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BIBLIOTHEQUE
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THEATRE FRANÇOIS,
SON ORIQINE*
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de la Sotfafe .
BIBLIOTHEQUE
•nîÉATRE FRANÇOIS.
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ÇoNTMNANT uti Extrait ât tous Us Ouvrages
compoféspour ce Théâtre , depuis les Myfiires
jufqu'aux Pièces de Pierre Corneille;. uieLiftt
Chronologique de celles compofées depuis cette
dernière époque jufqu' à préfent i avec deux Ta-
"blés alphabétiques j l'une des Auteurs Çf l'aiari^
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FRANÇOIS.
Année 1628.
Jean de schelandre.
TYR ETSIDON. TragUComiîdie en deux Joue-
nées , dont l'une repréfentc les funeftes fuccès des
amours de Léonce 8c de Philolinc , & la féconde les
divers empèchcmcns & l'heureux fuccès de Belcar fie
de Meliaue. Chaque Journée en cinq adcs , en vers »
avec une Préface de F. O. P. & un avis de l'Impri-
mcur an Lcâeur. Paris, Robert-Etienne j 1618.
in-So.
(PREMIERE JOURNÉE. A^t premier.) Phar-
nabaze > Roi de Tyr , & AbdolominC) Roi de Sldon ,
après s'être fait long-tems la guerre avec un fuccès
égal , envoycnt chacun leurs fils à la tfite de l'année ,
pour donner un combat décifif. La victoire refte en-
core incertaine ; & les deu!£ Princes font fûts vù\au>
% THEATRE FRANÇOIS.
îiîers. ( ASe deuxième. )/PhiIoline, ïemme du vieux
Zorote , veut aller au bal. Son mari lai répond qu'elle
fera mieux de s'occuper des foins du ménage. Phi-
loline die qu'elle en eft laiTe >& qu'elle mené la vie
la plus tri(le. Elle ajoute qu'au moins > fi elle avbit un
enfant ^ fa compagnie la défennuyerôit.
ZOROTE.
II. ne dent pas à moi. Fais-jcpasle devoir?
P H I L O L I N £. •
K'ayanc couché que vous, je n*en puis rien fçayoir.
Le Vieillard perfîAant dans fes refus , elle feint de
vouloir fe tuer ; ce qui le détermine enfin à lui per«
mettre d'aller au bal » mais accompagnée de fa (œur.
Elle n'eft pas trop contente d'avoir avec elle cette fur-
veillante ; & elle fe propofe de fe venger de fon vieux
mari.
S'adcefTe donc à moi quelqu'homme qui me plaife ,
Quelque beau Cavalier , plein d'amoureufe braife.
Zoroce, ouvre ton fronc \ ^ ta rameure t*attend :
7e ce la planceray (î profonde en la cêce »
Qu*elle ne tombera qu*â la more de la bêcc.
\ARe troijiéme.) L^onte, 61s du Roi Pharnabaze,
voit Philoline au bal y en devient amoureux > lui dé-
clare fon amour , & en eft bien reçu. ( Aâe quatrii^
me. ) Timadon > Ecuyer de Léonte > fe fert d'un jeune
JPage ^u'U fait babiller eo fille > pour dpnner à Philo.
THEATRE FRANÇOIS. 3
Une une lettre de ce Prince ; & craignant qu'il ne foie
furpris par le vieux Zoroce, il lui demande :
Arez-votts bien lié pour paroicre • • . • •
la crête de coq d'inde à vos aynes pendue >
Gardez qu'avec la main le méfiant magot » •
Voulant prehdre un creufet, ne rencontre un lingot.
LE PAGE.
J'ai fait de m«n relief une platte peinture :
Que G. chaque époufée , au tournoy de nature,
Afiuroit fon faquin d'im aulfi fort plaAron ,
Le plus hardi lancier y deviendroit poltron.
Le Page travefli va tout de fuite chez Zorote ; &:
le voyant ivre^ il fe met à chanter. Zorote , le prenant
pour une fille 9 & la trouvant fort à fon gré, lui pro-
pofe d'entrer dans fa chambre, & dit :
Queyoîcy bien mon fait ! viens , ma mignone, approche.
L E P A G E.
O que Totre batail efl trop mal pour m^fclqche !
n y entre cependant, & Zorote lui dit :
Tu trouveras chez moy bonne table & bon lit*
( À3e cinquième* ) Zorote eft bien-tot au &it de tout
le manège du Page , & des amours de Lléonte & de
fa femme. Il veut venger fon affront fur le Prince
même ; & il le foit affaffiner par des foldats. Cette
Joamée finit par les regrets du Roi Abdolomine fur
cet aflTaflSnat*
4 THE A TRE FRA NÇOIS.
Je ne donnerai point 4'extrait de la féconde Jour*
née I donc le Aile eft moins libre que celui de la pre-
mière ; & je renvoyé le Lefteur à la Tragédie de
Tyr & Sidon par Daniel Dancheres > dont j'ai parlé
(bus Tannée i68o. Schelandre a fuivi abfblumenc le
même plan & la même intrigue : & il n'a partagé fa
pièce en deux Journées y que pour rendre compte
dans la première des amours de Léonte & de Philo^
line y dont il n'eft point fait mention dans celle de
Dancheres. La feule différence qu'on y trouve 9 eft
dans le nom des deux Rois & dans le dénouement.
Dans celle-ci) Meliane ne meurt point, Belcar revient
à Tyr , Pharnabaze lui donne fa fille en mariage , Se
fait mourir dans les tourmens Zorote le meurtrier de
fon fils 9 qu' Abdolomine lui a 'envoyé pour ordonner
de ion fupplice.
THULLIN.
tA PRODIGIEUSE RECONNOISSANCE DE
DAPHNIS ET DE CLORIS, leurs amours, leurs
aventure» & leur mariage«-Le tout rédigé en une Co-
médie en quatrf ades , en vers, dédiée auxf beaux e&
pritsdece tems. Paris > JeanBeifin» i6i8. i/i-8^«
Le vieillard Nemée avoit trouvé fur le bord du ri-
vage an enfant dans fon berceau ; il en avoit pris foin
& Tavoit nbmmé Daphnis. Quelque tems après j le
Berger Palemon avoit au(G rencontré une petite fille
cxpofée fur le même fleuve : i! Tavoit élevée & Tavoit
nommée Cloris. Ces deux petits orphelins étoiént éle-
très dans ie même hameau« Ils le virent » s'aimèrent 8c
THËA TRE FR A NÇO IS. J
fe donnèrent la foi de mariage. I.e Berger Cléon, qui
almoic aulTi Cloris, lui déclare (bn amour. La Ber-
gère y eft infenfible y & lui répond qu'elle a donné (bti
cœur à Daphnis , & qu'elle n'aimera jamais que lui*
Dans ce même tems > le Roi Eacide vient confuker
l'Oracle fur ce qu'il avoit à &ire , pour détourner la
pefie qui ravageoit fes Etats. L'Oracle lui répond
que les Dieux ne peuvent être appaifés i qu'en obfer-
vaut les loix avec plus d'exaâiitude. Cléon> pour fe
venger des mépris de Cloris» faifit avidement cette
occa(ion , & va dénoncer les deux jeunes amans qui
étoient fur le point de fe marier avant Tâge prefcrît
par les loix du pays. Onteis arrête : ils répondent aa
Roi avec la plus grançle fermeté » & font condamnés
à la mort. Le Roi Heiliphile arrive au moment même
où ils alloient être exécutés. Il paroit furpris» en
voyant un foîeil empreint fur l'eftomac de Daphnîs»
I) demande qu'on fafpende le fupplice : il prend diver
fes informations. Enfin le vieillard Nemée^ qui lui ap.
porte le berceau dans lequel il avoit autrefois trouvé
cet enfant, ne lui laifTe plus lieu de douter que Daph«
Dis e(l fon fils. Il le reconnoit & l'embrafle. D'un au-
tre cocé y le Berger Palemon arrive auffi : il fait voir
un miroir caiTé qu'il avoit trouvé dans le berceau de
Cloris , derrière lequel on avoit tracé des caraûèrea
qui £bnt connoitre que Cloris eft fille du Roi Eacide*-
Ces deux Rois, enchantés d'avoir fi heureufement re-
trouvé leurs en&ns 2. les unUTent enfemble, .& condam»^
6 THEATRE FRANÇOIS.
netit Cléôn au Tupplice qui étoit préparé pour les deux
amans^
L'ANTIQUITÉ DU TRIOMPHE DE BEZIERS
AU JOUR DE L'ASCENSION , dédiée par rim-
primeur à Mefficurs lesHabitansde ladite Ville, con-
tenant les plus rares hiftoires qui ont été repréfentées
au rofiiit jour ^ ces dernières années. Beziejëis , Jean
Martel» 1628. i/z-ix.
Les treize pièces dont je vais donner Vanalyfefont ren^
fermées fous ce titre. Pour avoir l'intelligence des mo-
tifs de cette fête t il faut fç?ivoîr que > la ville de Bé-
liers ayant été délivrée des ennemis le jour de l'Af-
cenfioo , on a inftitué une cérémonie pour en confer-
ver le fouvenîr. Ce jour - là , les peuples Voifins fe
rendent k Beziers ; on y tient une foire 1 on y fait une
proeefllon » & on y célèbre des Jeux. Des pièces
dramatiq^s font partie de la folemnité de ce Jour. Il
faut fçavoir encore qu'il y a dans cette Ville unegrofle
ftatue de pierre qu'on croît repréfenter un ancien Ca-
pitaine nommé Pierre Pecruce, que le peuple par cor-
rwption appelle Pepefuc. Ceft ce même Pepefuc qui
jotre le phis grand rôle dans la plupart de ces pièces.
HISTOIRE DE PEPESUC à fept perfonnages.
Après un prologue , Megere paroît fur la terre &
annonce la guerre. Les Soldats Gafcons & François,
prennent les armes , & réveillent Pepefuc leur Géné-
ral. Celui-ci les anime à bien faire; & lorfqu'îls font
tout prêts à combattre , la paix les arrête par fon re-
tour. Megere revient , les anime de nouveau. Ils reo-
THEATRE FRANÇOIS. y
trent tous en fureur ; mais la paix qui revient rétablit
le calme , & chacun fe retire dans fon foyer. Dans
cette pièce froide & fans fe! , le Soldat François, Mé-
gère & la Paix parlent &ançois; & les autres Adeors»
gaicon.
LE JUGEMENT DE PARIS à huit perfoiw
nages.
Le Berger Paris eft amoureux de la Bergère Oeno^
ne y qui le fuit pour éprourer fa fidélité. Enfin elle fe
rend & avoue fa fbiblefTe.
PARIS,
permettez cependant que je baife une fois
Ces lèvres de coral, qui vont faifant les loîx.
A.mcs cbades defîrs.
O E N G N E.
Votre bouche de rofe.
Ne doit pas demander une fî iufle chofe.
COLIN.
Ayflo non pouyrio pas ana millou que ya y
Puis qu'aves commençât , es rafou d*accaba.
Intras dedins tou bofc joufl caucos ombrettos ,
Refrefcas la calou de voftros amourettos.
Ceci ne peut pas mieux aUer qu'il va. Pidfque pom
ave^ commencé 9 il efi rcàfonnahle à* achever. En»eTi ^^^
le bois f Cf fous Fombre des arbres , rafratchiffii la chb^
leur de vos amour s*^
Ils (bivent ce confeil. Quelque tems après Coiin dit 1
Je ou m'en bou dins lou bofc, per vcyre s'elle es laflc.
Jt m*tnvâis ddns le hoh,£OHr voir un feu fi tilt tfiê^t^
8 THEATRE FRANÇOIS.
Cependant Mercure arrive ; il annonce Tavcntare de
la pomme d'or jettée par la Difcorde, & defiinée à la
plu$ belle. Il rend compte auffi de la querelle que
cette pomme a fufcitée entre les Déeffes Junon »
Pallas & Vénus , & du deflein que les Dieux ont pris
de rendre Paris juge dé ce différend. Les Déeffes
arrivent devant leur Juge » & font chacune un long
difçours au berger. Paris leur répond :
. Déedês , ce feroic un jugement volage..
De juger d*un foleil à travers un nuage.
Votre riche parure ombrage vos thréfors :
Ces beautés font dedans , il les faut voir dehors ;
Il vous faut exhiber à mes yeux toutes nues.
Elles obéiffent : & Paris adjuge à Vénus le prix de
la beauté. Elle lui promet en récompenfe les faveurs
. de la belle Hélène ; & il part pour la Grèce. Cepen-
dant Colin inftruit la malheureufe Oenone du départ
de fon amant. Cette tendre bergère fc défoie ; elle fe
rappelle le^ promefles de Paris ; elle répète les vers
que pour elle il avoit gravés fur les arbres.
Alors que Paris înfîdelle
Sans Oenone refpirera y
le flux à foy-mêmc rebelle
Vers fa fourcc' retournera.
Enfin elle fe donne la mort. Colin , au défefpoîr da
malheur qui vient d'arriver , & dont fon indifcrétion
^Jl caufe^ veut aulfi fe tuer ; m^is la réflexion qui
THEATRE FRANÇOIS. g
hit qu'il pourroit être mangé par les loups 9 le dé-
tourne de ce defTein.
You fîou doncos d'avift pcr cfvka aquel fort j
Que qui es viou fio viou y & qui es mort fîo more.
Je fuis doncques d*avis four éviter ce fort ,
Que qui efi vif fait vif y CT* que qui efi mortjoit mort.
Il enterre Oenone, & grave une épîtaphe fur fon
tombeau. Cette pièce en un afte eft moitié en fraa«
çois i moitié en gafcon.
HISTOIRE DE LA RÉJOUISSANCE DES
CHAMBRIERES DE BEZIERS, fur le nouveau
refkilliiTement d'eau des tuyaux de la fontaine.
Il y avoit à Beziers une fontaine , qui depuis quel«
ques années ne couloic plus. Les fervantes^ qui étoienc
obligées d'aller chercher de Tean fort loin > fe plai«
gnent à la Ville & la noenacent de la quitter » (i la
fontaine n'eft bientôt rétablie. Elles difent, pour leura
raifons , qu'en allant à la rivière 9 elles courent rifque
de tomber y que les femmes ont le malheureux penr
chant de faire toujours leur chute par derrière 9 &
que les hommes viennent alors mettre le doigt 9 ou le
bouchon9 dans le gouleau de leur bouteille , qu'ils fen«
dent même bien fouvent. A cette occafîon 9 les fer<-
vantes racontent de bonnes hiftoires qui leur font ar-
rivées. L'une eft rencontrée par fon galant qui la ren-
verfe , & veut voir fi elle eft fêlée : il trouve le dé-
faut & y met une emplâtret L'autre écume le çot^
20 THEATRE FRANÇOIS.
(on amant la prend par derrière , elle laifTe tomber l'é-
cumoire & la cherche : l'amant lut en préfente le
manche 9 & lui dit de le mettre dans certain trou >
pour le rendre folide. D'autres difent des chofes à
peu près femblables. Cependant la Ville leur promet
qu'elles feront bientôt contentes ; & en eiFet on voit y
peu de tems, après, la fontaine jaillir. Les fervantes
célèbrent cet événement par des chanfbns affez plai^
fautes. Cette farce comique & fort orduriere efl en
un afte , & moitié françois f moitié gafcon.
LES MARIAGES R'HABILLÉS , Paftoi^lê
à cinq perfbnnages.
Le vieillard Policart confie à fon valet Cafcarel
qu'il a defTein de fe marier avec Coucouve, & le
charge de conclure cette zSàitç. Il veut en même-
tems (aire ^poufer Serane fà fille unique avec Alimou
fils de Coucouve. Cafcarel s'acquitte de fa commiffion;
& ce double mariage étoit prêt à fe conclure > lorfque
ce valet , ayant été grondé par fon maître 9 brouille »
pour fe venger, la Vieille & le Vieillard. Il leur fait à
l'un & à l'autre un récit infidèle de leur caraftère. Où
en vient cependant aux éclaircifTemens.
COUCOUVE.
Cafcarel me diguet qu*on pafTaves pas neity
Quand ères endourmic , qu'on piÛèlTes al leitr
LE VIEILLARD.
Lou malhurous goujat jamais non mange rayes^
8'on me digucc que vous quado neic y cagayes.
THEATRE FRANÇOIS. ti
COUCOUVE.
Cajcartlrr^a dit que vous ne pajfie'^^pas une nuit, ^o^F*
^ue vous étie:^ endormi , que vous ne piJpkBie:^ au lit*
LE VIEILLARD.
Le malheureux Goujat , je veux ne jamais manger ra^i
vesy s'il ne m* a pas dit que chaque nuit vous y ehiier*
On découvre la friponnerie du valet ; & les maria-
ges s'accompliffent. Cette Paftorale en cinq aftes %
n'a nulle obfcénité* Elle eft toute en vers gafcons de
douze (illabes.
LA COLERE DE PEPESUC. Les Fêtes, dont
nous avons parlé, avoient été interrompues à caufe
des abus qui s'y étoient gliiTés ; on les rétablit en-
fuite : & cette pièce fut repréfentée à cette occafion»
Elle n'eft qu*iine efpece de dialogue entre quelques
perfonnes du peuple, fur l'interruption de la cérémo-
nie, & Pepefuc qui vante fes exploits & raconte fon
hifloire. Une femme l'interrompt , pour lui demander
ce qu'il a fait de deux groflès coquilles ^ & d'un long
pendant à l'avenact f qui faifoic trémoufler toutes les
filles. Il lui répond :
Dame Bigorro aquos Tcray ,
Ycou ay perdu mon papagay »
Et vous diray mon infortuno.
Uno neit qu'on fado pas luno ,
Une troupe de jouveacels ,
Que dcraberon lous martels ,
En penfan qu'yeou foufH uno porco,
Vcngeroun d*une eftrango foru^.
IX THEATRE FRANÇOIS,
■ Me lou prengcron en las dous mas ^
£t pu/s cire qui c laras ;
Me Vy douaeron de eouâîdet
Un de cenaillos-om^cides,
Crcfcn que 'forte un gros martel
De la grand porte d'uacaftel;
Si bé que tan me brandigeron ,
Qu'a la â me lou deraberon*
Dame Bigorre > cela efl. vrai que j'ai perdu mon perr$*
quet ; (r je vous dirai mon infortune. Une nuit qiiil riy
jçLvoit point de lune y une troupe de jouvenceaux qui crra^
choient tous les marteaux y penfant que ^e.fujfe u :^ porte f
vinrent d^ une étrange fot te y ils me le prirent avec les deux
mains , & puis tire toi 9 tire moi : ils me donnèrent des
JecouJJes avec des tenailles homicides , croyant que ce JÛt
un gros marteau de la grande porte d*un Château , Ji bien
que tant ils me branlèrent , qu'à la jUi ils me V arrache^
rent.
Il décaille enfaite les diverfès aventures de cet etv*
gin , qui fervit de pilon à un Apothicaire ; enfuite de
batan de cloche ^ &c. Ôcc. Ceft ainli que finit cet
ouvrage y qui eft en un aâe & écrit ed gafcon;
LAS CARITATS DE BEZIERS à huit perfon-
nages.
C'eft le nom de la Fête en queftion. On dit &ire
caritats , le jour de la cérémonie. Dans cette pièce >
deux jeunes hommes & leurs amantes vont alTiAer à
* la fête. Ils écoutent les difcours des perfonnages qui
THEATRE FRANÇOIS. 13
fervent à ce triomphe. On fait l'hifloire de Pepefuc ,
du chameau , &c. Les filles prennent place. Deux
Bergers ont enfemble un dialogue. L'un d'eux dit ;
Mas Damas , predas nous eue |ue parel de filles ,
Kous autres li aprendren de jouga de las quilles ,
Que cal cira toujours à la rego del miech.
Mefdames , yrète^-nous une paire de fille si G* nous leur
apprendrons à jouer aux quilles ; à notre jeu , il fauttou^
jours tirer â la raye du milieu. La proceflTion palFe en-
fiiite fur le théâtre ; & les deux jeunes amans épou-
fent leurs maitreflfes. Cette pièce e(l en quatre aâes
^ en vers alexandrins gafcons.
HISTOIRE MEMORABLE SUR LE DUEL
D'ISABELLE ET DE CLORIS , pour la jouidance
de Pbilemon.
Ilabelle aime Philemon ; mais elle eft gênée par
une vieille mère acariâtre > qui lui permet rarement
de forâr. Cloris > fon amie & fa confidente, fe char*
ge de fes meffages, & lui procure les moyens de
voir fon amant. Cette Cloris devient elle-même amou*
reufe de Philemon. Elle combat quelquefois fa paf>
fion» & cède enfin à fa violence. Elle dit à Philemon
qulfabelle eft infidelle. Celui - ci entre en fureur 9
rompt avec fa maitre/Te , & offre fon cœur à Cloris
qui l'accepte. Ifabelle , au defefpoir , épie la conduite
de (on amanc : elle regarde à travers une porte , Se
14 THEATRE FRANÇOIS.
le voit entre les bras de Cloris. Elle ne doute plus
de la perfidie de ion amie; & pour s'en venger, elle
lui envoie un cartel > & fur le théâtre le bat contre
elle, répée à la main. Cloris combe morte de Tes blef-
fures. Ifabelle fe déguife en foldat» pour ne pas tom*
ber entre les mains de la Juftice. Philemon fe met
en campagne » pour la chercher ; il la rencontre. Sous
fon déguiiëment 9 elle lui demande l'aumône i il la
reconnoit t & l'époufe. Cette pièce eft en cinq aâes
& en grands vers gafcons. Elle eft bien verûfiée , bien
conduite ^ & les perfonnages bien (butenus.
PLAINTE D'UN PAYSAN fur le mauvais traî-
fement qu'ils reçoivent des Soldats; à trois perfon*
cages.
Ce titre explique tout le fujet de cette pièce , qui
eft en vers gafcons. C'eft un Payfan & deux Soldats
qui viennent à la fête de Beziers » & qui font le dé-
tail dés horreurs de la guerre y & fur tout des rigueurs
qu'on exerce contre les Payfans.
LAS AVANTUROS DE GAZETTO.
LES AVENTURES DE GAZETTE , à fix pet-
fonnages.
Ce Gazette eft le chef d'une troupe de Boulions.
Il raconte quelques aventures qui lui font arrivées. Il
THEATRE FRANÇOIS, is
ne fait pas cependant le fuj et principal de b pièce.
Une vieille femme fait l'éloge de fa âlle > qui aime
tellement le travail.
Que per non perdre tems, ben fouyen ons'avifo»
Qu'elle piffe en marchan fan leva la camifo.
Que pour ne point perdre de tems , bien Jouvent on la
toit qu'elle piffe en marchant fans lever fa ekemife.
Cette fille fi fage » fi diligente , eft aimée d'un jeûne
homme qu'elle dédaigne. Sa mère la perfécute , pour
le lui faire époufer ; mais pour fe fouflraire à fes re«
proches & à ceux de fbn amant f elle s'engage dans
la troupe de Gazette. On la pourfuit & on la ratrape.
On veut punir Gazette 9 qui fe juftifie. Enfin la pièce
finit par le mariage de cette fille avec fbn galant.
Cette Comédie eft en trois aâes & en vers gafcoos
de douze fillabes.
LES AMOURS DE LA GUIMBARDE, à cinq
perfbnnages.
Cette pièce eft très-plaifante , & paroit n'avoir été
compofée, que pour faire valoir quelques chanfons f qui
couroient dans le tems en Languedoc fur les amours
de Guimbarde & de Dupont. Celui-ci, combattu par
l'amour & par la gloire , cède à ce dernier' fentiment»
& part pour le Château de Plaifance , où il va en
i6 THEATRE FRA NÇO IS.
garniibn. En vain Guimbarde veut le retenir. Elle
jette les hauts cris fur le départ de ion amant. Mi-
quonquette y (on amie> lui confeille de cacher Ton cha-
grin i pour ne pas de/enir la fable de la Ville. En
effet I on entend chanter de tous côtés des couplets
fur les amours de Dupont & de Guimbarde. Il y en
a pittfieurs de très-plaifans ; mais trop longs pour les
traduire. Guimbarde envoie un meflTager àDupon^
pour rinftruire de ce qui fe paffe. Cet amant arrive
fur le champ , & promet de punir les Chanfonniers ;
tnais > dans le même tems , il entend chanter dans les
coulifles de nouvelles chanfbns fur lui & fur fa mai-
trèfle. Dupont prend alors le parti le plus fage : il fe
prête à la plaifanterie ; & Guimbarde & lui fe met-
tent à chanter ces mêmes chanfons , & à danfei^ avec
la plus grande gaïeté. Cette Comédie efl: en un ade
& toute en vers gafcons.
HISTOIRE DE DONO PEIROUTOUNO.
HISTOIRE DE DAME PEIROUTOUNE/
k quatre perfonnages.
Rondelette eft aimée de Braquetîn , & lui tient
rigueur. Celui-ci implore le fecours deCupidon^ pour
parvenir à la fléchir. Ce Dieu la trouve endormie»
lui tire une flèche par derrière , & promet à Braque-
quetin qu'il la trouvera plus docile. Dès qu'elle efl
réveillée ,
THEATRE FRANÇOIS. ty
réveillëe , il va Taborder i & eft fort étonné de la
trouver encore plus cruelle. Il s'en plaint à TAmour ,
& lui obferve qu'il faut toujours tirer les filles par de-
vant ^ fi on veut réulTir avec elles. Enfuite il va trou-
ver Dame Peiroutoune » & la met dans fes intérêts*
Celle-ci vient à bout d'adoucir Rondelette , & lui fait
époufer Ton amant. On célèbre par des chanfbns la
gloire de^Peiroutoune : l'Amour lui-mênie lui cède la
palme » & lui remet fes flèches & fon carquois; Cette
pièce eft en un ade & en vers languedociens.
HISTOIRE DU VALET GUILLAUME ET
DE LA SERVANTE ANTOINE, à fix perlon-
nages.
Guillaume & la Servante Antoine déclament con-
tre l'Amour. Ce Dieu^ pour les punir , lance d'abord
une de fes flèches fur Guillaume, qui eft embrafé d'a-
mour. Il pourfuit fans cefle Antoine, qui eft inlènG-
ble. Cet amant malheureux fe defefpere j l'Amour ^
touché de fa douleur , blefle enfin Antoine ^ qui de-
vient aufll tendre que Guillaume ; mais celui-ci, pour
(è venger > feint d'être peu touché de fon amour.
Antoine le fuit par. tout ; elle va le trouver dans fa
maifon. Guillauifte profite de l'occafion , & fatisfàic
les defirs d'Antoine. Cependant le maître de Guil-
laume & la maitrefle d'Antoine s'apperçoivent de
cette intrigue I & furprennent ces deux amans cou-,
çhés enfemblet ;
Tome IL ^
zS THEATRE FRANÇOIS.
M ADE MOISELLE.
Combien de fols , paillard&<, as-tu fouillé ton lie ?
ANTOINE.
Non , pas c[\ic trente cops.
Seule me tJt trente coups,
MONSIEUR.
Un tel nombre fufHt.
Antoine avoue qu'elle eftgroflè , & on lui fait épou-
/èr fon amant. Cette pièce en un afte eft affez plai-
fante. Le Monfieur , la Demoifelle & Cupidon , par-
lent ftançois; les autres , languedocien.
Les deux Boutades qui fuivent , fur le coqui-
llage f fur la pauvreté & fur la mode , ne font que des
déclamations fans fcènes. Elles font en vers gafcons.
On n'y trouve que ces quatre vers françois; c'cft un
perroquet qui parle :
Je caquette dans un bocage ,
£t mes difcours font bien hardis ^
Mais Cl yézoïs dans votre cage ,
Je ferûis plus que )e ne dis.
LES AMOURS D'UN SERGENT AVEC
UNE VILLAGEOISE , à deux perfonnages.
Ceft un dialogue Gafcon , en (lances de fix vers »
entre' un Sergent & une Villageoife. Le Sergent fait
une déclaration d'amour > 6c la Villageoife le refufe.
THEATRE FRANÇOIS. 19
x:laude brueys et Charles feau.
jardin deys musos proa(ençalos.
jardin des muses provençales.
Ce recaeil eft compofé de différentes pièces , dont
la plupart n'ont point d'autre titre que celui de Cp-
médie; il eft en trois volumes i/z-ii. fa.is nom de
Ville ni d'Imprimeur. Les deux premiers imprimés
en 16x8. font de Claude Brueys; & letroifiémê) im-
primé en 166 s • eft de Charles Feau.
COMEDIE A ONZE PERSONNAGES. Cette
pièce commence par un long prologue , fur les effets
& les fuites de l'amour. { Aâie premier, ) Bourgau p
Apothicaire, aime Angelo, & en eft aimé ; mais le
père de cette fille la donne en mariage à Matériau p
plus riche que Bourgau. Angelo , fâchée de n'être pas
à (on amant , promet bien à fon père de faire (on mari
cocu : & l'on verra qu'elle tient exaftement fa parole.
Forlin f homme fort riche , aimoit Ca(îaqdre ; & on
la lui a refufée , parce qu'il étoit plus riche qu'elle*
Bourgau & Forlin admirent la bizarrerie de leur de-
ftin. L'un a été refufé à caufe de fa pauvreté i l'autre,
à caa(e de fes richeffes. Ils prennent la réfolution de
renoncer aux femmes , & de ne fe livrer qu'aux dou-
ceurs de l'amitié. Après avoir détaillé tous les mal-
beurs qui fuivent le mariage 9 ils (îniffent par dire :
Tous leys maris que foac contens ,
V aafatjiea fus loir cuou d'un veicé.
ta THEATRE FRANÇOIS.
Tous les maris ^ qui /ont conttns ^ danferoitnt fur Uçul
d'un verre.
Le valet Fauquet amoureux de la (ervante Brilr
letto > la preHe de céder à fa cendreiTe > il lui dit i
Fen un enfant à la mitac ,
f £c ti fournirai la femcnzo.
r'
Faifons un enfant, de moitié $ & te fournirai de la fc^
Utence.
( jlêle deuxième. ) Forlîn , malgré fa belle réfolution^
devient amoureux de Perline. Bourgau lui fait en
vain un portrait horrible des femmes & du mariage.
Il lui dit:
Qu'u pcend ftemo cromp' un houftau ,
Que tous n'eu pouorcon uno clau»
Qui prend une femme , acheté une maifon dont tous les
•hommes portent la clef
i
Tous ces difcours (ont inutiles : Forlin perfide dans
fon amour , & engage même Bourgau à le fervir* Us
vont enfemble trouver Perline ; Forlin Tépoufe , & va
Vite fe coucher avec elle. ( A^e troijiéme. ) Bourgau
devient amoureux de Perline. Il réHfte vainement à la
paCHof) qu'il relient pour la femme de fon ami > qui , de
fon côté inquiet de la conduite de fa femme» veut (ça-
voirfi elle lui eftfidelle. 11 prie Bourgau, dont il igno*
rela foibleffe, d'éprouver celle de fa femme. Il prétex-
te un voyage , & laifTe le champ libre à fon ami. ( Aâle
quatrième. ) Forlio > pour être plus fur de fon fait ^ fe
THE A TJIE FRANCO IS, «
cache dans un coin de la chambre : Bourgau a la coti»
verfacion la plas tendre avec Perline > qui confent en«
"fin à lui tout accorder. Ils paflent dans une autre
chambre , pour finir plus commodément cette con«
Terfation. Forlin leur laiife conclure l'affaire ; & étane
pleinement convaincu ^ il ordonné auifi tôt à Ton valet
de déménager toute la mai(bn > & de le fuivre dans
ÛL retraite. Bourgau &c PerKne prennent le parti de
Tivre enfemble. Bientôt aprè^ j Bourgau fent renaître
dans (on cœur l'amour qu'il avoit eu autrefois pooi^
Angelo, & cherche les moyens d'en jouir. II s'adre{%
à Ramplne macq. • • • qui lut tient des propos digner
de fon état 9 & qui lui promet Tes fervices. Elle va
en effet trouver Angelo» 6c vient à bout de la corrom^
pre. Elle vient auffitôt en avertir Bourgau 9 & lui dit ;.
la befte es fellado & bridada »
Non fàu ptus ren que la xnonca.
La liu eftfielUe €r. bridée ^ il m faut plus^ rien fue hg,
monter,
Ahgeb fuppôfe une maladie ^ & \€îtt les hauts^
cris. Son mari Matériau va chercher l'Apothicaire
Bourgau 9 l'amebe à ia femme & les laiffe enfemble^
Il regarde par le trou de la ferrure y & voit ce qu'o»
imagine. Il jure de fe venger. ( Aâle cinquiéme.y Ma*
teriau fe déguife , & va chez Bourgau. Celui-ci Ivi
demande ^Ue eft fa maladie.
ii THEATRE FRANÇOIS,
Un pau defToUto rcmbourîgo ,
M*es yengu enfle comm*un paii. '
' Un peu au'dejfous du nombj^il m?eft venu enflé comme, .
ttnj>ain,
Bourgau y^ faire un cataplafme : en mème^tefns
Perline arrive dans I:^ boutique. Matériau lui expli-
que fon mal ; elle fe charge de le guérir » & ils paflent
enfe^ble dans une chambre > pour procéder à cette
cure* Quelque temsaprèr» Bourgau revieut» & appor-
te le cataplafme. Matériau Ten remercie > & lut ap-
prend qu'il n'en a plus befoin ji &^que Perine Ta
guéri. ËnSn il fe découvre » & lui die qu'il vient de
lui rendre ce qu'il lui avoit prêté, Bourgau au defet
poir rencontre Forlin y fait la paix avec lui» ils Te dé-
terminent à renoncer à toutes les femmes , Se à (ë con-
tenter de la fervante Brilletto y qu'ils font coucher au
milieu d'eux. Fauquet > ce valet dont il a déjà été
fait mention 9 veut avoir fa part de Brilletto, & trou-
ve le moyen de coucher avec elle dans leur lit* Bour-
gau & Forlin s'en étant apperçus > & voyant Hnuti-
}ité d^ vouloir trouver une femme fidelle » prennent
ie parti de pardonner à leur feramé & à leur maitrefle.
SPUFgau époufe Angelo % dont le mari eft mort ; For-
lin reî>rend Perline ; & Brilletto fb marie avec Fau-
quet. Il eft inutile de remarquer que l'Auteur n'a
point le mérite de l'invention de Ton fujet^i & qu'il la
tiré du conte de Joconde dans rAriôfte.
THEATRE FRANÇOIS. a^
. COMEDIE A SEPT PERSONNAGES. Cette
pièce , qui efl: auill en cinq aâ:es , eA mal imaginée y &
de très-mauvais goût. Carlin eft une efp^éce d'amou*
reux tranli > qui aime Pauline à la^ fureur* Cette
Pauline le dédaigne toujours. Carlin s'adreiTe à une
macq. . • • qui. s'efforce dé fëdulre Pauline 9 & qui n'y
peut réuflir. Cette fille fage repouffe , avec une vertu
aaftere & avec mépris , les différens affauts de la
macq.. • • mais on eft furpris, avec raifon > de la voir
tout- à-coup s^mbrafer d'amour pour un charettier^
à qui elle fe livre^ Carlin la furprend entre les bras de
cet indigne amant: &9 pour la punir de cette hon^
teufe fbibleffe , il lui fait épouTer fon valet. Appa«
remment qu'il veut auffi fe punir lui-même; car il
époufe la fervante de Pauline ; & pour que perfonne
ne manque à la fête , il marie la macq. « ^ . avec le
cbarettier.
COMEDIE A SEPT PERSONNAGES , & ça
cinq aâres.
L'Auteur a voulu prouver dans cette pièce indé-
cente > qu'avec de l'argent on vient à bout de tout.
Rolin ) quoique marié $ eft amoureux d'Arcinno j fem-
me de fon voifin» II va trouver Fourgonne j^efpeçe de
macq. . • . pour l'engager à difpofer Arcinno à le bien
recevoir. Fourgonne refufe d'abord de feire ce met
fage. Elle s'y détermine enfin pour 50 écus^ que
Rolia loi donne* Elle va chez Arcinno , qui d'abord
t6 THEATRE FRANÇOIS.
faire dés ordonnances. Le Secrétaire de Carnaval loi
raconte comment celles qui reftoicnt , avoient ité
brûlées dans le Château de Gafcogne. La defcrip-
tion de ce Château eft bien faite y & d'un bon co-
mique. On fait de nouvelles ordonnances, qui (ont
dignes du fujet. Elles prêchent le libertinage & la
débauche. L'Auteur n'a pas été plus modéré dans les
cxpreffions que dans les préceptes. Voici une des
maximes les moins malhonnêtes.
Quant eis ELuffians gens de grand cuco >
lous amys Juras de nacuro ,
De tout tens lyés agut permés
Bouta levamc per no mes ,
Lorfque trobon quauquo mendigo ,
Qu'a mangefon fou rembourigo^.
Quant auxRibaudfy ^ens de grand cœur^ les amis Jurés
de la nature , dt tout tem U leur a étéptrmis de mettre U
levain pour neuf mois y lorfqu^Hs trouvent quelque femelle à
qui il démange fous le n'ombriU
COMEDIE A SEPT PERSONNAGES.
C'eft la même pièce,' mais d'une autre édition
que la féconde y dont je viens de parler à l'article de
Jardin deys mufosy &c.
L'EMBARQUAMENT., LEYS COîTQUES.
TOS , ET LHUROUX VI AGI DE CAR-
MENTRAW.
. L'EMBARQUEMENT , LES CONQUESTES,
ET L'HEUREUX VOYAGE DE CARNAVAL.
THEATRE FRANÇOIS. %-)
C'eft plutôt un dialogue qu'une Comédie , entre
des bourgeois & des foldacs. h^% premiers font des
queftions aux féconds , fur les difFérens fujets indi-
qués dans ce titre. Tout cela eft dit d'une &çoq a0ez
comique , mais ne mérite aucun extrait. ^
COMEDIE DE L'INTEREZ OÙ DE LA
RESSEMBLANÇO , en cinq aâes & à huit per«
(bnnages.
COMEDIE DE LINTEREST OU DE LA
RESSEMBLANCE.
Maître Gonin a dans fa maifon une (ille fort laide i
jSc un tréfor gardé par des lutins. Il promet le tréfor
à celui quiépoufèra fa fille 9 & le délivrera des ef-*
^its. Un Poéce & Jean Fricano 9 efpece de fanfa-
ron f (e préfentent & difputenc la préférence. Riga-
deon 9 valef de Goniq % & qui vraifemblablement eft
jui-mème le maître Gonin » fait tomber dans le piè-
ge le père » la fille , les deux amoureux & leurs va-
lets , & s'empare du tréfor. C'ed ainfi que finit cette
f iece > q[ui çft mal conduire 1 fi( qui n'a nulle bonne
plaifanterie* ^
LA FARÇO DE JUAN DOUGRAU A SIEIS
PERSONAGES , OU L'ASSEMBLADÔ DEI
PAURES MANDIANS DE MARSILLO PER
EMPECHE DE BASTIR LA CHARITÉ, en un
ade.
. LÀ FARCE DE JEAN DU GRAU A SIX
a« THEATRE FRANÇOIS,
PERSONNAGES,OU L'ASSEMBLÉE DES
PAUVRES MENDIANS DE MARSEILLE,
POUR EMPESCHER DE BASTIR LA CHA-
RITE'.
La ville de Marfeille fait bâtir THÔpital de laCha-
tlté 9 pour renfermer les pauvres tnendians. Sur cette
nouvelle tous les pauvres fe recrient contre la tyran-
nie y & préfèrent la liberté aux fecours que l'on pro-
jnet dans cette maifbn. Chacun fe plaint à fa façon»
Jean du Grau les raflemble tous, pour prendre une
réfolution. Il les harangue» puis demande leur avis.
On conclue) enfin à faire une bourfe commune» à met»
tre à part une fomme chaque Jour » jufqu'à ce que
THôpital fut bâti , & de vivre enfiiite de cet argent,
(ans pliis demander la Charité : qu'alors la Ville , ne
trouvant plus de pauvres, vendroit certainement cet
Hôpital ; qu'auffitot ils fe remettroient en campagne
pour recommencer leur métier. Cette prétendue Ëirce
tft encore plus triffe que fon (iijet.
LOU PROUCÉS DE CARMENTRAW, î/»i
12. fans date.
LE PROCES DE CARNAVAL.
Carnaval paroît défolé : le Joueur , le Débauché»
le Danfeur , lui demandent raifon de fon affliftion* 13
répond , que c'eft uûe femme nommée Madame Ca-
rême, qui le perfécute , & qui veut régner à fa phce«^
THEATRE FRANÇOIS. zg
Anffitôt fes amis prennent le parti de la noyer : ils fe
mettent en embufcade ; & lorfqu'elle pafTe , ils la jet*
cent dans la rivière : mais elle fe fauve , & aiOftée
d'un Avocat , elle va porter fes plaintes au Juge. On
plaide la caufe de part & d*autre ; & Carnaval eft
condamné à mort. Ceft ainfî que finit cette pièce» qui
cft en quatre aâes> & qui n'a rien de remarquable »
que le portrait de Dai;ne Carême , trop long pour être
rapporté ici.
A Gr^I M E'E f ou P Amour extravagant , Tragî-Co-
tnédicy dédiée à Madame de Chalais^ avec un argu-
ment Se un avertiiTement au Leâeur. PakiS^ Jean
Martin, 1629. i/i 8^.
■
( A^e premier. ) La Prîncefle Agimée , qui aime
Dyfèrafte , (e plaint de ce que fa mère veut la con-
traindre à époufer le berger Pbilagan. D'un autre
côté) le père de Dyfèrafte veut le marier avec la ber«
gère Alphife > qu'il n*aime poir t. Il prend le parti
d'aller trouver Agimée, qui> apr^s quelques difficultés»
confent à prendre la fmee-avtTc lui , déguifés tous deux
en bergers. Ils empruntent les habits de Philagan 8c
d' Alphife » (bus prétexte qu'ils ont promis de fe trou-
ver à un bal , fous ce déguifement. ( Aâfe deuxième. )
La nuit furprend les deux fugitifs à l'entrée d'une fb-
r&t. Le berger Cléonor, qui paflbit pour Ponde d'AI<j
30 THEATRE FRANÇOIS.
phiie 9 les empêche d'y entrer , en les aiTurant qu'elle
eft remplie de bètes féroces. Par reconnoiflance , ils
lui racontent leur hifloire % (k lui demandent le che-
min qn'ils doivent prendre ; il leur conieille d'aller à
Charente. Cependant le père de Dyferafte fait cher-
cher fon fils f dans le deffein'de le forcer à épouièr
Alphife. Il rencontre cette bergère avec Philagan ,
rievêtus des habits de fon fils & de ceux d*Agimée,
Il foupçonne qu'ils les ont afTaiTmés , & va (e plaindre
à la Juftice y qui condamne à la mort le berger & la
bergère. Dans ce moment , Cléonor arrive , qui ap-
prend^ ce que font devenus Agimée & Dyferafte, &
qui par ce moyen prouve Tinnocence d'Alphift & de
Philagan. ( Aâe quatrième. ) Agimée & Dyfenafte vi-
vent à Charente au milieu des plaifirs. La Princeffe
fatiguée s'endort fur le gazon : Dyferafte veut pro-
fiter de cette occafion pour l'embrafler ; quand Agi-
mée ; agitée par un rêve , fe réveille. Elle raconte à
fon amant qu'elle avoit cru voir Cléonor , fous la for-
me d'un lion > qui étoit prêt à la dévorer ; mais qu'il
étoit accouru y & qu'il l'avoit délivrée de fa fureur. Les
bergers & les bergères y furviennent alors , & pro*
pofent à la Princeffe de vouloir bien danfer avec eux.
Elle accepte cette propofition. Un fanglier^ pourfuivi
par un Chaffeur , vient troubler la fête , & di(perfe
les bergers. Dyferafte tue cet animal , & fe trouvant
(èul avec Agimée^ il lui parle de fon amour.
THEATRE FRANÇOIS. 31
A G I M É E.
Que faut-il te donner , pour te rendre content }
DYSERASTE.
Qu6 VOUS ne m*aimiez point d'une amitié commune i
Que vous favorisez de quelque pnvauté '
Mon amour qui tient trop de la lidélité ;
Que dedans votre fein je trouve quelque place y
Que nulle occafion n*empêche que i'embraiTe
Celle qu'un faiiit hymen me devroit accorder.
La Princefle lui promet de Taimer ; mais à condi-
m qu'il ne fe permettra jamais rien qui puiiTe por«
: atteinte % fa vertu. Ils fe jurent tous deux une fi-
lité éternelle» ôc fe déterminent à partir de Cha-
nte ; mais dans l'inftant arrivent le père de Dyferafte,
ec la mère d'Agimée* Dyferafte avoue à Ton père
l'il aime» & qu'il n'aimera jamais qu'Agimée. Celle-
tient le même langage à fa mère > qui la fait met-
î en prifon. ( A6le quatrième. ) Ces deux amans font
ujours fidèles / malgré les perfécutions de leurs pa-
ns. Alphifè , defefperée de ne pouvoir toucher la
ère de Dyferafte 9 iè précipite du haut d'un rocher,
bilagan j voyant que fes foins auprès d'Agimée n'ont
is plus de fuccès 9 viept fe battre avec Dyferafte ;
î dernier blefle fon adverfaire, & croît même l'avoir
é. Se voyant délivré de fon rival , il cherche à en-
stenir (a maitreïïe : mais dans les tranfports qui Ta-
tent) il tire une flèche , qui par un malheureux lia-
3* THEATRE FRANÇOIS.
ÙLcd /va blefler Agitnée. Au déferpoir de ce malbear»
il veut fe tuer; mais la mère d'Agimée l'en empêche^
& demande au Roi quil ibic puni. On le traduit de-
vant le$ Juges y auxquels il prouve bientôt (on inno-'
cence. Evadelphe vient enfuice Taccufer de la mort de
Fhilagan , dont il fe juftiâe également» Enfin arrive
Cléonor 9 qui veut perfuader que c*eft lui qui a pré-
cipité Alphife du haut du rocher. Il ajoute qu'Alphife
n'eft point fa nièce , mais qu'elle eft fille unique du
Prince Lothare. Dyferafte ne répond à cette odieufe
imputation > qu'en défiant publiquement Tes accufa-
teurs à un combat fingulier ^ & en (è (bumettant à la
volonté de Ton vainqueur , qui feroit maître de le dé-
clarer innocent ou coupable» ( ASe cinquième. ) Agi-
mée , indruice de ce qui vient de fe pafler , écrit à
(on amant > de fe laiHer vaincre par le cavalier , qui
portera fur ion bouclier la devife qu'elle lui indique.
Il comprend aifément ce que cela veut dire. Il entre
en lice , & triomphe de tous fes adverfaires. Enfin
Agimée fe préfente ^ (bus un habit de cavalier , com-
bat Dyferafte, qui fe laiiTe terraffer. Agimée rappelle
abrs au Roi la parole qu'il a donnée 9 que le vain*
queur de Dyferafte pourroit difpofer de fon fort. Elle
fe fait reconnoitre , & fupplie le Roi de l'unir à fon
amant. Il le lui accorde. Dans le même moment» ar-
rive un Ambaifadeur du Prince Lothare 9 qui rede^
mande la fille de fon maître , élevée fous le nom d'Aï-
phife. Tandis que le Roi lui apprend la mort de
cette
THEATRE FRANÇOIS. 3?
»ette Princeffe; oh la voit arriver fous l'habit de ca-
valier , iccompagnée de Philagan. Ce dernier venoit
pour combattre Dyferafte , elle pour le défendre. Ils
apprennent bientôt l'événement du combat 9 & font
retentir Tair de leurs plaintes. L'Ambafladeur recon-
Qoit la fille de Lothare » & la prie d'agréer la main
de Philagan, qui, voyant qu'il n'avoit plus rien à efpé-
rer d'Agimée, pffre fon cœur à Alphife. La pièce
Énit par le double mariage de Dyferafte avec Agîmée*
& de Philagan avec Alphife.
C. S. S» DE LA CROIX > Avocat en Par-
lement.
<
LA CLIMENE, Tragî - Comédie Paftorale en
cinq aâes , en vers , dédiée à Madame des Loges %
avec un argument , & quelques œuvres poétiques.
PiuaTS , Gilles Corrozet, 1629. in-S^.
L'INCONSTANCE PUNIE , ou la Melanle ,
Tragi- Comédie en cinq aâres, en vers, dédiécf à
Ariftandre, avec un argument. Pari S » ie même, 16410
(SUJET DELA CLI MENE.) Le Prince
Siphax craignant que Phalante , Roi de Catis , né fie
enlever la Princeffe Marie , fa fille , pour la Êiîre épou-
ièr aa Prince Florimant , fon fils aine , &it courir fô
brait de fa mort , & la remet eatre les mains du ber-
ger Semire. Florimant paffe par hafard dans le villa»
ge, où Semire élevoit la jeone Prioceffei qu'il faifoic
Tome IL C
34 THEATRE FRANÇOIS.
paiTer pour fa propre fille» & à qui il avoit doï^né le
nom de Climene. Il eu devient amoureux ; & pour
pouvoir lui parler de fa paffion, il prend l'habit de
berger , & fe fait appeller Akidor. Liridas» fon frère ^
paffe par ha(krd dans le même village. Enchanté de
la beauté de Climeile > il fe d^uife aiifTi en berger ^
& prend le nom de Silahdre. Ce Prince , après quel-
ques converfations , qu'il a avec la bergère y voyant
qu'il ne pouvoit toucher fon coeur » perd l'efprit , &
£iit mille extravagances ; enfin il a recours à un Ma-
gicien 9 qui lui donne un bracelet p par la vertu du»
quel il ddt fe faire aimer de Climene > dès qu'elle
l'aura à (on bras. Il trouve le moyen de le lui faire
porter. Auffitôt Clknene tombe dans un fbmmeil lé«
thargique. Une eau > que le mtmè Magicien avoit
donnée à Silandre^ la fait revenir. Par reconnoifTance»
Climene accorde un balfer à Silandre ; mais elle l'af*
fure en mêrae-tems que c'eft la feule £iveur qu'il re-
cevra d'elle^ & qu'elle n'aitnera jamais qu'Âlcidor.
Ce berger » dans fon defefpoir 9 prend l'habit d'Her-
mite. Cependant Âlcidor , qui avoit été témoin da
bai&r t que CItmene avoit aecordté à Silandre > fe livre
à la plus affreufe jaloufiie » & fait à fa maitreffe les
reproct^es les plus vif^. Elle fejuftifie aiifëmènt , en
lui découvrant le myflère du bracelet enchanfé. Enfin
dans Silandre 9 Alcidor reconnoit fon frère Llridas.
Le bon -homme Semire révèle la naiiTance de Cli-
mene. Alcidor eiçmene cette Prinçeiire à la Cour du
Jloi fon perc > où il l'époufet
THEATRE FRANÇOIS. 55
Pour donner une idée de la vcirfification^ de i'Au-
tear j je citerai Tinvocation que le Magicien &it aux
Démons^
- »
Joignez d'un D<rud étroit qu*on ne puilTe comprendre ,
£c Silandre à Climenc £c Cltmenc à SH andrè ,
Vous qui fçavez former de violensdefîrs, i *
Qui changez les humeurs pour changer les plailtrs :
Joignez d'un noeud caché que pas un ne comprenne ^
ht Climene à Silandre y & Silandre à Climede.
( S.UJET DE ^INCONSTANCE PUNIE.)
Clarimanc» Prince étranger i eH jeecé p;^r une tempête
dans un port^ près de la detnem^^'ii» pauvre Geii«
tilhomme , nommé Crante 9 qui a itrOi» filles. Ce Prin*
ce derienc fucceffivement amoureiix de& trch iœut9>
Ces divers chaogemens font caufe de plu&eurs éiréne«
mens fiHiefles. Câlins » amant de l'aînée $ défefper^
de la voir fur le point d'époufer le Prince 1 va fe pré>
cipiter dans tin âeuve. CloriTe, feeur puînée de Me*
lanie^ vient lui annoncer cette triÛe nouveiis;. Le
Prince oubliant Melanie 9 & enchanté de la bç^uté
de Clorife 1 la demande en mariage au bon- faommei,
Crante qui la lui accorde fur le champ. Poqr fe venger
de Clorifa > Melanie fait paroitre aux yeux du Prince
Lozie f fa troifiéme ibeur ; auffit&t il en devient beau-
coup plus épris 9 qu'il n'avoit été des deux autres.
Clorife eft fi fenfible à cette inconftance , qu'elle fe
donne la mort ; & cette mort coûte ia vie ^ l'in ortu-
née Lozie ^ qui fur le champ expire de douleur»
3^ THE A TRÊ FRA 'NÇO IS.
Crante aa de(è(poir de tous les malheurs arrivés dan^
ià mdifotiy fe tue : Melanie^ témoin de tant de fune-
ftes cataftrophes p court fe précipiter dans le même
fleuré y où s'eft jette Con amant. Mais quelle eft.fa fur'»
priiè! Elle entend Çc reconuoit la voix de Caliris:
elle le revoit épris du même amour. Dans le tems que
ces deux amans fe livrent à la joie de s'être retrou-
vés » Clarimant» llnconftant Clarimant furvient, met
répée à la main , fond fur le fidelle & tendre Caliris;
f r
Un ooup de foudre frappe le Prince , Técrafe à leurs
yeux > & les délivre de fa fureur. Dans le même in^
fiant f ils apperçoivent une^pouronnei qui defcend du
fond d'un nuage épais > & qui vient (e pofer fur la tête
de Caliris : ils entendent auffi une voix aérienne , qui
annonce que les Dieux ordonnent que Caliris foie
pour jamais uni à Melanie parle nœud de l'hymen.
Ceft ainfi que finit cette pièce , ^ui certainement mé«
ritoit plus le tkre de Tragédie , qne celui de Tragî-
Comédie. Le feul endroit que j'ai cru pouvoir en ci-
ter 9 efi celui, où Mélanie fe plaint de la coquetterie
de Clorife » qui lui enlevé le cœur du Prince : c'eft
ainâ qu'elle s'exprime :
Ses libres actbns décoiivroient Ton écÇTein ,
Quand feignant le cacher , elle montroit Con fein :
Fuis ôcant Ton mouchoir , comme chofe importune,
Faifoic voir tout â uud fa blancheur non commuQe ^
£c lotfqtte l'étranger furpris par ces appas ,
Tachoic àU baUeC) montraat ne vouloir gas.
T HE AT AE FRANCO IS. ^f
ticGi^oit tant foie peu ,' puis fe biffant furpréndre ,
Recevant ces bldfer^ > ae xnanquoit à les. ccQKk^^
P ICHO U,n6k Dijon , d'une Emilie nobleî
M* Ifnard de Grenoble > Dodenr en Médecine i
Se (on ami » dans une Préface qu'il a im(è à la tête de
la Filis de Scire > dan^ laquelle il parle de la per(bnne
& des ouvrages de ce Poëte 9 nous apprend qu'il
fut aiTaffiné à l'âge d'environ 3 f ans. Il ne nous eik
dit pas la raifon. Il afluce que le Cardinal de Riche-
lieu honora cette pièce de fon appix>bation , quoique
la régie des 24 heures n'y fut pas ob&rvée , & qu'il
dit nlème àTAuteur que c'étoit la Paftorale la plua
fufte & la mieux travaillée qu'il eût encore vue.
LES FOLIES DE CARDENIO^ tragî-Comé-
4ie en cinq aftes 9 en vers , dédiée à M. de Saini*
Simon. Pa&is, François Targa 1 i<lf^o^ m-8^«
L'INFIDELLE CONFIPENTE , Tragî-Com*
dédiée à M. de Càftelnau. TfAKlS , le même p 2 6}i.
.- f • ■ • •
LA FILIS DÉ SCIRE, Comédie Paftorale cm
cinq aâes , en vers , dédiée à Monfieur p frère unique
Au Roi , avec un prologue & des fiances > adceiTéesi
au Roi. Paris > le mijn^ 1 x6 j^»
(SUJET DES FOLIES DE CARDENI0.|
Cardenio , amant aitiié de Lucinde » fe perfoade qu'élu
le lui préfère Dom Fernant. Cette prétendue infidé-
lité le tourmente 11 fort , qu'A en perd la raifon. Donn
FeroanC cherche à profiter du malheur arrivé à foa
x^S THEATRE FRANÇOIS.
jival ; mais Lucinde ne veut potot récoetér. Doro<
thée , que Dom Fcrnant avok aimée , fe défefpere de
fon incQnflance. 11$ fe read^ot tous facceiTivement
dans le même defert , où Dom Quichotte > fuivi de
^9(i^:ho . j^Hnça > avoit déjà retXïonc!ré €ardemo. Ce
tbailieoreux amanc Pavoit pri$ pour fon confident , Sf,
jîîroit aveuglément tous fes çpnfeils ; ce qui Jui fait
faire beajL^cqup plus de folies qu'auparavant. Le bérop
(delà i^ai)(|i9e d^jiritnt alors le principal objet de la pie-
ce. On lui joue mitje tour« : enfin l'on ne (çait pas trop
|»ourquoi il n'eft pics du tout quedion de lui ; & tous
ces amans infqjptjanés deviennent heureux cout-à«
coup. Cardenio guérit de fa folie, lorfqu'on lui a
prouvé la fi^tiélifé 4e Luqinde. Son rival » Dom Fer-
x^U i cefle de travérfer Tes amours ; & époufe Doro-
thée f (à première palfion.
• ( SUJET I^ÊLINFIDELLE CONFIDENTE.)
Lifanor 9 Chevalier d'une grande confidération , de*
Yient:JW9Q\9i^iKÇ*i^jLprire> fiHe d'un bourgeois de
Tolède , qui » pour obvier au danger de cette paffion ^
la met diez la mère de Dom Fernand & de Dom
Pedre » ennemis déclarés de Lifanor. Cephalie , leur
Cx\i€\f ^levîent bieti^t l'amier^ 1^ confidente <Qle Lo-«
r)re>& l^^ proini^t de iavorifer ion ^cpour ; mpis ayaul
vu Mfaqor , ejle en devient bientôt éprife « & ne
(pipgf plp$ ^'à x^ï^it b, ^palhjsif r^e iimie > & lui
];avir le çœuç dje fpa amant. Elle fubjUtue une de :fè«
THEATRE FRANÇOIS. 39
propres lentes avec Ton portrait , à un 4}il!et que Lo«
.fife Ta voit priée de faire tenir à Lifanor; ât Lifanot
devient încondant. II demande & obtient des rendez-'
vous f dans l'un defquels il détermine Cephalie à fe
Jaifler enlever, Dom Fernand & Dom Pedre 9 îâftruits
^qu'oq vient d'enlever leur fœur > pourfaivent le ravif^
jfeur : ils le joignent » le bleiTent & le traînent » pieds
& maip^ Ués> d^ns un cacbot. Ils enferipenc Cepha«
:|ie dans la n^èni.e pfifbx). Ces deux amans , trouvant
le moyen de s'échapper 9 arrivent heureufement à
Lisbonne. Les deux fireres en font au défefpoir; &
dans une difpute Qu'ils ont avec Lorife > qui prenoie
toujours le parti jf^ Lifanor > Tqn des deux lui donne
un coup de poignard. Elle en guérit ; mais y accablée
par fes o^lheurs» e)le preo4 ^^ parti d^ 5-hai»ller en
Hermite , Çc 4e fe retirer dans pn defert. Elle y ren-'
contre Francilque » jdomefiique de Lifiitiôt-> qui lui
apprend que les disux frères de Cephalie > répandoiene
le bruit que c'étûit Lifanor qui Tavoit aKTavfl^née, Il
lui dit auffi qu'il alloit à la Cour du Roi, 4#^>^
la part de fon maitre » ces deux calomniateurs. Lorife
prend auflfitôt fon parti. EUe quitte fes babjiç^ 4'HeF-'
mite 9 & prend ceux d'un Chevalier* Elle arrive à
Lisbonne ; & uniquement occupée du danger qu'ai«
toit courir Lifanor » en combattant ]ui, feul contre
deux f el]e arrive (àr le champ de bataille 9 & fe pro*
pofe pour lui fervir dé fécond. Le Roi fufpend le
combat , pour fçavoir quçl eA ce nouveau Chevalier*^
40 THEATRE FRANÇOIS^
Lifanor la renannoît bientôt , malgré fon déguifêmene^
^ lui demande pardon. Dom Pedre Te jette à fes
pieds ) & le lui demande auffi : & la pièce finit par
le mariage de Lifanor avec Cephaliè , & par celui
de Dom Pedr^ avec Lorife 9 qui confent à cette union»
pour le bonheur & la tranquillité 4e fbn volage amant*
. On trouve d'aflez beaux vers dans cet ouvrage. Je
ne citerai que ceux que Lifanor dit au Roi > qui veuç
s'oppoCbr à ce que lui feul combattit contre les deux
frères.
Grand Ptincé , le Dcftin m'a fait naître en un rang ,
Où |c dois plus chérir mon honneur qiîe mon fang :
Xc mon ame , ayant peur d'offenler ma mémoire y
^ Sçaic méprifer.ma vie Se àif^ûtct nia gloire.
(SUJET' DÉ LA FTLIS DE SCIREO Cette
-pièce ^ftfi connue , que je ne crois pas devoir en
Tdonngr pn extrait bien fuivL Jfe ipe contenterai d'ail
^ citer quelques vers 9 pour donner à mes lefteursune
idée du talent poëtique de Picbon.
Gelîe eft ènlevçe par uni centaure. Elle raconte ainû
fbn aventuré :
- . • 1 . - * *
Auffitôc me liant au plus prochain ormeau y
Et rompant ines habits comme un foible rameau >
Ce. cruel, elinemi portant fur moi là vue» ' '
A ,fes . fales regards m'expoCa toute nue.
Moi qui poudois alors des foupirs jusqu'aux deux y
Je cdfai dé crier pour abaider les yeux :
I,a honce eu mâme temps ûir mon yîfage peint» f
M'ôca çcçi;c pâlçur qur veuoit cic ma crainte } ' ;
tx. mon efprit confus s*iniaginoit alors ^
Que ma feule paupière «VYOic couvert moa jsorps#
T HE A TR É FR A NÇO IS. 41
Deux bergers 9 que Tes cris attirent dans le bois 9
la délivrent du danger auquefelle étoit expofée. Elle
:n eft pénétrée d'une fi vive feconnoiflance ^ qu'elle
:onçoit la plus violente paffion pour fes libérateurs^
Elle exprime ainfî les charmes de l'amour :
Amour 9 quoiqu'on en dife , eA un cyran H doux,
, Qu'on aimr le pouvoir qu*il obtient delTus nous.
Amour eft un enfant auifî vieux que le moncU;
Un glorieux vainqueur de la terre & de-ltondcy
£c qui , par le pouvoir de fes charmes divers ,
Confervc la nature & peuple l'univers.
Dans un monologue y où elle fe repréfente l'état de
[on cœur > partagé entre deux bergers^ elle s'écrie!
Ha! bergère' infenfSe»
A quoi fe réfoudra .ta douteufe penfée > '
Amour ne confent pas que tu fois a Itin deuxj
Et le Ciel te défend de les aimer ^pus deux.
AnDÙnte 9 l'un de fes deux amans > la trouye prcP
que fans connoiffance ^ couchée à l'ombre d'un épai$
Feuillage » & dit :
Si Tamour fe mouroit , çn dirqlt : le v<Àà\
£t fî la mon aimoic y on la peiadroit ainii.
Loriqu'die eft revepue de cejt ^IfanoiùITement.
A.miDte confént aulC qu'elle dXtxit Ion rival j & lui dit;
7e yeux bien qu'en ton ame un dodble amour s'aflemblej
Tu peux aûner fans crime Aminte Zc Nife cAfemble.
Et lors que le trépas finira mes douleurs ,
Avok pour Tua dts feux> & pour Taucre des pleura
4% THEATRE FRANÇOIS.
Un collier d'or ^ fur lequel écoient gravées des let-
tres égyptiennes y çgion ne pouvoit lire qu'en rejoi^
gnant les deux parties de ce collier ^ dont Filis avok
l'une , & Tirfis l'aqtre > procure une reconnaiffancç
théâtrale , $c donne le dénouement à cette PaQorale f
en apprenant à Celie que Nife 9 l'un de fes deux
amans ^ eA Ton propre frère. La pièce fe termine par
le mariage de Celie avec Âminte ^ & par celui de
Tirfis ave.c Filis.
N. VUPESCHIER, Parifien , étoit Avocat.
LA COMEDIE DES COMEDIES, en cinq
aftes 9 en profe 9 traduite de l'Italien en langage de
l'orateur François. P A Q. i s ^ Nicolas de la Code,
1629, m-8^.
Cette pièce t& une efpece d'allégorie. L'éIoquen«
ce y eft perfonnifiée > fous le nom de Clorinde« Le
premier aâe n'efl: qu*un prologue ^ (ans diflinftion de
fcènés. Le Dofteur fait à fon Secrétaire l'aveu de (à
pafTion pour Clorinde. Il veut engager aufli l'un de
fes anciens amis y à le fervir auprès de fa maitrelTe*
Ce prologue eft rempli de ces obfcénitési qu'on ne
roagifibit point alors d*entendre fur le théâtre. Ce*
pendaiit il iK)uvoit paioJtrâ finguliety de voir Je Se-
crétaire d'un Doéteur, lui dire : J'envoje Uen f.f.
ces bonnes. gens du temspajfé^ i'avoir pris tant de peine
à ne faire rien gui vaille, &c. Outre les indécences»
T ME AT RE FRANÇOIS. 4J
il 7 a des traiit^ aiTez libres. Hyjdafpe j ami du Doc«
leur 9 en {>arlant d'un voyage qu'il a fait à Rome>
.<Ut, 4^'il a iiajfé Us yieds de celui qui ejt la tête de toute
la CMéiientéy a^-fdeds qui marchent fur la tête des Roh
& des C<^m^e$. Pans le quatr^me ade^ qui eil
cottpé par fcèœs > ie Paladin cpiiSe ^ Alexandrie » fpp
camarade, r^nnoar donc il brûle pour Clorirxie. EUe
paroiCf & te PaUdiio lui fak une Unigue §e ridicule
harangue. Le Qo&^r vient équité, ^ crquve Iç
moyeu de lui dédafîer fa paffion. Ce dernier eft foi^
xnal reçu de Qorinde. II prend cependant le partjl
de l'aller demander en mariage ^tt Seigneur Pantap
too « père de l'objet qu'il adore. Il lui fait l'hiftoirç
ide (^ vie » la defcrîpcion de fa maifon & de Tes jarr
àiia& » ki vanfê les charmes de iâ folitude > & lui ap-
prend qull s'occeppe à per&âionher ré}oq]uer>P9^
P^talon lui dem^ade iin petit difco^rs de fa façpn »
pour être en état de |uger de fa capacité. Au troi^
fiéme aftei k Patadki dans uxi éiitc^tien qu'il a avec
Clorinde» lui propofe de contraâer enfemble i/n d$
tes petits mariages' JlUbres ^ qu'çn ne recherche même le
confentemeat de ferjonae pçur les conjommer. En pcr-
foane f^ge » ej^b ki répond ; VEglife ne les approuve
pas. Le Paladin loi dît : Elle ne les approuve pas ; elle
ferme néanmoins hs yeux pour faire femhlant de ne les
pas voir. Le Paladin fe retire > en fàtuant & refahiant
Çlorinde i qui enmiyée de fes ^o€ppUmens & de fes
(écérCQCÇS^ lui 4iC : Vm êtes msjJiplHn de cérémçnie^^
44 THEATRE FRANÇOIS.
que le vieux Teftamenu Dans le quatrième aâ:e » \ë
Dofteur fe plaint à Cloridde de Tes rigueurs. Survient
le Seigneur Pantalon y à qui il réi:ite une harangue :
Sur les fiécles i'oT en comparâifon des miferes G* corrup'
tien du nôtre. Le Paladin fe mocque de ce difcours ;
& en fait un fur la vieîllejfe de Pantalon^ dont celui*
ci eft fi enchanté » qu'il lui donne la préférenice y & kii
accorde (à fille en mariage > & mettant leur main Tune
dans l'autre j il leur dit t Alle^f chers enfans, vcas
enfermer en quelque lieu tous deux énfemble ; G* n'e»
farte^ point que vous ny fajjte^ un tiers^ Dans le dn»
quiéme aâre 9 le Dofteur » piqué du triomphe de foa
rival , employé le bras de fon ami Hydafpe 9 pour
donner des coups de bâton au preux Paladin , qui
ies reçoit avec beaucoup de douceur & de patience:
Vne dernière fcène où Grifelin » fou du Doâeur, tieat
une infinité de propos extravagans» fert d'épilogue à
cette pièce finguliere> quel'Auteur à intitulée ^ je ne
fçais pourquoi , la Comédie des Comédies.
i • - •
Le but de Dupefchier dans cette pièce > a été de
faire une critique plaifante, de l'éloquence empou-
Iée> & des hyperboles de Balzac > fous te nom de du
Barri. Il employé^ pour les tourner enridicule^Sc (es
termes femiliers» & fesphrafes entières* Un Auteur
contemporain a entrepris l'apologie de Balzacien
donnant un ouvrage (bus ce titre.
LE THEATRE RENVERSÉ, OU LA CO-
MEDIE DBS COMEDIBS ABATTUE^ parM«
THE A TRE FRANÇOIS. 45
ile L* M. Paris y Jean le Bouci 1629. in»i2.
Cefl un examen critique de la pièce de Dupef-
chier % dans lequel il juftifie pleinement Balzac y de
tons les prétendus ridicules 9 qu'on avoic voulu lui
donner.
RALTHAZAR BARO y né à Valence en Dau-
phiné , en 1600. il fut Secrétaire du célèbre Honoré
d'Uf fé , & acheva le roman de rAftrée. Il mourut
en néso. l'un des quarante de l'Académie Fiançoife,
CELINDE , Po^me héroïque p ou plutôt TragL
Comédie » en cinq aftes , en profe , dédiée à Céfar
Vendôme. Paris, François Pomeray, 1629. in^S"^^
Dans le troifiéme afte de cette pièce > on repréfente
une petite Tragédie 9 compofée de 300 vers, & in-
titulée , Judith*
LA CLORISE, Paftorale en cinq aftes, en vers,
dédiée au Cardinal de Richelieu. Paris , Antoine
de Somma ville > 1 6 3 4. i/z-S ^«
Cette pièce fat jouée par la Troupe de Bellerat ,
le 27 Janvier 1636. devant la Reine & toute laCour^
à l'Hôtel de Richelieu,
LA PARTHENIE , Tragî . Comédie , dédiée à
Mademdfelle Marie- Anne-Louife d'Orléans, Paris p
Antoine de Sommaville^ <^43* z^4^«
LA CLARIMONDE , Tragi . Comédie , dédiée
à la Reine Anne d'Autriche. Paris , Antoine de Som-
niaville, 1643. in-j^^.
46 THE AT ri: FRANÇOIS.
LE PRINCE FUGITIF , Poëme Dramatique ea
cinq a<%esy en.vers ^ dédié à la Reine de Suéde ^ Chri-
fiine. PARIS) Antoine dd Sommavilie, x649« i^'^°*
SAINT EUSTACHE, martyr, Po^me dramati-
que en cinq aftes y en vers , dédié à Henriette-Marie ,
fille de France & Reine d Angleterre. Paris , An«
toinedeSommaviUey 1^49» i/z-4^.
CARISTE , ott les Charmes de b Beauté , Poëme
^ dratnattque eti cinq ades > en vers » dédié par Antoine
de Somma ville , à Madame la Princefle » après la mort
de r Auteur. Paris f Antoine de. SommaviHe 9 x6)i*
W-40.
ROSE MONDE 9 Tragédie. Paris, Antoine de
Somma ville > 1 6 $ i • în-4^ •
L'AMANTE VINDICATIVE , Poëme drama-
^ tique en cinq aâes , en vers. P A R i S > Antoine de
Sommayiile, 16$ 2. in-^^»
{ SUJET DE CELINDE ) Floridan avoit promis
fa main à Parthenice ; nmis Tes pafrenS t'a voient deftihé
à Celitidé. Celte ci aimoit utnqoement Lucidon. Pb-.
ridan arrive fur le théâtre , chantant des vers en Thon*
neurde fit nouvelle maitrefTe; Parthenice , :qai le fotip*
çonnoit de perfidie 9 le fuit dégdifée en hohime. W&tt
eft bientôt convaincue de fa trahîfon y & veut le ttier
d'un coup de piftolet ; mais l'amorce né prend point.
Floridan met l'épée à la main , reconnoit Partbenice ,
1^ defarme; répond affez mal à k% juftes reproches».
THEATRE FRANÇOIS. 47
Ac fort* Les paréos de Celinde viennent lui appren-
dre qu'ils vont la marier à Floridan. Elle en indruit
aollltôt Lacidor 9 qpï vent tuer fon rival. Celinde le
ki défend f & lui jure qu'elle ne donnera jamai$ fa
main à d'autre qu'à lui. Floridan furvient ; tes parens
de Celinde qui font trompés aux difcour^ équivoques!
qu'elle lui dent, déterminent le jour de la noce pour
le jour mèàie ; & poar folemaifer cette journée, ils
propofont aux quatre amans de jouer une Tragédie >
qulbavoient déjà répétée. Chacun prend place» &
ils repréfentent une pièce intitulée , Judith ; Floridati
faifoit le rôle d'Holopberne , & Celinde celui de Ju-
dith. A la dernière fcène^ Judith s'approche d'Holo-
pheme endormi » & lui plonge fon poignard dans le
corps; Celinde tombe enfuite aux pieds de fon père ,
& lui reproche fa tyrannie > qui Ta déterminée a(u cri-
me qu'elle vient de commettre. Pour fauver fa mai-
trèfle , Lucidor veut perfuader que c'eft lui feul , qui
eft coupable. On les conduit tous deux en prifon*
Floridam eft porté dans fon lit. Parthenice le fuit ;
& croyant qu'il vient de rendre tes derniers foùpirs^
elle fe précipite (br lui y s'enfonce un poignard dans
le feih , & prie fts parens de k (ixire enterrer dans le
foème combetfu. Celinde & Lucidor font interrogés.
Avant que de prononcef l'arrêt de mort, om condam-
neCelinde à aller faire amande honorable far le tom-
beau des deux infortunés amans. Celinde, en préfence
de tout le peuple, & les mains liées derrière le dosj
48 THEATRE FRANÇOIS.
dit en ce moment les choies les plus attendrifTanteS*
Tout-à-coup le tombeau s'ouvre » & l'on en voit fortir
Floridan & Parthenîce. On peut juger de l'étonné-
ment des Aâreurs. L'ofi apprend que la grande quan-
tité ^e fang quils avoient perdu > joint à un long éva-
nouiiTementy a voit fait croire qu'ils étoient morts ^
qu'on les avoit portés dans ce tombeau ; mais que
bientôt après ils avoient repris connoiflance,' & que
leurs blefTures n'étoîent point coniidérables. On les
guérit. Floridan époufe Parthenice > & Celinde époule
ÏLucidor.
(SUJET DE LA CLORISE.) Les Bergères
Clorife Se Eliante font aimées par Alidor & Pliili-
dan. Ces deux Bergers font long-tems malheureux.
Mais> à force de (Mns & de tendrefTe , ils trouvent le
moyen de rendre leurs bergères fenfibles. Ces quatre
amans alloient être enfin heureux > quand les parens
de Clorife troublent leur bonheur , en la promettant
en mariage à Erafle : mais dès que cet amant géné-
reux 9 apprend le penchant que Clorife avoit pour
Alidor ; il cède tous fes droits à ce Berger , & en^
gage même les parens de Clorife à confenûr à fon
union avec Alidor y & à celle d'Eiiante avec^ Phili-j
dan. C'ed là le dénouement de cette pièce > qui.eft
affez bien écrite > & paflablement conduite. Voici
un exemple de la verfiHcation. C'eA Philidan qui part-
ie à Eliante > de l'excès de fes charmes.
ELIANTE,
TH1E:ATRE FRANÇOIS. 49
' ' ) E L I A N T Ê.
€'eft trop , je ne fçaurbis plus longtems confcntU
A t'almer & te voie capable de mentir.
P H I L I D A N.
5î de ce que j'ai dit ta rigueur trop connue
Cherciie la yeiité , la voili toute nue. *
[* Il lui otefon tnonchoir dn col, )
î L I A N TE.
Que fais-tu » Philidan }
P H l L I D A N.
Ceft que je veux au moins
Vous convaincre d'erreur avec deux beaux témoins. ^
E L I A N T E. *
( * Elle remet le tnonchoir fur fort coî^}
Caufeur, rens ce mouchoir j ou de tant die malices
Je fçaurai châtier Tauteur & les complices.
PHILIDAN.
Pourquoi les caches tu 3 ^'•^
E L I A N T E.
Pour ce que j'ai raifon ,
Fuis qu'ils font faux témoins, de les mettre en priion»
( SU JET DE LA PARTHENIE,)'Par le fort
ëej armes? Parthenie cft, devenue l'efdave d'Alexan-
dre 9 qui a conçu pour elle l'amour le plus violent.
Elle lui demande en grâce de vouloir bien donner la
liberté à fon frère Hytafpc. Alexandrela lui accorde
fur le champ f & le comble depréfens. Cet, Hytafpc
étoit répoux de Parthenie; & elle en avoitfait my-
llere > crainte d'exciter la jaloufie d'Alexandre ; .mais
Tomll. li
50 THE ATRE FRANCO IS.
ce (êcret eft bientôt découvert; & Alexandre, n'é*
coûtant que fa fureur y ordonne qu'on fafle mourir cet
époux trop aimé de Parchenie. Epheftion } dans la
crainte q«ie le Roi ne donne cet ordre à un autre »
le charge de le faire exécuter. Bientôt après f on vient
annoncer à Alexandre la mort d'Hyrafpe. Farthenie
l'accable des reproches les plus amers , & veut fe poi«
gnarder* Epheflton paroit > qui lui arrache le fer des
mains. Alexandre fent toute l'horreur de Ton crime ,
demande pardon à Parthenie > & veut l'exciter à le
frapper lui-même. Epheftion, voyant le fincere repen-
tir du Roi » lui apprend alors 9 qu'étant fur qu'il fe re-
pentiroit bientôt d'avoir donné un ordre aufli cruel >
il ne l'avoit point exécuté 9 & que Hytafpe vivoit en-
core. Alexandre 9 au comble de la joie > remercie
fon Bivori , & rend la liberté & la couronne à ces
deux époux.
La verfificatîon & la conduite de cette pîece , quî
eut un très-grand fuccès , firent beaucoup d'honneur à
fon Auteur. Entre pluiieurs morceaux dignes d'être
rapportés y j'ai choifi celui-ci. Ceft Alexandre qui
xend compte à Epheftion d'une converfation qu'il a
«ue avec Parthenie 9 & de la réponfe qu'elle a faite
à ÙL déclaration d amour.
sire , ce qu'aujourd'hui tu recherches de moi ,
£fl digne d*un tyran , mais indigne d'un Roi,
Que ces lâches beautéi devait toi proAicuent
letirs infâmes appas qui charment y mais qui tuent }
Qv'elles t'accordent tout de crainte de périr :
lUes fsaYCAt flatter > U mot je f^ais mouiir.
r
THEATRE FRANÇOIS. £1
Ufc plus ragcmcnt <ics faveurs de Bellonne»
N*aguerres je porto is le fcepcre & la couronne :
£c bien que déformais ces marques de grandeur
Ne foienc plus dans mes mains > elles fonc dans mon caur :
C'eft là que y defpitanc les coups de U fortune «
£c le £acheux fuccès d'une guerre in^>ortune »
Malgré ma fervicude & malgré c^ projets ,
Ma vertu trouve encore un fceptre & des fujets.
(SUJET DE CLARIMONDE.) Alma2an,Roi
d* Alger , vient de gagner une bataille contre Soli-
mont I Roi de Tunis f où Solimont a été fait prilbn*
nier. Le foecès de cette Journée eft dû à la conduite
& à la valeur d'Alcandre, favori d'AImazan. Ce
Roi , pénétré de ceconnoifTance y & rempli d'admira-
tion pour les grandes a&ions qu'il lui a vo faire > lui
donne le choix de fa récompenfe. Depuis long - tems
Alcandre étoit amoureux & ^imé de CIarimonde>
fille de Solimont , qui avoit été conduite à Alger avec
(on père. Il la demande en mariage ^ pour prix de
fes exploits. Le Roi la lui accorde > malgré les repté«
fentations de Melidor» qui aimoit aufTi Clarimonde*
Melidor » voyant que rien ne pouvoit déterminer le
Roi à refufer Clarimonde à Alcandre » fort pour
chercher les moyens de troubler le bonheur de (on
rival. Le Roi, qui n'a voit point encore vu Glarimon-
de i l'envoie chercher pour lui annoncer qu'il la deftîne
à Alcandre; mais au même indant qn'il l'apperçoît^
il en devient fi éperduement amoureux > qu'il déclare
à Alcandre qu'il fiiut qu'il renonce à Clarimonde^
Dij
THEATRE FRANÇOIS.
& qu'il veut lui-même Tépoufer. La Princefle montre
envain toute fa tendrefle pour Alcandre. Le Roi
tténace de faire mourir (bu rivale & dit àCIarimoade :.
Songe aux profpericés dont ma grandeur te flace >
Ta reponfe fera ton naufrage , ou ton port s
£t ta bouche eA ici l'arbitre de ton fort^
Le Roi redouble Tes menaces contre Alcandre. Cta-^
rimonde perfiAc dans fes refus. Ils fe réparent tous
dans le plus grand chagrin. Enfin la Princefle veut: ,
voir fon amant I qui fe déguife en Jardinier ^ pour être
introduit dans le Palais. Ils ontenfëmble une longue,
converfation. Clarimonde lui propofe de forcer la pri-
fon , & de rendre la liberté à Solimont , qui a un grand
parti dans la Ville i & qui certainement le mettroit à
portée de tuer Almazan. Alcandre préfère fon de-
voir à j'efpérance de pofTéder fa maitrefle > & re*
fufe d'entrer dans aucun complot contre fon Roi. Ils
fe quittent > ne ponfervant plus aucune efpérance , &
dans le plus grand defefpoir. Cependant Meiidor , qui
épioit toutes les a&ions d' Alcandre i ayant appris
qu'il étoit entré déguifè dans le jardin | le fait arrêter
lorfqu'il en fortoit , & vient Taccufer au Roi de s'être
introduit dans le Palais > pour lui ocer la vie 6c la
Couronne. Le Roi remercie Meiidor du fervice im^-
portant qu'il vient de lui rendre > & lui demande quel
cft le prix qu'il eh defire. Meiidor , qui ignoroit qu'AI-
laazan étoit amoureux de Clarimonde, lui demande
cette ?£iQ£e0e en mariage. Le Roi lui répond qu'il
THEATRE FRANÇOIS. 53
rie peut la lui accorder , & qu'il la defline pour être
Reine d'Alger. Meiidor fait de vainjB efforts pour l'ob-
tenir > & fort dans le deifein de fe venger du Roi. En
mème-tems Clarimonde qui vient d'apprendre que fou
amant a été arrêté , accourt pour le juftifier , & fe jette
aux pieds du Roi ^ pour demander à prouver l'inno*
cence d'Âlcandre. Le Roi lui dit qu'AIcandrè a voulu
ftttenter à fes jours*^ La PrincefTe s'écrie :
O faince vérité , montre toi xoute Jiue ;
Viens, DéefTe immortelle, & donne â Pinnocenc
Conrre la calomnie un azile puiiTanr»
Sire , n'imputez nen.au généreux Âlcandre l
Bien loin de vous trahir , il a fçu vous défendre*.
£t s'il n*eut aujourd'hui mes defirs combattus,
Solimont feroit libre^ & vous ne feriez plus.
Almazan efl; inexorable. Enfin > vaincu par (on amours
il lui propofe de donner la liberté £e à Alcandre & à
Solimont, fi elle veut bien l'époufer. Clarimonde,
voyant le danger que couroit & fon père & fon amant^
prend le parti d'yconfentir, déterminée à fetuer»dèa
que Solimont & Alcandre feroient en liberté, Cô»
pendant Meiidor (è met à la tète d^une troupe de con-*
furés , force le Palais, & cherche le Roi pou? le poi-
gnarder. Almazan ^ fè voyant (ans aucune re(fource f.
n'attend plus que la mort ^ lôrfqtfôn Went lui annon-
cer qu' Alcandre , ayant appris le crime de Meiidor »
étoit accouru , a voit combattu ce^ traître, hai avoit pafië
^D épée au travers du corp»> & avoit mis en ^ite tout
Diii
S4 THEATRE FRANÇOIS.
les rebelles. Melidor vient mourir fur le théâtre , &
avoue au Roi que la feule jaloufie lui avoit infpiré
dlmputer à Alcandre un crime dont il n'étoit point
coupable. Le vi&orieux Alcandre arrive en ce mo-
ifiènt. Le Roi rembraffe, le prie d'oublier ce qui s'eft
•paffé, le comble d'amitié, & rend la liberté & la
Couronne à Solimont, à condition qu' Alcandre foit l'é-
pOQ^c de Clarimonde^ & régne apràs lui dans Tunis*
(SUJET DU PRINCE FUGITIF.) Le Prince
Philoxandre , dont on a envabi les Etats y fe réfugie
dans le Ropume deCyrene, où il vit incognito. Il
devient amoureux & eft aimé d'Ârchitrafte > fille du
Roi. Deux autres Princes > Orphiiè & Alcede > font
ks rivaux. Le Roi Ofmont , voifin & ennemi du Roi
de Cyrene, arrive avec une groflfe armée ^ pour s'ena-
parer de fes Etats. Le Roi fort à la tète de fes trou-
pes, pour aller au< devant d'Ofmont , & déclare que
celui des Princes » qui , dans la bataille , lui rendra de
plus grands fervices» fera l'époux de fa fille. Il choi-
fit Philoxandre , pour veiller à la défenfe de la Ville
.& de la Princefle. Quelque flaté que foit l'amoureux
Philoxandre ><îu'Architrafte (bit confiée à fes foins; il
iènt cepeïîdant , que s^il refte dans Cyrene , il ne peut
prétendre au prix deftiné par le Roi à celui qui fe fera
le pltfs diftiiigué. 11^ confie fès inquiétudes à la Prin-
celltt) qui lui Ordonne de voler au fecours de fbn perew
Il obéit avec jode. Dès qu'il eft arrivé fur le champ
V
THEATRE FRANÇOIS. S$
de bataille y la viâoire fe décide bientôt poar le Roi
de Cyrene > & le Roi Ofinont eft tué dans le combat
par un inconnu. Orphife & Alcefle vantent leurs ex«
ploits au Roi; & chacun d*eux croit devoir obtenir
la préférence. Le Roi leur répond qu'ils doivent s'ea
rapporter à la Princefle ; & que c^eft à elle à décider
lequel des deux elle veut pour (on époux* Il donne
fes tablettes^ à Philoxandre , popr les porter à Archi^
trafte > & pour lui dire qu'elle écrive deiTus le nom
de celui qu'elle veut rendre heureux. Il les rapporte
bientôt ; & le Roi y lit , que c'eft Philoxandre qu'elle
choiGt. Ce Monarque eft aulfi fâché que furpris de
ce choix. Il cache cependant fon reflentiment^ & an*
nonce que c'efl Alcefte que la Princefle a nommé. Il
charge en même tems Philoxandre de l'en aller avec*
dr, qui , fans paroitre aucunement ému, part pour
exécuter cet ordre. Le Roi > étonné de fa tranquil-
lité 9 le rappelle ; & à force de ^ueftions ^ il tire
enfin l'aveu de fa paffion pour la Princefle. Le Roi
paroit fort irrité dé fà témérité, Philoxandre fort Se
reparok bientôt après > revêtu des mêmes armes qu'U
portoit lors de la bataille. On le reconnolt pour le
vainqueur d*Ofmont. Il jette J'épée de cet ennemi
aux pieds du Roi> lu^ découvre là naiflance^ & ob^
tient la Princefle en mariage*
Cette pièce en général eft aflèz bien verfîfôe. Oo
y trouve plufîeurs beaux endroits : en voici un que
î'ai cru qui méritoir d'être rapporté. Les deux riyaux.|
56 THEATRE FRANCO tS.
Alcefte & Orphife, veulent fe battre. Pour les cfli
empêcher ^ le Roi leur dit :
Arrêtez ce tranfport dont votre ame eft faifie \
Ne vous regardez plus d'un œil de jaloufie :
Car enfin où tendroit ce combat entrepris ?
Pehfez-vous qu'Architralle en dût être le prix ?
tlle dépend de moi , non du fore de vos armes :
Il faut pour Tacc^uenr , moins de fang que d: larmes. , .
Oa s'il en faut du fang , il ne vous efè permis
D'en puifcr autre part que chez mts ennemis.
i, C'eft là qu'il faut cueillir des lauriers digaes d'elle , &c.
^' (SUJET DE SAINTEUSTACHE. ) Placide
va à la chaffe , pour eiTayer des chiens , que l'Empe-
reur Trajan lui avoit donnés. Il apperçoit un cerf, qui
portoit fur fa tête une Croix lumineule II entend en
mêrne-tems lortir de cette Croix une voix , qui las
placide , ccfTe enfin de t'armer contre moi .•
Ouvre l'œil de ton ame aux rayons de la foi ;
Ir rendant tes efprits de ma gloire capables,
Brife de tes faux Dieux les idoles coupables^
G'eft moi fcul , qui de rien ai formé l'univers;
La nature me do.'t fes miracles divers > . .
• Et tout ce qui refpire ou qui paroîc aii monde
N'eft fait que pour bénir ma fageiffe profonde.
Ces deux bras que je t'ouvre , & ces pieds que eu vof j
Attachés par des clouds fur une infâme croix ,
Ont ftrvi de tribut , ou plutôt de vidimes ,
Pour expier l'horreur Se l'excès de tes crimes :
Ce côté d'une lance a fouffert la rigueur ,
Seulement pour t'ouvrirun paiTagc à mon cœur:
Er ce corps immolé n*lauroit point de bleffures,
' S'il n*cûc fallu du fang pour laver tes injarcs.
TSEATRE FRANÇOIS. S7
Frappé & pénétré de cç miracle, Placide le vient
raconter à fa femme ; & ils fe font tous deux Chré-
tiens. Il prend le nom dEuftache; & elle» celui de
Téopifte. A peine ont- ils reçu le Baptême ^ qu'on
vient leur apprendre qu'un furieux ouragan a ravagé .
tous leurs biens. Ils en reçoivent la nouvelle avec la
plus grande tranquillité; & pour ne plus habiter le
iéjour dangereux delà Cour, ils prennent le parti de
pafTer la mer, & d'emmener avec eux leurs deux
enBins. Euftache apperçoit un vaiiTeau , Se crie à ua
Matelot de demander au Maître de Téquipage, s'il
veut bien le recevoir à boi^« Le Matelot vient avec
la chaloupe ? fait monter dedans la femme d'Eufia-*
che , & le laifle lui & (es en&ns fur le rivage. Un
moment après , tandis qu'il eft occupé à tranfporter
fes enBins > pour leur faire pafler un torrent , un lion
en enlevé un , & un ours Tautre. Le malheureux
Euflache continiae fon chemin , & rencontre une Ber-
gère qui le conduit à fon père , au fervice duquel il
entre. La fcêne fe trouve enfuite occupée par le re-
tour du vaiffeau > qui avoit enlevé Téopifte. Son ra-
vifTeur , nommé Tirfis , l'entraîne pieds & mains liéa
dans un bois , pour l'y violer ; mais Téopifte invo-
que la Vierge , & le >onnere tombe fur Tirfis. Ce-
pendant Trajan , qui ignore & ce qu'eft devenu Eu-
ftache , & qu'il ait changé dé religion , le fait cher^
cher , pour réduire deux Provinces qui s'étoient ï£<
vottées. On le reoonnoîc fous fes, habits villageois^
$8 THEATRE FRANÇOIS.
& on le ramené à la Cour. Les deux enfàns d'Eufia^
che y enlevés par des bêtes féroces 9 reparoiflent alors
fur la fcène ; tous deux font Soldats > l'un fous le nom
de la Fleur , l'autre fous celui de la Fortune > liés en-
feroble de la plus forte amitié. Ils fe racontent mu-
tuellement leur hiftoire j & fç reconnoifTent pour fre*
res. Ils vont enfuite chez un Bourgeois de la Ville»
où ils dévoient loger. Ils y trouvent Téopifte pour
fêrvante. Ils ont une converfation avec elle ; & elle
les reconnoit pour fes enfàns. Elle apprend par eux
que le Général va bientôt pafTer. Elle demande à le
voie pour les lui recommander ladnife à f^naudien*
ce > elle retrouve en lui Ton époux > & lui préiente
fes deux enfans 1 qu'il croy oit morts depuis long-teras»
Cette double reconoiflance termine le quatrième a&e.
Au cinquième 9 le Préteur reçoit un ordre de l'Em*
pereur, pour aller au devant d'Euftache > qui revient
viftorieux > & pour lui faire dreifer des autels. EiH
Aache refufe cet honneur impie» & déclare au Préteur
qu'il e(l Chrétien. Celui-ci lui repréfente envain les
dangers qu'il court, en fuivant une loi que l'Empereur
À profcrite ; il le menace envain de la mort. Eudache
inébranlable fe h\t gloire de braver les dangers 1 &
d'adorer le vrai Dieu , & lui dit :
Ces déic^s frivoles y
Ces fantômes parlans , ou plutôt Tes idoles ,
Que votre efprit de^^u révère en tant de lieux y
Ka un mot ces dcrnoos que vous nommez vos Diour^
THEATRE FRANÇOIS, $^
Sont éiÇi objets trop bas pour des vœux légitimes.
Je ne connois qu'un Dieu , qui , chargé de nos crimes y
Pour contenter Ton père & fléchir Ton couroux.
Sur Tautel de la croix s^tÇi immolé pour nous.
Le Préteur voyant qu'il ne peut rien gagner fur
fon eiprit , le fait conduire en prifbn , & va trouver
Téopïfte > à qui il permet d'avoir un entretien avec
lui. Ils en fortent vi&orieux ^ & plus confirmés que
jamais dans la Religion chrétienne : leurs deux enfans
fuivenc l'exemple y que leur donnent les auteurs de
leurs îpurs, & tous les deux demandent le martyre.
On les conduit au fupplice ; & ils meurent tous quatre
avec le même courage & la même fermeté. La pièce
finit par la converfion du Préteur y qui déclare qu'il
eft Chrétien.
(SUJET DE CARISTE.) Carifte, jeune ber-
gère , dont on ignore la nailTance » arrive en Sicile.
Cléon 9 fils du Roi Antfaénor» en devient éperdue-
ment amoureux» dès rinftant^mème qu'il l'apperçoit*
Antfaénor qui ne p^ut concevoir un amour auffi fubit»
fe per&ade que ce ne peut être que par un pouvoir
fumaturel > & que Carîftô eft magicienne. La Prin-
cefle Afterie, qu'il vouloit faire épou&r à fon fils » voih
lanc perdre ià rivale > le confirme dans cette idée f
& (bbome même dei gens qui viennent rendre comp-
te au Roi , qu'ils ont vu Carifte s'occupant à la ma-
gie. Il la fait auffitôt conduire en prifon ; mais il ne
€o THEATRE FRANÇOIS.
peut empêcher , fuivant les loix du Pays , qu'elle ne
cherche un Chevalier pour défendre fa caufe. Il ne
lui donne que vingt- quatre heures pour le trouver ; &
charge Nicandre, le plus valeureux Chevalier de iâ
Cour, de foutenir f les armes à la main .que Carifiè eft
magicienne. Un inconnu fe préfente > pour être le
champion de Carifle. Les combattans entrent dans h
lice; & bientôt Nicandre eft dé(àrmé. Le viâorieux
inconnu demande qu'on mette Carifle en liberté ;
mais le Roi , contre la foi donnée , & plus piéoccupé
que jamais que Carifle e(l magicienne, pullque Ni*
candre a é:é vaincu (i facilement j la fait re:o nuire en
pri(bn> & ordonne qu'on lui amené les deux combat-
tans. On peut juger de (à furprife, lorfqu'il reconnok
Ton fils dans celui qui a été vaincu, & la PrincefTe
Afterie dans le Chevalier viftorieux. Lefeit eft bien-
tôt éclairci. Cléon avoit obtenu de Nicandre la per-
miflion de combattre à fa place , déterminé à (c laifler
vaincre , & rilême à mourir , pour fauver les jours
'de fa maîtieffe ; & Afterie, ferepentant des calomnies
'qu'elle avoit inventées contre Carifte, n'ayant pu trou-
ver de Chevalier pour défendre la caufe de cette in-
•fortunée, s'étoit déterminée à combattre elle-même*
Cette étrange aventure confirme plus que jamais le
Roi dans tés préventions contre Carifte. Il fc déter-
mine même à la faire mourir , lorfqu'on lui annonce
tm Courier venant de Corinthe. Pour être au fait du
dénouement > il faut f^avoir que quelque tems aupa-
THEATRE FRANÇOIS. 6i
ravant, Cléon écoit devenu amoureux de Stéphanie,
fille du Roi de Corinthe y fur la réjputation de la gran*
de beauté de cette Princefle ; quil avoit obtenu de
fbn père , de la faire demander en mariage /& qu'on
la. lui avolt accordée ; mais qu'au moment que cette
PrinceiTe fe préparoit à partir ^ un Prince Corinthien
s*étoit emparé du Trône , avoit fait mourir le Roi f
père de Stéphanie y Tavoit fait enfermer dans une tour^
& peu de tems après avoit fait courir le bruit de fa
mort. Cléon en avoit été au défefpoir , & rien n*a-
voit pu Ten diftraire jufqu'à l'arrivée de Carifte» On
fe doute bien que Carifte eft cette même Stéphanie,
que Ton croyoit morte. Le courier de Corinthe la re-
connoit ; % ce courier étoit celui là même qui Tavoit
fdixt évader de la tour > où elle étoit enfermée j & qui
avoit exigé d'elle de cacher fon nom & fa naiflance ,
tant que le tyran feroit fur le Trône : ce tyran venoic
de mourir , & k s Corinthiens redemandoient leur
Reine avec le plus grand empreffement* .Cette re^*
connoilTance procure le bonheur des deux amans ;
Cléon époufe Carifte , & parc avec elle pour aller à
Corinthe.
(SUJET DE ROSEMONDE.) J'ai déjà parlé
deux fois de ce même fujet, traité toutes les deux
fois fous le titre d'Alboin ; l'un à l'article de Claude
Billard Sieur de Courgenay , (bus l'année 1607 ; &
l'autre à l'article de Nicolas Chrétien , Sieur des Croix,
ibuc l'année 1608 .Une cbofe aflez fmguliere; c'eft que
6% THEATRE FRANÇOIS.
Baro lui-même l'avoit déjà à peu près traité fous le
titre de Clarimonde > à Texception du dénouement
qui eft abfolument différent ; qu'il en a tiré beaucoup
d'endroits^ & de (ituations > & même une fcène en-
tière vers pour vers : je me contenterai donc d'en par-
ler trèsTucdnâement ; mais j'en citerai un morceau »
qui m'a paru bien verfifîé.
Âlboin accorde Rofemonde aux vœux d'Ermige :
cet amant y au comble de la joie y vient annoncer à la
FrinceiTe cette heureuTe nouvelle. Rofemonde, fe rap-
pellant tous les malheurs dont elle eft accablée > craint
que loin de les faire finir , Tamour ne veuille encore
les augmenter : Ermige lui répond :
Ce Dieu , dont vous parlez , amolli par mes larmes ^
N*a plus , pour nous troubler y de colère » ni d'armes ;
Mes pleurs ont détourné les traits de Ton courroux s
£t je n*ai déformais à combattre que vous.
Je fçai que pour le fang dont le ciel vous fit naître 9
Quand de tout l'univers je me rendrois le maître ,
Je ferois un objet indigne d'efpcrer
La gloire où mes defirs me forcent d'afpîrer.
Mais Pamour & la mort égalent tout le monde:
Four peu que votre flamme à la mienne réponde.
Cet obflacle du rang fe verra furmonté.
Ou par votre infortune , ou par votre bonté.
Courez , belle Piincefle 9 où ma foi vous convie:
Vous êtes aujourd'hui l'arbitre de ma vie :
Mon fort efl dans vos mains 'y & mon contentement
Ke dépend déformais que d'un mot feulement.
ROSEMONDE.
Hélas ! as-tu befoin du fecours de ma bouche ^
Tour connoître à quel poi^it ton inceiêc me touche j
THEATRE FRANÇOIS. 63
Tes dcfîfs Tont les mîens 5 tu le fçaîs , ru le Voîi \ ^
£c mon coeur par mes yeux te l'a dit mille fois.
Pourquoi donc au|ourd*iiui veux-tu que ]*i t'expriioc
L'excès de mon anaour, ou plutôt de mon crime}
£c que daas ce moment mf>n feu te foit Connu
Par un mot que la honte a toujours retenu >
£t bien , puifqu'il le faut « & que c'eA pour ta ^oire^
Ecoute en ce feul mot Tanêt de ta yiâoire :
Je t'aime*
\
/
Alboin voit Rofemondey en devient amoureux > for.
me le deflein dé Tépoufer > ordonne à Ermige de n'y
plus fonger ; & rebuté par Rofemonde , la fait par dé-
pic boire dans le crâne de Ton père qu'il a tué, eft
enfin afTaffiné par Ermige & par Paradée^ qui efl:
auffi amoureux de Rofemonde. Ermige fè repent bien-
tôt de fon crime, & tue Paradée. Ce traître a remis à
Aofenx>nde une fiole , dont la liqueur doit calmer les
agitations f dans lefquelles les remords plongeoient Er«
mige. Rofemonde f voyant (on amant plus agité que
jamais y lui donne cette liqueur; c'écoit un poifon fub«
dU Ermige en éprouve bientôt l'effet ^ & meurt. La
Princefle fe tue ; & la confidente promet aux Speâa-
teurs que , dès qu'elle aura enfermé ces amans dans
le même tombeau p elle ne manquera pas auffi de
mourir.
( SUJET DE L'AMANTE VINDICATIVE. )
Cléandre > père d'Oronte 9 eft amoureux d'Oxane , Se
f eue répooler. Celle-ci aime Oronte ; mais Oronte
€4 THEATRE FRANÇOIS:
adore Olympe. Oxane , qui a fait de vains efforts pour
* fe faire aimer d'Oronte, voyant qu'elle n'y peut réuf-
fir i cherche à fe venger» Elle parvient bientôt à le
brouiller avec Olympe , à qui elle perfuade qq'il (b
vante de Tes faveurs ; d'un autre côté ^ elle perfuade
à Oronte que fa maitreffe eft inâdelle > & qu'elle eft
avec un amant, à qui elle a donné un rendez -vous.
Oronte furieux fort pour immoler (on rival; au mo-
ment qu'il va le percer ^ il reconnoit fon père y que la
méchante Oxane avoit engagé k fe trouver à ce pré-
tendu rendez-vous. Cléandre croit que fon fils a voula
raflkifiner , & en porte fet plaintes au Roi. Oronte eft
fyr le champ condamné à être précipité dans la mer.
Oxane apprend bientôt que fon amant va périr : elle
fe livre au plus affreux defefpoir ; & cédant à k^ ja-
ftes remords ) elle fe tue 9 après avoir écrit au Roi une
lettre , où elle Itii avoue tous fes crimes , & où elle
prouve l'innocence d'Oronte. Cette lettre arrive heu-
ceufement à tems : Oronte eft remis en liberté, &
,époufe Olympe.
1630.
ANTOINE MARECHAL , Avocat au Parlement
de Paris. t
LA GENEREUSE ALLEMANDE , ou LE
TRIOMPHE DE L'AMOUR , ,Tragi . Comédie
mife en deux Journées , chaque Journée en cinq ac-
tes j çn vers ^ où fous noms empruntés, & parmi d'a-
gréables £c diverfes feintes , eft repréfentée l'hiftoire
do
THEATRE FRA NÇÙIS. 6 S
^ fictt Lottis du Cbâtelet y Baron de Cir e^ , & de &
femme Urfule Audes de Cpilemberg. Pakis ,> Pierre
Rocolet, 16} I. i/z 8°. La première Journée dédiée
i M. de Ptty-Laureo9« la deuxième/ à M. de Laqnay.
LA SŒUR VALEUREUSE, oa r AVEUGLE
AMANTE, Tragi Comédie, en cinq aâes, dédié»
à MonTeigneur le Djic de Vendôqaeé Pa&is , Arc«
de Somma ville, 1634. ûi- 8^*
L'INCONSTANCE D'HYLAS , Tragî-Coraédie,
Pafiorale , en cinq aâes > en vers 9 dédiée à Monfei-*
gneur Henry de Lorraine, Archevêque de Reims.
Paris , François Tairga, 1635. i/z-8^.
LE BAILLEUR, ou LES SATYRES DU
TEMS , oa LES RAILLERIES DE LA COUR i
Comédie en cin^ aâes, m^ vers^ dédiée à MonfcÎM
gneor le Cardinal de Richelievu Pari s^ Toudaiist
Quinet, 1638. w-4^.
LA COUR BERGERE, ou L'ARCADIEDEÎ
MESSIHE PHILIPPE SIDNET ^ Tragi CoMédie,
dédiée à Robert Sidaey, Comte de LeyceAre , Auei*
bafladeuren France. Paris, TounaiatQuinet^ *^39«
w-4^,
»
LE MAUSOLÉE, Trag^Comédîe,dé«^ à
M. de Moncancon , & .repré^ntée par la Troupe
Royale y en id^ow Paris., Touflàint Quiaet, 164^^
iii-4«.
E JUGEMENT EQVÏTABLE DE CHARLES
LE H4RDr ^ DSRNIfill DUC DB^ BOUKû^^
T^mt IL £
66 THEATRE FRANÇOIS.
GNE , Tragédie, dédiée à M. le Comte de Ranzap;
Paris, TouiTaint Quinec> 16^6. iii'^^.
. LE VERITABLE CAPITAN , ou LE FAN-
FARON ; Comédie , en cinq aftes , en vers y re-
préfentée fur le Théâtre royal du Marais f & imitée
de Plauce j dédiée à M. le Comte de VinieuU Paris^
ToufTaint Quinet, 1640. i/z-^o.
PAPYRE , ou LE DICTATEUR ROMAIN ,
Tragédie ^ dédiée à M. le Duc d'Epernon. Paris >
Touifaint Quinet » / 6^6. în-j^^.
(SUJET DE LA GENEREUSE ALLEMAN-
DE , premere Journée, ) Le Seigneur Arifiandre » &«
ineux guerrier y devient amoureux de Camille : ils (^
jurent tous deux une tendreiTe éternelle. Adrafte ,
frère d'armes d'Ariftafidre > trouble tout -à- coup Ton
bonheur, en l'avertifTant qu'il eft très-néceflàîre qu'ils
le rendirent auprès de l'Empereur , qui avoit beibin
dé leurs ferviceS» Ils partent & laiflent Camille dans
le deferpoir. Ils paflent à la Cour d'un Prince Alle-
mand 9 nommé Corileon ; Cloriande , fœur de ce Prin-
ce 9 & Rofeline, Ton époufe^ deviennent amoureufes
d'Aridandre ; celui-ci donme.la préférence à Rofeline ^
qui le baife & rebaife fur le. théâtre , & qui lui donne
rendez-vous pour le (bir. Mais il eft obligé d'allery le
même jour^ à la Cour de l'Empereur* Par le confeil de
Cloriande, Corileon qui avoit (bupçonné l'intrigue de fa
femme 9 h hït enfermer dans une tour» Yacbles»
THEATRE FRANÇOIS. 6y
Ambafladeur auprès de Corileoo^ ^toii ainbareux de
Cloriande , & avoit appris que (a ïnaitrefle aimoie
Ariflandre. Dès que celui-ci eft de. retour > il k dé&
an combat , qui fe pafle fur le théâtre f & dans lequel
fAmbafladeur eft tué. On pour(uit Âriftandre jùlques
dans fa maifon. Au moment qu'il eft prêt d'y être
forcé, il eft tout-à-coup délivré par Camijie. Cette
amante tendre & fidelle s'écoit déguifée en homme i
étoit venue à la Cour de Corileon , pouriépier la con«
dnite d'Ariftandre ; ne pouvoit douter de (bn infîdé«
Gté ; & avoit cependant la générofité de prendre ià
défenlè. Elle fe fait connoitre à fbn parjure amant a
elle découvre fon (èx^ au peuple 9 qui, frappé de (à
grandeur d'ame> s'appaife^Sc fe contente d'avoir la
parole d'Ariftandre t qu'il fe cbnftitueroit prifonnier
dans un Château voifîn.
fSUJET DE LA DEUXIEME JOURNEE.)
Cbriande juftifie Rofeline» pour obtenir la liberté
dAriftandre ; mais malheureufement on trouve entre
les mains de fon page la bague de Rofeline , & une
lettre qui découvre leur intrigue. Corileon, furieux^ fkic
mettre (bo rival dans un cachot. Camille va demander à
l'Empereur la grâce de fon amant; ellel'obiJtiit : mais
Corileon demeure inflexible > & veut abfolument faire
mourir Arifhndre. Camille employé alors & la ru(è
fc la force. Elle (è d(%uifè en^maçon , pénétre dans
la ptifoni £e infiruit fon amant de ^e qu'il doit faire.
En ^
68 THEATRE FRANÇOIS.
£Ue aâèœble eDfâlce des troupes , vient attaqueir la
ville d'Arles , où k paflè la Arène > la prend , délivre
Ariftaudrci & l'époufè.
r SUJET DE tA SdSUR VALEUREUSE. )
Jl faudrpit écrirç^ uaafTçz long roman > pour tracer ki
tous îes iévénemens mis en aâion dans cette Tragi<>
Comédie. Je ^rois qu'il fuffira de dire que le Roi de
Pferfe à deux enfans , une fîHc nommée Oronte , &
vm âls ix>mmé Lucrdor ; qii'OroQCe aime ion propre
&ere; que celu^ ci > indigpé de cet anaourj quitte la.
Cour de Ton père, & va en Thrace ; qu'il a pluiieura
aventures ; que fa feur déguîfée ea homme ^ qui va à
fe recherche n'en a pas moins ; qu'elle fê bat même
iknsc^ outmii fc^ contré Jt|i , d^abord &ns te comioi^
cre I eofutoe 4e .foreur de fe v4)tr xpéftïÇéc par ]mi qu'il
y a pluiieurç autres combansfingulierSy où pericmne
ri'eft tué î que le d^guifement d'Ôronte produit plu-
fieurs méprifes ; qu'enfin leur père les reconcilie : Sd
que cette pièce y chargée de tant d'incidens & de tant
d'aâ^onsidUfikéntes, n'en èft paa plus întéreSànte«
. ^ . • . ■»
(SUJET DE L'INCONSTANCE D'HYLAS.)
î-e titre de cette Paflor^lc cft très- bien rempli. Hy-
hs aimé çn effet fucceflïvemerit plufieurs Bergères , fc.
fcs trompe toutes , les unes après les autres ; il devient
enfin aiiioore«ik de 3tdle > ikhi moins ioconfftante que
kii : & leulr markige terarine la fAece , fats qiK l'ÂU*:
teur nous laîfTe entrevoir d le mariage les §|âérira de
leur légèreté.
(SUJET DU RAILtElTR.) Clarimond eft
lue dped» da^manvais ptaifitot ; il trompe plu&org-
THE A TR'E FRANCO IS^. 6^
^rfbnniges de la pièce : & ceux^, pour s'en vanger^
le trompent aoffi 4 leur tour ;. ce qui fkijc le. dénoue*
ment de cette Comédie , qui n'a ni fél , ni liaifon , ni
intrigue , ni ftyle , & qui certainement eft fort au»
defTous du médiocre.
(SUJET DE LA COUR BERGERE. ) Bazile,
Hoi d'Arcadie , effirayi pat un Oracle , qiii lui avoi«
anooocé que fes co£ins feroient conduits fur Véchar
fàut» prend llnbÂt de Berger, & âiit enfermer daot
une tour fa femme & (es deux filles , Vainée nommée
Pamele » la cadette Philoclée. Deux jeunes Princes
amoureux des deux ibeurs > pour sintroduire auprès
d'elles, fe déguifcot l'un en Amazone» l'autre eu Ber*
ger. Sous Ibn habit » f e premier a des aventures aflez
plaifântes. Le vieux Roi, trompé par ibn habillement^
eu devient amoureux ; la Reine , qui a découvert (on
fexet employé tous les moyens poffibles pour s'en
faire aimer , & fe moque d^ lafimplicité défoia mariy
qui de ibn côté trouve bien plaifane les tendres em«
preiTemens de ùl femme pour cette Amaaone. Ënfiii
poor parvenir au dénouement , l'Oracle s'accomplit :>
void comment. Omphiale , Prince d'Arcadie , qui n'a
pu obcettir Philoclée en mariage , preiTé par & mère %
que l'ambition dévore , fe révolte contre le vieux Roi i
& eideve la maltreft'& fa foeur ^ 8é feit tout ce qu'il
peut pour gagner Philoclée, 6c pour engagea* Patnelé
à le fervir. N'ayant pli y parvenir, & cherchant à lei
Eiîj -
70 THMATRÊ FRANÇOIS:
intimider y il feint de les condamner à mort , & les hH
conduire fur l'échafeut. Alen ne peut ébranler le coo-
rage des deux fœurs. Il les fait reconduire en prifon.
Bientôt après 9 n'écoutant que fon defefpoir» il fe tue;
& fa mère en fait autant. Les deux Princes dégut(és>
voulant fecourir leurs maitrefles > fe font reconnoitre »
& volent à leur fecours : ils les ramènent bientôt au
Roi 9 & les lui demandent en mariage. Le vieux Bazilè
qui voit que l'Oracle > qu'il redoutoit ^ eft accompli > les
leur accorde » & quitte les habits de Berger»
(SU JET DU VERITABLE CAPITAN
MATAMORE.) Cette pièce eft une imitation dv
Miles Gloriofus de Plaute. Matamore a enlevé à Ma«
flrick la jeune Philafie ; & l'a conduite à Paris. Pla*
*^cide , amant aimé de cette belle , découvre le Keu où
il la tient enfermée; il gagne l'amitié du voifin de
Matan^re ; & l'on pratique une porte fecrette > qui
communique dans les deux niailons. Par ce moyen ^
Placide; voit fa maitrefle à toutes heures & à tous mo>
mens. Un valet de Matamore les iurprend un jour en«
femble> & va en avertir fon maître. On fabrique fur
le chan^p une hiftoire : on lui dit que Philafie avoit
une fœur )umeûe> qui lui reflèmble fi parSiitement »
qu'on les prend tous les jours l'une pour l'autre» 8e
que cette (œur eft arrivée à Paris. Le valet paroit d'a^
bord en douter ; pour le perfuader , on fait parokte
fucceffivement devant lui Philafie & fit^ prétendue
THEATRE FRANÇOIS. yi
feur; ce qutoccâfiomie des kzzîs 9 qui jettent quel-
que gayeté dans la pièce. Enfin le valet demeuré
parfaitement convaincu de TexiAence des deux (beurs*
Les deux amans prennent alors le parti de fe débar-
rafler du Matamore , & de le tourner en ridicule. On
lui perfuade qu'une femme de grande qualité eft
amoureufe de lui , & lui demande un rendez-vous ;
on lui dit^ en mème-tems> que fur la plainte de la fceur
de Philafie 9 un Commtflaire étott venu la redéman^
der. lia peur, & il la rend. On turpropofe un com-
bat ; il le refufè » & va à foq rendez-vons > où il re»
çoic cent coups de bâton. Enfin ^ après avoir été bien
mocqué & bien battu, on le détrompe » & on té
chafle honteufement.
(SUJET DU MAUSOLÉE. ) Artemife, veuve de
Maufole» arrive fur le thfôtre^ fiiivie de Ton Echanfon,
qui porte une coupe ; elle prend rurne qur renferme
les cendres de (on époux » en mêle dans la coupe , &
l'avale. Tandis qu'elle s'occupe de cette trifle & tendre
aftion , on vient l'avertir que la Ville e(ï aflîégée par
Cenoman , Roi de Candie. Ce Prince étoit amoureux
de Doralie $ fille d'Artemife } & n'avoir entrepris ce
fiége» que pour trouver une occafion de pouvoir lui
parler. Il lui &it propofèr une entrevue : la Princcflc
f accepte » mais dans l'intention de fe défaire de lut.
Elle ordonne que quand on l'introduira chess elle , oix
hi ôce fou épée , & pofte des ioldats pour l'aflaffiner.^
^% THEATRE FRANÇOIS.
Çenoman & trouve au rendcs^vout : Iz vb9 Se (k foil*
jpiflipn non*reul£tnent défarment Doralie» mais mèr
me ia rendent amourcttlè de lui : tUc Taverck d» dan-
g^ qu'il a couru , lui rend fixi 4p4e > fc le remroyc à
ipt) c^mp. CJiobante» coufm de Doratkf» eft faûpri-
^mer dans tin combat , où Cenoman a tout l*ayane»-
^ : ce vainqueur géoiértux le renvoyé for ie diaœp
à U PrinceiTe. ^irtin l*ardente paffien de ce Prince
triomphe nonrfeuleinent de Doralie^ mats encore à' AU
candie y qui aim^t la PrincenÎT) ic à qui la Reine l'a-
vait promife. Ce rival généreux (k charge depréfeater
^i-m^me Cenoman à Artemife, 9c de folticiter pour
Jui la main de Doralie. ArtemUe ne peut Ce refufer
aux infiances qu'on lui Fait ; &ç la pièce fink par le
mariage de Cenoman avec Doralie.
(SUJET DU* JUGEMENT ÉQUITABLE.)
Bodolpbe, Gouverneur de Mafirick, & £ivofi de
Charles le Hardi i puc de Bourgogne, devient amoo-
reux de Mathilde femme d'Albert, qui ne veut point
répondre à Ton amour. II simagine q«e (on mari eft
Je feul obfiack qui l'empêche de Tatisfaire fkê voeux ;
& il conçoit rhorrible projet de as défaire d'Albertf
en Tuppoiànt une lettre qui i'accuTe d'avw voulu tirrey
la ville au Roi Louis X I . avec ^«i Charles étcAt alors
en guerre. Auflîtot il fiit arrêter ee malheureux époux»
Qpi efl: condamné à mort. Mafthilde viest hii demander
la grace^ de (on mari ; U la refufea 9i vpkt eu. même
THEATRE FRANÇOIS. 75
Ums profiter de roccafion poor la Tioler* Heuraife*
mtnt Fredegonde 9 mère de Rodolphe ^ arrive eo ce
momeot , & arrire bien à propos ; car Mathilde étoit
fiws connoiflance. Charles» tnifaraic de cet attetuatlf
quitte le ^ge de Liège > & arrive à Maftrick. Il fait
veair devant lui Rodolphe 9 qui bient&t eft convaioco
du crime qu'il veook de commettre ; pour réparation
doqoel il loi ordonne d'épouier Machilde ^ laquelle £ût
bien des difficultés; & enfin le mariage fe conclud.
Charles donne un grand feftio pour les nouveaux tna-
rtés y an (brtir duquel il njene toute la compagnie f à
l'escception de Rodolphe , pour voir un (peâacie, quil
dit avoir ordonné. On arrive ; on levé la toile : & l'on
peur juger de la (urprife des fpeâateurs , quand ils
vpyetit au milieu du théâtre Rodolphe à genoux » la
tète fiir un billaud ^ & It bourreau le bras levé prêt
à frapper 9 lorfque Charles lui en donnera le (ignal.
Cependant ce PHoce fort , fans l'avoir donné : toutes
les femmes attendries par ce fpcâacle , le fiiivent ; la
mère du coupable» à leur tète» fe jette aux genoux de
Charles > pour dematïder la grâce du criminel. Ma<-
diilde ellemème s'attendrit, & ne s'y oppofe plus:
Cfaaiies refis inexorable. Fredegonde alors lui remet
deux billets , par lefquels il apprend que Rodolphe
t& bn fils. Malgré tout ce que la nature infpire en ce
flooment à Charles > il envoyé Tordre que le coupable
fiiic cxéaaité ; Ce Rodolphe périt parla main du bour-
fcao»
74 THEATRE F A ANC OIS.
(SUJET DE PAPYRE.) Papyre, Diftateor
Romain» quitte (bn. armée, & va à Rome ofiTfr aut
Dieux des facrifiees : il défend à Fabie f Générât de
la Cavalerie , de combattre pendant fon abfence. Fa«
bie trouve une occafion fi favorable , qu'il croit ne pas
devoir la négliger : il attaque les ennemis > & rempor-
te fur eux une viAoire complette. Malgré tout l'éclat
de cette aâion » Papyre veut punir la défobéiflance
du vainqueur , & demande au Sénat de le condamner
à mort. Le Sénat n'ofe niTabibudre ni le condamner »
& renvoyé cette affaire au peuple , qui fe trouve dans
la même indéctfion y & qui enfin fe détermine à laifler
ce Diâateur le maître du defiin de Fabie. Le févere
Papyre le fait auffi-tôt faifir par Tes Liâeurs » & or-
donne fon fupplice. Le peuple alors fe fouleve, &
prend le parti de Fabie. L'armée n'eft pas plutôt in-
flruite du fort qu'on deftinoit au héros » qui l'a voit fait
triompher des ennemis de Rome > qu'elle (è révolte ,
& demande à grands cris la grâce ût cet heureux
coupable. Fabie » père , qui pour lors étoit Conful ,
n'écoutant que les intérêts de fa patrie y va arracher
fon fils des bras du peuple , & le Uvre au Diâateur>
qoi, touché de la grandeur d'ame du vieux Fabie, par-
donne enfin à fon fils. Cette pièce eft très-intéreflan'
te. Ce qui contribue à augmenter l'intérêt ; c'en que
Lucille 9 femme de Papyre , eft fœur du Conful Fa-
bie; que Papyre a promis fa fille au jeune Fabie»
dont il pourfuivoit la mort; que Papyrie aime Fabie»
THEATRE FRANÇOIS. js
qu'on kii defline poar époux > & iju'elle veut fe don-
ner la mort « û on le fait périr : enfin , c'eft que le jea^
ne Fabie ne peut haïr Papyre ; qu'il applaudit à (bo
jugement ; & qu'il veut fe livrer lui-même entre fes
mains. De plus 9 la pièce efl: fortement écrite» pleine
de beautés de détail , & de cette noblefle de fenti-
mens qui caradérifent les Romains* Je vais rapporter
ici la (cène deuxième du troifîéme aâe y qui m'a para
fur-tout mériter l'attention du Lefteur. Dans la fcène
précédente , Lucille » femme de Papy re 9 le foUicite
en vain d'accorder la grâce au jeune Fabie. Papyife
finit cette pièce par ces mots » et vainqueur doit périrm
Sa fille Papyrie entre dans ce moment ; & entendant
le deifein cruel de fon père , elle dit :
Mais non pai rotte gendre»
P A P Y R E.
Que ce nom mefurprend ! Lucille , qu'eft ced.
PAPYRIE*
Ah ! donnez-moi ùl tfe«
P A P Y R î.
Et toi , ma fille au£S !
Quoi! toute ma maifon me combat y & conTpirs
Contre Pautorité que )e garde à l'Empire !
Confpirez pour Fabie , & combatez tous trois y
J'aurai pour moi l'empire & la force 6c les loir.
Que parles tu d'un gendre ? & quelle eft cette audace y
Qui te fait demander ôç ûi yie & ma grâce >
Quoy ! pour mon ennemi (j[u*un crime rend vainqueur f
Ta bouche o(e s'ouvrir auilî bien que ton cour 2
Quelle indifcrécion? où va cette imprudence}
( à Luiile. )
Madame , & l'on trahit ain/i ma confidence!
Vous êtes femme enfin , & tous avez parlé.
y
^6 THEATRE FRANÇOIS.
L U C I L E.
Je ÙÙM atcre de plus ; & j'ai couc recelé.
Mais quand bien j'aurais tû ce qu'il faltoic apprendre ^
la parole vous Ue ; eil-il moins votre gendre ?
P A P Y R E.
]Lè fccrec a'ecoic pas û prêt à publier :
>(a parole eft facrée s elle me doir lier*
Oui y oui 9 nous la riendroo^. Vous n'aves fçu vous tair9
Ma fille a trop appris, ^ n'ofe que rrop faire :
Mais un moyen me reAe , en le faisant punir >
D'acquitter ma parole 8c ne la pas tenii:
7e la dégagerai fans que f e la viole »
•le romprai ce lien (ans rompre ma parole s
Fabie eft donc mon gendre : & pour ne l'être pas ,
Je me puis dégager bientôt par Xbn trépas ^
Je punirai fon crime.
P A P Y R I E.
Ah ! mon père !
PAPY RE.
• Et le votre.
P.A P Y R lE.
■
Sçachez que foQ trépas fert futvi dHin autre :
Regardez votre foi » ma douleur , 8c Ton rang i
Epargnez votre gendre $ épargnez votre iàng.
Kous avons metiré tous deux votre co(ere :
Mais il ell votre gendre , 8c vous étet mon pcot^
P A P Y R É*
M^is il eft criminel s 8c vous , bien plus que lui*
Mais ...
L U C I L £.
Ferez vous périr votre race aujourd'hui ?
Croyez que je fuivrai le deftin de nu fille.
C^uoi ! pour un point d'honneur^ perdre votre £u9iUe f
THEATRE FRANÇOIS. yy
P A P y XJE>
€c fomcTa confenrer k pouvoir foirrccaiay
Qui m*anime à ce coup & ny hauflb U main.
Ma main lui va donner ce que Rome demande ,
Si Fabto eft trop^ peu , ma famiire en offrande j
$t ma Êumlle encor eft peu pour (on belbin ,
Tout mon fang coukra dans un fi nc6ie êûfk^
Ma diâacure attend un exemple fi rare:
Elle, on lui y doit périr. 3cc.
1630*
MONLEON. ^
L'AMPHITRitE, Poème de nouvelle inventiob
en cinq aAes, en vers» dédié à M. le Marqnb d'£f-
fiat. Pakis, MaclûeaGinlIeiDot, i6)o« mu8^.
THIESTE, Tragédie, dédiée à M. le ComtQ
d'Allés. Paris. Le même, 163 3. in 4^
(SUJET D'AMPHITRITE. ) Amphîtrîte eft
anooreolè da Soleil ; mais ce IKeu épris des cbartnes
deClydet refofe de s'anir à elle. La DéeiTe indignée
fait vœa de ne plus aimer déformais aucun Dieu , 8e
conçoit une paffion violente pour Léandre. Jupiter ,
examinant avec plus d'attention les attraits d'Amphi*
trite» devient amoureux d'ette , & lui hia ià déclaration
qu'elle reçoit avec mépris. Ce Dieu s'en plaine à t'A«
moar y qui , ye ne fçals poiïrquoi j endort la DéelTe-
forte bopd de la mer. Neptune pafle dans ce Heu ^ où
Ampbinile étoit livrée aux charmes du focnmeil ; il
cSt fur te ^bamp épris de fa beaaté ; il lui demende
7S THEATRE FRANÇOIS.
fa main ; il eft traité de même qae Jupiter ; il exhale
(a furear> en excitant un orage eiFroyable. L'Océan
8c Thétis prient Jupiter de calmer la colère de Nep-
tune. Il change Léandre en rocher : Sylvie qui aimoit
ce Berger » grave une épitaphe fur ce même rocher.
Amphitrite» ignorant le deftin fune(le de (on amant> le
cherche , lit l'épitaphe > & fe dérefpere. Neptune la
prefle de fe rendre à fes vœux : elle y confent enfin >
à condition qu'on rendra la vie à Léandre» & qu'il
époufera Sylvie. Les Dieux afliftént aux noces de
Neptune & d'Âmphitrite; quand le Soleil % jaloux du
l>onheu^ du Dieu de la mer , embrafe le monde. Ju*
piter lui ordonne d'éteindre cet embrafement i il obât ;
& la pièce finit. Ce drame eft d'une longueur exceifi?
ve : il y a peu d'intérêt y mais il eft bien écrit > & il
devoit produire un fpeftacle magnifique.
(SUJET DE THIESTE.) Thiefte, âpres avoir:
commis un incefte avec Mérope 9 femme d'Acrée fon
frère > eft obligé de s'enfuir ^ & vivoit dansj'exil avec
deux enfans» qu'il a voit eu de fa belle- fœur. Atrée»
qui ne refpiroit que la vengeance » feint de lui par«
donner : il lui propofe de venir partager fa Couronne.
Thiefte y confent avec ioye » & fait partir avant lui
fes deux fils : ils arrivent à la Cour d'Atréet qui aufli-
tôt faic empoifonner des fruits , qu'on porte de fa part
à Mérope > dans le jtems qu'elle embraflbit fes enfans :
elle leur partage ce funefte préfent^ & ils meurent en«
>
THEATRE FRANÇOIS. ^g
« (a bras. Atrée vient jouir de fa douleur, âc lui
onne le choix de mourir y ou par ]e fer ou par le poi-
»n : elle fe tue > eu vômiiTant mille imprécations con-
e la barbarie de (on époux. Thiefie ignore ces mal-
cors : il arrive* Atrée l'accueille avec les plus grandes
irefTes ; lui donne un feltin , ^ milieu duquel, pour
:ellcr leur réconciliation > il &it apporter une cotipe
c la préfente àThiefte» qui Ha trouvant pleine de
itngy fe livre à la plu$ violente inquiétude : il deman-
le fes enfkns » il demande Mérope : Atrée fiiic alors
irer un rideau > & lui Biît voir la tète > les pieds 6c
es mains àe fes deux fils : il lui apprend en même
:ems qu'il vient de fe nourrir de leur chair , & que la
x>ope eft pleine de leur (àng : on tire tout d'un conp un
lutre rideau > & il lui montre le cadavre de Mérope*
Atrée fe repait avec joye des fureurs & du défefpoir
de Tbiefte. Il n'y a jamais eu fans doute rien de plus
affreux , que le fpe&acle de cette Tragédie > qui d'ail-
leurs eft bien écrite fie bien conduite.
Il y a une^ troifiéme Tragédie du mftme Auteur ,
btitolée , Hector > donnée en 1630. Je n'en donne
pas d'extrait > ne l'ayant point.
t
x63o»
P. B.
CLEONICE , ou L'AMOUR TÉMÉRAIRE ,
Tragi' Comédie > Pafiorale ea cinq zStea, en vers >
8o / THEATRE FRANÇOIS.
dédiée au Roi. Pa&is ^ Nicolas Rouffet , 1 6 |o. m-i^^
PoIemoD , amouretix de Cléonice 9 lui fait préfcne
d'un bracelet, avaMic de panir pour un voyage de quel* j
ques îoiirs* Cléouke» affligée de l'abfence de toof
amant y va (è promener , dans «ts bois où eBe rencontre
Potidor > qcA hti Êiit cme dédaratk» d'amoar : eHe re^
jette lès ¥œ»x ; & eo fe quittant elte lasi£e toinbor le
bracelet , que Poiemon venoit de bi domier. Polidor
s'en empare, & ne reuc pas le Uà rendre. Elle va
trouver un Magicien, pour qu'il ki procmre les moyens
de ravoir Ton bracdet. Cekii^i kd pennet d'enchanter
une {ontaine >où Pc^dcMr a coatume de v^srir le déiad-
teser , & Tallure que cette eau lui ferai for le cfaamp
perdre la raifo». Dsmis leinèn^e tetns> Philidor » père
de Potidor > veut Tet^ger à époufer la bergère Atu
floeae. Cof^am dans Ton aaKmr pour Ckonice , il la
ceftrfe. Arimene» ^ui sdmoit Potidor* Te rend auprès
de cette fontaine enchantée ^ ou eUe e%ere «cocon*
trer l'objet de fa tendrefTe : elle boit de cette eau , &
fur te champ efle extravague. Dorante , qui en étoîc
amoureux > la joint, & veut lui parler de fa flâme ; il
eft fort furpris d^ lui entendre tenir des difcourt tota-
lement hors du bon fens* Cependant Poiemon arrive
de (on voyage ; Cléonice lui raconte Taventure du
bracelet : il jure dé punir Polidor ; il le rencontre , fe
bat contre lui , Teçoît un coup morte) de ta maks de
fon rival > & expire. Polidor redoute h eotere de
Cléonice 9
THEATRE tRANÇOJS. St
£onice , & rencontre 9 fort à propos , le Magicien ,
i lui confeille de fe vêtir des habits d^ Foiemon >
qui lui donne une pommade, qui lui fait prendre
Sî-t&c les traits du malheureux Polemon. Cfêonice
trompe» & vient lui confier qu'elle a feçii une let-
I de (on père, qui lui mande qu'il veut^la inarier à un
ind Seigneur : le feint Polemon fe défefpere ; & en*
ils prennent le parti de s'enfuir enfemble. Peu de
ns après ) Cléonice apprend la mort de (on pere>
qui la détermine à revenir dans (on pays avec celui
*elle prend toujours pour Polemon ; ils rencontrent
lilidas» père de Polid^r , qui croit que Ion fils a é£<é
î par Polemon 5 & qui » s'imagin^ot voir (on meur-
er y fond fur lui pour fe venger. Le feint Polemon
i remet alors la bpëte magique ; & fur le champ
lilidas reconnoit (on fils ^ l'embraiTe ; mais Cléoni<-
détrompée ne refpire qge vengeance contre le vain*
lear de (on amant , qgand tout à coup les cho(e8
ippaifent 9 par l'apparition fubite de l'ombre de Po-
mon , qui apprend à Cléonice que Polidor > loin
^tre un fimple berger» étoit le vrai Polemon qu'on
oit changé en nourrice , & que lui au contraire qui
oit porté le nom de Polemon 9 n'étoit le fils que d'un
Luvre paftre. On confulte l'Oracle » qui confirme ce
le Tombre venoit de dire ; & Polidor époufe Cléo-
ce^ & Dorante Arimene } que le Magicien a guérie.
rome 11. E,
0% THEATRE FRANÇOIS,
t6)0.
RAM PÂLE.
i
B^jLjNDE 9 Tragi-Comédie , où parmi le mèlao^
ge agréable de diverfes variétés ^ deux PrinceiTes ar-
rivent ait cofrible de leurs delirs , dédiée à M. de
Toumoui IJy€IK, P. Drobct, 1630. i)i.8*.
•o •
DOROTHE'E,oa LA VICTORIEUSE
MARTYRE De Ï-'AMOUR, Tragédie. Lyom,
Michel Ddrand> 1658. ia-8^.
( SUJET DE LA BELINDE. ] Cette pièce rcf-
femble à plufieurs autres « dont j'ai déjà donné Tex-
4rait. Ce font des amans & dt s amantes » déguifés les
uns en femnies> 4es autres eti hopimes : ce qui occa-
fionne quelques amours bizarres , & quelques avan-
tures tris^comiauoes ; enfin on re<K>nnott leur fexe , &
00 les ttâit conformément k Iturs defîrs. Pdidor &
Belindeibnt ies héros de cette Tragi-Gomédie > quife
termioc par leur mariage.
{ SUJET DE POROTHEE. ) Dorotliée profef-
ibît lêcretement I^ Loi de^ Chrétiens^ Aprice & Tb^
^le en deyiespenjc amoureux. Chriâiœ & Califte;,
au 4é£elpoir 4e ce qu'elle leur 4 enlevé Ijeur^aïQ^os^
l'acou&nt d'un crime imaginaire , if, la fom: vepir au
Tribunal d' Aprice : elles fe repentent bien- toc ()e
cette calomnie , Dorothée ayant publiquement décla-
ré qu'elle eft Chrétienne^ & qu'elle ne veut point
THEATRE FRANÇOIS. ^3
îS'aatre époux que JefusChrift. PrefTées par leur^re-
rôordj» > elles fe jettent aux pied$ de la Sainte > qui
leur pardonne, & qui les convertit. Aprice au défe&
poir de cet événement , s'en plaint à fbn ami Théo-
phile y qui augmente encore (à douleur , en lui avouant
qu'il eft lui-même Chrétien. Aprice alors, fe livrant
tout entier k fa fureur , fait périr Dorothée 9 Chriftine^
Cali(le> Théophile, les valets > les fervantes; & pour
que la fcène fût enfanglantée par tous les AâeurS; H
finit par fe tuer lui-même. \
N. DE RAYSSIGUIER, aé à Alby, en Langue-
doc, a exercé la profeâion 4' Avocat. ;.:.. v ^
TRAGI.COME'DIE PASTORALE, ^q« LES
AMOURS DAbTREE ET DE CELADON , font
mêlées à celles ^de Piane , de Silvandrej & iePMsp
avec les inconjlances d'Ujlas > en cinq aftes ^ en vers »
dédiée à Mademoifelle de Ragny> avec un avis aa
Lefteur , une préface , 8c quelques vers. Paris ,
Nicolas Beffin, i6)Q. i/i-'S^.
La jB^/nf , Pierre P^vid> 1631. în-S*.
L'AMINTE DU TASSE, Tragi-Comédie , Pa-
{lorale en cinq a&es , en vers > accomnKtdée au théâ»
tre François , dédiée i Monfeigneur le Pue de Yen-:
tadour» Paris, Aug. Courbé, i6}t.in-8'*.
I.A BOURGEOISE , ou LA PROMENADE
Fii
84 THE A TRE FR A NÇO IS.
DE SAINT. CLOUD, Tragi - Comédie , en Ani\
aftes^en vers, dédiée à M. de Briois, Secrétaire da
Roi 9 Seigneur de Bagnoilec, avecun avis au Leâeurj
un argument, & des (lances à M. le Marquis d'Ânv?
bres. Paris , Pierie Billaine> 163 3. m-8^.
FA LIN I CE, CIREINICE ET FLORISE,
Tragi . Comédie , tirée de \Afirée , de M. Honora
d'Urféi dédiée à M. le Comte de Vieules. Paris*
Antoine de Sommaville, 1634. if^^^*
FILIDOR ET ORONTE, ou LA CELII^E'E*
ou LA CALIKIE , Tragi- Comédie, dédiée à Mada-
me de Rohan. P a Ris, ToufTaint Quinet^ 1636*
LES TUILLERIES , Tragî-Comédie , dédiée k
M. de la Lambe Roquelaure, Paris > Ant. de Som»
inaville , 16345. i/I.«^
(SUJET DE LA TRAGI-COME'DIE PASTO-
RALE. ) Aflrée acca]>le Céladon de toutes fes ïU
.gueurs , & jui;défend de paroltre jamais devant elle ;
ce malheureux berger au défefpoir fe précipite daos
le Lîgnon: Aftrée, le croyant noyé, pleure la mort de
Ion amant. * Cependant des pétbeurs le retirent de
i'eau: dès qu'il eft rendu à la v^e> il ne s'occupe que
des moyens de revoir fa maitrefle ; & pour n'en être
pas reconnu» il Te déguife en femme. Aflréeen efFefi
ne le reconnoit point : mais dès qu'elle apprehd qiie
ci*efl: le t-endre Céladon, elle fe met en colère contiie
lui> & lui ordonne d'aller fe tuer. Ce fidelamaoc ?a
THEATRE FRANÇOIS. 8^
fout cxécoteF les ordres de fa cruelle maitrefle ;
Aftrée touchéQ d'un tel ei^cès d'amour > le rappelle 9
& confent à l'époufec.
( L* A M ÎN T E, ) Cet ouvrage eft une traduftîon
libre de VAnànta , célèbre Paftorale italienne : je
n'en donnerai point ki l'extrait : on le trouvera dans
la div.ifion defiin^e aux traduâions des Poètes étran-
gers. De toutes les pièces de Ray(Cgqier , celle-ci eft
la mfeux écrite > parce qu'il a fbuvent traduit heureu-
lètnent les penfées délicates de l'Auteur italien ; mais
lorfqu'il a voulu s*en-écarter 9 il eft prefque toujours
tombé dans le ridicule le plus outré. En voici uo
exemple :
Afiiouc n^cfl.que tropi*aoti1 de mes pleurs àttoiaïahf.
Il ne demande plus que mon fang 8c. ma vie :
Et je veux en fuivanc fôn inhumaine enyie^
Que ma cruelle Se lui , le boivent par les yeux.
(SUJET DE LA BOURGEOISE, ou LA
PROMENADE DE SAINT CLOUD. ) Camilte ,
}eune Florentm > amoureux de Sylvie, fur le faux
bruîc de fa mort» quitte fa patrie, prend te nom
d'AcriTey va en Hollande , & die là vient en Fiance ,
avec A-tis , jeune homme » avec qui il s'eft lié de h
plus grande amitié : il trouve chez (on amïuné certaine
Clorife. Cette Clorife éfoit deftinée en mariage à Atis :
Acrife lui trouve une fi parfaite reiTemblsnce avec &
chère Sylvie , (.& c'ètoit, elle en cfFet ) qu'il en devient
9jnour.eux ; il fe livre à. 6)n penchant avec. d'autant
plus de Ëicili£é> que (on aoâ iui^ avoit confié» qu'il. qq
Fuj
S6 THEATRE FRANÇOIS.
vouloir point époufer Cîorife , & ^u'il étoît amoareui
de Florifc. En même tcms utie bourgcoife du volfi-
nage devient éperdumcnt amoureufe d'Acrîfe ; & con-
fioifTant Tes fentimens pour Olorife, eHe employé tous
ks moyens poifibles pour traverièr fes amours. Aucutî
ùt lui ayant réuffi , elle prend le parti d'avertir Atil
que (on ami le trompe , & quil e(ï amoureux & aimé
de Florife : Atis furieux fe bat Contre Acrife ; on kl
fépare : & heureufement le père d'Acrile arrive en
France. li reconnok dans Acrife fon 6is Canaille : & la
pièce fc dénoue par le mariage de Clorife redeve-
nue Sylvie avec fon amant, par celui d'Atis avec Flo-
rife , & enfiti par celui de la Bourgeoife avec !e Se-
crétaire de la maifbn. Une partie de la fcêne fe paffe
à Saint- Cloud ,. ce qui a occafionné le fécond titre de
cet ouvrage.
V
. (sujet.de palinice, cireinice, et
FLORIDE. ) Ces trois jeunes femmes ont chacune un
acupt;: ces amans ont des rivaux : & T Auteur par-
yient par dp petûs nK)yens, & par une intrigue très-
compliquée à les marier y fuivanc leur de(àr« Cette
pièce n.a rien de remarquable qu'une aiTez grande
quantité de fiances^ qui» quoique médiocres» Cm:
cependant ce qu'il y a de mieux dans l'ouvrage*
(SUJET D'ALIDOR ET ORONTE.)
Orotte aimoit Calirie , & en étoit aimé; Alidor, fon
fceveu 9 arritfe d'Angleterre! voit Calirie & en der
THEATRE FRANÇOIS. ty
rîebc épris : il ne peut parvenir à s'en faire aimer > &
tombe dans une maladie de langueur. Le Médecin ,
ayant découvert le fujet de (on mat, l'apprend à
Oronte i qui confent pour lui fauver la vie , de céder
la makreffe à Ton neveu : lorCque le mariage eft pr&e
t fè conclure , Caiirie h\t les plus tendres reproches
il Oronte y qui en eft attendri : it lui demande pardon $
& il obtient, fa grâce f Alidor les furprend en ce mo»
ment d'attepdriirement 9 & veut fe tuer de défefpoir*
Caiirie l'arrête ^ & leur promet de les mettre bien-tôt
tous les deux d'accord : en effet , elle fe défigure teU
lement le vifage avec fon couteau , qu'elle deviens
cfEroyable* Malgré Texcès de (on changement» Oronte
demande encore à Pépoufer : Alidor héfke : il recon^
noit dans le même inftant une amante qu'il avoit eue
en Angleterre 9 qui s'étôit déguifée en homme pour
le fuivre » & qui lui fait les plus tendres reproches fur
Ibn inconftance. Alidor lui demande pardon flc Té*
poufe ; & fop oncle fe marie avec Caiirie*
(SUJET DES TUILLERIES.) Cette pièce
porte ce titre ^ parce que c'eft dans cet endroit que
fe pafTent la plupart des événemens* Alctdon 9 amanti
de Daphnide , attaque dans ce jardin Lucidan fon
rivàV : ils fortent enfembte» & vont fe battre près de
là : on les fépare avant qif ils fè foient bleflfés. On vien^
annoncer cette nouvelle à Daphnide fie à Clarimene ^
igniCoBt dans cette même promenade : après quelques
ê8 THEATRE FRANÇOIS.
a&ions peu théâtrales > & très-longues à décrire , Al2
cidon devient amoureux deClarimene & Tépoufe» &
Lucidan fe tnarie avec Daphnide.
JEAN MAIRETj de Befançon, né en 1610 î
mort en > 1 686. il fut Secrétaire de M. le Duc de
Montmorency ) & dit avoir commencé à donner fes
pièces dès l'âge de quinze ans.
CRISEIDE ET JVRIM AND , Tragi - Comédie;
Rouen , Jacques Befogne , 1630.2/18^.
LA SYLVIE , Tragi Comédie , Paftorale , dédiée
à M. le Duc de Montmorency. Paris , François
Targa , 1630. i/ï-8^. ( Il y en a plufieurs éditions.)
•m'
LA SILVANIRE , ©u LA MORTE VIVE i
Tragi -Comédie) avec des chœurs & un prologue ^
intitulé ; TAmpur Honnête, dédiée à Madame la Du-
cheffe de Montmorency , avec un argument , & une
préface en forme de difcours poétique, à M. deCra*.
maiU Par i s , François Targa , 1 6 3 1 . in- 4°.
LES GALANTERIES DU DUC D'OSSONE ,
Comédie dédiée à Antoine Brun , Procureur Général
au Parlement de Dple^ Ibn très- cher ami. Cette épî-
tre eft intitulée : Comique Cf JingulieTe. Pari S j Ro-
colet, 1656. w-4*'.
LA VIRGINIE, Tragi-Comédie , dédiée à
la Reine. Paris, Rocolet , 16} s* w-4^«
LA SOPHONISBE, Tragi Comédie , dédiée ii
M* le Garde des Sceaux. ( Sfguier ) Paris > Rocolet.^
THEATRE FRANÇOIS. 89
MARC- ANTOINE, ou LA CLEOPATRE,
Tragédie» dédiée à M. le Comte de Belin. PauiS,
Sommaville, 1627. w-4^.
LE GRAND ET DERNIER SOLIMAN , ou
la mort de Mudapha» Tragédie^ dédiée à Mad. la Du-
cheiTe de Montmorency. PÀRiS,Coarbé»i639.ÎAi-4^,
LE ROLAND FURIEUX , où Te trouve joint
rfpifode de Zerbin & dTfabelle , Tragi- Comédie»
dédiée à M. Belin. PariS'» Courbé» 1640. i/i*4?.
LILLUSTRE CORSAIRE , Tragi - Comédie ,
dédiée à Madame la Duchefle d'Aiguillon. Paris>
Courbé» 1640. in- 4^.
ATHENAIS, Tragi. Comédie, dédiée à M. TE.
vêque du Mans. (La Fené) Paris » Brequigny ^
i64£«in-4^.
LA SIDONIE , Tragî-Comédîe Héroïque , dédiée
à Mademoifelle d'Haute fort. Paris» Sommaviile >
1643. 2/l*4^.
(SUJET DE CHRISEIDE.) Arimand& fa chère
Chrifeide font prifonniers] dans la même Ville , &
ils ignorent le fort l'un de l'autre. Le Roi Gondebaut
devient amoureux de fy. captive > & lui fait faire des
propofitions par un de (es pages : Chrifeïde , fidelle
à Arimand » rejette la paffion du Roi; enfin par le (è-
cours d'un confident zélé , elle trouve le moyen de (e
ûuver avec fon amant. Le Roi , au défefpoir , fait
courir après eux : on lui ramené Chrifeïde; elle
tft conduite à l'Autel 7 où Gondebaut compte l'é-
ço THEATRE FRANÇOIS.
poufer ; le Sacrificateitr eft prêt à les unir. Chriféïde
fe faific alors du couteau facré, embraffe le tombeau
des amans , azyle inviolable dans ce Royaume > &
adrefl'è ces mots au Roi :
Grand Roi > je f ure ici la puiâance adorable
De ce Dieu , dont le nom vous eft tant vénérable »
I3b ce gcand Testâtes * , i^ qui tous vos autels
( * Nom de la Divinité adorudans ce Ttm^U)
Rendent incefli^nent des honneurs immortels,
Que jamais le mépris de ta royale couche
Ne me fît recourir au tombeau que je touche }
£t n'etoit qu'un premier en mon ame a pris lieu p
Afin de t'epoufer , je quitterois un Dieu :
Mais fans me parjurer , &. fans trahir ma flame^ .
7e ne puis recevoir un autrie feu dans Tame ;
Ferme jufqu*à la mort dans ce premier deflèin^
Xt ptête â me porter ce couteau dans le fein y
Si l'on me veut titer du tombeau que j'embraflè.
Le Roi veut cependant la forcer à quitter cet asyle:
le Grand Prêtre le menace de la colère du Dieu. Le
Roi infifte encore>lorfqu'Arimandparoit/& fe dévoue
à la mort pour fauver les jours de Chriféïde. Le Roi
fe livre d'abord à la plus violente colère ; enfuite il
balance entre la générofité ou la vengeance : enfin il
fe laifTe toucher, & confent au mariage de ces àcùs
i^mans, qu'il comble même de bienfeits*
\ ( SUJET DE SYLVIE. ) Thelamc , fils du Roi
âp Sicile , amoureux de Sylvie» jeune bergère^ prend
\ks habits de berger pour la voir plus familièrement :
h bergère répond à£t paffion. Ces deux amans vi-
THEATRE FRANÇOIS. çt
toient beuretix, quand le Roi, inftruit de ceteeineri*^
gue 9 & voûtant la faire finir 9 propofe à fon fils de le
marier avec la fiile d'un Roi voifin. Le Prince refufe
ce mariage. Le Koi , qui écoîc magicien 9 furieux dei
refus de (on fils, Tenchante lui & Sylvie ; il fe jrepent
bien*tôt de cette aftîon ; mais il ft'ayant pas le poq»
voir de rompre le charme, H fe livre à la plus vive
douleur. Ffofeftan, Prince de Candie , qui , fur le feut
portrait de Méliphile , fceor de Tbefame , en étcSt
devenu paflionément amoureux 9 arriva eu Sicile : il
apprend que le Roi avoit promis cette Princefle efl
mariage à celui qui pourrok rompre le charme 9 qu'il
avoit jette for fon fils : ce Prince, non moins habile
magicien que le Rd 9 détruit bien-tôt renchantement.
Le Roi acquitte fa promeflè 9 & lui &it époufer Meli«
phile ; il marie en méme-tems Tbelame avec Sylvie*
Cette pièce eut dans le tems le plus grand fuccès :
ce n'eft certainement pas le mérite de la verfification;
je n'ai pu y trouver un feul vers à citer. Ce n'eA pas.
non plus par la conduite ; elle eft commune & em-
brouillée. Il faut apparemment qu'on ait eu envie
d*encourager TAutcur. ,
(SUJET DE LA SILV ANDRE.) J'ai déjà
parlé du même fufet fous l'année 1617. ^^ rendant
compte d'un ouvrage ibus ce même titre > qui eft de
M. d'Urfé, en vers non rimes. Mairet n'y a fait d'au«
tre changement, que de la raettfre en vers rimes très*
médiocres i & bien infiîrieurs à ceux noii rimes do
ç^ THE A TKE FR A NÇOIS.
célèbre Auteur de l'Adrée. Le feul mérite de cette
Tragi - Comédie 9 c'efl d'être imprimée magnifique-
cnent > & d'être ornfe à chaque aâe d'une belle éf«
campe, gravée par Michel Laine ^ qui eft relative au
ifajet.
(SUJET DU DUC D'OSSONE-) Le Ducd'Ot
fbne efl amoureux d'Emilie , femme du Seigneur Pau«
lio ; celui-ci devient jaloux de Camille ^ amant de (à
femme , & le fait aflaffiner. Il fe fauve enfuite chez le
Duc d'Oifone ^ qui lui donne azyle dans une maifon
à trente lieues de Naples. Avant de partir , Paulin
laifTe fa femme en garde à Flavie , fa fœur , jeune &
jolie veuve. Le Duc , profitant de l'abfence du mari »
va la nuit fous les fenêtres d'Emilie : il y trouve une
échelle de corde ; il en profite « monte % & trouve
Emilie déguifée en homme & prête à fortir ; il lui bit
l'aveu de (on amour. Emilie lui dit qu'elle n'y peut
répondre , & lui avoue qu'elle aime Camille ; elle im-
plore (a générofîtéy pour l'aider à tromper une vieille,
avec qui elle efl: obligée de coucher ; & le prie de
vouloir bien tenir fa place » pendant qu'elle ira rece-
voir les derniers (bupirs de ion amant*. Comptant fur
fa reconnoiffance » le Duc confent à tout ; & Emilie
fort. Cependant Flavie, cette prétendue vieille» qui
a entendu toute la converfation , veut profiter de Pa-
venture. On la voit dans (on lit, feignant de dormir ^
&appellant en fonge le Duc d'OfTone. Le Duc, fur-
pris & piqué de curiofitéi veut voir celle à qui il ini^
THEATRE FRANÇOIS. gj
nre une R i^rande pafllon : il la regarde ^ voie une jeu-
le & jolie perfonne , au lieu de cette vieille duègne
ja'on lui avoit annoncée y & fe jette entre Tes bras;
Emilie revient, & ignore ce qui vient defe pafTer.
Camille fe trouve tout- à coup guéri , oublie Emilie »
devient amoureux de Flavie > & lui demande un ren«
dez-vous. De (on côcé > le Duc en obtient un d'Emi«
lie t qui eft piquée de l'infidélité de ion amant. Le
Duc & CaiÀille font introduits dans la maifon > ti îQ^ça
Tan de l'autre; les deux fœurs cherchent à fe trom*-
per mutuellement, & fe trompent elles* mêmes lor&
qu'elles font entrer leurs amans ; Flavie prend le Duc
d'OiTone , & Emilie , Camille : cette fituation eft co^
mique & théâtrale; mais Mairet n'en a pas fçu tirer
parti. Emilie & Flavie fe font l*aveu de leur foibleife»
iè pardonnent leur mutuelle méfiance^ & vont coucher
avec leurs amans.
On voit par cet extrait combien cette pièce pèche
contre les bonnes mœurs ; les détails le prouvent en-
core davantage : elle eft aflez bien conduite i maisfoi*
blement verlifiée. Je n'ai pu trouver que ces quatre
vers contre la jalouGe , qui valûlTent la peine d'être
cités. Emilie parte de l'airafimat commis contre fon
amant.
Ce font de ces effets y exécrable vipère
Qui pique& en naldanc ton miferable père ,
Monflre de jaloufîe y à qui cent yeux au front]
UefoQC pas yoix e&€0r6 lesob|eu«çU4a*ili rant«^ '
54 THEATRE FRANÇOIS.
(SUJET DE VIRQINIE.)LeRoideThrace
avoit un fils ; celui d'Epire^ une fille ; ces deux Monar-
ques avoient confié leurs enfans à Calidpr ^ qui étoit
un Mage refpe&é dans tout le pays* Ce fçsivant hom-
me avoic lu dans l'avenir que ces enfàns dévoient être
m jour funeftes aux auteurs de leur naiOT^^tice. Pour
Jeur empêcher de commettre ce crime ahomioable , il
»*enfuit à Rome avec euK> fHit courir 1^ bruit de leur
mort t|^ les fait ié|ever comme frère Se fi^ux. jLe Roi
d'Ëpire meurt ; Euridicei fa veuve i déclare la guerre
à Clearque^ Roi de Thrace. Un naufrage av<ût jette
en Epire^ Perifi^re 9ç Vir^nie, firer^ &ç fflpur» Pe-
rifudre quî fervoic dans l'armée de la Reine y s'y étoit
fort diAingué , ^ avoit même bleflé le Roi Clearque.
^ndromire , coufme d'Suridice , devient amoureufe
4e Pcriandre , ^ lui découvre fa paflSon ; celui-ci ne
Teut point l'écouter; elle cherche, à s*en venger; &
par le confeil de fa nourrice » elle charge des aiTafllns
de le tuer. Elle cpit avoir été obéie» & veutaufld
fftire mourir Virginie^ eeUe ci échappe au danger ; Se
fe réfugie auprès d'Euridice, à qui elle compte Ton
aventure* La Reine la prend fous fa prote(%ion* La
pourrice > furieufe que cette viâdme lui foit échappées
& craignant même que la Reine , qui avoit paru avoir
quelques foupçons contre elle ^ ne découvrit à la fin
fes intrigues criminelles, cherche à la prévenir^ fie
perfuade à Ândromire qu'il eft néceflaire d'accufer
Euridice d'avoir eu un icommerce criminel avecPe«
THEATRE FRANÇOIS. 95
idre. Amintas > amoureux d'Andrormre, k propofe
ir Ibucenir, les armes à la iQS^iii, la vérité de cette
:tt&cion« Cependant Periandre qui airoit édiappé à
aiTaffins > & qui craîgnoit les fureurs d'Andtomire f
toit réfugié chez Clearque ^ qui l'avoit reçu avec
nté. Dès qu'il apprend le danger de la Reine & de
fœur 9 il demande à fon nouveau proteâeur la per-
iffioD de les aller défendre. Clearque y confelit ôc
ut même l'accompagner. Ils entrent dans la carrie-
; Periandre combat. & bleffe mortellement Amin*
8 > qui > avant que de mourir , découvre toute Tin-
igue, & juftifie la Reine. Le vainqueur fe décçuvre
ors> Scfkit connoitre (on compagnon. Euridice, toiH
lée de la générofité de Clearque > fait la paix avec
\ Prince. Dans le même tems , Calidor > ce Mage »
li avoit été chargé d'élever le fils de Clearque & la
le d'Euridicej arrive en Epire. Il découvre à Clear«
3e que Periandre eft fon fils 9 & à Euridice que Vir*
inie eft (à fille : il leur appretid en mème^ems le
iotif qui Tavoit engagé à faire courir le bruit de la
lort de ces deux encans ; & déclare qu'aftuellemenft
n'y a plus rien à craindre ; & que l'oracle étoit ac«
ompli y puifque Periandre avoit bleiTé fon père dans
n combat^ & que Virginie avoit été caufe de l'im'
ofiure de la nourrice » fous laquelle fa mère avoit
lenfé fuccombèr. On imagine aifément que le dé-
louement de cette Tragi-Comédie eft le mariage de
'eriandrç avec V^gloic»
SS THEATRE FRANÇOIS.
En général cette pièce efl: mieux &ite que la pré«
cédente 9 tant pour la conduite que pour la, verfîfîca-
tion ; il n'y a cependant nul endroit bien frappant ; &
je n'y ai trouvé qu'un morceau du récit d'une tempê-
te , qui mérite peut être l'attention du Leâeur : c'en ^
Periandre qui rend compte à Clearque comment il
avoit abordé en Epire»
le iPilote , â qui l'art & les périls paiïèz
Moncroienc ceux dont alors nous étions menacez ^
S'écria : voiles bas , te que chacun s'aprête
l A combatre aujourd'hui la plus fiere tempête
Qui jamais ait troublé la bonace des flots.
A peine achevoit-il ces véritables mots ,
Que le ciel entr'ouvert nous déclare la guerre ,
Par un éclair ûiiv i d'u n grand coup de ton aère s
£t comme fi ce bruit eut été le fignal
Pour nous épouvanter d*un aflfaut général ,
Va déluge de pluye» un orage de grêle,
De foudres & d'éclairs nous chargea pêle-mêl;
£t nous eûmec raifon de craindre également
le malheur du naufrage, & de l'embrafement*
Quelques traits de clarté ne perçoient les ténèbres.
Que pour rendre à nos yeux les objets plus funèbres,^
£t montrer fur le £iont des plus vieux matelots
L'image de la mort errante fur les flots ,
Qui tantôt s'abaiffoient en profondes vallées,
£r tantôt fe hauflbient en moi^^tagnes (allées;
De forte que je crois que la vague atteignit
Jufqu'à la région du feu qu'elle éteignit;
Car les fureurs du ciel enfin dindnuerenty ice»
(SUJET DE SOPHONISBE.) J'ai déjà donné
l'extrait de deux pièces fous le même titre ; la pre-
mière fous l'année 1581. à l'article de Nicolas de
Montreuz ,
THEATRE FAANÇOIS. ^7
Montreux ; la féconde, fous l'année 1 585. à l'artide
de Claude Mermec. Ainff je n'en donnerai point de
celle de Mairet ; c'eft fans doute le meilleur ouvrage
de cet Auteur. Animé par les grands fuccès de Cor*
neille, Mairet s'eft furpafle dan^ cette pièce, qui eft
fagemenC conduite, dont les versant harmonieux &
afTez pleins d'idée» & qui eut la gloire d'occuper le
théâtre pendant foixante Repréfentations avec les mê-
mes applaudiflemens. Quelques années après , le grand
Corneille traita le même fujet ; mais autant dans fa
Sophonisbe, Mairet eft audeffusde lui-même, autant
dans la (ienne , Corneille eft au-delTous de l'Auteur de
Cinna : & je crois malgré la différence du génie , des
talens & de la réputation des deux Auteurs y que Ton
doit donner la préférence à celle de Mairet.
(SUJET DE MARC ANTOINE.) En 1682.
le Sieur de la Chapelle a traité le même fujet fous le
titre de Cléopatre. La bataille d'A&ium, la mort d'An-
toine , celle de Cléopatre , la générofité d'Oâavie »
fœur d' Augufte , & répudiée par Antoine y font des
points d'hiftoire trop connus^ pour que je croye devoir
donner l'extrait de cette Tragédie y dont la conduite
& la verfîficacion ne peuvent pas faire honneur à
l'Auteur , ni exciter la curiofité du Leâeur. Je n'en
rapporterai qu'un endroit ^ pour prouver que dans les
naauvaifes pièces» on peut quelquefois en tirer de
grandes idées. L'on fe rappelle fans doute ces quatre
vers 9 qui ont été (i applaudis fur notre théâtre ^ &
qui le font encore lorfqu'on repréfente la Cléopatre du
Sr de la Chapelle. Pour en faire fentir toute la beauté,
Je vais rappeller les (ituations où Eros les prononce.
Antoine vaincu vient chercher fa confolation dans les
bras de Cléopatre >& apprend la mort de cette Rçi-
Tome IL G
98 THEATRE FRANÇOIS.
ne; cet infortuné Romain fe livre au plus affreux
défefpoir >& n'ayant plus rien (jui ne lui rappelle Tes
malheurs , il prend le parti de mourir , donne foQ
épée à Eros (on confident, & lui ordonne de le tuer:
Eros reçoit avec reipeâ: le gîaiye de fôp makre y &
lui die :
Détournez un moment votre augufle vifage.
Donc rafped révéré , glaceroit mon courage*
Vous donner le trépas , ce feroic vous trahir %
Je vous dois feulement l'exemple de mourir ;
Imitez moi.
Eros fe frappe dans le même inftatit , & Antoine fe
tue de la même épée. Dans cette même fituation i
Mairet fait répondre à Lucile , ami d'Antoine :
Seigneur , puifqu*!! vous plaît que' je fois Phomicidc
De la race 4'£née & de celle d*Alcide,
Détournez , )e vous prie , ou cachez à mes yeux
Cet augufte vifage , & ce front glorieux ,
Que l'ai vu commander à tant de milliers d'hommes.
Après avoir prononcé ces mots, Lucile fe tae.
Antoine > frappé de la générofité de Ton ami» fuit fca
exemple.
(SUJET DE SOLIMAN ou DE LA MORT DE
MUSTAPHA.) Un avertiffement que l'on trouve à
la tête de cette Tragédie , annonce que l'Auteur l'a
compofée avec beaucoup de (bin , & qu'elle eft dans
toutes les régies du théâtre. Il eft vrai que l'unité
de lieu & d'aâion s'y trouve > & que la régie dts
THEATRE FRANÇOIS. 59
irtngt & quatre heures y eft ohfcrv^e ; mais pour cela
la pièce n'en eft ni plus intéreflante, ni mieux veriifiéç :
en voici t'intrigue. Mudapha f fils de Soliman & de
Roxefane , a été changé dès le berceau : & lorfque
ce Prince eft (brci de l'enBince» fa mère, qui le croie
fils d'une Sultane^ fa rivale 9 cherche à le perdre
dans l'efpric de Sûliman : elle l'accufe d'avoir une
intrigue criminelle avec la fille du Roi de Perfe 9 dont
il eft amoureqx y & qu'elle fait pafler pour un efpion 9
à caufe que cette jeune Princeffe eft déguifée fous des
habits d'homme. Soliman fe laifle prévenir contre Mu-
flapha> & renvoyé au fupplice , lui & fa maîtrefle.
A peine l'exécution eft-elle finie , que Roxelane ap-
prend que ce même Muftapha , qu'elje vient de faire
mourir, eft fan propre fils : livrée aux plus affreux
défefpoir, elle fe perce le cœpr, & la pièce finit.
(SUJET DE ROLAND FURIEUX,) M. QuU
nault a renfermé toute cette Tragi- Comédie dan? le
quatrième & cinquième aile de fon opéra de Roland ;
c'eft abfolument la même marche. Roland cherche
Angélique , il entre dans une forêt où il trouve fur
les arbres (on nom , gravé avec celui de Medor. Il
appelle des bergers 9 à qui il demaqde quel eft ce
Médor ; on lui racont» route fon hiftoire , & on lui
montre le bracelet qu'Angélique leur avoit donné
pour récompenfe. Roland , au défelpoir , s'enfonce
dans la forêt , où il devient furieux ; il déracine les
arbres , tue les bergers & les troupeaux > Sec. Mairec
tào THEATRE FkANÇOÎS.
y a ajouté l'épître d'IfabeUe , de Zerbin ^ de Rôdo*
lùonc. Ce(l dans cette même pièce que l'on trouve
deux^vers bien connus. Aronce, un des Officiers de
Rodomont ^ lui dit qu'il a trouvé deux poinçons d'un
vin mufcat excellent^ & qu'il n'ofe les lui offrir à caufe
que la loi lui défend d'en boire : Rodomonc lui ré«
pond :
Ne croyant de ma loi que ce qiiMt en faut croiire ,
Sur couc quand il s'agit de manger ou de boire ,
S'il efl tel que tu dis , j*cn ptendrai largement.
A R O N T £.
£t votre Majellé fera tris-fagement.
Cependant Roland de plus en plus furieux y rea<
contre Rodomont j le renverfe ^ & pourfuit toujours
un berger > i|u*il jette enfin par-deffus la plus hautç
montagne. Content de cet exploit , il veut (e repo-
fer } lorfqull voit un monftre contre lequel il veut com-
battre ; c'étoit le Dieu du Sommeil , il fuccombe fous
les charmes & s'endort Adolphe arrive fur l'Hippo-
griphCf lui rend la raifbn 9 le fait monter en croupe
fur (on cheval ailé, & lui dit :
• ..«•.••••. Serrez les genoux 9
J*enfile un grand chemin , où les plus belles bottes
Peuvent impunément faire la nique aux crottes :
£c lî Ton n*a fermé le palfage dts airs.
Nous verrons aujourd'hui Charlcmagne & Tes pairs.
(SUJET DE L'ILLUSTRE CORSÀII^,)
THEATRE FRANÇOIS. toi
épante > Prince de Sicile , étaat à MarfeiHe , devienc
noureux & eft aimé de la PrincefTe Ifinénie ; oblU
S de s'abrencer pour quelque tetns , il lui demande
être admis un foir dans (k chambre > pour prendre
>ngé d'elle. Il y vient : l'excès de fon amour > la cen-
refle ye lui promet Ifménie , Toccafion enfin l'en-
ige à vouloir lui dérober un baifer. La Princefle^ ftl«
eufc de cette témérité , lui défend de jamais repa«
>itre devant elle : le Prince veut fe juftifier , mais en
lin ; elle ne veut point Técouter. Croyant alors
^oir perdu tout efpoir de l'attendrir i il fe jette par
le fenêtre, & fe précipice dans la mer. Ifn^nieeftaa
îfefpoir de la mort de fon amant f 8c devient folle i
n l'emmené dans une mai(bn de campagne > & oâ
it courir le bruit de fa mort. Au bout de deux ans f
ti Médecin la guérit : on la ramené à MarfeiHe avec
»ute 9 fa raifon ; mais plongée dans une mélancolie^
où rien ne la peut tirer. Lypas , Roi de Ligurie »
n s'étoit emparé des Etats de Sicile i depuis la perte
î Lépante» arrive à MarfeiHe ^ devient amoureux
Ifménie ^ & la demande en mariage à Dorante »
rince de MarfeiHe i & frère de cette Ptincefle. Do^
nte f enchanté de donner fa fœur à un Roi auiC puit
nt^la lui accorde. Mais liménle, toujours (idelle à
mémoire âe ion cher Lépante j ne veut point en-
:ndre parler de ce mariage. Voilà l'état où font les
bofes » lorfque la pièce commence. Il faut fçavoir en-
ore que Dorante j faifant un voyage fur mer > eft priç
G \\\
îox THEATRE FRANÇOIS.
par des corfaiïes. Axâlla , Général de ces pîratcJi
qui ti>étoîc point fur fés vaifleaùx , lorrqu'on le fit prî*
fôntiter , apprenant que c*eîl te Prince de Provence ^
tju'il a tn fa poitTànce , lui rend autfî tôt la liberté &
te téïivoye à MarfeUlè*, coniblé des plus riches pré-
fets ; feïcigeâtitfèùleriient de ce Prince de lin donner
fà parofe , qlill lui accordera Ifeénie eh mariage, s'il
là hiî demande , avant qu'il eh ait dîfpofé. On Tent bien
tpie tèt Àîcalla «ift Lépante. Des pirates fa voient re-
tïtë de ï^au, en avoient pris foin , & ravoîent rendu
iàia Vte. Bien-tôt après, il fut înftruit dubruh delà
îtiôtt dlfttiéhîe : cet amant malheureux ne voulant pas
^ûi fûrvlvïe , & cherchant un trépas glorieux , confent
d'ètfe le chef de ces corfaires. II fait mille aàions
*éclataft'tts , fans trouver la mort qu'il cherchoit. Enfin
il apprend qu'Ifménie rfell point morte, & il brûle de
!{i revoir. Il arrive à Marfeille chez le même Méde-
<;ÎA, ^û1 ^voît guéri laPrTncefle ; il fe fait reconnoî-
trè à tùî > & lé prie dé lui procurer les moyens de
Vôîr îôbjet qu'il adore. Ce Médecin > de tout tëras ,
attaché à Lépaiaté , lui montre toutes les difficultés de
^pénétrer dans là retraite d'tfménle. Enfin 11 ne trouve
«fTàutre expédient , que de le lui préfenter , comme un
fol, qui pourra la diftraire de fa mélancolie. Rien ne
Tui <:ô\ite pour voit ce qu'il aime ; fl fe déguife , eft
ïhtroâuit chez Ifménie; Scfous un nom fuppofé, il lui
Vacorite Ton hiftoire ; la Prîncéfle étonnée du rapport
qu'elle à avec la fienne , s'attendrit. Lépante profite
THEATRE FRANÇOIS. lo^
da moment , & fis fait reconnoitre. Ils fe furent tous
deux une tendrefle éternelle ; elle lui confie le défef-
poîr où elle eftj. par rapport à l'engagement que fon
frère a cootra&é avec le Roi Lypas. Lépante lui pro«
met de lever bien-tôt cet obftade : «n efFet > il en-
voyé à Dorante xm de Tes Lieutenans , avec une let-
tre (ignée Axalla ^ où il le fomme de fa parole, 8c
lui demande Ifitiénle en mariage : Dorante n'héfite
pas f & &tt réponle à Axalla qu'il peut arriver > âc
qu'il ferafépoux de fa foeur. Le Roi Lypas, inftruît
de cet événement ^ enlevé Ifinénie ; au moment où il
eft prêt d'entrer dans fcs vaifleaux , il eft attaqué par
Lépante, qui déHvne la Princeffe, 8c fait Lypas prî-
fonnîer- Le vainqueur fc Kit alors comioître pour cet
AxaHa^à qui Von a promis Ifménie i fk en mème«
tems pour Lépante , Prince de Sicile, que l'on a cru
mort. Dorante lui fait époufer Ifn>étiie; & Lypas » pour
obtenir fà liberté ^ lui rend la Sicile.
(SUJET D'AT HE ]5l A I S. )
Il'cflrfai» cher Paulin, qto'à ne confîdérer
Que cette ma|eftc qui nous fait adorer^
Et cette vaine pompe étonnant le vulgaire ,
Qui nous coâtc'beaucou^ ,& ne nous fert de gaett-. ^
Le peuple mal inArufC)» nous croie auffî cantenc »
Que dans Tor & la poprpre;, il nous voit éclatant*
Mais ceux qui par fageffe , ou par expérience ,
l^adcnt de notre fort iyec 'plus de ictence^ **
to4 THEATRE FRANÇOIS,
Sçavenc que Ifs chagrins & les cutfans foucis
Sont avec les grands Rois dans les Trônes .
Ccft rEmperéur Théodofe , qui ouvre la fcène par
èes vers. On peut fe rappeller ceux que Phocas dit
en coromeuçant -la Tragédie d'Héraclius. Il eft bon
d'obferver queja Tragédie d'Athcnais eft de t6^2ftx.
celle d'Héraclius eft de 1647— Théodofe ne vouloit
ppint fe marier> & fe piquoit même de méprifer les
feux de Tamour. Sa fœur Pulçherie > qui n'approuvoit
point fon indifférence 9 lui dit qu'elle vient de voir
dans Athenais le chef-d'œuvrç dje- la beauté « de la
grâce & de la modeftie. Tant de louantes piquent
la curioGcé de l'Empereur ; il. témoigne à fa fceur le
defir qu'il aurait de voir cette jeune iperveille. PuU
chérie , fur le champ > lui en procure Toccafion ^ & le
fait cacher dans (on cabinet ^ au moment qa'Âthenais
avec fan frère » viennent rendre la PrincelTe juge de
leurs diâérens y au fujet de la fucceiTion de leur père.
Pulçherie adjuge gain de caufe au frère ^ & promet
la proteârion à la fœur. Théodofe ^ qui a entendu le
plus long & le plus faftidieux plaidoyer 9 n'en a ce-
pendant pas été ennuyé > tant il eft enchanté de la
beauté d'Athenaist II avoue à Pulçherie q«11 en eft
devenu pafConnément amoureux. Après quelques évé-
nemens aflez communs ^ où la vertu d' Athenais brille
toujours de plus en plus 9 l'Empereur 9 du confente*
ment de fa fœur, fe détermine à Tépoufer* Au mo-
ment où il va être heureux, un obftacle imprévu dé-
truit tout fou bonheur. Athenais eft payenne > Théo-
THEATRE FRANÇOIS. îo$.
dofe eft chrétied. On employé les plus habiles Doc*
tears pour la convertir ; Atbenais > toujours ferme
dans fa croyance , la préfère à la grandeur & à fa
tendrefTe. Enfin un confident de l'Empereur » nommé
Paulin , parvient à lui démontrer la vanité & l'impuif-
fance de ces idoles » & lui fait connoitre les faintes
?éfités de notre Religion. Elle fefàit chrétienne : rien
ne femblc^ plus «'oppofer au bonheur de Theodofe»
lorfqu'un mouvement de jaloufie, auffi ridicule que mal
fondé y lui fait imaginer qu'Athenais aime Paulin : n'é-
coutant alors que fa colère > il chafTe honteufèment
du Palais cette jeune beauté 9 yeut punir Paulin de
fon infidélité» & Te livre à la plus affreufe douleur.
Enfin Pulcherie lui démontre. la faufleté & TinjuAice
de (es (bupçons; il rappelle Adienaisi lui demande
pardon , & l'époufe.
(SUJET DE SIDONIE.) Bereminthe, Reine
d'Arménie > & mère de Pharnace 9 pendant l'abfënce
de ce Prince j conclud le. mariage de Sidoniet fille
d'Arcomene^. fon premier Miniftre» avec Cioaxarey
jeune Prince fans Etats ; mais qm par fa valeur avoit
confervé ceux d'Arménie. Ph^nacé arrive au momenfi
même où cet hymen alloit k conclure : l'amour qu'il
avoiç pour Sidonie» & l'oracle. qui bi avoit été pro^
nonce au Temple dç Jupiter Ammour le déterminent
jts'oppofer à cçtteunion.Cet Oracle s'exprimoit ainfi:
thS T^ÊATkÈ FRANÇOIS,
la merveillt que tu chéris ,
Du plus 4ie«rcttx des Rôis'^ desm&rîs ,
Fera la deilinéfei
£t les Dieux l'aiment tant »
Que de fon hymence,
t>épcTid tout le bonheur du (bepttè qui t'attend.
Pharnace va trouver Ctoaxaure 9 £c kii deasailBe avec
hauteur de lui céder Sidonte. Ce frince* lik de ia
parole 4e là Reine 9 du cooTenteii^eiit d'Arcômene ^ &
de l'ansour de Sidoiiile> réfufe à Pbartiace de lui faire
on ^refl ûcdScé : oeloioci s'efflport?e , & met l'épée
à la main. La Reif»> fortant en cet inflatit^ fe met en
colère contre £)n fils y & confirme à Cinaxare la pa-
coleiqu'elle lui a^âonnée. Pharnace au défe^k , mon-
Cre i fa mère l'Orade 4]a'il avoit reçu ^ & cherche à
lui prouver que c'eft priver (on Royaume & 4bn fils,
du plus grand bonheur > (i elle ne lui accorde pas Si-
éonie. La fiietne béfite quelques momens , & enfin
pceod le (>aiFti <de s*eii rapporter à^ la volonté des
Dieux* ËUe hk venir un enfant, met le nom de fon
Çk 6c «oeltii de Oaaxare> dans «m vfUfe > Se prononce
^ue ie mora qui forcka le premier^ ^dééermtoera xrdui
qui ^sm, obtenir la main de S£dd«»e ; c'eft celui ^de
Pharnace <qni fort , coQt le mc»fide eft au 4éfe(poir ;
mais on prend lé parti 4^obén: ^ à ce -que le Ciel vient
de décider^ On conduit Sidonie àl'Aùtèl; mfitle pré-
Ëiges funeftes fe maoifeiîentaux yeux dés (peftateurs.
Enfin Arcomene prend la parole > rappelle un ancien
THEATRE FRANÇOIS. loy
Oracle qui annonce qu^ le Royaume d' Arâiéôie fera
détruit t fi jamais une efclave ikvient l'^pcmTe ^ Roi»
Il déclare que Sidonie eft efclave > qu*il Ta trouvée
fur le fern d\ine eftkve ex^ranlre ; que tfayaiw point
d^enfàns , tl T'^v^ âevée 8t lait fdStt fcnf <k fille.
Enfin il fait t»oîr tittt toééaiBe d'ôir qw'eMe av*â8tatei»
à fon xrd : un Sage, ^qui fetrouve dUtts te Teriiple^
prend cette tnédiffle , •& nprês î'*vôtr exa«iiaé, litf*ife
que Don-.fetrlement > Î^Artne ft'éft fcM une ^dWà\f^^
maïs ttfème 'qu'elle 'eft née de Tang ïoyal. L'ef(péra¥K:e
renak dims le cœur de PliarnUcfe; mai* rffé eft bien-
tôft Jétruhe : re ftième Sage felt voSr que 'cette mé^
daille eft creofe i îl l'onvrej^ entît»eun écrit > pat
lequel on apprend qUe Sidbtiie -eft néfe d'i» itttrtagé
iecret, que le feu Roi Hfrtrpu^fe ^vcSt contraâé mwc
une Prîtîceflfe, qùi'ëtôit rtiattty hii donnant te ^jcffer j
que peu de tewrs après , ce îloi airoit ^poi*fé feéri-
mimlre , & que par xonféquent ISîdtoîe écoît ftefè* d^è
Pharnâce , le calme tenait auffi^ôt >&Cinaxare ép&ttt
fe û dhôre Sîdôme.
1-650»
LES AVENTURES AMOUREUSES D'OM-
PHALE 9 fon combats, fe perte, fon retour & fon
mariage. Tragi-Comédie dédiée à Monfeîgnéur,fréi^
unique du Roi. 'Parts , Pîerré t!hè>rrfîer, xSjb.^/s-
^. On trouve au commencement *Me Ode au J^câibir
to8 THEATRE FRANÇOIS:
la prife de la Rochelle ; & à la fin i les amoars de ta
.Bergère Ifis, efpece de Poëcne.
(SUJET D'OMPHALE. ) Le Prince Daphnis cft
amoureax d'Ooiphale , & en obtient un rendez- vous
pendant la nuit. Polidon » rival de Daphnis y le voit
ibrtir de chez la Princefle > & entend & leurs derniers
adieux , & le rendez -vous pris pour le lendemain*
^Furieux du bonheur de Daphnis > il veut le perdre
dans TeCprit d'Omphale; il va la trouver , & lui dit en
iecret i que ce jeune Prince té vante par tout qu'elle
lui a accordé Tes dernières faveurs : quelques parti-
cularités qu'il avoit entendues 9 le rendez>TOus don«
né pour la nuit prochaine, qu'il lui rappelle, la per-
fuade de l'indifcrétion de fon amant ; n'écoutant alors
que fa colère , elle engage Polidon à appeller Daphnis
en duel. Ce Pritice accepte le défi, Çc fe porte au
cet^dez-vous : bientôt Ton adverlâire paroit ; il le com«
bat , & le perce d'un coup mortel. Mais quel eft l'ex*
ces de fa douleur , lorfque dans l'ennemi qu'il vient
de vaincre , il reconnoit ià chère Omphale. Cette ten«
dre amante , craignant pour les jours de l'objet qu'elle
aime encore , .malgré (à jufte colère contre lui » avoic
engagé Polidon à fe défifter du combat , & avoit elle-
même pris (a place. Daphnis veut (è pafler (on épée
au travers du corps : Omphale l'arrête > & exige mè«
me fa parole d'honneur , qu'il n'attentera pas iur (es
jpurs > il le lui promeci mais voulant abrplument périr»
THEATRE FRANÇOIS. M09
il va troaver le Roi » & lui conte le crime qu'il vient
de commettre • le Roi le &it conduire en prifon 9 6c
envoyé chercher le corps d'Omphale> pour le dépo-
ièr dans un fuperbe mausolée. On ne le trouve pas :
un Hermite a voit paiTé à l'endroit où s'étoit donné
ce malheureux combat; il s'étoit apperçu qu'Omphale
refpiroit encore 1 & l'a voit transportée dans fa retrai-
te , où il la guérit bien-tôt. Cependant Polidon , dé-
chiré par Tes remords , quitte la Cour 9 & veut fe con-
finer dans une retraite. Il arrive précifément dans celle
de rHermite » qui avoit rendu la vie à Omphale. Il
ne reconnoit pas cette Prince(re> qui étoit habillée en
berger. Il raconte à l'Hermite Tes aventures» & corn,
ment il étoit caufe de la mort d'Omphale : il ajoute
qu'il va l'être auffi de celle de Daphnis» dont on avoit
diâeré le fupplice > pour l'immoler fur le tombeau de
cette Princefle. A ce récit > Omphale reconnoit l'in-
nocence de (bn amant , & apprend ^ en tremblant 9 le
danger où il eft. Sans en rien dire à l'Hermite > elle
court à la Ville» fe fait reconnoitre au Roi» au mo-
ment même où Ton conduifbit Daphnîs k la mort;
Daphnis juftifîé époufe Omphale ; & Polidqn qui
arrive avec THermite > ne voulant plus troubler le
bonheur de ces amans > donne la main à la Princefle
Méliante^ dont il étoit aimé depuis long tems. • • • •
Cette pièce n'eft pas mal conduite; mais elle eft l»eti
plattement verfifiée.
iïù THEATRE FRANÇOIS.
Vers i6jo.
LES MURMURES DES FEMMES , FILLES
ET SERVANTES, en trow aftes, en vcr#, w-S^.
£iQ8 diitte > ni nom de Ville ni d'Imprimé lu:*
(SUJET DE CETTE PIECE.) Les perfonnages
de cette efpece de Drame , font tous des femmes , oa
des filles de bourgeois & d'artiâiis 9 qui fe rencon-
trent 9 & qui fe dirent mutuellement qu*elles font
mandées à la Ville 9 pour fubir la réformé ordonnée
fur les habillemens. Il n'y en a pas une qui ne crie à
TinjuRice , & qui ne prétende avoir le droit de por-
ter le vêtement qui lui plaira le plus. Il n'y a dans
cet ouvrage ni conduire , ni intrigue ^ ni gayecé ; &
je n'en parle ici que parce qu'il eft divifé en aâes 1
& en fcènes.
i63i.
GEORGES DE SCUDEKYj né au Havre-de-
Grâce, en 1601. mort d'apoplexie le 14 Mai i66%*
de l'Académie Françoife.. Il étoit frère de Mademoi-
felle de Scudery , qui a donné plufieurs ouvrages.
LIGDAMON ET LYDl AS , ou L A RESSEM-
BLANCE, Tragi. Comédie 9 dédiée à M. le Duc de
Montmorency. Pa&is, François Targa, 163^1.111^ 8^*
LE TROMPEUR PUNI, ou l'HISTOIRE
SEPTENTRIONALE, Tragi- Comédie, dédiée à
Madame de Combalet , avec une Préface lur let
THEATRE FRANÇOIS, tu
(Eavres de Scuderjr 9 par M. de ChandeviUe. Paeis ,
Pierre BillainC) 1633. in-S^.
LA COMEDIE DES COMEDIENS. Poëme
de nouvelle invention , en cinq aâe$ 9 &. 09 prolo*
gue, dédié à M. le Marquis de Coalin* PA&IS, Au-
gufiin Courbé > i 6 3 5 • in-S^.
CRANTE . Tragî-Comédie , dédiée à Madame la
Duchefle de Longueville, Paris ^ Augudin Courbé>
LE VASSAL GENEREUX, Poëtne, TragJ.
Comédie , en cinq aâes , en vers > dédiée àMademoi-
felle Rambouillet, Paris > Anguftin Courbé^ xâ^ô.
LE PRINCE DÉGUISÉ, Tragî-Comédie , dé-
diée à Mademoifelle de Bourbon. Paris » Aug^fiin
*Courbé> \6^6. i/i-8*.
LE FILS SUPPOSÉ, Comédie en cinq aôes',
en vers y dédiée à M. le Cbevaliçr de Saint-Georges*
Paris ^ Augu^in Courbé , 1636. i/i-8''.
LA MORT DE. CESAR, Tragi- Comédie, a vc«
nn Prologue du Tibre & de la Seine, dédiée au Car-
dinal de Richelieu. Pa K l s ^ Aug. Courbé , 1 6 ) 6.
D ID O N , Tragédie , dédiée à M. le Comte de
Belin. Paris , Augufiin Courbé» 16)7. 1/1-4^. .
L^AMANT LIBERAL , Tragi . Comédie , dédiée
à la RetnCt Paris 1 Auguilin Courbé , 1^638. in-^^.
ztx THEATRE FRANÇOIS.
L'AMOUR TYRANNIQUE, Tragî - Comédie ;
dédiée à Madame la Dachefle d'Aiguillon , avec un
difcours de la Tragédie, ou remarques fur Tamoar
tyrannique , dédiée à l'Académie Françoîfe , pat
Sillac d' Arbois. ( Jean-François Sarrafîn ) P a r i s >
Auguftin Courbé, 1639. î«-4®»
EUDOXE, Tragî-Comédîe , dédiée aux Dames,
par Eudoxe même. Paris, Aug. Courbé, 1641.
î/2-4^.
ANDROMIRE, Tragi-Comédie , avec un avis aa
Leâeur. Paris, Ane. de Sommaville , 1641. 2/1-4^
IBRAHIM , ou IILLUSTRE BASSA , Tragî-
Comédie» dédiée à M. le Prince de Monaco. PariS,
Nicolas de Sercy • 1643. in 4^.
A X I A N E , Tragt-Comédie , en cinq aâres , en
Profe , avec une préface , pour jullifier la Profe. Pa-
ILiS , Nicolas de Farcy , / 644. in-^^.
ARMINIUS, ou LES FRERES ENNEMIS,
Tragi Comédie I avec une préface, dans laquelle il
rend compte d'une manfere avantageufe des (êize
Poèmes dramatiques > qu'il a compofês , & où il die
que cet ouvrage fera le dernier de ce genre qui for-
tira de fa plume» Paris, TouiTainc Quinet, 1644.
1/1*4^.
(SUJET DE LIGDAMON ET LYDIAS.)
L*amoureux Ligdamon , au défefpoir des rigueurs de
Sylvie, prendle parti de fe tuer. Un de (es amis lui
.confeille , .pttifqùll a le deflfein de mourir, d'aller du
moins
THEATREFRAKfÇQJS. iij
iBcnns à rarmée cberrcKer un trépstô^gtone^iXr II ac-
cepte ce çonfeil avec plaifir 9 & pa^c; pans^un autre
pays» Lydias^ qui reflcoibloic parfakemeuc^à/Lygda-
mon > & qui étoit aimé d'Amerineri/re b^c centre uq
de Tes rivaux > le tue 1 & ell obligé de quitter fa maÎT
CrefTe & (on pays. 1^1 arrive dans {eHeu^qu||iab\j^ok
Sylvie : cette belle f depuis le départ de Ligdamon >
étolc devenu fenfible à fes feux y & cous les j6uf:s pleu-
roit fon abfence; elle croît revoir fonamanc ;''elié lûî
&it mille careiTes « & l'aflure qu'elle eft dé(et rnipée it
répoufer. Mais ce berger > fidèle à fon An^j^ine-, rejet^
te les careiTes de Sylvie» & TalTure qu'il ne la connoic
pas y ce qui la met au défefpoir. Tàtidisquè "cètfe pan^
faite reflemblance lui procuroit une auni bonne fortune i
cette même reflembknce en procuroit une bien con*
traire à Ligdamon. Il e(l attaqué par le frère cte cjeluî
que Lydias a voit tué ; il le bleflTe : il eft pris ». ppur-
fuivi comme meurtrier ^ & condamné ànK>rt. Cepen-
dant Amerine ,. qui croit reconnoitre fon amant) le dé«
livre du fupplicey en. demandant à Tépoufer. Lîgda-
moQ en agit avec Amerine » comme Lydias avec Syl-
vie ; & voyant» quoiqu'il puifle dire\ qu'on le coh^
doit malgré lui au Temple, il jette du ppifpn dans Isi
cpupe. nuptiale 9 l'avale > &, tombe fans conaoiflançQ
m pied de 1* Autel. Un ba^rd heureux conduit Ljfi
dias & Sylvie» dans ce même Temple yjppjKeconno^t
aoffi^tôt les différentes méprifesqu^ont occasionnées 1|^
parfaite reffemblance d|^ Xigdamw iSc ^^e («ydias.
Tom IL ^ H
ti4 THÉÂTRE FkÀNÇÔIS.
Sylvie veut (i}îiare%>n atnaiât dan^hnuic datoinbeàa
quand ^duî^ui aV^^it (o\M\ \t pèifbn^ Ligdamon»
2M:rî?e à ptbpôs pdiHr faire finir ïk dôulfent ; il ârrètri
Pefflct de la pôtioli) q^î n'^tolt tjtie ibm&fef*. Lîg^
damon l:tpt'end fes ïètts, reconnoît Sylvie & l'époufè.
Amcribé fek ett-'inème-tcfms le bonbear de Lydîas.
: • ■' :y : ■ '■-■ - ^ ■■■■■:'
fat ^\iàe c^tiQ ç^jfiCQ e(l on n!e peut plus fldictde:^
TAutei^r. y abufe fans ceiTe de ces pointes ou jeux de^
bots , qui en effet étoient aiTez d'ufage en ce tems*
tky m^i^ iiôtit on ufoie cependant avec modération.
Scudéry , au côiAraif e , aftetaed^ en inférer un aff
moins dans cba^que repliquie. Je n'en citerai qu'un
exemple I ix, c'e peut-être i'endipiç le moins dérai-
fonnable de cett« Tragi-Comédie. . ^ • Un Berger de-
iinande à Sylvie pourquoi elle refufe avec tant d'opi-
inâtteté le don du cûeur de Lîgdamon. Sylvie loi
répondt -
Qb*it gardb ce hezu. don , pour moi )e le renvoyé :
le'nt ywnfàiik pàflèt ^t uii oifeau àc t>reye »
Qui (é nourrit de <et\iït s & ce iVeft mon deflèin
De reiïembler lui monftre ayant deux coeurs au fein.
{.SUJET D^ TROMPEUR PUNI.) Arfiddr &
GfêdAtè i Sè}gn«>âr$ Aingtbis > (bht tous deux âmôu»
rcu^fc Ae Nerée 5 Atfidor eft tAmè , Gléônfce méprîfï i
célui-d pou* trouMer le bonheur dé ^tï rivale tient
lui faire confidence , qu'il pafle toufte^ les nfuits avec
Nwéfe > & lui prc^e lifxèttte de le rendre témoin de
fon IjonBfëèr; a le fait eactier j & Wén^tôt tiprès,
Arâdoi^là yok^ itith><toic peffiatÂ^tMA: duezNerée;
• 1
THEATRE FRANÇOIS. itS
/aiaca de l'infidélité de & makrefle^ dès qu'il U
it 9 il Taccable df s repfoclies les plus outrageant*
is quelques évéi»eme{i5 affe? communs , Neréii
édater fôn ionocefKis aux yeuic d'Arfidor^ Celuir
irîeux de k çalonmie dt Cléonte , fe bat <^til$
& l€ tue. Rien ne tremblant plus le bonheur d' Ac?
'9 & le trompeur étant puni ^ la pièce devoit na^
llement èvAu jMais elle eut été trop cputte .i ^
kri fait naître tout- à- coup un incident inatcendui
dérange* la félicité de$ deux amans. Le Roi d^
inemarck fait demander au Roi d'Angleterre la
1 de Nerée pour Alcandre , fon favori : le Roi
igleterre la lui accorde , & fait fur le champ partir
e jeune beauté pour Coppenhague. Arfidor au dé-
Dir , abandonne fa patrie ^ & va errant de contrée
:ontrée. Il rencontre on jour trois hommes » qui
fouloient aflafSncr un feul, qui fe défendoît vail-
mant. Il prend auffi-tot le parti ^u plus foible , &
les aflkffins. Celui ci , à qui il vient de fauver la
f lui jure une amitié & une reconnoiffaTTCe éter-
e : ils le font réjciproqucment confîdenc||des divers
nemens de leur vie. On peut juger de leur cLa-
I , lorfqu'ils fe ^fe<îonnoiffent pour rivaux , c^étoit
andre qu'Arfidor venoit de délivrer de la main des
[fins : malgré l'amitié qu'ils s'écoient promife > l'a-
ir eft le plus fbrt ; 8t quoi qu'à tegret ; Ï1$ convien-
t cependant , que lorfqu'ils feront arrivés à la ca-
lie , ils fe battcoac l'un ■çoatxe i'autre : il« y;arri-
ii6 TÏIEMRE FRANÇOIS.
vent y & Alcandre obtient du Roi toute (iireté pour
Con rival. Ils entrent dans la carrière , fe battent : Ar^
fidor defarme Alcandrei & lui rend aulChtôt ibn épée
piour continuer le combat : cétui-ci touché de cet excès
de générofitéy le reconnoit pour (on vainqueur > lui juré
de ne plus mettre obftacle à fon bonheur ; & obtient
pour Arfidor & la main de Nerée $ & la proteâion du
Roi. Je vais citer un endroit de cette pièce 9 pour
faire connoitre à mon Leâeur comment dans ce tems-
Ik on exprimoit lia galanterie. Arfidor dit à Nerée :
Aujourd'hui , que le Ciel sVft paré pour ce plaire ,
Que pour voir re$ beautés, le Soleil nous éclaire,
£t qu*â travers l'afur il darde des rayons ,
Qui nous viennent baifer, bien que nous les fuyons ^
Viens defibus ces ormeaux éviter leur outrage ^
Tu t*y mettras à Tombre , & m^ôteras l*ombrage i
Car voi que ce iirival , qu'Amour a fçu coucher ,
AbaifTe fa lumière , & fonge à fe coucher.
Viens, ma belle déefTe , & vois dans la fontaine
Ces arbres d'aientour tracer leur ombre vainc j
SouflFre qu*en ce ruiiTeau par ua Toin diligent.
Je failê parmi Tor diflillcr de Targenc >
Que lavAt ces cheveux , cette onde ait Tavantage
De prendre la couleur du beau fable du Tage :
Lors faifanc un miracle au bord de. ce ftiiflêau ,
On verra le Soleil au iîgne du verfeau.
Viens conter le fablon de cecce eau cranfparence \
G'ed le nombre des maux donc tU fais/rignorante.
Viens voir dans ce criftal où je fens^ m*cmb^afer ,
Conmie quoi fans couleurs on peut pçindre un baifcr i
Viens t*en fouler ces âeurs qui penchenc à la vue
Sii «cUet dom le Ci«l libéral c'a pouï vue- .* '
THEATRE FR ANÇCTlSi if^
Viens tromper le zéphire tn^oufeux de BhiliB ,
En lui moucranc ce ceint de rofes & de lys i
U ce prendra pour elle 'y ha ! fe faux miferablie ^^
Car tes perfèâions'n*bnc rien de comparable :
Que Ton cherche rob}et Irplus rempli d*accraits ,
Que Ton faite un .^ofctcait de cous les btàiix :poRtMCt t*
Les grâces de Venus , celles <ie la nature , '
Le plus vif coloris qui foie en la peinture ^
^ L'albâtre » le coi^, 1^ viOige d'amouf , > . ' -'^
Les étoiles 9 la lune y & la clarté du iour;» )
Les perles» les rubis» toutes les fleuts enfemble^ .,
N*ont den qui foit û beau , ni rien qui te relTemble. ,
Ce diTcoun e(l charmant y autant que fôn^ùtear ). '
£c <*eil à mon regret qu'il eft un peu menteur.
- ÀRSl DOR, '
Pour Toir fi j*sii flatté ee fu)et de ma ftame f -
#(.egarde dans cette onde » ou bien dedatis mon> àm^.9.
L*un ôc l'autre à l'inftant te feront avouer, ; ,:
Que tout ce que J'ai dit «trop peu te lôucrT
1 • ^
^ ' I w« ft i *4 ■
(SUJET DE LA ÇOMEDïE DES CQMB.
DIENS«) Cet OQVi^ge ccwimeJKKç.par uaPrologip
sn profç $ aflez plai&tit ; enfuîteila Comédie >.qôi'ttft
sa .deux 9iâes & en prpfe ; ell^fe pafe eotre diSi*
:tm A Aeors dlane troupe 4e ComédieB8> qai arrivent
i hyQ^.f ScokVvm 4*eiis; r^ncontjre^^lbo oncle» iIQi>
l'a^d gronde fon ipf ye» vde bjproliiffipii qn'il a eiq«
biairée , Sç qui finit > p^r entrer lui-mènie d«ns IsLtroa^
pe. On lit au nsilieM de cettp Comédie oae Edogue^
doqï^ voici les pr^iPMîr^^^irs;.
fia TffEATR E FR ANÇOîSi
,^: T ANCHE t) B.
Que faire s vous ici dans cecce Tprêt; fombre y
Où nul foleil que vous n*a japiais pénétré.
J'y cherchas <ce 901 fuit c'eft-à^dice de i*oi|ibrc9
It fuyais feulemenç CQ ()ue|^ài tencoixcé»
Enfin cet ouvrage flngrfter f fimt par line Tragt
Comédie Paftoralte è» trois aftcs» & en vers , inti-
tulée > \ Ammf'' taché par Vamour , que ces mêmes
Adeurs rèpréfëiièétic pour lé début de fonde. Ce
Drame ne méri e aucun èxtrsût; il eft froid , fans con-
duite ,& mal écçil^è - v; :
•}■)■! ■
(SUJET D'ORANTE, > Xftpandre, fik du Gou-
verneur de Napte«> çA aïoQiîirâHQ^âi aîmid'QaDte»
fille d'uUf Se4gnei»r Napotkaim Malheurei^fement pour
ct^ amans, la haine ia plus^vi]^ d^vifoit leurs tnallbos;
& Lucinde i mère d'Oratite , par averfion pour la fa^
«ûUé cTlfimai^r^ » a voit qùitt'éKaides pour feréfo-
tgÎQr'cbèa Ormiin ^ Gouverfieâr dte Pife^ (b» parent»
:ir i4pi<(»«tageoit1à hainci^. * Quèiqîle maiié j €>it^
-jteitlenr )iifiioiMfei|X' 4Ûrafité :^ j^oor panrdaîp à t»
ibas/xï ivigz^ ÏMAhAiè Mt^^^wè^^^ en mariage à qb
:v|cu< Seigflfcttr Piâm , ntfmmé Ptorànge , Te ftltUM
^fue la luiîne; qu^ètle concevidit fi(<ciefEikeiiieQt pour fott
4poux > la poi»rFok un }efi# AétttveiVàt^ àéeouter ftvé-
^nUmieni (^ti^aaxM»r. CépèiidàM^ lei^ laroies dOraQ-
te f dont il ignoroit TankHiF peur JESm^ndre s Si ta ré«
pugnancé ^'elle témoigne pour ce mariage , le dé«
jFIpraoge de ne pluj^foDgor k çQt;tç ii^w, ,Mw Lu-
àinde y flattée des graijujies ricb^eç df.Flpranget lui
grpmec de lui teok pvole^ & de (^} (àqvçF^ de Pife
^yi^c fa fillÇ| pour ^ W idpnner. |fi9x^ndr^,^Vfrtipv
Qr^ntc de tou^ cfSi ^véçemeo^ , w^j^Jw djtng^*
^jja'U y cwit , airîvc> i^ife, djjfgwï^oÇP M?«*^p4*
,vQ|t ^ maitrçû^» ^ l'eçg^ge à le foivrefo^ 4e8 Jhar
bi^ d^hoqame. Florange le rencont^e^ > ^: l^, cpipb^t ;
j^ Ton âge & fe £c4^1pflfeIeUT^î^ bie^rfpt i.l^iBi^tcî
4e (pn riv^l^qoî, lai .^apne 1% viç. Q«5i^t|,iiiritBiift:
.q^'Iflflk^udrc lui auront ^ç^c^v^ Qp^|%, 1v| ff^vG^ye^TO
^j^j^Lf ^ lui indiqua Iç lieu ^ ea^%ti : Ifmiîindre
.f?jf ipei^d, 8^ trouva Qr|pi^K;2^^ na^leiji^d^ t/p^s fti&^
JJi prçnd< a^ttffi^tôt i^ d^^^Ç^Jo ç^hiifjfiH sepm CQm-
}^t^ I ijc W fcf^ a9îi(gi|8 : ç'^toift: Fl^iai^Q , .^W ^
.HqiUfibyeogçi: d'Owîn^jayîçâfr ^uj^lu^ oc^> vie>
Q^^ fpçi ÎWBM^, cqpff 9f;à fois b9«ifefi^r> * fec^
.fç^^ç r^îr lei d^^ f^mllei* H V^ l^vw NI iàe«5 fe
.^(^$i;^op4«sdlH2lP^tn»p^;^ )eoi: bj^lWglIt^If |iqpll4
.4f: la bdUf Ro$l^ç >J]il^4^ Pue d« ^J;çtagpei, Se hé*
l^tie^ 4<|ifir8 Sfm, .I<iKi<kR jb âb 4M 4n Acà des
txo TÉrÈÀTRÉ FkANÇOÏS.
Francs 9 èfl: Ton rivah 'Dans an combat contre les iXatf
neis j Theandré (îgnale fon couragfe avec tant d'édat,
^ue lé. fioi àiàrhîé de fl Valetrr , lui accof de Refilée
en -mÉi'iafgëi 'Lûcidan s'y oppofe énvain. Mais an mo-
-ni^nt'àfênie Où çee hymen alloit fe célèbrery*le Roi
«jeurt ; & Lùadàfe n'^^iàs plutôt fur le Trône, ^tfîl
Vêtit fôfter RdBlée à l'époufer. Les Seîgnetiifs & te
•peuplé cherëhertt en- vatiti à empêcher le hoùveaa
iîoi ëêcommfeetfe cette ît^ùftice ; Lucidan periîfté',
i&Wéiaie'même lesjours de Theandré : ce qui frrite
tî fottntéitœwts &' lei e(^t«^ dé la N^ion > qti'on le
^hïtfle^^dtf trène ^ & qu'on iélit-Theandrc à (îf place*
Theandré n'adcepte h Couronné » que fous re fermctit
Iblemnel qu^n lui fEttcati^ pieds des Autelsf» d'obéir
QK^ètûttït àu pi^emiéif de'tës cbmmandemèns. Après
evokcéço ce ferment^^, îl^Ôttté fut leTrône^ ïclBait
au « petif^Ie & aux Grands "^tm long dîfcours^, viin if létfr
péàvi^é I'z0}iigicé àe fon^^fenfi & aprèsléuir avoir
tappetlé le ferment qu'ib' vîéhnént <fe fiîrei'îl fëùrôi^-
éc^nnè-de^rétondbitre Ldbidan pour ieurthaièrèlégi-
Cime. Après avoir ceffé de parler > il defcéhd dtiTrô-
iiëV va^ébér<>bet'Luddani,< l'y feit monter , loi reidee
le Sceptre & la Couronne , &lilt prête lé fi^ëintë: le
ferment de fidélité. Tous fuivent (on exemple. Lud*
dan toûoké de% généro&^ dê^foW rival /le' pi'fe^oa-
Met C9 <^i^ sTéft cpailé iSiM fait époùfèt Rofitébb
' En tout î cette pièce h*é(f pàtf mal côntlù^tëV Û y
a quël^cé^ àuiiK)ic^ pa(fiabte«^: eh voici -inl^^i' m'a
{ r
THEATRE FRANÇOIS. i«
jnm mériter d'être ràppotté { <&fi^ hi premier^' (bène
da premier a^e. Theandre témoigne à Rolilée Tior
quiétude où il (cft^ qu'elle ne-fe.laifle ébloyie^jpa^ li;t
rang de fon rival, elle lui répond: \ ^_
; « • 'f ,.._,. r
;..•..,...... ÏTeri'dls pas davantage. * "^ " I ' '^
Qaaad l'empire dtt Ciel lui r^drcut eorpacoige ; ^ ? :i ^m S7
Quand de la terre entiete il fe rendroit vainqueur «
Il en perdroic le nom , en attaqtiaiit mon caur.
(SUJET DU PRINCE DEGUKÊ.) Cette
pièce eft fort compliquée. CleàrqaCi fits^du Roi de
NapleS) pafTe par la Sicile» y yoit Argenie , unique
héritière de ce Royaume, en dévient paffionnémene
amoureux 9 retourne chez* fon peré, JBc l'engage à en*
voyer des AmbafTadeurs y popr la, lui faire obtenir en
mariage. Le Roi de Sicile ks refofe j^ & celui de
Naples piqué de ce tefusy lût déclare là guerre , eft
vainqueur , & le fait pri.fçnnier. Clearqîie efpérant
l'adoucir , ne néglige aucune oceafion de Jui donner
des preuves de refpeft. "Mais ce Monarque > irrité de
(es malheurs, s'abandonne, Uil chagrin > &. meurt. Le
brait cjurt que Clear^e l'avait empoifanné ; & Ro-
femonde , mère d'Argcnie ^ adoptadt cetre impofture,
d&rlare que» cette fille n^iira point d'autre époux ^ que
cdai qui lui apportera 1*:^!$ de. Clearqne. Cepen-
dant ce jeune Prince , plus amoureàt dé jour en jour,
& vaincu parle defîr de févolr ce qu'il aime, malgré
toos les dangers qu'il y çouctr^priélKl le parti d'abor*
der en Sicile > fe déguife ^ èc s'ëngvg^ comme garçdn
t%% T SE AT RM FRANCO TS.
dbe39 fe jarifarior de h Rctee. La Prioceffe 1
tre plafienrs foid 9 &eft frappée de Êi bom
^le hii parle ; & Iç Prince çn confcrvitnt le
gi^exigeoit l'état qu'il avoit embrafTé» ne pei
danr pas l'occaiiojti de lili.dii^edes galanteries
ve même > nu îoiir>celie de ki réciter^es St
Au doux climat de !^ grece y
Un Jeftie Prince amoureux ,
Qui a'oibic voir (a maitrcCe »
Bric un iMCeia^aiigereux i
Pour approcher de la hçlle ,^
QuHin malheur 'jfalfolc rebelle
A canttiÉifidsliréî? r
De{rcu,is.U9 habit rudique, .
it Couvrît fa qualité.: '
la lartuiie fimoitiblo ,
Fouf ikmaîfm fim pouvoir y
A cette H^mphe adorable
L'offrit &' fit recevoir ;
Aiofi (but^fbabkdiiiiifdire »
|>*iMi, tcom^ma ^'UaiiQilfe ^étt9 ,
Pcçnant le foin chaque jour »
Il foute aux piedà ta Couronne ,
Q^ (lu i)iàâfiincé lui io&np»
Pqur avo^ jlfU»,4*{|nioui:.
. Il vivait de cette forte »
• plein de gloire & de plaidr ^
I^aif <^uae-«l^âpatioe Aof tt' ^
llficcena^f^i^4B%:(
Qui (bUicica fon.ame ,
De faire éclater la âame ^
Qjul le piivoicidt lopot s
l' t I
- - . * . i
;.■)
jrSÉAfRE PRAHÇOIS. i%%
Si bien que s'approchant d'elle »
Son caur lui tint ce propdt.
Nyi^phe:, picD$;KCO0|uit(&iiÇ9
P^un fort qui m*eft aiTez deux y
Çuifqiie Je tiens la nailT^ce ^
©tt faag des Dieux comme tous*) ■.. - ^ ^
Maiii fi k nifiaL^iof^bofe ,
Q^uc faje çel^i <iu^ difpofc
B'un coeur qui vous efl 4^'Qné ^
Déplak à l'œil de Silv^é:,
X^ QDiui T|i ptiiifcK la vit
Ççfqu'iU*iwr*coAdama^^ " î
Je fuis ...... il ferme U iboUjChe^
Sur le puinc de fe Dommer ,
QqacUociiitite le couche t ; -'
fit; «ju'pn U doit cftoAt V . . .
U fouffjre la violence
Du refpeâ & du (Ilence >
Il parflSf pàU Si tfanâ s '
^C^dir»(iU UclU
Fut picoyabh , ou rebelle • ^
L'hiftoire finit ainfî.
T
En elfes 9 tt ti-'t!^ avoir pas d^Éipàntage à dif t« Bufts
après qiMiqpafs ^>i^ii4raMM ^qfcii tètti^eni KHijoHJr» dé
mieux w mieux dan» f efpm de la Pikicefle ^ il lui
avoQ» quH eft te fil» do Roi de-N^âphts i & que c*^'
fexcès de l'afAOUf qiill refTeoc poor eKe ^ qoi l'ai d^-
sermisiî à parottré Rme ce dégaUbmdnl : Argeoic lei;
avoae aofi qtt'éHe ^aime i & lui réeMmuiiide le ptîis
grand myAere. C^s amans fiveitnt heàreax , loHq^e
ioot à*GOup kùr bonheur ell troublé pair ta jafouSfr de
la femose diu jiïdifiief ^ qui j amoureu&dti Prinee-d^
•tx4 THSyiThJ^ mANÇOISi
gnifé , & au dérefpoir, de s'en voir tnéprif^é , ayant
découvert (on intrigue avec la Princeffe > v^ aaffi-tôt la
révéler à la Reine; La Reine » fîirieafe de ce qu'elle
vient d'entendre , 'dèfcéod dans le /jardin » forprend
Clearque aux genoux, de (a fille j & les lait tous les
deux conduire en prifbn. Une Loi 4u Royaume avoit
prévu le cas où une jçune PrincefTe engageroit (ba
cœur 9 fans l'aveu de Tes père & mere> Sç^çondamnoie
à la mort celui des deux amans ^ qui le premier avoit
&it l'aveu de fa pafllon : Clearque n'béGte pas & s'a-
voue coupable. De (on côté, Argenie afliire que c'eft
elle qui l'ed; on ne peutconnottre la vérité; & pour fe
tirer d'embarras $ on ordonne que le fort dés armes en
dédderoit. C'étoit dans ce tems-là la reflburce ordi«
naire, pour les affaires embarrafTantes. Le Prince trou-
ve le riioyen de féduire fes gardes^ qui lé font fortir
de prifon ; & pour faiiver les jours de ce qu'il aimei
il s'arme ^ il entre dans la lice » & veut combattre pour
ffirouver que c^i'Wiiiit, qui , jç pi^elpiçr , a dédaré
d^SLfe^x. Animée par le même objet i Argenie ^ qui ii
Î^HS recouvert fe liberté, fe vêtit; ep Chevalier, & fe
f grlfente pour, prouver > que c'eft au .çoiitr J4re la Prîo-
.^^9i qui ^^ coupable- On met ces deux tendres amaQs
iyîsbà-?is l'un de l'autre. La trompette, foiïne, le fignU
efe, dotine f & bien-tôt la PrincefTe; eft ir^iac^ie ; lôn çs^
^q^ t0i;nbç>.Çkarque la recpnnoit> il veut ië tuer:
.^F^enie qui n'étoit point blefTée , &j.qi^i feolemeat
.^ojt.ét4 rçnyerfée de defTus foa cbev^U arrête les
THEATRE FRANÇOIS. t%s
tranfports de fon amant y caisse fon défefpoir ; mais
perfide toujours à foutenir que c'eft elle y qui Ta en-
gagé dans ce fatal amour. Enfin lé Prince ^ ne voyant
plus d^utre moyen de fauver les jours d'Argenie ,
rappelle à la Reine4e ferment qu'elle a fait de ne don-
ner d'autre époux à fa fille , que celui qui méttroît eà
fa puiflkncc la tète de Clearque. Il fe &it connoitté
alors pour ce même Clearque v dont elle pourfuic lé
trépas : il n'ofe , dit il , efpérer la récompenfe promife,
puifqu'elle le (bupçonne d'un crime aufli IfFreux ; mais
il confent à perdre la vie f fi les jours d'Argenie font
en fàrete. La Reine^ étonnée » balance quelque tems t
heureufement elle apprend par un témoin de la mort
de fon époux , qile , loin d'attenter à ks jours > Oeai^
que au contraire n'avoit fongé qu'à les çonfer\rer. Ëilé
oublie alors toute fa haine ; elle ne voit plus en Ctear*
que que le plus généreux des hommes , & Tamanc
ie plus tendre , & elle lui fait époofèr Argenie* :
>
(SU JET DU FILS SUPPOSE'.) Deux Gen-
tilshommes François» Rofandre & Almedor^ fe pro-
pofèntde reflehrer les nœuds de leur ancienne amitié ^
en uBtiTant leurs enfàns. Ro&ndre n'avoit qu'une fille >
nommée Luciane ; & Almedor^ un feul fils nommé Phi«
tante. Ce fik étoit en Breta^e depuis fa naifance;
il y étoit amoureux > & aimé de Belife , four de Clo-
ff an j Gentilhomme Breton ; & Clorian s'oppofoit à
leur bonheur. C'étok là la pofition de Philante , lort
iX^ THEATRE FRANÇOIS,'
qa'ao domeiiique d'Almedor vient lui anjogncer > xpxi
çft cbargé par fon pef e de le conduire à Paris y où il
veut le marier. Ce jeune homme, au défefpoir) va
çonâer fon maliieur à fa maitreiTe , jure qu^i moum
de douleur > s'il la quitte un inftaot^ & ^n&n la décer«
inine à le fuivre, (bus des habits d'horame , lui pro«
mettaoc de la conduire à fon père ^ qui dès qu'il la
verra > ne pourra qu'applaudir à fon choix. Il charge
en œèœetems ce dooieflique» qui devoit le: mener à
Paris I & qu^il avoit «ris dans Tes intérêts de conduire
Befife à un lieu ou il doit bien-têt l'aller trouver. La
fortune Voppofa à fon projet ; Clorian > inîlruit qu'on
yeooit d'enlever fa foeur , en foupçonne PhiUnte & le
^it arrêter. Il va le trouver dans la prifbn y pour fça^
voir où eft Belife» & le menace de la mort s'il ne le
lui apprend : mais bien tôt vaincu par la douleur, la
vertu & l'arpour de Pbils^nte , ii devietft fon ami , loi
procure la liberté i iipM même avec lui ^ur rejoin-
dre Belife. Nous l'avons laifTée en habits d'homme 9
& fous la conduite du valet d'AInaedor. Après avoir
attendu vaînem^t Philant^j ce ^|et liH coofeiUe
palier à Paris 1 où eUfe apprendra ce ^'eft devenu
fou amant. EUe y arrivée 9 va chez Almeilor > s'infor*
me de Philante : on n'en avoit point encore eu la
inoindse nouvelle. Ce même valet lui coniètUe alors
de proifiter de fon d^guifement >,& de fo &ire pafler
pour PMante. En eiïet 9 elle arrive avec ce rofé coo-
fident : & le bon^homme qui n'a voit jamais vil fon fîlsi
THEATRE J^RANÇOIS. i%y
ne doate ^s ^cre et m (bit Iti? tft ^n^banté 4e &
grâce & de ft %are ^ & fiir le thtaîmp le metie chez
Lociaoe. Il %ft Ééceffaire de Tçàvoir '(|Qe éett<e Lucia-
ne s^éoûic env'^ki o^fée à^n- tnariage avec Pliilan-
te; qu'elle aimoit un jeune Gentilhomme DOmmé
Oronte» & qu'elle avoit formé le projet de tâcher dç
dégoûter d'elle celui qu'on VOofoit hii &ire époufer«
En efïet dès qu'elle en trouve Toccafion ^ eUe acca-
ble le prÀendu Philaote de h^kie^ d0 m^ri^ Mai^
Belife qui fem coMbien les ntfOQiens fotù: précieut^ fe
confie à elle, & lui avoue fon fexe & fon dégùife^i
ment : elles f^ jurent aloris l'amîtié la plus forte 9 £c
paroiflent dune fî parfaite intelligence , qu'Oronf e qui
arrive dans ce moment > tombe dans ntoe telle jaloux
fie g qu'il prend le parti d'appeller fon rival en duel.
Oa porte le cartel chez Almedor, au moment m^me
où le véritable Philante y arrivoit 9 & on le lui remet.
Ce jeune homme » étonfné d'une querelle fi peu atten«
due ^fe rend cependant au rendez- vous. Oronte^ fort
furpris de voir un homme qu'il ne connok pas, 9'ex«
pli que avec lui. Us conviennent d'aller enlèmble 4:hez
Almedory pour confondre l'ittipoUeur qui prend le
' nom de Philante. Ils font demander le vieillard ; mais
ib odt beta hi parler > ce bon*b6aime prévenu ne
veut pas les écouter, & &it venir céhri qu'il veut ^ 8c
qu'il (butient étire fon fils. On peut juger aifément dé
la furprife des deux amans, lorfqu'ils fe reconnoUTent.
Enfin Clorian conte toute l'bâfloire , fait connoicre à
ia§ THEATRE FKANÇOIS.
A1niedpr& la naii&nq: iSc le^ biens de (à ibeur. Celui«
ci çonçenc de o'ècre point privé de Belife ^ qa'il avoit
aimé comme fon fiia> la reçoit pour (à fille; & Rofan-
dre, fuivant l'exemple de Ton ami> CQofeojt au bon-
heur d'OroQte. . '^
( SUJET i5e la mort de CESAR. ) Ce
fameux événement eft généralement trop connu pour
que je donne l'extrait de cette pièce > dans laquelle
Scuderi a fuivi fcrupuleufement tout ce que nous en
ont; tranfmis les Hifioriens. Les Auteurs , qui depuis
Ipi ont traité le même fujet , ont auffi à peu près
adopté le même plan, qui y pour ainf^direy eft un
plan donné par l'hiftoire même. L'on trouve, quel-
^ue^ beaux vers dans cette Tragédie. Voici ceux que
dit Srutus en la commençant :
Ke 4éUberoBs pjus , le fort en eft ) etté ^
jL*cx''cs de prévoyance eft une lâcheté :
91 faut pour ce grand coup choifir l*heure opportune ,
. £c puis s'abandonner aux mains de la fortune.
. Fléau dts foibles efptits , image lu danger ,
Vous choquez un dellcin qui ne fçauroit changer. s
n efl juile , il eft beau , c*eft ce que je demande :
Ma main , rcfblvons nous; Thonneur vous le commande :
Montions le m^me cœur qu'ont montré nos parens ,
£t que le nom de Çrute eft iFatal aux tyrans.
Dans la cinquième fcène du quai;riéme aâe y Brute
paroit inquiet du fort de Porcie , en cas qu'il fuccooi*
be fous ion entrepôfe^ elle lui répond :
' - On verra que je fuis (quoique l'on iéxécute)
La fille de Cacon ^ 'ScU femine de Siu(e ^ . r : .
Que
THEATRE FRANÇOIS. tx^
Que Tunivers entier s'dj||PnbIe contre toi ;
Au/n bien que ton coeur fubdilera ma foi.
La peine la plus grande & la mieux inventée ,
Donc Tamc d*un mortel puifTe être tourmentée f
Me verra confcrver tout ce que j'ai promis ,
tt']2 ferai pâlir tes plus fiers ennemis.
Ma &rce 8c fa vertu feront honte à leur vice ,
Je trouverai la gloire au milieu du fupptlcc ',
£r toute leur puiffance , & toute leur rigueur ,
N'ébranleront jamais fon ame , ni mon cœur.
(SUJET DE D I DO N. ) C'eft encore idurt
^inc d'hidoire trop connu > & trop traité pour que
e croye devoir donner aucun extrait de cette pièce.
$cuderi y a imité , autant qu'il a pu , le Livre de
l'Enéïde. Voici un des endroits qui m'a paru le plus
paflable : je le rapporte pour donner à mon Lefteur
la fàtisfaâion 4e juger 3 fi l'imitateur a bien réudl^ en
voulant rendre ces beaux vers de Virgile :
j^ec tibi Divn pnrens y generli nec Dardanus auftof.
Perfide > fed duris gênUit te cautibus horrens
aucajùs y Hyrcanœque admorunt uhera tigres*
Kon , parjure , Vénus ne fut jamais ta mère ,
Ni * Dardaa ton ayeul ^ mais le Cau^fe afTL'eiix \
( * Dardanus f )
T*engçndra dans les flancs d*un rocher ténébreux )
Non , je n*en doute pas , ame lâche & traîtrefle ,
Ton enfance a fuccé le lait d*une Tigrelîè :
Non , non ne feignons plui , difons tout en ce jour f
BanniiTons le refpeâ , comme il challe Tamcair ;
A t-il voulu donner pour adoucir ma plainct ,
Seulement une larme , au fujet de ma crainte t
A-c-il fait un foupîr , me voyant fondre en pleurs ?
A-t-il levé les yeux couché de mes douleurs !
Tome IL 1
ijo THEATRE FRANÇOIS,
A-t'il cette pitié qui m'ofl fî nécefkir^
Il ne la connoîc pas , rinfâme , le coHire 3
Il efl né pour trahir , il fuit le changement ,
£t perfide , fe plaît au perfide élément.
(SUJET DE L'AMANT LIBERAL.) Pam^
phile & Léandre , Gentilshommes Siciliens , font tous
deux amoureux de Leonife : le premier fort riche ^
étoit aimé & deftinè à époufer Cette belle : les vœux
4u fécond étoient rejettes. Ces deux rivaux , fe prp-
menant un jour fur la mer avec l'objet de leurs vœux
& Rodolphe (on père , (ont pris par des corfaires
Turcs 9 qui demandent 20000 ducats pour leur ran-
çon. Rien n'étoit plus aifé à Pamphile que de les
donner ; mais fon avarice étoit plus forte que fon
amour ; il veut marchander. Léandre plus généreux
propofe à ces corlâires de vendre (on bien pour faire
cette fomme » & de l'emmené^ avec eux pour cau-
tion. Les Turcs prefïènt Pamphile de fe déterminer;
îl ne peut fe réfoudre à payer une auflS groffe (bmme :
& les corfaires craignant de perdre du tems , parta*
gent leur butin » féparent les efclaves y & arrivent à
Nicofie* Le maître de Leonice la vend à un Juif ^ qui
en devient amoureux > & qui veut en jouir ; elle pré-
fère la mort à fon deshonneur. Celui-ci lui reproche
fa douceur & fes bienfaits ; elle lui répond :
Celui qui fe repent , après un bon ofHce y
£f(ace entièrement la grâce du fer^ice :
Celui qui le reproche , étant peu généreux ,
AbTout d'ingratitude un pauvre mallieureuiE :
TMEATRE FRANÇOIS, 131
£t celui qui ne fen qu*à cau£ê de lui-même ,
Montre qu'il n'aime point , ou fculcnient qu'il s'aime t
Servant par intérêt , il n'oblige que foi j
It je mets en ce rang le bien que je rcçoi.
Cette robe a de Tor , vous me l'avez donnée x.
Mais 9 hélas ! la vi^lime efl ainfî couronnée \
Quand on veut Tégorger » on la pare de fleurs 9
£t ce funefie babit m'a bien coûté des pleurs , &c*
•
Ce Juii^, voyant qu'il ne peut vaincre fon opiniâtre*
té, prend, pour fe venger ^ le parti de la vendre à un
autre. Il la mené à Haii , Bâcha de Nicofie , & lui
propofe de l'acheter. Ce Bâcha avoii avec lui , lors-
qu'on lui montre cette efclave» Hazan i fon prédecef-
feur > & Ibrahim Cadi : toqs trois en deviennent anK>u -
reux : les deux Bâchas impétueux veulent fe battre ;
leCa^i,en Prêtre rufé, employé l'adreffe & l'artifice >
& dit que cette efclave étoit (i belle ^ qu'il faut la de-
ftiner au Grand Seigneur. Nouvelle difpute entre les
deux Bâchas , ils veulent avoir la préférence pour la
lui préfenter j faifant femblant de vouloir les mettre
d'accord , mais en eifet ^ pour fatisfaire fa pafiion ^ le
Cadi propofe de la garder chez lui jufqu'au moment
de (bn départ : les Bâchas y confentent , & le Cadi
l'emmené. Léandre , qui croyoit Léonife périe dans la
iner> & qui ne fongeoit qu'à mourir, étoit eiclave
chez ce même Cadi , avec Rodolphe & Pamphile.
On peut juger de fa fiirprife & de fa joye , lorfqu'il la
revoit vivante; mais l'on doit comprendre auffi fa dou-
leur, lorfqu'il apprend le fort qu'on lui deRine. Il
tS% THEATRE FRANÇOIS.
confie fon hiftoire & fes malheurs à un de Tes cama-
rades d'efclavage » nommé Mahamud > qui > quoique
Chrétien ^ dans le fond du cœur % (è faifoic paffer
pour avoir abjuré fa religion ^ & qui écoit le principal
confident du Cadi. Mahamud , touché des larmes &
du Gncere amour de Léandre i lui promet de le fer-
vir I & de trouver le moyen de le faire fortir de l'ef-
clavage y lui & fa maitrefle. Une feule chofe Tembar^
raffe ; c*e(l de pouvoir lui faire parler à Léonife , pour
concerter les mefures enfemble. Un heureux hafard
1^^ leur procure. Le Cadi , toujours de plus en plus
amoureux > & n'ayant pu fléchir les rigueurs de Léo-
nife 9 les charge de lui parler en fa faveur. Pour
furcroit de bonheur , la femme du Cadi, devenue
amoureufe de Léandre , charge au(fi Léonife fie lui
rendre le pareil office. Léandre & Léonife fe trou- ]
Tent donc enfemble : & le tendre Léandre » toujours
rempli d*amour > mais qui croit que Léonife aime tou-
jours Pamphile ^ lui dit :
f e ne viens point ici , poudS par met àtùti ,
Troubler votre repos, & choqaer vos plai/irs;
Bien que mon coeur brûlé foit toujours dans la flâmob
£i)fin le jugement fait mieux agir mon ame,
£tTans bcifer mes fers, ni rompre ma prifon ,
Je n*ai pas moins d'amour , mais j^ai plus de raifon r
Oui , |*ai vu mes défauts^ i*ai connu vos mérites \
Et comme tous les deux n'avoient point de limites^
£i que mon cœur pourtant vouloit vous adorer *,
Pour «imer faas faillir, faime fans efpétec, &c.
THEATRE FRANÇOIS. 133
Us fe rendent enfiiice mutueHement compte de leur
commiffion : ils fîniiTent par fe jurer une tendreiTe éter-
nelle } & par s'arranger pour faire réuffir le projet et
Mafaamud. En ef&t , par le confeil de cet eiclave ^
le Cidi fait préparer un bâtiment , fous préteste de
conduire lui même Léonife au Grand Seigneur : mais
véritablement pour la conduire dans* une ifle où il
prétendoit en abufer. Dès que fon bâtiment eft prêt 9 il
part avec Léonife 9 n'emmenant avec lui que Rodoi^
phe , Pamphile >. Léandre , Mahaouid ^ & quelques
autres efclaves choifis par ce dernier. Ils abordent
bien-tôt à cette ifle ^ où le Cadi comptoit triompher
des rigueurs de Léonife. Quand. les deux Bâchas in-
ftruits de ion départ 1 font chacun , à Tinfçu l'un de
l'autre, armer un vaiifeau pour le pourfuivre» & lui
enlever l'efclave chrétienne. Ils arrivent tous deux
dans cette iile} où étoit le Cadi ils y débarquent »
luD d'un coté > l'autre de l'autre , fe rencontrent , pé«
i fiétrent leurs deffeins , & fe combattent avec toute la
fureur qu'infpire la jaloufie. Enfin » lorfque Léandre
& Mahamud voyent les deux partis prefque entière-
ment détruits > iisfe jettent au milieu ^ immolent bien-
tôt , à la fureté de Léonife 1 ce qui reftoit des che6
& des combattans ; & pour ne plus avoir aucun fujet
d'inquiétude> ils tuent le Cadi> remontent dans fon bâ«
timent » fe fauvent en Sicile , où Léandre reçoit la
(écompenfe de fa valeur & de fa générofité ^ en époii«
fm & chère Léonife*.
Î34 THEATRE FRANÇOIS:
(SUJET DE L'AMOUR TYRANNIQUE.)
Four l'inteUigence de cet extrait , il faut fçavoir qao
Tiridate^ Roi de Pont, a époufé Ormene^ fille d'O-
rofmane > Roi de Cappadoce ; & qu'il eft devena
éperdôment amoureux de Polixene , femme de Ti-
grane 9 frère d'Ormene : que , pour parvenir à l'avoir
en fa puiflance { il a déclaré la guerre à (on beau- père ;
qu'il fa vaincu dans pluiieurs combats 9 qu'il l'a fait
prifbnnier > & qu'il s'eft emparé de toute la Cappa**
doce > à l'exception de la Ville d'Amarie 1 dont il
forme le (tege > & dans laquelle Tigrane & Polixene
étoient enfermés. II faut fçavoir aufli que la malheureu«
fe Ormene 9 la plus vertueufe des femmes 9 6c qui ai*
me pafConément fon mari , eft inftruite de (on amour
inceftueux. C'eft donc devant les murs d'Amarie qu'eft
établie la fcène de cette Tragi-Comédie. Tiridate en
prefTe vivement les attaques : il méprife les fages con«
ftils de Pharnabafe 9 Seigneur de fa Cour , & qui
avoit été chargé de fon éducation. Il ne fait pas plus
de cas des prières de fon beau-pere, qui veut le faire
rentrer dans fon devoir ; & dans toutes les occa(ion9
il montre (on caraâère farouche & barbare. Enfin
voulant avoir abfoloment en (a puiiTance & Polixene
& Amarie 9 il fait conduire Orofmane fous les ma«
railles de cette Ville ^ & ûrdopne à Phraafte? l'un de
fes Généraux , de demander à parler à Tigrane , Se
de lui dire qu'il a Ordre de poignarder (on père à fes
yeux I n fur le champ il ne rend la Ville. Tigrane
THEATRE FRANÇOIS. 23$
l'héfite pas ; & malgré ce quil a à redouter > la pitié
maternelle l'emporte ^ & il fe détermine à fe rendre.
}rormane le lui défend , & lui ordonne même dft
ombattre pour le falut de fa fetij^me & de la Ville ^
afqu'au dernier Ibopir , & finit par lui dire :
• ...,. Meurs en fils d'Orofmaiie y
Comme je vais mourir en père de Tigrane.
L'ordre de poignarder Orofmane n'étant qu'une
einte » qui n'avoit pas réuffi » Phraafte le ramené aa
[loi f qui fur le champ ordonne un affaut général. Le
âge Pharnabafe veut encore eflayer de le ramener i
a douceur ; mais l'orgueilleux Tiridate ^ fier de fes
uccès 9 devenoit chaque inftant plus farouche ^ & lui
3ît qu'il n'a rien à craindre , & qu'ayant fçu conquérir
cet Empire, il fçaura bien le conferver. Le prudent
Gouverneur lui répond :
• . « . Quand votre valeur étendroit fon empire
Aux plus lointains climats , que Ton ait decouvers>
£r feroit un état de tout cet univers i
Quand ( dis-je ) votre cœur n*auroit plus rien â craindre ^
Si Ton delTein n'eil jufte , il eft toujours à plaindre.
Au milieu des grandeurs , dc$ Thrônes édatans.
Les Princes vicieux ne font jamais contents :
L*or , la pourpre , le dais , le fceptrs & la couronne^
Ni la garde qui veille , & qui les environne,
Ke fçauroient empêcher que les jufles remords ,
rlus cruels mille fois que les plus dures morts ,
Au milieu de la pourpre , au milieu de la gloire ,
Ne leur foient un bourceau , logés^ns la mémoire»
l'image de teiir crime, épouventable à voir,
Ss préfcatc à leurs yeux ,.aycc le défcrpoir j
*3C THEATRE FRANÇOIS.
£c tffî , dont la grandeur nous paroïc fouveraine ,
Sur Ty voire 6c fur l'or fc fent mettre à la gêne j ;
Son efpric efl troublé d'une noire vapeur :
Il a tout ofFenfé , tout aufli lui fait peur ,
£c fou thrône deviei^t pour punir fa malice ,
Le fuperbc échafFaut de fon fccret fupplic« r
Ah ! Seigneur , la raifon vous parle par ilia voix y
Elle qui doit régner où régnent les grands Rois.
Tiridate méprîfe de fi fages aviç» & lui défend de
lui en donner davantage. L'afTaut eft donné ^ & la
Place eft prife ; mais Tigrane & Polixcne fe fauvent :
& Tigrane, cédant aux craintes & aux larmes de Iba
époufe, çonfent à lui donner la mort qu'elle defire, &
qu'elle lui demande g il lui plonge un poignard dans
le fein , jette (on corps dans l'eau , & ne fe perce pas
lui-même pour aller imqooler à fa vengeance le bar-
bare, qui Ta réduit à cette cruelle néceflîcé. L'amour
féconde rarement les defleins fanguinaires : & la main
tremblante deTamonreux Tlgrane> n'a voit porta qu'une
légère bleffure à l'objet de toute fa tendreffe. Le bruit,
que fon corps avoit fait en tombant dans l'eau, avoit
fait venir du fecours, & on l'en avoit retirée , & mi(è
dans une tente voifine ; mais le tyran ignoroît toutes
ces circonftances ^ & ne l'ayant pas trouvée dans la
Ville , fe défoloit d'avoir ainfi perdu l'objet de tous
fes crimes. Phraafte la lui amené ; Tiridate au com-
ble de fes voçux , lui déclare fon amour ; elle le re-
jette avec hauteur , & le quitte avec mépris* Cepen-
dant on vient l'avertir que Tigrane eft dans fon ç^irap,
r
THEATRE FRANÇOIS. 137
il le ÙLit aufli-tôc arrêter & charger de fers. Ce Prin*
ce infortuné , au milieu des malheurs qui l'accablent p
goûte cependant un moment de confolation. Il ap-
prend que Polixene eft en vie. Il lui écrit la lettre la
plus tendre I lui rappelle qu'il l'a (èrvie en pareil cas»
& lui demande > comme la plus précieufe preuve de
Ton amour » de lui envoyer du poifon , pour lui faire
éviter l'horreur de mourir par l'ordre du tyran* Il
finit fa lettre par ces vers : .
Prcrc-moî ton fecours , pour terminer mes peines | -
Trouve moi ce poifon qui^me délivrera :
Si je n*écois chargé de chaînes,
«
J'irois baifer la main qui me le donnera*
Après avoir lu cette lettre ^ elle fe livre à (es réfle-
xions 9 & dit :
Trîfte , defefperée , înterdite , & confufe ;
Honneur , tu veux un don que l'amour ce reEufe.
La mort 9 quelque confeil que tu puifTes m'offrir »
£(l plus dure à donner qu'elle n'eil à fou^ir :
£c de tous les grands maux , honneur , le mal extrême
î.(i d'en faire c.ndurer à l*ob|et que Ton aime.
Cependant à la fin elle fe détermine , & lui envoyé
ce poifon qu'il defire : mais Tiridate rencontre celui
qu'elle en avoit chargé» l'arrête , s'empare de la Iet«-
tre & du poifon , & s'imagine que c'ef): à lui qu'on le
deflinoit. Alors n'écoutant plus que fa fureur » il prend
le parti de livrer au:s fupplices» & Ton beau-pere» &
i
J38 THEATRE FRANÇOIS.
fon beau-frere, & fa femme, & fa belle-fœur (aprè^
avoir cependant joui auparavant de cette dernière. )
Quand tout*à-côup on vient l'avertir ^ que Troilus»
fils du Roi de Phrigie , & frère de Polixene , Tient à
la tète d'une armée de Phrigiens , attaquer la fienne.
Il envoyé Phraalle fe mettre à la tète de ks troupes ,
& lui ordonne de lui amener Troilus chargé de fers.
Alais Phraafîe » au lieu de combattre Troilus , lui rend
au contraire les armes : il croit fervir fon maitret en
mettant un obftacle au deflein qu'il avoit de commet-
tre tant de crimes. En effet , ce fuperbe & cruel vain-
queur 9 (é trouve lui-même à la merci de (es ennemis.
Alors la généreufe Ormene > qui conferve toujours
ion cara&ère , oublie les mépris dont Tiridate l'a voit
accablée dans la profpérité. Elle ne (bnge qu'à fon
malheur préfent , & fe jette aAc pied$ de fon père &
de fon frère, pour leur demander la vie de fon époux.
Orofmane & Tigrane , ne peuvent réfifîer à ks lar-
mes & à fa vertu , pardonnent à Tiridate , & la pièce
finit par la plus parfaite reconciliation.
Ceft dans cette Tragi- Comédie , comme je J'ai déjà
dit dans mon difcours préliminaire , que fut in-
troduite la régie des vingt -quatre heures. L'uni-
té y eft auffi obfervé. EUe eut le plus grand fuccès,,
& on la regarda comme un vrai chef-d'œuvre. Le
Cardinal de Richelieu , après l'avoir vu repréfenter ,
dit: cet ouvrage n'a pas béfoin d'apologie, & il fe
défend affez de lui-m&me. Sarrazin , lorfqu'on l'im^
THEATRE FRANÇOIS. 139
prima 9 mie à la tète un difcoors i où il cherche à
prouver les grandes beautés de cette pièce > & lea
grands talens de Ton Auteur.
(SUJET D'EUDOXE.) Certainement Péloquen-:
ce de Sarrazin^ & le crédit du Cardinal de Riche-
lieu , auroiene faits de vains eflbrts pour (aîre réuflir
cette Tragi - Comédie > qui eft fans aâiôh s dont le
fujet eft médiocre > & qui eft mal écrite. Cette Ëu-
doxe avoit d'abord époulë l'Empereur Valentinien »
qui avoit été tué par Maxime. Celui • ci s'étoit em-
paré de Ton Trône , & avoit forcé fa veuve à l'épou-
fer. Elle avoit deux filles de fon premier mariage %
Tune nommée comme elle , l'autre Fi^cidie. Pour
venger la mort de Valentinien , Eudoxe avoit appelle
à fon fecours Genferic , Roi des Vandales , qui étoit
fur le champ accouru > qui avoit tué Maxime 9 (âccagé
Rome > & emmené captives l'Impératrice & (es deux
filles. Dès fon enfance , Eudoxe aimoit & étoit ^imée
d'un Seigneur Romain , nommé Urlàce : Thrafimond 1
fils de Genferic, étoit devenu amoureux de la jeune
Eudoxe » & Placidie étoit aimée par Olimbre. Tous'
ces difFérens amours , quoique réciproques > ne font
nul effet dans la pièce. Le feul qui puiffe fixer l'at-
mention » eft celui de Genferic pour l'Impératrice > non
par fà galanterie , mais parce que voyant qu'il ne peut
la toucher , il veut , comme un vrai Vandale > la violer
à tout moment. C'en étoit même fait y fi cette Prin-
cefle n'a voit trouvé le fecret de mettre le feu à la
140 THEATRE FRANÇOIS.
chambre , où le crime allott fe commettre. Il eft vrai
qu'on ne peut pas trop comprendre , comment elle
peut y réuflir. Mais ce qui tfk peut-être encore plus
difficile à imaginer , c'eft que Genferic qui la voit au
milieu des fiâmes i au lieu de la fecourir > la quitte
pour aller de toutes Tes forces crier > ai^ feu , au feu ;
c*eft pourtant ce qui arrive. Et comme tout eft incom^
préhenfible dans cette pièce , Eudoxe oublie que c'eft
elle qui a mis le feu dans le Palais , pour y périr avec
toute fa famille ; & s'emprefie de defcendre par une
fenêtre avec fes filles , pour fe (auver de l'incendie*
En même-tems» fans aucun motif, Genferic rentre
dans ces débris embrafés , y apperçoit quelques olTe-
mens > ne doute pas que ce ne foit les précieux reftes
de l'Impératrice 9 les fait porter (bus un dais > leur fait
rendre les plus grands honneurs » & commet mille
extravagances. Enfin un galant -homme furvient, &
le vovant plongé dans la deuleur & dans la ftenefie»
il lui demande , fi en effet , fon repentir eft bien fin*
cere. Genferic protefte qu'il eft dans le plus violent
défefpoir , qu'il fent toute l'horreur de (k conduite ,
& qu'il eft bien (ur que , fi par un événement impof-
fible l'Impératrice s'ofFroit à fa vue > il n'auroît plus
pour elle que des fentimens de refpeft &.d'amitié«
Puifque cela eft ainfi , dit cet honnête perlbonage, la
voilà. En efFe|i , l'Impératrice paroit : Genferic n'en
eft pas trop étonné ; il lui demande pardon. Et pour
ne pas perdre de tems> dans Tûiftant même > il lui
THEATRE FRANÇOIS. 141
fait épouièr Urface; il unit aulfi la jeune Eudoxe
avec Trafimond > & Placidie avec Olimbre ; & tous
fe réunifient , pour lui dire qu'il eft le meilleur hom-
ne du monde.
fSU JET D'ANDROMIRE. ) Cette Princeffe,
Reine de Sicile 9 partagç les feux de Cleonime $
Prince d'Agrigence 9 Général de fes armées» & Thon*
me le plus aimable & le plus valeureux* Arbas, Prin-
ce de Meffine 9 aimoit depuis long-tems , & étoic ai-
mé de Policrice^ fœur de la Reine : mais il cède
tout-à-coup à Ton ambition » & fe déclare amant d'An»
dromire > & prétend à fa main & à la Couronne. Ju«
gurtha f Roi de Numidie , avoiç dé(iré unir fon fils
Siphax avec la Reine ; mais fidèle à fa tendrefle. elle
avoit refufé ce mariage. Jugurtha > pour s'en venger >
étoit entré en Sicile > à la tête d'une armée formida-
ble 9 s'étoit emparé du Royaume ; & il ne refioit plus
à la Reine que la feule Ville de Siracufe , dont il
faifbit lefiege. Dans unefortie, Cleonime avoit ^il
Siphax prifonnier > l'a voit envoyé à la Reine f & s'é-
toit bien-tôt lié avec lui de l'amitié la plus tendre. Ce
Prince n'a voit fenti que du refpeâ pour Andromire;
mais étoit devenu paflSooément amoureux de Strato-
nice, fà. plus jeune iœur, & lui avoit plû. Jugurtha
envoyé des Ambafladeurs à Siracufe , pour traiter l'é-
change de fon fils. Andromire fait afiembler ion con-
14% THE ATRE FRANÇOIS.
feil 9 Arbas s'oppofe à ce qu'on rende la liberté à Si«
phax. Cleonime 9 aa contraire , prefle la Reine de la
lui accorder 9 & en mème-tems de le renvoyer làos
rançon. La Reine préfère avec plaifîr cet avis géné-
reux 9 & fait fur le champ conduire Siphax dans le
camp des Numides. Arbas > furieux des préférences
que la Reine accorde fans cefTe à fon rival > jure de
s'çn venger. J^Q effet y h nuit même , Cleoninse or-
donne une fortîe , ils fe mettent tous deux à la tète
des troupes ; mais à force d'argent , Arbas avoir ré-
duit celles qui combattoient fous les ordres de Cleo-
nime ; & à la première attaque elles Tabandonnent au
milieu des ennemis » qui le font prifonnier. On le con-
duic à Jugurtha ; & Siphax voyant (on ami dans les
fers > demande fa liberté à (on père 9 & lui rappelle
que c*eft ce même Cleonime , qui vient de lui rendre
ion fik. Le Roi , qui fent bien que Siracufe y privée
du fecours de ce bérosj doit bien- tôt tomber en fa
puifi^nce > défend à (bu fils de lui en parler davanta-
ge , & le charge même de la garde du prifonnier. Le
Prince » au défefpoir de fe voir forcé de trahir > ou foa
devoir 9 ou Tamitié 9 a un entretien avec (on ami» où
brillent dans tout leur éclat la vertu & la générofité;
& le Prince finit par l'aiTurer que 9 dôt-il lui en coûer
la vie 9 il le mectroit bien-tôt à portée d'empêcher fon
rival de profiter de fon abfence. Cependant la Reine
apprend le malheur arrivé à Cleonime» Elle accufe
THEATRE FRANÇOIS. 143
Àrbas d'y avoir contribue; celui-ci fe jufllfie > lui
rend compte de l'aftion , & lui demande ce qu'il au-
roic pu faire davantage. La Reine lui répond :
Y mourir.
Il falloir s'enterrer , évitant rinfamie ,
Dans les retranchemens de Tarmée ennemie :
' Ceft là que le trépas étoit & jufle , 6c beau ,
£c qu'un homme de coeur auroit fait foi\ tombeau*
Enfbite la Reine fait le ferment le plus folemnel $
d'accorder 9 fans réferve, tout ce que lui deman(|eroit:
cel«i qui lui ameneroic Cleonimç. Arbas fort à Tin-
ftant même de la Ville > à la tête d'un gros détache-
ment y attaque le quartier où j'on gardoit (on rival ^
le délivre , le ramenie à la Reine > lui rappelle ion fer-
ment , & lui demande fa main. Andromire fe livre
au défefpoir > mais ne peut le refufer. Elle fe retire
un moment chez elle f demande du poilbn à ion Mé-
decin f l'avale avec avidité f revient trouver Tes fœurs ,
& déclare devant tout le monde > que» pour prouver
fa tendreiTe à Cleonîme , & pour éviter l'horreur d'ê-
tre à Arbas , elle vient de s'empoifonner, Auffi-tôt
Cleonime veut fe tuer ;* la Reine le lui défend : Arbas
y fe laiife attendrir par un ipedtacle auflS touchant > &
1 montre le 4^1us iincere repentir de tout ce qu'il a fait.
' En même-tems on vient les avertir, que les Numides
font maîtres de la Ville. Jugurtha paroît > non en en-
nemi ; mais au contraire dans le defTein de faire le
bonheur général. Vaincu par les larmes > la vertu , &
144 THEATRE FRANÇOIS.
l'amour de fon fils , il s'écoic déterminé à faire tout Cô
qu'il defiroic. Mais quelle eft (a furprife, quand il ap-
prend que la Reine va mourir! Il envoyé' chercher le
Médecin 7 qui annonce qu'on n'a rien à craindre pour
les jours de la Reine : que lorfqu'elle lui Savoie de-
mandé du poifon > s'étanc bien apperçu du trouble
qui déchiroit Ton ame » au lieu de lui en avoir don-
né» il ne lui avoit préfenté qu'un breuvage indifFé«
rent. Alors Arbas fe jette à Tes genoux > lui demande
pardon , l'aflurè qu'il ne veut plus s'oppofer à fon bon-
hear» & lui rend fa' parole. Il fe tourne enfuitevers
Policrite y avoue fes torts avec honte , & lui demande
grâce. Enfin le mariage d'Andromire avec Cleonimei
de Stratonice avec Siphax > & de Policrite avec Ar-
bas > rend tout le monde content.
(SUJET D'IQilAHIM. ) Juftinîan Paleologue',
ayant eu dans une bataille le bonheur de fauver (a
vie à l'Empereur Soliman , d'efclave il étoit devenu
Grand Vifir , & favori du Sultan. Pour lui plaire, il
avoit confenti (fans cependant renoncer à fa Religion)
à prendre l'habillement Turc> & le nom d'Ibrahim.
Chaque jour fa faveur augmentoit » ainfi que fon fin-
cere attachement pour le Sultan. Cepeniftnt fouvent
on le voyoit trifte & rêveur : & l'Empereur ^ inquiet
du chagrin de fon ami, exige de fon amitié de lui
en confier le motif. Ibrahim ne peut fe refufer aux
tendres follicitations de fon maître 9 & lui avoue que,
lorfqu'ii
THEATRE FRANÇOIS. 14$
torfqa'il fat pris fur la mer 9 il aimoît & écoit aimé
dllabelle» PrincefTe de Monaco; & que le tourment
de ne plus voir l'objet de toute fa tendrefle le ploii-
geoic quelquefois dans une douleur , qu'il n'étoit pas
le mairre de tracher. Sans lui rien dire , Soliman en-
voyé auffi-tôt fes Galcres pour enlever Kabelle ^ & la
préfente à fon £ivori. Ceft dans cette pofition 9 c]ue
commence la pièce. Il faut cependant fçavoir encore
que 9 peu après l'arrivée d'Ifabelle , Ibrahim étoit allé
fe mettre à la tète des Turcs y pour combattre les
Ferfans ; & que I^oxelane -, Sultane âvorite » jaloufe
de la grande autorité d'Ibrahim 9 cherchoic à le per«
dre. Elle en trouve bien-tôt le moyen ; pendant l'at>
fence du Viiir ^ Soliman devient éperdûment amou-
reux d'Ifabelle ; & malgré les combats que font dans
fon cœur l'amitié & la reconnoidànce , l'amour de-
meure le plus fort. Il découvre (à paffi^n à Ifàbelle,
qui 9 confiante à (à tendreffe pour JuRinian , rejette les
vœux du Sultan. Solimaa étoit vertueux; & il au*- ^
roic » fans doute y triomphé de (on amour , fi llùftan »
créature deRoxelane» & qui fçavoit combien Ibra-
him lui étoit odieux , n'avoit cru trouver un nK)yen
fur de le perdre 9 en flattant l'amour de rEmpereur.
En effet t il lui promet un prompt fuccès, fie l'empê-
che enfin d'écouter la voix de la vertu* Ce Monarque
revoit I&belle , & veut être obéît. Elle préfère la
ixK>rt , fie même la defire. Tout ne refpiroit en ce mO'
ment que trouble fie qu'mtrigue dans le Serrail^ lort
Tome IL IK.
14^ THÉ A TRE FR A NÇO IS.
que toutà-coup Ibrahim revient vainqueur dés Pef-
fans , donc il apporte le Sceptre & la Couronne aux
pieds de Soliman. L'Empereur , honteux d'avoir fongé
à trahir Ton ami > pendant qu'il lui foumet un Empire,
fc livre encore aux douceurs de Pamitié - l'embrafle 5
& jugeant de fon impatience , l'envoyé trouver If»-
belle. Il fait plus ; il veut abrolument renoncer à cette
beauté y quand le traître Ruftan vient encore par Tes
pernicieux confeils lui ravir l'honneur d'avoir écouté
d'audi judes remords. Cependant Ifabelle apprend à
Ibrahim la funede paflîon du Sultan. Ils prennent le
parti de s'enfuir enfemble : mais la cruelle Roxelane
avoit trop d'efpions autour d'eux y pour n'être pas in^
ilruite de toutes leurs aâions : & au moment même
qu'ils fortent du Serrait > elle vient en avertir l'Empe-
reur f qui r cédant à fa douleur & à fa colère , envoyé
tous les Janiffaires après eux. On les rencontre : Ibra-
him fe met en défenfe ; mais il jette bientôt fes ap-
mes aux pieds de fes ennemis > lorfqu'on le menace,
$'il ne fe rend pas j d'immoler Ifabelle. On le charge
de fers.) & on le conduit au Serrail. Ruftan , qui avoit
été chargé du foin de l'arrêter , vient rendre compte
au Sultan du. fuccès de (on entreprife ; & pour aug-
menter encore fa colère , fuppofe qu'il a découvert
que l'ingrat Ibrahim alloit fe mettre à la tête de fes
troupes, &les révolter contre lui. Roxelane exagère
l'énormité de ce crime , & demande la mort du cou-
pable. SoUmia.JTe; rappelle a^ors qu'il avoit juré à
THEATRE FRANÇÙlS. 14^
Ibfahim » lorfquUl le 6t Grand Viûr , <]iie , quelque
chofê.qui arrivât, tant qu'il feroit envie, de ne jamais
le condamner à mort. Roxelane envoyé fur le champ
chercher le Mufti, qui étoic auffi une de fes créatu-
res, pdur tâcher de relever TEmpereur de fon fer-
ment. Il arrive; il le loue du refpeft qu'il conferve
pour la ikinteté d'un ferment : mais il trouve un moyen
de 1 éluder : il lui dit que , le fommeil ëtant limage de
la mort , il pouvoit profiter de cet inAant pour faire
périr ie coupable* L'Empereur adopte ce funefte
canfeil , & ordonne à Rufian > dès qu'il. le verroit en-
dormi, de livrer Ibrahim entre les mains des muets.
Il fe couche : Ruftan attend avec impatience le mo^
ment > ou il verra fermer les yeux xlu Sultan. II croit
même s'en être apperçu , & veut aller fervir la fureur
de Roxelane : mais Soliman l'arrête. Sans ceffe com-
battu par (es remords , il ne pouvoit goûter les dou-
ceurs du repos; ramitié, Tamour & la reconnoiffan-
ce fe peignoîent alternativement à fes yeux. Enfin il
croit entendre la voix même de Mahomet, lui repro-
cher le crime qu'il veut commettre. Il n'héfite plus :
il envoyé chercher Ibrahim & Ifabelle, s'avoue cou-
pable , les prie de lui pardonner , & de lui accorder
leur amitié. Mais craignant encore les charmes trop
pmiTans de la Princefle de Monaco , il permet à Ibra-
him de l'emmener en Italie , & il les comble tous
deux de préfens. On vient en raême-téms lui annoncer-
K ij
14S THEATRE FRANÇOIS.
î
que le Mufti & Ruftan avoient été déchirés par le
peuple 9 6c que la Sultane écoit morte de fureur.
Quoique je n'aye pas trouvé dans cette Tragédie»
une tirade de vers digne d'être citée , elle eft cepen-
dant bien écrite : la conduite en eft bonne» & les ca-
raâères font (butenus. Pour ne point allonger cet ex-
trait y je n'ai pas parlé de deux perfonnages vertueux*
Celui d'Aftçrie , fille du Sultan » qui > quoiqu'elle aime
Ibrahim , ferc toujours I&belle , & lui facrifie fon
amour; & celui du brave Achomat, amoureux d'A-
fierie > à qui l'on perfuade que Soliman veut la don-
ner à Ibrahim ; & qui > lorfqu'il voit ce Yifîr dans
l'infortune ^ vient demander fa grâce à l'Empereur %
dûMl lui en coûter l'objet de fon amour.
(SUJET D'AXIANE.) Leontidas, père d'A-
xiane ^ avoit été injuftement chaflé de Lesbos ^ dont
il et oit Souverain. Aigri par ce malheur y il s'étoit fait
cbef des pirates »qui défoloient les mers, & avoit em«
mené fa fille avec lui. Un jour dans un combat , où
il eft vainqueur % il fait prifonnier Harmocrate , fils de
Diophantç , Roi de Crète. Ce Prince devient bien-
tôt amoureux d'Axiane y & en eft aimé. Enfin il cher-
che à lui perfiiader de (àifîr upe occaiion , où elle pour-
voit quitter les vaifteaux de Leontidas , & de le fui-
vre en Crète > où il Taffure que (on père fera enchanté
de la recevoir : elle héfite quelque tems. A la fin i
vaincue par l'amour y par le defeipoir de voir chaque
THEATRE FRANÇOIS. i4§
Inftant broUer aux fers de fon amant > & par Thor-
reur d'être toojours témoin des cruautés qu'exer»
çoient les pirates 9 elle fe détermine à le fuivre». Ils
partent & abordent à Lemnps» où regnoit Ârcbidame ^
frère de Diophante ; & Harmocrate apprend » avec
Cranfport^ cjue fon père y étoit depuis quelques jours ^
Il lai préfente Axiane, il lui vaotejes vertus de cette
PrincefTe ; il lui dit que c'eft à elle à qui il doit la
tibertée : enfin il lui avoue leur amour réciproques
Toutes ces raifons n'empêchent pas Diophante de les-
accabler tous deux du poids de (k colère» & de dire
à Harmocrate que la fuite eft une aâion lâche & hon-^
teufe. Axiane » loin de fe révolter contre la dureté^
du Roi de Crète > lui parle avec une douceur & une
vertu fi refpeâable, qu'elle finit par l'attendrir • &
qu'il appl^dit au choix qtfavoit fait fon fils. Cepen-
dant Leontidas , furieux de la fuite d'Axiane ^ Se t^
chant qu'elle s'étoit réfugiée à Lemnos > h\t débai^
quer Tes troupes ^ pour prendre cette Ville > avoir
Axiane en fa puiflance^ & la punk févecement. Le^
Roi de Crête 9 avec fon fîrere & fon fils , vont à la
tête de leur armée pour le combattre ; la bataille s'en-
gage ; plufieurs fois Harmocrate fauve la, vie à (bo.
père , & à celui de fa maitrefle» Mais.> ajrant appris:
qu'une troupe de corikires mardboient pour enlevée
Axiane > il vole au-devant d'eux, & les défait. Pen-
dant fot^abfence, Leontidas, étoit demeuré vainqueur^
avoit fait Diophante prifonnier ^ & l'avoic emmàn4
r^ô THE^ATRE FRANÇOIS.
<bna Tes vaHr4.aax. Pea de tetas après , Leemttdas hà
eev^ojse ua %t (e^ Capitaines , pour tm propoPef fé*»
cËaogff d'ÂoâaôieL. contre Diophance ; & en cas de re-
fus, poar l'affurer de la prochaine mort de fon père.
Haj^mocrate ne peat fe déternoiner> ni à rendre Âxia^
tïQ > ni à laifler périr Diophaôte. Enfin il prend le par«
ti> à l'in%u de fa makrefle , d'aHer fe fendre lai-même,
à LeoQtidaSit & de reprendre fes fers> pour rompre
ceux de fon père. H part. D'uîn awijre côté, Axiane»
q^ioiqu'elle n'ignore pas le fort que lui deftinoit Leon«
tidas, va trouver ATchidame, lui amande en grâce
de lut procurer les moyens d'aller ifrou ver fon père,
j&bi prouve que «'eft b feule reffource qui leur refte.
Archidame s'oppofe^ quelque tems à un projet qu'il
croit: devoir lui être fatal : fnais vaincu par fes rai-
ibnsi; de plus, persuadé que rien ne peut réHfter à
à fés charmes & à fa vertu > il lui donne un efquif.
Elle pecommande ffu'on cache, avec le plus grand
ft>}n ; (bfl départ â-Hkrmocrate. Elle s'embarque , &
adcive au vai(lba'tt de ion père. Mais quelle eft &
& ftirprife & fa doafcur , Ibrfque le premier objet qui
fèappe fes «yeux' , eft Harmocrate lui-même. Elle fe
jîgtte a«x genou» de Ton père , qui demeure infle-
s^ibte 9 & qui ne patoJt pa« même ému de l'aôion
gét^reufe (te ces deux amans. Il cbnfent à rendre
te liberté à Diophante ; mais il veut garder fon an-
cien prifonnier , & fiiire mourir fa fiHe. Il fe paflt
alors un combat de tendrefle > entre Harmocrate &
THEATRE FRANÇÇIS. tSt
Axiane, qui veulent mourir l'un pour l'autre 9 fi toa«
diant 9 que la &rouche Leontidas en eft enfin atten-
dri. Il rompt lui même les fers du Roi de Crète > c6n«
fent à Tunion de fa fille avec le fils de ce Monarque :
& pour la rendre plus digne de lui , il demande des
troupes pour aller reconquérir Tifle de Lesbos, & la
lui donner pour dot» Ils partent tous enfemble pour
cette expédition.
J'ignore fi c'eft parce que cette Tragî Comédie eft
écrite en profi; ; mais*il eft difficile d'en trouver une
plus froide $ quoique le (ùjet en (bit fort intéredant.
(SUJET D'ARMENIUS.) Dans une longue Pré-
face > que l'on trouve à la tête de cette pièce , Scu-
deri après avoir loué > fans modefiie 9 les quinze dra-
mes qui précédent celui ci ^ dit : » Enfin , Leâeur ^
):» il ne me reôe plus, qu'à nommer le grand Arminius»
» que je vous préfente » & par lequel je prétens finir
yy un fi long & laborieux travail : c'ed mon chef-
» d'oeuvre , que je vous préfente efl cette pièce, &
yi l'ouvrage le plus achevé qui foit jamais parti de ma
m plome ; car foit pour la fable , pour les mœurs 9 pour
3» les (entimensy & pour la verfijScation , il eiit certain
» que je ne fis jamais rien de plus jufte > de plus
» ^rand ^ ni de plus beau; & que fi mes labeurs
>3 avoient pu mériter une couronne, je ne l'attendroîs
3D que de ce dernier, &c. * J'ignore fi les Ledeurs de
ibti tems trouvèrent cp^i eût raiibn d'adjuger ainfi
la palme à cette Tragi- Comédie. Mais }e fuis per-
fuadé qu'on ne feroit pas aujourd'hui de /on avis :
c'eft même à mon gré une de (es moindres pièces »
& où l'on trouve le plus de mauvais vers , & de &uf-
E
i5x THEATRE FRANÇOIS.
fes pepfées ; les caraâères font petits , & ne répon*^
dent jamais à la célébrité des perfonnages qu'ils re-
préfencent. Ce (l en un mot, !a preuve certaine de
a décadence d'un homme médiocre. Arminius vient
dans le camp de Germanicus , lui redemander baflc'
jnent Hercinîe fa femme , & fille de Segefte , Prince
Allemand. Ce Segefte > pour fe venger d* Arminius»
qui avoit époufé Hercinîe malgré lui» avoit embraiTé
le parti des Romains > avec un jeune étourdi , nom*
me Flavian, qui étoit ftere du héros des Gaules. Il
cft néceffaire de fçavoir que Segefte avoit 4^berd
deCré Arminius pour fon gendre y qui de fbn côté
ibuhaitoic fort ce mariage » & qui même avoit envoyé
Ion Grere Flavian» pour régler les conditions. Mais»
Flaylan » dès qu'il eut vu la Princeffe, en étoIt
devenu tell^ement amoureux , qu'oubliant fon devoir y
il n'avoit travaillé qu'à rendre Arminius odieux à Se*
gefte & à Hcrcinie , quil y avoit réuffi ; & qu'à force
de foins fie d'intrigues» il étoit parvenu à fi bien fé*
duire le père & la fille » qu*il avoit enfin obtenu pour
lui la main de la Princefle. Ceft au moment même
que cet hymen alloit fe célébrer » qu'Arminius> inftruit
de la trahifon de fon frère, envoyé des Ambaflà'
deurs au Prince Allemand , qui ne veut pas les écoa«
ter; & que voyant qu'il n'a plus d'autres reflburces»
prend le parti & réuflit à enlever Hercinie , à qui il
prouve bien-tôt (on innocence fc fa tendrefte » &
qu'il l'époufe. Peu de tems après , un parti de
ilomains 8*étanc emparé d'une petite Ville où il Ta*
THEATRE FR^ANÇOIS. 153
\ok lailTée 9 l'a voit emmenée dans leur camp. Il faut
encore fçavoir qu'il y avoit auffi dans le même camp>
une autre PrincefTe nommée Segîmire > (Ille d'Inguio-
rnere» Prince puiflanc parmi les Allemands. Cette Prin*
cefTe aimoi t Flavian» & en avoit été aimée. Voilà ceque
j'ai cru indifpenfable de fçavoir , pour Tintelligence
de cette pièce. Arminius vient donc trouver Germa-
nicus ; lui offre (es tréfors pour la rançon d'Hercinie i
& &it un pompeux étalage de fa grandeur d'ame y
de fes vertus & de. (on amour pour la fille de Sege«.
fte. Germanicus fe laiiTe féduire , & eft prêt à lui
rendre (on épou(è j lor(qu'Agrippine lui repréfente
tout ce qu'il a à redouter de l'efgrit (bupçonneux de
Tibère. Germanicus écoute fa femme avec complai*
fance > & fuit fes avis. Il fait toutes les honnêtetés
poflibles au valeureux Gaulois ; mais il lui refu(è Hef«
cinie. Arminius , au defefpoir , employé alors tous les
plus petits moyens pour tâcher de la lui faire rendre,
il va implorer l'ancienne amitié de Segefie, qui le
rebute groflîérement. Il va trouver fon frère , qui né
le traite pas mieux > & avec lequel il finit par fe bat-
tre. Enfin le dénouement de ce 4hef-d*œuvre s'opère
par l'arrivée de Germanicus 9 qui > ayant entendu le
bruit des combattans, fort de fa tente, & trouve les
deux frères Tépée à la main , & prêts à s*entr'ègor'*
ger. Il veut punir Flavian , d'avoir ofé violer l'holpi-
talité jurée à Arminius : mais ce héros » Herciniey la
tendre & délaifTée Seginùre 9 & même Agrippine fe
J54 THEATRE FRANÇOIS.
joignent enfemble f pour demander fa grâce. Germa-
nicus la leur accorde » rend Hernicie au généreux
Arminius > & (ait époufer Segimire au valeureux Fla«
vian. Ainfi tout le inonde eft ou paroit content.
J'ai déjà dit qu*en tout , cette pièce étoit mal ver
fifiée. Voici cependant une tirade , qui, je crois, pour-
ra plaire : c'eft dans la fcène où les deux frères fe
souvent enfemble. Arminius reproche à Flavian fa
perfidie , & lui demande quel motif il peut alléguer
pour fa jufiificatipn. Il lui répond :
L'amour eft un cfFct qui n*cft pas volontaire :
l'heure , Poccafîan , la caufe « le moment »
L'obicc , la volonté , rien n'agit librement.
C'efl un ordre fecret de^hofcs enchaînées ,
Qui fulvent feulement la loi de( deflinées ,
Qu'on ne peut empêcher, & qui, malgré nos foins.
Arrivent à leur fin , lorsqu'on le croit le moins.
On attribue encore à cet Auteur, LucIDAN,oa
le Héraut d'armes, en 1639. ^ AnnibaU Tragédie.
1631.
JEAN DE RofROU^ né à Dreux, le 19 Août
Ï609. Lieutenant Particulier de cette Ville ^ où il
mourujt d'une fièvre pourpreufe le 27 Juin 16 fo.
UHIPOCONDRIAQUE,ou LEMORT
AMOUREUX » Tragi-Coraédie , avec un argument;^
dédiée à Monfeigneur le Comté de SoiiTons* PaeiSi
Touflaint Quinct , 1 63 1 . ifl-8°.
THE ATRE FRANÇOIS. J^S
CLEAGENOR ET DORISTÉE, Tragî-Comé-
die » avec un argument > dédiée à M. le Cocace de
Belin. Paris , TouiTaint Quinet ,
LA BAGUE M L'OUBLI , Comédie eh cinq
aftesj en vers» avec un argument, dédiée au Roi»
Paris, François Targa, 1635.. m 8^.
LA DIANE, Comédie en cinq a^Aes, en verSp
avec un argument, dédiée à M» le Comte de Fief<{ue^«
Paris, François Targa» 16^5. i;z.8®.
LA CELIMENE, Comédie en cinq aftes , eH
vers , dédiée à M. le Comte de Nançay. Paris 9 Aur
toiûe de Sommaville, 1636. m 4^.
L'HEUREUSE CONSTANCE , Tragî-Comédie^
dédiée à la Reine. Paris , Touffaint Quinet , 16 ^6.
HERCULE MOURANT, ou LA DEJANIRE,
Tragédie , dédiée à M* le Cardinal de Richelieu-»
Paris , Touflainc Quinet, 1636.2/1-4^.
LES OCCASIONS PERDUES, Tragî- Corné-
die, dédiëe à Mad. la Comteffe de Soifibns. Paris >
Touflaint Quinet, 163^6, w-4^.
LES MENECHMES, Comédie en cmq aûes,
en vers, dédiée à M« le Comte de Belin» P ari s^
Antoine de Sommaville, 1636. i/z<4^
o
L'HEUREUX NAUFRAGErTK^Comédie.
Paris > Antoine de Sominavilte > *^6.JT* ù>-4*«
t
1
j£6 THEATRE JtRANÇOiiS.
LA CELIANE, Tragi- Comédie , dédiée à Mai
dame la Marquife de Pezé, Paris , Touflaint Qui-
Det^ 1637* '^-4^*
LA PELERINE AMOUREUSE , ou L'ANGE-
LIQUE , Tragi-Gomédie. Paris , Antoine de Som-
inaville> 16 37* 1/1-4^.
LE FILANDRE , Comédie en cinq aftes , en
yers. Paris » Antoine de Somma ville > i6)7.i/i-4^«
AGESILAN DE COLCHOS, Tragi-Comédie ,
dédiée à Madame de Combalet. Paris , Antoine de
Sommavillei i6 37.i/z*4^«
* .
L'INNOCENTE INFIDÉLITÉ, Tragî-Comé-
die. Paris , Antoine de Sommaville^ <^37* ''^ 4°*
LA CLORINDE » Comédie en cinq aftes , en
vers. Paris y Antoine de SommavilIe> 16^7. in.j^^.
AMELIE, Tragi-Comédie , dédiée à Madame la
Princefle Marie. Paris» Antoine dp Sommaville ,
x5}8. î/z-4"*
/ LES SOSIES , Comédie en cinq aftes, en vers,
dédiée à M. le Marquis de Liancour. Paeis, An-
toine de Sommaville, 1638. 1/1-4%
LES DEUX PUCELLES,Tragi.Comédie, dé-
diée à Mademoifellé de Longueville. Paris, An*
coine de Sommaviite , 1639. ia.i2*
LA BELLE ALPHREDE , Comédie en cinq
aâ:es>. en vers, dédiée à Sylvie. PARIS, Antoine de
Sgmms^ville , 1 6 3 9. i/i4^.
THEATRE FRANÇOIS. 157
LAURE PERSÉCUTÉE, Tragi-Comédîe , dé-
dièe à Mademoifelle de Vertus. Pa&iS , XouiTaint
Quinec^ 1639. i/z-4*'.
La même, chez le même, 1646. irhia.
« La même 9 dédiée à M. de Crequi 9 premier Gen«
lilhomme de la Chambre 9 idem , in- 8^.
ANTIGONE , Tragédie , dédiée à M. le Comte
de Guebrian, Paris , Touflâinc Qainct , 16 39.
" o
J7Z-4 •
La mime y chez le même 9 1639, in-iz.
CHRIS ANTE, Tragédie. PariS» Antome de
Somma ville > 1640. 1/1-4^ •
LES CAPTIFS , ou LES ESCLAVES , Comé-
die tirée de Plaute , en cinq aâes , en vers. Paris p
Antoine de Sommaville^ lô^Otin-^^.
La même , idem , z/z«i2«
IPHIGENIE EN AULIDE, Tragédie. Par iS,
Touflainc Quinett 1641. i/z-4^
»«• •
CLARICE, ou L'AMOUR CONSTANT,
Comédie en cinq aâes> en vers, avec un avis aa
Leâeur ^ dans lequel il avoue que cette pièce eft une
imitation de celle de Sforza d'Oddi. Pari s , Tout»
làint^ 1644. î/i-40.
y
BELISSAIRE, Tragédie, dédiée à M. deGaife,
Fa&iS) Toaflaint Qainct j i644< in-4*'>
X58 THEATRE FRANÇOIS.
CE LIE ou LE VICE ROI DE NAPLES,
Tragi-Comédie, Paris, Touffaint Quinet , le^é.
LA S CE U R 9 Comédie en cinq aâes , en vers«
FâriSj Touffaint Quinet, 1647. in-^^.
La même, fous le titre de SŒUR GENEREUSE,
idem f in- 11..
LE VERIT ABLE, S AINTGENEST, Tragédie.
Paris, Antoine de Sommaville, 1648. 2/2-4'^.
DOM BERNARD DE CABRERE , TragU
Comédie , dédiée, par une Elégie» à M* le Cardinal
de Mazarin. Paris, Touffaint Quinet^ 1648. i/z-4''.
La même% idem^ in*it» , .
VENCESLAS , Tragi-Comédie , dédiée à M. de
Crequi, premier Gentilhomme de la Chambre. Paris,
Antoine de Sommaville> 1^48^ in-^^.
II y t eu plufieurs éditions de cette pièce , outre
une avec dès correâions par M. de Marmontel.
COSROES , Tragédie. Paris, Antoine de Som-
maviile, 1649. î^-4^-
il y a eu auffi plufieurs éditions de cet ouvrage ,
outre une avec des correâions par M. le Marquis
d'Uffé..
DOM LOPE DE CARDONNE, TraglComé^
THEATRE FRANÇOIS. z^g
ffie. Pari s 9 Antoine de Soramaville , i6p.t ï«-4'^-
AMARILLIS > Paflorale en cinq aftes , en vers*
Paris, Antoine de Sommaville, m-4^
LA FLORIMONDE , Comédie en cinq aâres,
en vers, & dernier ouvrage de M. deRotrou» PariS^
Antoine de Sommaville. 165 5. in-^^.
^ SUJET DE L'HIPOCONDRIAQUE. ) Clorî-
dan, jeune Seigneur Grec, eft obligé par Tordre de
fon père d'aller à Corinthe , & de quitter Perfide ,
qu'il adore , & dont il eft aimé. II trouve en chemin
Cleonice, que deux Gentilshommes enlevoient. Il
tue les ravifleurs, & la délivre^ Elle conçoit dans ce
moment la plus grande paflîon pour (on libérateur 9
& le mené chez fon père , où elle fait de vains efïurts
pour s'en faire aimer. Un jour qu'elle étoit dans un
bois, où elle fe plaignoit de la trop grande fidélité
de Cloridan, elle apperçoit un page : elle l'arrête, le
queftionne , & apprend qu'il étoit chargé d'une lettre
de Perfide pour Floridan. Elle féduit ce page^ & tire
de lui cette lettre , qui étoit conçue en ces termes :
Adorable fujet des maux que |*ai fouflFerts ,
L'excès de Tamour me furmonte ;
Je romps le voile de la honte ,
Pour te mander que rien ne peut rompre mes fers.
Elle y change quelques mots 9 la rend enfulte au
z6o THEATRE FRANÇOIS.
page 9 qui la remet: à Cloridan > qui y lie :
Adorable fuiet des maux que j*ai foufFercsy
Au point que là mort me furmonce ,
Je romps ^e voile de la honte
Four te mander que rien ne peut rompre mesfèts»
Ce tendre amant au defefpoir , queftionne en
tremblant ce page , qui 9 fuivant les ordres de Cleo-
nice 9 lui' annonce que PerHde eft morte« Il tombe auffi'
tôt fans cpnnoiiTance ; & lorfqu'il la reprend , on s*ap-
perçoit qu'il eft derenu fou 9 & qu'il fe croit mort lui-
même. Cependant Aliafte > qui étoit amoureux de
Cleonice » & qui avoic été obligé de s'abfenter pour
quelque tems 9 avoit rencontré Perfide , & revenoic
avec elle à Corintbe. Etant près d'y arriver 9 ils ren^
contrent le page 9 qui avoic trahi Perfide 9 attaché tout
nud à un arbre. Elle le reconnoit > & le fait déta-
cher. Il fe jette à fes genoux 9 & lui avoue fa perfi-
die. Ils volent auffi-tôt chez Cleonice : & tous» de
concert , travaillent à guérir le malheureux Cloridaa
de (à folie. Pour y parvenir t on lui montre plufieurs
perfonnes 9 que l'on fuppofe mortes y & que l'harmo-
nie des inftrumens , rend bien-tôt à la vie. A la fin»
il fe croit lui même relTufcité, & court embrafler fâ
maitrefTe. Cleonice > guérie de fon amour pour Clori*
dan» rend fon cœur à Aliafte ; & le mariage de Qo-
ridan avec Perfide» & d'Aliafte avec Cleonice ùit
le dénouement de cette pièce.
Rotroa
THEATRE rkANÇèlS. t6i
Rotrou> qui n'âvoitque vingt ans > lorfqull a corn*
K)ré cette Tragi - Comédie > aflure , dans l'argument »
|ue l'on trouve à la tète > que ce fujeC> qùelqu'étran-
;e qu'il paroilTe > n'élî cependant que l'image d'un
ivénenient véritable , & qu'il s'eft févérernerit âftreinc
u collume du théâtre , ( ou plutôt à tous les dé^nuts
|ui le desbônoroient alors. En effet , la licence des
laifers les plus lafcifs > donnés^ & rendus publique-
nent, y étoit autorifée. ïi a même ofé, comme on le
roit dans l'extrait ci-deffus , y èxpofer iin page tout
iud , qui , danâ cet état ; a un long entretien avec
'erfide. Cependant > quelque médiocre que Toit cetfe
Âece y elle annonce un homme de talent , & qui a
léja quelques cdnnoifTances du poëme dramatique. }
(SUJET DE DORISTÈE.) Mënaiidrè, rival dé
!^leageiior, amant aimé de Doriftée> avoit enlevé cette
»elle> & l'avôit caché chez lui : mais ks (oins, ni fb'nt
moar , n'ayant pfi la fléchir i il engage (bn ami Oza«
or à tâcher de la rendre favorable à Tes vœux. Ce
raitre Ozatiôr i loin de fervir Ton ami i étant devenu
li-même amoureux de Doriftéê ^ l'enlevé • la déguife
n page, te veut la violer dans un bois. Cleàgenor^
ui y depuis la perte de fa maitreffe , étoic fans cefle
ccupé à pouvoir découvrir où elle étoit , vient beà-
îufemént à pafTer dans ce même bols. Il tue té ra-
ifTeur» £e retrouve ainfi l'objet ^e fa tendreffe. Po^
(lée fatiguée des violences d'Ozanor> mouroit ile
>if ; & Cleagehof court à une fontaine lui chercher,
e Teaù. Pendant ce tems, iurvié^nnént deux voleurs y';
ui obligent le page i les fuivrè ^ &à embraflèr leur
lome 11. \à
i6x TM£ ATR E FRANCO IS.
mèeier# Ckagenor > en («venatit de h fooiaioe , eft
seiiGomré pràs du cûrp& d'Ozatior i j^r ]« Prévôt &
fes-archers ^ qui remmènent ptifonnier. Doriftée , à qui
tes voleurs avoient donné le nom de. iPhilemoûd > arrête
Tbéandre , fous prétexte de lui demander h bourfe ;
& à rinftant fe découvre à lui : & toug deu?( de cùû^
cérc attaquent les voleurs, qui font mis en faite.
Théandre > infiruit ,du fexe de Philemond , en devient
paffionnément amoureux j fiç le donne pour page à
Dorante , fa femme , qui fur le champ oot^it la plus
Vive pa(!ioh pour fon beau page : fa beauté fait h
même impréffion fur le eoeur de Diane, femme.de-
chambre de Dorante «qui devient rivale de fa mai-
creire> de force que Philemond prelfé de tous côtés i
Quel z&Tà itie gouverne , & quelle éft ma fortune !
FiUc, )t fuis ravie : 6c pagp i on m'importune
Dorante , qui ne lé pèrdo'it jamais de vue , ta prefTe
ic chanter , & de raccompagner avec (a guiure : il
diante fes paroles :
Je plainiX^loris , le mal eztrêmd)
A quoi ton amour te refout ;
Mais la loi qîii fait que tout m|aîme ,
Ile m'ofoUge pais d'aimer couc.
' Enfin ne pouvant plus réiiAer aux importunités de
Dorante, elle lui montre fon fein en plein théâtre > &
lui démontre par là l'iniKilité de fes poarfuites : elle
THEATRE FRANÇOIS. i6^
lui découvre en même- tçins que Tbeandre ^ qui coa-
tioit foQ fexe, brûle pour elle du plus violent ampur.
En eâet , cet infidèle époux ^ qui à conçu le projet
de fe réparer de fa femme , pour s'unir avec Doriftée ■
lui fait croire que Cleagenor a été tué par Menan-
dre. Cette tendre amande au defefpoir s'ea&foie
dans ÙL ctiambre. Cependant Cleagenor étoit ibrti dé
prifon : il vient voir Theandre , qui lui dit que Dod«
ftée eit morte de la main d'un voleur > qui étoit ac-
tuelleroent chez lui. On hit parokre ce prétetidu
aiTaffin : & lorfque Cleagenor vole fur lui pour lui
, plonger (on épée dans le corps, il reconnott(â cberc;
Doriftée , qu'il époûfe enfin Hpcis tant de traverfes &
de malheureux événemens. La femme de chambrd 9
qui connoit alors combien elle s!efi abufèe > en aimant
Phiiemond , finit la pièce par ces quatre vers :
O Tagreable abus ! Que pouvoir cecce belle i
Je cedois à ràm»ur , &. j'efpcrois tout d'elle :
Mais nature y pourvût i & mon honnecct^ |i
Quoique fe rexpofailr , écoic en fntecéi
L'Auteur commence ainfi fôri avertiflemeht au le
ftetU: : » Le fort de Dorifiée efl rel^ qu* après avoir été
y> trois fois erdivée, on en a ravi jufffuHà Jbn hiftàre G*
y> que fes aventwes qyant fait m page ^ fa perfonhe 9
>> ont fait encore des pages de fa vit. c^ II fc plaint e^-
fuite qu'oti en à fait plufieurs éditions ,; qui l'ont dé-
figurée; mais que celle-ci étant de fon aveu. >> Cette
• 5> cadette dé trente fxurs fera envie aUx autres de la
: yt Jévre.y ji $IU efi traitée favorablement » fr fi çftti
164 THEATRE FRANÇOIS.
y> beauté qui la fit adorer au théâtre , conferve encoié
» quelque partie de fort e^me, quand elle fera regardée àe
» plus prés, ce
(SUJET DE LA BAGUE DE L'OUBLI.)
Alphonfe 9 Roi de Sicile > eft amoureux de Liliane ,
fille du Duc Alexandre ; & pour obtenir Tes faveursi
il la flatte de partager un jour le Trône avec elle.
Enfuite il ordonne les préparatifs du mariage de fa
four Leonore avec le Duc de Calabre» fils du Roi
de Naples. Mais cette Princeife 9 qui dàmc un jeune
Seigneur , nommé Leandre , lui promet de Tépoufer,
s'il peut s'emparer du Royaume de Sicile , (ans cepeo-
dant attenter à la vie d'Alphonfè^ Leandre, enchanté
de cettç eipérance» va confulter Alcandre , fameux
Magicien > qui lui donne une bague enchantée , qâ
doit faire perdre la mémoire au Roi, tant quil la por'
tera à fon doigt. D'un autre coté > la tendre Liliane ,
inftruite que fon père vient d'arrêter (on mariage avec
Tancrede » Prince de Tarente^ en avertit le Roi , &
le prefTe d'accomplir fa promeiTe. Alphonfe^ qui defî.
roit éluder cet hymen , la ralTure & lai promet de
faire arrêter , & Alexandre & Tancrede , fous pré-
texte de quelques pratiques fecretes contre l'Etat.
Peu de tems après , l'anneau enchanté que Leandre
avoit trouvé le fecret de faire porter au Roi , com-
mence à faire effet. On le voit alternativement extra-
vagant te raifonnable I fuivant les tems où iU la bague
THEATRE FRANÇOIS. 165
>n doigt , & ceuk où il ne l'a pas. Enfiq % infiruit:
' Fabrice de la trahifon de Leandre & deLeonore».
ait démonter le diamant enchanté ^ fous lequel il
uve un talifman , qu'il déchire ; & ayant appris
? pendant fes accès de folie 9 il avoit confenti à l'u*
n de fa fœur avec Leandre > il les envoyé chér-
ir ; & pour qu'ils ne puifTent pas fe douter qu'il eft
itré dans fon bons fens ^ il porte toujours à fbn doige
te bague > qui alors ne pou voit plus &ire efïet. Il
it d'extra vaguer encore : il les fait monter fur (on
^ne > lâur dit que c'efl; à eux déformais à rendre la
ice , Sf. les prie de décider d'une af&iré > dont il
leur rendre compte. Il leur raconte leur propre
uOire 9 & les prefle de donner leur décifîon. Lean^
; voyant bien que tout étoit découvert % fans paroî*
déconcerté > prend la parole & rappelle aa Roi
violences, qu'il a lui-m$me exercées contre Lilia-*
» le Duc Alexandre & le Comte Tancrede. l\
iite que l'amour * étant la feule caufe de tous ces
ers événemens » ce (entiment impétueux portoio
c loi fon excùfë. Leonore & lui > defcendent du
>ne7 fe jettent à fes pieds > & lui demandent par-
I. Le Roi dit alors qu'il va réparer fes torts. Il
ine la main à Liliane , & commet le Duc Alexao-
! pour décider abfolument du Ibrt de Leoynore &
l^eandre : ce Duc confirme leur mariage ^ le Roi
onfent fur le champ ; mais les envoyé à Sarragoffe
^u'^ qpUYÇl ordrç* i^ofuice il dgune une de fes çou^
La* •
iS6 THEATRE FRANÇOIS.
fines eh mariage à Tancrede y & vingt mille écas de
^^etire à Fabriice ^ potir épou^r Melite > fuivante de
I*ilianf •
t. 'on verra par les vers fuivans , que cette fuivante
fi*atoit pai5 îe ftyîfe bien cMtié. Aptes quelques plai»
feffîéries qu'elfe Fait à fa maicreflb ^ eHe loi dit :
IX )e cratns'bfeû pour vous , qu*enHn il ne dérobé
. Ce ^ ite 'SottÀt paft retrdfir Votre robe i
^ Qvft ce-jcuAe Méiurque y à ces tardas infcrak »
Ne vous ôçe une Heur » pour vous donner un fruir*
(SI7J£T DE LA Ï)IANE. } Mdiaiithe^ mere^é
Lt&adre & ée Diane , voulant (kire pafler toutes les
Mctiefles de fa maiion fur la t&te de fon 61$ , fait éle-
ver itcretteotent ft fille •chez un payfan ; & quel-
que tems après ^ fiât courir le bruk de fa mort. En*
foitè, pour aiforër «no:»:e plus là fortune de Ltfandre ,
die arrête fûn mariage avec Rofinde y quoiqu'elle ne
fèt aiocs âgéé'qve tkiix ans.* Cè^eone homme y qui
ckflroit voyager, qukte fa patii». Ditne, qui vivoît
î^oram fa ùaii&Dce , avolt iàfpiré le plus tendra
^iQOur à un jeune Seigneur , iiômtné Lyfimantt, & ne
f^étoit p(i ^dëfetidre devoir delt tferidrcflfe pour lûî*
Lyfimant > obligé d'atter à Paris > la ^dti^ avec le
|3u» grand él^^gHn , %c les ferméns les phis réitérés
lie ^a pltifs par&ite confiance. Mais qui peut âépefn*
tite la douleur de Diane , lôrfqu'ëlle apprend que fott
amant «d infidèle > & qnl) eft amoiireiïK d'Prantç , fille
THEATRE FRANÇOIS. i6j
de Filetnoa. Elle parc auifî-toc pour aller troubler (ê^
nouvelles atiiours , & & mec au (êrvîce de fa rivale.
Un nommé Sylvian > payfan , amoureux de Diane »
prend le parti de la fuivre, & encre demeflique chet
Lyiknanc. Si Sylvian n'avoic pas «d le bonheur de
plaire à Diane ; il avok celui d'être aimé de la jeune
Doi'othée , ^ui n'béfite pas à quitter Bologne ^ pour
aller rejoindre (on amant. Orante avoic <^onçu la p1u0
grande anwclé pour Diane ; & la crouvant un jour
occupée à lire des lettres , ellelui demande à les voir.
Diane les VA donne (ans liéfiter : c'étoic une rufe qu'el*
le avok imaginée, pour faire connoître à Orante que
Lyfimant-étok amoureux à Bologne, puifque cfétoit
les mêmes lettres qu'elle avoit reçues de lui. Loin
d'«n être affligée , Orante en eft au contraire fort aife.
Elle aimoîc Arifte ; & ht feule cbéiflance pour ion
père la faifbic confentir à époufer Lyfimant. Elle
porte fur te champ ces lettres iFilemon, qui aufli.^
tôt va faire les réproches les pbs amers à t.yfimaiit«
Celui-^ les reçoit fort froidement, & montre fipea
d'ardeur pour Orante, que Fil^mon rompt tout enga-^
gement aarec lui. Reu après , Lyfimant rencontre
Diane , fans la connôitre ; & la prenant (knplement
pour la femme de chambre d'Orante, il la chargé de
lui dire qu'il n'eft nullement .affligé ^'avoir rompii
avec fon père , & qu'il eft amoureux de Rofinde. En
effet, il va chez cette Rtjiînde , «on pout diercfaer à
lui plaire 9 mais dansîefpérancede faire de la peine i
\a Vi
i68 THEATRE FRANÇOIS.
Prante. Cependant Di^ne n'en eft pais moins jalouft
de cette nquvçlle ipaîtreffe ; $c à l'inRant inètne,ellç
s'habille en homme , vjt chez Rofinde , jk fe fait ai>.
nopcer fous le nom de Lifandre» qui^ comme on a
vu au cpn^menc^mçnt de cet e3|:trait » dçvoit être foQ J
^poux. Comme elle y étoit > le véritable Lilàndre ^r- j
rive de tés voyages; , defçend cbçz celle qvii lui eft
^eftinée en mariage, eft fort Turpris d'y trouver un
autre lui-mèmç » & veut faire punir l'itnppfteqr : fon
fexe que l'pn découvre » empêche qu'on ne la menç
ÇQ prifbtXy & 1^ fait aufli reconnoitre pqur fœur de
Lifàndre > par une marque qu'elle porte au (çin ; &;,
tout (^e fuite la pièce arrive à (pu dénouement. Diane
^poufe fon cher Lyfimant; Lifandre devient l'épous
de Rodnde ; Arifte> celui d'Orante; & pour que tooç
|e monde s'engage fous les loix de l'hymen , Sylviaq
^'u^it à pQrpthéç*
Cette Comédie eft àls^leâure d'une très -grand ç
obfcurité. Je ne fç^is (i la rçpréfentation en déve?
loppè "mieux l'intrigue; en tout cas, elle eft fi char»
gée d'épifodes inutiles» & d'évenemens mal dirige j»
que le fpeâacle en devoit être beaucoup plus fati«
guant qiji'amufant. Ep tout y elle eft affez b|en écrite.
Elle commence p^v un monologue de Diane arrivée ^
if'aris 9 & conv2\incv|e de Tinfid élite de fon amant ^
jpont voici les premiers vers : '
Le Soleil a quitté l'humide fein de Tp.ndej^
Le dernier de lès jours illumixie le inonde i
THEATRE FRANÇOIS, 1^.9
péplor^ble rebut d*un infidèle amant ,
Moins aimable qu*ainié , plus ingrat que charmant*
Toi , qui vis fon amour p 8c qui vois Tes dédains ,
Redoutable vainqueur des Dieux & des Humains ,
Eteins , ou récompenfe une ardesr 6. parfaite t
Que je meure vangée , ou vive fatisfaite.
( SU JET DE CELIMENE. ) Flprante, niecç
â'OrdLXitc, lui fait Tavei; de la tendrefle qu'elle reflent
pour Filandre ^ & lui vante Tanoiour que fon amant a
pour elle. Filandre arrive en cçt inftantt qui j)aro!c
troublé à la yue de fa maitrefle > quit depuis quelques
jours > étoit abfente» & qui n'étoit pas revenue chez
fa tante , que de ce jour ipème- Or^nte le plalfànte
for (on embarras , qui augmente y & qui ne finit que
par l'aveu qu'il fait de fon infidélité , & de l'amour
qu'il reflent pour Celimene. II poufle fa confidence
plus loin ; il avoue qu'il eft le plus malheureux des
hommes > & Celimene la plus cruelle & la plus înfen-
lible des femmes. Florante lui dit que i malgré cette
grande infenfibilité > elle entifeprend de s'en (aire ai-
mer , s'il veut lui prêter un habit d'homme » & lui
jurer , en cas qu'il réu(fifle , de reprendre fes premie-
f es chaînes. Filandre s'y engage , & lui envoyé fur le
champ un de fes habits. Elle le vêtit; & auffitôt fe
fait préiènter à Celimene y fous le nom de Floridan ,
neveu d'Qrantet II eft néceflaire de fçavoir que Celi«
{peoe ayoit un amant , nommé Alidor>, qu'elle n'ai-
lyo THEATRE FRANÇOIS.
moit pas> & une fœur nomméç Félidè , qui atmoie
& étoit aimée de Lyfis » ami d'AIidor. Ce fuppofé
Fioridan réuffic ais-delà de fes e^érafoces , puifqa'ii
tourne ù bien la tète aux deux fœurs , qù'Alidor &
Lyfis veulent lui faire mettre Vépée à la niaiD. U par-
vient à les calmer } en les afluraut que , loiu de vouloir
leur nuire > il ne cherchoit,, au contraire > qu'à leur
rendre fervice , & que le même jour ils en auroient
la preuve. En effet y il obtient de Celimene un bracelet
de Tes cheveux , & un rendez - vous ; & de Félicie » la
lettre la plus tendre > qui lui afllgne apffi un rendes
vous* Dès qu'il a en mains ces preuves de fa viâoirei
il les remet auffi-tot aux deux amans jaloux : & A\U
dot va tenir fa place auprès de Celimene y 6c Lyfîs
auprès de Félicie. Ces deux jeunes beautés , au dé«
lerpoir de fe voir trompées par le parjure FIori<
dan ^promettent à leur amant de s'unir avec lui, pour^
vu qu'il les venge du volage Fioridan , qui furvîcnt Se
qui fe juftifie bien-tôt auprès d'elle , en leur décou-
vrant fon fexe. Enfin la Comédie fe dénoue par le
mariage de Florante avec Filandre i de Celimene avec
Alidor , & de Félicie avec Lyfis,
Cecte ^iece n'eft certainement pas ta iaettleure dt
Jlotrou. U aufoit dù^ je crois » tirer ghs de parti de
l'intrigue* Les vers en fontmèdiocres, & je n*ai trou-
vé que ceux • ci qu'on peut citer, Orante vante à fa
THEATRE FRANÇOIS. tji
filece les charmes de la campagne qu'elle habite , 8c
Ipi dit :
Aoffi mille amoureux en cette ^iirade
VienBfent perdre leur foin & leur kiqiriécud^
Ces lieux ont chaque jour de nouveaux habitant}
Ils y Tiennent fachês , & sY trouvent contens,
L«s cœurs font enchantés de l'air qu*on y refaite.
Chacun y fait Pamouc » peu de monde y foupitt \
Ce Dieu de tous Tes traits y choifît les meilleurs ;
Il éft Roi parmi nous > il eft tyran ailleurs^
{SUJET DE L'HEUREUSE CONSTANCE.)
Jjt Roi de Hongrie > allant incogoito à un Village ,
pour ¥oir }a ileine de Naples , qa'ii doit époirfer , f
rencontre Rofelie y qae la curioficé y a^oit conduite.
Ileft (i foudainemeiit frappé de Jês charmes ^ qo'ou-
bliaat les avantagea qu*il dok troàver dans Ton maria*
ge avec la Reine de Napiec ^ il envoyé dire 'à cette
Prinçefle , qu'il en eft bien afBigé ; mais qu'il neibage
pltis à hû donner h main. lA S<eitie , furieure de cet
outrage , retourne auffitôt en Dalniatie , où la fcènt
te tx^nfpoxtt avec elle ; & fié fotigeaùt qu'à la ven-
geance » elle ipropofe à Paris , Ambafladeur ^u Rof
auprès d'elle^ de Wppufer, & de le mettre à la tête
d'une armée iforwiîdaWe ^ pour ravager la Hongrie.
Gt Paris étoit auflS ataoûreux de Reffelie ; ât en étok
•rop épris , pour que rèfpoir ftatteur du Trône put le
rendre iiKOt^lMt^^ Maisxrraignantd'irriterlaReinei s'H
parott w vouloir afefolumeiit pas Te prêter à cette pro^
x^% THEATRE FRANÇOIS.
polition y il lai répond qa'avant touc>il efi nécefTaireqall
retourne en Hongrie rendre compte au Roi de (k mit
Son La Reine y confenc : il part » & la fcène le fait en
}iongrie> où leRoi fait de vains efforts pour faire agréer
fa paffion à Rofelie. Cette belle aimoic Alcandre , frère
du Roi ; & ce jeune Prince en étoit auffi éperdûment
amoureux. Le Koi» informé de leur amour mutuel i
voulant lever cet obflacle y qu'il croyoit le (êul qui
s'opposât à fon bonheur » envoyé une Ambaffâde à h
Beine deNaples? lui fait dire qu'un amour involon-
taire, mais indilToluble > Tattachoit pour toujours à
Hofêlie y & qu'il lui of&oit pour réparer fes torts ^ de
lui donner pour époux (on frère Alcandre y qui paiToiC
pour un Prince accompli. En mèmetems il fait partir
Alcandre pour aller fur la frontière de Dalmatie , atte»*
dre la réponfe de la Reine. Cette Princefle > pour
éviter une guerre cruelle, accepte la propo(kion. Dès
que le jeune Prince efl: inftruit du confentemenc de la
Reine > il prend le parti pour rompre ce funefte hy«
men , de choifir parmi Tes domeftiques le plus laid &
le plus mauflade , pour le faire pafler pour lui, & fe
donne pour Gentilhon^me de la fuite du Prince. Son
ftratagême réuflît : la Reine eft fort étonnée de tout
le bien qu'elle avoir entendu dire d'un Prince, qui lui
paroiflbit auffi brutal quHnfenfé; & Êitiguée de tou-
tes (es impertinences, elle le congédie. Ce Prince em
chanté retournoit en Hongrie pour revoir fa. chère
|lQfeIie> lorfqu'il reçoit une lettre qui Iç n^et ^a çoobi
TSE A TRÈ FRA NÇO IS. iy^
)Ie da derefpoîr. Le Roi f pour le déterminer à coà-
rlurefdn hymen avec la Reitie> lui écrit qu'enfin il
ivoit triomphé des rigueurs de Rofelie, & qu'il ve-
loit de répoufer. Ce n'étoit pas le feul ftratagèrae »
lont le Roi s'étoit fervi pour parvenir à époufer Ro-
elle. Il avoit fait remettre en même tems une lettre
lu Pritlce à cette belle , dans laquelle il avouoit qu'é-
>loui par l'éclat du Trône , il avoit donné la main à
la Reine. Ceft dans ces circonftances qu'Alcandre
irrive incognito en Hongrie > il veut revoii' encore Ion
nfidelle maitrefle , & lui &irè des reproches fur (bn
nconftance. Il fefait introduire chex elle^ fans vou-
loir l'écouter ; ils s'accablent tous deux de reproches.
Enfin ils reconnoifTent leur erreur , & (è jurent un
Eimour plus tendre que jamais^ Le Roi les furprend
enfemble; & fai&nt un crime à Alcandre d'être fe«
venu fans Ibn ordre > il l'envoyé en prifon. Cepen^
dant la Reine de Naples, curieufe de voir <:ette Rofe-
lie y dont la beauté fait tant de bruit ; fe déguife en
pèlerine » arrive en Hongrie , & trouve le moyen de
ie faire admettre chez Rofalie. Le Roi y arrive , &
efl furpris de la rare beauté de cette étrangère. En
même-tems ce Paris > qu'elle avoit voulu époufèr ,
dans un mouvement de colère y furvient > & la fait re-
connoitre pour la Reine de Naples. Le Roi (è jette
aoi&tôt à Tes genoux > & lui demande pardon ; la Rei-
ne le lui accorde ^ & confent à Tépoufer. Alcandre ,
qu'on fait fortir de prifon , reçoit la main de la fidelle
174 THEATRE FRANÇOIS.
Rofelie; & pour confoler PAmbaffa^eûr Paris» de b
perte d'un Trône, & de celle de Ta maicrefle^ on loi
donne en mariage Florinée y proche parente de U
Râne*
Oti voit aifémént par cet extrait y que ni la réglé
des vinge.quatre heures > ni celle de l'unité de liea >
ne font pas obfervées dans cette Tragi-Comédie. Aa
refte elleeft tiSét bien conduite & aifez intéreffante;
.& l'on y troiiye quelques vers heureux 9 entr'aunres
ceux-ci. • 4 • Âlcandre , au défefpoir de ce que le Roi
eft amoureux de fa chère Rofelie ^ & craignant qu'elle
tie fuccombe à Tenvie d'être Reine 9 dit :
Mourrai-|c aujourd'hui , d'une mort étemelle }
Car c'efl mourir touiours , que de vivre fans elle.
Va porter , Dieu des cœurs, ton bandeau (lir Tes yeiix i
Four la rendre infenfible aux pompes de ces lieux.
iDdLîïS la fcène fui vante ^ ce Prince dit à Rofelie ;
;•.•••• si je voyois revivre (Ur la terre
les maîtreCTes du Dieu qui lance le tonncre y
£t hàtc à tput le monde adorer leurs appas ,
Leurs charmes les plus doux , ne me tenceroient pas }
Quoique le fort m'offrît fur la terre ou fur Tonde ,
Je préfère ces yeux à l'empire du monde.
(SUJET DHERCULË MOURANT.) Cet
événement eft trop connu > pour que je fafle un long
extrait de cette pièce, dans laquelle Rotrou a abfo-
lument fuivi la marche des tragiques anciens. Hercule
cherche enyain à fe Êtirc aimer jde la jeune lole ; Se
par fes foins i\ excite h jaloufie de Délire | qniloi
THEATRE FRANÇOIS. ty^
snvoye une robe trempée dans le faog du centaure
Kefliis. Il ne Ta pas plutôt vécue, quil fe knt em-
bra(ë par des feux dévorans. Voyant que tout lècours
[ni devient inutile , il (ait drefler un bûcher > & il or->-
donne lorfque Ton corps fera confumé > qu'on immole
lUx pieds du bûcher Arças 9 jeune Prince > amant aimé
llole* Au moment où Ton doit exécuter cet (Mrdre
inhumain > on entend un grand coup de tonnerre : le
Ciel s'ouvre , Hercule paroit dans (a gloire 1 annonce
]ult eft au rang des Dieux , pardonne a Arcas 9 Ce
lui fait épouiêr lole ; ainii tout le monde fe retire
content.
Il y a dans cette Tragédie une prière qu^HercoIe
adrefle à Jupiter , en commençant un facrifice qu il laî
ofïre f qui m'a paru mériter d'être rapportéeé (li parle
à Philoftete , aâe troijîeme , fcène première* )
Oyez û mon elpric conçoit une prière
Séance dans ma bouche , & cligne de mon peie.
Qu? ce globe azucé foit confiant en fon Qouxsf
Qu'à jamais le Soleil y diriCe les jours-s
Que d'un ordre étemel rafceur brillante & ptu:e> •
Aux heures de la nuit , éclaire la nature ;
Que la terre donnée en partage aux humains
Ntfoit jamais ingratte au travail de leurs maint)
Que le fer déformais ne ferve plus au monde ,
Qu'à couper de Cerês la chevelure blonde ,
Q'une éternelle paix règne entre les mortels y
Qo'oii ne verfé chi fang que 4effu> les antek s
Que la mer foit €ua flots , que iannis vent n'exdrci
Contre Part des nochers le courroux d'Amphicrice i
ÏC que le foudre enfin demeure y après mes faits ,
Padslet tiMMBs de mon père un ifiiiHle faix.
S ^ « • . •
1^6 THEATRE FRANÇOIS:
(SUJET DES MENECHMES.) Cette pièce eff
une imitation Tervile de celle de Plaute. Je n'en don«
nerai point d'extrait ; & fi quelqu'un defiroit en con-
noitre le fujet , je le renvoyé à la pièce charmante da
Sieiir Regnard y qui eft fous le même titre , & qui ren*
ferme la même intrigue que celle de l'Auteur latin ;
mais corrigée & embellie par la quantité de détails
heureux qu'on y trouve^
(SUJET DES OCCASIONS PERDUES.)
^our l'intelligence de cette pièce , la plus finguliere
peut-être dt toutes celles dont j'âye encore rendu
compte. Il eft nécefTaire que je mette fouâ les yeux
du Lefteur les noms des perfonnages.
Hélène y Iteine de Naples.
Cleonce y Gentilhomme de la Reine; àt amoureux d'elle;
Clorimand ^ Prince d'Efpagne.
Atys.
{Ormin, Gentilshommes Siciliens;
Lerme*
lyfîsy Serviteur de Clorimand.
Adraile , Seigneur Napolitain , amoureux d'iTabeUe;
ifâbelle , Demoifelle atuchée â la Reine.
Alphonfe, Roi de Sicile.
Cleonis, Confident du Roi.
Filemon , Confident de la Reinei.
Cleonard, Confident dé Cleonte.* *
Hélène » étant à la chaiîe , dit à Cleonte i dont eÙé
ignoroit Tamour , de ne pas s'éloigner d'elle , tandis
qu'elle va chercher un moment de repos. Son fommeil
eft bien-tôt troublé par un bruit de combàttans; elle
apperçoit trois hommes^ qui en attaquoient un feul.
Cétoi»
THEATRE FRANÇOIS. iyy
lit Acys 9 Ormin & Lerme > qui avoient ordce da
Uphonfe d'aflaffiner Clorimand^ dès qu'ils feroient
es près de Naples* Quoiqu'à regret > ces Gen*
mkvùçs cherchoient à obéir à leur Souverain ; &^
mandTe défendoit. La.Reine » vojrant ce combat
il^ envoyé Cleonte & fcs Gardes aii fecours du
:e Ëfpagnol 9 & tes crois Gentilshommes pren«
la fuite. L'on amené Clorimand à la Reine» qui ^
tnençaot à s'intéreflèr à Ton fort, lui 'demande le
de (es aventures. Le Prince lui confie qu'il avoit
e favori du Roi de Sicile y qu'il étoit amoureux
imé de l'Infante, fœur.du Roi, & que L'excès de
bonheur avoit armé contre Jiit l'envie des court!-
, qui l'a voient petduxlans l'efpritdeileur maitre^
ue ce Prince , perfuadé par mille faux rapports ^
>ic fiétèrminé à le, faire périra La Réitie paroittrès-
Ible aux divers é^iêénemens arrivés à l'aimable E(^
tiol i & fa pitiéi di^ieucjbkn-tôt & plus forte paf-
I. Ne pou^snotrfe dâiernûoer. à lui eu faite l'aveu^
ou,vre^(bn cœur & Ifabeik> & elle la prie d'é-
ç iM;i^:lettj:e tendre à Clorimandy & dé juidoinnec
reu^ess rvpus , pour rjentretenir fous fes fenàtresi
»eUe lui r^egrifenie enVaià^ iiue par cette. deuÂHh
sUe court dfqae deiperdre & Adrafte & (à céçvL^
mr La: Reine , qui çoûapte tetdr la fdacei d^JûbelIë
» rendez-vous > la raflure > Se veut êtes* obéie ;^& la
re . eft écrite & remife à Cloritniand >. qui eft <e»^
Dfé de fn bonne fQftuQe, ayant trquyé Ifabelie'
rom€ it. yk
t^^ THEATRE FRANÇOIS.
fore à fo0 gré. Il fe rend au lieu indiqué ^ fuivi iê
Cleonte, àqui il airoit confié fon bonheur; &l6rr«
qu'ils foat près ^e la fpiiàrr^ ^ il epgage Ton ami à s'é-
loi^i^r. 11 Erouire la Reine qui l'atcendoit; ils ont
une cQâverfation fort tendre ^ & Clorimand qui croit
toujours parler à Ilâbelle , {^roit fort amoureux. Ce-
pendiint quelque bruit que l'on enten4 les oblige
^e fe réparer ; c^étoit Adrafte > qui ^ ayant toutes tes
Quitale bonheur d'entretebir fa maicrciTe à cette fenê-
tre 9 venoit pour la voir. Clorimand i qui ne doute
pa$ qu$ ce ne foit fpn ami Cleonté f lui &it des t^^^tQ'
cbes d'êlre:?jçnu fi tôt Tinterrompre > lui confie i'eiccès
4e fou amûuc pour Ifs^belle^ lui vante les charmes de
ç^tte jeune beauté \ fe vante de^; Êi veûrs ( honnêtes
cependant ) quil en a reçàeis > & lui avoue qtie la nuit
f^i vante il obtiendra tout çd qu'il pe^it deiirer, Adra-
fte au défcf^oir d^ètse devenu le confident de fon ri-
<KaI > &: de ne pouvoir douter dé l'infidéiké de fa x&A
XX^S^% veut d'abord fe. venger de CbriHàatid; nràisil
préfeit d'aitcabler atyaravant l'infidèle par les repro-
f{be& kfi jphis outiiageans, puis enfoite d'attaquer foa
hmreux & indiferet rival. Cependant fur le bruit de
1a b^uté do la |leiQe de Naples y AlphoÀfe en ét&a
4ievenu amoureux ^ & avoic qukté f<^ Eéa^ pour ve-
f)ir.| fous le ncpi d'Ambaff^deur , la demaâde^ mœa«
jriager pour bil-mème. Tandis qu'il cherche \ fe faire
iftiroduire chez la Reine f Adrafte & Clorimand fe
rencontrent ; le jalogx Adrafle facrifie à Ciorlmand les
THEATRE FRANÇOIS,
ettres pleines d'amoar » qq'il a reçues dlfabelle : il
^erfe ainfi dans le cœur du PriQce Efpagnol j lepoifon
je la jaloufie ^ & fe recire. Clorimand , animé d^ fu«
reur^ va trouver Ifabelley & fe plaine de ce qu'elle
rhercbe à le tromper. I&belic> qui étok aafli de*
irenue amoureufe de Clorimand > lui avoue qu'elle
ivoic en efiet aimé Adrafte ; mais cUe lus jure en m^
ne - tcms que , depuis qu'elle le voyo|t ^ Adrafle lui
5toic devenu plus qu'indifférent f elle lui avoua qu'elle
reflepc pour lui Tampur le pbis tendre. L'aimable E^
pagnol fe laiiT^ Tédoire : le plqs cendre baifer ^Q le
juge de leur réconciliation ; & ils prennent un rendea-
^ous pour la nuit fuivante^ où Clpriinand dévoie être
introduit dans fa chambre* Malheufcufe^iit la Reine
lirvient dans ce moment mèipç , & efl témoin de cette
privs^qeé» qui la met forC en cokre* Clôcimand fe re-
ire : h J^i^ine s'emporte contre IfiibeUe ; cetled cbei.
?bç à fçiaftUÎQr 9 & fomient qu'elle n'a fait qu'exécuter
'es Offres» & qvCidlp c'a îamais eo d'autre incentipa
)ue de la fervir. La Rjsine lei répond décepiment ;
Vous TOUS acquittet bied de ce qu'on vous commande s
7e n*fn df ^ pçUt use pcciure plus gcande i . /
Jo vous veux accorder le ^epps deTQrmjUs i
Pour loyer de vos foins » ne me ypyfiz jamaisi
Sçacbez que 6ûre trop , Se ne pas afiez faire ^
Ç'éroi( à fflQQamQui également déplaire s ^
. Cherchez i voc baiièrs ^^ autre fpnçlem^t s
Me les re|ettez point fur mpn comma|i4emenc i
CVft trop d'obéiffance , & vous fonder fur elle } '
€'eft ds ma ToioïKé faire une maqucreUe.
Mij
t8o THEATRE FRAifÇOIS.
Ce gentil étranger à vos efptits blefles ,
C'eil à lui ; non à moi « que vous obei(!èz«
Adieu , n*exereez plus cette charge fatale ^
Et ne m'obligez point â revoir ma rivale.
Ifabelle fe retire ; & le Roi de Sidlè , comme A
baiTadeur > eft admis à l'Audience de la Reine. Il (
pofe fa commiffion , vance l'amour & la puiffance da
Monarque , qui défire fa main. La Reine le fait re-
cîrer j en lui difant qu'elle en va délibérer arec ion
Confeil. Elle confulte Cléonte f & lui marqué beau-
coup d'éloigiiement pour ce: mariage ; elle lui avoue
en même » tems qu'elle fera plus flattée de donner la
main à quelqu'un» qui lui devra-le Trê>ney qued'épott*
fer un Roi >qui croira , avec raiion r n^ l^i rien devoir.
L'amoureux Cléonte applaudit au difcours de la Rei«
ne 9 fe flattant que c^étoit lui^qu'eHe avait àéCtgnéf
Jorfqu'elle n'avôit parlé du projet de couronner uq
homme d'une paiiTance inférieure à la (iénne. Mais
quelle eft fa douleur & fa rage , lorfque la Reine loi
déclare que c'eft Clorimand qu'elle veut épouler ^ &
qu'on doit déformais le regarder comn^e Roi de Naples?
C'eft ainfi que finit le quatrième ^aâl^^ pour préparer
dans IjS cinquième une foule d'événemens fîngùtiers >
& enfi grande quantité^ que peut-être il n'y a pas
d'ade qui en renferme autant. La Reine le commen-
ce en chargeant Filemon 9 fon confident, déporter
une lettre au gentil EfpagtK)!» &Te retire. Filemon,
qui apparemment a voit trouvé l'Ambafladeur fuppofé
THEATRE FRANÇOIS. z8i
6 joli que Clorimand^ ne doute pas que ce ne foit à
que le billet doux s'adrefle^ & le lui remet. Il
le conçu aioii ;
Renonçons au dégiiifement 9
£r levbnsje mafque à la feinte t
Traitons Pamour ouvertement y
Cher Efpagol , je fuis atteinte ;
Je conois vos venus , je fçais votre naiflânce }
Moncœureftûirmomëy . \ .
£t je mets fous Votre puifTance
Ma fortune , & ma volonté.
Quand la nuit voilera les deux j — ^
Venez apprendre de ma bouche ,
Combien., malgré vos envieux.
Votre infîgne vertu me touche i
Us dreiTent une embûche à votre belfe vie ^
fvitez ces jaloux.
Malgré leur haine & leur envie 9
Je vous aime^ Hélène efl à vous.
' f
I ■ r
Dn peut juger de l'excès de pye du Roi , en liianft
billet. Jl ne doute pas que la Reine eft inflruite de
rang > & il fe prépare à être, le plus heureux des
urnes. Il fe retire > voyant Adrafte &. Cléonte*
dernier raiTure le jaloux Adra(le> & lui dit qui-
elle eft fidèle > & que c'eft de la Re}ne » dcmt
)rimand eft amoureux ; que même il en eft aimé;
is qu'il empêchera fon bonheur , & qu'il va bien*
le priver de vie. Adrafte 9 au comble de Tes vœux »
pour parler àlfabelle, qui apiendQÎt 9vecimpa^
ice Clarimandy pour l'admettre d9<ns ion lit^ â^
fioiÛQit ces Y w mpdeftes ;
l^a. THÉÂTRE FRANÇOIS,
Que ce bel étransgier eA long^tems à yenit !
Que de triftes penfers viennent m*encretenir !
Avez-vous donc , mci Coin9 y pour ce foir refervee
La fleur, que vous avez G. long-teimconfervéel
Ce que vingt ans entiers ont fait Axeurir (le fraie ,
Sera-t-il feulement la moiffon d'une nuit ?
Mais qui A'aimerpit pas ce vaÎAqueuç dç mon ^me ? Sec
Elle entend da brait , & demande ; efi^ce toi ^ Clôt
mand. Adraftcf voulant profiter de l'occafion^Iairéponu,
Oui, maVieJJiy & ed admis dans fa chambre. CIo-
rimand ^ qui avoit été retenu par qtrelque obfiacle y fe
rend au lieu indiqué > & eft aufli furp^ris qu'affligé
de ne pas trouyec Ifabetle. Il ne fe doutoit en auca*
ne façon du malheur qui lui arrîvcît. Il entend da
bruit y & voit un homme aflailli par plufieurs : il vole
à fon recours > & le délivre. Cétoit Cleonte qui avoir
atta^é le^ Aoi dé Sicile /au montent qu'il alloit au
midc2;>voi3i5 indicé dans le bffldt de lai Reine. Clçonte
n*^ pdttc É^otimi , & toy^nt (on entreprife man-
qi^e y fe retiré Ivec précipitation, tl fe (ait alors une
tendre reconneiffanee entre \t Roi & fon libérateur.
]l$ fe confient niut^ellement qù*ilâ viennent tous deux
60 bonne fortune dans le Palais* La Reme parok à la
porte f par laquelle elle doit fiiire entrer fon amant ;
& dit, î?/-ci? jwM iwf , ma vh. Le Roi qui ne doute pas
^e ç'eft à lin que ce difcours s'adrefle, répond : Je
la viens recevoir de vus Tares appas , & rentre avec la
Heine I qui i eo referont la porter dit» Çlorimand efi
THEATRE FRANÇOIS. 183
è moi > mon amour ejl content. Ces mots farprenàent
fort Clopmand , qui ne fe doatoic en aucune façon
f être aimé de la Reine ; & il fe cache dans un coin $
pour attendre qu'l&belle , TintrodoiTe chez elle. Ce-
>endant Cléonte revient ; & Ifabelle , entendant du
)ruit , fe mec à la fenêtre , & demandé qui font cé^
rens indifcrets, qui viennent troubler le repos de la
leine. Le jabux Cléonte lui répond qu'elle n'en a
)as 4}efoin ^ puifqtfelle eft aftuellemeot edtre lés bras
le Clorimand. I&belle lui dit de ne point outrager
bn époux i & que Gbrimahd eft avec elle. On pédc
luger de là furptife Bc du chagrin de Clorhnandy
]ui entéhd qu'on le croitjouiflàntdés faveurs de deux
oiies femmes f & qui eft dans un càin fort mal à fou
life. Enfin tout s'éclaircit : Adrafle defceiid avec Ifa-
}elle , qui d'abord eft fort en colère de la méprile.
Snfih toyant bi^n qif il ti'y avoit plus dioyen de s'en
lédire > elle lui dêoSande pairdOn d'un itiometilt dé lé-
rereté* l'embraiTe tendrement, & hit promet l'amoitr
e plus conftant. En même-tems la Reine > qui avotft
Luffi entendu du bruit ^ defcend fur le théâtre. (H
àut fuppofer qu'à Naples, les Dames étoient fi veç-
ueufès , que lorfqu'elles admectoient leurs amans dans
eurs chambres, elles vduloiént couvrir leur défaite
la voile de la plus fombre ô'bfcurité. ) C'elï ce qiii
ait que la Reine ^ toujours dans l'erreur y après avoir
rrondé|dic:
Oai Clôf hnahd eft mieà , oui Clôrimaod eft Roi i
Il«n(ft^éiDoncc^fi(Kapleiroiii(a]al» i
?S4 THEATRE FRANÇOIS.
Cependant le Roi de Sicile ne tarde pas à rejoi*
are ÙL nouvelle époufe ; elle qui le prend toujours
pour L'AmbalTadeur > ordonne qu'on venge l'outrage
qu^il vient de lui faire. Le Roi fort furpris de fa co-
lère» lui montre le billet que Filemon lui a remis de
(d. part; & Clorimand le fait connoitre pour le Mo-
narque de Sicile. Alors la Reine 9 qui fent bien qu'el-
le n'a pas d'autre parti à prendre que, de fuivre Te*
xemple d'Ifabelle , accepte avec )oye la main de ce
Monarque > qui f pour témoigner fa reconnoiflance à
Clorimand , lui promet l'Infante en mariage; Cet ef-
poir rallume tous fes feux » & il fe croit au comble
du bonheur. Enfin 9 pour que le pauvre Cléonte ne
reftât pas fans femme > On lui donne Heliante, coo-
fine de là Reine.
• *
(SUJET DE L'HEUREUX NAUFRAGE. )
Cléàndre» Prince d'Epire» aimoit Sc.étoît aimé de
Floronde , fille du Roi de ce pays. Ce Monarque
ayant refufé fà fille aux vœux de Cléandre , ce jeune
Prince 9 de concert avec Floronde» prend le parti de
l'enlever. Ils s'embarquent & quittent l'Epire ; mais
une tempête furieufe fait périr le vaifTeau , dans le-
quel il$ étoiient , & Cléandre efl jette (ans connoifTan*
€ç far les rives de Daln^atie^ où la Reine SalmacisSc
Ççphalie y fa fœur, le rencontrent^ & le font tranfporter
^ffnsun Château voiGn, Pès qu'il ?i repris fesfenst
U ^ forf étonné àc fe vqiç fur un lit magnigque ^ d|os
THEATR^E FRANÇOIS. i8S
pne chambre 4e^ plp$ ornées 9 $c dans un lieu qui lu^
çft abfblumenc inconnu. Il eft reciré de Tes réfiexion9
par l'arrivée de Salmacis t qui vient fçavoir de fe^.
nouvelles ; quand Çléandre i'apperçpit , il s*écrie :
Mais ua objet charmant , ou Venus elle-même
Vient éclaircir mon doute , en cet(% peine extcêmCf
Telle faifant briller Tes appas infinis ^
Cette mère d*amour va baifer Adonis \
It telle d'orient tous les matins devalle
L'époufe de Titon , dans les bras de Cephalç.
La Reine 9 qui commençoic à fentir pour Ton hôtç
plus que de la pafCon 9 lui témoigne le defir qu'elle a
d'apprendre fes aventures : il les lui raconte 9 & Ë|i^
voir auffi. la plus grande impatience de fçavoir à qui
il doit la vie. On lui dit que c'eft k la Reine de Dal-
matie. Cependant Çléandre fe livre à la plus grande
douleur ^ ne doutant pas qu'il n'r!t perdu fa çhere Flo-
ronde^ En même-tems on vient apprendre à la Reine »
que le Roi d'Epire étoit à la tète d'une armée formi-
dable pour lui demander Cléandie , qu'il veut punir
comme le raviiTeur de fa fille. La Reine > qui faific avec
çmpreffement toutes les occafions de revoir Çléan-
dre, vient lui apprendre cette nouvelle, & lui pro-
pofe de le mettre à la tête de ks troupes , pour fou-
tenîr une querelle qui leur efl; devenue commune.
Poqr témoigner (a reconnoiiTahce à la Reine j^ il ac-
çepçç |a propofîtipn i i^ais malgré toutes les chofes
s
iSS THEATRE FRANÇOIS.
prévenances que loi dit cette Princeûe , il ne pe
s*empècher de Te livrer devant elle à la doaleur la pi
amere , & âax plus tendres regrets Ihr la mort dé'
miritrefle ; ce qui déchire le cœur de la tendre Sain
cis« Dans ce moment , on lui vient annoncer qu'oc
enfin découvert un jeune homme de la fuite de Clés
dre. Il eft nécefTaire àt fçavoir que cette Prince:
avoit fait chercher» avec le plus gt-ànd foin , qo<
qu'un qui appartint à ce jeune Prince : & à for
d'argent, elle lui avoit fait promettre^ pour ôter toute
pérance à fon maitre > qu'il diroit avoir vu périr FI
ronde dans les flots. Ce jeune homme eft introdi
devant Cléandre y qui , reconhoiflant fous ce déguii
ment fa chère Floronde» eft prèt^ dans un tranfp<
involontaire , à trahir un fecret fi nécefTaire à cache
quand Floronde ( qui ne paroit que fous le nom
Lifanor ^ Se que déformais je nommerai toujours aini
ientant toute l'importance du myflère , rintèrromp
& lui Conte comment elle a vu périr Floi onde. Le Pri
ce aSeâe de fe livrer à la plus grande doùlèûr : &
Reine , croyant qu'il feroit bien aife de refter feul av
Lifanor, fe retire & les laifTe tous deux enfemb
Ils fe livrent aux tranfports mutueîs de leur joye >
iè promettent de fe conduire fi prudemment, qu'
ne pourra découvrir leur intrigue. Cependant ta R*
ne 9 dont l'amour augmentoit à chaque inftant, chère
à engager Lifanor à lui être favorable auprès dé (
maitre > & lui avoue que (on déffein eft dé lé phcct l
THEATRE FRANÇOIS. tSy
le Trêoe. Lifanor lui promet de la fervir de Totl
fiûeax. Et quand elle eft avec Cléandr é 9 elle t\t do
la confiance que fa rivale a et elle. Pour jettêr Lifa^
nor dans un plusgràdd embarras , Cephalie , (ceur dé
la Reine > qui eft devenue aiifO amoureufe de Cléan-
dre 9 vient lui faire la même confidence » & la charge
de vanter fa tendrefle au Prince d'Epire. Elle le lui
promet , & fe retire. Dorifmond , grand Seigneur de
Palnaatie 9 depuis lông-tems amourc^u^ de Cephalie »
furieux des mépris dont cette Princefle l'accable > at-
tribue ce changement aux fentimens qu'elle a pour
Cléandre $ & fait appeller ce Prince en due). En
même tems Cléandre » fçachant par un efpion la mort
du TÎeox Roi d'Epire , vient apprendre cette fâcheufe
nouvelle à Flôronde ; & ils prennent le parti de prO>
pofèr à la Reine d'envoyer Lifanor vers le nouveau
Roi 9 pour lui fàn^ des propofitions de paix. Ils
comptoient fur Taniitié du nouveau Monarque y qui
avoit toujours fort aimé Flôronde ; & ils efpéroient
qu'en la revoyant » il ne pourroit lui rien refiifer ^
qu'elle refteroi^*âùprès de fon frère , & que Cléandre
chercheroit le moyen de les aller joindre. La Reine
y confent, & Lifanor part. Cléandre fe porte au ren-
dez-vous indiqué par Dorifmond , & eft auffi-tôt af-
feilli par trois aflaffins , qCtt ce trâicre avoit chargé de
le tuer. II fe défend : Dorifmond accourt au moment
qu'il venoit de tuer le fecond ; le troifiéme fuit bien-
%Q% W (ot% de^ dçux autres ; & enfin Dorifmond lui-
i88 THEATRE FRANÇOIS.
même eft percé d'un coup mortel. Cléandre aûfTi tôt
va rendre compte à la Reine de ce qui vient de fc
pafTer ; mais il la trouve dans la plus grande foreor
contre lui. Elle avoit été prévenue que Cléandre ne
4h battoit contre Dorifmond , que parce que ce dernier
avoit découvert que le Prince d*Epire étoit amoureux
& aimé de Céphalie. Sans vouloir écouter fa juftit
cation , & fe livrant toute entière à la jalou(ie> elle
fait conduire le Prince en prifon , & ordonne qu'on
lui faflfe Ton procès* Les Juges fe rafTemblent > & le
condamnent à mort. On le conduit au lieu du fuppli-'
ce , le bourreau eft prêt de faire fon office > quand un
page de la Reine fait arrêter l'exécution > & donne
à Cléandre un billet de cette PrinceiTe » dans lequel
çlle lui mande que , s'il veut lui donner la main > elle
eft prête d'oublier l'injurîeufe préférence qu'il a don*
née à fa fœur. Cléandre protefte qu'il n'a jamais aimé
Cçphalie , qu'il adore &c adorera toujours Floronde p
& que cette Princefle eft vivante, La Reine > qui oe
peut confentir à fa mort y vient elle-même pour le per-
fuader. Alors Cléandre lui révèle que celui qu'elle a
connu y fous le nom de Lifapor , eft cette Floronde
qu'il adore. En même-tems cette Princefle , toujours
fous les habits de Lifanor y joint la. Reine , & lui con*
firme ce que Cléandre venoit de lui dire. Il faut que
le Lefteur fçache que Floronde avoit bien eraployélc
tems , qu'elle avoit paiTé auprès de fon frère ; non-fea-?
lement elle avoit obtenu la grâce de Ciéapdrç j, v^m
THEATRE FRANÇOIS. t8<)
avoit auffi obtenu Taveu du Roi > pour qu'elle
)u(ac. ï)e plus > voulant lever les obflacles que la
le pouvoit apporter à eet hymen , elle avoit tant
é au Rai , fon frere 9 les charmes de la Reine de
matie j q,ue ce Monarque en étoit devenu amou-
i, » Se avoit chargé le feint Lifanor de propofer à
Leine une entrevue » pour terminer leur querelle ,
aire une paix durable. En effet 9 Lifanor 9 connu
s pour Floronde > propofe cette entrevue à la
ine » qui y confent. Le Roi ne tarde pas à arriver ,
[l auffî - tôt éperduement amoureux de la Reine ;
cette entrevue > ainfi que la piece^ finit par le ma«
rc du Roi d'Epire avec la Reine de Dalmatie . &
celui de Cléandre avec fa chère Floronde. Pour
phalie » prend généreufement (on parti 9 & cède p
s regret ', Cléandre à Floronde.
En tout , cette pièce [eft affez bien écrite ; la con-
ite en eft fage y affez régulière , & n'eft point char-*
s d'événemens ^igantefques , comme Teft la pré«(
iente.
( SUJET DE. LA CËLIANÉ. ) Si je ne tn'étoîfl
s impofé . la loi de donner une idée de toutes les
îces de théâtre jufqu'à Corneille > je me ferois cer-
nement difpenfé de parler de celle-ci ^ qui ne peut
rien exciter la curiofité du Leâeur. Elle eft mal
rite & mal conduite , & de plus , fort indécente ,
ifq'u'bn y trouve plufieurs fcènes > dans lefquellcs !e$
lans s'accablent de baifers redoublés. Pour peu
bme que Ton veuille laifTer égarer fon imagination ,
I^o THEATRE FRANÇOIS.
|1 efl aifé de foupçonner que ce n'efl pas feulemeoti
de (impies baifers que; fe borne la tendre complai*
fance des amans. On y voie une femme bleflfée pat
(on amanc ; & sll eft impoffible de comprendre com-
ment cela arrive I il l'eft encore davantage dlmagi-
ner comment elle eft guérie ^uffi promptement. Ao
moindre obftacle 9 f Aâeur tire fon poignard > & vea
fè tuer; & cette aftion eft répétée fept à huit fois
danti la pièce. On y trouve auffi un excès d'amitié^
digne de rabfurdité de cette Tragi-Comédie ^ qai
commence par la rencontre de Florimant & de Pam*
phile j anciens & intimes amis. Pamphile confie à Flo-
rimant » qu'il eft amoureux & aimé de Nife ; mais que
cette beauté ayant qial-à-propos conçu des foupçoDS
de fa fidélité , pour les calmer y il avoit pris le parti
de quitter fon pays , ^ de venir le trouver. Florimant
fe félicite du bonheur de le voir , & lui confie a.uffi
qu'il eft amoureux ^ aimé de la belle Celiane. Epfîn
il quitte (pn ami, çn \m dif^nt que c'étoit là le mo»
ment quil doit aller voir Pobjet de fà tendrefte. Le
pauvre Pamphile refte feul , & fe livre aux triftes ré-
flexioDiS qu0 loi infpiretit Tinjuftice de ce qu'il aime»
& finit par s'endormir. Cependant Nife p qui a de&p-
prouvé i'abfence de fon amant > a pris le parti de le
fuivre , & arrive précifément daps le bois , où ellç
trouve Paœpl^iie çndornai : elle le reconnoit» & hér
fite quelque tems fur le parti qu'elle doi$ prendre*
Enfin elle fe détermine à tirçr l'épée de Pamphile ;
THEATRE FRANÇOIS. iqr
]e k percer avec ; TelFort qu'elle fait réveille
npfaile y qai > fans la reconnoitre % i'empècbc^
€ tuer. Elle fe mec eu colère d'un fecours qu'elle
iéfiroit pas > & le menace de tourner fe$ armes
tre lui-niême. Pamphile toujours ignorant à qui il
le 9 malgré une longue converfation , fe rit de fes
laces» Enfin leur difpute ne finit , que lorfque
nphi!e lui a pafTé fon épée au travers du corps;
: tombe à fes pieds > & auffi-tôt il l'a reconnoit.
croit bien qu'il veut fe tuer; il fe livre aux plus
dres regrets $ puis fans fonger à la faire panfer, il
re dans la plus ample juftification de (on parfait
:>ur pour elle ; & ce n^eft qu^après un dialogue
aviron cent cinquante yers f qu'il fe rappelle qu'il
t aller chercher le$ moyens d'étancber fon fang.
;ft ainii que 6nit \ç premier a€le. Le dfuxkmt
nmenc^ par une lotigpe conyerfation % que Flori*
pd a ^vec fa Cetiane » qui eQ fimvent ipterrpmpoe
les plus tendres baifers* Enfin Celiane finit cette
ne p^ disç à fon amani :
le ffiîsd'un s^iud G. fpîgtie^x detpn àlfe ^
Que le ne pui$ foufirir que le Soleil me baîTe |
Avançons dans ce bois 9 & parmi ces ormeaux;
Cbercboni pour nous couvrir de plus épais raiiieaux y
Où rien jie vienne plus traverfer notre ^oye , •
Où nous n*ayons ph^ rien qufc l'amour q^i aoiis voye.
En e&t, ils fe retirent dans le plus épais do bois^
ig% TtlEAtRE FRANÇOIS.
où ce Dîeu feul fçait ce qui s'y pafle ; & l'on voit aloril
fur la fcène , Pamphile au chevet du lit de Nife y qui
la baife 6c rebaife > & qui après pludeurs baifers» éta-
blit (k bouche fur Ton fein ; Nife > qui, malgré toute fa
tendreiTe 9 veut un peu moralirer y lui dit :
■
£n baifant ces cheveu ]c , tu n'as qu'un avantage ^
(Qu'une toile infenflble avecque toi parcage :
Crois-tu > touchant ce corps , alléger ton fouci i
Ce bonheur eft commun à. mes h^bics auili ,
Tous ces plaifirs font faux : û la beauté de Pâme
K'efl le premier objet de Pamoureufe fiâme ^ &e.
Elle continue (a morale ; & Pamphile relte toii-
jours fur fon fein , & il ne s'en retire que pour faire
place à Florimand , Philidor & Celiane. Ce qui eft
difficile à comprendre ^ c'eft comment Nife, qui eft
dans fon lit y fort de deflbs la fcène. Enfin » elle en
ibrt> puifqpe les trois Aârpurâ, que je viens de nom*
mer 9 refient feuls fur le théâtre^ Ce Philidor étoit
amoureux de Celiane ; Se malhéureufement avoit été
témoin de quelques privautés 9 qu'elle avoit accordées
à Florimand. Après avoir fait les reproches les plus
amers à Celiane , il marque toute fa colère à fon riv^l»
& ils fîniflent par fe battre. Pamphile arrive fort à
propos pour les- (éparer; Philidor fe retire, & Pam-
phile apprend à Florimand > que Nife eft arrivée , &
qu'elle eft aâuellement dans fa maifon. Florimand va
avec fon ami faire les honneurs de chez lui; & le
deuxième
THEATRE FRANÇOIS. 193
taxîéme aâle irnit* Pendant l'intervalle du deuxième
a troifiéme a6le > Florimand qui a vu Nife , en eft,
evenu paffionnéinent amoureux ; & Celiane en
!ft déjà indruite. Elle confie fa jàloulie à fâ nour<»
ice 9 & quitte la fcène. Florimand l'occupe alors ,
z dans un très -long monologue , il fe reproche de
lanquer ainfi à Celiane & à Ton amie II fe pion-
;e fi fort dans fes réflexions , qu'il ne voit ni n'entend
^aniphile y qui furvient , & qu'il met ainfi au fait de
bs plus fecrettes penfées. Pampbile n'héfite pas fur
e parti qu'il doit prendre : & fans fonger au chagrin
Qortel quil va caufer à Nife , uniquement occupé da
>onheur de Florimand > il l'interrompt pour lui dire
|u'il peut fe tranquillifer l'efprit , & que facrifiant l'a*
Qour à l'amitié 9 il lui cède avec plaifir la beauté qui
aafe fon tourment* Florimand s'oppofe à cet excès
e générofité : & pour fe punir de troubler ainfi le
onheur de fon ami > il tire (on poignard & veut s'en
lercer* Pampbile l'arrête ^ & le perfuade enfin d'ac-
epter le facrifice quil lui veut faire ; il fe charge mâ«
le d'y déterminer Nife : & Florimand enchanté (e
étire. Nife furvient; & le généreux Pampbile lui
onfîe qu'il Ta cédée à fon ami^ Nife s'oppofe en vain
; ce cruel facrifice ; elle cherche envain par les plus
endres careiTes à retenir Pampbile. Celui ci de plus
m plus emprefTé pour le bonheur de fon ami, tire
on poignard > & jure à Nife de s'en percer à fes
reux , fi elle ne confent à faire le bonheur de Flori*
Tome IL îî
f^4 THE ATRE FRA NÇOIS.
âiand. La tendre Nife né peut (butenir ce (peâaclei
confént à tout, & finit par dire :
Mon Tgil s'adoucira par ce contentement >
Que je n'aurai jamais refufé mon amant.
Ceft aînfi que finit le troijîéme aâle ; & le quatrième
conlmehce par une converfation entre Florimand
& Celiane^ où Celiane lui téniioigne toute fa jaloa-
ût 9 & lui reproche toute ia perfidie* Florimand pro-
tefte qu'il lui eft toujours fidèle. Celiane n'en eft pa^
la dupe > & le quitte dans la plus grande colère con-
tre lui* Pamphile & Nife fiirviennent ; & Pamphite
tnnotice à fon ami qu'enfin NUe confent à Ion bon-
heur. Ils Te retirent tous trois» pour faire place à Ce-
liane i qui revient déguifée fous des habits de garçoa
jardinier > tenant dans fa main un panier plein de boa^
qùetSè L*amoureux Filidor la rencontré & la, recoû-
noit ; il profite de l'occafion ^our lui parler de (bft
amour : elle le traite toujours avec la toême froideur)
& joignant la plaifànterie au mépris r elle It quitte en
lui donnant une fleur de fouci. Filidor> reft^feul^fe
défefpere des rigueurs de Celiane; & cft joint par
Julie > fœur de FloHmand , dtfnt il étoit aimé» Elle
Teut chercher à calmbr fa douleur , mais envain ; &
ils fe retirent enfemble» L'on roiç ilors Nife , tenant
une coupe rehiplie de poifon , qu'elle eft dans la réfo-
lution d'avaler > pour ne pas donner la maîn à Flori-
cimand. Après un affez long itonologiie > elle porte
THEATRE FRANÇOIS. \q^
cette ^oupe à fa bouche » lorfque Julie furvient , qui la
lui arrache des mains j & la renverfe par terre*
Nife loi fait des reproches de Tavoir empêché de finir
Os malheurs ; 6c Celiane ^ toujours en garçon jardin
çîer j vient fe mêler à la converfation : elles fe font
toutes trçls ^9 ftyeo mutuel de leurs (èutimens ; &
Julie jniagîne un ftratagème , qu'elle alTure qui les
rendra toutes beurjsufes. Elle (è retiré , & le quatrié*
jne aâe fiuif. Dans llnterv^ille du quatrième ^6le ,
Julie a iuftruit Nife & Celiaoe du rôle qu'elles doi-^
rent jouer : eqfviite elle va trouver fon frère > ^ qui elle
dit que fa tendre amitié pour lui l'a déterminée à lui
révéla qn (êcret » qui va fans doute le mettre au àè-
fefpqir , mais qu'il eft néceffaire cependant qu'il ap«
preuoe; que Nife n'e(l rien moins que fage ,& qu'elle
vient 4e la laiiTer entrp les bras d'un garçon jardin
nier ; l'amoureux Florimand n'en veut rien croire , &
ÙL (ceur pc»ir le convaincre , le mené à la porte de la
chambre, où Geliane déguifée étoit avec Nife. Dès
que Nife entend du bruit ^ elle ne doute pas^ fuivant
ce qu'elles avcnçnt arrangé avec Julie , que c'eft die
qui amené, fou frère, pour le convaincre de fa préten-
dre infidélité. Elle fe jette au col du garçon jardi-
nier ; & Florimand eH témoin des carefles les ^lus
tendces , & entend les difcours les plus paffionnés. Ne
pouvant plus long*tems retenir fa fureur , Florimand
fe .retire , & va chercher Pamphile pour le convaincre
aufiî delà mauvaife conduite de Ni^* En même-tevicv^
ig(S THEATRE FRANÇOIS.
Filidor 9 toujours tourmenté par foh amour pour Ce^
liane > furvient ; & Julie lui confie que la tète a tour-
né à cette jeune beauté , qu'elle fe croie homme 9 8c
& qu'elle eft paffionnément amoureufe de Nife; elle le
mené à la porte que venoit de quitter Florimand ;
& Filidor entend les tendres déclarations que Celiane
fait à Nife > & fe retire en déplorant le fort de Ce-
liane. Cependant Florimand qui eft allé chercher
Famphile , le rencontre , couché au pied d'un arbre $
déplorant Ton malheur ; & il l'arrête au moment qu'il
alloit fe paiTer (on épée au travers du corps. Flori-
mand lui dit qu'il ne doit pas tant regretter Nife > &
lui conte ce qu'il vient de voir. Famphile n'en veue
rien croire. Pour le convaincre , il le conduit à cette
même porte où il avoit été témoin de la mauvaife con-
duite de Nife ; l'on fent bien qu'auffi-tôt qu'elles (bup-
çonnent que ces deux amis peuvent les voir y les ca^
refles redoublent , les plus tendres proteftations k re-
nouvellent. Florimand, cédant à fa fureur, veut en*
foncer la porte ; & Nife > témoignant le plus grand
effroi , fait promptement cacher le garçon jardinier*
Florimand , Famphile , Filidor & Julie , entrent dans
cette chambre. Après avoir fait les reproches lesphis
outrageans à Nife 9 Florimand > l'épée à la main» ar-
rache le garçon jardinier de derrière la tapiflerie t &
veut le percer aux pieds de la coupable Ni(e. Mais
quelle eft fa furprife^ lorfqu'il reconnoit la tendre Ce-
liane^ qui> loin de l'accabler de reproches > lui tient
THEATRE FRANÇOIS. 2.97
le difcoars le plus tendre* Fbrimand fe jette â fcs
pieds 9 lui demande pardon y Kobtient & Tépoufeb
Pamphile s'unit à fa chère Nife; & Filidor qui admire
tefprit de Julie , & qui Tent bien qu'il faut qu'il rei.
nonce à Celiane/ donne la main à cette jeune beau-
té > dont il connoit la tendreffe pour lui.
^ (SUJET DELA PELERINE AMOUREUSE.)
Cet ouvrage eft fi différent du précédent , que Ton
poorroit douter qu'ils îuflent dé la même main-. Celui-
ci eft bien écrit > les vers en font faciles^ l'on en ren**
contre même d'heureux 9 la conduite en eft fage , la
fable bien trouvée ; 6c il n'y a que les défauts dans
lefquels tomboient alors tous les Auteurs , Corneille
n'ayant point encore fixé les régies confiantes du po^-
me dramatique ; ainfi je crois que cette pièce a eu
un grand fuccès y Qc a fait un grand honneur à Rotrou.
Xacidor qui avoit été amoureux à Lyon d'Angélique »
ayant été obligé de rçvenir à Florence , promet à (à
isaitrefie de la revenir trouver dans fix mois. Ayant
négligé de lui donner de k^ nouvelles > elle le croit
îa^déle; & pourpouvoir quitter fa patrie, elle fe
fait pafifer pourmort». Lucidor eft afHigè en appre-
nant cette nouvelle ; mais bientôt touché des grands
-biçns de Celie > fille d'Erafme , il la demande en ma-
riage y & l'obtient : mais s'il a le confentement du
perei il n'a pas celui de la fille. Celle aimoit un au.
;tre Lucidor > qui n'étoit connu que comme Peintre f
& fous le nom de Léandre ; elle avoit même poufifée ,
^latendreflc pour lui afTez loin pour qu'il y parût; elle
îg8 THEATRE FRANÇOIS.
^toît groflfe de quatre mois. On peut juger de
défefpoir , quand elle apprend que fon père la del
à Lucidor. Pour rompre ce mariage , de concert s
ion amant 9 elle fe fait paiTôr pour fplle; elle fe<
Diane , & elle eh décrit les fondions dans des
très bien faits. £lle veut battre fôd prétendu , qu'
prend pour Afteon : elle, joue fi bien fon perfbnnage>
le bon homme Erafme^ après avoir épuifé la rci(
des Médecins , & même celle df s Miniftres des Di(
a recours à une Pèlerine , qui vient d'arriver à Flo
ce , & dont on vante ks fuWimes connoifTanccs.
iiourricè de Celîe , qui fçàit que fcét'te Pèlerine v2
river , & qui fçait combien elle peut être utile à
lie pour cacher fon étât^ va la trouver > lui cobf
vérité de l'aventure , & lui demande fon fecôCIrs j
rompre le mariage de Lucidor avec Gelie. La P
tine y codfent > d'autant pluà vèlot^i'érs y que l'o
de fôn pèlerinage n'^voit d'autre iM que de rétt
ver fon cher LUcidor. G'étoit cette tnême Âhgel
que Lucidor avoit aimée à Lyon , & qu'il croyoit i
tè. La Pèlerine promet à Erafibé d"emplôyer t
ià fcience. Tout alloit le miéUx dû monde , lorfq
vaîet de ce vieillard t qui avoit écouté à la perte
con verfation de Gèlie avec ïà noiihricé ^ vient têi
tout le myftère i Erafme; Le boh-Bomn^e en'i
chercher les aïcHers , & ftit tiitrêcet Léandrè»
voyant qu'il *n*a plus d'autre reffoùrce , tlécoûvr
ijaiffance. Il étoît fils d'un des principaux de Valer
f
THEATRE FRANÇOIS. 19g
& ayant été pris par les Turc$ > & n'ayant pu donner
de Tes nouvelles y il paiToit pour être mort : on ne peut
douter de la vérité de Ton hiftoire» puif^oe fon frère >
qui par hafard étoit à FloreDce > & qui même étoic
ïufli amoureux de Célie , le r econnoit % & lui cède
toutes iês pr étentionl fur lu maiu de cette belle* Eraf-
n&e > enchanté de trouver daqs Tiimantaimé de (à 61Ie^
un gendre d'une auffi grande naiflance , la lui donne
fans balancer; la tendra Pèlerine demandç alor$leur
affiftance , pour conooltre les fèntimens de fon Luci«
dor. Il paroit : on lui parle de cette Angélique de
Lyon ; il avoue tout l'amour qu'il avoit reiTenti pour
elle.: il avoae auffi tout les regrets que 61 mort lui
avoit caa£^s ; &avoueei%ore ^ue > quelque belle que
fût Gélie « il avoit été plus tenté par fcs richefles^ que
par fes charmes. Angélique paroit alors devant lui ;
it la reconnoît avec tranfport , il l'obtient aifément >
ainfi que la main de Ja belle Pèlerine.
/
(SUJET DE FILANDRE.) Les deux frère
.Tbiiiiante & Philandre font amoureux de Theane •
le premier è(t aimé, les vœux du fécond (ont rebu-
tés. GélLdor eft amoureux & aimé de Nerée» fœur
de Thimoœte ;& Cephife^ fceur de Theane» aime vai-
nement Celidor. L'on voit par là que Philandre Se
Cephife font malheureux. Ils s'unîiTent enfemble^pour
parvenir à femer la jabufie dans l'efprit des quatre
amans heureux ; & ils y parviennent bientôt. Theane
tiod . THE A TR E FR A NÇO IS.
troit que Thîmante efl; amoureux de fa (œur ; & Thi«
tnante , de Ton côté, croit que Tincondante Theane re-
çoit les vœux de Ton frère Philandre. On perfuade
aifément à Nerée que Celidor aime Cephife» & a
Celidor que Nerée aime Pbilandre ; ain(i Philandre f
fans cefTe accablé des rigueurs de fa raaitreiTe 9 & le
plus infortuné des amans I pafle pendant quelque tems
pour le plus heureux & le plus aimé des hommes*
Mais enfin la fourbe fe découvre i Thimanthe , qui ,
pai^un excès de douleur de ht perte de fa maitreffe,
s'écoit allé noyer , (è retrouve ; & la pièce finit par le
mariage de Thimante avec Theane 9 de Celidor avec
Nerée > & de Filandre avec Cephife> qui tous deux,
n'ayant plus d-efpérance pour fe confoler> prennent le
parti de s'époufer. Quoique cette pièce ne (bit pas
mal écrite , le fujet en eft petit , llntrigue commune ,
la décence y eft peu obfervée , & l'envie dç fe tueç
prend aflez louvçnt aijx Aftcuts,
(SUJET D'AGESILAN DE COLCHOS.)
Ce fujet eft tiré mot à mot des Amadis. La pièce
commence par un combat de Florifel avec Bruneo 9
Prince amoureux de Diane » fille de Sidonie> Reine
de Guindaye & de FlorifeL Pour donner l'intelligen-
ce de cette pièce à ceux qui ne connoiiFent pas les
Amadis , il eft néceffaire de fçavôir que Florifel , fils
de l'Empereur Amadis de Grèce» étant jeune Cheva-
lier, & cherchant les aventures, pafia dans i'ifle df
Guindaye^ vit Sidoniç^ en devint amoureux, lui plat^
THEATRE FRANÇOIS. xoi
8c en eut la Princeffe Diane ; que ce Prince tomba
bien tôt dans le plus violent défefpoir > d'avoir ainfi
manqué à la Princeffe Lucelle j dont il étoit éperdâ*
ment amoureux > & qu'il prit le parti d'abandonner
Sidonie ; que cette Reine 9 au défefpoir de la perte de
Ion amant V ne recevoit d'autre coniblation que de la
jeune Diane, dont la beauté croiflbit chaque iour ; que
dès que cette jeune Princeffe eut atteint 1 âge de trei**
zc an9> on ne pouvoit la voir fans l'adorer ; que Sido*
nie avoit envpy^é le portrait de Diane dans toutes les
Cours de l'univers» & avoit promis que celui qui lui
apporteroit la tète de Florifel y deviendroit l'époux de
fa Hlle ; que plulieurs Princes avoient déjà tenté de mé-
riter un prix au(C flatteur > & que Bruneo étoit un de
ceux i}ui pourfuivoient la mort de Florifel. Ille jointe
le combat & efl vaincu. Florifel lui rend la liberté,
& lui ordonne feulement d'aller mettre fes armes aux
pieds de la Reine Sidonie. Bruneo rencontre le jeune
Agefilan 9 fils du Roi de Colcbos , à qui il compte fon
défaire ; il lui montre en mên^e tems fon bouclier »
fur lequel étoit peint le portrait de Diane. Agefilan
D'à pas plutôt jette les yeux fur cette beauté > qu'il en
devient pafSonnément amoureux ; mais ne pouvant
honnêtement entreprendre d'ôter la vie à fon onclé
Florifel) il prend le parti» par le confeil de fon Ecuyer,
^e s'habiller , en femme» d'aller en Guindaye, 6c de
chercher les moyens fous ce déguifement , de fe faire
introduire chez la jeune beauté qu'il adore. Il arrive
xo% THEATRE FRANÇOIS.
bien-tôt dans cette lile , Ce met fous les fenêtres de li
belle Diane , Scy chante cette cbanfbn :
\
O ciel ! û ta Diane eut de mêmes appas ,
Qu^on peint ceux de celle que faime ,
Ce qu*on dit de Venus, & de Paris n*e(l pas »
Ou Ton aveuglement en jugeant, fut extrême*
La Princeffe enchantée de la beauté de la voix
qu'elle vient d'entendre , fe met à la fenêtre , & que-
flionne laperfonne qui vient de chanter : Agefiiîin dé-
gttifé lui répond en tremblant, tant il éft frappé de
ks charmes. EhSn il lui dit qu'il eft une jeune fille
de Crète , qu'il fe nomme Daraïde * ; & qu'ayant en-
tendu dire que Diane étoît la gloire du monde , elle
àvoit pris le parti de venir lui offrir fes ièrvices. La
PrincefTe , enchantée &de fes talens& de ià" conver-
fatîon , la retient avec grand plaifîr , la préfente à la
Reine , qui confent que Daraïde vive avec Diane; &
bien-tôt Diane fènt la plus tendre amitié pour l'aima-
ble Daraïde. Bruneo arrive en ce moment , qui, pour
exécuter les ordres de Florifel , met fon épée aux
pieds de la Reine. Cette PrincefTe , qti , malgré l'in-
fidélité de Florifel , raîmoit encore , témoigne en mê-
me-tems & de la douleur de voir que fk vengeance
n'eft pas fatisfaite > & de la joye de ce que fon par-
jure amant u'avoit pas perdu la vie. Après quelques
événemens affez îndifférens ', le Prince Anaxartei
* f r ;e n'en parlerai plus que fous ce nom*
r
THEATRE FRANÇOIS. aoj
Chevalier amoureux » arrive à la Cour de Guindaye y
pour (butenir , les armes à la main , que fa maicrefle
êft la première beauté de l'univers. La feinte Daraïde^
révoltée de ce difcours> arrache une épée de la main
d'un page , pour foutenir que la beauté de Diane tie
pëUt foufFrir aucune comparaifbn* Après quelques poli^
t^fTes qu'Anaxarte fait au fexe de Dat^ïde f il eft
6nHn forcé de combattre contre elle ; & Daraïde
eft bien - tôt viÀorleufe, La Princeffe eft enchantée
de devoir le prix de la beauté à (a chère Daraïde ;
& la Reine» furprife & charmée de fa valeur , la char-
gé de venger fon injure contre le volage Florifel.
Daraïde > n'ofant refufer la Reine > lui promet une
prompte fatisfaârion. Cependant , quand ii eft feul , il
regrette les momehs qu'il va paffer éloigné de fe chère
Diane ; & dans (k dbuleur , il (t ^omme 8c fe fait
connôître pour le Prince Agefilan à Ardenie « confi-
dente de Diaîîe> qui Fécoute. Cette Zfélée confidente
va fur le champ révéler ce myftère à Diane , & la fé-
licite fur une conquête auifi glorieufe Diane lui avoue
qu'envain elle Veut fe fâcher , que l'amour la retient,
• "^u'efle aimoît Daraîdé, qu'elle aime Agèfflan ; mais que.
Il le Prince ofé lui découvrir fe maiffiince , elletâche-
Ta pendant quelque teins de lui trémbigner de la cô-
iere. En effet, Daraïde arrive pour prendre xrohgé
^'elle ; & dans rattendrîffement de fes adieux , elle fe
*fàît connôître pour l'amant le plus tendre. La Prin-
ceffe feint d'entrer dans la plus grande colère , & fe
ao4 THEATRE FRANÇOIS.
retire. Le Prince , fè croyant perdu > tombe fans con*
ooliTance : la Reine paroit» fuivit de Diane » qui}
fçachant ' le défefpoir de fon amant > cherchoic une
occafion de le calmer. En effet « elle trouve le moyen
de lui dire bien des chofes , qui remettent le calme
dans Ton ame; elle finit par Tembrafler. Le Prince
part y arrive au bord de la mer pour s'embarquer > &
«ft fort furpris d'y trouver Florilel , qu'une tempête fu-
rieule avoit jette fur le rivage : ils fe reconnoiflenc*
«AgeGIan 9 enchanté d'une aufll beureufe rencontre»
avoue à Florifel qu'il eft chargé par Sidonie du foin
/de (a vengeance; & fans lui faire part de (on projet»
il le fait cacher dans une maifon fûre , & va auffi-tôe
trouver Sidonie , lui dit qu'il a rencontré Florifel i
^n'il Ta combattu & tué. La Reine^» au défefpoir , k
livre aux plus tendres regrets , veut mourir ; mais
auparavant elle délire voir encore l'amant qu'elle a
«ant aimé 9 & fe tuer auprès de lui. Daraïde la con-
duit dans la maifon où étoit Florifel ; la Reine re*
connoit qu'il n'eft qu'endormi : Daraïde lui dit qu'elle
^ voulu lui réferver la gloire de fe venger elle-mè'
me. La Reine n'y peut confentir. Florifel iè réveille,
jreconnoit cette Reine 9 qu'il avoit autrefois tant ai*
mée y fe jette à fes genoux y lui demande grâce y loi
jure un amour éternel y lui offre fa main y dont il étok
maitre de difpofer » la Princeffe Lucelle étant morte.
La colère de la Reine s'éteint 9 l'amour vient régner k
fa place ; & elle confent ^ avec tranfport y k ThymeQ
THEATRE FRANÇOIS. %o^
qae Florifel lui propofe. Daraïde rappelle alors à la
Reine le ferment qu'elle a fait de ne donner la maio
de Diane qu'à celui qui lui livreroit la tète de Flori-
fel y & la fomme de lui tenir fa parole y puifqo'il
avoit rempli la condition. La Reine lui dit qu'elle en
tèroit enchantée , fi elle étoit d'un autre faxe ; Daraïde
lui répond que, puifqu'elle ne veut pas la lui donner^
à fa prière 9 elle ait la bonté de l'accorder au Prio»
ce Agefilan > qui efl éperdûment amoureux de Dia*
fiu. La Reine y confent : Daraïde k fait alors recon-
sdtre, & bien* tôt l'union, de Florifel & de Sidonie,
d* Agefilan avec Diane rendent ces quatre amans
heureux. ( La pièce finit par une fcène d*un certain
Rofaran^ faux brave, & perfonnage épiTodique > que
TAuteur avoit introduit dans cette pièce , pour y ré-
pandre de la gayeté , & qui n*y jette que du froid ;
c"efl le feul défaut qu'oin puifle reprocher à cet ouvra*
ge 9 qui efl le meilleur que jufqu'alors Rotrou eâc
compofé. La conduite en efl fage & intérefTante ; la
verfification en efl noble & aifée ; & je crois qu*avec
un peu de foin» on la pourroit mettre à portée de
paroître avec fuccès fur notre théâtre.)
(SUJET DE L'INNOCENTE INFIDÉLITÉ.)
Hermante > jeune beauté , dont Felifmond y Roi d*E«
pire , avoit été épris & bien traité , déplore fa foi-
blefTe , voyant que ce Roi alloit faire monter fur le
Trône Parthenie ^ dont il étoit devenu paiTionnémenc
amoureux : elle veut oaourir plutôt que de renoncer
au Trône 9 &: au cœur du Roi. Enfin Clariane» ùl
%o6 THEATRE FRANÇOIS.
nourrice , à qui ^lle con6e tous k$ çhagrioi » lui
ièille diroplorer le fecours d'un vieillard > qui
doit Tart magique, & fe propoTe d'ailer le cor
de fa part. Hernsante la prefTe de oe pa^perd
tnflanc. Clariane y vole, & revient bien-toc lui
que le Magiden lui prépare un açneau encb:
que tant qu'elle le portera à ion doigt > le Roi i
d'amour que pour elle ; & que dans u|ie heu
plus 9 elle aura cette bague en fa puifTance : mais
heuteiifeœent pour elle penxiant ce court înter^
le Roi conduit Partbenie au Temple , & l'épouA
Roi témoigne toute la )oye> qu'il refTent de ce
nen. Mais à peine la cérémonie en eft achc
qu'Her mante entre dans le Temple, & aufll-tô
lifmond ne voit plus Parthenie qu'avec mépris
s'occupe uniquement d'Hermante. Tout le monde
pris d'un G prompt changement , fort ; & le Rc
Hermante avec empreflement 9 qui ne le traite qu
dédain. Enfin elle confent à lui pardonner » s'il (i
termine à faire périr la nouvelle Reine , ^ à la
régner en fa place. Felifmond > aveuglé par la i
invincible du charme 9 y confent ^ & forme le de
de charger Evandre 9 fi>n confident , de condui
belle Parthenie dans une maifon de plai(ance , de
tre côté de la rivière, & en chemin de la n<
Hermante lui promet alors de lui rendre toute fà
dreiTe ; & pour préliminaire^» lui accorde quel
baifersi que le Roi >reçoit avec tranfport. Il en
THEATRE FRANÇOIS. %cj
aaffi-tôc chercher Evandre > & lui ordonne d'exécatei:
cet horrible projet. Cet Evandre écoit un homme ver-
tueux > & fort attaché à fon maître ; il accepta cette
cruelle commiffion', non dans le deflein delà remë
plir y mais dans la crainte que » s'il l'eût refufé , le Roi
c'en chargeât un autre » qui l'exécutât pour faire %
cour au Monarque. Il va donc trouver Parchenie »
qui y malgré toutes Tes injufiices , aimoit pa(fionémeot
Felifmond. Il lui confie l'ordre barbare qu'il vient At
recevoir; mais il lui jure en mêmetems qu'il ne l'exér
cutera pas f & qu'au contraire il va la conduire dans
une forterefle à lui y où elle vivra inconnue & en (&;•-
reté f & qu'il fera courir le bruit de fa mort. Cette
îenne & vertueufe Reine ^ voulant en tout complaire
à fon cruel époux > preflfe Evandre d'exécuter fa conH
miflioD. Enfin elle Ce rend^féduite par refpérance 4le
Toir>un jour» le Roi revenir de fon aveuglement, & (e
laifTe conduire au Château d*Evandre. Cependant il
y avoit à la Cour d'Epire un grand Seigtieur > nommé
Clarimond , fort amoureux de Parthenie , qui avok
compté l'époufer , & qui étc^ au dérefpoir qu'elle eût
donné la préférence au Roi. Il ie flatté de pouvoir
profiter du mépris que le Roi ténooignoit pour (à nou^
velle ^oule. Et ayant appris par Clariane le funeAe
projet contre ia vie de la R-eine-» fie le fecours que
lui prêtoit Evandre > déterminé par les confeik de
xette vieille intriguante y il fe détermine à Tenlever
du Château i où l'on venoit de la <:onduire« Pour y
ap8 THEATRE FRANÇOIS:
parvenir > il étoit néceffaire de féduire une jeune fîlle>
nommée Leoniet la feule qui eût fuivi la Reine ; &
la feule y qui pendant la nuit , pouvoit ouvrir la porte
du Château. Celiane s'en charge , a une longue coa«
Terfation avec elle, lui donne de riches préfens delà
part de Clarimond ; & cette fille promet de faire tout
ce que 1 on défire. Ce n'étoit qu'une feinte : Leonie
connoiiToit toute la noirceur de l'ame de Celiane; &
dès qu'elle l'a quittée , elle va avertir la Reine , en
préfence d'Evandre , de ce qui vient d'arriver. Evan-
dre prend fur le champ fon parti, il arme les foibles
mains de Parthenie & de Leonie, de deux piflolets;
il en prend autant , & vont tous trois attendre Cla»
rimond à la porte y par laquelle il devoit être intro-
duit. Ils ne l'y attendent pas long tems. Â peine ce
criminel amant de la Reine eft - il entré i qu'elle loi
lâche un coup de piftolet : il tombe mort ; la faite
s'enfuit ; la coupable Celiane qui l'accompagnoit >
laifie de frayeur » eil arrêtée y & fait bien-tôt Tavea
de tous fes crimes. Evandre n*a pas plutôt appris
que c'eft par le fecours d'une bague magique, qae
Hermante triomphe du cœur du Roi , quil recondok
en fecret Parthenie à la Capitale. Il la tait cacher
dans fon appartement, & va dire au Roi qu'il a exé-
cuté fa comminfion.. Felifmond ^ de plus en plusavea«
glé , loin de fentir aucun remords , paroît même en-
chanté de cette nouvelle. Il eft bon de fçavoir que >
lorfqu'Evandre eft introduit devant leRçi^lafituatioa
n'eft
f THEATRE FRANÇOIS. %o§
tfeft pas trop décente. Il le trouve fortatit du lit d'Her-
mante , fe fervant des domeftiques de cette femme
pour s'habiller , maudiflant la brièveté d'une nuit auffi
délicieufe pour lui : & tout cela fe pa(te devant
les fpeâateurs. Félirmond va achever fa toilette dans
un cabinet f où il emmené Evandre. Cet homme ver-
tueux profite d'un moment où le Roi veut refter feùl ^
rentre dans la chambre d'HermanCe ; & > le poignard à
la main > lui arrache le fatal anneau qui avoit troublé
l*e(prit de Féiifmond. Cette femme appelle à fon fè«
cours ; le Roi paroit » & veut la venger. Mais le char-
me n'a voit plus d'effet : il la trotive bien- tôt auffi haif*
Éible 9 que l'inftant d'auparavant il la trouvoit adora*
- ble. Le crime qu'il vient de commettre y fe retrace à
i'inftanc à fes yeux; il (è livre au plus affreux délè&
poir y envoyé Hermante en prifon y & ordonne à Evan-
dre de faire dreffer un maufolée dans le même Tem^
pie > où le matin il avoit époufë Partbenie y il lui or.
donne en mème-tems de âiire raflembler les parens de
cette Reine infortunée. Accoutumé à la promptitude
avec laquelle Evandre exécute fes ordres y il fe rend
lui-même dans ce Ten^le , raconte aux parens de
Parthenie le crime qu'il a commis, & leur propofe de
i le punir > en l'immolant aux mânes de fa vertueufé
époufe. Voyant qu'ils relient tous dans l'inadion^ il
tire fon poignard & veut s'en percer. Maisja Reine
paroit y qui change l'excès de fa douleqr en. un excès
de joye. Il lui demande pardon^ & il.robtient aîfé-_
Tome lU O
%to THEATRE FRANÇOIS.
mène. La pièce fiait par le cosnfeil pxadenc qn'EvaiP
dre donne au Roi , de laifier à la Reine une heure de
repos > donc elle a un grand .belbio.
Le travail du chemin a Ia(Ie c^ beau cprpj ;
£c le chemin eft long du Royaume des morts.
Cette p^ece t^e peut €;ertainen^ejnt pa^ eotrer gn
comparaifon avec la précédente. Elle eA cependant
aflez bien vcrfifiée ; mais j'intrigue en eft jmaf conçue
& mal conduite. On ignore fi la vieille Çeliane eil
punie ; on n'eft pas plui sofiruit du fort d'Herroante ;
à chaque inQant la fcèoe ichange de Jieu ; & la iitqatioo
dans lacjueUe Evand^ trouve le j^oi , ^a^omme^cc*
ment du cinquième afte ^ eft de la plus grande indé-
cence > ain(] que les détails.
(SUJET DE LA FLQRINDE.) Cette pièce
eft 9 je crois > une des plus mauvaifes de Rotrou : die
eft mal écrite ; & quoique Tîntrigue en fbit aflez platte>
elle n'a cependant nulle vraifemblance. C'eft un nom-
mé Celiandre > qui tourne la tète à toutes les fem.
mes qu'il rencontre. Il n'aime cepetldant que Clorin-
de 9 qui par le confeil de Dorimene 9 fà rivale , aiïefte
de rejetter Tes vœux » quoiqu'elle l'aime pafliooé-
ment. Cet amant au déiefpoir de fes mépris , feint de
rompre fes chaînes , & de s'attacher à Dorimene.
Clorinde , quoique dans le plus horrible chagrin 9 n'a
pas Pefprit de s'expliquer avec lui » & perfuadée de
rinconftance dé fon amant , elle fe livre à la doulenr
la plus amere^ & prend le parti de mourir. Une de
V V
r THEATRE FRANÇOIS. an
ttt amies > nommée Lifante , la voyant baignée de
pleurs 9 lui demande le motif de fes. larmes ; elle lui
raconte rinfidéUté de Ceiiandre : la jeune Lifante ^
pour fervir fon amie , lui promet d'emplayer le fecours
de la plus fine coquetterie, pour détacher Ceiiandre
de Dorimene, & s'engage de le ramener bien-tôt à
fes pieds. En ei&t^ elle trouve le moyen d'avoir une
longue converfkion avec iul , dans laquelle elle em«
ployé avec adreile cet art fëduiiknt , û funefte à la li-
berté des hommes ; mais envain. Cependant plus elle
caofe avec Ceiiandre , plus elle goûte les charmes
de ÙL converfation. Enfin cette feinte la conduit in(ën«
Q>lemait iôus le pouvoir du Dieu qu'elle avoit fi long-
^ems bravé. Oubliant alors les intérêts de fon amie %
elle s'occupe uniquement à le confirmer dans fes inju-
fies fbupçoos. C'eft ainfi que (e paflent les quatre
premiers aâes fans ciialeur , ians intérêt , & dans une
querelle monotone : quepetle qui pouvoit 6c qui de-
voit finir dès la première fcène ; mais l'Auteur vou-
loit donner une pièce en cinq aâes. Enfin dans le cin-
^émc y .CeUandre delèfperé > & né pouvant plus s'ex-
pofecaux rigueurs & aux mépris de jClorinde > fe dé«
. termine à aller à la guerre^ & en partant lui fait re-.
I mettre la lettre la plus tendre. Clorinde enchantée
prend auffitôt le parti de courir après fon amant , 8c
de le ramener avec elle. Et apparemment , pour exé-
cuter iim projet d'une façon plus galante > elles s'ha-
inlienc en hommes > elle ^Lifanti^ 9 avec laquelle elk
Ou
^
ftex THEATRE FRANÇOIS.
étoic raccommodée j depuis Taveu que celle-ci lof
avoit fait de fa trahiron > & le repentir qu'elle îui en
avoit témoigné. Toutes deux donc > le pifiolet à la
main, attendent Celiandre à (on paiTage; celui-ci» plon-
gé dans Tes trides réflexions^ eft fort étonné des'en^
cendre demander la bourfe ; il veut fe mettre en dé-
fenfê} & reconnoit Clorinde. On croit que c'eft lu
qui fe précipite à fes genoux ; point ^c'eft elle qui (ë
Jette aux fkns > où elle lui fait Taveu de Tamour le
plus tendre > & où elle lui jure. que ce n'eft que par
les confeils de la perfide Dorimene, qu'elle a afiefté
une indifférence , que fon cœur démentoit parfaite*
tnent. Celiandre > au comble du bonheur y renonce
auffi-tôt à fon ardeur guerrière, embraife (k mattreffe;
& ils retournent enfemble à Paris pour fe marier. La
jeune Lifante engage auifi fa foi à Celimant > frère de
Clorinde > qui , depuis long - tems , étoit amoureux
d'elle : & l'on foupçonne que Dorimene va fe Ëiire
Religieufe.
( SUJET D'AMELIE.) Amélie avoue à Dorife,
fa confidente» qu'elle eft touchée de l'excès de l'amour
de Dionys; mais qu'elle n'ofe pas lui faire l'aveu de
fa tendrefTe. Celle-ci lui confeille d'aller dans le jar-
din» de fe coucher fiir un lit de verdure» & que
lorfqu'elle y verra arriver fbn amant» de feindre de
dormir ; & en rêvant de lui avouer tout ce qu^elle
penfe de favorable pour lui ; qu^enfoite à fon réveil ^
THEATRE FRANÇOIS. %i3
elle lui dira qu'on ne doit point faire aucun compte
des longes. Cela s'exécute ponftuellement ; & le ten-
dre & difcrec Dionys pafTe fubitement de l'excès de
la fatis&âion dans l'borrible chagrin > d'avoir vu Ton
bonheur ne durer qu^un inftant. Il eft bon de fçavoir
que le père d'Ameiîe ne vouloit point de Dionys pour
gendre ; il ne le trouvoit pas aflez riche : il donnoic
la préférence à un certain Erafte > que fa fille déte^.
fioit. Après plufieurs événemens très- peu intéreflans,
Dionys propofe à Amélie de l'enlever ; & elle y con«
fent (ans balancer. Son bc^n-homme de père fe déref-
pêre à cette nouvelle; & Erafte prend le parti de
courre après elle ; il ,1a joint > & la veut faire arrêter
par deux laquais qui te fuivoient. Un jeune bomtne
prend, la défenfe d'Amélie : Erafle met l'épée à la
main pour le punir de (on audace; mais il jette bien-
tôt Tes armes à Tes pieds » lorfqu'il le reconnoit pour
Cloris, jeune Demoifelle, dont il avoit été palTioné-
ment amoureux > & qu'il croyoit morte. Ses . feux fe
rallument ; il promet à Amélie de ne plus porter ob«
llacle à (on union avec Dionys. Il va même trouver
le père 9 dont il apporcre le confentement ; & tout fe
termine très heureufement & très ennuyeufement. Il
y .a même un troifiéme mariage 9 d'Orante » fœur d'A«
melie » &vec Lyfidan > ami de Dionys. Je n'ai point
parlé de l'intrigue de ces deux amans ^ à laquelle j'a-
wue gue Je n'ai pas compris grand chofe. Cette
O iij
a/4 THEATRE FRANÇOIS.
Orante fage & vcrtueufe, q»i a promis fa foi à Lyfidan^
devient tout-à-coup amoareufe de Diotiys y fie fait de
vains efforts pour i'entever à fa iëeur. Sa paffidn s'é-
teint aulfî aifément qu'eHe s'étoit allumée , & elle finit
par s'attacher à Lyfidan. Atl refte i cette pièce » quoi-
qu'un peu mieux écrice , eft encore plus mauvaife que
la précédente. II eft difficile de comprendre comment
Rotrou a pu s'imaginer de tirer cinq aâes d'un fujec »
dont on auroit peine à faire une fcène théâtrale. II a
cru peut-èére trouver une grande reiToprce dans lé
rôle d'un Capitan ; mais ce perfpnniige $ ordinairement
très-faiiidieuxy eft ici d'uq ennui mortel, & pour le
moins âûfli .p]at que l'intrigue de la pièce; & en vé-
rité c'eft tout dire. ' ,
(SUJET £>ES SOSIES. ) Gé fùjët éft trop conntf
pour mériter un ^extrait; G'eftmhe- tradiiâriôn-, ou
pour mieux dire y une imitation de J'Ampbitr^on de
Plante ; pièce que Molière a JFait paroître depuis fur
notre théâtre , â'une façon fit bcilïaiite, qu'elle eût fait
oublier celle de Rotrou^ fi elfë ne feùt été dès fa
naiflance.-
{ SUJET BESi DEUX PUGEIiLES. ) Théo-
dofe & Le|]cai}ie> (ont ceé deu^ prétenidûes P«œL-
les^t qui ifen noéritenit rien moins que le ctom, puit
qtre la première ( (bu&la promeife , il efl: vrai , de itia*'
riage) a déjà ceflé de l'être > & que k iicednde comp-
toit bien aulfi fur la même avendare ) ayant accordé
^ pendant la nuit un rendez-vour kfy& amajit » qui n'a
THEATRE FRANÇOIS. %îS
f^ liea > 8e qui occaiionne un qaiprôqup > principal
iacideot de cette pièce , qui commence par ces vers :
Dieux ! que te Ciel , ce foir , couvre d'un voile obfcur
Ce lambris étoile de fa route d'azur !
O àtitt ! pour m*eâcaucer tu pafles ma prière ,
Tu {êmMes moins cacher qu'éteindre la lumière , &c.
C'éft Dom Antoine qui les dit , allaht chez Leucà-
die > qui doit cette huit même conibier tous fes defirs.
Il eft joint par Lindamor , fbn domeftique > à qui il
dit:
. Mais f approche à la £n du glorieux féjour »
Où je dois polfedér ce miracle d'amour.
Auens- là mon retour , & quoique ta pnTdehcc
T'ait Eût digne d*entrçr en notre coii^nc^ }
Ne te laiffe point voir à ce premier abord
Où l'honnlte pudeur fait un dernier effort ,
Où quelque glace en<tor relie parmi les fiâmes j
Où les moindres témoins blçiTent les yeux des -dames >
Où la crainte eft encoc fî proche du dedr ,
Qu'elle y ravit aux fens la moitié du plai/ir.
Enmème.tems Lindamor lui ren^etihie lettré de Théo-
dofe, }eune beauté > dont il avoie obtenu les dernières
&f eurs, àprèsi Itiî avoir promis de l'époufèr? Tattrait du
phifir ]e détoufue Aé lire <^ette lettre. EnStiil la iit^
il cft touché de Pextrètiîe tendreflfe qu'on lui montre ,
8c de l'aveu qu'on lui &it qu'il fera bien- tôt père. La
probité triomphe ; & il renonce bien • tôt au rendez^
roQS) qui> l'inftant d'auparavant» fàilbît l'objet de
/^
%i6 THEATRE FRANÇOIS,
tous (es vœux. Cependant Leucadie > impatientée de
pe point vpîr arriver fon ainant > defcend en petit
destiabillé à la porte de fa maifo» ; elle entend du
bruit, croit <jue c'eft lui , & dit : cher Antoine > eft-ce
toi. Elle redouble cette queftion , avec encore plus de
tendreife; 6c Ton peut juger de fa iùrprife & de fon
défefpoir ^^uand au lieu de (on amant > elle reconnoit
fon père, qui fe met dans la plus grande colère coo^
(re elle. Çeft ^infî que finit le ^r^mier aSe. L^ fécond ^
ain(i que les rroi; autres fe paiTent chez un Hôtelier,
ou dans les environs de l'Hôtellerie , dans laquelle la
jeune Theodofe, inquiète de Tabrence de' Dom An-
toine, venoit d'arriver , & a voit demandé, uae chans-
bre pour elle feule, Il eii néceflair^ de içavoir que
pour pouvoirs fui v^^ fon amant i elle s'étoit vêtue en
homme ; que rhôte & l'hôtelTe y (ont trompés , &
qu'ils raifonnent çntreeuxdu chagrin cruel où ce jeune
homme paroît plongé. Peu de tems après , unt autre
jeune homme , nt)mmé Alexandre , arrive dans la me*
me Hôtellerie , & demande une chambre avec ero-
pr^ffement : l'hôte lui répond qu'il n'y en a plus ; il
inlîfte y 6ç fur l'affurance qu'il m veut prendre .^'ob
inoment de repos , l'hôteiTe imaginant que le premier
jeunç homme doit dormir, ellçje, conduit dans fa
chambre , en prenant la papole 4» d^^P^Çr arrivé, qu'il
.n'y reftera que trois heures au plus. Le voilà donc
introduit dans la chambre où étoit Theodofe; il fe jettç
f^r un lit ; mais à peine y eft il , quç l'iofoiftw^ç
THEATRE FRANÇOIS. %iy
Theodofè , qui croît fon amant infidèle , commence
les plus criftes complaintes. Alexandre en eft fi toa«
cbé > qa'il ne peut s'empêcher de le lui témoigner*
Theodofè furprife > & craignant qu'on ne veuille atr
tenter à fon honneur ^ (ë jette en bas de (on lit ; Ale^
icandre en fait autant > & lui propofe > malgré la fati*
gue dont il eft accablé, de fortir de cette chambra»
fi il l'iniportune. Il s'offre en mèmje-»tems de la fèrvir
de tout fon pouvoir : Theodofè prend confiance en lui>
& finit par lui compter fon hiftoire ; ce qui pjrocurj^
une reconnoifTance : car cet Alexandre, à qui elle
vient de confier qu'elle eft groffe » eft fon propre fre*
re ; mais elle Ta voit fi fort intéreffé par i*éxc$s de
l'amoor qa^UeLavoif témoigné pour Dom Aptoin^t
qa'il lui promet- de la fervij: > JU jfe ' punir fbn amanç
4s'il eft infidde. Ils .partemt enfèmble de cette Hôtelier
rie 9 & prennent le chemin deSeville. En pafTant
dans une forêt >.U9:C<^0coQtren| unjçune homme, que
les voleurs avoiçnt attaché à un arbre > après l'avoir
volé. Il eft bon que le Leâeurfçacbe que ce jeune
homme étoit l'infortunée & tendre Leucadie > qui>
pour fuir la çdere de fbn per^e-^ ayoit pris le parti de
levètif ainfi, & avoit été vQléç&; attachée à cet ar-
bre par les v^le^rs* Dans la criiiQjl;^ de les rencoa.
trer y Alexandre & les deux jinipe^ Fucelles ^ dont
l'une étoit déjà groffe, &dont l'autre avoit bien comp«
^é en courre les rifques^ reprennent le chemin de
}'l)ôteUerie ; pour fe mettre en état de voyager avec
%ï8 TSEdTRE FRANÇOIS.
phis de nihroté. Dè$ ^tilts font arrivés , les deux jeu"
nés aies dégaifées fe fient de la plus tendre amitié ,
& fe ptonifeêcènc la pias tendre confiance ; elles fe de-
mandent leur aventure ; la pauvre Leucadie commen-
ce à compter la &énne > elle nomme fon amant , c'é-
toit ce même Dom Antoine ^ que Theôdofe avoit tant
de raifons de regarder comme fon m^ri ; ètle f^tt
cependant fe cofHieniry & laifie à fa rivale' ïé tems
d'achever fonhrfïoire. Cependant Alexandre y informé
du fexe de Leucadte ^ en étoit devenu pàffionnément
amoôr^i. Peu de tems apirèt» it fe paffe un grand
brurit ; c^étott Tes mèmei voleurs qui potirfiiWoieD^
Dbm AntoiMé Leucadie le rècbnnôft, & vote à foa
fèco^f^ y mais eftvaiti ; il tùm^^ baigné datis fon fang,
ài^ iftdtâcifat qu'Aldkandre & Theoddfe^ arrrrVQientpoar
le défeÀ^e. Les vôteur^ i^erifiijrei^; lïom Antoine
recoâtioit fes deu^ m^ltreffes >^&^ft aC^ emba'r raflU
Mai$ eâfiiï croyant n'avoir pins qu^'un moment à vivre y
il fé déelaréen faveur de TheodDfe.- Le^Leâreurfçait
MMl^^en hc^iiffMmr r it né p6â^i| pas felre^ autre-
ment. Léâcàfdié Ib^ die là mad&Wr & bientôt après
éîd appôiler Thîeodôfe f voûtant fe^ ba^re avec elle :
Tbé(9dofe vvéÀfk- (po«lv^, & lui pafle avéë tant de
é6>âceùr &d'anâtié> qâb Leufcadie rÉfmbràfTb & M
t^ fon amant. MÙselfe j^nden mèmé-iems lé
partî de n(i6urir;-&' *yattt reécôlDtré les arcbeirs qui
eherchoient lés ^otefuifs, eHé fé ftiit paflfer pbur un
tf eux } avoue que dépôts la ptûs tendre jeuneffe > eSe
THEATRE FRANÇOIS, ni^
nt cmbrafTé la proféf&on dt voleur » qu'elle avoir
nmis tant de vols > tant de in^urtres. Enfin les ar-
;rs l'arrêtent & la cotiduifeiit en prifon , ce qu^
nine le quatriçme aSte. Le cinquième commence par
combat entre le père de Dom Antoine Se celui de
eodofe. Dpm Sanche , père de Leucadie , compté
n en avoir auiC fa part , en cas que celui de Tkeo^
è foit vaincu ; ce combat eft interrompe p*ar Dom
toine, qui henreurement n'a volt point ééé âu&
Se qu'on l'a voit imaginé > & qui étoit dan^ la frfui
Biite famé, il fe foit alors qne grande recoÀnoî&
ce : Theodofe demande pardon à foù père 9' tdb^
Qt , & etvméme tems Dom Antoine p&ûf fen épàvit.
; vieux Sancbe fait encore le mutin > & véuè fe
:tre; kxrfqu'on entend un gratid bruit â'é|)éé8 : 6n^ y
irt 9 & l'on reconnoit Alexittldre cô^baétant kfé
:hei?s , pour mettre Leucadie en lîbe^té. Doià San^
e reconnoit LdUcadie ; Si -c&m^^ cbèf dé là Jufti-
y la fait mettre en Mb^né. AléJilÀnfdre lui parle dé
I amour pour fa fillev6( obtient fon aveDK ÈébcsMié
iéfitepas à lui donner tefien'y toucbéé dé la viatie^
se laquelle il avoie éipoà fk vie pour Ut mettre eà
erté, & ayant promis à fen- àrate'theodiàré^' âd né
nais troubler (bti bonbeur. Aînfi là pîecé fiàîf pâi?
nmfiage de Do^cà Ahtôihé àf^éic î'héodb'fe y ëc pai^
ui d'Alexandre avec Leacadie. Gd( ôévragé ét^
m fupérieur aux deux pr^çédéfist. H eft bien écrit i
vers en font faciles. Il y a , il eft vrai , un trop
ind nombre d'événemens ; mais ptufieurs prodùifeat
xxo THEATRE FRANÇOIS.
des fcènes heureores & touchantes. En y corrigeant
quelque chofe j je crois qu'on pourroit la rendre trèS"
fufceptible d'un grand fuccès»
(SUJET DE LA BELLE ALPHREDE.)
Jlgnore fi c*eft pour juftifier l'état de fa chère Sylvie,
à qui Rotrou dédie cet ouvrage , que l'héroïne de la
pièce, ainfi que de la précédente, eft groiTe à pleine
ceinture : mais il n'en eft pas moins vrai que la belle
lAl[^rede eft dans ce trifte état; & d'autant plas
Crifte) que Ton cher Rodolphe n'eft qu'un inconftaot;
qu'il eft devenu amoureux d'une jeune Angloife, nom-
ihéc I(àbelle> & qu'il a abandonné la pauvre AU
phrede. Dans cette jiumiliante fituation , elle avoit
pris le parti de fe déguifer en homme y pour le fuivre
& tenter encore un dernier efFort fur le cœur de ce
pçr^de^' quand eUe l'apperçoit au milieu de plofieors
pirates Arabes y qui veulent pu le prendre } ou le tuer.
Elieyoleàfon fecours^tue le plus confidérable de
c^ brigands f & les autres prennent la fuite. RodoI«
pbe, qui ne la r^onoit p^s fous ces vêtemens , veut
ki témoigner toute^^fàr:e.cpntioi(rance. Mais quelle eft
iàfurpjrife brfque fpn libérateur > fans l'écouter ^ Tac-
cable de reproches» & lui dit de défendre fa vie. Il
la recpnnoit alors > lui demande pardon , lui avoue
qu'il fent toute l'énormité de fon crime, qu'il en eft
pénétfé de douleur : mais qu'une force fupérieur^
ï'entraine> & qu'il eft obligé de céder aux charmes
trop poiflans de h jeune ifabelle« AJphrede m défefr
THEATRE FRANÇOIS. %%i
olr, le préffe de (è défendre. Rodolphe jette Ton
pée à Tes pieds y & lai dit que fa vengeance efi ^ude»
: qu'il fe livre à k$ coups : elle lui répond f en laif«
nt tomber (on épée :
Toffirant à ma fureur , lâche objet de mes larmes ^
Tu fçais , combien légers font les coups de mes armes ^
Comme ils font fans efFec , tu les attens fans peur,
Alphrede 9 ( & eu le fçais ) ne peut frapper au cœur*
Conferve donc le four , & fuis tes deAinécs ;
Le Ciel à tes fouhaics égale tes années :
7e fçaurai cependant alléger mes douleurs ;
Celui qui peut mourir y peut vaincre tous malheurs > &c«'
Cependant les Arabçs» voulant venger la mort de leu^
ef 9 viennent en plus grand nombre , fe faiGflent da
rjure Rodolphe & de la tendre Alphrede » & les
nduifent devant Amintas , leur Général f qui avoiç
I fils nommé Acafte, Il eft bon de fçavoir que ce6
Qdintas > Gentilhomme de Barcelonne , ne courroie
ifi les mers que dans Tefpérance de retrouver une (œur,
/Icafte 9 qui lui avoit été enlevée il y avoit près de
linze ans. On enchaine les deux prifbnniers , & bien^
t l'on conduit devant lui le jeune homme déguifé.
n peut juger de l'excès de la joye de ce vieillard 9;
rfque dans ce jeune homme > il reconnoit cette fîllo
chère qu'il cherchoit depuis fi long-tems. Le Lefteur
; (ans doute bien perfuadé que Rotrou a eu foin
>rner autant qu'il a pu cette reconnoifTance. Mais
tnnoye je Ibupçonne que ces ornemens ne Tinterei^
%x% THEATRE FRANÇOIS.
fent pe.Q£-ètre que médiocrement ; f eo fopprime I
détails* En&i la belle Alphredè , toivchée des caref
réitérées de Tauiteur de fes jours ^ ne veut rien avi
de caché pour lui. Elle lui avoue qu'inceflamment c
va le faire grandpere, fans cependant lui donner
gendre y parce que fon amant eA infidèle ; elle lai 2
prend en mème-tems que cet amant à été fait pri(i
nier avec elle> & qu'il eft dans ce même vajiTe
Amintas veut fur le champ employer fautorité p(
lui &ire réparer l'honneur de fa fille. Elle s'y oppo
& fe jet^e à fe^ pie^s^ pp,u^ lui 4ei^an4er la peri
fion de pafTer en Angleterre avec (on frère AcaC
Qu'elle veut parler à. cette Ifabelle 9 qui lui a enl
le cœur de (on amant , & promet à fon père 9 que i
employer la force 9 elle trouvera le moyen de coni
ce cette affaire à une bôureu(è fin* Elle le conjure
mème>jtems de rendre la liberté à Rodolphe 9 dès qu'
fera partie. Le bon Amintas confent à tout. Alphr
ibftruit alors Ferrande, confident de Rodolphe,
qui étoit dans fes intérêts , du rôle qu'il doit joa
& part pour l'Angleterre, Ferrande vieiït bien .
après annoncer à fon maître > que fes fers vont •
rompus & que telle a été la dernière volonté d
phrede ; il lui raconte que cette jeune beauté a 1
du les derniers foupirs ; que le vieil Amintas é
devenu amoureux d'elle , avoît tenté tous les mo)
pour la féduire ; qu'elle a voit rejet tée fes vœux a
mépris > & que lui ayant avoué l'excès de (on as
THEATRE FRANÇOIS. 5115
poof jiû JUaaot j tout perfide qu'il étoit ; la rage de c«
vieillard étoit Montée au point , qu'il lui avoit plongé
uo poignard dans le cœujr ; qu'il 9'étoit bien tôt re^
penti de fa barbarie , & que )a tendre Aipbrede la
loi avoit pardonnée > en exigeant qi^'il rendit la li-
berté à cet amant f qu'il tenoit dans les fers. Rodol-
phe fe défbrpere » & (ê regarde comme l'auteur de
ÙL mort. Au mifleu de (es regrets , Am^as vient lui
annoncer qu'il eft libre » & le maître de partir lorf-
^12*11 le voudra. Rodolphe l'accable de reproches &[
d'injures ; entr'autres il lui dit :
Viel troncy que par mépris la parque lailTe au |oar^
Ou que te croyant mort fa maio avare oublie , &c«
Enfin f voyant qu'il ne peut honnêtement propofer
un duel au vieiSard» il prend le parti de venger fur
le fils le aime du père 9 & part pour aller joindre
Acafte en Angleterre. La fcène s'y tranfporte ; &
l'on voit un certain Erafle amojoreux d'Iiabelle , qui
a trouvé le moyen d'enlever cette jeupe beauté avec
Ibn père Eurilas , & qui veut faire mourir ce vieil-
lard pour le punir de fes refus. Un hasard heureux
conduit en cet endroit Acafte & (â (œur Alphrede
habillée en homme , qui prennent la défenfe d'Euri-
laS) & tuent Erafte & fés complices. Ayant appris
qu'Ifabelle efl: gardée dans un bois voifîn par les
valets de cet Erafle , ils volent à fon fècours^ & la
1
%Z4 THEATRE FRANÇOIS.
délivrent bien-tôt. Mais Acafie y f^^d ^ liberté i &
dès le premier moment devient paffionément amoa^
reux dlfàbelle , qui témoigne à Tes libérateurs toute
fa reconnoilTance. Alphrede, qui ne perd point fon
objet de vue » paroit dire avec indifférence que fon
frère & elle > font venus en Angleterre» pour appren-
dre aune jeune beauté» nommée Ifabelle , que fon
amant Rodolf»he eft mort. Les regrets d'Ifabelie font
bien-tôt connoitre l'intérêt qu'elle prend à cette fa-
nefte nouvelle. Cependant Acafte > qui ne veut pas
perdre un inftant» va trouver Eurilas, lui découvre
fa naiflance» lui parle de Texcès d'amour qu'il reiTent
pour (à fille > & la lui deniandé eti' mariage. Ce bon
vieillard > enchanté de trouver aufli promptement une
occaGon de lui témoigner fa reconnoiflance , l'embraiTe
& l'accepte pour fon gendre ; il le conduit auffi tôt à
Ifabelle > & lui ordonne de l'accepter pour époux^
Elle qui croyoit fon amant mort > qui devoit (on bon'
neur à Acafte > & qui le trouvoit fort à fdn gré f l'ac*
cepte avec plaifir. Cependant le trifte Rodolphe > tou-
jours déchiré par fes remords , plus amoureux qu'il
ne l'avoit jamais été de la belle Alphrede , toute morte
qu'il la croyoit 9 & ne (bngeant plus , qu'avec horreur^
à l'amour qu'il avoir reflenti pour Ifabelle , aborde ea
Angleterre > au moment même où l'on célébroit le ma-
riage de l'heureux Acafte. Il le fait appeller^en duel;
k cartel fe donne ridiculement au milieu du ballet
danfé, pour célébrer le» noces d'ifabelle. Aca^lefe
rend
THEATRE FRANÇOIS. 1lx§
l^ènd au lieu indiqué ; & > mallgré toute la bravoure
dont il étoit doué , veut y au lieu de fe battre > entrer en
juftification avec Rodolphe, 11 avoît fes raifons : il
vouloit pénétrer quels écoient Tes fentimens pour Ifa-
belle. Il lui dit que^ (i c'eA elle qui eft la caùfe du
combat qu'il defire y il la lui cède de tout (bn cœur.
Rodolphe lui reproche fa lâcheté , l'aiTure qulfabelle
lui eft devenue parfaitement indifférente, & qu'il ne
veut le combattre que pour venger > par fa mort> celle
de l'infortunée Alphrede > que (on barbare père a fî
cruellement maflacrée. Quoiqu'enchanté de cet aveu»
Acafte veut juger encore quelle imprefTion ta vue d'I«
fabelle pourra produire fur Rodolphe. Il Tenvoye cher«
cher 9 céitere fes offres de la lui céder; celui-ci per*
fifie dans fes refus y & à vouloir combattre. Acafte >
iktisfait & bien éloigné de vouloir mettre Tépée à la
main contre l'amant de fa fœur , lui dit qu'il va lui
montrer cette beauté^ qui defarmera ià colère. Ro«
dolpbe > prêt à perdre patience , Ini reproche encore
Tindignité de, (a conduite. Enfin Alphrede arrive i
Rodolphe ne daigne pas jetter les yeux fur elle , 6c
prefle Acafte de ie mettre en défenfe > lui répète
qu'il veut venger iamort d'Alphrede, qu'il adore toute
morte qu'elle eft^ & qu'il adorera' toujours jufqu'aa
moment que l'excès de fa douleur & defbn repentie
voudra bien le rejoindre avec elle. Alphrede, baignée
de larmes, fe fait ieconnoitre : Rodolphe fe jette à
lies genoux 9 lui demande^ grâce ^ fie l'obtient fans
lome IL Ç
1
%%e THEATRE FRANÇOIS.
peine. Enfin les baifers les plus tendres , le calme le
plus heureux fuccedent à l'agitation qui régnoit fur la
fcène i< & Tunion de Rodolphe avec la belle Alphre-
de, termine cet ouvrage , qui n'eft pas (ans métittf
quoique rempli des chofes les plus ridicules % uot
dans la diâion que dans la conduite y & dont je crois
qu'on pourroit tirer parti en te retouchant avec foin;
jBc en l'accommodant à nos ufages.
(SUJET DE LAURE PERSÉCUTÉE. ) Ceft
ici une bien mauvaife pièce à tous égards ; elle eft
fans intérêt; les vers» la diftion^ là conduite font
également ridicules ;; & la grande réputation , que
Rotrou avoit déjà acquife , ne put empêcher la chute
de cet ouvrage I qui commence par le Capitaine des
Gardes du Roi de Hongrie , qui vient arrêter Oron-
tée » héritier préfomptif de la Couronne. L& motif de
fa^ colère du Roi contre fon fils» eft qu'il avoit appris
que ce jeune Prince étoit amoureux d'une jeune S&t
inconnue y nommée Laure , qu'il vouloit époufer;
& que ce Roi avoit arrêté fon mariage avec la fiUe
du Roi de Pologne , qui y ce jour la même , devoit
arriver à Bude , Capitale de fes Etats. Le Prince fe
met fort en colère 9 & enfin rend fon épée. Une
chofe aflez bifarre > c'eft qu'O Aave > confident do Prin-
ce 9 fçachant que le Roi fait chercher par tout Laure,
pour la faire mourir 1 prendie parti pour lui faover la
vie 9 de la faire habiller en page » & de la faire con-
duire fous cet habit dans la prMbn d'Orontéew Ce
déguifement réuffit fi bie&i que le Rd qui la reocoa-
THEATRE FRANÇOIS. %%j
tre > & qoi a une longue converfation avec dSe » ne
fe doute de rien > & la renvoyé à (bn fils > qui » com«*
me l'on crdc bien , la reçoit avec des tranfports de
joye inexprimables. Cependant (ans qu'on fçache quel
fecrec il a employé pour fortit de fa prifon > il vient ,
foivi de Ton joli page , pour (ê jetter aux pieds de Ton
père, qui étoit en cofpverfàtion avec Ton Caj^taine
des Gardes > à qui U cônfioit toute Ta colère contre
Orofitée> & ibr-rout contre Laure, quil ventàbroltt-
ment faire mourir.* Ce Capitaine des Gardes » qui eft
on bon*homme> lui représente quil tfy a pas de mo^
rif pour ôter ta vie à cette jeune beauté i le Roi lui
répond :
• *'» ••« »'■ • «
Sans reircire ni sailofi) m çoi^pte de mes roeur %
Je yeux ce que je yeux y pasce que je le veux.
• Enfin Orontée fe Jette à fès pieds > & cherche en-
vain à ^attendrir. Le Roi, de plus en plus furieux i
lui reproche d'aimer une inconnue.
• . . . . . Une femme
Pletdue, abandonnée, entre toutes infôrae y v
Qui {de mtUc aHbuvk les defîrs dtiTohis^ .
£t capable de cout^ fl ce n^eft d*un refus 9 &ç«
On peut juger combien îc pauvre petit Page fouf-
Ire 9 de fe voir crayonner avec un pareil pinceau , &
combien le Prince cherche à détromper fon père (ur
tidée quil s^eft formé de fa chère Laure. Le Roi n'en
veut pdtit démordre j| & Paflure qu'il lut en dotosetoi
xx8 THEATRE: FRANÇOIS.
la preuve. Le Prince promet de n'y plus^fonger, fl
en efFet on lai fait voir des chofes auffi pea^vraifenu
blables. Le Roi prend le parti de fédqire Oâ:ave;il
y réuffit ; & ce traitre lui promet que le Pf Ince fera
bien fîta s'il ne fe laifle abufer : il fort pour arranger
toute fa fourberie. Une chofe incroyable > & qui
exille cependant dans cette pièce ; c'eQ que , cette
Laure y qui fçait avec quelle ardeur le Roi pourfuitfon
trépas 9 quitte (es habits de Page , & bien iure que ce
Monarque , ne • la connoit. pas ^ y uniquement par
plaifanterie > ou pour faire parade de fa beauté ,
yiept.fe. jetter i fes pieds ,,&:. lui deniande jufticc
d'un jeune homme qui l'a abufée Le bon Roi
s'enflamme » lui promet jqflicç , 6^ la congédie j mais
il charge (on Capitaine des Gardes de tâcher de la
faire confentir à hii accorder fes faveurs : î! s'acquitte
.de (à comçiiflîon ; & il e{l«fur le champ accepté, dès
jjue la .nqit fera venue. Il v^a avec emprefferaent an-
noncer cette bonne nouvelle à/Temoureiix vieillard}
qui témoigne tpute l'impatience qu'il a de voir arriver
ce moment fortuné. Son 61s Iç joint dans ce inQment,
& avec ironie lui apprend que cette fille» qui fort
de chez lui y eft cette même Lâure, dont iî a parlé
avec tant de mépris. Le .Roi (lirieux va s*enfenner
dans fon cabinet , où Oâave vient le trouver podr
lui apprendre que fa fourbe eft toute prête. En effet,
îi avoit Êduit, fous l'idée de rendre fervice à fa maî-
treffe) une femme-de^çbambre de Laure | qui s^tojt
THEATRE FRANÇOIS. %i^
tue des habits que cette jeune beauté avoît portés
jour là. Elle fe met à une fenêtre y fous lacjuelle
Roi avoit conduit Orontée: & là elle fait les plus
ndres déclarations à Oârave > qu'elle requiert d'à*
our : elle fait plus , elle parle avec mépris de la
iffiondu Prince ) qu'elle avoue n'avoir jamais aimé
rontée furieux > tire (on épée pour punir la perfide»
* Roi l'arrête y & la fenêtre fe referme. Refié feul,
entre dans la plus grande fureur, il veut fe tuer^il
ut tuer Oâûive, il veut tuer Laure : enfin il fe livre
es réflexions^ qu'il finit par rheureufe:comparaifon
le je^vais mettre fous les yeux du Leâeur. C'eft
3fi qu^ii s'exprime :
Avec quelle confiance au courroux qui m'anime ,
De ma divinité ferai*je ma viâime !
Faut- il donc ruiner le temple où j'ai prié ,
£c démolir Taucel oà j*ai facrifîé ?
Puis-)e , Tayant aimée à Tegal de moi-même ,
D*un extrême fî-tôt pafler à l*autre extrême.
Kon , fortez de mon fein , vains projets que je fais :
Je Taime au plus haut point , que je Taimai jamais.
7e fçais que ma confiance , après un tel outrage »
£fl bien moins un «xcès , qu'un défaut de courage ^
ît que le fouvenit de fa déloyauté
£fl un honteux reproche à mon honnêteté.
Mais le mal, que je fens , reffemble à ces ulcères ,
. Qui par quelqu'accident , deviennent néceffaires ,
Doac il efl dangereux de fe laifTer guérir ^
£t qu'on ne peut fermer fansfe Êiire mourir, &c.
Enfin il finit par la voir, & Paccable de reproches;
inre veut fe juftifier > il ne l'écoute pas. Oâave qui
ajo THEATRE FRANÇOIS.
craint un éclaircilTement 9 qui pourroic lui devenir &'
tal j le détermine à fe retirer chez lin. Il n'y refte pas
long'Cems : il trou(ve le fecret de's'évader , & revicoc
chez Laure lai renouveller Tes reproches. La querelle
n'eat jamais, peu^ècre eu de fin , fi Lydie , cette mê-
me femme - de • chambre , qui y de bonne foi , avoit
<;ependant fêrvi à abufer le Frioce > ne f!ïc venu les
détromper. Les tranfports de la réconciliation font aoffi
ceijdres que ceux de la colère avoient été violens. Ayant
appris que h PrinceiTe Polopoife alloit#arriver > ils
prennent le parti de fe marier , pour confiater leac
état. En efïet ^ on la voit bientôt paroitre ; & le Prin-
ce qui ne la redoute plus y lui dit^ toutes (ôrtes de ga-
lanteries. Enfin Laure revient jouer à fes pieds le
même perfonnage y qu'elle avoit ddevant joué à ceux
du Roi. Elle lui conte une hiftoire > où elle fuppofe
qu'elle alloit époufer Ton amant ^ mais que fes
parens s*y oppofoient à caufe qu'il étoit d'une naifian*
ce fupérieure à la fienne. La PrinceiTe veut laiifer
décider le Prince ; mais il la prie de prononcer le ja-
gement ; elle décide que > l'amour foumettant à Ton
pouvoir & la fortune & la nature même y puifque
ces deux amans s'aimoient fi paflîônément, ils dé-
voient s'époufer malgré l'oppofition de leurs parens.
Orontée & Laure applaudirent à cet arrêt > & lai
avouent qu'elle a décidé leur bonheur, puifque c'eft
leur hiftoire qui vient de lui être racontée. Elle eft un
peu étonûée. En même < tems un vieillard > nommé
THEATRE FRANÇOIS. z3r
Clidamas ^ qui avoic élevé Laure comme fa fille g
vient dire à Infente que cette Laure eft fa fœur , que
le feu Roi leur père avoît fur la foi d'un fonge voulu
faire mourir , & que la Reine lui avoit confiée pour
conferver fes jours ; il lui remet des lettres de cette
Reine, leur mère , qui confirme cette hiftoire ; & lln-
fànte , enchantée d'avoir retrouvé une fœur auflî aima-
ble, l'embraffe avec tendreffe > & eft trop bonne pa-
rente pour vouloir s'oppofer à fon bonheur : ainfi elle
lui cède le Prince de tout (on cœur. Le Roi arrive en ce
moment , qui ne comprend rien à la joye immodérée
d.e fon fils. Enfin tout s'éclaircit ; & comme il ne dé-
firoit qu'une Princefle pour belle-fille > il confent à Tii^
nion d'Orontée avec Laure ; mais on refte fort em-
barraflée de ce qu'on fera de Ilnfante. Enfin un cour-
tifan avifé prop ofe au Roi de l'époufer. Ce Monar-
que adopte ce confeil avec tranfport, & demande
en tremblant l'ayeu de l'Infente, qui le lui donne avec
plaifir. Ainfi cette pièce fe termine par le double
mariage de l'Infante avec le Roi , qui ne s'attendoit
certainement pas à cette bonne fortune $ & par celui
du Prince avec fa chère Laure.
( SUJET D'ANTIGONE. ) Cet ouvrage n'a pas
dû faire plus dlionneur à Rotrou que le précèdent.
Une chofe bizare , c'cft qu'il a trouvé le fecrct de
n'infpirer aucune terreur y en traitant le fujet le plus
fait f fans doute ^ pour en infpirer* Tout meurt dans
P iv
a^x THEATRE'FR ANÇO 1S.
cette pièce , on ne regrette perfonne , & Ton ne (!
pas même le plus léger attendriffement. La vcrfific
tion n'eft pas meilleure que la conduite. La pie
commence ainfi, que celle de Racine. Jocafte expri-
me la mortelle inquiétude où elle eft > & l'horreor
qui la déchire de ce que Eteocle a profité d'un mo-
ment de fommeil où elle a été. plongée , pour fortir
de Thebes ^ & aller combattre Polinicc. Elle apprend
avec quelque {àtisfaftion que Menecée y $*étant dévoué
à la mort pour le falut de (k patrie 9 avoit arrêté la
fureur des combattans : mais ce calme ne dure pas
longtem». On vient bien- tôt après lui annoncer que
Polinice,confervant toute fa haine contre fon frère
Eteocle 9 lui avoit fait propofer pour terminer leurs dif-
férends de fe battre l'un contre l'autre , & qu'Eteocle
l'avoit accepté, Jocafte fait tout ce qu'elle peut pour
empêcher ce combat ciiminel. Les deux frères,
trop animés pour écouter ni la raifon ni la nature >
perfiftent dans leur férocité. Enfin dans Tintervalle
du deux au troifiéme a6ie , ils fe battent & fe tuent tous
deux. Jocafte , livrée au defefpoir y fe tue au moment
qu'elle apprend la fin cruelle de fes deux fils ; &
Créon 9 comme le plus proche héritier de la Couron-
ne > eft proclamé Roi. Hémon > Ëls du nouveau Mo«
narque , vient annoncer ces triftes nouvelles à Anti-
gone > dont il étoit amoureux fc aimé , en lui dépei-
gnant l'inftant où fes deux frères s'abordent ^ & où le
combat eft prêt à commencer ; il lui dit ;
THE ATRE FRA NÇOIS. %33
- ' Pareils à deux lions , & plus cruels encore ,
Du gefte f ciiâcua d*cux , l'un Taucre fe dévore ^
Avant qu'en êcrc aux mains , ils combaccenc da veux »
£c Te lancent d*abord cent regards furieux , &c.
. Après tant de tragiques événemens , on pourroic
foupçonner que la piecç alloit finir : elle n'eil feule-
ment pas à la moitié , & les trois derniers a&es lan-
guiiTent en dialogues froids 9 pour amener encore un
événement tragique 9 mais point incéreïïant. Dès que
Créon eft monté fur le Trône > il fait élever un fuper-
be maufoléeàEteocle; il défend > fous peine de ia vfe,
que l'on enterre Polinice» & deRine le corps de ce
Prince pour pâture aux corbeaux. La pieiife Anti-
gone ) qui fçavoit que > (i (on malheureux frère n*étoiC
pas enfeveli , fon ame erreroit fans cefle fur les bords
du Scix , & ne pourroit jamais trâverfer ce fleuve re-
doutable f veut lui rendre ce religieux devoir ; & mé-
prifant le danger 9 elle fort la nuit pour exécuter cette
louable entreprife» elley réuffit; mais elle eft arrêtée
au moment même qu'elle vient de l'achever* On la
conduit au Roi^ qui ^ furieux du mépris qu'elle a eu
pour fes ordres » la condamne à être renfermée dans
une grotte > & à y mourir de faim. Le tendre Hémon
(e iette envainaux pieds de fon pere> lui parle envain
de l'excès de l'amour qu'il reflent pour Antigonet
dont la mort entraînera certainement la fienne. Le
barbareCréon rede inexorable ; un de fes princi-
paux Minifires n'en eft pas plus favorablement écou«
té. Enfin on lui amenç le fameux aveugle Tyrefîas 9
^34■ THEATRE FRANÇOIS.
donc le f^volr furnaturel étoic refpeâé dans tonte
Grèce. Ce fàge vieillard lui annonce qu'il fera ble
tôt accablé des plus grands malheurs , s'il ne renon
à (on projet inhumain. Créon le traite de vieux ra<
doteur , & demeure inflexible. Hemon, ayant perdu
toute efpérance) prend le parti d'aller forcer la roche
où Ton gardoît Antigone , & de la délivrer. Mais quel
•eft fon défefpoir, lorfqu'en y entrant il trouve foo
amante baignée dans fon fang , & qui venoit de fe
percer le cœur : il fe livre aux plus tendres regrets
Créon arrive à propos , pour effuycr les plus cruels
reproches. Enfin > quand Hémon n'a plus rien à direy
il tombe mort fur le corps de fa maitrefle. Ce (pefta-
cle touche afTez Créon pour le faire évanouir ; & la
pièce finit 9 fans que Ton fçache combien le Roi refte
fans connoifTance.
(SUJET DE CRIS ANTE. ) Les Romains fe font
emparés de Corinthe : Antioche > Roi de cette Ville »
s'eft fauve au milieu du carnage ; mais Crifante, (on
époufe 9 a été faîte prifonniere , & conduite dans le
camp des vainqueurs. La pièce commence par le dé-
part de Manilius> Général des Romains > qui eft obli-
gé d'aller à Tegée , Ville voifine , & qui pendant fon
abfence charge le jeune Caffius , un des plus valeu*
reux Officiers de l'armée f du commandement de^
troupes & de la garde de la Reine. Caffius eft en^
chanté de cette commiCton* Dè$ le moment que Cri-
THEATRE FRANÇOIS. X3/;
(ànte étoit arrivée dans le camp > il en étoit devenu
paffionèment amoureux» Il va la trouver, lui oiFre
tous les fervices qui peuvent dépendre de lui » & finit
par lui déclarer Ton amour. Crifante regarde cet aveu
comme un outrage , & lui reproche d*ofer abufer de
rétat où le fort Ta réduite. CafTius fe retire dans le
plus cruel dérefpoir. Enfin cédant à la violence de Ton
amour » il envoyé chercher Orante , une des femmes -
de la Reine j & veut l'engager à le fervir auprès de
fa maicrefTe : celle-ci s'y refufe. Voyant qu'il ne peut
la (ëduire , il lui déclare qu'il efl déterminé à jouir
de la Reine » ou de gré ou de force > & lui dit en
mèmetems que > fi elle confent k lui accorder fes fa-
veurs 9 il lui rendra aufll-tôt la liberté ; mais que fi elle
perfifie dans fes refus > il aura décidément recours
aux moyens les plus odieux. Après lui avoir ainfi
annoncé fes volonté » il la quitte ; & elle va trouver
Crifante. Elle s'acquitte , en tremblant > de fa corn*
mifTion* Cette Princefle friifonne d'horreur à cette
propofition. Orante> qui croit que c'eft cependant le
meilleur parti que la Reine puifTe prendre > finit par
lui dire : fi vous vous livrés k lui avec complai-
fance , il promet
• • - • . Avotremajefléy
De lui faire au0tcôc rendre la libené.
La Reine tire aulfi-tôt fon poignard » & perce le
cœur d'Oraùte , en lui difant :
Prend U déjme en ta mort , horreur de la nature*
%3S THEATRE FRANÇOIS.
Cette fcène efl: théâtrale , bien conduite , & bien
écrite , & a du feire effet. Cependant Caffius n'écou-
tant plu^ que (à paffion > après avoir fait envain on der*
nier effort pour obtenir l'aveu de cette Princeffe in-
fortunée, la traite comme autrefois le fils de Tarquia
avoit traité Lucrèce , & tout de fuite lui rend la li-
berté. Crifante au défefpoir de l'outrage qu'elle vieot
de recevoir , s'adreife ainfi à la mort :
Efpoir des affligés , ténebrcufe DéefTe , »
Tu cherches qui ce fuis , & tu fuis qui te preflê*
Ne va point effrayer ces fuperbes Palais y
Où perfonnc pour coi ne forme de fouhaics >
Epargne ces beautés , que tout le monde adore :
Laiflè qui te redoute , & viens à qui cMmplore \
Des plus heureux mortels tp tranches les devins j
Jufques dans les berceaux eu cherches àt% butins \
£c tu crains mon abord , parce que tu m'es chère &c«
Enfin» elle prend le parti d'alUr retrouver le Roi*
(bn époux. Caffius rendu à lui-même , envifage toute
Hiorreur de fon crime , & fe livre aux plus triftes re-
grets. Pendant qu'il fe fent déchirer par fes remords >
ilnfortunée viâime de ik funeOe paffion avôit rejoint
Antioche> qui fe livre aux plus doux tranfports> en
revoyant l'objet de toute fa tendreiTe. La Reine l'ar^
rëte ; & par un courage au- defTus de l'humanité»
cette belle & vertueule Princefle lui dit qu'elle eft
indigne de fes careflTes > & lui fait l'aveu de tout ce
qui s'eft pafTé. Le Roi » qui n'a voit pas l'ame auffi éle^
vée > reçoit avec chagrin cette affreufe confidence»
r
.THEATRE FRANÇOIS. %3y
h fe livrant à une baife jaloufie , lui fait les reproches
les moins mérités Crifante au dérefpoir de cette bar-
barie > & voulant lui prouver l'injuAice de Tes (bup«
ÇODS, retourne au camp des Romains j où Manilius
étoit déjà de retour. (Il eft bon de fçavoir que l'on
n'avoit aucun foupçon du crime.de Caflîus^ & que la
mort de deux foldats » qui s'étoient entre-tués à la
porte de la tente ^ où Ton gardoit la Reine >.avoit
perfuadé que cette PrinceiTe avoit été enlevée par les
troupes du Roi (bn époux. ) Cette malheureufe Rei-
ne entre dans la tente du Général , fe jette à Tes pieds»
& lui raconte le crime de Caflîus. Manilius frémic
d'horreur à ce funefte récit > & envoyé auffi tôt cher-
cher le coupable > qui j loin de chercher à fe juftifier »
avoue un crime qu'il détefte» & demande la mort
qu'il mérite. Il met même Ton épée aux pieds de la
Reine , pour qu'en le privant elle - même de la vie f
elle puifle goûter à longs traits le ptaifir de la ven-
geance. Les principaux Chefs de l'armée, craignant
que Manilius ne le condamne > lui vantent fa valeur^
lui rappellent les fervices qu'il a déjà rendus , & ceux
que l'on en peut encore attendre. Manilius eft inexo-
rable ; & par un jugement digne des anciens Ro^
mains , il remet Caflîus au pouvoir de la Reine , pour
qu'elle puifle à (on gré ordonner fon fupplice. Cri-
iante ramafle alors l'épée du criminel ^ la lui remet
entre les main$ > en adreflanc ces mots à Manilius ; ,
«■3 » THEATRE FRA NÇOIS,
Je fais contre ma haine on généreux effort,
£t je laiffe à fa main la gloire de (a more.
Tiens , fois en ce devoir le Prêtre àc la viûime^
£t qu'une belle mort repare un lâche crime.
Cafllus fe tue : la Reine demande fa tète ^ & tout
de fuite) va retrouver Antîoche, qui refafe de lavoir.
Elle entre farieafe daus ià tente , lui reproche la cruau-
té de fes foQpçons, jette à fes pieds la tètt de Caf-
fius» & fe perce le cœur. Antîoche < fentant qu'il a eu
fort f & voyant bien qu'il n'avoit pas d'autre parti à
prendre, fe pafle fon épée au travers du corps ^ ce
qui fait le dénouement de la Tragédie.
Cette pièce a de grandes beautés > fur» tout dans
les détails ; la veriiHcacion en eft noble & facil^. Ec
fi les Speâateurs ont bien voulu fe prêter à l'événe-
ment , qui fait le noeud de la pièce » c'efl à-dire^ aa
viol de la Reine , qui fe pafTe dans Hntervalle da
du deuxième au troijiéme a&Cy je crois qu'ils te font livra
avec tranfport au plaifir d'encourager l'Auteur par
des applaudiiTemens redoublés, & que cet ouvrage
a fait grand honneur à Rotrou.
- (SUJET DES CAPTIFS. ) Cette pièce eft la
traduâion de celle de Plante > intitulée de même ;
ainfi je n'en donnerai point d'extrait , je me contente-
rai feulement d'en rapporter quelques vers, qui m'ont
paru bien faits. Dans la troifiéme fcène du deuxième
nSe, Philenice qui aime un jeune captif d'Elide»
nommé Tindare ^ & à qui Celie> fa confidente, re-
THEATRE FRANÇOIS. 239
>roche cet amour honteux > lui répond pour fe jufti-
΀r:
Je ne reconnois point cet amour ordinaire y
Donc notre efprit fe forme un être imaginaire ,
A qui notre foibleile érige des autels ^
£t qu^elle pfe placer entre les Immortels.
Ces traits , qu'il a portés jufqu*att fein de fa mere«
Ces fiâmes & ces fers , ne font qu'une chimère \
On les pourroit éteindre « on les pouroit brifer ,
Mais on Ce forge un Dieu pour les autorifer.
L'amour qui me podède , eft une autre pùidânce ^
£ficâive y 2c qui part d'une réelle éflence ,
Qui malgré moi réfifle à fes perfecuteurs ,
l.^ Dieux m'en font témoins \ car ils en font auteurs ^ &c«
Dans la Jcène cinquième du quatrième aSe > après
|ue l'on a découvert que Tindare, qui, jufqu'abrs
voit été regardé comme un homme confidérable
l'Elide , n'étoit qu'un vil efclave 9 ce malheureux
eune homme fe trouve avec Philenice qu'il adore ,
Se dont il eft aimé : ils ont enfemble la [converfation
a plus^ tendre. Tindare reproche aux Dieux Tinjudi-
:e de l'avoir fait naître d'ui^k rang (î inférieur à celui
le l'objet de tous fes fentimens. Philenice lui dit :
• •••••••
PuiCque c'eft un arrêt du fort qui me poutfuit ^
Il faut aveuglement fuivre ta dedinée , -
Qui m'ordonne l'amour , & défend rh/menéc*
Je réconcilierai quatre ennemis puiflàns ,
L'amour £c la vcrm la raifon & les fens ,
£t fçaitraibien aimer , fans prendre de licence
Qui puiilt défi)eaci£ le lieu de toa aai^;|noe<*
2-40 THEATRE FRANÇOIS.
Oui , Tindare , je t'aime , & ne veux point de toi i
Je te ferai fidelle , & te tiendrai ma foi i
NourifTant le dcfir , je tuer^ i*efpérancc i
J*aimerai le parti , mais fuirai l'alliance i
£t puifque mon attente a fi mal fuccedé , .
Mon coeur fera vaincu fans être pofTedé i
Si le triomplie au moins n'a fuivi la viâoire y
, Un fécond après toi n'en aura pas la gloire.
Va 9 que bientôt le Ciel te tire de ce lieu :
Mais je perdrai la vie en te perdant. Adieu. .
Enfin la pièce finît par le mariage de Philenîcc
fon cher Tindare , qui eft reconnu pour le fils d\
plus riches habitans d'Ecolie.
( SUJET D'IPHIGENIE EN AULII
Hacïne a traité depuis !e même fujet f qu*il a j
ainfi que Rotrou, dans Euripide, que ce der
traduit fervilement; mais fans y mettre les gr
beautés qui font dans roriginal. Il n*a pas mèm
ployé les ornemens des détails. La verfificati
cft médiocre, & le ftyle eft encore au-deflbus ; ps
fituation. Céft une biche qui paroît fur l'Aute
moment que Ca!chas aPoit plonger le couteau d
fein de la jeune Iphigente , qui devient iijvifible.
ne paioît alors dans fon char , & annonce aux '
qu'elle a fait tranfporter la fille d'Agameranon en
ride , pour y être grande PrêcieiTe dans fon tei
qu'elle eft fatisfaîte de la foumiffion que ce Che
Grecs lui a témoignée; & que les vents vont êi
vorables pour le départ de la flotte. Racine» ai
traire, en empruntant les traits du génie du !
Grec^ a fçu imroduire i'épifbde d'Ëriphile ^pou
THEATRE FRANÇOIS. %4i
^re le. dénouement conforme à nos ufages ; & il a
Orné cette Tragédie par le charme de cette po^Qe
iiarmonieufe » qui* cara&érife tous fe^ ouvrages.
(SUJET DE CLARICE. ) Avant que d'entrer
dans le détail de cette pièce , il eft nécefTaire de (ça«
voir que la plus forte animofité regnoit entre Ray-
mond père de L^andre , & Horace père de Clari•^
ce; que ce dernier ayant eu le de(rous> a voit ^té
obligé de quitter Gènes i fa patrie , & de fe réfugier à
Florence i & que ce départ forcé avoit encore animé
Ta haine contre Raymond. Le Le&eur foupçonne fans
doute que Léandre étoit amoureux & aimé de CIa«
rice 9 & efl: bien petfuadé du défefpoir affreux où ce
jeune homme eft plongé >lôrfqu'il voit l'objet de fa
tendreife forcé d'abatidonnier fa patrie. Cédant à
l'excès de fon amour , quelque danger qu'il apper-
çoive, s'il étoit reconnu par Horace , il fe détermine
à fuivre fa maitreffe : mais comme il avoit des pré-*
cautions à prendre vis*à>vis de fon pere^ quife feroic
oppofé à fon départ , s'i} en avoit pénétré les motiâ ;
il feint d'aller en Efpagne^ & s'embarque. Il eft prid
en chemin par des Algériens , chez lefquefs il refte
efclave pendant (ix ans> fans pouvoir donner de (es
nouvelles. Un jeûne Gentilhomme de Florence , t%mj
mé Alexis , arrive alors à Alger ^ le rachetfe y le prend
à (on fervicej & conçoit pour lui la plus tendre ami^
tié. Cet Alexis avoic été amoureux dlfabelle , qui
fainoqic ^âe bonne foi , & qui fe Sattoit de V€^\i^<^\.
Tû/7iâII. Ci
ft"î4* TJÏE AfkEFRÀNÇ 0:i S.
Mais il îavoit abandonnée , dès* cfixc Clarice fat arcii
vée à Florence. Occupé de (on nouvel amodr , 8c
comptant fur i'efprit & fur rattachement de Léandre»
^i avoit pris lei nom d'Hortenfe^ & qui- ^ans toute
Ja pièce parpit toujours fous ce nom \ï% il.en avok
fait préfenf à Horace ; m^is il i^ Imi avoit: pas encore
confié Ton fecret. Si^ fiDnées. d'abfeiKe avoient a^ez
changé Léandre 9 poar qu'il n^ pût pas être reconnu
Di par le père ni par la fille. Il gagna Men^tot toute la
confiance de ron.nQiiv^att oiaitr^* C'eft dans ee(te po«
fition que con^mence la Congédie > dont je ne donne*
cai qu'un entrait foçt cQijçt , cette pièce étant rem"
plie d'épifodes reçues> dan$ ce tcms-là $ mai» abfolu*
ment rqettées^ d^s celui-ci« Hortenfe rencontre Al-
phode f un de fes a^ciei^ ^i$ :^ quî lui fair des re«
proches^ de laifler fi)n perQ da^s^ l'inquiétude qii$: lut
caufè une aufC longue abfence» $c quî lui tnet. fous les
yçux les, danger^ où il s'eKpofe^» s'il eft reconnu par
Horace. Hortenlè avoue Tes torts > les attribue à la
violence de foo amour 9 & c^age (on ami à partis
pour Gènes > pour travailler à réconcilier (on père
avec celui de Clacice> &: pour tâcher que foo bymen
a^yec cette jeune beauté fût la bafe de cette récon^
ciliaiion. Alphonfe fe lailTe perfuader 9 ât part pour
entamer cette négociation. Divers évéoeraens aflèis
indifFérens conduifeot au dénouement : entre ajutres »
Horace v^ut donner fa fille en mariage à un vieux
^^d^io 9 qui n'a pas. le fens çQjamun^ àiais qui éit
THEATRE F'RANÇOIS. ii4J
fort riche & fort àmoareux. Fartni pldfieurs {^i^po^
iMicoles r que ce Médecin dene à (on futur beau père p
il lai pcoinefry aufTitôt cjue Clarice fera fa femme >
^ -. " • . . ■ ■'■■■■■•
De lui faire un fîlypoôcur dçs la naif^ce p
Four marque du CçaVoir donc le père e(i doué.
ParoU enfuit^ Uo CaCpitanV perfonnage aJcfrs aaffi &
la mode > qu'il feifoit rrdiciile aaj6ufd*htii , qui eft can-^
txA amoureux de Ciarice > tantôt dl&betl#, dont \é
rpld eft parâite^niefit; inrotile dans la pièce ; car il â6
r^paad aoconçf %2(ftté ,: &- il me fere qu'à ptocèrer-
deg feènes très^&ftidieufesw H dit à fi)ifi vafet:
Sçaîâ-cu mes qualités > Lieutenant de la pefte ,
Intendant gfnérsrl des nléni^ces du fort y
Coloiiel du canlage y êc Gïtnmis de la-mort y
L*effroyable terreur d^ terre & cte Votât ^
£c pour dire , en un mot y le deftruâeur-du monde.
Ctarice inftrdite du ^rojec qu'a Ion père de la dôn«-
ner en^ mariage ao vieuss M édecîiï , pour conferver h
foi pour Leatiube^ tout pai^jùre qu'elle le crûit» for-
me le projet de l'aller retrouver à Geneâ ; puis réflé*
chiffant for l'iadécence à une fflte <le quitter la maifont
gatemeUé , eHeidî aàr^ifleces^ paroles : Je vetfx partir ;
- ' ■ * >
. . .«. • • . Et toujoa» mon honneôr me retient ;
Mon honneur qui m*efl cher , parce qu'il t'appartient.
Je n'ofe te ehdfchef â caufe que je c*aim^ ,
]£t me privé Jk toi poui^ l'amour de toi même.
.'.••., ■ _ . - - «
Quelques coups de bâtons que l'on dotvtvt ?l^\!^^ï^
%44 THEATRE FRANÇOIS;
teur f rompent (on marhge : mais U fe j^réfente^n an^
tre rival , qui plonge Hortenfe dans le plus violent,
défefpoir : c'eft Alexis , fon ^rocieti maître 9 (bn amir
qui le prie de le fervir auprès de Clarice , donc il eft
amoureux. La reconnoifTaAe engage Hortenfe à le lui
promettre* En effet il l'exécute , & Horaceraccepte
Alexis pour fon gendre. Cette Comédie devient alors
fort interrelTante. Clarice» encore plus affligée de ce
nouveau mariage quetiu précédent 1 puifqu'elle ne
peut plijs prétexter (es refus > ni fur l'inégalité 4e l'âge»
ni (ur celle de la naiflance» fe détermine abfolument
à partir. Elle rencontre Hortenfe ; &, pour le mettre*
dans fes intérêts ^ elle lui compte fon hiftoire; elle lui
avoue l'excès de fon amour pour Leandre. Celui ci
cft prêt à fe fa^re connoicre. Mais la probitétriom-
phe : il préfère le bonheur de fiin ami au (ien propre»
& détermine enfin Clarice à retourner chez elle:
Après cet eflFort générenx i il fucconibe à fa douleàr.
Enfin Alphonfe arri^ de Gènes» avec une efpece
de teftament de Raymond , dans lequel il demande
pardon à Horace (des chagrins qu'il lui a caufés» &
le prie , pour réunir leur deux faniilles > d'accorder à
Iteandre Clarice en mariage. Alexis apprend d'abord
cette nouvelle avec chagrin : mais lorfqu'il (çait que
ce Leandre eft ce même Hortenfe, fon plus cher ami,
il vole au devant de lui, pour être le premier à lui
apprendre cette heureufe nouvelle. La fcène entre
les deux amis efl fort théâtrale, Hortenfe 1 tout entier
THE ATRE FRANÇOIS. ^45
à fa douleur , ne peut comprendre le bonheur qu*A-
itrgxs lui annoncé. II croit avoir perdu Clarice ^ & eft
bien fur que ce mot h'eft plus pour lui qu'un être
chimérique. Ce n'cft qu'après lui avoir répété plu-
sieurs fois qu'il la lui cède, & qU'Horace la lui don-
ne , qu'U- a la (àtisfaâion de le voir pafler , de l'ex-
cès de la douleur ^ aux tranfports de la joye la plus
pure. Ils vont enfemble chez le bon- homme Horace ^
où la pièce fe termine par le mariage de Leandre
avec-Clàrice , & par celui d'Alexis avec Ifàbelle^
LbrCqué Leandre éft reconnu , & que fon bonheur efl!
cotJÀdS>ii ^ Aâeur ftit cette réflexion :
■ V "
C"
A U En , le^écite obtient fa récompenfe :
£t r^tmour nous fait voir qu^avecque cpnnoi (lance ,
Quoiqu'on s'en imagine , ii régit l'univers ,
•£t qu*U porte un baivds^u > fnais qu'il voie au travers*
^ jSi dé.nôs jours on traitoit ce fujet avec un peu de
fbîn ije crois quHl auroitun très-grand fuccès. Rotrou
atoit traduit cette pièce de Sfbrza d'Oddf , Auteur
l^lieo : ce Poëte étoit le plus grand admirateur > &
toujours l'imitateur de Plante ; & les pièces, qui nous
reft ent de Jui 9 font toutes dans le genre de ce celé-
brt Auteur comique.
, .îc . - • . ' • • • ■ -
(SUJET Ï)E*BELISSAIRE.) Avant que d'é-
poqfèf t'Empei^éur Juffinien , Théodore avoit aimé
BeliiTaire venais ceiâi - ci > fidèle à Anthonie ^ dont 'H
étoit éperdûment amoureux f n'avoit janiais voulu
s'unir avec Théodore; Bien tôt aprèsii'Empereur la fait
0.4^ THEATRE FRANÇOIS.
nvontçr fur le Trône, & elle fcmfery^e dansibo ç(
ïe défir de la vçngeance. Envain ce Mros 'g3gp?
i)^t^ïl\ç$ f formel; des Royaumes* Il ne p^ut cri
pher de la hai^e de rimpéjr^trijce t qui yeut abl
meot fi^irje périr celui qui a hleifé fon at^pur pr^;
Elle réduit up Çourcifan » nommé Léonce, qui >
les ha^it;^ 4'uii (bldac eftrppié ^ çiendî^a^ , vient
mendier l'apijQiQiie au Général des Kooiain^ ^ çpin|
iaifir ui^ ipOanç j^vorable pour 1^ p(^najr4@r.
lifTa^ref. attendri dç râat de^e/foldat .qj^'Ji nerQ
nojflbit pas 9 Ifii.dpnçe m^ ciï^^4%^ gpnd ]
Léonce, touché4e cette géj^çficéyrfçjoçteà^ifl
lui avoue fon projet criminel » &• l'avertit de fe
der du courroux d'une femme. C'eft ainfi ij^e fir
premieT aSe. Dans le deuxième 9 ppuyp) aiTail^^t/: 1
pératrice ^ au défefpoir qoe Léonce né faft
mieux fervie , trouve le moyen de corrompre Nac
qui lui promet d'exécuter âdéle^^çt Ces ordr^.
effet, \1 va chez Bi^iiT^jr^^i &Je ^cmi^ant ondoi
il veut profiter de ce moment ^ lor(qu^il voit à cè^
Iqiun papier où fon nom eft écrit : il Hl; que l'Ei
réur , voulant donner à fon favori les plus fprteS {
ves de (k confiance & de (on amitié » l'a voit laii
maigre, de nommer celui qq'it jqgjsq^ te plu$^d
d'être le Qpuverneur d'It^ -^ & q«P. p'ét^fe lui
frvolt çhoifi pour cgt inippi;tapt ^(nplpir fPiéfi^fi
reconndi&nce 9 il ééteile fon crl:f^ > : & éctk au
de ce même papier : garde «^îoj du: courroux d
JHEATRE FRANÇOIS^. a47
npe. L'Impératrice apprend bien-tôt queNarfez
Ta -pas mieux feryie que Leoncç» & s'adrefle à
ilippe» qu'elle gagne ^vec d'autant plus de facilité »
AntJiDniej 4ont il eft amoureux 9 doit être le prix
fon crime. Lehafard fait que Narfez & Léonce
eodent la converfation de Théodore avec Philip*
: ^ 6c i^lant l'enipéicher d'attenter aux jours de
r bienfaiteur 9 Us rattetident à (on paflage pour lui
r la vie* Il alloit^ en ei&t,, fuccomber fous leurs
ips 9 iorfque Beliflàire Xurvient 9 & voyant deux
unies qui en atcaquoient un feul > prend fa défenfè
les met; en fuite. Il ne veut point fe faire connoi-
par celui à qui il vient de conferver les jours ; &
ai»cl lui donne fa bague. Dans le troijiéme aBe , aa-
afTaffipat manqué : Philippe , qui igliore que c'eft à
tiflaire à qui il doit la vie ^ cherche toujours à exé-
er les ordres de l'Impératrice ; & ayant rencontré
&meux Général > il lui demande fa main à baifer ;
nptant lui retenir le bras > & en mème-tems lui
rcer le cœur. BeMaire refufe l'hommage qu'on veut
rendre. Enfin % vaincu par les inflances les plus
es , il la lui donne : heureufèmenc Philippe recoù-
It la bague» qu'il avoit remife à (bn libérateur ; colv-
fe à fes pieds qu'il étoit venu par les ordres d'une
ime pour lui ravir le jour; il lui en dit.a/Tez pour
faire comprendre que c'étoit Théodore qui avoic
ijuré fa perte. Cependant cette Princefle, au défef^
r de voir échouer ainii toutes fes entreprifes fur les
%48 THEATRE FR'ANÇOISf.
jours de BelifTaire , ne veut plas (e rapporter qa
elle-même du (bin de fa vengefthce ; & ayant m
contré l'objet de fon courroux fur un lit de repor
elle fe précipite fur lui pour lui percer le fèîn , Jo
qu'elle eft arrêtée tout- à^ coup par l'Empereur It
même. Ce Monarque, croyant ion ami dans le fein <
repos, avoit refpefté fon (bmmeil , & atteiidoit tr
quillement qu'il fût réveillé pour lui parler d'af&i
importantes. Juftinien , indigna dé l'aâîoh de The
dore , la condamne à l'exiU & aflbcie Beliflaîre à l'Ei
pire. Il profite de fa nouvelle autorité pour faire grâ-
ce à l'Impératrice , & pour la reconcilier avec Coâ
époux : enfuite il renoncé au pouvoir fouverain. Loin
d'être touchée de cette aârion généreufe^ Théodore
n'en eft que plus animée à la vengeance. Le bâfard
lui procure une lettre très -tendre, que BeliCTaire
écrivoit à fa chère Anthonie. Elle la porte à l'Empe*
reur , & lui perfuade que c'eft à elle que cette lettre
s'adrefTe, & que (on favori cherche à le deshonorer»
Le trop crédule Juftinien ajoute foi à cette impoiture*
& fans vouloir écouter les juftifîcations de Beliflairei
il le condamne à mort. Lorfqu'on vient dire à Theo^
^ore que l'on conduit BeliiTaire au fupplice, elle (e
fent déchirée par fes remords, & veut reparer k.
crime qu'elle a commis : elle envoyé avertir Juftintcn
qu'elle Ta abufé 9 & que Beliflaire étoit innocent.
L'Empereur envoyé au plutôt un courrier pour em»
pêcher l'exécution. Il arrive trop tard > $c ce béros
THÉÂTRE FRANÇOIS. ^49
tf^toît déjà plus* Ceft aînfi que finît cette Tragédie ,
qui certainement eft au-deffous du médiocre. Rotrou ,
en voulant faire paroitre dan» Téclat le plus brillant
la vertu de (on héros ^ fe fert toujours des mêmes
moyens. BelKTaire s'exprime (buvent comme un Capi.
tan ; il eft platement amoureux d'Anthonie. Juftinien ,
qui a toujours paiTé pour un très-grand homme > joue
ici le rôle.d'un^ trè$- grand fbt. Narfçz, un des hom-
mes le plus vertueux de (on fiecle > nous eft donné
comme un aflaffin de fang-froid : & ce même Belif-
faire 9 fi fbuvent Ëinfaron » lorfqu'il eft condamné à la
mort f reproche baflement à l'Empereur les différen-
tes Qccafions où il lui a fauve la vie > lui rappelle
combien de Royaumes il a conquis pour lui> combien
de vidoires il a remportées ^ & combien, de fois il a
obtenu les tiônneurs du triomphe; & le tout> pour
demander la vie. Ennn 9 cette pièce eft pleine dedé-
Êiuts* L'un des principaux > c'eft que l'on ignore ce
que devient la coupable Théodore r que Ton ne fçaic
pas davantage le fort de la tendre Anthonie ; & que
Ton n'eft pas plus inftruit de ce que penfè l'Empereur
après ce funefte événement*
( SU JEÏ DE CELIE. ) Je ne^croîs pas avoir
fait l'extrait d'une pièce plus mauvaife que celle --ci :
elle eft fans intrigues 9 fans intérêt & mal écrite. Je
me (èrois même difpenfé d'en parler > fi je n'a vois cni
devoir faire également connoitre Rotrou ^ & dans fès
défauts Se dans fes grandes qualités. Deux frères »
Dom Alvare & Dom Flaminie > neveux du Vicerôi
de Naples» à llnfçu l'un de raiitre, (ont tous deux
amoureux de Celle a fille d'Euphrafte ; Gentilhomme
a^o T HÈ AT RE^ FRANÇOIS-.
Napolicam > & fort pauvre. Alvare a.rni^ 4ans (es iû«
cérèts Lucinde t fille-de- chambre de Celiez Agafie>
vakt d'Euphrafte, eft*dans ceux de Ffaminfc : mr"'
ramour a rangé Celle du parti de Dom Âtvare. F
minle ayant appris que fon oncle > malgré (Iqégalité
^es ripbelTes > avoit confenti au mariage d*Alirace avec
Celie , a recours aux moyens les plus odieux po
rompre cet hymen. Il va trouver fort frôre ; il lui
qu'il s'intérefle trop à fa gloire & à fpn bonheur , pour
lui laifTer coptraâer un hymen aufli honteux ).& pour
se pas l'avertir que Celle n'étott qu'une fille abaudou-
néej qui, j[ùfqu'àpréfent,n*a voit eii d^aùtf'e revenu
que celui qu'elle s'étoît procuré par Tes complaifances
criminelles ^^ue lui-même en payant ayoit obtenu Tes
&veurs« Alvare fé met en fureur contre Ton frère > &
ireut le punir d'ofer attenter à 1» répâtatidn de Celie.
Cefui-ci lui propofe de lui donner cette même nuit îa
preuve de ce qu'il vient de dire , & lui mpntfe une
lettre de Celie 9 qui lui alTigne un rendez* vous» En
efïèci 4^<]ue^e'fatll fuom^^ût: eflraïri\^é>l^ pauvre
Alvare eft témoin qtf Agafte introduit ^at^ec myftere
Fiaminie dans la m^ifbn d'Euphraftè. II fe retire fîw
lieux ; & lé lendemain ayant rencontré Euphraâe , il
lui annonce qu'il rompt avec fafîlle» & liû raconte
tout ce qui s'eft paflé, Le bon homme au défefpoir
de l'infamie de Celie f va tout auffi-tôt lui pbnger un
poignard dans le cosur* Flamipie a{>pre&d bien -tôt
THEATRE FJRANÇOIS. a^i
te funefte npi^velle > & voyant^ue (on impofture
fervi qu'à faire périr l'objet de fa tendrelTe > il fe
t déchirer par les remords les plus cruels > & va
^t avouer à Ton frère. Ils vep|çptcous deux mourir ^
0^ expier l'un Ht mlomnie^ Tautre (on trop de cré-
lité , & fe (^ifp^tent long-cems lequel eft le plus
ipable. Cependant Eupbrafte > rendu à lui • même»
t qu'il n*apas trop bien Ëtit d'écouter fi légèrement
i premier Qipugement 9 & de tuer ainfi fa fille fans
avoir dooné feulement le tems de (è juftifier. Il va
:cufer au Vijpe^oi de ce crîme^ odieux ; mais il l\à
itient en m^c^rtems, que lè$ 4eux neveux font
nplices de (à mauvaifè aâîon ; & que } fans écouter
i^oix dii fang» ^ n'écoutant que celle de la jufiiceà
3e peut fe iJifpeofer de les faire périr tous troiiè
s deux frères» plongés dans 4e défefpoir de la mort
Celief eonviet^neittf: qu'BuphfaCie. a raifôn^ & &
nouent volontiers à perdre la:viç. Le Viceroi-qui
loit fes neveux > eft.aiTez emharraifê. Enfin >.pout
tirer d'affaiiie ^il prononce que pour qui cherche à
lurir 9 la mort n'eft pas un foppUce > & qu'il a ima«
é un moyen bien plus fôr pour les punir tons trois.
ttfreuCeiQ!ÇPt qu'Euphrafie avoit encore une: fille fort
le. nommée ISnene^ Il ordc^ne donc à ce maU
ireuK père de vivre 9 pout ^voir le Jtems de fe repeui»
de fon crime; au tendre Alvare de conferver fes
rs y pour pleurer fans ceiTe (k maitrefife ; & à Fla-
licj comme au plus criminel» d'époufer la jeune
x^x THEATRE FRANÇOIS.
Ifinene. On auroic peine à imaginer ce qbi arrive de
ce beau jugement.: c'eft qu'Euphrafte eft tout-à-coap
confblé, & dit qu'iV gagne beaucoup à ce marché i
poifqu'au lieu d'une fille, il acquiert un fils; c'eftqoe
Flaminie, oubliant Celle avec l#mème fecilité , avoue
<|Q'iI eft au comble de la joye 9 & quil trouve Iftnene
Ibrc à {bn gré. Mais ce qui) y a de plus furprenaot ^
encore : c'eft qu'Alvare, ce modèle des par&its aman^i
eft outré de jaloufie du bonheur de (bn frère ; c'eft
qu'il (butient qu'il époufera Ifmene rau(fi-bien que lui;
J6l qu'il eft bien bieare que Flaminie /étant reconnu le
plus coupable , au lieu d'être puni comme il le mè«
rite y reçoive au contraire une récompenfe aulfi agréa-
ble* Enfin 9 cédant au tranfport de fai colère. & au
dèfir qu'il a d'époùfer , il tire à moitié fon épée > &
|ure que ce n'eft que par fa mort qu'on [^eut pofleder
Ifuiene. Flaminie 9 qui meurt auffi d'envre de fe ma«
rieri lui répond peu tendrement qu'à cela ne tienne 1
& accepte le combat* Le pauvre Viceroi-eft dans le
ptus grand embarras > & cherche ënirsin à calmer l'a-
cimoQté de fes.neveux. Enfin Pou ne Içait ce qui
alloit arriver » lorfque ta jeune Ifmene parait > & vient
annoncer que Celle eft en pleine (ànté ; que fon père
aveuglé par la colère , n'avoit porté qu'un cotip<> qui
avoit gliÏÏé fur fa gorge » & que faifie pat la frayear
elle s'étolt évanouie. En effets on la voit bien «rôt
parokre plus belle ^ue jamais : le calme r^nait dans
le coeur d'Alvare ; & comptant époufer (;^le«ci ^ il rer
THEATRE FRANÇOIS. x$3
ice fans peine à Ifmene , Celie fait un peu !a rçn-
rie > & pardonne enfin à Alvare; ; & le mariage des
kx frères avec les deux fœurs termine xecte eiù
'eûfe Tragi-Comédie.
[SUJET DE LA SŒUR.) Autant que faî cm
iivoir annoncer la pièce précédente , comme une
s^plus mauvaifés donc j'aye encore rendu compte «
:ant je crois pouvoir dire que je n'ai pas jufqu'à
^nt parlé d'aucune » mieux conduite & plus in»
«(Tante que celle-ci. Le fujet en eft heureux; le»
fs en font nobles & aifés; & Von ne peut pas s'em-
cher d'être furpris que ces deux ouvrages foicnt de
même main. Il eft vrai que je foupçonne, avec
elque fondement „ que celui-ci pourroit bien être
e traduâion de ce même Sfor2a d'Oddi , duquel
>trpu avoic déjà traduit Clarice. La Sœur eft abib-
nent dans le genre que cet Auteur avoit adopté ,
:ft-à dire , dans celui des Auteurs dramatiques La-
is ; mais foit traduârion , foit imitation » Rotrou ne
•us a pas moins laiflié une pièce excellente 9 dont je
is rendre compte dans le plus grand détail > elpe-
nt pouvoir engager quelqu'un des Poètes de nos
urs à la rendre fufceptible de paroitre fur notre
éâfre>*où je crois qu'elle pourroit faire un grand
fet. '
( A&e premier , fcène première. ) Lelie 1 amoureux
Aurelie , confie à Ibn valet Ergafte > le défefpoir où
eft de ce que (on père veut lui faire époufer Eroxe-
e ) & le conjure de chercher des moyens pour rbm*
re ce fatal hymen. Ergafte lui confeiUe de fe confier.
454 THE A TR È FRANCO IS.
à Erafte, qui étant amoureux & aimé d'Eroxenci
fera certainement charmé de le fervir en cette occa-
fion , puifqu'en mème^tems il fe fervira lui-même. 11^
vont enfemble le chercher, [fcèrie deuxième) Lydie,
fervante d'Orgie , oncle d'Eroxene , & par conféqoeot
confidente de xrette jeune beauté , cherche Erafte pdur
lui apprendre une fâcheafe nouvelle^' (/c^Aze troifiémt)
Erafte joint Lydie : celle-ci lui apprend que , dès le
foir même , Lelie doit être l'époux d'Eroxene. Enfte
au défefpoir , prend le par^ de fe battre contre fûtt
rival, ifcéne quatrième) Lelie vient. avec empreffe-
ment joindre Erafte^ qui le reçoit très^ froidement ^
& qui lui avoue qu'il le regarde comme fon rival
Pour le détromper , il lui conte fon hiftoîre. Il y a
près de quitize ans que la Reine de Pologne voulut
faire venir à la Cour ma mère & ma fœur ; elles fe
mirent aufTi-tôt en mer y & on ignore leur fort. Eofiù
il y a environ deux ans que mon père apprit qu'elles
étoîent tombées au pouvoir dunCorfeîre; il fçiA ^ue'
manière a voit été vendue & tranfportéc à Conftan-
rinople > qu'on avoit vendue ma/oeur à un autre Mar-
chaud; mais qu'on ignoroit ce qu'elle étoit devenue.
Sur le champ 9 il me fit partir avec la rançon de ma
mère* J'arrivai à Venife > où je devins éperdûmént
amoureux d'une fille, nommée Sophie f qui iervoic
dans l'hôtellerie : elle me dit qiïe , fans^ connoître ks
auteurs de Tes purs y elle (çavoit feulement qu'elle
étoit d^une iliuftre naiilknce^ & qi>'6Ué avoit été fiite
' THEATRE FRANÇOIS. a^^
sfclàvë dès fa plos cendre enfance. Sa fagefle > (a
beauté m'attachèrent à elle pour le refle de ma vie s
& (lir de mourir de douleor, fi je b qtsitroisuninftant,
^ confiai mon amour &mes in<)uiétude9 à E^gafte,
)ui me confeitla , après avoir vu*qu'enyaiir iï voulœt
ne diftraîre de cet engagement y de refter iricognit0
mprès de ma maitrefTe le tems que je devois em^^
)Ioyer pour fadre le voyage de Gontiantinoplç ; après
juoi }e reviendrois* re^ouver mon pere> ^ qtnjera^*
nenerois Sophie y que je diroîs être ma fœur Aureliev
que î'avoisr^racbetëe à Condantinople d'un Marchand
d'efclaves y qui en même-tems m'a voit appris la mort
de ma mère. J'exécutai fon confeil : je fuis revenu id
&vec la jeune Sophie j qui paiïe pour ma fœur Aure-
lie ; je lUdore chaque ]oar de plus en plus ; je fuis
même engagé avec elle par un mariage fecret. Jugez
maintenant Ci vous devez être jaloux de moi , & fi lé
mariage d;Eroxenfe' ne m'eft pas pTus fâcheux qu'à
vous-même. Ergafle, ennuyé de la longue hiftoire de
ion maicre, prend la parole» & leur dit qu'il n'eft
qu'uB moyen pour les tirer intrigues ; c*eft que LeKé
accepte avec tranfport la propolicion que doit tuf faire
(on père d'époufer Eroxene ; & qu'Erafte lui deman-
de en nïêmetems Aurelie ett mariage» & de h pren-
dre fans dot» Article néceifaire , puifqu'il l'avoit déjà
promife au vieillard Polidore fous la même condition 9
Se que certaiùement par ce moyen ils gagneroient du
moins du temr. Les deux jeunes gens^ enchantée de*
l'unir avec Polidore. Anfelme > qui paroic dans <
ment, empêche la converfation d'aller plus loin,
s'en va dans la chambre d'Aurelie > pour lui coi
qu'ils ont projette pour (brtir d'embarras ; .& E
reifte avec le vieux Anfelme» qui ,paroic méc
de l'affiduité trop marquée que Lelie témoigo
fœur. Ergafte qui joue le perfbnnage d'un vale
gant & plaifànt , à tout ce que lui dit le vie
répond toujours : c'eft la coutume de Turquie ;
à la Hn impatiente Anfelme» qui , pour changer ci
verl^tion , lui dit qu'il prétend dès ce fuir mèn
rier fà fille Aurelie avec Polidore." Erg?ifte , qt
dégoûter le père de (on maître de ce mariage ,
que Polidore n'eft pas aulTi riche qu'on le croit,
il lui dit que ce même Polidore fe mocquoit fam
de lui , & publioit par tout qu'il avoit plufteurs i
tnodités perfonnelles > qui rendoient fa focié
defasréable. Quand Ergafte voit le bp0<*hom
THEATRE FRANÇOIS. %Sy
avoue à fa confidente qu'elle eft jaloufe des ai&duitâ
de fon amant chez le frère d'Aurelie» & qui la char-
ge de veiller à ce qui fe pafle , & de lui en rendre
compte. Lydie , reftée feule ^ fait des réflexions fur la
piûifance de l'amoar : Lelie la joint. Et comme pour
exécuter le projet convenu > il eft fort preffé d'aller
trouver le bon-homme Anfelme f il lui parle fort à la
bâte 9 & s'arrête peu avec elle. {Scène fixiime) Anfel-
me paroit. Erafte i qui croit Lydie bien loin ^ l'aborde
avec emprelTement , lui exagère (on amour pour Aa<>
relie , la lui demande en mariage »& l'obtient. Lydie»
qui s'étoit cachée dans un coin > & qui avoit entendu
toute la conver&tion^ déclame dans un monologue con-
tre la perfidie des hommes» & fe prépare à avertir (à
maîtrelTe de l'infidélité d'Erafte. Le troîfUme aSe
commence par le vieillard Geronte» qui arrive de
Conftantinople avec ibn fils nommé Horace ; ils fonts
tous deux vêtus à la Turc ; & te fils nç parle que cette
langue. Ces deux perfonnages» fur-tout celui du fils,
(ont très-épi(bdiques » & fort inutiles à la pièce » où
ils ne fervent qu'à amener une fcène y qui veut être
plaifante. Enfin , le bon - homme Geronte , enchanté
de fe retrouver dans fa patrie , apperçoit Anfelme &
n l'embraftr : enfuite il lui dit qu'il a vu fa femme à
Conftantinople ) qu'elle eft en bonne fanté, mais fort
farprife du peu d'empreflement qu'il a pour la rache-
ter. Anfelme alTure que fa femme eft morte, & quel
Geronte radote > fur-tout lorfqa'U ]fà foutiedt que ja*
Tome IL Ml
XS8 THEATRE FRANÇOIS.
filais là filk Aurelie ti'àvoit para dans Codftantino
Geronce lui remet alors une lettre de Conftance.
(èlme ne peat fe refufer à cette preuve , puifqoll
connok la main.de fa femme. li appelle fa fille A
He pour la pr^fenter k Gerônte » & pour qu'elle
prenne par lui des nouvelles de fa mère» Cette (
]«tte le pauvre Anfelme dans la plus grande pei
xité i car Geroûte fentîent <}u'Aitrelie veut Tabi]
^'elle n'eft pas (a fille j & qu'il Ta vue fervantc
cabaret à Venife* Aurelie fe récrie contre llmpei
du vieillard» Se fe retire. Celui-ci quitte Anii
potir quelques affaires » & liii laifle fon fils jufqu'i
retour. Anfelme fait fes réflexions fur ce qui vien
fe paffer; lorfqull eft joint par Oelie & Ergafte
queftionne fon fils fur Ion voyage à Conftantino]
&fur ceux qui lui ont afluréqueOonftanceiétdit me
L*elîe s'embarraflfe : Ergaftç prend la paitofe > &
pond pour fon maître > 6c foutient à Anfelme que
ronte s'eft voulu moequertle fui ; ^pour lelui prou
il quefttonne Horace dans tme langue qu'il fabr i
fût le champ. Honrèe fiirpris lui répond -en T
Êrgààt explique à fa façon toutes ks réponfes d'
fftce> & finit par perfuader à Anidine queGero
ée îaveu de fon fils , Aoit un peu yvre ,1orfqtrt
avoit parïé. Leiie , enchanté de f dprit de fon va
fit croyant êtne forti d'mtrîgue , fe retire avec lui.
ronte vient retrouver Anfelmet qui lui reproche^
mauyt^eé pkilanteries 6c fonyvreffe* Cehii-ci
TffEATfiE fRA}{ÇOIS. *5.9
tçitt furpris , fut - tout iQf rqu'^t^ffilme lai fmmt qtt6
(pa fils <| tout 9iyoué. |1 garlç boQ Tqfç ^ Horace f qui
\\^ r^pppd qu'un hof^n^f lui avQ^ parié en uue lam
glAe qui li|| ^oh tpt|^|ei):|en( iuCQUUue , quHl lui avoil
r^popdu qft)?|qqe^ motç ppur lui dire qu'il ne l'enteiH
dojt pa^ > $c que ç'â:^i( i^ tout ce qui s^étoit paifif;
Qeroope ^iTure JVnfi^Iuie qu-qn çl^erche è le tromper^
j^ s'en v?if J^nÇplmP i f efté feul % fe promet bien de fii
yipnger d'prg^^^. Ce0: i^iuii que finit Attréfiéme aSei,
|> qiuffriim^ QDitqmf ncf par I^eiie ^ qi^i rit encore avee
^f g^(le de l-ko^tçux (Iratagème qu'il avoit eniployé
pour tfPiBper fqp père. Il^i (put Ipçj^rrompus par Tarf
rifjée d'une ff^mmP vêtue ^ U Turque 9 ^qi y iapr&s plui»
(ie^rç qçegiQj)^ t fp &it f nfiu cpupoltré pour Confilb^
f:e » feipm? d'Aufelme de mère de Leiiê« Celui -oâ
pr^pd Ip ^irti (de lui coût ^vpuer. Cette tendre 'merg
p?rdppD^ à Tpn fite» S^ lui promet même d'appûyer &
g^iirjberie> S? de faire pfifibr aus yeux d'Ânfelme Sa»
pbif ppur i^ fille Au|:elie« Srgafte fort pour aller avec#
fi^ i^ feipt^e Ayrelie de tput ce qui vient de fe paSer^
le du rple q^'^le doit Jouer brfqu'elle parpitra dèf
i^Ut CPUftwce» Ia fçène troifUm fe pafle entre Coqr
ft|i|/ce & Mie , qui témoigne à ffi njere Fexcès de &
tÇQd^efle if. de f» r/bCQnnpiAance. L'arrivée d'AnfeIt
fo^ I qid vient etpbral&f &n époufe » forme lu fcinf
^^iiéi€. Il t^oigoe conte (à joye de fon heureux
rf fpur » & ordpufie qfi'on fa0e deicendre Aurelie pour
vmrfii ioere^ &:^s çia^uiimc* Aucelie fe Jette àucsi^
i^â THEATRE FRAf/ÇOrs.
de & miere , qui Tembrafle avec la plus grande tcn^
drefle. Anfëlroe enchanté de Ton bonheur > fe retire
avec fa fille ; & \^JcèneJixiéme fe pafle entre Confian-
ce y Lelie & Ergafte. Cette fcène eft , on ne peut pas
plus intéreflante. Ergafte fait des complimens à Con«
fiance , for la manière fubtile donc elle a joué (on rôle ;
elle héiite un inftant , & apprend enfin à Ton fils qu'Au-
relie eft réellement fa fœur. Lelie fe défefpere ; fa
mère Texcufe fur l'ignorance où il avoit été de la
oaiffance d'Aurelie ,& centre chez Anfelme» de peur
c]u'il ne le furprenne dans Tétat de fureur où il e(t.
[Scèae Jeptïéme) Lelie veut mourir; Ergafte cherche
aie cônfoler» & lui perfuade d'aller trocfVer Erafte*
^cène huitième) Erafte arrive d'un côté, & Eroxene
de l'autre. Il eft fort étonné de la trouver dans la plus
grande colère contre lui. Il ignoroît que Lydie avoie
entendu la converfation qu'il avoit eue avec Anfelme
datis Iç feconi aêle y & qu'elle en avoit rendu compte
à fa maitrefle : il veut fe juftifier; elle le quitte en lui
défendant de la voir jamais. {Scène neuvième ) Erafte
fe' défefpere de la cogère d'Eroxene ; & il ne fçait à
quoi Vaitfibuer. ( Sci/itf dixième ) Erafte rencontre Ly-
die ; il veut s'eitpliquer avec elle fur le courroux d'E-
rbxene : celle - ci ne veut point l'entendre ni lui ré-
pondre ; dans l'excès de fa douleur , il la quitte pour
aller confulter Lelie. La fcéne onzième fe pafle efttre
Orgie , oncle d'Eroxene , & Lydie 9 & eft bien né-
ceilaire au dénouement. Le vieillardi en colère d'avoir
THEATRE FRANÇOIS: %6t
trouvé Lydie en converfation avec Erafte , lui fait les
reproches les plus outrageans. Il la veut faire rentrer
chez lui 9 où il rafTure qu'il la battra tout à Ton aife.
Celle-ci , effrayée de la menace ^ n'y veut abfolumenc
pas rentrer ; & le pétulent vieillard la prend par les
cheveux 9 & l'entraine malgré elle chez lui. Le cm-
quîéme aâe commence par Lydie ^ qui fort furieufe de
chez Orgie > qui l'a battue outrageufement. Elle (ë
promet de fe venger promptement , & feprOpofe pour
cet effet d'aller trouver Ânfelme. ( Scène deuxième 'y
Elle le rencontre tout à propos » & lui raconte qu'Âu-
celie » qu'il croit fa fille | eft fille d'un certain Pamphi-
le» frère d'Orgie, & mort depuis quelque tems; &
qu'Eroxene ^ qu'pn tient pour fille de Pamphile > l'eft
de Confiance & de lui. Anfelme étonné lui demande
l'explication de cette énigme. La voici. LorfqueCon-
fiance mit au monde Âurelie > on la donna à nourrir à
Fenice> femme de Pamphile. Cette Fenice , qui > de
(on côté, venoit d'accoucher auffi d'une fille ^ promit
de donner ion enfant à élever à une nourrice » & d'a-
voir (bin de la fille d'Anfelme. Elle fit tout le contrai-
re : elle donna Aurelie à élever à une nourrice y (buS
le nom d'Eroxene ^ & éleva fa propre fille , (bus le
nom d'Aurelie > & la fit paffer pour fille d'Anfelme p
efpérant > avec le tenis , que la feinte Aurelie leur té«
moigneroit fa reconnoiffance de l'avoir tirée de rindi««
gence où le Ciel la defiinoit. Un hafard heureu:ij:, queU
^ue tems après > procura à Pamphile des richeffçs^forc
ultérieures à telles d'Abfeltâe. Il vôulôt àXoks wimi
la vérité , & irtpretidtie 4a 61te^ Gë fbt d^iis ce tems-
là I, tjuJeUe fut elitevée atèc ConSÀtrce ^zk xm certain
Turc. Ptà de tems après> Pâhi^hltè, fetitàt^l: là fin pro^
chaîne > donna Toh bien à fen flrere Orgie ; tnàis à là
charge, eo cas iqu'bh ittroiiva la fkùfle Àurèlie^ de
h éàKei dé di:jt mHle dticàts. Elle apprfehd èm tnëme«
cèn» & Atifehttè i'atttô^ de Lèli^ pbtut cette fatiilfe
AureKèrfc lui dit^ûll eft dans lie droit de répéter
Ces dix niilte ducats , ptsirqitte \t teftàtn^t eft tn bon-
ne ferme ictae^ un Notaires bifférent^e^ jpréùvés ne
péthrent plâ$ {j^Ëiëttre à Anfi^tnê de doiitèt dé Ik
vgrîté dfe cme biftofrê. Il Va ttrouvet Oiçiè > qui re-
i&et f avec un pett de peiné > fes dix ihille dtrcàts ; lit
le nmtiaîgè de Ldié avec Sophiie , Ifit ^'Erafte ^oi fe
îuAiSe ailÎMctat àvë'c Etoxelû^ , tèrihibe ceinte pièce i
^ }'avouè avoir tr otivé cfaarmantie. ^
(SUJET DU VÉRITABLE SAtNt GENEST.)
Pôèr récom j)ebftr îa valeur deMàtîmîn,l'Èttipéreûf
Skldétl^ Itti accordeiàfinè eh iûaHagè :& pour rdem-
dtf^ la pôitij^e de tét h/méh > on BAt Venir dés Corné-
4Jeft6 ^ui l'épréfèhtent une Tragédie ^ dotlt l'aâ^oti eft
le martyre d'Adrîàh, dont Génttt , CÔëbrè Àâeair,
repi'âën^ te f Àlè. Il lé joûéliftipârietirefiieût, qo'au
niiHéu âïèâ^dela ptécè/ilèhtéçoit dés tote^liménsdt
rË«|>eréâr K dé totité là Gour. Lt>ir%u*a arrive au mo-
Itïeiit dan^ la piéée où l'on hd promet toos lôs hoonenri
THEATRE FRANÇOIS. ^63
qu'il peut délirer, s*il veut renoncer au vrai Dieu^ & où
on loi &it Yoir tous les fupplices préparés , s'il perfifie à
ne TOidoir point âcrifier aux Idoles : enfin briqu'il
fait ùi dernier^ profisffion de foi , où f loin d'être inti«
tnidé par Tappareil des tourmâns y il démontre ia va^
nîté & l'ihipuiflance des £uix Dieux ^ & où il établit
les ointes vérités dn Chriftianifme y Genefi > tout-à*
coup pénétré fie éclairé par un rayon de la grâce f
déchre hautement qu'il a embraflé les feotimens de
cdoi dont il repréfentoit le personnage ; en un mot^
qa'il écoit Chrétien ; quil fe faiibit gloire de l'être ,
& qu'il écoit prêt à (iibir avec délices les plus cru^
fiipplices f pour (butenir les vârités reipeâables^de là
Rel^ion Ctirétienne. On regarde d'abord tous ces
diicours comme un art merveilleux du Comédien:
mais on en eftbieivtât d^^ompé. L'Empereur furieux
le condamne au Tupplice > ^Hl («bit avec la fermeté »
le courage » & la piété <hKi vrai Chrétien.
Cette Tjragédie n'eft oertainemexit pas digne de
t Auteur de la pièce précédente. U y a quatre vers qui
m'ont paru mériter d'être cités, Dioçletien dit que , par
le (ècours de l'hiAoire » malgré la baffeiTe de fa naif-
fance 9 Maximin pafTera à la poftérité ; c'eft ainfi qull
la dépeint»
UhUfaaure , 4es grands cocacs la |»Ius cbete cfpirfmc^ j
Que le cems traite feule avccque xévérence \
Qui ne redoutant rien , ne peut rien refpe^r y
Qui fe prodah ûuxs £ird 9 ^ parle fans flatter 9 &c.
a6'4 THEATRE FRANÇOIS.
(SU JET DE DOM BERNARD DE CABRERE.)
Cette pièce n'eft pas meilleure que la précédente.
Rotrou a imaginé une aflez médiocre intrigue , pour
avoir lieu de faire éclater le malheur y qui poorfiit
iàns ceflè Dom Lope de Lune , malgré fa vertu & les
fervices qu'il rend journellement à TEtat- En eilèt f
rien ne lui réuffit. Dom Bernard de Cabrere ^ Gêné*
rai des armées & favori de Dom Pedre ^ Roi d'Ar-
ragouy r^voye porter une lettre à ce Monarque >
dans laquelle il lui rend compte des différentes vic-
toires qu'il a remportées fur Tes ennemis > qui font
toutes dues à la valeur & à la conduite de Dom Lope»
Il égare cette lettre : il va cependant parler au Roii
Au moment où il eft prêt à s'expliquer devant lui, on
apporte à Dom Pedre une lettre de Leonore > dont il
eft amoureux : il ne s'occupe plus que de la lettre
qu'il viebt de recevoir 9 & Dom Lope eft éconduit. Il
retrouve cependant une nouvelle occafion d'être in-
troduit devant le Roi. II lui préfente un placet que
Dom Pedre paroit recevoir avec bonté f & qu'il s'ap-
prête à lire. Dans ce moment même , pafle Leonore
qui fait un faux pas. Le Roi veut lui donner la maint
laifte tomber le mémoire qu'il vient de recevoir , &le
perd. Enfin Dom Bernard arrive à la Cour , & releva
fes elpérances. Il le mené avec lui chez le Roi , qui
embraffe Dom Bernard , le fait Amiral & Duc d'OC*
fone f & qui lui demande le détail de ta dernière ac-
tion. Le Général lui en rend compte ; &'précifémenfi
THEATRE FRANÇOIS. %6s
lu moment où il lui vainte les grands exploits de (bn
atni , le Roi s'endort , & n'en entend pas un mot. Il
Te réveille » lorfqu'il lui nomme les autres Officiers qui
Te (ont diflingués. II leur aflîgne à tous des récom-
penfe» ; & l'infortuné Dom Lope eft le feul oublié.
Enfin il reçoit une déclaration d'amour ^ (ignée Vio-
lente 9 nom de rin&nte , fœur du Roi. II fe flatte que
du moins l'amour va le dédommager des rigueurs de
la fortune. Il eft bon de fçavoir j pour comprendre le
dénoûment de cette pièce > que l'Infante aimoit Dom
Bernard; & que Leonore> malgré l'amour que Dom
Pedre avoitpour elle> aimoit auflS ce héros. Leonore>
ayant pénétré les fentîmens de Violente , pour lui Biire
prendre Dom Bernard en averfion ^ imagine de rédui-
re un Secrétaire du Roi, à qui elle fait contrefaire l'é*
criture de Dom Bernard, pour lui adrefler une lettre
la plus remplie d'anpipur : elle vouloit la faire tomber
entre les mains de l'Infante 9 pour exciter fa jaloufie
& lui faire croire que Dom Bernard ne défiroit que
Leonore. Le Roi furprendfon Secrétaire, écrivant
cette lettre ; & voyant qu'elle s'adrefTe à l'objet de (a
tendrefTe > pour punir (à témérité > il le fait mettre en
prifbn. Peu de tems après > Dom Bernard , voulant
obliger fon ami Dom Lope f vient trouver le Roi 9
pour lui parler en fa Biveur. Dom Pedre préoccupé ,
& qui croit que c'eft la grâce du Secrétaire qu'il vient
demander ^ l'arrête au premier mot , & te prie de ne
lui pas 4emander la feule chofe^ qu'il ne peut pas lui
adS THE A TRE FR ANÇOIS.
accorder ; mais qu'il a des raifons peribnnelles de fe
plaindre amèrement de lai* Dom Bernard n'ofe iofif-
ter davantage ; & ayant rencontré Dpm Lope , il loi
demande quels peuvent* être les grands grie& quête
Roi a contre lui. Celui-ci i'aflure qu'il ne peut en avoir
aucun; & que c'eft la fuite de fa mauvaiiè étoile»
qui te détermine à prendre le parti de fe retirer chea
lui , & d'abandonner tout efpoir de fortune. Dom Ber-
mrd le conjure de vouloir bien encore l'aider àr^
pou&er les ennemis qui fe fout approchés de ht Ville.
Il ne veut point refufer fon ami : ils fe mettent à la tête
des troupes , 6c bien têc la vi&oire couronne leur va-
le ur* Dom Bernard vient rendre compte au Roi de
ce nouveau fuccès ; 6t en habile courtilkn , U ne nom-
me pas Dom Lope : mais il répète faits cefTe que ce
fuccès efl: du au courage d'an brave foldat » efpérant
toujours que Dom Pedre lui demar.derott le nom de
ee brave homme. Pmât'dil tout ; le Roi feperfuadei
i^tte par modeftie ^ Dom Bernard ne vent pas fe nom*
mer ; êc que c'eft lui 9 qui eft ce foidàt, dont il a tant
txdké ia valeur. Il técampenfe quelques Officiers
qu'on lui nomme 5 & le pauvre Dom Lope eft encore
t>rjblié. Cependant ce mortel infortuné rencontre l'In-
fante ; & perfuadé que c'éft <i'eHe qtf il a reço cette
tendre déclaration , êoxlt j'ai parlé ci-^eflus ^ 8 ofe lui
iSeclarerfon amour. V-oyatit que la Priftceife îe reçoit ,
Très-froidement , û lui rappelk la lettre qu^ a reçac
d'elle* L'Infiiutc le prend akws pour on M , €c ap-
THEATRE FRANÇOIS. %6i
pilIê à Ton Tecoiyrs. Le Roi fiirvient x Dotn Lopd faifift
<^ette occafion pour lui parler de fes fervice$. Dom
Pedre y qui les ignôroic > le pretid aufC pôdr uti it>-
'enfé^ SsL le fait fQttir par les épaulée. Il rencouttè
Oom Bernard > à qui il raconte cet affront. Cependant
Ton valet arrive , qdi lui remet nne lettre & uneéchar-
)é de la^n de (\ nsattreiTe, ^ui étdit une vieille
iile attachée à lltifante » qui en efiet Te ùoinmoit X\^
eDte t il lu) en &it ainfi le portrait :
l.a plui belle tnoitié de ce mouvant fquelecte
Couché deïTous Ton lit , èc vieflbus fa toilbctt ;
D'abord que i*ai n^omé , s'afuflatit avec foin y
£lle a pris Tes patins pour me voir de plus loin |
Vout Second ornement )*ai vu fur Tes épaules
IM i^regé des mon^ , qui (éparent ks Gaules i
Son front où Ton diroit que te fbc â ^zSk ,
S*éleye à hauts filions fur un oeil enfoncé ,
Qu'on peut dire un foleil , non , parce qu'il édaife ,
j^s parce quMtJft ftd , & qu'il n'a ^int de frcrc.
Lt tems à ptis plki^t par de lon^s atdden'ts ,
À ronger Jk potkk i'ivotrc de fes dents :
&'un art mal agencé ^ le plftere & la peinture >
Sut fil pendante t<^«e ofit ioaché ta tiatute.
Rien ne la pare enim'qin fte fok cmprutacé.
. Pour Ton poil y il eft fien ^ pour l'avoir fttheté \
Mais il fut autrefois GclUi d'une auccc tècc>i&c.
Ne cédant :plu« a«oune «^>éràii€e à Dom Lof>e> il
prend congédie fera ^auiî, lia 'dit ^n hwatX ftâieu,8t
p^. lie Roi aborde en te moTnent Dom Bernard ;
& après plufieurs queftions ^ découvre avec plaifir
%68 THEATRE FRANÇOIS.
qa*ileft amoureux de Tlnfânce; il l'envoyé auffi-tôt
chercher , & la lui donne pour époufe. Leonore far-
-vient 9 qui» voyant que Violente va lui enlever Ton
amant » rappelle au Roi qu'il lui avoit juré de lui ac-
corder l'époux qu'elle défireroity & qu'en conféquen-
ce elle demandoit Dom Bernard. Dom Pedre loi
avoit en effet fait cette promelTe > fe flattant que le
choix tomberoit fur lui même* Il eft un moment em-
barraflTé; puiS) fansfonger à tenir fa parole ^ & content
des vertus de fon favori > il embrafle Leonore & i'é*
poufe. Dom Bernard faifit cet indant, pour parler ao
Roi des fervices de Dom Lope. Dom Pedre paroit
honteux de ne les avoir pas récompenfés : il charge
Dom Bernard de le faire revenir à la Cour , & de
l'adurer qu'il y fera comblé de grâces. C'eft ainfi que
&dM cette ennuyeufe Tragi- Comédie.
( VENCESLAS. ) La célébrité de cette Tragédie
m'empêche d'en donner l'extrait ; je n'ai cherché dans
cet ouvrage qu'à mettre fous les yeux de mes Lec-
teurs l'analyfe des pièces qv'ils auroient de la peine
à trouver > & dont la plupart font peu connus. Celle-ci
étoit chez tous les Libraires ; avant même qu'un Au-
teur connu par fes talens dramatiques, en eât corrigé
quelques vers > dont les exprefïions n'étoient plus d'Q-
fagëi & l'eut reroife au théâtre» où jelle reçut de
nouveaux applaudiflemens. Cette pièce eft fans
contredit le chef d'œuvre de Rotrou , tant par la con-
duite que par la beauté des caraâères » & par la ver^
liScation.
THEATRE FRANÇOIS. ^6^
(COSROES.) hts mêmes raîfons m'empêcheront
de donner Tanal/iè de cette Tragédie ^ dans laquelle »
quoiqu'inférieure à la précédente , on trouve les plus
grandes beautés. Dans Ton tems ; elle eue aulfi un très-
grand fuccès. En 170 5. feu Monfieur le Marquis DufTé
la fît reparoicre avec des correâions ; & il eue lieu de
s'applaudir de la peine qu'il avoit prife.
{ SUJET DE DOM LOPE DE CARDONNE.)
Dom Pedre , fils de Dom Philippe » Roi d'Arragon f
amoureux dElife» (œur dé Dom Lope de Cardon-
ne, fait tout ce que peut infpirer l'amour le plus ten-
dre > fans parvenir à toucher le cœur de cette jeune
beauté) qui ne peut oublier que ce Prince a tué en
duel Dom Louis fon amant , qu'elle alloit époufer.
Dans le tems, que la douleur immodéré de l'Infant^ met-
.toit toute la Cour dans Tinquiétude, Dom Lope de Car-
donne & Dom Sanche de" Moncade , tous deux
amis ) tous deux Généraux des armées d'Arragon »
mais malheureufement tous deux amoureux de l'In-
fante Théodore , à l'infçu l'un de l'autre y reviennent
àSarragofle; de après avoir remporté difFérentes vic-
toires > apportet^t aux pieds du Roi les dépouilles de
(es ennemis. En rendant compte à ce Monarque des
détails de la campagne 9 chacun d'eux tour à tour
exalte les exploits de Ton ami » & lui attribue tous
les avantages que l'on a remportés; Le Roit enchanté
de leur union & de leurs fervices (ignalés> s'engage
à leur accprder tout ce qui pourra flatter leurs défirs ,
tiyo THEATRE FRANÇOIS.
ils reftenc to^s fileqx d^nç le (ilence. Dom Philippe
charge alors l'Infànce de tâcher de l^s faire expliquer*
Elle n'y réaffit pa^ plus que Ion pçre ; ils paroifleac
cous deux trçmblans devant elle , & n'ofent fe déch-
irer, Enfin un ipi^lbççreitijç hafarçl }çur fiiît connaître
qu'ils (ont tous dçox rivauijp ; le plus polimerj( da
inonde» &en fe jurant toujours l'amitié la plusten-
jdre , ils prennent le parti de s'égorger. Us font fépa-
tirés par le père de Dom Sanche > qui leur propofe de
remettre leur combat jufqu'à ce qu^'iis ayent connu les
lèntimens de l'Inâinte ; ^ que fi el)e en préfère an»
de (ç foumettfe à fa volonté. Ils y confentent. Thee^
ibre alloit & dédarer en faveur de Çardonne» qu'elle
aimoic depuis long-|tetps> lorfque fon frère vient te
conjurer, de cacher encore (es fentim^ns 9 fe flattant
qu'Elifè s'adre&roit à lui pour obtenir la préférence
pour fon frère > & qu'il auroit la fatisfadUon de loi
rendre fervîce. Llnfaàte ne peut refbfer Dom Pedre :
Us deux rivaux amis ont encore une converfàcioû
avec elie; & pour complaijre à Dom Pedre ^ elle
les traite tous deux également èp. froidement. Ib
preoneoc alors le parti d'achever leur combac II eft
jiéceflaire de fçavdrque le Roi f inftruit de leur àrSi^
rend, leur avoit défendu ) (bus peine de la vie f de
Cù battre enfemble. L'amour les force à la défbbéit
&fflce* & Cardonne vient bien-tôt annoncer à Théo-
;dore que Mançade eft mort. L'Infante » connoiflaot
clecaraâèce inflexible dç (bq père >fent tout le danger
THEATRE FRANÇOIS. %yi
|Qe courre (on amant ; & dans l'excès de fa douleur ^
te peut s'empêcher de lui montrer toute fa t^ndrefle^
In eiFet^ le Roi paroit , & déclare à Cardonne , que
our tenir fa parole » il lui accorde l'Infante en ma^
âge ; mais qu'il peut fe préparer , des pieds de l'Au<-
A, k porter fa tète fur un écha&ut. Cet arrêt cruel
lioit s'exécuter , lorfque llnfant vient rappetler aa
.oi qu'il lui a\roit juré de lui accorder telle grâce qu*il
éfireroic sll vouloit renoncer à Elife : qu'il renonçoie
onc à cet hymen ; & que pour le prix^ d'un auffi
rand facrifice, il demandoit la vie de Cardonne. Le
,oi la lui accorde à l'inftant. Elife > attendrie par ce
-ait de généroiké » oublie fon premier amant , Se vole
ans les bras de Dom Pedre ; & le double hymen de
Infant avec fa chère Elife , & de Cardonne avec lin-
mte termine cette Tragî- Comédie. Le père de
ioncade vient annoncer en même teras que (on filt
*efl: pas mort , & qu'il y a même Heu d'e(pérer &
;aérifbn.
Cette {Hpce Ibrt inférieure aux deux précédantes ^
Teft cependant pas fans mérite ; elle eu aflez intéi-
elTante & bien écrite. Les rôles des deux amis font
inguliers; celui d*Elifc eft très-beau ; mais un défaut
4en confidérable ; c'eâ la double intrigue qui » icès^
xivent 1 lÎLifp/end l'intér èt^. Elle o'a ét^ impriniée qu'a-
rès la mort de l'Auteur.
(SUJET DE FLORIMONDE- ) Cette jeune
(cauté aimeCleante,quiméprife l'amour. D'unaùtre
a7^ THE AT HE FRANÇOIS.
côté » Tbeafte qui avoit aimé^ Felicie^ qu'il croit mor-
te 9 & qui feint d'être amoureux de Cleonice , adore
Florimonde. Cleonice nefait femblant de recevoir faTO-
rablement les vœux de Theafte , que pour avoir oc-
cafion de parler avec lui deTbimante, (bn frère i
qu'elle aime tout abfenc qu'il eft , & tout perfide
qu'elle le croit. Différens événemens , la plupart pea
incéreiTans , conduifent au dénoùment. Je ne parle-
rai que de ceux néceiTaires pour le faire comprendre.
Florimonde, ne pouvant toucher le cœur de l'infenfible
Cleante 9 eft prête à mourir de douleur. Evandre , foD
ami 9 lui confeille de feindre d'écouter les vœux de
Theafte^ afin de piquer l'amour propre de Cleante*
Elle fuit cet avis» qui lui réulTit parfaitement; &
Cleante devient bien-côt éperdûment amoureux d'elle.
Elle l'accable à Ton tour de mépris, & en fa préfence
comble Theade de faveurs. Cleante veut fe battre
contre fbn heureux rival : Evandre empêche ce duel»
ainfi que plufieurs autres , dont il eft inutile de rendre
compte. Un jeune homme » qui fe dit frère de Felicici
veut fe battre autfi contre Theafte » pour le punir de
l'outrage quMl a fait à fa (beur. Evandre empêche en-
core ce combat. Cependant Cleante , réduit au défef-
poir, & déterminé à mourir 9 reçoit de Florimonde l'a-
veu qu'elle n'a jamais ceiTé de l'aimer. D'un autre
coté , ce prétendu frère de Felicie eft reconnu pour
Felicie elle-même ; Theafte la reçoit avec tranfport 1
& reprend fes chaînes. Enfin Thimante reparoit tout-
à-coap,
THEATRE FRANÇOIS. 9:yi
à coup f avoue Tes fautes ^ & Cléonice lui pardonne*
Ainti un triple maçiage fait le dénoûment de cette
pièce > qui eft médiocre > & qui n'a non plus été im-
primée qu'après la mort de Rotrou.
9
(AMARILLIS. ) Cette piecfs n'a Jamais été
repréfentée. * Rotrou voyant que les ï'aftorales n'é-
toient plus à la mode f ne voulut point donner celle-
ci ; mais il fe fer vit du* fujet pour compofer fa Celi-
mene 9 dont j'ai précédemment rendu compte, dans
laquelle il a confervé prelque tous les vers^ & toutes
les fcènes d'Amarillis. Il changea feulement le nom
des AâreurSjfupprima les Stances & le rôle des trois
fàtyres. Après fa mort , un de fes amis ayant trouvé
cette Paftorale parmi fes papiers, la fit imprimer, Se
oe lui rendit pas fervice.
L'on attribue encore plufieurs autres pièces à cet
Auteur , entr'autres DOM ALVARE DE LUNE,
donnée en 16-^7.
JEAN PUJET DE LA SERRE, :Hiftoriogra-
;phe de France , & Confeiller d'Etat, né à Touloufc
en 1600. & mort eni566.
PANDOSTE ou LA PRINCESSE MALHEU-
REUSE, Tragédie en Profe , dédiée à Uranie,
divifée en deux Journées chacune en cinq ades , &
avec quelques cha^geriiens dans les perfdnnàges. On
trouve après TEpître dédiçatoire , un avis au Lefteuc
-& l'argument des deux Journées. Paris, Pierre Bil*
Jaine, .1631. i/i-S**,
Tome U. %
/
a.74 THEATRE FRANÇOIS,
m
' PYRAME. Tragédie en cinq aftes , en profe^
diée à Madame la Comtefle de Bergbe. Lyon > J
Aymé Candy y 7 6 n* '^-B^*
THOMAS MORUS , OU LE TRIOMPHE
LA FOI "ET DE LA CONSTANCE, Trag
en cinq a&es > en profe , dédiée à Madame la
chelTe d'Aiguillon. If a Kl s, Aug. Courbé» n
LE SAC DE CARTHAGE , Tragédie en
aâes, en profe. Paris yToufTaint Quinet ^ u
W-40.
LE MARTYRE DE SAINTE CATHERIP
Tragédie en cinq aftes , en profe , dédiée à Mad
la Chanceliere« Paris , Ant. de Somma ville ^ it
CtlMËNE, ou LE TRIOMPHE DE
VERTU , Tragi - Comédie en cinq ades, en pn
dédiée k Madame la Dachefle de Sully. Paris , j
deSommaville» i(S43.i/r-4^.
THÉSÉE, ou LE PïlINCE RECONNU, :
giComédie en cinq aftes , en profe. Paris , Ant.
Sommaville f 1 644. in-^^.
(SUJET DE PANDOSTE.) Cette Tragédie
divifée en deux Journées.
PREMIERE JOURNÉE.
Agatocle , Roi de Sicile , arrive dans la Cou
Roi Pandofte ; fa bonne miae > les charmes de (à <
TÉE ATRÈ TR ANÇO IS. %2^
VérIadoDy fes attentions pour la Reine» verfenc dans
le coeur de Pandofte tout le poifon dé la jaloufiç»
Eperdoment amoureux de Bellaire i qu'il venoic d'é*
pouier y il crdyoit qu'on ne pouvoit la voir fans l'aimera
Il prend les poIitefTes d'Agatocle pour des preuves
d'amour : bien- tôt il foupçùnne Ton époufê d^ètre d'ac-
cord avec lui pour le deshonorer , & il prend le parti
de faire empoifonner Agatode; Ce Prïnce eft averti à
tems y & quitte promptement les Etats de Pandbfiei
8a fhlte confirmé encore lés foupçons du jaloux Mo-
narque ; & quoique la Reine fût enceinte , il la fait
mettre en prifon : elle y accouche d'une fille ^ que
le Roi Biit expofèr fur les flots» dans un bateau fans
voiles Scians matelots : enfuite il veut faire punir fon
époufe comme coupable d'adultère* Une Loi dti
Royaume ne permettoit pas de condamner une Reine^
iàns avoir auparavant confulté rÔracle d'Apollon. On
obferve cette cérémonie ; & l'Oracle juftifie abfolu-
tnent Bellaire. Mais cette Princèffe ne jouit pas long,
téms du bonhét^r d'avoir vu éclater Ton inhocenceé
Elle apprend la nouvelle de la mort de fon fils uni-
que ; & la douleur qu^elle en reflent ^ termine auffi-
tôt fa vie.
Cette pièce eft froide^ /ans intérêt. La Serre si
cru faire un chef-d'œuvre, d'éloquence dans les ten-
dres'adieux que la Reine fait en mourant à fon cruel
époax ; 6c yraifemblablemeht il s'eft trompée
Slj
d'un payfan^ qui, frappé de la magnificence defes
geS) &-du brillant d'une bague de grand prix c
]ui avolt attachée au col* i'avoit élevée comme fa
& lui avoit donné le nom de Pauvie. Dorade
unique du Roi Agatocle , rencontre un jour cette
ne bergère, & en devient paffionéraent amour eq:
parvient à s'en fa|re aimer ; & après s'être enga
l'époufer, il l'enlevé. Crainte. que le père nourr
de Fauvie ne révélât leur fecret , ils l'emmenent
eux. Ils font jette? par une tempête afFreufe fui
rivages du Royaume d^ Pandofte. Ce Monarque, a
apperçu. Fauvie , ne .peut rélîfter à fes cha^rmes
en devient palfionément amoureux'. Il cherche en
à la féduire la vertucufe & tendre Fauvie n'eft p
éblouie ci par la majjefté du Trône ni par l'a]
des , préfens. Enfin Pandoi5:e fait mettre Doraftc
prifon ; & peu de tems après il le condamne à m
efpérant que Fauvie > pour obtenir la grâce de
éproux? lui accorderoit celle qu'il défiroit. Dan
*même tems^onlui annonce des Ambaffadeurs du
de Sicile , lequel ayant appris que fon fils avoit en
THEATRE FRANÇOIS. 2.77
b fille d'un payfan ^ & étoit arrivé dans les Etats de
Pandoâe^ lui envoyé redemander ce jeune Prince f
& en mème-tems la punition de la bergère* .Pandofte
eft fort furpris de trouver dans Dorafte l'héritier du
Trône de Sicile : il le fait mettre fur le champ en
liberté; & ne pouvant fe déterminer à punir Fauvie^
il impute tout le crime au payfan » qui paiïbît pour le
père de cette jeune beauté» & l'envoyé au fupplice.
Ce payfan déclare alors que Fauvie n'efl: point fa
fille, & qu'il Tavoit trouvée abandonnée fur lés flots;
Il produit en mème-tems & les langes & la bague y
qu'elle avoit alors au col. Cette bague fert alors à la
faire reconnoître i & Pandode trouve en cette^j^ine
bergère cette même jeune fille , que dans un tranfport
de jalouGe il avoit voulu faire périr. L'on fent bien
que tout le mc^nde eft bientôt d'accord ,' & que le
mariage de Dorafte avec Fauvie termine cette pie«
ce y qui certainement n'eft pas meilleure que la pré^
cédente.
( F Y R A M E. ) Je ne donnerai point d'extrait de
cette Tragédie ; tout le monde eft inftruit de cette
hiftoire : & la façon dont la Serre l'a traitée 9 n'inyitje
certainement pas à entrer dans les détails. Pour f^ilre
connoître par quelle efpëce d'éloquence cet Auteur
comptoit foutenir un drame en profe. Je vai^ rappor-
ter réndroit de cet ouvrage , qu'il regardoit avec le
plus de complaifance. Dans la première fcéne du qua,n
triéme afie , Pirame avoue à Thisbé qui! fe fuit tour-
menter par les foupçons de la jaloufic. Xhi^bé lui ré«
pond :
II
1)1
.%j8 THEATRE FRANÇOIS;
x» Te laiiTesvCu déjà maitrifer à çettepaflîôo > ^ol Itt
3> la tyraqpiç çft ÎDfopportable ? De qai peu3ç-ta toq Id
f» jaloux, a:
PYRAME. |«
1» Du Soleil qui te regarde > de^ 1-air qui t^enviroo'
;ii ne, de la terre qui te porte » & du zepbiremème
y> qui fe cache dans tes cheveux. Je fuis encore ja-
9» loux de toi-même y car il me femble que nia boa**
:p cbe devroic faire l'oSSce de tes mains > Quêtant pa^
d» dignes de toucher ton beau vifage ; tes regards me
» mettent en peine , ne pouvant être toujours lear
3> objet; tes foupirs muets y tes penfées trop feaet-
ap tes y & enfin toutes tes a&ions me tiennçnc conti-
ai nuellçment en aârion , pu pour Tenvie ou poor b
9> crainte : Par donne- moi, chère ame, tous ces tranf
K> ports d'ajQQQur , puitquç tes perfedions les qqt fak
1» Witre. ce
T H I S B É,
o» Ttt me demandes pardon d'une erreur qçii mérir
^ te récompenlè ; & pour te Içl témoigner , je veai;
:^ foulager te^ inquiétudes. Sçacbes donc que le So-
>» leil ne me regarde ji^mais que de çplere y dans le
:ù mépi;is qqe je F^is de fa clarté > puifque tu e$ le feul
^ aftre qui m'éçlairç. Que l'air qui m'çnviroane entre
9> ^ien dans ma bouche > mais non pas dans mon coeari
qo parce qu'il eft tout plçiti d'amour^ La vanité que
îl f ai s^ijifi de me dire ta ipaîtrefle , me fait fouleif I^
THEATRE FRANÇOIS, %y^,
». terre d'an pied dédaigneux : & le zephir ne Ct ca-
i» cbe dans mes cheveux , que de la honte qu'il a de
i^ ne pouvoir rien prétendre. Pour mesregards^ilsfbnt
o toujours vagabonds & errans hors de ta préfencë i
» ne pouvant trouver d'objet capable de le^ arrêter ;
y & je te dirai que mes foupirs * quoiqu'ils foient
o muets t te parlent toujours le langage de ma paf-
»> fioB ) & mes penfées n'ont rien de fecret que le^
» fecret de mon amour, ce
( SUJET DE THOMAS MORUS. ) Henri VIL
Roi d'Angleterre , employé tous les moyens poffiblesi
pour qu'Artenice , fAniie de BoUlen ) dont il ieft
éperdument amoureux > réponde à Tes déiirs ; 8t né
pouvant y réuflir ^ il prend le parti de l'époufer 9 tkdiè
répudier la Reine. IPour lever les difficultés» que lé
Pape oppolbit fans cefle à ce projet y il change* dé*
Religion, & fait monter Artenicefur le Trône. Tho-
mas Morus^ Chancelier d'Angleterre, vient trouvët
le Roi » & lui tient le difcours le plus éloquent & lé
plus courageux , pour (butenir les droits des Auéels
8c ceux de la Reine. Henri ne pouvant le gagner^ Si
le trouvant toujours inébranlable dans fes pritdpes't
l'envoyé au fupplice. Il meurt avec la piété & la fer-
meté, qu'on de voit attendre d'un au (fi grand homme#
■y i
Cette pièce , qui n'efl: pas meilleure que les précé*^
dentés, a de plus un très- grand défaut. C'eft qu'Ar-
tenice y joue le plus beau rôle* iSon caraârère eft reft
Siv
:s8o THE AT RE FR ANÇOIS. ^
pedable : on Taîme i on ne peut s'empêcher d'applati^
dir à fon élévation. On voit , fans regret , le départ,
de la Reine ; 6c >fe>n eft peii toiiché de la mort de
Thomas Moru^,
(SUJET DU SAC DE CARTHAGE.) Les
Romains s'étant emparé de Carthage > les malheU'
reux habitans de cette Ville » pour refpîrer encore la
liberté > prennent le parti de fe renfermer dans la Ci-
tadelle; mais les vivres leur manquent bien -tôt :ce
qui les détermine à envoyer un Officier pour deman*
der à capituler. Scipion ne veut fe prêter à aucune
proportion , 8ç déclare <jull ne les écoutera que lorf-
qu'ils fe prendront à difcrétion > & qu'on aura fait moa-
^ir certains chefs qu'il défigne. Au défefpoir de cette
l;)arbarîe, ils fe déterminent à fe défendre jufqu'au
dernier foupir. Cependant Afdrubal» voyant le fort qui
les attend, 8c cr^gnant pour fa femme & ks filles^
va trouver Scipion, & lui promet de le rendre maî-
tre de la Citadelle. Spphronice , fon époufe 9 indignée
des foupçons que Ton a contre lui > va le trouver dans
la tente du Général des Romains , l'interroge ; &
ayant appris fon projet ,' malgré la préfence de Sci-
pion f elle l'accable de reproches , le quitte & rentre
dans la Citadelle, plie s'arme avec fes filles , pour dé-
fendre fa patrie & mourir glorieufement. Quelques
Carthaginois qui la foupçonnent d'intelligence avec
fon mari, accourent pour l'immoler ^ leur fureur;
p^is il$ la trouvent fervent d'exemple kux phis hiA-^
THEATRE FRANÇOIS. x8i^
▼es Carthaginois. Malgré toute fa valeur i les Ro«^^
ifiains par la trahifon d'Afdrubal , fe rendent enfin
naitres de la: Citadelle y où ils mettent tout à feu &
à iang. Afdrubal fe précipite au milieu des fiâmes
pour iâuver fa femme ScCss enfans. Dès queSophro-
BÎce Tapperçoit, elle donne la mort à fes deux filles,
& fe perce le cœur du même poignard. Afdrubal,
déchiré par ce fpedacle funefle , & dévoré par fes
remords , fe pafîe (on épée au travers du corps.
Il y a quelques beautés dans cette pièce : le rôle
<Jle Sophronice eft ferme &: courageux ; Scipion ba-
varde un peu , mais il foutient affez l'idée qu'on s*eft
fdrmée de la vertu des anciens Romains. On auroit
peut-être pu tirer parti de ce fujet, s'il .eut été orné
des agrémens de la po^ûe.
(SI/JET DU MARTYRE DE SAINTE CA-
THERINE. ) Pour remercier les Dieux d'une vic-
toire éclatante, qu'il vient de remporter, TEmpereur
ordonne qu'on leur offre un facrifice folemnel, & veut
obliger les Chrétiens à brûler de Tencens fur leurs
autels. Fidèles au vrai Dieu , ils préfèrent la mort à
une pareille profanation. Catherine , Princefle d'Ale-
xandrie , plaide leur caufe en préfence de l'Empe-
reur , & finit par fe déclarer Chrétienne. L'Empereur,
ébloui par fes charmes , lui offre fa Couronne , à con-
dition qu'elle changera de Religion. La Princeffe re-
jette fes offres avec mépris ; ce Monarque de plus en
plus amoureux i voulant la gagner } fait venir un fameux
a^z THEATRE FRANÇOIS.
pbilofbphe , pour difputer contre elle , en préfence de
toute la Cour. Elle réfute tous Tes argumens^ & finit
par convertir le philoCophe ., l'Impératrice & tous les
Auditeurs. L'Empereur furieux les envoyé tous an
fupplice. Avant que de mourir > Catherine &it pla«
fieurs miracles ; & après fa mort» on entend les An*
ges chanter une hymne à fa louange. L'Empereur
convaincu par cette merveille , embrafTe le Chriftia-
nifme.
Le fond de cette Tragédie efl: fans contredit très"
édifiant ; mais les détails en font bien froids & bien
ennuyeux.
(SUJET DE CLIMENE. ) Clîmene & Pam-
philie ) fa fœur , Princefles chailées de leurs Etats i
fe réfugient chez un Roi voiGn. Poliarque , favori de
ce Prince > devient amoureux de Climene 9 & s'en
fait aimer : il fe croit au comble du bonheur 9 quand
il apprend que fbn maître eft (on rival. Tout concoarl
à fa perte. Pamphilie » qui eft devenue amoureufe de
lui > pour lui ôter toute efpérance d'époufer Climene t
découvre au Roi la tendre union de ces deux amans*
Ce Monarque 9 furieux contre fon favori > le fait met*»
tre en pri(bn ; & fa colère augmentant de moment en
moment , il veut faire mourir & Poliarque & Clime-
ne) & tous ceux qui ont pris leur parti : puis tout-à-
coup il pardonne à tout le monde ; marie Poliarque
sivec Climene ; leur donne des troupes pour remonter
THE A TR E FRA NÇOIS. aSf
fiir !e Trône; fait grâce à Cléonte > qui 1% trahi pour
obéir à Patnphilie , dont il eft amoureux ; 8c pour
comble de générp^é > lui donne cette ftrinceiTe ayeç
une riche dot*
Cette pièce eft peut-être la plus mauvaîfe & la plus
ennuyeufe de toutes celles de la Serre ; & c'eft beau-
coup dire*
( THES£E. ) Les mêmes raifons qui m'ont empê-
che de donner l'extrait de Pyrame y m'empêchent d'en
donner de cette Tragi- Comédie; je neferois qu'en-
nuyer mon leâeur , n'y ayant certainement rien dans
cet ouvrage > foit par le flyle > Toit par la conduite » qui
mérite Ton attention. Si cependant quelqu'un défiroit
connoitre les détails de ce fujet, je le renvoyé avec
confiance k TOpera » que le célèbre Quipault a fait
fous le même titre. C'eft à peu près la même marche*
JaZ, feule diSérence , en ne parlant pas de celle qui
exifte entre un chef-d'œuvre £c une platitude y ceft
qu*ici Thefée éppufe Ântiope 9 Reine des Amazones»
& que dans l'Opère , ç'eft la jeune Eglé que ce héros
^poufe.
1631.
BRI DARD.
Û R A N I E , Tragi . Comédie Paftorale , en cinq
nAes f dédiée à Mademoifelle de Bourbon 9 avec un
avis au Leâeur* quelques vers & un argument*
Paris* Jean Martin ^ 16^8. in-8^.
(SUJET D'URANIE.) Florilame , Prince
^'Iflande ^ eft ^mçjpreux & aimé d'y ranie 1 fille du
iLè4 THEATRE FRANÇOIS.
Roi de Phrigie. Ce Monarque y qui défire un Prince
plus puiflant pour fon gendre, refufe Florilame. Celui-
ci , au défefpoir , veut d'abord tuer Je Roi ; mais il eft
retenu par cette réflexion , qu'il dit tendrement à fit
maîtrefle.
Puis pourois-je donner , quand )*en aurois cArie y
La more à celui-là qui c'a donné la vie.
Enfin ne trouvant pas d'autre expédient, il lui pro*
pofe de quitter la Cour de (on père , 8c de fe réfugier
en Arcadie , où (bus de (impies habits de bergers ils
pourront faire Taraour tout à leur aife. La PrincefTe
y confent ; & ils partent : ce qui met le Roi dans la
plus grande fureur. En mème-tems les Amba(radears
du Roi de Phéacie> viennent lui demander pour leur
maître , Uranie en mariage. Voici toute la harangue
du Chef de ramba(rade.
Grand Roi , notre fouhaic vous donne le bon foir .....
On leur (ait part de l'enlèvement de la Prihce(re;
& fur le champ ils prennent leur audience de congé*
Cependant les deux jeunes amans arrivent heureufè-
ment en Arcadie» Florilame , voulant pro(îcer de la
liberté où ils fe trouvent , demande un baifer à Ura^
nie : cette Prince(re rougit ; il lui dit :
Mais pourquoi rougis-cu ?
URANIE.
Ne fçais-cu pas encore
Qu'envoyant le Soleil, on voit rougir l'aurore î
THE A TRE PRA NÇOIS. %8$
Leur bonheur n'eft pas de longue durée. Une ber»
gère de la contrée devient amoureure de Florilame^
& ne peut parvenir à s'en faire aimer. Pour fe ven-
ger , elle trouve le moyen de perfuader à Uranie que
Florilame èft inconftant. Cette Princefle trop crédule
reçoit fon amant (i froidement , que» pénétré de défeC-
poir , il fe dévoue à la mort. II monte fur le rocher
le plus efcarpé y & crainte que fa chute ne fervit pas
fon défîr ^ il s'enfonce auparavant un poignard dans le
feîn, puis fe précipite du rocher. D'un autre côté,
la Princefle , ne voulant pas furvivre à l'infidélité de
fon amant , eft prête à fe percer le cœur , lorfqu'elle
eft arrêtée par un vieillard, qui lui perfuade , avai t
d'exécuter fon projet , de confulter l'Oracle de Dia-
ne. Il' la conduit dans le Temple de cette Déefle ;
die interroge l'Oracle , qui lui répond ;
Un trcpalIB vivant t'ôçpra de ce dcuiL
On apporte en efïet dans ce mêmfe Temple le
pauvre Florilame baigné dans fon fang : la Princefle
le reconnok » & l'inonde de fes larmes. Que ne peuc
point fur un cœur bien épris les preuves de tendreflesf
de robjet qu'il adore ? Florilame 9 le tendre Florila*
me, qui paroiflbit n'avoir pas un moment à vivre,
recueille avec tranfport les larmes précieufes d'Ura-
nie ; & ces larmes ont un charme fi puiflant p qu'elles
le rendent aufli - tôt à fa vie. Ce bonheur inattendu
eft fuivi d'un autre , fur lequel ils ne pqavoient pas
%66 THEATRE mAÉfÇÔlS.
plus compter : c'éfl: que le Capitaine des Gardei
Roi de Phrigie vient leur annoncer que le Rôi| i
feulement n'ell plus en colère contre eux* mais m
qu'jl les attend avec impatience > & qu'il confent ï
«mioUè Ils s'embarquenc auffi-tôt > arrivent en Pfari
le Roi les embrafle f & fait dans f inftant mtm
lebrer leur mariage.
Pour donner une idée du talent poëtique du
Bridard) j'ai cru devoir rapporter deux ftan'
que j'ai choifies parmi iix y que fe difent tendreî
Florilame ôc Uranie , étant fur le vaiiTeaa qu
cpnduit en PhrigiCé
û R A N I £i
pieux y que cecce onde efl amouretife ^
Depuis qu'elle porte nos feux !
11 femble qu'elle fait à^^ vceux g
De n'être jamais rigoureufe.
Regardez comme le repos
Coule lentement fur Ton dos^
Ha ! certes , notre amour la tente'.
N'eft-ce pas que dans ce beau tem^
Elle veut devenir confiante y
Nous voyant tous^ deux û confbiis*
FLORILAME.
Admirable 6c cbafte Uranie ,
Les amours font nos patelots ; "
Les grâces fe changent en flots y
Pour te donner leur compagnie»
Vois comme autour de ce vaiileâtty
Les belles nymphes de cette eau »
A travers ces miroirs liquides »
Péyoreuc des yeux tes beautés j
THEATRE FRANÇOIS. a^y
£c font gloire d'avoir dans leurs feins tout humides
I>es chaleurs poutres raretés.
Je ne dois pas non plus oublier de faire part à mes
Lieâeurs d'un avis , qui fe trouve à la tète de cette
Tragi- Comédie^ où Bridard après avoir pris (bin de
le louer tant qu'il peut > & (urement beaucoup plus
qu'il ne l'a été par Tes contemporains > dit : y> Certes
3> pourvu qu'une per(bnne m'ait en quelque opinion p
3> je méprife les cenfores & les louanges de ces criti-
y> ques à la douzaine. Si mon ftyle n'eft relevé , il
3» eft intelligible ; fi mes vers ont peu d'orgueil » ils
y» ont aflez de politeife y pour m'exempter du nom de
y> pédant ^ que mes envieux poifedent légitimement*
y> J'ai hanté d'autres lieux que des Collèges , où j'ai
y> appris à ne point faire du latin & du François une
» même langue ^ &c. ce
1631.
J. G. DÛRVAL.
LES TRAVAUX D'ULYSSE , Tragî-Comédîe
en cinq aâ:es^ & tirée d'Homère» dédiée à M. le.
t>uc de Nivernois. P a r i s ^ Pierre Menard ,1631;.
AGARISTE, Tragi- Comédie en cinq aftes, en
Vers , dédiée à Madame la DucbefTe de Nemoursl»
Paris, François Targa , 163 6, in^S^.
PANTHÈE> Tragédie en cinq aftes, en vers,
tirée de Xenophon i dédiée à M. le Duc de Nemours*
Pa&is I Cardin Befognei 1639. in-^^
%8S THEATRE FRANÇOIS,
(SUJET DES TRAVAUX D'ULY!
L'Auteur a inféré dans cet ouvrage 9 qui rel
beaucoup plus à un poème épique > mis en dia
qu'à un drame , tout ce qu'il a pu raffembler de
tures d'Ulyfle » après le fiége de Troycs. Oi
ce héros favorifé par Eole , qui lui donne de:
remplis des vents néceflaires, pour lui proq
heureux voyage. L'on voit auffi les matelots
perfuadés que ces outres contiennent les plu:
préfens , les ouvrent toutes, & excitent la p
lente tempête. Ulyfle eft obligé d'aborder da
de Circé. Il cft aimé de cette Princefle ; & aprc
obtenu d'elle la délivrance de fes coropagn
voyage , il la quitte pour defcendre aux enfen
on fait paroître la Cour de Pluton : Ulyfle
avec les grands criminels de la fable. II y re
avec plaifir les ombres de fes amis, tués au f
Troyes. Tirefias , qui paroît à fon tour, lui fa
rentes prédidions fur ce qui doit encofe lui i
enfuite on fait paVoitre fur la fcène Jupiter >
ieil & d'autres Divinités. Enfin Ulyfle , val
de tous les obftacies 9 rejoint fes compagnons;
en fimflant cette pièce , Jupiter annonce la j
jpour venger le Soleil,* de ce qu'ils ont ofé <
des troupeaux , qui lui étoient confacrés.
On ne peut citer de cette pièce auffi réguli
lizarre 9 que les vers fur les maux que caufe
nç
THEATRE FRANÇOIS. %Sq
sllémenc dans le monde Tor & l'argent. Ceft par
ate réflexion qu'Ulyffe commence :
Minéraux épanchés du vaîflèau de Pandore ,
Veines d*or & d'argent , que tout lé monde adore $
Vains tréfors amadés dans le temple d'Até ,
Pernicieux outils de la néceâité} ^
Ixecrables métaux dans la terre (leriles, , ..: j
Mais qui faites germer tant de o^aux dans Içs Villes ^
Vous êtes fi puifTanSf qu*aO)Ourd*hui les mortels
Aux idoles d'argent > érigent des autels, &c«
(SUJET D'AGARITE. ) Le Roî amoureux de
L jeune Agarite ^ charge un de Tes courtifans de &ire
cette belle l'aveu de fk paf&on. Celui ci» pour l'en-
2tger à lui répondre f lui die en lui montrant UQ tst«
leau qui repréfente le Frintems*
r
• ••••••«
Voyez ce beau printems où Pamour s'eft lui-même
Repréfenté par tout comme Tùr un emblème 9
Il n*efl trait là de-dans, qui ne youd^fafTe voir
Des chefs'd'ceuvres entiers de Ton dirin pouyoir*
Alors que ces peupliers à la vigne fe lient ,
Leurs feuilles tremblent d'aife , & leurs branches s*en plient |
L'efprit qui les produit , d'un foin perpétuel , *
Nourrit entre leurs troncs un amour mutuel ^ ^
Ainfi le grenadier & le mirche fe baifent »
Xt parmi les citrons , les oranges fe plaifenti
Cette palme profite & fe charge de fruits ,
FaCant près de fon mâle Qc les jours & les nuits^ &Ct
Cependant Medoti > père d'Agarite» indruit de
imour du Roî pour fa fille , & voulant la fouftraire
Qx pourfuites de ce Monarque; fait courir le bruic
%go THEATRE FRANÇOIS.
qu'elle eft enlevée ^ & la fait enfermer dans un vieax
. Château > où elle pafTe bien-tôt les momens les plus
délicieux p par l'amour mutuel entre Policafte JSc elle.
Ayant eu 9 un jour , enfemble quelque petites alterca-
tions 9 Agarite cherche à appaifer (bn amant : il Eût
ainfi ks condi tions :
c ' ■
P O L I G À s T E.
Pour n'y pcnfer jamais , permets que je te baUe«
y A G A R IT i.
Fou<;yu qu'en tout honneur....
jQ . P O L I Ç A S T Ç.
Je ne démande rien .
Autre chofe, d'honi&ur> que de prendre le ti«n«
AGARITE.
■*
Tu t'émfUicîpes trop de parkr de la forte.
POLICÀSTE.
- . . j. ' , .
Ha ! que tu coimois^mal l'amour que je te porte;
AGARITE.
Après un doux biifer , ne demande rien plus }
J^^hais plus que la mort <^es plaifîrs diiïblus.
,^ O L I C A S TE.
76 ne yeux point^palTer ou le <ein ou la bc^che ;
>ligQarde , ne crains point qi^'autre.part je te t ouche^
A G A R ï T E.
C*e(l trop recommencer. Ha ! je me iaclierai.
' POLI CAS TE.
, . . . Je n'en veux plus qu'un autre , & puis je m'en iraJM
AGARITE.
pcpêchei-Y0U8| je crains que Lyzcne revieoAe»
THEATRE FRANÇOIS. xgi
Elle avoit Tes raifons pour craindre la préfence de
Lyzene; elle fçavoic qu'il étoit amoureux d'elles mais
elle îgnoroit encore qu'il Tavoit demandée en maria-
ge ^ & que Medon la lui avoit accordée, Medon vient
avec (atisfaéHon annoncer à Ta fille le bon parti qu'il
à trouvé pour elle, & lui Ayante lès grands biens de
Lyzene. La tendie Agarite > peu SdCtéè des faveurs
de la fortuné , répond à fon père :
J*j|ixnerois oiieux avoir Policafte tout nud,
Medon. eft peu touché du noble défintereflemenÉ
de fa fiUe, & lui ordonne de (e préparer à donner la
main à celui qu'il lui deflinei La pauvre Agarite au
défefpoir cherche fon amant, poufr lui apprendre cette
funefte nouvelle. Celui - ci la raflure , & lui confeille
de feindre d'obéir à fon peré ; & le^ foir de fes noces
dé quitter la maifoh patertieHè^ pourrie venir join-
dre dans un azyle fur , qu'il lui indique. Le projet'
S'exécute ; & Agarité rejoint Policafte , qui la' fait
âégaifer en homme ; en l'aidant à s'habiller , il ne peut
•'empêcher de prendre quelques privautés : Agarité
le gronde > & il lui tépoiid : '
."'/*■'■■'■
iyipn ame , le moyen d^ l'aid^ à tâtons **
(* CétoitlamitA
La main en ce devoir , eA (î pc^ àni tetonis ,
i^A^on ne peut. ' >
(A G A K I TE.)
XaifTc-iBoi*
1 \\
%gz THE ATRE FRANÇOIS,
(POLICASTE, )
Pourquoi te lai{{êraî-je ?
Miracle ! j*ai trouvé fur deux pommes de neige
Deux petits glands de feu y &c.
Il dl néceiTaire de fçavoir que le Roi avoit été m^
ftruit qu'Agarite alloit époufer Lyzene ^ & qu'il
a voie formé le deiTein de faire enlever cette belle le
jour de Tes noces ^ & de faire tuer Ton mari* Des hotok
mes mafqués entrent dans le bal , tuent le nouveau
marié ; mais ne trouvant point Ton époufe 9 on eft bien-
tôt après convaincu qu'Agarite eft morte > parce que
Ton trouve k^ habits fur le bord de la mer. A cette
affreufe nouvelle , le Roi fe livre au plus violent dé-
fefpoir : il fait faire la ftatue de cette jeune beauté f
qu'il met fur un lit de parade » & vient tous les jours
y pleurer la perte de robjet qu'il adore. Les deux
jeunes amans» ennuyés de leur retraite > revienneoc
déguiCés dans la ville ^ & apprennent ce qui fè pafle
à la Cour. Policafte perfuade à une jeune Pxincefle,
qui avoit quelque goût pour le JUoi > de prendre la
place de h ftatue J'A^arite , ^ dç faifir un inftant
fevorable pour confoler le Roi.- Ce Monarque arpve
à fon ordinaire pour continuer (es triftes regrets. Il
eft d'abord fort étonné de ce changement de décora-
tion; peu à peu il s'y acçoutyme : enfuitè il devient
amoureux de cette jeune Princefle >.& jenfin.il finit
par l'époufer. Enchanté xle (on boqheur > il veut coq«
noitre l'auteur d'un fi heureux fliratagème ; on IqJ
THEATRE FRANÇOIS. %q$
nene Policafte » qui $'engage de faire quelque chofe
^ bien furprenant ^ c'eft de rendre Agarite à la vie»
on la lui promet en mariage ; le Rœ lui en donne
parole : auffi-côt Agarite paroit > & on lui Ëiit époa*;
r Ion cher Policade,
( SUJET DE PANTHÉE. ) Panthée eft prifon..
ère de Cyrus; Arafpe eft commis à fa garde > & en
rvient amoureux : voyant qu'il ne peut la faire con-
Qtirà Tes déiirS) il veut la violer. Le Roi , inftruit de
) forfait 9 charge Abradate, ami d'Arafpe ^ de lui
m laver la tête. Pour mieux s'acquitter de fa com»
i(Con> Abradate prend le ton ironique , & lui dit;
Après nnt de périls que vous avez courus ,
Pcnfei vous point toujours être aimé de C/rus ?
Serez ^ous point au rang des illuflres Monarques 9
Pour ce dernier combat , dont vous pprtez les marques?
Ce coup d*ongle imprimé vous a mis en courroux*
Mais efl-il de la main de Panchée , ou de vous î
Tout au milieu du front , vous avez une étoile |
N*eA-ce point de l*agrafFe attachée à fon voile î
Quelque gros diamant a caufe ce malheur , *
Qjui vous fait fur le nez une extrême douleur* , ;
£t cette cgratignure , une épingle mal mife , * r
Vous Ta faite à la joue » en baifant la chemife i
Je m*étonne , voyant .votre poil hérifTé ,
Comme vous n^êtes chauve, en ayant tant lalflél
G ce fameux combat , & digne de mémoire ,
Qvi voi^s met à main une palme de gloire !
Arafpe confus » n'a rien de bon à répondre ; mais
i confofion redouble encore ^ loriqu'il voit arri-.
ig4 THEATRE FRANÇOIS.
ver Cyrus 9 qui veut d'abord le faire punir iMi^
ment ; & qui enfuite, eti fin politique , trouve le moyen
de profiter de fa faute. Il feint de Texiler , & lui or-
doni^e d'aller chez Tes ennemis , ou fans doute il fera
bien reçu , enfuite de revenir lui rendre compte de
)a fituation de lair armée. Cependant Panthée , per-
fuadée que c'efl par rapport à elle que Cyrus s'eft
privé d'Arafpe, pour témoigner fa reconnoiflànce à
ce Monarque , écrit à fon mari Abradate de quitter
le parti de Crefus , pour venir prendre celui du Roi
des Perfes. En effet , Abradate fuit les confeils de fi
femme. Cyrus le reçoit avec les plus grands hon-
neurs, & lui donne le commandement d'une partie
de fes troupes. Qn doit bien remar^guer en cet endroit
avec quelle adreffe Durval fçait donner à Cyrus le
çara&ère de la plus grande bienfaifance. Malgré tous
les embarras de la guerre 9 ce Monarque , toujours
plein de bonté & d'attention j fait donner à Abradate
une grande tente , poqr , avant fon départ y paffer du
moins une bonne nuit avec fa femme ; Abradate, en-
chanté de cette honnêteté, vient en rendre compte 4
Ifanthée , & à'exprinae ainfi :
Avant que je me rende où ma charge m'appelle ^
Cyrus m*a voulu fatre une grâce nouvelle ,
pe nous loger enfemble encor cette nuit ,
four au moins » fi je meurs , vous lai£*er un beau fruît«
|1 juge que deniain > vous ferez plus contente , &e.
|i.près avoir eu une très «• bonne nuit> & rempli toulQ
^ THEATRE FRANÇOIS. %g^
le^ devoirs , Abradate quitte Panthée , (è met à la tête
dés troupesi livre on combat à Crefus» où ce Monarque
eft bleflié & fait prifbonier. Mais le nouveau Gén^
lal eft lui-même blei][é daDgéreufement. On le rap*
porte dans le camp > où il meurt entre les bras de
Panthée , qui > de défefpoir , fe tue fiir le corps de fou
époux*
• - •
Cette pièce eft très-régulîere , & remplie de per-
JTonnages épiibdiques. L'Auteur dans la Préface avoue
qu'il n'a point voulu s'afTujettîr aux régies des trois
Unités : auflî les violet-il à chaque inftant. La fcèet
eft tantôt dans le camp de Cyrus, tantôt dans celui
de Crefus. Il y a une PrinceiTe Armenide^ époufe
de Tygrane, qui , fans (ça voir pourquoi , eft d^guifée
en honmie > & qui ne produit aucun ei^^t ; certaine-
ment la verfification ne fauve pas l'irrégularité delà
conduite*
R. M. SIEUR DU ROCHER,
L'I N b I E N N E AMOUREUSE , ou L'HEU-
REUX NAUFRAGE, Tragi-Comédie en cinq
aâes 9 en vers > imitée de l'Ariofte 9 dédiée à '^Made-
moifelle de Liancourtj avec un argument, 6c quel*
, qoes vers à l'Auteur. PÀ&ls ^ Jean Corr^zet, 1^31»
LA MELIZE , ou LES PRINCES RECON-
NUS > Paftorale comique en cinq aftes j en vers y
avec un prologue facétieux , un argument, & quel-
ques vers à TAuteçir f dédiée à Madame la DvcheiTe
r
%9& THEATRE FRANÇOIS.
de Moncbazon. Paris: Corrozec , 1634. in-8^#
(SUJET DE L'INDIENNE AMOUREUSE.)
Clerafte & Rodomare y fils du Roi du Pérou , fonc
{cctés par une tempête dans l'ifle de la Floride > &
arrivent aflez à propos pour délivrer Axiane , fille da
Roi , qui étoit au moment d'être violée par Méan-
dre 1 Prince du Mexique 9 à qui ils accordent la vie.
Clerafte devient amoureux d'Axiane 9 & a le boa-
beur de lui plaire : elle lui accorde même quelques
jbaifers*
C L E R A s T E.
» . . • • . - s
£t ibuffrez que mon ame en eztafe ravie ^
fiance fut ce fein le dernier craie de vie.
AXIANE,
Laidèz meurir ces fruits : le tems 8c la raifoii
Vous les feront ceuillr en leur propre faifoii*
CLERASTE.
Vous permettrez du moins que nos bouches fe colent^
£c que dans ces plaiiîrs nos deux âmes s'envolent. .
AXIANE.
Vous priver de fî peu 9 ce feroic voi^s punir i
Mais après cela die , à n*y plus revenir.
!Après s'être dit bien des chofes tendres > voyant
que le jour efl prêt à finir, Axiané dit à (bn amant:
Retirons-nous , mon ame , attendant que le fout
Recommence de luire avccque notre amour*
CLERASTE.
Mon bel aftrc , tes yeux n'ont que trop de liimicrei
tl Iç Soleil Cautoa i*vîîittç,uCjt cacticrç-.
THEATRE FRANÇOIS. %S7
Voyant, par les rayons que jettent tes beaux yeux j
Qae tu n*es ici basque ce qu*il efl aux deux.
Cependant Méandre eft bien-tôt inftruit de l'intel-
ligence qui règne entre ces deux amans ; & pour la
troubler) il donne un rendez*vous à Rofemonde.
dont il eft aimé : il lui fait prendre les habits de à
coufine Axiane , & par ce ftratagème perfuade à CIe«
rafte qu'il efl: tout au mieux traité par la Princefle.
Ce tendre amant au défefpoir , & croyant ne pouvoir
plus douter de (on malheur 9 fe précipite dans les flots.
Son frère vient demander juflice au Roi. Ce Monar-
que inftruit des motifs qui avoient porté Clerafle à
fe donner la mort , fait mettre en prifbn Axiane &
Méandre , & bien-tôt les condamne à la mort. Il eft
néceflaire de fçavoir qu'on avoit rétiré Clérafte du
milieu des eaux » & qu'on l'avoit rendu à la vie ; mais
que ce Prince, fe rappellant fanScefTe l'infidélité d'A«
xfane i & plongé de plus en plus dans l'amertume &
la douleur 9 s'étoit confiné dans un défçrt. Il faut fça«
voir encore que Rofemonde , ayant appris qu'on avoic
condamné Axiane ^ fe reprochant d'avoir contribué
à(bn malheur , & déchirée par fes remords» s'étoïc
retirée dans le même défert. Le Printe la rencontre :
elle lui apprend tout cequis'eft pafTéà la Cour depuis
qu'il s'en eftabfenté. Par ce récit elle lui fait connoître
l'innocence d'Axiane ; mais lui apprend en même-
tems que cette Princefle infortunée va périr par la
jnaia du bourreau. Clérafte n'hérite pas ; il part dans
5,9^ THEATRE FRANÇOIS.
rioftant) perfuadeà Rofemonde de le faivre; ikarni^
Tent au moment même où Ton alloit livrer la Frio*
celTe au fupplice : ils la juftifient aifément. Le R(H
tranfporté de joye de trouver fa fille innocent^ i la
jdonne en mariage à Clérafte > Biît époufer RofetnoD-
4e à Rodomare> & fait brûler Méandre.
f SU JET DE MELIZE.) Des pirates avoîent
enlevé Melize, fiUe-du Roi, & l'avoient donnée au
Roi d'Arcadie. Le Roi d'Elide déclare la guerre à
celui d'Arcadie^ & s'empare de fes Etats. Le Monar-
que détrôné fe réfugie , & vit incognito dans une fo-
rêt yoifme. Avant que de partir , il avoit remis entre
les mains d'un de fes confidens fes deux enfans> Flo-
rîgene & Delphire avec Melize ,-pour les faire élever
dans un village voiGn : il lui recommanda fur-tout de
leur cacher le fang ilIuAre à qui ils dévoient la vie »
& qu'il leur perfuada qu'ils font fils de payfans. Ces
enfans croiffoient en âge & en beauté ; Florîgene de-
vient amoureux de Melize > & en eft aimé. Ce Flo-
rîgene étoit fi joli , qu'il tournoit la tête à toutes les
bergères. Enfin après bien des tracafiferies , des jalotf-
fieSy de petites intrigues & de plus petits moyens 9
on heureux événement procure la reconnoiflTance de
tous ces enfans. Le vieux Roi d'Elide étoit mort : fon
fils Clitimant étoit monté fur le Trône; ce Prince avoit
vu Delphire & en étoit amoureux. Il rend la Cou-
ronne au vieux Roi d'Arcadie , pçre de ùk maitrefTç»
THEATRE FRANÇOIS. 2,95
lui demande Pejphire en mariage ^ & rpbtient , ac«
corde (à feur Melize au gentil Flprigcne : 8c tout le
monde eit heurelux.
Je n'ai point trouvé dans cette pièce très-médiocre,
devers qui valuiTent la peine d'être cités; mais j'ai
cru devoir rapporter le Commencement du prologue,
qui , comme Ton a vu > eft annoncé fous le titre de
facétieux , & qui du moins eft fort fingulier. Voici
ion début.
» Rien » rien : Je ne le ferai pas , je n*y fiiîs pas
» tenu , bien que pour ce faire je foi^ aflez fourni de
» fil & d'aiguille. Youlez fçavoir , Mefdames , le fujet
y> d.e ma jufte colère ? C'eft que nos Confrer'es fou^
y^ tieiîfient par une infinité de beaux argumens, que
:» je fuis tenu de vous le faire , que ma qualité m'y
y> oblige; Bref, qu'il faut que je vous le&fTe : & bien
p> il n'y a remède, puifque votre mérite & mon
'>3 devoir me foUicitent de vous le faire pour .1^ dé-
yy charge de ma cotifcience. Je vous le ferai donc.
yy Que la fueur ne vous monte point fur le front , MeC-
» dames : j'entends le prologue , &c.
165 !•
JEAN OGIER DE GOMBAUD, né à SaîAt-
Juft de LuiTac > près Brouage en Saintonges y mort eii
1666. âgé de près de cent ans; il étoit de l'Acadé-
mie Françoife & Gentilhomme*
L'A MARANTE, Paftorale en cinq aétes , en
vers , avec des chœurs & un prologue > dédiée à la
Heine , mère du Roi. Paris, Ant. deSommaville^
3QO THEATRE FRANCO li:
LES DAN AIDES , Tragédie , dédiée à Monfeî-
gneur Fouqaet. Paris, Aug. Courbé» 1650. i/I-S^
(SUJET D'AR AMANTE.) Amarante , fille de
JDaphnfs , étoit la plus belle & la plus riche bergère
du canton ; tous les bergers (bupiroient pour elle. Mais
elle ne s'étoit point déclarée pour aucun d'eux. Le
jeune Alexis étoit le plus paiConné ; & quoiqu'il fùl
pauvre i& qu'il ignorât l'auteur de Tes jours > il cher*
choit fans ceflè à lui donner des preuves de l'excès de
fon amour. Son bonheur le conduifît un jour dans an
bois, où il délivra Amarante des mains d'un fatyre,
qui étoit prêt à la violer ; la bergère fut fenfible com«
me elle le devoit à un auffi grand fervice > mdis n'o(à
c^endant. pas encore fe déclarer en fk faveur. Dapbnis
fou père, défirant avoir un gendre, la prefle de choî-
fir un époux. Tous les amans fe rafTemblent ; un plai.
fant > lés voyant en fi grand nombre , dit ;
VoU^ bien des épousa :
Il faudra un grand lie pour les contenir tous.
Cependant Amarante, ne pouvant réfifier aux or-
dres réitérés de (bn père , déclare qu'elle donnera la
main à celui qui lui rapportera une ceinture qu'elle
avoit perdue , lorfque le fatyre voulut lui Biire vio^
lence>ou qui lui préfentera la dépouille d'un grand
cerf célèbre dans le canton, à caufe de fa finguliere
légèreté. Elle fçavoit qu'Alexis avoit ramaifé la cein-
.ture> & elle ne doutoit point qu'il ne fiuc bienaôi
TMEA.TRE FRANÇOIS. 501
^nqueur du cerf. En effet j il devance tous lès ri«
vaux ; ii voit le cerf» le joint & le tue ; mais malheu-
reufement , fuccombant fous la fatigue quil avoit ^f-
fuyée ce jour là, & contre cet animal & contre lelà«
tyre, il s'endort. Oronte^ jeune bergerei qui lui avok
ftovain offert fa tendreiTe» voyant qu'il avoit rempfi
les deux conditions exigées par Amarante , & qu^il
àlloit devenir fon époux > cède k la jaloufie, lui vole
la ceinture , & attache au col du cerf un billet f qui
paroic écrit de la main même de Diane , par lequel
cette Déefle ordonne la mort d'Alexis , pour avoir
ofé tuer un animal qui lui écoit con(acré. Dès que les
bergers ont connoiflance de cet ordre cruel , ils arrè«
leot le malheureux berger 9 & le conduifent au (up-
plice. Aniarante prend envain fa défenfe : il alIoit
périr > lorfque Timandre 9 le plus puiflant des bergers
de la contrée, arrive tout à propos d'un très -long
voyage 9 qu'il avoit entrepris pour retrouver fon fils
& (à fille , qu'on lui avoit enlevé depuis long-tems :
on peut juger de fa joye lorfqu'il reconnoît fon fils
dans Alexis , & fà fille dans Oronte. Sa fatisfàdioa
eft bien-tôt troublée, lorfqu'il apprend qu'on alloit fai-
re mouric Alexis» Oronte alors , pour fauver les jours
de foH frère , révèle la fupercherie qu'elle avoit faite;
& Alexis juftifié pafle auffi-tôt des bras dp U mort
dans ceux de ùl cheie Amarante»
Cette Paftorale chargée d'incidens > qui la rendent
30X THEATRE FRANÇOIS.
très- ohfcurei eft bien mauvaife & bien mal écrite;
les chœurs danslesentr'aâes^ (ont ce qu'il y a déplus
paflable , mais ne méritent cependant pas que j'en
dte aucun fragment. '
(LES DAN AIDES.) Je ne croîs pas devoir
donner i'analyfe de cette pièce ; & je renvoyé à deux.
Auteurs , qui ont traités le même fujet , Aiuperous
en 1704. Ibus le titre d'Hypermneftre , & TÀbbé
Abeille fous celui de Lincée. La première eut le plus
grand fuccès ; & on la voit encore aujourd'hui avec
la même iâtisfaftion. La féconde , quoique remplie
de grandes beautés , n'a point été repréfèntée. A la
mort de l'Abbé Abeille , on la trouva dans/fes pa-
piers : il n'y a pas long - tems qu'on l'a imprimée en
Hollande pour la première fois. Celle de Gombaud
dans fon tems attira avec juftice les fufFrages de
tous les fpeâateurs. La conduite ^ il eft vrai , n'en eft
pas exaâement régulière ; mais la verfiScation en eft
noble , & préfente (buvent des tableaux vraiment tra-
giques. Pour en donner une idée 9 j'en citerai deux
endroits ; l'un pris dans la deuxième f cène du premier
aSe , au moment que le Roi , intimidé par un Oracle
qui lui a prédit qu'il périroit par la main d'un de fes
gardes , fait venir des devins ; i»'un d'eux > après avoir
confulté les entrailles des animaux > lui dit ;
les Dieux épouvantés abandonnent leurs Temples ,
îtfemblent redouter des montres fans exemples»
La première viâime entraînée à TAutel ,
Tombe comme indignée après le coup mortel ;
Xe fang coule à regret dé Tes veines tremblantes i
Les autres ont Pefiroi , paroifTent chancellanteSy
It pour fe délivrer font leur dernier e£Fort y
Pa les voit ac^ai^Ujc long-tcm^dprèsleur more.
THE AT RE FRANÇOIS, 30^
On voit des coeurs flétris, des entrailles horribles ^
Qui de notre infortune ont des marques viables.
La flâme , au lieu de tendre au fuprême (ejouc ,
Au lieu de s'élever , rampe tout à Tentour j
£t telle que Lucine au milieu des nuages ,
£lle prend la couleur conforme À Tes préiCages :
Tantôt rouge & fànglante , elle attaque les corps^ •
£t tantôt pâle & fombre , elle imite les morts.
Les torches ont perdu leur clarté coutumiere^
£t ne font éclater qu'une ombre de lumière.
Comme les mânes Tout au-delà du tombeau y
Si le trifte univess (bufire quelque flambeau, &c.
L'aatre eft tirée de la féconde fcène du quatrième
le : c'eft Alphite > confidente d*Hypermneflre , qiû
snc lai apprendre le crime affreux que fes ibeurs
*nnent de commettre. Interrompue dans fbn récit ^^
le le continue ainG :
Pour courir au fecours , que d'un commun accord ,
£Ues fe dévoient rendre en ce tragique e£fort ,
la fîere Iphimedufe , & la belle Âflerie ,
Spnoient .cbmn^e en triomphe , & niàrchoienc en furie f
Les bras nuds & faugUns , également armés.
Qui déjà fembioient être au meurtre accoutumés^
La vaine ambition de paroître cruelles ,
Amcnoit Callidice & Theane après elles*
Toutes avec ardeur , s'avançoient pour aider
Celles , que trop de crainte auroit pu retarder.
£n effet , Adianthe , Hyppodame , Euridice
Ne fe pouvoient réfoudre à ce cruel office }
£t d'un^trouble fi grand , leurs courages preflés
La&floient languir les corps' qu'elles avoient bleiTés, &c.
L*on attribue encore à cet Auteur Cidype & Aconce»
: Théodore. Ces pièces n'ont point été iœgrioiéea.
y<74 THEATRE FRANÇOIS.
RICHEMONTBANCHEREAU, né à Saumur,
b6i2. il étok Avocat au Parlement
L'ESPERANCE GLORIEUSE , ôa AMOI
ET JUSTICE, Trag. Comédie en cinq aâtes, en v(
dédiée à Monfeigneur le Prince de Condé> avec un 2
au Leâeur, une Préface à M. de la Martiniere BroiTs
Gentilhomme Vendomois > & quelques poëfies di\
fes. Paris, Claude Collet» i6)2.. i/i-8^.
LES PASSIONS EG ARE'ES , ou LE ROMi
DU TEMS , Tragi-Comédie en cinq aûes , en ve
dédiée à Monfeigneur le Comte de Fiefque, a
un avis au Leâ;eur. Parjs» Claude Collet, 16:
fa 8<*.
( SUJET DE L'ESPERANCE GLORIEUS]
Cloris avoic eu quelques complaifances pour Philid<
cet amant indifcret fe vante de fes Biveurs > & ti
même des propos injurieux à Ton honneur. Elle
trouver un Procureur , & lui dit :
Monfîeur , il efl befaîn id de confulter
Que la force d'amour , m*ayaac fait arrêter
Dans un lien fatal , ou mon ame eft complice >
D*un cercain innocent , tout fourré de malice ,
D'un infidel atnant qui tire vanité ,
De triompher envain de ma fidélité »
De qui les beaux difcours , xponflrcs de flatterie f .
M*ont fembfê des crayons de l'enfant d'Idalie j
Mais dont la lâcheté fe porte jufques-U ^
De publier ici que j'avois fait cela ,
THE 4Tii£ FRANÇOIS. 305
Et qui plas eft éncor , thùCè plus inhumaine ,
21 a mis â ma porte ud boiichoil pour enfeagne t'
il a fait des romaûs pour me deshonorer*
N'aurois-|e pas bon droit dé le faire appénérî
Le Procareur lui ébnfeitfe de demander juftice» il
efle une Requête qu'on jpréfeute au Ju^e du lieu.
3ici tin fragment de cette requête : c'eft Cioris qui
pofe fe$ griefs contre Finlidor.
*i - i *■ /■ •'
é • • • '
Que le vite a p6ttyoîrH>ù^ lâ^nàtufe abonde y .: ' <
: 5Î";#^ *^'* de yecnw <i^ç pRur;pfittplçr.l« nXtoftde »
Que ce que la nature en naifliant lui donna > •
A pour fes (Qretés befoin d'un cadena.
Z>e dire qucramour prend/a çqtt^ pjour d^ppff f . ,
Quand la terre i:çgaracaur4çj(I<ius de fg Juppé 9. , .
Que Tamour fe recire en Ton Ûeu plus fecret >
Pour lui faire jecter d^laçi^es ^e regrtfc : .-> ;
Qu'amour nâquitide l'eau , qu'elle aime les anguillts^
£t qu'en cas de procès tout le droit éft aux filtés. " ^ ^
Ainû la Suppliante ofe vous requérit , , . „. ;
( Si vous n'avei £iit voeu àc la faiie mourir )
D'en vouloir décernet àùè'i^ia. Tenoinmée ;
Qui de feu qu'eUe^oit ^ n^.eft^piurqu'Ufïé^âÀséii ' '" ' '
Qu'à ces fins Philidoc , corpipteur de l'amour , . . ;
Ait a^gnatîonàcecbmpétetirjour, • '- — • *
Four guérir Ton ho^peiv: , en dépens 8ç ^mei^lç^ ,
Dommages , intérêts. : c'eft ce qu'elle demande i; : ^
Le tout coniideré« yous plaifè l'ordoAner r , c , . . .. ^
£lle a pour votre droit wx baifei: à,4oAaec» . ., -^
Le Juge fort content de la ^récompecife qu'on lui
it efpérer, prononce cette Sentence ; ^ - -*
Tome II. y,
|of THE4TRK rjt^N^ÇOJS^
E^ yû ^)i*a(naur, ^ lé dfifljil^ ,
Sur la tecK ^ le ciel y & ronde »
iSax^sii^ davantage epqui;^^'
Nous ordonnons que tout le monde
i fera^comme il çft re^MJi. -
\ .f^ - t ^0^4
' PubfcteïhrftahtattGrrfiér:
DrefTez le jugement fur le v^dci^fiecet*
Après ce premier Jugement ^ l'af&ire eft portée
devant le Juge, Royal » & .phâ4éet cotttradiâokement
devant luu L' Avocat «foi parie c^tfcte Oorisv die ea«
tre autres chotàs:
I ' • » I '« i ,
Je confdf^ > konSaîr , que ma partie àdrèrfë
Seiaifl*e bien fouirent tomWr à la fenverie , &c.
i^
Les Avocats àyam celKâ^'de^ parier, le Juge io'
tcrroge*Clôriàl «lui dit : \]Z 1
Clodsy lere^ Ifi mUn { êteS'T9Ùspas p^
Vous fi^i{tokifiiiec.dUuie{binde qoeteUe*
Enfin le Jdgé prononce àinE&S^^^ :
Nous dUô^ V ï^aht f|^ ce diîbbt^ri d^ârniouffecte y
Que nous n^^SHnoùs plus qu'une inationnette ^
Que la Dame -atu bouchon tnfottAefada fait ,
Zt viendra dét^et tons ceux qui lui ont fait. ^
Et ce beau différend venant de l'amour même ,
':i <^:4^^ni^qûe'pôu[rplââre^^àTobitde»
I<e dé&ndeuf «i^ gpmnwipîggipa . . : ^
■ r
» ■
(
THE ATRE FRA IfÇOIS. §6y
t)ts pie ces de Cloris , 6c la collation.
Xc £u£Ulc dçoit iiiifi fur Tes fins de rtqoefie^
Kous ne rcinpêchons pas de >ouec defon téfiç i
A la charge pourtant , d'éviter les abois ,
Que rhonneur peUt foiiffrir à la fin de neuf mois > &c«
^ 1 , * ■ • • ■>•,■* \ * » ■ ' - >■
Il lai nonime auflS un Carateur» & lui défend de
>Dger à fe marier de ce jour à onze ans. Pendsiiit!
>us ces plaidoyers , Philidor étoic ixiiorc 9 6k Cloni
voie contrafté an noavel engagement avec le jeoîle
'hilane 9 dont elle eft éperdûmènt àmoareufe , &
a'elle vôuloit épdufer ; Ton Carateur s'oppofè à cet
ymen^ Scelle fe retire dans un défert. Philanedé-
louvrê le lieu de (a retraite 9' & s'y rend en habit
l'Hermite. Enfin pour dénouer là pièce > on fait pàL*
' oitre l'ombre de Philidor > qui confeiTe que c'éft il
brc qu'il a mal parlé de Cloris ^ & ^oi dit :
Je fuis ce malheureux, de qui la médifance
jËntreptit autrefois de bleffer Tinnocence.
TaÀ pour punition des fiâmes 5c àc& fers ,
£t pour honte Tèffiroi du cachot des enfers.
Il retourné auffltôt dans fk défagréable habitai*
don. En mème-temis l'Àmoùr paroit dans Ton chàr i
qui ordo nné l'union de Philane & de Cloris 9 & qu{
leur promet mille bonheurs. Perfbnne n'bfe s'oppôfer
à la volonté du maître des Dieusç; & ces deux amani
fe marient à la grande CatisËiâion l'un de Tautre*
Cette, pièce indécéâté i ïâal écrite 9 & pluâ tiiti
3o8 rUXATRE FRANÇOIS.
conduite encore • a cependant eu le$ plus grands élo*
ges de tous les Auteurs contemporains : on peut foop-
çonner que la jaloufîe , de nos jours (i commune en*
tre les Portes , n'étoit pas encore bien établie dans
ce tems là.
(SUJET DES PASSIONS EGARE'ES.) Je
ne crois pas qur*il y ait jamais rien eu de (i abfarde
que cette pièce , qui d'ailleurs eft fi chargée d'épifo-
des » qu'il faudroit la fuiyre fcènes par fcènes > pour
en donner une jufte analyfe. Je me contenterai dooc
d*en rapporter les chofes principales. Caliante eft
amoureux & aimé d'Artenice. Aronte^ vieillard ridi*
cule> eft auffi épris de cette jeune beauté , qui fe
moque de lui , & qui répond ainfi à la déclaration
d'amour du bonhonmie.
Un peu de ctin blanchi d'âge d& non de raifon > >
Collé defTous un os accueilli dé poifon ,
Où mille vermifTeaux onc déjà fait un iiege,i
Qui ferc à 1* odorat de prifon & de piège -y
Vd parchemin rouillé y qui fut autrefois fîonc >
lorfqu'on pouvoir encor y tracer un affront s
Deux portraits de ces creux d'un cheval de bagage y
. Qu'on appelioit fourcils en fervant au ménage j
Deux cavernes de cire , ou )e fais un ferment ^
Qiie vous en faites trop pour votre enterrement >
Un tuyau de vapeurs , dont n'approche perfonne ,
Farce qu^on tient par tobt que la lèpre fe donne y
Deux antres vermoulus , où l'on voit quelques vers ,
Qui ne daignent ronger un mort dans l'univers ^
Un peu de cuir u(é dedus une carcadè y
Qu'on n'oferoit choquer de peur qu'elle fe cafTe i
Peux lèvres « dont les traits font û vieux 5c d meuti ^
Qu'à peine ^ euvenc^ils nous dire un je me meurs i
THEATRE FRANÇOIS. 309^
tTn foufflie 9 dont l*haleine un peu contagîeulb y
€oarc ici le danget d'être litigleure i
Un poil tout hériflS f qu'on n'oferoit toucher.
De peur qu'en le touchant on vînt à l'arracher;
Un corpi qui pafleroit poutTombre d*ua atome ^
$i Ton lui dérpboit le titre de fantôme i
Un port qui raccourcit enfemhle tout le corps,.
Pour avoir moins de peine à paifer chex les morts ;
Infîn vos cheveux gris , v 0$ yeux caves en tête »
Vos os pareils à ceux de quelque vieille bête ,
Demandent bien plutôt quelque prompt monuraenr^
Que de vous arrêter, i me voir feulement.
•
Une Magicienne prend la figure d'Artenice , Se fout
déguifement jouit de Caliante. Filandre & AlcidOf
it tous deux amoureux d'Agarite ; le premier fe
ouille avec elle» & fe réconcilie» d'une manière un
o fînguliere ». d'autant que le raccommodement fe
ic fur le théâtre y & fe pafle ainfi. Agarice fe cou-
e^ & feint de dormir. Filandre fe met auprès d'elle
abufe de Ion fommeil ; puis il meurt fur fon (ein
ns un excès de plaifir ; 8c ce qu'il y a encore de plus
:oncevable, c'eft qu'Agarite fe confole de la mort
i fon Filandre » en embraffant Alcidor > & le con-
lifant dans fit chambre 9 fans doute pour y réjpéter
fcène dont elle a préfenté le fpeftacle en public. On
mve encore bien d'autres ridicuUtés dans cette pie*
: un Guillaume qui dit beaucoup de platitudes» &
i fans fçavoir pourquoi » met le feu à la ville ^ ou/
en du monde çérit* Oliante 6c Artenice qui fe
Y i\\
battent, fç reçpnnoiiTçQ^ & s'épcml^nt, poojr fiûre Iie^
4énouement » mais faos lo^Eifs m raifiHis. Je {KAmoii
citer encore plufietirs autres événbthèns auffi cohtrai-
res au bqn fens : maïs je crois a^FOir feit afiez cdnnoi-
. tre cet ouvrage > qui , guoiqu'encore plus mauvais qae
le précèdent^ & certainement bien plus contre les
bonnes mœurs > a reçu cependant lés éloges lè$ plus
flatteurs des Auteurs tes plujs çélébries du tem s » tels
que Racan > Mairet » Desfontaines » Gombaiid 9 &
plufieurs autres ^ c|ui s'efForcjpretit à l'envi d['exalter la
beauté de cette pièce. Je ne peux m'empêcher de ci*
ter les vers de Gombaud , c'eft ainfi qu'il s'exprime ;
» ■ • ■ ■ ■ •
Ô f que j e vois d'appas dedans tes pa£lioxi$ \
£t que ces belles fi£tioQs
Que ta plume nous a tracées ^
Si doucement flattent refpric ,
Que je ferois ferment qu'un Ange les écrit »
£t qne l'amour lui feiil en trouve les penjR6$«
MKEmCLE, Gonfeiller dn Ro} , ^ Général de
la Cour des Monnoyes» né en i5qo. mpnrat Doyea
de Udite Cour en 1661.
P A L E M O N , Fat)Ie bocagere & paftorale , ea
cinq aâes, en vers > avec des chœurs^ un prolpguç
èc une préface. Paris , Buguaft ^ 1 6 } x • î/z- 8 ^.
N I O B ES Tragédie çn cinq aâeS) en versy avec it%
choeurs, une préface & un argument ^ Paris Ze mtmel
■< . '* >.».".■ ■■,"■* ■ '• • ■
L^ EIPELLE BERGERE , Comédie paftorale,
enfrlnq a^e8}'en vers» i^vec des choeurs ^ un prdQ-
THEATRE rKANÇOlS. ^
gae f une pjr^ce ^ va ^trgameot. Cette p^^ le
trouve » page %i^ 5 . da feçonil Lijvrf i^ef Ëi^trecietis
des iiluftres Berges , 9\m^g^ cle Frqiiçle împnmé k
Paris che2 Dugnaft > en 16^^ i/t-S^.
(SUJET DE PÂLEMON.) Four garantir les
bergers fie bergères de Saint -Germain des pièges
de l'arnoor, Diane vient s'établir ^ans la forêt > fi(.
prend les habits de bergère. Elle expofe ainfi tes noo-
tift qui l'y ont déternrïnée.
le viens état ce pays en ces habits rqftiques ,
Afin 4'anéantir les fettertes pratiques y
Que l'amour y conduit y débauchant mes chadèisrs,
Parrefpoirmtnronger cf6 cet feintes douceurs^
Il attire leurs ctturs à ce que plus fabborre s
Il promet des baifers , ou quelque chofe encore '
Qtii leur plaît davantage 9 &;c.
Son (êconrs eût été Êivorable an matheqrenx Pale-
tnon > (i elle avpit pu le guérir de Ipn amour pour
l'ingrate Climene. Ce tendre berger cberchoit fsnvain
k lui plaire ; rien ne pouvoit vaincre (on indiffiSrence.
n rencont re un jour Ergafte 1 & lui racoifite ajtifi To-
rigine de (on arnoor.
Je n'avoîs point appris à connoître l'amour ,
liOrfque, pour éviter le plus grand chaud du foura
J'allai vers un ruiflêau , de qui le beau rivage
Çonfervoit raille fleurs dedans un frais ombrage | ,
<Sa fource eft à l'écart } & jamais nos troupeaux ,
Pour fe défalteter , ne vont troubler Tes eaux*
P I A N £ « qui préfide à l'horreur des bocages «,
I.e permet feulement aux animtaux faiivages^
Stx THEATRE FKAff.ÇOlS.
Bicliei , daims ,*&: cHeyceuils , qu! Vont èa (ïlretê
Data ua lieu (S pUiHiQt , & fî peu ftêqucnté, '
Près de cette demeure oà Flore a Ton empire y
l*air doucement ému du rpufle de zephîre ,
£c la fraîcheur de Teau me venoient careflèr y
Afin que leur douceur m'invitât d*ayancer.
le fuiyis le fentier qui m*y pouvait conduire »
Jufques fous un couvert où le Soleil vient luire ^
Comme à la dérobée au travers des rameaux
pe cent arbres feuillus , vieux Palais des pifeaux » '
Qui dès Taube du jour dans cet épais feuillage »
^ont ouir jufqu'au foir un amoureux langage \
Me pe;nfant repofêf dedans lin lieu fî beau ,
Je vis plufieurs carquois au bord de ce ruiffeau y
Attachés fut 1^ faule en forme de trophée.
Le coeur xpe bat a\i fçin , ppoA ame eft échaufl^ç
P'ua defir violent, & |e ne fongeois pas
Que l'allois avancer l'heure 4e, mpn trép;^.
Je découvre de loin quelques nymphes enfemble s^
Je deâre , )e crains , je m'adure 5c \t tremble s
J'avance toutefois, Çc l'ardeur du defir ,
Me promet par leur vue un extrême plaiiîr s>
La peur cède la place à l'efpoir de la joye ;
£t comme le chafTeuc approche de fa proye »
Paifant un long circuit , falloM â pas comptée
^ Fout contempler de près , ces divipes beautés ;
Craignant d'être apperçu , je n'eulTe o(% qu*â peine
Mettre un pied devant l'autre » & poùiler mon haleîae s
J'avois de la frayeur des feuilles qui tomboient »
Je frémiCpis ai| bruit des oifeaux qui paffoient |
£t l'onde du tuilTeau , par fo^ petit murmure ,
Me fembloit nuirç aufH dedans cette aventure.
Enfin tout en fueur entre des arbriftèaux ,
ït caché des builTons , qui le long de ces eaux
Ipont une paliffade , & croifTent en grand noo^bre •
Afin d'entretenir ce beau rivage à l'ombre ,
TfJEÂTRE FRANÇOIS. 31^
Tai pu voir d'alTez.près rhonneyi d'un tel réjout^
Et les fens traafportés de merveille ic d*amour ,
J*apperçu« dans le bain quatre nymphes très-belles.
O puilTants Vénus , je vis C |L I M £ N £ entre elles ,
C L I M £ N £ que fadore , & de qui 1 .1 beauté .
Triomphe de nia joye & de ma liberté :
O que feus de plaiHr de la voir toute nue !
Une flâme d*ara9ur à mes fens peu connue ,
Me furprit par les yeux , & pafià dans mon cœur.
Qui brûlant fit hommage à fou nouveau vainqueur , &c.
Cç récit ne fert qu'à lui rappellcr fes malheurs ; &
De (e Tentant plus la force de les fupporter , il prend
le parti de s'aller précipiter dans la Seine. Son père
qui furvient à proposa le détourne de ce fatal projet »
& le détermine à faire un dernier effort pour yaincre
l'indifférence de Climene : il y confent , ^ le fort
femble auffi-tôt VQuloir le fervir. Il délivre fa bergère
des pattes d'un loup qui Pallpit dévorer : c'étoit une
magicienne qui étant amoureufe de lui , & jaloufe
de la tendreffe qu'il témoignoit à Climene » pour (è
venger de (à rivale f avoit conjuré ce loup y afin de la
faire périr* Climene délivrée de cet affreux danger ^
au lieu de témoigner fa reconnoiffance au tendre Pa-
lemon> le quitte fans lui rien dire 9 & le lai(fe dans
le plus afifreux défefpoir. Elle va compter fon aven-
ture à Delon » bergère de fes amis > quiyTurprife de
(on indifférence 8e de fa cruauté , lui dit :
N-'excitez pas l'amour à fe veoger de vou^.
$t4 THEATRE FRANÇÙlSi
CL I M E N E.
Il ne in^mporte pss qull fe mette en coortoox |
Diane , pour le moins ^ me fera favorable.
la menace d'amour ne m*eft point Tedoutabfe^
Lprfijue cette Déefle a foia de me gardée^
DELON.
^n pouvoir toutefois fe doit à|Fpt^ender*
Il me fouvient toujours de la trifle aventure
Qà Kaysfe perdit. Naysque la nature
Avoir faite ici-bas , pour fe faire admirer }
Son extrême beauté fe yoyoit défirer
D'un grand nombre d'amans j mais famais la cruelle
M'aima pas un de ceux qui foupiroienr pour elle*
Seulement à la chafle elle prenoit plaifir ,
Et les fombres forêts étoieilt tout fon defîr.
Celui qui dans les fers de fon cruel empire
Avoir le plus d'amour & le plus de martyre ,
C'étoit le bel Adrafle , agréable chafleur »
Que la faveur du Ciel avoit fait poileflèur
Pe fes plus riches dons , Se qui dès fa jeuneHè
Avoir le bien de vivre auprès de fa maîtreflè s
lis écoient de même âge 9 U d'un defir pareil ,
Et n'avoient pas dix ans , que, dès que le Soleil
Commençoit â dorer les fommets des montagnes,,'
Xnfemble ils pourfuivoient dans de rafes campagnes^
Lès timides levreaux 'y & quelquefois auffi
La prife des oifeaux , étoit tout leur fouci :
Ils retournoient au ibir , & chargés de leur proye
Xntroient dans leur demeure avec beaucoup de (oye*
Mais enfin lorfque l'eau de fon rapide cours »
Dedans la même voye eut refait plusieurs tours ,
Ces plaiHrs innocens , èc fes chères délices ,
Se changèrent foudain en d'horribles fupplices }
Comme on voit qu'un beau jour fe rend tri/le â nos yeux 9
Quand l'orage furyient , ^ nous cache les cietu^
rSEATRE TKANÇOIS, 31$
Adrafte commençj^ de cefijêadc en l'ame
tes premiets mpuvexnens d'une nailEmte flâme 9
it recevant le )oag il ne put ihritec
les attraits de Najrs , qui le dévoient domter*
Tandis qu'il s'effprça de fléchie cette belle ,
it bois reprjt trois fois une feuille nouvelle ,
^t trois fois le Soleil fit jaunir les moitrons t
|1 gémit , ii pleura \ £bn ame en cent façons '
Découvrit les çwm dont elle épit gênée.
^4ai$ ce fut vaiûement , & fa n ymphe obftin^
Lui ténioignant toujours une extrême rigiieur,
§ouffi:it qu'en fa prefence il mourût de langueuit*
Mourant 9 il l'adoroit , & d'une voix débile
|1 tâcha d'adoucir ce courage immobile ,
Mais les trilles accens de (a dolente voix
Emurent feulement les rochers & les bois»
Cette inhumanité ne fut pas inipunie \
Nays fe vit faifîr d'une aveugle manie f
Qui la mit à la gieiie , ^ termina (es jours »
Pour ne pouvoir jouir de fes folles amours*
p C LI M£N £ ! écoiitez la fuite d'une hifloire ^
Que vous devez.gta^er dedans votre mémoire ^
Vengeance épouvantable y ^ juile châtiment» ,
P'avoir caufê la mort d'un fi fidèle amant.
Nays » la fieré nymphe , appetçut l^lidore ,
Qui trop jeune pour lors , ne pouvoir pas encore
Devenir amoureu^ , £c reffentir au coeur
Les foins qu'y met l'amour » quand il en eft vainqueur*
Bile en fiit toutefois ù. vivement èprife ,
Que fon coeur , ennenii de la moindre remife ,
Mouroit d'impatience , £c ne pouvoit durer
Sanss'offirir à. celui qu'il vouloir adorer.
Auffi-tôt eUe alla , de raifon dépourvue »
Trouver ce bçau garçon , doux charme de ia vue ^
Qui trompe fes defirs 9 & ne peut amortit
Les Çecré'tces acdeun qu*il lui fait reflèntir*
/
pS THEATRE FRANÇOIS,
Que tes yeux , lui dit-elle , & que ton beau vifage
Sur les plue accomplis , emponenc d'avantage ï ,
Que ta mete efl lieureufe , & qu'elle a de plaifîr
De voir ton beau printems répondre à fbn defîrî
Tu ne cédesjcn tien aux nymphes les phis belles :
Xt quiconque , crois-moi , te yetroit arec elles ,
Ke pourroit remarquer d'autre diveriitê ,
Si ce n'eft que ton teint a ît plus de beauté.
Tes regards font plus doux , & les puilTantes flèches
\ Qu'y vient {^rendre l'amour , font de plus grandes brèches.
£lle tieno ce langage ; & cellànt de parler ,
>Tays folle d'amour , commence à l'accoler 9
le prelTe fur fbn fein , & cent fois le cebaife;
It lut , qui, de (a part , reffent un certain aife
De fe voir cared^, la rebaifoit aufli ;
Mais c'étoient d^baifers , dont Vénus n'a fouci,
. Propres pour une mère , 5c non pour une amante ,
Qui meurt à petit feu deffus lui languifTante.
La nymphe à tout propos fes peine» dédasott {
Mais il n'entendoit pas ce qu'elle défîrpit :
Son âge eo étoit caufe , & fa trame ordonnée
N'arrivoit pas encore à la douzième année. ■
£lle perdit fîx mois à toujours foupirer :
^ Sa compagne fouvent la voulut retirer
De cette patTîon fô , ma foeur , difoit-elle (
Il faut que ton déût en d'autres lieux t'appelle r
Change d'aflèâion *, celui que tu chéris p^
lA comme un petit fan y qui fur les bords fleuris
l>e quelque beau ruidèau , fe mire dedans l'onde ,
Où -prend en^bondilTant fa coutCe vagabonde ;
Il n'a point d'autres foin» 9 & le fea de l'amour
Si-tôt dedans fon fang ne peut faire (éjour :
Ke cherche point des fruits , qui trop dure» encore^
N'ont feoti du Soleil l'ardeur qui les colore ,
leur donne fa faveux , & fa maturité.
Ses confeils furent yaiiu jT^cIe cocue enchanté
X
THEATRE FRANÇOIS, 317
De la B/mphe ambureufe atcrut plutôt fa rage ^
Qv*elie ne fut postée âforàrxle feivage. /
L'amour jufqu'à tel point auigmenu fa fureur ,
Qu^eile en perdit la hoote ^ Se le Qyïn de l'honneur«
Même on dit que , lafcive outre toute mefure ,
Elle tâcke une fois de former la nature ,
Qui feule rëpugnoit à fa lubricité ,
[El & voyant véduite à telle eitrémité > ^
De ne pouvoir jouir de ce qu'elle défire , '
Pleine de défefpoir , de rage & de martyre ^ ^
A la mort réfolue , eHe embrafla celui -
Qui lui faifoit fentir un û monel ennui ,
Et ûe précipitant au plus creux de la Seine ,
Ule finit fes jours , foA amour & fa peine.
Cette hiftoire ne la fait point changer de fentimens,
c elle continue à accabler de rigueurs le pauvre Pa«
imon. Ce malheureux berger n'écoutant plus que
a défefpoir 9 fe précipite dans la Seine. Cependantf
>ar prouver à Diane qu'elle ne pouvoit faire que de
iins~ efforts contre lui , l'Amour enchante une fon»
ine f dont lé criAal brillant invitoit tous les bergers
5*y venir baigner» & il donne à cette fource tran&
trente le pouvoir d'embrafer de tous fes feux , les
rinphes qui s'y baigneroient. Climene fut la premie-
: qui en fit l'épreuve ; elle fe vit tout-à-coup déchi-
e de regrets ; elle déplore la perte de (on amant,
: elle veut mourir fur le corps de ce malheureux bcri;
:t, qu'elle embraffe mille fois tout inanimé qu'il étoit*
;8 pleurs» fes careflfes ranin^nc ce par &it amant*
1 s'apperçpit qu'il reipire encore ; de nouvelles iai;
3/8 THEATRE FRANÇOIS.
mes ^ & là chaleur de cent baifers multipUés k ren
dent enfin à là vie< Climene y aalH tendre qu'elle avoi
été cruelle > fait bien-tôt le bonheur àt Toh cher ti
lèmon.
' . ■ •"..■■..■ ' .-. ' " ' '
Eti général cette pièce eft bien écrite ; & l'on
èrouve quelques vers charmans. Ceft une itnitatib
du Pafiôr Fido , ifiais aù-deflbus de ion original.
( SUJET DÉ l^IÔBÉ. ) Tout le monde connb
hiifioire de Niobé. Cette Reipé > fiere de fa non
breufè poftérité , veut fe hite rendre les honneu
divins > & interrompt un iàcrifice qu'on offrait à L;
ionè : la Déefle y pour fe venger de cette impiéU
lait tuer par Diane & Apollon les fept fils & les (è
Mes de Niobé. Voilà le (hjét de cette Tragédie : <
ioici le dénouement. Tantale ^ un des fils de Niobi
devoit épôufer Eriphile ; celle-ci ignore le fort de (i
amant > & l'attend dans un lieu écarté. Elle découv
iin jour un teiàufolëe > ddnt Tinfcription lui apprei
les malheurs de la famille de Niobé. En mème^tei
l'ombre de Tantale lui apparoit^ & lui fait lè ré
de (à fin tragique. Eriphile meurt de douleur > &
pièce finit. Je n'y ai point trouvé de Vers qui mé
taflent d'être rapportés.
^ (SUJET DELÀ FmÈLLE BERGERE
Celinte^ jeune Berger, aimoit fit étoit aimé de
jeune Lerice ; itiais foh oncle Aftibùlé déftinoit
TItSAT RE FRANÇOIS, 319
D à Merinde > berger plus riche que Celinte. Le.
e
ne pouvant plu$ évitçr un mariage , qui la faitok
irif de douleur ^ conlènt de quitter (on pays 9 Sc
\mvtt Celinte dads une autre contrée. Ils s'acian«>
U pour fe tr^ver à iin Heu indiqué: la Bergère
vée au rendez •» vous» eft enlevée par Tordre de
f rias » Prince de Théflalie 9 qui , l'ayant un jour reoh
:rée à la chaffe ^ en étoit devenu amoureux* On
t Juger du défefpoir du Berger > Iorfqu*après avoir
; tems attendu fa maltreiTe > il n*en eut aucune
velle. Il fit tant de perquifitioos 9 qu'à la &i il df-
^rit qu'elle étoit dans un des Châteaux du Prince,
e (^avoft comment iaire , lorfque Periéis ^ épooft
[^alyrias » jaloufe de l'amour que fon mari tânoi-
it à Lériicé , procure à Celinte le moyen de l'enlever
e Heu dangereux . Après y avdr réuûS , il fe réft^
z dk dans une forêt ; enfuke il va trouver Adibule i
A il promet de rendre fa nièce » pourvu qu'il veuille
I la lui acoocderen mariage. Afiibule y con^t; K
ïs amans (ont bien-tôt heureux*
3ette {HjBçe eft fagement » mais froidement écrites
y a point de (ituatiqu Se peu dlntérèt. Voici deux
phes d^un chœqr ou d'une ode y qui termine le
ner dSe » que j'ai cru pouvoir rapporter.
. L! A H^ U JL ftirmoïKe cxMue cboft i
. j^UffçpJK àfon gré difpoiê
0es Dieiut donc il va triomphant }
' Éc-lesiM^onarqttesdeUterrey'
3XO THEATRE FRANÇOIS,
Devant lui plus frêles que verre ^
Ne foac qu'cfclaves d*un enfant.
llienvcrfc par fa puiflaoce
Tout ce qui lui fait rcfiAance ,
Comme un torrent pîein de fureur ,
Qui tombant dés hautes montagnes^
Vient ravager fcn nos Campagnes
L*e{pérance du Laboureur.
16)2.
tE COMTE.
LA DORIMENE, tr^gî - Comédie en cinq
z&es f en vers , dédiée à Madame Boulatiger. PakUi
Cardia Befogne} 1632^ in 8^«
* * ^ ■ .- ■
- CSjtJJET DE LA, DORIMENE. ) Tirfis denent
amoureux de Dorimeoe y qui bien-eôt-partage fes fenti-
inens. Lifis » fon rivai ^l'appo^en dddl> & en efi Ueffé;
mais Tirfis eft obligé de fe (tenir <$kcfaé pour éviter le^
pourfuites de ce combaÇf Uj^e vieillejyiafquife devient
amoureufe de Iqi , & v^ui: l'époufeciL en iQème>tem$
un vieux Comte conçoit la plu^ grande paflion pour
Dorimene , & la démaddé en mariage. Lesfparens de
Tirfis & de Dorirtiéne , trouvant ce vieux Seigneur
8c cette vieille Da^e > des^partis fort ayaptageux pour
leurs en&ns , les leur accordent* Le tendre TirGs
& la jeune Dorimene > au déferpoir de voir ainfi leur
' amour traverfé, prennent le parti dé s^tifiiir enfem-
ble; on les ratrap^; oû lç9 conduit die van( le Roi 9
qu^
THEATRE FR ANÇOIS. 3x1
qui, touché de l'excès de l'amour de Tirfis, lui par-
donne f & engage le père & la mère de Dorimene à
acûorderleur fiUe aux voeux de foh tendre amant.
Cette pièce eft dps plus médiocres , tant pour Ik
conduite, que pour la verfifîcation; 8t i)aalgré les ^élo-
ges qu'on trouve adrefles au Sieur le Comte , à la tête
de Ion ouvrage 9 il a ^ je crois , fagement fait de n<s
plus rentrer dans la carrière dramatique. Voici le feut
endroit que j'ai cru pouvoir rapporter pour donner
ridée du talent de l'Auteur : il fe trouve à la fin du
quatrême aàe. Ceft une plainte que TirGs adrefte à
Dorimene^
Ma belle » qu'ai \e fait ? De quoi fuis-je coupable t
Pourquoi ne vois-ie plus vos charmes précieux ?
De douleur feulémenc me rendez-vdu5 capable >
Pour avoir adoré l'amour dedans vos yeux ?
3'apperçois bien l'aurore ea fa courfe ordinaire ,
Me montrant tous les fours fes habits les plu^beaui^s \
Mais las, )e ne vois plus dcïïlis noue hémirphere>
£clater les rayons du premier des flambeaux.^
Vous avez oublié les fermens pleins de fiâmes ^
Dont notre chafle amour entrecenoit nos feux >
£t brifant les liens qui captivoient nos âmes ^ ,
Vous avez oftcnfé mes déilrs & mes vœux. .
Depuis que mon coeur eft deflous votre puiflâticé ^
Je n'ai pas fait paroître un manquement d'amour ;
Mais votre changement , contraire â ma condaiicfcj^'
Se voit vifîblement & de nuic & de four.. :
Sus donc , ô beau Soleil , qui ravîflèz mon ame ^
Sortez de l'océan pour montrer vos clartés i
Et vous verrez bien- tôt un rayon de ma flâme ,
Monter dedaitf le Ciel pour joindre vos hesiutssé
Tome IL "X,
3^ar V THEATRE ÈRAlfÇÙÎSi
161%.
LE MERCIER INVENTIF, Paftordete cioq
tâes> en vers. Trot es. Nicolas Oodot, i6}i.
(SUJET DU MERCIER INVENTIF.) Le
Berger Floridon écoit amoureux de Florice ; Melidor
l'Àoit de Caliance : & cous deux écdent suffi mX-
lieureux Tau que l'autre. Ces Bergères ne vouloient
abfolutnent point entendre parler d'amour. Ils of«
froient un jour un fàcriffce au Dieu Pan 9 lorfqu'tls fo-
rent abordés par un Mercier , qui leur offiit ainfi ia
i&archandife.
Mon maScre 9 i^pi^octo-vouss }*ai tine^ce «itik >
Pour couvrir le deranc de ces rares lieaucis.
PL 0 R X G S.
Sont qtfelquec devameaiix ^jue tu is a^porfês*
LEMERCIER.
Non y ce font des bâtons de canelles fùcrées ,
Où pendent d'un cdté deux muguectes coudréts.
la femme en nos Pays le trouve fort utile ,
Et en prend le matin pout déteindre le féu ^
Quand çlle^l'a au cul , Ibufflex., tâcez on peu*
Après quelques autres propos auffi indécens^ les
Bergères fe retirent. Les Bergers 1 refliés feub avec le
Mercier 1 lui confient leurs peines : il s'engage à les
fecourir ; & ayant retrouvé les Bergères » il veut leur
perfuader de & .marier ^ en leur di&ttt ;
TÉEAT^É FRAkÇOiS, i%^
Quel bien ^uc-ôÂ trouret tA lin atbic butilc \
Cac la femme faut h^mtet » eft un ttou fan» cbcriUé »
Maison fanS eôavercure , étui (ans dageollet »
Bouteille fans boUchon , miiid perci lànt £uii!et«
Tous ces beaux difcourè ne font riènTur refpric éeè
£ergeres«I.e Mercier toujours en difcouratit^ lès cou-
dait dai^ on b(^s» lés y kiâe; enroite va trûufet
tems amans > à ^^i il confeillè dé ne pas laifler échftp*
per cette ^eureùfe océafion. Jl leur dit :
Etendex-les for Thèrbe y 8c amoureux IBietgert
Plantez. Tacbce de rie en leurs petits vergers;
JLes Besgérs (iiivent & exécutent ce pérutcieuit
conleil : les Bergères fe tuent de défelpoir ; lès BerÂ
gers le tuent auffi. Enfin Mercure furvient 9 qui lel
rèflfufcitent ; & la pièce finit par le mariage de <^
quatre amans.
Il eR fans doute bien (ingulier que , dans un tèmà
où f on commençoit déjà à corriger les indécences dé
notre Théâtre , on ait permis une pièce aufli forte con-
tre les bonnes mœurs que l'eft celle-ci* Tout en eft
repréhenfible > lès détails & les aâions*
t.DB,LACHAKtiAlS.
X£ S BOCAGES , Paftorale en cincj a<Sès i èd
^ers» où l'on YsAt la fuite de Cyrine 9 le ouel de (té
anoans > les dédains & les rufes d'Amire , l'exmM-
3^4. ^^EÂTRE FRANÇOIS.
gance de Meliàrqùe } la jaloufie d'Eliandre 9 l'an
de Filenîié , la froideur de Neriftil , la vanité des <
mes de TholitriSy fa mauvaife fin, & les diTgr
de Ponirot. Paris , chez Touflaint Dubray , k
(SUJET DES BOCAGES. ) Cette Paftoral
. ^iiàî bi^are que riflicule : elle n'a ni régie ni coi
te. Les perfonnages font Bellibrpn , Chevalier en
' Cirine," Infante des ifles ténébreufes ; Eliandre,
ger dévoré de jaloufie ; Meliarque , autre Berge
taqué de folie ; Amire , Bergère infenfible ; Nei
Berger qui n'aime rien , & qui eft aimé de File
Tholitris > vieux Magicien ; Larimart > autre CI
, lier errant ; Farenire & Orzileon , tous deux Berj
Calirée, Bergère ; Ponirot , Sauvage » & les
' nions.
si;. Cirîftç a été enlevée des ifles ténébreufes p
^Sauvage Ponirot; Iç Chevalier Bellibron éperdu
. amoureux d'elle, la délivre des mains de ce
fire : pour lui témoigner là reconnoifTance , C
. lui dit :
Re^evez'ce baifer pour gage de ma foi.
BELLIBRON.
Quels plaifîrs font égaux à ceux que je reçois !
Incore , ma maîtrcffc ? hé quoi? Etes vous chiche
D*une forte de biens ^ dont vous êtes û riche !
Le fou Meliarque & le jaloux Bliabdre s'
;.cent ^Tenvie de toucher le ccpur d' Amire : clU
-répond toujours avec indifférence.^ & fe retire.
THEATRE F.R AN ÇQl^^^ ^ /ct-çF
rifiil vient occaperla^rç^e avec Fileoieé/ J?ai' dSja
die que Neriftil n'aimoit rien > & que Fitenie Fftdordit^ >
cette Bergère lai adrefle ces jolis vers :
Si TOUS fçaviez, cruel, à qu|cl point je vous aime »
Vous participeriez à ma douleur extrêmçj 'i ^ ' ; j l'ï
£t fî vous n'étiez point capable d'amitié , : t :.0
Au moins TOUS le feriez 'peut-être de pitié. .
Comme il n'eft capable ni de l'an ni ^^ë hltitfe de
ces fentimensj elle le quitte pour alleif implorer les
fecours des Démons*; elfe s\idreffe au Magicien Tho-
lîtris. Celui-ci fait fès conjurations, & lui' promet une
rofey qui certainement ^rendra Neriftil fenfible;^ dès
qu'elle la lui aura donnée. J^\% lui répond ;
Je le feux s mais je crains qui 'c^ttb'àme mutine
N'en retienne la fleur , «ç^'^nlaiiTc l'épine. ^
La propriété de cette fleur étoit d'enflâmer celle
qui Ja recevpit , pour celui qui la lui donnoit, Thoii«
cris compcoit la préfenter à Fi)ei}ie , & par ce moyen
la rendre amoureufe de lui. Popr donner l'air dli my.
fiére à la cérémonie» od bande tes^ yeux deTholitriSf
il cueille lâ rofe ; 6c au moment même qu'il alloit la
donner à Filenie > le fot Méliarque furvient , la lui ar^i
rache des mains , & s'enfuit. D'tin autre' côté ,'té Sau-
vage Ponirot rencontré Àijiire '& Callirée dans ut>
bois y & veut les violer. Au grand regret du Satyre i
Callirée fe fauve ; il s'écrie avec' douleur :
3'âi perdu ta x^oitié de m» bqoxit; Ç^suine» :^- ç. ;. .>{ '
JSnfifi il veut nfer de vioténce àv^ André $ qui die
O fi|oqiei|X deftlas I iA iii*are^*rotis çonduice S
F Q K I R O t.
Ii| qn tien ftyortUé â mes ardens défît; ,
Qà nous partagerçfûi im créfor de ptai/irs.
A M I R E.
PteOfl k tout peur TOUS, 6e )« ne vow d«maM#
^f^q^ de me U^ilTer i la cho(c ft*eft pas gtaade.
? O N I R O T.
Qoelfac Tôt entendrpic vos 6;tvole$ difcoucs»
AMIK.B.
If^illignon!
F O H X R O T.
llami^mic!
A M I R E«
Ail ! ncn cœiirl
^ 9 N I R O T.
A MI RB.
90HIR0T.
Entres, ù>fn (fcçnAtlQf^
AMXI^Ç:
^ae |çr«|-TÇfiii de moi»
P O NI R OT,
Ce que Von fait dei aoQseï*
4 M I R E.
H(|9§ ^ 1901^ dçttx mi t veuillez à tout le molns^
|| te iiiii arcf \fptti I ^ ce (oit. fiuii té^^
TUE4TR JE FRANC O U, p^y
PONIR^OT.
Petibime ne nous To||»
A M I R E.
J*ai peur que ma eompagnt
Trouve quelque Berger dedans cène campagne >
Ec que pour mon IbcouB elle l'amené ici.
P O N I K O T.
Je vous vais délivrer de ce ^c (bud.-
X>'id |e pooftai voir par tout cette plalaa.
le ne d^uvre zkn : '
A M I R Ç.
Vous n*y voyez qu*â peine •
Il faudroit miein monter fur qçc arbriÇeau-la.
PONIROT.
• ■ ■ •
Elle y vie;iç i la fiu. Ne tienc-il qu^à cela !
21 la £iuc contenter.
A M I R E.
Faites bien la revqet
Aâa de n'être point fiirpcis à Timpourvue.
P O N I R O T.
7e lalEe ces cdteaux 2c ce boccage vetty
Bt')e )ctte ma vue aa\ pays dêcomperc*
A M I R E.
C*eft bien fait , pourTuives \ ne voyes^ous pedbnne l
P O N I R O T.
Venni : mais |e htû Tentindle fi bonne »
(Cfeoe vous CttOk flonmie.
A M I R E.
Avlfis à cdté, ^
# - •■
3^8 THEATRE FRANÇOIS.
P'O N I R. O T.
Je regarde par tout avecque liberté. ' " - ■ ■
Mais que me faites-vous >
( Elle iui lie tout doucement Us jumbes à l*ârhru)
. A M I H E.
Un petit artifice y
De peiu 9 en vous h^u0anc > que le pied ne vous gUfle»
P O N I R O T.
Je vois le loup ^roii des troupeaux de moutons^
A M I R £.
O Dieux ! Ce font les miens : fus, fus, diligent^pns.
" : (ElUfeftuve,^
On peut juger de la foreur du Satyre, en voyan*
^înfi échapper fa proye. Laiflbns le fur fon arbre, &
fuivons la fcène qui change d'objet. Elle eft oqçupée
par Bellibron , conduifaqt toujours fa chère Cirinc.
il eft joint par Larimart , autre Chevalier errant, &
amoureux depuis long-tem$f delà jeune |n&iqte. Il
veut que Bellibron lui ren^e fa n^itreffe; celui ci n'y
^ - * ♦
voulant pas confentir , }\s fe combattent : des Bergers
furviennent qui les f^arent , & qui leur confeillent de
8'en rapporter au choix de Cirine : ils y confeitent,
& Cirine accorde la préférence à Larimart , q^i tout
de fuite part avec Tlnfante,^ laifle le malheureux
Bellibron dans le plus affreux défefpoîr. Pour calmer
fon chagrin , les Bergers lui propofânc d'embuafifer la
vie çhampçcre , donc -ils lui vimtent aipfi leç doa^
THÉ A TR É FR A NÇO IS, 3x9
Que nous ro'mmes heureux au milieu de nos bois !
Kous ne connoifloh^ point ces ri^oureufes loix.
Qui forcent â Forcer celles de la natu é.
Rencontre ni duel , ou quelqu*autre aventure ,
Qui n*aie' pour fondement qu'un petit point d*honneur> .
Ne nous ôte jamSiis la vie ou le bonheur :
Quand les filles des champs deviemient infidelles ,
Leurs amans s'en riront « ou changeront comme elles.
Voici leur compUment : me veux-tu , ie te veux,
$1 tu ne me veux pas , trouve mieux Ci tu peux.
Tant de naïveté règne dans nos villagv's ,
Que nos moindres peafcrs font delTus nos vifages.
Bellibron fe livre aux confeils des Bergers > &
opte leur façon de vivre* Cependant Meliarque ,
r TefFet de la rofe enchantée , eft devenu éperdû-
;nc amoureux de Tholitris, qu'il prend toujours
•ur une femmç^ & à qui il fait les déclarations les
18 tendres: entre -autres extravagances j il dit en
imtrant le vieux Sorcier ;
Voici le beau fujet dont j'ai le cœur épris !
Adorable beauté , dont la vive lumière '
/ Touche de fes rayons mon ame prifonniere j
)\ eft tenis que l'amour loge dedans vos yeux.
Tous ceux qui m'aimeront , ne peuvent faire mieuit;
'Vos grâces , vos atrraits , vos appas âp-vos channes •
Exercent leur pouvoir jufques delTous mes amies }
Yos charmes , vos atrraits; , vos grâces , vos appas
Font naître à tout moment des fleurs dcflous mes pasj
Vos charmes , vos attraits , vos appas ôc vos grâces
LaifTent delTus mon coeur leurs favorables traces 9
Vos grâces , vos appas ,'vos charmes , voi aitraicf
^' Jettent dedans mon feiu des invifîbles trjûç s.
Ijo THEATRE FRANÇOtS^
Qui me fonc ddirer fous l'imourenx einp^e ^
Ce que l'eCpece ^n , xoais que je n'oTe dire^
On fçait biea que )e Cuis le premiec des giiecriçts:
Mais votre belle main va ravir mes laorieR.
Faices^moi la hvcjm , que pour ma bien venuçy
7e touche d*ua baifcr votre face cheaue*
Cependant Poniroc > détaché de fon arbre , &
jours plas ardent après les Bergères , retrouve Ami-
re, & ne veut point laifler échapper cette occafioo;
mais il en eft encore la dupe ^ & eft pris dans une ef-
pece de piège ; tous les Bergers & toutes^es Bergè-
res viennent autour de lui 9 & le tournent* en ridi-
cule. Enfin on le laifle toujours bien lié & garotté.
Le vieux Tholitris furvient qui le délie ; pour récom^
pînfe 9 Ponirot le tue : Meliarque arrive > qui voyant fa
xnaitrefle morte^ (car le charme avoit toujours (on eftt)
jette les plus hauts cris 9 & fe précipité fur le cada»
vre du vieux Magicien. Ponirot , ennuyé de &s lar-
mes ) le bat; M^U^fque fe défend à coupç de pieds;
le Satyre les lui faifit > le fait tomb(er y & veut l'enune-
ner dans fa caverne.^ Le tendre Meliarque hors de
défenfe p ne veut point abandonner le corps de ion
amante 1 & avec iès mains faifit fes vètemens : (àos
s'en embarrafler > Ponirot les entraine tous deux ; &
ce qu'il y a de fingulier , c*eft que ce prétendu lazd
ùk le dénoûment de la pièce»
mCOLAS DE GROUCHTr Skoi de h Coorî
THEATS^E TKANÇOIS. jjt
né à QermoQt en B^WfOifis^ Avocat ca Parlemenr.
LA BEATITUDE , ou LES INIMITABLES
AMOURS t)E THEOYS (FILS DE DIEU) ET
DE CARITË ( LA GRACE > eti dix Poëmes dra*
matique^ de cîd^ aâe^ y en chacun defquels fe tnûtci
faadere ablbloe, & paroifleot nouveaux effets » dé*
di^e an Cardinal de Richelieu. PAiiis > lôjx. îa 8^#
fans nom d'Imprimeur.
(SUJET DE LA BEATITUDE.) Si Ton cher-
clioit à donner un exemple d'un (lyle bouribuflé 8c
ridicule 9 on te trouvera fans peine dans cet ouvrage»
Ouvrez te Livre au ha£ird ^ & certainement vous
verrez le chef-d'œuvre de la déraifon. Il femble que
l'Auteur a pris à tâché de raffembler les mots les pluf
bifares & les moins &its pour fe trouver enfemble.
Ce Poi^me d'une longueur infupportable eft uoeaU
légorie perpétuelle ; il eut certainement été trouvé:
abfurde dans te fiecle même de François Premier.
Comment peut -on imaginer qu'il ait été compofé
dans le tems où notre Langue commençoità s'épu-
rer, & que l'Auteur ait ofé le dédier au Cardinal de
Richelieu % le proteâeur des Arts & des talens* Quel*
qu'aflbmante que foit la leâure de plus de 900 pages
d\ine po^fie révoltante » j'en fuivrai cependant l'ana*
lyfe avec exaftitude. Avant que de la commencer 9
éc avant de donner l'idée de la verfification du Sei«
gneur de Grouchi ; je crois devoir donner celle de ûl
profe. Voici l'avis que l'on trouve à la tète 4es Béa*
çitudes.
AXJX XECTBURS FRANÇOIS.
)» Belles âmes , fi les Génies n'ont rencontré chez
» iros cerveaux l'imagination capable , pour etercer
îî^ THÉÂTRE TRAI^ÇÔIS.
3> leurs inventions divines ; je fçaïqae tnon Hyle votts
» tournera incontinent à dégoût, comme n'étant point
•» naturel à votre inclination. Pourtant , confiderezrle
3» on peuV&Tuçezdu moins en paflant le naïf dfi
:» fa confidence aux moelles de fesargumens. Poffi-
3^ bfe en recueillirez-vous des ébattemens à vos yeux 9
V aux variétés des hiftoires : (pour ne dire des fixions)
^ mais y de grâce 1 ne le blâmez pour n*être point de
» votre humeur , n^ vous frères de fa nature : (i non >
:» les univerfels vous jugeront; & moi je ne fçaurois
>> qu'en dire; car mon humilité me facre votre fervi-
s> teur. Je parle ici deflus tout autrement aux Do&es|:
3b c'eft à eux auffi que je livre le dé 1 fiU veulent
yo quereller ma chance. Adieu, ce
(SUJET DU PREMIER POEME.) Gys,
(la terre) & Udore , ( la mer ) ont une fille nomiiée
Carite (la grâce) à qui elles dontfent pour Gouver'
nahte Erpetone ( le ferpent )• Cette Gouvernante con-
duit ibn élevé dans le jardin d'Ëden, ou (e trouvoit
un pommier , du fruit duquel Vafilie (le Roi) avbit
défendu de manger fous peine de fa difgrace. Erpe-
tone preffe Carite de manger de ce fruit ; la pauvre
fille fuccombe à la tentation. Auffi - tôt Vafilie parok
armé du glaive de la vengeance ; il condamne Carite
à une prifon perpétuelle , & Erpetone à la mort. Ca-
rite, au défefpoir de la faute qu'elle a commife , pafle
fes jours dans les larmes & les regrets ; fes pleurs
montent jufques aux Cieux. Theoys 1 (fils de Dieu)
en eft touché :11 lui envoyé 03îte > ( meffager ) qui
ki annonce que Theoys veut mçtcre Sq à fes peinc^»
THEATRE FRANÇOIS. Jjî
!c l'épouferé A cette heoreufe nouvelle > Carite > Gys ,
k Udore font éclater leur joye , & le premier Pocf me
bit.
Four Elire juger leLeâreur de la verfi6cation>void.
m morceau pris au hafard. Vafilie > rempli d'orgueil > .
exalte (a puifTance^ s'adrefle à un de Tes ConfeillerSy
ic lui ordonne de lui dire fans flatterie ce qu'il en
3en(e ; celui-ci lui répond :
Fuifque ta majeflé , Monarque , m'en dirpenfe ,
£t que tu veux de moi croire fans c*irriter ,
Je ne te daigne ainfî d*un cajol appafler
Sur cefte vanité qui t*en^praint la cervelle , .
( Mais prens la part des Dieux , ce que je t'en tévellc )
C'efl qu'une déïté plus grande infiniment »
Que tu n'es ravallé préfide au firmament;
Que tu tiens feulement de fa main volontaire
le Diadème fainâ , dont tu es uibucaire \
Que fans lui tu n*as rien , voire fans fon pouvoir ,
Tu ne peux celle part > ou celle te mouvoir i , ^
Que fi tu veux régner ^ il faut que tu lui ferves ,
£t que fes juftes Loix humblement tu obfervcf •
V A S I L I E.
Ceft ici nouveau fait y & plein d'eftonnement >
Si ta bouche â ce coup deceptive ne ment ,
Qu'itme faille obferver la perfonne incognue ,
Que tu dis habiter mefmement en la nue !
Je me garderai bien pourtant de m'abaifTec
Au culte in|urieux ^ crainte de m'offènfer.
(SUJET DU DEUXIEME POEME.) Odite
rend compte à Theoys de fa commifRoo ; & celui-ci
3Î4 THE A TRE FR âNÇO U.
prmid aufli c&c h téSsAossuM d'alkr
Cance , & eofuice de Tëpo^lb^. 11 en demaiide la ptt-
miffioii àfon père Pantocrator (le Tbut-poiflant.)Cé
Prince fait tout ce qu'il peut poar détourner (on fils
de ce delTein ; & voyant que toutes Tes repréfeota*
fions ibnt inotiles , il y donne enfin Ion confentement.
Theoys fe traveftit en Pèlerin ; & fons ce déguife-
ment s'introduit dans la prifon de Carite, Il cromre
fes Gardes qui difputoienc enfemble ^ & qui raifori-
noient ainfi fur le vin :
I I. G A s. D £.
^-ce péché que boire ? £s%u ^ât d'inOnafec ?
Aucun ne pourrpic vivf e un |oQr (ans mïWcvSsk. :
Tout le monde feroit vilainenienc damnafa^ »
Voixe le brute autam , comme k eaiioJa^iufbt* t
I. G A R D £.
Par ce terme |'eaten(is cetce lox^gue boiflba »
Q^i s'introduit par tout d*UQe grecque façon,
C'cft de boire aux fansés d*un tel ou d*uae telle ,
Tant qu'un ardent brazier jiotrexervcau marttUfc»
Et tant que l'eftomach , pçiir fa repleâioa y
Du fuc délicieux fai&uneiexpulfson
Avec des reniemens & Tideux blal^h^mes ,
Ceft la mode au)ourd'hui des honunes & dcsittuqo»
il. GARDE.
Ta £lîs le (erieux ; maïs raillerie à part y
Tel carroux s*établic maintenant toute part ;
Xtce malheur pourtant Temble plus tolcrable^
A nous aiurss goulus , qu'à Tordre Ténérable ,
Qu'à ces hommes eûeues en puiilânce & Tçavoir ^
'QBPh ^ raogesttliiea mieux Qiî'à faire leur^rolt :
THEATRE FRANÇOIS, 335
E^ llême on die que la grands he fe&c l^lttc qne cifSef ,
De CCS fidet bàlfloAi iadis tant mépddts.
I. G A R D £.
M'en font finon riife? Ils boivent plus encre eux ,
It font plus de dégât, que nous mal-<ncontt*eux.
Car quand nous beUroas trop , c'en parce que n'aguett, '
£t même que tantoft de vin n*aurons-flous guère s
Et ainfi (banîiraAt toute fobriété ;
Beuvons-notts bim fouvent lufquU Télfriet^ i
£t|quoi qu'en ce forfait ne foyons excufabl^y
Si ne fournies «ous point chez Dieu tant accnfablcs.
Comme ces grands Soleils , qui deul!bnt efclaiccr ,
Et par leurs aftioas nous prévenir d^etrer »
Où on les voit fVKt » bêlas ! Toze-je dire f
Et les Cieux , & les Dieux atniftcr U maudire 9
tJfer d'une infolence , Se des éaormicés 9
Que )e ne veux par noms rendre ip lînUtés,
Ctaince que leur horreur ne fut io0ipports^e
Aux yeux des gens de bien , ta^t 9 ^ 4kpf^Mc ,
Et tant eft mélangé d'abomln^ion >
Quft ie n'ofe nommiBr > irur moUe p9tiiçm.
^ Par de belles parples i 6c en leur donnant pour
oire , Theoys les engage à lui permettre de parles
Carite. Lorfqall (è trouve a vet elle t il lui dit :
t H E O T s.
Çarite f mon bel oeil » vous trouverez poflîble
XCa foçon de vous voir aflèx inadmiflîfce't
Mais approchons de grâce , un peu cette doifon ,
Par oà le jour s'ci|)talle emmy voue prifon ,
Afin que votre ori^le heureufement accueille
Mon dire , Se qu'autre icy que vous ne le recueille.
SS6 THEATRE FRANÇOIS.
C A R I T E,
Piiïant, il mcfleiroit à ma virginité , ..
De m'accoilet de vous , même en cette unité y
' Si premier je ne Içay quel cft votre meflage,
T H E O I S.
Vrayment je recognois que vous êtes fort iage y
Auifi ne convient-il efqouter librement
Tout homme paiTager , qui fe gauCTe & nous ment*
Sçaciiez donc que fe fuis , malheureufe Carite^
Ce Dauphin qui languit defTous votre mérite y
Et qui vous ay ces jours par Odite fait voir .
Quel amour je pouvois de vos vertus avoir s
(Comme je trefpallbis dans un fi douxfervage;
Que le pleur me fervoic de viançle ôc breuvage j
Que fi je ne pouvois d*icy. vous retirer ,
3*y vieudrois dedaus peu mon âge mattirer^
Mais fi mon veftement vous paroift ridicule.
Et moy fans gravité , mon difcours fans macule
Vous fera bien toucher que je ne fuis de ceux
Qui pour vous decevoif feignent les angoiifeuxtf ...
C A R I T £.
Si eftes Thoys , <[ue m'a dépeint Odire y
Qui franchifiez pour moy cette prifon maudite,
{Comme un fain jugement me le vient figurer y
Et que ^'os doux propos me le font augurer )
)e rends mille mercis desja pour mon préface ,
A vos divinités , & cheute fur ma face ,
Vay quedaat , que j^adore , Ôc que je baife encoc
les efieaux afïeurez du vénérable corps y
Qui daigne ainfi pour moy déguifer fa nature ^
Afin qu'en ces horteUrs on lui fade ouverture.
Cette tendre converfatîôn continué encore
tems , & toujours fur le même ton. Quand ils
fÉEATkÈ FRANÇqi^. jjy
-mok rien à dire > THeoys lui fait vècir Tes habits de
Peleriaf Çc lui prend les Gens : fous ce trav&fliiTe-
inent » les Gardes laifTent fortir Carice , & Theoys reftd
en prifon. Odice qui attend à là porte 9 conduit Ca-
irice chez Tes parens;
(SUJET DU TROISIEME POEME, le
Mophitë f ( grand Prêtre } & un Confeillér , vont à la
prifon pour &ire des queftions à Carite. Ils font bien
donnés de trouver Theoys à (a place , & vont (ur le
champ en avertir VaGlie. Ce Roi barbare (ait venir
Irheoys devant lui, & l'interroge avec dureté. Celui-
ci lui conte toute fon hifloire ; mais loin d'en être
touche^ Vafilie le condamne à mort^ on le fouette
' julqu'au fàng; & comme il etoit encore vierge , il fat
condamhé (coâimé les Veftales^) à être enterré vil*.
Pendant le tems que l'on jngeoit Theoys , Odite alla
vite avertir Pa!ntocrator dû daîtiger 4^e ton fils courotc
fur la terre. ^Pantoàrator lui donne fur le champ une
lettre pour Vafilie ; mais Odité arrivé trop tard , 6c
Theoys avoit déjà été exécuté. Odite va pleurer fur
le tombeau de fon jeune maître. Il lé trouve qui en
étoit déjà (brti : ils vont pour joindre Carite dans une
forée prochaine. Cette belle , ayant appris la mort de
ion amant , ne vouloit point lui furvivre , & de défet
poir alloit fe (>éndré à un arbre. La préfence de
Theoys la furprend & laconfole. Ils rengagent à s'em-
t>arquer avec fes parens 9 8c d'aller à Olimpe en Ara-
Tomèil. X
>3^ TUE^TRE FRANÇOISi
bie :Theoy$ lui promet: de Ty joindre inGeflàmmeât.
(SUJET DU QUATRlË^E POEME.) Le
Mophite appirend que Theoys eft forci du tombeau^
& croît que c'cft Gys qui l'en a retira. Eley ( titoyi-
ble) lui annonce que c'eft Theoys lui-même qui a
ouvert fa tombe 9 qu'il eft le Dauphin de l'Olimpe»
& qu'il va trouver (on père Fantacrator pour l'enga-
ger à venger Ton injure. Ce récit met le Mophite fi
fort en colère > qu'il veut perdrai Carite & fit famille;
fïiais Gy$9 qui en eft averti par Eley, prefle le départ
& s'embarque avec (à fille ; une tempête furieufèles
jette fur les cotes d'Afie. Aulique^ ( Courtifan ) vi^c
rendre compte au Prince Ophis de la graade beauté
de cette nouvelle débarquée; & en eft fi troqbléi
qu'il ne fçait pas trop ce quil dit* Ôphis lui dit :
Approchez , Çoai^Uaa* D*où e/l cttie^Teâue -
Qui pâioic à grands pas detecs):fous;pârve|wie3 . ;
. A U L I Q U E,
Monarque y je ne. ^uis.
O P H t S.
Son vent eft fyncopé»
A U L I Q U E. i
Mon yenc \ Pardonue2-moi : mais ce copiroccupc
thtz la Divinité , qui savit hvpcn(îe ,
Vous avoir louirdefiienc ma reponlb âdfrie^.
S^achez donc y généreux , que de cent réglons ^
Que du nord au midi , du Gange aux Geiions,
7e dis en tout ce que nature vous parcage ,
Ne fe peut rencoâùèr lin plut faiàâ hérîtage'i
r >
XMËATRÈ FRANÇOIS, ^j^
tJn don plus vénérable ^jUa préTenc plus exquis ,
Un laurier plus chérable , un tréfor xnieux acquis ^ ,,
Que celui que Neprtlne , Qu fa chère Amphicrite
ybuè a tàncbfl fobfHé 4'ûne haleine contrite.
b it» H I S.
Qu'ëft-cëlUn VaiUeau chargé dejfiVresou d'argon^? ,
Kepcun' ne fût jamais vers moy tant indulgent î . . -
Ains me paroift ingrat / quoy que chacune annçe
la dixmë des Taureaux lui foie ici donnée*
A y LI Qnj E»
Ceft bien tutrfe pipcftïit «jdlfvouis f;ïît rccèWif.
i
■. *^ijé
AuliqUe ^ dis quf <6r^t \t^lt précèmis (çavoir* i
A U t I Q U E. .
»i *i
fc'cft un ptéfent du Ciel s <p:: jft leri!^ hibitàbû . ; ^ . t
Jamais n^en prodiiific ^i p$itû( j$ no^blcè :..... J
O P H 1 S. v- ^ ^
Pis donc hâtivement, fans me plus, tia^inct. -, s ; -
A U I. I Q^-E'. ~^ - -
UneDaitic* ' • '
:b:P^H I^.- ' - .i i
Une Damé rfeft-teéôuft'cftdmiefr -^ •-•■'
AUX. iQ.y,X. -.,^ . . , .
Une Dame qui tient «alntrplttcoft une Divè ^ . - . wi :.vî
la beauté de Vénus ^ jr èfituff, du K^radive^ : : ? . . * U
Que veux dite cfc fol par (oii embrouillement î * ' ' . .
Je lis dans fa couleur que f^ pàrofc'ment. " W. ^ .'^ ^
si ie ments , que le Ciel colosé me f untife; ic ^^ ^i.'r : X
Que ma yie k yo&ittNi&j8iaUipteeiii(B^lU(f«; . . > v^ }«:# :: ?•
X5^
346 THEATRE FRANÇOIS;
O P H I s;
DKb donc »'ecIaSrci-toi de tes incendonS}
£c ne riens fàrciflanc le vrai de fiâions.
A U L I Q U E,
Comme il vous pleuft , grand Roy, me dél^uei: naguerte^'
Pour voir à qui Neptune menoit û rude guerre V
7e grimpe â toutes mains les tertres Capharez y
Où mes efj^tits tantoft parurent efgarez ,
Pour l'horreur que f'avois de roir la xher mottée^
Ore jufqu'au lambris î fi^tancolltepoctée
Auai/caveattx cnTouffirez , aux ancres poiflbnneux »
Si bas qu*on pouvoir voir les planchers avemeux.
X>e la tremeur que j'eus i àt% vents 6c de l'orage p
Je pâU^ois de cndnte & baiilbts de courage y
Quand le deftin me fit aiilader autre part ,
Pour voir la Déïté qu'icelui vbus départ s
Jç dis cette beauté que |e vous ai prédite.
C'eftici que mon «ontr, & ma bouche interdite
]De dire 9 ou palpiter, s'accoifa lentement ' -^
Pour adorer ridole aii vrai concenteme^t.
Près fa divinité (îolt tm mifétable;
C^S'elle eft morcelle , iteftfon auchear vénérable.)
lequel fe lamentoic de leur calamité y
£t fe plaignoit du fort f u6|tt'à l'extrémité :
Quand l'unique beauté de ce monde habitable >
Settant de Ces beaux yeux le charme inévitable
Sut ce trille vieillard , vint à le confolêr :
ftélas! ce fut alors que j^pprisd'afiEbler»
Si f étois Empereur , ou s'il eftoit loifîblè
Z>e vous la demander (ans me trouver rifîble.
Béias , ce fut ici , que J'appris i fouiirir ,
34alheur , que le bonheur pour vous me vint ofixic %
Car je n'ai mérité de rang ni de fer vice «
Que celle Péïcè pour falaire je vitfè ,
7e tiiTe de plus près.pe^r 4e comamineff
Gc ttiftfC qtt« le Citlàtoaiiêiilpeuc4oniMrif
TSE ATRMi FRANÇOIS, ji^t
ne viem^e pat dhine langue flatteufe
Vous décoi^r 1^ feux d'une amour convditeufè ;
Car {e n*en fuis point digne , £c (çai trop que }es Cieux ^
jpour vous fàroriTer » font ainfi gracieux*
Conune elle euft appailS fon autheur fur la perte
De fon vaifeau bri(S contre une roche apefte ,
Voici qu'un nouveau dueil eftraint fon géniteur 9
Qu'aucun de fa beauté fe rendit ferviteur :
C Auflî faudroit-il bien vivre (ans cognoi£Qmce ,
Que n'aflêrvir fon ccBur à fî forte puiiCmce 9^
Pnifque fon oeil décoche un garot û charmant »
Qu'il foudroie avoir Tame ou de bronze ou d'ayman , ) ^
Craint que de force ou gré cefte fleur on moi^onne y
Qu'il dépeignoit pronûfiî à quelqu'autré perfonne.
Ophis n'a pas plocôc vu Garite» quil en devient
Sperdûment anioureux 9 & lai propofe de répoufer.
Pidelle à fon cher Tbeoys 9 Carice refufe ieJPrince;
3phis (e défefpere ; Antique lai confeiUe dé la violer.
^e Prince généreux rejette ce confeil barbare ; mais
1 {e laiflè fi fort maitrifer par la douleur »^&iLpleure
ellement quHl ^n perd les yeux» ^ Cependant! ayant
aie encore des effi>rts inutils > pour toucher le cœur
le Carite; & fçachant que fon projet étoit d'aller en
drabie 1 il lui donne des vaifleaux pour l'y conduite*
(SUJET DU CINQUIEME POEME,) Le
raiflèau fur lequel Carite s'efl embarquéej fait naufragp
far les côtes deSiqle* Gyseft abtmé danslesflots»
ivec prefque tout l'équipage : Carite fe (au ve avec
peine fur une manyaifé planche. Les dangers qu'elle a
r
342; TBBATÂÊ FAANÇOÎS.
cearas & la perte de ioa per^^tluîfonl f e|iir oMi^nrf^
qui ne refpire pas une patfahfe téfignstlom
C AR I t B,
* *
|[«'ait peut-il rCimarquer par les (lectes paflîi 9
Tantdemaux, taût dVunuis, tant d*e0rois amàfléi (
Tant de malheurs éctos fur une infortunée t
Las ! la pareille à moi n*éft paseiicore née !
O ! Deftins impheux , c^ui m'avez enlevé
De mon fe jour n^tal , qui m'avez conrervé^
D'attouchement impur d'Ophis le miférable ,,
Voules-voiis déformais que je fois dévorable •
Far la première dent du lion généreux?
( II eft vrai que ta mer refle aux plUs malheureux, t
Mer , hélas ! noire mer , que tu m'es dédaigneufe ,
^ tie Yoi^sint gorger de ma. peau diàrogneufe.
Hé >, pou|:qH^ r{^^7tu favorable â chacun »
(Si la qiprt , pour le moins ^ favorifoit ;^ucun. j^
ft'k moi ttr nieras toti aV'em^prdfonde !
. - Th nt odn&Qtîias qu!en toi je itié cbmfonde !
,. , Hé ! qwufd t^^ Ijots hautains ^ quand tes ialés lUi^eavx^^
Sont Venus «çolerer , fracaffeir nos vaiflèaux y
JEtquien'mtflâs éclats ma nef fût découpée,
foiiratlu^i <kÉi6 cetais ^lodf ciiqti'éfcEiap|>^
. ,ï^i^eX;|UYa$Eê au(n mon aymé géiii«ettr ! '
Qu*ayoit ce doux vieillart méfiait â fon, aqthcuç l
' Vt^tiWoit-il contraûél* Usl Je fuis prgucilleufe >
. ^idltit contrié le Ciel cette voht pérflleu^ !
S'il n'ayoit ofFenGé^ ce nit pour mon forfait ,
^ Quçton if^rgs, g^nitotft , des 05odes,fi4c défait :
Ce tut pour n^on péché , que ce Hec Cantorbie •
- Irécheller^ jamais la perleufe Arabie*
|Ji^! ce fut^kAr moil ciSmeV^ ma légetc^^
Qujp ïous.ce6lJfU3^qu;OpWs^«r«<i«^^^^^ Antfc»
Qvie ces braves Nochers (on tjpûyés de^ l§. yic , .
^' £t que de ânîi^ôrreurs |e mcTcns'pîîutfuiyic S
TffEA TttÊ FRANÇOIS, 343
Wi$b pete ! 8c Vous nmeat$ 9 qui gorgez les poiCons »
^Diir/expiér. l'txcès^cmsn \cunt% façons ,
Atténuiez un pe^ç x^ prochaine tendue »
Aufllrtoft que du Ciel dm priece encendite
Ziwoira quelque efprîc fuppUer à Caron , r
X)«9oas^a(reir (wlN^ttl^ au4eià d'Acheron.
Ccft donc àyoa»9 Tom^t , quA ma vo^ i^fe^^
pu nyal que je reÇtei^ s'eft peureufe adredee.
^enpettez «^ mou pleiir de vous ofKder
pbur cet luHnraes efteints , êc de propitier
JfÇS Dieifx M^i^s t*^^ ^ne leurs piteux cadavres
Çâ 9 là| pirouette^ par un vent dans les havres,
Ke viennent mendians la fepulture aux yeux i
Ec q|ue les Qmbres yp^s^ de ces corps odeux
N'errent plus longuement que \c les ai trouvées.
Void^Ptre étemel hia prière achevée.
; :14«b j'qublipb MU ipQti foufflez àtheoys
Que d'un repos forcable avec eux (e jouys.
Après avoir réSechi encore Ttir fon malheureux forfi
rllç fç livre enciéremenc à Ion d^fi^rpoir , & yeot (e
iréâpitçr dans la tner. L'ombre 4^ fon père lui appa<>
oîC:^ & "par de fages cônfeilslui remet le calme dan9
-efprit. Pécerminée à vivre, elle joint Niçlîs^ Ser-
rer, & fa feâimé Nation, qui lui donnent les feccyors
léceflaires : ils lui apprennent qu'elle étoit dans le
[loyanme de Ja Rçinç Aco^ (l'Oiiie)qae celte Reine
Lvoit trois filles I Partenopey Ligie & Leucpfie^ quj
Ftoient Sy rennes t & dçnt la voix étoit & belle > que
par la douce mâodîe de leurs chants, elks trou-
>loientla raifon de ceux qui les écoutoient, St qu'en-
iiit^ elles les métamorphoioient en diiFérens animaux.
3^4 THEATRE FRANÇOIS:
fout Ce précautionner contre cet çnchantcment > Ça^
rite fe munît de l'herbe MOiYi & w rendre vifiteà
la Reine , qui la reçoit avec toutes les apparences de
Tamitié , & qui fait chanter fes filles. On ne peut pein-
dre rétpnnement de la Aeioe 9 lorfqu'eUe V|ipperçoit
que Carite let ifntend tranquillement t elle prendun par«
ti fort (ingulier 9 c'e(ï de lui oSiirron Trône» u elle veut
fe fixer dans ce féjqqr ; Carite qui n'eft occupée que
d'arriver àOlîmpe^ la refufey Sf, s'enibarqoe avec
Niclis&Nanoh. ' . . ^ . ^
(SUJET DU SIXIEME POEME.) Àufli-jôt
^ \ y. ^ . . I . • ■ ^
que la Reine eut appris que Carite quittait les côtes
de Sicile > elle envoya plufieurs perfonnes pour la 14
ramener , entre autres' Porneîs & Lemos. En allant
s'acquitter de leur commiffion > ils ont une conver(k-
tion enfemble fur les dififérens goûts , Porneis aimoit
autant les plaifirs de l'amour , que Lemos chériflbit
ceux de Baccbus. Voici un firà^mént de leurs propofi;
PORNEIS.
...■>,»■- •
Tu te plalç i mon Lemos , zwc caroujt & aux mets , .
tt moi dans ïes combat^ de Vénus \c m'exerce. ' '
, î -.•'•- ■^" -■'■ L E M O^^. * • •
^1 iTaypis 4cs moyçQS autant c(»^me ien eut Xecœ »
Je ne voudtois donner une obole au plaifîc« ,
Duquel încelTamment t'enflâme le defir.
J'aime plus un |ambdn tout Vermdl de fallnc,
Q^e lei yeux enchanteurs d^une ffiffi:e€o]7ne:r
filus me plaSl la bouteille au fuc . délicieux > • '
iiuc ne fbroit Carite , ou la Rcineliçs Cieux*
THEATRE FRANÇOIS. J45
' fi as toc chfuc d*amoar , potinreu que |e ùxàSk
Mon corps 4e feryelas , 4e pailez ^ fy^çiSci
Car mon plus grand fouhait » fe remarque accompli^
Qti^nd 4e chaii; ôc de vin , |e me ^êns tout rempli.
[P OR N £1 S. .
Ton defir eft brutal « Lemos , & deshonnefte :
U vaut plus courtiTer une accorte bfuiiette '
A l'ombre d*un cjrprès , ou d'un faufac^atielieç» 9
Que dé farcir ainfi , Ton ventre Un |our entier,
^ue dôux'eil le plaifir lui donner la fambette ,
Après un iâinç devii , St cpmber à courbette
Dans vUk val upffli d'un nefla^ d*pdeùrs^
£t demi fgcéy m'y force , allentir Tes ardeurs
Entre les bras laftez d'une {eune Bergère ,
3ans s*f palConnet dTune amour eftrai%ete i
Car rage raviflèur ternit cefte beauté,
. In laquelle aurions mis entière loyauté:
Ainfi ferions-nous fats d'aimer une riidée i
lé chaxige tend- tou)ours noftre ame aâriandée.
Us rencpncrçnt Niclis au moment même où Carite
alloit monter dans la barcjue pour quitter la Sicile : la
• ■ ■ ■ * ' .
rae de cette rare beauté les rend tous deux $moa-
r . ,1 ... , . J ■ . . -, .
reux; ^ loin de la reconduire à la Reine» ils pren«
nent le parti de s'enibarquer ^vec elle : & les voilà
donc , Carite i Porneis » Lemos > Niclis & Nanon »
dans UQ bateau en pleine mer , où la Scène vogue
ivec eux , $: où il faut que le Speâateur ait la bonté
de les fuivrç. I^orneis & Lemos > après bien des dé-
clarations d'amour t voyant quç Gjtrite méprire leur
tendrefle > pour pouvoir la violer plâl à leur aife i tuent
Niclis & Nanon > enfuite tirent au (brt k qui en jouira
r • *
• V
54^ TM^ATKt tRANÇOIS.
le premier ; |e ibrt faforife Liemos » qm Is He i fc qd
lui 4it:
^fais je vois qu^l Toq$ faut coucher auparâVâfit ,
Que je pui^Te à nion ai(ç i'^fentpr ce devant.
Comme il eft prèç à çonfbamct cei(e^ ^mvre d&i-
quité f Carice lai 4op»itide la permtfficHï de jpoairoir
faire di| moins auparavant une petite priera à Pieu;
Lemo$ y confent ;<^^t^ invoque le Seigneur : auffi*
tôt le tonnerre I lar gfefle I le irenc & la pltaye feréa-
nifTent pour fubmerger le vaifTeau. Pôrnçis 8c Lemosi
qui Tentent bien que ce font les prières de Carite> qui
ont occaHonné cette teqpéte> fe jettent à^ pieds,
lui font ferment de lui garder le plus profond refpeâi
Si la conjurent de VQulQir bien app^ifer rQrage« Unç
nouvelle praifon rend le calme aux flots, Jlsarrivept
au Pont-Euxin où Carite débarque toute feule ; eDç
ordonne à Porneis Se à Lenaos ;*de retourner eo Si-
cile dan$ le bafe^u : ils Qbéiflent,
( SUJET DU SEPTIEME POEME. ) Je crois
ne pouvoir mieux, faire pour la fatisfk&ion de mon
ji^&eur > que de copier Targtiment qui fe trouve à la
la tête de ce feptiéme Po^ne^ Quelque (bin que je
prifle pour faire un extrait qui pût le fatisfaire , je ne
pourrois certainement pas approcher du %le du Sr
^e Grouchi , qui > j^cn^$ > ti*eft fùrpàflTé dans cet ar-
gument, ^.e voici tel qu'il t&. :
:p carite defcendue fur la rive odpreufe de Sarma-
THEATRE FRANÇOIS. 347
^ rie 9 y fyit iè$ regrets fat la dore perte de Nidis &
3> de Nanoq , meurtris & abîmés pour fa défenfe ;
^> d'où elle brofTe par les bois ppur trouver aliment.
^ TKçreyte (Te chaffeur ) MycKr, (le nez) & autres
^> Tapperçurept ; ^c croyant qu'elles fut Diane > ac-
» courent lui offrir leursiépieixx & leqrs cors; mai^
^ elle en fit refus > les fupplis^nt qu'ils la conduiiei>t feu-
)> lement où elle trouvât à oç^nger. JIs la meiterenc au
)> Palais d'Ofphri(ie,(odor8M;)oQ le Prince Malacoflè:,
53 (molefle) s'en rendît amoureux, & la follicita tel*
)> lement par l'entremife. d'Aromatie , (iëmeurs)
» & d'Ânthologue , ( Bouquetière ) fuivantes de la
>> Reine, & vint à une extrémité fifort paffionnée,
y> que fe voulant défaire , ( pour fon refus ) de foti ef-
>> pece >^Carite fut aa point d'ac^uîefcer , ramenant
yy en fon ame leç traverfès paifôes , 6c préjugeant le$
y> futures, la diftance d'Olympe 9 & la difficulté d'y
» parvenir à travers tant dTécaeil» & de Pyrates^ Ce
» fut ici que le généreux ïbeoys , regardant au mi«
3? rpir éternel de Pantpcf ator fon pef e , y confider:^
» Carite fpr^ procl^e de chopper au change ^tene-
3>> mçnt qu'il lui envoyé ^ rheurç fon mercure Uriel,
9> qui li^i ayant apparq ^ la tapcç. 4e foo inconftance ,
^> la remet en baleine fçir la pourfuite de Theoys j^
3?^ ravcrtiflant de vuider te Palais d'Qfpbrifie, & fe
31 porter au rivage pu elle 2|vpit Q-aguerre pris terre ^
yy & que là elle trotiverok uii vaiiTeau fretté , àiéix
:»» Nochers > Sa trois iitivantes > tous envoyés de la
349 THEATRE FRAITÇOIS.
y> parc de (pn fidèle pour fa condi^Ce 9 ce qu'elle
» promet de laire. ce
Voici le début de cettç prétendue Tragédie 1
Carite qui parle.
■ . . ■ _ ■ '• • »
CARI TE.
Des plaifîrs aux prifons , d'icelles en marSe p
X>e» flocs/f e me cegnois par la £iim dévotée »
Si ^fidqûc fere accort ne vient taiTafier
De moi Ton eftomach ^ avant que mon golîec
M'ordonne ouvertement une plus rude guerre :
7e (êns (b picoureun ; il n'y mettra plus guère y
Si bîe^ <^e de Çarîbde en Sdle me voici :
J^Confoin pernicieux tottrtiç en mortel fouci*
O ! Cieux y je n'ai plutôt vos faveuts éprouvées ,
Que par un xiaalhèur prompt y elles ne foient levées»
Ce m'cil pourtant beaucoup d'avoir |a tettadi
le monftre in}urieux de luxure înTeufl^ y
Ztfon frère gourma|id , iî ma trille penfSe
l>^ii piteux fouvénir n'eAoit intereflée.
Pour voif s , chaftçs amant? , que )e veux ifegtetter ,
Tant que mon ail ^leureux vous pourra famencer »
Afin de ne tacher par une ingratitude ,
Votre amitié Tans pair , & la faime habitude
Qu'aviez. |a concraûée fyeç ma chafleté y
Vous le feul Parançon de toute honnêteté :
Las l faut-il qu'en ces Âots ma contrainte vous quitte l
Xt que ma (ainte amour en devoir ne slàcquine i
Sans vous dreffer parfums > difç chans funéraux^
rbiir déleâer les Dieux , non point les infernaux ^
Las' ! puifque mon pouvoir ref^e manque en i'a&ir^ .
Prenez ma volonté pour le vain (atisÊûre, ' '
^ Voyez mon cœur ouvert plein d'jcme avidité
. De ^'en ^lus acquitter 9 quand b coaimodic&
THEATRE FRAffÇOis. 349
Par fes occafîons m%n ouvrira la porte :
Tandis lifez le dueil qu'en mon ame j6 porte s
Vous verrez fa couleur propre â vous contenter :
Car s'il eft interdit fur nous-même attenter »
Je vais par ces forêts tantoil trouver la fere
Pour me rejoindre âvous, exempte â me défaire ^ &c.
(SUJET pu HUItlEME POÈME.) Après
s*ètre fauvée du Palais de la Reine Ofphrifîe » Carite
rencontre Tapinois, ( humble) Ypomenon> (patient)
qui la oondaifedt dans un vaifleau > où elle trouve troii
fœurs nooiniées Pifiiê ^ (foy) Elpis> (efpérance)
Agape» f charité) qui toutes trois ^ s'ofiGrent pour Ik
fervir. Elle s'embatque avec elles » & elles lui font
compliment for fa fidélité pour Theoy s > elles PaiTu^
rent au(0 qu*il efi toujours amoureux d'elle > & qu'il
compte I après avoir confommé Tes travaux 9 venir la
rejoindre pour ne la plus quitter* Ces bonnes ooa-
velles donnent de nouveaux charmes à Carite. Nep-
tune qui l'apperçoit ^ en devient amoureux > & veut
en jouir • Pour y parvenir j il lui envoyé Triton qui fe
fait annoncer de la part deTheoys^ enfuite il faitlor«
tir une ifle de la mer , & aiTure Carite que c'efi là
Olimpe : apparemment que Neptune avoir aufC eu la
précaution de prendre la figure de Theoys ; car Ca^
rite s'y confie 1 & defcend dans Tiile avec lui : tl !a
conduit (bus des berceaux de (rerdure> & lui fait des
propofitions deshonnètes ;. la différ.ence de fcs propos
avec ceux de Theoys doune du (bupçon à Carite*
^5d THE A TRE FRÂ nçms.
Elle appelle fes coropagneâ à ion (ëcQqr^ : dlfii
ventaa moment mèipe <)ù Neptune alleic biv»
& la délivrent de eé danger ; dlës (è ivixlba^u
abordent à rifle de Malchë^
On fera fané doute fûrpris dé cet abus ridia
la fable > & de voir Neptune & Jefiis-<3hrift>
lemarqûe» il e(l vraij de l'atlégorie} jouer ciiaci
pèrfonnage dans la mèttië pièce ; mai^ tout èfl: ii
préhenfible dans cet ouvrage. Vend un inorcè
la kène erti% Meptune Sx. Caritè. Caritè ^i
mence à douter de la bonne foi de Neptunev q<
bocd s'eft voxdu faire pafTer pour Tfaeôyà, t
poifr Fantocratûr , &: qui toujours à tcmki jouir i
fe met ien prières pour implorer le lècourfi \
Neptune. l'aborde ^ & lui i]i£ :
N E P T U N Ê.
Hf quoi ! mes cfeàftcs yeux , Je vous ttouvé eii prière ,
^ A quoi faire}
CARITE.
A ch^fTer yçtre pouifuite arrière.
NEPTUNE.'.
La Prière eu ceci prend- t>lle un tel pouvoirs
CAR I T E.
La Prière m'a fait divinement fcavoif
Que vous êce nn Démon", non point celle puiUanCe j
Cefte fagébonté , qui veut la jôuiiCincê»
De; mon ame , non .pas. l'impur accoupkaaçnt ^
Que deiîrez de moi pratiquer amplement.
Ceft pourquoi délaiflèz vôftre plainte encombreofe»
£c 4Xtourzi«c 9 maudit > en i*avMi)ie ib^obrcuie ^'^ ^ . . . ^
THÈATAX FRANÇOIS. 351
Mttôn l'appellerai mes teoii Sœtns «u iecours »
£c dt vos fabtés leur ferai le difcovus.
N E.P TUNE.,
Quelles Saurs précends-m m*oppofer de puiiknce »
Premier qu'avoir de tdi parfaite |oui(fauce }
C A R I T E,
Trois Soruts qUe Theoys m'envoya de là fus ,
Crainte que mes efprits par toi fiiiïent deceus^
Ou par quelque arrogant qui poitaft ta livrée.
NEPTUNE.
Tu crois donc par leurs mains, échapper délivrée }
Mais tu verras tantoft s*elles ont le pouvoir »
Que je ne te fouTmette à Tamoureux devoir.
Non» non , meschaftes yeux 9 ne vis phis^ in&n^i
Banni ce mol erreur de ta foible penCée.
^e Tnis le Père henteux du f^vatit Theoys ,
Qui t'aimai dèileciout , que de roppocc l'outs 9
Quelle forme c'on^oit , quellje candeur neigeuCe.
Pourquoi donc , mes Soleils, £iis-tude la raj^eufe
Contre moi , qui péris , fi tu n*as â pidé
Xe 9r;ïS«r to^âmmant d'une Ikiate amiâS.
• t
€ A R I T E.
O^iy ces 4)ra£evs Bouqular^ qui formant ta luxure >
Veulent bniiler moïiame , (Se la nœtQje en preCut» ,
Daûs l'abyfme effroyable -à ze% frères Démons?
Eft-ce pas là y foiiillart > qu'ore tu me femonds !
^on, mais à carefiêc d'tftte inégale fiâme
Cet amour inA*eeni » ^ui mes veines enââme.
CAR iti.
L'Immortelle vertu v«ttt agir (împlnnen^»
Reâiyanc toute ocdH^e , & ûle accqupleiacut.
3Si THEATRE FkAîfÇOis:
NEPTUNE.
Tdute yérttt franchit cet amoureux palTage.
C A R I T E.
le ToiiUnc y fe cognoi comme tu n*es pas fage.
NEPTUNE.
Safr ou fol y (i iâut-il pourtant vous embraflcr.
C A R I t E.
^c te ferois plûcoft de ces mains treTpaiTei:.
NEPTUNE.
Par les rogues Démons tu fais bien la ruzée ^
Et Toudrois (àfentir cette aimable rozée.
Qui diiliUe à toute heure au giron deVénUS.
( SUJET DU NEUVIEME POEME. ) Ca
arrivée à Malthe > inrpiré par (a grande be^iuté la
craelle jalooGe à la Nimphe Makbée. Un Con
dear la condaic àr Megà^uirion , (Te grand Ma
qui la reçoit avec la plus grande diftinâion> & qui
ne pouvoir mieux faire que de l'énvOyer à Ludc
^ue> (Louis Xin.) La fcèné continue à voyage
arrive en France. Le Roi a une converlàtiôn
tiere avec te Commandeur i & il luiftïc âinfi le tal
de l'état de fon Royaume :
Ce ilecle , Cavaliçr j eft tellement défait ,
Que la vertu s'ençoUrt habiter les'montagner>
Entre les écroulTeurs de glands & dechatagnes.
Autrefois en ma France on voyoit d^ honneurs ^
Et des gens tous civils , au lieu de blafonneurs. '
On voyoit des Neftors, qui tenoient pour mailles ^
Des fidèles confeils^^-au lieu de cetiang-fues ^ ' '
THEATRE FRANÇOIS. 3S3
Qui fe gorgcnt du fang de mon pitewc écat ,
La paix y fleuri (Toit au lieu d*un atcencac.
C'eft Tbemis, ou couchoic une DéelTe Aflrée,
Qui au paroy , fans plus maincenanc accouftrée ,
Nous dit que fa balance efl Tu jecie à tout vent ,
Peinte en or apporté fur les flots du levant.
Dans le Temple habitoit lors un PaAeur fidèle f
( Mais il eft mefleant pincer cette cordelle )
Où maintenant on voit des gardes pour des chefs*
Le Commandeur lui préfence enfuice Carite» que
le Roi traite avec amitié ; il lui donne pour direfteur
Ploufiotope, (le Cardinal de Richelieu. ) Ce qu'il y a
d'aflez fingulier , c'cft que l'Auteur dépeint ici le Car-
dinal comme un homme (impie, modefte , fans art»
fans ambition , & plein de candeur & de franchife.
Ce Prélat ne fe croit pas digne de diriger la jeune
Carite ; & il la met en Couvent chez la Dame Eu(ë-
bie, ( Religion , où elle prend le voile. Le Roi renvoyé
enfuitè le Commandeur avec des remercimens pour
Magaquirion*
(SUJET DU DIXIEME POEME.) Par le
canfeil de Ploufiotope , Eufebie donne pour compa-*
gnes à Carite > Euphroline , ( chafteté ) Penie , ( pau-
vreté) & Upacoye, (obéiffance) qui Tinftruifent avec
quelle humilité elle doit aborder Ton amant » lorfqu'elle
fera arrivée à Olimpe : bien>tôt après Theoys envoyé
Uriel la chercher. Ploufiotope rend compte à Eufe-
Tome IL Z
S54 THEATRE F RA NIÇOIS.
bie de toutes les différentes provifions > dont il a fait
prêtent à Carite pour Ton voyage; il lui dit ao^lS;
Je lui donne au déparc le rjrmbole de paix»
L'olive donc }e fis un fuc aflèz épais >
Duquel )e lui froccai du corps Qne parcie i ,
Afin que fur rabyûne , elle fuc advertie
_ D*avoir un cœur robufte encontre les aiTaucs»
Qui lui feront livrés par quelques noirs yailàux*
Carite s'embarque avec ITriel pour aller retrouver
Theoys. Chemin fai(ànt> ils rencontrent différensm oo-
fires > qui lui font grand peur ; elle fè frotte le vifage
avec une eau bouillantes qui la rend plus belle que
jamais. Enfin elle arrive au Port de Gracè^ (Havre
d'Olimpe. ) Uriel va fur le champ en rendre compte
à Theoys, qui au(fi-tpt va trouver Pantocrator ^ pour
lui demander la permiflipn de lui faire quelques pré-
fens & de Tépoufer. (On ne fera peut être pas fâché
de voir comment l'Auteur fait exprimer le Tou(:puir«
fant, ) Voici ce qu'il hi répond :
Prends ce qu'il ce plaira 9 mon fils , à pleines mains.
Paye, cher Theoys , fes maux avec ufure^
Les Dieux ne donnent poinc d'une eflroiile mefure.
S'ellç a foufFerc pour coi des crayerfes en mer \
Je dis s*elie n'a craint par ces flots abyfmer »
£n te venant chercher , à travers la tempeAe :
Je veux qu'il foie cogneu par la voix d'un trompette.
Ets'elle a pour l'amour lancé quelque foufpir^
Je ne veux cet eHan d'oubliance aflaupir.
THEATRE FRANÇOIS. 555
les faînâs Dieux & les Roys , font de grands luminaires ,
Ils ne compenfcnc pas par les prix ordinaires :
Car pour un peu d*encens qu'on facre à leurs aurels.
Ils vetfenc un threfor aux adorans mortels i
Les Roys pour un bouquec > {tour un fruiâ déleâable ^
t>onneront un état , un office notable ;
Âinfi )e vcux^ mon fils, pour la récorapenfer » ^
Que tout auprès de moi tU la faâè avancer i
Qu'elle ce folt untofl chaftement efpoufée.
Puis qu'elle n'a ta mo^r par les feux merpriii^*
Par les eaux Se rochers elle te va cherchant »
Ced uii fainâ procédé , qui va trop alléchant
Un coeur digne d'amout , tel que tu fais paroîtré
A ceux 9 qui te voudront diyinemeut cognoiflré.
Orne toi donc , ma force , à la mifux recevoir ^
Tandis que je ferai le nopçage fçavoir v
Par tout ce grand Palais y afin que chacun penfè
De lui contribuer > pour juik récompenfe >
Les chants , & les honneurs » qui lui font vraiment deuBs j "
£t qui font plus plaifanS , plus ils font at tendus!
I^rends en mon cabinet une fraizeà dentelle j
La branche 4e Palmier ^ & la robbe immortelle ;
Prends auifî la Couronne , & le Thiare faint ,
De laquelle fa tempe & fon front foit enceint.
Mais ne les porte point » il te feroit maufTade >
Tranfmets-lui feulement ( à façon d'ambafTade , }
£t puis quand tu fçauras par un viile relais i
Comme elle approchera du celefle Palais >
De mille Cavaliers & de plus alHlUe ,
Tu viendras au-devànt jufques à la montée
De ce Throfnc royal , que je te vaî ceddant
Pour la mieux accueillir , unt un ferme afcendant
L*amour a fur mon cœur ^ & la volonté fainte
De laquelle tu dis que fon ame eft enceinte «
TheoysV enchanté de la bonté de fon père, envoyé
Zi)
35^ THEATRE FRANÇOIS.
à Carke une robe Tuperbe^ & un grand & magnifique
cortège pour la faire encrer avec plus de pompe dans
Olimpe. Elle y arrive. Dès qu'elle apperçoitTheoysi
elle fe jette à fes pieds : le chajte Theqys l'embrajfeâvi'
nement 9 & la préfente à fbn père , qui donne un nou-
vel aveu à Ton mariage. Au milieu de fa gloire ellefe
fou vient de Ludovidiquée» de Plouiiocope & d'Eo-
febie : elle envoyé au premier un laurier , & une pal-
me à chacun des deux autres : elle promet de plus à
Ludovidiquée une ample lignée , un Jiecle d'heureufe vie,
& enfin un couronnement au Ciel* C'eft ainfi que finit
ce fingulier & pitoyable ouvrage.
1632.
LES TROPHE'ES DE LA FIDELITE', Tra.
gl-Comédiey Paftorale anonyme r dédiée aux bous
efprits. Lyon, Claude Cayne, i6j2. w-S**,
(SUJET DES TROPHE'ES DE LA FIDE-
LITE'.) Timandre, berger , aimoit paffionément Si*
laire : cette bergère répondoit à fon amour. Voici un
fragment d'iine tendre conver(àtion de ces deux
amans :
. T I M A N D RE.
Ta PuilTance tCtik pas moiadre que ta beaucé ^
Qui divine me faic fous cet habit profane ,
Croire de voir Juoon « ou Vénus , ou Diane.
S I L A I R E.
Ne fois point complaifanc par ^ç% impiétés ;
THEATRE FRANÇOIS. 357
Cra!ns-tu point le courroux de ces trois Déïcés,
Que ta comparaifon ofFenCe trop honteufe ?
T I M A N D R E.
Pardonne cet erreur à ma langue amoureufe.
Qui ne fçaurOit aiTez élever ces appas :
Kon , tu n*es point Junon > ' je ne le voudrois pas ;
Tu ferois trop jaloufe, & ferois trop d'injure
A ma fidélité , m*eftimant un parjure t
Si tu eflois aufîi la DéeiTe Vénus ,
Je verrois près de toi les Cupidons tous nus ;
Je ne le voudrois pas s car tu ferois comme elle
Facile aux appétits 'd*une amitié nouvelle :
vTu es encore moins la DéefTe des bois 3
Le; Dieux ne veulent pas que tu fuives Tes loîx i
Elle tient â vertu d*avoir un coeur fauvage ,
Chez qui jamais l'amour n'a pu trouver padage ;
It }*aprèns de tes yeux , où mon pourcraiâ je voy ,
Qu*amour te rend fenfible aux mêmes traits que moy i
Et s'il eft vrai , qu'enfin Endymion pour elle
Se rencontra plus beau qu'elle ne fût cruelle ,
Elle faifoit toujours dormir ce pauvre amant: %
Au lieu que tu me fais veiller inceffemmant ,
Et ne donnes jamais du repos à mon ame.
S I L A I R E. *
Voudrois- tu bien m'aimer avecque moins de flâme ?
T I M An DR E.
Non , je te le proteftc , & j'en jure tes yeux;
Je veus bien , s'il fe peut , t'aimer encore mieux : ' -*• - ,
Mais apaour m'a aprins le fons de fa fcience^ » : i
Le mien ne reçoit plus augment ni défaillance.
Que fi jamais mon cœur recevoir d'autres traits f
Ct quHl ne peut pourtant , bleffé de ces attraits ,
Afin que mon efprit recognoifle fon crime
Qu'un jufle châtiment le tire de l^byme,
X ru. •••
Z 11]
355 THEATRE FRANÇOIS.
Je conTens qu6 le loup ravage impunêmenc
Les parcs où mes agneaux bêlent innocemment ;
Que mon troupeau famais ne treuve de Pheihage %
Que languiflanr de foif il pérUTe de rage >
£t qu*Iris , la brebis que tu chéris H fprt ,
Tunibe devant nies yeux aux ombres de la môrt^
S I L AIRE.
Tiens auffi pour certain qu*avant qiiè ma penfée j^
Quelque mauvais démon dont elle foit poufl^e»
Soufpire quelquefois d'autre mal que du tien >
Xt de ton amitié treuve ennayeux le bien 3
JLes plaines & les mons feront la mefme chofe ,
Le Soleil du midi confervera la rofe ,
Toutes les fleurs naîtront au milieu de Thyver ,
Et la terre au Printemps perdra fpn tapis verd,
pref y avant que Silaire oublie fon Timandrè ^
Aux éternelles nuits on la verra defcendre ,
Et garder même encor panpi les irépaflçz
Le plaifiint fouvenir de fes deiirs paifez.
Ils alloient être unis > lorfque Cléagi^ne , Roi de Sir
racufç , devient amoureux <ie Silaire. Il cherche en-
vain à la féduire. Cette bergère fîdelle à (oq cherTi*
mandre^ rejette avec méprî^ les déclarations de CleO'
gène ; ce Monarque enchanté de Tes charnues & de fat
yertu , va la demander en mariage à fpn père & à fa
mère, qui, comme l'on croit bien , n'ont garde de
f cfufer pour Içur fille un fi glorieux hymen. Pour faire
briller auffi la conftancé du berger , une grandç Prin*
ççfle^ nommée Elife, devient amoureufç de lui, &
veut répoufer. Ce tendrç amant uniquement occupa
t^ç f^ l>crgçrç, rçfufela main de la Princel^Tç ^ Çlifç,
THEATRE FRANÇOIS. 3^3
qui troave le berger charmant f voyant qu'elle ne peut
le déterminer au mariage » lui demande de venir do
moins paflèr quelques momens dans fa chambre. T!«
maadre qui craint le danger d'un tète à tète» la réfufe
inhumainement. Elife au défefpoir fonge à fe vepger
fur fa rivale : elle faiteropoifonner une pomme qu'elle
deftine à Silaire ; & le poifbn en eft (i violent; que
dès que la bergère l'aura fentie^ elle périra iniailli-
blement. Le hafard favorife fon funefle projet ^ elle
trouve la bergère endormie ^ pofe fur Ton feinla pom*
me fatale ) & fe retire. Le Rpî Cleogene arrive en ce
moment, & ne peut fe refufer au plaifir féduâeur de
fe rendre le maître d'une pomme qui a touché le fein
de (a maitrefle; il baife & rebaife cent fois ce fruit
dangereux. Èien-tôt il en reflent l'effet , & meurt. Dès
qa'Elife efl inftruite du funefle accident qui vient
d'arriver au Roi , elle fe fent déchirée par fes re-
mords ; elle avoue ion crime : bien^tôt après la tête
lui tourne , elle croit que le Roi Ta frappée d'un coup
ierrible de malTue , & elle expire en prononçant ces
mots:
puis que ma trahlfoii ores efl décourerte ,
Sy racufains , vengez deffus moi vôtre perce :
exercez fur ce corps , infâme & criminel j
Tout ce que vos Tyrans ont crouvé de cruel.
Etoufez couc d'un temps mes plaintes & mon crime |^
Dans vos taureaux d'airain choififTez un abyme
Four me précipiter : le fer , le feu , les eaux >
. >Ie feront pas afTez pour punir tous mes maux :
ZiVf
,360 THEATRE FRANÇOIS.
Mais VOUS ne venez pas pour veDger Cleogene >
Vous vous ré jouiirez fans douce de fa pêne.
Toi , à qui ce trépas paroîc û douloureux ,
Fidelle confidant de Ce Prince amoureux ,
Ou t'en es-tu allé? Entreptens fa vengeance:
Son ombre te femond à punir mon ofïànce.
Vois-tu pas que fa main me montre à ta fureur f
£t ce donne de quoi châtier mon erreur l .
Prens ce flambeau ardant que ce fpeâre prefante.
Mais il s*en vienf à moii que fa main eftpefante ?
Tu m'obliges , achevé > arrête néanmoins.
Si je meurs vitemaoc , j'en endurerai moins.
Cette torche infernale ard dedaus mes entrailles }
Une troupe de morts vient à mes funérailles ^
Vn noir fantôme avec une malTe de feu 9
Faroît pour m'ailommer. Attends encor un pjéu ,
Modère ta furie y & épargne ma tête :
Me voici fans ce coup à mourir toute prête ^
Au lieu des yeux il a deus gros charbons ardans ,
La rage & la fureur éclattent là dedans :
Ce monflre va ronflant le feu par les narines^
£t fa bouche vomit des fiâmes fulfurines. .
Dieux , il me veut frapper ! Ha , monflre furieux ,
Ce grand coup aip ravit la lumière des CSeux.
Après la mort de Cleogene & d'Elife , rien ne s'op-
pofant plus au Jbonheur des deux amans ; ils rççQiyent
enfin Vaveu de leurs parens , & ils s'époufent à la
grande fatisfaâion Tun de l'autre.
CHARLES'^VION, Ecuyer, Seigneur de
Valibrayy fils d'un Auditeur des Comptes^ né à Parisi
mort vers i6s6»
11!
THEATRE FRANÇOIS. 361
L'AMINTHE DU TASSE. Paftorale fideletnenC
traduite de ricalien , en cinq aftes , en vers , dédiée
à Mademoifelle de iBourbon , avec un long avertiffe-
tnenc. Paris, Pierre Rocolet, 1^2. i/iS®.
' M. de Beauchamps a raifon de dire que l'Auteur dans
Ion avertiflement annonce qu'il n'a point mis Ton nom
à cette pièce y non pour fe cacher , mais parce qu'on ne
fe fbucie pas de fçavoir le nom d'un Tradufteur. Mal-
gré cela cependant i'Epître dédicatoire de l'exemplai-
re que j'ai eft fignée Dalibray.
LA POMPE FUNEBRE, ou DAMON ET
CLORIS , Paftorale en cinq aftes 9 en vers 9 tra-
duite de l'Italien de Cefar Cremonin , dédiée à Ma-
dame la Baronne de Chandolan, avec un long aver-
tiflement. Paris 9 Pierre Rocolet, 1634. ^^ 8°.
LA REFORME DU ROYAUME D'AMOUR ,
contenant quatre Intermèdes , en profe , repréfentés
avec la Paftorale précédente. Paris > Pierre Roco-
let, 1634. i/z-8^.
. i
^ LE TORISMOND DU TASSE, Tragédie;
avec un avis au Lefteur , & un argument. Paris »
Denys Houflaye , 1636.1/1-40.
m
LE SOLIMAN, Tragi.Comédie , traduite de
ritalien du Comte Bonàrelli. Paris , Touflàint Qui-
net, 1637^ i/1-4^.
- Je ne donnerai point d'extrait des ouvrages de
Dalibrày , m'étant borné à parler feulement de ceux
des Auteurs qui ont compofés en notre langue. Cornai
36x THEATRE FRANÇOIS.
jne Ton peut cependant foupçonner que la Réforme do
Royaume d'Amour eft de ion invention > j'avertirai
le Leâeur que c'eil peut-être l'ouvrage le plus ridi-
cule & le plus abfûrde que l'on ait jamais vu. Il en
|x>urra juger en lui nommant feulement les Aâeurs >
qui font y l'Amour > les Pleurs > la Jaloufie y les Soa-
,pirs 9 le Cahos , Semiramis >Cléopatre i Artemife > &c«
Si c'ed là le feul fruit du génie de Dalibray , on ne
peut certainement pas regretter qu'il n'ait pas plus
louvént donné carrière à Ton imagination » & qu'il fe
l^it contenté du fimple titre de Traduâ;çur.
FARCE PLAISANTE ET RECREATIXE i
qu*a joué un Porteur à! eau le jour defes noces dans Parist
en vers de quatre pieds» i6f 2. zaz^^^.
J'ai vu cette pièce entre les mains de feu M. Barré i
.& c'eft lui qui eci a donné le titre, l^epuis fa morti
je n'ai pu içavqir entre les mains de qui ^Ue eft tom-
bée > & par cbnféquent je ne peux pas en donner
l'extrait.
, ,651.
'DU VIEUGET.
, LES AVENTURES DE POLICANDRE ET
'DE BASQLIE , Tragédie , dédiée par un Sonnet à
S. A. S. Madame la Princeffe de Cangnan. PahiSi
Pierre Billche, i6j2. in 8**,
' ( SUJET DES AVENTURES DE POLICAN-
DRE. ) Cet ouvrage eft moins un poëme dramatique
qu'un roman , écrit en vers y & dont llntrigue eft la
THtlATRE FRANÇOIS. 3(^3
^Iu$ compliquée. Je tâcherai cependant d'en débroail*
Ipr le cabos ; & en m'arrêtatit aux principaux perfbn-
nagçs I je ne parlerai point de la foule d^s rôles épi-
(bdi^uesy qui ne fervent uniquement qu'à embrouilleiT
lie fbjet & à fournir de uiauvaifes fcènes*
Ba^zolie & Ceralide étoîent deux fœurs qui vivoient
heareufes dans le feîn de leur famille ; Meleandre Se
Policandre étoient cous deux amoureux de Bazolie*
Bazolie aimoit Policandre , & ne pouvoic fpaf&ir Me-
leandre : leurs affaires alloient le mieux du monde.
Melcane, mère de Bazolie, défiroit fort avoir Poli-
candre pour gendre , lorfqu'il prend touc-à-coup fan-
taiGe à Pelicare > pete de Bazolie , de marier elle
^ fà fœur à deux étrangers de ks amis. Pour évite
un mariage G contraire à Tes vues » Melcane imagine de
^éguifer Tes deuK filles en Pèlerins > & de les envoyer
chez des parens en Italie , fous la conduite de Poli-
candre. Malheureufement Meleandre eft inftruit de
ce projet, & ayant fait le fignal convenu , il emmené
les deux fcéurs. Il efl: bien-tôt après aflaflîflé par des
voleurs : les deux (œurs fe réfugient dans un Hermi*
tage, & inceffamment édifient tout le canton par la
(kinteté de leur vie. Cependant Policandre après avoir
f épété cent: fois le fignal projette , qui étoit de con-
trefaire le petit chien , apprend par Melcane qu'un au-
tre a enlevée fa maitrefle. Il parcourt la moitié da
inonde pour retrouver ce qu'il aime ;^ mais envain. It
lui arrivé mille aventures ; il efl blefie ^ il fait naufra-
3^4 THEATRE FRANÇOIS.
ge , il eft fait ; efclave ; enfin il devient foa* Son pete
& fa niere avec Melcane , après l'avoir cherché long*
cems y le rencontrent dans une forêt , faifant toutes les
folies ppffibles : il ne reconnoit point (es parens ; on
eft obligé de le lier> pour pouvoir l'emmener: la
grande réputation des deux nouveaux Hermites en«
gage cette compagnie à les aller trouver » & à leur
demander leurs prières en faveur du pauvre infenfé.
Melcane > qui ne reconnoit pas (es filles dont une
longue barbe cachoit le vifage , reconnoit du moins
les habits qu'elle leur avoit donnés , lorfqu'elle les fie
déguifer en Pèlerins : elle foupçonne aufll-tôt ces Her-
mites de les avoir affaflinées* Elle fe jette fur l'un d'eux ^
lui arrache la barbe, & Ton peut juger & de fa joye
& de fa furprife, lorfcju'elle reconnoit en cet Hermite
une de fes filles : l'autre fe jette à fes pieds ; & cette
reconnoiflance efl fi heureufe , qu'à l'inftant même
qu'il revoit fa chère Bazolîe , Polîcandre recouvre fon
'■ bon fens. Le père de ces deux jolis Hermites , qu'une
bleflfure avoit arrêté jufqu'alors dans THermitage, &
qui avoit été foigné par eux avec tout le foin & Tac*
tention poflîble , efl enchanté de retrouver ks enfans,
& ne veut plus s'occuper qu'à feire leur bonheur. Il
commence par celui de Bazolie , en lui accordant fon
cher Policandre pour époux-
Telle efl à peu près la fable de ce Drame , l'un des
THEATRE FRANÇOIS. 36 S
ennuyeux &des plus inal écrits quej'aye lus: je
pu trouver uh feul endroit qui méritât l'attention
eâeur. Je citerai cependant quelques couplets
dans un accès de folie ^ chante Policandre (bus le
de Nivelle y nom qu'il a adopté dans fa démence :
Pour eftre arrivé trop tard ,
Uo autre a pris ma maicrefTe.
Amour , ce petit baflard ,
Me jouant cette finefic.
Me dit que. fétois plus heureux y
D*eAre infenf^ qu^amoureux.
Je mets en comparaifon
Ces deux chofes en la vie :
L*amour trouble la raifon^
Ce trouble fait la folie;]
£{ me rend bien plus heureux »
D^eftre infenfé qu^amoureux.
J'ai couru tout Tunivers
^our trouver ce que fcfpere :
£c ces voyages divers
Sur terre , comme en galère ,
M*ont fait efUmer heureux y
Dièdre aufli fou qu*amoureux.
Mais ne fçauipis-< je revoie
Les beautés de Bazolie,
Pont Tabfence eut le pouvoir
De me donner la folie ,
£t pour fon retour heureux ,
îflre moins fou qu'amoureux.
OKMEIL.
E RAVISSEMENT DE FLOWSE, ou
^S6 THEATRE J^RA^ÇQIS,
L;HEURÉUX EVENEMENT DES ORACLES,
ou CELIDOa ET CELINOE, avec un arguinept*
Tragi- Comédie > imprimée avec 4ç^ mélanges poëci*
ques. Paris > ToulTaint Quinec , 1632. za-Bv.
CELIDOR ET CLENIDE, t6^i.
(SUJET DU RAVISSEMENT DE FLORISE*)
iPour confbler Celinde^ veuve depuis quel<]ue teins»
Celidor s'offre de l'époufer : Çelinde lui répond qu'elle
ne confentira jamais à un fécond bymenée, que par
Tordre exprès d'un Oracle. Celidor va (ur le champ
confulter la fage Mondaine 1 qui lui donne un portrait^
en raflfurant que c'eft celui de la peribnne qu'il doit
un jour ëpoufer. Celidor ^ quoique touché de la beau-
té de celle que repréfente ce {portrait , va auprès de
la Sibille chercher de nouveaux éclaircilTemens. Dans
cet intervalle le Capitaine Timandre revient de la
guerre; malgré les confeils du Poëte Amphion, il
devient amoureux de Çelinde. Cette veuve lui ayant
feit la même réponfe qn% Celf^dor , i) va. avec le Poëte
confulter auffi la Sibille. Il rencontre C^idor , & ils
fe confient mutuellement leur projet. Arrivés chez la
Sibille , elle ne veut point parler devant le Poète qui
lui dit quelques injures > & fe retire. La Sibille leur
déclare alors qu'ils feront tous deux côntens; mais
qu'il eft néceflaire auparavant, d'obtenir l'aveu d'une
Divinité.' Ils s'en retournoient aflez fàtisfaits de cette
répojife # lorfqu'ils entendent des cris , & qu'ils re-
THEATRE FRANÇOIS. ^6j
iDoifTenc la voix de Celinde. Ils volent à fon Te-
ars ; elle leur apprend que le Diea Pan vient d^
enlever fa nièce Florife : ils courent pour la d^li«
^r 9 & ils y réuflSflent, Celidor reconnoit dans Flo-
î l'original du portrait que la (âge Mondaine lui a
nné ; il en devient paflionément amoureux ^ la ra-
me à (à tante , la lui demande en mariage &
btient; mais le <• Dieu Pan iurvient) qui attaque
ïlidor pour lui enlever Florife* Celidor a le coura-
de mefurer Tes forces avec celles d'un immortel s
atloit vraifemblablement fuccomber » lorfque le
ëte Amphton furvient & les fépare ; il trouve auilt
moyen de perfuader à Pan de renoncer à Florife ,
de ne plus s'oppofer au bonheur de CeIidor« Ce
eu y confent ; & le double mariage de Timandrç
se Celinde 9 & de Celidor avec Florife ^ fait le dé*,
ùment de cette pièce. Le grand Prêtre qui les xxvàt^
ir dit :
vivez toujours unis en fcmblable dedr ;
Que le âcheux dégoût n*aUere lé plaifir ;
Que pas un d'encre vous n*aille courir au chai^« \
Ains deifous le mari que la femme fe cangc.
Amphion , fî tu yeux , tu te puis matier y
Tous deux elles préfens pour vous aparier.
L E P O E TE.
Je ^e fuis pas (i fot de me mettre en forvage :
Mon coeur tremble au récit du nom de cecuage.
3*en demeure d'accord s baife-moi feulement 1
$ans ccrc toa mari > |t ferai ton amant.
368 THE A TKÉ FR A NÇO IS.
LA SAGE MONDAINE.
vous eftes bien plaifanc que de parler ainfi >
Je vous eAime fort exempt de ce fouci •
Jamais le repentie d*une ââme nouvelle
Ne me pourra ravir le beau nom de pucelle.
(SUJET DE CELIDOR ET DE CLENIDE.)
Deux femmes de Marfeille font attaquées de la pefte
en rabfence de leurs maris i elles envoyent nourrir
leurs enfans à la campugne , & meurent bien-tôt après.
CesenfanSi l'un nommé Celidor , d'entre Clenide y
élevés enfemble 9 menoient une vie paftorale lencroiT-
£ànt en âge , ils deviennent amoureux l'un de l'autre.
Après une longue abfence > leurs pères reviennenc
dans le pays : & dès qu'ils ont appris qu'ils ont perdu
leurs femmes & leurs enfans , la douleur les engage à
le faire Hermites. La même nuit > tous deux ont un
fonge qui leur aflure que leurs enfans font encore vi-
vans , qu'ils font dans le voifinage , & qu'ils s'aiment.
La (ingularité d'avoir fait tous deux le même rêve
les engage à faire des recherches , qui leur procure
de retrouver l'un fon 61s > l'autre fa fille , & ils les unif-
fent enfemble. . \
L'Auteur a cru jettcr de la variété dans ce Drame
le plus froid 6c le plus ennuyeux que l'on puifle lire)
en faiiant paroitre un Géant , qui ravage les campa-
gnes &c que Ton enchaîne ; en introduifant des bergers
&c des bergères » qui font amoureux les uns des
autres; mais il s'efl: certainement trompé. La verfifica*
tion
THEA TR E FR ANÇOIS. 36g
feoix n'^ D^s plus Intéreflaqte que la pièce; & je n'ai
pa^ trpvive un (eut endroit qui méritât d'être cité*
G, ipE COSTEi
j y
XiZIMENE, Ccnnédieqpàftocale eti cinq iStesi
to iperst > avrec uti Prologue , dédiée ^. Madegioirellè
Quifc» Paris , Tbom^ç dj? la RueU^ç 1 1 6 ii..i/z-8%
» • .
' ( SUJET DE hlÉlMENUà Après on. Pïologùe ;
datis lequel un berger vante les agrémens de la viecham?
pètre y les bergères Belaris & Clarisbé comttienceht
la pièce , en répétant à peu prés les jnèppics propos :
enfuite un GaTcon &Un Gemilhomnié enkvefiC la ber«
gère Lizimene, les bergers Bèrèriîs & Nisbétbrvien^
hent & la délivrent ; mais îllçuç en cô,vite la liberté:
ils deviennent tous deu:t amoureux de cette jeune
bergère. '
'<•)-'
Après bien des prpteftî^tîpns d'àmpur ^ après des
événemens très^ communs. âc mal amenés , JÛzimene
fe déclare en faveMild«BfiKPi$..PpMr/pptepir pendant
Cinq aâes cette frcttde. iutitigue t auifi^ pfatte que la
vérification » ( & c'eft toqtdire ) il y a plufieurs autres
intrigues abfôiamenttnutiies à^ la pièce. Merindor eft
amoureux de fielarîs , Fîlifinont Peft de Clarisbé ; mais
par une bizarrerie (^ l'aiinpiir 9 Qel^ris aime Fi1ifmQnt>
8c Clarisbé aime Mérindor^ ce n'était pas-lc moyen
d'être heureux^ Enfîa les Bergers prennent le parti de
• TcmcIL A^^
rr
3yo THEATRE FRANÇOIS.
k conformer aux défirs des Bergères : ils changenl
d'objet > & ils font tous cohtens. Outre cette ^ifbde»
on trouve encore celle d'un Gafcon, qui parle ion pa-
tois > & qui eft amoureux de différentes Bergères;
celle d'une troupe d'Egyptiennes 9 qui enlèvent la bour.
k d'un [Vieillard duqiiel on Tè mocque; & quelques
autres encore SLufll peu intét^iTcttices le$ unes que les
autres. Todr donner unte idée de la verûfication j je
vais rapporter le morceau Taillant de ce^te pièce. Ceft
1^ berger Belaris qui vante aiQTrks Charmer dç^la vie
paftorale.
Fontaines , clairs riiideaux ^ & campagnes fieuries,
6e)ours déiidéifx de notre Betgetic,
Que liôus-Tooimes htoreux en toutes lés Aifons ^
JDc quitter qviel^e£bis nos |)ecites mairpns y
It revenir ici pour recevoir encore
Wille nouveaux plaiiîrî au iiàtttc de l'aurore ! ■ -
KoUj.vâiDns écouter le murmiqre 4e» eajux^^
ïc le chant gracieux de mille & mille oifeaux :
Nous voyons tous les jours Tétoile matiniere y
£t même en fa faifon , qu'on nomme pcint^niere :
Nous voyons puis après la belle aube du jour
Avec ï^n teint vermeil lôrfqu'elie iïft dcTetour!
Cer aflre qui la fuit avec fa trefl«?4)l<*nd5B , ' '
Vfent redÔQnënc (out Wl^lla^ictb àviiùonde.
«/iliors nous re^cdons ces beafix]prés eiitaillésy
Avfcrccs clairs, tui^eaux , ^ é^qiix. ils font mouillés. • • _
^ous voyons Jes troupeaux defcendre d*unc butte >
Avjcc. leur conduûeur qui feue d'une fluttc'i
V^t^ks petits bergers derrière les buiffons , . > T
< Chantanc:i4eur patois d^sp^ifantessçhàùToas. ^
Infin pour abréger , cela nous rcpréfentc
les niitiques plaiûrs d*uûe amour innocente^ &c«
THEATRE FRANÇOIS. ^yi
163»*
PIERRE DE MARCASSVSrAvoc2Lt au
arlement de Paris > né en Gafcogne eh IJ84. fut
rofefleur de Rhétorique au Collège de la Marche à
arisi où il mourut eu 1664.
•y
L'EROMENE , Paftorale en cinq aétes , en ?ers^
édlée à M. le Marquis du Pont de-Çourlay. Pakis^
ierhe Rôulét, 163 3. i/i-8^.
XES PECHEURS ILLUSTRES , Tragi-Comé-
le I dédiée à Madatpe la Baronne d'Qriïidilie» avec
n argument & d'autres, poi^fies. Paris > Guillaume
>œi&ei:, 1648. i/i'4^«
-' -■'
(SUJET DE L'ERdMÈNE. J Ergafle & Ar^
aille } tous deux égris des.char^pes d'Eromene > pré-
endent chacun avoir la préférence ftir (on rival; la
iifpute finit par un combat , & Eromène qui furvient
•s empêche de continiier. Elle leur donné i tous deux
peu près la même efpéraiicë ; hiais dans le fond du
ceur elle préferoît Arniille. JJra.hie & Cloris paroiffent
nfuite fur la fcêne : elles s'entretiennent enfemble de
sar adrefle à la chaHe , & fur-tout de celle d'Idale ^
sur compagne. Cloris dit:
- D'Un feul cpup de foii.arc , ^ a mis au cercueil.
i U R A N I E.
Quoi donc ! , .
•CLORIS.
Vgt hiïojiàtli^i un poUIàn , un chevfïuii ,
Aa\\
57^ THEATRE FRANÇOIS.
I
Du Tuperbe Ladon les. rives fans fécondes , ^:
Les ont vu cous les trois rouler avec leurs ondes f
Aio/î d'un cou]^. Idale , efn de bord étranger ^
Empêch e de voler y de courre Sç de nager.
«
Après cette converfation > Clpris fédaice par ks
mauvais confi^ils d'une perfide anûe» a la lâche corn*
plaifaiice de fe livrer entre les bracr d'ArùailIe^ qu'on
eft même obligé d'attraper pour le porter à profiter
d'une occafion favorable ^ où l'on lui promet de le
faire jouir d'Btomefl^. En effet , on lui montre Cloris
qui feint de dormir , & otî lui perfoade que c'efi l'ob-
jet qu'il adore. Àrmille héfite qilelqués tems , s'il ofera
profiter du fommeil de fa Bergère.' Enfin il fe couche
tout doucemenr auprès d'elle, en difàdt :
Que doîs-tu craindre , Miuille ? achevé ton deflêin ,
Et mecs-lai ptofnpcenienc te laurier dans le fein.
.... r .' . ■ \
V •■•«••
Ce qu'il y a de. bien fingulier, c*eft qye tootes les
libertés que prend Armille, & qui font pouffées tpçt
au plus loin y fe paHent fur le théâtre aux yeux dés
Ipeftàteurs. Eromene furvîent , qui ne peut plus dou-
ter de l'infidélité de fon amant! Armilïe qui rcconnoît ,
qu'il s'eft trompé ; détéfte ibti 'erreur , & cherche en-
vain à fe juitifier. Eromene ne véûtibfblument plus
entendre parler de lui. Ce tpndre amant > ^ni n^avoit
péché que par trop d'amour ,. fe livre au plus affreux
défefpoir, & veut fe tuer. ^Eomene s'attertdrît , lai
pardonne, .Çc l'épôufe,. Ce qu'il y a encore de bien
THEATRE FRANÇOIS. 373
^étoaiumt» c^ft jqa'Sfgafle> Ton riv^il , iljment aHflùtôc
iRxi ami ; & voulant lui en donner Une peeuve non
éqiivo(]i!te > pour répacer le tort qu'Armille vient de
fiûcè à Qoris « «Ljdeinahde fa noam.^ & jdevient fon
:épOOX«
Le LeAeorjuge aiféoient de Tindécence de c^t ou-
vrage ) qui ne raci^ette par aucune beauté ce défaut
impardonnable ; il peut auffi aifémpnt juger de la bou-
te de ta veriîficatiôh , puiFque le peu de vers que j'ai
cités ,* font les meilteur s de k pièce»
(SIJJET DES JPECHEURS ILLUSTRES.) Il
^(pvt^défenda dè^kœ & de modrir d^os i'ifle deDe-
los : il iBUloit qaeiesfetjpimes allaflent accoucher ; &
les malades finir leurs jours» dans Tiâe de Rbenie.
Malgré cette loi bizare y deux femmes mettent au
monde dans DeloS^ fune un gardon , Tautre une fille ;
& au(Stôt les envoyept dans Une iile voifine. Les
floeres meurent ; ces eu&ns élevés enfembleir^on foiià
le 'Dom d' Alcafidre ^ l'attcre fous^dui d'Sr-mitle j, con-
çoivent de Tamonr l'un pour l'autre, lis étoient fiey-
reQX;9 lorfqu'un bafard fait qu'ErmiHe eft reconnue
pour la Princefle de Delos. Ses palrens lui <îéfendent
d'écouter davantage jes vœux d'Alç^ndcé ^ elle obéit
à regret j ou du mains elle feint d'obéifé» Sotn amant
trompé par les apparet^ets > féliVré a;u d^fpoîr , &
du haut d'un rocher fej)récipité dans la pier. Pendant
qu'il exécutoit ce fta^fle projet^ on découvre auffi
\
374 T'^^ AT RE F k ANC O IS.
fon illuftre naiOance*: les parens; d'Emiille lar peraset^
tent alors de* (oivre fon penchant > Ce le^cîi promettencr
pour époux : dans le moment inème on vient lui an*
noncer que la douleur l'avoit déterminé àfé prédpi'
ter du haut du rocher, appelle dans ces contrées le
Saut des Amans. £rmille baignée de pleurs veut ac-
con>pagner fon amant dans la nuit éternelle » lorfqoe
tout-à-coup elle le voit reparoître devant elle. Par an
heureux hafardji il étoit tombé dans des filets depé«
cheurs ^ qui l'a vpient (êcouruç à propos; ; & il avoit
appris parmi eux que Ton étoit inquiet d'un inconnu i
nommé Alcandre , donc on venoit de découvrir l'illa-
fire origine > ce qui l'a voit déterminé à reparoitre àh
Cour. Son mariage avec Ermille ^it le dénoûmeot
de cette pièce.
Si du moins cet ouvra gç n'eft psfs contre les bonnçs
n^œurs, il n'eft ni plus intéreiTant^nf mieux écrit qoe
le précédent : on jugera de la verfification par ce
' morceau que je crois ètr« le moins-mauvais qu'on puiife
y trouver. Alc^ndre au défeTpcir vient confakerPrO'
tée ) qui ne veu& pas lui répondre : ce malbenreqx
aimant cherche ut\e occaHon.de le furprendfe^ ^le
(rpqvaQt endprgii , i| dit ;
vénérable Démon des Vagabondes picncs.
Doux efpoir de mes maux , doux eTpoir de mes pene& ,
Père de tant de âots , dont lesjeflus divers
D'une éternelle eflreinte embr^ent l'univers :
Toujours vieux , toujours jeune, & feul qui dans le moQdç
pç (Qut genxc immortel rtn^la^ccre fëcc^de ;
THÉÂTRE tRANÇOIS, 375
51 <l6 tant de beautés ,doii}: l'aimable Dotis
A tant de puilTans Dieux , & bleflès & guéris y
Il en fut jamais une à qui les de(tinée$
• Ayent fournis l'orgueil de tes belles années \ •
51 jamais de l'amour Padorable flambeau
^mbrazji ton conrage au milieu de Ton eau :
O î Perc impérieux des mers ^ des rivières , " "/ * ^
Montré-toi favorable â mes judes ptieres : '
£(coute ma douleur : oy mes cuifans regrets ;
De mon futur deftin révèle les fecrets.
Etouâêxlans mon cdeur l'efpérance, 0u la crcinte , . •
£t donne pour januiis une fin à ma pleiute. . ,.
Ainfî de Tunivers Técernel ornement
Révère le pouvoir de fon vailc élément t
/^infi du Dieu du jour la courfe vagabonde
Commence en ton Empire , & s'acheva en ton onde.
Mais ce Dieii , plus cruel & plus four^ que fes flots ,
Se moque des foupiis , des pleurs djr^des fanglocs. »
Plus on le prie , & dIus il eft inexorable .
La force 8c non nos maux nous le rend ftcourable.
Refous-toi donc , Alcandre , à cette heure qu'il dort ^
A l'aAidmi fi bien » & l*eftreindre fi ^tt, / 1
Que furprîs dans tes ncpuds 9 u feule violence
^oblige en ta faveur à rompxe fon filçnce.
Dieux ! fur combien d'eQpace eft eftendu fon corps !
Que fôn'ftçnt eft afBrcut i que fes membres font forts !
Quelle t^ ! quels pies! & quel énorme ventre ! ,
De quel bruit fon fommeil fait retentir cet antre l .
Alcandre infortuné , raflcure tes efprirs :
Ijt voilà dans tes lacs : tu le tieûs : il eft ptis.
Donne , donne à fes bras une rude fecouflè ,
Il faut qu'il fe refveille : il faut qu'il te repoufle»
JE4N^94PTISTE DECROSILLESyAbbé de
Aaiy
37<î THEATRE FRANÇOîS.
Sainc-Ouen , mort m i6st^ dans une eJctrèiae ^a«
vreté.
CHASTETÉ INVINCIBLE , Ott TIROS ET
URANIE, Bergerie en prôfe, en cîticj aftes, avec
les chœurs , en vers , & un ayis du Libraire ao Lec-
teur. Paris, Simon Fevrijer, 1653. w-8*'.
Cette pièce fe trou^ç 9uâi fpus Iç titre fin^IefflenC
de JÎTcis & Uranicf imprimée en i6)i). & encore
(bus celui dç Bergerie de M: de CraJiÙes y impmaét
çn 1634* ■ ' ■ ^
(SUJET DE LA CHASTETÉ INVINCIBLE.)
Par les Loix du pays, le Prince Thyrîîs eft obligé
de mener une vie pafior^k; Il dievient anbureux d'U-
ranie, la plus belle & là plus înferifible des Bergères
du canton; ç'eft enyaîn qu'il ne perd ,pas une occa-
fîon de lui parler de Ion ^naaurv. La Bergère ne veat
pas l'écouter ; il lt|i rend etnrain les ieryîces les plus
eiTentiels, Ur^nie n'en eft que plus févere ; il ell
blelTé dans un combat tjall entreprend pour la déli-
vrer des bras d'un Satyre ; elle ne lai en tëmeSgne
pas la plus légère reçonnoiflimce. Lç pauvre Prince,
réduit au dérefpoir &. ne pouvant phis oonfisrver la
pîoindrç efpérance, n'étontè plus que IS doùtear , &
fe tue^ Uranie fc défefpére en apprenant la mort de
fon amant , & fe reproche «Ta cruauté. On apporte
^eyant elle le corps de Thyrfis , qu'elle inonde de fe^
larmes* Enfin ^rec qttèlqucs parp]e$ magr^es, &
'
^ti^ÀTR É FRA N.ÇO 15. jyy
Hvedla cditi^aîRnce qu'elle a» de colerfes lèvres de
Ycje fur la bouche livide de Thyrfii > cç Prince reflbfci-
te , & Vépoufe*
£fi lUanc Tanalyfe de cette pièce, l'on doit croire
que c'eft un fujet crès-fîmple & fort peu compliqué ;
mais au contraire i! eft très- embrouillé par mille per-
ïbnnâges épifodiques , qui viennent fucceflîvemeùt
ennttytr le l.è<fteùr , & retarder le progrès des fcènes.
On 7 vnpît alternativement de^ bergers , des Bjergere^,^
xles Prêtres I des Sacrificateurs, des Satyres , des Ma-
giciens y &c. On Ut dans l'argument qui eft à la tètç;
Les aSes font en profe 9 &• les ehœurs en vers y à çauje
que cette Bergerie efi ime chajleté invincible j honneur
fera le prologue. Je vais rapporter quelques traits de
cet ouvrage,' pour f^îre connoîcr^ le ftyle & le génie
^c Pj^ûteur.
Tbyrlis repond à Uranie qui le compare à Diane.
■ t
THYRSIS.
33 îyç bon cœur j'acquiefcerai à ta réfolution ^ pour-
^ vu que l'iévénetrient r^ede au pcéfage. Cette
Dééfie né lîôflede ntâle qualité , dans laquelle ipus
les Teiîtlmeds humains ne Payent pofledée. Lune
ce au Èiel , elle aime Endimion , qui jouit de Tes fa-
3> veurs fur les montagnes de Carie« Diane dans les
^3 bois» elle aime Hyppolite 9. après avoir aimé A1«
j>y phée,! dont Jes eaux font (kcrées depuis ce tems-Ià.
3(» PtoT^i^ne daiis les «nfers^ e^'e fe ravit de joye de
^> ce que Pluton Py ravit d'amosmr » & les ténébces de
57^ THE4TRÊ François:
9> l^ar féJQur ne font éternelles , qa'afin dç couvrir
?? leurs cs^refTçs qui le font aufli. Elle préfide k la fé*
» licite des accouchemens (bus le nom de Lucine : &
» pourquoi penfes-tu qu'aux nuits qui font les plus
X» fereines f elle fe plait fi fort à briller deflus les eaux ?
3» En voici la raifon que j'ai appris de Menalque^ elle
3» y fait des ondes d'argent pour marier les pymphes
;x> qui ont trouvé parti. Tellement que j'ai fujet de te
9> fouhaiter l'imitation de cette Déefie , même encore
» que tu en retranches tout ce qui te (ëmblera paiTer
yy les bornes d^une légitime amitié,
Thyrfis interroge un -Devin (ur le (uccès de foo
9mour , celui-ci lui^ demande l'origine de (on amoor*
Thyrfis- lui répond : » Il vient de deux autres jo-
» meayx , qu'on prepdroit ppur.Çaftor & PoUux,
>> n'é toit an obdacle^ qu'il y a > c'eft que leur mère
yi n*eft pas Lede. ce L'Imprimenr , qui n'a voit pas bien
compris toute la gentillefle de ce jeu de mots > avoit
fbttement cru que l'Auteur s'étoit trompé , & avoit
bonn);ment imprimé Laide. L'Abbé de CrofiUes , in«
digne de cette balourdife, a. eu foin d^ns l'exemplaire
que j'ai> de rayer cette bévue > & à la mange d'écrire
de fa propre main Lede. Voici un dialogue entre Li-
candre , magicien , & la bergère Driope , qui ne aolt
pas à fcs preftiges.
Lie ANDRE.
33 Veux-tu que je faffe defcendre d'Ofla & de Pe-:
93 lion , les aunes & les pins ? & puis je les ferai dan:
^ (er en rafe campagne.
THEATRE FRANÇOIS. 37^
D R I O P E.
/ I
» Les coup? de hache les font deibendre tous lesi
»> jours ; & les flots les font danfer quand ils fervent
>3 de m^($ de navire.
Lie AND RE.
>y Veuic- tu que je fafle venir les ténèbres en plein
midi ?
DRIOPE.
>o Une tonne > un berceau 7 un bœsfort épais fe-
» ront tout le même.
LJCANDRE.
Veux*tu que je faflè niarçher les ombres?
DRIOPE,
y> Chacun fait inarcher la Tienne p pourvi!^ qu'il fq
jo ppuirmeine aa Soleil*
LICANDRÇ.
D» Veux- tu que je faffç revenir les efprits ?
DRIOPE.
M L'eau jettée fur le vifage n'y manque point.
\ L I C A N D R E.
y> Veux -tu que je faffe parler les rochers & lc$
D? arbres?
35o T^EATtiE FRANÇOIS,
B Rî OPE,
' Thyrfis le fait en y gravant Tes vers, & ayectaol
» dç perfedion, que c'eft un vrai miracle^
FRANÇOIS LE MÈTEL, Sk pE BOISROBERT,
Abbé d^ Châtilloù • fur - Seine > Aumônier du Roi >
Confeiller d'Etat & de l'Académie Françoife ^ né à
Caën en 1592. mort en i66%.
PYR ANDRE ET LISIMENE, ou LA BELLE
LISIMENE,ou L'HEUREUSE TROMPERIE,
Tragi-Comédie , dédiée à M. de Cahuiac. Paeis,
(TouiTaint Quinet 9x693. iV 4^*
LES RIVAUX AMIS, Tragî-Comédie , dédiée
à Monfeigneur le Comte d'Aiinai , par Jean Çaudoio*
Paris , Aug. Courbé, 1639. in-4<»»
LES ÎDEUX ALC ANDKES , Tragi - Comédie ,
dédiée par le Sr de Bonair à M. Chapelain de Palle-
zeau* Paris, Ant^ ^ SommaTiUé^ i6^x>. in-^^é
P ALENE S ACRIFIE'E , Tragédie , déÔiéeà
Monfeigneur de Saint-Mars 9 par le Sieur de Bonair.
Paris 1 Touflaint Quinet, 1640. zfl-4®,
* ■ ■ . * ■ '
LE COURONNEMENT DE DARIE,T«p-
Comédie > dédiée à Monfe^neur lé Maréchal de Gui-
çhe. Paris , TouiTaint Quinet, 1648. in-^^,
LA VRAYE DIDON, ou DIDONLA
]
h
tttEAtâÈ FRANÇOii. ^Bi
:H A STB , Tragédie , dédiée à Madame la Corn-
efle d'Harcdtitu Paris » Touflaint Quinet^ i<^43«
LA JALOUSE D'ELLE. MESMÉ, Comédie
n cinq aâes , en vers» dédiée à M. le Marquis de
lichelitaè FAâii^Aug. Courbé 9 1650. i/i-4'».
LA FOLLE GAGEURE > ou LES DIVËR^
3SSEMENS PE LA COMTESSE DE PEM-
JROC , Comédie en cinq aftes , en vers > dédiée à
itoniieur» freredùlloi. Paris } Augufiia Cburbéf
LES TBQK ©BONTES, Comédie en cinq
i£bes» en vers /dédire à Mademoifelie de M^rtimxzsi^
?ARIS , Aug. CQmbé , 1561. i/iw^o. r
CASSAîjtpRE, COMTESSE DE BARCELON-
SfE, Tragi-tomëdie , dédiée à M, le Duc di? Nf:-)
tnours. Paris 9 Aug. Courbé, 1654. i/i*4*'.
L'INCPiNlSfUE* Comédie en cinq aâe^, éii
iirers > dédiée à Monfeigneur le Cardinal Mazarin |,
Paris > QpUv d^ Loyne$, in-ïzy
LA BELLE PL AIDEUS&r Comédie en cinq
aAes r en ver8>> dédiée à Madame de Ris , Première'
Pcéfidente do {Parlement de Ndi^andie. PàriS,
Guil. de Lnyneé, ii^S ^. i/z.»2,.'
. . 1" ....»•'
LES GENEREUX ENNEMIS ^^ Comédie en
cinq aâes^ en verS) dédiée^ à Aîadbme de Brancàs*
j«x THEATRE FRANCO ISx
LA BELLE INVISIBLE, ôuLA CONS-'
TANCp EPROUVEE, Tragi-Comédie, dédiée à
M. de Bellievre, Premier Prâîdenc. Paris» Goili
de Luynes , 1656. iii' 1 2.
LES COUPS DAMOUR ET DE FORTUNE^
DU L'HEUREUSE INFORTUNEE, Tra^-Co-
médie , dédiée à M. de Mancini. Pakis, Guil. de
Luynes, 1655. za-i2.
LES APPARENCES TtlÔMPÈUSËS, Corné-
die eh cinq aâés , en vers j dédiée à Madame la Pré-
fidenteïhoré. J^AUt^^ Guillaume de Luynes i iés6«
THEODORE, REINE D'HONGRIE, Tragi.
Comédie y dédiée à Madame la Procureufe Géûéra-
le, Paris, Pierre l*Amy, 1658. i/z-tii
~ L'AMANT RIDICULE , Comédie en un aâc,
en versi Paris, i6jj. in n* ' '
LES DEUX SEMBLABLES, Comédie en cinq
aâès y en vers > dédiée par M. de fionair à M. Clia-
pelain , Sti^neùr Aà Pallezeaa , CbnfèHlér & Secré-
taire du Roi. PARis^Tiniflaint Qtnnée, 1 642. in 4V
Cette dernière jpiecr«$ efft ûiot jiciiur'^iiM la mêobe
thofe que les «jj^iyc Ak^ndres s ti'oifîémer pièce det
Boifrobert. Il n'y.a ^bfoJlament qiîe te (rondfpice &
la datte de changée; car même au haut .de chaque
page le titre eft les deux Alcandres.
(SUJET i)E PYR ANDRE ET DE LISI-
MENE'} Quoi^eTonignorâtbt nail&Qce de Fyran-
THÉÂTRE FRANÇOIS, ^8j
are 9 fa valeur l'avoit élevé aax premières places cla
Royaume de Thrace » donc il avoir défendu les fron<^
t!ereSy'& vaincu les ennemis. Pendant la guerre, le
Roi avdit envoyé fa fille Lifimene auprès d'Ofantè jl
fille du Roi d'Albanie. Le calme étant revenu dans
feô Etats , i! envoyé fon fils Pyroxene pour riécrher-
chcr lajeunePrincefle.Pyrandre, quibrùlolt pour elle
de l'amour le plus tendre, & qui en étoit aimé, ac-
compagne le Prince dans ce voyagé. Dès que Pyrao-
dre eft arrivé à la Cour d'Albanie , fes grâces , ùl
bonne mine , touchent le cceur d'Orante ; elle fait con^
fidence à Lifimene de fa nouvelle pafllon^ & tout de
faite écrit à fon amant de venir la trouver dans fa ctiam-
bre cette même nuit. Pyrandre fort furpris de (k bon-
ne fortune , mais ne voulant pas manquer à J^ifimene ,
en fait confidence, à Pyxoxene qui aimoît Orante» &
lui perfuade d'aller tenir fa place au rendez -vous.
Comme Ton croît bien , Pyroxene accepte la projiofi-
^tion avec grand plaifir , & y vole. Lifimene qui le
voit paffer, & qui le prend pour Pyrandre , n'écoaîtant
que la jaloufie , va avertir Atfxe / frère d'Orante , de
tout ce qui fe pafie. Aràxe enfonce la porte de fa
(ceur. Pyroxene fe fauve fans qu'on puifie le comiol-
tre; & Pyrandre pafle toujours pour être le feulcou-
pable; On, Tarrête, on le met en prifon, & bien tôt
après il eft condamné à mort. Pyroxene p^ fpuffre pas
que Ton conduife fon ami au fupplice , & avoue tout
au Roi. Il lui demande fa fille en mariage > & l'ob- ^
^84 THEATRE FKANÇOtL
tient. Au moment que Lizimene eft enchantée ii
ilonocence de Ton amant » fdn bonheur &'aC9:oit en-
core par un événement imprévu. Pyrandrç eft recon-
nu pour le fils du Roi d'^^lbànle , & ion matlage avec
pzimene termine beureufement cette Tr^i - Ccooé-
die y dont je rapporterai une fcèae pour foire coddoI-
tre quel fut le début de Boi(kobert»
L E G.E O L.I E R;
Qui YΫnt ftappcr û utdî
L' E X E M P T.
Ouvre-moi, monat&i:
- - ■ ■ . *
L E G E O L I £ R.
Non , je n'ouvrirai point > car il eft heure indue i
7e fçai bien mon meftier , vous me prenez pour grde»'
L* E X E M<P T.
i^i tu n'ouvres , C6(juih ! '
LE G SOL r E R.
(^lià efl: cemangetu; i?aujc^'
Qui fait fi peu d*hQnn«ujc au^ Concierges Royaux \
SECOND EXEMPT,.. ,
.Connois-tu ce bâton !
L E GJE jO L I E R.
Mondeur , je vous demande
Très-humblement pardon , d*une faute fi grande.
JeÂ'cuiTe pas connu le Roi me(m&i la voix: '^ '
Tellpis tropen colcre^-Endori^nHerougcoiry .
Que Ton caffbitmon verre , & répandoit ma fau^^ ,'
Quand vous avez frappé, leprensmonhaut dechâuflb/
£t m*en viens vous ouvpir. ' . , . v .
V EX B M P T. ' .
C6 Geôlier eft pkiùtfr*'!
DE
,* 1
tÉEATRÉ FR A NÇOI S. 3 85
L E G £ O L I E R.
%t bien , que voulez- vous de moi , Monueuc TExerapt >
S E C O N, D E X I M P T.
Que tu gardes cet homme y 6c m*en reude un bon conce.
LEGEOLIÉR.
Approchez-vous , beau fils ■<, 6c n^ayez point de honte :
C*cfl ia maifon du Roi. J'ai bien logé chez nous
Des muguets pour le moins auiii friCés que vous,
SECOND EXEMPt.
Allons ^ il efl dedaps : rcfpond de fa perfbnnc ,
£c prens garde aux prifons.^
LE GEOLIER.
Monficur , je lui pardonne ,
S'il endort fans cohgjê , puifquc l'y voilà mis i
Kon pas quand il àuroit cent diables pour amis : • • •
Moulîeur, ça de Targent , payez la bien venue»
Vous aurez ce cachot qui refpond fur la rue.
. ,\ PY^ANDRÊ.
Ami 9 je le ^erai , tu t^en contenterai.
LE GEOLIER.
A d'autres ! j'aime un, tien plus que deux tu l'auras,
4 I '
P Y. R A N D R E.
Mon valet a ma bourfe.
, L E G E.Q L 1ER,
Et le diable m'emporte
Si le mien n'a la clef aufli de cette porte.
Vbus pcnfez m'éxcroquer , mais 'prenez garde à vous :
Je vous mettrai là-bas avec quatre filous ,
Qui daaferont cantofl deifous une potence.
Vous tranchez Un peu trop de rhommç d'importance.
7om II, ^ \i
386 THEATRE FRANÇOIS.
P Y R A N D R E.
O rhomme deffiant ! garde^ en accendant mieux.
Cette bague.
LE GEOLIER.
Monfîeur , voyez de ces deux lieux
Lequel vous voulez prendre. A ce coup je vous aime :
Soyez feur d*efb:e ici traitté comme moi-mefme.
Ma foi c*eft grand dommage : il a bonne façon |
Et Ton juge à le voir , qu*il eft joli garçon.
S il doit eflre branché , je Tirai voir defiàire j
Et prirai de bon cceur le Bciurreau , mon cpmpere ,
De fecouer pour luy dextrement le jaret ,*
M'en d*euft-il confier pinte après au cabaret.
(SUJET DES RIVAUX AMIS. ) Jarbe, Duc
de Calabre 9 fait cirer i'horofcope^ de fon fils; & on
lui prédit qu'il doit avoir pour fa fœur on amour io-
cedueux^ & faire la guerre à Ton père. Four éviter
ces mallieurs 9 il le confie à un de fes fujets , qui loi
cache fa naiflance 9 Téleve comme fon fils , & lui doo'
ne le nom de Phalante* Parvenu à un certain âge/
Phalante va dans la Cour Violas , Prince de Tareo*
te ; & il s'y diftingue par tant de belles adions » que
ce Prince lui promet Une de fès fœurs en mariage.
Cependant comme il étoitfurvénu quelques différends
entre la Cour de Tarenlè & cette de Calabre, lolas
l'envoyé en Ambaffade auprès de Jarbe : il devient
amoureux de Bérénice , fille de ce Prince; il en cil
aimé 9 & ils fe jurent une tendrefle éternelle. Mais
desraifons d'État dérangent leurs projets, i& Bérénice
THEATRE FRANÇOIS. 387
ttll obligé d'époafer lolas ; ce mariage retarde > maî^
n'empêche pa» la rupture entre les deux Princes. Ils
fe diéclarent la guierrè^ Phalante fuk le parti dlolas >
qui dans une forcie^A fi •dahgereufemént bleiTé , qu'on
le croit mort. Phalante & Bérénice dé^^drent foii fort,
& fe rappellent teufs anciennes amoiirs. Iola$ les en-
tendoit y mais loin d^ètre choqué de leurs feux , il leur
cémpigne combien ii eff fâché de n'avoif pas été in^
ftruic plutôt de leur tendreffe mutuelle > & leur juré
qu'il auroic fait Timpoïlible pour les unir enfemble;
Cette <:onverfation augmente }e danger de fon état ;
& fe ctoyant prêt de fa fin , il lègue à foh rival , & eti
même cems (on ami > & fa femme & (on Trône. Cette
genérofité n'a pas lieu. lolàs guérit , & regrette de
a'avoir pas 9 par fa n^ort , (ait le bonheur de fon ami.
On donne de nouveaux combats , & Phalante eft re«
connu par fon père putatif , qui lui découvre fa naiP
lance» & qui le conduit aux pieds de Jarbe. Ce
Prince, enchanté de retrouver dans fon fils un héros,
dont les exploits étoient fi vantés , fait la paix avec
lolasi & on fcelle ce traité par le paariage de Pha-
lante avec la PrinceflEede.Tarenter C'eft ainfi que (e.
dénoue cette pièce médiocrement écrite , mais aifez
bien conduite , & dans laquelle je n'ai rien trouvé
qui méritât d'être rapporcéw
I • • * . ,
( SUJET, DES DEUX ALCANDRES. ) Toute
l'intrigue de cet ouvrage roule fur Tuniformicé des
Doms de deux jeunes gens, tous deux amoureux
^S8 THEATRE FRANÇOIS.
^ans Tolçde. Atç<^ndre 4e C^ftiUe aîmoit & étoh
ahné de Fenice. La même union cegnoic encce Alcao*
dre de C#^talogne & Ifmene. Ces deux jeunes beau-
tés, quilogêoienc dans la même maifon^ donnent cha-
cune un rendez vous à leurs amans. Le hafard faic
qu'Alcandre de Catalogne j arrivé le premier au ren-
dez-vous., entend une voiK> qui demande » eft-ce
vous Alcandre^ il répond : oui, ne doutant pas qae
ce fût la confidente' dlfmene : on lui ouvre la porte »
& au grand étonnement de tous deux il eft introdoie
chez Fenice , dont le père furvient tout à-coup & veut
k tuer. Il s'échappe, & rencontre Alcandre de Ca^
talognepfès la fenêtre d'Jfmene : un fpupçon récipro-
que 9 quelques mots équivoques les engagent à fe bat-
tre 9 ils font féparés & conduits tous deux en prifon.
Leur aventure s'éclaircit, ils deviennent amis, & ils
^poufent l'objet de leurs vœux.
Je ne rapporterai de cette pièce, qui eft aflfez bien
écrite que ces dix vers; c'efl: Alcandre de Catalogne
qui les dit après avoir lu un billet d'Ifmene , qui lui
affigne un rendez vous pour dix heures du foir : tout
plein de fon bonheur , il s'écrie :
Soleil , puiî qn« tu vois le bonheur de mes jours ,
Ne le recar.le pas , précipite ton cours. . ^ .
£fleiiis eu ma faveur ta lumière adorable ;
LailTe venir ta fccur , qui m'eft]plus favorable.
Souviens-toi qu'autrefois tu courus pour Dàphiié,
£t de laurier p4t moi eu feras couronné f
THE A TRE FRA I^^ÇOIS: $8^
'* Accourds pour uo |oaç côfl chéfà'm QtdÀt^t\
Je c'ejOeve un Auccl, graud & beau lumiûa re ^ /
Si dans rimpacicnçcjoù tu me vois réduU ,
Tu fuis pout faire place aux ailres dé la huit', Sec,
'♦ >
( SUJET; DE PAtENE.) Sython»,Roi desHo-
4omantes> avoit unç 611e d'une li grande beauté , que
tous les Princes la rçcherchoier^jt en mariage. Ce Ma*-
narqii|$> craignant ^ei 4*^ fdire des ennemis des autres
s'il acçordoit la préférence à l'un d'eu^ ,.ftc, publier
^ue ,^pouF obtenir Palene, ;il faHoit çoqnbattçeî contre
lui i Que fa âjle feroitle prix de celui qui Taurçût vainf»
çu ;, mais.qoe.^'il ^tpit vainqueur ,,la rapr^.tqffiinçroit.
les^ joars/dç fpu ady.crlaire. Plufieurs P/ripççf ayoient
déia, fu^cQfpbés ipu^ Ûiy^leiir, lorfqpe;„| f|?^)îaqtvque.
tant de^difTérenç. combats avoient ^pujirefes forces, il
renonça à entrer docénàvant en lice ; &,|)fédfément^
au moment qqe le Prince Clite, qu'une^ bkfTareayoiC-
retenii^^i^ mois dans fe cbambrç , venpit ic mçttre fur
les ranss^ pour le combacjtre.Onétoit afTezembariadé
Iprfqijç Priante,, i^-rité'^çonjtre dite i. qui; Ivri avoit re*.
fufé Xa, (çeur jd^nt il étoit amoureux > s'offre à tenir
la place du Roi bus les mêmes conditions. KJ[^anou-.
velle de ce combat fe répand bien-toc ; & Palene eiFra*
yée pour les jours daClite qu'elle aimoit, faic féduire
l'Ecuyer de Driante > pour que le char de ce Prince (q
brisât en entrant dansla iicç. En eflet^ il n'y efl; pas
plutôt entré que (on char fe met en pièces. Clite ^ qui
ignoroit ce qui s'étoit pafTé ^ iaifit cet avantage , & lui
plonge Ton épé^etdansJe eorp»;:QR le croit mort. Le
Roi cft bien-tôt -inftruit de la trahifon commîfe contre
Driante ^ & veut faire mourir Clltç : mais Patène
voyant les jours de Ton amant en danger, veut en
mênietems hii fauver & l'honneur & la vîe. Elle
avoue qu'elle ëft fa feule coupable. Son ^ere l'envoyé
fur le champ au fuppfice. Elleétoitau milieti dèsSa-
crifitateurs prêts à Hmmolet , quand CBte ^ à îa tête
d'une trôcrpe de fôldats choife , accourt pour la déli-
vrer ; il retarde dit moins fa mort i mais malgré toute
h valettr ,11 afîoît fuc'cotnber , lorfqù'on voit accourir
lin homme 'qui s'écrie qu'on cisftfë de tombattre, que
Briante n'ëft' pa^ mort , & qttir' pardonne à Clîte ,
plourvô qùll lui accorde fa 'ftéuT en Mariage, ÇÎite y
coulent avec^oj'e"; &le mariage de ces deujt Princes
avec les Prûicrefles qtfîli adorent termine hedreufè'
ment cette pièce, qui eftàffez bien conduite ,& très-
bien écrite. îi y à même quelques morceaux de poêfie
d'une grande beauté pour-cetemslà , où Fôn cour-
roit après lé fâttx^efprit. Je n'en rapporterai cepen-
dant que les (lances > que prononce Palene étant fur
l'échafFaùd.
Puis- je fans réCftàncc abandonner mori ftig^
A c? clui^ f^criiïce ?
Hè ^uoj \ Sans relpcâer mon jTcxe, m mon raii|^.
On m^expofe au fupplice ?
Je croyoîs triompher en ce funefte jour,
£c y y fuis couronnée en viâime d*àmour.
THEATRE PRANÇOIS, 391
Volcî le Juftc effet de mes îniuftçs craintes;
Puis-|e me voir tombée en de fi grjuids malheurs y
Sans répandre da pleurs , .
Sans pouffer des foupirs , & fans faire des plaintes ?
Hélas ! Cl je frémis , on me doit pardonner s . :
Ce fpcôacle m'eûopne.
Mon amour aujourd'hui me dcypijc couronnçr 9
£c la mort me couronne s
Ces deux flambeaux d'hymea , qui dévoient m'efclairer y
Sont convertis en feux , qui me vont dévorer y
Et vont couvrir ces yeux d'^ernelles ténèbres.
Cette pompe , fuivie & d'heu^ H du plaifirs ,
Qu*attendoient mes dip/irs »
Se change en Tappareil de mes £9.mpes funèbres.
Quel crime ai-je commis , pour fubir une loi
Si dure ôcfifévcrc?
Syton , fouvenez-vous , fî vous cftes mon Roi ,
Que vous efles mon père.
Mais quoi ! je fens TefiFet d*un arreff ab folu \
Le Juge a prononcé , car vous l*avez voulu 3
Ah ! rigueur incroyable à la race future ;
Four paroiffre équitable aux yeux de tous les Rois ,
Vous obfervez vos lois \
EtVOttseAesinjuffe ay3çk>|x4cjiatiatiire. /
r
Ceff pour toi que je meurs y o Clyte généreux ,
Tu me vois condamnée ^ '
Bc tu n!es point touché de mon fijirt rigoureux \
Tu m*as abandonnée.
Peut-effre verfes-tu quelques pleurs fuperflus :
Mjûs Qlyce 9 il me falloit quelque chofe de plus *,
3pa- THE A TRET RA^- ÇO T 5,
Ton bras , pour mon falut , devoittout entreprçndrç ;
Tu devois bazarder tout tpn fang aujourd'hui ,
Pour arrefter celui
Que ce coufteau funcftc c(l tout prèft de répandre.
C 3 : ' • '\ *• .. 'v - '• . > . -.
if
Mais que pourroîs-tu feul contre un fi puîflant Roîî
Non , IWJrt , pé« CelteîieftVic : ;^'
Vis, cher Clitc , & prrns foin de éonfetycr en, toi
Morï àmôur ,-& ma Vie. ' . -.,
Va » ne hazarde point , cequr je lï'âî pcii voie
Dans lé taoindtt péril , fani être «iw défcfpoir ,
Sans hasarder ma vie, & courir »u fupplice : >
AufH bien ma frayeur dans ton douteux effort ;, >
Avariceroit nia mort ,
ît prccipit'croit ce fatal facriiSëe.
Je voudrois bien pourtant que-çh vîfles en moi
Cette ardeur fi. confiante* .
Clitc , fi tu voyois comme je^meur$ pour toi ,
Je mourrois plus contente..
Mais je la fuis a(iez en mon fort malheureut ,
Te prouvant par ma n^ort mon amçur gériéreux.
Oui j fçachsnt que tu vis , fans regret ie fuccombe , *
Et me confo.c encdr , ne pouvant plus te voir ,
5ii ^e te.fais fç^voir
Que je trcuîvc pour toi dels douceurs dans la tombe* ^
(SUJET DU COURaNNEMEMT CE
pARIE. ) Artaxerces, RoidePerfe» pour r^cora*
penfer fon fils Dariç des grandes viâoîres qu'il a rem-
portées contre les ennemis de l'Etat ^ l'aflbcîe auTrô*
fie. Ce jeune Prineé ëtôft attiôufcux d'Afplifiè, & en
étoic aimé ; il vouloit Tépoufèr : le Roi qui aimoit auffi
çettç jeunç be^ut^^ Tquç ^ijSFérens prétQ^^tçs i s'ofpo*
THEATRE F^4^NfOIS. 3^3
foît à cet, hymen. Darie fora\e .le dejTein de quitter la
Perfe , & de s!enfuir avec fa Tnaîtr.effe ; mais il change
de projet, lorfqur'ilv apprend qiiej^l.ejogr de fon couron-,
-^nement ,, la Loi portoit qu'il , pouvoit donner un ordre^
fans l'aveu^de fon père , Scqueftel qu*il fut on devoir
Texécuter. Il attend avec impatience le jppr où il doit^j
être aflbcié à la puiffance fuprême. Ce jour arrivé f
& dès qu'il "çft 'fiii le Trône » iP ordonné que Iç Grand
Prêtre vienne l'unir avec f^jc^ere- Afpafie. Le^Roî^
fait de vains efforts, pour que fon n|s révoque cet or-j
dre qui lui perce le cœur. Darie y perfifte ; Arta-
xerces furieux ordonne en.fecret à Arjalpe, un autre
de fes fils, d'aller enlever Afpa'fie^^'& de la; mettre
' dans un lieu de fureté & incônfiù à Dârié. Ariafpe y
court. Darie > averti àtems, voie au fecours de là
maîtreffe : il veut combattre fon frère , Afpafie fe jette
au^milieu de leurs, épées, & les arrête. Entia. tout
étoît en combufttou dans là Cour de Perfe ,/ lorfque
Tiribafé , grànd'iSeigneur Perfah i voulant profiter de
ce défordre, foirmie une cpnfpiration pour aiTaiTioer le
Eoi, & fe mettre fur fon Trône. Tiribafe, à la tête
des Conjurés, entre dans la chambre d'Artaxerces ; ce
Monarque , averti à tems, fç iàuve^f & bien-tôt après
Tiribafe eft arrêté. Dans le même moment, Darie
qui avoit raflemblé des amis, pour pouvoir enlever
Afpafie , entre dans le Palais lépée à la main. Le Roi»
trompé par les apparences , le croit complice de Ti-
ribafe , & lui plonge fon poignard dans le fein* On
1
394 THEAT'RE FRANCO ÏS. »
emporte ce Prince mourant. Le Roi cônnnît bîcnîtôt
Ilnnocence de Darie, & fe défërpere de l'avoir toé;
faenreufement le poignard âyoit coulé dans les chairs»
éc Darie reparoît au grand contenterttent d'Artaxer-
ces 9 q^h pour lui témoigner & (bn repentir & (bnami^
dé ,& lui cède & le Trône & AfpaGe.
Cette pièce .eû,bien conduite & bien verfifiée. J'en
dterai deux endroits qui Wont paru mériter d'être
rapportés. Ameftris , Reine de Perfe , en converfa»
tioiî avec AFpafie > iûî dit':
Oubliez , belle Grecque , oubliez vos douleurs ;
Donnez à mon cxcniplc un peu de trcfvé aux pleun;
PuiA|ue notre fortune, a tant de reflemblance ,
It que le fort lespefe en efgale balances .
'^ A S P A S I E.
Njotre fortune égale > Ah ! que me dites-vous?
Si le fort mfeft cruel , Madame , il vous efî doux :
Cac il vous £ivotiil à Theute qu'il me brave.
. £n^ vous êtes Reines & moi )e fuis efclare.
, Quand je fonge aux h on neurs qu*Amour vouf a rendus ^
£c que je les compare à ceux que )*ai perdus:
- Quand je voi les malheuri dont |e fuis traverse'» '
. Votre grandeur préfentfs & ina gloire padSe:
Quand le vaillant Cyrus , alors qu'il fe fit Roi y^
D: mille objets qu'il vid , n'aima jamais que moi ,
- Et qu'il me deAina, centre toute eipérance,
'A partager ce Tràne acquis par fa naiffânçe:
Q^and je fonge aux refus confiants & généreux »
'" Qui charmèrent le cœur de ce Prince amoureux j
' Qu'envain ce Conquérant , ce maître de l'Afîe ,
Voûiut ppur fa maîtreïïe une pauvre Afpafie r
Que ce bouillant déCir dont il fut combattu y
Tandis qu'il vainquoit tout , fléchit fous ma yert»>
THEATRE FRANÇOIS' 395
Qu'enHa il me fit Heine â rhonhetir de la Grèce i
^ £p que vous Ameflri^ qui nâquiftes Ptincelfe »
Par la (^ule nai (Tance aviez droit de régner
' Sur les coeurs qde vos yeux fçavent Tari d- ragnet.
'-^ « I>îeesrnons oà le fort vous fut (I favorable?
. A préfem voui régnez où je fuis miCérable :
Chacun a du refpeû pour vos divins appas;
Ijes miens rôntmefprifes. Aind \2 tie voi pat
, Qu'ici noHre ^oune ait cane de re ambiance 9'
Nique leX^cc les pdfeen û ju/le baïUnoe..
' Dans une fcêne de Darîe avec Artaxerces , ce Mo-
narque veut décacher fon fils de famoùr qu'il a pour
4^fpafie /& lui die r
'■'■''■ " .
LE ROI»
Maïs quoi , la trpuve-m, û parité & C ^eUf l.
DARIE.
Quand le Cie( l'eue crée , il rompit f^^n model.
-^ illee{Vininïitabre,&d*erprit& de corps:
CeftuneoBUfttdbitiiîUÂitéâ ÇakcoufrfeseflTores» . ^
Ses yeux font des foleils où l'amour prend ùs fiâmes }
Ses cheveux des lien« ppm: le» roy^le^ âmes ^ '
Zt fa bouche de rofe admirable en beauté >
. JJk Toracle qù l*amour vei;ç e^rc çoi^fulçé.
(SUJET DÉ LA VRAYE DIDON. ) Hîarbas,
Roi d« Gettdfe> étoît amourèdx de Dldon, & avoic
plufieurs fois demandé fa maiq ; mais cette I^eine
fidelle aux mânes d^ Ton époux Sicbée , avoic toujours
rejette cet hymen. Pour fe vcmger de fes refus > le
Roi de Getfulte entre dans (es Etats » à la tète d'une
poifTante armée. Didon appelle à ipn fecours fou frère
3q6 THEATRE FRANÇOIS.
Pîgmalion y qui joint Tes troupes à celles de fa fo^rf
& qui marche contre Hiarbas. Avant tjue de combat-
tre, Hyarbas demande une entrevue à JPigmalion : il
lui déclare que ce n'cft point Tambition qui rarn»e
contre Didon , mais le plus tendre amour ; que, piqué
de fes dédains , illui àvoit déclaré la guerre ; mais
qu'il étoit prêt à mettre fcs armes à fes pieds, li elle
confent à Tépoufer. Pîgmalion , qui croit que cet hy-
men eft avantageux & à fa fœur & à f e^ peqples,
confeille au Roi de Getulie , de fe rendre maître de
Didon & de la forcer à répoufer:;.& il lui promet
que loin d'y mettre obftacle , H le favoriferoit plutôt.
Hyarbas fuit ce confeil : Didon tombe en fa puifîance,
& voyant qu'on la veut contramdre à un hymen qu'elle
détefte , elle fe tue. Je ne rapporterai de cette pièce ,
qui eft intéreffante & bien écrite, que le, monologue
de Didon , avamt que de fe percer le fein^ . -
D M> ou $ EULS^ ■
Elle paroît dans fi tente , où f on voit fur une table
un poignard, & un grand yafe d*Q.r .àJtafitique , re-
préfectant une urne où feront le^ cçn^reis dç Sychée^'
Me voici feule enfin , oC libre & dégagée .
De ceux qui me tenoient ici comme a(fîégée»
£p dépit des deflips t^ui ixi,'Qucrageûient fi fort ,
Me voici, grâce aux Dieux , maîtreife de mon forC*
Nous pouvons fans contrainte , en Teftat où nous fommes^
' >lous plaindre cgalcment 8c des Dieux U des hômmçs^
THE ATRE FHANÇOIS. 357
Qui m*ont fait lufquMci la guerre injuftemem ,
%t qu' m*onc.tous érf cruels également.
Mon trcre , & ce tyran donc je fuis pourfuivie »
Con pireiic d'un même air tous deux contre ma vie :
L'un cft traître U perfide , & Tautre fubotneur ^
I.*un Vwur ravir mes biens , & Tautre mon honneur.
Si mon Frère avoir eu quelque boime penfiée ,
Tendante à mon fccours , m*auroit- il délai flee )
Si ce Rot , dont Tamour me fut toujours fufpeây
>f *avoit vraiment aimée , il eût eu du refpeâ ,
Et n*eut pas menacé de vengeance & d'outrage ,
Vn corps à qui fou cœur eût fait le moindre hommage*
Mais grâce aux Immortels , voici, voici de quoi
Braver avec mépris &: mon frère , & le Rui.
* Voici qui peut fauver 9 avec gloire infinie y
Celle qu*on vouloir perdre avec ignominie»
Toi qui croyois contr*elle avec toure rigueur ,
V&t de tous les droits d'un infolent Vainqueur ,
Tu n*auras que Iq tronc , & ta vengeance lâche
A rhonneur de Didon ne fera point de tache $
Elle a le cœur trop bon , trop grand , trop généreux y
pour céder au pouvoir d*un tyran rigoureux.
Compagne de ma fuite & de mes infortunes ,
Anne , à qui mes douleurs furent toujours communes i
Chère & fidelle fœur, donr la rendre amitié
Excite feule ici mon ame à la pitié ^
Xes Dieux me font témoins de la douleur extrême ,
Que j*ai de te quitter Vaimantplus que moi-même i
It de te voir réduite à la nccelHcé ,
De dépendre aujourd'hui d'un tyran Irrité.
Si i'avois pu fauver cestréfors qu'on ai'onleve ,
Les reAes malheureux de cette pauvre veufve >
J'aurois eu poui; le niohis , de toi me fepàrant ,
Le plaifîr de t'en fîtii» un préfent en mourant.
T^
£it ptnan$ U ^ff^éfd^CrU ifuijant.
35» THEATRE FRANÇOIS.
Mais je ne puis plus rien en ce départ itineftt.
Reçois ces t rides pleurs , c'efl roue ce qui me réfle.
Traître Pygmation 9 frère dénaturé y
Et toi cruel Tyran contre moi conjuré ;
Voyez où vos fureurs dans teur rage inliumaiUe ,
Ont réduit le deflin d'une fî grande Reine.
Ctiï vous qui m*avez mis ce poignard â la main»
ix qui levez mon bras , & qui percez mon feiii.
it vous , Urne facrée où repofe la cendre '
De celui qui m'a~fait tant de larmes répandre^
ReHes inanimez de mon fidclle époujc, "'
Je vou^ prends à témoins que ce juile courrout »
Ce noble défcfpoir & cette liardiede
Ke tendent qu*â l'efïèt de ma fainte pronleilê.
Je vous conjure au moihs , voyant ma "pureté ,
D'apprendre mon liiftoîre à la poftéritc ,
£t rous les vrais motifs de ma mort généreufé.
Qu'on pourroit foupçonner étant (î malfaeureafe :
Que C\ pour outrager mon honneur 8c ma foi y
L'impofture jamais s'élcvoit contre moi >
Tâchez de réprimer toute in julie licence ,
Itde jullificr par tout mon innocence.
Chers Mânes de Sychée , ombre de mon époux »
Agréez cette iiiort qui me rejoiht à vous 'y
Et qui me va donner, dans les champs ElilBes ,
Les douceu*-s du repos qtii me font refufees.
(SUJET DE LA JALOUSE 1>'ELLE
MESME.)
t î A Nb RE.
Enfin, cher Philipin , npps voici dan$parii^ .
Où je viens augmenter le nombre des mads»: .:J. -
P H I L î PI N. -
Et des Cocus peuc-êcre ocker la Con&airie>^6t4.'^- ^
THEATRE FRANÇOIS. 395,
Ceft ainfî que débute cette pièce qui e(l écrite
avec gayeté » & où Ton trouve des incidens affez co»
miques* Léandre arrive à Paris 1 pour époufer Angé-
lique f qu'il n'a jamais vue. Il rencontre dans une
Ëglife une femme ma(quée;; il en devient amoureux^
& lui dit mille galanteries. Enfin il eft conduit chez
(à prétendue.» qui le reconnoit pour celui qu'elle a
vu à rEglifè» & qui lui a donné la main. Elle de-
vient auffi-tôt jaloufe d'elle - même ; & pour pou(S^
cette affaire aufll loin qu'elle peut aller , elle donne
à Léandre difïérens rendez-vous > mais toujours (bus
le nom de la Dame inconnue » 6c toujours un mafque
fur le vifage. Plus Léandre lui parle > plus il en eft
épris ; il prend le parti de rompre avec Angélique^
££ apprend avec la plus grande indifférence qu'elfe
eft prête à en époufer un autre. Enfin Angélique fê
fait connoitre à lui ; Léandre fe défefpere , & vet|t
mourir : Angélique lui pardonne fa prétendue, infidé*
lité, & répoufe.
SUJET DE LA FOLLE GAGEURE*
FluHeurs perfoniles fe trouvent raflemblées chez la
Comte(fe de Pembrock ; on agite diverfes queftipns ;
enfin Ton demande quelle eft la chofe que l'on répute
la plus difficile. Lidamant a(fure que la garde d'unç
femme eft la chofe impoffible ; Telame (buttent qu'ufi
l^omme expert ne fe laîifera pas tromper^ Ce Tdamp
avoit une fœur nommée Diane j. qu'i^gs^rdoiç avçc ^ifr
400 THE A TRÊ FR ANÇO IS.
tant de .précautions qbe (i elle eût écé fa femme. Li«
damant avance que , malgré tous le^ (oins de Telame,
il enlèvera Diane fans lui faire violente, & fans que
Telame puifTe s'en douter. Telârae parie le con-
traire : le pari établi', Lidamant cherche & réuffit à
plaire à Diane 9 & par le fecours de vingt ftracagê'
mes aflez plaifans , qu'employé fon valet Frontin» il
trouve le moyen de Tenlevcr. Telame perd ainfi la
gageure , & confent au mariage de Lidamant avec
fa fœur.
Cette pièce eft tirée de rEfpâgnol. Dans l'original
elle a pour ticre, la chofe impojjible. En gériéral cette
pièce eft écrite avec gayeté ; je n'y ai rien trouvé ce-
pendant qui méritât d'être rapporté.
(SUJET DES TROIS ORONTES.) Cléante
eft amoureux & aimé- de Clarifte ; mais Amidor,
père de cette jeune beauté, l'a promife à Oronte de
Bordeaux 9 fils d un de fes anciens 2lmià. Cléante qui
n'étoit point connu d'Amidor, prend le parti de fe faire
préfenter à lui fous le nom d'Orontc; & , comme l'on
peut imaginer, en eft crèsf-bien accueilli. Ses affaires
alloient le mieux dix raoride , lorfqu^on voit paroîtrc
un fécond Oronte. Il eft néceffatre de développer
quel eft le motif de ce tiôuveaudéguifément. Le vé-
ritable Oronte avoit promis foi de mariage à' une fille
de Bordeaux , nommée Caffandre ; mais féd uit pat
les grands biens qu'AiDidor prbmetcoic à fa fille , il
s'étoic
THEATRE FRANÇOIS. 4oi
kitoit (iétèrinîné à partir de Boréaux v& à venk à
Bmiïs époi^fer Cali{lè.Cafland]^e.> aujdérefpDir de Tui-
fidéUcé'jde foo amant , prend le pard de le prévenir >
àrrivie: ii Paris , & fe fait préfêntef à Atnidor fons. le
çom d'Oronce. Amidor eft fore étonné de cette aven«
tare: mais il ne peut douter que celui-ci ne (bit le
véritable, lorlqu'il lui remet la lettre def6n ami Fer-
tiand 9 père de l^époùx qu'il deftinë à (a fille. Il veut
défendre fa m^ifbn à Cléante , Jorfque le trôifiénje
Oromé paroit ftar h icène > & jçtte.un nouvel embar-
ras dans la pièce. Enfin tout fe dénoue heureofement.
Oronte reconnoit Caflandre ; &'toikhéde cett^e preu-
ve dfetendrefle, il hii demande,pacdoii^& répoufé.
Amidor^ obligé de renoncer a^iâlsde^amiy accor-
de Califte aux vœux dé Cléante. - - :
Cette Comédie n^eflpa^ njal iprit^e ; l'intrigue çri
eft gaye §c bien conduite ; & ç'ejl un fujet dont oài
pourroit peut-être tirer parti. \'
..',•,■■
- (SUJET DE CA8SANDRE.) Cîiffandre, Com-
tèflè de Barcelonne> étoit (busja^tuteile.d^ Duc dé
Cardonne. Aftolfe,fils de ce Duc >f âoit iimoureux
& aimé de la jeune ComteflTe ;Jes:Btats {s'a^Bfenableiit
pour déterminer la Princeflfe à fe marier , & à choifir
parmi tant de Princes qui la defnatïdent celui qu'elle
veut pour fon époux ; ellen*héfite jpoint/ & nonimé
Afïolfe, Le Duc frémît en apprenant que c'eflfon fils,'
à qài la PrincèiTei dC)tod là pré&renieT il fait venir
Tome li. Ce
'40X THEATRE FRANÇOIS.
Aftolfe ) & lui apprend que GaiTandre eft ùl fœttr«
Des raifbns d'Etat avoient autrefois obligé le Duc à
fubftituer fà fille à la PrinceiTe qui venoit de naitre i
& qu'on croyoit qui alloit mourir. On peut juger do
défefpoir d' Aftolfe & de celui de la Princefle > en ap-
prenant cette fûnefte nouvelle. Cet événement pro«
duit des (ituations très-touchantes. Ca(randre> dénier-
minée à defcendre d'un Trône qui ne lui appartieot
pas y fait aflembler les Grands» lorfqu'on voit arriver
un vieux Seigneur qui avoit été chargé de fon éduca-
tion y qui avoit fçu toute l'intrigue pour fubftituer h
fille du Duc de Cardonne à la jeutie Princefle > & qd
même s'étoit chargé de faire cet échange néceflàifè
pour le bien de l'Etat. Ce vieux Seigneur fortdt d'ef*
clavage où il avoit été retenu quin2e ans ; il déclare
que Caflandre étoit la véritable Princefl'e ; qu'en la
cranfportant du camp où elle étoit née , s*étant ap-
perçu que fa fanté s'étoit raffermie y il n'a voit pas fài(
réchange projette^ & qu'il ne l'avoit pas dit au Dde
de Cardonne 9 dont il redoutoit l'ambitioii. Les preu-
ves les plus manifeftes démontrent la vérité de cette
tiiftoire ; & CafTandre fait célébrer alors (on mariage
avec (on cher Aftolfe.
Quoiqu'il y. ait des endroits fort intéreflans dans
cette pièce , ce n'eft certainement ni la meilleure ni la
inieux écrite de l'Abbé de Boifrobert.
( SUJET DE t.'INCONNUE.} Cet ouvrage «ft
THEATRE FRANÇOIS^. 4oi
iit) ^«(diainement condiuiél d|e quiproquos » qui pro-
dliifept dqs fcènes a,{rez atnufantes. Voici ce qai y
dobnë lieu* DZ Riaîohd a reçu chez lui Un ami > noni-
mé D. Félix. CeP^mOnd à une icëur ; rôais pour
éviter }es prop|ç$il cache à fon ami que cette fœur,
iiomfa^e Glimene % demeure dans |a même riiaifon.
Climene cependant fe prend de belle pa^ffiôa-^ur Fe*.
lix ; elle va un matin le trouver dans une prairie voi**
fine , & lie converfàtiôn avec lui. Félix devient amou«
reu^ d'elle > tuais ne peut parvenir à fçavpir qui elle
.4sll 9 ni où elle loge. Bien-tôt après^ il fait confidence
à D. Rembnd de l'amour qu!il a conçu pour une in*
cooni^ct. Climene , qui de fon appartement entend
leur cQpverfation y tremt^e d'être reconnue. EHe écrié
à (m amant ^ & lui donne rendez-vous chez Orante >
tnaicrefle. de D. Remond. FeUx y voit fon inconnue.
Ce reiîdez vous eA troublé par quelqu'un qu'on en-
^ tend mpnter » on cache Dou Félix dans un cabinet :
c'étoiç D. Remond qui venoit voir Orantê. Il s'ap-
perçoit qu'un homme eft çjiché chez fa makreflef eh
pt^nd ombrage, & s'en va en colère. ; Orànte le fuit
Xofques ^bez lui peur fe jufiifier. Climenç, pendant
leur explication , fort voilée d'un cabinet vpifîn p &
traverfe l'appartement. Orante qui la i&écohnoit î eu
prend aulfi de la jaloufie. Çepéûdàùt ]>. Félix» vou-
lant revoir fon inconnue^ prend D. Remond pour
compagnon i & ^^ fnene à la porté d'Orante. Enfin
tout s'éclaircit î la jaloufie cçfTe ; fie en époufant Qtmi
404 TÉÈÂTRE FRANÇOIS.
te , D.'Remcytid acctordfe fa ïcetir aux vœux de Don
{Fdiic. <?eft iinfi ^tte & ^te#mii!e "-cette pièce, dont
"l'iîDrrigiie .eft'iin; pea embrQuiUiéc.i::S^p que ceUes de
toutes les Comédies de ce teiQ^Jà.^
- .. ..i . •- . «
^ ( S0JET BÉ LA BELLfftïC*-! D E tJS E. )
AmfdbrVTtetix avares s'oppore au mariage de fonfik
*Érgfatte avec 'CorîDtiè , parée ^ue celle -^ci n'a poar
toûcè fdrtûnfe t]u'cin procès^ doM le fttccès eft incer*
' tath t ^maî^ tout le tncndé 'è'éÊ&nt mis «Raccord pont
le erOtnper, t)n parvient à%i |Neiïûader <:e que l'on
VébJt ; '& l'ônfek paffer<:oritiftc poor^iDe Comteflc
Brétënne fort riche , & le frère de Corinne qui eR
'amoureux -delà fille de 4^ v^^e pour un Baron qùa
^ de trêsi^bdteVTèrres/ iPdonnè^ff autîWrt plas M^
aahs fe t^éfge^ qu'on lui feit erttendpe qu'il ne M en
xdtitéti; titn ^tt ce ^ôàblé ^hj^tnen. • Cêpcndttnt îqêl
fe découvre -à là %nôftùré dti-éofttrat. Cc^inhe» ainfi
• que foft frère V font obligés^ de -dkeleur^ vrais nom«.
'iLt ^leilfeirdfe inet'en^coIëre;toafe il «*appai(e b^^^
tôt 10rfq[û'<* \Hfefit annohcet à^la belle #la*deufeqn*él|e
' a gagné fotf procès , & qu^elle& -fon frerê font récl-
lenreht ci^ès-^riichès. !Lé bott^homoie alors donne 6m
' conïWîtëmetrt avec gfând pfetifli*. Mais avant ^n ve-
^ ttir ^Iâ> if a-feltft fcîerK ^éà'ifttrigués pour.procurer de
^^â+gènt^ S Ergafte : -dèu^c Valets adroits y réuffiflènt.
'¥âintfet, pùur engager lé vieillard à en donner, l'un fe
iilit pïfffer pour un riche Marchand , & devient la eau-
^'tàùti del^uerequi emprunte. Une autre fois» déguifif»
ri 'j
THEATRE FRANÇOIS. 405
Xms deux en HaifTiers » ils vont chez Amidor > qai
eft abfënc , faiâr & emporter un lit , que cet avare. ra-
cheté enfuite fans fçavKyir que ce meubla lui appar-
tient , parce qu'on le hxï làlffe poui" peu de diofe.
Enfin cet Amidor eft l'harp^goade l'avare. Il Te trou-
ire même dans cette pièce une fçèn^ i q^^ dBf,h mê-
me que dans ce chef-4'ceuvre de Molière» C'^ft ^Ile
iu père quifetrouve nis^^à-^ii^is (on fih'^^.&lquîjËins
le connoitre il alloit prêtera uihre. Le$ r^cft de^dtux
iralet^ y & celui d'une certaine Nteette « fmvante' de
Corinne , font aflcr plaifans ; & eii tourte pieeë eft
gaye & affez bien écrite. Voici la tmfiéme fiêné du
jremier aSe, qui donnera l'idée du ftyle de cet ou-
irrage.
SCETSU llh
î R G A S T E,
1^
Ouiy trop injude Mtrc y H fxqe vous cootsnter s - {
Taime trop , ce mépris ae -peue mi reliutsr^ ' 'A
Hé ! quoi , chère Micette 9 M iiqii de me d&feaobe ^ r 7
Toi de qui i'acteaddû 4lftè Am4cié fi tMuire ^ i ' t f ^
Quand ni vois qu*oB m^ir^iiltty (k qifon de 4c ofa^éoi ^ . i
Tu fécondes l'outn^e , U fàAaê eencce m«i ! ■ . : . Wi
, Sans raifoQ on me saille U ^^quocKe Ams cflftc* '
NI C l TT E.
C«nnoi(rez-vous pas bien l*humeur de ma maîtrefle ?
Monfieur n*en acciifez que ces maudits procès.
ta fièvre trouble moins , & ca^fe moins d'accès :
Tantôt nos chiens de Clercs , je crois qu'ils étoîent yvres ,
Monroient nos contredits â quatre-vingt-dix livres :
Je crois qu'ils les feront ençor monter plus haut.
Et fans argent conteiit menacent d'un défaut.
>„'
cu^
7
"^oS THE À TR E FRANCO IS^
I ' • ...
7ugez iî ce n*e(l pas pour nous mettre en colère j
Pour fupporter ces ftàis nôtre boùrft; eft légère ^
- Puiilrdépenfeeft telle à Paris aii)ontd'hui,
. Qu'enfin le plus ai£é n*7 vit pas fans ennui.
ÎR G A S T E.
Nicette | f'allois dire à cette îniufte ifemme
Que Tes feuls intérêts inquiètent nion ame }
Que |*ai chez le Notaire cnToyé Filipin ^
Où |e croit qiie )!autïu de iikrgent à fa fin ; '^\
Que fa néceifîté bien' plus quelle metouche :
Mais elle ili*a fermé trop brufq uement la bouche i
Sllen*! pas daigné fçulement m'écouter.
Çï I C E T T E.
C'étoit pat là 9 Monfieur , qu*il fàltoit débuter :
Vous auriez eu fans doute une longue audience.
l^aif dans ros complimens on perdroit patience t
Vous nous voyez cHagilns ^ ainfi que des hiboux ,
%t vous vous amufez â faire les yeux 4^ux*
Ma maître^ a raifon : i!arvû vôtre iblblefTe »
Par ma foi , quand on voit que néceffité pre(Iç.,
H faut avoir l'efprit bienchauCé de travers ^
Pour f'àraulbr encore à débiter des vert ,
A faire des chanfons , donner djs? (èrcnadesJ
Si nôtre Procureiir fe pjiyi^c en gs^mbades ,
£t qu'il eût pris fa part de cet beaux paCe-tems p
Vous auriez eu raifon s nous ferions tous conten^ r^
Mais ma foi ces gens là ne mâchent point à vuide.
Comme ditnaa maitrefle , il nous faut du folide
Et fur vos bouts rimes dont on s*eft bien mocqué^
Kous ne trouverions pas crédit d'un fol marqué. ^
Cependant il faut vivre , entretenir ménage,
i^e qui ne fe fait point avec ce badinage.
i[^royez-vous^ nous pouffant des foupirs fi fou venty
Ùu'ainfî que des Pluviers nous nous paifilons de rcnû
THEATRE FRANÇOIS. 407
^ que gens altérés p lu s qu*on ne fçauroit croire ,
^'appaifenc par ces pleurs que tous nous faites boire!
Laiflèz'là ces beaux mots > û. 4o\ix » fi mefurés :
C'eft l'or feul qui fait vivre » & non les mors dorés. ]
Si vous n'en trouvez point par Taide du Notaire »
Monfieur > dans ce logis vous n'avez rien à faire»
£ R G A S T £w
Va , Yen aurai Nicette : 6ç i*y cours de ce pas ^
A^tures-en Àrgine 9 2c ne me deilers pas.
Tiens , prends ces deux Louy t : ce n*eil rien qu'une tVaAçe | ^
Tu recevras de moi meilleure récompenfe.
NICETTE. - ^
Quoi 9 j'en auipis encor ?
£ H G A S T B.
. Va, va, celac*e(th«c. ■ '^
N I C E T TEi ' 5 1
(Ce que {e vous difois n'eft pas de mon eAoc ;^ r
Monfieur , je ne ûiis pas û Cotte ni fi bête }
Je vous crois libéral', )e vo us crois fort bonncte*
Mais ma m aitrefle croit que vous ne l'êtes point 9 ^
Ceft un étrange efprit. Il Faut ^ue fur cepoinc^
Vous la defabufiez fecourant fa famille. t
£lle en parloir tantôt aflez bas à fa fille ,
Et I e faifois femblant de ne pas écouter.
A l'avenir 9 Monfieur, je vousvei^x tout conteij.
On vous fait injuftice : ayant un père riche , . , .
On croit fes biens à vous ; & l'on vous nomme chiche $
Mais. •'•'.••
]& KG A S T E.
Va^ dans peu de retins , oi^ verra qui je fuis.
Et tu t'en fentiras encor fi je le puis.
NICETTE.
. MamattrefTe Cori nne etk l>onne Demoifelle ;
Ce que je vous ai diç>MondeurrAC vient point d'elle 1. -'^
Ce if
4&8 THEATRE FRAl^fOIS*
Vous devinez aiTcidc qui |c veux piticrj *
Mais il faut dans ce tems un peu- diâimukir.
Jufqu'au revoir y Mdniîeur.
E R O A i t È;
Adiétf , chère Nicette.
(SUJET DES GENEREUX ENNEMIS.)
Dom Fernandy Sdgoeâr Efpagnol i avait étsdciiQ-
jtraint pour une affaire dhdftfnéur diè fe iféfà(gief à
Lisbonne. Une huit, il entend un grand bruit à fa
porte : il fort^ Tépée à la main » &^voit un inconnu qui
difpute (a vie contre Gx hommes ^ il vole à (pn fe-
cour$; les afTaffins s'jétant enfuis ^t il réfugie chez loi
celui qu'il vienl :de'jdéUvrer. Ce brave inconnu écoit
l'amant de Confiance , (œur de Dém Fernand : il don*
noit une ferenade^â fa toâîCfeffê* lôrfi^tie feCôètc
d'Erneft , frère de Dôm Fernand & de Côfiftance , le
voyant fous les fenêtres de fa fœar > l^oblige à fe bat-
tre. Le Comte èft blefTé à fAOrt dans te coti^bat> &
fes domeftiques voulant venger leur maitre» àvoient
attaqué fon vainqueur , & alloient le tuer lorfqoe
3bom Fernand^tolt arrivé à fon feéôûrs. Dès que
i)om Fernand fçâit qqé d'ëtï celui dont il a jfauvé les
jours qui a bleffé fon frère , il lai déclare qu'il eftJn-
difpenfablement forcé de fè Bàttr^e contre lui. L'in-
connu fait Hmpodîble pôlïr h'êcré pas contraint, de
combattre (on libérateur ;. raa}s, il s'y détermine lorf-
qu'il apprend qu^il a rhopnçn*r,de.Xa fœur Léouoreà
yen^^r* I>Qm {^ri^nd aitc^tiét^^ ia.Bpit} dans
THEATRE FRANÇOIS. 40Q
h chambre ^ & ne Tavoit pas ëpoufée. Avant qae
d'en venir aux mains , ils ont Tun pour l'autre les meil-
leurs procédés ; ils fe fauvent mutuellement la vie.
Enfin ils trouvent un moment favorable, & ils fe bat-
tent : on les fépare , & l'on apprend à Dom Fernand
<que ce brave inconnu étôk le Seigneur Dom Pedre,
frère de Leonôrè. Là réconciliation eft d'autant plus
aifée à faire $ que lé Comte Erneft n'étoit point mort.
Ainfi podr terminer cette pièce, Dora Fernand époufe
Leonore> Sa Dom Pedre fa chère Confiance.
( SUJET DE LA BELLE INVISIBLE. ) L'in-
trîgue de ce Drame , quoique fort compliquée , eft
très^bien conduite. Cette pièce e A dans le goût du
Théâtre Efpagool ; & je crois qu'on pourroit en tirer
on grand parti » en y retranchant un peu. Dom Car-
Iqs , Seigneur Efpagnol > jeune 9 aimable , & qui vient
de remporter tous les prix>du tournois > e(l générale-
ment recherché par toutes les Dames de Naples. Le
Pue d'0{roQne> Viceroif vouloit le marier à une jeune
beauté ^ QQmmée Lucille : mais Dom Carlos étoit
épris d'une Pâme» dont il ne connoillbit ni le nom
ni la Qgtire , mais de qui il avoitreçu plufieurs rendez*
vous daos des lieux inconnus, & la Dame toujours
mafquée. Il écoit fl enchanté de fes grâces & de (on
eCprit^ qu'il cède Lucille fans peine à fon.ami Dom
P^r>^. Bm mème-tenas un jeune Jborame , nommé Ale-
xisy quîjL;{)Qur réunir les grands. bi^^s de famailbn,
devait épQ»£^ ia^cpvifme Marcelle^ tâche d'éloigner
410 THE ATRE FRA NÇO IS.
ce mariage autant qu'il le peut. Marcelle fe plaint de
(on indifférence : Alexis cherche à la raiTurer ^ & lui
dit modeftement qu'il craint d'être indigne d'eUe;'ce
qui fait répondre cei^ deux vers à Maircflle ;
Alexif , que le Ciel pris plailû: de former ^ — '
N*auroit point de défaut s*il fçavoic bien aimer»
Endn , ne voyant plus moyen d'échapper aux pre(£iD-
Ces inftances de Tes parens > il prend te parti de fe dé*
couvrir j & avoue à Marcelle que des raifbns de famille
revoient hit toujours pafler pour un hoinme , mais qull
étmt du même k^e qu'elle , Se qu'au lieu d'Alexis elle
fe nommoit Olimpe. Marc elle l'embrafTe ; & Dom
Alvare, quifur\rient& quiétoit amoureux de MarceL
le I en eft fi jaloux , que le pauvre Alexis a bien de la
peine à éviter un combat qu'il auroit fans doute mal
(bu tenu. Je croi^ qu-on devine aifémept que ce joli
Alexis n'eft autre que la belle inconnue. Mais comme
die vouloit abfolument éprouver la confiance de Dom
Carlos » elle lui donne un rendez- vous ; & au moment
qu'il efl le plus occupé à lui parler çie fon amour» il
efi tout-àcoup enlevé par fix hommes mafqués» qui
le conduifent dans un Palais fuperbe > o ù toutes lea
magnificences poffibles font prodiguées. Une femme
mafquée lui dit que fa màitrefTe^^la plus grande beau*
té de toute l'£fpagne 9 efl amoureufe de lui, &.va
paroître à fes yeux. En effet , Olimpe > car c'étote
ellerinème qui vQuloit juger de fes feâtimetisj paroJI
THEATRE FRANÇOIS. 419
(dans tout l'éclat de la [eanefle & de la beauté. Maif
Dom Carlos toujours fidèle à Ton inconnue , quoiqu'é?
Uoui des charmes d'Olimpe > fe refufe à fa tendrefle ;
elle le menace de la plus cruelle vengeance : il eft ^
inébranlable. Enfin tout fe dénoue chez la Vicereine;
& Dom Carlos, reconnoiflant dans Olimpe fa chère
inconnue, Tépoufe avec tranfport ; Dom Pçdre époufe
Lucille ; & Dom Alvare, Marcelle.
- -, - • ■ * ■ ■
(SUJET DES COUPS DAMOUR ET DE
FORTUNE.) Le Comte de Barcelonne en mourant
avoit laiifé deux filles, l'une nommée Aurore , l'autre
Eftelle : elles fe difputoient la Couronne. Eftelle foo-
Ceoott qtf Aurore ^ fille d'Elvire , ne pouvoit être rc*
gardée coitime légitime > puifque après fa naiflance»
le Comte ayoit époufé Ifabelle; 'qu'elle étoit le feul
fkqit de ce mariage > contraâé fuivant les Loix^ Se
par conféquent la (èule héritière des Etats defon père;
qo'envain deux ans après 9 Ifabelle étant morte ^ le
C^mte avoit alors épqufé Elvire, & avoit légitimé
jAiurore ; qu!élle ne pouvoit être regardée que comme
le fruit de l'amour , & non d'un lien facré. A ces
railbns afles; apparentes > Aurore répondoit qu'avant
fà iiaifencç> le Cotpte avoit pris les engagemens les
plus lŒcmnels avec Elvire ; qu'il avoit protefté contre
Ift^riolencê de ion père, lorfque malgré lui il Tavoit en«
'gagé avec Ifabelle ; qu^ufTitôt qu'il Tavoit pu il avoit .
H^ûmé ks premiers engagemens; ainfi qu'elle feule
4^^ THEATRE FRANÇOIS.
écoit l'enfanc légitime du feu Comte ; & qu'EfteUe nt
pouvoic pa$ être regardée comme telle» putfque k
mariage de fa mère étoit nul de plein droit. Cette
difpuce parcageoic toute la Cour de Barcelonne. Dom
I^othaire , Comte d'Urgel , & amoureuxxd'Aurore }
foutenoit Ton parti. Le Comte de RpuffiUon épris des
charmes d'Eflelte , armoit pour (butenir (es droits^
Pendant ces débats , Dom Roger de Moncade arrive
d'Afrique y où il s'étoit (ignalé par Tes exploits ; il voit
Aurore 9 devient amoureux d'elle , & (e range defoo
parti. Aurore» de (on coté , voit Moncade avec conw
plaifancé , & confie à Diane (à parente » & (œur do
jeune guerrier , (es fentimens pour (on firere* Mon-
cade paroit devant la PrincefTe. Après quelques mo^
mens de converfation , elle lui demande s'il a jamais
^té amoureux : il lui avoue qu'il a aimé quelques tems
une jeune Etéonore; elle le prie d'en &îre )e poi^-
trait : il veut profiter de cette occaiion > & croyant
qu* Aurore (è reconnoitroit dans ce portrait , il y met
toute la chaleur & la paffion poiSible: Aurore le con-
gédie fort mécontente de lui. Une autre occafion le j
delTerc encore auprès d'elle. Dom Lothaire, dans un 1
entretien avec Moncade » s'apperçoit qu'il eft amoa«
reux d'Aurore, & eu devient jaloux. Pou^iiieux
connoitre Tes fentimens , il feint de dire du tmn de&
beauté : Moncade lui donne le démenti ie plus «p
trageant; ils niettept l'épée à la main. La Princefib
furvienti §c les féparent, & veutfçsvpir le fujet de
THEATRE FRANÇOIS. 41 i
lear combat. Lotbaire attribue alors à Moncade les
mêmes propos qu'il avoit lui - même tenus contre la
beauté d'Aurore : & la Princefle au défefpoir , bannit
pour jamais Moncade de fa préfence. Ce Prince, ac«
câblé de cet ordre rigoureux » n'en eft pas moins ar-
dent à (but enir les intérêts de cette injufte PrinceiTe.
Ses ennemie viennent l'attaquer : il fe mêle comme un
inconnu parmi les foldats qui combattent pour elle.
Il avoit chaTïgé fes armes, & en portoit de très-fira-
ples > fur Jefquelles quatre S étoient gravées. On ad-
mire bien-tôt les exploits du guerrier aux quatre S »
& c'eft' à fa valeur qu'eft due la fuite des ennemis.
Pendant le combat , il avoit vaincu le Comte de Rouf-
fillon, & lui avoit enlevé une aigrette de diamans
^qu'il portoit fur fon cafque. C*étoit une faveur de la
Frinceffe Eftelle. Moncade, efpérant qu'en apprenant
les fervices qu'il vient de lui rendre , Aurore ferotc
moins en colère contre ^ui , va chercher Diane dans
les jardins, il y trouve la Princeffe endormie, il met
à ies pieds l'aigrette avec ces quatre vers.
Qui vous offre ces diamans ,
£(l le plus difcrec des aman^ ^
Prenez ce fruit de la viâoire y
Puifqu'il vous doit toute fa gloire.
Après cette galanterie n'ayant pu trouver fa foeur ,
il (brt du jardin. Aurore fe réveille , eft étonnée à la
V vue 4^ ces diamans & de ces vers , & demande à
4^4 THE A TRE FR A NÇO IS^
Diane qui la joint , ii quelqu'un eft entré dans le
jardin : elle lui répond que Lothaire eft le ied qai y
ibic entré. Aurore ne doute pas que ce ne (bit de loi
qu'elle tient & les vers & les diamans ^ & auroit bieô
mieux aimé qu'ils vinflent de Moncade. Lothaire
fnrvienty quij pour porter le dernier coup àfbnrivaU
montre une lettre qu'Efielle écrit à Moncade»par
laquelle on le peut foupçonnér d'être d'intelligcDce
avec cette Princefle. Aurore ^ furieufe de ce nouvel
outrage 9 rentre avec dépit dans ion appartemeoc.
Cependant pendant la riuit> le prati d'Eifelle voulant
faire un dernier effort > donne un nouveau combat;
mais le guerrier aux quatre S > détermine la viâroire da
côté d'Aurore. On ignore le fort du Comte de RoaC
fillon, & l'on croit qu'il a été tué; Dom LothairCi
qui dans ce brave guerrier aux quatre S > avoit re-
connu Moncade > & qui craint qu'un éclaircifTement 1
qui ne peut être éloigné ^ ne détruife toutes fes efpé-
rances , fait promptement faire un bouclier où les
quatre S font''reprérentéeS9& arrive chez Aurore ar-
ïné de ce bouclier > qui avoit tant imprimé de terreur
à fes ennemis : elle ne peut plus douter que c'eft à lui
i qui elle doit le Trône i & eft prête à le partager
avec' lui , lorfque Moncade paroit portant le même
bouclier. Lothaire veut le faire paiTer pour un impo-
fteùr. Aurore qui fent toujours du foible pour lui 1
quelque peine qu'elle ait à le croire innocent » voù-
droit bien qu'il le &iU Enfin pour terminer cette quo»
THEATRE FRANÇOIS. 415
relie $ Moncadéfaic paroitre le Comte de Rouffillon,
qu'il avoit fait prifonnier ^ & qui développe tout le my«
ftére* MoDcade eft reconnu pour le héros aux quatre S«
Lotbairet nepouvant plus déguifer la vérité* avoue tout
ce qui S'en palTé» & dit que l'excès de Ton amoUr l'a*
¥oit porté à chercher tous les moyens de perdre Moa-
cade» dont il reconnotflbit la fupériorité du mérite. Il
demande pardon à Aurore , confefle qu'elle doit la
préférence à fon rival ; la Princefle lui pardonne. Il
demande l'amitié de Moncade » qui la lui accorde ;
Efielle paroit en ce niioment. Aurore y fans voulc»t
entrer dans aucun éclairciflement y partage avec elle
les Etats de leur père ^fic lui donne le Comte de
Rouifillon pour époux : elle choiiit Moncade pour le
fien ; & pour conlbler Lothaire qui Tavoit bien fervié»
die lui fait épouifer Diane (à confine , & fœuf de Mon-
cade.
Voilà un bien long extrait pour une pièce très-
tnédiocre , & qui quoique fagement conduite , eft écri-
te (i froidement , que l'intérêt (è trouve confondu dans
des détails inutiles & faftidieux.
(SUJET DÈS APPARENCES TROMPEU-
SES. ) Lintrigue de cette pièce roule fur des événe-
mens peu vraifemblables , & fans intérêt; elle eft
médiocrement écrite y & je n'ai pu y trouver un feul
endroit qui méritât d'être rapporté. Dom Cefar des
Urfins eft amoureux à Naples de Floride > fille d'un
gfzxkà Seigneur ; il eft stimé de cette belle. Un joue
. 1
* 4i(^ THEATRE FRANÇOIS.
Qu'il fe rendoit à un rendez- vous qfu'eile lui avolt'aon-
né j il trouve fous (es fenêtres un homme qui M tire
iin coup de pîftolet ; il fe défend & le tue ; il effobli»
gé de s'enfuir , & il fe réfugie à Gayette. Floride in-
firuité du départ de fon amant > mais fans fçavoir'où
il s'eft réfugié > quitte la maifon de fon père pour le
chercher. Elle arrive à Gayette, & deaiande azylei
Ifmene > fille de Dom Alonfe , Gouverneur dé la Pla-
ce. Ifmené étoit promife à Dom Juan : è'étoit un ma-
riage de convenance ; ils ne fe connoîflbient ni Tun ni
Tautre. Ifmene rencontre par ha fard Dom Cefar, &
fe plaît à entendre fes galanteries : elle a deux ou trois
occafions de l'entretenir, & commence à prendre un
peu de goût pour lui. Dom Juan arrive, qui eft en-
chanté d'elle. Il le trouvé que ce Dom Juan étoit
ami intime de Dom Cefar^' qui dans le même iufiaot
qu'il a quitté fon ami > eA conduit en prifbn par ordre
du Gouverneur , qui fait arrêter ien même • téios &
conduire chez lui une Dame avec qui il étoit 9 & 99'il
prend pour Floride ; c'étoit fon peré qui avoit prié le
Gouverneur de les faire arrêter tous deux ; mais il
îgnoroit que cetPe prétendue I^oride qu'il envoyoit
chez lui, & que par refpeft pour le fexe, il nefeit
point dévoiler , étoit fa propre fille , qui étoït venue
un peu exercer fa coquetterie avec Dom Cefar. La
manière ambiguë dont il s'explique avec elle 9 fait
croire à Ilmene qu'elle eft reconnue de fon père ; &
elle eft prête à mourir de douleur. Deùk: ou trois ih-
très
THEATRE FRANÇOIS. 4if
très încîdens dans le même genre font arriver au dér
hoûment , qui fe termine par le mariage de Dom
Cefar avec Floride > & par celui de Dom Juan aveti
Ifmene,
(SÛJÈt IDE THEObOtlÉ- ) Ladiflas, Roi dé
Tîongrîe , ayant déclajré la guerre aux Turcs f fe met
à la tête de fon armée , & laide pour gouverner fon
Royaume pendant fon abfence Théodore fon époufe^
& Tindare fon frère. Tindâre avoit été amoureuse
dTrenie , parçnte de la Reine : il paffoit même pour
Têtre encore. Cependant, depuis quelque tems, op
'iie lui voyoit pqjnt les mêmes cmpreflemenS. Irenô
l'aimoit paffiônnément; & la Reine qui çraignoit fa foi-
"fclefle^ lui avoit défendu de voir ce Prince, jufqu'Ji
icè qu'il eut prouvé la fincerité de fes feux, en la de-
'mandant en mariage. La jeune Irène cherche & trou-
^Ve le moyen d'avoir une explication avec Tindare y Sf
~e(l au défefpoir du peu d^amour que le Prince lui témoi'
gne. La Reine qui s'eft apperçu du chagrin de Tin-
"dare , & qui l'attribue à la défenfe qu'elle a fait à Irène
de le voir, l'envoyé chercher. Ce Prince -a une lon-
' gue converfation avec elle ; la Reine eft furprife de la
"froideur avec laquelle il lui répond quand il lui parleî
d'Irené : il cherche à fe faire entendre ; mais il nofe
fe déclarer tout-à-fait. En effets il n'aimoit plus Ire-
fie, & étoit paftlonnépour la Reine 9 qui croyant quel
' par diflîmulation il n'avoit pas voulu lui avouer touÉ
Tome Hé D à
'4i8 THE ATRE FRANÇOIS.
l'amour qu'il reflentoît pour Irène, fort & va trouver
cette jeune beauté. Cependant un courîer arrive pour
lui annoncer la grande viâoire que le Roi vient de
remporter fur les Turcs : le Prince aulTi-tôt vient en
rendre compte à la Reine; 8ç l'ocçalion lui procurant
la fecilité de s'expliquer, iljui déclare Texcès de Va-
mouT quil reffent pour elle. La Reine lui fait fentir
avec douceur l'énormité de fon crime; fk bonté en-
hardit le Prince > qui ofe lui baifér la main. La Reine
lui défend de jamais fe préfehter devant elle, & le
quitte. En niême-tems, un nouveau courîer lui apporte
une lettre du Roi , qui lui masque qu'après la viâoire
qu'il vient de remporter fur Tes ennemis, étant obligé
de donner du repos à fon armée , il profite de cette
.0ccafion de venir revoir la Reine: il le prie de ne
l'en pas avertir j pour jouir du plaifir de fa furprife.
Xe Prince? ne doutant pas que là Reine ne révèle fon
crime, va au-devant du Roi,, & paroît devant lui pé-
tiétré delà plus vive douleur. Ladiflas qui aimoitfon
frère, lui en demande le fujet. Tindare n*a pais
honte d'ajouter l'impofture à fon crime , & confie aa
Roi que la Reine eft anioureufe de lui , & a voulu lui
faire fouiller le lit de fon frère. Ce trop crédule Mo-
narque etitredans la plus grande fureur , & fe livrant
tout entier à la colère, il ordonne à Raraeze, fon
confident , d'aller plonger un poignard dans le cœur
de cette infidelle époufe. Rameze obéit avec regret,
& vient bien-tôt après apprendre au Roi qu'il a exé-
THEATRE FRANÇOIS. 41g
tùté feS ordres crqels. Irène paroît enfuite , qui
prouve à ce Monarque l'innocence & la vertu de fon
époufe. Ladiflas fe IWre alors aux plus trifies regrets^
& vçut fuivre Théodore dans la nuit du tombeau^
Quand on n^ peqc plus douter des remords légitimes
du Roi , Théodore parok tout-à-coup à fes yeux : Iç
Roi enchanté fe jet^te à Tes genoux > & lui demande
grâce ; il l'obtieçç fans peine ; mais la Reine lui de-
mande celle de Tindare > fous con dition qu'il époufera
Jrene : Ton fent bien que Ladiflas n'avoit rien à refu-
Jffc àfa vertueufe époufe ; ainlî il pardonne à Tindare,
L'on ignore fi ce Prince en profite ; car la pièce finit
au moment aue le Roi. accorde la grâce au crimitiel
Tindare,
Cette Tragi-Comédie n'eft pas fans mérite ; Tintrî-
gue en eft très bien conduite : nulle éprfode n'en re-
tarde la marche ; elle eft fagemenr écrite , mais fans
aucune beauté de détail ; cependant elle a eu un grand
fudcès far le Théâtre.
(SUJET DE L'AMANt RIDICULE. Cette
pièce fût repréfentéè^dans un ballet que le Roi fit
exécuter en fa préfence «n 165c. elle n'a nulle inté-
rêt, & eft très médiocrement écrite. Toute l'intrigue
roule fur un certain Alonce , qui eft fort riche & fort
pokron I à qui le père d'KkbelIe a accordé la piéféren-
ce fur Léandre fort aimable & fort brave , mais fort
pauvre , & qui eft amoureux & aimé d'Ifabelle* En-
préfeQce de cette jeune beauté ^ Âlonce a une que
'4M THEATRE FRANÇOIS.
relie avec Damis 9 dont il fe tire fi mai , qu*I(abelle efl
révoltée de fa lâcheté. Pour fe rétablir dans l'efprit
de (à maitrefle , il propofe à Leandre y qui étoit fon
coufin, de feindre de prendre querelle enfemble 9 de
mettre l'épée à la main , & qu*eniiu Leandre fe laiflè
défarmer : Leandre y confent ; le combat s'engage, le
bruit fait deicendre Ifabelle. Dès que Leandre l'ap-
perçoit, il avertit Alonce qu'il ne veut pas fe laiffer
deshonorer en préfcnce de l'objet qu'il adore > &
qu'il aie à fe défendre : AIdnce lui rend les armes 9
lui cède Ifabelle > l'inditue fon héritier ^ & la pièce
finit.
LOUIS LE HAYER DU PERRON.
LES HEUREUSES AVTENTURES. Tragî-
Comédie en cinq adeS9 en vers , dédiée à Meflîre
François d'Averton , Comte de Belin 9 avec un argu-
ment. Paris, Ant. de Sommayille, 163 j. i/i 8®.
, ( SUJET DES HEUREUSES AVENTURES.)
Orante , Roi de Sicile > avoit deux fils : le plus jeune
nommé Tyrene , lui eft enlevé par des Corfaires Turcs.
Il fait la guerre à ces barbares, révient vidtorîeux,
mais n'a pas pu recouvrer Tyrene. Ce Prince, voulant
affurer la tranquillité de fon Royaumfe, prend le parti
de marier Atys fon fils aîné à la Princeffe Cloriraene;
mais pour éviter ce mariage, Atys qui ^toit amou-
reux de PolinicC) fe retire dans un defert avec CleoD
THEATRE FRANÇOIS. 4x1
n favori, & 6it courir le bruit qu'il eft allé voya-
;r* Polinice inflruite de la retraite de fon amant «
ent foulager (es ennuis. Cleon qui la voit arriver ^
inonce ainli cette bonne nouvelle à Atys 2
J*e(loi^ comme afToapi dans un profond fommeil ,
Lorfque ccAe merveille à ^ui rien n'eâ pareil ,
£c qui fcnt la moitié de votre inquiétude^
S*eu vient pour vous guérir en cette fqUcude s
Sitofl que j'apperçeu tant d'aimables clartés ,
Jenc.visplus d'ombrage en ces bois efcartés.
Si pour lors on n'eufl veu le point du jour efclore f
Tout 1^ monde eût juré que c'euil eflé l'aurore.
Il lui raconte tout de fuite qu'il a aùffi trouvé de
loi charmer les ennuis de fa (blitude y & qu'il étoic
svenu amoureux d'une jeune Bergère j qu'il avoifi
inçontrée en quittant FoUnice,
Apres que j'eus quitté cet objet gracieux ^
7e me voulois coucher fur un li: de fougère ,
Qui fembloit être fait des mains d'une Bergères
Alors je m'avifai defTus l'émail des fleurs ,
Une- jeune beauté qui contoit fes douleurs;
La curioficé me fit approcher d'elle ,
Afin que fon difcours m'apprît quelque nouvelle.
J'admirai fes appas , & dedans ce loifir ,
Mon CGCur tout tranfporté d'un excès de plaifir ,
Penfa trouver la mort près de cefte merveille ,
Dont la voix me tira les efprits par l'oreille.
Ha ! ma bouche ne peut vous la bien figurer ,
Puifqu'il faut feulement fe taire &: l'adorer.
Cette Bergère efl; nommée Amélie ; elle étoit fille
i:^ Duc de Parme ; Se poui: fe fouftraire aux violeiy
4^% THEATRE FRANÇOIS.
ces d'Alphonfe (on ennemi, elle s'étoit réfugiée dans
te deferCy & avoit pris les habits champêtres. Cleon
parvient à lui plaire, & ces quatre amans vivoient
les plus heureux du monde. Uniquement occupés
de leur aniûur , ils ne fongeoient çp!k leur bonheur.
Atys difoit un jour à Poliniqs,
Vivons en liberté , mon cœur •, il cft permis .
De recueillir les fraiis , qu'iaraour nous a promis:
Qu*il feplaiflen tes yeux. Ta beauté loi rellèmble ,
Tes charmes & Tes feux s*accordenc bien enfemble.
£t lorfqu*!! en cft yvre , 2c qa'il veut fommeiller y
Ta gorge en s*élevant lui fert d*un oreiller.
Le Roi ordonne cependant qu'on arrête Polinicc,
qu'il regarde conanxe Tobj^t de U fuite & deladéfo
béiffance de fon fils. At^^li^n^ veut point quitter foq
amie, & s'expofe à partager avec elle tout le danger
où la colère du Roi val'expofer. Dansle même tems,
on arrête un chef des Pirates » & on le .conduit au
Roi ; on peut juger de la furprife & de la joye de ce
Monarque j lorfque dans ce jeune Corfaire il xecûo-
noît fon fils. Tyrene ; la triftçflfe dans Jaquelle la Cour
étoit plongée , fe change en fêtes & en feftins. Un
événement encore fort heureux, c'eft qu'avant d'être
arrêté , Tyrene àvoït vu Glorimene , en étoit devenu
amoureux , & avoit trouvé les moyens de lui plaire,
Oranteau > comble de la joye , & voyant qu'il pouvoit
tout arranger à la fatisfaâion générale, envoyé cher*
cher Atys,on le trouvé occupé àcécîtér des (lances,
THE A TR E FRA NÇOIS. 4%J
mr exprimer le défefpoir où le plonge rabfence de
)linice. En voici trois couplets :
VcSioi y la terreur & la peine
Ont crevé les yeux au Soleil :
C*eft (ie quoi le Dieu du (ommeil
Ronfle en fa caverne d'ébene ,
le fera tous jours endormi ,
Pour la more de fon ennemi*
les fonges & les fancaifîcs
Rcporcnc auprès de Ton lia;
£c fon ambition n' eflit
Que des projets de frenaifles »
A delTein de défefpeier ,
Ceux qui le viennent adorer.
Qui m*a mis fur ce précipice ,
Ou les lutins font defchaînés :
Je ne crois pas que les damnés ^
• Soufdent un plus cruel fupplice :
£t parmi ces confuHons ,
3*ai les itaême^illufîons*
On le ramené à la Cour avec (bn ami Cfeon ; ce*
endant Tyrene ne perdoit pas une occafion de voir
L cbere Clorimene ; & comme il cohfervoit encore ua
eu les manières curque^^ il lui adrefle ces vers :
Quiè je baife ton front \ que mon ail idoladre.
Admire les attraits de t^ gorge d*albaflre :
Jamais tant de beauté ne ' contenta mes fens ,
Je n*ai point encor yeu dé charmes (i puidans : ,
FermcvS , ô mon Soleil , que ma main facrilege ^
Promené fon ardeur delTus ton fein de neige :
Que ce globe eft poli^ que )*aimcfa rondeur !
L*ambce ne peut avoir une plus douce odeur :
DdU
4^4 T^E A TRE FR ANÇOl S,
Les œillets que l'cfté fait briller fur la plaine ,
Cèdent à la douceur qui part de ton baleine.
Enfin Atys arrive , & auflîtôc le Roi le marie àPo
linice; Tyrene époufe Clorimene, & Clçon Amélie;
i^infi touc le mond^ eft cQntenc,^ ^
1633.
LE CHEVALIER PE HAUSSAIS- )
(LA C Y D rP P E. ) Paflorale en cinq adtes , en
vers, avec des chœurs & deqx prologues differensj
& une lettre de T. R. F* à M. deR. fpn cher ami«
Paris, Jean Martin, 1633. z/i- 8^.
(SU JET DE LA CYDIPPE.) Voici le début
d'une Lettre que Ton trouve au coron^encement de
cette pièce , qui peut faire croire que cet ouvrage eft
un chef- d'oeuvre. Mais qu'on le life ; & l'on fentira
bientôt combien cette Lettre efl: un tifTu de louanges
peu méritée^ % ^ combien le Chevalier de Bauflais a
çu de folle vanité de laiffer imprirçer cette b^ffe flat-
terie. Voici comme s'explique fon Panegirifte.
LETTRE A M.D.Ri
Moï^SlEUR, MONCHER AMI,
35 Eftant fur le poind de vous écrire > & de vous
» entretenir des; nouvelles que nous apprenons ici de
D3 tous les çndroits du monde , j'ai penfé q:ie vous ne
5> pouviez rien voir de plus agréable pour vous diver-
a> tiren voftrefolitude» qa'une Paftorale de Monfieur
:)3 le Chevalier de BaufTais* L'eflime que y oas faites
THEATRE FRANÇOIS. 4%^
^ d'un efprit fi excellent , vous en donnera d'abord
7» une bonne opinion ; mais vous ferez étonné d'une
?> œuvre fi rare » fortie des mains d'un homme 9 dont
>ï l'humeur & la profeffion ne iemblenc pas pouvoir
3> fouffrir deux heures d'eftude. Nous avons bien des
:>3 chofes merveilleufes dans noftre Langue ; mais pour
yo des vers nous n'avons juftju'ici rien veu de fembla-
5> ble. Et vous qui fçavez tout ce que la Grèce , l'I'-
3» talie & l'Efpagne ont produit de beau pour leThéâ-^
» tre, je m'afleure que vous direz que rien de tout
D> cela ne s'égale à cet ouvrage, Confiderez les meil-
33 leurs écrits d'Euripide , de Seneque , du Taffe > de
jfy Guarini , de Lope de Vega , vous n'y verrez point
Di des vers fi doux , fi fonnans , fi délicats & fi maje-
3> (lueux > une invention plus agréable , un deflein con*
3> duit avec tant de jugement', & une grâce contî-
3» nuelle & divertiflante, comme dans cet ouvrage,,
33 Je m'afleure même que vous ne trouverez point de
33 plus beaux vers dans les poëmes héroïques d'Ho-
33 mère, de Virgile &du TaiTe, Malherbe nouslaif-
3;> fant des Odes , qui lui donnent grande réputation »
33 & non pas injuftement ; car il a fiirpaiTé tous les
33 Poëres de fon temps , & ceux qui l'ont précédé
3> dans noftre langue : mais il n'efl: pas fi difficile do
33 bien faire; en petit deflein , que dans une pièce de
33 longue étendue : quand il a voulu entreprendre
33 quelque chofe de plus longue haleine, fes régies
33 ont perdu beaucoup de leur févérité , comme on
33 peut aifément connoiftre dans une tradudion. Au
33 refte pour venir à ce genre d'efcrits, il arrive (ba-
33 vent que les vers approuvés en la ledure, ne font
33 pas bien receus du Théâtre; & au contraire, que
35 ceux que le Théâtre admire , ne peuvent eftre leus
^ ^yecque attention ; l'Amynte, & le Paftor Fidp,
4xff THEATRE FRANÇOIS.
y> les deux plus belles Paftorales de la langue Italien-
-» ne ,ont reçeu ce mauvais traitenaent fur le Théâtrci
y» & fur-tout du vulgaire, qui préfère à rAmptCi
» (chef- d'œuvre de poëfie ,; de malheureufes farces,
» que les honneftes gens ne veulent pas leulement re-
>y garder : & de noUre temps n'avons -nous pas vea
35 ces belles Bergeries, eftre mefprifées d'une multi-
» rude ignorante j qui fe pafme de joye au récit de
» quelques vers impertinens , que Malherbe nommoit
o5 Vois pile:^ de IHoJlel de Bourgogne , & qui fe plai-
y> gnoit qu'une fotce populace en faifoit plus d'eiht
35 que de (es poëfîes : mais il n'avoit pas fujet de s'en
35 plaindre , fi ce n'eft peut eftre que BoifTet euft rai-
an fon de fe fafcher de quoy fes doux airs ne feroieot
» pas fi bien goufiez fur le Pont-neuf, que quelques
35 chaulons d'yvrogne , ou de garçon de Boutique. Or
35 l'Autheur de cette Paftorale aflemble Tagrément
35 du Théâtre & de la ledure , avecque tant de per-
35 feâion, que je ne fçaurois croire qu'on y puifle rien
3> defîrer. Ce n'efl: pas qu'il ait eu deffein , non plus
35 que ces grands hommes', de plaire au vulgaire;
35 mais il a pris foin de n'ennuyer perfonne. ce
Je croîs que le Leâeur eft étonné de voir ainfi
VAuteur qu'on élevé fort au deflus de tous les fe-
meuxPoëtes de l'antiquité; je vais maintenant paffer
à l'extrait de ce fameux Poëme.
Melindor , Berger, eft amoureux & aimé de la
Bergère Cydippe ; mais comme leurs parens font très-
pauvres , ils refufent de les unir enfemble : ce qui
plonge le tendre Melindor dans un tel défespoir, qu'il
quitte fa patrie ; mais l'amour l'y ramené bientôt. Peu*
THEATRE FRANCO IS. 4%y
^ant fon abfence, un Berger fort riche, nommé Pale-
mon, demande & obtient la main deCydippe. Cé-
toi€ la veille de Tes noces cfueMelindor arrive ; il ren-
contre fa maîtreffe , il lui fait des reproches ; elle.s'ex-
cufe ; & enfin,ils prennent le parti de s'enfuir le len-
demain enfemble. Malheureufement un Satyre qui les
avoit entendus , en avertit Pale mon : ilsTe mettent en-
femble en embufcade , attaquent Melindor > & le laif-
fent mourant.' ][l a cependant la force encore de fe
Crainer à la caverne d'un Hermite. Cydippe vient au
rendez- vous, trouve la place pleine de fang; & ne
doutant pas que ce ne foit celui de fon amant, elle
fe perce lefein. Dès que Palemon apprend cette fu-
nefle nouvelle , il fe tue auffi ; mais ce qu'il y a de
fingulier, c'efl: qu'aucun des trois ne meure. Un Ma-
gicien guérit Cydippe & Palemon ; & l'Hermite rap-
pelle Melindor à la vie. Malgré tous ces tragiques
événemens , Palemon fonge toujours à pofleder Cy-
dippe ; Çc le mariage fe conclud. La Bergère paffe
dans une chambre voifine pour fe deshabiller; Pale-
mon fe met tout fimplement en chemife fur le Théâ-
tre ; il attend avec impatience le moment où il va
jouir de l'objet qu'il adore , lorfqu'il entend la voix
de Cydippe profcrer ces paroles : 0 mon cher Melin-
dor, embrajfe ta Cydippe , & bien- tôt lui jurer qu'elle ne
fera jamais qu'à lui. Il entre en fureur , & fe déter-
mine à en époufer une autre. Jolas, père de Cydip.
pe > qui furvient dans ce moment , & qui n'eft au fait
4^8 THEATRE FRANÇOIS.
de rien > fe met fort en colère contre Palemon, fort
qu'il lui dit qu'il ne veut plus de fa fille y & qu'il va
donner la main à Lycoris , le vieillard lui répond ;
j o L A s.
Tu laides donc ma fîlle , ame lâche & brutale ,
Après avoir ravi fa^pudeur virginale ?
En voili le fpjec, ou )e ne l*entends pas. ^
PALEMON.
Hélas! ce doux penfer me caufe le trépas.
Vreflé d'impatience , au-delTous fa ceiuiure^
y%i touche.
J O L A S.
Quoi? parlez.
P À L E M O N.
Sa cuide blanche 6c dure:
Ccft ma feule faveur.
!
/
Jolas gronde Cydippe d'avoir ainfi perdu un fi boa
parti ; mais il en efl: bientôt çonfolé , lorfqu'on vient
annoncer à Melindor qu'un de fes parens, fort riche,
venoit de mourir, & l'avoit nommé fon unique héri-
tier. Les deux mariages de Melindor avec Cydippe»
& de Palemon avec Lycoris, terminent cette Paftora-
le , qui , quoiqu'en dife la lettre que j'ai citée , n'eft
m bien écrite ni bien conduite , & qui de plus eft char-
gée de plufieurs rôles épifodiques , dont je n'ai pas
rendu compte , étant très-inutiles au fond du. lujet»
1633.
CHABROL.
rORISELLE ou LES EXTRESMES MOUVE-
THEATRE FkANÇOiÉ. 4%^
*IËNS D'AMOUR , Trâgi-Comédie en cinq à&es;
en vers , dédiée à Monfeigneur le Maréchal de BaC-
fompiérre# Paris ^ Mathieu Colombel , 163 ji i/i-8*^»
* (SUJET D'ORIZELLE.) Cherulphe, Roi de
tombardie, avôît promiis fà fille Oriiielle à Eleonor»
Prince de foo faiîg; tnais cette Princefle aiûioit &
écôit aimée du vaillant Dorimori » célèbre par ks ex-
ploits. Un jour qu'ils s'entretçnoient familièrement
enfemble » Algenôr , Seigneur Lombard , qui avoit
été amoureux d'Orizelle , envie le bonheur de Dorî-
'mon, l'appelle en duel, & èft tué. Pour éviter la
colère du Roi , Dorimon fe retire dans un defeft fous
des habits d'Hermîte. Il lui fur vient encore un nouveau
"rivaL Dàttérîe , fils du Roi d'Italie, devient amoiï-
reux d'Orizelle, & la fait demander en mariage:
Cherulphe la lui refufe. Ce Prince furieux- de n'avoir
pas obtenu l'objet de fesdéfirs déclare la guerre au
père de fa maîtreffe. Il arrive en Lombardiè à la tête
de fes trotïpes , & accompagné d'Eurice fa fœur. H
cft néceflaire de fçavoir que cette Eurice étoit tou-
jours habillée en homme , qu'elle n*aimoit que les a^
mes, & que fous Ton traveftiflementelle avoit euplu-
fieurs duels , dont elle étoit toujours fortie viftorieufe,
Cherulphe regrette alors de n'avoir plus à fa Cour fi;
brave Dorimon pour le mettre à la tête de fcs arméei.
Orizelle profite de cette occafion , pour prouver à fon
père que Dorimon n'étoit point coupable , & qu*il
avoit été provoqué au combat pat Algenor. Le Roi
430 THEATRE FRANÇOIS.
connoiffanc fon innocence , lui pardonne & (bubaîtc
Ion cecpur ; Orizelle lui envoyé aufiî tôt des armes &
un cheval , & lui demande de joindre l'armée. H ar-
rive au moment qu'elle alloit être mife en déroute»
& où le Roi alloit perdre la vie. Il délivre Cherul-
phe du milieu des ennemis 9 rétablit les affaires 1 ga-
gne en6n la bataille , & &it prifonnier Datterie & fa
fœur , qui p'étoit connue que fous le nom de Damon.
On les conduit à la Capitale. L'heureux Dorimon,
plus amoureux que jamais, fe flatte d'obtenir Orizelle
pour récompenfe de fa valeur & de fes fervices.
Quand Eleonor, qui voit qu'il eftle principal obftacle
à fon bonheur , lui fait donner fous le nom d'Orizelle
un bouquet empolfonné ^ qui le rend fou. A force de
foin, on parvient cependant à le guérir ; mais ce qu'il
y a de fingulier, c'çlt que le premier u fa ge qu'il
fait de fa raifon, c'eft d'époufer Eurice. On peut
juger du défefpoir de la tendre Orizelle, qui croit
qu'on a encore enibrcelé Ton amant. Enfin voyant
qu'elle ne peut être heureufe que par la mort d'Euri-
ce & par celle d'Eleqnor , elle promet Ja main à ce
Prince , s'il combat & tue Eurice. Pour obéir à ce
qu'il aime , Eleonor fait appeller Eurice en duel ; cette
Princeffe fe rend à l'affignation , le combat commen-
ce , Eleonor bleffé alloit fuccomber fous la valeur de
la jeune guerrière , quand elle rencontra un poignard
fous fes pieds & tombe; Eleonor fe fert lâchement
de cette occafion , & la tue ; en mème-tems Orizelle
THEATRE FRANÇOIS. 431
amafle ce poignard . & profitant de la foibleiTe d'E-
eonor j elle le lui plonge dans le cœur. Défaite de (à
ivale , elle va trouver le Roi fon père , & demande
Dorimon pour fon époux. Cherulphe n'en avoît point
i'autre à hi projpofer , puifque Datterie venoit de
mourir y & qu'Eleonor n'étoit plus ; ainfi ce brave
Général obtient enfin le prix de fes travaux , & époufe
Qrizelle. Si la façon dont cette Princefle avoit levé
les obftacles qui s'oppofoient à fon bonheur , étoit un
peu barbare , du moins c'étoit une grande preuve
qu'elle donnoit à fon amant de l'excès de fon amour.
De plus , dans ce (iecle là ., on n'étoit apparemment
pas (î difficile fur les moyens qu'on employoic pour
réuflîr.
Je n'ai point de vers à citer de cet étrange ouvra-
ge , qui , je né fçai pourquoi, porie le titre de Tragi-
Comédie , puifque la quantité de gens qui meurent
pouvoit bien lui mériter celui de Tragédie. Je dirai
feulement qu'elle efl: médiocrement écrite , & encore
plus médiocrement conduite. Je ne peux cependant
pas m'erapècher de mettre fous les yeux du Leâeur
une pièce de poefie qui eft à la tête , & qui eft cer-
tainement le chef- d'oeuvre du ma^uvais goût & de la
difficulté vaincue. Chabrol l'a compofee en l'honneur
du Maréchal de Baflbmpierre; fon proteâeur.
431 T If E AT RE FHANÇOIS.
A N A G R A M Ei
François de B as sou pi erré
fuis des Amis près de ce bon Roy,
^jMonder fur fcs exploits un rcfpcd ^J^àvorablc;
^cnd/Jc à tous les mortels fa faveu/J adoj^ablc.
fc^ f faillir les deftiiis & les vaincre J^ la fois,
î>onobfta,^^t tousies traits de 1 'i]^£oT tu î> e même;
C^onfidércr Combien fon Prin (^c en fc C^ rct raimc
Qbjedc à vO^ haineux lcsi'0'ms d'un b^nfrançois.
^"^c me croyojfs vraiment atceTnt d ' i n g r a t ^**^tude,
C-^i je ne vou^5^ offrois ce J^ fruits de mon éC^tude,
^ont le naïf ^effcin J[)emande votre a^vœu;
tqt fi vous agréez c^s termes de la gu[>jrre^
b^urinant fur le J^zonzc \xixc fois . tûafFompicrre,
j^u lieu de m_/^rs,,^près onvoiis en croirj^ Dieu*
C-^ns doute Je^ afTaut^T fur les troupe Ck angloiffc
C^ont dig n e^^ d' e m p è jucher les étrangèrcO^ noifes,
^ ù leurs cQups redoublés fubirent vQtrc effort:
^^is fans ,/^ettre en oubli coy^mc à l'heure ^arsblcmc
**Qour n'approcher vos ^ /*^as avec I^c**^ tune même
K^ fuyo/t , d'où l'Anglois v/nt rccevou^ r la mort
^ncor^i mais le temps pour ThJ^ure mt>j difpeucc
^cft/^aignant mes efcrits aux /^ igueu ^sdufilcncfi
^ aJÇemcnt peut-on voir fans guer/2^e défaJ^Qoy.
n^^n cela vous avez ptéveu Voftr^J^ anagramme^
Qui difpofant mes vers par le fil de fa trame ,
Vous dit, Fais dss Amis au près de ce bon Rot.
, THEATRE FRANÇOIS. 43 j
boUGENOT, de Dijon.
LA FIDELJLE TROMPERIE ^TragiCômédiè.
^ARis, Aftt. de Sommavillè, 1633. in 8"".
LA COMEDIE DES COMEDIENS, Tragî-
Comédie, dédiée à Monfeigneur le Comte de Saule,
avec ian argument. Paris, Pierre David, 1631.
(SUJET DE LA FIDELLE TROMPERIE.)
Clorifée , Reine de Cypre , enchantée des grâces &
âe la valeur de Filamire, Prince d'Arnoepie, fe laifTe
trop aller aa pencKatit qu'elle a pour lut; 8t elle fe
(ènc bien* tôt dans un état que le mariage feùl peut
àutorifer. Filamire, qui de voit époufer Clarindé, uni-
que héritière du Trôné des Medes >' dès qu'il fçaic
Clorifée dans ce fâcheux état , fe fauve de fes Etats,
& va conclure fon mariage avec la Princefle de Me-^
die. Cependant la Reine de Cypre met au mohde une
fille qu'elle nomme Alderine, qui dès l'âge de douze
ans étoit déjà fi belle , qu'elle fait faire fon portrait
& la promet en mariage à celui qui lui apportera la
tète de Filamire. Armîdôre, Prince de Phrigie, &
neveu de Filamire , ayant vu un de ces pprtraits > de-
vient amoureux de la jeune Alderine : il fe déguife
en Amazonfe , & eft introduit chez la Princefle, (bus
le nom de Lucide. 11 eft fi frappé de fes charmes,
qu'il fait ainfi fon portrait:
Tàme ÎI. ^ ^
434 tntkfkÈ fAAffçms,
Sa divine beauté qui peut â^chir les ^VSjà ^^
Merveille de la terre , & chef-d'œuvre des Oair »
^u iàgemenc d'àihoùr deméiii^e fâAs e'3tefll£te \ •
Oeik le plus cher objet ^ue le Soleil coacemplr«
Sa face a des appas en fa proportion »
Qui font autant de traits de fa perfeâlon.
Sesicliéveux que l*or imr divinement coloré y
thxs oeâyx que ceux d*am6ûî: ni que ceux die l*à\itOit ^
Peuvent être à bon droit inis en conïpàrîi (bii »
Aux rais dont le Soleil enrichit l'otifion.
Son beau front où Thonneur relevé ùl viâoire ,
£ftun Ciel où Top voit deux fris en leur gloire^
Augures du beauftemsaux pluyes de mes yeux ,
formés de deux Soleiîs pleins d'éclairs radieux >
Dont |e fais mes i^iroirs , encore que nia face
Se perde bien fouvent dans cette bel]iB> glace ^^
Sttr<|ui deux foûrciU noirs témoignent un clefîr^
De faire duèil pour ceux que (es yeiix font mourir ^
Quand fon doublé corail Tun à lli'ucrc le tbiicbc ,
11 forme l'arc d'ambûr figure de fa fiôu^rhe »
Qui venant â s'ouvrir deflbus fon ceii piant ,
Découvre un beau tiréfbr de perles d'Orient*
^es foues où l'amour fon triomphe préplare ,
Sont de pourpf e de Tyr^ & de marbre ^e paré |
£c combien qu'elles foient de méine qualité ,
illes femblent pourtant difputer la beauté.
Son nez eil ù parfait , qu'il donne à (on ViCige
D*une féconde gloire un fécond avantage.
L'albâtie de fgn col , des grâces le tableau y
De ce nouvel Olympe e(l un atlas nouveau*
Sohfein où les vert]is élèvent leur empire y
^û un thrône d'yvoîce où la gloire rel^ ire.
Sa belle main , fon bras en blancheur nompar^ ,
Arrêieroient bien mieux la coùrfe du Soleil ,
Que ne fit autrefois la fille de Penée ,
lorfquMle ledoubloit fa fuite iafortunét.
THEATRE FkÂNÇOÏS. 41s
ISouï'W tra\reftlffëm€lht > Lucide gagne tellement
l'alfeâiOd B'AIderinCj que cette Princefle ne pouvoit
• pliîi quitter (à chëVé ÀM^6ne , qui a plufieuris fois
le bonteur de donner ibn fa pî-éfencê dés preuves de
^ t^ateun DaiÀ Rbis Voifins dîfclarent la guerre à ia
lUfitus ; la Jéàbé Amazic^ë léis colÉibat> remporte fur
-e\i:t la vtâbiré) £c tes<>t>)ige d^ fortir avec honte de
Kfle de Ghypt«. A^rè* de fi glorieux exploits j la
ileirsé ^ toujours dccupfe de la vengeance, lui de-
mandée d'aller combattre f^itàniîre , & de IW apporter
fa tteb* L'Amazont y càèftnt ; ihais en prenant congé
de là PritK^éfle % \\ lui àV6ue & Ton amour & fbn
fcxe, Atderîîie iéi défend de ne jarèais réparoître de-
vant elle ; au comble du défefpoir il part; Pendant
fon abfence, les deux Rois qull avoit vaincus, reiv
treut dans Me de Chypre^ & y mettent tout à feu &
à faog. La Reine &oit réduite aux derniers abols^
lorfqu'ô» entend retentir- le nom de Lucide; les Sol-
dats V à ^é uott fi chéri , lènte^rit renaître leur courage ;
îon combat ; & TAmazone fecondée dun brave guer^
rier> remporte la viâoir^^la pltis complçttei fait ks
dçQx Hois priTonnters > i6t le^ conduit à la Reine ,
t^U après l'af^oir félîfclté & remerdé , luidemaudèS
èHe aVempli fepromeffë; die Taffure que oui. La
Reine eft au déftPpbir : Lùtrde h ronjtfrc de le fuli
pendpe Jtffqtt'àu moment où efle ïuî ait en effet remis
etttrîè 1^ ïntiins ^1i tête defôà ^dla^e ^rbaiir. Quand
ii^^flUît é&y^m^ , Lïiddè i(kà\x\z dfôt^^e ^aès une
Y. e \\
4^6 THEATRE FRANÇOIS^
tente , où le premier objets qui frappe fes yeux i eft le
Roi Filamire endormi : l'Amazone rempliiToit par là
(à promefle ^ puifqu'il livroic fon ennepii eo fa puifiao-
ce. Filamire entendant du bruit fe réveîUe, reconnoit
Clorifée fi chère autrefois à fon cœur , fe j^cte à fes
genoux > lui demande pardon > & l'obtient. Lucide fe
fait connoitre pour le Prince Armidore y demande Ak
derine en mariage : la Reine la lui accorde; & poar
que rien né manque à la fête 9 arrive un Courier qm
annonce à Filamire que ht Reine » (on époufe % eft
morte. Ce Prince fe jette de nouveau aux genoux de
Clorifée > lui demande fa main , que la ReineJui do5-
ne avec tranfport. Ainfi cette pièce fe termine par od
double hy menée,
(SU JET DE LA COMEDIE DES COME-
DIENS.) Cette pièce eft d'un genre nouveau: elle
eft en cinq aâes ; les deux premiers (ont en profe ,
& fe paient entre les Cocnédiens d'alors» qoi fe dif-
putent les rôles. Ce n'eft qu*un bavardage fort long
& fort ennuyeux » fans aâion , fans intrigue » & dont
par cohféquetjt je n'ai rieri de plus à dire, L^s trois
autresaâès (bttt en versVc^ft «ne pièce que ces mê-
mes Comédiens repré(èhtént » & qu'on pourroit inti«
tuler la Courtisanne vertueuse. En voici le fujet.
Une fille nommée Califte» dont l'ame eft hopnête , eft
obligée > malgré elle^ d'embraifer la profeflîoa de Cour-
ti&nne, Oimandre en devient amoureux » mais die re-
jette (;on(lamment fes voeux. . Ce Simandre nvoit une
maitreflTe nommé» Gtarinde^ qu'il avoit quittée pour
THEATKE. FRANÇOISr: 4^7
jB^attacher uniquement à la jeune Courcifanne^ qui ^
comme je Vai déjà dit, ne veut entendre à aucune de
fes propofitiens. Elle n'étdit point fi cruelle pour tui
jeune François 9 nommé Filàme : elle s'écoit prife de
goût pour lui I mais e& fiiivant toujours (on- catàâère ,
c^eft-à-dire> aved toute la décence 8ç la pudeur pçf^
^ble. Après quelques aventures fort peu mcereflan-
tes f Clarinde, qui s'étoit déguifée en homme pour
épier les adioris dé foh vcjlage amat>t j ..vient rendre
vifite à Califte; dlei lui. vjQit entre les mains «irbijôu
lur lequel il y avoit des armés; ce liijou produit une
reconnoiflance. Califterôt' Simandre Te' ti^vfeni- frère
& fœur : dans leur enfance , Ils avoient tèùs deux été
enlevés par des Corfaires.. j.Çettç recpnnpiflance eft
bien-tôt fuivie d'une autre. Ils retrouvent leur père»
qui eft un homme cbnlïdér^bié dans yenife , & qui
enchanté de revoir fesenfans, dont il fecroybit^privé
pour jamais I les marie fc/^le chanip) Ifbivant leurs
inclinations. Simandre épbilfe €lariii^>^'^4a ver-
tueufe Califte fon cher FifeWjèV
Il y a dans cet ouvrage très médiocre > le rôle d'un
yalet , nonïmé Fauftin , qài eft - affez plaifant; Ge
Faoftin eft auffi gourmand qu'Arlequin: Yoici desK
ftances qui annoncent fon caraâère.
B A U S T I N.
Que mon maître eft cruel 'contre là foi promife ^
Et qu'il efl inhumain !
Que maudit foit le jdur ^ue je Vins à Vcnift y
Pour y mourir de faim I
4iB TME A TR B. FRANÇOIS»'
Tu yeftasy difoit-il , de$ Cités^pfus (upèrl>e$
Un miracle nouveaîi't : r
X^is iç n'y mang^ rien (|ue des Mif <&. ^telieçbef ^
It a*y bois que de Teau.
tc4!^ipltifçii^touilUmaf9U4i)t4i(« t
, A coi|rir ce hazard ,• ....
C*eft que je ereus la mer être de Matvoi(îey
• • Etlepayédé lardv • ' '^ * -
Mon maître j qui fçaVdit difpo(er mon courage ,
^ - Me diibic, haFàuftin,'
Tetpioiiidrcs mcxsfesotic ttuoidÀcbi aufromage^
Le foir & le matin.
Ji n^e t»^ifu^ y mais vpyee ma g)ii«^
Que Içs chapons au ri;,
Etoient au(n communs par coûté rlcalie «
: . Que ict choux àPàrir.
* ■ »^ •♦ • ■ j ' '•».'". ^
Mon eoâer qui déjà cfoyoît âtre aux partage*
'- ' -De cc'que j'âVofe cteU , '
' '■ Ma p tc0<{ic dr vi4nir «aglôuc|r ces ^fo^p» :
^^ <i4^ Ë^r i«ifc rHoit@iir 4p l^iilijv ;
Vendu mes bons habits : -
Maintexianc il me faut diser d'une fardine $ •
. £tf d'im peu de pain bis,
Vjirt^pff^tâ^ dsigons , de ji]ujikngquia^odi(Si
Sçait fi bien cajoler mon maJLCfetSç ^fraj^hiCe y
Qu'il nous dé vore tout.
Cependant que Simandreeftyci^ fa^pyij^^c;^
A prodiguer Ces doi\s ^ ■
La faim me follicire â^uvoir ^ ^qmtt;^ ^J^ »
Mç fouUr de chatdQ<u«
*- • r
~ i -^ ti*<y -
t -^ I»
9
VkxoMm qA U (oit a réncontrf te centra
' OÂbttjpoit fonaéfir:
Mon maille k fçali: bien , Se mes dcoo 8c mon veotrc
Ign 0115 le d^pll^.
• Il
Quoi qui.fe puiile offiric' :
Je me yeux décharger de fa faim , que les bêcea
N*oAC^û jamais foufiFrir.
DE VERONEAV, de Bloiy.
m
L'IMPUISSANCE, Tragi Comédie , Paftorale en
cinq aâesy en vers , jy^c ^yn a>rsu|penc & quelques
autres poêfies. Paris \ Tôuffainc Quînet, 1 6 3 i^. in. %!".
(SUJET DE LIMPUISSANCE.) En rendant
compte de plufieur^ P^^l^,*^^ ?"P^P^^^ 9 }}^ ^^ve°(
prévenu mes Lefteurs (ur la fimplicité de nos ayej^x »
qui regardoient çoj[nmç des naïvet|ç ipppçent^^ ,'ce
que nos mèeurf i^qi^ §:^nt prep^^ ppur
des ordures grQ^^^i^v J!^ Si^ reoipUrois cç{>|SjçÛE^ne
pas mon objet, ^ U déticatçSTe d^ (H>tr^ fi^ck xofêttoic
des entraves à ma.plamç , & me faifolt fiippr|m£f ces
endroits indécens r 11 eft vi^i > mais qui fervent à ca-
raârérifer & les Auteurs > & la façon de penfer d'à*
lors. Je ne peux même démontrer la pureté qui re«
gne à prérent Tur notre théâtre , que par comparai-
fon avec la licence qu'on y Ibùflroit autrefois ; & je
n'écris que pour ce Public éclairé » qm 9 voulant bien
fe tranFporter à ces tems peo policés encore, ne re-
garderont ces expreffiohs desfaonnètes, que comme
des mots vagues, qui caraâi^rifenc l'innocence de ce
Eciv
440 THE A TRE FR Al^fO ÎS.
iiecle. Molière, le grand Molière > s'eft fervi (oqT^t
ide termes & d'images 9 dont on rougiroic à préfent.
I^e théâtre étoit cependant déjà bien corrigé ; tùiM
n'étoit pas encore arrivé à ce' point de décence >qd
y règne aujourd'hui. Cette réflexion me fera peut-être
obtenir un peu d'indulgence pour ranaïyfe de cette
pièce 9 dont le titre feu) i^nqonce déjà l'indéçenc^.
L'Empereur d'Ethiopie avoit une fille unique 9 nom*
mée Philinte , qu'il voulait marier malgré elle au Prin-
ce Anaxandre , fils du Roi de Tartarîe. Ce Prince
«'entretenant de fon amour pour la Princeffe , avec
L|fiman Ton con(jdent , celui-ci lai dif:;
I . . . ■ ._ ,
' ... . > ■;
L Y S I M À ^.
Les filles ont rcfprit trop artificieux ,
Faignant de n*aimer pas ce qui leur plai^ le mieux :
Mais fi tous les defirs de ce fexe volage ,
Se pou voient en effet voir defïlis leur vifage ,
Sans doute avec plaifir nous ferions efibnnez'
D'y voir je ne fçay quoy bien plus loQg que leurs nez ^
Pour dire librement tout ce que )*ay dans Tame :
t^efk que je ne fers point de matière à leur flame :
Dans leurs perféflions tout eft plein de défaut*^
Parce que nous portons l£ meilleur qif illeur £aut*
7e paye avec inefpris leur plus grand artifice ^ -
^t quand on yeut-prétrnd^ à Itux faire fervlce p
Si-toA que les devins en fout datis nous cquçuSi^
Il s*cn faut rendre maiflre, & prendrç le deifu^
' • 'an A X A N D R E. "* *
. . « ",
Ce n'eft paS comme on vit avec une Princeâèj^
tt fi^ioft qUtf je fuis au|»rcs de ma maîtrcflc ^-^
Ûu éternel refpeû me retient arreflé , ^
It me fait feulement adorer fa beauté.
I » « < . > V • -. • . ... ■ • . l P '
THEATRE FRANÇOIS. 441
L Y s I M A N.
Mais dans un grand refpeâ , vous Tarez trop foofiètte :
Ceil yoifs qui la tenez trop long-temps defcouyene.
ANAX ANDRE.
Tu fçais bien que je fuis abbattu de Tes coups.
' L y S I M A N.
Faites-en toutdemefme &. la mettez deflous.
Le Prince deTartarie a une longue cooverladon
avec la Princeflè qu'il adore 9 qui le traite avec beau-
coup d'indifférence. Il confie fés chagrins à fon confi-
dent , qui lui répond :
L Y s ï M A N.
Ne vous eftpnnesf as de cette humeur 'reyeTdie:
C4r de fon|>.u^elj|ge dlç fait la déper<;}ie > '>
£t en congédiant un bien G. précieux,
. Illai faut quelque temps, à iiireles^feux. ' : ^-' ' J
les filles bien fbuvent contrefont les fôchéés, . ; •» ,
£t dans un corps ouvert ont des âmes cachées.
Leur face n*eft jamais d-acc6rd avec leutccrur ;
Vous verrez dans trois ]6urs fi je fuis un menteur*.
Les rideaux ay^t mis ce beau Soleil à l*Qm|>re ,
lors elle gpuflera, des délices fans nombre >
Cherchant par fes baifers le plaifant intered, \ •
D*un morceau dont le nom feulement lui déplaift. ,
L'on voit bien-tot après une fcène entre le Berger
Ifmin &Philene, yvrogne décidé. Voici une partie
de leur converfation.
I S M f N.
Le ventre eft votre Dieu j mais celai que je fers
^c borne Cqo pouvoir qu'au bout de l'univers.
44^ THEATRE rRANÇOlS^.
P tt I L E N E.
Votif merpriibz 9àcchus , le ptenant pottr oft autre y
Car c*eft-tm Dieu plus grand & plus gros que le ^dcrew
I S M I N.
C'eft qu'amour eft fubtil , & que Baccfaos efl gras-];
It l'ua stfe de Parc , & l'autre n'en cire pas.
P H î L E N E.
^ l!Q«r ^Qft^r yvTffxt&r^x dan;i rapoureulc brèche ,
Quand il cire de l'arc , nous y metcons la flèche.
I S M I N.
Tous faites de l'amour un difcours tout nouvea» %
S^aver-vous bien pourquoi l'on lui docme mt bandeau f
F H I L E N E.
I>D bandeau deTamour ^la rat^n eft bittf grsoder
Quand on dk amoureux i ç'eft-qu^ilfauc- que l'en:J>'^ ^ *- **^
Dans ta même (bène^ceSInteiie ft^ aîofi le por-
trak de ik makreflfe»
Elle a le cuI*beaucoup plus large que hi bouche;
Elle n'a point^de denci , & fans beaucoup d^effbnsr.
Me monflre quand fe y^ux ce qu'elle a dans fe cor{« ^
Indore qu'elle vemllc eftre touspurs bouchée ,
J^évice fon approche alors qu'elle eft couchée ?
Son^ol eft un peu long , & Ton ve^ncre eft biengr^nc!*
" Quelquefois en penfant Ik prendre file me preirf" j
'. ilSrarèi defoo amour rend ma -face vetoiefUc*'
I S M I N.
Mais en£n dices-moi Ton, 95>iç.
F ^ I L E N E.
C'el^labouiQîSew
Tm4TM mmÇOJS. 44)
11 eft néceflaire que je ^Çe cpi^PQ|cre quel étoitce
Berger Iftnîn t^ç'étpic Iç Prjnce ifl;^rifnie , ^tîi ^toit
amoureux & zyséi^h W^m^ik fibflÎDiie. Il L'avoit
demandé en mariage ^rjËpi^jefir} fon pere> qui l'a*
voit refiifé! Sf ^ ^^çf^t ^§]ém zM fiÇméiiSff ^ns
les bois où il s^écott fiitc Berger i inalgré tout (bu
amour pour la Prinij^eile ^lîlinc pestie défendre des
charmes d&Giurixeiie^# Bec^cel Si ildéikesîen 'faire
une occupation pour te diOràire dé fon chagrin. Cette
Charixene avoit époufS un Beèger, nommé Sylvain f
qui étoit imatfflfênt, elle felàMètTtbît Tans i^érk du
mauvais époux qu'on lui avoit donné. Sylvain Tayan^
fnrprife un jour qui verfoit des tàrmês» il lui dit:
Bon |ôur ^ chère moitié inpQaiyejixYa(jeiite i
Vient mefler fâ criileiTe avecque vos eimuis*
: -C -h-..A'R'.i-.x'e-n- €;:■ *■" -'
>l*e(^érez pas qu*aiafi ée bonCjduC'inè ddnéente ;
J'aimcrois bcauçft|y?j^4jça,X9^i;^ b9$m€S.a^l^• . t
DequoI VOUS plaîgnez-vous ? car je voiisVoîs changée:
Vous forgez |pncre moi des foudres dans votre oril.
•• ">,.-. %.^ . , . . ^.
CHAR I X E>ï i.
Au contrjî^>^ppfgf^, ,i|: V91W :%'s 9}îljigép.;
s Yl-îV AVIIN.
Maïs toutefoip^ jitt]màin>£àm que çela.Yoïis pici|ae p
Touche toutes totâuîâii^ftrâiidl inânimcoc.
444 THEATRE FRANÇÔis,
CHARtXENE. '
Vous pouvez Taf^Uer inftrament de mufîque ,
Oii vous n^avez joiié que des doigts reulemein;.
* . SYLVAIN.
SI mes efforts font vaîns , mespalHons font fortes \
Vous donnez trop de bUfme à pics fens refroidis. '
C H A R I X E N B. .
Voas ayez bien la foi , mais vos œuvres font txuMtei ;
Ce n*efl pas le chemin 4'aller en Paradis.
S XL V AIN. .
AM^ti^ ^ ▼os beaux ye\ix'où:ie reçois ma flâme^
Mon ame travaillée ftidure mille efforts.
C H A R î XEN E.
Vous avez bien raifon de travailler de Tame ,
N'ayant pas le pouvoiide Irâvaillet du corps.
• 5-T^l-V A I N^ ■ ' '• •'"
AyeZ'Vous oublie cette heureufe journée.
Où le flambeau d'hyiïieRefçl^rQit no^rCTâru }
C H,A R.IîX E N E. .•.;-
Dedans levrai flambeiau qtir ifert à Phymôûfe ; '^ * ' ^
Je n'ai jamais cogneu (^e y g^us «ulfiez du feu.
SYLVAIN. .,^
Le mariage fainû vous retient ^ilTeryie »:• •- n - ^ ^ • -
Sci liens né font pas r<3mpus facilement.
C riAR rx E NE*.'
m
la mort romçt ces lîeiis; & je vous croîiîans*vîc V '
Car les morts > cômitié Vous /n'ont point de>'mi3iuyeineniù
S YXV A I Ni. 2
Ke fçavez^ous pas bien que Tautheur de naiois - ^ '^- ^ >
Neveutpasqu'on^dcfikceiinlilce qu'ilafaiC' "o.
^
THEATRE FRANÇOIS. 44$
G H A R I X E N E.
Vous ne faites jamais un homme qu'en peiilture i
Il yous faut feulement une femme en pourtraiâ.
SYLVAIN.
Au moins que ma prière à la fin vous retienne >
Et n'imitez cas Tair ,ce lé ger élément.
CHARIXENE.
Ceft yous qui l'imitez : fa région moyenne ,
Aufli-bien que la yoflre , eft froide extrêmemexte.
SYLVAIN.
Je yeux chercher remède au itial qui yous pôlTede ;
L*amour pour yoflre -bien ya mon cceur efchauffant.
C H A R I X E NE.
Vous portez dedans yous un fouyerain remède^
Au moins pour m'empefcher d*ayoir le liial d'enfant»
SYLVAIN.
Mon Soleil , youlez-yous empefcher que je montre
Sur yofire chariot y dont je fuis le cocher }
CHARIXENE.
Duy ', car de Phaeton vous recevriez la honte y
Qui montoit comme vous, ne fçachant pas toucher.
irmin fait accroire à Sylvain qu'il connoit ud Magi-
cien » qui le pourra rendre habile au mariage; & liii
confeille d'aller le confulter avec fa femme ; le Berger
court la chercher : & pendant ce tems Ifmin s'habille
en Magicien. Le Berger & fa femme arrivent enfem**
ble ; & Sylvain adreflant la parolp au Magicien , lui
dît:
Otez-mot de Tétat où mon malheur m*a mis ,
Afin quVn embrasant Charixene , je puilTe
.Faife^utrtf chofe au lia , quq lui gratter la cuiiïè. '
44^ THEATRE FRA^l^ÇVîS:
Ifmin, par refpeâ^ dtt-iU pour fes démons > les fait
toas deax mettre en cfaemifed & ledrâifc laiifë^ leurs
habits à la porté i il côtiâbic Sylvàth daâs» un cabineti
& Charixene dans an à'ùti^e; il baife celle-ci fbaspré-
texte d'une Cérémonie magique, 6c lui ibàniè là gorge
tout à Ton aife , en l'aflurant que c'eft pour lui graver
fur le cœur des caraâères néceflaires à l'effet du char-
me. Enfuiceil leur fait aivàlèr à tous deux une potion >
qui doit bien -tôt lê6 pldttgbr dans le plus profond
fommeil ; aptes quttt il tes congédié; Dii fé doute
bien qu'il comptoit incëJftàmment rejoindre Cbârixe*
ne 9 & profiter dé fbh (bmméil. Pendant toutes Tes ce*
rémonies» Pbilinte pour éviter d'époufèr Abaxandre,
iê fauve de la Cour de fon père avec Licafte , fon
confident. Paflant enfemble près de l'endroit où SyL
vain & Charixenb aVoieiit iàiiTés ieuti^ iiieibfesr ; it^ pro*
fitent de cette occaiibti pobr fé déguifer , ils prennent
ces vètemens r uftiqués s '& laifTént à là pladé lés ma*
gnifiques qu'ils pbrtoîéûè. Le ÎBergè'r & là Bergère
font fort étonnée dé ité chàti^^^ï^^» & VHàiii fe fert
de cette drtonn^rice *, ^otir vabtér îe JpôuvbiV dé iï«
ch^rniés. Ils s*en vôht tous deux > & è*éhdortiient âivk
!a forêt. L'Émpétéut kVoit chVoyé dès G&tdes pour
lui ramelîet fâ fille > *èc le complice tiefe fbîte. Ces
Gardes rencontrent Sylvain & fa temmé endormis, &
ayant reconnu les habits qu'ils portoient, croyentqAe
c'eft la Princefie & fon cbnfident ; màîè lés Voyant
plongés dans un fi profond fommeil > 11 lés foupçon*
THEATRE FRANÇOIS. 447
fient d'èCft morts. Ils apperçoivefat biën-côt aprëi Phi-
iÎDte & LicaftbVqoi cherchote^c à fes éiieer« Qà les
prend pour les affaffins de la PrincefTe , & on les ar-
f été : on lëè tibd'dtlit tout de fuite a^ec c^ deux cdrpt
^Qe Von crdt nfti):t6 ^ devant PEmperenr -y qui (ans èrbp
èxaniltier te$ Hlàgs^ f droit ià fille ihortè > & d^Iol-e
fon mul&ettr. Il tzk niettre en prifon Pfaititlte & Ëi^
cafte qu'il tite ï^connok pas > & que par leurs v€t^
mens il pretid pôar un iBerg^r 8c une Berger<e« llfmin,
toujours vêm en Magicien» ie pràehte àlbts à l'Erti-
|>èrèur > & lui {^t'ôitDet dé rendre là vie â ces deux ca-
davres i S'il veut M réràiettre le ^Hlbtihier & là pdfôh*
i^ereu L'Em^^iHr y bénftht> lOhih dôhnè iiii brëU
irage à Sjrlvaîtt & àCharîkenei qui les rfetfre du fofr-
meil où ils étoieét pion]gés » & emmené fôhs tâVdèr
fe Berger i& là feérgfere , iqù'il côndaît bien vïte en
Arménie. Il le &ic tônnbicré aWs à Philiàte, & l'ë-
jpoufe. On apprend bientôt après là mort dé l'fimpé-
teur ; 8clé Frincé part pour aller (e Hiiré réconnoîtte
Empereur d'EthîojSie. Ceft aînfi que fc termîhè cette
piiece, dont la conduite n'eft pas plus figé que le
ftyle. On né feràpébt-écre pas fâché de fçavc^r , qu'À-
naxandre , obligé de renoncer à Philinte ^ fe fait Hér-
sDÎte.
1634..
LAtAKR'E.
L À C L E 6 N I D E , Tragi . Comédie , PaHorale
448 THEATRE FRANÇOIS.
dédiée à. M. le Duc de Luynes y Pair de France i
Paris» TouiTaint Qainet» i6}/^.An'S^.
( SUJET DE LA CLEONIDE, ) Eimlien & Mar-
dan y braves Capitaines de la ville de Marfeille y par*
cent pour aller hite la guerre aux Turcs y dès qu'ils
ont vu accoucher leurs femmes : celle d*EmiUen nûc aa
monde un garçon ^ celle de Marciqn un0 fiUèè Fea
après leur départ» une pefte cruelle ravagea Mar»
feille : pour faire éviter ce danger à leurs enfans>ces
deux tendres mères les envoyèrent dans un village
prochain , & ordonnèrent qu'on leur cachât leur naif-
fance ; après avoir pris Ces fages précautions» elles
moururent toutes deux. Ces deux enfans» croilTanteo
âge & en beauté» conçurent bien-tôt le.pliTs tondre
amour l'un pour l'autre ; mais celle qui les élevpit
s'oppofolc toujours à leur union , & fidelle à la pro-
mefTe qu'elle avoit faite à leur mère» elle ne leur ré-
Veloit pas leur naiflance : il étoit afTez diiScile dans
cette poûtion de dénouer cette pièce. Voici ce qufi-
magine l'Auteur pour y parvenir. Il fait s^triver dans
le village où demeuroient ces deux jeunes amans i
deux vieils Hermites à barbe blanche. On imagiee
aifément que ces deux Hermites étoient Emilieo &
Marcion » qui , à leur retour de la guerre » ayant trou-
vé leurs femmes mortes, & n'ayant pu découvrir ce
qu'étoient devenus leurs enfans » avoient pris le parti
de fe faire Hermites» Illeur étoit arrivé la nuit pré-
cédente
THEATRE FRANÇOIS. 449
(nidente > quelque chofe de bien finguliér & de bien
heureux ; c*e(l que leurs différences femmes leur
étoient apparues en (bnge ^ & leur àvoienc appris que
ces enfans^ dont ils avoient pleuré la perte, vivoienC
dans tel village v fous le nom de Celidor & de Cleo-
nide^ qu'ils s'aimoient tous deux padionément» & qu'il
falloit qu'ils allaiTent dès le lendemain les chercher »
les reconnoitre , & les marier. Le rapport de ces deux
foDges leur en pérfuade la vérité ; ils partent donc
pour ce village y où en effet ils retrouvent leurs en«
fans 9 ils les enihraffent , & dès le même jour lesuniC
fent Tun à Tautre. On trouve dans cette piece^ une des
plus mauvaifes & des plus mal écrites que j'aye lues >
plufieurs épifbdes fort étrangères s^u fujet; entr'autres
celles d'un Géant énorme » qui caufe beaucoup dm
frajreur aux Bergers & aux .Bergères > & dont on
trouve le moyen de fe rendre maitre» en profitant d'an
inftant où il étoit couché tout de fon long pour .boire
dans la rivière , i!e fongeant en ce moment qu'à étan«
cher fa (bif : tous les Bergers fe jettent fur lui , Tatta*
chent avec de grofles cordes , & l'enferment dans une
cave. Une autre qui n'eft pas plus intéreflante 9 eil
celle d'un Berger plus fat qu'un petit maitre, qui
fe vante des faveurs qall n'a pas obtenues , qui mé-
prife les Bergères qui lui témoignent de la tendrefle»
& qui finit par être lui-même l'objet du mépris de tout
lecantoUê
Tome IL Ff
Ç^So THEATRE FRANÇOIS,
T
BENESIN.
LUCIANE, ou LA CRÉDULITÉ' BLAMA-
BLE, Tragi-comédie, Paftorale , dédiée à M. de
Viilemontée 9 Incendant en Poicou , avec un arga-
iDenc , un éloge à l'Auceur , & deux Madrigaux*
Poitiers, Abraham Monnin , 1634. î^^-S^.
- M. Beauchamps,en parlant de cette pièce, dit qu'elle
^11 rare , & qu'il n'a jamais vu que ce feul exemplaire.
(SUJET DE LUCIANE.) Cette pièce, dont la
(Coupe refTemble à celle de mille autres , dont j'ai déjà
donné l'i^nalyfe , eft fi froide & fi médiocrement écri-
te f que je n'y ai pas trouvé un leul vers que je puiffe
cker. Luciane aimoit le Berger Celidan , & ce Ber*
iger Tadoroit ; une autre Bergère t nommée Felife y
iécoit amoureufe de Celidan^ & n'en recevoic que des
mépris. Pour fe venger , elle cherche à le brouiller
avec fa chère Luciane ; elle va trouver cette tendre
mais trop crédule Bergère , & lui perfiiade que Ce-
lidan eft infidèle f & qu'il n'eft occupé que de la jeune
Clarice. Luciane fe livrant toute entière aux toar-
inens de la jaloufie , à Tinftant même qu*elle rencon-
tre le fidèle Celidan., fans vouloir l'écouter un inftant,
le bannit à jamais dé fa préfence. Ce Berger pour fe
punir d'avoir eu le malheur de déplaire à Luciaoe,
prend le parti de s'aller précipiter dans un fleuve pro-
chain : au moment qu'il alloit exécuter ce funefte pror
THE ATRE TRA ïfÇO IS. 4^t
Jet » il en eft détourné par la compaffiori que lui inft
{>lre un cavalier qu'il voit tomber d'un coup d'épée>
que lui porte Ton adverfaire. Il joint le vainqueur %
nommé Ërafte 9 qui lui raconte que le fujet de leut
combat > étoit pour une jeune Bergère la plus belle
du canton 9 dont tout«à-coup ils étoient tous deux deve*»
nus amoureux y & dont ils fe difputoient la poiTefConé
Après quelqu'autrè propos j Celidail reconnoît quô
c'cft de fa chère Luciane dont il s'agit ; il compte alors
fbn hiftoire à Ef%(le , & le prie même de dire à cette
Bergère , que ne pouvafat fopporter fon ccutroux > il
jiHoit fe donner la mort. Erafte lui promet d'exécuter
(à commiffion ; mais lui protefte que quelque cruelle
que paifle être Luciane > il en aura la jouiflance* Ils
fe réparent en cet inftant. En effet , auffitôt qu Erafte
peut joindre Luciàtie» il lui raconte la fin tragique de
Celî4ao« FéUfe .qui étoit préfente à ce récita déchi^
rée par fes remords 9 avoue toute la noirceur de (on
totrigutS) & dévoile linnocence du malheureux Ber^^
ger : Xuciane fent renaître toute ià xendreilb) & fo
livre au plus affreux défdpoir. Cependant Céridan» (e
rappeliatit les dernières paroles d'Erafte, & Cràignane
jqu'il ne Voulût attenter à l'honneur de fa trop chère
Luciane^ veut, avant de mourir , la délivrer de ce dan^
ger> & aller combattre ce téméraire. Il va prendre
l'épée. de celui qu'il croit avoir vu périr de la main
d'Erafte j il le trouve encore en vie, le fait fécouriri
Hc loji emprunte fes armes. II ya fur le champ cher*
Ffii
43X THEATRE FRANÇOIS.
cher Erafte y il le trouve avec Luciane; il le combat i
& en triomphe. Luciane reconnoit fon amant y lui de*
mande pardon > l'embrafTe & l'époufe. Et pour que
tout le monde foit content & heureux ^ au dénoûmeoc
de cette pièce, il fe trouve à point aflez de Bergères
pour devenir les époufes de tous les Aâreurs qui ont
paru fur la fcène : il n'y a pas jufqu'au bleflfé qui trou-
ve aulfi une femme» & qui fe marie malgré l'état où
M étoit«
1634* #
LE MATOIS MARY , ou LA COURTISANE
ATTRAPÉE, Comédie en trois afbes, en profe,
imitée d'un Livre Efpagnol , intitulé : El Sagai ^^^^
Marido examinàdo , appropriée aux pratiques de Pa-
ris. Paris, Pierre Billaine, 1634.2/2-8^.
(SUJET DU MATOIS MARY.) Lariflc,
Courtifanne habile , pour fe mettre à l'abri de la iPo^
lice 9 forme le projet de fe marier ; mais elle veat
choifîr un homme , dont elle foit (ûre d'être la mai-
trefle 9 & qui ne trouve jamais rien à redire à fa con-
duite. On lui en propofe plufieùrs qui ne lui convien-
nent point par différens motifs* Enfin on lui vante
tant la patience & la docilité d'un certain M. du Pi-
peau ) qu'elle s'informe (i tout ce qu'on lui en a dit eft
vrai. Un intriguant ami de ce du Pipeau ^ qui, loin
d'être un imbécille » étoit au contraire un fin matois >
qui ne fongeoit qu'à s'emparer du bien de la Courti^
tiiào&e» fe préfente à eUe^ & pour la déterminer , lui
THEATRE FRANÇOIS. '451
iraconte ainfî , ce qui écoic arrivé un jour à fbn ami
avec fa défunte femme*
^> Vous (çaurez donc que ce bon corps d'homme
9> donc eft que (lion > étant marié avec la défunte Lu-
33 crece^ n'étoit point ombrageux ni fcrupuleux com-
33 me il y en a , lefquels dès qu'ils voyent quelques
y> courtois courtifans » baifer leurs femmes , fouiller
3> dans leur fein pour détacher peut-être une épingle
:>y qui les pique > OU fous leur jupe pour renouer leur
3> jartiere y ou leur rendre quelque autre forte de fer-
33 vice > fe fcandalifent auffi-tôt > & s'imaginent qu'il y
3> a du mal , quoique cela ne fe fàffe jamais que par
33 amitié; il ne s'ofFenfoic point auffi des privautés»
-yy qu'un certain cavalier appelle Monfieur Guilotier »
;» fils d'un Tréforier de J'Epargne , avoit avec fa fem*
35 me , ni des fréquentes vifites qu'il faifoit en (à maî-
» fon , en laquelle , combien qu'il fut de fort noble
3> extra&ion , il ne fe dédaignoit point de fervir de
^> pourvoyeur & d'argentier ; car il la rendoit fi bien
» fournie de tout ce qui y étoit néceffair© , qu'on n'y
3? connoiflbit point l'indigence ni l'incommodité. Il
3:> eft vrai qu'il couroit un bruit que c'étoit lui qui
3> avoit cueilli la première fleur de pudicité de Lu-
>D crece ; mais le Cavalier s'en excufoit fort > & ju-
:» roit que> quand il y entra , il trouva des traces qui
3> lui témoignèrent que plus d'une douzaine d'autres
^ y avoient été devant lui > [ & certes on le pouvolc
F f iij
4S4 THEATRE FRANÇOIS.
>y bien croire ainfî: car c'étoit un Gentilhomme fort
y> véritable > & Lucrèce étoit auflî trop habile femme
j> pour l'avoir laiiTée fi long-tems fur la plante en dan-
3> ger de flétrir. ) Et comme ce Cavalier étoit gran-
35 dément afFedionné au bien de la maifon de Mon-
» fieur du Pipeau , & qu'ils étoient en bonne intelii*
D> Hgence enfemble, quand il avenoit qu'il avoit à foire
y^ de Lucrèce, (laquelle fçavoit un fçcret pour mo-
D3 derer une certaine infirmité à quoi il étoit fouvent
D3 fujet) elle l'alloit librement trouver aux champs ou
yy à la Ville ; & laifToit quelquefois Monfieur duPipeaa
>> veuf & Concierge de fa maifon pour quinze ou à
D5 vingt jours feulement, fans que jamais il y trouvât
>) rien à dire ; au contraire il louoit fa charité y & le
a> foin qu'elle avoit de conferver un fi bon ami. Or un
yy jour que du Pipeau vit fa femme en fon déshabillé,
D3 & en volonté de ne j^oiiit fortir du logis , il prit
yy envie de s'aller pourmener ; il lui demanda humble*
y> ment congé , & elle lui ayant donné % il s'en va.
» Il ne fut pas plutôt hors de la maifon , que ce cava-
3> lier envoya un carofle à Lucrèce , avec une lettre
3c> par laquelle il la convioit de fe trouver en un cer-
5> tain lieu de la Ville où il failbit une collation avec de
p> fes amis > enfans du Pérou comme lui. Elle , pour
3> éviter l'ingratitude, s'habille promptement, & fe
:^3 rend au lieu où elle étoit mandée. Mais voici un
55 étrange rencontre : Monfieur du Pipeau fut long-
ea (ems ^ çbçrçber compagnie ^ Ç2^r il n'aypit pas tanc
THEATRE FRANÇOIS. 45 S
» d'amis que fa femme ; & l'ayant trouvée ^le deflein
33 & le chemin de leur pourmenade^ le$ obligea fans
3> y penfer à paHer droit devant la maifon où étoit
33 l'affemblée du Cavalier ; & comme il y avoit force
yi monde , & que c*étoit dans une grande falle qui re«
» gardoit fur la rue d'où l'on entendoic le bruit dç
D3 leur paffe tems, Monfieur du Pipeau leva les yeux
3> aux fenêtres de cette falle , où il apperçut le cava-
yy lier appuyé de côté auprès d'une Dame f à laquelle
y> il manioit le fein , qu'il ne peut envifager ni reco*
» gnoiftre. Il ne fit pas femblant de irien , il pourfqi-*
3> vit fon chemin avec fa compagnie. Le foir venu ^
yi & la collation faite > Lucrèce s'en retourne chez
3> iPe ; & s'étant deshabillée & remife en l'état qu'elle
» ^toit quand elle fut mandée ^ & qu'elle ne faifoic
33 pour autre confidération que pour être plus à fon
>» aife ; car elle ne craignoit rien , elle étoit ab(blu<i
yy ment maîtrefle. Voici le bon di^ Pipeau qui revient
>3 de fa pourmenade > avec un vifage fort trifte & mé«
30 lancolique ; de quoi Lucrèce ne s'appercevoit pas
x> encore. Mais étant à table ^ & voyant qu'il ne maa-
» geoic point , elle reconnut qu'il y avoit quelque cholê
» d'extraordinaire en fa perfonne : car c'eft un hom-
->:> me qui eft fort fain f qui digère fort bien , & qu|
>» ne manque jamais d'appétit : là-deflus elle lui de-
3) mande ce qu'il avoit , s'il étoit malade 1 s'il lui étoit
D3 arrivé quelque malheur depuis qu'il étoit forti » s'il
x> avoit perdu fon argent au. jeu > ou fa bourfe par les
Ffiv
4SS THEATRE FRANÇOIS.
» chemins : mais voyant que plus elle fe mettoit es
» peine de l'enquérir , & plus il devenoic muet , elle
» le mené dans Ton cabinet» & le menace de lui faire
3> mettre chauffes bas, s'il ne lui difoic vitement ce
» qui Tobligeoit de faire ainfi le piteux ; car elle le
33 châtioit comme (on enfant : & lors en lui deman-
9> dant pardon , il lui dit : Mademoifelle Lucrèce ;
» (car il ne Tappelloit pasfafemgie) c'eft un poignant
9» regret que j'ai dans le cœur de vous voir méprifée
:» de la perfonne que vous affeâionnez le plus qui me
» rend ainfi mélancolique. ,0! eft-il poffible qu'il y
:» ait des gommes fi méconnoiifans de leur bonne for-
3> tune ? Hé I n'ai-je pas raifon d'être affligé , ayant vu
^ cette après -dinée Monfieur Guilotier à une fÊlb-
v> tre > qui careflbit une Dame ? Il me fâchoit fort de
» vous apporter cette mauvaife nouvelle : mais voas
>9 me contraignez à la dire. A l'inflant Lucrèce fit un
5* 'grand éclat de rire : & eft ce là toute ta fâcherie,
3) lui dit-elle ? £b! gros (bt que tu es , nejoi'astu pas
yy bien reconnu , c'étoit moi. Puis en lui pafTant la
y> main dans les cheveux comme un goujart qui fe
a> peigne, elle lui conta que le Sieur Guilotier l'a voit
y> envoyé quérir, & tout le refte. Et lui, comme s'il
a> fut revenu, de quelque évanouiflement , fit un grand'
ac» foupir : vous me redonnez la vie, dit il , & me tirez
3» d'une grande inquiétude.
Ce trait de boobomie détennina Larifie , & elle
THEATRE FRANÇOIS. 40
l'époufe. Dès que la cérémonie eft faite > le Seigneur
du Pipeau , n'ayant plu^ befoin de feindre 9 fe rend
maître dans la maifon 1 devient un mari févere y fe
mocque des plaintes de fa femme ^ & chafTe tous fes
amans.
»
Cette pîece occupe elle feule un volume entier de
278 pages ; les Scènes n'y font pas diftinguées > & le
Dialogue en eft fbuvent très plat , & quelquefois ob-
(cène. Il y a une double intrigue qui y jette beaucoup
d'obfcurité : je n'ai rendu compte que de la princi-
pale.
1634.
GUYON GUERIN DE BOUSCAL, de Langue-
doc , Confeiller du Roi , Avocat au Confeil.
LA DORANISE , Tragi - Comédie Paftorale en
cinqades, en vers, dédiée à Mademoifelle Margue-
rite de Rohan. Paris , Mabre Cramoify , en la Bou-
tique de Langelier, 1634. m-8^.
LA MORT DE BRUTE ET DE PORClE ,
OQ LA VENGEANCE DE LA MORT DE CE-
SAR , Tragi Comédie , avec un Prologue , en vers
de la renommée, dédiée à Monfeigneur le Cardinal
de Richelieu. Paris» Touflaint Quinet , 16^7.
L'AMANT LIBERAL , Tragi-Comédie. Paris ,
ToufTaint Quinet, 1637. i«-4^«
CLEOMENE, Tragi-Comédie, Paris, Antoine
de Sommaville > 1640, in 4^,
458 THEATRE FRANÇOIS.
DOM QUICHOTTE DE LA MANCHE,
Comédie en cinq ades, en vers. PakiS, Touffaiitf
Quinet, 1640. i/i-4^«
DOM QUICHOTTE DE LA MANCHE,
féconde partie 9 Comédie en cinq ades , en vers. Pa-
ris y Anu de Sommaville, 1640. in 4^.
LE GOUVERNEMENT DE SANCHO
PANSA, Comédie en cinq ades, en vers. Paris,
Ant. de Sommaville, 1641.1/1-4°.
LE FILS DES AD VOUÉ , ou LE JUGEMENT
DE THEODORIC, Roi dltalie , Tragi-Cgmédie.
Paris, Ant. de Sommaville, i64z. i/z-4°.
LA MORT D'AGIS , Tragédie. Paris, Ant. de
Sommaville, iG^z. inx^"".
OROONDATE. ou LES AMANS DISCRETS,
Tragi-Comédie. Paris, Ant.de Sommaville, 1645.
LE PRINCE RÉTABLI, Tragî-Comédîe, dé-
diée à Monfeigneur le Maréchal de Schomberg. Pa-
ris , Touffaint Quinet, 1647. in-^^.
(SUJET DE DORA^ISE. ) Cette pièce eft on
roman des plus compliqués. Pour y comprendre quel-
que chofe , il eft néceffaire d'y donner 1^ plus grande
attention , par la quantité d'Epifodes abfurdes qu'on
y trouve. On peut dire auffi que , lorfqu*on eft par-
venu à débrouiller ce cahos , on regrette , avec rai-
fon , la peine qu'on s'eft donnée pour y réaffir , c*eft
THEATRE FRANÇOIS. 455
certainement une mauvaife pièce, mal écrite^ & dans
laquelle je crois impolTible de découvrir un feul vers
partable ; je vais tâcher d'en donner Tanalyfe , & je
ferai mon pofllble pour^ être moins obfcur que l'ouvra^
ge y que je défîre foire connoitre à mes Le&eurs.
Criftnte , Prince d'Arabie , & Doranife > Princefle
de Chypre , s'aiment mutuellement ; mais leurs p%-
rens s'opppfent à leur union , ils vont confultçr POra-;
çle 9 qui leur répond :
Voguez hardiment fur Neptune , 8wC.
Sur la foi de cet Oracle , ils s'embarquent ; & à
peine font-ils en pleine mer , qu'Us font aflaillis par
une tempête terrible : ils veulent fe làuver dans Tet
quif ; Doranife y entre la première , mais à peine y
eft-elle , qu'une vague fépare l'efqmf du vaiffeau , &
cet efquif va fe brifer dans l'ifle de Lidie. Doranife »
au défefpoir d'être ainfi féparée de fon amant y & crai-
gnant même qu'il n'ait été englouti dans les flots 9
veut fe tuer ; des Bergers & des Bergères viennent à
fon fecours » flattent fon défefpoir , lui perfuadent qu'el-
le reverra bien-tôt fon amant, & la détournent de fe
donner la mort. Un nouvel Oracle détermine Dora^
nife' à conferver fa vie. Pour prolonger l'abfence de
Crifante » & cependant occuper la fcèn^ ^ on voit
dans cette ifle» des Satyres» des Syl vains , des Dé^
mens, des Driades, des Magiciens. Les Satyres &
Jçç Sylvains, toujours arden^^i veulent fans ceffe vio-.
4So THEATRE FRANÇOIS. I
1er les Bergères. Les Bergers amoureux fauvent leurs
inaicreiTes des bras de ces monftres ; les Magiciens
jSc les Driades fervent ou nuifent alternaicvement aux
Bergers & aux Bergères. ( J'ignore quel a été le but
de l'Auteur d'introduire cette foule prodigieufe de par-
fonnages épifodiques : enfin ils y (ont. Mais je crois
que c'eft en avoir afTez parlé , & qu'il eft teros de
revenir à Crilànte i ) qui par un miracle s'eft fkuvé de
la tempête 9 mais qui eft tombé entre les mains des
Corfaires , qui ravageoient toutes ces côtes. Ces Fi-
ffUtes (ont bien-tôt attaqués par d'autres : Cri(knte com-
bat pour ceux qui l'ont reçu fur le bord. On croit ai-
fément qu'il tua une douzaine des plus braves de ks
Adverfaires» & que ce fut à fa valeur qu'on dut la
viâroire. Le Capitaine, enchanté de fes exploits, lui
donne le commandement du vaiiTeau ennemi , dont
on s'étoit emparé ; mais les autres brigands jaloux de
la préférence qu'il venoit d'obtenir , profitent d'un in-
ftant où ils le trouvent dans fon lit , & le jettent tout
endormi dans la mer. Heureufement il fe trouve fur
un rocher où il achevé de paflTer la nuit. A la pointe
du jour , il apperçoit un vaifTeau > il demande du fe-
eours , on le reçoit dans ce navire ; & il reconnoit
dans fon libérateur Amintas, fon Gouverneur, que le
Roi fon père avoit envoyé, pour tâcher de le trou-
ver. Crifante ne jouit pas long-tems de cette heureufc
rencontre. Une nouvelle tempête, & plus furieu(è en-
core que celle qui Ta voit féparé de fa chère Doranifc ,
THEATRE FRANÇOIS. 461
engloutie le vaiiTeau ; & il eft le ieul qui aye le bon*
heur de fe fauver > fur une planche qui le porte fur le
rivage de Lydie. £n arrivant > il eft attaqué par des
voleurs 9 il eft fecouru par le berger Orminte ; les vo-
leurs font mis en fuite : ce Berger conduit Crifantc
dans fa m^iibn; en y allant ils. apperçoi vent des Ber-
gères pourfuivies par des Satyres > ils volent à
leur fecouru \ & les délivrent. Il eft difficile d'exprî-
mer le raviftement de Crifante» lorfque dans ces Ber-
gères il reconnoit fa chère Doranife. La pièce pou-
voir finir en cet endroit : mais il falloit i^ire paroitre
fur la fcène PhiUmante j Roi d'Arabie. Ce Monarque »
inftruit du naufrage d'Amintas ^ & de plus en plus
inquiet du fort de fon cher Crifànte y prend le parti
d'aller le chercher lui-même. Il s'embarque y & com-
me cela devoit ètre> il fait naufrage ^ & eft porté
dans rifle de Lydie. Mais ce qu'otï ne pouvoit pas
deviner ;c'eft qu'un Magicien > fon ennemi , inftruit de
ifon malheur / veut profiter de (on defaftre > & vient
l'attaquer au moment qu'il mettoit pied à terre. H
alloit fuccomber fous fes efforts y lorfque Crifante &
Orminte arrivent à fon fecours, & tuent te Magicien
& fa fuite ; ce Magicien expirant veut prononcer quel-
ques mots ; mais la mort l'en empêche. Une voix mî-
raculeufe fe fait alors entendre > & annonce à Phili-
inante qu'Ormlnte eft fon fécond fils , qui lui avoit; été
enlevé au moment de fa naiflTance. On peut aiféflient
îagej: de la joyç de ce Monarque y qui dans fés libé-
4^1 THEATRE FRANÇOIS.
rateurs retrouve Tes deux enfans : il confent avec p1aî<*
fir à Tunion de Crifante avec Doranife ; mais il refufe
fbn aveu à la pafTion qu*Ormince refTencpic pour la
Bergère Arcemife. Ce jeune Prince, plus touché des
charmes de fa Bergère que de (a nouvelle grandeur %
fe jette aux pieds de Ton père , & lui peint fi vive-
ment l'excès de fan amour ^ que ce bon Rôi attendri
l'embrafle, & lui promet de l'unir avec fa chère Arce-
mife: mais il veut que les noces fe faflfent avec éclat
au milieu de (à Cour, ainfi il les fait embarquer avec
lui pour retourner en Arabie. Et pour que tout le
monde fût heureux , avant de mettre à la voile f il
fait unir enfemble tous les Bergers 6t les Bergères i
qui s'aimoient , & leur fait à tous de riches préfens.
(SUJET DE LA VENGEANCE DE LA
MORT DE CESAR.) Tandis que Brute & Caffic
rangent leurs troupes en bataille ; Antoine & Oâave
exhortent les leurs à venger la mort du plus grand
des hommes. Avant que de combattre > Brute va faire
fes adieux à Porcie y fon époufe. Voici une partie (k
leur tendre converfation.
i p o R c I ï.
Ttt vas donc au combat >
BRUTE.
La liberté m*appeUe|
Et je Tcroîs content de m*immolcr pour elle.
Si |e ))ouvois fçavoir ma Forcié en te|bOS,
Loin des troubles que Mars. • • ^
XffEATRE FRANÇOIS. 46 J
P O iR. C 1 E.
Brife là ce propos :
Û choque ihâ verta qui feroic ofièaf^c ^
S'il écoic approuvé d'une feule penfée
Quoi ! Bcute douce encor que mon afieâion
Ke fbic pas au degré de la pcrfedion :
Du repos loin de lui , fans qui mêpie la vie
Ne fçauroic me durer que contre mon envie.
Ha î c'eft trop , & ce coup me touche plus le cocur^
Que la crainte de voit Uollre ennemi vainqueur.
La fille de Cacon naquit parmi les armes }
Les horreurs des combats ont pour elle des charmes 5
It Ton repos s*y trouve ainfi qu'en tous les lieox ,
Où Bruce lui parole favorilé des Dieux.
Que le Ciel conjuré fe range pour 0£Uye » -
Que le Peuple Romain demande d*eAre cfclavc^ j
Que par ces changcmens l'efpoir te foit ollé
De rétablir jamais l'antique liberté y
Qu'après edre banuis de noflre chère terre y
Tout l'Empire afleniblé nous déclare la guerte^
£t que tous les malheurs accompagnent nos pas j
Si je fuis avec toi , je ne me plaindrai pas.
BRUTE.
'- - «' • . ■ ■ ' ' ' " '
Quepercé^ccent coups au milieu des batailles I
Le Vainqueur in folent m'arrache les entrailles
Si tu vis pour chanter l'honneur de mon trefpas f
Fut-il pins violent , je ne me plaindrai pas.
P O R C I E.
• Que nos cruels tyrans par de nouvelles gefnes ,
Portent au plus haut point leur rigueur &c mes peines :
Si je puis par ma mort t'exempter du trépas ,
J'en aueile le Ciel , je ne me plaindrai pas.
4^4 THEATREfRA NÇ OJS.
BRUTE.-
Si je pouvois trouver dans le Ton de la guçrre ,
Avecque ton tepos celui de noftre terre «
DeufTe^je pour un feul , fou^frir mille trépaf ^
Je ferai facisfaic , 6c ne me plaindrai pas.
Aprè^ ravoir quitté > il va fe mettre à la tète d'une
partie de l'armée , & Caffie à la tête de l'autre ; la
vidoire balance long-tems entre les deux partis. De
Ton côté/ Brute eft viâorieux ; mais Caffie ed dé-
fait : il envoyé demander du fecours à (bn Collè-
gue f dont il ignore la viâoire. Ce (écours n'arrivant
pas au gré de Ton impatience y & craignant que Brute
n'ait été auffi mis en fuite > il fe plonge un poignard
dans le cœur. Brute arrive dans le moment même
avec des troupes pour le fecourir. Il eft faifî d'hor-
reur en le trouvant fans vie. Antoine profite de fon
abfence, & défait le corps avec lequel Brute avoit
triorapTié. Ce Héros , voyant qu'il n*y avoit plus au-
cun efpoir de rétablir fes affaires > fe paiTe fon épéo
au travers du corps. Dès que la vertueafe & tendre
Porcie apprend cette funeûe nouvelle, elle veut foi*
vre (bn époux dans la nuit du tombeau : on s'oppofe
à cedefTein, mais envain; voyant qu'on lui avoit rari
toutes les armes qui pouvoient lui ôter la vie , elle fe
jette fur des charbons ardens > les avale & meurt*
Antoine & Oftave ne peuvent reftifer des larmes à h
mort courageufe de cette Héroïne ; & Ces vers qu'O-
ftave dit à AntoUie > terminent la Tragédie.
£nfii
THEATRE FRANÇOIS. 4SS
EnHn grâces aux Dieux ^ nous fommes dauf le port s
Nous avons dilfîpé tes flambeaux' du difcord , . : . .
Démoli les autels , & bafti nos trophées
Sur le fanglant débris des guerres eiloufTces.
Thémis règne par- tout , Mars languit abbattu ,
Le vice qui s^enfùit fait place à la vertu >
Rome nous tend les bras 9 nos Couronnes font prêtes $
Allons donc recevoir ces fruits de nos conquêtes >
\ AHn que nodre front , de lauriers ombragé ,
Mondre â tout Tuiiivers que Céfar efl vengé.
Cette pièce eft froide, mais affez bien verfifî^e; on
y trouve - deux récits de bataille » qui ont quelques
beautés ; elle eft précédée d'un Prolpgue de la Re^
nommée , qui efl: à la louange de Louis XIIL & du
Cardinal de Richelieu.
(SUJET DE L'AMANT LIBERALO Je ne
parlerai! point ici de cet ouvrage» que Boufcalcom-^
pofa de concerc avec Beys : le Leâeur trouvera à l'ar-
ticle de ce dernier, la raifon pourquoi j'aî «placé Tex-
trait de cette pièce fous l'aqnée 1631. à l'article de
Scuderi.
f ... * ^ ' ; '
" ' f
(SUJET DE CLEOMENE. ) Cléomene , Roi
de Sparte , chaiTé de fes Etats par fes Sujets, fe ré-
fugie avec fa mère Crateficlée , &c Agiatis fa femme
chez Ptôlomée , Roi d'Egypte. Il follrcita ce Prince
«le lui donner du fecours pour remonter itir le Trône.
Ftolomée, qui eft devenu amoureux d'AgiatiS| diffère
tpu}ours fous diiférens prétextes. Deux de fes Cqn«
fidens , vils adulateurs de fes paffions, lui confeillent,
pour fatis&ire à la foiji fa gloire & fon amour $ ^e
Jome IL G g
466 THE A TRE FRANÇOIS.
donner des troupes à Cléomene^ & de retenir auprès
de lui Agiatis y comme un gage de fa fidélité. Ptolomée
y confent; mais ces mêmes confident ^ jaloux de la
confiance que Ptolomée témoignoit à Magas (on frerei
veulent perdre ce PrinûS & rendre fiifpeâe au RoifoD
amitié pour Cléomene. Enfin à force de calomnies,
ils déterminent à faire mettre en prifon & CléomeDC
& Magas. A cette nouvelle ^ Agiatis vient demander
au Roi la liberté de fon mari. Le Roi la met à un
prix qui ne peut convenir à la vertu d'AgiatiSj illa
prefle encore , & elle lui répond :
AGIATIS.
J*ai,ine mieux fon malheur que ca bonne fortune,
Puifqu'il doiccermoigner. à la poiléricé
Vcxcès de mon courage 9 & de ca cruauté s
Sdule y foulç ces yeux de l'obiec lameiicable y
De l*tiijt<Ac trépas d'un Prince mifjêrable s
Comprends dans fon arrefl ^ & mes enfàns , & moi»
Mais fçache que le Ciel eft au-dcffus de coi^
Qu'il fçait venger le fang qu'on verfe fur la cerrtf ,
Que c*eft de Ces vapeurs que fe ,fai& la tonnerre s
It qu'enfin rinjuftice , ôc rinhùmanicé,
Trouvent Ic^châtimcnt qu*elle8 ont mérité.
Adieu y va ^ulqu'^it bout > oppriwç ^innocence :
Nous ]^/ouvons manquet d'hçur , mais non pas de confiance.
Agiatis n'ayant pu rien obtenir de Ptolomée , fc
tue ; Crateficlée fuit foti exemple. Les deux fils de
' Cléomene fçachant le rnalheur de leur père , & ré-
^ moins de la fin tragique de leur mère, fe jettent par
" ttnc^ fënétre, & meurent. Cependant Cléomene qui
THEATRE FRANÇOIS. 4^
ignore toutes ces cataftlrophes y fe fauve de fa prifon ;
& ayant raiTetnUé les Spartiates qui l'avoient feivi»
fe met à leur tête & rend la liberté à fen aim Ma'gas»
Celui-ci va fur le champ trouver fon fréré^ pour tâ-
cher de le fléchir ca faveur de Cléomene, Pendant
ce tems-Ià> les deux perfides tonâdens ayant raffem-
blé les trpupes Egyptiennes , font attaquer Cléôme-
ne; le Capitaine des Gardes de Ptolomée lui vient
faire ainfi le récit dé ce combat»
ORNANTE.
' Après que G^omene
Zut fait toos (a eflbrts poar délivrer Magas,
£t que de tdiis les fîiens H eut fceu te trefpas y ' .
Se tournant vtfs (és^^Hi qui le li]ivo1enx'{^iis ^(^^
Il leur dit qu'il fellbît s*arracfter de U prclTc , -
Ft foudato s'dflançanraattavcr^dèS'SblcIàti ''
Qui l'avoi mt entdùVé , par l'effort tié foù bi'a J '
» fe fît faire jout V ^ ^t jfÂirfiedrs en faite, <<
£t fauva du péril'fa perfo^ine /&:Tàr fuhe.
Noi plus vaillaris gûcrtîcrs cfptôfovent fa fottur;
Ici tombe OHrifêrsht -, 8c là le'Gorrvcrntur;
Une grefle de tratt» fotti eh valu fur -fcSTaitafer,
Ils femblent repoa ((h ^at ià fbrce dUs ' chatnltfs :
Là lesMns afluroîttit xju'iî efttrit nWriïorte! , '
Les autres dans letir cif ùr lui drelfoKnt un âiitd ^
Et vos cheft arotënt peur qu't^iV ce ^cÂ"e!>ctrêriie , '
Le peuple fe toumailptxàrlul coifcre yous-noiêmè ^
Chacun en mutmurbîrj nwrls'tnifinfcor pouvoir
Rangea tous les tmit^H'llut xtrtàéi dû'dcvoir.
Cependant Cléomrné ejfho^oit fds Oendahnes
A fe faire mourh avec Ifeàrs propr-s armies t
Mouibns, leur difôitH^ ^luftôft ^c dé fduffHr
Qu'un vainqueur ait pôûVoU de iiwi Msc mourir.
Ggii
4.6$ THEATRE FR ANC OIS,
Sauvons Thonncur de Sparte , & monftrons â îa terre
Qull n*c(k permis qu'à txoas de nous v^ncre àià guerre s
Que nous f^VoUs parer tout le refte des coups ,
£c qu'ilVeft deu qu'à nous de triompher de nous.
Il dit, & tous les Hens approuvant fa harangue »
firent faire à leurs mains Toffice de leur langue ,
S'eflanccnt l'un fur l'autre j &: lçur$ nobles fureurs
Confondent les vaincus avccques les vainqueuis.
Kipotas ïe premier , tranfportc de colère ,
Enfonce Ton poignard dans le fein tle Ton frère'.
Sur le point que Mégj^e , imitant ^a/ureur^^ ;
/ Xui donne un coup d*efpée , & lui perce le cœur.
Chacun court à la mort, perfonne n*yTé{îAe i
Xuphôrbe impatient fc. jette fucMégifte y
Tous deux tombent à terre , & le plus âjct, des. ^ja:i .
Saute fur le plus foibjie , & le prend 4UX-chcyc^^ , ,
Puis hau^ànt ron.eipce à frapper toutjS^prefle » . .
e coup mortel d'un autre qùi-Varrefle.
£n moins d'un tourne^roain , Cltfarqt&e. tout jpercc .
Tombe fur Polémas , que Piile a i;e^aflef
Mégiftoune fur Pi^e ,, ^r^ fu^ , Még^qnne ,. ,
£t la mort à l'envt fe te^pit , &.fe-çl^QQe.v
Cléomene ei^ riant préOpjpjce alors fon iein 9
Mais chacun en deAouuie ^ le fer^Ôc ia,main.r> .
Quoi! dit-il, mes an^i$),fuis^ je aiïçzmi&rable ..
Pour ne pas mériter une mort honorable i .
A moi, mesCoippi^noxu,m^s;Ço|npagpens à moi:
frappez , frappez, fai?^, p^r , Çc; |aqy^ yç^ftf e R^ou
A ces mots ,,,^Qiuslç8:fif3i?.rei?i|b^aAtl«^^i?owr^^
Scmbloicnt,% préparcjr .Xxf;X^içi^3Lfit;,h9mm^S'^ >
Quand le plus.avanx:é luidpnnaii^ daW,le flanc p
Arrcfte leur et^yje^ & rçQpandce^,bejUi4iU^g*; ■>■■
Ce coup hade la Au de ce combat funcfte.»; .
C léomcne en tombanç^ fait tombçjc ijout le rçfte ,
T.t dans moins d'u^ iÇ^fl^.c >P.i^ Y^^f 5i9H!>iÇ^;&^f^'^^#
Accableifovij5lp,fe|i|46ifju>,pfpp^^4aHîiei;se , ;
"N
îAînfî leur défefpoir a fait fiins rc/îftaiice , ' ^ -
Ce que û'avoic pas pn tôitte néftre piàÂksce ; : ^ i.: ^r: ' i
AinfilcRoyudfij^part&cnccnoblccwirjçDux, . . | ...
Triomphant de lui-même , a triomphe de nous.
L*on a veu fur le champ un ferpent'efFt'oyâble' ^ ^ i f^»
S'eftendre fur le corps de ce Roy miferable i . tj
.%t quand quelques Soldats vouloient s'en apt>iJoclier ^ -
Taire tous fcs éWom pour les en cmpefche^. ^ , / f- 'i
Tout le peuple s'alTemblc , ôç ce nouveau fpcûaclc > r = t
. JPar les plus avife^ ^ft pfis pour t|n miracle j . .. , . , . . . . '
Wcfme on croit; q^c les Dieux veulent venger la morÇ . . *
De ce Roy malheureux qu*on accufoît à tort 5
Un murmure confus par-tout Ce fait cntcndte,
.-111* - . # ^
On parle de Magas , & de ne plus attendre ,
It je pars à rihftàrit ^our vous en advcrtir. '
En efFet i Maga» paroic > accable Ton frère d<^ re<*
proches : Pcolomée çr^nt qull nç vienne lui rav^rh
Couronné ; tùsAs Magas le raffare , & lui dit< qu'il ne
i^eut point l'imiter ilahs fès crimes, & qu'il fçait tro^
le refpeâ: qu'il doii à (on frère & à fon Roi ; enfuice
il lui montre un poignard : Ptolomée lui demande
)jud ufage il en veut faire ; il lui répond :
>
' f înîr d'uo mcm0 coup ttiâ vîc & ma mîfere,
ït par cette aûion te laifler des remords , •
— Qui te faifeiit fans cedè endurer mille morts $ ' *.
Adieu barbare , adi^u $ ry 9 tyran fanguinairc f i ' -^
%t règne déformais fans avoir peur d*un frère»
Cependant ne crains pas qu'un peuple révolté '
Puniffe les effets, de ta jncchanceté i . ^
Je m'en vay Tàppaifer , & te tirer de peine y* '
It puis )*iray mourir aupcés de Cléoftiencr
G_ •••
g >'j
\
470: TUE dT R E\ F&y^NÇ O IS:
Ptolomée^ livré à M-içèmej) i^lènc déchirer pa(^ kf
remords 9 & déplore le ^alheoff-qu'iLa. eu dis (e livrer
aux perfides coniêib de fes deux inâmes confidens»
qu'il chafTe pour jamais de ùl préfeoçe.
Cette [ûece m'eft pas facis mérite; il y ^ cepeodant
un grand défaut > c'eft que (e rôlei de Pedomée n'eft
pas décidé : il con^met bien des crimes , & il a'ce«
pendant des vertus ; c*eft lin Pifince fôibte qui fe Ifvre
aveuglément aux cpnfeils de ceux qui fçavènt adroi-
tement flatter fespaffions: fouvent on l'abhorre» quel-
quefois on le pl^intt Enfin Ton voit clairement que
ee font Tes deux confidjen;; qui, ont corcotp^pu (bu a^i
& ces confidens ne font pas alTez punis.
(SUJET DE DÔM QUICHOTTE, première
Partie. ) Le roman du fauHeûx Cervantes eft trop con^
nu , pour éxigen que* }e hfk qb. 1^1% d^il. de cet. on'
vrage; , & de^. deux pièces C^i^^y^^^ Bm(çilA mis ea
aAion quelques exploits d.H Héi;oj^ çle la Manche & de
fbh Ecuyer, & les autres feulement en récit. Malgré
h gaieté du fujet, la plupart dès fcènes font froide £r
languifTantes:, quçiqu'àueac bien écritea.; la vecfifica-M
tion en eft aifée > & l'Auteur n'a point abufé de la li-
cence que l'on fe donpoit ençpjTjÇ > 4^ fe fervir des.ex-
preffions les plus libres : en toutiL, quoique je neçroye
pas qu'on puiiTe faire aucun ii^ge pi, tirer aucun parti
de ces trois pjeceSi , ellqfi Uje,6^. çu I^^n9 mérite»
Càrdenio & Fernand s'^tànt^ raccommodés avec
leurs maîtreffes , veulent poqr, s'amufec profiter de la
folie de Dom Quichotte & deSaucfaoi Dorothée fe f4it
THE A TRÊ FRANÇOIS. 4yi
lafllër pour la Àeioc de Micomicoo^ & vient implo-
rer le fecours da brate Chevalier y qui lai promet de
a remettre bien-tôt for fbtr Trône, Lat fourberie eft
>rète à fe découvrir : Sancho ayant apperçtr Dom
7ernand embrafler la prétendue Reine f il en vient
endre compte à Ton maitre % en préfence de TEcuyer
le cette fauffe Princeffe.
SANC'HÔ.
Monfîeur , vous pouvez bien me donner votre lance ^
£c temeccce à l'arçon I^armec ou le baffîh. '
D O M q U I C H O T T î. .
Tourquoy?
SANCHO.
Parce.
DOM Q,U I.Ç. H O T T £•
R.efponcU« *
SÀKCHO.
l'advencure eft â fin*
t-t Heîne efl facisfàite ', & dans <tet'té caVerhé «
Dieu fçait , 6i nous auYfî ^ comme elle fe ^uvetne*
Un jeune Chevalier lia ûenc entre Ces bras.
Qui lui parle d*an;iour , la baiie à chaque pas ^
Ille le baife auifî : bref, ce font des merveilles»
V ES CV V %X.
Vous pouvez vous tromper, "
•Ô O M Q U I C H OT t Éw -'
Croicay-je i mes oreilles 7
S^ A N C H Ô.
Monfeigneur l'Efcuyer , croyez que pour ce poînâ
J*ay des ysux clairvoyaas , 6& qui ne trompent points
G g iv
4JX THÊATRB FRANÇOIS.
• Voftrc maîtrelle a tort <i'abufer*éc mon maître.
Et s*U croit monçconfeil 9 it vous fcira.çoglioîcre..
D O NU Q U I C H O T T E.
Ttifez Vous. . ,
S A N C H 6.
J^e ne puis , c*eil un trop làfche tour^
' L' fe S C à Y E a.
Vous vous eCchiuScz trop. ' - '
S A N C H O.
Perdre uneJfle en un tour l
<-■•■• , .. - .
Euflîez-vous plus de barbe , & fuft voaje vifage-
Moins femblable à celuy d'un Barbier de village ,
Que |e cognois^ fort bien , rou^ apprendrez enfin
QuevS*attaquer à nous , ce n*eft pas eftre fin >
Itqucvoilrcmaîtrefre.* ' ^ *' ''' '
L' E S C u y i: R. *
» r . ' • ^
Ah î vous dCvftez vous taire»
D'une Reyne* ... •.;...
SANpîip.,
Elle reilaudîpcu que ma mère.
I> O M QUI Ç H. O T T £•
. • Quel démon t*a féduit i
A me faire un drfî^Ôiks qui te perd & me nuit S
Rcfponds , traiftre'.'
« A N C H Q. .1
J'ai veu. '
' D Q M Q U I Ç H p T t iS.
* • Tu çerfifles ! /
S A N C HO.
N'importe,
7'ay veu ce que j'ay dit^ ou le Diable m^emporcc.
THE AT RE FRANC O IS. 475 .
ït VOUS me faites tort de me traiter ainfî :
Mondeur qui la baifois vous te peut dire auHi ,
* Et ces aut^e^Meifîeurs , qui Tauront veu fans doute ;
Car ils eftoient préfens. •
La Reine qui farvîent 9 ne paroît point troublée
de cette accufàtion , & rejette la prétendue viGon
de Sancho fur le Magicien ennemi de la gloire du
Chevalier : if en cft bien-tôt perfuadé, & brûle d'im-
patience de ;partir pour mettre fia à cette aventure.
C'eft ainfi ^a'il s'exprime à Sancho.
D o M Q U l\: H o T T E«
DeslÀ dr routes pafts la terre dk éclairée ,
Apollon a quitté la couche de Nerée > ,
^ Les EAoilçs de peut fe cachent à nos yeux ,
Sous un épais manteau de la couleur des cieux $
. , ïl fcmble qu'au Commet les montagQes s'allument»
Que les bois font dorez , & que les plaines fument.
Desjà les laboureurs meinent leurs boeufs aux champs ,
Tous le? cocqsdti logis ont achevé leurs chants*, ■ ^
Mille oifeaux éveillez , d*une voix raviflante >
Saluent à Tenvi la lumière naiiïante ,
'L*ombre s*efvanouit , la clarté fuit fes pas ,
£c bref 9 il efV grand jour & nous ne partons pas \ ' >
S A N G H O.
Desjà dedans Seville à la place publique ,
On entend jargonner maint courtcaut dd boutique ^
Desjà Ton voit trotter nombre de crocheteurs ,
De pages , de laq^uais , & de folliciteurs ,
It desjà maint bcuveur , pour foulager fa telle ,
Dedans le cabaret prend du poil de la befte :
Ici dans le logis tout le monde èft debout y
la maicreiT^ a foufflé les chandelles par- tout ^
'4y4 THEATRE FRANCO IS^
L*bofle , les bras crouflez , & le bonnet en tefte ,
Gonfle du bouc du doigt les faulces qu'il appccAfti
Desjà le marmiton commence de couper
* La cuiile d'un poulet qui reila du fouper ;
Des) à de cous coflez les poules débuchées
Voue becqiier près du cocq pour eftre recherchées^ ,
La plufparr des pigeons ont desj^â pris VcSar ,
Le vacher a donné le dernier coup de cor ,
La tniye & Tes cochons vont fouiller dans la plaûui
Rodînance & grifon ronflent après l'aveine y
Piuftod qu'après le |nur de nos fanglans conf(>ats;
It bref 9 il eft grand jour ,.^ nous ne partons p9S t
En même tctns la Comteffe Trifelde vient fe jcttcr
aux pieds da Chevalier > & implore fou fecoiks con-
tre le Géant. Malerobrun > avec ht permiffion delà
Reine de Micomicon > avec qui il étoit engagé ; il
monte fur le cheval de bois , ayant ion fidèle Sancho
en croupe , dans l'intention d'aller combattre le Géant.
Et ils ont enfemble cette converfatioo.
V LAC. TRIFALDE.
Des) à vous fendez Tair
Plus vifle qu4 les traies qui partent du tonnerre ;
Sanche , tenez*vous bien , vous panchez vers la terrée
DOM QUICHOTTE.
Ne me ferre pas tant.
S A. K C H O.
A ee que je pois voir ^
Nous irons doticcment.
FERNANDE.
Gatdc-toi bien de cheéitp
THEATRE FRANÇOIS' 47i
■m
m
Valeureux Efcutf et >^af: Cms idoute U çheive
Du baftard d'Apollon qui fit la culebuce 9
Du zodiaque en ba$ 9 fut moindte mille fùî$
Que la tienne arrivant des lieux oit je te^vois ; ^
Infin TefloigneiTient vous cache â noflre veue^'
Vous votez à préfent ai^-deiTus de la nue \
Allez , allez en paix ^le Ciel guide vos pas.
S A N C H O.
Si nous Itions (î l^auts qu'ils ne nous viilent pas,
Le$ pourrions-nous entendre ^
t> OÙ Q U I Ç H b f t' Ei-
En pareille adventure
La magie travaille ,& non pas la nature i *
C'eil pourquoi je veux oroirç » ^ ciefi^ pour ^euté ^
Que noue fommes bien: près di^ plancher azuré.
F E R N A N D E , *tf ^.
Donnez-moi ce flambeau.
D O M Q U I C H O T T E.
Bon Dieu ! quelle lumière!
Serions-nous près du feu- qui brufle fans matière ?
As-tu rien defcouvert >
$ A N C H Q. 1
Ji^a.barbe.çfl toute en feu^
Je veux i^érohiment me defcouvrir un peu.
E E. RN AN P£ fi rtikant & bds^ , %
Il fe faut reculer. .
DOM QUICHOTTE*
Garde-toi de le faire.
^S A N C H O.
Ma foi , je le felf>is s'il étoit néceffaire:
£n deulTai-je niourir : mais je ne fçai comment
Au itavçrs mQH bandeau je rois parfaitemcat.
^47^^ THEJTRE FR'Al^ÇOISi
«
D O' M Q U I C H O^T T £.
Tu 7ols patÊûtemoiic , 2c que yoûj-tu s
S A N C H O.
Merveille^
Maïs dont la nouve^i^uté n*eut jamais de pareille 'j,
La ceire comme un pois. ^
C A R D E N I E Bas.
Ecoutez comme il ment f
DO. M Q U I C H O T TE.
Ke defcoutres-tu point fut ce bas élément
Des Villes ^ des Châteaux >
' S A N C H O*
Non , mais bien pjudeurs hommes^
D O M QUICHOTTE*
^e paroiflent-ils gros i
S A N C H O.
r •
Pas plus gros que des pommes»
DOM QUICHOTTE.
Sanche 9 TOUS vous trompez. ..
«' S A N C H O.
le ne me trompe point j.
Ce que je vîenide dire eft vrai de poinft en poinâ«
FERNANDE bas. .^
Quel mcnteuf ^bfiinc ! I : ' .
DOM QUICHOTTE.
j .
Pourtant fî Sançhe n'erre j(
Il eft bien affeuté qu'il ne voit point là terre ;
Car cftant coihme un pois , il eft tout évident
Qu'un feul lion^zoc la cguvie étant beaucoup plus gtaud^
THEATRE FRANÇOIS. i^jjl
F E R N AN D ^ bas.
Xe menteur efl furpris.
S A N C H O. .
£c pourtant il me femble
Qu'une pomme 8c des pois Te peuvent voir enfemble }
Croyez ce qui vous plaift , mais fed la vérité :
Je voy le monde entier par un petit cdté. ^
Les fulëes ayant fait éclater îe cheval > Dom Qui*
chotte & Sanchq tombent à terre > & l'on perfuade
au Chevalier qu'il a mis à fin la plus terrible aventu-
re. Il fe retourne alors à la Reine, en PaiTurant, qu'il
brûle d'impatience d'employer (es armes viâorieufes
à ion fervice; c'eft àinfi que fe termine la première
pièce de Dom Quichotte.
(SUJET Ï3E DOM QUICHOTTE , deuxième
Partie.) Cette pièce commence ainû : Dom Quichotte,
étant de* retour dans Ton village ^ & fe prépacant à
partir pour de nouvelles expéditions 9 il veut déter-
miner Sancho à lé ftiivre ; celui - ci s'y rend t n^is il
lui fait part de quelques objeâions que lui a fait fa
femme. Voici la fcène qu'ils ont enfemble.
s A N c HE.
Enfin après avoir querellé bien des fols ,
3'ai difpofé ma femme à ce que je Toulois ;
Illc ne fe plaint plus de voir que je la quitte.
DOM QUICHOTTI.
^oi^ipouvoj^ dc^cpAttlr.
, ,. «AN ÇH.E.'
• ' * . ■■-■■>■ ' ■ ]
NonpaseBcor 11 yifles
"478 THE A TRE FR ANÇOÎS.
lUe m*a confeilfê quVu moins â tout hazard
J'efcrivide avec vous avant notre deipairt »
Et qùoy qu*on puifîe dite , on eft dignre de blâme
De mefprirec touftoms les conferis d*^une femme i
la mtcbnetn icec endroit parle avec jugébiâic.
DO M QUICHOTTE.
Mais quel cft ce confeil? dites4e cU>rement«
S A N Ç H E.
Vous fçavra vpieM laorc ne ifefpeâie i^sTotine ,
Et qu'il Êiuc malgré nous vouloir ce qu'elle ordonne}
Eufliez-vous mieux armé que n*ef^ un ïaquéfhàrd ,
Vous ttc Ççvùnct patet la pointe dèToh âztâ.
. . Lors "que moins on y pcAfe eUe nous vient furprendre f
Et le même Âmadis ne s'en put pas défendre »
Tant d'autres Chevaliers que je n'ai pas connus ,
Donc vous m'avez padé , que foat-ils ,d«vefuis»
Ils ont fubi la loy qu'il nous f'kudra tous fuivre >
On Ifcs a veu mourir , fi l'on les a vcu vivre :
> CCar pourice dernier poinâ , il m*t{k un peu fufpeift. }
î>OM QUiCtiOTTE.
Taifez-vous, eu pàtléz avec plus de refpeâ.
S A N C H E.
le dis donc que la mort , cette vieille damnée »
Vous peut exterminer dans une matiiiée ;
Et ce coup , quoiquç grand , ne me iutpjrendrolt pas|^
Car fa faux tranc)^. mieux que voilre coutelas.
En vain contre fa force ou oppoCe les charmes ^ .
Que les Magiciens marmotent fur les armes %
Le Cimeterre ardent , Flamberge , Dufandal,
Qui coupoient comme beurre , ader , marbre -Se métal ^
Lt tant d'autres encot dôot Vous pariez fans ccâe ^
^'o&c eil de ^uô/ tcoJs coAOfe Coue diableiT^
THEATRE FRANÇOIS. 479
JDOM QUICHOTTE.
Xnfin â quel deilèîn tendent tous ces difcours ?
S A N e H ï.
jToQS cei^ qui le${>ottolent ont veu finir leurs fours,
£t malgré leurs armets , leurs lances ^ leurs bfettes , '
Ces fendeurs de ^azeaux font morts comme des belles.
Mais ce qui plus m*e(lonne , eA de voir qu*à Ton choix
La mon fauche en tout temps les fubjeâs & les Roys p
Le fâge avec le fou , le pauvre avec le riche ^
Le MaiAre & TEfcuyer , le prodigue fie le chiche^
Le Jeune de le Vieillard , le malade fie le fain ,
Le Lâche & le Vaillant , le Noble fie le VHain ,
Le plus petit afnon comme le plus grand aûbç ,
£t dedans un Chaileau comme en une-cabane.
D. Q V I C H O T T E.
#anche , venons au point > .c*efl par trop difcourir;
, S A N C H E.
Ayant donc reconnu qu*il nous faut tous mourir j
Ma femme trouve bon* - - ^ .
D. QUICHOTTE.
Parle donc y que veut-elîcf
S A N C H E.
£llevtut«
D. QUICHOTTE.
Tes'difi;u)Uis me rompent la cervelle ^ .
Abrège, fi tu peux.
S AN CH E.
Monfieur , ma femme veut*
D. QUICHOTTE,
G^eft être bien prudent de vouloir ce qu'on peut 3
Maispatley'fi tu vçux.
S A N C H 1,
Monfieiir.
48o THEATRE FRANÇOIS.
D. QUICHOTTE.
Parle.
S A N C H E.
3'enrage^
LailTez-mol donc parler.
D. Q U I C H O T T E.
' Tanc de caquet m^oucragej
Acheté donc , maudit.
S A N C H E.
LaiiTez-moi commencer ji
Ma femme a donc penfê,
D. Q U I C H O T T E.
Qu'a-t-elle pu penfccS
Qu'cft-cc î Parle , & fois bref.
S A N C H E.
Ah l Pieu que j'ai de peme ]
C'eft. , . .
D. QU I C HO T T E.
Quoy?
S A N C H E.
C*e(l ce que c*efl y laifTez-moi prendre haleine*
Malheureux que je fuis ! j'ai l'efprit tout confus.
D. QUICHOTTE.
Mais qu'eû-cc ) Parle enfin.
S A N C H E.
Une m'tn fouvient plus I
Voilà le bel e/Fet de voftre impatience.
- I
D. QUICHOTTE.
Dîtes plutoft celui de voftte impertinence.
Si tout du premier cortp Voirs m'euflîez raconté
Ce qu'on vous avoit dit , \s vous e^lfe efcouté
Mai
THEATRE FRANÇOIS, ^3t
Maïs puifque le defir d*exercervo(lre langue y
Vous a faic dégorger cette belle harangue >
Que vous n*avez rien dit de ce que vous deviez^
Lorfque je le voulois & que vous le pouviez ^ ^
Voftre punicibn tne femble légitime , ' "
£c mefms Ae beaucoup moindre que voflre crime t
Or , parlez à cette heure en touie libecté.
S A N C H E.
C*e(l, cen'eftpas cela, je me fuis mécompte i
£t de grâce y Monfîeur , aidez à ma mémoire»
P O M QUICHOTTE* . v
Tu parlois de ta femme , & quMl la falloit croire^
S A N C H E.
Ah ! bon *, je m'en fouviens : ma femme m*a donc dit ^
Que je ne de vois pais m'eugager à crédit > *
£t qu'en attendant TlHe ou bien quelque Royaum^e ,
Qui doibt changer en dais , mon pauvre toid de chaume |[
Il fcroit à propos pour nourrir mes enfans.
Que vous m*aii(igna(àez des gages tous les ans.
DOM QUtCliOTTE»
Des gages y ignorant! il 'eil. facile à ctofre
Que ta femme ny toy , n'avez point leu rhiftoire
Voyez les Amadis, les Placirs 4 les Renauds y r
t'Archevefque Turpîn , Tirante , Roncevaux ,
Tous les trois Paimerins , Bernard de Strapatole>'
Ecavalié de Phebe , Clivante , Gilpole ,
Roland le furieux , Splendian , Philtfmard ^
Les quatre Fils- Ay mon , Jean de Paris , Richard ,
Morgand , Robert-le-Diablc , & Pierre de Provence j
It vous condamnerez votre crade ignorance ;
Car vous if y verre! point que jamais Cavalier
Ait traite de la forte avec fon Efcuyct ,
Et \c ne voudrois pas , pour plaire à voftre femme /
Contrevenir à Pocdi'C> 8c me chargei: de blâmes
Jem II, Hh
4»* W^ATRE FRAirçoiSi
Non , je n*en ferai lien.
S A N C H E.
Monficur ,
DO M QUICHOTTE.
N'en parlons plus»
S A N C H E.
7e me contenterai de deux cent miUe éc us.
Cefl peu pour un gr^nd Kqy, tel ^ you$ devez êcrat
DOM QUICHOTTE.
Si vous me fervez bien je vous dois recoûnoître y
Ne vous mêlez de rien , repofcz vous fur moy ^
Je vous donnerai Tifle , où j^vous ferai Roy.
S A N C H E.
Dieu le veuille ! à propos, dites -moi , je vous prie
Si par quelque accident de la 'chevalerie
Je pBis devenir Roy , comme je le prétens.
Ma femme fera Reyne , fie mes fils des Infants»
DÔM QUICHOTTE.
Qui doute de celai} '
S A N C K E.
Moi , j'en doute & je penfe
Que c'eft un peii beaucoup pour Monfieur Sanche Pance«
DOM QUICHOTTE.
D^une relie façon le dcz- pourroit tourner
Que j*aurois dans trois jours cent Ifles à donner^
^iijelesavçis*
SANCHE.
Vous m'en donneriez une.
r domquiçhottr;
AfTuré que je fiiis de nsa bonne foiitune ^
Je te donneiois tout»
fiaEATJLf: FRANÇOIS. 48%
s A N C H £.
Que de biens à la fbys !
Fanons , Monfîeur , partons , allons nous faire Roys.
Aprèsqaelques aventures priTesdu romao »k Che-
valier arriva chez la Ducheffe y où on lui joue tous
les tours podlbles ; on fait paroitre fuccedivemenc
devant^ lui les fiU^s du gr?iud SophlS l^e Géant Li-
lyandée, Âlquif, ArchelaUs^ Merlin y & Dulcinée;
& pour le détromper de (es idées chimériques f on
lui fait voir que ce ibnt des dooieAiques de la mai*
fon qui ont joué ces perfonnages ; mais loin que cela
le guérifle dé fa folie, il n'en eft que plus déterminé
à chercher les avenfur^ ; & la pieioe ^c par ces qua-
tre vers que dît Sancho.
Allons où TOUS voudrez , Sanclie n'eft pas capable
De vous abandonner , allaiCez vous au Diabk :
Poutfuivez feuleçient le deflein d*êcre Roi,
Je vous cefpoRds touiours de mon ame & de moi;
(SUJET DU GOUVERNEMENT DE
SANCHO-PANSA.) Dom Quichotte, avec le
Duc & l|i Dacfaefle ycondqifent Sanche dans fon Iile ;
ce Chevalier faifit cette occaiîon pour débiter les plus
t>eiles maximes à fon Ecuyer j fur la façon dont il doic
fe conduire dans (à nouvelle dignité ; il lui confeiHe
cnfîiite de fe dé^Ëaiire de cette H^i^vaif^ habitude d'en»
laUer toqjours proverbes fur proverbe» » il lui dit ;
. Hhij
484 THEATRE FRAJSTÇOlSi
DOM QUICHOTTE,
Bannis de ces di£cour5 ces proverbes antiques , *
Oonc tu ce fers fi mal dans toutes ces répliques*
S A N C H E.
Quant i ce dernier point , pour ne vous point mentir »
Monfeigneur Dom Quichot , )e n*y puis confentir : •
De toute ma roaifon je n*ai d'autre héritage ^
Les proverbes enfin ont eftc mon partage.
9*en fçai plus qu'un grand Livre , & quand je veux parler >
Ils veulent tous lortir jufqu'à fe quereller.
C'efl pourquoi quelquefois j'en mets en évidence y
Qui n*ont aucun rapport avec ce que je penfe.
Pourtant à l'avenir j'en peferai les mots,
£t n'en citerai point qui ne foie à propos.
Qui ne fçait fon meAier qu'il ferme fa boutique ^
La fcience par- tout vaut moins que la pratique.
Jamais lâns l'appétit on ne fit bou repas ,
Onverroit fans la peur de courageux Soldats $
£t jai toujours tenu pour maxime afiurée y
Que bon rçnom vaut mieux que ceinture doréc«!
DOM QUICHOTTE.
£h bien ! ne voilà pas un difcours bien fuivyî
Tu fais bien ton profit de ce que je te dy.
S A N C H E,
£ii quoy manqué-je donc ?
D. Q U I C H O T T E.
Dy-moy , je.t'cn conjure J
Pourquoy vâs-tu parler de renom , de ceinture ,
De Soldats, d'appétit , de meftier , de repas î
S A N C H E.
Je vous jure ma foy que j e n'y penfois pas ,
Et que dorefnavant j'auray foin de me taire ,
. Pour ne âcn alléguer qui vous puiflc déplaire ^
THEATS>E FRANÇOIS. 4SS
Aux Seigneurs îes honneurs, (buvent trop parler nuîc ^
Xa parole fait Thomme , on cognoift Tarbre au fruit. '
Pourtant avec le temps toutes chofes fe changent :
Il fait mauvais .aux bois quand les loups s*entremangent|
Qui fe contente efl riche , aux Princes tout fied bien.
Tel maiilre y tel valet ^^ qui bien fait ne craint rien*
DOM QUICHOTTE.
Courage.
S A N C H E.
Il efl certain 9 quoi que Ton puiiTe dire ^
Ceft mal fait de cboifir & de prendre le pire :
Rien ne peut obliger au-delà du pouvoir v
La plus grande fineffe eft de n'en point avoir*
Il ne faut qu'un feul fou pour'en amufer mille ;
Qu'on n'ait pafl^ les ponts on n'eA pas dans la Vilt&^
La nuit donne confeil , la nuit tous chats font gris ^
Jamais çjaat emmouâé ne prit belle fburis.
DOM QUICHOTTE-
Achevez i votre aife> & puis fermer la porte.
S A N C H E.
La fortune n*eA pas< toujours de même forte »
Mais quoique l'on ait dit que l'on ne nuit aux Cousp
Qui fe fera brebis fera mangé des loups :
Il eA vray que le bien ne s'aquiert pas fans peine ,
Qui frappe du couteau doit niourir delà gaîné ^
La £n couronne l'œuvre « à beau |eu beau retour à : . .
Le temps découvie tout , & chacun à fon tour.. , :
Il n'ed pas toujours fête , au port on fait naufrage „
Qui veut noyer fon chien Taccufe de la rage : r - > -
Mais je trouve après tout, après bien conceA^ A
Que Tafiie du commun eA toujours mal baAé.
pites-moy , Monfeigneur * quelque diable l'emporte^
Je ne fçaurois le fuivre , il a pouAè la porte.
PomQuichoucrort*
Hnin
^S0 TUE ET RE FRANÇOIS.
Sancho prononce plufieurs jugemens : une Egyp*
tienne qu'il iSkk condamner pour yol^ jâftiSe ainfifoQ
crime :
Le larcîii eft un crime,
A qui foùvcnt l'on donne un pardon légiiimc.
Par exemple i ii nuit ndiis dérobe le jour ,
Le filcnce le bruft,-5c l'âbfenCc l'ànlôui? J
Les exrrefmes malheurs nous defrobenc des larmes ,
Le temps à la beauté defrdbe èoiis f^s charmes.
Les ans & la hddc^t defrobenc lés amans »
Les cacerrcs au£ nous defrobent les dents,
la £evre l'appétit , la liune la moiiélle i
Le hâle la blancheur » le pavé laf femelle ;
Le travail le repoi , les veilles le fommeil «
La déba,pche le temps , & Tofubre le Soleil ,
Le loup deÇrobe au(fî. les moutoois & lies chéfvret ,
Les renards les chapons y \ts chiias coiitàriis les lievies ^
Lé milan les poulet» , le blereau le raifin ,
Les abeilles les fleurs , \z& moucherons le vin ,
Les fourmis le froment y 8c la gireflè les pdmmes^
Les chenilles la feuille , hc là péfte ferhômmes, *
La lourre les poiHpin y la gUerre les Soldats.
Tout efl plçin. de larrons que vôiis ne pendez pâl;
£t le gibet n'efl fait que pour les nâferables.
<• .'■•■■. . ■ ^ ■
Enfuite y comme on rimagine bien ^ SâtKrho (b met
à table , & le Doaiettt le itfêt mi é(M^6\t ; cri même
tems on vient ràvértir que jçs énheniis font dans fon
Gouvernement y Sancho meurt de peur. Enfin la pièce
finit par ces ver»i que Sàdicho dégoÔté d'e$ é'^iidèùrf
adreiTe au Médecin :
Je ne répondrai point à Vos împertînencei.
Je fçài depuis long-temps endurer les offcnccf|
THEATRE FR AïfÇOIS, 4Î7
^onfîcttr le Médecin , ]6 dirai fculemen'r
Que voftre piaiuce ici n'a poiik de fondenient.
r J'abandonne un meftier donc je fuis incapable^
It de qui la grandeur me rçndroic mifer^ble , j
Où je mourrois de faim , où je mourrois de peur ,
Où f attendrois encor quelque plus grand matkeur ,
Four monifa-er à plufieurs qui fuivenc la fortune 9 ^
Qu'après ravoir trouvée, elle nous imporwnc, ;
£c qu'il efl alTeuré que le foiiverain bien
Confîfte feulement à ne de/Iter rien.
.- , ■ ■■♦
Vous ^ peuple- ambitieux yude qui t'extra^aghnce
Se porte à fouluitter la fuprefme puifTance ,: . i
Qui dittes tous les jours , je voudrois eftre Roy :
Regardez mon eftat, pçeneziexpiQplç à^pioy.
J'ellois fimple Berger , heureux dans mon mefnage s
Mais quoique j^ebfTe affez, je voulus davantage >
Le Diable qui nous pôufTe au defir d'edre grands ^
Me mit dans le chemin desefcuyers errants.
Là , je veux m'enrichir , &; faire bonne cherc ;
Mais au lieu d'y trouver de qiioy me fatisfaire |
Je ne fus pas plutoft à ce degré d'hofineur ,
Que je le mefprifay pour eftre Gouverneur* ,.
Icy j'imaginoisT^^sJeftiiis magnifiques ,-
Qui de cent Rôô^fiuv viiidèruient dcsbbfitiquest
Mais ce faux Médecin ^ cie péç|f|i|: > ce mocqueuc > ^
Avec des rolibe^s m'y fait dîner par CGçuc. , , , . . r
Enfin Sanche efl réduit à voir avec envie
»'Xctrttft^HfesdottÇfl»rçrtfc^ptBBlfc«î«t,^ :.<£.:
£t quittant des. fijbjcâisqui^ lui font des affronts^ ,r \
Ce Berger Gouverneur retourne à fes moutons.
t ».
$T?JET DU JFILS^ DESAVOUE,) Jâlie éto*
r^pouÇp ^e L^pid«^> SénAenc Ramàiii.' Ce' L^dè
0)9(m^j:!é p»t te^^loèfie^^, turoit pbiigé & femme à
H h i»
ifS^ THEATRE FRAN'ÇQIS:
quitter Rome ^ & à vivre à la campagne : elle y 4tdlt
devenue enceloteyil s'étoit injuAemenc perfiiadé qu*el*
le ne pouvc^c Têtre que par une infidélité. Elle accoi»
che d'un garçon, qu'il ne veut point reconnoîtrç, &
cette malhçureufe petite créature eft abadonnnée
dès le moment même de fa oaiiTanciei. Quelques tems
après l'Epidemeurt^ & il pafTe pour confiant qu'il
ne laifle point de poftérité. Il étoit néceffaire quq j'é-
tabliife ces fait$ pour l'iatellig^ence de cçtce p^ece# qi4
commence ainfi ;. -
.' J U L II. ftutté
Souvctiîf importun qitî trouble mes plailîr$5^
Tyran de mq» repos, caufe Hc mes foupirs ,
Image de ition fils qui me pourfuis fans ceflc ^
Donne enfin quelque trêve à ma tongue triftcllew
Cher Ôc ftincfté objet de ma ptui tendre âfriçur^
Cage qui ne fut mien que refpace d*un îbûr^
Préfent de la natufe , ôc Truid de'l*fiymenéc it
Félicité ravie auflr-rolt que dPonnéc,
Innocent malheureux djsîqui \t phiinVle (bit ^ ^
Sans rçavcôrfi^je-pléuxe ou cavié'ou<tti morv« . . >
Çeflc , celle, mon fils i de troubler ma petilce^
Du mortel derplarfir de ma perte paltéê ., Ôcc.
Cependant (on , fils tt*étoît; point mort, it vîvoh cfeeS
les Goths , fous le nom d^ SïndeHc ; & dans diffé-
rentes occafions^ït s'étoit fi fortement diftingué, que
fe^RoiTbeoudoricravoltprisLieii amitié, & ea avoic
f^it un dc'Xe&|iciiicipauxJQKpitàin«s. Ce jeane g^er-
iie(. reifi^ctf^tiie oa jouT' ua :§f(Md^i<fi\ fol découvre Ql
V ' > i. ♦
THEATRE FRANÇOIS. 48 cf
laiflance ; il brûle de fe faire reconnoitre par fa mère;
nais il cherche une façon adroite de Iç faire. Voici
:omine il. s'y prend ;
s ï N D E R I c.
Cependant que le Roy contemple dans la Ville
Xes funeftes eftecs de la guerre civile ,
Puir ces beaux monumens qui marquoient autres fotc^
ït la grandeur de Rome , 8c Torgucil de Tes Roys ^
Laiflànc ces raretés par le tems confumées ,
7e viens pour admirer des beautés animées.
Pourquoi rougiflèz-vous quand je veux vous loues f
Avez vous Êûc deffein de me defadvouer }
5^uis-je ne pas rougir » de voir que l'on me loue|
TlnlfTez ce difcours , ou |e vous dcTadvoue.
S I N D E R I C.
' Quand vous me nlenacez de me defadvcuer f
Vous me repréfentez ce que }*ai veu jouer ,
C*e{l un fubjeâ nouveau ^ort extraordinaire^
Et dont les iftcidens font capables de plaire.
|.es Aâcurs chez lé Roy Pont aiTez bien joué^
JULIE.
On le Aomme , Monfieur ? '
S I N D E R I C.
Le fîls detadvoué«
JULIE. ^
Ce nom promet beaucoup.
S I N D E R I C.
Vous plait-il que ]*en ùJSa
Va récit abtcgé?
r JULIE.
Faites -moi cette grace«
4SO THEATRi: FKAI^ÇOtSi
s I N D E R I C,
Ainfi ceux qui n*onc point l'efpric afl^z préfenr p
Pour fournir le fuiec d*un entretien pUifant y -
Contraints par bienfeance à dire quelque choie ,
Récitent quelques vers , débitent quelque profe ,)
Veolcnc Ce fairs croire y en enfant leurs auteurs y\
tt pour tuer le temps , tuent leurs auditeuts :
Quelques autres plus fins , mais pourtant plus modefies^
Accommodent au temps Thifloire de leurs geftcs »
JEt foahi quelque beau nom d'un héros de roman ^
Découvrent leur amour fans découvris ramant.
TSmtte le^ premiers , mais<lans cette adrcntike
L'aâiour ne paroifl point ) ce n'eH qiie-la nature
Qui cafche par addrefTe à fe faire efcouter,
It qui cache Ton nom pour fe manifeder*
JULIE.
SaSk qa*en cet endrott , ]e fçai ce qu*â faut ctpire^
liais je bcufle dé)a d'apprendre cette hiiloice.
S I N D E R I C.
Un Sénateur Romain par je ne fçai quel fort jp
Veut de fon fils naiflam précipiter la mort,
Mais les trilles regrets d'une dolente mère ,
font nuxierer enfin un arreil fi fédère i
Omiferable fils ell pourtant bien puni» • - *
Il n'eft pas plutôt né que le voilà banni.
J U 1 ! É.
O Dieux ! qu'al-je entendu ? Mais fçaurai-ie le nklef
S I N D E R I C.
àh l ce n*e{l point encôr l'endroit lé plus fuoefte S
TV LÎ E.
Je nf intereilê prefque en fot| mauvais deftla f
Vws le banoilTemem lenconcia-c-il fa fin ^
; THEATRE FRANÇOIS. 4^1
s I N D E R I C.
9on trépas lui ^àiroîc , poucvéii qù^en fa mifere
Il coguûc fa maifon aux larmes de fa luerè :
Il ne mourut donc point y mais pour chercher lamoit
Il s'expofa cent fois à la merci dû Tare.
A peine a-t-il quinze ans qu'il demsinde lies armes ^
Four chercher le trépas au milieu des allarmes ,
Qa*on le voit le premier au plus fort des hazards^
Braver infolemment les outrages de Mars :
Mais comme en ces endroits le mefpris de la vîe f j
Impefche bien fouveiic qu'elle nous foit f avic 9
Au lieu de fon trémas il y trouve l'honneur ,
ît s'il fe connoiilbic il a trop de bonheur ,
le plus.grand des mortels eAime fa vaillance*
JOLIE.
Où £t'il ces progrès?
S I N D E R I C.
Au Royaume dsprance^
Soubs Clovis les premiers , après toubs Alatic,
£t depuis fotis Zcnotl , 8c foubs Thét)dbric.
JULIE.
Cette hilloire eA àa temps.
• S I N D E tl ï C.
kvi)déti.*hm dAnticsfMe$
On méfie bien fôày^t des fuccês véritables;
Aind les payions s'cfntouvent beaucoi^ mièttJt*
J U L t E.
Vous en voyez rcflfct , voyant pleurer mes yeux ;
£n£nquede^rnt-iU
é I N D E R i C.
Il fut conduit à Ronu 9
Où quelque bçau dcAin le mena chez un homme ^
.y
'49*^ THEATRE FRAN'ÇOiSi
Qui l'avoit fecouru dans fon banniflement ,
Qui lui dit que fon pcrc «oit au monument ^
Que a mère vivoit.
J U t 1 £•
Ah Dieu î
S I N D E R r G.
Le teint vous change.'
JULIE.
6e dernier accident me paroijft bien ellrange !
S I N D E R I C.
Là s'ouvre le théâtre où le Roy fc fait voir }
Ce Chevalier lui dit ce qu'il vient de fçavoir i
le Roi le fait réfoudre à parler à fa mère.
Voici ce qui le choque , & qui le defefp.ere»
On lui dit que Lépide. ....
JULIE.
Ab ! Dieu ! qu'ai- jeentcnda?
S I N D E R r C.
K^avoit point eu d'enfant , loin d*en avoir perdu^
Jugez de fon regret après cette nouvelle ^
Il appelle une fois la fortune cruelle ;
Il voulut par fa mort s'exempter de la Lof-,
Mais il fe conferva pour l'amour de fon Ro/v
JULIE.
t.
Monsieur , en cet endroit pardonnez ina ^biéffr j^ '
Vous faiâes ce.diA:ours avecques tant d'adrefle ,
Qu'il faut que par des pleurs l'exprime ma douleuc#«
S I N P E R I C.
{
Vous allez voir ici fa gloire y ou fon malheur..
Il fe refout enfin d'aller trouver fa mère :
■ -. ■ >
Mais que lui dira-.t-il , & qu'efl-ce qu'il peut faircj^
Il eft dans fa maifôn , il lui parle , il la voit j
Sonf^ng y eiis'èmouvant> lui dit qu'il la cogaotflj; .
THEATRE FRANÇOIS. 493
l)e(roubs le nom d'un autre , il dit Ton advemure >
11 efmeut la pitié pour toucher la nature ,
Son delTcln réulîic , fa mère fond en pleurs y
Il va fe découvrir , ainfî que fes malheurs ,
Mais la crainte Tarrefte ; enfin il s*y difpofe ,
L'occafion efl belle , Ôc Ton fang veut qu'il ofe*
Ah ! ma mère , dit-il , fi ce nom ni*cft permis ,
Découvreï-vo^s les yeux y te voyez vôtre fih«
JULIE.
Ah 1 mon fils.
S I N D E R I C.
Ah ! ma mcre.
Toat fembloic concourir à ce qu'il dedroiti lorfqu'uti
accident imprévu vient troubler Ton bonheur. Depuis
ion veuvage 9 Julie avoit écouté favorablement lés
yoeux de Maxime ^ & comptoit même l'époufer incef*
(amment. Cependant elle ne lui avoit pas voulu confier
qu'elle eût retrouvé Ton fils ; elle avoit même engagé
Sinderic à cacher encore fa naiiTance. Ce jeune hom«
me la voyoit fort fouvent j en recevoit les plus ten»
dires careiTes. Maxime les furprend au moment que
Julie Tembraffoit : il devient jaloux 9 cherche que-
relle à Sinderic > fe bat contre lui, & eft bleflfé. Julie
au défefpoir du danger que court fon amant , ne veut
plus revoir Sinderic 1 & le défavoue pour fon fils. Il
va porter fes plaintes au Roi 9 ce Monarque fait ve-
nir Julie devant lui > & ne peut jamais obtenir d'elle
qu'elle veuille reconnoitre Sinderic. Enfin ce Monar«
que imagine un moyen de fçavoir la vérité; il pro«
494 THEATRE FRANÇOIS.
nonce qae fi Julis n'eft point la mère de Sinderic à
l'inftant elle devienne fa femme. Julie frémit d'hor-
reur à cette propofîtion , & fe voit enfin forcée d'a-
vouer qu'il eft fon fils : celui-ci s'étoit réconcilié avec
Maxime. Pour le guérir de (k jaloufie y il lui décou«
vre fa naifTance» & il prefle lui-même l'union de (a
mère avec lui ; c'eft par l'aveu du Roi pour ce ma-
riage que finit cette pièce.
(SUJET DE LA MORT D'AGIS.) Agis &
Léonidas regnoient tous les deux à Sparte. Agis pro
pofe une loi pour le partage des terres y & Léonidas
8*y oppofe» Le peuple , à qui cette loi étpit très-favo-
rable y fçachant que Léonidas s'y étoit oppofé y fe
mutine & demande fa mort. Cléonide> fille de ce
malheureux Roi y & femme d'Agis> engage fon époux
à prendre le parti de Léonidas. Agis harangue le
peuple y le perfuade & fait commuer la peine de
mort en un exil perpétuel. Il â foin d'envoyer une
efcorte à (on beau-pere y pour empêcher qu'il ne foit
infulté en fortant de Sparte. Les amis de Léonidas
profitent de cette attention d'Agis pour le perdre. Ils
perfiiadent au peuple qu'il n'a chaffé fon beau- père
du Trône que pour régner feul , &. opprimer la liber-
té. Le peuple fe révolte y redemande Léonidas 9 à qui
il rend la Couronne. On arrête Agis ; on le remet en«
tre les mains des Ephores » qui le condamnent à mort*
On vient annoncer à Lépnidas^ en préfiënee >de Cléoç
THEATRE FRANÇOIS. 43^
nîde , que l'arrêt vient d'être exécuté. Cette Prin-
cefTe fe tue ^ & ion père fe liyre aux plus af&eux re*
mords. C'eft aiqS que finit cette pièce y qui eft froi-
de > languifTante , & très-médiocremenc écrite*
(SUJET D'OROONDATE.) Oroondate,
Prince de Majroc, eft amoureux d'Alciane, Princeflê
des Ifles Fortunées : ou par excès d'amour , ou par
excès de timidité » il n'a pas encore ofé lui faire Ta-
veu de fa paffion ;■ fon confident cherche en vain à lui
perfuader qu'Alci'ane le regarde avec de$ yeux favo-
rables. Ce Prince eft prêt à fe mettre en colère con-
tre lui 9 & lui di^ :
OROONDATE.
Hélas que me dis* tu ]$
Pour flatter mon amour tu blefTcs fa vertu ,
Je ne puis efcouter un difcours qui l'outrage^
T H I A M I S.
Mais quoi?,
OROONDATE.
Je 19 dc6fènds d*en parler davantage |
Thiamis , fois difcret , mais par quelle a^ion
TTa-t-elle fait juger de fon affedion ?
r Ne m*as-cu point parlé fans aucune apparence ?
Keff onçU-mpi , mus au moins ne dy rien qui roâènce^
THIAMIS.
. 24e parler que de vous dedans rous ces difcourS f
Vous voir avec pl^ifir & vouç louer toujours,
I4*eft-ce pas témoigner qu'une fecrctte flâme >
Commeacexl*échàaâFet les froideurs de fon am«!»
49S THEATRE F.RAJVÇÔIS,
OROONDATÈ.
Ah ! que m juges mal de fa civilité !
C'en efl un témoignage ou bien de fa bonté ^
Que je dois recevoir avccqucs révérence,
£t non pas en tirer une iujude efpérance:
Je fçai bien que pluHeurs , dans un pareil bonheur^
Croiroient avec l'oreille avoir gaigné le cœur ,
Qu*au)ourd'iiui cette erreur a pafTé pour maxime ^
Qu'on confond aifémcnt l'amour avec Teftimc ,
St qu'une honneftc femme avec des complimeii
engage innocemment de crédules amans ,
Qui tirent quelquefois par excès d?injuftice
De fon honnêteté les foupçons de fon vice s ^
Mais je n'approuve point cette légèreté.
Qui joint l'ingratitude à la témérité ^
Qui rompt la libetté du commerce des âmes f
£t tache le renom des plus honnefles femmes s
Ainiî je ne crains pas que , pour eftre eflimé j
XJn honncfte homme ait droit de s'eftimcr aimé ,
L'eftime cft un -tribut qu'on rend fans que l'on aime^
£t l'amour ne fe doit , iî non à l'amour mefme.
II fait bien-tôt connoîtrc qu'il n*a de tîmîdît^ qdô
vis à vis l'objet qu'il adore ; les Etats d'Aîciane font
attaqués par le Prince Mexandre t Oroondate vole au
fecours de la Princeffe, & remporte ftr fon ennemi
la viftoire la plus fignalée, Alciane n'avoit pas befoin
de ce motif pour aimer le Roi, Depuis loog-tems elle
en étoit charmée ; mais la décence Tempèchoic de dé*
couvrir fes fentimens. Le fouverain de Maroc avoie
un frère » nommé Bajazet ; la Princeffe une fceûr i
nommée Clitie ;^ qui moins difcrets que leurs aînés ,
•'aimoient & ayouolent leur tendr elfe. Cependant par
det
THEATRE FR ANÇOIS. 4g^
ides aâions équivoques , par des mots à double en*
tente, Oroondate.fe perfuade tout à-coup qu'Alcranô
aime Bajazet, & Alciane croie qu'Oroondare aimd
Clitie. Ceft le pivot fur lequel roule touc le nœud de
la pièce. Cette intrigue eft condui:e aflez mal adroit
tement i & on eft fans cefle impatient de voir led
A&eurs prendre toujours les paroles afofolument à
contre- fens. Cepen:iant cela eft pouiTé fi loin , que
fajazet fe perfuade qu'il eft en effet aimé d'Alciane»
L'ambition triomphe , il oublie fon amour pour Clitie f
& va prier Ton frère de demander pour lui la Prin-
cefTe des Ifles Fortunées : Oroondate de plus en plus
perfuade que cette PrincefTe aime en effet Bajazet^
quelque chagrin que lui caufe cette démarche , fe
détermine cependant à la faire; Alciane au défefpoir
que le Roi fonge à lui faire donner la main à un autre
qu'à lui-même, refufe abfolument de s'unir à Bajazet*
Oroondate ne fçait que penfer de ce refus , auquel il
o'avoit pas lieu de s'attendre ; la converfàcion cbiiti^»
iiiie« laPrinceiTe lui demande s'il n'a jamais été amou«
reux. Le Roi, en tremblant, lui avoue qu'il eft épris
plus qu'on ne l'a jamais été de la plus par&ite beau*
té, Alciane le prefle de lui découvrir I objet de fa
itendrefle ; le Roi plus embarrafle qu'on ne peut l'ex-
p;imer, tire une boëte de'' fa poche , ia remet à la
Princefle , & lui dit que cette boëce renferme le por-
trait de l'ôbiec qull adore; elle l'ouvre avec empret
Tome U. I î
49^ THEATRE FRANÇOIS;
fement » & eft an comble de fa joye , lorfqu'elle fe
voit peiûte dans cette mignature : eUe lui die que, poar
reconnoitre fa confiance , elle lui avouoit que cette
même boête renfermoit auflî le portrait de celui qu'el*
le préféroit à toute la terre 9 & fe retire. Le Roi eft
fort empreifé à découvrir le fecret qui lui cachoit ce
portrait, il n'y peut parvenir. Son confident ^ après lui
ftvoir fait un très long & très- plat difcours fur les pro-
priétés de l'optique , veut tirer fon maître de peine y
mais n'eft pas plus adroit que lui. La Princefle,
après avoir joui alTez iongtems de l'embarras du Roi|
lui apprend dans un billet le moyen de découvrir ce
fecret : on peut juger des tranfports du difcret Mo«
narque , lorfqu'il voit que c'eft fon portrait , & qu'il
Ut des preuves de la tendrefTe d'Âlciane pour lui; il
va fe jetter aux pieds de la Princeffé^ & l'union de
ces deux amans fait vraifemblablement ccScv l'excès
de leur difcrétion. Le Roi obtient de Clitie de par-
donner à fbn frère le moment d'erreur où le defic
du Trône l'a voit plongé, Se époufe auffi la jeune
PrincefTe. C'eft ainfi que fe termine cette pièce la
plus froide & la plus ennuyçufe dont j'aye encore
rendu compte. Il eft aflez diflîcile de comprendre
comment cette boëte, qui contribue au dénoûment,
renferme ces deux portraits : on laifle à entendre que
c'eft un ouvrage qu'avoit &it faire le Prince Bajazet.
(SUJET DU PRINCE RÉTABLI.) Pow
THEATRE FRANÇOIS. 49,9
- •
^donner Tidée de la verfification noble & aifée de cette
Tragi - Comédie , je vais en rapporter la première
fcène qui fèrvira en tnème-tems à mettre fous les yeux
«lu Leâeur Texpolition du fujet«
ALEXISAKGE.
Cooy derpouiller un frère & lui creyci les yeux ^
N*e(l-ce doac pas allez pour me rendre odieux >
Sans me fouiller cncor du fangd*un |eune Prince 9
Qui me voie fans murmure occuper fa Province î
Qu*on ne m'en parle plus , il vivra > je le véuxi
Si je fuis moins cruel , je ièrai plus heureux.
Enfin il eft mon iaag , il cil fils de mon frère.
C 1 Y T E.
Mais d*un frère ennemi , que vous voulez défalcc^
A L E X I S A N G E.
Ce frère fut Tobjet de mon averfion ,
Quand fon Thrône l*écQic de ;non ambition ;
Je haylTois ^n règne , & non ^s fa pçrfonne :
Mais depuis que mon bras lui ravit la Couronne , ,
Que )e règne à fa place ^ èc ^qu*il ell dans les fers i
Tii même du regret des maux quMl a fouffètts.
Alors qUe je formii le deflèin de lui nuire 9
Je voulois m*e(lablir Se non pas le détruire ;
Je rechcrchois fon Thrône & non pas fon tombeau i
Voulant efhe (on maiilre, ic non pasfon bourceau«
Je fçai qu*en pourfuiyat^ç la PuiCance fuprème.
J'ai fuivi les cooieils d'une rigueur extrême }
Que rien n'a diverti le cours de mes de (feins :
J'ai profané les lieux & les flroits les plus faints^
Mais qui ne fçait auffi qu'à celui qui médite ^
De gagner un Etat, toute chofe efl licite ;
£t qu'un grand cceur rempli de cette padion^
Me cognoit d'autie loy qu« fon ambition l
Sôo THÈÀTR Ê fR A N^OlSi
Maintenant que je fuis au bout de la carrière ,
3*ai droit de rclafchcr de ma rigueur première ,
-Dé flatter des Sujets , & des Princes vaincus ,
Qui veulent m'obcir,' qui ne réfift eut plus.
C L y T E.
Ouï , Seigneur , c'eft aînfi que doit agir un Prince^
Qui des mftins d*uii rebelle arrache fa Province ,
Qui rentre dans les droits , & parmi des fubjets *
Dont lejvœux devànçoient TcfFet de fcs projets;
Mais qui règne fans titre , a bien d'autres maximes ;
£t comme Tes grandeurs ne foili pas légitimes ,
Sur la moindre apparence il craint lin attentat ,
£t perd tout ce qui peut lui contefler l'£tat :
L'hilloire efl pleine enfin d'exemples remarquable^
Des Roys que la douceur a rendu miferables -y
Mille Se inille vainqueurs , par excès de bonté.
Ont perdu les lauriers qu'ils avoieut emporté.
La douceur n'ell plus bonne après la violence
Le vaincu ne la voit qu*avccque deffiance :
U foupçonne toujours, dans fon inimitié ,
Qu'on le âa'tce par fraude & non pas par pitié;
Ainfi, perdez! ....
A LE X I SA N G E.
Suflfit, je ne fçauroîs vous croire,'
Ce beau fang tefpandu fouilleroit ma vidoire.
C L Y T E.
^ y«us bazardez J!£tat , en voulant les (àurei:.
A L £ X I S A N G E*
Ce bras qui l*a conquis le fçaura confçrvcr.
Celui qui n'a pas craint les maiftrcs de l'Empire^
Suivis derSataillons armés pour le deHruire ,
Ke fçauroit fe Tcfoudre à les craindre aujourd'hui »
Qu'ils fout en Ton pouvoir , fans forcé & fans appui 9
Quand ils m'ont réfî/lc par une guerre ouverte ,
le u'ai poinc balancé pour réfoudte leur perte ,
^ L
THEATRE rRANÇOIS. <50i
iTai ^né leur çrépas, quand ils fignolent ma mort ;
J'^i vaincu leurs efforts par un plus gran4 effort.
Ayant Icré contr*c»ix une pui(ïante armée ,
Je l'ai dans les combats au carnage, animée, ^
3'ai pris Conftantinople , Scdedruic fans botreut
Tout ce qui s'oppQfoic à ma ^ufte fureur :
Ma haine avoir alors des objets véritables ;
« Mais voyant dans mes fers ces Princes miferables j^ '
Malgré les fentimens de mon inimitié »
Ils me font devenus des objets de pitié ;
It loin d'autorifer vôtre in jufte penfée ,
3'abhorre les effets de ma rigueur pa(î2C|^ . ■
^c m'çn Pïiiclcz jamais. - ;
C L y T E. : ;
Je vous dois obéir ;
, , - . .. ... .- . .
Mais vous obéiffant ^ je crains de vous trahir y
£c qu'un^jour , mais trop tard , j*en fouffre du reptocHçé
A L E X I S. A Ivl G E.,
C'eftaffoz , ^rifons-14.5 car PUcidc s'approche.
On a vu par cette fcène combien Alexis Ange e(f
touché d'avoir ité obligé 9 pour fatisfaire à Ton ambî*
Ciouy de faire crever les yeux à ion frère Ifaac, &
de le &ire mettre en prifon avec le jeune Alexis ^foa
fils. La cçmpafnon pour leur fore miférable triom*
phe des ayis de tous fes Confèillers , & il leur rend
la liberté à tous deux ^malgré le danger où Ton afTure
qu'il s'exppfe. U fait plu^ ; fçacbant que fon neveu
ttft amoureux d'une (œur de l'Impératrice^ il charge
cette jeune Princeffe de calmer la jufte colère d'Ale-
xis 9 & de lui dire qu'il confent à la lui donner pour
ipoufç I Se à lui ^Sixm h Couronne après lui* S%
$bi.. TVEATAÊ rïlAl</ÇÔIS,
clémence n'eft pas récompenfée. Ifaac & Ton fils ne
font pas plutôt en liberté > qu'ils ne s'occupent que
du foin de fe venger. Alexis fe (auve de Confiantino-
pie y & va joindre Baudoin > Général des François 9
qui marchoit pour délivrer Jerùfalem. Baudoin ^ tou-
ché des malheurs du jeune Alexis » s'engage à le vei^
ger , il déclare la guerre à l'Empereur Grec , & met
le fiége devant Conftantîhople. tjhe chofe aflez fin-
guliere > c'eft que pendant ce (lége où l'on combattoit
tous les jours , le jeune Alexis trouve le moyen de
S'entretenir fur les remparts pendant une heure avec
fa maitrefle. Cependatnt Baudoin s'empare de la Ville»
Alexis Ange (e faiive avec fa femme 9 & âddre la
bonté Divine » qui le punit fi légèrement do crine
qu'il avoit commis. Baudoin paroit avec Ifàac & le
jeune Alexis. Il rëhd le Scéptî-e iu père i 6c Ir^tle aa
fils f puis il finit la pièce par ces vers :
2^e confidercz plus ce ^ue nom avons faîf »
Mais adorez la caufe en recevant TefFet :
Ce n'eft pas noftre bras qui foice des miiraîlÎM ,'
C'efl la puifTante miin du grand Dîéa cfe^ batallfes^
Lui feiil , comme il lui plaift » fait U défait ÏXià Rois ^
£t nous n'avons rien fait qu'exécuter Tes lolx.
Chers compa^nonc choius pour ce beau miniftere ,
RecoguoifTons Thonneur <|u*il a daigné nous faire 3
rourfUivons noftre cour(è , & fortanc de ce Uba ^^
Allons venger ailleurs la querelle de Dieu.
Toute la Paleftine attend nojlre a(fii^ance »
IDu tyraii qui Topprime,- allons ptetldre vengeince^
Héndre le Jordain Hbre une fecqnd* fois»
THEATRE FRANÇOIS. ^ù^
Cette pièce n'eft pas bien intéreflantet tnais elle
çft très -bien écrite; on en pèat juger par la fcène
que j'ai rapportée : toutes les autres font veriifiées
avec la même facilité , & la même nobleffe. Un grand
défaut qu'on peut reprocher à l'Auteur , c'eft qu'Ale-
xis Ange y qui n'eft qu'un ufbrpateur, qui a fait crè^
ver les yeux à fon frère ^ & qu'on dev.oit nous repré-
fenter comme un tyran cruel , eft au contraire le meil-
leur homme du monde j plein de retigién > rempli
^'humanité» & déteftant fans cefle k$ mmes qu^
l'ambition lui avoit fait commettre > & lorfqu'on le
voit prêt à périr , & obligé de s'enfuir de Conftanti-
fiople >'on ne peut pas s'empêcher de s'intérefler à lulj^
& de plaindre fon fort.
1654.
* LE COMBAT YICTORIEUX DE BACCHU^
CONTRE NEPTUNE > enfemble fa naiffance & fa
vie 9 Comédie en troiâ aâes» en vers. Earïs ^ Jean
Martin 9 16 34. in-Z^.
( SUJET DU COMBAT VICTORIEUX DE
BACCHUS. ) Semelé ayant perdu foa fils Bacchus>
eft inconfolable » elle defcend fur Ijt terre pour le
chercher. Des Amazones l'a voient trouvé & leret\«
dent' à fa mère. Semelé> enchantée» prle ces Amazo*
nés de vouloir bien l'élever,, elles s'en chargent avec
plaifirj & lui offrent du lait & (de Peau, fiaçchus re(u(ç
avec opiniâtreté de boire de ces liqueurs. Un Aftro-
logue qui fe trouve là 1 leur confeilte de lui donner
du vin; BacchusJlavale^âyectlébcé^A Devenu grand
cout-à-jcoup> il fe £uicfoivre par des Soldats , qui tou^i
go4 THEATRE FRANÇOIS.
ont la boutçille à la main. Il rencontre Neptune i aved
qui il a querelle ; il lui livre bataille , Sl le met en
fuite. Bien tôt après , Neptune revient à la charge,
il eft encore vaincu > 3acchus rqrpreD4 U ville d'Atbè-
ws > ôç y publie cet Edit,
x> Bacçhuç, Roi de Grave, de la Sciota Scd'Aye,
a> Grand Duc d'Auxerre , de Bourgogne , Comte
» d'Orléans & d'Argenteuil , a ordonné & ordonne
:>> qu'un chacun de fes fubje&s» de quelque aage &
yy condition qu'ils foient , gardent inyiolablement Ta-
» fage du vin , dit liqueur Bachique, à peine d'être
» brûlé tout vif, & les cendres jettées au vent , leuri
» biens confiiqués, moitié applicables aux cabaretfi
)> & l'autre aux dénonciateurs, ce
L LICURGUE à BACCHUS.
• '■.■* .
» Redoutable Monarque de l'univers , nous ac^
ift ceptons tous volontiers les Loi x que votre Majefté
>^a ordonnées ; Ôc je promets devant tous les Diemc
y> immortels que j'attefte , que je ferai tout le premier
$» qui pbfervera jufqu'â l'heure de la mort TEdiâ?
:>> maintenapt publié, & je publierai moi même àtooC
>» ce peuple, auquel autrefois j'aicommanâé;^ rJSdiA
"^ que votre Majefté a ordonné,
C H 4 HS q N^
Bacchas , mes chets- amis j(
A^ boirçyuftu? ço^yiçi; *:
i
THEATRE FRANÇOIS. $oS
Obfervons fes Edits
hu jours de noftrc vie;
BA CCHUS.
J'aurai égard à l'honneur & à l'obâflance que ta
»> rends à ma Majefté. V.ens quant & moi} Je ce
» vçux faire mon Efcuyer. ce *
Ceft ainfi que fe termine cette pièce la plus p>te,
la plus roauvaife , & la plus ridiculement écrite qu'on
puifle trouver. Je n'en aurois pas même rendu compte,
tant elle eft ablurde , fi le titre ne l'annonçoit comme
une Comédie , quoique certainement elle oVic rieD
<|ui reflçmble à un Drame*
CHARLES HERSENT, Prédicateur & Chatw
celier de l'Eglife Cathédrale de Metz.
LA PASTORALE , ou PARAPHRASE DU
CANTIQUE DES CANTIQUES, fuivant le fen«
de la lettre y en cinq aâes , en profe.
LA PASTORALE SAINTE, ou PARA-
PHRASE ALLEGORIQUE DU CANTIQUE
DES CANTIQUES DE SALOMON , Roi dlf-
raëi I en cinq ades , en profe,
LA PASTORALE SAINTE, ou PARA-
PHRASE MYSTIQUE DU CANTIQUE DES
CANTIQUES DE SALOMON, Roi dVra^l, et
cinq a^es^ çn profe^
§oS THEATRE FRANCO It,
Ces trois pièces fe trouvent dans un volatne çpi
a pour titre y la Paftorale Sainte , o\x paraphrafe da
Cantique des Cantiques de Salomon , Roi dlfraël y
félon là lettre , & (elon les fens allégorique ou my-
flique I avec une ample introdudion , dédiée à M. le
Cardinal de Richelieu^ Paris » Pierre Blaife} 1655*
(SUJET DE LA PASTORALE SAINTE.)
Cet ouvrage y comme je viens de l'annoncer» eftdi-
vifé en trois PadoraleSy ou plutôt en trois Drames
myfliques y & fort longs. Il ne peut intérefTer que les
perfonnes verfées dans l'interprétation des livres faints,
& curieufes de voir les difFérens fens qu'on a pu
donner à ce Cantique mydérieux. L'Auteur n'entre
en matière qu'après une très - ennuyeufë difTertatioa
fur ce Livre de Salomon : après quoi commence la
première partie , dans laquelle il s'attache au fens*
purement littéral du Cantique des Cantiques. Il in-
troduit fur la fcène un Berger & une Bergère 9 épris
l'un pour l'autre de la paflion la plus vive , à laquelle
Ils s'abandonnent tout entiers , & qu'ils peignent avec
une chaleur d'exprefllons finguliere. D'après le texte
refpeâable qu'il cite en marge , il a imaginé des in«
cîdens qu'il met en œuvre , & dont il compofè l'intri-
gue. Je craindrois de profaner ce fujet fublime^ fi
jl'ofbis détailler avec exaâitude la marche de cette
Pafiorale , & je craindrois en mème-tems d'aprèter à
rire à mes Le&eursy qui, dans ce fiécle-ci, n'ont
plus cette heureufe (implicite, qui faifoît autrefois re?
garder les naïvetés les plus ridicules comme des beau-
tés fublimes. Enfin , malgré les pieux efforts de l'Au-
teur y les expreffions plus que paffionnées , dont fe
fervent les Adteurs , pourraient fcandàiifer ceux q(ô
THEATRE FRANÇOIS. $oy
né font pas accoutumés au ftyle tnyftique porté à l'ex-
trême. Comment pourrois- je , en effet , voiler ces ter-
mes, fi fou vent répétés par l'amant i lorfqu'il s'enivre
des louanges qu'il donne aux tettons , au ventre $ au
nombril) aux euifles, &c. de fa bien-aimée.
Les deux Paftorales qui fuivent , font une double
paraphrafe du Cantique , dont l'une , eft l'union de
f Eglife avec Jefus-Chrift , & les perfonnages fubfti-
flitués à l'amoureux Berger & à la tendre Bergère »
font le Verbe éternel , l'Eglife , l'Ange & les Filleà
de Sion, &c. Dans Tautre § c*eft Tunion de l'a me avec
le Verbe , & on introduit fur la Scène , l'Ame , le
Verbe , les t^'idelés , les Direfteqrs de confcience ,
&c. Dans toutes deuxi on introduit le texte, & oti
l'allotîge du fens myftique qu'on veut lui donner ; &
l'Auteur plein encore du caraâère pafTionné que , dans
(à première pièce , il a donné à fon Berger , conferve
au Verbe éternel uri Ay\b tendre & galant , qui peut
dans ce tem$ là avoir fait un grand clFet ; mais qui
certainement dans celui* ci ne feroit ni goûté ni 9p^
prouvé.
16352
JE^N MILLET de Grenoble.
LA CONSTANCE DE PHILIN ET MAR-
GOTON , Paftorale en cinq aftes, en vers Proven?-
çaux , & quelques vers François , dédiée à Monfei^
gneur de Sault , François de Bonne-Crequy , avec un
Prologue récité par lâ Nymphe de Grenoble à Mon-
feignenr le Comte de Sault , & à Madame la Com-
Ceile^ Grenoble , Edouard Raban > 1 6 3 5 . in 8?.
JANIN OU LA HAUDA , Pftftorale & Tragi-
^od THEATRE FRANÇOIS.
Comédie » repréfentée à Grenoble , en cinq a^es;;
en vers Provençaux 9 dédiée à Monfëigneur Pourroy»
Chevalier , Préfident en la Cour de Parlement de
Dauphiné , avec un Argument & un Prologue de la
Vaye de Saflbnnage, Qreno^lEji Edouard Raban ^
LA BOURGEOISE DE GRENOBLE, Comé-
die en cinq a6te$ ^envers Provençaux , dédiée à Mon-
feigneur le Comte de Sault. Qrenoçle, Philip-
pçsCharuys, 166$. î«-8°.
Je ne peux pas rendre compte de %A constan-
ce DE Philin et Margoton t n'ayant jamais pu
trouver cette pièce , de l'exiftence de laquelle je ne
peux cependant pa$ douter. ^
(SU JET DE JANIN. > Le Berger Janîn cft
amoureux de l'Hiiuda ^ fille de Piero & de Thierena.
Cette Bergère, révoltée de (on ind^fcrétioii , reçoit fc»
vœux très-froidement ; ce jeune homme , outre le dé«
feux d'être indifcret , étoit encore fort avantageux*
y oici comme il parle de lui-même*
per ml je fçu ^ 4ni ^^^ ^^(> qu'una fiUi.
M'approche , un limafon en fort de fia coquillî ^^
Comm* un Joeyno poillen à poin de travailliez^
Ferme fare gingame faut pa gatillic.
Ne feu pa cycrivan & (î potto la pluma y
Ne feu pa mareicha & fi ficro l'encluma ,
Ne feu pa pellatic & fi fcavo fourra ,
£ ne feu pa baitié & fcavo rembourra ,
Comme noflron fournie , fegon SardanapahW
7c fçayo biei) mena, lo maoçho de la paU »,
THEATRE FRANÇOIS. £o^
Je n'entrcprcno ren que n'en vcneyfo aboUt ,
I«co que je n'ay ren apprei je fcavo tout.
La Thooi , la Margot , la Bercha , la Lorenci^
Ont deyia eyfaya la meica dema fcienci ,
It je lour ai (l bien apprei Bedin bedot ,
Qu'elle volon toujour fichié dedin le pot.
£llc yolon toujour lo fu à lour colayni ^
Ren ne lour fâche tant que lo tour & reychayuî;
y> Pour moi je fuis û. dru qu*au(fî-tôt qu'une fille
9> M'apptoche , un limaçon me fort de la coquille.
9> Comme un jeune Poulain avant de travailler,
3> Pour me faire fauter il ne faut pas me chatouiUer.
31 Je ne fuis pas Ecrivain , & pourtant je porte une plume ^
3> Je ne fuis pas Matéchal , & fçait battre l'enclume >
» Je ne fuis Pelletier, & je fçais bien fourrer ,
31 Je ne fuis pas Bourlier , & je fçais rembourer,
» Comme notre Fourniet * , fécond Sardana^alc »
3> Je fçais fort bien mener le manche de la pèle.
» Et je n'cntreprens rien dont je ne vienne à bout y
3) Et n'ayant rien appris , je fais fort bien <ie tout i
» La Toinon , la Margot , la Berthe , laLorence^
3> Ont edayé déjà moitié de ma fcience.
n Et je leur ai appris Ci bien Bedin * * Bedot,
9> Qu'elles veulent ioujours ficher dedans le pot , &c.
Il rencentre THauda & lai fait des propofidons»
qa'ane fille ne peut accepter que de la part d'an
époux ; THauda fe fâche , & lui défend de jamais
paroitre devant elle. Âmidor y Gentilhomme Fran-
çois > rencontre à la chafTe cette jeune beauté » & en
devient amoureux. II parvient à lui plaire > & ils (e
(*) Boulanger. (*♦) Le Jtu d'amour.
^io THEATRE FRANÇOIS,
promettent mutuellement la foi de mariage. Pierone
fc foucie pas d'avoir un Gentilhomme pour gendre 9
& préfère J^nin ; Thicrena au contraire donne la
préférence à Amidor. L'Hauda^ pour mettre fon père
& fa mère d'accord y confeille à (on amant de prendre
rtiabit de Berger 9 lui promettant que cette déféren*
ce plairoit certainement à Piero» Janin, qui eft inftruit
du bonheur prochain d*Amidor, s'adreffc à une Sor-
cière pour tâcher d y mettre obflacle ; il eft trompé
dans Ton efpérance > & Amidoif époufe (a chère l'Hau*
da. Janin toujours occupé dudefir de fe venger, pré-
tend avec le flageolet de la Sorcière nouer l'éguillette
an nouvel époux ; inais cette dernière entreprife ne
lui réulTit pas mieux que la précédente ; & la pieco
finit après le bonheur certain des jeunes mariés*
Dans toute cette Paftorale, qui eft très-gaye,îl
n'y a qu'Anùdor & fon frère Floridon , qui parlent
François, les autres s'expriment en Provençal. Il y a
deux jolies chanfons > qui , je crois , feront piaiûr au
Leâear;la première eft dans le Prologue.
ycîcy lo mcy que tout combade y Voici le mois où tout gambade j
Comrae lou Chourot ^ Lapin, Comme la chèvre & le lapin.
Et que dcfîu louz aubcpin , ît que dclTus les aubepins
Lo RoâîgDon donne Taubade : Le roâîgnol donne ra.ubade ;
Car fen fommcllié not ni jour. Car fans fommcillcr, nuit ni jour,
U charf melle de Tamour. H iaic le ramage d*amour«
If Lo tem et il dou que teut chante Le tems tti û doux qus tout chante
La graci de c* eft on Printem , Les agrémeus de ce Printcms ,
£t (arore lo paiTatem , ït rend plus favourctix les amufemeas
Vboey ou la l'Hauda m'enchante, Du^bois ou la Lhauda m'enchame.
Tout lo mondo fur io verdou ^ Tout le monde fut la verdure.
Se fçai beiilé ormi nou dou. Sçaic fc baifqc honnis nous deux.
THEATRE FRANÇOIS.
5«
*^ Voulouz izejru en lour ramageo>
1r>e dou en dou 6c bec à bec >
S*accordou mieu que Ion rebec ,
£n fe fempeillaa lo plumageo.
Mais la Lhauda que )*amo tant >
Ne vott pa que j*en faiïb aucan.
f Lilli vou pro que je ta danfo
XJ fon de quoquc âagcolet ,
Mais quana )e focy lo marjolec
I ne vou pa que je piciamo
Son beifîé dou per rerpii:a y
Inco qui m'encen foufpira.
f Quoque fey à la deyrobada >
Je lui en attr.ippo quoqu'un , .
Lou garçon ( comme die chacun >
. Ke font jamey Tamour de Bada »
Inco qu*un beific gafconna ,
l^*ec pas a dou que lo donna.
f Vaut mieu feybaudi à la courfa,
tQue de demoura rebuti ,
Ceu & tout-à tat abruti ,
Qui mori de fey près de la fourfa ,
Jamey jamcy lou vergognou.
£n amour ne font grand Se^gnou.
f Et raut ben mieu prendre pcr forci
I.OU beiué que ne beifié pa ,
Louz honrou y perdou leur pa >
It comifie l'abro fcn eycorcy »
Devenon fec , quand la cofa
Refufe de louz atrofa.
f £ fakr doDqua que je folageo
Mon amour de mille bei{îé ,
Et quand i deburtct m*eygrcciné ,
J*eybrandarey fon pucelage ,
Au ni bien le Chaflcl moin fort ,
Ne la rend jamey qu'à Teyfort.
(i) Langage naturel.
(2) La faflc danfer.
( 3) ^^ parois trop emprelTi*
i4) Sans en cirer pacti.
Tous les oifeauz en leur ramage ,
De deux à deux ^ & bec à bec ,
S^accordcnt mieux que le rebec ^ (i)
Et fe careHent le plumage y
Mais la ^hauda que j'aime tant »
Ne veut pas que j'en faflè autant.
Elle veut bien que je la daafe (%)
Au fon de quelque flageolet ;
Mais quand je fais le marjolety (3)
Elle ne veut pas que je puife
Son doux baifer pour refpirer »
Quoiqu'elle m'entende foupii;er»
Quelquefois à la dérobée
Je lui en attrape quelqu'un.
Les Gafcons > comme dit chacun »
Ne font jamais l'amour de Bade, (4)
Quoiqu'un baifer gafconné , i$)
Ne foie pas û doux qu'un donné.
Il vaut mieux fe jouer à la courfe ,
Que de demeurer rabougri , (6)
Celui-là eil tout-à-fait abruti.
Qui meure de foif près de la fource.
Jamais jamais les vergogneux (7)
En amour ne font grands Seigneurs. (8j
Il vaut bien mieux prendre par force
Le baifer que ne baifer pas.
Les honteux y perdent leurs pas ^
Et comme l'arbre fans écorce
Devient fec , quand la tofée
Refufe de l'arrofer.
Il faut donc que je foulage
Mon amour par mille baifers.
Et quand elle devroit m'cgratigner.
Je forcerai ion pucelage.
Auflî-bien le Château le moins fort
Ne fe rend jamais qu'à l'e^Torr.
■?-*
(5) Dérobé.
(6) Sans rien faire.
(7) Les honteux.
(S) Ne font pas fortune.
^î% THEATRE FRANÇOIS.
Ceft Janin au défefpoir de la perte de fa maitrefTei qn
chante la féconde»
Que feray-jc Poiiret ,
Puifqae l'amour m*c(l aygro !
Comme un aren fourec ,
Je vocy deveni maygro :
^on arma deyfola ,
Ne fe poc consola.
^ U ver de mon foufpy^
Fcrdaii ma tourccrcUa,
Xfon groin vac mieu fiappy 9
Que flou brîHa de greUa ;
It mon cour marfondu ,
Vat être tout fondu.
^ Je feu dezeretta
De touta à Tefperancî,
Gnat poinc de pourecti y
)4i même de foufFrancl^
Si granda fur lo cour.
Que la perta en amour.
f L'air deburir s'embrunchié
De ma mina malada,
ît tou c'eft ou tochic
Qui ont prey la pelada ,
t>eburion , plein de chalou j
Fendre de ma dolou.
^ Mais l'air s'en eyclaircît>
It fat rire fa faci ,
£t lou rochié maffîr ,
Ke me pnoniiron que glacî »
Tout , jufqu'uz animau ,
Se mocquou de mon mau»
^ U lieu de fare un rue
De me plou , qui fen ceflâ
ColifTc aViec un brut ,
V pied de ma maitreàa y
I.a terra apra de four ,
Lebet comm'un rafour.
Que fcraî-ie Pauvret,
Puifque l'amour m'eft aigre? Cil
Comme un harang foret ,
Je vais dormir maigre :
Mon ame délolée
Ne peut être confolée.
Au veut de mon foUpî^ f
Perdant ma tounerdle, /
Mon vifage va plus fe âétrl^.
Qu'une fleur briCee par la g^êlei^
£t mon cœur n or fondu
Va'êire tout fondu.
Je fuis deshérité
De toute e'pérance;
Il n'y a poiàit de pauvreté ^
Ni même de fbufFrancc
si grande fur le cœur ,
Que la perte en amour.
L*air devroit fc brouillée
De ma mine malade^
£t tous Ses rochers
Qui ont pris la pelée ^ d")
Devroient, p!cin5 de chaleur jj
Fondre de ma douleur.
Mais l'air s'en éclaircic^
ït fait rire fa (àce ,
£t les rochers maflifs
Ne me montrent que glace |
Tout , jufqu'aux animaux ^
Se mocque de mc\ xxiaux«
(z) Contraire, funefle.
(3.) Qui ont perdu toute leur verdui
f Puifq
THEATRE rRANÇOiS, gt^,
f Paif(|ue de tottt recouc9
L*c(pera^nce fcnverfe»
Faut que faye recoar
A la moïc que tout vccfe t
Audi ben je feu là
Davey tant bariula»
f O mort que î*ay chu6
Vxt ma ^atikla madalli «
^ £t qui fa tout muH ,
Vin feyc de ta dalli
la fi pria de mfon four^
Yinginie de Tamour»
N
Le contrat de mariage entre Àmidor Se Lhaudâ
eft en vers François ; i*ai cru que le Leâcuc en ver«
roit quelques articles avec plailir)^
Itéra y en contemplation
De leur proche conjonâion^'
Thievena , bonne ménagère ^ -
Mexe de ladite Beigece ^
Lui donne un liô couvert de fleuctj;
Pour y eileindre Tes chaleurs :
'' A la charge que bien apprifb ,
Elle n*y lafche point fa prife;.
Item y fa tante , qui fouvent
Souflè mieux du cul que le vent y
Lui donne un four pour fon lifàge |
A la charge qu*en fon ménage
£Ue mette bien le levain,
£t ne pétiiite point en vain.
- Item i l'époun^e future ,
suivant les loax dçiia natur»^
Se cOwIUtue /'es moutons >
Sa bpuche > fef /eu^ , fes tçctoxls>
%meIL Kk
p4 THEATRE FRANÇOIS»
Et ce qu'elle a deffbus ft cotte ,
Que pour rupplémenc de (à dote^
^ Ilic exhibera dans la nuiâ ,
Que l'un à l'aulrc doit fans bruit
Tirer quelaue coup d'edocade.
Four enfoncer la barfcade.
Item , ledit futur époux ,
Pour mourir entre deux genoux»
Et rendre fon ame a(rouvie ^
Au lieu où chacun prend la vie ,
Se conftitue roi^ (es biens ,
Autant pour lui , que pour les ûcaSp
A la forme de l'inventaire
Fait ci-devant par moi Notaire.
Item , outre un de fes boyaux ,
Donne â réj^ufc pour joyaux ,
Deux perles «n rondeur égales, &c.
(SUJET DE LA BOURGEOISE DE GRE-
NOBLE.) Marciane, veuve & bourgeoife de Gre-
noble , avoic une 61le , Dommée Diane ; Rochimon i
veuf auffi & de la jnême Ville > avoit un fils nomm^
Caflbre i le jeune homme & la jeune fille s'aimoient»
& Marciane & Rochimon feignent de confentir à
leur union ; mais ils avoient tous deux un autre pro^
jet. Rochimon 9 amoureux de Diane > voujoit par fo-
percherie devenir (on époux ; & Marciane , à qui
CafTore plaifoit fort, comptoit avec la mèmeadreiTe
s'unir à lui ; les deux jeunes gens font heiureufemeoc
avertis de cette fourberie y & Caflbre qui prévoit que
fon père s'oppofera k fon niariage ^ tombe daos le dé-
THEATRE FRANÇOIS. ^i^
fefpoir > & fe fait Pèlerin. Après mille aventures afless
(ingulieresy trois Fées arrivent à Grenoble > prennent
les jéones amans fous leur proteâion^ & terminent la
pièce p^r le mariage de Rochimon avec Marciane »
& par celui de Cailbre avec Diane. Plufieurs autres
mariages fe célèbrent en même tems; entre autres ce-
lui de Becgame > Doâeur^ , avec la jeune Florinde ,
& tout le monde eft content. Dans cette pièce > qui
cft fort gaye &ain peu libre » il n'y a que Gautier ^
père du Doâeur ^ & le Doâeur j qui parlent en Fran»
çois. Je vais citer une partie d'une fcène qui fe paflo
cn^re eux deux*
G A u t ï È R.
^e veiiz marier mon Garçon
A fîlle de bonne maifon :
Viens-çà , mon fils , ma genituréi
Mon image , ma portraiture »
£n ton yifage on void le mien ^
£t toi au mien tu vois le tien, -
Regarde 4na phifîonomie,
La tienne n*e{l que la copie }
Car la miedne eft l'original ;
7e fuis celui qui dans un val y
Où tendent d*amour les amorces ^
Ai fait trembler toutes mes force!
Pour t*engendrer femblable â moi t
Tsk mère fçait bien comme quoi
7*ai travaillé à fa baubille.
Afin que tu ne fufl point fille*
^e voulus , U première nuift
Qu*il fallut sQofymmcx fans haâi r
SiS THEATRE FRANÇOIS;
Aux nopces notre mariage ,
Qu'elle attachaft i mon vifage
Sa force imagination , '
Afin qu'à la conception
£lle te formafl un beau mâle ,
De Perfonne à la mienne égale t
in confêquence , mon iîls ^ je veux
Avoir des enfans & nepveux ,
Qui perpétuent mon Vtfage ,
Au moyen de ton mariage.
Je Veux que ton corps foit con)oincÀ
Four voir mon defic à ce point.
L È D O C T E U R,
îl faut , mon père , que je faflè
Plufleurs portraits de vodre face y
Que j'aille dedans le Couveuc
Des repenties , où fouvent
L'on entend plaindre ces nonettos
A deâàuc des chofcs fecretces,
GAUTIER.
U n*e{l pas permis aux Garçons»
LE docteur;
Pourveu que j'aye des calçons ,
Veftu en fille découpée ,
Faifant la jument efcbapée.
Ces AbbefTes qui vont cherchant
L'aurorp jufques au couchant.
Me feront mener en carrolTe
Pour me jetter dedans leur foflc i,
Sans pitié de mes jeunes ans.
.GAUTIER.
Et quand ta feras U-dedam $ '
THEATRE FRANÇOIS: ^17
LE DOCTEUR.
7e les prendrai toutes pour femmes*
* GAUTIER.
7e ne yeux point de ces infâmes
Qui fe font mis à l'abandon ,
Pour un morceau de cupidon :
Point de geufe, point d'éventée ,
7e veux une fille arreftée.
Lt DOCTEUR.
Elles font toutes en arrefl ,
Attendant le chafTeur tout pre(l«
GAUTIER.
7( ne veux point que ta tirafTe
S'aille eftendre fur t-Ile chafïc,
7*aime mieux que tu fois veneur
Pans une garenne d'iionneur.
LE DOCTE URj
On ne trouve dans la garenne
Que des conins , qui font de peine -
A ceux q^i les prennent a^ux trouf.
G A U T I E A*
Ceux qui les fiiyent font des fous«
LE DOCTEUR.
Mon pere-4 il vaut bien mieux fe \0mdfC4 • j^
GAUTIER.
A quelque vierge , car la ntoindrs
Vaut mieux qu'un canon évente»
Et qui par force efl démonté.
7e veux que tu prenne une HUe
Sortie àt bonne famille 9
Vertucufe en perfeé^on^
ifgale à ca condiciotw
"^i* THE AT RE FRANÇOIS.
t E DOCTEUR.
S! au thàriâge agréable
Chacun doit prendre Ton femblablc %
Je dois mettre la bague au doigr ,
D'une repentie q^^i foit »
Comme nioi vierge fort honnefle«
G A U T I E R.
Je as yeux point telle Moinetre.
tE DOCTExTr,
Je ferai pris pour fuborneur ,
$i à unt-fille d'honneur
Je fuppofc que je fuis vierge i
]Et me yoilâ fous un Concierge ^
parce que |e ne fuis pas tel , *
Pour paroiftre devant TAutet
Pu Dieu hymen , qui ne deinan^^
Que virginité pour offrande.
GAUTIER,
A ce compte la tienne efl loln^
L E D o ç TE a;
Une fille dedans uti coin
Me Ta iravi > me fatfant faire
Ce que vous faites à ma mere«
• . ' q A U T I E R,
Mais pourquoi as-tu confend ^
Que je h'ajrc été adverci \
LE D O C T iÉ U R*
Jç ne voulois pas çondefceiHt-re s
Mais )e n'ai pas pu me deiFei>drei^
Car contenant Se combartai^t
J'ai çft4 ravi à l'wdiRC,
TÏÏEA'T]^E\ F:B\ANÇ<>IS. ^19
0 A U T I f a.
Ta jeu^^eHc eft donc déflorée y
£t ma maîfoo déshonorée \
Xf ais i'employ^rai mes amis ,
Afin que ce crime commis
Cn ra perfonne ne demeure
Impuni : il faut qu'elle meure «
Nomms-fa-moi donc prompcement >
Que l'en pourfuive châtiment t
Car je me déclare partie.
LE DOCTEU R...
Ceft Jaaneron la repentie ,
Qui m'a tiré par mon manteau]
Four me faire puifer de l'eau
Dans une citerne profonde ,
Xfe remontrant que tout le monde
£ft forti de feniblable creux ,
£t qu'il falloit pour' être heureux f
Chercber au lieu de fa nailfance
Le bien de la rélouifTance i
A ce propos je me rendis.
GAUTIER. =
te après ta condefcendis.
• - •
^ L E DOCTEU lU
Toute montée i fa defcente. . • •
GAUTIER.
Ah ! carcogne moins innocente y
Que la garce qui a forcé
Son compère dans un fbfl^ ,
Tu as fait entrer l'ianocencc
Au lieu de fa convalefcence »
Four ton plaidr defordonné :
Mais )e u yeux coujper yle nez s
K k If
Va- t'en qùerîr mon arBàldte,
Ma cuiraffe , Aon pô<^ en tefte- »
Mon cimeterre , mon eftoc ,
ic ma grande arquebufe à crùC»
LE P O C T E U R.
Mon père , 4 quoi faire caQt 4*arme$ !^
Vc^^z-ypM$ cjaufer des. aUUrmes {
G A U T I E R.-
7c veux forcer ccûe maifon ,
Qui ejtlercéc-à rdraifoni . ^
L K D a e T EUR.
Xes chaflcs qiii en font Geôlières ^
Qui font ces filles prifonnieres y
Afin d'exterminer Tamour ,
Vous feront repentir un jour %'
$i vous (ouçhez ce reliquairç;
t " ' ■ .
: G A U T 1ER.
Qu*ctles s'en aillent â BeaucâtCQ
Faire amas de confeéiibn , * "
Jour prcférvèr H'îûftôifta^
La jeuncfTc dç cette Ville. ^ . . /
Et non pas pour fervir d'aziî»
Aux ferpens , qui comâie fad!s ^,
Ont figuré un Paradis
A mon fils de Içur vilainie :
Si cette maifon n'ed pu/iie .
^*en ftrai des cendres au venc»
PE LA PINELIERE\ ANGEVIN,
HYPPQUTE i Tragédie * ttokée ^e Séncqw
.THEATRE FRANÇOIS. ^xt
avec unPrologac en vers libres » ùnè Préface du Sieor
' de Haut G^tlion t & un avis au Leâeur. Paris»
Ant, de Somma ville, 1635.1/1-8^.
(SUJET D'HYPPOLITE.) Par les éloges que
Ton trouve à la tête de cette Tragédie , on peut aifé-
ment conjedurer que dans fon tems elle eut le plus
grand fuccès. Après l'avoir lue avec attention, jeûe
fuis point étonné qu'elle ai'' fait Un prodigieux effet
; fur les Speâateurs; elle eft écrite avec chaleir , &
l'on y trouve des fcènes copiées d'après Sophocle 8c
" Burîpide ; quoique j'en donne uD extrait , je ren-
voyé le Ledeur à la Tragédie de Phèdre de Raci-
ne. Ceft abfolument la même coupe, & la même in-
trigue. Phèdre eft amoureufe d'Hyppolite , (^ nour-
rice flate fa paffion. Cette Reine déclare fonvamouc
au jeune Prince , qui ne l'écoute qu'avec horreur , &
qui la quitte avec mépris; mais malheureufeipent il
laifle Ton épée etitre fes mains. A l'arrivée de Tiiefée ;
Phèdre accufe Hyppolite de Pavoir voulu violer ; foa
épée h\t preuve contre lui; Thefée dévoue (on fils à
Ja colère de Neptune ^ &c. &c. La feule différence
qu'il y ait eri^re'ces deux pièces > c'eft qu'on ne trouve
point dans^ celle - ci l'Epifbde d'Aricie , que Hacine
a (i heureafement employée ; & que , pour infpirer
plus de terreur dans le dénomment , la Pineliere éta-
blit que Phèdre au défefpoir de Isi mort d'Hyf^polite,
fait raffembler devant elle les membres épari; de ce
malheureux Prince; & fans avoir égard à la pitéfènce
de Tbefée ,k ^ui même elle reproche fa folle credo*
ç%% THEATjRE FRANÇOIS.
lité , elle avooe fa honteufe paffion pour ce îeane
' ros , & fe précipice fur fon cadavre > en s'eofot
un poignard dans le coeùr.
Pour donner une idée de la verfifîcatton de
Tragédie , j'ai choifi le récit de la mort d Hypp(
Si Ton compare celui ci avec celui de Racine 5 &
Ton examine çn même tems le même endroit da
pièce de Séneque > on fera fans doute furpris dç
.combien Racine a fçu embellir & enrichir Toii]
~ latin ; & combien au contraire la Pineliére , pai
imitation trop fervile ^ l'a rendu foible & ennuyé
Ecoutez donCi^^rand Roi, le funcfte accident,
Qu' donne à ce jçune adre un fî prompt occident;
A ^eine ay.mt fortt de la Cité d'Athènes ,
Neptune nous yic-il fur te bord de fes plaines ,
Oà mon Prince en Ton char Aiivi de tous Tes gens p
Souâroic que Tes chevaux fulTent moin^'diltgeiis î
Qu')alnflantrbumtde<lo$de favàfte campâgoc» ' ,
Il &ic dç mille mont» une feule montagne.
Et dedans un moment ,s*échappant à nos yeux;
D'un humide baîfervâ fiiluer.les Cieuz,
It ce qui nous cavic dedans cette aventuc» «
Ufr^grand câline CexplJ!>loiz endormit la nature^ .
On voyoit volrîeer fur Teau mille alcyons ,
*rbus les'tyrans de Vair étoicut fahs palTîons ^ • .
Ces tbuiibillohs'àifés ,<6mme ils ont dé côtttume»
; K4 Êiifoîeut point blanchir le rivage d'écume ,
>îi bruire horriblement Teau. contre les rochers j.
Pour eâF^rayer de loin les tîmidcs nochers s
te tonnerre cft Târis'bftMÉ , ou bien Vâlr&tM
tes rayons dvi M^»^ dorent rouie la terre , ^
, Tout le Ciel fans vapeur, ne fut jamais (î puy^
£cû ouelques blancheurs pâîllTenc fon nut ^
i- -i
THÉÂTRE FRANÇOIS, 5x3
1
le voile délicat de cette belle nue y
Le rend plus agréable encore à notre vue.
Ainfi plaifent les lys defTus l'herbe étalés ,
Aind Ton aime à voir defTus les flots falét ,
Les voiles blanchiiTans avec l'azur de l'onde ;
Aucun vent n'enfle donc cette plaine profonde y
Et fa propre colère élevé ain^ Tes eâux
Jufqii'où brillent les feux des noi^urnes flambeaux*
La mer|>our4es vàiiTeaux n*a pas fait cet oragç)
Groffe & pleine d*un monflre >. elle fort du rivage
£t ce mont d'eau chargé de )e ne fçai quel poids »
Tombe ^eSm la terre , & roule vers le bois i
Chacun ,de,nous alors eut ôrayeur, & la crainte
De Tes pâles couleurs fut nos fronts s'écoic peinte«
THÉSÉE.
Hyppoli^ eut-il peur , ou vit-il fans trembltc
Ces flots horriblement Air U terre rouler i
A. T H V S.
Mon Prince fe mocquant de nos âmes fl molles ,
Raflliroit tous fes gens avecque Tes paroles.
Amis , que craignez -vous , étant avecque moi?
Quoi ! Neptune pour vous çftil fi plein d*eflroî ,
Que fur la terre auifi vous craignie;^ fa colère ?
Au refle penfez-vous qu'il fonge k nous déplaire)
Ce Monarque efl trop jufle , il n*a pas ce deflein >.
Peut-être qu'il vomit quelque roc de fon fein ,
Ou qu'il cache des champs dans ce ventre fenile 9
Ec proche de ces bords veut enfanter une iAe.
Il achey-oit encor qo^ ce vafte élément
Ébranlantes rochers mugît borriblemenc :
Alors ce^1ob6 d'eau s'entr*ouvre , & fur le fable
Vomit avc<*quc effort un montre épouvcntable %
Il edfuivi d'un flot de l'élément amer,
Qui lui faic^Vir la tette uixi petitie mer.
/;i4 THEATRE FRANÇOIS,
Et ledoablanc la peur dont la troupe eft atteints y
Noits amcine ce mal plus grand que notre crainte.
THÉSÉE,
t
Ce prodîgç en6mté de la fureur de Peau ,
P2cut4l i vos yeux fpus quelque corps nouveau S
A T H y S.
C*ctoît un grand taureau de ces humid&S'ptaines^
Qui feroic tui g^ant même enrre les baleines.
St fa thc & fon col étoient du même teint
Dont des flots de la tncr le moite dos eft peint ,
les fentes des naféaux fant largement ouvertes ,
D'an rouge pâHiïànt fes codes font couyercet ^
Et le refte du corps tout d'écailles femë ,
Tient de cet élément qui l'avoit animé :
les yeux éKsticeloient à cet effroi des affles ,
Kt la gocule en Couvrant vômidoit mille flixncs*
Tout tremble à fon afpeâ , & cet objet d'horreur
A tous ceux d'alentour donne de la terreur ,
les troupeaux eflrayés courent par les campagnes ^
les chafleurs étonnés grimpent fur les montagnes»
Ct parmi les forêts cherclient^ pour fe cacher ,.
Quelques buifibns toufiùs ou le creux d'un rocher.
Mon Prince fans trembler y & plein d'uin gran4 cotti:a£&>
Sans fuir honteufement de ce trifte rivage ^
!Ranin%e fes chevaux de frayeur égarés ^
Icar lient la bride roide « & les rçnd allures*
Ce montre incontinent prend fa force , s'élance p.
St fond devers mon Prince avecque violence.
U crie y il frappe en vain , fes foins font/uperflus^
Ses chevaux foiK troublés» & n'obéidênr plutf »
Le monftre les powrfui^ v&î quittant le derrière ^
I^ devance > s'arrête , & leur fert de barrière. .
Mon Prince fans^ pâUr lui jette des rcga|rdt.
Capables de porter U peur 4U fdft dc^Mari» .
THEATRE FRANÇOIS, sx^.
Se d'une voix tonnante il lui dit ces paroles :
Tu fais pour m'effiraycr des menaces frivoles ,
3*ai de mon père appris â vaincre les taureaux ,
Et ne les crains pas plus , quoiqu'ils viennent des eaux*
L Y C R. A T E.
Cette gran de Valeur fans botne & fans limite ,
Fait certes , fait bien voir le père d*PIyppolite«
THESEE.
Faut-il que le vice entre en ces coeurs gènéteuxl
Mais achevé.
A T H V S.
A Tafpeû de cet objet affreux ,
Les chevaux étonnés de cette erreur fî proche ,
Se cabrent aufli-tot & renverfent le coche :
£t mon Prince , furpris dans un malheur fî prompt ^^
Tombe cruellement , & fe meurtrit le front ,
£n tombant il i^atuche à fon coche , & des tbenci
Il fait à fes deux pieds de malheureufes chaînes »
£t plus à les défaire il employé d*eiFor< ,
U redouble les nœuds & les ferre plus fort.
Les chevaux cependant ians guide & fans contrainte jf '•
Courent de tous côtés ou les porte la crainte ,
£c marquent leur chenyn par des traces de fang»-
Rompent fur des rochers où fa tête ou fon flanc »
Des rochers dans le bois , & du bois au rivage >
Ils laiiTent des morceaux de fon rare vifage.
De fangUntes noirceurs tout fon beau front cfk peint ^
Les ronces vont brifànt les rofes de fon teint;
L*on voit de cette horreur les épines tremblantes.
Montrer de fes cheveux fur des peintes fanglantcs i
Un buiiTon en padant retient un de fes yeux ,
Ce qui refte en ce lieu s'arrache en d*auttes lieux ^
Sa tête fans vifage après le coche roule ,
Se le long* des rochers la, cervelle découle»
5a tf THEATRE FR:éNÇOIS.
les cheyaax ignorans de ces trilles malheurs «
Traînent le corps gêné des dernières dtf>iileurs.
Enfin ce tronc fauglant en morceaux fe répare ,
It mis tu mille lieux de roi-même s'égatCé
JAes compagnons témoins d*une telle rigueur ,
Tous les larmes aux yeux 6c la trifteife au cœur «
De ce corps ^ue les Dieux firent incomparable y
Cherchoient de tous côtés le rcfie déplorable.
^ Nous trouvions feul à feul en des lieux différens
Du fang glacé fur Therbe , & des membres mourant ,
Les chiens ciîAes auflî du malheur de leur miître ,
Scntoicnc ceux ^ue les bois cmpêchoient de paioître.
t6}6.
LE DUELLISTE MALHEUREUX , Tragf-
Comédie. Pièce nouvelle pleine d'intrigues à la nio«
de 4 fuivanc le cemsi non jamais vue ou imprimée ^
avec un avis au Leâeur. Rouen , Guillaume de la
Haye, 1636. 1/2-4**.
^ SUJET DU DUELLISTE MALHEUREUX.)
Le Duelhde rencontre Onomafte , il s'imagine que
celui-ci l'a regardé avec mépris , il lui envoyé un car-
tel , fe bat contre lui & eft dcfarmé. Ce DuelIiKe
étoit amoureux de Glicere , qui (è plaint à lui d'un
Poète qui avoic fait des vers contre elle : le Duellifle
promet de la venger , il va chercher le Poôte , il vent
lui donner cent coups de bâton , mais le Poëcç loi
arrache Ton bâton , & lui en donne à lui* même une
grande quatitité de coups. Cependant Majordome
devient amour eu:?(. de Glicere « elle en fait confidence
THEATRE FRANÇOIS. ^xy^
DuelHIle » qui fur le champ appelle (on rival en
el I il e(l encore bleiïé & defarmé. Majordome
porte répée du Duellifte aux pieds de Glicer^ , &
lui montre tant d'amour , qu-elle fe laifle réduire &
accorde les dernières faveurs. Le Duellifte a en-
te diverfes aventures f il met Tépée à la main con«
) un Soldat y qui le defarme; il fe bat contre Ari-
ind , un de Tes amis f qu'il avoit pris pour fon fe-
nd , & dont il veut éprouver le courage ; il eft blefféé
ifin il va -trouver Glicere qui lui confeille j puifqu'il
t n malheureux dans tous fes combats, de fe faire
ermite. La Duellide goûte cet avis , & le fuit. Cet
rimand , le dernier contre lequel le Duellifte s'eft
Lttu y écoit amoureux de Lydie » & la recherchoit
) mariage; mais il avoic déjà prévenu les privilèges!
: rbymen ,^ ils ont cette fcène enfemble :
Lydie entrera trijiement,
Arimand allant la trouver,
IbCaîs voici ma maîcrede : eh ! bien , mon petit corai ^
Mes amours , «es dcfîrs y mon maîcre « mon vainqi^eiiç ^
7e t'ai laidee au lit : écois tu trop lafTée?
N'avois-tu point afièz dormi la nuit paflee !
7e n'ai pts fait de bruit fortaiit d'auprès de roi ,
M'as-tu fitntîs lever , fans mentir , dis le moi ?
Tes yeux êtofent fermés , me levant de ta couche ^
^at cuetit4 le baifer doucement fur ta bouche»
Puis je t'ai recouverte ^ & tirant le rideau
7« fttis defcendu bas, fans mulles, fans chapeau ,
Craignant de t'éveiller ; car j'aime tant ton alfe. •
Mon ccetxv'ppi^cbe-ioi , permets que je re baife.
Sx8 THEATRE FRANÇaiSi '
Regardant U Peuple* ;
Ke YODS mocquez de âioi d'aller idolâtrant
Ces beaux ycxxx donc les traies vont mon çceur pênécranf
I>es pointes de l'amour : mon ame en efl meuccri: ,
Car de les adorer > ce n*efl qu'idolâtrie }
'Baifc-moi donc ^ mon orur , tu me £ais trop languir*
Allons encor un coup fur tes lèvres cueillir
Ce neâar de Ternis \ ne fais point la fâcheufe ,
Crains- tu qu'on ne te voye? £s-tu encoire hoaceufe t
On ne s'en cache ptus> chacune en fait autant,
C'écoic au tenis palTé > mais non pas maintenant s
Vn Dieu nous le commande , inftruic de la aatux»
A faire fon femblablc , 6c brufquec l'aYeniure ;
Allons (ans plus uider.
L y D I £. /
£h ! Monfîeur , mon hotmeot f
A R r M A N D.
t>e garder de crélbr, ce m'efl un grand bonheur*
LYDIE.
Mais vous m'avez promis la foi de mariage 1^
ARIMAND.
T£ l'ai ptomife ! U vous \
L Y D I £ fleurante.
Vous en avez un^gagÉ
Trop fort pour en douter , \q fuis du tout â vous %
£t, Monfieur, exaucez ma prière à genoux:
Vous avez mon honneur , i'ai votre foi promife ,
AMotts nous marier , allons droiç à l'Eglife i •
Nour trouverons un Prêtre , allons fans plus cacher ^'
Faifons taire le monde i on vient me regarder
Jufques deCous le aez> ^ deviens il honxcuCo s
Quafid
THEATRE FRANÇOIS. ^a^
Quand la fîUe a failli , ô ! qu'elle cfï malheureufe :
Tu ^e ce hâtes point ! allons donc pronipteiiient>
Aurois-je été crompée en prenant ion ferment }
Répons ? quels fouvenir^ roulcni: dans fa penfée ?
Voudrois-tu me laiiler en ce point ofF.nlee i
Ayant ioui de moi me vouloir inéptifer?
Enfin Majordome avec (Sliceré , Arîmand avec Ly»
die, vont trouver enfemble le nouvel Hermite, qui
leur donne la bénédiâion nuptiale y & qui les unité
Il e(l difficile de voir une pièce plus mauvaife » plus
plate ^ plus mal écrite , &c plus indécente que ccUc-cik
Î636*
CHARLES BEYS, mort en 1659- H fut mis
à la Baftille , ayant été foupçonné d'avoir écrit con-
tre le Gouvernementé Son innocence reconnue l'en âc
(brtir promptement.
L'HOSPITAL DES FOUX, Tragî-Comédie^
avec un avis au Leâieur. Paris, Toufiaint Quinet^
.1636- in ^°.
Lamêmcy 1639. in^ia«
LE JALOUX SANS StJJÊT , Tragî-Com^cîîe ,
dédiée à M. de Gondy , Abbé de Buzay. P a R i s ^
TouflTaint Quinet, 1656. i/1.4®.
CELINE, ou LES FRERES RIVAUX.
Tragi-Comédie, PARIS» ÏOùflaint Quinet , 1637.
a/i-4 .
Tome Ik jLl
f^o^ THEATRE FRANÇOIS.
L'AMANT LIBERAL, Tragi Comédie. Paris,
Touflainc Quinet , 1638. 1/1-4°. Ceft la même que
celle qui ell à Tarticle de Bôufcal. Cette pièce eft
douteufe entre les deux Auteurs.
LES ILLUSTRES FOUX . Comédie en cinq
aftes , en vers , dédiée à M. le Duc d'Arpajon. Paris,
Olivier de Varennes , i6s}' ifi-^'^»
(SUJET DE L'HOSPITAL DES FOUX.)
Je ne donnerai point en ce moment - ci l'extrait de
cette .pièce , qui eft abfolument le même fond que
l'ouvrage que Beys fit repréfenter quelque tems après
fous le titre des Illuftres Foux ; ainfi je renvoyé mes
Leâeurs à l'extrait que je donnerai de cette Corné-
die. Je les avertis feulement que dans la dernière >
l'Auteur a eu foin de changer tous les noms des Ac-
teurs , qu'il a diftribué différemment fes fcènes , qu'il
y en a ajouté quelques -unes > & fupprimé d'autres;
qu'il a auffi tranfpofé & retranché des vers , qu'il y
en a mis de nouveaux , & que malgré la peine qu'il
s'eft donnée à toutes ces différentes correâions y la
pièce n'en eft pas meilleure , & n'eut qu'an médioae
fuccès.
(SUJET DU JALOUX SANS SUJET.)
Alindor , amoureux de Clarice 9 devient (ans motif
jaloux de Belanire j qui loin d'en vouloir à (a mai'
tfe{re,adoroit au contraire Arthemife , qui déddignoit
fes foins , & qui aimoit & étoit aimé d'Erace. La
juloufie d'Alindor, & les mépris d*Arthemi(e détermU
nent Belanire à offck fes vœux à Clarice ^ dont il eft
THEATRE ERJNÇOIS. 531
Ire^u très> (roidement : malgré rextrême jaloufie d' A«*
lindor, elle lui donnolc la préférence fur tous (es ri-
vaux. Cet amant inquiet des aiTiduités de Belanire •
imagine pour l'écarter de chez fa maitrefle d'engager
£race Ton ami 9 de feindre de Tamour pour Clarlce»
& de laifler entrevoir à Belanire , qu'il le verra fans
chagrin pofleffeur d*Arthemife ; par ce moyen il efpe^^
re avoir Toccalion de voir plus fouvent fa maîtreffç ,
étant bien fur que fon ami > qui eft riche , fera reçu
tout favorablement par le perc de Clarîce , qui eft
un vieil avare , qui l'avoit rcfufé à caufc 4^ fon pçu
dé fortune. Cette intrigue eft concertée entre Aliij-
dor y Erace , Clarice & Arthemife- Tout alloit le
mieux du monde , Erace avoit introduit AHndor >
comme fon ami j chez le père de Clarice i Belanire
féduit par de faufles apparences , s'étoit livré tout en-
tier à Arthemife, & ne voyoit plus Clarice ,' quand
tout-à-coup Alindor fe livre kks jaloux foupçons, &
fe perfuade qu'il eft trahi par Erace. 11 en porte les
plaintes les plus ameres à Arthemife 9 & lui perfuade
enfin que fon amant eft infidèle* , Arthemife furieufe»
jure de ne plus revoir ce perfide : ce n-étoit point là
le projet d'Aliodor, il vouloit au contraire qu'elle le
rappellât auprès d'elle, & qu'elle Im défendît de re-
voir Clarice ; mais cette belle (e livre toute entière à
fon reflentiment , ce qui met encore Alindor dans un
plus grand embarras. Cependant Arthemife a vmç ex«
plication avec Erace ^ qui fe juftifie aifément, & qui
Llij
^$^% THEATRE FRANÇOIS:
piqué du procédé d'Alîndor Tappelle en duel ; celui-d
ne veut point fe battre contre ton ami ^ à qui il avoue
les torts & le malheureux penchant qui le porte à la
jaloufie. Enfin on convient qu'Erace ira trouver le
père de Clarice, qu'elle lui avouera qu'elle aime &
qu'elle eft aimée d'Alindor , & qu'il fera (on poffible
pour le déterminer à lui donner la main de fa fille.
Après bien des difficultés , le vieillard reçoit Alindor
pour fon gendre; Eràce époufe en mème-tems Arthe-
mife , & Belanire , dont on ne fçavoic que faire , &
qui fe voyoit fans femme, rencontre heureufemetiC
une fœur d'Arthemife , qui veut bien s'unir avec lui.
L'intrigue de cette pièce, qui eft fort compliquée,
eft conduite avec fagefle & clarté. Cette Tragi - Co-
médie eut dans fon tems quelque fuccès. Voici un
endroit qui fera juger du ftyle , & qui convient au fu-
jet; c'eft le portrait de la jaloiifie.
Pour ne vous point flatter > ce lâche mouvement ■
Souvent n'a point de caufe , & naît en un moment ^
Un cctur bien généreux n'en eft gueres capable ,
Et fouvent l'efprit feul de ce mal eft coupable s
Dans cette pa(fion chacun le veut flatter ,
Il cherche des moyens , afin de l'irriter ,
It pourvu que fon ame en foit bien pofTédée ,
S*il n'en trouve en effet , il en trouve en idée :
^ous le voyons lui-même , à lui-même trompeur j^ :: V
Il fe fait des fujets 6c de peine Se de peur ,
Il ccmpofe en veillant des fonges déceftables ,
Se les veut par après prendre pour des yéritablei^
THEATRE FRANCO IS, ^3 jf
Il s'ofFenfe de tout , il tient tout pour fufpeâ •
Il prend en même part l'injure & le refpeâ ,
Il craint la modcftle 9 a peur de rinfoleuce , '
£t le difcours le blefTe autant c^ue le filence.
(SUJET DE CELINE.) Lifanor & Cefîne
avolent été élevés enfemble dans une campagne éloi'»
gnée de Coppenhague , ils ignoroient à qui ils dé-
voient le jour, &ils gardoient les moutons. A force
de valeur, Lifanor rend des fervices fi confidérables à
l'Etat , qu'il en appelle à la Cour dç Dannemarck , où
il fait la plus brillante fortune. Céline trouve aufTi le
lii>oyen de s'introduire dans la même Cour» & d'y
avoir une grande confidération ; enchantée de retrou-
ver celui avec qui ellç avoit paffé fon enfance , elle ne
peut s'empêcher de l'aimer , elle lui découvre fa ten-
dre(& ; mais Lifanor uniquement occupé delà gloire^
ne veut point contrafter d'engagement. Therfandre
& Lifidas ,. fils du Duc de Mofcoviç > voyant Céline i
en deviennent amoureux^ & fe cachent mutuellemen(i
les fentimens que cette beauté leur infpire ; d'un au«
tre côté Agante & Califte , filles du Roi de Danne-
marck , font éprifes des charmes de Lifanor , qui les
reçoit toutes deux avec h mêmç indiflférence. Cette
double rivalité des deux frères & des deux fœurs ,
produit quelques incidens, & brouille tout le monde*
Enfin arrive le dénoùment , qui , je l'avoue , eft ua
peu tiré par les cheveux : on découvre tout-à-coup k
certaines marques que porte Céline ^ qu'elle eft alto
UvCy
534 THE4TRE FRANÇOIS.
du Duc de Mofcovie ; elle avoic été changée au^er*
ceau , & prife enfuite par des Corfaires ; en même
teins , par le moyen d'une chaîne que Lifanor aifoit
toujours à fon col > il eft reconnu pour fils du Rot de
Dannetnarck : après cette double reconnoiflance , Li-
fanor époufe Céline , & les deux Princes de Mofco-
vie époufent les deux Princeffes de Dannetnarck.
Cette pièce eft froide & languiflante , & la verfifi-
cation en eft fi médiocre , que je n'ai pas trouvé oo
feul endroit qui méritât d'être cicé.
(SUJET DE L'AMANT LIBERAL. ) J'ai déjà
dit à l'article de Boufcal , qu'il avoit compofé cette
{>iece de concert avec Beys, ainfi elle appartient éga-
ement à l'article de ces deux Auteurs , quoique l'on
trouve deux éditions de cet ouvrage, Tune de 16)7.
l'autre de 1638. Je peux affurer qu'il n'y en a eu
qu'une feuk , & qu'on a tout au plu« changé le froo-
tifpice , ou que c'eft une faute d'impreffion. Ceux qui
îiùront envie de connoîtrç ce Drame , en trouveront
l'extrait fousl'atinée 1631. à Tarticle de Saideri, qui
a aii^îi traité ce même fujet, & fous ie même titre,
en cbanî^eant feulement le nom des Adeurs, &en
compofant d'autres vers. Il eft apparent que Beys &
Boufcal montrèrent leur ouvrage , & que Scuderi en
ayant trouvé la fable intéretfaure , voulut fe ["^ppro-
f lyer s & il eft sur que la pièce & les vers de ce der-
nier valent beaucoup mieux que ceux des deux au-
tres.
r SU JET DES ILLUSTRES FOUX.) Dom
Alredes ai2K>ureux depuis long.tems de Lucîaoe,
THEATsRE FRANÇOIS. 535
/>*ayant pu l'obtenir de fes parens , la preffç de quitter
*a patrie , & de le fuivre dégaif(^ç en homme. Cette
tendre amante y confent , & ils partent. Ils rencon-
trent en chemin des voleurs , Luciane veut en vain fe
défendre , elle eft bien-tôt defarmée ; fon amant après
la plus vigoureufe défenfe, éprouve a^affi le même
fort. Le chef des brigands ayant reconnu le fexe de
Luciane 9 en devient amoureux; & pour fe débarr
rafler de Dom Alfrede , il ordonne qu'on le précipitç
dans la mer. La douleur que celui-ci r efTent de 1^
perte de fa chère Luciane , lui fait envifager la mort
avec plaifir : il tient même des difcoqrs fi tendres > R
touchans f qu'il attendrit l'ame de ces fp^rbares, q^i
non-feulement n'écoutent point Tordre 4e leur Capi-
taine y mais même qui le mettent en Ubert^. Il fe r4«
fugie à Valence où il rencontre un de (es amis 9 qi|i
le conduit à l'Hôpital des foux ; pn peut Juger de Ql
. ficuation lorfqu'il y reconnoît Luciane ; l'efprit avoit
tourné à cette belle? lorfque les voleurs étpient venus
rendre compte à leur chef , qu'ils venoient de faire
périr Dom Alfrede: & ce Capitaine ne voulant pas
fe charger d'une folle, l'avoit envoyée à l'Hôpital. Dès
qu'elle reconnoit fon amant, elle recouvre fon boh
fens ; ils méditent enfemble les moyens de la tirer de
. cette honteufe prifon. Dans ce moment il entend da
bruit 9 il voit un homme pourfoivi piar des Soldats, il
met l'épée à la main & le délivre. Il ignoroit com«
bien U étoit heureux d'avoir rendu un fervice & im^
L liv
SJ6 THEATRE FRANÇOIS.
portant à cet inconnu ; c*étoic Dom Alfonfe , frère de
J-uciane. Il eft bon de fçavoir que ce Dom Alfonfe i
dans l'intention de venger Phonneur de fa fœur , avoit
été chez Dom Alfrede pour Tappeller en duel , qu*i»
y avoit vu Julie , fœur de Dom Alfrede , qu'il en étoit
devenu amoureux, & qu'après quelques événeraens
il Pavoic enlevée. Peu de tems après il avoit été forcé
de s'en féparer, parce que s'étant battu contre un
homme qu'il avoit tué , il avoit été contraint de fè fan-
ver prompteraent ; il raconte fôn hiftoire à fon libéra-
teur I qui ne fe fait pas reconnoîtr e : il te recommande
en fuite à Dom Pedre fon ami , qui avoit le plus grand
crédit dans Valence. Alfrede perfuade à Dom Pedre
qu'il a les raifons les plus eflentielles de fe cacher
quelque tems, & lui demande d'être enfermé dans
l'hôpital des foux , on le met près de Lucianei &
on ne doute pas de fa folie , aux carefles qu'on loi
voit faire à cette belle , qui n'ayant pas quitté fes vè-
temens , paffe pour un homme. Cependant Julie in*
quiette de (oh amant , arrive à Valence pour le cher-
cher, elle é^oit fuivie d'un Seigneur François , nommé
Tirinte, qui eft amoureux d'elle, mais dont elle mé-
prifoit l'hommage. Tirinte par curiofité va voir l'Hô-
pital des foux , il eft touché de la grâce & de la beau-
té de Luciane, qu'il prend pour un jeune homme , &
le délivre avec de l'argent. On comprend le défet
poir d' Alfrede, lorfqall fe voit féparer de tout ce
Q^'il aiine ; il raconte alprsi ion hiftoire ; mais pb» il
THEATRE FRANÇOIS. $3y
aflare que Luciane eft une femme, & qu'elle eft fa maL
trcffe, plus on le croir fou ; il devient furieux, & on le
reflerre plus e'troitement. Cette fcène eft très-comique»
Luciane fe rencontre avec Julie, elles fe prennent bien-
(ôt d'amitié , & fe conSent mutuellement leurs aven-
tures : elles vont enfemble àTHôpital, Julie embraffe
fon frère; Luciane , qui n'avoir point encore quitté fes
habits d'Jiomme, embraffe fon amie , & Dom Alfonfe
furvient dans ce même inftant , il traite Julie dlnâ-
délie , l'accable de reproches , & veut tuer Luciane ;
elle fe jette à fon col , & fe fait reconnoître pour fa
fœur; Dom Alfrçde fe découvre alors, comme ils
étoient tous les deux également coupables 9 ils fe par-
donnent mutuellement. Dom Alfrede fort de cet
indigne féjour; & (on mariage avec Lucianç, & ce*
lui de Dom Alfonfe avec Julie , terminent cette pièce»
qui eft médiocre, dont l'intrigue eft très compliquée»
& où l'on trouve plufieurs fcènes épifôdiques entre
les principaux foux de l'Hôpital : on fait fucoeflî ve-
inent paroitre desMuficiens;, des Poëres , des Alchy-
miftes, des Aftrologue$, des Comédien?, &c. qui
tje jettent aucune gaieté dans cet ouvrage y où je n'ai
pu trouver un endroit qui valût la peine d'être rap«
porté,
ISAAC DE SENSERy^DE, de l'Académie
Françoife, né à Lions, près Rouen , en 1612. morc
en 1691,
LA CLEOPATRE , Tragédie , dédiée à Moti-
feigneur le Cardinal de Richelieu* ?AJ^IS ; Ant« dQ
Soaimavillçi 1636. in-^^^^
53» THEATRE FRANÇOIS.
LA MORT DACHILLE, ET LA DISPUTE
DE SES ARMES, Tragédie, dédiée au Roi. Pa-
ris, Ant. de Sommaville, 1637. '^ 4°»
I P H I S ET JANTE , Comédie en cinq aftes ,
dédiée à M. de Beautru, Introduâeur des Ambafla-
deurs. Paris, Ant. de Sommaville» J637. 1/1-4^
GUSTAPHE,OU L'HEUREUSE AMBITION,
Tragi Comédie, dédiée à M. le Marquis de Hunau-
daye , Comte de Plefarec. Paris , Ane. de Somma-
ville, 1637. i/i-4^.
MELEAGRE , Tragédie, dédiée à M. le Marquis
de Brezé. Paris , Antoine de Sommaville , 1641*
i/z-4^.
LA PUCEÎ.LE D'ORLEANS, Tragédie.
Paris, Ant. de Sommaville, 1641. i/i-4S
Cette dernière pièce eft douteufe entre lui & la
Menardiere.
(SUJET DE CLEOPATRE.) J'ai déjà donné
l'extrait de cette Tragédie , fous l'année i ^6Z. à l'ar-
ticle de Robert Garnier. La coupe & l'intrigue de
celle-ci , étant abfolument les mêmes , je renvoyé mes
Leâeurs à celle du feiziemé fiecle , en les aflurant
qu'elle eft certainement beaucoup mieux écrite &
beaucoup plus intéreflante , que celle de Benferade ;
.pour les faire juger du fiyle des deux Auteurs, je
mettrai fous leurs yeux le morceau le plus poétique
que j'ai pu trouver dans la Tragédie de ce dernier ;
|e rapporterai après cela ce que dans la même pofitioo
THEATRE FRANÇOIS. SJ^
Garnîer fait dire à Ton I.eâeur ^ & que l'on a déjà
trouvé lorfque i*ai donné rextraic de fa Ciéopatre. '
D I R C E T » Garde d'Antoine. ( 'Dans Benferade, )
• Du haut «tu tombeau ,
Ses filles d'une corde attiroient ce fardeau :
La Reine même aidoic en ce vil exercice i '
Sts délicates mains y faifoicnt leur otfice ,
Ses efibrts étoieni grands} on n'eût pas tiré mteur,
%t Ton front paroiiToit mouillé comme fes yeux*
Antoine fufpendant la douleur qui le blefle ,
Four y contribuer avecque fa foibleiTe ,
Tendoit fes bras mourans , les roidiffoit exprès.
Se fouflevoit un peu , mais retomboit après.
D I R C E T, (Dans Rùhert GamierJ)
Jamais rien û piteux au monde ne fut yeu :
L'on montoit d'une corde Antoine peu à peu ,
Que rameallolt laiflknt ; fa barbe mal peignée ,
Sa face & fa poictioe écoit de fang baignée ,
Toutes fois tout hideux & mourant qu'il efloît f
Ses yeux demy-couverts fur la Reine jcttoit,
Luy tendoit tes deux mains^, fe foulevoit luy-njcme ,"
Mais fon corps retomboit d'une fbiblefTe extrême,
La miferable Dame , ayant les yeux mouillés »
Les cheveux fur le front fans art cfparpillés,
La poitrine de coups fanglantement plombée ,
Se panchoit contre bas , à telle recourbée ,
S'cflançoit à la corde , Ôc de tout fon effort
Courageufe attiroit cet homme demy-mort i
Le fang luy devaloit au vifage de peine ,
Les Beris luy roidifroient , elle étoit hors d'haleloe;
Le peuple qui d'à bas amaffé regardoit,
Pe gcftcs 6c de voix à l'cnvy luy aidoit :
Tous crioient , l'exhottoient 6c fouffroient en leur ame j
Fein^nt^ fuant> ainû que cette pauvre Dame 9
^40 THE AT RE FR A NÇO IS,
Toutcsfois invaincue , au travail dura ranc ,
De Tes femmes aidée , & d*un cceur (1 conflanc y
Qu'Antoine fut tiré dans le fépulchre fombre ,
i Oà je crois que des morts il augmente le nombre*
(SUJET DE LA MORT D*ACHILLE ET DE
LA DISPUTE DE SES ARMES. ) Suivant le titre
que ppcte cette pièce, elle renferme un double fujet,
la mort du fils deThetis ? & la difpute entre Ajax &
Ulyffe au fujet de ks armes. Ce n'eft pas le feul dé-
faut de cet ouvrage que je préfererois cependant
au précédent , quoiqu'il ne foit ni mieux écrit ni plus
intéreiTant > mais Benferade a puifé (on fujet dans
Homère , & il copie des traits de ce grand homme ,
qui , tout défigurés qu'ils font , confervent encore ce
ton de grandeur 6c de fublimité , qui cara<%.érife les
écrits de ce Prince des Portes.
Prîam vient redemander à Achille le corps de foo
fils Heâror ; le Héros grec ne lui accorde cette grâ-
ce y que fous la condition que le Roi des Troyens lui
donnera (a fillé Polixene en mariage : Priam y con-
fent avec joye, & obtient d'Achille qu'il. ne combat*
Ira plus pour le parti des Grecs. Ajax & Ulyffe vien-
nent en vain le preffer de fe joindre à eux pour re«
pouffer les Troyens ; Achille tient la parole qu'il vient
de donner , & refte dans fa tante : mais malheureu-
fement Troïle , fils de Priam , qui ignoroît l'alliance
promife entre fon père & Açhillç , vient le braver
îufques fous fes pavillons. Ce Héros ne peut (bucenir
un pareil af&ont ^ fort| combat Troïle^ & le tue. La
THEATRE FRANÇOIS. 541
mort de ce jeune Prince jette la confternation dans
ïroye ; fon frère Paris veut ablolument le venger , il
va trouver le fils de Thetis , & l'engage à venir dans
Troye , pour contrader aux pieds des Autels fon hy-
men avec Polixene. L'amoureux Achille y vole > entrç
dans le Temple , & Paris le tue en trahifon au moment
qu'il alloit prononcer le ferment qui le rendoit gendre
de Priam, Ceft ainfi que finit ce qu'on peut appeller
la première partie de cette Tragédie. Après ce funefte
événement qui fe pafle dans le quatrième afte. Ajax
& Ulyfle difputent les armes de ce Héros , après avoir
fait chacun une très-longue harangue , où ils rappor-
tent leurs difFérens exploits , & où ils vantent les
fervices importans qu'ils ont rendus à l'armée : les
Grecs décident en faveur d'Ulyfle , & Ajax fe tue
de défefpoir.
(SUJET D'IPHIS ET JANTE.) Cette Comé-
die eft tirée du neuvième Livre des Métamprpho-
fes d'Ovide ; & pour rendre fon Poëme plus théâ-
tral » l'Auteur y a ajouté quelques épifbdes, Iphis »
quoique fille , avoit toujours été élevée comme un
garçon ; fa mère ayant été obligée de cacher fon fexe,
parce que fon mari lui avoit ordonné en cas qu'elle
n'accouchât que d'une fille , de la faire expofer. Iphis ,
trompé lui-rtième fur fon fexe , étoit devenu amoureux
de la jeune Jante ; leurs parens d'accord , le mariage
fut bientôt arrêté. La mère d'Iphis , qui feule étoit
clans le fecret 1 fait de vains efforts pour s'y oppoGùr.
54^ THEATRE FRANÇOIS.
Ce mariage ridicule fe célèbre , & Ton fe doute bîen
de ce qui arriva la première nuit des côces. Le pau-
vre Iphis , privé des douceurs dont il fe flattoit de
jouir, va trouver fa mere> & lui rend compte ainfi de
ce qui s'cA paiTé.
I p H I s.
Ce que le jour cachoic, la nuiâ^ Ta decoayerc î
Nous cudions bien voulu concencer noftcc envie ,f
Et je ne fus jamais fî trille & H ravie.
Son mefconcentemem me donnoit du foncer ,
Mais la pofTcnîon me ravilToic auiTy ,
Et quoique mon aideur me fûcforc inutile»
J*oubliois quelque temps que j^eflois une fiile«
7e ne reccus jamais cane de conccncemens ,
Je me lai (fois aller à mes ravitïèmens ,
D'un baifer j'apaifois mes amoureufes Hévres »
Et mon ame venoit jufqu'au bord de mes lèvres»'
Dans le doux fendmenc de ces biens fuperflus »
J'oubliois celuy même où j^afpirois le plus.
7*embraflois ce beau corps , dont la blancheur extrêoïc
XTexcicoic â luy faire une place en moy-même :
7e touchois^ jebaiCois, j*avois le ccrur contcnc.
TELETUZE.
Vous n'avez qu'à vous voir, vous en verrez autant*
L'on n'a jamais parlé d'un amour de la forte :
Qu'elle fait fur vos fcns une imprcifion force î
Encor qu'a- t'e lie dit , lorfqu'cUe a recognu
Qu'un gardon comme vous ck fille eftanc tout nu t
I F H I S.
Hélas! qu'euft-clle dit? elle eftoit occupée
A fe plaindre tous bas d'avoir eflé trompée ,
Et fon cœur me difoit par de fecrets fiiupirs.
Qu'il ne rencoiitroic pas L* but de fcs defîrs.
3e lui baife le fcin , je pafme fur fa boudie g
Mais elle s' ta émxvit ^uCTi ^eu qu'une foucha.
THEATRE FRANÇOIS. 543
le reçoit de ma part , comme d'un impotcim 9
Mille de mes baifers , fans m'en rendre pas un.
Le jour vicnc , )c la voy qui le levé & s*habille ^
Honceufe de fe voie la femme d*une fille.
Enfin ne fçachanr quel parti prendre , Iphîs fe rend
au Temple d'ifis, il implore Ton fecours : la Ddefle
exauce fes vœux , &. la change en garçon ; plein de
reconnoiflance pour la Déefl'e & d'amour pour (i
chère Jante , il vole pour lui faire part des bontés
dlfis.
Cette pièce n'eft pas mal écrite , mais elle eft froi-
de & languiffante.
(SUJET DE GUSTAPHE.) Ce Prince, fils
aîné du Roi de Perfe , fe révolte contre fon père »
perd une bataille , eft o bligé de s'enfuir , & il fe ré-
fugie dans le Turqueftan , où il vit inconnu. Il eft
néceflaire de fçavoir que le plus grand chagrin que
reflentoit Guftaphe » étoit d'avoir été obligé de quitter
la PrinceHe Celinte , dont il étoit amoureux > & donc
il étoit aimé. Un jour que ce Prince étoit dans la Ca-
pitale du Turqueftan , il apprend que ce jour- là même
le Roi vouloit marier fa fille Amafîe> & que fuivanc
■ufage du P^ys , tous ceux qui prétendoient à cet hy-
men glorieux , alloient fe raflembler dans la cour du
Palais 9 que la PrincefTe paroîtroit alors une pomme à
la main , & qu'elle la remettroit à celui à qui elle
donneroic la préférence. Guftaphe par (impie cuiioft*
£44 THÉÂTRE FRANÇOIS.
té, veut être témoin de cette cérémonie ; & Ton peut
juger de fa furprife lorfqu'il reçoit la pomme des raains
de la Princeffe* Cette préférence flateufe triomphe de
Ton amour pour Celinie , & il paroit devant Amafie
pénétré de joye & de reconnoi (Tance. Le Roi n'étoit
pas fi content d'avoir pour gendre un (impie inconnu,
& cherchant à s'en défaire , il l'envoyé combattre un
Prince voifm qui s'étoit révolté , fe flattant qu'il pé-
rira dans cette expédition. Son attente eft trompée >
Guftaphe, toujours vidorieux, triomphe de fon enne»
mi , & ramené le caîrae dans le Turqueftan. Un jour
les Soldats lui amenèrent un inconnu , qui demandoit
à lut parler en particulier : ce Général l'admet dans
fon cabinet, & Ion peut juger de (a furprife lorfque
dans cet inconnu, il reconnoit la Princeffe CelintCi
que Tamour avoit forcée à quitter Ja Perfe pour le
chercher. Voici comment elle s'explique avec lui ;
C E L I N T E.
Que tu m'as fait pleurer ! que j'ay mauây les armes l
Jamais pour un amant on ne Vit tant* de larmes ,
It i en ai plus verfô pour la Fuite du mien ,
Que Didcm pour U fuite , & le crime du flen.
Je m'cftimois Tobjct qui te faifoit tout faire ,
It quand «m t'accufoit d'avoir trahi ton père ,
Mon cfprit > fans le croire , oyant parler de toy ^
Tenfoit qu'on t'accufaft de me fauffer la foy j
It fi quelqu'un difoit , c'eft un Prince rebelle :
Vous mentez , répondo's-je , il m'eft toujours fîdeJff*'
La Cour avoic pitié des pleurs que je verfois.
Combien a-t'on voulu les eiTuyer de fois 2
THEATRE FRANÇOIS. 54-^
Mais de cette dôutcur que mon àme a fentic ,
Les confolations onc fait une patcie.
Ouelquefois je trouvQÎs des:ditertifreràens
Aux Livres qui traicqîent des malheureux amans i
Y voyant d'un Paris Enônc abandonnée ,
£t balançant mon fort avec fa deilin^e,
O rivale d'Helene ! ô mon doux entretien !
Mon malheut , m*écriois-fe , cft moindre qùe*îft tien r
Quoyjqu'àit'faic contre moy 3a fortiinc inhumaine ,
Je n'ay que partagé la moitié de ta' peint,
Vcu que Taimal^le objet de toii eiimiy prcifànc , »
Fut abfcnt §c rdiage , ÔC le mien tr^eft qu'abfcritf
C*eft coran^ j'ay. vécu depuis qUe la 'fottûnc
Rend à mes pa(Tioui ta difgracc coimndneV' '"
Mais as-tu confervé ton amour .^^ t^ foy?
As-tu fait , cher amant , ce que j'ay fait pour toy 1
T'es-tu bien fouvenu de la pauvre Celints^ -
Quoiqu*aa.aic tnçefijiu mes foupiuV & nia plainte ^
Icy mon ame avoue â fa confu^n > ,
Qu'elle a trop peu foùScrt en cette occadon :
Voftre abfencc n'eft pas un tourmetlc <)rdtna{re;' • -••
£2ifin je n'ay pas fait ce que je dçvois Jaircé
• - - - - ' ■ ~
e E L I ^ T Ei
rfc ■ .'•■ ■■'■'■' -
Far-là tous les amans perchent a difcourir ;
Tu veux dire comme eux que tu devois mourir ^
Mais ton heureufe vie cft indigne de blâme.** * ' '
aU-S^iT A P-H E-;
Kon i \t Cuh xxîfûlasl ^ fe liA'accufe , Madame ,
Je n'ay point témoigné ce Jufte défcfpoir ,
Que loing de vos bea^ ypux )t def oî) concevoir $
«fe n'ay point redcnti cette ardeur bien-aimce ,
Dont mon anie à jamais dévoie eftre enflâmée ;
Tome lié ' M tti
•
54<S THEATRE FRANÇOIS,
Txf révecé trop peu de fi channans appas s
Cioycz-ie , ma Princeflè.
C E L I N T E.
Ha ! je ne le croy pas*
G U S T A P H E.
^u'en cet avtugleinent Ton fort eft pitoyable V
Et que mon cdme ^A gcand y puirqu*il eft iacroyable |
Madame , il n*eft plus temps de le diâSmuler ,
Qui pécha (ans rougir , (ans honte doit parler.
Voftre caur qu'il faudra que ma mort (atisfàllê,
A befoin de CQ^jiAançe , ^ j*ay beioin de grace^
Tous les reurdemens font icy fuperflus.
C E L I N T i.
Quelle grâce yeux* tu 2
Q y. S T A P H S;
V. Que TOUS ne cftlàimSeB pfai^ '
C E L I N T *•
Ma kaine eft*çe unegmce!
• Glu S T A P H E.
^ Une Êûreut iniîgaol
CE t I N TE.
Quoy ! mon am«iu: vous nuit?
a U S T AP HX
Non I inais f eniiiis iadi^nd
ILc dois-je réyclcr ?
^ ^ ) G £ L I N T E^
your en elles prié^
T H lE AT RE FRANÇOIS. 547
6 U s T A P H E.
Je Aihé • •
C E L I N T E.
Achevw toft. . . vous elles >
G U S T A P H E.
C E L I N T E.
Vous eftcs marié!
G a S T A P H E,
TcUc cft ma dcftinée.
Et vous arez raifôn d'en paroiftre étonné^
C E L I N T E,
Poffible raillw-voBs ?
GUSTAPHE.
Ha ! Madame , en ce po!n(
C*eft à mon gtand tegret que Je ne raille points
Hélas! \t IFOUS raconte une chofe trop vraye*
C E L I N T E.
O comble de mes maux ! â ma dernière playe }
Kais moa ame â ce coup fe deroit préparer.
GUSTAPHE.
Madame , c*e(l an trait que je n^y fcea parer ^
Malgré ma paflion qui l'en vouloit defièndre :
Du K07 de ce pays le ibrt m'a &it le gendcs |
Comme tel d'Artaban j'ay l'orgueil abattu ,
Vous cirant des prifofis.
C S L IN T E.
Q^e ne m*x laiiIbi^t1l> ftc.,
La tendre Celtûte i)c pouvant plus époufer (bn cher -
Guftaphe , loi demande pour toute grâce de lui lainèr
Mm ij
S49 THEATRE FRANÇOIS,
garder fes habits d'homme • & (bus ce traveftiflemeoC
de la donner pour Ecuyer à la Princefle AmaGê : Gu-
fiaphe y confenc , & lorfqu'il préfente ce jeune Gen-
tilhomme à fa femme » cela produit une fcène affez
finguliere; Celinte tout d'abord découvre fon (èxe àla
Princefle > & lui conte (à véritable hiftoîre. GuJ^phe
tremble qu'à la fin elle ne le fafle reconnoitre pour le
volage amant dont elle fe plaint. Mais Celinte con-
tente de lui avoir* donné ce monient d'inquiétude ,
iaifle tout le monde dans la même ignorance du fort
de l'époux d'Amafie. Enfin Zarir^ frère de Gullapbe,
arrive dans le Turquedan , le reconnoit & lui apprend
que le Roi leur père lui a tout pardonné , & lui re-
met même Ion Sceptre & fa Couronne : le nouveai
Roi de Perfe fe découvre alors au Rqi ion beau- père»
&fe prépare à emniener Aniafie dans (on Royaume;
mais avant de partir il veut reconnoitre la tendceffe
de Celinte , & engage fon friere Zafir à répoufer.
C'eft ainfi .que fe termine cette pièce , plu^ froide
encore que la précédente ^ mais dans laquelle on (rour
ve quelques fers ai&z heureuse.
( SUJET DE MELEAGRE.) Un fanglîer âi&eux
ravageoit la Province: pour la délivrer de cette bête
cruelle ,-Méléagre veut la combattre , & il part ac-
compagné de Toxée & Plexipe^ frères de (à mère;
de Thefée igc de Jafon ^ Tes amis ^ & d'Atalante ft
'J
THE A TR E FR A NÇ OIS. $49
maîtrene : Pour déranger cette jeune beauté du dan-
ger qu'elle veut courir , Dejanire > fœur de (on amant >
lui fait ainfi le portrait de ce monflre*
C'cft un fanglier affreux qui vous livre la guerre,
Par qui le Ciel fâché , fc venge de la terre ,
Bonc les criûes regards fonc des traies venimeux » ^ -
£t qui portent la flâme , & le fang avec eux 9
Son courroux fait briller deux ardentes prunelles»
Il montre un double rang 'de défenCes mortelles «
Sa. bure fe bériffe 9 & fait de toutes parts ,
De Ton poil rude & dtoit > une fiotêt- de dar^s^
Mais fans que moa récit vous en doive diflraire ,
Par les maux qu*il a faits , voyez ce qu'il peut faire.
Depuis le jour fatal que fa rage a paru ,
Que n'a- 1- elle détruit ? où nVt'elle couru ?
Les plus fertiles champs font demeurés en friche ^
Il a fait un defert d'une campagne riche >
Il a fcul renverfé de fes crochets aigus ,
la gloire de Gérés & riipnneur de. Gachus , - ;
£c faifant un débris d'une belle apparence ,
Il a du Laboureur ravagé l'efpérance :
Il s'efl fait un jouet des fupcrbes troupeaux ,
Xt des foibles brebis, & des plus fiers taurçaux :
Que votre bel! efprit enfin fe le figure ,
Comme un. monflre échapé des mains de la nature y
Qui , fait pour la détruire , &: la mettre au tombeau^
Ke refpeâeroit.pas ce qu'ellça de plusbeau»
Ces fages avis &e la détournent point de voler où
la gloire l'appelle > & elle a même l'avantage: d'être
la première qui blefle le fanglier : Méléagre le tue %
& fur le champ il en préfente la dépouille à Atajante«
M m iij
/
^5« THEATRE FRANÇOIS.
Toxée te Plextpe f jaloux de ia voit en po(reffioo du
prix de la viâoire „ la lui arrachent des mains^ Mé-
léagre furvient^ qui veut enfin tes engager à rendre à
fa maicrefTe ces dépouilles fanglantes ; ils ne veulenc
jamais y confentir i & Méléagre contraint de les cotn-
battre * les tue tous les deux. Altée qui croit que fes
deux frères ont été rois à mort par le fenglier , féli-
cite (on fils fur fa viftoire , ^ lui fait épouièr Ata«
lante. Bientôt après elle apprend que Toxée & Ple-
xipe font tombés fous les coups de Méléagre^ elle
entre en fureur» elle ne regarde plus ce Prince com-
me fon fils , $c jure (a mort* Qn fçait que fa ¥ie étdt
attachée à un tifon que les parques avoient donné à
Altée f & qu'elle çonfervoit avec foin. Cette merc
barbare fe livrant toute entière à fon défe(poir , prend
ce funefte tifon , le confume ^ apprend la mort de
fon fils > & fe tue.
Cette pièce eft encore plus mauvaifie que les pré-
cédentes, elle eft fans tnrérèt &mal ve^fiSéê.. Ben-
ferade a voulu faire une fcène terrible ji eo fkifàntpa-
roitre Altée brûlant le fiinefte tîfen, (cachant bien
qu'elle faifôit périr fon fils ; mais les ver^ de ce
Monologue font fi mauvais, que > malgré toute l'hor«
reur de cette fituation , on n'en eft ni touché ni mê-
me fùrpris.
(SUJET DE LAPÛCEtXE D'QRtEANS.)
THEATRE FRANÇOIS, ^ii
L' A N G E.
I
Sainte fille du Ciel *y Pucelle incomparable^
De cou Prince affligé Le fecours adorable ,
Quicre pour un moment la charge de tes feri «
Et fors par ma faveur de tes. cachots ouyettsi
Viens apprendre de moy ma dernière a/fiftance ,
£t de ton fort heureux la plus belle ordonnance.
Dan« les triftes horreurs de cette epaidc nuit ,
V07 ce long trait de &u , qui Tcrs moy te conduit ^
Marche , marche , 8c bénis l'éclair que je t'envoye ,.
Pour tracer à Tes pieds une agréable voye.
L A P U C E L L I.
Quels nouveau^ fentimens d'un céleAe bonheur 9
M'ouvrent l'ame t>C les Tons à la voix du Seigneur "i
Ha ! i'entens 9 & je Voy Ton divin interprète ,
Qui me va déclarer la volonté fecrctte* ,
U A N G E.
Xfcoute feulement 9 & ne t*étonne pas^
Par les ordres du Ciel , au milieu des combats ^
7ay foutenu la force 8c conduit ton tfpée 9
Contre les opprelTeurs de la Fraiice ufurpée*
In ptifon 9 fur ta vie 8c contre ton repos ^
JLe confeil des mefchans a fait de vains complots*
J'ai mis ton innocence au deiTus de leur rage 9
Xt je me trouve au bouc de mon illuftte ouvrage i
Mais il me refte encore au point où \t te voy 9
A te fortifier toy-mefme contre toy ;
Dieu voulant de ton fort te rendre la mâitrefTe i
Ordonne à ma vertu d'appuyer ta foibleilê ,
Er de porter ton cceur à de hauts mouvemens.,
Au-déli de ta^fbrce 8c de tes feAcimeas.
* Le Ciel s'ouvre par un gca^d éclair j 8c l'Ange paroît>
M m lu
01k, TH^ ATRE FRA NÇ& IS,.
Ce fut pour obéir à la Toute-pui{ïâQce ,
«
Que ma main t*éleva d*une bafîe nai (Tance ,
Appliquant con-.courage à ces nobles emplois ,'
Où ton. bras généreux , par tanr de grands exploits >
De Charles ruiné ' rétablit les affaires,
ît le fît remonter au Thrône de Tes pères :
Fille Se (împlc Sergece , on te vit dHm grand coeur
Paire rraindre par-tout ce Monarque vainqueur y
It traîner avec toy Thonneut 6c la viéloirc ,
Dépouillant de lauriers tout le ckamp de la gldire ,
Far des faits inouis , merveilleux en leurs cours ,
Qu'on ne croira jamais , & qu'on lira toujours.
Tu n*as plus maintenant de Monarque à défif:ndre ,
De bataille à gagner , ni de Ville à reprendre ,
£t tout ce qui te refle en ce dernier efiFort ^
Ç*cft de paroître ferme , & voir venic la morc^
£lle vient , t\\t accourt > 6c par cette journé^
Ta prifon Ce termine , 6c ta vie e(l bornée.
LA PUCELLE.
Que Dieu, fade de moy tout ce qu*il en réfout ^
3*adore Tes dedrets, 6c je fuis prefte à tout.
Fille heureufe 6c fans prix , qi^l , malgré tant d*obflacIes ,
A fait du DieUj vivant les célèbres miracles ,
^'apporte de tes maux Temiere guérifon ,
Çt pour t ouvrir le Ciel , je t'ouvre la pdfon*
En cet endroit f^tal tu feras condamnée ,
^t dans ce mefme endroit , tU feras couronnéej^
Contre toy rinjuftice élèvera fo» bxas ,
Elle t'outragera , mais tu la confondras ,
!^i ta fainte innocence , avant que. l'on l'opprime ^
Mefme en fon Tribunal • fera trembler le crime.
Tu n'appréhenderas fupplicc ni tourment,
^i tu çognpis la main qui rompt dans un momepi^
THEATRE FRANÇOIS, 553
lEo dépit àcs mcchaiis , tes prifons criminelles , ;
ruifqu'elle peut fur eux ce qu'elle a fait fur elles :
Oui , tu leur jetteras |a hante fur le fconc ,
£t tu les jugeras quand ils te jiigeront^
Songeant à leur fureur ^ ne craiqs puiat ta roibleS*c \
Car Cl dans le beibin Téloquençe te laiile ,
là, mon heureux fecours, cfprouvé tant de fois,
» Soutiendra ta penfee & conduira ta voix.
Ou Çi dans ipes faveurs tu manques de refuges y
£t que t^abando|inant au pouvoir de tes Juges ,
Mon recours au dehors te quitte déformais ,
Souffre Tordre d'en haut , ne murmure jamais \
Puifqu'elle vient du Ciel , laifTe chcoir la tempefte^
£t foumets à Tes coups ton innocente teflç.
To|i ame ira , d'un vol & plus noble Bc plus pron^pt,
£Ile ei^ fera pIm^ grande , & fes forces croiilronc.
En ce coup généreu:)^ d'efprit fie de courage 9
On verra triompher & ton fexe & ton âge \
la mort t'apareftra fous le mafque trompeur
Dont elle fe déguife afin de faite peur »
Tu l'envilagéras faps que ton coeur frémiflè s
C'ed la mefmc à la gqerre , & la mefme au fupplice^
Çt celle que tu vis au milieu des combats ,
Dans ce martyre fainft ne dégénère pas.
Nos lafcl^ef eiinçn3>s. que tu combles d'envie.
Attendent que ta more FafTc honte à ta vie S
Mais ta noble vertu foufFrira fon dedin ,
Et toute génércufc ira jufqu'à la fin.
Donc (four ce difpofer , puifque Dieu le commande,
A ce dernier combat dont la palme eA Ci grande y
Et n fort importance â quiconque efl vainqueur.
Par tes yeux à ta peine accoumme ton cœur:
t En Yo^là daiis les ai;:s une image tracée ,
* Icy paroifl-ra en perfpcdive une femme dans un feu allumé , ^
une foule de peuple à Tcncour d'elle.
SS4 THEATRE FRANÇOIS,
Occupe li'dcffus tes feax 6c u penfSe »
le lifaat (Uns ce vagu:, où ton fore efl écrit ^
Renforce ta vigueur « ranime ton efprit :
V07 le brillant tableau du funefte fupptice ,
Qu*i ta fainte rerni prépare llnjuftice :
Il te faudra franchir ces braikrs que voilâ ,
It pour aller au Ciel tu paflèras par-là :
Voy la foule d*un peuple autour d'une innocente 5^
Qui dans l'ardeur da feux demeure 6 confiante >
Tafchc de l'imiter jufqu'à fon moindre traH »
£t que l'original fbit digne du portrait
LA FUCBLLE.
Fiâmes , \e veux foufirir yoRtc ardeur violente r
Ha! qu'en me confommant , vous me rendrez brillante}
Mon ame fera voir , contre vos traits puiilans ,
Ma réfolucion plu& forte que mes fens*
L* ANGE.
Va , pourfuy , je te laide , ô fille trop heureufe ^
Par-defTus tout le fexe, & forte, & courageufe S*
Je remets ta conduite à u feule vertu ^ .
£t reprens le fentier que i'ay tantoft batttk
Regarde en m'en allant où la gloire féjourae»
Tu t'en iras bien-toft par où je m'en retourne ^
Afin d'y recevoir une félicité
Rayonnante d'honneur & d'immortalité.
C'eft^ainfi que commence cette pièce. Pea après le
Comte de Warvick , qui eft amoureux de la Pucelle»
Tient lui propofer de la tirer des mains des. Anglois;
la Pucelle préfère de refter dans ùl prilba^ Se reçoie
avec mépris fes tendres hommages. Cependant le
Confeil s'afTemble pour la condanmer j elle paroit de^
THEATRE FRANÇOIS. ££$
vant fes Jages> & les confond par fon éloquence &
ik fermeté ; ob rompt l'aflemblée fans l'avoir jugée ,
& on la renvoya en prifon. Comme plufieurs cbefii
des Anglois defîrotent (à perte y on forme un nou*
veau Tribunal > où elle eft condamnée à être brûlée
vive » elle va au fupplice avec une fermeté digne de
cette héroïne. Plulieurs de (es Juges gémifTent d'a-
voir prononcé cet arrêt injufte & barbare , mais trop
tard : cet arrêt eft exécuté , & la Pucelle meurt avec
un courage , qui infpire la plus parfaite admiration k
tous les rpe<3:ateurs.
Voilà le fond de cette Tragédie 5 dont le fujet eft
fi connu , qu'il eft très-inutile d'encrer dans un plus
long détail. Je crois qu'après avoir lu cet ouvrage «
& l'avoir mis en comparaifon avec ceux de Benfè-
rade qui Tont précédé , cette pièce ne peut plus être
dout^ufe entre lui & la Menardiere. On ne pourra
jamais fe perfuader que le même Auteur ait donné les
pièces dont je viens de faire l'analyfe & travaillé à
celle-ci , qui eft conduite avec art > fagefle & intérêt ^
& dont la verfification noble & aifée fe foutient de-
puis le commencement jufqu'à la fin. J'ai penfé que la
première fcène fuffiroit pour en donner l'idée , &
j'aurois aifôment pu choifir encore vingt endroits > qui
iurement auroient fait pjaifir à mes Leâieurs.
JEAN DESMARETS , Seigneur de Saint-Sorlîn,
derAcadémîe Françoife» né à Paris en 1^96. morç
en 16^6.
S^S THE A TRE FR ANÇ0:IS.
ASP ASIE, Comédie en cinq aftes, en vers.
Paris > Jean Camufat^ 1636. in^^^
SCIPION, Tragédie, dédiée à Monfeîgneur le
Cardinal de Richelieu. Paris» Henry le Gras»
1639. in-40.
L'ouverture du Théâtre de la Grand'Salle du Pa-
lais Cardinal, MiRAME, Tragi-Comédie , dédiée aa
Roy. Paris, Henry le Gras, 1641. in- folio ^ fig%
La même , i«-4*'. . *
La même y î/i-8^.
ROXANE, Tragî - Comédie , dédiée à Monfcî-
gneur le Cardinal de Richelieu. P a k i s , Henry le
Gras, 1647. zfl'4°.
LES VISIONNAIRES, Comédie en cinq ades,
en vers, avec un argument. Paris, Jean Camnfat,
1647. irt-4^.
ERIGONE , Tragédie en Profe. Paris , le Gras >
1641. i/z-i2.
EUROPE , Comédie héroïque & allégorique, en
cinq ades, en vers , avec un avis au Leâreur, une
clef des perfonnages , & un prologue de la paixdcf-
cendant du Ciel. Paris, Henry le Gras» 1643. 2/1-4''.
{SUJET D'ASP ASIE.) Lyfis aimoit d'Afpafie;
& en étoit aimé. Argiléon, père de LyGs, qui igno-
(Qit Tampur de foq fils pour cçtte jeune beauté > la de-
THEATRE FRANÇOIS. 5^^
mande en mariage pour lui-même 9 & l'obtienté A£-
pafie refufe en vain de confentir à ce tunefte engage-
ment , elle eft forcée d'obéir à fes parent , & Thymea
fc conclut fans que Lyfis en foit inftruit. Argiléon,- en-
chanté de fon bonheur , conduit fa nouvelle époufe
^ chez lui , où il trouve fon fils, à qui il recommande
d'avoir pour elle toutes les attentions polfibles. Il (brt
& va chercher un Prêtre pour bénir le lit nuptial.
Cette cérémonie étoit en ufage parmi les vieillards ,
qui fe flattoîent par-là de devenir bien plus propres
aux devoirs du mariage. Pendant rabfencc d'Argi-
léon, Afpafie apprend à Lyfis l'excès de fon maU
heur.
L Y s I s.
Plaidrs donc la grandeur furpafTe mon attenté ,
Rendites-vous jamais une ame plus contente ?
O favorable jour ! ô defirs fortunés !
Délices de mon cœnr. Qjaoy ! vous vous deflournez !
Faites-moi voir vos yeux , & par quelque carefic
Soulagez mon ftrdeur. Mais Dieux ! quelle triIle^e i
Au moins regardez-moi d'un vifage plus doux.
A S P A S I £*
Je ne puis vous fou^cir > Lyiîs , retirez-vous*
L Y S I S.
Kéla^ ! hors de faifon vous me femblez cruello. i ..
A S P A s I £.
il^rant fliis de douceUr , je ferois crimiiieUtf,
SSS THEATRE FRANÇOIS.
L Y s I s.
En Tefiac oà \c fuis y parler fi criftcmenc !
A S P A S I £.
la Pcftat où je fuis » je ne puis autrement.
L Y S I S.
Xf es uniques deiirs , mon efpoir , ma penfêe !
Quel ennu/ vous furprend > Q,\ioy ! vous ai-je ôfteaftfe*
A S P A S I £.
iZftonIfez vos de/îrs > bannifTez Votre efpDîr ,
Amant trop malheureux , qu*â peine j'ofe Voir.
Scachez ( hélas ! je meurs } qu*un fîinefte hy mente
Me rend avecque vous aux pleurs abandonnée.
L Y S I S.
'Appeliez- vous funefte un nceud qui mVft û. douxt
A S P A S I B.
Vn naaid dont vous ferez cruellement jaloux»
L Y S I S.
Qui vot9 a fait de moy craindre la )aloulîe(
Me croyez pas que j'entre en cette frénefîe»
A S P Â S I £.
Préparez-vous pourtant à feHtir fa fureur.
Hélas ! c'eft trop long^ temps vous laifler en erreur i
Erreur qui m'a tantoft comme vei^ abulée !
Je fuis i voftre père â préfent efpou((^e.
L Y S I S.
A mon père ! ha ! bosu Dieux \ quel eftrange difcouri f
A^ P A S I £.
Ony f c*c&ok pour luy-méiae , ignorant vos amoutt ^
THEATRE FRANÇOIS, 5^5
QuHl a fak fa demande ) -& poux Ton advancage
A^enoc a foudain conclu le mariage.
t y S I s.
Ih ! quqy ! fans rcâftefr , & fans m*en adrertir 9
Voilte ame à ce malhear a bien pu coafcnârl
A S P A S I £.
ray tâché , maïs en vain > d'y faire réfiftance :
Le pouvoir paternel a. vaincu ma confiance :
Se desja par rhjonen nous Tommes aâemblés*
L V S I S.
7e perds le jugement » tous mes fens font troublée !
O digne de pitié , comme digne d'envie ,
Je perds , c^ vous perdant , l'cfpérauce & la vie.
A S P A S I E.
Ah ! bons Dieux! il k meurt : trifle comm^ncemeajc
Qui me va préparer un éternel tourment.
Hélas! ie fuis ky de fécours defpourveue.
Parlez à moy > Ly<ts. Il recouvre la veue.
Lyfis y confolec-vôus , te faites , pour le moins ,
Que de & grands tranfports Ce parlent fans teimoins*'
t Y S I S.
Adorable beauté , mais de qui la foihieflè
Comble mes jours. d*horreur|» ^ lesiiensde triileâè!
Helas! en quel malheur nous avez-vous plongea!
Tyrans les plus cruels des efprics afiligés ,
Mouvemens infenfés , que la fureur ordonne ^
Kagesdcdefefpoirs, ày^us je m'abandonna.
. A S P A S I E.
Quittez ces fentlmens , & les laiHèz dompttr
4 la mel^BC ratfon qui iv'a pu rucmontet.
f6o TSÊATÈE FRAJt^ÇÔIi,
L Y s I S^.
At)pelle2-vous raifon de s'cfire ainfî rendue ?
Hélas ! pcnfant Tavoir , vous l'avez bien perdue j
Dans un mc(h?è malheur , meflanc confufémenc
Un perc miferablc , & voa$ , & voftrc amant :
De qui me dois-je plaindre en ma douleur excreûne t\
De ccluy que )*honoré , ou de cette que j'aime ?
Mon père efl i^nocenc , & n*a que le fettl corc
D'avoir précipité ce maliieureux accotdv
Il fut prompt , il c(l vrai , mais j'en accuTe encore
L*exce(five beauté de celle que fadore.
Il ignoroit ma Hâme , 5c ne fe doucoit pas
Que je flifïè engagé dans les mefmes ^ppas.
Je cannois fa tendreiTe, & mon coeur s'imagine
Que (î de mes ennuis il euft fceu roriglne i
D*un amour paternel , il m'eud donné fecours
Avant que d'eAre pris dans les. mefhies amoucs.;
Xiif^rablc rerpeâ , impuilTant & timide ,: ;
Dont la rigueur m*a fait à moy-n^me perfide y
Ir qui me confommant d'ennuis jSi de douleurs g
A consommé le temps jufques à Tes maUieurs*
Hélas ! de quelle crainte abufois-cu mon amc >
Mon père cuit approuvé mes defleins & ma .flâme ^
Puifque pour mon dommage il m'a bien fait fçavoic
Que fon coeur pour mes feux fe pouvoir émouvoir^
Plus un (I beau fujét lu/- femble de£fable i ■■
£t plus il èu(! jugé mon anàour raifonnable.
Donc je n)'en voudrois plaindre , Se je raccufcroîr
Pour avoir defiré ce que fe dcfîrois ?
Mais vous , dont la beauté trop fatale à ma vie',
M'eft inhumainement par vous-mefme ravie , -
Bel Se cruel objet ', quel rigoureux ef^ott
Vous a donc fait réfoudre à me dounpr la mort?
Au moins fi dcsparensl'oTguei^lcùfe'puiflfancc^^
©c volkc foible cœur combattoic hi confiance/ • '
Ke
THEATRE FRANÇOIS, s€i
•
Ne pouviez-vous tarder d'une heure , ou d'un moment!
Quel de^eia fî pre{I^ de perdr^ voftre amant 2
De mon père aveuglé Tamour précipitée ,
Peut-eftre par mes pleuri euft été furmontée ;
Il auroit eu y fans doute , en connoifTant mou mal $ ■ . ■
Quelqu'horreur de fe voir mon père & mon xival.
De vos cruels parens l'avare convoitife
A donc favorifé la funefte cntrepri.c
D'un perc infortuné , qui , contre Ton de/Teîn »
Met à Ton fils unique un poignard dans le fein*
JMais â VOU5', pour complaire i leiir fatale envie ^ " -
G'eftoic peu , c'eftoit peu , que de m'oller la vie >
tx pour colifidérer <:e que valoit ma foy ,
Une heure de combat -euft trop éeé pour moy.
N'imporcoiE de quel traie j'âvois l'ame bleifée t
Il me falloir plnftofl bannir de la penfée ;
£t pour'ne pas choquer un devoir rigoureux y
Du nombre des vivans , rayer Ce malheureux.
Il fe falloir pluftoft noircir d'ingratitude ,
Que de languir un temps en quelque inquiétade !
9> Que les devoirs rendus par un fidèle amant ,
9) En un timide cœur > fe gravent foiblement.
A S P A S I E.
•
Il çft bien vrai , Lyfîs , vous m'avez obligée ,
Alof s que voftre amour à raoy s'eft engagée :
Vos foins & vos refpeûs gagnèrent mon efprie §
Mais ce fuc feulementia raifpn qui me prit :
£t lorfque cetce flamme, à mourir deftinée.
De la mefme raifon , s'eft veue abandonnée ,
nie a quitté fa place au devoir Ton vainqueur ,
luy cédant pour jamais le règne de mon cœur.
Croirois-je , pour aimer , eftre moins aftèrvie
Au pouvoir des parcns , qui m'ont donne la vie î
Et pour quelque defir , puls-je n'obéir pas
A ces Pieux animés qii'on réyece icy bas ?
i^i i'ifÉAtAE fAANÇoîS,
•
Quicèez, jpdur HiHrfaicdr ccitè dhulébr èjcéêifié :
C'eft bien cAre confiant qui* fé\Vàiâctic f^jr-ittefiâé.
L y S I S.
Ouy ypout ybtli ithiter ^ il filtft quictet rân)bttk^ )
Mais faifant p!às quê iroùà , fè quitttfajr \t ]àut.
Si vivant dans Te^oir $ péiloii^lem de ttiftéffè >
f uis-je fouâiii la vie en^èrdàiit ma itiàicreife >
' A S P A S t E.
Lyfis, quît^ottt.ccs.tionis de maicteiTe & diamant*
La rage efl exctifable au premier mouvement :
J'ay fenty , comme voUs , ces premières allarmet s
J*en ai fait des regrets, |*en ai verO^ des larmes »
Mais enfin {*ay dompté^ pat des efforts puidans»
La douleur qui penfoit s'emj^arer de mes fensi
Quoy donc ? PenCbx-vous vivre. avec unt de mifere ^
Vous iii*aimerez , Lyiîs^ d^uoe amitié de frerc »
£t chafTant de nos c^urs Tardeut U le toutment ^
Je pourray 1>ibn àu(fî vous aimer £ûnâement.
Mais voicy T^léfîn , tafchez , je vous Cupplie ,
De caclier devant luy voftre mélancolie.
Cependant Ârgiléon qm à appris l'amoar que fou
fils reffentoit poUr Afpafiê, né doutâift pas que, pen-
dant Ton abfepce ,» il n'ait facisfait fa paf&oa^ ren-
tre en fureur , & letir fait à toe^ deax les reproches
les plus vifs & les plus àrdêns. Enfin i! enfermé Af-
pafîe dans le jardin y & fort de nouveau pour aller
fe plaindre à Tes parens. Ly(is trouve le moyen de
s'introduire cjahs ce jardin ; èh fàifânt ïes derhîerS
adieux à Afpafie ; l'idée cruelle de ne plus voir ce
qu'il adore j le fait tomter fans conmnfifance : cette
THEATRE fRÀNÇOÎi. 5^^
befle^ touchée de l'excès cle Ta tendrefifc ^ combe éva-"
nouie entre Tes bras : Ârgiléem & t€6 f arens d'Af^
pafie arrivetit en cet inftatit , & te!t vo]f^i¥ en cette
(Ituation , Qe doutent pas qo^ils ne ibient aiminels ;
bien -tôt la douleur la plus vive fiiec^de à eettè>
faufTe idée y ils croient (qv^ïfs font morts lous les deùXf
& fe dérerpereht d'avoir auffi injufteitiefit trouUé leur
amour. Ils fe promettent de réparer leur faute s'ili
parviennent aies rappeller à la vie 1 ilâ y réuffiâfeott
& réunilfent aulfitôt ces deux ten4t*es amans«
Cette pièce eft ^rptde & aiTez médiocreoiest éçriteé
( SUJET DE SCIPION. ) Tout le fnônde cou*
tioft le trait de l'htftoire qui couvrit Sel pion de taûfr^
de gloire , lorfque ce jeuâe hét^is retidit au Prince
Ifidibilis (on amanjte , fans la vouloir de regarder^
crainte d'être féduit par fa beauté. Defmarers a pré-
tendu traiter ici le même fujet ; mais il l'a tellement
défiguré^ que le Lefteur aura certainement grandd
^eine à la reconnokre.
Sciplon affiége Cartbagene : Ûiinde » Prlnceffé
d'Hilpale , eft dans cette Ville , & Lucidàn , Prince
des Celtiberiens , ion amant > fait de tels prodiges
de valeur , que c'eft à lui feul que Ton doit de n'être
pas encore fournis aux RoQiains. Pour prix de fed
exploits , il demande au Gouverneur la Princeffo
d'Hirpale. Ce Gouverneur la lui promet. En même
tems Garamaotei Prince des Numides 9 quieftauffi
N n ij
56*4 TJIE A TRE FR ANÇO IS.
amoureux d'OUnde 9 vient lui demander cette jeune
beauté, & il eft r<efufé. .Outré, de ces refus , & ne
fongeant qu'à.si'ei^ venger » il va dans le camp des
Romains 9 les introduit dans la Ville; & pour pri^c
de fa trabifon » il demande à Scipion de lui donner
Olinde, le. Général la lui promet : mais Olinde n'é-
toit pas encore en Ton pouvoir , elle s'écoic réfugiée
dafis le Châteaut Par une nouvelle trahifon , Gara-
xnance trouve le moyen de l'en faire fortir ^ mais Lucidan
furvient lorfqq'il veut Venlever y le combat j & le
bleiTe dangereufemedt ; tandis qu'il perd tout fon fang»
arrive Hyanifte, Priricefle des Ifles Fortunées > qui!
avoit .auciefois aimée ^ & qu'il, avoit abandonnées
CeCte PrincefTe s'étoit traveflie en foldac , pour cher*
chef & punir fon volage amant , elle le trouve prêt
à rendre les derniers foupirs/ Loin d'en être atten*
drie» elle jouit avec volupté du fpeâracle barbare
de. la mort du Prince qu'elle aime> elle joint à cette
cruauté celle de lui faire des plaifanteries piquantes,
$c défend qu'on lui donne du fecours. C'eft une fcène
|iorrible & dégoûtante : enfin elle lé quitte. Pendant
ce tems ^ Scipion fe rend maître du Château , & on
lui amené Olinde ; loin d'avoir cette continence C
vantée dans Phiftoire, il devient tout à coup amou-
reux d'elle , & s'efforce de la fédùîre. Cette mafceu-
reufe PrinceÇe cherche en vain à le ramener à là ver-
tu j lui avoue inutilement que fa foi efl: engagée an
Prince Lucidan qu'elle aime. Rien ne peut fléchir
THE A TRE FRANÇOIS. '^Sç
fambureux Général-, <juî même veut faire mourir Luf
cidan, dont il eft -jaloux. Cependant Olinde montre
tant d'amour pour ce Prince & pour la vertu 3 que
Scipion commençoit à s'attendrir, lorfque Garamante»
quf fe trouve tout à coup guéri de Tes bleflures, vient
lui rappeller qu'illut a promis de lui donner Olinde
pour prix du fervice qu'il lui a rendu ; Scipion , ef-
dave de fa parole > fans s'embarrafler des pleurs d'O-
linde & du défefpoir de Lucidan > eft prêt à la lui
remettre entre les mains , quand Hyanifbe furvient à
'propos^, & le fait fouvenir qu'il a juré de lui livrer
un traître qu'elle cherchoic depuis fi long tems ^ fi ja-
mais ce perfide tomboit (bus (k puiflance 7. qu'elle ré-
'clamoit cette promeiTe , & que ce traître étoit Gara«
mante. Le Général lui livre auffi>tôt le coupable, &
unit Olinde avec fon cher Lucidan. On ignore le focc
du Prince Numide, qui meurt vraifemblablement par.
l'ordre de Hyanifbe ; car cette PrincelTe finit la pièce
en faifant 1& vceu d'être toujours vierge»
Cette pièce n'eft pas meilleure que la précédente^
,& je n'y ai rien trouvé qui mérite d'être cité.
(SUJET DE MIRAME.) Azamor, Roi de
Phrygie 9 eft amoureux de Mirame , fille du Roi de
Bithinie. Cette Princeflfe méprife (on hommage • &
aime le Prince A rimant ^ favori du Roi de Colchos.
Ce Monarque depuis longcems étoic ennemi du père
N niij
0f THEATH S FR ANÇOI^.
lie Mttufne , 6l Af imant dan^ T^rpoic de revoir &
maîCTcflc 5 <m de rcolevep àiforcç ouverte , détcroiinc
le Roi (on makre à ttédar^ la guerre aq Roi de Bi«
^birïie ; il éâ'fatc Généml > d( ^arre 4 main armée
^ Bichifiie , il a uiie eotrevqe avec la Princeffe i 8c
il Itii déeoovre tôiu (es deflein^a Mirame voyape le
itmr i^rditce, fe forcé i la quilt^r } & refte dans Kn«
^Q^r^de la plus grande ayaot tout à craindre , oq
pbur fon peré ou {idur fou amant. On vient lui aiv*
tidncer ^ue ce dernier a remporté lu vi^oire , mail
eHe en eft tnen-tèt détrompée par )e Roi Ton père»
^ui revient vainqueur « it qui tis^^m Ariœant pri-
^nier } il hii amioQoe quHI va t>ten^t^ parokre à fes
y&ux. En efibt ^ cm lui amené ce malbeoreux Prince ,
4c on les IcriflS» fêtais enfemblé ; maïs le Roravoit &it
ft^bhèr 4n de J^s courtifaiis » qui >n&em} toute leqr
€dnVer&tioâ> 6t «fui vient lîii rendre ^compte que ià
Sttèidtti^ ÀrimaDt. Ce Mmnarque tnt^re dans la plus
grande colère^ Ceft en ce moment que U pièce eft
fort chargée d'événemens. On vient dire ^ Mirame
qu'Ariinam: ayant appris qt^te aîlbit fouler Aza-
mor,s'étoic tué de derefpoir. Cette tendre Ptincene
ne voulant point furvivre à (on amant « deniande du
poiibn à fa confidente , qui lui en apporte ; elfe le
|)rend avec le plus grand plaiHr ; il fait Tur le champ
Ion effet > & l-on court annoncer au Roi la mort de
^ fille- Il étoit alors avec un Ambaflîadeqr du Roi
dç Çol^pSi t^ui venoit lui propoîer la paix aux çoa-
ditions de donniçr AIir?tniç à Arf iTU^pt > <}^'pn faie
connolcre pdur frera d'A^mor , & à qui te Roi de
Colchos afÇir^. fa Couronae : c'eût été le mieux du
inonde , mais il y.avpiç un gran^ emp^^çhçpijBnt k ce
traité ; c'étoit la mort d'Arimant & celle de la Prin«
ceffe. Heureiifement il n'en étoit rien , Mirame n'a-
voit pris qu/iin ibmnifei:^ , §ç ^^mant qi^'on ?voît
cru mort n'écoit qu'évanoui. Ik paraiflem: lou^ les
deux à la fatisfaftion générale ^ & Azamor ne voulant
pas troubler cette latiçf^âion jujaiverfelle i çéde Mi*
rame à (on &ere , ce qui finit le dénouemeot»
Cette pièce n*e(l pas fans défa,i;its > mais elle eft
bien fupérîepre aux deux précédentes. Elle excite une
forte de curiofité > quji tlçnt beaucoup de l'intérêt ; de
plus elle eft pleine d'efprit fif b^en yérCSée , j'en pour-
rois citer pJiiQçiari^ çn4fPÂ(? ^h V? cf pis, ferp^ent plaifîr
à mes Leâu^rs ; j'ai d^o^î o^vi}-i<:i poijir donner feu-
lement une idée de la ve^fiâeatioa ; c'.eft MÂrat^e qui
avoue à la conêdente & t^idrefle pour Aciaiant* Cette
confidente lui dît :
A L M I R E.
Mais qui ne raimerok >
* M I k A M E.
Il jL'dft que trop m^ble.
Mais mon ccKur pour Tain^er^ n*€n cA.pas.moins^blaûnable ^
Je me fcns anin»! d'une imprudente ^euf »
Contre mon fang année , Sccomic au gr;uideu^
Au bien dekRUMi Pays y je .pféteçe. ma ââme :
Mais quai eft con cjpoit.» mifjFrahlc }Aksxofi7
N n îf
\
iSS THEATRE rR ANC 01 S.
It quetcft ton amour , qui fait que tu trahis
Ton honneur , ton repos , ton perç , & ton Pays?
. Quel honl^eur, malhsureufe , oferas-tu prétendre ,
Quand tu verras ton père , & ton Pays en cendre ?
Sors de mon amc, fors , amour mfonuné.
Qui fait perdre le vour à qui me l'a donné ^
£t voy dedans mon coeur tes fiâmes eAouffëes ,
Toy qui veux fur fa tombe cflever tes trophées ;
Ou même (T mon cœur ne fçauroit , fans mourir^
Perdre ton ka fatal ^dontilne peiic guérir »
S'il ne peut t'elloufFer fans s'efh>ufïêr luy-mcfraey.
Je confens à ma mort , je l'ordonne , je l'aime y
J'ayme mieux immoler & ma flâme & mon coeur ,
Que conferver ma vie en perdant mon, honneur*
Ma mort confcrvera mon père & fa Couronne.
Mais perdray-je Arimant? la rai Ton me l'ordonne*
G'eil fous le nom d*amant un ennemi couvert y
Le perdant , je ne perds que celuy qui me perd i
Hélas ! quand par tes yeux je fus enforcelée ,
C'eA lors que ma raifon devoir efhe appellée :
Quand l'aimable Arimant me parloir en ces lieux »
De la voix pour fon Prince ,•& pour luy par les yeux^
' J*e(coutois de- fa voix la trompeufe jcntremife.
-Cependant que {es yeux capciy.QieQt ma franchifç^
Mon amour s'attachant à ce vifîble objet , ,
Je crus aimer le maiilre , & j'aimay le fujet*
Serois-je maintenant* de tourmens agitée.
Si defiors ma raifon eût été confultée 2
Mais le Prince étant Aiort qui couyroit mon erreur ^
Mon amour defcouvert eft devenu iiireut ^
£t malgré ma raifon me fait ëflre perfide >
Funeile à ma patrie , ingrate & parricide ,
Arimant fe gli(& dans mon cœur innocent.
Mon feu caché s'accrut 6c fe rendit puisant.
Je ne pus le cognoi/lre au point de fa naiiTance»
ît ne pus le domter quand j'w eus coçnoiilancck
THEATRE FRANÇOIS. ^69
II en coûta cent mille écus au Cardiral de Riche-
lieu, pour faire paroitre fur le théâtre Cet ouvrage»
auquel on croit qu'il avoic travaillé : il alTifla à la pre-
mière repréfentation , & fut au défefpoir de fon peu
de fuccès. Plein de dépit , il fe retira à Ruelle , & fit
dire à DeTmarets de venir lui parler. Cet Auteur qui
craignok avec raifon l'humeur du MiniHre , îê fît ac-
compagner par un de Tes amis , nommé Petit. Dès
que le Cardinal les vit , il s'écria : Hé bien \ les
François n'auront jamais de goût , ils n'ont point été
charmés de Mira me ; Defmarets ne fçavoit que ré-
pondre ; Petit prit la parole, & lui dit : Monfeigneur,
ce n'eft point du tout la fiiute de l'ouvrage , qui fans
doute eft admirable , mais bien celle des Comédiens.
Votre Eminence ne s'eft-elle pas apperçue, que non-
feulement ils ne fçavoient pas leurs rolles 9 mais mê-
me qu'ils étoient tous ivres. EfFeârivement 9 reprit le
Cardinal 9 je me rappelle qu'ils ont tous joué d'une
manière pitoyable. Cette idée le calma , il reprit bien-
tôt fa belle humeur , & les retint à fouper pour par-
ler encore avec eux d^ Mirame. Dès que Defmarets
& Petit furent de retour à Paris > ils allèrent avertir
les Comédiens de ce qui venoit de fe pafler à Ruelle 9
ils eurent foin de s'ailurer des fuffrages de plufieurs
Speâateurs; & ils j parvinrent (i bien > qu'à la fécon-
de repréfentation on n'entendit 9 pendant toute la
pièce 9 que des applaudiffemens réitérés ; ce qui fit le
plus grand plaifir au Cardinal.
m
(SUJET DE ROXANE.) Cohortane , Satrape
de Perfe , & père de Roxane , apprend à fa fille qu'A-
lexandre va arriver dans la Capitale de fon Gouver-
nennent , £c 1(4 ordonne de fe parer pour tâcher de
570 THEATRE FRANÇOIS.
plaire à ce Héros. Phradate , autre Satrape j amoQ«
reux & aimé de Roxane, vient propofer à Cohortane
de fe révolter contre leur vainqueur^ Cohortaae reçoit
cette propofition avec indignation » im vçat garder h
^€délité qu'il a promife à Alexandre. II fe retire , Phra-
date demeure feul avec Roxane > & lui dit :
R • X A N 1 y ▼«>iK voyez à 4\\}f>y fe fuis réduic y
Au lieu de m*affif]ler , Coliorcane me fuît :
Pour vous i*ay tout perdu , mon honneur , âjies Pçoyinç^;|
£c pour vous je me voy le plus honteux des Princes :
Abandonné de tout , dans mon fort xjgoureux
Ke fçachaat en quel lieu cacher un malheureux.
Jff ne puis cfpérer une feconHe grâce ;
la honte me fainr , & Ja mort me menace.
7e ne puis vous avoir , je ne puis vous quitter »
It le feul défe fpoir s'offre pour m'aflîftcr.
Vous voyez le party que l'amour m'a fait prendre^
Qui devois-fe oublier , de vous , ou d'Alexandre ?
A tous deux mec Vainqueurs f'avois donné ma foy.
I^^oee^t raa Prince^e , âc l'autre efloic jnoii IU>yV
IMois fon prifonnier , 4*c(lois.au|fiJe voftre.
Je devois tout à l'un , & |'«Aqis tout -à l'avxtire.
Mai* )C n*ay redout-é , pQ^r vous garder rpon eçpu. i
Vj le camp orgueilleux de ce ^pui(Iant vainqueur ,
^y le honteux tegrec de manquer à mon maigre »
Ky les noms de parjure , & d'ingrat & de trailbre*
D'un codé , je voyois mon repos , mon devoir;
De l'autre mou amour ,' mon defîr , mon efpoir^:
D'un co/lé ce difois-je, un grand Roy me demande 3
Dé l'autre ta beauté du monde la plus grande.
Avec l'un Xe 6iit voir un favoraWe f<y:t;>
,. Pc» d'cfpoijr avec l'autre ,,8c la honte gc l^ixjQtc, .
Mais fî faut- il choiiîr : tu ne peux plus attendre»
' Il faut perdie Roxanie , ou^juitccr Afexandte, -
THEATRE FRANÇOIS. ^jt
•. . . . '
Il hm , ou > àa&ixàÊSt aa le voir triompher
De ces changes puUUm ^i fccureiit t*e£chauStr» ^
Au plus noble deffeia ton amour ce convie.
Abandonne potir lui t«s bien$ , ta foy , ta vie:
R.évdce tes ^eu « tâfcâe à Taiocte ce B,Qf i
Incite Cohoitaoc à ie joindia avec tOy. >
Meurs pluftoil mille fois , que de voir Alexandre
MaiAre de la beaqré qui mec con coeur en cendre*
Tzy tenté ce deilcin • il ne m*a rien produira
J*ay prié Cohnrtane , & j'en fuis cfconduir,
C'eA de tous les mortels le plus inébranlable y
Moj des plus m^heureux |e plus iAconTcHable ,
Qui ne puis , unt le Ciel ipc regarde en courroux^
Ny demeurer icy > ny m'eiloi^Qer de vous.
Boxatve It blâixje d'sivoir aÎBG diirulgué Ion com-
plot fans être aflfur^ d'un parti pmffiipt^ & kii con-
fcille de fonger à fa ftueté. Cependant AIe>çandre ar-
rive , Voit Roxane » & en devient amoureuic : il jure
de lui accorder la première grâce xja'eUé lui deman-
dera. Cette Printeflfe fçachant que le Roi étoit inftrult
des projets féditieux dePliradate« fe jçtte àfcs pieds»
& lui demaiule la^grace de ce crinmel* Alexandre la
lui accorde. Phradate, înftrult del'amonr du Rot pour
Roxane , devient plus furieux que jamais » & loin d'é«
coûter la reconnoiâàiice » il fé Ime tout entier à la
jaloufie. Il forme une noaveHe confpîration , dans la-
quelle il fait entrer Clite , un des favoris d'Alexan-
dre f qu'il trouve le moyen de fédutre en bii appre-
nant que fdn maître veut époufer Roxane. Il pouffç
plus loin ^a JFurçarj Se préférant de voir périr fa matr
^7% THEATRE FRANÇOIS.
trèfle àl'horrear de fa voir entre les bras d'Aleièandro
il confent à fa mort. Cette Princefle , cjui par hafard
étoit proche de l*endroit où les Conjurés s'étoient
raflemblés 9 avoit écouté toute leur converfation ; locf-
qu'ils s'étoient féparés , elle avoit entendu Pfaradate
leur dire :
Immolons ce rîl fang , cette fîlle orgueilleufe ,
O Grecs , pour ne pas voir cette nopcc honteufe»
On peut juger & de fa colère & de fa douleur»
elle joint fon cruel amant » & lui dit :
o cœut lafche , cft-cc aînfî que tu parles de moy ,
TraiAre , après avoir faiâ ce que )*ay fai£^ pour toyi
Non y )e ne parle point , 6 Prince abominable 1
De la vie 8c des biens dont tu m'es redevable :
Pour le moindre des miens j*en euiTe faiâ autant i
Mais de t'avoir gardé ce courage confiant »
Qui m*a fait préférer , dans ta mifere extrême.
Ta recherche aux grandeurs , au fceptre » au diadème.
7e t'ay rendu plus grand qu3 ce puiflant vainqueur.
7e te l*ay fait combattre de vaincre dans mon cœur:
Je t^ay fait triompher : ah ! l'ofoi^tu prétendre l
Je t*ay mis dans mon ame au-delTus d*Alexandre.
Juge G. ce n*eA pas , perfide , te porter
Au degré le plus haut où l'on puiile monter»
Peut on te donner plus qu*ane noble vlâoire »
Sur celuy qui du monde a la plus haute gloire ?
ïc tu m'abbaiffes , lafche , autant que tu le peux^
M'appellant un vil fang , un efprit orgueilleux !
7é ûiis du fang de ceux qui les thrônes foufbiennect ^
De ceux qui font les Roys, de ceux qui les deviennent.
' . Je fuis du noble fang , ( niais quoy ! l'ignores-cu ? )
De ces Friaces égatu eu pui^stnce, ea yerttt^
THEATRE FRANÇOIS: J73
Qui fifcnt de l'un d'eux , au lever de l'aurore,
le Roy dans l'univers le feul que Ton adore.
Tu changes dans ton cceur fous le crime abbactu »
La noblefTe en bafTjire , en vice la vcrcu.
Qu'un aurre appelle orgu il ma confiance , 6c l'outrage:
Mais par coy cec orgueil fe doit nommer cours ga«
J'^y mcfprifé le Roy : dois-tu m'en accufcr >
Un mefpris ù'iGt pour toy , fcrr i me mcfprifct :
Mon grand cœur contre moy fert à ton ame noirs 9
£t tu me bacs i'u fer donc j'ay fai^ ta vidoire.
Je t'eflevc en honneur , & toy, bien diffèrent y
Tu précens m'acquérir en me deshonorant*
Mais Uw* le prétends plus , je dctefle ta rage ,
In<iigne de ma foy comme de mon courage.
Tu viens d'oiFiir ton bras pour m'ofler la clarté^
Le mien me défendra contre ta lafchecé.
Quoy ! eu l'ofFics ce fang aux foldais d'Alexandre,
^ Ce mcfmt- fang J)our toy tout preft à fe refpandre !
J'emploiray concre toy dans ce lafchc delîein ,
Ce poignard que pour toy j'eufTe mis da^ mon fein.
Elle va enfuite trouver Alexandre , & lui révèle là
conrpiration , elle lui nomme Clite parmi les Conju-
rés. Ce Monarque au défefpnir de la trahifon de (on
ami, l'invite à un feflin,veut lui pardonner; mais fur
des reproches injurieux que lui fait Clite > il s'aban-
donne tout entier à la colère , & le tue. Enfuite plein
d'horreur pour cette adtion barbare i il fe livre au plus
affreux défefpoir : fes Capitaines cherchent en vain
à adoucir Ces chagrins , fa douleur n'en eft que plus
forte ; la feule Roxane parvient à le calmer , en con-
fentant à l'époufer. Pour confervei: tout fon éclat aa
fy4 THSATRÉ FRANÇOIS. *
caraâère de Roxane ^ il eft oéet^fiatr^ 4e fçaYoir
qu'elle avoit téfolQ de fè plonger an poignard dans
le cœur plutôt que d^époufer Alexandre , tant que
vivrok Phradace* Phradate, pour la dégager de cette
fidélité refpeâabie t fiir<«touc pour un faotnme qui avoit
cqnfenti à ia mort après avoir échoué dans la fécon-
de conjuration , prend heureufe^neBt le parti de fe^
luer 9 & lailTe ain(i Roxane maltrelTe de difpofer de
fa main» & ellô la donne à Alexandreé
On trouve dans cette pièce les plus grands défauts
& auffi de très-grandes beautés , fur-tout d^s les dé-
tails. J'aurdis pu citer encore plufieurs endroits .ver«
(ifîés avec une uobleAe & une chaJeiM* linguliere ;
elle n'eut cependant qu'un très-médiôcre fuccès. Ho-
race , Cinna , PoHeuâ:^ » avoient déjà paru fur la
fcène , & Corneille, en éclairant fon fieclc , avoit
cruellement obfcurci la réputation des Auteurs fes
Vbniemporaina»
(SUJET DES VISIONNAIRES.) On trouve à
la tète de cet ouvrage un argument qui jufiifie le ca«
rafbère que Defmarets a introduit dans fa Comédie.
Il fe plaint à la fin des (:ritiques que l'on a fiaites de cette
pièce» & il dit : j> C'eft être bien déraifonnable d'ac-
7» cufer d'obfcurité celui qui , dans la bouche du
» PoCte, s'eft voulu mocquer de l'obrcurité desan-
^ ciennes Poëfies. «c
Ce n'cft pas pour tojr que j'éais^
Jndoâe & ilupide vulgaire :
THEATRE FRANÇOIS. ^yf
J'ercris pour les nf>bles efpiits f
Je Terois rhapri dt ce plaire.
Lés Vifionnaires eurent un très- grand fuCcès à lat
irepréftntâcion> quoique le fujet en foie crès-extraordi*
nairê f & qu'on aie pu ^croire que c'étoic un déeEche^*
mené des Peeiees-Maifons , offert aux yeux des Spec-
tateurS. Je penfe que vraifemblablement la protèc-^
cioil déclarée que le Cardinal de Richelieu accorda à
cet ouf rage > où l'on dit même qu'il avoit travaillé «
contribua beaucoup aux aplaudifTemens que le Public
lui donna. On voit paroitre fuccelfivement Artabaze ^
faux bravée qui croit avoir conquis le monde; Amidor,
Poëce extravagant^ qui s'imagine être fort au-de(Iu8
d'Homère; Filidan qui s'enflâme avec fureur pour la
première dont il trouve la beauté décrite dans quel-
que ouvrage ; Fhalante qui n'a pas le fol , mais qui (è
croit plus riche que Créfus ; MéliiTe , qui en lifs^nt l'hi-
floire d'Alexandre , eil devenue follement éprife de ce
Héros , & qui ne veut point avoir d'autre époux; He(^
périe qui s'iniagine que fes charmes dangereux foqt
le malheur du monde» qui fe pique de la plus par-
faite infenfibilité > & qui croit qu'on ne peut la voir
un inftant fans en avoir la tète tournée; Sefliane qui
ne connoit d'autre bonheur que la Comédie , qui^ de
tout ce qu'efle voit ou entend» forme fur le champ un
plan pour ce fpeftacle, 8c qui renonce à tout enga-
gement , pour s'occuper uniquement de fes talens prêt
Ccndus; enfin Alcidoui père de ces trois folles > &;
'Sy6 THEATRE FRANÇOIS.
aaffi imbecille que fes filles font extravagantes. Je
ne parle point d'un certain Lifandre ^ parent d'Âlci-
donj qui ne fert qu'à mettre un peu de liaifon dans les
fcènes > ((i tant eft qu'il y en ait). Âlcidon veut abfO'
lument marier fes trois filles y qui> comme l'on fçait,
n'ont point du tout ce projet; il les offre au premier
venu. II accepte pour gendre le premier qui fe pré«
fente ^ & fe perfuade toujours être arrivé au moment
de les voir établies. Comme les quatre perlbnnaget
ridicules dont j'ai parlé > venoient (buvent che2lui^&
qu'il fe perfuade que c'eft dans l'intehtion de devenir
fes gendres > il eft très-embarraffé de s'en trouver un
de trop, n'ayant que trois filles pour les quatre pré-
tendans. Le dénouement le tire de cet embarras. Mé-
lifle, fidelle à fon chère Alexandre, déclare à fon
père qu'elle préfère la mort à l'hymen. Hefperie re-
Tufé de fe marier par pitié pour le genre humain; elle
fent bien que pour faire un feul homme heureux , elle
en rendroit cent mille miférables. Seftiane n'aimant
que la Comédie , ne peut confentir au mariage , &
dit à fon père:
7e neveux point , mon père , ePpoufer un cenfeut.
Puifque vous me foufFrez recevoir la douceur
Des plaifirs ionocens que le théâtre appprtc ,
Preiidrois-je le ba^rd de vivre d*autre forte'
Puis on a des enfans , qui vous font fur les bras ; -
les mener au théâtre ; ô Dieux ! quel embarras ( - \
Tantod
)rEE A TRE FRANÇOIS-, 577
<
ïantoft couche ou grofTefre, ou quelque maladie^
Pour jamais vous font dire , adieu la Comédie.
Je ne fuis pas Ci follt j àuflî je vous promets ,
Tour coûtes ces raifons , d'eftre fille à jamaîif.
Enfin les prétendus gendres paroifl*ent; Filidan dé.
dare que , dans ces trois filles , il ne reconnoic poinE
Tobjec qu'il adore; Amidor avoué qu*il ne tui a de-
mandé une de Tes âiles que par galanterie > & qu'il
ne peut être amoureux que de la PoëGe. Après avoic
queflionné Pbalante fur fes grandes richefles , on dé-
couvre qu'il n'a pa^Ie (bl, 6c nulle efpérance d'avoir
famais du bien. Artabaze déclare que c'eft par un
excès de bonté qu'il a laifle concevoir à Alcidon l'et
pérance d'un honneur qu'à peine Jupiter oferoit pré*
tendre : ailifi les quatre prétendans fe retirent. Le
bon-homme fe trouve fans avoir de gendres y & fçs
trois îEUes font enchantées de refter dans le célibat.
Quoique je nexroye pas que cçtte pièce ait Jamaîà
mérité les applaudiflemens qu'on lui a donnés » elle
n'eft cependant pas fans mérite; on y trouve des dé--
•tails heureux en tout » les verS font bien Faits, & l'on
y trouve une fcène finguliere , & qui doit avoir faic
effet. La fille Poëte , toujours occupée de fes talons ,
propofe de jouer une Tragédie. Il donne à Artabaze
le rôle d'Alexandre; cduici entrant fur la fcène, en-
tend prononcer le nom de ce Héros ; c'étoit Méliffe »
il croit qu'elle répète fon rôle ; mais voici cette fcènc
que le Leâeur verra peut-être avec plaîfir.
Tome IL O o
iy9 THÉÂTRE fRA^ÇOifi
Quand pourray-fe goûter cane de félicité^
Alexandre , mon coeur f
A a T A B A Z E.
Quelle efl cette beàutft
Qui parle d'Alexandre > Elle paroift hardie.
Ma foy , vous le vArcz j c'eft cette Tragédie
Donc patloic ce fantafque , elle en dit (|uclques ycrv
M E L I S S E,
Ouy , je le yeux chercher par-tout cet univers»
Mais quel |;>raye guerrier me vient icy furpréndref
A R T A B A Z S*
H faut luy répanir : je fois cet Alexandre.
M K L I S S. È.
Vous eftcs Alexandre > o me« yeux bienheurcirr ^
Vous voyez donc Tob^t de mes vœux amoureur*
Que j'embralfe vos pieds , griMid Prince que ^*adofe$
Quitte , quitte , mon cceur , Tennuy qui te dévores
Je le voy , ce grand Roy , ce héros nom pare il p
Le plus grand que famais efclaira le Soleil >
Ce fils dd Jupiter, ce prodige en courage.
ARTABAZE.
Cette fille à mon gré faid bien Ton perA>unag9»
M E L ISS E.
Vous elles Alexandre ? au moins encore on moc*
Pourfuiyez de parler»
l
ARTABAZE»
Je ne fuis pas il foc»
MELISSE.
Parlez doo€, dker obiet donc taon orne efl épn(c«
THEAT^-^ FRANÇOIS. $79
r . . . A.R T A B A^ E. . -
fc fuis cet Alexandre 9 & cela vous ru£(c.
M » t I S SE..
îî me fuffit , de Vray , d'avoir Thcur de voW voît.
Vous forcer de parler , c'eft paficr mon devoir «
£&oy derunirers, c'e^ par trop encrepreudce,
t A a T A B A Z E.
Mik-ct pour ffloy tQ titre , ou bien pour Alexandce t
MELISSE.
Comment Tentcndcz -vous ?
ARTABA2E.
Si ce titre efl pour moy^
Comme m*appartcnant auflî , je le reçoy ;
j^ais je le maintiens faux , Ci c*eil pour Alexandre.
MELISSE.
Vous tenez un difcours que je ne puis comprendre^
Vous eâes Alexandre , Stc vous ne Teftes pasi
A R,T A B A 2 E.
Ceil ptr moy qu* Alexandre a fouièrt le tterpas»
*M fi L I S S E.
Vous l'eues donc fans l'eftreî A préfent Alexandre
£ft comme le Phœnix qui renaiA de fa cendre :
Car c'eft Uiy qui revit , ôc fi , ce ne l'cft plus.
A peine j'entendois ces propos ambigus.
Mais , ô cher Alexandte , ô Fripce q^ m^embrâfc \
r
A R T A B A 2 E.
laiffons là Tragédie , on m'appelle Ahabaze , *
S'ius craint que le tomïerre , ic l'orage & les vents.
MELISSE,
Atrabaze eft le nom de PuA de y^s^ fiûvams y
O O Ij
58 é» THEATRE FRANÇOIS.
Qui le fut de Darie. Ah ! le vouJriez-vous prendre?
O Dieux 1 ne quiccez point ce beau nom d*Alexandn»
ARTABAZE.
Arrabaze cil le nom du plus grand des guerriers %
Dont le fronjt eil chargé de cent miUe Uur.iers.
MELISSE.
raice>-moy donc entendre ^ eft-ce métamorphore»
Qui vousiait Aitabaze y ou bien mctempfycorcL^
ARTABAZE.
Quoy ! vous dites auili des mots de ce foccieç
Qui fit la Tragédie î
M E L I S $ E,
Invincible guerrier ,
Alors on vous crut mon par charme ou maladiei
Ce fut dotic un forcier qui fit la Tragédie^
ARTABAZE.
Il e(l vrai que de peur fen ay penfé mourir.
Vous a-t-on dit Te^froy qui m*a lane fart courir 3
MELISSE.
Quoy donci il vous fit peur, ô valeur fans fccondel
A-RTABAZE.
Il m'a faiâ difparoiflre aux yeux de tout le monde^
MELISSE.
Vous difparutes donc par un charme puiflànc >
ARTABAZE.
Par des mots qui pourroient en effrayer un cent«
Par un certain démon qgi,*il porteic dans fa pod\e«
M £ L I S S L,
O Dieux !
ARTABAZE.
Nul 4e ùk moït {ic fat jaqivs ii proche*
THEATRE rk AN ÇÙUy '$^i
MELISSE.
Depuis cet accident qu'il s'eft fait de combats !
^ ARTABA2E.
Quels combats fcfont faits?
M E L I S E.
Ne les fçavcz-vouspasi
ARTABAZE.
On s'cft battu fans moy ? Je détefte , penragci
MELISSE.
Ce fut lorfque vos chefs eurent fait le pattage
De tous ces grands Pays conquis par vos travaux!
ARTABAZE.
Je les feray tous pendre , où font-ils ces marauds!
Ils partagent mon bien \
MELISSE-
Depuis leurs deftînées
On pourroitbien compter près de deux raille annéeSii
ARTABAZE.
les Dieux , pour les fauver de mon ju^e courraux ^
Ont mis aflèurement cet efpace entre nous.
M E L I S I £•
Hélas ! où courez-vous \
ARTABAZE.
Ce forcier me v'Ut prendre^
MELISSE.
Je vous fuivray par*tout , ô mon cher Alexandre.
(SUJET P'ERIGONE.) Euridice , Reine de Ta.*
probane » a promis en mariage fa fille Erigone au Roi
ide Carmanie. Cette Prinçene aimoic Pcoloméej Prince.
SH THEATRE FRANÇOIS,
d'Arabie i ^uf voyageapt incognito ^ écoit devenu
amoureux d'elle ^ & ^jés'écoic faic connoitre que d'elle
feule; elle apprend à Ton amant le fatal projet dj> la
Reine 9 & lui annonce en même tems que Cléom^ney
frère du Roi , qu'on lui dedine pour époux , va bien»
tôt arriver pour Tëpoufer au nom de fon frère. Pto-
lomée> au défefpoir de cette nouvelle» montre toute fa
doilfeur à la Princefle » & avec fon aveu , s'enlbaïque
fur le champ I va au-devant du Prince de Carmanie^
l'attaque, le défait, le prend prîfonnîef , ' s'ènij)are
defes papiers, prend (on nom , arrive à la Cour^> où
l'on célèbre auflî-tôt la cérémonie du mariage. Le
vrai Cléomene, qu'il tenoit prifonniçr, trouve le riioyen
de s'échapper > fe pré&nte à la Reine; niais par fba
éloquence, Ptolomée perfuade à la Reine que c'eft
un impoftêur , & cette Princefle le f^it nïettre en pri-
fon. Il eft néceflaire de f^avbir qu'un Oracle avoic
annoncé à la Reine > qu^elle épouferôit celui qui vien-
droit demander Erigone en mariage; elle fe perfoade
avec plaifir que c'étoit Ptolomée que l'oracle avoit
défigné ; elle lui fait une tendre déclaration : le Prince
pour la tromper y répond avec galanterie. Euridice
ne veut plus qu'il parte avec fa fille. Elle envoyé un
Ambafladeur au Roi de Carmanie , lui demander fon
aveu pour ce nouveau mariage. Dans cet intervalle ^
une 'fèmme qui étoit dans la confidence d'Erigone »
VÎetit tout révéler à la Reine, qui entre dans laplu$
Igrande colère; ellefeit mettre Cléomène en libertéi
f'
THEATRE FRANÇOIS. ,^83
& fonge aux moyens de fe venger Ue f côlomée ; mais
celui-ci lui montre tant d'amour pour Erigone^ qu'elle
fe laifle enfin toucher ; elle lui pardonne > & lui donne
là fille en mariage : convaincue alors que c*étoicCléo*
mené que l'oracle, lui annonçoic pour époux ^ elle lui
ofïre fa main ; ce Prince l'accepte avec tranfport , &
fe fait reconnoître pour le Roi deCarmanie, qui^^^fous
Ae nom de fon frère , étoit venu voir la Princeffe qu'il
.avoic demandée en mariage.
Cette pièce eft affez froide ^ & étant écrite e»
profe, je n'ai rien à en citer.
(EUROPE. ) J'aurois defiré que cette pièce, la
.dernière dont je devrois faire l'extrait , m*en eût pft
fournir un digne de l'attention des Leâeurs ; mais
quel degré de chaleur ou d'intérêt pourroisje donner
à l'analyfe d'un ouvrage 9 dont le fujet & les vers mè*
.mes foQt abfblument allégoriques? Je me contente
donc de donner la clef des perfonnages^ & celte des
allégories répandues dans les vers de cette Gomédie-
héroïquei telles qu'elles (ê trouvent à la fin de la pièce.
CLEF DES PERSONNAGES.
lA RHNE-EUROPE , reprcfcntc TEuropc.
FRANCION , le François.
IBERE, l'Efpagnol. .
GERMANIQUE , TAIkmand.
AUSONIE, l'Iiaiic.
PARTHENOPE, Naplej.
XfÊLANIE, Milan.
AUSTRASIB, la Lorraine.
LILIAN , Suivanc de I^inuidcM^
HISPÂLE , Sttiyaiu dlbece.
\
S$4i "ÏHEATRE FJIANÇOI^^
*' CLEF DES ALLEGORIES*
^HlLBTONE , fignifie PAngletcrrc.
ALPINE , Madame de Savoye.
LA ROCHE REBELLE , la Rochelle.
UN PRINCE MORT CHEZ AUSONIE ,' le vieux Duc de Mantou^;
UN SEUL PRISONNIER, François premier.
UN PRINCE AUGUSTE , VOISIN D'AUST^ASIe', PEleacur d< À
Trêves.
UN PRINCE GERMAIN DU SAJÎg D'ALBIONE , le Roi de Bohême.
UN PRINCE CiUl;S*ÉTABLIT EN ON DROIT LÉGITIME, le Duc
dcNevers; Duc de Mantouc.
TROIS N<B*îDS DES CHEVEUX D'AUSTRASIE, Clermont , Stenay
& Jamecs. -
LA BOfTE DE DTAMAKS D*AUSTRASÎE , Naftcy.
LES DESTRUCTEURS D* AUTELS , Luthériens & Gaîvîniftes.
CEUX QU/IL A FAIT VE^JIR DU BOUT DE L'UNIVERS OU DB
LA MER GLA CIALE , les Suédois. '
CE GRAND ROY , CE PUISSANT CONQUÉRANT , le Koy de
Suèdti * ; j
CES GRANDS CHEFS DE SA CENDRE ENFANTÉS, les Chcft i
Suédois. I
CE SAXON , le Duc de 'Wcymar.
UN PRINCE QUI D'UN. PEUPLE AFFRANQHÎ COMMANDE LES i
AÇ.MÉfcS, le Prince d*Orange.' • —
LE BIEN DES PRESTRES MITRES, I(Js Eyêchés que leRoydeHon- 1
grie a donnes aux Luthériens. ^
DES PEUPLES Affranchis qui cherchent mon secoure, i
les Çfttalaas.«
TASSrSTE UN ROY, le Roy de Portugal.
TROIS puissances ROYALES > les Rois d'Efpagne , de Hongrie &
d'Angleterre.
TROIS couronnes DUCALES, Savoye, Mantouc, Lorraine.
LE PORT DE LA MER LIGUSTIQUE , Monaco.
LA CLEF DE L'ÉTAT D1BERE , Perpignan.
DE MELANIB ONT ESCORNÉ L'ETAT. Prifc de TortottC.
LA PLACE EST EN MSS MAINS , Sedan.
Fin du Tome Ih
."vp^iFï'-
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