fut  rétablie , 
on  effectua  un  second  échauffement,  puis  encore  un  troisième.  ') 
Je  trouvai  ainsi: 

Dans  un  premier  poil: 
à  la  température  de  21°, 7  —  1  mm.  était  parcouru  en  205  sec. 
après  échauff'.  à  28^,2  —  „     „        ,,  „         „    226     „ 

Dans  un  second  poil: 
à  la  température  de  20", 8  —  1  mm.  était  parcouru  en  164     „ 
après  échauff.  à  27°,  1  —  „     „         „  „         „    203     „ 

„  „         „  34°,0  —  le  mouvement  s'arrêtait. 

Dans  un  troisième  poil: 
à  la  température  de  20°,8  —  1  mm.  était  parcouru  en     99     „ 
après  échauff.  à  24'',3  —  ,,     „         „  „         „    126     ,, 

„  „         „  33°,  1  —  le  mouvement  s'arrêtait. 


i  )  Les  nombres  donnés  sont  des  moyennes  ;  ils  ont  été  calculés  d'après 
l'observation  du  temps  que  des  granulations ,  situées  tout  près  des  parois  du 
protoplasma,  mettaient  a  parcourir  1  division  d'un  micromètre  oculaire 
(  =  gi-  mm.  de  l'objet)  sous  un  grossissement  de  320  fois. 


394  HUGO    DE     VRIES.     MATERIAUX    POUR    LA    GONNAISSA.NGE 

On  voit  que  le  mouvement  éprouve  un  ralentissement  d'autant 
plus  considérable,  que  la  variation  de  température  comprend  un 
plus  grand  nombre  de  degrés. 

J'ai  aussi  constaté  un  pareil  ralentissement  lorsque  les  poils 
radicaux  sont  refroidis  rapidement.  Des  poils ,  dans  lesquels  le 
mouvement  avait  à  la  température  de  22^,0  une  vitesse  moyenne 
de  1  mm.  en  174  sec,  ayant  été  portés  lentement  à  28°,4,  — 
ce  qui  avait  accru  la  vitesse ,  —  puis  refroidis  rapidement  à  22^,0, 
ne  montrèrent  plus  qu'une  vitesse  de  1  mm.  en  198  sec.  Après 
échauifement  lent  à  40^^  et  refroidissement  brusque  à  22",0,  on 
trouva:  1  mm.  en  230  sec;  après  refroidissement  de  42',ô  à 
22°,0,  le  mouvement  s'arrêta. 

V.    Influence   de   la   température   sur 

l'imbibition   des   parois   des   cellules    vivantes. 

A  peu  d'exceptions  près,  le  mouvement  des  sucs  dans  les 
plantes  se  fait  toujours  par  osmose  et  imbibition.  La  vitesse  de  ce 
mouvement  doit  donc  augmenter  avec  Taccroissement  de  la  tem- 
pérature, si  cet  accroissement  favorise  les  deux  phénomènes  en 
question.  Pour  l'imbibition ,  le  fait,  bien  que  très  probable,  n'était 
pas  encore  prouvé,  ce  qui  m'a  engagé  à  faire  quelques  expériences 
concernant  l'influence  de  la  température  sur  l'imbibition  des  parois 
des  cellules  vivantes.  Les  questions  que  je  me  suis  surtout  proposé 
de  résoudre  étaient  les  deux  suivantes  :  1  ".  comment  le  maximum 
de  la  proportion  d'eau  dans  les  parois  cellulaires  dépend-il  de 
la  température  ?  2^  les  mouvements  d'imbibition  augmentent-ils  de 
vitesse  lorsque  la  température  s'élève  ? 

Voici  la  méthode  d'après  laquelle  j'ai  opéré. 

Dans  les  entre-nœuds  qui  croissent  vigoureusement,  le  paren- 
chyme possède,  comme  l'on  sait,  une  tendance  à  s'allonger, 
mais  il  est  empêché  d'obéir  à  cette  tendance  par  l' épidémie.  Cette 
action  réciproque  a  pour  effet  que  chaque  ruban  d'épiderme, 
garni  de  parenchyme,  qu'on  enlève  d'un  pareil  entre-nœud,  prend 
une  courbure  dans  laquelle  le  parenchyme  occupe  le  côté  convexe. 
Ce  parenchyme  n'est  pas  saturé  d'eau:  il  peut  en  absorber  une 
nouvelle   quantité ,    ce   qui  augmente  sa  longueur  et ,   par  suite , 


DE  l'influence  DE  LA  TEMPERATURE  SUR  LES  PLANTES.  395 

la  courbure  du  ruban.  Il  n'est  pas  rare  de  voir  de  semblables 
rubans  s'enrouler  en  hélice^  lorsqu'ils  sont  plongés  dans  Feau 
ou  dans  une  dissolution  saline  très  étendue.  La  quantité  d'eau 
absorbée  par  l'épiderme  lui-même  est  très  faible.  Les  recherches 
de  M.  Hofmeister  ont  montré  i)  que  la  cause  de  ce  changement 
de  tension  réside  exclusivement  dans  les  parois  cellulaires ,  et  que 
la  tension  du  contenu  des  cellules  est  sans  influence  sur  la  forme 
du  tissu  considéré  dans  son  entier.  L'enroulement  en  hélice  des 
rubans  est  donc  le  résultat  de  l'imbibitiou  de  l'eau  dans  les  parois 
des  cellules  du  parenchyme  ^  et  toute  cause  qui  vient  à  modifier 
cette  imbibition ,  se  manifestera  par  un  changement  dans  les  tours 
de  spire.  Cette  méthode  ne  permet  pas  une  détermination  absolue 
de  l'allongement  du  parenchyme,  mais,  par  contre,  elle  est 
propre  à  mettre  en  évidence  de  très  petites  différences.  Les  détails 
de  la  méthode  varient  suivant  la  nature  du  problème  qu'il  s'agit 
de  résoudre. 

Dans  l'examen  de  la  question  :  si  les  parois  des  cellules  vivantes 
peuvent  contenir  plus  d'eau,  ou  moins  d'eau,  à  une  température 
plus  élevée  qu'à  une  température  plus  basse,  on  est  arrêté  par 
cette  circonstance,  qu'il  est  très  difficile,  et  peut-être  impossible, 
de  faire  absorber  son  maximum  d'eau  à  une  paroi  de  cellule 
vivante.  En  effet,  lorsqu'un  tissu,  placé  dans  de  l'eau  d'une 
température  déterminée,  a  cessé  d'en  absorber  d'une  manière 
visible  à  l'œil,  il  ne  s'ensuit  pas  encore  qu'il  contienne  toute  la 
proportion  d'eau  qu'il  pourrait  contenir  à  cette  température;  — 
de  même  qu'une  dissolution  saline  n'est  pas  saturée,  par  cela 
seul  que,  se  trouvant  en  contact  avec  un  excès  du  sel  à  l'état 
solide,  elle  n'en  dissout  plus  en  quantité  appréciable.  J'ai 
donc  dû  me  contenter  d'observer  les  parois  cellulaires  dans  l'état 
où  elles  renferment  toute  l'eau  qu'elles  sont  capables  d'absorber 
à  la  température  existante. 

L  Un  ruban  de  parenchyme,  avec  épiderme,  d'un  jeune  entre- 
nœud de  tige  de    Valeriana  officinalis   forma  en  15  heures,  dans 


1)  Hofmeister,,   <  Flom ,  1862,  p.  508. 


396  HUGO     DE    VRIES.      MATERIAUX    POUR    LA    CONiXAlSSANCE 

l'eau  à  15°,  trois  tours  de  spire,  après  quoi  il  ne  changea 
plus,  pendant  6  heures,  dans  cette  même  eau  à  15°.  Dans  l'eau 
à  43°  sa  courbure  augmenta,  en  1  heure  de  temps,  de  manière 
que  le  bout  libre  (l'autre  était  fixé)  avança  de  3  mm.  Un  séjour 
ultérieur  de  12  heures  dans  de  l'eau  à  15°  ne  lui  fit  pas  perdre 
cet  excès  de  courbure. 

II.  Un  ruban  analogue ,  placé  dans  de  l'eau  à  20°,  avait  cessé 
de  se  contourner  au  bout  de  5  heures;  mais  ensuite,  dans  de 
l'eau  à  44°,  il  forma  encore,  en  10  minutes,  un  demi-tour 
supplémentaire  ;  dans  l'eau  froide  il  ne  se  déroula  pas.  La  même 
chose  fut  observée  sur  d'autres  rubans. 

III.  Des  rubans  d'épiderme  et  de  parenchyme  de  jeunes  entre- 
nœuds de:  Taraxacum  officinale,  Oenanlhe  fistulosa ,  Silaus 
tenuifolius ,  Sfachys  setifera  et  Veronica  Buxbaumii  ^  après  être 
restés  pendant  12  heures  dans  de  l'eau  à  20°,  ne  montrèrent 
plus  aucun  accroissement  de  courbure ,  à  cette  température ,  pendant 
les  5  heures  suivantes.  Tenus  pendant  1  heure  dans  de  l'eau  à 
40'^,  ils  prirent  tous  un  surcroît  d'enroulement;  reportés  ensuite 
dans  de  l'eau  à  20°,  ils  conservèrent  la  forme  acquise. 

On  voit  que,  dans  tous  ces  cas,  les  parois  des  cellules 
s'imbibent  plus  à  une  température  élevée  qu'à  une  température 
plus  basse;  mais  que  l'eau,  une  fois  absorbée ,  ne  se  dégage  plus 
par  un  refroidissement  subséquent. 

Pour  la  solution  de  la  seconde  des  deux  questions  que  je 
m'étais  posées,  il  y  avait  à  tenir  compte  des  résultats  suivants 
d'une  étude  préliminaire:  P.  La  rapidité  avec  laquelle  le  liquide 
s'imbibe  est  d'autant  plus  grande  que  le  tissu  est  plus  éloigné 
du  point  de  saturation.  2".  Plus  un  ruban  est  large,  moins  il 
forme ,  dans  les  mêmes  conditions ,  de  tours  de  spire  :  les  rubans 
comparés  étant  d'ailleurs  supposés  de  même  longueur  et  pris  sur 
le  même  entre-nœud.  3".  Sauf  dans  le  cas  où  l'on  opère  sur  des 
parties  extrêmement  jeunes,  le  nombre  des  tours  de  spire  est, 
cœteris  paribus ,  d'autant  plus  petit  que  la  partie  étudiée  est  plus 
âgée.  4".  Dans  les  dissolutions  salines  le  parenchyme  s'allonge 
également,    mais    d'autant    moins    que    la    dissolution    est    plus 


DE  l'lNFLUEIVGE  DE  LA  TEMPERATURE  SUR  LES  PLANTES.  397 

concentrée.  Dans  des  dissolutions  trop  concentrées,  les  parois 
cellulaires  perdent  de  nouveau  Teau  qu'elles  avaient  d'abord 
absorbée. 

Les  rubans  destinés  à  des  expériences  comparatives  doivent 
donc  avoir  la  même  largeur,  être  pris  sur  le  même  entre-nœud, 
à  la  même  hauteur,  et  être  mis  en  expérience  pendant  des 
temps  égaux.  Pour  éliminer  les  différences  individuelles,  il  est 
bon  aussi  d'employer  les  moyennes  ou  les  sommes;  j'ai  toujours 
donné  la  préférence  à  ces  dernières,  qui,  lorsqu'on  prend  les 
précautions  nécessaires,  méritent  le  même  degré  de  confiance. 

De  ce  qui  précède  on  peut  déduire  deux  méthodes  propres  à 
faire  connaître  l'influence  de  la  température  sur  la  rapidité  avec 
laquelle  les  parois  des  cellules  s'imbibent  dans  l'eau  ou  dans  des 
dissolutions  salines:  P.  On  compare  des  rubans  égaux  et  pris 
sur  le  même  entre-nœud,  qui  s'imbibent  à  des  températures 
différentes.  2".  On  n'emploie  qu'un  seul  ruban  :  on  le  laisse 
s'imbiber  à  une  certaine  température  et,  au  bout  de  quelque 
temps,  on  détermine  la  vitesse  d'absorption  de  l'eau,  par  exemple, 
ia  quantité  d'allongement  en  une  demi-heure;  ensuite  on  porte 
le  ruban  dans  de  l'eau  d'une  température  plus  élevée  ou  plus 
basse  et,  après  une  demi-heure,  on  constate  si  l'allongement  a 
été  plus  grand  que  dans  la  demi-heure  précédente.  Si  tel  est  le 
cas ,  on  peut  en  conclure  avec  certitude  —  vu  que  la  vitesse 
à  température  constante  diminue  de  plus  en  plus  —  que  la  vitesse 
a  été  plus  considérable  à  la  température  employée  en  dernier 
lieu  qu'à  celle  employée  en  commençant.  J'ai  toujours  fait  usage 
des  deux  méthodes  à  la  fois. 

Renvoyant  pour  l'ensemble  des  expériences  à  mon  Mémoire 
original,  j'en  communiquerai  ici  une  seule  série,  afin  de  faire 
connaître  plus  en  détail  la  manière  de  procéder. 

De  jeunes  fragments  de  tiges  de  différentes  espèces  furent 
étudiés  selon  les  deux  méthodes.  Les  résultats  obtenus  par  la 
première  sont  compris  dans  le  tableau  suivant.  De  chaque  espèce  de 
plantes,  cinq  jeunes  parties  de  tige  furent  coupées  à  une  longueur  de 
100    mm.    et    fendues    chacune  eu  trois  rubans  égaux.  Les  trois 


398 


HUGO    DE    VRIES.     MATERIAUX    POUR    LA    CONiXAlSSANCE 


séries  de  cinq  rubans  furent  alors  immergées,  pour  s'imbiber,  dans 
de  Feau  à  trois  températures  différentes  :  un  des  rubans  de  chaque 
entre-nœud  fut  ainsi  étudié  à  la  température  de  40^,  un  autre  à 
la  température  de  21°  et  le  troisième  à  la  température  de  1°. 
Les  rubans  restaient  dans  l'eau  pendant  une  heure  ;  on  comptait 
les  tours  de  spire,  d'abord  immédiatement  avant  l'introduction 
dans  l'eau,  puis  après  une  J^  heure  et  1  heure  d'immersion. 

Dans  le  tableau ,  le  chiffre  placé  devant  le  signe  —  indique  le 
nombre  de  tours  de  spire  entiers ,  le  chiftVe  placé  après ,  le  nombre 
de  huitièmes  de  tour  ;  c'est  ainsi ,  par  exemple ,  que  1 — 3  signifie 
IJ  tour  de  spire. 


TexMPÉrature  : 

Taraxacum  officinale.  , 

Stachys  excelsa 

Veronica  Buxbaumii . , 
Althsea  officinalis .... 
Cirsiuin  tuberosum  .  . 
Chenopodium  Gluinoa 


1—0 
1—5 

0 
0-5 


1—3 
1—5 

0 
0—3 
3—0 
1—6 


2 
1—6^ 

0 
0-3 

1—2 
1—1 


-1  23-1 


15-2 
18-1 
24-7 


13-0 
17—2 
21—6 
21—2 
27—0 


20-5 
8-7  j 
16-2 
10-1| 
12—7 
16-0 


31— 5|26— 2  21-6 
16— 2jl4-2  10-1 
18— 1 1 17— 7  16— 7 

i  21—3 

|ll-7 

i  i21— 4 


Pour  l'examen  par  la  seconde  méthode,  des  rubans  qui  étaient 
restés  pendant  une  heure  dans  de  l'eau  à  21°  furent  portés 
dans  de  l'eau  à  40°,  et  d'autres  qui  avaient  été  tenus  pendant 
une  heure  dans  de  Feau  à  1°  furent  introduits  dans  de  Feau 
à  21°.  Les  chiffres  du  tableau  suivant  représentent,  comme 
ceux  du  précédent,  les  sommes  des  tours  de  spire  de  cinq 
rubans,  longs  chacun  de  100  mm.  La  colonne  D — C  donne 
l'allongement  dans  la  deuxième  demi-heure,  la  colonne  E — D 
celui  dans  la  troisième  demi-heure,  par  conséquent  après  le 
changement  de  température. 


DE  L  INFLUENCE  DE  LA  TEMPERATURE  SUR  LES  PLANTES. 


399 


ESPÈCES. 


TEMPÉRATURE 

1 

TOURS     DE    SPIRE    APRÈS:      1 

^ . . 

y-^- -^ 

•.^--— — -^\ 

de  la 

de  la 

pre- 
mière 

dernière 
demi- 

1  heure . 

1  heure. 

li  heure. 

heure . 

heure. 

A. 

B. 

C. 

i 

]). 

E. 

D  -C. 


E— D 


Cirsium  tuberosum.  .  . 

Althsea  officinalis 

Taraxacum  officinale. . 

Stachys  excelsa 

Veronica  Buxbaïunii. . 
Chenopodiuin  Quinoa. 


21°  ! 
21    I 

21  ! 

21  I 
21  I 
21    i 


40' 
40 
40 
40 
40 
40 


21—2    !  22—2      24—7 


21-6    I  23—0 
23—1    j  26—2 


13-0 

17-2 
27-0 


14-2 

17-7 
30—3 


25-7 
31-0 
16-6 
19—2 
34—0 


1-0 
1—2 
3—1 
1—2 
0—5 
3—3 


2—5 
2-7 
4-6 

2—4 
1—3 
3—5 


Cirsium  tuberosum .  .  . 

Althsea  officinalis 

Taraxacum  officinale.  . 

Stachys  excelsa 

Veronica  Buxbaumii.  . 
Chenopodium   Q,uinoa. 


21 

!  12—7 

14-7 

17-0 

2--0 

21 

|19-1 

21     3 

24     3 

:  2—2 

21 

!  20—5 

21—6 

26-0 

1—1 

21 

,    8-7 

10—1 

12—0  j 

1—2 

21 

16-2 

16-7 

17-7 

0—5 

21 

16-0 

21-4 

26—1 

i  5-4 

2—1 
3-0 
4-2 
1-7 
1-0 
4—5 


Les  deux  tableaux  montrent  très  clairement  que,  dans  toutes 
les  espèces  étudiées ,  la  vitesse  d'imbibition  est  d'autant  plus  grande 
que  la  température  est  plus  élevée. 

Les  résultats  qui  se  déduisent  des  expériences  rapportées  et 
de  toutes  les  autres  sont  les  suivants: 

Les  parois  des  cellules  (vivantes)  renferment,  à  l'état  de 
saturation,  d'autant  plus  d'eau  que  la  saturation  a  eu  lieu  à 
une  température  plus  élevée. 

Les  parois  des  cellules  absorbent  l'eau  et  les  dissolutions  salines 
étendues  avec  d'autant  plus  de  rapidité  que  la  température  est 
plus  élevée. 

Les  parois  des  cellules  cèdent  leur  eau  d'imbibition  aux  agents 
de  déshydratation  avec  d'autant  plus  de  rapidité  que  la  température 
est  plus  élevée. 

Une  conséquence  directe  des  deux  derniers  résultats  est  que: 

Les  perturbations  locales  de  l'état  d'équilibre  de  l'eau  d'imbi- 


400 


HUGO  DE  VRIRS.  MATERIAUX  POUR  LA  CONNAISSANCE 


bitioiî   dans   un   système  de  parois  cellulaires  s'effacent  d'autant 
plus  rapidement  que  la  température  est  plus  élevée. 

D'après  cela^  il  est  très  probable  aussi  que  les  perturbations 
locales  de  l'état  d'équilibre  des  matières  dissoutes  dans  le  liquide 
d'imbibition  s'effaceront  plus  rapidement  à  une  température  plus 
élevée  qu'à  une  température  plus  basse. 

VI.  Influence   de  la  température 
sur    la    rapidité    de    la   germination. 

La  relation  entre  la  germination  et  la  température  a  été 
étudiée  jusqu'ici  par  trois  méthodes  différentes  :  P.  On  a  déterminé 
le  temps  qui  est  nécessaire  à  la  radicule  pour  percer  l'épisperme. 
2".  On  a  mesuré  la  longueur  que  la  radicule  et  la  plumule 
atteignent  en  un  temps  fixé.  3".  On  a  observé  le  temps  nécessaire 
pour  le  déploiement  complet  des  parties  du  germe. 

J'ai  fait  l'application  de  la  seconde  de  ces  méthodes,  —  que 
M.  Sachs  ^)  a  employée  le  premier,  —  à  la  germination  d'un 
certain  nombre  d'espèces.  Les  graines  étaient  placées  dans 
l'appareil  de  chauffage  décrit  par  M.  Sachs,  et  y  germaient  à 
une  température  constante,  choisie  à  volonté.  Au  bout  de  48  heures 
elles  étaient  retirées  de  l'appareil,  et  on  mesurait  la  longueur  de 
leur  radicule.  Les  deux  tableaux  suivants  donnent  les  moyennes 
des  valeurs  ainsi  trouvées  ;  on  a  pris  pour  longueur  de  la  radicule  la 
distance  entre  son  extrémité  et  le  point  où  sont  insérés  les  cotylédons. 


Longueur  (en  mm.)  atteinte  par  la  radicule  en  48  heures 
(en  2   X   48  h.    pour  les  tempér.    de  15°  et  de  21", 2) . 


15,0' 


21,2126,8" 


29,0° 


31,5^  34,0" 


37,0"' 38,6"  4-2,5^ 


Phaseolus  vulgaris 8,3    31,1 

Helianthus  annims i  15,6  I  56,6 


Brassica  Napus 
Cannabis  sativa. 


8,0 

4,8 


27,0 
24,2 


21,1 

25,3  ,  30,3 

8,7    11,8 

6,0  1  16,2 


32,0    22,0  I  17,0  ;  13,5 
37,9  ;  34,4    18,0      9,9 
16,2  '    5,3  ^     0    ,     0 
25,5  I  15,0    12,5  I    7,5 


2,0 
0 
0 
1,5 


1)  Sachs,    Physiol.   Unters.  uh.  die  Âhhàngigkeit  der  Keimung  von  der  Tempe- 
rat  iir ,   <  Pringsheini's  Jahrh.,  II.  1860,  p.  338. 


DE  L  IXFLUKXCE  DR  LA  TEMPERATURE  SUR  LES  PLANTES. 


401 


Longueur  (en  mm.)  atteinte  par  la  radicule 
en  48  heures. 


15,1"       21,6^ 


27,4' 


30.6' 


33,9' 


37,2' 


Cucumis  Melo 

Siuapis  alha 

Lepidium  sativum  .  . 
Liniim  usitatissimum 


3.8 
5,9 
1.5 


24,9 
38,0 
20.5 


]8,2 
5:>,0 
71,9 
44,8 


27,1 
44,1 
44,6 
39,9 


38,6 
30,2 
26,9 
28,1 


70,3 
10,0 

0 

9,2 


Ces  deux  tableaux  confirment  le  résultat  déjà  obtenu  par  M. 
Sachs,  savoir,  qu'il  y  a  pour  chaque  espèce  un  point  d'élection 
(optimum) ,  où  la  croissance  se  fait  avec  plus  de  rapidité  qu'à  toute 
autre  température ,  et  qu'au-dessous  de  ce  point  la  longueur  atteinte 
augmente  à  mesure  que  la  température  s'élève,  tandis  qu'au- 
dessus,  elle  diminue  à  mesure  que  la  température  monte. 

La  comparaison  du  second  de  ces  tableaux  avec  les  résultats 
obtenus  par  M.  A.  De  Candolle  '),  d'après  la  première  des  trois 
méthodes  rappelées ,  montre  que  le  point  d'élection ,  pour 
le  Cucumis  Melo  y  est  situé,  d'après  la  méthode  de  De  Candolle , 
à  25°,  et,  d'après  la  méthode  de  Sachs,  vers  37°,2  ou  même 
au-dessus.  Chez  les  trois  autres  plantes,  ce  point  se  trouve  à 
21°  suivant  M.  De  Candolle,  et  à  27°,4  d'après  mes  expériences. 
Chez  toutes,  par  conséquent,  la  température  qui  convient  le 
mieux  dans  les  conditions  choisies  par  M.  Sachs,  est  plus  élevée 
que  celle  qui  favorise  le  plus  la  première  apparition  de  la  radicule 
à  l'extérieur. 


1)  A.  De  Candolle,  De  la  germination  etc..   -<  Bihl. 
XXIV,  p.  243. 


iv.  de  Genève ,  1865 , 


Archives  Néerlandaises,  T.  V. 


26 


QUELQUES   OBSERVATIONS 


SUR    LA 


SPLANCHNOLOGIE  DU  RHINOCHAETES  JUBATUS,  VER.  ET  DESM. 


W.   MARSHALL. 


Un  des  oiseaux  les  plus  intéressants  qui  aient  été  découverts 
dans  ces  derniers  temps  est ,  sans  contredit ,  \q  Rhinochaetus  jubatiis. 

La  position  systématique  de  cet  oiseau  ne  semble  plus  guère 
douteuse,  surtout  depuis  que  M.  Parker  nous  a  fait  connaître 
son  ostéologie  dans  une  superbe  monographie  '  )  ;  mais  il  ne  sera 
peut-être  pas  sans  utilité  de  communiquer  quelques  détails  sur 
la  structure  de  ses  viscères ,  en  prenant  pour  terme  de  comparaison 
les  données  qu'on  possède  sur  les  mêmes  organes  chez  d'autres 
Echassiers  et  Cigognes  (au  sens  de  L.  Bonaparte  et  de  V.  Carus). 

L'individu  dont  j'ai  eu  l'occasion  d'examiner  le  tronc  à  l'état  frais , 
était  mort  au  Jardin  zoologique  d'Amsterdam ,  et  sa  dépouille  montée 
se  voit  aujourd'hui  dans  le  musée  —  peu  considérable  par  l'étendue 
mais  riche  en  objets  précieux  —  qui  est  annexé  à  cet  établissement. 


La  langue,  qui  est  presque  entièrement  cornée,  diffère  par  sa 
forme  de  la  langue  triangulaire  —  aiguë ,  propre ,  en  général , 
aux  autres  Echassiers  et  Cigognes  ;  elle  est  cochléariforme ,  étranglée 


1)  W.  Parker,  Onthe  Osteology  ofthe  Kagîi  (Rli.  jubatus) ,  dans:   Transactions 
of  Zool.  Soc.  0/  Lonclon,  vol.  VI,  p.  501.  1869. 


W.  MARSHALL.  QUELQUES  OBSERVATIONS  SUR  LA^  ETC.    403 

en  arrière  du  milieu ,  excavée  ;  il  n'y  a  pas  de  papilles  à  son 
bord  postérieur^  mais  seulement^  à  peu  de  distance  en  avant, 
une  élévation  arrondie,  de  grandeur  médiocre.  L'os  hyoïde  se 
compose  de  six  pièces,  dont  deux  forment  la  partie  médiane, 
tandis  que  deux  autres,  de  chaque  côté,  constituent  les  cornes 
de  l'os.  La  pièce  antérieure,  impaire,  qui  est  composée  des  os 
entog-losses  (counale  ceraiohyal ,  Parker)  ici  soudés  ensemble,  est 
lancéolée,  imitant  en  petit  la  forme  de  la  langue  ,  non  entièrement 
ossifiée,  mais  cartilagineuse  à  la  partie  antérieure.  Au  milieu 
elle  est  pourvue  d'un  trou,  et  dans  ce  trou  joue  une  apophyse 
assez  longue,  garnie  de  facettes  articulaires  sur  les  côtés  de 
la  seconde  pièce  impaire,  du  basi-hyal  (Geoffroy),  de  sorte  que 
la  langue  peut  se  mouvoir  avec  beaucoup  de  liberté.  Au-dessus 
de  ce  point  se  trouve  l'élévation  de  la  langue  dont  il  a  été 
parlé  plus  haut,  et  cette  élévation  est  creuse  à  l'intérieur,  de 
manière  que  l'apophyse  y  pénètre  quand  la  langue  elle-même  se 
meut.  L'uro-h}  al  est  ici  un  appendice  cartilagineux  du  basi-hyal. 
Les  cornes  de  l'hyoïde,  qui  s'articulent  également,  bien  qu'avec 
peu  de  mobilité,  sur  le  basi-hyal,  se  composent  chacune  de  deux 
pièces,  une  antérieure,  plus  grande,  cylindYÏqnQ  (proximal  thyro- 
hyal,  Parker),  et  une  postérieure,  conique  {distal  Ihyrohyal, 
Parker),  qui  se  courbe  en  dedans  et  en  dessus:  entre  les  deux 
pièces  osseuses  de  chaque  corne  se  trouve  une  masse  cartilagi- 
neuse considérable,  qui  est  plus  épaisse  que  les  os  mêmes. 
La   longueur    de   l'os  entoglosse  est =  15  mm. 

\  basi-hyal  i  ^^ 

"  "  "   (  uro-hyal  \  " —  "^^      " 

„         „  „  la  partie  antér.  de  la  corne  est  =  29      „ 

,,         r  J7    >;         71     poster.  „     „       „       „    z=  20      „ 

L'œsophage,    qui    n'est    pas    très    large    et    qui   est    garni    à 

l'intérieur  de  plis  prononcés,  n'a  pas  de  jabot;  mais,  quand  on 

le    remplit    avec    de   l'eau,    il  se  montre  susceptible  d'une  forte 

dilatation,  comme  dans  les  genres  Haematopus ,  Ardea  et  Grus. 

Le  ventricule    succenturié    se    divise    en    deux    parties;    dans 

la  partie  antérieure  se   trouvent   les    follicules,    qui  n'atteignent 

26* 


404       W.  MARSHALL.  QUELQUES  OBSERVATIONS  SUR  LA 

pas  une  très  grande  dimension;  tout  au  plus  2  mm.,  et  qui 
ne  sont  pas  divisés.  Entre  cette  région  à  follicules,  large  de 
30  mm.,  et  le  cardia  de  l'estomac  proprement  dit,  se  voit  une 
zone,  large  de  15  mm.,  qui  est  dépourvue  de  glandes.  C'est  là 
une  particularité  que  je  n'ai  jamais  observée  moi-même  chez 
d'autres  Echassiers  ou  Cigognes,  et  dont  l'existence  dans  ces 
familles  n'est  aussi  mentionnée  par  aucun  des  ouvrages  que  j'ai 
à  ma  disposition.  Le  ventricule  succenturié  n'est  pas  étranglé  du 
côté  du  gésier,  mais  se  continue  avec  lui  en  s'élargissant  suc- 
cessivement; à  l'intérieur,  le  cardia  est  nettement  accusé  par 
l'épitliélium  du  gésier. 

Tantôt  le  gésier  des  Echassiers  se  présente  comme  une  poche 
plus  ou  moins  membraneuse ,  à  parois  faiblement  développées  (le 
degré  extrême  se  voit  dans  l'Otis),  et  alors  les  deux  puissants 
disques  tendineux  sont  situés  en  avant  et  eu  arrière;  tantôt  il 
montre  une  structure  analogue  à  celle  de  l'estomac  des  Coqs, 
des  Canards,  etc.,  et  dans  ce  cas  les  couches  musculaires  sont 
souvent  très  considérables ,  et  les  disques  tendineux  se  rapprochent 
plus  des  côtés  de  l'estomac  (par  exemple,  chezles  Tringa,  Grus , 
Gallinula).  Chez  les  Cigognes  l'estomac  est  membraneux ,  à  portion 
pylorique  souvent  distincte  du  reste.  Le  Rh.juhalus2i\mQ^iom^Q 
membraneux ,  faiblement  développé ,  presque  semblable  à  celui  de 
rOutarde ,  mais  pourvu  à  l'intérieur  d'une  couche  épithéliale  beaucoup 
plus  épaisse,  de  couleur  foncée.  La  longueur  du  conduit  digestif, 
depuis  la  pointe  de  la  langue  jusqu'au  pylore,  est  de  232  mm. 

Dans  l'intestin  grêle  se  trouvent,  comme  chez  les  Tringa ,  les 
Haematopus  et  d'autres  genres,  des  plis  disposés  en  zigzag,  entre 
lesquels  on  voit  des  villosités  extrêmement  fines. 

Au  point  où  l'intestin  grêle  s'abouche  avec  le  gros  intestin, 
il  existe  deux  cœcums  terminés  en  pointe ,  remarquablement  petits 
pour  un  oiseau  de  cette  famille:  ils  n'ont  que  18  mm.,  c'est-à-dire 
une  longueur  qui  est  à  celle  du  canal  intestinal  entier  environ 
comme  1  :  50 ,  tandis  que  chez  les  Trinqa ,  par  exemple ,  ce  rapport 
est  de  1:11.  Dans  les  Haemalopus  (bien  que  ces  appendices  n'y 
aient  pas  6  pouces  de   longueur,    comme    le    dit    Meckel,    mais 


SPLAISCHNOLOGIE  DU  RHINOCHAETES  JUBATUS,  VER.   ET  DESM.       405 

seulement  3  p.  et  demi),  et  surtout  dans  les  Fulica,  Gallinula 
et  Otis,  les  cœcums  se  montrent  beaucoup  plus  développés. 

Le  gros  intestin  est  long  de  93  mm.  et  a  un  volume  quatre 
fois  plus  considérable  que  celui  de  l'intestin  grêle  :  sa  circonférence 
mesure  20  mm.  ;  à  l'intérieur  il  est  lisse ,  de  même  que  les  cœcums. 

Le  cloaque  ne  présente  rien  de  remarquable. 

La  longueur  totale  du  canal  intestinal,  depuis  le  pylore  jusqu'à 
l'anus,  est  de  660  mnî. 

Le  diverticulum  qui,  d'après  Stannius  ^),  se  trouve  presque 
constamment  dans  les  Rallus ,  ISumenius ,  Crex ,  Limosa,  Tringa 
et  Gallinula,  —  ce  que  je  puis  confirmer  pour  ce  qui  regarde  les 
trois  derniers  de  ces  genres ,  —  et  qui  chez  les  Grus  et  les  Ardea 
se  rencontre  au  moins  très  fréquemment ,  manque  totalement  chez 
notre  oiseau. 

Je  ne  puis  rien  dire  au  sujet  des  glandes  de  la  tête  et  de  la 
cavité  buccale,  attendu  que  l'animal,  comme  je  l'ai  déjà  fait 
connaître,  devait  être  empaillé. 

Les  grandes  glandes  de  l'abdomen  présentent  des  particularités 
intéressantes. 

Le  pancréas ,  de  couleur  rougeâtre ,  se  compose  de  deux  glandes 
entièrement  séparées,  entre  lesquelles  il  m'a  été  impossible  de 
découvrir  la  moindre  connexion.  Le  lobe  supérieur  est  à  peu  près 
de  la  longueur  de  la  première  anse  intestinale,  savoir  de  51  mm. , 
et  montre  au  côté  droit  un  court  conduit  pancréatique.  Le  lobe 
inférieur  est  d'un  quart  plus  long  que  le  supérieur  et  se  continue , 
du  côté  gauche,  avec  deux  conduits  pancréatiques  assez  longs. 
Le  premier  des  trois  conduits  débouche  dans  l'intestin  à  54  mm. 
au  dessus  du  deuxième,  et  celui-ci  à  13  mm.  au-dessus  du 
troisième.  Le  pancréas  est  simple,  d'après  M.  Stannius  -),  chez 
les  Ciconia:  dans  le  genre  Otis  il  est  composé  de  deux  lobes 
continus;  chez  les   Grus  et  les  Oedicnemus  il  est  double. 

Chez    les    Echassiers    et    les   Cigognes   le  foie  affecte  presque 


1)  Stannius,  Lehrbiich  d.    vergl.    Anai.  d.    Wirhelth.,  le  éd.,  1846,  p.  302. 

2)  /.  c,  p.  305. 


406  W.    MARSHALL.    QUELQUES    OBSERVATIONS    SUR    LA 

toujours  la  disposition  ordinaire  aux  Oiseaux,  c'est-à-dire  que  le 
lobe  droit  y  surpasse  d'une  manière  notable,  et  souvent  même 
d'une  manière  considérable,  le  lobe  gauche;  une  exception  singu- 
lière se  rencontre  toutefois  chez  le  C/cowîa  «/6rt  et  surtout,  d'après 
Nitsch,  chez  le  Charadrius:  chez  le  premier,  les  deux  lobes 
sont  d'égale  grandeur,  et  chez  le  second,  c'est  même  le  lobe 
gauche  qui  prédomine.  L'oiseau  dont  nous  nous  occupons  ici  m'a 
offert  le  même  rapport:  le  volume  du  lobe  gauche  du  foie  sur- 
passait de  plus  d'un  tiers  celui  du  lobe  droit. 

La  vésicule  biliaire  manquait,  ce  qui  toutefois  peut  être  une 
anomalie  individuelle ,  telle  qu'on  la  rencontre  assez  fréquemment. 
C'est  ainsi  que  Collins  ^)  n'a  pas  trouvé  de  vésicule  chez  une 
Grue,  Perrault  ^)  chez  deux  des  six  individus  à'Anlliropoides 
virgo  qu'il  avait  examinés,  Blumenbach  ")  chez  un  Coq,  et  moi- 
même,  différentes  fois,  chez  des  Corbeaux  et  des  Geais;  du 
reste,  dans  l'Homme  lui-même"^),  l'autopsie  a  fait  constater  plus 
d'une  fois  l'absence  de  la  vésicule.  Les  conduits  hépato-entériques 
débouchaient  dans  l'intestin  au  côté  opposé  à  celui  où  arrivaient  les 
deux  derniers  conduits  pancréatiques,  et  ils  alternaient  avec  ceux-ci. 

La  rate ,  qui  dans  /'  Otls  est  très  petite ,  a  ici  une  longueur  de 
25  mm.,  ce  qui  est  considérable  pour  un  Oiseau;  elle  est  en 
forme  de  fève  et  de  couleur  rouge  clair. 

Les  reins  sont  trilobés  de  chaque  côté  ;  les  testicules  sont  petits 
et  d'un  noir  brillant. 

Au  larynx  supérieur  manque  complètement  l'épiglotte  rudimen- 
taire,  et  les  papilles  de  la  fente  de  la  glotte  ne  sont  aussi  que 
peu  développées.  A  la  face  interne  de  la  pièce  antérieure  et 
principale  du  cartilage  thyréoïde  se  trouve ,  de  même  par  exemple 
que  chez  la  Grue ,  une  saillie  qui  avance  dans  la  cavité  laryngienne. 

La  trachée  est  plus  aplatie  par  devant  que  par  derrière  ;  ses 
anneaux  cartilagineux ,  —  qui  chez  les  Otis ,  par  exemple ,  alter- 


1)  Collins,  A  System  of  anutomy ,  1685,  t.  I,  p.  456. 

2)  Perrault,  dans  les  Mém.  de  l\ic.  des  Se.  dep.  1666—1699,  t.  II,  p.  323. 

3)  Blumenbach,  Handb.  d.  vergl.  Anat.,  1805,  p.  182. 

4)  Meckel,  Handb.  d.  menscM.  Anat.,  t.  IV,  p.  359. 


SPLANCHNOLOGIE  DU  RHINOCHA  ETES  JUBATUS,  VER.  ET  DESM.       407 

nent  sous  le  rapport  de  la  hauteur,  de  telle  sorte  que,  si  l'un 
d'eux  est  plus  haut  à  droite  et  plus  bas  à  gauche,  c'est  le 
contraire  qu'on  observe  chez  le  précédent  et  le  suivant,  —  sont 
partout  de  même  hauteur  et  fermés  sur  toute  l'étendue  de  la 
trachée.  Aux  bronches  (qui  chez  les  Ciconia  par  exemple  sont 
également  formées  d'anneaux),  on  trouve  au  lieu  d'anneaux  des 
tiges,  qui  sont  unies  en  arrière  par  une  membrane  tympaniforme 
interne  très  large;  le  diamètre  intérieur  de  chacune  des  bronches 
est  plus  grand  que  celui  de  la  trachée  dans  sa  partie  inférieure. 
Au  larynx  inférieur  il  n'y  a  pas  de  tambour  proprement  dit,  et 
la  traverse  est  faiblement  cartilagineuse.  On  trouve  ici ,  comme  chez 
les  Ardea,  les  Ralliis  et  la  plupart  des  autres  Echassiers  et 
Cigognes,  deux  paires  de  muscles,  savoir,  les  muscles  sterno- 
trachéaux  et  broncho-trachéaux  ;  ces  derniers  toutefois  ne  s'insèrent 
pas,  comme  chez  les  Ardea ,  à  l'extrémité  supérieure  des  bronches, 
mais  au  dernier  cartilage  de  la  trachée  ;  ces  muscles  sont  d'ailleurs 
faiblement  développés. 

En  ce  qui  concerne  le  système  vasculaire,  je  mentionnerai 
seulement  que  chaque  artère  innominée  donne  naissance  à  une 
carotide  primitive. 

On  voit,  par  les  faits  qui  précèdent,  que  chez  cet  oiseau 
le  système  viscéral  aussi  présente  des  particularités  qui  se  ren- 
contrent ,  en  partie  chez  les  Echassiers ,  en  partie  chez  les  Cigognes  : 
c'est  ainsi,  par  exemple,  que  l'estomac,  organe  dont  la  forme 
et  la  structure  dépendent  en  première  ligne  du  genre  de  vie,  a 
chez  le  Rh.  jubaius  la  forme  de  poche  et  la  consistance  mem- 
braneuse ,  comme  chez  les  Ardéidés ,  tandis  que  chez  les  Gruidés 
il  est  toujours  très  musculeux.  D'un  autre  côté,  et  bien  qu'il  ne 
faille  pas  attacher  trop  d'importance  à  ce  fait ,  il  est  remarquable 
que  le  caractère  particulier  du  foie  ne  se  retrouve  que  chez  un 
seul  oiseau  de  l'ordre  des  Echassiers,  chez  le  Charadrius. 

En  tout  cas,  ces  divers  faits  ne  sont  nullement  contraires  à 
l'opinion    de    M.    Parker  '),    fondée  sur  l'ostéologie  de  l'oiseau, 

1)  /.  c,  p.  502  et  520. 


408  W.    MARSHALL.    QUELQUES    OBSERVATIONS    SUR    LA 

savoir;  que  le  Rli.  jubatus  est  en  quelque  sorte  une  Grue  „géné- 
ralisée"  et  que,  avec  \ Eurypyffciy  il  se  rapproche  plus  des 
Nycticoracés ,  qui  font  j)artie  des  vrais  Hérons  ^  que  des  Grues 
typiques  ;  lesquelles  sont  déjà  des  Echassiers  ayant  avec  les 
Ardéidés  une  affinité  assez  grande.  Il  paraît  convenable  de  réunir 
le  Rhinochaetes  et  V Eurijpjjy a  en  nu  SGul  genre ,  à  l'exemple  de  M. 
V.  Carus  ^),  et  on  peut  acquiescer  pleinement  à  l'avis  de  ce 
savant;  qui  regarde  ce  genre  comme  composé  de  formes  inter- 
médiaires entre  les  Raies  et  les  Hérons  ^  et  comme  terminant  le 
mieux  ;  conjointement  avec  les  Psopliia,  la  série  des  Echassiers 
du  côté  des  Cigognes. 


J)  V.  Carus,  Bandhuch  der  Zoologie  etc.,  1868,  t.  I.,  p.  341, 


EXPLICATION      DES     FIGURES. 

(Planche  X.) 

Fig.   1.  Rhinochaetus  juhatus. 

a.  Langue  ;  b.  élévation  qu'on  voit  à  sa  surface  ; 
c.  fente  de  la  glotte  avec  la  saillie;  d.  papilles; 
e,  œsophage  avec  ses  plis.  —  Grandeur  naturelle. 

Fig.  2.  Même  oiseau,  os  hyoïde. 

a.  os  entoglosses  soudés  entre  eux;  b.  basi-hyal; 
c.  uro-hyal  cartilagineux  ;  d.  grande  pièce  de  la 
corne  de  l'hyoïde  ;  e.  petite  pièce  de  la  corne  de  l'hyoïde  ; 
/.  cartilage  intermédiaire  entre  ces  deux  pièces. 

Les    parties    cartilagineuses    ont    reçu    une    teinte 
foncée.  —  Grandeur  nat. 

Fig.  3.  Même  oiseau. 

a.  basi-hyal;  avec  son  prolongement  b  (situé  sous  b 
de  la  Fig.  1)  montrant  ses  deux  facettes  articulaires  ; 
c.  facette  articulaire  pour  les  cornes;  d.  uro-hyal  car- 
tilagineux. —  Grandeur  nat. 


SPLANCHiNOLOGIE  DU  RHIA'OCHA  ETES  JUBATUS  ,  VER.  ET  DESM.       409 

Fig.  4.  Même   oiseau,    paroi    antérieure    de   restomaC;   vue   à 

l'intérieur. 

a.  œsophage;    h.  portion    glanclulifère    du    ventricule 

succenturié  ;  c.  zone  dépourvue  de  glandes  du  même  ; 

d.  gésier;  e.  sa  faible  paroi  musculaire;  /'.  son  épais 

épithélium;  g.  pylore.  —  Grandeur  nat. 
Fig.  5.   Gallinula  chloropus ,   estomac. 

a.    ventricule    succenturié  ;     h.  h.    muscles    latéraux  ; 

c.  c.  muscles  intermédiaires  ;  d.  pylore.  —  Grandeur  nat. 
Fig.  6.  Rh.  jubatiis. 

a.  intestin  grêle  ;  b.  b.  petits  cœcums  ;  c.  gros  intestin.  — 

Grandeur  nat. 
Fig.  7.   Tr'uHja  arenaria ,  les  mêmes  parties,  indiquées  par  les 

mêmes  lettres.  —  Grandeur  nat. 
Fig.  8.  Rh.  jubalus. 

a.  ventricule  succenturié  ;  b.  gésier  ;  c.  intestin  grêle  ; 

dy  d'.  les  deux  lobes  séparés  du  pancréas;  e,  e',  e".  les 

trois    conduits   pancréatiques:    /'.    le  petit  lobe  droit, 

et  /'.  le  grand  lobe  gauche  du  foie;  g ,  g',  les  deux 

conduits  hépato-entériques  ;  h.  rate.  —  Grandeur  réd. 

de  %. 
Fig.  9.  Même  oiseau,  bifurcation  de  la  trachée. 

a.  muscle  sterno-trachéal;  b.  muscle  broncho-trachéal. — 

Grandeur  nat. 

Leyde,  octobre  187U. 


SUR  QUELQUES  MONSTRUOSITÉS 

OBSEUVEES  CHEZ  DES  CRUSTACES, 


J.    A.    HERKLOTS. 


Littérature. 

Mart.  Bernh.  a  Beruiz,  Chela  Asfaci  marini  monstrosa  (Obs.  C.)  et  Chela 
Âstaci  marini  monstrosa  alia  (Obs.  C  I.) .  dans  Miscellmiea  curiosa  medico-physica 
Acad.  NaUirae  Curiosorum ,  nve  Ephemeridum  medico-physicarum  germanicarum, 
curiosarum  Jmms  secundus,  anni  scilicet  1671  ,  p.  174. 

J.  E.  Valentiui ,  Chela  Astaci  fuviatilis  tribus  apicibus  praedita  (Obs.  CXXVI.) , 
dans  Acta  Acad.  Caes.  Leopold.   Carol.Natiirae  Curiosorum ,  t.  Il,  p.  285  ;  1730. 

A.  J.  Roesel  von  Rosenhoff,  MonatlicJie  Lisekien-Belustigmigen ,  t.  III. 
Der  Elijsskrebs  hiesigen  Landes,  pi.  LX  et  LXI;  1755. 

F.  Tiedemann ,  Beschreibung  einiger  seltnen  Thier-missgeburten ,  dans  Deutsches 
Archiv  Jiir  Physiologie,  t.  V,  p.  127;  1819. 

Dr.  G.  Jaeger,  Zwei  Beispiele  missgebiideter  Krebssclieeren ,  dans  Meckel's 
Archiv  filr  Anatoniie  u.  Physiologie ,  Année  1826,  p.  95. 

H.  Lucas,  Notice  sur  quelques  monstruosités  observées  dans  les  Crustacés 
appartenant  aux  genres  Carcinus,  Lupa ,  Homanis  et  Astaciis ,  dans  A?inales  de 
la  Société  entomologiqne  de  France,  2e  Série,  t.  II,  p.  41;  1844. 

Dr.  G.  Jaeger,  Vergleicbende  Darstellung  der  missgebildeten  Scheere  des 
gemeinen  Flusskrebses  (Astac.  fiumatilis)  und  der  missgebildeten  Scheere  einer 
Krabbe  {Cancer  uca  L. ,  Uca  ima  Latr.)  aus  Surinam,  dans  Jahreshefte  des 
Fereins  filr  vaterlàndische  Naturkiinde  in   Wiirtemherg ,  Année  VII ,  p.  33  ;  1851. 

J.  A.  Herklots,  Notice  carcinologique ,  dans  Dierkundige  Bijdragenuitgegeiien 
door  het  L'on.  Zool.  Genootschap  Natura  artis  magistra  te  Amsterdam,  t.  I, 
fasc.  5;  1852. 


J.   A.   HERKLOTS.   SUR   QUELQUES    MONSTRUOSITES,    ETC.  411 

On  n'a  fait  connaître  jusqu'ici  qu'un  nombre  relativement 
très  petit  de  monstruosités ,  chez  les  Crustacés.  Von  Berniz  ouvrit 
la  liste  des  descripteurs ,  il  y  a  près  de  deux  siècles,  par  ses 
observations  sur  deux  pinces  monstrueuses  du  Homard.  Valentin , 
Roesel,  Tiedemann  et  M.  Jaeger  décrivirent  tous  des  anomalies 
de  l'Ecrevisse  commune.  Plus  tard ,  M.  Jaeger  présenta  dans  les 
Wttrtembergische  Jahreshefte  un  résumé  des  monstruosités  qui  lui 
étaient  connues  ;  aux  sept  cas  recueillis  par  Roesel  et  Tiedemann 
et  aux  deux  que  lui-même  avait  déjà  publiés  antérieurement,  il 
en  ajouta  encore  deux  autres;  il  donna  en  outre  la  figure  et  la 
description  d'une  anomalie  très  compliquée  de  V  Uca  una  Latr. 
La  Notice  de  M.  Lucas ,  qui  renfermait  un  exemple  observé  chez 
l'Ecrevisse  commune,  un  chez  le  Homard  et  deux  chez  des  Crabes, 
le  Carciniis  moenas  Bast.  et  le  Lupa  f/«'caw //m  Latr. ,  avait  échappé 
à  M.  Jaeger. 

Dans  tous  ces  cas  ^)  la  monstruosité  portait  sur  une  pince  de 
l'animal.  Cette  circonstance  tient-elle  à  l'excessive  rareté  des 
anomalies  dans  d'autres  parties  des  Crustacés,  ou  bien  est-elle 
due  à  ce  que  le  sujet  n'a  pas  suffisamment  attiré  l'attention  des 
observateurs  ?  C'est  là  une  question  que  je  dois  laisser  indécise. 
Pour  ce  qui  me  regarde,  je  n'ai  rencontré  jusqu'à  présent 
qu'un  seul  exemple,  offert  par  le  tarse  d'une  patte  de  la  deuxième 
paire  du  Lilhodes  arctica  Lam.,  tandis  que  je  viens  d'observer 
chez  des  Crabes  deux  nouveaux  cas  de  pinces  monstrueuses, 
dont  je  vais  donner  la  description.  Les  figures  (PL  XI.)  qui  accom- 
pagnent ce  travail  sont  dues  à  mon  ami  et  collègue  M.  Snellen 
van  Vollenhoven,  auquel  j'adresse  ici  mes  sincères  remercîments. 

L'anomalie  dont  je  parlerai  en  premier  lieu ,  parce  qu'elle  est 
la  plus  simple,  se  montre  chez  une  espèce  du  genre  Xaniho  de 
Leach,  en  donnant  à  ce  genre  l'extension  que  lui  attribuait  de 
Haan,  c'est-à-dire  en  y  réunissant  les  Xantho  et  les  Chlorodius , 


'  )  E-oesel  parle  aussi  d'une  lésion  par  suite  de  laquelle  on  trouverait  au 
nez  de  l'Ecrevisse  une  excroissance  particulière  ayant  une  forme  monstrueuse. 
Je  ne  connais  toutefois   ni   figures  ni  descriptions  d'une  semblable  déformation. 


412  J.    A.    HERKLOTS.    SUR    QUELQUES    MONSTRUOSITES 

qui  étaient  distingués  principalement  par  la  conformation  des  pinces. 

Dans  les  espèces  qui  composaient  le  genre  67i/oro6/ù/5  de  Leach, 
les  extrémités  des  doigts  sont  élargies  et  creusées  à  la  pointe, 
de  manière  à  former  en  quelque  sorte  des  cuillers. 

C  est  à  ce  groupe  qu'appartient  notre  individu,  Xaniho 
pitnclulatus  de  Haan,  de  la  Mer  Rouge  (Voy.  PI.  XI,  fig.  1 — 4). 

La  main  ainsi  que  le  pouce  sont  constitués  d'une  manière  tout 
à  fait  normale  ;  la  portion  digitale  de  la  main  ,  vue  du  côté  externe , 
est  plus  large  que  d'ordinaire,  et  elle  est  bifurquée  dans  sa 
moitié  antérieure. 

Au  bord  supérieur  l'index  se  courbe  en  dessus  et  en  dehors, 
et  forme  une  extrémité  moins  développée  que  d'habitude,  mais 
ayant  du  reste  la  conformation  normale. 

Au  bord  inférieur  le  doigt  donne  naissance  à  la  seconde  branche. 
A  partir  du  point  où  celle  ci  se  sépare  de  l'extrémité  supérieure , 
elle  se  porte  en  dessous  et  en  dedans ,  et  forme  dans  cette  direction 
une  extrémité  également  creusée  en  cuiller ,  qui  est  unie  presque  à 
angle  droit  avec  la  première. 

Les  dents  du  doigt  immobile  se  continuent  sur  l'extrémité 
supérieure  ;  l'autre  extrémité  en  est  dépourvue.  La  surface  préhensile 
de  la  branche  inférieure  est  tournée  obliquement  en  dedans,  et 
tout  à  fait  hors  de  la  portée  de  celle  du  pouce;  quant  à  la 
branche  supérieure ,  sa  cuiller  n'est  que  partiellement  atteinte  par 
le  pouce ,  à  cause  de  la  direction  vers  l'extérieur  que  cette  branche 
a  prise,  bien  que  les  deux  cuillers  soient  situées  presque  dans 
le  même  plan  horizontal. 

L'impression  linéaire  inférieure,  qui  dans  la  pince  normale  est 
parallèle  au  bord  inférieur,  se  trouve  ici  placée  plus  haut,  se 
divise  à  la  bifurcation  du  doigt  et  se  continue  sur  chacune  des 
deux  branches. 

A  la  face  interne  de  la  pince  on  ne  remarque  rien  d'irrégulier. 

Le  second  exemple  de  monstruosité  (Voy.  PI.  XI,  fig.  5 — 8) 
dont  je  ferai  part  ici,  concerne  un  individu  à! Eriphia  spinifrons 
Herbst,    provenant    de    la  Mer  Méditerranée;    c'est  une  femelle, 


OBSERVÉES    CHEZ    DES    CRUSTACES.  413 

dont  la  taille  ')  est  au-dessous  des  dimensions  ordinaires,  mais 
qui  du  reste  dans  toutes  ses  parties,  sauf  dans  la  pince  gauche, 
est  conformée  absolument  selon  le  type  normal. 

Chez  cette  espèce,  comme  l'on  sait,  les  pinces  des  deux  côtés 
ne  diffèrent  pas  seulement  par  la  grandeur,  mais  aussi  par  la 
forme  des  parties  et  par  la  sculpture.  La  plus  petite  des  deux 
pinces,  —  qui,  sur  les  huit  spécimens  de  notre  Musée,  ne  se 
trouve  qu'une  seule  fois  au  côté  droit, — a  les  doigts  plus  faibles , 
plus  comprimés  latéralement  et  découpés  en  dents  à  leur  bord 
aigu.  Des  sillons  dirigés  longitudinalement  permettent  d'y  distinguer 
différentes  parties.  Le  côté  externe  de  la  main  montre  sur  toute 
sa  surface,  au  lieu  des  éminences  tuberculeuses  que  la  grande 
pince  possède  sur  sa  moitié  supérieure,  des  saillies  spiniformes, 
entre  lesquelles  sont  implantés  des  poils  raides. 

Dans  notre  individu  la  petite  pince  se  trouve  également  au 
côté  gauche.  Pour  ce  qui  regarde  la  main  et  le  doigt  mobile ,  la 
structure  et  la  sculpture  ont  gardé  tout  à  fait  leurs  caractères 
ordinaires;  mais  la  partie  antérieure  de  la  main,  que  l'on 
désigne  sous  le  nom  d'index,  présente  des  anomalies  très 
remarquables. 

Au  côté  inférieur  on  voit  un  index  un  peu  raccourci  se  courber, 
sous  un  angle  presque  droit ,  vers  le  bas.  Vis-à-vis  de  cet  index 
se  trouve  un  pouce  ayant  la  conformation  habituelle:  ces  deux 
parties  constituent  donc  une  pince  qui  fait  un  angle  droit  avec 
l'axe  normal  de  la  main.  Au-dessus  du  pouce  de  cette  pince 
inférieure  s'élève  un  autre  pouce,  également  perpendiculaire  à 
l'axe  de  la  main,  mais  dirigé  vers  le  haut,  et  faisant  par  consé- 
quent un  angle  droit  avec  le  pouce  normal.  Entre  les  deux  pouces 
désignés  en  dernier  lieu  se  trouvent  deux  index,  ne  consistant 
pour  ainsi  dire  que  dans  leur  partie  supérieure,  dentée,  et  unis 
entre  eux  par  une  côte  élevée  mais  étroite,  qui  résulte  de  la 
soudure  des  portions  moyennes  et  inférieures  des  deux  doigts, 
et    qui    est    placée    obliquement,    sous    un   angle  d'environ  45"", 


1  )  La  carapace  a  34  mm.  de  largeur  sur  25  mm.  de  longuem*. 


414  J.    A.    HERKLOTS.    SUR    OUKI-OnES    MONSTRUOSITES 

relativement  à  l'axe  de  la  main.  Ces  doigts  sont  d'environ  un 
tiers  plus  petits  que  l'index  de  la  pince  inférieure,  et  aussi  d'un 
tiers  plus  petits  que  ne  l'exigerait  le  rapport  avec  leurs  pouces 
respectifs.  Ils  sont  arrondis  à  la  pointe. 

La  main  ou ,  pour  mieux  dire ,  la  pièce  basilaire  de  la  portion 
digitale  de  la  main,  est  prolongée  pour  l'insertion  de  ces  doigts 
surnuméraires ,  et  la  portion  médiane  de  ce  prolongement  s'étend 
jusque  devant  le  pouce.  La  partie  intermédiaire  entre  les  pouces 
les  plus  divergents  et  la  face  d'insertion  des  index  soudés,  se 
dirige  obliquement  en  haut  et  en  arrière  jusqu'au-dessous  de 
l'implantation  du  pouce  normal.  Au  bord  inférieur  l'insertion  de 
l'index  se  fait  sur  un  prolongement  carré. 

Toute  la  partie  surajoutée  porte  des  épines,  qui  ne  sont  pas 
distribuées  régulièrement  sur  la  surface,  mais  entassées  sur  les 
pièces  basilaires  des  différents  doigts. 

Le  côté  interne  de  la  main ,  où  ces  parties  surabondantes  se 
distinguent  encore  mieux,  est  tout  à  fait  lisse. 

Tous  les  pouces  paraissent  avoir  été  libres  et  mobiles  :  du  moins  ils 
montrent  tous  les  parties  articulaires,  tubercules  et  cavités,  or- 
dinaires et  normales.  Si  tel  a  été  effectivement  le  cas ,  ce  qu'il 
est  difficile  de  décider  sur  des  exemplaires  desséchés,  le 
mouvement  des  doigts  de  la  pince  inférieure  a  été  normal;  le 
mouvement  de  la  pince  moyenne  n'a  pu  produire  qu'une  action 
restreinte ,  à  cause  du  peu  de  développement  de  l'index  ;  enfin  le 
pouce  supérieur,  normal,  se  mouvait  en  arrière  de  son  index  et 
ne  formait  pas  avec  lui  une  pince  proprement  dite.  Par  contre, 
les  pouces  des  pinces  moyenne  et  supérieure  se  rencontraient  et 
se  croisaient  au  bout  dans  leurs  mouvements,  et  constituaient 
ainsi  une  tenaille  qui  a  pu  être  d'usage  à  l'animal. 

Après  avoir  décrit  ces  monstruosités ,  il  ne  sera  pas  tout  à  fait 
sans  intérêt  d'examiner  quelle  place  elles  doivent  prendre  dans 
la  série  des  formes  connues. 

M.  Jaeger  a  déjà  présenté  un  aperçu  comparatif  des  anomalies 
des  pinces  de  l'Ecrevisse  commune  et  de  V  Uca  una  Latr.  ,mais. 


OBSERVÉES  CHEZ  DES  CRUSTACES.  415 

par  suite  de  l'ignorance  où  il  a  été  au  sujet  des  observations 
de    M.    Lucas  ;    son    travail    est   resté  nécessairement  incomplet. 

Les  deux  plus  anciens  auteurs  sur  cette  matière  ne  sont  pas 
nommés  par  M.  Jaeger.  L'un  deux,  Valentin,  rapporte  simple- 
ment qu'il  possédait  une  pince  d'Ecrevisse  commune  munie  de 
trois  extrémités;  en  l'absence  de  tout  détail  descriptif  et  de  toute 
figure  ;  on  doit  se  borner  à  prendre  note  du  fait. 

Von  Berniz  au  contraire  a  figuré  les  deux  pinces  d'Astaciis 
marinus  sur  lesquelles  ont  porté  ses  observations. 

Dans  son  Observation  C  il  représente  une  pince  gauche  de 
Hotnarus  vulgaris  M.  Edw.  ^  chargée  de  différentes  productions 
étrangères;  aussi  la  désigne-t-il  comme  chela  variis  marinis  in- 
crustaia.  Outre  ces  tubes  de  Serpules  etc.,  la  pince  montre,  au 
bord  interne  du  doigt  immobile,  deux  incisions  situées  l'une 
derrière  l'autre  et  divisant  le  doigt  en  trois  parties.  Le  pouce  a, 
d'après  les  indications  de  von  Berniz,  deux  saillies,  qui  ressem- 
blent à  un  nez  et  à  une  lèvre  supérieure.  Ces  saillies  sont  situées 
à  la  base  du  pouce,  mais,  plus  en  avant,  il  y  a  encore  un 
autre  appendice,  beaucoup  plus  grand  et  plus  saillant. 

L'impression  que  donne  cet  ensemble  est,  à  mon  avis,  qu'on 
a  afiaire  au  produit  d'une  lésion  externe  de  l'index,  et  que  la 
déformation  subie  par  le  bord  inférieur  du  pouce  résulte  de  son 
adaptation  au  bord  supérieur  déformé  de  l'index. 

La  pince  fossile  qui  fait  le  sujet  de  l'Observation  C I  est 
simplement  figurée;  l'auteur  n'ajoute  pas  un  seul  mot  de  descrip- 
tion, mais  renvoie  à  la  planche  pour  prendre  connaissance  de 
l'anomalie.  L'examen  de  cette  planche  ne  me  semble  toutefois 
pas  suffisant  pour  donner  tous  les  éclaircissements  désirables  ;  l'étude 
de  la  pièce  originale ,  si  celle-ci  existe  encore ,  serait  absolument 
nécessaire.  Je  me  contenterai  donc  de  dire  ici  que  la  forme,  la 
brièveté  et  la  terminaison  en  pointe  effilée  de  l'index,  ainsi  que 
ses  rapports  avec  la  main  et  avec  le  pouce,  mettent  presque 
hors  de  doute  qu'il  s'agit  d'un  doigt  régénéré,  qui  à  son  tour 
a  modifié  également  la  forme  et  la  courbure  du  pouce. 

Dans    l'aperçu    qui    va    suivre,     je     crois    donc    qu'il    vaudra 


416  .T.    A.    ÏIERKLOTS.    SUR    QUELQUES    MONSTRUOSITES 

mieux  ne  pas  tenir  compte  de  ces  formes  imparfaitement  connues. 
Il  suffit  de  les  avoir  mentionnées  pour  mémoire, 

M.  Jaeger  a  coordonné  les  anomalies  dont  il  avait  connaissance 
en  une  série  ^  dans  laquelle  le  rang  est  déterminé  par  la  nature 
de  la  partie  affectée  et  par  le  degré  de  la  déformation. 

Il  commence  par  les  anomalies  du  pouce,  dans  lesquelles,  à 
côté  du  pouce  normal,  plus  ou  moins  modifié,  il  existe  une 
branche  accessoire,  qui  reste  simple  ou  bien  se  subdivise.  Des 
exemples  appartenant  à  cette  section  se  voient,  sur  la  planche 
de  M.  Jaeger,  dans  les  figures  1,  2  et  3,  cas  observés  par  lui- 
même,  et  dans  les  figures  4  et  5,  cas  observés  par  Roesel;  ces 
derniers  sont  représentés  sur  les  planches  LX,  f.  29,  et  LXI, 
f.  33,  des   fnsekten  Belusligungen. 

La  seconde  section  de  notre  auteur  comprend  les  anomalies  de 
l'index  ou  de  la  partie  prolongée  de  la  main ,  où  l'on  rencontre , 
d'après  les  figures  et  les  descriptions ,  soit  des  appendices  simples , 
pointus,  à  la  partie  basilaire  de  l'index:  Jaeger  fig.  6  :=  Roesel 
pi.  LXI,  fig.  31,  et  Lucas  pi.  I,  fig.  2,  —  soit  aussi  la  scission 
et  division  de  l'index  proprement  dit:  Jaeger,  fig.  7,  8  et  9. 

A  la  suite  de  ces  déformations  M.  Jaeger  place  celle  qui  est 
représentée  par  sa  fig.  lOrzrRoesel  pi.  LXI,  fig.  32,  où  l'index 
se  termine  par  deux  extrémités,  tandis  que  vers  le  milieu  du 
doigt  se  détache,  en  direction  oblique,  une  branche  assez  sem- 
blable à  la  moitié  antérieure  d'un  doigt  normal. 

Une  troisième  section  est  formée  par  M.  Jaeger  des  anomalies 
qui  atteignent  la  main  proprement  dite. 

Il  y  rapporte  sa  figure  ll=:Iloesel  pi.  LX,  fig.  28,  qui 
montre  sur  la  face  latérale  de  la  main ,  avant  l'origine  du  doigt 
immobile,  une  excroissance  divisée  en  trois  branches. 

Il  place  dans  la  même  section  l'anomalie  de  VUca  una  Latr. , 
représentée  par  ses  fig.  12  et  13. 

Dans  cette  dernière  anomalie  toutefois,  il  me  semble  qu'on 
doit  reconnaître  une  rubrique  entièrement  différente,  dont  nous 
avons  déjà  eu  une  espèce  d'avant-coureur  dans  le  cas  des  deux 
extrémités  antérieures  de  l'index  représenté  par  Roesel,   fig.  32. 


OBSERVÉRS  CHEZ  DES  CRUSTACES.  417 

Dans  toutes  les  formes  considérées  jusqu'ici  '),  nous  n'avions 
affaire,  selon  ma  manière  de  voir,  qu'à  de  simples  appendices, 
excroissances  ou  autres  productions  accessoires  purement  acciden- 
telles, et  il  n'y  avait  pas  la  moindre  apparence  d'une  multipli- 
cation d'organes  normaux. 

Déjà  dans  la  première  anomalie  que  je  viens  de  décrire,  celle 
du  Xantlio ,  on  voit  la  manifestation  de  ce  phénomène  à  un 
faible  degré.  Il  se  montre  à  un  degré  plus  prononcé  dans 
le  cas  figuré  par  M.  Lucas ,  fig.  1  ;  où  il  existe  également  un 
doublement  latéral  de  l'index.  A  ce  cas  se  rattache  celui  représenté 
par  la  fig.  4  de  M.  Lucas,  où  l'un  des  index  ainsi  formés  se 
divise  encore  une  fois  en  deux  parties  à  la  pointe. 

Ce  même  doublement  latéral  de  l'index ,  je  crois  le  reconnaître 
dans  la  fig.  12  de  M.  Jaeger,  mais  ici  il  y  a  en  outre  existence 
d'une  double  pince. 

Dans  la  2e  figure  de  M.  Lucas,  où  le  pouce  porte  les  doigts 
surnuméraires,  mais  où  il  n'y  a  pas  de  véritable  doublement  de 
la  pince ,  attendu  que  trois  des  quatre  doigts  sont  unis  entre 
eux  d'une  manière  immuable,  je  vois  un  degré  inférieur  de  ce 
développement  anormal. 

Un  degré  plus  élevé  se  rencontre  dans  V Uca  de  M.  Jaeger, 
chez  lequel  chacun  des  deux  index  a  en  face  de  lui  un  pouce 
mobile ,  encore  que  le  pouce  de  la  pince  inférieure  soit  uni  d'une 
manière  immuable  à  l'index  de  la  pince  supérieure. 

Mais  l'anomalie  la  plus  complexe,  dans  cette  direction,  nous 
est  offerte  par  la  pince  à! Eriphia  décrite  ci-dessus,  où  chacun 
des  trois  pouces  peut  se  mouvoir  séparément,  et  où,  par  le 
renversement  d'une  couple  d'appendices,  il  se  forme  trois  pinces 
complètes. 


J  )  Il  est  très  possible  que  quelques-unes  des  anomalies  déjà  connues ,  par 
exemple  celle  de  Jaeger  fig.  3 ,  ou  celle  de  Roesel  pi,  LX ,  fig.  29 ,  doivent 
être  rapportées  à  cette  rubrique.  Toutefois,  dans  aucun  de  ces  cas,  il  ne  saurait 
être  question  de  mobilité  des  parties  surnuméraires ,  et  je  dois  faire  remarquer 
que  l'idée  générale  de  Roesel  au  sujet  des  monstruosités  observées  par  lui,  les 
présente  comme  un  simple  résultat  de  blessures  ou  de  meurtrissures. 

Archives  Néerlandaises,  T.  V.  27 


418  J.    A.    HERKLOTS.    SUh    QUELQUES    MONSTRUOSITES 

A  cette  même  rubrique  de  déviations  du  type  par  voie  de 
multiplication  d'organes  ^  il  faut  rapporter  aussi  l'anomalie  que 
j'ai  fait  connaître  antérieurement  dans  \q^  Dierkundige  Uijdrafjen , 
et  dont,  pour  ne  rien  omettre ,  je  reproduirai  ici  la  description 
et  la  figure  (Voy.  pi.  XI,  fig.  9  et  10). 

Cette  anomalie  a  été  observée  au  tarse  de  la  patte  gauche  de 
la  deuxième  paire,  chez  un  spécimen  de  Lithodes  arctica  Lam., 
qui  se  voit  encore  dans  le  Musée  de  la  Société  royale  zoologique 
Nalura  artis  magistrat   à  Amsterdam. 

La  patte  droite  et  tous  les  articles  de  la  patte  gauche,  à 
l'exception  du  dernier,  ont  la  conformation  normale.  Le  tarse 
gauche  n'a  qu'environ  la  moitié  de  la  longueur  qu'il  devrait 
atteindre  ;  il  s'élargit  en  une  espèce  de  main ,  qui  se  termine  par 
trois  doigts,  inégaux  de  grandeur,  et  non  situés  dans  le  même 
plan,  car  celui  du  milieu  se  replie  en  arrière,  tandis  que 
l'antérieur  se  porte  en  avant.  Les  épines  manquent  au  bord 
supérieur  du  tarse;  ce  n'est  qu'au  doigt  antérieur  qu'on  voit  des 
vestiges  d'épines. 

A  la  fin  de  son  travail  M.  Jaeger  communique  les  résultats 
auxquels  l'a  conduit  l'étude  des  anomalies  arrivées  à  sa  con- 
naissance ;  ce  sont  des  considérations  sur  lesquelles  je  ne  m'étendrai 
pas  ici.  A  cette  occasion ,  l'auteur  fait  ressortir  aussi  l'intérêt 
qu'offrirait  l'étude  anatomique  des  parties  anomales.  En  même 
temps  il  indique  comment  on  pourrait  décider,  par  l'observation , 
si  ces  anomalies  persistent  sans  modification,  ou  bien  si,  lors  de 
la  mue  des  Crustacés,  le  renouvellement  de  leur  enveloppe 
tégumentaire  conduit  à  une  atténuation  ou  à  une  aggravation  de 
l'écart  existant. 

Relativement  à  ce  dernier  point ,  Roesel  assure  que  ces  excrois- 
sances se  maintiennent  invariablement  dans  les  mues  successives. 
Il  ne  dit  pas  toutefois  jusqu'à  quel  point  cette  assertion  repose 
sur  des  observations  personnelles. 

Les  phénomènes  sont  encore  compliqués  par  la  faculté  de 
reproduction   de   membres   perdus   ou   mutilés   que  possèdent  les 


OBSERVEES    CHEZ    DES    CRUSTACES.  419 

Crustacés  ;  et  dont  l'action  mieux  connue  nous  fournirait  peut-être 
des  éclaircissements  sous  maint  rapport.  L'intelligence  parfaite 
de  l'ensemble  du  phénomène  ne  peut  évidemment  être  attendue 
que  d'observations  heureuses  sur  des  individus  anomaux  vivants , 
combinées    avec  l'étude  anatomique  à  l'état  frais. 

Les  Crustacés  sont  d'ailleurs  si  généralement  et  si  abondamment 
répandus,  qu'il  ne  semble  pas  que  l'espoir  d'atteindre  un  jour  à 
cette  connaissance  doive  nécessairement  être  rangé  parmi  les  pi  a 
vota.  Il  ne  s'agit  que  de  tirer  parti  des  circonstances  favorables. 


EXPLICATION      DES      FIGURES. 
(Planche    XI). 

Fig.   1.  Pince  gauche  normale  du  Xanl/io  punctulalus  deEsi3in^ 

I  grand,  naturelle. 
„      2.  Pince  gauche  anomale  de  la  même  espèce,    vue  d'en 

dehors ,  f  grand,  nat. 
„      3.  La  même,  vue  obliquement  d'en  bas  et  d'eu   dehors, 

^  grand,  nat. 
„      4.  La  même,  vue  tout  à  fait  d'en  bas,  ^  grand,  nat. 
„      5.  Pince  gauche  normale  de  V Eriphia  spinifrons  Herbst, 

grand,   nat. 
„      6.  Pince  gauche   anomale    de  la  même  espèce,  vue  d'en 

dehors,       grand,  nat. 
„      7.  La  même  retournée,  vue  du  côté  interne,  grand,  nat. 
„      8.  Les  pinces  supérieure  et  moyenne,  vues  d'en  dehors, 

I  grand  nat. 
„      9.  Tarse  de  la  deuxième  patte  droite  du  Lithodes  arciica 

Lam.,  grand,  nat. 
„    10.  Tarse  de  la  deuxième  patte  gauche  du  même  individu, 
grand,  nat. 


27 


SUR  LA  MANIERE  DE  VIVRE 

DE  L'EUEYTOMA  LOiNGIPENNIS  walk., 

PAR 

H.  WEYENBERGH  Jr. 


Le  genre  Eurytoma  (Illiger),  qui  compte  environ  60  espèces 
européennes^  appartient  à  la  sous-famille  des  Euryfomidae  (Wal- 
ker) ,  famille  des  Chalcididae  (Westwood) ,  section  des  Enlophaga 
(Westwood) ,  division  des  Terebrantia  (Linné) ,  ordre  des  Hymenop- 
lera  (Linné)  ou  Piezala  (Fabricius). 

Dans  presque  tous  les  Traités  de  zoologie  on  trouve  mentionné, 
relativement  au  genre  Eurytoma,  que  les  espèces  vivent  en 
parasites  à  l'intérieur  d'autres  insectes,  comme  cela  a  lieu  pour 
les  Eurytomides  et  les  Clialcidides  en  général. 

11  paraît  toutefois  que  plusieurs  espèces  d' Eurytoma  font  exception 
à  cette  règle  générale.  C'est  ainsi  qu'on  verra,  par  les  détails 
dans  lesquels  nous  allons  entrer  au  sujet  de  l' Eurytoma  longîpennis 
(Walker) ,  que  la  larve  de  cette  espèce  vit  dans  des  excroissances 
en  forme  de  galles  du  Psamma  arenaria  L.  (en  lioll.  duinhelm).  Il 
est  encore  une  autre  espèce  du  même  genre  qui ,  à  ma  connaissance , 
a  les  mêmes  habitudes.  On  trouve  en  effet,  dans  les  Transactions 
of  the  enlomological  Society  of  London ,  III^  Série ,  t.  2  {Proceedings)  , 
p.  141,  le  passage  suivant,  extrait  d'un  recueil  périodique  amé- 
ricain, et  relatif  à  V  Eurytoma  flavipes  (Forstev)  :  „Oftlie  Eurytoma 
ftavipes  for  instance  we  learn  that  its  déprédations  hâve  been  so 
great    in    the  central  part  of  the  State  (New-York)  that,    unless 


H.    WEYEiNBEKGH  JR.   SUR    LA    MANIERE     DE    VIVRE     ETC.  421 

some  relief  is  found,  barley  will  hardly  appear  in  our  sensal 
reports.  It  is  worth  remarking  by  the  way  that  the  New-York 
farmers  appear  from  this  to  hâve  no  objection  to  making  returns 
of  the  yield  of  their  crops."  Il  est  donc  probable  que  cet  Eurytoma 
occasionne  des  déformations  aux  épis  de  l'Orge,  de  même  que 
l' E.  longipennis  à  ceux  du  Psamma.  Le  dommage  qui  doit  en  résulter 
pour  les  récoltes  de  cette  céréale  est  facile  à  comprendre. 

C'est  en  1868  que  j'eus  pour  la  première  fois  l'occasion  d'étudier 
les  déformations  du  Psamma  arenaria ,  sur  des  échantillons  trouvés 
à  Zandvoort,  près  de  Harlem,  par  un  de  mes  amis.  A  l'extrémité 
de  la  tige  existe  une  dilatation  qui  a  l'aspect  extérieur  d'un  bouton 
de  fleur  court  et  épais.  Cette  galle  se  voit  représentée  dans  la 
fig.  1  (PI.  XII):  a  est  ici  la  tige,  b.  b  les  feuilles  externes,  c  les 
feuilles  internes  soudées  avec  l'excroissance.  Lorsqu'on  ouvre  une 
pareille  galle,  en  enlevant  les  feuilles  une  à  une,  on  trouve 
entre  les  feuilles  centrales  intimement  soudées,  dans  une  substance 
verte,  d'apparence  médullaire,  une  larve  d'une  couleur  jaune  clair. 
C'est  cette  larve  qui,  agissant  comme  cause  d'irritation  anomale , 
donne  lieu  au  développement  morbide  du  tissu  végétal. 

La  larve  est  logée  dans  un  conduit  au  milieu  de  la  matière 
médullaire  verte,  dont  elle  paraît  faire  sa  nourriture.  Je  regarde 
cette  matière  comme  un  exsudât  de  la  plante,  épanché  par  suite 
de  l'inflammation  que  détermine  la  larve,  et  solidifié  peu  à  peu. 

Au  mois  d'août  Ja  larve  n'a  encore  que  2,5  millimètres  de 
longueur,  mais,  à  cela  près,  elle  ne  diffère  pas  des  larves  qui 
ont  atteint  toute  leur  croissance  et  qu'on  trouve  depuis  la  fin  de 
l'automne  jusqu'au  printemps.  Ces  larves  adultes  sont  longues 
d'au  moins  5  millim. 

La  forme  de  la  larve  est  en  général  assez  allongée,  et  la 
couleur,  comme  nous  l'avons  dit,  d'un  jaune  clair.  Les  douze 
segments  du  corps  se  distinguent  facilement.  Sur  la  face  dorsale 
de  plusieurs  des  anneaux  on  remarque  des  saillies  en  forme  de 
verrues;  ces  tubercules  se  voient  nettement  depuis  le  quatrième 
jusqu'au  dixième  anneau,  et  c'est  sur  le  sixième  et  le  septième 
qu'ils  sont  le  plus  grands.  L'extrémité  céphalique  est  un  peu  plus 


422  H.    WEYENBERGH    JR.    SUR     LA     MANIERE    DE     VIVRE 

pointue  que  l'extrémité  caudale ,  et  celle  ci  montre,  à  sa  terminaison 
obtuse,  une  petite  impression  que  je  regarde  comme  l'ouverture 
anale.  La  tête  est  petite  et  présente  une  paire  de  mâchoires 
triangulaires,  plus  ou  moins  courbes,  au-dessus  desquelles  on 
voit,  sur  la  tête,  une  impression  transversale.  Je  n'ai  pu  observer 
d'autres  particularités  à  cette  larve,  dont  les  divers  segments  se 
ressemblent  d'ailleurs  parfaitement  par  la  forme  et  la  couleur  et 
ne  diffèrent  un  peu  que  par  la  dimension.  A  l'aide  d'un  fort 
grossissement  on  découvre  çà  et  là  un  petit  poil  aux  segments 
postérieurs.  La  figure  2  montre  la  larve  grossie,  et  la  figure  3 
est  une  représentation  très  amplifiée  de  la  tête.  Un  des  anneaux 
du  milieu  est  représenté  fortement  grossi  dans  la  figure  4,  pour 
donner  une  idée  exacte  de  la  forme  et  de  la  position  des  mamelons 
verruqueux.  A  ce  grossissement  on  distingue  quelques  petits  poils 
sur  ces  mamelons.  Comme  on  le  reconnaît  sur  la  figure,  la  saillie 
des  mamelons  s'abaisse  plus  doucement  vers  la  surface  générale 
du  corps  à  leur  côté  antérieur  qu'à  leur  côté  postérieur. 

Me  trouvant  il  y  a  quelque  temps  à  Zandvoort,  je  profitai  de 
l'occasion  pour  me  faire  indiquer  l'endroit  où  les  Psamma  déformés 
avaient  été  découverts,  et  j'en  recueillis  encore  de  nombreux 
exemplaires.  Le  lieu  où  ils  se  trouvaient  est  une  petite  dépression 
dans  les  dunes,  à  quelques  pas  au  sud  de  l'Hôtel  des  bains;  les 
plantes  attaquées  occupaient  surtout  la  pente  intérieure  de  la 
dune  qui  borde  la  plage,  et  il  était  facile  de  les  distinguer  à 
distance,  une  fois  qu'on  avait  appris  à  en  connaître  une  seule. 
Bien  qu'on  fût  déjà  au  mois  de  décembre,  je  ne  remarquai  encore 
aucun  changement  dans  les  larves.  Jusque  tout  récemment,  Zand- 
voort était  resté  la  seule  localité  de  notre  pays  où  l'Hyménoptère 
en  question  eût  été  observé;  antérieurement  à  cette  découverte, 
il  ne  comptait  pas  parmi  les  espèces  indigènes.  Au  mois  d'août 
1870,  M.  Hugo  de  Vries  l'a  retrouvé  dans  les  dunes  de  la  Hollande 
méridionale,  près  de  Naaldwijk  et  de  Voorne.  —  La  larve  et  la 
manière  de  vivre  de  cette  espèce  étaient  inconnues  jusqu'à  présent. 

Une  circonstance  qui  attira  particulièrement  mon  attention, 
c'est    que    plusieurs    des   galles  du  Psamma  étaient  attaquées  et 


DE    l'eURYTOMA    LOA'GIPENNIS   walk.  423 

montraient  un  assez  grand  trou,  qui;  de  l'extérieur,  pénétrait 
jusqu'à  l'endroit  où  avait  résidé  la  larve;  quant  à  celle-ci,  elle 
avait  toujours  disparu  des  excroissances  attaquées.  En  examinant 
ces  trous  avec  plus  de  soin,  j'y  reconnus  des  traces  évidentes 
de  l'action  des  dents  d'un  animal  rongeur,  ce  qui  me  conduit  à 
supposer  que  les  Campagnols  cherchent  dans  ces  larves  une  nourriture 
succulente  pendant  la  saison  rigoureuse,  alors  que  leur  table 
n'est  en  général  pas  trop  abondamment  servie. 

Dans  les  premiers  jours  du  mois  de  mars  de  cette  année,  je 
me  rendis  de  nouveau  à  l'endroit  désigné  et  rassemblai  encore 
quelques  galles;  je  trouvai  les  habitants  toujours  dans  le  même 
état  qu'à  l'époque  de  ma  première  visite,  sauf  qu'ils  avaient 
peut  être  pris  un  peu  d'accroissement.  J'ouvris  alors  aussi  une  des 
excroissances  que  j'avais  rapportées  en  automne  et  qui  avaient 
passé  l'hiver  dans  ma  chambre,  dans  un  verre  sec;  mais  je  ne 
remarquai  aucune  différence  avec  celles  qui  étaient  restées  en  plein 
air.  A  l'une  des  galles  je  vis  un  petit  trou,  par  lequel  je  supposai 
qu'un  Ichneumonide  avait  pu  sortir,  et  dans  une  couple  d'autres 
je  trouvai  une  petite  coque  allongée,  à  tissu  très  fin,  qui  me 
parut  également  provenir  d'un  Ichueumon.  A  la  fin  de  juillet 
j'obtins  de  ces  coques  le  parasite  Bracon  caudiger  (Nées  ab  Es.), 
Hyménoptère  dont  l'existence  dans  notre  pays  était  également 
restée  inconnue.  Les  coques  de  ce  Bracon  variaient  en  couleur 
du  blanc  clair  au  gris  foncé,  et  les  plus  foncées  fournissaient 
toujours  des  individus  mâles.  La  larve  de  cette  espèce  a  échappé 
à  mon  observation. 

Même  au  commencement  d'avril  les  larves  de  l' Eurytoma  lotigi- 
pennis  persistaient  encore  dans  le  même  état  ;  mais ,  vers  le  milieu 
de  ce  mois,  elles  étaient  changées  en  nymphes,  où  l'on  ne 
distinguait  plus  que  des  contours  obscurs  et  dont  la  couleur  était 
le  jaune  clair  uniforme.  L'abdomen  se  terminait  en  une  petite 
pointe  noire,  à  laquelle  pendait  encore,  sous  la  forme  d'une 
membrane  blanche,  la  dépouille  ridée  de  la  larve.  Peu  à  peu  les 
formes  devinrent  plus  distinctes  et  les  linéaments  des  diverses 
parties  commencèrent  à  s'accuser ,  à  partir  du  dos.  Une  couple  de 


424  H.    WEYENBERGH    JR.    SUR    LA    iMANIERE    DE    VIVRE 

jours  avant  Téclosion,  la  couleur  était  partout  d'un  noir  brillant. 
Cette  coloration  avait  commencé  par  la  formation  d'un  point  noir 
sur  le  milieu  de  l'abdomen  et  l'apparition  d'une  teinte  foncée 
sur  les  yeux,  puis  elle  s'était  étendue  successivement  à  tout 
l'abdomen,  à  la  tête  et  au  thorax,  et  en  dernier  lieu  aux  étuis 
des  ailes  et  aux  pattes.  La  fig.  5  montre  la  nymphe  telle  qu'elle 
est  au  moment  où  la  larve  vient  de  passer  à  cet  état ,  et  la  fig.  6 
la  représente  peu  de  temps  avant  l'apparition  de  l'insecte  parfait  ; 
les  yeux  sont  alors  bruns,  et  aux  segments  de  l'abdomen  ainsi 
qu'aux  organes  appendiculaires  se  voient  encore  les  restes  de  la 
couleur  jaune.  La  tête  (que  la  fig.  7  représente  de  face)  offre  une 
forme  triangulaire  et  des  antennes  à  gaines  crénelées  et  assez 
courtes.  Les  pattes  sont  de  longueur  médiocre,  les  ailes  sont 
appliquées  sur  la  face  antérieure  de  l'abdomen  et  un  peu  plus 
longues  que  celui-ci.  Le  thorax  est  très  bombé  sur  le  dos,  et 
l'abdomen  assez  obtus  à  l'extrémité. 

Les  nymphes  se  transformèrent  en  insectes  parfaits  à  la  fin  de 
mai  et  en  juin.  L'état  de  nymphe  dure  donc  environ  six  semaines. 

Pendant  que  j'attendais  de  jour  en  jour  le  développement  des 
insectes  parfaits,  j'eus  encore  la  surprise  de  voir  apparaître  un 
Coléoptère  du  genre  Dasytes  Payk.  (famille  des  Dasytidae,  des 
Malacodermes  (Marseul)),  sslyoïyIq  Dasytes  nobilis  (IWigQr) ,  espèce 
qui  était  également  nouvelle  pour  la  faune  néerlandaise ,  et  dont , 
quelques  semaines  plus  tard  (le  9  août) ,  M.  J.  Kinker  captura  un 
individu  à  Bergen  dans  la  Hollande  septentrionale.  Lorsque  ce 
Coléoptère  se  montra  pour  la  première  fois,  je  crus  à  une  méprise; 
mais,  après  que  d'autres  individus  eurent  suivi  le  premier,  j'examinai 
la  chose  de  plus  près,  et  je  me  convainquis  que  ces  animaux  ve 
naient  bien  réellement  de  l'intérieur  de  la  galle,  à  laquelle  ils 
pratiquaient  un  trou  semblable  à  celui  dont  j'ai  fait  mention  plus 
haut,  en  parlant  du  Bracon  caudiger.  En  tout,  je  recueillis  4  ou 
5  exemplaires  de  Dasytes,  et  je  reconnus  que  dans  toutes  les 
galles  qui  avaient  été  habitées  par  ces  Coléoptères,  les  larves 
di  Eurytoma  avaient  disparu.  Le  Dasytes  nohilis  paraît  donc  être 
aussi  un  parasite  de  V  Eurytoma  long  {permis ,  ce  qui  est  d'ailleurs 


DE    l'eURYTOMA    LONGIPENxMS   walk.  425 

en  parfait  accord  avec  le  régime  zoophage  des  larves  et  des  insectes 
du  genre  Dasyles.  Les  premiers  états  de  ce  Coléoptère  me  sont 
toutefois  restés  inconnus,  attendu  que  rien  n'avait  pu  me  faire 
deviner  sa  présence. 

Pour  éviter  les  redites ,  je  serai  bref  dans  la  description  de 
V Euryioma  longipennis  à  l'état  parfait,  dont  M.  Walker  a  déjà 
fait  connaître  les  caractères  dans  les  Ann.  and  Magaz.  of  ISat.  hist. , 
1845,  t.  XV,  p.  496. 

La  nymphe  n'est  pas  entourée  d'une  coque,  mais  repose  librement 
au  milieu  du  conduit,  qui  passe  par  Taxe  de  la  galle. 

Description  de  l'insecte  parfait  (Voyez:  fig.  8,  l'insecte  entier; 
fig.  9,  une  antenne  grossie;  fig.  10  et  11,  les  ailes). 

La  forme  générale  est  allongée,  et  la  couleur  générale  est  le 
noir  brillant,  parfois  avec  un  éclat  légèrement  métallique.  Cette 
couleur  recouvre  les  parties  suivantes:  la  tête  et  les  yeux,  qui 
sont  grands,  les  antennes  assez  courtes,  les  mâchoires,  le  cou, 
qui  se  distingue  assez  bien,  le  thorax,  qui  est  allongé  et  plus  ou 
moins  rude  et  inégal  à  la  face  dorsale,  enfin  l'abdomen,  qui  est 
piriforme  et  terminé  en  pointe.  Les  hanches ,  la  partie  supérieure 
des  fémurs,  surtout  au  côté  interne  des  pattes  de  devant,  la 
partie  moyenne  des  tibias  des  pattes  postérieures  et  les  tarses 
sont  également  noirs  ;  le  reste  des  pattes  a  une  couleur  brunâtre , 
passant  du  brun  clair  au  brun  foncé.  Les  ailes  ne  sont  pas  très 
diaphanes,  mais  plus  ou  moins  troubles  et  un  peu  irisées  à  la 
pointe.  Les  pattes  ne  sont  pas  longues;  par  contre,  les  ailes 
dépassent  de  beaucoup  la  pointe  de  l'abdomen,  de  sorte  que 
cette  espèce  porte  à  assez  bon  droit  le  nom  de  longipennis. 
La  nervure  primaire  des  ailes  est  colorée  en  brun  clair.  La  lon- 
gueur de  l'insecte  est  d'environ  4  millimètres,  l'expansion  des 
ailes  mesure  7  à  8  millimètres.  Les  sexes  se  distinguent,  non- 
seulement  par  la  forme  plus  ou  moins  aiguë  du  bout  de  l'abdomen 
et  la  présence  ou  l'absence  de  la  tarière,  mais  aussi  par  les 
antennes,  qui  sont  plus  longues  chez  le  mâle,  et  par  les  ailes 
supérieures,  dont  la  pointe  montre  chez  les  femelles  une  petite 
nervure  transversale. 


426  H.    WEYENBERGH    JR.    SUR    LA    MANIERE    DE    VIVRE 

L'œuf  m'est  resté  inconnu,  et  mes  petits  Hyménoptères  captifs 
ue  s'accouplèrent  pas.  A  l'état  de  liberté,  l'accouplement,  la 
ponte  et  l'éclosion  des  œufs  paraissent  se  suivre  à  d'assez  courts 
intervalles,  car  dès  le  commencement  d'août  on  trouve  de  nouveau 
de  jeunes  larves.  Il  est  probable  que  l'introduction  de  l'œuf  dans 
la  tige  du  Psamma  se  fait  de  la  manière  ordinaire. 

Ces  animaux  sont  d'un  naturel  inerte  et  apathique  ;  le  vol 
paraît  leur  être  difficile,  et  souvent  ils  restent  des  journées 
entières  sans  changer  de  place,  et  cela  soit  qu'on  les  tienne  dans 
l'obscurité,  ou  qu'on  les  expose  aux  rayons  solaires,  ou  qu'on 
leur  envoie  des  bouffées  de  tabac.  Ce  défaut  de  mobilité  explique 
en  partie  le  peu  d'abondance  de  l'espèce,  surtout  si  l'on  tient 
compte  de  ce  qu'elle  est  en  butte  aux  attaques  d'Ichneumons,  de 
Coléoptères  et  de  Campagnols,  ennemis  auxquels  viendront  s'ajouter 
maintenant  les  entomologistes. 

J'ignore  si,  outre  l'Euryloma  ici  décrit  et  F E.  flavipes ,  qui  vit 
dans  l'orge,  il  y  a  encore  d'autres  espèces  de  ce  genre  qui  aient 
les  mêmes  habitudes  phytophages.  Par  contre ,  le  régime  zoophage , 
parasite,  est  bien  constaté  pour  un  grand  nombre  d'espèces,  telles 
que:  E.  ahrotani  (Panzer)  dans  le  Bombyx  pini  L.  et  le  Liparis 
dispar  L.,  E.  abielicola  (Katzeburg)  dans  \q  Curculio  violaceusF. ^ 
E.  extiucta  (Ratzeb.)  dans  le  Nemafus  angiislatmKl.y  E.  aciciilala 
(Ratzeb.)  dans  le  Nematus  pedunculi  Kl.  et  dans  le  Cecidomyia 
salicina  Low. ,  E.  cosfata  (Ratzeb.)  dans  des  cocons  de  Microgasier 
provenus  du  Pieris  crataeLfi  L.,  E.  flavovaria  (Ratzeb.)  dans 
l'Hylesinus  fraxini  F.,  E.  plumata  (Illiger)  dans  le  Microqaster 
liparidis  Ratz. ,  E.  signala  (Nées  ab  Es.)  dans  des  galles  de  Cynips , 
E.  striolata  (Ratzeb.)  dans  r Eccoplogaster  intricatusM2i\. ,  et  beau- 
coup d'autres.  Il  y  a  bien  encore  une  espèce  qui  a  été  citée  comme 
vivant  sur  une  plante,  savoir  l'E.  exilis  (J)ViioVix)  suyXc  Centaiirea 
niqra  L.  ;  mais  on  n'indique  pas  de  quelle  façon  elle  y  vit ,  si 
c'est  dans  une  galle  ou  de  toute  autre  manière. 

M.  Westwood  dans  son  Introd.  to  modem  classif.y  t.  II,  p.  161 
(Note) ,  et  M.  Blanchard  dans  son  Hisl.  nal.  des  ins.  ne  croyaient 
pas    encore    que  certains  Eurytoma  produisissent  eux-mêmes  des 


DE  l'eurytoma  longipennis  walk.  427 

galles,    mais  pensaient  que  ces  insectes    ne  se  trouvent  dans  ces 
excroissances  que  „pour  se  nourrir  des  vrais  habitants." 

On  sait  peu  de  chose  concernant  la  distribution  géographique 
de  V Eurytoïiia  longipennis.  L'auteur  qui  l'a  décrit  le  premier  l'a 
trouvé  en  i\ngleterre;  il  a  été  rencontré  ensuite  dans  la  Néer- 
lande,  aux  endroits  indiqués  ci-dessus,  par  MM.  Hugo  de  Vries 
et  Kitsema,  ainsi  que  par  moi-même. 
Harlem,  1870. 


EXPLICATION      DES     FIGURES. 

(PI.  XII). 

Fig.     1.  Galle  du   Psamma  arenaria.  L. 
„       2.  Larve  de  l'Eurytoma  longipennis  Walk.  (grossie). 
„       3.  Tête  de  la  larve  (très  grossie). 
„       4.  Un  des  segments  moyens  (très  grossi). 
„       5.  La  nymphe,  peu  de  temps  après  sa  formation  (grossie). 
„       6.  La  nymphe ,  peu  de  temps  avant  la  sortie  de  l'insecte 

parfait  (grossie). 
„       7.  La  tête  de  la  nymphe,  de  face  (grossie). 
„        8.   Euryloma  longipennis  Walk.  ?  (grossi). 
„       9.  L'antenne  d'un  mâle  (grossie). 

„  10.  L'aile  supérieure  d'un  mâle  (grossie). 

„  11.  L'aile  inférieure  d'un  mâle  (grossie). 

„  12.  Une  patte  de  derrière  (grossie). 

„  13.  Une  partie  d'une  aile  (très  grossie). 


NB.  Les  poils  nombreux  qui  couvrent  les  ailes,  comme  on  le 
voit  dans  les  fig.  10  et  11,  se  trouvent  chez  les  deux 
sexes.  Dans  la  fig.  8 ,  pour  plus  de  clarté ,  ce  caractère 
n'a  pas  été  exprimé. 


LA  PREUVE  DIRECTE 


QUE     LES 


GLOBULES  DU  SANG  FOURNISSENT  DE  LA  FIBRINE, 


A.    HEYNSIUS. 


M.  van  der  Horst  avait  remarqué  ')  que  si  le  sang  d'un 
animal  est  reçu  immédiatement,  au  sortir  des  vaisseaux,  dans 
une  solution  de  Cl  Na  d'une  concentration  telle  que  la  coagulation 
soit  empêchée,  et  si,  après  que  les  globules  se  sont  déposés,  le 
plasma  étendu  est  saturé  de  ClNa,  il  apparaît  à  la  surface  du 
liquide  une  couche  de  matière  albuminoïde  insoluble,  semblable 
à  la  fibrine,  tandis  que,  au  fond  du  vase,  il  se  forme  un  pré- 
cipité floconneux  de  matière  albuminoïde  soluble  dans  le  chlorure 
de  sodium  étendu  et  susceptible  d'être  coagulée  dans  cette  disso- 
lution. M.  van  der  Horst  avait  constaté  en  outre  qu'en  ajoutant 
aux  globules  du  sang,  séparés  avec  soin,  des  dissolutions  salines 
et  traitant  ensuite  le  mélange  par  l'eau,  on  peut  extraire  des 
globules  une  matière  albuminoïde,  qui  par  ses  caractères,  ainsi 
que  l'avait  déjà  remarqué  M.  Denis,  se  rapproche  le  plus  de 
la  fibrine. 

Postérieurement,  j'avais  trouvé  que  cette  matière  s'obtient 
aussi,  du  moins  avec  du  sang  d'oiseau,  quand  le  sang  défibriné 
est  mêlé  rapidement  avec  une  grande  quantité  d'eau,    et  j'avais 


)  Voyez  Arch.  néerl.,  t.  IV,  p.  97  et  suiv. 


A.    HEYNSIUS.    LA    PREUVE    DIRECTE    QUE    LES,    ETC.  429 

moDtré  que  la  matière  ainsi  séparée  renferme  au  moins  1  "/o  de  soufre  '  ). 

J'avais  trouvé  de  plus  que  lorsque  le  sang,  aussitôt  qu'il  a 
été  retiré  des  vaisseaux,  est  mêlé  avec  une  certaine  quantité  de 
de  phosphate  de  soude,  il  fournit,  dans  la  grande  majorité  des 
cas,  plus  de  fibrine  que  le  sang  qui  n'a  pas  subi  ce  mélange, 
et  j'avais  même  pu  communiquer  quelques  expériences  dans 
lesquelles  la  proportion  de  fibrine  avait  été,  de  cette  manière, 
plus  que  doublée  -). 

J'avais  montré  enfin  que  lorsque  le  sang  est  reçu  dans  une 
solution  faible  de  sel  marin ,  refroidie  à  0°,  le  plasma  ainsi  étendu 
donne,  même  après  qu'on  y  a  ajouté  de  la  globuline,  beaucoup 
moins  de  fibrine  qu'on  n'en  retire  du  sang  lui-même  ^•). 

Ces  résultats  m'avaient  forcé  de  renoncer  à  l'opinion  générale- 
ment adoptée  depuis  J.  Millier,  d'après  laquelle  la  fibrine,  — 
ou  la  matière  fibrinogène  selon  l'hypothèse  de  M.  Schmidt,  — 
proviendrait  du  plasma;  ils  m'avaient  conduit  à  indiquer  au 
contraire  le  stroma  des  globules  comme  la  source  principale  de 
la  fibrine  du  sang. 

C'était  là,  en  effet,  la  seule  explication  que  permettaient  les 
résultats  obtenus.  L'expérience  sur  laquelle  se  fondait  J.  Millier 
pour  regarder  la  fibrine  comme  partie  intégrante  du  plasma,  — 
savoir,  la  coagulation  du  sang  de  grenouille  après  qu'il  a  été 
privé  de  ses  globules  par  la  filtration ,  —  ne  constitue  évidemment 
pas  une  preuve  suffisante;  cette  manière  de  voir  est,  au  moins 
sous  certains  rapports,  en  complète  opposition  avec  les  phéno- 
mènes observés  par  moi,  tandis  que,  d'un  autre  côté,  tous  les 
faits  connus  se  concilient  parfaitement  avec  l'hypothèse  que  le 
plasma  du  sang  vivant  ne  renferme  pas  de  matière  fibrinogène  en 


1  )  Voyez  Jrch.  néerl. ,  t.  IV,  p.  133. 

2)  Loc.  cit.,  p.  147.  Depuis  lors  j'ai  encore  répété  cette  expérience  plusieurs 
fois  et  toujours  avec  le  même  succès.  Il  est  inutile  de  faire  connaître  ces 
nouveaux  résultats,  attendu  que  j'ai  maintenant  des  arguments  plus  décisifs  à 
produire  en  faveur  de  la  proposition  que  les  globules  du  sang  renferment  de 
la  fibrine. 

3  )  Loc.  cil. ,  p. 


430  A.    IIEYNSIUS.    LA    PREUVE    DIRECTE    QUE    LES 

quantité  notable ,  mais  que  c'est  seulement  après  l'extraction  du 
sang  que    le    stroma  des  globules  cède  cette  matière  au  plasma. 

Mais,  quelque  probabilité  que  mon  hypothèse  reçût  des  phéno- 
mènes observés,  la  preuve  directe  que  les  globules  donnent  de 
la  tibrine  manquait  encore.  Avec  les  globules  isolés  je  ne  parve- 
nais plus  à  produire  une  coagulation ,  une  séparation  de  fibrine. 
„Ce  résultat  négatif/'  disais-je  '),  „ne  constitue  du  reste  pas 
un  argument  contre  l'hypothèse  que  la  fibrine  soit  fournie  en  partie 
par  les  corpuscules  du  sang.  Si  ces  corpuscules  ont  perdu  leur 
vitalité  et  si,  par  suite,  comme  dans  d'autres  organismes  élémen- 
taires, une  partie  plus  ou  moins  considérable  du  contenu  albumineux 
s'est  coagulée,  il  n'y  a  rien  d'étonnant  à  ce  qu'on  ne  réussisse 
pas  à  obtenir  une  seconde  coagulation.  Nous  aurons  alors  beau 
dissoudre  cette  matière  dans  des  dissolutions  salines,  nous  n'y 
verrons  pas  plus  de  coagulation  que  dans  les  solutions  de  myosine 
ou  de  quelque  autre  protoplasma  coagulé,  —  pas  plus  que  dans 
les  solutions  de  la  fibrine  elle-même."  Néanmoins,  il  va  sans 
dire  qu'il  me  paraissait  toujours  très  désirable  de  donner  la 
preuve  directe  en  question,  si  la  chose  était  possible. 

Jusqu'alors  j'avais  opéré  surtout  sur  du  sang  de  vache,  de 
veau,  de  chien,  de  lapin  et  de  poulet,  et,  pour  faire  déposer 
les  globules  et  maintenir  le  plasma  liquide,  ce  sang  avait  été 
mélangé  ordinairement,  au  sortir  de  la  veine,  avec  une  solution 
de  Cl  Na  d'environ  3"/o.  Or  on  sait  que,  pour  observer  les  phé- 
nomènes de  contraction  du  protoplasma ,  il  faut  éviter  l'intervention 
de  tous  les  agents  énergiques ,  et  employer  une  dissolution  saline 
de  tout  au  plus  y^  ^  l^/o?  si  l'on  ne  veut  pas  voir  ces  phéno- 
mènes de  contraction  s'arrêter  très  promptement  par  suite  de 
la  coagulation  du  protoplasma. 

Pour  cette  raison,  j'avais  déjà  essayé  antérieurement  si  des 
solutions  de  sel,  moins  concentrées  que  celles  dont  il  avait  été 
fait  usage  primitivement,  ne  seraient  pas  également  capables  de 
prévenir    la   coagulation   du  plasma.  J'avais  trouvé  qu'en  refroi- 


1)  Loc.  cit.,  p.  142. 


GLOBULES    DU    SANG    FOURNISSENT    DE    LA    FIBRINE.  431 

dissant  rapidement  à  0°,  ou  pouvait  effectivement  se  contenter 
d'une  proportion  de  sel  un  peu  moindre,  mais,  même  dans  ces 
conditions,  le  sang-  des  animaux  précités  ne  restait  liquide  que 
lorsque  la  proportion  de  sel  s'élevait  au  moins  à  2,5"/o. 

Parmi  les  différentes  sortes  de  sang ,  celui  de  cheval  se  distingue 
par  la  lenteur  de  sa  coagulation.  A  la  température  ordinaire  ce 
sang  reste  liquide  pendant  une  heure  et  plus  après  l'extraction, 
et  lorsqu'on  prend  les  soins  convenables  pour  le  refroidir  rapi- 
dement à  0^,  on  peut,  comme  Ton  sait,  lui  conserver  l'état 
liquide  pendant  beaucoup  plus  longtemps  et  même  pendant 
24  heures. 

D'après  cela,  si  les  globules  du  sang  fournissent  réellement 
de  la  fibrine,  je  pensai  qu'il  ne  serait  peut-être  pas  impossible 
de  réaliser  avec  le  sang  du  cheval  ce  que  j'avais  jusqu'alors 
vainement  tenté  d'obtenir  avec  le  sang  d'autres  animaux.  Peu 
importe  que  l'on  ignore  la  raison  pour  laquelle  ce  sang  se  coagule 
plus  lentement  ;  le  fait  seul  donnait  lieu  d'espérer  qu'on  parvieu- 
drait  peut-être,  avec  lui,  à  fournir  la  preuve  directe  désirée.  Peut- 
être  des  solutions  salines  plus  faibles  suffiraient-elles  pour  con- 
server à  ce  sang  sa  liquidité  et  par  conséquent  pour  maintenir  le 
protoplasma  des  globules  lui-même  à  l'état  vivant,  non  coagulé. 

Comme,  pour  obtenir  ce  résultat,  le  refroidissement  rapide  à 
0-  était  certainement  une  condition  nécessaire,  je  remis  l'exécution 
de  l'expérience  jusqu'au  moment  où  je  pourrais  disposer  des  grands 
froids  de  l'hiver.  Dans  mes  expériences  antérieures  la  température 
de  l'air  avait  été  le  plus  souvent  au-dessus  de  0^,  et,  bien  que 
le  sang  après  son  extraction  eût  toujours  été  refroidi  à  0°,  cette 
circonstance  pouvait  bien  ne  pas  être  tout  à  fait  étrangère  au 
fait  que  la  solution  saline  devait  contenir  au  moins  2%  p.  c.  de 
Cl  Na  pour  maintenir  le  plasma  liquide. 

Je  pris  donc,  pour  commencer,  des  solutions  de  chlorure  de 
sodium  à  4  p.  c,  à  3  p.  c.  et  à  2  p.  c,  et  dans  1000  ce.  de  ces 
solutions  je  laissai  se  déposer  environ  100  ce.  de  sang  de  cheval. 
Comme  moyen  de  contrôle  je  fis,  pour  chacun  de  ces  degrés  de 
concentration,    deux    expériences    différentes.   Les   flacons  et  les 


432  A.    HEYNSIUS.    LA    PREUVE    DIRECTE    QUE    LES 

solutions  salines  étaient  pesés  d'avance  et  refroidis  à  0°.  Le  sang , 
reçu  dans  des  verres  gradués  refroidis  à  0"",  était  versé  immé- 
diatement dans  la  solution  saline,  et  le  mélange  était  placé  dans  une 
masse  considérable  de  glace  fondante.  Après  qu'il  y  était  resté 
pendant  assez  longtemps  pour  que  sa  température  se  fût  abaissée  à 
0^,  on  déterminait  par  une  pesée  la  quantité  de  sang  ajoutée. 
Lorsque  les  globules  du  sang  étaient  entièrement  déposés,  on 
décantait  avec  précaution  et  d'une  manière  aussi  complète  que 
possible  le  sérum  étendu.  Le  flacon  était  ensuite  pesé  de  nouveau , 
ce  qui  donnait  le  poids  des  globules  déposés  plus  le  plasma 
étendu  qui  leur  était  resté  adhérent.  Les  globules  ainsi  obtenus 
étaient  en  partie  délayés  dans  du  sérum  de  vache  refroidi  à  0^, 
en  partie  dissous  dans  de  l'eau  refroidie  puis  chauffés  à  40^. 

L'épreuve  réussit  parfaitement.  Dans  chacune  des  six  expériences 
instituées  il  y  eut  coagulation  évidente;  mais  c'est  surtout  avec 
les  globules  séparés  du  sang  par  la  solution  de  chlorure  de 
sodium  à  2  p.  c. ,  que  le  résultat  fut  frappant.  Avec  ceux-là 
on    obtint    une    coagulation    en    caillot   bien   formé. 

La  réussite  ainsi  constatée,  j'entrepris  naturellement  une  déter- 
mination quantitative,  qui  me  donna  les  chiffres  suivants: 

Richesse    Quantité  Globules  Proportion 

de  la       de  sansr,    déposés,  de  fibrine ,  ^^  ,  • 

.1..^;,.,.        „.,  „_""     J  „..    '      en  r  Observations. 

0,07  Mélangé  avec  du  sér.  de  vache. 

0,08  „          „     de  l'eau. 

0,08  „          „     du  sér.  de  vache. 

0,11  „          „     de  l'eau. 

0,14  „          „     du  sér.  de  vache. 

0,13  „          „     de  l'eau. 

Ce  résultat  est  certainement  très  satisfaisant.  Le  sang  lui-même 
ayant  fourni  0,6  p.  c.  de  fibrine,  on  voit  que  l  de  cette  quantité 
peut  encore  être  retiré  des  globules.  Il  est  impossible  de  faire  dériver 
cette  fraction  du  plasma  adhérent,  car  dans  cette  hypothèse,  en 
admettant  par  exemple  qu'il  faille  encore  déduire  du  poids  des 
globules  la  moitié  pour  le  plasma  qui  leur  adhère,  on  arriverait 


Apei 

solution 
de  Cl  Na. 

en  gr. 

en  gr 

1. 

4% 

102 

52 

2. 

4  „ 

115 

58 

3. 

3  „ 

104 

47 

4. 

3  „ 

101 

44 

5. 

2  „ 

117,5 

79 

6. 

2  „ 

105 

53 

GLOBULES    DU    SA>G    FOURNISSENT    DE    LA     FIBRINE.  433 

à  des  chiffres  absurdes  pour  la  richesse  en  fibrine  de  ce  plasma. 
Prenons  le  cas  le  plus  défavorable  (expérience  1),  celui  dans 
lequel  a  été  obtenue  la  plus  petite  quantité  de  fibrine.  Supposons 
que  le  poids  des  globules  provenant  de  102  gr.  de  sang  ne  soit 
que  de  26  gr. ,  et  que  le  reste  des  52  gr.  trouvés ,  c'est-à-dire 
26  gr. ,  doive  être  attribué  au  plasma  qui  mouille  les  globules. 
Le  poids  total  de  la  solution  saline  dans  laquelle  le  sang  a  été 
reçu  s'élevait  à  1120  gr.  Dans  ce  poids  total  il  aurait  donc  dû 
se  trouver  3,5  gr.  de  fibrine,  ce  qui  assignerait  au  plasma  sanguin 
lui-même  une  richesse  en  fibrine  d'environ  4,5  p.  c. 

Mais  la  proportion  de  fibrine  du  plasma  a  aussi  été  déterminée 
directement.  On  prit  200  ce.  de  plasma  soigneusement  séparé 
des  globules,  —  lequel  plasma  était  parfaitement  incolore  dans 
les  expériences  3 — 6,  mais  d'une  teinte  rouge  clair  dans  les 
expériences  1  et  2,  —  et  on  les  chauffa  à  40°,  après  les  avoir 
étendus  d'une  quantité  d'eau  telle  que  la  proportion  de  sel 
fût  de  2  p.  c.  dans  tous  les  liquides.  Par  ce  traitement,  il  ne 
se  sépara  du  liquide  de  5  et  6  qu'une  quantité  insignifiante  de 
matière  albuminoïde,  du  liquide  de  3  et  4  un  peu  plus,  et  de 
celui  de  1  et  2  une  quantité  assez  notable.  Dans  aucune  de  ces 
expériences  la  coagulation  ne  donna  lieu  à  un  caillot ,  partout  on 
n'obtint  que  des  flocons.  La  détermination  quantitative  fournit  le 
résultat  suivant: 

Fibrine  Eibrine 

en  grammes.  du  plasma 

en  %. 


1. 

0,120 

c'est-à-dire     0,68 

2. 

0,098 

0,55 

3. 

0,020 

0,11 

4. 

0,020 

0,11 

5. 

0,007 

0,04 

6. 

0,001 

0,04 

Le   chiffre  plus  élevé  obtenu  dans  les  expériences  1  et  2,   où 
le  plasma  était  un  peu  coloré,    faisait  naître  la  présomption  que 
les  liquides  abandonneraient  plus  de  fibrine  si  on  les  mélangeait 
Archives  Néerlandaises,  T.  V.  28 


434  A.     HEYNvSIUS.    LA    PREUVE    DIRECTE     QUE    LES 

avec  du  sérum.  On  ajouta  par  conséquent  à  chacun  d'eux  25  ce. 
de  sérum  de  vache,  après  quoi  on  obtint: 

ribrine  Fibrine 

en  grammes  du   plasma 

en  o/. 

1.  0,014  c'est-à-dire  0,08 

2.  0,0J2  „  0,06 

3.  0,034  „  0,19 

4.  0,029  „  0,15 

5.  0,045  „  0,20 

6.  0,030  „  0,16 

La  quantité  totale  d'albumine  coagulable  (fibrine)  dans  le 
plasma  s'élevait  donc  à: 

1 0,76  o/o 

2 0,61  „ 

3 0,30  „ 

4 0,26  „ 

5  ....  , 0,24  „ 

6 0.20  „ 

On  pourrait  penser  toutefois  que  par  suite  de  l'une  ou  l'autre 
circonstance,  telle  par  exemple  que  la  trop  forte  proportion  de 
sel  dans  le  liquide,  la  coagulation  du  plasma  avait  été  incom- 
plète. Pour  ce  motif  je  cherchai  encore  combien  de  matière  al- 
buminoïde  il  était  possible  de  retirer  du  plasma  à  l'aide  de  la 
saturation  par  Cl  Na.  Je  trouvai  ainsi  dans  200  ce.  : 

1.  0,175     c'est-à-dire     0,85  "/o 

2.  0,183  „  0,99    „ 

3.  0,166  „  0,88    „ 

4.  0,151  „  0,89    ,. 

5.  0,155  „  0,70    „ 

6.  0,117  „  0,62    „ 

On  voit  d'après  cela  que  la  quantité  de  fibrine  ou  de  matière 
fibrinogène  contenue  dans  le  plasma  est  absolument  incapable  de 
rendre  compte  de  la  quantité  de  fibrine  qui  a  été  retirée  des 
globules  séparés  du  sang. 


GLOBULES    DU    SANG    FOURNISSENT    DE    LA    FIBRINE.  435 

Cette    conclusion   est   d'ailleurs  en  parfait  accord  avec  la  pro- 
portion de  fibrine  du  sang  lui-même.    J'ai  trouvé  en  effet: 


Sang 

Fibrine 

Fibrine 

en  grammes. 

en  grammes. 

en  %. 

103 

0,601 

0,59 

62,5 

0,419 

0,67 

82 

0,513 

0,64 

Quelque  satisfaisant  qu'eût  été  le  résultat,  je  tenais  pourtant 
à  répéter  l'expérience  encore  une  fois.  Il  avait  été  reconnu  qu'une 
solution  de  Cl  Na  à  2  ^j^  était  bien  suffisante  pour  maintenir  le 
sang  à  l'état  liquide,  et  c'est  précisément  avec  cette  solution 
faible  qu'on  avait  extrait  le  plus  de  fibrine  des  globules.  Peut- 
être  était-il  possible  d'employer  des  solutions  salines  encore  moins 
concentrées.  Les  expériences  communiquées  ci-dessus  avaient  eu 
lieu  le  3  février  dernier ,  par  une  température  qui ,  bien  que  peu 
élevée,  était  pourtant  de  quelques  degrés  au-dessus  de  0^.  Je 
voulus  donc  recommencer  l'épreuve  à  une  température  encore  plus 
basse,  et  recevoir  en  outre  le  sang  dans  des  solutions  salines 
encore  plus  faibles.  En  conséquence,  le  14  février ,  la  température 
de  l'air  étant  de  3 — 4°  au-dessous  de  0^ ,  du  sang  de  cheval  fut 
recueilli,  de  la  manière  indiquée  précédemment,  dans  des  solu- 
tions de  Cl  Na  à  0,5  p.  c.  et  1  p.  c. 

Dans  la  solution  à  0,5  p.  c.  les  globules  du  sang  ne  se  dé- 
posèrent qu'imparfaitement  ;  en  outre ,  la  solution  se  colora  for- 
tement et  après  24  heures  elle  était  partiellement  coagulée. 

Au  contraire,  dans  la  solution  à  1  p.  c.  de  ClNa,  le  dépôt 
des  globules  se  fit  de  la  manière  la  plus  nette:  le  liquide  ne 
montrait  aucune  trace  de  coloration  ni  de  coagulation.  Les 
globules  déposés  formaient  sur  le  fond  du  vase  une  couche 
d'un  rouge  vif.  Ils  furent  délayés  dans  du  sérum  refroidi  à  0^, 
puis  abandonnés  à  eux-mêmes  dans  une  pièce  chauffée.  Une 
coagulation  parfaite ,  en  caillot ,  s'y  produisit ,  et  la  détermination 
quantitative  donna  le  résultat  suivant: 

28^*^ 


436  A.    HEYNSTUS.    LA    PREUVE    DIRECTE     QUE    LES 


Richesse  de 

Quantité 

Globules 

Proportion 

Expérience. 

la  solution 

de  sang , 

déposés , 

de  librine. 

de  Cl  Na. 

en  grammes. 

en  grammes. 

en%. 

7 

1^ 

112 

61 

1,1 

On  prit  630  ce.  du  plasma  étendu  et  limpide  dans  lequel  les 
globules  s'étaient  déposés,  et,  après  y  avoir  ajouté  50  c.c.  de 
sérum  de  vache,  on  chauffa  à  40".  On  obtint  ainsi  0,067  gr.  de 
fibrine.  Les  globules  avaient  été  mélangés  avec  1064  gr.  de 
liquide  ;  on  avait  donc  trouvé  pour  la  quantité  totale  de  plasma 
sanguin  0,114  gr.  ou  0,1  p.  c.  de  fibrine;  par  la  saturation  avec 
Cl  Na  on  en  précipita  0,65  p.  c.  de  matière  albuminoïde. 

On  effectua  également  une  détermination  quantitative  de  la 
fibrine  du  sang  lui-même,  sur  une  portion  de  ce  liquide  recueillie 
immédiatement  après  la  première.  290  gr.  de  sang  fournirent 
1,21  p.  c.  de  fibrine  (déterminée  par  le  lavage  du  caillot). 

Le  résultat,  comme  on  voit,  ne  laisse  rien  à  désirer.  Il  est 
établi  que  quand  du  sang  de  cheval  est  reçu,  sous  des  condi- 
tions favorables,  dans  une  solution  de  Cl  Na  à  1  p.  c. ,  le  plasma 
ne  renferme  que  9  p.  c.  de  la  quantité  de  fibrine  du  sang ,  tandis 
que  les  globules  fournissent  le  reste,  c'est-à-dire  91  p.  c. 

La  proposition,  que  les  globules  du  sang  sont 
réellement  la  source  principale  de  la  fibrine  de  ce 
liquide,    est    donc    aussi    démontrée    directement. 

Lorsque  les  globules  du  sang,  déposés,  comme  on  vient  de  le 
dire,  dans  une  solution  de  chlorure  de  sodium  à  1  p.  c. ,  sont 
portés  sous  le  microscope,  on  ne  constate  d'abord  aucun  chan- 
gement dans  leur  forme.  Mais,  au  bout  de  très  peu  de  temps, 
leurs  contours  deviennent  irréguliers.  Ils  commencent  à  s'agglu- 
tiner entre  eux  et  forment  des  grumeaux  d'une  matière  gélatineuse, 
colorée  en  rouge.  On  acquiert  donc  aussi  immédiatement ,  par  la 
vue,  la  preuve  de  la  coagulation  des  globules  du  sang. 

J'aurais  volontiers  étudié  de  plus  près,  sous  le  microscope, 
ces  phénomènes  de  coagulation ,  mais  je  n'ai  pas  été  à  même  de 
le  faire,  n'ayant  plus  pu  obtenir  du  sang  de  cheval.  Surtout  pendant 
l'hiver,    qui  est  la  saison  la  plus  favorable  pour  ces  recherches, 


GLOBULES    DU    SA>'G    FOURMSSE.NT    DE    LA     FIBRINE.  437 

on  n'aime  pas  à  laisser  subir  une  saignée  à  un  cheval.  Au  prin- 
temps on  l'accorde  plus  facilement,  et  j'espère  par  conséquent 
avoir  bientôt  l'occasion  de  reprendre  cette  étude  ^). 

La  même  raison  m'a  empêché  de  rechercher  si  une  proportion 
de  fibrine  aussi  élevée  que  celle  donnée  par  l'expérience  7  se 
présente  plus  fréquemment  chez  le  cheval.  Dans  l'expérience  pré- 
cédente la  quantité  n'avait  pas  été  aussi  grande.  L'animal  qui 
avait  fourni  le  sang  était  sain ,  mais  vieux.  Le  sang  se  coagulait 
très  lentement ,  en  partie ,  sans  doute ,  par  suite  de  la  basse  tempé- 
rature; or  la  coagulation  lente  semble  augmenter,  en  général, 
la  proportion  de  fibrine. 

Dans  une  autre  expérience ,  480  gr.  de  sang  du  même  cheval 
qui  avait  fourni  la  matière  de  l'expérience  1,  furent  mélangés 
avec  5  litres  d'une  dissolution  de  Cl  Na  à  1  p.  c.  refroidie  àO'', 
et  les  globules  déposés  furent  délayés  dans  assez  de  sérum  de 
vache  pour  que  le  volume  total  fût  de  500  ce,  c'est-à-dire  à 
peu  près  égal  à  celui  du  sang  employé.  Ici  également  on  obtint 
un  caillot  parfait,  qui  donna  12,345  gr.  de  fibrine  humide.  —  Cette 
fibrine,  soumise  au  lavage,  n'abandonne  que  très  difficilement  la 
matière  colorante  qui  l'imbibe,  et  elle  reste  toujours  d'une  teinte 
un  peu  grisâtre.  Sous  ce  rapport,  elle  se  comporte  comme  la 
matière  qui  se  sépare  du  sang  défibriné  de  poulet ,  quand  on  le  mêle 
avec  de  l'eau:  cette  matière  non  plus  ne  peut  être  obtenue  en- 
tièrement incolore. 

Quoique  la  nature  albuminoïde  de  la  matière  obtenue  par  la 
coagulation  des  globules  du  sang  se  démontre  facilement  par  les 
réactifs  ordinaires,  je  n'ai  pourtant  pas  négligé  d'en  contrôler  la 
composition  élémentaire.  Avant  de  la  soumettre  à  l'analyse  je  la 

1  )  Bien  que  je  ne  mécouuaisse  pas  l'importauce  d'une  pareille  étude  micros- 
copique, je  crois  pourtant  —  ce  qui  du  reste  a  déjà  été  constaté  dans  beaucoup 
de  recherclies  raicrocliimiques  très  diverses  et,  pour  le  sang  en  particulier,  dans 
celles  de  M.  Briicke  {Sitzungsher.  d.  IFien.  Akad. ,  t.  LIX)  et  de  M.  Rollet 
{U-dtersuch.  aus  dem  Institute  in  Graz ,  1870)  —  qu'elle  peut  simplement  servir 
de  guide  et  de  moyen  de  contrôle  pour  l'étude  macroscopique,  mais  qu'elle  est 
tout  à  fait  incapable  de  nous  éclairer  sur  la  véritable  nature  chimique  des  prin- 
cipes constituants. 


438  A.    HEYNSIUS.    LA     PREUVE     DIRECTE    QUE    LES 

fis  bouillir   à   différentes   reprises  avec  de   l'étlier  et  de  ralcool; 
puis  sécher  à  une  température  de  130°. 

0,2834  gr.  donnèrent  0,5552  gr.  CO^  et 

0,1881    „     H,0. 
0,2802  gr.  donnèrent  NH3  en  quantité  suffisante  pour  sa- 
turer  3,25   ce.  d'acide  cblorhydrique  normal. 
0,2842  gr.   donnèrent  0,0336  gr.  BaSO^. 
La  matière  renfermait  par  conséquent  : 

C 53,4 

H 7,4 

N 16,3 

S 1,2 

0 21,7 

Bien  qu'il  soit  prouvé  maintenant  que  les  globules  du  sang 
fournissent  de  la  fibrine  lorsque  ce  liquide  est  extrait  des  vais- 
seaux ,  cela  ne  veut  pas  dire  que  la  fibrine  soit  un  élément  con- 
stitutif des  globules  vivants.  Au  contraire ,  si  elle  faisait ,  comme 
telle,  partie  constituante  des  globules  vivants,  il  est  clair  qu'elle 
ne  pourrait  plus  être  cédée  par  les  globules  au  plasma.  Quant  à 
la  forme  sous  laquelle  la  matière  fibrinogène  existe  réellement 
durant  la  vie,  c'est  ce  qu'il  m'est  tout  aussi  impossible  de  préciser 
pour  la  matière  fibrinogène  des  globules  du  sang  que  pour  celle  des 
muscles  et  du  protoplasma  en  général.  Mais,  d'un  côté  comme  de 
l'autre,  les  phénomènes  observés  nous  conduisent  à  l'hypothèse,  que 
cette  matière  fibrinogène  existe  dans  le  protoplasma  vivant  à 
l'état  de  combinaison  avec  d'autres  matières,  et  que  cette  com- 
binaison se  défait  au  moment  de  la  mort. 

Lorsque,  à  ce  moment,  le  protoplasma  est  en  contact  avec 
un  liquide,  une  partie  plus  ou  moins  considérable,  suivant 
les  circonstances,  de  la  matière  fibrinogène  elle-même,  ou 
peut-être  de  sa  substance-mère,  passe  dans  ce  liquide.  Le  reste 
se  coagule  dans  le  protoplasma  même. 

Il  est  difficile  de  dire  combien  il  existe  de  cette  matière  fibri- 
nogène dans  le  plasma  du  sang  vivant.  Mes  expériences  montrent 
que  la  quantité  n'en  peut  être  grande.    La  dissolution  de  Cl  Na 


GLOBULES    DU    SANG    FOURiMSSENT    DE    LA     FIBRINE.  439 

à  1  p.  c. ,  dans  laquelle  s'étaient  déposés  les  globules  du  sang, 
n'a  donné  qu'un  poids  de  fibrine  correspondant  à  une  proportion 
de  0,1  p.  c.  de  cette  matière  dans  le  plasma,  tandis  que  le  sang 
lui-même  en  fournit  0,2  p.  c.  Le  plasma  vivant  ne  peut  donc  en 
avoir  contenu  plus  de  0, 1  p.  c. ,  mais  il  y  a  de  fortes  raisons 
pour  croire  que  la  proportion  de  fibrine  du  plasma  vivant  doit 
être  évaluée  à  moins  encore,  car  1°  ce  plasma  étendu  n'est  pas 
exempt  de  cellules,  surtout  de  globules  blancs  du  sang,  et  2^  il 
est  probable  que  les  globules  du  sang,  en  se  déposant,  ont  cédé 
au  liquide  une  certaine  quantité  de  leur  fibrine. 

Avec  le  sang  d'autres  espèces  animales  je  n'ai  pas  réussi 
jusqu'à  présent  à  produire,  au  moyen  des  globules  isolés,  une 
coagulation  véritable.  En  opérant  sur  le  sang  du  chien ,  par  un 
froid  rigoureux,  on  trouve  bien  que  les  globules  se  déposent 
parfaitement  dans  une  dissolution  de  Cl  Na  à  1  p.  c.  et  que  le 
liquide  ne  se  coagule  pas ,  mais  les  globules  séparés  ne  donnent , 
après  avoir  été  mêlés  avec  du  sérum  ou  dissous  dans  l'eau ,  que 
la  quantité  de  fibrine  qui  peut  être  attribuée  au  plasma  adhérent. 
Néanmoins ,  ici  encore  on  retire  du  plasma  étendu  beaucoup  moins 
de  fibrine  qu'on  n'en  obtient  du  sang  lui-même.  Dans  le  sang 
des  animaux  autres  que  le  cheval ,  la  substance-mère  de  la  fibrine 
paraît  donc  se  décomposer  plus  rapidement,  et  donner  lieu  à  la 
coagulation  dans  les  globules  mêmes,  avant  qu'ils  puissent  être 
séparés  du  plasma.  Pourtant,  je  pense  que  personne  ne  fera 
difficulté  de  regarder  comme  s'appliquant  aussi  au  sang  d'autres 
animaux  ce  qui  a  été  reconnu  pour  celui  du  cheval. 

L'insuccès  des  expériences  chez  les  animaux  autres  que  le  cheval 
n'est  pas  sans  importance  sous  un  autre  rapport.  La  question  pourrait 
s'élever  si  la  matière  fibrinogène  ne  serait  pas  entraînée  avec  les 
globules  d'une  manière  mécanique,  et  ainsi  précipitée  du  plasma. 
Le  résultat  négatif  obtenu  avec  le  sang  des  animaux  autres  que 
le  cheval,  montre  qu'il  ne  peut  en  être  ainsi.  En  effet,  si  la 
matière  fibrinogène  était  entraînée  mécaniquement  par  les  globules , 
lorsque  ceux-ci  se  déposent  dans  une  solution  saline  étendue, 
toutes  les  sortes  de  sang  devraient  se  comporter  de  la  même  manière. 


NOUVEAUX  RÉSULTATS  DE  MESUKES 

PAR  LE  PLANIMÈTRE  POLAIIIE  D'AMSLER, 

PAR 

H.    HARTOGH   HEYS   VAN   ZOUTEVEEN. 


Dans  le  tome  IV  de  ce  Journal  j'ai  fait  connaître  le  résultat 
de  mesures  exécutées,  à  l'aide  du  planimètre  polaire ,  sur  la 
Carte  géologique  du  Dr.  Staring.  Depuis  lors,  j'ai  encore  reçu 
trois  cartes  supplémentaires,  faisant  partie  du  même  travail:  la 
première  indique  la  constitution  du  Limbourg  et  de  la  Hesbaye, 
après  qu'on  a  enlevé  par  la  pensée  les  dépôts  quartaires;  la  se- 
conde représente  la  Néerlande,  telle  qu'elle  serait  en  supposant 
les  digues  absentes  et  le  pays  inondé  par  la  mer  à  la 
hauteur  du  flux  ordinaire  et  par  les  rivières  au  niveau  le 
plus  élevé  possible;  la  troisième  est  une  carte  hypsométrique  des 
Pays  Bas.  J'ai  fait  à  ces  trois  cartes  l'application  du  planimètre 
polaire  d'Amsler,  et  je  crois  qu'il  ne  sera  pas  sans  intérêt  de 
publier  également  le  résultat  de  ces  nouvelles  mesures. 

Quand  on  fait  abstraction  en  idée  des  terrains  quartaires,  les 
terrains  plus  anciens  occupent  dans  la  partie  du  Limbourg  néer- 
landais située  au  sud  d'une  ligne  allant  de  Papenhoven  à  Broek- 
Sittard,  l'étendue  suivante: 

Terrain   houiller : 110  hectares. 

Système  aaclieiiien 260         // 

Système  liervien 900         // 

Système  galoppien 9410         // 

Système  maestriclitien 13580         // 

Système  tongrien  inférieur 5980         // 

Système  tongrien  supérieur 1280         // 

Système  rupélien  inférieur 8590         » 

Gravier  d'Elsloo 280 

Système  boldérien,  Lignites  du  Limbourg 21670         // 

Total 77777."  6^2060' hectares  ; 


H.    HARTOGH    HEYS    VAM    ZOUTEVEEN.    NOUVEAUX    RESULTATS    ETC.    441 


à  quoi  il  faut  ajouter  que,  dans  les  limites  indiquées ,  il  se  trouve 
encore ,  le  long  de  la  rive  droite  de  la  Meuse ,  au  nord  de  Wyk , 
plus  de  3000  hectares  de  terrain  laissé  en  blanc. 
Le  tableau  ci-dessas  donne  donc  pour  les 

terrains  primaires 110  hectares 

//        secondaires 2^150        // 

//       tertiaires 37800        // 

En  comparant  ces  nombres  à  ceux  qui  ont  été  publiés  anté- 
rieurement,  on  trouve  que  les  terrains  en  question  se  montrent 
au  jour  (non  recouverts  par  des  dépôts  quartaires)  sur  l'étendue 
suivante  : 


Terrain  liouiller 0  hectares  ou        0  po 

Système  aachenien 120  //          //    46,1 

Système  hervien 596  //          //    66,2 

Système  galoppien 176  //          //      1,8 

Sjstème  maestrichtieu 556  //          //      4,0 

Système  tongrien  inférieur 124  //          //      2.0 

Système  tongrien  supérieur 120  //          //      9,3 

Système  rupélien  inférieur 248  //          //    42,8 

Gravier  d'Elsloo 8  //          //    42,8 

Système  bolderien,  Lignites  du  Limbourg.  554  //          //    42,5 

c'est-à-dire  : 

Terrains  primaires 0  hectares  ou  0  pour  cent 

//        secondaires 1418  //  //  6      //        // 

//        tertiaires 1054  //  //  2,7  "        " 

Total 7^50^      //  //  4      // 


u"  cent. 


Les  mesures  effectuées  sur  la  seconde  carte  nous  apprennent 
que,  si  les  digues  n'existaient  pas,  1,060,160  hectares  ou  32,2 
pour  cent  de  la  surface  de  la  Néer lande  seraient  couverts  par  la 
mer  à  chaque  marée  haute.  C'est  donc  seulement  cette  partie  du 
sol  qui  peut  être  regardée  comme  conquise  sur  les  eaux,  et  on 
voit  d'après  cela  combien  est  fausse  cette  idée,  répandue  surtout 
à  l'étranger ,  que  notre  pays  presque  tout  entier  aurait  été  arraché 
aux  flots  par  la  main  de  l'homme.  Dans  l'hypothèse  de  la  non- 
existence  des  digues,  il  y  aurait,  en  outre,  411,280  hectares, 
ou  12,5  pour  cent  de  la  superficie  du  sol,  qui  seraient  submergés 


442       H.    lïARTOGH     HKYS    VAN    ZOUÏEVEEN.    NOUVEAUX    RESULTATS 

par  les  rivières  lors  des  plus  fortes  crues.  Si  Ton  déduit  la  somme 
des  deux  nombres  précités  de  l'étendue  totale  de  la  Néerlande, 
soit  3,283,998  hectares  (d'après  les  mesures  cadastrales  de  1860), 
on  arrive  à  ce  résultat,  que  1,812,558  hectares  ou  55,1  pour  cent 
de  la  surface  ne  seraient  envahis ,  ni  par  la  mer  dans  les  marées 
ordinaires,  ni  par  les  rivières  au  maximum  connu  de  leur  élévation  ^). 

L'application   du   planimétre   à  la  troisième  carte  a  produit  le 
tableau  suivant: 


Hauteur  eu  mètres  au-dessus 

ou  au-dessous  de  A.  P. 

(zéro  de  l'échelle   d'Amsterdam). 


Nombre 
d'hectares. 


Rapport  à  la  superficie  totale  ; 
exprimé   en    centièmes. 


plus  bas  que  2,5  —  A.  P. 

81650 

2d,76  ) 

2,5  — A.  P.  jusqu'à    à  A.  P. 

846080 

A.  P.  jusqu'à   1  +  A.  P. 

449930 

13,70  ^ 

1  +  A.  P.  jusqu'à  5-j-A.  P. 

436300 

13,28 

8,70  1 
23,48      71,69 
10,48  i 

1,46    1 

5  H-  A.  P.  jusqu'à  10  +  A.  P. 

2S6650 

10  -h  A.  P.  jusqu'à  25  +  A.  P. 

771160 

25  -h  A.  P.  jusqu'à  50  +  A.  P. 

344400 

50  H-  A.  P.  jusqu'à  100  +  A.  P. 

48130 

plus  haut  que  100  +  A.  P. 

19610 

0,59 

Total 

3283910 

99,93 

Le  résultat  brut  de  la  mensuration  était  un  peu  plus  élevé  :  la 
somme  des  nombres  obtenus  montait  à  3,315,960  hectares,  et 
surpassait  par  conséquent  d'environ  ^/^^  pour  cent  l'évaluation 
cadastrale.  Cette  mensuration  n'avait  donc  pas  tout  à  fait  le 
même  degré  d'exactitude  que  celle  de  la  Carte  géologique,  ce 
qui  est  dû  sans  doute  à  ce  que  la  carte  mesurée  en  dernier  lieu 
est  à  une  échelle  beaucoup  plus  petite.  Néanmoins,  la  différence 
avec  le  chiffre  réel  de  la  superficie  est  encore  extrêmement  faible. 

Chacun  des  résultats  bruts  de  l'opération  a  été  réduit  de  ^j^q 
pour  cent,  et  c'est  ainsi  qu'ont  été  obtenus  les  nombres  d'hectares 
qui  figurent  au  tableau  précédent.  Quant  aux  rapports  centésimaux , 


'  )  Il  n'a  pas  été  possible  d'obtenir  ce  dernier  nombre  par  voie  directe .  attendu 
qu'une  grande  partie  de  la  province  de  Linibourg  ne  ligure  pas  sur  la  carte. 


DE    31ESURES    PAR    LE    PLANIMÈTRE    POLAIRE     d'aMSLER.  443 

ils  ont  été  déduits  directement  des  nombres  fournis  par  la  men- 
suration. De  même  que  pour  la  Carte  géologique,  les  mesures 
embrassent  tout  ce  qui  peut  être  regardé  comme  faisant  partie 
de  la  terre  solide,  mais  non  les  plages  et  les  bas-fonds  qui  assè- 
chent à  marée  basse. 

Le  dernier  tableau  me  paraît  également  très  propre  à  donner 
une  idée  plus  juste  de  Fétat  de  notre  sol,  surtout  aux  étrangers. 
Ceux-ci  se  représentent  ordinairement  la  surface  de  notre  pays 
comme  tout  à  fait  plane ,  comme  étant  située  au-dessous  du  niveau  de 
la  mer  dans  la  plus  grande  partie  de  son  étendue ,  et  comme  ne 
s'élevant,  dans  tout  le  reste,  que  très  peu  au-dessus.  Le  tableau 
nous  montre,  au  contraire,  qu'il  n'y  a  qu'environ  28  pour  cent 
du  sol  qui  soient  inférieurs  au  niveau  moyen  de  la  mer  (A.  P.), 
tandis  que  prés  de  72  pour  cent,  ou  les  ^  environ,  dépassent 
ce  niveau  et  s'élèvent  à  des  hauteurs  variées ,  qui  atteignent  100 
mètres  sur  une  grande  étendue  du  territoire  et  qui  peuvent  même 
aller  jusqu'à  200  mètres.  Les  points  les  plus  bas  ne  sont  presque 
jamais  à  plus  de  5  mètres  au-dessous  de  A.  P. 


NOTE  SUE  LA 
NIDIFICATION  DE  VESPA  GERMANICA  FABR., 


PAR 

H.  J.  VAN  ANKUM. 


C'est  un  fait  universellement  connu  que  la  Vespaqermanica,  l'espèce 
de  Guêpes  sociales  la  plus  commune  dans  notre  pays,  construit 
son  nid  sous  terre,  de  préférence  dans  une  cavité  déjà  existante. 
Il  en  est  de  même  des  Vespa  vulgaris  anct.  et  Vespa  rufa  L. ,  deux 
espèces  dont  la  première  se  rencontre  fréquemment  chez  nous, 
tandis  que  la  seconde  y  est  plus  rare.  Dans  quelques  cas  pour- 
tant  la    Vespa    vulgaris   fait   son    nid,  non  pas  au-dessous,  mais 


444  H.    J.    VAN    ANKUM.     NOTE     SUR    LA    NIDIFICATION 

au-dessus  du  sol.  M.  Smith  du  moins  rapporte  [Zoologiste  l,  n».  VI, 
}).  166)  que  cette  espèce  place  quelquefois  ses  guêpiers  dans  des 
granges,  etc.,  que  lui-même  en  a  découvert  un  dans  une  vieille 
pompe  en  bois,  et  que  M.  Westvvood  possède  des  individus  pro- 
venant d'un  nid  qui  se  trouvait  attaché  au  toit  d'une  maison. 
M.  Wood  (Homes  withoul  hands ,  P.  VIII,  p.  256)  dit  également 
que  les  guêpiers  de  Vespa  vnlgaris  sont  quelquefois  construits 
au-dessus  du  sol,  et  qu'il  existe  au  musée  d'Oxford  un  très  grand 
spécimen,  trouvé  dans  de  semblables  conditions. 

Quant  aux  deux  autres  espèces  de  Guêpes  souterraines  {ground 
wasps,  comme  les  Anglais  appellent  les  espèces  sociales,  qui  construi- 
sent leurs  guêpiers  dans  le  sol),  leurs  nids,  pour  autant  que  je 
sache,  n'ont  jamais  été  trouvés  autre  part  que  sous  terre. 

Pendant  Tété  de  l'année  actuelle,  il  arriva  qu'un  nid  de 
Guêpes  fut  construit  dans  une  serre  du  ci-devant  Jardin  bota- 
nique de  Rotterdam,  sur  une  planche  située  à  environ  3  mètres 
au-dessus  du  sol.  Sur  cette  planche  se  trouvaient  plusieurs  cou- 
vertures de  chanvre,  destinées  à  être  posées  sur  le  vitrage  de 
la  serre,  pour  abriter  les  plantes,  lors  des  grands  froids.  Ces 
couvertures  étaient  roulées  sur  elles-mêmes  et  empilées  les  unes 
sur  les  autres.  C'est  dans  un  des  rouleaux  inférieurs,  dans  une 
cavité  restée  accidentellement  entre  les  plis  de  l'étoffe,  que  les 
Guêpes  avaient  établi  leur  nid.  A  cause  de  l'embarras  qu'ils  occa- 
sionnaient ,  les  insectes  furent  expulsés  au  commencement  du  mois 
de  septembre.  Ayant  appris  ces  circonstances,  il  y  a  quelques 
semaines,  je  me  rendis  sur  les  lieux,  et  voici  ce  que  je  constatai. 

Le  nid  se  composait  de  4  rayons.  Deux  de  ces  rayons ,  les  plus 
grands ,  avaient  une  forme  ovale  très  allongée ,  sans  aucun  doute 
parce  que  l'espace  disponible  n'avait  pas  permis  aux  Guêpes  de 
leur  donner  la  forme  ronde  ordinaire.  L'un  de  ces  gâteaux, — 
qui  avait  servi  à  élever  des  individus  mâles ,  ainsi  que  je  le  reconnus 
par  l'examen  d'une  nymphe  assez  bien  développée  qui  se  trou- 
vait encore  dans  un  des  alvéoles, — 'était  long  de  220  mm.  et 
large  de  6  mm.  Le  second  gâteau,  qui  avait  été  occupé  par  des 
individus   femelles,    présentait    un    diamètre   longitudinal   de  190 


DE  VESPA  GERMANICA  FABR.  445 

mm.  et  un  diamètre  transversal  de  6  mm.  Les  deux  autres  rayons, 
qui  avaient  également  servi  à  élever  des  femelles,  étaient 
beaucoup  plus  petits  que  ceux  dont  il  vient  d'être  question:  l'un 
était  un  peu  plus  grand  qu'une  pièce  de  cinq  francs,  l'autre  n'avait 
guère  la  dimension  d'une  pièce  de  deux  francs. 

A  l'inspection  d'une  couple  de  spécimens  de  l'insecte ,  qui  se  trou- 
vaient près  du  nid,  je  reconnus  immédiatement  que  celui  ci  appar- 
tenait aux  Guêpes  souterraines.  En  effet ,  aussi  bien  chez  la  femelle , 
qui  vivait  encore  au  moment  où  le  nid  fut  enlevé,  que  cbez  le 
mâle,  les  yeux  atteignaient  la  base  des  mandibules,  et  le  premier 
article  des  antennes  ne  montrait  pas  de  couleur  jaune.  Il  était 
évident  aussi  que  le  nid  ne  pouvait  provenir  de  Vesparufa,  aucun 
des  deux  individus  n'ayant  sur  le  second  segment  de  l'abdomen 
les  taches  rouges  caractéristiques  de  cette  espèce.  L'individu  femelle 
montre  sur  le  chaperon  jaune  trois  petits  points  noirs;  le  premier 
segment  de  l'abdomen  est  jaune  avec  trois  taches  noires,  dont 
celle  du  milieu  a  une  forme  rhomboïdale  ;  enfin  les  taches  qui  se 
voient  le  long  des  épaules,  des  deux  côtés  du  thorax,  sont  de 
forme  triangulaire').  Tous  ces  caractères  prouvent  suffisamment, 
qu'il  s'agit  ici  de  la  Vespa  germanica.  D'ailleurs,  j'ai  encore 
examiné  les  organes  générateurs  mâles ,  qui,  d'après  les  recherches 
de  M.  vSmith  [Zoologist ,  IX,  n».  CVII,  Appendix,  art.  XXVII, 
p.  CLXXVIII;  idem,  X,  n".  CXXI,  p.  3703),  offrent  des  diffé- 
rences assez  prononcées  dans  beaucoup  de  nos  espèces  indigènes. 
Cet  examen  a  complètement  mis  hors  de  doute  l'identité  de  l'espèce. 

Nous  avons  donc  ici  un  premier  exemple  d'un  nid  de  Vespa 
germanica,  construit  au-dessus  du  sol.  L'écart  est  toutefois 
moins  grand  qu'il  ne  semble  au  premier  abord,  puisque  l'insecte 
s'est  servi,  comme  d'ordinaire,  d'une  cavité  préexistante. 

Mais  l'étude  du  nid  montra,  qu'il  était  encore  intéressant  sous 


0  Pour  la  distinction  des  femelles  et  des  ouvrières  des  Vespa  germanica  et 
indgaris,  on  doit  tenir  compte  surtout  de  la  forme  de  ces  tackes  ;  chez  la  première 
espèce,  elles  sont  plus  triangulaires,  chez;  la  seconde,  linéaires.  J'ai  fixé  récem- 
ment l'attention  sur  la  valeur  de  ce  caractère ,  dans  mon  mémoire  sur  les  guêpes 
sociales  indigènes  („Inlandsche  sociale  wespen"). 


446  H.    J.    VAN    ANKUiM.    NOTES    SUR    LA    NIDIFICATION,    ETC. 

d'autres  rapports.  En  effets  les  rayons  n'étaient  pas  régulièrement 
fixés  les  uns  au-dessous  des  autres  par  de  petits  piliers,  comme 
c'est  ordinairement  le  cas  dans  les  nids  de  Guêpes  et  les  ouver- 
tures des  alvéoles  n'étaient  pas  non  plus  tournées  en  dessous. 
Chacun  des  rayons  était  attaché  isolément  à  la  couverture  de  chan- 
vre,  par  conséquent  aux  parois  de  la  cavité,  qui  était  plus  ou 
moins  cylindrique.  On  aura  une  idée  exacte  de  la  disposition  du 
nid ,  en  se  figurant  les  4  rayons  placés  à  côté  et  les  uns  près  des 
autres  sur  une  couverture  étendue  horizontalement ,  puis  se  figurant 
cette  couverture  enroulée ,  de  manière  à  laisser  subsister  un  petit 
espace  occupé  précisément  par  les  rayons. 

Le  nid  était  remarquable  aussi  par  l'absence  d'une  enve- 
loppe. La  même  chose  a  été  observée  une  fois  dans  le  nid 
de  Vespa  Crahro  L.-M.  de  Saussure  {Monographie  des  Guêpes  soci- 
ales,  p.  XCVI,  PI.  XVI,  tig.  2)  mentionne  un  nid  de  cette  espèce, 
conservé  au  Musée  de  Londres,  bâti  dans  un  tronc  d'arbre  creux 
et  qui  manque  totalement  d'enveloppe.  Pour  les  Guêpes  sou- 
terraines un  fait  analogue  n'avait  pas  encore  été  signalé ,  au  moins 
à  ma  connaissance.  Dans  le  nid  que  je  viens  de  décrire,  on  ne 
trouvait,  ça  et  là,  que  de  très  faibles  traces  d'une  enveloppe, 
ce  qui  est  tout  à  fait  d'accord  avec  la  remarque  suivante  de  M.  de 
Saussure  iloc.  cil.,  p.  C)  relativement  au  nid  des  Guêpes  souter- 
raines: „Son  enveloppe  ne  sera  nécessaire  qu'autant  que  la  cavité 
laissera  des  fentes  à  boucher  ou  des  orifices  à  diminuer;  elle 
pourra  donc  être  ou  nulle  ou  incomplète ,  ou  complète  mais  irré- 
gulière; le  hasard  seul  en  décidera  et  les  convenances  locales 
serviront  de  guide  aux  travaux  que  dirige  chez  les  Guêpes  aériennes 
une  loi  fixe  et  immuable." 


SUR  QUELQUES 

nouvelles  formules  de  réduction 

DANS    LA 

THÉORIE  DES  INTÉGRALES  DEFINIES, 

PAR 

D.  BIERENS  DE  HAAN. 


Mém.  de  l'Ac.  Rov.  fies  Sciences.    Sciences  Phys.  et  matliera.  T.   XII. 


1.  Parmi  toutes  les  méthodes  différentes  que  Ton  a  inventées 
pour  la  réduction  des  intégrales  définies,  il  y  a  une  qui  est  tou- 
jours d'un  grand  intérêt.  C'est  celle  où  il  s'agit  de  développer 
en  série  indéfinie  un  facteur  de  la  fonction  à  intégrer.  Or,  d'une 
part  elle  constitue  un  lieu  entre  la  théorie  des  intégrales  défi- 
nies et  celle  des  séries ,  théories  dont  on  ne  peut  méconnaître  la 
liaison  intime,  et  d'un  autre  côté  elle  offre  beaucoup  d'intérêt  au 
point  de  vue  de  l'analyse.  C'est-à-dire  qu'ici  les  conditions  de 
convergence  jouent  un  grand  rôle  et  qu'il  faut  être  prudent 
dans  l'application  des  règles  qui  ont  généralement  cours  ;  et  encore , 
que  parfois  Ton  tombe  sur  des  résultats,  soit  très  simples ,  soit  très 
curieux,  auxquels  ou  ne  se  serait  pas  attendu.  Dans  plusieurs 
de  mes  notes  antérieures  les  exemples  n'en  manquent  pas,  et  dans 
celle-ci  il  s'agit  encore  de  ces  intégrales,  qui  s'y  trouvent  dans 
une  position  particulièrement  extraordinaire. 

En  général,  dans  ces  sortes  de  recherches,  il  est  absolument 
nécessaire  d'exclure  tout  à  fait  les  séries  qui  seront  divergentes 
entre  les  limites  de  la  variable,  dont  on  fait  usage.  Et  cela  est 
tout  naturel,  puisque  seulement  dans  le  cas  de  séries  convergentes 


448      D.    BIERENS    DE    IIAAN.    NOUVELLES    FORMULES    DE    REDUCTION. 

on  a  affaire  à  des  intégrales  continues.  Les  intégrales  discon- 
tinues mènent  à  des  séries  divergentes ,  et  Ton  peut  dire  généra- 
lement qu'elles  se  soustraient  à  toute  discussion.  Dès  lors  il 
peut  paraître  dangereux  et  même  illicite  d'introduire  une  sorte  de 
séries  divergentes ^  comme  nous  allons  le  faire:  mais  pourtant 
j'ose  croire  que  les  résultats  seront  suffisamment  établis ,  pourvu 
qu'on  ne  néglige  pas  les  mesures  de  précaution^  que  la  mé- 
thode démontre  être  indispensables  ^  mais  en  même  temps  suffi- 
santes. 

2.  Toute  fonction  qui  peut  être  développée  suivant  les  sinus 
ou  les  cosinus  des  multiples  de  la  variable  x  ou  plutôt  du  pro- 
duit SX j  —  et  c'est  une  propriété  assez  étendue,  —  peut  être 
exprimée  par  une  sommation  par  rapport  à  l'indice  n 

a  a 

/,  (x)  =  V  A«  Sin  nsx,  .  .  (a)     f\  (x)  ^=  Bq  +  -T  B«  Cos  nsx  ;  .  (h) 
1  '  1 

où  l'on  n'a  pas  mis  le  Bo  sous  le  signe  de  sommation, 
parce  qu'il  arrive  souvent  dans  la  suite  que  les  fonctions,  qui  con- 
tiennent Bq  ,  ne  suivent  pas  la  même  loi  que  celles  qui  contien- 
nent le  B«. 

Maintenant  soit  q,  (x)  une  fonction  quelconque  de  a?,  et  /9  et 
q  des  limites  quelconques  de  cette  variable:  il  vient 

çq  a  ^q 

I  (f>{x)f^  (x)dx=z:^  An  j  (f'{x)  Sinnsx  dx, (A) 

çq  M  a  .q 

I  (f>  {^)fi  W  dxz=z^Q    I  (p  (^x)  dx  -h  V  B«   j  (f  {x)  Cos  nsx  dx .  .  (B) 

Pour  que  ces  formules  puissent  servir,  il  est  nécessaire  que  les  inté- 
grales qui  se  trouvent  sous  le  signe  de  sommation ,  ainsi  que  celle 
qui  est  facteur  de  Bq,  soient  toutes  continues:  puis,  que  les  séries 
sous  les  signes  de  sommation  soient  convergentes ,  dans  le  cas  de  a 
infini,  c'est-à-dire  lorsque  ces  séries  deviennent  infinies.  Car  lorsque 
les  intégrales  elles-mêmes  sont  discontinues,  on  ne  saurait  les  som- 
mer :  et  lorsque  les  intégrales  sont  continues ,  mais  que  la  série  est 
divergente,  il  ne  peut  y  avoir  un  signe  d'égalité  entre  les   deux 


D.    BIEREXS    DE    HAAN.    NOUVELLES    FORMULES    DE    REDUCTION.      449 

membres  de  chaque  équation  :  les  séries  divergentes  ne  représen- 
tant aucune  fonction  bien  définie. 

Quand  une  fois  ces  conditions  sont  remplies^  il  ne  reste  plus 
qu'à  déterminer  les  intégrales 

I   (p  (x)  clx ^ .  .  .  (c)   I   (f  (x)  Sin  ux  dx,.  .  [d)    I   (ç  {x)  Cos  ux  dx  ;  .  (e) 

de  sorte  qu'il  faudra  choisir  la  fonction  (p  {x)  et  les  limites  j)  et 
q  telles  que  cette  intégration  soit  possible.  Dès  lors  on  peut  en- 
core étendre  cette  méthode. 

3.  Prenons  une  seconde  fonction,  que  l'on  puisse  développer 
suivant  les  sinus  ou  les  cosinus  des  multiples  du  produit  te;  ex- 
primons-la par  une  sommation  par  rapport  à  l'indice  m  ,  on  aura 

c  c 

/g  {x)  =  V  Cm  Sin  m(x,  .  .  (/)    /\  (x)  1=  Do  +  -S"  Dm  Cos  mtx\  .  {g) 
1  1 

où  le  coefficient  Dq  n'est  pas  pris  sous  le  signe  de  sommation, 
par  la  même  raison  qui,  au  N^.  2,  s'appliquait  au  coefficient  Bo- 
Maintenant  dans  les  théorèmes  (A)  et  (B)  l'on  n'a  qu'à  rem- 
placer go  (.r)  par  go  {x)  f^  {x)  ou  par  ^  {x)  f\  {x)  :  puis  il  faut 
réduire  les  produits  des  sinus  et  des  cosinus  à  une  somme  ou 
à  une  différence  d'autres  fonctions  goniométriques,  de  telle  sorte 
que  l'on  revienne  toujours  aux  mêmes  intégrales  (c),  (f/),  (e)  ;  c'est 
ainsi  que  l'on  trouve  les  théorèmes  suivants. 

I  «P  (^0  f\  (=^)  /s  C-^)  ^^^  =  ^  A«  2"  C;rt  I  q>  [x]  Sin  nsx.  Sin  mix  dxzzz 
Jp  1         1         Jp 

=  -  ^  K  sQm  I     cf{x)dx[Cos  !  [ns^mt)x ]  —Cos  |  {ns^mt)x  j  ]  ,  (C) 
Z  \         1       J  p 

Cl  ^  C9 

I      ^  {^)  f\    (•^)  /4   {p^)  f^-^  =  Do    ^     A«     j      (f  [x)  Sin  nsx  dx  -+- 

J  P  1  Jp 

a  c  çq  a  rq 

-h  2^A«  vDw  j     (fj{x)Sinnsx.Cosmtxdx—iyQ  2  kn  \     cf[x)Sinnsxdx-V- 
1        1        Jp  1       Jp 

a  c  rq  . 

S  An  y;  Dm  I     ^{x)dx [Sin  |  {ns-\-mf)x    -f-  Sin  |  {ns — mt)x  j  ] ,  (D) 
l        1        Jj) 


1  ^ 


Archives  Néerlandaises,  T.  V.  29 


450  D.  BIERENS  DE  HAAN.  NOUVELLES  FORMULES  DE  REDUCTION. 

V  (^)  ./2   (^)  f?.    (^)  ^^**'  =  Bo  ^  Cm    j     (p  {xj  Sin  mtx  dx  -{- 
p  \  J  p 

a  c  rq  ^  ^  Cl  . 

-f-  :i"  B«  ^  C/«  1     (p (x) Cos  nsx.Sin mtx  dx^^^  i:Gm\     q>{x)Sin mtxdx-\- 
i        \       Jp  1       Jp 

-I-  -  V  Btt  V  Cw  j     cp  [x)  dx  [Sin  |  {ns-\-mt)  x  j  — Sin  { {us — 7nl)  x\]^   (E) 
2  i        i       Jp 

f^ix)/^  WA  {^)dx=BQ  Do  P(p(a')^*^+Bo  Id.^  [\>(x)Cosmtxdx-{- 

Jp  Jp  1  *'io 

a  rq  a  c  rq 

-h  Do  ^  B«  I    (?5  (o-')  Cos  nsx  dx  -\-  2:  Bn  ^  T)m  I    <?  [x]  Cos  nsx.  Cos  m Ix dxz= 
i       Jp  i        i        J  p 

rq  ^        Çl  ^       Cl 

=BoDo  I   (p{x)  dx-\-làQ  2  Dm     (p{x)Cosmlxdx-ï-Do  vB«  |    (f{x)Cosnsxdx-\- 
Jp  1       Jp  1      Jp 

H-  - 1  Bn  1  D;«    r  <P  {x)  dx  [Cos  j  {ns  +  mt)x  \-{-Cos\  {ns — mt)  x]].  (F) 

2  1  1  Jj-; 

Ces  quatre  théorèmes  exigent  les  mêmes  conditions  que  les  précé- 
dents (A)  et  (B).  Ils  donnent  lieu  à  quelques  remarques. 

4.  Dès  que  la  fonction  <p  (x)  est  de  telle  nature  que  l'intégrale 
(c)  n'est  qu'un  cas  particulier  de  l'autre  (e)  pour  u  zéro ,  et  que 
Bo  et  Do  se  déduisent  de  Bn  et  Dm  pour  n  et  m  zéro ,  l'on  peut 
simplifier  les  résultats,  en  admettant  le  terme  détaché  sous  la 
sommation,  pourvu  qu'on  commence  celle-ci  pour  n  ou  m  zéro, 
au  lieu  de  l'unité.  Lorsque  de  plus,  en  pareil  cas,  la  valeur  de 
l'intégrale  (d)  s'annule  pour  u  zéro ,  on  peut  en  faire  de  même  rela- 
tivement aux  sommations  qui  en  dépendent  pour  cause  de  symétrie. 

En  outre,  cette  propriété  de  la  fonction  q,  (x)  donne  lieu  à 
une  autre  quant  aux  seconds  membres  de  nos  théorèmes.  Car 
alors,  dans  le  cas  où  la  différence  ns  —  mt  s'annule,  on  peut 
garder  ce  terme  sous  le  signe  de  sommation,  sans  altérer  le 
résultat.  Il  en  est  de  même  pour  ns  —  mt  négatif:  aussi  long- 
temps que  les  intégrales  (d)  et  (e)  conservent  leur  valeur  pour 
un  u  négatif. 

Mais  si  au  contraire  la  valeur  de  ces  intégrales  (d)  et  (e) 
change  pour  un  u  négatif,  ou  si  l'intégrale  (c) ,  pour  ns  —  mt 
zéro ,    n'est  plus  un  cas  particulier  de  l'autre  (e) ,  nos  théorèmes 


J).    BIERENS    DE    HA    N.    NOUVELLES    FORMULES    DE     REDUCTION.     451 

changent  de  forme.  Dorénavant  il  faut  beaucoup  de  précautions 
quant  aux  intégrales  qui  ont  un  facteur  Sin  \  (us — ml)  x\  ou 
Cos  \{ns — mt)x\\  et  d'abord  il  faut  partager  ces  intégrales 
sous  le  signe  de  sommation  en  deux  groupes,  selon  que 
ns  —  ml  est  positif  ou  négatif,  ou  bien  qu'il  s'annule.  En  géné- 
ral sr.  et  ix  sont  des  multiples  simples  de  x  :  après  leur  substi- 
tution le  signe  de  {ns  —  mt)  x  dépendra  d'une  relation  simple 
entre  les  indices  n  et  m  :  il  faudra  en  tenir  compte  à  l'égard  des 
limites  a  et  c  de  la  sommation  par  rapport  à  ces  indices  n  et  m. 
Mais  ce  partage  des  séries  doubles  qui  résultent  de  la  multiplica- 
tion des  séries  /'  entre  elles,  offrira  des  difficultés  particulières. 

Quand,  en  premier  lieu,  cette  série  double  est  finie,  la  sépara- 
tion des  deux  parties  se  fait  suivant  une  série  de  termes  diago- 
naux, pour  ainsi  dire,  qui  alors  en  même  temps  donnent  lieu 
à  d'autres  valeurs  propres;  l'une  des  moitiés  de  la  série  répond 
au  signe  positif  de  la  différence  ns  —  mt ,  l'autre  moitié  au 
signe  négatif.  De  plus,  lorsqu'on  n'a  pas  l'égalité  absolue  de 
s  ç^i  t,  ces  termes  diagonaux  ne  se  trouvent  pas  dans  chaque 
série  partielle  horizontale,  ou  dans  chaque  série  partielle  verti- 
cale. De  sorte  qu'il  faut  user  ici  de  beaucoup  de  circonspection, 
et  même  ordinairement  on  ne  pourra  pas  exprimer  le  résultat 
par  une  même  formule  générale.  Ce  qui  vient  d'être  remarqué 
par  rapport  à  une  série  double  finie,  s'applique  encore  à  plus 
forte  raison  à  une  série  infinie  dans  l'une  des  directions,  ou 
dans  les  deux  directions  (pour  a  =z  co  ,  c  =  co  ). 

Ainsi  cette  série  se  trouve  dans  le  même  cas  qu'une  inté- 
grale double,  où  la  fonction  à  intégrer  devient  discontinue  entre 
les  limites  de  l'intégration  et  où,  par  suite,  il  n'est  pas  permis 
d'intervertir  l'ordre  des  intégrations,  comme  on  le  fait  générale- 
ment. Si  pourtant  on  se  décide  à  cette  interversion ,  afin  de  pou- 
voir trouver  la  valeur  de  l'intégrale,  il  devient  nécessaire  d'ajouter 
une  correction,  dont  la  forme  est  connue.  De  même  ici,  dans  la 
sommation  de  la  série,  il  faut  prendre  des  précautions  analogues. 

5.  Toutes  ces  difficultés  s'accroissent ,  dès  que  l'on  passe  à  l'ap- 
plication pour  des  formes  particulières  d'une  des  fonctions  f(x)f 

29* 


452      D.    BIERENS    DE    ITAAN.    NOUVELLES    FORMULES    DE     REDUCTION. 

et  il  devient  plus  utile,  sinon  nécessaire,  de  séparer  la  méthode 
en  ses  deux  parties  consécutives.  Il  est  vrai  que  de  la  sorte 
on  ne  peut  se  passer  des  mesures  de  précaution,  mais  mainte- 
nant  il   sera    beaucoup   plus   facile  de  les  introduire. 

De  la  même  manière  que  l'on  a  déduit  au  N".  3  les  théorèmes 
(C)  à  (F) ,  on  aura  ici 

q,  {x)  Sin  uoe,/i  {îp)  dx  z=.  ^  kn   I  9  (i^)  Sin  ux.  Sin  nsx  dx  = 
p  1  ^  p 

\  ^         rî 
z=:  -2  knl  (f  {x)  dx  [Cos  I  {ns  —  ii)x]  — Cos  j  {ns  -{-  u)x  ]  ] ,  .  (G) 
^  l        Jp 

/q  «         /•? 

cp  (x)  Cos  ux.f^  {x)dx:=.:^  kn\  (f  [x]  Cos  ux.  Sin  nsx  dx  = 
p  1        J  p 

\    a  çq 

:=z- 2  kn\   (p{ix) ds  [Sin  \{ns  -\-  u) x  )  +  Sin  {  {ns  —  ii)x\],.  (H) 
2  1        Jp 

l  (p  (x)  Sin  ux.  f^    [x]  dx  =:  Bq    /  g,  [x]   Sin  ux  dx  -h 
Jp  "  ''p 

a      Ci  r? 

H-  ^  Bw  I   (p(x)  Sin  ux.  Cos  nsx  dx-zn^^    \    (p  [x)  Sin  ux  dx  -\- 

1        ^p  V 

-h  ^  -  B«  /   ff>  {x)  dx  [Sin  \  {ns  -^u)x]  —  Sin  (  {ns  —  u)ûr.\],.  .  (I) 
^  1       Jp 

I   (f  {x)  Cos  ux.  f^   {x)  dx  z=  Bq   I  (p  {x)  Cos  ux  dx  ■+■ 
Jp  ''p 

a         rq  rq 

-h  -^  Bw  I  (p  {x)  Cos  ux.  Cos  nsx  dx  =  Bq    |  <?  {x)  Cos  ux  dx  -^ 

1        •';,  Jp 

1  ^         /»? 
H-^^B«  /  cr.{i^)dx[Cos[{ns-\-u)x]-\-  Cos\{ns  —  u)x\]  .  .{K) 
^  i       J  p 

Dans  ces  formules  toutes  les  intégrales  du  second  membre  dépen- 
dent, comme  toujours,  des  intégrales  (c),  (fi),  {e). 

On  peut  employer  ces  théorèmes  au  lieu  des  précédents  (A)  et 
(B).  Ici  l'on  a  introduit  le  facteur  Sin  ux  et  Cosux,  afin  que  plus 
tard ,  en  employant  le  facteur  /\  (x)  ou  /],  (x) ,  on  n'ait  qu'à 
sommer  ces  Sin  ux  et  Cosux  pour   obtenir   des  théorèmes  analo- 


D.    BIEREiNS    DE     HAAN.    NOUVELLES    F0R31ULES    DE    REDUCTION.     453 

gues  aux  théorèûies  (C)  à  (F).  Toutefois  il  est  évident  que,  dans  le 
cas  où  (p  {x)  contient  déjà  un  facteur  de  cette  nature ,  il  n'est  plus 
besoin  d'eu  introduire;  alors  les  théorèmes  (A)  et  (B)  sont  suffi- 
sants ;  leurs  seconds  membres  acquièrent  dès  lors  la  forme  des 
premiers  membres  de  ces  formules  (G)  à  (K). 

Il  s'agit  maintenant  d'écrire  ces  formules  pour  quelque  valeur 
spéciale  convenable  de  la  fonction  <p  {x)  ,  de  calculer  les  inté- 
grales du  second  membre ,  et  de  développer  les  sommations, 
autant  qu'il  est  possible.  De  la  sorte  on  obtient  autant  d'in- 
tégrales définies  qui  sont  rendues  propres  à  notre  but.  Lorsqu'on 
y  écrit  ml  pour  u,  qu'on  les  multiplie  respectivement  par  Qm  et 
par  Dm ,  —  ici  il  ne  faut  pas  oublier  le  terme  détaché  à  coeffi- 
cient Dq  ,  —  et  qu'on  en  prend  la  sommation  par  rapport  à 
l'indice  m ,  les  premiers  membres  sont  devenus  les  mêmes ,  comme 
on  vient  de  le  remarquer,  que  ceux  des  théorèmes  (C)  à  (K)  :  mais 
on  a  séparé  les  réductions  aux  seconds  membres  en  deux  opéra- 
tions consécutives,  et  c'était  justement  ce  que  nous  voulions  faire. 

6.  Maintenant  il  faut  faire  le  choix  de  la  fonction  (p  (x) ,  afin 
que  les  intégrales  (c),  (t/),  (e),  soient  connues  entre  les  limites  p  et 
q.  Soit  p^=.0,  q:=zco,  et  prenons  q)  {x)  tel  que,  outre  un  isiO,- 

tem' Sin  91  SX  ou  Cosmx,  il  s'y  trouve  encore  un  facteur 


q"^  —  x"^ 


ou  .    Alors  on  trouve  dans  mes  Nouvelles  Tables  d'In- 

q'^  —  x"^  ' 

tégrales  Définies,  Table  17,  N°.  1,  et  Table  161,  N'>.  5,  4,  6 
et  3,  les  intégrales  suivantes 


Ç"^       qdx  ^  n\    ("^  qCosnsx    ,  n 

I     __^ =  0,  .  .  {h)    \      \ — -  dx  =  -    Sm  nqs, 

JQ    q    — x-^  J  0    q^  —  x-^  ^ 


(0 


q^  —  x^  J  0   q 

J  r\      n- ;/? ^  2 

I       u.  ^uo  fe ou.  ^,^,___  Q^^  ^^^^^  Q^  (nqs)  +  Sin  nqs.  Si  (nqs) ,  (/) 


xSinnsx    ,                  ^     ^  //\ 

dx  zzz  —  -     Cos  nqs  J [k) 

q- — x-- 

X  Cos  USX 


g' 


l       9_^^'  ^^,  _-  ;§|J^  jig^^  Qi  (^j^^j  —  Cqs  ^qg^  Si  (îiqs)  ;  (m) 
J  0    q"^  —  x"^ 


q^  —  X 


454   D.  BIERENS  DE  HAAN.  NOUVELLES  FORMULES  DE  REDUCTION. 

OÙ  les  fonctions  Ci  (?/)  =^  —  l dx  et  Si  (y)  =:  I  '   -     '  '    dx 

J  y        X  '  Jo        X 

sont  les  Sinus-intégral  et  Cosinus-intégral  ^  que  Ton  connaît. 

Quand  on  fait  usage  des  relations  gonioniétricjves  connues  pour 
changer  un  produit  de  sinus  et  de  cosinus  en  une  somme  ou  une 
différence  de  ces  fonctions,  il  vient 

Sinpa;.Sin  nsw  — :=  —  -  Cos  pq.  Sin  nqs  [p  >  ns]  , 

0  q-  — w"^  ^ 


:=  —  -  Sin  pq.  Cos  nqs  [p  <  ns]  ,:=.  —  -  Sin  2  pq  [p  =  ns]  ;  .  .   {n) 

Li  •de 

Sin px. Cos  nsx  — = Cos  pq.  Cos  nqs  [p  >  ns]  , 

G  q-  — x^  ^ 

z=  -  Sinpq.  Sin  nqs  [p  <  ns],  =  — •-  Cos  2  pq  [pz=ns]  ; .  .  (o) 


/xclx  ^ 

Cos  px.Sin  nsx ^iz  -  Sin  pq.  Sin  nqs  \p  >  ns]  , 
G                             q"^ — x''-        ^ 

z=  — -T  Cos  pq.  Cos  nqs  [p  <  ns]  ,■=.  —  -  Cos  2  pq  [pz=:ns]  ;  .  .  [p) 

£i  4 

/     Cos  px.  Cos  nsx — r-=:=  o  -^'^^  PR-  ^^^  M^  [v  >  ^'^]? 
0                             q'^  —  X-        2 

=  ^  Cos  pq.  Sin  nqs  [p  <:ns],ziz  —■  Sin  2  pq  [pzzzns]]  ...(</) 
J  4 

/<^     .                         xdx  1 

Sin  px.Sin  nsx  — z=:  -  *b7w  pq.  [Sin  nqs. }  0/  [{ns  -\-  p)  q]  + 
0                                       Q      X  '  ^ 


xdx  1  ,,. 

-h  Ci  [{ns — p)  q]  }  —  Cos  nqs.  |  Si[{ns-rp)  q]  -f  /S'i'[(//5 — p)q]  \  ]  — 
^  Cos  pq.  [Cos  nqs.  j  Ci  [(/«^  H- p)  f/]   —  Ci  [{ns  —  p)  q]  |    + 

+  Sin  nqs.  |  ^7  [{ns  -+■  p)  q]  —  Si  [{ns  —  p)  q]]], W 

qdiT      1    ^,. 

4-  Si  [{ns~p)  q]  ]  -h  Cos  nqs.  \  Ci[(ns-hp)  q]  +  Ci[{ns—p)  q]\]-{- 
-\-  _  Cos  pq.  [ —  Cos  nqs.  j  *SV  [{tis  -\-  p)  q)]  —  Si  [{ns  —  p)  q]  }  -{- 
+  Sin  nqs.  \  Ci  [{ns  -+-  p)  q]  —  Ci  [{ns  —  p)  q]  \]  , {s) 


/     Sin  px. Cos  nsx  — L =:  -  Sin  pq.  [Sin  nqs.  |  Si  [{ns  +  p)  q]  H- 
0                                      Q             X  "  ^ 


/ 


/ 


D.    BIERE.NS    DE    HAA.N.     NOUVELLES    FORMULES    DE    RÉDUCTION.     455 

Cospx.Sinnsx ^ ■=  -  Sinpq.[8in  nqs.  !  Si  [{ns  +  p)  q\  — 

0  q    —  X  z 

-  Si  [(us — p)  q]  j  H-  Cosnqs.  j  Ci[{ns+p)  q]  +  Ci  [[ns — p)q]  |  ]  + 

-  -   Cospq.  [ —  Cos  nqs.  j  Si  [  (ns  -{-  p)  q]  -h  Si  [{ns  — p)  q]  )  -h 

Cl 

-Sinnqs,  j  Ci  [{ns -\- p)  q]  — Ci  [{ns  —  p)  q]  \], (/) 

ocdcc  1     .  ( 

Cospx.Cosnsx—^ ^^-=z  -  8in  pq.  [Sin  nqs.  [  Ci[{ns  -h  p)  q]  — 

G  q  "  — —  X  ^ 

—  Ci  [{ns — p)  q\  j  —  Cosnqs.  j  Si  [{7is-\-p)  q] —  Si  [(tis — p) q]  \] -h 
+  -  Cospq.  [Cos  nqs.  \  Ci  [{ns  -h  p)  q]  +  Ci  [{ns  — p)  q]  \  -f- 

-f-  Sinnqs.  }  Si  [{ns  -{-  p)  q]  +  Si  [{ns  —  p)  q]\] {u) 

Dans  les  quatre  premières  formules ,  le  signe  de  ns  —  j»  a 
eu  une  grande  influence  sur  les  valeurs  des  intégrales.  Il  n'en 
est  pas  ainsi  des  quatre  dernières.  Par  contre,  celles-ci  sont 
bien  moins  développées.  Mais  ici  il  faut  prendre  des  mesures 
de  précaution  pour  éviter  des  cas  de  discontinuité  :  il  ne  peut  pas 
y  en  avoir  pour  le  Sinus  intégral ,  puisque  Si{0)z=:0:  mais  pour 
le  Cosinus-intégral  on  a  Ci  (0)  =  go  . 

Donc ,  pour  éviter  ce  cas ,  il  faut  et  il  suffit  que  ns  —  p  diffère 

de   zéro,  ou  que,  n  étant  toujours  quelque  nombre  entier,  -  ne 

s 

soit  pas  un  nombre  entier.  Cette  supposition  devra  donc  toujours 
être  prise  en  considération  dans  la  suite. 

Maintenant,  au  moyen  des  intégrales  (m),  de  {i)  et  [h),  de  (k)  et 
(/),  les  théorèmes  (A)  et  (B)  nous  donnent 


^  ûdx  ^ 

/j  {x) — ^ -=2  1' kn  [Sin  nqs.  Ci  {nqs) — Cos  nqs.  Si  {nqs)].  ,{1) 

0  (?^ — x"^        1 

"/.  {^)  -^^^=^^"^^nSinnqs=^-f\  {q) , (Il) 

"  /,  te)  -^^  =  -Yskn  Cos  mis=-l  l/\  (,/)  _  A,  I ,  (III) 
0  q^  —  X-  ^  i  ^ 

"a(^)-î^  =  ^ (IV) 

0  q^  —  X^ 


456      D.    BIEREINS    DE    HAAN.    NOUVELLES    FORiMULES    DE     REDUCTION. 

On   voit   que   la   dernière   intégrale    est  discontinue,  à  cause  de 
l'intégrale 

r-     xdx    _  ^    l  ,  .  ^        ,,r 

=  —  ^   Bo     \co    —    lq^\    z=  —   œ. 
On  i3eut  y  remédier  en  faisant  usage  de  la  fonction 

a 

f\    (x)  z=:  Z  B«   Cos  nsx ,  (v) 

1 

au  lieu  de  /\  (x)  dans  (h).  On  pourrait  prendre  ici 

a 

fi   (-^y  —  Bq  HZ  ^  B«   Cos  nsx, 
1 

et  l'on  trouve 

/**                    xdx  ^ 

f'%  G'^) i=:-^'Brt  [Cosnqs.Ci(nqs) — Sin?iqs.Si{7iqs)].{ÏVa) 
0                 q^  —  x^        1 

7.  Mais  la  même  fonction  9  (x)  peut  servir  pour  les  théo- 
rèmes (G)  à  (K),  où  l'on  change  le  u  en  p:  dans  les  réductions 
on  n'a  plus  besoin  de  l'intégrale  (h) ,  mais  seulement  des  suivantes  (i) 
à  (w).  Quant  au  signe  de  ns  —  p,  il  a  influence  pour  les  inté- 
grales (n)  à  (q)  ;  ce  n'est  pas  le  cas  dans  les  suivantes  (r)  à  (u). 

Aussi  longtemps  que  p^  as ,  la  plus  grande  valeur  de  n ,  qui 
est  n  =  a,  ne  peut  rendre  p — 71s  négatif,  et  il  faut  eniployer 
les  premières  valeurs  des  intégrales  (w)  à  (9').  Quand  onap=za,s', 
ce  qui  vient  d'être  dit  est  encore  vrai  pour  toute  la  sommation ,  de 
n:=zl  à  n-=a  —  1  :  mais  pour  le  dernier  terme  de  la  somma- 
tion, pour  nz:=.a,  on  a  p  —  ns=.Oy  et  par  suite  il  faut  prendre 
pour  ce  terme  la  troisième  valeur  des  intégrales.  Quand  enfin 
on  a  p  ^  as,  il  y  aura  une  certaine  valeur  d  de  n  (où  l'on  a 
1  <.d  <.  a) ,  telle  que  p  —  ds  soit  encore  positif,  mais  que  pour  le 
n  suivant,  nz=:d  -\-  1 ,  on  ait  p  —  {d  -[-  1)  s  négatif.  Dès  lors, 
pour  la  première  sommation ,  de  7iz=:l  à  n:=:d  ,i\  faut  employer 
la  première  valeur  des  intégrales ,  mais  de  nz=:d-\-  1  à  n  =  a 
il  faut  au  contraire  en  prendre  la  deuxième.  Il  peut  y  avoir  en- 
core un  cas  d'exception ,  c'est  lorsque  p  est  égal  à  ds.  Dans  ce 
cas    il   faut   diviser    la    sommation   en  trois  parties  distinctes  :  la 


D.    BIERENS    DE    HAAi\.    NOUVELLES    FORMULES    DE    REDUCTION.     457 

première,    une   sommation  de  ?i  zz:  1  k  nzzid — 1,  avec  la  pre- 
mière valeur  des  intégrales  ;  ensuite  un  terme  détaché  pour  n-=z.d 
suivant  la  troisième  valeur;  et  enfin  une  seconde  sommation,  de 
nz=zd-\-  1  à  71=:  a,  avec  la  deuxième  valeur  des  intégrales. 
Ici  d  est  le  plus  grand  nombre   entier   qui   soit    contenu  dans 

la  fraction  -;  l'on  se  sert  de  la  notation  connue  d  z=z  /^l^;etla 

s  ^^^  s 

différence   des   deux   cas  consiste  dans  la  condition,  que  la  pre- 
mière fois  !-  était  fractionnaire,  c'est-à-dire  dp  <:  6-  <  (f/ +  1) /?  ; 

s 

tandis  que  la  seconde  fois  on  avait  dpzzzs  <  (d-\-l)  p  et  L  était 

s 

entier.  On  écrit  ces  conditions  ainsi  :  dzzz  T  '-  fraction  etd=:)^L 

entier  ;  les  mots  fraction  et  entier  ne  regardant  que  la  fraction  — . 

s 

Maintenant  le  chemin  est  frayé  pour  avoir  des  résultats  sûrs 
et  que  l'on  puisse  représenter  d'une  manière  claire  et  convenable. 
On  trouvera  des  valeurs  quelquefois  différentes  pour  les  divers  cas , 
et  plus  tard  on  pourra  introduire  la  fonction  /'.  {x)  ou  /\  (x). 

8.  Pour  donner  une  idée  des  résultats,  employons  la  formule 
(«)  avec  /j  (x) j  et  (o)  avec  /\  (x),  on  trouve 


f 


ûdx  ^  ^  .  \ 

/j  (x)Sinpx  — =  — -  Cospq,  v  KnSin  nq^^^i  i 

=z  — l  Cospq.  f\[q),  ] 


:=:  —  ~-Cospq,:>: knSinnqs—-^Sinpq.  Z knCosnqs,        ....  (V6) 
^  1  ^  d+l 

p  <  as , 


z=z  — —  Cospq.Zkn  Sinnqs-\-'^  ^AnSin  !  (ns — p)q  \  ziz 
^  1         -  '^  d+l 

a 

=  —  - Cospq. f,  {q)-{-    2:AnSin  \{ns  —  p)q],         I,  .  .   .   .  (Vc) 
^  d+l 


458      D.    BIERENS    DE     HAAN.    NOUVELLES    FORMULES    DE     REDUCTION. 

n  ^  n     ^  i 

—  —  -  Sinpq.Z kn  Cas  nqs—  -  2'  knSin  [  {ns~p)q  \  =-L- p  ^  as, 


^-.-Sinpq.\f,^{(l)—A,\—-2:AnS{n  \{ns-p)q 


'\ 


[p  ^  un,  -| 
'■ri 


(Vd) 


A  ( 

J  0 


x)  Sin  px  — — — -  =  —  ^  Bo  Cos  pq— 

q^  —  x^  ^ 

71  ^  n 

—  —  Cos  pq .  Z  Bw  Cos  nqs:=z  —  -  Cos  pq  ./^  (q'>, 


\p  >  as\ ,  .  (Nid) 


:=:  —  -  Bo  Cos  pq—  -  B«  Cos  2pq  —  —  Cospq  .2.  B«  Cos  nqs=   ...  (  VI6) 
2  4  2  i 


=  —  -  Eo  Cos  pq-h  -  B«  —  -  Cos  pq,Z B«  Cos  nqs  =         [/?  =  as\  , 
Z  4  2  X  l 


;.A('^)4-7B«, 


.  .  .  (Vie) 


=  —  -  B^Cospq  —  -  Cos pq.I^^nCos  nqs~\-  -  Sinpq.Z^BnSinnqs, 


(VI^) 


=  —  -BoCospq—  ~  Cospq.ZBnCosnqs+  -  i:BnCos\{ns-~p)q\—[ 
^  ^  1  ^  d+\ 


n  71     "  , 

=  •—  -  (7o6^ pq.f^ [q)  -i--  SBnCosI  (ns—p) q    , 

=  —  -Bq Cospq-\- -  Sinpq.2^BnSinnqs—  -i:BnCos  \  {ns—p)q  )  =| 


p->  as, 

s 
fraction 


(Vie) 


— -Bo  Cospq-^  ~  Sinpq.  f^  (q)-~  ^  ^B«  Cos  \  {ns—p) q  j , 


(VI/) 


d—\ 


=  —  -  Bo  Cos  pq  —  -  Cospq.Z  B«  Cos  nqs  —  -Bu  Cos2pq  -i- 
2i  Z  i  4 

+  -  Sm  pq.  2:Bn  Sin  nqs , 
^  d+l 

=  —  -  B^^Cospq+  -  B^—-  Cospq.i:BnCosnqs+  -  ^B« Co^j (;ns—p)q\  — 

^  4  2  1  2^4.1 

=--  Cospq._f\_  (,y)4_^B^  +  ^  2^  B«  (7o6-  j  [ns—p..q  \ , 

^  4  2^4.[ 

=— -  BqCos pq—  ~  Bd+  -  Sinpq.ZBnSinnqs—  -  ZBnCos\{^ns~p)q\  — 


p->  as, 
entier 


(VI?) 


(vi/0 


7T  ^^  71 


d—l 


=^—  -BqCos pq—~Bd+  -  Sinpq.  f\  {q)  —  ^  ^  ^»  ^^^  î  i*^^—P)9  I  • 


(VI/) 


D.    BIERENS    DE     HAAIN'.    iNOUVELLES    FORMULES    DE    REDUCTION.     459 

Avant  d'aller  plus  loin,  quelques  remarques. 
En  premier  lieu,  la  troisième  valeur  de  {n)  est  contenue  dans 
les  deux  premières  valeurs  comme  valeur  limite,  puisqu'on  a 

—  -   Sin  nqs.  Cos  nqs  zzz.  —  -    Sin  2  nqs  ■==.  —        Sin  2  pq. 
Ainsi  dans  les  formules  (Va)  à  (V^)  il  n'y  avait  pas  lieu  de  dis- 
tinguer entre  les  cas  de  p  >  as  et  de  p^=z  as ,  ou  bien  de  !-  frac- 

s 

tion  ou  entier.  Au  contraire,  cela  était  bien  nécessaire  pour  l'in- 
tégrale suivante,  puisque  dans  {p)  la  troisième  valeur  ne  se 
déduit  pas  des  deux  premières.  Dès  lors  il  devait  y  avoir  diffé- 
rence entre  (Via)  et  (VI6j,  entre  (Yld)  à  (Ylf)  et  {Ylg)  à  (VU). 
Quelquefois  il  y  avait  lieu  de  réduire  la  sommation  à  la  fonction 
/i  (9)  0^^  .A  {9)  :  on  en  a  profité,  sans  faire  de  distinction  en 
ce  cas  entre  les  coefficients  A«  et  B«.  Enfin ,  puisqu'on   a   toujours 

a  a  d 

2:  =  n  —  i:, 

d+l  G  1 

l'on  a  donné  le  résultat  tant  par  la  première  sommation  que  par 
la  dernière  ;  afin  d'en  laisser  le  choix ,  suivant  que  a  —  d  est 
ou  non  plus  petit  que  d,  c'est-à-dire  que  a  est  ou  non  plus 
petit  que  2d. 

9.  Pour  l'application  de  ces  formules,  qui  forment  le  premier 
pas  dans  notre  méthode ,  il  est  nécessaire  de  choisir  des  fonctions 
/i  (•^)  q^^i  fournissent  des  coefficients  kti  et  B«  propres  à  donner 
au  second  membre  des  expressions  assez  simples  ;  s'il  est  possible , 
de  telle  manière  que  la  sommation  de  1  à  ^,  et  de  f/  -1-  1  à  a 
soit  facile  à  exprimer. 

Prenons  à  cet  effet 

^.     /  V  r  Sin  SX  ^        o  • 

/,    [x]  ■=: =  Z  r«  Siti  nsXj 

1  — 2r  Cos  SX  +  r'^  i 

/^   {x)  zz:  ^^ z=  1  -h  2  J  r«  Cos  nsx^ 

1 — 2r  Cos  SX  ~h  r^  1 

1 — 2r  Cos  SX -\- r^  l 


460      D.    BIERENS    DE    HAAN.    NOUVELLES    FORMULES    DE    REDUCTION. 

puisqu'on  a  eu  même  temps 

G  l—2rCosiis-\-r''       i  l~2rCosqs-hr'' ' 

i  rn  Sin  nq,  =  '  ^'"  ^^  ~  ^''  ^'''  ''"^^  ~^  ^^'"^'  ^'''  I  (^-1)  ^^  U 
1  1  —  2r  Cos  qs  ~\- r"^ 

i  rn  Cos  nqs=  ^  Co^  qs-r^—r^  Cas  kqs+r^+i  Cos  \  (/.-— 1)  qs  \  ^ 
1  1  —  2r  Cos  qs-\-  r^ 

*    ^  o-                 /  ^^'^^  f^Qs  —  ^  '^ïw  I  (A;  —  1)  <^5  i 
2,  r^  Sin  nqs  •=.  r^  1 Lj^ , 

k  1  —  2r  Cos  qs-{-  r^ 

•^       ^                   ;   Cos  kqs  —  ?'  Cos  \  (k  —  1)  as  \  ,  , 

Z  r^  Cosnqs-=zrk 1 JJ^ ^  ^    '  ; {x) 

h  1  —  2r  Cos  qs-\-r'  '  ^  ^ 

qui  valent  pour  —  1  <  r  <  1 .  Comme  «  est  infini ,  on  a  tou- 
jours p  <  C5  ;  ainsi  les  cas  de  p  <:cs  ou  pz=cs  ne  sauraient 
se  présenter  ici. 

Substituons  la  fonction  /\  dans  les  équations  (I)  et  (III);  la 
fonction  f^  dans  (II)  ,  et  la  deuxième  des  relations  {x)  dans 
(IVa),  il  vient 

— ^ =z  -T  r«    ISiu  tiQs.  Cl  (nos)  — 

0   l  —  2rCossx-hr''     q'^—x^  l  ^  ^  ^^^ 

—   Cos  nqs.  Si  {iiqs)] - (Ij 

f"^  I  — r2  qdx  ^ 

I --* z=  n  2.  r^  /Sin  nos  = 

Jo   l--2r  ^05  6'^ +  r2    q^  —  x^  i 

7r  r  /Sm  qs 

1  — 2r  Co5  SX  -hr'^^ 


/(l — rMrCo^À-^          qdx  ^  /-,    .      on   ^         o- 

-^ i L =  -  1  4-r2)  ^  r«  /S'îw  y«OA^  = 

0   i-'2rCossx-i-r''   q'^—x''  2  i 

5      (1  +  r^)  r  /Sm  qs  ,... 


2   1  — 2r  Co5^5-+-r2  ' '  ' 

"*  î'  aS<'w  SX  xdx  ^    ^.        ^ 

z=  —   -    ^  r«   Cos  nqs  = 

2r  Co5  SX  -\-r'^     q^  —  x^  2     i 

Tir            Cos  qs  —  r  ,., 

= ^  ^ , (4) 

2     1  —  2r  Cos  qs  -\-  r^ 


io    1 


D.  BÏERENS  DE  HAAN.  NOUVELLES  FORMULES  DE  REDUCTION.  461 

r"^       r  [Cos  SX  —  r)  xdx  ^^        r^  ^-  /      n    , 

/      -^ 1 =  2,  r«    \Cos  nos.  Ci  (nos)  -+- 

J  0   l  —  2rCossx-{-r''-     q' —x''  i         ^  ^  ^^^ 

-h  Sin  nqs.  Si  (nqs)] (5) 

Ici,  pour  les  intégrales  suivantes,  il  est  à  préférer  de  ne  faire 
usage  dans  les  cas  particuliers  que  des  formes  non  réduites, 
puisque  dans  les  réductions  (x)  se  trouvent  toutes  les  somma- 
tions dont  on  a  besoin.  De  cette  manière  les  théorèmes  (VI6),  (Via) 
et  (Vlg)  nous  donnent  : 

Z*'^      r  Sin  sx.  Sin  px  qdx  n  ^  f, 

I      ^ — ^ = Cos  pq.  i:  r«  Sin  nqs  — 

J  0   l  —  2rCossx  +  r''  q"" —x'-  2  i 

^  CY-  ^  ^  ^  ^i  rSinqs — rd+^Sin\{d-k-\)qs\-{~ 
—  -  mn  pq,  2.  r^Cos  nqsz= Cos  pq ^— ^^    ' 

2  d+i  2  1  —  2r  Cos  qs -i- 

-hrd+2Sinqs  __  n  ^.^^        ^^^^^^  Cos\{d-hl)qs\  —  r  Cos  dqs  ___ 
4-r2  2  l  —  2rCosqs-^r^ 

^  —  r  Sin  qs.  Cos  pq  +  r^+^  Siu  j  (ds  +  5  —  P)  ^\  H- 

~^2  1  —  2r  Cos  qs  -\- 

-i-r^^2Sin[ids-p)q\     V.^rE ^fraciion]  ...  (6) 

—  ^rSinqs       ^"^—J^osdqs  p__^P^   entier  1  .  .  .(6a) 

r°^  (1 — r'^)8inpx      xdx  n  n  o  t  «^ 

1     ^^ ^ ' —  == CospQ Cospq.22Jr^Cos7iqs4- 

J  ol—2rCossx-hr''q'-—x^  2        '  '      2       '^       1  ^^ 


4-    -   Sin  pq.  2  2:  r'«  Sin  nqs  =  —   -    Cos  pq  — 
2  d+i  2 

^  rCosqs  —  r^  —  r^+^  Cos  {{d-]~l)  qs]-{- rd+2  Cos  dqs 

jt.ospq  l—.2rCosqs-{-r'^ 

_i(l— r2)Co5p9  4. 

, ,  ,  Sin   {d^l]qs   —  r  Sin  dqs  2 

-hnSinpq.r^+^    ._1A-^      ^^    ' Lz=7t 

'^^  l—2rCosqs-hr''  l—2rCosqs-\- 

-f-r^+i  Cos  \  {ds-f-s—p)q  \  —r^+2  Cos  j  {ds-p)q  j    r  ,_  y  p    frac-  T  ._ 
4.  r^  '  L  ""       5  '  tion  J 


462     D.    BIERENS    DE    IIAAN.    NOUVELLES    FORMULES    DE    RÉDUCTION. 

:=  —  -  Cos  pq Cos  pq.  2  ^  r«  Cos  nqs r^  Cos  2  pq  -j- 

2  2  i  2 

+     Stn  pq.  2  2J  r«  Sin  nqs  rz:  —       Cas  pq  -{- 

2  d-hi  2 

+  n  Cos  pq  ^^  ^^^  ^'^  —  r  ^  —  r^^  Cos  dqs  +  r^+  ^  Cos  \  (ri  —  1)  ^.v  j    _ 

1  —  2r  Cos  qs  -{-  r^ 

—  -  r«  Cos  2  pq  -i-  n  Stn  pq.  r«+l   '  -^ ^^— ^ ±    ■=. 

2  1  —  2r  Cos  qs  +  f  ^ 

2     1  — 2r  Co^ç^  +  r^     '   L  ^  ^^  J 

/"^rfl — r^jCossx.Sinpx      xdx                   it     ^    ^ 
-— i=r r^    (7o5  pq  — 
0      l  —  2rCossx  +  r''      q'^—x'^                 2 

—  Cos  pq.{l+r'^)::i:r»Cosnqs^ — Sinpq{\-\-r'^)2:r^^Sinnqs——r'^  Cospq— 
2  1  2  d+\  2 

TT  ^  ,.        ^ ,  rCos  qs  ~r^  -_r«^+l  Cos  !  (f/+l)7^  I  _Lr^'+2  Cos  dqs 

—  -Cospq.{]-{-r^) ^ ^ V    ',  ^   + 

2  1  —  2r  (7o5^5  +  r^ 

+  -  Sm  pq.   Il  ~\-  r^)  r^+^  Î_L_Z — ^  ^    ' i_  — 

2        '^     '  ^  1  — 2r  Co5^5  +  r^  ~" 

^  —  (1 — r -)rCos pq.  Cos qs-{- (  1+r - )  r«^+i  (7o6-  j  (ri5  -|-  5  —  ;?)  ^  |  — 

_--  ___ 

_^1  +  ,.),.^2C,,|(,,_^),|^  r/::z:/:i\  fraction!  .  .  .    (8) 

—  2r  Cos  qs  -^r^  L  *  J 

=  —    -  r^   Cospq ■     Cospq.  (l+r^)  2^  r^  Cos  nqs (i  H- 

+  r  2  )  f  û?  (7o,s  2pq-i-  -  Sin  pq.  {1-i-r'^)  2:  r^  Sin  nqs  =  —  -  r  -   Cos  pq  — 
2  d+i  2 

_ln  j^ri)nn.^J^'^'^'—^''—'''^^^''k^'-^rd+i  Cos\{d—\)qs\ 
2  l—2rCosqs-{-r'' 

--il+r^)rc^Cos2pq+^[l+r^)Sinpq.rd+^  g^U^+ljg.j -r^mc/g. 
4'  ^'2^  ^      ^^  l  —  2rCosqs^r'' 

— Cospq.  Cos  qs-\.  -  r«^— 1(  1  -|-r  ^  ) 

=  lr{l-r^) ^ ^ frf^  ^^\   entier"(;(8.) 

^  1 — 2rCosqs-i-r^  L  -^  J 


D.  BIERENS  DE  HAAN.  NOUVELLES  FORMULES  DE  REDUCTION.  463 

10.  Maintenant  on  peut  employer  ces  intégrales  pour  déduire 
un  nouveau  système  de  formules  de  réduction  générales,  au 
moyen  des  formules  (/)  et  {g)  du  N^.  3.  Car,  lorsque  dans  les 
intégrales  (6),  (7)  en  (8)  on  fait  p  =  mt,  il  se  trouve  sous  le 
signe  d'intégration  le  facteur  sin  mtx ,  de  sorte  qu'elles  peuvent 
servir  pour  le  développement  (/").  Multiplions  par  Qm  et  sommons 
par  rapport  à  m  de  m:=:l  à  m  =:  c  ;  comme  dans  ces  inté- 
grales on  a  calculé  toutes  les  sommations,  de  telle  manière  qu'il 
n'y  eût  plus  de  n ,  on  pourra  changer  ici  le  m  en  n.  Mais  il  y  a 
quelques  particularités  à  observer  : 

1°.  Aussi  longtemps  que  la  plus  grande  valeur  de  p,  qui  na- 
turellement est  ici  cf  y  reste  moindre  que  s,  on  a  d  zévo ,  puisque 
ce   d   est   par    hypothèse   le   plus   grand   nombre    entier   contenu 

dans  la  fraction  —  :  de  sorte  qu'il  faut  employer  les   valeurs   (7) 

s 

et  (8),  à  l'exclusion  de  (la)  et  [Sa). 

2^.  Quand  la  plus  grande  valeur  de  p^  c'est-à-dire  et ,  devient 
égale  à  s,  alors  ce  qui  vient  d'être  remarqué  s'applique  à  la  som- 
mation de  n  •=  1  jusqu'à  n  =  c — 1:  mais  pour  w=:c,  on  ob- 
tient le  terme  correspondant  à  d=ily  de  façon  qu'ici  pour  le 
terme  détaché  il  faut  employer  non  les  valeurs  (7)  et  (8),  mais 
les  valeurs  (7^)  et  (8a)  = 

3o.  Soit  et  plus  grand  que  s ,  mais  plus  petit  que  2^,  5  <  c/  <  2^; 
il  se  peut  que  s  soit  un  multiple  de  t^  ou  non.  En  premier  lieu , 
supposons  que  s  se  trouve  entre  deux  multiples  consécutifs  de 
/,  c'est-à-dire,  /./  <  5  <  (k  H-  1)  /:  alors  on  a  premièrement  la 
sommation  du  cas  1°  de  n=:l  à  nz=zk,  avec  f/  z=  0  ;  ensuite  une 
seconde  sommation  de  nzzik  -\-l  à  n-=LC,  où  d-=.l:  ces  som- 
mations exigent  toutes  deux  les  valeurs  (7)  et  (8).  —  En  second 
lieu,  supposons  que  s  représente  un  multiple  exact  de  /,  soit  s-=:ktj 
où  k  moindre  que  c:  premièrement  il  vient  la  sommation  du  cas 
1°  de  n-=.l  à  n-^k — 1,  pour  d-=:0,  où  il  faut  employer  les  in- 
tégrales (7)  et  (8)  ;  ensuite  vient  le  terme  détaché,  auquel  s'appliquent 
les  intégrales  {la)  et  (8^),  pour  nzzzk  et  f/  =  l;  enfin  la  dernière 
sommation  de  nz=.  k  -{-  1  à  nzizc,  où  maintenant  ^  izz  1 ,  exige 
de  nouveau  les  intégrales  (7)  et  (8). 


464      D.    BIERENS    DE    HAAN.    NOUVELLES    FORMULES    DE    REDUCTION. 

4°.  Quand  ci  devient  égal  au  double  de  s ,  ct=z  2s,  il  y  a  de 
nouveau  à  distinguer  deux  cas ,  suivant  que  s  est  ou  non  un  multiple 
de  /.  Dans  le  second  de  ces  cas ,  soit  s  situé  entre  deux  multiples  con- 
sécutifs de  ^  ;  p.  e.  kt  <  5  <:  {k-\-l)t  ;  il  faut  prendre  la  sommation  du 
1°  de  n  =  l  à  n^=k  pour  dzzzO,  et  la  seconde  sommation  du 
3°  de  M  =  A'  +  1  à  n:=zc —  1  ;  ensuite  il  faut  ajouter  un  terme 
détaché  à  coefficient  Ce,  on  d  =  2,  et  où  il  faut  employer  les 
intégrales  (7a)  et  (8a).  —  Quand  au  contraire  s  est  un  multiple 
exact  de  /,  c'est-à-dire  sz=kf,  la  sommation  du  1^  doit  se  faire 
de  n  nz  l  à  n:=.k — 1;  elle  sera  suivie  d'un  terme  détaché , 
calculé  d'après  2°:  après  cela  viennent  la  seconde  sommation 
de  3°  de  w  =zz  A  -f-  1  k  n=zc  —  1  ^  et  le  terme  détaché  pour 
71  i=z  c,  comme  auparavant. 

5°.  Lorsque  et  est  plus  grand  que  le  double  de  5 ,  mais  moindre 
que  le  triple,  nous  avons  quatre  cas  différents.  Supposons  pre- 
mièrement que  s  ne  soit  pas  un  multiple  exact  de  t,  donc 
kt  ^s  ^{k -h  1)  t  et  par  suite  2  A;/ <  2^  <  2  f/v  +  1)  /  :  ici  il 
peut  se  présenter  trois  cas. En  premier  lieu  soit  2kt  ^2s  <^{2k-{-i)t, 
ce  qui  comprend  la  première  inégalité  par  rapport  à  s:  on  a  une 
première  sommation  comme  au  1°  de  w  i=  1  à  n:=:k]  une  deux- 
ième sommation  comme  au  3°  de  w  nz  A;  -h  1  k  n  =  2k  :  enfin 
une  troisième  sommation  de  n=:2k  -\-  1  à  nz=c,  où  maintenant 
on  a  d=z2,  et  à  laquelle  conviennent  les  intégrales  (7)  et  (8). — 
En  second  lieu  soit  (2A;-|-1)  /  <  25  <  2  (A--hl)^  qui  comprend  encore 
la  première  inégalité  pour  s  ;  alors  aux  sommations  précédentes  il  n'y 
a  rien  à  changer  que  les  limites  :  la  deuxième  va  de  n=zk-\-l 
à  nz=:2k  -^  ly  la  troisième  de  ?«  =  2A;  -h  2  à  «  zz:  c.  —  En  trois- 
ième lieu  2s  peut  être  un  multiple  exact  de  /,  et  alors  il  faut  qu'on 
ait  2sz={2k  -h  1)  /,  à  cause  des  limites  de  2^:  dans  ce  cas  la 
première  sommation  du  1°  va  de  nz=l  à  w  =  A;  ;  la  seconde 
sommation  du  3°  va  de  n  =  k-^l  knzz:  2k ,  et  est  suivie  d'un  terme 
détaché  pour  «  =  2  /<;  +  1 ,  où  dz=z2,Qi  où  il  faut  employer  les 
intégrales  (7a)  et  (8a)  :  enfin  on  a  la  troisième  sommation  de  plus 
haut ,  de  nz=^2  k  -^  2  à  n-=.c.  —  En  quatrième  lieu  il  se  peut 
que   s  soit    un   multiple   exact   de  /,  soit  s  =  kt'^  dès  lors  il  est 


D.    BIERENS    DE    HAAN.    NOUVELLES    FORMULES    DE    RÉDUCTION.     465 

2s  :=  2kt  :  dans  ce  cas  on  a  la  sommation  du  1°  de  w  =  1  à 
n^=z  k  —  1  ^  un  terme  détaché  comme  au  2""  pour  n'=zk  et  ci-=z\ 
avec  le  coefficient  C/t,  une  deuxième  sommation  du  3°  à.Q  n  •=.  k  -\-  i 
k  ti  =i2  k  —  1 ,  un  nouveau  terme  détaché  comme  au  4°  pour 
nz=z2k  et  d::=2  avec  le  coefficient  O^k,  enfin  une  troisième  som- 
mation comme  auparavant  de  n:=.2  k  -\-  1  k  n:=  c]  pour  les 
sommations  il  faut  employer  les  intégrales  (7)  et  (8)  ^  pour  les 
termes  détachés ^  les  intégrales  {la)  et  {Sa). 

6'^.  Dans  le  cas  où  et  devient  plus  grand  encore,  on  suivra 
la  même  marche.  Soit  et  z=:  Is  -{-  s',  où  s'  <.  s ,  il  faudra  diviser 
la  sommation  en  /  +  1  sommations  partielles ,  allant  chacune 
d'un  multiple  de  k, — k  est  toujours  le  plus  grand  nombre  contenu 

dans  -,  donc  kl  <s^  {k  +  1)  /,  —  au  multiple  suivant,  c'est-à- 
dire  de  nz=zXk  à  n  z=:  {l -\- 1)  k  ]  on  y  a  donc  d:=X.  Seulement 
dans  les  cas  où ,  pour  n^=i^  k^  on  a  /^  kl  égal  à  5  ou  à  un 
multiple  de  5,  il  faut  prendre  le  terme  détaché  correspondant, 
de  telle  sorte  que  la  sommation  précédente  finisse  par  n-=.^  k —  1  : 
dans  ce  terme  on  a  toujours  d^z^  -{-  1 ,  et  il  faut  y  employer  les 
intégrales  {la)  {Sa),  tandis  que  dans  les  sommations  c'est  toujours 
les  intégrales  (7)  et  (8)  qui  paraissent. 

11.  A  l'aide  de  l'application  de  ces  remarques  on  obtient  par 
l'intégrale  (6) 

/•'^    ..    ,  ,  Sin  SX  qdx 

I      /s  [^) = 

Jo  1  —  2r  Cos  SX -h  r^   q^ — x^ 

jt  p  c 

2(1 — 2rCosqs-\-r^)    ]_  i 

-\-{Cosqs—r)2iCnSinnlg  \= {r—Cosqs)^QnSinnlq= 

1  J     2{\—2rCosqs-^-r'^)  i 

n         r  —  Cosqs 

=  ôi        o    n ^LT^^^f?).      [cl<cs], 

2  1  —  2r  Cos  qs-\-  r^ 


Archives  Néerlandaises,  T.  V.  30 


466  D.  BIERENS  DE  HAAN.  NOUVELLES  FORMULES  DE  REDUCTION. 

Sin  SX  qdx       


2r  Cos  SX  H-  r^   q'^  —  x'^ 

— 1 


io   1  — 

—  . 1  (r —  Cos  qs)  2J  CnSi?i  nlq-\-Cc{ — Sin qs. Cos qs-\- 

2(1 — 2r  Cos qs^r'^)\_  1 

-^rr  Sin  qs~r  '^ .  0)  1  —  -       '^  ~~  ^""^  ^^       \' Z^nSinnlq^{^oSinq^  — 
^  \       2  \—2rCosqs^-r''  L  i  J 

n      r — Cos  qs       i.  n.   a-      ^        ^      *' — Cos  qs        .  ,  ,      p  ^         , 
21— 2r Cos qs+r^  l  ^      2  l~2rCosqs-\-r-^'^  ^''^''    ^  ^ 

— "^ I  (r  —  Cos  qs)  ZQn  Sin  niq  —  [Sin  qs  — 

2(1  —  2r  Cos  qs -\- r'^)    L  i 

— rSin2qs'{-r-Sinqs)  ^QnCosntq — r[Cos2qs — rCosqs)ZQnSinntq  1  :=. 
k+l  k-\-l  J 

[c 
(r — Cos  qs)  Z  Q>„Sin  niq— Sin  qs.{l — 2rCos  qs-{- 
1 

c  c  -, 

+  r^)  Z  Q^n  Cos  niq  H-  Cos  qs,  (1  —  2r  Cos  ^5  +  r^)  v  q^ ^[^^  ,,^^  I   ^ 
k+\  k^\  J 

=   ÔT^ ^ X-2-.    V'  -  ^''  ^'^  'f-  (^)  +  (^-  ^''  ^'^  ^^'  "^ 

2(1  —  2t  Cos  qs-\-r^)    L 


r  —  Cos 


.A  (?)  + 


)5;+i  J         2    Ll — 2r67o5^5-4-r 

-F^C^/Sm  1(^^  —  5)^)1        [5<c^<25,  kl<.s<,{k-\-\)i\, 
k^\  J 

[y^— 1 
fr — Cos  ûs)  Z  CnSin  niq-uCk( — Sin  qs.  Cos  qs-u 
1 

c 

-\-rSin  qs—r^  .0)—{Sin  qs—rSin2qs+r^Sinqs)2:CnCosnfq — r{Cos2qs — 

k-\-l 

—rCosqs)ZCnSinntq  1^-- — — —— 1  {r—Cosqs)2CnSinniq-^ 

^  k+\  A      2{l—'2rCosqs-\-r-)[_  l 

+  (1  -  2r  Cos  qs  +  r^)  Z  Cn  Sin  \  (ni  -  s)  q\  +  Ok.  o"|   = 
k+:  J 

=::?r_In^^iii_/,  [q)+i:CnSin  (  (n/-*)^  1  T  [A^^=*  <c^  <2,9], 
2LI — 2rCo<s3'-^4-r2    "         k-\-\  A 


D.    BIERENS    DE     IIÂAN.    NOUVELLES    FORMULES    DE     REDUCTION.     467 

/°^  Sin  SX  qdx        

0  '^^    ^^   1  _  2r  Cos  SX  +  r2     ^^  —  x'^   ~" 

(r  —  -  Cos  as)  2:  Cn  Sin  nia  — 
1 
c— 1 

—  [Sin  qs — rSïn  2  g  s  -\-r^  Sin  qs)  ^  C«  Cos  ntq — r  (  Cos  2  qs  — 

—  r  Cos  qs)  Z  Qn  Sin  ntq  +  C^  Sin  qs.  (r^  —  Cos  2  qs)  \  = 

/t-hl  J 

[c 
[r—Cosqs)  Z  CnSin  nfq-\^{l—2rCos  qs-^ 
1 

-^r^)2:CnSin\{nl  —  s)ç\^Cr.0~\:=='V -~^'''^' /3  (r/)+ 

[/c 
(r  —  Cos  qs)  Z  Qn  Sin  ntq  — Sin  qs.  (1— 
1 

2/t  2k 

—  2rCos(is-{'r'-)  2:  d,  Cos  ntq — r[Cos2qs — r  Cosqs)i:Q„Sin  ntq — 

k+\  k-\-l 

c 

—  [Sin  qs  —  r-  Sin  3qs  +  r ^  Sin  2qs)  2  Cn  Cos  ntq — r'^{Cos  3qs  — 

2/î:+l 

—  r  Cos  2  qs)  2  Cn  Sin  ntq  1  zz: 

2yî:+l  J 

= "" [{r—Cosqs)2;CnSinntq-i~{l—2rCosqs-^ 

2(1  —  2r  Cos  qs  +  r^  )  L  1 

2k  c 

+r2)  zCn  Sin  j  {ni — s)q  \  — {Sin  qs—r^Sin3qs-^r-'Sin  qs)2:  CnCosntq^ 
k+i  2k-\-l 

+  {Cos  qs  —  r  —  r-   Cos  ?,qs  +  r^  Cos  qs)  Z  Cn  Sin  ntq\   = 

2k-\-l  J 

2k 


_    -_r       r—Cosqs _^  J  ^^  ^.^^ ,  [nt—s)q  j  + 

2\_\  —  2rCosqs-\-r'  a-+i  *  ' 


1 

4- 


i^2rCb79H-r'^  ^^^^  ^^'''  I  ^''^~'^'^  i  -'^C^'^'^^+r'^^in  \  {3s-nt)q  |  + 

30* 


468      D.    BIERENS    DE    HAAN.    NOUVELLES    FORMULES    DE    REDUCTION. 

r  —  Cos 


+  ,■'   Sin\{nt-2s)q\]\    =    |    f  '—^""l'  /,(,)  + 

'  J  2    Ll —  2r  Cos  qs-i-r^ 

+  2:0nSin  I  {nt—s)q  \+  ZQn  [Sin  j  {nl—s)q  \  -^rSin  j  {nt—2s)q  \]  \  = 
k+\  '  2^+1  J 

—  ^   r rj--Cosj^ (9)  +i  C.  ^m   |  (^i/ — ^)  r;  |    + 

-\-rhOn  Sin  \  {nt—2s)  q\l  ,   [2s<ct^  3s,  2kl  <  2^  <  (2A;-i-l)/] , 

2k^l  J 

[k 
(r —  Cos  ns)  Z  C«  Sm  ntq  —  Sin  qs.{l  — 
1 

2/^4-1  2>t4-l 

—  2rCosqsj^r'^)ZQn  Cos  ntq  —  r{Cos2qs~r  Cos  qs)2;Qn  Sin  ntq  — 

c 

(Sin  os  —  r^  Sin  S  qs -^  r^  Sin  2  qs)  Z  CV  Cos  ntq  —  r^  {Cos  3qs  — 

2/^+1 

—  r  Cos2  qs)  Z  C«  Sin  ntq  I  z=z 

2k+2  J 

[{r  —  Cos  qs)  /3  (ç)  -f-  (  1  —  2r  Cos  qs  + 


2{1— 2r  Cos  qs-^r^) 


/  2k+l  c 

-\-r'')   ^    Z  C«  Sin    I  [ni  —  s)  q\   +  ^  C«   {Sin    \  {nt  —  s)  q  \   — 
^   I  k-^i  ^  2k+2 

n  ^  1  ^     r  r Cos  qs  /.     /    ^ 

_  r  Sin    (n/  —  2*  ç  =  -      ^ ^r— ^ —7—^  /3  (7)  -h 

'  ^  ^  J         2   L 1  —  2  r  Co*  $5  H-  r  ^ 

-\-2:Cn  Sin  \  {7it  —  s)  q\-^r  2:  Cn  Sin  \  {nt  —  2s)q]'], 
k+l  2^42  J 

[2s  <cl<.  3s,  {2k  +  l)t<.2s<.2  {k^l)  t], 

k 

— "1 V(r  —  Cos  qs)  Z  (^n  Sin  ntq  —  Sin  qs.  (1  — 

"  2{l—2rCosqs-hr'')  L  1 

2k  2^ 

—  2r  Cos  qs-^r'^)  2:Cn  Cos  ntq  —  r{Cos  2qs  — r  Cos  qs)  2;  Cn  Sin  ntq-{- 
k-\-i  ^^+1 

c 

■i-C2k+lSinqs.{r'^  -Cos2qs)-  {Sinqs—r'^  Sin3qs-hr^  Sin2qs)2:CuCos  ntq— 

2k-\-2 

—  r^  {Cos  3qs  —  r  Cos2  qs)  2  C«  Sm  ntq     = 

2k+l  J 


0.    BIERENS    DE    HÂA.N.    NOUVELLES    FORMULES    DE    RÉDUCTION.     469 

Sin  SX  gdx       


/^  mn  SX  qau; 

0  -^^  ^^^  T—2r  Cos  sx-^r^  q^  —  x- 


2  (1— 2r  Cosqs^r'^) 


(,.  —  Cos  qs)  Z  C«  Sin  ntq-\-{\ — 2r  Cos  qsJ^ 


+  r-)  Z  C«  Sin  \[ni—s)  q  \  +  C2/î:+l.  0  +   (1  —  2r   (7o<s  qs  -\- 
k-\-\ 


2/^+2  J 

2    Ll — 2r  Cos  qs-\-r^  &+i 

+  r  1  C«  ^m  I  w^  —  2^)  9  I  X        [(2A;+1)  ^  =:  2^  <  c^  <:  3*], 


2/t+ 

>^— 1 


— . !! \(r — Cosns)ZCnSin  ntq^Qki — Sin  qs.Cos  qsJ^ 

-'2{l— 2r  Cos  qs  +  r^)V  i 

2k-\-\ 
4_  ;.  Sin  qs  —  0}  ~  [Sin  qs  —  r  ^/«  2qs-^r-  Sin  qs)  ^  C«  Cos  ntq  — 

2/î:+l 

—  r  (Cos2qs~-rCosqs)  ^  CnSinntq-\-  C2k  Sinqs.{r^  -- Cos2 qs)-+- 

k+] 

c 

4-  (Sin  QS  —  r'^  Sin  3  qs  -\- r^  Sin  2  qs)  Z  ^n  Cos  ntq  —  r'^{Cos3qs  — 

2/t+l 

—  r  Cos  2  qs)  Z  Cw  Sin  ntq  1  =: 

2k+l  J 

-- ^ V(r  —  Cos  qs)  2  C«  Sin  ntq  +  C/^.  0  +  (1  — 

2(1— 2r(7o5r^5  +  r2)  L  l 

—  2r  (7o5  qs+  r^)  Z  Qn  Sin  [  {nt—s)  q  \  +  C2k.  0  4-  (1  —  2r  Cos  qs  + 

k+i 


n   Y       r  —  Cos  qs 


-2r  Cos  qs  -{-r 


A   (9)  + 


H-  r-^)  1  Cn  Sin  j  («^  -  2*)  9  1 1  =  ^  f  . 
2/t+l  J  J    Ll 

C„5i/i  I  (»^./— .9)9  1  +r2:CnSin  I  (n/— 2^)9  )  1 ,  [2kt=2s  <z  et  <^  3s] 
1  '    2k+i  J 


k+ 


470     D.    BIERE.NS    DK    HAA-N.    NOUVELLES    FORMULES    DE     RÉDUCTION. 

12.  Pour  bien  comprendre  les  réductions  dont  on  a  fait  usage, 
observons  qu'en  premier  lieu  on  a  toujours  développé  suivant  les 
préceptes  du  N^.  10  et  qu'ensuite  on  a  étendu  de  // =  1  à  n  =  c\ix 
première  sommation,  qui  allait  de  «=1  à  nz=:zk — 1  ou  à  n=zk, 

h  c  a 

puisque  Z  ■=.  :^  —  Z.   Les  fonctions  à  soustraire  pouvaient  dès 

1  i        //+i 

lors  se  combiner  avec  la  deuxième  sommation,  et  ainsi  jusqu'à  la 
fin  de  la  formule.  Il  est  clair  que  les  termes  détachés  pou- 
vaient être  admis,  en  entier  ou  en  partie ,  sous  les  sommations.  En 
comparant  les  résultats,  au  nombre  de  neuf,  on  voit  qu'on  peut 
les  réduire  aux  quatre  cas  suivants,  qui  seuls  diffèrent  entre  eux. 


/ 


"^  8in  SX  qdx      ^r         r  —  Cos  qs 

0  ^'  ^^^    \  —  2r  Cos  SX  J^V"    q'^-xJ  "~  2    \—2r  Cos qs^r'^  ^ '  ^'^'' 

[cl^s] (Xlllrt) 

-  r       r-Cosq^  ^  ç^^  ^ .^^         __       ,  -I 

2  Li—2rCosqs-hr'  '-''      /c+i  '  'J 

[/a^s^cl^2s],  .  .  .   (Xlllb) 

— -f      '^~",^^''^'       fJq)^lCnSm\(nt~s)q\-i-ryCnSin\{nt-  2s)q\] , 
2L1 — 2rio6'qs-^r'^-  ^+1  2/^+1  J 

[2s<ct<:3s,  2kt^2s<{2k^l)t],  .  .  (XIIIc) 

^T     r-    Cosqs     ^^^(  )+^c  ^^V?!(^i/-.9)^|+ric.^e/i!{n/-2.')7il  ^ 
2Li-2rCosqs-^r-^-'-'^k+i         *  *2/-+2         '  U 

[2^  <  et  <  Ss,  {2k-{-l)t  <  2s^2  :k+l)t],  .  .  (XIIW) 

Cet  exemple  suffira  pour  faire  comprendre  l'usage  de  la  méthode, 
dont  on  pourra  trouver  plusieurs  autres  applications  dans  le 
Mémoire  lui-même. 


SUE  LE 

DOSAGE  DE  L'ACIDE  PH08PH0RIQUE 

EN  PRÉSENCE  DE  L'OXYDE  DE  FER  ET  DE  L'ALUMINE 

PAR 

A.    ADRIAANSZ. 


Il  y  a  environ  trois  ans  ')  j'ai  communiqué  un  certain  nombre 
de  dosages  de  l'acide  phosphorique,  exécutés  par  la  méthode  de 
M.  Chancel;  c'est-à-dire^  au  moyen  du  nitrate  de  bismuth.  La 
dissolution  de  nitrate  de  bismuth  avait  été  préparée  exactement 
d'après  le  procédé  indiqué  par  M.  Chancel,  et,  vu  que  même 
les  plus  faibles  traces  de  chlore  et  d'acide  sulfurique  empêchent 
la  précipitation  complète  du  phosphate  de  bismuth,  on  avait 
toujours  ajouté  à  la  dissolution  un  peu  de  Ag NO "^  et  de  Ba  (NO^)^, 
puis  séparé  par  la  filtration  le  précipité  produit.  La  valeur  de 
la  méthode,  dans  le  cas  où  l'acide  phosphorique  ne  se  trouve  en 
présence  que  des  alcalis,  ressortait  avec  évidence  des  résultats 
que  j'avais  obtenus,  savoir: 

Quantité  de  P*0*  trouvée  dans  25  ce. 
de  dissokition  de  phosphate  de  soude. 


par  la 

par  le 

par  la 

par  le 

magnésie. 

bismuth. 

magnésie. 

bismuth. 

N^ 

le 

série. 

N^ 

Ille 

série. 

1 

0,05596 

0,05565 

1 

0,04892 

0,04979 

2 

0,05658 

2 

0,04861 

0,05000 

3 

0,05646 

3 

0,04966 

4 

0,05658 

4 

0,04978 

Ile 

série. 

5 

0,04972 

1 

0,11340 

0,11369 

6 

0,04948 

2 

0,11334 

ï)  Voyez  Arch.  néerl.,  t.  III,  p.  186. 


472       A.  ADRIAANSZ.  SUR  LK  DOSAGE  DE  l'aCIDE  PHOSPHORIQUE  EN 

Les  expériences  de  M.  Holzberger  '  ) ,  qui  avait  trouvé  qu'il 
se  précipite  toujours  du  sous-nitrate  de  bismuth  avec  le  phosphate 
de  bismuth,  m'étaieut  encore  inconnues  à  cette  époque ,  et 
j'avais  cru  pouvoir  expliquer  le  léger  excès  de  P^O',  que  me 
donnait  habituellement  le  dosage  par  le  bismuth,  par  la  faible 
solubilité  du  précipité  magnésique  dans  l'eau  de  lavage.  Pour 
III  N^  2  l'eau  de  lavage  fut  mesurée,  et  il  en  résulta  une 
correction  2)  de  0,00128  P^O^  ;  0,04861  devenait  par  conséquent 
0,04989 ,  quantité  qui  s'accordait  avec  celle  trouvée  par  le  bismuth. 

J'avais  aussi  essayé  la  méthode  en  présence  de  la  chaux,  ce 
qui  m'avait  donné  : 

N°.  par  la  magnésie.  par  le  bismuth. 

1  0,04892  0,04967 

2  0,04861  0,04897 

Enfin  j'avais  dosé  l'acide  phosphorique  dans  une  dissolution 
à  laquelle  on  avait  préalablement  ajouté  du  nitrate  d'alumine  et 
du  nitrate  de  fer.  Comme,  dans  ces  conditions,  le  phosphate  de 
bismuth  renfermait  toujours  un  peu  de  fer  et  d'alumine,  le  précipité 
était  dissous  dans  H  Cl,  le  bismuth  séparé  par  H -S,  l'excès  de 
H=^S  chassé  par  la  chaleur,  le  fer  oxydé  à  l'aide  de  quelques 
gouttes  d'acide  nitrique,  et  enfin,  après  l'addition  de  très  peu 
d'acide  citrique  pour  maintenir  en  solution  les  très  petites  quantités 
de  fer  et  d'alumine,  l'acide  phosphorique  était  dosé,  par  la 
magnésie.  J'avais  ainsi  obtenu: 

Ni  alumine  ni  fer  De  l'alumine  et  du  fer 

dans  la  dissolution  ;  dans  la  dissolution  ; 

directement  par  la  par   le  bismuth  et 

N".                               magnésie.  ensuite  par  la  magnésie. 

1  0,05596  0,05469 

2  0,05596 

3  0,05539 


j)  Archiv    der  Pharmacie,  t.  116,  p.  37. 

2)  Tresenius,  Anîeitung  zur  qualit.  chem.  Anal.  (1866).  p.  333. 


PRÉSENCE    DE    l'oXYDE    DE     FER    ET    DE    l'aLUMINE.  .473 

De  ces  chiffres  j'avais  cru  pouvoir  conclure  que  la  méthode 
de  M.  Chancel  donne  des  résultats  très  exacts,  même  quand  il 
existe  dans  la  matière  des  sels  de  chaux,  de  fer  et  d'alumine, 
et  je  n'avais  par  conséquent  pas  hésité  à  la  recommander  pour 
le  dosage  de  P^  0^  dans  les  terres  arables.  Il  fallait  dans  ce 
cas  précipiter  par  l'ammoniaque  l'extrait  chlorhydrique  de  la 
terre  arable ,  redissoudre  le  précipité  dans  H  N  0  ^  ,  éloigner  les 
traces  de  Cl  et  de  H- SO*  par  AgNO^  et  Ba(NO-^)S  précipi- 
ter l'acide  phosphorique  par  le  nitrate  de  bismuth,  et  dans  le 
précipité  doser  P'^  0'  par  la  magnésie,  ainsi  qu'il  a  été  dit  ci- 
dessus. 

Peu  de  temps  après  la  publication  de  ma  Note,  j'appris  de 
différents  côtés  que  la  détermination  de  P^  0^  dans  les  terres 
arables,  telle  que  je  l'avais  conseillée,  avait  conduit  à  des  résul- 
tats très  peu  satisfaisants,  à  ce  point  qu'il  était  souvent  impos- 
sible de  déceler  l'acide  phosphorique  dans  les  terres  par  le  bis- 
muth, bien  que  cet  acide  y  existât. 

J'ai  donc  tâché  de  découvrir  à  quoi  il  fallait  attribuer  cet 
insuccès.  L'idée  la  plus  naturelle  était  que  la  précipitation  se 
trouvait  empêchée  par  une  grande  quantité  de  fer  et  d'alumine. 
Pour  m'en  assurer  je  fis  les  expériences  sui^-antes. 

Une  solution  qui  contenait  0,0544  P^  0^ -1-0,0414  Fe^  0^ + 
0,0230  Al- 0^  donna  un  précipité  par  la  liqueur  bismuthique  au 
bout  d'environ  dix  minutes;  il  se  forma  également  un  précipité 
dans  une  solution  de  0,0544  P^  0^  +  0,1242  Fe^O^  +0,0690 
Al^O^  Mais  lorsqu'on  ajouta  un  très  grand  excès  de  dissolution 
de  fer  et  d'alumine,  on  n'observa  plus  le  moindre  précipité,  même 
après  un  temps  très  long. 

Il  s'agissait  maintenant  de  savoir  si  les  sels  de  fer  et  d'alumine 
entravaient  à  un  égal  degré  la  précipitation  du  phosphate  de 
bismuth.  Quant  au  fer,  tandis  qu'un  précipité  prenait  immédia- 
tement naissance  lorsque  la  quantité  d'acide  phosphorique  était 
un  peu  grande  par  rapport  à  celle  du  fer,  je  trouvai  qu'une  so- 
lution de  0,0544  gr.  P^  0^  +  0,2070  Fe^  0%  c'est-à-dire  de 
26,2  P^O''   sur  100  Fe^  0%  ne  montrait  après  un  laps  de  trois 


474       A.  ADRIAAiNSZ.  SUR  LE  DOSAGE  DE  l'aCIDE  PHOSPHORIQUE  EN 

jours  qu'un  trouble  très  léger,  et  qu'une  quantité  encore  plus 
forte  de  fer  maintenait  le  phosphate  de  bismuth  complètement  en 
solution.  Les  sels  d'alumine  au  contraire  mettaient  beaucoup  moins 
d'obstacles  à  la  précipitation,  comme  des  expériences  préliminai- 
res l'avaient  déjà  appris,  et  il  parut  en  conséquence  intéressant 
de  rechercher  jusqu'à  quel  rapport  entre  les  quantités  de  P-O"^ 
et  AP  0''  la  détermination  quantitative  de  P^  0^  par  le  nitrate 
de  bismuth  restait  possible. 

Le  dosage  de  P"^0^  dans  le  précipité  de  phosphate  de  bis- 
muth se  lit  par  la  magnésie ,  suivant  la  méthode  indiquée  pré- 
cédemment. Les  résultats  obtenus  sont  les  suivants: 


P2   05 

en 

solution, 


A1^03 
ajoutée  à 
l'état   de 
nitrate. 


I  trouvé  dans 
lephospli.  de 
bismuth  par 
la  magnésie. 


OBSERVATIONS. 


0,0^)38 

0,1970 

32,7 

0,0645 

Après  l'addition  du  ni- 
trate de  bismuth,  la  li- 
queur fut  abandonné  à  elle- 
même  pendant  36  heures. 

0,0638 

0,3940 

16,0 

0,0631 

Idem. 

0,05i4 

0,8050 

6,6 

0,0582 

Chauffé  pendant  3  heu- 
res ,  puis  abandonné  pen- 
dant 24  heures. 

0,0688 

1,1810 

5,4 

0,0642 

Abandonné  pendant  36 
heures. 

0,0255 

1,1879 

2,2 

0,0260 

Chauffé  pendant  4  heu- 
res ,  puis  abandonné  pen- 
dant 8  jours. 

0,0255 

2,5236 

1,1 

0,0228 

Chauffé  pendant  4  heu- 
res ,  puis  abandonné  pen- 
dant 8  jours. 

0,0255 

2,5286 

1,1 

0,0241 

Idem. 

0,0255 

5,0172 

0,5 

0.0118 

Idem. 

0,0255 

8,8326 

0,28 

— 

Dans  cette  dernière  expérience,  la  liqueur  ne    montra   pas    le 


PRÉSENCE     DE    l'oXYDE    DE    FER    ET    DE     l'aLUMJNE.  475 

plus  léger  précipité,  après  être  restée  en  repos  pendant  3  jours 
et  avoir  été  chauffée  pendant  plusieurs  jours.  Avant  l'addition 
du  nitrate  de  bismuth  les  solutions  furent  toujours  fortement 
étendues  ;  le  chauffage  avait  lieu  au  bain-marie.  La  petite 
quantité  de  P^  0^ ,  qui  ordinairement  a  été  trouvée  de  trop, 
doit  probablement  être  attribuée  à  la  difficulté  d'obtenir  parfaite- 
ment blanc  par  la  calcination  le  pyrophosphate  de  magnésie  pro- 
venant d'une  dissolution  qui  renferme  de  F  acide  tartrique  ou 
de  l'acide  citrique. 

Le  tableau  précédent  montre  que  lorsque  la  proportion  de 
P^O^  ne  tombe  pas  au-dessous  de  2  p.  c.  environ  de  celle 
de  AP  0^ ,  l'acide  phosphorique  peut  être  déterminé  quan- 
titativement, avec  l'exactitude  nécessaire,  au  moyen  du  nitrate 
de  bismuth;  tandis  que  nous  avons  vu  plus  haut  que  P-  0^  ne 
peut  plus  être  décelé  qualitativement  par  ce  réactif,  même  lorsque 
sa  proportion  s'élève  encore  à  26,2  p.  c.  de  celle  du  fer  existant 
dans  la  liqueur.  Dans  le  cas  toutefois  où  Fe^  0^  existe  en  quan- 
tité beaucoup  moindre,  sa  présence  n'est  pas  un  obstacle  à  ce 
que  P-0^  puisse  être  déterminé  à  l'aide  du  bismuth;  c'est  ce 
qui  résulte  des  trois  dosages  communiqués  ci-dessus ,  et  aussi  de 
ceux  exécutés  récemment  par  MM.  Birnbaum  et  Chojnacki ,  '  ) 
qui  ont  également  séparé  P-  0^  du  phosphate  de  fer  par  le 
moyen  du  bismuth;  la  quantité  de  P-O^,  comparée  à  celle  du 
fer,  a  donc  dû  dépasser  ici  de  beaucoup  26,2  p.  c,  sans  quoi 
il  eût  été  impossible  de  trouver  la  proportion  voulue  de  P^O^. 
Quoi  qu'il  en  soit ,  mes  expériences  apprennent  qu'il  n'est  pas 
prudent  de  séparer  l'acide  phosphorique  directement  par  le  bis- 
muth, lorsqu'il,  est  en  présence  du  fer. 

Il  faut  donc  éloigner  le  fer,  et  pour  cela  j'ai  procédé  de  la 
manière  suivante. 

Si  à  une  dissolution  convenablement  étendue  d'oxyde  de  fer 
et  d'alumine  dans  l'acide  chlorhydrique  on  ajoute  une  dissolution 
d'hyposulfite    de    soude,    T oxyde    de    fer,    comme  Ton  sait,  est 


1)  Fresenius,  Zeitschrift  fur  analytische  Chemie ,  IX,  20o. 


476       A.  ADRIAANSZ.  SUR  LE  DOSAGE  DE  l'aCIDE  PHOSPHORIQUE  EN 

transformé  après  quelque  temps  en  oxydule ,  et  si  alors  on  chauffe 
la  liqueur,  l'alumine  est  précipitée ,  tandis  que  l'oxydule  de  fer 
reste  dissous  ;  dans  le  cas  où  la  liqueur  renferme  en  même  temps 
de  l'acide  pbosphorique,  cet  acide  est  complètement  précipité  avec 
l'alumine ,  il  n'en  reste  pas  une  trace  en  dissolution.  C'est  de 
cette  réaction  que  j'ai  fait  usage. 

Une  solution  renfermant  P^  0^ ,  Fe^  0-^  et  AP  0^  fut  additionnée 
d'hyposulfite  de  soude,  abandonnée  à  elle-même  jusqu'à  ce  que 
tout  le  Fe^  0^  fût  réduit  en  Fe  0 ,  puis  chauffée  ;  de  cette  manière , 
le  fer  se  trouva  éloigné  et  l'acide  phosphorique  transporté  sur 
l'alumine. 

Le  précipité  d'alumine  et  d'acide  phosphorique  fut  alors  dissous 
dans  HNO%  l'acide  phosphorique  précipité  de  nouveau  par  le 
bismuth  et  finalement  dosé  dans  cette  combinaison  par  la  mag- 
nésie. Lorsque  le  fer  existe  en  très  grande  abondance,  il  arrive 
quelquefois  qu'après  réchauffement  avec  l'hyposulfite  de  soude 
l'alumine  précipitée  contienne  un  peu  de  fer.  L'alumine  est  alors 
redissoute  dans  H  Cl  et  traitée  encore  une  fois  par  l'hyposulfite. 
Par  ce  moyen,  quelque  grande  que  soit  la  quantité  de  fer,  l'acide 
phosphorique  se  laisse  doser  avec  l'exactitude  nécessaire;  il  ne 
faut  pas  perdre  de  vue  toutefois  que,  d'après  ce  qui  a  été  dit 
précédemment,  la  quantité  de  P- 0'^  ne  doit  pas  être  inférieure 
à  2  p.  c.  par  rapport  à  celle  de  Al-0^. 

Je  cherchai  encore  à  trouver  quelque  moyen  de  doser  l'acide 
phosphorique  même  lorsqu'il  se  trouve  vis-à-vis  de  l'alumine  en 
proportion  plus  faible;  je  pensai  que  dans  réchauffement  d'une 
dissolution  d'alumine  et  d'acide  phosphorique  avec  l'hyposulfite 
de  soude ,  on  pourrait  peut-être  découvrir  une  période  où  tout  le 
P-0^  se  précipiterait  avec  une  partie  de  Al-0%  ce  qui  per- 
mettrait de  transporter  l'acide  sur  une  fraction  seulement  de 
l'alumine  ;  mais  des  expériences  faites  à  ce  sujet  montrèrent  que 
les  choses  ne  se  passent  pas  ainsi.  Nonobstant  cela,  on  est 
pourtant  en  état,  par  une  extension  de  la  méthode  indiquée,  de 
déterminer  P^  0^  quantitativement,  même  quand  sa  proportion, 
par    rapport    à    celle   de  l'alumine,    est  beaucoup  au-dessous  de 


PRÉSENCE    DE    l'oXYDE    DE    FER    ET    DE    l'aLUMINE.  477 

2  p.  c.  En  effet,  après  avoir  transporté,  à  l'aide  de  J'hyposulfite 
de  soude,  l'acide  phosphorique  sur  l'alumine,  et  avoir  redissous 
celle-ci  dans  HNO^ ,  on  peut  ajouter  une  quantité  co?wi/e  d'acide 
phosphorique,  quantité  telle  que  l'acide  atteigne  ou  plutôt  dépasse 
2  p.  c.  de  l'alumine  présente;  alors  seulement  P-0^  pourra  être 
précipité  par  le  bismuth ,  puis  dosé  ;  le  résultat  de  ce  dosage , 
diminué  de  la  quantité  ajoutée ,  fera  connaître  la  quantité  cherchée. 

Par  tout  ce  qui  vient  d'être  dit,  je  crois  avoir  établi  que  la 
méthode  de  M.  Chancel  convient  surtout  pour  séparer  P^  0^  des 
dissolutions  contenant  de  la  chaux  et  de  l'alumine;  qu'elle  peut 
servir  au  même  usage  quand  la  liqueur  renferme  une  petite 
quantité  de  fer ,  mais  non  lorsque  le  fer  y  existe  en  abondance  ; 
qu'il  est  par  conséquent  toujours  prudent,  en  cas  de  présence  du 
fer,  de  transporter  l'acide  phosphorique  sur  l'alumine  au  moyen 
du  traitement  par  l'hyposulfite  de  soude  ;  enfin ,  qu'en  présence 
de  l'alumine,  quelque  grande  qu'en  soit  la  quantité,  ou  peut 
toujours,  par  l'addition  d'une  quantité  connue  de  P^O^,  déter- 
miner la  proportion  d'acide  phosphorique  qui  existait  dans  la  liqueur. 

Toutes  les  difficultés  que  le  dosage  rencontre  dans  les  terres 
arables  sont  donc  surmontées.  En  peu  de  mots ,  et  pour  le  répéter 
encore  une  fois,  voici  la  marche  que  je  suis  actuellement. 

A  la  dissolution  chlorhydrique  convenablement  étendue  on 
ajoute  de  l'hyposulfite  de  soude,  et,  après  que  la  transformation 
de  Fe^O^  en  FeO  est  achevée ,  on  chauffe  ;  le  précipité  d'alumine 
chargée  d'acide  phosphorique  étant  lavé  et  dissous  dans  HNO'%  on 
ajoute  un  peu  de  AgNO^  et  de  Ba(NO^)'''  pour  se  débarrasser  du 
chlore  et  de  l'acide  sulfurique,  on  étend  fortement,  on  ajoute  le 
nitrate  de  bismuth,  on  chauffe  pendant  2  ou  3  heures  au  bain- 
marie,  au  bout  d'une  couple  de  jours  on  sépare  par  la  filtration 
le  phosphate  de  bismuth,  et  enfin  on  y  dose  l'acide  phosphorique 
par  la  magnésie,  comme  il  a  été  indiqué  précédemment. 

Par  cette  méthode  on  a  encore  exécuté  les  déterminations  sui- 
vantes sur  des  échantillons  de  terres  séchés  à  120°. 


478  A.    AORfAANSZ.    SUH    LE     DOSAGE    DE    l'aCIDE,     ETC. 

Quantité  de  terre  ou 
PjOs  d'argile  employée 

ti-ouvé.  poui-  l'analyse. 

Terre  végétale   du  jardin  du 

Laboratoire 0,22  p.  c.         150  grammes. 

Terre  du  même  jardin,  deux 

mois    plus    tard 0,257    „  150       „ 

Argile    de   Frise 0,36      „  50       „ 

Argile    déposée    par    la    mer 

dans   l'île    d'Ameland,    en 

fragments    arrondis    ....     0,14     „  25       „ 

Alluvion  du  Wahal  à  Nimègue     0,17      ,,  5       „  (environ) 

AUuvion  de  l'Yssel  à  Deventer     0,21      „  12       „         „ 

Vase    très    fine    déposée   par 

l'eau     de     la     Meuse     à 

Rotterdam 0,196    „  4       „         „ 

Dans  ces  analyses  l'alumine  fut  dosée  également,  et  on  trouva 
que,  par  rapport  à  la  quantité  de  cet  élément,  celle  de  l'acide 
phospliorique  variait  de  2,2  à  4  p.  c. ,  sauf  pour  l'argile  marine 
déposée  à  Ameland,  dans  laquelle  la  proportion  relative  n'était 
que  de  1,8  p.  c. 

Laboratoire  de  chimie  de  l'Athénée  dAmsterdam.  Juillet  1870. 


ERRATA. 


Pag.  268  ligne  5  au  lieu  de:  Au  printemps  de   1867;  lire:  Au   printemps 
de  1868. 
//      270  ligne  15  et  16  au  lieu  de:  Elles   se   changèrent  en   insectes  par- 
faits,   ailés,   mâles   et  femelles;  lire:  Elles  se  changèrent  en 
insectes  parfaits,  mâles  ailés  et  femelles  aptères. 


Pî.  X 


A 


xJ    V 


Hitl't 


\h 


4  ^/ 


PL    XI 


■gr 


T  T^   ■---.- 


ffiii 


x>  .^^-  .{"^  lij^ 


% 


PI  xri 


Eurytonia    longipeunis 


/v,/  /v/ ////;,//■//-<■.  /vV/..v  /7///./v;./^<' 


3  2044 


K  1é 

%^'f^-^'^'> 

t^\ 

ii 

l^^^i 

■        .    .fl 

«"^ft^ 

L>1>-:  .^.•^:'-.:*^?; 

il 

^! 

1^      C 

■^ 

li^^i' 

l'iV.T. 

-^%^-if•'^•''^»^^ 


■5«^>rv«; 


,l#^^«.-     ^   r?   :^