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Full text of "Belgique horticole"

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BELGIQUE  HORTICOLE, 


JOURNAL   DES    JARDINS. 


I.iégo.  —  Imp.  de  J.-G.  Lardinois. 


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LÀ 


BELGIQUE  HORTICOLE, 

JOURNAL  DES  JARDINS, 


DES    SERRES    ET     DES    VERftERS, 


Charles  MORREN, 


Docleur  en  sciences,  en  philosophie  naturelle  et  en  médecine,  Professeur  ordinaire  de  botanique  et  d'agri- 
culture à  l'université  de  Liège,  Directeur  du  jardin  botanique,  Chevalier  de  l'Ordre  de  Léopold,  de 
l'Ordre  royal  et  militaire  du  Christ,  de  l'Etoile  Polaire  de  Suède  et  de  Korwége,  de  l'Ordre  royal  de 
Danebrog,  de  ia  Couronne  de  Wurtemberg,  de  la  Couronne  de  Chêne,  etc.,  Membre  titulaire  de  l'aca- 
démie royale  des  sciences,  des  lettres  et  des  beaux-arts  de  Belgique,  Membre  du  Conseil  supérieur  d'agri- 
culture du  royaume,  Membre  honoraire  de  l'académie  royale  de  Dublin,  Correspondant  des  académies  des 
sciences  de  Breslau,  Florence,  Madrid,  Naples,  Padoue,  Rome,  Turin,  de  l'académie  royale  d'agriculture 
du  royaume  de  Sardaigne  et  de  Piémont,  Membre  honoraire  de  la  Société  générale  d'Agriculture  des 
Pays-Bas,  de  l'Académie  impériale  des  sciences  de  Rouen,  de  la  Société  royale  d'encouragement  de 
l'horticulture  des  Pays-Bas,  du  Cercle  agricole  et  horticole  du  Grand-Duché  de  Luxembourg,  Associé 
ou  Correspondant  des  Sociétés  impériales  ou  royales  d'agriculture  et  de  botanique  de  Barcelonne, 
Berlin,  Bruxelles,  Caen,  Chartres,  Clermont-Ferrand,  Cherbourg,  Dijon,  la  Drenthe,  Edimbourg,  Gand, 
Groningue,  Halle,  Heidelberg,  Leipzig,  Mâcon,  Malines,  Marbourg,  la  Moselle,  Paris,  Ratisbonne, 
Roslofc,   Rotlerdam,  Rouen,  la   Sarthe,  Silésie,  Strasbourg,   Stockholm,  Utrecht,  Valence,   etc. 


ET 


Edouard  MORREN, 

Docteur  en  sciences  naturelles,  candidat  en  philosophie  et  lettres,  Membre  de  la  Société  impériale  et  cen- 
trale d'horticulture  de  Paris,  Membre  correspondant  de  l'association  britannique  pour  l'avancement  des 
sciences.  Membre  honoraire   de  la   Société  d'horticulture   de  Toscane. 


TOME  VI. 

LIBRART 

NEW  YORK 

BOTANICAL 

GAROEM 

LIÈGE, 
A  LA  DIRECTION  GÉNÉRALE,  HUE  LOUYKEX,  71. 


185G 


en 
I 


PROLOGUE 


CONSACRE 


A  LA  MÉMOIRE  DE  JEAN  KICKX, 

17  35-1*31.  NEW  YORK 

BOTAN1CAL 

La  botanique,  qui  apprend  à  connaître  les  plantes  dans  leur  nature 
intime,  dans  leurs  rapports  entre  elles  et  avec  toutes  les  choses  créées,  et 
l'horticulture  qui  les  observe  pour  les  entourer  des  meilleures  condi- 
tions de  végétation,  qui  réunit  dans  un  espace  restreint  toutes  les  es- 
pèces que  le  Créateur  avait  disséminées  sur  la  surface  entière  de  la  terre, 
qui  étend  sans  cesse  le  domaine  des  végétaux  utiles,  qui  les  change 
et  les  perfectionne  suivant  les  différents  climats  et  les  besoins  de 
l'homme  et  qui  parvient  même  à  modifier  profondément  l'aspect 
d'une  contrée ,  par  la  lutte  victorieuse  du  travail  contre  la  na- 
ture sauvage,  sont  deux  sciences  sœurs  étroitement  unies,  s'entr'aidant 
sans  cesse  et  marchant  ensemble  d'un  pas  rapide  vers  un  but  commun. 
La  botanique,  c'est-à-dire  la  connaissance  des  plantes,  a  vu  naître  l'hor- 
ticulture, elle  a  guidé  ses  premiers  pas,  l'a  élevée  dans  ses  préceptes,  lui 
montre  souvent  des  horizons  nouveaux,  augmente  ses  richesses  et  ses 
moyens  d'action,  s'efforce  toujours  de  répondre  à  ses  questions  et  d'ex- 
pliquer ses  trouvailles.  L'horticulture  reconnaissante  conserve  et  cultive 
par  des  soins  incessants  les  plantes  dont  l'étude  appartient  à  la  bota- 
nique, et  presque  toutes  les  plantes  que  des  voyageurs  intrépides  dé- 
couvrent dans  des  régions  encore  inexplorées  sont  reçues  dans  les 
"îni  collections  horticoles;  il  est  bien  peu  de  découvertes  physiologiques  qui 
ne  trouvent  leur  application  immédiate  dans  la  culture,  et  celle-ci  en  pro- 
voque souvent  de  nouvelles;  les  variétés  et  les  hybrides  sont  nées  de 
l'horticulture.  On  peut  dire  avec  justesse,  depuis  quelque  temps  surtout, 
ZD  q«e  l'horticulture  est  la  botanique  mise  en  pratique,  elle  sert  à  répandre 
î*  et  à  diffuser  les  principes  de  la  science,  précisément  parce  qu'elle  cons- 
titue l'application  immédiate  de  ces  principes.  Les  botanistes  les  plus 
éminentsde  tous  les  pays  ne  dédaignent  plus  de  rédiger  des  journaux 
d'horticulture  dans  lesquels  ils  décrivent  les  plantes  qui  se  distinguent 


—  VI  — 

par  quelques  mérites,  mettent  à  la  portée  de  tous  les  connaissances 
scientifiques  directement  utiles,  et  font  connaître  les  résultats  de  leurs 
recherches  sur  des  faits  d'un  intérêt  plus  ou  moins  général  :  ce  sont 
Lindley,  Hooker  et  Moore  en  Angleterre;  Decaisne  et  Duchartre  en 
France;  F.Otto,  Regel,  Reichenbach,  C.  Koch,  etc.,  en  Allemagne; 
DeVrieseen  Hollande;  le  Ch.  Parlatore  en  Italie;  Planchon,  Galeotti  et 
Ch.  Morren  en  Belgique.  Grâce  à  celle  haute  direction,  l'horticulture 
s'appuie  sur  les  véritables  méthodes  scientifiques,  et  elle  s'est  acquis  une 
haute  importance. 

Il  est  donc  juste  qu'elle  témoigne  des  sentiments  de  sa  vive  recon- 
naissance à  ceux  qui  ont  contribué  aux  progrès  delà  botanique;  les 
adeptes  de  l'une  sont  les  bienfaiteurs  de  l'autre. 

Lorsqu'après  1735  Linné  eut  jeté  les  fondements  de  son  immortelle 
conception  sur  le  système  de  la  nature,  l'Europe  scientifique  tressaillit  à 
sa  voix  si  ferme,  si  sage  et  surtout  si  riche  en  fécondes  idées.  Réforma- 
teur ardent,  connaissant  les  choses  et  les  hommes,  il  commanda  bientôt 
en  maître;  ses  disciples  propageaient  ses  doctrines;  l'Asie  mineure, 
l'Egypte,  la  Chine,  le  Japon,  le  Malabar,  les  deux  Amériques  sont  ex- 
ploités en  son  nom  par  des  hommes,  devenus  célèbres  à  leur  tour,  aux- 
quels il  avait  inculqué  ses  principes. 

A  cette  époque  qui  donnait  à  l'une  des  plus  importantes  branches  des 
connaissances  humaines  une  direction  que  les  siècles  ne  changeront  plus, 
la  Belgique,  il  faut  l'avouer,  ne  comptait  pas  un  naturaliste  digne  de  ce 
nom.  La  France  pouvait  citer  avec  orgueil  son  Bernard  de  Jussieu,  son 
Adanson;  en  Allemagne  les  grands  noms  abondaient;  un  petit  pays 
comme  la  Suisse  avait  produit  Haller;  la  Hollande,  où  Linné  lui-même 
avait  trouvé  ses  premières  ressources  contre  le  malheur  et  ses  premiers 
encouragements  à  de  plus  brillants  succès,  la  Hollande  avait  Boerhaave 
et  Adrien  Van  Royen,  auquel  reviendra  toujours  la  gloire  d'avoirclassé, 
le  premier,  les  phanérogames  d'après  le  nombre  de  leurs  cotylédons. 
La  Belgique  semblait  alors  osciller  entre  l'Allemagne  qui  élevait  Linné 
aux  nues  et  la  France,  où  Adanson  et  Buffon  le  méconnaissaient;  mais 
en  vérité  elle  n'avait  pas  de  dignes  successeurs  des  Spiegel,  des  Dodoens 
et  des  L'Ecluse. 

Cette  malheureuse  circonstance  eut  pour  résultat  de  ne  voir  importer  en 
Belgique  les  idées  linnéennes  que  vers  le  temps  même  de  la  mort  del'Aris- 
totedu  Nord.  En  1774,  Linné  fut  frappé  d'apoplexie,  et  quatre  ans  après 
il  mourut.  En  177o,  naquit  à  Bruxelles  Jean  Kickx,  qui,  avec  Van  der 
Siège  de  Putte,  Du  Rondeau,  Roucel,  Rozin  et  Dekin,  peut  être  compté 
parmi  les  plus  ardents  propagateurs  dans  nos  provinces  des  doctrines 
suédoises. Kickx  elDekin  sont  même  les  deux  savants  qui  ontimprimé  au 


—   VII  — 

commencement  du  dix-neuvième  siècle  le  caractère  que  portèrent  alors 
les  sciences  naturelles  en  Belgique.  Par  la  publication  de  ses  ouvrages,  ou 
par  la  persuasion  de  l'enseignement,  Kickx  établit  en  Belgique  la  domi- 
nation littéraire  que  la  réforme  de  Linné  avait  étendue  si  promptement 
sur  le  monde  civilisé.  Si  dans  aucune  science  on  ne  peut  citer  une  doc- 
trine nouvelle  qui  eut,  comme  celle  du  botaniste  de  Rashult,  une  exten- 
sion aussi  rapide  et  une  influence  aussi  forte,  c'est  que  non-seulement  elle 
était  bonneen  elle-même,  mais  c'est  que  la  précision  et  lavéritédeses  vues, 
le  charme  de  sa  poésie,  toute  laconique  mais  plus  pleine  d'images  par  la 
pensée  que  par  la  parole,  l'universalité  de  son  application  inspiraient  à 
ceux  qui  l'entendaient  une  vraie  passion  et  par  suite  un  grand  pouvoir 
sur  les  esprits.  » 

Jean  KickxnaquitàBruxellesle9marsl775.  Son  pèreétait  pharmacien; 
il  le  perdit  à  l'âge  de  six  ans  et  sa  mère  le  destinait  à  la  même  profession. 
De  bonne  heure  ses  idées  se  tournèrent  donc  vers  l'étude  des  langues  an- 
ciennes, des  sciences  chimiques,  physiques  et  naturelles  dont  l'art  du 
pharmacien  est  une  constante  application.  11  faut  remarquer  qu'à  celte 
époque,  il  était  bien  difficile  à  un  jeune  homme  d'acquérir  des  connais- 
sances dans  ces  parties;  Bruxelles  n'avait  pas  d'enseignement;  c'était 
tout  au  plus  si  quelques  minces  fractions  des  sciences  naturelles  étaient 
enseignées  à  l'Université  de  Louvain  ;  on  faisait  soi-même  son  éducation 
scientifique  sous  le  patronaged'un  maître  apothicaire.  Cependant  le  jeune 
Kickx,  à  l'âge  de  48  ans,  fut  reçu  pharmacien  par  la  corporation  confé- 
rant le  diplôme  de  cet  état  (20  juillet  1793).  Le  diplôme  dit  qu'il  fut 
reculer  lofflyk,  c'était  la  maxima  cum  lande  ou  la  plus  grande  distinc- 
tion du  nouveau  style.  L'académicien  Du  Rondeau,  qui  s'occupait  de 
chimie,  de  botanique,  d'économie  rurale  et  d'anatomie  comparée,  re- 
marqua l'instruction  du  récipiendaire  et  en  parla  au  baron  Vanderslege 
de  Putte,  l'ancien  amman  de  Bruxelles,  dont  les  écrits  sur  l'histoire  na- 
turelle avaient  été  les  premiers  guides  de  Kickx  dans  l'élude  de  celte 
science.  Bientôt  une  amitié,  basée  sur  une  estime  réciproque  et  sur  la 
communication  de  ce  que  l'on  savait,  cimenta  les  liens  entre  ces  trois 
hommes  remarquables.  La  réputation  de  Kickx  était  déjà  si  bien  établie, 
lors  de  l'invasion  française,  que  le  nouveau  gouvernement,  sans  doute 
sur  l'avis  de  Van  Hullhem,  alors  député  à  Paris  et  consulté  à  l'égard  de 
l'instruction  publique  qui  devait  être  organisée  dans  nos  provinces,  le 
désigna  pour  la  place  de  professeur  de  botanique  à  l'école  centrale  d'An- 
vers. Mais  celui-ci  déclina  l'honneur  qu'on  voulut  lui  faire,  et  un  élève 
de  Daubenton,  d'ailleurs  bruxellois  de  naissance,  Adrien  Dekin,  fut 
nommé  à  cette  chaire. 

Bientôt  les  écoles  centrales  tirent  place  aux  académies,  ces  fractions 


—    VIII   — 

de  la  grande  Université  Impériale  de  1807,  université  qui  se  ressentait 
de  son  origine;  elle  était  plus  militaire  que  scientifique.  Kickx  s'occu- 
pait en  silence  de  ses  études,  vivant  dans  sa  famille  et  n'accceptant  tout 
au  plus  du  gouvernement  français  que  la  modeste  place  de  membre  du 
jury  médical  de  son  département,  charge  qu'il  reçut  en  1805  et  dont  il 
fut  revêtu  jusqu'à  la  chute  de  l'empire  français  en  1814. 

En  1788,  l'Académie  impériale  des  sciences  avait  proposé  un  prix 
pour  faire  «  indiquer  les  plantes  qui  croissent  spontanément  dans  les 
Pays-Bas  Autrichiens  dont  il  n'avait  été  fait  mention  par  aucun  des 
auteurs  tant  anciens  que  modernes  qui  avaient  écrit  sur  la  Botanique 
des  dites  provinces  ou  des  pays  voisins.  »  Dès  cette  époque  on  sentait 
donc  le  besoin  d'une  flore  nationale;  Boucel  répondit  à  cette  question  et 
en  1792  il  fit  paraître  son  Traité  des  plantes  les  moins  fréquentes  en  Bel- 
gique. Cet  appel  et  cette  publication  durent  frapper  l'attention  de  Kickx, 
qui  s'était  lié  d'amitié  avec  le  vénérable  Van  Mons,  notre  immortel  po- 
mologue;  dès  1796,  il  commença  des  herborisations  suivies  dans  les 
environs  de  Bruxelles,  et  c'est  à  cette  circonstance  et  aux  prières  de 
Van  3Ions  que  nous  devons  la  Flora  Bruxellensis ,  le  premier  ouvrage 
que  Kickx  fit  paraître. 

Ce  travail  est  le  fruit  de  seize  années  d'herborisations  dans  un  rayon 
de  deux  lieues  autour  de  Bruxelles  ;  il  est  très-consciencieusement  fait  : 
fide  alienanihil  propono,nam  plantas  relatas  ipse  vidi  et  collegi,ei  il  sera 
toujours  consulté  comme  un  document  utile.  Les  espèces  citées  sont  au 
nombre  de  823  ,  rangées  dans  l'ordre  du  système  Linnéen,  mais  mal- 
heureusement mutilé  d'après  la  plus  mauvaise  édition,  celle  de  Gmelin, 
la  XIIIe.  — Les  descriptions  spécifiques  et  génériques  sont  extraites  de 
cet  ouvrage;  Kickx  y  a  joint  quelques  synonymes  d'ouvrages  anciens,  les 
noms  flamands  et  français  et  l'indication  exacte  des  localités.  La  flore 
est  précédée  d'un  dictionnaire  des  termes  techniques  les  plus  usuels 
dans  le  langage  de  la  science.  On  en  trouve  un  semblable  non-seulement 
dans  la  Flora  herbonensis  de  Leers  dont  Kickx  ignorait  l'existence, 
mais  encore  Boucel  avait  déjà  fait  la  même  chose  dans  son  Traité  des 
plantes. 

Plus  tard  (1) Kickx  étendit  jusqu'à  cinq  lieues  le  rayon  de  sa  Flore,  et 
augmenta  de  171  espèces  le  nombre  antérieur  de  823  (ensemble  994). 
De  même  il  revint  en  1828  sur  la  classification  de  Gmelin  qu'il  avait 


(1)  Notice  sur  quelques  plantes  observées  aux  environs  de  Bruxelles.  Comple-rondu 
des  travaux  de  la  société  des  sciences  médicales  et  naturelles  de  Bru\elles,  182(3 . 
p.  9i. 


—   IX   — 

suivie  d'abord  (1).  Un  homme  aussi  consciencieux  reconnaît  facilement 
ses  erreurs. 

En  1815,  la  Société  royale  de  botanique  et  d'agriculture  de  Gand  le 
nomma  membre  et  ce  fut  à  cette  occasion  qu'il  lui  adressa  l'année  sui- 
vante une  Notice  sur  la  germination,  travail  qui  est  resté  inédit,  mais 
que  l'on  peut  consulter  aux  archives  de  cette  société.  On  possède  plu- 
sieurs moyens  d'accélérer  la  germination  des  graines,  tels  que  l'emploi 
du  chlore  ,  du  charbon  de  bois  pulvérisé,  de  l'eau  chaude,  un  commen- 
cement de  fermentation,  etc.  Kickx  songea,  dès  1816,  à  trouver  un  pro- 
cédé applicable  à  l'agriculture;  ce  procédé  consiste,  il  est  vrai,  dans 
l'emploi  d'une  singulière  recette.  La  voici  :  On  mélange  de  la  fiente  de 
pigeon,  de  poule,  du  crotin  de  cheval,  de  vache,  de  mouton,  de  la  cendre 
de  bois  et  de  l'eau,  on  laisse  macérer  pendant  5  à  6  jours,  on  chauife  et 
on  y  trempe  la  graine  pendant  36  heures,  puis  on  la  fait  sécher  au  vent 
et  on  sème.  Le  persil,  qui  met  40  jours  à  germer,  traité  de  cette  manière 
lève  en  16  jours.  L'auteur  recherche  en  outre  dans  cette  notice  quelles 
sont  les  matières  qui  conviennent  le  mieux  pour  engraisser  ou  pour 
amender  chaque  espèce  de  terrain. 

L'Académie  royale  des  sciences  et  belles-lettres  de  Bruxelles  avait  inter- 
rompu ses  utiles  travaux  depuis  vingt  ans;  les  changements  politiques, 
les  révolutions  avaient  éloigné  les  hommes  des  paisibles  occupations  de 
la  science  sans  les  progrès  de  laquelle  il  n'y  a  point  de  bonheur  possible 
pour  la  société.  En  1816,  cette  institution  centrale  reprit  ses  séances,  et 
en  1817  J.  Kickx  fut  reçu  membre  de  la  compagnie  (2).  Il  paya  son  tribut 
à  ce  corps  savant  par  une  Notice  sur  la  découverte  du  gypse  sélénite  ou 
sulfate  de  chaux  cristallisé  et  d'une  argile  plastique  inconnue  jusqu'alors 
dans  le  voisinage  de  Bruxelles  (7  septembre  1818).  L'impression  de  ce  tra- 
vail fut  décidée,  mais  il  est  resté  manuscrit.  Cette  découverte  aurait  eu 
lieu  au  village  de  Hellik, sur  la  grande  route  de  Bruxelles  à  Gand.  Les 
cristaux  de  gypse  étaient  limpides,  sous  forme  de  petits  prismes  hexaè- 
dres, ayant  deux  faces  opposées  plus  larges  que  les  autres,  ce  qui 
les  faisait  paraître  un  peu  aplatis  et  terminés  aux  extrémités  par 
une  troncature   oblique  sur  les  faces  étroites. 

En  1820,  Kickx  publia  un  second  ouvrage  de  minéralogie,  intitulé 
Tentamen  mineralogicum  et  destiné  à  servir  de  manuel  élémentaire  poul- 
ies élèves,  mais  qui  ne  se  distingue  pas  par  les  mêmes  mérites  que  ses 
publications  botaniques.  C'est  une  assez  faible  application  des  principes 


(1)  Résumé  du  cours  de  minéralogie  et  de  botanique.  Bruxelles,  1828,  p.  220. 

(2)  Il  fut    nommé  le  ô   mai  1817,  agréé  par  le  roi  le  21   et   introduit  le  31  mai 
suivant. 


—   X    — 

(le  la  méthode  de  Linné  au  règne  minéral  ;  le  maître  lui-même  n'avait 
d'ailleurs  accordé  que  peu  d'attention  aux  corps  inorganiques. 

Nous  avons  dit  que  l'éducation  de  Kickx  l'avait  porté  vers  l'élude  des 
langues  anciennes;  il  écrivait  le  latin  avec  pureté.  Un  de  ses  auteurs 
favoris  était  César,  et  dans  ses  courses  dans  la  province,  soit  comme 
botaniste  et  géologue,  soit  comme  membre  de  la  commission  médicale 
chargé  d'inspecter  les  pharmacies  des  communes,  il  aimait  à  retrouver 
les  traces  des  combats  que  nos  ancêtres  avaient  soutenus  avec  tant  de 
gloire  contre  les  Romains.  L'historien  Desroches  avait  placé  à  Wain- 
beeck  près  d'Assche  le  combat  des  Nerviens  contre  Cicéron,  après  que 
Cotta  et  Sabinus  avaient  été  battus  par  Ambiorix.  Dewez,  un  des  amis 
intimes  de  Kickx,  croyait  que  Mons  avait  été  le  théâtre  de  la  bataille. 
Notre  naturaliste,  les  commentaires  de  César  à  la  main,  retrouve  toutes 
les  particularités  topographiques  citées  par  le  général  romain  dans  les 
environs  de  Castre,  village  du  Brabant,  situé  entre  Bruxelles  et  Enghien, 
au  nord-ouest  de  Hal,  village  dont  le  nom  même  est  le  Castri  locus  des 
anciens.  Le  14  octobre  1820,  il  communiqua  son  opinion  à  l'Académie 
sous  forme  de  remarques  publiées  t.  2,  p.  LV  des  nouveaux  mémoires. 

De  1817  à  1819  Kickx  avait  été  très-utile  à  l'Académie  pour  plusieurs 
rapports  dont  il  s'était  chargé  ;  le  plus  remarquable  est  un  précis  sur 
les  moyens  d'encourager  dans  le  royaume  V exploitation  du  salpêtre,  sa 
purification,  l'établissement  des  salpétrières  artificielles  et  la  préparation 
des  poudres  (4  sept.  1817).  Le  Ministre  remercia  publiquement  M.  Kickx, 
pour  ce  mémoire  qui  avait  été  utile  au  gouvernement  (1).  Les  autres 
rapports  roulent  sur  les  méthodes  de  préserver  les  édifices  des  incendies 
par  le  carton  préservateur  du  baron  de  Cellier,  sur  les  méthodes  de 
rendre  imperméables  à  l'eau  toutes  sortes  d'étoffes,  draps,  papiers,  etc. 
(Kickx  proposait  l'emploi  d'un  savon  d'alumine  pour  cet  usage;  le  même 
moyen  vient  tout  récemment  d'être  indiqué  en  France,  et  tous  les  journaux 
l'ont  accueilli  comme  une  nouvelle  découverte),  sur  la  fabrication  des 
briques,  sur  les  alunières  de  la  province  de  Liège  et  sur  les  précipita- 
tions des  métaux.  On  voit  que  son  activité  s'appliquait  aussi  aux  choses 
immédiatement  utiles  aux  arts  et  métiers. 

Le  14  octobre  1820  ,  Kickx  annonce  à  l'Académie  que  parmi  les  pa- 
piers de  son  ancien  collègue  de  Burtin  s'était  trouvé  un  mémoire,  lu 
autrefois  à  l'Académie  sur  le  trou  de  Han  dans  le  Luxembourg.  Le 
prince  de  Gavre  et  Dewez  examinèrent  ce  travail  et  l'on  sentit  le  besoin 
d'avoir  de  nouveaux  détails  sur  celte  belle  curiosité  naturelle  du  pays, 

(1)  Voyez  lt:  rapport  sur  l'élat  des  travaux  de  l'Académie  depuis  1816-1822,  par 
Dewez,  nouveau  membre  de  l'Académie,  t.  2,  p.  LX. 


—     M    — 

la  rivale  de  la  fameuse  grotte  cTAntiparos  illustrée  par  Tournelbrt.  On 
décida  que  MM.  Quetelet  et  Kickx  se  rendraient  à  Han  pour  donner  une 
histoire  détaillée  de  sa  grotte  :  M.  Quetelet  se  chargea  d'en  faire  le  plan; 
c'était  la  première  fois  qu'une  opération  de  ce  genre  était  pratiquée  en 
Belgique.  Kickx  s'occupa  de  la  description  géognosique  et  physique  et 
joignit  à  la  relation  de  sa  promenade  quelques  détails  sur  la  faune  et  la 
flore  du  pays. La  description  topographique  est  traitée  avec  beaucoup  de 
soins  et  de  détails,  tandis  que  la  partie  géologique  laisse  à  désirer.  La 
dissertation  sur  les  traps  stratiformes  (7  janvier  1822),  n'a  pas  laissé  plus 
de  trace  dans  la  science  géologique.  Enfin,  pour  en  finir  tout  d'un  trait 
avec  les  publications  de  minéralogie  que  nous  a  léguées  Kickx,  citons 
le  Résumé  du  cours  de  minéralogie  et  de  botanique  publié  en  1828.  C'était 
un  petit  manuel  pour  les  élèves,  destiné  à  épargner  du  temps  aux  leçons. 
Après  quelques  généralités  sur  l'histoire  naturelle  et  sur  le  règne  mi- 
néral, il  y  parle  des  principales  espèces  minérales  rangées  sous  les  classes 
de  pierres  et  terres,  de  substances  salines,  de  substances  métallifères  et 
de  matières  combustibles,  adoptant  ainsi  la  classification  établie  par 
Avicenne,  vers  le  milieu  du  XIVe  siècle;  il  termine  par  un  rapide  aperçu 
de  géognosie  et  expose  et  discute  les  systèmes  de  classification  de  Berze- 
lius,  de  Hauy  et  de  Werner.  Nous  reviendrons  plus  loin  sur  le  résumé 
du  cours  de  botanique. 

Depuis  1821,  Kickx  livrait  à  l'Académie  des  observations  de  météoro- 
logie, et  en  1824,  il  lui  présenta  son  Mémoire  sur  la  Géographie  physique 
du  Brabant  méridional,  où  sont  consignés  les  résultats  de  vingt  années 
d'observations  sur  les  variations  atmosphériques.  On  doit  regretter  que 
ce  zèle  si  constant  et  si  louable  ait  perdu  toute  sa  valeur  par  le  peu  de 
connaissance  de  la  physique  de  précision  qu'on  possédait  alors.  Kickx 
observait  avec  un  baromètre  défectueux,  dépourvu  de  vernier;  il  ne  fai- 
sait pas  les  corrections  de  température  et  de  l'action  capillaire;  il  perdait 
ainsi  le  fruit  de  ses  veilles,  de  son  exactitude  et  de  sa  constance. 

Comme  chimiste,  J.  Kickx  s'occupa  aussi  de  la  confection  del'éther  sul- 
furique  et  de  la  liqueur  minérale  d'Hoffman  (mémoire  présenté  à  la  so- 
ciété des  sciences  médicales  et  naturelles  de  Bruxelles,  le  7  mai  1823). 
Son  but,  dans  ce  travail,  est  de  rechercher  la  transformation  plus  ou 
moins  facile  des  différentes  sortes  d'alcool  en  éther;  il  préfère  l'esprit  de 
vin  à  l'alcool  de  grain. 

Nous  avons  vu  que  les  premiers  pas  de  Kickx  dans  la  carrière  scienti- 
fique l'avaient  conduit  dans  le  royaume  de  Flore.  Il  n'en  aurait  pas  dû 
sortir,  car  c'est  incontestablement  à  la  botanique  qu'il  a  rendu  les 
services  les  plus  vrais.  Nous  avons  vu  comment  il  s'était  pénétré  de  la 
doctrine  de  Linné  et  avec  quelle  ardeur  il  la  partageait.  Un  malheureux 


—  XII   — 

épisode  dans  l'histoire  des  sciences  en  Belgique  précéda  l'arrivée  de  Kickx 
au  professorat;  ce  fut  celui  du  12  avril  1823,  jour  où  coïncidèrent  l'in- 
cendie du  Musée  central  de  minéralogie  et  la  mort  subite  de  Dekin, 
son  directeur  et  jusque-là  professeur  de  sciences  naturelles  de  l'école  de 
médecine  de  Bruxelles.  Cet  événement  interrompait  les  leçons;  le  con- 
seil d'administration  des  hospices  pria  Kickx  de  les  continuer,  la  voix 
publique  le  désignait  comme  le  seul  successeur  possible  de  Dekin.  Mais 
la  nomination  se  faisait  par  l'autorité  municipale.  Le  gouvernement  don- 
nait l'exemple  d'un  favoritisme  outrageant  au  protit  des  étrangers,  et  la 
régence  devait  lui  plaire  en  l'imitant.  Le  chevalier  de  Ronnaye,  français, 
fort  brave  homme  si  on  veut,  mais  à  coup  sûr  très-peu  propre  à  l'en- 
seignement, parvint  à  se  faire  nommer.  A  cette  nouvelle  un  soulèvement 
bien  légitime  porte  les  élèves  de  l'Ecole  à  protester  contre  une  injustice 
si  flagrante.  Kickx,  dans  le  peu  de  leçons  qu'il  avait  données  avait  acquis 
sur  eux  une  grande  influence,  lous  lui  vouèrent  une  estime  sincère,  un 
attachement  qui  tenait  de  l'amour  filial;  sa  dernière  leçon  excita  des 
larmes  d'abord,  puis  une  résolution  plus  mâle  et  plus  significative  :  on 
reconduisit  Kickx  chez  lui  en  cortège  et  l'on  décida  bientôt  de  le  prier 
de  continuer  ses  leçons  en  dépit  du  malencontreux  arrêté  qui  le  privait  de 
sa  chaire.  Les  élèves  étaient  nombreux  (près  de  80),  un  seul  passa  à 
l'ennemi.  Le  nouveau  professeur  légal  ne  parla,  le  jour  de  son  instal- 
lation, qu'aux  autorités  et  à  lui,  les  autres  élèves  se  tenaient  rangés  en 
ligne,  dans  la  cour  du  palais  de  Lorraine  et  résistaient  aux  invitations  que 
venaient  leur  adresser  les  professeurs  et  les  membres  de  la  régence 
pour  les  faire  entrer  dans  la  salle  des  leçons.  Au  concours  qui  précé- 
dait la  distribution  des  prix,  ce  seul  élève  devait  gagner  une  couronne 
que  personne  ne  lui  disputait;  il  la  reçut,  mais  aux  rires  moqueurs  de 
ses  condisciples. 

Celte  résistance  honorait  autant  Kickx  que  les  élèves,  car  il  ne  faut 
point  voir  dans  cette  conduite  une  émeute  d'école  ou  un  de  ces  symp- 
tômes précurseurs  de  la  révolution  nationale  qui  éclata  plus  tard;  il  n'y 
eut  là  aucune  vue  politique,  mais  c'était  une  démonstration  qui  pro- 
testait en  faveur  de  la  science  et  de  la  justice.  Les  élèves  prièrent  leur 
professeur  d'achever  le  cours  qu'il  avait  commencé;  un  jardin  où  l'on 
cultivait  les  plantes  médicinales  à  l'usage  des  pharmaciens,  fut  approprié, 
et  Kickx  y  reprit  ses  leçons  au  milieu  d'un  nombreux  auditoire  et 
aux  applaudissements  dignement  mérités.  A  la  fin  du  cours,  il  proposa 
un  concours  et  fit  graver  à  ses  frais  deux  médailles  pour  ceux  qui  en 
auraient  été  les  vainqueurs;  de  précieux  ouvrages  d'histoire  naturelle 
étaient  destinés  aux  accessits.  Mon  père,  alors  âgé  de  seize  ans,  fut  l'un  des 
vainqueurs  de  ce  concours  et  remporta  l'une  des  médailles.  Il  attachai! 


—   XIII   — 

beaucoup  de  prix  à  ce  premier  succès  en  botanique,  surtout  à  cause  de 
la  haute  estime  que  le  caractère  de  M.  Kickx  avait  inspiré  à  tous  ses 
élèves.  On  était  sur  le  point  de  se  séparer  lorsque  mon  père  proposa  à 
ses  condisciples  d'offrir  au  professeur  un  buste  en  marbre  de  Linné,  en 
signe  de  reconnaissance.  Mais  Kickx  ne  vit  dans  ce  souvenir  qu'un 
présent,  il  le  refusa  et  n'agréa  que  les  paroles  de  reconnaissance  et  de 
vénération  que  prononça,  au  nom  des  élèves,  M.  Leroy. 

Cependant,  M.  Leroy  et  quelques  personnes  demandèrent  la  des- 
titution du  chevalier  Deronnaye  qui  avait  brigué  une  malencontreuse 
nomination;  ils  s'adressèrent  au  Roi,  au  ministre,  à  la  régence,  à  la 
commission  médicale,  et  après  deux  ans  de  tentatives,  ils  réussirent 
à  obtenir  de  M.  Van  Gobelschroy,  ministre  de  l'intérieur,  et  cette  révo- 
cation et  la  réintégration  de  Kickx  dans  ses  fonctions  de  professeur  de 
minéralogie,  de  pharmacie  et  de  botanique.  Nous  devons  laisser  l'appré- 
ciation du  professeur  Kickx  à  l'un  de  ses  disciples  qui  eut  le  bonheur  de 
l'entendre.  Voici  comment  s'exprime  M.  Leroy,  qui  a  aussi  jeté  quelques 
fleurs  sur  la  tombe  de  son  ancien  maître. 

«  Comme  professeur,  Kickx  sut  toujours  s'attirer  l'estime  de  ses 
élèves;  il  savait  leur  faire  goûter  le  plaisir  de  l'étude  en  leur  proposant 
des  questions  qu'ils  avaient  intérêt  à  résoudre.  C'est  ainsi  qu'en  géo- 
logie il  donnait  à  faire  la  description  des  terrains  des  environs  de 
Bruxelles;  pour  la  minéralogie,  donner  tous  les  caractères  des  miné- 
raux que  l'on  rencontre  dans  ces  mêmes  terrains  ;  en  botanique,  décrire 
toutes  les  plantes  officinales  des  environs  de  Bruxelles;  nous  avions  de 
quatre  à  six  mois  pour  les  résoudre. 

»Nos  excursions  botaniques  et  minéralogiques  étaient  des  plus 
agréables;  il  arrivait  fréquemment  que  nous  partions  dès  5  heures  du 
matin  pour  ne  revenir  que  vers  40  ou  11  heures  du  soir.  C'est  dans  ces 
courses,  éloignées  de  3  à  4  lieues  de  la  capitale,  qu'il  savait  nous  faire 
goûter  les  plaisirs  de  l'étude;  avec  quelle  attention,  quel  soin,  les  élèves 
rangés  autour  de  lui  recueillaient  ses  savantes  leçons,  soit  sur  une 
plante,  sur  un  terrain  ou  un  minéral!.,  et  pendant  nos  courses,  il  nous 
traitait  avec  tant  de  sollicitude,  qu'on  l'eût  pris  pour  un  père  accompagné 
de  ses  enfants. 

»Son  excessive  sensibilité  ne  lui  permit  pas  de  s'occuper  d'ento- 
mologie; il  ne  pouvait  voir  traverser  un  insecte  d'une  épingle;  je  me 
rappelle  que  dans  ce  temps,  alors  que  je  m'occupais  déjà  de  cette  étude,  il 
me  disait  :  «  Je  ne  puis  concevoir  comment  vous  pouvez  martyriser  ces 
pauvres  êtres.  »  Il  n'était  cependant  pas  sans  connaissances  dans  cette 
partie  de  la  zoologie.  » 

En  1828,  Kickx,  dans  le  but  de  permettre  à  ses  élèves  de  méditer 


—    X!V   — 

d'avance  l'objet  de  chaque  leçon  et  de  trouver  un  mérnoratif  de  tout  ce 
qui  avait  été  traité  dans  les  leçons  précédentes,  publia  un  Résumé  du 
cours  de  botanique.  Dans  une  centaine  de  pages,  divisées  en  212  para- 
graphes, il  a  su  accumuler  tous  les  termes  et  les  définitions  indispen- 
sables à  l'étude  do  la  botanique.  C'est  un  livre  inséparable  d'un  en- 
seignement oral  qui  permet  de  développer  et  d'expliquer  les  notions 
scientifiques;  il  n'avait  et  ne  pouvait  avoir  d'autre  portée  qu'un  très-court 
abrégé  du  cours  professé  au  Musée  des  sciences.  La  botanique  générale 
est  divisée  en  trois  parties  :  1°  la  botanique  descriptive,  ou  celle  qui 
traite  des  formes  extérieures  des  végétaux  et  des  termes  qui  les  ex- 
priment; 2°  la  botanique  organique  qui  a  pour  objet  la  constitution 
intérieure  des  végétaux  et  les  fonctions  vitales  qu'ils  exécutent;  3°  la 
botanique  méthodique  :  elle  comprend  la  subordination  ou  classement 
des  végétaux  selon  des  règles  uniformes  et  constantes.  Il  ne  faut  pas 
juger  la  philosophie  qui  règne  dans  ce  livre  au  point  de  vue  de  la  science 
d'aujourd'hui.  L'époque  à  laquelle  il  fut  publié  était  une  période  de 
transition;  Kickx  combattait  pour  les  idées  de  Linné  et  il  lui  répugnait 
d'admettre  les  nouvelles  théories  de  De  Candolle  et  de  Richard.  C'est 
ainsi  qu'il  se  refuse  à  croire  que  l'axe  horizontal  et  souterrain  des  Iris 
du  Sceau  de  Salomon,  etc.,  soit  une  tige  et  non  pas  une  racine  noueuse; 
il  ne  peut  admettre  que  les  épines,  les  crampons,  les  vrilles  et  les  autres 
organes  analogues  représentent  des  organes  supérieurs,  tels  que  des 
branches,  des  feuilles  ou  des  pétioles  avortés.  Aujourd'hui  il  le  faut 
bien. 

En  herborisant  au  mois  de  juin  1822  près  d'Heyndonk  sur  le  Ruppel, 
Kickx  trouva  un  Vcrbascam  qu'il  eût  immédiatement  considéré  comme 
une  espèce  nouvelle  si  l'extrême  tendance  à  l'hybridité  clans  ce  genre  ne 
l'eût  engagé  à  plus  de  prudence.  Il  exposa  ses  doutes  dans  une  notice  sur 
quelques  plantes  observées  aux  environs  de  Bruxelles,  depuis  l'impression 
de  laFlora  Bruxellensis ,  lue  à  la  Société  des  sciences  naturelles  etmédi- 
dicales  deRruxelles  le  6  novembre  1823.  Il  y  établit  que  son  Verbascum. 
paraissait  se  rapprocher  par  ses  feuilles  ovales  lancéolées,  par  ses  fleurs 
disposées  en  fascicules  distincts,  plus  grandes  et  d'un  jaune  plus  pâle 
que  celles  du  V.  thapsus,  ainsi  que  par  la  grandeur  de  ses  bractées,  du 
V.phlomoïdes,  étranger  à  notre  pays.  Cette  dernière  assertion  est  inexacte; 
le  V.  phlomoïdes  de  Linné  et  de  Schrader  est  assez  commun  dans  la  pro- 
vince de  Liège,  pour  que  ses  fleurs  soient  recueillies  par  la  pharmacie. 
En  1826  Agarth  publia  dans  le  Rulletin  des  sciences  naturelles  la  des- 
cription d'un  Verbascum  trouvé  par  lui  aux  environs  de  Stockholm  et 
qu'il  nommait  V.  bracteatum  ;  Kickx  crut  pouvoir  rapporter  la  plante 
qu'il  avait  rencontrée  à  Heyndonk  à  la  description  d'Agarth  et  publia 


XV 


une  Notice  sur  une  sorte  de  Verbascum  dans  le  Messager  des  sciences  et 
des  arts,  1826,  p.  206.  Plus  tard  M.  Dumortier  l'érigea  en  espèce  dis- 
tincte sous  le  nom  de  Verbascum  Kickxianum.  Mais  l'existence  de  cette 
nouvelle  espèce  de  la  flore  belge  n'a  pas  été  confirmée;  le  V . Kickziamim 
était  ou  bien  l'une  des  fréquentes  hybrides  que  l'on  rencontre  dans  ce 
genre  et  dont  la  durée  est  toujours  passagère,  ou,  ce  qui  nous  paraît  plus 
probable,  une  forme  du  V.  thapsiforme  Schrad.  présentant,  de  même 
que  Kickx  l'avait  observé  pour  sa  plante,  des  caractères  intermédiaires 
entre  le  Bouillon  blanc  et  le  V.  phlomoïdes. 

La  même  année  Kickx  publia  dans  les  Annales  de  la  société  Linnéenne 
de  Paris  une  notice  sur  VArabis  albida  et  alpina,  et  une  nouvelle  espèce 
d'Agaric  qu'il  découvrit  à  Boitsfort  et  nomma  Agaricus  revohitus. 

Kickx  était  fait  à  l'unisson  de  la  méthode  si  sévère  et  si  précise  de 
Linné,  son  esprit  s'était  moulé  à  tant  de  rigueur,  son  caractère  se  tra- 
duisait au  dehors  par  une  parole  peut-être  sèche,  mais  toujours  juste  et 
jamais  inutile;  dans  ses  leçons  comme  dans  sa  conversation  il  suivait  à 
la  lettre  la  stricte  sentence  du  maître  :  Botanicus  nec  res  oratorio  sermone 
ebuccinat;  avare  de  son  temps  qu'il  livrait  tout  entier  à  son  instruction, 
à  celle  des  autres  ou  au  soulagement  des  maux  de  l'humanité,  il  était 
parcimonieux  de  discours  et  de  phrases;  si  quelquefois  ceux  qui  ne  le 
connaissaient  pas  intimement  voyaient  en  lui  de  la  rudesse,   ceux  à 
qui  il  avait  voué  une  amitié  d'autant  plus  précieuse  qu'elle  ne  s'accordait 
qu'à  bon  escient,  appréciaient  et  sa  droiture  et  sa  vraie  sensibilité,  car 
son  cœur  vibrait  profondément.  Il  est  inutile   sans  doute  de  faire  re- 
marquer qu'un  caractère  qui  avait  quelque  chose  d'antique,  lui  faisait 
détester  l'intrigue  pour  briguer  les  places,  et  que  sévère  pour  lui-même, 
il  avait  le  droit  de  l'être  pour  les  autres,  il  fut  dans  sa  carrière  plus 
d'une  fois  en  butte  aux  traits  des  méchants  dont  il  dévoilait  les  machi- 
nations avec  une  désespérante  àpreté.  On  a  pu  remarquer  que  quoi- 
qu'il passât  par  les  époques  de  la  révolution  brabançonne,  de  la  révolu- 
tion française  ,  qu'il  vit  l'envahissement  du  territoire  belge  par  les 
Français,  l'élévation  de  Guillaume  et  la  proclamation  de  l'indépendance 
nationale  en  1830,  jamais  son  nom  ne  fut  mêlé  à  la  politique;  il  savait 
que  la  science  est  placée  plus  haut  que  les  partis.  Sa  vie  s'écoulait  dou- 
cement partagée  entre  l'étude  et  la  famille.  Son  épouse  Jeanne-Catherine 
Vanmerstraeten  lui  avait  donné  cinq  enfants;  il  la  perdit  dès  1816  et  sa 
fille  en  1828  ;  lui-même  s'éteignit  le  27  mars  1831,  à  l'âge  de  56  ans.  Mais 
il  a  laissé  à  sa  patrie,  outre  l'empreinte  de  sa  carrière  scientifique ,  un  fils 
élevé  dans  le  culte  des  sciences  naturelles,  auquel  il  a  transmis  ses  con- 
naissances et  son  expérience ,  et  qui  a  su  porter  plus  haut  encore  le 
nom  paternel  en  se  plaçant  au  rang  des  botanistes  les  plus  éminents  de 


—  XVI  — 

notre  époque;  M.  J.  Kickx,  professeur  ordinaire  de  botanique  à  l'U- 
niversité de  Gand  et  membre  de  l'Académie  royale  des  sciences  et 
belles-lettres  de  Bruxelles  est  un  des  savants  distingués  qui  font  l'orne- 
ment du  règne  de  Léopold  premier.  Le  nom  de  Kickx  passera  de  plus 
aux  générations  futures  avec  le  Kickxia  arborea  (Blume,  Rimphia  179) 
de  la  famille  des  Apocynées  :  le  nom  d'une  plante  est  un  monument  que 
les  siècles  n'effacent  pas. 


BIBLIOGRAPHIE  DES  OUVRAGES  DE  J.  KICKX. 

1812.  Flora  Bruxellensis  exhibens  charactercs  generumet  specierum  plantarumcircum 
Bruxellas  crescentium,  secundum  Linneum  dispositacumsynonimis  auctorum, 
1  vol.  in-8. 

1816.  Notice  sur  la  germination,  adressée  à  la  Société  de  botanique  et  d'agricultnre  de 
Gand  (inédit). 

4818.  Notice  sur  la  découverte  du  Gypse  sélénite  ou  sulfate  dechaux  cristallisé,  et  d'une 
argile  plastique  inconnue  jusqu'ici  dans  le  voisinage  de  Bruxelles  (inédit).  Lu 
à  la  séance  de  l'Académie  royale  de  Bruxelles  du  7  septembre. 

1820.  Tcntamen  mineralogicum  seu  nova  distributio  in  classes  ordines,  gênera  et  spe- 
cies,  etc.  Cuiadditur  lexicon  mineralogicum,  1vol.  in-8. 

—  Bemarques  sur  un    passage   de   l'histoire   des  Pays-Bas   autrichiens,   de   feu 

M. Desroches,  in-4.  Nouveau  mémoire  de  l'Académie  royale  de  Bruxelles,  t.  II , 
page  55. 

1822.  Belalion  d'un  voyage  faità  la  grotte  de  Han  au  mois  d'août  1822,  par  MM.  Kickx 

et  Quelelet.  in-4.  Nouv.  mém.  de  l'Acad.  de  Bruxelles,  t.  II. 

—  Précis  sur  l'extraction  et  la  purification  du  Salpêtre  et  sur  l'établissement  des 

salpètrières  artificielles,  in-8. 

—  Dissertation  sur  les  traps  stratiformes,  lue  à  la  séance  de  l'Académie  du  7  jan- 

vier 1822,  in-4. 

1823.  Bemarques  sur  la  confection  de  l'éther  sulfurique  et  de  la  liqueur  minérale  d'Hoff- 

mann ;  présentées  à  la  Société  des  sciences  médicales  et  nat.  de  Bruxelles. 

1824.  Mémoire  sur  la  géographie  physique  du  Brabant  méridional,  lu  à  la  séance  de 

l'Académie  de  Bruxelles  du  11  octobre  1824,  in-4. 

—  Notice  sur   quelques  plantes  observées  aux  environs  de  Bruxelles  depuis  1813. 

Compte-rendu  des  travaux  de  la  Soc.  des  se.  médic.  et  natur.  de  Bruxelles,  1826. 
in-8. 
1826.  Notice  sur  une  nouvelle  espèce  de  Verbascum,   in-8.,   avec  2  planches   lith. 
Messager  des  sciences  et  des  arts. 

—  Notice  sur  l'Arabis  albida  et  alpina.  Annales  de  la  Soc.  Linnéenne  de  Paris. 

—  Une  nouvelle  espèce  d'Agaric.  Ann.  de  la  Société  Linnéenne  de  Paris,  t.  V, 

page  66. 
1828.  Bésumé  du  cours  de  minéralogie  et  de  botanique  donné  au  Musée  des  sciences 
et  des  lettres  de  Bruxelles,  in-8. 

M.  Kickx  rédigea  en  outre  les  rapports  suivants  ,  adressés  par  la 
commission  médicale  du  Brabant,  dont  il  était  secrétaire,  au  gouver- 
nement Néerlandais. 

1»  La  vente  des  médicaments  par  les  établissements  hospitaliers. 

2»  Le  débit  des  médicaments  par  les  médecins  et  chirurgiens  de  campagne,  là  où  se 

trouve  un  pharmacien  légalement  admis. 
3°  La  distinction  des  chirurgiens,  en  chirurgiens  de  ville,  du  plat  pays  ou  de  vaisseaux, 

distinction  opposée  aux  intérêts  de  l'humanité. 
4o  La  faculté  d'obtenir  le  litre  d'accoucheur  sans  être  chirurgien. 
5»  La  fixation  du  nombre  de  ceux  qui  exercent  l'art  de  guérir  d'après  la  population. 

NOTICES  BIOGBAPHIQUES. 

Marchal.  Notice  nécrologique  sur  M.  Kickx,  lue  à  la  séance  du  4  juin  1S31  de  l'Aca- 
démie des  sciences  et  belles-lettres  de  Bruxelles. 

G.  F.  Leroy.  Notice  Biographique  sur  Jean  Kickx,  lue  à  la  Société  des  sciences  mé- 
dicales et  naturelles  de  Bruxelles  dans  la  séance  du  3  juillet  1837. 

Vanderheyden.  Notice  Biographiquesur  J.  Kickx.  Journal  de  pharmacie  d'Anvers, 
1851,  p.  315. 


Ti'onaeol  u  m  . 
1.2.  Sflicucriniumi  .  3.  Xaudmii.    4  «  Chaixiamim 


LA 

BELGIQUE  HORTICOLE, 

JOURNAL  DES  JARDINS,  DES  SERRES  ET  DES  VERGERS 

HORTICULTURE. 


NOTE  SUR  QUELQUES  VARIÉTÉS  NOUVELLES  DE  CAPUCINES, 
ET  LA  CULTURE  DES  ESPÈCES  RULBEUSES, 

Par  M.  Edouard  Morren. 

Le  genre  Tropœolum  compte  aujourd'hui  environ  quarante  espèces, 
toutes  originaires  de  la  région  des  Andes  et  spécialement  du  Pérou. 
Elles  se  sont  rapidement  répandues  dans  les  cultures  et  chaque  nou- 
velle venue  est  accueillie  avec  reconnaissance;  toutes  les  capucines  sont 
de  jolies  plantes  aux  tiges  volubiles,  d'une  végétation  tantôt  rapide  et 
vigoureuse,  tantôt  d'une  délicatesse  extraordinaire,  toujours  élégante. 
Le  feuillage  est  abondant,  très-varié  et  les  fleurs  aux  formes  insolites, 
grandes  et  belles,  sont  peintes  de  toutes  les  couleurs  possibles  et 
même  de  couleurs  impossibles  puisqu'elles  se  rient  des  lois  que  certains 
botanistes  prétendent  imposer  à  la  nature;  les  unes  se  montrent  parées 
de  jaune,  d'orange,  de  pourpre  ou  de  brun;  les  autres  de  rose,  de  bleu 
ou  d'indigo  ;  quelquefois  même  le  bleu  et  le  jaune  se  marient  dans  la 
même  fleur,  au  grand  désespoir  des  botanistes  précités. 

Linné  publiait  il  y  a  un  siècle  son  Specics  Plantarum  (1753),  où  il 
décrivait  les  trois  seules  capucines  alors  connues  et  arrivées  du  Pérou; 
c'étaient:  la  grande  capucine  ou  Tropœolum  majus,  la  petite  capucine 
ou  Tropœolum  minus  et  la  capucine  étrangère  ou  T.  peregrinum.  Long- 
temps on  ne  connut  que  ces  trois  espèces  linnéennes;  mais  pendant 
ces  dernières  années ,  ce  beau  genre  s'est  subitement  enrichi  d'une 
foule  d'espèces  nouvelles,  très-différentes  de  forme  et  de  coloris.  Ce 
genre  déjà  si  varié  à  l'état  sauvage  ne  pouvait  manquer  de  se  diversifier 
encore  par  la  culture ,  de  donner  des  variétés  remarquables  et  de  se 
soumettre  à  des  fécondations  artificielles.  C'est  ce  qui  est  en  effet  arrivé. 

Nous  publions  le  portrait  de  deux  fleurs  d'une  variété  de  capucine 
nommée  Tropœolum  Scheuerianum,  bien  recommandable  par  la  richesse 
de  sa  coloration  et  la  vigueur  de  sa  végétation.  Cette  capucine  est  de 

BliLG.   HORT.    T.    VI.  1. 


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pleine  terre,  s'élève  à  plusieurs  mètres  et  se  couvre  d'un  nombre 
prodigieux  de  belles  et  grandes  fleurs;  sa  tendance,  à  produire  des 
variétés  nouvelles  est  telle,  qu'il  est  difficile  d'observer  deux  fleurs 
absolument  semblables  sur  la  même  plante.  Les  pétales  sont  d'un 
beau  jaune  paille ,  grands ,  arrondis  ;  les  deux  supérieurs  montrent , 
depuis  la  naissance  de  l'onglet  jusque  vers  le  milieu  du  limbe,  une 
large  bande  pourpre  foncé,  relevée  de  quelques  stries  fines  presque 
noires;  les  trois  pétales  inférieurs  présentent,  immédiatement  à  la 
naissance  du  limbe,  chacun  une  macule  rouge,  comme  une  tache  de 
sang;  tout  le  reste  est  uniformément  jaune  paille.  Mais  un  peu  plus 
haut,  sur  la  même  tige,  on  trouve  des  fleurs  dont  les  pétales  sont 
marbrés  de  carmin  ;  ailleurs  ,  l'extrémité  des  lobes  est  tachée  de 
pourpre,  tantôt  les  macules  inférieures  sont  petites  et  séparées  des 
supérieures,  tantôt  elles  se  prolongent  jusqu'à  se  réunir,  et  chaque 
pétale  est  traversé  d'une  bande  pourpre,  à  sa  partie  médiane.  Il  serait 
impossible  enfin  de  définir  une  coloration  aussi  variée.  Le  T.  Scheue- 
ricmum  (Figuré  PL  I,  n°  1  et  2)  est  une  variété  du  T.  Majus,  de  pleine 
terre  et  vivace  en  serre.  ■ —  Nous  en  avons  des  graines  qui  sont  à  la 
disposition  de  nos  abonnés. 

En  même  temps  que  le  T.  Scheuerianum ,  nous  publions  le  dessin 
de  variétés  nouvelles  de  Tropœolum,  obtenues  à  l'établissement  du 
Prado  de  Marseille,  dirigé,  par  M.  Geoffre.  M.  Fcrrand  a  créé  les 
T.  Chaixianam  et  T.  Massiliense  du  mariage  du  T.  Moritzianum  et  de 
la  variété  nommée  Lilli. 

Le  Tropœolum  Chaixianum,  qui  ressemble  beaucoup  au  T.  Lobbianum 
var.  Splendens,  figuré  PI.  I,  fig.  4,  a  les  fleurs  d'un  beau  rouge 
pourpre  foncé,  éclairé,  vermillon;  les  pétales  supérieurs  sont  bien 
arrondis,  les  inférieurs  lobés  et  barbus  en  dedans.  Ces  fleurs  sont  de 
grandeur  moyenne. 

Le  T.  Massiliense  a  les  fleurs  de  même  grandeur  que  le  précédent, 
à  contours  bien  arrondis,  à  pétales  lobés,  colorés  en  orange  clair, 
chatoyant,  présentant  chacun  une  grande  macule  à  la  naissance  du 
limbe;  les  deux  macules  supérieures  sont  vermillon,  celles  des  pétales 
inférieurs  sont  rose-pourpre. 

M.  Desponds  a  gagné  la  capucine  qu'il  nomme  Trop.  Nandinii 
(PI.  I,  fig.  3)  à  fleurs  ordinairement  d'un  orange  foncé,  maculées 
de  carmin;  nous  disons  ordinairement ,  parce  que  certaines  fleurs  sont 
jaunes,  maculées  carmin,  et  d'autres  lignées  et  striées  de  la  même 
nuance,  plus  ou  moins  foncée. 

M.  Huber,  horticulteur  à  Hyères,  possède  un  Tropœolum  Lobbianum 
tricolor  à  pétales  rouge  brillant,  à  macules  bleues,  rappelant  la  couleur 
de  YHabrothamnns  cyanens. 


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Les  Tropœolum  constituent  un  des  plus  beaux  ornements  des  serres 
et  des  jardins;  leurs  tiges  volubiles  s'enlacent,  courent  et  serpentent 
dans  toutes  les  directions  et  se  couvrent  d'un  nombre  prodigieux  de 
fleurs.  On  peut  les  considérer  comme  des  lianes  herbacées  et  annuelles; 
comme  elles,  elles  aiment  un  soleil  ardent  sur  un  sol  humide,  la  sève 
abonde  dans  leurs  tissus  et  elles  croissent  avec  une  grande  rapidité. 
Les  unes  sont  réellement  annuelles ,  les  autres  sont ,  de  même  que 
certaines  Ipomées,  vivaces  par  un  gros  tubercule  persistant.  Toutes 
donnent  des  fleurs  remarquables  par  la  forme  et  éclatantes  de  coloris. 
La  vulgaire  capucine  brille  de  tant  de  feux  qu'elle  semble  souvent 
lancer  des  éclairs  pendant  la  nuit. 

La  culture  des  espèces  annuelles  de  pleine  terre  n'offre  aucune  diffi- 
culté; semez-les  au  printemps  dans  une  bonne  terre,  à  une  bonne 
exposition,  arrosez-les  fréquemment  et  elles  se  porteront  à  merveille. 
Mais  les  espèces  de  serre  tempérée,  aux  tiges  délicates  comme  des 
cheveux,  réclament  quelques  soins. 

Janvier.  —  Placez  les  bulbes,  si  vous  ne  l'avez  déjà  fait  en  automne, 
dans  des  pots,  remplis  d'une  terre  formée,  à  parties  égales,  d'argile 
sableuse  et  de  tourbe;  on  doit  adapter  les  pots  et  les  treillis  à  la  force 
des  plantes  et  d'après  la  nature  des  espèces.  On  élève  d'abord  les  tiges 
directement  à  la  partie  supérieure,  puis  on  les  fait  brusquement  redes- 
cendre et  on  remplit  enfin  les  vides. 

Février.  —  On  doit  examiner  chaque  jour  les  jeunes  pousses  et  leur 
donner  la  direction  convenable.  On  arrose  abondamment  mais  soigneu- 
sement. 

Mars.  —  Mêmes  soins  que  pendant  le  mois  de  février;  garnir  unifor- 
mément les  treillis  pour  que  toutes  les  parties  soient  fleuries,  et  dans 
le  même  but  ne  pas  les  entourer  d'autres  plantes,  mais  les  bien  aérer. 

Avril.  —  On  doit,  nécessairement  continuer  à  lier  les  tiges.  Lorsque 
les  pots  sont  bien  remplis  de  racines,  il  convient  de  donner  un  supplé- 
ment de  nourriture  par  des  arrosements  d'engrais  liquide. 

Mai.  —  Mettez  les  plantes  dans  la  partie  la  mieux  aérée  de  la  serre, 
près  du  verre.  Au  moment  de  la  floraison  elles  doivent  être  à  l'ombre; 
il  faut  surveiller  les  dégâts  que  pourraient  faire  les  limaces  et  la 
chenille  du  choux.  L'arrosage  peut  être  abondant. 

Juin.  —  Dès  que  la  floraison  cesse,  on  doit  priver  les  plantes  gra- 
duellement d'eau  et  même  les  laisser  sécher  entièrement  pendant  une 
couple  de  mois.  Il  est  souvent  du  plus  bel  effet  de  cultiver  ensemble 
dans  un  môme  pot,  plusieurs  espèces  de  Tropœolum.  Ainsi  si  on 
réunit  le  Tropœolum  brachyceras  et  le  T.  tricolor,  on  obtient  une 
combinaison  de  couleurs  des  plus  agréables  à  l'œil.  Nous  recomman- 


(ions  ù  nos  lecteurs  de  combiner  artistement  dans  leurs  cultures  le 
jaune  du  T.  brachyceras ,  le  bleu  céleste  et  si  doux  du  T.  cœruleum , 
avec  les  couleurs  si  riches  du  T.  tricoter. 

Juillet.  —  Séchez  complètement  les  bulbes  à  mesure  que  le  feuillage 
se  meurt;  il  faut  bien  préserver  les  bulbes  de  l'humidité  qui  les  ferait 
infailliblement  périr. 

Août. — Pendant  le  mois  d'août  on  tient  les  bulbes  parfaitement  en 
repos. 

Septembre.  —  Rempotez  les  bulbes  qui  donnent  signe  de  végétation, 
mais  ne  forcez  pas  ceux  qui  sont  en  repos.  Faites  usage  d'argile 
sableuse  et  de  terreau  de  feuilles.  Arrosez  modérément. 

Octobre.  —  Placez  les  plantes  dans  une  partie  de  la  serre  fraîche, 
aérée  et  bien  éclairée;  fixez  les  treillis  et  recommencez  à  diriger  les 
tiges  à  mesure  qu'elles  s'accroissent. 

Novembre.  —  Continuez  à  rempoter  tous  les  bulbes  qui  sortent  de 
leur  état  de  torpeur,  à  conduire  les  plantes  dont  la  croissance  avance, 
et  à  arroser  soigneusement,  car  autant  la  sécheresse  est  nécessaire  après 
la  floraison,  autant  l'eau  est  indispensable  pendant  la  période  de  végé- 
tation. 

Décembre.  —  Mêmes  recommandations  que  pour  le  mois  précédent; 
garnissez  les  treillis  solon  votre  bon  goût  et  évitez  surtout  que  les 
plantes  ne  soient  étiolées. 


MOYEN  DE  FAIRE  FLEURIR  LE   TROPOEOLUM 
WAGENERIANUM , 

Par    M.    E.    Rege. 

Malgré  la  beauté  de  son  feuillage  et  de  ses  fleurs  singulières,  rouges, 
avec  des  pétales  d'un  bleu  noirâtre,  cette  espèce  de  Tropœolum  est 
encore  très-peu  cultivée,  à  cause  de  sa  grande  difficulté  à  fleurir. 
L'été  dernier  un  pied  de  cette  espèce  fut  planté  en  pleine  terre,  dans 
le  jardin  de  Zurich,  à  demi-ombre,  et,  par  précaution,  il  fut  ensuite 
déplanté  à  l'automne.  Plus  tard,  il  fut  placé  dans  une  serre  tempérée 
dans  laquelle  les  variétés  du  Tropœolum  Lobbianum  fleurissent  abon- 
damment pendant  tout  l'hiver.  Comme  chaque  année,  le  Tropœolum 
Wagenerianum  y  développa  de  longs  jets  vigoureux  et  peu  de  fleurs. 
Le  jardinier  chargé  de  cette  serre  eut  l'idée  de  supprimer,  en  les 
pinçant,  les  jets  vigoureux  que  portait  l'extrémité  de  la  plante.  Peu 
après  on  vit  se  développer  de  petites  pousses  maigres  qui  se  couvrirent 
de  fleurs  pendant   les  mois  de  janvier  ol  de  février.  Si   ce  procédé 


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si  simple  pouvait  faire  fleurir  constamment  cette  belle  plante,  il  serait 
d'un  emploi  aussi  facile  qu'avantageux. 

(Gartenflora  ,  1855,  p.  104.  —  Traduction 
du  Journ.  de  la  Soc.  Imp.  d'horticult.) 


REVUE  DE  PLANTES  NOUVELLES  OU  INTÉRESSANTES. 

Bégonia  iitagsiifica,  Linden.  —  Famille  des  Regoniacées.  — 
M.  Linden  en  annonçant  cette  nouvelle  espèce  dans  son  catalogue 
pour  1855  s'exprime  ainsi  : 

«  Découverte  par  nous  dans  les  parties  froides  et  nébuleuses  de  l'état 
de  Cundinamarca,  à  une  altitude  supra-marine  de  2,600  mètres,  cette 
merveilleuse  espèce  échappa  pendant  plusieurs  années  aux  recherches 
actives  de  nos  collecteurs,  et  ce  ne  fut  qu'au  commencement  de  l'année 
dernière  que  nous  fûmes  assez  heureux  pour  en  obtenir  des  graines 
fraîches.  Il  nous  suffira  de  rapporter  l'anecdote  suivante  pour  faire 
apprécier  le  mérite  de  cette  plante  et  justifier  le  cas  que  nous  en 
faisons:  A  son  passage  à  Rruxelles,  au  printemps  dernier,  M.  de 
Warscewicz  nous  raconta  qu'une  des  plantes  qui  l'avaient  le  plus 
impressionné  par  sa  beauté ,  était  un  Regonia  d'une  magnificence 
extraordinaire,  trouvé  par  lui  dans  les  régions  froides  de  la  Nouvelle 
Grenade  et  auquel  il  avait  donné  le  nom  de  magnifica.  C'était,  selon 
lui ,  une  de  ses  plus  précieuses  trouvailles  ,  et  il  regrettait  vivement  de 
ne  pas  en  avoir  pu  faire  l'introduction.  Quelle  ne  fut  donc  pas  sa 
surprise,  lorsqu'en  parcourant  nos  serres,  il  s'arrêta  tout-à-coup  en 
présence  de  plusieurs  exemplaires  de  la  plante ,  décorée  du  même  nom 
spécifique  que,  dans  son  admiration,  il  lui  avait  donné  spontanément 
et  que  le  même  sentiment  nous  avait  dicté  à  quelques  milliers  de  lieues 
de  distance. 

»Le  Bégonia  magnifica  forme  une  plante  touffue,  à  feuilles  épaisses 
de  grandeur  moyenne,  à  face  supérieure  finement  veloutée  et  veinée  de 
blanc  argenté  à  reflets  métalliques  :  les  nervures  delà  partie  inférieure, 
de  même  que  les  pétioles,  la  tige  et  les  pédoncules,  sont  recouverts 
d'un  duvet  brun  rougeâtre.  Les  fleurs ,  de  Fécarlate  le  plus  vif,  pédi- 
cellées  et  réunies  au  nombre  de  6-8  sur  un  même  pédoncule,  mesurent 
chacune  deux  pouces  de  diamètre.  » 

Genetyllis  tulipifera.  Hook.  —  Bot.  Mag.  pi.  4858.  —  Syn.: 
Hedarome  tulipiferum,  Lind.  in  Gard,  chron.  1854,??.  323.  —  Fana. 
des  Myrtacées.  —  Icosandrie  Monogynie.  —  Le  vénérable  Drummond 
rapporta,  au  nombre   de  ses  découvertes  les  plus   intéressantes  de 


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l'Australie  méridionale,  des  fragments  de  deux  espèces  de  Genetyllis, 
recueillis  clans  le  canton  de  la  rivière  des  Cygnes.  Ces  deux  espèces  ont 
heureusement  prospéré  de  graines  dans  les  jardins  anglais.  Le  G.  tuli- 
pifera,  décrit  par  M.  Hooker,  quoique  haut  à  peine  de  deux  pieds  et 
dix  pouces,  portait  de  450  à  200  bouquets  de  fleurs;  chaque  rameau 
était  terminé  par  un  riche  involucre  pendant,  de  la  forme  d'une  belle 
tulipe,  et  que  beaucoup  de  personnes,  ignorant  la  nature  véritable  de 
ces  organes,  auraient  pris  pour  des  corolles. 

Le  G.  tulipifera  constitue  une  arbrisseau  de  deux  à  trois  pieds  de 
haut,  ferme,  dressé,  très-branchu ;  les  rameaux  sont  à  peu  près  verti- 
caux, anguleux,  brun  pâle.  Les  feuilles,  en  général  opposées,  presque 
sessiles,  persistantes,  étalées,  oblongues-elliptiques,  d'un  vert  foncé 
pointillé  supérieurement,  plus  pâles  en  dessous,  à  bords  membraneux 
ou  submembraneux.  Les  inflorescences  terminent  les  nombreux  ra- 
meaux, entourées  d'un  involucre  grand,  pendant,  vivement  coloré. 
Les  feuilles  supérieures  sont  aussi  plus  grandes,  plus  larges  et  plus 
ou  moins  colorées.  Les  bractées  qui  constituent  les  involucres  sont 
blanches,  plus  ou  moins  striées  et  tachées  de  rose  ou  de  rouge  et 
disposées  de  telle  sorte  qu'elles  figurent  une  corolle  polypétale.  Les 
fleurs  véritables  sont  petites,  peu  nombreuses,  rassemblées  à  la  base 
de  l'involucre  et  munies  chacune  de  deux  bractéoles  concaves  et  sub- 
carénées. Le  tube  du  calice  est  subturbiné,  marqué  de  10  nervures; 
le  limbe  est  à  cinq  dents  petites  et  obtuses.  La  corolle  est  formée  de 
cinq  pétales  ovés,  obtus.  Les  étamines  surgissent  d'un  anneau  ou 
disque  à  la  gorge  du  calice;  dix  sont  parfaites,  courtes,  à  anthères 
globuleuses  et  dix  autres  disposées  sur  un  second  rang  sont  avortées. 
Le  style  est  trois  fois  aussi  long  que  la  fleur,  épais,  subulé,  à  stigmate 
barbu. 

Oenaetyllis  iBtacrosie&ia.  Turczn.  —  Turczn.  in  Bull.  Soc. 
mosc.  XXII,  part.  II,  p.  18.  —  Walpers.  Ann.  Bct.  System.  II,  p.  616. 
—  Flore  des  serres,  1009,  p.  109.  —  Fam.  des  Myrtacées.  —  Icosandrie 
Monogynie. —  Le  Genetyllis  macrostegia  forme  un  sous-arbrisseau  qui  a 
le  port  d'un  Pimelea;  il  a  les  feuilles  très-glabres,  décussées,  linéanes- 
oblongues,  obtuses,  atténuées  à  la  base  en  un  pétiole  court,  odorantes. 
Les  fleurs,  ou  plutôt  les  involucres  que  le  vulgaire  nommera  fleurs, 
sont  pendantes,  formées  de  bractées  colorées  en  rouge  brun  et  res- 
semblent un  peu  à  des  boutons  de  fuchsias  d'où  le  nom  de  Genetyllis 
fuchsioides  sous  lequel  on  désigne  souvent  le  G.  macrostegia.  C'est  une 
plante  australienne  de  serre  froide. 

C'haetogastra    liiideniana,     Planch.    —  Flore    des    serres , 


1011-1012,  p.  113.  —  Famille  des  Mélastomacées. —  Décandrie  mono- 
gynie. — Cette  superbe  mélastomacée  forme  un  arbuste  de  1  à  2  mètres, 
à  feuillage  sombre ,  rude  et  abondant ,  et  à  fleurs  grandes ,  d'un  rouge 
vif.  Elle  a  été  découverte  par  M.  Linden  au  sommet  du  Monserrata, 
un  des  points  culminants  du  haut  plateau  de  Bogota,  à  9,840  pieds 
d'altitude.  M.  Schlim  l'a  retrouvée  sur  les  bautes  cimes  des  Andes  de 
la  province  de  Pamplona  dans  la  Nouvelle-Grenade  et  l'a  envoyée 
vivante  en  Europe.  C'est  une  admirable  plante,  dont  aucune  descrip- 
tion ne  saurait  donner  une  idée  convenable.  Les  rameaux  et  la  face 
inférieure  des  feuilles  sont  recouverts  d'un  duvet  ferrugineux;  les 
feuilles  à  pétioles  courts,  ovées-oblongues,  à  5  nervures  épaisses,  à 
fleurs  axillaires,  subpaniculées,  à  pédicelles  courts;  les  divisions  du 
calice  sont  linéanes  aiguës;  les  pétales  larges,  ovés,  sont  trois  fois 
plus  longs  que  le  calice  et  rouge  de  sang. 

Eiorlieria  Bieasmifica.  PI.  et  Lind.  —  Flore  des  serres,  1013, 
p.   117.   —  Famille  des  Gesnériacées.  ■ —  Didynamie  Àngiospermie. 

Le  Locheria  magnifiai  est  encore  une  merveille  de  la  Colombie, 
introduite  par  M.  Linden  qui  le  reçut  par  M.  Triana  de  la  province  de 
Popayan  dans  la  Nouvelle-Grenade.  C'est  une  admirable  Gesnériacée 
qui  peut  se  cultiver  en  serre  tempérée;  les  tiges,  les  pétioles  et  les 
nervures  sont  recouverts  d'un  duvet  pourpré;  les  feuilles  sont  pubes- 
centes,  ovées-oblongues,  pointues,  dentées.  Les  fleurs  axillaires  portées 
sur  de  long  pédicelles,  présentent  un  limbe  très-large,  rouge  orangé, 
à  livrée  noire.  Les  serres  tempérées  comptent  peu  de  fleurs  plus 
recomm  amiables. 


REMARQUES  SUR  LES  MIMULES, 
Par  M.  Ch.  Morren. 

L'étranger  qui  parcourt  à  Gand  un  dimancbe  d'été  le  marché  aux 
fleurs,  établi  sur  la  Place  d'Armes,  s'aperçoit  bientôt  que  les  mimules 
sont  des  plantes  populaires  qui  ont  acquis,  à  juste  titre  d'ailleurs, 
une  grande  vogue.  Elles  sont  en  effet  dignes  de  figurer  dans  les  par- 
terres des  châteaux  comme  sur  la  fenêtre  des  plus  modestes  demeures, 
à  cause  de  la  profusion  de  leurs  fleurs,  de  leur  forme  capricieuse,  de 
leur  figure  légèrement  caustique  ,  de  leurs  coloris  brillants.  Les  bota- 
nistes les  ont  classées  dans  la  famille  des  scrophulariées;  ils  les  ont 
divisées  en  deux  genres,  les  mimulus  proprement  dits  et  les  diplacus; 
et  le  premier  genre  est  à  son  tour  distingué  en  deux  groupes,  les 


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espèces  à  tige  droite  et  celles  dont  la  tige  est  naturellement  pendante 
ou  montante  par  le  moyen  de  tuteurs  et  de  liens. 

Un  des  phénomènes  les  plus  intéressants  des  mimuhis  et  des  diplacus 
est  l'extrême  excitabilité  du  stigmate,  lequel  est  formé  de  deux  lèvres 
ordinairement  ouvertes;  il  suffit  de  toucher  légèrement  ces  organes, 
de  laisser  tomber  sur  eux  quelques  grains  de  pollen ,  de  poussière  ou 
de  sable;  il  suffit  de  titiller  les  bords  de  ces  lèvres  pour  les  voir 
soudain  se  mouvoir,  se  relever,  se  presser  l'une  contre  l'autre ,  comme 
une  bouche  qui  se  ferme.  Si  le  pollen  est  tombé  sur  elles,  il  est  bientôt 
comprimé  entre  ces  deux  valves,  comme  si  la  nature  prenait  ce  moyen 
pour  assurer  dans  ces  plantes  la  fécondité  des  ovaires.  Nous  avons 
observé  naguère  ce  phénomène  avec  soin  et  nous  avons  découvert  alors 
que  la  fécondation  ne  s'opère  pas  à  la  surface  de  ces  lèvres  mobiles, 
mais  seulement  sur  leurs  bords  frangés  de  papilles  courtes,  de  sorte 
que  le  pollen  tombant  sur  elles  est  ramené  dans  ce  mouvement  d'ap- 
proche vers  le  bord  où  existe  le  vrai  et  seul  stigmate  physiologique. 
Les  personnes  qui  voient  pour  la  première  fois  le  mouvement  du 
stigmate  des  mimulùs,  témoignent  toutes  un  intérêt  particulier  à  la 
vue  de  ce  phénomène  singulier  et  surtout  aux  pensées  qu'une  telle 
observation  ne  manque  pas  de  suggérer. 

11  est  peu  de  maisons  où  l'on  ne  cultive  en  Belgique  la  plante-musc 
ou  le  mimuhis  moschatus,  jolie  et  curieuse  plante  que  nous  devons  au 
célèbre  Donglas  qui  l'avait  découverte  dans  la  Colombie.  C'est  une 
petite  plante  vivace  qui  se  cultive  facilement  dans  les  appartements, 
à  l'ombre,  qui  demande  une  bonne  terre  de  bruyère  légère  et  se  sème 
pour  ainsi  dire  d'elle-même  ;  elle  reprend  d'ailleurs  de  boutures  faites 
au  printemps.  On  n'en  a  vu  les  premiers  pieds  que  vers  1826,  mais  sa 
facilité  à  se  reproduire  l'a  répandue  avec  profusion  en  peu  d'années. 
Les  tiges  étant  tombantes,  on  peut  orner  avec  la  plante-musc  des 
corbeilles,  des  vases  suspendus,  des  devants  de  rochers.  On  peut 
encore,  tant  est  grande  sa  docilité,  la  cultiver  en  gazon,  en  tapis  de 
verdure  ;  enfin  elle  se  laisse  conduire  sur  des  treilles,  sur  des  éventails, 
des  boules ,  des  formes  quelconques  et  partout  elle  offre  en  avant  une 
quantité  considérable  de  fleurs  jaunes,  peu  développées,  mais  nom- 
breuses et  d'une  grande  douceur  de  ton  sur  la  verdure  gaie  et  pâle  des 
tiges  et  des  feuilles.  L'odeur  de  musc  vient  des  poils  qui  sont  glu- 
tineux  et  qui  sécrètent  une  substance  visqueuse,  sans  doute  à  base 
animale;  ces  poils  existent  en  profusion  sur  toute  la  plante. 

La  mimule  de  Virginie  ou  le  mimulus  ringens  est  une  plante  connue 
il  y  a  près  d'un  siècle,  introduite  du  nord  de  l'Amérique  en  1759,  d'une 
grande  rusticité,  qui  demande  de  l'ombre  alternant  avec  le  soleil  et 


—  9  i  — 

dont  les  feuilles  montrent  une  végétation  ordinairement  forte,  alors 
que  les  fleurs  sont  d'un  bleu  pâle.  La  terre  pour  tous  les  mimulus  doit 
être  meuble,  bien  divisée  et  cette  espèce-ci,  même  malgré  sa  rusticité, 
se  trouve  encore  bien  d'une  terre  de  bruyère  mélangée.  Nous  l'avons 
vue  cultivée  avec  le  plus  grand  succès  au-dessous  des  azalées,  des 
rosages,  des  bruyères  dans  les  parcs  particuliers  à  ces  espèces.  On  la 
multiplie  par  les  racines  et  le  semis  se  fait  immédiatement  après  la 
maturation  des  graines  qui  sont  fort  petites  et  doivent  être  déposées  à 
la  surface  de  la  terre.  C'est  une  circonstance  trop  ignorée  et  qui 
souvent  donne  lieu  à  des  mécomptes,  que  le  semis  nécessairement 
superficiel  des  mimules  chez  lesquelles  toutes  les  graines  sont  extraor- 
dinairement  peliles.  Le  mimulus  ringens  est  un  de  ceux  dont  la  tige  est 
roide  et  droite. 

Cette  qualité  appartient  aussi  au  mimulus  alatus  originaire  de  l'Amé- 
rique du  nord,  introduit  en  1783;  la  feuille  en  est  grande,  ovale, 
elliptique,  et  les  fleurs  varient  du  bleu  au  pourpre.  La  culture  est 
semblable  à  celle  de  l'espèce  précédente. 

Les  mimulus  linearis  décrit  par  Bentham ,  originaire  de  la  Californie, 
structus  du  même  auteur,  mais  appartenant  aux  ïndes  orientales  et 
hirsutus  de  Blumc,  plante  de  Java,  complètent  les  espèces  à  tige  droite, 
aux  feuilles  penninerves  et  au  calice  tubuleux.  Ces  trois  dernières 
espèces  sont  très-peu  répandues  dans  nos  collections. 

Sans  parler  de  toutes  les  espèces  qui  appartiennent  à  la  section  des 
mimules  à  tiges  droites,  nous  mentionnerons  cependant  quelques-unes 
des  plus  remarquables. 

La  mimule  de  Lewis  (  mimulus  Lewisii  )  est  une  jolie  plante  vivace , 
venant  des  bords  du  Missouri,  connue  seulement  depuis  1824,  et  que 
dislingue  sa  grande  fleur  d'un  rouge  pâle.  Elle  aime  aussi  l'ombre,  une 
terre  de  bruyère  légère  et  beaucoup  d'humidité. 

La  mimule  cardinal  (  Mimulus  cardinalis  )  est  très-répandue  dans 
nos  jardins,  dans  nos  cultures  de  salons.  C'est  un  enfant  de  la  Californie, 
transporté  en  Europe  seulement  en  1835,  et  dont  la  belle  fleur,  d'un 
rouge  écarlate  vif,  fait  le  plus  brillant  effet  dans  les  parterres.  Cette 
plante  se  multiplie  de  toute  façon  :  par  la  division  du  pied,  par  les 
boutures,  par  les  graines,  mais  pour  avoir  de  beaux  pieds,  il  faut  les 
replanter  souvent  au  printemps  surtout.  Nous  avons  vu  en  Angleterre, 
dans  les  jardins  royaux  de  Windsor,  tirer  un  admirable  parti  de  cette 
espèce  pour  meubler  des  parterres  géométriques  où  ces  fleurs  écarlates 
s'entrelaçaient  avec  les  ibéris  qui  formaient  une  espèce  de  tapis  de  neige 
sur  lequel  s'épanouissaient  ces  corolles  de  rubis.  C'est  encore  au  mal- 
heureux et  célèbre  Douglas  qu'on  doit  cette  belle  plante;  il  l'avait  fait 

BELG.    HORT.    T.    VI.  2 


—  10  — 

connaître  d'abord  à  son  ami  le  savant  Bentham  qui  l'a  décrite  pour  ltt 
première  fois.  Nous  rappellerons  ici  à  propos  du  rouge  de  sang  de  la 
corolle  de  cette  plante  que  David  Douglas,  ce  célèbre  collecteur  de  la 
société  d'horticulture  de  Londres,  risqua  souvent  ses  jours,  soit  qu'il 
eût  à  combattre  les  sauvages  ou  les  horreurs  de  la  faim,  au  milieu  des 
Montagnes  Rocheuses  ou  de  la  haute  Californie.  On  sait  que  dans  les 
Ues ■Sandwich  il  eut  le  malheur  de  tomber,  dans  une  herborisation,  au 
milieu  d'une  fosse  couverte  de  branches  préparée  pour  prendre  des 
taureaux  sauvages.  Ces  animaux  le  mirent  en  pièces.  Puisse  le  sou- 
venir de  ce  martyr  de  la  science  et  de  la  passion  des  fleurs  se  per- 
pétuer, entouré  de  respect  et  d'admiration,  chez  ceux  qui  s'arrêtent 
devant  cette  mimule  ensanglantée  dans  ses  corolles! 

La  mimule  rose  (Mimulus  roseus)  est  encore  originaire  de  la  Cali- 
fornie d'où  Douglas  l'envoya  en  1833.  Vivace  mais  plus  beau  si  on 
le  resème  tous  les  printemps,  ce  mimulus  a  une  tige  décombante  et 
visqueuse,  des  feuilles  oblongues  et  dentées,  des  fleurs  d'un  beau  rose 
et  vif  avec  des  macules  petites  sur  la  partie  inférieure  du  tube.  Ce 
joli  végétal  aime  aussi  comme  ses  congénères  l'ombre  avec  quelques 
rayons  du  soleil  interrompu,  une  terre  légère,  meuble,  à  base  de 
détritus  de  bruyères. 

Le  mimulus  luteus  ou  la  mimule  jaune  de  Linné  ne  doit  pas  être 
confondu  avec  le  mimulus  luteus  du  Botanical  magazine,  lequel  est 
une  variété  du  guttatus.  Le  vrai  mimulus  luteus  est  originaire  du 
Chili  ;  vivace,  pourvu  de  feuilles  éroso-dentées ,  ovales  ou  sublyrées 
et  celles  du  haut  sont  cordées  amplexicaules.  La  corolle  est  jaune 
avec  une  tache  sanguine  au  milieu.  C'est  cette  espèce  qui  a  produit 
des  variétés  nombreuses  comme  les  rivularis,  variegaiïis,  Smithii, 
Youngiani,  Wilsoni,  etc.,  et  de  plus,  la  variété  variegatus  {mimulus 
luteus-variegatus)  a  produit  des  hybrides  en  s'accouplant  avec  le  mi- 
mulus cardinalis.  Les  hybrides  ont  montré  des  fleurs  roses,  pourpres, 
orange  foncé  et  écarlate  :  deux  d'entre  eux,  le  mimulus  Moodiana  et 
Mac  Lainii  des  horticulteurs  (mimulus  cardinali-luteus  des  auteurs) 
se  sont  de  nouveau  croisés  avec  leur  père,  le  cardinal,  et  ont  enfanté 
ainsi  des  plantes  qui  se  sont  infiniment  rapprochées  du  type  paternel. 
Cependant  M.  Leeds  qui  s'est  appliqué  surtout  aux  expériences  de  ce 
genre  chez  les  mimules,  a  remarqué  que  le  pollen  du  Mac  Lainii 
appliqué  sur  le  stigmate  du  cardinalis  ne  donnait  que  des  fruits  sans 
graines,  comme  par  un  retour  à  la  loi  naturelle. 

La  mimule  tachetée  (mimidus  guttatus)  a  été  décrite  par  De  Candolle 
dans  son  Hortus  monspellusanus.  C'est  comme  nous  l'avons  dit,  le 
mimulus  luteus  de  Sims  ;  les  feuilles  sont  presqu'entières ,  les  infé- 


—  11  — 

rieures  pétiolées  ,  les  supérieures  cordées  amplexicaules  ,  le  calice  fruc- 
tifère renflé  avec  l'ouverture  contractée,  la  corolle  double  en  longueur, 
jaune,  ponctuée  de  rouge.  Elle  est  vivace  et  on  peut  en  la  recouvrant 
l'hiver  lui  faire  passer  la  mauvaise  saison.  Nous  l'avons  vu  parfaitement 
réussir  à  l'ombre  des  bosquets.  Elle  est  originaire  du  Pérou. 

Douglas  nous  a  rapporté  encore  de  la  Californie  la  mimule  flori- 
bonde  (Mimulus  floribundus  Dougl.)  dont  la  tige  est  rameuse,  poilue 
et  visqueuse,  les  feuilles  pétiolées,  ovales,  subdentées,  tronquées  à 
la  base  et  les  dents  du  calice  très-courtes.  La  fleur  est  jaune.  C'est 
une  plante  vivace,  peu  haute  et  remarquable  par  le  grand  nombre  de 
ses  fleurs  qui  se  succèdent  tout  l'été.  On  ne  la  connaît  que  depuis 
4856  ;  elle  se  multiplie  par  boutures  et  par  graines. 

La  Mimule,  parvi  flore  (Mimulus  parviflorus  Lindl.)  vient  du  Chili 
et  de  Mexico,  d'où  elle  a  été  apportée  en  1824.  M.  Lindley  l'a  décrite 
dans  le  Botanical  register,  tab.  874.  Elle  est  glabre,  ou  un  peu  pubé- 
rulente,  les  feuilles  ovales,  éroso-dentécs,  tronquées  et  cordées;  le 
calice  a  une  dent  supérieure  très-grande,  mais  la  corolle  est  malheu- 
reusement plus  petite  que  le  calice  qui  semble  avoir  pris  la  nourriture 
de  l'organe  corollin;  celui-ci  est  jaune. 

La  mimule  des  Andes  (Mimulus  ctndicolus  Kunth),  est  une  plante 
vivace  de  l'Amérique  australe,  à  feuilles  cordiformes  obtuses,  inéga- 
lement dentées,  et  dont  les  fleurs  sont  opposées,  axillaires,  le  calice 
pourvu  d'une  grande  dent  au-dessus  et  la  corolle  qui  est  d'un  rose 
pourpre  n'a  que  la  longueur  du  calice.  Elle  se  cultive  comme  les 
espèces  précédentes. 

On  signale  encore  comme  espèces  peu  répandues  dans  les  jardins  et 
qui  mériteraient  de  l'être  davantage  les  mimules  brevipes  (Benth.),  de 
Californie,  tenellus  (Bunge),  de  la  Chine,  lyratus  (Benth.),  de  la  Cali- 
fornie, glabratus  (Kunth),  du  Mexique,  pilosiusculus  (Kunth),  du  Pérou, 
alsinoïdes  {Dougl.),  de  l'Amérique  du  nord  et  de  la  Californie,  primu- 
loïdes  (Benth.) ,  de  l'Amérique  du  nord,  peduncularis  (Dougl.),  de  la 
Californie,  javanicus  (Blume),  de  Java,  Nepalensis  (Dougl.),  du  Népaul, 
orbicularis  [Wallich),  du  pays  des  Birmans,  repens  (B.  Brown),  de  la 
terre  de  Van  Diemen,  gracilis  (B.  Brown),  du  port  Jackson,  glandulosus 
(Lehm),  de  l'Amérique  boréale.  Plusieurs  de  ces  espèces  sont  annuelles. 

Ce  que  nous  venons  d'en  dire  porte  le  nombre  de  mimulus  à  trente, 
dont  neuf  appartiennent  à  la  Californie;  mais  néanmoins  cette  forme 
de  plantes  s'est  distribuée  à  la  fois  dans  l'Amérique  extratropicale 
occidentale,  boréale  et  australe,  dans  les  Andes  du  Pérou  de  l'Inde 
du  nord,  en  Chine,  à  Java,  dans  la  Nouvelle-Hollande,  régions  dis- 
séminées, mais  où  les  mêmes  circonstances  climatériques  se  retrouvent 


—  12  — 

de  manière  à  ce  que  l'altitude  occupée  par  les  mimulus  nous  donne 
toute  sécurité  pour  leur  culture  en  Europe. 

Nuttal  a  séparé  des  mimulus  les  diplacus  qui  n'en  sont  différents 
que  par  le  fruit  ;  chez  les  mimulus  les  valves  deviennent  alternes  aux 
placentas  par  la  séparation  de  ceux-ci,  tandis  que  chez  les  diplacus 
les  valves  enlèvent  à  la  déhiscence  les  placentas  même.  Les  diplacus 
sont  des  sous-arbrisseaux  de  la  Californie ,  dont  deux  espèces  se 
retrouvent  dans  nos  jardins,  le  puniceus  et  le  glutinosus,  celui-ci  ayant 
des  fleurs  jaunes,  celui-là  des  fleurs  pourpres;  ils  sont  d'orangerie, 
se  multiplient  par  les  boutures  et  les  semences  déposées  en  couche 
chaude.  Ces  plantes  ont  au  reste  toutes  formes  des  mimules,  mais 
ne  peuvent  pas  rivaliser  avec  elles  pour  la  facilité  de  leur  culture. 
Tout  amateur  intelligent  saura  pour  ses  jardins  ou  ses  appartements 
tirer  un  grand  parti  de  ces  scrophulariées  à  stigmate  mobile. 


NOTE  SUR  LA  CULTURE  DES  PELÀRGOMUMS, 
Pau  M.   Edouard  Morren. 


P  rlrail  du  PRLARGONIUH  de  M.  ONGHTON,  offerl  à  ta  Reine  d'Angleterre  par  la  Soeie'lé  royale  de  Botanique  de  I.n-nlrfs. 


—  13  — 

On  peul  cul li ver  avec  succès  les  pelargoniums  dans  la  plupart  des 
serres  tempérées,  mais  ils  ne  se  développent  nulle  part  mieux  que  dans 
une  serre  vitrée  de  tous  les  côtés,  exposée  au  levant  et  au  couchant  et 
bien  aérée.  Les  Anglais  ne  négligent  jamais  d'introduire  l'air  par  la 
partie  la  plus  chaude  de  la  serre  afin  de  pouvoir  ventiler  même  pendant 
les  temps  froids;  l'air  s'échauffant  dès  son  entrée,  on  n'a  pas  à  craindre 
des  courants  d'air  froid.  Un  air  sec  et  piquant  est  très-funeste  aux 
plantes,  il  dessèche  leurs  tissus,  jaunit  et  crispe  leur  feuillage.  Les 
pelargoniums,  pendant  la  période  de  végétation,  doivent  être  placés  le 
plus  près  possible  des  vitres,  être  entourés  d'une  atmosphère  chaude  et 
humide  mais  constamment  renouvelée  et  ventilée.  On  dispose  ordinai- 
rement les  plantes  sur  une  grande  tablette  horizontale  qui  occupe  le 
milieu  de  la  serre  et  est  entourée  par  le  chemin  et  latéralement  sur  des 
galeries  placées  immédiatement  contre  les  vitres;  les  plus  fortes  plantes 
au  milieu  du  premier  emplacement,  les  jeunes  sujets  sur  les  côtés.  Les 
serres  en  bois  sont,  sous  maint  rapport,  préférables  aux  constructions 
en  fer;  elles  coûtent  moins,  conservent  mieux  la  chaleur,  ne  se  recou- 
vrent pas  d'une  humidité  qui,  en  se  rassemblant,  finit  par  former  des 
gouttelettes  froides  qui  tombent  sur  les  feuilles  et  provoquent  la  moi- 
sissure, et  bien  entretenues,  peintes  à  lacéruse,  elles  se  conservent  indéfi- 
niment. Le  fer  ne  doit  être  conseillé  que  pour  certaines  serres  remarqua- 
bles par  leurs  dimensions  extraordinaires  ou  l'élégance  de  leurs  formes. 

Il  est  bon  au  premier  printemps,  dès  que  l'on  est  assuré  de  n'avoir 
plus  rien  à  craindre  des  gelées,  de  sortir  les  pelargoniums  jusqu'à  ce 
que  les  boutons  soient  formés.  Alors  il  convient  de  les  rentrer  dans  la 
serre,  près  des  vitres,  dans  une  atmosphère  humide  mais  souvent 
renouvelée.  Jusqu'au  moment  de  la  floraison  on  seringue  les  plantes 
tous  les  matins;  plus  tard  on  se  contente  d'arroser  les  pots,  car  l'eau 
tombant  sur  les  fleurs  ternirait  leur  éclat;  il  faut  aussi  éviter  les  rayons 
directs  du  soleil  et  ne  laisser  pénétrer  jusqu'aux  plantes  qu'une  lumière 
diffuse.  Les  petits  pelargoniums  de  fantaisie  fleurissent  abondamment 
en  plein  air  ou  en  pleine  terre  et  forment  de  petits  buissons  tout 
émaillés  des  couleurs  les  plus  éclatantes.  Il  faut  avoir  soin  de  disposer 
les  variétés  de  manière  à  obtenir  un  harmonieux  contraste  de  couleurs. 

Après  la  floraison  on  expose  les  plantes  à  l'air  libre  et  graduellement 
au  soleil  pour  solidifier  les  rameaux  et  provoquer  la  maturation  des 
fruits;  les  graines  recueillies  se  sèment  ordinairement  au  mois  de  mars 
suivant.  Au  commencement  de  l'automne, on  procède  à  la  taille  des  pelar- 
t/oniums,  après  les  avoir  laissé  sécher  pendant  quelques  jours  ;  on  élague 
toutes  les  petites  branches  inutiles  et  on  coupe  l'extrémité  des  rameaux 
de  l'année  de  manière  à  donner  à  la  plante  la  forme  désirée.  Cette  forme 


14  — 


variera  nécessairement  beau- 
coup; mais  nous  conseillons 
fort  de  tailler  en  pyramide  ou 
en  boule.  Les   deux  petites 
ligures    ci -contre   montrent 
l'une  un  squelette  de  pelar- 
gonium  taillé  en  pyramide, 
l'autre    la   même   plante  en 
végétation.  Cette  forme  élé- 
gante permet  de  cultiver  un 
grand    nombre   de    variétés 
dans  un  espace  restreint.  Elle  £S%M 
est  de  beaucoup   préférable  $Êf 
et  bien  supérieure  à  ces  in-  fil 
dividus  tous  dégarnis  du  pied  ^^ 
et  verdoyant  seulement  à  la 
partie  supérieure. 
La  multiplication  se  fait  très-facilement,  par  boutures  dans  un  terreau 
léger,  mélangé  de  sable  et  après  la  taille.  Avant  l'hiver  toutes   les 
boutures  sont  bien  enracinées. 

Dès  l'apparition  des  froids  on  doit  rentrer  les  pelargoniums  dans 
une  serre  médiocrement  chauffée,  de  manière  à  les  maintenir  dans  un 
état  complet  de  repos.  11  faut  par  conséquent  être  avare  d'eau.  Il  est 
facile  de  réaliser  ces  conditions  dans  une  serre  spécialement  réservée 
aux  pelargoniums,  mais  si  on  ne  dispose  que  d'une  seule  serre  tem- 
pérée, il  faut  avoir  soin  de  les  placer  dans  la  partie  la  plus  froide,  la 
plus  sèche  et  la  mieux  aérée.  On  ne  peut  chauffer  ni  arroser  que  vers 
la  fin  de  février  quand  commencera  la  période  de  végétation.  Il  convient 
alors  de  rempoter  dans  des  pots  appropriés  à  la  vigueur  des  plantes 
et  avec  une  terre  composée  d'un  mélange  de  un  quart  de  terre  franche, 
un  quart  de  terreau  de  couche,  un  quart  de  terre  de  bruyère  ou  de 
terreau  de  feuilles,  un  demi-quart,  de  poudretle  et  un  demi-quart  de 
sable.  Il  est  presque  superflu  d'ajouter  qu'il  est  indispensable  de 
drainer  parfaitement.  Quelques  jardiniers  conseillent  de  rempoter  les 
pelargoniums  au  moment  de  leur  rentrée  en  novembre  ,  d'autres 
s'élèvent  énergiquement  contre  cette  pratique.  On  change  de  pot  et  de 
terre,  en  janvier,  les  plantes  que  l'on  veut  voir  fleurir  en  juin,  et  en 
février  celles  qui  doivent  être  fleuries  en  juillet. 

La  fléuraison  successive  des  pelargoniums  dépend  beaucoup  du  trai- 
tement hivernal.  Par-dessus  tout,  il  faut  éviter  l'humidité  stagnante 
et  la  chaleur  sèche.  Si  les  pucerons  apparaissaient,  il  faudrait  immé- 


diatement recourir  aux  fumigation?  de  tabac 


E.  M. 


—  45  — 
ESTHÉTIQUE  ET  CULTURE  DES  CINÉRAIRES, 

OU  DES  QUALITÉS  QUE  CES  FLEURS  DOIVENT  RÉALISER 
D'APRÈS  M.  G.  G., 

Par    M.    Edouard    Mo  ri»  en. 


Les  cinéraires  étaient  jadis  de  pauvres  petites  fieurs,  éloilées,  à 
pétales  étroits  ;  on  aurait  ri  de  celui  qui  eût  osé  avancer  que  ces  fleurs, 
pour  être  parfaites,  devaient  être  rondes,  et  beaucoup  de  personnes 
soutenaient  qu'il  était  impossible  de  réaliser  cet  idéal.  Quelles  étaient 
cependant  les  exigences?  II  fallait  augmenter  le  nombre  des  pétales, 
les  élargir,  arrondir  leurs  extrémités  et  en  faire  disparaître  les  dents  : 
voilà  ce  qui  doit  constituer  une  fleur  parfaitement  ronde. 


—  16 


La  beauté  des  cinéraires  dépend  beaucoup  de  leur  couleur.  La  tex- 
ture des  pétales  est  naturellement  rude  et  ridée,  ce  qui  assombrit 
les  teintes  :  ainsi  le  bleu  et  le  rouge,  qui  seraient  veloutés  s'ils  étaient 
étendus  sur  une  surface  unie,  paraissent  ternes  sur  un  fond  rude 
comme  le  papier.  Il  faut  donc  s'efforcer  d'obtenir  des  cinéraires  dont 
les  pétales  soient  brillants  et  unis.  Quant  au  coloris,  que  les  pétales 
soient  à  fond  blanc  et  vivement  colorés  à  l'extrémité  ;  le  blanc  des 
cinéraires,  est,  précisément  à  cause  de  la  surface  rugueuse  des  pétales, 
du  blanc  de  lait  le  pins  pur.  Toute  la  beauté  de  la  coloration  d'une 
cinéraire  se  résume  dans  le  blanc  pur  du  fond  et  la  brillante  teinte  de 
l'extrémité  des  rayons  ;  cette  bordure  doit  être  très-régulière  et  former 
un  cercle  parfait. 

Souvent  le  disque  est  trop  grand  pour  la  fleur ,  il  n'est  ni  noir  ni 
jaune  et  offre  un  aspect  d'un  gris  sale.  Celte  imperfection  passe  souvent 
inaperçue  aux  yeux  des  amateurs. 

Une  fleur  parfaite  doit  avoir  le  disque  soit  noir,  soit  jaune  d'or, 
un  fond  blanc  et  une  aréole  vivement  colorée  ;  pins  grand  est  le 
contraste,  plus  belle  est  la  fleur,  mais  rien  n'est  plus  rare  qu'une 
cinéraire  parfaite.  Il  faut  en  outre  que  les  pétales  soient  veloutés  ou 
glacés,  que  la  fleur  soit  entièrement  plane  ;  jamais  elle  ne  peut  former 
la  coupe  et  il  est  même  préférable  qu'elle  soit  légèrement  bombée. 

Que  le  feuillage  soit  vi- 


goureux et  que  les  feuilles 
se  présentent  comme  des 
surfaces  unies  ;  que  l'inflo- 
rescence soit  plane  et  que 
les  fleurs  ne  se  superposent 
pas. 

Telles  sont  les  qualités 
qu'un  bon  expert  doit  exiger 
et  l'on  voit  qu'il  n'est  pas 
facile  de  bien  juger  des  ci- 
néraires, puisqu'il  ne  faut 
perdre  de  vue  aucun  des 
points  précités. 

11  est  une  autre  catégorie 
de  cinéraires  qui  n'est  pas 

sans  mérite;  ce  sont  celles  dont  les  bords  sont  vivement  colorés  et 
dont  la  teinte  vient  se  perdre  insensiblement  vers  la  naissance  des 
pétales.  Nous  ne  considérons  cependant  ces  variétés  que  comme  de 
second  ordre. 


—  17  — 

En  résumé  : 

La  fleur  doit  être  ronde  ;  les  pétales  sans  dentelures,  ni  découpures, 
à  bords  arrondis.  ' 

Plus  les  pétales  sont  larges,  obtus,  épais  et  d'une  texture  unie, 
mieux  ils  valent  ;  ils  ne  peuvent  laisser  entre  eux  aucun  intervalle. 

Le  disque  doit  avoir  un  tiers ,  sinon  un  quart  du  diamètre  total  de 
la  fleur. 

L'inflorescence  doit  être  large;  les  fleurs  l'une  à  côté  de  l'autre,  bords 
à  bords,  formant  une  surface  plane,  un  peu  bombée  vers  le  centre. 

Le  fond  de  ces  fleurs  doit  être  le  blanc  pur  ;  tous  les  cercles  doivent 
être  d'une  couleur  vive  et  bien  définie,  formant  autant  d'anneaux 
régulièrement  concentriques  ;  le  coloris  doit  toujours  être  brillant  : 
plus  le  contraste  est  vif,  mieux  il  vaut. 

Les  plus  belles  nouveautés  de  cinéraires  sont  les  suivantes  :  Mar- 
guerite d'Anjou,  marron-cramoisi,  à  disque  foncé;  Constellation,  cl 'un 
blanc  pur,  bordé  nettement  de  bleu;  Impératrice  Eugénie,  très-belle 
variété  blanche,  à  bords  cramoisis  et  disque  violet;  Fascination,  d'un 
bleu  foncé,  cercle  blanc  autour  du  disque;  Lord  Stamford,  blanc  pur, 
bordé  d'un  bleu  de  porcelaine,  variété  fort  distinguée  ;  Madame  Gérard 
Leigh,  blanc  pur,  à  bord  rose  violacé,  disque  bleu;  Madame  Rogers, 
blanc ,  bordé  d'un  rose  pourpré ,  disque  foncé ,  forme  excellente  ; 
Novelty,  rouge  violet,  à  disque  clair,  fleurs  grandes  et  belles; 
Picturata,  superbe  variété  à  fond  blanc,  large  bordure  rose  violacé, 
disque  couleur  de  lavande;  Prince  de  Prusse,  bleu  de  ciel  brillant, 
disque,  entouré  d'un  cercle  blanc;  Prince  Albert,  cramoisi-écarlate , 
fleur  de  beaucoup  d'effet;  Scottish  Cliieftain,  blanc,  large  bordure 
violette,  disque  violet. 

—  Malgré  la  juste  faveur  dont  ces  charmantes  fleurs  jouissent, 
elles  sont  rarement  traitées  comme  elles  doivent  l'être;  voici,  selon 
nous,  la  manière  la  plus  convenable  de  les  cultiver. 

On  propage  aisément  les  cinéraires  en  séparant  les  rejets  des  vieux 
pieds  et  en  les  plantant  dans  de  petits  pots  ;  mais  il  vaut  mieux  en  faire, 
vers  la  fin  du  mois  de  juin ,  des  boutures  qu'on  place  dans  une  couche 
froide.  Il  est  bon  également  de  recueillir  les  graines  des  meilleures 
variétés,  qu'on  sème  de  bonne  heure  au  printemps,  dans  des  pots  larges 
ou  dans  des  terrines.  On  met  ces  pots  en  lieu  où  ils  puissent  recevoir 
une  bonne  chaleur  de  fond.  Lorsque  les  graines  ont  levé  et  que  les 
jeunes  plantes  montrent  leurs  premières  feuilles,  on  les  repique  avec 
soin  dans  de  tout  petits  pois  et  on  continue  de  donner  une  chaleur 
modérée  jusqu'à  ce  que  le  temps  permette  de  les  transporter  dans  une 
couche.  Là,  on  laisse  les  plantes  tout  près  du  verre,  on  ombre  et  l'on 

BELG.    HORT.    T.    VI.  3 


—  48  — 

tient  fermé  pendant  quelques  jours,  après  lesquels  on  donne  un  peu 
d'air,  en  aérant  ensuite  de  plus  en  plus  jusqu'à  ce  que  les  jeunes  pieds 
aient  pris  une  certaine  force.  On  arrose  modérément ,  tout  juste  assez 
pour  entretenir  la  terre  fraîche.  Mais  on  doit  surtout  éviter  de  laisser 
sécher  la  terre,  car  le  manque  d'eau  est  la  seule  cause  à  laquelle  il  faut 
attribuer  le  développement  du  champignon  parasite  ou  de  la  moisissure 
qui  fait  le  plus  grand  mal  à  ces  plantes.  Pour  empêcher  l'invasion  de  ce 
champignon  destructeur,  il  faut  :  1°  laisser  à  l'air  une  libre  circulation 
pendant  le  jour,  en  ayant  soin  de  fermer  les  châssis  le  soir;  2°  faire  les 
arrosements  avec  beaucoup  d'exactitude  et  d'attention;  3°  enlever  toutes 
les  feuilles  mortes  qui  ont,  en  outre,  l'inconvénient  de  devenir  des 
nids  à  pucerons. 

Les  plantes  ayant  pris  de  la  force,  on  les  rempote  avec  un  composé 
formé,  par  portions  égales,  de  terre  tourbeuse,  de  terre  franche,  de 
terreau  de  feuilles,  de  fumier  de  vache  consommé  et  de  sable.  On 
emploie  des  pots  de  six  pouces,  avec  une  bonne  couche  de  tessons,  sur 
laquelle  on  met  une  assise  mince  de  morceaux  de  tourbe.  Après  le 
rempotage,  on  remet  les  plantes  dans  la  couche.  On  arrose  modérément, 
et  on  laisse  passer  un  bon  courant  d'air  dont  l'action  est  très-salutaire. 
Il  faut  surtout  veiller  à  ce  que  les  racines  ne  soient  pas  gênées  et  ne  se 
contournent  pas  au  contact  du  pot,  ce  qu'on  évite  en  rempotant  assez 
souvent,  et  en  donnant  aux  plantes  des  pots  plus  grands.  Après  les 
rempotages,  on  replace  les  plantes  dans  le  coffre.  Si  les  pucerons  s'y 
montrent,  on  les  détruit  au  moyen  de  fumigations  de  tabac. 

Après  avoir  reçu  les  soins  qui  viennent  d'être  indiqués,  les  cinéraires 
doivent  former  déjà  des  plantes  d'une  bonne  force;  si  cependant  elles 
n'avaient  pas  pris  un  développement  suffisant,  on  les  arroserait  avec  un 
engrais  liquide.  Le  meilleur  est  donné  par  le  fumier  de  vache,  qui  a, 
de  plus,  selon  nous,  le  mérite  d'aviver  la  couleur  des  fleurs.  A  la  fin 
d'octobre,  on  opère  encore  un  rempotage  en  employant  le  même 
compost  que  précédemment,  un  changement  de  terre  étant  à  cette  époque 
très-préjudiciable.  On  place  ensuite  les  plantes  dans  une  orangerie  tout 
contre  les  vitres,  ou  bien  dans  une  couche,  pourvu  qu'on  puisse  la 
chauffer  assez  pour  empêcher  la  gelée  de  s'y  faire  sentir.  Jusqu'à  l'é- 
poque de  leur  floraison,  on  doit  employer  tous  les  moyens  possibles 
pour  entretenir  la  végétation  constamment  vigoureuse;  on  les  attache 
soigneusement  pour  leur  donner  une  forme  compacte  et  serrée.  Vers  la 
fin  de  février,  elles  seront  en  fleurs,  et  la  beauté  de  leur  floraison 
dédommagera  des  soins  que  leur  culture  a  exigés.  Dès  que  les  fleurs 
commencent  à  se  flétrir  et  que  les  feuilles  jaunissent,  on  donne  moins 
d'eau,  et,  si  la  chose  est  possible,  on  place  en  plein  air,  ces  plantes 
exigeant  une  période  de  repos. 


—  19  — 

UN  MOT  SUR  LA  RUSTICITÉ  DE  PLUSIEURS  ARBRES  RÉSINEUX , 

DE  QUELQUES  VARIÉTÉS 

DE  CAMELL1AS  ET  AUTRES  PLANTES. 

Nous  croyons  être  utiles  à  grand  nombre  de  nos  abonnés,  qui  crain- 
draient délivrer  leurs  arbres  à  la  pleine  terre,  en  leur  signalant  ici 
quantité  d'arbres  exotiques  cultivés  à  Harcourt  (département  de  l'Eure) , 
et  qui  ont  résisté  à  l'hiver  dernier. 

Ce  sont  les  Cunninghamia  sinensis,  Araucaria  imbricata,  Abies 
Douglasii,  A.  Menziezii,  A.  Wcbbiana,  A.  Nordmanniana,  A.  Cepha- 
lonica,  Pinus  halepensis,  P.  Pinea,  P.  monspeliensis,  P.  excelsa,  Cednts 
Deodara,  Podocarpus  Makii,  Koraiana  spicala,  Cupressus  fmiebris, 
C.  macrocarpa,  C.  torulosa,  G.  eiegans,  Séquoia  sempervirens ,  Crypto- 
meria  Japonica,  Libocedrvs  chilensis.  Le  bel  arbre  qui  se  trouve  le 
dernier  de  notre  nomenclature  est  un  des  premiers  sujets  qui  aient  été 
livrés  à  la  pleine  terre  dans  les  cultures  françaises;  on  peut  donc  être 
assuré  aujourd'hui  qu'il  résiste  à  la  température  de  notre  climat. 

Les  Pinas  ponderosa,  P.  excelsa,  P.  monticola  et  P.  Lambert iana  s'y 
sont  aussi  développés  avec  beaucoup  de  vigueur;  mais  les  Cryptomeria 
Japonica  les  dépassent  de  beaucoup.  La  plus  grande  partie  des  jeunes 
individus  plantés  l'année  dernière  a  poussé  des  bourgeons  verticaux  de 
plus  d'un  mètre,  et,  quoique  les  tiges  fussent  encore  à  l'état  herbacé  au 
mois  de  novembre,  elles  n'ont  cependant  pas  été  atteintes  par  le  froid. 

Trois  camellias,  dont  deux  à  fleurs  panachées  et  un  à  fleur  rouge, 
avaient  été  mis  pour  expérience  en  pleine  terre  avec  cinq  azaleas,  dont 
deux  A.  liliiflora,  deux  .1.  viohtcea  et  un  A.  phœnicea.  Les  camellias 
abandonnés  à  la  pleine  terre  et  placés  au  nord  sans  aucune  couverture, 
n'ont  perdu  que  quelques  feuilles;  il  en  a  été  de  même  des  deux  azaleas 
à  fleurs  blanches;  mais  les  autres  variétés  ont  eu  l'extrémité  de  leurs 
rameaux  endommagés. 

Le  Calycanthus  occidentalis,  Lindl.  (macrophyllus)  et  le  Nandina  do- 
mestica  ont  également  résisté  à  la  gelée  et  n'ont  perdu  aucune  de  leurs 
branches. 

Joignons  à  cette  note  une  liste  d'anciennes  variétés  cultivées  en  terre 
de  bruyère,  à  l'air  libre,  dans  différentes  positions,  dans  les  jardins  de 
M.  Margal  fils,  pépiniériste,  à  Yitry-sur-Scine. 


Camellia  panaché. 

Ca 

mollia 

Grand- Frédéric. 

—        tricolor. 

— 

Camplerii. 

—        variegata. 

— 

Pulkeriana  slriata. 

—         imbricala. 

— 

imperialis. 

—        formosissima. 

—  20  — 

Nous  ne  doutons  pas  qu'un  grand  nombre  de  camellias ,  issus  d'un 
type  provenant  des  régions  froides  du  Japon  et  de  la  Chine,  ne  four- 
nissent des  variétés  de  diverses  couleurs ,  assez  rustiques  sous  le  climat 
de  Paris  pour  servir  à  l'ornementation  de  nos  massifs  de  terre  de  bruyère. 

Il  serait  donc  urgent  de  tenter  l'expérience  de  la  pleine  terre  sur  un 
sujet  de  chaque  variété,  pour  en  connaître  la  rusticité. 

Le  genre  rhododendron-azalée  est  sans  contredit  un  des  plus  flori- 
fères et  des  plus  riches  en  couleurs  variées  pour  l'ornementation  des 
serres.  Il  est  donc  dans  l'intérêt  de  la  floriculture  de  faire  connaître  le 
mérite  des  variétés  de  rhododendrons-azalées  qui  nous  ont  donné  des 
preuves  de  leur  rusticité  cet  hiver.  Nous  citerons  les  suivantes  : 

Rhododendron  ledifolium.  Azalea  liliiflora,  Hort.    Rhododendron  amœnum,  Lind!. 
—  Danielsianum.  Azalea  vittata ,  Hort. 

Ces  variétés,  plantées  au  Muséum  depuis  1852  dans  des  massifs 
de  terre  de  bruyère,  à  l'air  libre,  ont  bravé  les  froids  rigoureux  de 
l'hiver  1854-55,  et  donnent  chaque  année  une  floraison  des  plus  bril- 
lantes; il  serait  donc  à  désirer  qu'on  tentât  des  expériences  sur  les 
variétés  de  ce  genre,  comme  sur  le  genre  camellia. 

(Extr.  de  la  Revue  Hort.,  tom.  IV.) 


HISTOIRE  DES  PLANTES  UTILES. 
Usage  des  feuilles    du  caféier   en   infusion. 

Les  chimistes  ont  découvert  le  même  principe  dans  le  thé  et  le  café, 
et  ce  principe  a  été  reconnu  exister  dans  la  feuille  du  caféier.  Quelques 
colons  européens  ont  essayé  de  l'infusion  des  feuilles  de  ce  dernier 
arbuste,  mais  ils  ont  été  devancés  par  une  population  barbare  de  l'archi- 
pel malais.  Voici  un  fragment  d'une  lettre  adressée  à  sir  W.-J.  Hooker, 
par  M.  James  Motley,  en  date  de  Singapore,  mars  1854. 

«  En  remontant  la  rivière  Chenaku  (ile  de  Sumatra)  je  vis  de  tous 
côtés  des  caféiers  près  des  habitations.  Leurs  fruits  étaient  toujours 
abandonnés  et  pourrissaient  sur  le  terrain.  J'en  demandai  la  raison,  et 
j'appris  que  les  habitants  buvaient  une  infusion  des  feuilles  et  négli- 
geaient complètement  les  fruits.  On  comprend  combien  je  désirais 
goûter  ce  breuvage  et  le  voir  préparer.  J'eus  heureusement  l'occasion 
de  satisfaire  ce  désir.  On  cueillit  devant  moi  quelques  branches  cou- 
vertes de  feuilles,  on  les  coupa  de  la  longueur  d'un  pied  environ,  et 
elles  furent  serrées  entre  deux  bambous  liés  aux  deux  extrémités,  ce 
qui  formait  une  sorte  de  disque  épais  de  feuillage  de  18  à  °20  pouces  de 


Cerise    blanche    du   Aord, 


—  21  — 

diamètre.  Alors  on  présenta  ce  disque  devant  un  feu  clair,  en  se  servant 
des  extrémités  du  bambou  comme  de  manche,  jusqu'à  ce  que  les  feuilles 
eussent  une  teinte  d'un  vert  brun ,  et  fussent  complètement  crispées  et 
friables.  La  fin  de  cette  opération  exige  quelques  soins,  car  les  feuilles 
deviennent  inflammables  comme  de  la  poudre  à  canon,  pour  ainsi  dire, 
et  si  la  flamme  les  atteint  elles  sont  détruites  en  un  instant.  Une  fois 
sèches,  les  feuilles  sont  pulvérisées  avec  la  main.  Cette  poudre  reçoit 
de  l'eau  bouillante,  comme  le  thé,  seulement  on  en  emploie  beaucoup 
plus.  Elle  donne  un  liquide  brun  foncé,  qui  paraît  du  café,  dont  l'odeur 
est  celle  du  thé  vert ,  et  dont  la  saveur  ressemble  certainement  beau- 
coup à  un  mélange  des  deux.  C'est  un  breuvage  très-agréable,  qui 
rafraîchit  après  un  jour  de  fatigue  au  soleil.  Je  comprends  comment  ce 
peuple  en  est  passionné.  » 

Le  caféier  a  été  introduit  à  Batavia  en  4690,  par  Van  Hoorn,  gou- 
verneur des  Indes  hollandaises.  Il  a  pu  se  répandre  à  Sumatra  vers  le 
commencement  du  siècle  dernier.  Comme  d'ailleurs  on  n'avait  point 
remarqué  l'usage  de  boire  une  infusion  de  feuilles ,  il  faut  que  les  indi- 
gènes de  cet  archipel  l'aient  inventé  depuis  peu.  Ils  ne  sont  donc  pas 
aussi  grossiers  et  aussi  routiniers  qu'on  le  suppose.  La  pratique  dont 
ils  donnent  l'exemple  sera  bientôt  imitée  ailleurs,  et  ouvrira  peut-être 
une  carrière  nouvelle  à  l'agriculture  et  au  commerce  des  colonies.  Telle 
contrée,  défavorable  à  la  maturité  des  baies  du  café,  peut  se  trouver 
favorable  au  développement  des  feuilles.  D'ailleurs,  il  ne  parait  pas  que 
l'usage  de  celles-ci  exclue  la  production  des  baies ,  du  moins  dans  une 
certaine  mesure.  On  aura  donc  deux  produits  du  même  arbre. 

(Hooker's,  Journal  of  Botany,  février  1855.) 


JARDIN  FRUITIER. 

CERISE   BLANCHE   DU   NORD, 
Par  M.  Edouard  Morren. 

Cette  cerise  remarquable  est  cultivée  à  Liège  dans  les  jardins  de 
Mmc  Brahy-Ekenholm ,  et  c'est  là  une  bonne  recommandation  pour  nos 
lecteurs,  qui  ont  déjà  été  souvent  initiés  aux  beautés  des  cultures  et 
ont  pu  apprécier  quelques-uns  des  gains  de  cette  dame. 

L'arbre  est  vigoureux  et  résistant,  à  bois  dur,  recouvert  d'une  écorce 
lisse  et  gris  d'acier,  très-fructifère.  Les  fruits,  qui  mûrissent  tôt,  sont 
gros,  ont  la  peau  et  la  chair  d'un  beau  jaune  paille;  ils  sont  arrondis, 


un  peu  allongés,  portés  par  dos  pédoncules  longs.  La  chair  en  est  ferme, 
douce  et  juteuse,  très-parfumée,  à  arrière-goût  un  peu  tonique;  ils  ont 
une  douceur  et  un  arôme  dont  aucune  cerise  colorée  ne  saurait  appro- 
cher, et  servis  sur  les  tables  au  milieu  des  cerises  roses,  rouges  et 
pourpres,  ils  plaisent  aux  yeux  autant  qu'ils  charment  le  palais. 


NOTE    SUR   L'ÉTABLISSEMENT   D'UNE   FRAISIÈRE, 

LA  CULTURE  ET  LA  PROPAGATION  DES  FRAISIERS, 

D'après  les  préceptes  de  M.  Undekhill,  amateur  anglais. 

Le  meilleur  emplacement  qui  convient  à  une  fraisière  est  une  expo- 
sition en  plein  soleil,  sans  aucun  ombrage.  Au  commencement  de 
juillet  on  fume  bien  le  sol  et  s'il  est  léger  on  y  mêle  de  la  marne,  car 
la  plupart  des  espèces  aiment  une  terre  ferme  et  argileuse  :  si  ces 
conditions  ne  sont  pas  remplies,  les  fraises  donneront  force  feuilles, 
mais  peu  de  fruits.  Après  avoir  bêché  et  bien  foulé  la  terre,  il  faut 
faire  choix  des  plantes  que  l'on  veut  y  mettre.  Les  meilleurs  coulants 
sent  ceux  qui  ont  de  courtes  racines;  ceux-là  n'ayant  guère  encore 
touché  au  sol ,  s'enfoncent  plus  promptement  dans  la  terre  et  reprennent 
beaucoup  plus  facilement.  On  les  enfonce  à  une  profondeur  médiocre, 
en  tassant  soigneusement  la  terre  autour  des  racines,  mais  sans 
recouvrir  le  cœur  de  la  jeune  planté.  Il  est  bon  de  les  abriter  un  peu 
du  soleil  immédiatement  après  la  plantation  et  de  les  arroser  un  peu, 
si  le  ciel  ne  se  charge  pas  de  la  chose.  Quelques  jardiniers  préfèrent 
les  premiers  coulants,  c'est-à-dire  les  plus  proches  de  la  plante-mère; 
mais  à  mon  avis  les  seconds,  les  troisièmes  ou  les  quatrièmes  ou  même 
les  coulants  secondaires  donneront  d'aussi  bonnes  plantes  que  les  pre- 
miers. Il  est  beaucoup  plus  important  d'établir  la  fraisière  assez  tôt 
pour  que  les  plants  se  soient  parfaitement  enracinés  avant  l'hiver, 
afin  qu'ils  ne  soient  pas  soulevés  par  les  gelées. 

On  ne  peut  jamais  garder,  sous  aucun  prétexte,  les  mêmes  plantes 
pendant  plus  de  deux  ans,  car  après  deux  récoltes,  elles  auront  perdu 
toute  leur  force  et  leur  vigueur;  la  première  année  on  obtient  des 
fruits  gros  et  de  la  meilleure  qualité,  la  seconde  année  la  récolte  sera 
particulièrement  abondante;  mais  les  fruits  dégénèrent  par  la  quantité 
et  la  qualité.  Un  renouvellement  bisannuel  est  donc  une  opération 
indispensable.  Pour  fortifier  les  jeunes  plantes  il  faut  leur  ôter  les  filets 
qu'elles  font  en  automne,  vu  qu'ils  tendent  nécessairement  à  affaiblir 
la  plante-mère. 


—  23  — 

Quoique  ce  mode  de  plantation  me  paraisse  préférable,  sa  réussite 
dépend  un  peu  du  temps.  De  fortes  plantes,  transplantées  avec  soin 
en  murs,  porteront  souvent  des  fruits  en  grande  abondance  la  même 
année. 

Il  faut  soigneusement  sarcler  les  mauvaises  herbes  de  ces  fraisières. 
En  automne,  après  avoir  choisi  assez  de  fdets  pour  les  nouvelles  plan- 
tations, il  faut  enlever  tous  ceux  qui  sont  de  trop  et  la  paille  qui  a 
servi  à  soutenir  les  fruits,  en  ayant  soin  cependant  de  ne  pas  ôter  les 
feuilles  des  plantes-mères.  Au  printemps,  après  avoir  sarclé,  on  répand 
autour  des  fraisiers  du  fumier  bien  consommé,  dont  la  pluie  enlèvera 
les  parties  solubles  et  utiles  pour  les  porter  aux  racines,  ou  de  l'engrais 
liquide  pourvu  qu'il  ne  soit  pas  trop  fort.  Le  guano  convient  parfaite- 
ment, mais  il  faut  en  user  avec  ménagement.  11  vaut  mieux  attendre 
le  mois  d'avril  pour  enlever  les  vieilles  feuilles  des  plantes,  car  s'il 
survenait  quelque  nouvelle  gelée,  elles  serviraient  à  protéger  les  jeunes 
feuilles  naissantes  qui  pourraient,  sans  cette  protection,  être  tuées  par 
le  mauvais  temps. 

Jamais  on  ne  doit  remuer  la  fraisière  avec  la  bêche  ou  la  fourche, 
car  on  ne  saurait  le  faire  sans  nuire  aux  racines;  on  ouvrirait  ainsi  le 
sol ,  et  pendant  la  maturation  la  chaleur  du  soleil  dessécherait  ces 
racines  qui  aiment  tant  la  fraîcheur;  on  nuirait  ainsi  à  la  qualité 
des  fruits. 

Dès  que  le  fruit  commence  à  se  former  et  jusqu'à  ce  qu'il  commence 
à  se  colorer,  on  ne  saurait  lui  donner  trop  d'eau;  plus  on  lui  en  donne 
et  plus  il  augmentera  de  volume.  Mais  après  que  le  changement  de 
couleur  a  eu  lieu,  la  fraisière  ne  peut  pas  être  tenue  trop  sèche.  On 
donne  d'abord  beaucoup  d'eau  pour  empêcher  le  sol  de  se  fendre 
pendant  la  sécheresse.  Dès  que  le  fruit  est  parvenu  à  la  moitié  de  sa 
grosseur  on  doit  répandre  de  la  paille  entre  les  plantes,  sous  les  fraises  : 
on  empêche  ainsi  les  fruits  d'être  souillés  par  la  boue,  et  on  maintient 
le  sol  dans  un  état  d'humidité  convenable.  Dès  que  je  vois  de  beaux 
fruits  se  former,  j'ai  l'habitude  de  les  placer  sur  un  morceau  d'ardoise 
qui,  en  attirant  les  rayons  du  soleil,  fait  que  le  fruitj.se  colore  d'une 
manière  uniforme. 

On  remplace  quelquefois  la  paille  par  de  l'herbe  fraîche;  c'est  une 
pratique  à  condamner  fortement,  car  cette  herbe  se  corrompt  par  la 
pluie  ou  même  seulement  par  l'humidité  naturelle  de  la  terre,  et  elle 
communique  aux  fraises  un  mauvais  goût  qui  les  gâte  encore  plus  que 
la  poussière.—  On  pourrait  supposer  que  l'usage  de  la  paille  (straw)  est 
l'origine  du  nom  anglais  de  la  fraise  (strawberry). 

La  distance  la  plus  convenable  abaisser  entre  les  plantes  des  meil- 


—  24  — 

ieures  et  des  plus  grosses  variétés  est  de  deux  pieds  anglais  ou 
60  centimètres  environ. 

Pour  qu'on  puisse  avoir  deux  bonnes  récoltes  des  mêmes  plantes 
en  une  année,  il  faut  faire  choix  des  espèces  les  plus  fécondes.  Après 
la  récolte  du  printemps,  on  enlève  les  filets,  on  transplante  les  fraisiers 
dans  des  pots,  que  l'on  arrose  avec  de  l'engrais  liquide,  puis  on  enfonce 
ceux-ci  dans  la  terre,  les  laissant  en  plein  air  jusqu'à  l'automne.  Quand 
les  plantes  auront  fleuri  et  noué  pour  la  seconde  fois,  on  les  transportera 
dans  la  serre,  où  la  chaleur  artificielle  déterminera  la  maturation  des 
fruits. 

Il  y  a  des  variétés  qu'on  appelle  perpétuelles,  qui  donnent  du  fruit, 
spontanément,  deux  fois  l'an.  Mais  à  mon  avis  les  fraises  qui  mûrissent 
en  plein  air,  soit  de  bonne  heure  au  printemps,  soit  pendant  l'automne, 
ne  valent  presque  jamais  rien,  car  il  faut  le  soleil  d'été  pour  leur 
donner  une  saveur  exquise. 

On  ne  devrait  jamais  tuer  ni  les  grenouilles,  ni  les  crapauds,  qui  ne 
fréquentent  les  fraisières  qu'à  cause  de  l'ombre  qu'ils  y  trouvent  ;  ils  y 
rendent  de  bons  services  en  mangeant  les  escargots,  les  limaces  et 
d'autres  insectes,  qui  eux  s'attaquent  aux  fruits.  Qu'un  amateur  de 
fraises  regarde  bâiller  un  crapaud  ou  une  grenouille ,  et  il  pourra  se 
convaincre ,  à  la  forme  de  la  gueule  de  ces  reptiles,  que  la  nature  ne  les 
a  pas  faits  pour  vivre  de  fruit  :  ce  sont  des  auxiliaires  utiles  dans  tous 
les  jardins,  et  les  cultivateurs  ont  peu  d'amis  qui  leur  rendent  de  plus 
grands  services. 


PATHOLOGIE   VÉGÉTALE. 


MODE  D'EMPLOI  DU  SOUFRE  DANS  LE  TRAITEMENT  DE  LA  MALADIE 

DE  LA  VIGNE  , 

Par  M.  C.-J.  Thibault. 

Parmi  les  moyens  divers  proposés  pour  combattre  la  maladie  de  la 
vigne,  le  soufre  est  celui  qui  a  prévalu.  On  peut  môme  conclure  des 
expériences  nombreuses  qui  ont  été  faites  à  ce  sujet ,  et  de  la  persé- 
vérance avec  laquelle  les  agriculteurs  s'occupent  de  ce  moyen,  que 
c'est  bien  là  le  remède  au  mal.  La  difficulté  consiste  surtout  dans 
l'application  durable  du  soufre  sur  la  vigne. 

A  plusieurs  reprises  nous  avons  publié  des  systèmes  proposés  dans 
ce  but  :  aujourd'hui  nous  reproduisons  l'extrait  d'une  note  que 
M.  Thibault  vient  de  soumettre  à  l'Académie  des  sciences  de  Paris. 


—  25  — 

«  La  réapparition  de  la  maladie  de  la  vigne  étant  signalée  de  nou- 
veau dans  plusieurs  régions,  je  crois  devoir  entretenir  l'Académie 
d'un  mode  de  traitement  que  j'ai  expérimenté  avec  un  plein  succès, 
et  qui ,  mis  en  pratique  sur  une  plus  grande  échelle  que  je  n'ai  pu  le 
faire,  donnera  le  même  résultat  que  celui  que  j'ai  obtenu. 

»  Parmi  les  nombreux  moyens  proposés  et  expérimentés  jusqu'à  ce 
jour,  celui  qui  a  paru  être  employé  avec  le  plus  de  succès  est  le  soufre. 
On  en  a  obtenu  des  effets  très-satisfaisants  à  Thomery  ;  mais  son 
emploi  à  l'état  de  fleur  de  soufre  offre  plus  d'un  inconvénient,  dont  le 
moindre  est  d'exiger  une  grande  quantité  de  soufre  pour  en  répandre 
peu  sur  les  ceps.  Il  faut  aussi,  pour  que  l'opération  réussisse,  qu'il 
y  ait  du  calme  dans  l'atmosphère  ;  car  le  moindre  vent  suffit  pour 
entraîner  le  soufre  projeté  ;  il  faut  encore  opérer  le  matin,  à  la  rosée, 
pour  qu'il  puisse  se  fixer.  L'ensemble  de  ces  divers  inconvénients  a 
sans  doute  été  cause  qu'il  ne  s'est  pas  généralisé.  Prenant  pour  point 
de  départ  les  expériences  faites  à  Thomery,  et  regardant  le  soufre 
comme  un  agent  dont  l'efficacité  a  été  constatée,  j'ai  recherché  un 
moyen  qui  permît  de  l'employer  avec  assez  de  facilité  pour  que  le 
procédé  pût  être  adopté  ;  j'y  suis  parvenu  au  moyen  de  la  prépa- 
ration suivante  : 

Polysulfure  de  potasse  du  commerce.     .     .      1  kilogramme. 

Acide  chlorhydrique -   .     .     .  250  grammes. 

Eau 100  litres. 

»On  fait  dissoudre  le  sulfure  dans  la  moitié  de  la  quantité  d'eau, 
on  ajoute  l'acide  dans  l'autre  partie,  et  on  mélange.  On  obtient  ainsi 
un  liquide  qui  tient  du  soufre  en  suspension,  du  sulfure  de  potassium 
et  de  l'hydrogène  sulfuré  en  dissolution. 

«Cette  préparation  peut  être  employée  quel  que  soit  l'état  de  l'at- 
mosphère, pourvu  qu'il  ne  pleuve  pas.  La  seule  précaution  à  prendre, 
c'est  de  n'opérer  les  mélanges  qu'au  fur  et  à  mesure  des  besoins,  de 
manière  à  employer  la  liqueur  aussitôt  qu'elle  est  préparée,  tandis 
qu'elle  est  laiteuse,  et  ne  pas  attendre  que  le  soufre  se  soit  précipité. 
On  peut  se  servir  d'un  irrigateur  ordinaire  pour  projeter  le  liquide 
sur  les  ceps  ;  un  seul  arrosage  peut  suffire  :  il  m'a  réussi  ;  du  reste , 
on  pourrait  revenir  à  un  second  traitement  quelques  jours  après  le 
premier,  si  l'on  s'apercevait  qu'il  y  eût  encore  trace  de  maladie.  Outre 
son  action  immédiate,  cette  solution  a  encore  cet  avantage,  que  le 
soufre  fixé  sur  les  ceps  laisse  dégager  pendant  quelques  jours  de 
l'hydrogène  sulfuré  avec  lequel  il  s'était,  pour  ainsi  dire,  combiné  au 
moment  de  la  précipitation;  en  outre,  du  nouveau  soufre  est  mis  à 

BEI.G.    HORT.    T.    VI.  4 


—  26  — 

nu  par  suite  de  la  décomposition  du  sulfure  de  potassium  au  contact 
de  l'air  ;  la  vigne  reste  donc  dans  un  milieu  sulfureux  assez  de  temps 
pour  que  l'action  du  soufre  devienne  certaine. 

»Mes  expériences  ont  été  faites  sur  une  treille  d'une  certaine  étendue 
(pouvant  fournir  une  pièce  de  vin  en  temps  ordinaire)  et  complè- 
tement infectée  par  l'oïdium;  elles  ont  été  faites  au  mois  d'août  der- 
nier, époque  où  la  maladie  était  dans  toute  son  intensité.  Pas  une 
grappe  n'était  saine;  un  réseau  pulvérulent,  signe  caractéristique  de 
la  maladie,  emprisonnait  presque  tous  les  grains.  Je  ne  traitai  qu'une 
partie  des  ceps,  l'autre  étant  réservée  pour  servir  de  terme  de  com- 
paraison ;  de  plus,  je  fis  choix  d'un  cep  bifurqué  ;  l'une  des  bifurca- 
tions fut  seule  soumise  au  traitement,  et  l'autre  réservée.  Le  résultat 
à  obtenir  devait  être  concluant,  et  il  l'a  été.  En  effet,  une  semaine 
après,  dans  toute  la  partie  des  ceps  qui  avait  été  arrosée  avec  le  lait 
sulfureux,  le  réseau  pulvérulent  qui  enveloppait  les  grains  avait  dis- 
paru ;  ceux-ci  ont  pris  de  la  transparence ,  se  sont  développés  avec 
rapidité ,  et  la  maturité  est  arrivée  assez  à  temps  pour  qu'ils  ne  fussent 
pas  infectés  de  nouveau  par  l'oïdium  couvrant  les  ceps  non  arrosés. 
Aucune  trace  de  maturité  ne  s'est  fait  remarquer  sur  les  ceps  non 
soumis  au  traitement,  les  grains  se  sont  desséchés.  Un  résultat  iden- 
tique a  eu  lieu  pour  l'expérience  faite  sur  le  ceps  bifurqué.» 

(Génie  industriel.) 

DU  GREFFAGE  DES  PRUNIERS  ET  DES  CERISIERS, 
Par  J.-J.  Bochnal,  père. 

Que  la  pratique  enseigne  bien  plus  que  toutes  les  instructions  théo- 
rétiques  ,  consignées  dans  des  livres  plus  ou  moins  classiques  :  c'est  un 
axiome  qui  doit  surtout  s'appliquer  à  l'arboriculture.  Que  l'on  prenne, 
en  effet,  en  main  quelque  traité  de  pomologie,  pour  y  voir  dans  quel 
temps,  à  quelle  époque  de  l'année,  il  faut  greffer  les  pruniers  et  les 
cerisiers,  et  principalement  ceux  dont  la  végétation  ne  laisse  rien  à 
désirer,  et  l'on  n'y  trouvera  rien  de  précis ,  rien  d'entièrement  satis- 
faisant, et  tout  au  plus  une  indication  d'autant  plus  incomplète,  qu'elle 
ne  peut  nullement  mener  au  but.  Les  pomologues  les  plus  expéri- 
mentés ne  peuvent  donner,  touchant  cette  partie  si  intéressante  de  la 
culture  des  arbres  fruitiers,  aucune  certitude. 

J'entends  chaque  année  des  horticulteurs  élever  des  plaintes  amères 
sur  la  non  réussite  de  leurs  greffes,  et  une  pratique,  qui  date  de 
longtemps,   m'a   fait  trouver  dans  les  vergers  d'arbres  à  noyaux, 


—  27  — 

beaucoup  de  sujets,  qui,  pourvus  de  rameaux  secs,  périssaient  au 
faite  ou  sommet,  tandis  qu'au  contraire  les  greffes  de  fruits  à  pépins, 
faites  sur  des  sujets  couverts  au-dessous  d'une  écorce  rugueuse,  avaient 
parfaitement  réussi.  Maintenant ,  la  connaissance  de  ce  fait  nous 
conduit  cà  celle  de  ces  diversités. 

Le  greffage  des  pruniers  et  des  cerisiers  doit  se  faire  aussitôt  que 
possible,  attendu  que  la  monte  de  la  sève  est  la  cause  que  les  rameaux 
dessèchent.  C'est  pourquoi  le  greffage  réussit  ordinairement  sur  des 
sujets  récemment  plantés,  parce  que  la  sève  n'a  encore  pu  se  déve- 
lopper. Après  le  mois  de  mars  il  est  presqu'inutile  de  greffer,  puisqu'on 
peut  se  tenir  pour  assuré  que  les  greffes  ne  prendront  point,  à  moins 
cependant  que  l'hiver  n'ait  été  extrêmement  rigoureux,  ou  que  les 
sujets  sur  lesquels  on  opère  soient  d'une  plantation  récente,  en  quel 
cas  la  circulation  de  la  sève  s'y  trouve  arrêtée  ou  arriérée. 

Comme  le  mouvement  de  la  sève  est  ordinairement  moins  intense 
quand  la  lune  commence  à  décroître  que  dans  sa  croissance,  il  est  bon 
de  choisir  la  phase  qui  suit  la  pleine  lune  pour  opérer  le  greffage. 

C'est  aussi  une  condition  de  réussite,  que  l'on  ne  greffe  pas  avec  des 
rameaux  tout  fraîchement  coupés;  ceux  qui  ont  quelques  jours  de  date 
et  qu'on  a,  pour  ainsi  dire  laissé  avoir  faim,  prendront  ordinairement 
plus  vite  et  mieux  que  ceux  qu'on  a  fait  immédiatement  passer  de  l'arbre 
duquel  on  les  a  coupés  dans  la  fente  du  sujet  où  on  les  greffe. 

La  greffe  du  prunier  doit  nécessairement  et  essentiellement  toucher 
l'écorce  extérieure  du  sujet  que  l'on  greffe,  tandis  que  celle  du  cerisier 
peut  indifféremment  se  poser  au  milieu  ou  aux  bords  de  la  fente  et 
rester  isolée  ou  bien  mise  en  contact  avec  l'écorce  extérieure. 

Il  faut  observer  de  laisser  au  sujet  que  l'on  greffe  une  pousse 
au-dessous  de  la  fente,  que  l'on  a  soin  d'enlever  plus  tard,  quand 
la  greffe  s'est  développée,  ce  qui  peut  se  faire  après  la  Saint-Jean. 
Ordinairement  dans  l'automne  on  débarrasse  le  sujet  greffé  de  tous  ses 
sauvageons. 

On  doit  aussi  opérer  de  manière  à  ce  que  l'œilleton  inférieur  de  la 
greffe  soit  placé  du  côté  interne,  et  ne  touche  aucunement  à  l'enduit, 
qui  doit  se  composer  de  deux  parties  de  poix,  sur  une  partie  de 
cire  jaune. 

Une  dernière  recommandation  est  de  ne  point  greffer  par  un  vent 
trop  violent,  afin  d'empêcher  les  greffes  de  gercer.  En  agissant  d'après 
ces  enseignements,  les  horticulteurs  verront  leurs  efforts  couronnés 
d'un  heureux  succès,  et  leurs  greffes  de  pruniers  et  cerisiers  réussir  à 
merveille. 

(Traduit  du  journal  allemand  Pomona). 


—  28  — 

CULTURE  MARAÎCHÈRE  DU  CARDON, 
Par  M.  P.  Joigneacx. 

Le  cardon  est  un  artichaut,  mais  un  artichaut  d'une  autre  espèee 
que  celui  de  notre  connaissance  à  tous.  L'un  n'est  bon  que  pour  ses 
tètes,  l'autre  n'est  recherché  que  pour  ses  côtes.  Qui  aime  les  artichauts 
cuits  aimera  vraisemblablement  les  côtes  des  cardons. 

Les  cardons  ne  sont  pas  communs  dans  nos  jardins,  sans  doute  parce 
que  le  nombre  des  consommateurs  en  est  restreint.  Nous  ne  saurions 
nous  expliquer  la  chose  autrement,  car  c'est  une  plante  de  facile  culture 
et  qui  réussit  partout  dans  les  terres  profondes ,  bien  ameublies  et  bien 
fumées  de  vieille  date.  Sous  les  climats  rapprochés  du  nord,  dans  les 
pays  froids,  les  cardons  ont  même  un  avantage  sur  les  artichauts  ordi- 
naires :  c'est  de  n'être  pas  exposés  aux  ravages  des  rudes  hivers ,  puis- 
qu'on les  sème  au  printemps  pour  les  arracher  en  automne. 

On  connaît  plusieurs  variétés  de  cardon ,  parmi  lesquelles  nous  cite- 
rons le  cardon  commun  ou  d'Espagne,  le  cardon  de  Tours  à  feuilles 
épineuses,  le  cardon  à  côtes  rouges  et  le  cardon  inerme  ou  à  côtes  pleines. 
On  fait  très-grand  cas  du  cardon  de  Tours  sous  le  rapport  de  la  qualité; 
mais  comme  ses  piquants  sont  redoutables  et  en  rendent  le  maniement 
difficile,  nous  engageons  nos  lecteurs  à  lui  préférer  le  cardon  inerme 
ou  à 'côtes  pleines,  qui  est  également  de  qualité  supérieure  et  dont  la 
culture  ne  présente  aucun  inconvénient. 

Procurez-vous,  dès  à  présent,  si  vous  le  jugez  convenable,  de  la 
graine  de  cette  dernière  variété;  puis  vers  la  fin  d'avril  ou  plutôt  dans 
la  première  quinzaine  de  mai,  quand  l'atmosphère  et  le  sol  seront  déjà 
tièdes,  vous  préparerez  un  carré  pour  recevoir  cette  graine.  Choisissez 
pour  cela  la  partie  de  terrain  la  plus  riche ,  couvrez-la  même  de  fumier 
noir  complètement  pourri,  afin  de  l'enrichir  davantage,  et  bêchez  à 
toute  profondeur  de  fer,  en  ayant  soin  de  bien  diviser  les  mottes  à 
chaque  coup  de  bêche.  Vous  nivellerez  ensuite  avec  le  râteau  et  laisserez 
le  sol  se  rasseoir  pendant  trois  ou  quatre  jours  seulement.  Au  bout  de 
ce  temps ,  vous  prendrez  un  cordeau  et  une  baguette  d'un  mètre  de  long 
au  moins,  qui  vous  servira  de  mesure  pour  rayonner  le  carré  dans  les 
deux  sens,  en  long  et  en  large.  Aux  points  où  les  rayons  se  croiseront, 
vous  ouvrirez  des  trous  de  30  centimètres  de  profondeur  sur  33  à  40 
de  diamètre;  vous  remplirez  ces  trous  avec  un  mélange  de  fumier  de 
vache  très-pourri,  de  fumier  de  cheval  également  très-pourri  et  de 
cendres  de  bois  que  vous  tasserez  légèrement  avec  la  main;  puis  vous 


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placerez  4  ou  5  graines  sur  cet  engrais  de  chaque  trou,  en  écartant  les 
graines  de  façon  qu'elles  soient  distancées  entre  elles  de  7  ou  8  centi- 
mètres environ.  Vous  pèserez  dessus  avec  le  dos  de  la  main  et  les  re- 
couvrirez de  5  centimètres  de  terre. 

En  temps  de  sécheresse,  vous  arroserez  deux  fois  par  jour,  matin  et 
soir,  avec  l'arrosoir  à  pomme,  pour  favoriser  la  levée  qui  se  fera  au 
bout  de  20  à  25  jours,  quelquefois  même  un  peu  plus  tôt.  Dès  que  les 
plants  auront  quatre  feuilles,  vous  éclaircirez,  vous  enlèverez  les  faibles 
et  laisserez  le  plus  robuste  de  la  touffe  en  place.  Vous  arroserez  après 
la  levée  comme  avant  et  continuerez  les  arrosages  avec  le  goulot  de  l'ar- 
rosoir, jusqu'au  moment  de  butter,  c'est-à-dire,  jusqu'à  ce  que  les 
feuilles  aient  de  30  à  40  centimètres  de  longueur,  et  seulement,  bien 
entendu,  dans  les  temps  de  sécheresse. 

Sous  le  climat  de  Paris,  les  feuilles  des  cardons  sont  ordinairement 
bonnes  à  blanchir  vers  la  fin  d'août;  mais  sous  le  climat  de  la  Belgique, 
cette  opération  n'a  lieu  qu'en  septembre,  parfois  même  au  commence- 
ment d'octobre,  selon  que  l'époque  des  semis  a  été  avancée  ou  retardée. 
Vous  vous  y  prendrez  de  la  manière  suivante  : 

Par  un  temps  chaud  et  après  l'évaporation  de  la  rosée,  vous  rassem- 
blerez les  feuilles  de  chaque  pied  de  cardon ,  comme  vous  faites  pour 
lier  les  endives  ou  coiffer  la  romaine ,  et  vous  lierez  ces  feuilles  par  la 
tête  d'abord  avec  un  lien  de  paille  ou  de  jonc,  mais  délicatement,  sans 
les  froisser,  sans  les  serrer  fortement.  Cela  fait,  vous  les  lierez  encore 
de  la  même  façon  par  le  milieu,  et  toujours  en  commençant  par  les 
plants  les  plus  développés  ;  après  quoi  vous  leur  mettrez  un  chapeau  de 
paille  serré  du  haut,  écarté  du  bas  en  forme  de  ruche,  et  vous  assujet- 
tirez solidement  ce  chapeau  en  relevant  de  la  terre  à  sa  base,  comme 
pour  butter.  Plus  cette  enveloppe  de  paille  sera  épaisse,  plus  vite  les 
cardons  blanchiront.  C'est  bon  à  savoir  et  à  retenir,  car  il  y  a  de  l'in- 
convénient à  blanchir  tous  les  pieds  en  même  temps.  Cette  opération 
veut  être  échelonnée,  et  voici  pourquoi  :  Les  cardons  blanchis  pour- 
rissent vite,  et  demandent  à  être  consommés  sans  retard.  En  liant  de 
huit  jours  en  huit  jours,  en  donnant  aux  uns  une  enveloppe  de  paille 
épaisse,  aux  autres  une  enveloppe  mince,  on  avance  et  l'on  retarde  à 
volonté  le  succès  de  l'opération;  ce  qui  est  plus  avantageux  pour  la 
consommation. 

Il  ne  faut  pas  moins  de  vingt  jours  pour  blanchir  convenablement 
les  cardons. 

Quelquefois  on  les  fait  blanchir  en  cave.  A  cet  effet,  on  sème  les  graines 
en  juin,  et  l'on  enlève  les  plants  avec  la  motte  à  l'approche  des  gelées, 
et  on  les  transporte  dans  la  partie  la  plus  obscure  de  la  cave ,  après  les 


—  30  — 

avoir  liées  tout  simplement.  Les  côtes  blanchissent  lentement  ainsi,  et 
l'on  se  trouve  approvisionné  pour  une  partie  de  l'hiver. 

Les  cardons  ne  se  mettent  en  fleur  et,  par  conséquent,  en  graines 
que  la  seconde  année.  On  laissera  donc  en  place,  sans  les  lier  ni  les 
empailler,  les  pieds  destinés  à  servir  de  porte-graines.  On  les  buttera, 
ou  bien  on  les  entourera  de  litière  comme  les  artichauts  ordinaires, 
pour  leur  faire  passer  l'hiver.  L'été  suivant,  dès  que  la  fleur  sera  bien 
ouverte,  on  tordra  la  tige  par  le  haut,  de  manière  à  renverser  la  fleur 
en  bas  ,  et  l'on  attendra  que  la  maturation  se  fasse  complètement. 

La  plupart  des  auteurs  qui  ont  écrit  des  livres  ou  des  articles  sur  la 
culture  maraîchère,  ont  eu,  selon  nous,  le  tort  grave  de  s'en  tenir  aux 
détails  sur  les  semis,  repiquages,  plantations  et  soins  d'entretien;  ils 
n'ont  pas  jugé  à  propos  de  signaler  les  usages  des  végétaux  qu'ils  nous 
recommandent.  Il  s'ensuit  que  nous  ne  tenons  pas  toujours  compte  de 
leurs  conseils,  et  cela  se  comprend.  Les  légumes  n'ont  d'importance 
pour  nous  qu'autant  que  leurs  usages  nous  sont  connus;  il  ne  s'agit 
pas  seulement  de  savoir  les  produire,  il  s'agit  surtout  de  savoir  les 
manger.  A  ce  propos,  nous  devons  des  éloges  a  M.  Gérardi,  président 
du  comice  agricole  de  Virton,  qui  a  eu  soin  dans  son  livre  sur  la  Culture 
des  plantes  potagères,  d'indiquer  minutieusement  les  moyens  de  tirer 
parti  des  plantes  en  question.  Nous  nous  permettrons  de  lui  emprunter 
les  quatre  modes  d'assaisonnement  qu'il  recommande  : 

«  1°  On  épluche  les  côtes  ou  cardes,  on  les  coupe  par  morceaux,  on 
les  fait  cuire  à  l'eau  bouillante  avec  sel;  on  fait  égoutler  et  on  verse 
dessus  ou  du  beurre  fondu ,  ou  une  sauce  blanche  ; 

»  2°  Après  avoir  fait  cuire  comme  dessus ,  on  met  dans  un  pot  ou 
dans  une  casserole,  de  la  graisse  ou  du  beurre,  avec  une  cuillerée  de 
farine  que  l'on  fait  roussir;  on  ajoute  bouillon,  persil,  sel,  poivre, 
ainsi  que  les  cardons  que  l'on  aura  fait  égoutter.  On  laissera  cuire  un 
quart  d'heure  ou  jusqu'à  ce  que  la  sauce  soit  suffisamment  réduite; 

»3°  On  frotte  un  plat  avec  du  beurre,  on  y  étend  les  cardons  que 
l'on  aura  fait  cuire  comme  dessus;  on  saupoudre  de  mie  de  pain,  on 
arrose  de  beurre  fondu,  on  met  les  assaisonnements  ordinaires,  on 
pose  le  plat  sur  des  cendres  brûlantes,  et  on  fait  prendre  couleur  avec 
un  couvercle  de  tourtière  chargé  de  braise  ; 

»4°  On  met  dans  une  casserole  du  beurre  manié  de  farine,  on  ajoute 
les  cardons  cuits  et  égouttés,  on  assaisonne,  on  lie  la  sauce  avec  un  ou 
deux  jaunes  d'ceufs;  lorsque  le  plat  est  retiré  du  feu,  on  ajoute  un  filet 
do  vinaigre.  » 


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LE  CRAMBÉ  MARITÏMA  OU  CHOU  MARIN, 

Par  M.   P.  Joigneaux. 

Voici  un  légume  excellent ,  très-recherché  en  Angleterre ,  à  peine 
connu  en  Belgique  et  en  France.  On  ne  le  rencontre  guère  que  dans 
les  jardins  de  grands  seigneurs  ou  dans  quelques-uns  de  ceux  qui 
avoisinent  les  grandes  villes.  Il  n'est  cependant  pas  d'une  culture  diffi- 
cile, il  est  robuste  et  passe  très-bien  les  hivers  sous  une  couverture 
de  litière.  Nous  en  avons  vu  de  beaux  échantillons  au  château  de 
Mirwart,  en  pleine  exposition  du  nord;  et,  réussissant  là,  il  n'y  a  pas 
de  raison  pour  qu'il  ne  réussisse  point  de  même  dans  toute  l'Ardenne. 
Pourquoi  donc  ne  cultive-t-on  pas  le  crambé  ?  Je  vais  vous  le  dire.  Nous 
n'avons  pas  la  patience  d'attendre;  en  jardinage,  comme  en  d'autres 
opérations,  nous  voulons  des  résultats  rapides,  pour  ainsi  dire  immé- 
diats; nous  sommes  pressés  de  jouir.  Or,  avec  le  crambé,  c'est  tout 
aussi  impossible  qu'avec  les  asperges.  La  première  année  ne  compte 
pas,  la  seconde  non  plus;  ce  n'est  qu'à  la  troisième  année  qu'on  com- 
mence les  récoltes,  trois  ou  quatre  dans  la  saison,  et  pendant  sept  ou 
huit  ans  de  suite,  souvent  plus.  Deux  années  d'attente  dans  la  vie  d'un 
homme,  qu'est-ce  que  cela!  Soyons  donc  moins  impatients;  ce  n'est  pas 
comme  s'il  s'agissait  de  semer  un  bois  de  chênes. 

Le  crambé  pousse  naturellement  dans  les  sables ,  sur  certains  points 
de  nos  côtes  maritimes;  ses  feuilles  radicales,  celles  du  bas,  sont  assez 
larges  et  ont  quelque  ressemblance  avec  les  feuilles  ondulées  du  chou 
brocolis.  Le  crambé,  en  outre,  appartient,  comme  le  chou,  à  la  grande 
famille  des  crucifères.  A  ces  divers  titres  ,  il  a  reçu  le  nom  vulgaire  de 
chou  marin. 

Culture.  Choisissez  une  terre  profonde,  légère,  sablonneuse,  autant 
que  possible;  mettez  en  automne  ou  en  hiver  une  forte  fumure  d'engrais 
d'étable  bien  pourri  ou  tout  simplement  de  bouse  de  vache.  Aussitôt 
les  beaux  jours  revenus,  en  avril,  bêchez  à  toute  profondeur  de  fer, 
nivelez  au  râteau,  puis,  tracez  au  cordeau,  à  60  centimètres  environ 
l'une  de  l'autre ,  des  lignes  légèrement  marquées ,  seulement  pour  vous 
guider.  Sur  chacune  de  ces  lignes ,  ouvrez  avec  la  main  de  petits  trous 
distancés  de  12  à  15  centimètres  environ,  mettez  dans  chacun  d'eux  un 
peu  de  terreau  bien  divisé,  placez  sur  ce  terreau  5  ou  6  graines  de 
crambé  et  recouvrez.  Dès  que  la  pousse  se  montrera,  vous  prendrez 
l'arrosoir  à  pomme,  vous  y  verserez  de  l'urine  de  vache  ou  du  purin  de 
fumier  que  vous  aurez  soin  d'abord  d'allonger  avec  de  l'eau  ordinaire, 
et  vous  mouillerez  le  semis  légèrement,  une  fois  par  jour,  en  temps  de 


—  32  — 

sécheresse  bien  entendu,  et  le  matin  seulement.  Au  bout  d'un  mois, 
vous  éclaircirez;  vous  enlèverez  à  la  main  les  plantes  faibles  et  épar- 
gnerez les  plus  robustes,  de  manière  à  laisser  entre  elles  un  espace  de 
60  centimètres  en  tous  sens.  Au  fur  et  à  mesure  que  les  mauvaises 
herbes  envahiront  la  planche,  vous  les  ferez  disparaître,  et  une  fois 
tous  les  quinze  jours  vous  binerez  délicatement  chaque  pied  de  crambé 
et  l'entourerez  avec  deux  ou  trois  poignées  de  terreau  ou  de  fumier  de 
.vache  très-décomposé.  C'est  une  plante  qui  aime  l'engrais  souvent 
renouvelé.  En  procédant  de  la  sorte,  vous  obtiendrez  une  vigoureuse 
végétation  de  première  année,  une  belle  et  forte  racine.  A  l'approche  de 
l'hiver,  vous  chargerez  les  planches  de  crambé  avec  du  fumier  long,  de 
la  paille  ou  des  feuilles  mortes.  Aussitôt  que  les  grands  froids  ne  seront 
plus  à  craindre,  vous  découvrirez  pour  donner  de  l'air.  Au  printemps 
de  cette  seconde  année,  vous  sarclerez  et  binerez  comme  précédemment, 
et  après  chaque  binage  vous  éparpillerez  un  peu  de  terreau  dans  le 
voisinage  des  pieds. 

Au  commencement  de  la  troisième  année,  dès  que  les  feuilles  se 
montreront,  vous  les  recouvrirez  avec  de  petites  ruches  en  paille  ou 
avec  des  pots ,  de  façon  que  la  lumière  du  jour  ne  puisse  frapper  les 
plantes.  Les  jeunes  pousses  de  feuilles  et  de  tiges  s'étioleront,  jauniront, 
blanchiront  en  se  développant  ainsi  à  l'ombre.  Lorsqu'elles  auront 
de  20  à  30  centimètres ,  vous  les  couperez  près  du  collet  et  les  mangerez 
cuites,  en  manière  de  petits  pois,  comme  les  asperges.  Les  personnes 
qui  aiment  les  choux-fleurs  aimeront  les  crambés,  car  ils  en  ont  la 
saveur  ou  approchant. 

Aussitôt  la  première  coupe  faite  ,  vous  envelopperez  chaque  pied 
tondu  avec  du  fumier  d'étable  et  vous  attendrez  que  de  nouvelles  jeunes 
feuilles  apparaissent  pour  recouvrir  comme  précédemment.  Cette  opé- 
ration d'étiolement  n'a  rien  de  difficile;  mais  il  pourrait  se  faire  qu'elle 
devînt  rebutante  pour  ceux  de  nos  lecteurs  qui  ne  se  soucient  point 
d'acheter  de  petites  ruches  ou  de  larges  pots.  A  ceux-là,  nous  recom- 
manderons tout  simplement  de  butter  les  crambés  comme  l'on  butte 
les  céleris,  tous  les  huits  jours,  et  presque  jusqu'au-dessus  des  feuilles 
chaque  fois.  Beaucoup  de  jardiniers,  et  des  plus  habiles,  ne  s'y  prennent 
pas  autrement. 

Le  crambé  ne  se  reproduit  pas  seulement  de  graine;  on  le  multiplie 
encore  d'œilletons  et  d'éclats  de  racines ,  et  de  la  sorte  on  gagne  une 
année.  Malgré  cela,  nous  conseillons  les  semis;  nous  leur  donnons  la 
préférence  sur  les  autres  modes  de  reproduction.  Les  plants  obtenus  de 
graine  sont  en  général  mieux  portants ,  plus  vigoureux ,  plus  durables , 
plus  productifs  que  ceux  obtenus  de  boutures  ou  de  racines. 


i-.").  Pelarooniuin  scarlet .  G.  DicTvtra  scandeiis. 


—  33  — 

HORTICULTURE. 


NOTE  SUR  LES  PÉLARGONIUMS  SCARLETS  ET  LEUR 

CULTURE, 

Par  M.  Edouard  Morren. 

Les  Pelargonium  zonale  et  P.  eximium  se  sont  métamorphosés  par 
la  culture  en  une  innombrable  quantité  de  variétés  et  d'hybrides,  dési- 
gnés, par  les  holticulteurs,  sous  le  nom  anglais  de  Pélargoniums  scarlets 
ou  pélargoniums  écarlates  et  connus  de  quelques  amateurs  sous  le  seul 
nom  de  Géraniums.  Les  premiers  pélargoniums  scarlets  étaient  réel- 
lement écarlates,  les  feuilles  seules  variaient  :  les  unes  étaient  traversées 
d'un  large  anneau  brun,  les  autres  étaient  panachées  de  blanc  ;  mais  on 
possède  aujourd'hui  des  scarlets  de  toutes  les  nuances,  depuis  le  blanc 
de  lait  le  plus  pur  jusqu'au  rouge  de  sang  qui  fatigue  l'œil  de  son  éclat, 
par  les  blancs  lavés  ou  veinés  de  rose,  les  chairs,  les  roses  tendres,  les 
roses  et  toutes  sortes  de  nuances  de  rouge  à  reflet  orangé  ou  carminé. 
Les  nouveaux  catalogues  des  horticulteurs  portent  près  d'une  centaine 
de  variétés,  assez  semblables  de  forme  mais  presque  toutes  différentes 
de  coloris.  Nous  avons  réuni  en  un  bouquet  quelques-unes  de  ces  va- 
riétés, pour  montrer  par  quelles  gradations  insensibles  ces  fleurs  se 
foncent  en  couleur. 

N°  1.  La  boule  de  neige  est  d'un  blanc  pur,  relevé  de  quelques  traits 
de  rose  ;  elle  forme  un  capitule  qui  rappelle  la  boule-de-neige  ou  rose- 
de-Gueldre  (Viburnum  opulus,  L.  var.  sterilis),  mais  plus  gros  et  à  fleurs 
plus  grandes. 

N°  2.  Hydrangeœformis,  dont  l'inflorescence  ressemble  à  celle  de 
l'hortensia,  à  pétales  rose  pâle. 

N°  3.  Le  Maréchal  Fabcrt  est  intermédiaire  entre  les  variétés  précé- 
dentes et  les  colorations  les  plus  vives. 

N°  4.  Rubens  est  d'un  rouge  écarlate,  à  nuance  carmin. 

N°  5.  Mountain  of  light  a  les  fleurs  d'un  vermillon  trop  intense  pour 
être  reproduit  par  le  pinceau  :  ces  fleurs  paraissent  encore  plus  brillantes 
lorsqu'elles  se  détachent  sur  le  feuillage  panaché  de  blanc. 

Les  pélargoniums  scarlets  ne  peuvent  manquer  nulle  part,  car  ils 
constituent  un  des  plus  beaux  ornements  des  jardins  pendant  toute  la 
durée  de  l'été;  arrangés  en  massifs,  ils  se  font  remarquer  par  la  vigueur 
de  la  végétation,  la  beauté  du  port,  la  richesse  du  feuillage,  la  variété  et 

r.ELG.    HORT.    T.    VI.  5 


—  34  — 

l'abondance  des  fleurs.  Parmi  les  dispositions  les  plus  harmoniques  que 
l'on  peut  donner  à  ces  massifs,  nous  conseillons  de  placer  au  premier 
plan  les  variétés  à  fleurs  blanches,  et,  si  possible,  à  feuillage  panaché, 
puis  les  rosés,  les  chairs  et  les  lilas,  et  successivement  les  couleurs  de 
plus  en  plus  vives,  jusqu'au  rouge  écarlate.  Si  l'on  en  forme  une  cor- 
beille circulaire  dans  la  pelouse,  il  est  alors  préférable  de  suivre  un 
ordre  inverse,  c'est-à-dire  le  vermillon  à  la  périphérie,  le  blanc  au 
centre.  Les  variétés  qui  produisent  le  plus  d'effet  sont  les  rouges  à 
feuilles  panachées  et  les  blanches  à  feuillage  sombre. 

On  fait  les  boutures  en  juillet,  dans  des  pots  de  trois  à  cinq  pouces, 
selon  l'extension  que  l'on  veut  laisser  prendre  aux  plantes.  On  les  taille 
de  manière  à  en  former  de  petits  buissons  bien  touffus,  et  on  les  laisse 
croître  lentement  pendant  tout  l'été  :  en  automne  on  les  fortifie  en  dimi- 
nuant les  arrosages  et  en  les  exposante  une  vive  lumière;  en  hiver,  on 
les  abrite  dans  une  serre  ou  une  orangerie,  qui  les  protège  de  la  gelée; 
la  température  doit  être  basse  et  l'air  souvent  renouvelé.  Vers  le  mois 
de  mars  on  les  chauffe  un  peu  plus,  on  provoque  et  on  aide  le  réveil  de 
la  végétation  ;  on  les  sort  et  on  forme  des  corbeilles  ou  des  bordures,  à 
la  fin  de  mai  ou  au  commencement  de  juin,  suivant  que  la  saison  est 
plus  ou  moins  favorable,  mais  jamais  avant  que  les  gelées  blanches  ne 
soient  plus  à  craindre.  Les  plantes,  ainsi  traitées,  formeront  de  petits 
buissons  compactes  et  touffus,  charmants  pour  les  plates-bandes  ou  les 
bordures  des  grands  parterres;  on  peut  aisément  les  maintenir  à  hauteur 
voulue,  par.  une  ou  deux  tailles  au  printemps. 

On  obtient  de  fortes  plantes  en  enlevant  à  l'automne,  avant  qu'ils 
n'aient  souffert  de  la  gelée,  les  pieds  qui  ont  végété  dans  le  jardin  pen- 
dant la  belle  saison;  on  les  cultive  dans  des  pots,  juste  assez  grands 
pour  contenir  les  racines  et  on  se  borne  à  les  garantir  du  froid.  Il 
importe  peu  si  ces  plantes  perdent  leurs  feuilles  pendant  l'hiver,  car  elles 
reverdiront  facilement  au  printemps  prochain. 

Toute  terre  de  jardin,  pas  trop  riche,  mais  argileuse,  convient  aux 
pélargoniums  scarlets;  en  hiver  on  les  cultive  dans  une  argile  sableuse, 
engraissée  d'un  peu  de  terreau  de  feuilles. 

Les  pélargoniums  scarlets,  lorsqu'ils  atteignent  une  taille  un  peu  con- 
sidérable, deviennent  une  des  plus  grandes  beautés  des  conservatoires, 
des  orangeries,  des  jardins  d'hiver  et  des  serres  tempérées.  Pour  les 
obtenir,  choisissez  en  été  de  jeunes  plantes  ayant  cinq  ou  six  branches 
au  pied;  laissez-les  un  peu  souffrir  de  la  soif  et  taillez-les  jusque  deux 
entre-nœuds  au-dessus  du  vieux  bois;  alors  enlevez  la  terre  des  racines, 
nettoyez  celles-ci  et  rempotez  ;  cela  fait,  placez  les  plantes  sous  un  abri, 
arrosez  rarement  et  laissez-les  croîire.  Lorsqu'elles  seront  bien  reprises 


—  35  — 

et  capables  de  supporter  la  lumière  directe,  transportez-les  à  une 
exposition  fortement  éclairée.  Pincez  tous  les  bourgeons  de  manière 
à  ne  laisser  sur  chaque  branche  que  deux  jets,  les  plus  forts,  les 
mieux  placés  et  de  vigueur  aussi  égale  que  possible.  Lorsque  les  plantes 
auront  bien  fait  racines,  transplantez-les  dans  des  pots  doubles  ou 
triples  de  ceux  dans  lesquels  elles  se  trouvent.  Laissez-les  à  l'air  libre 
tant  qu'elles  n'ont  rien  à  craindre  de  l'hiver;  hivernez-les  dans  une 
serre  tempérée,  à  une  place  bien  éclairée  et  arrosez  si  rarement  que  la 
terre  se  trouve  souvent  desséchée.  Lorsque  ces  pélargoniums  com- 
menceront à  pousser  au  premier  printemps,  chauffez  la  serre  un  peu  plus 
que  de  coutume,  ne  soyez  plus  aussi  circonspect  dans  les  arrosages  et, 
alternativement,  donnez  de  l'eau  pure  et  un  peu  d'engrais  liquide. 
A  cette  époque,  arrangez  les  branches  symétriquement  et  écartez-les  les 
unes  des  autres  :  cette  opération  est  nécessaire  pendant  le  jeune  âge  de 
la  plante,  qui  se  ressentira  toujours  des  effets  d'une  bonne  conduite. 
Aussitôt  que  vous  apercevrez  les  boutons,  pincez  les  jets  qui  les  sur- 
montent afin  que  toute  la  sève  se  porte  vers  les  fleurs;  éliminez,  pour 
la  même  raison ,  tous  les  bourgeons  latéraux  qui  tendraient  à  se 
produire. 

Les  pélargoniums  ainsi  traités  fleurissent  en  mai  ou  au  commence- 
ment de  juin.  Au  milieu  de  juillet  on  les  laisse  sécher,  on  les  taille,  on 
les  rempote  et  on  les  traite  comme  précédemment  pour  la  saison 
suivante. 


NOTE  SUR  L'ADLUMIA  CIRRHOSA  ,  RAFIN , 

Par  M.  Edouard  Morren. 

Famille  des  Fumar lacées.   —   diadelphie  hexandrie. 


ÀDLUMIÀ.  Calix  diptiyllus.  Pet.  4,  la- 
teralia  calcarata ,  in  corollam  4-Iobam 
fungosam  apice  connata.  Stamina  6  in 
phalangas  cluas  approximata  ;  filamenta 
libéra.  Antherse  biloculares.  Stigma  bi- 
lobum.  Siliqua  bivalvis  polysperma. 


ADLUMIA  CIRRHOSA.  Raf.  Scandens 
18-20  ped.  fol.  biternato  divisis;  floribus 
numerosis  pallide  violaceis.  In  Amer, 
bor.  corydalis  fiuigosce  vent,  choix,  t.  19. 
—  Swcct.  fl.  gard.  t.  189. 


On  ne  dédaigne  jamais  une  plante  grimpante,  moins  encore  lorsqu'elle 
est  jolie,  gracieuse  et  élevée.  L'Adlumia  à  vrilles  convient  admirable- 
ment pour  garnir  les  tonnelles  pendant  l'été,  il  pousse  très-rapidement 
et  chaque  lige  acquiert  une  longueur  moyenne  de  18  à  20  pieds. 
Adlumia  rappelle  le  nom  du  major  Adlum,  américain,  qui  écrivit  sur  les 
vignes,  et  l'adjectif  cirrhôsa  rappelle  que  les  pétioles  sont  contournés  en 


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vrille  à  leur  extrémité.  C'est  une  plante  de  la  famille  tics  Fumariaeées 
bien  voisine  du  genre  Dicentra  dont  elle  se  distingue  à  peine.  Grim- 
pante, ses  tiges  et  ses  feuilles  sont  glabres,  ses  pétioles  en  vrilles. 
Pétales  4,  soudés  à  la  base  en  une  corolle  monopétale,  deux  fois  bossue 
et  persistante.  Le  fruit  est  une  silique  bivalve  polysperme;  les  graines 
4  à  6,  noires,  luisantes.  VAdlumia  cirrhosa  est  la  seule  espèce  du  genre. 

On  ne  saurait  se  représenter  la  délicatesse  de  ses  feuilles  profondé- 
ment divisées,  d'une  légèreté  toute  aérienne  et  d'un  beau  vert  gai.  Les 
fleurs  sont  nombreuses,  assez  grandes,  blanc  rosé  ou  teintées  de  très- 
pâle  bleu,  et  pendant,  comme  de  petites  clochettes,  à  des  pédoncules 
fins  comme  des  cheveux.  La  floraison  est  continue  pendant  tout  l'été. 

L'Adlumia  à  vrilles  est  de  pleine  terre ,  bisannuel  et  originaire  du 
Canada  et  de  la  Pensylvanie;  il  est  cité  dans  Vent,  choix,  pi.  19,  sous 
le  nom  de  Corydalis  fungosa. 


REVUE  DE  PLANTES  NOUVELLES  OU  INTÉRESSANTES. 

Thujopsis  dolabrata.  Sieb.  et  Zuccarini.  —  Flora  Japonica 
Vol.  H,  p.  32;  alias  Thuya  dolabrata  Thunbcrg.  —  Le  jardin  botanique 
de  Leyde  vient  de  s'enrichir  d'un  ou  deux  pieds  vivants  de  ce  bel  arbre, 
et  à  cette  occasion,  M.  De  Vriese,  le  savant  professeur  de  botanique 
de  cette  ville,  nous  donne  quelques  détails  sur  son  histoire. 

Le  genre  Thujopsis  diffère  des  Thuija  par  les  écailles  ligneuses  de  ses 
cônes,  ayant  chacune  à  leur  aisselle,  cinq  graines  disposées  sur  deux 
rangs;  ils  se  ressemblent  par  le  port  des  branches  et  les  feuilles,  mais 
ces  dernières  sont  couvertes,  sur  tout  le  milieu  de  leur  face  inférieure , 
de  stomates  glauques,  tandis  que  les  Thuyas  n'ont  pas  de  stomates 
du  tout. 

Le  Thujopsis  dolabrata  est  originaire  du  Japon  où  il  est  nommé  Hiba; 
il  acquiert  de  grandes  dimensions  et  un  port  majestueux;  il  forme  un 
arbre  pyramidal,  à  branches  dressées  ou  souvent  pendantes.  Il  croît 
sauvage  dans  les  montagnes  des  îles  de  Nipon,  spécialement  dans  la 
chaîne  nommée  Hakone,  où  on  le  trouve  de  préférence  au  fond  des 
vallées.  Son  bois  est  très-recherché  pour  les  bâtisses;  les  feuilles 
sont  d'un  vert  très-foncé,  excepté  sur  le  milieu  de  leur  face  infé- 
rieure où  elles  sont  couvertes  d'une  efflorescence  argentée  qui  leur 
donne  une  très-belle  apparence.  Il  existe  une  variété  plus  petite,  nommée 
Nezu  par  les  Japonais.  On  peut  supposer  que  le  Thujopsis  dolabrata  sera 
tout  aussi  rustique  que  nos  Thuya. 


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Abies  IBookeriania.  Murr.  —  A.  Murray,  in  Edimb.  new  Phil. 
Journal,  i.,  289,  t.  9.  —  Abies  BBatîoiaâ»aBa,  ibid.  —  Gard,  chron. 
1855,  n°  22,  p.  372.  —  L' Abies  Hookeriana  est  très-voisin  de  VA,  alba; 
les  cônes  ont  entre  eux  la  plus  grande  ressemblance;  ils  sont  de  même 
couleur  et  les  écailles  sont  dans  tous  deux  en  forme  de  cuiller  et  à  bords 
réguliers;  mais  VA.  Hookeriana  a  les  cônes,  et  plus  particulièrement  les 
écailles,  les  graines  et  les  ailes  plus  grands.  L'habitas  de  l'arbre  et  le 
mode  de  croissance  des  feuilles  sont  également  différents.  Dans  l'A.  alba 
les  feuilles  sont  insérées  très-régulièrement  le  long  des  branches;  dans 
VA.  Hookeriana  elles  sont  fasciculées,  un  peu  tordues  supérieurement, 
comme  celles  de  VA.  nobilis. 

Cet  Abies  est  aussi  très-ressemblant  avecIM.  Pattoniana,  introduit 
il  y  a  trois  ou  quatre  ans  par  Jeffrey,  le  voyageur  envoyé  par  VEdim- 
bnrgh  Oregon  Expédition,  et  comme  cette  espèce  est  peu  connue  (ayant 
seulement  été  décrite  et  figurée  dans  une  circulaire  privée  envoyée  aux 
membres  de  l'association),  nous  pensons  qu'il  sera  utile  de  donner  les 
caractères  qui  la  distinguent  de  VA.  Hookeriana. 

Tous  deux,  VA.  Pattoniana  et  VA.  Hookeriana,  sont  des  arbres  d'une 
excessive  beauté,  mais  le  premier  est  décrit  par  Jeffrey  comme  ayant 
150  pieds  (anglais)  de  hauteur,  et  dominant  tout  le  reste  de  la  forêt. 
L'élévation  de  VA.  Hookeriana  est  seulement  de  50  pieds.  Le  bois  est 
dur  et  résistant.  L'arbre  se  distingue  plutôt  par  la  grâce  du  port  que  par  la 
taille.  Sauf  le  Cupressus  Laivsoniana,  M.  Murray  décrit  cet  arbre  comme 
étant  le  plus  beau  de  tous  ceux  récemment  découverts  dans  la  dernière 
excursion  ;  il  insiste  surtout  sur  la  grâce  et  l'élégance  toute  particulière 
de  ce  végétal.  Les  cônes  de  ces  deux  arbres  montrent  des  caractères 
qui  peuvent  servir  à  les  distinguer  :  ils  sont  de  grosseur  égale,  mais 
ceux  de  VA.  Pattoniana  sont  d'une  couleur  brune  foncée,  tandis  que 
ceux  de  VA.  Hookeriana  sont  brun  fauve,  à  peu  près  de  la  teinte  de 
notre  mélèze  commun  ou  de  V Abies  alba.  Les  écailles  de  VA.  Pattoniana 
sont  d'un  tiers  plus  petites  que  celles  de  VA.  Hookeriana;  elles  sont  pro- 
fondément crénelées  dans  toutes  leurs  parties  libres;  elles  sont  douces 
au  toucher  et  proéminentes;  les  écailles  de  VA.  Hookeriana  ne  sont  pas 
crénelées,  une  ligne  imperceptible  se  montre  seulement  çà  et  là.  La 
forme  de  ces  écailles  n'est  pas  régulière,  elles  sont  plus  découpées  d'un 
côté  que  de  l'autre;  là  où  la  découpure  commence,  la  bractée  s'amincit  au 
point  de  devenir  membraneuse.  Dans  VA.  Pattoniana  il  n'y  a  ni  cet 
amincissement,  ni  ces  découpures  ;  les  bractées  s'imbriquent  et  se  su- 
perposent sans  rugosités,  tandis  que  dans  VA.  Hookerianala  superposi- 
tion est  très-marquée.  Les  graines  et  les  ailes  de  VA.  Pattoniana,  sont 
un  tiers  plus  courtes  que  celles  de  VA.  Hookeriana  ;  l'aile  du  premier 


—  38  — 

est  teinté  de  violet  brunâtre  que  l'on  ne  retrouve  pas  chez  le  second. 
Cette  espèce  fut  trouvée  au  haut  des  montagnes  de  la  Californie,  à 
environ  41  degrés  de  latitude  nord,  où  la  terre  était  déjà  couverte  de 
neige  au  16  octobre.  Cette  nouvelle  conifère  a  reçu  le  nom  de  sir  Wil- 
liam Hooker,  en  honneur  des  services  qu'il  a  rendus  à  la  botanique.  Le 
comité  de  l'association  botanique  de  POrégon  a  baptisé  le  second  du  nom 
de  Pattoniana,  en  mémoire  de  M.  Patton  de  Cairnies  du  Perthschier, 
qui  se  livra  à  une  série  d'expériences  pour  déterminer  les  altitudes  où 
différentes  conifères  peuvent  être  cultivées  avantageusement  comme 
arbres  forestiers. 

CiBppessais  LawsoiBâawa.  Murr.  —  Murray,  in  Edimb.  new 
Phil.  Journal,  i.,  292,  T.  10.  —  Gard,  chronicle,  1855,  n°  22,  p.  372. 
—  Ce  cyprès  est  le  plus  bel  arbre  qui  fut  découvert  dans  l'expédition  de 
l'Orégon  ;  il  végétait  sur  les  bords  d'une  rivière,  dans  une  vallée  en- 
caissée entre  des  montagnes;  il  était  haut  de  cent  pieds  (anglais)  et  large 
de  deux  pieds.  Le  feuillage  est  des  plus  délicats;  les  branches  se  relèvent 
aux  extrémités,  puis  retombent  avec  l'élégance  des  plumes  d'autruche. 
La  cime  est  légère  comme  celle  du  Deodora.  Le  bois  est  excellent  pour 
la  charpente.  Cet  arbre  a  été  dédié  à  MM.  Lawson,  pépiniéristes  très- 
distingués  d'Edimbourg,  qui  après  avoir  fait  connaître  et  répandu  tant 
d'espèces  différentes  de  conifères,  ont  bien  mérité  que  leur  nom  fût  at- 
taché à  une  espèce  destinée  à  devenir  extrêmement  populaire. 

Ce  Cupressm  a  ses  cônes  excessivement  petits  et  les  branches  toutes 
couvertes  de  petites  écailles  extraordinairement  serrées,  ressemblant  à 
celles  du  Juniperus  phœnicea. 

Juniperue  pyriforesaïs.  Murr.  —  Foliis  primariis  patentibus 
ternatim,  verticillatis  pungéntibùs  glaucis,  secundariis  arcte  adpressis, 
imbricatis  acutis,  galbulis  pyriformibus  (obovatis)  denique  oblongis 
squamis  apice  liberis  foliaceis  demum  reflexis. 

MM.  Veith  et  Lobb  ont  reçu  le  Juniperus  pyriformis  des  montagnes 
de  San  Bernardino  en  Californie,  où  il  ne  s'élève  qu'à  10  ou  12  pieds.  Les 
feuilles  jeunes  sont  tristiques,  glauques,  acérées;  sur  les  vieilles  branches 
elles  sont  très-serrées  et  courtes.  Les  fruits  sont  remarquables;  ils 
ressemblent,  pendant  leur  jeune  âge,  à  de  petites  poires,  mais  marqués 
par  les  extrémités  des  écailles  durcies.  Lorsque  la  croissance  est  com- 
plète, ces  écailles  se  retournent  sur  elles-mêmes.  Les  fruits  sont  d'un 
violet  foncé,  recouverts  d'une  cire  glauque. 

t'upressus  MacMabiana.  Murr.  —  A.  Murray,  in  Edimb. 
new  Phil.  Journ.,  i.,  293,  t.  2.  —  Foliis  obtusis  utrinque  concavis  fa- 


—  39  — 

rinosis  carinâ  et  apic-e  viridibus,  strobilis  globosis  :  sqnamis  umbone  obluso 
elongato  incurvo  armatis. 

M.  André  Murray  le  découvrit  en  Californie,  à  41°  Nord;  il  le  décrit 
comme  un  arbrisseau  toujours  vert,  de  petite  taille,  d'un  aspect  tour- 
menté et  tortueux.  Il  ressemble  au  Cupressus  uhdeana;  mais  on  le  dis- 
tingue immédiatement  à  ses  feuilles  profondément  découpées  de  chaque 
côté,  et  à  la  glaucescence  qui  tapisse  les  sinus  ;  le  dos  et  l'extrémité  des 
dents  conservent  une  belle  couleur  verte.  Cette  particularité  s'observe 
difficilement  sur  les  vieilles  plantes  exposées  depuis  longtemps  aux  in- 
tempéries de  l'air,  mais  cette  diversité  de  nuance  fournit  un  caractère 
qui  distingue  le  C.  maenabiana,  que  M.  Lobb  a  rapporté  de  la  Sierra- 
Nevada  de  la  Californie  septentrionale,  où  la  plante  formait  des  buis- 
sons de  6  cà  40  pieds  de  haut.  Les  pieds  que  M.  Veilh  a  reçus  de  M.  Lobb 
ont  conservé  tout  le  mérite  de  ce  coloris  mélangé  de  vert,  de  glauque  et 
de  brun  :  lorsque  cette  plante  est  jeune  et  vigoureuse  elle  est  extrême- 
ment belle. 

Pinus  Bet8ï-«S§îleyi.  A.  Murray,  in  Edimb.  new  PMI.  Journal, 
i.,  286,  t.  6.  —  Gard,  chron.  1855,  p.  453,  n°  27.—  Fam.  des 
Conifères  ,  Monœcie-Monadelphie.  —  C'est  un  arbre  d'une  grande 
beauté  ;  l'un  de  ceux  qui  furent  abattus  mesurait  123  pieds  de  hauteur 
et  le  tronc  44  pouces  de  diamètre;  un  autre  avait  17  pieds  4  pouces 
de  circonférence  à  trois  pieds  au-dessus  du  sol.  On  le  découvrit  au 
sommet  d'une  montagne  élevée,  par  41°  de  latitude  Nord,  à  la  même 
altitude  que  les  Pinns  Jeffrey  i  et  monticola,  que  YAbies  grandis  et  plus 
haut  que  les  P.  Benthamiana  et  Lambcrtiana. 

Le  P.  Beardsleyi  et  le  P.  Craigana  paraissent  avoir  plus  d'affinités 
avec  le  P.  Benthamiana  que  toutes  les  espèces  jusqu'ici  décrites;  mais 
l'espèce  qui  nous  occupe  a  les  cônes  longs  de  trois  pouces  seulement 
tandis  qu'ils  en  comptent  cinq  chez  le  P.  Benthamiana;  les  feuilles  de  ce 
dernier  ont  11  pouces  de  longueur,  dont  un  est  entouré  par  la  bractée 
vaginale;  celles  du  P.  Beardsleyi  ont  seulement  6  pouces  et  la  graine  un 
huitième  de  pouce  :  les  ailes  de  la  graine  du  P.  Benthamiana  sont 
beaucoup  plus  grandes  et  plus  larges  que  celles  du  Beardsleyi  :  le  bois 
du  Beardsleyi  est  parfaitement  homogène  dans  toute  son  épaisseur, 
tandis  que  le  cœur  du  Benthamiana  est  plus  rouge  que  l'aubier  :  enfin 
le  premier  croît  beaucoup  plus  loin  sur  les  montagnes  que  le  second. 

Il  y  a  également  quelque  ressemblance  entre  ce  nouveau  pin  et 
le  P.  ponderosa,  mais  la  forme  du  cône,  l'apparence  et  la  figure  de  la 
graine,  permettent  de  le  distinguer  suffisamment. 


—  40  — 

ARCHITECTURE    DES   JARDINS. 


QUELQUES  INDICATIONS   SUR  LES  MOYENS  D'OBTENIR  UNE  FLORAISON 
CONTINUE   DANS  LES  PARTERRES  DES  PETITS  JARDINS, 

Par    M.   Edouard   Morren. 

Trop  souvent  les  parterres  des  jardins  restent  nus  pendant  la  plus 
grande  partie  de  l'année  ;  on  se  borne  à  y  introduire  une  seule  ou  un 
petit  nombre  d'espèces  qui  fleurissent  seulement  soit  au  printemps, 
soit  pendant  l'été,  soit  enfin  à  l'automne;  et,  hors  l'une  de  ces  époques, 
le  parterre  reste  dégarni.  Il  ne  faut  pas  dans  un  petit  jardin  séparer  dans 
des  plates-bandes  différentes  les  plantes  printanières,  les  estivales  et  les 
automnales,  mais  s'efforcer  de  les  coordonner  dans  l'espace  restreint 
dont  on  dispose,  de  façon  à  obtenir  une  floraison  continue  depuis  les 
premiers  beaux  jours  jusqu'au  retour  de  l'hiver. 

Il  est  facile  d'atteindre  ce  résultat  en  combinant  avec  art  les  cultures 
des  plantes  bulbeuses,  des  végétaux  herbacés  vivaces  ou  annuels  et  de 
quelques  belles  plantes  d'ornement  de  serre  tempérée,  tels  que  Pélargo- 
niums,  Géraniums,  Fuchsias,  Verveines,  Cupheas,  Héliotropes,  etc.;  on 
peut  alors  avoir  un  jardin  dont  toutes  les  parties  soient  émaillées  de 
fleurs  pendant  toute  l'année.  Il  faut,  dans  un  très-petit  jardin,  cultiver 
un  grand  nombre  de  plantes  vivaces  printanières,  au  feuillage  varié,  tels 
que  les  Arabis,  les  Murets,  les  Silènes,  les  Anémones,  etc.  :  on  les  met 
en  terre,  en  automne,  lorsqu'on  rentre  les  plantes  d'orangerie.  A  cette 
époque  on  plante  également  les  bulbes.  Voici  au  reste  la  description  de 
quelques  parterres  ordonnés  d'après  les  principes  qui  viennent  d'être 
énoncés. 

On  établit  des  bordures  d'Oxalis  ou  de  Crocus  variés  ;  on  peut  même 
former  quelques  bordures  de  Crocus  et  d'Oxalis  réunis;  les  premiers 
fleurissent  au  premier  printemps,  les  seconds  pendant  tout  le  reste  de 
l'année.  Dans  le  parterre  brillent  pendant  le  mois  de  mai  quelques 
groupes  de  Tulipes  et  au  centre  une  douzaine  de  Jacinthes. 

D'autres  parterres  peuvent  être  ornés,  au  printemps,  de  giroflées 
jaunes,  bordés  d' Arabis  et  émaillés  de  Tulipes,  d'Hépatiques,  de  Prime- 
vères, d'Auricules,  de  Narcisses,  de  Gentianes,  etc.  Toutes  ces  plantes 
peuvent  rester  en  place  pendant  l'année,  car  on  laisse  entre  elles  des 
intervalles  assez  grands  pour  y  faire  croître  certaines  espèces  vivaces  de 
pleine  terre,  qui  sont  destinées  à  fleurir  pendant  le  courant  de  l'été. 


—  41  — 

Puis  vient  le  moment  de  sortir  des  serres  toutes  sortes  de  plantes 
d'ornement,  dont  la  floraison  brillante  succède  immédiatement  à  celle 
des  plantes  bulbeuses  printanières;  ce  sont,  comme  nous  l'avons  déjà 
dit,  les  Héliotropes,  les  Calcéolaires ,  les  Verveines ,  les  Fuchsias,  les 
Pélargoniums,  les  Géraniums,  les  Cupheas,  etc.,  qui  fournissent  le 
contingent  le  plus  considérable. 

Des  semis  de  plantes  annuelles,  répandus  çà  et  là,  peuvent  combler 
les  vides  et  contribuer  surtout  à  la  beauté  du  jardin  pendant  l'automne. 

D'autres  parterres  peuvent  se  couvrir  de  brillantes  fleurs,  au  moyen 
de  la  disposition  suivante  :  on  les  forme  de  Pivoines  mélangées  à  des 
Dahlias,  les  premiers  épanouissent  leurs  vertes  fleurs  au  printemps  et 
cèdent  ensuite  volontiers  la  place  aux  Dahlias.  Il  convient  de  semer  dans 
ces  parterres  quelques  Pavots,  des  Mauves  ou  des  Lavateres  qui  brillent 
pendant  l'espace  de  temps  qui  s'écoule  entre  la  floraison  des  Pivoines  et 
celle  des  Dahlias;  semées,  et  éparses  dans  le  parterre  et  en  bordure 
épaisse,  ces  plantes  dissimulent  les  tiges  flétries  des  Pivoines. 

Un  second  parterre  de  Dahlias  peut  être  bordé  de  Salvia  ou  de  Stachys, 
qui  donnent  une  végétation  vigoureuse  et  une  floraison  abondante,  sans 
réclamer  d'autres  soins  que  celui  de  les  enlever  lorsqu'ils  sont  dé  fleuris. 

Au  moyen  de  ces  espèces  si  vulgaires,  un  jardin  peut  offrir  une  suc- 
cession non  interrompue  de  fleurs;  il  excitera  l'admiration,  au  printemps 
surtout  par  les  plantes  bulbeuses,  en  été  par  les  espèces  vivaces  de  pleine 
terre  et  par  les  végétaux  de  serre  tempérée,  en  automne  par  les  Dahlias 
et  les  semis  de  jolies  fleurs  annuelles. 


THÉ  INDIGÈNE. 

Les  feuilles  du  fraisier  des  forêts,  recueillies  immédiatement  après 
la  maturation  des  fruits ,  desséchées  au  soleil  ou  légèrement  torréfiées 
sur  des  plaques  chaudes,  donnent  par  infusion,  au  rapport  d'un  médecin 
de  Vienne,  M.  Kletznisky,  une  boisson  diététique  dont  l'odeur  agréable, 
la  saveur  astringente,  rappellent  celle  du  thé  de  Chine.  Cette  infusion 
se  mêle  au  lait  chaud  et  froid  sans  se  coaguler,  supporte  bien  le 
rhum,  et  possède  la  même  action  diaphorétique  que  le  thé  de  Chine; 
seulement  elle  est  un  peu  moins  excitante,  quoiqu'on  ne  puisse  lui 
nier  un  léger  effet  somnifuge. 

En  distillant  l'infusion,  on  obtient,  avec  l'eau  condensée,  un  arôme 
très-agréable,  qui  appartient  sans  doute  à  la  classe  de  la  coumarine  et 
de  ses  huiles  éthérées.  Le  résidu  renferme  beaucoup  de  tannin,  un  peu 
d'acide  citrique  et  une  quantité  considérable  de  matière  azotée  et  de 
cendres. 

BELG.    HOKT.    T.    VI.  6 


—  42  — 

ARCHITECTURE    HORTICOLE, 


PLANS  D'UNE  DISPOSITION  ÉCONOMIQUE  A  DONNER 
AUX  SERRES  ET  AUX  RACHES, 

Par  M.  Edouard  Morren. 

L'économie  est  toujours  une  considération  importante  à  laquelle  s'ar- 
rêtent l'amateur  et  le  jardinier  qui  veulent  édifier  un  établissement  hor- 
ticole sur  une  petite  échelle;  et  si,  à  peu  de  frais,  on  peut  donner  aux 
serres  une  disposition  convenable,  il  serait  en  effet  ridicule  de  dépenser 
beaucoup  d'argent  sans  faire  mieux.  Les  plans  d'une  disposition  écono- 
mique des  serres  et  des  bâches,  que  nous  propesons  aujourd'hui, 
d'après  un  amateur  anglais,  ne  seront,  peut-être,  pas  sans  intérêt  pour 
les  fleuristes  qui  voudraient  se  donner  la  jouissance  d'un  petit  établisse- 
ment, réunissant  les  conditions  nécessaires  à  la  culture  des  diverses 
sortes  de  plantes,  c'est-à-dire  une  serre  chaude,  une  serre  tempérée,  et 
des  bâches  chaudes  et  froides.  Ces  plans  ont  été  tracés  en  ne  perdant 
pas  de  vue  une  stricte  économie  d'espace,  ce  qui  est  un  point  d'une 
grande  importance  pour  les  petits  jardins,  et  dans  le  but  de  tirer  le  plus 
grand  profit  possible  de  l'ensemble  des  matériaux  :  on  a  eu  égard  enfin 
à  la  solidité  à  donner  aux  bâtiments  et  à  la  modicité  du  coût.  Mais  dans 
les  constructions  horticoles,  comme  dans  tout  autre  genre  de  bâtisses, 
il  n'y  a  pas  économie  à  lésiner  sur  les  matières  premières;  l'expérience 
prouve  que  les  meilleurs  matériaux  et  les  plus  habiles  ouvriers  sont 
toujours  les  plus  économiques,  et  ceux  qui  épargnent  quelqu'argent  en 
usant  de  ressources  dans  l'édification  de  leurs  serres,  ne  manquent 
jamais  de  regretter  l'argent  jeté,  après  six  ou  sept  ans  d'usage. 

Dans  ces  plans  on  n'a  pas  indiqué  la  position  à  donner  aux  fourneaux; 
mais  nous  conseillons  de  les  placer  du  côté  nord  de  la  serre  chaude,  et 
de  manière  à  pouvoir  chauffer  les  serres  et  les  bâches,  indépendamment 
les  unes  des  autres,  ou  le  tout  ensemble,  selon  la  nécessité.  Les  serres 
et  bâches  tempérées  seront  chauffées  par  des  tuyaux  sortant  des  serres 
et  bâches  chaudes  ;  ces  tuyaux  doivent  être  placés  horizontalement, 
dans  une  auge  cimentée,  afin  qu'on  puisse,  lorsque  les  plantes  réclament 
une  chaleur  humide,  y  verser  de  l'eau  qui  se  transformera  en  abon- 
dantes vapeurs  (PI.  6,  litt.  D).  Les  tuyaux  de  chauffage  doivent  avoir 
trois  pouces  de  diamètre  et  ceux  qui   courent  sous  les  tablettes  pour  le 


—  43  — 

bottom-heat,  seulement  deux  pouces.  Pour  les  bâches  latérales  il  suffit, 
ordinairement,  de  tuyaux  de  deux  pouces,  mais  là  où  une  haute  cha- 
leur est  nécessaire,  il  faut  des  tuyaux  de  trois  à  quatre  pouces  ;  les 
bâches  froides  peuvent  aisément  servir  de  couches.  Dans  la  serre  chaude 
on  peut  cultiver  les  orchidées,  surtout  les  orchidées  indiennes,  et  appro- 
prier la  serre  tempérée  à  la  culture  des  orchidées  mexicaines  et  d'autres 
des  climats  relativement  froids. 

PI.  6. 


S2=H-fckK 


A.  Sentier. 

B.  Tablette  pour  placer  les  pots  ou  pour  cultiver  les  plantes  en  pleine 
terre. 

C.  Tuyaux  d'eau  chaude,  de  trois  pouces  de  diamètre  dans  les  serres, 
de  deux  pouces  dans  les  bâches. 

D.  Auge  d'eau  chaude  pour  le  bottom-heat,  chauffée  par  deux  tuyaux 
ou  mieux  par  la  cheminée  des  fourneaux. 

PI.  7. 


— 

HcLc/>e  ^froicL . 

JBacûc  Cfyaiul&. 

B 

B 

B 

StttC  ^'cïcfe.  - 

tStZte^  cAccucfeï 

B 

B 

. 

J3cicZ)&  ^froide- , 

BcicÂù  cAcLude,. 

—  44  — 

LITTÉRATURE   HORTICOLE 


CONSIDÉRATIONS   DIVERSES   SUR   LES   PHÉNOMÈNES. 

PÉRIODIQUES. 


PHÉNOMÈNES    DIURNES, 
Par   M.  H.  Lecoq, 

Professeur  d'histoire  naturelle  de  îa  ville  de  Clermonl-Ferrand. 
(Extrait    des    Etudes    de    géographie    botanique,  etc.) 

Si  les  saisons  amènent  périodiquement  dans  la  vie  des  plantes  des 
changements  qui  se  succèdent  avec  régularité,  et  qui  sont  dus  prin- 
cipalement à  la  chaleur  du  climat,  la  lumière  solaire  et  le  mouvement 
diurne  de  la  terre,  qui  en  divise  le  cours,  apportent  aussi  dans  la 
végétation  des  variations  journalières  qui  modifient  à  chaque  instant 
les  scènes  de  la  nature. 

Le  matin,  dès  que  l'orient  s'éclaire,  la  riche  ceinture  de  l'aurore 
enveloppe  l'horizon,  les  teintes  diverses  de  la  lumière  réfléchie  ou 
réfractée,  teignent  le  ciel  de  couleurs  pures,  et  les  nuages  légers  qui 
flottent  au  firmament  sont  baignés  de  cette  clarté  douteuse  qui  n'est 
plus  la  nuit,  mais  qui  n'est  pas  encore  le  jour,  image  du  passé  qui 
fuit,  de  l'avenir  qui  se  presse.  Le  grand  flambeau  du  monde  s'élève 
avec  majesté;  il  écarte  les  nues,  illumine  leurs  contours,  et  leurs 
franges  empourprées  s'effacent  sous  l'éther  lumineux  dont  il  agite  les 
ondes  vivifiantes. 

Les  gouttelettes  perlées  de  la  rosée  des  nuits  se  dissolvent  dans 
l'océan  des  airs ,  recueillent  l'encens  des  fleurs  et  s'élèvent  aux  concerts 
des  oiseaux,  comme  un  premier  hommage  à  l'Eternel.  Les  plantes 
nocturnes  s'endorment,  s'inclinent  ou  s'abritent  des  feux  du  jour; 
les  autres  s'étendent  et  se  réveillent. 

La  brise  du  matin  se  charge  bientôt  de  nuages  légers  des  pous- 
sières fécondantes  qui  voyagent  dans  les  airs,  et  vont  au  loin  cher- 
cher les  germes  auxquels  il  doivent  donner  la  vie.  Dès  l'aube  du  jour, 
les  graminées,  serrées  dans  les  prairies,  nous  montrent  leurs  pani- 
cules  ou  leurs  épis  couverts  d'anthères  suspendues,  qui  viennent  de 
s'échapper  des  enveloppes  qui  les  retenaient  captives.  A  cette  pre- 
mière heure  du  jour,  les  plantes  aquatiques  élèvent  leurs  fleurs  au- 


—  45  — 

dessus  des  eaux,  et  les  grands  phénomènes  de  la  génération  com- 
mencent, enveloppés  des  brillants  tissus  qui  semblent  destinés  à  en 
voiler  les  mystères.  Il  nous  serait  impossible  de  décrire  les  innom- 
brables combinaisons  de  la  nature  qui  sont  destinées  à  s'accomplir 
sous  l'influence  de  cette  vive  lumière,  dont  les  corolles  diversement 
colorées  doivent  sans  doute  augmenter  encore  l'éclat  ou  affaiblir  l'in- 
tensité. C'est  presque  toujours  le  matin  que  tous  ces  prodiges  se 
présentent.  11  est  des  fleurs  dont  les  corolles  elles-mêmes  sont  sou- 
mises à  l'aclion  directe  de  la  lumière  du  jour,  et  que,  pour  cette 
raison ,  on  nomme  météoriques.  Les  unes  peuvent  s'ouvrir  et  se  fermer 
pendant  plusieurs  jours,  suivant  la  présence  ou  l'absence  de  l'astre 
qui  les  éclaire;  d'autres,  entièrement  éphémères,  éclosent  après  l'aurore 
et  tombent  effeuillées  avant  la  fin  du  jour. 

L'Arnica  montana  ouvre  de  bonne  heure  les  disques  dorés  de  ses 
calathides  ;  les  Tragopogon  étalent  leurs  fleurons  violets  ou  couleur 
de  soufre  ;  le  Mcconopsis  cambrica  montre  quatre  pétales  d'un  jaune 
pur,  et  le  Chelidonium  cornicûtdtum  lutte  de  grandeur  et  d'éclat  avec 
le  coquelicot  matinal. 

Les  lins  disposent  en  étoiles  leurs  pétales  d'un  bleu  pur,  qui  tombent 
presque  toujours  avant  que  le  soleil  n'ait  atteint  le  méridien.  Les 
Lactuca,  YAnagaUis  phœnicea  ne  tardent  pas  à  s'éveiller  ;  le  Hiera- 
cium  Pilosella  et  quelques  caryophyllées  attendent  neuf  heures  pour 
s'ouvrir,  et,  sur  les  sables  échauffés  de  l'Afrique,  des  ficoïdes  et  des 
pourpiers  ne  s'éveillent  que  si  les  rayons  ardents  du  soleil  viennent 
frapper  leurs  corolles. 

Les  cistes,  aux  pétales  chiffonnés,  aux  grandes  fleurs  éclatantes, 
s'ouvrent  aux  différentes  heures  de  la  matinée  ;  ils  décorent  d'une 
riche  parure  les  îles  et  les  rivages  de  la  Méditerranée  :  le  soleil  du 
matin  fait  éclore  leurs  fleurs  par  milliers,  et  la  brise  du  soir,  chargée 
de  leurs  pétales  carminés,  les  dépose  mollement  sur  les  vagues,  où 
ils  forment  encore  de  nouveaux  contrastes  avec  l'azur  des  eaux. 

Les  rosiers  perdent  bientôt,  sous  l'action  du  soleil  qui  passe  au 
méridien,  les  pétales  odorants  témoins  de  leurs  amours,  tandis  que 
les  adonis,  étalant  toute  la  vivacité  de  leur  coloris,  resserrent  avant 
le  soir  leurs  pétales  allongés  et  réservent  au  lendemain  la  répétition 
de  ces  mouvements  excités  par  la  lumière. 

Le  soir,  les  vapeurs  se  condensent  en  légers  tissus  que  le  zéphir 
déploie  ou  chiffonne  à  son  gré,  en  flocons  mobiles  qui  se  réunissent 
en  un  voile  épais,  comme  pour  cacher  l'instant  précis  où  l'éclatant 
flambeau  a  terminé  sa  carrière.  Mais  longtemps  encore  la  lumière 
inonde  les  espaces  du  firmament,  toutes  les  nuances  du  rose  et  du 


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pourpre  s'y  montrent  tour  à  tour.  De  légers  cirrus,  détachés  de  la 
nue,  courent  au  zénith  recueillir  la  dernière  étincelle  du  feu  qui 
s'éloigne  en  mourant,  et  le  crépuscule  éteint  les  dernières  ombres, 
dont  les  contours  indécis  s'effacent  comme  le  temps  qui  fuit  et  la  vie 
qui  s'écoule.  Alors  les  bruits  du  jour  ont  cessé  ;  la  grande  voix  de 
la  nature  ne  retentit  plus  dans  les  accents  divers  qui  s'élevaient  jusqu'à 
la  divinité.  L'oiseau  balancé  sur  la  branche  flexible  du  chèvrefeuille, 
ou  caché  sous  la  guirlande  de  l'aubépine,  a  suspendu  ses  chants 
d'amour;  l'insecte  a  replié  ses  ailes  sous  ses  élytres  dorées,  et,  mol- 
lement bercé  dans  le  calice  parfumé  de  la  fleur  des  champs,  repose 
sous  un  voile  de  pourpre  ou  de  saphir. 

L'écho  ne  répond  plus  au  chant  du  pasteur;  tout  dort  dans  la  nature, 
et  les  plantes,  comme  les  animaux,  une  fois  privées  de  lumière,  sont 
soumises  aussi  à  l'empire  du  sommeil. 

Que  l'on  parcoure  les  bois  ou  les  campagnes,  que  l'on  suive  l'eau 
murmurante  d'un  ruisseau  ou  qu'on  s'égare  sur  la  pelouse,  déjà 
couverte  de  rosée,  partout  les  plantes  sont  endormies;  le  vent  des 
orages  les  courbe  sans  les  éveiller;  le  tonnerre  gronde  sans  nuire 
à  leur  repos;  la  pluie  les  inonde  sans  interrompre  cet  instant  d'inertie. 
La  sensitive  si  délicate  s'endort  tous  les  soirs  d'un  profond  sommeil  ; 
elle  rapproche  ses  folioles,  les  applique  les  unes  sur  les  autres,  puis 
elle  abat  ses  longues  feuilles  pliées  sur  sa  tige,  et  reste  immobile 
jusqu'à  ce  que  la  lumière  ramène  son  réveil.  Les  chocs,  les  cahots 
d'une  voiture,  le  vent  qui  souffle  avec  violence,  ne  font  que  prolonger 
cette  immobilité.  Le  calme  seul  la  rappelle  à  la  vie. 

La  nuit  paraît  avoir  une  influence  plus  grande  encore  sur  le  sainfoin 
des  Indes,  découvert  au  Bengale,  en  1777,  par  milady  Monson,  dans 
les  lieux  les  plus  chauds  et  les  plus  humides  de  ce  vaste  delta  du 
Gange. 

Chacune  des  feuilles  de  cette  délicate  légumineuse  a  trois  folioles 
comme  celles  de  notre  trèfle,  une  plus  grande  au  milieu,  deux  plus 
petites  sur  les  côtés.  Dans  le  jour,  la  foliole  du  milieu  est  horizontale 
et  sans  mouvement;  la  nuit  elle  se  courbe  et  vient  s'appliquer  sur  son 
support,  comme  si  la  fatigue  l'invitait  au  repos,  et  pourtant  cette 
foliole  est  restée  toujours  immobile,  tandis  que  les  deux  latérales, 
d'une  activité  incroyable,  descendent  et  remontent,  s'inclinent  et  se 
relèvent  devant  la  première ,  avec  une  assiduité  constante  et  sans 
employer  plus  d'une  minute  pour  chacune  de  leurs  oscillations. 

Elles  descendent  plus  vite  qu'elles  ne  montent,  et,  constamment 
agitées,  image  de  ces  existences  tourmentées  qui  n'ont  jamais  connu 
le  calme  et  la  paix,  elles  se  meuvent  dès  leur  naissance,  et  ne  cessent 


qu'à  leur  mort,  continuant  encore  si  la  plante  est  coupée;  mais,  plus 
vives  dans  leur  jeunesse,  elles  ralentissent  comme  nous  leurs  mouve- 
ments quand  la  vieillesse  les  atteint,  quand  la  mort  les  menace. 

Pas  de  sommeil  pour  ces  deux  folioles;  la  nuit  est  sans  action  sur 
elles  ,  tandis  que  la  supérieure  s'endort  paisiblement  :  à  peine  si , 
pendant  le  jour,  une  d'elles  s'arrête  quelques  instants,  pendant  que 
l'autre  continue  à  osciller.  Le  zéphir  incline  les  rameaux  de  la  plante 
sans  arrêter  son  essor,  mais  la  tempête  la  rend  immobile. 

Quelquefois  pourtant,  dans  ces  régions  brûlantes,  la  chaleur  suffo- 
cante oblige  au  repos,  et  notre  plante  fait  la  sieste  pendant  quelques 
instants.  Ses  deux  folioles  s'arrêtent  endormies. 

Transporté  dans  nos  serres,  VHedysarum  gyrans  conserve  en  partie 
son  activité;  mais  éloigné  du  sol  brûlant  de  sa  patrie,  de  l'air  humide 
de  ses  marais,  ses  mouvements  sont  plus  lents,  moins  réguliers, 
et  nous  l'avons  vu  tromper  son  exil  par  de  longues  heures  de  sommeil. 

Mais  nous  n'avons  pas  besoin  d'aller  chercher  au  loin  les  exemples 
nombreux  de  ces  intéressants  phénomènes  :  parcourons  la  nuit  nos 
prairies  et  nos  coteaux,  pénétrons  dans  nos  silencieuses  forêts,  alors 
qu'elles  ne  sont  plus  éclairées  que  par  la  lumière  tremblante  et 
argentée  de  la  lune  à  travers  le  feuillage,  et  nous  verrons  bientôt 
que  toutes  les  plantes  ont  changé  de  forme  et  d'aspect. 

Les  trèfles  ont  redressé  leurs  folioles,  qui  dorment  trois  à  trois  sur 
leurs  longs  pétioles;  les  délicates  oxalis  ont  abaissé  les  leurs,  qui 
sommeillent  inclinées  et  comme  fatiguées  de  leur  végétation  du  jour. 
Les  feuilles  de  Atriplex  s'appliquent  sur  les  jeunes  pousses  et  som- 
meillent en  les  protégeant. 

L'œnothère,  si  commune  sur  le  bord  de  nos  rivières,  dispose,  le 
soir,  ses  feuilles  supérieures  en  berceau,  formant  ainsi  un  apparte- 
ment à  jour,  où  la  fleur  peut  veiller  ou  dormir  à  son  gré,  et  le  Sida, 
aux  fleurs  éphémères,  renverse  son  feuillage,  qui  s'assoupit  avec 
nonchalance,  comptant  sur  les  pétioles  qui  le  redressent  et  l'appliquent 
contre  la  tige. 

Ailleurs ,  ce  sont  des  mauves  aux  jolies  fleurs  lilacées ,  dont  les 
feuilles  se  roulent  en  cornets  et  s'approchent  des  fleurs  dans  leurs  ins- 
tants de  repos. 

Le  soir,  pendant  que  la  gesse  odorante,  le  pois  de  senteur  de  nos 
jardins,  laisse  échapper  ses  effluves  parfumées,  quand  nos  fèves  fleuries 
abandonnent  à  la  brise  les  doux  parfums  des  champs,  leurs  feuilles 
s'appliquent  les  unes  sur  les  autres  et  dorment  d'un  profond  sommeil , 
au  milieu  de  ces  suaves  émanations  des  corolles. 

Le  baguenaudier  a  des  feuilles  qui,  le  soir,  s'éloignent  dos  fleurs  et 


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reposent,  à  l'instar  le  la  — nsitive,  face  contre  face,  tandis  que  les 
casses  retournent  leurs  folioles,  les  a]  ss  ai  et  donnent  dos  à  dos, 
comme  si  elles  conservaient  le  souvenir  d"un  profond  «dissentiment. 

Si  déjà  dans  la  nuit  l'aspect  de  nos  eamj  _  ;.  -t  plus  le  même, 
cette  différence  est  encore  bien  plus  marquée  dans  les  contrées  équi- 
noxiales.  Le  paysage  doit  quelq  -on  caractère  à  des  plantes  légu- 

mineus—  .  ses  :  herba  -.  _  iUX  dormeurs  par  excellence  I 
dont  les  feuilles,  étalées  pendant  le  jour,  se  montrent  en  légers  pa- 
naches ou  en  lonc     sséi     s. 

Le  soir  commencent  leurs  gr  -      olutions;  elles  sont  i  - 

."astre  qui  décline ,  et  dont  les  dernières  lueurs  d'un  court  crépus- 
cule viennent  éclairer  encore  le  terme  de  leur  assoupissement.  Alors  la 
natui       -    endormie  et  entre  dans  ime  apparent  que 

nous  appelons  la  nuit,  dans  le  silence  et  le  sommeil. 

Près  de  Calabozo  et  de  Saint-J-r  :  .  lans  1" Amérique  du  Sud,  il 
existe  dans  les  savanes,  au  milieu  des  graminées,  plusieurs  plantes 
voisines  de  la  sensitive  qui,  fatiguées  de  la  chaleur  du  jour,  s'en- 
dorment le  soir  avant  même  que  le  soleil  ne  soit  couché;  ce  sont  les 
Mimosa  pigra,  M.  dormiem  et  le  Tvrnera  guianemis,  désignés  par  les 
colons  espagnols  sous  le  nom  expressif  de  Dormideras.  Les  be-tiaux  à 
demi-sauvages  qui  parcourent  ces  savanes  lient  avec  avidité  ces 

sitrces  h  ri         -  larges  touffes    empiétement  endormies  sont 

dévorées  pendant  leur  sommeil. 

On  voit,  dans  un  grand  nombre  de  plantes,  les  feuilles  protéger  les 
fleurs  pendant  la  nuit,  et  ne  s'endormir  qu'après  avoir  dressé  autour 
d'elles  un  abri  protecteur.  Tel  est  le  trèfle  incarnat,  dont  les  feuilles 
entourent  les  riches  corolles;  tel  est  ce  joli  Lotus  orniihopodwides ,  où 

grand  Linné  vit  pour  la  première  fois  le  sommeil  des  plantes,  en 
remarquant  qu'il  présente  le  triple  phénomène  de  relever  ses  bractées , 
composées  de  trois  petites  folioles,  pour  embrasser  entièrement  les 
trois  fleurs  terminales,  dans  le  même  temps  qu'il  penche  légèrement 
-  ;  pédoncules,  et  qu'il  I  tomber  sur  la  terre  ses  rameaux  affai- 

blis ei  fatigués  par  la  veille. 

Dans  d'autres,  an  contraire,  les   feuilles   descendent   tout  à  fait, 
abandonnent  les  fleurs  .   se  renversent  et  dorment  sur  le  dos.  On  voit, 
dans  le  lupin  blanc,  cette  singulière  disposition,  et,  dans  quelques  par- 
Pyrénées  où  l'on  cultive  ensemble  les  deux  plantes  que  nous 
venons  de  citer,  les  champs  sont  de  magnifiques  parterres,  on  viennent 
.chevétrer  les  panaches  blancs  du  lupin  et  les  têtes  carminées  du 

-  neh.  La  nuit,  tout  est  changé;  le  lupin  semble  avoir  perdu  ses 
feuilles  et  le  trèfle  ne  montre  plus  sa  fleur.  On  ne  reconnaît  plus,  i 
dan*  le  sommeil,  le  riche  tapis  si  brillant  pendant  le  jour. 


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Pourquoi  ces  modifications  profondes,  ces  instincts  si  divers  dans 
deux  plantes  de  ia  même  famille?  Pourquoi  ces  soins  et  d'où  vient  cette 
espèce  d'abandon?  La  rosée  du  ciel,  utile  à  l'une,  pourrait-elle  nuire  à 
l'autre  qui  cherche  à  s'abriter? 

Dieu  seul  connaît  ces  mystères;  contentons-nous  d'admirer. 

Ainsi,  les  plantes  dorment  comme  les  animaux,  et,  chose  remar- 
quable, ce  sommeil  tend  à  les  rapprocher  de  l'enfance.  La  feuille  a 
comme  un  vague  souvenir  de  la  manière  dont  elle  était  ployée  dans 
son  bourgeon,  lorsque,  avant  d'être  éclose,  elle  dormait  du  sommeil 
léthargique  de  l'hiver,  mollement  couchée  sur  le  duvet  et  chaudement 
abritée  par  ses  fourrures  imperméables. 

Chaque  nuit,  elle  cherche  à  reprendre  cette  ancienne  position,  et, 
comme  si  elle  regrettait  la  perte  de  son  repos,  elle  essaie  de  se 
rapprocher  de  la  situation  qu'elle  avait  dans  son  jeune  âge. 

Il  y  a  plus  :  semblables  aux  animaux  qui,  dans  leur  jeunesse,  sont 
plus  dormeurs  qu'à  un  âge  avancé,  on  voit  les  feuilles  veiller  plus 
longtemps  à  mesure  qu'elles  vieillissent,  dormir  peu,  ne  plus  dormir 
du  tout ,  et  bientôt  après  la  mort  vient  remplacer  le  sommeil. 

Cette  tendance  au  sommeil  dans  le  jeune  âge  est  surtout  remar- 
quable dans  l'acacia  de  Sainte-Hélène  (Acacia  pendilla).  Cette  espèce 
lève  avec  des  feuilles  ailées,  et  la  jeune  plante,  semblable  à  la  sensitive, 
s'endort  profondément  tous  les  soirs.  Pendant  quelques  mois,  des 
feuilles  semblables  se  produisent  ;  elles  sont  ailées  et  dormeuses  comme 
celles  du  Mimosa  dealbata;  mais  bientôt  arrivent  ses  véritables  feuilles; 
entières,  dressées  contre  la  tige,  elles  ne  dorment  plus  et  restent 
toujours  dans  la  même  position. 

Ce  ne  sont  pas  seulement  les  organes  foliacés  des  plantes  qui  sont 
soumis  à  ces  alternatives  de  veilles  et  de  repos  ;  les  fleurs ,  ces  brillants 
météores  de  la  terre,  s'éteignent  aussi  la  nuit  dans  quelques  espèces, 
mais  plus  souvent,  comme  les  astres  du  firmament,  c'est  pendant  la 
nuit  qu'elles  brillent  de  tout  leur  éclat. 

Les  unes  se  couchent  de  bonne  heure  et  se  réveillent  très-tard; 
d'autres  ont  un  sommeil  que  rien  ne  peut  interrompre,  et  pendant 
lequel  la  mort  les  surprend,  tandis  qu'il  en  est  de  capricieuses,  comme 
tout  ce  qui  est  joli,  qui,  à  moitié  endormies,  à  demi-éveillees,  hésitent, 
attendent  si  l'aurore  ramène  le  soleil,  et  s'inquiètent,  avant  d'ouvrir 
complètement  leurs  corolles,  si  de  gros  nuages  ne  cachent  pas  l'horizon, 
si  le  ciel  enfin  sera  assez  pur  pour  qu'elles  puissent  développer,  sans 
les  compromettre,  leurs  magnifiques  toilettes. 

I.a  chicorée  sauvage  forme  ses  jolies  fleurs  bleues  dès  on/f  heures 

BEL6.    HORT.    T.    VI.  7 


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du  matin ,  mais  quelquefois  cependant  elle  attend  jusqu'à  trois  et 
quatre  heures  pour  dormir  complètement. 

A  deux  heures,  le  mouron  des  champs,  si  gracieux  par  ses  corolles 
de  saphir  ou  d'écarlate,  s'assoupit  jusqu'au  lendemain  matin. 

Les  piloselles ,  aux  fleurs  dorées  et  symétriques,  ouvrent  leurs 
disques  à  la  lumière,  se  referment  à  la  même  heure,  et  un  grand 
nombre  de  synanthérées ,  imitant  leur  exemple,  s'endorment  en  plein 
soleil. 

L'œillet  prolifère,  plus  dormeur  encore,  permet  à  peine  que  midi 
ait  sonné  pour  fermer  ses  pétales,  et  il  attend  neuf  heures  du  lende- 
main pour  les  ouvrir. 

Chacun  a  pu  voir  le  pissenlit  se  fermer  à  des  heures  diverses  de 
l'après-midi,  et  les  corolles  blanches  et  roses  des  liserons  sommeiller 
dès  cinq  heures  du  soir.  Les  pourpiers,  les  ficoïdes,  les  Sonclms,  se 
reposent  à  des  heures  diverses  de  la  journée,  et  la  dame  d'onze  heures, 
dont  le  nom  seul  indique  la  paresse  et  la  nonchalance,  ne  s'en  couche 
pas  moins  dès  que  trois  heures  ont  sonné. 

Mais  suivons  le  ruisseau  qui  court  sur  ces  belles  prairies,  et  dont 
les  plis  et  les  méandres  dessinent  un  réseau  mobile  souvent  caché  par 
les  fleurs  assoupies;  nous  verrons  sur  ses  bords  des  groupes  d'Aîisma 
dont  les  pétales  chiffonnés  cachent  les  étamines.  Semblables  à  des 
rideaux  fermés  par  un  mécanisme  invisible,  le  soleil  seul  pourra  les 
ouvrir.  L'impatiente,  aux  tiges  transparentes,  abaissera  ses  feuilles 
sur  ses  fleurs  suspendues,  les  couvrant  ainsi  d'une  tente  mobile  im- 
perméable à  l'eau ,  qui  le  jour  s'élèvera  d'elle-même  pour  redescendre 
encore. 

Les  nénuphars,  dressant  leurs  pétales  charnus,  oscilleront  sur  les 
rides  inégales  des  flots  qui  se  succèdent,  comme  ces  oiseaux  de  mer 
qui,  dormant  sur  la  vague  agitée,  suivent  ses  contours  mobiles  et 
toujours  renaissants,  et  ne  se  réveillent  qu'à  la  brise  du  matin. 

Ainsi  l'on  voit  ces  fleurs,  sous  forme  de  lys  flottants  ou  d'étoiles 
d'or  semées  sur  les  lacs  et  les  ruisseaux,  attendre  la  clarté  du  jour 
pour  redresser  leurs  pédoncules,  entr'ouvrir  leurs  calices  et  se  montrer 
dans  leur  magnificence. 

Nos  étangs  sont  aussi  couverts  de  renoncules  flottantes  qui  s'étendent 
sur  les  eaux  comme  des  étoiles  de  neige  dont  les  rayons  se  relèvent 
le  soir  et  couvrent  les  étamines ,  ainsi  que  le  ferait  un  voile  de  mous- 
seline ou  de  linon. 

Ne  semblerait-il  pas,  après  ces  détails,  que  tout  est  silence  et  repos 
dans  la  nuit,  que  la  nature  entière  est  morte  et  que  les  agitations  du 
monde  sont  suspendues?  11  n'en  est  rien,  les  ténèbres  ont  leur  anima- 


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lion  comme  les  journées  éclairées  par  le  soleil  ;  la  nuit  a  ses  flam- 
beaux, ses  acteurs  et  sa  vie,  les  décors  ont  changé,  mais  le  drame 
continue. 

Si  les  feuilles  sont  en  repos,  si  quelques  fleurs  sont  fermées, 
presque  toutes  ces  dernières  appartiennent  à  la  nuit.  C'est  alors  qu'elles 
éclosent,  on  les  trouve  au  réveil,  et  le  parterre  de  la  chaumière  et  le 
tapis  vert  des  montagnes  se  couvrent  et  s'émaillent  de  corolles  fraîches 
et  odorantes. 

C'est  pendant  l'obscurité  que  la  plupart  des  plantes  répandent  ces 
émanations  qui  parfument  les  nuits  d'été  et  que  l'air  transporte  à  de 
grandes  distances. 

A  l'heure  où  tout  repose,  il  y  a  donc  des  fleurs  qui  étalent  leur 
magnificence  ;  endormies  pendant  le  jour  sous  les  plis  de  leurs  calices, 
c'est  le  soir  seulement  qu'elles  essaient  d'entr'ouvrir  leurs  corolles  ; 
elles  s'éveillent  quand  le  soleil  quitte  notre  hémisphère.  Les  Mirabilis 
déploient  alors  ces  larges  corolles  arrondies  où  le  blanc,  le  jaune  et 
l'écarlate  s'offrent  dans  toute  leur  pureté  et  se  mélangent  de  mille 
manières  différentes  ;  le  Cactus  grandiflorus  attend  la  nuit  close  pour 
épanouir  ses  nombreux  pétales,  pour  écarter  ses  innombrables  éta- 
mines  et  exhaler  le  parfum  le  plus  suave  et  le  plus  délicat.  Il  semble 
vouloir  se  soustraire  à  tous  les  regards  ;  les  ténèbres  sont  nécessaires 
à  son  hyménée,  et  l'aurore  ne  vient  plus  éclairer  qu'un  mystère  ac- 
compli et  une  parure  flétrie. 

Quelques  espèces  moins  impressionnables  conservent  pendant  le  jour 
leurs  corolles  entr'ouvertes,  mais  attendent  le  soir  pour  déceler  leur 
présence  par  les  plus  douces  émanations.  Le  nom  de  tristes  que  tous 
les  botanistes  leur  ont  donné  pour  épithète,  s'applique  à  un  Géranium, 
à  un  Gladiolus,  à  un  Hesperis,  etc.,  dont  les  fleurs  nocturnes  n'avaient 
pas  besoin  d'un  brillant  coloris,  puisque  les  yeux  ne  pouvaient  les 
apercevoir,  et  que  leur  odeur  seule  devait  nous  guider  vers  leur  séjour. 
Pendant  que  la  plupart  de  ses  congénères  sommeillent,  le  Silène 
noctiflora  reste  ouvert  jusqu'aux  lueurs  du  malin.  Les  coquelicots  de 
nos  guérets,  les  gesses  qui  s'attachent  à  nos  buissons,  les  délicates 
graminées  qui  se  balancent  dans  nos  prairies,  les  œnothères  et  les 
épilobes  qui  suivent  le  cours  de  nos  ruisseaux,  la  primevère  de  la 
vallée  et  la  soldanelie  des  montagnes,  profitent  pour  s'ouvrir  de  la 
sérénité  de  la  nuit. 

Jamais,  du  reste,  un  calme  parfait  n'existe  pendant  l'absence  du 
soleil;  au  contraire,  l'oreille  saisit  et  distingue  des  bruits  qui  dans 
le  jour  sont  confus  et  mélangés.  Le  silence  dans  la  nature  est  presque 
inconnu.  L'insecte  bourdonne  encore  sur  la  fleur  qui  s'entr'ouvre,  le 


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sphinx  vient  en  bruissant  y  puiser  le  miel  que  sécrètent  ses  nectaires, 
et  la  noctuelle  déploie  ses  ailes  dont  les  nuances  fondues  ou  con- 
trastantes défient  les  plus  habiles  pinceaux. 

L'air  dans  les  contrées  chaudes  se  remplit  de  mouches  lumineuses, 
étoiles  mobiles  et  vacillantes,  constellations  indécises  qui  semblent 
parodier  le  spectacle  des  cieux. 

Chaque  plante  a  donc  dans  la  journée  ses  heures  de  repos  et 
d'animation ,  et  Linné ,  se  reportant  à  l'âge  d'or  et  aux  simples  besoins 
des  heureux  habitants  de  ce  siècle,  avait  divisé  le  temps  d'après  les 
habitudes  de  veille  et  de  sommeil  des  plantes,  horloge  moins  exacte  que 
poétique,  dont  les  heures  changeaient  suivant  les  latitudes.  La  lumière 
paraît  du  reste  être  la  cause  active  de  cet  état  de  veille  ou  de  repos 
que  nous  montrent  les  végétaux.  M.  Schnetzler  a  remarqué,  pendant 
l'éclipsé  de  soleil  du  28  juillet  1851 ,  que  toutes  les  feuilles  d'un  jeune 
Robinia  pseudo-Acacia  se  rabattirent  pour  dormir  dès  que  la  lumière 
diminua,  et  qu'elles  se  réveillèrent  à  cinq  heures,  quand  le  soleil  brilla 
de  nouveau  de  tout  son  éclat. 

Le  mélilot  a  des  folioles  qui  se  dressent  sur  l'axe  de  la  feuille  ;  celles 
du  Colutea  arborescents  se  relèvent  au-dessus  de  l'axe,  jusqu'à  se  toucher 
par  leur  surface  supérieure,  précisément  après  que  la  lumière  a  cessé 
d'agir. 

La  fleur  de  YOEnothera  biennis  s'ouvre  à  la  nuit  tombante,  par  la 
même  raison  que  les  folioles  du  Robinia  pseudo-Acacia  se  rabattent  dès 
que  l'action  excitante  de  la  lumière  a  cessé  (1). 

C'est  encore  à  l'action  de  la  lumière  qu'est  due  la  tendance  qu'ont 
certaines  fleurs  à  se  tourner  vers  le  soleil,  et  à  suivre  sa  marche 
diurne,  phénomène  qui  a  reçu  le  nom  de  natation.  De  Candole  répète 
avec  les  autres  auteurs  que  ce  fait  est  très- facile  à  voir  dans  YEelian- 
thus  annuus,  soleil  de  nos  jardins.  Nous  croyons  le  fait  inexact,  et 
nous  n'avons  jamais  vu  cette  fleur  suivre  le  cours  de  l'astre  qui  l'éclairé. 

Nous  avons  vu  le  matin  les  chicorées  ouvrir  leurs  fleurs  bleues  en 
face  du  soleil  levant.  Nous  avons  vu  les  anémones  et  toutes  les  pulsatilles 
suivre  son  cours. 

Bory  de  Saint-Vincent  cite  aussi  les  nombreuses  anémones  qu'il 
observa  en  Grèce  comme  constamment  tournées  vers  le  soleil.  «  Je  se- 
rrais tenté  de  croire,  dit-il,  que  ce  mode  de  gyration  invariable  chez 
aies  anémones,  lequel  ne  s'observe  à  un  si  haut  degré  dans  aucune 
»  autre  plante,  dut  être  remarqué  de  temps  immémorial,  et  que  c'est 
»à  ces  végétaux,  bien  mieux  qu'à  ce  qu'on  appelle  héliotrope  et  tour- 

(!)  Bibliothèque  de  Genève,  février  1852.  Archives,  p.  166. 


—  53  — 

»nesol,  que  l'antiquité  voulut  faire  allusion  par  l'histoire  de  la  nymphe 
«CIvtia,  morte  d'amour  pour  Apollon ,  et  qui,  métamorphosée  en  fleur, 
«sembla  conserver  l'habitude  de  poursuivre  de  ses  regards  le  radieux 
»  ingrat  dont  elle  fut  dédaignée  (1).  » 

Dans  l'étude  de  ces  phases  diurnes  excitées  par  la  lumière,  nous 
remarquons  encore  la  fréquence  des  espèces  sensibles  vers  les  régions 
équatoriales ,  et  leur  diminution  vers  le  nord.  Nous  voyons  des  familles 
entières,  comme  les  légumineuses,  cistinées,  rosacées,  nymphœacées, 
plusieurs  renonculacées,  chicoracées,  linées,  balsaminées,  oxalidées, 
portulacées ,  ficoïdées,  alismacées,  offrir,  soit  dans  le  sommeil  de  leur 
feuillage,  soit  dans  l'époque  de  l'épanouissement  de  leurs  fleurs  ou 
dans  les  mouvements  diurnes  et  réguliers  de  leurs  pétales,  des  phéno- 
mènes dus  bien  positivement  à  l'action  que  la  lumière  exerce  sur  leurs 
organes.  Les  légumineuses,  les  balsaminées,  les  oxalidées  sont  surtout 
sensibles  par  leurs  feuilles,  les  autres  par  leurs  fleurs. 

Les  légumineuses  à  feuilles  sensibles,  les  cistinées,  balsaminées, 
oxalidées,  portulacées,  ficoïdées,  deviennent  bien  plus  nombreuses 
dans  les  pays  chauds,  et  d'autres  groupes  impressionnés  par  la  lumière 
viennent  aussi  s'y  ajouter. 

Il  est  remarquable  que  la  majeure  partie  de  ces  plantes  impres- 
sionnables appartiennent  aux  grandes  classes  des  thalamiflores  et  des 
calyciflores,  un  plus  petit  nombre  aux  corolliflores  et  aux  monochla- 
mydées,  et  très-peu  aux  monocotylédones. 

Nous  trouvons  aussi  dans  la  même  famille  des  genres  impression- 
nables et  d'autres  impassibles.  Les  Erodium  sont  météoriques,  les 
Géranium  ne  le  sont  pas  ou  le  sont  moins.  Les  campanules  ne  montrent 
pas  de  sensibilité,  et  les  prismatocarpes  n'ouvrent  leurs  corolles  qu'à 
une  vive  lumière. 

On  comprend  que  ces  mouvements  diurnes  soient  fréquents  dans  des 
contrées  où,  pendant  l'acte  de  la  végétation,  le  jour  succède  régulière- 
ment à  la  nuit,  dans  des  lieux  où  la  longueur  des  nuits  se  rapproche 
sensiblement  de  celle  des  journées  éclairées,  comme  cela  a  lieu  sous  la 
zone  torride.  Par  une  raison  contraire,  les  plantes  dormeuses  ou 
météoriques  doivent  être  rares  vers  les  pôles.  Là,  pendant  la  vie  des 
plantes,  les  journées  sont  longues  et  sans  ténèbres.  Les  nuits,  quand 
elles  existent,  sont  réduites  à  des  crépuscules  éclairés.  Où  seraient  donc 
les  alternatives  qui  rendraient  sensibles  le  sommeil  et  le  réveil  des 
plantes  ?  comment  celles-ci  seraient-elles  guidées  ,  lorsque  les  lépi- 
doptères diurnes  et  nocturnes,  trompés  par  la  lumière,  ne  distinguent 

(1)  Bory,  Exp.  scicntif.  en  Morée,  t.  1 ,  p.  209. 


—  54  — 

plus  la  nuit  du  jour,  échangent  mutuellement  les  heures  consacrées  à 
leurs  jeux  ou  à  leurs  ébats,  et  se  rencontrent  ensemble  sur  des  parterres 
fleuris  qu'une  lumière  continuelle  éclaire  et  fait  éclore. 

Nous  aurions  désiré  donner  ici  le  tableau  des  plantes  impression- 
nables du  plateau  central  de  la  France,  du  midi  de  l'Espagne  et  de  la 
Laponie;  malheureusement  les  études  faites,  à  ce  point  de  vue,  sont 
trop  incomplètes  pour  que  nous  puissions  ajouter  ces  détails  aux  géné- 
ralités que  nous  avons  exposées. 


LES  PALMIERS  DE  LA  GRANDE   SERRE  DE  KEW, 
d'après  un  article  de  M.  J.  Houlston, 

Dans  le   Florish,  frutish  and  Gardai  Miscellany. 

Dans  la  grande  serre  à  palmiers   du  jardin  de  Kew,  les  plantes 
se  portent  mieux  qu'on  ne  l'aurait  présumé,  en  raison  de  la  rigueur 
de  l'hiver  passé.  Plusieurs  individus  deviennent  maintenant  très-grands 
et  prennent  assez  bien  le  port  et  les  proportions  qui  les  distinguent 
dans  leur  pays  natal;  ce  sont  particulièrement  les  Musa,  Zannia,  Ence- 
phalartos,  Pandanus,   Urania,  les  bambous  et  plusieurs  palmiers  qui 
forment  déjà  d'admirables  individus.  Au  nombre  des  plus  beaux  parmi 
ces  derniers,  se  trouvent  :  un  Cocos  plumosa  qui  a  près  de  60  pieds 
anglais  (18m,900)  de  haut,  et  un  Cocos  coronata  de  même  dimension; 
le  palmier  vinifère  des  Indes  orientales  (Caryota  urens)  de  60  pieds, 
le  sagoutier  des  Indes  orientales  (Arenga  saccharifera)  de  40  pieds 
(12m,600),  arbre  magnifique,  l'un  des  plus  beaux  de  la  famille,  dont 
les  feuilles  sont  blanches  à  la  face  inférieure  ;  le  palmier  à  cire  de  la  ' 
Nouvelle-Grenade  (Ceroxylon  andicola),  dont  les  feuilles  sont  également 
blanches  en  dessous  ;  le  grand  palmier-éventail  des  Indes  orientales 
(Sabal  umbraculifera) ,  haut  de  30  pieds  (9m,450),  avec  un  tronc  qui 
mesure  presque  2  pieds  (0m,630)  de  diamètre  à  la  base.  On  voit  encore 
dans  la  même  serre  un  chou-palmiste  d'Australie  (Seaforthia  elegans) 
haut  de  30  pieds  (9m,450)  ;  un  palmier-éventail  d'Australie  (Corypha 
Australis) ,  à  peu  près  aussi  haut  ;  un  palmier  ivoire  végétal  (Phyte- 
lephas  macrocarpa),  de  20  pieds  (6m,300)  ;  un  Livistonia  Borbonica 
de  même  hauteur  et  plusieurs   autres  également  remarquables   par 
leur  beauté  et  par  leurs  fortes  proportions. 


oo 


CONSTRUCTIONS    HORTICOLES. 


RELATION   DU   TRANSPORT   D'UN    PALMIER  GIGANTESQUE,  Latania  Borbonica , 
DU    JARDIN    LODDIGES   AU    PALAIS    DE    CRISTAL    DE    SYDENHAM, 

Par  Sir  P. -F.  Keir. 

La  riche  collection  de  plantes  exotiques  que  possèdent  les  MM.  Lod- 
diges  à  Hackney,  Londres,  jouissait,  il  y  a  un  siècle  déjà,  de  la  grande 
réputation  qu'elle  a  conservée  et  agrandie  aujourd'hui.  Cet  établissement 
fut  fondé  par  Conrad  Loddiges,  natif  de  Hanovre  et  qui  arriva  en 
Angleterre  en  1760.  Il  débuta  comme  jardinier  à  Hackney,  chez 
Jean  Busch ,  le  même  qui  fut  appelé  plus  tard  par  l'impératrice  Cathe- 
rine de  Russie  pour  dessiner  ses  jardins.  Conrad  Loddiges  s'établit 
à  Hackney  et  se  livra  pendant  soixante-dix  ans  au  commerce  des 
plantes.  On  lui  doit  l'introduction  d'une  foule  d'espèces  répandues 
aujourd'hui  dans  tous  les  jardins,  telles  que  les  Rhubarbes,  le  Ro- 
sage  du  Pont,  l'Aucuba  du  Japon,  le  Dahlia,  etc. 

Ses  deux  fils  lui  succédèrent  et  s'appliquèrent  à  donner  un  carac- 
tère scientifique  à  leur  belle  et  grande  collection  ;  ils  envoyèrent  force 
botanistes  voyageurs  dans  les  différents  pays  du  globe  pour  y  cher- 
cher des  plantes  rares  et  intéressantes  ;  aussi  jamais  établissement  ne 
fut  plus  riche  de  toutes  sortes  de  plantes  cultivables. 

Sir  Joseph  Paxton  acheta,  il  y  a  deux  ans,  cette  collection  unique 
pour  compte  de  la  compagnie  du  Palais  de  cristal  de  Sydenham;  ce 
n'était  rien  d'acheter,  de  l'or  suffisait,  mais  il  fallait  transporter  les 
Titans  végétaux  de  Hackney  à  Sydenham  ;  ce  travail  fut  pénible  et 
intéressant. 

Notre  gravure,  empruntée  à  Vlllustrated  London  News  représente ,  ou 
pour  parler  plus  exactement,  devrait  représenter  le  transport  d'un 
gigantesque  Latania  Borbonica  ou  Palmier  à  éventail,  de  Hackney  à 
Sydenham ,  si  le  graveur  n'avait  xylographie  un  Phœnix  au  lieu  d'un 
Latania.  Cet  arbre,  venu  des  îles  Maurice,  appartint  d'abord  à  l'Im- 
pératrice Joséphine  et  ornait  les  serres  du  palais  de  Fontainebleau  : 
plus  tard  il  fut  acheté  et  envoyé  en  Angleterre  par  Thomas  Evans , 
Esq.  à  Stepney  près  de  Londres  ;  à  la  mort  de  cet  amateur,  en  1814, 
M.  Loddiges,  se  rendit  acquéreur  du  Palmier. 

Ce  Latania  Borbonica  n'avait  à  cette  époque  que  cinq  pieds  de 
hauteur  :  il  est  resté  dans  la  Palmière  de  Hackney  jusqu'à  son  trans- 


-  56  - 
PI.   11. 


—  57  — 

port  au  palais  de  Sydenham.  Cet  admirable  végétal  a  maintenant  50 
pieds  de  hauteur  et  pèse  au-dessus  de  2,000  livres  ;  il  se  trouve  dans 
une  caisse  de  8  pieds  carrés  et  le  tout  ensemble  pèse  environ  15  tonnes 
ou  30,000  livres.  Lorsqu'il  s'agit  de  mettre  en  mouvement  cette 
énorme  masse  pour  l'envoyer  au  palais  de  cristal,  on  dut  la  barder  de 
fer  et  de  bois;  on  fit  ensuite  avancer  sous  elle  un  chaniot  qui,  lui- 
même  pesait  14,000  livres  et  sur  lequel  on  laissa  descendre  le  Latania; 
enfin  on  attela  à  ce  précieux  fardeau  32  des  plus  vigoureux  et  des  plus 
beaux  chevaux  de  Londres. 

Quoique  la  gravure  ne  semble  pas  attester  une  aussi  grande  largeur 
de  fronde,  les  feuilles  ont  cependant  souvent  balayé  dans  le  trajet  les 
fenêtres  du  troisième  étage  des  maisons,  et  l'on  sait  si  les  étages  de 
Londres  sont  assez  haut  placés. 

L'établissement  Loddiges  est  maintenant  considérablement  restreint; 
des  rues  nouvelles  ont  traversé  ses  magnifiques  cultures,  jadis  un  des 
plus  beaux  ornements  de  Londres,  et  des  maisons  se  sont  élevées  dans 
le  célèbre  jardin  qui  a  fourni  les  principaux  matériaux  des  riches  et 
belles  collections,  dont  les  Anglais  ont  aujourd'hui  le  droit  d'être  fiers. 

Les  vastes  serres  de  Hackney  possédaient  toutes  les  Orchidées  les 
plus  superbes  et  les  plus  recherchées.  Jamais  on  n'a  vu  en  Angle- 
terre une  collection  aussi  nombreuse  de  cette  famille  aristocratique. 
MM.  Loddiges  unissaient  la  science  à  l'amour  des  fleurs  et  faisaient 
autorité  pour  tout  ce  qui  concerne  la  nomenclature  et  les  caractères 
botaniques  des  espèces  et  des  variétés.  La  collection  de  Camélias  n'était 
pas  moins  admirable,  tant  par  sa  variété  et  sa  richesse  que  par  les 
dimensions  des  plantes  qui,  pendant  l'hiver,  faisaient  l'ornement  obligé 
de  toutes  les  fêtes  et  dont  les  fleurs  brillaient  aux  mains  des  dames. 
Se  promener  dans  les  grandes  serres  des  palmiers,  y  contempler  la 
beauté,  la  variété  et  l'ampleur  du  règne  végétal,  c'était  se  transporter 
dans  une  forêt  du  Brésil  où  l'âme  est  enchaînée  par  le  silence  et  la 
solitude. 

Mais  la  forêt  est  défrichée  maintenant,  tout  est  désert  et  il  ne  reste 
que  le  souvenir  et  les  heureux  résultats  d'une  impulsion  vigoureuse. 
Les  forêts  indiennes  et  américaines  que  MM.  Loddiges  avaient  im- 
portées sur  le  sol  Britannique  sont  transplantées  dans  l'immense 
Palmière  du  jardin  royal  de  Kew  et  dans  les  vastes  transepts  du  Palais 
de  cristal  de  Sydenham. 

M.  Loddiges,  fils,  possédait  en  outre  une  fort  riche  collection  d'oi- 
seaux d'Amérique  et  a  rédigé  pendant  quelques  années  un  journal  de 
botanique  «  The  botanical  cabinet.  » 

BELG.    HORT.    T.    VI.  8 


58 


INSTRUMENTS  D'HORTICULTURE. 


NOUVELLE  SERINGUE-ARROSOIR  ANGLAISE. 


PL   12. 


Nous  mettons  sous  les  yeux  de  nos  lecteurs  une  nouvelle  seringue 
anglaise,  inventée  par  MM.  J.  Tylor  et  fils,  fabricants  de  meubles  hor- 
ticoles à  Londres  (Warwick  Lane ,  Newgate  Street,  London).  Cet 
instrument  réalise  les  conditions  de  la  pompe  aspirante  et  foulante 
et  son  usage  présente  une  foule  d'avantages  parmi  lesquels  l'économie 
de  temps  n'est  pas  le  moindre.  Il  peut  servir  à  lancer  l'eau  sur  les 
plantes  sous  forme  de  pluie  tombant  sur  le  feuillage ,  ou  à  arroser  les 
pots  sans  mouiller  les  feuilles;  il  projette  l'eau  cà  une  hauteur  de 
huit  pieds  et  peut  déposer  dans  un  pot  élevé  sur  un  gradin  à  cette 
hauteur,  juste  la  quantité  d'eau  qui  lui  est  nécessaire.  Cette  seringue 
est  également  avantageuse  pour  les  jardins  et  pour  les  serres,  et  elle 
peut  verser  deux  fois  autant  d'eau,  dans  un  temps  donné,  que  tout 
autre  instrument  de  ce  genre  employé  jusqu'ici.  11  n'est  pas  nécessaire 
après  chaque  coup  de  piston  de  recourir  au  vase  pour  remplir  le 
cylindre,  l'eau  y  arrivant  d'elle-même  par  un  tube  flexible  :  par  suite, 


—  59  — 

on  épargne  beaucoup  de  peine,  beaucoup  de  fatigue  ,  beaucoup  de  temps 
et  on  gagne  beaucoup  de  propreté,  car  l'inventeur  a  en  outre  arrangé 
les  choses  de  manière  à  ce  que  l'eau  ne  surgisse  jamais  par  l'orifice 
supérieur  comme  tant  de  seringues  ont  l'inconvenance  de  le  faire. 

M.  Tylor  et  fils  vend  ses  instruments  à  21  et  25  schellings.  Nous 
espérons  les  voir  bientôt  importer  en  Belgique  et  en  France. 


Fumigateur  a  action  spontanée. 

Cet  appareil  auquel  son  inventeur,  M.  Richard  Gallier,  de  West- 
Bromwich  (Angleterre)  propose  d'attacher  son  propre  nom ,  est  destiné 
à  éviter  aux  jardiniers  et  amateurs  l'inconvénient  de  rester  dans  une 
atmosphère  de  fumée  de  tabac  pendant  l'opération  de  Yenfumage  des 
serres.  Il  consiste  en  une  cheminée  conique,  en  tôle  ou  en  terre  cuite, 
formée  de  deux  moitiés  superposées,  dont  l'inférieure,  élevée  au-dessus 
du  sol  par  des  pieds  assez  courts,  porte  une  grille  dans  son  fond. 
Pour  exécuter  l'opération,  il  suffit  d'enlever  la  moitié  supérieure  de 
la  cheminée,  de  placer  sur  la  grille  trois  ou  quatre  charbons  ardents, 
de  répandre  uniformément  sur  ces  derniers  la  quantité  requise  de 
tabac,  de  remettre  en  place  le  chapeau  de  la  cheminée  et  de  fermer  en 
sortant  la  porte  de  la  serre  :  le  reste  s'exécute  de  lui-même. 


Encre  noire  indélébile  pour  écrire  sur  le  zinc 

Au  moyen  de  l'encre  dont  nous  donnons  ici  la  composition,  on 
peut  inscrire,  avec  une  plume,  le  nom  des  plantes,  sur  les  étiquettes 
de  zinc.  Voici  la  recette  : 

Vert  de  gris  en  poudre,  une  partie. 

Sel  ammoniac  en  poudre,  une  partie. 

Noir  de  fumée,  une  demi-partie. 

Eau,  dix  parties. 

On  mêle  ces  poudres  dans  un  mortier  de  verre  ou  de  porcelaine,' 
en  y  ajoutant  une  partie  d'eau,  afin  d'obtenir  une  pâte  bien  homogène; 
on  verse  ensuite  le  restant  de  l'eau  en  continuant  de  mêler  le  tout 
ensemble. 

Avant  de  se  servir  de  cette  encre,  il  faut  avoir  soin  d'agiter  chaque 
fois  la  bouteille  ou  le  flacon  qui  contient  cette  composition.  Après 
quelques  jours,  les  caractères  prennent  une  grande  solidité.  Le  noir  de 
fumée  petit,  au  besoin,  être  remplacé  par  des  matières  colorantes 
minérales. 


—  60  — 

JARDIN   FRUITIER. 


LA  POMME  FRAMBOISE   OU  CALVILLE  RAYÉ  D'AUTOMNE, 

Par   M.    Royer, 

Conseiller  provincial  à  Namur. 

Cet  excellent  fruit  d'automne  est  particulièrement  connu  dans  les 
provinces  méridionales  de  la  Belgique,  où  on  le  cultive  depuis  très- 
longtemps.  Suivant  Knoop,  il  serait  d'origine  hollandaise;  cet  auteur 
en  fait  grand  cas. 

La  pomme  framboise  est  d'un  beau  volume,  arrondie,  un  peu  dé- 
primée, plus  ou  moins  côtelée,  aplatie  vers  le  pédoncule,  où  elle  a 
sa  plus  grande  largeur;  elle  se  rétrécit  graduellement  vers  le  calice 
pour  se  terminer  en  pointe  obtuse.  La  peau  lisse,  luisante,  vert-clair, 
jaunit  légèrement  à  la  maturité  ;  elle  est  fortement  maculée  de  rouge- 
clair,  et  striée  de  rouge  carmin.  Ce  coloris  est  beaucoup  plus  intense 
du  côté  du  soleil  que  du  côté  de  l'ombre;  parfois  même,  les  fruits 
sont  entièrement  rouges  vers  cette  première  partie,  et  ponctués  de 
gris-roux.  Le  calice  est  clos;  la  cavité  où  il  est  placé,  peu  profonde 
et  côtelée  ;  ses  divisions  sont  brunes,  duveteuses  ;  le  pédoncule,  long 
de  2  centimètres,  est  gros,  vert,  un  peu  charnu;  il  est  placé  dans 
une  cavité  profonde,  très-évasée,  bosselée  ou  côtelée.  La  chair  est 
blanche,  fine,  très-tendre  ou  molle,  remplie  d'une  eau  abondante, 
sucrée,  un  peu  acidulée  et  dont  l'arôme  rappelle  un  peu  celui  de  la 
framboise,  dont  cet  excellent  fruit  porte  le  nom.  Le  trognon  est  cor- 
diforme;  les  loges  sont  grandes,  ouvertes  el  contiennent  ordinairement 
deux  pépins,  petits,  ovales,  aigus  par  un  bout,  obtus  par  l'autre, 
couleur  brun-clair. 

La  pomme  framboise  mûrit  vers  la  fin  de  septembre,  dans  une 
saison  qui  produit  jusqu'ici  peu  de  bonnes  pommes.  C'est  un  motif  de 
plus  pour  lui  donner  une  place  dans  les  jardins ,  où  l'on  pourrait 
avancer  sa  maturité,  en  la  plaçant  en  espalier  à  bonne  exposition. 
On  comblera  ainsi  une  lacune  dans  les  desserts  du  mois  de  septembre, 
déjà  si  riche  en  fruits  de  tout  genre.  Par  leur  beauté  autant  que  par 
leur  agréable  parfum ,  les  pommes  framboises  y  figureront  avec  hon- 
neur. Elles  se  conservent  bien  et  longtemps  au  fruitier. 

L'arbre  est  non-seulement  fertile,  mais  peu  difficile  sur  l'exposition; 


iSV.i 


Pommes    Framboises 


—  61  — 

nous  l'avons  vu  en  espalier  à  l'exposition  du  nord,  donner  en  abon- 
dance de  beaux  et  bons  produits.  Il  est  peu  vigoureux;  ses  rameaux 
sont  grêles,  courts,  cotonneux  à  leur  sommet;  l'épiderme  brun  rouge, 
et  ponctué  de  nombreuses  lenticelles  petites,  gris-roux,  très-appa- 
rentes, proéminentes  et  distribuées  par  groupes  sur  le  rameau.  La 
feuille  est  moyenne,  ovale,  pointue,  assez  épaisse  et  largement  dentée. 

(Ann.  de  Pomologie.) 


NOUVELLE  NOTE  CONCERNANT   LE   FRAISIER  PERPÉTUEL, 

DÉLICES   D'AUTOMNE. 

Nous  avons,  à  la  page  275  du  T.  V  de  la  Belgique  Horticole,  fait 
connaître  les  qualités  d'une  nouvelle  variété  de  fraise.  Ce  que  nous 
disions  était  la  relation  fidèle  de  l'observation  de  1854;  pendant  l'au- 
tomne de  cette  année  (15  octobre)  cette  fraise  était  criblée  de  fleurs  et 
de  fruits  chez  le  producteur,  le  sieur  Lejeune,  gendre  de  M.  Lorio, 
faubourg  Hocheporte ,  à  Liège. 

M.  Jacob-Makoy  s'en  rendit  acquéreur,  la  baptisa  du  titre  pompeux 
et  appétissant  de  délices  d'automne  et  l'annonça  en  vente  dans  son 
catalogue  pour  1855  en  la  décrivant  comme  suit  : 

«  Variété  perpétuelle  des  Alpes,  rouge,  sans  coulant,  gagnée  à  Liège 
et  vendue  pour  la  première  fois  en  novembre  1854.  Chaque  plante- 
mère  donne  deux  à  six  hampes  bien  droites ,  d'environ  20  centimètres 
de  haut.  Dans  la  bonne  saison,  la  longueur  des  fruits  atteint  4  cen- 
timètres sur  3  centimètres  de  largeur.  Cette  perpétuelle  est  très-rus- 
tique, car  malgré  4°  R.  sous  zéro  et  en  plein  air,  il  y  avait  encore  à 
la  mi-novembre  des  fruits  mangeables  de  3  centimètres  de  haut  et 
3  centimètres  de  diamètre.  » 

Mais  il  parait  que  cette  appréciation  était  prématurée,  car,  disons-le 
sans  détour,  quantum  mutatur  ab  Mo  tempore,  les  prétendus  Délices 
d'automne  ont  cette  année  trompé  l'attente  générale  ;  ils  n'ont  produit 
qu'une  seule  récolte  abondante,  comme  font  toutes  les  fraises  :  quelques 
fleurs  qui  se  sont  montrées  cà  et  là,  pendant  l'automne  1855,  autorisent 
seules  d'attendre  l'expérience  de  l'année  prochaine  et  de  supposer  que 
les  Délices  d'automne  pourraient  bien  se  transformer  en  Délices  d'hiver 
par  la  facilité  de  leur  culture  forcée.  Nous  crûmes  devoir  signaler  à 
nos  lecteurs  une  fraise  dont  l'apparition  en  1854  avait  fait  sensation  à 
Liège  ;  il  était  donc  de  notre  devoir  de  leur  faire  connaître  le  sort  qui 
lui  était  réservé  en  1855  :  attendons  1856  :  il  ne  passera  que  trop  tôt. 


—  62  — 

CULTURE    MARAICHERE. 


LES  RADIS  D'AUTOMNE  OU  D'HIVER, 
Par  M.  Pierre  Joigneaux. 

Le  vocabulaire  des  jardiniers  est  surtout  remarquable  par  la  confu- 
sion qui  y  règne:  la  plupart  du  temps,  c'est  à  ne  pas  s'y  reconnaître. 
Les  mots  dont  ils  se  servent  changent  avec  les  localités,  et  il  s'ensuit 
toutes  sortes  de  mécomptes.  On  ferait  bien,  ce  nous  semble,  de  mettre 
un  peu  d'ordre  dans  ce  chaos  des  jargons  et  d'adopter  une  langue  horti- 
cole qui  eût  pour  tous  et  dans  tous  les  pays  la  même  signification.  S'il 
était  nécessaire  d'en  démontrer  l'utilité,  nous  prendrions  pour  exemple 
la  confusion  qui  existe  à  l'endroit  des  radis  d'automne  ou  d'hiver. 
Dans  une  grande  partie  de  la  France,  et  à  Paris  notamment,  on  les 
désigne  sous  le  nom  de  raifort,  bien  qu'ils  n'aient  pour  ainsi  dire 
aucune  ressemblance  avec  le  véritable  raifort  qui  n'est  autre  chose  que 
le  cochlearia  armoracia  ou  moutarde  de  capucin.  Dans  les  Vosges,  ces 
mêmes  radis  portent  le  nom  de  raves,  tandis  qu'en  réalité  la  rave  n'est 
autre  chose  que  le  navet  de  la  grande  culture.  A  Bruxelles,  ce  sont 
des  radis  gris  d'été,  des  radis  de  saison,  des  radis  de  tous  les  mois. 
Dans  la  province  de  Luxembourg,  enfin,  ce  sont  des  ramonasses. 
Comment  se  retrouverait-on  au  milieu  de  ce  désordre  d'appellations? 

Sous  le  nom  de  radis  d'automne  ou  d'hiver,  nous  entendons  désigner 
ces  radis  de  la  grosse  espèce,  que  l'on  sème  ordinairement  en  juin, 
juillet  et  août,  pour  les  récoller  en  automne  et  les  manger  à  titre 
d'assaisonnement,  par  tranches  crues,  saupoudrés  de  sel  et  quelquefois 
aiguisés  d'un  filet  de  vinaigre.  Ces  radis  se  rapprochent  des  navets  de 
table  par  le  volume  et  la  forme  de  leurs  racines.  Il  y  en  a  de  ronds 
comme  une  toupie;  il  y  en  a  de  longs  et  de  cylindriques.  Les  plus 
communs  de  ces  radis  et  les  mieux  connus  sont  de  couleur  grise  ou 
brunâtre;  les  variétés  les  plus  nouvelles  sont:  le  rose  de  Chine,  le 
blanc  de  Chine,  le  blanc  d'Augsbourg  et  le  gros  violet.  Les  personnes 
qui  ont  écrit  sur  le  jardinage  vantent  beaucoup  ces  variétés  nouvelles, 
les  trouvent  plus  délicates,  plus  fines  et  moins  sujettes  à  devenir 
cotonneuses  que  le  radis  gris;  mais  les  consommateurs  ne  sont  pas, 
à  beaucoup  près,  de  cet  avis:  leur  saveur  n'a  pas  le  montant,  le 
piquant  du  vieux  radis  gris;  elle  se  rapproche  trop  de  la  saveur  de 


—  63  — 

navet.  Nous  avons  cultivé  le  rose,  le  violet,  tous  deux  à  racines 
longues  et  rondes,  et,  pour  notre  compte,  nous  les  plaçons  bien 
au-dessous  du  radis  gris  ou  brunâtre,  en  forme  de  toupie.  On  dit 
beaucoup  de  bien  du  blanc  de  Chine  à  feuilles  longues,  et  surtout  du 
blanc  d'Augsbourg,  dont  la  racine  ressemble  à  une  toupie  renversée. 
Nous  ne  connaissons  pas  ces  variétés,  et  n'avons,  par  conséquent,  pas 
qualité  pour  nous  prononcer. 

La  culture  du  radis  d'automne  ou  d'hiver  ne  présente  pas  la  moindre 
difficulté.  On  peut  les  semer  clair  en  planches  de  quinzaine  en  quin- 
zaine, du  mois  de  juin  à  la  lin  d'août,  dans  une  terre  bien  ameublée 
et  bien  fumée  de  l'année  précédente.  Autant  que  possible,  on  recher- 
chera une  exposition  un  peu  ombragée  et  l'on  ne  ménagera  pas  les 
arrosements  en  temps  de  sécheresse.  Le  plus  souvent,  on  disperse  les 
graines  une  à  une,  de  loin  en  loin,  parmi  les  asperges,  les  oignons, 
les  endives,  etc.  Dans  quelques  localités  de  la  France,  sur  certains 
points  des  Vosges,  par  exemple,  où  l'on  consomme  beaucoup  de  radis 
gris  et  blancs  d'automne  ou  d'hiver,  sous  le  nom  de  raves,  il  est 
d'usage,  pour  les  obtenir  d'un  beau  volume,  de  procéder  à  une  sorte 
de  pralinage  qui  nous  inspire  plus  de  confiance  que  celui  de  M.  Bickès. 
Ce  pralinage  consiste  à  introduire  la  graine  dans  une  crotte  de  chèvre 
et  à  mettre  le  tout  en  terre. 

Les  gros  radis,  dont  il  est  question  dans  cet  article,  deviennent 
spongieux  ou  cotonneux,  comme  disent  les  gens  du  métier,  toutes  les 
fois  qu'après  les  avoir  semés  de  bonne  heure  on  veut  les  conserver 
l'hiver  en  cave.  A  cet  effet,  on  aura  donc  soin  de  ne  prendre  que  les 
derniers  semés  et  de  les  conserver  dans  du  sable  frais  ou  de  la  terre 
fine,  aussitôt  après  la  récolte.  Ils  se  maintiendront  ainsi  parfaitement 
fermes  pendant  longtemps. 


—  64  — 

AGROLOGIE    HORTICOLE. 


SUR  LES  AVANTAGES  DE  L'EMPLOI  DE  L'ENGRAIS  LIQUIDE 

POUR  LA  VÉGÉTATION  DES  PLANTES. 


Il  n'est,  aucun  point  de  la  culture  des  plantes,  qui  exige  plus  de 
précautions,  de  connaissances  et  de  surveillance  que  l'application  des 
engrais  liquides.  Lorsqu'une  plante  est  confinée  dans  un  pot,  l'accrois- 
sement de  ses  racines  produit  un  exhaussement  du  sol  et  bientôt  la 
terre  ne  peut  plus  fournir  assez  de  nourriture  ;  si  l'on  veut  que  la 
plante  grandisse  rapidement,  on  doit  remplacer  cette  terre  épuisée  par 
de  la  terre  vierge  ou  avoir  recours  à  l'engrais  liquide.  On  ne  saurait 
trop  recommander  à  l'attention  des  fleuristes  les  avantages  de  cet  auxi- 
liaire, qui  devrait  être  beaucoup  plus  employé  qu'il  ne  l'est.  J'ai 
toujours  remarqué  l'action  merveilleuse  de  cet  engrais  sur  les  plantes 
très-florifères,  telles  que  les  pétunias,  géraniums,  certaines  calcéolaires, 
les  balsamines  et  les  crètes-de-coq,  et  jamais  je  n'ai  rencontré  une 
plante  d'ornement  qui  ne  se  trouvât  pas  bien  de  l'usage  d'une  plus  ou 
moins  grande  quantité  de  cet  élément.  Beaucoup  de  plantes  de  la 
Nouvelle-Hollande  sont  d'une  vigueur  extraordinaire  lorsqu'elles  sont 
soumises  à  ce  traitement;  les  Epacris,  Diosma,  Pohjgala,  etc.,  et  beau- 
coup de  bruyères  même,  profitent  beaucoup  de  l'engrais  liquide  con- 
venablement employé,  par  exemple,  une  fois  tous  les  huit  ou  dix  jours. 
En  arrosant  les  plantes  avec  cet  engrais,  on  remarquera,  qu'après 
l'avoir  employé  un  certains  temps,  le  sol  ne  se  desséchera  pas  aussi 
promptement  que  s'il  avait  été  humecté  avec  de  l'eau  claire,  et  ceci, 
indépendamment  des  propriétés  nutritives  extraordinaires  qu'il  aura 
communiquées  au  sol;  c'est  déjà  un  résultat  assez  important  que  de 
parvenir  à  cultiver  des  plantes  sans  être  astreint  à  des  arrosages 
continuels.  Il  n'est  pas  plus  difficile  d'user  de  l'engrais  liquide  que 
d'employer  l'eau  ordinaire,  et  considérant  tous  les  avantages  que  l'on 
en  retire,  il  est  vraiment  inexplicable  que  son  usage  ne  soit  pas  plus 
répandu. 

(Traduit  librement  de  l'anglais.) 


i.  La  vatera  mantima  .  Gtnian.  2.  Stvlidiuin   recurvum  .  GraKam 


65 


B 


HORTICULTURE, 


NOTE  SUR  LE  LAVATERA  MARITIMA,  Govan, 
El  les  principales  espèces  dti  même  genre, 

Par  M.   Edouard  Morren. 

Les  Lavaters  sont  de  belles  Malvaeées  spontanées  dans  l'Europe 
méridionale,  surtout  dans  le  bassin  de  la  Méditerranée;  voisins  des 
Malva,  M  al  ope,  Althœa,  Sida,  Hibiscus,  Pavonia  et  Abutilon,  ils 
établissent  le  passage  entre  les  mauves  herbacées  des  latitudes  tem- 
pérées et  les  gigantesques  Bombax,  Carolinea  et  Adansonia  (Baobabs) 
des  tropiques;  quelques-uns  sont  annuels  et  herbacés,  beaucoup 
forment,  des  arbrisseaux  ou  des  arbustes  ayant  le  port  des  Abutilon 
et  des  Gossypium  ou  Cotonniers.  Leur  nom  rappelle  celui  des  Lavater, 
famille  dont  plusieurs  membres  illustrèrent  Zurich,  depuis  Louis 
Lavater,  né  en  -1527,  jusqu'au  célèbre  auteur  des  Essais  physiogno- 
moniques,  Jean-Gaspard  Lavater  ;  il  consacre  spécialement  la  mémoire 
de  Henri  Lavater,  médecin  et  naturaliste,  et  de  son  fils  Jean-Henri,  qui 
lui  succéda  dans  la  chaire  de  mathématiques  et  de  physique. 

Le  genre  Lavater  fait  partie  de  la  monadelphie  polyandrie  de  Linné 
et  de  la  famille  des  Malvaeées  de  la  méthode  naturelle.  Il  était  primi- 
tivement réuni  au  genre  Malva,  mauve.  Ce  nom  de  Malva,  dériverait, 
suivant  quelques-uns,  du  mot  grec  ^«a*^,  adoucissant,  qui  lui-même 
a  pour  racine  ftxXecxte  ou  ftet^aa-a-a,  adoucir,  et  ferait  ainsi  allusion  aux 
propriétés  émollientes  et  laxatives  de  la  plante.  Mais  d'autres  sou- 
tiennent, à  tort  pensons-nous,  que  Malva  dérive  de  l'hébreu,  parce  que 
le  nom  hébreu  des  mauves  est  Malluach,  à  cause  de  leur  saveur  salée  ; 
malach  signifiait  sel  dans  le  langage  des  prophètes.  Les  Grecs  et  les 
Romains  mangeaient  la  mauve  cuite  ou  crue  en  salade,  usage  que  nous 
retrouvons  encore  chez  les  Chinois.  L'histoire  nous  apprend  aussi 
qu'une  mauve  ligneuse  était  très-estirr.ée  comme  aliment  chez  les 
Egyptiens. 

Tout  le  monde  sait  que  la  mauve,  dans  le  langage  des  fleurs,  est  l'em- 
blème de  la  douceur  et  d'une  tendre  disposition,  et  voilà  pourquoi  elle 
était  rangée  par  les  anciens  au  nombre  des  plantes  funèbres  :  ils  avaient 
coutume  de  border  les  tombes  de  leurs  amis  de  mauves  et  d'asphodèles. 

Le  genre  Lavatera  a  été  distrait  de  celui  des  mauves  par  le  célèbre 
Tournefort,  professeur  de  Botanique  au  Jardin  du  Roi, à  Paris,  de  1686 
oek;.  hort.  t.  vi.  9 


—  66  — 

à  1708.  Il  est  caractérisé  par  :  un  involucre  à  3,  6  ou  9  divisions  cohé- 
rentes; un  calice  quinquéfide,  une  corolle  formée  de  cinq  pétales 
ovales.  Etamines  cohérentes  en  un  tube  dilaté  à  la  base,  recouvrant  les 
ovaires  et  se  prolongeant  en  une  colonne  terminée  par  un  grand  nombre 
de  filets.  Ovaires  nombreux,  disposés  en  verticille  autour  de  la  base 
d'un  axe  floral  allongé  en  cône  ou  dilaté  soit  en  disque  orbiculaire,  soit 
en  petites  crêtes.  Le  style  est  terminé  par  des  stigmates  nombreux.  Les 
fruits  ne  s'ouvrent  pas  à  la  maturité,  mais  se  séparent  de  l'axe. 

Ce  genre  est  riche  en  espèces  d'ornement  pour  les  jardins  et  les 
serres  tempérées,  d'une  culture  facile  et  à  fleurs  grandes,  d'un  coloris 
toujours  brillant  ou  tendre. 

Le  Lavatera  maritima,  Gouan  (L.  rotundifolia  de  Lamarck)  cons- 
titue un  arbuste  qui  peut  s'élever  jusqu'à  deux  mètres,  très-branchu,  à 
feuilles  orbiculaires,  ordinairement  à  base  tronquée,  dentées,  les  supé- 
rieures lobées,  recouvertes  de  poils  mous,  blancs  et  cotonneux,  per- 
sistantes. Les  fleurs  sont  nombreuses,  naissent  de  pédoncules  axillaires 
solitaires,  de  la  longueur  des  feuilles;  elles  sont  blanches,  roses  ou  à 
fond  blanc  lavé  ou  maculé  de  diverses  nuances  de  rose,  à  onglet  pourpre, 
larges  et  étalées.  L'involucre  est  plus  court  que  le  calice,  non  ac- 
eressent,  à  lobes  lancéolés,  un  peu  étalés.  Calice  à  divisions  triangulaires, 
dressées,  conniventes.  Corolle  une  fois  plus  longue  que  le  calice.  Car- 
pelles glabres,  noircissant  à  la  maturité,  rugueux,  à  dos  plane,  à  bords 
aigus  et  ondulés.  Axe  floral  en  petit  cône,  relevé  de  crêtes  membra- 
neuses et  ne  recouvrant  pas  les  carpelles. 

Le  Lavater  maritime  croît  autour  de  la  Méditerranée,  dans  le  midi 
de  la  France,  en  Sardaigne,  sur  les  côtes  orientales  d'Espagne  et 
exceptionnellement  dans  quelques  îles  de  la  Bretagne  française  (île 
d'Houat,  Belle-Ile-en-Mer,  etc.). 

On  le  cultive  en  été  en  pleine  terre  dans  le  jardin,  en  hiver  en  serre 
tempérée,  et  on  le  multiplie  par  graines  ou  boutures. 
Les  principaux  Lavaters  cultivés  sont  les  suivants  : 
Lavatera  t riméstrig ,   L.    (Stegia   lavatera    DC.)    ou    Mauve- 
fleurie. 

Elle  est  annuelle,  de  pleine  terre  et  spontanée  dans  l'Europe  méri- 
dionale. Les  feuilles  sont  d'un  vert  gai,  glabres,  les  fleurs  grandes, 
blanches,  roses  ou  pourpres. 

ï.avnccrn.nrevifoiin,  DC.  ou  Lavater  à  feuilles  d'érable. 

Arbuste  de  serre  tempérée,  originaire  de  Ténérif  et  des  Canaries. 

Les  feuilles  sont  à  f>  ou  7  lobes  aigus,  sub-dentées,  presque  glabres. 

Les  fleurs  naissent  solitaires  sur  des  pédoncules  axillaires;  les  pétales 

grands,  blancs,   lilns  ou  lavés  de  rose,  tachés  de  pourpre  à  la  base. 


—  67  — 

Lavatera  oEbia,  L.  ou  Lavater  d'Hyères. 

Les  tiges  sont  rameuses;  les  feuilles  crénelées  ou  presque  entières, 
les  inférieures  cordées  à  3  ou  5  lobes.  Pédoncules  axillaires,  solitaires, 
très-courts;  pétales  purpurins,  bilobés,  deux  ou  trois  fois  plus  long* 
que  le  calice.  Axe  floral  prolongé  en  saillie  hémisphérique,  ne  recou- 
vrant pas  le  carpelle.  Il  forme  un  arbuste  de  1  à  1  1/2  mètre,  qui 
réclame  l'orangerie  en  hiver. 

Lavatera  Thuringsiaea,  L.  ou  Lavater  de  Thuringe. 

Plante  vivace,  herbacée,  de  pleine  terre,  à  tiges  hautes  de  1-2  mètres, 
cotonneuses.  Feuilles  inférieures  anguleuses,  les  supérieures  trilobées, 
à  lobe  médian  plus  long.  Pédoncules  solitaires,  uniflores,  plus  longs 
que  le  pétiole.  Pétales  roses  bilobés.  Originaire  de  l'Allemagne  et  de 
la  Russie. 

Ravalera  arDiorea,  L.  ou  Lavater  en  arbre. 

Tiges  hautes  de  deux  à  trois  mètres ,  très-rameuses,  à  feuilles  d'un 
vert  pâle,  cotonneuses,  plissées ,  crénelées.  Pédoncules  axillaires 
agrégés,  inégaux,  plus  courts  que  la  feuille.  Involucre  plus  grand  que 
le  calice,  accressent.  Pétales  violets ,  deux  fois  plus  grands  que  le  calice. 
Bisannuel,  spontané  sur  les  rochers  maritimes. 

On  cultive  en  outre  comme  arbustes  d'ornement  des  orangeries,  de 
serre  tempérée  ou  de  jardin  d'hiver  :  le  Lavatera  hispida,  DC,  à  fleurs 
roses  et  sauvage  à  Alger;  le  Lav.  unguiculata,  DC.  à  fleurs  pourpres, 
venu  de  Grèce;  le  Lav.  micans,  DC,  originaire  d'Espagne;  le  Lav.  lusi- 
tanica,  DC,  du  Portugal;  le  Lav.  triloba,  DC,  à  fleurs  lilas  et  natif 
d'Espagne,  etc. 

On  sème  en  pleine  terre  les  espèces  annuelles  suivantes  : 

Lavatera  mollis,  Chr.  (Egypte);  ambigaa,  DC  (Naples);  syl- 
vestris,  DG.  (Portugal);  lanceolota,  W.;  cretica,  DC  (Crète);  Neapo- 
litana,  DC  (Naples);  etc. 


APERÇU  SUR  LE  STYLIDIUM  RECURVUM  de-  Grahenn, 
Et   les  autres  espèces  du  même-  genre, 

Par  M.   Edouard  Morren. 

Cette  charmante  Styîidiée  croît  en  Australie,  dans  les  endroits  tour- 
beux, sous  les  arbustes,  ou  attachée  aux  flancs  des  montagnes  entre 
les  pierres  dans  des  stations  ombragées.  Les  tiges  sont  rameuses, 
hautes  rie  quelques  pouces;  les  feuilles  nombreuses,  forment  de  petites 


—  6H  ~ 

rosaces,  subulées,  recourbées,  à  bords  membraneux  inférieurement. 
Les  fleurs  sont  rassemblées  en  une  cime  un  peu  rameuse,  nombreuses 
et  d'un  beau  rouge. 

Le  genre  Stijlidium  compte  un  grand  nombre  d'espèces  intéressantes 
par  la  beauté  de  leurs  corolles  et  la  singularité  de  leurs  mœurs  :  nous 
croyons  donc  qu'on  lira  avec  intérêt  la  monographie  suivante  du  genre 
Stijlidium,  traduite  du  Hamburger-BlumenzeUimg,  par  la  rédaction  de 
la  Flore  des  Serres. 

«  Quoique  les  espèces  du  genre  Stijlidium  aient  rang  parmi  les  plus 
jolies  plantes,  on  les  trouve  cependant  fort  peu  répandues  dans  les 
jardins;  chose  d'autant  plus  étonnante  que  leur  culture  n'offre  d'ordi- 
naire pas  de  difficulté  sérieuse.  Sur  près  de  cent  espèces  connues, 
il  ne  s'en  trouve  pas  vingt  dans  les  différentes  collections  de  l'Angle- 
terre et  du  continent.  A  l'exception  de  deux  ou  trois,  toutes  les  espèces 
connues  jusqu'à  ce  jour  proviennent  de  l'Australie,  où  la  plupart 
croissent  sur  les  bords  de  la  rivière  des  Cygnes  [Swan-River).  Dans  les 
Plantœ  Preisseanœ,  le  Dr  Sonder  en  énumère  plus  de  70,  parmi  les- 
quelles il  en  décrit  environ  40  nouvelles.  Ces  dernières  lurent  dé- 
couvertes et  introduites  par  le  Dr  Preiss,  qui  en  lit  parvenir  des 
exemplaires  d'herbier,  en  même  temps  que  des  graines. 

»Les  Stijlidium  offrent  tous,  sous  le  rapport  physiologique,  un  carac- 
tère extrêmement  curieux.  Les  étamines  et  le  pistil,  sont,  comme  chez 
les  Orchidées,  soudés  en  un  gynostème;  les  deux  anthères,  placées  aux 
deux  côtés  du  stigmate,  se  tournent  le  dos.  On  comprend  donc  aisé- 
ment la  difficulté  d'un  contact  entre  le  pollen  et  le  stigmate.  Mais  la 
nature  sait  obvier  à  tout.  Elle  a  imprimé  au  gynostème,  vers  le  milieu 
de  sa  longueur,  une  courbure  formée  de  cellules  très-irritables.  A  la 
moindre  secousse  qu'éprouve  la  fleur,  cette  courbure  se  redresse  avec 
une  grande  rapidité.  Ce  mouvement  fait  tomber  le  pollen  mûr  sur  le 
stigmate,  et  la  fécondation  est  consommée. 

»Pour  cultiver  les  Stijlidium  avec  succès,  on  les  place  pendant  l'hiver 
dans  une  serre  froide,  en  un  endroit  sec  et  éclairé;  car  tous,  et  princi- 
palement les  espèces  à  feuilles  disposées  en  rosettes,  souffrent  promp- 
tement  de  l'humidité.  On  rempote  les  plantes  au  printemps,  et  on 
les  place  sous  châssis  froid,  où  l'été  les  voit  se  développer  à  merveille. 
Pendant  les  jours  de  soleil  on  leur  donne  de  l'ombre,  le  soleil  brûlant 
en  été  leur  étant  tout  aussi  funeste  que  l'humidité  en  hiver.  On  doit 
user  de  prudence  dans  les  arrosements  et  prendre  garde  que  la  terre 
où  elles  croissent  ne  s'aigrisse.  On  prévient  cet  inconvénient  en  mettant 
une  couche  de  tessons  au  fond  du  pot.  Le  compost  qui  leur  plaitle 
mieux,  c'est  de  la  terre  de  feuilles,  de  la  terre  de  gazons  et  un  peu  de 


69  — 


terre  de  bruyère;  on  y  ajoute  un  peu  de  sable  el  du  charbon  de  bois. 
La  multiplication  se  fait  de  graines,  de  boutures  ou  d'éclats. 

«Les  espèces  les  plus  connues,  que  l'on  cultive  dans  les  jardins,  sont 
les  suivantes  : 


1.  SIYLIDfUtt  ADNATUM,  R.  Br. 
[Bot.  Reg.  t.  9iS). 

Connu  depuis  18*24  ;  les  petites  tiges 
qui  s'élèvent  du  rhizome  atteignent  5  à  6 
pouces  de  hauteur,  et  sont,  dès  leur  base, 
couvertes  de  feuilles.  Racème  floral  sim- 
ple, terminal.  Fleurs  petites,  rose  clair. 

2.  STYLIDIUM  FASCICULATUM,  R. 
Br.  [Bot.  Mag.  t.  5816;  Bot.  Reg.  t. 
1459). 

Ressemble  au  précédent,  n'est  proba- 
blement qu'annuel.  Fleurs  en  racème 
long,  terminal,  non  branchu  ;  d'un  blanc 
rougeâlre,  petites. 

5.  STYLIDIUM  FRUTICOSUM,R  Br. 
[glandulosum ,  Salisb.). 

Connu  depuis  180-3.  Petit  buisson,  tige 
ayant  V-2  pied  de  hauteur,  fleurs  au  som- 
met de  la  lige,  petites,  rose  clair. 

4. STYLIDIUM  LARICIFOLIUM,  Rich. 
[Bot.  Reg.  t.  550),  tenuifolium  [liai. 
Mag.  t.  2249). 

Introduit  dès  1818.  Gazonnnnt ,  ra- 
meaux littéralement  couverts  de  feuilles 
étroites,  linéaires.  Racème  floral  au  som- 
met de  la  lige,  branchu.  Fleurs  grandes, 
roses. 

5.  STYLIDIUM  RECURVUM,  Grah. 
[Bot.  Mag.  t.  5913),  St.  bulbi/erum  Blh., 
proliferum,  DC. 

Tige  haute  de  G  pouces,  semi-gazon- 
nante,  grêle,  branchue;  fleurs  terminales, 
petites,  rouges. 

6.  STYLIDIUM  SCANDEKS,  R.  Br. 
[Bot.  Mugi  t.  3136.  Ham.bg.  Gurtenztg. 
V.  p.  114.) 

Connu  depuis  1803.  Tige  haute  de  1  </i 
à  2  pieds,  grêle,  d'une  apparence  rou- 
geâlre, branchue;  feuilles  longues  de  3  '/.> 
pouces,  linéaires,  en  verlicille,  à  pointe  re- 
courbée. Racème  dressé;  il  yen  a  plusieurs 
au  sommet  des  branches.  Fleurs  grandes, 
d'un  beau  violet;  très-belle  espèce. 

7.  STYLIDIUM  SAXIFKAGOIDES  > 
Lindl.  [Bot.  Mag.  t.  4529  ;  Belcj.  Hort. 
IV.  9'  livraison).  St.assimilc  Bth.  Hatnbg. 
Gurtenztg.  VI.  p.  -'«63. 


Feuilles  radicales,  disposées  en  rosettes 
très-rapprorhées;  tige  florale  s'élevant  du 
milieu  des  rosettes,  haute  de  t/.2  -  I  pied, 
fleurs  en  racème  simple,  grandes,  jaunes, 
belles. 

S.STYL.GRAMINIFOLlUM,Sw.  (fiof. 
Mag.  t.  1918.  Bot.  Reg.  I.  t.  90). 

Introduit  en  1803.  Feuilles  radicales, 
disposées  en  rosettes;  tige  florale,  haute 
de  1  à  2  pieds,  fleurs  en  racème  terminal, 
grandes,  rouge  puce;  belle  espèce. 

9.  STYLIDIUM  LEHMANNIANUM  , 
Sond.  (ftntœniim  Ohlendff.). 

Feuilles  radicales  en  rosettes.  Tige  flo- 
rale, haute  de 5  à  5  pouces,  fleurs  grandes, 
jaune  nankin. 

10.  STYLIDIUM  L1NDLEYANUM, 
Sond.  [St.  cnulrosaceum  Lindl.). 

Fleurs  nankin. 

11.  STYLIDIUM  ARMERIA.  Rich. 
Feuillesradicales,  disposéesen  rosettes. 

Tige  florale,  haute  de  4  à  6  pouces,  fleurs 
grandes,  rouge  foncé. 

VI.  STYLIDIUM  MELOSTACI1YS,  R. 
Br.,  Prod  ,  FI.  N.  IL,  p-  568.  DC.  Prod. 
VII,  p.  533. 

L'illustre  Robert  Brown  et  son  compa- 
gnon de  voyage,  Ferd.  Baner,  découvri- 
rent les  premiers  celte  jolie  espèce  dans 
la  terre  de  Van  Diémen.  Le  jardin  bota- 
nique de  l'université  de  Vienne  en  a  reçu 
des  graines,  en  1852,  du  jardin  botanique 
de  Heyne.  Les  fleurs  sont  rose  lilacé  et 
de  longue  durée  :  l'espèce  est  de  serre 
froide. 

13.  STYLIDIUM  MUCROXIFOLIUM  , 
Sond.  {Bot.  Mag.  t.  4538.  Hambg.  Gur- 
tenztg VI.  p.  520  )  St.  Hookeri,  FI.  des 
Serres.  VI,  p.  229. 

Tige  haute  de  2  à  3  pouces,  entièrement 
recouverte  de  feuilles  très-étroites.  Ra- 
cème floral  terminal,  long  de  6  à  8  pouces. 
Fleurs  grandes,  d'un  jaune  brillant. 

14.  STYLIDIUM  CILIATUM  .  Lindl. 
[Bot.  Mag.  t.  3883.)  St.  setigertim,  DC. 

Feuilles  radicales  en  rosettes.  Tige  flo 
raie  haute  de  1  à  1  ,!*  pied,  fleurs  jaunes. 


ÏO 


18.  STYLIDIUM  BRUNONIAMJM  , 
Blh.  (Bot.  Iîeg.  vol.  28,  t.  15). 

Feuilles  radicales  en  rosettes  ;  de  leur 
milieu  s'élève  une  lige  florale  haute  d'en- 
viron 1  pied.  Fleurs  nombreuses,  en  ra- 
cème  terminal,  beau  rose. 

16.  STYLIDIUM  SUFFRUTICOSUM... 
Cité  dans  le  catalogue  de  M.  Low  à 

Clapton. 

17.  STYLIDIUM  JUNCEUM.  R.  Br. 
Feuilles  radicales  disposées  en  rosettes. 

Fleurs  rouges. 


18.  STYLIDIUM  HIRSUTUM,  R.  Br. 
(Bot.  Mag.  t.  3194). 

Feuilles  radicales,  ayant  presque  6 
pouces  de  longueur,  dressées  ;  lige  radi- 
cale, dépassant  9  pouces,  également  dres- 
sée. Racème  floral  terminal,  long  de  1  à 
1  i/s  pouce;  fleurs  roses  foncées, grandes. 

19.  STYLIDIUM  P1LOSUM  ,  Labill. 
(Bot  Mag.  1842  t.  41,  St.  longiful.,  Rich.) 

Feuilles  radicales,  dressées;  racème  à 
fleurs,  haul  d'un  pied  ;  fleurs  grandes, 
blanches. 


«Bien  cultivées,  les  espèces  énumérées  ci-dessus  sont  presque  toutes 
d'un  très-joli  effet  dans  les  serres  froides.  Ce  qu'il  importe  le  plus 
d'obtenir  dans  la  culture  de  ces  plantes,  ce  sont  des  exemplaires  forts. 
Les  espèces  3,  4,  6,  7,  8,  11,  12,  13,  14,  15,  18  et  19  sont  parti- 
culièrement dignes  d'être  cultivées;  elles  se  distinguent  des  autres  par 
des  fleurs  assez  grandes  et  d'un  brillant  coloris.» 


REVUE  DE  PLANTES  NOUVELLES  OU  INTÉRESSANTES. 

Isoinma  Triaiiœi.  Regel.  —  Isoîome  de  Triano.  —  Regel, 
Gart.  Flora  IV,  107,  PL  82.—  Illust.  Horticole.  1855.  PL  57.- 
Famille  des  Gesnériacées.  —  Cette  jolie  Gesnériacée  a  été  découverte 
dans  la  province  de  Santa-Martha  en  Colombie,  par  M.  Warscewicz , 
qui  l'a  introduite  en  Europe.  Elle  s'élève  à  plus  d'un  mètre;  les  tiges 
et  les  feuilles  sont  recouvertes  d'une  pubescence  rouge  de  fer.  Les 
feuilles,  longues  de  plus  d'un  décimètre,  sont  ovées-lancéolées,  d'un 
vert  foncé,  à  bords  crénelés-dentés.  Les  fleurs  sont  terminales, 
grandes,  d'un  beau  rouge  vif;  le  tube  de  la  corolle  est  allongé  et 
ventru,  le  limbe  est  presque  régulier,  à  cinq  lobes  arrondis,  plus  on 
moins  marmorés  de  blanc. 

Vlsoloma  Trianœi  est  réellement  de  serre  chaude,  mais  on  le  cultive 
dans  une  bonne  serre  tempérée. 

TliermopsSs  foarbata.  Royle.  —  Royle  ,  Illuslr.  Rimai.  PL 
p.  100,  t.  39,  fig.  I.  —  Walp.  Repert.  V.  I,  p.  562.  —  Benth.  in  Hook. 
Lond.  Journ.  Bot.  V.  2,  p.  43\.  —  Bot.  Mag.  t.  4868.  —  Syn.  : 
Anagyris  barbata,  Graham,  in  Wall.  Cat.  n.  5341.  —  Fam.  des 
Légumineuses.  —  Décandrie  Monogynie.  —  Cette  belle  espèce  de 
Thermopsis,  à  fleurs  grandes  et  d'une  coloration  splendide,  a  été  cul- 
tivée par  M.  Mooredans  le  jardin  botanique  de  Glasnevin.  Les  graines 
avaient  été  envoyées  de  l'Himalaya,  par  le  major  Madden.  Elle  vit  à 


—  71  — 

une  altitude  de  10,000  à  43,000  pieds,  dans  les  vallées  les  plus  sèches. 
C'est  une  superbe  plante  toute  velue,  à  feuilles  sessiles,  lancéolées, 
acuminées,  glabres  ou  bordées  de  poils,  en  verticilles  de  trois  à  sept. 
Les  fleurs  apparaissent  sur  des  racèmes  axillaires,  épais,  denses, 
allongés. Les  pétales  sont  grands,  d'un  beau  violet  très-foncé;  l'étendard 
est  dressé,  orbiculaire,  bilobé,  les  ailes  sont  arrondies,  plus  courtes 
que  la  carène  ;  étamines  toutes  libres;  ovaire  velu. 

Saïvîn  Catneriozii.  Hort.  Germ.,  ex  Regel.  —  Gartenflora,  cah. 
de  juin  4855,  p.  484,  tab.  424.  —  Sauge  de  Camerton.  Fam.  des 
Labiées.  —  Cette  sauge  est  très-répandue,  sous  le  nom  que  lui  con- 
serve M.  Regel,  dans  les  jardins  d'Allemagne;  mais  elle  n'avait  été 
encore  ni  décrite,  ni  figurée.  Il  paraît  qu'elle  est  venue  du  Mexique. 
Elle  forme  un  sous-arbrisseau  d'un  mètre  et  demi  à  deux  mètres  et 
demi,  à  tige  rameuse,  couverte  de  poils  courts;  ses  feuilles  pétiolées 
sont  ovales  ou  en  cœur,  presque  arrondies  à  la  base,  très-aiguës  au 
sommet,  dentées  en  scie  ,  ciliées,  longues  de  3  ou  4  centimètres;  leur 
face  supérieure  est  rendue  rude  par  la  présence  de  poils  très-courts , 
tandis  que  leur  face  inférieure  est  velue  sur  les  nervures  seulement. 
A  l'extrémité  des  branches  et  d'un  grand  nombre  de  rameaux  courts  se 
développent  de  jolies  grappes  de  fleurs  colorées  en  rouge  vermillon, 
rangées  par  faux-verticilles  de  six  ou  quatre.  Ces  fleurs  ont  la  lèvre 
supérieure  droite,  échancrée  à  l'extrémité,  un  peu  plus  longue  que  la 
lèvre  inférieure,  qui  est  trilobée.  Cette  sauge  est  tellement  voisine  du 
S.  elegans  Vahl.,  que  peut-être  en  est-elle  une  simple  variété. 

La  sauge  de  Camerton  fleurit  abondamment  aux  mois  de  mars  et 
avril  dans  l'orangerie.  Mise  en  pleine  terre  pendant  l'été,  elle  donne 
de  très-beaux  pieds  qui  ne  fleurissent  cependant  qu'au  printemps 
suivant. 

Stylopliorurai  dipltytluan.  Nuttall.  —Nutt.,  Gen.  Y.  2,  p.'. 
—  Gray.  Gen.  Plants  u.  s.  t.  48.  —  Botany  of  the  Northern  United 
States,  p.  27.  —  Syn.  :  Stylophorum  petiolatum  Nuttall,  Stylopkorum 
Ohioense,  Spreng.  Syst.  Y.  2,  p.  570.  --  Meconopsis  diphylla,  DC. 
Syst.  Y.  2,  p.  88.  Prodr.  VA, p.  421.  Torrey  et  Gray,  FI.  N.  Am.  Y.  I, 
p.  64.  —  Meconopsis  petiolata,  DC.  I.  c.  —  Chelidonium  diphyllum, 
Michx.  FI.  V.  I,  p.  309.  —  Bot.  Mag.pl.  4867.  —  Fam.  des  Papave- 
racées.  —  Polyandrie  Monogynie.  —  Le  Stylophorum  diphyllum,  dont 
les  graines  ont  été  envoyées  en  Europe  par  le  Dr  Asa  Gray ,  profes- 
seur de  botanique  à  l'université  de  Cambridge,  est  spontané  dans  les 
bois  des  Etats-Unis  du  Sud.  Les  plantes  ont  de  six  pouces  à  un  pied 
de  haut,  ressemblent  nu  Meconopsis  rambrica;  les  tiges,  les  pétioles  et 


—  72  — 

les  pédoncules  sont  couver l s  de  poils  dressés;  les  feuilles  radicales  sont 
oblongues  ou  ovales,  lobées,  pennatifides ,  cordées  à  la  base,  à  seg- 
ments lobés  ou  crénelés,  glauques  intérieurement.  Les  feuilles  cau- 
linaires,  ordinairement  au  nombre  de  deux,  sont  opposées  et  forment 
un  involucre.  Les  fleurs  sont  solitaires,  d'un  jaune  pâle,  inclinées,  les 
sépales  poilus,  les  étamines  nombreuses. 

PBîysrelîus  C'apensîs-  E.  Mey.  (de  çevynv,  fuir  et  vxtot  soleil). 

—  Phygélie  du  Cap.  —  Bot.  Mag.,  Vol.  XI,  1855,  lab.  4881.  —  Benth. 
in  comp.  to  Bot.  Mag.,  V.  2,  p.  53.  —  Fielding,  Sert.  Plant.,  t.  66,  67. 

—  Benth.  in  de  Cand.  Prodr.,  v.  10,  p.  300.  —  Fam.  des  Scrophula- 
riacées,  Didynamie  Gymnospermie. —  Cette  belle  plante,  découverte 
seulement  dans  ces  derniers  temps  à  Witbergen  en  Caffrerie,  sur  les 
bords  des  torrents,  n'a  que  bien  peu  de  Vhabitus  des  végétaux  de  cette 
région,  mais  ressemble  singulièrement  aux  Pentstemons  de  l'Amérique 
du  Nord.  Le  Phygélie  du  Cap  a  fleuri  cet  été  en  plein  air,  chez 
MM.  Veitch  à  Exeter,  et  promet  de  donner  des  graines  mûres;  c'est 
une  excellente  acquisition  pour  les  jardins;  la  plante  est  sans  doute 
vivace  et  buissonneuse,  mais  elle  peut  réclamer  une  orangerie  pour  la 
protéger  pendant  l'hiver.  Le  Witbergen  est,  pensons-nous,  une  mon- 
tagne très-élevée,  mais  nous  ne  connaissons  cependant  pas  la  hauteur 
au-dessus  de  la  mer,  de  la  localité  où  croît  le  Phygélie  du  Cap,  hauteur 
qui  autorise  probablement  à  croire  à  sa  nature  rustique. 

Le  Phygelius  Capensis  est  une  plante  de  deux  à  trois  pieds  d'élé- 
vation,  y  compris  sa  panicule ,  dressée,  ligneuse  à  la  base,  herbacée 
supérieurement,  branchue,  partout  glabre;  branches  quadrilatérales, 
à  angles  ailés.  Les  feuilles  sont  opposées;  les  inférieures  d'une  gran- 
deur moyenne,  la  lame  mesurant  4  à  5  pouces,  le  pétiole  deux  pouces 
environ;  ce  pétiole  est  profondément  creusé  en  gouttière  et  auriculé  à 
sa  base  de  chaque  côté,  la  lame  est  ovale,  légèrement  acuminée,  dentée, 
penninerve  et  réticulée.  Les  feuilles  deviennent  graduellement  plus 
petites  à  la  partie  supérieure  de  la  plante.  L'inflorescence  est  une 
panicule  pyramidale ,  à  rachis  quadrilatéral ,  ailé ,  à  divisions  en 
grappes  corymbiformes,  à  pédicelles  courbes  et  à  fleurs  pendantes.  Le 
calice  a  un  tube  court,  obtus  à  la  base,  et  un  limbe  de  cinq  segments 
étalés  ovés-acuminés.  La  corolle  est  tubuleuse,  à  tube  très-long, 
courbe,  à  base  dilatée  et  renflée;  elle  se  termine  par  un  limbe  très- 
oblique  à  cinq  segments  écartés,  pointus.  Ces  fleurs  sont  d'un  beau 
rouge  vif,  sauf  la  gorge  qui  est  jaune. 

Akebla  quiitata.  Decaisne.  —  I)cne.  Mém.  sur  les  Lardizalcaléês, 
p.  195.  —  Lind.  Bot.  Beg.,  1847,  t.  28.—  Flore  des  serres,  Avril  1855. 


- —     I  o    — 

—  Bot.  Moy.,  pi.  4864. —  Syn.:  Rajania quinata,  Thunb.  Jap.,p.  148. 

—  Fam.  des  Lardizabalées.  —  Monœcie  hexandrie.  —  Cette  belle 
plante  a  été  recueillie  en  Chine  par  M.  Fortune,  mais  elle  parait  cepen- 
dant originaire  du  Japon  et  est  bien  figurée  et  décrite  dans  la  Flora 
Japonica  de  Siebold  et  Zuccarini. 

VAkebia  quinata  est  un  arbuste  toujours  vert,  grimpant,  à  tiges 
flexibles,  arrondies,  partout  absolument  glabres  :  les  feuilles  sont 
alternes,  à  pétioles  arrondis,  ordinairement  à  cinq  folioles  articulées 
sur  le  pétiole,  pétiolulées,  obovées ,  émarginées  ou  obcordées,  entières, 
coriaces,  glauques  à  la  face  inférieure.  Les  racèmes  sont  axillaires  et 
naissent  de  branches  latérales  réduites,  pédoncules,  à  divisions  pour- 
vues de  petites  bractées.  Les  fleurs  sont  pédicellées,  unisexuelles, 
odorantes  :  les  mâles  sont  plus  petites,  terminales  sur  les  racèmes, 
leurs  sépales  sont  oblongs  ou  elliptiques,  réfléchis;  étamines  au  nombre 
de  6,  sur  deux  rangs,  à  filaments  très-courts,  à  anthères  oblongues.  Sur 
chaque  racème  il  y  a  de  deux  à  cinq  fleurs  femelles,  portées  sur  des 
pédicelles  plus  longs  que  ceux  des  mâles.  Ces  fleurs  sont  d'un  beau 
violet,  à  trois  sépales  larges,  elliptiques,  concaves,  coriaces,  à  trois  ou 
cinq  ovaires  surmontés  d'un  stigmate  sessile. 

Stanloopea  eeornnta.  Lindl.  (A  la  mémoire  de  Philippe- 
Henri,  comte  de  Stanhope,  président  de  la  Société  de  médecine  et  de 
botanique  de  Londres.)  Traduit  du  latin  :  Stanhope  cornu.  —  Bot. 
Maq.,  tab.  4885. —  Lemaire,  in  Flore  des  Serres,  p.  481,  Dec.  4846.  — 
Paxton,  Flow.  Gard.  Geeanings,  ?i°  54,  ic.  20.  —  Reich.,  fil.  Rot. 
Zeit.  X,  4852,  p.  836.  — Lindl.,  Fol.  Orchid.  Part.  I,  p.  8.  —  Synon.: 
Stanhopeastrnm  ccornutum,  Reich.,  fil.  in  Mohl  et  Schlecht.  Rot.  Zeit.  X, 
1852,  p.  927.  —  Xenia,  Orchid,  tab.  43.  — -  Fam.  des  Orchidées; 
Gyiiandrie  monandrie. 

Le  Stanhopea  eeornnta  est  parvenu  à  l'établissement  de  M.  Loddiges 
à  Hackney,  de  l'Amérique  centrale.  Les  remarques  suivantes  sur  cette 
curieuse  plante,  que  nous  devons  à  M.  le  Dr  Lindley  sont  plus  pré- 
cieuses qu'une  simple   description  : 

«  Cette  plante  a  été  publiée  en  premier  lieu  par  M.  le  professeur 
Lemaire  dans  la  Flore  des  Serres,  en  décembre  4846.  Ce  journal  en 
avait  puisé  la  figure  dans  mon  ouvrage  intitulé  Folia  Orchidacea  (oc- 
tobre 4852),  et  l'auteur  supposait  que  le  Stanhopea  eeornnta  pouvait  être 
un  monstre  de  quelque  espèce,  peut-être  du  Stanhopea  tricornis.  Immé- 
diatement après,  le  professeur  Reichenbach  fi:s,  annonça  (Bot.  Zeit., 
Dec.  24,  4852)  qu'il  avait  examiné  la  plante  en  question,  que  ce 
n'était  pas  une  monstruosité,  mais  un  nouveau  genre,  Stanhopcatirum, 

BELG.    HOP.T.    T.    VI.  ÎC 


—  74  — 

unissant  les  Peristeriacées  aux  Stanhopêacêes.  A  l'époque  où  l'on 
avançait  la  possibilité  que  le  S.  ecornuta  pouvait  n'être  qu'un  cas 
teratologique,  je  ne  l'avais  pas  encore  observé,  mais  à  présent  que 
j'ai  pu  disposer  d'un  exemplaire  vivant  je  persiste  dans  mon  opinion. 
Il  est  vrai  que  l'on  remarque  une  élévation  au  milieu  du  creux  du 
labelle,  et  que  la  colonne,  au  lieu  d'être  longue  et  ailée,  est  courte 
et  charnue.  Mais  d'un  autre  côté,  le  port  de  la  plante  est  si  exacte- 
ment celui  d'un  Stanhopea  que  M.  Loddiges,  duquel  nous  avons  reçu 
le  spécimen  soumis  à  notre  examen,  l'avait  toujours  pris  pour  le 
Stanhopea  grandi flor a.  Son  mode  de  floraison  ne  présente  pas  la 
moindre  différence  avec  celui  du  S.  cirrhata  originaire  des  mêmes 
contrées  ;  cette  dernière  espèce  possède  la  plupart  des  caractères 
qui  paraissaient  si  étonnants  chez  le  S.  ccornuta. 

Salvia  asperata-  Falconer.  —  (De  salvare,  sauver,  à  cause  des 
propriétés  médicinales  des  sauges.)  Sauge  rude.  —Bot.  Mag.  tab.  4884. 
—  Benth.,  in  De  Cand.  Prodr.  V.  12,  p.  282.  —  Famille  des  Labiées  ; 
Diandrie  monogynie. 

Cette  nouvelle  sauge  a  fleuri  cette  année  en  pleine  terre  dans  les 
jardins  de  Kew.  Les  graines  avaient  été  envoyées  de  Cachemire  à  Isaac 
Anderson,  Esq.  à  Maryfieîd,  près  d'Edimbourg.  Elle  s'élève  à  deux  pieds 
au  moins  et  forme  un  petit  buisson  plus  ou  moins  branchu  dès  la  base. 
Les  tiges  sont  droites,  hérissées  de  longs  poils  blancs  mêlés  à  une 
pubescence  glanduleuse.  Les  feuilles  inférieures  sont  pétiolées  ,  les 
supérieures  sessiles,  ovales  ou  ovales-oblongues,  cordées  à  la  base, 
subacuminées,  fortement  bidentées  sur  les  bords,  velues,  à  surface 
gaufrée  et  rude.  Les  épis  floraux  sont  très-longs,  à  verlicillastres  (faux 
verticilles  formés  par  les  fleurs)  de  six  à  huit  fleurs  à  peu  près  sessiles. 
A  la  base  de  chaque  verticillastre,  on  trouve  une  paire  de  bractées 
opposées,  sessiles,  grandes,  larges,  ovales  longuement  acuminées, 
étalées  ou  réfléchies,  submembraneuses,  d'un  vert  pâle,  striées  de 
blanc-verdâtre.  Le  calice  est  campanule,  presque  aussi  long  que  le 
tube  de  la  corolle,  hispide,  bilabié;  la  lèvre  supérieure  formée  de  trois 
dents,  dont  la  moyenne  est  la  plus  courte  ;  la  lèvre  inférieure  bidentée.  La 
corolle  est  blanche,  un  peu  verdoyante,  courbe,  cylindrique,  d'un 
tiers  de  la  longueur  du  limbe.  Celui-ci  est  bilabié;  la  lèvre  supérieure, 
dépassant  l'inférieure,  est  oblongue,  en  forme  de  faux  comprimée, 
pubescente  et  hispide  ;  l'inférieure  est  trilobée,  à  lobe  moyen  chevelu 
intérieurement.  Etamines  incluses.  L'ovaire  quaclrilobé,  sur  un  large 
disque  charnu.  Le  style  est  très-long,  mais  inclus  dans  la  lèvre  supé- 
rieure; le  stigmate,  un  peu  exserte,  est  formé  de  deux  segments  inégaux 
ci  subulés. 


—  75  — 

Seeiuannla  iernifolia.  Regel.  (M.  Seemann ,  rédacteur  du 
journal  botanique  le  Bonplandia).  —  Gartenflora,  cah.  de  juin  1855, 
p.  183,  tab.  122.—  Seemannieà  feuilles  ternées.  —  Fam.  des  Gesné- 
riacées. 

Ce  sous-arbrisseau,  haut  de  70  centimètres  à  1  mètre,  est  couvert 
dans  toutes  ses  parties  de  poils  courts  et  raides.  Sa  tige  est  grêle, 
flexneuse,  simple.  Ses  feuilles,  disposées  par  verticilles  de  trois,  rare- 
ment de  quatre,  sont  pétiolées,  lancéolées,  obtuses,  entières,  vertes  en 
dessus,  blanchâtres  en  dessous,  où  les  nervures  se  montrent  tres- 
saillantes. Ses  fleurs,  d'un  rouge  de  brique,  sont  solitaires  à  l'aisselle 
des  petites  feuilles  naissantes  du  sommet  de  la  tige,  et  par  leur  rap- 
prochement, elles  représentent  une  grappe  courte.  Les  graines  de  cette 
plante  nouvelle  ont  été  envoyées  du  Pérou  à  M.  Regel  sous  le  nom  de 
Gesneria  quadrifolia.  Elle  fleurit  aux  mois  d'octobre  et  novembre.  On 
la  cultive  en  serre  tempérée  dans  du  terreau  de  feuilles  ou  de  la  terre 
de  bruyère.  On  la  multiplie  par  boutures,  et  au  moyen  de  ses  rejets 
ainsi  que  de  ses  tubercules  écailleux. 

SohralSa  fi*ag;raiBs.  Rz.  et  Pav.  (Fr.  Mart.  Sobral,  botaniste 
espagnol)  Sobral  odorant.  —  Bot.  Mag.,  tab.  4882.  — Lindl.,  in 
Gard.  Chron.  1853,  p.  598,  ?i°  5.  —  Fol.  Orchid.,  Part.  5,  n.  12. 
—  Fam.  des   Orchidées;    Gynandrie  monandrie. 

Cette  espèce  est  un  charmant  petit  Sobral  odorant,  originaire 
de  la  province  d'Ocana  dans  la  Nouvel !e-Grenade,  qui  parait  avoir 
été  découvert  par  Schlim,  et  fut  d'abord  introduit  en  Belgique, 
d'où  il  passa  en  Angleterre.  C'est  une  orchidée  terrestre;  les  tiges 
ont  environ  un  pied  de  long;  il  en  nait  plusieurs  d'une  même 
racine;  leur  partie  inférieure  est  engainée  par  la  base  de  la  pre- 
mière feuille  et  est  couverte  de  quelques  petites  écailles.  Les  feuilles, 
au  nombre  d'une  ou  de  deux,  sont  oblongues  lancéolées,  de  4  à 
5  pouces  de  long,  un  peu  charnues,  glabres  comme  tout  le  reste 
de  la  plante,  à  nervation  longitudinale  et  à  nervures  proéminentes 
en  dessous.  Le  pédoncule  est  terminal,  long,  comprimé,  portant  à 
son  extrémité  deux  ou  trois  bractées  lancéolées,  vertes,  carminées, 
ressemblant  à  de  petites  feuilles  :  de  l'aisselle  de  la  dernière  de  ces 
bractées,  longue  de  deux  ou  trois  pouces,  naît  la  Heur.  Cette  fleur 
est  petite  pour  un  Scbralia,  puisqu'elle  n'a  que  deux  pouces  de 
diamètre,  mais  elle  est  odorante,  d'un  jaune  de  soufre  pâle  un  peu 
verdâtre.  Les  sépales  sont  oblongs  lancéolés  ;  les  pétales  sont  de  la 
même  forme,  mais  ils  entourent  la  corolle.  Le  labelle  est  modérément 
large,   obové  ou  cunéé;   les  lobes  latéraux   sont  obscurs,  confinés  à 


—  76  — 

la  base;    le  lobe    moyen  est   grand,  étalé,    fimbrié   et  crispé  de  la 
plus  belle  façon,  son  disque  est  relevé  par  une  belle  macule  jaune. 

Tydœa  oareliata.  Regel,  var.  formosa.  —  Gartenflora,  cah.  de 
juin  18o5,  p.  181,  tab.  120.  Famille  des  Gesnériacées;  Didynamie 
angiospermie. 

Cette  belle  plante  a  été  introduite  en  Europe  par  M.  de  Warzêwicz, 
qui  en  a  recueilli  les  graines  à  Santa-Martha  (Nouvelle-Grenade).  La 
variété  qu'elle  forme  se  distingue  du  type  de  l'espèce  par  une  taille 
plus  basse,  une  floraison  beaucoup  plus  abondante,  et  des  fleurt» 
plus  belles,  plus  grandes,  beaucoup  plus  abondamment  marquées 
de  taches  d'un  rouge  noir,  se  détachant  sur  la  teinte  générale  d'un 
beau  rouge  vif.  Son  beau  feuillage  et  l'abondance  de  ses  fleurs,  qui 
se  développent  l'été  et  l'hiver,   en  font  une  acquisition  précieuse. 

On  la  plante  dans  du  bon  terreau  de  feuilles  meuble  ou  dans  de 
la  terre  de  bruyère;  on  la  place  dans  une  serre  tempérée  près  du 
jour,  et  on  l'arrose  assez  abondamment.  A  l'époque  de  la  floraison, 
on  se  trouve  fort  bien  de  l'arroser  avec  un  peu  d'engrais  liquide. 
Elle  appartient  à  la  catégorie  des  Gesnériacées  qui  sont  en  végétation 
pendant  toute  l'année.  On  la  multiplie  promplement  et  très-facile- 
ment au  moyen  de  ses  nombreux  stolons  qu'on  détache  et  qu'on 
plante  à  part. 

B5Iâî;es*g;sî3  Staorïoeyanea.  Lemaire.  (J.-G.  Billberg,  conseiller 
d'Etat  et  botaniste  de  Stockholm;  il  écrivit  en  1822  sur  les  plantes  de  la 
Suède.)  Billberg  bleu  et  rouge.  —  Bot.  Mag.,  tab.  4883.  — Flor.  der 
Gewchshsr.  V.  3,  p.  207.  —  Walp.,  Ann.  Bot.  V.  I,  p.  838.  — Fam.  des 
Broméliacées;  Hexandrie  monogynie. 

L'Amérique  du  Sud  abonde  en  Broméliacées  remarquables,  qui  doivent 
toujours  occuper  une  belle  place  dans  nos  serres  chaudes,  mais  elles 
sont  malheureusement  encore  négligées  des  botanistes  à  cause  de  la  dif- 
ficulté de  les  sécher  en  herbier.  La  nouvelle  espèce  a  les  feuilles  d*un 
vert  foncé,  agréablement  striées  de  bandes  blanches  transversales;  les 
bractées  sont  d'un  rose  tendre,  et  les  corolles,  de  grande  taille,  sont 
blanches  lavées  de  bleu.  La  tige  florale  ou  scape  est  entourée  par  la 
couronne  de  feuilles  et  couverte  de  bractées  lancéolées,  fortement  acu- 
minées,  roses,  farineuses,  dentées  d'épines  sur  les  bords.  Les  fleurs  sont 
en  thyrse  capité,  à  tube  calicinal  oval  soudé  à  l'ovaire,  à  limbe  de  trois 
segments  roses,  dressés,  ovés.  Les  pétales  de  la  corolle,  au  nombre  de 
trois,  sont  linéaires  oblongs  ou  spatules,  droits,  légèrement  recourbés, 
très-obtus,  roses  dans  le  bouton,  puis  d'un  blanc  pur  et  passant  plus 
tard  graduellement  à  une  belle  teinte  bleue. 


i  i 


LISTE  DE  PLANTES  ANNUELLES 

QUI    MÉRITENT    D'ÊTRE    PLUS   FRÉQUEMMENT   CULTIVÉES   QU'ELLES   SE    LE 
SONT   ENCORE   SUR    LE   CONTINENT    (4). 

Cette  liste  a  été  dressée  par  M.  J.-H.  Beckmann,  jardinier,  alle- 
mand d'origine,  mais  fixé  en  Angleterre,  et  les  indications  qu'elle 
renferme  ont  été  puisées  dans  les  jardins  et  les  ouvrages  anglais. 
Les  plantes  qu'elle  mentionne  sont  ou  récemment  introduites,  ou 
trop  peu  cultivées  sur  le  continent.  A  côté  de  leur  nom  nous  ajou- 
terons celui  de  la  famille  à  laquelle  elles  appartiennent,  l'auteur  ayant 
négligé  de  le  faire. 

Bartonia  aurea,  Lindl.  (Loasées).  Charmante  plante  de  Californie, 
à  grandes  fleurs  jaunes  et  à  longues  étamines  en  grand  nombre; 
elle  s'élève  de  50  à  65  centimètres;  elle  convient  parfaitement  pour 
des  groupes  dans  les   pelouses  et  pour  les  plates-bandes. 

Bahia  latifolia,  DC.  (Composées).  Plante  de  Californie,  dont  la 
végétation  est  trés-vigoureuse,  qui  se  ramifie  beaucoup  et  qui  s'élève 
à  65  centimètres.  Ses  fleurs  en  étoile  sont  d'un  jaune  pâle,  très- 
abondantes.   Elle  convient  parfaitement  pour  massifs. 

Cacalia  sonchifolia.  (Composées).  Très-belle  plante  des  Indes 
orientales,  haute  d'environ  3  décimètres,  dont  les  fleurs  sont  d'un 
jaune  d'or,  très-convenable  pour  massifs  et  plates-bandes.  îl  faut  la 
semer  dru. 

Calandrinia  umbellata,  DC.  (Pcrtulacées).  Plante  haute  seulement 
de  45  à  16  centimètres,  à  nombreuses  fleurs  d'un  beau  rouge. 
C'est  une  charmante  espèce  qui  convient  pour  rocailles,  pour  cor- 
beilles, petites  plates-bandes,  même  pour  pots.  Elle  vient  du  Chili. 
Il  faut  la  semer  de  bonne  heure  en  pots,  parce  qu'elle  supporte  mai 
la  transplantation. 

Calandrinia  discolor,  Schrad.  Plante  basse,  du  Chili,  à  feuilles 
charnues,  à  fleurs  d'un  beau  rose,  en  grappes,  qui  s'élèvent  jusqu'à 
3  décimètres.  Pour  corbeilles  et  plates-bandes.  Traitement  de  la 
précédente. 

Calceolaria  chelidonioides.  (Scrophulariacées).  On  peut  avoir 
celle  espèce  fleurie  pendant  toutes  les  saisons.  Elle  s'élève  à  50 
centimètres  et  elle  porte  une  masse  de  fleurs  d'un  jaune  pâle,  qui, 
néanmoins,  ne  durent  pas  longtemps.  Elle  convient  très-bien  pour 
remplir  des  places  vides,  parce  qu'elle  fleurit  promptement. 

(1)  Hnmhnrger  Gartm    uud    Blumcnzcitùttn,    juillet    1853.   Journ.    de   In    Sur. 
imp,  et  rrnfr.  rlr  Paris. 


—  78  — 

Campanula  (Speeularia)  vihcœflora.  (Campanulacées).  Plante  de  la 
Nouvelle-Hollande,  très-jolie  lorsqu'elle  est  en  masse.  Elle  est  haute 
de  3  décimètres;  elle  porte  un  grand  nombre  do  fleurs  petites, 
mais  d'un   beau  bleu   foncé,  à  gorge  blanche. 

Campainula  (Speeularia)  pentagona.  Originaire  du  Levant,  celle-ci 
ressemble  pour  le  port  à  la  précédente;  mais  ses  fleurs  sont  plus 
grandes  et  un  peu  plus  pâles.  Une  variété,  Campanula  pentagona 
alba,  a  les  fleurs  blanches. 

Cenia  turbinata,  Pers.  (Composées).  Plante  du  Cap,  semblable 
à  une  camomille,  haute  de  15  à  20  centimètres,  à  fleurs  blanches, 
très-abondantes.  Elle  convient  pour  les  plates-bandes,  mais  surtout 
pour  bordures.  Le  Cenia  turbinata  formosa  en  est  une  variété  à  fleurs 
jaunes. 

Clintonia  pulchella,  Lindl.  (Lobéliacées).  Celte  charmante  petite 
filante,  quoique  déjà  bien  connue,  n'est  pas  cultivée  comme  elle 
mérite  de  l'être.  Elle  vient  du  nord-ouest  de  l'Amérique.  Elle  con- 
vient aussi  bien  pour  plates-bandes  que  pour  corbeilles  et  même 
pour  pots. 

Cop.eopsis  corois'ata,  Hook.  (Composées).  Plante  d'un  bel  effet 
avec  ses  grands  capitules  étoiles,  jaune  pâle,  dont  le  centre  est 
pourpré.  Elle  s'élève  de  50  à  65  centimètres.  Elle  fait  de  belles 
planches  et  peut  même  être  disposée  en  corbeilles.  Elle  vient  du 
Mexique. 

Diaistiius  gardneri  ,  Hort.  (Caryophyllées).  Joli  œillet  de  l'Europe 
méridionale,  qui  s'élève  à  3  décimètres  environ.  Ses  fleurs  frangées 
sont  d'un  rouge  foncé.  On  peut  très-bien  le  cultiver  en  pots;  mais 
on  en   fait  aussi  de  charmantes  planches  pendant  tout  l'été. 

Eucharidium  grandiflorum,  Fisch.  et  Mey.  (Onagrariées).  Jolie  es- 
pèce de  l'Amérique  septentrionale,  qui  s'élève  à  un  pied,  et  dont 
les  fleurs  ressemblent  à  celles  du  Clarkia  pulchella,  avec  une  teinte 
un  peu  plus  foncée.  Elle  fleurit  abondamment;  elle  est  très-propre 
à  faire  des  planches,  des  massifs  et  de  longues  lignes  dans  les 
plates-bandes. 

Eucmda  bartonioides.  (Loasées).  Espèce  déjà  bien  connue,  de 
l'Amérique  du  Sud,  à  grandes  fleurs  d'un  jaune  brillant.  Sa  taille 
est  de  33  centimètres.  Elle  est  délicate  et  doit  être  cultivée  en  pots. 

Eutoca  viscida,  Benth.  (Hydrophyllées).  L'une  des  plus  belles  es- 
pèces annuelles  d'ornement.  Elle  est  déjà  bien  connue;  mais  on  ne 
saurait  trop  la  recommander.  Ses  charmantes  fleurs  sont  d'un  beau 
bleu  intense.  On  en  fait  de  très-jolies  planches.  On  peut  aussi  en 
obtenir  de   beaux  pieds  en  pots.   Elle  vient  de  la   Californie. 


—  79  — 

Gaillardia  pîcta,  Sweet.  (Composées).  Jolie  espèce  bien  connue 
et  qu'on  n'a  pas  besoin  de  recommander.  Elle  convient  pour  les 
planches  et  pour  des   corbeilles   au  milieu  de  pelouses. 

Gilia  achille./EFOLia,  Benth.  (Polémoniacées).  Elégante  espèce  de 
la  Californie,  qui,  semée  dru,  fait  de  délicieuses  planches.  Ses  fleurs 
sont  d'un  bleu  pourpre  foncé.  Elle  s'élève  à  40  centimètres.  Sa 
végétation  est  plus   vigoureuse   que   celle  du   Gilia  ïricolor. 

Gilia  (Leptosiphon)  lutea,  Stend.  Petite  plante,  l'une  des  plus 
jolies  qui  nous  soient  venues  de  la  Californie.  Ses  nombreuses  fleurs 
sont  d'un  jaune  d'or.  On  peut  la  disposer  en  planches,  en  massifs, 
sur  des  pelouses,  ou  même  en  pots. 

Godetia  schami?  (Onagrariées).  C'est  la  plus  belle  de  toutes  les 
Godétiées.  Elle  est  haute  de  40  centimètres.  Elle  porte  une  masse 
de  grandes  fleurs  d'un  rose  pâle,  dont  chaque  pétale  est  marqué 
d'une  macule  rouge  brillant.  Elle  convient  pour  planches.  Elle  est 
de  la  Californie. 

Helichrysum  bracteatum,  Willd.  (Composées).  Cette  plante  de  la 
Nouvelle-Hollande,  quoique  connue  depuis  longtemps,  n'est  pas  cul- 
tivée comme  elle  devrait  l'être,  en  raison  de  l'effet  que  produisent 
ses  grands  capitules  jaunes.  On  en  possède  des  variétés  blanches. 
Elle  atteint  un  mètre  de  hauteur.  Elle  fait  très-bien,  en  touffes,  en 
planches  et  dans  les  pelouses. 

Heliophila  trifida.  (Crucifères).  Petite  plante  intéressante  du  Cap 
de  Bonne-Espérance,  aussi  propre  à  orner  les  serres  froides  au 
printemps  que  les  planches  des  jardins  en  été.  Elle  s'élève  à  25  cen- 
timètres. Elle  donne  une  profusion  de  petites  fleurs  bleues  et  blanches. 

Hiriscus  africanus.  Mell.  (31alvacées).  Cette  plante  très-florifère 
mérite,  à  tous  égards,  d'être  cultivée.  Ses  fleurs  sont  blanches,  tachées 
de  pourpre.  Elle  s'élève  à  50  centimètres.  On  en  fait  de  charmantes 
planches:  elle  convient  ainsi  pour  plates-bandes,  comme  elle  fleurit 
pendant  tout  l'été. 

Ipomoea  Burridgi.  (Convolvulacées).  Plante  très-convenable  pour 
recouvrir  les  treillis.  Elle  donne  quantité  de  fleurs  d'un  rouge  d'œillet, 
passant  au  blanc  dans  le  centre. 

Limnanthes  alba  (Limnanthées).  Plante  avantageuse  par  sa  floraison 
précoce  et  tardive.  Elle  est  de  la  Californie.  Elle  s'élève  à  25  centimètres; 
elle  fait  beaucoup  d'effet  en  masses  au  milieu  des  pelouses.  Elle  fleurit 
abondamment  et  ses  fleurs  sont  d'un  blanc  très-pur. 

Linaria  macroura.  (Scrophulariées).  Espèce  très-intéressante,  à 
fleurs  lilas-pâle,  très-abondantes.  Elle  est  haute  de  33  centimètres.  Elle 
l'ait  très-bien  en  planches  et  dans  les  plates-bandes. 


—  80  — 

Liislm  GRANDiFLonuM,  Desf.  (Rubrum,  Hort.)  (Linéesj.  Espèce  haule  de 
33  centimètres,  à  grandes  fleurs  d'un  très-beau  rouge. 

Loasa  (Caiophora)  lateritia,  Hook.  (Loasées).  Cette  plante  bien 
connue  a  été  à  tort  fort  négligée,  car  elle  est  très-jolie,  grimpant 
sur  un  treillis.  Ses  fleurs,  d'un  rouge-pâle,  ont  au  centre  des  taches 
blanchâtres.  Elle  est  un  peu  délicate  et  doit  être  semée  sur 
couche. 

Lupinus  Moritzianus,  H.  Berol.  (Légumineuses).  Le  plus  joli  des 
Lupins  annuels  qui  nous  sont  venus  de  Californie.  Il  s'élève  droit  à 
85  centimètres.  Ses  fleurs  d'un  beau  bleu,  à  sommités  blanches,  sont 
abondantes  et  forment  des  grappes  longues  de  20  centimètres.  Il 
produit  beaucoup  d'effet  dans  les  plates-bandes. 

Malva  zebriina  (Malvacées).  C'est  l'une  des  plantes  qui  méritent  le 
plus  d'être  cultivées.  Elle  s'élève  à  1  mètre  33  centimètres,  et  ses 
fleurs  sont  grandes  ,  en  cloche  ,  blanches  ,  rayées  de  rouge.  Elle 
produit  un  très-bel  effet  en  groupes  dans  les  plates-bandes  et  les 
pelouses. 

Nolana  grandiflora  (Nolanacées).  Espèce  rampante,  à  feuilles  un 
peu  charnues,  du  Chili.  Ses  fleurs  ressemblent  à  celles  d'un  Liseron; 
mais  elles  sont  plus  brillantes  et  rayées  de  bleu.  Elle  est  charmante  sur 
des  rocailles  ou  en  petites  planches. 

Oxalis  rosea  (OxalidéesV  Cette  espèce,  l'une  des  plus  jolies  parmi 
les  espèces  annuelles,  se  trouve  dans  quelques  jardins;  mais  elle  n'est 
pas  ,  à  beaucoup  près,  aussi  répandue  qu'elle  devrait  l'être,  car  elle  fait, 
pour  l'été,  des  planches  et  des  bordures  d'un  charmant  effet.  Elle  ne 
s'élève  guère  qu'à  15  centimètres,  et  elle  donne  en  masse  des  fleurs  d'un 
rose-pâle.  Elle  est  originaire  du  Chili. 

Perilla  arguta,  Benth.  (Labiées).  Plante  de  Chine,  dont  le  feuillage, 
d'un  pourpre  sombre  et  très-crispé,  contraste  avec  le  vert  des  autres 
plantes.  Il  faut  la  semer  en  pots  sur  couche  chaude. 

Phacelia  tripeis;natifida  ,  Hort.  (  Hydrophyllées  ).  Espèce  de 
Californie,  très-florifère,  à  fleurs  d'un  bleu  intense,  haute  de  33  cen- 
mètres,  qui  convient  très-bien  pour  planches  et  pour  massifs.  Elle 
n'exige  aucun  soin. 

Platystemon  californicum  (Papavéracéesi.  Il  forme  de  jolies 
planches  et  il  fleurit  de  très-bonne  heure.  Il  ne  s'élève  guère  qu'à 
33  centimètres.  Ses  fleurs  sont  blanchâtres  et  abondantes. 

Podolepîs  rfgata  (Composées).  De  l'Australie.  Il  n'est  pas  laid  et 
fleurit  longtemps.  Ses  fleurs  sont  grandes,  d'un  jaune  pâle.  La  plante 
s'élève  à  50  centimètres.  Le  Podolrpis  chrysdnthd,  End!.,  lui  ressemble; 
mais  s^s  fleurs  sont  plus  jaunes. 


81  — 

Portulaca  (Portulacées).  Presque  tous  sont  de  jolies  plantes.  Il 
faut  les  traiter  comme  des  espèces  d'orangerie;  cependant  on  peut, 
très-bien  leur  donner  place  dans  les  plates-bandes.  Ceux  qui  méritent 
la  préférence  sont  le  P.  Thclhisoni,  dont  la  végétation  est  vigoureuse  : 
il  a  les  fleurs  rouges  et  une  variété  les  a  doubles;  le  P.  splendens,  à 
fleurs  d'un  rouge  pâle;  le  P.  alba  striata,  à  fleurs  blanches  rayées  de 
rouge,  enfin  le  P.  Thorboni  lutca,  à  fleurs  jaunes. 

Rhodaisthe  Manglesii,  Linrll.  (Composées).  Cette  délicieuse  espèce, 
de  la  rivière  des  Cygnes  (Swan-River),  n'est  pas  aussi  répandue 
qu'elle  devrait  l'être.  Non-seulement  elle  produit  un  effet  remarquable 
dans  les  planches  d'un  jardin,  mais  encore  elle  forme,  au  premier 
printemps,  le  plus  brillant  ornement  d'une  orangerie,  avec  ses  capitules 
rosés  qui  sont  de  très-longue  durée.  Comme  elle  est  un  peu  déli- 
cate, on  doit  la  tenir  d'abord  dans  de  petits  pots  et  ne  la  mettre  en 
pleine  terre  que  lorsqu'elle  a  pris  assez  de  force. 

Sapoinarïa  calabrica  (Caryophyllées).  C'est  une  plante  étalée,  à  cause 
de  la  faiblesse  de  ses  tiges,  à  fleurs  purpurines.  Elle  est  très-belle  et 
elle  convient  parfaitement  pour  planches  et  plates-bandes,  même  pour 
la  culture  en  pots. 

Silène  pendula,  Linn.  Var.  alba  (Caryophyllées).  Il  donne  une 
grande  quantité  de  jolies  fleurs  blanches.  Il  réussit  surtout  dans  delà 
terre  tourbeuse.  Il  produit  un  charmant  effet  en  planches  et  dans  les 
plates-bandes. 

Sphenogyne  speciosa,  Mannd.  (Composées).  Jolie  plante  du  Cap-de- 
Bonne-Espérance,  qui  fleurit  tout  l'été.  Elle  figure  merveilleusement 
en  planches  et  dans  les  plates-bandes  par  ses  masses  de  capitules 
orangé  et  noir. 

Tagetes  signata,  Bartl.  (Composées).  Une  cks  plus  jolies  plantes 
annuelles  de  l'Amérique  méridionale,  à  feuilles  finement  divisées  et  à 
capitules  jaunes  très-jolis  et  fort  abondants.  Une  planche  formée  de 
cette  espèce  est  extrêmement  jolie. 

Venidium  eximilm  (Composées).  Plante  haute  de  3  décimètres,  qui 
convient  pour  planches. 

Whitlavia  grandiflora,  Lind.  (Hydrophyllées).  Jolie  nouvelle  plante 
annuelle  de  Californie,  à  corolle  bleue,  d'une  forme  élégante  et  à 
longues  élamines.  Elle  s'élève  à  33  centimètres.  Elle  fleurit  abon- 
damment. 


BELC.    HORT.    T.    VI.  11 


82 


CONSTRUCTIONS    HORTICOLES. 


NOTICE  SUR  LES  ROCKWORKS  OU  ROCHERS  ARTIFICIELS , 

Par   M.  Olivier    Du  Vivier. 

L'amour  du  pittoresque  est  un  sentiment  profondément  enraciné 
dans  le  cœur  de  l'homme  :  l'histoire  de  tous  les  peuples  et  l'obser- 
vation attentive  de  ce  qui  se  passe  constamment  sous  nos  yeux, 
en  sont  des  preuves  plus  que  convaincantes.  L'homme  rejette  l'uni- 
formité et  il  faut  à  son  sens  optique  des  images  formées  de  lignes 
courbes  et  gracieuses ,  pour  que  l'impression  s'en  transmette  agréa- 
blement à  son  cerveau.  La  nature,  du  reste,  a  également  hor- 
reur de  la  ligne  droite,  de  la  ligne  droite  pure,  bien  entendu: 
ses  œuvres ,  considérées  aussi  bien  dans  leur  ensemble  que  dans 
leurs  détails,  nous  présentent  un  assemblage  de  formes  qui,  pour 
la  plupart,  sont  engendrées  du  cercle,  de  l'ellipse  et  de  la  para- 
bole, et  qui,  unies  à  des  couleurs  harmoniques,  réalisent  des  effets 
superbes  de  pittoresque,  de  ce  pittoresque  qui  plait  tant  à  l'homme. 
Telles  sont  les  longues  croupes  de  montagnes,  surmontées  de  hauts 
pitons  en  pyramides  et  séparées  entre  elles  par  de  profondes  val- 
lées; tels  sont  encore  tous  nos  végétaux,  depuis  le  lichen  jusqu'au 
baobab;  telles  sont  surtout  les  fleurs  dont  les  formes,  variées  à 
l'infini,  font  que  chaque  plante,  chaque  corolle  même,  peut  pré- 
tendre constituer  à  elle  seule  un  pittoresque  du  plus  haut  intérêt. 
Il  n'est  donc  nullement  étonnant  que  l'homme,  enfant  de  la  créa- 
tion, cherche  et  se  plaise  à  contempler  ce  qui,  précisément,  entrait 
dans   l'essence  de  la  création. 

Mais  l'homme  n'est  pas  seulement  un  être  organique  jeté  sur 
l'écorce  du  globe;  l'homme  est  aussi,  et  principalement,  un  être 
pensant;  il  a  une  âme,  il  est  créateur,  et,  non  content  d'admirer 
tout  ce  qui  l'entoure,  ne  pouvant  pas,  d'après  sa  nature,  user  sans 
discernement,  des  bienfaits  que  la  Providence  a  placés  sous  sa  main, 
l'homme,  disons-nous,  s'est  uni  à  l'homme,  et  la  civilisation,  née 
de  cette  association,  a  enfanté  ces  merveilles  innombrables  dont  le 
résultat  est  de  nous  procurer  la  plus  grande  somme  de  bonheur, 
c'est-à-dire  de  plaire  à  la   fois  à  notre  esprit  et  à  nos  sens. 

C'est   ainsi  que  naquirent  les  arts,   les  sciences,  l'industrie;  c'est 


—  83  — 

ainsi  que  s'épanouit  l'horticulture.  L'homme  voulut  d'autres  fleurs, 
d'autres  parterres,  d'autres  jardins  que  ceux  dont  il  avait  été  octroyé 
gratuitement;  il  rassembla  dans  un  espace  étroit  les  fleurs  des  cinq 
parties  du  monde,  les  plantes  tropicales  et  les  plantes  circumpolaires,  le 
nénuphar  lotos  du  Nil  et  le  cèdre  du  Liban.  Mais  aussi  combien  de 
difficultés  ne  dut-il  pas  vaincre,  avant  de  parvenir  à  de  satisfaisants 
résultats!  Quelle  patience  ne  fallut-il  pas  à  ces  infatigables  amants 
des  fleurs  pour  faire  progresser  l'horticulture,  alors  surtout  que  la 
vraie  science  des  plantes,  que  la  botanique  était  encore  plongée  dans 
de   profondes   ténèbres! 

De  nos  jours,  rien  n'est  impossible  à  l'horticulture,  soutenue  par 
la  botanique.  Les  merveilles  nées  hier  sont  effacées  par  celles  du 
lendemain,  et  c'est  à  peine  si  les  nombreux  journaux  horticoles  peuvent 
suivre  une  à  une  toutes  les  améliorations  qui  surgissent  dans  le  but 
d'embellir  nos  jardins.  Cependant,  parmi  tous  ces  essais  suivis  avec 
persévérance  et  mis  en  pratique  avec  plus  ou  moins  de  bonheur, 
il  en  est  un  qui,  au  point  de  vue  du  bon  goût,  nous  semble 
laisser  beaucoup  à  désirer,  bien  que  ce  soit  peut-être  la  chose  dont 
on  puisse  tirer  le  plus  de  parti  pour  l'ornementation  des  jardins 
paysagers,  précisément  à  cause  du  caractère  pittoresque  qu'elle  leur 
imprime.  Nous  voulons  parler  des  rochers  artificiels  et  de  leur  culture. 
Mais  avant  d'aborder  ce  sujet  intéressant,  qu'on  nous  permette  de 
faire  remarquer  que  l'expression  «  Rocher  artificiel  »  est  prise  ici 
dans  un  sens  complètement  abusif  et  vicieux,  puisque  les  rochers 
en  question  sont  extraits  du  sein  même  des  montagnes  et  que  leur 
agglomération  seule  est  un  effet  de  l'art.  Le  mot  rocaille,  employé 
aussi  quelquefois  pour  désigner  les  constructions  dont  nous  parlons, 
ne  les  exprime  pas  davantage,  et  nous  croyons  devoir  proposer 
avantageusement  l'adoption  du  substantif  anglais  Rockwork  (littéra- 
lement :  construction  de  rochers)  qui,  en  langage  horticole,  représente- 
rait parfaitement  l'idée  de  «  toute  construction  ornementale  ayant  pour 
matériaux  des  blocs  de  rochers  naturels  de  dimensions  quelconques.  » 

Et  maintenant,  pourquoi  cette  partie  de  l'ornementation  des  jar- 
dins est-elle  si  négligée?  Pourquoi,  lorsqu'on  arrive  à  de  si  beaux 
résultats  dans  l'édification  des  serres,  dans  le  tracé  des  parterres, 
ne  parvient-on  pas  à  agglomérer  convenablement  quelques  pierres 
qui  se  trouvent  tout  préparées  sous  notre,  main?  Pourquoi  choisit-on 
si  mal  les  plantes  destinées  à  parer  les  rockworks,  alors  que  tous 
nos  jardins   brillent  de  l'harmonie  résultant  de  la  combinaison  des 

couleurs  et  des   formes  florales?    Pourquoi ?  Mais   arrêtons   nos 

interrogations  et,   pour  y  répondre,  contrntons-n<Mis  de  dire  que  les 


—  te  — 

difficultés  souvent  très-grandes  de  se  procurer  les  matériaux  néces- 
saires, que  le  manque  d'un  goût  délicat  et  d"un  jugement  sûr,  que  le 
siience  gardé  sur  cette  matière  par  les  hommes  compeîenis  en  cons- 
tructions horticoles,  que  l'ignorance  dans  laquelle  on  croupit  relati- 
lent  a  la  culture  des  végétaux  pvtrophiics.  que  principalement  et 
surtout  la  tendance  de  notre  imagination  à  vouloir  créer  et  non  pas- 
im  -.  prétendre  imposer  l'art  à  la  nature  :  que  toutes  ees  casses 
tantôt  isc-  es,  Eaalôt  reunies,  constituent  les  véritables  obstacles  qui 
s'opposent  à   l'édification   convenable  des  roekworks. 

Imiter  la  nature,  tel  est  le  principe  le  plus  vrai  et  le  plus  gé- 
néral que  l'on  doit  se  garder  de  jamais  perdre  de  vue.  C'est  de  ce 
principe  que  découlent  toutes  les  règles  que  nous  allons  tacher  dé- 
poser, règles  qui,  nous  le  savons  bien,  seront  loin  d'être  complètes, 
mais  qui,  peut-être,  attireront  l'attention  des  hommes  spéciaux  et 
comme  le  bâton  du  législateur  juif,  feront  sortir  du  rocher  l'une 
des  sources  les  plus  fécondes  de  la  décoration  naturelle  de  nos  jar- 
dins paysagers. 

On  élève  des  roekworks  dans  plusieurs  circonstances  et  pour  at- 
teindre différents  bUs  :  tantôt  c'est  une  construction  purement  orne- 
mentale, simplement  pittoresque ,  nullement  indispensable  ;  tantôt 
e'est  une  espèce  de  clôture,  de  mur-limite,  divisant  élégamment 
entre  elles  plusieurs  parties  d'une  même  propriété;  d'autres  fois,  c'est 
un  rideau  destiné  à  cacher  aux  yeux,  des  endroits  ou  des  choses 
peu  faits  pour  leur  plaire;  souvent  enfin,  e'est  un  lieu  retire,  une 
-èce  d'hermitage,  un  arcanum  où  l'homme,  amateur  de  la  soli- 
tude, va,  loin  des  bruits  du  mo..  -  livrer  aux  voluptueuses  rêve- 
ries d'une  imagination  libre  et  vagabonde. 

Quoi  qu'il  en  soit,  et  abstraction  faite  du  but,  le  rockwork  doit 
toujours  être  une  création  indépendante  :  isolez-le  autant  que  pos- 
sible, et  surtout,  n'allez  pas  l'accoler  soit  à  des  murailles,  soit  à  des 
souches  d'arbres,  placez-le  moins  encore  au  milieu  de  ces  ronds 
points  ombrages  par  les  géants  de  la  végétation.  Ce  n'est  pas  non 
plus  près  des  habitations,  ni  du  centre  d'une  pelouse  verdoyante 
que  doit  s'élancer  le  rockwork,  car,  par  ce  rapprochement  de  l'art 
et  de  la  nature,  l'on  ne  parvient  qu'à  produire  des  effets  aussi  peu 
harmonieux  que  ridicules.  Au  contraire,  choisissez  les  sites  les  plus 
abrupts,  les  plus  pittoresques  de  votre  jardin  ou  de  votre  parc, 
Ici.  -  ra  un  étang  aux  rives  capricieusement  déchiquetées  et  dans 
l'onde  duquel  vous  ferez  miroiter  la  silhouette  de  formes  plus  bi- 
zarres encore;  là,  un  mince  filet  d'eau,  une  obscure  fontaiiie  sera 
utilisée,  et,  par  vos  soins,   se  métamorphosera  en   une  source  dont 


—  85  — 

le  limpide  cristal  s'épanchera  en  murmurant  des  crevasses  rocail- 
leuses que  vous  aurez  fait  naître;  ou  bien,  vous  transformerez  de 
légères  et  accidentelles  ondulations  de  terrain  en  ravins  escarpés; 
ou  bien  encore,  vous  créerez  la  plus  admirable  perspective  en  éle- 
vant le  rockwofk  à  l'une  des  extrémités  soit  de  l'avenue  principale, 
soit  des  allées  collatérales  du  jardin. 

On  a  placé  des  rockworks  dans  tous  les  pays  et  dans  toutes  les  posi- 
tions, et  c'est  encore  là  un  reproche  à  adresser  à  ces  sortes  de  construc- 
tions. Quoi  de  plus  absurde,  en  effet,  que  de  les  édifier  là  où  tout  est 
montagnes,  vallées  et  rochers?  Quoi  de  plus  ridicule  que  de  rassem- 
bler quelques  pierres  et  de  les  agglomérer  dans  des  contrées  telles 
que  la  Suisse,  la  Savoie,  l'Ecosse? 

Le  rockwork  peut  être  introduit  dans  les  jardins  pittoresques,  si 
improprement  appelés  jardins  anglais,  dans  les  jardins  de  ville  comme 
dans  ceux  de  campagne,  mais  jamais  il  ne  peut  concourir  à  l'ornemen- 
tation des  jardins  géométriques.  Il  peut  même  occuper  toute  la  surface 
d'un  jardin  peu  étendu,  qu'il  agrandit  alors  considérablement  par  les 
ondulations,  les  escarpements  et  les  élévations  que  sa  structure  en- 
traine nécessairement.  M.  Ch.  Me  Intosh  rapporte  avoir  vu  en  Angle- 
terre un  de  ces  jardins  et  en  donne  une  description  trop  curieuse  pour 
que  nous  n'en  rappelions  pas  ici  les  principales  dispositions.  Le  pro- 
priétaire de  ce  jardin,  homme  de  beaucoup  de  goût,  avait  cherché  à  y 
créer  le  plus  d'embellissements  et  le  plus  d'étendue  possible  par  une 
disposition  habilement  combinée  de  rochers ,  de  pièces  d'eau  et  de 
plantations.  Les  promenades  nombreuses  et  tortueuses,  s'il  en  fut, 
côtoyaient,  les  unes  des  rocs  1  aï  1  lés  à  pic,  les  autres  de  profondes  ra- 
vines, tandis  que  celles-ci  s'enfonçaient  dans  de  ténébreux  souterrains, 
et  que  toutes,  rampant,  circulant,  s'entrecroisant,  formaient  un  véri- 
table labyrinthe  dans  lequel  il  était  impossible  à  l'étranger  de  se  recon- 
naître.Bien  plus,  l'illusion  avait  été  poussée  si  loin,  que  ce  jardin,  dont 
la  surface  mesurait  seulement  27  0  mètres  de  longueur  sur  22  1/2  de 
large,  paraissait  beaucoup  plus  vaste  qu'il  ne  l'était  en  réalité,  et  que 
vous  passiez  d'un  sentier  à  un  autre  sans  vous  apercevoir  que  vous 
veniez  de  traverser  l'endroit  situé  au-dessus  de  celui  dans  lequel  vous 
vous  trouvez,  sans  vous  douter  enfin  que  ce  que  vous  admirez  main- 
tenant, ne  se  trouve  qu'à  quelques  pas  de  ce  que  vous  avez  précédem- 
ment contemplé.  Le  centre  de  cette  petite  merveille  était  occupé  par  un 
aquarium  de  36  mètres  et  demi  de  circonférence  et  de  60  à  90 
centimètres  de  profondeur;  admirablement  creusé,  ce  lac  mignon  se 
présentait  dans  toute  sa  beauté,  alors  surtout  que,  juché  sur  un  pont 
de   construction  aussi  hardie  qu'élégante,  on  pou\;iit  embrasser   d'un 


—  86  - 

coup  d'œil  tous  les  sites  de  ce  charmant  séjour.  Les  pics,  les  anfrac- 
tuosités,  les  formes  luxuriantes  de  la  végétation,  tout  enfin  venait  se 
refléter  dans  ce  miroir  limpide;  ses  bords  irréguliers  s'élevaient  tantôt 
d'une  façon  abrupte  et  sauvage,  tantôt  graduellement  et  par  des  degrés 
taillés  dans  le  roc,  tandis  qu'un  ravin  étroit  et  profond,  forme  de  roches 
à  l'aspect  usé,  et  rempli  de  cailloux  arrondis,  partait  du  souterrain  et 
aboutissait  à  cet  étang,  dont  il  paraissait  ainsi  avoir  été  la  source. 
L'effet  de  celte  rockery,  pour  nous  servir  du  terme  propre,  était  vrai- 
ment fantastique  :  il  était  entré  dans  sa  construction  plus  de  '132,000  k. 
de  pierres,  et  ces  pierres,  il  avait  fallu  les  transporter  d'une  distance 
de  3  milles;  l'aspect  de  ces  roches  n'était  rien  moins  que  juvénile,  car 
des  mousses  et  des  lichens  abondants  et  variés  en  couvraient  partout 
la  surface,  et,  des  interslices  qu'elles  laissaient  entre  elles,  s'échappait 
une  riche  et  verdoyante  chevelure  de  plantes  rampantes,  de  buissons 
et  d'arbustes.  L'aquarium,  où  scintillaient  les  dorades  aux  reflets  mé- 
talliques, était  riche  en  végétaux  aquatiques,  et  bien  certainement  si  le 
propriétaire  de  cette  construction  eût  été  amateur  de  plantes  alpines, 
nous  croyons  que  la  flore  suisse  presque  toute  entière  aurait  pu  y  être 
transportée  et  entretenue  avec  succès. 

Nous  arrivons  maintenant  au  choix  des  matériaux  propres  à  la  cons- 
truction des  rockworks,  et  ce  choix  exige  des  connaissances  spéciales, 
à  cause  des  actions  de  ces  corps  sur  les  plantes  que  l'on  se  propose  d'y 
cultiver.  Nous  ne  voulons,  nous  ne  pouvons  pas  donner  les  rapports 
et  les  contrastes  qui  existent  entre  telle  plante  et  telle  variété  de  rocher; 
un  tel  travail  serait  inutile  d'ailleurs,  car  ici  le  choix  n'est  pas  toujours 
possible,  et  il  faut,  le  plus  souvent,  se  contenter  de  ce  que  la  richesse 
géologique  de  la  localité  nous  présente;  mais  le  plus  souvent  aussi,  cela 
suffit,  et  les  ravins  des  rochers,  les  pentes  et  les  sommets  des  mon- 
tagnes, les  falaises  de  la  mer  sont  des  sources  assez  prodigues  des  ma- 
tériaux nécessaires.  Après  cela,  que  vos  blocs  soient  calcaires,  quar- 
tzeux  ou  granitiques,  qu'ils  appartiennent  aux  terrains  pénéen  ou 
dévonien ,  que  ce  soient  des  basaltes  ou  des  roches  porphyriques,  peu 
importe;  mais  ce  qu'il  ne  faut  jamais  oublier  en  détachant  la  partie  que 
vous  devez  employer  de  la  masse  commune,  c'est  d'étudier  la  nature 
sur  place,  de  porter  une  attention  minutieuse  sur  la  manière  dont  les 
variétés  de  roches  sont  disposées  dans  leur  stratification  et  de  prendre 
une  connaissance  exacte  des  espèces  et  des  genres  végétaux  qui  y 
croissent  spontanément.  En  général,  les  roches  rouges  de  couleur, 
mélangées  de  marbres  blancs,  offrent  les  contrastes  les  plus  agréables 
comme  fond  et  deviennent  harmoniques  avec  les  tapis  verts  des  mousses; 
mais,  en  général  aussi,  il  pst  bon  de  varier  la  nature  des  matériaux, 


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afin  de  pouvoir  plus  facilement  cultiver  les  plantes  des  diverses  loca- 
lités rocailleuses. 

Après  ce  que  nous  avons  dit,  est-il  besoin  de  nous  élever  contre  la 
construction  de  ces  monceaux  informes ,  composés  de  pièces  hétéro- 
clites, de  débris  de  bâtimenls,  de  coquillages,  de  fossiles,  de  pétrifica- 
tions, etc.,  etc.?  Est-il  nécessaire  de  répéter  que  toutes  ces  ridicules 
imitations  ne  sont  qu'un  blasphème  adressé  à  la  nature,  que  des  cari- 
catures de  l'œuvre  divine?  Nous  ne  le  croyons  pas  et  nous  nous 
bornons  à  recommander  fortement  aux  vrais  amateurs  du  beau,  de 
rejeter  loin  de  leur  esprit  tous  les  plans  de  semblables  constructions 
qui  pourraient  y  surgir. 

La  terre  propre  à  la  végétation  des  rockworks  et  destinée  à  en  réunir 
les  éléments,  comme  à  en  tapisser  certaines  anfractuosités,  ne  doit 
pas  non  plus  être  choisie  sans  discernement;  sa  nature  doit  être  en 
rapport  avec  celle  des  roches  employées,  et  favorable  au  libre  dévelop- 
pement des  plantes  alpines  :  ei!e  sera  donc  sableuse  ou  calcaire,  ou 
bien  calcaro-sableuse,  mais  jamais  argileuse;  sa  couleur,  d'un  jaune 
fauve  variable,  sera  assez  foncée  pour  s'échauffer  aux  rayons  solaires, 
et  sa  perméabilité  aux  eaux  pluviales  lui  permettra  de  se  conserver 
humide  à  quelques  pouces  de  pro'ondeur,  sans  former,  après  les  pluies, 
une  sorte  de  pâte  ou  bouillie;  enfin  elle  contiendra  de  l'humus  (débris 
organiques)  susceptible,  par  une  décomposition  spontanée,  de  fournir 
aux  plantes  des  aliments  solubles  ou  volatils. 

L'emplacement  où  doit  s'élever  le  rockwork  étant  choisi,  les  maté- 
riaux qui  doivent  entrer  dans  sa  composition  étant  prêts,  il  s'agit  main- 
tenant de  présider  à  sa  construction  même,  et  c'est  ici  surtout  qu'un 
goût  réfléchi  ,  qu'une  longue  habitude  d'observer  attentivement  la 
nature  deviennent  d'une  nécessité  absolue.  En  effet,  ces  sortes  de 
constructions  ne  ressortenten  aucune  manière  des  principes  de  l'art 
architectural,  elles  ne  demandent  rien  de  régulier,  rien  de  symétrique, 
rien  de  monotone;  aucune  apparence  de  travail  ne  doit  s'y  laisser 
remarquer,  et,  bien  loin  de  leur  donner  ce  cachet  artistique  que  l'on  y 
rencontre  si  souvent,  il  faut  que  leur  surface  présente  le  plus  ("(irrégu- 
larités possible  et  que  les  mamelons,  les  pics,  les  ravins,  les  grottes,  les 
escarpements  y  paraissent  avoir  été  créés  par  la  main  de  Dieu.  Toutefois 
l'expérience  a  fait  naitre  certaines  règles  générales  que  nous  devons 
exposer;  mais  auparavant  il  nous  semble  utile  de  dire  quelques  mots 
de  plusieurs  constructions  de  ce  genre  élevées  en  Angleterre,  cons- 
tructions remarquables  et  intéressantes  sous  plus  d'un  rapport.  Arrê- 
tons-nous d'abord  au  magnifique  jardin  rocailleux  de  Blenheim,  qui 
couvre  une  surface  de  plus  d'un  acre  de  terrain .  et  où  l'art  est  parvenu 


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à  imiter  les  accidents  des  pays  montueux,  de  façon  à  tromper  l'œil  lé 
plus  exercé.  Il  est  formé  de  pierres  calcaires  entremêlées  de  débris 
organiques,  matériaux  propres  à  la  localité;  des  chemins  et  des  esca- 
liers habilement  ménagés  courent  sinueusement  d'une  roche  à  une  autre, 
et  font  ainsi  communiquer  entre  elles  les  diverses  parties  de  cette 
construction  horticole.  Etonnons-nous  ensuite  en  contemplant  les  blocs 
granitiques  de  Sion,  qui  ont  été  élevés  à  grands  frais  pour  figurer  un 
aride  et  massif  rocher  couvert  d'une  végétation  alpestre,  mais  qui 
eussent  avantageusement  cédé  leur  place  à  une  riche  promenade  tirée 
au  cordeau  et  embellie  de  vases,  statues,  balustrades  et  ornements  ana- 
logues, tels  que  le  comportait  le  caractère  du  reste  du  jardin.  Puis 
remarquons  en  passant  dans  les  cultures  de  M.  Skirving,  à  Liverpool, 
ce  rockvvork  formé  de  matériaux  hétérogènes,  recouvert  de  ciment  et 
jeté  fort  élégamment  entre  les  parterres  particuliers  et  le  jardin  public 
de  cet  amateur  distingué.  Citons  encore  la  merveilleuse  représentation 
des  montagnes  de  la  Savoie,  avec  la  vallée  de  Chamouny,  que  lady 
Broughton  a  fait  élever  dans  son  domaine  de  Hoole-House,  dans  le 
Cheshire  (1).  Appelons  enfin  l'attention  sur  le  rockwork  érigé,  il  y  a 
peu  de  temps,  à  Chatsworlh,  comme  sur  la  plus  prodigieuse,  la  plus 
gigantesque,  la  plus  immense  conception  de  ce  genre.  Ce  rockwork, 
souriant  sous  son  épaisse  fourrure  de  végétation  pétrophile,  divise  le 
terrain  situé  autour  du  château  princier,  et  le  sépare  de  l'orangerie 
Mammoth.  Ici,  on  n'a  rien  imité,  rien,  si  ce  n'est  la  nature:  aussi, 
après  examen  fait,  on  est  tenté  de  se  demander  si  M.  Joseph  Paxton 
n'a  pas,  par  quelque  procédé  surhumain,  enlevé  de  sa  base  une 
montagne  entière  du  Derbyshire  pour  la  transporter  à  Chatsworth. 

En  Belgique,  les  essais  tentés  jusqu'à  ce  jour  dans  cette  partie  de 
l'ornementation  horticulturale,  laissent  encore  beaucoup  à  désirer. 
Nous  n'osons  nommer  tel  et  tel  jardin  de  notre  connaissance,  qui  ne 
mériteraient  certainement  aucun  reproche ,  s'ils  n'étaient  défigurés 
par  des  monceaux  informes,  ou  plutôt  aux  fermes  hideuses  et  absurdes, 
que  leurs  possesseurs  décorent  pompeusement  du  litre  de  rochers 
artificiels;  artificiels  en  effet,  ils  ne  le  sont  que  trop!  Nous  ne  louerons 
pas  davantage  les  constructions  publiques  de  ce  genre  élevées  en  notre 
pays,  et,  pour  ne  citer  qu'un  exemple,  nous  le  choisirons  dans  un 
endroit  où  tout  respire  la  grâce  et  la  coquetterie,  dans  un  lieu  que 
visitent  chaque  année  les  touristes  de  tous  les  coins  du  globe,  à  Spa, 
en  un  mot.  À  Spa,  me  direz-vous?   Comment  oser  cherchera  lutter 

(1)  Lp  rockwork  de  Hoolo-llouse  a  été  décrit  er  figuré  par  M.  Ch.  Morron  .  dans 
ïe  3'  volume  de  la  Belgique  horticole,  page  55. 


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avec  la  nature,  là  où  la  nature  est  si  brillante  et  si  riche?  Eh  bien, 
écoutez  ce  que  dit  M.  Adolphe  Joanne,  en  parlant  du  tas  de  pierres 
empilées  au-dessus  d'une  source  minérale,  au-dessus  du  Barisart,  et 
cela  par  les  soins  judicieux  de  l'édilité  spadoise.  «  En  1850,»  dit  cet 
estimable  écrivain,  «  le  bourgmestre  et  l'échevin  de  Spa  abandonnèrent 
leur  traitement  annuel  pour  la  construction  de  je  ne  sais  quoi  au-dessus 
de  cette  fontaine,  dont  l'eau,  agréable  a  boire,  est  riche  en  acide  car- 
bonique. Leur  goût  n'égalait  pas  leur  générosité.  Il  est  impossible  de 
rien  voir  de  plus  ridicule,  de  plus  laid,  de  plus  inutile  que  la  chose 
inqualifiable  à  l'érection  de  laquelle  ils  ont  employé  leur  traitement.  Au- 
dessus  d'un  affreux  amas  de  blocs  de  rochers  qui  cherchent  en  vain  à 
imiter  une  grotte,  s'élève  un  petit  pavillon,  sous  lequel  on  ne  peut  se 
mettre  à  l'abri  ni  du  soleil,  ni  de  la  pluie,  ni  du  vent.  t>  Ce  jugement 
pourra  paraître  sévère  aux  yeux  des  personnes  qui  n'ont  pas  vu  cette 
construction  :  pour  nous,  à  qui  on  l'a  fait  admirer,  il  ne  nous  paraît 
que  juste,  pour  ne  pas  dire  davantage. 

Il  y  a  deux  points  qu'il  faut,  parlout  et  toujours,  s'attacher  à  ob- 
server strictement  dans  la  construction  des  roekworks  :  et  d'abord, 
c'est  ce  que  nous  avons  déjà  répété  tant  de  fois,  c'est-à-dire  l'imi- 
tation de  la  nature;  faites  donc  que  vos  anfractuosiîés,  vos  pentes, 
vos  escarpements,  ne  crient  pas  bien  haut  que  voire  main  les  a 
créés,  mais,  au  contraire,  que  le  rockwork  paraisse  comme  inhérent 
au  sol  sur  lequel  il  se  trouve;  qu'il  paraisse,  non  pas  l'œuvre  de 
l'homme,  mais  une  production  échappée  au  souffle  divin.  La  seconde 
règle  est  d'interrompre  habilement  les  accidents  de  terrain  par  des 
végétations  d'à-propos,  nous  voulons  dire  par  des  plantes  alpines, 
des  plantes  rocheuses,  des  plantes  qui,  comme  ces  tourelles  féodales 
dont  il  ne  reste  plus  aujourd'hui  que  des  ruines,  cherchent,  en 
élevant  leur  habitas  sur  les  pics  les  plus  aigus,  un  air  pur,  un 
soleil  toujours  brillant,  une  liberté  d'épanouissement  qu'elles  ne 
pourraient  trouver  ailleurs. 

Le  rockwork  doit  toujours  se  bâtir  sur  un  ou  plusieurs  mon- 
ticules de  terre,  s'il  est  construit  dans  un  jardin  à  surface  plane; 
si,  au  contraire,  celui-ci  offrait  fortuitement  de  ces  sortes  d'éléva- 
tions, ou  mieux,  s'il  laissait  émerger  de  son  flanc  des  blocs  natu- 
rels de  rochers,  ceux-ci  et  celles-là  serviraient  avantageusement  de 
charpente  au  rockwork.  Les  pierres  de  même  nature,  de  même  as- 
pect, de  même  couleur,  seront  placées  les  unes  à  côté  des  autres, 
car  leur  mélange,  pour  être  plus  bizarre,  ne  serait  rien  moins  que 
naturel.  Si  vous  De  vous  proposez  pas  d'étendre  votre  construction 
sur  une  grande  surface,  ne  lui  donnez  pas  non  plus  trop  d'élévation. 

BELG.    HORT.    T.    VI.  12 


-  90  — 

pour  que  l'ensemble  paraisse  solide  et  bien  assis  sur  sa  base.  On 
peut  toutefois  créer  une  apparence  de  hauteur  factice,  soit  en  e.xea- 
vant  le  terrain,  là  où  surgit  le  rockwork,  soit  en  opérant  au  sommet 
de  celui-ci  une  plantation  d'arbres  toujours  verts  et  d'arbustes  nains 
particulièrement  propres  à  cet  usage.  Faisons  enfin  remarquer  que 
les  abords  des  constructions  de  ce  genre  ne  doivent  pas  non  plus  se 
ressentir  des  progrès  de  l'horticulture;  les  parterres,  les  plates-bandes, 
les  pelouses  même,  seront  donc  éloignés  et  feront  place  à  une  cul- 
ture empreinte  de  la  plus  grande  rusticité  :  ce  seront,  dit  M.  Noël 
Humphreys,  d'immenses  genêts,  des  cytises  florifères,  des  ajoncs 
épineux  à  fleurs  doubles,  un  choix  bien  fait,  mais  très-varié,  de 
fougères,  des  bruyères,  des  ronces  à  grandes  fleurs,  des  clématites 
et  atragènes  variant  leurs  fleurs  du  blanc  au  bleu,  du  rose  au  violet 
et  du  jaune  au  brun. 

Enfin  le  rockwork  est  érigé,  et  beaucoup  de  personnes  croient 
avoir  tout  fait  quand  elles  en  sont  arrivées  à  ce  point.  En  réalité 
cependant,  elles  n'ont  accompli  que  la  moitié  de  leur  tâche,  car  la 
vie  manque  à  leur  œuvre,  et,  avec  la  vie,  la  grâce,  la  beau'é,  en 
un  mot,  les  charmes  de  la  parure.  Ornez  donc  le  rockwork,  em- 
bellissez-le, nen  pas  en  y  agençant  des  bas-reliefs  ou  en  le  décorant 
de  peintures  et  de  sculptures,  mais  simplement  en  venant  en  aide 
à  la  nature,  c'est-à-dire  en  y  transportant  un  choix  de  plantes  propres 
à  y  être  cultivées,  de  plantes  qui,  tout  en  charmant  l'œil  par  la 
beauté  de  leur  feuillage,  de  leur  port  et  de  leurs  pétales,  puissent 
trouver  dans  leur  nouvelle  colonie  tous  les  éléments  de  vitalité  qui 
existaient  pour  elles  dans  la  mère  patrie.  Nous  savons  bien  qu'une 
foule  de  végétaux  qui  croissent  dans  les  plaines,  sont  susceptibles 
d'être  entretenus  entre  les  crevasses  et  les  fissures  des  rockworks; 
mais,  outre  que  le  plus  souvent  ces  végétaux,  placés  dans  de  telles 
conditions,  vivotent  plutôt  qu'ils  ne  vivent,  il  faut  aussi  tenir  compte 
de  l'effet  produit  sur  notre  sens  optique,  il  faut  compter  avec  l'es- 
thétique, avec  l'harmonie  qui  a  présidé  à  la  distribution  des  espèces 
sur  le  globe. 

Les  plantes  des  montagnes,  et  particulièrement  les  espèces  pétro- 
philes,  seront  donc  exclusivement  choisies  lorsqu'il  s'agira  d'animer 
et  de  vivifier  un  rockwork.  Parmi  ces  espèces,  il  en  est,  nous  sommes 
loin  de  le  méconnaître,  qui  établissent  leur  station,  ici.  au  milieu 
des  plaines  d'une  contrée  fertile,  là,  sur  les  flancs  déchirés  d'une 
roche  volcanique  ;  mais  il  ne  reste  pas  moins  vrai  que  chacune 
d'elle  a  son  habitus  propre,  et  que  des  circonstances,  naturelles  sans 
doute,  mais  tout-à-fait  spéciales,  ont  seules  agrandi  son  aire  d'exten- 


—  9i  — 

sion  au  delà  des  limites  que  la  nature  lui  avait  primitivement  tracées. 
D'ailleurs,  le  nombre  relatif  des  individus  croissant  dans  des  lieux 
différents,  la  plus  ou  moins  grande  facilité  de  développement  que 
ces  individus  acquièrent  dans  les  divers  terrains  où  ils  ont  pris 
racine,  enfin  leur  faciès  général,  sont  des  caractères  suffisants  pour 
faire  distinguer  qu'une  espèce  donnée  est  essentielle  à  la  région  des 
plaines  ou  à  celle  des  montagnes,  appartient  aux  bords  des  rivières 
ou  aux  coulées  de  lave  hérissées  de  rochers. 

Les  plantes  rupeslres  comprennent  de  nombreuses  et  belles  espèces, 
parmi  lesquelles  l'amateur  peut  facilement  faire  un  choix  de  plantes 
variées  qu'il  saura  répartir  avec  goût  dans  les  différentes  parties  du 
rockwork  dont  il  aura  embelli  son   habitation  de  campagne. 

Certes,  ce  serait  un  travail  fort  utilement  entrepris  que  celui  qui 
aurait  pour  but  de  décrire,  dune  manière  claire  et  succincte,  les 
méthodes  employées  dans  la  culture  des  rochers  dits  artificiels, 
de  délimiter  nettement  les  espèces  pélrophiles,  de  décrire  ces  es- 
pèces et  de  narrer  leurs  mœurs,  de  faire,  en  un  mot,  l'histoire 
complète  de  l'élément  vital  du  rockwork.  Bien  que  ce  vaste  sujet 
n'incombe  pas  à  cet  article,  nous  ne  croyons  pas  pouvoir  mieux 
le  terminer  qu'en  essayant  d'esquisser  à  grands  traits  le  tableau 
d'une  de  ces  végétations  rupestres,  qui  font  l'admiration  de  tous  et 
qu'il  serait  facile,  avec  quelques  soins,  de  reproduire  auprès  do 
son  habitation   de  campagne. 

Nous  passons  sous  silence  les  différentes  espèces  de  mousses,  de 
lichens  et  de  champignons  qui  concourent,  non  pas  à  l'embellisse- 
ment des  rochers,  mais  qui  leur  impriment  un  cachet  de  vétusté 
tout  particulier,  et  nous  arrivons  à  une  famille  presque  entièrement 
rupestre,  au  groupe  élégant  des  fougères.  Ici,  point  de  fleurs  pour 
le  vulgaire,  point  de  couleurs  éclatantes,  mais,  en  revanche,  un 
feuillage  aux  formes  aussi  variées  qu'insolites,  et  où  l'on  rencontre, 
selon  les  espèces,  toutes  les  nuances  du  vert  le  plus  pur.  Ainsi, 
l'on  voit  le  Polypodium  vulgare  insinuer  sa  souche  écailleuse  entre 
les  crevasses  de  rochers,  et  étaler,  au  revers  de  ses  feuilles  lan- 
céolées, les  disques  dorés  de  sa  régulière  fructification.  Deux  autres 
Po'ypodium ,  d'une  grande  délicatesse. ,  recherchent  l'ombre  et  les 
masses  pierreuses  :  ce  sont  les  P.  phegopteris  et  P.  dryopteris,  tandi3 
que  le  P.  calcareum,  à  feuilles  d'un  vert  pâle,  croit  sur  les  coteaux 
qui  lui  ont  fait  donner  son  nom.  Le  Cystopteris  fragilis  couvre  les 
rochers  humides  et  partage  ses  stations  avec  le  C.  regia,  tout  aussi 
élégant  que  lui.  VAllosorus  crispus  forme,  sur  le  Mensenc,  des  ga- 
rons serrés  d'une  grande  beauté,  et  le  Polypodium  Oreopteris  déroule 


—  92  — 

scs  frondes  découpées,  au  milieu  des  trachytes  éboulés.  Les  nom- 
breux Asplenium  insinuent  leurs  rhizomes  dans  les  moindres  fentes 
qu'ils  rencontrent.  VA.  scolopendrium  étale  sur  les  rochers  humectés 
et  ombragés  ses  touffes  vertes,  coriaces  et  vernissées;  VA.  ceteracfi, 
une  des  plus  belles  espèces  de  ce  genre,  en  est  aussi  une  des  plus 
communes,  VA.  tricomanes  doit  son  aspect  gracieux  aux  petites 
folioles  nombreuses  et  arrondies  de  son  feuillage,  légèrement  cré- 
nelées à  leur  contour,  ou  profondément  incisées.  VA.  maritimum 
découvert  et  décrit,  pour  la  première  fois,  par  De  L'Obel,  qui  le 
trouva  sur  les  rochers  des  côtes  maritimes  de  l'Angleterre,  et  qui, 
plus  tard,  fut  retrouvé  en  France;  VA.  ruta-rmiraria ,  dont  la  ré- 
putation, en  thérapeutique,  était  jadis  si  générale;  VA.  adiantum 
nigrum,  dont  les  feuilles  plusieurs  fois  ailées  ressemblent  à  celles 
de  la  plupart  des  ombelles;  l'A.  Breynii,  VA.  germanicum,  enfin 
VA.  septentrionale,  aux  frondes  linéaires,  viennent  payer  également 
leur  tribut  au  paysage  et  ajouter  une  beauté  particulière  à  l'har- 
monie qui  résulte  de  la  réunion  de  ces  bizarres  végétaux.  Il  n'est 
pas  jusqu'au  Lycopodium  selago  qui  ne  s'empare  des  roches  élevées, 
et  qui  ne  concoure,  pour  une  large  part,  à  la  décoration  de  ces 
grandes  scènes  végétales,  où  apparaissent  aussi  les  espèces  nom- 
breuses, mais  encore  mal  définies,  des  genres  Pteris,  Blechnum, 
Osmunda,  Botrychium,  Opliioglossum,  etc.  Pour  mieux  faire  res- 
sortir encore  les  ressources  qu'offre  la  culture  des  membres  de  la 
grande  famille  des  Filices,  nous  donnons  ici  le  dessin  d'un  rock- 
work  exclusivement  planté  de  fougères,  si  ce  n'est  au  sommet,  où 
la  sombre  et  sévère  végétation  de  quelques  abiétinées  vient  trancher 
heureusement  avec  les  zigzags  capricieux  que  forment  les  frondes 
des   végétaux  placés  au-dessous   d'elle. 

Mais  cette  famille  est  loin  d'être  la  seule  dont  l'emploi  doive  se 
recommander  dans  l'ornementation  des  rockworks,  et  il  nous  reste 
encore  à  jeter  un  coup  d'œil  rapide  sur  quelques  genres  de  plantes 
particulièrement  propres  à  cet  usage.  Les  magnifiques  Etudes  sur  la 
Géographie  botanique  de  l'Europe,  etc.,  par  M.  Henri  Lecoq,  nous 
seront,  dans  cette  énumération,  d'un  grand  secours.  Si  donc  l'on 
recherche  les  végétaux  qu'affectionnent  ces  roches  de  nature  et  d'aspect 
tout  divers,  ou  remarquera  bien  certainement  deux  genres  de  plantes 
très-différentes,  qui  semblent  vouloir  se  partager  le  terrain  :  ce  sont 
les  Sedum  et  les  Saxifraga,  ceux-ei  cherchant  les  endroits  humectés, 
ceux-là  bravant  les  feux  du  soleil  et  fleurissant  abondamment  dans 
leur  station  découverte.  Plusieurs  graminées  recherchent  aussi  ces 
lieux  peu   fertiles,  témoin  le  Bromus  tectorum,  les  Poa,  divers  Fe&> 


m  — 


PL  15. 


Aspect  d'uu  Rockworlf  piaulé  de  fougères  t!  de  conifci 


—  94  — 

tuca  et  YAvena  amethystina  dont  les  frêles  épis  se  balancent  molle- 
ment sur  le  flanc  de  tous  nos  coteaux  de  nature  calcaire.  Les 
Hieraciam  s'épanouissent  également  dans  les  lieux  les  plus  arides; 
tels  sont  le  H.  pilosella,  le  //.  saxatile,  le  H.  ochroleucum,  le  H.  Mou- 
geoti,  le  H.  lonjifolium  et  lo  H.  amplexicaulc.  Au  printemps,  de 
nombreuses  crucifères,  parmi  lesquelles  les  génies  Bruya,  Curdumine, 
Biscutella  et  Sinapis  apparaissent  surfont  au  milieu  des  rochers  vol- 
caniques. UArabis  alpina  étale  les  bouquets  blancs  comme  la  neige, 
et  VA.  cebennensis,  réfugié  dans  les  lieux  les  plus  sauvages,  se 
plait  sur  les  basaltes  ou  les  roches  granitiques,  d'où  il  excite  l'envie 
du  botaniste.  La  riche  famille  des  synanthérées  est  principalement 
représentée  par  les  genres  Anthémis,  Imita,  Lactuca ,  Gnaphalium, 
Phœnixopits,  Artemisia,  etc.,  etc.  Les  Caryophvllées  paraissent  plus 
communs  sur  les  terrains  primitifs;  on  y  trouve  VÂrenaria  mun- 
tana,  VA.  kispida,  les  Silène  saxifraga,  S.  inaperta  et  le  Diantlius 
hirlus  qui  végète  aussi  très-bien  sur  les  rochers  basaltiques,  de 
même  que  VAndrosœmum  officinale,  qui  croit  dans  les  mêmes  loca- 
lités. Une  des  belles  décorations  des  rochers  est  formée  par  I\4m- 
thyllis  montana  qui  s'y  développe  quelquefois  en  abondance,  avec 
des  Pkagnalon,  des  Ononis,  des  Alsine,  et  qui  marie  si  habile- 
ment ses  fleurs  avec  les  corolles  élégantes  et  frangées  du  Pohjjala 
calcarea.  Disons  enfin  que  des  Pencedanum,  des  Seseli,  des  Cumpa- 
nttla,  des  Patent  Ma,  des  Veronica,  des  Ger.tnivm,  des  Iris  même, 
et  mille  autres  genres,  se  joignant  à  ceux  que  nous  venons  de  citer, 
ne  contribuent  pas  médiocrement  à  donner  à  la  végétation  des  ro- 
chers, cette  harmonie  dans  le  paysage,  cette  richesse  de  tons,  cette 
élégance  de  formes,  que  l'homme,  par  d'habiles  constructions  hor- 
ticoles, aime  à  rappeler  jusqu'à  près  de  sa  demeure. 


Pêches, 
i. Grosse  niionoiine    2  '.'>  Madeleine  de  Courson 


—  83  — 

JARDIN   FRUITIER 


PÊCHE    GROSSE    MIGNONNE. 
Par  M.  Edouard  Morren. 

Cette  pèche  est  une  des  meilleures  connues.  L'arbre  est  très-fruc- 
tifère, il  a  les  feuilles  très-finement  dentées  et  couvertes,  à  l'extrémité 
des  pétioles,  de  petites  glandules  globuleuses  d'un  vert  gai.  Les  fleurs 
sont  grandes  et  d'un  rose  Irès-pàle;  les  fruits  sont  gros,  arrondis,  à 
epicarpe  recouvert  de  duvet,  à  fond  jaune  comme  bronzé,  et  nuancé  de 
riches  teintes  brun  foncé  et  pourpre.  Ici  la  chair  est  blanche,  adhérente 
au  noyau,  et  là  elle  est  rose,  d'une  saveur  exquise  et  fondante. 


PÈCHE  MADELEINE  DE  COURSON ,  OU  PÊCHE  DE  VIN, 

PAR    LE    MÊME. 

Cette  variété  n'est  pas  nouvelle,  puisqu'elle  était  connue  déjà  de 
Duhamel;  mais  c'est  une  des  plus  estimées  pour  son  parfum  exquis  et  sa 
saveur  très-vineuse. 

Les  feuilles  sont  grandes,  étroites,  acérées,  bordées  d'incisions  bien 
marquées  et  profondes,  dépourvues  de  glandes.  Les  fleurs  sont  petites 
et  vivement  colorées.  Les  fruits  sont  globuleux,  de  grosseur  movenne, 
à  peau  duveteuse,  vivement  colorée  en  rose  du  côté  expcsé  au  soleil.  La 
chair  adhère  au  noyau,  elle  est  bianche,  très-fondante,  délicieuse, 
d'un  rose  foncé  autour  de  l'endocarpe. 


PLAN  DON  DOMAINE  DE  TROIS  HECTARES, 

Par  M.   Edouard  Morren. 

L'entrée ,  près  de  laquelle  se  trouve  la  loge  du  portier  {V.  la  pi.  ri-contre,  12), 
conduit  à  la  maison  (l'habitation  et  à  ses  dépendances  :  an  sud-ouesi  de  la  demeure, 
sont  u ne  serre,  un  jardin  floréal  circulaire  et  un  espace  pour  aquarium  ;  au  nord-est, 
une  cour  et  une  buanderie  (5)  ,  puis  nue  basse-coisr  (4),  avec  les  cages  pour  l'en- 
graissement des  volailles  ;  derrière  est  une  porcherie  (2)  et  en  (1)  une  cour  avec 
remises  et  écuries  qui  communique  avec  un  enclos  (5)  pour  déposer  le  fumier  et  les 
composts.  En  (6)  sont  les  rouches  et  hangards ,  en  (7)  une  partie  de  résene  pour 
les  primeurs,  et  eu  (8)  deux  serres  à  forcer.  On  peut  arriver  au  jardin  légumier  (9) 
par  les  dépendances  et  par  le  jardin  anglais  5  on  y  a  ménagé  deux  bassins  alimentés 
par  l'étang  Derrière  le  légumier  on  a  bâti  la  maisonnette  du  jardinier  et  en  a\ant  on 
a  planté  le  fruitier.  Dans  le  jardin,  aux  angles  des  promenades,  sont  des  bouquets 
d'arbustes   nains. 

Le  caractère  distinct  if  de  ce  plan  est  de  chercher  toute  son  ornementation  dans  les 
plus  belles  espèces  d  arbres  et  d'arbustes,  de  les  planter  en  groupe  ou  Isolés,  suivaDt 
les  exigences  du  bon  goût  et  d'un  jugement  sôr. 


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—  97  — 

HORTICULTURE. 


LILAS  PRINCESSE  CAMILLE  DE  ROHAN; 
nouveau    gain   de  M.  Brahy-Ekenholm  ,    édité  par  M.  Jacob-Makoy; 

Par  M.   Edouard  Morren. 

Le  lilas  est  la  plus  belle,  la  plus  aimable  et  la  plus  espiègle  fleur  de 
mai;  la  fille  aînée  du  printemps,  la  jeune  et  folâtre  Hébé  est  l'emblème 
de  la  jeunesse  et  de  la  première  émotion  d'amour,  comme  elle  est  un  des 
charmes  les  plus  séduisants  dont  se  pare  la  terre  lorsqu'elle  renaît 
toujours  jeune  pour  sourire  au  soleil  de  mai.  Pour  toutes  ces  raisons, 
et  pour  bien  d'autres  encore,  les  amateurs  de  lilas,  c'est-à-dire  tout  le 
monde,  accueilleront  avec  joie  l'annonce  d'une  variété  nouvelle  obtenue 
par  M.  Brahy-Ekenholm  ,  amateur  distingué  ,  auquel  l'horticulture 
est  déjà  redevable  d'un  si  grand  nombre  de  produits  remarquables  (1). 

Le  nouveau  lilas,  Princesse  Camille  de  Rohan,  est  gracieux  et  en 
même  temps  remarquable  et  original.  On  pourrait  croire  qu'un  lilas 
dût  être  lilas;  ce  fut  vrai  pendant  longtemps;  mais  aujourd'hui  cette  vé- 
rité est  usée:  le  nouveau  lilas  n'est  pas  lilas,  il  est  rose  :  on  possédait  des 
variétés  lilas,  violettes,  bleues  et  blanches.  Ces  dernières  sont  blanches 
parce  que  toute  matière  colorante  manque  dans  leurs  tissus;  les  pre- 
miers ont  conservé  la  couleur  typique  de  l'espèce,  c'est-à-dire  un  mé- 
lange intime  de  bleu  et  de  carmin  dont  résulte  le  lilas;  dans  les  deuxièmes 
et  troisièmes  la  matière  colorante  bleue  prédomine  ou  existe  seule.  Or, 
c'est  précisément  la  condition  inverse  que  vient  de  réaliser  M.  Brahy; 
toute  trace  ou  nuance  de  bleu  a  disparu  et  il  n'est  resté  qu'un  rose  de 
chair  le  plus  pur.  Chaque  fleur,  à  tube  régulier  et  à  limbe  parfaitement 
dessiné  en  forme  de  soucoupe  ,  fort,  épais  et  charnu  au  point  de  res- 
sembler à  de  la  cire,  présente  cette  teinte  tendre  à  sa  face  supérieure, 
tandis  que  la  face  inférieure,  le  dessous  de  chaque  fleur  ou  les  boutons 
sont  d'une  coloration  beaucoup  plus  vive.  Cette  particularité  fait  excep- 
tion au  mode  général  de  coloration  des  fleurs,  qui  sont  d'ordinaire 
d'une  teinte  beaucoup  plus  vive  sur  la  face  qui  reçoit  directement  la 
lumière.  Le  mélange  du  rose  tendre  et  du  carmin  sur  chaque  fleur  et 
dans  un  seul  thyrse   produit  un  contraste  de  couleur  très-agréable   à 

(1)  Voy.  Bc.lrj.  hnrt.,  !..  IV,  185-3-1834,  p.  65  :  Les  lilas  nouveaux  :  1°  Croix  de 
Brahy  ;  2°  Ekenbolm  ;  3"  Double  azuré  ;  4°  Charlcmagne. 

BELC.    IIOUT.    T.    VI.  13 


—  98  — 

l'œil.  Chaque  thyrse  est  grand,  épais,  arrondi,  très-régulièrement  fourni 
de  fleurs  nombreuses  et  pressées  sans  se  déformer;  plusieurs  thyrses 
secondaires  surgissent  à  la  base  de  l'inflorescence  principale  et  il  en  ré- 
sulte un  gros  bouquet  formé  par  une  seule  branche. 

Le  nouveau  lilas  devait  porter  un  beau  nom  qui  rappelât  immédiate- 
ment les  nombreuses  qualités  qui  le  distinguent;  on  ne  pouvait,  dès 
lors,  faire  un  choix  plus  heureux  que  celui  de  Madame  la  princesse 
Camille  de  Rohan,  épouse  de  S.  A.  le  prince  Camille  de  Rohan,  duc  de 
Montbazon  et  de  Bouillon,  l'un  des  plus  éminenls,  des  plus  passionnés 
et  des  plus  savants  protecteurs  de  l'horticulture. 

Le  jardin  du  domaine  de  Sichrow  près  de  Liebenau  en  Bohème,  la  ré- 
sidence d'été  du  prince,  couvre  plus  d'une  lieue  carrée.  Il  nous  suffira  de 
dire,  pour  en  faire  apprécier  les  mérites,  qu'on  y  cultive  environ  6,000 
espèces  diverses  de  serre  tempérée  et  de  serre  chaude,  parmi  lesquelles  on 
remarque  une  collection  de  127  espèces  et  variétés  d'acacia,  un  Banksia 
solandri  (grandis  major)  de  20  pieds  de  haut,  le  Bertholetia  exeelsa,  un 
exemplaire  d'une  force  remarquable  du  Lomatia  polyantha,  des  collections 
uniques  d' '  JEschynantlms,  d'Amaryllis,  d'Amila,  d'Artocarpus ,  de  Bank- 
sia, de  Brownea,  de  Clerodendron,  de  Dryandra,  d'Epaeriè,  de  Fuchsia , 
de  Gardénia,  de  Gloxinia,  de  Protea,  etc.,  etc.,  en  un  mot  de  toutes  les 
plus  belles  plantes  cultivées.  La  collection  d'Orchidées  compte  environ 
500  espèces,  et  des  plus  rares  :  on  y  remarque  le  Cypripedium  cau- 
datiim,  le  Huntlcya  radians,  le  Miltonia  virginalis,  YUropodium  Lindeni, 
VAerides  affine,  VA.  quinquevulnerum,  etc.,  etc.  Les  Palmiers,  Cycadées, 
Pandanées,  Cyclanthées,  Musacées  et  Dracena  sont  au  nombre  de  84 
espèces  :  nous  citerons  seulement  les  superbes  exemplaires  d'un  pal- 
mier très-rare,  le  Brahea  dulcis,  du  Licuala  spinosa,  du  Seaforthia 
elegans,  du  Tlirinax  argentea  et  du  charmant  Thrinax  pygmœa.  Enfin, 
près  de  200  Cactées,  700  espèces  et  variétés  d'Erica,  350  variétés 
d'Azalea  Indica,  250  Rhododendrons,  plus  de  500  Camélias,  250  Coni- 
fères, 500  Pioses,  etc.,  embellissent  ce  domaine  princier. 

Le  nouveau  lilas  se  recommande  beaucoup  par  ses  charmes  personnels; 
ils  suffisent  pour  que  tout  le  monde  coure  au  devant  de  la  fleur,  pour 
qu'on  se  dispute  ses  premiers  sourires.  N'est  donc  pas  prophète  celui 
qui  présage  un  heureux  avenir  à  la  belle  fleur,  qu'honore  le  grand  nom 
d'une  noble  dame,  Madame  la  princesse  Camille  de  Rohan,  que  protège 
le  zèle  et  les  connaissances  de  son  auteur,  M.  Brahy-Ekenholm,  et  que 
recommande  la  réputation  européenne  de  l'établissement  de  M.  Jacob- 
Makov,  car  c'est  réalité. 


I 


1.  C  oletlS     li  lunuM  ,     I*  on  tl 


i     var.  pet' 


•t.naïus     2.Lilas  Princesse  Camille  de  liolia 


—  99  — 

LE  COLEUS  BLUMEI,  VARIÉTÉ   PECTINATUS, 

Nouveau  gain  de  M.  Jacob-Makoy; 

Par  M.  Edouard  Morren. 

En  1851,  M.  YVillink,  horticulteur-amateur  d'Amsterdam,  intro- 
duisit en  Europe  une  nouvelle  espèce  du  genre  Coleus,  que  Bentham 
dédia  au  célèbre  botaniste  Blume,  directeur  du  jardin  botanique  de 
Batavia  et  auteur  de  la  Flore  de  Batavia  (1).  Le  genre  Coleus  fut 
établi  par  Loureir  (FI.  Cochinch.)  sur  ce  caractère,  que  les  filaments 
des  étamines  sont  soudés  à  la  base  en  un  tube  qui  engaine  le  style 
UoXios,  gaine).  Tout  le  monde  connaît,  aujourd'hui,  cette  remarquable 
labiée  de  Java,  un  peu  délicate,  mais  d'une  multiplication  très-facile, 
au  feuillage  vert  tendre,  maculé  de  rouge  de  sang  et  aux  longs  épis  de 
fleurs  bleues  et  blanches.  Les  feuilles  de  l'espèce  sont  ovales,  acumi- 
nées,  dentées,  atténuées  à  la  base;  le  milieu  de  la  lame  est  occupé  par 
une  large  macule  rouge.  L'établissement  de  M.  Jacob-Makoy,  à  Liège, 
vient  de  gagner  une  variété  nouvelle  du  Coleus  de  Blume,  que  nous 
figurons  à  la  planche  18.  Elle  est  remarquable  par  l'ampleur  des 
feuilles,  la  richesse  de  la  coloration  et  surtout  par  la  forme  des  dents  ; 
ces  dents  sont  très-longues,  allongées,  ovales,  acuminées,  elles  ont  la 
forme  des  dents  d'un  peigne  et  sont  disposées  de  la  même  façon  sur  les 
bords  des  feuilles,  d'où  le  nom  de  pectinatus.  Celte  variété  est  de  beau- 
coup supérieure  à  l'espèce. 

Le  Coleus  Blumei  aime  la  chaleur,  la  lumière  et  l'humidité;  la  tempé- 
rature de  la  serre  tempérée  lui  suffit  toutefois.  La  lumière  directe  du 
soleil  a  pour  effet  d'augmenter  la  beauté  de  sa  superbe  panachure;  à  la 
fin  de  mai,  on  peut  mettre  les  plantes  en  pleine  terre  à  une  bonne  expo- 
sition. 

APPENDICE  A  UN  ARTICLE  DU  JOURNAL  LA  BELGIQUE 
HOBTLCOLE  SUR  LES  PANTOUFLES  DU  PERE  FEUILLÉE 
ET  LES  BRODEQUINS  DU  DOCTEUR  FORTHERGILL; 

Par  M.  Remy  Romanet,  du  bourg  St.-Audèal  (Ardèché). 

Tous  les  amateurs  qui   s'adonnent  à  la  culture  si  riche  des  Calcéo- 
laires,  recommandent,  après  avoir  semé  les  graines  au  mois  de  juillet 

(1)  Voy.    Fclglqnc   horticole,  T.  IV,   p.  203. 


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ou  d'août,  de  repiquer  les  jeunes  plants,  dans  des  petits  pots  bien  drai- 
nés; de  les  exposer  ensuite  pendant  l'hiver  aux  rayons  solaires,  sur 
"une  tablette  d'une  serre  tempérée;  d'éviter  avec  soin  l'humidité 
presque  permanente  de  la  saison  d'hiver,  de  ne  leur  donner  qu'un 
léger  bassinage,  tout  juste  pour  entretenir  la  vie;  avec  ces  soins  minu- 
tieux, on  est  largement  récompensé  au  mois  de  juin,  par  une  riche 
floraison. 

J'ai  fait  tout  le  contraire,  c'est-à-dire  qu'il  s'est  passé  tout  l'opposé  à 
mon  insu  ;  néanmoins  mes  Calcéolaires  ont  fleuri,  et  voici  comment  : 
au  mois  d'août  1854,  j'ai  semé  des  graines  de  Calcéolaires  dans  une 
terrine,  convenablement  terreautée  et  drainée;  je  l'ai  exposée  à  l'ombre 
•comme  cela  se  pratique  ;  les  graines  ont  levé  admirablement,  j'ai  laissé 
les  jeunes  plants  dans  la  terrine,  que  j'ai  placée  derrière  une  vitrine 
d'une  serre  froide.  Un  hiver  des  plus  rigoureux  survint  cette  année-là  ; 
la  neige  a  régné  l'espace  de  22  jours  sur  la  surface  du  sol;  le  thermo- 
mètre Réaumur  est  descendu  à  huit  degrés  au-dessous  de  zéro  ;  une 
négligence  impardonnable  m'a  fait  perdre  mes  plantes  de  Calcéolaires; 
j'en  ai  amèrement  déploré  la  perte! 

Vers  le  milieu  du  mois  d'avril  1855  je  changeais  de  place  un  grand 
vase  contenant  un  Calla  d'Ethiopie,  qui  fut  oublié,  et  qui  a  supporté 
toute  l'intempérie  de  l'hiver  dont  j'ai  parlé;  quelle  fut  ma  surprise,  en 
apercevant  derrière  ce  vase  deux  Calcéolaires  en  fleur  d'un  beau  jaune!! 
Probablement  une  fourmi  avait  emporté  deux  ou  trois  graines ,  et  les 
avait  mises  dans  son  trou,  qui  se  trouvait  au  pied  du  mur  touchant  le 
sol,  et  bien  exposé  au  midi.  J'enlève  soigneusement  les  deux  plants, 
je  les  mets  séparément  dans  un  pot,  et  je  jouis  pendant  tout  l'été  d'une 
belle  floraison. 

Je  partage  l'opinion  de  M.  Alphonse  Karr,  qui  disait  si  bien  dans  ses 
lettres  écrites  de  son  jardin  et  dont  nous  sommes  privés  à  regret  depuis 
bien  des  années,  dans  le  journal  Y  Illustration  t  que  beaucoup  de  plantes, 
demandant  les  soins  si  délicats  d'une  serre  chaude  ou  tempérée,  s'ac- 
commoderaient peut-être  très-bien  en  pleine  terre. 

Enfin,  je  laisse  aux  amateurs  qui  cultivent  les  Calcéolaires  cette 
étrange  surprise,  et  cette  expérience  inattendue.  Voilà  bien  une  fleur, 
comme  le  dit  si  spirituellement  M.  Charles  Morren,  une  fleur  pleine 
d'imprévu  et  d'étrangetés  ;  une  fleur  de  notre  siècle!! 


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REVUE  DE  PLANTES  NOUVELLES  OU  INTÉRESSANTES. 

DelpHiaiium  cardinale.  Hook. — Elym.  :  de  ê~t*<ptv,  del phi- 
nus,  dauphin  ;  par  allusion  à  la  forme  des  fleurs  avant  leur  épanouis- 
sement.— Bot.  mag.,  tab.  4887.  —  Delphinium,  ou  Pied  d'alouette,  écar- 
late.  —  Fam.  des  Renonculacées;  Polyandrie  trigynie. 

Les  Delphinium  bleus,  pourpres  ou  blancs,  nous  sont  familiers 
dans  les  jardins.  Nous  avons  la  satisfaction  de  faire  connaître  une 
espèce  de  Delphinium,  égalant  les  autres,  s'il  ne  les  surpasse  pas, 
pour  le  port  et  l'aspect  de  la  plante,  et  brillant  surtout  par  le  luxe 
de  la  coloration  des  fleurs,  dont  l'œil  peut  à  peine  soutenir  le  vif 
écarlate.  Cette  plante  est  une  des  nombreuses  nouveautés  recueillies 
par  M.  Wm.  Lobb  en  Californie  et  introduite  dans  nos  jardins  par 
MM.  Veitch  et  fils,  d'Exeter.  Traitée  comme  une  plante  annuelle  de 
nos  jardins  elle  ne  peut  manquer  de  devenir  la  favorite  de  tous  les 
floriculleurs  d'élite.  Les  explorateurs  des  Etats-Unis  avaient  men- 
tionné cette  rareté,  31.  le  Dr  Torrey  en  avait  des  exemplaires  en 
sa  possession,  mais  elle  n'avait  pas  été  publiée  avant  la  figure  que 
vient  d'en   donner  sir  W.  Hooker. 

Les  spécimens  cultivés  mesuraient  de  6  à  9  décimètres,  ce  qui 
est  une  taille  beaucoup  plus  élevée  que  la  hauteur  des  exemplaires 
desséchés  dans  les  herbiers.  La  plupart  des  feuilles  sont  radicales, 
portées  sur  des  pétioles  très-longs,  robustes,  arrondis;  elles  sont 
glabres,  comme  le  reste  de  la  plante,  digitées,  divisées  en  cinq  seg- 
ments principaux,  étendus,  cunéo-lancéolés,  fortement  nervés;  la 
circonférence  de  la  lame  représente  un  contour  cordé;  les  segments 
sont  les  uns  simples,  étroits  et  très-acuminés,  les  autres  plus  larges  et 
plus  ou  moins  profondément  divisés  en  deux  à  cinq  lobes,  qui  sont 
très-pointus.  Les  feuilles  caulinaires  sont  peu  nombreuses,  graduelle- 
ment plus  petites  à  mesure  que  l'on  s'élève,  portées  sur  des  pétioles 
plus  petits,  à  segments  moins  nombreux,  passant  enfin  aux  bractées 
simples,  sessiles,  lancéolées  de  la  panicule  terminale.  Cette  panicule,  ou 
racème  composé,  est  allongée  et  porte  un  grand  nombre  de  grandes  et 
belles  fleurs,  à  l'extrémité  de  longs  pédicelles  dressés  et  pubescents  : 
à  la  base  de  ces  pédicelles  sont  deux  bractées  opposées  et  subulées.  Les 
fleurs  sont  légèrement  pendantes,  leur  longueur  est  de  cinq  centimètres 
environ  y  compris  l'éperon,  d'une  riche  couleur  écarlate,  excepté  les 
pétales  qui  sont  en  partie  d'un  jaune  vif.  Les  cinq  sépales  sont  larges, 
ovés,  très-obtus;  l'éperon,  aussi  long  que  la  fleur,  légèrement  ascen- 
dant, est  cramoisi.  Les  pétales  et  leurs  appendices  ou  éperons  sont  de 


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la  même  forme  et  vont  se  loger  dans  l'éperon  du  calice;  le  limbe,  aussi 
bien  que  les  petits  pétales,  est  pileux.  Etamines  nombreuses;  anthères 
oblongues,  jaunes.  Les  trois  ovaires  sont  dressés,  glabres,  terminés  en 
styles  courts  et  subulés. 

C«5P«aâa  sMsueE'Isa*  Cham.  — ■  Bot.  Mag.,  tab.  4888.  —  Cham.,  in 
Linncea  1829,  p.  474.  —  De  Cand.,  Prodr.  9,  p.  476.  —  Syn.  :  Cardia 
Sebestena.  Yell.  FI.  Flum.  v.  2,  p.  251.  —  Etym.  :  Le  genre  Cordia  fut 
établi  par  Linné  à  la  mémoire  de  Eurich  et  Valère  Cordus.  Le  premier 
naquit  en  1486  à  Simmershausen  dans  la  Hesse,  fut  professeur  à  Erfurt 
et  à  Marbourg,  et  mourut  médecin  à  Brème  en  1535;  il  publia  entre 
autres  ouvrages  le  Botanoligicum.  Son  fils  Valère  naquit  à  Erfurt  en 
1515  et  mourut  k  Rome  en  1544  ;  il  fut  médecin  et  botaniste,  et 
laissa  :  Annotatioms  in  Dioscoridem  :  Liber  quintus  stirpium  de&crip- 
tionum,  quas  in  Italia  sibi  visas  describit,  avec  des  annotations  de 
C.  Gesner,  et  Dispensatorium  pharmacorum  omnium.  —  Fam.  des  Bor- 
raginées;  Pentandrie  monOgynîe.  Cordie  superbe. 

La  plante  forme  un  arbrisseau  de  deux  à  trois  pieds  d'élévation. 
Les  branches  sont  robustes,  rondes,  lisses.  Les  feuilles,  réunies  en 
grand  nombre  à  l'extrémité  des  branches,  sont  grandes,  de  18  à  24 
cent,  de  long,  elliptiques  cunéées,  quelque  peu  ondulées,  entières,  d'un 
vert  foncé,  acuminées  ;  les  nervures  principales  sont  déprimées  à  la  face 
supérieure,  proéminentes  à  l'inférieure.  Le  pédoncule  terminal,  aussi 
long  que  les  feuilles,  porte  une  cyme  dicholome ,  de  très-grandes  fleurs 
blanches  teintées  de  jaune,  chacune  sessile  sur  un  rameau  plus  ou  moins 
scorpioïde.  Le  calice  est  blanc  verdâtre,  à  peu  près  cylindrique,  ouvert 
irrégulièrement.  Corolle  très-grande,  plissée,  campanulée-infundibuli- 
forme,  à  lobes  larges,  arrondis,  étalés.  Cinq  etamines,  insérées  sur  la 
partie  étroite  du  tube,  incluses,  à  filaments  pileux  à  la  base,  à  anthères 
sagilées,  extrorses.  Ovaire  subglobuleux;  style  excédant  peu  les  eta- 
mines; stigmate  deux  fois  bifide;  segments  clavés. 

Culture.  On  suppose  le  Cordia  superba originaire  delarégion  tropicale  du 
Brésil.  On  le  traite  comme  plante  de  serre  chaude  et  il  fleurit  en  septembre. 

A  Ht  uni conte  Dissocia.   LindL  —  Bot.  Mag.,  t.  4890.  —  Lindl. 
in  Bot.  Beg.  1838,  sub.  Tab.  19.  —De  Cand.  Prodr.  v.  9,  p.  237.  — 
Syn.  :  Inearvillea  Emcdi.  Wall.  Cat.  n.  487.  — Etym.  :  de  «^fi, autour, 
et  X.OW  chevelure.   —  Fam.    des  Bignoniacées  ;    Didynamie   Gymnos- 
permie.  — -  Amphicome  des  monts  Emodi. 

Cette  plante,  découverte  par  le  Dr  Wallich,  est  l'espèce  typique  du 
genre  Amphicome  (Incarvillea,  Wall.);  ce  genre  des  Indes  Occidentales, 
consiste  en  deux  espèces,  que  le  Dr  Royle  a  séparées  avec  raison  des 


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ïncarvillea  pour  en  faire  une  section  sous  le  nom  de  Amphicome.  Le 
A.  arguta,  espèce  fort  différente  de  celle-ci,  fut  le  premier  cultivé 
et  a  été  bien  figuré  par  le  Dr  Royle  dans  sa  Himalayari  Flora  et  par  le 
Dr  Linclley  dans  son  Botanlcal  R&gister  (1838,  tab.  19).  Ce  dernier  auteur 
parle  de  VA.  Emodi  comme  d'une  espèce  beaucoup  plus  belle,  à  fleurs 
plus  grandes  et  plus  nombreuses,  à  feuillage  plus  robuste  et  d'une  taille 
beaucoup  plus  élevée,  mais  dont  on  attendait  encore  l'introduction. 

En  185u2,  M.  Hooker  en  reçut  des  graines  du  major  Vicary,  et  la 
plante  fleurit  à  Kew,  sous  châssis  froid,  en  octobre  1855.  C'est  une 
agréable  plante,  originaire  des  montagnes  de  l'Emodi,  près  de  Sri- 
naghur. 

Racine  persistante,  tige  annuelle  et,  comme  la  plante  entière,  glabre, 
haute  d'un  pied  à  un  pied  et  demi ,  peu  branchue.  Feuilles  impari- 
pennées,  à  5  ou  7  paires  de  folioles,  opposées,  cordato-ovales,  obtuses 
brièvement,  mais  manifestement  péliolulées  ,  à  bords  crénato-lobés. 
Pédoncules  terminaux  ,  feuillus  ou  portant  seulement  deux  à  trois 
bractées  cunéées.  Fleurs  grandes,  belles,  d'abord  en  corymbe,  pendant 
la  maturation  des  fruits  l'inflorescence  devient  racémiforme.  Pédicelles 
courts,  bractées.  Tube  du  calice,  turbiné,  épais,  charnu;  limbe  à 
cinq  dents  courtes,  obtuses  ,  épaisses  et  granulées.  Corolle  orange, 
d'une  forme  intermédiaire  à  l'infundibulée  et  la  campanulée.  Limbe 
très-grand,  à  cinq  lobes  étalés,  arrondis,  émarginés,  rosés.  Etamines 
incluses,  insérées  sur  la  partie  contractée  du  tube  de  la  corolle,  clidy- 
names;  filaments  courbes,  de  telle  sorte  que  les  anthères  se  trouvent 
réunies  par  paires,  à  loges  divergentes  et  portant  chacune  une  longue 
touffe  de  poils  et  un  aiguillon  en  arrière.  Ovaire  oblong,  brièvement 
stipité,  entouré  d'un  anneau  hypogyne.  Style  filiforme,  stigmate  à  deux- 
lèvres  grandes  et  étalées. 

IBeBtriirohBuiBi  Mac  Carthiœ.  Hook.  —  Bot.  Mag.,  t.  4886.  — 
Etym.  :  de  foifyûv,  arbre,  et  put»,  vivre.  —  Dendrobium  de  Madame 
Mac  Carthy.  —  Fam.  des  Orchidées;  Gyandrie  Monandrie. 

Cette  superbe  espèce  de  Dendrobium,  qui  semble  avoir  échappé  jus- 
qu'ici à  l'observation  des  botanistes  de  Ceylan,  se  présente,  pendante  des 
troncs  des  grands  arbres,  dans  les  forêts  voisines  de  Ratuapoora,  où 
elle  est  désignée  par  les  naturels  sous  le  nom  de  Wisak-mal,  ce  que  l'on 
peut  traduire  par  fleur  du  mois  de  pluie  ou  fleur  de  mai.  Celte  char- 
mante plante,  sans  contredit  la  plus  belle  des  Orchidées  de  Ceylan,  a  été 
dédiée  à  Madame  Mac  Carthy,  épouse  de  l'honorable  Esquire  C.-J.  Mac 
Carthy,  secrétaire  colonial  de  l'île  de  Ceylan. 

Les  tiges  sont  simples,  longues  de  4  à  6  décimètres,  de  l'épaisseur 


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d'une  plume  d'oie,  striées  légèrement;  entrenœuds  de  2  1/2  à  4  centi- 
mètres. Les  feuilles  sont  peu  nombreuses,  à  la  partie  supérieure  des 
tiges,  elles  mesurent  de  6  à  10  centimètres  de  longueur  sur  deux  à  deux 
centimètres  et  demi.  Les  racèmes  sont  au  nombre  de  un  à  trois,  chacun 
à  l'aisselle  d'une  feuille  et  portant  quatre  ou  cinq  fleurs;  les  pédoncules 
sont  munis  à  la  base  de  quelques  bractées  engainantes-,  pédicelles 
blanchâtres,  longs  d'environ  trois  centimètres.  Fleurs  belles,  elles  ont 
presque  8  centimètres  de  longueur  et  9  de  diamètre,  d'un  pourpre 
pâle;  sépales  étroits-lancéolés,  égalant  presque  en  longueur  les  pétales 
beaucoup  plus  larges,  oblongs-lancéolés  ;  labelle  de  la  même  taille  que 
les  pétales,  plus  ou  moins  trapéziforme,  arrondi  à  la  pointe,  émoussé, 
à  peine  trilobé,  plus  ou  moins  caréné  supérieurement,  blanc,  marqué 
d'une  foule  de  petites  taches  lilas  sur  la  gorge,  d'une  grande  macule 
pourpre  foncé  sur  le  disque,  et  la  pointe  largement  marginée  de  pourpre 
pâle  avec  environ  sept  stries  longitudinales  plus  foncées.  Colonne 
blanche,  légèrement  teintée  de  pourpre,  subquadrilatère,  munie  de  deux 
cornes  tronquées,  dressées  ou  un  peu  réfléchies,  entre  lesquelles  est 
situé  l'anthère,  en  forme  de  casque,  purpurescenle;  les  quatre  pollinies, 
d'un  jaune  pâle  sont  adhérentes  en  une  masse  oblongue. 

Cœlogyne  speciosa.  Lindl.  —  Bot.  Mag.,  t.  4889.  — Lindl.  Gcn. 
et  sp.  Orchid.,  p.  39.  Bot.  Beg.  1847,  t.  23.  —  Syn.  :  Chelonanthera 
speciosa,  Blume,  Bijd.  384,  t.  M.  —  Etym.  :  de  k»s\os  creux,  fistuleux 
et  yvy>j ,  organe  femelle. —  Fam.  des  Orchidées;  Gynandrie  Monan- 
drie.  —  Cœlogyne  gracieux. 

Cette  belle  espèce  de  Cœlogyne  a  été  introduite  de  Java  par  Monsieur 
Thomas  Lobb,  collecteur  de  MM.  Veitch.  Le  labellum  de  la  fleur  est 
admirable  tant  par  le  coloris  que  par  sa  forme  exquise. 

Pseudobulbes  ovales-oblongs,  comprimés  et  marqués  de  côtes  élevées, 
portant  au  sommet  une  seule  feuille  elliptique-lancéolée,  acuminée, 
membraneuse,  striée  et  ondulée.  De  la  base  d'une  jeune  feuille  cannelée, 
surgit  une  hampe  florale,  beaucoup  plus  courte  que  la  feuille,  et  portant 
une  ou  deux  fleurs  pendantes,  très-grandes,  mais  peu  brillantes  par  le 
coloris.  Les  sépales  sont  larges,  lancéolés,  les  latéraux  étant  les  plus 
longs  et  les  plus  étroits,  l'intermédiaire  plus  large  et  moins  acuminé, 
cariné,  tous  d'un  vert  olive-pâle.  Pétales  très-grands,  linéaires,  de  la 
même  couleur  que  les  sépales,  pendants.  Labelle  très-grand,  jaune 
d'ocre,  veiné,  teinté  et  taché  de  rouge  de  sang,  blanc  à  la  pointe.  Il  est 
de  forme  oblongue,  trilobé,  à  lobes  latéraux  petits,  à  lobe  moyen 
large  et  lui-même  bilobé,  frangé.  Sur  presque  toute  la  longueur  du 
kibelle  sont  deux  grandes  crêtes  frangées  et  terminées  par  d'admirables 


—  105  — 

poils  étoiles.  La  colonne  est  grande,  semi-circulaire,  ailée,  huppée  au 
sommet,  sous  lequel  est  située  la  loge  pollinique  renfermant  les  quatre 
masses  réunies  par  une  grande  glande. 

Rhododendron  retusum.  Bennet.  Rosage  émoussé.  —  Benn. 
in  Fi.  Jav.,  p.  88,  t.  20.  —  DC.  Prodr. ,  v.  7,  p.  724.  —  Bot.  Mag.,  PL 
4859.  Syn.  :  Vireya retusa,  Blum.  Bijdr.  p.  856.  —  Fam.  des  Ericacées. 

—  Décandrie  Monogynie. 

Il  est  originaire  des  montagnes  élevées  de  Java  où  il  fut  découvert  par 
Blume;  le  Dr  Horsfied  le  retrouva  dans  l'île  de  Sumatra,  en  1818, 
à  une  journée  de  Padang  vers  Menangeabo,  à  une  altitude  de  3000  pieds 
au-dessus  de  l'Océan.  On  doit  le  cultiver  comme  plante  d'orangerie. 
MM.  Rollison  l'ont  reçu  de  graines  envoyées  de  Java  par  leur  col- 
lecteur M.  Henschell.  C'est  une  charmante  plante  (a  lovelij  plant)  du 
groupe  des  B..  ferrugineum  et  hirsutum,  parmi  les  espèces  européennes 
et  des  B.  anthopogon  et  lepidotum  parmi  les  rosages  indiens,  mais  su- 
périeurs à  eux  par  le  coloris  et  le  feuillage  ;  les  fleurs  sont  plus  écarlates 
que  dans  aucune  autre  espèce  du  genre. 

Le  B.  retusum  constitue  un  arbuste  d'un  pied  ou  deux  de  hauteur, 
ligneux.  Les  feuilles  ont  deux  pouces  à  deux  pouces  et  demi,  sessiles, 
oblongues  ou  elliptiques  obovées  ,  toujours  vertes,  coriaces,  glabres,  à 
bords  réfléchis,  l'extrémité  est  très-obtuse.  Les  ombelles  terminales,  à  8 
ou  9  fleurs,  un  peu  inclinées.  Le  calice  est  court,  vert-jaunâtre,  cilié  et 
écailleux,  une  des  divisions  dépasse  les  autres.  La  corolle  a  un  pouce  et 
demi  de  longueur,  écarlate,  tubuleuse  infundibulil'orme,  à  base  ventrue, 
à  limbe  court  peu  étalé  à,  cinq  lobes  arrondis.  Etamines  10,  à  filaments 
glabres.  Ovaire  oblong  quinqueanguleux.  Style  court. 

Kliododendroit  €aiâfornicuin.  Hook.  Rosage  de  la  Californie. 

—  Bot.  Mag.,  tab.  4863.  —  Fam.  des  Ericacées.  —  Décandrie   Mono- 
gynie. 

Ce  beau  rosage  de  la  Californie  a  le  port  du  B.  maximum  ou  plutôt 
du  B.  catawbiense.  Les  feuilles  ,  portées  sur  des  pétioles  courts,  sont 
longues  de  3  à  4  pouces,  elliptiques,  obovées,  aiguës,  souvent  mucro- 
nées  à  la  pointe,  glabres  et  nues  aux  deux  faces.  Sous  les  fleurs,  les 
feuilles  sont  généralement  plus  nombreuses  et  plus  serrées,  de  ma- 
nière à  former  un  large  involucre  vert  foncé  dans  lequel  brillent  de 
grands  pétales  vivement  colorés.  Le  calice  est  petit,  à  cinq  lobes;  la 
corolle  est  d'abord  d'un  carmin  riche  et  bien  ouverte,  elle  est  largement 
campanulée.  Le  tube  est  court  et  se  divise  brusquement  en  cinq  lobes 
larges,  ovales,  ondulés.  C'est  un  des  plus   beaux  rosages  connus,   il  a 


—  106  — 

fleuri  chez  M.  Veitch,  King's-road,  Chelsea,  et  a  figure  au  mois  de  juin 
dernier  au  palais  de  cristal  de  Sydenham. 

Strei»tocar|>us  Gardenê.  Hook.  Streptocarpe  de  Garden.  — 
Bot.  Mag.,  pi.  4862.  — Fam.  des  Didymocarpécs.  —  Diandrie  mono- 
gynie. 

Nous  avons  signalé,  il  y  a  quelques  mois,  l'apparition  du  Strepto- 
carpus  polyanthiis,  et  nous  avons  de  nouveau  la  satisfaction  d'annoncer 
une  nouvelle  espèce  de  ce  beau  genre,  le  S.  Gardent,  importé  de  Natal 
par  le  capitaine  Garden.  Il  a  beaucoup  d'affinité  avec  le  S.  Rexii,  bien 
connu  des  fleuristes,  tout  en  étant  très-distinct  tant  par  le  feuillage  que 
par  les  fleurs.  Les  feuilles  sont  plus  grandes  et  plus  belles,  plus  ovales, 
plus  rugueuses  et  cordées  à  la  base.  Les  pédoncules  sont  toujours 
biflores,  le  calice  a  les  divisions  étalées  à  leur  extrémité.  La  corolle  est 
de  même  aspect  que  celle  du  S.  Rexii,  et  cependant  différente  de  forme  et 
de  coloration  :  d'un  pâle  bleu  uniforme  dans  le  S.  Rexii,  ici  le  tube  est 
vert  ou  blanc  verdâtre  et  le  limbe  lilas  ;  de  plus  le  tube  est  plus  large, 
légèrement  courbe   inférieurement,  et  le  limbe,  au  lieu  de  s'étaler  en 
cinq  lobes  égaux,  est  plus  décidément  bilabié,  a  deux  divisions  supé- 
rieures relevées  et  trois  divisions  inférieures  formant  la  seconde  lèvre. 

La  plante  fleurit  copieusement  dans  une  bonne  serre  tempérée  pen- 
dant toute  la  durée  de  l'été. 

IBëgtlotEteittium  littorale.  Martius.   Diplothemium  du   littoral. 

—  Mart,  Palm.  110,  t.  76,  f.  5.  —  Klh.  Enum.  Plant.,  V.  3,  p.  290.  — 
Bot.  Mag.,  pi.  4861.  —  Syn.  :  Cocos  arenafius,  Gomez  ,  Act.  Olysip. 
1812,  p.  61.  — Fam.  des  Palmiers.  —  Monœcie  Polyandrie. 

Les  trois  espèces  décrites  du  genre  Diplothemium  sont  considérées 
comme  particulières  au  Brésil;  Martius  dit  de  celle-ci  qu'elle  croit  sur 
les  rivages  sablonneux  de  St.-Sébastien. 

Le  caudex  est  court,  horizontal  ;  les  frondes  de  trois  à  quatre  pieds 
de  longueur,  dressées-étalées,  rigides;  le  pétiole  occupe  plus  de  la  moitié 
de  leur  longueur,  anguleux;  les  pinnules  sont  serrées,  linéaires  lancéo- 
lées, très-acuminées,  solitaires  ou  insérées  trois  ou  quatre  ensemble. 
La  spathe  est  longue  de  4  à  5  pouces,  acuminée.  Les  fleurs  forment 
un  épi  serré  sur  le  spadice,  d'un  jaune  plus  ou  moins  vif  :  dioïque. 

Drymonia  villosa.  Hook.  —  Bot.  Mag.,  tab.  4866.  —  Fam.  des 
Gesnériacées.  —  Didynamie  Angiospermie. 

Cette  belle  espèce,  remarquable  par  son  beau  feuillage,  a  été  importée 
en  Belgique,  de  Surinam,  par  un  voyageur  de  M.  Van  Houtte.  Elle  est 
subherbacée,  haute  d'un  pied  à  un  pied  et  demi,  très-branchue ,  cou- 


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verte  de  poils  longs  et  serrés  sur  les  rameaux  et  sur  les  feuilles.  Les 
fleurs  sont  axillaires,  généralement  ternées,  à  corolle  villeuse  extérieu- 
rement, à  tube  gibbeux,  courbe,  comprimé,  à  limbe  bilabié,  blanche 
teintée  de  pourpre,  surtout  à  la  gorge.  Serre  chaude. 

RicoftiaGia  f n-a^ra  bus.  Hook.  —  Bot.  Mag.,  tab.  4865.  —  Fam. 
des  Solanées.  —  Pentandrie  Monogynie. 

C'est  une  fort  belle  espèce  de  tabac  découverte  pendant  l'expédition 
du  capitaine  Denham,  par  MM.  Macgillivray  etMilne,  dans  les  rochers  de 
l'ile  des  Pins;  elle  est  remarquable  par  la  fermeté  et  l'épaisseur  de  ses 
feuilles  qui  sont  comme  satinées  à  l'état  sec,  par  les  dimensions  extra- 
ordinaires qu'elle  atteint  par  la  culture,  et  par  l'odeur  délicieuse  qui 
s'échappe  de  ses  grandes  fleurs  blanches.  Le  N.  fragrans  est  certaine- 
ment voisin  du  N.  undulata,  Vent,  et  Br.  (iY.  suaveolens  Lehm.).  C'est 
une  plante  de  culture  facile  dans  toute  serre  froide  et  qui  doit  trouver 
sa  place  dans  toutes  les  collections;  sa  floraison  est  continue  pendant 
tout  l'été. 


REVUE  DES  ROSES  NOUVELLES. 

Rose  gloire  de  Dijon,  fig.  dans  le  Floricult.  cabinet,  Dec.  1855. 
Rose  dérive  du  mot  celtique  rhod  (red),  rouge,  à  cause  de  la  couleur 
dominante  de  celte  Heur  à  l'époque  où  ce  nom  lui  fut  donné. 

Ludovic  Verlhema.  qui  voyageait  dans  le  midi  en  1503,  dit  que  la 
Toscane  était  particulièrement  renommée  pour  ses  roses  et  qu'il  en  vit 
des  fleurs,  à  la  fois  rouge,  blanche  et  jaune.  M.  William  Ouseley  relate, 
dans  son  ouvrage  sur  la  Perse,  que  lorsqu'il  entra  dans  le  jardin  appar- 
tenant au  gouverneur  près  de  Fassa  ;  il  faillit  être  écrasé  sous  des  roses. 
La  célèbre  princesse  Nourmahal  creusa  un  canal  entier  qui  fut  alimente 
d'eau  de  rose  pour  le  plus  grand  bonheur  du  nez  du  grand  Mogol.  La 
chaleur  du  soleil  ayant  séparé  l'eau  de  l'huile  essentielle  de  la  rose, 
on  remarqua  cette  substance  flottant  à  la  surface  du  canal,  et  c'est  ainsi 
que  fut  découverte  l'essence  de  rose. 

La  Rose  gloire  de  Dijon  appartient  à  la  section  des  Roses  thé;  elle  a 
été  gagnée  par  MM.  Jacotot,  de  Dijon,  qui  l'ont  exhibée  récemment  à 
l'exposition  de  la  Société  d'Horticulture  de  Cote  en  France  où  elle  obtint 
la  grande  médaille,  et  où  le  jury  la  nomma  Gloire  de  Dijon.  Depuis,  elle 
fut  encore  exposée  à  la  Société  d'Horticulture  de  la  Seine,  dont  les 
dames  patronesses  lui  décernèrent  la  grande  médaille  d'or.  La  plante 
est  forte  et  vigoureuse,  le  feuillage  est  riche  et  abondant,  d'un  beau 
vert  à  la  face  supérieure  avec  le  dessous  des  jeunes  feuilles  d'un  char- 


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niant  rouge  carmin;  elle  est  trés-florifère ,  les  fleurs  mesurent  en 
moyenne  de  12  a  lo  centimètres  de  diamètre,  absolument  doubles,  et 
émanent  le  parfum  le  plus  suave.  Dans  une  situation  sèche,  la  rose 
Gloire  de  Dijon  parait  être  parfaitement  rustique,  aussi  bien  les  pieds 
francs  que  ceux  qui  auraient  été  greffés  :  c'est  une  délicieuse  plante 
d'orangerie  et  elle  l'emporte  sur  toutes  les  autres  roses  pour  le  forçage; 
bien  cultivée,  elle  peut  donner  des  fleurs  pendant  toute  l'année. 

Rose  Mathuris  Régnier.  —  Rosier  hybride  remontant.  M.  Rouil- 
lard  le  décrit  de  la  manière  suivante  dans  le  Journ.  de  la  Soc.  Imp.  et 
cent.  d'Hort.  : 

Bois  gros,  fort,  dressé;  mérithalles  allongés;  épiderme  vert-clairet 
assez  distinctement  velu  sur  le  jeune  bois;  aiguillons  assez  nombreux 
et  forts,  presque  droits,  très-aigus,  rougeàtres,  nuancés  du  jaune  gri- 
sâtre de  la  corne.  Feuilles  amples,  composées  de  cinq  folioles,  rarement 
de  trois,  ovales  ou  ovales  allongées,  de  dimensions  inégales,  la  termi- 
nale toujours  plus  grande,  toutes  assez  largement  quoique  peu  profon- 
dement dentées  sur  leur  bord,  finissent  en  pointe  fort  peu  accusée,  et 
sont  vert-clair  et  lisses  en  dessus,  vert  blanchâtre  et  un  peu  coton- 
neuses en  dessous.  Le  pétiole  assez  long,  avec  stipules  bien  distinctes  à 
la  base  et  qui  l'accompagnent  jusqu'à  peu  près  la  moitié  de  sa  longueur, 
est  armé  en  dessous  de  quelques  aiguillons  crochus  et  très-acérés  ;  il 
est  vert  en  dessous  et  teinté  de  rose  rouge  en  dessus.  Pédoncules  assez 
longs,  forts,  hérissés  de  faibles  aiguillons  (presque  des  poils),  brunâtres. 
Ovaires  souvent  coniques  et  quelquefois  pyriformes,  jamais  étranglés 
au  sommet,  presque  lisses.  (Ces  deux  derniers  organes  sont  vert-clair.) 
Sépales  en  nombre  variable  (de  5  à  8,  caractère  particulier),  souvent 
foliacés  ou  très-foliacés.  Boutons  forts,  globuleux,  se  présentant  en 
corvmbes  de  3  à  4  au  sommet  des  rameaux  où,  parfois,  ils  sont  soli- 
taires.  Fleurs  moyennes  (7   cent.),  très-épaisses,    cupuliformes,  pro- 
fondes en  ouvrant,  puis  en  achevant  de  s'épanouir  elles  se  développent 
en  trois  ou  quatre  faisceaux  qui  se  déroulent  régulièrement  du  centre 
à  la  circonférence;  elles  sont  très-doubles,  quoique  les  organes  de  la 
reproduction  soient  visibles;  leur  épanouissement  se  fait  bien  en  toute 
saison.  Coloris  rose  tendre,  pâlissant  encore  au  pourtour  floral.  Odeur 
suave. 

Ce  nouveau  rosier  sort  des  cultures  de  M.  Lévèque  dit  René,  horti- 
culteur parisien,  et  appartient  à  la  section  des  hybrides  de  Portland  à 
floraison  continue.  Sa  forte  végétation,  qui  ne  lui  retire  rien  de  sa 
faculté  remontante,  lui  assure  une  longue  durée  et  la  beauté  de  ses 
fleurs  le  recommandera  sûrement  à  l'attention  des  floriculteurs.  Il  est 
vraisemblable   qu'il  réussira  franc   de   pied;  il  est  déjà  certain  qu'il 


—  109  — 

s'accommode  bien  de  l'églantier.  Il  a  été  mis  au  commerce  à  l'automne 
de  1855. 

Rose  madame  Masson.  Nous  trouvons  dans  la  livraison  de  novembre 
de  Y  Horticulteur  français  la  figure  de  la  rose  madame  Masson,  gagnée 
en  1854  par  M.  Marest,  horticulteur,  rue  d'Enfer,  à  Paris.  Cette 
panche  est  accompagnée  de  la  description  suivante  due  a  M.  Lescuyer. 

«  Ce  rosier  est  très-vigoureux  ;  son  feuillage  ample  et  d'un  beau  vert 
accompagne  admirablement  de  très-grandes  et  magnifiques  fleurs  par- 
faitement pleines,  d'un  très-beau  cramoisi  velouté,  et  éclairé  de  rouge 
vif  passant  ensuite  au  violâtre.  —  C'est  une  des  bonnes  roses  de  1854. 
Elle  appartient  à  la  section  des  hybrides  remontants.  » 

Rose  panachée  d'Orléaiss;  rosier  hybride  perpétuel  (1).  On  recherche, 
non  sans  raison,  dans  les  jardins,  ces  variétés  de  rosiers  à  fleurs  pana- 
chées, dont  les  élégantes  bigarrures  rappellent  celles  des  œillets  fla- 
mands et  luttent  souvent  avec  eux,  sous  ce  rapport,  d'élégance  et 
d'agréments. 

Telle  est,  par  exemple,  celle  dont  on  doit  tout  récemment  la  mise 
dans  le  commerce  à  notre  honorable  correspondant,  M.  Dauvrcsse, 
horticulteur-pépiniériste,  à  Orléans,  et  successeur  de  MM.  Transon- 
Gombauit. 

Le  bel  individu  que  nous  avons  vu  cette  année,  nous  a  offert  des  fleurs 
de  première  grandeur,  parfaitement  pleines,  très-étoffées,  d'un  beau 
ton  rose  vif,  admirablement  et  franchement  panachées,  c'est-à-dire, 
striées,  maculées  et  rubanées  de  teintes  semblables  plus  ou  moins 
foncées. 

Cette  rose  appartient  à  la  section  dite  des  hybrides  perpétuelles,  ainsi 
dites,  comme  on  sait,  en  raison  de  leur  floraison  pour  ainsi  dire  perpé- 
tuelle et  qui  ne  cesse  qu'à  l'arrivée  des  gelées.  Nous  croyons  pouvoir 
la  recommander  au  choix  des  amateurs  comme  une  des  plus  belles  et 
des  plus  franchement  panachées  que  nous  connaissions  jusqu'ici. 

Docteur  Heînon;  Rosier  hybride  de  Portland,  à  floraison  remontante 
et  d'une  forte  végétation.  (Chez  Mr  Léon  Lille,  horticulteur,  marchand 
grainier,  pépiniériste,  cours  Morand,  7,  à  Lyon  (Rhône)  et  chez  M.Eug. 
Verdier,  fils  aîné,  rue  des  Trois-Ormes,  6,  boulevard  de  la  Gare  d'Ivry , 
à  Paris). 

Le  bois,  gros  et  fort,  forme  un  buisson  touffu  aux  longs  rameaux; 
les  mérithalles  sont  assez  allongés,  l'épiderme  est  lisse  et  vert-clair.  Un 
caractère  distinctif  de  ce  nouveau  Rosier  est  le  manque  total  d'aiguillon. 

Les  feuilles  qui  revêtissent  bien  les  rameaux  sont  assez  grandes, 

{))  Ch.  Lemaire,  dans  lllmt.  Hort.  Dec.  1855. 


—  no  — 

variables  dans  le  nombre  de  leurs  folioles,  lesquelles  cependant  sont 
presque  toujours  de  cinq;  celles-ci  sont  ovales-allongées  finissant  en 
pointe,  de  dimensions  inégales,  la  terminale  plus  grande,  finement  et  peu 
profondément  dentées;  elles  sont  lisses  et  vert  assez  clair  au-dessus; 
légèrement  cotonneuses  et  vert-blanchâtre  au-dessous.  Les  pétioles, 
assez  longs  et  grêles,  sont  accompagnés  jusqu'au  tiers  environ  de  leur 
longueur,  par  des  stipules  peu  apparentes;  ils  sont  armés  parfois  de 
très-rares  et  petits  aiguillons  crochus ,  et  leur  couleur  est  vert-clair. 

Les  pédoncules,  de  longueur  moyenne,  sont  assez  forts  et  sou- 
tiennent bien  la  fleur;  ils  sont  vert-clair,  parsemés  de  petits  poils  peu 
nombreux  de  même  couleur,  un  peu  brunâtres  au  sommet;  ils  ont 
souvent  à  leur  base  quelques  petites  stipules,  et,  parfois,  une  feuille 
stipulaire. 

Les  ovaires,  moyens,  plutôt  pyriformes,' légèrement  étranglés  au 
sommet,  que  semi-fu  si  formes,  sont  presque  lisses  et  vert-clair. 

Les  boutons  se  présentent  au  nombre  de  deux  à  trois  au  sommet 
des  rameaux,   où  ils  sont  souvent  solitaires;    ils   sont  assez  gros, 
presque   complètement  globuleux,   terminés  en  pointe.  Les  sépales, 
ordinairement  au  nombre  de  cinq,  sont  presque  toujours  très-foliacés. 
Les  fleurs  sont  moyennes  (7  à  8  cent.) ,  pleines  ;  les  pétales  extérieurs 
sont  régulièrement  disposés  en  coupe  assez  profonde,  ceux  intérieurs, 
formant  une  rosette  ou  étoile  à  quatre  compartiments,  laissent  aperce- 
voir au  centre  les  pistils  et  quelques  rares  étamines.  La  disposition 
totale  de  ces  fleurs  qui  s'épanouissent  bien  en  toute  saison,  en  toute 
circonstance,  est  d'une  grande  régularité  et  remplie  d'une  gracieuse 
élégance.  Leur  couleur  est  unique  dans  cette  section ,  elle  est  d'un  blanc 
très-pur,  qui  n'est  ni  le  blanc  de  lait,  ni  le  blanc  de  neige;  elle  n'a  ni 
la  légère  teinte  bleuâtre  de  l'un,  ni  la  blancheur  froide,  absolue,  de 
l'autre;  mais  le  bas  et  les  plis  des  pétales  reflètent  une  teinte  jaunâtre 
à  peine  sensible,  qui  avive  le  blanc  de  leur  étoffe  satinée.  L'odeur, 
très-particulière    et   fort   suave,   rappelle  beaucoup  celle   du   Rosier 
Canelle  (Rosa  cinnamomœa), 

Cette  belle  et  très-précieuse  Rose  provient  d'un  semis  fait  en  1850 
par  M.  Léon  Lille,  Grainier-Horticulteur  à  Lyon,  dans  lequel  se 
trouvaient  beaucoup  de  graines  du  Rosier  hybride  remontant  YElen- 
dard  de  Marengo.  Il  paraît  probable  que  la  nouvelle  rose  sort  de  cette 
variété,  qu'elle  rappelle  assez  dans  son  aspect  général  :  cependant  sa 
forte  végétation  contraste  avec  celle  assez  chétive  de  VEtendard.  Le 
Docteur  Hénon  fait  bien  sur  églantier,  on  peut  croire  qu'il  fera  de 
même  franc  de  pied.  Il  sera  mis  en  vente  cet  Automne  (1855). 
Pieds  forts.  ...  25  fr.  la  pièce.  —  100  fr.  les  cinq. 
—    moyen.  .  .  15  fr.  la  pièce.  —    GO  fr.  les  cinq. 


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Rose  Madame  Vidot  (Hybride  remontant).  L'Horticulteur  français 
de 1851  (1855,  pi.  X,  p.  101)  signale  cette  nouvelle  rose  qui  vient 
d'être  mise  dans  le  commerce  par  M.  Eugène  Yerdier,  fds  aîné, 
horticulteur,  rue  des  Trois-Ormes  de  la  gare  d'Ivry ,  près  Paris.  La 
fleur  est  au-dessus  de  la  moyenne  pour  la  grandeur,  bien  faite,  admi- 
rable de  coloris  qui  est  un  blanc  rose  carné  tendre,  transparent, 
nuancé  de  rose  plus  vif.  M.  Lescuyer  en  donne  la  description  suivante  : 

«  Le  pédoncule  est  gros,  court,  très-glanduleux,  s'évasant  graduelle- 
ment en  tube  calicinal  en  forme  d'entonnoir  glabre,  non  contracté  à  la 
gorge;  folioles  calicinales  au  nombre  de  cinq,  allongées,  assez  large- 
ment acuminées,  glanduleuses  en  dehors,  duveteuses  en  dedans  et  sur 
les  bords;  dans  trois  de  ces  folioles,  l'extrémité  est  plus  ou  moins 
élargie  et  foliacée  et  les  bords  sont  garnis  d'un  ou  de  deux  appendices 
linéaires  ciliés.  Pétales  très-nombreux,  obovales  redressés,  un  peu  en 
cuiller,  admirablement  et  très-régulièrement  imbriqués  dans  les  rangées 
extérieures,  ceux  du  centre  plus  ou  moins  plissés  et  un  peu  pèle-mèle 
formant  la  rosette  d'officier  de  la  Légion-d'Honneur.  Etamines  nulles, 
styles  saillants,  libres,  nombreux,  surmontant  autant  d'ovaires  ren- 
fermés dans  le  tube  du  calice. 


CULTURE  DES  JACINTHES  DANS  DES  VASES. 

Remplissez  les  vases  d'eau  de  pluie  ou  de  rivière  jusqu'à  affleurer 
juste  le  plateau  ou  base  de  la  bulbe;  placez-les  dans  un  lieu  obscur 
pendant  une  quinzaine  de  jours,  dans  le  but  de  favoriser  la  croissance 
des  racines  ;  après  quoi  apportez-les  à  la  lumière  le  plus  près  possible 
des  vitres,  car  si  on  les  laissait  sur  la  tablette  de  la  cheminée  ou  à 
quelqu'autre  endroit  chaud  mais  obscur,  les  fleurs  se  développeraient 
prématurément  mais  sans  acquérir  toute  leur  coloration  ni  leur  vigueur. 
Il  convient  de  changer  l'eau  tous  les  quinze  jours  ou  plus  souvent  si 
elle  se  corrompait,  et  chaque  fois  de  nettoyer  les  bulbes.  Quelques 
espèces  produisent  des  rejetons  sur  les  côtés  des  bulbes,  il  faut  les 
enlever  à  l'aide  d'un  canif  ou  d'un  greffoir,  mais  lorsque  deux  hampes 
florales  surgissent  du  centre,  il  faut  les  conserver.  Les  Jacinthes  simples 
sont  en  général  celles  qui  conviennent  le  mieux  pour  la  culture  aqua- 
tique, mais  quelques  variétés  doubles  réussissent  également  bien.  Après 
la  floraison  on  doit  enlever  les  hampes,  mettre  les  bulbes  en  pleine 
terre  dans  un  endroit  sec  du  jardin. 


—  112  — 

HYDROPLASIE  HORTICOLE. 


Bassins,  Vasques,  Vases,  Sujets,  Fleurs  artificielles  hydrauliques  en 
métal  et  ajutages  de  jeux  d'eau,  fabriqués  dans  les  ateliers  de  M.  Henri 
Leclerc,  ingénieur  mécanicien  lujdraulicien  à  Paris, 

Par  M.  Edouard  Morren. 

On  a  coutume  d'harmoniser  les  jeux  d'eaux  avec  les  plantes;  un  filet 
d'eau  qui  jaillit  dans  un  jardin  ou  entre  des  fleurs,  anime  les  beautés 
immobiles  et  silencieuses  des  végétaux  et  l'éclat  incolore  des  goutte- 
lettes est  rehaussé  par  le  contraste  avec  la  teinte  sombre  du  feuillage  et 
le  brillant  coloris  des  pétales.  Jusqu'ici  on  dissimulait  plus  ou  moins 
adroitement  les  ajutages  des  conduits  d'eau  dont  surgissaient  les  jets. 
M.  Henri  Leclerc,  ingénieur  mécanicien  hydraulicien  à  Paris,  a  eu  l'in- 
génieuse idée  de  fabriquer  des  fleurs  hydrauliques  en  métal,  et  il  a 
matérialisé  cette  idée  avec  une  perfection  étonnante.  Les  nombreux 
visiteurs  à  l'Exposition  universelle  de  l'Industrie  à  Paris,  ont  sans  doute 
admiré,  dans  la  galerie  d'annexé,  une  énorme  corbeille  fleurie  dont 
jaillissaient  mille  filets  d'eau;  en  l'examinant  avec  attention,  on  était 
surpris  de  reconnaître  que  c'était  du  sein  même  des  fleurs  que  surgis- 
saient ces  jets  ;  ici  de  la  pointe  des  feuilles  ou  des  pétales,  là  de  l'extré- 
mité des  étamines  ou  des  styles. 

Nous  avons  visité  les  ateliers  de  M.  Henri  Leclerc,  situés  rue 
Menilmontant,  16;  nous  crûmes  entrer  dans  une  serre;  partout  autour 
de  nous  s'épanouissaient  des  pots  fleuris  de  Lys,  d'Amaryllis,  de  Cou- 
ronne Impériale,  d'Iris,  d'Achmea,  d'Agapanthus,  de  Tulipe,  de  Calla, 
de  Typha,  de  Strelitzia  de  la  reine,  d'Aloës,  de  Billbergia,  de  Jacinthe, 
de  Crinum,  de  Tubéreuse  et  de  bien  d'autres  encore  cultivées  en  pots 
ou  réunies  en  élégantes  corbeilles.  Toutes  ces  plantes  étaient  faites  de 
cuivre.  La  nature  était  restée  complètement  étrangère  à  leur  formation, 
mais  elle  avait  été  fidèlement,  savamment,  nous  nous  permettrons  même 
de  dire  botaniquement  imitée  par  M.  Henri  Leclerc.  Les  plantes  avaient 
leur  port  réel,  les  organes  avaient  conservé  toute  leur  délicatesse,  toute 
leur  fraîcheur  naturelles,  la  teinte  verte  des  feuilles  et  les  nuances  déli- 
cates des  fleurs  étaient  fixés  sur  le  métal  comme  elles  le  sont  sur  les  feuilles 
et  sur  les  fleurs  vivantes.  C'est  dans  l'épaisseur  même  de  ces  organes 
délicats  que  l'habile  ingénieur  a  ménagé  les  conduits  d'eau  qui  viennent 
se  terminer  à  leur  extrémité.  Placez  quelqu'un  de  ces  pots,  ou  l'une  ou 


lia 


PI.  19. 


Fleurs  hydrauliques  de  M.   II.  Leclerc  :.  Nénuphar ,   Nymphéa,   Typha ,    Tubéreuse  et  Calla. 


BELG.    IlOItT.    T.    VF, 


14 


-  414  — 
PI.  20. 


Corbeille  de  fleurs  hydrauliques. 

l'autre  de  ces  corbeilles  sur  l'orifice  d'un  tube  où  vous  disposez  d'une 
pression  hydraulique,  et  au  même  instant  vous  verrez  jaillir,  de  la  pointe 
des  pétales  et  des  anthères  des  étamines,  des  jets  d'eau  délicats  qui  re- 
tomberont en  perles  limpides  sur  le  feuillage.  Remarquez  qu'en  agis- 
sant de  la  sorte  vous  ne  commettrez  pas  une  absurdité  botanique,  cette 
eau  ne  surgira  pas  d'une  plante  qui  croît  naturellement  dans  des  lieux 
secs,  elle  ne  viendra  pas  mouiller  le  feuillage  d'une  espèce  des  mon- 
tagnes; M.  Henri  Leclerc  a  cherché  les  modèles  de  ses   (leurs  hydrau- 


115 


PL  21. 


Corbeille  de  fleurs  hydrauliques  de  l'Exposition  universelle  de  l'industrie  à  Paris. 


liques  dans  les  végétaux  qui  croissent  spontanément  dans  les  stations 
humides,  qui  se  plaisent  aux  bords  des  ruisseaux  ou  sur  les  rives  des 
étangs. 

Notre  planche  19  représente  cinq  des  fleurs  hydrauliques  de  M. 
H.  Leclerc;  ce  sont  des  exemples  d'une  collection  de  plusieurs  cen- 
taines de  sujets  semblables  fabriqués  dans  les  usines  de  la  rue  Menil- 
montant.  Est-il  besoin  de  les  nommer  pour  que  vous  reconnaissiez  le 
Nénuphar  à  fleurs  jaunes,  le  blanc  Nymphéa,  le  Typha  ou  roseau  du 
Christ,  la  Tubéreuse  odorante  et  le  Calla  d'Ethiopie?  Ces  Nymphéacées, 
placées  à  la  surface  d'un  bassin  et  ajustées  à  l'orifice  d'un  tuyau  de  con- 
duite, lancent  l'eau  par  la  surface  du  stigmate  et  par  l'extrémité  des  éta- 
mines.  La  valeur  commerciale  des  fleurs  hydrauliques  de  M.  H.  Leclerc 


—  116  — 

ne  paraîtra  pas  trop  élevée,  eu  égard  à  la  difficulté  de  la  fabrication  et  au 
fini  de  l'exécution. 

Le  prix  des  pots  analogues  à  ceux  représentés  par  notre  planche  19 
est  de  40  à  70  francs;  une  corbeille,  dont  notre  planche  20  offre  un 
exemple,  vaut  de  quatre  à  huit  cents  francs.  Quant  au  gigantesque  bassin 
qui  a  figuré  à  l'Exposition  universelle,  et  dont  notre  planche  21  retrace 
les  principaux  caractères,  son  coût  est  de  17,000  francs. 

On  ne  saurait  rien  imaginer  de  plus  gracieux  et  de  plus  séduisant 
dans  une  serre  ou  dans  un  salon  qu'une  de  ces  corbeilles  de  M. 
H.  Leclerc,  si  l'on  entremêle  les  fleurs  hydrauliques  de  quelques  végé- 
taux vivants  et  qu'on  puisse,  le  soir,  disposer  quelques  lumières  entre  le 
feuillage.  Le  murmure  de  l'eau,  l'éclat  des  gouttelettes  limpides  et  bril- 
lantes qui  scintillent,  voltigent,  sautillent,  tombent,  et  retombent  sur  la 
verdure  des  feuilles,  la  douce  senteur  des  fleurs  exercent  sur  l'âme  les 
plus  suaves  impressions. 


CULTURE  DES  P1MELIA. 

Ce  beau  genre  de  plantes  de  serre  tempérée,  peut,  par  quelques  soins, 
croître  et  fleurir  de  bonne  heure.  Il  convient  de  rempoter  dès  l'appari- 
tion du  printemps,  dans  de  la  bonne  terre  tourbeuse,  bien  brisée  par  la 
bêche  mais  non  tamisée  et  mêlée  d'une  certaine  quantité  de  sable;  il  faut 
avoir  soin,  dans  celte  opération,  de  ne  pas  blesser  les  radicelles.  Les 
pots,  qui  ne  peuvent  pas  être  trop  grands,  doivent  être  bien  drainés. 
Les  Pimelia  aiment  une  terre  riche  de  terreau  et  fortement  tassée  ;  ils  ne 
prospèrent  jamais  dans  un  sol  trop  meuble.  Après  le  rempotage,  on  con- 
seille d'arroser  les  plantes  et  de  les  placer  dans  la  serre  à  une  bonne  ex- 
position, bien  aérée  et  bien  éclairée  :  jamais,  sous  aucun  prétexte,  on  ne 
peut  les  étouffer  sous  d'autres  plantes,  mais  elles  doivent  être  au  con- 
traire complètement  libres.  Les  Pimelia  doivent  demeurer  dans  la  serre 
pendant  l'été  et  être  préservés  des  rayons  du  soleil  lorsque  l'action  de 
ceux-ci  est  la  plus  forte.  Les  rameaux,  plantés  dans  du  sable,  couverts 
d'une  cloche  et  placés  dans  la  bâche,  s'enracinent  facilement.  Les  Pimelia 
dccussata-sîiperba,  loncjifolia ,  glauca,  hispida,  Hendersoni,  spectabilis 
et  supcrba,  sont  de  fort  belles  espèces. 


117 


OPÉRATIONS  HORTICOLES. 


COMMENT  AGIT  LE  DRAINAGE  (I), 

Par  M.   C.  Risler. 

Une  petite  expérience,  qu'il  est  facile  de  répéter  et  encore  plus  facile 
de  comprendre,  m'a  beaucoup  aidé  à  me  faire  une  notion  précise  de  la 
manière  dont  le  drainage  produit  les  effets  remarquables  nue  la  pratique 
a  constatés.  Peut-être  pourra-t-elle  rendre  à  d'autres  le  même  service; 
c'est  pourquoi  je  vais  essayer  de  la  décrire. 

Des  recherches  indépendantes  du  drainage  m'avaient  amené  à  faire 
végéter  diverses  espèces  de  plantes  dans  des  cônes  en  terre  d'environ 
0ra,55  de  hauteur  et  0ni,25  de  diamètre  à  leur  base.  Tous  ces  cônes 
étaient  remplis  de  la  même  terre,  en  même  quantité.  J'avais  laissé  les 
uns  ouverts  à  la  partie  inférieure,  après  que  j'y  avais  mis  un  décimètre 
environ  de  petits  cailloux  qui  y  produisaient  un  drainage  parfait.  Quel- 
ques-uns d'entre  eux  furent  au  contraire  hermétiquement  bouchés.  Il 
parait  que,  depuis  le  commencement  de  mes  expériences,  les  pluies 
n'ont  jamais  été  assez  abondantes  pour  verser  dans  les  cônes  une  quan- 
tité d'eau  plus  grande  que  la  terre  n'en  pouvait  absorber,  car  il  n'en  a 
point  passé  du  tout  à  travers  les  cônes  drainés.  Ainsi  donc  il  ne  pouvait 
pas  y  avoir  d'eau  stagnante  dans  les  cônes  bouchés.  Ces  cônes  repré- 
sentaient une  terre  qui  n'aurait  pas  besoin  d'être  drainée,  si  toutefois  il 
est  vrai  que  le  drainage  n'agit,  comme  on  le  croit  assez  généralement, 
qu'en  permettant  à  l'excès  d'eau  de  s'écouler.  Et  cependant  les  plantes 
furent  très-vigoureuses  dans  les  cônes  drainés ,  tandis  qu'elles  se  mon- 
trèrent souffrantes  dans  les  cônes  non  drainés.  Je  ne  pus  trouver  d'autre 
explication  de  ce  fait  que  celle-ci  :  les  cônes  drainés  ont  été  mieux  aérés 
que  les  autres. 

Pour  m'assurer  de  la  justesse  de  cette  conclusion,  je  cherchai  à  repro- 
duire autant  que  possible  les  'conditions  dans  lesquelles  se  trouve  une 
terre  drainée,  en  y  ajoutant  une  disposition  qui  rendit  visible   toute 


(1)  Nous  reproduisons  ici  cet  excellent  article  de  M.  Eug  Risler,  inséré  dans  le 
.Journal  d'Ayr.  prat.  (France),  et  auquel  nous  adhérons  complètement,  à  cause  de 
l'application  des  expériences  de  l'auteur  au  drainage,  tel  qu'il  est  pratiqué  en  hor- 
ticulture. 


—  Ii8  — 

entrée  ou  sortie  d'air.  La  figure  22  reproduit  cette  disposition.  Quelques 
mots  d'explication  suffiraient  pour  des  chimistes  habitués  aux  appa- 
reils ordinaires  des  laboratoires  ;  mais  la  plupart  de  nos  lecteurs  deman- 
deront plus  de  détails. 

PL  22. 


Démonstration  de  l'aération  du  sol  produite  par  le  drainage. 


J'ai  mis  à  une  hauteur  de  0m,15  environ  de  la  terre  légèrement  humide 
dans  un  flacon  muni  à  sa  partie  inférieure  d'un  robinet  e,  dont  le  tube 
pénètre  à  une  petite  distance  dans  l'intérieur  de  la  terre  et  peut  repré- 
senter, par  conséquent,  un  drainage  avec  assez  d'exactitude.  L'ou- 
verture supérieure  du  flacon  est  fermée  hermétiquement  au  moyen 
d'un  bouchon  à  travers  lequel  passent,  d'une  part,  un  tube  à  robinet 
qui  sert  à  introduire  l'eau,  et,  de  l'autre  ,  un  tube  qui  communique 
avec  l'intérieur  d'un  flacon  à  trois  tubulures ,  rempli  en  partie  d'eau  et 
arrangé  de  telle  manière  que  l'air  qui  y  entrerait  par  le  tube  m  serait 
obligé  de  passer  à  travers  l'eau  et  de  rendre  ainsi  son  entrée  visible  à 
l'œil. 

Je  commence  par  fermer  le  robinet  e,  j'enlève  le  bouchon  /  du  petit 
flacon,  et  j'introduis  à  travers  le  tube  /  assez  d'eau  pour  représenter  une 
forte  pluie;  puis,  je  ferme  le  robinet  f,  et  je  remets  le  bouchon  en  /.  Tant 
que  le  robinet  e  reste  fermé,  c'est-à-dire,  tant  que  le  drainage  ne 
s'opère  pas,  l'eau  introduite  occupe  la  position  a  b  c  cl ,  et  ne  pénètre 
que  très-lentement  sous  le  sol,  en  déplaçant  l'air  qui  s'y  trouve  ren- 
fermé, et  le  forçant  à  sortir  par  le  haut  en  bulles  qui  crèvent  à  la  surface 
du  liquide.  Dans  ce  cas,  l'eau  prend  la  place  d'une  certaine  quantité 
d'air;  elle  amène,  il  est  vrai,  l'oxygène  qu'elle  porte  en  solution;  mais 
elle  n'en  amène  évidemment  pas  assez  pour  compenser  celui  qu'elle  a 
fait  sortir;  par  conséquent,  le  sol  renferme,  après  chaque  pluie,  moins 


—  119  — 

d'oxygène  qu'il  n'en  renfermait  avant  cette  pluie,  et  c'est  seulement 
quand  l'eau  ainsi  introduite  sera  évaporée ,  qu'il  pourra  rentrer  de  l'air. 

Mais  si  nous  ouvrons  le  robinet  e,  si  nous  établissons  le  drainage, 
nous  verrons  les  choses  changer  complètement  de  face.  L'air  renfermé 
dans  la  terre  trouvant  à  s'échapper  par  le  bas ,  ce  qui  devient  aisément 
visible  si  l'on  plonge  l'extrémité  du  robinet  dans  un  vase  d'eau,  l'eau 
abc  d  s'infiltre  graduellement  dans  la  terre,  et,  tandis  que  l'air  cor- 
rompu est  chassé  d'un  autre  côté,  il  arrive  par  en  haut  de  l'air  pur  que 
nous  voyons  traverser  le  flacon  laveur  par  le  tube  m.  Ainsi  le  drai- 
nage agit  même  avant  qu'il  s'écoule  de  l'eau  par  les  tuyaux.  Quand  cet 
écoulement  commence,  l'aération  cesse;  nous  voyons  bien  encore  entrer 
de  l'air  par  le  tube  m,  mais  cet  air  ne  sert  plus  à  remplacer  de  l'air  cor- 
rompu, il  remplace  l'eau  qui  est  partie;  notre  appareil  fonctionne 
comme  un  aspirateur  ordinaire,  et  les  faits  que  nous  y  observons 
n'offrent  plus  aucun  intérêt.  On  croit  généralement  que  les  drains 
n'agissent  que  lorsqu'ils  coulent.  D'après  ce  qui  précède  il  y  aurait 
deux  actions  :  aération  chaque  fois  qu'il  tombe  de  la  pluie,  et  écoule- 
ment de  l'eau  que  le  sol  ne  peut  absorber  chaque  fois  que  les  pluies 
dépassent  la  faculté  d'absorption  du  sol.  Dans  le  cas  où  il  n'y  avait  ni 
drainage,  ni  sous-sol  perméable,  nous  avons  vu  que  les  pluies  ne  font 
que  diminuer  la  somme  d'oxygène  qui  reste  disponible  pour  les  be- 
soins de  la  végétation;  maintenant,  au  contraire,  il  y  a  sortie  d'air 
corrompu,  c'est-à-dire  d'air  privé  d'une  partie  de  son  oxygène,  et 
entrée  d'air  nouveau. 

Or,  chacun  sait  que  l'aération  est  le  but  principal  de  la  culture.  Pour 
peu  qu'un  cultivateur  se  soit  demandé  la  raison  des  pratiques  que 
l'expérience  lui  a  fait  adopter,  pour  peu  qu'il  réfléchisse  davantage  que 
les  bœufs  qui  traînent  la  charrue,  il  saura  que  les  labours ,  par  exemple, 
sont  destinés  à  aérer  le  sol.  S'il  avait,  en  outre,  quelque  confiance  dans 
les  chimistes,  il  apprendrait  des  belles  expériences  de  Saussure  que 
l'oxygène  est  nécessaire  à  la  respiration  des  racines,  comme  il  est  né- 
cessaire à  celle  des  animaux;  il  verrait  dans  les  travaux  des  autres  sa- 
vants, résumés  dernièrement  à  l'occasion  du  drainage  même  par 
M.  Chevreul  à  la  Société  centrale  d'Agriculture,  et  par  M.  Barrai,  dans 
son  Manuel  du  drainage,  que  la  transformation  de  tous  les  matériaux 
que  renferment  ces  terres  que  l'on  achète  à  2,000  frs.  l'hectare,  et  de  ces 
engrais  que  l'on  trouve  bon  de  payer  6  frs.  le  mètre  cube,  que  leur 
transformation  en  argent  bien  monnayé,  c'est-à-dire  en  substances  ca- 
pables de  former  le  blé  et  tous  les  produits  qui  s'échangent  contre  l'ar- 
gent, ne  peut  s'opérer  que  si  l'on  donne  au  sol  de  l'oxygène,  et  qu'à 
défaut  d'oxygène,  ces  terres  elles  engrais  eux-mêmes,  loin  de  produire 


—  120  — 

les  végétaux,  les  luent  au  contraire,  parce  qu'ils  deviennent  des  poisons 
au  lieu  de  devenir  des  aliments. 

Ainsi  donc,  chaque  fois  qu'une  pluie  tombe  sur  une  terre  drainée  ou 
à  sous-sol  naturellement  perméable,  chaque  fois  qu'on  donne  de  l'eau 
à  un  pot  drainé,  elle  y  amène  non-seulement  l'eau  nécessaire  pour  dis- 
soudre les  substances  qui  sont  prêtes  à  servir  d'aliments,  c'est-à-dire 
que  l'oxidation  a  déjà  rendues  solubles;  mais  elle  y  entraîne  à  sa  suite 
une  autre  nouvelle  portion  d'oxygène,  qui  va  préparer  de  nouveaux 
aliments  et  les  mettre  à  la  disposition  de  l'eau,  qui  prochainement 
viendra  les  porter  dans  le  sein  des  végétaux.  Chaque  fois,  au  con- 
traire, que  l'eau  tombe  sur  une  terre  à  sous-sol  imperméable  et  non 
drainée,  elle  diminue  la  proportion  d'oxygène  que  cette  terre  contient, 
et  puis,  restant  stagnante  dans  le  sous-sol,  elle  produit  d'autres  effets 
nuisibles,  l'abaissement  de  température,  etc.,  que  l'on  a  souvent  cons- 
tatés; c'est  seulement  à  mesure  que  le  soleil  évapore  cette  eau  qu'elle 
peut  faire  place  à  l'air.  Dans  les  terres  à  sous-sol  imperméable,  l'aéra- 
tion ne  peut  se  faire  sous  nos  climats  qu'à  une  très-faible  profondeur; 
au-dessous  de  cette  profondeur,  les  substances  qui  s'y  trouvent  renfer- 
mées restent  à  l'état  de  poison,  et  voilà  pourquoi  il  vaut  mieux,  dans 
les  sols  d'une  telle  nature,  et  surtout  dans  ceux  qui,  en  plus,  sont 
très-ferrugineux,  ne  donner  que  des  labours  superficiels,  malgré  les 
conseils  de  quelques  hommes  qui  nuisent  au  progrès  réel,  parce  qu'ils 
se  font  les  avocats  quand  même  d'un  principe  qui  n'est  juste  que  dans 
certaines  limites.  Je  ne  relaterai  pas  les  nombreux  faits  de  la  pratique, 
qui  à  la  fois  prouvent  l'aération  que  le  drainage  produit  et  s'expliquent 
par  elle. 

Je  crois  pouvoir  résumer  ces  observations  en  disant  que  la  pluie  est 
le  principal  moyen  d'aération  que  la  nature  a  donné  au  sol. 

Tout  ce  qui  précède,  et  l'ingénieuse  expérience  qui  explique  le  mode 
d'action  du  drainage,  s'applique  non-seulement  à  la  culture  des 
champs,  mais  plus  spécialement  encore  au  drainage  que  les  fleuristes 
opèrent  dans  leurs  pots. 


Prune    Impériale    violette. 


124  — 

JARDIN  FRUITIER. 


FRUNE  IMPÉRIALE  VIOLETTE, 
Par    M .    Il  o  y  e  r  , 

Conseiller  provincial  à  Namur. 

Les  variétés  du  genre  prunier  sont  très-nombreuses  clans  les  nomen- 
clatures françaises;  Merlet,  la  Quintinie  et  Duhamel  mentionnent  une 
foule  de  Damas,  de  Perdrigons,  de  Diaprées,  d'Impériales,  et  autres 
prunes,  dont  la  plupart  sont  peu  cultivées  en  Belgique.  Nous  ne  devons 
pas  le  regretter  au  point  de  vue  des  fruits  de  table;  nos  jardins  sont 
assez  riches  en  variétés  de  premier  ordre,  et  nous  n'avons,  sous  ce 
rapport,  que  l'embarras  du  choix,  depuis  surtout  que  l'Amérique,  où 
cette  culture  se  fait  sur  une  très-grande  échelle,  nous  a  envoyé  beau- 
coup de  variétés  précieuses.  Mais  il  n'en  est  pas  de  même  de  la  culture 
des  vergers,  qui  fournit  au  commerce  les  fruits  secs,  d'une  si  grande 
importance  dans  l'économie  domestique.  Cette  industrie  est  florissante 
dans  les  vallées  de  nos  provinces  méridionales,  où  l'on  a  toujours  cul- 
tivé pour  cet  usage  le  Quëtsch  ou  Koëtsche  ordinaire,  connu  dans  ces 
contrées  sous  le  nom  inexact  d'Altesse;  cette  variété  est  très-productive 
sans  doute,  mais  laisse  beaucoup  à  désirer  sous  le  rapport  de  la  qualité 
et  du  poids.  11  en  résulte  la  nécessité  de  recourir  à  la  France  pour  les 
fruits  de  choix  :  on  les  importe  de  Bordeaux  spécialement,  en  assez 
grande  quantité  et  à  des  prix  fort  élevés. 

Dans  l'intérêt  du  progrès  de  nos  cultures,  il  serait  donc  important 
de  rechercher  les  variétés  fertiles  de  qualité  supérieure,  et  analogue  au 
Quëtsch  sous  les  rapports  du  goût,  de  la  couleur  et  de  la  forme. 

Ces  conditions  paraissent  réunies  dans  les  prunes  Diaprées  violettes 
et  Impériales  violettes,  qui  se  ressemblent  beaucoup,  mais  qu'il  ne  faut 
pas  confondre.  La  première  mûrit  au  commencement  d'août;  la  seconde, 
dont  nous  nous  occupons  ici,  est  une  variété  du  mois  de  septembre. 

Cette  prune  est  grosse,  ovale  allongée,  suspendue  à  une  queue  longue 
de  25  à  27  millimètres,  vert  grisâtre,  placée  dans  une  cavité  assez  pro- 
fonde, étroite  et  arrondie.  Le  sillon  est  bien  prononcé,  quoique  peu 
creusé.  Le  point  pistillaire  est  rouge,  assez  large,  très-apparent,  con- 
cave. La  peau,  violette  et  fleurie,  est  épaisse  et  se  détache  avec  quelque 


—  122  — 

difficulté  de  la  chair.  Celle-ci  est  ferme,  succulente,  vert  jaunâtre, 
remplie  d'un  jus  abondant,  sucré  et  d'un  goût  relevé.  Le  noyau  est 
ovale,  pointu  à  son  sommet  et  obtus  à  sa  base;  il  mesure  30  milli- 
mètres en  hauteur,  17  en  largeur  et  11  en  épaisseur;  les  arêtes  du 
ventre  sont  obtuses,  crénelées,  divisées  par  un  sillon  étroit  et  profond; 
celles  du  dos  sont  obtuses  ;  les  joues  sont  convexes  et  rugueuses  ;  il 
se  détache  bien  de  la  chair,  à  laquelle  il  n'est  adhérent  qne  par  ses 
extrémités. 

La  Quintinie  estimait  tellement  ce  beau  fruit,  que  dans  la  liste  des 
premiers  pruniers  à  planter  dans  un  jardin  de  peu  d'étendue,  il  place 
Y  Impériale  violette  en  troisième  ligne  ,  immédiatement  après  la  Reine- 
Claude  (1).  Cet  auteur  affirme  qu'elle  est  également  bonne  à  manger 
crue  ou  en  pruneaux.  Merlet  cite  aussi  les  Impériales  comme  propres 
à  ce  dernier  usage. 

Nous  avons  vérifié  ces  allégations  par  quelques  essais  comparatifs. 
VImpériale  violette  séchée,  soumise  au  jugement  de  la  commission 
royale  de  pomologie,  s'est  trouvée  au  moins  égale  en  qualité  à  la 
Quëtsck  ordinaire. 

En  poids,  nous  avons  constaté  les  résultats  suivants,  sur  Irenle-cinq 
fruits  de  chaque  variété  : 

Quëtsch 130  Grammes. 

Prune  de  Bordeaux  ou  d'Agen.      .     250        » 
Impériale  violette 388        » 

Il  serait  donc  intéressant  de  chercher  à  faire  sortir  la  variété  qui 
nous  occupe,  du  cadre  des  fruits  de  jardin  pour  l'introduire  dans  la 
grande  culture,  et  d'essayer  sa  fertilité  dans  les  vergers.  Nous  en  pos- 
sédons quelques  arbres  en  espalier  au  nord-est;  à  celte  exposition,  elle 
n'a  jamais  été  sujette  à  l'alternat  des  récoltes;  depuis  vingt  ans,  celles- 
ci  sont  aussi  abondantes  que  régulières. 

L'arbre  de  VImpériale  violette  n'est  pas  de  première  grandeur,  mais 
il  est  vigoureux  et  d'une  grande  fertilité,  il  manque  rarement  de  donner. 

Les  rameaux  sont  assez  longs,  rouge  brun  du  côté  du  soleil,  verls, 
un  peu  violacés  du  côté  opposé,  surtout  vers  la  cime;  le  vieux  bois  est 
brun,  tiqueté  de  très-petits  points  gris. 

Le  bouton  est  pointu,  écarté  de  la  branche  par  un  support  peu  élevé. 

Les  feuilles  sont  ovales-lancéolées,  pointues  par  les  deux  extrémités, 
dentelées  régulièrement  et  finement.  Les  fleurs  sont  assez  grandes  et 
leurs  pétales  arrondis. 

(1)  Instruction  pour  les  jardins,  olc.  \  édition  de  1740,  t.  II,  p.  403. 


,r  r 


PHYSIOLOGIE  VEGETALE. 


DE  L'ORIGINE  DES  ESPÈCES  EN  BOTANIQUE  ET  DE  L'APPARITION 
DES  PLANTES  SUR  LE  GLOBE, 

Par  M.  A.   Malbranciie. 

(Ce  travail  a  été  lu  à  l'Académie  des  Sciences,  Arts  et  Belles-Lettres  de  Rouen, 
le  27  juillet  1855,  à  l'occasion  de  la  réception  de  l'auteur). 

Dans  l'élude  si  noble  des  œuvres  de  Dieu,  tout  est  digne  de  nos  mé- 
ditations ;  mais  un  intérêt  plus  vif  encore  s'attache  à  la  recherche  de 
l'origine  des  choses.  Il  semble  que  l'attrait  de  l'étude  grandit  à  propor- 
tion du  mystère  qui  l'entoure,  et  de  la  hauteur  de  vues  où  il  faut  se 
placer.  Les  pensées  de  l'homme  ne  connaissent  point  de  bornes  et, 
franchissant  les  siècles,  par  delà  ces  jours  où  les  astres  commençaient 
à  mesurer  le  temps,  elles  sondent  audacieusement  ces  mystères  des 
premiers  âges  de  la  terre,  où  la  matière  soumise  se  moulait  obéis- 
sante aux  ordres  de  l'architecte  divin,  où  le  Créateur,  penché  sur 
l'abîme,  animait  le  chaos  de  sa  parole  puissante  et  faisait  jaillir  partout 
la  vie.  La  lumière  dissipe  les  ténèbres,  le  firmament  étend  son  pavillon 
immense,  les  mers  sont  renfermées  dans  leurs  bassins  profonds,  la 
terre,  dégagée  des  eaux,  reçoit  sa  parure  verdoyante;  le  soleil  com- 
mence son  cours  radieux,  la  mer,  les  airs,  la. terre  se  peuplent  d'ani- 
maux variés,  puis,  d'un  peu  de  limon  qu'il  pétrit  sans  doute  lui-même 
de  sa  main  divine  et  auquel  il  joignit  une  parcelle  de  son  être,  une  âme 
libre,  immortelle  et  esprit  comme  lui ,  Dieu  forma  l'homme,  maître  et 
dominateur  de  tous  les  êtres,  terme  et  chef-d'œuvre  de  la  création. 

Tel  est,  en  quelques  mots,  ce  travail  merveilleux  qui  dura  sans  doute 
de  longs  siècles,  pendant  lesquels  des  révolutions  considérables  ont 
bouleversé  le  globe  à  diverses  reprises  et  n'ont  eu  pour  témoin  que 
l'auteur  même  des  choses  auquel  il  a  plu  d'envelopper  d'un  voile,  peut- 
être  à  jamais  impénétrable,  son  œuvre  créatrice. 

Tous  les  jours,  dans  sa  marche  progressive  et  par  l'organe  de  ses 
plus  illustres  représentants,  la  science  vient  nous  montrer  la  confor- 
mité de  ses  observations  avec  le  récit  de  Moïse.  Les  entrailles  de  la  terre 
sont  les  archives  antiques  où  elle  reconnaît  l'ordre  assigné  par  la  Genèse 
à  la  formation  des  choses.  Il  s'en  faut  cependant,  qu'une  certitude  ab- 
solue soit  acquise  sur  toutes  les  solutions  de  ce  gigantesque  problème. 
Des  esprits,  également  éminents,  sont  divisés  sur  des  appréciations  où 


—  124  — 

l'expérience  est  souvent  muette.  Les  opinions  les  plus  diverses  sont 
soutenues  avec  une  pareille  habileté  pour  coordonner  les  laits  géogé- 
niques  et  expliquer  les  agitations  de  la  jeunesse  de  notre  globe.  Le 
champ  est  donc  encore  ouvert  aux  investigations;  entrons-y  sans  pré- 
vention, sans  partialité,  sans  autre  but  que  de  chercher  pour  elle-même 
la  vérité,  ce  bien  suprême  de  notre  intelligence. 

Il  importe  extrêmement  dans  les  études  spéculatives  de  se  garder  de 
deux  écucils,  également  dangereux,  où  bon  nombre  d'observateurs  ont 
l'ait  naufrage.  Quelques-uns  partent  d'idées  préconçues,  fixes,  qui  en- 
traînent à  leur  insu  leurs  raisonnements  et  pèsent  de  tout  leur  poids 
sur  leurs  conclusions.  C'est  un  des  plus  funestes  travers  de  l'esprit 
humain  que  celle  aberration  de  logique.  Il  faut  que  tous  les  faits  se 
plient,  se  façonnent  au  moule  préparé  à  l'avance,  qu'ils  rentrent  clans  le 
système  qu'il  s'agit  de  prouver.    On   néglige  un  détail  fâcheux,    on 
généralise  un  fait  exceptionnel;  bon  gré  mal  gré,  la  conclusion  désirée 
sort  de  cette  logique  flexible.  Quelques  autres,  se  cramponnant  aux  idées 
qui  ont  cours  depuis  longtemps  malgré  l'incertitude  qui  les  entoure, 
et  l'absence  des  solutions  qu'elles  ne  donnent  pas,  se  refusent  à  tout 
nouvel  examen,  repoussent  a  priori  les  novateurs  assez  osés  pour  discu- 
ter les  opinions  reçues.  C'est,  depuis  que  les  esprits  raisonnent,  la  vieille 
lutte  de  la  routine  contre  le  progrès.  S'il  est  des  traditions  respectables, 
des  vérités  acquises  inattaquables,  c'est  un  étrange  aveuglement  que  de 
ne  plus  croire  à  la  perfectibilité  des  connaissances  humaines.  Et,  quand 
on  a  vu  crouler  tant  de  systèmes  qui  paraissaient  solidement  établis, 
peut-on  bien  conserver  tant  d'assurance?  11  y  a  quelque  chose  qui  ne 
change  pas,  qui  n'est  point  perfectible,  qui  est  complet  :  c'est  la  vérité 
religieuse;  mais  la  science  n'a  point  eu  sa  révélation;  livrée  au  travail 
des  esprits  faciles  à  s'égarer,  elle  doit  s'exercer  longtemps  encore  avant 
d'atteindre,  si  jamais  elle  doit  y  arriver  ici-bas,  sa  perfection  et  sa  sta- 
bilité. 

En  étudiant  les  divers  systèmes  qui  se  sont  produits  pour  expliquer 
l'origine  des  espèces  végétales,  je  n'en  ai  point  trouvé  qui  satisfassent 
complètement  aux  principes  de  la  science  et,  j'ajouterai,  au  récit  de  la 
Genèse.  Car  il  y  a  dans  les  livres  saints  un  élément  du  débat  que  l'on  ne 
peut  négliger  pour  former  sa  conviction  dans  cette  appréciation  com- 
plexe de  faits  et  de  théories  où  l'expérience  nous  fait  souvent  défaut. 
D'ailleurs,  bien  établir  l'accord  des  observations  scientifiques  avec  le 
texte  sacré,  c'est  servir  la  science  qui  reçoit  ainsi  une  confirmation  et 
une  autorité  nouvelles.  Nous  pèserons  donc,  à  ce  double  point  de  vue, 
la  valeur  de  ces  théories;  j'essaierai  d'en  faire  voir  les  imperfections  et 
de  présenter  quelques  considérations  nouvelles.  .le  puiserai  le  plus  sou- 


—  125  — 

vent  mes  arguments  dans  les  écrits  de  savants  justement  considérés, 
plutôt  que  dans  mon  propre  fonds.  Néanmoins,  c'est  avec  une  certaine 
défiance  que  j'aborde  un  aussi  grave  sujet  et  que  j'expose  ces  aperçus. 
—  Que  l'indulgence  les  accueille  et  que  l'expérience  les  juge. 

Quelle  idée  faut-il  se  faire  de  la  création  végétale?  Quand  et  comment 
les  diverses  espèces  de  plantes  ont-elles  apparu  sur  la  terre?  La  puissance 
créatrice  s'est-elle  exercée  à  plusieurs  reprises?  La  matière  serait-elle 
susceptible  de  se  modifier  sous  des  influences  biologiques  variées?  Ou 
bien  y-a-t-il  eu  simultanéité  dans  l'apparition  de  tous  les  types  fixes  et 
invariables?  Autant  de  questions  sur  lesquelles  la  diversité  des  opinions 
partage  les  plus  érudits. 

On  admet  aujourd'hui,  sans  conteste,  que  les  jours  de  la  Genèse  re- 
présentent des  époques  d'une  assez  longue  durée,  que  des  catastrophes 
importantes  ont  bouleversé  le  globe  à  plusieurs  intervalles.  En  sondant 
les  profondeurs  de  la  terre,  la  science  a  recueilli  des  débris  précieux  à 
l'aide  desquels  elle  fait  revivre  ces  générations  éteintes,  elle  rétablit  le 
globe  dans  sa  virilité,  le  peuple  des  êtres  puissants  qui  l'habitaient, 
et  nous  refait  le  tableau  de  ces  temps  primitifs  où  les  végétaux  étaient 
seuls  en  possession  d'un  sol  encore  brûlant,  où  les  animaux  sans  maitre 
erraient  en  paix  dans  les  solitudes  terrestres.  Nous  n'envisagerons  la 
question  qu'au  point  de  vue  du  règne  végétal,  et  je  dis  d'abord  que  les 
divers  systèmes  peuvent  se  réunir  en  trois  groupes  ainsi  définis. 

1°  Y  a-t-il  eu  développement  progressif  des  végétaux,  c'est-à-dire  que 
les  plus  simples,  ayant  paru  les  premiers,  se  sont-ils  peu  à  peu  modifiés, 
transformés  sous  des  influences  biologiques  changeantes  en  ceux  que 
nous  voyons  aujourd'hui?  A  chaque  catastrophe  les  types  primitifs  n'au- 
raient point  été  détruits,  mais  changés,  perfectionnés,  passant  du  simple 
au  composé,  de  l'imparfait  au  parfait.  Les  espèces  actuelles  dérivant 
ainsi  par  progression  des  espèces  primitives. 

2°  Toutes  les  plantes  actuelles  et  passées,  vivantes  et  détruites,  ont- 
elles  été  créées  simultanément  dès  le  commencement?  A  chaque  révolu- 
tion un  certain  nombre  périssait  sans  compensation.  Les  survivantes 
repeuplaient  le  sol. 

3°  Enfin  des  plantes  nouvelles  ont-elles  apparu  à  chaque  période  géo- 
logique, indépendantes  de  celles  antérieures  ,  soit  qu'elles  résultent  de 
créations  successives  correspondantes  à  chaque  période,  soit  qu'elles 
soient  considérées,  le  dirai-je,  comme  productions  spontanées  de  la 
matière. 

En  d'autres  termes  et  pour  résumer  ces  différents  point  de  vue,  les 
végétaux  actuels  sont-ils  les  descendants,  les  contemporains  ou  les  suc- 
cesseurs des  plantes  fossiles? 


—  126  — 

§  I.  Nous  examinerons  d'abord  la  théorie  qui  admet  que  les  plantes 
d'une  première  création  présentant  les  organisations  les  plus  simples,  se 
modifiant  sous  les  influences  des  variations  de  la  température,  de  la 
pression  et  de  la  composition  atmosphérique,  sont  arrivées  par  des 
transformations  successives  aux  types  parfaits  qui  dominent  aujour- 
d'hui. Cette  opinion,  soutenue  avec  talent,  jouit  d'un  certain  crédit;  aussi 
entrerai-je  à  son  égard  dans  un  examen  plus  approfondi.  Elle  s'appuie  : 
1°  sur  les  observations  géologiques  qui  nous  montrent  la  prédominance 
des  végétaux  inférieurs  dans  les  couches  les  plus  anciennes  du  globe  ; 
2°  sur  des  raisons  physiologiques  surtout  qui  impliquent  la  possibilité 
pour  les  types  spécifiques  de  se  modifier,  sous  les  influences  climaté- 
riques,  assez  profondément  pour  passer  des  plus  simples  aux  plus  com- 
posés et  des  formes  antiques  si  extraordinaires  à  celles  que  nous 
voyons  aujourd'hui. 

Geoffroy  Saint-Hilaire,  un  de  ses  plus  illustres  champions,  recon- 
naît un  seul  système  de  créations  incessamment  et  successivement 
progressives,  remaniées  sous  toutes  les  formes,  par  l'action  toute- 
puissante  des  milieux  ambiants.  (1) 

Le  savant  professeur  de  Clermont-Ferrand,  M.  Lecoq,  pense  qu'il 
se  produit  continuellement  des  types  nouveaux,  des  formes  définies, 
stables,  qui  se  dégagent  et  se  fixent  par  l'action  du  temps  et  de  l'ha- 
bitude. «  Qui  oserait  affirmer,  dit-il,  que  cette  dernière  création  (l'ère 
«actuelle)  n'offre  pas  elle-même  plusieurs  périodes  distinctes,  ou  plutôt 
»une  succession  lente  et  progressive  de  tous  les  types  qui  la  composent? 
»  Pourquoi  ne  pas  considérer,  comme  les  plus  anciennes,  les  espèces  les 
»  mieux  définies,  comme  le  sont  la  plupart  des  Monocotylédonées, 
»des  Fougères,  des  Conifères,  des  Cicadées,  et  ne  pas  voir  dans  les 
»Dicotylédonées  un  certain  nombre  de  genres,  de  création  plus  ré- 
»cente  (2)  dont  les  espèces  seraient  encore  confondues,  attendant  du 
»  temps  et  de  l'habitude  une  stabilité  qu'elles  n'ont  pas  encore  acquise(3).» 

M.  Naudin  va  plus  loin.  Dans  un  article  très-intéressant,  publié  dans 
la  Revue  horticole ,  il  développe  cette  idée  que  des  types  primitifs,  peu 
nombreux,  doués  d'une  certaine  plasticité  et  d'une  flexibilité  consi- 
dérable, modifiés  par  la  différence  des  milieux,  ont  produit  toutes  les 


(1)  Etudes  progj-cssivrs  d'un  naturaliste. 

(2)  51.  Lecoq  paraît  bien  ici  admettre  plusieurs  créations  correspondantes  aux 
différentes  ères  géologiques  ;  mais  nous  verrons  plus  loin  qu'il  a  depuis  adopté  l'idée 
d'une  création  unique  ,  se  transformant  également. 

(3)  Considérations  sur  l'Espère  en  botanique.  (Portefeuille  des  horticulteurs,  T.  1). 


—  \n  — 

formes  que  nous  voyons  aujourd'hui;  ainsi  se  comprend,  dit-il,  la 
communauté  d'organisation  des  êtres  d'un  même  règne  (1). 

Enfin  M.  Lecoq,  dans  un  ouvrage  tout  récent,  conclut  ainsi  sur 
l'origine  des  espèces  :  «  Nous  croyons  à  la  transformation  passée , 
»  actuelle  et  future  des  êtres  d'une  seule  et  unique  création  divine  (2).  » 

Sur  quels  faits  se  base-t-on  pour  admettre  ces  modifications  impor- 
tantes de  formes  et  d'organes,  cette  flexibilité  des  types  sous  les  in- 
fluences de  la  température  du  sol,  de  la  pression  et  de  la  composition 
atmosphérique?  L'expérience  nous  a-t-elle  montré  quelques  faits  ana- 
logues? Si  cette  facilité  de  transformation  a  existé,  nous  devrions  la 
retrouver  dans  les  espèces  actuelles.  Elles  ne  diffèrent  point  par  leur 
organisation  de  leurs  ancêtres;  elles  ne  sont  pas  plus  éloignées  de  ceux-ci 
que  les  plantes  actuelles  de  l'Equateur  de  celles  qui  peuplent  les  régions 
polaires.  Si  cette  mobilitéde  formes  existait  encore  aujourd'hui,  ce  serait 
à  désespérer  de  la  nomenclature  et  des  classifications  botaniques.  On  ne 
connaît  pas  d'observation  certaine  de  la  formation  d'espèces  nouvelles 
ou  du  passage  d'une  espèce  à  une  autre.  Un  grand  nombre  de  savants 
dont  nous  entendrons  toul-à-1'heure  le  langage,  professent  la  fixité  des 
types,  leur  résistance  aux  milieux.  Les  plantes,  déplacées  de  leurs  condi- 
tions normales,  périssent  et  ne  se  transforment  pas.  Nous  verrons  que 
l'espèce  est  certaine,  constante,  invariable  dans  ses  caractères  impor- 
tants. Dans  les  variations  légères  qu'elle  peut  offrir,  on  reconnaît  facile- 
ment la  consanguinité  des  individus.  Cela  entre  si  bien  dans  le  plan  de 
la  nature,  que  la  plupart  des  êtres  frappés  d'altération  accidentelle , 
hybrides  ou  monstres,  ne  sont  plus  aptes  à  la  fécondation  ;  ou  si  cette 
faculté  existe  encore,  c'est  pour  ramener  leur  postérité  au  type  dont  la 
pureté  avait  souffert  dommage.  C'est  par  mutilation  et  par  surprise, 
pour  ainsi  dire,  que  l'horticulteur  perpétue  ces  déviations  à  son  profit. 

La  mutabilité  des  formes  est  contraire  aux  faits  de  l'expérience  dans 
l'ère  actuelle.  On  n'a  pu  constater  la  moindre  différence  entre  les  espèces 
contemporaines  et  les  mêmes  espèces  qui  habitaient  le  globe  il  y  a  3  à 
4,000  ans.  Des  graines  trouvées  dans  les  tombeaux  égyptiens,  ont  repro- 
duit des  plantes  en  tout  point  semblables  à  celles  que  nous  connaissons 
aujourd'hui  (3).  «  Pas  une  plante  n'est  perdue,  dit  le  poétique  Bernardin, 
»depuis  Circé,  la  plus  ancienne  des  botanistes,  dont  Homère  nous  a  en 


(1)  Considérations  philosophiques  sur  V Espèce  et  la    Variété.   {Revue  horticole, 
n°  6,  1852). 

(2)  Etudes  sur  la  Géojraphie  botanique  de  l'Europe  T.  5,  p.  230,  Paris,  1854. 
(5)  Girarmn.  Joum.  de  Ph.  et  de  Chim. 


—  128  — 

«quelque  sorte  conservé  l'herbier...  La  jalouse  Clylée  se  tourne  toujour  ; 
»vers  le  soleil,  et  le  beau  fils  de  Lériope,  Narcisse,  s'admire  encore  sur 
»le  bord  des  fontaines  (1).  » 

Il  est  vrai  que  le  temps  de  nos  observations  est  court  relativement 
aux  périodes  d'une  longue  durée  qui  l'ont  précédé;  mais,  «toujours 
»est-il,  d'après  Cuvier,  qu'il  suffit  pour  nous  apprendre  qu'il  y  a  dans  la 
»  nature  une  telle  stabilité,  que  les  espèces  se  maintiennent  constamment 
»avec  leurs  caractères  distinctifs  (2).  » 

On  a  cru  un  moment  posséder  un  fait  important  pour  la  transforma- 
tion des  espèces.  Un  observateur  dont  la  sagacité  avait  cette  fois  été 
mise  en  défaut,  M.  E.  Fabre,  d'Ayde,  après  10  ans  d'expérience  qui  pa- 
raissaient irréprochables,  avait  conclu  que  le  blé  (Triticum)  dérivait  des 
OEgylops,  plantes  sauvages  abondantes  dans  le  midi  de  la  France.  Ce 
grave  résultat  bouleversait  toutes  les  idées  reçues  en  établissant  le  pas- 
sage, non-seulement  d'une  espèce  à  une  autre  espèce,  mais  d'un  genre  à 
un  autre  genre.  Tout  le  monde  botanique  fut  ému  de  cette  communi- 
cation, et  les  «  partisans  de  la  philosophie  de  l'identité  absolue,  » 
comme  les  appelle  M.  Jordan,  criaient  déjà  :  victoire!  Mais  un  examen 
attentif,  fait  sur  les  lieux  même  et,  tout  récemment,  les  expériences  de 
M.  Godron,  qui  a  reproduit  sous  ses  yeux  toutes  les  circonstances  du 
phénomène  et  fait  voir  qu'il  rentrait  dans  les  conditions  habituelles  de 
l'hybridation  (3),  ont  mis  à  néant  tout  ce  que  cette  observation  avait 
d'extraordinaire.  Dans  son  mémoire,  l'habile  botaniste  que  je  citais 
d'abord,  M.  Jordan  ,  discute  longuement  toutes  les  expériences  de 
M.  Fabre  et  se  résume  en  disant,  avec  une  sévérité  un  peu  excessive 
peut-être,  qu'il  est  difficile  d'accumuler  dans  une  expérience  des  erreurs 
plus  manifestes  et  plus  nombreuses  (4). 

(La  suite  à  la  prochaine  livraison.) 


(1)  Etudes  4m%  p.  194. 

(2)  ('..  D'Orbigny  et  A.  Gentr.  Géologie  appliquée,  1851. 

(ô)  De  la  fécondation  des  OEgylops  par  les  Trilieum,  Nancy  185u. 

(4)  De  l'origine  île  diverses  variétés  ou  espèecs  d'arbres  fruitiers,  etc.  18oô. 


Camellia    Auo'uste   Delfosse. 


429  — 

HORTICULTURE. 


COURTE  BIOGRAPHIE  DU  CAMELLIA, 

SUIVIE     DE     LA     DESCRIPTION     D'UNE    VARIÉTÉ     NOUVELLE  : 
CAMELLIA  JAPONICA,  VAR.  AUGUSTE  DELFOSSE, 

Gain  de  M.  Defresne,    édité  par  M.   Auguste  Verschaffelt. 
Par  M.  Edouard  Morren. 

D'après  l'opinion  la  plus  accréditée,  l'introduction  du  Camellia  en 
Europe  eut  lieu  en  1739  et  serait  due  au  P.  G.-J.  Kamel,  de  la  C'e  de 
Jésus,  qui  fut  envoyé  en  mission  aux  Iles  Philippines  à  la  fin  du  dix- 
septième  siècle.  Le  nom  du  Père  Kamel,  qui  ,  italianisé,  devient 
Camelli,  fut  immortalisé  par  Linné  qui  l'attacha  à  l'arbuste  au  feuillage 
sombre,  sévère  et  ferme,  aux  fleurs  éclatantes,  amples  et  symétriques,  et 
que  l'on  aime  sous  le  nom  deCamellia  ;  on  voit  qu'en  vertu  de  son  origine 
on  devrait  orthographier  Kamelia.  Linné  témoigna  ainsi,  delà  manière 
la  plus  noble ,  sa  reconnaissance  envers  celui  qui  avait  fait  connaître, 
non-seulement  le  Camellia,  mais  encore  un  grand  nombre  de  produc- 
tions naturelles  de  l'île  Luçon,  et  comme  si  tout  le  monde  avait  voulu 
s'associer  à  la  pensée  de  Linné  ,  le  Camellia  est  demeuré  l'emblème 
de  la  reconnaissance.  Mais,  si  l'on  en  croyait  l'opinion  du  célèbre 
auteur  de  la  Flora  Japonica,  le  docteur  Von  Siebold,  Linné  aurait  consa- 
cré une  usurpation  :  de  même  qu'Améric  Vespuce  recueillit  l'honneur  de 
la  découverte  de  Colomb,  que  M.  Quinquet  attacha  son  nom  aux  lampes 
inventées  par  Argant,  que  le  daguerréotype  devrait  plutôt  porter  le 
nom  de  Niepce  que  celui  de  Daguerre,  de  même  Kamel  ne  serait  pas  le 
premier  introducteur  du  Camellia.  M.  Von  Siebold  lui  dénie  cet  honneur 
pour  l'attribuer  à  lord  Petre.  filais  ceux  qui  partagent  cette  opinion  au- 
raient-ils le  courage  de  décorer  le  Camellia  du  nom  de  Pétrin?  Ce  nom  est 
encore  plus  barbare  que  celui  des  Chinois  qui  disent  son  tsja  en  par- 
lant de  la  rose  du  Japon,  ce  qui  signifie  thé  de  la  montagne.  On  sait 
que  les  Camellias  et  les  thés  sont  deux  genres  de  plantes  très-voisins, 
appartenant  à  la  famille  des  Ternstrœmiacées. 

Le  Camellia,  malgré  la  sinistre  prédiction  d'Alphonse  Karr,  qui  pen- 
sait qu'il  ne  devait  la  vogue  dont  il  jouissait  déjà  jadis,  qu'à  la  difficulté 
de  sa  culture,  et  que  dans  le  pays  des  roses,  le  règne  du  Camellia  ne 
pouvait  être  que  passager,  est,  et  sera  longtemps  encore  une  créature 
bien  séduisante  pour  tous  ceux  qui  sont  sensibles  aux  charmes  des 
belg.  hort.  t.  vi.  15 


—  130  — 

fleurs.  Un  seul  reproche  peut  être  adressé  à  la  rose  du  Japon,  celui  de  ne 
pas  embaumer  les  airs:  à  ceux  qui  voudraient  une  raison  de  cette  stérilité, 
nous  conterons  la  délicieuse  allégorie  imaginée,  en  1820,  par  M.  Norbert 
Cornelissen,  de  Gand  (1).  «Jupiter  s'ennuyait;  Junon,  malgré  le  récit 
de  quelques  anecdotes  scandaleuses,  ne  le  déridait  guère.  Hébé  et  Flore 
y  réussirent.  Hébé  se  chargea  donc  de  raconter  au  maître  des  dieux 
l'histoire  de  la  plante  apportée  en  Europe  par  un  jésuite.  C'est  là  de 
l'imagination  s'il  en  fut.  Voici  cette  singulière  histoire.  Vénus  avait 
été  surprise  avec  Mars  par  son  mari  Vulcain,  et  l'Amour  se  moquait 
fort  irrespectueusement  de  sa  mère.  Elle  résolut  de  le  faire  fustiger,  et 
les  Grâces  devaient  mettre  en  sang  la  peau  fine  de  ce  pauvre  Cupidon;  les 
verges  étaient  désignées  :  c'étaient  des  branches  de  rosiers.  Flore,  dans 
cette  terrible  conjoncture,  sauva  l'Amour.  Elle  indique  à  Zéphir  la  rose 
de  Niphon.«  Vous  reconnaîtrez,  lui  dit-elle,  l'arbuste  que  la  déesse  vous 
demande  aux  signes  suivants  :  ses  rameaux  sont  ornés  de  feuilles 
brillantes  et  qui  ne  perdent  jamais  l'éclat  de  smaragde;  la  fleur  est 
semblable  à  la  rose,  belle  comme  la  rose,  privée  d'épines  et  n'offensant 
jamais  la  main  qui  la  cueille  :  les  dieux  l'appellent  Anacanthis,  les 
hommes  Sasanqua.  »  Zéphir  rapporta  donc  du  Japon  le  Camellia, 
l'anacanthis  des  dieux,  et  quand  il  parut  «  les  Grâces  admirèrent  la  fleur; 
un  premier  mouvement  de  coquetterie,  qu'il  est  si  difficile  de  réprimer, 
même  à  la  cour  de  Cythère,  l'emporta;  l'anacanthide  dans  un  instant 
devint  la  parure  de  leur  sein  et  de  leur  front  virginal,  et  remplaça  les 
lis  et  les  roses.  »  Il  est  presque  inutile  d'ajouter  que  dans  le  supplice 
que  les  Grâces  ,  de  leurs  mains  délicates  et  flatteuses,  infligèrent  à 
l'Amour,  aucune  épine  n'effleura  les  molles  et  tendres  chairs  de  l'enfant 
espiègle.  Vénus  prit  en  haine  la  rose  de  Niphon.  «  Flore,  cent  fois 
depuis  ce  jour  fatal,  lorsque  seule  avec  ses  trois  compagnes,  elle 
embellissait  la  toilette  de  Vénus,  sollicita  le  pardon  de  l'innocente  fleur  ; 
mais  la  déesse  n'oubliant  jamais  combien  elle  avait  été  humiliée,  resta 
inexorable,  et  depuis  lors,  la  rose  de  Niphon  a  cessé  d'embaumer 
les  airs,  et  reléguée  sans  gloire  dans  une  île  lointaine  et  inconnue  aux 
Muses  ,  elle  n'offre  à  la  divine  poésie  ni  l'image  de  sa  beauté  ,  ni  même 
la  tradition  de  ses  noms  antiques.  » 

Le  Camellia  croît  spontanément  au  Japon.  M.  Von  Siebold,  qui  a  pu 
l'observer  dans  sa  patrie,  en  donne  la  description  suivante  : 


(1)  De  fatis  KameUiœ  Japonicœ  litsus  poeticns.  Le  titre  seul  est  en  latin  ;  le  conte 
est  en  français,  écrit  avec  verve  et  enjouement.  Voy.  Annales  Brlgiques  des  sciences  , 
arts.  etc.  T.  5.  p.  120-144.  1820.  fianrt. 


—  131  — 

«  Le  Camellia  sauvage,  dit-il  (Flora  Japonica,  p.  457),  se  présenté 
eomme  un  arbre  de  15  à  20  pieds  de  hauteur,  souvent  aussi  comme  un 
arbrisseau,  avec  plusieurs  tiges  de  3  à  6  pouces  de  diamètre  d'une  seule 
racine.  L'écorce  est  lisse  et  cendrée.  Il  croît  en  société  et  s'empare 
souvent  d'une  étendue  de  plusieurs  arpents.  Les  bocages  touffus 
ressemblent  beaucoup,  par  leur  port,  à  ceux  de  nos  hêtres  de  15  à  20 
ans,  comme  en  général  l'extérieur  du  Camellia  s'en  approche.  C'est  ainsi 
qu'on  le  rencontre  dans  les  contrées  boisées  des  îles  de  Kinsin,  Sikok, 
et  dans  la  plupart  des  provinces  du  Nippon  ,  encore  à  une  hauteur  de 
800  pieds  au-dessus  de  la  mer.  Dans  les  provinces  du  midi,  il  commence 
déjà  à  fleurir  en  hiver  et  y  persiste  jusqu'en  avril.  Les  fruits  mûrissent 
en  septembre.  On  recueille  les  semences  et  on  en  extrait  une  huile  qui, 
jointe  à  la  cire  végétale  du  Rhns  sticcedaneum  ,  aux  huiles  essentielles 
de  laurier  et  de  giroflier,  et  à  d'autres  parfums,  s'emploie  comme  une 
pommade  en  usage  clans  le  pays.  L'écorce  de  la  racine  était  recommandée 
jadis,  comme  remède  contre  la  diarrhée.  Les  branches,  toujours  vertes, 
servent  d'ornements  aux  cimetières,  décorés  toute  l'année,  selon  l'usage 
du  pays.  Lors  de  la  floraison  de  la  plante  et  principalement  à  la  fête 
des  lanternes,  pendant  laquelle  on  décore  et  éclaire,  la  nuit,  les  tombeaux 
avec  le  plus  grand  soin,  et  où  se  célèbrent  conjointement  les  cérémonies 
nocturnes  des  temples ,  il  résulte  de  cet  usage  un  profit  considérable 
pour  les  pauvres  campagnards.  Le  bois  est  fort  dur  et  s'emploie  pour 
les  objets  d'art,  ou  sert  comme  combustible  dans  les  provinces  où  il 
se  trouve  en  quantité  ,  comme  par  exemple  à  Nangasaki. 

»  Au  Japon,  en  Chine  et  en  Korai  on  le  cultive  depuis  bien  des  siècles, 
et  le  nombre  des  variétés  produites  ou  par  hasard  ou  par  culture  est 
infini;  il  s'en  fait  aussi  un  grand  commerce  entre  ces  pays  par 
l'échange  et  la  vente.  Non-seulement  les  jardiniers  s'occupent  de  ce 
commerce,  mais  encore  les  gens  de  la  campagne,  et  par  cette  dernière 
raison  on  trouve  fréquemment,  en  rase  campagne,  de  superbes  exem- 
plaires de  plantes-mères  de  Camellia,  dont  les  branches,  artistement 
repliées  vers  la  terre,  sont  greffées  par  approche  sur  des  pieds  sauvages, 
même  souvent  rabougris  et  plantés,  à  l'entour,  à  cet  effet.  Certaines  va- 
riétés sont  recherchées  de  préférence  à  certaines  époques,  comme  dans 
ces  derniers  temps  celles  à  grandes  fleurs  simples.  Au  Japon  on  les  traite 
ordinairement  comme  arbres  nains,  et  pour  cela  on  les  greffe  par  ap- 
proche sur  des  troncs  sauvages  coupés  très-près  de  la  racine,  souvent 
même  estropiés  ou  creusés.  Dans  les  bosquets  entourant  les  temples  et 
dans  les  jardins,  on  rencontre  cependant  des  exemplaires  cultivés,  par- 
venus à  la  taille  d'arbres  considérables.  Un  tel  arbre,  parsemé  de  cen- 


—  132  — 

laines  de  fleurs  diverses  en  couleur  et  en  grosseur  ,  par  suite  de 
greffes  sur  les  différentes  branches,  produit  un  effet  ravissant,  nuançant 
les  teintes  en  rouge,  blanc,  bigarré,  à  fleurs  simples  ou  doubles.  Ordi- 
nairement le  Camellia  cultivé  fleurit  un  peu  plus  tard,  en  même  temps 
et  en  société  avec  le  mume  si  recherché  (Prunus  mime),  le  coing  japo- 
nais (Cydonia  japonica),  les  jasmins,  les  corylopsis,  avec  les  cornouil- 
lers (Cornus  officinalis),  et  les  magnoliers.  » 

La  nouvelle  variété  de  Camellia  Japonica,  etc.,  dont  nous  publions 
le  portrait  à  la  planche  24,  doit  figurer  au  premier  rang,  parmi  les 
meilleurs  succès  des  horticulteurs;  elle  se  distingue  surtout,  par  la 
remarquable  régularité  de  l'imbrication  des  pétales,  qui  forment  comme 
six  rayons  partant  du  cœur  de  la  fleur  et  allant  successivement  en 
s'élargissant  vers  la  circonférence  et  par  une  coloration  bien  rare  , 
les  pétales  étant  bordés  de  carmin  pâle  et  de  blanc  pur. 

La  fleur  mesure  un  décimètre  de  diamètre;  elle  est  parfaitement  cir- 
culaire, à  peu  près  plane,  et  régulièrement  double  jusqu'au  centre.  Les 
pétales  sont  d'autant  plus  grands  qu'ils  sont  insérés  plus  près  de  l'exté- 
rieur; ils  ont  alors  de  trois  à  quatre  centimètres  de  largeur,  sont  arron- 
dis, très-légèrement  atténués  au  sommet,  parfois  même,  montrent  une 
tendance  à  être  acuminés,  c'est-à-dire,  à  se  terminer  par  une  petite 
pointe.  Au  centre  même  de  la  corolle,  les  pétales  sont  très-petits, 
réguliers,  lancéolés  et  forment  une  élégante  rosace. 

Chaque  pétale  est  d'un  pourpre  carminé  foncé  vers  la  base  et  l'onglet; 
vers  la  circonférence,  ce  carmin  devient  plus  pâle  et  se  dissipe  peu  à  peu, 
pour  laisser  un  mince  filet  blanc  sur  le  bord.  D'après  cette  coloration  , 
chaque  pétale  se  dessine  et  se  circonscrit  nettement  sur  ses  voisins  ,  et 
comme  par  leur  ensemble  ils  forment  une  corolle  parfaitement  imbriquée 
et  bien  pleine,  en  voyant  ce  Camellia,  on  est  immédiatement  frappé  de 
la  régularité  de  tant  de  pétales  bicolores,  harmoniquement  disposés  et 
tous  distincts. 

Le  bouton  est  vert-pàle,  protégé  par  des  bractées  et  des  sépales  courts, 
larges  et  imbriqués.  Les  feuilles  sont  ovales,  régulièrement  dentées,  à 
pointe  réfléchie,  d'un  vert  foncé  ;  les  tiges  sont  fauves. 

Ce  magnifique  Camellia  est  un  nouveau  succès  pour  les  fleuristes 
liégeois;  il  a  été  obtenu  par  l'un  de  nos  plus  intelligents  horticulteurs, 
M.  Defresne,  en  fécondant  artificiellement  le  Camellia  Weimarii  par 
YEximia,  et  provient  d'un  semis  de  4846. M.  Defresne  nous  a  assuré  que 
le  Camellia  Weimarii,  variété  semi-double,  donne  presque  toujours  un 
grand  nombre  de  variétés  parfaitement  imbriques.  M.  Defresne  a  donné 
au  nouveau  Camellia  le  nom  d'un  homme  honoré  de  tous  les  Belges  , 


—  133  — 

celui  de  M.  Auguste  Delfosse  ,  ancien  président  de  la  Chambre  des 
Représentants,  et  député   de  la  ville  de  Liège. 

M.  Ambroise  Verschaffelt  ,  de  Gand ,  s'est  rendu  acquéreur  du 
nouveau  Camellia  Var.  M.  Auguste  Delfosse. 

Il  sera  mis  dans  le  commerce  au  printemps  prochain. 

Plantes  hautes  de  25  à  35  centimètres  :  frs.  25. 

S'adresser  aux  bureaux  de  la  Belgique  horticole,  ou  à  M.  Ambroise 
Verschaffelt,  à  Gand. 


PELARGONIUM  ENDLICHERIANUM,  FENZL. 

Pêlargonium  d'Endlicher  ; 

Par  M.  Edouard  Morren. 

M.  Lindley  a  décrit  récemment  (The  gara,  chron.  1855,  n°  35,  p.  580), 
une  nouvelle  espèce  de  Pélargonium,  bien  intéressante  aux  yeux  des 
horticulteurs  parla  beauté  et  la  singularité  de  ses  fleurs, et  digne  de  fixer 
l'attenticn  des  botanistes  parce  que,  par  le  pays  dont  elle  est  originaire, 
elle  fait  totalement  exception  à  ce  que  l'on  savait  de  la  distribution  géo- 
graphique des  Pélargoniums  et  que,  comme  si  cette  anomalie  d'habitat 
avait  exercé  une  puissante  influence  sur  son  organisation,  ses  fleurs 
présentent  l'exemple  d'une  singulière  anomalie  de  structure.  Nous 
savions  que  la  patrie  de  la  plupart  des  espèces  de  ce  vaste  genre  était  le 
Cap  de  Bonne-Espérance  ;  on  en  avait  découvert  quelques  autres  dans 
les  colonies  anglaises  de  l'Australie,  dans  la  Nouvelle-Hollande,  la  terre 
de  Van  Diémen  et  l'île  de  Tristan  d'Acugna;  aucune  n'avait  été  observée 
dans  l'hémisphère  nord,  si  ce  n'est  une  aux  Canaries  et  deux  ou  trois 
en  Abyssinie.  Mais  l'espèce  qui  fait  l'objet  de  cette  notice  fait  exception  à 
cette  loi  de  géographie  botanique  ;  elle  appartient  à  l'Asie-Mineure.  Elle 
a  été  trouvée  par  le  voyageur  Kotschy,  dans  la  Caramanie,  et  a  été 
envoyée  par  lui  à  Vienne  où  elle  a  été  cultivée  par  M.  François  Rauch, 
directeur  d'un  des  jardins  de  S.  M.  l'Empereur  d'Autriche.  M.  Kotschy 
rencontra  le  P.  Endlicherianum  sur  les  pentes  calcaires,  dans  les  ravins 
de  l'admirable  contrée  montueuse  qui  avoisine  le  village  de  Gullek  où 
il  le  trouva  en  fleur  le  30  juillet  1853.  Ce  village  de  Gullek  n'est  encore 
mentionné  sur  aucune  carte,  mais  on  peut  supposer  qu'il  se  trouve 
quelque  part  sur  la  pente  méridionale  du  Bulgar-Dagh ,  ou  chaine  du 
Taurus. 

M.  Lindlev  avait  observé  l'été  dernier  le  P.  Endlicherianum,  dans  les 
jardins  delà  société  horticulturale  de  Londres,  â  Chiswick.  Nous  avons 
à  la  même  époque  admiré  son  abondante  floraison  dans  l'établissemenl 


—  134  — 

de  M.  Jacob-Makoy  à  Liège,  et.  nous  avons  pu  en  dessiner  deux  fleur», 
lithographiées  à  la  planche  25,  ftg.  5. 

Le  P.  Endlicherianam  est  un  sous-arbrisseau ,  à  souche  charnue,  à 
feuilles  radicales,  arrondies-réniformes,  crénelées,  dentées,  pubescentes 
et  odorantes.  Les  fleurs  sont  grandes  et  frappent  tout  d'abord  par  leur 
bizarrerie  ;  des  cinq  pétales  qu'elles  devraient  présenter,  les  deux  supé- 
rieurs seuls  sont  développés;  les  trois  autres  ont  avorté  mais  sont 
visibles  à  l'état  rudimentaire  à  la  base  du  tube  staminal,  sous  forme  de 
petites  languettes  blanchâtres.  Les  deux  grands  pétales  sont  rouge- 
carmin  vif,  rehaussé  de  veines  anastomosées  plus  brillantes.  Chaque 
inflorescence  portait  de  dix  à  quinze  fleurs. 

Cette  nouvelle  plante  requiert  la  protection  d'une  serre  froide  en 
hiver,  au  moins  la  lui  accorde-t-on  jusqu'ici  ;  en  été  on  la  met  en  pleine 
terre  où  elle  acquiert  un  très-grand  développement.  Nul  doute  qu'elle  ne 
devienne  la  souche  de  nombreux  hybrides. 


REVUE  DE  PLANTES  NOUVELLES  ET  INTÉRESSANTES. 

1  :*(liviiaiiHius  fulgens.  Wall.  —  Bot.  Mag.,  1856,  tab.  4891* 
-Wall.  Cat.  n.  797.  —  De  Cand.  Prodr.  V.  9,  p.  261.  —  Fam.  des 
Cyrtandracées.  —  Didynamie  gymnospermie. —  iEschynanthe  brillante. 

Cette  nouvelle  espèce  dTEschynante  ne  le  cède  en  rien  aux  M.  gran- 
di florus,  Don.,  Lobbianus,  Hook.,  pulcher,  DC,  Javaîiicus,  etc.  Ses  tiges 
sont  fortes,  arrondies,  traînantes,  peu  ramifiées  :  les  feuilles  opposées, 
grandes,  vert  foncé,  épaisses,  charnues,  oblongues-lancéolées,  presque 
ovales,  acuminées,  entières,  légèrement  carénées  en  dessous;  nervures 
obscures,  pas  même  visibles  dans  les  feuilles  âgées  dont  le  parenchyme 
parait  ridé  et  dont  les  bords  sont  quelque  peu  sinués  et  dentés.  Les 
fleurs  sont  réunies  en  une  ombelle  terminale,  sans  bractées,  ou  munies 
seulement  d'une  paire  de  petites  feuilles  à  la  base.  Les  pédicelles  sont 
courts,  uniflores.  Calice  plus  long  que  les  pédicelles,  d'une  forme  inter- 
médiaire entre  la  cylindrique  et  l'infundibuliforme,  beaucoup  plus  large 
que  le  tube  de  la  corolle,  à  limbe  dressé-élalé,  à  cinq  lobes  égaux, 
petits  et  pointus.  La  corolle  est  trois  fois  aussi  longue  que  le  calice,  en 
forme  de  massue,  à  tube  allongé  etsvelle,  allant  graduellement  en  s'élar- 
gissant,  vers  la  partie  supérieure  où  elle  est  comprimée  et  contractée, 
à  limbe  quinquélobé  et  quelque  peu  bilabié.  La  couleur  des  fleurs  est 
écarlate  et  chaque  lobe  de  la  corolle  est  marqué  de  lignes  noires.  Les 
étamines  sont  didynames,  longuement  exsertes;  les  anthères  conni- 
ventes  par  paire.  Slvlo  également  très-exserte,  à  stigmate  très-dilaté 


—  135  — 

Cette  espèce  est  originaire  de  Tavoy,  aux  Indes  orientales,  où  elle  a  été 
recueillie  par  Goniez.  Elle  est  arrivée,  à  l'établissement  de  MM.  Veitch  à 
Exeter  et  Chelsea,  de  Moulmein,  par  M.  Thomas  Lobb.  Elle  promet  de 
fleurir  de  bonne  heure  et  peu  de  plantes  la  surpassent  pour  la  culture 
dans  des  vases  suspendus  dans  les  serres  chaudes. 

Clivia  Gardent.  Hook.  —  Bot.  Mag.,  tab.  4895.  —  Etymol.  :  le 
genre  Clivia  a  été  établi  par  Lindley,  en  l'honneur  de   la  duchesse  de 
Northumberland,  de  la  maison  de  Clive.  —  Fam.  des  Amaryllidées.  - 
Hexandrie  monogynie.  —  Clivie  du  major  Garden. 

Cette  nouvelle  plante,  figurée  dans  la  livraison  de  janvier  1856  du 
Botanical  magazine,  est  manifestement  une  espèce  de  Clivia,  Lindl. 
(Imantophyllum,  Hook.),  et  bien  distincte  de  l'unique  espèce  jusqu'ici 
connue  de  ce  genre  Africain.  Les  feuilles  sont  plus  longues  et  s'amin- 
cissent graduellement  en  une  pointe  acuminée  mais  pas  aiguë.  L'ombelle 
est  composée  d'un  plus  petit  nombre  de  fleurs,  mais  elles  sont  doubles 
de  celles  du  C.  nobilis  et  plus  vivement  colorées,  fortement  courbées  ou 
falquées  et  les  pointes  des  sépales,  au  lieu  d'être  infléchies  en  dedans,  de 
manière  à  ne  laisser  qu'une  très-petite  ouverture  entre  elles,  sont  étalées 
et  constituent  ainsi  une  corolle  infundibuliforme.  Le  Clivia  nobilis 
habite  les  rives  de  la  rivière  du  Grand-Poisson  (Great  Fish  River),  dans 
l'Afrique  méridionale  ;  le  C.  Gardeni  a  été  découvert  dans  la  colonie  de 
Natal,  par  M.  le  Major  Garden,  qui  l'a  introduit  au  jardin  royal  de  Kew. 

Traitée  comme  une  plante  de  serre  tempérée ,  cette  nouvelle  espèce 
fleurit  abondamment  pendant  les  mois  d'hiver  et  reste  dans  cet  état  pen- 
dant plusieurs  semaines. 

Leptodactylon  Californicum.  Hook.  —  Bot.  Mag.  ,  tab.  4872. 
— Hook.  etArn.  Bot.  of  Beech.  Voy.  v.  1,  p.  369,  t.  89. —  Synon.  : 
Gilia  Californica,  Benth.,  in  De  Cand.  Proclr.,  v.  9,  p.  316.  — Etym.  : 
de  mtttos,  mince,  et  «JWriMo?,  doigt,  parce  que  la  plante  est  fissidactyle , 
c'est-à-dire  a  les  feuilles  fendues  en  filets  capillaires  et  courts. — Fam. des 
Polémoniacées.  —  Pentandrie  monogynie.  —  Leptodactyle  de  Californie. 

Celte  charmante  plante  a  été  considérée  par  M.  Hooker  et  le  Dr  Arnott, 
comme  devant  constituer  un  genre  distinct  de  Polémoniacées  ,  et  ils  lui 
donnèrent  le  nom  de  Leptodactylon,  à  cause  de  la  forme  des  feuilles , 
profondément  digitées  et  à  segments  très-étroits.  D'après  M.  Bentham, 
le  genre  de  Hooker  et  Arnott  formerait  plutôt  une  section  du  genre 
Gilia,  à  laquelle  il  conserve  le  nom  de  Leptodactylon,  et  aux  deux 
espèces  de  Leptodactylon,  les  L.  Californicum  et  L.Hookerii,  il  en  ajoute 
une  troisième,  venant  des  Montagnes-Rocheuses,  le  Cantuu  pungens  du 


—  136  - 

Dr  Torrey  (Ogochloa  Torrcyi  de  Don,  dans  le  Gard.  dict.  vol.  4,  p.  246). 

Le  port  du  Leptodactyle  de  la  Californie  rappelle  plutôt  un  Phlox  qu'un 
Gilia;  comme  son  nom  l'indique,  il  est  originaire  de  la  Californie; 
M.  William  Lobb  en  envoya  des  graines,  de  San  Bernardino,  dans 
la  Californie  méridionale,  à  MM.  Veitch.  Cette  nouvelle  plante  est  une 
précieuse  acquisition  pour  nos  jardins;  elle  forme  un  sous-arbrisseau 
rustique,  remarquable  par  le  feuillage  abondant  de  ses  rameaux  infé- 
rieurs et  par  les  dimensions  et  la  beauté  des  corolles.  Les  fleurs  s'épa- 
nouissent en  juillet.  En  voici  du  reste  le  signalement  complet  : 

Arbrisseau  bas  et  procumbant,  très-branchu,  à  rameaux  délicats, 
abondamment  recouverts  d'un  feuillage  fascicule. Feuilles  alternes,  pro- 
fondément digitées  jusqu'à  la  base  en  cinq  à  sept  segments  subulés 
mais  arrondis,  rigides,  capillaires  et  mucronés  à  la  pointe.  Fleurs 
nombreuses,  grandes,  naissant  sur  de  courts  rameaux  latéraux,  sessiles 
à  l'aisselle  des  feuilles  et  souvent  si  pressées  qu'elles  cachent  complète- 
ment les  feuilles  et  les  branches.  Sur  le  calice  on  observe  de  longs  poils 
dressés,  le  tube  est  cylindrique  à  cinq  côtes,  à  dents  subulées,  mucronées. 
Corolle  hypocratéri forme,  rose,  à  tube  délié,  plus  long  que  le  calice,  à 
limbe  de  cinq  lobes  grands,  étalés,  cunéés.  Anthères  au  nombre  de 
cinq,  sessiles,  insérées  juste  dans  le  tube  de  la  corolle,  oblongues. 
L'ovaire  est  ovale,  glabre;  il  surgit  d'un  disque  annulaire.  Style  aussi 
long  que  l'ovaire,  à  stigmate  triple,  linéaire,  de  la  même  longueur  ou 
plus  allongé  que  le  style.  (Voy.  Pl.  25,  fig.  2.) 

Helianthemnm  Tuberaria.  Mill.  —  Bot.  Mag.,  tab.  4873.  - 
Mill.  Dict.  n.  10.  • —  De  Cand.,  Prodr.,  v.  I,  p.  270.  —  Synon.  :  Cistus 
tuberaria,  Linn.  Sp.  Pl.  p.  741.  Cav.  le.  v.  I,  p.  65,  t.  67. —  Tuberaria 
nostras.  Bauh.  Hist.  v.  2 ,  p.  12.  —  Etymol.  ":  de  txios,  soleil,  et  ctvS-tjuov, 
fleur;  les  fleurs  sont  jaune  d'or  et  la  plante  végète  dans  des  stations 
fortement  éclairées  par  le  soleil.  —  Fam.  des  Cystinées  :  Polyandrie 
monogynie.  —  Hélianthème  des  truffes. 

C'est  une  charmante  plante,  aux  fleurs  les  plus  grandes  de  toutes  les 
espèces  d'Hélianthème,  ressemblant  à  une  rose  jaune,  très-convenable 
et  d'un  très-bel  effet  sur  un  rockwork  situé  au  midi  dans  un  jardin;  elle 
fleurit  en  juillet  et  la  fleuraison  se  continue  pendant  longtemps.  L'es- 
pèce est  spontanée  dans  le  midi  de  la  France,  en  Italie,  en  Espagne,  en 
Portugal,  en  Sicile  et  dans  le  nord  de  l'Afrique.  Son  nom  spécifique 
de  Tuberaria  vient  de  ce  que  sa  présence  est  presque  toujours  un  indice 
certain  de  la  présence  de  truffes  dans  le  sol.  L'Hélianthème  des  truffes 
ou  Hélianthème  à  feuilles  de  plantain  est  une  plante  connue  depuis 
longtemps,  mais  trop  négligée.  Ses  brillantes  fleurs,  formées  de  cinq 


i.  Cn  lia  (lia  ut  houles.  End.  2..  Leptodactyloi)  ('aliloniiciim.liooL.iU'onvoU  u  lus  Althaeoïdes, 
var  Aro  virus,  i  Tel  rat  liera  ericoïdes.  Hort.  5.Pelar6oiiiiLra  HiuIIicIkm'imiuhii. 


137 

pétales  d'un  jaune  brillant,  amples,  obcordés,  étalés,  avec  une  grande 
macule  rouge  de  sang  foncé  à  la  base,  s'épanouissent  en  plein  soleil 
et  ne  demandent  que  peu  de  soins.  Les  pieds  doivent  être  rentrés  à  la 
fin  de  l'automne,  tenus  secs  pendant  l'hiver  et  transplantés  dans  l'en- 
droit le  plus  chaud  du  jardin  au  mois  de  mai. 

Gilia  Dianthoïdes.  Endl.  —  Bot.  Mag.,  tab.  4876.  —  Endl. 
Atakt.,  t.  29.  —  Benlh.  in  De  Cand.  Prodr.,  v.  9,  p.  314.  —  Synon.  : 
Fenzlia  dianthiflora.  Benth.  in  Bot.  Beg.  (sub  tab.  1692,  Collomia  coc- 
cinea)  Hook.  le.  Plant.,  v.  2,  p.  199.  —  Etym.  :  le  genre  Gilia  a  été 
établi  par  Ruiz  et  Pavon  en  l'honneur  de  Philippe  Salvador  Gil,  bota- 
niste espagnol,  qui  vécut  dans  la  seconde  moitié  du  dix-huitième  siècle. 
—  Fam.  des  Polémoniacées.  —  Pentandrie  Monogynie.  —  Gilia  à  fleurs 
de  Dianthus. 

Cette  charmante  petite  plante  annuelle,  si  bien  appropriée  aux  bor- 
dures des  parterres,  est  originaire  de  la  Californie,  où  elle  avait  été 
découverte  par  Douglas;  elle  vient  d'être  introduite  dans  nos  jardins 
par  MM.  Veitch,  qui  l'ont  reçue  de  leur  collecteur,  M.  W.  Lobb.  C'est 
déjà  une  bien  jolie  espèce  à  l'état  spontané,  et  cependant  la  culture  l'a 
si  bien  modifiée  que  l'on  aurait  d'abord  quelque  peine  à  la  reconnaître  : 
ainsi  d'une  toute  petite  plante,  à  peine  ramifiée,  portant  seulement 
deux  ou  trois  fleurs,  elle  s'est  métamorphosée  en  un  végétal  très- 
rameux,  étalé,  à  branches  filiformes  et  à  petites  feuilles  linéaires  com- 
plètement cachées  sous  une  quantité  innombrable  de  fleurs,  de  la  teinte 
la  plus  délicate  de  lilas  et  rehaussées  chacune  par  cinq  macules,  rouge 
de  sang  foncé,  entourant  un  œil  de  couleur  orange  situé  au  centre. 
Elle  fleurit  pendant  toute  la  durée  de  l'été,  surtout  si  on  a  soin  de  l'ar- 
roser suffisamment.  (Voy.  son  portrait,  Pl.  25,  fig.  1.) 

La  plante  atteint  12  à  15  centimètres  de  hauteur.  Les  tiges  sont 
minces,  filiformes,  glabres  ou  munies  de  quelques  poils  dressés,  droites 
et  à  peu  près  simples  ou  plus  ou  moins  étalées  et  ramifiées  par  dicho- 
tomie, auquel  cas  elles  sont  très-florifères.  Feuilles  opposées,  connées 
à  la  base  par  paires  distinctes,  étroites,  linéaires,  poilues  et  ciliées  dans 
leur  moitié  inférieure.  Pédoncules  courts,  dressés,  minces,  poilus,  ter- 
minaux et  axillaires,  solitaires  et  ne  portant  qu'une  fleur;  celle-ci  est 
dressée.  Calice  à  cinq  segments  inégaux  dans  leur  longueur,  poilus  sur 
le  dos.  Corolle  en  roue,  grande,  eu  égard  à  la  taille  de  la  plante;  tube 
court;  limbe  à  cinq  lobes  étalés,  obovés,  aigus,  à  bords  dentelés  en 
scie.  Cinq  étamines  égales,  insérées  près  de  la  base  du  tube;  anthères 
ovales,  oranges;  filaments  minces,  subulés.  Style  un  peu  plus  long  que 
le  tube,  à  stigmate  triple,  linéaire. 


—  138  — 

Convolvulus    AUf&ueoidcs,  L.  var.  Argyreu» FI.  des  Serres, 

lab.  1021.  —  Linn.  Sp.  222,  non  Thunb.—  Sibth.  et  Sm.  FI.  Grœc. 
t.  194.  —  Synon.  :  Convolvulus  argereus,  DC.  FI.  franc,  supplém.  — 
Convolvulus  althaeoides,  Bot.  Mag.,  t.  359.  —  Trattin  Thés,  bot.,  t.  57. 
—  Convolvulus  argyrophyllus,  Verzeichn.  Pfl.  Hoffmans.  Gart.  1824, 
p.  53.  —  Etymol.  :  le  genre  Convolvulus  a  été  établi  par  Linné;  ce  mot 
vient  de  convolvere,  tordre,  rouler  en  spirale,  à  cause  des  tiges  volu- 
biles  de  ces  plantes.  —  Fam.  des  Convolvulacées.  —  Pentandrie  Mo- 
nogynie.  —  Liseron  à  fleurs  d'Althaea,  variété  à  feuilles  argentées. 

Le  Convolvulus  Althœoides  est  une  plante  d'Europe,  qui  n'est  pas 
assez  cultivée  dans  les  jardins,  eu  égard  à  ses  grandes  fleurs  à  corolles 
plissées,  d'un  rose  frais.  Ses  rameaux,  grêles  et  semi-ligneux,  s'étalent 
en  tous  sens  sur  la  terre;  les  feuilles  sont  remarquablement  découpées 
et  dans  la  variété  argyreus  ont  une  apparence  argentée  et  soyeuse.  Cette 
espèce  est  spontanée  dans  le  bassin  de  la  Méditerranée,  se  trouve  en 
Provence  et  a  été  signalée  dans  deux  localités  de  la  Flore  de  Montpellier. 
Elle  est  vivace,  se  contente  d'une  toute  petite  place  au  soleil,  dans 
n'importe  quelle  terre:  elle  se  multiplie  de  boutures.  (Vov.Pl.  25,  fig.3.) 

Tctratheca  ericoïdes.  Hort.  —  FI.  des  serres,  tab.  1065.  — 
Etym.  :  de  nr^u,  quatre,  et  5-iw,  endroit  où  l'on  conserve  quelque 
chose,  réservoir;  les  étamines  étant  quadriloculaires.  —  Fam.  des  Tré- 
mandrées.  —  Octandrie  monogvnie.  —  Tétrathèque  éricoïde. 

Il  ne  faut  pas  confondre  cette  jolie  plante  avec  sa  sœur,  dont  le  nom  lui 
ressemble  trop,  le  T.  Ericifolia  on  Tétrathèque  à  feuilles  cl'Erica.  Leurs 
personnes  se  distinguent  plus  aisément  que  leurs  noms.  Dans  l'espèce 
qui  nous  occupe  et  dont  nous  avons  dessiné  une  branche  fleurie  sur  la 
planche  25,  les  rameaux  sont  glabres  ou  très-parcimonieusement  pi- 
leux; les  feuilles  linéaires  subsessiles,  alternes  ou  plus  souvent  rassem- 
blées en  faux  verlicilles  ternes,  à  bords  recourbés;  les  pédicelles  sont 
axillaires,  solitaires,  beaucoup  plus  courts  que  les  feuilles,  glabres  ainsi 
que  le  calice.  Ce  dernier  a  les  sépales  ovales,  acuminés,  pointus;  les 
pétales  sont  obovés  roses;  les  anthères  linéaires,  plus  courtes  ou  éga- 
lant les  pétales,  ont  la  pointe  jaune.  Le  T.  Ericifolia  se  distingue  de  ce 
signalement  par  ses  feuilles  plus  courtes,  plus  strictement  verticillées,  à 
surface  hérissée  de  poils  ou  de  papilles  et  surtout  par  ses  pédicelles 
beaucoup  plus  longs  que  les  feuilles  et  par  quelques  poils  sur  le  calice. 

L'espèce  est  originaire  d'Australie,  croît  à  Van  Diémen  et  peut  passer 
l'hiver  en  serre  froide.  En  été  elle  peut  être  mise  en  pleine  terre  et  en 
plein  air,  dans  du  terreau  de  feuilles  mêlé  de  terre  de  bruyère.  Elle  y 
formera  de  jolis  buissons  si  on  la  soumet  à  une  taille  sévère.  Multiplica- 
tion par  boutures. 


—  139  — 
REVUE  DES  FOUGÈRES  NOUVELLES. 

Maintenant  que  les  fougères  deviennent  si  populaires,  et  que  les 
amateurs  de  plantes  d'ornement  apprécient  les  qualités  ornementales 
de  leur  gracieux  feuillage,  dont  l'effet  est  de  rehausser,  par  le  contraste, 
les  beautés  des  plantes  très-florifères,  nous  pensons  qu'une  courte  notice 
sur  les  fougères  nouvelles  de  jardin,  peut  être  utile  à  ceux  qui  forment 
descollections  de  ces  plantes  (1). 

1°  Nephroleims  davallioides.  T.  M.  —  Etym.  :  Nephrolepis  de 
vt<Pt>os,  rein,  et  m™ ,  écaille,  indusie.  —  Nephrolepis  Davallioïde.  — 
Syn.  •  Aspidiam  davallioides,  Swartz,  syn.  Fil.  48  et  247;  Hooker ,  le. 
Plant.,  t.  395-6. 


Fronde  puînée,  glabre;  pinnules  ses- 
siles,  les  inférieures  stériles,  lancéolées 
acuminées,  dentées  obtusenienL ,  les  su- 
périeures fertiles,  plus  étroites  et  très- 


allongées,  profondément  crénato-lobées,  à 
lobes  arrondis  et  portant  à  la  pointe  une 
sore  unique  ;  rachis  couvert  de  petites 
écailles  étroites.  (Voy.  PI.  26,  fig.  1.) 


Le  Nephrolepis  Davallioïde  est  une  agréable  fougère  de  serre,  tou- 
jours verte,  à  frondes  gracieuses  et  pendantes,  longues  de  près  d'un 
mètre,  larges  de  24  a  30  centimètres.  Les  pinnules  sont  distantes,  hori- 
zontales ,  les  inférieures  larges  ,  les  supérieures  plus  étroites  ,  plus 
longues  et  très-également  lobées,  à  lobes  étroits,  arrondis  à  la  pointe 
qui  porte  une  seule  sore,  dont  l'indusie  réniforme  est  placée  juste  en 
dedans  du  Lord  du  lobe.  Une  structure  semblable  se  présente  dans  le 
Dicksonia  abrupta  de  Bory,  plante  séparée  par  Près]  comme  constituant 
un  genre  nouveau,  sous  le  nom  de  Leptoplemia  :  mais  la  fructification  de 
la  plante  deRory  est  en  réalité  celle  d'un  Dicksonia,  puisqu'elle  possède 
l'indusie  bivalve  propre  à  ce  genre.  Dans  le  Nephrolepis  Davallioïde  au 
contraire,  qui  est  réuni  par  quelques  ptéridilogistes  à  l'espèce  de  Bory, 
le  bord  du  tube  est  entier  et  l'indusie  est  réellement  celle  d'un  Nephro- 
lepis. Il  se  rapproche,  en  outre,  des  Nephrolepis  par  le  développement 
d'un  rhizome  stolonifère  filiforme  écailleux,  auquel  les  frondes  sont 
adhérentes  en  fascicules.  Cette  très-élégante  espèce  a  été  introduite  de 
Java,  en  4852,  par  MM.  Rollisson. 

2°  Platyloma  brownii.  J.  Smith. —  Etym.  :  de  kXutos,  large,  et  xuua, 

(1)  La  reproduction  des  fougères  a  lieu  par  des  spores  Les  spores  se  développent 
dans  des  sporanges,  ordinairement  accumulés  par  petits  amas  à  la  face  inférieure  des 
frondes.  On  a  donné  à  ces  réunions  de  sporanges  le  nom  de  sores.  Ces  sores  sont 
quelquefois  nues,  quelquefois  recouvertes  d'une  petite  écaille,  figurant  une  sorte  de 
couvercle  mobile  à  la  maturité  et  nommée  indusie.  C'est  une  petite  pellicule  mince  et 
scarieuse,  formée  au  détriment  de  la  cuticule.  Le  sporange  présente  souvent  une 
série  de  cellules  plus  grandes  les  unes  que  les  autres  et  qui  servent  à  provoquer  la 
déhiscence  (l'ouverture)  pour  laisser  échapper  les  spores  :  c'est  Ieconnecticule. 


—  140  — 


PI.  26. 


Fig.  1.  Kephrolepis  Davallioldcs- 


Fig.  2.  Plalyloma  Brownii. 


Fig.  ii.  Pycnopteris  Sirholdi. 


Fie.  -!.  Davalli.i  dissecta 


141 


frange,  bord,  bordure.  ■ — Platylome  de  Brown.  —  Hook.  Journ.  Bot.  , 
iv.  160.  —  Syn.  :  Adiantum  paradoxum,  R.  Brown,  Prod.  Nov.  Holl.  ; 
Allosusus  paradoxus,  Kunze;  Pteris  latizona,  A.  Cunningham,  MS.  , 
in  Herb. 


Fronde  ovale pinnée;  pinnulespeu  nom- 
breuses, oblongues-ovées,  ou  lancéolées, 
arrondies  ou  subcordées  à  la  base  ;  ner- 
vures non  apparentes;  sores  larges,  li- 
néaires,  marginales;   indusies  étroites, 


herbacées;  rachis  et  pédicelles  de  chaque 
fronde  pubéruleux  et  de  même  que  le  long 
stipe,  ayant  l'apparence  de   l'ébène  et 
portant  quelques  écailles. 
(Voy.  PI.  26,  fig.2.) 


Cette  belle  et  rare  fougère  de  serre  froide  est  très-voisine  du  Platy- 
îoma  falcatum;  mais  elle  diffère  essentiellement  de  cette  espèce  par  la 
longueur  des  stipes, ses  frondes  courtes  et  larges,  par  la  forme  différente 
des  pinnules  et  par  la  nature  des  écailles  disséminées  sur  les  stipes  et 
les  rachis.  C'est  une  magnifique  espèce,  croissant  à  6  décimètres  de 
hauteur,  et  dont  les  frondes  sont  attachées  sur  les  côtés  d'un  rhizome 
rampant.  L'espèce  ,  qui  a  été  introduite  en  1853  par  MM.  Henderson  , 
est  supposée  venue  de  la  Nouvelle-Zélande;  on  ne  la  connaissait  jusqu'ici 
qu'à  la  Nouvelle-Hollande. 

3°  Pûlypodium  (Arthropleris)  Filipes.  T.  M.  — Etym.  :  de  sroAur , 
beaucoup,  et  noàiov,  diminutif  de  %ov?,  pied.  —  Polypode  patte  de  chat. 


Fronde  simple  ,  elliptique-lancéolée  , 
ou  oblongue-ovée;  ou  bien  pinnée  ,  à 
1-5  paires  de  petites  pinnules  oblon- 
gues-obtuses  et  une  pinnule  terminale 
lancéolée-acuminée,  ordinairement    plus 


grande  que  les  autres  ;  sores  submargi- 
nales ;  rachis  et  stipes  cotonneux  ;  rhi- 
zome filiforme,  couvert  d'écaillés  fauves, 
étalées,  lancéolées. 


Cette  curieuse  petite  plante,  qui  a  l'apparence  d'un  Ficus  rampant,  a 
été  importée  par  MM.  Henderson,  en  même  temps  que  le  Platyloma 
Brownii.  Ses  frondes,  qui  sont  articulées  avec  le  rhizome  rampant,  sont 
longues  de  8  à  12  centimètres,  parfois  de  forme  elliptique  lancéolée  et 
absolument  entières,  ou  oblongues-ovées,  avec  un  petit  lobe  ou  deux  à  la 
base,  parfois  distinctement  pinnée,  avec  une,  deux  ou  trois  paires  de 
petites  pinnules  obtuses  etune  pinnule  terminale  acuminée-lancéolée,  or- 
dinairement plus  grande,  obscurément  crénelée  et  légèrement  velue  en 
dessous,  sur  les  nervures.  Les  rachis  et  les  stipes  sont  couverts  de  petits 
poils  courbes  ;  le  rhizome  est  très-svelte  et  revêtu  d'écaillés  lancéolées  , 
couleur  de  tan.  Les  nervures  sont  une  ou  deux  fois  dichotomes  et  termi- 
nées en  dedans  du  bord.  La  plante  a  fructifié  modérément,  l'été  de  1854, 
dans  le  jardin  de  la  Société  Royale  de  Botanique  de  Londres,  et  a  montré 
qu'elle  était  un  Polypodium  du  groupe  des  Arthropteris,  bien  différente 
par  son  rhizome  mince  et  sa  petite  faille  de  toutes  les  autres  espèces 
de  la  même  section  de  ce  genre. 


—  142  — 

4°  Pycnopteris.  Th.  Moore.  —  Etym.  :  de  vokios,  dense,  serré ,  com- 
pacte, et  *Tipit%,  fougère. 


Sores  médianes,circulaircs,  très-grandes, 
disposées  contre  les  côtés  par  deux  ,  trois 
ou  quatre  séries  irrégulières,  indusiées. 
Indusie  arrondie-réniforme.  Nervures  di- 
cholomes  ;  veinules  allongées,  parallèles- 


courbes, libres,  terminées  contre  les  bords 
par  un  point;  les  plus  inférieures,  l'anté- 
rieure et  la  postérieure  (parfois  plus,  ou 
même  toutes)  de  chaque  fascicule  ,  sori- 
fères. 


Pycnopteris  Sieboldi.  T.  M.  in  Hort.  Van  Houlle.  — Pyenoptère 
de  Siebold.  —  Syn.  :  Aspïdium  Sieboldi,  V.  Houtte ,  cat.;  Lastrea 
Sieboldi,  T.  M.  in  Herb. 


Fronde  coriace,  large  pinnée ,  lisse; 
pinnules  peu  nombreuses,  obliquement 
oblongues  lancéolées ,  falquées,  irrégu- 
lièrement dentées;  les  inférieures  pédon- 
culées  et  inégalement  cordées  à  la  base  , 


les  supérieures  sessiles  et  décurrentes; 
sores  grandes,  nombreuses,  irrégulière- 
ment disposées  en  deux  ou  trois  séries; 
stipes  écailleux  inférieurement  ;  frondes 
adhérentes.  (Voy.  PI.  26,  fig.  3.) 


Le  Pyenoptère  de  Siebold  est  une  remarquable  fougère,  d'un  faciès 
si  spécial  et  d'un  port  si  d  fièrent  de  celui  des  autres  Aspidium  à  ner- 
vures libres,  qu'on  peut  raisonnablement  proposer  de  l'en  séparer.  Il  est 
d'un  aspect  fier  et  raide,  d'une  couleur  verte  très-foncée,  et  cherche  sa 
beauté  ailleurs  que  dans  la  délicatesse  habituelle  des  fougères,  ce  qui  le 
rend  précieux  pour  les  effets  de  contraste.  Il  croît  à  la  hauteur  de  trois 
décimètres  ou  plus;  la  partie  foliée  des  frondes  est  aussi  large  que  longue 
et  consisteen  d  eux  ou  quatre  paires  de  pinnules  très-épaisses,  ayant  la 
consistance  du  cuir  et  une  pinnule  terminale  plus  grande.  Les  pinnules 
des  frondes  stériles  sont  longues  de  lu2  à  20  centimètres,  obiongues- 
lancéolées,  falquées,  acuminées  et  légèrement  ondulées,  portées  sur  un 
stipe  de  9  à  42  centimètres,  très-robuste  à  la  base  et  couvert,  là,  d'écaillés 
longues,  étroites  et  terminées  en  poils.  Les  frondes  fertiles  qui  portent 
des  sores  partout,  sont  élevées  sur  des  stipes  plus  longs  que  les  stériles 
et  sont  de  plus  quelque  peu  contractées,  les  pinnules  les  plus  parfaites 
ayant  environ  deux  centimètres  et  demi  de  largeur  tandis  que  sur  les 
frondes  stériles  elles  mesurent  quatre  centimètres.  Les  sores  sont  très- 
grandes,  noires,  très-fournies  et  soutenues  par  une  sorte  de  réceptacle 
élevé.  La  vernation  est  particulière.  Le  rhizome  ou  caudex,  auquel  adhèrent 
les  frondes  ,  s'accroît  tout-à-fait  verticalement  et  la  pointe  développée 
au-delà  de  la  base  des  frondes  parfaites,  de  manière  à  montrer  deux 
ou  trois  séries  de  frondes  naissantes,  ayant  une  disposition  décussée. 
Cette  fougère  a  été  fournie  à  M.  Van  Houtte  par  M.  Von  Siebold,  comme 
originaire  du  Japon  ou  de  la  Chine.  Elle  croît  bien  en  serre  tempérée; 
mais  on  peut  la  dire  rustique  depuis  qu'elle  a  survécu  à  l'hiver  de 
1854-1855,  dans  le  jardin  de  M.  Ward  à  Clapham,  et  en  plein   air. 


—  143  — 

sans  aucune  protection,  dans  le  jardin  de  M.  East,  Esq.  à  Blackleath, 
duché  de  Kent.  On  peut  l'obtenir  avec  beaucoup  de  facilité  de  ses  spores. 
Le  genre  Pycnopteris  se  rapproche  des  Laslrea  par  sa  fructification , 
et  des  Polystichum  par  sa  nervation  :  ces  nervures  sont  absolument 
semblables  à  celles  des  scolopendres. 

5°  Davallia  dissecta.  J.  Smith.  M.  S.;  Etym.  :  du  nom  du  bota- 
niste Edmond  Davall  de  Orbe,  dans  le  canton  de  Berne.  —  Gard.  Mag. 
Bot.  iii.,  325.  —  Davallie  découpé. 


Fronde  délicate,  glabre  triangulaire, 
très-pinnée  ,  sub-membraneuse  ;  pin- 
nules  allongées,  triangulaires,  acuminées, 
les  inférieures  obliques;  les  dernières 
oblongues,  profondément  pinnatifides  ,  à 
segments  linéaires  entiers  ou  bifides  ; 
racbis  et  nervures  moyennes  ailées  ;  sores 


occupant  la  pointe  des  segments;  sou- 
vent munies  d'une  petite  dent  extérieure; 
involucres  linéaires,  en  forme  de  petite 
coupe;  rhizome  allongé,  grimpant,  très- 
écailleux,  à  écailles  subulées,  fimbriées; 
frondes  articulées. 
(Voy.  PI.  26,  fig.  4.) 


Le  Davallie  découpé  est  une  très-élégante  fougère  de  serre  chaude, 
mais  pouvant  aussi  croître  dans  une  atmosphère  tranquille  sans  l'in- 
fluence d'une  haute  chaleur.  Les  frondes  sont  d'un  vert  pâle  agréable  et 
sont  très-divisées  ;  elles  sont  longues  de  trois  à  cinq  décimètres. 

Elles  sont  dans  leur  ensemble  triangulaires  ou  plus  ou  moins  penta- 
gones, par  suite  du  grand  développement  des  pinnules  inférieures;  les 
autres  pinnules  sont  étroites,  allongées,  triangulaires-acuminées;  les 
pinnules  primaires  et  secondaires  sont  oblongues;  les  segments  étroits 
linéaires,  entiers  ou  avec  une  entaille  superficielle  à  la  pointe.  Les  sores 
sont  situées  à  la  pointe  des  lobes  et  ont,  par  occasion,  une  petite  dent 
du  côté  extérieur,  très-rarement  une  seconde  du  côté  interne;  les  invo- 
lucres sont  en  forme  de  coupe  linéaire.  Cette  fougère,  qui  est  native  de 
Java,  fut  introduite  en  1849,  par  MM.  Rollisson;  c'est  une  des  formes 
les  plus  élégantes  du  beau  genre  Davallia  et  elle  se  cultive  très-aisément. 

6°  Phlebodium  multiseriale.  Moore  et  Houlston,  in  Gen.  and  sp.  of 
Cuit.  Ferns,  ined.  —  Etym.  :  de  <pA£/3a>«^?,  vaisseau.  —  Phlebodie  mul- 
tisériée. 


Fronde  ample,  sub-pinnée,  verte,  non 
glauque;  segments  grands,  lancéolés-acu- 
minés,  dilatés  à  la  hase,  entiers  ;  sores  en 


plusieurs  séries  de  chaque  côté  de  la  ner- 
vure médiane;  rhizome  rude,  à  écailles 
brun  pâle  ;  frondes  articulées. 


Le  Phlebodium  multiseriale  est  une  noble  fougère,  du  port  et  de 
l'aspect  du  Phlebodium  aureum,  mais  qui  en  diffère  par  la  plus  grande 
largeur  de  ses  segments,  par  l'absence  complète  de  cette  teinte  bleuâtre 
qui  dominedans  le  P.  aureum  et  par  les  nombreuses  petites  sores  rangées 
en  quatre  ou  cinq  séries  sur  toute  la  surface  des  segments.  Les  frondes 
sont  longues  de  fi  à   12  décimètres,  pinnatifides  ou  pinnées  à  la  base; 


_  \u  — 

ïes  segments  sont  lancéolés,  aeuminés,  longs  de  24  à  30  centimètres, 
larges  presque  de  5  centimètres;  les  sinus  sont  étroits  et  arrondis  et 
non  pas  larges  et  obliques  comme  dans  le  P.  aureum.  La  fructification 
occupe  la  partie  supérieure  de  la  fronde  ou  parfois  couvre  toute  la  sur- 
face de  certaines  autres.  La  plante  vient  de  l'Amérique  du  Sud  et  fut 
introduite  à  Kew,  en  4850;  plus  récemment  elle  a  été  reçue  du  Deme- 
rara.  C'est  une  espèce  d'un  bel  effet  parmi  les  fougères  de  grande 
taille. 

(Pour  être  continué). 


CULTURE  DU  SALVIA  SPLENDENS, 

Par  M.  Thomas  Williams,  de  Liverpool  (1). 

il  est  à  remarquer  que  le  Salvia  splcndens,  aux  brillantes  fleurs 
écarlates,  est  rarement  cultivé  avec  tous  les  soins  qu'il  exige;  je  soumets 
cette  plante  au  traitement  suivant,  qui  m'a  toujours  donné  d'heureux 
résultats. 

Dès  le  mois  de  mai,  je  place  trois  ou  quatre  boutures  au  bord  d'un 
pot  à  fleurs  de  six  pouces  :  dès  qu'elles  sont  enracinées,  je  mets  chaque 
plante  séparément  dans  un  pot  de  même  dimension,  et  sitôt  qu'il  est 
rempli  de  chevelu  je  transplante  dans  les  pots  destinés  à  la  floraison. 
Les  plantes  ne  réclament  ensuite  qu'un  arrosage  abondant  et,  par  inter- 
valles, de  l'engrais  liquide;  elles  doivent  être  mises  en  serre  tempérée 
et  souvent  pincées,  jusque  vers  le  mois  d'août;  dès  cette  époque  on 
peut  les  laisser  croître  librement. 

Toute  bonne  terre  ordinaire  convient  au  Salvia  splendens;  il  faut 
seulement  veiller  à  ce  que  le  drainage  soit  bien  établi,  afin  que  l'eau 
s'écoule  facilement.  Les  plantes  cultivées  ainsi  s'élèvent  de  six  à  huit 
pieds  et  se  couvrent,  jusqu'à  la  Noël,  d'une  floraison  abondante;  nulle 
autre  n'est  plus  ornementale  et  n'égayé  davantage  pendant  ces  tristes 
mois  de  l'année  :  ce  Salvia  se  prête  parfaitement  à  la  culture  en  boule; 
en  conservant  une  tige-mère  et  enlevant  toutes  les  autres,  on  obtient 
aisément  une  belle  tète  fleurie. 

Le  Salvia  speciosa  (ou  S.  pulchdla  de  quelques-uns)  est  de  plus  petite 
taille;  en  le  conduisant  convenablement,  il  forme  un  buisson  nain, 
couvert  d'une  floraison  abondante;  ses  fleurs,  d'un  rouge  brillant,  sont 
fort  recherchées  en  hiver  et  au  printemps,  de  même  que  celles  du 


1)  Traduit  du   Floricuttural  Cabinet 


—  145  — 

Salvia  Gesneriflora,  dont  les  grands  épis  produisent  le  plus  bel  effet 
pendant  les  trois  premiers  mois  de  l'année.  Les  boutures  doivent  être 
faites  au  mois  d'août  ;  elles  doivent  passer  l'hiver  sous  un  bon  châssis 
sec  qui  les  garantisse  des  gelées  ;  aux  premiers  jours  du  printemps  on 
les  met  en  pleine  terre  où  les  plantes  peuvent  se  développer  librement. 
En  automne,  lorsque  les  gelées  sont  à  craindre,  on  les  enlève  avec  la 
motte  de  terre  pour  les  mettre  en  pots  et  les  rentrer  dans  la  serre  : 
convenablement  arrosées,  elles  fleurissent  abondamment  à  l'époque 
indiquée.  Les  plantes  provenant  des  boutures  d'automne  deviennent  de 
forts  pieds  ;  si  l'on  désire  des  plantes  naines,  on  emploie  des  boutures 
du  mois  d'avril. 


SEMIS  DE  FOUGÈRES  DE  SERRE  CHAUDE. 

On  remplit  un  pot  de  grandeur  convenable  avec  de  la  terre  de 
bruyère  sableuse  ,  dont  on  laisse  quelques  parties  s'élever  au-dessus 
des  autres,  de  telle  sorte  que  la  surface  soit  inégale.  On  se  contente 
ensuite  de  jeter  la  semence  des  Fougères  qu'on  veut  multiplier  sur  le 
haut  et  sur  les  côtés  de  ces  petites  éminences.  Ce  genre  de  semis  est 
rendu  nécessaire  par  l'exiguité  de  cette  semence,  et  par  la  nécessité 
de  varier  pour  elles  les  conditions  dans  lesquelles  elle  se  trouvera 
placée  à  la  suite  de  cette  opération.  On  comprend  en  effet,  sans  peine, 
que  si  on  se  contentait  de  la  répandre  sur  de  la  terre  formant  une 
surface  unie,  elle  se  trouverait  toute  soumise  à  la  fois  aux  mêmes 
influences  d'humidité  surabondante  ou  de  trop  grande  sécheresse, 
tandis  que  la  formation  de  petites  éminences,  entre  lesquelles  se  trouvent 
des  parties  plus  humides,  permet  toujours  à  un  certain  nombre  de  ces 
graines  de  trouver  ce  qui  leur  convient. 

La  terre  sur  laquelle  on  veut  semer  a  dû  être  préalablement  échaudée 
à  l'eau  bouillante,  précaution  qui  a  pour  résultat  de  tuer  les  graines 
de  Fougères  communes  et  rustiques  qui  pouvaient  s'y  trouver  déjà, 
comme  celles  de  YAspidium  Filis-Mas  et  de  quelques  autres,  qui  même, 
malgré  ce  soin  préliminaire,  se  montrent  encore  quelquefois. 

Généralement,  ces  semis  réussissent  bien  sous  une  cloche  placée 
dans  la  partie  fraîche  d'une  serre  de  manière  à  ce  que  toute  évapora- 
tion  soit  empêchée;  mais  lorsque  les  jeunes  plantes  commencent  à  se 
développer,  elles  ne  s'accommodent  nullement  de  ce  genre  de  traite- 
ment. On  ne  doit  jamais  arroser  la  surface  des  pots,  mais  on  les  main- 
tient suffisamment  humides  en  les  posant  sur  une  assiette  où  se  trouve 
un  pou  d'eau. 

BEI  G.    HORT.    T.    VI.  16 


—  440  — 


MEUBLES  ET  ORNEMENTS  DE  JARDIN. 


CHOIX  DE  PLANTES  POUR  LES  GRANDS   VASES 
D'ORNEMENT  (1). 

L'auteur  de  l'article  dont  nous  allons  donner  une  analyse  se  plaint  de 
ce  que  les  grands  vases,  qui  prennent  aujourd'hui  une  place  de  plus  en 
plus  importante  dans  l'ornementation  des  jardins,  ont  presque  toujours 
des  formes  et  des  dimensions  qui  ne  permettent  pas  d'y  enfermer  une 
masse  de  terre  suffisante  pour  nourrir  des  plantes.  Il  regrette  aussi 
qu'un  peu  plus  de  goût  et  de  variété  ne  préside  pas  au  choix  des  plantes 
avec  lesquelles  on  garnit  ces  vases ,  et  qu'on  n'adopte  presque  toujours 
pour  cet  objet  que  des  Pélargoniums  à  fleurs  rouges  ,  qui  sans  doute 
fleurissent  abondamment,  mais  qui  n'ont  ni  la  grâce  ni  l'élégance  de 
plusieurs  autres  végétaux  également  propres  à  ce  genre  de  disposition. 

Il  n'est  pas  nécessaire,  dit-il,  de  recourir  à  des  plantes  d'un  prix  élevé 
pour  obtenir  un  charmant  effet  avec  les  vases  de  ce  genre  ;  souvent  les 
espèces  les  plus  communes  l'emportent  pour  cet  objet  sur  une  foule 
d'autres  plus  remarquables  par  leur  rareté.  Ainsi  il  dit  avoir  vu  un  vase 
rempli  de  Fougères  indigènes  qui  était  d'une  beauté  surprenante ,  et  il 
ajoute  (jue  beaucoup  de  Fougères  exotiques  seraient  encore  préfé- 
rables à  la  plupart  de  celles  de  nos  pays.  Comme  plantes  à  recommander 
avant  toutes  sous  ce  rapport,  il  signale  YAgapanthus  umbellatiis  et  ses 
analogues.  De  forts  pieds  d'Agapanthe,  transplantés  au  mois  de  mai 
dans  les  vases  destinés  à  l'ornementation  et  ensuite  arrosés  abondam- 
ment, cette  espèce  étant  presque  aquatique,  produisent  un  très-bel  effet 
par  leurs  feuilles  ensiformes  et  retombantes  ainsi  que  par  leurs  belles 
ombelles  de  fleurs  bleues.  Dans  des  endroits  abrités  et  couverts,  un 
vase  garni  de  Calla  œthiopica  est  vraiment  magnifique.  L'auteur  vante 
aussi  le  Tritonia  aurea  comme  très-beau  avec  ses  fleurs  d'un  bel  orangé 
et  ses  feuilles  étroites,  pourvu  qu'il  soit  planté  en  touffe  épaisse.  Le 
Phormium  tenax  et  quelques  Yucca  se  recommandent  par  leur  feuillage. 
On  peut  encore  trouver  parmi  les  Glayeuls  et  les  Iris  un  assez  grand 
nombre  de  plantes  qui  figurent  très-bien  dans  les  grands  vases  pour 
décoration.  Afin  de  rehausser  l'effet  de  ces  plantes,  l'horticulteur  anglais 

(1)  The.  florish,  fruitish  and  Gardai  Miscellany,  cahier  d'août  1 855.  —  Journ.  de 

la  Soc.  Imp.  et  Cent,  d'hort.  de  Paris. 


—  147  — 

conseille  d'ajouter  à  leur  touffe  des  plantes  grimpantes  ou  à  longues 
tiges  ,  qui  puissent  serpenter  autour  des  bords  du  vase  ou  qui  re- 
tombent pour  former  des  festons  autour  de  la  base.  Les  plantes  qu'il 
signale  comme  les  plus  convenables  pour  cette  effet  sont  les  Lophosper- 
mum,  les  Maurandia  bleu,  rouge  et  blanc,  les  Tropœolum  pentaphyllum 
et  speciosum,  le  Calystegia  pubescens,  le  Campanula  fragilis ,  les  Lobelia 
erinus  et  unidentata,  et  quelques  autres  plus  petites,  qui  peuvent  être 
utilisées  pour  les  vases  de  faibles  dimensions. 


SUR  LE  PIRCUNIA  ESCULENTA,  Miq., 

(  Phytolacca  esculenta  ),  comme  plante  potagère; 

Par  M.  S.  Regel. 

L'introduction  de  ce  nouveau  légume  remonte  déjà  à  quelques 
années,  et  M.  Regel  dit  pouvoir  porter  maintenant  un  jugement  sur 
sa  valeur  réelle.  Il  n'a  pas  trouvé  qu'il  justifiât  l'éloge  qu'on  en  avait 
fait  à  l'époque  de  son  introduction. 

On  peut  employer  les  feuilles  de  cette  plante  de  la  même  manière 
que  les  épinards;  non-seulement  elles  ne  valent  pas  mieux,  mais  encore 
leur  arrière-goût  particulier  et  acidulé  doit  les  faire  regarder  par  la 
plupart  des  personnes  comme  inférieures  à  notre  épinard  ordinaire. 
En  outre,  la  culture  du  Pircunia  exige  beaucoup  plus  de  précautions 
que  celle  de  l'épinard.  Si  l'on  opère  de  bonne  heure,  on  peut  récolter 
les  feuilles  tout  l'été,  et  il  suffît  même  de  rabattre  les  pieds  pour  leur 
faire  produire  de  nouvelles  tiges.  La  racine  volumineuse  et  charnue 
de  cette  espèce  passe  parfaitement  l'hiver  en  pleine  terre;  ainsi  elle 
s'est  conservée  en  très-bon  état,  à  Zurich,  sans  couverture,  pendant 
l'hiver  dernier  ;  mais  les  gelées  blanches  font  périr  le  jeune  plant.  Une 
terre  plantée  de  Pircunia  donne  des  récoltes  plusieurs  années  de 
suite.  On  peut,  pendant  l'hiver,  couvrir  la  terre  avec  du  fumier  court 
qui  suffira  ensuite  parfaitement  comme  engrais.  Le  produit  devient  même 
très-abondant  et  plus  assuré,  les  années  suivantes,  lorsqu'on  procède 
ainsi. 


—  IIS 


ARBORICULTURE. 


NOUVELLE  VARIETE  DE  L'ARBRE  AUX  QUARANTE  ECUS, 

éditée  par  M.  Jacob  Makoy. 

SALISBURIA  ADIANTIFOLIA  ,  VAR.  LACINIATA  ; 

Par  M.  Edouard  Morren. 

Le  genre  Salisburia,  de  la  famille  des  Conifères,  a  été  fondé  par 
Smith  (Transact.  of  Linn.  Society,  t.  III)  à  la  mémoire  de  Rich.-Ant. 
Salisbury,  botaniste  anglais,  auteur  du  Prodromus  stirpium  in  Horto 
Chapel  Allerton  viventium,  1796,  et,  avec  la  collaboration  de  Hooker,  du 
Paradisus  Londinensis,  1800.  La  seule  espèce  bien  déterminée  est  le 
Salisburia  adiantifolia  Sm.,  plus  connue  sous  le  nom  linnéen  de  Gincko 
biloba  :  elle  est  originaire  de  la  Chine  où  elle  acquiert  des  dimensions 
gigantesques.  Bunge  rapporte  avoir  vu  près  d'une  pagode,  aux  environs 
de  Pékin,  un  Gincko  dont  le  tronc  de  l'arbre  mesurait  plus  de  treize 
mètres  de  circonférence.  Son  introduction  en  Europe  remonte  à  l'an- 
née 1727. 

L'établissement  de  M.  Jacob-Makoy,  à  Liège,  a  mis  dans  le  com- 
merce, l'année  dernière,  une  variété  nouvelle,  complètement  différente 
du  type  et  bien  propre  à  exciter  la  convoitise  des  amateurs  de  coni- 
fères en  particulier  et  de  beaux  arbres  en  général.  L'origine  de  cette 
variété  nous  est  inconnue.  Dans  l'espèce,  les  feuilles  glabres,  veinées, 
portées  sur  des  pétioles  assez  longs  et  flexibles,  ont  le  bord  supérieur 
arrondi,  inégalement  crénelé  et  simplement  divisé  par  le  milieu  en 
deux  lobes.  Dans  la  nouvelle  variété  laciniala,  les  feuilles  sont  profon- 
dément divisées  en  lanières  minces,  très-nombreuses,  inégales,  den- 
tées, d'où  le  nom  de  laciniala.  La  végétation  de  cette  variété  est  aussi 
rustique  que  celle  de  l'espèce,  mais  on  sait  que  la  croissance  de  l'arbre 
aux  quarante  écus  est  toujours  faible  et  languissante  dans  le  jeune  âge 
et  que  ce  n'est  qu'après  avoir  vaincu  cette  première  faiblesse  que  la 
plante  pousse  avec  vigueur  pour  devenir  l'un  des  plus  beaux  ornements 
de  nos  jardins.  La  planche  27  est  destinée  à  donner  une  idée  de  la  forme 
des  feuilles  du  S.  adiantifolia  var.  laciniala  :  elle  représente  un  très- 
jeune  rameau  en  voie  de  développement;  nous  n'avons  donc  pu  donner 
aux  feuilles  toute  l'ampleur  qu'elles  acquièrent. 


—  149  - 
PI.  27. 


Salisburia  ailianliiblia  ,  var.    laciniala 


—  150  — 

JARDIN  FRUITIER. 


MOYEN  DE  FORMER  PROMPTEMENT  LES  ESPALIERS, 

Par  M.  Du  Breuil, 

Professeur  d'agriculture  et   d'arboriculture  (1). 

L'établissement  des  chemins  de  fer  exerce  la  plus  heureuse  in- 
fluence sur  la  production  des  fruits  de  table,  en  leur  ouvrant  une  voie 
prompte  et  facile  pour  arriver  aux  centres  de  consommation  les  plus 
éloignés.  Cette  culture,  bornée  d'abord  au  voisinage  des  grandes  villes, 
s'étend  de  plus  en  plus,  et  constituera  bientôt,  pour  notre  pays  ,  une 
industrie  nouvelle  dont  les  produits  se  répandront  sur  tous  les  marchés 
du  nord  de  l'Europe.  Aussi  jamais  on  n'a  tant  planté  d'arbres  fruitiers, 
jamais  on  ne  s'est  tant  préoccupé  de  l'amélioration  de  leur  culture  :  pra- 
ticiens et  amateurs  rivalisent  de  zèle  à  cet  égard,  et  nous  ne  doutons  pas 
que  cet  art  ne  parvienne  bientôt  à  un  haut  degré  de  perfection  ,  si  ce 
progrès  se  soutient  encore  pendant  quelque  temps. 

Nous  devons  toutefois  signaler  ici  une  tendance  fâcheuse,  chez  un 
grand  nombre  de  nouveaux  adeptes  de  l'arboriculture  fruitière.  C'est 
l'oubli  du  côté  économique  dans  cette  intéressante  question.  Ils  se 
torturent  l'esprit  pour  imaginer  de  nouvelles  formes  à  imposer  à  la 
charpente  des  arbres,  sans  tenir  compte  du  temps  et  des  difficultés.  Us 
ne  font  ainsi  que  démontrer  de  nouveau  ,  qu'avec  du  temps  et  de  l'intel- 
ligence, on  peut  soumettre  la  charpente  des  arbres  aux  formes  les  plus 
variées  et  les  plus  capricieuses.  Us  ne  songent  pas  assez  à  remplir  ces 
conditions,  qui  doivent  cependant  dominer  toutes  les  autres  ,  à  savoir  : 
que  la  charpente  des  arbres  fruitiers  doit  offrir  une  forme  telle,  qu'elle 
puisse  être  constituée  dans  le  laps  de  temps  le  plus  court ,  avec  le  moins 
de  soins  possible,  sans  perte  d'espace  et  en  conservant  aux  arbres  leur 
plus  haut  degré  de  fertilité,  ou  en  d'autres  termes,  que  l'on  puisse  tirer 
d'une  surface  donnée,  consacrée  à  cette  culture,  le  revenu  net  le  plus 
élevé.  Nous  venons  aujourd'hui  proposer  une  forme  propre  à  donner  ce 
résultat. 

On  sait  que  les  formes  le  plus  généralement  employées  pour  les  poi- 

(1)  Joiim.  d'Agr.  prat.  de  France. 


—    loi   — 

riers  en  espaliers  sont  telles,  qu'il  faut  pour  un  mur  de  2™, 50  d'élévation 
un  laps  de  temps  de  16  à  18  ans  avant  que  ces  arbres  ne  couvrent  entiè- 
rement la  surface  qu'on  a  dû  réserver  à  chacun  d'eux,  c'est-à-dire  16  à 
20  mètres  carrés.  C'est  trop  attendre  le  produit  maximum  de  ces  arbres; 
car  pendant  ce  temps  l'intérêt  du  prix  du  sol,  de  la  construction  des 
murs  et  des  frais  d'entretien,  n'est  payé  que  d'une  manière  très-insufti- 
sante  par  le  produit.  Nous  avons  déjà  décrit  dans  la  troisième  édition 
de  notre  traité  d'arboriculture,  sous  le  nom  de  cordon  oblique  double, 
une  forme  de  charpente  qui ,  appliquée  contre  des  murs  d'au  moins 
2ra,50  d'élévation,  permet  de  terminer  complètement  les  espaliers  de 
poiriers,  pommiers,  pruniers,  cerisiers  et  abricotiers  dans  l'espace  de 
six  à  sept  ans.  Celles  que  nous  conseillons  aujourd'hui  (PI.  28)  et  qui 
n'est  que  l'application  aux  espèces  précédentes  du  cordon  oblique  simple 
que  nous  avons  imaginé  en  18-43  pour  le  pêcher,  donne  un  résultat 
plus  prompt  encore,  puisqu'on  atteint  le  même  but  à  la  fin  de  la  troi- 
sième ou  de  la  quatrième  année.  Voici  comment  on  devra  procéder  pour 
un  espalier  de  poiriers  : 

Choisir  des  arbres  d'un  an  de  greffe,  sains  et  vigoureux,  greffés  sur 
coignassier ,  pour  les  variétés  très-vigoureuses,  et  sur  franc  pour  les 
autres.  Les  planter  le  long  des  murs  en  laissant  entre  chacun  d'eux  un 

PI.  28. 


Espalier  en  cordon  oblique  simple  i système  Du  Breuil). 


—  152  — 

intervalle  de  trente-cinq  centimètres  seulement.  Les  incliner,  en  les  plan- 
tant, sur  un  angle  de  60°,  puis  retrancher  le  tiers  de  la  longueur 
totale  de  la  tige.  Favoriser  le  développement  du  bourgeon  terminal, 
en  appliquant  pendant  l'été  le  pincement  aux  bourgeons  latéraux  pour 
les  transformer  en  rameaux  à  fruit.  L'année  suivante,  lors  de  la  taille 
d'hiver,  retrancher  le  tiers  de  la  longueur  totale  du  nouveau  prolonge- 
ment et  donner  aux  rameaux  latéraux  les  soins  ordinaires  pour  en  faire 
des  rameaux  à  fruit.  Soumettre,  pendant  l'été,  les  nouveaux  bourgeons 
aux  mêmes  opérations  que  précédemment.  Répéter  ces  soins  chaque 
année  jusqu'au  moment  où  la  tige  a  parcouru  les  deux  tiers  de  l'espace 
qui  la  sépare  du  sommet  du  mur.  Alors  incliner  la  tige  sur  un  angle  de 
45°  lors  du  palissage  d'hiver,  et  continuer  de  l'allonger  jusque  sous  le 
larmier.  Ce  but  sera  atteint  vers  la  fin  de  la  troisième  ou  de  la  quatrième 
année,  et  l'espalier  sera  ainsi  terminé  et  en  plein  rapport.  11  n'y  aura 
plus  toutefois  qu'à  compléter  la  charpente  du  premier  et  du  dernier 
arbre  de  l'espalier  en  leur  donnant  la  forme  qu'indique  notre  figure, 
afin  qu'il  ne  reste  aucun  vide  sur  le  mur. 

On  peut  donc  obtenir  avec  cette  nouvelle  disposition,  vers  la  cin- 
quième année,  un  produit  maximum  qu'on  était  obligé  d'attendre 
avec  les  anciennes  formes  pendant  seize  ou  dix-huit  ans.  Il  convient  en 
outre  de  signaler  la  simplicité  de  cette  forme,  qui  rend  son  exécution 
facile  même  pour  les  jardiniers  les  moins  exercés ,  la  possibilité  de 
réunir  un  grand  nombre  de  variétés  différentes  sur  un  petit  espace, 
enfin  la  promptitude  avec  laquelle  on  peut  remplir  l'intervalle  laissé 
libre  par  la  mort  accidentelle  de  l'un  de  ces  arbres.  On  peut  craindre 
il  est  vrai,  que  le  peu  d'intervalle  laissé  entre  les  arbres  (0m,35)  ne 
soit  insuffisant  pour  le  développement  convenable  de  leurs  racines; 
mais  cette  objection  tombe  d'elle-même  si  l'on  songe  au  peu  d'étendue 
de  la  tige  et  à  l'espace  dont  les  racines  peuvent  disposer  en  avant  du 
mur.  Si  l'on  redoute,  au  contraire,  que  la  tige  ne  soit  trop  restreinte 
et  que  cela  ne  nuise  à  la  formation  des  boutons  à  fleurs  par  suite  d'un 
excès  de  vigueur,  il  suffira  d'examiner  la  fertilité  des  nombreux  espa- 
liers de  pêchers  soumis  à  notre  forme  en  cordon  oblique  simple  pour 
voir  s'évanouir  cette  crainte.  Une  seule  objection  reste,  c'est  qu'on 
ne  pourra  convenablement  établir  cette  forme  que  contre  un  mur 
offrant  au  moins  trois  mètres  d'élévation.  Les  murs  plus  bas  ne  per- 
mettraient pas  aux  tiges  d'acquérir  une  longueur  suffisante,  et  leur 
excès  de  vigueur  nuirait  alors  à  leur  mise  à  fruit.  Disons  en  terminant 
que  ce  cordon  oblique  simple,  avec  plantation  à  0m, 35,  peut  être  appliqué 
avec  le  même  succès  aux  pommiers,  pruniers,  cerisiers  et  abricotiers 
en  espalier  ou  en  contre-espalier,  pourvu  que  le  support  de  ces  derniers 
ait  au  moins  trois  mètres  de  hauteur 


Poiiv     SanOmnolo. 


—  153  — 
POIRE  SANGUINOLE  ; 

Pau  M.  Edouard  Morren. 

Cette  poire  est  décrite  dans  la  plupart  des  grands  traités  de  pomo- 
logie;  mais  nous  n'avons  pas  été  peu  surpris  en  lisant  qu'on  ne  la  culti- 
vait guère  que  pour  son  originalité  et  que  sa  chair  était  insipide.  Si  cela 
est  vrai  de  l'ancienne  sanguinole  nous  ne  craignons  pas  d'avancer  que 
celle  du  pays  de  Liège  constitue  une  race  spéciale,  car  sans  être  de  pre- 
mier choix,  les  poires  que  nous  avons  dégustées  cet  automme  étaient  très- 
bonnes.  La  chair  n'est  ni  tout-à-fait  ferme,  ni  tout-à-fait  fondante;  elle  le 
serait  sans  une  certaine  quantité  de  sable  du  côté  des  pépins  ;  elle  a  un 
goût....  de  poire  bien  entendu,  mais  assaisonné  d'un  arôme  qui  rappelle 
la  framboise,  la  fraise,  la  cerise,  en  un  mot  tous  les  fruits  à  chair  rouge. 

Cet  arôme  a  sa  raison  d'être  dansla  matière  colorante  rouge  qui  im- 
prègne tout  le  tissu  de  la  sanguinole  et  qui  est  la  même  que  celle  de  la 
cerise,  de  la  groseille,  de  la  framboise,  etc. 

L'arbre  a  les  feuilles  grandes,  farineuses  et  présentant  ce  caractère 
particulier  qu'elles  sont  plus  larges  que  longues.  Le  fruit  est  petit,  de  6 
à  7  centimètres  de  hauteur,  ovoïde  globuleux,  un  peu  irrégulier;  le  pé- 
doncule est  inséré  latéralement.  La  peau  est  assez  épaisse,  adhérente,  à 
fond  vert,  tachée  et  marbrée  de  rouge,  marquée  et  mouchetée  de  nom- 
breuses petites  taches  brunes,  très-abondantes  surtout  vers  l'ombilic,  et 
que  l'on  retrouve  même  sur  la  queue.  L'intérieur  du  fruit  est  réellement 
admirable;  la  chair  est  rouge  pivoine,  marié  à  des  teintes  roses  et  blan- 
ches. Cette  chair  ressemble  à  du  sang,  à  s'y  méprendre,  ainsi  que  le 
prouve  l'anecdote  suivante.  Un  de  nos  principaux  pépiniéristes  liégeois, 
dont  le  nom  a  été  souvent  cité  dans  ce  recueil,  employait  depuis  quelque 
temps,  comme  journalier,  un  ouvrier  forgeron ,  momentanément  sans 
ouvrage,  lorsqu'il  s'aperçut  que  bon  nombre  de  ses  fruits,  et  des  meil- 
leurs, disparaissaient;  il  allait  se  livrer  à  la  recherche  du  coupable  quand 
il  fut  prévenu  par  notre  jardinier-forgeron,  qui  accourut  vers  lui  tout 
effaré,  lui  assurant  qu'il  venait  d'éprouver  un  violent  crachement  de 
sang  :  il  tenait  encore  en  main  la  moitié  d'une  poire  sanguinole  qu'il 
supposait  teinte  de  son  sang.  Notre  pépiniériste  n'eut  pas  de  peine  à  con- 
naître son  voleur,  et  il  le  renvoya  se  soigner  chez  lui. 

La  sanguinole  mûrit  dans  la  seconde  moitié  d'octobre.  Servie  en  mar- 
melade ou  en  compote,  elle  constitue  un  plat  charmant,  d'un  goût  très- 
agréable. 


-  154  — 

PHYSIOLOGIE  VEGETALE. 


*■  r 


DE  L'ORIGINE  DES  ESPECES  EX  BOTANIQUE  ET  DE  L'APPARITION 
DES  PLANTES  SUR  LE  GLOBE  , 

Par  M.  A.  Malbranche. 

[Suite)  (1). 

Citons  encore  d'autres  témoignages  de  la  fixité  des  types  spécifiques. 

Linné,  revenant  sur  les  idées  exprimées  dans  ses  premiers  ouvrages, 
part  du  principe  «  qu'il  y  a  autant  d'espèces  que  l'Etre  infini  produisit  au 
»  commencement  de  formes  diverses  sur  la  terre  (2).  » 

De  Candolle  déclare  que  les  espèces  sont  permanentes.  «  Tout  indi- 
vidu, dit-il,  provient  d'un  autre  semblable  à  lui;  tous  les  faits  certains 
»nous  conduisent  à  cette  opinion  qu'on  n'attaque  qu'en  combinant  des 
«faits  douteux  ou  ambigus  (3).  » 

Fée,  qui  admet  cependant  un  ordre  progressif  de  types  qui  se  déve- 
loppèrent successivement  sur  le  globe,  de  plus  en  plus  préparé  pour  des 
créations  plus  parfaites,  reconnaît  néanmoins  la  fixité  pour  ces  formes 
nouvelles  et  fait  cette  sage  réflexion  qui  me  semble  un  peu  la  progres- 
sion naturelle  qu'il  admet  d'abord.  «  Si  le  hasard,  dit-il,  présidait  seul  à 
»la  création  des  corps  organisés, et  si  la  nature  n'assurait  point  leur  repro- 
»duction  d'une  manière  fixe  et  immuable,  les  mêmes  formes  ne  seraient 
«jamais  reproduites  et  tout  rentrerait  bientôt  dans  le  chaos  (4).  » 

M.  Godron,  dans  un  mémoire  remarquable,  établit,  d'une  manière 
incontestable,  la  fixité  de  l'espèce  sur  laquelle  le  climat,  le  terrain,  les 
milieux  ne  peuvent  produire  que  des  modifications  légères  accidentelles, 
sans  jamais  altérer  les  caractères  importants,  qui  sont  invariables.  Le 
climat  tue  les  espèces  plutôt  que  de  les  modifier  (5). 

Je  lis  dans  Cuvier  :  «  On  n'a  aucune  preuve  que  toutes  les  différences, 
»qui  distinguent  aujourd'hui  les  êtres  organisés,  soient  dénature  à  avoir 
»pu  être  produites  par  les  circonstances  (6).  » 


(1)  Voy.  livraison  de  janvier,  p.  12-5. 

(2)  Phil.  bot. 

(ô)  Uict.  des  se.  natur.  de  Levrault.  art.  Géographie  bot. 
(4)  Essai  sur  les  Cryptogames.  Introduction,  p.  X. 
(ô)  De  l'espèce  et  des  races  dans  les  vires  organisés. 
(li)  Règne  animal,  Introduction. 


De  Jussieu,  Flourens,  Milue  Edwards,  de  Blainville  partagent  Ja  même 
upinion. 

Si  donc,  dans  la  période  moderne,  rien  ne  peut  faire  supposer  que  la 
multiplicité  des  espèces  est  le  résultat  des  modifications  produites  par 
les  influences  extérieures,  est-on  bien  fondé  à  déclarer  qu'il  en  fut  au- 
trement dans  les  périodes  antérieures?  Sans  doute,  la  jeunesse  des  plantes 
et  la  puissance  de  changements  atmosphériques  ou  géologiques,  dont  on 
peut  à  peine  estimer  la  valeur,  ont  pu  réagir  plus  énergiquement  que  les 
phénomènes  analogues  actuels  ;  mais  enfin  ce  n'est  là  qu'une  supposition 
gratuite  que  rien  ne  vient  appuyer.  Il  eût  fallu,  d'ailleurs,  que  cette  action 
des  agents  extérieurs  eût  été  assez  forte  et  assez  profonde  pour  faire 
passer  les  plantes,  non-seulement  d'une  espèce  à  une  autre  espèce,  mais 
d'un  genre  à  un  autre  genre;  car  les  plantes  fossiles,  que  nous  retrou- 
vons ,  diffèrent  considérablement  de  celles  existantes  aujourd'hui. 
A  très-peu  d'exceptions  près,  elles  appartiennent  toutes  à  des  genres 
particuliers.  La  paléontologie  nous  enseigne  ce  fait  très-remarquable  et 
très-important  :  qu'elle  n'a  point  constaté,  avec  évidence,  de  formes  in- 
termédiaires, transitoires,  faisant  passage  d'une  espèce  à  une  autre  (1). 
La  mutabilité  des  espèces,  si  elle  était  possible,  ne  se  concevrait  que 
par  l'action  lente  et  continue  de  causes  de  plus  en  plus  prononcées, 
agissant  graduellement  sur  les  êtres.  N'est-ce  pas  ainsi  que  les  varia- 
tions s'obtiennent ,  que  les  naturalisations  se  font ,  tandis  que  des 
changements  brusques  et  subits  font  périr  les  végétaux ,  mais  ne  les 
modifient  pas  ? 

Permettez-moi  de  citer  encore  à  ce  sujet  De  Candolle,  qui  a  généra- 
lement mis  tant  de  prudence  dans  ses  conclusions  :  «  Quelle  complica- 
tion d'hypothèses  ne  faut-il  pas  admettre  pour  conclure  que  les  êtres 
«actuels  sont  des  modifications  de  ceux  qui  ont  été  détruits?  On  conçoit 
«sans  peine  qu'une  grande  révolution  terrestre  a  pu  détruire  les  êtres 
«alors  existants,  à  peu  près  comme  une  inondation  locale  détruit  les 
«animaux  elles  plantes  d'une  vallée.  Mais  pour  que  ces  êtres  se  fussent 
«transformés  en  d'autres,  il  faudrait  supposer,  contre  les  faits  géolo- 
«giques,  que  ces  révolutions  ont  été  très-lentes;  et,  contre  les  faits  or- 
«ganiques,  que  les  espèces  peuvent  se  modifier  en  espèces,  genres  ou 
«classes  différentes  (2).  » 

M.  Geoffroy  St.-Hilaire  fait  observer  que  si  toutes  les  espèces  avaient 
existé  tout  d'abord,  comme  il  en  disparaissait  à  chaque  révolution  du 


(1)  C.  D'Orbigny  rtA.  Gente;  foc.  cit. 
(-2)  Physiolog.  végct. 


—  156  — 

globe,  le  nombre  des  espèces  devrait  décroître,  et  c'est  le  contraire  qui 
a  lieu  (1).  De  cette  prétendue  augmentation  des  espèces,  il  tire  un  argu- 
ment en  faveur  de  la  transformation  des  types,  se  multipliant  avec  les 
diverses  influences  qu'ils  subissent.  Voyons  ce  que  vaut  cette  assertion? 
Sur  quoi  se  fonde-t-on  pour  prétendre  que  le  nombre  des  plantes  aug- 
mente? Le  dénombrement  des  premières  époques  est  encore  à  faire,  et 
l'on  n'en  saurait  vouloir  dresser  le  catalogue  avec  les  espèces  fossiles 
maintenant  au  nombre  de  quelques  mille.  Les  plantes  augmentent, 
mais  c'est  dans  nos  Flores,  dans  nos  herbiers.  Si  elles  ont  presque 
quadruplé  depuis  Linné  (2),  c'est  qu'on  a  exploré  un  bien  plus  grand 
nombre  de  pays;  c'est  qu'on  a  distingué  beaucoup  de  formes  que  les 
anciens  botanistes  avaient  réunies  ou  confondues.  «Il  est  certain,  dit 
M.  Jordan,  qu'il  y  a  eu  augmentation  d'espèces  ou  de  races  dans  les 
livres  de  la  science,  dans  les  catalogues  du  commerce;  mais  rien  ne 
prouve  qu'il  y  ait  eu  augmentation  correspondante  dans  la  réalité  des 
choses,  c'est-à-dire,  qu'il  y  ait  eu  des  créations  nouvelles  (3).  »  La 
France  a  sans  doute  été  bien  explorée,  eh  bien  !  il  n'y  a  pas  d'année 
que  l'on  ne  distingue  ou  ne  découvre  encore  plusieurs  espèces  nouvelles. 
Sont-ce  des  dérivations  d'autres  types?  sont-ce  des  créations  nouvelles? 
Rien  de  tout  cela.  Elles  n'avaient  point  été  remarquées.  Que  de  landes,  de 
forêts,  de  rivières,  de  montagnes  au  monde  où  l'œil  exercé  d'un  bota- 
niste n'a  point  encore  pénétré,  et  où  végètent  certainement  beaucoup 
de  plantes  inconnues  que  découvriront  les  explorateurs  à  venir  et  qui 
augmenteront  encore  nos  catalogues. 

On  a  conclu  aussi  du  règne  animal  au  règne  végétal  pour  affirmer  la 
mobilité  des  espèces.  Les  races  humaines  et  celles  des  animaux  domes- 
tiques ont  fourni  des  arguments  qui  semblaient,  au  premier  abord,  diffi- 
ciles à  réfuter.  Mais  l'observation  a  démontré  que  les  caractères  qui 
distinguent  ces  races  n'ont  aucune  importance  en  classification.  Les 
caractères  fondamentaux  des  espèces,  tirés  de  la  dentition  et  de  la  con- 
nexion des  os,  ne  sont  nullement  altérés  chez  les  diverses  races  de 
chiens,  par  exemple.  Les  croisements  féconds,  qui  font  disparaître  ces 
différences,  l'influence  bien  manifeste  de  la  nourriture,  du  climat,  des 
habitudes,  joignez-y,  pour  les  races  humaines ,  celle  des  mœurs,  de  la 


(1)  Cours  de  Zoologie,  p.  XII. 

(2)  Linné  portait  à  8,000  le  nombre  des  plantes  connues,  cl  évaluait  a  <\vu\  et 
trois  fois  ce  nombre  la  totalile  de  celles  ilu  globe. Do  Candolle  estimait  que  cette  Kjta 
lité  devait  être  de  110  à  120  nulle.  M.  Jordan  pense  qu'on  en  distinguera  encore 

autant. 

(5)  Loc.  citai. 


—  157 

religion,  du  langage,  t'ont  bien  voir  que  ces  variétés  ne  sont  qu'un  acci- 
dent et  n'ont  qu'une  iixité  relative.  Toutes  ces  formes,  déviations  pas- 
sagères d'un  type,  qui  reparaît  dès  que  cessent  les  influences  qui  l'a- 
vaient modifié,  sont  bien  des  races  et  non  des  espèces  nouvelles  et 
ne  prouvent  rien  contre  la  fixité  des  types  spécifiques  dès  qu'il  est 
reconnu  que  les  caractères  qui  les  distinguent  n'ont  aucune  valeur 
organique. 

Dans  le  règne  végétal  on  obtient  ou  on  rencontre  aussi  des  races  et 
des  variétés.  La  plupart  disparaissent  avec  les  causes  qui  les  ont  pro- 
duites. Nous  avons  déjà  vu  que  les  hybrides  et  les  variétés,  qui  s'écartent 
trop  des  caractères  de  l'espèce,  reviennent  par  la  reproduction  au  type 
primitif  ou  sont  frappées  de  stérilité.  La  nature  ne  permet  pas  que  ces 
formes  anormales  se  perpétuent  et  jettent  de  la  confusion  dans  les  types 
qui  sont  son  ouvrage. 

On  se  fait  généralement  une  fausse  idée  de  ce  qu'il  faut  entendre  par 
espèce.  L'espèce  n'est  point  le  groupement  arbitraire  des  individus  qui 
se  ressemblent,  pas  davantage  une  création  méthodique  pour  aider  notre 
mémoire.  L'espèce  est  l'œuvre  de  la  nature  ,  ou  plutôt  du  Créateur. 
C'est  cette  forme  typique,  spéciale,  originelle,  indélébile,  inhérente  au 
germe  et  dont  il  a  été  marqué ,  quand  il  a  été  créé.  C'est  cette  forme 
propre,  constante,  ineffaçable,  que  rien  n'arrête  et  ne  modifie  grave- 
ment dans  son  développement,  qui  brave  les  obstacles,  ou  bien  la  ma- 
tière elle-même  qu'elle  caractérise  ,  qu'elle  spécifie ,  y  succombe. 

Rien  ne  ressemble  plus  quelquefois  à  un  germe  qu'un  autre  germe. 
En  voici  deux  que  le  même  milieu  a  reçus  ,  la  même  nourriture  leur  est 
présentée  ;  voyez  cependant,  à  mesure  qu'ils  se  développent,  comme  les 
différences  se  prononcent,  comme  les  types  spéciaux  se  dessinent,  comme 
cette  prédestination  finale,  invincible,  innée  en  chacun  d'eux  se  montre 
de  plus  en  plus  malgré  l'uniformité  des  circonstances.  L'un  est  devenu 
cette  humble  Renoncule  qui  tapisse  de  ses  corolles  de  neige  la  surface  de 
l'eau  ;  l'autre  ,  ce  superbe  Nénuphar  dont  les  périanthes  dorés  sont  un 
des  plus  beaux  ornements  des  eaux  tranquilles  et  solitaires. Ne  sentons- 
nous  pas  qu'il  y  a  là  quelque  chose,  indépendant  de  l'atmosphère,  du 
sol,  de  la  température.  Il  y  a  là  un  atome,  un  germe,  descendant  et  héri- 
tier d'un  aïeul,  fécondé  au  commencement  par  la  volonté  divine,  et  dont 
la  vie  suit  forcément  son  cours  dans  les  circonstances  pour  lesquelles  il 
a  été  créé. 

L'espèce  est  un  type  de  raison  dont  les  caractères  que  nous  saisissons, 
sont  la  manifestation,  l'expression.  «  Le  fonds  essentiel ,  observe  très- 
»  judicieusement  M.  Jordan,  qui  nécessairement  préexiste  au  développe- 
»ment  et  produit  ce  développement,  est  conçu    par  la  pensée  comme 


—  158  — 

«absolument  un  et  indivisible,  par  conséquent  comme  immuable  et 
«inaltérable....  Le  fonds  commun,  identique  chez  tous  les  individus  qui 
«représentent  une  même  forme  spécifique,  c'est  là  l'espèce  (1).  » 

Cherchons  maintenant  dans  un  autre  ordre  de  considérations  des  élé- 
ments de  conviction.  Dans  une  matière  où  l'expérience  fait  souvent 
défaut,  les  preuves  de  raison  vont  nous  éclairer. 

C'est  se  faire,  ce  me  semble,  une  singulière  idée  de  la  puissance  créa- 
trice que  de  supposer  qu'elle  ne  produisit  d'abord  que  des  êtres  impar- 
faits, sans  caractères  définis,  sans  formes  constantes,  et  qu'il  fallut  les 
influences  du  temps  et  de  l'habitude  pour  les  perfectionner  et  fixer  leur 
organisation.  Les  plantes  n'auraient  donc  pas  été  créées  pour  les  milieux 
où  elles  sont  placées,  pour  les  influences  qu'elles  subissent.  Dans  cette 
hypothèse  qui  va  jusqu'à  considérer  le  règne  végétal  «comme  un  grand 
«arbre  dont  les  racines,  mystérieusement  cachées  dans  les  profondeurs 
«des  temps  cosmogoniques, auraient  donné  naissance  à  un  nombre  limité 
«de  tiges,  successivement  divisées  et  subdivisées....  Ces  premières  tiges 
»  représenteraient  les  types  primordiaux  du  règne,  leurs  dernières  rami- 
«fications  seraient  les  espèces  actuelles  (2);»  dans  cette  hypothèse,  dis-je, 
l'olivier,  l'oranger,  le  riz,  n'auraient  donc  point  été  créés,  dès  le  com- 
mencement, pour  les  brûlants  climats  du  soleil  ;  ni  le  blé  ,  le  pommier, 
les  conifères,  pour  les  zones  refroidies  du  Nord.  Il  nous  faudrait  ad- 
mettre que  des  végétations  indécises,  uniformes,  devinrent  riz  ou  blé, 
produisirent  des  pommes  ou  des  oranges,  selon  les  conditions  biolo- 
giques où  elles  se  sont  trouvées. 

Voilà  ,  clans  toutes  ses  conséquences,  ce  système  de  perfectionne- 
ment des  espèces.  «  Cette  théorie  conduit  à  un  abime  ,  dirai-je  avec  les 
auteurs  de  la  Géologie  appliquée. »  De  là  au  matérialisme  il  n'y  a  que  la 
main.  On  lui  fournit  ainsi  des  armes  terribles.  Si  l'on  ne  conclut  pas  la 
même  proposition,  on  part  à  peu  près  des  mêmes  prémisses.  On  ne  dit 
pas  :  «  La  vie,  comme  la  matière,  est  de  toute  éternité  !  Rien  n'est  fait  de 
rien;  créer  ne  peut  donc  être  qu'une  modification  heureuse  de  la  matière... 
il  n'y  a  pas  d'autre  création.  »  On  ne  dit  pas  :  «De  génération  en  géné- 
ration la  nécessité  de  nouvelles  habitudes,  les  efforts  continus  qui  s'en 
sont  suivis  ont  pu  rendre  l'habitant  d'un  élément  propre  à  un  autre  élé- 
ment... Si  le  serpent  est  la  succession  du  ver,  le  renard  l'embryon  du 
lion,  le  lion  celui  de  l'orang  ou  de  l'éléphant...  de  la  progression  intelli- 


(  1  )  Loc.  cilat. 

(2)  Naudin;  Considéré  philosophiq.  sur  l'espèce,  o\c.  Loi-,  citât. 


—  159  — 

génie  de  ce  dernier  pourra  naître  l'homme  (1)  !..»  Théorie  monstrueuse, 
qui  ravale  l'homme  au  niveau  de  la  brute  et  fait  de  son  intelligence,  cet 
apanage  sublime  de  son  être,  un  instinct  plus  parfait.  Théorie  impie  qui 
exalte  la  matière  et  se  passe  de  la  divinité. 

Les  savants  que  j'ai  cités  ne  vont  pas  si  loin  ;  on  veut  bien  faire  une 
exception  pour  l'homme.  Ils  ne  tirent  pas  de  leurs  théories  ces  consé- 
quences qui  en  découlent  pourtant  :  la  matière,  est  une  ;  ce  sont  les  in- 
fluences diverses  qui  font  la  variété  des  résultats.  Après  chaque  révolution 
géologique,  les  espèces  se  trouvaient  modifiées  en  se  perfectionnant. 
Ainsi ,  nouveaux  phœnix,  et  plus  heureuses  que  cet  oiseau  célèbre,  les 
plantes  renaîtraient  de  leurs  débris,  plus  parfaites  que  leurs  ancêtres. 

Une  seconde  considération  sur  laquelle  s'appuient  les  partisans  de  la 
progression,  c'est  la  gradation  d'organisation,  observée  parmi  les  fos- 
siles, à  mesure  que  l'on  se  rapproche  de  l'époque  actuelle.  Mais  de  ce 
que  cette  progression  existe  ,  doit-on  en  conclure  nécessairement  à  la 
transformation  des  espèces  primitives?  Non,  sans  doute;  il  convient  de 
voir  si  cette  assertion  ne  contredit  point  les  principes  les  plus  certains  de 
la  science  ni  les  quelques  données  qu'il  a  plu  à  Dieu  de  nous  révéler 
sur  son  œuvre.  Nous  savons  déjà  que  la  science  et  la  raison  sont  loin 
d'être  favorables  à  ce  système  ;  nous  verrons  tout-à-1'heure  s'il  peut  se 
concilier  avec  les  textes  sacrés  ;  mais  voici  qui  va  lui  porter  un  coup 
mortel. 

Cette  gradation  successive  de  l'apparition  des  êtres  n'est  rien  moins 
qu'exacte,  et,  si  la  majorité  des  observations  semble  la  confirmer,  la 
minorité  des  espèces  qui  font  exception  est  toujours  un  obstacle  invin- 
cible à  la  loi  des  perfectionnements.  Dans  le  règne  animal,  où  cela  sem- 
blait le  moins  faire  de  doute,  écoutez  ce  qu'en  pensent  les  auteurs  les 
plus  récents  :  «  Ce  degré  successif  de  perfection  a  été  exagéré.  Il  n'est  pas 
»  exact  dans  toutes  ses  parties,  puisqu'on  trouve  dans  les  terrains  anciens 
»des  mollusques,  des  reptiles  et  des  poissons  d'une  organisation  très- 
»  complexe,  tandis  que  les  terrains  modernes  recèlent  des  genres  de  ces 
«animaux  d'une  apparence  très-simple  (2).  »  «Les  classes  d'animaux,  à 
«l'exception  de  2  sur  19  (mammifères  et  myriapodes),  ont  marché  paral- 
«Ièlement  et  non  successivement...  Il  résulte  de  ce  qui  précède  que  les 
«animaux,  loin  de  perfectionner  successivement  leurs  organes  et  de  pas- 
«ser  par  tous  les  degrés  de  perfection  dans  les  âges  du  monde,  ont  sou- 


(1)  Boucher    de  Perthes.  Essai  sur  Vorif/inc  cl  l'apparition  des  êtres  ;  T.  I,  pag. 
317  et  suiv. 

(1)  C.  d'Oruigny  cf  A.  Gknte.  Loc.citat. 


—  160  — 

«vent  à  cet  égard,  moins  gagné  que  perdu  dans  quelques  embranche- 
»ments,  ou  sont  au  moins  restés  stationnaires ;  ce  qui  exclut  tout-à-fait 
»la  marche  croissante,  générale,  du  simple  au  composé,  dans  le  cours 
«des  âges  géologiques  (1).  » 

Les  auteurs  de  la  Flore  fossile  d'Angleterre,  MM.  Lindley  et  W.  Hut- 
ton,  rejettent  aussi  la  théorie  de  progression,  soutenue  par  M.  Bron- 
gniart,  en  se  fondant  sur  ce  qu'on  n'a  pas  encore  découvert  dans  la 
houille  de  cryptogames  inférieurs  (champignons,  mousses),  sur  l'ahsence 
ou  la  petite  proportion  de  monocotylédonées  herbacées,  dans  les  couches 
anciennes  (2).  On  répond  à  cela  que  la  délicatesse  de  ces  plantes  ne  leur 
aura  pas  permis  de  résister  aux  événements  qui  ont  bouleversé  le  globe 
et  que,  si  on  ne  les  retrouve  plus,  leur  petite  taille  a  pu  aussi  les  dé- 
rober aux  recherches.  Mais  on  peut  encore  objecter  à  la  progression  que 
l'on  trouve  déjà  des  dicotyiédonées,  dès  la  première  période,  dans  ce 
terrain  houiller  (3),  qui  recèle  les  vestiges  de  la  première  végétation  ; 
dicotyiédonées  qui  seraient  le  dernier  terme  d'une  progression  d'orga- 
nisation déplus  en  plus  complexe,  et  aussi  ces  fougères  arborescentes, 
ces  Cicadées  gigantesques,  dernier  terme  d'une  progression  en  vigueur 
et  en  puissance. 

Enfin  je  me  demande,  à  ce  point  de  vue,  comment  on  explique  qu'il 
existe  encore  des  cryptogames  et  des  monocotylédonées,  si  ces  plantes 
ont  été  la  première  évolution  du  règne  végétal  et  si  les  influences  exté- 
rieurs pouvaient  les  modifier  à  ce  point  de  les  changer  en  dicotyiédo- 
nées. Je  me  demande  encore  par  la  même  raison,  comment  il  a  pu  y  avoir 
sitôt  des  dicotyiédonées ,  dont  le  nombre  est  assez  grand  encore  en  y 
comprenant  avec  M.  Lindley,  le  genre  fossile  Sigillaria,  puisqu'on  dé- 
clare que  cette  organisation  plus  parfaite  n'est  que  le  résultat  des  causes 
extérieures. 

(La  fin  à  la  prochaine  livraison.) 


(1)  A.  d'Orbigny.  Cours  élément,  de  Paléontologie.  1850. 

(2)  A.  De  Candolle.  Introduction  à  l'étude  de  /a  botanique. 

(ô)  A.  Brongniart.  Prod.  du  végét.  /hss.  —  C.  d'Orbigny  et  A.  Gente.  Loc.  cit. 


Gloximas. 

i.  Mademoiselle    Brialmonl  .  2. Général    Brialmont  .  3.Cornélie 
4    Marie    l.co'rcllo.  D.Louis    Leûrelle. 


—  161  — 

HORTICULTURE. 


NOUVELLES  VARIÉTÉS  DE  GLOXINIAS, 

De  la  collection  de    Madame   Legrelle  d'Hanis  ; 
Par  M.  Edouard  Morren. 

Nous  présentons,  ci-contre,  à  nos  lecteurs,  l'iconographie  de  quelques 
variétés  nouvelles  du  genre  de  plantes  fondé  par  l'Héritier  en  l'honneur 
du  botaniste  P.-B.  Gloxin,  de  Strasbourg,  le  genre  Gloxinia  :  ce  sont 
des  spécimen  d'une  des  collections  les  plus  nombreuses  et  les  mieux 
choisies  de  la  Belgique,  celle  de  Mme  Legrelle  d'Hanis,  d'Anvers,  dont  les 
soins  éclairés  et  persévérants,  qu'elle  veut  bien  donner  à  ces  brillantes 
Gesnériacées,  ont  été  couronnés  du  meilleur  succès.  Deux  des  variétés 
dont  nous  publions  le  portrait  (PI.  30,  n°  2  et  5)  appartiennent  à  la  sec- 
tion remarquable  des  erectœ,  à  corolle  droite,  dressée,  la  plus  estimée 
aujourd'hui  dans  le  monde  horticole.  Ces  Gloxinias  sont  aussi  appelés 
Gloxinia  Fyfiaria,  du  nom  de  celui  qui  les  a  le  premier  fait  connaître 
en  4845,  M.  Fyfe,  jardinier  à  Rothesay  dans  le  Beteshire.  Ils  méritent 
sous  tous  les  rapports  l'affection  des  amateurs  et  l'attention  desbota- 
nistes. Leur  port  est  préférable  à  celui  des  nombreuses  variétés  de 
Gloxinia  speciosa;  les  fleurs  sont  droites,  agréablement  colorées  et  régu- 
lières; elles  sont  d'un  effet  admirable  dans  les  bouquets.  Elles  étonnent 
le  botaniste  par  leur  insertion  dressée,  le  tube  droit  de  la  corolle,  le 
limbe  régulier,  étalé  et  surtout  par  la  présence  de  cinq  étamines  égales, 
et  non  didynames,  par  suite  du  développement,  tout-à-fait  inattendu 
chez  une  Gesnériacée,  et  de  la  fertilité  de  l'étamine  rudimentaire.  Ces 
caractères  sont  essentiels  et  il  est  bien  difficile  d'admettre  que  les 
Gloxinia  erecta  des  horticulteurs  soient  le  résultat  d'une  hybridation  : 
ils  ont  même  une  importance  au  moins  générique. 

MIle  Brialmont ,  qui  entoure  les  fleurs  de  soins  charmants  et  de 
tendres  sollicitudes,  a  bien  voulu  accepter,  de  Mme  Legrelle  d'Hanis, 
l'hommage  de  l'une  des  plus  fraîches  et  des  plus  gracieuses  variétés  de 
Gloxinia  de  sa  collection.  Les  autres  variétés  dessinées  sur  la  planche, 
portent  les  noms  de  M.  le  Général  Brialmont,  aide-de-camp  de  Sa  Ma- 
jesté le  Roi,  Cornélie,  Mlle  Marie  Legrelle  et  M.  Louù  Legrelle. 


RELG.    HORT.    T.    VI. 


—  162  — 
CULTURE  DES  GLOXINIAS, 

D'après  la  méthode  d'un  amateur  anglais  du  Derbyshire. 

Les  Gloxinias,  si  nombreux  et  si  généralement  répandus  dans  les 
cultures,  sont  originaires  des  contrées  tropicales  où  on  les  rencontre 
croissant  dans  les  taillis  et  les  lisières  des  épaisses  forêts,  sur  un  sol  noir 
formé  par  la  décomposition  des  feuilles  et  des  écorcesqui  tombent  chaque 
année.  Us  y  sont,  en  outre,  soumis  à  des  pluies  torrentielles,  suivies 
de  l'action  d'une  vive  lumière  et  d'un  air  pur.  La  chaleur  bienfaisante 
et  humide  qui  en  résulte  provoque  le  développement  de  leurs  belles 
feuilles  charnues  et  de  leurs  charmantes  fleurs  blanches,  azurées  ou 
roses,  avec  une  rapidité  qu'il  serait  impossible  d'atteindre  dans  nos 
serres  chaudes  d'Europe. 

Pendant  l'hiver  je  conservais  les  variétés  des  Gloxinias,  en  feuilles, 
dans  une  petite  serre  chaude,  dont  la  température  descend  rarement  en 
dessous  de  16°  pendant  le  jour,  et  de  15°  pendant  la  nuit.  Au  commen- 
cement de  mars  j'examinais  les  plantes,  leur  donnais  un  supplément  de 
ehaleur  et  pendant  toute  la  durée  de  l'été  elles  fournissaient  une  admi- 
rable fleuraison,  que  je  ne  crois  cependant  pas  comparable  à  celle  qui 
doit  se  produire  dans  les  stations  humides  de  l'Amérique  Méridionale. 

Décidé  à  suivre  les  indications  de  la  nature,  je  commençai  l'avant- 
dernier  automne  à  diminuer  graduellement  les  arrosements.  Au  mois 
de  novembre  une  trentaine  de  mes  plantes  étaient  complètement  flétries 
et  je  les  débarrassai  des  feuilles  et  des  tiges  mortes.  Après  ce,  elles 
furent  enfouies,  avec  quelques  Gesnérias,  sous  une  couche  de  vieux 
tan  d'un  pied  d'épaisseur,  où  elles  restèrent  jusqu'au  milieu  de  février, 
époque  à  laquelle  je  les  trouvai  commençant  à  pousser  hors  de  leurs 
pots.  Je  préparai  alors  le  compost  suivant  dans  la  serre  chaude  pour  lui 
donner  la  température  convenable  :  terreau  bien  consommé  provenant 
d'un  vieux  chêne ,  terre  de  bruyère  sableuse  et  sable  blanc,  en  parties 
égales,  auxquelles  j'ajoutai  environ  un  cinquième  d'argile  tourbeuse. 
Au-dessus  du  drainage  je  plaçai  une  couche  de  terreau  de  feuilles  et  de 
bois  à  moitié  consommé  et  je  donnai  aux  plantes  des  pots  de  seize  ou  de 
trente-deux,  suivant  leur  force.  Après  le  rempotage  elles  reçurent  un 
bon  arrosement  et  furent  soumises  à  une  température  de  18  à  23  degrés 
centigrades  ;  pendant  tout  le  temps  que  les  feuilles  mirent  à  se  faire  jour 
au  travers  du  sol ,  on  distribua  l'eau  avec  prudence,  mais  on  maintint  le 
sol  humide  et  l'on  plaça  quelques  réservoirs  d'eau  autour  des  plantes 
pour  saturer  l'atmosphère  de  vapeurs  aqueuses.  Lorsque  les  feuilles 
eurent  atteint  un  certain  développement,  les  arrosements  furent  plus 
fréquents,  et  soir  et  matin  on  les  mouillait  à  l'aide  d'un  petit  arrosoir 


—  163  — 

avec  de  l'eau  portée  à  la  température  de  la  serre.  Une  fois  la  semaine  je 
leur  distribuai  de  l'engrais  liquide,  ce  qui  leur  donna  une  vigueur  ex- 
traordinaire. Les  plantes  commencèrent  à  fleurir  vers  le  milieu  d'avril , 
et,  à  la  mi-juin  elles  brillèrent  de  tout  leur  éclat,  surpassant  tout  ce 
que  j'avais  vu  auparavant.  Quelques  plantes  avaient  plusieurs  tiges  de 
douze  à  seize  pouces  de  hauteur,  surmontées  de  nombreuses  fleurs  : 
sur  l'une  d'elles  je  comptai  soixante-sept  fleurs  parfaites  en  même 
temps.  Sur  un  pied  de  G.  speciosa  je  trouvai  soixante-treize  superbes 
fleurs  ouvertes,  et  pendant  toute  la  durée  de  la  saison  il  ne  me  donna 
pas  moins  de  cent  soixante-dix  corolles.  La  plante  mesurait ,  depuis 
l'extrémité  d'une  feuille  jusqu'au  côté  opposé  ,  deux  pieds  de  diamètre; 
chaque  feuille  avait  neuf  pouces  de  largeur.  Un  G.  candida  portait 
quarante  fleurs  ouvertes  à  la  fois. 

Le  reste  de  ma  collection  (cent  quarante  plantes)  ne  fut  pas  recouvert 
de  tan,  les  tiges  et  les  feuilles  ne  me  paraissant  pas  assez  fanées;  mais  il 
fut  conservé,  tout-à-fait  sec,  dans  une  température  de  quatorze  degrés. 
Ces  plantes  ne  furent  pas  excitées  avant  le  commencement  d'avril  ;  elles 
fleurirent  après  celles  du  premier  lot,  mais  sans  atteindre  la  même  per- 
fection. Je  suis  convaincu  que  beaucoup  d'horticulteurs  distingués  ne 
consentiront  pas  à  laisser  sécher  leur  plantes  en  automne,  craignant  de 
les  voir  périr  par  trop  de  siccité  ;  il  est  certain  qu'en  laissant  les  plantes 
dans  la  serre  chaude,  où  la  température  est  de  seize  à  dix-sept  degrés 
et  où  l'air  est  saturé  d'humidité,  elles  doivent  être  plus  on  moins  ex- 
citées et  que  lorsqu'elles  commencent  à  sortir  de  la  période  de  repos  , 
beaucoup  d'entre  elles  seront  parfaitement  incapables  d'absorber  la  nour- 
riture qui  leurest  octroyée  sous  forme  d'arrosement,et  conséquemment 
périront.  Je  puis  cependant  assurer  que  par  celte  méthode  je  n'ai 
perdu  aucune  plante.  Mais  celles  qui  avaient  été  protégées  dans  le  tan  , 
se  développèrent  et  fleurirent  avec  le  double  de  vigueur  de  celles  dont 
les  pots  restèrent  à  l'air. 

La  multiplication  des  Gloxinias  n'est  pas  plus  difficile  que  leur  cul- 
ture ;  elle  se  fait  par  boutures ,  divisions,  par  les  feuilles  ou  par  graines 
qui  sont  toujours  abondantes.  Dans  la  culture  du  G.  maculata  il  est 
convenable  de  réduire  les  jets  à  deux  ou  trois  au  plus  ;  il  s'élève  alors 
à  deux  ou  trois  pieds. 

REVUE  DE  PLANTES  NOUVELLES  ET  INTÉRESSANTES. 

Tecoma  fulva.  Don. — Bot.  Mag.,  tab.  4896.  Don.  Gen.  Syst.  v.  4, 
p.  224.  —  De  Cand.  Prod.  v.  9,  p.  224.  —  Synon.  :  Bignonia  fulva, 
Car.  le.  v.  6,  p.  58,  t.  580.  —  Etym.  :  du  nom  Mexicain  de  ce  genre 


—  164  — 

Tecomaxochitl.  —  Fam.  des  Bignoniacées.  Didynamie  Angiospermie. — 
Tecoma  à  fleurs  jaunes. 

Il  n'est  pas  douteux  que  cette  superbe  plante  ne  soit  la  même  que  le 
Bignonia  fulva  de  Cavanilles,  connue  seulement,  jusque  dans  ces  der- 
niers temps,  de  cet  auteur  et  de  Louis  Née,  qui  rapporte  l'avoir  trouvée 
«  in  siccis  arenosis  portus  Aricœ  in  confinio  Peruviœ,  »  vers  18°  26  de 
latitude  sud.  MM.  Cuming,  Mc  Lean  et  Warszewicz  l'ont  également 
trouvée  au  Pérou  et  M.  Pentland  en  Bolivie.  Elle  vient  de  fleurir  chez 
MM.  Veitch. 

C'est  un  arbrisseau  dressé,  à  branches  brun  pourpre,  arrondies, 
glabres,  sauf  les  plus  jaunes  qui  sont  poilues.  Les  feuilles  sont  opposées, 
pétiolées,  imparipennées,  à  douze  folioles  opposées,  sessiles,  cunéées, 
grossièrement  dentées,  glabres  et  à  une  foliole  terminale  ;  pétioles  mé- 
diocrement ailés,  contractés  au  point  d'insertion  des  folioles;  rachis 
ailé  entre  chaque  paire  de  folioles  ;  les  jeunes  feuilles  sont  légèrement  ve- 
lues. Fleurs  en  racème  terminal  ou  porté  sur  de  petites  branches  axil- 
laires  qui  naissent  des  feuilles  supérieures;  l'ensemble  de  l'inflorescence 
est  une  grande  cyme  feuillée.  Pédicelles  velus.  Calice  glabre  (poilu,  sui- 
vant Cavanilles)  obové,  obscurément  anguleux,  découpé  en  cinq  dents 
assez  profondes,  triangulaires,  acuminées,  dressées.  Corolle  longue  de 
deux  pouces,  rouge  à  la  partie  supérieure,  d'un  beau  jaune  en  dessous  ; 
tube  cylindrique,  mais  aminci  et  délié  à  la  partie  inférieure  de  manière 
à  devenir  infundibuliforme  et  courbe;  limbe  à  peine  bilabié  à  cinq  lobes 
à  peu  près  égaux,  arrondis,  étalés.  Quatre  étamines,  incluses,  didy- 
names,  insérées  sur  la  gorge  de  la  corolle,  à  filaments  courts,  à  an- 
thères à  deux  loges  oblongues  un  peu  divergentes  et  à  connectif  terminé 
par  une  petite  dent;  la  cinquième  étamine  est  avortée  et  se  retrouve  plus 
bas  dans  le  tube.  Ovaire  allongé,  surmonté  d'un  disque  épais  glandu- 
leux; style  plus  long  que  la  corolle,  à  stigmate  grand,  bilabié. 

Nyctanthes  Arbor-tristi».  Linn. — Linn.Sp.pl.  v.2,  p.  8.  Roxb. 
FI.  Ind.  v.  I,  p.  85.  Hort.  Kew.  éd.  %v.  1.  Ker,  Bot.  Reg.,  t.  399. 
DC.  Prod.  v.  8,  p.  314.  Bot.  Mag.,  tab.  4900.  —  Synon.  :  Scabrita 
scabra,  Linn.  Syst.  veget.  éd.  12,  p.  115.  Parillium  arbor  tristis,  Gartn. 
Manjapumeram,  Rheede,  Hort.  Malab.  v.  1,  p.  35,  t.  21.  Sép  'halica', 
Jones,  Asiat.  Res.  v.  4,  p.  224.  Etymol.  :  »u|,  nuit,  et  avêof,  fleur.  — 
Fam.  des  Jasminées.  Diandrie  Monogynie.  —  Arbre  triste  ou  Jasmin  de 
nuit. 

Quoique  sir  Joseph  Banks  introduisit,  dès  1781,  le  Nij et anthes  arbor 
tristis  des  Indes,  cette  plante  intéressante  est  cependant  peu  répandue 
dans  les  collections. Son  nom  lui  a  peut-être  porté  malheur.  SirW.  Jones 


—  165  — 

(Asiat.  Res.)  nous  dit  que  cet  arbre  riant,  car  il  n'a  rien  de  triste  dans 
son  aspect,  répand  son  délicieux  arôme  à  une  distance  considérable  tous 
les  soirs,  mais  qu'au  lever  du  soleil  il  laisse  tomber  la  plupart  de  ses 
fleurs  nocturnes,  qui  sont  ramassées  avec  soin  pour  l'usage  des  parfu- 
meurs et  des  teinturiers.  On  l'appelle  aux  Indes  Sép  'halica,  nom  qui 
exprime  l'idée  que  les  abeilles  dorment  sur  ses  fleurs.  Il  est  vrai,  tou- 
tefois, qu'après  la  chute  des  corolles  blanches  et  odorantes,  à  gorge  et  à 
tube  oranges,  qui  a  lieu  de  bonne  heure  chaque  matin,  la  plante  est  d'un 
aspect  assez  insignifiant.  C'est,  suivant  Roxburg,  la  matière  colorante 
orange  des  tubes,  qui  est  recherchée  des  teinturiers,  mais  qui  malheureu- 
sement ne  peut  pas  acquérir  de  fixité.  La  floraison  a  lieu  en  été.  D'après 
Clusius  le  N.  Arbor  tristis  ne  croîtrait  aux  Indes  qu'à  Goa,  mais  le 
Dr  Hooker  l'a  trouvé  en  abondance  dans  l'Assam. 

Le  N.  Arbor  tristis  forme  aux  Indes  un  petit  arbre,  et  dans  nos  cul- 
tures un  arbuste  déjeté,  à  rameaux  quadrangulaires,  ailés,  à  angles  co- 
lorés en  rouge.  Les  feuilles  sontovées,  acuminées,  de  deux  à  cinq  pouces 
de  long,  opposées,  penninerves,  entières  ou  souvent  dentées-lobées;  les 
pétioles  mesurent  un  demi  ou  trois  quarts  de  pouce.  L'inflorescence  est 
un  corymbe  terminal  à  ramifications  opposées ,  portant  chacune  trois 
fleurs  sessiles  ayant  à  la  base  deux  larges  bractées  ovées  entourant  le 
calice.  Celui-ci  est  cylindrique,  subturbiné  ,  couvert  de  poils  apprîmes, 
tronqué,  à  cinq  dents  très-minimes.  La  corolle  est  hypocratériforme,  à 
tube  trois  fois  aussi  long  que  le  calice,  orange  h  l'intérieur  et  à  l'exté- 
rieur; le  limbe  est  à  six  segments  étalés,  imbriqués,  cunéés,  subcon- 
tortés,  creusés  à  la  périphérie,  blancs.  Deux  étamines  incluses  à  filets 
très-courts,  insérées  juste  à  la  gorge,  à  anthère  ovée-cordée,  munie  d'un 
petit  appendice  à  la  face  dorsale  près  de  l'extrémité.  Ovaire  ovale  globu- 
leux; style  inclus,  plus  court  que  le  tube  de  la  corolle;  stigmate  pelté 
avec  une  dépression  au  centre. 

Cypripedium  purpuratum.  Lindl.  in  Bot.  Reg.  v.  23,  t.  1991. 

Wight.Ic.  Plant.  Ind.  Or.  v.S,t.  1790  ?  Bot.  Mag.  tab.  4901 ,  Etym.  : 
de  KvTTfiiç,  nom  grec  de  la  déesse  Vénus,  et  nehtt,  Trohov,  chaussure, 
le  beau  labellum  de  ces  plantes  ayant  quelque  analogie  avec  une 
chaussure.  — Fam.  des  Orchidées.  Gynandrie  Diandrie.  — Cypripède 
pourpre. 

Le  Cypripedium  purpuratum,  Lindl.  ,  est  très-voisin  du  C.  Venustum 
Wall.;  la  principale  différence  consiste  dans  l'absence  de  verrues  à  la 
partie  supérieure  des  pétales.  Cette  charmante  plante  est  originaire  de 
l'Archipel  Malais  et  fleurit  en  serre  chaude  au  mois  de  novembre. 

Les  feuilles  sont  radicales,  les  plus  grandes  de  quatre  ou  cinq  pouces 


—  166  — 

de  long ,  oblongues ,  légèrement  acuminées  ,  souvent  bien  trifides  à  la 
pointe,  distiques,  engainantes  et  équitantes  à  la  base  ;  leur  surface  est 
striée  et  entre  les  stries  sont  des  macules  vertes  et  blanches.  La  hampe 
ou  scape  qui  naît  d'une  petite  feuille  engainante,  s'élève  à  huit  ou  dix 
pouces,  est  arrondie,  purpurescente  et  pubescente.  La  fleur  est  grande , 
solitaire,  terminale;  à  la  base  d'un  long  ovaire  clavé,  on  trouve  une 
assez  grande  bractée  verte.  Les  sépales  sont  étalés,  les  deux  supérieurs 
très-grands,  subarrondis,  très-acuminés  ,  blancs,  richement  striés  de 
pourpre;  le  sépale  inférieur  est  petit,  oblong,  pointu,  brun  pourpre, 
dirigé  vers  le  sol.  Les  pétales  sont  très-grands,  oblongs,  acuminés,  de 
couleur  pourpre  foncée.  Le  labelle  est  grand  ,  unguiculé,  d'un  pourpre 
verdâtre,  légèrement  veiné.  L'étamine  stérile  est  réniforme. 

Magnolia  Campbelllt.  Hook.  f.  et  Toms.  in  FI.  ind.  1.77,  et 
prior ,  in  Illustr.  of  Himal.  Plants,  tab.  IV,  V,  Illustr.  Hort.  vol.  III , 
1856  ,  tab.  79.  —  Etymol.  :  François  Magnol,  professeur  de  botanique 
à  Montpellier,  né  en  1638,  mort  en  1715.  Linné,  en  créant  ce  genre, 
dit  qu'il  le  dédiait  à  Magnol ,  par  allusion  à  l'éclat  de  son  savoir.  —  Fam. 
des  Magnoliacées.  Polyandrie  Polygynie.  —  Magnolia  de  Campbell. 

Voici  en  quels  termes  ,  d'après  la  traduction  publiée  récemment  dans 
l'Illustration  Horticole ,  M.  Hooker  fils  fait  connaître  ce  splendide 
végétal  : 

Ce  superbe  arbre,  qui  forme  un  trait  si  remarquable  dans  le  paysage 
et  la  végétation  du  Dorjeling,  fut  choisi  par  le  docteur  Thomson  et  moi, 
pour  rappeler  les  éminents  services  de  notre  ami  le  docteur  Campbell, 
résidant  dans  ce  pays ,  en  ce  qui  regarde  la  naissance  et  les  progrès  de 
cet  important  établissement  sanitaire,  ainsi  que  ses  nombreuses  contri- 
butions à  nos  connaissances  sur  la  géographie,  les  productions  natu- 
relles ,  les  arts,  les  manufactures  et  les  races  humaines  du  Népaul  et 
du  Sikkim-Himalava. 

La  Magnolia  Campbellii  a  été  découverte  par  le  docteur  Griffith  , 
dans  le  Boutan.  C'est  un  grand  arbre  forestier,  commun  dans  les  bran- 
ches externes  de  la  chaîne  du  Sikkim  ,  à  une  altitude  moyenne  de 
8-10,000  pieds,  se  montrant  sur  la  route,  au-dessus  de  Pacheem,  et 
de  là  gagnant  le  sommet  duSinchul,  à  8,000  pieds  ,  et  celui  du  Tonglo 
à  10,000.  Quoiqu'il  se  montre  quelquefois  dans  les  branches  centrales 
de  ces  chaînes  de  montagnes  ,  à  une  pareille  élévation ,  il  y  est  beaucoup 
moins  fréquent  ;  le  tronc  en  est  droit,  souvent  haut  de  40  pieds,  sur  12 
à  20  de  circonférence  et  revêtu  d'une  écorce  noire;  le  bois  en  est  mou 
et  presque  sans  usage.  Les  fleurs  s'épanouissent  en  avril,  au  sommet 
de  toutes  les  branches,  alors  que  l'arbre  est  encore  absolument  sans 


—  167  — 

feuilles;  elles  varient  du  blanc  au  rose  foncé  ou  presque  cramoisi  et  en 
volume  de  six  à  dix  pouces;  l'arôme  en  est  faible.  En  mai  l'arbre  est  en 
pleines  feuilles  et  le  fruit  mûrit  en  octobre;  alors  encore  se  montrent 
quelques  fleurs  petites  et  déformées.  Chez  les  jeunes  plantes  les  feuilles 
sont  entièrement  glabres  ;  celles  des  arbres  plus  avancés  en  âge  sont 
plus  ou  moins  soyeuses  en  dessous. 

Il  y  a  dans  l'Inde  deux  autres  espèces  de  ce  genre;  l'une,  la  M.  globosa 
Hook.  f.  et  Thoms.,  n'a  jusqu'ici  été  découverte  que  dans  les  vallées  in- 
térieures du  Sikkim,  où  elle  croît  sur  les  lisières  des  bois,  à  9-10,000 
pieds  d'altitude;  c'est  un  petit  arbre  à  feuilles  également  décidues,  à 
fleurs  globuleuses  ,  d'un  blanc  de  neige  et  de  la  grosseur  du  poing  à 
peu  près  ;  elles  paraissent  en  juin  et  sont  fort  suavement  odorantes.  Elle 
est  étroitement  alliée  à  la  M.  conspicua  du  Japon,  introduite  dans  nos 
jardins.  L'autre  espèce,  la  M.  spherocarpa,  Roxb.,  est  indigène  dans  le 
Chittagong ,  les  monts  Khasia  et  le  Népaul ,  où  elle  habite  les  vallées 
subtropicales.  Les  M.  Campbelli  et  globosa  seront  sans  doute  rustiques 
en  Angleterre,  mais  la  sphenocarpa  réclamera  chez  nous  une  chaleur 
presque  tropicale. 

Culture.  Orangerie  et  serre  froide  :  sol  riche ,  meuble ,  frais  et  pro- 
fond. Muliplication  par  le  marcottage  et  mieux  par  le  greffage  sur  le 
M.purpurea. 

DendroMnm  Mglbbnm.  Lindl. —  Bot.Mag.,tab.A89%.—  Syn.  : 
Dendrobium  bilobum,  Paxt.  FI.  Garden.  v.  3,  p.  25,  n.  491,  fig.  245.  — 
Etym.  :  v.  s.  p.  103.  —  Fana,  des  Orchidées ,  Gynandrie  Monogynie.  — 
Dendrobium  k  deux  bosses. 

Cette  espèce  de  Dendrobium  porte  de  très  jolies-fleurs,  lilas  foncé,  à 
sépales  ovés ,  étalés  et  a  été  nommée  bigibbum ,  parce  que  les  deux  fo- 
lioles latérales  du  périanthe  se  terminent  chacune  en  un  éperon  court , 
émoussé  et  courbe.  Les  pétales  sont  grands,  orbiculaires,  horizontaux  ; 
le  labelle  est  de  couleur  foncée,  trilobé,  à  lobes  latéraux,  grands,  re- 
courbés et  à  lobe  moyen  un  peu  réfléchi,  légèrement  concave  à  la  pointe!; 
son  disque  porte  une  grande  crête  élevée  ,  blanche  et  papilleuse  sur  la 
plus  grande  partie  de  son  étendue.  Mais  les  tiges  longues  et  faibles  de  la 
plante  ,  les  feuilles  peu  nombreuses  et  étroites,  lui  ôtent  beaucoup  de 
ses  avantages.  Elle  a  été  découverte  par  le Dr  Thomson,  sur  le  mont 
Adolphe,  sur  lacôte  Nord-Est  de  la  Nouvelle-Hollande  et  envoyée  à  Mr  C. 
Loddiges.  La  station  où  on  l'a  trouvée  étant  située  sous  les  tropiques, 
montre  qu'elle  demande  plus  de  chaleur  pour  sa  culture  que  la  plupart 
des  Orchidées  australiennes. 


—  168  — 

Aralia  papyrlfera.  Hook.  —  Bot.Mag.,  tab.  4897.  Hook.  Joum.  of 
Botany,  1852,  p.  53  ,  t.  1,  2.  — ■  Etym.  :  Sarrazin,  médecin  français  à 
Québec,  envoya  en  1804  un  Aralia  à  Fagon  à  Paris,  sous  le  nom  ca- 
nadien de  Aralia.  —  Fam.  des  Araliacées.  —  Pentandrie  pentagynie. 
—  Plante  au  papier  de  riz. 

On  est  maintenant  complètement  édifié  sur  l'histoire,  l'origine  et  la 
nature  du  fameux  papier  de  riz  des  Chinois ,  qu'ils  fabriquent  avec 
Y  Aralia  papyrifera.  Cette  plante  a  été  envoyée  en  Angleterre  par  sir 
John  Bowring,  gouverneur  de  Hong-Kong  et  par  son  fils  J.-C.  Bow- 
ring;  elle  y  a  fleuri  en  décembre  1855.  Les  branches  ne  forment  que 
très-peu  de  bois  et  renferment  une  moelle  abondante  de  la  plus  éclatante 
blancheur  et  qui  constitue  la  matière  première  de  la  fabrication  du  pa- 
pier de  riz. 

REVUE  DES  FOUGÈRES  NOUVELLES. 

(Suite.  Yoy.  p.   139.) 

7°  Davallia  bullata.  Wallich.  —  Wall.  Cat.  IV°.  258.  Hook.  Sp. 
Fil.  i.,  169,*.  50  b.  Gard.  Chron.  1855,  p.  532.— Davallieà  frondes 
bullées. 


Frondes  ovales -deltoïdes,  submem- 
braneuses ,  tripinnées,  à  divisions  infé- 
rieures acuminées  triangulaires, obliques, 
allongées  ;  pinnules  lancéolées  ,  oblon- 
gues,  pinnatifides,  à  dernier  segment  en 
forme  de  dent  linéaire-pointue  ,  courbée 


en  faux  et  portant  les  sores  à  la  face 
inférieure  ;  involucres  en  coupe  oblon- 
gue  ;  rhizome  rampant  couvert  d'écaillés 
brunes  ,  entières  ,  étalées  ,  subulées  ; 
frondes  articulées. 
(Voy.Pl.  31,fig.  1.) 


Cette  fougère  qui  est  petite,  très-élégante,  a  été  introduite  à  Kew  en 
1852,  du  Népaul  et  de  l'Assam,  et  à  peu  près  à  la  même  époque,  par 
M.  Nuttall.  Elle  paraît  être  décidue,  les  rhizomes  étant  souvent,  sinon 
toujours ,  dépourvus  de  frondes  pendant  l'hiver  ;  ces  frondes  sont 
articulées,  hautes  tout  au  plus  d'un  pied,  vert  pâle,  submembraneuses, 
glabres,  deltoïdes,  tripinnées,  à  rachis  ailé.  Les  segments  primaires  infé- 
rieurs sont  subopposés,  triangulaires,  allongés,  acuminés;  pinnules 
oblongues-lancéolées,  profondément  pinnatifides  ;  pinnules  secondaires 
oblongues,  terminées  par  une  dent  pointue,  courbe,  falquée.  Les  sores 
sont  solitaires  sur  la  face  inférieure  de  ces  segments  falciformes  et  ont 
un  involucre  court,  oblong,  tronqué,  cupule.  Les  frondes  fertiles  ont 
toute  la  face  supérieure  comme  grossièrement  chagrinée  par  une  mul- 
titude de  bulles,  d'où  le  nom  de  D.  bullata. 

8°  Phlebodium  in^equale,  T.  M.  in  Herb.  -  Syn.  :  Polypodium 
riseriale  Hort.  —  Gard.  Chron.  1855,  p.  660.—  Phlébodie inégale. 


169  — 


Fronde  ample  ,  pinnée  ,  herbacée  , 
membraneuse  ;  segments  lancéolés  ,  lé- 
gèrement glauques ,  les  inférieurs  pé- 
tioles ,  les  supérieurs  sessiles  et  adnés  , 
tous  inégaux  à  la  base  ;  sores  grandes, 


rondes,  sur  une  série  le  long  de  la  ner- 
vure médiane;  rhizome  couvert  d'écaillés 
déprimées,  ovées  ,  acuminées  ;  frondes 
annuelles  articulées. 


Les  frondes  sont  grandes,  pendantes,  vert  pâle,  de  trois  ou  quatre 
pied  au  plus  d'étendue  ,  pinnées  ,  oblongues-ovales.  Les  pinnules  in- 
férieures sont  lancéolées,  atténuées  à  la  pointe  et  rétrécies  à  la  base  où 
elles  sont  inégalement  développées,  la  lame  se  continuant  plus  bas  sur 
le  pétiole  du  côté  antérieur  que  du  côté  opposé.  Vers  le  milieu  de  la 
hauteur  des  frondes  les  pinnules  sont  sessiles  ;  les  supérieures  sont 
adnées-décurrentes  et  la  terminale  est  ordinairement,  mais  pas  toujours, 
lobée  et  inégale  à  la  base.  Le  bord  des  pinnules  est  crénelé.  Les  sores 
sont  grandes,  rondes,  disposées  en  une  série  simple  contre  la  nervure 
moyenne ,  placées  tantôt  dans  une  aréole  costale  à  l'extrémité  d'une 
veinule  ,  ce  qui  caractérise  les  Goniophlebhim  ,  tantôt  'sur  une  veinule 
extérieure  à  l'aréole  costale  ou  enfin  au  point  d'intersection  de  deux 
ou  d'un  plus  grand  nombre  de  veines,  ce  qui  est  l'organisation  nor- 
male des  Phlebodium. 

Le  Pli.  inœquale  est  donc  une  espèce  intermédiaire  entre  les  genres 
Goniophlebhim  et  Phlebodium;  c'est  une  fort  belle  plante  de  serre 
chaude  ,  remarquable  par  ses  frondes  caduques  qui  tombent  toutes  en 
hiver  et  se  renouvellent  de  bonne  heure  au  printemps.  Le  stipe  est 
charnu  et  vert  pâle.  Le  rhizome,  qui  est  de  la  grosseur  du  pouce  et 
croit  en  touffes  ramifiées ,  est  couvert  d'écaillés  étroitement  appliquées 
contre  lui,  ovales,  acuminées.  L'aspect  général  de  cette  plante  rappelle 
le  Phlebodium  aureum,  mais  elle  en  diffère  essentiellement  par  ses 
frondes  annuelles  et  réellement  pinnées.  On  la  croit  originaire  de 
Guatemala  et  importée  il  y  a  quelques  années  par  M.  Loddiges. 

9°  Adiantum  cultratum,  J.  Smith.  — Hook.  Sp.  Fil.  i.  34.  Gard. 
Chron.  1855,  p.  660.  —  Syn.  Adiantum  pentadactylon .  Hort.  non 
Langsdorff  et  Fischer. — Etym.:  a  privatif  et  Ahumv,  mouiller;  a^iÛ»toS> 
qui  craint  l'humidité.  Adiante  coutelier. 


Frondes  glabres,  tripartites  bipinnées  ; 
pinnules  oblongues-rhomboïdales,  lobées 
à  la  marge  supérieure  et  à  la  pointe  ,  en- 
tières au  bord    inférieur   falqué  5  sores 


petites  ,  étroites  ,  oblongues    linéaires , 
placées  à  l'extrémité  des  lobes  5  stipes 
brun-acajou  ,  frondes  adhérentes. 
(Voy.  PI.  51,  fig.  2.) 


Cette  belle  espèce  ornementale  d' Adiantum,  demande  la  serre  chaude. 
Les  frondes  sont  glabres,  vert  foncé  à  reflet  olive,  de  quatre  décimètres 
et  demi  à  six  décimètres  d'élévation  et  tripartites-bipinnées,  c'est-à-dire 
bipinnées  avec  la  partie  inférieure  de  segments  bipartites.  Los  pinnules 


170  - 


PI.  31. 


Fig.  1.  Daralliabullata,  Wall. 


Fig.  2.  Adianluiii  cullraluin,  i.  Si». 


Fig.  3.  G\mii(K;ramina  lanata,  Klolzsch. 


Fig.  4.   Acrophorus  hispidus,  T.  I. 


—  171 


sont  oblongues  rhomboïdales ,  légèrement  cordées,  le  bord  supérieur 
et  l'extrémité  plus  ou  moins  atténués  présentent  de  nombreuses  cré- 
nelures,et  le  bord  inférieur  est  concave.  Les  sores  sont  petites,  étroites, 
linéaires-oblongues,  occupant  l'extrémité  des  lobes.  Le  stipe  etlerachis 
sont  bruns- marron  foncé  pendant  leur  jeunesse  et  noircissent  plus 
tard.  Les  frondes  sont  adhérentes  sur  un  rhizome  rampant. 

Cette  espèce  est  connue  en  Belgique  sous  le  nom  de  Adiantum 
pentadactylon ,  qui  appartient  à  une  forme  lobée  de  VA.  trapéziforme. 
Elle  en  diffère  par  des  proportions  plus  minimes ,  des  pinnules  plus 
étroites  à  bord  postérieur  falqué  ,  presque  pas  du  tout  glabres  en 
dessous  et  des  sores  plus  petites  linéaires-oblongues. 

10°  Gymisogramma  lanata.  Klotzsch.  —  A.  Braun  in  App.  Gen.  et 
Sp.  nov.  Hort.  Reg.  Bot.  Berol.  coluntur  1854.—  Gard.  Chron.  1855, 
p.  660.  —  Etym.  de  yu/uno;,  nu  et  yp*^*,  ligne,  trait  ;  les  lignes  de 
sores  ne  sont  protégées  par  aucun  organe. —  Gymnogrammie  laineuse. 


Frondes  ovales  lancéolées  ,  bipinnées 
intérieurement,  pinuatifides  à  l'extrémité  ; 
segments  sessiles  ,  étroits  ,  lancéolés  ; 
pinnules  oblongues  ,  les  inférieures  dis- 
tinctes, contractées  à  la  base  ,  les  supé- 
rieures confondues  ,  mousses  ;  les  pre- 
mières sont  lobulées  ou  subpinnatifides 


à  la  base,  inégalement  dentées ,  à  bord 
légèrement  réfléchi  ;  la  surface  supé- 
rieure est  glabre  ,  l'inférieure  laineuse  ; 
stipes  et  rachis  couverts  de  poils  laineux 
jaune  cannelle. 

(Voy.  PI.  31,  fig.  3.) 


Cette  remarquable  fougère  a  été  recueillie  en  1850  à  Veragua  par 
M.  Warszewicz  et  germa  pour  la  première  fois,  de  spores,  dans  le 
jardin  de  M.  Mathieu,  à  Berlin.  Elle  possède  un  court  caudex  dressé, 
donnant  naissance  à  un  petit  nombre  de  frondes  tendres  et  herbacées, 
dont  les  stipes  sont  revêtus  d'une  bourre  jaune  pâle  et  de  crins  foncés, 
et  dont  la  face  inférieure,  recouverte  de  poils  blancs  et  laineux,  est 
toute  chargée  de  sores,  consistent  en  séries  de  sporanges  étendues  sur 
les  nervures.  Cette  espèce  appartient  réellement  au  genre  Gymnogramma 
quoiqu'elle  paraisse  très-différente  des  autres  espèces  répandues  dans 
les  cultures.  Dans  le  spécimen  décrit  par  M.  Moore,  le  stipe  mesurait 
environ  9  pouces  de  long,  la  partie  foliacée  de  la  fronde  18  pouces; 
les  plus  grands  segments  avaient  5  pouces  et  les  pinnules  un  pouce. 
Elle  est  de  serre  chaude. 

11°  Acrophorus  hispidus.  T.  M.  —  Proc.  Lin.  Soc.  1854,  285.  Gard. 
Chron.  1855,  p.  661.  —  Syn.  :  Davallia  hispida,  Heward,  Herb.  Dav. 
Novœ  Zelandiœ,  Colenso,  Tasm.  Journ.  of  Nat.  Science;  Hooker,  Species 
Filicum,  t.  51,  B. —  Etym.  :  de  **p«»,  pointe,  extrémité  et  çtpuv,  porter. 
Les  sores  sont  portées  par  l'extrémité  des  veinules  inférieures.  —  Acro- 
phore  hispide. 


172  — 


Frondes  ovales,  acuminées,  tripinnées, 
membraneuses,  rigides  ;  segments  sti- 
pités  linéaires,  oblongs,  acuminés;  pin- 
nules  pyramidales,  lancéolées  obliques  à 
pointes  pinnatifides  ;  pinnules  secon- 
daires lancéolées,  profondément  pinnati- 
fides, à  segments  ovales,  pointus,  falqués 
ou  obovés,  entiers  ou  munis  d'une  ou  de 


deux  dents;  sores  nombreuses  sur  les 
dents  latérales  des  lobes,  indusiées;  in- 
dusie  consistant  en  une  écaille  large, 
ovale,  fixée  en  travers  de  sa  base;  cau- 
dex  rampant,  velu  ;  stipes  et  rachis  fau- 
ves; la  base  du  stipe  et  la  côte  des  pinnules 
primaires  sont  recouvertes  de  nombreux 
poils  ferrugineux.  (Voy.  PI.  31,  fig.  4.) 


Cette  espèce  a  été  rapportée  au  groupe  des  Leacostegia  de  la  section 
des  Davallia;  elle  diffère  des  Davallia  en  ce  que  les  sores  ne  sont  pas 
renfermées  dans  un  involucre  tubuleux,  mais  recouvertes  par  uneindusie 
écailleuse,  et  elle  nous  paraît  plus  voisine  des  Cijstopteris  que  des  Da- 
vallia. Elle  constitue  une  élégante  fougère  de  serre  tempérée  dont  les 
frondes  paraissent  être  d'une  ampleur  très-variable;  elles  atteignent 
parfois  deux  pieds  d'élévation  y  compris  le  stipe,  et  dans  d'autres  cas, 
d'après  M.  Hooker,  elles  s'arrêtent  à  trois  pouces.  Les  frondes  sont  très- 
gracieuses  et  finement  découpées,  d'un  beau  vert,  chargées  de  fructifi- 
cations qui  sont  ordinairement  placées  sur  une  petite  dent  des  der- 
nières divisions.  VA.  hispidus  a  été  introduit  il  y  a  peu  de  temps  par 
M.  R.  Kennedy  de  la  Nouvelle-Zélande  où  M.  A.  Cunningham  l'avait 
découvert. 

12°  Lomaria  discolor,  Willdenow .  —  Willd.,  Sp.  PL  v.  293.  —  Gard. 
Chron.  1855,  p.  661.  —  Syn.  :  Onoclea,  Swartz.  Hemionitis,  Schkuhr. 
t.  6,  Osmunda,  Forster.— -  Etym.  :  de  xapu,  rebord,  marge.  Les  indusies 
sont  à  peu  près  marginales.  —  Lomaria  de  diverses  couleurs. 


Frondes  en  touffe,  pinnées;  les  sté- 
riles sont  étroites,  lancéolées,  à  pinnules 
alternes,  sessiles,  oblongues,  pointues, 
horizontales,  subcrénelées,  jaune  pale  en 


dessous;  les  fertiles  sont  linéaires-lan- 
céolées, à  pinnules  linéaires  obtuses, 
horizontales,  souvent  foliacées  à  la  base; 
indusies  ciliées  dentées. 


Cette  espèce  a  été  importée  de  la  Nouvelle-Zélande  par  M.  Kennedy  et 
a  fructifié  pour  la  première  fois  chez  le  Dr  Young  à  Kennington.  Les 
frondes  stériles,  portées  par  un  caudex  dressé,  sont  étroites  lancéolées, 
à  pinnules  oblongues  pointues,  d'un  vert  foncé  au-dessus  et  plus  pâle  in- 
férieurement  et  longues  d'un  pied  à  un  pied  et  demi.  Les  frondes  fertiles 
sont  plus  grandes,  dressées,  plus  étroites,  à  pinnules  linéaires  dilatées  à 
la  base.  Serre  tempérée. 


PL  33 


) 


Belvédère   rustique 


P1.32. 


■  m 

-SB  h&. 


■ 


Belvédère    champêtre 


—  173  — 

ARCHITECTURE  HORTICOLE. 


DESCRIPTION  DE  DEUX  BELVÉDÈRES  DE  JARDIN, 
Par  M.  Edouard  Morren. 

Un  belvéder  ou  belvédère  est  un  petit  bâtiment  construit  dans  un 
jardin  ou  un  parc,  sur  une  éminence  d'où  l'on  découvre  une  grande 
étendue  de  pays,  pour  se  mettre  à  l'abri  des  rayons  du  soleil  ou  des  in- 
jures du  temps.  C'est  un  mot  italien  qui  signifie  Belle-vue,  parce  que 
c'est  un  point  d'où  l'on  doit  jouir  de  beaux  paysages.  Dans  les  plus  petits 
jardins  on  a  coutume  de  former  un  remblai,  souvent  tapissé  d'un 
Rockwork  et  surmonté  d'un  belvéder  pour  y  prendre  le  frais  en  se  ré- 
créant de  l'animation  qui  règne  sur  une  route  pavée  ou  ferrée,  un  fleuve, 
une  rivière  ou  un  canal.  Dans  les  maisons  de  campagne  ou  les  parcs  il 
est  rare  que  l'on  ne  trouve  pas  des  accidents  de  terrain  naturels  dont 
on  puisse  profiter  pour  édifier  des  constructions  de  ce  genre. 

Les  planches  32  et  33  représentent  deux  modèles  de  belveders  gra- 
cieux, élégants  et  commodes  que  l'on  peut  réaliser  à  peu  de  frais.  Le 
premier,  le  belvédère  champêtre,  s'élève  au  bord  d'un  ruisseau,  au  haut 
d'une  chute  d'eau  naturelle;  on  y  arrive  par  un  sentier  sinueux  qui 
serpente  sur  la  colline.  La  base  est  formée  d'une  maçonnerie  grossière, 
octogone,  en  pyramide  tronquée  et  entourée  de  broussailles  fleuries; 
elle  supporte  une  construction  de  bois  consistant  en  une  chambrette 
vitrée  à  huit  côtés,  destinée  à  des  repas  champêtres;  autour  règne  une 
galerie  d'où  l'on  domine  tout  le  pays  d'alentour  et  qui  par  huit  colon- 
nettes  légères  supporte  la  corniche  du  toit.  Celui-ci  est  formé  de  minces 
planchettes  ou  plutôt  de  lames  de  zinc  et  peint  par  bandes  de  couleur 
vive. 

Le  pavillon  rustique,  figuré  planche  33,  est  d'une  construction  plus 
simple  et  moins  coûteuse.  Il  est  placé  sur  un  rocher  naturel,  au  bord 
d'une  pièce  d'eau,  au-dessusde  l'entréed'une  grotte  ou  d'un  passage  sou- 
terrain. Des  degrés  grossièrement  taillés  dans  le  roc  ou  formés  de  frag- 
ments artistement  disposés,  entourés  de  quelques  arbrisseaux  croissant 
dans  les  anfractuosités  du  rocher,  s'élèvent  jusqu'à  lui.  La  base  est  cir- 
culaire naturelle  ou  artificielle.  Quelques  perches  solides  soutiennent  un 
toit  ombreux  formé  de  chaume  ou  de  mousse  verte. 

Il  est  inutile  de  dire  qu'il  importe  bien  moins  de  construire  un  belvé- 
dère de  telle  ou  telle  façon,  que  de  le  placer  dans  la  meilleure  situation 
possible  et  de  ménager  avec  intelligence  les  plus  beaux  points  de  vue. 
De  grands  arbres  ne  peuvent  jamais  le  dominer. 


—  174  — 
COMMENT  ON  PEUT  ÉTABLIR  UNE  GLACIÈRE  A  BON  MARCHÉ , 

ET  COMMENT  IL  CONVIENT  DE  CONSERVER  LA  GLACE  ; 

Par  M.  Edouard  Morren. 

A  mesure  que  nous  avançons  dans  la  civilisation,  ce  qui  n'était 
d'abord  qu'un  luxe  raffiné,  devient  nécessaire  à  notre  existence  :  il  n'en 
est  de  meilleure  preuve  que  le  besoin  de  glace  pendant  les  mois  d'été. 
Cette  consommation  va  sans  cesse  croissant,  et  là  où  une  glacière 
médiocre  suffisait  il  y  a  quelques  années,  il  en  faut  deux  ou  trois  de  nos 
jours.  L'usage  de  la  glace  est  d'ailleurs  une  jouissance  tellement  à  la 
portée  de  tous  que  nous  ne  comprenons  pas  bien  pourquoi  il  ne  s'est 
pas  vulgarisé  davantage. 

La  nature  fait  croître  pendant  l'été  les  bois  qui  doivent  nous  chauffer 
pendant  les  froids ,  comme  elle  nous  donne  en  hiver  de  la  glace  destinée 
à  nous  rafraîchir  pendant  les  ardeurs  de  l'été.  Tout  le  monde  s'approvi- 
sionne de  chauffage  pour  l'hiver,  tandis  que  bien  peu  emmagasinent  de 
la  fraîcheur  pour  l'été.  Est-ce  à  dire  que  la  glace  coûte  cher,  que  sa  con- 
servation est  difficile ,  qu'elle  réclame  des  soins  tout  spéciaux  ou  entraîne 
à  de  grandes  dépenses  ?  Rien  n'est  moins  vrai  :  la  nature  ne  nous  en 
prodigue  que  trop. — Quand  nous  n'en  savons  que  faire,  pourquoi  ne  la 
ramasserions-nous'pas  ?  Rien  n'est  plus  aisé  que  de  lui  donner  un  abri, 
la  mettre  en  magasin  ;  il  suffit  de  la  traiter  comme  toute  autre  marchan- 
dise susceptible  de  s'avarier,  c'est-à-dire  d'user  de  quelque  précautions 
à  son  égard.  Il  en  coûte  beaucoup  de  se  chauffer  en  hiver,  tandis  que 
rien  n'est  plus  aisé  que  de  lutter  contre  la  chaleur  de  l'été,  de  jouir  des 
beautés  de  la  nature  en  tempérant  ses  excès.  Si  tout  le  monde  pouvait 
être  convaincu  de  la  facilité  et  du  bon  marché  de  l'établissement  d'une 
glacière,  l'usage  de  la  glace,  qui  n'est  encore  répandu  qu'à  Paris,  dans 
les  grandes  villes  ou  chez  les  riches,  ne  tarderait  pas  à  devenir  général. 

Tout  jardin  d'une  certaine  étendue,  devrait  compter,  au  nombre  de 
ses  dépendances,  une  glacière,  dont  le  soin  incomberait  nécessairement 
au  jardinier  :  nous  espérons  que  les  observations  suivantes  ne  seront  pas 
lues  sans  intérêt  par  les  abonnés  à  la  Belgique  horticole. 

Le  problème  de  la  conservation  de  la  glace  se  réduit  à  la  question  d'en- 
tourer cette  glace  d'une  enveloppe,  assez  peu  conductrice  de  la  chaleur, 
pour  empêcher  la  température  extérieure  de  pénétrer  jusqu'à  elle.  Si  l'on 
pouvait  entourer  la  glace  d'une  substance  qui  ne  se  laissât  pas  pénétrer 
par  la  chaleur,  il  est  évident  qu'elle  se  conserverait  indéfiniment  sans 


—  175  — 

altération.  Malheureusement  cette  substance  n'existe  pas  ;  il  n'est  point 
de  corps  qui  s'opposent  complètement  au  passage  de  la  chaleur ,  comme 
il  en  est  qui  s'opposent  au  passage  de  la  lumière.  Il  faut  donc  placer  la 
glacière  dans  des  conditions  telles,  qu'elle  s'échauffe  le  moins  possible, 
c'est-à-dire  que  la  chaleur  ne  pénètre  jusqu'à  elle  que  le  plus  difficile- 
ment possible. 

En  premier  lieu,  le  réservoir  où  l'on  peut  aller  chercher  la  glace, 
doit  être,  si  possible,  une  large  pièce  d'eau,  bien  entretenue,  sans 
mauvaises  herbes ,  ni  feuilles  mortes ,  car  rien  n'est  d'un  emploi  aussi 
incommode  que  de  la  glace  souillée.  L'eau  qui  doit  fournir  la  glace  pour 
les  usages  domestiques,  devra  donc,  si  faire  se  peut,  ne  pas  être  bordée 
ni  ombragée  par  de  grands  arbres ,  qui  exercent  encore  une  influence 
nuisible  en  s'opposant  à  la  gelée  de  l'eau,  parce  qu'ils  arrêtent  la  radia- 
tion de  la  chaleur.  C'est  là  un  phénomène  que  l'on  peut  observer  après 
toute  nuit  froide  :  tandis  qu'une  portion  d'un  étang  est  prise,  la  partie 
qui  est  dominée  par  des  branches  reste  libre. 

Il  est  bien  évident  qu'il  faut  emmagasiner  la  glace  pendant  les  plus 
grands  froids  et  jamais  pendant  le  dégel,  car  plus  la  glace  sera  froide, 
plus  il  faudra  de  chaleur  pour  la  fondre.  De  la  glace  à  5°  ou  6°  c.  résis- 
tera bien  plus  longtemps  que  de  la  glace  à  0°. 

Ayant  obtenu  une  glace  limpide,  nous  la  supposons  transportée  à  la 
glacière  où  elle  est  brisée  avec  soin ,  sur  un  parquet  propre  et  solide, 
formé  d'une  substance  très-peu  conductrice,  comme  de  la  paille,  du  bois 
ou  surtout  du  poussier  de  charbon  ;  on  ne  saurait  la  réduire  en  frag- 
ments trop  petits,  ni  la  tasser  et  la  presser  trop  fortement.  Il  faut 
tasser  la  glace  à  mesure  qu'on  charge  la  glacière,  d'abord  pour  utiliser 
tout  son  espace,  ensuite  pour  s'opposer  à  la  circulation  de  l'air.  Tous 
les  fragments  de  glace  finissent  par  se  souder  en  une  seule  masse  qui 
résiste  bien  plus  aisément  à  la  chaleur  qu'une  multitude  de  petit  mor- 
ceaux isolés. 

Une  grande  glacière  conservera,  toute  proportion  gardée,  une  plus 
grande  quantité  de  glace  qu'une  petite.  Il  est  de  la  plus  haute  impor- 
tance qu'elle  soit  placée  dans  une  situation  parfaitement  sèche.  Nous 
conseillons  aussi  d'éviter,  quoique  ce  soit  l'usage,  l'emploi  de  la  paille 
sur  les  côtés,  parce  que,  si  une  fois  elle  a  été  atteinte  par  l'humidité, 
elle  hâte  la  fonte  de  la  glace. 

On  connaît  un  procédé  américain ,  qui  a  été  suivi  en  Angleterre  chez 
lord  Lilford,  dans  le  Northamptonshire,  et  chez  lord  Jersey,  dans 
l'Oxfordshire,  pour  se  faire  quitte  de  l'humidité  ;  il  consiste  à  ménager 
une  petite  ouverture  ,  que  l'on  puisse  fermer  à  volonté ,  dans  la  porte  de 
la  glacière  et  une  autre  correspondante  dans  le  mur  opposé.  Ces  trous 


—  47b'  — 

sont  ouverts  chaque  nuit,  et  fermés  de  bonne  heure  chaque  matin.  II  en 
résulte  un  courant  d'air  sec  et  frais  qui  enlève  l'humidité  dont  l'influence 
fâcheuse  n'aurait  pas  tardé  à  se  faire  sentir  sur  la  glace.  Les  gravures 
qui  accompagnent  cette  notice  sont  faites  d'après  ce  plan. 

PI.  34. 


a,  fosse  5  6,  vestibule  ; 
ec ,  portes  ;  dd ,  ouver- 
tures ;  ce,  mur  de  pierres 
bien  sec  ;  f,  voûte  de 
briques  ;  g,  couche  d'ar- 


gile de  quatre  pieds  d'é- 
paisseur ;  h  et  i,  siphon 
ot  drain  pour  l'écoule- 
ment de  l'eau;  15 /t  6  m., 
quatre  mètres;  10/"1  6  in.r 
trois  mètres. 


Fîg  \.   Coupe  transversale  d'une  glacière. 


Fig.  2.    Seelinii  horizontale  d'une  glacière. 
Les  lettres  ont  la  même  signification  que  dans  la  fig.  1, 


—  m  — 

On  perd  beaucoup  de  glace  par  l'ouverture  trop  fréquente  ou  incon- 
sidérée de  la  glacière;  l'heure  la  plus  convenable  pour  y  entrer  est 
pendant  l'aube. 

En  résumé,  pour  conserver  de  la  glace  avec  succès,  il  faut  s'efforcer 
de  la  recueillir  bien  propre,  la  réduire  en  poudre,  la  bien  tasser,  remplir 
la  glacière  aussi  exactement  que  possible  et  enlever  toujours  l'humidité. 

Quant  à  la  situation,  la  glacière  doit  être  abritée  des  rayons  du  soleil 
par  des  arbres  élevés,  mais  du  côté  du  nord  elle  peut  être  libre,  plutôt 
qu'ombragée  par  des  branchages  qui  s'opposent  à  la  radiation  de  la 
chaleur  accumulée  pendant  les  jours  chauds  de  l'été. 

On  fait  les  glacières  de  différentes  formes,  de  diverses  dimensions  et, 
en  vue  de  l'économie  du  charriage,  en  général,  près  des  eaux  destinées 
à  les  alimenter,  sur  un  terrain  en  pente.  Quelques  personnes  ne  brisent 
pas  la  glace  pour  la  tasser,  mais  remplissent  les  intervalles  avec  de  la 
neige  et  de  l'eau;  nous  ne  conseillons  pas  cette  pratique  ;  parce  qu'il  est 
bien  difficile  d'entamer  une  masse  aussi  compacte. 

On  peut ,  à  l'aide  d'une  légère  modification ,  éviter  de  grands  frais 
dans  la  construction  d'une  glacière  :  on  a  coutume  de  les  bâtir  en  cône 
renversé,  cette  forme  permettant  à  la  glace  de  se  tasser  en  une  masse 
compacte.  On  peut  cependant  leur  donner  la  forme  carrée  et  employer 
des  matériaux  beaucoup  moins  dispendieux  que  la  maçonnerie.  Une 
simple  cage  de  bois,  juste  suffisante  pour  empêcher  le  contact  de  la  glace 
au  sol  et  une  couche  épaisse  de  paille  ou  de  chaume,  sont  tout  ce  qu'il 
faut,  si  les  autres  conditions  énumérées  plus  haut  sont  remplies.  Ainsi, 
à  l'aide  de  quelques  matériaux  à  bon  marché  et  rustiques  et  de  quelque 
connaissance  des  lois  qui  régissent  la  diffusion  de  la  chaleur  par  l'ab- 
sorption et  la  radiation,  la  plus  modeste  villa  peut,  comme  le  domaine  du 
riche,  avoir  sa  glacière.  Une  glacière  construite  d'après  le  procédé  de 
M.  Hawkins,  et  pouvant  contenir  4,000  liv.  de  glace,  ne  coûte  que 
437  frs.  20  c.  En  voici  la  description  : 

«  Elle  est  à  moitié  creusée  dans  le  sol  et  carrée  en  tous  sens  :  sa  lar- 
geur est  de  2  mètres,  sa  profondeur  de  2  mètres;  le  fond  se  termine 
en  entonnoir.  A  cette  faible  profondeur  les  eaux  se  perdent  ordinaire- 
ment d'elles-mêmes;  si  le  terrain  n'était  pas  propre  à  les  absorber,  on 
s'en  débarrasserait  par  un  petit  conduit.  Sur  le  fond  on  place  un  cadre 
formé  de  quatre  pièces  de  bois,  d'un  décimètre  d'équarrissage,  bordant 
bien  exactement  les  parois  verticales  et  appuyé  sur  le  sol  ;  et  par-dessus 
ce  cadre  un  certain  nombre  de  traverses  horizontales  recouvertes  à  leur 
tour  par  des  lattes;  les  parois  verticales  sont  garnies  delà  même  manière; 
on  y  dispose  simplement  des  montants  de  10  centimètres,  revêtus  de 
lattes  sur  toute   leur  hauteur.   Enfin   on   recouvre  la  glacière  avec 

BELG.    HOKT.    T.    VI.  18 


—  178  — 

un  couvercle  formé  de  quatre  grandes  pièces  croisées,  séparées  par 
un  intervalle  d'un  mètre  et  débordant  un  peu  l'excavation  de  manière 
à  former  soutien  par  la  terre.  On  peut  ménager  au  centre  de  ce  cou- 
vercle un  petit  conduit  en  planches,  s'élevant  presque  à  la  hauteur 
du  sol  et  par  lequel  on  jette  la  glace  pendant  l'hiver.  Cette  espèce  de 
cage,  bien  simple,  une  fois  posée  dans  l'intérieur  de  l'excavation,  on  n'a 
plus  qu'à  revêtir  intérieurement  toutes  les  faces  avec  des  paillassons; 
on  a  eu  soin  de  ménager  une  porte  avec  quelques  gradins  sur  la  face 
tournée  au  nord  ;  on  recouvre  cette  porte  de  bottes  de  paille,  ainsi  que  la 
partie  inclinée  placée  tout-à-fait  en  dehors  ;  enfin,  après  avoir  mis  de  la 
paille  au-dessus  des  lattes  du  couvercle,  on  fait  un  remblais  d'environ 
un  mètre  d'épaisseur,  autour  duquel  on  plante  des  arbustes  ou  des 
arbres  capables  d'entretenir  toujours  à  la  surface  un  ombrage  suffisant, 
et  de  faire  ainsi  un  nouveau  rempart  contre  les  rayons  du  soleil. 

PI.  3o. 


Glacière  établie  d'après  le  système  de  M.  Hawkins. 


»  Certes ,  il  n'y  a  pas  à  craindre  pour  une  pareille  construction  de  se 
voir  entraîner  à  de  bien  grandes  dépenses  ni  d'échouer.  Si  le  terrain  est 
solide,  on  peut  même  diminuer  les  frais,  et  se  contenter  de  traverses 
tapissées  de  paillassons.  L'intervalle  entre  les  deux  portes  peut  être  uti- 
lisé pour  la  conservation  des  aliments;  mais  il  faut  observer  que  l'on  ne 
doit  entrer  dans  la  glacière  que  le  plus  rarement  possible  et  de  grand 
matin  ;  chaque  fois  que  l'on  ouvre  la  porte,  il  se  fond  une  certaine  quan- 
tité de  glace. 

»0n  comprend  aisément  que  l'on  peut  construire  sur  le  même  plan 
une  glacière  beaucoup  plus  vaste.  11  se  fond  d'autant  moins  de  glace 


—  179  — 

que  la  glacière  est  plus  grande  et  en  contient  davantage.  Aussi 
dans  une  très-petite  glacière  se  fond-il  énormément  de  glace.  Pour 
en  conserver  une  livre  pour  l'été,  il  faudrait  peut-être  en  mettre  mille 
pendant  l'hiver.  Il  n'y  a  donc  pas  un  avantage  notable  à  construire  une 
glacière  sur  des  proportions  plus  restreintes  que  celles  que  nous 
venons  d'indiquer.  Si  on  a  trop  de  glace  pour  soi,  il  en  reste  pour  obli- 
ger ses  voisins  et  ses  amis,  et  c'est  une  obligeance  qui  ne  coûte  pas 
cher.  » 


CULTURE  MARAÎCHÈRE. 


ACCLIMATATION  EN   EUROPE  DE    QUATRE  NOUVELLES 
VARIÉTÉS  RUSTIQUES  DE  BATATES  (batatas  edulis)  , 

Provenant  du  Japon  et  introduites    par  M.  le  Dr  Von  Sieboldt; 

Par  M.  Edouard  Morren. 

La  Batate  est  connue  depuis  le  XVIe  siècle;  elle  est  originaire  des 
tropiques,  d'où  insensiblement  elle  s'est  propagée  vers  les  zones  tem- 
pérées. Depuis  longtemps  elle  est  naturalisée  dans  l'Amérique  du  Nord, 
le  Japon  et  la  Chine.  Dans  ces  deux  empires,  elle  remplace  entièrement 
la  pomme  de  terre,  et  dans  toutes  les  contrées  situées  sous  l'isotherme 
de  12°  R.,  elle  peut  être  acclimatée  sans  peine  aucune.  Il  en  est  actuel- 
lement de  la  Batate  comme  de  la  pomme  de  terre  ;  l'une  et  l'autre  se 
sont  multipliées  ,  sous  des  climats  divers,  en  variétés  nombreuses  qui 
se  distinguent  par  la  feuille,  ia  fleur,  la  couleur,  la  farine,  la  qualité 
et  la  productivité.  La  Balate  peut  donc  être  cultivée  avec  succès  où  l'on 
cultive  la  pomme  de  terre,  sa  congénère,  également  originaire  des  tro- 
piques. Les  Bâtâtes  cultivées  au  Japon  sont  entre  toutes  les  plus  fari- 
neuses, elles  ont  la  plus  grande  analogie  avec  les  meilleures  variétés  de 
pommes  de  terre,  et  généralement  dans  ce  pays  on  préfère  la  Batate  au 
Yams  ou  Discorea  Japonica. 

La  Batate  fournit  une  énorme  quantité  de  racines  qui  se  préparent  et 
se  mangent  de  la  même  manière  que  les  pommes  de  terre,  soit  bouil- 
lies, rôties  ou  frites.  Avant  sa  maturité  complète  on  peut  en  faire  des 
conserves  au  sucre  qui  sont  exquises  et  elles  peuvent  se  prêter  à  toutes 
les  formes  que  le  luxe  de  nos  tables  a  imaginées.  Le  Dr  Von  Sieboldt , 
qui  a  passé  sept  années  au  Japon, déclare  avoir  mangé  journellement  des 
Bâtâtes  avec  le  plus  grand  plaisir. 

Convaincu  delà  haute  utilité  alimentaire  de  cette  plante,  le  Dr  Von 


—  180  — 

Sieboldt  s'est  efforcé  d'introduire  en  Europe  les  races  les  plus  rustiques 
du  Japon,  et  après  plusieurs  essais  infructueux  ,  il  est  enfin  parvenu  à 
recevoir  en  vie,  à  Leyde,  quatre  variétés  différentes,  lesquelles  sont  dans 
ce  moment  en  voie  démultiplication  dans  l'établissement  horticole  d'ac- 
climatation des  produits  Javanais  à  Leyde.  Voici  les  noms  indigènes  des 
quatre  variétés  de  Bâtâtes  rustiques  importées  récemment  dans  les  Pays- 
Bas  par  les  soins  du  Dr  Von  Siebold  : 

4°  Satsuma-imo ;  Batate  du  district  de  Satsumn. 

2°  Aka-imo;  Batate  rouge. 

3°  Siro-imo;  Batate  blanche. 

4°  Hanabeke-imo;  Batate  à  fleur  de  Cydonia  japonica. 

La  culture  de  la  Batate  doit  nécessairement  être  d'abord  réservée  aux 
jardins  potagers  ;  des  soins  particuliers  et  des  semis  successifs  ne  tar- 
deront pas  à  donner  des  variétés  plus  rustiques  encore.  En  attendant, 
il  faut,  comme  pour  tant  d'autres  de  nos  légumes,  hâter  la  croissance 
des  Bâtâtes ,  en  les  mettant  d'abord  dans  des  couches  pour  les  trans- 
planter ensuite  en  plein  air.  Cette  plante  demande  moins  de  soins  qu'un 
grand  nombre  d'autres  légumes  dont  les  qualités  sont  bien  moins  pré- 
cieuses et  dont  l'avenir  n'offre  aucune  chance  d'amélioration. 

Rien  n'est  plus  simple  ni  plus  facile  que  la  culture  de  la  Batate  ;  il 
faut  lui  réserver  un  terrain  préparé  à  l'avance  par  un  bêchage  pro- 
fond ;  on  met  les  jeunes  boutures  en  place  vers  la  mi-mai,  lorsqu'aucun 
abri  ne  leur  est  plus  nécessaire  ;  si  les  racines  ne  sont  pas  entièrement 
développées  on  ombrage  les  plantes  durant  quelque  temps  afin  que  le 
soleil  n'arrête  pas  leur  reprise.  Dès  le  mois  d'août  on  trouve  au  pied 
des  plantes  des  tubercules  bons  à  consommer,  que  l'on  peut  détacher 
sans  nuire  à  la  végétation  ;  ce  n'est  qu'en  octobre  qu'on  arrache  toute 
la  plante  pour  faire  la  récolte  entière,  les  tubercules  ayant  alors  atteint 
leur  entier  développement.  La  bonne  conservation  des  racines  exige 
un  endroit  parfaitement  sec,  à  l'abri  du  froid  et  surtout  des  atteintes 
de  l'humidité. 

Le  Dr  Von  Sieboldt  a  tout  espoir  dans  l'acclimatation  de  cette  plante 
et  en  vue  de  la  propager  dans  toute  l'Europe  ,  il  a  multiplié  en  grand 
les  quatre  variétés  rustiques  du  Batatas  edalis.  Une  souscription  est 
ouverte  à  l'établissement  d'acclimatation  du  Dr  Von  Sieboldt  et  Ge,  à 
Leyde,  qui  fournit  une  plante  de  chacune  de  ces  variétés  de  Batate,  au 
prix  de  10  francs  les  quatre. 

Nous  prévenons  MM.  les  abonnés  qu'ils  peuvent  obtenir  ces  quatre 
variétés  au  même  prix  ,  en  s'adressant  directement  au  bureau  du 
journal  la  Belgique  Horticole,  où  se  trouve  un  dépôt  de  ces  plantes 
utiles. 


181 


GÉOGRAPHIE   BOTANIQUE. 


LES  ENVIRONS  DE  BUENOS-AYRES. 

Lettre  adressée  à  la  rédaction  de  la  Belgique  horticole, 
Par  M.  Leichtlin. 

Le  Rio  de  la  Plata,  fleuve  dont  les  eaux  sales  ne  justifient  guère  1s 
le  nom  de  fleuve  d'argent,  est  à  son  embouchure  large  de  60  lieues  ;  un 
peu  plus  haut  il  a  10  lieues.  Sur  la  rive  droite,  s'élève  dans  une  situation 
magnifique  et  en  amphithéâtre  sur  une  colline,  la  ville  de  San-Filipe  de 
Montevideo.  Une  journée  plus  loin,  le  voyageur  voit  s'étendre  sur  une 
plaine  basse  et  environnée  seulement  d'un  côté  de  quelques  collines,  la 
ville  de  Buenos-Ayres  ,  métropole  de  la  république  du  même  nom, 
qui  s'est  séparée  dans  ces  derniers  temps  des  autres  provinces  qui  for- 
ment maintenant  la  confédération  Argentine.  Un  séjour  de  trois  mois 
à  Buenos-Ayres  m'engage  à  vous  communiquer  les  observations  que 
j'ai  pu  y  faire  et  que  je  crois  de  nature  à  intéresser  un  botaniste  et  un 
horticulteur. 

L'aspect  général  de  la  contrée  est  une  plaine  parfaitement  unie,  dont 
la  monotonie  n'est  interrompue  çà  et  là  que  par  quelques  petites  col- 
lines. Cette  plaine,  de  Buenos-Ayres  jusqu'aux  Cordillières,  s'élève  in- 
sensiblement jusqu'à  une  altitude  de  3,000  pieds.  Le  caractère  de  la  vé- 
gétation de  cette  région  rappelle  au  voyageur  l'Europe  méridionale  ou 
le  bassin  de  la  Méditerranée;  mais  l'absence  presque  complète  d'arbres 
et  le  glacial  pampiro,  ajoutent  beaucoup  à  la  mélancolie  du  paysage. 
Ce  pampiro  est  un  vent  violent,  qui  souffle  du  sud-ouest  et  apporte  sou- 
vent avec  lui  de  grands  nuages  de  poussière,  des  orages  et  des  ouragans 
furieux.  Il  s'oppose  tout-à-fait  à  la  croissance  des  arbres  dans  la  plaine. 
Le  pampiro  ,  comme  tous  les  vents,  est  le  résultat  de  la  tendance  à 
l'équilibre  dans  l'atmosphère  ;  il  se  forme  sur  les  sommets  des  Cordil- 
lières et  se  précipite  avec  véhémence  sur  ces  plaines  ou  pampas  qui,  à 
certains  endroits,  lui  offrent  des  débouchés  de  200  à  300  lieues  de  large. 
Ces  immenses  plaines  émanent  pendant  les  nuits  sereines  la  chaleur  du 
soleil  qu'elles  ont  condensée  pendant  le  jour;  la  déperdition  va  même 
au-delà  de  la  chaleur  reçue,  de  sorte  qu'elles  se  refroidissent  considéra- 
blement, et  lorsque  le  pampiro,  qui  n'est  pas  bien  chaud  de  son  naturel, 


—  182  — 

souille  par-dessus,  il  est  loin  de  se  réchauffer  :  ces  circonstances  expli- 
quent comment,  après  qu'il  a  venté  quelques  heures,  la  terre,  dans  les 
environs  de  Buenos-Ayres  ,  se  couvre  d'une  croûte  de  glace.  Ce  vent 
est  cependant  un  bienfait  pour  ces  régions,  qui  seraient  bientôt  affligées 
par  des  maladies  de  toute  sorte,  ne  fût-ce  que  par  suite  de  la  coutume  de 
laisser  se  putréfier  dans  les  rues  des  cadavres  ou  des  restes  d'animaux 
égorgés.  Après  que  le  pampiro  a  venté,  l'air  est  aussi  pur  que  dans  les 
montagnes  de  la  Suisse. 

La  température  moyenne  de  l'année  est  de     .     .     .     16°-17°  R. 
»  »         du  mois  le  plus  chaud,  de    23°  R. 

»  »  »  »       froid,  de     11°  R. 

C'est  à  cause  du  pampiro  seul  que  pendant  la  nuit  l'air  est  refroidi  de 
2°  à  3°  R. 

Les  plantes  qui  caractérisent  le  tableau  de  la  végétation  du  pays  sont 
notamment  des  graminées,  des  agaves,  des  cactées,  quelques  rares 
espèces  d'arbres  et  d'arbustes,  et  des  palmiers  disséminés  çà  et  là.  Ces 
prairies  indéfinies,  uniformément  formées  de  gazons  et  qui  commencent 
aux  portes  de  la  ville,  se  nomment  ici  Pampas.  En  Colombie  et  au  Brésil 
de  vastes  plaines  analogues  portent  le  nom  de  Llanos  et  dans  l'Amé- 
rique Septentrionale  celui  de  Savanes  ou  Prairies. 

Les  routes  qui  conduisent  à  la  ville  dans  l'intérieur  du  pays  ne  mé- 
ritent plus  ce  nom,  à  l'exception  des  deux  principales,  dès  quelques  lieues 
de  distance.  Elles  viennent  se  noyer  dans  une  mer  d'herbes,  hors  de 
laquelle  on  voit  seulement  s'élever,  comme  des  récifs,  de  loin  en  loin  , 
de  gigantesques  Hombu's,  arbres  qui  me  paraissent  de  la  famille  des 
Urticées  et  qui  servent  ici  comme  de  colonnes  itinéraires  pour  le  voya- 
geur. 

La  flore  de  ces  Pampas  ne  comprend  que  quelques  familles;  on  y  ren- 
contre des  Solanées  herbacées,  des  Composées ,  des  Verbenacées,  des 
Crucifères,  peu  de  Campanulacées,  très-peu  deLiliacées;  mais  plus  près 
des  rivages  de  la  mer  la  végétation  s'enrichit  notablement.  Dans  les  par- 
ties basses,  voisines  du  Rio  de  la  Plata  et  exposées  aux  inondations,  on 
voit  se  développer  des  Erythrina  arborescents,  des  Arundo,des  Cyperus 
et  divers  joncs ,  tandis  que  sur  les  eaux  mêmes  flottent  des  Pistia  et  des 
Pontederia  (rosea  et  crassifolia).  De  nombreux  Tradescantia  et  des  So- 
lanées herbacées  se  pressent  sous  les  arbres  là  où  elles  trouvent  un  peu 
d'ombre.  Je  n'ai  trouvé  des  Palmiers  qu'à  l'état  cultivé,  entre  autres  des 
Corijpha  minor  et  des  Phœnix  dactylifera ,  et  l'on  s'aperçoit  aisément 
qu'ils  se  trouvent  ici  sur  leur  limite  extrême  de  croissance. 

Les  jardins  qui  environnent  la  ville  sont  entourés  de  haies  d'Agave 
americann,  de  Cactus,  d'Opuntia,  d'Arundo  donax  (?)  ou  d'une  espèce 


—  183  — 

d'Acacia.  Sous  ces  plantes  le  sol  est  tapissé  de  violettes,  et  des  Trupœo- 
lam  pentaphyllum  s'entrelacent  autour  d'elles  et  s'élèvent  quelquefois 
sur  les  Solanum  glaucum,  les  saules-pleureurs  et  les  Arbres  du  paradis 
qui  sont  plantés  dans  les  clôtures.  Ce  dernier  arbre  «  arbol  dclparaiso  » 
est  beaucoup  cultivé,  mais  de  même  que  les  saules-pleureurs,  le  Ro- 
binia  pseudo-acacia  et  les  peupliers,  sa  présence  à  Buenos-Ayres  est  le 
résultat  d'une  introduction.  Il  ressemble  assez  aux  Frênes,  mais  je  n'ai 
pas  vu  la  fleur;  son  bois  sert,  ainsi  que  celui  des  autres  arbres  nommés 
ci-dessus,  à  former  les  corals  ou  covalons,  espèces  d'enclos  où  l'on 
parque  le  bétail  pendant  la  nuit.  J'ai  en  outre  retrouvé  quatre  arbres 
fruitiers  d'Europe,  le  pêcher,  l'olivier,  l'oranger  et  le  coignassier.  Ce 
dernier  sert  de  sujet  pour  tous  les  arbres  fruitiers  à  pépins  et  pousse  à 
merveille.  La  culture  de  l'oranger  est  très-répandue,  mais  ses  fruits  ne 
sont  que  de  qualité  médiocre  :  l'olivier  croit  trop  lentement  pour  qu'il 
acquière  quelque  importance,  mais  il  en  est  autrement  du  pêcher  dont 
on  a  fait  des  plantations  immenses  et  qui  produit,  par  sa  croissance  ra- 
pide, tous  les  trois  à  cinq  ans,  une  bonne  coupe  de  bois  à  brûler  :  dès 
la  seconde  année,  il  donne  une  abondante  récolte  de  fruits  que  l'on  fait 
sécher,  comme  les  pruneaux  en  France,  pour  servir  de  nourriture 
d'hiver. 

Le  chardon  d'Espagne  (Cynara  cardunculus)  est  devenu  un  fléau  du 
pays.  Quelques  graines  sont  arrivées  en  1769,  attachées,  paraît-il,  aux 
poils  d'un  âne;  elles  ont  trouvé  le  climat  favorable  et  le  sol  bon,  et  se 
sont  multipliées  d'une  manière  effrayante  et  funeste  :  de  grandes  éten- 
dues de  terrain  en  sont  couvertes  et  ne  peuvent  plus  servir  à  rien,  car  le 
bétail  et  les  chevaux  ne  les  broutent  pas.  Ce  chardon,  les  agaves,  les 
cactées,  les  Hombu's,  les  orangers,  les  acacias  et  quelques  autres  plantes 
constituent  des  prairies  dont  la  vue  produit  une  impression  pénible  sur 
l'esprit  de  l'étranger  qui  arrive  d'Europe  et  qui,  en  présence  de  cette 
végétation  tropicale  bâtarde,  songe  avec  bonheur  aux  majestueuses  forêts 
et  aux  prairies  verdoyantes  de  la  patrie. 

Passons  maintenant  à  l'état  de  l'horticulture.  Les  maisons  de  cam- 
pagne, qui  font  pour  ainsi  dire  encore  partie  de  la  ville,  se  nomment 
quintas  :  elles  sont  la  demeure  des  riches  pendant  l'été.  Leurs  jardins 
sont  grands,  ombragés  d'arbres  fruitiers  de  tous  genres  et  spécialement 
d'orangers;  autour  des  maisons  il  y  a  quelques  plates-bandes,  plantées 
de  toutes  sortes  de  fleurs  et  d'arbustes.  Quelques  quintas  ont  des  collec- 
tions assez  complètes  et  des  jardins  floraux  très-bien  dessinés  et  parfai- 
tement entretenus,  mais  elles  sont  rares  :  on  y  voit  quelques  Acacias  de  la 
Nouvelle-Hollande,  des  Clianthus,  des  Héliotropes,  des  Cactées,  des 
Salvia,  des  Géraniums,  des  Dahlias,  des  Brugmansia  couverts  de  leurs 


—  184  — 

superbes  corolles  blanches,  des  Gardénia  florida  en  très-grands  exem- 
plaires, des  Rosiers,  des  Abutilon,  des  Hibiscus,  des  Pyrus  japonica, 
quelques  Conifères,  des  Lauriers,  des  Bignonia,  etc. ,  etc.  Les  Azalées 
et  les  Rosages  n'y  vivent  pas  et  les  Gamellias  réussissent  mal ,  ils 
ne  font  que  des  boutons  à  fleurs  et  s'épuisent  en  peu  d'années  ;  c'est 
avec  de  grandes  précautions  et  des  soins  assidus  que  les  jardiniers  par- 
viennent à  les  cultiver  et  très-rarement  à  les  multiplier.  Aussi  les  prix 
en  sont-ils  très-élevés  :  un  Camellia  passable,  de  60  centimètres  de  hau- 
teur, vaut  150  à  200  francs.  Une  fleur  de  Camellia  blanc  se  paye  en 
hiver  (juillet),  qui  est  l'époque  de  la  floraison,  une  once  d'or  ou  85  frs.; 
mais  on  n'en  vend  qu'à  des  occasions  exceptionnelles.  Les  plantes  ne  se 
vendent  que  rarement  à  Buenos-Ayres,  les  propriétaires  faisant  des 
échanges  entre  eux  et  aussitôt  que  l'un  d'eux  est  en  possession  d'une 
nouvelle  plante,  on  la  retrouve  chez  tous  les  autres. 

On  lutte  avec  peine  contre  les  animaux  nuisibles  :  en  quelques  en- 
droits il  est  nécessaire  d'entourer  chaque  pied  de  rosier  d'un  vase  d'eau 
enfoncé  dans  la  terre  pour  les  garantir  des  ravages  de  certaines  fourmis  : 
ces  insectes,  en  moins  d'une  heure,  dévorent  un  rosier  tout  entier. 

Un  grand  nombre  de  plantes  potagères  viennent  très-bien,  spéciale- 
ment les  choux,  mais  il  faut  établir  à  grands  frais  des  pompes  et  des 
bassins  pour  des  irrigations,  car  sans  cela  tout  se  dessèche  en  été.  Le 
sous-sol  est  çà  et  là  imprégné  de  sel;  à  tel  endroit,  en  creusant  un  peu, 
on  trouve  de  l'eau  salée,  tandis  que  10  pieds  plus  loin  on  retrouve  de 
l'eau  douce.  Le  blé  ne  pousse  que  des  feuilles,  sauf  en  quelques  endroits 
favorisés,  et  quant  aux  pommes  de  terre,  il  faut  les  renouveler  tous  les 
trois  ans  par  des  tubercules  étrangers,  et  malgré  cette  précaution  le 
produit  est  aqueux  et  sans  goût. 

De  l'autre  côté  du  Rio  de  la  Plata,  dans  la  Banda  oriental  del  Urai- 
quay,  la  situation,  le  sol  et  les  conditions  climatériques  sont  plus  favo- 
rables à  l'agriculture  et  à  l'horticulture. 

Tel  est  le  résumé  de  mes  observations  botaniques  et  horticoles  à 
Buenos-Ayres;  je  n'ai  d'autre  prétention  que  l'exactitude,  et  j'espère  que 
vous  voudrez  bien  accueillir  avec  indulgence  le  récit  d'un  jeune  homme 
qui  se  hasarde  pour  la  première  fois  de  mettre  ses  aperçus  par  écrit. 


. 


(  alvillc    Manche  à  cotes 


—  185  — 

JARDIN  FRUITIER. 


LA  POMME    CALVILLE   BLANCHE   A   COTES, 
Par  M.  Edouard  Morren. 

Ce  fruit  est  gros,  les  plus  beaux  mesurent  8  centimètres  en  dia- 
mètre transversal  et  6  Va  en  hauteur  ;  la  base  est  largement  aplatie 
et  le  sommet  rétréci.  L'œil  est  irrégulier,  situé  dans  une  petite  dé- 
pression ;  il  en  part  cinq  côtes  saillantes  qui  se  prolongent,  s'élargissent 
et  disparaissent  sur  le  pourtour  de  la  pomme  ;  elles  reparaissent  mais 
plus  surbaissées  du  côté  de  la  queue.  Celle-ci  est  courte  (8  millimètres), 
et  logée  dans  un  entonnoir  profond.  La  peau  est  d'abord  jaune  vert 
et  jaunit  à  la  maturité  :  du  côté  du  soleil  elle  est  souvent  pointillée  et 
vergée  de  rouge  ;  de  plus  elle  est  fine,  lisse  et  luisante.  La  chair  est 
blanche,  tendre  et  fine,  d'un  goût  sucré,  aromatique,  un  peu  acidulé, 
très-bonne  comme  toutes  les  calvilles.  Les  loges  ovariennes  sont  peu 
élevées  et  renferment  des  pépins  courts  et  larges.  Elle  mûrit  vers  la 
mi-décembre,  mais  on  peut  la  conserver  jusqu'en  avril  et  mai. 

Les  rameaux  sont  gros,  longs,  brun-violacé.  L'arbre  est  très-fertile, 
convient  très-bien  pour  la  culture  en  espalier  dans  des  expositions  au 
nord  ou  au  couchant  ;  greffé  sur  franc  on  le  cultive  en  haut  vent. 

Le  spécimen  que  nous  avons  figuré  et  décrit  provient  des  pépinières 
de  M.  Fastré,  à  Tilff ,  près  de  Liège. 


—  18(>  — 

PHYSIOLOGIE  VEGETALE. 


r  r 


DE  L'ORIGINE  DES  ESPÈCES  EX  BOTANIQUE  ET  DE  L'APPARITION 
DES  PLANTES  SUR  LE  GLOBE  , 

Par  M.  A.  Malbranche. 
(Suite  et  fin)  (i). 

La  première  période  végétale  dont  les  schistes  et  la  houille  nous  ont 
conservé  les  débris,  a  déjà,  en  effet,  une  certaine  vigueur  pour  le  premier 
degré  d'une  progression  qui  n'est  pas  terminée  de  nos  jours,  d'après 
quelques  auteurs.  Des  Fougères  arborescentes,  des  Lyeopodiacées  gigan- 
tesques disent  assez  quelle  énergie  la  végétation  avait  déjà  dans  ces  pre- 
miers âges,  et  je  me  sentirais  aussi  disposé  à  croire  à  la  décadence  qu'à 
la  progression  du  règne  végétal.  Tout  n'a-t-il  pas  un  peu  déchu  depuis 
l'origine  des  choses,  à  mesure  qu'on  s'éloigne  des  types  que  le  Créateur 
avait  formés  d'abord.  Où  sont  aujourd'hui  les  équivalents  de  ces  grandes 
races  d'animaux  dont  les  squelettes  nous  étonnent  ?  Qu'est  la  race  hu- 
maine elle-même  auprès  de  ces  patriarches,  de  ces  premiers  ancêtres 
dont  la  longévité  nous  confond  ?  Et  dans  des  temps  plus  voisins.... 

Nous  sommes  étonnés  de  ces  harnais  de  guerre 
Qu'à  peine  noire  bras  peut  soulever  de  terre, 
Et  nous  nous  demandons  si  chez  l'homme  d'alors 
La  taille  était  plus  haute  et  les  muscles  plus  Torts  ; 
N'en  doutons  pas,  leurs  fils,  triste  progéniture, 
Ont  déchu  par  degrés  de  force  et  de  stature. 

(Barthélémy.) 

Voyons  maintenant  dans  le  texte  sacré  quelles  raisons  nous  trouve- 
rons pour  ou  contre  cette  théorie.  Rappelons  d'abord  le  texte  même  de 
la  Genèse  (2)  : 

«  Dieu  dit  encore  :  Que  la  terre  produise  de  l'herbe  verte  qui  porte 
»de  la  graine,  et  des  arbres  fruitiers  qui  portent  du  fruit,  chacun  selon 
»son  espèce,  et  qui  renferment  leur  semence  en  eux-mêmes  pour  se  re- 
»  produire  sur  la  terre.  Et  cela  se  lit  ainsi.  » 

«  La  terre  produisit  donc  de  l'herbe  verte  qui  portait  de  la  graine 
»  selon    son   espèce,    et  des  [arbres    fruitiers   qui    renfermaient  leur 


(1)  Voy.  livraison  de  janvier,  p.  123.  et  de  février,  p.  154. 

(2)  On  néglige  habituellement  de  consulter  les  traditions  bibliques  ,  le  seul  livre 
où  soit  écrite  cependant  l'histoire  des  premiers  âges  de  la  terre.  Il  faut  sans  doute  se 
résoudre  à  ignorer  beaucoup  ici-bas.  Nous  ne  voyons  les  choses  qu'à  travers  des 
ombres,  mais  s'il  a  plu  à  Dieu  de  soulever  un  coin  du  voile ,  ce  n'est  pas  être  trop 
curieux  que  de  proliter  de  celle  lumière,  et  ce  serait  être  ingrat  que  de  la  dédaigner. 


—  187  — 

»  semence  en  eux-mêmes,  chacun  selon  son  espèce.  Et  Dieu  vit  que 
»cela  était  bon.  » 

«  Il  y  eut  un  soir  et  un  matin.  Ce  fut  le  troisième  jour  (1).  » 
Est-il  possible  de  voir  dans  ces  paroles  qu'il  ne  fut  créé  au 
commencement  que  des  plantes  inférieures  qui  ont  préparé  le  sol 
et  formé  le  premier  homme,  pour  recevoir  des  plantes  de  plus  en 
plus  parfaites  (2).  Est-il  possible  d'y  comprendre  qu'il  ne  fût  créé 
qu'un  petit  nombre  de  types,  ou  plutôt  de  formes  incertaines,  sus- 
ceptibles de  se  modifier  considérablement  et  attendant  des  causes  exté- 
rieures, du  temps,  de  l'habitude  leur  perfection  et  leur  stabilité  (3). 
Il  me  parait  que  Dieu  a  commandé  que  la  terre  produisit  tout 
de  suite  des  plantes  parfaites  :  «  des  herbes  et  des  arbres  qui  por- 
tent leur  fruit ,  chacun  selon  son  espèce.  »  Cela  ne  coûtait  pas 
davantage  à  sa  puissance  ;  cela  convenait  mieux  à  sa  majesté.  Et 
il  a  été  obéi  complètement  :  «  et  cela  se  fit  ainsi....  Et  Dieu  vit 
que  cela  était  bon.  »  Faudrail-il  admettre  que  de  longs  siècles  ont 
passé  sur  des  créations  élémentaires,  que  les  animaux  avaient  déjà 
paru  (puisque,  s'il  faut  nous  décider  d'après  les  débris  fossiles,  il 
est  nécessaire  d'arriver  à  la  période  jurassique  pour  trouver  des 
végétaux  analogues  à  ceux  existant  aujourd'hui)  avant  que  le  créa- 
teur eût  pu  juger  son   œuvre  et   trouver  que  cela  était  bon. 

L'historien  sacré  ne  distingue  pas  de  degrés,  comme  pour  le  règne 
animal.  Avant  de  passer  à  une  autre  période,  il  nous  apprend  que 
la  terre  avait  produit  et  que  Dieu  vit  que  cela  était  bon.  «  Il  y  eut 
un  soir  et  un  matin.  Ce  fut  le  3me  jour.  »  Ainsi  ,  avant  toute  autre 
création,  voici  le  règne  végétal  complet,  jugé  bon.  Je  ne  vois  point 
de  place  à  l'équivoque,  à  l'incertitude.  L'herbe  n'a  point  dû  précéder 
l'arbre  mais  l'accompagner.  Tandis  que  celui-ci  s'élançait  dans  une 
atmosphère  chargée  des  gaz  les  plus  favorables  à  la  végétation,  celle- 
là  végétait  modestement  à  ses  pieds ,  cachant  la  rudité  d'un  sol  encore 
brûlant.  L'harmonie  qui  résulte  de  la  distribution  des  plantes  devait 
régner  déjà  sur  la  terre.  On  ne  saurait  concevoir  autrement  l'œuvre 
divine.  «Il  a  pu  plaire  à  Dieu,  dit  le  cardinal  Wiseman,  de  faire 
«paraître  les  plantes  dès  le  premier  instant  de  leur  naissance  dans 
»  toute  leur  grandeur   et  leur  beauté  (4).  » 

S'il  n'y  a  point  eu  développement  progressif  dans  l'apparition  des 


(1)  Gcnes.  c.  I,  v.  11  et  12.  Traduct.  de  Lcmaistrc  de  Sary. 

(2)  POIRET  ,  FÉE  ,  BrONGNIART. 

(5)  A.  St.-Hilaire  ,  Lecoq  ,  Naudin. 

(4)  Discours  sur  les  rapports  entre  la  science  rt  la  religion   révélée .  5e  Disc  , 
P.  212. 


—  188  — 

végétaux,  ces  herbes  et  ces  arbres,  premiers  habitants  du  sol,  (liftèrent 
cependant  de  ceux  que  nous  voyons  aujourd'hui.  Ceux-ci  sont-ils  leurs 
contemporains  des  premiers  âges,  ou  bien  leur  ont-ils  succédé  à  cer- 
taines époques?  Nous  entrons  là  dans  une  nouvelle  phase  de  la  discus- 
sion qui  sera  traitée  brièvement. 

§  II.  Toutes  les  espèces  végétales  sont-elles  contemporaines  de  la 
première  création  de  ce  3e  jour  où  la  terre,  fécondée  par  la  parole  di- 
vine, se  couvrit  de  sa  première  parure? 

A  l'examen  général  des  fossiles  il  ressort  une  loi  que  M.  Pietit 
a  ainsi  formulée  :  «  Les  espèces  d'animaux  d'une  époque  géologique 
«n'ont  vécu  ni  avant,  ni  après  cette  époque;  en  sorte  que  chaque 
«formation  a  ses  fossiles  spéciaux  et  qu'aucune  espèce  ne  peut  être 
»  trouvée  dans  deux  terrains  d'âge  différent  (1).  »  Cette  absence  des 
formes  d'un  terrain  dans  tous  ceux  qui  l'ont  précédé  serait  impossible 
à  expliquer,  si  toutes  les  espèces  ont  primitivement  vécu  simulta- 
nément. On  ne  peut  raisonnablement  supposer  que  toutes  les  formes 
postérieures  à  une  époque  se  sont  toujours  dérobées  aux  recherches, 
ou  bien  que,  seules,  elles  ont  survécu  toutes,  sans  pertes,  sans 
extinction  appréciable,  aux  révolutions  du  globe,  révolutions  qui  ont 
pourtant  anéanti  de  si  puissantes  végétations,  tandis  que  les  plus 
délicates  aurait  résisté.  Il  faut  cependant  se  placer  nécessairement 
dans  l'une  de  ces  deux  hypothèses ,  si  l'on  admet  cette  contemporanéité 
des  espèces  actuelles  et  éteintes.  Leur  délicatesse,  que  l'on  pourrait 
invoquer  pour  supposer  qu'elles  ont  pu  échapper  aux  investigations 
de  la  science,  rend  encore  moins  probable  qu'elles  aient  pu  résister 
aux  bouleversements  qu'il  leur  a  fallu  traverser  pour  arriver  jusqu'à 
nous. 

Cette  seule  considération  me  semble  assez  importante,  assez  décisive, 
pour  ne  pas  nous  arrêter  davantage  à  cette  opinion. 

§  III.  De  tous  les  faits  géologiques  il  résulte  clairement  qu'il  y  a  eu 
succession  dans  l'apparition  des  végétaux.  Après  chaque  révolution  ter- 
restre de  nouvelles  espèces  ont  paru,  non  pas  dérivation  de  formes  anté- 
rieures, nous  l'avons  reconnue  impossible,  pas  davantage  survivance 
de  générations  contemporaines,  mais  types  absolument  nouveaux,  par- 
ticuliers à  leur  époque,  produit  de  créations  nouvelles,  successives  ou  du 
développement  de  germes  préexistant. 

Je  ne  m'abaisserai  point  à  discuter  la  théorie  des  créations  spontanées, 
dont  l'énoncé  seul  répugne  au  plus  simple  bon  sens.  Créations  sponta- 
nées, accouplement  barbare  de  deux  mots  qui  s'excluent;  car  l'idée  de 

(1)   Traité   île    Paléontologie. 


—  189  — 

création  implique  nécessairement  un  créateur,  un  intermédiaire,  agis- 
sant sur  la  chose  produite  ;  l'idée  de  spontanéité  marque,  au  contraire, 
un  acte  que  rien  n'a  provoqué,  un  mouvement  propre,  indépendant. 
Générations  spontanées  n'est  pas  plus  heureux;  qui  dit  génération,  in- 
dique une  descendance  d'êtres  antérieurs,  de  parents  générateurs.  Un 
esprit  sensé  ne  peut  soutenir  ce  système  qui  n'a  bientôt  plus  que  des 
contradicteurs. 

Des  créations  successives  supposent  que  la  puissance  créatrice,  agis- 
sant à  chaque  époque,  suppléait  par  de  nouvelles  créations  aux  extinc- 
tions périodiques  des  êtres.  Cette  opinion,  adoptée  par  quelques  auteurs, 
ne  les  satisfait  point  complètement.  «  En  effet,  lisons-nous  dans  la  géo- 
logie appliquée,  bien  que  cette  théorie  ne  rende  pas  exactement  compte 
»de  tous  les  faits  et  qu'il  en  coûte  à  l'esprit  d'admettre  que  le  créateur 
»ait,  pour  ainsi  dire,  brisé  à  plusieurs  reprises  son  œuvre  de  la  veille, 
«elle  est  loin  de  soulever  des  objections  aussi  graves  que  les  deux 
«autres  (4).  »  Cette  réflexion  révèle  bien  l'embarras  de  la  science  lors- 
qu'elle n'a  plus  que  les  cadavres  pétrifiés  des  êtres  pour  se  prononcer 
sur  leur  naissance,  leur  vie  et  leur  mort. 

Une  dernière  théorie  admet  la  préexistence  originelle  de  tous  les 
germes  et  leur  développement  successif  dans  le  temps ,  à  mesure  que  se 
présentaient  les  conditions  favorables,  prévues  parle  créateur.  Dans 
cet  ordre  d'idées,  les  germes  de  toutes  les  espèces  furent  créés  au  com- 
mencement, un  certain  nombre  se  développa  d'abord,  types  appropriés 
aux  conditions  de  leur  époque  et  la  caractérisant.  Une  révolution  sur- 
vient, anéantit  tout  ou  partie  de  ces  êtres  ;  de  nouveaux  germes  se 
réveillent,  produisent  de  nouvelles  espèces,  et  ainsi  de  suite  jusqu'à 
l'époque  actuelle  qui  terminera,  nous  pouvons  le  penser,  la  succession 
de  ces  diverses  évolutions. 

Voici  comment  St.  Augustin ,  qui  fut  une  des  plus  grandes  lumières 
de  son  temps,  résume  cette  théorie  :«  La  production  des  êtres  vivants 
«et  animés,  dit-il,  n'était  complète  et  terminée  que  d'une  certaine  ma- 
nière dans  leur  principe  et  dans  leur  cause,  en  ce  sens  que  la  terre  et 
»les  eaux,  en  passant  du  néant  à  l'être,  avaient  reçu  en  même  temps  le 
«pouvoir  d'amener  au  jour,  à  l'époque  fixée,  les  êtres  vivants  destinés  à 
«répandre  dans  les  airs,  dans  les  abîmes  des  mers  et  sur  tous  les  points 
«du  globe  la  vie  et  le  mouvement  qui  forment  le  plus  bel  ornement  de 
«la  nature...  Ainsi,  répète  le  savant  Docteur,  les  êtres  vivants  n'ont 
«apparu  dans  l'état  actuel  que  dans  le  temps,  ou  autrement  dit,  par  le 
«déroulement  successif  des  siècles  (per  volumina  seculorum)  (2).  » 

(1)  C.  d'Orbigny  et  A.  Gente    Loc.  cil. 

(2)  Lettres  sur  la  Genèse. 


—  190  — 

Cuvier ,  ce  génie  qui  a  jeté  tant  de  lumière  sur  les  questions 
géologiques,  a  écrit  ces  paroles  remarquables  :  «  Les  formes  ne  se 
«produisent  ni  ne  se  changent  elles-mêmes.  La  vie  suppose  leur  exis- 
tence ;  elle  ne  peut  s'allumer  que  dans  des  organisations  toutes 
»  préparées  et  les  méditations  les  plus  profondes  comme  les  observations 
»les  plus  délicates  n'aboutissent  qu'au  mystère  de  la  préexistence  des 
»  germes  (1).  » 

Plusieurs  esprits  d'élite,  Haller,  l'admirable  physiologiste  Bonnet, 
le  cardinal  de  Polignac,  Leibnitz,  Mallebranche  ont,  exprimé  la  même 
opinion.  Seulement  quelques-uns,  comme  l'auteur  de  l'Anli-Lucrèce, 
vont  bien  plus  loin  que  la  thèse  que  je  défends.  Ils  prétendent  que 
dans  les  premiers  germes,  dans  les  premières  espèces  créées,  étaient 
contenues  toutes  celles  qui  devaient  se  développer  dans  la  suite  des 
siècles.  Ainsi  tous  les  chênes  qui  existent,  ont  existé  ou  existeront, 
étaient  contenus  en  germes  dans  le  premier  qui  fût  créé.  L'humanité 
tout  entière  était  dans  Adam.  On  fait  valoir  à  l'appui  de  cette  théorie 
des  arguments  qui  ne  manquent  pas  de  fondement,  mais,  sans  me 
prononcer  sur  leur  valeur,  je  m'arrête  aux  limites  que  je  me  suis  tracé  : 
l'apparition  des  espèces  sur  le  globe.  Le  reste  regarde  leur  propagation 
et  leur  reproduction  qui  me  semblent  suffisamment  expliquées  par 
la  faculté  dont  elles  furent  clouées,  en  les  créant,  de  se  reproduire 
par  leur  semence. 

Créations  successives  ou  germes  préexistants,  la  science  ne  peut 
plus  nous  éclairer  sur  le  choix  entre  ces  deux  systèmes  ;  où  cher- 
cherions-nous des  faits  analogues.  Voyons  si  les  traditions  bibliques 
ne  nous  apporteront  pas  quelque  lumière. 

Rien  dans  la  Genèse  ne  peut  faire  supposer  une  périodicité  clans 
la  création  des  plantes,  une  répétition  de  l'action  créatrice  sur  la 
matière.  Il  paraît  au  contraire  que  le  règne  végétal  a  été  formé  d'un 
seul  jet.  Serait-il  bien  raisonnable  de  croire  que,  après  chaque  phase 
de  la  création  animale,  Dieu  fût  revenu  au  règne  végétal?  Non!  Il 
exprime  un  commandement  :  «  que  la  terre  produise.  »  Et  la  terre 
à  cette  parole  est  fécondée,  pénétrée  de  ces  germes  innombrables 
dont  l'évolution  successive  devait  remplir  les  longs  siècles  du  globe. 
Tout  d'abord  une  première  génération  puissante  couvre  la  nudité 
du  sol  et  Dieu  juge  «  que  cela  est  bon.  »  Mais  voici  une  nouvelle 
explication  du  texte  hébreu,  que  nous  a  fait  connaître  M.  Marcel 
de  Serres,  qui  vient  merveilleusement  à  l'appui  de  la  création  ori- 
ginelle de  tous  les  germes  et  donner  à  cette  doctrine  une  grande 
vraisemblance. 

(1)  Rèfprc  intimai:  introchir1io?i. 


—  491  — 

M.  Marcel  de  Serres  a  fait  remarquer  que  le  latin  de  la  Vulgate 
n'a  pas  rendu  exactement  le  texte  hébreu.  Mais  dans  cet  entraînement 
des  esprits  vers  la  succession  graduée  des  êtres,  il  a  forcé  le  sens 
des  mots  pour  leur  faire  exprimer  cette  progression  que  l'on  voulait 
retrouver  partout.  «  Descheb ,  qui  répond  au  latin  germen  et  que 
»nous  avons  traduit,  dit-il,  avec  M.  Cahen,  par  toutes  sortes  de 
«végétaux,  faute  de  mieux,  semble  plutôt  signifier  la  plante  cellulaire, 
»la  plus  simple  du  règne  végétal.  En  second  lieu  l'expression  Descheb 
»(Herba)  a  été  généralement  entendue  comme  désignant  les  herbes;  ce 
«qui  comprend  tous  les  végétaux  non  ligneux.  Enfin  par  hets  (arbor) , 
.«Moïse  a  indiqué  les  arbres  proprement  dits;  gradation  qui  est  par- 
«faitement  d'accord  avec  ce  que  nous  a  appris  la  succession  des  couches 
«terrestres  sur  la  succession  des   végétaux  (1).  » 

Il  y  a  dans  ce  raisonnement,  au  point  de  vue  de  la  science  végétale, 
plusieurs  inexactitudes.  Jamais  les  plantes  cellulaires  (en  acceptant  ce 
mot),  les  herbes  et  les  arbres,  ne  peuvent  former  une  progression  d'êtres 
comparables,  soit  par  leur  organisation,  soit  par  leur  vigueur.  Les 
herbes  comprennent  des  plantes  de  l'organisation  la  plus  parfaite,  tandis 
que  les  arbres  monocotyledonées  sont  placés  très  bas  sur  l'échelle  de  la 
perfection  végétale.  Nous  allons  revenir  à  Germen  ;  mais  les  herbes  et 
les  arbres,  si  nous  saisissons  bien  la  pensée  de  l'écrivain  sacré,  ex- 
priment toutes  les  espèces  de  végétaux.  Ce  fut  là  les  deux  divisions  des 
premiers  naturalistes,  et  c'est  encore  de  nos  jours,  pour  les  personnes 
étrangères  aux  sciences  naturelles,  une  façon  habituelle  de  distinguer 
les  plantes.  On  ne  peut  voir  dans  ces  expressions  qu'un  langage  à  la 
portée  de  tous.  De  même  quand  Josué  commande  au  soleil  de  s'arrêter; 
quand  nos  astronomes  annoncent  le  lever  et  le  coucher  de  cet  astre, 
ils  ne  s'expriment  point  comme  des  savants,  ils  parlent  pour  être  com- 
pris de  tout  le  monde. 

Je  ne  suis  rien  moins  qu'hébraïsant,  mais,  en  acceptant  le  sens  latin 
attribué  à  l'hébreu  par  M.  Marcel  de  Serres,  il  peut  bien  m'ètre  permis 
d'en  discuter  botaniquement  les  limites  et  la  valeur.  Ainsi  en  rendant 
germen  (heschele)  par  plantes  cellulaires,  on  me  semble  avoir  totale- 
ment dénaturé  le  sens  exact  de  ce  mot.  Germen,  d'où  notre  mot  fran- 
çais germe,  n'a  jamais  exprimé  que  le  premier  état  d'un  être,  le  point 
de  départ  d'un  système  qui  va  se  développer,  la  semence,  l'embryon 
d'un  type  qui  attend  des  circonstances  favorables  pour  commencer  son 
évolution  ;  mais  jamais  en  être  développé  ,  quelque  élémentaire  et 
quelque  simple  qu'on  le  suppose.  Par  germen  il  faut  absolument  en- 
tendre, ce  que  nous  apprend  le  sens  littéraire,   naturel,  exact,   ces 

(1)  Dans  les  Etudes  Pliilnsnpfi.  sur  le  clirislirmismr.  par  A.  IS'icoi.as,  T.  1  .  P.  364. 


—  492  — 

germes  dont  je  vous  parlais  en  établissant  la  constance  de  l'espèce,  en 
germes  créés  par  une  finalité  arrêtée  dans  le  dessein  du  créateur  (1). 

Dès  lors  tout  se  comprend  sans  effort:  germina  herbammet  arborum; 
les  germes  de  toutes  les  plantes  sont  créés  dans  le  sol,  préparé  pour  les 
recevoir  (2).  La  vie  repose  en  eux,  attendant  pour  se  produire  des  con- 
ditions favorables,  son  printemps,  si  vous  voulez.  L'action  divine  est 
complète  et  terminée,  le  jeu  des  éléments  fera  le  reste.  Ainsi  fait  le 
semeur  :  quand  il  a  confié  à  la  terre  travaillée  la  précieuse  semence,  il 
attend  de  la  vertu  qui  réside  en  elle  et  des  circonstances  favorables  des 
saisons,  la  moisson  promise  à  ses  peines  ;  et,  médiocre  ou  abondante, 
elle  ne  se  fait  jamais  attendre.  Jamais  l'août  n'a  passé  sans  que  les  épis 
dorés  aient  couvert  les  sillons ,  sans  que  la  pourpre  des  raisins  ait  rougi 
les  treilles. 

Ce  sommeil  des  germes  n'a  rien  qui  répugne  à  la  raison.  Nous  voyons 
tous  les  jours,  par  une  singulière  analogie,  des  graines  enfouies  reposer 
de  longues  années  endormies  dans  le  sol  jusqu'à  ce  que,  des  boulever- 
sements de  terrain  lui  rapportent  de  l'air  et  de  la  lumière,  ces  conditions 
nouvelles  déterminent  leur  évolution. 

De  même  encore  nous  voyons  tous  les  ans  chaque  plante  se  mon- 
trer à  son  époque,  à  sa  saison,  sans  que  nous  nous  rendions  bien 
compte  de  ces  différences.  Chaque  automne  le  sol  reçoit  les  graines 
de  toutes  les  plantes;  mais,  en  vain  avril  réchauffe  la  terre  de  ses 
premiers  rayons,  en  vain  mai  ramène  les  longs  jours  et  les  chauds 
soleils,  tandis  que,  dès  mars,  les  tussilages  ont  épanoui  leurs  ca- 
pitules, les  scabieuses  attendront  que  les  ardeurs  de  la  canicule  aient 
passé  sur  leurs  jeunes  tiges.  Et  plus  tardifs  encore,  le  colchique  et 
l'œillet  superbe  ne  viennent  qu'aux  derniers  beaux  jours  réjouir  la 
terre  qui  se  refroidit  déjà.  La  végétation  se  distribue  ainsi  pendant  les 
mois  de  l'année,  comme  elle  a  dû  le  faire  pendant  les  siècles  qui  ne  sont 
que  comme  un  jour  devant  le  Tout-Puissant. 


(1)  Il  ne  peut  s'agir  ici  que  de  l'idée  métaphysique  du  germe  ,  et  nullement  de 
semences  ou  d'embryon  comme  les  botanistes  l'entendent.  Sans  chercher  davantage 
à  pénétrer  les  mystères  de  cette  œuvre  divine,  on  doit  se  faire  une  idée  différente 
de  l'exercice  d'une  toute-puissance  qui  crée  et  de  la  génération  d'êtres  qui  se  repro- 
duisent. 

(2)  Nous  ne  pouvons  résister  au  désir  de  citer  cette  belle  pensée  :  «  Le  Créateur 
«avait  dès  le  principe  chargé  la  mer  de  travailler  au  profit  de  la  terre  ,  comme  un  ro- 
buste esclave  accomplit  la  tâche  trop  rude  pour  le  père  de  famille  ;  l'Océan  avant 
■  d'arroser  notre  sol  parle  mécanisme  des  nuages,  l'avait  labouré,  retourné,  sans 
«épargner  les  façons  ni  l'engrais.  » 

Kosei.lt  nn  Lorgi  fs.  La  vmrt  avant  l'homme,  p.  12G. 


i.  Delphinium  cardinale  Book.  2/Delphinium  ajsureum.flo.p] 
?>.  Delphinium  coernlesceiis  fb-pk.  4. Delphinium  maonifieum. 


—  193  — 

HORTICULTURE. 


LES  DAUPHINELLES  DES  JARDINS, 
Par  M.   Edouard  Morren. 

Le  nombre  des  dauphinelles  aujourd'hui  décrites  et  figurées  par  les 
botanistes,  s'élève  à  soixante  espèces  environ ,  la  plupart  originaires  de 
l'Europe  ou  de  l'Amérique  du  Nord.  Leur  nom  exprime  l'analogie  des 
fleurs,  avant  leur  épanouissement,  et  de  la  forme  des  dauphins  (del- 
phinus),  figurés  dans  les  armoiries.  Elles  sont  en  effet  curieuses  et 
insolites;  ces  fleurs  se  prolongent  en  arrière  en  un  long  appendice, 
nommé  éperon,  formé  par  le  sépale  supérieur.  Le  calice  est  pétai oïde 
et  coloré,  à  sépales  inégaux,  le  supérieur  redressé  en  cornet  pointu  ou 
éperon;  quatre  ou  deux  pétales  irréguliers,  souvent  soudés  en  un  seul, 
forment  une  corolle  presque  monopétale,  terminée  à  sa  base  par  un 
éperon  engainé  dans  celui  du  calice.  Les  étamines  sont  nombreuses;  les 
carpelles,  qui  sont  des  follicules,  sont  sessiles,  libres  et  verticillés; 
leur  nombre  est  variable  de  1-5;  les  graines  sont  anguleuses  et  ru- 
gueuses. 

Les  dauphinelles  sont  annuelles  ou  vivaces,  rustiques,  d'une  culture 
facile,  terre  franche,  meuble,  bonne  exposition,  multiplication  des 
espèces  vivaces  par  éclats,  des  annuelles  par  graines,  d'une  floraison 
abondante  et  on  les  recherche,  avec  raison,  ainsi  que  les  aconits,  à  cause 
de  leur  belle  couleur  bleue  dont  la  nature  s'est  montrée  si  avare.  La 
plupart  des  espèces  répandues  dans  les  jardins  ont  donné  des  variétés 
de  coloration  et  à  fleurs  doubles  ou  pleines.  Ces  espèces,  les  plus  recom- 
mandables,  sont  :  le  Pied  d'alouette  ou  Delphinium  Ajacis  Linn.;  la 
dauphinelle  des  champs  ou  D.  consolida  L.  qui  fleurit  dans  les  moissons 
après  les  bluets  et  les  coquelicots;  la  dauphinelle  d'Orient,  D.  orientale 
Gay,  \eD.  cardiopetalum  DG.  des  Pyrénées;  la  dauphinelle  à  grandes 
fleurs,  D.  grandiflorum  L.,  originaire  de  la  Sibérie,  vivace  et  à  grandes 
fleurs  bleues  souvent  doubles;  le  magnifique  D.  Cheilanthum  Fisch, 
var.  Hendersoni;  le  D.  albiflorum  DC.  ou  dauphinelle  à  fleurs  blanches, 
vivace  et  venant  d'Arménie;  le  D.  rtegans  var.  de  B.  de  Barlow,  à 
grandes  fleurs  semi-doubles  d'un  bleu  chatoyant;  le  D.  azureum  dé- 
couvert par  Michaux  dans  l'Amérique  boréale;  le  D.  intermedium  Ait. 
si  fécond  en  variétés,  le  D.  speciosnm  Bieb.  du  Caucase;  la  dauphinelle 

BEI.G.    HORT.    T.    VI.  19 


—  194  — 

à  fleurs  tristes  (D.  triste  Fisch.),  remarquable  par  sa  coloration  brun- 
fauve  et  noire  et  enfin  la  Staphysaigre  (D.  staphysagria  Lin.)  employée 
en  médecine. 

Sur  la  planche  37  sont  peintes  quelques  fleurs  du  D.  cardinale  Hook. 
que  nous  avons  signalé  et  décrit  à  la  page  101  et  dont  nous  pouvons 
aujourd'hui  annoncer  l'arrivée  sur  le  continent  et  la  mise  en  vente.  Le 
D.  azureum  Mich.  a  produit  une  charmante  variété  à  fleurs  pleines 
(fig.  2)  d'un  bleu  tendre;  celles  du  D.  intermedium  Ait .  var.  carulescens 
fl.  pi.  ont  les  pétales  lilas,  chatoyants,  bordés  d'azur  (fig.  3)  ;  enfin 
le  D.  magnijicim  Paxt.  (fig.  3)  est  peint  du  bleu  le  plus  intense. 


EXPÉRIENCES  SUR  LA  VÉGÉTATION  DES  PLANTES 

ÉPIPHYTES, 

Et  conséquences  qui  en  découlent  relativement  à  la  culture  de  ces  plantes. 

Par  M.  P.  Duchahtre. 

La  connaissance  de  la  végétation  est  la  base  la  plus  solide,  je  ne 
crains  même  pas  de  dire  la  seule  base  solide  que  puisse  avoir  la  culture. 
En  effet,  si  l'on  savait  comment  toutes  les  plantes  végètent,  si  l'on  était 
fixé  sur  les  conditions  d'humidité,  de  température,  de  sol  qui  déter- 
minent leur  accroissement,  sur  la  manière  dont  elles  se  comportent 
relativement  à  l'air  qui  les  entoure,  à  la  terre  dans  laquelle  s'enfoncent 
leurs  racines,  il  suffirait  de  reproduire  exactement  pour  elles  dans  les 
jardins  l'état  de  choses  en  vue  duquel  la  nature  les  a  organisées.  Dès  lors 
toute  culture  deviendrait  rationnelle,  aussi  éclairée  dans  ses  principes 
que  sûre  dans  ses  résultats,  et  les  milliers  d'observations  individuelles 
dont  se  composent  aujourd'hui  l'art  du  jardinage,  au  lieu  de  rester  des 
faits  isolés  et  purement  traditionnels,  se  relieraient  en  un  corps  de  doc- 
trine cohérent  et  méthodique. 

Malheureusement  l'horticulture  ne  possède  pas  encore  cette  base  sur 
laquelle  tout  porte  à  espérer  qu'elle  reposera  plus  tard.  Quelques  faits 
généraux  ont  été  découverts,  quelques  grandes  lois  ont  été  posées;  mais, 
sur  une  foule  de  points,  elle  est  encore  réduite  à  marcher  à  peu  près 
au  hasard,  à  procéder  par  simples  tâtonnements.  Cependant  ii  serait 
injuste  de  lui  en  faire  un  reproche  ;  car  cette  connaissance  approfondie 
de  la  végétation  sur  laquelle  elle  devrait  fonder  tous  ses  préceptes,  ce 
n'est  pas  elle  qui  est  appelée  à  l'acquérir  ;  c'est  à  la  physiologie  végétale 


—  195  — 

à  lui  en  fournir  les  éléments  que  sa  mission  à  elle  est  de  féconder  par 
une  application  intelligente  et  raisonnée. 

Mais,  il  faut  bien  le  reconnaître,  la  physiologie  végétale  n'est  pas 
encore  parvenue  à  répandre  le  même  jour  sur  tous  les  phénomènes  de 
la  vie  des  plantes.  Malgré  les  travaux  assidus  d'un  grand  nombre 
d'hommes  éminents,  une  obscurité  presque  complète  couvre  quelques 
parties  de  son  vaste  domaine  ;  l'incertitude  règne  sur  plusieurs  autres, 
et,  parmi  celles  qu'on  regarde  comme  suffisamment  connues,  on  est 
quelquefois  surpris  de  reconnaître,  à  l'essai,  que  tel  principe  qu'on 
acceptait  de  confiance  avait  besoin  d'être  confirmé  par  l'expérimentation, 
même  que  telle  idée  générale  qui  était  admise  comme  vérité  démontrée 
était  en  complet  désaccord  avec  les  faits.  Cette  assertion,  qui  pourra 
paraître  hardie,  j'espère  en  démontrer  l'exactitude  dans  cette  note  à 
propos  d'un  sujet  qui  intéresse  également  le  physiologiste  et  l'horti- 
culteur. 

Il  existe  une  catégorie  de  plantes  très-remarquables  par  la  situation 
exceptionnelle  dans  laquelle  elles  vivent  ;  c'est  celle  des  plantes  qu'on 
nomme  épiphytes  ou  épidendres,  pour  indiquer  qu'elles  végètent  dans 
une  indépendance  complète  du  sol ,  fixées  à  l'écorce  d'arbres  qui  leur 
servent  uniquement  de  supports.  Il  faut  bien  se  garder  de  confondre 
ces  végétaux  singuliers,  placés  en  général  par  la  nature  dans  les  régions 
chaudes  du  globe,  avec  d'autres  qui  croissent  également  sur  des  arbres, 
mais  dans  des  conditions  entièrement  différentes,  par  exemple  avec  notre 
Gui.  En  effet,  tandis  que  les  premiers  ne  cherchent  sur  les  arbres  qu'un 
simple  support,  les  derniers  y  puisent  l'aliment  qui  leur  est.  nécessaire; 
pour  cela  ils  enfoncent  profondément  dans  le  tissu  qui  doit  remplacer 
pour  eux  le  sol  nourricier,  soit  des  racines  douées  d'une  organisation 
particulière  et  d'un  mode  de  formation  tout-à-fait  spécial ,  soit  des 
suçoirs  qui  produisent  pour  eux  le  même  effet.  Ce  sont  donc  de  véri- 
tables parasites,  dont  l'existence  est  tellement  liée  à  celle  de  la  plante 
nourricière  qu'ils  meurent  nécessairement  lorsqu'elle  meurt.  Au  con- 
traire, les  épiphytes  sont  uniquement  superficielles;  leurs  racines 
flottent  simplement  dans  l'air,  ou  tout  au  plus  elles  se  collent  à  la  sur- 
face de  l'écorce,  du  bois,  des  corps  divers  avec  lesquels  elles  sont  en 
contact.  Ces  plantes  ne  peuvent  dès  lors  rien  puiser  dans  le  tissu  de 
l'arbre  qui  les  porte  ;  aussi  n'ont-elles  avec  les  vraies  parasites  qu'une 
ressemblance  apparente  et  non  réelle  ;  ce  sont,  comme  on  l'a  dit,  des 
fausses-parasites,  pour  lesquelles  il  est  indifférent  que  leur  support  soit 
vivant  ou  mort,  et  qu'on  cultive  avec  un  plein  succès  en  se  bornant  à 
les  fixer  sur  des  branches  coupées  ou  bien  à  de  simples  morceaux  de 
liège.  Pour  achever  de  fixer  les  idées  à  ce  sujet,  je  rappellerai  que  les 


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épiphytcs  habituellement  cultivées  dans  les  jardins  appartiennent  aux 
familles  des  Orchidées,  des  Broméliacées  et  à  un  petit  nombre  d'autres 
groupes  naturels. 

11  semble  logique  de  supposer  que  des  plantes  sans  la  moindre  rela- 
tion avec  le  sol ,  dépourvues  de  tout  organe  propre  à  puiser  dans  les 
arbres  qui  les  portent  l'aliment  nécessaire  à  leur  nutrition ,  des  plantes 
pour  lesquelles  il  n'existe  pas  d'autre  milieu  que  l'air  atmosphérique, 
doivent  puiser  dans  cet  air  l'humidité  dont  elles  ont  besoin  pour  leur 
développement.  C'est  en  effet  l'idée  à  laquelle  on  s'est  universellement 
arrêté.  On  a  dit  et  répété  dans  tous  les  ouvrages  de  botanique  et  d'hor- 
ticulture que  les  plantes  épiphytes  vivent  principalement  de  l'humidité 
en  vapeur  qu'elles  puisent  dans  l'air;  que  les  organes  de  cette  absorp- 
tion nécessaire  à  leur  existence  sont,  d'un  côté,  les  feuilles,  de  l'autre 
et  principalement  les  racines  aériennes.  En  examinant  ces  racines  au 
point  de  vue  de  leur  structure  anatomique,  on  y  a  reconnu  une  orga- 
nisation spéciale.  Par  exemple,  dans  celles  des  Orchidées,  on  a  constaté 
depuis  longtemps  l'existence  d'une  enveloppe  extérieure  formée  d'un 
tissu  particulier,  et  l'on  a  dit  dès  lors  de  la  manière  la  plus  positive  que 
cette  zone  externe  est  spécialement  chargée  d'absorber  et  de  condenser 
la  vapeur  aqueuse  de  l'atmosphère,  pour  l'introduire  dans  l'intérieur 
du  végétal  qui  doit  en  faire  son  principal  aliment. 

Partant  de  cette  idée,  les  horticulteurs  ont  imaginé  pour  les  plantes  épi- 
phytes en  général,  et  pour  les  Orchidées  tropicales  en  particulier,  un  mode 
de  culture  tout  spécial.  Pour  mettre  à  la  portée  des  organes  absorbants  la 
vapeur  aqueuse  avec  laquelle  on  suppose  qu'elles  doivent  surtout  se 
nourrir,  on  s'est  attaché  à  rendre  extrêmement  humide  l'air  des  serres 
dans  lesquelles  on  les  cultive.  Nous  lisons  même  dans  un  ouvrage  récent 
très-connu  et  justement  estimé  sur  la  Culture  des  Orchidées  (par 
M.  Morel,  p.  66),  que,  pour  certaines  de  ces  plantes,  l'humidité  de  la 
serre  peut  suffire.  D'un  autre  côté  ,  le  célèbre  horticulteur  anglais 
Loddiges  ,  après  avoir  épuisé  tous  les  moyens  ordinaires  pour  rendre 
extrêmement  humide  l'air  de  sa  serre  à  Orchidées, est  allé  jusqu'à  trans- 
former ses  bâches  en  un  vaste  bassin  toujours  rempli  d'eau,  sur  lequel 
sont  disposées  ses  plantes ,  soutenues  simplement  par  des  supports  à 
quelques  centimètres  au-dessus  de  la  surface  du  liquide. 

Il  y  a  mieux.  L'un  des  botanistes  les  plus  distingués  de  l'Allemagne, 
M.  Unger,  a  fait  deux  expériences  par  lesquelles  il  croit  avoir  démontré 
non-seulement  que  les  racines  aériennes  absorbent  la  vapeur  d'eau  ré- 
pandue dans  l'air,  mais  encore  qu'elles  en  absorbent  une  grande  quan- 
tité. Dans  sa  première  expérience,  il  a  vu,  dit-il,  une  racine  aérienne 
(VEpidendrum  elongatum  longue  de  17  pouces,  placée  dans  un  air  saturé 


—  197  — 

de  vapeur  d'eau,  absorber  en  24  heures  plus  de  */9  de  son  poids 
(Voyez  Anatomie  und  Physiol.  der  Pflanzen,  1855,  pag.  506  et  507). 
Sa  seconde  expérience  a  porté  sur  une  épiphyte  de  la  famille  des  Com- 
mélynées,  le  Spironema  fragrans  Lindl.  Un  pied  de  cette  plante,  simple- 
ment fixé  contre  un  morceau  de  bois,  a  été  suspendu  dans  l'atmosphère 
humide  d'une  serre.  Dans  l'espace  d'un  an,  dit  le  savant  allemand,  il  a 
doublé  de  poids,  grâce  uniquement  à  la  vapeur  d'eau  répandue  dans 
l'air  qu'il  a  pu  absorber  au  moyen  de  ses  racines  aériennes  (Voy.  Sit- 
zungsberichte  ,vol.  xn,  p.  349). 

Eh  bien,  cette  idée  que  les  épiphytes,  Orchidées,  Broméliacées  et 
autres,  vivent  surtout  de  la  vapeur  d'eau  absorbée  par  leurs  feuilles  et 
leurs  racines  aériennes;  cette  idée  universellement  admise  et  sur  laquelle 
est  basé  en  grande  partie  leur  traitement  dans  les  serres;  cette  idée,  je 
suis  obligé  de  le  dire,  est  erronée,  et  l'explication  qu'on  a  donnée  de  la 
végétation  de  ces  plantes  se  trouve  ainsi  sapée  par  sa  base.  En  effet, 
des  expériences  en  grand  nombre  m'ont  prouvé  que  les  épiphytes  n'ab- 
sorbent l'humidité  en  vapeur  répandue  dans  l'air  ni  par  leurs  feuilles 
ni  par  leurs  racines;  d'où  il  résulte  que  l'atmosphère  humide  des  serres 
ne  leur  fournit  rien,  ne  les  nourrit  pas  et  ne  peut  intervenir  dans  leur 
végétation  qu'en  diminuant  la  transpiration  abondante  dont  leur  sur- 
face serait  le  siège,  si  l'air  qui  les  entoure  était  plus  sec.  Pour  qu'elles 
absorbent  l'eau  nécessaire  à  leur  nutrition,  il  faut  qu'elle  leur  arrive  à 
l'état  liquide.  Dès  lors,  dans  leur  pays  natal,  les  pluies  et  les  rosées, 
dans  nos  serres,  les  seringuages  et  les  arrosements  ont  pour  elles  toute 
l'importance  qu'on  avait  attribuée  à  tort  à  la  vapeur  aqueuse. 

Maintenant,  pour  faire  partager  la  conviction  que  j'ai  acquise  à  ce 
sujet,  je  dois  exposer  les  résultats  de  mes  recherches.  Seulement,  ne 
voulant  pas  fatiguer  l'attention,  j'abrégerai  cet  exposé  en  le  limitant 
à  quelques-unes  des  nombreuses  expériences  que  j'ai  faites.  J'ose 
espérer  qu'elles  constitueront  une  démonstration  d'une  parfaite 
rigueur. 

Un  moyen  aussi  simple  que  sûr  de  reconnaître  si  des  plantes  ont 
opéré  une  absorption  quelconque,  est  fourni  par  l'emploi  de  la  balance. 
Evidemment  les  feuilles  ou  les  racines  ne  peuvent  absorber  de  l'eau 
sans  que  le  poids  de  la  plante  entière  en  soit  augmenté,  tandis  qu'une 
diminution  de  poids  indique  sur-le-champ  ou  bien  que  l'absorption  a 
été  nulle,  ou  tout  au  moins,  et  dans  la  supposition  la  plus  défavorable, 
qu'elle  a  été  insignifiante  comparativement  à  la  déperdition.  La  balance 
dont  j'ai  fait  usage  accusait  nettement  les  demi-décigrammes,  et  dès  lors 
elle  me  donnait  une  exactitude  plus  que  suffisante  pour  les  observations 
auxquelles  je  l'employais.  Pour  obtenir  une  certitude  complète,  j'ai  tenu 


—  198  — 

à  vérifier,  d'abord  séparément,  s'il  y  avait  absorption  de  vapeur  aqueuse, 
dans  un  air  très-humide,  d'un  côté,  par  les  feuilles,  de  l'autre,  par  les 
racines  aériennes;  après  quoi  j'ai  soumis  des  plantes  entières  à  la  même 
expérimentation.  Je  ne  dois  pas  négliger  de  dire  que,  si  j'ai  pu  faire  mes 
expériences  et  les  varier  autant  que  je  le  désirais,  je  le  dois  à  l'obligeance 
de  M.  Louis  Neumann  qui  a  mis  à  ma  disposition,  dans  la  serre  chaude 
du  Jardin  des  Plantes  confiée  à  sa  direction,  tous  les  sujets  dont  j'avais 
besoin. 

§  1.  — Pour  reconnaître  si  les  feuilles  des  plantes  épiphytes  absorbent 
de  la  vapeur  d'eau  dans  un  air  rendu  avec  intention  extrêmement  hu- 
mide, j'ai  renfermé  une  tige  vigoureuse  de  Dendrobium  moschatum 
chargée  de  14  feuilles,  sous  une  cloche  de  verre  que  j'ai  posée  sur  une 
assiette  remplie  d'eau.  L'air  contenu  clans  cette  cloche  était  ainsi  telle- 
ment humide  que  la  surface  intérieure  du  verre  se  couvrait  d'une 
couche  de  vapeur  condensée  en  eau.  Au  commencement  de  l'expérience, 
le  5  octobre,  la  tige  entière  pesait  18  gr.  55.  Après  une  semaine,  son 
poids  était  déjà  réduit  à  16  gr.  95.  Ainsi,  au  lieu  d'absorber  l'humidité 
abondante  de  l'air  qui  l'entourait,  elle  avait  perdu,  en  si  peu  de  temps, 
1  gr.  60,  c'est-à-dire  près  de  '/te  c^e  son  poids  primitif.  —  Une  grande 
feuille  d'Angrcecum  eburneum,  longue  d'environ  65  centimètres,  a  été 
placée  le  même  jour,  5  octobre,  de  manière  analogue.  YA\q  pesait  alors 
44  gr.  05.  Après  quinze  jours,  quoiqu'elle  fût  encore  très-fraîche,  elle 
ne  pesait  plus  que  40  gr.  35.  Elle  avait  donc  perdu,  malgré  sa  grande 
consistance,  3  gr.  70,  c'est-à-dire  '/t2  &Q  son  poids  primitif.  —  Une  tige 
d'Epidendrum  elongatum,  portant  12  feuilles,  a  été  suspendue,  le  9  oc- 
tobre, dans  la  serre  à  Orchidées  du  jardin  des  Plantes,  dans  laquelle 
règne  constamment  une  extrême  humidité.  Elle  pesait  alors  13  gr.  55. 
Le  6  novembre  suivant,  c'est-à-dire  en  moins  d'un  mois,  et  quoiqu'elle 
fût  toujours  verte  et  fraîche,  son  poids  était  descendu  à  11  gr.  90.  Elle 
avait  ainsi  perdu  1  gr.  65  ou  A/Sde  son  premier  poids. 

Le  Spironema  fragans  Lindl.  ayant  été  le  sujet  d'une  des  expériences 
de  M.  Unger,  j'ai  mis  un  soin  particulier  à  vérifier  de  quelle  manière  il 
se  comporte  dans  toutes  les  circonstances  diverses  sous  l'influence  des- 
quelles il  m'a  été  possible  de  le  placer.  J'ai  commencé,  le  12  décembre, 
par  en  suspendre  une  longue  branche,  pourvue  de  dix  feuilles,  dans  une 
partie  de  la  serre  à  Orchidées  où  j'étais  certain  qu'elle  ne  recevrait  pas 
d'eau.  J'en  avais  préalablement  recouvert  la  section  avec  une  couche 
épaisse  de  collodion.  Le  poids  de  cette  branche  était  alors  de  19  gr.  50. 
Le  12  janvier,  ou  exactement  un  mois  plus  lard,  elle  ne  pesait  plus  que 
13  gr.  65,  et  elle  avait  ainsi  perdu  5  gr.  85  ou  presque  un  tiers  de  sou 
poids  primitif.  Durant  cet  espace  de  temps,  non-seulement  elle  n'avait 


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pas  végété  du  tout,  mais  encore  ses  trois  feuilles  inférieures  avaient  en- 
tièrement séché,  et  les  autres,  quoiqu'elles  fussent  restées  vertes,  étaient, 
devenues  visiblement  flasques.  On  verra  plus  loin  que  d'autres  branches 
de  la  même  espèce  se  sont  comportées  tout  différemment  lorsque,  sus- 
pendues dans  la  même  serre,  elles  ont  été  mouillées  par  des  serin- 
guages  à  peu  près  journaliers.  ■ —  Une  autre  branche  de  Spironema, 
remarquable  par  son  extrême  vigueur,  a  été  suspendue,  le  12  janvier, 
dans  la  même  partie  de  la  serre,  sa  section  inférieure  ayant  été  préala- 
blement recouverte  de  collodion.  Son  poids,  qui  était  alors  de  49  gr.  60, 
était  déjà  descendu,  le  19  janvier,  après  une  semaine,  à  40  gr.  Elle 
avait  donc  subi,  dans  ce  court  espace  de  temps,  la  diminution  consi- 
dérable de  9  gr.  60,  près  de  */5  du  poids  initial,  ce  qui  s'explique  par  la 
grande  quantité  de  suc  qui  remplissait  ses  tissus  au  commencement  de 
l'observation. 

Les  exemples  fournis  par  les  quatre  plantes  dont  il  vient  d'être  ques- 
tiou  prouvent,  je  crois,  surabondamment  que  des  plantes  épiphytes, 
réduites  à  leurs  feuilles  ou  à  leur  tige  feuillée,  ne  prennent  pas  d'humi- 
dité dans  l'air  qui  les  environne. 

§2.  —  Dans  le  but  de  déterminer  le  rôle  des  racines  aériennes  par 
rapporta  l'humidité  répandue  dans  l'air,  j'ai  d'abord  employé  une  dis- 
position particulière.  J'ai  pris  un  pied  de  Dendrobium  moschatum  formé 
d'une  tige  longue  de  25  centim.  et  chargée  de  onze  feuilles,  de  la  base 
de  laquelle  partait  un  faisceau  de  16  racines  en  état  parfait,  qui  s'étaient 
développées  à  l'air.  Le  6  octobre,  cette  plante,  dont  le  poids  fut  trouvé 
égal  à  12  gr.  65,  fut  adaptée  à  une  cloche  à  douille,  de  telle  sorte  que,  le 
bas  de  la  tige  passant  à  travers  un  bouchon  qui  fermait  exactement 
l'ouverture  supérieure,  le  faisceau  de  racines  se  trouvait  seul  renfermé 
dans  la  cloche,  et  la  tige  feuillée  flottait  librement  dans  l'air.  La  cloche 
fut  alors  posée  sur  une  assiette  pleine  d'eau.  Les  racines  entourées  ainsi 
elles  seules  d'une  atmosphère  très-humide,  n'y  ont  absolument  rien 
puisé  et,  le  26  du  même  mois,  la  plante  avait  perdu  2  gr.  65  ou  environ 
*/g  de  son  poids  primitif. — Pour  compléter  la  démonstration  en  éliminant 
la  transpiration  des  feuilles,  j'ai  disposé  de  la  même  manière,  le  6  octobre, 
un  autre  pied  de  Dendrobium  moschatum  qui  portait  un  magnifique 
faisceau  de  21  racines  en  état  parfait.  La  tige,  qui  sortait  de  la  cloche  à 
douille,  a  été  coupée  au-dessous  de  la  feuille  inférieure.  Le  poids  de  la 
portion  de  plante  mise  en  expérience  était  de  9  gr.  75.  La  cloche  ayant 
été  posée  sur  une  assiette  pleine  d'eau,  les  racines  se  sont  trouvées 
plongées  dans  une  atmosphère  confinée  extrêmement  humide.  Cepen- 
dant elles  n'ont  pas  absorbé  une  quantité  appréciable  d'humidité,  et, 
le  26  octobre,  ou  après  20  jours  d'expérience,  la  plante  avait  perdu 


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I  gr.  10,  c'est-à-dire  un  peu  plus  de  '/g  de  son  poids  primitif.  —  Je 
n'ajouterai  qu'une  autre  expérience  du  même  genre.  —  Le  9  octobre, 
une  tige  d'Epidendrum  elongatum,  du  bas  de  laquelle  partait  un  faisceau 
de  10  longues  racines  en  très-bon  état,  développées  dans  l'air,  a  été 
coupée  immédiatement  au-dessous  de  sa  feuille  inférieure.  Le  faisceau 
de  racines  s'est  trouvé  par-là  isolé  avec  une  faible  longueur  de  tige,  et  le 
tout  ensemble  a  pesé  2  gr.  65.  La  plante  ainsi  préparée  a  été  suspendue 
dans  la  serre  à  Orchidées,  et,  dès  le  19  octobre,  ou  en  10  jours,  son 
poids  était  descendu  à  1  gr.  70.  Loin  d'absorber  de  l'humidité,  elle  avait 
ainsi  perdu  en  peu  de  temps  0  gr.  95,  c'est-à-dire  près  de  2/o  de  son 
poids  primitif. 

§3.  —  Après  avoir  fait  isolément,  comme  on  vient  de  le  voir,  des 
expériences  sur  les  feuilles  et  sur  les  racines  aériennes  des  plantes  épi- 
phytes,  j'ai  voulu  expérimenter  sur  des  plantes  entières,  en  opérant 
toujours  dans  l'atmosphère  très-humide  de  la  serre  à  Orchidées  du 
Jardin  des  Plantes.  Les  résultats  de  ces  nouvelles  observations  ayant  été 
parfaitement  concordants  soit  entre  eux,  soit  avec  les  précédents,  je  me 
contenterai  d'en  rapporter  quelques-uns  pris  en  quelque  sorte  au 
hasard. 

Le  9  octobre,  un  pied  d'Epidendrum  elongatum  formé  de  2  tiges 
feuillées  inégales  et  de  6  racines  aériennes  en  très-bon  état,  a  été  sus- 
pendu dans  la  serre.  Il  pesait  alors  4  gr.  45.  Après  10  jours  de  séjour 
dans  cette  atmosphère  humide,  son  poids  n'était  plus  que  de  3  gr.  55. 

II  avait  ainsi  perdu  0  gr.  90,  c'est-à-dire  environ  75  de  son  poids  pri- 
mitif. —  Le  même  jour,  je  mis  en  observation  une  bille  de  chêne  écorcé 
qui  portait  plusieurs  pieds  d'Oncidium  ampliatum  majus  pourvus  de 
nombreuses  racines.  Sur  les  9  pseudobulbes  que  présentait  la  touffe  en- 
tière, 4  seulement  se  terminaient  par  une  feuille  bien  développée.  Le  tout 
ensemble  pesa  741  gr.  35.  Dix  jours  après,  ce  poids  s'était  réduit  à  731  gr. 
70;  il  avait  donc  diminué  de  près  de  10  gr. —  Le  27  octobre,  j'ai  pesé  un 
pied  d'Oncidium  Lanceanum  à  4  feuilles,  remarquable  par  la  force  et  la 
longueur  de  ses  racines  aériennes  dont  l'extrémité  était  verte  sur  en- 
viron 15  millim.  La  plante  était  placée  entre  deux  petites  plaques  de 
liège  mince,  et  sa  base  était  entourée  d'une  petite  quantité  de  mousse 
sèche.  Le  tout  ensemble  pesait  162  gr.  15.  Au  bout  d'un  mois  et  demi 
de  séjour  dans  la  serre  humide,  le  12  décembre,  ce  poids  était  descendu 
à  146  gr.  75;  il  avait  donc  diminué  de  15  gr.  40.  Comme  dans  l'exemple 
précédent,  il  faut  reporter  une  partie  de  la  diminution  sur  le  support 
de  la  plante;  mais  certainement  cette  partie  ne  peut  avoir  été  considé- 
rable, car  le  bois  et  le  liège  étaient  déjà  très-secs  au  commencement  de 
l'observation.  —  Une  forte  tige  d'Ornitliidium  densifîorum  bifurquée  et 


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portant  7  pseudobulbes  terminés  chacun  par  une  feuille  avec  deux 
autres  sans  feuille,  a  été  détachée  du  pied-mère,  et  sa  section  a  été  re- 
couverte de  collodion.  Ainsi  préparée,  elle  a  pesé  71  gr.  75.  Au  bout 
d'une  semaine,  le  19  janvier,  elle  ne  pesait  déjà  plus  que  69  gr.  65,  et 
cependant  sa  végétation  avait  continué;  trois  inflorescences,  dont  l'ex- 
trémité se  montrait  à  peine  en  dehors  de  la  gaîne  au  commencement  de 
l'expérience,  s'étaient  allongées  de  manière  à  se  montrer  en  majeure 
partie  et  chacune  d'elles  avait  épanoui  une  de  ses  fleurs. 

Je  me  bornerai  à  ces  exemples  qui  me  semblent  plus  que  suffisants 
pour  la  famille  des  Orchidées.  Pour  celle  des  Broméliacées,  j'ai  pu 
prendre  comme  sujets  d'observation  deux  Tillandsia  indéterminés.  Le 
premier  forme  une  touffe  arrondie,  dans  laquelle  sont  réunis  ,  sans  in- 
termédiaire, deux  pieds  en  bonne  voie  de  développement.  Ses  feuilles 
lancéolées,  très-aiguës  ,  canaliculées  ,  nombreuses  ,  longues  de  8  à  10 
centim.  ,  sont  blanchies  par  une  couche  de  petites  écailles  qui  se 
montrent  au-delà  des  bords  comme  des  dents  irrégulières  et  membra- 
neuses. Il  est  désigné  sur  l'étiquette  comme  venu  de  Santos.  Le  18  dé- 
cembre, la  touffe  entière  de  cette  plante  pesait  61  gr.  50  :  un  mois  plus 
tard,  le  19  janvier,  son  poids  s'est  trouvé  réduit  à  55  gr.  80.  Elle  avait 
donc  subi  une  perte  de  5  gr.  70  ,  c'est-à-dire  de  plus  de  i/ii  de  son 
poids  primitif.  —  Le  second  Tillandsia,  également  indéterminé,  a  de 
longues  feuilles  en  gouttière  et  nues  ou  à  peu  près,  qui  forment  une 
touffe  étroite  et  allongée.  Il  est  fixé  contre  un  petit  morceau  de  bois 
très-léger,  avec  lequel  il  est  arrivé  de  son  pays  natal.  De  sa  base  est 
sortie  une  pousse  actuellement  en  végétation,  qui  a  déjà  quelques  centi- 
mètres de  longueur.  Le  18  décembre,  la  plante  avec  son  support  et  un 
très-petit  coussinet  de  mousse,  pesait  180  gr.  50.  Un  mois  plus  tard,  le 
19  janvier,  ce  poids  n'était  plus  que  de  176  gr.  50  ;  cependant  la  plante- 
mère  et  son  jet  latéral  paraissaient  aussi  frais  que  le  premier  jour. 

11  est,  je  crois,  démontré  par  les  expériences  dont  on  vient  de  voir  les 
résultats,  que  les  plantes  vraiment  épiphytes,  Orchidées,  Broméliacées 
et  autres,  ne  tirent  de  l'atmosphère,  ni  par  leurs  feuilles,  ni  par  leurs 
racines,  l'humidité  qui  s'y  trouve  répandue,  quelque  forte  que  puisse 
en  être  la  proportion.  C'est  là,  si  je  ne  me  trompe,  un  fait  inattendu, 
contraire  même  aux  idées  qui  avaient  eu  cours  jusqu'à  ce  jour.  Mais 
comment  ces  plantes  se  nourrissent-elles,  puisque  leur  situation  est 
telle  qu'elles  ne  peuvent  rien  recevoir  que  de  l'atmosphère,  seul  milieu 
dans  lequel  elles  vivent?  C'est  uniquement  en  absorbant  l'eau  liquide 
qui  mouille  leur  surface  et  particulièrement  celle  de  leurs  racines,  or- 
gane principal  de  cette  absorption.  L'exactitude  de  ce  nouvel  énonce 
m'a  été  prouvée  par  un  grand  nombre  d'expériences,  parmi  lesquelles 


—  202  — 

je  me  contenterai  d'en  rapporter  quelques-unes  qui  soient  de  nature  à 
fournir  une  complète  démonstration. 

§  4.  —  J'ai  rapporté  plus  haut  une  expérience  dans  laquelle  un  pied 
vigoureux  de  Dendrobium  moschatim,  ayant  ses  racines  seules  renfer- 
mées dans  une  cloche  dont  l'air  était  très-humide,  avait  perdu  en  20 
jours  près  de  '/3  de  son  poids  initial.  Lorsque  la  plante  a  été  parvenue 
à  ce  point,  j'en  ai  mouillé  les  racines  en  secouant  un  peu  d'eau  dans  la 
cloche  une  ou  deux  fois  par  jour.  Grâce  à  l'absorption  qui  a  eu  lieu, 
dans  l'espace  de  5  jours  ,  la  plante  avait  réparé  ses  pertes,  elle  avait  re- 
pris sa  fraîcheur,  et,  du  26  au  31  octobre,  son  poids  s'était  élevé  de 
3  gr.  60  au-dessus  du  point  le  plus  bas  auquel  elle  fût  d'abord  des- 
cendue. —  Les  résultats  ont  été  lout-à-fait  analogues  pour  le  faisceau 
isolé  de  racines  de  la  même  plante  qui,  comme  on  l'a  vu  ,  avait  été 
adapté  à  un  semblable  appareil. 

J'ai  rapporté  encore  une  expérience  faite  sur  un  pied  iVEpidendrum 
elongatum  à  deux  tiges  inégales,  fouillées,  de  la  base  desquelles  par- 
taient 6  racines  en  très-bon  état.  Lorsque  cette  plante  suspendue  dans  la 
serre  à  Orchidées,  eut  assez  perdu  de  son  poids  pour  descendre  de  4  gr. 
45  à  3  gr.  55  et  même  3  gr.  45,  on  commença  à  la  mouiller  à  peu  près 
une  fois  par  jour  au  moyen  d'un  simple  seringuage.  Dès  ce  moment, 
elle  augmenta  de  poids  graduellement,  et,  malgré  les  irrégularités 
qui  avaient  eu  lieu  dans  les  seringuages,  elle  était  remontée,  le 
12  janvier,  à  son  poids  initial  de  4  gr.  45.  ■ —  Un  autre  pied  de  la 
même  espèce  dont  la  tige  portait  6  feuilles  et  avait  produit  à  sa  base  deux 
longues  racines  avec  quelques  autres  beaucoup  plus  courtes  ,  a  donné 
des  résultats  encore  plus  prononcés.  Le  9  octobre  ,  son  poids  était  de 
3  gr.  40,  et,  10  jours  plus  lard,  comme  on  n'avait  pas  donné  d'eau,  il 
était  descendu  à  3  gr.  25.  Alors  on  a  commencé  à  seringuer,  d'abord 
rarement,  puis  à  peu  près  chaque  jour  ,  à  la  fin  assez  régulièrement 
deux  fois  par  jour.  Traitée  de  la  sorte,  cette  plante  a  suivi  une  marche 
ascendante  dans  laquelle  on  n'a  pas  observé  d'autre  points  d'arrêt  que 
lorsque,  pour  un  motif  quelconque  ,  les  seringuages  étaient  disconti- 
nués. Du  19  au  31  octobre  ,  son  poids,  d'abord  réduit  à  3  gr.  25,  était 
monté  à  3  gr.  95,  et  il  était  parvenu  à  4  gr.  20  dès  le  12  décembre.  Il 
avait  ainsi  dépassé  exactement  d'un  gramme  celui  qu'avait  la  plante  au 
moment  même  où  elle  avait  été  mise  en  expérience.  Je  ferai  remarquer 
que  l'accroissement  de  poids  s'est  montré  constamment  en  rapport  avec 
les  mouillages  donnés.  Il  a  été  plus  fort  lorsqu'on  a  seringue  deux  fois 
par  jour  que  lorsqu'on  l'a  fait  une  seule  fois,  et  il  a  été  suspendu  dès 
que  la  plante  n'a  plus  reçu  d'eau  momentanément,  pour  reprendre  lors- 
qu'on a  recommencé  de  mouiller. 


—  203  — 

J'ai  obtenu  des  résultats  analogues  sur  le  Dendrobium  nobile,  le  Bras- 
savola  perrina  ,  sur  deux  Eria  de  Cayenne ,  sur  r 'Ornithidium  denisr 
florum,  sur  deux  Oncidiuin,  etc.  Je  n'entrerai  pas  dans  le  détail  de  ces 
nombreuses  observations.  J'ajouterai  seulement  les  résultats  remar- 
quables que  m'a  donnés  le  Spironema  fragrans.  Une  branche  vigou- 
reuse de  cette  épiphyte  portant  10  belles  feuilles  et  5  racines  sèches,  a 
été  suspendue  dans  la  serre,  le  12  décembre,  après  que  sa  section  eut 
été  soigneusement  recouverte  de  collodion.  Elle  pesait  alors  31  gr.  65. 
A  partir  de  ce  moment  elle  a  été  seringuée  assez  régulièrement  une  fois 
par  jour.  Le  19  janvier  suivant,  c'est-à-dire  après  un  mois  et  7  jours, 
son  poids  s'était  élevé  graduellement  à  34  gr.  25.  Pendant  ce  temps,  la 
plante  avait  développé,  sur  4  de  ses  nœuds,  6  racines  aériennes  dont 
une  était  déjà  longue  d'environ  15  millim.,  et  tout  en  elle  indiquait  une 
vigueur  vraiment  remarquable.  D'autres  pieds  de  la  même  espèce  m'ont 
donné  des  résultats  tout-à-fait  semblables  et  il  m'est  resté  ainsi  la  con- 
viction que  si,  dans  l'expérience  de  M.  Unger,  un  pied  de  la  même 
plante,  suspendu  dans  une  serre,  a  doublé  de  poids  en  un  an  ,  ce  fait 
tient  uniquement,  non  pas  à  une  absorption  de  la  vapeur  aqueuse,  puis- 
que mes  observations  prouvent  qu'elle  n'a  pas  lieu,  mais  à  l'effet  de  se- 
ringuages  donnés  par  le  jardinier  a  l'insu  de  l'expérimentateur. 

La  conséquence  capitale  amenée  par  tout  ce  qui  précède  ,  c'est  que 
le  principe  fondamental  sur  lequel  repose  la  culture  des  plantes  épi- 
phytes  en  général  et  des  Orchidées  en  particulier,  est  en  désaccord  avec 
la  marche  naturelle  de  la  végétation  de  ces  plantes.  En  cherchant  par 
tous  les  procédés  possibles  à  charger  d'humidité  l'atmosphère  des  serres, 
on  ne  contribue  en  rien  à  la  nutrition  de  ces  singuliers  végétaux,  et  le 
seul  moyen  pour  leur  fournir  l'élément  fondamental  de  leur  développe- 
ment consiste  dans  les  arrosements  pour  celles  qui  sont  en  pots,  dans 
les  seringuages  pour  presque  toutes,  mais  particulièrement  pour  celles 
qui  sont  cultivées  sur  des  bûches  ou  contre  des  plaques  de  liège.  Les 
tenir  dans  un  air  extrêmement  humide  sans  les  mouiller,  c'est  simple- 
ment les  affamer  tout  en  cherchant  à  les  nourrir;  tandis  que  leur  végé- 
tation est  accélérée  par  des  mouillages  fréquents,  toutefois  dans  la  limite 
de  ce  qu'il  est  permis  de  faire  dans  la  culture  en  serre. 

Au  reste,  ce  qu'on  observe  dans  la  nature  concorde  avec  les  résultats 
des  expériences  que  j'ai  rapportées  et  avec  les  conséquences  que  j'en  ai 
déduites.  Les  Orchidées  épiphytes  spontanées  ne  peuvent  se  nourrir  que 
de  l'eau  des  pluies  ou  des  rosées;  or, des  expériences  que  je  ne  crois  pas 
devoir  rapporter  en  ce  moment  m'ont  prouvé  qu'en  général  la  force 
d'absorption  des  racines  aériennes  est  peu  considérable.  Pour  ces  di- 
vers motifs,  on  ne  doit  pas  s'étonner  du  grand  nombre  de  racines  que: 


—  204  — 

développent  ces  plantes.  M.  Béer,  qui  insiste  sur  ce  point  dans  son  im- 
portant ouvrage  sur  les  Orchidées,  dit  avoir  reçu  d'Amérique  des  pieds 
qui  en  portaient  jusqu'à  5  ou  6  étages,  et  sur  lesquels  il  restait  encore 
des  vestiges  qui  prouvaient  qu'un  grand  nombre  de  ces  organes  avaient 
été  brisés.  Ainsi  la  nature  multiplie  dans  ces  végétaux  les  organes  ab- 
sorbants pour  leur  permettre  de  profiter  le  plus  possible  de  l'eau  qui , 
hors  de  la  saison  des  pluies  ,  doit  être  rare  pour  eux.  dans  les  régions 
où  ils  croissent  naturellement.  Mais  dans  nos  cultures  où  le  climat  arti- 
ficiel qu'on  leur  fait  diffère  nécessairement  sous  plusieurs  rapports  de 
celui  qui  leur  est  naturel  et  où  d'ailleurs  les  mouillages  plus  ou  moins 
fréquents  qui  entrent  dans  le  régime  habituel  des  serres  les  placent 
dans  des  conditions  tout-à-fait  différentes,  ces  plantes  ne  montrent  pas 
d'ordinaire  la  même  abondance  d'organes  absorbants.  D'ailleurs  leur 
développement  y  est  généralement  peu  rapide,  et  les  Broméliacées  épi- 
phytes  se  font  encore  remarquer  parmi  elles  sous  ce  rapport,  elles  qu'on 
voit  souvent  ne  posséder  qu'un  faisceau  très-peu  volumineux  de  ra- 
cines aériennes  courtes  et  grêles,  par  lesquelles  on  ne  peut  supposer  que 
se  fasse  une  absorption  considérable. 

La  manière  dont  j'ai  montré  que  les  épiphytes  absorbent  leur  prin- 
cipal aliment  me  semble  expliquer  ce  fait  aujourd'hui  bien  connu  que 
l'eau  de  pluie  est  la  plus  avantageuse  de  toutes  pour  leur  culture.  C'est 
qu'en  effet,  sur  les  arbres  qui  les  portent,  elles  ne  peuvent  recevoir 
d'autre  eau  que  celles  des  pluies  et  des  rosées,  la  plus  pure  de  toutes,  et 
dès  lors  celle  des  sources,  des  puits  et  des  rivières,  qui  contient  tou- 
jours en  dissolution  des  matières  salines  ou  autres,  doit  être  pour  elles 
un  aliment  indigeste,  s'il  m'est  permis  d'employer  cette  expression. 

Il  est  presque  inutile  de  faire  observer  en  terminant  que  le  seul  but 
que  je  me  suis  proposé  dans  cette  note  a  été  d'établir  un  principe  gé- 
néral déduit  de  l'expérience,  et  que  je  ne  veux,  ni  ne  dois  entrer  dans 
des  détails  qu'on  trouve  d'ailleurs  indiqués  avec  soin  dans  différents 
ouvrages,  notamment  dans  celui  de  M.  Morel  sur  la  culture  des  Orchi 
dées,  à  son  excellent  chapitre  sur  les  mouillages. 


REVUE  DE  PLANTES  NOUVELLES  ET  INTÉRESSANTES. 

Rhododendron  Monlinainense.  Hook. —  Bot.  Mag.  tab.  4904. 
—  Fam.  des  Ericées;  Décandrie  Monogynie. — Etym.:  de  po^v,  rose,  et 
<JWp«v,  arbre,  les  rosages  étant  des  végétaux  frutescents  ayant  la  plu- 
part des  fleurs  roses.  —  Rosage  de  Moulmain. 

Les  recherches  récentes  des  botanistes  ont  démontré  que  c'esl  dans 


—  205  — 

les  parties  orientales  du  globe,  près  du  parallèle  des  îles  Malaises,  dans 
la  région  montueuse  depuis  Bornéo  et  Java  au  sud,  jusqu'au  Sikkim- 
Himalaya  au  nord,  que  l'on  découvrira  le  plus  grand  nombre  de  Rhodo- 
dendrons ;  témoin  les  récentes  découvertes  du  Dr  Hooker  dans  cette 
dernière  contrée,  celles  de  MM.  Griffith  et  Booth  dans  le  territoire  du 
Boutan ,  des  botanistes  hollandais  à  Java  et  de  M.  Lowe  à  Bornéo. 
Le  R.  Moulmainense  a  été  rencontré  par  M.  Thomas  Lobb,  surtout  à 
Moulmain,  à  une  altitude  de  5,000  pieds  au-dessus  du  niveau  de  la  mer. 
C'est  un  arbrisseau  à  rameaux  rougeâtres,  glabres,  comme  tout  le  reste 
de  la  plante  et  privés  des  petites  écailles  ou  lépides  si  abondantes  sur 
un  grand  nombre  d'espèces  du  genre.  Les  feuilles  sont  principalement 
insérées  à  l'extrémité  des  branches  et  juste  sous  l'ombelle  de  fleurs  ; 
elles  ont  quatre  à  cinq  pouces  de  long,  largement  lancéolées,  penni- 
nerves,  brièvement  acuminées,  coriacées  ,  vert  foncé  au-dessus,  plus 
pâles  à  la  face  inférieure.  Pétioles  courts,  arrondis,  renflés  à  la  base. 
Fleurs  formant  une  ombelle  à  l'extrémité  des  branches,  mais  naissant 
cependant  par  groupes  de  deux  ou  trois,  pédoncules  à  peu  près  aussi 
longs  que  les  fleurs.  Calice  très-court,  à  peine  visible,  si  ce  n'est  après 
la  chute  de  la  corolle  et  alors  il  se  présente  comme  un  petit  disque 
quinquélobé.  Corolle  blanche  (rose  dans  quelques  exemplaires  d'herbier) 
teintée  de  jaune  à  l'intérieur,  infundibuliforme-campanulée.  Tube  peu 
allongé,  sillonné;  lobes  du  limbe,  plus  longs  que  le  tube, étalés,  oblongs- 
obtus,  pas  apiculés,  ondulés.  Dix  étamines,  dressées,  plus  courtes  que 
les  lobes  de  la  corolle,  à  filaments  légèrement  velus  inférieurement,  à 
anthères  petites,  oblongues  (abortives?).  Ovaire  oblong,  exlraordinaire- 
ment  étroit,  à  six  sillons  profonds  ;  style  glabre  plus  long  que  les  éta- 
mines, à  stigmate  capité,  indistinctement  lobé. 

Rixea  aznrea,  Mon*,  var.  grandiflora. —  Illust.  Hort.  1856 
tab.85. — Synon.  :  Tropœolum  azureum  Miers,  var.  grandifloram. 
—  Etymol.:  le  genre  Rixea  a  été  fondé  par  M.  Ch.  Morren,  à  la  mé- 
moire du  gantois  J.  Rixe,  qui  le  premier  importa  le  froment  au  Chili. 
— Fam.  des  Tropœolées,  Octandrie  Monogynie. — Rixea  azuré,  variété 
à  grandes  fleurs. 

Cette  nouvelle  variété,  du  Rixea  azurea  Mon*.,  est  remarquable  par 
ses  fleurs  deux  ou  trois  fois  plus  grandes  que  celles  du  type,  par  sa 
végétation  plus  robuste,  ses  feuilles  plus  amples,  etc.  Elle  a  été  adressée 
directement  du  Pérou  à  l'établissement  de  M.  Amb.  Verschaffelt  à  Gand, 
où  elle  a  fleuri  pour  la  première  fois  au  mois  de  juin  1855. 

Cenia  pruinosa.  DC— De  Cand.  Prodr.  VI.  31.—  Gard.  Chron. 
1856,  p.  4.  —  Etymol.  :  de  «evo?,  qui  ne  contient  rien,  vide,  crenx, 


—  206  — 

parce  que  les  pédoncules  floraux  sont  vides  à  leur  extrémité  renflée  en 
forme  de  toupie. — Fana,  des  Composées  ;  Syngénésie  superflue.  —  Cenia 
cirier. 

Celte  espèce  est  une  des  plus  jolies  plantes  annuelles  d'introduction 
nouvelle;  quoique  native  du  Cap  de  Bonne-Espérance,  elle  ne  demande 
pas  plus  de  soins  qu'un  plant  de  Camomille,  auquel  elle  ressemble 
quelque  peu  par  ses  feuilles  finement  découpées  en  segments  linéaires. 
Elle  forme  des  touffes  d'un  vert  brillant ,  hautes  de  cinq  à  six  pouces 
seulement  et  qui  donnent  avec  profusion  et  pendant  fort  longtemps  des 
capitules  floraux,  circulaires,  convexes,  du  diamètre  d'une  pièce  d'un 
franc,  consistant  en  une  foule  de  fleurons  tubuleux  jaunes,  entourés 
d'un  cercle  de  rayons  courts,  jaunes  en  dessus,  d'un  pourpre  foncé  en 
dessous.  L'involucre  consiste  en  deux  rangs  de  huit  bractées  chacun, 
insérées  à  l'extrémité  d'un  renflement  du  pédoncule  et  couvertes  d'une 
fleur  glauque,  d'où  le  nom  de  pruinosa. 

Ccni.i  turbinata.  Persoon.  —  De  Cand.  Prodr.  VI.  830.  Cenie 
toupie. 

Cette  plante  ,  l'ancien  Cotula  turbinata  de  Linné,  avait  été  perdue, 
jusqu'à  sa  nouvelle  réintroduction  du  Cap  il  y  a  quelques  années. 
Elle  ressemble  beaucoup  au  C.  pruinosa,  mais  les  feuilles  sont  plus 
aiguës  et  plus  poilues,  le  renflement  de  l'extrémité  du  pédoncule  est 
beaucoup  plus  considérable  et  sans  glaucescence.  Elle  a  fourni  trois 
variétés  horticoles  :  C.  turbinata,  C.  turbinata  formosa  et  C.  turbinata 
alba. 

Ceanothus  integerrimus.Hook. — Hooker  et  Arnott  in  Beechey's 
Voyage,  p.  329.  ■ —  Gard.  Chron.  1856,  p.  36.  —  Etim.  :  Théopliraste 
nomma  Kiuva^o;  une  plante  épineuse,  d'ailleurs  inconnue  et  Linné 
attacha  ce  nom  à  un  genre  de  plante  de  la  famille  des  Rhamnées  et  de 
la  Pentandrie  monogynie.  —  Céanothus  à  feuilles  entières. 

Cette  plante  est  peu  connue,  quoique  parfaitement  rustique  et  sub- 
toujours-verte ;  elle  forme  un  grand  buisson,  à  rameaux  sveltes,  ayant 
le  port  des  C.  thyrsiflorus ,  azureus  eipallidus.  Les  feuilles  sont  minces, 
ovales,  trinerves  et  complètement  privées  de  pubescence.  Les  fleurs 
sont  d'un  blanc  pur,  en  panicules  terminales  étroites.  On  trouva  d'abord 
cette  espèce  en  Californie,  plus  tard  Hartew  la  revit  dans  la  vallée  de 
Sacramento.  Le  C.  verrucosus,  espèce  tout-à-fait  distincte,  est  parfois 
appelée  C.  integerrimus  par  les  horticulteurs. 

Banksia  Victoria?.  Meisn.  —  Bot.  Mag.  lab.  4906.  Meisn.  New 
Austral.  Prot.  in  Hooh.  Journ.  Bot.   1855,  v.  7,  p.  119.  — Synon.: 


—  207  — 

Banksia  speciosa ,  Lindl.  Bot.  Beg.  t.  1728  {non  Br.).—  Etymol.:  genre 
fondé  par  Linné  fils  en  l'honneur  de  sir  Joseph  Banks,  né  en  Angleterre 
en  1743,  qui  accompagna  avec  le  Dr  Solander,  le  capitaine  Cook  dans 
son  premier  voyage  autour  du  monde  en  1769,  70  et  71  et  qui  publia 
les  dessins  et  gravures  de  la  belle  édition  de  Premier  Voyage  de  Cook, 
Londres  1773.  Il  fut  comblé  d'honneurs  et  s'en  montra  digne  par  la 
noblesse  de  son  caractère  et  les  services  qu'il  rendit  aux  sciences  natu- 
relles ;  il  fut  président  de  la  Société  royale  de  Londres,  correspondant 
de  l'Institut  de  France  et  mourut  en  1820. —  Banksia  de  Victoria. 

Cette  espèce  croît  dans  la  région  de  la  rivière  des  Cygnes  ;  elle  est 
d'un  très-beau  port,  très-voisine  du  B.  speciosa,  mais  s'en  distingue 
par  les  segments  des  feuilles  plus  larges,  planes  et  verts  en  dessous. 

Encephalartus  CafFei».  Lehm.  —  Bot.  Mag.  tab.  4903.  Lehm. 
Pugill.  v.  6,  p.  11.  Miq.  Monogr.  cycad.  p.  53.  —  Synon.  :  Cycas 
caffra ,  Thunb.  Nov.  Act.  Beg.  Soc.  Ups.  tom.  2,  p.  283.  Zamia  cycadis 
Linn.  Fil.  suppl.  p.  443.  Ait.  Hort.  Kew.  éd.  2.  p.  412.  Zamia  Caffra 
Thunb.  FI.  cap.  éd.  Schult.  p.  429.  Encephalartns  longifolia,  Lehm. 
Pugill.  v.  6,  p.  14.  Miq.  I.  c.p.M. — Etym.  :  Encephalartos  de  u,  dans, 
Ktç>u\f},  tête  et  ùprcs,pain;  les  fruits  alimentaires  et  charnus  consistent 
en  une  réunion  de  carpelles  en  forme  de  tète. —  Fam.  des  Cycadées.- — 
Diœcie  polyandrie.  —  Encéphalartus  des  Caffres  ou  pain  des  Caffres. 

Les  quarante  espèces  dont  se  compose  le  genre  Encephalartus  sont 
encore  la  plupart  imparfaitement  connues,  faute  de  spécimens  complets. 
L'E.  Caffer,  notamment,  découvert  par  Thunberg,  et  YE.  longifolius  de 
Lehmann  sont  deux  espèces  bien  difficiles  à  distinguer  (1).  Le  premier 
est  l'arbre  à  pain  des  Caffres  ;  Thunberg  nous  dit  de  la  substance 
appelée  pain  des  Caffres,  qu'elle  consiste  dans  le  bourgeon  (ou  choux) 
terminal  de  la  plante  ,  formé  par  les  jeunes  feuilles  et  le  sommet  de  la 
tige.  Pour  en  préparer  du  pain,  les  Caffres  ont  coutume,  après  en  avoir 
enlevé  la  moelle,  de  l'enfouir  en  terre,  où  ils  le  laissent  pourrir  pendant 
l'espace  de  deux  mois,  après  quoi  ils  le  pétrissent  et  en  font  un  gâteau, 
qu'ils  cuisent  très-légèrement  dans  la  cendre.  Les  graines  peuvent  égale- 
ment être  frites  et  mangées.  L'arbre  croît  dans  des  endroits  secs  et  sté- 
riles, entre  les  pierres,  et  pousse  lentement. 


(1)  Le  Dr  Lehmann  distingue  ainsi  ces  deux  espèces  dans  son  Pugillus  : 

E.  Caffer;  caudice  glabre- ;  rachi  trigono,  pinnisque  lanceolalis  aculis  mucronatis 

viridibus  glabris,  junioribus  dente  uno  alterove  ,  adultis  integris,  fructu  glabro. 
E.  longifolius;  caudice  glabro,  rachi  tetragono  pinnisque  lanceolalis  acutis  muticis 

integerrimis  viridibus  glabris,  fructu  glabro. 


—  208  — 

Cattleya  maxima.  Lindl.  —  Bot.  Mag.  tab.  4902.  Lindl.  Gen.  et 
Sp.  Orchid,  p.  116.  Bot.  Beg.  1844,  sw^.  t.  5.  Joum.  of  the  Hort.  Soc. 
v.  i,part.  1,  p.  64.  Bot.  Beg.  1846,  v.  32,  t.  1. — Etymol.:  genre  établi 
par  Lindley  en  l'honneur  de  W.  Cattley,  membre  de  la  Société  d'horti- 
culture de  Londres. —  Fam.  des  Orchidées  ;  Gynandrie  Monandrie. — 
Cattleya  grand. 

Originaire  de  la  Colombie,  le  C.  maxima  est  très-voisin  des  C.  Mossiœ 
et  labiata  dont  il  diffère  spécialement  par  les  pseudobulbes  longuement 
cannelés  et  par  les  pétales  convexes  et  ondulés ,  d'une  apparence  toute 
différente  des  pétales  minces  et  à  peu  près  planes  des  C. Mossiœ  et  labiata. 
Chaque  panicule  est  formée  de  six  à  sept  grandes  et  belles  fleurs ,  à 
sépales  étalés,  étroits,  lancéolés,  acuminés,  ordinairement  colorés  en 
rose  pâle  ;  les  pétales  sont  également  étalés,  de  la  même  couleur,  mais 
plus  larges  et  ondulés  ;  le  labelle  est  très-grand,  les  deux  lobes  latéraux 
roulés  en  un  tube,  celui  du  milieu  est  grand,  étalé  et  crispé. 

Laelia  acuminata.  Lindl. —  Bot.  Mag.  Tab.  4995.  Lindl.  Bot.  Beg. 
1841.  t.  24.  —  Genre  établi  par  Lindley  à  la  mémoire  de  Caïus  Lœlius , 
surnommé  Sapiens  et  dont  Cicéron  a  placé  le  nom  en  tête  de  son  dia- 
logue de  Amicitia.  Après  s'être  fait  remarquer  au  forum  comme  ora- 
teur, il  accompagna  Scipion-Emilien  ,  son  ami,  au  siège  de  Carthage, 
s'y  distingua  par  sa  valeur,  fut  préteur  en  Espagne  et  consul  l'an  140 
av.  J.-C.  et  se  retira  à  la  campagne  où  il  partagea  ses  loisirs  entre  l'étude 
et  les  travaux  agrestes.  — Laelie  acuminée. 

Ce  Lselia,  délicat ,  gracieux  et  odorant  est  originaire  de  Guatumala  , 
d'où  il  a  été  envoyé  à  la  Société  d'Horticulture  de  Londres  par  M.  Hart- 
weg,  sous  le  nom  de  Flor  de  Jésus  que  lui  donnent  les  naturels,  à  cause 
de  sa  beauté.  On  l'a  découvert,  croissant  sur  un  tronc  de  Calebassier 
(Crescentia  cujete),  clans  un  endroit  nommé  Retatnlen.  Il  est  très-voisin 
du  Lœlia  rubescens  de  Lindley,  dont  il  ne  paraît  différer  que  par  ses 
fleurs  plus  grandes,  disposées  en  corymbe,  et  par  la  forme  du  labelle. 
Ces  fleurs  sont  blanches,  très-gracieuses,  à  ovaire  long,  pédonculi- 
forme,  muni,  dans  la  moitié  de  sa  longueur,  d'une  bractée  subulée, 
à  sépales  étalés,  linéaires-oblongs,  ou  plutôt  acuminés,  à  pétales  ob- 
longs. 


—  209  — 

ARCHITECTURE   DES  JARDINS. 


LES  LABYRINTHES  DE  JARDINS, 

Par  M.  Edouard  Morren. 

Dédale,  le  Vaucanson  d'Athènes,  après  avoir  tué  son  neveu  dans  la 
crainte  de  le  voir  un  jour  le  surpasser  lui-même  dans  l'art  de  construire 
des  automates,  se  réfugia  en  Crète;  il  y  bâtit,  par  ordre  de  Minos,  le 
fameux  labyrinthe  qui  conserva  son  nom  et  dans  lequel  le  juge  des 
enfers  voulait  enfermer  Pasiphaé,  sa  femme,  pour  cause  d'inconduite. 
Pasiphaé  y  fut  tuée  par  Thésée,  et  Minos  y  égara  Dédale  avec  son  fils 
Icare  sous  le  prétexte  qu'ils  favorisaient  Pasiphaé  dans  ses  débauches. 

Telle  serait,  d'après  la  Fable,  l'origine  des  labyrinthes  ou  dédales. 
Les  anciens  citent  encore  le  labyrinthe  d'Egypte,  que  l'on  suppose  plus 
ancien  que  celui  de  Crète,  et  ceux  de  l'île  de  Lemnos  et  d'Elrurie.  Or, 
personne  n'a  jamais  vu  le  labyrinthe  de  Crète  ;  mais  cette  ile,  aujour- 
d'hui Candie,  présente  de  profondes  cavernes,  à  galeries  compliquées; 
pour  les  parcourir,  il  est  indispensable  de  se  munir  d'un  fil,  qu'à 
l'exemple  de  Thésée,  on  doit  laisser  traîner  derrière  soi  depuis  l'entrée. 
Tournefort  est  le  premier  qui  visita  ces  cavernes  creusées  au  pied  du 
mont  Ida  et  il  les  décrit  dans  son  Voyage  du  Levant.  Tout  porte  à  croire 
qu'elles  sont  l'objet  de  la  fable  des  labyrinthes  de  l'antiquité. 

Au  dix-septième  et  au  dix-huitième  siècle,  le  goût  des  labyrinthes  de 
jardins  était  très-répandu.  Les  rois  les  avaient  mis  de  mode,  car  ceux 
de  Versailles,  de  Chantilly  et  de  Choisy-le-Roi  étaient  renommés.  On  les 
formait  de  charmilles,  de  thuyas  ou  de  lilas,  s'efforçant  de  disposer 
les  allées  et  les  sentiers  de  façon  à  égarer  le  promeneur,  puis  à  l'in- 
quiéter, de  jeter  le  trouble  et  la  crainte  dans  son  âme  lorsque,  las  d'errer 
dans  ces  sombres  et  monotones  promenades,  la  nuit  venait  le  surprendre 
sans  qu'il  pût  trouver  d'issue.  Les  chemins  se  ressemblaient  tous,  d'une 
longueur  uniforme,  plantés  d'une  seule  sorte  d'arbres,  sans  rien  qui  pût 
servir  d'étape  ou  de  point  de  repère,  et  l'on  n'avait  pas  les  ailes  d'Icare; 
d'ailleurs  le  souvenir  de  sa  catastrophe  venait  encore  assombrir  l'ima- 
gination. Le  poète  des  jardins  l'a  dit  : 

Lassé  d'errer,  en  vain  le  terme  est  devant  moi; 
Il  faut  encore  errer,  serpenter  malgré  soi , 
Et,  maudissant  vingt  fois  votre  importune  adresse, 
Suivre  sans  cesse  un  but  qui  rccnle  sans  cesse. 

RELG.    HORÎ.    T.    VI.  20 


210  — 
PI.  38. 


—  211   — 

Notre  gravure  reproduit  le  dessin  d'un  labyrinthe  de  jardin  qui  pour- 
rait être  imité  dans  un  parc  d'une  certaine  étendue,  car  à  part  l'inten- 
tion de  rire  aux  dépens  des  promeneurs  égarés,  les  promenades  sont 
très-agréablement  tracées ,  variées  et  très-nombreuses ,  sans  être  con- 
fuses, pour  l'espace  restreint  dont  on  dispose  ;  on  met  beaucoup  dans 
peu  avec  ce  plan.  Ce  labyrinthe  est  appelé  labyrinthe  en  volute  ou  spi- 
rale, dans  le  bouquin  auquel  nous  l'empruntons  ;  l'auteur  l'accompagne 
de  ces  lignes  : 

«  Au  centre  du  labyrinthe  est  un  bassin  accompagné  d'une  salle  percée 
de  huit  allées,  qui  se  rendent  à  quatre  carrefours,  d'où  insensiblement 
vous  passez  dans  des  culs-de-sacs,  ornés  de  cabinets,  de  berceaux  de 
treillage,  tapis  de  gazon,  fontaines,  figures,  etc.,  qui  surprennent  et 
amusent  agréablement  ceux  qui  s'y  sont  égarés.  La  quantité  d'allées  et 
de  détours  différents  qui  se  rencontrent  dans  la  composition  de  ce  laby- 
rinthe, le  rendent  des  plus  embarrassants,  sans  cependant  lui  ôter  la 
régularité  et  la  grâce  du  dessin.  Il  n'y  a  qu'une  seule  entrée,  qui  sert 
aussi  de  sortie,  où  l'on  a  placé  exprès  un  cabinet  de  treillage  pour  le 
rendre  plus  difficile. 

»  Ce  labyrinthe  demande  un  peu  de  terrain  pour  devenir  beau  en 
exécution,  et  ne  peut  guère  se  planter  dans  un  espace  moindre  de  7  à 
8  arpents,  sans  cela  les  allées  se  toucheraient  de  trop  près,  ce  qui  en 
ôterait  l'embarras,  et  en  même  temps  tout  le  mérite.  » 


REMARQUES  SUR  LE  ROSA  DEVONIENSIS. 

La  Rose  Devoniensis  est  une  hybride  obtenue  de  la  Rose  jaune  de 
Chine  (R.  Ochroleuca),  mais  son  père  est  inconnu.  Quant  à  sa  culture  , 
on  peut,  en  toute  sûreté,  recommander  de  la  planter  contre  un  mur  ex- 
posé à  l'est  ou  à  l'ouest,  la  couleur  des  fleurs  étant  dans  cette  situation 
beaucoup  plus  riche  que  si  les  rayons  du  soleil  les  frappaient  directement. 
Le  sol  doit  être  une  bonne  terre  grasse  bien  fumée,  pour  que  la  plante 
puisse  développer  dans  toute  leur  vigueur  ses  belles  et  grandes  fleurs 
doubles ,  d'un  beau  jaune  et  mesurant  souvent  plus  de  cinq  pouces  de 
diamètre  :  elles  sont  très-abondantes,  parfaites  et  d'un  parfum  qu'au- 
cune autre  rose  ne  surpasse.  La  rose  Devoniensis  est  l'un  des  plus  beaux 
ornements  de  la  pleine  terre  pendant  l'été.  On  rempote  les  plantes  à 
l'automne,  on  les  taille  à  la  fin  de  janvier  et  les  replace  dans  les  par- 
terres au  commencement  de  mai.  Pendant  l'hiver  on  les  protège  sous 
un  châssis  frais  sans  être  humide.  Si  l'exposition  était  chaude  et  sèche, 
les  plantes  peuvent  ne  pas  être  relevées,  mais  quelques  pouces  de  feuilles 
sèches  les  protègent  suffisamment  contre  les  rigueurs  de  l'hiver. 


—  212  — 

NOTIONS  GÉNÉRALES 

DE  PALÉONTOLOGIE  VÉGÉTALE. 

Traduit  de  l'Allemand  du  Dr  M.  Seubert,  de  Carlsruhe  (I), 
Par  A.-P.  de  Borre,  candidat  en  Sciences  naturelles. 

La  Paléontologie  du  règne  végétal,  ou  Paléophytologie  ,  est  l'histoire 
naturelle  des  plantes  du  inonde  primitif;  elle  décrit  les  débris  fossiles 
de  végétaux  qui  se  trouvent  dans  les  différentes  couches  géologiques,  et 
cherche  à  établir  d'après  ces  données  les  caractères  de  la  végétation  des 
époques  terrestres  antérieures.  Nous  obtenons  par  là  une  image  du  dé- 
veloppement successif  de  la  vie  végétale  sur  la  terre  pendant  les  temps 
qui  ont  précédé  l'histoire;  c'est  pourquoi  on  peut  encore  distinguer 
cette  science  comme  histoire  primordiale  du  règne  végétal,  de  Yhistoire 
moderne  du  règne  végétal ,  qui  traite  des  changements  survenus  dans  la 
végétation  pendant  les  temps  historiques,  et  qui  se  rattache  naturelle- 
ment à  la  géographie  botanique. 

Les  plantes  fossiles,  comme  en  général  toutes  les  pétrifications,  ne  se 
trouvent  que  dans  les  roches  de  sédiment,  ou  couches  résultant  d'un 
dépôt  par  l'eau.  Les  conditions  dans  lesquelles  se  présentent  les  débris 
des  plantes  fossiles  sont  très-variées.  Quelquefois  toute  leur  substance 
est  remplacée  par  la  matière  pétrifiante,  ordinairement  la  chaux  ou  la 
silice,  auquel  cas  leur  structure  interne  et  caractéristique  est  souvent 
perdue;  cependant  beaucoup  de  bois  silicifiés  la  conservent  et  sontencore 
reconnaissables  sous  le  microscope,  même  dans  leurs  organes  élémen- 
taires. Si,  au  contraire,  la  substance  organique  se  conserve  plus  ou  moins, 
la  pièce,  quand  elle  est  plate  et  mince,  présente  une  empreinte  distincte 
souvent  jusque  dans  ses  plus  petits  détails,  comme  cela  se  voit  princi- 
palement chez  les  feuilles;  ou  bien  la  masse  a  ses  parties  ligneuses  plus 
ou  moins  transformées  en  charbon. 

Nous  distinguons  deux  espèces  de  charbons  fossiles,  la  houille  et  le 
lignite  (2).  Tous  deux  sont  évidemment  d'origine  végétale,  comme  le 
prouve  incontestablement  leur  composition  chimique.  Chez  la  houille, 
la  métamorphose  est  plus  complète;  elle  ne  laisse  plus  reconnaître  dans 
sa  masse  aucune  structure  végétale.  Le  lignite  au  contraire  se  présente 
sous  l'aspect  d'un  bois  bitumineux,  souvent  encore  si  peu  changé,  qu'il 


(1)  Lehrbuch  der  gesammten  Pflanzenkunde.  IVU  Abschnitt.  Stuttgart,  1853. 

(2)  La  houille  elle  lignite,  qui  ont  souvent  une  grande  ressemblance  dans  leurs 
caractères  extérieurs,  se  distinguent  toujours  parfaitement ,  en  ce  que  la  première 
donne  avec  les  alcalis  caustiques  une  solution  d'un  jaune  pâle,  tandis  que  le  dernier 
produit  une  solution  brun  foncé. 


—  213  — 

laisse  reconnaître  évidemment,  même  à  l'extérieur,  la  structure  du  bois, 
et  qu'il  montre  sous  le  microscope  les  formes  caractéristiques  des  or- 
ganes élémentaires.  Parfois  aussi  l'intérieur  de  la  pétrification  est  rempli 
de  substance  minérale,  tandis  que  la  surface  constitue  une  mince  gaine 
de  charbon ,  qui  porte  l'empreinte  caractéristique. 

En  général  les  plantes  fossiles  ne  se  trouvent  qu'incomplètes  et  en 
fragments.  Les  circonstances  qui  ont  accompagné  leur  dépôt,  et  notam- 
ment l'action  de  l'eau,  les  ont  souvent  partiellement  détruites;  il  est 
rare  qu'elles  conservent  les  parties  les  plus  tendres,  telles  que  les  fleurs. 
Les  feuilles,  les  troncs  et  les  fruits  ,  pour  autant  que  ceux-ci  sont  con- 
servés, sont  généralement  séparés  les  uns  des  autres.  C'est  ce  qui  fait 
qu'il  est  souvent  impossible  d'appliquer  aux  plantes  fossiles  les  règles 
de  la  détermination  scientifique  des  plantes;  nous  devons  donc  nous  en 
tenir  aux  caractères  de  la  première  vue,  comme  la  distribution  des 
veines  des  feuilles,  et  nous  ne  pouvons  souvent  nous  prononcer  avec 
entière  certitude  sur  la  question  de  savoir  si  les  organes  séparés  appar- 
tiennent ou  non  à  une  même  plante,  ni  sur  leur  rapport  avec  les  plantes 
actuelles.  Si  nous  comparons  les  végétaux  fossiles  qui  se  sont  conservés 
jusqu'à  nous,  avec  la  végétation  qui  vit  actuellement  sur  la  terre  ,  nous 
leur  trouvons  une  concordance  d'autant  plus  grande  avec  cette  dernière  , 
que  la  couche  à  laquelle  les  débris  végétaux  appartiennent,  est  plus  ré- 
cente. Dans  les  plus  anciennes  formations  se  présentent  des  espèces  qui 
paraissent  appartenir  à  des  familles  aujourd'hui  éteintes,  comme  les 
Astérophyllitées  (1);  plus  tard  les  familles,  mais  non  les  genres,  se  rap- 
portent à  la  végétation  actuelle  ;  enfin  dans  les  couches  les  plus  récentes, 
nous  trouvons  des  espèces  de  genres  encore  vivants,  tels  que  les  genres 
Chara,  Pteris,  Quercus,  Fagus,  etc.  Lorsque  les  caractères  ne  permettent 
aucune  détermination  décisive  sur  l'identité  du  genre,  mais  qu'il  faille 
pourtant  faire  connaître  la  grande  ressemblance  des  espèces  fossiles 
avec  celles  d'un  genre  vivant,  on  se  sert  de  la  désinence  ites  ;  exemples  : 
Asplenites,  Pinites,  Chondrites,  etc.  On  n'a  pas  encore  déterminé  avec 
précision  des  plantes  fossiles  qui  seraient  identiques  avec  les  espèces 
actuellement  vivantes. 

L'énumération  systématique  suivante  comprend  les  familles  auxquelles 
on  a  jusqu'ici  rapporté  avec  vraisemblance  des  débris  fossiles,  et  comme 
exemples,  quelques  genres  importants  avec  leurs  principales  particula- 
rités. De  courtes  descriptions  seront  donnnés  seulement  pour  quelques- 
unes  des  formes  les  plus  remarquables,  surtout  les  formes  anomales  , 
qui  diffèrent  essentiellement  des  espèces  vivantes. 

(1)  Ces  familles  sont  inarquées  d'un  astérisque  dans  l'énumération  qui  va  suivre. 


—  214  — 
CHAPITRE  I. 

APERÇU  SYSTÉMATIQUE  DES  GENRES  DE  VÉGÉTAUX  FOSSILES  LES 

PLUS   IMPORTANTS. 


I.  —  THALLOPHYTES. 

FAMILLE  DES  ALGUES. 

Les  Algues  fossiles  sont  médiocrement  nombreuses;  on  trouve  sur- 
tout des  Algues  marines  des  sous-familles  des  Fucoïdées  et  des  Floridées. 
Les  premières  plantes  qui  se  rencontrent  dans  les  terrains  de  transition, 
sont  des  Fucus,  et,  à  partir  de  là,  on  trouve  des  Algues  à  travers  toute 
la  série  des  formations  jusque  dans  les  plus  récentes.  Les  plus  anciennes 
formes  sont  plus  semblables  à  celles  des  mers  tropicales;  les  plus  nou- 
velles ressemblent  à  celles  des  climats  plus  froids. 

Genres  :  Confervites  Brongniart,  et  Caulerpites  Sternberg,  dans  le 
calcaire  jurassique,  la  craie  et  les  formations  tertiaires. 

Chondrites  Sternb.,  et  Sphcwococcites  Slernb.  Des  espèces  nom- 
breuses depuis  le  terrain  de  transition  jusque  dans  les  formations 
tertiaires. 

Cystoseirites  Sternb.,  et  Fucoïdes  Harl.,  dans  les  terrains  tertiaires. 

Sargassites  Sternb.,  dans  la  craie  et  le  lias. 

FAMILLE  DES  LICHENS. 

On  n'a  reconnu  jusqu'à  présent  que  deux  espèces  fossiles  de  Lichens, 
dans  les  formations  les  plus  modernes. 

FAMILLE  DES  CHAMPIGNONS. 

Quelques  petits  Champignons  parasites  ont  été  trouvés  sur  diverses 
parties  de  plantes,  dans  les  anciennes  formations. 

Genres  :  Excipulites  Gôppert,  Sphœrites  Unger,  Nyctomyces  Hartig. 
Sur  les  bois  fossiles. 

II.  —  CRYPTOGAMES  FOLIACÉS. 

C'est  seulement  dans  le  Succin,  dans  une  formation  tertiaire  par  con- 
séquent ,  que  l'on  trouve  des  Mousses  et  des  Hépatiques ,  notamment  de 
nombreuses  espèces  du  genre  Muscites  Brongn. 

L'immense  majorité  des  plantes  fossiles  de  ce  groupe  sont  des  Cryp- 
togames vasculaires,  à  savoir  les  véritables  Fougères,  et  les  familles 
voisines,  en  partie  éteintes  aujourd'hui. 


215  — 


FAMILLE  DES   FOUGERES. 

La  famille  des  Fougères  est  très-richement  représentée  dans  les  plus 
anciennes  formations,  notamment  dans  la  houille;  elles  paraissent  avoir 
été  pour  la  plupart  des  Fougères  arborescentes;  cependant  on  ne  peut 
plus  rapporter  les  empreintes  de  frondes  aux  tiges  auxquelles  elles  ap- 
partiennent, car  les  deux  organes  se  présentent  séparés.  La  disposition 
des  organes  de  fructification  n'étant  en  général  plus  visible,  les  genres 
sont  fondés  principalement  sur  la  distribution  des  nervures. 

La  richesse  des  Fougères  en  espèces  se  maintient  à  peu  près  sans  di- 
minution jusqu'à  la  formation  crétacée,  et  les  genres  typiques  de  la 
période  houillère  se  retrouvent  jusque-là.  Mais,  dans  les  formations  ter- 
tiaires ,  on  trouve  au  contraire  des  genres  de  Fougères  beaucoup  plus 
petites,  et  notamment  des  espèces  voisines  de  nos  Fougères  vivantes. 

1°  Frondes  ou  feuilles  de  Fougères. 


Fig.  1.  — Un  fragment  de  Nevropleris  leunifolia. 

Genres  :  Nevropteris  Brongn.  Feuilles  simples,  bipinnées;  pinnules 
cordiformes  à  la  base;  nervures  latérales  simplement  ou  doublement 
dichotomiques.  De  nombreuses  espèces  dans  la  formation  houillère  ; 
quelques-unes  aussi  dans  les  formations  triasique  et  jurassique. 

Odontopteris  Brongn.  Espèces  nombreuses  dans  le  terrrain  houiller. 


Fig.  2.  —  Une  piuuule  de  Cyclopteris  orbieularis. 
Cyclopteris  Brongn.  Feuilles  simplement  pinnées ,   pinnules  circu- 


—  216  — 

laires,  nervures  très-divisées.  Un  petit  nombre  d'espèces  dans  le  terrain 
houiller ,  un  plus  grand  nombre  dans  la  formation  carbonifère,  quel- 
ques-unes dans  le  lias  et  le  jura. 


Fig.  3.  —  Sphenopleris  elcgans. 

Sphenopteris  Brongn.  Feuilles  multipinnées,  pinnules  lobées  à  lobe 
inférieur  divisé  ou  denté  ;  nervures  latérales  naissant  sous  un  angle  aigu, 
dichotomiques.  Espèces  en  petit  nombre  dans  le  grauwacke,  nombreuses 
dans  le  terrain  houiller,  en  plus  grand  nombre  depuis  le  keuper  jusqu'à 
la  craie. 

Hymenophyllites  Gœpp.  Feuilles  2-3  pinnées,  avec  un  rachis  ailé  et 
des  pinnules  sessiles;  nervures  une  fois  dichotomiques.  Sores  ronds,  à 
l'extrémité  des  pinnules.  De  nombreuses  espèces  dans  le  terrain  houiller, 
en  petit  nombre  dans  les  couches  plus  modernes. 


Fig.  4.  —  Pecopleris  aquilina. 
Pecopteris  Brongn.  Feuilles  simplement  pinnées  ou  multipinnées,  pin- 
nules sessiles  dans  toute  leur  largeur,  nervures  latérales  arquées,  dichoto- 
miques; sores  arrondis,  2-sériés.  Des  espèces  très-nombreuses  dans  le 
terrain  houiller;  d'autres  dans  le  keuper  et  jusqu'à  la  craie;  une  espèce 
également  dans  la  formation  du  lignite  (dans  leSuccin). 


—  217  — 

Tœniopteris  Brongn.  Plus  rare  dans  les  formations  anciennes,  riche- 
ment représenté  dans  les  diverses  formations  secondaires. 

Ahomopteris  Brongn.  Une  seule  espèce  dans  le  grès  bigarré. 

Alethopteris  Gœpp.  Espèces  nombreuses  dans  le  terrain  houiller,  et 
davantage  dans  les  couches  secondaires. 

Asplenites  Gœpp.  Depuis  le  terrain  houiller  jusque  dans  les  couches 
tertiaires. 

Parmi  les  genres  vivants,  on  trouve  entre  autres  dans  les  terrains  ter- 
tiaires, les  genres  Pteris  L.,  et  Aspidium  Swartz. 

2°  Troncs  de  Fougères. 

Protopteris  Sternb.  Surface  du  tronc  portant  les  cicatrices  des  feuilles 
disposées  en  spirale;  cylindre  ligneux  composé  de  huit  faisceaux  vascu- 
laires.  Espèces  nombreuses,  principalement  dans  le  terrain  houiller; 
quelques-unes  aussi  dans  le  grès  bigarré. 

Caulopteris  Lindley.  Grandes  cicatrices  disposées  en  séries  épaisses. 
Dans  la  formation  carbonifère. 

Psaronius  Cordier.  Espèces  nombreuses  dans  le  grès  rouge  du  terrain 
pénéen  (1).  Quelques  auteurs  les  ont  rapprochées  du  genre  Marattia 
parmi  les  Fougères  vivantes,  tandis  que  Brongniart  leur  assigne  une 
place  parmi  les  Lycopodiacées. 

"famille  des  sigillariées. 

Genres  :  Sigillaria  Brongn.  Troncs  dont  la  surface  est  couverte  de 
cicatrices  foliaires  discoïdales,  disposées  en  séries  longitudinales.  Ils 
présentent  en  général  trois  faisceaux  vasculaires  centraux,  qui  ont  leur 
origine  dans  la  couche  interne  du  cylindre  ligneux.  Ces  troncs  atteignent 
une  grandeur  considérable  et  ont  parfois  environ  40  pieds  de  longueur. 
Les  cicatrices  sont  plus  petites  que  celles  des  Fougères  arborescentes, 
et  attendu  cette  circonstance,  ainsi  que  leur  constitution  différente,  on 
ne  sait  encore  trop  si  les  plantes  de  ce  groupe  étaient  réellement  des 
Fougères,  ou  si  elles  doivent  former  une  famille  particulière,  quoique 
très-voisine.  Suivant  Brongniart  au  contraire,  les  Sigillariées  appartien- 
draient aux  Dicotylédones  gymnospermes.  Elles  sont  nombreuses  dans 
le  terrain  houiller.  Les  espèces  du  genre  Stigmaria  Brongn.  sont  vrai- 
semblablement les  racines  de  ces  plantes. 

Syringodendron  Brongn.  La  surface  des  troncs  présente  de  larges  ri- 
goles dans  lesquelles  se  trouvent  les  petites  cicatrices  rondes  des  feuilles. 
Mêmes  terrains. 

(1)  Le  Todtlkgcndc  des  géologues  allemands.  [N.  du  Tracl.) 


248  — 


FAMILLE    DES    LYC0P0D1ACÉES. 


Fig.  5.  —  Lycopodites  (Walchia)  Schlolheimii.  Rameau  avec  fructifications.  Brongniart  place  le 

geure  Walchia  parmi  les  Conifères. 

Genres  :  Lycopodites  Brongn.  Feuilles  squammiformes ,  disposées 
en  spirales.  Organes  de  la  fructification  en  forme  de  cônes.  Quelques 
espèces  dans  le  terrain  houiller,  et  des  espèces  douteuses  dans  le  jura. 


d 


Fig.  6.  —  Lepidodendron  elegans.  a.  Un  troue,  b.  Coupe  du  troue,  c.  Rameau  pourvu  de 
feuilles,  d.  Morceau  d'écorce  avec  les  cicatrices  foliaires ,  de  grandeur  naturelle. 

Lepidodendron  Sternb.  Troncs  dichotomiques,  atteignant  jusqu'à 
100  pieds  de  hauteur  environ,  couverts  de  cicatrices  rhomboïdales  dis- 
posées en  spirales;  feuilles  simples,  linéaires,  situées  au  milieu  des 
cicatrices  supérieures.  De  nombreuses  espèces  dans  le  terrain  houiller. 

Knorria  Sternb.  Dans  le  grauwacke. 

(La  fin  à  la  prochaine  livraison.) 


■ 


s^s*!& 


Xoix  exotiques. 

L.Lecythis  ollaria.2.Carya  olivoeformis .  3.Bertlioletia  excel«a.4*P»staria  Lentiscus. 
5.Caryocar  butyrosum.  11.  AracKis  bypoéaea.7.  Anacardhun  occulculalc .8  (  arya  alba. 


—  219  — 

HISTOIRE  DES  PLANTES  UTILES. 


DE  QUELQUES  FRUITS  ETRANGERS  OU  EXOTIQUES, 

Par  M.  Edouard  Morren. 

Les  fruits  dont  nous  allons  parler  sont  non-seulement  intéressants  au 
point  de  vue  botanique,  mais  ont  acquis,  la  plupart,  une  grande  impor- 
tance commerciale.  On  ne  se  contente  plus  aujourd'hui  des  produits  de 
son  pays;  les  facilités  des  communications  établissent  entre  tous  les 
peuples  une  solidarité  commerciale,  industrielle  et  économique;  un 
grand  nombre  de  productions  intertropicales  sont  devenues  d'une  né- 
cessité absolue  aux  habitants  des  zones  froides  et  tempérées  ;  d'autres  , 
d'un  usage  plus  restreint,  se  répandent  chaque  jour  davantage.  La  fa- 
cilité avec  laquelle  les  fruits  à  péricarpe  osseux  et  les  différentes  sortes 
de  noix  peuvent  être  conservés  et  transportés  au  loin,  et  l'agréable  sa- 
veur de  la  plupart  d'entre  eux,  les  font  rechercher,  soit  comme  matière 
alimentaire,  soit  comme  addition  à  nos  desserts.  Croirait-on  ,  par 
exemple,  que  l'on  importe  annuellement  en  Angleterre  jusque  50,000 
boisseaux  de  noix  du  Rrésil,  fruit  que  depuis  quelques  années  on  trouve 
chez  la  plupart  des  épiciers  et  qui  provient  principalement  du  district 
de  Para  au  Brésil.  C'est  l'histoire  naturelle  de  cette  noix  et  de  quelques 
autres  fruits  secs  analogues,  que  nous  allons  brièvement  faire  con- 
naître. 

1°  Noix  du  Brésil;  Bertholletia  excelsa  Humb.  etBonpl. 

(PL  45,  fig.  3.) 

La  noix  du  Brésil  ou  de  Para  est  le  fruit  d'un  grand  et  bel  arbre  de 
l'Amérique  australe,  le  Bertholletia  excelsa,  de  la  famille  des  Myrtacées, 
tribu  des  Lecythidées.  Cette  espèce  constitue  seule  le  genre  Berthol- 
letia, fondé  par  Humbold  et  Bonpland  (FI.  Mquin.  I.  122,  T.  36)  en 
l'honneur  du  physicien  français  Berthollet.  Elle  abonde  "dans  les  forêts 
du  district  de  Para  au  Brésil  et  dans  les  forêts  de  l'Orénoque.  C'est  un 
arbre  gigantesque ,  dont  le  tronc  atteint  souvent  quatre  pieds  de  dia- 
mètre à  la  base  et  une  centaine  de  pieds  de  hauteur  avant  de  se  ra- 
mifier et  dont  la  hauteur  totale  est  alors  de  120  pieds.  Les  noix  ou 
graines  ne  viennent  pas  isolées,  mais  elles  sont  rassemblées  avec  la  plus 
remarquable  exactitude  au  nombre  de  16  à  20,  dans  une  capsule  li- 
gneuse, à  peu  près  ronde,  un  peu  pyriforme  ,  charnue  en  dedans;  les 


—  220  — 

^raines  ou  noix  sont  triangulaires  et  fixées  à  la  colonne  centrale  ;  elles 
consistent  en  une  enveloppe  ligneuse,  ou  test  brun  foncé,  présentant  deux 
faces  latérales  aplaties  et  une  face  plus  petite  convexe  et  très-ru- 
gueuse; en  brisant  cette  enveloppe,  un  peu  plus  dure  que  celle  de  notre 
noix  indigène ,  on  trouve  une  grosse  amande  ,  arrondie  ,  allongée, 
d'une  saveur  qui  rappelle  celle  de  la  noisette,  mais  plus  huileuse  et  très- 
délicate. 

La  capsule  des  Bertholletia  est  si  dure  et  si  lourde  qu'il  est  dange- 
reux de  passer,  à  l'époque  de  leur  maturité,  sous  ces  arbres  ;  au  moins 
une  tête  d'Indien  n'est-elle  pas  assez  solide  pour  résister  au  choc  fatal 
d'un  Castanha-Cabomba,  comme  l'appellent  les  Brésiliens. 

Les  singes  sont  avides  des  noix  du  Bertholletia;  on  les  voit  parfois 
frapper  patiemment  la  capsule  avec  une  pierre  pendant  plusieurs  heures 
pour  arriver  aux  graines  qu'elle  récèle.  Ils  surveillent  la  chute  des  fruits 
avec  grande  attention,  et  lorsqu'il  vient  à  en  tomber  un,  c'est  le  signal 
d'une  amusante  gribouillette  ;  à  l'instant  les  sentinelles  quadrumanes, 
perchées  dans  les  hautes  cimes  ,  s'élancent  de  branches  en  branches  en 
s'accrochant  par  leur  longue  queue  préhensible  ,  sur  le  précieux  juvia  , 
pour  lequel  s'engage  un  combat  acharné  ,  image  fidèle  des  luttes  de  la 
race  humaine.  La  hauteur  des  Bertholletia  rendrait  leur  récolte  très- 
difficile  :  on  raconte  que  les  Indiens  profitent  pour  cette  opération  de 
l'instinct  d'imitation  des  singes  ;  ils  les  attaquent  en  leur  lançant  des 
pierres,  et  ces  animaux  leur  jettent  en  retour  des  capsules  du  Berthol- 
letia, avec  accompagnement  de  force  hurlements.  On  récolte  ainsi  une 
grande  quantité  de  noix  qui  sont  transportées  dans  des  canots  et  livrées 
au  commerce.  La  principale  station  des  Bertholletia  est  la  rivière  Ari- 
pecuru,  une  branche  du  fleuve  des  Amazones  ;  la  récolte  se  fait  pendant 
l'hiver,  par  des  bandes  d'indiens  Castanheiros. 

Le  Bertholletia  excelsa  a  été  introduit  en  Europe;  il  croît  dans  plu- 
sieurs serres  chaudes  de  Belgique.  Ses  rameaux  sont  alternes,  garnis  à 
l'extrémité  de  feuilles  coriaces,  très-amples,  oblongues,  entières,  exsti- 
pulées,  alternes,  les  fleurs  sont  en  grappe  ou  épi,  d'un  jaune  blanchâtre 
à  étamines  blanches. 

2°  Noix  de  Sapucaïa  ;  Lecythis  ollaria  Loeffl. 
(PL  45,  fig.  1.) 

Le  Lecythis  ollaria  est  un  arbre  de  la  même  famille  que  le  Bertholletia 
(Lecythidées)  et  croît  dans  les  mêmes  localités.  Il  appartient  à  un  genre 
formé  de  huit  espèces  environ  ,  toutes  propres  à  l'Amérique  méridio- 
nale, fondé  par  Loeffing  (de  A**»***,  flacon,  par  allusion  à  la  forme  du 
fruit)  et  dont  le  nom  français  est  Quatelé.  Le  quatelé  marmite  (Lecythis 


—  <m  — 

ollaria)  est  un  bel  arbre  dont  le  bois  est  très-recherché  pour  les  cons- 
tructions submergées;  ses  feuilles  sont  cordées,  presque  entières, ovales, 
sessiles.  Le  fruit  est  une  capsule  en  forme  d'urne,  dure,  ligneuse, 
épaisse,  convexe  à  son  sommet,  bordée  par  les  restes  du  calice,  s'ou- 
vrant  par  une  sorte  de  couvercle  qui  tombe  en  laissant  une  ouverture 
suffisante  pour  que  les  noix  puissent  en  sortir.  Ces  capsules  servent  aux 
indigènes  de  tasses  et  de  vases,  elles  ressemblent  assez  bien  à  une  mar- 
mite surmontée  de  son  couvercle,  et  on  les  appelle  Marmites  de  Singes. 

Les  Noix  de  Sapucaia  sont  les  graines  du  Lecythis  ollaria  ;  elles  sont 
attachées  à  un  placenta  conique,  sont  allongées,  légèrement  courbées 
en  S  et  à  surface  profondément  ridée  longitudînalement  ;  la  coquille 
est  plus  tendre  que  celle  de  la  plupart  des  noix.  Il  est  regrettable  que  ce 
fruit  délicieux  ne  soit  pas  plus  connu  ;  il  en  arrive  parfois  de  petites 
quantités  en  Angleterre,  qui  sont  vendues  à  vil  prix  vu  l'ignorance  où 
l'on  se  trouve  de  ses  qualités  précieuses.  Il  est  cependant  bien  supérieur 
à  la  noix  du  Brésil  ;  sa  saveur  est  plus  délicate  et  il  est  plus  digestible. 

Malheureusement  ces  qualités  sont  bien  connues  des  singes  qui 
abondent  dans  les  forêts  brésiliennes  ;  ils  n'ont  garde  d'assommer  les 
Indiens  castanheiros  avec  des  cabombas  ou  capsules  de  Quatelé ,  mais 
ils  les  gardent  précieusement  et  s'en  nourrissent,  ce  qui  fait  que  nous 
ne  pouvons  en  obtenir  qu'un  bien  petit  nombre.  Les  singes,  dans  leur 
avidité  pour  les  noix  de  Sapucaia,  poussent  la  main  à  travers  l'ouverture 
de  la  capsule  juste  suffisante  pour  lui  livrer  passage  et  empoignent  les 
noix  ;  mais  l'orifice  qui  a  laissé  passer  la  main  vide  se  refuse  à  la  laisser 
retourner  pleine,  et  l'animal  s'exténue  en  vains  efforts  plutôt  que  d'aban- 
donner son  butin.  Les  Indiens  profitent  de  cette  stupide  cupidité  pour 
surprendre  les  singes  ;  ils  enlèvent  le  couvercle  de  quelques  noix  qu'ils 
jettent  sous  les  arbres;  un  singe  gourmand  venant  à  passer  ne  se  con- 
tente pas  d'un  seul  fruit,  mais  plonge  les  mains  dans  deux  à  la  fois, 
en  s'obstinant  à  ne  pas  lâcher  prise  ;  dans  cette  situation  sa  capture 
est  nécessairement  aisée.  «  Il  est  trop  vieux  singe  pour  se  laisser  prendre 
à  un  Cabomba  »  est  un  proverbe  vulgaire  au  Brésil.  * 

3°  Noix  de  Souari  ;  Caryocar  dutyraceum. 
(PL  45,  fr.  5.) 

Les  espèces  du  genre  Caryocar  (de  xctpyàv,  noix)  de  Linné,  de  la  famille 
des  Rhizobolacées ,  sont  des  arbres  très-remarquables  de  l'Amérique 
tropicale  dont  plusieurs  sont  cultivées  dans  les  serres  d'Europe,  notam- 
ment le  superbe  C.  nuciferum  aux  grandes  fleurs  à  pétales  pourpres 
presque  noirs  bordés  de  rouge  et  aux  étamines  nombreuses,  exsertes 


—  222  — 

et  d'une  belle  couleur  jaune.  Ce  genre  est  constitué  par  7  espèces  en- 
viron et  on  lui  réunit  comme  section  les  deux  genres  Pekea  et  Souari 
d'Aublet. 

Le  C.  butyraceum  est  un  arbre  gigantesque  qui  croit  dans  le  Demarara  ; 
son  bois  est  très-estimé  pour  la  construction  des  navires.  Ses  fruits 
sont  de  grosses  noix  qui  viennent  en  touffes  et  portent  les  traces  de  la 
pression  qu'elles  exercent  l'une  sur  l'autre  ;  elles  renferment  quatre 
graines  comprimées  de  deux  côtés ,  arrondies  à  l'extérieur  et  colorées 
en  beau  rouge  brun  ;  leur  surface  est  couverte  de  nombreux  tubercules 
arrondis.  L'amande  est  peut-être  plus  agréable  que  celle  de  toutes  les 
autres  noix  ;  elle  est  aussi  douce  que  celle  de  l'amandier  mais  plus 
tendre  et  d'une  saveur  plus  laiteuse  ;  elle  renferme  une  grande  quantité 
d'une  huile  grasse,  butyreuse,  aussi  bonne  que  l'huile  d'olive  et  qu'on 
emploie  souvent  à  Cayenne  en  guise  de  beurre.  Quoique  ces  fruits  se 
conservent  bien,  on  n'en  importe  qu'une  très-petite  quantité  en  Angle- 
terre, probablement  à  cause  de  la  grande  difficulté  de  la  récolte,  vu  la 
hauteur  de  l'arbre. 

4°  Noix  d'anacarde;  Anacardium  occidentale  Linn. 
(PL  45,  fig.  7,) 

Les  Anacardiers  sont  de  grands  arbres,  originaires  des  Indes  et  in- 
troduits par  la  culture  en  Amérique.  L'espèce  la  plus  remarquable  est 
l'Anacardium  occidentale  L.,  appelé  bibo  dans  son  pays  natal.  C'est  un 
arbre  élevé,  à  feuilles  grandes,  elliptiques-oblongues,  lisses  en  dessus, 
âpres  à  la  face  inférieure,  à  fleurs  petites  et  nombreuses,  à  ovaire  libre, 
à  une  seule  loge  et  un  seul  ovule  suspendu,  surmonté  de  trois  styles.  Le 
fruit  est  une  petite  noix  réniforme,  de  couleur  gris-cendré,  enchâssée 
jusqu'au  tiers  de  sa  hauteur  dans  un  gros  disque  charnu  et  renflé  que 
l'on  prendrait  pour  le  fruit  proprement  dit  parce  qu'il  acquiert  plus  de 
volume  que  la  noix.  Le  suc  de  ce  disque,  fermenté,  sert  aux  Indes  à 
fabriquer  une  sorte  de  vin  et  une  excellente  limonade.  Quant  à  la  noix 
elle-même,  ses  parois  consistent  en  trois  parties  distinctes;  l'extérieure 
et  l'intérieure  sont  dures  et  sèches,  mais  la  partie  moyenne  est  creusée 
de  canaux  qui  renferment  un  suc  rougeâtre  tellement  acre  que  l'impru- 
dent qui  aurait  le  malheur  d'y  porter  les  dents  ressent  immédiatement 
de  vives  douleurs  et  une  excoriation  des  lèvres  et  de  la  langue.  Ce  suc  sert 
à  ronger  les  excroissances  charnues  et,  mêlé  à  la  chaux,  il  forme  une 
encre  à  marquer  le  linge  en  caractère  indélébiles,  sans  toutefois  altérer 
l'étoffe;  il  est  encore  usité  dans  plusieurs  maladies.  L'amande  renfermée 
dans  cette  coquille  est  très-bonne;  on  l'obtient  en  faisant  rôtir  les  noix 
sous  la  cendre;  leur  goût  rappelle  la  châtaigne  ou  la  pistache.  On  les 


—  223  — 

mange  fraîches  ou  confites  au  sucre  ou  au  sel.  On  prétend  aux  Indes 
qu'elles  exercent  une  heureuse  influence  sur  la  santé,  chassent  les  hu- 
meurs, exaltent  les  sens  et  même  qu'elles  donnent  de  l'esprit  à  ceux  qui 
n'en  ont  pas;  on  en  voit,  parfois,  aux  étalages  des  confiseurs,  mais  on 
en  achète  rarement. 

La  noix  d'Anacarde  est  souvent  confondue  avec  l'Anacarde  des  bou- 
tiques, fruit  du  Semecarpusanacardium  Lin.  fil.  (Anacardium  offïcinarum 
Gœrtn.),  arbre  spontané  de  l'Amérique  tropicale  et  avec  lequel  ils  ontbeau- 
coup  de  ressemblance. L'Anacarde  des  boutiques  a  le  fruit  plus  long,  porte 
une  cicatrice  blanche  à  la  base  et  diffère  de  forme  et  de  couleur;  la  zone 
moyenne  donne  une  belle  matière  noire  très-usitée  pour  la  fabrication 
des  vernis,  industrie  pour  laquelle  on  importe  surtout  ces  fruits. 
L'amande  rôtie  est  cependant  aussi  douce  que  celle  de  VA.  occidentale. 

5°  Noix  de  Pecan  (Pecan  Nut);  Carya  oliv/Eformis  Nutt. 

(PL  45,  jfy'.  2.) 

Le  genre  Carya  (x*/)«*,  noyer)  a  été  fondé  par  Nuttal  aux  dépens  de 
plusieurs  espèces  de  Juglaus  de  Linné  et  renferme  environ  douze  es- 
pèces propres  à  l'Amérique  boréale.  Les  caractères  différentiels  du  genre 
sont  :  3  ou  6  étamines,  au  lieu  de  14-16,  un  seul  style  sessile,  au  lieu 
de  2,  etc.  La  noix  du  C.  olivœfoi'mis  a,  comme  le  nom  de  l'espèce  l'in- 
dique la  forme  d'une  olive  ;  elle  en  a  à  peu  près  les  dimensions  mais  un 
peu  plus  de  longueur  et  plus  étroite.  Sa  couleur  est  le  brun  rougeâtre 
pâle,  et  l'écaillé  est  peu  résistante.  La  saveur  de  l'amande  rappelle  im- 
médiatement la  noix  de  notre  pays.  On  n'en  importe  que  de  faibles 
quantités  en  Europe.  Ces  noix  sont  très-estimées  des  Américains;  on  en 
extrait  une  huile  grasse  ;  on  en  exporte  de  la  Louisiane  vers  les  Antilles 
des  cargaisons  complètes. 

6°  Noix  Hickory  (Hickory  Nut)  ;  Carya  alba  Nutt. 
(PL  45,  fig.  8.) 

Le  Carya  alba  est  une  des  plus  belles  essences  forestières  de  l'Amé- 
rique du  Nord.  Sa  noix  est  à  écaille  lisse,  jaune  pâle  ou  blanchâtre, 
striée  longitudinalement  de  trois  ou  quatre  rides,  très-forte.  L'amande 
qu'elle  renferme  a  l'apparence  de  celle  de  la  noix  ordinaire;  elle  sert  de 
nourriture  aux  Peaux-Rouges. 

7°  Pistaches,  fruits  du  Pistacia  Ientiscus  Linn. 

{PL  &,fig.  4.) 

Le  pistachier  est  cultivé  dans  une  grande  partie  de  l'Europe  méri- 
dionale, dans  les  îles  de  l'Archipel  grec,  spécialement  à  Chio  où  l'on 


recueille  la  résine  de  cet  arbre.  Son  fruit  est  d'un  vert  rougeàtre,  d'un 
ponce  de  long;  l'amande  est  d'un  vert  pâle  et  d'une  saveur  très-agréable. 
Le?  Turcs  et  les  Grecs  consomment  beaucoup  de  pistaches  et  ne  nous 
en  envoient  que  de  très-faibles  quantités. 

8°  Pistaches  de  terre,  Arachis  hypogjia  Linn. 
PL  45,  fig.  6.) 

L 'Arachis  hypogœa  L.  A.  A f ricana,  Lour.,  A.  asiatica,  Lour.,  A. 
americana,  Ténor.)  ou  Arachide  est  la  seule  espèce  de  ce  genre  de 
Le^rumineusr.  C'rSt  une  plante  herbacée,  annuelle,  rameuse,  à  feuilles 
bijur  es,  ï  folioles  obovales,  entières,  obtuses,  et  à  stipules  adnées, 
inéquilatérales,  acérées.  Les  fleurs  sont  les  unes  hermaphrodites  sté- 
riles, les  autres  femelles  et  fertiles;  elles  sont  petites,  jaunes,  axil- 
laires.  sessiles,  ordinairement  géminées.  Après  la  fécondation,  le  stipe 
de  l'ovaire  des  fleurs  femelles,  court  dans  l'origine,  s'allonge  peu  à  peu, 
et  finit  par  élever  l'ovaire  au-dessus  du  tube  calicinal ,  lequel  persiste 
sous  forme  de  pédoncule.  Alors  le  jeune  fruit  se  recourbe  vers  la  terre, 
s'y  enfonce,  et  y  accomplit  sa  maturation  à  plusieurs  pouces  au-dessous 
delà  surface.  La  pistache  de  terre  est  généralement  cultivée  sur  les  côtes 
occidentales  d'Afrique,  où  elle  constitue  la  base  de  l'alimentation  de  la 
population  nègre;  on  l'y  nomme  Moonduli;  elle  s'est  répandue  sous 
toute  la  zone  équatoriale.  en  Chine  et  aux  Etats-Unis.  Les  fruits  ren- 
ferment une  ou  deux  graines,  de  la  grosseur  d'une  noisette,  d'un  goût 
analogue;  elles  renferment  une  excellente  huile  grasse.  On  les  mange 
crues,  bouillies  ou  torréfie^;.  L" Arachis  hypogea  se  cultive  dans  le  midi 
de  la  France  ;  en  lui  donnant  quelques  soins  il  peut  réussir  dans  nos 
jardins  potagers. 


CULTURE  DES  PORTULACCAS  POUR  BORDURE. 

On  sème  en  mars  sous  couche  ou  en  pots  dans  une  bâche.  Lorsque 
les  jeunes  plantes  apparaissent,  on  les  repique  dans  de  petits  pots  et  on 
les  conserve  quelque  temps  en  serre  tempérée;  plus  tard  on  les  trans- 
porte sous  couche  libre,  les  protégeant  seulement  pendant  les  nuits 
froides,  jusqu'à  l'époque  de  leur  transplantation.  Vers  le  milieu  de  mai 
on  les  livre  à  la  pleine  terre.  Les  portulaccas  aiment  une  bordure  ou  un 
terrain  pierreux  bien  éclairé  du  soleil;  un  sol  humide  et  argileux  leur 
est  funeste  :  les  fleurs  ne  s'ouvrent  que  sous  l'influence  des  ravons 
directs  du  soleil;  elles  se  continuent  jusqu'à  l'arrivée  des  froids.  Ce 
sont  des  plantes  très-recommandables ,  d'une  agréable  floraison  et  d'un 
bel  effet  ornemental. 


Œillets    de   fantaisie. 
].  ;\lln<"  PhiHppsDorn.  «2.  VI m'  Noëlle.  3.Napoléon  III.  4  Capitaine  Paillon 


—  225  — 

HORTICULTURE. 


A  PROPOS  DES  OEILLETS  DE  FANTAISIE 

DE    LA    COLLECTION    DE   M.    JaCOB-WeYHE  ; 

(Représentés  pi.  46.) 
Par  M.  Edouard  Morren. 

Fig.  1.  OEillet  de  fantaisie  à  fond  jaune  :  M<"e  Philippsborn,  de  Cologne. 

Fig.  2.  OEillet  de  fantaisie  à  fond  blanc  :  Mœe  Noëlle,  dame  du  directeur  général 

•    de  la  Monnaie,  à  Berlin. 
Fig.  3.  OEillet  de  fantaisie  à  fond  jaune  :  Napoléon  III. 
Fig.  4.  OEillet  de  fantaisie  à  fond  jaune  :  Capitaine  Paillou. 

Les  fleurs,  filles  du  soleil  et  de  la  rosée,  sont  d'aimables  coquettes  qui 
savent  user  de  tous  les  moyens  de  séduction  pour  attirer,  retenir  et 
exciter  l'amour.  Elles  demandent  peu.  donnent  beaucoup  et  sourient 
avec  tant  de  grâce  à  celui  qui  les  aime  ! 

On  aime  les  fleurs,  mais  on  a  sa  fleur  préférée. 

C'est  elle  qui  nous  paraît  entre  toutes  la  plus  accomplie,  elle  est  le 
principal  ornement  du  parterre  ;  c'est  elle  dont  on  éloigne  avec  la  plus 
grande  sollicitude  les  herbes  vulgaires  et  envieuses  qui  s'obstinent, 
malgré  les  plus  sévères  remontrances,  à  vouloir  fréquenter  la  bonne 
compagnie  ;  c'est  elle  que  l'on  protège  la  première  contre  ceux  qui 
pourraient  troubler  son  repos,  porter  atteinte  à  sa  santé,  la  faire  souf- 
frir ou  la  fâcher  ;  c'est  elle  qui  sait  donner  le  bonheur. 

Quel  est  donc  le  charme  séducteur  de  la  fleur  préférée  ? 

Ce  n'est  pas  la  pureté  de  ses  formes,  la  fraîcheur  de  son  teint,  ni  le 
parfum  suave  qu'elle  exhale,  mais  plutôt  le  sentiment  qui  naît  de  l'har- 
monie de  toutes  ces  beautés,  son  expression.  Chaque  fleur,  comme 
toute  œuvre  artistique,  est  l'expression  d'une  idée  créatrice,  d'une 
pensée,  d'un  sentiment. 

Les  fleurs  sont  une  source  féconde  et  intarissable  d'inspirations,  à 
laquelle  on  va  s'abreuver  de  sentiments  de  reconnaissance  et  d'espé- 
rance, de  consolation  et  de  bonheur,  de  rêverie  et  de  joie,  de  pureté  et 
d'amour. 

Savoir  lire  dans  les  corolles,  c'est  connaître  le  langage  des  fleurs. 

Chacune  semble  être  l'expression  d'un  sentiment,  elle  en  devient  l'em- 
blème et,  par  suite,  se  trouve  intimement  liée  à  un  souvenir,  à  une  es- 
pérance  ! 

Cette  fleur  est  la  fleur  préférée. 

BELG.    HORT.    T.    VI.  2* 


—  226  — 

L'œillel,  par  son  feuillage  à  la  fois  robuste,  élégant  et  délicat,  son  al- 
lure libre  et  dégagée,  ses  pétales  profondément  enracinés  débordant  un 
calice  trop  étroit,  ses  fleurs  d'une  forme  harmonique,  de  couleurs  pures 
et  surtout  d'un  parfum  enivrant,  symbolise  Y  amour  sincère.  Mais 
l'œillet,  comme  l'amour,  présente  une  énorme  quantité  de  variétés. 
L'œillet  blanc,  constant  dans  sa  couleur,  exprime  un  amour  fidèle; 
l'œillet  rose,  couleur  de  chair,  est  la  fleur  de  la  sensation,  etc. 

Les  œillets  de  fantaisie  me  rappellent  les  bergères  enrubanées  de 
Watteau;  ce  sont  de  belles  joufflues,  bien  fraîches  et  en  même  temps 
remplies  de  finesse,  de  grâce  et  de  coquetterie;  leur  unique  soin  est  la 
toilette;  puis,  heureuses  de  tant  de  crinoline,  de  volants,  de  satin,  de 
soie,  de  gaze,  de  rubans,  de  nœuds  et  de  bonnes  senteurs,  elles  attendent 
le  papillon  en  se  souriant  à  elles-mêmes. 

Comparez  ces  fleurs  à  l'œillet  flamand  (1);  vous  trouverez  à  celui-ci 
une  expression  toute  autre. 

L'œillet  flamand  est  la  beauté  campagnarde  ;  ses  contours  sont  amples 
et  arrondis ,  son  teint  blanc  et  frais  est  hardiment  coloré  d'incarnat,  elle 
ne  connaît  rien  de  la  recherche  des  modes  de  la  ville ,  elle  étouffe  sous 
l'étreinte  du  corset;  oubliant  toutes  les  sages  exhortations  de  MM.  les 
amateurs,  l'œillet  flamand  crève  souvent  son  calice. 

Le  Bon  Jardinier  pour  1855,  donne  les  conseils  suivants  pour  la  cul- 
ture de  l'œillet. 

«  Ces  plantes  perdent  la  pureté  de  leurs  couleurs  par  une  culture  peu 
soignée;  dès  que  l'on  voit  leurs  nuances  se  confondre,  et  le  fond  blanc 
prendre  une  teinte  rougeùtre,  on  marcotte  la  plante  en  pleine  terre 
franche  pure;  on  relève  les  marcottes  pour  leur  faire  passer  l'hiver  en 
pot,  dans  une  pièce  sèche  et  bien  aérée,  et  on  les  replante  dans  la  même 
terre,  à  bonne  exposition  libre  dans  le  jardin,  après  les  premières  pluies 
d'avril.  Si  la  pleine  terre  franche  ne  leur  rend  pas  tout  leur  éclat ,  on 
les  réforme  comme  dégénérées,  mais  elles  peuvent  encore  fournir 
d'excellentes  graines. —  Les  œillets  se  cultivent  en  pots  de  0m,16  à  0m,20 
de  diamètre.  Leur  faible  tige  ne  peut  supporter  la  fleur  ;  il  lui  faut  un 
tuteur.  On  se  sert  d'une  baguette  de  bois ,  ou  de  fil  de  fer  ,  peinte  en 
vert,  à  laquelle  on  l'attache  avec  du  jonc  ou  du  fil,  à  mesure  de  la 
floraison  ;  on  les  place  sur  un  buffet  ou  gradin  disposé  en  six  ou  sept 
rangs  de  tablettes. 

«Pour  entretenir  une  collection  ou  l'augmenter,  il  faut  semer  ou  re- 
courir au  commerce.  On  sème  de  préférence  les  œillets  doubles,  dits  vio- 


(I)  A  défaut  de  la  nature,  Voyez  Belgique  Horticole,  T.  1,  PI.  51),  p.  277. 


—  227  — 

lels-pourpre ,  bizarre-rose,  bizarre-feu.  L'œillet  simple  donne  toujours 
de  la  graine  ;  mais  sur  2  à  3,000  graines  on  obtient  difficilement  un  semi- 
double.  Il  faut  donc  préférer  celle  des  doubles.  On  sème  au  printemps 
en  terrine,  en  terre  franche  mêlée  d'un  tiers  de  terreau  bien  passé,  ou  en 
terre  de  bruyère.  On  lève  le  plant  quand  il  a  six  à  huit  feuilles.  On 
le  repique  dans  une  planche  de  terre  franche  bien  ameublie  et  fumée  de 
l'année  précédente,  ou  terrautée  au  moment  du  repiquage.  On  met  les 
plantes  à  0m,22  l'une  de  l'autre,  si  l'on  doit  les  relever  en  motte  à  l'au- 
tomne, pour  les  distribuer  dans  les  plates-bandes,  et  à  0m,35  à  0m,40 ,  si 
l'on  veut  les  laisser  en  place.  On  soigne  cette  plantation  en  binagesët  arro- 
sementsjusqu'àla  fin  de  l'automne.  Ces  jeunes  plantes  sont  si  vigoureuses 
qu'elles  passent  ordinairement  l'hiver  sans  soins  ni  couverture;  mais 
comme  elles  sont  très-sensibles  au  verglas,  aux  transitions  subites  de 
température  en  hiver  et  aux  hâles  du  soleil  de  mars,  les  horticulteurs 
attentifs  bordent  leurs  planches  de  petites  bâches  sur  lesquelles  ils  éten- 
dent des  paillassons  pour  éviter  ces  accidents.  Après  les  premières  pluies 
douces  de  la  fin  de  mars  ,  ils  ne  les  couvrent  plus  au  soleil.  On  a  soin, 
en  les  couvrant ,  de  leur  ménager  un  courant  d'air;  ils  ne  craignent 
point  un  froid  de  8  à  10  degrés.  Au  printemps,  on  enlève  les  feuilles 
pourries.  On  donne  de  fréquents  binages  jusqu'à  la  fleur,  qui,  dans  nos 
climats,  a  lieu  vers  la  fin  de  juin. 

«Quand  les  tiges  commencent  à  monter,  on  plante  un  tuteur  ou  une 
baguette  dans  le  pot  et  on  y  attache  les  montants  avec  du  jonc,  de  la 
laine,  ou  avec  des  anneaux  en  métal  ou  en  gomme  élastique,  que  l'on 
remonte  à  mesure  que  les  tiges  s'allongent;  on  ne  laisse  que  trois  à 
quatre  boutons  sur  chacune.  On  place  au  bout  des  baguettes  des  ergots 
de  mouton,  de  porc  ou  de  veau,  où  les  perce-oreilles  se  retirent  à  la 
pointe  du  jour,  et  où  on  peut  les  détruire  le  matin.  A  mesure  que  les 
jeunes  plants  fleurissent,  on  arrache  ceux  qui  n'ont  pas  les  qualités 
requises.  Ordinairement  les  jeuhes  plantes  ont  des  touffes  de  marcottes. 
On  fera  bien  d'en  couper  quelques-unes  aux  plantes  rares  ,  poiir  les 
bouturer  à  l'ombre,  en  bonne  terre.  On  coupe  horizontalement  ces  mar- 
cottes au  milieu  d'un  nœud;  on  fait  ensuite,  au  milieu  de  ce  nœud,  une 
fente  longitudinale  de  0m,009  à  0m,012  seulement.  On  ôte  les  feuilles 
jusqu'à  0m,04  de  hauteur.  On  ouvre  la  terre  avec  son  doigt ,  et  on  y 
place  la  bouture,  qu'on  soigne  et  arrose  jusqu'à  ce  qu'elle  indique  qu'elle 
a  des  racines.  Ces  boutures,  préférables  aux  marcottes,  conservent  plus 
longtemps  la  pureté  de  leur  coloris;  c'est  le  moyen  qu'il  faut  employer 
pour  sauver  une  plante  qui  menace  de  dégénérer. 
»Les  CCillets  ne  se  rentrent  qu'aux  gelées,  qu'ils  ne  craignentmème  pas; 
mais  l'humidité  leur  est  contraire.  En  hiver  il  faut  les  tenir  ou  sous  un 


—  228  — 

hangar  approprié,  ou  en  orangerie  près  des  jours,  ou  dans  des  chambres 
bien  aérées.  On  ne  les  arrose  que  pour  ne  pas  les  laisser  mourir;  on 
leur  donne  l'air  et  le  soleil  tant  que  l'on  peut,  quand  la  température  est 
douce.  On  les  préserve  du  soleil  de  mars  ,  et  sur  la  fin  de  ce  mois  ,  on 
leur  rend  l'air  libre  après  les  premières  pluies. 

»Les  semis  d'OEillets  ont  produitaussi  une  série  de  nouvelles  variétés, 
qui  ont  sur  les  autres  le  grand  avantage  de  remonter  et  de  fleurir  tout 
l'hiver.  En  les  rentrant  dans  une  serre  froide  ou  un  jardin  d'hiver,  on 
jouit  pendant  toute  la  mauvaise  saison  de  leurs  fleurs  odoriférantes  , 
blanches,  rouges  et  panachées.  On  n'a  pas  encore  obtenu  de  nuances 
aussi  diverses  que  dans  la  race  des  non  remontantes  ;  cependant  quelques 
horticulteurs  sont  arrivés  à  composer  des  collections  de  30  à  40  variétés, 
et  il  faut  espérer  qu'avant  peu  les  Œillets  remontants  rivaliseront  de 
variété  et  de  richesse  de  coloris  avec  leurs  devanciers.  » 


LISTE  DES  FOUGÈRES  DE  SERRE  FROIDE  ET  TEMPÉRÉE. 


La  culture  de  cette  intéressante  famille  de  plantes  s'étend  chaque 
année  davantage.  Les  fougères  plaisent  par  l'élégance  de  leurs  frondes 
et  la  belle  coloration  de  leur  feuillage  ;  elles  sont  remarquables  par  leurs 
formes  variées  et  bizarres  et  la  délicatesse  des  détails  de  leur  organisa- 
tion. L'expérience  a  prouvé  que  toutes  les  espèces  suivantes  peuvent  se 
contenter  de  la  chaleur  des  serres  froides  que  l'on  ne  chauffe  que  pen- 
dant les  froids  les  plus  rigoureux.  Les  noms  précédés  d'un  astérisque 
sont  ceux  des  plantes  qui  depuis  deux  ans  ont  résisté  à  l'air  libre, 
quelques-unes  seulement  ont  été  légèrement  protégées  par  de  vieilles 
frondes  ou  des  feuilles  sèches.  Les  espèces  marquées  d'un  S  demandent 
moins  d'humidité  que  les  autres  et  prospèrent  dans  une  serre  sèche. 


Adianlum  assimile,  Sw. 


* 

» 

cuneatum,  Hook. 

S 

n 

monanthemum,  Lin 

¥S 

» 

hispidulum,  R.  Br. 

» 

praemorsum,  Swz. 

» 

formosum,  R.  Br. 

» 

canariense,  Willd. 

» 

reniforme,  Lin. 

» 

falcatum,  Swz. 

» 

affine,  Willd. 

il 

polyodon,  Forst. 

» 

pubescens,  Schk. 

• 

» 

acutum,  Willd. 

» 

selulosum,  J.  Sm. 

n 

planicaule,  Wall. 

S  Â 

splenium  attenuatum,  R.  Br. 

S 

» 

Petrarchae,  Dec. 

s 

» 

furcaturo,  Swz. 

* 

Athyrium 

umbrosum,  J.  Sm. 

» 

palmatum.  Lam. 

» 

axillare,  J.  Sm. 

# 

« 

lucidum,  Forst. 

* 

Antigramma  rhizophylla,  J.  Sm 

* 

n 

ebeneum,  Ait. 

Alsophylla  capensis,  J.  Sm 

s 

» 

compressum,S\vz. 

Acrophorus  hispida,  T.  Moore. 

s 

n 

oblusatum,  Forst. 

Arlhopter 

is  exigua,  T.  Moore. 

Asplenium  Qabelliforme,  R.  Br. 


229 


Balanlium  culcila,  Kaulf. 
Blechnum  triangulare,  Link. 
»         occidentale,  Lin. 
•         striatum,  R.  Br. 
»        australe. 
Cyathea  dealbata,  Don. 
»         medullaris,  Don. 
S  Cassebeera  farinosa,  J.  Sm. 
S        »  pteridoides,  Presl. 

»  hastata,  J.  Sm. 

»  inframarginalis,  J.  Sm. 

S  Cheilanthes  micropteris,  Swz. 
S        »  spectabilis,  Kaul. 

S        »  viscosa,  Lk. 

S        »  cuneata,  Lk. 

Cibotium  Schiedii,  Sch. 
»  Barometz,  J.  Sm. 

*  Cyrtomium  falcatum,  Swz. 
Darea  bullifera. 

■>>       diversifolia. 

»      cicutaria. 

»      flaccida. 
Davallia  tenuifolia,  Swz. 

»  canariensis,  Swz. 

»  pyxidata,  Cav. 

»  bullata. 

Dictymia  attenuata,  J.  Sm. 
Drynaria  erinoïdes,  J.  Sm. 

»  diversifolia. 

»  Fortuni. 

»  vulgaris,  J.  Sm. 

*  »  Billardieri,  J.  Sm. 
»  pustulata,  J.  Sm. 
»  linearis. 

Doodia  aspera,  R.  Br. 

*  »         lunulata,  R.  Br. 
»         caudala,  R.  Br. 

*  Diplazium  decussatum,  J.  Sm. 
Dicksonia  squarrosa. 

»  antarctica,  Labf. 

»  arborescens,  L'Hér. 

Doryopteris  pedata. 
S  Elaphoglossum  conforme. 
S  »  squamosum. 

Goniophlebium   argutum7  J.  Sm. 
»  sepultum,  J.  Sm. 

»  vaccinifolium. 

*  Gymnogramna  Totta,  Lowe. 

»  leptophylla,  Desv. 

»  chaerophylla,  Desv. 

aurita,  Hook. 
Goniopleris  fraxinifolia. 
»  proliféra. 


S  Gleichcnia  micropliylla. 
S  »  dicarpa. 

Hypolepis  repens,  Presl. 

*  »        rugulosa. 
Lygodium  palmatum,  Swz. 

»  flexuosum,  Swz. 

»  japonicum,  Swz. 

»  articulatum,  Swz. 

»  microphyllum,  Swz. 

Litobrochia  vesperlilionis,  J.  S. 

»  leptophylla,  J.  Sm. 

Lomaria  lanceolata,  Spreng. 

»       nuda,  Willd. 

*  »      Patersoni,  Spreng. 
»      gillesi,  Hook. 

»      magellanica,  Desv. 
»      attenuata,  Willd. 
Lastrea  glabella. 
„      acuminata. 
»       spinescens. 
•       elongata,  Presl. 
»       eburnea,  J.  Sm. 
»      decomposita,  J.  Sm. 
»       decurrens. 
»      canariensis,  Presl. 
S  Mohria  thurifraga,  Swz. 

Meniscium  simplex. 
S  Mertensia  flabellata,  J.  Sm. 
Marattia  elegans,  Endl. 

*  Nephrodium  molle,  R.  Br. 

»        unitum,  R.  Br. 
S  Nothochlœnanivea,  Desv. 
S  »  bypoleuca,  Kunze. 

S  »  vestita,  J.  Sm. 

S  »  marantae,  R.  B. 

S  »  Eckloniana,  Kunze. 

S  »  distans,  R.  B. 

S  »  lendigera.  J.  Sm. 

Neottopheris  vulgaris,  J.  Sm. 
S  Nipholobus  pertusus,  Spreng. 
S  »  varius,  Kaulf. 

S  »  rupestris,  Spreng. 

S  »  lingua,  Spreng. 

Nephrolepis  exaltata,  Schott. 
»  undulata. 

*  Onychium  lucidum,  Spreng. 
S  PycnopterisSieboldi. 

Platylomacordata,  J.  Sm. 


» 

flexuosa,  J.  Sm. 

S 

» 

ternifolia,  J.  Sm.   , 

*  s 

rt 

rotundifolia,  J.  Sm 

S 

» 

Browni,  J.  Sm. 

» 

» 

faleata,  J.  Sm. 

280  — 


S  Plaljloina  calomelanos,  J.  Sm. 
S  »  atropurpurea,  J.  Sm. 

Phlebodium  aureum. 
»  Iriseriale. 

»  sqiiamulosum. 

*  Pteris  longifolia.Sm. 
»     cretica,  Sm. 
crenata,  Swz. 
umbrosa,  R.  B. 
serrulata,  Lin. 
argnta,  Vahl. 
kingiana,  Endlich. 
Iremula,  R.  B. 
semipinnala,  Lin. 
Platycerium  grande,  J.  Sm. 
»  alcicorne,  Desv. 

Polypoclium  effusum,  Swz. 


» 

» 
» 

» 

» 


*  Polypodium  trichoides. 

»  paradisœ. 

»  subpeliolalum,  Hook. 

Polystichumjungens,  Presl. 
»  proliferum,  J.  Sm. 

»  capense,  J.  Sm. 

»  drepannm,  Presl. 

»  hispidum,  J.  Sm. 

»  falcinellum,  Presl. 

S  Scolopendrium  Krebsi. 

*  Sitolobium  davalloïdes,  J.  Sm. 
Todea  africana,  Willd. 

»      pellucida,  Carm. 
Trichomanes  reniforme,  Forst. 
S  Woodsia  mollis,  J.  Sm. 
'  Woodwardia  radicans,  Willd. 


REVUE  DES  PLANTES  NOUVELLES  ET  INTÉRESSANTES. 

Corréa  cardinal!».  Muell.  —  Bot.  Mag.  Tab.  4912.  —  Etym.  : 
José  Francesco  Corréa  de  Serra,  naquit  en  1750  à  Serpa,  petite  ville  forte 
de  l'Alentéjo  en  Portugal;  il  voyagea  à  Paris,  à  Londres,  dans  l'Amé- 
rique du  Nord  et  fut  plus  tard  membre  des  Cortès  de  Portugal  où  il 
mourut  en  1823.  Botaniste  zélé,  il  écrivit  plusieurs  mémoires  sur  la 
physiologie  des  plantes.  — Famille  des  Diosmées;  Octandrie  Mono- 
gynie.  —  Corréa  éearlate. 

MM.  Veitch  ont  reçu  le  Corréa  cardinalis  de  l'Australie  par  graines  ; 
la  plante  forme  dans  l'établissement  de  Exeter  et  Chelsea  un  beau 
buisson  de  deux  à  trois  pieds  de  hauteur  ,  à  branches  gracieuses,  ar- 
rondies, à  feuilles  vert  foncé  en-dessus,  pâle  et  blanchâtre  à  la  face  in- 
férieure et  dont  les  plus  jeunes  rameaux  portent  des  fleurs  pendantes  , 
de  deux  centimètres  et  demi  à  quatre  centimètres  de  long,  d'un  éearlate 
vif,  sauf  les  segments  de  la  corolle  qui  sont  jaunâtres.  Les  filets  des  éta- 
mines  dépassent  le  limbe  dressé  de  la  corolle  de  plus  d'un  demi  centi- 
mètre. Le  C.  cardinalis  est  une  précieuse  acquisition  pour  toutes  les 
serres  froides,  tant  par  la  beauté  de  ses  fleurs  que  par  l'époque  de  leur 
apparition ,  le  commencement  de  mars.  Le  Dr  F.  Mueller  a  découvert 
cette  plante  près  de  la  rivière  Latrobe,  dans  les  endroits  buissonneux  et 
sableux  sur  les  montagnes  et  dans  la  plaine  stérile  de  Port-Albert, 
à  la  colonie  de  Victoria  dans  l'Australie  méridionale. 


Eschscliolzia  califoruica.  DC.  var.  Flore  pleno. —  Lejourn. 

des  roses,  troisième  année,  première  livraison.  —  Etym.  :  Jean  Frédéric 


—  231  — 

Eschscholz  naquit  à  Dorpat  en  1793,  où  il  pratiqua  la  médecine.  Il  ac- 
compagna Kotzebue  comme  médecin  dans  ses  voyages  d'exploration  de 
1815-18  et  de  1823-26,  puis  fut  nommé  professeur  de  médecine  à 
Dorpat  et  mourut  en  1831  :  il  écrivit  spécialement  sur  la  zoologie. — 
Fam.  des  Papavéracées ;  Polyandrie  Monogynie.  —  Eschscholzie  de  Ca- 
lifornie à  fleur  double. 

Tout  le  monde  connaît  l'Eschscholzie  à  fleur  simple,  dont  le  coloris 
or  éclatant  attire  les  regards.  L'année  dernière,  M.  Léon  Lille  (de Lyon) 
remarqua  dans  ses  semis  une  variété  à  fleurs  doubles,  dont  il  s'empressa 
de  couper  les  rameaux  pour  les  multiplier.  Les  boutures  ne  réussirent 
pas,  et  le  pied-mère  épuisé  par  la  taille,  ne  put  fleurir  de  nouveau.  Il 
faut  espérer  qu'il  donnera  des  graines  cette  année  et  que  par  ce  moyen 
il  pourra  se  propager. 


PLANTES  NOUVELLES  DE  SERRE  FROIDE  ET  TEMPÉRÉE, 

Mises  pour  la  première  fois  dans  le  commerce,  par  M.   J.   Linden. 
(Extrait  du  catalogue  de  M.  Linden,  pour  1856.) 

Calyptraria  Hœinantha.  PI.  et  Lind.  —  C'est  avec  une  vive  sa- 
tisfaction que  nous  offrons  cette  merveilleuse  plante,  le  plus  splendide 
représentant  (sans  en  excepter  le  Medinilla  magnifica)  de  la  famille 
des  Mélastomées,  introduit  jusqu'à  ce  jour  en  Europe.  Ses  fleurs  sont 
éclatantes,  très-nombreuses  et  amples;  c'est  à  leur  coloris  que  ce  ma- 
gnifique arbuste  doit  le  nom  énergique  de  Sangre  de  toro  sous  lequel  il 
est  connu  dans  son  pays  natal.  C'est  un  arbuste  touffu  et  très-florifère, 
à  branches,  pétioles,  pédoncules,  pédicelles  et  calices  recouverts,  de  même 
que  la  face  inférieure  des  feuilles,  d'un  duvet  fauve.  Ces  dernières  sont 
extrêmement  épaisses,  coriaces  et  très-remarquables  par  leur  belle  nerva- 
tion réticulée.  Les  racèmes  florifères  ont  jusqu'à  deux  pieds  de  longueur, 
portant  chacun  15  à  20  fleurs,  à  pétales  charnus  et  persistants  et  à  ca- 
lice s'ouvrant  en  forme  de  boite  à  savonnette. 

Découvert  en  1844  ,  par  M.  Schlim  ,  sur  les  versants  semi-froids  du 
redoutable  Paramo  de  Cachiri ,  ce  Calyptraria  a  été  retrouvé  plus  ré- 
cemment par  le  même  voyageur,  dans  la  province  d'Ocana,  d'où  il  nous 
en  envoya  des  souches  vivantes  et  des  graines.  Il  croit  dans  les  terrains 
argileux,  à  une  altitude  de  5,000  à  7,000  pieds,  en  compagnie  d'autres 
arbustes  de  grand  mérite  que  nous  sommes  heureux  de  posséder  égale- 
ment à  l'état  vivant.  Ce  sont  le  Purdiaca  nutans,  aux  gracieux  épis  re- 
tombants ,  à  bractées  d'un  blanc  pur   et  à  fleurs  d'un  rose  tendre  ;  le 


—  232  — 

Clethra  consimilis,  à  feuilles  de  Vaccinium  et  à  jolies  fleurs  blanches  en 
corymbes,  plusieurs  magnifiques  Bejaria  et  Lisianthus  ,  etc.  (Prix,  30 
à  50/*  rancs.) 

Cnphea  eminens.  PL  et  Lind.  (Voy.  Belg.  Hort.  t.\,  p.  293). 
Probablement  la  plus  remarquable  espèce  de  tout  le  genre.  C'est  une 
plante  robuste  semi-ligneuse  ,  ù  tiges  droites,  hautes  de  0m,40  à  0m,50, 
garnies  vers  le  bas  de  nombreuses  feuilles  lancéolées,  semblables  à  celles 
du  pêcher  et  se  terminant  par  un  épi  très-serré  de  fleurs  ,  comparative- 
ment très-grandes  et  dont  les  calices  présentent  des  nuances  de  rouge 
très-vif  et  de  jaune  orange.  Malgré  l'absence  de  pétales,  cette  espèce  est 
d'un  très-bel  effet  ornemental.  (Prix,  20  francs.) 

Gonocalyx  pulcher.  PL  et  Lind.  —  Charmante  vacciniée  frutes- 
cente, à  rameaux  touffus,  dressés,  garnis  d'un  feuillage  dense,  et  çà  et  là, 
parmi  les  feuilles,  de  jolies  fleurs  tubuleuses  d'un  rouge  vif.  Les  fleurs 
sont  petites ,  presque  orbiculaires  et  ressemblent  un  peu  à  celles  de 
l'Alaterne  (Rlwmnus  Alaternus).  Les  jeunes  pousses,  de  même  que  les 
nouvelles  feuilles,  se  colorent  d'un  beau  rose  pourpré.  Le  G.  pulcher  a  été 
découvert  par  M.  Schlim,  en  compagnie  du  Calyptraria  hœmantha,  etc., 
dans  les  provinces  de  Pamplona  et  d'Ocana,  où  il  croit  à  une  altitude  de 
7,000  pieds.  (Prix,  25  francs.) 

Monochactam  ensiferum.  Naud.  —  Petit  arbuste  touffu  à  bran- 
ches divariquées  et  à  feuilles  épaisses,  linéaires  lancéolées,  glabres  en 
dessus ,  les  pétioles  comme  les  parties  herbacées  des  rameaux  sont 
d'un  beau  rouge.  Les  fleurs  sont  grandes,  d'un  rose  vif.  C'est  une  char- 
mante plante,  dont  la  découverte  est  due  à  31.  Ghiesbrecht,  qui  la  ren- 
contra dans  la  province  d'Oaxaca  au  Mexique.  (Prix,  15  francs.) 

Scutellaria  Trianœi.  PL  et  Lind.  —  Charmante  espèce  à  corolle 
d'un  rouge  violet  presque  amaranthe,  à  lèvre  inférieure  très-large  et 
semi-orbiculaire,  à  feuilles  lisses  et  ovales.  Originaire  des  régions  tem- 
pérées de  la  province  de  Bogota,  d'où  elle  nous  fut  envoyée  par  M.  J. 
Triana.  (Prix,  15  francs.) 


V  REVUE  DES  FOUGÈRES  NOUVELLES. 

(Suite.  Voy.  p.   168.) 

13°  Nephrodium  venustum,  HewardM.  S.  —  Gard.  Chron.  1855,/;. 
677.  —  Etym.  :  de  vtçpoç,  rein,  à  cause  de  la  forme  des  indusies.  — 


—  233 


PI.  47. 


Fig.  1.  Nephrodium  venustum,  Dew. 


Fig.  2.  Laslrea  pilosissinia,  J.  Sm. 


c^^^. 


Fig.  3.  lastrea  rccedens ,  J.  S  m. 


Fig.  \.  Davallia  lenuifolia ,  Swarlz. 


—  234  — 


Synon.  :  Aspidium  venustum,  Heward,  Mag.  Nat.  Hist.  1838. 
phrodie  gracieuse. 


Ne- 


Frondes  glabres  lancéolées,  pinnato- 
pinnatifides  à  divisions  alternes  ,  étroites 
linéaires  lancéolées,  sessiles,  ou  les  plus 
inférieures  très-brièvement  pétiolulées  ; 


segments  arrondis,  oblongs-obtus  sub- 
falqués;  sores  sub-marginales;  rachis  cou- 
verts de  poils  étoiles.  (Voy.  pi.  47,  fig.  1.) 


Cette  espèce  est  une  belle  fougère  de  grande  taille  ;  ses  frondes  me- 
surent six  décimètres  à  un  mètre  de  longueur  sur  deuxà  trois  décimètres 
de  large  :  elles  sont  absolument  glabres,  d'un  vert  clair  et  brillant,  pin- 
nées  ;  les  pinnules  inférieures  sont  quelque  peu  pétiolées  ;  les  supérieures 
sessiles,  amincies  en  pointe  effilée  et  allongée.  Les  pinnules  sont  divisées 
jusqu'à  la  moitié  de  leur  longueur  environ  en  lobes  oblongs,  un  peu 
falqués,  entiers  et  légèrement  ciliés.  Les  sores  sont  sub-marginales,  sou- 
vent réunies  en  ligne.  Les  frondes  sont  adhérentes  à  un  rhizome  dressé. 
Le  N.  venustum  est  originaire  de  la  Jamaïque;  il  a  été  introduit  en  1852 
au  jardin  botanique  de  Kew  et  se  cultive  en  serre  chaude. 

14°  Lastrea  pilosissima,  J.  Smith.  —  Gard.  Chron.  1855.  p.  677. — 
Etym.  :  Le  genre  Lastrea  fut  établi  par  Bory-Saint- Vincent  à  la  mémoire 
de  C.  J.  L.  de  Lastre,  qui  écrivit  en  1835  sur  la  végétation  du  départe- 
ment de  la  Vienne  et  publia  en  1842  une  flore  de  ce  district.  —  Synon.  : 
Aspidium pilosissimum,  G.  Don.  M.  S.,Herb.  Hort.  Soc.  Lond.  —  Las- 
trea très-poilu. 


Frondes  ternées,  deltoïdes  ou  penta- 
gones, a  partitions  inférieures  tripinnées, 
trapézo-triangulaires  ,  à  divisions  posté- 
rieures triples  des  antérieures;  à  pointe 
allongée  ;  pinnules  obliques  oblongues- 


ovées  ,  profondément  pinnatifides,  à  seg- 
ments oblongs  ou  obovés,  entiers  ou  si- 
nueux; sores  petites  dispersées;  rachis 
et  côtes  velus  en  dessus,  pubescents  en 
dessous  ;  stipes  velus.  (Voy.  PI.  47,  fig.  2.) 


Le  Lastrea  pilosissima  réclame  la  chaleur  de  la  serre  chaude  ;  il  est 
natif  de  Sierra  Leone  et  fut  introduit  au  jardin  botanique  de  Chelsea  en 
1851  par  M.  Whitfield.  Les  frondes  sont  vert-grisàtre,  herbacées  et  su- 
jettes à  noircir  facilement;  elles  croissent  à  4  ou  6  décimètres  de  hau- 
teur et  sont  à  trois  branches  ou  plutôt  pentagones  par  le  grand  déve- 
loppement des  deux  pinnules  postérieures  divergentes.  Les  dernières 
pinnules  sont  oblongues-ovées  ou  ovées-tronquées  et  souvent  obliques 
ou  inéquilatérales,  profondément  pinnatifides  à  lobes  oblongs  ou  obovés, 
entiers  ou  sinueux  sur  leurs  bords.  Les  sores  sont  terminales  sur  les 
veines,  assez  petites,  disséminées  sur  toute  la  fronde  en  petit  nombre 
sur  chaque  segment.  Le  stipc  est  abondamment  recouvert  de  longs  poils 
blancs  mêlés  à  des  écailles  noires  ;  les  rachis  et  les  grosses  nervures 
sont  couverts  de  longs  poils  en-dessus  et  pubescents  en-dessous;  sur  la 


—  235  — 

face  supérieure  de  la  fronde  on  remarque  des  poils  raides  implantés  sans 
ordre  ;  on  en  retrouve  un  plus  petit  nombre  à  la  face  inférieure  le  long 
des  veines.  Cette  espèce  est  très-voisine  de  YAspidium  quinquefidum  de 
Palisot  de  Beauvois,  mais  elle  est  beaucoup  plus  composée. 

15°  Lastrea  recedens,  J.  Smith.  —  Gard.  Chron.  1855.  p.  708.  — 
Synon.  :  Polypodium  recedens,  J.  Sm.,  En.  Fil.  Phil.,  Hook.  Journ.  Bot. 
iii.  394.  Lastrea  elegans  des  horticulteurs.  —  Lastrea  modeste. 


dentés  ;  sores  submarginales  ;  stipes  ad- 
hérents à  un  rhizome  rampant. 
(Voy.  PI.  47,  fig.  5.) 


Frondes  pentagones,  pubescentes-glan- 
duleuses,-  tripinnées,  pinnules  linéaires 
oblongues,  aiguës,  décurrentes,  profon- 
dément pinnatifides,  à  segments  courts  et 

Cette  élégante  fougère  est  originaire  de  Ceylan  et  des  îles  Philippines  , 
d'où  le  Dr  Gardner  l'a  envoyée  à  Kew.  Ses  frondes  portées  par  un  stipe 
allongé,  écailleux  à  la  base,  atteignent  5  à  6  décimètres  de  hauteur;  elles 
sont  d'un  vert  clair  et  abondamment  recouvertes  de  petits  poils  mêlés 
à  des  glandes.  Leur  contour  est  pentagonal,  les  deux  pinnules  posté- 
rieures étant  considérablement  élargies  ;  les  pinnules  secondaires  sont 
oblongues,  ou  linéaires-oblongues,  aiguës;  elles  sont  pinnatifides,  à  seg- 
ments courts  dentés.  Les  sores  forment  une  série  le  long  de  la  marge  de 
ces  segments  où  elles  sont  accumulées  en  grand  nombre.  Le  rhizome 
est  rampant,  les  frondes  lui  sont  adhérentes  et  naissent  sur  ses  côtés,  leur 
stipe  est  dressé,  la  partie  feuillée  est  étalée.  Cette  espèce  reste  toujours 
verte  et  se  cultive  en  serre. 

16°  Drynaria  Fortum,  T.  Moore,  Gênera  and.  species  of  cultivated 
Ferns,  ined. —  Gard.  Chron.  1855  p.  708.  Etym.  :  de  J)y?,  chêne,  parce 
que  ces  plantes,  croissant  dans  les  forêts,  sont  dryophiles. — Drynaria 
de  Fortune. 


Frondes  simples,  lancéolées  atténuées, 
subcoriaces,  légèrement  ondulées  ,  gla- 
bres, marquées  de  points  transparents  ; 
sores  réunies  à  la  partie   supérieure  de 


la  fronde,  en  une  série  voisine  de  la  côte; 
stipes  articulés  avec  un  rhizome  ram- 
pant et  écailleux. 


Le  D.  Fortuni  est  une  espèce  élégante,  toujours  verte,  à  frondes 
simples,  ayant  l'apparence  d'un  Scolopendre  légèrement  ondulé.  Les 
frondes  mesurent  trois  décimètres  au  moins  de  longueur,  étroites  lancéo- 
lées, atténuées  tant  à  la  base  qu'à  la  pointe,  d'un  vert  foncé,  entières  ou 
subsinuées  et  ondulées,  lisses,  marquées  de  points  transparents  qui  in- 
diquent la  terminaison  des  dernières  veinules ,  elles  sont  portées  par  un 
stipe  légèrement  écailleux  qui  vient  s'articuler  latéralement  sur  un  rhi- 
zome rampant.  Les  sores  forment  une  seule  série  de  points  ronds  contre 
la  côte  à  la  partie  supérieure  des  frondes.  Cette  espèce  a  été  recueillie 
en  Chine  par  M.  Fortune,  pendant  son  second  voyage.  Elle  réussit  par- 
faitement en  serre  tempérée. 


—  236  — 

17°  Davallia  tenuifolia,  Swartz.  Synopsis  Filicum ,  133,  350; 
Hooker,  Sp.  Fil.  i.,  186.  Gard.  Chron.ASSS.  p.  709.  —  Etym.  :  v.  p. 
143.  —  Davallie  à  feuilles  tenues. 


Frondes  dressées  ou  arquées,  ovales- 
lancéolées  ,  allongées  ,  glabres  ,  subco- 
riaces, biou  tripinnées,  à  rachis  comprimé 
ou  ailé;  derniers  segments  très-nombreux, 
dressés,linéaires,  en  forme  de  coins,  tron- 


qués, bifides  ou  légèrement  échancrés  ; 
sores  terminales  contre  l'extrémité  tron- 
quée des  segments,  courts,  oblongs,  soli- 
taires ou  par  paires. 
(Voir  PI.  47,  fig.  4.) 


Cette  plante,  déjà  répandue  dans  les  herbiers  où  elle  se  faisait  remar- 
quer par  la  raideur  alliée  à  une  élégante  découpure  des  frondes,  est  à  l'état 
cultivé  une  des  fougères  les  plus  élégantes ,  ses  grandes  frondes  profon- 
dément divisées  retombant  avec  grâce  de  manière  à  mieux  faire  res- 
sortir leurs  beautés.  Leur  couleur  est  un  vert  gai  et  leur  longueur  six 
décimètres;  les  divisions  sont  ovales  lancéolées,  deux  fois  séquées  et 
chaque  segment  de  nouveau  séparé  en  deux  lobes  cunéiformes.  Chaque 
fronde ,  dans  son  ensemble ,  est  constituée  par  une  multitude  de  lobes 
étroits  à  pointe  tronquée ,  portant  chacun ,  en  dessous,  près  de  cette 
pointe,  une  sore  courte  oblongue  dans  le  sens  transversal  :  l'extrémité 
tronquée  des  lobes  est  souvent  échancrée.  Les  sores  sont  logées  dans  un 
petit  involucre  creusé  en  forme  de  coupe.  Cette  élégante  fougère  a  été 
introduite  de  Java  en  1851  par  MM.  Rollissons  et  est  encore  rare  dans 
les  cultures  ;  elle  est  toujours  verte  et  doit  être  tenue  en  serre. 


CULTURE  DU  CAMPANULA  PYRAMIDALIS. 

Cette  belle  plante  n'atteint  pas  toujours  le  degré  de  perfection  dont 
elle  est  susceptible.  On  sème  en  mars  sous  châssis;  lorsque  les  plantes 
ont  fait  deux  ou  trois  feuilles,  on  les  repique  dans  des  pots  de  trois 
pouces,  on  les  abrite  jusqu'à  ce  qu'elles  aient  fait  racine,  puis  on  les 
endurcit  petit  à  petit.  Préparez  en  mai  une  bonne  pièce  de  terre,  dans 
un  endroit  bien  aéré,  et  plantez-y  les  campanules  à  cinq  décimètres  de 
distance;  laissez-les  en  place  jusqu'en  mars  suivant,  époque  à  laquelle 
elles  auront  fait  de  bonnes  racines.  On  relève  alors  les  plantes  avec  une 
bonne  motte  de  terre  autour  des  racines  et  on  leur  donne  des  pots  de 
45  centimètres  et  le  compost  suivant  :  parties  égales  de  fumier  de  cheval 
bien  décomposé,  d'argile  calcareuse,  de  terreau  de  feuilles,  mêlées  à  du 
sable  blanc  et  bien  drainé.  On  les  rentre  sous  une  couche  ou  dans  une 
bâche,  que  l'on  tient  soigneusement  fermée  dans  les  premiers  temps. 
Bientôt  les  campanules  montrent  leur  hampe  florale  ;  on  leur  fournit 
alors  beaucoup  d'air,  on  les  seringue  et  les  tient  assez  humides.  Lorsque 
cette  hampe  est  haute  d'environ  deux  pieds  on  reporte  les  plantes  dans 
un  endroit  bien  aéré  de  la  serre;  elle  s'élèvera  dès  lors  rapidement  et 
peut  atteindre  jusque  trois  mètres. 


—  237  — 

MEUBLES  ET  ORNEMENTS  DE  JARDIN. 


SIDÉROTECHNIE  HORTICOLE.- ALLEE  COUVERTE,  KIOSQUE  ,  FAUTEUILS 
ET  DIVANS  AMÉRICAINS,  EN  FER  CREUX, 

Par  M.  Edouard  Morren. 

Un  ameublement  de  jardin  en  fer  creux  présente  des  avantages  incon- 
testables sur  le  bois  et  la  fonte.  Le  bois,  quel  que  soit  le  soin  avec  lequel 
on  l'entretienne,  ne  résiste  pas  longtemps  aux  variations  de  chaleur 
et  d'humidité;  la  fonte  est  d'un  usage  incommode,  elle  est  lourde  et 
très-fragile.  Le  fer  creux  au  contraire  a  la  légèreté  du  bois  unie  à  la 
solidité  du  fer.  Des  chaises,  des  bancs  et  des  tables  de  bois  restent  long- 
temps mouillés  après  la  pluie,  la  fonte  devient  brûlante  sous  l'action 
du  soleil  ou  bien  elle  refroidit  trop  si  la  chaleur  de  l'atmosphère  est  peu 
élevée.  Les  meubles  de  fer  creux  étant  façonnés  en  tubes  de  tôle  recou- 
verts d'un  vernis  de  couleur  claire,  l'eau  glisse  sur  leur  surface  et  ils  se 
maintiennent  à  une  température  uniforme,  qualité  précieuse  pour  les 
treillages  destinés  aux  plantes  grimpantes.  Enfin  le  fer  creux  se  prête 
mieux  que  le  bois  ou  la  fonte,  à  toutes  les  exigences  du  goût  et  de  l'hor- 
ticulture artistique. 

Ces  avantages  sont  d'ailleurs  appréciés  par  le  public.  Il  s'est  établi  en 
Belgique,  en  France  et  en  Angleterre  plusieurs  usines  considérables 
occupées  uniquement  à  la  fabrication  de  meubles,  d'ornements  et  d'us- 
tensiles de  jardinage,  en  fer  creux.  On  en  fait  des  tables,  des  chaises, 
des  fauteuils,  des  bancs,  des  corbeilles,  des  vases,  des  jardinières,  des 
treillages,  des  bordures,  des  balustrades,  des  grilles,  etc.,  et  même  des 
pavillons,  des  kiosques,  des  ponts,  des  poulaillers,  des  serres,  etc.  Ces 
différentes  constructions  se  distinguent  par  un  caractère  propre  de  légè- 
reté, d'élégance  et  de  propreté;  elles  conviennent  spécialement  pour  les 
petits  jardins  de  ville  ou  pour  les  embellissements  des  parcs.  L'un  des 
établissements  les  plus  vastes  de  sidérotechnie  horticole  est  l'usine  Tron- 
chon,  établie  à  Paris,  avenue  de  St.-Cloud.  On  a  pu  remarquer  ses  pro- 
duits à  l'Exposition  universelle  de  l'horticulture  de  1855  à  Paris,  dans 
le  pavillon  de  l'Industrie  horticole,  et  l'on  a  dû  reconnaître  qu'ils  se  re- 
commandaient, outre  les  qualités  générales  des  meubles  de  ce  genre,  par 
le  bon  goût,  la  correction  et  le  cachet  artistique  de  leur  dessin.  Les  gra- 
vures qui  accompagnent  cet  article  sont  la  reproduction  exacte  de 
meubles  et  d'ornements  sortis  de  l'usine  Tronchon. 


238 


—  239  — 

La  planche  48  représente  une  promenade  couverte,  telle  qu'il  peut  être 
convenable  d'en  établir  dans  certaines  circonstances  pour  prendre  le 
frais  pendant  que  le  soleil  est  trop  ardent  ou  pour  respirer  l'air  alors  qu'il 
pleut  ou  qu'il  vente;  c'est  aussi  un  passage  entre  le  corps  de  logis  prin- 
cipal et  une  de  ses  dépendances.  On  plante  auprès  de  cette  charpente  des 
Aristolochia,  des  Ampélopsis,  des  Glycine,  des  Clematis,  des  Bignonia, 
des  Menispermum,  des  Periploca,  des  Humulus,  des  Vitis,  des  Celas- 
trus,  etc.,  qui  s'élancent,  s'enlacent  et  se  tortillent  en  une  voûte  de  ver- 
dure impénétrable  au  soleil  et  à  la  pluie.  On  garnit  chaque  année  la  base 
de  cette  construction  avec  des  volubiles  annuelles,  telles  que  des  Ipomœa, 
des  Calystegia,  des  Cobœa,  des  Tropœohm,  des  Passiflora,  des  Cyclan- 
tera,  etc.,  dont  les  corolles  brillantes  s'épanouissent  sous  les  yeux  des 
promeneurs  et  embaument  l'air  qu'ils  respirent.  On  peut,  il  est  vrai, 
élever  la  charpente  de  ces  berceaux  en  bois,  mais  elle  doit  généralement 
être  alors  trop  massive  pour  résister  au  temps  et  au  poids,  chaque  année 
plus  considérable,  des  végétaux  qu'elle  soutient. 


l'I.  4!).    Fauteuil  et  divan  américains. 


—  240  — 

Il  nous  est  arrivé  depuis  peu  de  temps  d'Amérique  des  modèles  déli- 
cieux d'un  nouveau  système  de  chaises,  fauteuils,  divans,  fumeuses  , 
causeuses,  bancs,  etc.,  qui ,  sans  aucun  doute,  sera,  bientôt  générale- 
ment imité.  L'idée  de  ces  sièges  devait  venir  à  ceux  qui  avaient  vu  les 
hamacs  suspendus  des  Indiens  ;  ils  consistent  en  un  tissu  à  mailles  mé- 
talliques, suspendu  au  dos  et  attaché  au  devant  du  siège  comme  il  est 
représenté  planche  49.  Ce  tissu  est  souple  et  flexible,  il  se  plie  aux  si- 
nuosités du  corps  de  celui  qui  s'y  repose.  La  plupart  des  sièges  de  jardin 
sont  durs  et  incommodes  ,  un  point  du  corps  se  fatigue  pour  tout  le 
reste  dont  il  supporte  rudement  le  poids,  mais  s'ils  sont  faits  d'après  le 
système  américain,  chaque  point  trouve  son  appui  et  le  corps  entier 
prend  du  repos.  Beaucoup  de  nos  lecteurs  ont  pu  sans  doute  apprécier 
les  douceurs  de  ces  sièges  dans  les  charmants  jardins  dessinés  par 
M.  Loire  aux  Champs-Elysées  pour  l'exposition  universelle  d'horticul- 
ture à  Paris  en  1855. 

Enfin  nous  avons  représenté  (PI.  50)  un  élégant  kiosque,  de  style 
moresque,  construit  en  fer  creux  et  sorti  des  ateliers  de  M.  Tronchon. 
Il  est  soutenu  par  six  colonnettes  autour  desquelles  grimpent  quelques 
végétaux  fleuris;  au  levant  et  au  couchant  sont  deux  stores  mobiles  qui 
donnent  de  l'ombre. 


Fig.  50.  Kiosque  moresque  en  fer  creux. 


—  241  — 
PHYSIOLOGIE  HORTICOLE  DE  LA  TOILETTE. 

LA    SAPONAIRE, 

Par  M.  Ch.  Morren. 

On  vend  à  Paris  et  par  conséquent  dans  toutes  nos  grandes  et  petites 
villes  de  Belgique,  des  paquets  d'une  plante  merveilleuse,  d'une  tige 
exotique  coupée  en  morceaux  longs  d'un  pouce,  mélangés  de  quelques 
feuilles  brisées  et  de  portions  de  racines,  le  tout  soigneusement  renfermé 
dans  un  sachet  de  papier  rose  et  musqué,  recouvert  d'une  étiquette 
chimico-comique,  disant  comme  quoi  la  saponine,  quinlescence  de  la 
plante  merveilleuse,  est  le  vrai  savon  de  la  nature.  Ces  petits  paquets  se 
vendent,  en  effet,  chez  les  marchandes  de  modes  et  sont  vivement  re- 
commandés aux  dames  et  demoiselles  pour  leur  permettre  d'ôter  ou  de 
faire  ôter  sur  toutes  les  espèces  de  soieries  les  taches  de  graisse  ou 
d'huile  qu'elles  n'y  font  jamais,  mais  dont  les  maladroits  servants  de 
table  ont  le  malheur  d'être  plus  ou  moins  coupables.  Il  va  de  soi  que 
la  saponine,  principe  du  savon  naturel,  n'a  aucune  des  mauvaises 
qualités  du  savon  de  fabrique;  elle  n'ôte  pas  le  brillant  de  la  soie,  elle 
conserve  le  lustre  des  étoffes,  elle  n'affaiblit,  ni  ne  rehausse  aucune 
teinte,  quelque  délicate  qu'elle  soit,  elle  ne  corrode  ni  ne  mange  aucune 
couleur;  enfin,  la  saponine  est  au  savon,  ce  que  sont  la  petite  maîtresse 
et  son  boudoir  parfumé  au  rustre  de  village  et  son  étable. 

On  comprendra  facilement  quenouseûmes  quelque  velléité  d'examiner 
cette  plante  à  savon,  qui  ne  pouvait  avoir  de  rivale  que  la  brosse  à  fibres 
ligneuses,  tirée  en  Chine  hors  d'un  arbre  à  savon,  dont  la  propriété 
saponifiante  est  éternelle.  Nous  avions  d'ailleurs  le  plaisir  de  posséder 
une  botte  de  ces  fibres  fameuses,  grâce  à  l'obligeance   de  M.  le  baron 

M ,  qui  rapporta  lui-même  de  la  Chine  cette  merveille  pour  faire  la 

barbe  à  ses  amis  d'Europe.  On  prend  la  botte  en  question,  on  l'agite 
dans  de  l'eau,  l'eau  se  savonne,  couvre  le  menton  de  mousse  et  sert  à 
quoi  vous  savez;  on  laisse  sécher  sa  botte  et  on  recommence  tant  de 
fois  qu'on  le  veut.  Evidemment  il  n'y  a  que  les  Chinois  qui  pouvaient 
faire  rivaliser  leur  savon  en  arbre  avec  la  saponine  des  marchandes  de 
modes  de  Paris.  Nous  revenons  à  celle-ci,  au  singulier.  Celte  plante 
saponifère  nous  parut  être  une  espèce  que  nous  offre  en  profusion  notre 
Flore  nationale,  une  espèce  fort  anciennement  connue  et  à  laquelle, 
depuis  la  botanique  du  moyen  âge,  on  a  réservé  le  nom  qui  indique  sa 
propriété,  à  savoir  la  Saponaire  et  jadis  la  Saponale.  L'examen  le  plus 

BEI.G.    HORT.    T.    VI.  22 


—  242  — 

circonstancié  nous  confirme  que  la  plante  de  Paris  est  une  des  plus  com- 
munes en  Belgique. 

En  effet,  qui  n'a  pas  vu  en  juillet,  août  et  septembre,  le  long  des 
haies,  aux  bords  des  routes,  sur  les  lieux  arides  et  secs,  surtout  entre 
les  pierres  des  torrents,  sur  les  îles  laissées  à  nu  dans  les  fleuves  et 
rivières,  dans  les  lits  des  canaux ,  des  cours  d'eau,  des  ruisseaux  plus 
ou  moins  taris,  une  jolie  plante,  munie  de  racines  vivaces,  longues, 
noueuses,  blanches  et  traçantes,  de  tiges  nombreuses,  presque  ligneuses, 
cylindriques,  atteignant  jusqu'à  un  demi-mètre  de  hauteur  et  noueuses, 
de  feuilles  d'un  vert  foncé,  allongées,  entières,  terminées  en  pointe  aux 
deux  bouts,  lisses  au  toucher  et  rappelant  en  quelque  sorte  l'existence 
du  savon  dans  la  plante  par  l'onctuosité  de  leur  surface.  Ces  feuilles  ont 
trois  ou  cinq  nervures  longitudinales  distinctes.  Les  fleurs  sont  dispo- 
sées en  thyrses  ou  panicules  comme  celles  d'un  phlox  auxquelles  elles 
ressemblent  d'ailleurs.  Ces  fleurs  sont  blanches  ou  presque  toujours 
rosées,  très-nombreuses,  pourvues  d'un  tube  et  d'un  limbe  divisé  en 
cinq  lanières  disposées  en  étoile.  Le  parfum  de  ces  fleurs  est  très-doux, 
très-agréable  et  rappelle  un  peu  celui  du  miel  de  Narbonne. 

Cette  plante  a  reçu  de  Linné  le  nom  de  Saponaria  officinalis.  On  la 
trouve  chez  quelques  pharmaciens,  mais  son  usage  médical  est  aujour- 
d'hui fort  restreint.  La  racine,  les  tiges,  les  feuilles  et  les  fleurs  sont 
amères  ,  résolutives  ,  apéritives  et  sudorifiques  :  on  ne  perd  rien  à 
le   savoir. 

Le  bétail  s'abstenant  de  pâturer  la  Saponaire,  on  la  trouve  presque 
toujours  entière,  et  comme  elle  est  vivace,  on  la  revoit  toutes  les  années 
aux  mêmes  emplacements.  Dodoëns  faisait  remarquer  dans  ses  Pemp- 
tades  de  4616  (p.  179),  que  de  son  temps  les  Belges  cultivaient  cette 
plante  dans  leurs  jardins  à  cause  de  sa  beauté.  Le  fait  est  que  la  Sapo- 
naire mériterait  d'orner  les  grottes,  les  pierrailles,  les  endroits  rocail- 
leux de  nos  jardins,  surtout  dans  les  grands  parcs.  Au  reste,  aujour- 
d'hui que  sa  qualité  revient  à  la  mode,  la  Saponaire  serait  à  la  fois  une 
première  utilité  et  une  plante  d'agrément  dans  les  parterres.  Elle  se 
maintient  très-bien  en  plate-bande  et  nous  en  cultivons  depuis  huit  ans 
dans  l'école  du  jardin  botanique  de  Liège,  sans  qu'elle  nous  donne  ni 
souci  ni  travail.  Tous  les  ans,  on  maintient  les  racines  clans  les  limites 
de  leur  propriété;  on  sarcle  et  voilà  tout.  La  reproduction  de  la  plante 
se  fait  soit  par  la  division  des  vieux  pieds,  soit  par  les  graines.  Les 
plantes  venant  par  ce  dernier  moyen  fleurissent  dès  la  seconde  année. 

11  paraît  au  reste  que  le  sexe  connaît  depuis  longtemps  la  Saponaire. 
Les  bacchantes  avaient  fait  cette  connaissance  avant  les  modistes  de 
Paris.  Ce  fait,  Guillandinus,  Langius,  Dodonams  l'ont  prouvé.  Il  y  avait, 


—  243  — 

au  dire  de  ces  érudits,  plusieurs  espèces  de  thyrses  dont  se  servaient 
aux  fêtes  de  Bacchus  et  de  Saturne,  et  dans  les  orgies  de  Rome,  les 
femmes  échevelées  couronnées  de  pampres  ou  de  lierre.  Un  de  ces 
thyrses  s'appelait  Céphalote,  parce  qu'il  était  terminé  par  une  tête  de 
fleurs,  et  dans  ce  cas  spécial,  les  bacchantes  avaient  jeté  leur  dévolu  sur 
la  Saponaire,  dont  les  fleurs  parfumées,  la  panicule  fournie  et  la  cou- 
leur consacrée  depuis  l'antiquité  aux  amours  et  à  leur  mère,  légitimaient 
ce  choix. 

D'autres  anciens  nommaient  la  Saponaire,  Tunica,  parce  qu'elle  ser- 
vait à  nettoyer  les  tuniques.  Sa  propriété  était  donc  connue  à  une 
époque  très-reculée. 

Des  bacchanales  la  Saponaire  est  tombée,  au  moyen  âge,  dans  le  gre- 
nier des  droguistes  et  des  apothicaires,  pour  descendre  enfin  de  nos  jours 
dans  les  magasins  de  modes.  Ainsi  le  voulurent  la  civilisation,  la  méde- 
cine et  la  chimie.  Cette  dernière  science  a  décrété  que  la  Saponaire 
contient  une  substance,  appelée  Saponine,  laquelle  a  pour  propriété 
de  faire  mousser  de  l'eau  claire,  propriété  plus  ou  moins  inexplicable 
pour  certaines  personnes,  mais  nullement  pour  d'autres.  Il  ne  faut  pour 
produire  cet  effet  que  l'y  agiter.  Puis  avec  cette  eau  claire,  devenue 
grasse,  on  enlève  sur  les  tissus  les  taches  de  graisse  et  d'huile.  On  em- 
ploie de  préférence  de  l'eau  chande  qui  dissout  mieux  la  saponine;  on 
met  la  plante  coupée  dans  un  bassin,  on  y  agite  avec  une  main  bien 
propre  les  morceaux  des  sommités  séchées,  coupées  et  fendues,  et  on 
obtient  bientôt  le  savon  naturel  et  mousseux  qu'on  frotte  sur  et  dessous 
la  tache  jusqu'à  ce  que  celle-ci  disparaisse.  A  moins  que  la  couleur,  si 
c'est  une  soie  teintée,  ne  soit  soluble  dans  l'eau,  la  nuance  reste,  en 
effet,  sans  mutation  dans  la  plupart  des  cas.  On  asperge  à  l'eau  propre, 
on  frotte  la  soie  et  on  laisse  sécher. 

Comme  la  botanique  ne  court  en  Belgique,  ni  les  rues  ni  les  cam- 
pagnes, nous  osons  conseiller  aux  horticulteurs  de  cultiver  la  Saponaire. 
Le  petit  paquet  de  tiges  coupées  coûte  à  Paris  un  franc  et  demi.  Il  y  a  tout 
bénéfice  et  agrément  de  payer  cinquante  centimes  chez  l'horticulteur, 
une  plante  destinée  à  ce  triple  avenir,  à  savoir  :  d'orner  les  jardins,  de 
dégraisser  les  dames  et  de  faire  la  barbe  aux  maris. 


_  244  — 

NOTIONS   GÉNÉRALES 

DE  PALÉONTOLOGIE  VÉGÉTALE. 

Traduit  de  l'Allemand  du  Dr  M.  Seubert,  de  Carlsruhe  (\), 
Par  A.-P.  de  Borre,  candidat  en  Sciences  naturelles. 

{Suite.)   (2). 
FAMILLE  des  équisétacées. 


Fig.  7.  — Calamiies  varîans.  a.  Une  porlioa  de  tronc  avec  deux  verlicilles,  l'écorce  n'est  que 

partiellement  couservée.  b.  Une  portion  de  la  surface,  aussi  dénudée  en  partie. 
Fig.  8  — Equisclum  columnare.  Un  nœud,  pourvu  de  la  gaine  dentée,   formée  de  feuilles 

réunies. 

Genres  :  Calamités  Suckow.  Troncs  articulés;  articulations  can- 
nelées; les  cannelures  sont  plus  visibles  sous  la  croûte  de  charbon 
qu'à  l'extérieur.  Les  feuilles  laissent  après  leur  chute  de  petits  nœuds. 
Rameaux  en  verticilles.  De  nombreuses  espèces  dans  le  grauwacke  et  le 
terrain  houiller,  d'autres  espèces  dans  le  grès  bigarré  et  le  keuper. 

Equisetites  Sternb.  Tige  articulée,  striée  longitudinalement  ;  divi- 
sions des  feuilles  profondément  séparées.  La  plupart  des  espèces  dans 
le  keuper;  quelques  espèces  se  trouvent  aussi  dans  le  terrain  houiller 
et  le  terrain  jurassique. 

Des  espèces  du  genre  Equisetum  L.  se  trouvent  également  dans 
les  terrains  tertiaires. 

'famille  des  astërophyllitées  (3). 
Cette  famille,  aujourd'hui  éteinte,  et  très-voisine  des  Equisétacées, 

(1)  Lehrbuch  der  gesammlen  Pflanzenkunde.  IVtc  Abschnitl.  Stuttgart,  1855. 

(2)  Voy.    p.  212. 

(3)  Brongniart  place  cette  famille  parmi  les  Dicotylédones  gymnospermes. 


—  245  — 

renferme  des  plantes  arborescentes  et  herbacées,  à  tige  rameuse,  arti- 
culée, et  à  feuilles  verticillées,  de  formes  variées.  Les  organes  de  fructi- 
fication en  épis  sont  terminaux  sur  les  tiges  et  les  branches. 

Genres  :  Asterophijllites  Brongn.  Tige  striée;  feuilles  étroites,  acumi- 
nées,  uninerves;  épis  déliés.  Espèces  nombreuses,  partie  dans  le  terrain 
de  transition,  partie  dans  le  terrain  houiller. 

Annularia  Sternb.  Comme  le  précédent,  mais  les  feuilles  sont  con- 
jointes à  la  base,  et  d'inégale  longueur. 


Fjg.  9.  —  Spkeiiophyllum  Scklotheimii.  a.  Un  rameau  avec  deux  épis,  b  et  c.  Feuilles  de 

différentes  formes  de  la  même  plante. 


Sphenophyllum  Brongn.  Feuilles  disposées  en  verticilles  de  6  à  12, 
cunéiformes,  dentées  ou  lobées,  tronquées  à  l'extrémité  supérieure.  Epis 
terminaux  ou  latéraux,  épais.  Les  espèces  se  trouvent  dans  le  terrain 
houiller. 


III. 


MONOCOTYLÉDONES. 


FAMILLE   DES   GRAMINÉES. 


On  n'a  trouvé  que  peu  de  débris  de  Graminées  fossiles,  savoir 
des  tiges  et  des  feuilles.  Les  inflorescences  se  présentent  plus  rarement. 

Genres  :  Mtophylhm  Brongn.,  et  Echinostachys  Brongn.,  dans  le 
grès  bigarré.  Culmites  Brongn.,   dans   les  terrains   tertiaires;  on  y 


—  246 


trouve  également  des  feuilles  appartenant  à   des  espèces  des  genres 
Triticum  et  Arundo. 

L'existence  fossile  des  Cypéracées  n'est  pas  encore  précisément  dé- 
montrée; il  en  est  de  même  des  Liliacées  et  des  Pandanées. 


FAMILLE   DES   SMILACÉES. 


Geisre  :  Smilacites  Brongn.  Feuilles  d'un  grand   nombre  d'espèces 
dans  différentes  couches  tertiaires. 


FAMILLE   DES  NA1ADEES. 


Genres  :  Zosterites  Brongn.,  et  Caulinites  Brongn . ,  dans  les  ter- 
rains tertiaires;  les  espèces  provenant  de  couches  plus  anciennes  sont 
douteuses.  Les  espèces  du  genre  Potamogeton  sont  assez  nombreuses 
dans  les  couches  tertiaires  plus  récentes. 


FAMILLE    DES   PALMIERS. 


Des  troncs,  des  feuilles  et  des  fruits  de  Palmiers  se  rencontrent  de- 
puis le  terrain  houiller  jusque  dans  l'époque  tertiaire,  où  ils  sont  beau- 
coup plus  abondants. 


Fig.  10.  —  Une  feuille  de  Flabellaria  Lamauonis. 

Genres  :  Flabellaria  Sternb.  Grande  feuille  en  éventail,  à  nervures 
parallèles.  Espèces  douteuses  dans  le  terrain  houiller,  rares  dans  les 
couches  secondaires,  plus  nombreuses  dans  les  tertiaires. 

Fasciculites  Cotta.  Troncs  à  faisceaux  vasculaires  épars;  dans  le  ter- 
rain houiller. 

Phœnicites  Brongn.  Feuilles  pinnées.  Terrains  tertiaires. 

IV.  —  DICOTYLÉDONES. 

Parmi  les  Dicotylédones  fossiles,  les  Apétales  sont  de  beaucoup  les  plus 
richement  représentées.  Mais,  parmi  ces  dernières,  les  Cycadées  et  les 


—  247  — 

Conifères,  c'est-à-dire  les  Gynmospermes,  ont  la  prépondérance.  Il  est 
utile  par  conséquent,  dans  l'étude  des  végétaux  fossiles,  d'opposer  à  cette 
division  des  Dicotylédones  gymnospermes ,  celle  des  Dicotylédones  angios- 
permes, comprenant  ainsi  le  reste  des  Apétales  ,  les  Monopétales  et  les 
Polypétales. 

A.  —  DICOTYLÉDONES   GYMNOSPERMES. 

FAMILLE    DES   CYCADÉES. 

On  trouve  des  troncs  et  des  feuilles  de  Cycadées  depuis  la  formation 
carbonifère  jusque  dans  la  craie  ;  ces  débris  abondent  surtout  dans  le 
terrain  jurassique;  un  seul  genre  se  trouve  encore  dans  les  terrains  ter- 
tiaires. Parleur  distribution  fossile ,  comme  aussi  par  plusieurs  carac- 
tères ,  tels  que  la  conformation  des  parties  ligneuses  et  l'estivation  in- 
volutée  des  feuilles,  les  Cycadées  se  rapprochent  beaucoup  des  Fougères. 


Fig.  \\.  —  Extrémité  de  feuille  du  Plerophylluui  Jœgori. 

Genres  :  Pterophyllum  Brongn.  Feuilles  pinnées;  folioles  adnées,  à 
nervures  parallèles.  Espèces  nombreuses,  dans  le  keuper  ,  le  lias  et  le 
jura. 

Medullosa  Cott.  Troncs  cannelés,  à  étui  médullaire  considérable.  Dans 
la  formation  carbonifère. 

Les  genres  :  Trigonocarpus  Brongn.  et  Zamiostrobus  Endlicher  ,  ont 
été  établis  sur  des  fruits  apocarpiens  et  syncarpiens  de  Cycadées. 


Fig.   12.  —  Tronc  de  Zamilcs  uiacrophyllus. 
Zamites  Brongn.  Feuilles   pinnées;  folioles  cordiformcs  à  la  base; 


—  248  — 

nervures  souvent  fourchues.  Troncs  raccourcis,  épais,  couverts  de 
cicatrices  foliaires  rhomboïdales.  De  nombreuses  espèces  dans  les  ter- 
rains secondaires. 

Nilssonia,  Brongn.  Beaucoup  d'espèces  dans  les  mêmes  terrains  que 
le  genre  précédent. 

FAMILLE   DES   CONIFÈRES. 

Les  Conifères  sont  très-richement  représentées  dans  la  Flore  fossile , 
et  leurs  bois  se  sont  conservés  plus  ou  moins  intacts  en  grande  quantité. 
On  les  reconnaît  toujours  aux  rangées  de  grands  points  à  double  con- 
tour, qui  occupent  les  côtés  des  cellules  prosenchymateuses  tournés 
vers  les  rayons  médullaires ,  tandis  que,  à  l'exception  d'un  petit  nombre 
de  vaisseaux  spiraux  ,  les  vaisseaux  proprement  dits  y  manquent  com- 
plètement. Ces  caractères  de  structure  microscopique  propres  au  bois 


niiiiiijpi 

ireii.insiiiîïï 


IHIIllMQI 


n 


Fig.  13.  —  Coupe  transversale  dans  la  direction  des  rayons  médullaires  du  Dadoxylon 

Brandlingii. 
Fig.  U.  — a  Coupe  transversale  ;  b  Coupe  longitudinale  du  Finîtes  ponderosus. 

des  Conifères,  nous  le  trouvons,  ainsi  que  leurs  autres  caractères,  dans 
tous  les  lignites,  aussi  longtemps  que  leur  structure  interne  est  distinc- 
tement reconnaissable.  Le  succin,  qui  se  trouve  dans  le  lignite,  est  la 
résine  du  Pinites  succinifera;  il  contient  parfois  des  restes  de  plantes  ou 
d'animaux  remarquables  par  leur  parfaite  conservation.  Outre  les  troncs 
ligneux  et  les  rameaux  garnis  de  feuilles,  il  n'est  pas  rare  de  trouver  à 
l'état  fossile  les  cônes  des  Conifères. 

Genres  :  Peuce,  Witth.,  Pissadendron,  Endl.,  et  Dadoxylon  Endl. 
Troncs  dans  le  terrain  de  transition ,  et  dans  la  formation  carbonifère. 

Avançantes  Gœpp.  Troncs  et  feuilles  dans  le  keuper  et  la  craie. 
Feuilles  et  cônes  dans  les  couches  tertiaires. 

Albertia  Schimp.  Feuilles  allongées,  finement  striées,  rétrécies  à  la 
base.  Cônes  allongés,  à  écailles  triangulaires  terminées  en  une  pointe. 
Plusieurs  espèces  dans  le  grès  bigarré. 


249 


Fig.  15.  —  In  rameau  avec  des  feuilles,  et  à  côté  un  cône  de  Voltzia  helcrophylla. 

Voltzia  Brongn.  Feuilles  sessiles,  droites  ou  courbées.  Cônes  cylin- 
driques, à  écailles  3-5  lobées,  sillonnées.  Dans  le  grès  bigarré. 

Pinites  Gœpp.  Ce  genre,  déjà  représenté  par  plusieurs  espèces  dans 
les  couches  secondaires,  offre  les  débris  les  plus  nombreux  dans  la  pé- 
riode tertiaire.  Beaucoup  de  leurs  troncs,  qu'on  rencontre  dans  le  lignite, 
sont  remarquables  par  leur  dimension  ;  on  connaît  des  exemplaires  de 
30  pieds  de  circonférence.  Leur  bois  est  parfois  si  bien  conservé,  qu'on 
peut  encore  l'employer  comme  tel.  Sur  ce  grand  nombre  d'espèces,  il 
n'y  en  a  que  peu  dont  on  trouve  des  feuilles  et  des  cônes  fossiles. 

Cu'pressites  Gœpp.  Les  branches  ,  les  cônes  et  les  chatons  mâles  se 
trouvent  à  l'état  de  conservation.  Les  espèces  se  trouvent  dans  les 
terrains  secondaires  et  tertiaires. 

TJmrites  Sternb.  Des  branches  de  ce  genre  se  trouvent  déjà  dans  les 
terrains  secondaires.  D'autres  espèces,  parfaitement  conservées,  se  ren- 
contrent dans  le  succin. 

On  y  trouve  également  les  chatons  mâles  du  genre  Juniperites 
Brongn. 

Cupressinoxylum  Gœpp.  Troncs  abondants  dans  le  lignite. 

Taxodites  Ung.  Plusieurs  espèces  dans  les  couches  tertiaires  les  plus 
récentes. 

Taxites  Brongn.  Des  troncs,  des  feuilles  et  peut-être  des  fruits  de  ce 
genre  se  trouvent  dans  le  lignite. 

B.  —  DICOTYLÉDONES  ANGIOSPERMES. 


Cette  section  du  règne  végétal ,  la  plus  vaste  dans  le  monde  actuel, 
n'offre  que  des  traces  isolées  jusqu'à  la  fin  de  la  période  secondaire.  Au 


250  — 


contraire,  il  en  apparaît,  dans  la  période  tertiaire ,  des  espèces  nom- 
breuses, semblables  pour  la  plupart  aux  espèces  actuellement  vivantes. 
C'est  à  la  période  secondaire  qu'il  faut  rapporter  le  genre  Credneria , 


Fig.  16.  —  Credneria  cuneifolia. 

dont  les  feuilles  se  trouvent  dans  le  quadersandstein  (1)  ;  ses  affinités  et 
sa  place  systématique  sont  encore  incertaines  jusqu'à  présent. 

1°  APÉTALES. 

FAMILLE   DES   BALSAMÉES. 

Des  feuilles  du  seul  genre  Liqaidambar  L. ,  se  trouvent  dans  diverses 
couches  tertiaires. 

FAMILLE   DES   SAL1CINÉES. 

Les  genres  Salix  L.  et  Populus  L.  sont  tous  deux  représentés  par  de 
nombreuses  espèces,  dont  les  feuilles  se  trouvent  dans  différentes 
couches  tertiaires. 

FAMILLE    DES   BÉTULACÉES. 

Genres  :  Betula  L.;  feuilles,  chatons  et  fruits  de  plusieurs  espèces 
dans  divers  terrains.  De  plus,  des  troncs  qui  forment  le  genre  Betuli- 
nium,  Ung. 

AlnusL.  Plusieurs  espèces  dans  les  terrains  tertiaires;  une  espèce 
dans  le  succin. 


(1)  Les  géologues  allemands  donnent  ce  nom  à  certains  grès  très-siliceux,  parfois 
ferrugineux  ou  manganésifères ,  mais  appartenant  à  des  formations  très-diverses.  Il 
s'en  trouve  beaucoup  dans  les  terrains  crétacés,  et  à  la  partie  inférieure  du  système 
liasique  de  Monsieur  le  professeur  Dumont.  (Note  du  Traducteur.) 


251  — 


FAMILLE    DES    MYRICEES. 


Genres  :  Myrica  L.  Espèces  nombreuses  dans  les  couches  tertiaires 
moyennes. 


Fig.  17.  —  Une  feuille  de  Complonia  asplenifona. 

Coînptonia  Banks.  Feuilles  étroites,  allongées,  pinnatifîdes.  Dans  les 
couches  tertiaires  moyennes  et  récentes. 

FAMILLE   DES   CUPULIFÈRES. 

Genres  :  Quercus  L.  Espèces  nombreuses  dans  les  terrains  tertiaires 
les  plus  modernes  (miocènes).  On  en  trouve  des  feuilles  ,  des  fleurs  et 
des  fruits  conservés,  ainsi  que  des  troncs  ressemblant  par  leur  structure 
au  bois  de  chêne,  et  qui  forment  le  genre  Quercinium  Ung. 

Fagus  L.  Feuilles  et  fruits  dans  différentes  couches  tertiaires.  Les 
troncs  qui  y  appartiennent ,  forment  le  genre  Fagonium  Ung. 

Carpinus  L.  Feuilles  nombreuses  et  fruits  dans  les  couches  tertiaires 
les  plus  modernes. 

FAMILLE   DES   PLATANÈES. 

Genre  :  Platanus  L.  Feuilles  de  plusieurs  espèces. 

FAMILLE   DES   JUGLANDÉES. 

Des  espèces  nombreuses  du  genre  Juglans  L.  Les  feuilles,  les  fruits 
et  le  bois  ont  une  plus  grande  dimension  que  chez  les  espèces  actuelles. 

FAMILLE  DES   ARTOCARPÉES. 

Des  feuilles  du  genre  Fiais  dans  le  lignite. 


—  252  — 

FAMILLE    DES    THYMÉLÉES. 

Les  troncs  ligneux  de  cette  famille  forment  le  genre  Haueria  Ung. , 
qui  se  trouve  dans  les  couches  tertiaires  les  plus  nouvelles. 

FAMILLE    DES    LAURINÉES. 

Genres  :  Laurus  L.  ,  et  Daphnogene  Ung.  Dans  le  lignite  et  d'autres 
couches  tertiaires. 

FAMILLE    DES    SANTALACÉES. 

Fruits  du  genre  Nyssa  L.,  dans  le  lignite. 

2°  MONOPÉTALES. 

Tous  les  représentants  de  cette  classe  se  trouvent  seulement  dans  les 
couches  tertiaires,  et  de  préférence  dans  celles  d'âge  moyen  ou  récent. 

FAMILLE    DES    RURIACÉES. 

Genres  :  Morinda  Vaillant.  Cinchona  L. 

FAMILLE  DES    VACCINIÉES. 

Genre  :  Vaccinium  L. 

FAMILLE    DES    ÉRICACÉES. 

Genres  :  Dermatophyllites  Gœpp.,  Andromeda  L. ,  Rhododendron  L. 

FAMILLE    DES    OLÉACÉES. 

Genres  :  Elœoïdes  Ung. ,  Olea  L. ,  Fraxinus  L. 

FAMILLE   DES   APOCYNÉES. 

Genres  :  Echitonium  Ung.,  Apocynoplujllum  Ung. 
De  plus,  les  familles  exotiques  des  Sapotacées,  des  Ebénacées  et  des 
Styracées,  ont  aussi  leurs  représentants  dans  la  flore  fossile. 

3o  POLYPÉTALES. 

Quant  à  la  distribution  fossile,  la  remarque  faite  pour  les  Monopé- 
tales, s'applique  aussi  à  cette  classe. 

FAMILLE    DES    MAGNOLIACÉES. 

Genres  :  Magnolia  L.,  Liriodendron  L. 


253  — 


FAMILLE    DES    BUTTNERIACEES. 


Genre  :  Dombeyopsis  Ung. 


Fig.  18.  —  Acer  tricnspidaliim.  a.  Une  empreinte  entière  de  feuille;  b.  l'extrémité  d'une 

autre  feuille. 


FAMILLE    DES    ACERIINEES. 


Genre  :  Acer  L.  De  nombreuses  espèces  de  ce  genre  offrent  des  em- 
preintes caractéristiques  de  feuilles  dans  différentescouches  tertiaires.  On 
trouve  de  pins,  à  l'état  fossile,  les  fruits  ailés  de  ce  genre,  et  du  bois 


d'érable  formant  le  genre  Acerinium  Ung. 


FAMILLE    DES    HALORAGEES. 

Tiges  garnies  de  verticilles  foliaires,  formant  le  genre  Myriophyllites, 
et  une  sorte  de  fruit,  qui  paraît  appartenir  au  genre  Trapa. 

FAMILLE    DES    RHAMNÉES. 

Genres  :  Rhamnus  L.,  et  Ceanothus  L.;  en  feuilles  nombreuses,  très- 
caractéristiques  et  en  fruits  isolés. 

FAMILLE    DES    ILICINÉES. 


Genres  :  Ilex  L.,  et  Prinos  L.,  la  plupart  du  temps  seulement  en  em- 
preintes foliaires. 

FAMILLE    DES    CÉLASTRINÉES. 

Genres  :  Celastrus  L.;  de  nombreuses  espèces.  EvonymusL. 


—  254  — 

FAMILLE    DES    TÉRÉBINTHACÉES. 

Genres  :  Pistacia  L. ,  et  Rlms  L.  Beaucoup  d'espèces  de  ce  dernier. 

FAMILLE    DES    MYRTACÉES. 

Genres  :  Myrtus  L.  Eugenia  Micheli. 

FAMILLE    DES    POMACÉES. 

Genres  :  Pyrus  L.,  Cratœgus  L. 

FAMILLE   DES   DRUPACÉES. 

Genres  :  Amygdalus  L.,  Prunus  L.De  nombreuses  espèces  de  tous 
les  deux. 

FAMILLE    DES    LÉGUMINEUSES. 

Les  débris  des  Légumineuses  sont  plus  abondants  que  ceux  de  toutes 
les  autres  Dicotylédones  angiospermes  ensemble.  On  en  trouve  à  l'état 
fossile,  des  feuilles  ,  des  fruits  et  des  graines. 

Genres  :  Cijtisus  L.  ;  Glycyrrhiza  L.  ;  Phaseolites  Ung.  ;  Palœolobium 
Ung.;  Cœsalpinia  Plumier;  GleditschiaL.;  Cassia  L.;  BauhiniaL.', 
Mimosite s  Bow.  ;  Acacia  L. 

Dans  la  même  classe,  les  familles  des  Capparidées ,  des  Nymphéacées 
des  Cucurbitacées,  des  Malpighiacées,  des  Tiliacées,  des  Sapindacées,  des 
Mélastomacées  et  des  Rosacées  sont  représentées  par  des  restes  isolés, 
qui  ne  sont  pas  toujours  déterminables  d'une  manière  certaine.  Ce  qui 
est  surtout  remarquable,  ce  sont  les  fleurs  fossiles  assez  bien  conservées, 
qui  semblent  appartenir  au  genre  Getonia  Roxburg,  de  la  famille  exo- 
tique des  Combrétacées. 

(La  fin  à  la  prochaine  livraison.) 


Xéfiier  à  eros  fruit 


—  255  — 

JARDIN  FRUITIER. 


DU  NÉFLIER  ET  DU  NÉFLIER  CULTIVÉ  A  GROS  FRUIT, 

(duhamel)  (Mespilus  Germanica  L.),  Par  L.  de  Bavay. 

Genre  de  la  famille  des  Rosacées,  dont  les  caractères  sont  un  calice 
monophylle  à  cinq  segments  aigus  et  persistants  ;  corolles  à  cinq  pétales 
arrondis,  adhérents  au  calice;  environ  vingt  étamines  à  anthères 
simples,  arrondies  et  à  fdaments  pareillement  insérés  sur  le  calice;  un 
ovaire  infère  ou  adhérent  au  calice  ;  deux  à  cinq  styles  terminés  chacun 
par  un  stigmate.  Fruit  pomiforme-globuleux ,  un  peu  ovale,  charnu, 
ombiliqué  à  son  sommet,  contenant  cinq  loges,  dont  chacune  renferme 
une  graine  osseuse. 

Le  Néflier  est  indigène  au  midi  de  la  France  et  aux  autres  contrées 
méridionales  de  l'Europe.  C'est  un  grand  arbrisseau  ou  un  petit  arbre  , 
dont  le  bois  est  dur  et  dont  les  feuilles  sont  alternes,  simples  ou  lobées, 
munies  à  leur  base  de  stipules  très-caduques  ;  à  fleurs  ordinairement 
terminales  et  disposées  en  corymbes. 

Le  fruit  du  Néflier  se  nomme  nèfle;  il  est  généralement  peu  estimé; 
cependant  il  est  des  personnes  qui  en  font  le  plus  grand  cas  ,  en  raison 
des  propriétés  rafraîchissantes  qu'il  possède  à  un  haut  degré  et  qu'il 
doit  à  sa  saveur  acidulée  et  astringente.  Cette  saveur  même  est  un  motif 
pour  en  user  avec  modération  ;  car,  pris  en  trop  grande  quantité,  il  laisse 
dans  la  bouche  une  sensation  âpre  et  désagréable. 

On  cueille  les  nèfles  vers  la  fin  d'octobre  et  avant  leur  maturité , 
qu'elles  achèvent  sur  la  paille;  car  elles  ne  sont  bonnes  que  lorsqu'elles 
sont  blettes. 

Les  Néfliers  réussissent  dans  toutes  espèces  de  terrains,  pourvu 
qu'ils  ne  soient  pas  marécageux;  cependant  ils  sont  plus  productifs 
dans  les  terres  un  peu  légères,  chaudes  et  substantielles.  Toute  exposi- 
tion leur  convient. 

On  multiplie  le  Néflier  de  noyaux,  qui  ne  lèvent  qu'au  second  prin- 
temps ;  aussi  emploie-t-on  le  moyen  plus  court  des  marcottes  et  de  la 
greffe  sur  l'aubépine  et  moins  avantageusement  sur  le  coignassier  et  le 
poirier  :  la  greffe  en  écusson,  à  œil  dormant,  est  celle  qui  convient  le 
mieux. 

Le  Néflier,  plus  irrégulier  encore  dans  sa  végétation  que  le  coignas- 
sier, refuse  absolument  de  se  soumettre  à  une  forme  quelconque.  Pour 
l'empêcher  de  devenir  trop  tortueux,  on  lui  donne  de  bonne  heure  un 
tuteur  assez  solide.  Des  fleurs  terminant  les  petits  rameaux  qui  gar- 
nissent les  branches  ,  sont  aussi  un  obstacle  à  la  taille  qui  détruirait  la 


—  256  — 

récolte.  Il  n'y  a  donc  lieu  à  employer  la  serpette  que  pour  le  mettre  à 
tige,  après  quoi  on  l'abandonne  à  la  nature,  en  prenant  soin  seulement 
de  le  nettoyer  de  son  bois  mort  et  des  fruits  avortés  et  restés  au  bout 
des  branches. 

C'est  un  arbrisseau  à  placer  dans  les  lieux  agrestes,  où  la  nature 
du  sol  refuse  à  nourrir  tout  autre  arbre  fruitier  plus  précieux. 

Le  genre  ne  contient  qu'une  espèce  fruitière  unique;  c'est  le  Néflier 
commun  ou  des  bois;  il  a  produit  plusieurs  variétés,  entre  autres  le 
Néflier  à  fruit  sans  noyaux  et  le  Néflier  à  gros  fruit;  ce  dernier  est  le 
meilleur  et  le  plus  recherché. 

Le  Néflier  commun  ou  des  bois  est  de  médiocre  grandeur.  Le  tronc, 
peu  volumineux,  est  tortueux,  à  rameaux  irréguliers,  souples,  pu- 
bescents,  dans  leur  jeunesse,  d'un  brun  fauve  en  vieillissant  et  ordinai- 
rement épineux.  Les  épines  sont  fortes,  courtes  et  ordinairement 
aiguës.  Les  feuilles  sont  alternes,  lancéolées  elliptiques,  entières 
on  seulement  dentées  au  sommet,  vertes  en  dessus,  tomenteuses  en  des- 
sous, à  pétiole  court,  cotonneux,  ayant  à  sa  base  deux  stipules  ovales  et 
caduques.  Les  yeux  sont  bruns,  pointus  et  appliqués  contre  les  tiges. 
Les  fleurs  sont  blanches,  solitaires,  terminales,  à  pédoncule  court, 
ferme,  cotonneux.  Le  calice  est  à  cinq  segments  foliacés,  velus,  surtout 
à  la  base,  persistant  et  couronnant  le  fruit,  qui  est  petit,  plat  et  pres- 
que sphérique. 

Le  Néflier  cultivé  a  gros  fruit  (Mespilus  macrocarpa  DC,  Néflier 
monstrueux,)  aies  tiges  plus  fortes  et  plus  élevées  que  dans  le  type; 
elles  n'ont  point  d'épines  et  poussent  plus  régulièrement.  Les  feuilles, 
plus  larges  presque  du  double,  sont  rarement  dentées.  Les  folioles  du 
calice  sont  aiguës  et  longues  de  27  à  30  millimètres  et  couronnent  éga- 
lement les  fruits.  Les  yeux  sont  petits  et  les  boutons  à  fruits  assez  gros 
et  pointillés  de  gris. 

Les  fruits  sont  gros  du  double  au  moins  du  Néflier  commun  ou  des 
bois.  Ils  sont  sur  l'arbre  d'une  couleur  vert-grisâtre.  Ces  nèfles,  tant 
qu'elles  n'ont  pas  acquis  la  parfaite  maturité,  ont  une  saveur  acerbe  qui 
les  fait  repousser;  ce  n'est  que  lorsqu'elles  sont  blettes  qu'elles  devien- 
nent mangeables.  On  les  cueille  vers  la  fin  d'octobre,  et  on  les  étale  sur 
la  paille  dans  un  lieu  sec.  Les  grosses  nèfles  mûrissent  plus  difficilement 
que  les  petites  :  pour  hâter  et  régulariser  leur  maturité,  on  les  roule 
dans  un  drap,  ce  qui  les  rend  blettes  également  à  la  surface  et  à  l'inté- 
rieur; autrement ,  celui-ci  est  mûr  quand  le  pourtour  est  encore  vert. 

Cette  variété,  qui  se  cultive  comme  le  Néflier  commun,  n'est  guère 
plus  difficile  sur  l'exposition  et  la  nature  du  terrain  et  ne  demande  aucun 
soin  particulier. 


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i  .  A  m  nlucomc  ciuodi    Liiull.  2.Spiraea  Eleevesiana  var,  Flore  pleiio, 


HORTICULTURE. 


AMPHICOME  EMODI,  Lindl.  —  ÀMPHICOME  DES  MONTS  EMODI. 

Famille  des  Bignoniacées.  —  (Planche  64,  fig.  1.) 

Par  M.  Edouard  Morren. 

Nous  avons  signalé  ,  dans  notre  Revue  des  plantes  nouvelles,  p.  102, 
cette  élégante  Bignoniacée,  aussitôt  après  son  apparition  en  Angleterre. 
Nous  n'avons  rien  à  ajouter  à  la  description  que  nous  en  avons  donnée 
alors,  le  dessin  ci-joint  pouvant  suppléer  à  ce  qui  lui  manque.  Il  suffira 
d'y  jeter  un  coup  d'œil  pour  s'assurer  du  bel  effet  ornemental  de  YAm- 
phicome  Emodi  dont  les  fleurs  à  tube  orangé  et  à  limbe  rose  sont  envi- 
ronnées d'un  feuillage  recouvert  d'une  glaucescence  bleuâtre.  La  plante 
est  vivace  dans  les  monts  Hymalaya  où  elle  fut  découverte  par  le 
Dr  Wallich.  La  seconde  espèce  du  genre,  Y  A.  arguta  Royl.  est  connue 
et  cultivée  depuis  longtemps  :  on  la  distingue  de  sa  sœur  puînée 
aux  segments  des  feuilles  sessiles,  ovales-lancéolés,  bordés  de  dents 
éparses  et  fortes  et  aux  lobes  du  calice  subulés  ;  elle  eroît  dans  l'Hyma- 
laya  entre  6,000  et  8,000  pieds  d'altitude. 

On  cultive  ces  plantes  en  serre  froide. 


SPIRyEA  REEVESIANA,  Hort.,  var.  FLORE  PLENO. 

SpirEe  de  M.  Reeves,  variété  a  fleurs  pleines. 

(PI.  64,  fig.  2.) 

Par  M.  Edouard  Morren. 

C'est  une  bonne  nouvelle  que  celle  de  l'introduction  récente  d'un 
arbuste  pour  la  pleine  terre.  Les  serres  reçoivent  sans  cesse  de  nom- 
breuses acquisitions,  tandis  que  le  nombre  des  espèces  rustiques  s'ac- 
croît lentement.  Le  Spirœa  Rcevesiana  Poir.  à  fleurs  simples,  a  été  ap- 
porté de.  Chine  en  Europe  dès  1824,  par  M.  John  Reeves,  qui  vient  de 
mourir  dans  sa  82e  année ,  à  Clapham  en  Angleterre.  Cet  homme  hono- 
rable, ardent  horticulteur,  fut  pendant  de  longues  années  expert  des 
thés  (tea-taster)  pour  la  compagnie  des  Indes-Orientales  en  Chine,  et 
l'horticulture  lui  doit  un  grand  nombre  de  belles  espèces.  Outre  le 
Spirœa  Reevesiana,  il  a  introduit  en  1821  le  Priniula  Sincnsis  par  les  soins 

BEI.G.    HORT.    T.    VI.  23 


—  258  — 

du  capitaine  R.  Rowes;  en  1822  il  envoya  à  la  Société  d'Horticulture, 
le  Prunus  serrulata  et  le  Prunus  salicina ,  et  envoya  en  Angleterre  de 
nombreuses  variétés  de  Chrysanthèmes  de  la  Chine.  Le  Spirœa  Ree- 
vesiana  est  confondu  par  quelques  horticulteurs  avec  le  Spirœa  lan- 
ceolata,  auquel  il  ressemble  d'ailleurs  beaucoup  et  qui  a  récemment 
produit  par  voie  de  semis  une  variété  à  fleurs  doubles,  mais  cette 
dernière  espèce  a  les  inflorescences  en  corymbes  axillaires  courte- 
ment  pédoncules.  Le  Spirée  de  M.  Reeves  à  fleurs  doubles  vient  d'être 
rapporté  de  Chine  par  le  célèbre  voyageur  Fortune.  C'est  un  arbuste 
rustique,  éminemment  ornemental,  d'une  culture  et  d'une  multiplication 
très-faciles.  Les  feuilles  sont  lancéolées,  dentées,  quelquefois  trilobées 
ou  pinnatifides,  glabres,  glaucescentes  à  la  face  inférieure.  Les  fleurs 
forment  des  racèmes  ou  fausses  ombelles  axillaires  ou  terminaux,  lon- 
guement pédoncules.  Voulez- vous  avoir  le  signe  particulier  de  son  si- 
gnalement, voyez  les  poils  qui  couvrent  la  face  inférieure  des  sépales  du 
calice.  La  variété  à  fleurs  doubles  a  de  plus  les  étamines  transformées 
toutes  en  pétales.  L'ensemble  de  la  plante  forme  un  buisson  de  plus 
d'un  mètre  de  hauteur. 

NOTE  SUR  LA  GERMINATION  DES  GRAINES  ANCIENNES, 

Par  M.   Max.  Leichllin. 

Persuadé  qu'il  est  du  devoir  de  toute  personne  qui  expérimente  de 
faire  connaître  les  résultats  heureux  et  intéressants  qu'elle  obtient, 
je  désire  communiquer  aux  lecteurs  de  la  Belgique  horticole  un  nou- 
veau procédé  pour  faire  germer  des  graines  âgées  et  surannées;  je  serais 
heureux  si  mes  paroles  pouvaient  avoir  quelques  conséquences  avanta- 
geuses pour  quelques-uns  d'entre  eux. 

On  a  reconnu  depuis  assez  longtemps  déjà  l'action  favorable  que  le 
chlore  exerce  sur  la  germination,  et  on  emploie  avec  avantage  ce  gaz  en 
solution  dans  l'eau.  Quelle  est  donc  lacausede  cette  influence  spéciale?Le 
chlore  possède,  spécialement  sous  l'influence  de  la  lumière  du  soleil,  la 
propriété  dedécomposer  l'eau,  il  s'unit  avec  l'hydrogène,  forme  de  l'acide 
chlorhydrique  et  met  l'oxygène  de  l'eau  en  liberté.  Cette  grande  quantité 
d'oxygène,  pour  ainsi  dire  condensé  et  en  contactavec  les  graines  ne  peut 
manquer  d'en  accélérer  la  germination,  puisque  l'on  sait  que  cet  acte  est 
provoqué  par  l'union  de  l'oxygène  avec  le  carbone  de  l'albumen  des 
graines,  sous  l'influence  de  la  lumière,  de  la  chaleur  et  de  l'humidité. 
Un  excès  d'oxygène  autour  des  graines  doit  donc  infailliblement  exciter, 
favoriser  et  hâter  les  progrès  de  la  germination.  L'action  du  chlore  est 
donc  indirecte  et  s'exerce  par  l'oxygène  qu'il  développe. 


Cependant  on  ne  peut  pas  toujours  employer  avec  succès  l'eau  chlorée. 
Toutes  les  graines  de  nature  farineuse  et  mucilagineuse  ne  s'en  trouvent 
pas  bien  ;  les  graines  oléagineuses  particulièrement  éprouvent  une  in- 
fluence fâcheuse  de  l'action  du  chlore,  parce  que  l'huile  contenue  dans 
les  cotylédons  est  coagulée  et  rancie;  la  germination  est  alors  au  moins 
ralentie,  sinon  rendue  impossible. 

L'emploi  du  charbon  de  bois  réduit  en  poussière  nous  a  présenté  des 
résultats  favorables  dans  ces  circonstances.  J'avais  reçu  de  la  Nouvelle- 
Hollande  quelques  graines  d'une  Asclépiadée,  âgées  déjà  de  deux  ans.  Je 
les  avais  traitées  de  diverses  manières  sans  réussir  à  provoquer  la  germi- 
nation. C'est  alors  que  je  mis  en  usage  le  charbon  de  bois  pulvérisé  et 
répandu  sur  la  terre  dans  laquelle  j'avais  semé  les  graines.  Après  une 
dizaine  de  jours  elles  étaient  levées. 

L'horticulteur  ne  doit  pas  s'arrêtera  ce  résultat  pratique;  il  doit 
raisonner  ses  opérations  et  s'efforcer  de  reconnaître  la  cause  des  phéno- 
mènes qui  se  présentent  à  lui.  Dans  ce  cas  particulier  il  nous  semble 
que  l'action  du  poussier  de  charbon  doit  être  attribuée  à  la  faculté  que 
possède  cette  substance  d'absorber  et  de  condenser  dans  ses  pores  toute 
espèce  de  gaz.  Le  charbon  de  bois  attire  et  retient  une  grande  quantité 
d'air  atmosphérique  et  par  conséquent  il  présente  aux  graines  plus  d'oxy- 
gène qu'elles  n'en  reçoivent  dans  les  circonstances  ordinaires.  Mais  peut- 
être  que  l'un  ou  l'autre  des  lecteurs  de  la  Belgique  horticole  est  à  même  de 
faire  des  expériences  nouvelles  et  plus  exactes,  de  nature  à  déterminer 
définitivement  la  théorie  de  l'influence  de  la  poussière  de  charbon  de 
bois  sur  la  germination.  Je  serais  heureux  de  voir  mon  récit  réussir 
à  donner  cette  impulsion. 


REVUE  DES  PLANTES  NOUVELLES  OU  INTÉRESSANTES. 

Coix  stiginatosa,  C.  Koch  et  Rouché.  —  App.  Gen.  et  Sp.  nov.  et 

min.  cogn.  quœ  in  H.  B.  Beroliensis  col.  A.  1855.  —  Fam.  des  Grami- 
nées. —  Monœcie  Triandrie.  —  Larmille  stigmatique  (1). 


(1)  Coix  stigmatosa  C.  Koch  et  Bouché  :  Folia  elongata,  anguste  lineari-lanceo- 
lata;  nitentia  ;  spicae  beterogamae;  mascula  pedunculo  complanato  longiore  insidens  ; 
spicula  biflora,  glumis  chartaceis,  oblongis,  acutis,  multinerviis,  flores  totos  amplec- 
lentibus;  paleae  membranaceae,  inferior  major  ;  lodiculae  duse  inœquales,  carnosula?, 
apice  truncaue  ;  pedicellus  ad   latus  singulae  spicula?  brevis,  spiculam  incompletam 


—  260  — 

Celle  nouvelle  espèce  de  Larmille  (Larme  de  Job)  introduite  au  jardin 
botanique  de  Berlin  et  décrite  par  MM.  Koch  et  Bouché,  est  très-voisine 
du  C.  Lacryma  L.  mais  elle  l'emporte  par  un  port  plus  ample  et  la  racine 
vivace.  On  la  distingue  des  C.  agrestis  Lour.  et  C.  exaltata  Willd.,  qui 
ont  les  chaumes  solides  et  du  C.  arundinacea  Koen.  dont  les  épilets 
sont  axillaires  et  subsessiles,  aux  caractères  suivants. 

La  plante  est  vivace,  rameuse,  à  plusieurs  tiges  portant  des  feuilles 
allongées  à  reflets  blanchâtres,  ondulées,  très-glabres  et  munies  de 
ligules  très-courtes  ;  épis  latéraux  doubles  ou  ternes,  simples,  composés 
les  mâles  d'un  petit  nombre  d'épilets,  les  femelles  d'un  seul;  ces  der- 
nières ont  les  stigmates  allongés  et  fortement  papilleux. 

Tradescantia  hypophiiea,  C.  Koch  et  Bouché.  — Appendix  Gen. 
etSp.  nov.  et  min.  cogn.  quee  in  H.  B.  Ber.  col.  a.  1855.  —  Fam.  des 
Commélynées.  —  Hexandrie  Monogynie. 

Cette  espèce  a  les  tiges  pendantes,  géniculées  et  qui  présentent  ce  ca- 
ractère spécial  de  porter  une  série  de  poils  blanchâtres  ou  souvent  bru- 
nâtres. Les  feuilles  sont  oblongues  aiguës,  hirsutes,  à  gaines  velues; 
les  pédoncules  sont  dichotomes  très-glabres,  à  rameaux  glanduleux. 
Les  fleurs  sont  petites,  disposées  en  ombelles  de  deux  à  cinq,  glandu- 
leuses, calice  égalant  la  longueur  de  la  corolle. 

Elle  a  été  introduite  par  M.  Warszewicz  des  régions  tropicales  de 
l'Amérique.  Voisine  du  T.  gcniculata  Jacq.  elle  en  diffère  par  des  feuilles 
plus  petites  et  les  ombelles  glanduleuses. 

Fritillarla  Pyrenaica,  L. — Linn.  Cod.  Nov.  2397.  — Fam. 
des  Tulipacées.  —  Hexandrie  Monogynie.  —  Fritillaire  des  Pyrénées. 

«  Infausta  species,  multorum  sphalmatum  dubiorumque  mater.  »  Espèce 
maudite,  mère  de  beaucoup  de  malheurs  et  de  méprises!  est- il  dit  déjà 
dans  l'édition  de  J.  Aug.  et  J.  Herm.  Schultes  du  Systema  vegetabilium 
(Vol.  VII,  P.  I,  pag.  389).  Aucun  botaniste  n'a  jamais  su  quelle  plante 
Linné  avait  voulu  désigner  sous  le  nom  de  F.  Pyrenaica,  et  quelques-uns 
supposent  même  que  Linné  lui-même  ne  le  savait  pas  exactement.  D'après 


et  parvam  gerens  ;  spica  altéra  et  tertia  ferainea  involucro  ovato,  duro,  marginibus 
connatocum  2-3  spicis  aliis  abortivis  et  ex  parte  emergentibus  inclusa,  unispiculata; 
glumse  involucriformes,  intus  spongiosa?,  inter  se  connatae,  florem  unicum  amplec- 
tentes  ;  paies  complanala?,  enerviae,  carnoso  membranaceaa,  ovatae,  in  cuspidem  su- 
bito attenuatae,  inferior  paulo  major;  staminea  oeffœta;  lodiculse  nullae;  germen 
ovatum.compressum  ;  stylus  ad  apiceni  pilis  papillosis  obtusis  ;  stigmata  duo,  deu- 
sissime  papillosa,  elongata. 


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quelques  auteurs,  cette  espèce  serait  la  même  que  le  F.  nervosa  Willd., 
d'après  d'autres  ce  serait  le  F.  racemosa  Sm.  M.  Koch,  directeur  adjoint 
au  jardin  botanique  de  Berlin  et  secrétaire-général  de  la  Société  d'Horti- 
culture de  Prusse,  vient  de  soumettre  cette  question  à  un  examen  ap- 
profondi. Il  a  été  conduit  à  distinguer  le  F.  Pyrenaica  L.  du  F.  racemosa 
Sm.  de  la  manière  suivante  en  considérant  cependant  comme  probable 
que  ces  deux  plantes  ne  sont  que  des  variétés  d'une  même  espèce  : 


F.  Pyrenaica,  L.  Caulis  1-5  florus 
folia  suprema  erecta,  flores  longitudine 
superantia  ;  sepala  tessellata,  ochraceo- 
brunnea,  apice  leviter  reflexa  ;  capsula 
columnaris  subito  attenuata. 


F.  racemosa.  Sm.  Caulis  pluriflorus 
folia  superiora  erecta,  flores  longitudine 
superantia  ;  sepala  tessellata  ochraceo- 
brunnea,  apice  erecta;  capsula  obeonica, 
ab  apice  ad  basim  attenuata. 


Fritillalre  des  Pyrénées.  Tige  por- 
tant de  1  à  5  fleurs  ;  feuilles  les  plus  su- 
périeures dressées,  dépassant  la  hauteur 
des  fleurs;  sépales  échiquetés  de  brun 
et  de  jaunâtre,  à  extrémité  légèrement 
réfléchie,  capsule  colomnaire,  subitement 
atténuée. 

Fritillalre  à  grappe.  Tige  pluriflore, 
feuilles  supérieures  dressées,  dépassant 
les  fleurs  en  longueur;  sépales  échiquetés 
debrun  et  dejaunàtre,à  extrémité  dressée, 
capsule  obeonique,  atténuée  du  sommet 
à  la  base. 


Fritillaria  prœcox,  Hort.  — Fritillaria  alba,  Hort.  Eystett.  Ord. 
III.  t.  8.  f.  3.  —  Fritillaire  précoce  (1). 

Glaucescente;  tige  pluriflore;  feuilles  oblongues  linéaires,  allongées; 
fleurs  au  nombre  de  2  à  3,  blanches,  formées  de  sépales  à  5  nervures 
sans  coloration  en  damier;  style  de  la  longueur  de  l'ovaire  avec  lequel 
il  arrive  à  la  moitié  de  la  hauteur  du  périanthe;  capsule  courte  oblongue. 
Cette  plante  avait  été  considérée  jusqu'ici  comme  une  variété  du 
F.  meleagris,  mais  elle  se  distingue  de  cette  espèce  par  les  feuilles  au 
nombre  de  6  à  8  (au  lieu  de  4  ou  5),  glaucescentes,  et  plus  larges,  par 
des  fleurs  plus  grandes,  toujours  blanches  et  par  un  style  de  la  longueur 
de  l'ovaire  et  non  pas  plus  long. 


(1)  F.  prwcox,  Hort.  Caulis  1-1  i/«  pedalis,  glaucescens,  apice  recurvus;  folia  prui- 
nosa,  glaucescenlia,  punctis  albis  subtilibus  adspersa,  erecta,  omnia  alterna,  semipe- 
dalia,  1/2  poil,  medio  lata,  suprema  flores  longitudine  psene  duplo superantia;  flores 
solitarii  aut  2-3  umbellati,  penduli  ;  sepala  oblonga,  dorso  et  ad  basin  extus  angulato- 
carinata,  inter  se  cequalia,  sed  interiora  paululum  latiora,  poil,  longa,  5  lin.  lata, 
nervis  5  aut  7  flavescentibus  et  longitudinalibus  percursa  ;  Glamenta  basi  appendice 
lata  instructa,  anguste  lanceolata,  antheris  oblongis  et  flavis  sesquilongiora  ;  germen 
columnare,  leres,  vix  trigonum.  Stylus  trifidus,  puberulus,  mox  decidiuus,  antheriN 
paululum  superans. 


—  262  — 

Fritillaria  lutea,  Bieb.  fl.  taur.  Cauc.  I,  269,  III,  263.  —  Fri- 
tillaire  jaune. 

La  couleur  des  fleurs  de  cette  espèce  est  variable,  elles  sont  échi- 
quetées  de  jaunâtre,  d'orangé  ou  de  brun  pâle;  une  de  ces  variétés, 
notamment  celle  à  fleurs  brunes,  est  souvent  confondue  avec  le  Fr. 
latifolia  "Willd.  ;  toutes  ont  les  feuilles  glauques.  Le  F.  latifolia  var. 
major  du  Botanical  Magazin  (pi.  1207).  le  F.  latifolia  var.  lutea  du 
même  ouvrage  (pi.  1538)  et  le  F.  latifolia  de  Redouté  (LU.  pi.  51)  ap- 
partiennent bien  à  cette  espèce  distincte  du  F.  lutea.  Le  F.  lutea  Bieb. 
se  rapproche  en  outre  beaucoup,  surtout  par  la  glaucescence,  du 
F.  glaucescens  Willd.  Mais  on  peut  le  distinguer  à  ses  fleurs  d'un  jaune 
sale,  à  peine,  sinon  pas  du  tout,  échiqueté,  mais  striées  de  brun,  et  à  ses 
feuilles  beaucoup  plus  larges.  Depuis  que  le  F.  lutea  Bieb.  est  cultivé 
au  jardin  botanique  de  Berlin,  il  n'a  jamais  présenté  de  variations,  à 
son  observateur  M.  Koch,  et  il  constitue  certainement,  d'après  cet  au- 
teur une,  espèce  distincte  introduite  d'Orient.  C'est  une  fort  belle  plante, 
souvent  haute  de  deux  pieds,  à  feuilles  larges  au  milieu  d'un  pouce. 

Le  F.  aurea  Schott.  paraît  voisin  du  F.  lutea  Bieb.,  mais  il  se  distingue 
par  des  feuilles  un  peu  plus  larges  et  subverticillées. 

Myogalum  affine,  G.  Koch  et  Bouché.  —  Syn.  :  Ornithogalum 
affine  ïïort.  ■ —  Fam.  des  Asphodélées;  Hexandrie  Monogynie.  — 
Myogale  allié. 

Celle  plante  est  glaucescenle  à  feuilles  marquées  d'une  ligne  blanche 
médiane,  canaliculées,  de  10  à  14  nervures;  fleurs  dirigées  dans  tous  les 
sens,  à  pédicelle  horizontal,  sépales  verts  bordés  d'une  large  marge 
blanche,  très-étalés  pendant  la  floraison,  mais  connivents  dans  les  fleurs 
fanées;  filets  très-larges,  bidentés  à  la  pointe,  alternant  avec  d'autres 
d'un  tiers  plus  courts.  Cette  espèce  est  voisine  du  M.  nutans  Lk.  mais 
elle  fleurit  10  à  15  jours  plus  tard;  de  plus,  les  feuilles  de  cette  dernière 
espèce  sont  seulement  marquées  de  8-10  nervures,  et  les  fleurs  sont 
plus  grandes  et  d'un  vert  plus  pâle.  Le  M.  Boucheanum  Kth.  diffère  par 
des  feuilles  plus  larges,  verles,  de  23  â  26  nervures;  au  contraire  le 
M.  ThirkeanimiC.  Koch  [Ornithogalum preesandrum  Gris),  a  les  feuilles 
plus  étroites,  les  pédoncules  plus  grêles,  les  fleurs  moins  nombreuses 
et  les  filaments  des  étamines  plus  courts  et  moins  bidentés. 

âjpctotis  acauli»,  L.  Var,  speciosa,  DC. —  DC.  Prodr.  VI, 
p.  485.  —  Flore  des  serres,  T.  XI,  tab.  1104.  —  Elvm.  :  «p™?,  ours,  et 
ois,  oreille.  —  Fam.  des  Composées,  tribu  des  Calendulacées-Arctoti- 


—  263  — 

tlces;  Syngénésie  nécessaire.  —  Arctotis  sans  tige,  variété  gracieuse. 

UArctotis  acaulis  de  Linné  et  toates  les  espèces  de  la  tribu  des  Arc- 
lotidées  habitent  le  Cap  de  Bonne-Espérance.  «  Comme  les  Venidium  et 
les  Gazania,  dit  M.  Planchon  dans  la  Flore  des  serres,  leurs  très-proches 
alliés,  les  Arctotis  sont  presque  tous  remarquables  par  la  beauté  de  leurs 
Heurs.  Us  sont  aussi  très-variables  de  forme  et  de  coloris  et  sous  ce  rap- 
port aucune  espèce  ne  joue  plus  que  VA rctotis  acaulis.  G'est  au  point 
que  Jacquin  a  pu,  sans  trop  d'invraisemblance,  figurer  comme  trois  es- 
pèces distinctes,  sous  les  noms  d' Arctotis  tricolor,  undulata  et  speciosa, 
les  trois  formes  que  Lessing  et  De  Candolle  donnent  comme  de  simples 
variétés  de  Y  Arctotis  acaulis.  Ajoutons  que  la  plante  figurée  par  Jacquin 
(Ilort.  Schœnbr.  t.  158)  sous  le  nom  d'Arctotis  acaulis  n'est  pas  le  véri- 
table Arctotis  acaulis  de  Linné,  et  que  De  Candolle  en  a  fait  Y  Arctotis 
adpressa.  » 

1/ Arctotis  acaulis  var.  speciosa  a  les  scapes  de  la  longueur  des  feuilles, 
celles-ci  sont  profondément  lyrées;  les  ligules  sont  jaunes  et  rouges  de 
sang  à  la  base  et  à  la  face  inférieure.  Dans  la  variété  tricolor  le  scape  est 
double  ou  triple  des  feuilles,  celles-ci  sont  à  peu  près  entières  ou  à  peine 
lyrées  et  les  ligules  sont  jaune  de  soufre  en  dessus,  rouge  foncé  en  des- 
sous. La  variété  undulata  se  distingue  de  cette  dernière  par  des  fleurs 
orangées  plus  pales  à  la  face  inférieure. 

UArctotis  acaulis  se  cultive  en  orangerie;  l'humidité  lui  est  funeste. 
En  été  les  pots  sont  enterrés  à  une  bonne  exposition  chaude  et  souvent 
entourés  de  mousse  pour  que  le  soleil  ne  dessèche  pas  promptement  la 
terre.  On  peut  encore  le  traiter  comme  plante  annuelle  en  le  semant  et 
repiquant  sous  couche  chaude. 

Ornithogalumi  ruthciiicum ,  Bouché  in  Kth.  Enumerut.  PL  IV. 
—  Etym.  :  opvtéo; ,  oiseau,  et  y»xu.,  lait.  —  Famille  des  Asphodélées  ; 
Hexandrie  monogynie. 

Cette  espèce,  à  peine  distincte  de  YO.  umbellatum  L.  s'en  fait  remar- 
quer par  ses  pédicelles  ascendants  et  par  ses  capsules  à  angles  obtus, 
au  lieu  d'être  aigus.  Les  feuilles  sont  concaves,  linéaires,  larges  de  3  à  4 
lignes  ,  de  la  même  longueur  ou  dépassant  un  peu  le  scape,  parcourues 
au  milieu  par  une  large  strie  blanche.  La  hampe  porte  7  à  9  fleurs  en 
corymbe;  pédoncules  ascendants;  pétales  blancs,  verdàlres  au  milieu, 
munis  d'une  très-petite  pointe  ,  deux  fois  plus  longs  que  les  iilets  des 
étamines;  ovaire  hexagone. 


k 


—  264 


FLORICULTURE  DE  SALON. 


CULTURE  DES  FOUGÈRES  SOUS  CLOCHE, 
Par  M.  Edouard  Morren. 
On  est  heureux  de  constater  les  progrès  de  la  culture  des  Fougères, 
surtout  auprès  des  dames  qui  savent  toujours  distinguer  l'élégance  et  la 
grâce.  Quelques-unes  nous  ont  fait  l'honneur  de  nous  demander  s'il  fal- 
lait absolument  à  ces  plantes  une  serre,  si  elles  ne  pouvaient  les  voir 
végéter  et  prospérer  dans  le  salon  sous  leurs  yeux  et  sous  leurs  soins 
immédiats,  afin  de  s'environner  au  moins  de  quelques-unes  de  ces 
plantes  au  feuillage  mille  fois  découpé  (Adiantum)  et  rehaussé  d'or  ou 
d'argent  (Gymnogramma  Chrijsophillum,  tartarea,  dealbata,  etc.).  Nous 
nous  empressons  de  répondre  affirmativement  et  de  faire  connaître  une 
méthode  conseillée  par  M.  J.  Cox,  jardinier  anglais,  et  nous  sommes  per- 
suadé qu'elle  sera  suivie  par  plusieurs. 


Fis.  65. 


Fig.  66. 


11  suffit  de  voiries  deux  vignettes 
qui  accompagnent  cet  article  pour 
comprendre  tout  le  procédé  et  s'as- 
surer qu'il  n'est  pas  d'une  exécution 
impraticable.  Procurez -vous  un 
piédestal  d'une  forme  quelconque, 
mais  en  harmonie  avec  l'ameu- 
blement du  salon  et  suffisamment 
élevé  pour  que  son  plateau  arrive 
au  moins  à  la  hauteur  de  l'appui 
de  la  fenêtre. On  conseille  de  le  faire 
circulaire  et  de  lui  donner  un 
diamètre  de  trois  pieds,  mais  à  la  rigueur  il  peut  être  moins  large. 
On  place  sur  ce  piédestal  une  cloche   de  verre  ou  plutôt  une   petite 


serre  de  salon  qui  doit  avoir  la  même  forme  et  reposer  solidement.  La 
charpente  peut  être  de  bois  ou,  si  l'on  veut  plus  de  légèreté,  en  baguettes 
de  cuivre.  Dans  notre  dessin,  le  haut  de  la  cloche  est  en  voûte  mais  il  est 
quelquefois  plus  facile  de  le  faire  rectiligne.On  doit  surtout  avoir  soin  de 
ménager  de  chaque  côté  un  compartiment  qui  puisse  s'ouvrir  et  qui  se 
ferme  bien  exactement  et  de  disposer  quelques  crochets  solides  dans  le 
haut  de  la  cloche  pour  y  suspendre  des  petits  pots.  On  forme  sur  le 
fond  du  meuble  un  lit  de  fragments  de  pots  cassés,  de  cailloux  ou  de 
toute  autre  matière  poreuse,  sur  lequel  on  étend  une  couche  mince  et 
unie  de  sable.  Cela  fait  on  place  au  centre  de  ce  petit  terrain,  une  pyra- 
mide de  zinc  à  quatre  faces,  haute  de  40  à  50  centimètres,  à  sommet 
tronqué  et  terminé  par  un  plateau  à  bords  relevés  et  munie  sur  les 
côtés  de  fortes  saillies,  de  deux  pouces  carrés  environ,  solidement  sou- 
dées, comme  il  est  représenté  dans  la  gravure  66.  Cette  pièce  est  destinée 
à  servir  de  soutien  à  un  petit  rocher  ou  rockwork  que  l'on  fait  de  pierres 
siliceuses  ou  calcaires,  pesant  chacune  cinq  à  six  livres  et  que  l'on  dispose 
tout  autour  du  cône  de  zinc  de  manière  à  le  cacher  complètement.  Les 
saillies  qui  existent  sur  les  faces  de  la  pyramide  servent  à  retenir  les 
pierres  qui  doivent  être  solidement  assujéties.  On  peut  pour  mieux  y 
parvenir  se  servir  d'un  peu  de  ciment  ou  de  fds  métalliques.  Les  inters- 
tices ménagés  avec  discernement  dans  la  construction  sont  alors  remplis 
d'une  bonne  terre,  douce,  onctueuse  au  toucher,  formée  de  terre  franche, 
déterre  de  bruyère  et  de  sable,  et  on  y  plante  un  choix  de  jeunes  Fougères 
fortement  enracinées. 

Les  espèces  de  petite  taille  sont  sans  doute  celles  qui  conviennent  le 
mieux  pour  ce  genre  de  culture,  mais  rien  n'empêche  de  mélanger  de 
quelques  variétés  plus  grandes  que  l'on  peut  remplacer  si  elles  prenaient 
trop  d'accroissement.  Entre  les  Fougères,  on  plante  quelques  Sélaginelles 
ouLycopodes  etl'on  y  laissecroîtreles  mousses,  les  Marchandas  etles  Jun- 
germanns,  afin  que  la  végétation  vienne  recouvrir  toute  la  surface  du 
rocher  d'une  couche  de  verdure.  Une  belle  plante  de  Lycopodium  um- 
brosum  placée  au  sommet  y  fait  un  effet  admirable  et  l'on  peut  suspendre 
au  dôme  de  la  cloche  quelques  petits  pots  de  Lycopodes  pendants.  Le 
petit  réservoir  ménagé  au  sommet  de  la  pyramide  de  zinc  doit  être  tou- 
jours rempli  d'eau  et  les  racines  des  plantes  entretenues  dans  un  état 
d'humidité  en  rapport  avec  leur  végétation.  Lorsque  tout  est  arrangé  et 
planté,  il  faut  arroser  légèrement  en  se  servant  d'un  petit  arrosoir  à 
pomme  très-fine  ou  d'une  seringue  de  jardinier.  On  continue  à  donner 
de  l'eau  très-rarement  parce  que  l'humidité  est  toujours  très-grande  sous 


—  266  — 

une  cloche  fermée;  aussi  est-il  utile  de  permettre  de  temps  eu  temps  la 
circulation  de  l'air  en  ouvrant  une  des  portes  latérales. 

On  peut  cultiver  dans  ces  petits  appareils  un  très-grand  nombre  d'es- 
pèces rustiques  ou  de  serre  tempérée  que  l'on  peut  se  procurer  partout; 
il  serait  doublement  intéressant  d'y  introduire  nos  charmantes  Fou- 
gères indigènes  que  l'on  peut  rapporter  de  ses  promenades. 


QUELQUES  MOTS  SUR  L'HISTOIRE  DE  L'ORANGER 

Et  sur  son  mode  le  plus  facile  de  culture  comme  plante  d'appartement , 

Par  M.  Olivier  Du  Vivier. 

Chanté  déjà  par  les  poètes  grecs  et  latins,  l'arbre  aux  pommes  d'or 
(mala  aurea)  eut  de  tout  temps  une  célébrité  que  ne  purent  lui  ravir  ni 
les  siècles,  ni  les  invasions  successives  de  mille  végétaux  gracieux  ,  dans 
le  domaine  de  l'horticulture.  Toujours  fêté,  choyé,  cultivé  avec  les  plus 
grands  soins,  l'Oranger  est  resté  la  parure  indispensable  de  tout  jardin 
plus  ou  moins  complet  :  son  port  majestueux,  son  feuillage  d'un  beau 
vert  et  toujours  persistant,  ses  fleurs  du  blanc  le  plus  pur  et  de  l'odeur 
la  plus  suave,  ses  fruits  enfin,  en  font  un  des  plus  beaux  ornements 
de  nos  allées,  un  des  plus  précieux  joyaux  de  nos  serres. 

L'oranger  doux,  Citrus  aurantium,  L.,  Aurantium  vulgare,  Poit.  et 
Risso,  parait  être,  selon  toute  probabilité,  originaire  de  l'Afrique.  C'est, 
en  elfe t,  près  de  Bernic,  l'ancienne  Hesperis,  situé  dans  le  pays  de 
Barca,  ou  bien  à  Larache,  dans  l'empire  de  Maroc,  que  les  historiens 
fixent  la  situation  du  jardin  consacré  à  Vénus  et  conquis  par  Hercule. 
S'il  faut  en  croire  une  autre  version,  l'Oranger  aurait  sa  patrie  en  Judée 
et  ce  serait  la  ville  de  Citron  qui  lui  aurait  donné  naissance. 

Suivant  Macrizi,  auteur  arabe,  l'orange  fut  apportée  de  l'Inde,  posté- 
rieurement à  l'an  300  de  l'hégire  ,  et  semée  d'abord  dans  l'Oman ,  d'où 
il  se  répandit  très-promptement  dans  les  jardins  de  la  Syrie,  d'Antioche 
et  d'Egypte. 

D'après  Palésio,  ce  serait  aux  Croisés  que  la  France  devrait  l'intro- 
duction de  l'Oranger,  et  ce  serait  à  Hyères,  en  Provence,  que  ce  bel 
arbre  aurait  tout  d'abord  pris  droit  de  domicile  et  d'indigénat.  Selon 
d'autres  auteurs,  le  premier  pied  d'oranger  cultivé  en  France,  serait  le 
Grand  Bourbon  ou  Grand  Connétable  ou  encore  François  1er,  semé  en 
1421  à  Pampelune,  transporté  en  1500  à  Chantilly,  puis  en  1684  à 
Versailles  où  il  est  encore  le  plus  beau  et  le  plus  majestueux  de  l'espèce. 

Quoi  qu'il  en  soit  de  ces  diverses  opinions,  toujours  est-il  que  partout 


—  267  — 

où  l'Oranger  se  montra,  partout  il  enleva  les  sympathies  des  amants  de 
Flore.  Louis  XIV,  qui  savait  si  bien  distinguer  et  reconnaître  le  beau,  était 
grand  admirateur  de  cet  arbre;  il  en  avait  toujours  des  pieds  fleuris  dans 
les  galeries  de  ses  palais,  où  ils  étaient  placés  dans  des  caisses  argentées 
et  artistement  ciselées.  Aujourd'hui,  nous  l'avons  déjà  dit,  tous  les  jar- 
dins en  possèdent,  et  le  midi  de  l'Europe  et  de  l'Amérique  ont  leurs 
forêts  d'Orangers  comme  nous  avons  nos  forêts  de  hêtres  et  de  chênes. 

Mais  ce  n'est  pas  seulement  aux  possesseurs  de  vastes  jardins  et  de 
serres  y  annexées  que  l'Oranger  vient  offrir  toutes  les  délices  de  sa  cul- 
ture. Car,  si  d'un  côté  ce  végétal  est  en  grand  honneur  chez  les  horti- 
culteurs et  les  grands  propriétaires,  de  l'autre  nous  ne  croyons  pas 
émettre  une  fausse  opinion  en  pensant  et  disant  qu'il  est  trop  abandonné 
par  la  classe  aisée  de  la  population,  qu'il  n'est  pas  assez  souvent  choisi 
pour  orner  nos  demeures.  Voyez  plutôt  et  jugez  :  les  salons  de  nos  jours 
regorgent  de  plantes  très-variées,  de  fougères,  de  crassulacées ,  de 
liliacées,  de  calcéolaires  ,  d'orchidées  et  de  cent  autres  espèces;  mais 
des  Orangers,  peu,  trop  peu  de  personnes  en  cultivent,  et  encore  les 
cultivent-elles  souvent  mal. 

Et  pourquoi  donc  cet  abandon?  En  vérité,  il  serait  bien  difficile  de  le 
dire,  à  moins  que  d'en  rejeter  la  cause  sur  la  mode,  cette  maîtresse  capri- 
cieuse et  sans  raison  aucune,  qui  étend  sa  domination  tyrannique  jus- 
que clans  l'empire  de  Flore.  Nous  ne  voulons  faire  le  procès  à  aucune 
fleur,  car  toutes  ont  droit  à  notre  admiration  et  chacune  d'elles  a  ses 
qualités,  mais  certes  il  n'en  est  guère  qui  réunissent  autant  de  charmes 
que  l'Oranger,  il  n'en  est  pas  qui  dédommagent  aussi  largement  l'ama- 
leur  des  peines  et  des  soins  éclairés  qu'il  s'est  donnés  pour  la  conserva- 
tion de  celte  aimable  plante.  Et  enfin,  n'est-ce  pas  un  acte  de  galanterie 
bien  délicate  que  celui  d'entourer  une  épouse  chérie,  une  sœur  aimée  , 
de  ces  fleurs  qui,  abstraction  faite  de  leurs  qualités  matérielles,  offrent 
encore,  par  leur  signification  emblématique,  l'image  du  plus  bel  attribut 
de  ia  femme? 

Nous  ne  décrirons  pas  ici  les  caractères  botaniques  bien  connus  de 
l'Oranger  doux,  ni  les  nombreuses  variétés  de  l'espèce;  nous  passerons 
également  sous  silence  les  usages  nombreux  de  ses  feuilles,  de  ses 
fleurs,  de  ses  fruits  et  de  son  bois,  et  nous  nous  contenterons  de  pré- 
senter quelques  considérations  sur  la  culture  la  plus  facile  de  l'Oranger 
destiné  à   faire  l'ornement  des  salons. 

Si  l'on  veut  avoir  la  jouissance  de  voir  naître  ,  de  voir  croître  et 
d'élever  soi-même  des  Orangers,  il  faut  d'abord  choisir  ou  composer 
une  terre  convenable,  et  la  meilleure  est  la  terre  normale  ou  franche, 


—  268  — 

mêlée  d'un  quart  de  terreau  de  feuilles  et  de  fumier,  ou  de  bonne  terre 
de  bruyère.  Cela  fait  et  les  pots  renfermant  cette  terre  ayant  été  préa- 
lablement arrosés,  on  plante,  au  mois  d'avril,  les  graines  ou  pépins,  à 
la  distance  de  2  pouces  l'un  de  l'autre  et  à  une  profondeur  d'un  bon 
pouce, au  moins.  On  expose  ensuite  les  pots  au  soleil  environ  une  heure 
ou  deux  par  jour  jusqu'à  ce  que  les  plantes  soient  levées,  et  alors  il  faut 
les  y  laisser  continuellement  pour  ne  les  retirer  que  le  soir,  ou  même 
pendant  la  journée,  si  la  température  était  trop  basse.  Inutile  de  dire 
qu'il  faudrait  arroser  les  graines  avant  leur  germination  si  le  sol  qui  les 
renferme,  se  desséchait.  Lorsqu'un  pot  se  trouve  trop  garni,  l'on  ar- 
rache les  plants  les  plus  faibles,  afin  de  donner  aux  autres  une  plus 
grande  facilité  d'évolution,  et  à  mesure  qu'ils  croissent,  on  garnit  leur 
pied  de  nouvelle  terre  semblable  à  celle  qu'on  a  employée. 

Au  bout  de  deux  ans  ,  on  peut  relever  en  mottes  les  jeunes  plants  et 
les  mettre  chacun  dans  un  pot.  On  coupera  alors  les  brins  qui  en  gar- 
nissent les  pieds,  et  on  arrachera  les  feuilles  et  les  épines  qui  pourraient 
les  rendre  noueux  et  tortus. 

11  faut  arroser  les  jeunes  Orangers  régulièrement  et  donner  de  temps 
à  autre  de  petits  labours  à  la  terre;  mais  ce  qui  leur  convient  mieux 
encore  que  les  arrosements  ordinaires,  c'est  de  plonger  les  pots  jusqu'à 
mi-hauteur  dans  un  vase  rempli  d'eau  et  de  les  y  laisser  jusqu'à  ce  que 
leur  superficie  paraisse  humide. 

Au  bout  de  six  ans,  les  Orangers  sont  généralement  en  état  d'être 
greffés,  en  approche  ou  en  écusson  à  œil  dormant;  la  première  de  ces 
greffes  se  fait  en  mai,  la  seconde  en  juillet,  août  ou  septembre.  Il  ne 
nous  incombe  pas  de  rappeler  ici  ces  deux  procédés  opératoires,  et  les 
gens  du  monde  devront  nécessairement  s'adresser  à  un  jardinier  exercé 
pour  les  faire  exécuter. 

Ces  soins, on  le  voit,  ne  sont  pas  bien  difficiles  à  prodiguer;  il  ne  faut, 
du  reste,  que  les  continuer  aux  Orangers  greffes  :  labourer  et  rafraî- 
chir la  terre  de  temps  en  temps;  ôter  tous  les  petits  jets  et  les  feuilles 
qui  pousseraient  au  pied. 

L'Oranger  ne  demande  pas  à  être  arrosé  souvent.  Il  ne  lui  faut 
qu'une  très-légère  humidité  pendant  l'hiver,  mais  il  lui  en  faut,  car 
trop  de  sécheresse  le  ferait  dépouiller.  Lorsqu'il  est  exposé  à  l'air  libre, 
on  lui  donne  un  bon  arrosement  d'abord,  s'il  fait  fort  chaud,  puis  on 
continue  par  des  arrosements  plus  légers.  Il  a,  du  reste,  besoin  d'eau 
chaque  fois  que  ses  feuilles  se  fanent  et  se  plient.  La  meilleure  eau  pour 
l'arroser  est  celle  dans  laquelle  on  aura  fait  macérer  de  la  lie  de  vin,  des 
crolins  de  mouton,  de  la  fiente  de  pigeon  ou  des  fonds  de  tonnes  d'huile 


—  269  — 

d'olive.  L'eau  de  mare  et  celle  qui  s'écoule  des  tas  de  fumier  sont  en- 
core excellentes;  mais  ces  substances,  qu'on  est  loin  de  rechercher  pour 
nos  appartements  et  desquelles  on  peut  parfaitement  se  passer,  seront 
très-bien  remplacées  par  de  l'eau  de  citerne  ordinaire  dont  la  tempé- 
rature sera  celle  de  l'air  ambiant. 

Telles  sont  les  quelques  règles  à  suivre  dans  la  culture  de  l'Oranger; 
en  les  mettant  en  pratique,  on  sera  certain  de  réussir  et  l'on  pourra 
ainsi,  en  toute  saison ,  orner,  embellir  et  parfumer  les  salons  au  moyen 
d'une  des  plus  charmantes  créatures  que  possède  le  règne  végétal. 


CULTURE  DU  PASS1FLORA  EDULIS, 

Par  M.  Ch.  Shepherd. 

Le  Passiflora  edalis  mérite  d'être  cultivé  plus  fréquemment  qu'il  ne 
l'est  aujourd'hui,  soit  à  cause  de  ses  fleurs  qui  sont  très-belles,  mélan- 
gées de  vert,  de  rouge  ponceau,  de  pourpre,  de  bleu  et  de  blanc,  seu- 
lement de  courte  durée,  soit  à  cause  de  ses  fruits  bons  à  manger  qu'on 
peut  obtenir  chaque  année  en  abondance,  pourvu  qu'on  ait  le  soin  de 
féconder  les  fleurs  artificiellement.  Une  serre  à  ananas  est  celle  qui  lui 
convient  le  mieux;  la  plante  cultivée  en  pots  qu'on  enfonce  dans  la 
tannée  et  attachée  près  du  verre  à  un  treillis  en  fil  de  fer,  végète  par- 
faitement. 

Cette  Passiflore  a  besoin  d'être  à  l'étroit  dans  son  pot  pour  devenir 
aussi  fertile  que  possible;  seulement  il  faut  l'arroser  abondamment 
pendant  le  temps  de  son  développement,  qui  doit  commencer  au  mois  de 
mars,  pour  que  le  fruit  atteigne  sa  maturité  en  temps  convenable.  Elle 
prospère  dans  une  terre  franche,  légère  et  riche.  On  la  multiplie  facile- 
ment soit  par  graines,  soit  par  boutures.  Le  bouturage  est  préférable 
au  semis  comme  donnant  des  pieds  qui  se  mettent  plus  promptement 
en  rapport.  Des  pieds  de  deux  ans  produisent  déjà  en  profusion. 

Le  fruit  de  cette  plante  est  à  peu  près  de  la  grosseur  d'un  œuf  de 
poule  à  sa  maturité,  sa  couleur  est  d'un  pourpre  brunâtre  foncé.  Il  est 
couvert  d'une  écorce  épaisse,  dure,  qu'il  faut  enlever.  La  pulpe  inté- 
rieure qui  couvre  cette  écorce  ressemble  à  celle  d'une  groseille  à  ma- 
quereau, si  ce  n'est  qu'elle  est  jaune  et  qu'elle  entoure  des  graines  beau- 
coup plus  grosses  que  celles  de  la  groseille.  Sa  saveur  semble  en  réunir 
trois  différentes  et  elle  plaît  généralement  beaucoup  à  ceux  qui  la  con- 
naissent. La  plante  est  très-belle  lorsqu'elle  porte  ses  fruits  en  abon- 
dance. Elle  végète  avec  vigueur ,  et  elle  fructifie  très-bien,  même 
lorsqu'on    la  palisse  autour  d'un  treillis  cylindrique. 


270 


INSTRUMENTS  D'HORTICULTURE. 


CUEILLE-FRUITS  DE  M.  DITTMARE  DE  WURTEMBERG 
ET  DE  M.  ARNIIEITER  DE  PARIS. 

Ces  deux  instruments  se  trouvaient  exposés  sous  le  Pavillon  de 
l'Industrie,  à  l'Exposition  universelle  d'Horticulture  de  Paris,  et  ont  été 
l'objet  de  la  description  suivante  de  V.  Borie  : 


Fig.  67.  Cueille-Fruits  de  M.  Dittmarc.         Fig.  08.  Cueille -Fruils de  M.  Ariiheilcr. 

«  Le  premier  a  été  construit  dans  les  ateliers  de  MM.  Dittmare  frères, 
de  Wurtemberg  (fig.  67)  ;  il  est  très-simple.  Les  deux  lames  du  sécateur 


—  271   — 

sont  en  forme  de  serpe.  Un  ressort,  appuyé  sur  une  cheville  qui  est 
attachée  à  la  lame  immobile,  maintient  les  ciseaux  ouverts.  Un  peu 
au-dessous  du  sécateur  est  rivé  un  petit  cercle  en  fil  de  fer  très-fort, 
autour  duquel  est  attaché  un  fourreau  en  filet.  Cet  instrument  a  deux 
inconvénients  :  il  faut  prendre  beaucoup  de  précautions  afin  de  placer  le 
filet  exactement  sous  le  fruit  que  l'on  veut  détacher;  on  peut  être  gêné 
par  des  branches  ou  par  tout  autre  obstacle,  le  tronc  d'un  arbre,  un 
mur.  Le  cerceau  du  fourreau  faisant  une  saillie  considérable,  il  serait 
quelquefois  difficile  d'approcher  le  sécateur  du  pédoncule  des  fruits  ; 
ensuite  chaque  fois  que  l'on  veut  faire  passer  les  fruits  du  filet  dans  le 
panier,  il  faut  dégager  l'outil  du  fourré  de  l'arbre,  et  ramener  la  poche 
aux  fruits  à  portée  de  la  main. 

»Le  cueille-fruits  de  M.  Arnheiter  de  Paris  (fig.  68),  obvie  à  ces  deux 
inconvénients  au  moyen  d'une  invention  ingénieuse.  Le  manche  de 
l'instrument  passe  au  milieu  du  fourreau  destiné  à  recevoir  les  fruits. 
La  saillie  extérieure  du  cerceau  est  conséquemment  moins  grande.  On 
peut  cueillir  sans  se  préocuper  de  placer  la  poche  exactement  au-dessous 
du  fruit  qui,  en  se  détachant  du  couteau,  ne  peut  tomber  ailleurs.  Enfin, 
au  moyen  d'un  cordeau,  on  peut  élever  et  abaisser  la  poche  sans 
changer  l'instrument  de  place.  Notre  dessin  représente  le  panier  du 
cueille-fruits  remontant  vers  le  couteau,  pour  reprendre  sa  place  au 
niveau  de  la  partie  où  s'emmanche  le  bâton.  t> 


FRAGMENTS  DU  RAPPORT 

PRONONCÉ    AU    NOM    DU   JURY 

Chargé  de  juger  les  concours  de  l'exposition  florale  de  Versailles  en  1855, 
Par  M.  Bernard  de  Rennes  (1). 

Lorsque  vint  le  moment  de  réaliser  la  grande  pensée  à  laquelle  nous 
devons  le  Palais  de  Cristal  et  ses  merveilles,  on  reconnut  que  le  titre 
d'universelle  donné  à  cette  exposition  manquait  d'exactitude  sous  un 
rapport  essentiel. 


(1)  Cet  article  n'est  pas  un  rapport  d'un  intérêt  purement  local  ;  il  est  écrit  dans  un 
style  vif  et  animé,  inspiré  par  l'amour  des  fleurs  et  guidé  par  leur  observation  judi- 
cieuse. M.  Bernard  de  Rennes  trace  en  quelques  lignes  un  portrait  pittoresque  et  exact 
des  fleurs  qui  se  présentent  à  lui;  c'est  là  un  talent  aussi  rare  que  diflicile  à  acquérir. 

( Note  de  la  Direction.) 


—  272  — 

On  avait  été  forcé  d'en  bannir  les  plantes  et  les  fleurs.  Aucune  place 
n'avait  pu  être  convenablement  disposée  pour  cette  branche  de  la 
richesse  nationale,  pour  cette  horticulture  qui  a  fait  depuis  vingt  ans 
de  si  heureux  progrès,  et  qui  est  devenue  en  France  une  importante 
industrie  et  un  art  charmant!  C'est  que  les  plantes  et  les  fleurs  sont  des 
êtres  vivants,  qu'on  ne  peut  montrer  que  vivants,  et  qui  exigent  de 
l'air,  de  l'espace,  des  abris,  de  la  chaleur,  des  soins  incessants,  con- 
ditions indispensables  à  leur  existence,  conditions  impossibles  à  réunir 
dans  le  Palais  de  l'Industrie. 

Ainsi  cette  grande  solennité  allait  être  privée  de  son  plus  riche 
ornement;  cette  fête  nationale,  donnée  par  la  France  au  monde  entier, 
était  exposée  à  se  passer  de  fleurs,  de  fleurs,  ces  créations  divines  qui 
reposent  si  doucement  les  yeux  ,  bien  vite  fatigués  de  l'œuvre  hu- 
maine!... Le  monde  horticole  s'est  ému!  Paris  et  Versailles  se  sont 
mis  à  l'œuvre,  et  deux  Expositions  florales  sont  venues  compléter  et 
embellir  celle  de  l'Industrie. 

Nos  jardiniers  versaillais  y  ont  largement  contribué,  et  bien  loin  de 
reculer  devant  la  concurrence  parisienne ,  stimulés,  au  contraire,  par 
cette  rivalité,  on  les  a  vus  redoubler  d'efforts,  se  multiplier,  pour 
soutenir  leur  réputation  et  pour  figurer  en  même  temps  au  jardin  des 
Champs-Elysées  et  au  parc  de  Versailles. 

Ce  sont  ces  efforts  et  leur  succès  que  nous  venons  récompenser 
aujourd'hui. 

Les  récompenses  que  nous  allons  distribuer  sont  un  témoignage  de 
l'intérêt  sérieux  du  gouvernement  pour  toutes  les  branches  du  travail, 
et  de  l'utilité  d'une  association  qui,  en  si  peu  d'années,  a  fait  faire  tant 
de  progrès  à  l'Horticulture.  Ces  progrès  se  mesurent  à  l'accroissement 
des  résultats  commerciaux ,  au  développement  des  établissements 
horticoles,  à  l'immense  différence  qui  existe  entre  nos  premiers  essais 
d'exposition,  dans  les  salles  de  l'Hôtel-de-Ville,  et  l'élégant  jardin  où 
nous  sommes  réunis. 

Ici  se  place  naturellement  l'éloge  d'un  homme  que  son  absence  me 
permet  de  louer,  de  M.  le  président  Pescatore,  dont  le  nom  est  dé- 
sormais européen  chez  tous  les  horticulteurs.  Nul,  en  France,  n'a  fait 
autant  que  lui  pour  l'art  chanté  par  l'abbé  Delille,  l'art  d'embellir  les 
jardins.  Jamais  fortune  plus  honorablement  acquise  n'a  contribué  plus 
libéralement  à  propager,  à  répandre  le  goût  des  belles  plantes,  à 
populariser  l'amour  des  fleurs,  à  encourager  les  producteurs  ! 

L'exposition  de  Versailles  a  été  en  grande  partie  l'ouvrage  de 
M.  Pescatore  ;  et,  si  par  un  sentiment  de  délicatesse  que  tout  le  monde 


—  273  — 

a  compris  el  approuvé,  il  ne  s'était  pas  volontairement  interdit  le 
concours,  le  premier  prix  lui  appartenait  de  droit.  Nous  aurions  eu  alors 
à  vous  parler  de  cette  étonnante  et  merveilleuse  famille  des  orchidées, 
dont,  avant  lui,  on  ne  connaissait  en  France  que  de  rares  et  incomplètes 
collections;  fleurs  aux  formes  bizarres,  mais  d'une  beauté  saisissante, 
et  qui  vous  ravissent  par  la  vivacité  et  les  contrastes  harmonieux  de  leur 
brillant  coloris,  par  les  parfums  suaves  ou  pénétrants  qu'exhalent  des 
corolles  de  nacre,  de  saphir,  de  moire  chatoyante,  ou  d'un  blanc  à  rendre 
la  neige  jalouse!  plantes  admirables,  au  milieu  desquelles  les  regards 
charmés  et  fascinés  se  perdent  dans  des  mirages  sans  fin.  Mais  je  l'ai  dit  : 
devant  le  désintéressement  de  leur  possesseur,  le  jury  s'est  abstenu,  il  a 
respecté  une  volonté  généreuse  qui  ne  réclamait  que  la  satisfaction 
d'avoir  contribué  si  puissamment  à  l'éclat  de  l'exposition. 

Toutes  les  récompenses  ont  été  partagées  entre  les  autres  concurrents, 
et  c'est  ce  partage  dont  nous  venons  vous  rendre  compte. 

Nous  allons  donc  vous  parler  d'Horticulture,  et  d'avance  je  vous 
demande  pardon  pour  quelques  détails  techniques,  inévitables  dans  un 
pareil  travail.  Rassurez-vous  cependant,  je  ne  suis  pas  savant  du  tout,  et 
je  serais  désolé  de  le  paraître.  J'aime  les  fleurs  tout  simplement,  comme 
Dieu  nous  les  a  faites ,  et  si  je  les  étudie  avec  amour,  si  je  recherche 
curieusement  les  lois  de  leur  organisme,  c'est  pour  avoir  un  motif  de 
les  admirer  davantage  et  de  rendre  grâce  à  Celui  qui  nous  les  a  données. 

Je  n'oserais  pas  d'ailleurs  faire  de  la  science  en  présence  de  ces  noms  : 
La  Quintinie,  Le  Nôtre,  Bernard  de  Jussieu,  Thouin,  qui  brillent  ici,  grâce 
à  l'heureuse  idée  de  notre  collègue,  M.  Heuzé,  à  qui  il  appartenait  plus 
qu'à  personne,  lui,  professeur  dans  l'une  de  nos  premières  écoles  d'A- 
griculture, d'évoquer  à  nos  yeux  ces  grands  noms  de  nos  maîtres  à  tous. 

Nous  allons  parcourir,  si  vous  le  voulez  bien,  cette  route  que  j'appel- 
lerai sans  figure  le  chemin  des  fleurs,  et  malgré  mon  secret  penchant  à 
prolonger  une  promenade  pendant  laquelle  l'heure  s'écoule  si  rapide- 
ment, je  tâcherai  d'abréger  les  stations. 

Parmi  ceux  de  nos  horticulteurs  qui  ont  le  plus  attiré  l'attention  du 
jury,  il  en  est  un  qui  a  concouru  quatre  fois  et  mérité  quatre  prix,  et 
dont  le  nom,  rencontré  une  cinquième  fois  dans  les  concours  imprévus, 
a  obtenu  une  cinquième  couronne. 

On  le  trouve  d'abord  au  chapitre  des  importations.  Le  premier  il  in- 
troduit à  Versailles  et  le  lis  géant,  à  la  tige  élancée  de  trois  à  quatre 
mètres,  terminée  par  un  racème  de  larges  fleurs  blanches  veinées  de 
pourpre  et  délicieusement  odorantes  ;  et  à  côté  de  ce  lis  indien,  une  autre 

PELG.    HORT.    T.    VI.  24 


—  274  — 

plante  rapportée  de  l'Himmalaya,  le  rhododendron  sikkim  auklandii,  aux 
splendides  panicules  de  fleurs,  conquête  d'autant  plus  précieuse  que 
l'arbuste  appartiendrait  à  la  pleine  terre. 

Le  même  exposant  se  fait  remarquer  au  concours  des  plus  belles  cul- 
tares,  d'abord  par  son  rhododendron  catesbei  alba,  la  plus  belle  et,  en 
même  temps,  la  plus  florifère  des  variétés  hybrides  du  maximum  et  du 
ponticum,  ensuite  par  un  massif  de  trente  variétés  d'autres  rhododen- 
drons provenant  de  ses  semis,  et  enfin  par  une  corbeille  d'azalées  de 
l'Inde,  petits  arbustes  symétriquement  arrondis,  couverts  littéralement 
de  fleurs,  véritable  mosaïque  offrant  tous  les  tons  de  la  gamme  des  cou- 
leurs, la  parcourant  par  une  gradation  artistement  calculée,  et  passant 
du  rouge  pourpre  à  toutes  les  nuances  du  rouge,  à  toutes  les  nuances 
du  rose  jusqu'au  blanc  rosé  et  au  blanc  d'albâtre.  Et  finalement,  par  un 
contraste  de  forme  dont  l'œil  est  enchanté,  le  même  horticulteur  nous  a 
offert  sa  collection  de  cyclamens,  la  fleur  aux  clochettes  gracieusement 
relevées,  la  fleur  chérie  des  belles  Siciliennes,  et  qui  joint  au  mérite  d'un 
suave  parfum  le  don  d'une  longue  floraison. 

Le  jury  a  voulu  réunir  les  cinq  palmes  obtenues  par  cet  exposant,  il 
en  a  tressé  une  couronne,  et  il  a  décerné  le  prix  d'honneur,  la  médaille 
d'or  de  l'Impératrice  à  M.  Truffaut  fils,  de  Versailles,  à  M.  Truffaut, 
qui,  en  apprenant  son  triomphe,  en  a  de  suite  modestement  reporté 
l'honneur  à  ses  dignes  maîtres,  messieurs  Bertin  et  Briot. 

A  côté  de  ce  prix  d'honneur  et  sur  le  même  plan,  vient  se  placer  le 
prix  de  l'Empereur,  donné  par  M.  le  ministre  d'Etat.  Le  vainqueur  dont 
je  vais  proclamer  le  nom,  a  également  concouru  cinq  fois  et  cinq  fois 
triomphé.  On  conçoit  dès-lors  que  le  choix  devenait  difficile  entre  ce 
concurrent  et  son  rival.  Mais  vous  allez  voir  avec  quel  judicieux  discer- 
nement, avec  quel  tact  délicat  a  prononcé  le  jury!  Le  prix  de  l'Impéra- 
trice appartenait  de  droit  aux  plus  belles  fleurs,  celui  de  l'Empereur  a 
été  attribué  à  des  produits  plus  sérieux,  aune  culture  très-belle  aussi, 
mais  plus  sévère,  et  qui  vient  accroître  magnifiquement  notre  richesse  fo- 
restière; je  veux  parler  de  ces  admirables  conifères  des  régions  tempérées 
du  Mexique,  de  la  Nouvelle-Hollande,  de  la  Nouvelle-Zélande  et  de  quel- 
ques parties  de  la  Chine  et  des  montagnes  de  l'Inde,  arbres  de  pleine 
terre,  aux  proportions  immenses,  et  qui  donneront  dans  l'avenir  à  nos 
forêts  montagneuses  un  caractère  de  grandeur  et  de  majesté  inconnu  à 
notre  vieille  Europe. 

C'est  dans  cette  tribu  que  se  font  admirer  les  abies  douglassii,  à  la 
tige  élancée,  haute  de  180  pieds,  au  feuillage  finement  découpé,  vert 
sombre  en  dessus,  argenté  en  dessous;  les  araucaria  si  variés,  pyra- 
mides de  150  pieds  de  hauteur,  aux  rameaux  gracieusement  pendants, 


—  275  — 

au  feuillage  curieusement  imbriqué;  les  élégants  cîipressus,  aux  branches 
dressées  ou  retombantes  à  la  manière  des  saules  pleureurs;  les  odorants 
jimiperus,  au  bois  dur  et  incorruptible,  et  tant  d'autres  que  j'omets  à 
regret,  et  enfin  le  colosse  californien,  la  merveille  de  la  végétation,  le 
Wellingtonia  giganlea,  qui  atteint  300  pieds  d'élévation,  80  pieds  de 
circonférence  et  qui  compte  alors  trois  mille  ans  d'âge!  La  pensée  s'ar- 
rête comme  perdue  devant  ce  prodige  de  la  création. 

Les  conifères  n'appartiennent  pas  tous  à  la  pleine  lerre.  Plusieurs  et 
en  grand  nombre,  comme  les  araucaria  du  Brésil,  exigent  la  serre  tem- 
pérée, et  deviennent  ainsi  l'ornement  obligéde  nos  jardins  d'hiver,  cette 
charmante  création  de  notre  époque,  grâce  à  laquelle  l'abri  de  quel- 
ques châssis  de  verre  nous  sépare  des  frimas  glacés  de  décembre  et  de 
janvier,  et  nous  offre  dans  une  tiède  atmosphère  la  verdure  brillante 
des  conifères  mêlée  à  l'éclat  du  camélia  et  de  cent  autres  plantes  dont 
l'art  de  nos  jardiniers  sait  hâter  la  floraison. 

Avant  de  vous  faire  connaître  l'homme  qui  a  doté  le  commerce  de 
Versailles  de  cette  nouvelle  arboriculture,  je  dois  signaler  ses  louables 
efforts  pour  introduire  chez  nous  Yigname  de  la  Chine,  cette  base  de  la 
nourriture  de  l'immense  population  du  céleste  Empire,  et  pour  rem- 
placer ainsi  la  pomme  de  terre,  dont  une  maladie,  rebelle  jusqu'ici  à  tous 
les  moyens  employés  pour  la  combattre,  a  momentanément  diminué  la 
production. 

Et  maintenant  je  nomme  et  j'appelle  à  recevoir  le  prix  de  l'Empereur, 
M.  Rémont,  pépiniériste,  à  Versailles. 

Après  ces  deux  prix,  qu'un  sentiment  de  haute  convenance  nous  fai- 
sait la  loi  d'appeler  les  premiers,  vient  se  placer  une  récompense  non 
moins  digne  de  l'ambition  de  nos  horticulteurs,  la  grande  médaille  d'or 
de  nos  Dames  Patronesses.  Elle  appartenait  naturellement  aux  fleurs. 

Le  moyen  le  plus  efficace  d'améliorer  les  races  et  d'obtenir  des 
plantes  nouvelles,  est  le  semis.  Pour  atteindre  le  but,  il  faut  marier 
les  plantes  et  faire  naître  de  ces  unions  des  couleurs  et  des  formes 
participant  des  deux  types  générateurs;  c'est  ce  qu'on  appelle  l'hybrida- 
tion, opération  difficile,  qui  demande  beaucoup  de  tact,  beaucoup  d'in- 
telligence et  une  extrême  légèreté  de  main,  soit  qu'on  procède  par  le 
rapprochement  des  deux  plantes,  soit  qu'on  transporte,  à  l'aide  d'un 
pinceau,  le  pollen  d'une  fleur  sur  le  stigmate  d'une  autre  fleur.  Eh  bien! 
un  homme  plus  avisé,  ou  mieux  inspiré,  a  eu  l'heureuse  idée  de  recourir 
à  un  agent  bien  autrement  léger,  bien  autrement  habile  que  le  plus  ha- 
bile opérateur  :  il  a  introduit  dans  la  serre,  au  moment  propice,  un  es- 
saim d'abeilles,  et  vous  devinez  de  suite  le  résultat  :  obéissant  à  son 
instinct  butineur,  la  mouche  laborieuse  va  voletant  de  fleur  en  Heur, 


—  276  — 

chargeant  ses  antennes,  ses  pattes,  ses  ailes,  de  la  poussière  fécondante, 
et  tour  à  tour  l'enlevant  et  la  déposant  sur  chaque  plante.  Le  moyen 
était  trouvé,  l'œuvre  était  accomplie,  et  de  là  cette  admirable  collection 
de  pelargonium  nouveaux,  nouveaux  de  formes  et  de  couleurs,  où  se 
rencontrent  six  larges  pétales,  richement  maculés,  et  offrant  aux  yeux 
éblouis  les  coloris  les  plus  frais,  les  plus  brillants,  les  plus  variés. 

C'est  cette  collection  qui  a  mérité  la  première  médaille  d'or  de  nos 
Dames  Patronesses;  c'est  son  habile  créateur  que  j'appelle  à  la  recevoir  : 
M.  Duval,  jardinier  à  Bellevue. 

Se  plaçant  à  ses  côtés  et  le  serrant  de  près,  un  autre  horticulteur  a 
mérité  une  double  distinction  pour  la  même  culture.  M.  Pierre  Dufoy, 
de  Paris,  a  obtenu  une  médaille  d'argent  pour  ses  pélargonies  à  grandes 
fleurs,  une  seconde  pour  ses  pélargonies  fantaisies,  une  troisième  pour 
de  délicieuses  verveines,  plante  si  chère  à  la  floriculture  ! 

La  seconde  médaille  d'or  de  ces  dames  a  été  décernée  par  le  jury  à  deux 
collections  de  plantes  d'une  incontestable  supériorité,  aux  pensées  et  aux 
cinéraires  exposées  sous  les  numéros  158  et  159.  C'est  après  dix  ans 
d'efforts  persévérants,  d'essais  répétés,  de  semis  renouvelés,  de  soins  de 
tout  genre,  qu'a  été  obtenue  cette  collection  de  fleurs  de  pensées  si  re- 
marquable. C'est  une  véritable  transformation;  jamais  cette  plante 
n'avait  montré  des  masques  plus  bizarres  et  plus  curieux,  un  assem- 
blage de  dessins  et  de  macules  fantasques  d'un  effet  plus  saisissant.  Et 
puis,  des  pétales  d'une  ampleur  et  d'un  développement  inouis,  des  cou- 
leurs à  défier  tous  les  prismes  de  l'arc-en-ciel,  et  une  étoffe  à  désespérer 
nos  plus  habiles  ouvriers  de  Lyon.  Un  velours  épaix,  soyeux,  brillant, 
irisé,  chatoyant,  et  appelant  irrésistiblement  la  caresse  et  le  toucher. 

Le  même  horticulteur  a  exposé  des  cinéraires  et  nous  a  montré  qu'il 
était  maître  en  plus  d'un  genre.  Quelle  jolie  fleur  que  la  cinéraire,  avec 
son  air  enfantin  et  sa  fraîcheur  printanière!  quels  regards  ne  sont 
frappés  de  cette  douceur  de  forme,  de  ces  pétales  étalés  en  rayons,  se 
soudant  avec  grâce  à  un  petit  disque  brun,  couronné  d'une  aigrette 
d'or,  sur  lesquels  la  palette  divine  a  répandu  les  couleurs  les  plus 
suaves,  quand  elles  sont  multiples  et  qu'elles  se  fondent  dans  une  dégra- 
dation insensible,  ou  les  plus  vives  et  les  plus  éblouissantes,  quand  la 
fleur  n'offre  que  deux  couleurs  ou  un  coloris  unique! 

L'habile  cultivateur  de  ces  belles  plantes  ,  et  qui  a  mérité  la  seconde 
médaille  d'or  des  Dames  Patronesses,  est  M.  Charpentier,  jardinier  à 
Bellevue. 

Une  plante  qui  ne  ressemble  à  aucune,  qui  à  elle  seule  constitue  un 
genre,  et  un  genre  offrant  plus  qu'aucun  autre  la  variété  de  coloris 
dans  la  fixité  de  la  forme,  a  mérité  et  obtenu  la  quatrième  médaille  d'or 


—  277  — 

des  Dames  Patronesses.  Ce  sont  les  calcéolaires  herbacées  qui  oui  si 
vivement  excité  la  curiosité  de  nos  visiteurs.  Cette  Heur  affecte  la  forme 
singulière  d'une  chaussure  évasée  et  élargie,  et  de  là  son  nom.  C'est,  si 
l'on  veut,  une  babouche  turque,  ou  si  l'on  veut  encore,  une  aumônière 
entr'ouverte.  Mais  que  de  gentillesse  dans  cette  forme  originale!  et 
comme  ce  tissu,  qu'on  croirait  emprunté,  par  sa  finesse  et  son  reflet,  à 
la  pure  laine  de  cachemire,  est  merveilleusement  tigré,  couvert  de  mou- 
chetures qui  en  font  autant  de  fourrures  qu'on  croirait  enlevées  à  de 
petits  léopards  de  mille  couleurs  diverses. 

Le  jardinier,  inventeur  après  Dieu  de  cette  fleur  singulière,  celui  qui 
a  remporté  le  prix,  est  M.  Lotin,  de  Port-Marly. 

Versailles,  si  riche  en  grands  souvenirs,  et  si  fière  à  juste  titre  de  son 
palais  historique  et  des  magnifiques  ombrages  de  son  parc  royal, 
dont  j'aime  si  fort  la  solitude  et  la  douce  tristesse,  ne  possède  qu'une 
seule  industrie,  l'Horticulture,  mais  qui  a  pris  depuis  quelques  années 
les  plus  heureux  développements  dans  toutes  ses  branches,  dans  ses 
primeurs,  dans  ses  légumes,  dans  ses  fruits  forcés,  aussi  bien  que  dans 
ses  fleurs  et  ses  arbustes  d'ornement.  A  qui  donc  vont  être  décernées 
les  deux  médailles  d'or  de  l'édilité  versaillaise?  vous  l'avez  pressenti  :  à 
deux  simples  jardiniers;  à  l'un  pour  ses  légumes  si  beaux,  pour  ses 
primeurs,  pour  ses  fruits  si  merveilleusement  forcés  qu'on  les  croirait 
venus  dans  leur  saison  naturelle  et  sous  leur  propre  climat,  depuis  le 
bananier  des  Indes  et  les  ananas  de  la  Jamaïque,  jusqu'à  nos  fraises, 
jusqu'à  nos  raisins,  jusqu'à  nos  groseilles  et  à  nos  cerises  qu'il  vous  a 
montrées  pendantes  à  un  arbre  vivant;  à  l'autre,  pour  la  taille  habile  de 
ses  fruitiers  et  la  conduite  de  ses  espaliers,  pour  les  formes  variées  qu'il 
sait  donner  à  chaque  arbre,  formes  appropriées  avec  discernement  à  la 
nature  et  à  l'espèce  de  chaque  fruit.  Sous  sa  serpette  intelligente,  la 
branche  conserve  tout  ce  qu'elle  peut  nourrir  de  boutons  à  fruit,  tandis 
que  la  croissance  du  bois  est  également  ménagée  dans  une  juste  pro- 
portion. On  peut  lui  appliquer,  avec  une  légère  variante,  le  vers  si 
connu  de  Boileau,  et  dire  que  pour  lui  : 

«  La  sève  esl  une  esclave  et  ne  sait  qu'obéir.  » 

Je  me  hâte  de  proclamer  les  noms  de  ces  deux  ouvriers  éminents  et 
j'appelle,  pour  le  premier  prix  de  la  ville  de  Versailles,  M.  Pcelle, 
jardinier  à  Glatigny;  pour  le  second  prix,  M.  Deseine,  pépiniériste  à 
Bougival. 

II  eût  été  regrettable  que  l'important  concours  des  légumes  et  des  fruits 
se  lut  trouvé  réduit  à  ces  deux   rivaux  ;  mais  beaucoup  d'autres  pré- 


—  278  — 

tondants  se  sont  présentés  dans  la  lice,  et  le  jury  a  été  heureux  d'avoir 
encore  des  récompenses  à  donner.  Il  a  décerné  deux  médailles  d'argent 
à  M.  Fraget  pour  ses  légumes  et  ses  ananas,  une  autre  médaille  à 
M.Boyer  pour  ses  fruits  conservés,  et  une  troisième  médaille  d'argent  à 
M.  Defresne  pour  ses  arbres  fruitiers,  si  habilement  formés  et  conduits  ! 

Il  est  une  fleur  dont  le  nom  n'a  pas  encore  été  prononcé  et  qui 
semblerait  être  l'objet  d'un  coupable  oubli,  comme  s'il  était  possible  de 
jamais  oublier  le  type  même  de  la  beauté.  Je  l'ai  conservée  à  dessein 
pour  la  dernière,  ne  pouvant,  par  l'ordre  des  concours,  l'appeler  la 
première,  ainsi  que  c'était  son  droit  de  reine.  On  la  nomme,  et  son  nom 
suffit  et  son  éloge  est  complet!  C'est  la  rose,  et  M.  Fontaine  fds,  dont  le 
nom  est  populaire  parmi  les  rosiéristes  de  l'Europe,  est  l'un  de  ses  jar- 
diniers favoris.  J'appelle  M.  Fontaine  à  recevoir  une  médaille  grand 
module. 

Aucun  concours  n'a  été  ouvert  cette  fois  aux  industries  accessoires  de 
l'Horticulture.  Leur  place  était  marquée  au  Palais  de  Cristal.  Ce  n'est 
donc  pas  à  titre  d'exposant  que  M.  Henri  Le  Clerc,  mécanicien,  nous  a 
apporté  le  jet-d'eau  qui  a  décoré  notre  exposition  d'une  manière  si 
gracieuse  et  si  utile  à  la  fraîcheur  de  l'atmosphère;  ce  n'est  pas  non 
plus  comme  récompense,  mais  comme  témoignage  de  satisfaction  pour 
son  empressement  à  nous  être  agréable  et  pour  son  désintéressement  , 
que  la  Société  lui  a  décerné  une  médaille  d'or  petit  module. 

A  son  nom  doit  être  associé  dans  nos  remerciments  le  nom  de  notre 
obligeant  collègue,  M.  Séguy,  directeur  des  eaux  de  Versailles,  pour  le 
concours  qu'il  a  bien  voulu  prêter  à  l'établissement  de  cette  vasque. 

Et  maintenant  que  j'ai  fait  ainsi  la  part  de  tous,  me  sera-t-il  permis  de 
songer  à  la  mienne  et  de  réclamer  aussi  une  récompense?  Je  vous  la 
demande,  et  elle  me  sera  douce,  elle  sera  complète  et  telle  que  je  l'ambi- 
tionne, si,  en  sortant  d'ici,  chacun  emporte  sous  l'impression  de  mes 
paroles,  un  motif,  s'il  aime  déjà  les  fleurs,  de  les  aimer  davantage,  s'il 
ne  les  connaît  pas  encore,  de  se  procurer  vite  ce  bonheur,  et  s'il  est 
convaincu  qu'aucune  jouissance  n'est  plus  pure  ,  plus  douce  ,  plus 
entière;  qu'aucune  ne  donne  plus  de  repos  à  l'esprit,  plus  de  calme  au 
cœur,  plus  d'élévation  à  la  pensée,  qu'aucune  enfin  ne  fait  mieux  com- 
prendre et  bénir  la  grandeur  et  la  bonté  de  Dieu  ! 


—  279  — 

NOTIONS  GÉNÉRALES 

DE  PALÉONTOLOGIE  VÉGÉTALE. 

Traduit  de  l'Allemand  du  DrM.  Seubert,  de  Carlsrufie  (1), 

Par  A. -P.  de  Borre,  candidat  en  Sciences  naturelles. 

(Suite  et  fin.)  (2), 

CHAPITRE  II. 

DU    CARACTÈRE    DE   LA    VÉGÉTATION    PENDANT    LES    DIFFÉRENTES    PÉRIODES 

TERRESTRES. 

11  résulte  déjà  manifestement  de  rénumération  qui  précède  des  formes 
les  plus  importantes  des  végétaux  fossiles  et  des  lieux  où  on  les  trouve, 
qu'ils  sont  distribués  avec  une  certaine  régularité  dans  les  diverses  for- 
mations ,  qui  représentent  les  grandes  époques  ou  périodes  du  dévelop- 
pement de  notre  planète.  Certains  genres  ou  certains  groupes  sont  plus 
particuliers  aux  formations  les  plus  anciennes,  certains  autres  aux  plus 
modernes,  et  constamment  nous  voyons  les  grandes  divisions  de  la  for- 
mation terrestre  différer  les  unes  des  autres  par  les  caractères  particu- 
liers de  leurs  débris  organiques;  on  peut  en  conclure  que  le  règne 
végétal ,  comme  le  règne  animal ,  a  dû  présenter  un  aspect  essentielle- 
ment différent  pendant  les  haltes  successives  du  développement  de  la 
terre.  Chaque  période  terrestre  doit  donc  posséder  aussi  son  caractère 
propre  de  végétation  ;  seulement  il  est  souvent  très-difficile  d'esquisser 
un  tableau  clair  de  la  végétation  primitive  d'après  ses  débris  relativement 
chétifs,  tant  à  cause  du  développement  très-restreint  du  règne  végétal 
sur  une  terre  couverte  alors  presque  en  totalité  par  les  eaux,  que  par 
suite  de  la  conservation  imparfaite  des  végétaux.  Nous  devons  par  con- 
séquent nous  borner  à  la  caractérisation  botanique  des  principaux 
groupes  de  formation,  en  passant  sous  silence  les  divisions  particulières, 
qui  résultent  de  la  Paléontologie  du  règne  animal. 

Si  nous  étudions  ces  diverses  périodes  principales  de  formation,  au 
point  de  vue  du  caractère  prépondérant  de  leur  végétation ,  en  tant  que 
celui-ci  s'est  conservé  à  l'état  fossile,  nous  y  trouvons  une  apparition 
successive  des  différentes  formes  de  plantes,  qui  indique  évidemment  un 
développement  graduel  du  règne  végétal  depuis  sa  première  origine  jus- 
qu'à la  période  terrestre  actuelle.  Les  formes  inférieures  des  Cryptogames 

(i)  Lehrbucb  der  gesaminlen  Pflanzenkuncle.  IVe  Abschnitl.  Slullgarl,  isri.~. 
(2)  Voy.  p.  212  ,  et  p.  244. 


—  280  — 

commencent  la  série,  les  cryptogames  vasculaires  leur  succèdent  immé- 
diatement, puis  viennent  les  Phanérogames  gymnospermes,  et  enfin  les 
Phanérogames  angiospermes,  jusqu'à  ce  que,  dans  les  formations  tertiaires 
les  plus  modernes,  la  végétation  présente  une  composition  générale  ana- 
logue à  celle  que  présente  le  monde  végétal  de  nos  jours.  Il  faut  cependant 
ensuite  faire  entrer  en  ligne  de  compte  les  influences  des  agents  extérieurs 
sur  la  vie  des  plantes,  pour  autant  que  nous  puissions  les  établir  pour  ces 
époques  éloignées,  en  les  déduisant  de  circonstances  diverses.  Dans  les 
premiers  temps  de  l'existence  de  notre  planète,  en  tant  que  nous  pouvons 
les  connaître,  une  portion  extrêmement  grande  de  la  surface  terrestre 
était  couverte  par  la  mer.  C'est  pourquoi  la  végétation  commence  néces- 
sairement par  des  Algues,  les  seules  plantes  marines  proprement  dites. 
Plus  tard,  un  plus  grand  nombre  de  terres  surgirent  du  sein  des  eaux; 
mais  on  doit  toujours  les  considérer  comme  des  îles  dispersées  sur  la 
vaste  surface  des  mers;  et,  dans  la  suite,  les  localités  marécageuses 
durent  encore  longtemps  prédominer,  même  dans  l'intérieur  des  conti- 
nents. Il  paraît  donc  naturel  que  les  Equisétacées  et  les  Fougères,  et  en 
général  toutes  les  plantes  qui  se  plaisent  encore  maintenant  dans  un  sol 
marécageux,  ou  du  moins  dans  une  atmosphère  imprégnée  d'humidité, 
se  trouvassent  en  majorité  dans  les  formations  anciennes  et  moyennes, 
tandis  que  les  formations  récentes  présentent  les  formes  variées  des 
plantes  terrestres  proprement  dites. 

Nous  adoptons  d'après  Brongniart  les  périodes  principales  suivantes 
de  la  végétation  dans  les  époques  géologiques  successives;  leur  ensemble 
constitue  le  tableau  du  développement  graduel  du  règne  végétal  sur  la 
terre. 

I.  —  RÈGNE  DES  CRYPTOGAMES  VASCULAIRES. 

1°    PÉRIODE    PRIMAIRE    OU    CARRONIFÈRE. 

Elle  comprend  les  plus  anciennes  couches  fossilifères  du  terrain  de 
transition,  où  se  trouvent  les  premiers  débris  végétaux,  notamment  des 
Algues  marines,  et  s'étend  jusqu'au  zechstein.  Mais  le  développement 
le  plus  remarquable  de  la  végétation  dans  cette  période,  se  montre  dans 
la  formation  carbonifère  proprement  dite  (1) ,  dont  les  masses  de 
houille,  comme  nous  l'avons  déjà  dit,  ont  indubitablement  une  origine 
végétale.  On  peut  donc  par  conséquent  en  appliquer  le  nom  à  toute  la 
période.  Toutefois,  comme  la  plupart  du  temps,  la  structure  végétale 


(1)  Le  système  bouiiler  de  notre  savant  inaîtic  ,  M.  Dûment.  {Note  du  Trad.) 


—  281  — 

est  détruite  dans  la  houille  elle-même,  ce  n'est  que  d'après  les  empreintes 
des  couches  de  grès  et  de  calcaire  qui  l'accompagnent,  que  nous  pou- 
vons conclure  avec  vraisemblance,  que  les  Sigillaria,  les  Syringoden- 
dron,  et  les  Fougères,  dont  les  feuilles  s'y  trouvent  si  abondamment, 
sont  en  grande  partie  les  plantes  dont  les  troncs  ligneux  se  sont  méta- 
morphosés en  houille.  Nous  pouvons  donc  caractériser  cette  période 
primaire  par  le  développement  prépondérant  des  Cryptogames  vascu- 
laires;  les  Gymnospermes  s'y  montrent  aussi  déjà,  mais  en  faible  pro- 
portion. 

II.  —  RÈGNE  DES  GYMNOSPERMES. 

2°  PÉRIODE  DU  GRÈS  BIGARRÉ  (1). 

Ici,  à  côté  des  Fougères,  encore  proportionnellement  nombreuses  et 
de  forme  caractéristique,  se  présentent  les  Dicotylédones  gymnospermes, 
notamment  de  nombreux  exemplaires  de  plusieurs  espèces  des  deux 
genres  Voltzia  et  Haidingera.  Mais  les  Cycadées  y  sont  encore  rares, 
tandis  qu'elles  paraissent  prendre  un  développement  prédominant  dans 
le  keuper  et  se  rattacher  aux  plantes  du  jura.  Pour  cette  raison ,  le 
keuper,  qui  autrement  est  regardé  comme  faisant  partie  du  trias,  doit, 
au  point  de  vue  botanique,  être  attribué  à  la  période  suivante. 

0°    PÉRIODE    JURASSIQUE. 

Cette  période  se  partage,  d'après  les  caractères  de  la  flore  fossile,  en 
trois  subdivisions  : 

a)  Epoque  de  végétation  du  keuper  (2). 

Elle  n'a  de  commun  avec  la  période  de  grès  bigarré  que  le  grand 
nombre  relatif  des  Fougères  et  des  Equisétacées,  sans  qu'il  y  ait  pour- 
tant concordance  dans  les  formes;  ce  sont  la  plupart  du  temps  des 
genres  qui  apparaissent  ici  pour  la  première  fois,  et  qui  doivent  se 
conserver  plus  ou  moins  à  partir  de  là  jusque  dans  les  formations  les 
plus  récentes.  A  côté  d'eux  se  présentent  les  Cycadées  dans  leur  plus 
grand  développement,  et  aussi  des  Conifères. 

b)  Epoque  de  végétation  du  lias  (3). 

Cette  époque  concorde  en  beaucoup  de  points  avec  la  précédente,  el 


(I)  Terrains  pénéen  et  triasique  (en  partie),  de  M.  Dtiraonl.         (Note  du  J'rud. 
{■2)  Système  kcuprique  de  M.  Dmnont. 
ô)  Système  liasique. 


—  282  -- 

toutes  deux  renferment  beaucoup  d'espèces  identiques  ou  très-voisines. 
Ce  sont  encore  les  Gymnospermes  qui  ont  la  prépondérance,  principa- 
lement les  Cycadées,  qui  sont  représentées  par  de  nombreuses  espèces 
des  genres  Zamites  et  Nilssonia. 

c)  Epoque  de  végétation  de  l'oolitlie  (1  ) . 

La  végétation  de  cette  époque  concorde  aussi,  dans  les  traits  princi- 
paux, avec  celle  de  la  précédente;  mais  elle  peut  se  caractériser  par  la 
plus  grande  ressemblance  de  ses  Cycadées,  appartenant  pour  la  plupart 
au  genre  Zamites,  avec  les  espèces  encore  vivantes,  et  par  la  plus  grande 
proportion  des  Conifères. 

Le  groupe  dit  Wealdien,  qui,  d'après  ses  autres  caractères  géolo- 
giques, se  rattache  à  la  formation  crétacée,  appartient,  d'après  sa  flore 
fossile,  à  la  période  jurassique,  les  Cycadées  et  les  Conifères,  c'est-à- 
dire  les  seules  Phanérogames  gymnospermes,  y  ayant  un  développement 
prépondérant,  tandis  qu'il  ne  s'y  rencontre  pas  encore  des  Dicotylé- 
dones angiospermes  (2). 

III.  —  RÈGNE  DES  ANGIOSPERMES. 

4°    PÉRIODE    CRÉTACÉE. 

Ici  se  présentent  pour  la  première  fois  les  Dicotylédones  angios- 
permes, qui  forment  présentement  les  trois  quarts  de  toute  la  végéta- 
tion. Cette  période  fait  en  quelque  sorte,  tant  par  sa  position  que  par  sa 
flore,  la  transition  des  couches  secondaires  aux  couches  tertiaires  sui- 
vantes. Elle  renferme  toutes  les  formes  caractéristiques  principales  des 
premières  :  les  Fucoïdées,  les  Fougères,  les  Cycadées  et  les  Conifères  ; 
et  déplus,  outre  un  petit  nombre  de  Monocotylédones,  diverses  Dicoty- 

(1)  Elle  correspond  aux  systèmes  portlandien,  oxfordien  et  balhonien  de  M.  l)u- 
mont. 

(2)  Les  dépôts  lacustres  et  fluviatiles  dont  il  s'agit  ici,  et  qui  sont  situés  dans  le 
sud-est  de  l'Angleterre  ,  sont  placés  par  M.  Dumonl  à  la  partie  inférieure  de  son  sys- 
tème aachénien,  et  doivent  commencer  la  série  des  terrains  crétacés.  Leur  nature 
géologique  et  leur  faune  ne  laissent  aucun  doute  à  cet  égard.  Quant  aux  Cycadées  et 
aux  Conifères  qu'on  y  rencontre,  ne  faudrait-il  pas  les  regarder  comme  des  contem- 
porains des  derniers  instants  de  la  période  jurassique,  qui  auraient  été  engloutis  dans 
des  dépôts  crétacés  lors  des  révolutions  qui  ont  dû  marquer  la  fin  de  l'époque  du 
jura?  L'absence  de  Dicotylédones  angiospermes  s'expliquerait  aussi  par  la  circon- 
stance que  la  création  végétale  de  l'époque  crétacée  ne  s'était  pas  développée,  aucune 
terre  de  formation  crétacée  n'ayant  encore  surgi  au  sein  de  l'Océan.  (Note  du  Trad.] 


—  283  — 

lédones  très-bien  caractérisées,  comme  par  exemple  le  genre  Credncria, 
qui  se  trouve  en  beaucoup  d'endroits  dans  le  quadersandstein.  Les  Dico- 
tylédones gymnospermes  et  angiospermes  y  sont  à  peu  près  en  nombre 
égal.  Le  dépôt  le  plus  moderne  de  la  formation  crétacée  est  celui  qu'on 
nomme  Fucoidensandstein ,  et  qui  renferme  en  grande  quantité  des 
Algues  marines,  surtout  du  genre  Chondrites. 

5°    PÉRIODE    TERTIAIRE. 

La  flore  tertiaire  se  rattache  en  général  dans  ses  parties  les  plus  mo- 
dernes, à  celle  qui  couvre  actuellement  la  surface  de  la  terre.  Elle  est 
caractérisée  par  la  prédominance  des  Dicotylédones  angiospermes,  ainsi 
que  des  Monocotylédones,et  en  particulier  des  Palmiers.  Elle sedistingue 
de  la  flore  des  couches  secondaires  adjacentes,  notamment  de  celle  de  la 
craie,  en  ce  que  les  Gymnospermes  y  deviennent  moins  importantes,  et 
que  leurs  formes  se  rapprochent  plus  des  formes  actuelles  des  climats 
tempérés;  c'est  ainsi  que  les  Cycadées  manquent  entièrement,  du  moins 
en  Europe,  dans  les  sédiments  tertiaires.  Nous  avons  déjà  dit  précédem- 
ment, que  les  lignites  qui  se  présentent  dans  ces  terrains  avec  une 
épaisseur  considérable,  sont  composés  d'amas  de  bois  de  Conifères  plus 
ou  moins  transformé. 

Par  une  comparaison  plus  rigoureuse  des  formations  tertiaires  parti- 
culières, d'après  les  débris  organiques  qu'elles  renferment  en  abon- 
dance, on  peut  les  partager  en  trois  grandes  subdivisions  :  les  dépôts 
anciens  (éocènes) ,  les  dépôts  moyens  (miocènes),  et  les  dépôts  mo- 
dernes (1)  (pliocènes).La  première  de  ces  époques  se  caractérise  botani- 
quement  par  la  prédominance  des  Algues  et  autres  plantes  marines,  et 
par  l'existence  d'un  très-petit  nombre  d'espèces  de  Palmiers.  Les  couches 
moyennes  offrent  une  prédominance  des  Palmiers  et  des  autres  familles 
exotiques  ;  enfin  dans  les  couches  modernes  (pliocènes),  les  Monocoty- 
lédones  sont  en  diminution,  et  les  Palmiers  manquent  complètement; 
la  végétation  présente  une  grande  analogie  avec  celle  des  contrées  tem- 
pérées de  l'Europe  et  de  l'Amérique  du  Nord. 

Résumé.  — En  général,  la  flore  fossile,  comparée  avec  la  flore  ac- 
tuelle, offre  comme  caractère  particulier  la  prédominance  des  Crypto- 
games vasculaires  et  des  Dicotylédones  gymnospermes,  tandis  que  les 
Thallophytes  et  les  Dicotylédones  polypétales  existaient  dans  un  rapport 


(1)  L'expression  modernes  a  ici  un  sens  tout  relatif.  11  no  s'agit  point  ici  des  ter- 
rains quaternaire!--,  dont  la  flore  ne  diffère  pas,  pour  les  diverses  contrées,  de  la  flore 
contemporaine.  [Noie  du  Trad.) 


—  284  — 

à  peu  près  égal  a  ce  qui  a  lieu  de  nos  jours.  Les  Mousses  au  contraire, 
les  Monocotylédones,  et  surtout  les  Dicotylédones  monopétales  se  pré- 
sentent parmi  les  plantes  fossiles  dans  une  proportion  beaucoup  plus 
faible  que  dans  la  flore  du  monde  actuel.  Si,  en  général,  on  attribue 
souvent  aux  plantes,  comme  aux  animaux  du  monde  ancien,  des  dimen- 
sions gigantesques,  cela  n'est  vrai  que  jusqu'à  un  certain  point,  en  ce 
que  certaines  formes  de  plantes,  comme  les  Equisétacées  et  les  Lycopo- 
diacées,  se  présentent  dans  les  plus  anciennes  formations  avec  un  déve- 
loppement arborescent,  tandis  que,  dans  la  création  de  nos  jours,  ce  ne 
sont  que  des  herbes,  et  en  ce  que,  chez  les  Fougères  du  monde  pri- 
mitif, les  espèces  arborescentes  l'emportent  également.  Le  déploiement 
extraordinaire  de  matière  végétale  qui  se  voit  dans  les  dépôts  de  houille, 
indique  peut-être  moins  une  végétation  colossale  et  luxuriante,  due  à  la 
grande  quantité  d'acide  carbonique  contenue  dans  l'atmosphère  à  ces 
époques  terrestres  reculées,  qu'un  long  espace  de  temps  pendant  lequel 
ces  amas  se  sont  formés  peu  à  peu.  Enfin,  la  comparaison  des  caractères 
de  la  végétation  des  formations  anciennes  et  moyennes  avec  ceux  de  la 
végétation  des  formations  modernes  et  du  monde  actuel,  démontre  que, 
plus  nous  nous  reportons  en  arrière  dans  le  temps,  plus  la  végétation 
semble  analogue  à  celle  des  régions  tropicales;  d'où  nous  pouvons  con- 
clure qu'il  existait  autrefois  une  température  plus  élevée,  qui  s'est 
abaissée  peu  à  peu.  La  végétation  se  montre  aussi  beaucoup  plus  unifor- 
mément répartie  à  la  surface  de  la  terre  dans  les  périodes  antérieures 
que  de  nos  jours;  la  différence  de  climat  des  diverses  contrées,  et  la  divi- 
sion correspondante  de  la  végétation  d'une  même  époque  en  flores  par- 
ticulières, apparaît  pour  la  première  fois  dans  la  période  tertiaire,  et  ne 
se  montre  complètement  dessinée  que  dans  le  monde  actuel. 


Tokav  dos  jardins  ou  Fondant    roux 


—  285  — 

JARDIN  FRUITIER. 


RAISIN  TOKAY  DES  JARDINS. 

(Chasselas  Tokay  des  Jardins,  Fondant  roux.)  Par  M.  L.  de  Bavay. 

Le  vin  de  Tokay  (1)  est  si  renomme  des  gourmets,  que  partout  on 
désire  posséder  le  cépage  qui  le  produit.  On  désigne  généralement, 
hors  de  Hongrie,  sous  le  nom  de  Vin  de  Tokay,  tous  les  précieux  vins 
de  liqueur  des  crus  les  plus  estimés  de  l'Hegyallya,  qui  se  récoltent  non- 
seulement  dans  cette  contrée,  mais  plus  spécialement  sur  le  coteau  de 
Mezès-Mali ,  à  Tokay  (2).  Bien  que  récoltés  entre  les  48e  et  49e  degrés 
de  latitude  septentrionale,  ces  vins  passent  pour  les  meilleurs  de  l'Eu- 
rope. Toutefois,  cette  opinion  n'est  pas  admise  en  France,  où  l'on 
oppose  aux  vins  muscats  de  l'Hegyallya  les  produits  les  plus  fins  de  la 
Côte-d'Or  et  les  délicieux  muscats  des  départements  méridionaux.  La 
pomologie  n'a  pas  à  intervenir  dans  ce  débat,  que  nous  devons  nous 
borner  à  mentionner. 

Rien  n'indique  que  le  raisin  qui  nous  occupe  soit  originaire  de 
Hongrie.  Il  existe  beaucoup  de  cépages  dans  les  vignobles  de  ee  terri- 
toire ;  et  aucun  n'y  est  connu  sous  le  nom  de  Tokay;  selon  M.  le  comte 
Odart,  il  n'y  est  pas  même  cultivé.  Cette  variété,  dont  on  ignore  l'ori- 
gine, a  reçu  dans  la  Collection  des  raisins  d'Angers  la  dénomination 
de  Tokay  des  jardins.  Lelieur,  dans  sa  Pomone,  cite  un  Tokay  dans  le 
département  des  Hautes-Pyrénées,  mais  c'est  un  raisin  noir.  Celui  qui 
fait  l'objet  de  cet  article,  ne  proviendrait-il  pas  du  département  du 
Haut-Rhin,  où  il  existe  depuis  longtemps?  11  est  à  présumer  qu'il  y 
aura  été  importé  de  la  Suisse,  où  l'on  estime  le  vin  qu'il  produit.  Il  est 
connu  dans  ce  pays  sous  le  nom  de  Fondant  roux. 

L'arbre  est  vigoureux  et  productif.  Les  sarments  sont  gros,  de  cou- 
leur cannelle  verdàtre,  à  mérithalles  espacés  de  10  centimètres.  Les 
feuilles  sont  grandes,  à  cinq  lobes  légèrement  dentés,  d'un  vert  ordi- 
naire. Le  pédoncule  est  rouge,  cylindrique,  long  de  12  centimètres. 
Les  grappes  sont  grosses  ou  moyennes.  Les  grains  sont  moyens,  ronds, 
peu  serrés;  leur  couleur  est  rose  clair,  un  peu  jaunissant;  ils  sont  demi- 
cassants  et  d'une  saveur  fort  analogue  à  celle  du  Chasselas  de  Fontaine- 
bleau. 

Cette  variété,  qui  est  exposée  chez  nous  en  plein  midi,  mûrit  vers  le 
15  septembre.  C'est  un  raisin  de  table  très-estimé,  et  dans  les  contrées 
où  l'on  peut  cultiver  la  vigne  en  vue  de  la  vinification,  les  produits  qu'il 
donne  ne  sont  pas  à  dédaigner. 

(1)  Bourg  de  Hongrie,  au  pied  du  massif  de  collines  appelé  montagne  de  Tokay, 
;i  GO  kilomètres  de  Presbourg. 

(2)  Petite  chaîne  de  collines  de  la  Transylvanie,  formant  l'extrémité  d'un  contre- 
fort des  Karpathes,  qui  va  s'abaissant  jusqu'à  la  Theiss,  le  long  de  la  rive  droite  du 
Bodroah. 


28U  - 


HISTOIRE  DES  PLANTES  UTILES. 


LES  FÉCULES  D'ARROW-ROOT. 

Le  nom  cVArrow-root ,  qui  signifie  mot  à  mot  racine  à  flèches,  vient 
de  l'usage  que  font  les  Indiens  d'Amérique  du  véritable  Arrow-root;  ils 
pensent  que  c'est  le  meilleur  antidote  pour  les  blessures  des  flèches  em- 
poisonnées. C'est  une  excellente  fécule  employée  surtout  pour  nourrir 
les  convalescents  et  les  vieillards  et  pour  faire  de  fort  bonnes  pâtisseries. 
On  importe  annuellement  en  Angleterre  environ  400  tonnes  des  diffé- 
rentes sortes   d'Arrow-root.   Mais  plusieurs  fécules  sont  confondues 


Fig.  70.  Maranla  arundinacea. 

dans  le  commerce  sous  ce  nom.  Aux  Indes  occidentales  l'Arrow-root 
est  le  produit  du  Maranta  arundinacea  (Fig.  70  )  de  la  famille  des  Ma- 
rantacées.  C'est  une  fécule  d'une  pureté  remarquable,  qui  se  présente 
sous  la  forme  d'une  fine  poudre  blanche  et  brillante,  mêlée  à  de  petites 
masses,  aisément  friables  entre  les  doigts.  Au  microscope  on  reconnaît 
dans  cette  poudre  l'organisation  des  granules  lamelles  de  fécule;  on  voit 
des  couches  concentriques  très-minces,  et  successivement  un  peu  pins 


°287 


larges  autour  d'un  point  qui  occupe  le  sommet  du  grain  et  qu'on  a 
nommé  hile.  Cette  fécule  ressemble  beaucoup  à  celle  de  la  Patate,  mais 
elle  est  d'un  blanc  jaunâtre  au  lieu  d'être  bleuâtre,  et  les  granules  sont 
moins  translucides.  L'Arrow-root  ne  s'extrait  pas,  comme  son  nom 
pourrait  le  faire  supposer,  d'une  racine,  mais  des  tiges  souterraines  ou 
rhizomes  du  Maranta  arundinacea.  Ces  rhizomes  sont  écailleux ,  blancs 
et  contiennent  beaucoup  de  fécule;  ils  se  forment  sous  terre  et  si  on  les 
laisse  végéter  ils  donnent  naissance  à  une  nouvelle  plante  qui  absorbe 
à  son  profit  la  fécule  déposée  dans  le  rhizome.  Pour  en  extraire  PÀrrow- 
root  on  réduit  les  rhizomes  en  pulpe  dans  des  mortiers  de  bois,  on  lave 
la  masse  à  l'eau  froide  et  le  liquide  laiteux  que  l'on  obtient  est  passé  à 
travers  de  fins  tamis  de  crins  puis  laissé  en  repos;  il  se  fait  un  dépôt, 
blanc    qu'on  lave    de  nouveau   à  l'eau   pure  et  qu'on    laisse  ensuite 

se  précipiter;  enfin  on  décante 
'eau  et  on  fait  sécher  au  soleil 
e  dépôt  blanc,  qui  est  alors 
l'Arrow-root  du  commerce.  Le 
plus  estimé  est  celui  des  Ber- 
mudes. 

L'Arrow-root  des  Indes  Orien- 
tales s'extrait  du  Curcuma  angus- 
tifolia  (fig.  71),  de  la  famille  des 
Zingibéracées  ;  cette  plante  pro- 
duit de  petits  rhizomes  dans 
lesquels  il  existe  une  substance 
colorée  et  acre,  et  qui  donne 
naissance  sur  les  côtés  à  un 
grand  nombre  de  prolonge- 
ments fibreux.  La  plupart  de 
ces  derniers  portent  de  petits 
tubercules  arrondis,  et  entière- 
ment dénués  de  la  saveur,  de 
l'odeur  et  de  la  couleur  du  rhi- 
zome. Ces  tubercules,  qui  ren- 
ferment une  grande  quantité  de 
fécule,  sont  recueillis  et  soumis 
aumèmetraitementque  l'Arrow- 
root  des  Indes- Orientales;  on 
en  obtient  une  fécule  fine  et 
blanche  mais  différente  de  la 
première  par  une  apparence  plus 
opaque  et  l'absence  de  particules 
solides  lorsqu'on  la  triture  entre 


Fie.  71.  Curcuma  augnstifoiia. 


288  — 


les  doigts.  On  connaît  une  autre  variété  d'Arrow-root,  un  peu  brunâtre 
et  provenant  probablement  d'une  autre  espèce  de  Curcuma. 
L'Arrow-root  du  Brésil  est  le  produit  des  racines  du  M anihotutilissima, 

espèce  d'Euphorbiacée  (fig.  72) 
désignée  aussi  sous  le  nom  de 
Janipha  manihot.  C'est  un  ar- 
buste de  vingt  à  trente  pieds  et 
à  racine  grosse  et  renflée,  dont 
le  suc,  comme  celui  de  toute  la 
plante,  possède  des  propriétés 
extrêmement  vénéneuses;  mais 
ce  poison  est  rendu  absolument 
inoffensif  par  la  chaleur.  Ces 
racines,  qui  pèsent  souvent  de 
25  à  30  livres,  sont  râpées  à 
l'état  frais  ;  on  en  extrait  le  suc, 
puis  la  pulpe  est  parfaitement 
lavée.  Le  suc,  quoique  étant  un 
violent  poison,  devient,  après 
avoir  été  bouilli,  un  délicieux 
assaisonnement  nommé  cassa- 
ripe  et  très-estimé  des  gour- 
mets. Après  que  la  pulpe  a  été 
lavée  à  l'eau  froide,  la  fécule  se 
sépare  à  un  grand  degré  de  pureté  et  on  la  èche  au  soleil;  on  obtient, 
ainsi  une  fine  poudre  blanche,  appelée  Arrow-root  du  Brésil,  dans  le 
commerce  et  dans  sa  patrie,  connue  sous  les  noms  de  moussache  et  de 
cipipa. 

Enfin  PArrow-root  de  Tahiti  est  la  fécule  du  Tacca  pinnalifida,  origi- 
naire des  îles  Molluques  et  des  îles  de  l'Océan  pacifique,  et  cultivée  dans 
différentes  contrées  de  la  Chine  et  des  Indes.  Ses  racines  acquièrent  un 
grand  développement  par  la  culture,  et  servent  d'aliment  en  Chine  et 
en  Cochinchine,  quoique  d'un  goût  très-amer.  Les  naturels  convertis  de 
Tahiti  préparent,  sous  la  direction  des  missionnaires  ,  une  sorte 
d'Arrow-root  avec  ces  racines ,  encore  fort  peu  répandue  dans  le 
commerce. 


Fin.  72.  Slaiiikol    ulilissinu. 


L_8  .  Scutellana   splendens  ,  Lk  ,  Kl,  cl  Oit.  ()_  12  .  Oxalis  0  il  oui. s  ,  Kl 


—  289  — 

HORTICULTURE. 


SCUTELLARIA  SPLENDENS,  LINK,  KLOTZSCH  ET  OTTO. 

SCUTELLAIRE   OU    TOQUE    BRILLANTE. 

Famille  des  Labiées.  —  Didynamie,  Gymmospermie. 

Par  M.  Edouard  Morren. 

Trib.  Scutellarinées,  Benth.,  genre   Scutellaria  L.  Sect.  Heteran- 
thesia,  Benth. 


SCUTELLARIA  SPLENDENS.  —  Can- 

libusadscendentibus,ramosis,pubescenti- 
bus  ;  foliis  peliolatis  late  cordato-ovalis  , 
obtusis  vel  vix  acuminatis,  rugulosis,  de- 
flexis,  laele-viridibus,  grosse  dentatis, 
utrinque  villoso-  pubescentibns  ,  flora- 
libus  parvis,  sub-ovatis,  utrinque  alte- 
nualis,  e  viridi  violaceis,  glanduloso  pu- 
berulis,  deciduis  ;  raceniis  elongatis, 
simplicibus  calycibusque  violaceis  ,  glan- 
duloso-puberulis;  floribus  sparsis;  corol- 
lis  saturate-cinnabarinis ,  puberulis,  ca- 
lyce  sextuplo  longioribus ,  tubo  elongato 
tenui,  lobis  abbreviatis  ;  antheris  giabris, 
acheniis  minutissime  echinulatis. 


Perennis  herbacea,  suffrutex. 

In  Mexici  prov.  Vera-Cruz. 

Icon.  plant,  rar.  Hort.  bot.  Berol.  p. 
51, 1. 13. 

Paxlon.  Mag.  of  Bot.  X,  99. 

Ann.  de  Flore  et  Pomone,  (Série  2.)  II, 
n°2,  nov.  1843,  p.  52. 

DC  Prodr.  XII,  415. 

Walpers.  Repert.  Bot.  syst.  III,  4844- 
45,  p.  749. 

Perilomiacordifolia,  Chain,  et  Sehlechi. 
Linnaea  6,  p.  574. 

S.  cordifolia,  Bot.  mag.  t.  4290. 


Cette  jolie  Scutellaire  a  les  fleurs  d'un  rouge  écaiiate  vif,  très-nom- 
breuses et  groupées  en  longs  racèmes.  Elle  vient  du  Mexique,  demande 
en  hiver  une  température  de  8  à  10°  R.,  un  sol  sec  et  une  situation 
contre  les  vitres  dans  la  serre.  En  été  on  peut  la  planter  en  plein  air 
comme  quelques  Salvia  et  Pentstemon  du  Mexique.  Elle  aime  un  sol 
formé  de  terreau  de  feuilles  bien  consommé  et  mélangé  de  sable;  elle 
fleurit  en  juin  et  juillet. 

Le  genre  Scutellaria,  déjà  très-nombreux,  s'enrichit  encore  chaque 
jour  par  des  introductions  nouvelles.  Nous  présenterons  prochainement 
à  nos  lecteurs  quelques  nouvelles  espèces  importées  en  Europe  par  le 
célèbre  horticulteur  de  Bruxelles, M.  Linden,  directeur  du  jardin  zoolo- 
gique. Mais  par  suite  de  ces  nouvelles  acquisitions,  une  certaine  con- 
fusion ne  saurait  manquer  de  venir  embrouiller  la  nomenclature  du 
genre,  surtout  la  section  des  Heterantliesia  (Benth.) ,  à  laquelle  la  plu- 
part appartiennent.  Nous  pensons  donc  devoir  publier  la  description 
détaillée  de  la  toque  brillante. 


BELG.    HORT.    T.    VI. 


25 


—  290  — 

La  tige  est  vivace,  presque  herbacée,  ordinairement  ramifiée  dès  la 
base,  ascendante,  quadrilatérale  à  angles  obtus,  légèrement  pubescente  , 
d'une  couleur  verte  passant  au  violet;  elle  atteint  la  hauteur  de  1  1/2 
pied.  Feuilles  opposées,  longuement  pétiolées,  ovales  cordées,  brus- 
quement amincies,  légèrement  pubescentes  sur  les  deux  faces,  à  bords 
grossièrement  dentés,  rugueuses,  membraneuses,  déclinées,  longues 
de  2-3  pouces,  larges  de  1  1/2  à  2  pouces.  Pétioles  divergents,  très-lé- 
gèrement pubescents,  arrondis,  canilaculés  supérieurement,  d'un  vert 
violacé,  longs  d'un  pouce.  Racèmes  pouvant  atteindre  un  pied  de 
hauteur,  presque  ronds,  striés  longitudinalement  et  de  même  que  les 
calices  etles  pédoncules  d'un  brun  violacé  et  pubescents.  Fleurs  pédoncu- 
lées,  éparses,mais  à  l'état  de  bouton,  surtout  vers  la  pointe  elles  forment 
des  verticilles  de  quatre  fleurs  qui  se  déforment  par  le  développement 
de  l'axe;  bractées  caduques,  longues  de  deux  lignes,  ovales  acuminées, 
légèrement  amincies  à  la  base,  dentées  en  scie,  pubescentes  glandu- 
leuses; les  deux  inférieures  seules  font  exception  par  leur  constance. 
Le  calice  est  long  de  deux  lignes,  campanule,  bilabié;  à  lèvres  entières, 
fermées  après  la  floraison  ;  sur  le  dos  de  la  lèvre  supérieure  on  trouve  un 
appendice  (scutellum)  en  forme  d'écaillé,  qui  se  dresse  après  la  floraison 
et,  qui  donne  au  calice,  qui  a  les  lèvres  étroitement  fermées  ,  la  forme 
d'un  casque  à  visière  abaissée.  Corolle  ringente,  d'un  rouge  de  cinabre 
vif,  légèrement  pubescente,  longue  d'un  pouce,  à  tube  légèrement 
courbe,  cylindrique  dans  la  moitié  inférieure,  aminci  puis  élargi  vers  les 
lèvres  qui  sont  triangulaires  obtuses;  la  lèvre  supérieure  est  trilobée, 
à  lobe  moyen  fortement  voûté,  tronqué,  à  bord  dentelé,  à  lobes  laté- 
raux de  lamême  longueur,  repliés  en  dedans  ;  la  lèvre  inférieure  est  plus 
longue,  courbée  en  bas,  entière,  tronquée  en  avant,  glabre  supérieure- 
ment, de  la  même  couleur  que  le  reste  de  la  corolle.  Etamines  au  nombre 
de  quatre,  blanches,  insérées  sur  le  côté  supérieur  de  la  corolle,  les 
inférieures  les  plus  longues  et  monoloculaires,  à  filets  présentant  sur  la 
face  inférieure  et  vers  le  milieu  une  série  de  poils  blancs  assez  longs;  an- 
thères presque  parallèles,  attachées  à  un  connectif  saillant  et  munies  de  5 
à  8glandes  lenticulaires  d'unblancbrillant,degrandeur inégale, s'ouvrant 
longitudinalement,  à  sutures  glabres.  Pollen  elliptique,  présentant  un 
sillon.  Ovaire quadriloculaire,  à  carpelles  très-légèrement  velus,  atta- 
chés latéralement  sur  un  gynophore,  oblong,  tronqué,  épais  à  la  base. 
Style  blanc,  filiforme,  caduc,  un  peu  courbe,  de  la  longueur  des 
etamines,  bifide  à  la  pointe,  à  division  supérieure  plus  courte. 

Cette  espèce  présente  beaucoup  de  ressemblance  avec  les  S.  longiflora 
Ben  th.,  S.  multiflora  Kcnih.,  S.  atriplicifolia  Ben  th.,  S.  coccinea  Humb. 
et  Kth.,  S.  incarnata  Vent,  et  Perilonia  ocymoïdes  Humb.  et  Kth. 


—  291  — 

Mais  le  S.  longifolia  a  des  feuilles  et  des  calices  glabres  ;  le  S.  multi- 
flora  a  les  fleurs  plus  courtes  et  des  feuilles  glabres  ;  le  S.  triplicifolia 
a  des  feuilles  presque  entières,  glabres,  et  des  fleurs  à  peine  pubes- 
centes.  Les  feuilles  sont  tronquées,  et,  de  même  que  les  fleurs,  sont 
dépourvues  de  poils  dans  le  S.  coccinea;  les  tiges  du  5.  incarnata  sont 
très-rameuses,  et  ses  fleurs  sont  d'un  rouge  brun  foncé;  enfin  \ePeri- 
lonia  ocymoïdes  ne  diffère  pas  seulement  par  la  forme  du  calice,  de  la 
corolle  et  des  fruits,  mais  aussi  par  des  feuilles  plus  petites  et  glabres 
à  la  face  supérieure. 

Explication  des  figures  de  la  planche  73. 

1  Feuilles  et  racème,  grandeur  naturelle. 

2  Une  fleur  de  grandeur  naturelle. 

3  Corolle  fendue  longitudinalemenl  pour  monlrer  la  forme  du  limbe  et  l'insertion 
des  étamines. 

4  Une  des  petites  étamines. 

5  Une  des  longues  étamines,  grossie  environ  six  fois. 
G  Un  grain  de  pollen. 

7  Le  même  qui  a  été  humidifié  (grossissem.  de  140). 

8  Gynophore,  carpelles  et  style  à  un  grossissement  de  six  fois. 


OXALIS  OTTONIS  KL. 

OXALIDE    DE    OTTO. 

Famille  des  Oxalidées.  —  Décaxdrie,  Pentagynie. 
Par  M.  Edouard  Morren. 

Oxalis  Ottonis  Kl.  Acaulis,  bulbosa;  bulbo  simplici,  basi  radiées  plures  tenues 
emiltente  ;  foliisternatis,  longe  petiolatis,  foliolis  latissime-obcordato  bilobis,  subtus 
margineque  sparsim  pilosis ,  inter  somnum  conduplicatis ,  unilaterali-pendulis  ; 
scapo  unifloro,  sparsim  piloso,  foliis  longiore,  supra  médium  bibracteolato,  ad  basim 
articulato,  post  anthesin  geniculato-procumbente,  sepalis  linearibus,  obtusis,  mar- 
gine  pubescentibus  ,  dorso  longitudinaliter  fusco-striatis,  corolla  saturale-aurea, 
nitente  ;  filamentis  edentulis ,  basi  nudis ,  stylisque  pilosis  ;  ovarii  loculis 
6-9    ovulatis. 

Klotzsch  in  Otto  und  Cietrich  Allgem.  Gartenzeitung  VII,  p.  313. 

Icon.  plant,  rar.  hort.  Bot.  Berolensis,  p.  8,  lab.  4. 

Les  Oxalis  américains  ont  trouvé,  dans  le  professeur  Zucarini,  de 
Munich,  un  si  excellent  monographe  que,  par  ses  travaux,  la  plupart  des 
doutes  sur  l'identité  des  espèces  ont  été  résolus,  et  qu'il  est  facile  de 
déterminer  celles  qui  ont  été  décrites.  Il  les  divise  en  espèces  acaules  et 
en  caulescentes;  les  acaules,  auxquelles  appartient  l'Oxalis  Ottonis,  sont 


—  292  — 

subdivisées  en  simplieifeuillées,  en  trifoliolées  et  en  palmatifoliolées. 
Les  trifoliolées  se  partagent  enfin  en  espèces  bulbeuses,  munies  de  tuber- 
cules, et  en  espèces  à  racines  articulées. 

Les  bulbes  de  ce  petit  Oxalis  se  sont  trouvées  par  hasard  entre  des 
plantes  et  de  la  terre  que  le  jardin  botanique  de  Berlin  reçut,  en  1839, 
de  Cuba  par  M.  Edouard  Otto.  A  la  même  époque,  on  le  cultivait  à  Bir- 
mingham sous  le  nom  de  O.geniculata.  C'est  une  charmante  plante,  pré- 
cieuse pour  tous  les  jardins  d'amateurs:  elle  est  basse,  touffue,  et  même 
les  plus  petites  bulbes  se  couvrent,  à  l'automne,  d'un  très-grand  nombre 
de  fleurs  d'un  effet  agréable  par  leur  belle  couleur  jaune  d'or  et  leur 
forme  élégante.  Nous  l'avons  remarquée,  depuis  quelques  années,  dans 
les  jardins  de  M.  Henrard,  démonstrateur  du  cours  d'agriculture  à 
l'Université  de  Liège,  et  pépiniériste  à  Sainte- Walburge,  près  Liège  ;  la 
floraison  a  lieu  en  septembre,  et  le  feuillage  est  moins  fugace  que  celui 
de  la  plupart  des  espèces  américaines,  car  la  végétation  se  continue  sans 
interruption  pendant  tout  l'hiver.  On  place  les  bulbes  dans  de  petits 
pots,  en  plein  air,  au  printemps  ;  elles  restent  en  repos  pendant  l'été, 
poussent  à  l'automne  des  feuilles  longues  de  trois  pouces,  composées  de 
trois  folioles  chacune,  divisées  en  deux  lobes  profonds,  et  des  fleurs  d'un 
jaune  brillant  et  larges  de  six  à  sept  lignes.  A  l'approche  des  froids ,  on 
doit  rentrer  les  pots  en  serre  froide  ou  sous  châssis. 

Description.  La  tige  souterraine  consiste  en  une  bulbe  ronde  de  la 
grosseur  d'une  noisette  etémettantà  la  base  quelques  radicelles  minces. 
Elle  est  recouverte  d'une  peau  brune  et  sèche,  et  consiste  en  écailles 
concentriques,  blanches,  charnues,  pointues  lancéolées.  Les  feuilles  pa- 
raissent par  fascicules  avec  les  fleurs,  immédiatement  du  sommet  de  la 
bulbe;  elles  sont  ternées,leur  pétiole  est  filiforme,  long  de  trois  pouces, 
un  peu  pubescent  et  légèrement  élargi  en  gaine  à  la  base  {stipulée,  petiolo 
adnatce)  ;  les  folioles  sont  presque  sessiles,  très-larges,  courtes,  profon- 
dément obcordées,  lisses  et  glabres  sur  la  face  supérieure,  poilues  çà 
et  là  sur  la  face  inférieure,  très-finement  ponctuées,  de  5  à  7  lignes  de 
large,  longues  de  2  i/s-3  lignes.  Les  lobes  sont  arrondis,  obovés,  réunis 
jusqu'à  la  moitié  de  leur  longueur  par  une  nervure  simple,  transparente 
et  saillante  sur  la  face  inférieure.  Les  folioles  ne  peuvent  pas,  à  cause  de 
leur  grande  largeur,  être  placées  l'une  à  côté  de  l'autre,  comme  dans  les 
autres  Oxalis;  mais  la  foliole  impaire  se  trouve  dans  une  situation  hori- 
zontale et  étalée  avec  les  deux  lobes  extérieurs  des  folioles  paires,  tandis 
que  les  deux  lobes  intérieurs  de  ces  dernières  sont  dressés  et  forment 
presque  un  angle  droit  avec  les  autres;  dans  l'état  de  sommeil,  les 
deux  lobes  des  folioles  se  rapprochent  par  la  face  supérieure  et  pendent 
toutes  d'un  seul  côté.  Chaque  hampe  ne  porte  qu'une  seule  fleur;  elles 


—  393  — 

sont  longues  de  cinq  pouces,  deux  fois  articulées,  pubescentes  ;  l'arti- 
culation inférieure  se  trouve  à  6-8  lignes  au-dessus  de  la  base  :  elle 
est  très-renflée  et  la  hampe  se  courbe,  après  la  floraison,  au  point  de 
se  coucher  contre  la  terre.  La  seconde  articulation  est  placée  au-dessus 
du  milieu  :  elle  porte  deux  bractées  opposées,  linéaires,  sessiles,  longues 
de  1  i/a  ligne  et  un  peu  poilues.  Calice  à  cinq  divisions,  étroitement 
appliqué  contre  la  fleur,  à  folioles  linéaires  obtuses,  légèrement  poilues 
sur  les  bords,  longues  de  2  1/2  lignes,  larges  de  1/2  et  présentant  une 
large  nervure  médiane  brune.  La  corolle  est  d'un  jaune  d'or,  brillante, 
étalée,  de  6  à  7  lignes  de  diamètre,  à  tube  cyathiforme;  elle  est  formée  de 
cinq  pétales,  cohérents  à  la  base,  tordus  dans  le  bouton, entiers,  presque 
orbiculaires,  courlement  onguiculés;  l'origine  du  limbe  porte,  jusqu'à 
la  moitié,  des  nervures  très-fines  et  rouges;  au  sommet,  ils  sont  imbri- 
qués, larges  de  4  à  5  lignes,  longs  de  6  à  7.  Il  y  a  dix  étamines  mona- 
delphes  à  la  base,  dont  cinq  alternativement  deux  fois  plus  courtes  que 
celles  qui  sont  opposées  aux  sépales.  Anthères  biloculaires,  jaunes, 
ovales,  obtuses  aux  deux  bouts ,  déhiscentes  par  deux  stries  longitudi- 
nales, insérées  latéralement,  courbées  vers  l'intérieur  dans  le  bouton, 
horizontales  à  l'ouverture  de  la  fleur  et  plus  tard  tournées  vers  l'exté- 
rieur. Pollen  à  grains  triangulaires  obtus  lenticulaires;  filets  subulés, 
nus,  les  plus  longs  poilus,  mesurant  trois  lignes;  les  plus  courts 
glabres,  longs  d'une  ligne.  Ovaire  allongé,  pentagone,  obtus,  glabre,  se 
prolongeant  à  la  pointe  en  5  styles,  quinquéloculaire,  à  loges  6  à  9  ovu- 
lées.  Ovules  pendants,  droits;  5  styles  subulés,  divergents,  légèrement 
velus  au  côté  extérieur,  d'un  tiers  plus  courts  que  les  plus  longues  éta- 
mines; stigmates  capités,  pénicillés,  jaunes. 

La  seule  espèce  voisine  de  YO.  Ottonis  Kl.  est  YO.  eriorhiza  zuccar, 
qui  se  distingue  par  une  bulbe  velue,  par  l'absence  de  l'articulation  infé- 
rieure sur  la  hampe  et  par  des  styles  plus  courts. 

Explication  des  figures,  planche  73. 

'J  Oxalis  Ottonis,  grandeur  naturelle. 

10  Appareil  sexuel  grossi  pour  montrer  les  étamines  cl  les  styles. 

11  Coupe  longitudinale  de  l'ovaire. 

12  Grains  de  pollen  considérablement  grossis. 


—  294  — 
MONOGRAPHIE  DES  COLCHIQUES  ET  DES  CROCUS 

Qui  fleurissent  à  l'arrière-saison; 

Traduit  de  l'allemand  du  Dr  Cii.  Koch  (1), 

Par  M.  Jules  Bourdon, 
Docteur  en  sciences  naturelles. 

Au  printemps,  le  réveil  de  la  nature  s'annonce  par  le  développement 
de  fleurs  qui  appartiennent  en  grande  partie  au  groupe  nombreux  des 
Monocotylédonées  bulbeuses;  des  Jacinthes,  des  Tulipes, des  Scilles,  des 
Crocus,  des  Iris,  des  Narcisses,  des  Perce-Neige,  des  Ornithogales,etc, 
sont  les  avant-coureurs  des  beaux  jours.  Quand  la  terre,  après  avoir 
été  couverte  de  neige  pendant  des  mois  entiers,  commence  à  s'échauffer 
sous  les  premiers  rayons  du  soleil,  alors  que  la  verdure  des  prairies, 
des  buissons  et  des  forêts  n'est  encore  que  peu  apparente,  on  voit  rapi- 
dement pousser  les  fleurs  des  plantes  bulbeuses,  qui,  complètement  for- 
mées dès  l'automne  précédent,  étaient  protégées  contre  les  influences 
extérieures  parles  enveloppes  du  bulbe.  Et  ce  sont  encore  des  plantes 
bulbeuses,  quoique  bien  moins  nombreuses  et  moins  variées,  qui 
fleurissent  à  l'arrière-saison  et  semblent  clore  la  végétation.  Dans  nos 
climats  septentrionaux,  nous  n'avons  que  notre  Colchique  d'automne,que 
tout  le  monde  connaît;  mais  déjà  dans  les  Alpes  et  surtout  en  Orient, 
ainsi  que  dans  les  pays  qui  entourent  la  Méditerranée,  il  s'y  joint  plu- 
sieurs autres  espèces  du  même  genre  et  un  grand  nombre  de  Crocus. 
Dans  les  contrées  tropicales,  il  existe  également  des  plantes  bulbeuses; 
ce  sont  principalement  des  Monocotylédonées  à  ovaire  infère,  les  Ama- 
ryllidées,  qui  apparaissent  après  les  chaleurs  de  l'été,  au  moment  où  la 
première  pluie  annonce  l'a.pproche  de  l'hiver  ou  de  ce  qu'on  nomme  la 
saison  des  pluies  (2).  Les  plaines  tristes  et  désertes,  connues  en 
Amérique  sous  les  noms  de  Pampas  et  de  Llanos,  se  transforment  subi- 
tement en  une  campagne  parée  des  fleurs  les  plus  belles  et  offrant  les 


(1)  Verhandlungcn  des  Verehies  zur  lie farder wtrj  des  Gartcnbaiics  in  den  Konig- 
lich.  Prcussisclicn  Slaaten.  Nouvelle  série;  deuxième  année,  1854,  p.  170. 

(2)  On  pourrait,  d'après  ces  termes,  supposer  que  la  saison  des  pluies,  dans  les 
régions  tropicales,  représente,  sous  tous  les  rapports,  l'hiver  de  nos  contrées.  II  est 
loin  d'en  être  ainsi  :  c'est ,  au  contraire  ,  à  notre  été  que  celle  saison  correspond 
quant  au  plus  grand  développement  de  la  vie  végétale,  et  quant  à  l'apparition  de  la 
plupart  des  animaux  dont  l'existence  est  en  relation  intime  avec  les  saisons.  (T.) 


—  295  — 

nuances  les  plus  variées  ;  il  y  a  peut-être  même  trop  de  couleurs  bril- 
lantes, et  l'on  aimerait  à  y  voir  plus  de  verdure. 

On  se  plaint  souvent  que  l'arrière-saison  est  pauvre  en  fleurs,  mais 
on  ne  cherche  pas  à  se  procurer,  sous  ce  rapport,  les  mêmes  jouissances 
qu'au  printemps.  Le  choix  des  fleurs  est  certainement  loin  d'être  aussi 
grand  que  pendant  le  second  tiers  de  l'année;  mais  il  y  a  pourtant  assez 
de  plantes  bulbeuses  qui  fleurissent  en  automne  pour  en  cultiver  dans 
cette  saison  une  collection  à  laquelle  on  ne  puisse  reprocher  ni  la  mono- 
tonie, ni  le  manque  de  variété.  Les  horticulteurs  pourront  d'ailleurs  par- 
venir à  augmenter  celle-ci,  s'ils  veulent  accorder  plus  d'attention  aux 
fleurs  d'automne;  les  nombreuses  variétés  de  Crocus,  de  Jacinthes  et 
de  Tulipes  n'ont  pas  non  plus  toujours  existé ,  mais  elles  ont  été  pro- 
duites par  la  culture. 

M.  l'inspecteur  Bouché  cultive  déjà  une  assez  grande  quantité  de 
plantes  bulbeuses  automnales;  sa  collection,  qu'il  présenta  à  l'une  des 
réunions  de  la  Société  pour  l'avancement  de  l'horticulture  dans  les 
Etats  prussiens,  fut  admirée  de  tous  ceux  qui  la  virent.  C'est  une  cul- 
ture à  laquelle  fous  les  possesseurs  de  jardins  devraient  prendre  intérêt; 
aussi  serait-il  à  désirer  qu'on  recherchât  quelles  sont  les  plantes  bul- 
beuses qui  portent  fleura  l'arrière-saison  ;  c'est  ce  qui  m'engage  à  essayer 
de  donner  ici  une  liste  de  celles  qui  me  sont  connues  et  qui,  pour  la 
plupart,  se  trouvent  au  jardin  botanique  de  Berlin.  Les  genres  Colcliicum 
et  Crocus  sont  les  plus  importants  ;  la  majeure  partie  des  espèces  du 
premier  fleurissent  en  automne  ;  quant  au  second,  la  moitié  des  espèces 
qui  le  composent  se  trouvent  dans  le  même  cas. 

I.  COLCHIQUE.  COLCH1CUM,  L. 


Ce  genre,  par  son  ovaire  triloculaire,  appartient  à  la  famille  des  Mélan- 
thacées,  et,  par  son  bulbe  solide  et  son  périgone  muni  d'un  long  tube, 
à  la  division  des  Colchicées.  11  se  distingue  des  genres  Bulbucodium  L. 
et  Merendera  Ramond,  par  son  périgone  gamophylle  et  à  gorge  nue. 

Les  Colchiques  ont  tout-à-fait  l'aspect  des  Crocus,  mais  leur  ovaire  est 
libre,  et  non  adhérent  comme  chez  ceux-ci.  Des  vingt-deux  espèces  con- 
nues actuellement,  seize  fleurissent  en  automne,  les  autres  au  printemps 
et  en  été.  C'est  principalement  dans  les  montagnes  qu'elles  croissent,  et 
surtout  dans  le  Caucase  et  sur  la  grande  chaîne  qui,  commençant  aux 
Pyrénées,  règne  presque  sans  interruption  depuis  le  nord  de  l'Es- 
pagne jusque  près  do  Constanlinoplc  ,  en  traversant  le  midi  de  la 
France,  la  Suisse,  l'Autriche  et  la  Turquie;  on  en  trouve  en  outre  plu- 


—  296  — 

sieurs  espèces  en  Orient  et  dans  les  diverses  contrées  de  l'Europe  mé- 
ridionale, et  quelques-unes  dans  le  nord  de  l'Afrique. 

1.  C.  autumnale ,  L.  —  Bien  qu'on  n'aime  pas  à  voir  celte  jolie 
fleur  dans  les  pâturages  à  cause  de  son  principe  acre,  elle  est  cependant, 
pour  les  prairies  de  l'Allemagne  centrale  et  méridionale,  un  véritable 
ornement,  que  l'on  remarque  d'autant  plus  que  la  campagne  est  pauvre 
en  fleurs  à  l'époque  de  l'année  où  elle  paraît.  Aussi  est-elle  plus  connue 
que  beaucoup  d'autres  plantes  ;  la  poésie  et  la  tradition  populaire  s'en 
sont  emparées  pour  en  faire  le  sujet  de  chansons  et  de  récits.  De  là 
viennent,  également  les  noms  divers  que  le  Colchique  d'automne  porte 
dans  les  différentes  contrées,  noms  qui  tous  rappellent  quelque  phéno- 
mène propre  à  cette  plante,  ou  se  rattachent  à  quelque  tradition.  Les 
plus  communs  sont  W ' ksen-Safran ,  Lichlblume ,  NacktcHure,  Nackte 
Jung  fer,  Michaelisblume ,  Herbstblume ,  Hundshoden,  Kïihschlotte,  Zeit- 
blume,  Spinnblume  et  Filins  antepatrem  (1).  Ce  dernier  nom  (le  fils  avant 
le  père),  employé  surtout  par  les  anciens  botanistes,  rappelle  l'intéres- 
sant phénomène  de  l'apparition  des  fleurs  avant  les  feuilles  (2).  L'habi- 
tation du  Colchique  d'automne  ne  s'étend  pas  au-delà  de  l'Europe  cen- 
trale; à  l'Est,  on  ne  le  trouve  que  jusqu'à  la  Volhynie  et  la  Pologne;  il 
est  douteux  qu'il  croisse  en  Crimée,  dans  le  Caucase,  en  Turquie,  en 
Grèce  et  en  Italie. 

Le  Colchique  d'automne  est  caractérisé  par  le  tube  de  son  périgone, 
qui  a  plusieurs  fois  la  longueur  du  limbe  ;  celui-ci  est  de  couleur  de 
ebair,  et  ses  divisions  sont  rapprochées  en  forme  de  cloche.  Le  bulbe 
porte,  au  printemps,  des  feuilles  lancéolées,  et  il  ne  produit,  en  général, 
que  peu  de  fleurs.  Un  autre  caractère,  important  pour  les  botanistes, 
consiste  en  ce  que  les  trois  styles  sont  renflés  à  l'extrémité  et  recourbés, 
et  portent  à  leur  face  interne  les  stigmates  qui  sont  linéaires. 

Il  y  a  déjà  assez  longtemps  qu'on  cultive  plusieurs  variétés,  dont  quel- 
ques-unes ont  même  été  décrites  comme  espèces.  Telles  sont  : 

a.  La  variété  à  fleurs  doubles,  déjà  citée  par  Bauhin  dans  le  Pinux. 

b.  La  variété  à  fleurs  blanches,  d'un  rouge  pourpré  ou  jaunes  (flore 
albo,  purpureo  et  luteo),  figurée  dans  le  Florilegium  de  Swertius. 

c.  La  variété  à  feuilles  bordées  de  blanc  (foliis  variegatis). 

d.  Une  variété  intéressante  que  Schullz  a  décrite  sous  le  nom  de  Col- 


(1)  En  français,  le  Colchique  d'automne  est  également  désigné  par  diilérents  noms 
vulgaires,  tels  que  Safran  des  près,  Safran  bâtard,  Tue-Chien,  Vcillotte.  (T.) 

(2)  Ce  nom  ne  proviendrait-il  pas  plutôt  de  ce  que  le  fruit  semble  précéder  la 
Heur?  (T.) 


—  297  — 

chicum  patois,  dans  la  Flora  pour  l'année  1826,  p.  132.  Les  divisions  du 
périgone  sont  divergentes  et  plus  spatuliformes  ;  elles  ont  la  longueur  des 
styles  qui,  d'ailleurs,  ne  sont  pas  saillants  et  égalent  les  étamines. 
Depuis  assez  longtemps,  on  cultive  une  plante  sous  ce  nom  dans  le 
jardin  botanique  de  Berlin  ;  mais  ce  n'est  probablement  que  la  variété  à 
Heurs  rouges  du  C.  polyanthum ,  Gawl. 

e.  Une  variété  non  moins  intéressante  qui  fleurit  régulièrement  au 
printemps  au  lieu  de  fleurir  en  automne;  elle  a  déjà  été  décrite  par 
Schrank  sous  le  nom  de  C.  vernum ,  par  Hoffmann  sous  le  nom  de 
C.  vemak,  et  par  Spenner  sous  le  nom'. de  C.prœcox. 

f.  On  rencontre  en  outre  diverses  formes  anomales  :  tantôt  le  pé- 
rigone présente  plus  de  six  divisions,  leur  nombre  pouvant  même 
aller  jusqu'à  douze  ;  tantôt  il  y  a  moins  de  six  étamines,  le  plus  souvent 
cinq. 

g.  Enfin,  c'est  peut-être  encore  à  celte  espèce  que  doit  se  rapporter 
le  C.  polyanthum,  Gawl.,  qui  n'a  été  décrit  nulle  part;  l'auteur  n'a  fait 
que  nommer  cette  plante,  figurée  d'ailleurs  par  Clusius,  et  indiquée 
par  cet  ancien  botaniste  comme  croissant  spontanément  en  Hongrie  ;  il 
s'en  trouve  également  une  figure  dans  le  Florilegium  de  Swertius.  Elle 
est  sans  doute  très-voisine  du  C.  autumnale,  mais  s'en  distingue  suffi- 
samment par  le  grand  nombre  de  fleurs  qui  sortent  du  bulbe  et  par  leur 
nervation,  qui  est  différente.  Nous  la  possédons  depuis  longtemps  dans 
le  jardin  botanique  de  Berlin;  ses  fleurs  sont  blancbes  ou  d'une  couleur 
de  chair  foncée;  nous  l'avons  reçue  deM.Buek,  à  Francfort-sur-1'Oder, 
sous  le  nom  de  C.  multiflorum.  On  finira  peut-être  par  reconnaître  que 
c'est  une  espèce  particulière. 

2.  C.  lsetuni,  Stev. —  Cette  espèce  n'a  encore  été  trouvée  que  dans  le 
Caucase.  On  l'a  souvent  confondue  avec  le  Colchique  d'automne,  mais 
elle  s'en  distingue  essentiellement  par  sa  couleur  plus  foncée,  par  les 
divisions  de  son  périgone  moins  larges  et  s'écartant  davantage;  par  son 
tube  beaucoup  plus  court,  ayant  à  peine  trois  à  quatre  fois  la  longueur 
des  divisions,  et  par  ses  styles  plus  droits,  à  peine  renflés  à  l'extrémité, 
ne  portant  pas  les  stigmates  sur  leur  côté.  On  n'avait  trouvé  cette  espèce 
que  dans  les  plaines  au  nord  du  Caucase  et  sur  les  hauteurs  qui  les  tra- 
versent; mais  je  l'ai  observée,  et  même  en  grande  quantité,  dans  les  par- 
ties les  plus  élevées.  La  plante  que  j'ai  vue  dans  les  jardins,  indiquée 
sous  le  nom  de  C.  lœtum,  était  toujours  le  C.  variegatum,  L. 

3.  C.  Neapolitamim,  Ten. —  Cette  espèce  intéressante  a  déjà  été 
figurée  sous  le  nom  de  C.  latifolium,  par  Redouté,  dans  la  468e  pi.  de 
son  célèbre  ouvrage  sur  les  Liliacées.  Elle  parait  représenter  notre  Col- 


—  298  — 

chique  d'automne  dans  l'Italie  méridionale;  cependant,  d'après  Teiiore, 

cette  dernière  espèce  y  existerait  également.  Le  Colchique  napolitain  est 
caractérisé  par  une  raie  blanche  qui  règne  sur  la  l'ace  interne  des  divi- 
sions du  limbe,  et  par  une  glande  jaunâtre  sécrétant  du  nectar  et  située 
à  la  base  des  étamines.  Elle  n'est  malheureusement  pas  plus  connue  dans 
les  jardins  que  l'espèce  précédente. 

4.  C.  imiltiflorum  ,  Brot.  —  C'est  une  espèce  encore  douteuse  , 
dont  le  caractère  distinctif  doit  consister  en  ce  que  trois  fleurs  sortent 
souvent  d'une  seule  et  même  spathe.  Elle  a  pour  patrie  le  Portugal. 

5.  C.  speciosum,  Stev. —  C.  latifolium,  Gris,  nec  Sm.  —  Cette 
espèce  est  certainement  la  plus  belle  et  la  plus  grande  ;  elle  est  extrê- 
mement abondante  dans  les  montagnes  du  Caucase,  et  croit  également 
en  Grèce  et  dans  la  Turquie  d'Europe  ;  elle  l'orme,  dans  ces  contrées, 
un  des  principaux  ornements  que  fournisse  le  règne  végétal.  J'ai  vu, 
notamment  dans  le  pays  des  Ossètes,  au  milieu  du  Caucase,  de  grands 
espaces  tout  couverts  de  cette  fleur.  Elle  s'annonce,  dès  le  printemps, 
par  ses  feuilles  très-larges,  arrondies  à  l'extrémité  et  un  peu  charnues. 
Chaque  bulbe  produit  ordinairement  trois  ou  quatre  fleurs  qui  ont  sou- 
vent un  pied  de  long,  et  sont  roses  et  non  de  couleur  de  chair.  Le  tube 
est  au  moins  quatre  fois  plus  long  que  le  limbe;  celui-ci  est  campanule 
et  ses  divisions  sont  largement  oblongues  ;  leurs  nervures  longitudi- 
nales, d'un  rouge  foncé,  sont  unies  les  unes  aux  autres  par  des  lignes 
transversales  qui  ne  sont  pas  d'une  couleur  différente  et  qui,  par  con- 
séquent, ne  forment  pas  un  dessin  en  damier.  Les  styles  sont  en 
général  un  peu  plus  longs  que  les  étamines,  et  atteignent  le  milieu  des 
divisions  du  limbe. 

6.  C.  ïlj  zucfitiiiiiaiB.  Gawl.  —  Cette  espèce  ,  également  belle  ,  est 
aussi  assez  répandue  dans  nos  jardins  ;  pour  la  taille,  elle  est  intermé- 
diaire entre  l'espèce  précédente  et  le  Colchique  ordinaire.  Elle  croit  dans 
les  environs  de  Constantinople ,  et  je  ne  sache  pas  qu'elle  ait  encore  été 
trouvée  clans  d'autres  pays.  Les  feuilles  sont  assez  larges  et  arrondies 
en  haut  ;  de  nombreuses  fleurs  poussent  ordinairement  d'un  seul  et 
même  bulbe.  Le  limbe  est  d'un  beau  rose  ;  on  lui  attribue  ordinairement 
le  quart  de  la  longueur  du  tube  ,  mais  le  rapport  de  ces  deux  parties 
dépend  de  la  profondeur  à  laquelle  se  trouve  le  bulbe,  et  il  est  par  con- 
séquent plus  ou  moins  variable.  Les  divisions  du  périgone  sont  oblongues 
et  ressemblent  beaucoup  à  celles  du  Colchique  d'automne,  mais  elles 
présentent  des  nervures  longitudinales  plus  lines,  plus  droites  et  moins 
serrées,  qui  sont  à  peine  reliées  les  unes  aux  autres  par  des  ligues  trans- 


—  299  — 

versales.  D'après  Steudel  et  Grisebach,  c'est  à  celte  espèce  que  se  rap- 
porte le  Colchicum  orientale,  Friw.  in  Kunth  enum.  pi.  IV,  p.  143. 

7.  C.  var iegatum ,  L.  — Les  divisions  du  périgone  sont  assez 
divergentes,  de  couleur  de  chair  et  marquées  d'un  dessin  en  damier  de 
couleur  violette.  Cela  leur  donne  un  aspect  tout  particulier,  qui  dis- 
tingue essentiellement  cette  espèce  des  précédentes  et  la  rend  très- 
propre  à  orner  les  jardins.  Les  fleurs  ont  la  grandeur  de  celles  du  Col- 
chique d'automne.  Les  feuilles  sont  oblongues-lancéolées  ;  leur  bord 
ondulé  fournit  un  bon  caractère.  Jusqu'à  présent,  cette  espèce  n'a  été 
trouvée  que  dans  les  îles  de  l'Archipel  grec. 

8.  C.  Bivonac,  Ten.  —  Cette  espèce,  plus  petite  que  la  précédente,  a 
également  un  dessin  en  damier  sur  sa  fleur,  mais  ce  dessin  est  moins 
distinct,  la  couleur  des  veines  étant  blanchâtre,  quelquefois  pourtant 
rougeàtre.  Elle  se  distingue  en  outre  par  les  divisions  de  son  périgone 
plus  dressées,  et  par  ses  feuilles  plus  étroites  et  non  ondulées  sur  les 
bords.  Ce  Colchique  n'a  été  trouvé,  d'une  manière  certaine,  qu'en  Sicile 
et  dans  l'Italie  méridionale.  On  le  voit  quelquefois  dans  les  jardins  sous 
le  nom  de  C.  lœtum. 

9.  C.  Atticum,  Sprunn.  —  Cette  espèce,  trouvée  dans  les  environs 
d'Athènes,  est  indiquée  comme  voisine  du  C.  Byzantinum,  Gawl.;  mais 
il  est  probable  que  ce  n'est  nullement  ici  sa  place,  et  qu'elle  appar- 
tient plutôt  au  genre  Merendera,  à  cause  de  son  périgone  divisé  jusqu'au 
bulbe.  On  ne  dit  pas  non  plus  si  elle  fleurit  en  automne.  Elle  doit  avoir 
des  feuilles  coriaces,  d'un  vert  bleuâtre  et  dressées,  et  plusieurs  fleurs 
sortant  d'un  même  bulbe. 

10.  C.  liugulatum,  Boiss.  et  Sprunn.  —  C'est  une  seconde  espèce 
originaire  de  la  Grèce,  mais  provenant  des  montagnes;  elle  est  égale- 
ment peu  connue  et  seulement  d'après  les  herbiers.  Elle  appartient  pro- 
bablement aux  espèces  à  petites  fleurs,  étant  indiquée  comme  voisine  du 
Colchique  des  sables  (C.  arenarium,  W.  et  K.).  La  longueur  de  toute  la 
fleur  est  de  moins  de  deux  pouces,  et  un  peu  plus  de  la  moitié  de  cette 
longueur  appartient  au  tube.  Les  divisions  du  limbe  sont  très-étroites, 
de  couleur  rose  et  seulement  un  peu  plus  longues  que  les  styles  ;  les 
étamines  font  à  peine  saillie  hors  du  tube. 

11.  C.  iimbi'oftiim,  Stev.  —  Ce  Colchique,  ainsi  que  les  trois  sui- 
vants, est  une  espèce  à  petites  fleurs;  il  convient  donc  moins  que  les 
précédents  pour  être  cultivé  dans  les  jardins.  Il  a  cependant  encore  un 
avantage,  c'est  que  plusieurs  fleurs  sortent  toujours  de  chaque  bulbe. 
La  fleur  est  de  couleur  de  chair  ou  d'un  rougeàtre  clair;  le  tube  est  assez 


—  300  — 

long,  ayant  en  moyenne  cinq  fois  la  longueur  des  divisions  du  limbe  ; 
celles-ci  sont  oblongues  et  un  peu  conni Ventes  vers  le  haut.  Les  ner- 
vures longitudinales  ne  sont  pas  aussi  serrées  que  dans  le  Colchique 
d'automne,  et  ne  sont  pas  reliées  entre  elles  par  des  lignes  transver- 
sales. En  outre,  cette  espèce  se  distingue  des  autres  espèces  à  petites 
fleurs  par  sa  capsule,  qui  ne  se  termine  pas  en  pointe  à  la  base,  mais  est 
arrondie  comme  dans  notre  Colchique  ordinaire.  Les  feuilles  ,  qui 
poussent  au  nombre  de  quatre  ou  de  cinq,  sont  assez  larges.  Cette 
plante  n'a  encore  été  trouvée  qu'en  Crimée. 

12.  C.  arenarfum ,  W.  et  K.  —  Cette  espèce  est  moins  propre  à 
être  cultivée  que  la  précédente,  la  fleur  étant  encore  plus  petite  et  chaque 
bulbe  n'en  portant  ordinairement  qu'une.  La  couleur  de  la  fleur  lire  un 
peu  sur  le  violet  ;  les  divisions  du  limbe  sont  très-étroites  ,  et ,  en 
moyenne,  quatre  fois  plus  courtes  que  le  tube  ;  leurs  nervures  longitu- 
dinales sont  droites  et  ne  sont  pas  reliées  entre  elles.  Les  styles  sont 
filiformes  et  à  peine  recourbés  à  leur  extrémité.  La  capsule  se  termine 
en  pointe  à  la  base,  ce  qui  distingue  essentiellement  cette  espèce  de  la 
précédente.  Ce  Colchique  porte,  en  général,  plusieurs  feuilles  assez 
étroites.  Il  croît,  à  ce  qu'il  paraît,  en  Hongrie  et  dans  le  Banat,  mais 
seulement  dans  les  plaines. 

13.  C.  parvuluin,  Ten.  —  Ne  portant  non  plus  qu'une  fleur,  qui 
est  également  petite,  cette  espèce  se  distingue  de  la  précédente  par  les 
divisions  de  son  périgone,  plus  larges  ,  arrondies  à  l'extrémité  et  faible- 
ment marquées  d'un  dessin  en  damier,  et  par  ses  étamines  qui  pré- 
sentent un  renflement  à  leur  base  et  dépassent  les  styles.  Les  feuilles 
sont  également  très-étroites  et  assez  nombreuses.  Cette  espèce  n'a  en- 
core été  rencontrée,  d'une  manière  certaine,  que  dans  les  prairies  mon- 
tagneuses de  l'Italie  méridionale,  car  il  me  semble  douteux  qu'elle  ait  été 
trouvée  en  Morée,  comme  le  dit  Link. 

14.  C.  Alpinum,  DC.  —  C.  montanum,  Ail.  nec  L.  —  Cette  espèce, 
qui  fleurit  déjà  en  juillet  et  en  août,  et  dont  les  fruits  sont  mûrs  dès  l'ar- 
rière-saison,  pourrait  ne  pas  figurer  ici,  cl  si  je  la  cite,  c'est  parce  que 
ses  fleurs  poussent  également  sans  feuilles.  C'est  au  Colchique  d'automne 
qu'elle  ressemble  le  plus  ;  les  divisions  du  limbe  ont  également  des 
nervures  longitudinales  ondulées,  et  sont  cinq  à  six  fois  plus  courtes 
que  le  tube;  mais  chaque  bulbe  ne  porte  en  général  qu'une  fleur,  et 
celle  fleur  est  petite.  Ce  Colchique  ne  croît  guère  que  sur  les  pentes  mé- 
ridionales des  Alpes,  dans  le  Dauphiné  et  sur  les  Apennins. 

[La  suite  au  prochain  numéro.) 


—  301   — 

PROCÉDÉ  EMPLOYÉ  EN  CHINE  POUR  PARFUMER  LE  THÉ. 
Traduit  de  l'anglais,  par  M.  A.  De  Borre. 

Nous  empruntons  à  une  lettre  du  voyageur  anglais  ,  Robert  Fortune, 
datée  de  Schanghaï,  le  2  mai  1855,  les  détails  intéressants  qui  suivent  : 

Je  vous  ai  envoyé,  il  y  a  quelques  années,  une  notice  sur  la  méthode 
chinoise  de  colorer  le  thé  à  l'aide  du  plâtre  et  du  bleu  de  Prusse,  procédé 
que  les  Chinois  emploient  pour  satisfaire  le  goût  dépravé  des  Anglais  et 
des  Américains.  J'essaierai  aujourd'hui  de  vous  décrire  un  procédé  beau- 
coup plus  agréable  et  plus  rationnel,  à  savoir  celui  de  parfumer  le  thé.  Ce 
qui  prouve  la  vérité  de  ce  que  j'avance,  c'est  la  valeur  respective  de  ces 
deux  opérations  aux  yeux  des  Chinois;  en  effet,  s'ils  colorent  le  thé, 
c'est  uniquement  celui  qu'ils  vendent,  tandis  qu'ils  consomment  eux- 
mêmes  et  apprécient  extrêmement  le  thé  parfumé.  Voici  donc  une 
notice  sur  cette  préparation,  empruntée  à  mon  journal. 

J'avais  pris  depuis  quelque  temps  des  informations  sur  les  procédés 
singuliers  employés  pour  parfumer  le  thé,  mais  les  réponses  'que  j'avais 
obtenues,  étaient  tellement  insuffisantes,  que  j'avais  perdu  l'espoir 
d'apprendre  la  chose,  à  moins  d'avoir  pu  voir  et  juger  de  mes  propres 
yeux  cette  opération.  Me  trouvant  peu  après  à  Canton,  j'appris  que 
cette  méthode  était  mise  en  usage  dans  une  fabrique  de  thé  de  l'île  de 
Honan.  Je  fus  conduit  à  celle  fabrique  par  MM.  Walkinshaw  et 
Thorburn,  négociants  en  thé  à  Canton,  et  par  le  marchand  chinois  à  qui 
elle  appartenait.  J'étais  par  conséquent  dans  les  meilleures  conditions  du 
monde  pour  m'instruire  à  fond  sur  cette  merveilleuse  industrie.  A 
notre  entrée  dans  la  fabrique,  une  scène  remarquable  s'offrit  à  nos  yeux. 
Toute  la  place  était  remplie  de  femmes  et  d'enfants  occupés  activement 
à  séparer  du  thé  noir  les  tiges  et  les  feuilles  brunes  ou  jaunes.  Ce 
travail  est  payé  à  raison  de  6  cash  la  boite,  et  chacun  des  travailleurs 
peut  gagner  par  jour  environ  60  cash.  Toute  cette  scène  me  rappelait 
la  grande  fabrique  de  cigares  du  gouvernement  à  Manille.  Des  hommes 
étaient  occupés  à  livrer  le  thé  à  l'état  brut,  puis  à  le  reprendre  purifié. 
Avec  chaque  quantité  de  thé,  on  donnait  une  marque  en  bois  qui  devait 
être  rendue  avec  elle.  Dans  les  provinces  septentrionales,  on  pèse  les 
feuilles  avant  et  après  l'opération  ,  afin  d'empêcher  les  fraudes,  qui  sont 
assez  fréquentes.  Je  ne  remarquai  pas  à  Canton  la  même  précaution. 
Plus  loin,  beaucoup  d'autres  ouvriers  travaillaient  à  faire  passer  le  thé 
par  des  cribles  de  diverses  grandeurs,  afin  d'en  séparer  les  graines,  et 
aussi  pour  trier  les  diverses  variétés  de  thé.  Cela  se  faisait  en  partie  au 
moyen  d'une  machine  à  secousses,  de  construction  analogue  à  celles  que 
les  cultivateurs  emploient  chez  nous  pour  cribler  le  grain.  Après  avoir 


/ 


—  302  — 

jeté  un  coup  d'œil  sur  ces  opérations,  je  dirigeai  mon  attention  sur  la 
manière  de  parfumer,  qui  était  le  véritable  but  de  ma  visite,  et  que  je 
vais  essayer  de  décrire. 

Dans  un  coin  du  bâtiment  se  trouvait  un  grand  tas  de  fleurs  d'oranger 
qui  remplissaient  l'air  du  parfum  le  plus  délicieux.  Un  homme  était 
occupé  à  les  cribler  pour  en  séparer  les  étamines  et  autres  petits  or- 
ganes, opération  nécessitée  par  l'obligation  où  l'on  est  de  séparer  les 
fleurs  après  qu'elles  ont  communiqué  leur  parfum  au  thé.  Sur  100 
parties,  on  en  utilise  70,  et  on  en  rejette  30.  Quand  on  emploie 
des  fleurs  d'oranger,  elles  doivent  être  tout-à-fait  épanouies,  afin 
d'avoir  tout  leur  parfum  ;  mais,  quand  on  se  sert  de  fleurs  de  jasmin, 
on  peut  les  prendre  en  boutons,  et  elles  s'épanouissent  et  exhalent 
leur  parfum',  tandis  qu'elles  sont  mêlées  au  thé.  Quand  les  fleurs 
ont  été  tamisées  de  la  sorte,  elles  sont  propres  à  être  employées.  Pen- 
dant ce  temps,  on  sèche  soigneusement  le  thé  qu'on  doit  parfumer. 
Il  est  bon  de  remarquer  qu'à  cette  époque  de  l'opération ,  le  thé  est  sec, 
tandis  que  les  fleurs  d'oranger  sont  absolument  comme  si  elles  venaient 
d'être  cueillies.  Alors  on  mélange  de  grandes  quantités  de  thé  avec  les 
fleurs,  dans  le  rapport  de  40  livres  de  fleurs  à  100  livres  de  thé.  On 
laisse  le  tout  ensemble  pendant  24  heures.  Ce  temps  écoulé,  on  sépare 
les  fleurs  du  thé;  on  y  parvient  aisément  par  des  criblages  et  des  van- 
nages réitérés.  Il  arrive  cependant  que  l'on  trouve  en  Angleterre  quel- 
ques-unes de  ces  fleurs  restées  dans  le  thé.  D'autre  part,  une  petite 
quantité  de  thé  reste  attachée  aux  fleurs  humides;  on  les  donne  généra- 
lement aux  pauvres,  qui  les  séparent  à  la  main. 

Pendant  cette  partie  de  l'opération,  les  fleurs  ont  imprégné  les  feuilles 
de  thé  d'une  forte  dose  de  leur  odeur;  mais  elles  y  ont  aussi  laissé  une 
certaine  quantité  d'humidité  qui  doit  nécessairement  être  séparée.  Cela 
se  fait  en  exposant  le  thé  sur  des  corbeilles  et  des  claies,  à  la  chaleur 
d'un  petit  feu  de  charbon  de  bois.  Le  parfum  communiqué  au  thé  est 
très-faible  pendant  un  certain  temps,  mais  il  reparaît  comme  l'odeur 
propre  du  thé,  après  que  celui-ci  est  resté  en  paquets  huit  à  quatorze 
jours.  On  répète  l'opération,  si  l'on  juge  que  le  parfum  n'est  pas  suffi- 
sant; et  le  facteur  de  la  fabrique  me  dit  que  quelquefois  il  parfumait 
deux  fois  avec  des  fleurs  d'oranger,  et  une  fois  avec  du  Mo-le  (Jasminum 
sambac) . 

Les  Chinois  se  servent,  pour  parfumer  le  thé,  de  diverses  plantes, 
dont  quelques-unes  passent  pour  supérieures  aux  autres,  et  qui 
ne  se  trouvent  pas  toutes  dans  la  même  saison  de  l'année.  La 
chose  m'ayant  paru  digne  d'attention,  j'ai  eu  soin  de  me  procurer 
les  noms  chinois  de  ces  plantes,  et  d'établir,  par  un  examen  attentif, 


—  303  — 

leur  corrélation  avec  les  noms  scientifiques.  La  liste  suivante  a  été 
faite  avec  le  plus  grand  soin,  et  est  d'une  entière  certitude.  J'ai  indiqué 
par  des  chiffres  le  mérite  relatif  de  chaque  plante  aux  yeux  des 
Chinois,  et  par  des  astérisques,  celles  qu'ils  emploient  ordinairement 
à  parfumer  le  thé  destiné  à  l'étranger. 

1  —  Rose  odorante    .     .     .     .en  Chinois  :  Tsing-moi-qni  hwa. 
1  ou  2  —  Prunier  à   fleurs    doubles         «  Moi  hwa. 

*  2  —  Jasminum  sambac  ...         »  Mo-le  hwa. 

*  2  on  ô — Jasminum  paniculatum     .  »  Sieu-hing  hwa. 

*4  —  Âglaia  odorata   ....  »  Lan  hwa,  ou  Ju-tschu-lan  hwa. 

5  —  Olea  fragrans »  Kwei  hwa. 

*  6  —  Oranger »  Chang  hwa. 

*  7  —  Gardénia  florida.     ...  »  Pak-sema  hwa. 

On  a  assuré  qu'on  employait  aussi  fréquemment  des  Chloranthus. 
C'est  une  erreur  qu'il  faut  probablement  attribuer  à  la  ressemblance  du 
nom  chinois  de  cette  plante  (Tschu-lan)  ,  avec  celui  de  V Aglaia  odorata 
[Lan  ou  Ju-tschu-lan). 

Les  différentes  fleurs  que  je  viens  d'énumérer,  ne  s'emploient  pas 
dans  les  mêmes  proportions.  Pour  100  livres  de  thé,  on  prend  40  livres 
de  fleurs  d'oranger,  ou  100  livres  d' Aglaia  odorata,  ou  50  livres 
de  Jasminum  sambac.  Les  fleurs  de  Sieu-hing  (Jasminum  paniculatum) 
s'emploient  d'ordinaire  en  mélange  avec  celles  de  Mo-le  (J. sambac),  dans 
le  rapport  de  10  livres  des  premières  pour  30  des  secondes,  et  les  40 
livres  du  mélange  suffisent  pour  100  livres  de  thé.  Le  Kwei-hwa  (Olea 
fragrans)  est  surtout  en  usage  dans  les  contrées  septentrionales  pour 
donner  le  parfum  à  une  variété  rare  et  chère  ,  le  Hyson-Pecco,  qui 
fournit  une  boisson  exquise  et  très-roborante,  si  on  la  prend  à  la  chi- 
noise, c'est-à-dire  sans  sucre  ni  lait.  La  quantité  de  fleurs  employées 
me  parut  très-grande,  et  je  m'informai  si  le  thé  parfumé  n'était  pas 
ensuite  mêlé  à  de  grandes  quantités  de  thé  non  parfumé.  Les  Chinois 
répondirent,  sans  hésiter,  qu'il  n'en  était  rien;  mais  je  dois  dire  qu'en 
dépit  de  leur  assertion,  il  me  reste  encore  des  doutes  sur  ce  point  (1). 

La  durée  du  temps  pendant  lequel  le  thé  retient  le  parfum  qu'on  lui  a 
donné,  est  réellement  surprenante.  Elle  varie  avec  les  espèces.  Le  thé  à 
Y  Olea  fragrans,  par  exemple,  ne  se  conserve  bon  qu'un  an  ;  au  bout  de 
la  seconde  année,  le  parfum  a  complètement  disparu,  et  est  remplacé 
par  une  odeur  oléagineuse  particulière  et  désagréable.  Le  thé  aux  fleurs 
d'Oranger  ou  de  Mo-le  se  conserve  deux  ou  trois  ans,  et  le  thé  au  Sieu- 


(1)  M.  Fortune  ne  mentionne  pas.  au  nombre  des  plantes  odorantes  servant  à  par- 
fumer le  thé,  le  CamcUia  sasanqna,  cité  par  les  voyageurs  qui,  avant  lui,  avaient  dit 
quelques  mots  de  cette  industrie.  A.  De  B. 


—  304  — 

Iring,  de  (rois  à  quatre  «ans.  Le  thé  à  YAglaia  conserve  son  parfum  plus 
qu'aucun  autre,  savoir  :  pendant  cinq  à  six  ans.  Le  thé  au  Sieu-hing  est 
celui  que  les  étrangers  doivent  le  plus  estimer,  bien  que  les  Chinois  le 
considèrent  comme  un  thé  de  deuxième  ou  de  troisième  classe. 

Le  thé  parfumé  pour  l'étranger  se  prépare  à  peu  près  uniquement  à 
Canton  et  est  connu  des  marchands  sous  les  noms  «d'Orange-Pecco  par- 
fumé,» et  de  «  Kaper  parfumé.  »  Ces  espèces  croissent  dans  la  province 
de  Canton,  à  Tai-shan,  ou  dans  les  environs.  M.  Walkinshaw  m'a  appris 
qu'on  avait  aussi  parfumé  pour  le  commerce  anglais  d'autres  espèces  de 
thé,  tant  noir  que  vert,  mais  que  ces  essais  n'avaient  pas  réussi.  Le  thé 
Kaper  est  au  thé  noir ,  ce  que  le  thé  Impérial  et  le  thé  Perle  sont  au  thé 
vert;  il  prend  pendant  la  manipulation  la  forme  de  globules,  et  se  sé- 
pare aisément  des  autres  feuilles  par  les  cribles  et  les  vans.  C'est  une 
erreur  assez  commune  de  croire  que  les  thés  Impérial,  Perle  et  Kaper 
se  fonten  roulant  à  la  main  une  à  une  des  feuilles  de  thé  vert  ou  de  thé 
noir.  Une  semblable  opération  leur  donnerait  un  prix  bien  plus  élevé 
que  celui  qu'ils  ont.  On  calcule  qu'une  récolte  de  thé  donne  70  o/o 
d'Orange-Pecco,  25  o/o  de  Souchong,  et  5  o/o  de  Kaper.  La  quantité  de 
véritable  Kaper  doit  être  par  conséquent  très-restreinte;  mais  on  a  beau- 
coup de  moyens  de  l'augmenter  par  des  manipulations  particulières. 

Dans  une  grande  fabrique  comme  celle  de  Canton,  il  reste  nécessai- 
rement après  le  criblage  de  l'Orange-Pecco,  du  Kaper  et  du  Souchong  , 
une  quantité  considérable  de  poussière  et  de  déchets  de  thé.  On  les  vend 
à  bas  prix  dans  le  pays,  et  sans  doute  on  leur  rend  souvent  avec  de  la 
terre  et  d'autres  ingrédients  une  certaine  apparence,  pour  former  ce 
qu'on  vend  actuellement  en  Angleterre  sous  le  nom  de  lie  tea  (thé  men- 
teur). Rien  ne  se  perd  en  Chine.  Les  tiges  et  les  feuilles  vertes  triées 
par  les  femmes  et  les  enfants  trouvent  du  débit  dans  le  pays;  et  les  fleurs, 
après  avoir  cédé  leur  parfum,  sont  données  aux  pauvres  qui  parviennent 
encore  à  en  détacher  quelques  feuilles  de  thé  échappées  aux  machines 
qui  servent  à  la  séparation.  Certaines  fleurs,  comme  celles  d'Aglaia, 
sont  séchées,  après  avoir  été  séparées  du  thé,  et  servent  à  préparer 
le  bâton  odorant,  qui  joue  un  si  grand  rôle  dans  les  cérémonies  reli- 
gieuses de  celte  nation. 

Il  résulte  de  ces  recherches  qu'outre  les  fleurs  employées  par  les 
Chinois,  il  en  est  beaucoup  d'autres  qui  pourraient  remplir  le  même 
but;  et,  dans  un  pays  comme  les  Indes,  où  vraisemblablement  on  cul- 
tivera le  thé  sur  une  grande  échelle,  il  sera  possible  de  faire  des  essais 
pour  le  parfumer  avec  toutes  sortes  de  Jasminées,  d'Aurantiacées,  de 
Daphnées,  et  d'innombrables  plantes  odorantes  de  ces  climats. 


74. 


Cyprès    chauve  on  Taxodium   dis  Hélium. 


PI.  75 


- 


S  a  ko-  (Jothaea    ro  msp  icua 


—  805  — 

ARBORICULTURE. 


LE  CYPRÈS  CHAUVE,  ou  TAXODIER  DISTIQUE. 

Taxodium  distichum,  Rich. , 
Par  M.   Edouard  Morren. 

Faïu.  des  Conifères  §  Cupressi liées.  PI.  IL  Monœcic  Mouadclphie. 

Le  Cyprès  chauve  a  été  introduit  en  Angleterre  avant  1640,  puisque 
Parkinson  (1)  ,  qui  écrivit  la  même  année,  parle  d'un  cyprès  d'Amé- 
rique, introduit  de  la  Virginie  par  Tradescant,  et  qui  est  la  même  plante 
que  celle  que  l'on  nomme  aujourd'hui  Taxodium  distichum.  Miller,  dans 
ses  Dictionnaire  des  Jardiniers  de  1731  et  1752,  cite  des  Cyprès  chauves 
(Cupressus  disticha)  qui  avaient,  dès  cette  époque,  atteint  des  dimen- 
sions considérables.  Dans  l'édition  de  1731,  il  dit  de  cet  arbre  :  «  On  est 
d'ailleurs  assuré  que  cette  espèce  est  fortdure,  d'après  quelques  individus 
qui  ont  été  autrefois  apportés  en  Angleterre  et  qu'on  voit  encore  au- 
jourd'hui dans  quelques  jardins,  et  particulièrement  dans  ceux  de  Jean 
Tradescant,  à  l'Ambeth  méridional,  près  du  Wauxhall ,  où  l'on  en 
trouve  un,  entre  autres,  qui  a  plus  de  trente  pieds  de  hauteur,  et  qui  est 
d'une  grosseur  considérable,  quoiqu'il  soit  dans  une  cour  ordinaire,  où 
l'on  n'en  prend  aucun  soin ,  et  dans  lequel  on  ■  enfoncé  plusieurs  cro- 
chets pour  y  attacher  des  cordeaux  de  lessive.  Cependant  cet  arbre  est 
fort  sain  et  vigoureux,  mais  il  n'a  pas  encore  produit  de  fruit  jusqu'à 
présentée  qui  peut  être  occasionné  par  le  manque  d'humidité;  car  nous 
voyons  souvent  des  plantes  aquatiques  élevées  dans  un  sol  sec,  où  elles 
produisent  rarement  autant  de  fleurs  ou  de  fruits  que  celles  qui  restent 
dans  l'eau.  »  Dans  l'édition  de  1752,  il  ajoute  :  «  On  voit  aussi  un  de  ces 
arbres  assez  gros  dans  le  jardin  d'Abraham  Janssen  ,  à  Wimbleton ,  en 
Surrey,  qui  a  produit  une  grande  quantité  de  cônes  qui,  dans  les  années 
favorables,  ont  donné  des  semences  parfaitement  mûres  et  aussi  bonnes 
que  celles  qu'on  apporte  de  l'Amérique.  On  a  transplanté  cet  arbre, 
lorsqu'il  était  déjà  fort  grand,  dans  un  sol  sec  et  stérile,  ce  qui  a  arrêté 
son  accroissement;  car,  depuis,  il  fait  très-peu  de  progrès.  » 

Humboldt  mentionne  des  cyprès  plantés  au  Mexique ,  dans  les  jardins 
des  empereurs ,  avant  la  conquête  des  Espagnols ,  et  qui  paraissent  ap- 
partenir à  l'espèce  qui  nous  occupe.  Un  d'entre  eux,  connu  sous  le  nom 

(I)  Park.  Theat.,elc.,  p.  1477. 

1ÎI.IC    IIORT.    T.    VI.  20 


—  306  — 

de  Cyprès  de  Montézuma,  et  croissant  dans  les  jardins  de  Chapultepec, 
près  de  Mexico,  avait  déjà  atteint  toute  sa  croissance  en  4520;  son  tronc 
mesurait  13  mètres  de  circonférence.  Un  autre,  existant  à  Santa-Maria 
de  Tula,  près  d'Oaxaca,  avait  39  mètres  de  circonférence. 

Dès  1640,  Parkinson  doutait  que  cette  conifère  fût  un  véritable  cyprès, 
comme  on  la  nommait  alors,  et  pensait  qu'on  l'avait  considérée  comme 
telle,  seulement  à  cause  de  l'odeur  de  son  bois.  Elle  fut  cependant  classée 
par  Linné  et  les  botanistes  qui  le  suivirent  dans  le  genre  Cupressus,  jus- 
qu'à ce  que  L.  C.  Richard (1)  en  fit  un  genre  nouveau,  Taxodium,  nom 
qui  rappelle  que  les  feuilles  ont  la  même  disposition  que  celles  des  ifs 
(Taxus).  Deux  années  plus  tard,  MM.  Mirbel  et  Schubert  en  firent  le 
sujet  d'une  description  nouvelle  sous  le  nom  générique  de  Schubertia  (2)  ; 
mais  celui  de  Taxodium  ayant  la  priorité,  a  été  admis  dans  la  science. 
Cependant  le  genre  primitif  de  Richard  a  été  réduit  plus  tard  par  Endli- 
eher,  qui  a  formé  à  ses  dépens  le  genre  Glyptostrobus  pour  le  Taxodium 
hcterophyllum  Brong. 

Les  Taxodiers  sont  des  arbres  de  l'Amérique  septentrionale,  s'étendant 
du  20°  au  45°  de  latitude  boréale  ;  les  uns  atteignent  de  très-grandes 
hauteurs ,  les  autres  restent  à  l'état  d'arbustes.  Leurs  branches  sont 
souvent  pendantes,  les  feuilles  étroites,  caduques,  alternes  et  distiques. 
L'espèce  la  plus  importante  est  le  T.  distichum  Richard,  vulgairement 
appelé  Cyprès  chauve,  Cyprès  de  la  Louisiane.  Il  peut  atteindre  120  pieds 
d'élévation,  et  son  tronc  mesurer  25  à  40  pieds  de  circonférence.  Les 
ramilles  sont  très-délica\es  et  ressemblent,  avec  leurs  feuilles  étroites, 
caduques  et  d'un  vert  gai,  à  des  feuilles  pinnées  d'acacia.  Les  chatons 
mâles  sont  petits  et  forment  une  sorte  d'épi  pendant  ;  les  femelles  sont 
globuleux.  Les  fruits  sont  durs,  de  la  grosseur  d'une  petite  noix,  arrondis, 
formés  d'écaillés  épaisses,  légèrement  striés,  chagrinés  en  dehors.  Les 
graines  sont  ligneuses ,  comprimées ,  irrégulières ,  quelquefois  un  peu 
prolongées  en  forme  d'arête  au-delà  des  bords  ;  elles  mûrissent  en  oc- 
tobre et  peuvent  se  conserver  deux  ans. 

L'arbre  est  d'un  aspect  pyramidal  pendant  sa  jeunesse,  mais  lorsqu'il 
a  atteint  tout  son  développement,  sa  cime  est  large,  étalée  et  rappelle 
le  port  d'un  vieux  cèdre  du  Liban  ;  il  est  rare  de  lui  voir  celte  forme  en 
Europe.  Les  Taxodiers  distiques  qui  croissent  sur  le  bord  des  rivières  , 
et  qui  se  trouvent  pendant  la  moitié  de  l'année  avoir  leur  base  baignée 
par  l'eau  ont  l'écorce  plus  pâle  que  celle  de  ceux  qui  vivent  dans  des  en- 
droits secs,  leur  bois  est  aussi  plus  pâle,  moins  résineux  et  moins  lourd  : 


(1)  Annales  du  Muséum.  T.  XVI,  p.  209. 

(-2)  Ifouv.  Bulletin  de  In  Soc.  Philom.  III,  p.  l-'ô. 


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on  les  nomme  Cyprès  blancs  dans  les  Carolines  et  eu  Géorgie.  Les 
antres,  qui  ont  l'écorce  plus  foncée,  le  bois  plus  résineux  et  d'une 
pesanteur  spécifique  plus  grande,  sont  appelés  Cyprès  noirs,  et  sont 
même  parfois  portés  dans  les  catalogues  sous  le  nom  de  Taxodium  dis- 
tichum  nigrum ,  mais  on  voit  que  l'on  peut  à  volonté  obtenir  des  Cyprès 
noirs  à  l'aide  de  Cyprès  blancs  et  vice-versa.  Le  bois  du  Cyprès  chauve 
est  d'un  grain  fin  et  devient,  après  avoir  été  exposé  quelque  temps  à 
l'air,  d'une  couleur  rougeâtre;  il  est  d'une  grande  force,  très-élastique, 
moins  résineux  que  celui  des  pins  et  résiste  bien  à  la  chaleur  et  à  l'hu- 
midité. Le  feuillage  est  léger,  clair,  d'une  teinte  très-agréable;  à  l'au- 
tomne il  devient  rougeâtre,  avant  de  tomber. 

Le  Cyprès  chauve  atteint  en  Amérique  les  plus  grandes  dimensions 
dans  les  marécages  des  provinces  méridionales  et  des  Florides,  dont  le 
sol  fangeux  est  chaque  année  submergé  parles  inondations;  le  tronc 
peut  y  acquérir  40  pieds  de  circonférence  à  la  base,  mais  cette  partie 
est,  il  est  vrai,  au  moins  trois  fois  plus  épaisse  que  le  reste  du  tronc  ; 
elle  est  ordinairement  creusée  aux  trois  quarts  de  sa  grosseur  et  sa  sur- 
face est  sillonnée  longitudinalement  de  cannelures  tortueuses,  elle  n'est 
d'aucune  valeur,  et  l'arbre  est  toujours  abattu  à  5  ou  6  pieds  au-dessus 
du  sol. 

Une  particularité  très-curieuse  que  présente  le  Taxodier  distique  , 
est  l'existence  des  protubérances  ou  exostoses  coniques  qui  naissent  des 
racines  secondaires  horizontales  ,  sur  les  vieux  individus  et  s'élèvent 
quelquefois  à  2  mètres  au-dessus  du  sol.  Ces  singulières  productions  ne 
se  montrent  que  sur  les  vieux  arbres  de  8-12  mètres,  plantés  aux  bords 
des  eaux  ,  dans  des  marécages  ou  dans  les  lieux  susceptibles  d'être 
inondés;  elles  s'élèvent  verticalement,  ont  l'écorce  lisse  ,  rousse  ou  bru- 
nâtre comme  celle  des  racines,  et  sont  creuses  intérieurement.  Jamais 
elles  ne  se  couvrent  de  végétation,  et  Michaux  nous  dit  qu'il  n'est  jamais 
parvenu  à  leur  faire  pousser  des  racines  ni  des  feuilles.  Les  nègres  s'en 
servent  pour  faire  des  ruches  d'abeilles.  M.  Carrière  rapporte  que  les 
Taxodiers  du  Parc  de  Fontainebleau,  placés  dans  le  voisinage  d'une  ri- 
vière, montrent  un  grand  nombre  de  ces  protubérances,  les  unes  for- 
mantdans  l'eau  et  le  long  des  rives  une  sorte  de  mur  naturel  ;  les  autres 
s'étendant  à  6-8  mètres  de  distance,  et  tellement  abondantes  qu'il  est 
impossible  de  faucher  la  prairie  qu'elles  ont  envahie.  Mais  près  d'Or- 
léans, à  Olivet,  des  Taxodiers  âgés  de  près  de  40  ans  n'ont  pas  encore 
montré  d'exostoses.  11  en  est  de  même  au  château  de  Cheverny  près 
Blois  (Gher  et  Loire)  où  plusieurs  individus  de  20  à  22  mètres  de  hau- 
teur, sur  2  mètres  de  circonférence,  plantés  sur  le  bord  d'un  étang, 
n'ont  encore  donné  que  quelques  petites  protubérances  sur  les  racines 
les  plus  voisines  de  l'eau. 


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M.  Carrière,  dans  son  excellent  Traité  général  des  conifères, 18S5j  p. 
149,  ajoute  : 

«  Cet  arbre  habite  et  recherche  principalement  les  lieux  fangeux;  et 
des  marais  d'une  étendue  considérable,  couverts  de  ces  arbres,  ont 
reçu  le  nom  de  Cyprières.  Mais  pour  qu'ils  acquièrent  de  grandes  dimen- 
sions, il  faut  que  les  marais  aient  beaucoup  de  profondeur,  car  lorsqu'ils 
reposent  sous  un  sous-sol  quartzeux  et  peu  profond,  ils  ne  s'élèvent 
guère  au-delà  de  8-15  mètres.  En  raison  des  qualités  de  son  bois,  le 
T.  distichum  est  l'un  des  arbres  les  plus  précieux  des  Etats-Unis;  il 
joint  à  une  grande  solidité  une  élasticité  considérable  et  une  incorrup- 
tibilité qui  le  font  très-rechercher  à  la  Louisiane,  où  on  le  préfère  à  tout 
autre,  tant  pour  la  charpente  que  pour  l'industrie;  on  en  exporte  an- 
nuellement une  grande  quantité  aux  Antilles.  S'il  ne  jouit  pas  des  mêmes 
avantages  en  Europe  qu'aux  Etats-Unis,  il  n'est  cependant  pas  sans  in- 
térêt; il  est  même  probable  qu'il  donnerait  d'assez  beaux  produits,  si 
on  le  cultivait  dans  les  terrains  fangeux  et  chauds  de  la  France  mé- 
ridionale, soit  clans  la  Camargne  ou  dans  les  endroits  les  plus  humides 
des  Landes  de  Bordeaux.  Il  suffirait  de  planter  les  arbres  sur  les  bords 
des  fossés;  l'on  pourrait  ainsi  utiliser  avantageusement  des  terrains  qui, 
jusqu'à  présent,  sont  restés  à  peu  près  improductifs. 

»  Comme  arbre  d'ornement,  le  T.  distichum  présente  d'autres  avan- 
tages :  il  a  le  mérite  d'être  très-rustique  et  de  supporter  facilement  nos 
hivers  les  plus  rigoureux.  Planté  près  des  étangs,  il  en  orne  admirable- 
ment les  rives,  et  produit,  par  son  feuillage  aussi  léger  qu'élégant,  le 
plus  agréable  effet.  Ses  racines  forment  par  leurs  protubérances,  quand 
les  arbres  sont  rapprochés  de  l'eau ,  une  sorte  de  digue  naturelle,  du 
coup  d'œil  le  plus  pittoresque.  » 

Ajoutons  que  nous  connaissons  aux  environs  de  Liège  plusieurs 
T.  distichum  d'un  âge  et  de  dimensions  assez  considérables  pour 
prouver  que  le  climat  de  Belgique  leur  est  très-convenable.  Ces  arbres 
ne  sont  cependant  pas  plantés  dans  leurs  conditions  de  végétation  na- 
turelle; on  doit  les  placer  dans  les  endroits  les  plus  humides  et  il  serait 
à  désirer  que  l'on  fit  l'essai  de  plantations  de  Cyprès-chauves  dans  les 
marais  de  la  Campine;  nous  pensons  qu'ils  y  prospéreraient  comme 
les  mélèzes  le  font  dans  les  endroits  secs  et  arides.  Les  graines  sont 
traitées  comme  celles  des  Cyprès,  et  elles  germent  dès  la  première 
année.  L'arbre  peut  aussi  être  multiplié  de  boutures  faites  en  automne. 
Un  moyen  facile  do  les  faire  reprendre  est  de  les  mettre  dans  de  l'eau 
avec  un  pouce  de  terre  au  fond  du  vase;  les  rameaux  émettront  des 
racines  qui  viendront  se  développer  dans  cette  terre;  dès  lors  les  jeunes 
plantes  peuvent  être  traitées  à  la  manière  ordinaire. 


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SAXL-GOTILEA  CONSPICUA, 

Ou  Saxe-Gotha  distingué,  conifère  de  pleine  terre, 

Par  M.  Edouard  Morren. 

(Voy.  PL  75.) 

M.  le  Dr  Lindley  vient,  dans  le  Journal  de  la  société  d'horticulture  de 
Londres,  d'attirer  l'attention  sur  une  nouvelle  conilére  rustique,  le 
Saxc-Gothœa  conspicua,  dont  le  nom  est  l'un  des  titres  de  François- 
Albert-Auguste-Charles-Emmanuel,  prince  de  Sa^e-Cobourg  et  Gotha, 
époux  de  la  reine  Victoria.  C'est  un  fort  bel  arbre  vert,  haut  de  trente 
pieds  et  découvert  par  M.  Lobb  sur  les  Andes  de  Patagonie  près  des 
neiges  éternelles  avec  le  Podocarpus  nubigena,  le  Fizt-lioya  patagonica, 
le  Libocedrus  telragona,  etc.  Son  climat  est  beaucoup  plus  rigoureux 
que  le  nôtre,  de  sorte  qu'il  croit  avec  vigueur  depuis  quatre  ans  à  Exeter, 
chez  MM.  Veitch,  en  plein  air  sans  aucune  sorte  d'abri. 

On  peut  décrire  les  Saxe-Golhœa,  dit  M.  Lindley,  comme  des  végétaux 
à  Heurs  mâles  de  Podocarpus,  à  fleurs  femelles  de  Dammara,  aux  fruits 
de  Juniperus,  aux  graines  de  Dacrydium  et  à  l'aspect  d'un  Taxus.  Leurs 
fruits  charnus,  composés  d'écaillés  cohérentes,  renfermant  la  graine  et 
formant  ce  que  l'on  nomme  une  galbule,  les  placent  près  des  Juniperus, 
dont  ils  diffèrent  d'autre  part  par  lesanthères  non  peltées,  parla  présence 
de  plus  d'un  rang  d'écaillés  parfaites  dans  le  fruit  et  par  ses  ovules  à  deux 
téguments  au  lieu  d'un  seul.  Sous  ce  dernier  rapport  ils  se  rapprochent 
des  Podocarpus  et  particulièrement  des  Dacrydium,  mais  le  tégument 
extérieur  de  la  graine  est  une  membrane  abortive  et  incomplète,  enve- 
loppant seulement  la  base  de  la  graine.  Sir  William  Hooker  comparait 
les  Saxe-Golhœa  à  un  Podocarpus  avec  les  fleurs  en  cône;  il  fut  sans 
doute  conduit  à  ce  rapprochement  par  la  nature  de  l'ovule,  et  c'est  le 
moyen  le  plus  philosophique  de  comprendre  la  nature  de  ce  singulier 
genre.  Les  Saxe-Golhœa  offrent  beaucoup  d'intérêt  en  formant  le 
passage  direct  des  Taxodium  à  Heurs  solitaires  aux  cônes  imbriqués 
des  véritables  conifères. 

Les  feuilles  ont  en  général  les  dimensions  et  L'apparence  de  l'if 
commun,  le  Taxus  baccata;  mais  elles  sont  glauques  en  dessous,  ex- 
cepté sur  la  nervure  médiane  et  sur  deux  ligues  étroites  en  dedans  des 
bords,  qui  sont  d'un  pâle  vert.  Les  fleurs  mâles  consistent  en  épis  ter- 
minaux plus  ou  moins  allongés  et  présentant  â  la  base  quelques  écailles 
concaves  et  acuminées  qui  forment  une  sorte  d'involucre  (PI.  75,  lig.  2). 
Chaque  fleur  consiste  en  une  anthère  solitaire  membraneuse,  présen- 
tant un  appendice  lancéolé,  acuniiné  et  réfléchi  cl  deux  loges  parallèles 


—  310  — 

s'ouvrant  longitudinalement  (fig.  3).  Les  Heurs  femelles  (lig.  4)  forment 
un  petit  cône  arrondi ,  pédoncule,  terminal  à  écailles  imbriquées,  char- 
nues ,  fermes,  lancéolées,  soudées  ensemble  à  la  base  où  elles  forment 
un  centre  solide;  toutes  semblent  être  fertiles,  et  elles  portent  (fig.  5) 
dans  une  petite  fossette,  au  milieu  de  la  face  interne,  un  ovule  réfléchi, 
qui,  d'après  M.  Clarcke,a  la  même  structure  que  celui  des  Gnetum  et  qui 
aurait  trois  téguments;  l'interne  prolongé  en  une  sorte  de  stigmate  n'est 
pas  aussi  manifeste  que  chez  les  Gnetum  et  que  M.  Lindley  avait  consi- 
déré comme  une  simple  expansion  du  nucelle  à  travers  le  hile.  L'enve- 
loppe externe  est  libre ,  mince  et  entoure  l'ovule  de  telle  sorte  que  ses 
deux  bords  ne  peuvent  pas  se  rencontrer  à  la  partie  inférieure  de  l'ovule, 
en  d'autres  termes  ,  cette  enveloppe  présente  une  fissure  vers  sa  face 
inférieure;  le  tégument  moyen  est  charnu  et  épais.  Le  fruit  (fig.  6)  est 
formé  par  la  consolidation  des  écailles  libres  du  cône  en  une  masse 
charnue  ,  déprimée,  à  surface  irrégulière  par  l'avortement  des  écailles 
stériles.  La  graine  (fig.  7)  est  une  noix  délicate  d'un  brun  pâle,  luisante, 
ovale,  avec  deux  petites  côtes  et  un  hile  large  et  irrégulier;  à  la  base  on 
retrouve  une  membrane  mince  et  courte  qui  représente  le  tégument 
externe  de  l'ovule. 


MÉDAILLE  D'OR 


DECEKNLE 


A  LA   BELGIQUE  HORTICOLE, 

Par  la  Société  Impériale  et  Centrale  d'Horticulture  de  Paris. 


RAPPORT  DE  M.  MOREL, 

Premier  Vice-Président  de  la  Société. 

Messieurs, 

Vous  avez  renvoyé  à  l'examen  d'une  Commission  composée  de  MM. 
Vilmorin,  Duchartre,  Pépin  et  Morel,  les  quatre  premiers  volumes  d'un 
ouvrage  périodique  ayant  pour  titre  :  la  Belgique  horticole,  Journal  des 
jardins,  des  serres  et  des  vergers. 

Cette  publication ,  fondée  en  1850  par  M.  Ch.  Morren,  qui  en  est  le 
rédacteur,  est  imprimée  en  beaux  caractères  et  en  format  grand  in-8" , 
illustrée  d'un  grand  nombre  de  planches,  soit  coloriées,  soit  xylogra- 


—  311  — 

phiées.  Pour  mieux  vous  faire  connaître  les  bases  sur  lesquelles  repose 
le  plan  de  cet  ouvrage,  nous  mettrons  sous  vos  yeux  les  matières  prin- 
cipales qui  concourent  à  sa  composition. 

Horticulture  ou  culture,  multiplication  et  description  des  plantes; 

Revue  des  plantes  nouvelles  ; 

Littérature  botanique  et  borlicole; 

Histoire  des  plantes  curieuses  ; 

Physiologie; 

Horticulture  de  salon  ; 

Architecture  des  jardins;  constructions  ; 

Meubles  de  jardin  et  instruments  de  jardinage  ; 

Arboriculture,  pomologie  et  jardin  fruitier  ; 

Culture  maraîchère; 

Pathologie  végétale,  ou  maladies  des  plantes; 

Animaux  nuisibles  ou  utiles. 

La  culture  des  plantes  de  salon  est  très-remarquablement  exposée; 
les  vignettes  très-nombreuses  qui  la  figurent  sont  parfaitement  exé- 
cutées. Les  végétaux  appropriés  à  ce  genre  de  traitement  y  sont  repré- 
sentés dans  des  jardinières  ,  des  corbeilles  et  dans  des  lampes  et  vases 
suspendus. 

Plusieurs  plans  et  dessins  pour  la  composition  des  jardins  souttrès- 
recommandables. 

Les  nouveautés  soit  en  plantes  tleuries,  soit  en  fruits,  y  sont  repré- 
sentées par  des  planches  coloriées  dont  le  nombre  et  d'environ  50  par 
volume. 

L'iconographie  n'est  pas  généralement  le  côté  par  lequel  se  distinguent 
les  publications  périodiques  de  l'horticulture,  et  à  cet  égard  la  Belgique 
horticole  fait  exception  à  la  règle  ;  les  planches  xylographiées,  qui  sont 
en  grand  nombre  (environ  80  par  vol.),  sont  bien  exécutées. 

Les  limites  de  ce  rapport  ne  nous  permettent  pas  de  passer  en  revue 
tous  les  articles  qui  méritent  d'être  signalés;  nous  nous  bornerons  à  ne 
citer  qu'un  très-petit  nombre  de  ceux  que  nous  relevons  dans  chacun 
des  quatre  volumes  : 

Monographie  des  Cypripedium  cl  des  Penstemon; 

Histoire  médicale,  botanique  et  horticole  des  Nymphéa. 

Culture  des  plantes  aériennes  pour  salons; 
Id.       du  chou  marin  en  Belgique; 

Description  d'un  jardin  à  Heurs  harmoniques,  de  grandeurs,  formes 
et  couleurs.  Cette  notice  sur  la  disposition  des  Heurs  pour  en  faire  res- 
sortir les  nuances,  est  d'un  grand  intérêt  pour  apprécier  l'effet  qu'elles 
produisent  en  massifs  homogènes  ou  hétérogènes  ; 


—  312  — 

Décoration  des  arbres  fruitiers  comme  moyen  {tour  les  luire  fructifier; 

De  la  greffe  par  application  ; 

De  la  supervégétation  chez  les  pommiers; 

Sur  les  Nepenlhès  et  plantes  à  amphores  ; 

Osphrésiologie  des  plantes;  odeur  posthume  de  l'Orchis  mâle; 

Moyens  de  faire  produire  aux  plantes  leurs  feuilles,  fleurs  et  fruits  à 
des  époques  déterminées  d'avance  ; 

Sur  la  culture  de  la  vigne,  par  M.  Charmeux  ; 

Théorie  des  couleurs  chez  les  végétaux; 

De  l'horticulture  considérée  comme  science  sociale,  morale,  artistique 
et  littéraire. 

L'auteur  a,  en  outre,  disséminé  dans  son  ouvrage  quelques  notices 
aussi  spirituelles  qu'intéressantes;  elles  ont  l'avantage  de  reposer  le  lec- 
teur d'une  attention  soutenue  en  mettant  sous  ses  yeux  des  faits  amu- 
sants et  instructifs. 

M.  Ch.  Morren,  rédacteur  de  la  Belgique  horticole,  est  depuis  long- 
temps avantageusement  connu  comme  botaniste  et  comme  horticulteur. 
Cette  publication  ne  pouvait  donc  tomber  en  de  meilleures  mains,  et 
nous  n'hésitons  pas  à  dire  que  les  nombreuses  leçons  de  théorie  et 
de  pratique  répandues  dans  son  livre  ne  sont  pas  au-dessous  de  la 
réputation  de  son  auteur.  Cette  publication  est  du  nombre  de  celles 
qui  doivent  être  entre  les  mains  des  amateurs  d'horticulture.  Ils  pour- 
ront y  puiser  des  instructions  utiles  et  y  rencontrer  un  guide  expéri- 
menté pour  leurs  travaux. 

Votre  mission,  Messieurs,  étant  d'encourager  tout  ce  qui  contribue 
aux  progrès  de  la  science  horticole,  nous  nous  résumons  en  vous  pro- 
posant de  renvoyer  ce  rapport  au  Comité  des  récompenses. 

La  Commission  des  récompenses,  composée  de  MM.  Garnon,  prési- 
dent, Pépin  et  Rousselon,  statuant  sur  ce  rapport,  a  conclu  de  la  ma- 
nière suivante  : 

Notre  premier  vice-président ,  M.  Morel,  vous  a  rendu  un  compte  dé- 
taillé de  la  Belgique  horticole  ,  Journal  des  jardins,  fondé  en  1850,  par 
M.  Ch.  Morren,  qui  en  est  le  rédacteur.  M.  le  rapporteur  en  fait  res- 
sortir le  mérite,  et  considère  cette  publication  comme  tout-à-fait  digne 
d'être  lue  et  étudiée  par  les  amateurs  d'horticulture.  Il  demande  aussi 
qu'une  récompense  soit  offerte  à  M.  Morren. 

La  Commission  vous  propose  de  décerner  à  M.  Morren  une  médaille 
d'or.  (Accordé.) 


9 
rieur  cl  fruits  (ces  derniers  moitié  <lo  grandeur  uaturelle  )  du 

\  au  il  la  G  ma  ucu  si  s  Smllô. 


—  3  la  — 

HISTOIRE  DES  PLANTES  UTILES. 


HISTOIRE  DE  LA  VANILLE  , 

Considérée  comme  un  produit  nouveau  des  Indes-Orientales  (1), 

Par  M.  H.  De  VR1ESE,  Professeur  à  Leydc. 

ANALYSE    ET    TRADUCTION 

Pau  M.    Edouard    Morren. 

Il  est  a  remarquer  combien  il  reste  encore 
de  connaissances  positives  à  acquérir  sur 
certains  articles  du  commerce,  qui  forment 
cependant  la  base  d'importantes  spéculations, 
cl  que  nous  fournit  la  nature  végétale. 

(Desvaux.) 

L'auteur  de  cet  important  travail,  après  avoir  fait  ressortir  l'utilité  de 
l'étude  des  plantes  et  des  produits  naturels  en  général  pour  le  commerce 
et  l'industrie,  rappelle  les  célèbres  découvertes  de  Robert  Brown,  en 
1821,  sur  la  fructification  des  Orchidées  qui  ont  eu  pour  résultat  de 
provoquer  la  fécondation  artificielle  de  la  Vanille,  d'abord  au  jardin 
botanique  de  Liège,  puis  dans  différentes  contrées  intertropicales.  Il  se 
propose  de  donner  l'histoire  de  la  Vanille,  mais  sans  se  dissimuler  les 
nombreuses  difficultés  que  présente  ce  genre  de  recherches  par  suite 
de  la  difficulté  de  communication,  des  descriptions  incomplètes  des  au- 
teurs et  des  spécimens  d'herbiers  dépourvus  de  certains  organes  impor- 
tants. La  Vanille  est  aujourd'hui  généralement  connue;  elle  entre  dans 
la  composition  d'un  grand  nombre  de  préparations  que  le  luxe  invente 
et  multiplie.  La  liqueur  fine  connue  sous  le  nom  de  crème  de  Vanille, 
beaucoup  de  sucreries,  les  meilleures  qualités  de  chocolat  consomment 
une  grande  quantité  de  cette  épice  qui  semble  être  devenue  indispen- 
sable. On  est  étonné  en  parcourant  les  statistiques,  de  voir  quel  chiffre 
élevé  atteint  la  consommation  annuelle,  et  on  reconnaît  que  lu  plus 
grande  partie  est  absorbée  par  les  cafés  des  boulevards  de  Paris. 

On  s'est  trop  pressé  de  croire  à  une  relation  entre  l'introduction  de 
la  Vanille  en  Europe  et  celle  du  chocolat.  Cette  assertion  n'a  rien  dç 
certain  et  il  est  beaucoup  plus  probable  que  la  Vanille  et  la  Cochenille 
ont  été  introduites  toutes  deux  en  1510  du  Mexique  en  Europe,  tandis 
que  le  chocolat  n'a  été  apporté  qu'en  1520.  Il  parait  que  les  Espagnols 


(1)  Tuinbouw-flora  van Nedcrland.  Vol.  II,  li\.  2,5,4,  185G. 


—  314  — 

sont  les  premiers  des  Européens  qui  aient  appris  à  mêler  la  Vanille  au 
Cacao  pour  en  faire  un  chocolat  aromatique  (1). 

Le  professeur  de  Leyde,  Charles  de  l'Ecluse,  écrit  (2)  qu'il  a  reçu  en 
1602  de  la  Vanille  de  Hugo  Morgan  qui  était  pharmacien  de  la  reine 
Elisabeth.  Il  nomma  ce  fruit  :  «  lobus  oblongus  aromaticus .  » 

L'histoire  botanique  de  la  Vanille  et  la  connaissance  de  la  découverte 
des  espèces  sont  très-obscures;  les  descriptions  et  les  représentations 
des  anciens  auteurs  sont  très-imparfaites.  Ce  que  l'on  trouve  dans  les 
herbiers,  sans  fleurs  ni  fruits,  n'est  d'aucun  secours,  puisque  ces  organes 
sont  indispensables  pour  fixer  les  espèces,  et  l'on  sait  que  ce  genre  en 
compte  plusieurs. 

On  trouve  des  iconographies  et  des  descriptions  de  Vanilles  dans  Plu- 
kenet,  Plumier  et  Merian,  mais  les  plantes  décrites  par  ces  auteurs 
appartiennent  sans  aucun  doute  à  différentes  espèces  que  Linné  (3)  a 
cependant  réunies  en  une  seule  qu'il  décrit  comme  suit  :  plante  grim- 
pante, à  feuilles  ovales  oblongues,  nervées,  sessiles,  caulinaires,  à  vrilles 
spirales  (4).  Excepté  dans  sa  Materia  medica,  Linné  ajoute  :  Royeni 
Hortus  Lugduno-Batavus ,  Merian  et  Plumier. 

On  lit  ce  qui  suit  dans  Mmc  Sybille  Merian  :  «  C'est  l'espèce  la  plus 
»  grande  de  Vanille  ;  deux  espèces  croissent  à  Surinam,  une  autre  est 
«un  peu  plus  petite  de  feuilles  et  de  fruits, les  feuilles  sont  épaisses  d'un 
«doigt,  elle  s'attache  aux  arbres  comme  la  Clématite  d'Europe,  les  ra- 
«meaux  et  les  feuilles  sont  verts  comme  l'herbe,  les  fruits  verts  ressem- 
blent à  une  gousse  de  haricot  (5)  et  sont  remplis  de  graines  oléagineuses 
»et  odorantes.  Elle  croit  dans  les  bois  sur  les  arbres  les  plus  élevés,  de 
«préférence  sur  ceux  qui  vivent  dans  les  terrains  marécageux  ou  Int- 
imides; on  connaît  son  usage  pour  le  chocolat,  mais  il  est  regrettable 
«qu'il  n'y  ait  pas  dans  le  pays  des  hommes  curieux  qui  aillent  à  la  re- 
»  cherche  de  produits  analogues,  qui  sans  doute  existent  dans  cette  vaste 
»et  riche  contrée.  C'est  le  Volubilis  siliquosa  Mexicana  foliis  plantaginis 
»de  Rajus,  le  Fililxoclitil,  flos  niger  et  aracus  aromaticus  de  Hernandez 
«dans  son  Historia  Mexicana  et  le  Vahilla  flore  viridi  et  albo  fructa 
y>nigrescente  de  Plumier  dans  son  Nova  plantarum  gênera.  » 

«Ce  végétal  est  encore  représenté  dans  différents  auteurs  sous  plu- 

(1)  Le  célèbre  Linné  a  publié  un  écrit  sur  le  potns  cliocolatus,  auquel  il  allie 
aussi  la  Vanille,  mais  il  ne  s'explique  pas  sur  l'époque  de  l'introduction.  Amœnitates 
Acadcmicœ  1765. 

(2)  ExolicorHin  libri  IX,  p.  72,  1605. 
(ô)  Species  plantarum  1547. 

(4)  «  Epidendrum  Vanillée,  scandais-,  foliis  ovato-oblongis,  uervosis,  sessilibus, 
caulinis,  cirrhis  spiralibvs.  « 

(5)  Va  u  il  la  guiauensis  Splilg  ? 


—  315  — 

«sieurs  autres  noms  que  l'on  peut  trouver  dans  le  Almagestwm bota- 
»nicumde  Plukenet,  p.  381  (1).  » 

La  plante  de  Blérian  n'est  cependant  pas  celle  qui  produit  les  Vanilles 
du  commerce,  comme  nous  le  prouverons. 

La  description  de  Plumier  est  conforme  au  Vanilla  planifolia  Andr. 
surtout  pour  la  couleur  verte  et  blanche  des  fleurs  (2);  il  semble  ce- 
pendant qu'il  a  encore  connu  une  autre  espèce,  mais  elle  n'est  pas  suf- 
fisamment désignée. 

Linné  a  établi  son  Epidendrum  Vanilla  d'après  la  planche  et  la  des- 
cription de  Plumier.  On  a  pensé  que  la  plante  de  Plumier  était  la  même 
que  le  Vanilla  aromatica  Sw.,maiscette  espèce  est  peu  connue  et  Lindley 
croit  improbable  que  les  fruils  du  commerce  proviennent  d'elle;  ils  ap- 
partiennent, sinon  toujours,  au  moins  le  plus  souvent,  au  Vanilla  plani- 
folia Andr.  M.  Robert  Biwb (H&rtus  Kewensû)  les  rapporte  au  Vanilla 
aromatica  mais  sans  citer  de  preuves  à  l'appui.  Il  est  aussi  établi  par  les 
expériences  de  M.  Charles Morren  et  d'autres,  que  les  fruits  du  Vanilla 
planifolia  ne  sont  pas  inodores. 

M.  Schiede,  qui  a  voyagé  en  Amérique  et  spécialement  au  Mexique, 
pense  que  l'on  a  confondu,  sous  le  nom  de  V.  planifolia,  deux  espèces 
différentes,  l'une  avec  deux  sillons  (V .  sylvestris) ,  l'autre  sans  sillons 
(V.  sativa)  sur  les  fruits. 

Selon  de  Humboldt,  les  Mexicains  se  servaient  déjà  de  la  vanille,  pour 
la  préparation  du  chocolat,  avant  la  conquête  de  l'Amérique  par  les  Es- 
pagnols; elle  aurait  été  introduite  du  Mexique  en  Europe,  en  1510, 
comme  une  substance  aromatique,  et  en  1520,  selon  le  même  auteur, 
aurait  eu  lieu  l'introduction  du  cacao,  à  peu  près  en  même  temps  que 
la  cochenille  et  un  peu  après  le  tabac. 

De  Humboldt  et  Bonpland  (1811)  nous  révèlent  ce  qui  suit  sur  le 
même  sujet  (3)  : 

«L'usage  de  la  Vanille  a  passé  des  Aztèques  auxEspagnols.  Le  chocolat 
des  Mexicains  était  parfumé  de  plusieurs  aromates,  parmi  lesquels  la 
gousse  de  la  vanille  occupait  le  premier  rang.  Aujourd'hui  (1811)  les 
Espagnols  ne  font  le  commerce  de  cette  production  précieuse  que  pour 
la  vendre  aux  autres  peuples  de  l'Europe.  Le  chocolat  espagnol  ne  con- 
tient pas  de  Vanille,  et  à  Mexico  même,  on  a  le  préjugé  de  regarder  ce 
parfum  comme  nuisible  à  la  santé,  surtout  pour  les  personnes  qui  ont 


(1)  Do  Surinaamsclie  insekten,  naauwkeurig  onderzoelit  en  in  prinl  gebragl  cloor 
.Maria  Sybilla  Merian,  Amsterdam  1730,  p.  20,  Afl.  XXV. 

(2)  Plum.  nov.gen.  pi.  Amer.  p.  23.  ej.   pi.  Amer,  t'aseiculus  VIII,  p.  18ô.  Il  dit 
Vanilla  flore  viridi  et  albo;  lructii  nigricanle. 

(3)  Voyage  de  Humboldt  et  Bonpland,  III*  partie.  Essai  politique  sur  le  royaume 
de  la  Nouvelle-Espagne,  t.  III,  p.  198.  Paris  1811. 


—  316  — 

le  système  nerveux  très-irritable.  On  entend  dire  gravement  que  la 
vanille  cause  des  maux  de  nerfs  {la  baynila  du  pasmo).  Il  y  a  peu  d'an- 
nées qu'à  Caracas  on  disait  la  même  chose  de  l'usage  du  cale ,  qui  com- 
mence cependant  à  s'y  répandre  parmi  les  indigènes. 

«Lorsqu'on  considère  le  prix  excessif  auquel  se  soutient  constamment 
la  Vanille  en  Europe,  on  est  étonné  de  l'incurie  des  habitants  de  l'Amé- 
rique espagnole,  qui  négligent  la  culture  d'une  plante  que  la  nature  pro- 
duit spontanément  entre  les  tropiques,  presque  partout  où  il  y  a  de  la 
chaleur,  de  l'ombre  et  beaucoup  d'humidité.  Toute  la  Vanille  que  con- 
somme l'Europe  vient  du  Mexique,  et  par  la  seule  voie  de  Vera-Cruz.  On 
la  récolte  sur  une  étendue  de  terrain  de  quelques  lieues  carrées.  Il  n'y  a 
pas  de  doute  cependant  que  la  côte  de  Caracas,  et  même  la  Havane, 
pourraient  en  faire  un  commerce  très-considérable.  Nous  avons  trouvé, 
pendant  le  cours  de  nos  herborisations,  des  gousses  de  vanille  très-aro- 
matiques et  d'une  grandeur  extraordinaire,  dans  les  montagnes  de 
Caripe,  à  la  côte  de  Parvie  ;  dans  la  belle  vallée  de  Bordones,  près  de 
Cumana  ;  dans  les  environs  de  Portocabello  et  de  Gnaignaza  ;  dans  les 
forêts  du  Turbaco,  près  de  Carthagène  des  Indes  ;  dans  la  province  de 
Joren,  sur  les  bords  de  la  rivière  des  Amazones,  et  dans  la  Guyane,  au 
pied  des  rochers  granitiques  qui  forment  les  grandes  cataractes  de  l'Oré- 
noque.  Des  habitants  de  Xalapa,qui  font  le  commerce  de  la  belle  Vanille 
mexicaine  de  Misantla,  ont  été  frappés  de  l'excellence  de  celle  que  M.Bon- 
pland  a  rapportée  de  l'Orénoque  et  que  nous  avons  cueillie  dans  les 
bosquets  qui  entourent  le  llaudal  de.  Maypure.  A  l'île  de  Cuba,  on  trouve 
des  plantes  de  Vanille  sur  les  côtes  de  Bahia  Honda  et  au  Mariel.  Celle 
de  Saint-Domingue  a  le  fruit  très-long,  mais  peu  odoriférant  ;  car  sou- 
vent une  grande  humidité,  en  favorisant  la  végétation ,  est  contraire  au 
développement  de  l'aromate.  D'ailleurs  ,  les  botanistes  voyageurs  ne 
doivent  pas  juger  de  la  bonté  de  la  Vanille  d'après  l'odeur  que  cette  liane 
répand  dans  les  forêts  de  l'Amérique  :  celle  odeur  est  due  en  grande 
partie  à  la  Heur,  qui,  dans  les  vallées  profondes  et  humides  des  Andes, 
est  quelquefois  longue  de  quatre  à  cinq  centimètres. 

»  L'auteur  de  Y  Histoire  philosophique  des  deux  Indes  (1)  se  plaint  du 
peu  de  notions  qu'il  a  pu  se  procurer  sur  la  culture  de  la  Vanille  au 
Mexique.  Il  ignore  même  le  nom  des  districts  qui  la  produisent.  Ayant 
été  sur  les  lieux,  j'ai  été  à  même  de  prendre  des  renseignements  plus  dé- 
1  aillés  et  plus  exacts.  J'ai  consulté,  à  Xalapa  et  à  Vera-Cruz,  des  per- 
sonnes qui,  depuis  trente  ans,  font  le  commerce  des  Vanilles  de  Misantla, 


(  1  )  Raynal,  1. 11,  p.  68,  §  16.  Thiery  de  Menonvillc,  de  la  culture  du  Nopal,  p.142. 
On  cultive  aussi  un  peu  de  Vanille  à  la  Jamaïque,  dans  les  paroisses  de  Sainte-Anue 
ri  '!i'  Sainte-Marte.  Brown,  p.  326. 


—  317  — 

de  Colipa  et  de  Papantla.  Voici  le  résultat  de  mes  recherches  sur  l'état 
actuel  de  cette  branche  intéressante  de  l'industrie  nationale. 

»  Toute  la  Vanille  que  le  Mexique  fournit  à  l'Europe  est  recueillie  dans 
les  deux  intendances  de  Vera-Cruz  et  d'Oaxaca.  Cette  plante  abonde 
principalement  sur  la  pente  orientale  de  la  cordillière  d'Anahnac,  entre 
les  19°  et  20°  de  latitude.  Les  indigènes  ayant  reconnu  de  bonne  heure 
combien,  malgré  cette  abondance,  la  récolte  était  difficile,  à  cause  de  la 
vaste  étendue  du  terrain  qu'il  fallait  parcourir  annuellement,  ont  pro- 
pagé l'espèce  en  réunissant  un  grand  nombre  de  plantes  dans  un  espace 
plus  étroit.  Cette  opération  n'a  pas  exigé  beaucoup  de  soin  :  il  a  suffi  de 
nettoyer  un  peu  le  sol  et  de  planter  deux  boutures  de  Vanille  au  pied  d'un 
arbre,  ou  bien  de  fixer  des  parties  coupées  de  la  tige  au  tronc  d'un  Liqui- 
dambar,  d'un  Ocotea  ou  d'un  Piper  arborescent. 

»  Les  boutures  ont  généralement  quatre  à  cinq  décimètres  de  longueur. 
On  les  attache,  avec  des  lianes,  aux  arbres  sur  lesquels  la  nouvelle  tige 
doit  monter.  Chaque  bouture  donne  du  fruit  la  troisième  année.  On 
compte,  pendant  trente  à  quarante  ans,  jusqu'à  cinquante  gousses  par 
pied,  surtout  si  la  végétation  de  la  Vanille  n'est  pas  arrêtée  par  la  proxi- 
mité d'autres  lianes  qui  l'étouflent.  La  Baynilla  amazona,  ou  Vanille  sau- 
vage, qui  n'a  point  été  plantée  par  la  main  de  l'homme,  croissant  dans 
un  terrain  couvert  d'arbustes  et  d'autres  plantes  grimpantes,  porte,  au 
Mexique,  des  fruits  très-secs  et  en  très-petite  quantité. 

»  Dansl'intendance  de  Vera-Cruz,  les  districts  célèbres  par  le  commerce 
de  la  Vanille  sont  la  Subdelegacion  de  Misantla,  avec  les  villages  indiens 
de  Misantla,  Colipa-Yacualta  (près  de  la  Sierra  de  Chicunquiato)  et  Nantla, 
appartenant  tous  jadis  à  YAlcaldia  major  de  la  Antigua;  la  Jurisdiccion 
de  Papantla,  et  celles  de  Santiago  et  San  Andres  Tuxtla.  Misantla  esta 
trente  lieues  de  distance  de  laVera-Cruz,  au  nord-ouest,  et  à  douze  lieues 
de  la  mer  :  c'est  un  endroit  charmant,  dans  lequel  on  ne  connaît  pas  le 
fléau  des  mosquitos  et  des  gegen,  qui  sont  si  nombreux  au  port  de 
Nantla,  sur  les  bords  du  Rio  de  Quilate,  et  à  Colipa.  Si  la  rivière  de 
Misantla,  dont  l'embouchure  est  près  de  la  Barra  de  Palmas,  était  rendue 
navigable,  ce  district  parviendrait  en  peu  de  temps  à  un  haut  degré  de 
prospérité. 

»  Les  naturels  de  Misantla  recueillent  la  Vanille  dans  les  montagnes  et 
les  forêts  de  Quilate.  La  plante  fleurit  dans  les  mois  de  février  et  de 
mars.  La  récolte  est  mauvaise  si,  à  cette  époque,  les  vents  du  nord  sont 
fréquents  et  accompagnés  de  beaucoup  de  pluie.  La  fleur  tombe  sans 
donner  du  fruit,  lorsque  l'humidité  est  trop  grande.  Une  sécheresse 
extrême  est  également  nuisible  à  l'accroissement  de  la  gousse.  D'ailleurs 
aucun  insecte  n'attaque  le  fruit  vert,  à  causi?  du  lait  qu'il  contient.  On 


—  318  — 

commence  à  If  couper  aux  mois  de  mars  et  d'avril,  lorsque  le  subdélégué 
a  publié  par  ban  que  la  récolte  est  permise  aux  Indiens  :  elle  dure  jus- 
qu'à la  fin  de  juin.  Les  naturels,  qui  restent  huit  jours  de  suite  dans  les 
forêts  de  Quilate,  vendent  la  vanille  fraîche  et  jaune  à  la  gente  de  razon, 
qui  sont  des  blancs,  des  métis  et  des  mulâtres  ;  ceux-ci  connaissent  seuls 
le  beneficio  de  la  Baynilla,  c'est-à-dire  la  manière  de  la  sécher  avec  soin, 
de  lui  conserver  un  lustre  argenté  et  de  la  ficeler  pour  le  transport  en 
Europe.  On  étend  les  fruits  jaunes  sur  des  toiles,  et  on  les  met  au  soleil 
pendant  quelques  heures.  Lorsqu'ils  sont  suffisamment  chauffés,  on  les 
enveloppe  dans  des  draps  de  laine  pour  les  faire  suer  ;  la  vanille 
noircit  alors,  et  l'on  finit  par  la  sécher  en  l'exposant,  depuis  le  matin 
jusqu'au  soir,  à  l'ardeur  du  soleil. 

»La  préparation  quel'on  donne  à  la  Vanille,  à  Golipa,  est  bien  supé- 
rieure au  beneficio  usité  à  Misantla.  On  assure  qu'en  déballant  les  pa- 
quets de  Vanille  à  Cadix,  on  trouve  dans  celle  de  Colipa  à  peine  six  pour 
cent  de  déchet,  tandis  que,  dans  la  Vanille  de  Misantla,  le  nombre  des 
gousses  pourries  ou  gâtées  s'élève  au  double.  Cette  dernière  variété  est 
plus  difficile  à  sécher,  parce  qu'elle  a  le  fruit  plus  grand  et  plus  aqueux 
que  celle  de  Colipa,  qui  récoltée  dans  des  savanes,  et  non  sur  des  mon- 
tagnes, est  appelée  baynilla  de  acaguales.  Lorsque  le  temps  pluvieux  ne 
permet  pas  aux  habitants  de  Misantla  et  de  Colipa  d'exposer  la  vanille 
aux  rayons  du  soleil  jusqu'à  ce  qu'elle  ait  acquis  une  couleur  noirâtre 
et  qu'elle  se  couvre  de  stries  argentées  [manchets  plateadas) ,  on  est  obligé 
de  recourir  à  l'emploi  d'une  chaleur  artificielle.  On  forme,  au  moyen  de 
petits  tuyaux  de  roseaux,  un  cadre  suspendu  par  des  cordes,  et  couvert 
d'une  toile  de  laine,  sur  laquelle  on  étend  les  gousses.  Le  feu  est  placé 
au-dessous,  mais  à  une  distance  considérable.  On  sèche  les  gousses  en 
donnant  un  léger  mouvement  au  cadre,  et  en  chauffant  peu  à  peu  les 
roseaux  et  la  toile.  Il  faut  beaucoup  de  soin  et  une  longue  expérience 
pour  réussir  à  bien  sécher  la  vanille  par  cette  méthode,  que  l'on  appelle 
beneficio  de  poscoyol.  Les  pertes  sont  généralement  très-grandes,  lors- 
qu'on emploie  la  chaleur  artificielle. 

»A  Misantla,  on  réunit  les  fruits  de  Vanille  en  paquets,  appelés  mazos: 
un  mazo  renferme  cinquante  gousses;  par  conséquent  un  millier 
(millar)  a  vingt  mazos.  Quoique  toute  la  Vanille  qui  entre  dans  le  com- 
merce paraisse  être  le  produit  d'une  seule  espèce  (Tlilxochtl),  on  divise 
cependant  le  fruit  récollé  en  quatre  classes  différentes.  La  nature  du 
sol,  l'humidité  de  l'air  et  la  chaleur  du  soleil  influent  singulièrement  sur 
la  grandeur  des  gousses  et  sur  la  quantité  de  parties  huileuses  et  aro- 
matiques qu'elles  contiennent.  Ces  quatre  classes  de  Vanille  sont  les 
suivantes,  à  commencer  par  celles  d'une  qualité  supérieure:  baynilla 


—  319  — 

/ma,  dans  laquelle  on  distingue  de  nouveau  la  grande  fina  et  la  chica  fina 
ou  mancuema;\e  zacate;  le  rezacate  et  la  basura.  Chaque  classe  est 
facile  à  reconnaître  en  Espagne,  par  la  manière  dont  les  paquets  sont 
ficelés.  La  grande  fina  a  communément  22  centimètres  de  longueur,  et 
chaque  maso  pèse,  à  Misanlla,  dix  onces  et  demie;  à  Colipa,  neuf  à 
dix.  La  chica  fina  est  de  cinq  centimètres  plus  courte  que  la  précédente, 
et  on  l'achète  la  moitié  moins  cher.  Le  zacate  est  une  Vanille  très- 
longue,  mais  extrêmement  mince,  et  très-aqueuse.  La  basura,  dont  un 
paquet  a  cent  gousses  ,  ne  sert  qu'à  remplir  le  fond  des  caisses  que  l'on 
expédie  pour  Cadix.  La  plus  mauvaise  qualité  de  Misantla  s'appelle  bay- 
nilla cimarona  (sauvage)  ou  baynilla  palo  :  elle  est  très-mince  et  presque 
dépourvue  de  suc.  Une  sixième  variété,  la  baynilla  pompona,  a  le  fruit 
très-grand  et  très-beau  :on  l'a  expédiée  à  différentes  reprises  en  Europe, 
et  par  le  moyen  des  négociants  de  Gènes,  pour  le  Levant  ;  mais  comme 
son  odeur  est  différente  de  la  vanille  appelée  grande  fina,  elle  n'y  a 
trouvé  aucun  débit  jusqu'ici. 

»On  voit,  d'après  ce  que  nous  venons  derapportersur  la  Vanille,  qu'il 
en  est  de  la  bonté  de  cette  production  comme  de  celle  du  quinquina , 
qui  ne  dépend  pas  seulement  de  l'espèce  de  cinchona  dont  il  provient, 
mais  aussi  de  la  hauteur  du  sol,  de  l'exposition  de  l'arbre,  de  l'époque 
de  la  récolte  et  du  soin  avec  lequel  l'écorce  a  été  séchée.  Le  commerce  de 
la  Vanille  et  celui  du  quinquina,  se  trouvent  également  entre  les  mains 
de  quelques  personnes  que  l'on  appelle  habilitadores,  parce  qu'ils  avan- 
cent de  l'argent  aux  cosecheros,  c'est-à-dire  aux  Indiens  qui  font  la  ré- 
colte, et  qui  se  mettent  par-là  sous  la  dépendance  des  entrepreneurs. 
Ce  sont  ces  derniers  qui  tirent  presque  seuls  tout  le  profit  de  cette 
branche  de  l'industrie  mexicaine.  La  concurrence  des  acheteurs  est 
d'autant  plus  petite  à  Misantla  et  à  Colipa,  qu'il  faut  une  longue  expé- 
rience pour  ne  pas  se  laisser  tromper  dans  l'achat  de  la  Vanille  préparée. 
Une  seule  gousse  tachetée  (manchada)  ,  peut  faire  perdre ,  pendant  la 
traversée  d'Amérique  en  Europe,  une  caisse  entière.  On  désigne,  par 
des  noms  particuliers  (mojo  negro ,  mojo  blanco,  garo),  les  défauts  que 
l'on  découvre  soit  à  la  gousse,  soit  au  pétiole  (gargante).  Aussi  un  ache- 
teur prudent  examine  plusieurs  fois  les  paquets  qu'il  réunit  dans  le 
même  envoi. 

»  Le  district  de  Papuntla,  qui  était  jadis  une  alcaldia  major,  se  trouve 
à  18  lieues  au  nord  de  Misantla  :  il  produit  très-peu  de  Vanille,  qui  en 
outre  est  mal  séchée,  quoique  très-aromatique.  On  accuse  les  Indiens 
de  Papantla,  comme  ceux  de  Nantla,de  s'introduire  furtivement  dans  les 
forêts  de  Quilate,  pour  recueillir  le  fruit  de  ïEpidendrum  planté  par 
les  naturels  de  Misantla.  Dans  l'intendance  d'Oaxaca,  c'est  le  village  de 


—  320  — 

Teutila  qui  est  célèbre  par  la  qualité  supérieure  de  la  Vanille  que  pro- 
duisent les  forêts  voisines.  Il  paraît  que  cette  variété  a  été  la  première 
introduite  en  Espagne  ,  au  seizième  siècle,  car  encore  aujourd'hui  la 
baynilla  de  Teutila  est  regardée,  à  Cadix,  comme  préférable  à  toutes  les 
autres  :  on  la  sèche,  en  effet,  avec  beaucoup  de  soin ,  en  la  piquant  avec 
des  épingles,  et  en  la  suspendant  par  des  fils  de  pité;  mais  elle  pèse  à 
peu  près  un  neuvième  de  moins  que  celle  de  Misantla.  J'ignore  la  quan- 
tité de  Vanille  qui  est  récoltée  dans  la  province  de  Honduras,  et  exportée 
annuellement  parle  petit  port  de  Truxillo;  mais  il  parait  qu'elle  est  peu 
considérable. 

»  Les  forêts  de  Quilate  donnent,  dans  des  années  très-abondantes,  800 
milliers  de  Vanille.  Une  mauvaise  récolte,  dans  des  années  très-plu- 
vieuses, ne  s'élève  qu'à  200  milliers.  On  évalue,  en  terme  moyen,  le 
produit  : 

De  Misantla  et  de  Colipa,  à  700  milliers. 

De  Papantla,  à     .     .     .     100       » 

De  Teutila,   à.     ...     110       » 

La  valeur  de  ces  910  milliers  est,  à  Vera-Cruz,  de  30  à  40,000  piastres. 
Il  faudrait  y  ajouter  le  produit  des  récolles  deSantiago  etde  San  Andres 
Tuxtla,  sur  lesquels  je  manque  de  données  suffisamment  exactes.  Sou- 
vent la  récolte  d'une  année  ne  passe  pas  en  entier  en  Europe  ;  mais  on 
en  réserve  une  partie  pour  la  réunir  à  celle  de  l'année  suivante.  » 

La  question  de  la  Vanille  a  surtout  été  traitée  en  Europe  depuis  les 
importantes  communications  de  M.  Charles  Morren  (1). 

Charles  Greville  (2)  a,  parait-il,  le  premier  cultivé  la  Vanille  en  Angle- 
terre, à  Paddington,près  de  Londres,  où  elle  a  fleuri  en  1807,  mais  sans 
donner  de  fruits.  Il  est  probable  qu'elle  avait  déjà  été  introduite  en  An- 
gleterre par  le  marquis  deBlandford  (duc  de  Marlborough).  Elle  a  été 
introduite  en  Belgique  on  1812.  Parmentier  la  fit  parvenir  au  jardin 
d'Anvers,  où  elle  fut  cultivée  par  Sommé,  qui  l'a  répandue  dans  tous 
les  jardins  de  la  4ue,  surtout  en  Flandre  et  à  Liège.  Elle  ne  frucli- 

tifiait  jamais,  mais  elle  fleurit  deux  fois  dans  les  serres  de  Madame  la 
vicomtesse  Vilain  XIV.  L'époque  exacte  de  son  introduction  dans  les 
Pays-Bas  n'est  pas  connue  d'une  manière  certaine,  quoiqu'on  la  trouve 
dans  les  travaux  de  Van  Roven. 

(La  suite  à  la  prochaine  livraison.) 


(1)  A  lecture  read  before  the  Brilisli  Association  for  the  avancement  of  science,  at 
New-Caslle.  Ann.  of  natur.  liislory,  III.  11  mars  1  «S t ï> .  Bulletin  de  l'Académie 
de  Bruxelles,  IV,  3. 

(2)  Brown,  Verni.  Schrifte,  11,  48.  Morren,  1.  c. 


.  MU  H 


l  Madame   Campai).  2.  Anna   EkenKolm  .  3.  Princesse  Henriette 
\.    Docteur    Von  SieDold.   .S.  Capitaine     ffiméate. 


—  324  — 

HORTICULTURE. 


HISTOIRE  LITTÉRAIRE  DE  LA  PENSÉE, 
Par  M.  Ch.  Morren. 

«  Voir  venir  les  choses  est  le  meilleur  moyen  de  les  connaître,  «disait 
M.  Turpin,  alors  même  qu'il  ne  turlupinait  pas  et  qu'il  ne  disait  pas 
pouvoir  faire  pousser  des  truffes  en  semant  des  feuilles  de  chênes. 
M.  Turpin  avait  ses  bons  moments  et  c'est  dans  un  de  ceux-là  qu'il 
écrivait  la  pensée  qui  ouvre  notre  histoire. 

Il  y  a  deux  moyens  de  voir  venir  les  choses  et  ils  ne  se  ressemblent 
pas.  L'un  est  le  moyen  physiologique;  c'est  de  semer  une  plante, 
de  la  voir  venir  et  de  la  suivre  dans  toutes  ses  métamorphoses,  dans 
tous  ses  phénomènes,  jusqu'à  la  mort;  l'autre  est  de  voir  venir  cette 
plante  dans  le  monde,  de  consulter  les  trésors  de  l'antiquité,  les  manus- 
crits du  moyen-âge,  les  incunables,  les  bouquins,  les  traités  et  les  mo- 
nographies du  jour  sur  papier  rose,  et  alors  on  connaîtra  aussi,  mais 
sous  un  autre  point  de  vue,  l'objet  de  sa  passion.  Or,  pour  bien  appré- 
cier ce  qu'on  aime,  il  faut  adopter,  en  horticulture  surtout,  les  deux 
moyens  à  la  fois,  les  deux  voies  de  Turpin,  et  cependant  il  n'était  pas 
fort  sur  le  dernier  procédé  :  c'est  que  celui-là  en  effet  est  un  peu  en- 
nuyeux. Nous  proposons  donc  de  commencer  la  biographie  des  pensées 
par  les  pensées  des  anciens. 

S'il  est  incontestable  que  les  anciens  ont  connu  les  violettes,  on 
pourrait  mettre  en  question  qu'ils  aient  connu  les  pensées  et  à  coup  sûr 
le  rapport  naturel  qui  lie  dans  un  même  genre  ces  deux  espèces,  ne 
leur  était  pas  venu.  Théophraste  a  parlé  d'un  <p\oyt»v  que  quelques 
érudits,  comme  Dodoëns,  ont  cru  être  la  pensée,  mais  les  commenta- 
teurs Bodé  de  Stapel  et  Scaliger  ont  démontré  l'inanité  de  cette  assertion. 
Ce  çxiyiov  était  pour  eux  l'oreille  d'ours  cultivée  de  leur  temps  par 
les  tulipiers  de  Hollande  qui  avaient  besoin,  disaient-ils,  d'un  petit 
grain  d'ellébore  «  elleboro  opus  habent,  ut  mania  hac  liberarl  possint.  » 
Cependant  pour  Stapel  et  Scaliger,  un  des  nombreux  épisodes  scandaleux 
de  la  vie  de  Jupiter  ne  peut  s'expliquer  que  par  la  pensée.  Le  maître  des 
dieux  aimait  la  nymphe  Io,  et,  voulant  cacher  ses  amours  à  sa  femme 
Junon,  il  transforma  sa  maîtresse  en  petite  vache.  La  terre  voulant 

BELG.    HOUT.    T.    VI.  27 


—  322  — 

être  agréable  à  cette  amante  de  nouvelle  espèce,  créa  une  fleur  pour  lui 
être  agréable  et  cette  (leur  représentait  la  jeune  fille,  c'est-à-dire  la 
jeune  vache;  comme  elle,  la  fleur  rougissait,  puis  s'empourprait  et  enfin 
blanchissait  «  rubescit  cnim  veluti  virgo,  purpurasit  autem,  veluti  bucula 
et  albescit.  »  Cassianus  Bassus  est  garant  du  fait  et  Scaliger  ne  peut  voir 
dans  ces  trois  couleurs  la  violette  odorante ,  mais  bien  la  pensée. 

Aimé  Martin  se  défend,  dit-on,  d'être  l'auteur  du  Langage  des  fleurs, 
ce  livre  célèbre  et  si  populaire.  Qu'il  s'en  défende  ou  ne  s'en  défende 
pas,  toujours  est-il  que  l'auteur  n'a  point,  à  propos  de  la  pensée,  raconté 
quelque  aventure  mythologique,  et  qu'à  propos  de  la  violette  l'histoire 
d'Io  n'est  plus  celle  de  nos  anciens  auteurs  si  naïfs  dans  leurs  pensées. 

Après  le  culte  des  dieux  est  venu  le  christianisme,  et,  dans  les  légendes 
du  moyen-âge,  la  pensée  tricolore,  comme  la  pensée  des  champs  (viola 
arvensis)  est  devenue  la  fleur  de  la  Sainte  Trinité  (herba  sanctse  Trini- 
tatis)  à  cause,  croit-on,  de  ses  trois  couleurs.  Sur  un  grand  nombre 
de  manuscrits  ornés  de  miniatures  que  nous  avons  consultés  pour  la 
rédaction  de  notre  Flore  paléographique  et  notamment  sur  plusieurs  de 
ces  livres  précieux  déposés  à  la  bibliothèque  de  Bourgogne,  à  Bruxelles, 
nous  avons  constaté  la  présence  de  la  pensée,  mais  la  pensée  non  modi- 
fiée par  la  culture.  Elle  n'en  était  pas  moins  un  ornement  des  jardins. 
«  Ces  fleurs,  dit  De  l'Escluse,  croissent  es  jardins....  chacune  fleur  de 
trois  couleurs  diverses  :  celles  de  haut  sont  le  plus  souvent  de  couleur 
violette  et  perse  ,  les  aultres  bleues  ou  iaulnatres  aians  des  traicts  noirs 
et  iaulneset  velues  au  millieu.»  La  sainte  Trinité  était  représentée  par 
ces  trois  couleurs  ;  du  moins  est-ce  l'opinion  de  Scaliger,  mais  on  pour- 
rait penser  que  cette  dénomination  est  provenue  d'un  autre  motif.  Lors- 
qu'on regarde  attentivement  une  pensée,  on  remarque  dans  son  milieu 
un  triangle  formé  par  les  bords  repliés  des  deux  pétales  latéraux  et  du 
pétale  inférieur.  Dans  ce  triangle  surgit  le  stigmate  qui  y  semble  un  œil, 
et  autour  de  ce  triangle  se  trouve  une  gloire  formée  de  stries  qui  si- 
mulent autant  de  rayons.  Or,  on  sait  que  dans  les  symboles  chrétiens 
un  triangle  d'où  sortent  des  rayons  lumineux  et  qui  contient  à  l'inté- 
rieur un  œil  ouvert,  est  l'image  du  Dieu  créateur,  formé  de  trois  per- 
sonnes, qui  veille  à  tout  l'univers.  Cette  idée  vient  spontanément  à  une 
foule  de  personnes  qui  remarquent  la  pensée.  Nous  avons  connu  un 
frère  Trappiste  qui  avait  peint  sur  le  mur  de  sa  cellule  une  pensée  et 
dans  le  triangle  une  tête  de  mort.  La  salutation  du  couvent  :  Frère, 
pensez  à  la  mort,  était  exprimée  par  cette  fleur.  Combien  de  fois,  dans 
le  monde,  ne  voyez-vous  pas  de  jeunes  amants  se  donner  leur  portrait 
peint  dans  le  triangle  d'une  pensée.  La  fleur  est  toujours  ici  une  arme 
parlante. 


Q9ÎJ    


Dans  les  incunables  de  botanique  et  dans  toutes  les  éditions  du 
XVIe  siècle,  la  pensée  est  citée  partout  sous  le  nom  de  pensée  sans 
qu'aucun  de  ces  auteurs  pense  à  expliquer  l'origine  de  ce  nom  français. 
Les  auteurs  latins  de  l'époque  la  nomment  jacea,  herba  Trinitatis,  herba 
clavellata,  les  allemands  freyscham  Kraut  ou  dryefelticheyt  Blumen;  le 
premier  de  ces  noms  allemands  provient  de  ce  que  «  ces  fleurs  boulies 
et  beues,  guérissent  le  commencement  du  mal  caduc  ou  de  la  maladie 
des  petits  enfants,  quand  ils  escument.  »  Le  second  nom  rappelle  la 
légende  du  moyen-âge.  Les  Anglais  ont  donné  à  la  pensée  un  nom  tout 
aussi  sentimental  que  les  français;  ils  l'appellent  la  paix  du  cœur, 
heart's  case.  Nous  ne  croyons  pas  que  M.  T.  B.Hall,  dans  ses  mémoires: 
On  the  habits  and  peculiarities  of  british  plants  and  on  the  dérivations  of 
their  latin  names,  ait  expliqué  l'étymologie  de  ce  nom.  L'horticulteur 
monographe  de  la  pensée,  M.  Rangonot  Godefroy,  se  perd  en  conjec- 
tures sur  le  nom  français  de  sa  fleur  favorite.  Le  passage  cité  plus  haut 
de  Clusius  prouve  que  le  nom  de  la  couleur  pensée ,  est  venu  de  la  fleur 
qui  était,  disait-on,  perse.  Dodoëns  écrivit  en  1567  une  Histoire  des 
fleurs  odorantes  et  propres  à  faire  des  couronnes;  c'est  là  que  le  botaniste 
de  Malines  nous  apprend  que  de  son  temps,  non-seulement  les  Français, 
mais  encore  les  Brabançons  et  les  Belges  d'alentour  nommaient  cette 
fleur  la  pensée,  mais  même  silence  sur  la  raison  de  ce  nom. 

Clusius  rapporte  que  de  son  temps  les  Flamands  appelaient  la  pensée 
Dreyvuldicheit  bloemen  ou  penseen,  c'est-à-dire,  d'après  la  légende 
pieuse  :  Fleur  de  la  Ste.  Trinité. 

M.  Ragonot  attribue  à  la  culture  de  la  pensée,  une  date  bien  récente  : 
1810.  Lady  Marie  ïennet,  fdle  du  comte  de  Tankervill,  s'en  serait 
occupée  sérieusement  la  première,  et  après  elle  Richard,  jardinier  de 
Walton,  un  des  frères  Lee,  puis  Lady  Ledelay  et  enfin  le  monde  horti- 
cole tout  entier.  Nous  croyons  ces  essais  beaucoup  plus  anciens,  nous  en 
demandons  pardon  à  ces  dames.  Le  premier  qui  cultiva  des  pensées 
comme  plantes  d'ornement,  est  Joachim  Camerarius.  Avant  1S79, 
De  l'Escluse  n'avait  pas  encore  vu  de  pensée  tricolore,  mais  Camerarius 
la  lui  communiqua.  Il  était  dans  la  destinée  de  la  pensée  d'être  une  fleur 
de  dame,  car  Camerarius  la  tenait  de  l'illustre  princesse  Du  Château  qui 
l'avait  prise  clans  les  montagnes  delà  Suisse.  De  l'Escluse  vit  les  pre- 
mières pensées  toutes  jaunes  ou  toutes  pourpres  obtenues  de  semis, 
dans  les  jardins,  dit-il,  du  prince  Guillaume  de  Hesse,  àCassel.  Notre 
célèbre  botaniste  donna  la  première  figure  en  bois  de  la  plante  qui  nous 
occupe. 

Cependant  les  pensées  unicolores  et  fort  belles,  devaient  être  rares  et 
elles  le  furent  longtemps,  car,  un  siècle  après,  Stnpel,  qui  vivait  en  Hol- 


—  324  — 

lande  dans  ce  XVIIB  siècle  si  ardent  pour  les  tulipes,  les  jacinthes,  les 
renoncules  et  autres  fleurs  d'ornement,  déclare  qu'il  n'avait  jamais  vu 
de  pensée  jaune.  La  pensée  ou  violette  tricolore  était  aussi  une  plante 
spontanée  de  Hollande,  et  la  lecture  du  passage  qui  y  a  rapport,  prouve 
évidemment  que  les  anthophiles  de  Harlem  n'y  faisaient  pas  une  grande 
attention.  Vandergroen,  jardinier  du  prince  d'Orange,  dans  son  Jar- 
dinier des  Pays-Bas,  publié  à  Bruxelles  en  4672,  ne  signale  que  quatre 
ou  cinq  pensées  ;  il  y  établit  clairement  aussi,  que  les  variétés  viennent 
de  semis,  et  signale  les  blanches,  les  rouges,  les  perses  (violettes) 
bigarrées  ,  les  rouges  bigarrées  et  les  blanches  à  feuilles  de  perses 
(pêcher)  ;  il  recommande  déjà  de  ne  prendre  les  graines  qu'au  fond  de 
la  capsule. 

Jusqu'au  XVIIe  siècle,  la  culture  des  pensées  devait  être  restreinte, 
parce  que  jusque-là  la  seule  viola  tricolor  avait  produit  des  variétés.  La 
sexualité  des  plantes  était  encore  un  mystère  pour  la  plupart  des 
hommes,  mais  au  XVIIIe  il  n'en  est  plus  de  même,  les  écrits  de  Zaluzian, 
de  Camerarius,  de  Geoffroy,  de  Vaillant,  et  surtout  ceux  de  Linné,  qui 
par  son  ingénieux  système  avait  popularisé  les  idées  sur  le  mariage  des 
fleurs,  avait  démontré  que  non-seulement  les  fleurs  avaient  des  sexes, 
mais  que  parfois  la  nature  permettait  des  unions  adultérines  entre  des 
espèces  différentes.  La  théorie  sur  l'hybridation  devenait  une  réalité.  Or, 
Linné  en  dirigeant  les  cultures  de  Clifford,  au  commencement  du 
XVIIIe  siècle,  avait  eu  à  s'occuper  des  pensées  qu'il  cherchait  à  classer. 
Les  cultures  d'Hermann  achevèrent  de  le  convaincre,  et  bien  qu'il  donnât 
les  viola  grandiflora  et  calcarata  pour  des  espèces,  l'une  des  Alpes 
suisses  et  des  Pyrénées,  et  l'autre  de  cette  dernière  station  seulement, 
il  n'hésita  pas  à  les  regarder  comme  des  progénitures  de  la  viola  tricolor 
dont  il  distinguait  une  foule  de  variétés. 

L'école  anglaise  est  le  résultat  de  ces  idées  linnéennes.  Les  belles  pen- 
sées obtenues  en  Angleterre  sont  des  résultats  de  fécondations  croisées. 
On  a  fait  copuler  entre  elles  les  viola  calcarata  Linn.  (montana  lutea 
grandiflora  de  Bauhin),  viola  gi^andiflGrade  Linné,  viola  amœna  d'Ecosse 
et  la  base  du  genre,  l'ancien  viola  tricolor.  De  là  sont  provenues  les 
pensées  actuelles  des  jardins. Nous  regrettons  que  M.  Ragonot  n'ait  pas 
fait  connaître  ces  détails  dont  la  connaissance  est  de  la  plus  haute  utilité 
pour  la  pratique  horticole  et  les  amateurs  de  ce  beau  genre. 

L'hybridation  eut  deux  résultats,  l'un  de  multiplier  les  couleurs, 
l'autre  de  perfectionner  les  formes.  Le  pourpre,  le  violet,  le  jaune,  le 
brun,  le  bronze,  le  blanc,  l'azur,  le  rose,  l'incarnat  se  marièrent  selon 
des  combinaisons  diverses,  et  M.  Hogg  qui  s'occupe  en  Angleterre  beau- 
coup de  ces  pensées,  signale  plus  de  cent  variétés  de  coloris;  elles  sont 


—  325  — 

en  effet  possibles  en  nombre  infini.  Sous  le  rapport  de  la  forme,  il  y  a  à 
remarquer  qu'originairement  la  pensée  est  une  fleur  irrégulière,  et  nous 
prouverons,  dans  son  histoire  physiologique,  pourquoi  elle  doit  l'être, 
et  dès  lors  l'irrégularité  qui  est  un  défaut  de  symétrie  ne  peut  plaire  à 
l'homme  de  bon  goût.  Ce  que  nous  appelons  le  beau  est  en  toute  chose 
le  résultat  d'une  harmonie  de  formes,  s'il  s'agit  déjuger  par  les  yeux, 
de  sons,  s'il  faut  juger  par  l'ouïe.  De  la  recherche  du  beau  est  né  un  art 
particulier,  Vesthétique,  qui  joue  un  si  grand  rôle  dans  les  beaux  arts. 
Or,  nous  sommes  d'avis  qu'il  y  a  une  esthétique  horticole  ou  botanique, 
et  cela  est  si  vrai  que  sans  raisonner  le  pourquoi  de  ce  sentiment,  les  An- 
glais ont  désigné  dans  chaque  genre  déplante  qu'ils  cultivent  ce  qu'ils 
appellent  des  perfections.  La  connaissance  de  ces  perfections,  connaissance 
qu'il  est  toujours  possible  de  raisonner  à  priori,  d'après  des  lois  fixes  et 
immuables,  constitue  une  branche  de  notre  esthétique  horticole  ou  bota- 
nique. En  appliquant  ces  idées  aux  pensées,  nous  arrivons  à  déterminer 
facilement  ce  que  doivent  être  les  perfections.  M.  Gorrie,  en  Angleterre, 
sans  raisonner  comme  nous,  est  arrivé  par  instinct,  par  le  sentiment  du 
beau,  appréciation  de  toute  intelligence  droite  et  de  toute  sensibilité  déli- 
cate, à  déterminer  le  même  type  du  beau  ou  la  perfection  de  la  pensée. 

Si  vous  jetez  les  yeux  surune  pensée  tricolore  de  nos  champs,  sa  figure 
générale  est  un  triangle  formé  de  deux  pétales  supérieurs  bleus  se  diri- 
geant en  haut  en  faisant  un  angle  au  milieu  de  la  fleur  et  d'un  pétale 
long  inférieur;  latéralement  entre  ces  pétales  s'en  étendent  deux  autres 
et  la  figure,  bien  que  se  circonscrivant  dans  un  triangle,  devient  irrégu- 
lière. L'irrégularité  ne  peut  plaire  aux  yeux  de  l'homme,  cela  est  impos- 
sible, cela  est  contre  nature.  Or,  toute  fleur  sera  d'autant  plus  belle 
qu'elle  réalise  mieux  la  condition  d'une  circonférence  dont  chaque  point 
est  équidistant  du  centre  :  c'est  là  une  figure  symétrique  et  harmonique; 
nous  la  recherchons  dans  la  tulipe,  la  renoncule,  la  rose,  le  camellia,  la 
jacinthe,  partout  enfin  ;  nous  devons  la  retrouver  dans  la  pensée.  Donc, 
toute  pensée  à  pourtour  circulaire,  à  larges  pétales  arrondis,  sans  échan- 
crures  ni  lobes,  se  superposant  sans  laisser  des  angles  vides  entre  eux, 
sans  ondulations,  d'une  certaine  grandeur,  sera,  quant  à  la  forme,  une 
perfection,  parce  qu'elle  sera  une  ligure  géométrique  régulière.  Si  à  ces 
conditions  de  forme  on  ajoute  des  couleurs  brillantes,  pures,  harmo- 
niques et  permanentes,  on  aura  le  complément  de  la  perfection  et  dans 
ce  cas  une  pensée  sera  conforme,  si  elle  réalise  ces  conditions,  au  canon 
ou  règle  de  l'esthétique.  Chaque  homme  raisonna t-il  ses  sentiments  ou 
non,  s'écriera  en  la  voyant  :  qu'elle  est  belle!  Nous  le  répétons,  les 
Anglais  ont  déjà  dans  leur  horticulture  raisonnée,  admis  l'existence  des 
canons  comme  règle  fixe  de  la  beauté.  Quand  l'horticulture  se  raisonne 
bien,  elle  devient  réellement  une  des  fractions  des  beaux-arts. 


—  326  — 
MONOGRAPHIE  DES  COLCHIQUES  ET  DES  CROCUS 

Qui  fleurissent  à  l'arrière-saison; 
Traduit  de  l'allemand  du  Dr  Ch.  Koch  (4), 
Par  M.  Jules  Bourdon, 
Docteur  en  sciences  naturelles. 

{Suite.)  (2). 


IL  SAFRAN.  CROCUS,  L. 

Quoique,  pour  la  forme  extérieure,  les  Crocus  ressemblent  extrême- 
ment aux  Colchiques,  ils  appartiennent  cependant,  à  cause  de  leur  ovaire 
infère,  à  une  tout  autre  famille,  à  celle  des  Iridées,  qui  se  distingue 
essentiellement  de  la  plupart  des  familles  voisines  par  le  nombre  des 
étamines,  qui  est  toujours  de  trois.  Le  genre  Crocus  est  lui-même  carac- 
térisé par  son  port  particulier  et  par  son  style  qui  se  divise  d'abord  en 
trois,  puis  en  un  grand  nombre  de  parties. 

Le  nombre  des  espèces  actuellement  connues  peut  être  évalué  à  cin- 
quante, dont  la  moitié  environ  fleurissent  au  printemps  et  l'autre 
moitié  en  automne.  Mais  malheureusement  les  premières  seules  sont 
cultivées  dans  les  jardins  avec  un  soin  tout  particulier,  bien  que  ce  soit 
précisément  parmi  les  dernières  que  se  trouvent  les  plus  belles  espèces. 
Aussi  est-il  à  désirer  que  les  jardiniers  s'attachent  spécialement  à  la 
culture  des  espèces  fleurissant  en  automne,  afin  d'obtenir  par  la  suite 
une  série  de  variétés  aussi  nombreuse  que  celle  que  nous  possédons 
pour  les  espèces  qui  fleurissent  au  printemps,  principalement  pour  les 
C.  venins  elversicolor. 

Les  Safrans  offrent  également  beaucoup  d'analogie  avec  les  Col- 
chiques, quant  à  leur  patrie  considérée  d'une  manière  générale;  ils 
semblent  seulement  être  encore  beaucoup  moins  communs  en  deçà  de 
la  chaîne  de  montagnes  que  nous  avons  citée  à  propos  de  ceux-ci,  mais 
ils  sont  d'autant  plus  abondants  au-delà.  Leurs  limites  vers  l'Est  ne 
sont  pas  exactement  connues;  aucune  espèce  n'a  encore  été  observée,  à 
ma  connaissance,  au-delà  du  Volga  et  de  la  mer  Caspienne.  On  n'a  pas 
encore  non  plus  trouvé  un  seul  Crocus  en  Perse  ,  mais  on  en  connaît 


(1)  Verhandlungen  des  Vereines  zur  Beforderung  des  Garlenbaues  in  den  Koiiii/- 
lich.  Preussischen  Staaten.  Nouvelle  série;  deuxième  année.  1854,  p.  170. 
Ci)  Voir  ci -dessus,  p.  294. 


—  327  — 

un  qui  croit  dans  la  province  deTalysch  sur  la  mer  Caspienne,  province 
qui  appartenait  jadis  à  la  Perse,  et  un  autre  dans  la  Haute- Arménie; 
enfin  on  en  a  découvert  quelques  espèces  en  Syrie  et  dans  le  nord  de 
l'Afrique. 

PREMIÈRE    SECTION. 

Divisions  du  limbe  inégales. 

1.  €.  Byzautinu»,  (Parkins.)  Ker.  —  C.  Banaticus,  Gay.  —  C. 
speciosus,  Rchb. —  C.  iridifloms,  Heuff.  inherb.  et  hort.  —  C'est  cer- 
tainement le  plus  beau  Crocus  que  l'on  connaisse.  Cette  espèce  et  la  sui- 
vante sont  très-faciles  à  distinguer  des  autres  par  les  divisions  de  leur 
iimbe  qui  sont  inégales.  Le  bulbe  est  légèrement  arrondi;  ses  tuniques 
sont  d'un  brun-jaunâtre,  très-minces  et  composées  de  fibres  longitudi- 
nales toutes  parallèles.  Il  pousse  en  automne  une  ou  deux  fleurs  dont  le 
tube  est  assez  long  et  d'un  blanc-bleuâtre;  les  divisions  extérieures  du 
limbe  s'écartent  beaucoup,  ont  une  nuance  d'un  bleu-grisâtre  plutôt 
que  violette  et  une  forme  elliptique,  et  sont  deux  fois  aussi  grandes  que 
les  divisions  intérieures;  celles-ci  sont  plus  étroites,  blanches,  dressées  et 
un  peu  tordues.  Les  trois  élamines  sont  plus  courtes  que  les  divisions 
du  limbe  et  que  les  stigmates;  ceux-ci  ont  à  peu  près  la  môme  longueur 
que  ces  divisions  et  sont  multifides  et  de  couleur  jaune.  Cette  espèce 
n'a  encore  été  trouvée  que  dans  les  environs  de  Constantinople  et  en 
Transylvanie. 

2.  C.  Herbertianus ,  Kœrnicke.  —  Cette  espèce,  établie  récem- 
ment, est  extrêmement  voisine  de  la  précédente  ,  ayant  comme  elle  les 
divisions  du  limbe  inégales;  mais  elle  est  plus  petite  dans  toutes  ses 
parties.  En  outre  les  divisions  extérieures  sont  obtuses  et  ont  une 
nuance  bleuâtre  se  rapprochant  davantage  du  violet,  tandis  que  les 
intérieures  ne  sont  pas  blanches,  mais  d'un  bleu  clair;  comme  dans 
l'espèce  précédente ,  elles  sont  dressées  et  un  peu  tordues,  et  plus 
courtes  de  moitié  que  les  divisions  extérieures.  Enfin  les  étamines  dé- 
passent un  peu  les  divisions  du  limbe  et  ne  sont  guère  plus  courtes 
que  les  stigmates,  qui  sont  également  très-divisés.  La  patrie  de  cette 
intéressante  espèce  est  la  Transylvanie ,  d'où  elle  est  arrivée  au  jardin 
botanique  de  Berlin;  elle  y  a  été  pendant  longtemps  cultivée  sous  le  nom 
de  C.  iridifloms. 

DEUXIÈME    SECTION. 

Stigmates  profondément  divisés;    fleurs  bleues,    violettes  ou  blanches; 
divisions  du  limbe  presque  égides. 

3.  C.  speciosus.  Bièb.  -  -  Colle  espèce,  qui  mérite  réellement   son 


—  328  — 

nom,  est  un  des  ornements  des  montagnes  du  Caucase,  jusque  dans  une 
saison  très-avancée.  Il  est  douteux  qu'on  l'ait  rencontrée  également  dans 
d'autres  montagnes;  elle  pourrait  bien  cependant  croître  ailleurs,  d'autant 
plus  qu'ellea  été  souvent  confondue  avec  le  C.Pyrenœus,  Ker.  Les  tuniques 
du  bulbe  sont  membraneuses  et  minces  et  ne  présentent  que  des  stries 
longitudinales  incomplètes  qui  sont  en  partie  à  peine  visibles;  ces  tu- 
niques se  détachent  plus  ou  moins  au-dessus  de  la  base.  Le  tube  est 
assez  long  et  d'un  blanc-bleuâtre  ;  la  gorge  est  blanche  et  présente  de 
petits  poils  blanchâtres  au-dessus  de  l'insertion  des  étamines;  celles-ci 
sont  blanches.  Les  trois  divisions  extérieures  du  périgone  sont  elliptiques 
et  d'un  violet  bleuâtre;  elles  sont  traversées  de  trois  nervures  longitudi- 
nales plus  obscures  et  offrent  aussi  une  nuance  plus  foncée  vers  leur 
base;  les  divisions  intérieures,  qui  sont  à  peu  près  de  la  même  grandeur, 
sont  beaucoup  plus  pâles  et  distinctement  veinées.  Les  styles,  d'un  orangé 
clair  et  divisés  en  un  grand  nombre  de  parties  divergentes,  ne  dépassent 
que  peu  les  étamines. 

On  possède  déjà  une  variété  de  cette  espèce  à  fleur  très-grande  et 
presque  entièrement  blanche  et  à  styles  de  couleur  plus  foncée  et  plus 
profondément  divisés. 

Une  seconde  variété  est  originaire  de  la  Transylvanie  et  pourrait  bien 
se  trouver  aussi  dans  la  Turquie  d'Europe.  Les  fleurs  sont  plus  grandes 
et  de  couleur  plus  foncée,  la  gorge  est  jaunâtre,  les  étamines  sont  éga- 
lement jaunâtres  et  les  stigmates  encore  plus  finement  divisés;  un 
examen  plus  exact  pourrait  bien  démontrer  que  c'est  une  espèce  dis- 
tincte, surtout  que  chaque  bulbe  porte  en  général  deux  fleurs. 

4.  C.  nudifloi'us,  Smith  (1798).  —  C.  multifidus,  Ramond  (1800). 
—  C.  Pyreîiœus,  (Parkins.)  Ker  (1808).  —  C.  speciosus,  Wils.  —  Cette 
espèce  est  en  général  plus  petite  que  la  précédente,  et  le  limbe  est  aussi 
plus  petit  par  rapport  au  tube.  La  fleur  est  de  couleur  plus  claire;  la 
gorge  est  d'un  jaunâtre  pâle  et  sans  poils.  Les  étamines  sont  également 
dépassées  par  les  stigmates,  qui  sont  orangés  et  à  divisions  nombreuses 
mais  courtes.  Mais  ce  Safran  se  distingue  essentiellement  de  toutes  les 
espèces  voisines,  en  ce  qu'il  produit  des  stolons  et  en  ce  que  les  tuniques 
du  bulbe  présentent  des  fibres  longitudinales  distinctes  et  se  détachent 
tout  autour,  mais  non  au-dessus  de  la  base.  Il  ne  croît  que  daas 
l'Europe  occidentale  et  en  Angleterre;  on  ne  le  trouve  plus  à  l'est  des 
Cévennes. 

5.  C.  pulchellus,  Herb.  —  Cette  espèce,  qui  n'est  connue  que  par 
l'herbier  de  Herbert,  a  été  trouvée  dans  les  environs  de  Constantinople; 
ce  n'est  probablement  qu'une  variété  plus  petite  cl  à  Heurs  plus  rouges 


—  329  — 

du  G.  Byzantinas,  Ker.  Elle  en  diffère  en  outre  par  une  gorge  d'un 
jaune  foncé  et  des  stigmates  moins  profondément  divisés.  Les  tuniques 
externes  du  bulbe  sont  membraneuses  et  se  séparent  à  la  base. 

6.  C.  Toaraefortii,  Gay.  —  Cette  espèce,  beaucoup  plus  petite, 
ne  se  trouve  pas  non  plus,  à  ma  connaissance  du  moins,  dans  les  jardins. 
Les  tuniques  du  bulbe  sont  également  très-minces  et  finissent  par  se 
déchirer  en  fibres  capillaires.  La  fleur  a  une  couleur  bleuâtre  avec  des 
stries  violettes.  La  gorge  est  d'un  jaune  clair,  presque  blanche,  de  même 
que  les  étamines,  qui  sont  finement  velues;  les  stigmates  sont  profondé- 
ment divisés  et  d'un  rouge-ponceau.  Chaque  bulbe  porte  une  à  trois 
fleurs.  Cette  espèce  n'a  été  trouvée  d'une  manière  certaine,  que  dans  les 
Cyclades. 

Le  C.  parvulus,  Herb.,  indiqué  d'abord  comme  espèce,  a  ensuite  été 
rapporté  au  C.  Tournefortii  par  l'auteur  lui-même;  cela  reste  douteux 
tant  qu'on  n'en  a  pas  vu  de  fleurs.  J'en  doute  surtout  à  cause  de  la  patrie 
du  C.  parvulus,  qui  est  la  Syrie. 

7.  C.  Boryi,  Gay.  — C.  Io?iicus,  Lindl. — C.  Veneris,  (nec  Venereus, 
Herb.)  Tapp.  in  Poech  enum.  pi.  ins.  Cypr.  — Ce  n'est  peut-être  qu'une 
variété  à  fleurs  pâles  de  l'espèce  précédente.  Les  tuniques  du  bulbe  sont 
également  minces,  mais  elles  ne  se  séparent  en  fibres  longitudinales  qu'à 
la  base  et  finissent  par  se  détacher  tout  autour.  La  fleur  est  d'un  blanc 
de  lait  et  n'a  pas  de  stries,  mais  la  gorge  et  le  tube  sont  jaunes. 
Cependant  d'après  Lindley  et  ïappeiner,  la  première  serait  orangée  et 
souvent  striée  de  violet  en  dehors.  Les  étamines  et  les  stigmates  sont 
exactement  semblables  à  ceux  de  l'espèce  précédente.  Le  Safran  de  Bory 
a  été  trouvé  dans  le  Péloponèse,  dans  les  îles  de  la  Grèce,  à  l'île  de 
Chypre  et  dans  l'Asie  mineure. 

8.  C.  sci'otinus,  Salisb.  nec  Bert. — Le  bulbe  est  arrondi  et  entouré 
de  tuniques  plus  solides,  qui  présentent  des  fibres  longitudinales  assez 
grosses.  Le  tube  du  périgone  est  strié  de  violet  ;  le  limbe  est  d'un  violet 
plus  grisâtre;  ses  divisions  extérieures  offrent  en  dehors  quelques  stries 
un  peu  plus  claires,  et  â  la  base  et  en  dedans  une  tache  jaune;  la  gorge 
est  d'un  jaune  clair  et  a  un  cercle  de  poils  fins.  De  la  gorge  sortent  les 
trois  étamines,  dont  les  filets  sont  jaunâtres,  courts  et  creusés  en  gout- 
tière à  leur  face  externe,  et  dont  les  anthères,  d'un  jaune  d'or  et  plus 
longues  que  les  filets,  atteignent  â  peine  la  base  des  stigmates;  ceux-ci 
sont  d'un  rouge-ponceau  et  leurs  nombreuses  divisions  forment  une 
touffe.  Cette  espèce  n'a  encore  été  trouvée  qu'en  Espagne,  puisque  la 
plante  d'Italie  indiquée  sous  le  même  nom  est  identique  avec  le  C.  Ion- 


—  330  — 

giflorus,  Raf.,  et  se  distingue  principalement  par  les  tuniques  de  son 
bulbe  à  veines  disposées  en  réseau,  par  ses  étamines  sans  sillon  et  par 
ses  stigmates  à  peine  divisés. 

9.  C.  Clusil,  Gay.  —  C.  autumnalis  multifidus,  Brot.  —  Cette  es- 
pèce a  été  établie  par  Gay,  d'après  un  Safran  découvert  par  Clusius  près 
de  Lisbonne,  puis  observé  également  et  figuré  par  Brotero.  Elle  est  à 
peine  différente  de  l'espèce  précédente;  elle  semble  ne  s'en  distinguer  que 
par  les  fibres  longitudinales  des  tuniques  de  son  bulbe  qui  sont  reliées 
vers  le  haut  en  forme  de  réseau,  par  sa  fleur  à  gorge  blanche  et  par  ses 
feuilles  apparaissant  en  même  temps  que  les  fleurs. 

10.  C.  SaBznianni,  Gay.—  C.  Tingitanus,  Herb.  —  Cette  espèce 
n'a  été  décrite  non  plus  que  d'après  des  herbiers  et  je  ne  sache  pas 
qu'elle  soit  encore  cultivée,  dans  aucun  jardin.  Elle  ressemble  tellement 
au  C.  serotinus,  Salisb.  que  Herbert  même  propose  del'y  réunir.  D'après 
la  description,  elle  ne  s'en  distingue  qu'en  ce  que  la  gorge  ne  porte  pas 
de  poils  et  a  peut-être  une  nuance  plus  jaunâtre.  Sa  patrie  est  le  Maroc. 

11.  C.  Caunbesscdesli,  Gay.  — C'est  une  espèce  non  moins  dou- 
teuse qui  a  été  trouvée  à  l'île  Majorque,  l'une  des  Baléares,  et  qui  pro- 
bablement doit  aussi  être  rapportée  au  C.  serotinus,  Salisb.  On  ne  la 
connaît  qu'à  l'état  de  fructification. 

12.  C.  Damascenas ,  Herb.  —  Nous  ne  connaissons  cette  espèce 
que  d'après  des  herbiers  ;  elle  a  été  recueillie  près  de  Damas  par  le  vice- 
consul  anglais  Cartwright.  Des  espèces  connues  jusqu'à  présent,  elle  est 
la  seule  qu'on  rencontre  aussi  loin  au  Sud-Est.  Pour  les  tuniques  du 
bulbe,  c'est  avec  le  C.  nudiflorus,  Sm.  et  les  espèces  voisines  qu'elle 
semble  avoir  le  plus  d'analogie,  puisque  ces  tuniques  sont  également 
d'une  nature  assez  membraneuse,  et  que  leurs  fibres  longitudinales  ne 
sont  pas  très-saillantes,  et  se  réunissent  les  unes  aux  autres  vers  le 
haut.  Le  tube  est  marqué  de  six  stries  et  n'est  pas  plus  long  que  le 
limbe;  celui-ci  est  d'un  bleuâtre  tirant  sur  le  gris;  ses  divisions  exté- 
rieures présentent  trois  stries  assez  larges,  penniformes  latéralement. 
Les  stigmates  sont  blanchâtres  et  assez  profondément  bifides,  et  dé- 
passent les  étamines,  dont  les  filets  sont  également  blancs  et  les  anthères 
jaunes. 

13.  C.  médius,  Balb.  — Cette  plante,  originaire  du  Piémont,  res- 
semble beaucoup  au  C.  nudiflorus,  Sm.  et  semble  seulement  être  encore 
plus  grande,  de  sorte  qu'elle  se  rapproche  plus  ou  moins  du  C.  speciosus, 
Bieb.  Mais  elle  se  distingue  très-facilement  de  ces  deux  espèces  par  les 


—   331    — 

tuniques  extérieures  de  son  bulbe  qui  sont  percées  à  jour  en  forme  de 
crible.  La  Heur  est  belle,  grande  et  d'un  violet  intense;  le  tube  est  assez 
long  et  la  gorge  nue.  Les  anthères  sont  beaucoup  plus  longues  que  les 
filets  et  atteignent  souvent  la  hauteur  des  stigmates;  ceux-ci  sont  de 
couleur  safranéeet  profondément  divisés.  Cette  belle  plante  ne  se  trouve 
pas  encore,  à  ma  connaissance  du  moins,  dans  nos  jardins. 

14.  C.  dianthus,  G.  Koch.  —  C'est  une  espèce  remarquable  qu'il 
serait  à  désirer  de  voir  introduire  dans  nos  jardins.  Chaque  bulbe  porte 
constamment  deux  ou  trois  Heurs  d'un  beau  bleu;  ce  bulbe  est  lui-même 
très-grand  ;  ses  tuniques  extérieures  sont  formées  de  fortes  fibres  lon- 
gitudinales, reliées  les  unes  aux  autres  en  forme  de  réseau.  Il  en  résulte 
que  cette  espèce  ressemble  au  C.  mediws,  Balb.,  ainsi  qu'au C.cancd 'lattis, 
Herb.  cité  plus  bas.  Le  tube  est  bleu,  comme  le  limbe,  et  il  a  en  général 
la  même  longueur  que  ce  dernier,  dont  les  divisions  sont  elliptiques.  La 
gorge  est  également  bleue;  il  en  sort  des  filets  Irès-courts,  portant  des 
anthères  extrêmement  grêles;  celles-ci  atteignent  la  même  hauteur  que 
les  stigmates,  qui  sont  multifides.  J'ai  trouvé  cette  espèce  dans  la 
Haute-Arménie. 

15.  C.  Spruueri,  Boiss.  et  Heldr.  —  Cette  espèce,  originaire  de  la 
Grèce,  porte  aussi  quelquefois  deux  fleurs  sur  un  même  bulbe;  par 
les  tuniques  extérieures  de  celui-ci,  elle  se  place  immédiatement  à  côté 
de  l'espèce  précédente.  Mais  la  fleur  est  de  couleur  rose  et  ses  divisions 
sont  elliptiques  et  présentent  à  leur  base  des  stries  violettes.  La  gorge, 
comme  dans  l'espèce  précédente,  ne  porte  pas  de  poils.  Les  anthères  ont 
de  même  des  filets  très-courts,  mais  n'atteignentpas  la  hauteur  des  styles, 
qui  sont  de  couleur  orangée,  multifides  et  un  peu  plus  courts  que  les 
divisions  du  limbe. 

16.  C.  vallicola,  Herb. — Cette  espèce  fut  trouvée  pour  la  première 
fois  en  1843  par  le  célèbre  voyageur  Th.Kotschy  dans  les  montagnes  de 
l'Asie-Mineure,  non  loin  de  la  grande  route  que  les  caravanes  suivent 
pour  se  rendre  de  Trébizonde  à  Erzeroum;  un  an  après  elle  fut  aussi 
envoyée  par  M.  Carlwright,  vice-consul  anglais  à  Trébizonde.  Le  limbe 
est  d'un  blanc  brillant  (et  non  d'un  jaune-paille  clair,  comme  l'indique  le 
Botanical  register,  1847,  t.  16,  f.  3)  ;  il  a  à  peu  près  la  longueur  du  tube, 
qui  est  d'un  jaune  clair  et  s'évase  subitement  à  sa  partie  supérieure;  les 
divisions  du  limbe  sont  elliptiques-allongées  et  terminées  en  pointe,  et 
présentent  à  leur  base,  tant  en  dedans  qu'en  dehors,  deux  taches  jaunes. 
Les  anthères  sont  blanches  et  ont  plus  de  deux  fois  la  longueur  des 
iilcls;  elles  atteignent  la  hauteur  des  stigmates  qui  sont  d'un  jaune  d'or 


—  332  — 


et  offrent  souvent  à  leur  extrémité  des  divisions  simples.  Enfin,  quant  au 
bulbe,  il  est  recouvert  de  tuniques  membraneuses  dont  les  fibres  longi- 
tudinales parallèles  sont  reliées  les  unes  aux  autres  vers  le  haut. 


TROISIÈME    SECTION. 


Stigmates  non  fendus,  mais  souvent  dentelés;  fleurs  bleues,  violettes  ou 
blanches;  divisions  du  limbe  presque  égales. 

17.  C.  Caspius,  F.  et  M.  —  Cette  espèce  diffère  entièrement,  quant 
à  sa  patrie,  du  C.  Boryi,  Gay,  auquel  Herbert  la  réunit  ;  elle  n'est  mal- 
heureusement connue  que  d'après  des  herbiers  et  je  ne  l'y  ai  pas  encore 
vue  moi-même.  Les  tuniques  du  bulbe  sont  minces  et  membraneuses, 
mais  ne  se  séparent  pas  en  fibres  à  la  base.  Je  ne  trouve  indiquée  nulle 
part  la  couleur  de  la  fleur,  mais  elle  parait  être  bleuâtre  ou  violette.  Le 
tube  est,  par  rapport  au  limbe,  beaucoup  plus  long  que  dans  le  C.  Boryi, 
Gay;  la  gorge  est  un  peu  velue.  Le  caractère  important  qui  dis- 
tingue l'espèce  actuelle  de  celle  qui  vient  d'être  citée,  consiste  dans  les 
stigmates  non  fendus,  mais  à  bords  entiers.  C'est  de  toutes  les  espèces 
connues  celle  qui  croit  le  plus  vers  l'Est;  elle  a  en  effet  été  trouvée  sui- 
tes bords  de  la  mer  Caspienne  dans  la  province  de  Talysch,  qui  apparte- 
nait jadis  à  la  Perse,  et  fait  maintenant  partie  de  l'empire  Russe; 
d'après  cela,  il  est  probable  qu'un  jour  on  trouvera  aussi  des  Safrans  en 
Perse. 

18.  C.  sativus,  L.  —  C.  autumnalis,  Sm.  et  Lam.  —  C.  officinale  f 
pers.  __  Cette   espèce  est  cultivée  depuis  très-longtemps,  notamment 
dans  le  midi  de  la  France,  dans  quelques  partie  de  l'Italie,  en  Hongrie  et 
dans  plusieurs  contrées  de  l'Orient,  à  cause  de  ses  stigmates  fortement 
aromatiques  et  de  couleur  safranée,  qui,  sous  le  nom  de  Safran,  forment 
un  article  de  commerce  important.  Sa  patrie  véritable  doit  être  l'Orient, 
quoiqu'on  la  rencontre  aussi  dans  divers  endroits  de  l'Italie  à  l'état  sau- 
vage. Le  bulbe  est  pyriforme;  ses  tuniques  extérieures  sont  caractérisées 
par  des  fibres  longitudinales  distinctement  saillantes   et  reliées  entre 
elles  vers  le  haut  en  forme  de  réseau.  La  fleur  pousse  sans  feuilles;  le 
limbe  est  d'un  violet-rougeâtre  et  en  général  presque  aussi  long  que  le 
tube;  celui-ci  devient  plus  foncé  à  la  partie  supérieure;  la  gorge  est  d'un 
violet  foncé  et  présente  une  couronne  de  poils.  Les  trois  stigmates 
ont  une  couleur  safranée,  s'élargissent  vers  leur  partie  supérieure,  sont 
plus  ou  moins  crénelés  et  égalent  en  longueur  les  divisions  du  limbe. 
Dans  \eBotanical  register,  année  1845,  Herbert  indique  sous  le  nom 
«le  C.  intromissus,  une  espèce  dont  il  n'a  pas  vii  de  fleurs  et  dont  il  n'a  pu 


—  333  — 

donner  l'époque  de  floraison.  Quoique  cette  espèce  soit  placée  près  du 
C.  sativus,  L.,  il  se  pourrait  qu'elle  en  fût  très-différente,  car  je  ne  con- 
nais aucune  espèce  dont  le  bulbe  ait  des  tuniques  à  fibres  longitudinales 
molles. 

19.  C.  Pallasii,  Bieb.  — Cette  plante  n'a  été  observée  jusqu'à  pré- 
sent qu'en  Crimée  et  ne  se  trouve  pas  encore  dans  les  jardins.  Elle  res- 
semble beaucoup  au  C.  sativus,  L.  ;  elle  doit  s'en  distinguer  par  des  stig- 
mates un  peu  moins  aromatiques  et  plus  courts  que  les  divisions  du 
limbe,  et  par  des  feuilles  pendantes.  D'après  Bieberstein,  les  feuilles 
sont  toujours  dressées  chez  le  C.  sativus,  L. 

20.  C.  Thouiasii,  Ten.  —  C.  odorus,  Vis.  stirp.  daim.  —  G.  lon- 
giflorus,  Rchb.  icon.  X,  f.  1281.  —  C.  Pallasii,  Vis.  et  Gris.  —  C.  cam- 
pestris,  Herb.  —  C.  hybermis,  Friv.  —  C.  Hadriaticns,  Herb.  —  C.  Cart- 
wrightianus,  Herb. —  Cette  espèce,  qui  croit  dans  le  sud-est  de  l'Europe 
et  dont  l'habitation  est  très-étendue,  est  différente  du  C.  sativus,  L.,  ainsi 
que  duC.  Pallasii^ieb.,  et  présente  ce  caractère  que  les  feuilles  viennent 
en  même  temps  que  les  fleurs.  Elle  ne  se  distingue  d'ailleurs  des  espèces 
qui  viennent  d'être  citées  qu'en  ce  que  les  stigmates  sont  renfermés  dans 
lafleur,  plutôt rougeà très  que  d'un  jaune-safran  pur,  et  encore  moins  aro- 
matiques, et  en  ce  que  les  divisions  extérieures  du  limbe  dépassent  un 
peu  les  intérieures.  Si  du  reste  le  C.  Pallasii,  Vis.,  devait  réellement  se 
rapporter  à  cette  espèce  et  non  pas  former  avec  le  C.  hybermis,  Friv. 
(C.  campestris,  Herb.)  une  espèce  particulière,  le  C.Thomasii,  Ten.  se 
reconnaîtrait  encore  à  son  bulbe  non  pyriforme,  mais  plus  arrondi  et 
un  peu  déprimé  à  sa  partie  supérieure. 

D'après  Grisebach,  le  C.  hybermis,  Friv.  se  distingue  du  C.  Pallasii, 
Vis.,  par  sa  fleur  plus  ouverte.  Mais  chez  cette  dernière  plante  les  stig- 
mates sont  encore  indiqués  comme  ayant  les  bords  moins  entiers. 

Sous  les  noms  de  C.  Hadriaticns  et  de  C.  Cartwrightianus,  Herbert  a 
encore  décrit  deux  espèces  à  fleurs  blanches  et  d'un  lilas  clair;  mais  il  a 
depuis  reconnu  lui-même  que  la  dernière  au  moins  pouvait  être  une  va- 
riété du  C.  Pallasii  propre  à  la  Turquie;  plus  tard  même  il  l'y  a  réunie. 
Je  les  regarde  toutes  deux  comme  appartenant  à  l'espèce  actuelle,  puis- 
qu'elles n'en  diffèrent  que  par  leurs  fleurs  blanches  et  quelquefois 
striées. 

Le  C.  Thomasii  a  été  trouvé  dans  l'Italie  méridionale,  en  Dalmatie, 
dans  presque  toute  la  Turquie  d'Europe  et  en  Grèce. 

21.  C.  longiflorus ,  Raf.  —  C.  odorus,  Biv.  —  C.  Neapolitanns, 
Hoppe.  — C.  serotinus,  Bertol.  discr.  dc'Zaff.  ital.  —  Cette  espèce,  qui 


—  334  — 

n'a  encore  été  trouvée  qu'en  Sicile,  est  aussi  très-voisine  du  Safran  offi- 
cinal, mais  se  distingue  également  par  un  bulbe  arrondi  (non  pyriforme) 
et  plus  petit,  dont  les  tuniques  extérieures  cependant  ont  la  même  struc- 
ture. La  fleur  est  plus  petite  et  de  couleur  violette;  le  tube  est  très- 
grêle  et  beaucoup  plus  long  que  le  limbe;  la  gorge  est  jaune  et  ne  pré- 
sente, au  lieu  de  poils  (que  du  reste  Herbert  indique  chez  les  plantes 
qu'il  a  cultivées),  qu'une  rugosité  due  à  des  cellules  saillantes.  Les  stig- 
mates, d'une  couleur  safranée  moins  intense,  mais  également  aroma- 
tiques, dépassent  à  peine  les  étamines,  et  offrent  des  dentelures  un  peu 
plus  profondes.  Quelquefois  les  feuilles  paraissent  en  même  temps  que 
les  fleurs,  mais  elles  sont  alors  très-petites  et  continuent  à  s'allonger. 

22.  C.  odorus,  Zerapha.  —  Je  ne  connais  pas  suffisamment  cette 
espèce,  qui  est,  en  tout  cas,  très-voisine  de  la  précédente.  Elle  paraît 
être  principalement  caractérisée  par  son  bulbe  ovale,  et  par  les  divisions 
de  son  limbe  qui  présentent  trois  stries  foncées  bien  distinctes.  La  gorge 
est  jaune  et  porte  de  petits  poils  plus  ou  moins  développés.  Cette  plante 
n'aencore  été  trouvée  qu'à  l'île  de  Malte. 

23.  C.  Kotechyanns,  C.  Koch.  ■ —  C'est  une  espèce  nouvelle  que 
nous  devons  à  l'infatigable  voyageur  Th.  Kotschy  de  Vienne,  et  qui  a 
été  répandue  par  MM.  Moschkowitz  et  Siegling  d'Erfurt  (1).  Elle  se  rap- 
proche assez  du  C.  sativus,  L.;  elle  se  distingue  par  son  limbe  à  divisions 
extérieures  et  intérieures  toutes  d'un  bleu  clair,  oblongues  et  obtuses, et 
par  sa  gorge  d'un  jaune  d'or,  de  laquelle  partent  des  stries  de  la  même 
couleur  qui  vont  se  perdre  dans  la  base  des  divisions;  les  divisions  exté- 
rieures, à  peine  plus  longues  que  les  intérieures,  présentent  cinq  à  neuf 
nervures  longitudinales  d'un  bleu  foncé.  Les  anthères  sont  portées  par 
de  très-courts  filets,  et  les  stigmates  sont  presque  entiers  et  ont  une 
teinte  plus  dorée  que  ceux  du  C.  sativns,  L.  Cette  jolie  plante  croît  sur 
le  Taurus. 

24.  C.  canccllatas,  Herb.  —  C'est  une  plante  de  la  Grèce,  bien 
reconnaissable  aux  tuniques  de  son  bulbe;  elles  ne  sont  en  effet  for- 
mées que  de  grosses  fibres  ayant  entre  elles  de  nombreuses  liaisons,  ce 
qui  fait  ressembler  ces  tuniques  à  un  treillis,  ou  mieux  encore  à  un  filet 
à  pêcher.  Les  feuilles  ne  sont  encore  que  peu  développées  après  la  flo- 
raison, qui  souvent  a  déjà  lieu  en  plein  été  (du  moins  dans  la  patrie  de 
cette  plante).  La  fleur  est  assez  grande  et  d'un  bleu-rougeàtre,  traversée 
seulement  de  stries  plus  foncées  à  la  base  des  divisions.  Les  stigmates 


(1)  Voy.  la  nouvel]*;  série  des  Verhandlungen,  1™  année,  pag.  Ô98,  où  oc  Crocus 
se  trouve  décrit  pour  la  première  fois. 


—  335  — 

sont  de  couleur  orangée,  presque  entiers  et  ne  dépassent  guère  les 
étamines.  Ce  Safran  ne  croît,  d'une  manière  bien  certaine,  qu'en  Grèce, 
car  la  petite  variété  recueillie  en  Syrie  par  Kotschy  pourrait  bien  appar- 
tenir à  une  autre  espèce.  Mais  deux  autres  variétés  indiquées  depuis  par 
Herbert  se  rapportent,  sans  aucun  doute  auC.cancellatus,  dont  elles  dif- 
fèrent par  des  fleurs  blanches.  L'une,  qui  est  striée  de  violet  à  la  base  du 
limbe  et  a  un  reflet  bleuâtre,  a  reçu  le  nom  de  C.  margaritaceus;  l'autre, 
qui  peut  présenter  ou  non  des  stries,  mais  est  d'ailleurs  absolument 
blanche,  celui  de  C.  Mazziaricus. 

QUATRIÈME    SECTION. 

Fleurs  jaunes  de  diverses  nuances. 

25.  C.  §iiwopowiaMïis,  C.  Koch.  —  J'ai  découvert  cette  jolie  espèce 
en  1836,  dans  les  montagnes  du  Caucase,  où  son  bulbe,  désigné  sous 
le  nom  d'Ensela,  est  généralement  employé  comme  aliment.  Ce  bulbe, 
petit  et  ovale,  est  recouvert  de  tuniques  brunes  et  membraneuses,  sur 
lesquelles  on  distinguée  peine  des  nervures  longitudinales,  et  qui  se  dé- 
tachent irrégulièrement  à  la  base.  Cette  espèce  a  pour  caractère  essentiel 
un  limbe  infundibuliforme  qui  se  transforme  insensiblement  en  un  tube 
de  la  même  longueur  que  lui  ou  à  peine  plus  long,  est  en  entier  d'un  beau 
jaune-paille,  de  même  que  le  tube,  et  ne  présente  aucune  nervure  de 
couleur  plus  foncée.  Les  divisions  du  limbe  sont  oblongues,  arrondies, 
à  peu  près  égales  entre  elles  et  beaucoup  plus  longues  que  les  stigmates; 
ceux-ci,  d'un  jaune  d'or  et  dentelés,  ne  dépassent  guère  les  anthères,  qui 
sont  longues  et  blanches.  On  pourrait  peut-être  rapporter  à  cette  espèce 
la  variété  jaune  du  C.  Carlwriglitianus,  Herb.  (C.  Pallasii,  Bieb.)  que 
Herbert  nomme  C.  Cartwrightianus  var.  Creticus,  parce  qu'elle  a  élé 
trouvée  sur  les  montagnes  de  l'ile  de  Candie. 

26.  C.  Yitelliniis ,  Wahlenb.  nec  Hort.  —  Cette  plante  de  la  Syrie, 
trouvée  sur  le  Liban  par  le  voyageur  suédois  Berggreen,  n'a  plus  été 
observée  depuis  et  n'a  jamais  été  introduite  dans  les  jardins.  Elle  est 
essentiellement  distincte  du  C.  vitelliniis,  cultivé  au  jardin  botanique  de 
Berlin,  qui  fleurit  au  printemps.  D'après  le  voyageur  qui  l'a  découverte, 
la  fleur  a  entièrement  une  couleur  de  jaune  d'œuf,  sans  aucune  ner- 
vure de  couleur  différente  ou  seulement  plus  foncée.  Elle  s'éloigne  de 
l'espèce  précédente  par  son  limbe  à  divisions  lancéolées,  beaucoup  plus 
longues  que  les  stigmates,  qui  sont  multifidcs  et  de  la  même  longueur 
que  les  étamines.  Il  est  probable  que  les  feuilles  paraissent  en  même 
temps  que  les  fleurs. 


—  336  — 
ARBRISSEAUX  DE  PLEINE  TERRE, 

FLEURISSANT   DE   BONNE    HEURE    AU    PRINTEMPS, 

Par  M.  William  WOOD. 

Il  est  surprenant  qu'on  n'ait  pas  encore  songé,  plus  qu'on  ne  l'a  fait, 
à  réunir  dans  les  jardins  un  plus  grand  nombre  d'arbrisseaux  à  flo- 
raison précoce,  qui  puissent  former  une  agréable  transition  entre  la 
nudité  de  la  terre  en  hiver  et  sa  riche  parure  de  fleurs  au  printemps. 
L'espèce  qui  peut  ouvrir  la  série  des  floraisons  de  la  manière  la  plus 
convenable  est  le  Daphne  mezereum,  dont  les  fleurs  purpurines,  blanches 
dans  une  variété,  exhalent  une  odeur  suave.  Une  autre  espèce  plus 
brillante  qu'elle,  est  le  beau  Rhododendre  de  la  Daourie  (Rhododendron 
dauricam  atrovirens)  qui,  dès  le  commencement  du  mois  de  mars, 
épanouit  ses  fleurs  d'un  joli  violet  rose.  Quelques  pieds  de  cet  ar- 
brisseau très-rustique,  abondamment  florifère,  d'un  port  gracieux, 
plantés  au  milieu  d'une  masse  du  premier,  ou  formant  eux-n  >es  une 
masse  isolée,  produisent  un  effet  remarquable.  Le  Jasminum  nudifloriim, 
qui  fleurit  en  hiver  et  au  premier  printemps,  produit  de  charmants 
contrastes,  sur  un  bord  de  verdure,  par  ses  fleurs  d'un  joli  jaune  clair, 
semblables  à  des  étoiles.  Après  lui  fleurit  le  Forsythia  viridissima,  dont 
les  branches  se  couvrent  littéralement  de  fleurs  jaunes,  à  odeur  suave, 
et  qui  se  montre  aussi  rustique  qu'abondamment  florifère.  On  peut 
faire  contraster  avec  cet  arbrisseau  l'élégant  Rhodora  Canadensis,  qui 
produit  une  profusion  de  fleurs  roses  lilacées,  petites,  mais  jolies.  Ces 
espèces  sont  suivies  du  Dentzia  gracilis  et  du  Rerberis  Darwini,  char- 
mants arbrisseaux,  dont  le  premier  ressemble  à  un  Syringat  en  minia- 
ture, avec  de  nombreuses  grappes  de  fleurs  blanches  comme  la  neige, 
dont  le  second  est  orné  d'un  grand  nombre  de  grappes  pendantes  de 
fleurs  colorées  en  jaune  d'or,  qui  contrastent  d'une  manière  charmante 
avec  la  verdure  du  feuillage.  Plus  tard  fleurit  le  nouveau  Rhododendron 
ciliatum  de  l'Himalaya,  jolie  espèce  naine,  dont  les  fleurs  blanches, 
légèrement  lavées  de  rose  sont  grandes  comparativement  aux  dimensions 
de  la  plante. 

Enfin  M.  Wood  recommande  comme  méritant  d'être  plus  répandues 
qu'elles  ne  le  sont  encore,  et  comme  très-propres  à  être  cultivées  en 
pot,  quelques  espèces  essentiellement  ornementales,  bien  connues,  il 
est  vrai,  mais  encore  trop  peu  recherchées,  dont  la  floraison  est  plus 
tardive,  notamment  le  Pêcher  à  fleurs  doubles,  le  Ribes  atro-sangui- 
neum,  et  le  charmant  Amandier  nain,  à  fleur  simple  et  double. 


33" 


MULTIPLICATION  DES  ÏROPOEOLUM  A  TUBERCULES. 

La  multiplication  des  espèces  de  Tropœolum  pourvues  de  tubercules, 
telles  que  les  Tropœolum  tricolor,  Jaratti,  azureum,  violaeeum,  présente 
beaucoup  de  difficultés  et  ne  réussit  même  pas  toujours  lorsqu'on  la  fait 
par  les  méthodes  ordinaires.  Aussi  le  prix  de  ces  plantes  se  maintient-il 
toujours  assez  élevé.  Il  est  rare  d'en  obtenir  des  graines,  et  d'ailleurs 
même  celles  qui  sont  bien  mûres  et  fraîches  ne  germent  pas  très-facile- 
ment. Les  boutures  exigent  beaucoup  de  soins  et  souvent  les  pieds 
qu'elles  produisent  meurent  avant  d'avoir  formé  des  tubercules.  Cette 
difficulté  de  multiplication  a  déterminé  l'auteur  à  essayer  un  nouveau 
procédé  de  propagation  qui  lui  a  parfaitement  réussi  et  qu'il  expose  de 
la  manière  suivante. 

Au  moment  de  la  plantation,  en  automne,  les  pots  qui  doivent  rece- 
voir les  tubercules  destinés  à  la  multiplication  des  Tropœolum  sont  rem- 
plis di  '^nost  habituellement  employé  pour  la  culture  de  ces  plantes 
seulem£n's  et  -u'à  5  ou  6  centimètres  du  bord.  Les  tubercules  sont 
alors  enf(ises  dont ->îtié  dans  cette  terre,  après  quoi  on  donne  assez  de 
chaleur  et  line  Par'<ie  <*nour  déterminer  une  végétation  rapide.  Dès  que 
la  tige  grêle  et  a  tourbeuse; forme  fe  ces  plantes  est  devenue  longue  de 
50  à  65  centimètres,  en  lu  '">ant  et  tordant  avec  assez  de  précautions 
pour  ne  pas  la  rompre,  on  lui  dit  des  blessures  sur  plusieurs  points, 
et,  autant  que  possible,  au  point  d'insertion  des  feuilles;  on  la  dispose 
ensuite  en  cercle  sur  la  surface  de  la  terre  où  on  l'assujettit.  On  achève 
ensuite  de  remplir  le  pot  jusqu'à  la  hauteur  ordinaire  ,  avec  de  la  terre 
de  bruyère  ou  du  terreau  de  feuilles  mélangé  de  beaucoup  de  sable,  de 
manière  à  ne  laisser  sortir  que  la  sommité  delà  tige.  Celle-ci  s'accroît 
rapidement;  la  plante,  comme  de  eoutume,  végète  avec  beaucoup  de 
vigueur  et  fleurit  abondamment.  Sa  tige  endommagée  avec  intention  et 
recouverte  de  terre,  produit  des  racines  sur  plusieurs  points,  de  ma- 
nière à  déterminer  une  nutrition  abondante.  En  outre,  en  retirant 
plus  tard  la  terre  superficielle,  on  reconnaît  autour  du  tubercule-mère 
plusieurs  jeunes  tubercules  qui  se  sont  produits  aux  points  où  la  tige 
avait  développé  des  racines  et  était  devenue  plus  épaisse.  Ainsi  tracé,  un 
pied  de  Tropœolum  Jaratti,  dans  un  pot  de  16  centimètres,  a  donné  six 
nouveaux  tubercules  qui  avaient  de  2  à  3  centimètres  de  diamètre. 

Le  Tropœolum  pentaphyllum  planté  en  pleine  terre  et  traité  de  la  même 
manière  a  produit  un  grand  nombre  de  tubercules  dont  l'épaisseur  allait 

REI.fi.    HORT.    T.    VI.  28 


—  338  — 

jusqu'à  5  centimètres.  Ainsi,  dans  la  même  année  ,  on  se  procure  sans 
difficulté  des  tubercules  de  ces  plantes  assez  forts  pour  servir  i  les  mul- 
tiplier commodément  et  avec  sûreté. 

(Gartenflora ,  traduction  du  Joum.  de  la  Soc. 
Imp.  et  Cent,  dlwrt.  de  Paris.) 


SUR  LA  CULTURE  DES  ORCHIDÉES  EN  PLEINE  TERRE, 

Par  M.  E.  Regel. 

Un  mémoire  étendu  qui  vient  d'être  publié  par  M.  E.  Regel,  au 
sujet  du  jardin  botanique  de  Zurich  ,  renferme,  dans  un  chapitre  spé- 
cial, un  véritable  traité  sur  la  culture  des  Orchidées  de  pleine  terre, 
à  laquelle  il  a  donné  une  attention  toute  particulière,  pendant  tout  le 
temps  qu'il  est  resté  à  la  tète  de  cet  établissement.  Nous  croyons  que 
nos  lecteurs  liront  avec  intérêt  un  résumé  de  ce  travai'  ..^rtant, 
fruit  de  l'expérience  personnelle  du  savant  qui  dirige  ..  ,  ,  noment, 
le  jardin  botanique  de  St.-Pétersbourg.  ,,      .  ,.  . 

Tandis  que  la  culture  des  Orchidées  tropK    j7 .      .  .  nos  jours  en 
,  ,,    ,       ■  •    ,.  .      forsythia  v>'\        J 

très-grande  vogue,  celle  des  plantes  indigent         .      orne  famille  est  en- 

d  iienrc  """ 
core  presque  entièrement  négligée.  La  ca,    J  en  est  surtout  dans  l'opinion 

généralement  répandue  que  ces  végétaux  ne  peuvent  être  cultivés  en 
pleine  terre,  mais  seulement  en  pots  et  que  même  dans  ces  conditions, 
ils  exigent  beaucoup  de  soins  et  de  précaution.  D'après  M.  Regel ,  cette 
opinion  est  entièrement  erronée. 

Les  Orchidées  indigènes  de  nos  pays  croissent  naturellement  dans  les 
prés,  dans  les  plaines,  sur  les  pentes  des  montagnes,  à  l'ombre  des  bois. 
On  ne  les  rencontre  que  sur  les  terres  qui  n'ont  pas  encore  été  fumées, 
ou  qui  ne  l'ont  été  que  très-faiblement.  Dès  que  les  prairies  com- 
mencent à  recevoir  des  fumures  régulières  ,  les  Orchidées  qui  s'y 
trouvaient  ne  tardent  pas  à  disparaître.  Elles  viennent  spontanément 
tantôt  sur  les  sols  entièrement  incultes  formés  uniquement  par  la  désa- 
grégation des  roches  ou  ne  contenant  encore  qu'une  très-faible  propor- 
tion d'humus,  tantôt  sur  des  terres  plus  riches  en  humus,  quelques-unes 
même  croissent  dans  l'humus  pur.  Parmi  ces  dernières  sont  les  espèces 
des  bois  touffus,  qui  ressemblent  entièrement  par  leur  port  à  des 
parasites.  Telles  sont  YEpipogum  Gmelini  et  le  Neottia  nidus-avis.  En 
outre,  on  en  rencontre  certaines  dans  des  endroits  humides  ou  même 
marécageux,  d'autres  sur  des  pentes  sèches,  etc. 


—  339  — 

Parmi  les  espèces  de  nos  pays,  la  plupart  forment  en  terre  deux  tu- 
bercules, soit  ovoïdes,  soit  prolongés  inférieurement  en  digitation,  dont 
l'un  déjà  flétri,  épuisé,  fournit  au  développement  de  la  tige  de  l'année  ; 
dont  l'autre,  tout  frais  et  renflé,  devra  servir  à  la  végétation  de  l'année 
suivante.  D'autres,  telles  que  les  Epipactis,  Neottia,  Cypripediam,  ne 
présentent  qu'un  faisceau  de  racines  simples,  plus  ou  moins  épaisses.  11 
est  de  la  plus  grande  importance,  lorsqu'on  veut  transporter  ces  diffé- 
rentes Orchidées  de  la  campagne  dans  les  jardins,  de  les  enlever  avec  une 
motte  telle  que  leur  portion  souterraine  y  soit  contenue  en  entier.  Ces 
faits  posés  et  développés,  M.  Regel  expose  la  culture  des  Orchidées 
indigènes  dans  plusieurs  paragraphes  dont  voici  le  résumé. 

Les  Orchidées  de  nos  pays  peuvent  très-bien  être  cultivées  dans  les 
jardins,  pourvu  qu'on  les  place  de  manière  analogue  à  leur  station 
naturelle. 

Toute  fumure  doit  être  soigneusement  évitée.  Dès  lors,  il  faut  éviter 
de  les  planter  dans  une  terre  déjà  engraissée  par  une  culture  jardinière 
antérieure  ou  fumée  depuis  peu  de  temps.  Pour  celles  comme  la  plupart 
des  Orchis  et  Ophrys  qui  croissent  naturellement  dans  des  prairies  ou 
des  pelouses  dont  la  terre  est  plus  ou  moins  mêlée  d'humus,  on  fait  un 
mélange  d'une  partie  de  terre  fraîche  douce  ou  de  terre  de  gazon,  d'une 
partie  de  terre  tourbeuse  et  d'une  demi-partie  de  sable  argileux  ou  de 
vase  d'étang. 

GRAND  FESTIVAL  HORTICOLE 

Organisé  à  Liège  le  24  août  1856,  à  Voccasion  du  25e  anniversaire  de 
l'inauguration  de  S.  M.  le  Roi. 

La  livraison  du  mois  d'août  de  la  Belgique  horticole  était  déjà  com- 
posée lorsque  s'est  ouverte  la  grande  exposition  de  fleurs,  fruits,  cé- 
réales et  instruments  aratoires,  organisée  par  les  Sociétés  d'horticul- 
ture de  Liège  réunies,  à  l'occasion  de  l'arrivée  du  roi  dans  leur  ville. 
Mais  nous  voulons  profiter  du  peu  d'espace  libre  qui  nous  reste  pour 
remercier  tous  les  horticulteurs  belges  et  étrangers  qui  ont  bien  voulu 
contribuer  à  l'éclat  d'une  manifestation  en  l'honneur  du  Roi ,  de  l'em- 
pressement qu'ils  ont  montré  pour  répondre  à  l'appel  de  la  Commission 
organisatrice.  L'exposition  a  surpassé  l'attente  générale  :  il  nous  suffira 
de  dire  que  127  exposants  y  ont  pris  part  en  répondant  à  98  concours, 
et  que  le  jury  a  décerné  2  médailles  d'or,  48  médailles  de  vermeil,  79 
médailles  d'argent ,  43  médailles  de  bronze.  Nous  publierons  le  compte 
rendu  de  l'exposition  dans  la  prochaine  livraison. 


—  340  — 

JARDIN  FRUITIER. 


DU  MURIER, 
Par  M.  L.   de  Bavay. 

Arbre  monoïque  et  parfois  dioïque.  Fleurs  mâles  :  calice  à  quatre  di- 
visions, corolle  nulle;  quatre  étamines  à  filaments  droits,  plus  longs 
que  le  calice.  Fleurs  femelles  :  calice  semblable;  corolle  nulle,  ovaire  su- 
père,  globuleux,  surmonté  de  deux  styles  divergents. 

Le  fruit  est  formé  par  la  réunion  de  toutes  les  fleurs  femelles,  d'un 
chaton  dont  les  calices,  devenus  charnus,  constituent  autant  de  petits 
fruits  à  une  graine,  lesquels  s'unissent  et  composent  la  mûre. 

Les  mûriers  sont  des  arbres  dont  le  suc  est  laiteux ,  les  feuilles 
alternes,  simples  et  accompagnées  de  stipules  à  leur  base.  Les  chatons 
sont  solitaires  ou  réunis  plusieurs  ensemble  dans  les  aisselles  des 
feuilles. 

Cet  arbre  a  beaucoup  plus  d'importance  pour  les  feuilles  qu'il  fournit 
à  la  nourriture  de  l'insecte  qui  donne  la  soie,  que  sous  le  rapport  de  son 
fruit,  qu'on  ne  sert  pas  à  table. 

Nous  n'avons  pas  à  nous  occuper  des  mûriers  qui  servent  à  l'éduca- 
tion des  vers  à  soie.  Nous  ne  devons  considérer  le  mûrier  que  sous  le 
rapport  des  fruits  et  c'est  pourquoi  nous  allons  traiter  du  mûrier  noir. 

MURIER  NOIR. 
[Monts  nigra,    Lin.) 

Arbre  de  7  à  14  mètres  selon  le  climat  et  la  nature  du  terrain,  se 
formant  en  tête  plus  ou  moins  arrondie,  à  branches  et  rameaux  tor- 
tueux et  à  bourgeons  courts  et  serrés.  Feuilles  pétiolées,  cordiformes, 
aiguës,  dentées,  glabres  et  rudes  en  dessus  ,  pubescentes  en  dessous  , 
entières  ou  quelquefois  lobées  ou  découpées.  Chatons  solitaires  ou  par 
deux  ou  trois  ensemble,  de  forme  oblongue,  à  axe  et  calice  pubescents, 
dans  les  fleurs  mâles;  ovales,  à  courts  pédoncules,  dans  les  fleurs  fe- 
melles. Fruits  ovales-oblongs,  de  grosseur  variable,  d'un  pourpre  noi- 
râtre, dont  la  saveur  mucilagineuse  ,  sucrée  et  acide,  est  assez  agréable. 
Les  fleurs  paraissent  en  juin  et  les  fruits  mûrissent  successivement  de 
juillet  en  septembre. 

Le  mûrier  noir  est  originaire  de  la  Perse  ,  mais  l'époque  de  son  in~ 
troduction  en  Europe  est  inconnue,  puisque  les  auteurs  anciens  n'en 
font  aucune  mention.  Il  a  probablement  été  importé  par  la  Grèce  et 
l'Italie,  d'où  les  Romains  l'auront  apporté  dans  les  Gaules  à  une  époque 
qu'on  ignore  également. 


Alnrirr  noir 


—  341  — 

Les  poètes  de  l'antiquité  ont  dit  que  son  fruit  a  été  blanc.  D'après 
Ovide  (Métamorphoses,  livre  IV),  c'est  depuis  que  Pyranie  s'est  donné 
la  mort  au  pied  d'un  mûrier,  que  ses  fruits,  arrosés  par  une  pluie  de 
sang,  sont  devenus  noirs,  et  que  sa  racine  ensanglantée  a  donné  la  cou- 
leur de  pourpre  à  la  mûre  qui  pend  à  ses  rameaux. 

Les  mûres  fraîches  étaient  en  usage  à  Rome,  où  on  les  mangeait  au 
commencement  des  repas,  et  l'on  en  faisait  une  préparation  médicale, 
espèce  de  panacée  universelle,  à  laquelle  on  attribuait  la  vertu  de  guérir 
tous  les  maux. 

De  notre  temps,  on  les  mange  fraîches  pendant  tout  le  mois  d'août. 
Elles  sont  rafraîchissantes  et  un  peu  astringentes,  de  même  que  le  sirop 
que  l'on  prépare  avec  parties  égales  de  sucre  et  de  mûres  noires  cueillies 
avant  leur  parfaite  maturité.  Ce  sirop  s'emploie  en  gargarismes,  comme 
spécifique  contre  les  maux  de  gorge.  Etendu  d'eau,  il  forme  une  boisson 
que  l'on  administre  dans  les  lièvres  bilieuses. 

L'écorce  du  mûrier  est  noire,  acre  et  amèrc;  on  peut  en  faire  des  cordes 
et  du  papier.  Pline  a  vanté  sa  propriété  purgative  ou  vermifuge;  mais 
la  médecine  moderne  n'en  fait  aucun  usage. 

Ses  feuilles  sont,  dit-on,  employées  en  Sicile  et  en  Calabre  pour  la 
nourriture  des  vers  à  soie  dont  on  Areut  obtenir  un  fil  plus  grossier  mais 
plus  solide. 

Son  bois,  qui,  au  dire  de  Pline,  noircit  en  vieillissant,  s'emploie  à  des 
ouvrages  de  menuiserie  et  de  tour.  Il  y  a  quelques  années  qu'à  Londres 
à  la  vente  de  la  veuve  du  médecin  Garrick,  un  vase  de  ce  bois  sculpté  et 
monté  en  vermeil,  fut  vendu  600  francs  et  un  fauteuil  sculpté  et  fait  du 
même  bois  atteignit  le  prix  de  3,800  francs.  Il  convient  d'ajouter  que 
ces  objets  provenaient  du  bois  d'un  mûrier  planté  par  Shakspeare. 

Le  mûrier  noir  est  presque  toujours  relégué  dans  les  basses-cours,  où 
il  trouve  un  abri  contre  les  vents  du  nord  et  un  terrain  mêlé  de  dé- 
combres, ce  qui  lui  convient  parfaitement.  On  le  laisse  croître  en  liberté, 
en  le  débarrassant  seulement  du  bois  mort;  on  ne  le  taille  que  pour  le 
rajeunir  ou  lorsque  ses  fruits  ont  perdu  leur  qualité. 

Il  y  a  des  mûriers  dont  les  récoltes  sont  alternes,  c'est-à-dire,  très- 
abondantes  une  année  sur  deux.  On  reconnaît  facilement  l'année  abon- 
dante au  grand  nombre  de  fleurs  femelles  et  à  la  rareté  des  fleurs  mâles. 

Les  mûriers  noirs  d'une  certaine  force,  qu'on  élève  dans  les  pépi- 
nières, sont  d'une  reprise  assez  difficile,  s'ils  n'y  ont  subi  quelques 
transplantations  préalables.  C'est  pourquoi  il  est  bon  de  pratiquer  des 
trous  assez  grands  et  de  les  y  planter,  en  remblayant  avec  des  détritus 
de  couche  ou  d'autres  terres  légères  et  substantielles. 

[Annales de  Pomologie,  li,  79.) 


CULTURE  MARAÎCHÈRE. 

LA  POMME  DE  TERRE  SAUVAGE, 
Par  J.  Lindley. 

Malgré  toutes  les  recherches  faites  sur  la  patrie  de  la  pomme  de  terre, 
son  origine  est  encore  enveloppée  d'obscurité.  Sans  parler  des  opinions 
anciennes,  Meyen,  dans  sa  Géographie  botanique,  lui  assigne  pour  patrie 
toute  la  partie  occidentale  de  l'Amérique  méridionale,  l'ayant  rencontrée 
lui-même  à  l'état  sauvage  dans  deux  localités  du  Chili  et  du  Pérou. 
Il  admet  aussi  avec  Ruiz  et  Pavon  qu'elle  se  trouve  dans  les  montagnes 
de  Chancay,  mais  ne  pense  pas,  comme  Humboldt,  qu'elle  ait  été  cul- 
tivée par  les  anciens  Mexicains  avant  l'arrivée  des  Européens.  Il  n'est 
pas  parfaitement  certain  que  les  pieds  trouvés  par  Meyen  fussent  réelle- 
ment sauvages;  mais  sur  la  côte  orientale  de  l'Amérique.  Darwin,  natu- 
raliste du  Beugle  ,  a  vu  la  pomme  de  terre  croissant  sur  les  côtes  sa- 
blonneuses des  îles  qui  forment  le  petit  archipel  des  Chanos,  par  le  45e 
degré  de  latitude.  Les  tubercules  étaient  généralement  petits;  l'un  d'eux 
cependant  avait  5  centimètres  de  diamètre  et  ressemblait  sous  tous  les 
points  aux  pommes  de  terre  anglaises.  On  les  trouve  encore  plus  au 
sud,  sur  la  côte  du  Chili,  et  les  Indiens  les  nomment  Aquinas.  Au 
Chili,  la  pomme  de  terre  est  à  l'état  sauvage  et  connue  sous  le  nom  de 
Maglia;  des  tubercules  envoyés  en  1822  par  M.  Caldelengh,  et  cultivés 
dans  le  jardin  de  la  Société  d'Horticulture  de  Londres,  ont  donné  une 
plante  identique  à  la  pomme  de  terre  anglaise.  On  en  a  fait ,  il  est  vrai, 
une  variété  sous  le  nom  de  Solarium  Commersonii ;  mais,  quant  à  moi, 
je  ne  saurais  trouver  aucune  différence  entre  notre  pomme  de  terre  et 
la  Maglia  du  Chili. 

M.  Uhde,  qui  réside  au  Mexique,  m'a  aussi  envoyé  des  tubercules 
sauvages  de  ce  pays  qui  ont  reproduit  notre  pomme  de  terre.  De  plus, 
en  juin  1846,  la  Société  a  reçu  une  variété  velue  du  Solarium  tuberosuin, 
donnant  peu  de  tubercules,  mais  beaucoup  de  stolons.  Le  paquet  portait 
pour  étiquette  :  «  Pommes  de  terre  sauvages  du  Pérou,  recueillies  à 
2,400  mètres  d'élévation.»  Cette  espèce  est  identique  à  la  Maglia  Au 
Chili  ;  c'est  elle  que  Schlechtendall  a  désignée  sous  le  nom  de  Solanum 
verrucosum;  elle  provenait  de  Mineral-del-monte.  Je  la  trouve  égale- 
ment identique  à  une  espèce  provenant  du  volcan  d'Orizaba,  d'une 
hauteur  de  3,000  mètres,  et  que  Schlechtendall  et  Bouché  ont  désignée 
sous  le  nom  de  Solanum  stolonifcrum. 

Le  Chili  et  le  Mexique  sont  donc  bien  la  pairie  de  la  vraie  pomme  tic 
terre. 


—  343  — 

HISTOIRE  DES  PLANTES  UTILES. 


NOTICE  SUR  QUELQUES  PRODUITS  IMPORTANTS 

Fournis  par  diverses  espèces  de  Palmiers  , 
Par  M.  Olivier  Du  Vivier. 

Le  pauvre  et  ignorant  émigrant  qui  abandonne  sa  cabane  natale  pour 
aller  demander  au  sol  de  l'Amérique  du  Sud  ce  que  la  terre  de  la  vieille 
Europe  ne  peut  lui  donner,  doit  être  frappé  d'éionnement  à  la  vue  de 
cette  magnifique  et  singulière  végétation  dont  il  ne  pouvait  avoir  au- 
cune idée.  La  richesse  des  formes  et  des  couleurs  lui  fait  déjà  pressentir 
l'abondance  des  produits,  et  c'est  avec  joie  qu'il  va  s'attacher  à  la  glèbe, 
certain  d'être  largement  rémunéré  des  premiers  travaux  qu'il  lui  faut 
nécessairement  entreprendre. 

Notre  dessein  n'est  pas  de  tracer,  à  grands  coups  de  pinceau  ,  un 
(ableau  séduisant,  mais  peu  utile,  de  la  végétation  des  tropiques;  ce 
que  nous  voulons  ,  c'est  tirer  de  ce  tableau  quelques-unes  des  plantes 
qui,  par  leurs  productions  diverses,  sont  devenues  presque  nécessaires 
à  l'humanité,  c'est  décrire  ces  plantes,  leurs  produits  et  la  manière  dont 
on  les  obtient;  c'est  établir  des  rapports  plus  intimes  entre  l'Europe  et 
les  autres  continents,  en  faisant  connaître  à  celle-là  les  matières  ex- 
portées de  ceux-ci. 

Pour  cet  article,  nous  avons  choisi ,  dans  la  belle  famille  des  Pal- 
miers, plusieurs  espèces  intéressantes  dont  nous  nous  proposons  d'ana- 
lyser les  productions. 

§   I.    LES    PALMIERS    A   SAGOU. 

Le  Sagou  est  une  fécule  provenant  de  diverses  espèces  de  palmiers, 
et  surtout  des  Sagus  Rumphii  (V.  pi.  79),  Sagus  lœvis  et  Saguerus  Rum- 
phii,  espèces  de  taille  peu  considérable  (20  à  30  pieds  au  plus)  et  que 
l'on  trouve  ordinairement  dans  des  endroits  marécageux.  Leur  tronc 
ou  stipe présente  extérieurement  un  derme  rugueux  et  épais,  assez  ana- 
logue à  celui  du  bambou;  mais  à  l'intérieur ,  il  est  rempli  d'une  moelle 
ou  tissu  cellulaire  qui  renferme  une  énorme  quantité  de  fécule  tenue  là 
en  réserve  par  la  nature  pour  la  maturation  du  fruit,  car  aussitôt  que 
la  floraison  du  palmier  a  cessé  et  que  le  fruit  commence  à  se  développer, 
les  cellules  féeulifères  disparaissent  elle  slipc  se  vide  complètement. 


344 


L'extraction  du  Sagou  est  une 
opération  très-facile,  mais  elle 
doit  se  faire  avant  l'épanouisse- 
ment des  fleurs,  et  elle  exige 
que  l'arbre  tout  entier  soit  sa- 
crifié. On  choisit,  pour  la  prati- 
quer, le  moment  où  les  feuilles 
des  Palmiers  se  couvrent  d'une 
poudre  blanchâtre  et  que  plu- 
sieurs épines,  tant  du  sommet 
que  des  feuilles,  commencent  à 
tomber  :  c'est  alors  que  la  moelle 
est  le  plus  abondante.  Le  tronc 
abattu  est  ensuite  fendu  et  divisé 
en  morceaux  de  6  à  7  pieds  de 
longueur,  et  la  moelle  arrachée, 
dépouillée  de  ses  enveloppes, 
puis  fortement  broyée,  est  sou- 
mise à  des  lavages  répétés  qui 
séparent  le  sagou  du  paren- 
Pl.  79.  Le  Minier  à  Sagou  (Sagus  Rumphii).       chyme.  De  celte  façon  la  fécule 

se  dépose  au  fond  du  vase,  et,  en  décantant,  on  l'obtient  très-blanche, 
très-fine  et  constituant,  après  avoir  été  séchée  au  soleil,  une  pâte  ap- 
pelée Sagiimanta;  mais  afin  qu'elle  se  conserve,  on  est  obligé  de  la 
passer  et  de  la  mouler  avec  des  platines  perforées,  puis  de  la  dessé- 
cher au  feu. 

Beaucoup  de  fabriques  anglaises  emploient  aujourd'hui  le  Sagou 
comme  amidon.  Mais  longtemps  auparavant  il  servait  de  nourriture 
aux  habitants  de  l'Archipel  indien  qui  le  préparent  de  diverses  façons. 
Ainsi,  clans  toutes  les  îles  Moluques,  aux  Manilles,  aux  Philippines,  etc., 
on  en  forme,  avec  la  pâte  molle,  tantôt  des  pains  mollets  assez  bons, 
tantôt,  par  son  association  avec  quelques  aromates,  des  poudingiies  qui 
conviennent  fort  bien  aux  convalescents;  d'autres  fois,  et  alors  c'est  aux 
marchés  d'Europe  qu'il  est  destiné,  le  Sagou  est  soumis  au  procédé  dit 
de  granulation,  procédé  qui  a  pour  but  d'en  former  de  petits  grains  ar- 
rondis, translucides  et  offrant  un  lustre  perlé  :  cette  préparation,  la 
seule  qu'on  emploie  dans  nos  contrées  comme  nourriture,  est  encore 
un  secret  conservé  par  les  Indiens. 

Le  Sagou  est  maintenant  universellement  employé  sur  notre  con- 
tinent, où  il  entre  dans  la  composition  des  potages  à  l'instar  du  riz,  du 
vermicelle,  delà  pâle  d'Italie  :  ses  grains  se  gonflent  par  leur  ébullition 


—  845  — 

dans  le  bouillon  et  y  acquièrent  une  plus  grande  translucidilé.  C'est  un 
aliment  léger  et  réparateur,  quoique  de  facile  digestion.  Seba  le  recom- 
mandait particulièrement  comme  la  première  nourriture  à  donner  aux 
enfants,  et  les  médecins  du  siècle  dernier  le  conseillaient  dans  la 
phthisie;  mais  le  Sagou,  pas  plus  que  les  médicaments,  n'a  aucune  vertu 
spécifique  contre  cette  dernière  affection;  s'il  agit,  c'est  tout  simple- 
ment comme  adoucissant,  comme  émollient. 

Il  existe  dans  le  commerce  deux  ou  trois  variétés  très-distinctes  de 
Sagou.  La  plus  répandue  est  le  Sagou  perlé,  qui  se  présente  sous  forme  de 
grains  de  sable  très-régulièrement  arrondis.  Puis  vient  le  Sayou  granulé, 
dont  les  grains  atteignent  la  grosseur  d'une  graine  de  moutarde  et  qui 
forment  une  excellente  préparation  devenant  d'un  usage  de  jour  en  jour 
plus  général.  Enfin,  comme  troisième  variété,  nous  admettons  le  Sagou 
brun  (Sagu  fuscum  de  Pereira)  que  l'on  rencontre  rarement  et  dont ,  en 
1851,  on  a  pu  voir  un  spécimen  à  l'Exposition  des  Importations  ,  de 
Liverpool.  Ce  Sagou,  de  couleur  rouge-brun,  présentait  un  aspect 
onctueux  et  ressemblait  assez  bien  à  des  graines  de  radis  plus  grosses 
que  d'ordinaire;  il  est  spécialement  connu  dans  le  commerce  sous  le 
nom  de  Sagou  de  Bornéo. 

Presque  tout  le  Sagou  qui  arrive  en  Europe  nous  vient  de  Singapore; 
mais  ce  lieu  n'est  rien  autre  que  l'entrepôt  des  produits  de  l'Inde.  Les 
Palmiers  à  Sagou  croissent  spontanément  dans  les  nombreuses  îles  de 
l'Océan  indien,  et  c'est  de  là  que  le  Sagou  est  envoyé  à  Singapore,  puis 
exporté  par  toute  la  terre.  Afin  de  montrer  combien  sa  consommation 
est  grande,  nous  ne  citerons  qu'un  fait,  à  savoir  la  quantité  qui  en  est 
importée  annuellement  en  Angleterre  et  qui  s'élève  aujourd'hui  à  plus 
de  5,000  tonnes. 

La  fécule  est  le  seul  produit  que  les  Européens  extraient  des  sagou- 
tiers;  mais  dans  l'Inde,  les  feuilles  de  ces  monocotylédones  servent  en 
outre  à  couvrir  les  maisons,  leurs  nervures  remplacent  le  chanvre  pour 
la  fabrication  des  cordages,  et  enfin,  il  n'est  pas  jusqu'au  duvet  qui 
recouvre  le  limbe  foliaire  qui  ne  serve  aux  Indiens  à  la  fabrication  de 
certaines  étoffes. 

§   II.    LE    PALMIER   GOMMUTK 

Souslenom  de  Gomuto,  le  célèbre  Rumphd'Amboine  décrivit  un  pal- 
mier que  Labillardière  observa  dans  les  vallées  humides  des  Moluqueset 
baptisa  du  nom  d'Arenga  Saccharifera.  C'est  le  palmier  Gommiiti  (v. 
pi.  80),  arbre  au  port  noble,  d'environ  20  mètres  de  hauteur,  à 
feuilles  ailées  et  longues  de  5  à  6  mètres  ;  ses  fleurs  sont  monoïques  et 
situées  dans  des  spathes  séparées. 


«"346 


l'I.  80.  Le  Palmier  Gomuiuli 
(Areiiga  sacekarifera). 


UArenga,  sans  avoir  l'impor- 
tance du  sagoulier,  n'en  constitue 
pas  moins,  pour  les  habitants  des 
tropiques,  une  production  végétale 
des'plus  utiles.  Lorsque  ses  grandes 
feuilles  ont  achevé  leur  croissance, 
lorsqu'elles  se  flétrissent,  elles  tom- 
bent, laissant  la  base  du  pétiole 
étreindre  fortement  le  stipe;  bien- 
tôt toutefois,  le  parenchyme  mou 
de  ces  restes  de  pétioles,  se  décom- 
pose à  son  tour  et  laisse  à  découvert 
de  fortes  fibres  souvent  disposées 
comme  à  l'époque  de  leur  dévelop- 
pement, mais  qui  ne  tardent  pas  à 
se  détacher  elles-mêmes  et  à  pendre 
librement,  ce  qui  fait  croire,  la  pre- 
mière fois  qu'on  examine  cet  arbre, 
que  le  tronc  a  été  déchiqueté  et 
comme  privé  de  son  derme. 

Or,  ce  sont  ces  fibres  qui,  pré- 
parées, servent  aux  habitants  de 
l'Inde  à  la  fabrication  de  toiles,  de 
cordages,  de  câbles  et  d'une  foule 
d'autres  objets  domestiques.  Les 


libres  de  Gommuti  sont  très-communes,  mais  elles  servent  presqu'ex- 
clusivement  aux  indigènes,  et  il  n'en  arrive  que  fort  peu  sur  notre  con- 
tinent où  il  n'est  pas  probable  d'ailleurs  qu'elles  obtiennent  quelque 
succès  ;  leur  raideur,  qui  empêche  d'en  fabriquer  des  cordages  lisses, 
et  leur  manque  d'élasticité,  ne  peuvent  en  effet  être  compensées  par 
leur  principale  qualité,  c'est-à-dire  leur  inaltérabilité  par  l'humidité. 

Mais  ce  n'est  pas  là  le  seul  produit  fourni  par  YArenga;  en  pratiquant 
des  incisions  aux  régimes  naissants  de  ce  palmier,  il  en  découle  une 
liqueur  qui,  soumise  à  la  coction,  donne  du  sucre,  et,  à  la  fermentation, 
une  liqueur  agréable.  En  ménageant  les  incisions,  on  obtient  cette 
liqueur  pendant  plus  de  la  moitié  de  l'année.  Enfin,  pour  terminer,  nous 
dirons  que  les  fruits  encore  verts  de  YArenga,  sont  confits  au  sucre,  et, 
dans  cet  état,  très-estimés  à  la  Cochinchine  où  on  les  sert  sur  les  tables 
les  mieux  composées. 


Ml 


§    III.    LE   COCOTIER. 

Commun  sous  les  tropiques,  mais  surtout  dans  les  îles  de  l'Archipel 
indien,  le  cocotier  (Cocos  nacifera,  L.)  (v.  pi.  81)  est  un  des  bienfaits 

les  plus  précieux  que  la 
nature  ait  pu  concéder 
aux  habitants  de  ces 
contrées.  Le  stipe,  les 
feuilles,  les  fruits,  tout 
y  est  utile.  L'homme 
peut  y  trouver  tout  ce 
qui  lui  est  strictement 
nécessaire  pour  vivre, 
et  la  preuve,  ce  sont  les 
nombreux  équipages  je- 
tés sur  des  ilôts  sablon- 
neux, et  qui  n'ont  dû 
leur  salut  qu'à  l'exis- 
tence de  quelques  Coco- 
tiers dont  le  germe  y 
avait  été  jeté  par  ces 
mêmes  vagues  qui  en- 
gloutissent les  mortels. 
La  noix  de  coco,  ou 
le  coco,  fournit  aux  ha- 
bitants des  tropiques 
une  nourriture  agréa- 
ble, une  boisson  rafraî- 
chissante ,  des  fibres 
textiles,  différents  us- 
tensiles de  ménage  et 
une  huile  estimée  pour 
divers  usages  domesti- 
H.  81.  Le  Cocotier  (Cocos  nucifera,  L.)  ques. 

L'enveloppe  extérieure  de  cette  noix  offre  trois  surfaces  planes  qui  se 
lerminent  au  sommet  en  une  pointe  émoussée,  de  sorte  qu'une  section 
transversale  de  la  noix  entière  produirait  une  figure  triangulaire.  Cette 
enveloppe,  formée  de  fibres  nombreuses  et  très-fortes,  formant  une 
coque  dure  et  compacte  à  la  périphérie  et  un  tissu  très-làche  à  l'inté- 
rieur, cette  enveloppe,  disons-nous,  sera  examinée  tout-à-1'heure. 
Immédiatement  après  elle,  en  allant  de  dehors  en  dedans,  se  présente 


—  348  — 

une  coque  de  forme  ovule,  très-dure,  et  d'environ  un  quart  de  pouce 
d'épaisseur  :  entre  les  mains  des  indigènes,  cette  coque,  polie  et  tra- 
vaillée, se  transforme  en  tasses,  poires  à  poudre,  vases,  gobelets,  gon- 
doles et  autres  jolis  ouvrages  nuancés  de  diverses  couleurs,  comme  ceux 
que  l'on  fabrique  avec  la  calebasse.  A  Siam,  elle  sert  à  mesurer  les 
liquides,  et  pour  cela,  on  gradue  sa  capacité  avec  de  petits  coquillages 
univalves  (Cyprœa  moneta,  L.)  appelés  Cauris.  Il  y  a  ainsi  des  cocos  de 
deux  cents,  trois  cents  et  même  de  mille  cauris. 

Lorsque  les  cocos  ne  sont  pas  encore  mûrs,  on  trouve,  sous  la  coque 
dont,  nous  venons  de  parler,  une  grande  quantité  d'une  eau  claire,  odo- 
rante, aigrelette  dont  on  fait  usage,  dans  le  pays,  soit  pour  se  désaltérer, 
soit  pour  relever  les  sauces.  Plus  tard,  cette  eau  se  convertit  en  une 
amande  fort  agréable  au  goût,  mais  qui,  conservée  longtemps,  finit  par 
rancir  et  devient  ainsi  une  nourriture  lourde  et  indigeste.  Enfin,  quand 
les  cocos  ont  atteint  la  moitié  de  leur  grosseur,  on  les  nomme  Cocos  au 
lait,  parce  que  la  substance  qu'ils  renferment  ressemble  à  une  crème 
épaissie,  crème  qui  forme  un  mets  délicat  et  très-recberché. 

Un  autre  produit  important  est  encore  retiré  de  la  noix  de  coco  : 
c'est  l'huile  ou  plutôt  le  beurre  de  coco  que  l'on  extrait  de  l'albumen  blanc 
de  l'amande,  et  qui  est  généralement  employé  dans  les  Indes.  Ce  beurre, 
assez  consistant,  est  d'un  blanc  lardacé  et  possède  une  odeur  sui 
gemris,  odeur  d'abord  assez  faible,  mais  qui,  à  mesure  que  l'huile 
vieillit,  devient  de  plus  en  plus  désagréable,  et  finit  par  rappeler  celle 
des  fromages  les  plus  avancés  ;  sans  cet  inconvénient,  le  beurre  de  coco 
servirait  beaucoup  plus  qu'il  ne  le  fait,  dans  la  fabrication  des  savons  et 
des  pommades;  on  ne  l'emploie  en  Europe  que  pour  en  retirer  delà 
stéarine  de  coco  ou  cocinine,  avec  laquelle  on  fabrique  d'excellentes 
bougies.  11  constitue  aussi  la  base  de  quelques  savons  très-grossiers  et 
usités  principalement  dans  la  marine.  En  1851,  la  quantité  de  ce  corps 
gras  importée  en  Angleterre,  s'est  élevée  au  poids  de  5000  tonnes, 
provenant  en  grande  partie  de  Manille  et  de  Ceylan. 

Quelques  mots  maintenant  de  l'enveloppe  extérieure  du  coco,  Lqui  est 
désignée  sous  le  nom  de  Caire.  Les  fibres  que  l'on  en  retire  sont  pres- 
qu'aussi  tenues  que  celles  du  chanvre  et  ont  sur  ces  dernières  l'avantage 
de  résister  plus  longtemps  à  l'action  de  l'eau.  Ces  fibres  se  préparent  dans 
l'Inde  sur  une  vaste  échelle,  mais  c'est  surtout  dans  les  parties  orientales 
de  cette  contrée  qu'on  les  rassemble  et  qu'on  leur  donne  les  qualités 
requises  pour  servir  à  la  confection  des  cordages,  etc.  Du  reste,  cette 
préparation  est  très-simple  :  on  bat  fortement  le  caire  pour  en  séparer 
les  fibres  sèches  cl  très-légèrement  unies  entre  elles;  celles-ci  sont  ensuite 
peignées  par  un  regayoir  très-solide,  qui  rejette  tout  ce  qui  n'est  pas 


—  349  — 

propre  à  être  tissé,  et  les  fibres,  alors  bien  distinctes,  sont  triées  selon 
leur  grosseur  et  importées  en  immense  quantité  en  Europe,  où  elles  sont 
aujourd'hui  manufacturées  en  bonnes  cordes,  paillassons,  nattes,  etc. 
Dans  l'Inde,  on  les  emploie  surtout  comme  cordages  de  navire  et  comme 
filets  de  pêche,  leur  légèreté  les  recommandant  spécialement  pour  ce 
dernier  usage;  leur  durée  est  également  surprenante,  et  il  n'est  peut- 
être  pas  de  fibre  végétale  qui  supporte  mieux  qu'elles  les  alternatives  de 
sécheresse  et  d'humidité.  Le  caire  est  aussi  transformé  en  brosses  qui 
sont  plus  durables  que  celles  que  nous  fabriquons  avec  des  soies  de 
cochon;  et,  sans  même  lui  faire  subir  aucune  préparation,  les  habitants 
pauvres  de  l'Inde  se  servent  de  ce  caire  en  guise  de  brosses,  de  l'emploi 
desquelles  ils  n'ont  qu'à  se  louer.  L'importation  des  fibres  de  cocotier 
prend  tous  les  jours  un  accroissement  plus  considérable  :  en  1850, 
l'Angleterre  en  a  vu  débarquer  dans  ses  ports  plus  de  10,000  tonnes, 
arrivant  surtout  de  Ceylan  et  de  Bombay. 

Outre  des  noix,  des  fibres,  de  l'huile,  et  sans  parler  des  racines,  dont 
on  construit  des  paniers,  etc.,  le  Cocotier,  comme  d'autres  espèces  de  la 
même  famille,  produit  encore  le  Vin  de  palmier,  appelé  aussi  Toddy; 
mais  sur  la  manière  dont  se  fait  l'extraclion  de  ce  vin,  règne  une 
erreur  que  l'on  voit  encore  se  reproduire  tous  les  jours  dans  les 
ouvrages  les  plus  estimables.  On  affirme,  en  effet,  qu'en  coupant  le 
chou  ou  les  bourgeons  terminaux  constituant  le  cœur  du  palmier,  il 
s'écoule  de  la  blessure  un  liquide  dont  la  fermentation  donne  naissance 
au  toddy.  Cette  opération,  qui  tuerait  le  palmier,  ne  se  pratique  pas  du 
tout  de  cette  façon,  mais  bien  en  excisant  la  spathe,  c'est-à-dire  l'enve- 
loppe de  la  panicule  des  fleurs.  Par  là,  on  empêche  le  Cocotier  de  pro- 
duire autantde  fruits  qu'il  en  aurait  portés  ;  mais  comme  il  donne  12  ré- 
coltes par  an,  l'on  perd  seulement  un  mois,  si  l'opération  est  bien  faite. 

Le  Cocotier,  disons-nous,  donne  des  fruits  tous  les  mois,  et,  où  on 
les  cultive,  on  a  soin  d'éclaircir  les  régimes  florifères,  de  façon  que 
chacun  d'eux  ne  produise  que  7  à  12  noix,  sans  quoi,  celles-ci  seraient 
inférieures  en  qualité  et  en  grosseur. 

M.  Braithwaite  Poole,  dans  ses  statistiques,  a  constaté  qu'en  1850,  il 
a  été  importé  en  Angleterre  1,575,000  noix  de  coco,  ou  le  poids  énorme 
de  1,575  tonnes.  Et  qu'on  se  souvienne  qu'en  Europe,  cette  noix  est 
simplement  un  objet  de  curiosité;  qu'elle  sert  principalement  de  jouet 
aux  enfants,  qu'elle  n'a,  en  un  mot,  aucun  usage  économique. 

Le  Cocotier  croissant  surtout  sur  les  bords  de  la  mer  et  sur  les  rives 
des  fleuves,  se  propage  très-aisément;  son  fruit,  recueilli  parles  flots, 
surnage  et  est  poussé  par  le  vent  jusqu'à  ce  qu'il  atteigne  un  récif  de 
corail,  un  banc  de  sable  sur  lequel,  implantant  de  puissantes  racines,  il 


—  350  — 

se  développe,  se  transforme  en  magnifique  palmier,  et  porte  la  vie  et 
l'abondance  là  où  tout  n'était  auparavant  que  désert,  et  néant.  Mais 
l'homme  va  au-devant  des  vues  de  la  nature,  et,  n'attendant  pas  ce  que 
peut-être  il  ne  rencontrera  jamais,  il  crée  des  plantations  de  cocotiers, 
comme  nos  pères  ont  créé  les  jardins  fruitiers  avec  la  pomme,  la  poire  , 
la  pèche,  etc.  C'est  surtout  dans  l'Amérique  méridionale  que  cela  se 
pratique  comme  suit  :  Les  noix  de  cocos  que  l'on  choisit  pour  graines 
sont  plantées  à  environ  un  pied  de  profondeur,  et  on  en  forme  des  rangs 
serrés  entre  eux,  pour  la  plus  grande  commodité  de  l'arrosement  :  on  les 
plante  souvent  aussi  le  long  des  murs  des  maisons,  afin  que  l'eau  qui 
tombe  des  toits  les  arrose;  cela  suffît  ordinairement,  et  le  propriétaire  se 
trouve  soulagé  d'un  grand  travail.  Cinq  mois  après  ,  les  pousses  com- 
mencent à  percer  la  terre,  et  après  un  an  ,  les  jeunes  arbres  peuvent 
être  transplantés.  On  les  place  alors  à  la  distance  de  8  ou  10  pas  les 
uns  des  autres,  dans  la  terre  qu'on  a  défrichée  pour  les  recevoir; 
aussitôt  qu'ils  ont  pris  racine,  et  il  en  est  fort  peu  qui  périssent,  on 
est  presque  dispensé  de  toute  culture  ultérieure. 

§   IV.    LE    DATTIER. 

Le  Dattier,  (Phœnix  dactylifera,  L.)  (  V.  pi.  82)  appartient  à  la 
Diœcie  de  Linné  et  constitue  le  Palmier  par  excellence  (1).  C'est  un 
arbre  magnifique,  élevant  son  stipe  altier  à  plus  de  50  pieds  de  hauteur, 
et  terminé  par  une  ample  touffe  de  feuilles  pennées,  de  palmes,  dont  les 
folioles  aiguës  s'étalent  élégamment  sur  les  côtés  d'un  pétiole  souvent 
long  de  plus  de  cinq  pieds.  Rien  de  plus  gracieux,  rien  de  plus  élégant 
qu'un  bosquet  de  ces  arbres  ;  écoutez  plutôt  ce  qu'en  pense  le  poète 
Moore  : 

«  Those  groups  of  lovely  dale-trees,  bending 
Languidly  their  leaf-crown'd  heads, 
Like  youthful  maids,  when  sleep  descending 
Warns  them  to  their  silken  beds  (2).  « 

De  l'aisselle  des  feuilles  sortent  des  spathes  fort  longues  qui 
bientôt  vont  s'ouvrir  et  laisser  s'échapper  de  larges  grappes  rameuses 
ou    régimes,    portant  les  unes   des   fleurs,    les  autres   des  ovaires, 


(1)  Chaque  fois  que  la  Bible  et  le  Nouveau-Testament  citent  le  Palmier,  c'est  du 
Dattier  qu'ils  entendent  parler. 

(2)  Ces  groupes  de  séduisants  dattiers  ,  courbant  languissamment  leur  tête  cou- 
ronnée de  feuillage,  ressemblent  à  ces  fraîches  jeunes  filles  que  le  sommeil  gagne  et 
conduit  à  leur  couche  de  soie. 


^5i 


selon  le  sexe  auquel  appartient 
l'individu.   Le  transport  de  la 
poussière  fécondante  sur  les  or- 
ganes femelles  réclame  donc  ici 
l'intervention  d'un  agent  quel- 
conque,  et  ce  sont  ordinaire- 
ment les  abeilles  et  le  vent  qui 
se  chargent  de  ce  soin  ;  mais  il 
arrive    bien    souvent   que    des 
Dattiers  femelles  restent  impro- 
ductifs,  faute  de  fécondation. 
Michaux  rapporte  à  ce  sujet  que 
les  Persans  avaient  depuis  long- 
temps  reconnu   que   le   pollen 
pouvait  se  conserver  intact  et 
qu'ils  avaient  coutume  d'en  ren- 
fermer  une    certaine    quantité 
dans  des  tubes  hermétiquement 
fermés  pour  la  projeter  sur  les 
Dattiers  femelles,  dans  les  con- 
trées où  l'ennemi  avait  détruit 
tous  les  individus  staminifères. 
Enfin  la  datte  succède  à  la 
fleur.  Ce  fruit  n'est  guère  aussi 
estimé  en  Europe  que  dans  son 
pays  natal ,  et  il  serait  assez  dif- 
ficile d'en  dire  la  cause,  car, 
outre  son  parfum  et  son  goût 
exquis  ,  il  constitue  encore  un 
PI.  82.  LeDallier  (Pbœnix  daclylifera ,  L.)       mets  très-nourrissant.  Les  dattes 
nous  viennent  de  Barbarie  et  d'Egypte,  et  sont  ordinairement  de  la 
variété  dite  Tafilat;  parfois  cependant  nous  recevons  aussi  d'Egypte 
des  Dattes  blanches  qui  sont  un  peu  plus  grosses  que  le  fruit  du  chêne, 
presqu'aussi  lisses  que  lui  et  d'un  blanc  jaunâtre  assez  foncé;  tandis 
que  les  Tafilat,  deux  fois  plus  volumineuses  qu'elles,  sont  d'un  rouge 
brun  sombre,  à  surface  ridée  et  couvertes  d'un  exsudât  saccharin. 

Le  D'  James  Richardson  dit,  en  parlant  des  dattes  du  Fezzan  : 
«  Alors  que  toute  nourriture  vient  à  manquer,  le  Dattier  prodigue, 
chaque  année,  son  fruit  nourrissant  et  empêche  ainsi  les  habitants  du 
désert  de  mourir  de  faim.  Les  dix-neuf  vingtièmes  de  la  population  du 
Fezzan  vivent  uniquement  de  dattes  pendant  neuf  mois  sur  douze,  et 


—  352  — 

une  multitude  d'animaux  s'en  nourrissent  également,  précisément  à 
l'époque  où  les  oasis  manquent  d'herbages.  »  Plus  loin,  le  même  voya- 
geur décrit  46  variétés  de  dattes  qu'il  a  trouvé  cultivées  dans  les  oasis 
des  déserts  du  nord  de  l'Afrique. 

Complètement  mûre,  la  datte  fraîche  est  appelée  ruteb;  mais  dans  cet 
état  elle  n'est  pas  susceptible  d'une  longue  conservation.  Pour  qu'on 
puisse  l'exporter  au  loin,  elle  doit  être  cueillie  un  peu  avant  sa  maturité, 
puis  desséchée  au  soleil. 

Les  Arabes  extraient  des  dattes  une  espèce  de  sirop  qu'ils  emploient 
dans  plusieurs  préparations  culinaires;  ils  en  fabriquent  aussi  la  farine 
de  dattes  que  son  incorruptibilité  rend  des  plus  précieuses  ;  enfin  on 
peut  retirer  et  on  retire  de  ces  fruits  une  sorte  particulière  de  vin  et  de 
l'alcool. 

Outre  le  fruit,  le  cœur  et  les  bourgeons  terminaux  du  Dattier,  connus 
sous  le  nom  de  chou  de  Palmier,  sont  fort  estimés  comme  légume; 
quand  on  enlève  ce  chou ,  il  s'écoule  de  la  blessure  pratiquée  une  im- 
mense quantité  de  liquide  qui  fermente  rapidement  et  qui,  soumis  à  la 
distillation  produit  un  arrack  de  qualité  inférieure.  Malheureusement  le 
pied  doit  périr  après  qu'on  lui  a  fait  subir  cette  opération. 

Le  bois  des  jeunes  Dattiers  ne  peut  être  employé  à  aucun  usage,  mais 
celui  des  pieds  mâles  âgés  sert  en  Afrique  comme  bois  de  charpente  et 
de  menuiserie,  et  résiste  parfaitement  à  l'action  destructive  de  l'humi- 
dité ;  c'est  toujours  le  bois  du  Dattier  mâle  que  l'on  emploie,  les  plants 
femelles  étant  précieusement  conservés  pour  la  production  des  dattes. 

Le  Dattier  se  plaît  dans  les  terrains  sablonneux  des  pays  tropicaux  ; 
on  le  trouve  cependant  cultivé  en  Grèce,  en  Italie  et  même  en  Provence; 
mais  c'est  surtout  dans  l'Afrique  septentrionale  et  dans  quelques  parties 
de  l'Asie  que  la  connaissance  de  sa  culture  remonte  aux  périodes 
les  plus  reculées.  Au  rapport  de  Burckhardt,  ces  arbres  sont  hérédi- 
taires dans  les  familles  arabes  et  vendus  comme  des  objets  de  valeur. 
Bien  souvent  la  dot  d'une  jeune  fille  est  tout  entière  composée  de 
Dattiers,  et  l'importance  que  l'on  y  attache  est  si  considérable,  que  la 
première  question  que  se  font  les  Bédouins  est-celle-ci  :  «  Quel  est  le 
prix  des  dattes  à  la  Mecque  ou  à  Médine?  » 

La  quantité  de  dattes  importées  annuellement  en  Angleterre  dépasse 
rarement  le  poids  de  10  à  12  tonnes. 


OiK'ulium    Limminohei ,  Ed. M? 


353 


HORTICULTURE. 


ONCIDIUM  LIMMINGHEI. 

Oncidie  de  M.  le  comte  Alfred  de  Limminghe. 

FAMILLE    DES    ORCHIDÉES.    —   GYNANDRIE    MONANDRIE. 

Par  M.  Edouard  Morren. 

Oncidium  Swartz,  Perianthium  explanatum.  Sepala  saepius  undulata,  lateralibus 
nunc  sublabelloconnatis.  Petala  conformia.  Labellum  maximum,  ecalcaratum,  cum 
columna  continuum,  varie  lobatum,  basi  tuberculatum  v.  cristatum.  Columna  libéra, 
semiteres,  apice  utrinque  alata.  Anthera  semi-bilocularis,  rostello  nunc  abbreviato, 
nuncelongato  rostrato.  Pollinise  2,  postice  sulcata,  caudicula  plana,  glandula  oblonga. 
—  Herbse  epiphytae,  nunc  pseudo-bulbosœ.  Folia  coriacea.  Scapi  paniculati  vaginali 
rarius  simplices.  Flores  speciosi,  saepius  maculati.  rarius  albi.  Lindlcy. 

Oncidium  (sect.  glainduligera)  Limminghei.  Caulis  epiphytus  scandens.  Pseudo- 
bulbis  adpressis,  oblongis,  obcordatis,  basi  atlenuatis,  obsolète  rugosis,  mono- 
pbyllis,  squama  utrinque  axillari,  longiori,  scariosa,  acuminata,  velatis.  Foliis 
solitariis,  sessilibus  ,  pseudo-bulbos  vix  duplo  superantibus,  planis,  ovato-oblongis 
obtusis,'mucronatis,basiinîequalicordatis,  acutis,subdimidiatis,alutaceoseabriusculiSj 
maculis  fuscis  transverse  multistriatis.  Scapo  tenue  elongato,  simplici,  bracteato  — 
bracteis  membranaceis  acutis  —  1-2-5  floribus  vicissim  florentibus.  Sepalis  basi 
connatis;  sepalo  dorsali  petalisque  conformibus,  concoloribus,  ovatis,  obtusis,  sub- 
undulatis,  basi  attenuatis,  flavovirentibus  fusco  late  maculatis;  sepalis  inferioribus 
paulo  minoribus,  virescentibus  pallide  brunneo  pictis.  Labelli  basi  auriculis  rotun- 
datis,  isthmoobcuneato  elongato  in  laminam  reniforme-obcordatam  bilobam  expanso. 
Crisla  biloba,  lobo  inferiore  majore,  utrinque  tuberculata.  Disco  tabuliformiquadran- 
gulari  callis  2  grumosis  anticis  notato.  Columnae  alis  4  laceratis  fimbriatis  :  2  latera- 
libus  angustioribus,  2  apicilaribus  inflexis,  basi  purpureo  punctatis.  Labelli  lobis 
crislaque  aureis  purpureo  guttatis.  Ed.  Morren. 

0.  Limminghei  Ed.  Morr.  Lindl.  Folia  Orchidacea  part.  VI  et  VII,  1855,  p.  56. — 
C.  et  Ed.  Morren,  Bchj.  Uort.  VI,  p.  553,  Tab.  83.  1856. 

UOncidium Limminghei  a  fleuri,  pour  la  première  fois,  au  mois  d'août 
1855  dans  les  serres  du  jardin  botanique  de  l'Université  de  Liège.  Son 
origine  n'est  pas  bien  certaine,  mais  nous  pensons  qu'il  est  originaire  de 
l'ancienne  province  de  Caraccas  dans  l'Amérique  méridionale  et  qu'il 
faisait  partie  d'une  collection  de  plantes  envoyées  en  Belgique  par  M.  Van 
Lousberghe,  consul  des  Pays-Bas.  Quoi  qu'il  en  soit,  l'examen  de  la 
fleur  nous  révéla  un  Oncidium,  et  nous  fit  supposer  l'espèce  nouvelle 

RELG.    HORT.    T.    VI.  29 


—  354  — 

et  voisine  de  YO.  papilio  :  le  savant  professeur  Lindley  confirma  ces 
vues  et  reconnut  qu'elle  devait  former,  avec  YO.  papilio  une  section 
spéciale  du  genre  Oncidie,  celle  des  glanduligera.  M.  le  comte  Alfred  de 
Limminghe,  botaniste  distingué,  l'un  des  plus  éminents  protecteurs  de 
l'horticulture  belge  et  grand  amateur  d'Orchidées,  voulut  bien  accepter 
la  dédicace  de  la  plante. 

L'oncidie  de  M.  le  comte  de  Limminghe  est  pour  le  botaniste  une 
plante  curieuse  et  intéressante  sous  plusieurs  rapports;  elle  possède 
en  outre  une  grande  élégance  de  formes.  C'est  une  miniature  gracieuse 
de  YOncidium  papilio:  de  même  qu'il  semble  qu'un  papillon  jaloux 
vient  toujours  cacher  les  fleurs  de  YO.  papilio,  de  même  on  croirait  voir 
posée  sur  la  hampe  fleurie  de  YO.  Limminghei  une  grosse  abeille  venant 
butiner  le  nectar  de  la  fleur. 

«Il  est  difficile,  dit  M.  le  Dr  Lindley  (1),  de  trouver  une  place  satisfai- 
sante pour  YO.  papilio;  et  maintenant  que  l'on  connaît  une  seconde  es- 
pèce (0.  Limminghei)  présentant  aussi  des  pétales  et  un  sépale  dorsal 
beaucoup  plus  grands  que  les  sépales  latéraux,  il  semble  convenable  de 
les  associer  en  un  petit  groupe  complètement  séparé  des  autres.  »  Ces 
deux  espèces  se  distinguent  en  effet  par  plusieurs  caractères  impor- 
tants, notamment  par  l'existence  de  glandes  ou  de  divisions  pectinées 
sur  la  colonne  formée  par  les  organes  de  la  reproduction,  des  nom- 
breuses espèces,  deux  cents  environ,  que  compte  aujourd'hui  le  genre 
Oncîdium. 

Sa  végétation  est  franchement  ëpiphyte  ;  elle  croît,  librement  sus- 
pendue dans  la  serre,  sur  un  morceau  de  bois  d'acacia  sans  terre,  sans 
humus  et  sans  mousse  :  la  tige  émet  des  racines  aériennes  qui  adhèrent 
fortement  contre  l'écorce,  et  elle-même  donne  naissance  en  s'allongeant 
à  des  pseudobulbes  distiques,  aplatis,  oblongs,  à  sommet  en  cœur,  à 
base  rétrécie,  à  surface  couverte  de  rugosités  confuses  et  donnant 
chacun  naissance  à  une  seule  feuille.  Ces  pseudobulbes  mesurent  en- 
viron 2  centimètres  de  hauteur,  15  millimètres  de  largeur,  sur  une 
épaisseur  de  3  à  4  millimètres;  ils  naissent,  comme  les  véritables  bour- 
geons ,  protégés  par  deux  écailles,  vertes  d'abord ,  plus  tard  scarieuses 
lancéolées,  acuminées,  opposées,  axillaires  et  voilant  en  partie  les  pseu- 
dobulbes comme  une  espèce  de  membrane  blanche  en  les  dépassant 
même  par  leur  pointe.  Les  feuilles  sont  solitaires,  sessiles,  longues  de 
3-4  centimètres,  larges  de  2  centimètres  environ,  planes,  arrondies  ou 
ovales,  à  base  en  cœur,  à  extrémité  amincie  ,  âpres  au  toucher,  très- 


Ci)  Lindley,  Folia  Orchidacra,   part.  VI  <n  VII,  p.  56. 1835. 


—  355  — 

finement  chagrinées,  et  marquées  de  nombreuses  stries  rouges,  petites, 
transversales  et  irrégulières.  Ces  feuilles  présentent  en  outre  une  par- 
ticularité remarquable,  à  savoir,  que  les  deux  moitiés  du  limbe  diffèrent 
de  forme  et  de  grandeur;  le  sillon  qui  marque  la  nervure  jmédiane  au 
lieu  de  partager  la  feuille  en  deux  parties  égales,  ne  correspond  au  con- 
traire jamais  au  diamètre  géométrique,  l'un  des  côtés  étant  cons- 
tamment plus  large  que  l'autre,  formant  à  la  base  une  oreillette  plus 
ample  et  le  dépassant  à  la  pointe.  D'autres  feuilles  présentent  ce  phéno- 
mène d'absence  de  symétrie,  par  exemple,  celle  des  Bégonia  :  mais 
dans  toutes  ces  plantes  on  observe  comme  règle  générale,  que  le  demi- 
limbe  le  moins  développé  est  toujours  situé  du  côté  de  la  tige,  tandis 
que  celui  qui  a  pris  le  plus  d'extension  est  dirigé  en  dehors.  Chez  YOn- 
cidium  Limminghei  au  contraire,  si  l'on  suppose  la  tige  formant  l'axe 
de  la  plante,  on  trouve  que  les  demi-limbes  les  plus  développés  sont 
dirigés  vers  le  centre  et  par  conséquent  que  toutes  les  feuilles  ont 
alternativement  la  moitié  droite  et  la  moitié  gauche  plus  considérable. 
Hampe  longue  de  15  centimètres,  glabre, arrondie,  maculée  de  rouge 
brun,  de  vert  et  de  petites  stries  blanchâtres,  munie  à  des  distances  de 
5 centimètres  environ  de  petites  bractées  scarieuses,  lancéolées,  acu- 
minées,  d'un  jaune  fauve,  marquées  de  petites  côtes  longitudinales  pa- 
rallèles et  longues  de  5  millimètres  :  elle  porte  deux  à  trois  boulons  qui 
s'épanouissent  successivement.  Chaque  fleur  mesure  de  3  à  4  centimètres 
de  diamètre.  Le  sépale  dorsal  et  les  deux  pétales  supérieurs  sont  de 
même  forme  et  de  même  couleur,  ovales,  obtus,  légèrement  ondulés  , 
atténués  à  la  base,  étalés,  un  peu  rejetés  en  arrière,  d'une  longueur  de 
47  millimètres  sur  une  largeur  de  8;  ils  sont  d'un  brun  fauve  pâle, 
maculé  de  jaune  verdâtre  surtout  vers  le  sommet,  d'un  aspect  mat, 
verdàtre  extérieurement  avec  des  stries  et  des  macules  brunes,  surtout 
vers  les  marges.  Sépales  inférieurs  plus  petits  que  le  dorsal  avec  lequel 
ils  sont  soudés  à  la  base,  longs  de  13  à  14  millimètres,  larges  de  6  à  7, 
entiers,  d'un  jaune  pâle,  marqués  de  bandes  transversales  fauves.  Le 
labelle  est  grand,  d'une  longueur  de  18  millimètres,  largeur  de  15  , 
muni  de  deux  grandes  ailes  latérales  arrondies  à  bords  ondulés,  isthme 
rétréci, s'élargissant  en  un  lobe  large,  étalé,  quadrilatéral  arrondi,  légè- 
rement échancré  au  milieu;  tout  entier  d'un  jaune  clair  vif  et  brillant , 
maculé  partout,  sauf  à  l'origine  du  lobe  moyen,  de  macules  rouges, 
semblables  à  des  gouttelettes  de  sang.  La  crête  se  présente  sous  forme 
d'une  lame  saillante,  mince,  comprimée,  présentant  sur  son  profildeux 
lobes,  le  supérieur  très-petit,  l'inférieur  beaucoup  plus  vaste,  et  mon- 
trant de  chaque  côté  à  la  base  une  petite  saillie  tuberculeuse,  de  la 
même  couleur  que  le  labelle.  Le  disque  est  tabuliforme  quadrangulaire  , 


—  356  — 

les  angles  antérieurs  portant  de  petites  callosités  irrégulières.  Colonne 
pourvue  fie  quatre  ailes  ou  appendices  pectinées,  les  deux  latérales  plus 
petites,  les  deux  supérieures  infléchies  et  présentant  une  dent  infé- 
rieure plus  profonde  que  les  autres,  d'un  jaune  pâle  coloré  en  rouge  vif 
à  l'insertion  sur  la  colonne. 

Culture.  La  culture  de  YOncidium  Limminghci  est  fort  simple;  il 
végète  sur  un  morceau  de  bois  d'acacia  revêtu  de  son  écoree  et  sus- 
pendu par  un  fil  de  fer  aux  vitres  d'une  serre  chaude.  Il  se  multiplie 
aisément  par  divisions  de  la  tige  que  l'on  fixe  contre  une  branche 
jusqu'à  ce  qu'elles  aient  émis  des  racines.  La  floraison  se  fait  en  août  et 
septembre. 


LA  SERRE  A  ORCHIDÉES  DE  M.  LLEWELYN 

A  PENLLERGARE. 

La  lecture  des  descriptions  de  la  végétation  splendide  qui  couvre  les 
bords  des  cataractes  des  rivières  tropicales,  suggéra  à  M.  Llewelyn,  la 
pensée  hardie  de  cultiver  ses  orchidées  dans  des  conditions  analogues. 
C'est  la  chute  du  fleuve  Berbrice  décrite  d'une  manière  si  saisissante  par 
Sir  R.  Schomburgk  à  l'occasion  de  la  découverte  du  Huntleya  violacea 
qu'il  ne  craignit  pas  de  représenter  dans  ses  serres;  il  forma  de  ces 
plantes  un  groupe  enchanteur,  animé  par  une  chute  d'eau  et  en  même 
temps  les  plaça  dans  les  meilleures  conditions  de  développement,  l'humi- 
dité et  la  chaleur.  Peut-on  en  effet  imaginer  un  séjour  plus  délicieux 
que  l'intérieur  de  la  serre  dePenllergare,  dont  notre  gravure  reproduit 
une  vue;  et  n'y  trouve-t-on  pas  réalisé  le  meilleur  mode  de  culture  des 
orchidées  par  un  amateur?  Il  ne  faut  pas  un  grand  effort  d'imagination 
pour  se  croire  transporté  sur  les  rives  d'un  ruisseau  de  la  Guyane,  et  si 
quelque  chose  peut  rappeler  qu'on  se  trouve  dans  la  serre  d'un  riche 
amateur  anglais,  c'est  que  les  fleurs  les  plus  suaves  des  Indes  orientales 
se  marient  aux  formes  élégantes  et  bizarres  des  épiphytes  de  l'Amérique 
tropicale. 

Le  Huntleya  violacea  fut  l'une  des  premières  espèces  plantées,  et  il 
fleurit  et  prospéra  immédiatement. 

Les  genres  des  Indes  orientales,  tels  que  les  Vanda,  les  Saccolabium , 
les  Aerides  et  d'autres  espèces  caulescentes  sont  cependant  ceux  qui 
végètent  avec  le  plus  de  vigueur;  la  plupart  d'entre  eux  exigent  à 
chaque  instant  l'emploi  de  la  serpette  pour  modérer  leur  ardeur  d'en- 
vahissement sur  le  territoire  des  espèces  plus  délicates.  Les  plantes  qui 
croissent  ainsi  ont  une  vigueur  toute  sauvage  et  sont  bien  différentes  de 


PI.  M 


Vue  de  la  Serre  à  Orchidées  de  lî.  Llcwelvii,  à  PeDllcrgar< 


—  3S8  — 

celles  cultivées  à  la  manière  ordinaire;  véritables  filles  de  l'air,  elles  pui- 
sent leur  subsistance  dans  l'humidité  atmosphérique  seulement,  et 
peuvent  donner  une  idée  de  leurs  forêts  natales.  Différentes  espèces  en- 
tremêlées dans  une  admirable  confusion  ,  des  Dendrobium,  des  Cama- 
rotis,  des  Renanthera ,  côte  à  côte  avec  des  guirlandes  de  fleurs  et  des  cou- 
ronnes de  feuilles  entrelacées,  envoient  leur  longues  racines  s'abreuver 
à  l'eau  de  la  cascade  ou  même  jusqu'au  bassin  où  elle  vient  se  précipiter. 
Beaucoup  d'espèces  se  fixent  sur  la  roche  elle-même,  d'autres  sur  des 
blocs  de  bois,  d'autres  encore  s'élancent  de  corbeilles  suspendues  et 
l'on  peut  ainsi  en  rassembler  un  grand  nombre  dans  un  espace  relati- 
vement restreint.  L'effet  général  est  admirable  et  l'humidité,  constamment 
entretenue  par  une  chute  d'eau ,  fortifie  la  constitution  des  plantes  en 
leur  donnant  le  bien-être  qu'elles  trouvent  dans  leur  patrie. 

L'eau  qui  doit  alimenter  la  cascade  est  amenée  au  sommet  de  la  serre 
par  un  tuyau  de  conduite  qui  passe  au  travers  de  la  chaudière;  elle  est 
ainsi  portée  à  une  température  suffisante,  puis  elle  vient  se  précipiter 
du  haut  d'un  rockwork,  se  brise  sur  les  saillies  des  pierres  ,  en  mille 
éclats  lancés  sur  les  plantes  ou  qui  retombent  pour  se  briser  encore  et 
former  une  nouvelle  chute  qui  se  divise  en  plusieurs  petits  ruisseaux 
et  forme  enfin  une  large  nappe  étendue  jusqu'au  vaste  bassin  occupant 
le  centre  de  la  serre  et  dont  les  rives  sinueuses  sont  verdoyantes  d'Or- 
chidées, de  Fougères  et  de  Lycopodiacées  ;  quelques  pierres  dont  le 
sommet  dépasse  le  niveau  de  l'eau,  des  troncs  d'arbres  qui  s'y  sont  af- 
faissés semblent  avoir  été  envahis  par  la  riche  végétation  épiphyte  des 
tropiques.  L'arrangement  des  pierres  du  rocher  ou  rockwork  doit 
varier  suivant  la  nature  de  celles  que  fournit  le  pays;  chez  M.  Llewelyn 
elles  sont  disposées  d'une  manière  assez  régulière  en  couches  super- 
posées comme  dans  les  roches  naturelles;  l'état  d'humidité  dans  lequel 
elles  se  trouvent  a  fait  qu'elles  ont  été  promptement  couvertes  d'un 
épais  tapis  de  Fougères  semées  spontanément  et  par  les  tiges  rampantes 
des  Lycopodiacées  tropicales,  au  milieu  desquelles  beaucoup  d'espèces 
d'Orchidées  aiment  à  s'enraciner. 

On  peut  dans  la  plupart  des  serres  parvenir  aisément  à  imiter  la  dis- 
position de  celle  de  Penllergare.  C'est  le  véritable  mode  de  culture  des 
Orchidées,  et  l'on  obtient  un  effet  bien  supérieur  à  celui  produit  par  des 
plantes  végétant  à  l'étroit  dans  des  pots  régulièrement  placés.  D'ailleurs 
presque  toutes  les  serres  à  Orchidées  sont  à  présent  établies  sur  un  plan 
de  jardin  d'hiver,  non-seulement  chez  les  riches  amateurs,  mais  même 
chez  nos  principaux  horticulteurs  qui  auront  sans  doute  reconnu  que 
ce  mode  de  culture  est  avantageux  aux  espèces.  La  singulière  végétation 
des  Orchidées  ,  dont  les  unes  veulent  croître  enterre,  les  autres  au 


—  359  — 

milieu  des  sphagnum,  celles-ci  sur  des  bûches  de  bois,  celles-là  dans  des 
corbeilles  suspendues,  dans  la  sécheresse  ou  dans  l'humidité,  à  la  lu- 
mière ou  à  l'ombre  ,  semble  presque  exiger  une  disposition  variée  et 
accidentée.  La  transformation  d'une  serre  en  un  plan  conforme  à  celui 
que  nous  venons  de  décrire  n'occasionne  d'autres  dépenses  que  celles  de 
la  construction  du  rockwork  et  de  la  conduite  de  l'eau. 


REVUE  DES  PLANTES   NOUVELLES  OU  INTÉRESSANTES. 

Pteris  hcterophylla,  L.  —  Bot.  Mag.  tab.  4925.  —  Linn.  Sp. 
PL  p.  1534.  —  Willd.  Sp,  PL  v.  5,  p.  394.  —  Fée,  Gen.  Fil.  p.  125  et 
126.  —  Synon.  :  Adiantum  foliis  hexagonis  Plumier,  fil.  pi.  37.  — 
Famille  des  Fougères;  Cryptogamie.  —  Ptéris  à  feuilles  variables. 

Ce  Pteris  ressem- 
ble beaucoup  au  Cry- 
ptogrammes crispa 
Ht.  (Pteris  crispa  L.) 
de  l'Europe,  tantpar 
sa  taille  que  par  ses 
frondes  fertiles  plus 
longues  que  les  fron- 
des stériles,  et  à  pin- 
nules  fertiles  com- 
primées présentant 
des  sores  opposés 
paralèles.  C'est,  mal- 
gré ces  affinités  gé- 
nérales, une  espèce 
distincte  et  fort  tran- 
chée parmi  les  congé- 
nères ;  elle  se  trouve 
surtout  à  la  Jamaï- 
que, d'où  elle  a  été 
introduite  clans  le 
jardin  royal  deKew; 
le  célèbre  Plumier  la 
découvrit  jadis  àSt.- 
Domingue  ;  elle  se 
trouverait  également 
près  de  Rio  de  Ja- 
neiro et  dans  l'île  de 
Cuba. 


PI.  85.  Pteris  helerojtltylla  L  (7»  grand,  nal.) 


—  360 


PI.  86.  Piunule  slérilc  (grossie).  PI.  87.  Piunule  fertile  (grossie). 

Les  frondes  stériles  ont  environ  15  à  20  centimètres  de  hauteur;  les 
fertiles  ont  jusqu'à  35  centimètres  de  longueur;  les  pinnulesdes  pre- 
mières sont  ovées  ou  obovées  ,  dentelées;  celles  des  secondes  sont 
oblongues  ou  oblongues  linéaires,  les  unes  et  les  autres  sont  glabres. 

Arlstolochia  Thwaitesii,  Hook.  —  Bot.  Mag.  tab.  4918.  —  Fa- 
mille des  Aristolochiacées;  Gynandrie  Hexandrie.  —  Aristoloche  de 
Thwaites. 

Pendant  une  excursion  dans  l'intérieur  de  Ceylan,  M.  Thwaites,  direc- 
teur du  jardin  botanique  de  Peradenia,  découvrit  celte  espèce  d'Aristo- 
loche dont  il  envoya  des  graines  à  M.  Hooker.  De  ces  graines  sont  pro- 
venus les  pieds  qui  ont  ileuri  au  mois  de  mars  de  cette  année  et  d'après 
lesquels  l'espèce  a  été  décrite  et  figurée.  Cette  plante  est  remarquable, 
dans  un  genre  qui  ne  renferme  guère  que  des  espèces  fétides,  ou  ino- 
dores, parce  que  ses  fleurs  exhalent  une  très-bonne  odeur  comparable 
à  celle  du  Colocasia  odora.  Elle  forme  un  sous-arbrisseau  dont  la  tige 
dressée,  simple  ou  rameuse  uniquement  à  sa  base,  haute  d'environ  2  dé- 
cimètres, part  d'un  rhizome  renflé  en  tubercule.  Ses  feuilles  sont 
lancéolées,  assez  nettement  spatulées  ,  acuminées  au  sommet,  parfai- 
tement entières,  portées  sur  un  court  pétiole.  Du  haut  du  rhizome 
partent  plusieurs  inflorescences  qui  consistent  en  sortes  de  grappes 
longues  de  8  ou  9  centimètres  ,  dont  chacune  ne  porte  à  la  fois 
qu'une  seule  fleur  épanouie.  A  chaque  fleur  est  opposée  une  petite 
bractée.  Ces  fleurs  elles-mêmes  sont  jaunâtres,  chargées  de  poils  en 
dehors  et  en  dedans,  et  leur  gorge  est  colorée  en  brun  pourpre  foncé; 


361  — 


elles  ont  la  forme  d'un  long  tube  deux  fois  courbé  brusquement  sur 
lui-même,  médiocrement  évasé  à  son  orifice  qui  est  oblique.  M.  Hooker 
fait  observer  que  cette  Aristoloche,  qui  a  été  tenue  en  serre  chaude,  pa- 
raît être  facile  à  cultiver. 

i lollinsla  veina,  Nutt.  —  Bot.  Mag.tab.AWl.—  Nûtt.  Journ. 
Acatl.  Philad.  v.  I,  p.  190  l.  1.  —  Famille  des  Scrophularinées.  Didy- 
namie  Angïospermie.  —  Collinsia  printanière. 


Celte  gracieuse  espèce  annuelle  est  ab- 
solument nouvelle  pour  les  jardins,  le  Col- 
linsia verna  de  Sweet  étant  le  C.  grandiflora 
Lindl.  originaire  de  l'Orégon.  Elle  n'est  pas 
moins  intéressante  par  la  beauté  des  fleurs 
à  lèvre  supérieure  blanc  pur,  et  à  lèvre  infé- 
rieure d'un  riche  bleu  d'azur  que  parce  qu'elle 
est  l'espèce  type  sur  laquelle  Nuttall  établit  le 
genre,  le  premier  qu'il  fonda  et  qu'il  dédia  à 
son  ami  Zacharie  Collins  de  Philadelphie, 
botanistedislingué.Ildécouvrit  le  C.  verna  en 
Pensylvanie,  croissant  dans  un  terrain  d'al- 
luvion  riche  et  un  peu  sableux  ;  on  le  trouve 
aussi  dans  le  Kentucky  et  le  Missouri.  C'est 
une  espèce  annuelle  de  pleine  terre  donnant 
une  abondante  floraison. 


Rhododendron  falconeri,  Hook.  fil . 
—Bot.  Mag.  lab.  4924.— Synon  :  Rhododen- 
dron venosum  Nuit.  —  Famille  des  Ericacées; 
Décandrie  Monogynie.  —  Rosage  du  Dr  Fal- 
coner. 

Le  R.  Falconeri  a  fleuri  pour  la  première 

fois  en  Europe  chez  MM.  Slandish  et  Noble 

à  Bayshot,   et  chez  M.  Fairie  à  Liverpool. 

Les  énormes  capitules  de  fleurs  blanches  et 

ses  belles  et  immenses  feuilles,  assignent  à 

cette  espèce  une  place  d'honneur  parmi  les 

plus  beaux  Rhododendrons  connus. 

Les  amateurs   devront  remarquer  que  le  Rhododendron  venosum  de 

Nuttall,  introduit  du  Bootan  par  M.  Booth   doit  èlre  fondu  dans  le 

/{.  Falconeri  pour  ne  former  avec  ce  dernier  qu'une  seule   cl   même 

espèce  sous  le  nom  de  Falconeri.,  antérieurement  décrit. 


ri.  88.  Collinsia  verna  Null 
('/,  gr.  nat.). 


—  36-2  — 

Les  exemplaires  qui  ont  fleuri  en  Angleterre  n'ont  encore  que  trois  ou 
quatre  pieds  de  hauteur;  dans  sa  patrie,  le  R.  Falconeri  s'élève  à  trente 
pieds,  et  son  tronc,  souvent  branchu  dès  la  base,  acquiert  jusqu'à  deux 
pieds  de  diamètre.  Les  feuilles  adultes  ont  huit,  dix  pouces  et  même  un 
pied  de  longueur;  elles  sont  coriaces,  épaisses,  elliptiques  ou  obovées, 
obtuses  à  la  base  et  au  sommet;  la  surface  supérieure  est  nue,  d'un  vert 
foncé  luisant;  la  face  inférieure  est  revêtue  d'un  duvet  laineux  ferrugi- 
neux. Les  fleurs,  réunies  en  tète,  sont  nombreuses,  très-grandes, 
blanches,  marquées  à  la  partie  supérieure  du  fond  de  la  corolle  d'une 
macule  pourpre  ou  chocolat  foncé.  La  corolle  est  campanulée,  à  limbe 
modérément  étalé  et  divisé  en  huit  ou  dix  lobes  arrondis,  obtus.  Calice  à 
cinq  lobes  très-petits,  presque  nuis.  Etamines  au  nombre  de  douze 
à  seize,  à  anthères  brunes,  petites  ;  pistil  à  stigmate  très-grand,  presque 
orbiculaire. 

Rhododendron  Hookcri,  Nattai!.—  Bot,  Mag.  tab.  4926.— 
Famille  des  Ericacées.  Décandrie  Monogynie. —  Rosage  deHooker. 


PI.  89.  Rhododendron  ïîookcri  Rull.  (4/9  gr.  liât.). 

Cetle  brillante  espèce,  découverte  sur  le  mont  Oola,  au  Bootan,  à 
8,000  et  9,000  pieds  d'altitude  supramarine,  où  elle  forme  des  bois 
entiers  conjointement  avec  le  Rhododendron  eximium,  a  fleuri  en  avril 
1856  chez  M.  Fairie  à  Livefpool. 


—  363  — 

Les  feuilles  sont  coriaces  et  très-épaisses,  glauques  en  dessous;  les 
fleurs,  au  nombre  de  dix  à  quinze  par  corymbe,  sont  d'un  rouge  sang 
vif,  à  cinq  lobes  profondément  bilobés. 

Rhododendron  Brookcanniii,  Low.  —  Bot.  Mag.  tab.  4935. 
—  Fam.  desEricacées.  Décandrie  Monogynie.  —  Rosage  de  sir  James 
Brooke  (rajah  ou  sultan  de  Sarawak,  dans  l'île  de  Bornéo). 

Les  découvertes  botaniques  dues  aux  explorations  de  MM.  Hooker, 
Thompson,  Lobb,  Low,  Henshall,  etc.,  dans  le  vaste  continent  indien 
et  les  îles  fertiles  de  la  Malaisie,  ont  pour  ainsi  dire  créé  une  nouvelle 
ère  au  genre  Rhododendron;  des  formes  insolites  ont  surgi  de  Java, 
de  Bornéo,  d'Assam  :  tantôt  ce  sont  des  fleurs  gigantesques  aux  coloris 
les  plus  riches  suspendues  en  touffes  arrondies  à  l'extrémité  de  rameaux 
et  de  tiges  s'enroulant  autour  des  arbres  géants  des  forêts  de  l'Himalaya 
ou  de  Java,  tantôt  des  fleurs  aux  formes  mignonnes  abondamment  jetées 
sur  des  arbrisseaux  buissonnants;  quelques  espèces  sont  pourvues  de 
feuilles  énormes,  laineuses  ou  lisses  comme  un  miroir;  d'autres  sont 
garnies  d'un  feuillage  presque  nain;  enfin  les  fleurs  présentent  toutes 
les  nuances  imaginables  de  la  palette  du  peintre  excepté  le  bleu.  Les 
îles  de  Bornéo,  de  Java,  etc.,  offrent  surtout  les  types  jaunes,  orangés 
et  vermillonnés;  l'Himalaya,  les  types  cocomés,  blancs  et  rosés.  Avec 
une  pareille  fécondité  de  formes  et  de  couleurs,  le  genre  Rhododendron 
doit  devenir,  entre  les  mains  de  nos  habiles  horticulteurs,  un  élément 
assuré  de  richesse,  et  pour  l'amateur  une  source  presque  intarissable 
de  jouissances  pendant  un  long  avenir. 

Le  R.  Brookeanum  a  d'abord  été  découvert  et  décrit  par  M.  Low 
pendant  son  voyage  d'exploration  h  Bornéo.  M.  T.  Lobb  l'a  ensuite 
introduit  chez  MM.  Veitch  de  Londres.  C'est  une  espèce  épiphyte,  à 
grosses  racines  charnues,  croissant  sur  les  très-grands  arbres  des  forêts 
humides.  Les  capitules  sont  amples,  les  fleurs  jaune  d'or.  La  culture 
est  analogue  à  celle  du  R.  Javanicum. 

Rhododendron  campanulatum,  var.  Wallichii,  Hook,  — 

Bot.  Mag.  tab.  4928.  —  Synon.  :  Rhododendron  Wallichii  Hook,  fds. — ■ 
Rosage  campanule,  variété  du  Dr  Wallich. 

Le  savant  docteur  Hooker  fils  avait  d'abord  considéré  ce  Rosage,  dé- 
couvert par  lui  dans  le  Sikkim-Himalaya,  comme  une  espèce  distincte; 
mais  ayant  eu  occasion  de  remarquer  plus  tard  la  nature  variable  du 
Rhododendron  campanulatum,  il  fut  amené  à  ne  plus  regarder  le  nou- 
veau rosage  que  comme  une  forme  particulière  du  type  campanulatum, 
dont  elle  se  distinguerait  par  un  feuillage  très-peu  duveteux  en  dessous, 
ou  presque  glabre,  et  par  ses  corolles  lilas  mais  non  maculées. 


—  364  — 

HISTOIRE  DES  PLANTES  UTILES. 


HISTOIRE  DE  LA  VANILLE, 

Considérée  comme  un  produit  nouveau  des  Indes-Orientales  (1), 

Par  M.  H.  De  VRIESE.  Professeur  à  Leyde. 

ANALYSE    ET    TRADUCTION 

Pau  M.    Edouard    Morren. 
(Suite  et  fin.)  (2). 

La  Vanille  parail  avoir  rarement  lleuri  eu  Hollande,  et  elle  n'y  a  jamais 
porté  fruit.  Elle  a  cependant  fructifié  en  premier  lieu  dans  les  serres  du 
jardin  botanique  de  Liège,  ensuite  à  Paris,  à  Kew,  à  Padoue,  à  Berlin  et 
dans  plusieurs  autres  jardins  de  l'Europe.  L'honneur  de  cette  décou- 
verte revient  à  M.  Charles  Morren,qui  a  montré  que  l'on  peut,  recueillir 
en  Europe  de  la  Vanille  aussi  bonne  (sinon  meilleure)  qu'au  Mexique. 

Il  a  prouvé  que  dans  nos  serres,  la  Vanille,  placée  dans  les  mêmes  con- 
ditions que  le  climat  du  Mexique,  y  prospère  comme  dans  sa  patrie. 
Si  l'on  a  soin  de  mettre  les  plantes  dans  la  partie  la  plus  sombre  des 
serres,  elles  s'enlaceront  autour  des  Palmiers  et  des  Dracœna,  et  alors  la 
culture  réussira  et  elles  porteront  des  fruits.  La  raison  pour  laquelle  les 
plantes  ne  fleurissent  pas  est  uniquement  qu'elles  sont  trop  petites  et 
trop  jeunes,  ou  que  la  température  est  trop  basse,  ou  l'atmosphère  pas 
assez  humide.  Pour  fleurir  dans  les  serres,  une  plante  de  Vanille  doit 
avoir  de  cinq  à  six  ans,  et  la  floraison  sera  d'autant  plus  riche  que  la 
plante  est  plus  branchue.  Cependant  il  faut  observer  que  le  nombre  des 
Heurs  ne  dépend  pas  de  la  grandeur  des  plantes,  mais  surtout  des  condi- 
tions où  elles  se  trouvent. 

Les  expériences  de  M.  Charles  Morren  sur  la  Vanille  sont  basées  sur 
la  science;  nous  en  rendrons  compte  plus  loin. 

Le  Vanillier  des  serres  est  le  Vanilla  planifoliu  Andr.,  qui  a  été  in- 
troduit, en  1739,  par  Philippe  Miller.  C'est  de  cette  espèce  que  le  docteur 


f\)  Tuinbowv-flora  van  Nederluntt.  Vol.  Ii,  liv.  '2,  ô,  4,  1850. 
(-->)  Voir  ci-dessus,  |».  ôl". 


—  365  - 

Lindley  a  publié  une  belle  illustration  d'après  Fr.  Bauer  (1),  dont  les 
fruits  sont  répandus  dans  le  commerce  et  qui,  dans  ces  dernières  an- 
nées, a  été  transporté  de  Leyde  à  Java  et  à  Surinam  ,  de  Paris  à  Pile 
Bourbon  (la  Réunion),  et  d'Angleterre  dans  ses  différentes  colonies. 

On  sait  que  Robert  Brown  a  décrit  deux  espèces  (2) ,  savoir  : 

1°  Vanilla  aromatica  Wild.  Sp.  pi.  4,  p.  14,  avec  renvoi  à  Plumier, 
ic.  183,  t.  188.  C'est  donc  à  cette  espèce  qu'on  devrait  rapporter  l'Epi- 
dendrum  Vanilla  de  Linné.  11  dit  qu'elle  provient  de  l'Amérique  méri- 
dionale (3).  Brown  renvoie  au  Species  plantarum  de  Wildenow,  dont  la 
synonymie  est  fort  embrouillée,  et  où  plusieurs  espèces  sont  sans  doute 
confondues. 

2°  Vanilla  planifolia  Andrews  reposit.  538  (Myro  bromœ  fragrans, 
Salisb.par.,  p.  82.)  C'est  la  Vanille  odorante  des  Indes  occidentales,  intro- 
duite en  1800  par  Charles  Granville  ;  elle  fleurit  d'avril  à  juin  (4). 

Quant  au  V.  aromatica,  je  m'en  suis  enquis  vainement  à  Kew  ;  elle 
n'y  existe  pas.  Lindley  ne  pense  pas  que  ce  soit  cette  espèce  qui  fournit 
les  fruits  du  commerce,  mais  bien  le  V.  planifolia  Andr.  (5). 

Du  Tour,  auteur  français ,  parle  de  deux  variétés  du  Vanilla  aroma- 
tica, dont  l'une,  de  Saint-Domingue  {Vanilla  flore  viridi  et  albofructu 
nigricante  Plum.  gen.  25.  ic.  t.  188),  aurait  les  fruits  inodores,  tandis 
que  la  seconde,  Vanilla  mexicana  (synon.  de  V.  aromatica  S\v.),  serait 
odorante  (6).  Cependant  Brown  donne  cette  Vanille,  c'est-à-dire  celle  de 
Plumier,  comme  une  synonymie  du  V.  aromatica  ,  quoique  Plumier  ait 
déclaré  qu'elle  servait,  au  Mexique,  à  parfumer  le  chocolat. 

A  Venezuela  on  cultive  différentes  Vanilles,  notamment: 

1°  La  Corriente  [Courante).  On  en  distingue  deux  variétés,  l'une 


(1)  Illustrations  of  Orchidaceons  plants  ;  by  Francis  Bauer  Esq.  with  notes  by 
John  Lindley.  London  1830-1838.  La  planche  XI  de  cet  ouvrage  doit  représenter  le 
fruit  du  V.  planifolia.  Je  ne  pense  pas  que  M.  Klotzch  démontre  suffisamment  son 
opinion  que  ce  fruit  soit  celui  du  commerce,  et  pourquoi  il  parle  d'un«  prétendu  fruit 
du  V.  planifolia.  »  Bot.  Zeit.  1845,  p.  564.  C'est  à  tort  qu'il  rapporte  le  V.  Guia- 
nensis  Splilz.au  V.  planifolia  Andr. 

(2)  Gênera  et  species  plant.  Orchidearum,  quse  in  horto  Kewensi  eoluntur  (Hort. 
Kew.,  vol.  V,  p.  188-222.  Verm.  Schr.  II,  28). 

(3)  Déjà  décrite  par  Swartz  :  Foliis-ovato-oblongis  nervosis,  capsulis  cylindraceis, 
longissimis.  Sw.  nov.  Act.  Ups.  6,  p.  66. 

(4)  Déjà  décrite  :  Foliis  oblongo-lanceolatis,  planis,  obsolete-striatis ,  label  lu 
retuso. 

(5)  Morren,  Annals  of  nat  hist.  III,  p.  1.  Bullet.  de  l'Acad.  roy.  des  sciences  et 
lettres  de  Belg.  1837.  IV,  1838,  p.  225. 

(6)  Dict.  d'hist   nat.,  éd.  de  Déterville,  t.  XXXV,  p.  202. 


—  m  — 

pleine  de  graines,  très-aromatique,  à  peau  très-fine  et  fort  estimée, 
l'autre  (Cuereda)  a  la  peau  épaisse,  mais  elle  est  très-fertile  et  la  plus 
importante  pour  le  commerce  (Vanilla  aromatica?  Sw.). 

2°  La  Silvestre  ou  Chimarrona  (blanche  ou  brune);  ses  fruits  sont 
toujours  plus  petits  que  ceux  connus  sous  le  nom  de  Corriente,  ils  ne 
sont  pas  aussi  bien  développés  et  mûrissent  plus  difficilement;  on  la 
trouve  désignée  clans  quelques  ouvrages  sous  le  nom  de  Scinarona. 

3°  La  Mestiza  (moyenne,  metresse).  Ces  fruits  sont  plus  cylindriques 
que  ceux  de  la  véritable  Vanille,  ils  sont  tachés  de  brun  sur  un  fond 
verdàtre  et  à  la  maturité  il  leur  arrive  souvent  de  se  crevasser  et  de  se 
déchirer. 

4°  La  puerca  (la  porcine).  Les  fruits  de  ce  Vanillier  sont  beaucoup 
plus  petits  que  ceux  du  Corriente  (n°  1),  plus  arrondis,  d'un  vert  plus 
foncé  et  lorsqu'ils  ont  été  préparés  en  les  laissant  sécher  ils  exhalent  une 
très-mauvaise  odeur,  d'où  leur  est  venu  le  nom  de  Vanille  de  Cochon. 

o°  La  pompona  a  les  fruits  beaucoup  plus  gros  et  plus  courts  que 
le  Corriente  ;  leur  arôme  est  très-agréable  et  se  développe  surtout  lorsqu'ils 
commencent  à  sécher,  mais  il  disparaît  promptement,  ce  qui  ôte  à  ces 
fruits  toute  leur  valeur.  Il  est  très-probable  que  c'est  celte  dernière 
espèce  que  l'on  trouve  désignée  par  quelques  auteurs  sous  le  nom  de 
Bova  (Vanille  bouffie)  et  que  l'on  appelle  Vanillon  dans  le  commerce  ; 
elle  ne  vaut  que  60  francs  environ  le  kilogramme,  tandis  que  la  première 
espèce  se  vend  à  raison  de  160  francs. 

La  récolte  se  fait  au  mois  de  décembre  ;  la  maturité  s'annonce  par 
une  teinte  jaune  clair  que  les  fruits  prennent  pendant  cette  période. 
On  doit  avoir  soin  de  les  cueillir  avec  leur  pédoncule,  puis  on  les  dispose 
sur  des  nattes  que  l'on  a  laissées  préalablement  s'échauffer  au  soleil. 
Sous  l'influence  de  la  lumière  et  de  la  chaleur  les  Vanilles  prennent  en 
12  heures  une  couleur  brune  comme  le  café;  mais  à  défaut  de  soleil  on 
peut  employer  la  chaleur  artificielle,  pourvu  qu'on  ait  soin  de  ne  pas 
dépasser  la  température  d'un  four  dans  lequel  on  vient  de  cuire  le  pain. 
On  continue  à  soumettre  les  fruits  pendant  deux  mois  à  l'influence 
du  soleil,  et  lorsqu'ils  ont  atteint  une  maturité  convenable  on  fait  un 
triage  des  diverses  qualités.  On  doit  avoir  grand  soin  de  ne  pas  pousser 
ladessication  jusqu'à  rendre  les  gousses  sèches  et  cassantes, maisde  leur 
conserver  une  certaine  mollesse.  Les  fruits  ayant  été  assortis  on  les 
renferme  par  bottes  de  cinquante  dans  des  caisses  de  fer-blanc.  Souvent 
on  les  falsifie  et  on  fait  passer  le  puerca  et  la  pompona  comme  fruits  de 
première  qualité.  Les  Vanilles  de  premier  ordre  sont  désignés  sous  les 
noms  de  premiera,  Chica  fina,  Sacate,  Resacate  et  basura. 

La  premiera  de  toute  première  qualité  se  reconnaît  par  l'extrême 


-  367  — 

longueur  des  gousses  ;  chaque  fruit  doit  mesurer  24  pouces,  et  l'épaisseur 
est  analogue.  L'ombilic  par  lequel  il  adhérait  à  la  plante  doit  être 
rempli. 

La  Chica  fina  est  semblable  à  la  premiera  sauf  que  les  fruits  sont 
moins  longs,  et  généralement  deux  de  cette  espèce  n'en  valent  qu'un  de 
la  première. 

La  Sacate  est  la  variété  moyenne,  sous  tous  les  rapports  moindre 
que  les  deux  précédentes. 

La  Recasate  est  de  troisième  qualité;  quatre  de  ces  fruits  ne  valent 
qu'une  belle  gousse;  ce  sont  les  fruits  cueillis  avant  la  maturité,  ils  sont 
petits  et  secs,  au  lieu  d'être  grands  et  mous. 

La  Basura  ou  racaille  est  la  dernière  qualité,  et  consiste  dans  un 
ramassis  de  tous  les  débris  des  gousses  tachées  ou  brisées,  elle  est  de 
très-minime  valeur. 

La  première  qualité  est  surtout  en  but  aux  falsifications  du  commerce 
qui  trouve  toujours  le  moyen  d'y  mélanger  des  gousses  de  troisième  et 
quatrième  qualité. 

Lorsque  tout  le  continent  américain  était  sous  la  dépendance  de 
l'Espagne,  le  commerce  de  la  Vanille  était  du  monopole  de  la  couronne. 
Il  y  avait  alors  une  inspection  sévère  qui  déterminait  la  cueillette  des 
fruits,  et  le  choix  des  assortiments;  il  en  résultaitque  les  qualités  étaient 
alors  supérieures  à  celles  de  notre  époque. 

Longtemps  après  que  la  domination  espagnole  avait  disparu,  la  pro- 
duction de  la  Vanille  est  restée  très-restreinle.  Le  district  de  Misantla 
n'en  produisait  guère  que  50,000  gousses  annuellement ,  mais  à  partir 
de  1844  la  récolte  atteignit  le  chiffre  de  2  millions  de  gousses;  en  1845 
et  1846  il  s'éleva  chaque  année  d'un  million.  A  cette  époque  une  bande 
de  brigands  envahit  cette  contrée,  et  fit  main  basse  sur  le  commerce  de 
la  Vanille;  ils  la  fournissaient  à  tout  prix  contre  de  l'argent  comptant. 
Mais  en  dehors  de  cet  odieux  monopole  le  commerce  a  toujours  pu  se 
procurer  20,000  caisses,  c'est-à-dire  plusieurs  millions  de  fruits. 

Au  Mexique  on  cultive  quatre  Vanilles  différentes  : 

1°  Vanillier-Pomvone  (Vanilla  pompona)  décrit  plus  haut.  La  gousse 
est  courte  et  épaisse,  se  sèche  difficilement,  et  ne  peut  pas  lutter  contre 
les  Vanilles  de  première  qualité. 

2°  Vanillier  sauvage,  dont  la  gousse  est  longue  et  étroite. 

3°  Le  Vanillier-metis  est  très-peu  estimé. 

4°  Le  Vanillier  franc,  le  plus  recherché  dans  le  commerce,  provient 
des  districts  Nantla,Jicaltepec  et  Misantla  dans  lePapantla;  elle  croît 
aussi  dans  les  forêts  du  Tuamtepec;  on  la  cultive  depuis  ces  dernières 
années  jusque  vers  les  bords  même  du  Golfe,  mais  les  fruits  qui  pro- 
viennent de  ces  parages  sont  généralement  inférieurs. 


—  368  — 

La  croissance  de  la  Vanille  est  incalculable;  en  trois  ou  quatre  ans 
elle  atteint  la  cime  des  plus  hauts  arbres,  une  seule  plante  se  divise  en 
30  à  70  rameaux,  qui  par  leurs  embranchements  forment  une  liane 
immense.  L'époque  de  la  floraison  est,  au  Mexique ,  les  mois  de  mars, 
d'avril  et  de  mai;  le  pédoncule  croît  en  même  temps  que  la  fleur,  et 
s'allonge  jusque  6  à  7  pouces.  S'il  y  a  fécondation,  un  fruit  succède  à  la 
fleur,  il  croît  pendant  un  mois,  puis  la  maturité  réclame  6  mois,  de  sorte 
que  la  récolte  peut  se  faire  en  décembre. 

Pour  établir  une  plantation  de  Vanille  au  Mexique  on  choisit  une 
forêt  vierge  que  l'on  éclaircit  en  coupant  un  grand  nombre  de  plantes, 
arbrisseaux  et  lianes;  on  abat  tous   les  gros  arbres,  ne  laissant  que 
ceux  dont  les  tiges  ne  dépassent  pas  10  pouces  de  diamètre.  Le  meilleur 
moment  pour  la  plantation  est  le  mois  d'avril,  époque  où  la  terre  étant 
très-humide,  les  plantes  reprennent  avec  facilité.  Le  mois  de  septembre 
convient  également  à  cause  des  pluies.  Cette  opération  se  fait  avec  grand 
soin  ;  chaque  bouture  mesure  un  mètre  à  un  mètre  et  demi  de  longueur; 
on  les  plante  près  d'arbres  à  tige  droite,  à  cime  étendue,  à  feuillage  peu 
touffu  et  en  préférant  surtout  les  espèces  à  sève  laiteuse  :  les  Vanilliers 
qui  croissent  sur  les  figuiers  produisent  les  meilleurs  fruits,  mais  ils  ne 
croissent  pas  sur  l'arbre  à  copalle  (Rhus  copallinium)  ni  sur  le  poivrier; 
on  ne  les  plante  jamais  au  pied  des  arbres  dont  l'écorce  se  renouvelle 
annuellement,  ce  qui  détruirait  les  racines.  On  place  deux  boutures  au 
côté  de  chaque  arbre,  en  enterrant  trois  entrenœuds,  et  en  les  recouvrant 
de  feuilles  sèches  et  de  broussailles  ;  leur  extrémité  est  liée  contre  le 
tuteur.  On  laisse  entre  chaque  plante  quatre  à  cinq  mètres  de  distance, 
afin  que  la  vanille  n'envahisse  pas  trop  tôt  tout  l'espace,  et  il  convient 
même  de  laisser  un  certain  nombre  d'arbres  libres  qui  puissent  aider  à 
soutenir  la  liane.  On  détruit  la  cime  des  arbres  qui  s'élèvent  trop,  pour 
les  forcer  à  pousser  des  branches  latérales  qui  conviennent  à  la  crois- 
sance de  la  Vanille.  Après  un  mois  les  boutures  ont  pris  une  rapide 
croissance  et  les  soins  de  culture  se  résument  dès  lors  à  s'opposer  à 
l'envahissement  des  plantes  sauvages,  dont  on  ne  doit  tolérer  que  la 
quantité    nécessaire  pour  entretenir    l'ombre   et    la  fraîcheur.    Une 
Vanillière  bien  entretenue  doit  donner  des  fruits  dès  la  troisième  année; 
on  ne  les  établit  jamais  sur  le  versant  des  montagnes,  mais  dans  les 
plaines  exposées  au  sud  ou  au  sud-ouest,  aux  bords  des  rivières,  dans 
les  terres  basses  ou  sur  le  plateau  des  montagnes,  et  toujours  sur  un 
terrain  argileux  ou  d'alluvion  ;  les  terres  sablonneuses  ou  trop  grasses 
ne  leur  conviennent  pas,  les  premières  les  dessèchent  et  les  secondes  les 
pourrissent.  Les  fruits  étant  mûrs  en  décembre,  la  cueillette  se  fait  à  la 
main  ou  par  de  longues   perches  à   l'aide  desquelles  on  lord   les 
pédoncules. 


—  369  — 

Surinam  ne  fournit  pas  de  Vanille  qui  convienne  au  commerce.  Cette 
plante,  originaire  de  l'Amérique  du  sud  et  des  Antilles,  fut  introduite 
en  Europe  et  dans  différentes  contrées  intertropicales,oùeIle  fut  entourée 
de  tous  les  soins  nécessaires  à  sa  croissance.  Elle  y  fleurissait  sans  y 
fructifier  jamais.  Mais  les  recherches  scientifiques  sont  venues  éclaircir 
ce  mystère  et  y  porter  remède.  En  1831  Robert  Brown  présenta  à  la 
Société  Linnéenne  de  Londres  ses  observations  relatives  à  la  fécondation 
des  Orchidées,  question  fort  peu  connue  jusqu'à  ce  jour.  En  1793,  Chr. 
Conr.  Springel  écrivait  que  les  insectes  avaient  une  grande  influence  sur 
cette  fonction  de  ces  plantes,  et  il  ajoute  que  leur  coopération  était 
indispensable  à  l'accomplissement  de  cet  acte,  parce  que  le  nectar  que 
les  fleurs  distillent  s'attachant  à  leurs  pattes  servait  à  recueillir  le  pollen. 
Il  en  est  de  même  dans  la  famille  des  Asclépiadées,  où  l'intervention  des 
insectes  est  également  indispensable.  Ceux-ci  ne  font  d'ailleurs  pas 
défaut  dans  les  contrées  tropicales,  où  leurs  cohortes  innombrables 
rendent  la  vie  fort  incommode.  Cependant,  même  dans  leur  patrie,  les 
Orchidées  fructifient  rarement,  et  dans  nos  serres,  malgré  de  nombreux 
essais  elles  s'y  refusent  presque  constamment;  il  en  est  de  même  de  la 
Vanille  qui  fleurissait  souvent,  mais  qui  ne  produisait  jamais  de  fruits; 
il  fallait  une  opération  artificielle  qui  vînt  en  aide  à  la  nature,  pour 
accomplir  le  rôle  que  celle-ci  remplit  ordinairement. 

Nous  trouvons  que  relativement  aux  Orchidées,  dès  1799,  un  certain 
Wachter  fit  le  premier  fructifier  une  plante  de  cette  famille,  le  Habenaria 
bifolia  (1) .  Plus  tard  Salisbury,  Treviranus,  Adolphe  Brongniart  et  Mirbel 
ont  obtenu  des  fruits  d'Orchidées  par  des  fécondations  artificielles  (2). 
M.  Ambroise  Verschaffelt,  horticulteur  à  Gand,  a  récemment  par  ce 
procédé  obtenu  des  graines  fertiles  de  plusieurs  espèces  (Lcptodes  bicolor, 
Lodia,  Phalenopsis),  qui,  ayant  été  semées,  ont  donné  naissance  à  de 
jeunes  plantes  (3).  La  voie  à  suivre  pour  obtenir  des  fructifications  arti- 
ficielles chez  les  Orchidées ,  avait  d'ailleurs  été  rigoureusement  tracée 
par  les  observations  de  Robert  Brown. 

C'est  M.  Charles -Morren,  professeur  de  botanique,  d'abord  à  l'Uni- 
versité de  Gand,  puis  à  Liège,  qui  le  premier  a  appliqué  cette  méthode 
à  la  Vanille.  A  lui  revient  donc  l'honneur  des  résultats  obtenus  dans  les 
cultures  de  l'Europe  et  des  colonies. 

Les  expériences  de  fécondation  faites  à  Gand  sur  les  Orchidées,  don- 
nèrent à  M.  Morren  l'idée  de  les  renouveler  sur  les  grands  pieds  de  Va- 

(1)  Racmcr's  Archiv.  II,  209. 

(2)  Trevinarus,  Zeitschrift  fur  P/iys.  II,  22!5. 

(3)  L'illustration  horticole,  vol.  2,  Livr.  !>,  1855,  p.  *5. 

RELG.    HORT.    T.    VI.  30 


—  370  — 

nilliers  qui  fleurissaient  abondamment  chaque  année  à  Liège;  on  n'aurait 
pu  faire  ces  expériences  ni  obtenir  ces  résultats  sans  être  éclairé  par  la 
science.  Dès  1836,  M.  Morren  obtint  une  cinquantaine  de  fruits  d'un 
même  nombre  de  fleurs,  et  en  1837,  il  en  récolta  100.  Dès  lors,  la  cul- 
ture était  assurée  et  il  avait  atteint  ce  résultat  que  du  moment  qu'on  a  des 
fleurs,  les  fruits  leur  succèdent  infailliblement.  M.  Morren  est  le  premier 
qui  ait  fait  une  récolte  de  Vanille  en  Europe  (1). 

Mais  maintenant  comment  provoquer  en  Europe  la  floraison  du  Va- 
nillier, un  Vanillier  donné,  lui  faire  porter  des  fleiws?.. 

Voici  comment  procédait  31.  Morren  :  La  serre  doit  être  une  bonne 
serre  chaude,  d'une  élévation  plus  considérable  que  les  serres  à  Orchi- 
dées ordinaires.  On  place  la  Vanille  dans  un  sol  consistant  en  coke, 
terre  de  bois,  terre  de  jardin  bien  humide  et  bois  de  saule,  et  on  la 
conduit  sur  des  colonnes  de  fer  ou  des  perches  de  sapin  revêtues  de 
leur  écorce.  Pour  la  faire  fleurir  on  tord  les  rameaux  en  une  spirale 
courte,  on  les  fend,  on  leur  fait  des  incisions,  en  un  mot  on  provoque 
par  tous  les  moyens  possibles  des  arrêts  de  sève  et  de  développement. 
La  floraison  se  fait  alors  en  février  et  avril  ;  les  fruits  réclament  un  an 
pour  mûrir,  après  ce  laps  de  temps  leur  extrémité  jaunit  et  ils  tom- 
bent; on  les  expose  sous -les  vitres  au  soleil  le  plus  chaud,  ils  pas- 
sent alors  au  brun  chocolat  et  développent'  leur  délicieux  arôme. 

La  fécondation  ne  manque  jamais.  Quelques  heures  après  cette  opéra- 
tion, les  pétales  pendent  flétris  et  la  fleur  s'abaisse  toute  entière.  Cependant 
il  s'écoule  trois  semaines  entre  l'imprégnation  et  la  fécondation  propre- 
ment dite,  c'est-à-dire  entre  le  moment  où  l'on  met  le  pollen  en  rapport 
avec  la  surface  stigmatique  et  celui  où  les  organes  fécondants  pénètrent 
dans  l'ovaire.  Par  suite  de  la  découverte  de  M.  Morren,  toutes  les  colonies 
intertropicales  peuvent  se  livrer  avec  avantage  à  la  culture  de  la  Vanille, 
ce  qui  montre  une  fois  de  plus  l'influence  de  la  science  sur  l'industrie. 
Le  premier  résultat  a  été  l'introduction  du  Vanillier  aux  Indes  occiden- 
tales, aux  îles  Philippines,  Bourbon,  à  Cayenne,  au  Brésil,  etc. 

MM.  Reinwart  et  Blume  firent,  en  1841,  la  proposition  au  gouverne- 
ment hollandais,  d'introduire  cette  plante  à  Java;  elle  fut  en  effet  ex- 
pédiée par  M.  Schuurmans  Stekhoven  et  transportée  par  M.  Pierot. 
On  a  su  depuis,  par  un  écrit  de  M.  Blume,  que  le  Vanillier  se  trouvait 
déjà  à  Java,  mais  on  ignore  quand  et  comment  il  y  est  arrivé  (2).  On  n'y 


(1)  Annals  ofnat.  hisl.  III,  14  mars  18ô9.  —  Bnllct.  de  l'Acad.  roy.  des  Se.  et  belles- 
lettres  de  Bruxelles,  année  1837,  IV,  1838,  p.  225. 

(2)  Blume,  bijdragen  422,  Rumphia  I,  197,  t.  68.  —  Jaarbook  van  de  Kon.  Nc- 
derl.  Maatsch.  tut.  aanmoediging  van  den  Txriubouw  1844,  p.  41  cl  suiv.  — Ann.  de 
la  Société  de  bot.  et  d'ar/ricidt.  de  Gand,  III,  145. 


—  371  — 

connaissait  d'ailleurs  pas  le  moyen  de  le  faire  fructifier,  et,  jusqu'en  1850 
il  n'avait  pas  encore  produit  des  fruits  à  Java.  A  cette  époque  (à  la  date 
du  24  octobre)  l'aide  jardinier  du  jardin  botanique  de  Java,  M.  Binnen- 
dijk  écrivit  à  M.  De  Vriese  :  «  Nous  avons  (1)  découvert  la  fructification 
de  la  Vanille  et  nous  sommes  heureux  de  voir  toutes  les  plantes  qui  fleu- 
rissent se  charger  de  bouquets  de  gousses,  dont  quelques-unes  mesu- 
raient 15  centimètres.  Les  plantes  de  trois  ans  portent  14  à  15  bouquets 
formés  chacun  de  10  à  12  gousses;  ces  Vanilliers  s'enroulent  naturelle- 
ment autour  des  cannelliers,  mais  nous  les  avons  détachés  pour  arriver 
plus  commodément  aux  fleurs.  » 

En  1851,  M.  De  Vriese  reçut  de  M.  Teijsmann  un  rameau  fructifère 
provenant  des  plantes  cultivées  à  Buitenzorg  ;  déjà  antérieurement  le 
gouverneur  général  Rochussen  avait  envoyé  à  S.  M.  le  roi  de  Hollande 
des  fruits  mûrs  et  préparés.  M.  Teijsmann  a  continué  la  culture  de  la 
Vanille  sur  une  grande  échelle,  et  avant  peu  de  temps  le  commerce 
pourra  en  retirer  de  grands  avantages,  la  plante  ayant  pris  à  Java 
un  développement  extraordinaire.  Pour  montrer  l'importance  commer- 
ciale de  cette  épice  il  suffira  de  dire  qu'on  en  importe  annuellement  à 
Bordeaux  lia  12,000  kilogrammes,  la  plus  grande  partie  consommée 
en  France,  l'exportation  se  bornant  à  1000  et  1200  kilogrammes. 

Les  prix  étaient  au  3  juillet  1855  de  : 

lre  qualité  fine  de  8  pouces  de  long  60-65  fr.  le  Va  kilogr.en  entrepôt. 


2e 

7-7  % 

» 

50-55  fr. 

|re 

»  cour  te  de  5-6  Va 

» 

35-40  fr. 

2e 

»  mi-fine  de  8-8  Va 

» 

45-50  fr. 

2e 

»        »          7-7  Va 

» 

30-35  fr. 

2e 

»      »        5-6 

» 

20-25  fr. 

Les  Vanilles  d'une  qualité  inférieure  ne  trouvent  de  placement  qu'au 
prix  de  8-12  francs  le  Va  kilogramme. 

En  comparant  entre  elles  la  longueur  moyenne  des  Vanilles  de  dif- 
férentes provenances,  on  arrive  au  résultat  suivant  : 

1°  Vanille  de  Mexico.     .     .     longueur    8  pouces. 


2° 

» 

l'Ile  de  France 

» 

7 

3" 

» 

Liège  .     .     . 

» 

8 

4<> 

» 

Syon  House  . 

» 

8 

5° 

» 

Buitenzorg    . 

» 

8 

6» 

» 

la  Réunion     . 

» 

i 

Il  est  assez  singulier  que  l'on  classe  généralement  la  valeur  de  la 


(1)  MM.  Teijsmann  et  Binnendijk. 


—  372  — 

Vanille  d'après  la  longueur  du  fruit,  et  que  cette  base  serve  générale- 
ment à  établir  les  différentes  qualités.  Cependant  on  trouve  sur  un  seul 
bouquet  des  fruits  de  grandeur  très-inégale.  La  qualité  réelle  du  fruit 
dépend  plutôt  de  l'huile  essentielle  qu'il  contient. 

En  1846,  le  ministre  J.  C.  Baud  chargea  M.  DeVriese  d'envoyer  à  Su- 
rinam quelques  plantes  dont  l'introduction  pourrait  présenter  des  avan- 
tages; le  véritable  Vanillier  n'étant  pas  indigène  dans  cette  colonie, 
M.  De  Vriese  joignit  cette  plante  à  son  envoi  et  apprit  quelques  années 
plus  tard,  par  M.  le  général-major  baron  R.  T.  Van  Raders,  gouver- 
neur, qu'elle  y  avait  prospéré.  Mais  on  doit  conclure  d'un  travail  récem- 
ment publié  par  M.  H.  C.  Focke  (4)  que  cette  culture  est  déjà  aban- 
donnée, sans  doute  à  cause  du  défaut  d'une  personne  éclairée. 

Mais  Splitgerber  (2)  nous  apprend  qu'il  croît  à  Surinam  une  espèce 
particulière  de  Vanillier,  le  Vanilla  Guianensis,  Splitgerber  (3),  dont 
nous  avons  donné  la  figure  pi.  76,  p.  343  (livraison  de  juillet).  Voici  ce 
que  cet  auteur  nous  dit  de  cette  plante  : 

«  Le  V.  Guianensis  croît  avec  le  plus  de  vigueur  dans  cette  partie 
basse  et  marécageuse  de  la  Guyane  hollandaise,  qui  n'est  pas  fort  éloignée 
des  côtes  de  la  mer.  Il  m'a  paru  moins  fréquent  vers  l'intérieur,  où  le 
terrain  devient  plus  ou  moins  montagneux  :  souvent  on  le  voit  couvrir 
de  ses  tiges,  les  troncs  des  plus  gros  arbres  jusqu'à  cinquante  et 
soixante  pieds  de  hauteur,  portant  vers  le  sommet  un  nombre  consi- 
dérable de  fruits,  lesquels  deviennent  odorants  en  se  desséchant,  et 
s'ouvrent  constamment  en  deux  valves,  caractère  distinctif  du  genre. 
L'une  de  ces  valves  est  plus  ou  moins  convexe,  et  répond  à  la  division 
intérieure  de  la  corolle  qui  forme  le  labelle;  l'autre  plus  large,  paraît 
comme  formée  de  deux  côtes  soudées  à  angle  droit,  dont  les  faces  sont 
opposées  aux  deux  autres  pétales.  Les  graines,  en  nombre  immense,  sont 
attachées  à  des  funicules  d'un  tissu  cellulaire  très-allongé;  libres  au 
sommet,  ces  funicules  se  réunissent  vers  la  moitié  de  leur  longueur,  et 
composent  une  masse  de  consistance  molle,  nommée  communément 
pulpe  de  la  Vanille. 

(1)  Aanteekeninrjcn  betreffendc  de  in  Surinam e  voorkomendc  soorten  vanhetges- 
lacht  Vanilla  in  Wcst-Indie.  Bijdragcn  tôt  de  bevordcring  van  de  Kcnnis  in  Ncderl. 

West-hidiche  Kolonicn.  Haarlem  1854,  p.  275. 

(2)  Note  sur  une  nouvelle  espèce  de  Vanille.  Ann.  Se.  Nat.  II  série,  t.  XV, 
p.  279. 

(5)  Vanilla  Guianensis,  Splitg.  foliis  elliptico-oblongis  acuminalis,  perianthii 
campanulati  laciniis  apice  revolutis,  labello  iniundibuliformi-convolulo  acutiusculo  , 
fructu  triqnetro. 

Crcscit  non  raro  in  sylvis  humidis  Surinami. 


—  373  — 

»11  est  extrêmement  rare  de  trouver  sur  les  fruits  de  l'espèce  de  la 
Guyane  quelques-unes  de  ces  aiguilles  d'acide  benzoïque  qui  forment 
fréquemment  des  effiorescences  sur  ceux  du  commerce.  Ils  se  distin- 
guent ainsi  de  ces  derniers  par  un  arôme  beaucoup  plus  prompt  à 
s'évaporer;  il  en  faut  probablement  chercher  la  cause  dans  la  méthode 
défectueuse  suivie  à  la  colonie  pour  les  préparer,  car  jusqu'à  présent 
l'insouciance  si  naturelle  aux  colons  a  empêché  de  tirer  aucun  parti  d'un 
végétal  qui  n'exige  pas  même  la  peine  de  le  cultiver.  Il  faut  dire  cependant 
que  la  préparation  des  fibres  de  l'espèce  décrite  ci-dessus  offre  plusieurs 
difficultés  dont  la  plus  grande  consiste  à  empêcher  les  valves  de  se  sé- 
parer, car  alors  leur  parfum  diminue  promptement.  L'huile  dont  on 
enduit  les  capsules  du  commerce  suffit  pour  parer  à  cet  inconvénient. 
Mais  il  n'en  est  pas  de  même  à  l'égard  de  celles  du  V.  Guianensis  :  elles 
sont  fort  grosses  et  tellement  charnues,  que  leur  dessication  exige  beau- 
coup de  temps,  surtout  dans  un  climat  aussi  humide  que  celui  de  Su- 
rinam :  quelque  soin  que  l'on  prenne  de  les  entourer  d'une  ficelle ,  leurs 
valves  tendent  continuellement  à  s'écarter;  il  serait  peut-être  utile 
d'employer  une  chaleur  artificielle,  afin  de  hâter  leur  dessication,  ou  de 
les  couvrir  d'une  couche  d'huile  plus  épaisse  ,  ce  qui  les  rendrait  moins 
coriaces;  mais  ce  moyen  ne  doit  être  mis  en  usage  qu'avec  beaucoup 
de  circonspection,  car  l'huile  employée  en  trop  grande  quantité  com- 
munique bientôt  une  odeur  désagréable  aux  capsules,  ce  qui  détruit  en- 
tièrement leur  qualité.  C'est  ce  que  l'on  remarque  également  à  celles  qui 
ont  été  conservées  dans  du  sucre,  méthode  emplovée  fréquemment  au 
Brésil.  Quoi  qu'il  en  soit,  des  essais  multipliés  et  faits  avec  soin,  peu- 
vent seuls  fournir  un  remède  contre  cet  obstacle  qui  ne  me  paraît  nul- 
lement insurmontable.  » 

Splitgerber  signale  ensuite  une  seconde  espèce  de  Vanillier  indigène  à 
Surinam,  le  V.  palmarum  Lindl.  Il  ne  l'a  rencontrée  que  dans  les  forêts 
de  l'intérieur  du  pays,  à  proximité  de  la  montagne  bleue  [Blaauwe  berg), 
où  elle  croit  contre  les  stipes  et  sur  les  sommets  des  M  aurifia  et  de  quel- 
ques autres  palmiers. 

On  connait  jusqu'à  ce  jour  les  espèces  suivantes  du  genre  Vanilla  : 

1°  Vanilla  aromatica,  Stvartz  in  act.  l'ps.  G.  p.  00,  R.  Brown  in  f/orto  Kcw.  V. 
220  (V.  flore  viridi  et  albo,  l'ructu  nigricante,  PI.  ic.   183,  t.  188.  Epiilendrum  Va- 
nilla. Linn.  sp.  pi.  1347).  Amérique  du  sud,  dans  les  bois  humides  et  montagneux 
Swartz;  Brésil  près  de  Rio  Janeiro.  Gardn.  052  ;  dans  la  province  de  Minas  Gerae 
Martine. 

2°  Vanilla  clavicclata  Swartz  in  Sclirad.  Journ.  1799.  2.  fig.  1,  fl.  ind.  orc.  1515 
(Epid.  claviciilatum  Sw.  prod.  120.  Cerei  atfinis,  etc.  Sioane  p.  1G0,  t.  224  flg.  "cl 
4.)  I»es  Antilles,  d'après  Swartz. 

3°  Vanilla  plamfolia  Andr. 


—  374  — 

4°  Vanilla  albida  Bl.  bijdr.  422.  Rumphia  1. 197,  t.  67.  Bois  humides  de  Java. 

5°  Vanilla  grandiflora  Lindl.  gen.  and  sp.  of  orch.   pi.  435.  An  V.  Pompona 
Schiede  ?  Guyane  française,  St.-Martin,  etc. 

G"  Vanilla  bicolor  Lindl.  in  bot.  reg.  1838.  mise,  n*  58.  DemerarySc/i07N&. 

7»  Vanilla  palmarum  Lindl.  1.  c.  (Epidendrum  Palmarum  Salzmannpl.  exsc.  Bras. 
Ep.  Vanilla  flor.  ilum.?)  Bahia,surle  stipe  des  Palmiers. 

8°  Vanilla  aphylla  Bl.  bijdr.  422.  Rumphia  I.  198,  t.  68,  à  Java  sur  les  terrains 
d'alluvion. 

9°  Vanilla  sativa  Lindl.  1.  c.  Baynilla  mansa  des  Espagnols  du  Mexique.  Croît  à 
Papantla,  Misanlla,  Nantla,  Colipa  où  on  la  cultive. 

10»  Vanilla  sylvestris  Lindl.  1.  c.  Baynilla  cimarona  des  Mexicains,  croît  avec 
la  précédente. 

11°  Vanilla  pompona  Schiede.  Linn.  IV,  p.  573.  Lindl.  I.  c. 

12°  Vanilla  inodora  Lindl.  Baynilla  de  Piserco  Schiede?  Linn.  IV.  p.  574.  De 
Misantla. 

13°  Vanilla  guianensis  Splitg. 

14°  Vanilla  ovalis  Blanco.  Flora  de  Filipinas  éd.  ait.  p.  448. 

15°  Vanilla  majayensis  Blanco  1.  c.  p.  593. 

16»  Vanilla  ïïamata  Klotzsch. 

17°  Vanilla  rdiziana  Klotzsch,  toutes  deux  du  Pérou. 

18°  Vanilla  odorata  Presl.  inrel.Henk,  p.  101  du  Guayaquil. 

19"  Vanilla  chamissonis  Klotzsch  de  la  province  de  Ste. -Catherine. 

A  ces  espèces,  on  doit  sans  doute  ajouter  le 

20°  Vanilla  lutescens  Moquin-Tandon  originaire  de  Guayra  au  Paraguay  et  cul- 
tivée depuis  quelques  années  au  jardin  botanique  de  la  Faculté  de  médecine  à  Paris. 
Ses  feuilles  sont  ovales,  les  fleurs  d'un  beau  jaune ,  en  grappes  axillaires  ,  les  fruits 
longs  de  10  à  15  centimètres. 

EXPLICATION  DE  LA  PLANCHE  76,  P.  313. 
Vanilla  Guianensis,  Spiltg. 

1 . 2  Colonne  ou  Gynostème  vu  de  côté  et  de  face. 

3  Opercule. 

4  Masse  pollinique. 

5  Graines  (grandeur  naturelle). 

6  Graines  (grossies  par  le  microscope). 

7.9  Ovules  avec  leur  funicule,  observés  au  microscope. 
8  Grains  de  pollen. 

10  Ovules  du  V.  Palmarum  Lindl. 

11  Diagramme  de  la  fleur  du  V.  Guianensis  Spiltg. 


Noix    Muscade    (  Myristica    tnoschata), 


t~\  ■»  v« 

3/D 


LE   MUSCADIER. 

Par  M.   Duchartre. 

Le  muscadier  [Myristica  fragrans  Houtt.,  M.  officinalis  L.  fil.,  M.  mos- 
chata  Thunb.,  M.  aromatica  Lam.)  est  une  des  possessions  les  plus 
précieuses  des  Hollandais.  Il  ne  croît  spontanément  que  dans  celles  des 
Moluques  qui  forment  la  portion  sud-est  de  l'archipel  et  sur  le  côté  de 
l'île  de  Ceram  ;  mais  il  s'est  répandu  peu  à  peu  dans  toutes  ces  îles.  Sa 
culture  est  restreinte  à  trois  de  ces  îles  qui  appartiennent  à  la  préfecture 
de  Randan,  savoir  ."  Lonthor,  Bantan-Neyra  et  Way,  situées  autour 
du  volcan  de  Gunung-Apie;  là  ses  produits  atteignent  toute  leur  perfec- 
tion, tandis  qu'ils  deviennent  de  qualité  plus  faible  à  mesure  qu'ils  pro- 
viennent de  pays  plus  éloignés  de  ces  parages.  Malgré  cette  particularité, 
la  culture  de  cet  arbre  a  été  tentée  en  divers  pays,  sans  donner  cepen- 
dant jamais  des  résultats  de  nature  à  porter  ombrage  au  monopole  hol- 
landais; ainsi  elle  a  été  introduite  de  bonne  heure  à  l'île  de  France  et 
de  là  à  Cayenne;  d'un  autre  côté  les  Anglais  en  ont  fait  des  plantations 
considérables  soit  à  Sumatra,  où  en  1820,  sir  T.  Rafles  en  possédait  en- 
viron 100,000  pieds,  dont  un  quart  en  plein  rapport,  soit  au  Bengale. 

Dans  les  îles  de  Bandan,  les  plantations  de  muscadiers  sont  disposées 
en  quinconce,  et  elles  sont  protégées  contre  la  trop  grande  ardeur  du 
soleil  et  contre  les  vents  de  mer  par  de  grands  arbres  plantés  dans  l'in- 
tervalle, le  plus  souvent  des  Canarium,  dont  on  enlève  les  branches 
inférieures  pour  laisser  circuler  l'air  plus  librement.  L'arbre  commence 
à  porter  à  cinqou  six  ans;  mais  ses  produits  sont  faibles  pendant  quatre 
ou  cinq  ans.  Lorsqu'il  est  en  plein  rapport,  on  obtient  annuellement  de 
chaque  pied  femelle  environ  5  kilogrammes  de  noix  muscades  et  '/s  ki- 
logramme  de  macis.  Pendant  presque  toute  l'année,  il  porte  à  la  fois 
des  fleurs  et  des  fruits.  Ceux-ci  n'atteignent  leur  maturité  qu'au  bout 
de  neuf  mois  ;  ils  fournissent  trois  récoltes  par  an  ;  la  première  et  la  plus 
abondante  se  fait  à  la  fin  de  juillet  ou  au  commencement  d'août,  la  se- 
conde en  novembre,  la  troisième  à  la  fin  de  mars  ou  au  commencement 
d'avril.  La  maturité  de  ces  fruits  se  reconnaît  à  la  couleur  roussàlre  de 
leur  péricarpe  qui  commence  en  même  temps  à  s'ouvrir;  ils  ont  la 
grosseur  d'une  petite  pèche,  marqués  de  chaque  côté  d'un  sillon  longi- 
tudinal, presque  glabre,  d'abord  vert  pâle,  puis  jaunâtre,  s'ouvrant  à  la 
maturité  en  deux  valves  de  manière  à  laisser  voir  par  la  fente  la  graine 
vulgairement  connue  sous  le  nom  de  noix  muscade,  revêtue  de  son 
macis.  Aussitôt  les  fruits  mûrs,  des  hommes  montent  sur  les  arbres, 


—  376  — 

cueillent  les  fruits  et  les  jettent  à  terre;  d'autres  les  ouvrent  sur-le- 
champ  et  en  retirent  la  graine  en  rejetant  le  péricarpe.  On  détache  en- 
suite le  macis  qu'on  expose  au  soleil  pendant  quelques  jours  pour  le 
faire  sécher  entièrement,  après  quoi  on  l'humecte  d'eau  de  mer  pour 
éviter  qu'il  ne  se  brise  en  morceaux,  et  on  l'introduit  dans  des  sacs  où 
on  le  presse  fortement  pour  l'expédier.  Quant  aux  muscades,  après  les 
avoir  ainsi  dépouillées  de  leur  macis,  on  les  expose  au  soleil  pendant 
trois  jours,  en  ayant  le  soin  de  les  enfermer  tous  les  soirs,  après  quoi  on 
achève  de  les  sécher  à  la  fumée  pendant  trois  ou  quatre  semaines;  on 
brise  ensuite  leur  test  pour  en  retirer  l'amande  qu'on  plonge  dans  de 
l'eau  de  chaux  dans  le  but  de  la  garantir  de  la  pourriture,  qu'on  enferme 
dans  des  tonneaux  préalablement  enduits  de  lait  de  chaux,  et  qu'on 
livre  ensuite  au  commerce  sous  le  nom  de  muscades.  D'après  les  docu- 
ments reproduits  par  M.  Hooker,  la  quantité  de  muscades  qui  se  vend 
annuellement  en  Europe,  s'élève  à  250,000  livres.  Pour  éviter  que  le 
prix  de  cette  substance  ne  vienne  à  baisser,  lorsque  la  récolte  est  très- 
abondante,  le  gouvernement  hollandais  n'en  conserve  que  la  quantité 
nécessaire  pour  la  consommation   annuelle,  et  il  fait  brûler  l'excédant. 

On  distingue  deux  variétés  principales  de  muscades  :  la  royale  et  la 
verte.  La  première  se  distingue  par  ses  noix  plus  grosses,  que  leur 
macis  déborde  au  sommet,  tandis  qu'il  est  plus  court  qu'elles  dans  la 
seconde.  En  général  les  bonnes  muscades  sont  grosses,  arrondies,  pe- 
santes, finement  marbrées  et  de  couleur  gris  clair;  celles-là  sont  vulgai- 
rement nommées  muscades  femelles,  tandis  qu'on  nomme  muscades 
mâles  ou  sauvages,  celles  de  qualité  inférieure,  qui  sont  plus  allongées, 
plus  légères  et  plus  colorées.  La  muscade  et  son  macis  renferment  deux 
huiles,  dont  l'une,  fixe,  jaune,  d'une  odeur  agréable,  en  consistance 
de  suif,  s'obtient  par  pression  dans  la  proportion  de  7S>  ou  même  quel- 
quefois de  V3;  elle  est  connue  sous  le  nom  impropre  d'huile  de  macis,  et 
sous  ceux  de  baume  ou  beurre  de  muscade;  l'autre,  volatile,  peu  abon- 
dante (environ  d/30)5  s'obtient  par  distillation  et  porte  dans  le  commerce 
le  nom  d'huile  de  muscade.  L'abondance  de  ces  deux  huiles  dans  le  macis 
le  rend  plus  aromatique  que  la  noix  elle-même.  La  saveur  de  la  muscade 
est  comparable  à  celle  de  la  cannelle  et  du  girofle,  aromatique,  chaude 
et  comme  poivrée,  surtout  celle  de  la  noix  même  ;  les  fragments  de  celle- 
ci  se  fondent  dans  la  bouche  en  laissant  une  impression  très-durable, 
tandis  que  ceux  du  macis  s'y  ramollissent  simplement  sans  se  fondre. 

La  muscade  jouit  de  propriétés  toniques  excitantes,  qui,  jointes  à  sa 
saveur  aromatique,  en  font  un  des  condiments  les  plus  habituels  et  les 
plus  estimés.  Dans  les  climats  chauds  elle  entre  dans  la  plupart  des  mets, 
souvent  même  dans  les  boissons.  Elle  joue  aussi  un  rôle  important  dans 
la  médecine  indienne. 


TABLE  DES  MATIÈRES 


DU 


SIXIÈME  VOLUME  DE  LA  BELGIQUE  HORTICOLE. 


1.  —  Horticulture. 

1.  Noie  sur  quelques  variétés  nouvelles  de  Capucines,  et  la  culture  des  es- 

pèces bulbeuses,  par  M.  Ed.  Morren.  .    * 1 

2.  Moyen  de  faire  fleurir  le  Tropœolum  Wagenerianum ,  par  M.  E.  Rege.     .  4 
5.  Remarques  sur  les  Mimules,  par  M. Ch.  Morren 7 

4.  Note  sur  la  culture  des  Pélargonium  ,  par  M.  Ed.  Morren 12 

5.  Esthétique  et  culture  des  Cinéraires ,  ou  des  qualités  que  ces  fleurs  doivent 

réaliser  d'après  M.  G.  G.,  par  M.  Ed.  Morren 15 

6.  Un  mot  sur  la  rusticité  de  plusieurs  arbres  résineux ,  de  quelques  variétés 

de  Camellias  et  autres  plantes 19 

7.  Note  sur  les  Pélargoniums  Soarlels  et  leur  culture,  par  M.  Ed.  Morren.  .  55 

8.  Note  sur  VAdlumiacirrhosa,  RaGn,  par  M.  Ed.  Blorren 55 

9.  Note  sur  la  Lavalera  maritima ,  Gouan  ,   et  les  principales  espèces  du 

même  genre,  par  M.  Ed.  Morren 65 

10.  Aperçu  sur  le  Stylidium  recurvum  de  Graham  ,  et  les  autres  espèces  du 

même  genre,  par  M.  Ed.  Morren , 67 

11.  Liste  de  plantes  annuelles  qui  méritent  d'être  plus  fréquemment  cultivées 

qu'elles  ne  le  sont  encore  sur  le  continent 77 

12.  Lilas.:  Princesse  Camille  de  Bohan;  nouveau  gain  de  M.  Brahy-Ekenholm, 

édité  par  M.  Jacob-Makoy  ;  par  M.  Ed.  Morren 97 

15.  Le  Coleus  Blumci,  variété pectinalus,  nouveau  gainde  M.  Jacob-Makoy,  par 

M.  Ed.  Morren 99 

14.  Appendice  à  un  article  de  la  Belgique  horticole  sur  les  pantoufles  du  père 

Feuillée  et  les  brodequins  du  docteur   Fothergill,  par  M.  Remi-Romanet.  ib. 

15.  Culture  des  Jacinthes  dans  des  vases 111 

16.  Culture  des  Pimelia 116 

17.  Courte  biographie  du  Camellia,  suivie  de  la  description  d'une  variété  nou- 

velle :  Camellia  Japonica  ,  var.    Auguste  Delfosse  ,  par  M.  Ed.  Morren.  129 

18.  Pélargonium  Endlicherianum,  Fenzl,  par  M.  Ed.  Morren 155 

19.  Culture  du  Salvia  splendcns 144 

20.  Semis  de  Fougères  de  serre  chaude 145 

21.  Nouvelles  variétés  de  Gloxinias  de  la  collection  de  M'"e  Legrelle  d'Hanis, 

par  M.  Ed.  Morren 161 

22.  Culture  des  Gloxinias  d'après  la  méthode  d'un  amateur  anglais  du  Der- 

byshire 162 

25.  Les  Daaphinelles  des  jardins,  par  M.  Ed.  Morren 195 

24.  Expériences  sur  la  végétation  des  plantes  épiphytes,  par  M.  Ducharlre.    .  194 

25.  Remarque  sur  le  Basa  Dcvoniensis 211 

26.  Cultures  des  Portulaccas  pour  bordure 224 

27.  A  propos  des  OEillets  de  fantaisie,  par  M.  Ed.  Morren 225 

28.  Liste  des  fougères  de  serre  froide  et  tempérée •  228 

29.  Culture  du  Campanula  pyramidalis 256 

50.  Amphicome  Emodi,  Lindl.,  par  M.  Ed.  Morren 257 


—  378  — 

31.  Spirœa  Recvesiana,  hort.,  yar.  flor.  plen.,  par  le  même 257 

32.  Note  sur  la  germination  des  graines  anciennes,  par  M.  Max.  Leichllin.  .     .  258 

33.  Culture  du  Passiflora  edulis,  par  M.  Cl).  Shepherd 269 

34.  Scutcllaria  sple?idens,  Link,  Klotzsch  et  Otto,  ou  description  de  la    Toque 

brillante,  par  M.  Ed.  Morren 289 

35.  Oxalis  Ottonis,  Kl.,  ou  description  de  l'Oxalide  de  Otto,  par  le  même    .     .  291 

36.  Monographie  des  Colchiques  et  des   Crocus  qui    fleurissent    à  l'arrière- 

saison  ;  traduit  de  l'allemand  du  Dr  Ch.  Koch,  par  M.  Jules  Bourdon.  294  et  326 

37.  Histoire  littéraire  de  la  Pensée,  par  M.  Ch.  Morren. 321 

38.  Arbrisseaux  de  pleine  terre  fleurissant  de  bonne  heure  au  printemps,  par 

M.  William  Wood 336 

39.  Multiplication  des  Tropœolum  à  tubercules 337 

40.  Sur  la  culture  des  Orchidées  en  pleine  terre,  par  M.  E.  Regel 538 

41.  Oncidium  Limminghei,  par  M.  Ed.  Morren 553 

42.  La  serre  à  Orchidées  de  M.  Llewelyn 326 


2.  —  Revue  des  plantes  nonvclles  ou  iaatéi'essantes. 


1.  Abies  Ilookeriana,  Murr.  . 

2.  Abies  Pattoniana,    Murr.  . 

3.  Acrophorus  hispidus,  T.  M. 

4.  Adiantum  cullratum,  J  .  Sm. 
fi.  yEschynantus  fulgens,  Wall. 

6.  Akebia  quinata,  Decaisne. 

7.  Amphicome  Emodi,  Lindl. 

8.  Aralia  papyrifera,  Hook.    . 

9.  Arctotis  acaulis,  L.,  var.   spe- 

ciosa.  DC 

10.  Arislolochia  Thwailesii,  Hook 

11.  Banksia  Victorise,  Meisn.  . 

12.  Bégonia  magnifica,  Linden 

13.  Billbergia  rhodocyanea  ,    Le 

maire 

14.  Calyptraria  Hœmantha,  PL  et 

Lind 

15.  Cattleya  maxima,  Lindl.     . 

16.  Ceanoihus  inlegerrimus,  Hook 

17.  Cenia   pruinosa,  DC.     .     . 

18.  Cenia  lurbinata,  Pers.  .     . 

19.  Chœtogastra  lindeniana,  PL 

20.  Clivia  Gardeni,  Hook.    .     . 

21.  Caelogine  speciosa,  Lind.  . 

22.  Coïx  sligmatosa,  Koch.     . 

23.  Collinsia  verna,  Nuit.   .     . 

24.  Convolvulus  allhseoides ,   L. 

var.  argyreus.    .... 

25.  Cordia  superba,  Chain.     . 

26.  Correa  cardinalis,  Muell.  . 

27.  Cuphea  eminens,  PL  et  Lind 

28.  Cupressus  Lawsoniana,  Murr 

29.  Cupressus  Macnabiana,  Murr 

50.  Davalliabullata,WalI.  .     . 

51.  Davallia  dissocia,  J.  Sm.    . 

32.  Davallia   tenuifolia,   Sw\    . 

33.  Delphinium  cardinale,   Hook 


Ùi 

ib. 

171 
169 
134 
72 
102 
168 

265 

359 

206 

5 

76 


231 
208 
206 
205 
206 
6 
155 
104 
259 
560 

138 
102 
250 
232 
38 
ib. 
168 
145 
256 
101 


54    Dendrobium  bigibbum,  Lind.  167 

55.  Dendrobium     Mac    Carihiae  , 

Hook 105 

56.  Diplothemium  littorale,   Mart.  100 

57.  Drymonia  villosa,  Hook.     .     .  ib. 

58.  Drynaria  Fortuni,  T.  M.     .     .  235 

59.  Encephalartus  Cafter,  Lehm  .  207 

40.  Eschscholzia  californica  ,  DC. 

var.  flor.  plen 230 

41.  Frilillaria  lutea,  Bieb.      .     .  262 

42.  Frilillaria  praecox,  Hort.    .     .  261 

43.  Frilillaria  pyrenaica.  L.     .     .  260 

44.  Frilillaria  racemosa,  Sm.  .     .  261 

45.  Genelyllismacrostegia.Turczn.  6 

46.  Genelyllis  tulipifera,  Hook.     .  5 

47.  Gilia  dianthioïdes,  End.     .     .  137 

48.  Gonocalyxpulcher,  Pl.et  Lind.  232 

49.  Gymuogramma  lanala,  Kl.      .  171 

50.  Helianlhemum  tuberaria,  Mill-  136 

51.  Isoloma  Triansei,  Regel.     .     .  70 

52.  Juniperus  pyriformis,  Murr   .  38 
55.  Laslrea  pilosissima,  J.  Sm.    .  254 

54.  Lastrea  recedens,  J.  Sm.  .    .  255 

55.  Leplodactylon  californicum.    .  155 

56.  Locheria    magnifica ,    PL     et 

Lind 7 

57.  Lœlia  acuminata,  Lindl.     .     .  208 

58.  Lomaria  discolor 172 

59.  Magnolia    Campbellii,    Hook.  166 

60.  Moiiocliœtum   ensiferunî  ,  P. 

etL 252 

61.  Myogalum  afflue,  C.  Koch.      .  268 

62.  Kephrodium    venustum,  Hew.  252 
65.  NephrolcpisDavallioïdcs,T.M.  139 

64.  Nicotiana  fragrans,  Hook.  .     .  107 

65.  Nyclanthes  Arbor  trislis,  Lin.  164 

66.  Oruilhogalum  ratheuicuui.     .  265 


—  379 


67. 
68. 
69. 
70. 
71. 
72. 
73. 
74. 
75. 
76. 

77. 

78. 
79. 
80. 

81. 

82. 

83. 


Phlebodium  inaequale,  T.  M. 
Phlebodium  multiseriale,  M. 
Phygelius  Capensis,  E.  Meg.  . 
Pinus  Beardsleyi,  Murr.  .  . 
Platyloma  Brownii,  J.  Smith. 
Polypodium  filipes,  T.  M.  . 
Pteris  heterophylla,  L.  .  . 
Pycnopteris  Sieboldi,  T.  M.  . 
Rhododendron  Brook.,  Low. 
Rhododendron    californicum , 

Hook.  .     • 

Rhododendron  campanulatum, 

var.  Wallichii,  Hook.  .  . 
Rhododendron  Falc,  Hook.  fil. 
Rhododendron  Hookeri,  Nuit. 
Rhododendron  Moulmainense, 

Hook 

Rhododendron  retusum,Benn. 

Rhododendron 

Rixea    azurea  ,    Morr.  ,    var. 

grandiflora 


168 

84. 

143 

85. 

72 

86. 

39 

87. 

139 

88. 

141 

89. 

358 

90. 

142 

363 

91. 

92. 

105 

93. 

94. 

363 

95. 

361 

362 

96. 

97 

204 

98. 

105 

363 

99. 

205 

100. 

Rose  Docteur  Henon.    .     .    .  109 

Rose  Gloire  de  Dijon.    .     .     .  107 

Rose  Madame  Masson  .    .     .  109 

Rose  Madame  Vidot.     .     .     .  111 

Rose  Mathurin  Régnier.     .     .  108 

Salvia  asperata,  Falconer.  .  74 
Salvia  Camerloni,  Hort.Germ. 

ex  Regel 71 

Scutellaria Trianei.,  PI.  et  Ld.  232 

Seemannia  lernifolia,  Regel  .  75 

Sobralia  fragans,  Rz.  et  Pav  .  «6. 

Slanhopea  ecornuta,  Lindl.  .  73 
Slylophorum  diphyllum,  Nut- 

lall 71 

Tetralheca  ericoïdes.  Hort.  .  138 

Thermopsis  barbata,  Royle.  .  70 
Thujopsis  dolabrata,  Sieb.  et 

Zuccarini 36 

Tradescantia     hypophsea,    C. 

Koch •     .  260 

Tydsea  ocellata,   Regel.    .    .  76 


1. 

2. 

3. 
4. 


3.  —  Histoire  des  plantes  ntiles. 

Usage  des  feuilles  du  Caféier  en  infusion 20 

De  quelques  fruits  étrangers  ou  exotiques,  par  M.  Ed.  Morren 219 

Les  fécules  d'Arrow-root 280 

Histoire  de  la  Vanille  considérée  comme  un  produit  nouveau  des  Indes- 
Orientales,  par   M.  H.  de  Vriese,  analyse  et  traduction,  par  M.  Ed. 

Morren 315-364 

Notice  sur  quelques  produits  importants  fournis  par  diverses  espèces  de 

Palmiers,  par  M.  Olivier  Du  Vivier 343 

La  Saponaire,  par  M.  Ch.  Morren 241 

Le  Muscadier,  par  M.  Duchartre 375 


4. 


Horticulture  de  Salon. 


1.  Culture  des  Fougères  sous  cloche,  par  M.  Ed.  Morren 264 

2.  Quelques  mots  sur  l'histoire  de  l'oranger  et  son  mode  de  culture  le  plus 

facile  comme  plante  d'appartement,  par  31.  Olivier  Du  Vivier 266 

5.  —  Opérations  horticoles. 

1.  Du  greffage  des  pruniers  et  des  cerisiers,  par  M.  J.-J.  Bochnal,  père.  .    .      20 

2.  Comment  agit  le  drainage,  par  M.  E.  Risler 117 

6.  —  Littérature  horticole. 


1.  Considérations  diverses   sur  les  phénomènes   périodiques.  Phénomènes 

diurnes,  par  M.  H.  Lecoq,  professeur  d'histoire  naturelle  de  la  ville  de 
Clermont-Ferrand 

2.  Les  Palmiers  de  la  grande  serre  de  Kew,  d'après  un   article  de  M.  J. 

Houlslon,  dans  le  Florish,  frutish  and  Gardcn  Miscellany.    •         .     .     . 

7.  —  Architecture  des  jardins. 


44 


54 


1 .  Quelques  indications  sur  les  moyens  d'obtenir  une  floraison  continue  dans 

les  parterres  des  petits  jardins,  par  M.  Ed.  Morren 40 


—  380  — 

2.  Plans  d'une  disposition  économique  à  donner  aux  serres  et  aux  bâches,  par 

le  même 42 

3.  Plan  d'un  jardin  de  trois  hectares,  par  le  même 95 

4.  Description  de  deux  belvédères,  par  le  même 173 

5.  Comment  on  peut  établir  un  glacière  à  bon  marché  et  comment  il  convient 

de  conserver  la  glace,  par  le  même 174 

6.  Les  labyrinthes  de  jardins ,  par  le  même 209 

8.  —  Constructions  horticoles. 

1.  Relation  du  transport  d'un  Palmier  gigantesque,  Latania  borbonica,  du 

jardin  Loddigesau  palais  de  cristal  de  Sydenham,  par  Sir  P.  F.  Keir.     .      55 

2.  Notice  sur  les  /{ockworks  ou  rochers  artificiels,  par  M.  Olivier  Du  Vivier.  .      82 

9.  —  Meubles  et  ornements  de  jardin. 

1.  Choix  de  plantes  pour  les  grands  vases  d'ornement •     .     .     14G 

2.  Sydérolechnie  horticole  :  Allée  couverte ,  Kiosque,  Fauteuils  et  Divans 

américains,  en  fer  creux,  par  M.  Ed.  Morren 257 

10.  —  Hydroplasie  horticole. 

1.  Bassins,  vasques,  vases,  fleurs  artificielles  hydrauliques  en  métal  et  aju- 
tages de  jeux  d'eau,  fabriqués  dans  les  ateliers  de  M.  Henri  Leclerc,  in- 
génieur mécanicien-hydraulicien  à  Paris  ;  par  M.  Ed.  Morren it2 

11.  —  Instruments  d'horticulture. 

1.  Nouvelle  seringue-arrosoir  anglaise 58 

2.  Fumigateur  à  action  spontanée 59 

3.  Cueille-fruits  de  M.  Dittmare  du  Wurtemberg  et  de  Al.  Arnheiter  de  Paris.     270 

12.  —  Agrologic  horticole. 

1.  Sur  les  avantages  de  l'emploi  de  l'engrais  liquide  pour  la  végétation  des 

plantes 64 

13.  —  Physiologie  végétale. 

1.  De  l'origine  des  espèces  en  botanique  et  de  l'apparition  des  plantes  sur  le 

globe,  par  M.  A.  Malbranche 123-154-186 

14.  —  Pathologie  végétale. 

1.  Mode  d'emploi  du  soufre  dans  le  traitement  de  la  maladie  de  la  vigne,  par 

M.  C.-J.  Thibault 24 

15.  —  Géographie  botanique. 

î.  Les  envirous  de  Buenos-Ayres,  par  M.  Leiehllin 181 

16.  —  Arboriculture. 

1.  Nouvelle  variété  de  l'arbre  aux  quarante  écus,  Salisburia  adiantifulia ,  var. 

laciniuta,  par  M.  Ed.  Morren 148 

2.  Le  Cyprès  chauve  ou  Taxodier  distique   (Taxodium  distichum  Rich.),  par 

le  même 305 

3.  Saxe-Gothœaconspicua  ou  Saxe-Gotha  distingué,  par  le  même 309 

17.  —  Jardin  fruitier. 

1.  Cerise  blancbe  du  Nord,  par  M.  Ed.  Morren 21 

2.  Note  sur  l'établissement  d'une  fraisière,  la  culture  et  la  propagation  des 

fraisiers,  d'après  les  préceptes  de  M.  Underhill,  amateur  anglais.    ...      22 


—  381  — 

5.   La  pomme  framboise  ou  calville  rayé  d'automne,  par  M.  Royer GO 

4.  Nouvelle  note  concernant  le  fraisier  perpétuel,  Délices  d'automne     ...  61 

5.  Pêche  grosse  mignonne • 95 

6.  Pêche  Madelaine  de  Courson  ou  pêche  de  vin 95 

7.  Prune  impériale  violette,  par  M.  Royer 121 

8.  Moyen  de  former  promptement  les  espaliers,  par  M.  du  Breuil 150 

9.  Poire  sanguinole,  par  M.  Ed.  Morren 153 

10.  La  pomme  calville  blanche  à  côtes,  par  le  même 185 

11.  Du  Néflier  et  du  Néflier  cultivé  à  gros  fruits,  par  M.  de  Bavay 255 

12    Raisin  Tokay  des  jardins,  par  le  même 285 

13.  Du  Mûrier,  par  le  même 340 

18.  —  Culture  maraîchère  et  jardin  potager. 

1.  Culture  maraîchère  du  Cardon 28 

2.  Le  Crambe  maritima  ou  chou  marin 31 

3.  Les  radis  d'automne  ou  d'hiver,  par  M.  P.  Joigneaux 62 

4.  Sur  le  Pircunia  csculenta,  Mig.,  comme  plante  potagère,  par  M.  S.  Regel    .  147 

5.  Acclimatation  en  Europe  de  quatre  nouvelles  variétés   rustiques  de  Bâtâtes 

{Batatas  edulis),  provenant  du  Japon  et  introduites  par  M.  le  Dr  Von  Sie- 

boldt,  par  Ed.  Morren 179 

6.  La  pomme  de  terre  sauvage,  par  M.  J.  Lindley 342 

19.  —  Miscellanées. 

1.  Encre  noire  indélébile  pour  écrire  sur  le  zinc 89 

2.  Notions  générales  de  Paléontologie  végétale,  traduit  de  l'Allemand  du  doc- 

teur Seubert.  par  M.  A.  de  Borre 212-244-279 

3.  Fragment  du  rapport  prononcé  au  nom  du  jury  chargé  de  juger  les  concours 

de  l'exposition  florale  de  Versailles  en  1855,  par  M.  Bernard  de  Rennes.    .  271 

4.  Médaille  d'or  décernée  à  la  Belgique  horticole  par  la  société  impériale  et  cen- 

trale d'Horticulture  de  Paris.  Rapport  de  M.  Morel,  premier  vice-président 

de  la  Société .     ...  310 

5.  Grand  festival  horticole  du  24  août  à  Liège 339 

20.  —  Planches  coloriées  de  fleurs. 

1.  Amphicome  Emodi.  Lindl 257 

2.  Camellia  Japonica,  var.  Aug.  Delfosse 129 

3.  Coleus  Blumœi,  var.  pectinatus 97 

4.  Delphiniumazureum,  flor.  plen 193 

5.  Delphinium  cardinale,  Hook ib. 

6.  Delphinium  cœrulescens,  flor.  plen ib, 

7.  Delphinium  magnificum ib. 

8.  Diclytra  scandens 33 

9.  Gloxinias,    var 161 

10.  Lavatera  maritima,  Gouan 65 

11.  Lilas  princesse  Camille  de  Rohan 97 

12.  Œillets  de  fantaisie  ,  var 225 

13.  Oxalis  Ottonis,  Kl 289 

14.  Pélargoniums  scarlets,  var • 33 

15.  Pensées,  var ,    .    .    .  321 

16.  Scutellaria  splendens,  Link , 289 

17.  Spiraea  Reevesiana,  hort.,  var.  fi.  pi 2Ï7 

18.  Stylidium  recurvum,  Graham 65 


—  38-2  — 

19.  Tropœolum  Chaixianum 1 

20.  Tropœolum  Naudinii ib. 

21.  Tropœolum  Scheuerianum ib. 

22.  Vanilla  Guianensis,  Splitg.     .    .    • 313 

21.  —  Planches  coloriées  de  fruits. 

1.  CERISIER. 

Cerise  blanche   du  Nord .    .  21 

2.  MURIER. 

Mûrier  noir 340 

3.  NÉFLIER. 

Néflier  à  gros  fruit 255 

4.  NOIX  EXOTIQUES. 

1.  Anacardium  occidentale 219 

2.  Arachis  hypogaea.    .    .    • ib. 

3.  Rertholetia  excelsa.   .    -. ib. 

4.  Carya  alba ib. 

5.  Carya  olivaeformis t&. 

6.  Caryocar  butyrosum • ib 

7.  Lecythis  ollaria ib. 

8.  Pistacia  lentiscus ib. 

5.  PÊCHERS. 

Pèche  grosse  mignonne 95 

Pêche  Madeleine    de  Courson ib. 

6.  POIRIER. 

Poire  sanguinole 153 

7.  POMMIERS. 

Pomme  calville  blanche  à  côtes 185 

Pommes  framboises  ou  Calville  rayé  d'automne (50 

8.  PRUNIER. 

Prune  impériale   violette ....  121 

9.  VIGNE. 

Raisin  Tokay  des  jardins 285 

22.  —  Planches  et  figures  xylographiées. 

ARCHITECTURE  HORTICOLE. 

1.  Plans  d'une  disposition  économique  des  serres  et  bâches 43 

2.  Plan  d'un  domaine  de  3  hectares 9(5 

3.  Plan  d'une  glacière 17t» 

4.  Glacière  établie  dans  le  système  de  M.  Hawkins 178 

5.  Plan  d'un  labyrinthe  de  jardin 210 

CONSTRUCTIONS  HORTICOLES. 

6.  Aspect  d'un  rockwoi  k  planté  de  Fougères  et  de  Conifères 93 

7.  Belvédère  rustique 172 

8.  Belvédère  champêtre 173 

9.  Vue  de  la  serre  à  Orchidées  de  M.  Llewelyn  à  Penllergare 357 


—  383  — 

OPÉRATIONS  HORTICOLES 

10.  Transport  du  Latania  borbonica 86 

11.  Démonstration  de  l'aération  du  sol  produite  par  le  drainage 118 

MEUBLES  ET  INSTRUMENTS  D'HORTICULTURE. 

12.  Seringue  aspirante  et  foulante 58 

13.  Fleurs  hydrauliques  de  M.  Leelerc 113 

14.  Corbeille  de  fleurs  hydrauliques 114 

15.  Corbeille  de  fleurs  hydrauliques  de  l'exposition  universelle  de  Paris  en  1853.  115 

16.  Allée  couverte  construite  en  fer  creux 238 

17.  Fauteuil  et  divan  américains 239 

18.  Kiosque  moresque  en  fer  creux 240 

19.  Rocher  sous  cloches  pour  la  culture  des  Fougères 264 

20.  Cueille-fruits  de  M.  Dittmare 270 

21.  Cueille-fruits  de  M.  Arnheiter ib. 

ESTHÉTIQUE  HORTICOLE. 

22.  Esthétique  d'une  cinéraire.     .    • 15 

CULTURES  OU  PLANTES  MODÈLES. 

23.  Portrait  du  Pélargonium  de  M.  Onghton 12 

24.  Modèle  de  culture  de  Pélargoniums 14 

25.  Modèle  de  culture  de  Cinéraire 16 

CULTURE  DES  ARBRES  FRUITIERS. 

26.  Espalier  en  cordon  oblique  simple 151 

PLANTES  NOUVELLES  OU  INTÉRESSANTES. 

27.  Adiantum  cultratum 170 

28.  Acrophorus  hispidus i    .    .  ib. 

29.  Collinsia  verna,Nutt 361 

30.  Convolvulus  althœoides 137 

31.  Davallia  bullata 170 

32.  Davallia  dissecta 140 

33.  Davallia  tenuifolia 233 

34.  Gilia  dianthoides,  End 137 

35.  Gymnogramma  lanata 170 

36.  Lastrea  pilosissima  ...     . 233 

37.  Lastrea  recedens ib, 

38.  Leptodactylon  californicum,  Hook 137 

39.  Nephrodium  venustum 233 

40.  Nephrolepis  davallioides 140 

41.  Pélargonium  Endlicherianum 137 

42.  Platyloma  Brownii 140 

43.  Pteris  heterophylia .,  359 

44.  Pycnopteris  Sieboldi 140 

45.  Rhododendron  Hookeri 362 

46.  Salisburia  adiantifolia,  var.  laciniala.     .    .    .     • 149 

47.  Tetratheca  ericoïdes,  Hort 137 

ARBRES. 

48.  Cyprès  chauve  ou  Taxodium  distichum 304 

49.  Saxe  Golhisa  conspicua ,{03 


—  384  — 

PLANTES  UTILES. 

30.  Arenga  saccharifera 346 

51.  Cocos  nueifera 347 

52.  Curcuma  angustifolia 287 

53.  Manihot  utilissima 288 

54.  Marantaarundinacea 286 

54.  Phœnix    dactylifera 351 

56.  SagusRumphii 344 

PLANTES  FOSSILES. 

57.  Nevropteris  tenuifolia 215 

58.  Cyclopteris  orbicularis ib. 

59.  Sphenopteris  elegans 216 

60.  Pecopteris  aquilina ib. 

61.  Lycopodites  Schlotheimii 218 

62.  Lepidodendron  elegans ib. 

63.  Calamités  varians. 244 

64.  Equisetum  columnare ib. 

65.  Sphenophillum  Schlotheimii 245 

66.  Flabellaria  Lamononis • 246 

67.  Pterophyllum  Jœgeri 247 

68.  Zamites  macrophyllus t'6. 

69.  Dadoxylon  Brandlingii 248 

70.  Pinites  ponderosus ib. 

71.  Voltzia  heterophylla 249 

72.  Credneria  cuneifolia 250 

73.  Comptonia  asplenifolia • 251 

74.  Acer  tricuspidatum 253 

Portrait  gravé. 

PORTRAIT  DE  JEAN  KICKX. 


FIN  DE  LA  TABLK  t)ES  MATIÈRES  DU  SIXIÈME  VOLUME. 


AVIS. 

Messieurs  les  abonnés  à  la  Belgique  horticole  qui  désirent  recevoir  des  graines  de 
fleurs  ou  de  plantes  d'ornement,  sont  priés  d'adresser  leurs  demandes  à  la  direction  du 
Journal,  qui  tient  à  leur  disposition  un  choix  très-varié  de  semences  de  pleine-terre  ou 
de  serre  :  chacun  d'eux  recevra  un  envoi  analogue  aux  désirs  qu'il  nous  aura  ex- 
primés. 


New  York  Botanical  Garden   Library 


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