Full text of "Armande"
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y II
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Petite Collection Guillaume
E. ET J. DE CONCOURT
Armande
PARIS
E. DENTU, ÉDITEUR
S, Place de Valois, )
M DCCC XCII
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Si efi lisvres que ne f: peuvent ignorer,
fi tnvi plus ne peuvent ne Je pojfefder.
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Armande
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" Peiile Colleclion Guillaume "
E.etJ.ue CONCOURT
Armande
lllustraUous de Marold
PARIS
E. DENTU, ÉDITEUR
J, Place de Valois, j
M DCCC XCll
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IL A LTÉ TIRÉ DE CliT OUVRAGE
quelques exemplaires sur ve'lin de cuve
des papeteries du Marais.
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E. ET J. DE CONCOURT
Edmond de Concourt est né h
Nancy, en 1822. Jules de Concourt
est né k Paris en 1830. Les deux
frères publièrent v^rmani^ en 1856.
Edmond et Jules de Concourt
furent au premier rang parmi ceux
qui menèrent et créèrent le réalisme
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naturalisme contemporain. Doués
d'une originalité puissante, d'une
finesse d'impression exquise et d'un
sentiment profond de la réalité, ils
écrivirent un grand nombre d'ou-
vrages de premier ordre, tant par la
beauté du style que par la sincérité
et la nouveauté de l'observation.
Germînie Lacerteux, Madame Gervai-
saîs, La Faust in (ce dernier roman
d'Edmond de Concourt seul) sont des
œuvres de génie. Les frères de Con-
court furent en outre des historiens
supérieurs, dans un genre de mono-
graphies et de biographies qu'ils ont
inventé (et auquel beaucoup d'hommes
distingués ont dû en partie leur ins-
piration), tels que Madame de Pomjni-
dûur, Marie-Anlo'melte, La Société fran-
çaise pendant la Révolution, La Clairon.
Les Concourt ont publié : Charles
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Demailly, Sœur Philontine, Germinie
Lacerteux, Renée Maupèrin, Manette
Salomon, Madame Gervahais, etc., etc.
Edmond de Concourt a publié : La
Fille Elisa, Les Frères Zemmganno,
La Faustin, Chérie, etc., etc.
Jules de Concourt est mort en 1870.
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Dix heures du soir. La nuit. Point
de lune. Un grand bruit de ferraille,
des étincelles sur le pavé, des voix
qui sacrent, une portière ouverte, une
femme descendue, des ombres noires
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2 ARMAKDE
qui se promènent sur la bâche, des
croupes de chevaux blancs, un mo-
ment, luisantes sous une lanterne, des
têtes de dormeurs embéguinés aux
vitres, deux caisses de bois blanc à
terre ; un, deux, trois grands claque-
ments de fouet : « Hue ! hop-là !
hue ! » — la diligence de Bordeaux à
Toulouse s'ébranle, part, fuit ; le
roulement décroit, s'éteint, meurt.
Il n'est que les maisons de petite
ville pour dormir ainsi. Bêtes et gens,
tout est couché. Langon est mort.
Seule, une petite fenêtre luit, où un
grand bonnet de coton se détache
sur la lumière. La dame regarde tour
à tour les deux caisses posées à côté
d'elle, et le bonnet de coton qui ne
bouge.
« Monsieur... — hasarde-t-elle au
bout de quelques instants.
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... Monsieur, Jo suis
actrice...
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ARMANDE 5
— Qui est là ? — et le bonnet de
coton se penche dans l'ombre et
cherche à voir.
— Monsieur, je suis actrice.
— Ah!
— Pourriez-vous m'indiquer où est
mon directeur?
— Mais... je ne connais pas de
théâtre ici.
— Comment ? il n'y a pas des ac-
teurs qui sont arrivés ?
— Ah ! oui, pour la foire... qui
viennent jouer pendant quinze jours...
ah ! oui. Est-ce que vous allez bientôt
travailler? »
La dame sentit son cœur se serrer.
Elle regarda insolemment le bonnet
de coton, et d'une voix brève :
M Monsieur, pourriez-vous m'indi-
quer un hôtel ici ?
— Il n'y a pas d'hôtel ici.
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6 ARMAND F.
— Ah ! .
— C'est-à-dire, si. Mais tout le
monde est couché à huit heures. On
n'ouvre plus. Si vous voulez, on va
vous donner une chambre ici. »
La dame accepta. On lui mit un
matelas sur le sol battu d'une chambre
du rez-de-chaussée ; et elle rêva ceci :
la Dangeville entrait par le mur, con-
duite en grande cérémonie par quatre
gentilshommes de la chambre ; elle
tenait à la main un ordre de début à la
Comédie-Française, signé Louis XV, et
tous les beaux gentilshommes avaient
tous quatre le
cœur percé d'une
flèche en bois
doré sur laquelle
était écrit :
Artrunde.
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II
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« Eh bien, et mon directeur? —
fit Armande, en nouant son chapeau.
— Votre directeur, je ne sais pas
où il est, mais on va vous mener au
théâtre. »
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lO ARMANDE
— Et l'homme au bonnet de
coton, qui était le maître de poste de
Langon, siffla. Vint un gamin hâlé et
bronzé, troué et pouilleux, dont la
plante du pied nu luisait comme une
corne usée.
Elle allait, elle allait, suivant l'en-
fant, d'un petit pas endiablé. Ses dix-
huit ans chantaient dans toute sa
personne. A chaque enjambée, des
roses lui montaient aux joues. Elle se
mouvait, elle se tournait, elle se
troussait : une Grâce à pied ! Son
chapeau de paille de riz semblait un
nimbe virginal et coquet. Mille rayons
couraient et luttaient de caprices et
de moires sur sa robe de soie gris-
perle. Tel qu'un papillon noir tout
prêt à s'envoler, son châle de den-
telle lui fuyait des épaules : et sous
sa jupe, pour un rien relevée, deux
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ARMANDE II
petits pieds mordaient le terrain ;
deux petits pieds cambrés, vifs et
prestes ; deux petits pieds décolletés,
moulés dans le bas bien blanc, et
libres et captifs dans le soulier mignon,
et faisant sonner haut leurs deux pe-
tits talons.
Les maisons blanches à volets rou-
ges se sont éveillées dans un beau
soleil, et versent sur la rue les lon-
gues ombres inégales des tuiles alter-
nées de leurs toits. Les grands bœufs,
écornés d'une corne, entoilés de gris,
portant sur leur front fier une toison
de mouton, comme la mamelle d'Her-
cule porte sa patte de lion, les grands
bœufs marchent pesants, graves,
lourds. Le babil et le rire ont ouvert
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12 . ARMANDE
toutes les portes, surmontées d'une
jolie croix de Saint-Jean en moelle de
sureau ; et parmi les arbustes et les
pots de grès rouge, encombrant les
marches de chaque perron ruineux et
moussu, et jusque derrière les plan-
ches remplaçant les carreaux cassés
des vieilles maisons Henri III, il est
de grands yeux avides qui suivent les
deux petits talons.
Et sur le terrain roux, les petits
talons de trottiner, de sautiller, de
raser les coulées de fumier, d'effleurer
les flaques d'eau, de voler sur les
cailloux pointus et de bondir et de
s'éjouir ainsi que deux petites souris
noires, et de se presser et de s'enfuir,
— on eût dit qu'ils sentaient tous les
regards de la ville à leurs trousses,
— et de ne presque plus prendre
terre, et d'entraîner la rougissante
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... Un si nn soulier, si
galant et si uet...
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ARMANDE I>
Armande, qui se retournait en des
poses charmeuses pour prier la crotte
d'épargner des mouches à sa robe.
Oh ! l'aimable spectacle, par tout
pays du monde qu'un pied au bout
d'une jambe, et qu'une jambe au bout
d'un pied ! oh ! le nouveau spectacle
à Langon qu'un si fin soulier, si ga-
lant et si net, un soulier que Borel
eût dessiné pour une Fanchette de
Rétif ! — Virac, dit Périgord, le bar-
bier, en passa la savonnette du pays
— sa main pleine de savon — sur
les yeux du quidam qu'il tenait sous
le rasoir.
La rue était longue, montueuse.
Pas une fenêtre, pas un croisillon qui
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l6 ARMANDH
n'eût son curieux. Armande marchait
toujours plus légère et plus vive.
« Ici ! » cria le gamin qui s'enfuit
à toutes jambes.
Armande leva les yeux. Elle lut :
Café de la Providence.
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III
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Il dormait.
Cétait un dç ces sommeils calmes,
plats, profonds et béats, que donne
l'alliance d'mje conscience d'or avec un
estomac de fer. Il gisait en travers de
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ARMAMDE
la porte qu'il Danrait toute ; son ventre
rose avait coulé sur le fumier mollet, et
s'y reposait, tressautant. Pour mieux
être, il avait allongé ses courtes
jambes. Un froncement de graisse et
trois cils blancs indiquaient seuls la
place de ses yeux. Dans son groin
immobile, un halètement tranquille
allait et venait, et si profondément il
goûtait son repos, que sa queue en
vrille s'était un peu dénouée. Le soleil
le berçait de caresses, passant ses
mains de lumière sur ses soies drues,
sur ses flancs truites, sur son long dos
truffé de rondes taches noires. Ni
remords, ni rêve qui le troublât en
sa sieste, cet honnête homme de co-
chon : une pose d'une paix, d'une
détente, d'une onction, d'un abandon
merveilleux à voir ! De longtemps en
ongtemps il remuait, pour chasser
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ARMANDB 23
les mouches, à peu près un quart de
son oreille : mais comme un prince
éventé par un esclave, il ne s'éveillait
pour cela, bien au contraire.
Armande prit à deux mains son
élan et son courage. Elle enjamba le
dormeur et entra. Devant une table,
un vieux bonhonune, tablier blanc au
ventre, besicles sur le nez, écrivait
sur un livre vert.
« Monsieur, je suis mademoiselle
Armande.
— Ah ! bien ! je vous attendais,
ma fille. »
Il releva ses besicles, et la regardant :
« Ce n'est pas tout près, oui, Bor-
deaux ?
— Non, Monsieur.
— Voulez-vous déjeuner ?
— Merci. J'ai déjeuné.
— Eh ! bien, asseyez-vous à côté
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24 ARMAKDE
de moi ; vous me tiendrez compagnie,
et nous causerons de nos affaires,
oui. Mais, mon enfant, ces jours-ci
il ne faudra pas vous faire si belle
que ça, oui, vous comprenez pour
l'ouvrage et le fumier... »
Quand le cochon a vu qu'Armande
l'enjambait, il s'est éveillé ; quand il
a vu qu'elle entrait, il est entré ; en-
tendant causer, il grogne, en se frot-
tant contre un vieux billard en noyer.
« ...C'est que vous allez avoir beau-
coup d'ouvrage, — reprend l'homme
sans se laisser interrompre.
— Mais, Monsieur, quand joue-t-on ?
— auoi ?
— Eh ! bien, la comédie. Vous
n'êtes donc pas le directeur?
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ARMANDE 2$
— Le directeur de quoi ?
— Du théâtre ?
— Non. Vous ne venez pas pour
être bonne ici?
— Mais non, je suis actrice?
— Ah ! je vais vous expliquer :
j'avais demandé à Bordeaux une 6Ue
pour servir pendant la foire, et je
croyais que c'était vous. C'est bien
ici le théâtre, oui, en haut, dans le
grenier. Mais le directeur est là qui
mange, là-bas en face. »
Quelques instants après, arrivait
im grand garçon,' en blouse blanche,
en pantalon garance, en pantoufles de
basane javme, lequel ouvrit une bouche
énorme pour dire à Armande :
« Mademoiselle, vous êtes une jolie
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26 ARMANDE
femme! Ça va donner de l'oeil à la
troupe! »
Et puis après avoir tourné et re-
tourné sa casquette dans ses deux
mains rouges :
« Je vais vous présenter au direc-
teur. »
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IV
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Sur la porte de l'auberge dix hom-
mes étaient rangés. Quand Armande
fut proche, les dix hommes abattirent
d'un seul mouvement leurs dix cas-
quettes. Le premier des dix hommes
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30 ARMANDE
qui portait une redingote boutonnée
sur un col de satin noir, passa dans ses
cheveux gras, une manche de chemise
saie et cinq doigts ornés de bagues.
Il salua comme à un lever de rideau.
« Mademoiselle Armande...
— C'est à monsieur le directeur
que j'ai l'honneur de parler?
— Lui-même dans la personne du
fils de sa maman. Mais ne prenons
pas racine. Les indigènes nous con-
templent. Donnez-vous donc, belle
dame, la peine d'entrer. Nous étions
en train de sustenter un rien nos pau-
vres cadavres... — Eh! Madeleine
Lamour ! une assiette et un verre à
Mademoiselle, à côté de moi, et plus
locomotive que cela ! »
Les dix hommes accrochèrent leurs
dix casquettes et reprirent leurs dix
fourchettes.
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ARMANDB $1
Au bout de deux bouchées :
« Mademoiselle a un appartement
en ville? — dit le directeur.
— Mon Dieu non, Monsieur.
— Ma grand'mère et le père Ber-
nard ! Savez-vous, colombe de mon
cœur, que ce ne sera pas un petit
travail de vous casemer dans cette
préfectanche de bourgeois vétil-
leux ?
— Vétilleux ! — reprirent d'une
même voix les neuf hommes — il y
en a deux d'acteurs qui ont volé ici !
— Et neuf morceaux de confit fer-
mèrent les neuf bouches du chœur.
— Après cela, ne prenez pas le
trac, timide créature ! Reposez-vous
le torse ; on en écrira à la Provi-
dence ! — Ah ! mais vous n'avez pas
de pension ; vous viendrez béquiller
avec nous.
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32 ARMANDB
— Mais les dames ? — interrogea
Armande, très fort effarouchée.
— Les dames ! les dames ! Est-ce
qu'on a peur de son vieux papa ! Elles
•sont en train de venir, ces dames. Qui
fait diligence n'y va pas. Nonob-
stant, elles sont dans celle de Nantes.
C'est-à-dire, la Momignard ne vient
pas. Madame est poitrinaire. Elle se
vide. Elle n'en a pas pour six mois.
Et d'une. La Saint-Firmin, elle, sûr,
elle arrive demain. Après cela, que la
Momignard frappe au monument, ça
m'est totalement inférieur. Une femme
en mi mineur, qui couche avec de
l'huile de morue, et poussive comme
un fiacre, pour un pauvre rôle de trois
cents !... et des bras que son économe
de père lui avait faits par charité,
des bras d'un court... tu sais, Bous-
caille? elle ne pouvait pas seulement
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ARMANDE 33
les lever au-dessus de sa tête le jour
d'une première ! et fière comme un
pou en calèche ! Encore une qui ne
voulait se ballader que dans la nou-
veauté ! et toutes ses gyries pour jouer
dans le Fantôme vivant et le Chien de
Moniargis ! Cré nom ! C'est pas des
pièces iocy qu'elle disait. C'est pas
des pièces toc les pièces à M. Pixéré-
court ! excusez ! des oranges à Ma-
dame ! avec ça que les vieux n'étaient
pas d'autres charpentiers que vos
lapins de maintenant. De la resucée
quoi ! Le bon temps des bonnes piè-
ces, mes agneaux, c'est fichu comme
les coucous ! Mais la belle ange,
vous boudez le comestible? Il ne fout
pas non plus vous fourrer dans le
toupet qu'on a l'habitude de nous
servir ici dans la semaine des gibe-
lottes de diamants, et des faisans
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34 ARMANDE
avec le grand cordon de la Légion
dhonneur en sautoir ! »
Armande ne répondit pas. Elle re-
gardait de côté. — Dans le fond de
la pièce ouverte sur la cour, l'auber-
giste, qui était boucher, ainsi que
beaucoup d'aubergistes de petites villes
du Midi, émouchait avec une vieille
savate, emmanchée au bout d'un long
bâton, les quartiers de viande sai-
gnants pendus au plafond.
« F, i, fi, c, h, u, chu, fichu le
drame ! le drame, plus ça ! Ah ! les
vieux b cuirassés qui ne s'embê-
taient pas ! des tonnerres de phrases
qui vous chatouillaient le tympan
dans le dur, et des monologues qui
se portaient bien ! C'était-il assez
lardé d'ognons, leurs grandes machi-
nes, que le cintre s'en essuyait l'oeil
avec ses chaussettes ! et va te faire
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... Sur la porte de l'au-
berge...
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ARMANDE 37
fiche ! Tavalanche de l'embarlificotis
qui vous tombait dessus à onze heures
trois quarts net, que vous n^auriez
pas été plus étonné de recevoir l'Obé-
lisque dans les carrières Montmartre !
Ah ! les crânes gueux ! ils vous fai-
saient le cœur comme un foulard !
A présent, sais-tu le truc ? faut que
ça se passe à la cour du temps de la
philanthropie ! Ils maquillent les cri-
mes, quoi ! Secouez-lui les puces au
public avec ça ! C'est comme si la
Cour d'assises était en palissandre
avec des filets de cuivre !
Premier voisin de gauche. — Mort
de cheval de grâce laisse-moi la paix
de Tilsitt de Suisse...
— Tu me scies, toi ! Voilà qu'ils
lui ont persuadé, au bourgeois, que
c'était contraire à sa digestion de lui
égorger du monde ; ça ferait mal aux
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38 ARMANDE
nerfs que son épouse s'est achetés à
la dernière révolution ! Qu'est-ce qu'il
veut, alors? Et puis, quand on rage,
faut rager, avec la voix d'un homme
qui se tient à cinquante centimes
pour acheter une maison de campa-
gne... »
Premier voisin de gauche. — ...
de sauvage avance' la voiture de sanglier
les mains derrière le dossier de notaire
du Pre'-aux- Clercs de Vune et Vautre
ruche...
— Des infamies qui ont des gants,
des blouses pas méchantes, qui savent
la règle des participes..., qu'ils ma-
rient tout de suite des rosières et le
prix Montyon! Une bonne pièce,
sais-tu ce que c'est qu'une bonne
pièce, toi? C'est... Et les traîtres
sont-ils bas ! Qjaand ils ont un kilo
de mort aux rats dans le coco, on
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ARMANDE ^9
veut qu'ils se trémoussent en douceur
dans un dos de fauteuil de 5 5 centi-
mètres... Une bonne pièce, là, une
bonne pièce, c'est... Et leurs carcasses
d'à présent ! des riens, des toiles d'arai-
gnée, qu'on y voit le dénouement à
travers comme l'Arc de triomphe par
l'enfilade des Champs-Elysées ! ils
appellent ça une intrigue, l'enfilade
des Champs-Elysées ! Et puis avec
leurs gestes de deux sous, numérotés
comme des clefs de pension bourgeoise,
qu'ils fassent une Geoi'ges ! et qu'ils
me préviennent ! je paierai le port !
Premier voisin de gauche. — ...de
mer lanlimiche de fouet gras comme
un moine eau de Cologne...
Premier voisin de droite. — Ah!
la rude femme, qui jouait avec du
rouge à vingt francs le pot, et que le
public l'a sifflée !
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40 ARMANDE
Deuxième voisin de gauche. — Le
public? qui qu'en parle du public?
Le public! qui qu'en a, que je le
mouche !
— Veux-tu te museler, braillard !
C'est ça, tapes-y dessus au public
comme une corl^eille qui abat des oies !
Le public, tais ton bec ! c'est notre
monsieur! — Et sais-tu les pères et
mères de la chose? Ce sont ces s...
coquins qui font des feuilletons...
Premier voisin de gauche. — ....
mariné d'argent d'armes.. .
— Dis donc, tu m'embêtes, toi, avec
tes queues de mots ! Vois-tu, Rati-
chon, il y en a de ces èplucheurs de
salade à six mille balles par an ! J'en
ai connu moi un qui ne pouvait
écrire qu'avec une casquette à côtes
de melon ; c'est trop fort ! eh ! bien,
les voilà, ces crctins-là qui ont
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. . . Mol pas béte, ]a
dIvUe les vaudevilles eu
deux...
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42 ARMANDE
débagoulé dans leurs journaux et ci
et çà : ce mot-là n'est pas chouette!
une phrase qui n'est pas clair de
lune ! votre style est portier ! et
patati, et patata, le mot de la Momi-
gnard : c'est pas toc! pas toc, mes
bijoux, qui a cent représentations,
qui intéresse à évanouir les gendar-
mes, et avorter les enceintes! pas
toc, qui vous dansait la danse des
œufs dans le creux de l'estomac, et
vous revenait la nuit comme un de
la Morgue ! Allons donc ! des balan-
çoires ! Eh ! toi, dis donc, mon verre
s'enrhume! Mais tout ça, ce n'est
rien! Sais-tu ce qu'ils veulent, les
cyniques ? Ils veulent dégoter le
rire ! plus que ça de genre ! Des calem-
bours ? ah ! bien oui ! c'est comme si
vous leur mettiez une punaise dans
l'oreille ! Moi pas bête, je divise les
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ARMANDE 43
vaudevilles en deux: il y a les vau-
devilles pendant lesquels on peut se
faire la barbe, et les autres où on ne
peut pas. Eh ! bien, ils sont pour
ceux où on ne se coupe pas ! Voilà
pour quoi ils sont, ces fadasses-là !
L'art dramatique, que je leur dirais
à tous vos journalistes, c'est de vous
empoigner. Je leur dirais, et net,
l'art dramatique, c'est pas tout ça,
c'est, je vous dis, de vous empoi-
gner! — parce que, écoutez ça, vous
autres, il n'y a pas de phrase, ni de
vers, ni de rien qui fasse l'effet —
de quoi? savez- vous de quoi? de
quoi? je vais vous le dire : eh !
bien ! du saut de la barque. Qu'un
jeune mâle, fendu comme un com-
pas, s'élance de la barque sur le plan-
cher du fond, — il lève les bras au
ciel comme cela, — un grand coup
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44 ARMANDE
de pied ! va te promener, la barque
file, vlan! — et si la direction pos-
sède une culotte de chamois, il n'y a
pas de tremblement qui tienne !
Deuxième voisin de droite. — Dis
donc, eh! bien, etBouchardy?
— Tu n'es pas gêné, toi! Bou-
chardy, c'est le rupin de la chose ! »
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Le directeur tira lentement de sa
poche une pipe de coco sculpté.
L'imagination d'un artiste de Roche-
fort en avait installé le fourneau dans
la tête d'une jeune Incas, portant au
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48 ARMANDE
front un diadème de plumes, au col
une fraise Henri III. Qiiand la fumée
commença à sortir convenablement
par le nez de la jeime Péruvienne, le
fumeur offrit le bras à Armande; et
toute la troupe s'égaya au dehors,
fière comme un bataillon, promenant
un drapeau neuf pour la première
fois.
La compagnie marchait sans hâte,
le directeur s'arrêtant tous les trois
pas, pour médire d'une maison, remon-
ter ses bretelles, ralllumer sa pipe.
Les neuf hommes s'assemblaient, se
repliaient, se foulaient, se déban-
daient, tournoyant autour d'Armande,
tantôt la pressant de compliments, et
tantôt la harcelant de madrigaux,
« Monsieur, — disait au seul gar-
çon qui pût l'entendre, le seul homme
de Langon qui sût la place précise
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... La compagnie r
chalt sans bâte...
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Digitizedby Google
ARMANDE $1
des ve'lites à la bataille de Tunis entre
Xantippe et Attilius RégiUus, — Mon-
sieur, remerciez ces gens de rien !
C'est du Vegèce qui marche ! Tenez !
regardez bien : l'ordre oblique, la dis-
position d'Épaminondas, décrite par
Xénophon ! — Maintenant savez-vous
ce que c'est, ceci? Pharsale! l'infan-
terie des deux armées en échiquier;
la casquette brune à droite, ce sont
les mille cavaliers de César, et la
verte à gauche, les sept mille de
Pompée ! — Ah ! ah ! oui, parfaite-
ment, la quaria iepugnaiio! Mara-
thon ! le centre faible et les ailes for-
tes ! — Ils font la iorlue à présent ;
— et remarquez: ils sont dix; dix,
juste autant que la légion avait de
cohortes! — Et voyez, mais voyez
donc ! l'ordre romain, les trois lignes,
les hasiats où est la grosse fumée de
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52 ARMANDE
pipe, les privées où on se mouche, et
les triaires où il y a deux redingotes!
— Bon ! i présent la vraie phalange
macédonienne de Philippe, l'Invincible
des anciens, celle que Polybe...»
Mais l'cléve du professeur d'histoire
regardait bien plus le centre des évo-
lutions que les évolutions mêmes.
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VI
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Le lendemain, dans la soirée, on
frappa chez Armande.
« Madame de Saint-Firmin, qui a
voulu avoir celui de vous présenter
ses hommages au débotté, » et il
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$6 ARMANDE
passa devant le directeur, le corps
branlant d'un petit vieillard serré dans
un maigre manteau.
La vieille petite créature avait des
cheveux blancs et des cheveux gris,
un regard froid, un profil aigu, le
teint blême des gens qui se nourris-
sent mal et qui boivent.
Elle alla à Armande, lui prit la
tête, prisa, et l'embrassa.
Armande voulut s'éehapper.
« Et ! vieux ! — dit la créature au
directeur — tu n'as pas prévenu l'en-
fant?... L'habitude des travestis qui
a déteint dans ma vie privée, ma
petite chatte! — Armande vit alors
que le vieillard n'avait pas un poil de
barbe. — Tu es charmante ! je t'aime
bien, et je couche avec toi, mon
agneau ! » fit la vieille.
Le directeur était parti.
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... Quand Armande so
rôveUla...
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58 ARMANDE
Quand Armande se réveilla, ses
yeux trouvèrent dans la chambre une
bizarre vision. Dans un nuage de
fumée blanche, au centre d'un cercle
de petits pots étranges, les pieds
dans les pantoufles d' Armande, une
vareuse rouge lui plissant au dos, un
caleçon collé à ses tibias osseux, une
raie de côté, perdue sur son crâne
pelé comme une route dans une lande,
la vieille soufflait un réchaud de terre
sur lequel graillonnait de la graisse.
Elle chantonnait d'une voix cassée :
L«a bons gendarmes sucent et resucent
Les morceaux de bots qu'est pas sucré ;
Ils s'en r'toument chex les épiciers,
Épiciers, tu nous as trompés I
« Eh ! bien, oui, ma biche ! on est à
sa cuisine; on a eu son printemps,
comme les autres; maintenant on
s'utilise... Je n'en vendrai jamais tant
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ARMANDE S9
que ma gueuse de peau en a mangé
de ce cold-cream !
Ils s'an r'tournent ch«i las «picten...
— Ah ! dis donc, tu sais Tordre et
la marche? Le vieux t'a-t-il dit?
Non?
tplctora, ta nous a trompés I
L'épicier reprend let morceaux de bols,
Les enfonce dans la castonnade...
— Pourvu qu'ils aient des selles de
femmes dans ce port de mer!
— Comment? des selles de fem-
mes?
— Eh ! bien, oui, pour la caval-
cade... appelle-moi ta petite mère,
hein?... il faut se tambouriner dans
un pays... toute la troupe à cheval...
Les enfonce dans la castonnade...
— T'as ma taille; tu me prêteras
ta robe, tu sais?
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6o ARMANDE
— Une cavalcade?... comme des
saltimbanques ?
— Que t'es jeune ! C'est reçu dans
le monde, une cavalcade! tous les
grands artistes ont commencé comme
ça!
Les enfonce dans la castonnade
Les bons gendarmes n'a pu eu d* rhume,
Ils ont vécu en bonne intelligence.
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VII
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Digitizedby Google
Qu'une bouteille tienne un accès
de folie, qu'une montre grande comme
une pièce de dix sous tienne vingt-
quatre heures, qu'un encrier tienne
un chef-d'œuvre, qu'une carte tienne
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64 ARM AN DE
une fortune, qu'un titre tienne un
succès, que le cœur d'une fille tienne
tout Paris, que le poignard d'un Stabs
tienne les destins de l'Europe, qu'un
corricoh tienne deux quarterons de
voyageurs, que le monde tienne César,
que la fosse commune tienne ses
hôtes, qu'une chambre tienne le para-
dis, qu'un violon tienne des rires et
des larmes, — toutes ces choses sont
des faits. Mais que la mémoire d'Ar-
mande ait tenu en quinze jours tous
ces rôles : Marie du Sonneur de Saint-
Paul, Adèle de Bruno lefileur, Rodo-
gune des Economies de Cabochard,
Mathilde de Philippe, Ernestine de
Qui se ressemble se gêne, Marie de la
Tirelire, Juliette de Sans nom, Lucia
de la Foi, VEspèrance et la Charité,
Marie des Mémoires du Diable, Antoi-
nette de la Citerne d'Ain, Henriette
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ARMANDE éj
d'HenrieUe Deschamps, Marguerite de
Roger Boniempsy et Adélaïde de
Quaire-vingt dix-neuf Moutons et un
Champenois, — le fait est un miracle.
Et qui le fit ce miracle? — la
phrase coutumière du directeur : « Sa-
chez-nous ça, ou faites vos paquets,
la belle ange! »
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VIII
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Une blanche fille, toute blan-
che et toute jeune, grassouillette et
ronde d'épaules, une nuque à damner
les gens, le ciel bleu dans ses yeux
bleus, la joue rouge d'un rouge de
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70 ARMANDE
Guerlain, ballottée, et reballottée dans
quelque chose qui est tout noir et
tout tortueux! Un frêle et charmant
petit corps, une miniature, une pou-
pée et une beauté, une femme-enfant,
une enfant-femme, ondoyant à tra-
vers les traîtrises et les sourcils char-
bonnés, passant et repassant dans le
cerceau des catastrophes impies, dans
le duel de Dieu et du diable, dans les
coups de poignard et les flammes
bleues, dans la terreur et le rugis-
sement des crimes! Une statuette de
l'Innocence et du Charme, traversant
ce cauchemar, avec deux doigts de
jupe, «et quelle jupe! le plus pim-
pant des anachronismes, un carillon
de couleurs empruntées à l'Ecosse, un
morceau d'arc-en-ciel cousu sur de la
soie !» Et la tête de cette vierge, quel
peintre la détacherait, comme ces
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ARMANDE 7I
vingt-quatre quinquets, sur ces mas-
ques et ces faces, sur toutes ces bou-
ches torses et sur tous ces yeux lou-
ches, sur tous ces fronts ridés, sur
tous ces nez vineux, sur ce monde de
grimaces et ce peuple de cabotins!
cortège immonde des laideurs morales,
plâtrées de plâtre, fardées de brique,
qui s'empressent, et se démènent, et
fourmillent tout autour de cette appa-
rition de première communiante !
Bref, quelques-uns affirment avoir
vu les cœurs de la salle s'en aller un
à un, tout le temps de cette première
représentation, s'accrocher à la cein-
ture d'Armande, et y rester pendus
comme un trousseau de petits poissons
d'acier à un crochet d'aimant.
La pauvre petite jouait pitoyable-
ment. Gestes, accent, silence même,
et ce petit doigt coquet posé sur la
dby Google
bouche, alors que le traître, rejetant
son manteau, montrait ses pistolets,
tout en elle était contresens, et tout
en elle était ensorcellement ! Tant de
naturel en tant d'embarras, une si
gentille gaucherie! Et elle était si
rose, cette oreille tendue au souffleur !
« C'était merveilleux d'inintelligence ;
c'était délicieux d'émotion ! »
Par mégarde, Armande se rappe-
lait-elle plus de trois phrases ; sa voix
tremblotante tombait-elle, sans inten-
tion, sur une note à peu prés juste,
la folie donnait le bal dans toutes les
têtes masculines de l'assemblée; et
jamais ne fut au monde, dans le par-
dedans Imaginatif d'un chacun, plus
grande culbute, sauterie, et trémous-
sement d'idées.
Qui eût décoiflfé les cervelles,
eût vu... Dans celle-ci, vieille et
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... Et eUe éUlt si rose,
cette oreille tendue au
souffleur...
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74
ARMANDE
rance, des peintres suspendus à des
cordes reblanchissaient une jolie mai-
son près d'un riou aux eaux claires ;
un jardinier plantait des rosiers,
et le propriétaire de la cervelle,
de la maison et des roses, atten-
dait sur la porte, toutes les clefs à la
main.
Dans celle-là, dans celle-là, toute
jeune et virginale... quel abatis! une
armée de bûcherons, aux bras nus,
jetait à terre sans pitié les arbres, les
beaux arbres d'un grand bois mar-
qués dans la réserve ; on voyait dans
le fond une vieille femme malade dans
un lit, et le régisseur portait l'argent
au petit ménage.
Dans une autre, de vieux écus sor-
taient d'un vieux bas de laine, et
dansaient, et sautaient, joyeux de
revoir le jour, et courant d'eux-
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ARMANDE 75
mêmes au tablier d^Armande. Ici,
mansarde et joie, chansons au cœur,
pinsons à la fenêtre, régalades de
petit vin, de petite chère, et de ten-
dresses grandes; là, chaise de poste,
roulant bon train d'amour au clair de
la lune.
Une qui n'était que livres reliés
en basane verte, et qu'additions à
quarante lignes à la page... un
quart de sourire d'Armande ! crac !
la cervelle et tous ses registres chavi-
raient dans le Lac de M. de Lamartine,
d'où elle remontait bleu de ciel.
Dans quelques-unes roulaient des
tronçons de vers , des fragments
d'hémistiches, des bouts de rimes
en aiid£. Dans beaucoup s'épanouis-
saient à huis clos, des images justi-
ciables de la Police Correctionnelle.
Il faut bien le dire : de toutes assu-
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76 ARMANOB
rèment, les plus sages, et les plus
bourgeoisement innocentes , étaient
les cervelles des acteurs, cervelles
tendues de blanc, de bas en haut,
avec un autel de l'hyménée au beau
milieu, et encadrée dans un cadre d'or,
la chanson du Sénateur de Béranger.
Armande eut brouhaha, cris, bravos,
rappels et bouquets; et la toile tom-
bée, tous les Langonnais, portant cha-
peau, firent escorte à Armande avec
tant de lanternes, que les chiens cru-
rent un moment à l'incendie de la
lune, et aboyèrent : Au feu! pour
sauver leur mère Hécate.
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IX
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Mlle Armande, grand premier rôle,
eune premier rôle, forte ingénuité,
soubrettes et Déjazet, se reposait de
ses fatigues de mémoire, en peignant
des décors.
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So ARMANDE
Son triomphe était la forêt, .qu'elle
peuplait de perroquets d'un rouge
éblouissant, avec des becs tout noirs
grands comme la main.
Mme Saint-Firmin, première duè-
gne et caractère, mère noble, rôles de
convenance, continuait son cold-cream,
et l'envoyait aux élégants de la ville,
moyennant cinquante centimes.
La grande coquette, qui était la
Bourdois, qui avait remplacé la Momi-
gnard, racontait ses amours en dili-
gence, et le mal que lui faisait le melon.
Le directeur vivait maritalement
avec sa pipe.
Le premier rôle en tous genres, les
Lafond, regardait passer, sur le pont,
l'eau, le temps et les bateaux à vapeur.
Le jeune premier, fort deuxième,
comparait un verre d'eau-de-vie avec
un autre, faisait le saut périlleux du
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... Le premier comique
mettait lea noms sur les
croix do bots...
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82 ARMANDE
poêle du café, imitait le cornet à pis-
ton, cassait une noisette avec un doigt,
pliait sa serviette en lapin.
Le premier rôle marqué, pères
nobles, lavait son linge, guérissait les
maux de dents, pronostiquait le temps,
collectionnait des cannes dans les bois,
saluait le curé, prenait le menton aux
bonnes.
Le grime en tous genres emprun-
tait des faux-cols au premier rôle, des
imitations au jeune premier, des can-
nes au père noble, de Tamour à
Mme Bourdois, de la monnaie à
Armande pour acheter du tabac, et du
tabac au directeur pour ne pas en
acheter.
Le premier comique, ancien pein-
tre en lettres, mettait, en ses moments
de loisir, les noms stir les croix de
bois des morts du cimetière.
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ARMANDE O;
Le deuxième et troisième comique
avait un anévrisme, et se plaignait de
Charles X.
Les utilités, quatre grands garçons
bien corporés, assis sur quatre bornes,
les grands fouets du maître de poste
en main, donnaient, de deux en deux
minutes, des coups de fouet dans
l'air.
Cette année-là, le vin n'était point
mauvais à Langon.
Cette année-là, le soleil sVttardait,
plein de pitié pour les garde-robes
légères.
La recette était, le crédit allait
être.
Armande qui avait pris, sans trop
le savoir, Thabitude de passer devant
trois fenêtres lui montrant trois fois
la tête d'un jeune homme fort alerte
à courir pour la voir ; Armande
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84 ARMANDE
peignait avec goût son vingt-neuvième
perroquet rouge à bec noir, quand
Mme Saint-Firmin lui remit un matin
trois lettres.
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84 ARMAXDE
peignait avec goût son vingt-neuvième
perroquet rouge à bec noir, quand
Mme Saint-Firmin lui remit un matin
trois lettres.
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La première lettre portait le tim-
bre de Bordeaux :
« Vilaine chienne, étais-tu donc
« battue à la maison ? ne t'avise pas
« de revenir, j'ai fait remonter ton lit
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S8 ARUAKDE
« au grenier; coquine, tu ma vais
« embrassé la veille comme à l'or-
« dinaire; jaimerais autant te voir
i< morte ; enfin la vielle maman Cadet
« n'a plus grand temps à rougir de
« toi dans ce monde, maintenant c'est
« fini, je n'ai plus rien pour toi ; je te
« menais pourtant au bal le diman-
« che : à mon lit de mort je ne t'em-
« brasserai pas, vois-tu bien ; tu m'as
« pris du linge en partant ; faut-il que
« j'ai vécu soixante-dix-huit ans à
« souffrir, je ne demanderai jamais
« asses de pardon au bon Dieu de te
« l'avoir laissé voir cette gueuse de
« femme du théâtre ; ne me fais pas
« de réponse, je ne veux pas voir de
« ton écriture ; jai dit aux dames Roret
« que je t'avais envoyée chez ta tante
« de Toulouse ; tu étais volontaire,
« mais je croyais que c'ettais un vice
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ARMANDC 09
« d'enfant; cela ne fait rien, mau-
« vaise fille, ta concience doit te
« reprocher; tu avais des robe plus
« belle qu'une enfant de riche; et
« quand cela se saura, ques que je
« reponderai? voilà les dernier mot
« que vous aurai de votre vielle grand
« mère, vous aurier bien pu attendre
« que je soit sous terre pour jouer la
« comédie si près de chez nous ; tous
« ce que vous ferai a présent m'est
« égal, j'avais une petite fille je nen
« ait plus, votre père n'ettait qu'un
« tisserant mais il na jamais fait de
« tord a personne, le pauvre cher
« brave homme; il taurais tué, ne
« revenez jamais, Jeannette a un balai
« pour les p.... »
La deuxième lettre portait le timbre
de Paris :
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90 ARMANDE
« Enfoncé le guignon, ma petite !
« Qu'est-ce que j'ai fait depuis que
« j'ai quitté cette sale baraque de
« théâtre de Bordeaux ? J'ai fait for-
et tune, mon ange ! Je suis aux Fo-
« lies-Dramatiques. Je tutoie des vau-
« devillistes, des millions, et les plus
« jolis garçons de la terre. Je vis le
« matin, je vis la nuit, je vis tou-
« jours. J'ai des amants, des caprices,
« des pièces, des meubles, des dettes,
« du crédit et cent mille francs de
« volants ! Je suis drôle, j'ai de l'es-
« prit, y épate ! je fais la gaieté ! on
« me jette des vers, des bouquets,
« des cœurs, des truffes, et les
« miettes du Régent ! Je connais la
« moitié du boulevard, et l'autre moi-
« tié me salue. Je fais mon trou,
« mon nom, et mon beurre ! J'ai
« mis les écrevisses bordelaises à la
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... La première lettre
portait lo timbre de Bor-
deaux...
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Digitizedby Google
ARMANDB 93
« mode, un marquis sur la paille, et
« Tindépendance d'un critique dans
« ma poche. Le public regarde mes
« jupons courts, comme un enfant
« regarde une tartine de confiture.
« Le cancan, c'est moi ! je dis : Des
« navets! comme Mlle Rachel! J'ai
« le chic des rôles flan ! et voilà ! je
« soupe et je resoupe ; je gaudriole
« et je cabriole ; je verse des chan-
« sons, du Champagne, et de l'amour!
« — Souvent ça me fait bien toc toc
« dans le dos, je toussaille ; — mais
i< zut ! en avant la musique !
« Et si tu savais comment le bon-
«« heur m'est tombé dessus ! Figure-
« toi je me promenais aux Champs-
« Elysées. J'étais d'un triste... Je
M revenais, ma chère, de jouer la
« comédie à Etampes, avec machin...
« tu ne connais pas ; il passa la nuit
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94 ARMANDE
« à tambouriner à mes carreaux. Je
« me promenais, je me promenais,
« bref! j'avais un cheveu dans mon
» existence. Je rencontre un morceau
« de ma famille bien décoré, un
« vieux, qui me dit : Veux-tu venir
« dîner ? — Merci, je suis écœurée.
« Je veux jouer à l'École-Lyrique,
« et je n'ai pas quatre-vingts francs.
« n me les lâche. J'avais mon idée.
« Je flanque mes quatre-vingts francs
« au L}Tique pour jouer le vendredi.
« Je vais aux Folies sans voiture,
« avec mes pieds naturels. Je trouve
« un gros homme, Mourier, dans sa
« niche. Ma foi ! j'y vais gaiement :
« — Monsieur, je veux jouer la co-
« médie.. — Il rit. — Eh ! bien que
« savez-vous faire ? — Rien. —
« Alors ? — Je veux que vous veniez
« me voir jouer, vendredi, à l'École-
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ARMANDE 95
« Lyrique. J'avais un aplomb ! Il
« m'aurait dit que je n'avais pas de
« talent, que je l'aurais appelé ga-
u nache ! — Allons ! eh bien ! en-
te voyez-moi deux stalles. — Le ven-
« dredi, je regarde dans la salle : pas
« plus de Mourier que dans un globe
« de lampe ! Bon ! je joue. Après je
i< vais trouver l'ouvreuse : Est-ce
K qu'il n'est pas venu un vieux pour
u me voir? — Oui, Madame, Môssieu
« le directeur des Folies-Dramatiques,
i< avec un autre vieux. II est parti.
■< — Il ne vous a rien dit pour moi ?
« — Non. — Très bien ! Le lende-
« main, je retiens une loge aux
< Folies. Je dîne chez une amie.
«J'arrive aux Folies. Je demande au
X contrôle : Est-ce que M. Mourier
« a été hier à l'École-Lyrique ? —
( Oui, Madame, il a été pour voir
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96 ARMANDE
« une nouvelle figure. — Eh ! bien
« cette figure, c'est la mienne. — Voilà
« le contrôle qui me salue. J'étais
« dans ma loge. Je n'y pensais plus.
« On frappe. — M. Mourier vous
« demande. — Ça me donne un
« coup. Mon Mourier me dit de m'as-
« seoir : — Mademoiselle, vous avez
« des dispositions. Vous êtes une
« très jolie fille terrible. Je vous en-
tt gage, si vous voulez, pour trois
« ans à 12, 15 et 18 cents francs;
« vous jouerez dans six mois. — Je
« le voyais pincé : — Non, je dis,
« vous m'engagerez pour trois ans et
« demi et je jouerai tout de suite. —
« Je jouai ; le public ne m'attrapa
« pas, et voilà l'histoire !
« Ah çà ! toi, qu'est-ce que tu fais?
« qu'est-ce que tu deviens r Je t'écris
« dans des pays grotesques. Tu des-
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ARMANPE 97
> sers des sous-prcfectiires de carton.
I Qu'est-ce que c'est ? Tu vas moisir
1 dans ces banlieues ; tu vas t'user
> pour des gens qui devraient te
' monter ton bois ! Mais tu ne tou-
< cheras que des peaux d'orange !
« C'est trop bête ! — Écoute-moi
' bien : je ne t'écris pas pour t'écla-
< bousser : Je t'aime, ma petite, et
< beaucoup. Quand il y a de la veine
< pour une, il y en a pour deux. Dis
n à ton directeur n'importe quoi
i< pour partir : que tu as le choléra,
< que tu as fait vœu d'aller toucher
i< la colonne Vendôme, que tu as une
« succession à recueillir sur le Pont-
w Neuf, — ce qui te viendra ; file,
i« tombe ici, je te fais ta leçon, je te
" lance sur le Mourier, nous le blo-
« quons; je te donne trois gestes et
« deux intonations, je te fais les cils,
15
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98 ARMANDE
« tu débutes, — et si au bout de
« quinze jours je ne suis pas jalouse
« de toi, je veux être rosière !
« Fanny Cascade. »
La troisième lettre ne portait pas
de timbre :
« Mademoiselle,
« Il n'est guère à espérer que le
« directeur du Théâtre-Français se
« détourne de la rue Richelieu jus-
« qu'ici pour vous engager. Voulez-
« vous me permettre de vous con-
« duire à lui ? »
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XI
Digitizedby Google
Digitizedby Google
Dans une chambre meublée de la
rue de Trcvise, voici comme elle
était : ses cheveux — une nuée blonde
— bouffaient sur son front décou-
vert ; deux petites pattes, larges ;\
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102 ARMANDE
peine comme deux doigts, avaient
mission de tenir sa chemise où cou-
raient mille broderies anglaises : une
seule était à son poste sur l'épaule,
l'autre avait glissé, et se balançait au
milieu de son bras ; les rayons des
bougies jouaient sur sa peau blanche,
miroitante comme un marbre.
Elle écrivait sur une feuille prise
au hasard, tournait le papier vers lui
quand elle avait fini, trempait la
plume et la lui tendait. Il répondait.
Le couple était tout sérieux : lui son-
geait à avoir de l'esprit ; elle, de
l'orthographe.
Elle. — A quoi pensez-vous,
mon ami ?
Lui. — A mille choses toutes
roses et toutes bleues ; à vous, k moi,
à nous !
— Comme c'est grand, Paris !
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ARMANDE IO5
— Si grand, ma chère, qu'un jeune
homme y échappe à son tailleur, et
le bonheur à l'envie !
— Sais-tu que j'ai bien peur des
Parisiennes ? Elles sont toutes jolies.
— Jolies, non ; laides avec goût,
je veux bien. Et les Parisiens, qu'en
dis-tu ?
— Tu ne me les montres pas.
— Oui, mais tu les regardes.
— Méchant !
— Enfin, es-tu contente du voyage?
T'ai-je bien menée? Remercies-tu le
postillon ?
— Tu demandes toujours des pour-
boires !
Deux baisers s'envolèrent, joyeux,
battant des ailes.
Lui. — Si je jetais la pendule au
feu?
Elle. — Pourquoi ?
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104 A R MAX DE
— Pour la tuer.
— Tu en hérites ?
— Non ; mais il n'y aurait pas de
demain.
— Fi ! le vilain ! quand on s'aime,
c'est aujourd'hui pendant toujours.
— Tu as de bien beaux yeux.
— Il faut bien avoir quelque
chose.
— Songes-tu, ma belle, qu'il n'y
a que quinze jours que je les con-
nais ?
— As-tu dcjà été amoureux?
— Moi ? non.
— Menteur!... et aimé ?
— Oui. J'ai eu une mère, un père,
une nourrice, deux chiens que je
battais, et un cheval à qui je donnais
des morceaux de sucre.
— Si nous sortions ?
— Si nous ne sortions pas ?
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... Une seule était à
£on poste sur l'épaule,
l'autre avait glissé...
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I06 ARM AN DE
— Nous regarderons les boutiques.
— Et nous verrons le diable dans
notre bourse !
— Alors, dis-moi ma bonne aven-
ture pour passer le temps.
— Ecoute bien : tu feras faire an-
tichambre à des attachés d'ambassade
et à des chefis de claque ; tu recevras
des châteaux sur des plats d'argent ;
et tu épouseras, sur la fin de tes
rêves, un comte italien qui n'aura
que fort peu d'enfants naturels.
— Et si je suis sifflée ?
— Le public est le public partout :
une grosse bête domptée par la claque.
— Parions que tu es jaloux ?
— De qui ?
— Dis-moi tout de suite que je
suis l'ennemi personnel d'une armée !
— Quand je jouais k I^ngon, mon
sourire n'était-il pas tout pour toi ?
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AR MANDE IO7
— Oui ; mais trois cents imbéciles
y mordaient.
— M'aimes-tu ?
— Bête !
— Combien m'aimes-tu?
— Je t'aime mieux que ne t'aiment
tous les bouquets de la terre, et tous
les bravos du monde !
— Et si je te le donnais mon sou-
rire tout entier sans y laisser mordre?
— Prends garde : je ne te le ren-
drais pas.
— Moi, Armande, mineure éman-
cipée, ingénue par vocation, Pari-
sienne depuis trois jours, et femme
depuis dix-huit ans, présentement
amoureuse, m'engage par-devant mes
pantoufles, mes trente-deux illusions,
le bouquet qui se meurt sur ma che-
minée, et celui que j'aime, à vivre à
deux cents lieues du monde, des lor-
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I08 ARMANDE
gnettes d'avant-scène, et de l'opinion
publique ; m'engage à renoncer aux
planches, aux soleils en papier huilé,
au rouge et à la gloire ; auquel en-
gagement si je contreviens, je consens
pour dédit, à être enfermée dans une
campagne où il n'y aura d'ombre que
mon chapeau de paille, à manger du
lapin tous les jours, et à voir mon
amour traité d'amour de deux sous
dans les quatre grands journaux.
Fait simple, entre lui et moi. l'an
que je fus enlevée sans crier. »
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XII
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Le jeune homme embrassa la pro-
messe. La feuille de papier était
pleine. Il la retourna pour répondre :
au dos, écrit d'une encre encore
fraîche, était un projet d'engagement
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I 12 ARMAN DE
avec le directeur des Folies-Drama-
tiques. Le lendemain matin, le projet
fut un traité signé ; — et le jeune
homme ne put trouver d'huissier qui
voulût instrumenter sur le billet
d'Armande.
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CE VOLUME
a été imprimé, gravé et broché
dans les ateliers de Edouard Guillaume
Editeur-Imprimeur de la Collection Guillaume
105, boulevard Bruue, 105
PARIS
23 Août 1892.
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Petite
Collection Guillaume
IN- 8° NELUMBO
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Toutes les illusiralions
qui ornent ce catalogue sont extraites
des ouvrages parus.
Nous encartons, en outre, un spécimen
tiré sur papier vélin de cuve.
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La Petite Collection Guillautiie n'est
pas une collection classique au sens étroit
du mot. Loin de se restreindre, elle
comprendra un choix de joyaux litté-
raires de toutes les époques comme de
tous les pays. Les chefs-d'œuvre mo-
dernes, contemporains • même, y cou-
doieront les chefs-d'œuvre anciens. On y
rencontrera, à côté de la grande littéra-
ture européenne — grecque, latine, fran-
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çaise, italienne, espagtiole, slave, anglaise,
allemande, Scandinave — des romans de
rinde, de la Chine, du Japon, de la
Perse, de l'Arabie, des récits exquis,
émouvants, étincelants, dont beaucoup
auront pour le public tout le charme de
l'inconnu.
La Pellle Collection Guillaume justifiera
ainsi sa devise :
Si efi livres que ne Je pewcnl ignorer,
fi tant plvs ne pewenl ne Je pojfcjder.
Et elle la justifiera malériellentent par
l'extrême bon marché de ses petits livres,
commodes et luxueux, livres de chevet et
de voyage autant que de bibliothèque.
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Les volumes de la " Pilite Collection
Guillaume "y in-S*» nelumbo, sont illus-
trés par Gambard, Conconi, Marold,
Rossi, etc. etc., et imprimés sur papier
de luxe, des fabriques de MM. Outhenin-
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Chalandre. Les caractères elzéviriens sont
gravés spécialement pour cette Collec-
tion.
Couverture en trois tirages, illustrée
d'une sanguine.
Broché. Prix Fr. 2
Il est tiré, de chaque ouvrage, quelques
exemplaires sur les incomparables
vélins de cuve des papeteries du
Marais. Le papier contient dans sa
pâte, en filigrane, les mots : Pelile
Coîhclion Guillaume.
Vélin, broché. Prix Fr. 3
Une reliure d'art, en peau pleine
(Maroquin souple), avec fers spéciaux,
tête dorée, est mise à la disposition
des amateurs, au prix de. . . Fr. S
Exemplaire sur vélin. Prix. . Fr. 6
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DESCRIPTION DES FERS
Sur le plat :
Ua nelumbo or, en relief, 1er gravé.
Sur le dos :
Titre et nelumbo or, 1er (pravé et a]ouré.
Doublure du plat
Dentelle or, composée d'une guirlande de fleurs
de lotus bleu.
Gardes de sole.
Ces fers ont été dessinés parGambanl.
IL PARAIT
DEUX VOLUMES PAR MOIS
EN VENTE :
Chez E. DENTU, Éditeur
^, place de Valois, j
PARIS
Et chez tous les Libraires de France
et de l'Étranger.
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CES VOLUMES
sont imprimés, gravés et brochés
dans les ateliers de Edouard Guillaume
Editeur-Imprimeur de la Collection Guillaume
105, boulevard Druae, 105
PARIS
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Catalogue
des Ouvrages
que la Petite Collection Guillaume
se propose de publier.
LITTÉRATURE FRANÇAISE
Chateaubriand. Jlala i vol.
Corneille . . . Œuvres 4 vol.
Alph. Daudet. UArlésienne . ... i vol.*
Diderot .... La Religieuse. ... i vol.
— Le Neveu de Rameau, i vol.
Fénelon .... Téîémaque i vol.
Ed et Jules >^,^^„^, , ^ol.
DE Concourt. . )
Tous les noms suivis d'un * sont dë]& en rente.
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La Fontaine. . Fables i vol.
— Contes I vol.
— L'Amour et Psyché', i vol.
Lesage Romans 4 vol.
Molière .... Œuvres 4 vol.
Perrault. . . . Contes i vol.
B. DE St-Pierre. Paul et Virginie. . i vol.*
L'abbé Prévost. Manon Lescaut. . . i vol. *
Rabelais Œuvres 4 vol.
Racine Œuvres 4 vol.
J.-J. Rousseau. Œuvres 4 vol.
Voltaire .... Œuvres 4 vol.
LITTÉRATURE GRECQUE
Anacréon. . . . Odes i vol.
Eschyle .... Prome'ihée i vol.
Homère V Odyssée i vol.
— V Iliade i vol.
LoNGUS Daphnis et Chloé. . i vol.
Platon Gorgias i vol.
Sapho Poésies i vol.
littérature latine
Apulée Vâne £or i vol.
Horace Poésies i voL
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— 19 —
JuvÉNAL Satires i vol.
Virgile Georgiques i vol.
Térence Les Adelphes .... i vol.
LITTÉRATURE ITALIENNE
L'Arioste. . . . Roland Furieux. . . 2 vol.
BoccACE Contes i vol.
Dante L'enfer et le Purga-
toire I vol.
— Le Paradis i vol.
Da Porta. . . . Giuîietta e Romeo. . i vol.
Manzoni Les Fiancés i vol.
SiLvio Pellico . Mes prisons i vol.
Tassoni Le Sceau enlevé. . . i vol.
T. Tasso. . . . Jérusalem Délivrée, i vol.
LITTÉRATURES ESPAGNOLE ET PORTUGAISE
Camoens Les Lusiades . ... 1 vol.
Cervantes. . . . Don Quichotte. . . 2 vol.
— Nouvelles i vol.
G. DE Castro. . Le Cid Cantpéiulor. 1 vol.
Romans wcAREsauES : 3 vol.
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LITTERATURE SLAVE
DosTOÏEWSKY. . Crime et Châlimenf .
Gogol Nouvelles. . . .
Pouchkine . . . Doubrcnvski . .
Tolstoï Mort d'Ivan lliilch.
— Anna Karénine.
TouRGUENEFF. . Un désespéré. .
2 vol.
I vol.
I vol.
1 vol.
2 vol.
I vol.
Les Eaux pr intanières, i vol.
LITTÉRATURES ANGLAISE ET AMÉRICAINE
Byron Le Corsaire et Lara, i vol. '
Dickens Le Grillon du foyer, i vol.
— David Copperfield. . 2 vol.
Lord Lytton. . Les derniers jours de
Pompét I vol.
HoGAR Poe. . . Le Scarabée d'or. . t vol.
Shakespeare. . . Œuvres 4 vol.
Sterne Le Voyage Sentimen-
tal I vol.
Swift Voyages de Gulliver. 1 vol.
Thackeray ... Le livre des Snobs. . i vol.
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— 21 —
LITTÉRATURE ALLEMANDE
Gœthe Werther i vol.
— Hermann et Dorothée, i vol.
— Faust I vol.
Schiller .... Les Brigands. ... i vol.
LITTÉRATURE SCANDINAVE
Andersen. . . . Contes et Nouvelles, i vol.
Ibsen Le Revenant .... i vol.
LITTÉRATURE HINDOUE
Natesa Sastri. Le Porteur de Sachet, i vol.
(InMit.)
Le Ramayana. . Episode. (Inédit). . i vol.
LITTÉRATURE CHINOISE
Printemps parfumé (Inédit) i vol.
LITTÉRATURES JAPONAISE, ARABE ET PERSANE
La Petite Collection Guillaume publiera, en
dehors de ce catalogue, une série toute mo-
derne et inédite, de manière à donner autant
que possible, chaque mois, une œuvre nou-
velle avec une œuvre ancienne.
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— 22 —
OUVRAGES PARUS
B. DE St-Pierre.
Gœthe
Katesa Sastri.
ALPH. Daudet. .
L*ABBÉ Prévost.
Edgar Poe. . .
Byron
Edmond et J ^
le Concourt. . (
Paul et Virginie
Wer'.her ....
Le Porteur de Suchet,
(Roman hindou)
VArîésienve . .
Mavon Lescaut .
Le Scarabée d'or.
Le Corsaire et Lara.
Armavde . . . .
I vol.
1 vol.
I vol.
I vol.
1 vol.
1 vol.
1 vol.
I vol.
sous PRESSE :
Tolstoï .... Mort d^Ivan Illiitch. i vol.
X*** Printemps parfumé, i vol.
(Inéilli)
Chateaubriand. Aiala i vol.
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Spécimen
d'une page de texte et gravure
de
Werther
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208 -WERTHER
il sembla à Lolotte quHl lui passait dans
l'âme un pressentiment du projet affreux
qu'il avait formé. Ses sens se troublèrent,
elle lui serra les mains, les pressa contre
son sein ; elle se pencha vers lui avec
attendrissement, et leurs joues brûlantes
se touchèrent. Le monde entier disparut
à leurs yeux ; il la prit dans ses bras,
la serra contre son coeur et couvrit ses
lèvres tremblantes et balbutiantes de bai-
sers furieux.
« "Werther ! — cria-t-elle d'une voix
étouffée et en se détournant, — "Werther ! »
Et d'une main faible elle tâchait de
l'écarter de son sein.
« "Werther ! » lui dit-elle enfin du ton
ferme et décidé de la vertu. Il ne put
y résister. Il la laissa glisser de ses bras
et, hors de lui, se prosterna devant elle.
Lolotte se leva, et, dans un trouble dou-
loureux, la VOIX tremblante, d'un accent
mêlé d'amour et de colère :
« C'est la dernière fois, — lui dit-elle,
— Werther ! vous ne me reverrez plus. »
Puis, jetant sur l'infortuné un dernier
regard plein d'amour, elle courut dans sa
chambre et en barricada la porte. Werther
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... n la laiiu glisser
da sas bras, et, hors de
lui, s« prostarna...
HER, tire' sur h vélin de cuve des papeteries du Marais.
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Table des Gravures
du
Catalogue
Marque de la Collection Xehnvhi
Portrait de Virginie
Kn-tête, tiré de Wcrihcr
Cul-de-lampe, tiré de V Arles ietine.
Hors-texte, portrait de Werther.
En-tête, tiré du Porteur de S.:chel. .
Hors-texte, tiré du Porteur de Suclh
En-tête, tiré du Porteur de Sachet
Cul-de-lampe, tiré de VArlésienne.
Hors-texte, tiré du Porteur de Sachet
Spécimen d'une page de texte et gra
vure de Werther 26-27
Spécimen sur vélin de cuve d'une
page de texte et gravure de Werther.
Table 29
23
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54B400
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EDOUARD GUILLAUME, IMPRIMEUR-ÉDITEUR
10$, boulevard Brune. Paris
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J
'A \
MIT •
msu
Edouard Guillaume, Imp.-Edit., 105, boulerard Brune, Paris.
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