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Full text of "Biographie nouvelle des contemporains; ou, Dictionnaire historique et raisonné de tous les hommes qui, depuis la Révolution française, ont acquis de la célèbrité par leurs actions, leurs écrits, leurs erreurs ou leurs crimes, soit en France, soit dans les pays étrangers"

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^  BIOGRAPHIE 


NOUVELLE 


DES  CONTEMPORAINS. 


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Les  soussignés  déclarent  que  les  Exemplaires  non  revêtus  de 
leurs  signatures  seront  réputés  contrefaits. 


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DE  l'imprimerie  DE  PLASSAN,   RUE  DE  \AT  GIRARD,  N"  l5, 
DERRIÈKE  l/onKON. 


MF.BC 


BIOGRAPHIE  NOUVELLE 


H 


DES 


CONTEMPORAINS, 

ou 

DICTIONNAIRE 

HISTORIQUE    ET    RAISONNE 

DE  TOL'S  LES  KOMMES  QUI,  DEPUIS  LA  RÉVOLUTION 
FRANÇAISE,  ONT  ACQUIS  DE  LA  CÉLÉBRITÉ 

PAR  LEURS  ACTIONS,  LEFRS  ECRITS,  LEURS  ERREURS  OU  LEURS  CRIMES, 

SOIT  EN  FRANCE,  SOIT  DANS  LES  PAYS  ÉTRANGERS; 

Précédée  d'un  Tableau  far  ordre  chronologique  des  époques  célèhres  et  des  èvéne- 
mens  remarquailes,  tant  en  France  qu'à  l'étranger,  depuis  lySy  jusqu'à  ce  jour, 
et  d'une  Table  alphabétique  des  assemblées  législatives,  à  partir  de  l'assetnblée 
'Constituante  jusqu'auas  dernières  chambres  des  pairs  et  des  députés. 

Par  mm.  A.  V.  ARNAULT,  ancien  membre  »e  l'Institut;  A.  JAY; 
E.  JOUY,  DE  l'Académie  française;  J.  NORVINS,  et  autres 
Hommes  de  lettres,  Magistrats  et  Militaires. 

ornée  de  3oo  portraits  au  burin, 
d'après   les   plus    célèbres    artistes. 


TOME  SEIZIÈME. 
PAN  I— POP 


PARIS, 

A  LA   LIBRAIRIE  HISTORIQUE,  HOTEL  D'ALIGRE, 

RUE  SAINT-HONORÉ,    N"  1^3. 
1824. 


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NOUVELLE 


DES  CONTEMPORAINS. 


P^  PANIS  (N\),  ilépiiU'î  de  Paris,  A 
la  coiivcîitioii  n.'îlionîile,  né  dain  le 
Pcrif^ord,  élail  venu  jeune  ache- 
ver ses  ctiuk's  et  «e  taire  recevoir 
avocat  à  Paris.  A  Tépoqne  de  lu 
révolution  en  17H9,  il  éiait  un 
tics  mcinl)res  les  moins  connus 
i]\)  barrian  delà  1  apilale.  Mais  l'a- 
vocat sans  cause  et  sans  renoiîi- 
mée  au  parlement,  se  crut  destiné 
à  jo'er  un  grand  rCde  coaiime  dé- 
fenseur (le  la  cause  populaire,  et 
5e  lança  avec  longue  dans  l'arène 
politique.  Panis  acquit  bientôt 
une  célébrité  qid  date,  malheu- 
reusement pour  lui,  des  horribles 
journées  des  2  et  3  seplend)re 
J799,.  S'il  n'en  lut  point  le  pr.o- 
Inotenr,  ni  un  des  auteurs,  comme 
on  rainjusleir>entavarK;é,annioins 
:j'en  rendit-iH'apologiste.  Jusqu'au 
10  août  il  avait  été  peu  question 
de  lui,  quoiqu'il  fût  devenu  le 
beau- frère  du  brasseur  Santcrre, 
qui  exerçait  déjà  une  giaude  in- 
îluencc  surle  peuple  desfaubourgs, 
avant  d'êtrenommé  commandant- 
général  de  la  garde  nationale  pari- 
sienne. Panis  avait  figuré,  ilil-on,  à 
la  lêJe  des  rusicmbleiricns  qui  se 

T.   V  VI. 


PANI 


portèrent  aucliâlean  des  Tuileries 
dans  la  matinée  du  10  août;  ce 
qu'il  y  a  de  plus  certain,  c'est 
que,  lorsque  le  succès  de  celte  ré- 
volution fut  assuré,  il  en  profita 
un  des  premiers.  Dans  la  nuit 
du  1  I  au  13,  il  s'installa  à  l'HAteN 
de-Ville,  en  qualité  de  membre  de 
cette  commune  monstrueuse,  qui, 
inopinément,  sans  élection  popu- 
laire,usurpant  tous  les  pouvoirs,  se 
constitua  de  sa  propre  autorité,  el 
chassa  les  véritables  représentans 
des  citoyens  de  Paris.  Lii  nouveUn 
municipalité  choisit  bientôt  dans 
son  sein  une  commission  compo- 
sée de  démagogues  des  plus  vio- 
lens,  et  à  laquelle  elle  donna  ht 
nom  (.'q  Comité  de  salut-public. 
Panis  en  fut  nommé  membre,  el 
signa  en  cette  qualité,  avec  Marat, 
Jourdhcuil,  Duplain,  Sergent,  et 
quelques  autres,  l|épou vantabir: 
circulaire  envoyée  dans  tous  les 
déparlemens,  pour  rendre  comp- 
te des  massacres  des  2  et  5 
septembre,  et  pour  engager  le- 
autres  communes  de  la  France  a 
imiter  l'exemple  donne  par  celle 
de  Paris.  Il  y  est   dit  :  «  que  de? 


"Conspirateurs  féroces,  détenus 
))(]ans  les  prisons,  ont  été  mis  à 
»  mort  par  le  peuple;  que  cet  acte 
"de  justice  avait  été  jugé  nécessaire 
«pour  retenir  par  la  terreur  ces 
siégions  de  traîtres  cachés  dans 
))les  murs  de  Paris»  au  moment 
»où  le  peuple  allait  marcher  à 
«l'ennemi;  et  sans  doute  la  nation 
«entière  s'empressera  d'employer 
»cc  moyen  si  nécessaire  de  salul- 
)) public,  et  sans  doute  tous  les 
«Français  s'écrieront  comme  les 
«Parisiens  :  Marchons  à  l'enne- 
nmi,  mais  ne  laissons  pas  derrière 
«nous  ces  brigands,  pour  égorger 
«nos  enfans  et  nos  femmes....  » 
Au  lieu  de  l'effet  que  les  signatai- 
res de  l'adresse  s'étaient  promis, un 
cri  presque  général  d'indignation 
et  d'horreur,  s'éleva  dans  la  Fran- 
ce entière  et  au  «ein  de  la  conven- 
tion même,  contre  les  provoca- 
teurs de  cttte  Saint-Barthélemi 
politique.  Panis  eût  bientôt  voulu 
laver  de  son  sang,  le  nom  qu'il 
avait  apposé  à  cette  exécrable 
circulaire,  mais  l'empreinte  en 
est  restée ineJTaçable,  et  au  moins 
les  crimes  politiques  de  septembre 
1792,  n'ont-ils|>oint  trouvé  d'apo- 
logistes parmi  les  historiens,  com- 
me en  ont  eu  les  crimes  religieux 
du  mois  d'août  1572.  La  terreur  qui 
s'était  emparée  d'une  foule  de  ci- 
toyens hormêtes  de  la  capitale,  et 
qui  laissa  le  champ  libre  à  quelques 
démagogues  forcenés  ,  contribua 
puissamment  ù  l'élection  de  Pani.-», 
qui  fut  nonmié  député  A  la  con- 
vention. Il  se  fit  peu  reniarquer 
à  la  tribune,  et  ne  jtrit  guère  lu 
parole  que  pour  repousser  les  vi- 
ves sorties  de  quelques-uns  de  ses 
collègues,  et  particulièrement  des 
membres  de  la  députatiou   de   la 


PA\ 

Gironde,  qui  ne  cessaient  d'atta- 
quer les  égorgeur»- de  septembre 
et  de  demander  leur  mise  en  juge- 
ment. Dans  le  procès  du  roi,  Panis 
vota  pour  la  mort,  contre  l'appel 
au  peuple  et  contre  le  sursis.  II  de- 
vint ensuite  ,  pendant  quelque 
temps,  membre  du  comité  de  sûre- 
té générale, et  parut  dévoué  à  la  fac- 
tion de  Robespierre,  jusqii'à  l'épo- 
que où  ce  derniei  fit  condamner 
à  mort  Danton.  Panis  se  rangea 
dès-lors  parmi  les  adversaires  de 
celui  qui  menaçait  de  décimer  la 
convention,  et  prit  une  part  active 
aux  événemens  du  9  et  10  thermi- 
dor an  2  (37  et  28  juillet  i794)- 
Dès  le  8,  il  avait  courageusement 
interpelé  Piobespierre  ,  encore 
tout-pui.-sanl,  le  sommant  de  dé- 
clarer s'il  l'avait  aussi  porté  sur 
la  liste  des  proscrits.  Dans  la 
journée  du  1"  prairial  an  5  (20  mai 
179.5),  ii  tenta  de  défendre  les 
chefs  de.)  insiu'gôs,  dont  la  con- 
vention venait  d'ordonner  la  mise 
en  accMJsalion  ;  mais  il  ne  put 
parvenir  à  se  faire  écouler,  et  l<i 
7  prairial  suivant  (27  mai),  ayant 
encore  voulu  parler  pour  la  dé- 
fense de  son  ami,  le  député  Lai- 
gnelot,  Panis  fut  lui-même  décré- 
té d'arrestation.  On  lui  reprocha 
son  adhésion  aux  massacres  de 
septembre  ;  il  protesta  vainement 
de  la  pureté  de  ses  intentions, 
vanta  son  humanité  et  ses  vertus, 
invoqua  Dieu,  et  p;nla  quel- 
que teujps  comme  un  homme 
en  délire.  Un  de  ses  collègues, 
Auguis,  dont  il  implora  le  témoi- 
gnage, et  qu'il  appela  son  ami, 
s'écria  :«  Point  d'amitié  avec  lu 
«colporteur  d«?  la  mort.  «Arrê- 
té à  la  sortie  de  la  séance,  Panis 
ne  lecouvra    »a   lii)Ci'lé    qu'api è-r 


Il 


PAN 

l'aministietlu  :\  brumaire  an  4  {'^^ 
octobre  1795).  Il  a  été  employé 
depuis  dans  l'administiatiou  des 
hospices  de  Pari.'î.  Il  était  resté 
pauvre  au  milieu  des  troubles  et  des 
spoliations  de  celte  époque,  et  on 
ne  l'a,  du  moins,  jamais  accusé 
de  s'être  approprié  les  dépouilles 
des  proscrits.  Il  a  même  rendu 
quelques  services  individuels,  et 
n'était  point  inexorable  envers  les 
infort  unes  qui  s'adressaient  directe- 
n)ent  à  lui.  On  l'a  souvent  enten- 
du déplorer  le  malheur  descircons- 
tances où  il  s'était  trouvé,  et  sur- 
toul(quoiquecene  fût  pas  là  le  mot 
propre)  le  malheur  de  s'être  laissé 
entraînera  jouer  un  rôle  en  1792. 
«.Je  n'ai  été,  s'écriail-il,  qu'un  ci- 
ntron  dont  on  a  exprimé  le  jus,  et 
«qu'ensuite  on  a  rejeté; cependant 
«j'ai  fait  quelque  bien  et  empêché 
•  beaucoup  de  mal.  «Cette  faible 
compensation  ne  sera  point  admi- 
se par  l'inflexible  postérité,  et  les 
saiin;lantespagesdenos  annales  qui 
retracent  les  forfaits  de  septembre, 
n''cn  peuvent  être  arrachées.  Panis 
s'est  depuis  lonf;-temps  retiré  de 
la  scène  politique,  où  il  n'aurait 
jamais  dû  paraître.  Une  biographie 
étrangère  l'attache  à  toutes  les  po- 
lice* secrètes  qui  se  sont  succé- 
dé sous  les  divers  gouvernemens 
de  la  France  jusqu'en  1816,  et  le 
fait  encore  exister  dans  ce  paya 
avec  une  l'ai!)le  pension  :  ces  faits 
ne  sont  nullement  prouvés.  Il  est 
plus  probable,  ain!<i  que  l'ont  an- 
noncé quelques  fi;uilles  publiques, 
(ju'il  est  sorti  de  France  en  1816, 
et  qu'il  s'est  élal)li  en  Italie. 
PANNKTIER  DK  VALDOTTE 

(l.E  COMTE  CLAt'HE-i>lARIU-J0SEPH), 

Miaréchal-de-camp ,    né    dans    le 
Dugey,  embrassa  l'état  militaire, 


PAN  5 

et  obtint  pendant  les  campagnes 
de  la  révolution,  un  avancement 
rapide.  Le  29  août  i8o3,iI  fut  éle- 
vé au  grade  de  général  de  brigade, 
et  nommé,  le  14  mars  1806,  prési- 
dent du  collège  électoral  de  l'Ain. 
Employé  en  1811  à  l'armée  d'Es- 
pagne, il  prit  d'assaut  Porlada,  se 
dii^tingua  l'année  suivante  au  siè- 
ge de  Valence,  et  contribua,  en 
18  »3,  à  faire  lever  le  siège  de  ïar- 
ragone.  Après  l'évacuation  de  la 
péninsule,  il  rentra  en  France, 
où  il  combattit  avec  gloire  sous  le 
maréchal  Augereau.  Dans  la  cam- 
pagne de  1814,  le  général  Pennc- 
tier  de  Valdotle  déploya  de  grands 
lalensetune  rare  intrépidité.  Le  19 
février,  il  entra  i\  Mâcon,  après  a- 
voir  repoussé  l'armée  ennemie,  se 
porta  sur  Chûlons, puis  sur  Lons-le- 
Saulnier,  chassant  toujours  devant 
lui  les  troupes  alliées.  Au  retour 
des  Bourbons,  il  fut  décoré  de  la 
croix  de  Saint  Louis.  Il  comman- 
dait un  corps  à  Waterloo,  et  ne  fit 
sa  retraite  qu'au  commencement 
de  juillet,  au  moment  où  il  allait 
être  enveloppé  par  l'ennemi.  De- 
puis le  licenciement  de  l'armée 
française  en  181 5,  le  général 
Pannetier  de  Valdotte  est  à  la  de- 
mi-solde. 

PANZER  (George-Wolfgand- 
François),  naquit, '\Sulzbach,d^ns 
le  Haut-Palalinat,le  16  mai  1729, 
et  fit  ses  études  à  l'université  d'Alt- 
dorf;  de  retour  dans  sa  patrie,  il 
exerça  le  ministère  évangélique  , 
et  se  livra  à  la  littérature.  Nom- 
mé, en  1751,  ministre  à  EyeUvang, 
et,  en  1773,  pasieur  de  la  paroisse 
de  Saint-Sébald  à  Nuremberg,  il 
lit  tous  ses  efforts  pour  supprimer 
les  pratiques  religieuses  qui  lui 
semblaient  des  restes  de  catholi- 


/f  TAN 

rismc,  et  inlioduisit  dans  sa  pa- 
roisse l'usage  de  la  confession  pu- 
blique. On  lui  doit  une  Descrip- 
tion des  plus  anciennes  bibles  alle- 
mandes ,  une  Histoire  des  bibles 
imprimées  à  ISuremba'g  depuis 
l'invention  de  l'imprimerie,  une 
Histoire  de  t' imprimerie  dans  les 
premiers  temps  à  Nio'etnberg  jus- 
qu'en i5oo,  et  des  Annales  de 
l'ancienne  littérature  allemande  ', 
ou  Annonces  et  Description  des  li- 
vres allemands  ,  imprimes  depuis 
l'invention  de  l'imprimerie  jus- 
qu'en i5'iO.  Mais  le  plus  impor- 
tant de  ses  ouvrages,  sans  contre- 
dit, est  celui  qui  porte  [)Our  titre  : 
Annales  typoi^rapliici  ab  artis  in- 
tentes origine  ad  annuîn  M.  D.  post 
Maittairii ,  Dentsii  ,  aliorunu/ue 
doctissimorum  virorum  curis  in  or- 
dinem  redacti ,  emcndati  et  aucti , 
Nureinbeig,  i^go-iSoS,  li  vo- 
lumes in-4°.  Panzer  mourut  le  9 
juillet  i8o5,  d'une  attaque  réilé- 
4-ée  d'apoplexie. 

PAOLl  (Fasca-l),  célèbre  géné- 
ral corse,  naquit  à  Voisinu  en 
Corse,  et  fut  élevé  au  collège  mi- 
litaire de  ISapIes,  où  il  fît  de  rapi- 
des progiès  dans  les  sciences. 
Au  sortir  de  ses  études  ,  il  fut 
nomn)é  lieutenant  dans  un  régi- 
ment dont  son  père  était  colo- 
nel. Ce  dernier,  l'un  des  plus 
habiles  guerriers  d»  la  Corse,  0- 
bligé  de  quitter  son  pays,  se  réfu- 
gia à  Naples,  pour  éviter  les  per- 
sécutions du  gouvernement  gé- 
nois. Paoli  avait  un  frère  nommé 
Clément,  qui,  brave  comme  lui, 
battit  souvent  les  mercenaires  de 
Gênes.  En  i^55,  Paoli  le  père,  re- 
tiré à  Naples,  envoya  son  fils  Pas- 
cal Cil  Corse,  où  il  fut  aussitôt 
reconnu  pour  conimanuant-géné- 


rai,  quoiqu'il  n'eût  que  20  ari.«. 
Sans  troupes  réglées,  sans  armes, 
sans  munitions,  sans  vivres,  sans 
argent,  sans  procteclions,  il  par- 
vint à  soutenir  la  guerre   contre 
une  partie  de  ses  compatriotes  at- 
tachés au  parti  génois,  et  contre 
le  gouvernement    de    Gênes   lui- 
même.  Pour  surmonter  de  pareils 
obstacles,  il  fallait  réunir  au  gé- 
nie de  rhonnne  d'état  le  courage 
du  héros;  aussi,  Frédéric-le-Grand 
l'appeiail-il    le  premier  capitaine 
de  l  Europe.  Ce  général,  qui  n'a- 
vait jiour  soldat  que  des  citoyens, 
sulcxalterde  plus  en  plus  l'amour 
de  la  liberté  dont  ils  étaient   en- 
flammés. Etant  parvenu  ù  apaiser 
les   guerres  civiles,  à   rétablir  lo 
calme  et  le  bon  ordre  dans  l'inté- 
rieur de  l'ilc,  il  s'occupa  à  com- 
battre les  Génois,   les  chassa  de 
position  en  poiiliou,  et  les  força 
à  se  concentrer  dans  les  principu- 
les    villes  maritimes  de  la  Corse. 
En  ij:G3il  fil  une  expédition  con- 
tre l'île  de  Caprara,  alors  occupée 
pur  une  forte  garnison  génoise  : 
600  braves  vidontaires  corses  s'em- 
parèrent de  cette  île   escarpée  et 
défendue  par  un  fort  qui  tlomiuo 
le    pays    et   la    mer.    Toutes    les 
trou[>es  génoises  et  leurs   forces 
maritimes  tentèrent  en  vain  d^  la 
reprendre.    Paoii   avait  commen- 
cé à  former  une  marine,  qui  de- 
vint l'eÛroi  du  commerce  de  Gê- 
nes; le  pavillon  corse,  ù  la  lêle  de 
Maure,   fut   reconnu   et  res[>ecté 
parles  puissances  voisines,  llavait 
une  correspondance  suivie   avec 
les  cours  de  l'Europe;  enfin,  sans 
aucun  appui  étranger,    il    battit 
partQullesGénois,  qui  furent  obli- 
gés d'avoir  recours  à  la  France. 
En   176^1,  elle  envoya  en  Corst- 


cytftT  c  a  l  ua  ou/ 


l'AO 

C,ooo  hommes  de  troupes  auxi- 
liaires, ce  qui  n'empêcha  pas  les 
Génois  d'êlre  forct'S,  en  1768, 
d'abandonner  la  Corse,  de  renon- 
cera leur  domination  lyranniquc, 
et  de  céder  cette  île  à  la  Franco. 
La  Corse  ne  refusait  pas  de  luire 
partie  intégrante  du  territoire  fran- 
çais, mais  elle  ne  voulait  pas  être 
vendue  par  le  gouvernement  de 
Gênes,  à  qui  elle  ne  reconnaissait 
pas  ce  droit.  La  nation  cor!?e  , 
par  l'organe  de  son  chef,  fit  à  cet 
égard  de  justes  représentations  à 
lu  cour  de  Versailles  ;  mais  elles 
furent  rejetées,  et  en  1768,  la 
cour  envoya  20,000  hommes  de 
troupes  réglées  pour  conquérir 
celte  île.  Les  Corses,  convaincus 
que  les  Français  combattaient 
pour  les  Génois,  se  levèrent  eo 
masse,  prirent  les  armes ,  et  se 
haltircnt  valeureusement  pour  la 
f|[loire  et  la  liberté  de  leur  patrie. 
Le  succès  couronna  leur  cons- 
tance, et  l'honneur  delà  France  se 
trouvant  compromis;  le  roi  fit  pas- 
ser aussitôt  de  nouvelb.s  troupes, 
des  armes,  des  vivres,  des  muni- 
lions,  et  surtout  de  l'argent,  ainsi 
que  des  brevets  destinés  à  gagner 
des  officiers  parmi  1-es  insulaires. 
En  effet,  ce  furent  des  bataillons 
formés  des  mécontens  corses,  qui 
servirent  d'avant-garde  à  l'armée 
française ,  et  celle  politique,  en- 
core plus  que  la  force,  eut  le  suc- 
cès que  la  cour  de  France  en  at- 
tendait. Cependant  les  Corses, 
sOus  la  conduite  de  Paoli,  se  bat- 
taient en  désespérés;  la  France, 
maîtresse  des  villes  maritimes , 
n'eut  à  conquérir  que  l'intérieur 
de  l'île,  et  le  général  Paoli,  grand 
dans  sa  défaite,  eut  la  gloire  de 
lutter  pendant  deux  ans  seul  et 


l'AO  5 

.vans  autre  appui  que  ses  conci- 
toyens contre  les  premières  puis- 
sances de  l'Europe.  Trahi  par  la 
fortune ,  il  se  réfugia  à  Londres. 
Un  millier  de  braves  patriotes 
quittèrent  avec  lui  la  Corse  et  se 
réfugièrent  en  Toscane.  Paoli  par- 
tagea tout  ce  qu'il  possédait  avec 
ses  compagnons  d'infortune ,  et 
continua  à  vivre  dans  la  retrai- 
te, malgré  les  offres  brillantes 
que  lui  fit  la  cour  de  Versailles, 
pour  l'engager  à  retourner  en 
Corse.  Rappelé  dans  sa  patrie 
par  im  décret  de  l'assemblée 
constituante  du  5o  novembre 
i^Sp  ,  il  y  rentra  couînie  simple 
citoyen;  mais  avec  ce  titre,  le 
seul  qu'il  ambilionnût ,  il  n'en 
fut  pas  moins  reçu  comme  un 
souverain.  Bientôt  son  inlluenco 
fit  ombrage  ;'i  la  convention  na- 
lion;i!e  :  le  2  avril  1795,  il  fut 
décrété  d'accusation;  le  5  juin 
suivant,  ce  décret  fut  suspendu; 
niai*,  le  lyjuillet,  un  autre  décret 
le  déclara  traître  à  la  république, 
et  le  mit  en  même  temps  hors  Li 
loi.  De  semblables  décrets  que 
nous  nous  abstiendrons  de  juger 
ne  peuvent  néanmoins  ni  ternir 
ni  diminuer  la  réputation  de  Pao- 
li :  si  pendant  le  lègne  de  la  ter- 
reur on  a  cherché  à  sacrifier  cet 
homme  célèbre,  ses  compatriotes 
se  sont  toujours  mis  on  avant  pour 
lui  servir  d'égide  et  lui  faire  un 
rempart  de  leurs  corps.  Les  Cor- 
ses n'ont  jamais  oublié  et  n'ou- 
blieront jamais  les  services  qu'il 
leur  a  rendus;  jamais  son  génie, 
ses  talons  militaires,  sa  conduite 
républicaine,  son  zèle,  son  amour 
pour  la  liberté  et  le  bien  de  sou 
pays  ,  ne  s'effaceront  de  leurs 
CTOurs.    Paoli   gouverna  la  Covsw 


G  Î'AO 

pendant  plus  de  quînre  ans  a- 
vec  gloire,  tant  comme  militaire 
cpie  comme  homme  d'état.  Il  é- 
lait  plus  législateur  encore  que 
guerrier,  a  dit  Voltaire;  son  cou- 
rage était  dans  l'esprit.  Quelque 
chose  qu'on  ait  dit  de  lui,  il  n'est 
pas  possible  que  ce  chef  n'tfit  de 
grandes  qualités:  établir  un  gou- 
vernement régulier  chez  un  peu- 
ple qui  n'en  voulait  pas.  réuuir 
sous  les  mêmes  lois  des  hommes 
divisés  et  indisciplinés,  former  ù 
la  fois  des  troupes  réglées,  et  ins- 
tituer une  espèce  d'université  (]ui 
pouvait  adoucir  les  moeurs;  établir 
des  tribunaux  de  justice,  mettre  un 
IVein  à  la  fureur  des  assassinats  et 
des  meurtres,  policer  la  barbarie, 
se  faiie  aimer  en  se  faisant  obéir, 
tout  cela  n'était  pas  d'un  homme 
ordinaire.  Il  ne  put  en  faire  assez, 
ni  po'-ir  rendre  la  Corse  indépen- 
dante,niponrrégner  pleinemer.t  : 
mais  il  eu  fit  assez  pour  acquérir 
de  1 1  gloire.  L'Europe  le  regarda 
comme  le  législateur  et  le  protec- 
teur de  sa  patrie.  Il  ujourut  à  Lon- 
dres le  5  février  1807. 

PAOLI  (  N.  )  ,  professeur  de 
mathématiques  à  Pise ,  a  cultivé 
cette  science  avec  beaucoup  de 
léle  et  de  succès.  On  lui  doit  des 
Elèrnens  d' algèbre  en  4  volumes  : 
les  deux  premiers  ont  paru  en 
i;:95,  et  les  deux  autres  en  1804. 
La  classe  des  sciences  mathémati- 
ques de  l'institut  de  France  en  a 
rendu  le  compte  le  plus  avanta- 
geux dans  le  passage  suivant  d'un 
de  ses  rapports  :  «  Le  degré  de 
«perfection  qui  manque  au  traité 
«de  Cousin  ,  sur  la  Tliéorie  tien 
r<  limites,  se  trouve  dans  le  second 
n  volume  des  Elémevs  cC algèbre, 
ï- publiés  par  RL  Paoli*  Cet  excel- 


PAP 

«lent  abrégé  de  calcul  différentiel 
»et  intégral  présente,  dans  un  or- 
))dre  bien  méthodique ,  très-sou- 
>'vent  la  substance,  et  presque 
>;  toujours  l'indic-'ition  des  métho- 
»des  les  plus  récentes;  et  le  troi- 
nsième  volume  se  recommande 
«encore,  par  les  recherches  parti- 
«culières  de  l'auteur,  sur  divers 
«points  importans  d'analyse  trans- 
«cendante.  » 

PAPILLON  DE  LA  FERTÉ 
(D.  P.  .T.),  intendant  des  Menus- 
Plaisirs  du  roi  à  l'époque  de  la  ré- 
volution, occupait  cette  place  de- 
puis un  grand  nombre  d'années. 
Le  nouvel  ordre  de  choses  la  lui 
fit  perdre  :  il  perdit  même,  par 
suite  des  événemcns,  sa  fortune 
et  sa  liberté.  Arrêté  comme  sus- 
pect, et  détenu  au  Luxembourg, 
il  s'y  trouvait  encore  lorsque  les 
agtns  du  comité  de  salut-public 
prétendirent  qu'une  conspiration 
qui  avait  des  ramifications  dans 
toutes  les  prisons  de  la  capitale  é- 
taitau  moment  d'éclater.  Compris 
dans  celte  accusation,  qui  pesait 
sur  presque  tous  les  détenus,  M. 
Papillon  de  La  Ferté  fut  traduit  au 
tribunal  révolutionnaire,  qui  le 
condamna  à  mort  le  20  messidor 
an  2  (8  juillet  1794).  Le  fils  de  M. 
Papillon  de  La  Ferté,  qui  servait 
alors  dans  un  régiment  de  hus- 
sards à  l'armée  que  commandait 
Pichegru,  en  apprenant  cette  fu- 
neste nouvelle,  quitta  son  régi- 
ment, et  passa  en  pays  étranger. 
il  rentra  en  France  sous  le  gou- 
vernement impérial;  mais  il  pa- 
raît qu'il  n'y  occupa  aucun  emploi. 
Après  la  re.>^tauratîon  en  iSi4'  d 
obtint  la  place  d'intendant  des  Me- 
nus-Plaisirs du  roi.  Cette  adminis- 
tration ayant  été  supprimée  ,  et 


PAT 

Jépuis  remplacée  par  celle  de  la 
dircclion  des  fctes  et  sperfacles  de 
la  cour,  M.  Papillon  de  La  Ferlé 
est  aujourd'hui  directeur  de  cette 
dernière;  il  est  baron  et  olïicier  de 
l'ordre  royal  de  la  légiou-d'hon- 
neur. 

PAPIN  (Élie),  maréchal-de- 
camp,  cpiilla,  en  1790,  la  profes- 
sion de  négociant ,  qu'il  exerçait 
à  Bordeaux,  et  prit  du  service  à 
l'armée  des  PjTénées-Orientales, 
où  il  parvint  rapidement  au  grade 
de  général  de  brigade.  Tout-à- 
coup  il  cessa  de  servir  la  républi- 
que et  revint  à  Bordeaux  ,  au  il 
s'attacha  à  l'Inslitut-royaliste,  qui 
lui  donna  le  titre  de  commandant 
de  cette  ville.  Cette  association 
ayant  été  bientôt  dissoute  par  l'ar- 
restation des  chefs,  le  général  Pa- 
pin  essaya  de  la  réorganiser  en 
1801.  Ses  démarches  éveillèrent 
rattcnliou  du  gouvernement,  et  il 
l'ut  recherché  et  poursuivi.  Une 
eon)mission  militaire  le  condamna 
à  mort  par  contumace  le  aS  fri- 
maire an  i4  (i8u()),  comme  cons- 
pirateur et  complice  de  l'Angle- 
terre. Il  alla  se  fixer  en  Amérique, 
et  s'y  livra  à  des  spéculations 
commerciales.  Il  y  amassa  une 
l'ortune  assez  considérable ,  que 
par  suite  du  rétablissement  du 
gouvernement  royal  en  1814  «1 
rapportait  en  France  ;  mais  son 
vaisseau  fut  submergé  ,  et  il  fut 
grièvement  blessé  en  se  sauvant 
à  la  nage.  Son  premier  soin ,  en 
rentrant  dans  sa  patrie  ,  fut  de 
faire  annuler  (1817)  par  le  a"'  con- 
seil de  guerre  de  la  1"  division 
militaire,  le  jugement  qui  l'avait 
condamné  et  privé  de  la  jouissan- 
ce de  ses  droits  civils. 

PAPLN  (N.), curé  de  Marly-l^i- 


PAP 

ville,  fut  nommé  député  du  cler- 
gé de  la  prévôté  et  vicomte  de  Pa- 
ris aux  états-généraux  en  1789  ;  ii 
s'y  prononça  avec  chaleur  pour  les 
idées  nouvelles,  il  prêta  le  ser- 
ment civique  et  religieux,  et  fit  dé- 
créter, après  une  sortie  énergique 
contre  le  préjugé  qui  faisait  atta- 
cher l'infamie  à  la  famille  des  con- 
damnés, «que  les  fautes  sont  per- 
sonnelles, et  que  la  honte  du  cri- 
me ne  peut  rejaillir  sur  l'innocent, 
quel  que  soit  le  lien  qui  l'unisse 
au  coupable.  0  Ces  principes  a- 
v-aient  été  développés,  en  1733, 
avec  une  grande  lorce  de  raison- 
nement et  une  hiule  éloquence, 
dans  l'excellent  discours  de  M.  La- 
crclelle  aîné,  sur  le  préjuge  des  pei- 
nes Infamantes.  Après  la  session  de 
l'assemblée  constituante,  M.  P.t- 
pin  a  repris  l'exercice  de  son  mi- 
nistère. 

PAPIN  (le  comte  Jeiu-Baptis- 
te),  président  du  canton  d'Aire 
pendant  la  révolution,  fut  élu  en 
mai  1797  député  du  département 
des  Landes  au  conseil  de>  anciens. 
Il  se  montra  partisan  de  la  révolu- 
tion du  18  brumaire  an  8  (9  no- 
vembre »799)j  et  passa  la  même 
année  au  corps-législatif.  L'empe- 
reur l'appela  au  sénat-conservu- 
teur  le  1"  février  i8o5.  Le  comte 
Papin  mourut  quelques  années 
après. 

PAPION  (N.),  directeur  et  pro- 
priétaire de  l'ancienne  fabrique  des 
damas  et  lampas  de  Tours,  n'est 
pas  moins  distingué  par  ses  con- 
naissances variées  que  par  ses  vues 
patriotiques.  Il  a  publié  sur  l'éco- 
nomie politique  des  ouvrages  qui 
ont  été  favorablement  accueillis. 
Ce  sont  :  1°  Solution  des  trois  fa- 
meux problèmes  de  géométrie,  178/1, 


8 


r.vp 


ir»-8"  avec  fig.,  la  quadrature  du 
oerole,  la  Iriseclion  de  l'angle  et 
la  duplication  du  cube;  a"  Considé- 
rations sur  les  établissemcns  néces- 
saires à  la  prospérité  de  l'agricul- 
ture, du  commerce  et  des  fabriques, 
i8o5,  iii-8°;  7>°  Réflexions  sur  le 
crédit  public,  i8n6,  in-S";  4°  ^l^- 
tiioire  sur  ta  culture  des  mûriers, 
i8ib,  in-S";  5"  Mémoire  sur  l'ad- 
ministration générale  du  commerce, 
présenté  au  roi,  i8i5,  in-8";  G" 
Opinion  d'un  Français  sur  tes  fi- 
nances et  la  contribution  de  guerre. 
Tours,  i8i5,  in-8";  7°  Opinion  sur 
la  dette  des  puissances  du  continent, 
les  dangers  et  les  ressources  pour 
leur  liquidation,  que  rendra  stable 
la  paix  générale  de  l' Europe,  1818, 
iii-8°. 

PAPON  Cl' ABBÉ  Jeau-Piebre), 
historien,  naquit  au  Pujel  de  Kci- 
ney,  près  de  Nice,  département 
des  Alpes  -  Maritimes  ,  vers  ijSO. 
Admis  jeune  encore  chez  les  PP. 
do  rOraloire,  où  il  professa  avec 
distinction  pendant  plusieurs  an- 
nées ,  il  se  fit  aimer  de  sa  congré- 
gation ,  qui  le  chargea  de  plusieurs 
missions  dont  il  s'acquitta  avec  ta- 
lent. Pour  se  consacrer  plus  libre- 
ment à  la  littérature,  il  quitta,  du 
consentement  de  ses  chels  .  la  con- 
grégation, et  devint  garde  de  la  bi- 
bliothèque de  Marseille;  l'abbé 
Papou  publia  une  Histoire  géné- 
rale de  Provence,  dont  le  second 
volume  fut  dédié  au  comte  de  Pro- 
vence (  aujourd'hui  Louis  XVIII). 
Les  états  de  cette  province  récom- 
pensèrent le  zèle  de  l'auteur  et  le 
mérite  de  l'ouvrage,  par  une  pen- 
sion de  8000  francs,  et  le  gouver- 
neur, le  maréchal  de  Bauveau  , 
augmenta  ce  revenu  de  la  valeur 
de  son  traitement  de  gouverneur. 


PAP 

L'abbé  Papon  s'était  fixé  à  Par!'* , 
où   il  resta  jusqu'après  les  mas- 
sacres de  septembre;  il  se  retira  , 
à  cette  époque,  dans  le  départe- 
ment du  Puy-de-Dôme.  Il  revint, 
en  1797.  dans  la  capitale,  et  n'eu 
sortit  plus  :  il  y  niourut  d'une  at- 
taque d'apoplexie,    le  i5  janvier 
181 5.   On   doit  à   l'abbé  Papon  : 
1°  Ode  sur  la  mo7't,  imprimétî  dans 
lu  recueil  de  l'aeadéinie  des  jeux 
floraux  ;   2"  l'Jrt  du  pointe  et  de 
l'orateur,  plusieurs  fois  imprimé  : 
la  première  édition   parut  à  Lyon 
en  1 7t)6  ;    5  '   Oraison  funèbre  de 
Charles   Emmanuel   III ,    roi    de 
Sardaigne ,  Turin,   1773»  impri- 
mée en    fr.mçais  et  v.n  italien;  4* 
Voyage  littéraire  de  Prot^etwe  ,  Pa- 
ris ,  1787,  2  vol.  in  - 12  :  cet  ou- 
vrable .  écrit  avec  talent ,  est  plein 
d'érudition  ;    5°  Histoire  générale 
de  Provence ,  4  ^^^'  '"-4"?  ouvrage 
curieux  ,  mais  «  où  ,  disent  les  con- 
tinuateurs  de  l'abbé   Feller,    on 
aurait   désiré  que   plusieurs    faits 
eussent    été  présentés   avec   plus 
d'étefldue.  La  notice  des  hommes 
célèbres  de  Provence  est  excessi- 
vement courte  ;  l'article  A' Agri- 
cola,  par  exemple  ,ne  contient  que 
six  lignes,    et  l'on   s'étonne  que 
dans  cet  le  notice  l'abbé  Papon  ait. 
oublié  son  confrère  l'illustre  Mas- 
sillon.  La  relation  do  la  peste  de 
Marseille  et  celle  du  siège  de  Tou- 
lon ,   faites   sur  les  mémoires  du 
maréchal  de  Tessé  ,  ne  manquent 
pas  de  mérite.  La  partie  des   mon- 
naies anciennes,  et  leur  compa- 
raison avec  les  nouvelles,  fournie 
par  le  président  de  Saint- Vincent, 
ne  laisse  rien  à  désirer  ;  on  y  trou- 
ve aussi  des  détails  très- uliles  et 
trè;-éteiidus  surl'histoire  naturelle- 
de  Provence.  Quelques  gravures 


vw 

(1(;  s<'s  beaux  monuinens  antiques 
n'auraient  pas  nui  au  succès  de 
Pou  vragc.  On  ne  saurait  assez  louer 
IczMect  l'acliviiéde  l'auteur  pour 
le  rendre  le  plus  parfait  possil.ie  , 
au  moins  eu  ce  qui  regarde  riii:>- 
torique  des  laits  :  aûu  de  se  pro- 
curer des  rcnseig^neinens  anlogrn- 
plies.  il  fit  le  voyage  de  Naples, 
royatuiie  que  les  comte?  de  Pro- 
vence avaient  long  -  temps  possé- 
dé. »  6"  Histoire  du  gouvernement 
français  depuis  rassemblée  des  no- 
tables ,  duii  février  i'^?>y,  jusqu'à 
la  fin  de  la  même  année,  Londres  et 
Paris,  1788,  iu-8°.  On  peut  join- 
dre à  cet  ouvrage  un  discours  que 
l'abbé  Papon  fit  paraître  dans  la 
même  année  sous  le  voile  de  l'ano- 
nyme; il  a  pour  titre  :  De  l'action 
de  l'opinion  sur  les  gouvernemens. 
r"  Époques  mémorables  de  ta  peste 
et  moyen  de  se  préserver  de  ce  fléau  , 
Paris,  1800. Cet  ouvrage, qui  com- 
prend les  époques  depuis  la  peste 
qui  ravagea  Athènes  au  temps  de 
Péric'ès et  d'Hippocrate, jusqu'à  la 
peste  de  Marseille,  a  été  fait  un 
peu  précipitamment  ;  mais  il  eut 
le  motif  le  plus  honorable.  Ce  fut 
l'expédition  d'Egypte  qui  y  donna 
lieu.  J/auleur  craignait  «  que  nos 
communications,  devenues  assez 
lréqu('i»le?  avec  une  contrée  où 
cet  le  maladie  est  endémique,  n'eus- 
sent des  suites  funestes  pour  la 
France  et  même  pour  l'Europe.  » 
8"  Histoire  de  la  révolution  de 
France^  Paris  ,  181  5,  (i  vol.  in-8"; 
elle  comprend  une  période  de  10 
-années  (  de  1 789  à  1 799  ).  Cet  ou- 
Trage  est  peu  digne  du  talent  <ie 
l'auteur,  qui  d'ailleurs  n'eut  pas  le 
temps  d'y  melire  la  dernière  main. 
PAPORET  (AsToiNE-PiriiRF.), 
juge  à  Saiul-Qucntin  ,  est  né  dans 


rAR 


«> 


cetic  ville  le  5  mars  ijôS-.  Après 
y  avoir  commencé  des  études,  qu'il 
vint  ensuite  terminera  Paris,  il  fut 
nommé  conseillera  la  cour  des  ai- 
des, place  qu'il  occupait  encore  en 
1789.  Il  retourna  à  cette  époque 
dans  sa  province,  et  dans  les  années 
1792  et  suivantes,  exerça  les  fonc- 
tions de  maire  et  d'agent  munici- 
pal de  sa  commune.  Après  le  18 
brumaire,  il  fut  réélu  maire,  et 
nommé  en  même  temps  membre 
du  conseil-général  d'arrondisse- 
ment de  Saint-Quentin.  Le  dépar- 
tcnient  de  l'Aisne  le  porta,  en 
i8o5  et  i8of>,  comme  candidat 
au  corps-législatif;  mais  il  n'y  fut 
point  appelé.  Au  second  retour 
des  Bourbons,  en  i8i5,  il  fit  par- 
tie de  la  chambre  des  députés,  jus- 
qu'à ce  que  l'ordonnance  du  5 
septembre  jSiG  en  eut  prononcé 
la  dissolution;  il  vota  constam- 
ment avec  la  majorité  de  cette 
chambre  dite  introuvab'e.T{ééUi  eu 
i8i6,  il  siégea  au  centre  jusqu'en 
1819,  et  depuis  ne  fit  plus  partie 
de  la  représentation  nationale.  11 
est  toujours  juge  an  tribunal  de  1" 
instance  de  Saint-Quentin. 

PARADIS  (Boniface),  avocat 
avant  la  révolution,  fut  élu,  eu 
1795,  député  du  département  do 
l'Yonne  au  conseil  des  anciens, 
en  devint  secrétaire,  puis  prési- 
dent au  mois  de  septembre  de  1 1 
mC'me  année.  M.  Paradis,  qui  pas- 
sait pour  appartenir  au  parti  cli- 
chien,  s'éleva  vivement,  en  1797, 
contre  la  disposition  de  la  loi  du 
3  brumaire,  qui  excluait  des 
fonctions  publiques  les  paren* 
d'emig:rés,  et  vola  aussi  la  clôture 
de  toutes  les  sociétés  politiques. 
La  lutte  entre  le  directoire  et  la 
majorité  des  conseils  ay  lut  été  d<  - 


1»  PAU 

ci«lée  par  le  18  fructidor  ar»  5, 
M.  Paradis  fut  condamné  à  la  dé- 
portation. Son  épouse  réclama 
en  sa  faveur,  mais  la  mesure  fut 
maintenue.  Toutefois  il  échappa 
à  l'exil  de  Cayenne,  se  rendit  à 
Oleron  eu  janvier  1798,  fut  rap- 
pelé en  1799  par  les  consuls,  et 
devint  ensuite  président  delà  cour 
de  justics  criminelle  de  l'Yonne. 
Membre  de  la  légion-d'honneur, 
il  a  obtenu,  lors  de  la  réorganisa- 
lion  des  tribunaux  en  181  i  ,  une 
}»lace  de  substitut  du  procureur- 
général  à  la  cour  impériale  de 
Paris  ,  mais  on  l'a  remplacé  en 
18 16. 

PARADIS- DE -RAYiMÔISDIS 
(.Jean-Zachakie;  ,  homme  de  let- 
tres ,  naquit  le  C  février  174^ 
à  Bourg  en  Bre.'ise,  où  son  père 
était  pourvu  de  la  charge  de  lieu- 
tenant-général du  bailliage. Jeune 
encore  ,  Paradis  -  de -Rayniondis 
lui  succéda  dans  cet  emploi  ; 
mais  la  faiblesse  de  sa  santé 
ne  lui  permit  pas  de  l'exer- 
cer long-temps  :  il  fut  obligé  de 
s'en  démettre  pour  aller,  d'après 
l'avis  des  médecins,  passer  cha- 
que année  l'hiver  à  Nice.  Il  y  ren- 
contra Thomas,  et  bientôt  l'auji- 
tié  la  plus  tendre  s'établit  entre  ces 
deux  jeunes  gens, que  rapprochait 
le  goût  le  plus  vif  pour  la  littéra- 
ture. Paradis- de -Raymondis  se 
trouvait  encore  dans  cette  ville 
lorsque,  le  28  septembre  1792,  le 
général  Anselme,  qui,  avec  trois 
bataillons  de  ligne,  quelques  vo- 
lontaires et  5oo  chevaux,  avait 
osé  traverser  le  Var,  puur  aller 
attaquer  8,000  hommes  de  trou- 
pes réglées  du  roi  de  Sardaigne, 
et  13. 000  hommes  de  milice,  pa- 
riât devant  ^'ice.   La  ville  est  à 


PAR 

l'instant  évacuée  par  les  trnnpi'â 
piémontaises  ,    les  magistrats  eu 
apportent  les  clefs  au  général  An- 
selme ;  les  forts  de  Montalban  et  do 
Ville-Franche  ouvrent  leurs  portes, 
et  la  France  compte  un  départe- 
ment de  plus.  Paradis-de-Rayinon- 
dis  s'éloigne  alors  et   se  retire  à 
Udine,  dans  le  Frioul,  011  il  s'oc- 
cuj)e  de  faire  valoir  une  très-belle 
maison  de  campagne  que  lui  loue 
le   comte  Fabio  Aquiuo.   Appre- 
nant que   Louis  XVI   allait  ê're 
mis  en  jugement,  il  sollicita,  mais 
en  vain,  l'honneur  de  défendre  cet 
infortuné  monarque;   revenu  en 
Franco  en  1797,  il  resta  pendant 
quelque  temps  à  Paris,  et  profita 
de  son    séjour   momentané   dan.s 
cette  ville  pour  y  faire  imprimer 
un  ouvrage  qui  respire  la  raison 
et  la  philosophie  ;  cet  ouvrage  peu 
connu,  et  qui  mérite  de  l'être,  a 
pour  titre  Des  Prêtres  et  des  cul- 
tes. Paradis-de-Raymondis  se  ren- 
dit ensuite  dans  sa  patrie,  où   il 
possédait    encore    quelques    pro- 
}iriétés  assez  étendues,  et  dès-lors 
il  fit  de  l'agriculture  l'objet  uni- 
que de  ses  études.    Cet  écrivain 
spirituel,  ce  savant  modeste,  mou- 
rut à  Lyon  le  i5  décembre  1800. 
On  a  de  lui, outre  qtielques  opus- 
cules sur  diverses  branches  de  la 
science  agricole,  notamment  sur 
l'amélioration  des  terres  et  la  cul- 
ture des  pommes  de  terre,  un  pe- 
tit traité  de  morale  et  du  bonheur, 
ouvrage  qui  parut  sans  nom  d'au- 
teur, et  dont  la  seconde  édition 
est   de   1795.    Un    des  rédacteurs 
d'une    de   nos  feuilles   publiques 
s'exprime  ainsi  en  rendant  comp- 
te de  ce   traité   :    «Personne  n'a 
vanté  ce  livre  :  mais  son  mérite  a 
percé  comme  l'odeur  de  la  viobl- 


PAR 

te  s'élève  du  seia  de  l'herbe.  La 
renommce  al  teindra  l'auteur  dans 
son  obscurité  et  dans  sa  retraite, 
où  il  mérite  de  trouver  le  bonheur 
dont  il  a  si  bien  enseigné  la  re- 
cherehe.  » 

PARADISI  (le  CvOmte  Jea?*), 
"rand-dinrnitaire  de  la  couronne 
de  fer,  décoré  du  grand-cordon 
de  la  légion-d'honneur,  membre 
de  l'insiiiut  de  Milan,  ex-prési- 
dent du  sénat  du  royaume  d'Ita- 
lie, etc.,  naquit  à  Preggio  de  Mo- 
dène,vers  l'année  1760.  Son  père, 
poète  distingué  de  son  temps,  lui 
laissa  plus  d.;  réputation  que  de 
fortune.  Ami  de  son  pays,  et  par- 
tisan de  la  liberté  que  la  révolu- 
lion  française  promettait  à  tous  les 
peuples,  M.  Paradisi  en  embrassa 
la  cause  avec  ardeur.  Le  général  en 
chef  Uorwiparle.  qui  avait  eu  occa- 
sion de  connaître  et  d'apprécier  ses 
talens,  le  fit  nommer  l'un  des  di- 
recteurs de  la  nouvelle  république 
Cisalpine.  M.  Paradisi  y  déploya 
<les  vertus  qui  devinrent  incom- 
modes à  quelques-uns  de  ses  col- 
lègues. Il  fut  victime  de  leurs  in- 
trigues auprès  du  général  Brune, 
qui,  au  nom  du  directoire  fran- 
çais, lui  iutima,  en  avril  179^, 
l'ordre  de  donner  sa  démission.  M. 
Paradisi  rentra  dans  la  (lasse  des 
simples  citoyens,  et  il  ne  prit  pbis 
aucune  part  aux  affaires  de  la  ré- 
publique. Il  n'en  l'ut  pas  moins 
exposé  aux  |>ersécutions  des  Au- 
trichiens, qui,  de  retour  en  Lom- 
bardie,  le  comprirent  parmi  ceux 
qui  furent  déportés  et  enfermés 
dans  les  fmteresses  de  Caltaro.  II 
se  consola  de  ce  nouveau  mal- 
heur en  se  livrant  entièrement  à 
l'élude  et  à  la  lecture  des  auteurs 
classiques.    La   bataille   de    Ma- 


PAR 


1 1 


i<»tigo  ayant  rétabli  le  pouvoir 
du  général  en  chef  Bonaparte 
en  Italie  ,  le  premier  soin  du 
triomphateur  ftit  de  briser  les  fer^ 
de  tant  d'illustres  victimes  de 
la  liberté.  M.  Paradisi  revint  à 
Milan ,  où  il  fut  accueilli  d'une 
manière  honorable  par  le  gouver- 
nement et  par  le  peuple.  Appelé  à 
faire  partie  du  gouverncnientpro- 
visoire,  il  donna  l'exeinple  de 
1  oubli  du  passé  et  du  pardon  en- 
vers ses  ennemis.  Eu  1801,  il  pa- 
rut aux  comices  de  Lyon  ,  où  il 
se  montra  favorable  aux  vues 
du  premier  consul  ,  se  rappelant 
peut  -  être  le  mauvais  usage 
que  la  multitude  avait  fait  des 
pouvoirs  qu'on  lui  avait  confiés. 
M.  Paradisi  mérita  ainsi  la  faveur 
du  prince  ,  qui  l'en  récompensa 
par  une  confiance  illimitée.  M. 
Paradisi  n'en  abusa  pas  :  ses  en- 
nemis mêmes  rendent  justice  à  sa 
modération  ,  à  son  désintéresse- 
ment, à  ses  vertus  publiques,  qui 
sont  d'autant  plus  précieuses  . 
qu'elles  sont  moins  communes  et 
plus  nécessaires  danss  les  temps 
de  révolution  et  de  trouble.  Le 
comte  Paradisi,  par  reconnaissan- 
ce envers  ses  bienfaiteurs,  insista 
fortement  dans  la  célèbre  séance 
du  17  avril  1814  1  pour  que  le 
sénat  du  royaume  d' Italie  fit  une 
démarche  auprès  des  alliés  ,  et 
parliculièreuient  de  l'Autriche  , 
])0ur  obtenir  que  la  couronne  en 
lût  placée  sur  la  tète  du  prince  Eu- 
gène {voj,  Beauiiarnais).  Mais  la 
majorité  se  déclara  contre  ce  vœu, 
et  il  fut  décidé  qu'on  se  bornerait 
à  demander  la  cessation  des  hosti- 
lités, l'indépendance  du  royaume 
et  l'intégiité  de  son  territoire, 
garantie  aux  termes  du  traité  de 


12  PAR 

Luncville.  Apres  la  chute  de  Na- 
poléon ,  Paradisi  resta  quelque 
leinps  à  Milan,  où  on  le  vil  plu- 
sieurs fois  à  la  tête  de  l'iuslitiU 
dont  il  était  le  président.  Il  rentra 
enfin  dans  ses  foyers  à  lVep;gio , 
où,  privé  de  ses  emplois,  il  vit 
retiré  et  avec  la  plus  sévère  éco- 
nomie. Ses  onvraj;;es  imprimés 
sont  :  1"  Discorso  rec'Uato  nella 
prima  adananza  dell'  instilato  ita- 
liano ,  in-4'';  2°  Ricerche  sulla  vi- 
Itrazione  délie  lamine  elastiche,  Bo- 
logne ,  1806,  in-.'i";  "5"  Ilvitalizio 
commedla.  Milan,  i8a3.  in-8°. 

PARCKVAL-GllANDMAISON 
(Frasçois-Augusïe)  ,  membre  de 
l'institut  et  de  la  légiond'lionneur, 
est  né  à  Paris,  le  7  mai  1759,  d'une 
famille  de  la  haute  finance;  il  cul- 
tiva d'abord  la  peinture,  où  il  eut 
pour  maître  Suvée;  après  quel- 
ques essais  infructueux  où  il  ac 
quit  la  preuve  qu'il  ne  se   ferait 
jamais    un    noui    dans   l'art    des 
David  et  des  Girodet,  il  se  livra 
sans  réserve  à  la  poésie  sous  I  in- 
lluence  et  l'inspiration  de  l'abbé 
Delille.  M.  Paroeval  conserva  quel- 
ques-uns des  défauts  de  cette éco'e 
brillante,  où  trop  souvent  le  luxe 
des  mots  couvre  la  misère  des  i- 
dées.Il  accompagna  le  général  en 
chef  Ronaparte  en  Egypte  en  179S, 
et  devint  membre  de  l'institut  du 
Caire;  il  fut,  dans  cette  expédi- 
tion, le  jouet  du  sort,  qui  ne  res- 
pecte pas  les  poètes  ;   et  ses  a- 
■ventures  auprès  des  pyramides  ap- 
partiennent au  ^cnva  héroï-comi- 
que. Membre  du  conseil  dos  pri- 
ses, sous  le  gouvernement  impé- 
rial, il  publia,  en  1804,  son  poë- 
ine  des  Amours  épiques ,  ouvrage 
plus   remarquable  par  la  facture 
<ics  vers,  que  par  l'invention,  puis- 


PAIV 

qu'il  ne  se  compose  que  de  nar- 
rations extraites  de  différons  poti- 
mes  épiques  ,  et  que  M.  Parceval 
a  souvent  traduites  ou  imitées  a- 
vec  un  rare  bonheur.  Il  prélu- 
dait, par  cet  ouvrage,  à  un  grand 
poëme  dont  Philippe-Auguste  est 
le  héros,  et  qu'il  termine  au  mo- 
ment (  Î824)  où  nous  écrivon» 
cette  notice.  Invente,  ta  vivras!  dit 
Lemierre  :  en  effet ,  l'invention 
seule  peut  tirer  un  poète  de  la 
classe  vulgaire  des  hommes  qui 
s'occupent  de  lier  des  rimes  et  de 
cad(;ncer  des  mots. 

PARDESSUS   (Jean -Marie), 
fils   d'un  avocat  de  Blois ,  est  né 
dans  cette  ville  le  11  août  1772, 
et  fut  reçu  avocat  en  1795.  Oppo- 
sé aux  principes  de  la  révolution, 
il  consacra  son  ministère  à  la  dé- 
fense des  proscrits,  et  ses  efforts 
ne  furent  pas  toujours  infructueux. 
En  i8o5,  il  se  familiarisa  avec  le 
pouvoir,  et  accepta  du  gouverne-r 
ment   impérial  la  place  d'adjoint 
delà  mairie  de  Blois,  et  ensuite 
celle  de  maire  de  la  même  ville. 
Appelé,  en  1807,  par  le  choix  du 
sénat,  au  corps-législatif,  M.  Par- 
dessus fil  marcher  de  front  ses  fonc- 
tions  administratives    el    législa- 
tives avec  ses  occupations  du  bar- 
reau et  ses  éludes  de  juri«j)ruden- 
ce.  Il  avait  publié  à  la  fin  de  1806 
le  Traité  des  servitudes  ;  il  fit  pa- 
raître, en  1809,  celui  du  Contrat- 
du-Change.    Après    la    session    il 
ne  fut  pas  réélu  au  corps-législatif, 
jtar  suite  du  sénatus-consuUe  qui 
prescrivait  l'âge  de  quarante  ans 
pour  être  admis  dans  ce   corps. 
Le  gouvernement, qui  le  regardait 
sans  doute  comme  un  de  ses  par- 
tisans   les  plus  zélés,  le  nomma 
à  la  chaire  de  professeur  de  droit 


I 


PAR 

«  ouuuercial  à  l'école  de  droit  de 
l'ari:?,  place  qu'il  occupait  encore 
à  l'époque  de  ia  prcniière  restnu- 
ration,  en  1814.  Alors  M.  Pardes- 
sus se  voua  tout  entier  au  gouvcr- 
ueuienl  royal.  Nommé  déj)uté  à 
la  chambre  de  181  5  par  le  dépar- 
lemeut  de  Loir-et-Cher,  il   prit 
place  au  côté  droit,  et  développa 
ses  p?incipes  dans  une  prot"e?sioii 
de  loi  qui  est  devenae  historique, 
et  qui  finissait  par  ces  mots  re- 
manp'.ables   :  «  Nous   voulons  la 
«charte  que  le  roi  nous  a  donnée; 
))nous  voulons  toutes  les  garanties 
•xjue  celle    charte   nous   assure; 
«nous   voulons   surtout,   et  bien 
«plus  que  ceux  qui  tenteniient  de 
«nous  calouiuiei',  la  liberté  indivi- 
«duelle,  la  liberté  de  la  presse,  la 
«liberté  des  consciences,  l'égalilé 
«des  citoyens  devant  la  loi.   »  Il 
fut  ensuiteappeiéà  toutes  lescom- 
missifms  iuiporianlf.s  de  cette  as- 
semblée, et  notammenl  à  celles 
qui  avaient   pour  objet  l'examen 
des  projets  de   loi   sur  l'anmislie 
et   sur  le    budget.   Il   concourut 
au      projet     de     la     commission 
qui  inodiljait  la  clémence   offerte 
par  le  gouvernement;   il  soutint 
fortement    son    opinion    dans    la 
discussiou     qui     eut     lieu     à     ia 
séance  du  3  janvier  1816;  il  n'ap- 
puya pas  avec  moins   de  force   le 
système  du  renouvellement  inté- 
gral de  la  chanibre  tous   les  cinq 
ans,  et  répondit  à  ceux  ([ui  vou- 
laient un  renouvellement  par  cin- 
quième,   comme   plus   favorable 
a  l'influence  minisiérielle,  par  ces 
paroleséncrgi(pjcs:  «Les  électeurs 
«démon  dépaUement  m'ont  dit  : 
»  Sercfi  le  lui  ;    ils  ne  uï'en   ont 
»|uis  dit  autantsur  le  ministère.  » 
A  roccaiiond'tmcpélition  préseu- 


TAR  j5 

lée,  le  25  avril  de  la  même  année, 
sur  le  jugement  qui  venailde con- 
damner à  mort  le  général  Travot, 
rhonorable  dépulé,  M.  Colomb, 
après  avoir  parlé  des  succès  mili- 
taires de  ce  général  et  de  la  répu- 
latioit  d'hunuuiité  dont  il  jouissait 
parmi  ses  ennemis  mêmes  ,  ayant 
laissé  entrevoirquelques  soupçons 
sur  la  justice  de  la  senteuce  pro- 
noncée c^:)nlre  lui,  M.  Pardessus, 
qui   entrait  dans  le  moment,   et 
qui   avait   entendu    les    derniers 
mots,  s'élance  aussitôt  à  la  tribu- 
ne, et  réfute  vivement  l'orateur. 
Son  zèle  lut  récompensé  le  8  mai 
i8i(),  par  la  place  de  membre  de 
la    commission    de    surveilUuicu 
des    caisses    d'amortissement    et 
de   consignation.    11  ne  fut  point 
réélu   après   la  dissolution   de  la 
chambre     par     l'ordonnance    d.i 
5    septembre    (1816),     et    eut 
de   plus  la  douleur,   bien  grande 
sans  doute  pour  cet  ancien  profes- 
seur, de  réclamnr  en    1819,  lors 
des  trouilles  de  l'école    d<;  droit, 
le  s». cours  de  l'autorité  contre  ces 
mêmes    élèves,  quil    [xéteudait 
avait  rendus   si  dociles  en   i8i4- 
Il    reparut    enfin    à    ia   chambre 
des  députés  ;   mais  alors  il  avak 
oublié    les    principes    qu'il    avait 
hautement   prol'essés  en   i8i5  :  il 
votaen  faveur  des  lois  d'exception, 
de  la  nouvelle  loi  des  élections,  et 
contre  la  liberté  de  la  presse;   il 
lit  aussi  un  humble  aveu  de  la  fai- 
blesse qu'il  avait  eue  de  prêter  ser- 
ment à  Napoléon  pendant  les  f<;77/ 
Jours  ,   et  cette  espèce  de  péni- 
tence pul)li({uequ'il  s'imposait  lui- 
même  a  dQ  ellacer  aux  yeux  d»? 
ses  honorables  amis    la  mobilité 
momentanée  de  sa  conduite  politi- 
que, lléélu  à  la  nouvelle  chambre 


>1 


PAR 


<!e  1824»  ses  improvisations,  dès 
les  premières  séances ,  l'ont  déjà 
signalé  comme  un  des  plus  zélés 
défenseursdes  projets  ministériels. 
M.  Pardessus  s'occupe  d'un  ou- 
vrage sur  le  droit  commercial  u- 
niversel,  cl  sur  les  lois  des  divers 
états  de  l'Europe,  coniparées  avec 
celles  de  la  France.  Outre  les  deux 
ouvrages  que  nous  avons  cités  plus 
haut,  il  a  encore  publié  :  Élémens 
de  jurisprudence  commerciale,  in- 
8°,  1 8 1 1  ;  Cours  de  droit  commer- 
cial, 4  ^*^1-  iri"8%  >Si4>  i8i5et 
jSiG. 

PARDIEU  (le  COMTE  N.  de), 
ancien  offîcier,  député  par  la  no- 
blesse du  bailliage  de  Saint-Quen- 
tin aux  états-généraux  en  1789, 
fut  un  des  vingt-sept  membres  de 
Ja  chambre  delà  noblesse  qui  pro- 
testèrent, le  19  juin,  contre  la  ma- 
jorité, et  qui  se  réunirent  au  tiers- 
état.  Il  prononça  à  cette  occasion 
un  discours  très  -  remarquable. 
jNommé,  dans  le  courant  de  la 
session,  commandant  de  la  garde 
nationale  de  Saint- Quentin  ,  il 
demanda  et  obtint  un  congé  pour 
aller  l'organiser.  De  retour  à  son 
poste,  il  s'y  fit  remarquer  par  son 
y.èle  à  concourir  à  toutes  les  réfor- 
mes. Il  j)arut  une  fuis  entre  au- 
tres à  la  tribune  pour  se  plaindre 
des  motions  sans  cesse  renaissan- 
tes sur  les  finances;  il  demanda 
et  fit  arrêter  qu'il  n'en  serait  plus 
entendu  de  nouvelles.  Après  la 
session,  il  rentra  dans  la  vie  pri- 
vée. 

PAJIE  (N.),  premier  clerc  de 
Danton,  lorsque  celui-ci  était  avo- 
cat aux  conseils  du  roi,  adopla  ses 
principes  politiques  ,  mais  avec 
beaucoup  plus  de  modération.  Il 
lut  d'abord  employé  en  qualilc  de 
commissaire  dans  le  déparlemcut 


PAR 

de  la  Seine.  Danton  devint  minis- 
tre de  la  justice  en  août  1792, 
et  presque  aussitôt  ,  Paré  fut 
nommé  secrétaire  du  conseil  exé- 
cutif provisoire.  Il  passa ,  l'an- 
née suivante  ,  au  iriinistère  de 
l'intérieur,  en  remplacement  de 
M.  Garât.  Cette  place  était  au- 
dessus  de  ses  forces;  il  fut  peu 
de  temps  après  obligé  de  l'aban- 
donner. En  1794,  Hébert  et  Vin- 
cent, qui  rap()elaient  le  nouveau 
Rolland,  le  dénoncèrent  aux  Cor- 
deliers,  mais  cette  dér)onciation 
n'eut  pas  de  suites.  Après  la  mort 
de  Danton,  de  nouveaux  dangers 
vinrent  le  menacer  :  il  fut  pour- 
suivi aux  Jacobins  par  Couthon  , 
qui  accusa  Rousselin  de  colpor- 
ter ses  écrits  pour  relever  le  par- 
ti abattu.  Il  devint  eu  1799,  com- 
missaire du  directoire-exécutif 
près  du  département  de  la  Seine, 
et  ensuite  administrateur  des  hô- 
pitaux militaires.  Paré,  retiré  de- 
puis dans  une  campagne  aux  envi- 
rons de  Paris,  y  vécut  tout-à-fail 
étranger  aux  affaires  publiques. 

PARENT  (Marie -Barbe),  jeu- 
ne fille  née  à  Valenciennes,  parta- 
gea l'enthousiasme  qui  enflammait 
tous  les  coeurs  aux  premiers  symp- 
tômes de  guerre  au  commence- 
ment de  la  révolution  :  elle 
déguisa  son  sexe,  prit  les  armes, 
et  servit  avec  une  grande  bravoure 
pendant  quinze  mois,  comme  vo- 
lontaire à  l'armée  de  la  Moselle. 
A3ant  été  blessée  au  siège  de 
Mayence,  elle  fut  alors  reconnue 
potu-  l'emme.  Elle  obtint  son  con- 
gé, et  reçut  une  gratification  du 
Goo  francs,  avec  lesquels  elle  re- 
tourna dans  sa  ville  natale. 

PARKM'  (François-Nicolas), 
ancien  curé  de  Ruissy-la-lierliauil 
près  de   Meiua,  département  de 


I 


I 


l'AR 

Soi ne-et- Marne,  naquit  à  Melun, 
en  1752,  et  n'entra  dans  la  carriè- 
le  ecciésiaslique  que  par  l'ordre 
formel  de  son  père.  Engagé  mal- 
gré lui  dans  on  état  qui  ne  con- 
venait ni  à  son   esprit    ni  à     ses 
goûts,  il  adopta  avec  exaltation 
les  nonve/inx  principes, et  renon- 
ça solennellement  à  ses  fonctions 
cccic.-iastiques.  En  ijgS  il  se  ma- 
ria ,  et  à  cette  époque  lut  le  ré- 
ducteur du  J  ournal  des  cnmpngves, 
Icuilie  qui,  malgré  les  désordres 
du   temps,  renfermait  générale- 
ment des  articles  sages  et  modé- 
rés.   On  lui  attribue  le   Courrier 
français,  in-^j",  qui  parut  égale- 
ment pendant  la  révolution.  Sous 
le  gouvernement  impérial,  Parent 
occupa  im  faible  emploi  dans  les 
bureaux  de   la  police;   il   en   fut 
privé  lors  de  la  première  restau- 
rUion  en  1814.  Réduit  à  coniger 
des  épreuves  dans  une  imprime- 
rie, il  vécut  dans  la  plus  grande 
gêne,   et  mourut,  à  l'âge  de  70 
ans,  le  ao  janvier  1822.  On  rap- 
porte qu'il   disait    à   ses  derniers 
momcns  :  «  Mon  Dieu,  vous  savez 
«que  ce   que  j'ai   fait   était  dans 
•  l'intimité  de  ma  conscience;  je 
»  ne  m'en  rcpens  pas.»  Il  a  pu- 
blié,   en    1799,    in -8°  :  Recueil 
d' Hymnes    plnlosopliiques ,    civi- 
qii'^s  et   muraux,   augmenté  de  la 
nute   en   pluin-chanl  ,    d'après    la 
Viuûque   d'is    meilleurs    auteurs, 
pour  faciliter  dans  les  campagnes 
la  câlcbrution  des  fêtes  républicai- 
nes. Son  extrême  pauvreté  ne  lui 
»  pas  permis  de  mettre  au  jour 
dilTérens  opuscules  dont  il  a  fait 
tirculer  de»  copies.   Ce  sont  :  i» 
i  Ennemi  du  sang;  1"  Raisonnons 
tons,    raisonnons    tout;    5°    Mon  . 
épitaplie  et  mes  confissions,  ou  Ma 
Profession  de  foi. 


PARENT-DE-CHASSY  (Nico- 
las), était  avocat  du  roi  au  con- 
seil et  au  prcsidial  de  Troyes,  lors- 
qu'il fut  élu,  en  1789,  député  du 
tiers-état  du  bailliage  du  Niver- 
nais aux  états-généraux,  oi"i  il  se 
fitpeuremarquer.il  retourna  dan» 
son  déparlement  après  la  session  , 
et  avait  renoncé  aux  affaires  pu- 
bliques, lorsque  des  papiers  troti- 
vés  dans  l'armoire  de  1er  aux  Tui- 
leries ,  l'ayant  fortement  compro- 
mis, il  fut  décrété  d'accusation 
par  la  convention  nationale;  con- 
duit à  Paris  et  livré  au  tribunal 
révolutionnaire,  il  lut  condamné 
à  mort  coimne  conspiralenr.  et 
exécuté  le  2  février  1796;  il  était 
à  peine  âgé  de  7ty  ans. 

PARENT -REAL  (N.  J.  M.). 
avocat  à  la  cour  royale  de  Paris, 
est  né  à  Ardres,  arrondissement 
de  Sainl-Omer,  au  mois  d'avril 
1768.  Son  père,  qui  avait  servi 
dans  la  gendarmerie,  le  destinaii 
à  entrer  dans  ce  corps  dont  la  sup- 
pression le  força  à  changer  ses 
projets.  Il  dirigea  vejs  la  profes- 
sion du  barreau  la  vocation  encore 
incertaine  de  son  fds.  Envoyé  au 
collège  de  Sainl-Omer,  le  jeune 
Parent  y  lit  de  bonnes  études  » 
qu'il  acheta  chez  les  oratoriens, 
à  Boulogne,  et  au  collège  de  Sain- 
te-Barbe, à  Paris,  où  il  fut  le  con- 
disciple de  l'abbé  Nicole,  ex-rec- 
teur de  l'acadéiriie  de  Paris;  de 
iM.  Lemairc,  professeur  de  la  fa- 
culté des  lettres;  de  M.  Planche, 
professeur  de  rhétorique  ,  et 
de  plusieurs  autres  élèves,  qui 
se  sont  depuis  distingués  dans 
diverses  carrières.  Décidé  à  suivre 
l.i  carrière  tlu  barreau,  il  fit  son 
droit,  et  fut  reçu  avocat  au  par- 
leuieut  de  Paris,  le  6  février  1790, 
duratit  les  vacances  extraordinai- 


i6 


PAR 


resqui  précédèrent  la  suppression 
des  parleinens.  Il  exerçait  la  pro- 
fession d'avocat  au  tribiiiiai  de 
district  de  Sainl-Oiuor ,  lors(|u'il 
fut  nommé,  par  dis[>ense  d'âge  , 
secrétaire  en  chef  de  l'adminis- 
tration du  district  de  Calais,  du 
directoire  duquel  il  devitit  bientôt 
l'un  des  membres.  La  loi  du  17 
frimaire  an  3,  portant  que  les  pa- 
rons etaUiésjusqu'au  degré  de  cou- 
sins-germains ne  pouvaient  être 
en  même  temps,  l'un  receveur  de 
district,  et  l'aulre  adminislraleur 
du  directoire  du  même  district, 
M.  Parent-Réal,  qui  était  le  beau- 
frère  du  receveiu',  se  démit  de 
5<'s  fonctions,  et  fut  nonuné  à  cel- 
les de  juge-de-paix  du  canton 
d'Ardres,  qu'il  exerça  jusqu'à  la 
mise  en  aclivilé  de  la  constitution 
de  l'an  3.  A  rinslallatiou  du  di- 
rectoire-exécutif, il  devint  suc- 
cessivement son  conunis>aire  prés 
de  l'administration  municipale  de 
Saint-Omer  et  près  de  l'adminis- 
tration centrale  du  département 
du  Pas-de-Calais.  Après  le  coup 
d'état  du  18  fructidor  an  5,  l'an- 
cien commissaire  près  de  cette 
administration  ayant  été  rappelé 
à  ers  mêmes  fonctions,  M.  Parent- 
Réal  fut  nommé  administrateur 
du  département,  et  il  en  était  bî 
président,  lorsqu'il  fut  élu  l'un 
des  députés  du  département  du 
Pas-de-Calais  an  conseil  des  cinq- 
cents.  Une  circonstance  remar(jua- 
ble  dans  les  élections  de  ce  dépar- 
tement, en  l'an  7,  c'est  que  sur 
huit  députés  à  élire,  la  petite  ville 
d'Ardres,  dont  la  population  s'élè- 
ve à  peine  à  (Joo  âmes,  avait  foiu'- 
ni  trois  députés,  dont  l'un  pour  le 
conseil  des  anciens,  M.  Garnier, 
et  deux  pour  le  conseil  des  c!n.'{- 
cents,  ?(iM.  Paipiit-iiéalol  Saiul- 


PAll 

Amour.  Durant  son  commissariat 
à  Saint-Omer,  l'on  avait  tenté, 
en  prairial  an  10,  d'organiser  dans 
celte  ville  des  compagnies  d'égor- 
geurs,  pour  y  répéter  les  désor- 
dres d'Aix  et  de  Marseille;  mais 
il  réprima  ces  inouvemens  sé- 
ditieux, et  prévint  les  crimes  eu 
annonçant,  dans  une  proclamalicKJ 
énergicjue,  «  qu'il  sévirait  égale- 
«ment  contre  le  disciple  de  iMarat 
»  et  contre  le  compagnon  de  Jésus, 
MClque  le  gouvernement, qui  avait 
"brisé  les  échafauds,  empêcherait 
«les hécatombes,  d  M.  Parent-Réal 
proposa  au  conseil  des  cinq-cents 
de  consacrer,  d'une  manière  spé- 
ciale, la  publicité  des  lois,  portant 
la  déclaration (pi'ime  armée  «a  bien 
mérité  de  la  patrie  »  par  Tinscrip- 
liou  en  entier  du  décret  sur  u'i 
drapeau  porté  dans  l'armée,  alter- 
nativement à  la  lête  de  chaque 
compagnie,  il  parla  sur  le  projet 
derésoiulion  relatit'aux  tribunaux 
de  commerce;  et  fit  la  proposition 
nouvelle  d'établir  prés  de  ces  tribu- 
naux un  commissaire  du  gouver- 
nement ,  pour  y  surveiller  et  as- 
surer l'exécution  des  lois,  ainsi 
que  le  ministère  public  le  fait 
près  des  autres  juridictions.  Il  pro- 
nonça plusieurs  autres  discours, 
et  s'était  fait  remarquer  dans 
cette  assemblée,  où  il  ne  siégea 
que  quelques  mois,  parla  sagesse 
de  ses  opinions  et  de  ses  volOo. 
Après  le  18  brumaire  an  8,  M. 
PiU'enlrRéal  fut  élu  «ncmbrc  du 
tribunal.  Il  y  demanda,  par  mo- 
tion «l'ordre,  que  les  présentations 
à  faire  j)ar  le  tri!)unat  de  candidat 
pour  l(!  sénat-conservateur  lussent 
moiivées;  il  parla  contre  l'appli- 
cation du  principe  des  cautionnc- 
mens  aux  fonctioimaires  et  em- 
ployés non  comptables;  il  coni- 


PAU 

baltil  le  pi()j«'t  de  loi  portant  é- 
tabiis^iMiK'nl  de  Iribuiiaiix  crimi- 
nels spéciaux;  il  s'éleva  aussi  con- 
tre la  recherche  de  la  paternité 
non  avouée,  et  il  prononça  de- 
vant le  corps -législatif,  comme 
orateur  du  Iribtuiat,  un  discours 
sur  le  projet  de  loi  tendant  à  dé- 
clarer que  rarmée  d'Orient,  les 
administrateurs,  les  sa  vans  et  les 
artistes  de  l'expédition  d'Egyp- 
te, avaient  également  bien  mérité 
de  la  pairie.  11  lut  compris,  en 
l'an  lo,  dans  le  premier  cinquiè- 
me sortant,  par  voie  d'élimination, 
€l  ne  quilta  plus  depuis  cette  é- 
poque  la  vie  privée,  que  pour 
exercer  successivement  le  ministè- 
re d'avocat  à  la  cour  de  cassation, 
au  conseil- d'état  et  aux  conseils 
du  roi.  Lors  de  la  condamnation 
du  général  Moreau,  par  le  tribunal 
du  département  criminel  de  la  Sei- 
ne, il  ofl'ril  d'être  son  détenseur  de- 
vant la  cour  de  ca^ssation;  mais  le 
général  refusa  de  tenter  aucune 
espèce  de  recours.  Parmi  les  tra- 
vaux et  les  succès  judiciaires  de 
M.  Parent-Réal,  l'on  a  pu  distin- 
guer une  demande  en  prise  à  par- 
lie  pour  M.  de  Boileau,  avocat  à 
Abbeville,  et  plusieurs  mémoires 
sur  la  question  de  validité  de  paie- 
nicns  elTectués  en  rescriptions  de 
la  trésorerie  et  en  mandats  faisant 
office  de  rescriptions,  pour  solde 
d'acquisitions  de  bois  nationaux. 
(]elle  contestation,  soulerme  pour 
la  négative,  opiniâtrement  par  le 
fisc,  intéressait  pour  une  somme 
de  plusieurs  millions,  valeur  iné- 
lallique,  le  plus  grand  nombre  des 
«cquéreurs  del)oi>  nationaux  dans 
le  déparlement  du  Pas-de-Calai-i, 
ainsi  que  dans  plusieurs  autres. 
Nous  devons  aussi  mentionner  un 

T.  XVl. 


PAR 


»7 


plaidoyer  prononcé  dans  une  cau- 
sti  capitale,  pour  un  cultivateur, 
accusé  d'avoir  assassiné  sa  femnie, 
dontiM.  Parent-Réal  prit  la  défen- 
se, étant  commissaire  près  l'ad- 
ministration municipale  de  Saint- 
Omer,  et  qu'il  fit  acquitter.  C'est 
ainsi  que  durant  ses  fonctions  ad- 
ministratives, il  voulut  reprendre 
l'exercice  de  sa  profession  pour 
servir  l'humanité,  comme  il  aima 
toujours  aussi  à  cultiver  les  scien- 
ces morales  et  philosophiques, 
au  milieu  même  de  ses  devoirs 
publics.  Sa  carrière  s'est  divisée 
entre  le  barreau,  l'administration 
et  les  lettres.  Aujourd'hui  avocat 
à  la  cour  royale  de  Paris,  il  se  dé- 
voue particulièrement  à  ceux  des 
travaux  de  sa  profession  qui  con- 
viennent le  mieux  à  la  retraite  du 
cabinet,  et  qui  s'accordent  le  plus 
avec  le  goût  des  études  littéraires. 
M.  Parenl-Réal  a  publié  une  Pe- 
tite Revue  des  instilations  oratoires 
de  M.  Delanialle,  et  il  est  l'un  des 
collaboraleur»  delà  Revue  encyclo- 
pédique. C'est  un  de  ces  hommes 
si  précieux,  si  honorables  qui, 
en  joignant  le  talent  et  le  goût  à 
un  noble  caractère  et  à  de  vastes  et 
solides  connaissances, contribuent, 
avec  plus  de  services  que  d'éclat, 
aux  continuels  progrès  du  bon  es- 
pi'it  dans  leur  siècle.  Il  a  dû  rece- 
voir connue  un  gage  de  l'estime 
de  tous  les  bons  juges  dims  notre 
philosophie  et  dans  notre  littératu- 
re aciuelle,  la  mention  distinguée 
que  M.  Lacretelle  aîné  a  faite  de 
lui  dans  la  revue  des  écrivains  qui 
ont  servi  la  science  judiciaire  (i" 
partie  de  la  collection  de  ses  œuvres, 
récemment  publiée).  C'est  la  jus- 
tice de  l'amitié  entre  des  hommes 
dignes  de  ne  connaître  enlre  eux- 


i8 


PAR 


mêmes  qu'une  vérité  de  conscien- 
ce :  celte  justice-là  ne  sait  pas 
plus  çxajîérer  i'éJoge  que  l'affji- 
blir. 

PARFA1T(N.), médecin  du  mi- 
nistère de  la  jçuerre,  et  memtire  de 
la  société  de  vaccine  ,  a  publié  : 
1°  Réflexions  historiques  et  criti- 
ques sur  les  dangers  de  la  variole 
naturel  le,  sur  les  différentes  métlio- 
des  de  traitement,  sur  les  avantages 
de  l'inoculation  et  les  succès  de  la 
vaccine  pour  C extinction  de  la  vario- 
le, hSo5,  in-H";  2°  Mon  Journal 
de  1807;,  ou  Voilâtes  gens  du  16' 
siècle,  2'  édition,  1808,  in-8°. 

PAREDAENS  (N.)'  libérateur 
belge,  est  né  à  Mons  dans  le  Hai- 
nault  aulrichien.  Après  s'être  fait 
connaître  avantageusement  par 
plusieurs  articles  insérés  dans  les 
)ournatix  de  Bruxelles  et  par  quel- 
que» poésies  légèrcSj  il  paraît  de- 
puis quelque  temps  avoir  exclu- 
sivement consacré  sa  plume  i\ 
célébrer  les  bau  ts  faits  de  ses  conci- 
toyens. Il  a  fait  paraître,  en  1819, 
un  ouvrage  intitulé  :  Fastes  de  la 
Belgique,  destiné  à  retracer  toutes 
les  actions  remarquables  dont 
riiistoire,  tant  ancienne  que  mo- 
derne de  ce  pays,  a  consacré  le 
souvenir.  Cet  ouvrage  tait  égale- 
ment bonneur  au  patriotisme  et 
au  talent  de  son  auteur. 

PAl>IINI  (Joseph),  poète  ita- 
lien, naquit,  en  i  ^"^9,  su  ries  bords 
du  lac  de  Pusiano,  dans  le  Mila- 
nez.  Parini  père,  presque  sans  for- 
tune ,  se  transporta  à  Milan  pour 
y  surveiller  lui  mên)e  l'éducation 
de  son  fils,  qu'il  plaça  au  gymnase 
Arcimboldi,  sous  la  direction  des 
barnabites.  Le  j(june  élève,  qu'un 
penchant  irrésistible  entraînait 
vers  la  poésie,  dut  se  soumettre 


PAU 

à  la  volonté  paternelle,  qui  l'obli- 
gea de  se  vouer  à  l'état  ecclésias- 
tique. Réduit,  pour  vivre,  à  co- 
pier les  factums  d'un  avocat,  et  à 
étudier  la  théologie  pour  obtenir 
les  ordres,  Parini  se  dédomma- 
geait de  ce  double  ennui  par  la 
lecture  de  quelques  bons  poètes 
qui  l'aidèrent  à  former  son  goût 
et  A  développer  ses  talens.  Il 
essaya  même  de  composer  des 
vers  que  ses  amis,  dans  l'intérêt 
de  sa  fortune  plutôt  que  de  sa  ré- 
putation, l'engagèrent  à  publier 
dans  un  petit  recuiil  qui  parut, 
en  1752,  sous  le  nom  de  Ripano 
Eupilino,  que  l'auteur  emprun- 
tait à  Eupiti,  ancienne  dénomina- 
tion du  lac  de  Pusiano.  Cette  pu- 
blication, quoique  prématurée, 
lui  fit  des  admiraieurs  ne  pouvant 
pas  encore  lui  donnerdes  envieux, 
et  lui  valut  l'honneur  d'être  admis 
au  sein  d<  l'Arcadieet  des  Trasfor- 
rnati.  Oijiigé  de  chenber  des  res- 
sources dans  le  travail,  Parini  ac- 
cepta une  place  de  précepteur 
ch*'z  les  Borronieo  et  les  Scrbel- 
loni ,  deux  des  plus  illustres  fa- 
milles milanaises  ;  et  il  put  s'ac- 
quitter ainsi  d'un  devoir  bien  doux 
pour  son  cœur,  celui  de  subvenir 
aux  besoins  de  sa  mère,  à  laquelle 
il  avait  déjà  fait  le  sacrifice  de  son 
modeste  héritage.  En  1756,  Pa- 
rini se  trouva  engiigé  dans  une 
querelle  littéraire  jtour  soutenir  la 
réputation  de  Segneri ,  sévère- 
ment jugé  par  Bandiera  dans  un 
ouvrage  intitulé  :  /  Pregiudizi 
délie  umane  lettere ;  cette  polémi- 
que ajouta  encore  à  sa  réputation; 
mais  ce  qui  éta!)lit  sa  célébrité  fut 
la  publication  du  premier  chant 
d'un  poëme  dans  lequel  il  se  mon- 
tra l'invenleur  d'un  nouveau  gen- 


PAR 

re  de  poésie.  Ce  poëine,  intitulé 
il  Giorno,  et  divisé  en  quatre  par- 
ties, //  Mattino  ,  il  Mezzogiorno  , 
//  Fespro,  la  Notte,  contient  la 
description  satirique  des  mœurs 
et  dos  habitudes  d'une  classe 
d'hommes  qui,  pour  être  la  plus 
éminente  dans  la  société,  n'en  est 
pas  ordinairement  la  plus  utile. 
L'auteur  prenant  le  ton  de  pré- 
cepteur d'im  jeune  noble,  lui  ap- 
prend sérieusement  à  consacrer 
sa  matinée  i\  la  toilette,  son  midi 
aux  importantes  occupations  de  la 

I.  table,  le  soir  à  la  promenade,  et  la 
i;  nuit  au  jeu  et  aux  conversazioni. 
"■  Une  grande  vigueur  poétique  est 
employée  dans  les  fréquens  épi- 
sodes dont  Parini  a  enrichi  son 
poëme  ;  cl  les  actions  les  plus  fri- 
voles, les  folies  les  plus  extrava- 
gantes, quelquefois  même  les  vi- 
ces les  plus  honteux,  sont  racon- 
tés avec  une  solennité  de  slyle 
qui  eu  rend  l'ironie  plus  amère. 
La  variété  des  sujets  et  les  nom- 
breux porlrfiils  des  individus  cap- 
tivent l'attention  du  lecleur,  tan- 
dis que  l'exacte  et  élégante  des- 
cription des  mœurs,  la  magnifi- 
cence du  langage  et  la  richesse  de 
la  poésie  piquent  sa  curiosité,  et 
rendent  l'intérêt  encore  plus  vif. 
Dieu  difiéreut  dos  autres  poêles 
italiens  qui  négligent  les  vices  de 
leur  temps  et  frondent  ceux  des 
siècles  p.issés,  Parini, rappelant  la 
poésie  à  sa  destination  primitive, 
se  sert  «lu  prestige  des  vers  pour 
rendre  sa  morale  moins  austère, 
et  frapper  de  ridicule  les  travers 
de  ses  contemporaitis.  //  Mattino, 
publié  en  17O3,  fut  applaudi  par 
toute  l'Italie,  «jui  admira  la  nou- 
veauté du  genre  et  la  brillante 
exécution  de  l'.nivragp;  elle  hâta 


PAR 


•9 


de   ses  vœux   la  publication   du 
Mezzogiorno,   qui  se  fit  attendre 
jusqu'en  i;G5.  Ces  deux  poëmes 
découragèrent   les   imitateurs   de 
Bettinelli,  d'Algarotti  et  de  Fru- 
goni,  qui  avaient  remis  à  la  mode 
les  vers  alïVanchis  du  joug  de  la 
rime,  que  les  Italiens  désignent 
sous  le  nom  de  sciolti.  Tl  est  pos- 
sible que  des  vers   tnédiocres  ca- 
chent leur  farblesse  sous  le  char- 
me musical  produit  par  le  retour 
des  mêmes  sons;  mais  pour  que 
les  sciolti  se  soutiennent,  ils  ont 
besoin  de  frapper  l'esprit  avant 
de  caresser  l'oreille,  car  ils  repré- 
sentent la  poésie  des  idées  plutôt 
que  celle  des  mots.  Le  comte  de 
Firmian ,  gouverneur   autrichien 
en  Lombardie,  qui  avait  encou- 
ragé Parini  à  publier  sou  poëme, 
voulant  tirer  un  meilleur  parti  de 
ses  lalens,lui  proposa  d'écrire  un 
journal  qui  eût  servi  de  modèle  11 
d'ignobles    compilations  qui  cir- 
culaient alors  en  Italie;  il  le  nom- 
ma aussi  professeur  de  belles-let- 
tres à  la  Canobiana,  dont  les  é- 
coles  étaient  destinées  à  combat- 
tre  l'influence    des    jésuites    sur 
l'enseignement.  A  la  suppression 
de   cet  ordre,    Parini    réunit   les 
chaires  d'éloquence  et  des  be  mx- 
arls  dans   le  gymnase   de  Bréra. 
Ce    fut  alors  qu'il  composa  ses 
Priricipi  délie  belle  lellere ,  qui, 
malgré  leur   peu   de  développe- 
ment, furent  regardés  comme  su- 
périeurs à  tous  ceux  dont  on  a- 
vait  jusqu'alors  fait  usage  en  Ita- 
lie; c'étaient  comme  les  premiè- 
res lignes  d'un  cadre  que  le  pro- 
fesseur  se   chargeait  de    remplir 
dans  ses  leçons.   Il  travaillait  en 
même   temps  au  Vcspro  et  A  lu 
Notte,  et  composait  des  odes  qui 


20  PAR 

sont  le  j)lns  beau  monument  ly- 
rique delà  poésie  iialienne.  Apres 
la  mort  du  comte  de  Firmian,  les 
eni)emi«dePariiiiclieichèreiilàlui 
imire  auprès  de  son  siiccesseiir,qui 
le  menaça  de  la  perte  de  ses  em- 
plois, mais  qui  n'osa  pas  les  lui 
retirer.  En  altendant,  Parini  ap- 
plaudissait aux  réformes  que  Jo- 
seph II- introduisait  dans  ses  états, 
et    qui  préludaient   aux   chan^e- 
mens  plus  importans  que   devait 
y  opérer  la  révolution  française; 
il  ouvrit  son  âme  à  l'espérance  de 
voir    briller  un   meilleur   avenir 
pour  sa   patrie.   S'adonnant  tout 
entier  à  la   politique  ,   il  suivait 
attentivement  la  marche  des  évé- 
nemens  et  les  progrès  de  la  liber- 
té;  sa   vue   aft'aibiie  déjà   par  le 
travail,  souffrit  encore  de  la  lec- 
ture assidue  des  journaux,  et  son 
œil  droit  se  couvrit  d'une   cata- 
racte qui,   quelques  années  plus 
tard,  se  répandit  sur  le  gauche. 
Lorsque  Léopold  II  vint  à  Milan, 
il  prit  des  informations  sur  Pari- 
ni, et  api)renant  qu'il  n'avait  pas 
une  fortune  proportionnée  à  ses 
besoins ,   il   ordonna   qu'on  aug- 
mentât   SCS    pensions,    et   qu'on 
le  mît   à   la   tête    des    écoles   de 
Brera.  Les  devoirs  de  son  état,  et 
son  goût   pour    la    politique,   le 
tinrent  quelque  temps  éloigné  de 
la  poésie;   il  y  revint  enfin  pour 
céder   au    désir   que    lui    témoi- 
gnait l'archiduchesse  JVlarie-Béa- 
trix  d'Esté,  de  voir  son   poëme 
achevé.  Parini  était  occupé  à  po- 
lir les  derniers  chants  du  Giorno^ 
lorsque  les  Français  firent  la  con- 
quête de  hi  Lomhardie.  Le  géné- 
ral Bonaparte  le  fit  nommer  chef 
de  la  municipalité  de  Milan,  pla- 
'Ce  dans  laquelle  Parini  resta  tant 


PAR 

qu'il  se  flatta  de  pouvoir  faire  le 
bien  de  son  pays;  mais  dès  qu'il 
s'aperçut  qu'on   voulait  se  servir 
de  son  influence  pour  mieux  as- 
servir ses  concitoyens,  il  se  dé- 
mit de  ses  fonctions,  et  fit  distri- 
buer en  secret  aux  pauvres  l'ar- 
gent qu'il  avait  tiré  de    ses   ap- 
pointemens.     S'enfermant    alors 
dans  le  cercle  de  ses  occupations 
littéraires  4  il  conçut  le  plan  d'un 
ouvrage  sur  la  Cène  de  Léonard 
de  Vinci,   que  malheureusement 
pour  les  arts  il  n'eut  pas  le  temps 
d'exécuter.  Cependant  les  Autri- 
chiens qui  avaient  reparu  en  Ita- 
lie, en  avril  1799,  renversèrent  la 
république  Cisalpine,  et  persécutè- 
rent ceux  qui  avaient  pris  la  moin- 
dre part  aux  affaires  publiques.  Pa- 
rini fut  respecté, et,  profitant  de  cet 
intervalle  de  repos,  il  se  fil  opérer 
d'un  œil  qu'il  eut  le  bonheur  de 
recouvrer.  Mais,  obligé  de  se  te- 
nir long-temps  couché  et  immo- 
bile, il  se  manifesta  une  hydropi- 
sie  dans  ses  jambes,  pour  laquelle 
les  médecins  lui  conseillèrent  d'al- 
ler habiter  la   campagne.    Il  s'y 
transporta  en  effet,  mais  n'ayant 
pu  en  supporter  l'air  trop  vif  pour 
un  corps  épuisé,  il  revint  à  Milan, 
où  il  mourut,  septuagénaire,  le 
i5  août   1799.    Parini  était  d'un 
goût  très-sévère ,  et  se  montrait 
toujours  mécontent  de  ses  pro- 
ductions :  «Je  ne  puis  pas  louer, 
i>  disait-il,  ce  que  les  autres  admi- 
»rent  :  je  sais  ce  qui  manque  à  la 
«perfection  de  mes  vers,  mais  je 
«suis  trop  vieux  pour  être  en  état 
«de  mieux  faire.»    Il  a  pourtant 
laissé    des  traces  profondes  dans 
la  route  qu'il  s'est  IVayée.  Auii  é- 
clairé  des  arts,  il  avait  une  prédi- 
lection marquée  pour  la  vie  des 


f  PAR 

peintresde  Vasari,  dontil  faisait  sa 
lecture  habituelle  ;  il  aimait  aussi 
Plutarque,  qu'il  appelait  le  plus 
honnête  écrivain   de    l'antiquité; 
et,  en  parlant  de  Macchiavelli,  il 
disait  :    «Cet  auteur    apprend   t\ 
«penser,  à  parler  et  à  écrire  libre- 
»ment.  »  La  musique  exerçait  un 
charme  inexprimable  sur  ses  sens; 
il  fut  intimement  lié  avec  Sacchi- 
ni ,  dont  il  déplora  la  mort  dans 
une  ode  qui  est  regardée,  à  juste 
titre,  comme  l'une  des  plus  belles 
qu'il  ait  composées.  Il  regardait 
Allieri  comme  le  créateur  de  la 
tragédie  italienne,  et  comme  ce- 
lui qui  s'était  le  plus  rapproché 
du     caractère    du    théâtre   grec , 
dont  le  but  était  de  rendre  odieux 
les  tyrans,  et  d'élever  le  peuple  à 
la  liberté  par  des  sentiuiens  no- 
bles et  hardis.  Varini  aimait  l'or- 
dre et  la  justice;  il  n'était  pas  de 
ces  esprits  turbulens  qui  ont  fait 
à  la  cause  de  la  liberté  plus  de 
mal  que  ses  ennemis  mêmes.  Il 
combattit  contre  tous  les  excès  : 
«  Par  la  persécution  et  la  violen- 
»ce,  disail-il,  on  ne  vient  à  bout 
»de  rien  :  le  chemin  de  la  liberté 
»  n'est  pas  celui  de  la  licence,  ef 
«l'on  ne   doit    pas   se  flatter  d'y 
«parvenir  par  les  crimes.  »  Lors- 
que le  général  Despiuois  s'empor- 
ta  d'une  manière   brutale  contre 
la  municipalité  de  Milan,  Parini 
se  retournant  vers  ses  collègues, 
leur  dit  en  riant  :  «  On  va  remon- 
»ter  un  peu  plus  haut  nos  échar- 
apes  ,  et  nous  serrer  le  cou  avec 
»  elles.  »  Un  homme  qu'il  n'estimait 
pas  lui  reprochait  un  jour  d'avoir 
donné-  l'aumône  à  un  prisonnier 
autrichien....  :  «Je  ne  la  refuse  à 
«personne,  répondit  Parini,  je  la 
«ierais  A  un  Turc,  à  un  Juif,  i\ 


PAR  2T 

»  toi-même,  si  tu  venais  me  la  de- 
»mander.  »  On  voulut  l'obliger 
un  jour  à  crier  devant  le  théâtre, 
mort  aux  aristocrates  !  «Yive  la 
«république!  cria-t-il,  et  mort  \ 
«personne.  »  A  l'arrivée  des  trou- 
pes autrichiennes  à  Milaij,  lors- 
que ses  ennemis  redoublèrent 
d'efforts  pour  lui  faire  perdre  ses 
places,  il  refusa  les  olîres  d'un 
ami  en  disant  :  "Je  demanderai 
«l'aumône,  et  je  vivrai  pour 
«l'exemple  de  la  postérité  et  la 
«honte  de  mes  concitoyens.  »  Le 
dernier  jour  de  sa  vie ,  il  dicta 
encore  à  un  de  ses  amis  un 
sonnet  contre  les  Autrichiens , 
alors  maîlres  du  territoire  de  sa 
patrie.  L'astronome  Oriani ,  qui 
ne  put  pas  obtenir  du  gouverne- 
ment autrichien  de  consacrer  en 
public  la  mémoire  d'un  si  illustre 
citoyen,  lui  fit,  au  retour  de  la 
république,  élever  à  ses  frai>  un 
monument  sous  les  portiques  du 
gymnase  de  Brera.  Outre  les  ou- 
vrages mentionnés  dans  le  cours 
de  cet  article,  Parini  a  laissé  des 
éloges,  des  discours,  des  lettres, 
des  poésies  de  toute  espèce,  des 
contes,  et  plusieurs  progranmies 
pour  des  sujets  de  peinture  et  de 
sculpture  qui  prouvent  son  gofit 
et  son  imaj;inatinn.  La  collection 
de  ses  œuvres  fut  publiée  à  iMi- 
lan  ,  en  1801,  6  vol.  in-S",  par 
l'avocat  Reina,  qui  a  composé  l'é- 
loge de  ce  célèbre  poète. 

PARIS  (N.),  ancien  garde-du- 
corps  du  roi  l.ouis  XVI,  n'avait 
point  attiré  l'attention  publique 
avant  la  révolution  ;  une  seule 
action  l'a  rendu  fameux.  Cédant 
à  l'indignation  que  lui  avait  ins- 
pirée la  condamnation  du  roi,  il 
crut    servir   son    parti ,    en  im- 


sa  PAR 

niolant  un  des  membres  ilc  la  con- 
vention qui  avaient  voté  la  mort 
du  inonar(|ue.  Fai  is  avait  d'abord 
résolu,  dit-on,  de  tuer  le  doc 
d'Orléans,  et  chercha  vainement 
l'occasion  de  frapper  ce  prince, 
qu'il  ne  put  approcher.  Le  -io 
janvier  1795,  il  entra  chez  un 
restaurateur  du  Palais  -  Royal  , 
nommé  Février,  et  y  reconnut  un 
des  hommes  qu'il  avait  dévoués  à 
la  mort,  Paris  l'aborde  aussitôt, 
lui  demande  :  <i  N'êtes- vous  pas 
JLepelelier  de  Saint-Fargeau  ?  — 
Oui. — Vous  avez  voté  la  mort  du 
roi?  —  Oui.  »  A  l'instant  il  lui 
plonge  dans  le  corps  le  sabre  qu'il 
portait  sous  son  manteau.  Lepele- 
lier  expira  peu  de  rnomens  après. 
Au  milieu  du  lunnilte.  Paris  trou- 
va le  moyen  de  s'échapper,  et 
sortit  bientôt  des  murs  de  Paris. 
Son  signalement  fut  répandu  dans 
toute  la  France.  Un  décret  de 
peine  de  mort  fut  porté  contre 
quiconque  lui  donnerait  asile. 
Après  avoir  erré  quelques  jours 
aux  environs  de  Paris,  il  fut  re- 
connu dans  une  auberge  où  il  ve- 
nait de  se  réfugier,  et  au  moment 
où  la  force  armée  y  entrait  pour 
le  saisir,  il  mit  lui-même  un  ter- 
me aux  poursuites,  et  se  tua  d'un 
coup  de  pistolet. 

PARIS  (Félix),  greffier  du  tri- 
bunal révolutionnaire  de  Paris, 
embrassa  la  cause  de  la  révolution 
avec  enthousiasme,  et  se  fit  auto- 
riser, en  1793,  à  prendre  le  nom 
de  Fubricius  pour  quitter  celui 
du  garde-du-cor])S  qui  avait  frap- 
pé Félix  Lepeletier.  11  n'est  pas 
étonnant  dès-lors  qu'il  se  soit  lié 
avec  Danton;  mais  il  l'est  da- 
vantage qu'il  fût  à  la  fois  mem- 
bre  de   la   société   des  Jacobins 


PAR 

et  de  celle  des  Cordeliers.  Dans 
le  courant  d'octobre,  Hébert  l'ac- 
cusa aux  jacobins  d'avoir  été 
dans  son  département  pour  y  scru- 
ter sa  conduite,  et  Momoro,  pour 
fortifier  l'accusation,  ajouta  que 
Fahricias  était  an  patriote  de 
fraîche  date.  Au  moment  où  Ro- 
bespierre voulait  se  débarrasser  de 
Danton,  Paris,  qui  eut  connaissan- 
ce de  l'intrigue,  fit  tous  ses  efforts 
pour  arracher  celui-ci  à  son  insou- 
ciance naturelle  :  le  jour  même  de 
son  arrestation  il  lui  annonça  qu'on 
devait  se  saisir  do  sa  personne  pen- 
dant la  nuit,  et  le  trouvant  tou- 
jours incrédule,  il  le  rejoignit  à 
l'Opéra  pour  l'empêcher  de  ren- 
trer chez  lui;  tout  fut  inutile.  Dan- 
ton s'obstina  à  regagner  son  do- 
micile ;  il  y  fut  arrêté,  et  de  là  con- 
duit à  l'échafaud.  Paris  fut  incar- 
céré au  9  thermidor  an  2  (27  juil- 
let 1794);  '"a»s  ayant  recouvré  la 
liberté,  il  fut  nommé  greffier  du 
tribunal  révolutionnaire  regénéré, 
et  mourut  sous  le  gouvernement 
directorial.  v 

PARIS  (P.  L.),  membre  de  la 
congrégation  de  l'oratoire  et  pro- 
fesseur «le  belles-lettres  à  l'époque 
de  la  révolution,  en  embrassa  les 
principes  avec  exagération.  Au 
mois  de  juillet  1792,  il  fut  arrêté 
pour  avoir  provoqué  l'insurrec- 
tion contre  Louis  XVI,  en  s'c- 
rriant  dans  sa  section  :  «  C'est  ici 
«un  combat  à  mort  entre  Louis 
»XVI  et  la  liberté.  »  Plusieurs 
sections  de  Paris  réclamèrent  con- 
tre la  détention  de  Paris,  et  l'as- 
semblée législative  enjoignit  au 
ministre  de  la  justice  de  faire  un 
rapport  sur  les  poursuites  exer- 
cées contre  ceux  qui  l'avaient  or- 
donnée. Paris  sortit  de  prison.  En 


PAU 

venant  remercier  l'assemblée  de 
lui  avoir  rendu  la  liberté ,  il 
demanda  la  mise  eu  accusa- 
tion du  juge  -  de  -  paix  Dupe- 
ron,  qui  avait  lancé  contre  lui  le 
mandat  d'arrêt;  il  devint,  peu  de 
temps  après,  oflTicier  municipal  de 
la  ville  de  Paris.  En  179^,  le  con- 
seil-général de  la  commune  le 
chargea  d'écrire  l'histoire  de  la 
journée  du  3i  mai,  et  lui  adjoi- 
gnit plusieurs  écrivains  qui  par- 
tageaient ses  opinions.  Paris  con- 
tinua d'exercer  les  mêmes  fonc- 
tions jusqu'au  9  thermidor  an  2 
(27  juillet  1794)?  mais  alors  il  fut 
mis  hors  la  loi  comme  complice 
de  Robespierre;  traduit  au  tribu- 
nal révolutionnaire  le  ii,  il  en- 
tendit son  arrêt  avec  fermeté,  et 
son  courage  ne  se  démentit  pas 
dans  ses  derniers  momens.  Il  a 
publié  :  1"  des  Odea  sur  ie  globe 
aérostatique  ,  sur  l'électricité  ,  et 
sur  J.  J.  Rousseau,  1786;  2°  les 
Eloges  de  Peiresc ,  du  capitaine 
Cook,  1790;  5"  un  Projet  d'édu- 
cation nationale. 

PARIS  (le  babon  Marie- Au- 
guste), lieutenant-général,  officier 
de  la  légion  -  d'honneur,  né,  en 
1771,  dans  la  commune  de  Ville- 
neuve, arrondissement  de  Miran- 
de,  département  du  Gard,  est 
mort  à  Perpignan,  le  3  juin  1814. 
Il  était  fils  d'un  juge  de  la  ville 
d'Auch.  Sa  mère,  restée  veuve 
avec  une  nombreuse  famille,  li- 
vrée entièrement  à  l'éducation  de 
ses  enfans,  avait  destiné  Auguste 
Paris  à  l'état  ecclésiastique.  Son 
peu  de  vocation  pour  cet  état  lui 
lit  quitter  le  séminaire,  afin  de  se 
réunir  à  ses  frères,  qui  avaient  é- 
tabli  une  maison  de  commerce  à 
Cordeaux;  mais  l'invasion  de  la 


PAR 


â5 


France  par  les  Espagnols  déran- 
gea ces  projets;  il  fut  appelé  à  la 
défense  de  son  pavs,  et  un  des  ba- 
taillons de  la  Gironcle  vit  les  cinq 
frères  Paris  enrôlés  dans  la  même 
compaîifnie.  Auguste  Paris,  par- 
venu au  grade  de  capitaine  adju- 
dant-majur,  fut  détaché  de  l'ar- 
mée des  Pyrénées  pour  se  rendre 
dans  la  Vendée.  La  destination  de 
son  bataillon  ayant  été  changée  à 
son  passage  à  Rochefort,   il    fut 
mis  à  la  disposition  de  Victor  Hu- 
gi!eseten)I)arqué  pour  les  Jles-du- 
Vent.  C'est  avec  ce  bataillon  que 
la  Guadeloupe  a  été  rc])risesurles 
Anglais,  et  c'est  à  la  tête  de  ce  mô- 
me bataillo!!  que  l'adjudant-major 
Paris  donna  de  nouvelles  preuves 
de  son  courage  et  de  ses  talens.  Il 
était  colonel  lorsqu'il  fut  griève- 
ment blessé  à  la  prise  du  camp  de 
Saint-Jean,  où  l'armée  anglaise, 
commandée  par  le  général  Gra- 
ham,  fut  obligée  de  niettre  bas  les- 
armes;  il  fut  élevé  au  grade  de  gé- 
néral de  brigade  par  les  commis- 
saires du  gouvernement,  Victor 
Hugues  et  Lebas.  Resté  à  la  Gua- 
deloupe sous  les  ordres  des  gou- 
verneurs qui  leur  succédèrent,  le 
commandement  lui  en  fut  confié 
après  la   déportation   du  général 
Desfournaux,  par  les  habitans  de 
cette  île.  De  retour  en  France,  il 
fut  employé  dans  l'expédition  de 
Flessingue  et  ensuite  en  Espagne. 
Sous  les  ()rdres  du  maréchal  Su- 
chet,  il  prit  part  à  toutes  les  ac- 
tions et  ù  tous  les  sièges  entrepris 
par  ce  maréchal  dans  la  Catalo- 
gne, l'Arragon,  et  le  royaume  do 
Valence ;il  fut  blessé  à  la  célèbre  ba- 
taille de  Sagonte,  qu'il  décida  en 
faveur  de  nos  armes  par  une  charge 
vigoureuse,  à  la  tôle  de  sa  briga- 


24  PAR 

de.  Le  maréchal  lui  confla  le  goii- 
■vernement  de  Sarragosse.  Le  gé- 
néral Paris  ont  dans  ce  coininan- 
dement  de  grandes  diflficultés  à 
surmonter.  Tour-à-tour  attaquant 
et  attaqué,  il  déploya  une  activité 
extraordinaire,  et  s'engagea  dans 
des  expéditions  plus  ou  moins  im- 
portantes, qui  foutes  tournèrent  à 
l'avantage  de  l'armée.  En  i8i3, 
abandonné  à  Sarragosse  à  ses  pro- 
pres forces,  il  fut  le  dernier  à  quit- 
ter le  sol  espagnol.  Sa  division  ne 
se  compo::;ait  que  d'un  très -petit 
nombre  de  troupes,  et  tous  les 
passages  lui  étaient  fermés  :  ce- 
pendant il  ne  se  laissa  point  inti- 
mider par  le  général  Mina  à  la 
"^  tête  de  toutes  ses  bandes  réunies. 
Après  l'avoir  quelque  temps  évi- 
té en  employant  tout  l'art  de  la 
stratégie,  il  lui  passa  sur  le  corps, 
parvint  sans  perle  au  fort  de  Ja- 
ca,  et  fit  sa  jonction  avec  l'armée 
du  maréchal  Soult,  à  laquelle  il 
resta  attaché.  Cette  action  lui  mé- 
rita le  grade  de  général  de  divi- 
sion, et  le  commandement  delà  r" 
division  de  l'armée  du  maréchal 
Soult.  Le  général  Paris  s'opposa 
long- temps,  avec  de  très-faibles 
moyens ,  aux  entreprises  de  la 
grande  division  anglaise,  com- 
mandée par  le  général  major  Ilill. 
La  bataille  d'Orthez  lui  fournit 
bientôt  les  moyens  de  déployer 
son  courage  et  son  habileté  ac- 
coutumés. Quoiqu'il  souffrît  beau- 
coup de  ses  blessures,  il  ne  put 
consentir  à  prendre  du  repos  dans 
les  circonstances  difficiles  où  la 
patrie  se  trouvait  engagée.  Il  con- 
tinua de  prendre  part  avec  la  ujê- 
me  activité  à  toutes  les  opérations 
de  la  riMraite  remarquable  termi- 
uée  par  la  bataille  de  Toulouse.  A 


PAR 

la  paix ,  le  général  Paris  fut  rap- 
pelé avec  sa  division  à  l'armée  du 
maréchal  Suchet,,à  Narbonne  et 
à  Perpignan.  Il  mourut,  jeune 
encore,  dans  cette  dernière  ville, 
par  suite  de  ses  blessures  et  des 
fatigues  de  la  guerre.  Le  désinté- 
ressement et  la  modération  du 
lieutenant -général  Paris,  dans 
l'exercice  des  fonctior»s  et  des 
gouvernemens  qui  lui  furent  con- 
fiés, lui  ont  acquis  l'estime  des 
ennemis  qu'il  avait  à  combattre. 
11  n'a  laissé  àsa  veuve  et  à  sa  fille, 
retirées  à  la  Martinique,  d'autre 
fortune  qu'une  modicpie  pension. 
PARIS  (Louis-Michel),  naquit 
à  Argentan  en  1740"  ^'^  de  bonnes 
études,  et  embrassa  l'état  ecclé- 
siastique. Ayant  refusé  de  prêter 
le  serment  exigé  des  prêtres  en 
1 790  ,  il  fut  obligé  de  quitter  ht 
France,  et  partit  pour  l'Angleter- 
re le  1 1  septembre  1792.  Il  s'y 
consacra  à  l'instruction  de  la  jeu- 
nesse, éleva  d'abord  une  école  à 
ses  frais  ,  où  il  réunit  un  grand 
nombre  d'élèves.  Lié  avec  l'abbé 
Carron,  il  ne  quitta  son  établisse- 
ment que  pour  aller  contribuer 
aux  succès  de  l'école  que  ce  der- 
nier avait  fondée  en  faveur  des 
enfans  de  familles  fiançaises  ré- 
fugiées à  Londres.  Paris  y  resta 
deux  années,  pendant  lesquelles 
il  fit  paraître  une  Introduction  à 
C étude  de  la  géographie  ,  et  des 
Klémcns  de  grammaire  française. 
Ces  deux  ouvrages  ,  écrits  avec 
méthode  et  clarté,  obtinrent  un 
succès  mérité.  Paris  profita  de  la 
révolution  du  18  brumaire  an  8 
pour  revenir  en  France,  et  rentra 
dans  le  sein  de  sa  famille  le  5  dé- 
cembre 1801.  La  carrière  de  l'ins- 
truction  était  devenue   l'élémeiH 


PAR 

de  l'abbé  Pari?;  il  y  forma  un  pen- 
sionnai dont  la  réputation  s'éten- 
dit an  loin,  et  lui  attira  en  peu  de 
temps  une  fonle  d'élèves ,  ce  qui 
décida  le  gouvernement  à  l'éri- 
ger, dès  i8o3,  on  école  secondai- 
re. Parmi  les  ouvrages  qu'a  pu- 
bliés l'abbé  Paris,  on  cite  particu- 
lièrement une  jolie  collection  de 
4^  petites  Cartes  élémentaires  d'as- 
tronomie et  de  géograpliie ,  in-iS, 
gravées  à  Alençon  par  iM.  Go- 
dard, connu  par  la  perfection  avec 
laquelle  il  exécute  ses  gravures  en 
bois;  le  texte  a  été  imprimé  sur  le 
revers  à  Falaise,  en  1807.  Ce  pe- 
tit ouvrage  très-instructif,  ainsi 
que  l'introduction  à  la  géogra- 
phie ,  allaient  bientôt  reparaître 
plus  dignes  de  leur  premier  suc- 
cès lorsque  l'abbé  Paris  mourut 
dan?  sa  ville  natale  le  16  juin 
1 80G. 

PARIS  (Pierre-Adrien),  archi- 
tecte, naquit  à  Besançon,  en  i7'i7. 
Son  père,  qui  le  destinait  ;\  suivre 
la  carrière  on  il  s'était  distingué 
comme  intend;iiit  des  hâlimens  de 
l'évêqu(;  de  Bâie,  lui  donna  les 
premiers  principes  du  dessin.  I-es 
progrès  du  jeune  PAris  lui  rendi- 
rent bientôt  nécessaire  ime  ins- 
truction plus  étendue  :  il  fut  en- 
voyé à  Paris,  et  placé  sous  la  di- 
rection de  Trouard,  arcbitecle  du 
roi ,  qui  lui  fit  suivre  en  même 
temps  les  cours  de  l'école  d'archi- 
tecture. A  Vîii^ii  de  '20  ans,  il  par- 
lit  pour  Rome ,  avec  le  titre  d<! 
pensionnaire;  il  s'y  appliqua  à  la 
niimismatiquc  et  à  l'archéologie , 
.sans  négliger  néanmoins  les  mo- 
numcns  d'architecture,  dont  il 
dessina  les  plus  remarquables.  De 
retour  en  France,  le  premier  usa- 
ge qu'il  fit  de  ses  laleiis  fut  d'en- 


PAR  a5 

richirde  riches  dessins  les  tableaux 
de  la  Suisse,  par  La  Borde,  et  le/ 
Voyage  à  N aptes,  de  Saint- > on; 
ce  qui  le  fit  connaître  assez  avan- 
tageusement pour  devenir,  en 
1778 ,  dessinateur  du  cabinet  du 
roi,  architecte  des  économats. 
Il  fut  ensuite  chargé  de  tous  les 
détails  des  fêtes  de  Versailles,  de 
Marly  et  de  ïrianon;  il  remplaça, 
peu  <le  temps  après,  Soulflot  à 
l'académie  d'architecture,  et  par- 
tit une  seconde  fois  pour  l'Italie, 
d'où  il  revint  avec  une  ample  col- 
lection de  dessins.  11  avait  été 
nommé  pendant  son  absence  ar- 
chitecte de  l'Opéra  ;  et  l'on  dut  à 
son  talent,  depuis  17S5,  toutes  les 
décorations  qui  furent  exécutées 
à  ce  théâtre,  dont  plusieurs  sont 
du  premier  mérite,  telles  que  cel- 
les (l'Armide,  de  Pan  11  rge,  etc.  Il 
donna  encore  le  plan  du  beau  por- 
tail de  la  cathédrale  d'Orléans, 
dont  il  surveilla  la  conj^lruction. 
Paris  fut  créé,  en  1788,  par  Louis 
XVI,  chevalier  de  Saint-Michel. 
Les  lettres  de  noblesse  qui  lui  fu- 
rent expédiées  sont  conçues  dans 
les  termes  les  plus  htmorables. 
Aux  approches  des  troubles  de 
la  révolution,  il  se  retira  dans  un 
asile  que  l'amitié  lui  avait  offert 
au  château  de  Colmoulin,  près  du 
Havre.  Sa  saule,  qui  avait  toujouis 
été  délicate,  s'était  de  plus  en  plus 
affaiblie;  il  suivit  le  conseil  qu'on 
lui  donna  de  voyager  pour  se 
rétablir,  et  passa  pour  la  troisième 
fois  en  Italie.  La  place  de  direc- 
teur de  l'école  de  France  était 
alors  vacante  par  la  mort  d(;  Su- 
vée  :  il  en  fut  chargé  par  intérim. 
Quelque  courte  que  fût  son  ad- 
ministration, elle  se  fit  remarquer 
par    les    améliorations    sensible» 


26 


PAR 


qu'elle  apporta  an  sort  des  pen- 
sionnaires. Assujélis  à  tontes  les 
formes  de  la  discipline  militaire  , 
leur  traitement  ne  dilVérait  pas  de 
celui  des  soldats  dans  une  caserne. 
Paris,  dans  un  mémoire  adressé  au 
ministre  de  l'intérieur,  fit  valoir  la 
nécessité  de  remettre  en  vij^ueur 
l'ancien  renflement,  et  y  proposa 
même  certaines  ujodifications,  qui 
furent  adoptées.  L'estime  qu'il 
avait  su  se  concilier  à  Rome  dé- 
termina les  membres  de  la  con- 
sulte à  lui  oflVir  la  place  de  con- 
servateur de  la  basilique  de  Saint- 
Pierre  ;  quelque  lucrative  qu'elle 
fût,  il  ne  balança  pas  à  la  refuser, 
déclarant  qu'elle  appartenait  à  un 
archite(;te  italien,  et  désigna  celui 
qu'il  jugeait  le  plus  digne  de 
l'occuper.  Il  était  enfin  déterminé 
à  revenir  en  France,  pour  y  pas- 
ser le  reste  de  ses  jours  au  sein 
de  sa  famille,  lorsque  le  gouver- 
nement français  l'invita  à  traiter 
de  l'acquisition  des  antiques  de  la 
villa  liorghèse  :  Paris  accepta 
celte  marque  de  confiance,  se 
trouvant  heureux  de  continuer  à 
procurer  à  son  pays  ime  collection 
qui  fait  aujourd'hui  le  principal 
ornement  du  musée  royal.  En 
1811,  il  dirigea  encore,  stir  l'invi- 
tation qui  lui  en  fut  faite,  les  fouil- 
les du  Colisée,  et  dressa  un  plan 
de  restauration  de  ce  monument, 
le  plus  vaste  que  les  anciens  aient 
exécuté,  après  avoir  dessiné  avec 
exactitude  toutes  les  parties  que 
les  décombres  tenaient  cachées. 
Rien  ne  le  retenait  plus  en  Ita- 
lie en  1814,  si  ce  n'est  son  at- 
tachement pour  un  ami  qui  lui 
était  bien  cher ,  le  respectable 
d'Agincourt,  alors  malade,  et  au- 
quel il   avait    fourni  des  dessins 


PAR 

])Our  son  histoire  des  arts  ;  il 
il  craignait  d'agraver  son  état  , 
en  s'éloignant  de  lui  dans  de  telles 
circonstances;  ce  ne  fut  que  trois 
ans  après  c,  lorsqu'il  lui  eut  rendu 
les  derniers  devoirs,  qu'il  partit 
pour  la  France.  Il  arriva  à  Resan- 
fon,  épuisé  de  fatigues,  et  affaibli 
par  im  genre  de  vie  sévère  ,  que 
rien  ne  le  put  jamais  déterminera 
changer.  Il  s'occupait  depuis  vingt 
ans  d'un  travail  important  sur  les 
édifices  anciens  de  l'Italie;  il  se 
hâta  d'y  mettre  la  dernière  main, 
et  put  se  féliciter  de  l'avoir  termi- 
né avant  sa  mort,  arrivée  le  i*' 
aofit  1819.  Cet  artiste  avait  toutes 
les  qualiiés  qui  procurent  les  suc- 
cèsrdu  goût, de  l'imagination, beau- 
couptle  connaissances,  un  caractè- 
re facile  et  liant.  Les  savans,  les 
artistes,  et  les  littérateurs  les  plus 
distingués  de  France  et  d'Italie, 
le  connaissaient  et  l'aimaient.  Il 
était  habile  architecte;  mais  il  a 
trouvé  peu  d'occasions  d'exercer 
ses  talens  en  ce  genre.  On  ne  con- 
naît de  lui  que  le  portail  de  la  ca- 
thédrale d'Orléans,  dont  nous 
avons  parlé,  et  quelques  bâtimens 
particuliers.  Il  avait  aussi  donné 
les  plans  de  l'hôtel-de-ville  de 
Neuchâteletde  l'hôpital  de  Bourg; 
mais  il  les  a  désavoués  publique- 
ment, parce  que  les  constructeurs 
les  avaient  dénaturés,  en  y  faisant 
des  changemens  essentiels  sans  sa 
participation.  Il  a  traduit  en  fran- 
çais :  V Agriculture  des  Anciens  , 
par  Dickson,  Paris,  1802,  in-S",  2 
vol.  fig. ,  et  ï Agriculture  pratique 
des  différentes  parties  de  l' Angle- 
terre, parAlarshal,  ibid.,  i8o3,  5 
vol.  in-8°,  et  atlas.  Il  a  laissé  en 
manuscrit  les  traductions  des  Oi- 
servations  sur  le  Vésuve ,   par  W. 


I 


PAR 

llamilton;  du  Traité  de  la  sobrièlé 
par  Carnaro;  du  Voyage  au  nord 
de  l' A  ngleterre,  par  Arthur  Youn^; 
et  des  Lettres  écrites  de  Barbarie, 
par  Jardin,  I!  existe  aussi  de  cet 
artiste  un  Recueil  de  dessins  et 
d'études  d'architecture,  se  com- 
posant de  9  vol.  très-grand  in- 
iolio  ;  c'est  en  ce  genre  une  des 
collections  les  plus  précieuses.  On 
a  encore  de  cet  artiste  :  Examen 
des  édifices  antiques  et  modernes  de 
la  ville  de  Rome ,  sous  le  rapport 
de  l'art,  etc.,  in-fol.  avec  des  pi. 
L'auteur  avait  traité  pour  la  pu- 
blication de  cet  ouvrage  avec  un 
graveur  célèbre  qui,  ne  s'étant  pas 
cru  obligé  de  remplir  les  condi- 
tions convenues,  s'est  dessaisi  du 
manuscrit  en  faveur  des  héri- 
tiers. L' Amphithéâtre  FlaDien,vul- 
gairement  nommé  le  Cotisée,  res- 
tauré d'après  les  détails  encore 
visibles  de  la  construction,  etc., 
in-folio,  4-ï  pi-  Ce  travail  se  trou- 
ve à  la  bibliothèque  du  roi,  mais 
on  en  voit  aussi  une  copie  à  la  bi- 
bliothèque (le  Besançon,  à  laquelle 
Paris  a  également  légué  ses  livres, 
ses  tableaux  et  ses  antiques.  Il 
existe  un  catalogue  raisonné  du 
cabinet  de  cet  artiste,  imprimé  à 
Besançon,  en  1821,  in-8°,  par 
l'ordre  du  conseil  municipal;  il 
e.st  précédé  d'une  notice  sur  la  vie 
«le  Paris,  et  orné  de  son  por- 
trait, et  de  5  planches  qui  repré- 
s<!ntent  des  antiques. 

PARI5EAU  (Nicolas  de),  né 
à  Paris,  en  1703,  d'une  famille 
assez  riche,  y  lit  de  bonnes  élu- 
des, et,  en  outre,  son  père  lui 
ayant  laissé  le  choix  de  la  carrière 
qu'il  devait  suivre,  le  jeune  Fari- 
seau  se  consacra  exclusivement  à 
Kart  dramatique,   et  fut  nommé 


PAR  27 

directeur  des  élèves  pour  la  danse 
de  l'Opéra;  les  soins  qu'exigeait 
cette  place,  ne  l'empêchèrent  pas 
de  composer  pour  plusieurs  théâ- 
tres de  la  capitale  un  assez  grand 
nombre  d'ouvrages,  dont  quel- 
ques-ims  eurent  beaucoup  de  suc- 
cès, et  révèlent  dans  leur  auteur 
l'habitude  et  l'entente  de  la 
scène,  une  certaine  facilité  à 
créer  un  sujet,  à  conduire  une 
intrigue  et  à  imaginer  des  res- 
sorts comiques.  Les  bluettes  é- 
chappées  à  la  plume  de  cet  écri- 
vain ,  se  distinguent  en  général 
par  un  style  naturel  qui  ne  man- 
que ni  de  gaîté  ni  d'originalité.  Il  a 
donné  :  1^  au  Théâtre-Français, 
le  Prix  académique,  comédie  ea 
un  acte,  en  vers,  1780;  2°  au 
théâtre  Italien,  la  Veuve  de  Can- 
cale,  parodie  en  5  actes,  en  vers, 
de  la  Veuve  du  Malabar,  tragédie 
de  Lemierre,  3  octobre  1780;  5* 
Adélaïde,  oui' Innocence  reconnue, 
pantomime  en  3  actes,  «780;  4* 
au  théâtre  Italien,  Richard,  pa- 
rodie de  Richard  III  ,  tragédie 
de  Rozoy,  1781;  celte  parodie  est 
piquante  et  spirituelle  ;  on  y  ap- 
plauditsurtout  le  couplet  suivant  : 
Riehardjimpatientédes  refus  de  la 
princes.se  qui  ne  veut  pas  répondre 
■\  son  amour,  lui  dit  : 

J'ai  des  procédés , 
Et  vous  m'excédez  ! 
Mais  à  la  fin  ,  moi ,  je  tranche. 
Je  suis  tout  rond  , 
£1  ma  façon 

Est  franche  : 
Concluons  donc 
L'iiymen  où  njon 
Cœur  penche. 
Réfléchissez-y 
Jusqu'à  samedi  : 
Nous  nous  marierons  dimanche. 

5"  Au  théâtre  Italien ,  la  Soirée- 
d'été,  divertissement  en  un  acte  et 
en  vaudevilles ,  1 78a  ;  6°  la  l>ind( 


28 


PAR 


ifa  ManSj  comédie  en  un  acle,  en 
prose,  1^85;  7°  tes  Deux  font  ta 
^aire,  ou  tes  Deux  bottes  de  foin, 
comédie  en  un  acle,  en  pro*e , 
1783  ;  8°  le  roi  Lie  ,  parodie 
en  un  acte  ,  en  vers  ,  du  Roi 
Léar,  tragédie  de  Ducis,  1  785;  9° 
au  théâtre  Italien ,  le  Bouquet  et 
les  étrennes^  comédie  en  un  acte, 
en  vers  :  le  sujet  de  celte  pièce  est 
tiré  d'un  conte  d'Imbert  ;  10°  au 
théâtre  Italien,  le  Rendez-vous,  ou 
les  deux  Rubans ,  comédie  en  un 
acte,  mêlée  d'ariettes  ;  les  airs  de 
cette  pièce  furent  faits  avant  les 
paroles.  L'auteur  de  la  musique 
l'ayant  fait  entendre  sur  des  sylla- 
bes sans  ordre  ni  suite,  Pariseau 
eut  la  patience  de  les  remplir. 
1 1°  Julien  et  Colette,  comédie  en 
im  acte,  en  vers,  1788;  la"  Jean 
La  Fontaine,  comédie  en  3  actes, 
en  prose,  1790.  Pariseau  rédigea 
dans  les  premières  années  de  la 
révolution,  le  journal  intitulé  la 
Feuille  ^du  jour,  journal  qui  ren- 
fermait une  foule  d'articles  sati- 
riques ,  dans  lesquels  Pariseau 
attaquait  vivement  les  doctrines 
du  moment;  devenu  suspect  par 
ses  opinions,  il  fut  arrêté  pendant 
le  régime  de  la  terreur,  et  enfer- 
mé au  Luxembourg;  la  ressem- 
blance de  son  nom  avec  celui  de 
M.  Parisot  {voyez  ce  nom),  ancien 
capitaine  de  la  garde' constitu- 
tionnelle du  roi,  qui  se  réunit  aux 
Suisses  pour  défendre  le  château 
des  Tuileries  le  10  août ,  le  fit 
comprendre  dans  une  conspira- 
tion dite  des  prisons  ,  et  il  périt 
victime  de  la  tyrannie  en  1795. 
Quelques-uns  de  ses  amis  qui  n'a- 
vaient cessé  de  faire  des  démar- 
ches pour  lui,  et  qui  ignoraient 
son  funeste  sort,  obtinrent  enfin 


PAR 

du  comité  de  saliif-public,  et  peu 
après  le  9  thermidor,  sa  mise  eu 
liberté.  Impatiens  d'embrasser  cet 
infortuné,  d'alb  r  briser  ses  fers, 
ils  volent  au  Luxembourg ,  de- 
mandent que  les  portes  soient  ou- 
vertes à  leur  ami.  Quelle  est  leur 
surprise!  quelle  est  leur  douleur! 
on  leur  apprend  que  deux  jours 
auparavant  Pariseau  avait  péri  sur 
ré(hafaHd  sous  le  nom  et  le  titre 
de  Parisot ,  capitaine  de  la  garde 
royale. 

PARISET  (Etienne),  médecin 
et  littérateur,  est  né  en  1770,  à 
Grands,  dans  l'ancienne  Champa- 
gne. Ses  parens,  hor?  d'état  de  lui 
donner  une  éducation  soignée  , 
l'envoyèrent  à  l'âge  de  iG  ans,  à 
Nantes,  chez  un  oncle,  parfumeur. 
Il  profilait  de  ses  momens  de 
loisirs  pour  se  livrer  à  l'étude,  et 
deux  ans  après,  en  1788,  admis  au 
collège  de  l'Oratoire,  il  y  parut  un 
des  meilleurs  écoliers  de  rhétori- 
que. Forcé,  en  i7()3,  de  partir 
pour  les  frontières,  il  fit,  l'année 
suivante,  la  guerre  de  la  Vendée, 
pendant  laquelle,  à  ce  qu'on  pré- 
tend, il  rédigea  les  pétitions  qui 
servirent  de  base  au  ra[)port  du 
conventionnel  Pons-  de  -Verdun, 
en  faveur  de  M°"  de  Bon  champ, 
femme  du  célèbre  général  de  ce 
nom  ;  ainsi  il  <nit  le  bonheur  de 
(Contribuer  à  sauver  la  vie  de  celte 
dame.  De  relour  à  Nantes,  il  se 
livra  à  l'étude  de  la  médecine,  et 
obtint,  au  concours  de  l'école  de 
Santé,  la  place  d'élève  qui  venait 
d  être  créée.  Il  soutint,  en  i8o5, 
pour  obtenir  le  titre  de  médecin, 
une  thèse  sur  les  Hémorragies  uté- 
rines. Quelques  années  après,  il 
fit  des  Cours  de  physiologie  et  d'i- 
déologie à  l'Athénée  de  Paris.  En 


PAR 

1820,  il  s'était  manirestô  à  Cadix, 
une  iTiafiulie  dans  laquelle  on  crut 
apercevoir  les  symptômes  d'une 
contagion  meurtrière  ;  iM.  l'ariset 
se  rendit  dans  celle  ville  avec  le 
jeune  Mazet ,  son  ami ,  et  pour 
ain^i  dire,  son  élève.  Il  a  bientôt 
reconnu  le  caractère  du  mal  qu'il 
se  proposait  de  combattre,  et  le 
juge  moins  dangereux  qu'on  ne  le 
croyait.  Les  craintes  qu'avait  é- 
prouvées  Cadix  eu  iSao,  furent 
ressenties  à  Barcelonne,  l'année 
suivante,  et  eurent  »m  eflét  plus 
terrible.  iM.  Pariset  partit  acconj- 
pagné  de  Mazet,  et  de  deux  autres 
de  ses  confrères  ;  par  une  fatalité 
des  plus  déplorables,  ce  fut  à  Ma- 
zel  qu'il  dorma  ,  en  quelque  sorte, 
ses  premiers  soins,  et  il  eut  la 
douleur  de  le  voir  périr,  après  10 
jours  de  maladie.  Le  genre  de  cet 
ouvrage  ne  nous  permet  pas  de 
discuter  la  part  qui  revient  à  M. 
Pariset  dans  la  gloire  acquise  par 
la  commission  qui  fut  envoyée  à 
Barcelonne.  Nous  dirons  simple- 
ment qu'à  son  retour  dans  sa  pa- 
trie, il  fut  comblé  des  faveurs  du 
gouvernement.  Il  devint  censeur 
et  membre  de  la  société  des  bonnes- 
lettres. M. Pariset  a  traduit  plusieurs 
ouvrages  d'Hippocrate,  ce  sont  :  1" 
Hippocralis  de  morbis  vulgaribus 
libri  primas  et  ter t lus  integri , 
1811,  in-52  ;  2°  des  notes  dans  le 
Formulaire  magistrat,  dcM-Caiiel- 
Gassicourt;  5°  A phorismes  d'Hip- 
pocrate, latin-français,  traduction 
nouvelle,  1817,  2  vol.  in-52.  i>l. 
Pariset  est  aussi  l'un  des  rédac- 
teurs du  Journal  de  Médecine.  Il 
a  fourni  ù  plusieurs  journaux,  et 
notannneut  au  Spectateur  politi- 
ijue  et  littéraire,  et  au  Dictionnaire 
ides  sciences  médicales  t  difféieii»  ar- 


PAR  ag 

ticles  ;  il  est  secrétaire  perpétuel 
de  l'Académie  royale  de  Médecine, 
et  cbevalier  de  Sainl-Micbel  et 
de  Tordre  royal  de  ia  légion-d'hon- 
neur. 

PAliISI  (Joseph)  ,  lieutenant- 
général  du  génie,  grand'croix  de 
l'ordre  militaire  de  Saint-Georges, 
membre  de  l'académie  royale  des 
sciences,  et  de  l'institut  d'encou- 
ragement de  Naplt  s,  des  acadé- 
mies italienne,  ionienne,  etc.,  na- 
quit à  Moliterno  en  Basilicate  le 
27  mars  1745  >  d'une  famille  ins- 
crite à  l'ordre  de  la  noblesse  de 
Coseuza.  Après  avoir  étudié  les 
mathématiques  ,  la  philosophie 
et  le  droit  sous  le  célèbre  Genove- 
si,  et  soùs  d'autres  habiles  maîtres, 
M.  Parisi  prit  le  parti  des  armes; 
il  servit  d'abord  dans  un  régiinent 
d'artillerie  ,  et  ensuite  dans  le 
corps  du  génie.  Ln  1781,  il  pu- 
blia un  ouvrage  intitulé  :  Elementi 
deW  architeltura  militare,  en  4 
vol.  in-8",  dont  il  parut  une  nou- 
velle édition  eu  iiSo2.  Cet  ouvra- 
ge donna  une  bonne  opinion  des 
lalens  de  rauleur,qu'on  jugea  di- 
gne d'aller  «-xaminer  les  progrès 
(pie  l'art  militaire  avait  faits  en  Al- 
lemagne. Il  y  lit  un  séjour  de  trois 
ans,  qui  lui  servirent  à  étendre  le 
cercle  de  ses  connaissances.  A 
son  retour  dans  sa  patrie  ,  il  fut 
promu  au  grade  de  colonel,  et 
chargé  de  l'organisation  d'ime  é- 
cole  militaire  dont  la  direction  lui 
fut  confiée.  En  171)6,  le  roi  de 
Naples  le  plaça  à  la  tête  de  l'état- 
major  de  l'armée  qu'il  avait  im- 
provisée pour  couvrir  les  frontiè- 
res de  son  royaume;  deux  ans 
après  il  l'éleva  au  grade  de  ma- 
réchal-de -camp  ,  et  le  nomma 
quartier -maître-général  de"  l'ai- 


5o  PAU 

niée  confiée  au  général  Mack. 
M.  Parisi  se  déclara  contre  la 
guerre ,  et  eut  uiGine  le  courage 
de  prédire  à  la  reine  Caroline  la 
funeste  is«ue  de  cette  campagne, 
à  laquelle  la  cour  de  Naples  se 
"préparait  contre  la  France  : 
«  Soixante  ans  de  paix,  lui  disait- 
ail,  nous  rendent  inhabiles  à  la 
«guerre.  »  Sous  les  règnes  de 
Joseph  Bonaparte  et  de  Joachiin 
Murât,  le  général  Parisi  a  occu- 
pé les  places  les  plus  éminentes  à 
la  cour  et  à  l'armée.  Il  était  con- 
seiller-d'élat ,  inspecteur- général 
<3u  génie  et  de  la  garde  nationale, 
gouverneur  dis  pages,  et  décoré 
du  grand-cordon  de  l'ordre  des 
Deux- Siciles.  Au  retour  du  roi 
Ferdinand,  le  général  Parisi,  des- 
titué de  toutes  ces  fondions  >  se 
relira  au  sein  de  sa  famille,  où  il 
se  consola  de  sa  disgrâce,  dans 
l'élude  et  par  les  souvenirs  d'une 
"vie  sans  remords  et  sans  honte. 
En  1820,  il  quitta  de  nouveau  sa 
retraite,  se  rendant  aux  vœux  de 
ses  amis  et  de  ses  concitoyens, qui 
l'appelaient  à  faire  partie  du  gou- 
vernement provisoire  ,  nommé 
par  le  roi  lor-qu'il  donna  une 
constitution  à  ses  peuples.  C'est 
de  l'école  militaire  fondée  par  ce 
général  que  l'on  a  vu  sortir  tant 
de  bons  officiers,  qui  déplorent 
comme  lui  de  ne  pas  appartenir 
à  une  autre  armée. 

PARISOT  (Jacques-Théodore), 
officier  de  marine,  né  à  Paris,  ie 
20  mai  1^85;  se  destinant,  dès  sa 
première  jeunesse ,  à  la  carrière 
des  armes,  que  son  père  avait  ho- 
norablement parcourue ,  il  n'en 
cultiva  pas  moins,  avec  soin,  les 
heureuses  dispositions  dont  il  était 
doué  pour  les  lettres  et  les  scien- 


pAii 

ces.  Après  avoir  fait  de  bonnes  é- 
tudes  dans  les  grandes  écoles  na- 
tionales, il  entra,  à  l'âge  de  i5ans, 
au  service  de  la  marine,  en  qua- 
lité d'aspirant,  grade  auquel  ses 
connaissances  théoriques  lui  don- 
naient droit.  Il  fut  bientôt  promu 
à  celui  d'officier,  et  dans  un  corps 
où  l'avancement,  à  cette  époque, 
n'était  rien  moins  que  rapide,  il 
parvint,  à  l'âge  de  28  ans,  sans 
autre  recommandation  que  celle 
de  SOS  services,  au  grade  de  lieu- 
tenant de  vaisseau.  Depuis  5  ans, 
il  en  avait  déjà  le  rang,  ayant  été 
nonuiié  au  commencement  de 
1807,  capitaine  -  adjudant-  major 
d'un  bataillon  de  marins.  M.  Pa- 
risot  eut  part  à  plusieurs  combats 
pendant  la  guerre  maritime  que 
vint  suspendre ,  pour  quelques 
mois,  la  paix  d'Amiens,  et  après 
la  rupture  de  cette  courte  trêve, 
il  se  fit  remarquer  de  nouveau 
dans  diverses  occasions  où  la  flot- 
te de  Boulogne  eut  à  combattre 
les  croisières  anglaises.  Employé 
ensuite  sur  la  flotte  de  l'Escaut, 
il  se  distingua,  en  1809,  lors  de 
l'expédition  que  les  Anglais  tentè- 
rent à  l'embouchure  de  ce  fleuve, 
et  plus  particulièrement  encore 
lors  de  leur  nouvelle  tentative 
contre  la  place  d'Anvers,  en  1814. 
Pendant  le  bombardement  de  ce 
port,  le  gouverneur  Carnot  lui  a- 
vait  donné  le  commandement  d'un 
des  principaux  bastions  où  se 
trouvaient  des  batteries  de  pièces 
de  18  et  de  mortiers,  qui  firent  le 
plus  grand  mal  aux  ennemis  ; 
pour  le  récompenser  des  services 
qu'il  n'avait  cessé  de  rendre ,  le 
gouverneur  lui  confia  le  com- 
mandement d'un  des  forts  exté- 
rieurs de  la  place,  qu'il  défendit 


PAR 

jusqu'à  la  fin  du  siégp.  Après  les 
événeiu«n.s  de  i8i5,  M.  P.irisut  se 
vit  ti»ut  -  à-coup  an'êtor  dans  sa 
carrière  inililaire  ,  à  l'âge  do  32 
ans.  Le  vicoinfe  Dabouchage,  a- 
lors  ministre  de  !a  marine,  ne  ju- 
gi'a  point  à  propos  de  conservera 
{'état  un  pareil  officier,  el  il  ne 
fut  point  compris  dans  la  nouvelle 
organisation  du  corps  de  la  ma- 
rine, dont  ce  minisire  présenta  le 
projet  au  roi.  Des  hommes  dont 
le  même  ministre  connaissait  sans 
doute  le  mérite,  et  beaucoup  d'au- 
tres qui  avaient  servi  dans  l'étran- 
ger, lurent  alors  employés  de  pré- 
l'érenoe  :  ^I.  Pari<ot  n'eut  même  ni 
pension  ni  retraite.  Il  supporta, 
avec  courage,  une  disgrâce  minis- 
térielle, qu'il  partageait  d'ailleurs 
avec  plusieurs  olïiciers  des  plus 
distingués  de  sou  arme  ,  comme 
lui  bons  militaires  ,  mais  peu 
courtisans.  Les  hîttres  qu'il  n'avait 
pas  ces^!é  de  cidtiver  devinrent  son 
unique  consolation.  A  la  connais- 
sance approfondie  des  diverses 
parties  de  l'art  de  la  guerre  ,  M. 
Parisot  joint  celle  des  principales 
langues  de  l'Europe.  Il  a  fourni 
des  renseignemens  précieux  pour 
la  partie  nic»ritin)e,  ainsi  que  des 
notices  et  des  articles  à  plusieurs 
ouvrages  publiés  depuis  i8i5,  tels 
que  Victoires  et  Conquêtes  ;  An- 
nales des  faits  et  des  sciences  mili- 
taires ,  etc.  Ou  lui  dcfit  aussi  la 
traduction  de  quelques  romans 
anglais,  tels  que  Florence  Macar- 
thy,  de  lady  Morgan ,  le  Château, 
de  Kcnilwurth,  de  AValter  Scott, 
t  d  autres  ouvrage'?  plus  impor- 
tans,  notamment  les  Vicws  of  A- 
merica,  de  miss  Wright,  The  Elé- 
ments of  polit icai  cconomy,  de  J. 
iMill,   et  lc8  fameuses  Letters  of 


PAPi 


5i 


Janius,  qui  ont  paru  en  i823. 
Dans  ce  dernier  ouvr.ig>>,  le  tra- 
ducteur eut  à  reproduire  en  notre 
langue,  les  mâles  beautés  d'un 
patriote  anglais  ,  dont  le  nom  est 
resté  ignoré,  mais  dont  la  plume 
fît  pâlir  plus  d'une  fois  les  minis- 
tres prévaricateurs  de  son  pays. 
Ces  lettres,  comme  on  sait,  ont 
survécu  aux  circonst;mces  qui  les 
firent  naître,  et  sont  encore  au- 
jourd'hui citées  en  Angleterre 
comme  des  chefs-d'œuvre.  En 
rendre  les  pensées  dans  toute  leur 
concision,  et  les  éloquentes  ex- 
pressions en  toute  leur  énergie, 
n'était  point  une  tâche  facile;  M. 
Parisot  s'en  est  acquitté  avec  suc- 
cès. Il  a  aussi  coopéré  depuis  plu- 
sieurs années,  à  la  rédaction  de 
journaux,  et  autres  ouvrages  pé- 
riodiques, au  Mercure  de  France, 
jusqu'à  ce  qu'il  cessât  de  paraître 
sous  ce  titre  ;  à  l'ancien  Diable 
boiteux,  à  la  Renommée,  etc.  Il  est 
aujourd'hui  l'un  d(!s  rédacteurs 
du  journal  le  Courrier  français,  et 
de  l'Encyclopédie  moderne,  publiée 
par  iM.  Gourtin. 

PARISOT  (N.),  membre  du 
conseil  des  cinq-cents  et  de  la  lé- 
gion-d'honneur, était,  avant  la 
révolution,  avocat  au  parlement 
de  Paris,  et  attaché  comme  con- 
seil à  la  maison  de  Soubise,  et, 
en  la  même  qualité,  à  l'adminis- 
tration des  fermes  générales.  Il 
fut  nommé,  en  1792.  capitaine  de 
la  garde  constitutionnelle  du  roi, 
et  concourut  à  la  défense  du  châ- 
teau lors  des  événemens  du  10 
août.  Grièvement  blessé,  il  dut  la 
vie  à  quelques  grenadiers  de  la 
section  des  Filles-Saint-Thomas, 
qui  l'enlevèrent  des  cours  du  châ- 
teau. A  peine  rétabli,  il  donna  de 


ù^  PAR 

nouvelles  preuves  d'attachement 
à  la  tamille  royale  :  il  vendit  son 
argenterie  et  en  ût  remettre  le 
montant  à  madame  Elisabeth, 
soeur  du  roi  [voyez  Elisabeth). 
Cette  auguste  princesse  ne  put 
lui  témoigner  sa  gratitude,  qu'en 
lui  adressant  quelques  mots  tracés 
avec  la  pointe  d'une  épingle.  Après 
la  mort  du  roi,  et  ayant  tout  à 
craindre  de  la  haine  de.  ses  enne- 
mis, il  quitta  la  France.  Il  était  à 
peine  éloigné,  qu'un  rédacteur  de 
la  Feuille  du  jour,  portant  à  peu 
près  son  nom  [voyez  Parisead), 
fit  condaniné  à  mort,  bien  qu'il 
prouvât  qu'il  n'avait  pas  servi 
dans  la  garde  constitutionnelle  et 
qu'il  fût,  enfin,  étranger  à  l'indi- 
vidu que  l'on  poursuivait.  Parisot 
reparut  après  la  révolution  du  q 
thermidor  an  2  (27  juillet  179^), 
et  devint,  en  1797,  membre  du 
conseil  des  cinq-cents.  Il  s'y  mon- 
tra sage  et  modéré,  et  échappa  au 
coup  d'état  du  18  fructidor  an  5 
(4  septembre  1797).  Opposé  à  la 
journée  du  18  brumaire  an  8  (9 
novembre  1799),  il  fut  exclu  du 
nouveau  corps -législatif.  Depuis 
celte  é})oque  jusqu'au  retour  de 
la  famille  royale,  en  181 4,  il  Té- 
cut  loin  de  Paris  ,  étranger  aux 
affaires  publiques.  Il  reçut  du  roi 
la  décoration  de  la  légion-d'hon- 
neur, et  fut  admis  au  conseil  de 
M°"  la  duchesse  douarière  d'Or- 
léans ;  il  en  était  encore  mem- 
bre lorsqu'il  mourut  en  1816. 

PARK.  (voyez  Mlngo-Pauk). 

PARKER  (sir  Hyde),  amiral 
anglais,  fut  destiné  do  bonne  heu- 
re au  service  de  mer.  Il  se  fit  re- 
marquer dans  plusieurs  circons- 
tances, et  parvint  rapidement  aux 
premiers  grades.  Promu  au  grade 


PAR 

de  vice-amiral,  il  futconstamment 
employé  contre  la  France,  soit  en 
Amérique,  soit  dans  la  Méditer- 
ranée. I!  se  signala  particulière- 
ment, le  14  février  1797,  à  la  ba- 
taille gagnée  par  lord  Saint-Vin- 
cent sur  la  flotte  espagnole  ;  la 
commune  de  Londres  lui  envoya 
des  lettres  de  bourgeoisie  dans 
une  boîte  d'or  de  la  valeur  de  100 
guinées.  Néanmoins,  au  mois  de 
novembre  1801,  il  fut  mis  en  ju- 
gement pour  avoir  expédié  aux 
Indes-Occidentales,  sans  un  ordre 
positif,  les  biltimens  V America  et 
la  Cléopâtre;  mais  la  cour  mar- 
tiale, devant  laquelle  il  comparut, 
l'acquitta  honorablement,  11  mou- 
rut, en  décembre  1802,  dans  sa 
terre  du  comté  de  Surrey. 

PARKER  (William),  capitaine 
de  vaisseau  anglais,  entra,  très- 
jeune  encore,  dans  la  marine^  et 
mérita  par  ses  services  le  com- 
mandement d'un  vaisseau.  La 
guerre  de  la  révolution  française 
lui  fournit  plusieurs  occasions  de 
se  distinguer,  notamment  le  28 
mai  1794,  où  il  soutint,  avec  V Au- 
dacieux, de  74,  un  combat  contre 
le  vaisseau  français  la  Bretagne, 
de  U2  canons.  Le  lendemain,  il 
eut  un  nouvel  engagement  avec 
une  frégate  et  deux  corvettes.  Il 
courut  se  réparer  dans  le  port  de 
Plymoulh,  et  se  trouva  à  la  ba- 
taille que  livra,  le  1"  juin,  l'amiral 
Howe.  Le  capitaineParker  qui  était 
aussi  à  l'attaque  devant  Boulogne 
en  septendjre  1801,  y  reçut  une 
blessure  grave,  dont  il  mourut  peu  . 
de  jours  après, 

PARKER  (Samuel),  évêque 
de  l'église  épiscopale  des  états  de 
Massachusselts,  naquit  à  Ports- 
moulh,  dans  le  New-ll.ampshirc, 


PAR 

en  1^45;  fit  ses  études  an  collège 
irHarvard,  y  prit  ses  grades  en 
1765,  et  se  livra  pendant  9  ans  à 
l'instruction  de  la  jeunesse,  à 
Newburg  et  dans  d'autres  villes. 
En  1775,  il  fit  le  voyage  d'Angle- 
terre pour  y  prendre  les  ordres; 
il  les  reçut  de  l'évt  que  de  Lon- 
dres, et  retourna  sur-le-champ  à 
Boston,  où  on  le  noiniiia,  en  1774? 
ministre  assistant  de  l'église  de  la 
Trinité,  dont  il  devint  recteur,  en 
1779.  Tous  les  ecclésiastiques  é- 
piscopaux  avaient  abandonné  la 
contrée  pendant  la  guerre  de  l'in- 
dépendance; Parker,  lesté  seul  à 
son  poste,  préserva,  par  l'ascen- 
dant de  son  mérite  et  par  sa  fer- 
meté, son  église  de  la  disper- 
sion. Quelques  aimées  après,  il 
fut  mis  à  la  tête  des  églises  épis- 
copales  du  pays  des  Massachus- 
setts,  poste  devenu  vacant  par  la 
mort  de  l'évêque  Bass;  mais  il  ne 
l'occupa  que  quelques  mois  ,  la 
mort  l'ayant  surpris  inopinément 
à  Boston,  le  6  décembre  1804.  Sa 
mort  laissa  des  regrets  dans  la 
contrée  qu'il  avait  habitée;  il  s'y 
était  rendu  recoumiandable  par 
ses  nombreux  actes  de  bienfai- 
sance. 11  avait  publié,  en  1797, 
un  choix  de  Sermons  et  quelques 
discours  de  circonstance,  etc. 

PARKER  (Richakd),  chef  de 
la  révolte  qui  éclata,  en  1797,  à 
bord  de  l'escadre  anglaise,  naquit, 
en  i70o,àExator.  Il  avait  reçu  une 
assez  bonne  éducation,  et  était  en- 
tré dans  la  marine  en  qualité  de 
surnuméraire,  à  l'époque  de  la 
guerre  d'Amérique.  A  la  paix ,  il 
se  maria  avantageusement,  mais 
il  eut  bientôt  dissipé  la  fortune  de 
sa  femme;  réduit  alurs  à  contrac- 
ter des  dette»,  qu'il  ne  put  acquit- 

T.  XV». 


PAR 


55 


ter,  il  fut  mis  en  prison  à  Edim- 
bourg. La  résolution  que  prirent, 
dans  cet  intervalle  ,  les  différens 
comtés  de  lever  des  matelots  pour 
la  marine  royale,  lui  fournit  une 
occasion  de  briser  ses  fers.  Il  s'en- 
rôla pour  être  libre,  et  fut  conduit 
à  Nore,  où  il  monta  à  bord  du  Sand- 
wich; il  ne  tarda  pas  à  s'y  faire  re- 
marquer par  des  propos  séditieux, 
et  des  provocations  contre  les  of- 
ficiers; elles  brisèrent  peu  à  peu  les 
liens  de  la  discipline,  et  lui  acqui- 
rent toute  la  confiance  des  mate- 
lots. Bientôt  la  révolte  éclata  sur 
toute  la  flotte,  et  ses  nombreux 
partisans  l'en  nommèrent  amiral. 
Il  montra  dans  cette  circonstance 
une  dignité  et  une  résolution  qui 
surprirent  tous  ceux  qui  en  furent 
témoins,  et  il  ne  parut  nullement 
étranger  à  des  fonctions  si  impor- 
tantes et  si  nouvelles  pour  lui.  Cet- 
te fièvre  d'insurrection  se  calma 
enfin;  la  crainte  du  châtiment  fît 
naître  des  réflexions,  et  Parker  s'a- 
perce vant  que  son  rôle  était  fini,  se 
livra  lui-même,  le  i5  juin,  entre 
les  mains  de  quatre  de  ses  cama- 
rades, ne  leur  demandant  que  de 
le  garantir  des  insultes  des  mate- 
lots qui  s'étaient  refusés  à  recon- 
naître son  autorité.   On  l'embar- 
qua alors,  sous  escorte,  dans  une 
chaloupe,  et  le  peuple,  à  son  dé- 
barquement,  l'accueillit  à  coups 
de  sifflets.  Ne  me  sifflez  pas,  je  me 
justifierai,  s'écria-l-il  douloureuse- 
ment. Déposé  d'abord  à  Maidsthone, 
il  fut  bientôt  transféré  à  Shcerness. 
Scpljours  entiers  furent  employés  à 
lui  faire  subir  diflérens  interroga- 
toires,  dans  lesquels  rien  ne  fut 
épargné   pour  découvrir  les  mo- 
teur.-, secrets  de  l'insurreclion  :  ses 
a  veux  ne  procurèrent  aucun  éclair- 


54 


PAR 


cissement.  Le  22  juin,  on  enten- 
dit plusieurs  témoins,  qui  tous  dé- 
posèrent contre  lui.  Son  caractè- 
re ne  se  démentit  pas  un  seul  ins- 
tant; il  répondit  à  tout  avec  au- 
tant de  noblesse  que  de  fermeté. 
Sur  la  fin  du  mois,  il  fut  condam- 
né à  être  pendu.  Il  entendit  son 
arrêt  sans  rien  perdre  de  sa  tran- 
quillité, et  assumant  seul  le  crime 
qu'il  allait  expier,  il  sollicita  l'in- 
dulgence de  ses  juges  en  faveur 
des  autres  matelots  qui  avaient 
pris  part  à  l'insurrection.  L'exécu- 
tion eut  lieu  le  3o  juin,  près  de 
Sheerness,  à  bord  du  Sandwich. 
Il  conserva  jusqu'au  dernier  mo- 
ment la  plus  parfaite  résignation. 
Son  corps  fut  ensuite  exposé  sur 
l'île  de  Cheppi,  vis-à-vis  de  la  ra- 
de du  Nord. 

PARRES  (Samuel),  savant  chi- 
miste, né  en  Angleterre,  est  au- 
teur de  plusieurs  ouvrages  esti- 
més. Son  Catnliisme  chimique, 
publié  â  Londres  en- 1806,  in-8", 
était,  en  1 8 1  2,  à  sa  cinquième  édi- 
tion. On  a  encore  de  lui  :  Rudi- 
mens  de  chimie  et  récits  de  quelques 
expériences  t}ouvelles,v?!>oi^,'\n-ii'>;  et 
Essais  chimiques  sur  divers  sujets, 
i8i5,  5  vol.  in-13.  M.  Parkes  est 
memi)rc  des  sociétés  linnéenne  et 
géoldgifpie  ,  de  la  société  des  an- 
tiquaires de  Perlh,  etc.,  etc.  Il 
est  propriétaire  d'une  gntfïde  ma- 
nufacture de  produits  chimiques, 
près  de  Londres. 

PARRHLJRSÏ  (.Jean),  ministre 
de  l'église  anglicane,  naquit,  en 
i^'^S,  à  Catesby-House,  comté  de 
Noribampton,  et  mourut,  le  21 
février  1797,  à  Epsomen-Surrey. 
II  était  très-instruit,  et  dès  1753, 
il  avait  écrit  contre  Wesley.  De- 
puis 1762,    il  a   fait   successive- 


PAR 

ment  paraître  :  1°  Son  Diction- 
naire hébreu,  sans  points,  précédé 
d'une  Gramm.(iire  hébraïque  et  chat- 
daique,  également  sans  points  : 
une  cinquième  édition  de  cet  ou- 
vrage, généralement  eslimé,  a  été 
publiée  à  Londres,  gros  in-8°,  en 
1802;  2°  un  Lexique  grec  et  an- 
glais du  N oweeau-T estament ,  pré- 
cédé d'une  Grammaire:  grecque  : 
la  première  édition  de  176^5  ,  in- 
4°,  a  été  suivie  de  plusieiu^s  au- 
tres; 5°  la  Divinité  et  la  préexis- 
tence de  Jésus  -  Christ ,  prouvées 
par  l' Ecriture;  ouvrage  particu- 
lièrement dirijïé  contre  Priesllev. 
On  trouve  encore  une  Lettre  cu- 
rieuse de  Parkhurst,  sur  la  confu- 
sion des  langues  à  Babel  ;  elle  a 
été  insérée  dans  le  Gentleman  Ma- 
gazin,dn  u)ois  d'août  1797.  Ce  sa- 
v;mt  était  aussi  recomniandable 
par  ses  vertus  que  par  ses  vastes 
connaissances. 

PARMENTIER  (  Antoine- Au- 
gustin), inspecteur  ~  général  du 
service  de  santé  ,  membre  de  l'ins- 
titut, naquit,  en  1737,  à  Mont- 
didicr,  département  de  la  Somme, 
d'ime  bonne  famille  de  bourgeoi- 
sie. Étant  bien  jeune  encore,  il 
perdit  son  père  et  ne  put  être 
placé  au  collège  par  le  défaut  de 
foitune  de  sa  famille  ;  mais  sa  mè- 
re ,  dont  l'éducation  avait  été  très- 
soignée,  lui  enseigna  les  élémens 
des  langues  française  et  latine, 
leçons  que  sa  situation  pénible 
ne  lui  permit  pas  de  continuer. 
Parmentier  fut  mis,  en  1755,  en 
apprentissage  chez  un  apothicaire 
de  Monldidier.  Ses  heureuses  dis- 
positions firent  sentir  la  nécessité 
(!<;  ['(Mivoyer  à  Paris,  011  il  pour- 
rait avec  ))lus  d'avantages  se  livrer 
aux   études  de    celte   profession. 


A.\.>^ 


Qj  a/nic/if(('/- 


PAR 

Placé  chez  mi  pharmacien  de  ses 
parens,  puis  employé  comme 
)ihariii;icien  dans  les  hôpilaux  de 
rarmée  de  Hanovre,  il  fixa  par 
-«on  zèle  et  son  aplilude  l'attention 
do  Bajen,  pharmacien  en  chef, 
»|iii  le  présenta  à  M.  de  Chamous- 
set,  intendant-  général  des  hôpi- 
taux. «  Stimnié,  disent  quelques- 
nns  do  ses  biographes  français  et 
étrangers,  par  ses  vertueux  maî- 
tres ,  il  profita  avec  ardeur  de 
toutes  les  sources  d'instruction  qui 
s'olTrirent  à  lui ,  visitant  les  fabri- 
ques dans  les  villes,  travaillant 
dans  les  laboratoires  des  pharma- 
ciens habiles,  et  observant  à  la 
campagne  les  pratiques  des  fer- 
miers. Fait  cinq  fois  prisonnier, 
et  transporté  dans  des  lieux  éloi- 
gnés ,  il  apprit  alors,  par  sa  pro- 
pre expérience,  jusqu'où  peuvent 
aller  les  horreurs  du  besoin,  ce 
qui  allniiia  peut-être  en  lui  ce  beau 
feu  d'humanité  dont  il  a  été  ani- 
mé durant  sa  longue  carrière.  »  La 
paix  de  1765  ramena  A  Paris  ce 
jeune  et  habile  praticien ,  qui , 
pour  augmenter  ses  connaissances 
dans  les  différentes  parties  de  son 
art,  suivit  les  leçons  des  NoUet, 
Rouelle,  Antoine  et  Bernard  de 
.lusàiuu.  En  1766,  il  remporta  au 
concours  une  place  inférieure 
(mais  vivement  disputée)  de  phar- 
macien,vacante  i\  l'hôtel  royal  des 
Invalides.  Ses  supérieurs,  frappés 
lie  son  instruction  et  de  son  zèle 
infatigable,  obtinrent  du  roi,  en 
1772,  la  place  de  pharmacien  en 
chef,  dont  il  ne  toucha  que  les 
énioUnnens,  les  sœurs  de  la  cha- 
rité, en  possession,  depuis  la  for- 
mation de  cet  établissement,  de  la 
<lircction  de  la  pharn)acie,étan  t  par- 
Tenues  à  conserver  les  droits  dont 


PAR 


35 


elles  voulaient  la  possession  exclu- 
sive. Libre,  contre  son  espér.mce, 
de  disposer  de  tout  son  temps,  il 
se  livra  à  des  travaux  d'utilité  do- 
mestique. Quelques  années  aupara- 
vant, en  i'y()()^  une  disette  géné- 
rale avait  déterminé  l'académie  à 
proposer  un  prix  pour  le  meilleur 
mémoire  qui  signalerait  les  végé- 
taux capables  de  suppléer  aux  plan- 
tes céréales,  Parmentier  remporta 
ce  prix.  La  pomme  de  terre,  trans- 
plantée du  Pérou  en  Europe  dès 
le  i5"  siècle,  devint  l'objet  de  sa 
constante  prédilection;  il  la  re- 
commanda avec  une  persévérance 
infatigable;  combattit  les  préju- 
gés qui  la  repoussaient  depuis  plus 
de  deuxsiècles, d'abord  parce  qu'on 
prétendait  qu'elle  était  suscepti- 
ble d'engendrer  b  lèpre,  ensuite 
parce  qu'elle  pouvait  être  la  cause 
de  fièvres  nombreuses  ,  et  vit  en- 
fin ,  mais  non  sans  peine,  triom- 
pher cette  utile  racine.  Non-seule- 
ment il  avait  démontré  que  l'on 
pouvait  trouver  un  aliment  déli- 
cat dans  la  fécule  de  la  pomme  de 
terre,  naguère  exclusivement  li- 
vrée aux  animaux  ,  mais  encore 
qu'elle  n'appauvrissait  point,  com- 
me on  le  prétendait,  le  terrain  où 
elle  était  semée ,  et  qu'elle  triom- 
phait même  des  terres  les  plus  in- 
grates. Pour  parvenir  à  ces  prin- 
cipaux résultats,  il  sollicita  de 
Louis  XVI et  obtint  5'jarpens  de  la 
plaine  des  Sablons,  dont  l'entiè- 
re stérilité  n'avait  encore  pu  être 
vaincue.  Le  terrain  ensemencé,  il 
attend  patiemment  (\^\Q  la  gcrmi- 
naison  vienne  justifier  ses  espéran- 
ces et  ses  promesses  que  l'on  ju- 
geait illusoires.  Les  fleurs  parais- 
sent enfin,  etParmentier enchanté 
schàted'en  former  un  bouquet  dont 


56  TAR 

ilestadmisà  faire  un  hommage 
solennel  au  roi,  qui  protégeait 
son  entreprise.  Louis  XVI  en  pare 
aussitôt  sa  boutonnière,  et  par  son 
suttVage  royal  détermine  celui  des 
courtisans.  La  piovince  voulut 
jouir  des  avantages  de  cette  utile 
tentative,  que  Parmenlier  renou- 
vela avec  le  même  bonheur  dans  la 
pl.iine  de  Grenelle.  Il  lit  aux  Inva- 
lides, avec  un  succès  parfait,  et  en 
présence  de  Franklin,  l'essai  d'un 
procédé  pour  obtenir  «  un  pain  sa- 
voureux de  la  pulpe  et  de  l'ami- 
don de  la  pomme  de  terre  combi- 
nés à  égaie  portion ,  sans  aucun 
mélange  de  farine.  »  Parmenlier 
enseigna  aux  pâtissiers  de  Pa- 
ris ,  avec  son  désintéressement  or- 
dinaire, le  secret  de  fabriquer  le 
gâteau  ou  biscuit  de  iSavoie,  qui  a 
pour  base  l'amidon  de  pommes  de 
terre.  Enfin  ou  raconte  qu'il  don- 
na un  dîner  «  dont  tous  les  apprêls, 
jusqu'aux  liqueurs,  consistaient 
dans  la  pomme  déterre,  déguisée 
sous  vingt  formes  différentes  ,  et 
où  il  avait  réuni  de  nombreux  con- 
vives :  leur  appétit  ne  fut  point  en 
défaut,  et  les  louanges  qu'ils  don- 
nèrent à  l'amphitriou  tournèrent 
à  l'avantage  delà  merveilleuse  ra- 
cine. »  Ces  succès  répandirent  le 
nom  de  Parmentier  et  de  sa  plante 
chérie  dans  toutes  les  parties  de 
l'Europe.  M.  François  de  Neufchâ- 
teau  proposa  de  sul)sliluer  au  nom 
impropre  de  la  Pomme  de  terre, 
celui  de  la  Parmenlicre.  Eu  effet,  le 
nom  de  ce  célèbre  agronome  et  celui 
de  ce  végétal,  sont  devenus  insépa- 
rables dans  la  mémoire  des  a  mis  des 
hommes.  Lepeuplen)ême  les  avait 
imis  ,  mais  ce  n'était  pas  toujours  a- 
vec  reconnaissance,  car  lorsqu'à 
certaine  époque  de  la  révolution 


PAii 

31.  Parmentier  fut  proposé  pour 
une  place  municipale,  un  des  vo- 
tans  s'opposa  à  son  élection,  en 
s'écriant  avec  colère  :  oIL  ne  nous 
fera  manger  que  des  pommes  de  ter- 
re ;  c'est  lui  qui  Us  a  Inventées.  » 
Au  surplus,  c'est  aux  hommes  de 
l'art  à  consigner  dans  les  fastes  de 
la  science  et  de  l'utilité  publique , 
à  signaler  enfin  tous  les  services 
que  Parmentier  a  rendus  dans  les 
différentes  fonctions  qu'il  a  rem- 
plies. Son  humanité  a  toujours  été 
égale  à  ses  talens.  Le  gouverne- 
ment directorial  le  nomma,  en 
1796,  membre  de  l'institut.  Sous 
le  gouvernement  consulaire  ,  il  de- 
vint président  du  conseil  de  salu- 
brité du  département  de  la  Seine, 
et  fut  confirtué  dans  ses  fonctions 
d'inspecteur-général  du  service  de 
santé  et  d'adminiî-trateur  des  hos- 
pices,qui  lui  avaient  été  précédem- 
ment confiées.  Parmentier  mourut 
généralement  regretté,  le  17  dé- 
cembre i8i3.  Voici  le  portrait  mo- 
ral et  phyfique  que  l'on  a  fait  de 
cet  excellent  citoyen.  «Partout,  ce 
qui  pouvait  être  utile  avait  droit 
d'exciter  son  attention ,  d'exercer 
son  activité;  partout  où  l'on  pou- 
vait travailler  beaucoup,  rendre 
de  grands  services  et  ne  rien  rece- 
voir, partout  où  l'on  se  réunissait 
pour  faire  du  bien,  il  accourait  le 
premier,  et  l'on  pouvait  être  sur 
de  disposer  de  son  temps,  de  sa 
plume,  et  au  besoin,  de  tout  ce 
qu'il  possédait.  Une  taille  élevée  et 
restée  droite  jusqu'à  ses  derniers 
jours ,  une  figure  pleine  d'aménité, 
un  regard  à-la-fois  noble  et  doux , 
de  beaux  cheveux  blancs  comme 
la  neige  semblaient  faire  de  ce  res- 
pectable vieillard  l'image  de  la  bon- 
té et  delà  vertu.  »  M.  Cuvier,  au 


PAU 

ivjom  de  l'instilut ,  M.  Silvestic,  au 
nom  do  la  société  d'iigncullurc, 
etfeuC;ulcl-de-Ga5sicourt,aunom 
de  la  sociélé  de  phar^nacie ,  ont 
fait  l'Eloge  de  Parmentier.  Nous 
allons  donner,  d'après  la  Biblio- 
fraplUc  agronomique ,  une  liste  a- 
brégée  des  ouvrages  de  ce  célèbre 
agronome,  sur  le  mérite  littéraire 
desquels  on  doit  peu  s'arrêter,  mais 
qui,  sous  le  rapport  de  l'ulilité, 
sont  2>i"esque  tous  dignes  de  fixer 
l'attention;  ce  sont  :  i°  Examen 
cliimique  des  pommes  de  terre,  Pa- 
ris, 1775,  in- 12;  1"  Manier e  de 
faire  le  pain  de  pommes  de  terre 
sans  mélange  de  farine,  Paris,  1799» 
in-y";  5"  lleclierckes  sur  les  végé- 
taux nourrissans  qui,  dans  les  temps 
de  disette  f  peuvent  remplacer  les 
alimens  ordinaires,  Paris,  1781, 
in-8'  ;  4"  Traité  sur  ta  culture  et  les 
usages  des  pommes  de  terre  ,  de  la 
patate  et  du  topbiambourg^  Paris  , 
1789,  in-8°;  ^V  Récréations  physi- 
ques, économiques  et  cUimiques  de 
Model ,  Paris  ,  1774?  2  vol.  in-8°, 
avec  des  observations  de  Parmen- 
tier, notamment  sur  les  champi- 
gnons; Ct"  Avis  aux  bonnes  ménagè- 
res des  villes  et  des  campagnes  sur 
la  manière  de  faire  le  pain  ,  Paris, 
1774  ,  reproduit,  en  1778,  sous  le 
titre  suivant  :  7°  le  Parfait  boulan- 
ger, ou  Traité  complet  sur  la  fabri- 
cation et  le  commerce  du  pain,  Pa- 
ris, 1778,  in-8";  8°  Traité  de  la 
châtaigne  f  Paris,  1780,  in -8°; 
9"  avec  M.  Cadet- de-Vaux,  Re- 
cueil de  pièces  concernant  les  exhu- 
mations fuites  dans  l'enceinte  de 
l'église  Saint-  Éloi  de  Dunkerque  , 
en  178/1;  10"  Le  mais  ou  blé  de 
Turquie,  apprécié  sous  tous  ses  rap- 
ports ,  3*  édition ,  Paris ,  imprime- 
rie impériale  :  lu  i"  édition  avait 


PAR 


57 


paru,  en  1786,  à  Bordeaux;  11° 
Instruction  sur  les  moyens  de  sup- 
pléer à  la  disette  des  fourrages,  et 
d' augmenter  la  subsistance  des  bes- 
tiaux, 1785;  i '2"  Chimie  hydrau- 
lique de  Lagaraye,  1785,  nouvelle 
édition  avec  des  notes  de  Parmen- 
tier ,  dans  lesquelles  il  présente  des 
observations  sur  celles  de  nos  plan- 
tes indigènes  d'où  l'on  peut  retirer 
une  recule  bleue  comparable  à  l'in- 
digo ;  1  5°  Dissertation  sur  la-natu- 
re des  eaux  de  la  Seine ,  avec  des 
remarques  sur  les  propriétés  phy- 
siques et  économiques  de  l'eau  en» 
général,  à  Paris,  1787;  14° /?!&- 
Iruction  sur  la  conservation  et  les 
usages  de  la  pomme  de  terre,  pu- 
bliée par  ordre  du  gouvernement, 
1789;  ï  5°  Economie  rurale  et  do- 
mestique dans  la  Bibliothèque  des 
Dames,  1790,  8  vol.  in-  18;  i6° 
Précis  d'expériences  et  d'observa- 
tions sur  les  différentes  espèces  de 
lait,  considérées  dans  leurs  rapports 
avec  la  chimie^  la  médecine  et  l'éco- 
nomie rurale,  Strasbourg,  1799, 
in-8°;  17"  Mémoire  sur  le  sang, 
Paris,  1791,  in-4°  :  ces  deux  der- 
niers ouvrages,  composés  en  socié- 
té avec  M.  Deyeuxi  voy.  ce  nom  ), 
lurent  couronnés  par  la  société  de 
médecine,  en  1790  et  1791  ;  18" 
plusieurs  Rapports  au  ministre  de 
l'intérieur  :  les  plus  remarquables 
sont  ceux  sur  les  soupes  àla  Rum- 
ford  et  sur  la  substitution  de  l'orge 
mondé  au  riz,  avec  des  observa- 
tionssur  les  soupes  aux  légumes  ou 
à  la  Rumford;  19°  Code  pharma- 
ceutique, '807,  3'édilion  ;  0.0° Ins- 
tructions sur  les  sirops  et  conserves 
de  raisins  destinés  à  remplacer  le 
sucre  ,dei8o8à  i8ii;2r  Nouvel 
aperçu  des  résultats  obtenus  de  la 
fabrique  des  sirops  cl  conserves  de 


58 


PAU 


raisins,  i8i3,in-8";  22°  enfin  il 
a  donn«;  un  grand  nombre  d''Jrti- 
cles  au  Cours  d'agriculture  de  l'abbé 
Rozier,  i\  la  Bibliotlièque  physico- 
économique ,  au  Journal  de  physi- 
que, à  VEncyciopcdie  par  ordre  de 
madères ,  au  Théâtre  d'agriculture 
d'Olivier  de  Serres,  édition  de  M. 
Huzard,  au  BuUelin  de  pharmacie, 
au  Traité  théorique  et  pratique)  sur 
la  culture  de  ta  vigne,  efc.  ,  etc. 

PARNY  (Évariste-Désirk-Des- 
FORGES,CHEVALiER  de),  naquit  à  l'île 
Bourbon.  C'est  le  plus  p;u'fait  des 
poètes  erotiques  que  la  France  ait 
produits.  A  une  époque  où  la  fa- 
veur et  la  prétention  se  parta- 
geaient l'empire  de  la  poésie  légè- 
re, il  fond  »,  entre  Dorât  et  Desina- 
his,  une  école  de  poésie  naturelle 
et  brillante,  où  toute  la  pureté  du 
goût,  toute  la  grâce  du  bon  ton, 
s'unissaient  à  l'abandon  du  senti- 
ment. A  g  ans,  il  quitta  les  cbanips 
que  le  soleil  du  tropique  brûle 
et  féconde,  et  vint  faire  ses  études 
à  Rennes.  Dégoûté  des  travaux 
pédantesques  qu'on  lui  imposait, 
il  fut  un  écolier  paresseux;  et 
bientôt  son  âme,  qui  avait  besoin 
d'enthousiasme,  se  livra  tout  en- 
tière aux  idées  mystiques.  On  l'ar- 
rêta dans  le  cours  de  ses  dévo- 
tions; on  lui  défendit  la  lecture  de 
la  Bible.  Il  ne  tarda  pas  à  changer 
de  passion,  et  se  livra  au  plaisir 
avec  la  mtMne  exaltation  qu'il  avait 
portée  dans  sa  prétendue  vocation 
religieuse.  Devenu  militaire,  il 
partit  pour  l'île  Bourbon,  où  il 
connut  Éleonore  B***,  jeune  créo- 
le, moins  belle  que  jolie,  et  qui 
possédait  surtout  la  grâce, 

Cette  grâce  plus  belle  encor  que  la  beauté. 

Uléonoie  avait  trciic  ans;    Parfiy 


PAU 

en  avait  vingt.  Il  employa  aiiprns 
d'elle  et  le  huigage  de  la  passion 
ardente  qu'il  ressentait,  et  loutrs 
les  ressources  de  la  séduction  :  le 
cœur  d'Eleonore  fut  sa  récompen- 
se ;  il  ne  lui  fut  pas  permis  de  lui 
donner  son  nom,  et  sa  maîtresse 
devint  l'épouse  d'un  autre.  Notre 
littérature  ne  connaissait  point  l'é- 
h'gie  erotique  :  Parny  écrivit  en 
vers  harmonieux  le  roman  de  ses 
amours.  Ses  accens  étaient  purs 
comme  la  nature,  ardens  comme 
la  passion.  Les  chants  maniérés  de 
Pezay,  de  Cubières  et  de  toute  l'é- 
cole de  Dorât,  disparurent  devant 
la  poésie  facile  et  gracieuse  de  Par- 
ny :  c'était  la  voix  du  rossignol  qui 
se  faisait  entendre  au  milieu  des 
accens  factices  de  ces  oiseaux  cpie 
l'on  instruit  à  conlrelaire  la  voix 
humaine.  C'est  eu  vain  qu'un  cri- 
tique sans  âme,  La  Harpe,  osa  pla- 
cer au-dessus  de  Parny,  du  poète 
de  l'amour,  Berlin,  le  poète  des 
bonnes  fortunes.  Bertin  avait  ver- 
sifié avec  soin,  et  quelquefois  avec 
bonheur,  les  nondireux  souvenirs 
de  sa  vie  galante  Parny  avait  im- 
pi'imé  à  ses  poésies  tout  le  naturel 
et  toute  l'ardeur  de  la  volupté  : 
c'était  (le  lui  que  l'on  pouvait  di- 
re comme  de  Sapho  :  spirant  com- 
missi  culores . .  .œoliœ  fidibus  puellœ. 
Le  chevalier  de  Parny  avait  déjà 
marqué  sa  place  au  premier  rang 
des  poètes  élégiaques,  lorsque  des 
affaires  de  famille  le  rappelèrent 
à  l'île  Bourbon  :  pendant  ce  temps, 
son  frère,  occupé  d'un  autre  gen- 
re de  gloire,  faisait  ses  preuves  de 
noblesse,  pour  entrer  <lans  les  car- 
rosses du  roi.  A  son  retour,  le  poè- 
te voyageur  publia  sa  jolie  épître 
aux  insurgens,  qui  ne  fit  pas  for- 
tune à  la  cour.  Les  plaisirs  le  ber- 


PAPx 

ocrent  jusqu'au  moment  où  la  ré- 
volulion  éclala.  Il  en  adopta  les 
principes.  «  Elle  ne  m'ôte,  (lisai{-il, 
«ni  places,  ni  préjugés,  ni  pen- 
»  siens,  n  Cependant  il  avait  écrit  tm 
joli  poëuie  sur  les  an)Ours  des  rei- 
nes de  France,  poëme  qu'il  brûla, 
par  une  loyauté  et  une  délicatesse 
bien  rares,  lorsqu'il  vit  renverser 
les  idoles  de  la  monarchie.  Le  peu 
de  fortune  qu'il  possédait  l'ut  en- 
traînée dans  le  déluge  des  assi- 
gnats. Employé  dans  rintruction 
publique,  nommé  administrateur 
du  théâtre  des  Arts,  il  vécut  dans 
un  état  de  médiocrité,  quelquefois 
si  voisin  de  l'indigence,  que  les 
secours  de  deux  amis  généreux 
(iM.  Français  de  Nantes  et  le  gé- 
néral Macdonald  )  soulagèrent 
souvent  sa  détresse.  Les  trou- 
bles de  la  révolution  comman- 
çaifnt  à  se  calmer  lorsqu'il  pu- 
blia «a  Guerre  des  DieuiCf  prëme 
que  la  pudeur  hésite  à  nommer, 
que  la  dévotion  voit  avec  scanda- 
le, n»ais  qui  ne  le  cède  qu'à  la  Pa- 
cclte  de  Voltaire  pour  l'imagina- 
tion, la  verve  et  le  coloris  brillant 
de  grâce  ,  de  satire  et  d'esprit. 
Napoléon,  qui  voulait  rassurer 
les  esprits  sur  l'espèce  d'indiflè- 
rence  en  matière  de  religion,  dont 
il  avait  fait  preuve  en  Egypte,  fit 
rayer  le  nom  d«i  poète  impie  de  la 
liste  des  candidats  à  la  place  de 
bibliothécaire  des  Invalides.  Nom- 
mé membre  de  rin-«lilut  en  180.";, 
il  publia  deux  autres  poiimes  tout 
aussi  peu  orthodoxes,  le  Paradis 
perdu  et  les  galanteries  de  ta  Bible  : 
ce  sont  des  esquisses  voluptueu- 
se», et  non  des  caricatures  satiri- 
ques. P;irny  ne  fit  aucune  basses- 
se pour  recouvrf  r  la  faveur  impé- 
riale :  il  ne  chanta  point  la  gran- 


PAR  39 

deur  qui  s'était  élevée  sur  les  dé- 
bris de  la  république.  Ses  derniers 
poëmes,  les  Roses  Croix,  God- 
dam,  Isnel  et  Aslega,  renferment 
encore  quelques  étincelles  éparses 
de  son  beau  talent.  Il  est  mort  le 
5  décembre  i8i4-  M-  Jouy  fut 
son  successeur  à  l'académie.  Par- 
ny  est  à  la  fois  le  Catulle  et  le  Ti- 
bule  de  la  France  :  et  tant  que  le 
sentiment  de  la  grâce  et  le  goût 
d'une  simplicité  pleine  de  chai  mes 
se  conserveront  dans  notre  litté- 
rature, le  chantre  d' Eléonorc  rcs- 
tera  le  modèle  du  genre  gracieux, 
et  le  poète  des  amans. 

PAROLETTI  (Victor- Modes- 
te, CHEVALIER  DE  ) ,  membre  de  la 
légion-J  honneur,  est  né  à  Turin 
en  1765.  Destiné  dans  sa  jeu- 
nesse à  la  carrière  judiciaire,  il  fut 
reçu  docteur  en  droit,  et  devint 
un  des  membres  les  plus  distin- 
gués de  l'académie  de  Turin.  En 
1799,  il  fut  nonmié  secrétaire-gé- 
néral du  g(>uvernement  provisoire 
établi  à  cette  époque  dans  le  Pié- 
mont, et,  l'année  suivante,  mem- 
bre de  la  consulta.  En  1802  ,  il  fit 
partie  de  la  commission  exéculive, 
et  futchargé  de  plusieurs  fonctions 
administratives.  .M.  Paroletti  a  sié- 
gé an  corps -législatif  de  France, 
depuis  le  mois  d'avril  1807  jus- 
qu'à la  fin  de  1811  ;  nonnné  dé- 
puté du  département  du  Pô,  où 
ses  concitoyens  l'avaient  élu  à  la 
presque  unanimité  des  suffrages, 
il  parut  plusieurs  fois  à  la  tribune, 
et  devint  secrétaire  de  cette  assem- 
blée en  1811.  Il  lui  fit  hommage 
de  la  belle  gravure  Du  jugement 
dernier  de  Michel-Ange  ,  exécutée 
fixr  Piroli,  et  parla  à  cette  occa- 
sion avec  éloquence  des  iMicoura- 
gemens  donnés  par  la  France  aux 


4o  PAR 

arts  en  Iulic,  des  élablisscmens 
d'utilité  publique,  et  des  moiiu- 
rnens  qui  s'y  élevaient  de  toutes 
parts.  11  avait  aussi  communiqué 
à  l'académie  de  Turin  la  décou- 
verte de  plusieurs  vases  antiques  et 
précieuxqui  venait  d'être  laite  dans 
une  des  terres  de  sa  famille.  Après 
les  événemens  de  i8i4iil  s'est 
retiré  des  fondions  publiques,  et 
a  obtenu,  l'année  suivante,  des 
lettresde  naturalisation  en  France, 
où  il  s'est  établi.  On  a  de  lui  plu- 
sieur/i  mémoires  scientifiques  et 
liistoriques,  présentés  aux  différen- 
tes académies  dont  il  est  membre  , 
unenire  autres  sur  le  surintendant 
Fouquet.  Il  a  en  outre  publié  les 
onvrao;es  suivans  :  i'  Recherches 
sur  l'influence  que  la  lumière  exerce 
sur  la  propagation  du  son,  Paris, 
1804,  in-4°  ;  2"  Description  histo- 
rique de  la  basilique  de  Superga  , 
Turin  ,  1808,  in-fol.  ;  5°  Disserta- 
tion sur  les  maladies  des  vers  à  soie; 
4"  Correspondance  vaudoise ,  ou  Be- 
cueil de  quelques  lett'es  des  hahilans 
des  vallées  de  Pignerol  sur  le  trem- 
blement de  terre,  1808,  in -8";  5° 
Discours  sur  le  caractère  et  l'étude 
des  deux  langues  française  et  ita- 
lienne ,  1811,  in- 4";  6"  Éloge 
historique  de  M arie-C lotilde- A dé- 
lalde-Xavière  de  France,  reine  de 
Sardaigne,  ouvraf;;epubliéen  181 1, 
et  accueilli  par  S.  M.  Louis  XVIII, 
auquel  l'auteur  a  été  admis  à  le 
présenter. 

PAROLETTI-GAETAN  (  Ca- 
mille-Thomas, CHEVALIER  De), 
frère  puîné  du  précédent,  maré- 
chal-de-camp au  servicede  France, 
officier  de  la  légion-d'honneur  ,  et 
chevalier  de  Saint  -  Louis,  né  à 
Turin,  le  3o  décembre  1769.  Il 
était  destiné  à  l'état  ecclésiastique 


PAR 

par  sa  famille,  et  y  entra  fort  jeu- 
ne. Mais  il  renonça  à  cet  état  lors 
de  l'entrée  des  Français  en  Italie, 
et  se  distingua  bientôt  dans  la  car- 
rière des  armes.  Nommé  chef  de 
bataillon  dans  l'armée  cisalpine, 
il  passa  ensuite  au  service  du  Pié- 
mont ,  en  qualité  d'adjudaut-com- 
inandant  en  l'an  9,  et  obtint  le 
même  grade  dans  l'armée  fran- 
çaise, lorsque  le  Piémont  fut  réuni 
à  la  France.  Il  se  fit  remarquer 
par  son  courage  et  ses  talens  mili- 
taires pendant  les  campagnes  d'I- 
talie; il  fut  blessé  et  fait  prison- 
nier en  1809  pî»r  les  Autrichiens. 
Après  son  échange,  il  servit  avec 
la  même  distinction  en  Espagne, 
fut  élevé  au  grade  de  général  de 
brigade  ,  passa  en  Allemagne  avec 
le  corps  d'armée  du  maréchal  Gou- 
vion-Saint-Cyr,  et  se  trouva  avec 
lui  dans  toutes  les  affaires"  de  la 
campagne  désa^trueuse  de  181 3, 
ainsi  qu'à  la  capitulation  de  Dres- 
de, conclue,  le  11  novembre,  et 
méconnue  quelques  jours  après  par 
les  alliés.  Rentré  en  France  ,  le  gé- 
néritl  Paroletti  fut  maintenu  dans 
son  grade  par  le  roi,  et  nommé 
chevalier  de  Saint-Louis.  Pendant 
lescentjourscn  i8i5,il  commandait 
dans  le  département  de  la  Haute- 
Loire,  et  après  le  licencienjent  de 
l'armée,  il  fut  mis  à  la  demi-sol- 
de. Ainsi  que  son  frère  ,  il  est  na- 
turalisé Français,  et  habite  avec 
lui  Paris. 

PAROY  (Jean-Philippe-Legen- 
TiL ,  MARQUIS  de),  chevalier  de 
Saint-Louis,  né,  en  i^So, d'une 
ancienne  famille  de  Bretagne ,  a- 
vait  embrassé  fort  jeune  l'étal  mi- 
litaire, et  était  colonel  à  l'époque 
de  la  révolution.  Opposé  aux 
principes   qu'elle   proclamait,    il 


PAR 

quitta  le  service,  et  consacrait  à 
la  peinture  tous  ses  niomcns  de 
loisir.  Son  père,  imbu  des  anciens 
préjugés  de  la  noblesse,  lui  avait 
expressément  interdit  cette  occu- 
pation .  et  un  jour  qu'il  le  trou- 
va, malgré  sa  défense,  la  paielte 
et  les  pinceaux  à  la  main,  il  les 
saisit  et  les  jeta  dans  les  fossés 
de  son  cliâleau,  en  disant  qu'il  ne 
voulait  pas  que  l'héritier  de  son 
nom  fût  un  artiste.  Quelques  an- 
nées ajM'ès  ,  cependant  ^  celaient 
devint  l'unique  ressource  de  toute 
la  famille;  il  sauva  même  M.  de 
l'aroy  père,  de  la  mort,  com- 
me émigré  et  comme  membre  du 
côté  droit  de  l'assemblée  consti- 
tuante, par  les  prolecteurs  qu'il 
acquit  à  son  fils.  Celui-ci  s'est  en- 
tièrement perdu  dans  l'obscurité 
de  la  vie  privée.  Il  a  publié  :  i" 
Opinions  religieuses,  royalistes  et 
politujues  (te  M.  Antoine  Quatre- 
mére-(ie-Qitiiicy ,  imprimées  dans 
deux  rapports  faits  au  départe- 
ment de  Paris,  1816.  in-8",  avec 
une  gravure  représentant  un  tour- 
ne>ol,  entouré  de  quatre  mers,  la 
mer  royaliste,  la  mer  religieuse, 
la  mer  révolutionnaire  et  la  mer 
d'intrigue,  a'édition,  1816,  in-8°, 
(  voyez  QuATiiEMÈRE-DE-  Quincy); 
2"  Précis  kistorique  de  l'origine  de 
l'académie  royale  de  peinture  , 
sculpture  et  gravure,  i8j(),  iu-8°. 
PAKQLE  (le  duc  bet.),  lieute- 
nant-général, député  aux  cortès, 
grand-d'Espagne  de  première  clas- 
se, chevalier  de  presque  tous  les 
ordres  de  S.  M.  C,  etc.,  est  né 
à  Valladolid  en  ijSS.  Destiné  par 
sa  famille,  l'une  des  plus  illustres 
de  la  Castille,  à  la  carrière  mili- 
taire, il  entra  au  service  presque 
immédiatement  après   avoir  ter- 


TAR 


4' 


miné  ses-études,  et  était  déjà  par- 
venu, en  1798,  au  grade  de  lieu- 
tenant-général. L'empereur  Na- 
poléon ayant  envahi  l'Espagne, 
en  1808,  le  duc  del  Parque  fut 
appelé  à  la  junte  de  Rayonne.  Il 
se  prononça  en  faveur  de  Joseph, 
qui  le  fit  son  capitaine  des  gardes, 
mais  cet  officier-général  renonça 
bientôt  au  service  du  nouveau 
monarque,  «convaincu  que  l'inté- 
rêt national  ne  peut  jamais  se 
concilier  avec  l'influence  étrangè- 
re. »  La  junte  suprême  lui  confia 
le  commandement  des  levées  de 
Castille  et  des  restes  de  l'armée 
du  marquis  de  la  Romana  (voyez 
La  Romana),  alors  réunis  aux  en- 
virons de  Ciudad- Rodrigo.  Le 
duc  del  Parque  remporta,  le  18 
octobre  1809,  quelques  avantages 
à  Tainames  sur  le  général  Mar- 
chand, et  le  repoussa  jusqu'à  Sa- 
iamanque,  où  il  entra  lui-même, 
le  35  octobre,  peu  d'heures  après 
l'évacuation  de  la  ville  par  les 
Français.  Il  eut  encore  des  succès 
vers  la  fin  du  Jiiois  suivant.  Dans 
les  preim'ers  mois  de  ï8io,  il 
combina  ses  opérations  avec  le 
général  Castanos,  et  se  dirigea  sur 
Séville  avec  l'élite  de  ses  troupes 
pour  couvrir  cette  ville;  mais  elle 
était  déjà  au  pouvoir  des  Fran- 
çais. Le  s5  novembre,  attaqué  à 
Carpio,  il  refusa  le  combat,  et  se 
retirait  sur  Alba  de  Torme,  lors- 
qu'il fut  rejoint  par  le  général 
Kellermann  qui,  malgré  sa  vive 
résistance,  le  battit  complètement. 
Il  rallia  néanmoins  les  débris  de 
son  armée,  et  se  joignit  au  duc 
d'Albuquerque  à  Puente  del  Ar- 
zobispo,  le  i5  décembre.  Envoyé 
en  Catalogue,  en  juin  i8i3,  avec 
une  forte  division  pour  seconder 


42 


PAR 


l'armée  anglaise  occupée  à  faire  le 
sié^je  cleTarragone,  il  y  fut  défait; 
mais  il  répara  ce  nouvel  échec  , 
et  prit  une  Irès-beîle  part  à  l'aflaire 
de  Castalla  ,  qui  ouvrit  Valence 
aux  armées  alliées.  Le  duc  del 
Parque ,  très-bien  reçu  de  Ferdi- 
nand VII,  lorsque  ce  prince  re- 
monta sur  le  trône  en  1814,  re- 
fusa, en  1816,  l'ambassade  de 
France  à  laquelle  il  fut  nommé. 
Kn  ibiQ,  il  fit  partie  du  conseil- 
d'état.  En  1820,  s'étant  prononcé 
franchement  en  faveur  de  la  ré- 
volution qui  éclata  dans  sa  patrie, 
il  fut  élu  député  aux  corlès,  qu'il 
a  présidées  avec  autant  de  sagesse 
que  d'impartialité.  Le  duc  del 
Parque,  dont  l'âge  et  les  fatij^ues 
ont  altéré  la  sauté,  jouit  de  l'es- 
time de  tous  les  amis  de  la  liberté 
constitutionnelle. 

PARREIN  (  PiEBRE-MAïniEii  ), 
général  de  brigade,  ex  -comman- 
dant du  département  de  Saône-et- 
Loire,  exerçait  avant  la  révolution 
la  profession  d'avocat  et  cultivait 
les  lettres.  11  jouissait  à  cette  épo- 
que d'une  réputation  sans  tache, 
et  n'a  cessé  de  la  mériter  que  par 
Texagération  de  ses  principes  po- 
litiques. Au  commencement  de 
1791,  il  dénonça  une  fabrique  de 
fciux  assignats,  et  reçut ,  le  3  mai 
de  la  même  année  ,  de  l'assemblée 
législative,  une  somme  de  i'.î.ooo 
francs  à  titre  de  récompense.  C'est 
au  10  aofit  1792  qu'il  se  fit  remar- 
quer pour  la  première  fois  par  son 
intrépidité  ,  et  en  même  temps  par 
son  extrême  exaltation.  L'année 
suivante,  il  fut  envoyé  dans  la 
Vendée  en  qualité  de  commissaire 
national;  il  y  mérita  que  le  trop 
fameux  Rossignol  fît  l'éloge  de  sa 
conduite;  il   fut  ensuite  nommé 


PAR 

président  de  la  commission  mili* 
taire  de  Saumur.  Commandant  a- 
vec  Ilonsin  de  l'armée  révolution- 
naire, il  fut  appelé  à  Lyon  par 
Collot-d'Herbois,  et  devint  prési- 
dent de  l'horrible  comnîis!?ion  tem- 
poraire établi*- danscette  ville,  qui 
livraà  l'échafaud  un  si  grand  nom- 
bre d'individus  comme  rebelles. 
Vers  le  même  temps,  nommé  gé- 
néral de  iirigade  ,  il  accompagna 
le  général  Hoche  dans  la  Vendée  ; 
de  retour  à  Paris,  un  peu  avant 
l'insurrection  du  1"'  prairial  an  5 
(20  mai  1795),  il  fut  dénoncé 
conime  l'un  des  chefs  de  ce  mou- 
vement populaire,  diri';é  contre  la 
convention  nationale.  Le  comité  de 
sftreté-géuérale  le  fit  arrêter,  mais 
l'amnistie  du  4  brumaire  an  4  hii 
rendit  la  liberté.  Le  général  Par- 
reiu  fut  implique  dans  le  priuès  de 
Babeuf;  mais  il  ne  se  trouva  au- 
cune charge  suffisante  contre  lui  , 
et  il  fut  absous.  Après  la  révolu- 
tion du  i8  fructidor  an  5  (  4  sep- 
tembre 1797  )  ,  il  fut  rétabli  duns 
son  grade  et  iiommé  commandant 
du  département  de  Saône-et- Loi- 
re. Le  directoire-exécutif  l'ayant 
soupçonné  au  mois  de  germinal 
an  G  (  avril  1798),  d'influencer  les 
élections  en  faveur  des  républi- 
cains exagérés,  lui  ordonna  de 
cesser  ses  fonctions ,  et  de  quitter 
le  départenjent.  Il  obtint,  après 
le  18  brumaire  an  8(9  novembre 
1799),  par  la  protection  de  Fou- 
ché  ,  ministre  de  la  police,  dont  il 
était  particulièrement  connu,  mais 
dont  il  ne  fut  jamais  l'agent  coiti- 
me  on  l'a  prétendu  à  tort ,  une 
pension  de  retraitecomme  officier- 
général.  Cette  pension  paraît  lui 
avoir  été  retirée  depuis  i8i4.  Fixé 
à  la  campagne ,  il  y  vitentièrement 


PAR 

ignoré.  Le  général  Parrcîn  esl  au- 
tfiur  d'une  pièce  en  3  actes  et  eu 
prose,  intitulée:  La  prise  de  la 
Bastille.  Elle  fut  représentée  à  Pa- 
ris à  la  fin  de  1792  ;  il  a  publié  de- 
puis Histoire  des  crimes  des  parle- 
meiis  ou  les  Horreurs  des  prisons 
judiciaires  dévoilées. 

PARÏOUNEAUX  (le  comte 
Louis),  lieutenant- général,  mem- 
bre de  la  chambre  des  députés,  où 
il  a  été  élu  par  le  département  du 
Var,  est  né  à  Paris  le  2G  septembre 
17G9,  et  sortait  à  peine  du  collège 
lorsque  la  révolution  éclata.  11 
s'enrôla  en  qualité  de  volontaire 
dans  le  premier  bataillon  de  gre- 
nadiers qui  fut  organisé  dans  la 
raj.iiale;  il  entra  ensuite  comme 
-ous-lieutenant  dans  le  régiment 
«le  llainault,  où  son  zèle  et  son 
activité  le  firent  bientôt  parvenir 
au  grade  de  capitaine.  Il  fit  ses 
premières  armes  avec  distinction 
sous  le 'général  Dugommier,  et 
monta  le  premier  à  l'assaut  d'une 
redoute  dont  la  prise  décida  du 
sf)rl  de  Toulon;  i!  fui  nommé 
adjudant-général  sur  le  champ  de 
bataille.  En  1796,  il  servit  à  l'ar- 
mée d'Italie,  sous  les  ordres  du 
général  en  chef  Bonaparte.  11  s'y 
fit  particulièrement  estimer  de 
.Ioubert,qni  lui  pn^uva  sa  confian- 
ce en  le  chargeant  de  diverses 
missions  délicates.  Sa  conduite 
brillante  à  la  bataille  de  Vérone 
lui  valut  le  grade  de  général  de 
brigade.  A  la  mrdheureuse  jour- 
née de  Novi,  où  le  brave  général 
Joubert  fut  tué,  il  fit  preuve  de 
talent  et  de  courage,  fut  blessé, 
et  tomba  au  pouvoir  d'un  enne- 
mi bien  supérieur  en  nombre  ; 
mais  il  fut  presque  aussitôt  échan- 
gé conlrc  M.  de  Zach,  major-gé- 


PAR 


^i5 


néral.  Le  27  août  i8o3,  il  reçut 
le  grade  de  général  de  division. 
En  1804,  il  fut  employé  à  l'armée 
d'Angleterre  sous  les  ordres  du 
maréchal  Ney,  dont  le  corps  était 
campé  à  Montreuil.  L'année  sui- 
vante, il  alla  rejoindre  en  Italie 
l'armée  que  commandait  Massé- 
na,  et  fut  charge  du  commande- 
ment de  la  division  des  grenadiers 
de  cette  armée.  Il  s'y  distingua 
dans  plusieurs  occasions,  notam- 
ment à  Véronnette  et  au  village 
de  Saint- Michel ,  où  il  culbuta 
successivement  l'ennemi  et  le  mit 
en  déroute  le  25  octobre.  Plus 
tard  il  coopéra  à  la  défaite  du 
corps  autrichien  de  Ruban,  et 
l'empr'cha  de  se  rendre  à  Venise. 
Appelé  au  commandement  d'une 
division  de  l'armée  du  roi  Joseph, 
il  enleva  Capoue,  dans  le  courant 
de  février  1806,  et  ne  trouva  plus 
d'obstacles  pour  arriver  à  Naples. 
Le  19  mai  suivant,  le  général  Par- 
louneaux  reçut  la  grande  décora- 
tion de  l'ordre  des  Deux-Siciles, 
et  fut  iiomnïé,  peu  de  temps  après, 
gouverneur  des  Abruzzes.  La  po- 
lice et  la  sûreté  des  routes  signa- 
lèrent son  administration  dans  ce 
pays.  Il  força  les  Ani^lais,  le  29 
mai  1809.  à  lever  le  siège  de 
Scylla  en  Calabre,  et  bien  qu'il 
n'eût  avec  lui  que  cinq  bataillons  et 
deux  escadrons  de  cavalerie,  il  fit 
beaucoup  de  prisonniers, et  s'em- 
para de  toute  l'artillerie  ennemie. 
Eii  1812,  il  fit  partie  de  l'expédi- 
tion de  Russie  et  du  corps  com- 
mandé parle  duc  de  Bellune.  Lors 
de  la  retraite  dcMoskoUjSa  division, 
qui  fut  placée  à  l'extrême  droite, 
était  à  peine  forte  de  5,Zîoo  hom- 
mes; lout-à-coup  elle  fut  cernée 
sur  la  rive  gauche  de  la  Bérésina 


44 


PAR 


par  Platow,  Witgenstein  et  ïsit- 
chakow.  EUe  se  trouvait  sans  mu- 
nitions, sans  vivres,  et  toutes  ses 
coinmunieations  avec  le  gros  de 
l'armée  française  étaient  coupées. 
Le  général  Partouneaux   parvint 
néanmoins  à  prendre  position,  le 
27  novembre,  sur  les  hauteurs  de 
Borisow.  Le  canon  et  la  fusillade 
se  faisaient  déjà  entetidre  dans  la 
direction  du  pont  établi  sur  la  Bé- 
résina  pour  le  passage  de  l'armée. 
Il  fit   à  la  hâte   ses   dispositions 
d'attaque,  et    ne    craignit   point 
d'engager  le   combat,    malgré  la 
disproportion  de  ses  forces  avec 
celles   de    l'ennemi.   Ce    combat 
fut  très-acharné,  les  Français  y 
firent  des  prodiges  de  voleur^  et 
pendant  quelque  temps  eurent  l'a- 
Tantage  ;    mais   enfin   ils    furent 
obligés  de  céder  au  noiiibre.  Le 
général  Partoimeaux,  après  avoir, 
dans  l'obscurité  de  la  nuit,   erré 
plusieurs  heures  à  travers  des  ma- 
récages et  des  bois,  en  essayant 
de  lemonter  la  Bérésina,  t(M!i!)a 
avec    le  reste  de  sa  division   au 
pouvoir  des  Russes.  La  capitula- 
tion qu'il  fit  en  cette  o.ccasion  lui 
attira   des   reproches    qui    lurent 
rendus  publics  dans  le  ag"""  bulle- 
tin de  la  grande  armée.   Ces  re- 
proches lui  parurent  injustes,  et 
lorsque  les  événemens  de-  1814 
lui  eurent  fait  recouvrer  la  liber- 
lé,  il  réclama  contre  des  assertions 
qu'il  appelait  mensongères.  Il  en 
conservait  encore  un  vif  ress»jnli- 
ment  à  l'époque  du  20  mars  1 8 1 5, 
et  le  témoigna   dans    une   lettre 
qu'il  adressa  à  Napoléon,  dont  il 
ne  reçut  aucun  emploi.  Après  la 
seconde  restauration ,  le  général 
Partouneaux  fut  nommé  gouver- 
neur de  la  8""  divlsioni\  Marseille, 


PAS 

puis, au  mois  d'octobre  de  l'année 
suivante,  gouverneur  de  la  10""  à 
Bordeaux.  Vers  le  même  temps, 
le  roi  lui  donna  le  titre  de  comte. 
Il  a  publié,  pour  la  justification 
de  sa  conduite  militaire  en  Rus- 
sie :  1°  Adresse  et  rapports  sur 
l'affaire  du  27  au  38  novembre 
1812,  qu'a  eue  la  12*  division  du 
9°  corps  de  la  grande -année  au 
passage  de  Hi  Bérésinu,  i8i5,  in- 
4°;  2"  Lettre  sur  le  compte  rendu 
par  plusieurs  historiens  de  la  cam- 
pagne de  l'iussie,  et  par  le  29'  bul- 
letin de  l'affaire  du  27  au  28  no- 
veinhre  1812,  in-4°,  1817.  Le 
gétu'.ral  Partouneaux  commande 
aujourd'hui  (1824)  la  première 
division  d'infanterie  de  la  garde 
royale. 

PASCALIS  (N.),  célèbre  juris- 
consulte, était,  i\  l'époque  de  la 
révolution,  avocat  au  parlement 
d'Aix  en  Provence;  il  joignait  à 
des  connaissances  profoiiles  en 
jurisprudence,  des  notions  éten- 
dues sur  l'administration  publi- 
que, et  avait  publié  sur  cette  par- 
lie  plusieurs  écrite  jusleuient  es- 
timés. Son  éloignemenl  pour  les 
nouveaux  principes,  et  le  peu  de 
ménagemens  qu'il  mit  dans  ses 
discnuis  et  dans  sa  conduite,  lui 
firent  de  nombreux  et  redoutables 
ennemis.  Il  fut  tué,  le,  12  décoin- 
bre  1790,  dans  une  émeute  qu'.i- 
vait  excité»!  l'ouverture  à\\ïi  cî-ib 
dit  des  Amis  du  roi  et  du  clergé. 
Sa  morl  précéda  de  peu  les  excès 
qui  eurent  lieu  à  celle  époque  à 
Avignon  et  dans  une  partie  du 
Midi. 

PASQUIER  (E.),  savant  juris- 
consulte, issu  d'une  famille  de 
robe^  depuis  long-temps  connuç 
dans  la  magistrature,  suivit  la  mû- 


PAS 

me  carrière  et  exerça,  long-temps 
avant  la  révolution  .  les  l'onctions 
de  conseiller  au  parlement  de  Pa- 
ris. Ennemi  de  la  révolution,  il 
prit  part  aux  arrêtes  du  parlement 
de  Toulouse  des  aS  et  27  sep- 
tembre 1790,  contre  les  opéra- 
tions de  l'assemblée  constituante. 
Pendant  le  régime  de  la  terreur, 
il  tut  dénoncé,  puis  arrêté,  et  tra- 
duit au  tribunal  révolutionnaire, 
qui  le  condamna  à  mort  le  21  a- 
vril  i7()4- 

PASQUIER  (  Etienne-  Denis, 
comte),  fils  du  précédent,  pré- 
fet de  police  sous  le  gouver- 
nement  impérial,  et,  sous  le  gou- 
vernement royal,  ministre  de  la 
justice,  garde-des-sceaux,  et,  en 
dernier  lieu,  ministre  des  affaires 
étrangères,  naquit  à  Paris  le  22 
avril  1767,  «it  fut  élevé. au  collège 
de  Juiily.  Il  descend  en  droite 
ligne ,  selon  la  Biographie  des 
hommes^  vivaiiSj  tome  V ,  du  l'a- 
nieux  Etienne  Pasquier,  avocat- 
général  sous  Henri  IV,  magistrat 
intègre  et  adversaire  prononcé 
des  jésuites,  qu'il  parvint  à  rédui- 
re, pour  bien  peu  de  temps  il  est 
vrai,  à  l'impuissance  de  nuire. 
Le  grand-père  du  baron  Pasquier 
l'ut  au  contraire  l'ami  des  jésuites, 
chez  lesquels  il  lut  élevé,  et  ac- 
quit quelque  célébrité  d'abord 
comme  procureur  du  roi  au  Châ- 
telct,  et  ensuite  comme  conseil- 
ler au  parlement.  Ce  fut  lui  qui 
fit  le  rapport  dans  le  procès  du 
comte  de  Lally  et  qui  montra  un 
si  grand  zèle  pour  obtenir  la  con- 
damna (ion  à  tuort  de  l'accusé;  ce  fut 
aussi  lui  qui  fit  mettre  un  bâillon  k 
ce  vieux  général,  lorsqu'on  le  con- 
duisit au  supplice,  afin  qu'il  ne 
pftt    point    parler    au    peuple    : 


PAS 


45 


(voy.  Biographie  universelle,  tome 
53.)  Le  père  de  iM.  Pasquier  avait 
destiné  son  fils  à  la  njagistrature, 
et  lui  avait  acheté  de  bonne  heure 
une  charge  de  conseiller  au  parle- 
ment de  Paris,  où  il  en  occupait 
une  lui-même.  Le  fils  ne  remplit 
aucune  foiiction  publique  pen- 
dant les  temps  orageux  de  la 
révolution,mais  après  l'avènement 
de  Napoléon  à  l'empire,  il  sollicita 
et  obtint,  non  sans  quelque  peine, 
une  place  d'auditi'ur  au  conseil- 
d'état.  L'archi-chancelier  Camba- 
cérès,  le  ministre  secrétaire  d'état 
duc  de  Bassano,  et  le  comte  lle- 
gnault  de  Saint-Jean-d'Angély, 
protégèrent  les  premiers  pas  de 
M.  Pasquier  dans  cette  nouvelle 
carrière,  et  parvinrent  à  vaincre 
la  répugnance  que  Napoléon  té- 
moignait à  élever  plus  haut  le  jeu- 
ne auditeur.  Il  fut  enfin  nommé 
maître  nas  requêtes,  le  8  février 
j  8 10,  et  peu  de  temps  après  pro- 
cureur-généraldu  sceau  des  titres, 
baron  elolTicier  de  la  légion-d'hon- 
neur. Lors  de  la  disgrâce  qu'en- 
courut le  préfet  de  police  Dubois, 
après  la  catastro[ihe  de  la  fête  don- 
née à  l'empereur  par  le  prince 
de  Schwarzemberg ,  pour  célé- 
brer le  mariage  de  l'impératrice 
Marie-Louise ,  le  baron  Pasquier 
obtint  ce  poste  de  haute  con- 
fiance. Il  le  remplit  avec  distinc- 
tion. Mais  malgré  les  frais  consi- 
dérables consacrés  à  cette  adminis- 
tration et  les  r<dnibreux  agens 
qu'elle  employait,  le  général  Mal- 
let  {voy.  ce  nom),  parvint  à  déro- 
ber au  préfet  de  police  toute  con- 
naissance de  la  trame  qu'il 
ourdissait  du  fond  de  sa  pri- 
son. Surpris  en  son  hôtel,  enlevé 
et  jeté  dans  une  voiture  de  place, 


46 


PAS 


le  préfet  fut  conduit  à  la  prison 
de  la  Force,  où  il  resta  enfermé 
jusqu'à  ce  que  i'auil.icieuse  entre- 
prise de  Mallet  eut  entièrement 
échoué.  On  crut  généralement 
dans  le  public  qu'une  immédiate 
destitution  de  M.  Pasquier  serait  la 
suite  du  retour  de  Napoléon,  qui 
avait  paru  très-irrilé;  mais  contre 
toute  attente,  le  préfet  de  police  sut 
fléchir  son  maître  et  se  maintenir 
dans  sa  place.  Le  préfet  de  la  Seine, 
M.  Frochot,  qui  n'avait  pas  été  in- 
carcéré par  Mallet,  (ut  seul  dis- 
gracié. M.  Pasquier  se  tiouva 
cependant  plus  éloigné  que  ja- 
mais du  ministère  de  la  justice  , 
auquel  son  mérite  lui  donnait 
sans  doute  des  droits  évideas  , 
et  les  lettres  insérées,  les  5  et  12 
avril  i8i4  ?  dans  le  Journal  de 
Paris f  et  dans  celui  des  Débats,  a- 
près  l'entrée  des^étrangers,  prou- 
vent qu'une  pareille  injustice  lais- 
se toujours  de  profonds  ressenti- 
mens.  Dès  la  première  restaura- 
ration,  M.  Pasquier  fut  nommé 
membre  du  conseil-d'élat  royiil , 
et  appelé,  le  2i  mai  suivant,  à  la 
direction  det»  pouts-<!t-chaussées , 
qu'il  conserva  jusqu'au  retour  de 
iSapoléon  de  l'île  d'Elbe.  Cette 
fois,  malgré  les  démarches  des 
premiers  protecteurs  de  M.  Pas- 
quier, auxquels  se  joignit  son  an- 
cien collègue  le  conseiller-d'état 
Ptéal,  Napoléon  resta  inflexible,  et 
le  ci-devant  préfet  de  police  ne 
fut  investi  d'aucun  de  ces  timplois, 
<ju'i!  n'eût  désirés  sans  doute  que 
pour  mieux  servir  la  cause  roya- 
le. Mais,  h;  jour  même  de  la  se- 
conde rentrée  de  S.  M.  Louis 
XVIII,  M.  Pasquier  fut  nommé 
iTiinistre  secrétaire-d'état  de  la  jus- 
tice, garde-des-sceaux ,  membre 


PAS 

du  conseil  privé,  et  peu  de  temps 
après  grand-cordon  de  la  légion- 
d'honneur.ll  fut  élu,  en  septeujbre 
181 5,  membre  de  la  chambré  des 
députés,  et  se  trouva  pendant 
quelque  temps  privé  du  porte- 
feuille et  de  la  garde  du  sceau, 
qui  furent  donnés  à  M.  Barbé- 
Marbois;  mais  il  eut  pour  dédom- 
magement la  place  de  commissai- 
re-juge pour  la  liquidation  des 
créances  des  sujets  des  puissances 
étrangères.  Rappelé  par  le  dépar- 
ment  de  la  Seine  à  la  chambre 
des  députés,  en  18 16,  il  s'y  montra 
constamment  le  zélé  défenseur 
de  tous  les  actes  et  projets  minis- 
tériels. Présenté  par  la  chambre 
au  nombre  des  candidats  pour  la 
présidence,  il  fut  nommé  par  le  roi 
à  celte  haute  fonction,  et  la  rem- 
plit   jusqu'au    mois    de     janvier 

1817.  M.  Pasquier  reprit  alors  sa 
place  de  garde-des-sceaux,  dont 
M.  Barbé-Marbois  fut  privé,  et 
la  perdit  dans  un  u(*uveau  revire- 
ment ministériel,  où,  en  décembre 

1818,  il  eut  pour  successeur  M.  de 
Serre.  Au  mois  d%Jctobre  1819, 
M.  Pasquier  présenta,  dit-on,  un 
mémoire  au  roi  sur  la  situation 
de  l'Europe  et  sur  la  marche  d»; 
l'administration  en  France,  de- 
puis qu'il  n'en  faisait  plus  partie. 
En  novembre  xle  la  même  année, 
un  portefeuille  lui  fut  rendu,  mais 
ce  ne  fut  pas  celui  de  la  justice; 
il  remplit  les  importantes  fonc- 
tions de  ministre  des  aftaires  é- 
Irangères  jusqu'en  1822.  Obligéde 
nouveau  de sorlirduministère avec 
la  vive  douleur  de  ne  pouvoir  plus 
aussi  utilement  servir  l'état  ,  il 
retnit  son  portefeuille  au  vicomte, 
aujourd'hui  duc  de  Montmorency, 
qui  ne  le  conserva  pas  long-temps. 


PAS 

M.  Pasquier  a  été  nommé  pair  de 
France,  avec  le  titre  de  comte  , 
et  a  t'ait  briller  en  plusieurs  occa- 
sions, dans  la  chambre  haute,  les 
falens  oratoires  dont  il  est  doué. 
Dans  la  session  actuelle  (1824),  il 
a  parlé  contre  le  projet  ministé- 
riel pour  la  réduction  des  rentes  : 
ce  fait  est  d'autant  plus  remarqua- 
ble, qu'en  recherchant  la  populari- 
té, l'orateur  marche  cette  fois  en 
sens  inverse  de  ses  habitudes. 
On  a  peine  à  reconnaître  à  ce  fait 
l'homme  qui,  au  sujet  de  la  loi  de 
la  liberté  des  journaux  ,  fit  une 
réponse  si  remarquable  et  sou- 
vent citée  depuis.  Quelques  dé- 
putés lui  reprochant  de  ne  servir 
que  les  intérêts  d'un  ^eul  parti,  di- 
saient :  mais  c'est  l'arbitraire  que 
vous  demandez? —  oui;  c'est  l'arbi- 
traire que  nous  voulons,  leur  dé- 
clara le  ministre,  La  polite.-se  ne 
nous  permet  pas  de  voir  autre  cho- 
se qu'une  naïveté  dans  cette  saillie, 
qui  rappelle  celles  de  l'abbé  Terrai. 
PASSA C  (  Philippe- JÉuÔME 
Gaucher  de)  ,  est  né  à  Vouvray, 
prés  de  Tours  en  1755,  d'une 
iamille  noble.  Il  fut  élevé  à  l'école 
Militaire  de  Vendôme,  entra  dans 
l'arme  de  l'artillerie,  en  1784, 
et  fut  reçu  officier  l'année  suivan- 
te. L'auteur  des  Liaisons  dangereu- 
ses, M.  de  Laclos,  servait  dei)uis 
long-temps  dans  le  régiment  de 
Toid  ,  où  il  fut  placé,  et,  malgré 
ladifférenced'âge,  il  s'établit  entre 
eux  des  rapports  d'amitié  que  la 
mort  seule  a  pu  rompre.  iM.  de 
Pa<sac,  opposé  aux  principes  de 
la  révolution,  sortit  de  France  en 
J7<)2,  servit  d'abord  dans  l'armée 
des  princes  ,  passa  ensuite  dan>; 
l'armée  anglaise,  en  Hollande 
«•t  eu  Portugal,  où  il  reprit  du  ser- 
vice dans  rarlillcrie.    llentré   en 


PAS  4; 

France  en  1802,  il  habita  le  dé- 
partement de  Loir-et-Cher  ,  et 
y  remplit  des  fonctions  adminis- 
tratives. Ef»  i8i4,  il  fut  nommé 
chevalier  de  Saint-Louis,  puis 
chef  de  bataillon  d'artillerie ,  et, 
en  181 5,  commandant  d'artillerie 
à  Laon.  Mais  l'état  de  sa  santé 
ne  lui  permettant  pas  d'en  rem- 
plir les  fonctions,  il  demanda  sa 
retraite.  M.  de  Passac  est  auteur 
d'un  grand  nombre  d'ouvrages. 
Voici  les  principaux  :  1°  Plusieurs 
Notices  biographiques  dans  la  Re- 
vue philosophique  et  littéraire  ;  2* 
Vie  de  W^ilUam  ColUns,  suivie  de 
la  traduction  de  quelques  églogues 
orientales  de  ce  poète,  d:ms  les 
Archives  philosophiques  et  littérai- 
res ;  5°  Honorine,  ou  Promenade 
dans  l'ile  de  IValcheren,  roman , 
imprimé  avec  divers  morceaux 
de  poésie,  traduits  de  l'anglais,  2 
vol.  in- 1  2,  1 808;  4°  un  grand  nom- 
bre de  poésies  légères  insérées  dans 
divers  recueils  périodiques;  5"  un 
Eloge  de  Gribeauval. 

PASSKRONI  (Jean-Charles), 
poète  italien,  né  en  I7i5,  à  Con- 
d  iinine,  village  du  comté  de  Nice, 
fit  les  étiulcs  convenables  à  l'état 
ecclésiastique  pour  lequel  il  était 
destiné  :  mais  vivant  au  milieu 
d'une  petite  société,  ses  talens  n'a- 
vaient qu'un  dévelop[)ement  lent 
et  borné.  Heureusement  pour  lui , 
son  oncle,  qui  était  à  la  tête  d'une 
école  élémiutaire  à  Milan,  appela 
le  jeime  Passeroni  auprès  de  lui  , 
pour  «m  faire  un  répétiteur;  c'est 
ainsi  qu'il  devint  maître  avant  de 
cesser  d'être  écolier.  Après  avoir 
appris  aux  autres  le  peu  qu'il  sa- 
vait ,  il  allait  chez  les  jésuites  pour 
y  puiser  les  connaissances  qui  lui 
manquaient  ;  il  tempérait  l'ennui 
de  ses  devoirs  par  les  vers  que  lui 


AS 


PAS 


inspirait  nne  muse  facile  et  pré- 
coce; et,  quelle  que  fût  la  faiblesse 
lîe  ces  premiers  essais  ,  ils  annon- 
çaient le  poète  et  le  firent  juger 
cligne  d'êlre  admis  au  nombre  des 
restaurateurs  de  l'ancienne  acadé- 
mie AG^iTrasfonnati.  Il  s'y  déclara 
le  protecteur  de  Parini ,  dont  l'ad- 
mission éprouvait  quelque  diffi- 
culté, et  ses  conseils  ne  furent  pas 
inutiles  au  chantre  du  Giorno. 
Doué  d'un  caractère  heureux  qui 
le  tenait  à  l'abri  des  embarras  et 
des  ennuis  de  la  vie  sociale ,  et 
ayant  une  facilité  extraordinaire 
pour  la  versification  ,  il  conçut  le 
projet,  et  trouva  le  loisir  d'écrire 
un  long  poëme  héroï-comique  sur 
la  vie  de  Cicéron.  Il  en  lut  les  pre- 
miers chants  à  l'académie  des  Trrt5- 
formati ;  il  en  récita  d'autres  à  celle 
des  Arcades,  qui  l'avait  accueilli 
dans  son  sein ,  lors  d'un  voyage 
qu'il  avait  fait  à  Rome,  où  il  avait 
suivi  Mgor.  Lucini,  qu'il  accompa- 
gna de  même  à  Cologne.  Le  Cicé- 
ron de  Passeroni  est  dans  le  genre 
de  Tristramshandy  ,  c'est-à-dire  , 
une  feinte  biographie,  où  ayant 
l'air  de  raconter  les  traits  de  la  vie 
d'une  personne,  on  se  perd  en  di- 
vagations pour  parler  de  choses 
disparates  et  étrangères  au  sujet. 
Ce  poëme  se  compose  de  loi 
chants,  qui  contiennent  11097 
octaves  ;  et  dans  un  si  long  travail, 
la  vie  de  Cicéron  ne  forme  qu'un 
petit  épisode,  presqu'impercepti- 
ble,  au  milieu  des  détails  sans 
nombre,  dont  il  l'a  surchargée. 
On  pourrait  l'appeler  une  Jascrie 
en  vers,  qui  pourtant  ne  manque 
.  pas  de  but  ,  car  Passeroni  attaque 
souvent  les  vices  et  les  ridicules 
de  son  temps;  mais  il  le  fait  sans 
amertume  ni  fiel;  il  mord  et  ne 


PAS 

blesse  pas.  Son  styie  est  comme  le 
caractère  de  l'auteur,  simple,  mo- 
deste ,  et  enjoué  :  sa  muse  se  mon- 
tre badine  partout,  ambitieuse 
nulle  part  :  la  spontanéité  est  son 
mérite,  la  prolixité  son  défaut. 
C'est  pourtant  Passeroni  que  Pa- 
rini, le  plus  concis  de  tous  les 
poètes  italiens  après  Alfieri,  con- 
sidtait  pour  la  correction  de  ses 
vers.  Ce  qui  peut  aider  à  expli- 
quer l'état  actuel  de  décourage- 
ment des  lettres  en  Italie,  et  faire 
apprécier  les  avantages  des  lois  , 
qui  garantissent  la  propriété  des 
autturs ,  c'est  que  iorque  Sterne 
se  rencontra  avec  Passeroni  à  IMi- 
lan,  il  demanda  à  celui-ci  ce  que 
son  poëme  lui  avait  rapporté.  «Je 
»  n'aurais,  répondit  Passeroni,  qu'à 
«vous  conduire  dans  les  magasins 
jde  mon  libraire,  pour  vous  mon- 
>i  trer  la  plus  grande  partie  de  mon 
»  édition,  dont  l'écoulement  a  été 
«rendu  impossible  par  la  quantité 
«des  contrefaçons  exécutées  en 
«Italie  même.  »  Plus  heureux  , 
Sterne  voyageait  en  grand  sei- 
gneur avec  le  produit  de  son  ma- 
nuscrit. Passeroni,  n'ayant  pour 
subsister  que  le  revenu  de  ses  mes- 
ses, se  soumettait  à  beaucoup  de 
privations  :  il  était  très-sobre  ,  se 
servait  lui-même,  et  quant  à  son 
habillement,  il  était  ordinairement 
en  lambeaux  :  sa  vie  était  tout-à- 
fait  poétique.  Ses  amiséchouaient 
auprès  de  lui ,  toutes  les  fois  qu'ils 
essayaient  de  lui  faire  accepter 
quelque  secours.  Animé  par  un 
esprit  de  pauvreté  vraiment  phi- 
losophique, il  s'était  résigné  à  pas- 
ser toute  sa  vie  dans  l'indigence. 
S'il  lui  arrivait  parfois  de  ga- 
gner quelque  somme  d'argent,  il 
se  montrait  tout  empressé  de  la 


PAS 

répandre  en  aumônes  :  ce  qu'on  lui 
vit  faire,  lorsque  la  n'îpiibliqne  ci- 
salpine lui  fit  remettre  ut)  rouleau 
de  4o  séquins.  S'étant  rendu  chez 
un  ami  pour  le  prier  de  lui  indi- 
quer quelque  honnête  homme  loai- 
bé  dans  le  besoin,  afin  de  lui  don- 
ner celte  somme  :  Je  ne  connais 
personne  de  plus  indigent,  ni  de 
plus  honnête  que  vous,  lui  répon- 
dit l'autre,  et  il  obligea  Passeroni 
de  garder  son  argent  pour  lui- 
même.  Passeroni,  non  content 
d'avoir  fait  un  long  pocme  sur  Ci- 
céroii,  pour  donner,  ii  ce  qu'il 
prétendait,  le  modèle  de  l'orateur, 
se  proposait  d'en  commencer  un 
autre  sur  Pétrarque  ,  dans  la  vue 
de  présenter  celui  du  poêle.  Il  à 
laissé  aussi  sept  voluiiiesde  fables, 
qu'il  a  composées  sur  le  retour  de 
l'âge.  En  lus  lisant ,  ou  ne  les  croi- 
rait pas  le  fruit  de  sa  vieillesse  ;  on 
y  admire  la  même  facilité,  la  mê- 
me négligence,  et  surtout  la  même 
intempérance  de  faire  des  vers  :  le 
style  en  tst  même  moins  correct 
que  celui  delà  vie  de  Cicéron,  et 
j)our  le  rendre  naïf,  il  l'a  abaissé 
lie  manière  à  le  rendre  vulgaire.  Il 
avait  aussi  trouvé  moyen  de  com- 
poser une  dizaine  de  volumes  de 
poésies  mêlées,  ce  qui  fait  que  son 
héritage  poétique  se  compose  de 
'jS  volumes.  Passeroni  mourut  à 
Milan,  le 26  décembre  i8o3.  Voici 
les  titres  de  ses  ouvrages  :  1°  Il 
Cicérone,  Milan  ,  1 7G8  ,  in  -  8° ,  6 
vol.  ;  'i"  Rime ,  ibid. ,  1776,  10  vol. 
in- 12  ;  5"  Favole  Esopiane ,  ibid. , 
1779,  in-  12,  7  vol.  Ils  ont  été 
plusieurs  fois  réimprimés. 

PASSEWAN-OGLOIJ,  ou  Pass- 
wan-Oglo«,  pacha  de  Widdin. 
Son  grand-père,  Osman,  était 
crieur  de  nuit  (ramoneur)  à  Wid- 

T.   XVI. 


PAS 


49 


din  ;  il  servit  dans  la  guerre  de 
1755  contre  les  Russes,  se  fit  dis- 
tinguer par  sa  bravoure,  et  obtint 
diverses  récompenses  ,  entre  au- 
tres, le  fief  de  Parabin,  en  Molda- 
vie, où  il  passa  le  reste  de  sa  vie, 
occupé  de  l'éducation  de  son  fils, 
Omar-Aga,  qui  parvint  au  grade 
de  bassi  aga,  ou  chef  de  district. 
Omar  eut  deux  fils  :  l'un,  Ibrahim- 
Bey  ,  qui  s'établit  négociant  à 
Constantinople  ;  l'autre,  Osman, 
surnonuTié  Pazman  Ohlu,  ou  Pas- 
sewand-Oglou  (fils  du  crieur  de 
nuit  ou  du  ramoneur).  Sou  père, 
qui  habitait  Widdiu  une  partie  de 
l'année  ,  le  fit  instruire  dans  les 
sciences  politiques,  économiques 
et  miliîaires.  Le  jeune  Osman,  qui 
était  né  en  1753,  joignait  à  une 
grande  activité  d'esprit  un  carac- 
tère très-violent.  En  1785,  étant 
ù  la  campagne  avec  son  père,  il  se 
prit  de  (juerelle  avec  lui  ,  et  les 
choses  eu  vinrent  au  point  que  le 
fils  s'étant  mis  à  la  tête  de  quel- 
ques-uns des  vassaux  de  son  père, 
qui  lui  étaient  dévoués  ,  attaqua 
et  mit  en  fuite  ceux  qu'Omar  a- 
vait  armés  pour  sa  défense.  Les 
principaux  habitans  de  Widdin 
s'inlerposèreul  dans  celte  querel- 
le, qui  dura  plus  de  2  ans.  Enfin, 
en  1788,  le  j)ère  fut  réduit  à  de- 
mander la  paix,  et  la  réconcilia- 
tion se  fit.  Depuis  ce  moment,  les 
hommes  qu'ils  avaient  enrôlés  lu- 
rent réunis  en  un  seul  corps  de 
troupes,  assez  nombreux  pour  que 
ces  deux  hommes  devinssent  en 
quelque  manière  les  maîtres  dans 
la  ville  de  Widdiu,  où  leur  auto- 
rité s'accrut  de  jour  en  jour  avec 
le  nombre  de  leurs  partisans.  Ib 
abusèrent  tellement  de  leur  in- 
fluence, qu'ils  faisaient  arbilraire.- 
4 


So  PAS 

ment  arrêter  quiconque  voulait 
s'opposer  à  leur  volonté.  La  Porte, 
alarmée  de  celt»;  usurpatiou  de  sa 
souveiainelé,  envoya  contre  eux, 
en  178S,  Madined,  pacha  ,  avec 
12,000  hommes.  »  l  !ui  promit  le 
pachaiik.  de  Widdin  s'il  parvenait 
à  les  expnlstr  de  la  ville.  Ils  fu- 
rent assiéj^és  ,  pendant  3  mois  , 
dans  "NViddin  ;  mais  ne  pouvant 
résister  à  des  forces  si  considé- 
rables, le  père  et  le  fils  prirent  le 
parti  de  se  réfugier,  avec  600  hom- 
mes qui  leur  restaient,  près  du 
prince  Maurujcni  ,  en  Yalacliie. 
Celui-ci  leur  accorda  sa  protec- 
tion ,  les  nomma  l'un  et  Tautre 
bir  bassa  ,  commandant  de  1,000 
himjmes  ,  et  établit  Omar  com- 
mandant à  Czernetz  ,  et  Passe- 
wan-Og!ou  à  Gjurgyero,  avec 
ordre  de  défendre  ces  postes  con- 
tre les  Autrichiens.  Omar  fut 
bientôt  après  délogé  de  Czcrnetz 
par  les  tniupes  in)périales  ,  et  se 
sauva  avec  17  des  siens  sur  la  rive 
droite  du  Danube,  où  il  s'établit 
dans  le  château  de  Kulla,  àGlieues 
de  Widdin,  Le  pacha  c|e  'NViddin 
ne  fut  pas  plus  tôt  instruit  de  l'ap- 
parition d'Omar ,  qu'il  envoya 
1,000  hommes,  avec  ordre  de  le 
prendre  mort  ou  vif.  Omar,  avec 
ses  17  hommes,  soutint  l'attaque 
pei\dant  3  ou  4.  jours,  cl  reçut 
^blessures;  mais  enfin,  le  château 
de  Kulla  fut  pris  d'assaut ,  la  pe- 
tite garnison  égorgée  ,  et  Omar 
fut  pris  vivant  avec  son  secrétaire,  , 
Mula-lbrahinj.  Au  moment  où 
Ton  apprit  à  Widdin  cet  événe- 
ment, le  peuple  s'ameuta  en  leuv 
faveur,  et  demanda  qu'ils  fusseiit 
relâihéfi;  le  p,a(  ha  ,  craignant  les 
suites,  de;  ce  mou,ven)ent  populai- 
re, envoyjï  au-devant  du  bey,  qui 


PAS 

amenait  les  deux  prisonniers.  Tor- 
dre de  leur  couper  la  tête  secrète- 
ment, ce  qui  fut  exécuté,  et  il  fut 
répandu  aussitôt  le  bruit  qu'Omar 
était  parvenu  à  s'échapper,  et  ce 
iiiux  bruit  calma  le  peuple  de 
AViddin.  Mais  Passewan-Oglou  , 
instruit  de  la  mort  trai;ique  de 
son  père,  résolut  d'en  tirer  ven- 
geance. Il  recruta  de  tous  côtés 
des  troupes  en  Vidachie,  et  étant 
parvenu  à  former  un  corps  de 
a, 000  houimes,  il  passa  le  Danube 
en  1789,  et  alla  s'établir  à  Bagna 
(entre  ISissa  et  Widdin)  ,  d'où  il 
entretint,  pendant  quelque  temps, 
des  inielligences  avec  les  habitans 
de  Widdin,  à  Teflel  d'exciter  con- 
tre le  pacha  le  ressentiment  des 
partisans  de  son  père  ,  et  de  les 
engager  à  seconder  l'attaque  qu'il 
méditait.  Pendant  ce  temps ,  il 
continuait  à  faire  des  recrues  dans 
la  Bulgarie;  dès  qu'il  se  vit  à  la, 
tête  de  C),ooo  hommes,  outre  les 
partisans  secrets  qu'd  avait  dans 
W  iddin,  il  entra  de  miit  dans  cel- 
te ville,  dont  ses  adhérens  lui  ou- 
vrirent les  portes,  et  s'empara  de 
la  citadelle  sans  coup- férir.  Le 
pacha,  tombé  en  son  pouvoir,  lui 
présenta  pour  sa  justification  un 
firman  du  grand-seigneur,  qui  lui 
ordonnait  de  mettre  à  nxjrtOmar- 
Aga.  Passcwan  -  Ogiou  lui  fit 
grâce  de  la  vie,  lui  ordonna  de 
licencier  ses  troupes,  au  nombre 
de  1.000  à  i,5oo  homnics  ,  ei  lui 
permit  de  vivre  à  Widdin,  confor- 
mément à  sa  dignité  ,  mais  sans 
aucun  pouvoir.  Devenu  maître  de 
Widdin,  Passewan-Oglou  en  con- 
fia l'administration  à  Bekir-Aga , 
l'un  de  ses  parens,  âgé  de  60  aus; 
et  quant  à  lui ,  ilse  rendit  avec  son 
corps  de  troupes,  fort: de,  6000 


PAS 

lioinmes.aiiprèsdugrand-vjsir  Jus- 
suffPacha.  qai  l'accueillit  parfaite- 
iiienl,  et  Imï  donna  encore  G,ooo 
hommes  à  coitiinaiuler.  Passevvan- 
Oglou,  avec  ce  corps  de  troupes, 
se  porta  sur  la  Slorawa,  pour  ta- 
ol)er  de  secourir  la  l"or{eie-«se  de 
Belgrade ,  a'^siéjjée  p;ir  les  Au- 
trichien.-; mais  il  lut  altaq.ié  par 
un  corps  de  troupes  impériales, 
qui  mirent  sa  tr  )upe  en  pleine 
déroute,  après  lui  avoir  tué  près 
de  3,000  hommes,  en  sorte  que 
PassewauOg'iOu  se  vit  réduit  à  se 
iH^-tirer  avec  5oo  hommes  au  camp 
du  grand- visir,  auprès  duquel 
\{  pa-sa  encore  deux  moi-',  après 
quoi  il  retourna  à  VViddin,  où  il 
se  tint  ti'dnquille  pendant  trois 
ans,,  sans  s'occuper,  ^  n  apparence, 
ni  du  Commandement,  ni  de  l'ad- 
ministration; mais  enfin,  il  deman- 
da au  vieux  lieckir-Ag.i  compte 
de  sa  gestion,  et  celui-ci  ayant  re- 
fusé de  satisfaire  à  sa  demande, 
Passewan-Oglou  le  fit  mettre  à 
mort,  et  s'empara  «le  s«s  hiens. 
Cependant  la  Porte  envoya  un 
nouveau  pacha,  nommé  Alchio- 
Pacha  ;  celui-ci,  ayant  instiuit 
le  grand ->ieignfMir  de  rantorité 
qu'exerçait  à  Widdin  Passewan- 
Oj;lou ,  soutenu  par  les  habitans 
de  celte  vilh;,  demandait  un  ren- 
fort de  i'i,ooo  hommes  pour  l'ex- 
pulser» II  reçut  pour  réponst!  un 
ûrman,  qui  lui  oid(mu.nt  d'en- 
Toyer  à  Constanlinople  la  tête 
de  Pîissewan-Oglou ,  mai?  on  ne 
lai  envoya  pas  les  forces  nécessai- 
res pour  l'exécution  de  ce  firmàri. 
Passe w»n-Oglou,  iristruit  de  ce  qui 
iii  passait,  rassemble  2,000  hom- 
mes, attaque  le  pacha,  qui  en  a- 
vail  5,000,  le  force  de  s'enfermer 
duus  lauitadulLe,  et  le  réduit  bien- 


PAS  5i 

tôt  à  capituler.  Le  pacha,  fait  pri- 
sonnier, consent  à  licencier  ses 
troupes,  à  l'exception  de  5oo  hom- 
mes pour  sa  garde ,  et  s'engage  à 
obtenir  du  grand-seigneur  la  grâ- 
ce de  Passewan-Oglod  :  l'un  et 
l'autre  vécurent  pendant  quelque 
temps  à  Widdin  en  assez  bonne 
intelligence;  niais  dans  le  mois  dô 
mai  1792,  Passewan-Oglou  étant 
aile  à  la  cairipague  avec  60  de  ses 
]>artisans,le  pacha  envoya  après  lui 
400  hommes,  qui  l'atleiguirent 
dans  le  village  de  Tatesta,  à  trois 
lieties  de  Widdin;  il  y  eut  un 
combat  très-vif,  à  la  suite  du(|uel 
Passewau-Oglou  se  trouva  enfermé 
avec  5o  des  siens  dans  une  maison, 
d'où  il  parvint  à  se  sauver  à  la 
faveur  d'un  déguisement.  Le  pa- 
cha découvrit  «a  retraite,  et  l'atta- 
qua de  nouveau;  mais  Passewan- 
Oglou  avait  eu  le  temps  de  ras- 
seud-)ler  du  monde.  Le  pacha  fut 
blessé  dans  le  combat,  et  fut  re- 
poussé avec  perte  de  200  hommes, 
Passewan-Oglou  ne  perdit  pas  de 
temps  à  renouer  ses  intelligences 
avec  les  habitans  de  VViddiii,  et  ù 
renforcer  ses  troupes  ;  dès  qu'il 
eut  rassemblé  3, 000  hommes,  il 
sejela<lans  Widdin  (en  juin  1792), 
et  après  un  combat  assez  vif,  il 
parvint  à  chasser  de  la  ville  le  pa- 
cha et  Sît  garnison,  et  prit,  pour 
la  seconde  fois ,  possession  de  la 
forteresse  à  main  armée.  Il  est 
sans  doute  extraordinaire  de  voir 
nu  simple  particulier,  sans  em- 
ploi, sans  autorité  légale,  par- 
venir à  se  rendre  maître  d'une 
forteresse  importante,  s'y  mainte- 
nir pendant  plusieurs  années, 
après  avoir  expulsé  le  mandataire 
du  souverain,  et  remplir  en  même 
temps  s«s  autrej  duvuirig'do  saiet 


02  PAS 

fidèle;  ainsi  Passewan-Oglou,  a- 
près  avoir  commis  divers  actes  de 
rébellion,  va  servir  dans  l'armée 
du  grand-seigneur,  et  à  son  re- 
tour, il  continue  d'agir  en  maitre 
à  \Yiddin.  Vainqueur  une  pre- 
mière fois  du  pacha  de  la  Porte, 
il  lui  pardonna  la  mort  de  son  pè- 
re ,  en  considération  du  firnian 
qui  l'y  autorisait;  vainqueur  d'un 
nouveau  pacha,  il  ne  lui  impose 
d'autre  loi  que  de  demander  sa 
grâce  au  grand -seigneur  :  ces 
conditions  dans  la  conduite  de 
Passewan  -  Oglou  s'expliquent 
par  la  nature  même  du  gouverne- 
ment ottoman.  La  personne  du 
souverain  est  tellement  sacrée 
aux  yeux  des  Musulmans,  qu'un 
pacha  rebelle,  même  en  portant 
atteinte  à  son  autorité,  ne  se  per- 
mettrait jamais  de  s'écarter  du  res- 
pect dû  à  sa  hautesse,  et  il  n'alta- 
que  ouvertement  que  ses  manda- 
taires, sous  prétexte  qu'ils  sont 
ses  ennemis  personnels  ,  ou  des 
traîtres  envers  le  grand-seigneur. 
On  se  rappelle  qu'à  l'époque  de 
l'année  1792?  l'ambassade  françai- 
se àConstantinople  parvint  à  dé- 
terminer la  Porte  à  former  divers 
corps  de  troupes  sur  le  pied  euro- 
ropéen,  et  que  cette  innovation 
excita  un  mécontentement  général 
parmi  les  janissaires.  Peu  de 
temps  auparavant,  la  Porte,  vou- 
lant punir  de  leur  lâcheté  et  de 
leur  insubordination  les  garnisons 
de  quelques  forteresses  sur  le  Da- 
nube, et  particulièrement  celle 
de  Belgrade,  avait  licencié  les 
janissaires  et  les  saphis  qui  les 
composaient,  et  les  avait  rem- 
placés par  les  kersales  ,  corps  de 
volontaires  ou  de  troupes  irrégu- 
lièresj  qui  ne  son  assujétis  à  au- 


PAS 

cune  discipline.  Passewan-Oglou 
profita  habilement  de  ces  circons- 
tances, et  se  montra  dès-lors 
ouvertement  le  protecteur  des 
janissaires  expulsés ,  qui  pour 
la  plupart,  étant  habitans  et  pro- 
priétaires de  maisons  dans  des  vil- 
les, se  voyaient  dépouillés  à  la 
fois  de  leurs  propriétés  et  de  leur 
solde.  Le  zèle  avec  lequel  il  prit 
leur  défense  accrut  le  nombre  de 
ses  partisans  dans  tout  l'empire, et 
jusque  dans  le  divan,  oi'i  il  existait 
une  secrète  opposition.  Dès  ce 
moment,  Passewan-Oglou  devint 
le  chef  d'un  paili  d  atifanl  plus 
puissant  ,  qu'il  reposait  sur  des 
liaisons  avec  tous  les  mécon- 
tens  de  la  Turquie  d'Europe  et 
d'Asie,  et  si  l'on  a  vu  depuis  ce 
chef  combattre  avec  une  poignée 
d'hommes  une  grande  partie  des 
forces  de  l'empire  ottoman,  ses 
succès  doivent  être  attribués  au- 
tant à  ses  intelligences  secrètes 
avec  les  mécontcns  qui  se  trou- 
vaient dans  l'armée  ,  qu'à  son 
caractère  ferme  et  audacieux.  La 
Porte  envoya,  en  1794»  le  pacha 
Hassi-Mufli,  pour  conférer  avec 
Passewaii-Oglou,  et  savoir  à  qnel- 
lescondilions  il  voulait  se  soumet- 
tre; mais  celui-»  i,  sou[)çonnant 
qu'on  lui  tendait  un  piège,  rompit 
bientôt  les  conférences,  et  congé- 
dia le  mandataire  de  la  Porte. 
Peu  de  ten)ps  après,  au  commen- 
cement de  1795,  Pa.-sewan-Oglou 
leva  des  troupes  à  Widdin  et  aux 
environs,  et  envoya  un  détache- 
ment de  1,000  hommes,  avec  or- 
dre de  s'emparer  de  la  forteresse 
de  Nikopolis,  à  vingt  lieues  au- 
dessus  de  Widdin,  sur  la  rive  droi- 
te du  Danube,  sous  prétexte  que 
la  possession  de  cette  place  était 


PAS 

nécessaire  à  Widdin.  Après  vingt 
jours  (le  siège,    Passewan-Oglou 
s'empara    de    Nikopolis,   y    Diil 
garnison,  et  en  donna  le  comman- 
dement à  un   de  ses  lieulenans. 
Vers  le  môme  temps,  il  envoya  de 
nombreux  émissaires  en  Bulgarie 
et  en    Servie,  pour  exciter  les  ja- 
nissaires licenciés   et   les   autres 
méconlens  de  ces  provinces  à  se 
rassembler  en  corps  de  troupes; 
et  peu  de  mois  suffirent  à  l'exé- 
cution de  ce  projet.  Dès  le  com- 
mencement de  juin,  une  foule  de 
mécontens  ,   secrètement   dirigés 
par  Passewan-Oglou  ,  qui  leur  a- 
vait  fourni  de  l'artillerie,  se  por- 
tèrent en  corps    d'armée    devant 
Belgrade,   s'emparèrent  des  fau- 
bourgs et  de  la  ville  basse,  et  peu 
s'en  fallut  qu'ils  n'obligeassent  le 
commandant  Hassan-Pacha,   qui 
s'était  réfugié  dans  lacitadelle,  l'i  se 
rendre   prisonnier;  mais  celui-ci 
ayant  tenu   bon  et  ayant  reçu  des 
secours  du  pacha  de  Bosnie,  par- 
vint ,    après    plusieurs     combats 
sanglans,  à  mettre  en  fuite  les  mé- 
contens,  au   mois   de  juillet.  La 
Porte,  instruite   de  la   part  que 
Pa!<sewan-Oglou  avait  eue  à  cette 
insurrection,  jugea  qu'elle  n'au- 
rait jamais    de    tranquillité    tant 
que  ce  chef  audacieux  existerait; 
en  conséquence,  elle  fit  marcher, 
en    1796,  une   armée  de  5o,ooo 
hommes,   aux   ordres  du  baglier- 
bey  de  Ron)élie,  et  de  quatre  au- 
tres pachas,  avec    l'ordre   d'atta- 
quer Passewan-Oglou,    et   de   le 
soumettre.  Celui-ci  comptait  alors 
près  de  5o,ooo   hommes  qui   lui 
étaient   entièrement    dévoués,  et 
qu'il  avait  exercés  au  maniement 
des  armes.   Il  avait  d'ailleurs  fait 
fortifier  AlViddin  avec  la  plusgran- 


PAS  55 

de  activité,  et  y  avait  rassemblé 
une  immense  quantité  de  vivres 
et  de   munitions,   sans  qu'on  ait 
jamais  su  comment  il  se  procurait 
des  fonds  nécessaires  pour  armer, 
soudoyer,  et  nourrir  tant  de  mon- 
de. On  sait  seulement  qu'un  cer- 
tain nombre  d'ingénieurs  français 
et  de   polonais    fugitifs    s'étaient 
rendus  auprès  de  lui;  que  les  pre- 
miers l'avaient  servi  de  leurs  talens 
dans  l'art  des  fortifications,  et  les 
seconds  avaient    introduit   parmi 
ses   troupes  quelques  notions   de 
tactique.    Après    plusieurs    atta- 
ques infructeuses  contre  Widdin, 
le  commandant  de  l'armée  otto- 
mane eutrecours  auxnégociations, 
et  le  résultat  fut  que  Passewan-O- 
glou payerait  5oo  bourses  àlaPorte, 
moyennant  la  promesse  qu'il  se- 
rait reconnu  pacha  de  Widdin,  et 
qu'il  y  aurait  une  amnistie  géné- 
rale :  la  Porte   ayant  ratifié  cette 
convention,  l'armée  eut  ordre  de 
lever  le  siège  de  Widdin,  qui  avait 
din-é  trois  mois.  Mais  bientôt  Pas- 
sewan-Oglou transporte  la  scène 
en  Homélie.  Une  foule  innombra- 
ble  de  mécontens ,  qu'on  a  dési- 
gnés sous  le  nom  de   voleurs   de 
Uoniélie,  couvraient  de  leurs  ra- 
vages cette  province,  depuis  Tir- 
nowa  jusqu'à  Andrinople.  Le  be- 
glier-bey  ,    Haru-Pacha,    accusé 
de  les  avoir  combattus  avec  trop 
de  mollesse,  est  déposé  et  rempla- 
cé par  cet  Alo-Pacha,  qui,  rappelé 
de  la  Natolie,  parce  qu'on  le  ju- 
gea le  seul  homme    capable    de 
sauver  l'empire  ,  trahit  les  espé- 
rances de  la  Porte,  et,  après  avoir 
commis  les  plus  grandes  exactions 
et    les    plus   horribles  massacres 
dans  les  pays  qu'il  était  chargé  de 
de  défendre,  parvint,  par  ses  né- 


54 


PAS 


gocintions  secrètes  avec  Pa«scwan- 
Oglou ,  à  l'aire  dissoudre  raraiée 
des  uiéconlens,  que  celui-ci  diri- 
geait de  Wid«lin  par  des  lils  iiivi- 
bles.  Ainsi  Alo- Pacha  obtint  la 
gloire  d'avoir  terminé  celle  guer- 
re, et  d'avoir  en  même  temps 
réconcilié  à  la  Porte  Passe- 
wan-Oglou.  iMais  celni-ci  n'a- 
vait lait  que  rappeler  auprès  de 
lui  cette  horde  de  niéconteris  qu'il 
semblait  n'avoir  di  tachés  dans  le 
voisinage  de  Con>tantinople,  que 
pour  s'a^surc^  du  degré  de  fai- 
blesse du  gouvernement,  et  il 
prouva  peu  de  temps  après  qu'il 
l'avait  parfaitement  apprécié.  Jus- 
qu'en 1797  Passcwan-Oglou  ne 
l'ut  que  le  moteur  secret  des 
rebelles  de  Homélie,  mais  après 
leur  expulsion  des  environs  d'An- 
drinople,  il  les  attira  ouvertement 
auprès  de  lui,  les  forma  en  corps 
de  troupes,  dont  il  grossit  la  petite 
armée  qu  il  avait  à  Widdin,  et 
dès  qu'il  se  vit  à  la  tête  de  3o  ou 
40,000  hommes,  il  suivit  un  plan 
plus  vaste  et  plus  régulier  sous  le 
rapport  militaire  et  politique.  Il 
commença  par  s'assurer  tout  le 
cours  du  Danube  entre  Belgrade 
et  Rusdtuck,  et  mit  des  garnisons 
à  Nikopolis  et  Sistow^e  ,  au  des- 
sous et  au-dessus  de  Widdin;  il 
s'empara  d'Ossowa  et  de  Semen- 
dria,  d'où  il  pirut  vouloir  atta- 
quer Belgrade;  mais  le  comman- 
dant de  cette  place  ayant  appelé 
à  son  secours  les  pachas  de  Bos- 
nie et  de  Thronic,  Passewan-0- 
glou  se  borna  à  mettre  un  corps 
d'observation  dans  le  voisinage  de 
Belgrade,  et  avec  le  reste  de  son 
armée,  il  se  porta  rapidement  en 
deux  colonnes  sur  la  route  d'An- 
drinople,  l'une  par  Nissa  et  So- 


PAS 

phin,  l'autre  par  Tirnowa  et  Phi- 
lippopoli.  Il  battit  ,  chemin  fai- 
sant, à  INissa,  un  corps  de  Bosmas- 
ques,  qu'il  obligea  de  se  réfu- 
gier dans  Belgrade,  et  il  répandit 
dans  l<i  Bulgarie  et  la  Servie  des 
émissaires  pour  gros,-.ir  le  nombr€' 
de  ses  adhérens.  l'n  des  moyi  n$ 
qu  il  employa  avec  le  plus  de  suc- 
cès, fut  de  diminuer  de  moitié 
les  impôts  dans  tous  les  pays  qu'il 
occupait  ,  et  de  se  concilier  la 
confiance  des  habitans  par  une 
exacte  justice,  et  par  la  pro- 
tection du  couimerce  et  des  })ro- 
priétés.  En  peu  de  tenips ,  il  fut 
maître  <îe  toute  la  Servie  et  de  la 
Bulgarie  ,  jusqu'à  Philippopoli  f 
où  il  établit  son  camp.  Alo-Pa- 
cha,  beglier-bey  de  Homélie,  eut 
ordre  de  l'attaquer;  mais  trop  in- 
férieur en  forces,  il  se  tint  sur  la 
défensive  aux  environs  d'Andrino- 
ple ,  tandis  que  Passewan  Oglou 
envoyait  des  partis  jusqu'aux 
portes  de  cette  ville,  et  même  sous 
les  murs  de  Constanlinople.  Quel- 
ques pachas  de  Macédoine  et  de 
la  Grèce  étaient  d'ailleurs  d'intel- 
ligence avec  Passewan-Oglou,  et 
une  pariie  des  troupes  que  l'on 
faisait  marcher  contre  lui  allait 
se  fondre  dans  son  armée  :  tout 
semblait  alors  annoncer  une  révor 
lution  dans  la  Turquie  d'Europe, 
lorsqu'enfin  la  Porte,  sérieuse- 
ment alarmée,  fit  accourir  de 
ses  provinces  d'Asie  un  grand 
nombre  de  troupes  ,  dont  elle 
donna  le  commandement  au  célè- 
bre Hussein!,  capitari -pacha  , 
qu'elle  revêtit  de  la  dignité  de  sct 
rasquier,  en  mettant  sous  ses  or-r 
dres  le  beglier-bey  Alo- Pacha,  et 
les  autres  pachas  restés  fidèles  à 
leur  souverain,   Çientôt    l'armée 


PAS 

ottomane,  forte  de  près  de  100,000 
hommes,  se  rassemble  dans  les 
environs d'Andrinople,  et  menace 
d'attaquer  Passewan-Oglon  dans 
son  camp  de  Philippopoli  ;  mais 
Htisseim-Pacha  trouva  plus  pru- 
dent de  le  tourner  par  ïirnowa. 
11  dirigea  une  forte  colonne  vers 
cette  place,  dont  il  s'empara  sans 
coup-férir,  étant  parvenu  à  gagner 
le  commandant  que  Passewan- 
Oglou  y  avait  établi.  Dès-lors  ce- 
Jui-ci  ne  se  trouva  plus  en  sûreté 
■à  Philippopoli,  et  prit  le  parti  de 
faire  sa  retraite  sur  Widdin.  Cette 
marche  rétrograde,  les  sanglantes 
exécutions  qu'ordonna  le  capitaii- 
paoha  dans  la  Bulgarie,  où  il  fit 
mettre  à  mort  un  grand  nombre 
d'adliérens  de  Passewan-Oglou , 
la  réputation  éclatante  de  ce  se- 
rasqiiier,  la  rapidité  de  sa  marche 
et  la  force  de  son  armée,  les  suc- 
cès qu'obtint  sur  le  Bas  -  Danu- 
be? le  p  icha  de  Nikopolis,  ceux 
qu'obtinrent  en  môme  temps  les 
pachas  de  Servie  et  de  Bosnie, 
qui  reprirent  les  forteresses  de  Se- 
mendria  et  d'Orsowa,  la  nécessité 
où  se  trouvait  Passewan-Ogloa 
de  s'enfermer  dans  Widdin,  par 
suite  de  ces  revers,  tons  ces  événe- 
mens  arrivés  coup  sur  coup,  jetè- 
rent le  découragement  et  l'épou- 
vante dans  ses  troupes,  dont  plus 
de  la  moitié  l'abandonna.  Aiosi 
ce  pacha  rebelle,  qui  pendant  deux 
ou  trois  mois  s'était  vu  à  la  lêted'u- 
ne  armée  formidable,  qu'il  avait 
portée  à  plus  de  60,000  hommes, 
se  vil  réduit  i\  se  défendre  dans  sa 
forteresse  avec  i5ou  16,000  hom- 
mes qui  lui  restaient;  il  y  fut  bien- 
tôt investi  par  l'armée  du  seras- 
quier,  renforcée  des  troupe<;  de 
douze  pachas,  tant  d'Europe  que 


PAS 


55 


d'Asie,  et  tout  annonçait  que  Pas- 
sewan-Oglou succomberait  î-ous 
des  forces  aussi  imposantes. 
L'armée  de  siège  fut  bientôt  se- 
condée dans  ses  opérations  par  une 
flottille  de  chaloupes  armées,  qui 
était  venue  de  Constantinople  par 
la  mer  Noire,  et  avait  remonté  le 
Danube.  Tout  ce  que  la  constan- 
ce, le  courage;  l'art  et  la  ruse, 
pejivent  opposer  à  la  supériorité 
des  forces,  fut  employé  par  Passe- 
wan-Oglou  pendant  quatre  ou 
cinq  mois  que  dura  le  siège,  f/ar- 
mée  ottomane  fut  repoussée  avec 
une  perte  considérable  dans  plus 
de  trente  attaques;  enfin  les  trou- 
pes d"Alo-Pacha  ayant  été  mises 
en  déroute, et  ce  beglier-bey  s'étant 
réfugié  à  Sophia  avec  les  restes 
de  sa  troupe  ,  l'armée  ottomane  , 
affaiblie  et  découragée  par  tant 
de  traverses, fut  à  son  tour  attaquée 
par  Passewan-Oglou,  et  mise  en 
déroule  complète  après  un  mas- 
sacre épouvantable  :  ou  porte  à 
10,000  hommes  le  nombre  des 
tués  dans  cette  dernière  action. 
Le  serasquier  Hus>eim-Pacha  se 
retira  avec  les  faibles  débris  dé 
l'armée  à  Lonya  (c'est  dans  cette 
ville  que  le  capitan-pacha  attira  le 
heglier-bey  Alo-Pacha,  et  le  tua 
de  sa  propre  main  pour  le  ptmir  de 
sa  perfidie,  à  laquelle  il  imputait 
le»  désastres  de  l'armée  ottomane), 
d'où  il  ouvrit  des  négociations,  au 
nom  de  la  Porte  ,  avec  Passewan- 
Oglou.  Au  bout  de  quelques  mois, 
les  commissaires  du  grand -sei- 
gneur conclurent  avec  lui  un  traité 
dont  les  principales  conditions  con- 
nues sont  :  que  Pa<(sewan-Oglou 
conserverait  le  pachalick.  de  Wid- 
din,avecunagrandissemcntde  ter- 
ritoire; qu'il  serait  élevé  A  ladigni- 


56 


PAS 


té  de  pacha  à  trois  queues;  que 
les  janissaires,  expulsés  de  Belgra- 
de et  des  antres  places,  seraient 
rétablis  dans  leurs  propriétés;  en- 
fin on  dit  qu'il  exigea  la  destitu- 
tion de  quelques  pachas  du  voisi- 
nage.  Il  paraît  que  ce  qui  déter- 
mina   principalement    Passewan- 
Oglou     à   se     soumettre     lut     la 
crainte  de  se  voir  attaqué  à  Wid- 
din  par  un  corps  de  4o?ooo  Rus- 
ses, en  vertu  d'un  article  du  trai- 
té d'alliance  entre  l'empereur  de 
Russie  et  le  grand-seigneur,  par 
lequel  le    premier  promettait  de 
taire  marcher  ce  nombre  de  trou- 
pes contre  le  pacha  rebelle   à   la 
première  réquisition  de  la  Subli- 
tne-Porte.  Après  cet  accoirimode- 
inent  conclu  à  la  fin  de  1798,  Pas- 
sewan-Oglou  licencia  une  partie 
de  ses  troupes,  mais  en  retint  as- 
sez pour  résister  aux  attaques  im- 
prévues des  pachas  voisins;  l'évé- 
nement justifia   bientôt   ses  pré- 
cautions  :  le  pacha  de  Romélie, 
que  ses  cruautés  avaient  fait  sur- 
nommer r/iomme  terrible,  rassem- 
bla en  secret  des  forces  considéra- 
bles ,  et  entra  brusquement,   en 
1797,  sur  le  territoire  deWiddin; 
il  croyait   surprendre   Passewan- 
Oglou  et  l'éxrascr.   Celui-ci  Tal- 
tendait.  Il  le  bat  complètement  à 
diverses  reprises  ,  et  le  poursuit 
jusqu'aux  portes  de  Sophia.  Il  rap- 
pelle alors  les  troupes  qu'il  a  li- 
cenciées et  se  montre  plus  redou- 
table que  jamais.  La  Porte,  épou- 
Tantée,  lève  une  armée  impériale, 
dont  elle  donne  le  commandement 
au  grand-visir.  Il  allait  entrer  en 
campagne,  lorsque  la  mort  de  Pas- 
sewan-Oglou  (arrivée  en   1800), 
mit  fin  aux  alarmes  du  sultan. 
PASTEUR  (Jean-Datid)  ,  dé- 


PAS 

pulé  à  la  convention  nationale  de 
la  république  batave,  et  auteur 
distingué,  naquit  à  Leyde ,  le  25 
mai  1^55,  de  parens  estimés,  qui 
lui  firent  faire  de  bonnes  études. 
Obligé  de  se  procm'er  des  moyens 
honorables  d'existence,  il  s'adon- 
na à  l'étude  du  droit  dans  sa  ville 
natale ,  mais  il  consacra  tous  ses 
loisirs  à  l'élude  des  sciences  natu- 
relles :  celles-ci  prirent  bientôt 
un  tel  ascendant  sur  son  esprit  , 
qu'il  abandonna  la  jurispru- 
dence pour  s'y  livrer  tout  en- 
tier. Lorsque  la  révoluti(»n  écla- 
ta en  J795,  ses  lalens,  secondés 
de  ses  opinions  politiques,  ne  tar- 
dèrent pas  à  l'élever  aux  emplois 
supérieurs.  A  cette  époque,  beau- 
coup de  vaisseaux  hollandais  se 
trouvaient  dans  les  ports  de  l'An- 
gleterre; il  importait  de  les  faire 
rentrer  dans  leur  patrie;  les  re- 
présentans  provisoires  du  peuple 
delà  HoUandechargèrent  de  cette 
mission  délicate  M.  Pasteur,  et 
le  lieutenant  de  marine,  M.  J.  L. 
Vitriavins,  en  les  autorisant  àcon- 
certer  entre  eux  les  mesures  les 
plus  propres  à  effectuer  cette  me- 
sure, en  persuadant  aux  capitai- 
nes des  vaisseaux  de  guerre  de 
quitter  ce  pays  avec  les  bâtimens 
qui  étaient  sous  leurs  ordres.  Les 
commissaires  hollandais  rempli- 
reiit  leur  mission  avec  im  succès 
complet.  Deretourdans  sa  patrie, 
M.  Pasteur  fut  immédiatement 
nommé  membre  du  comité  de  la 
marine,  et  le  1"  mars  de  la  même 
année,  élu  représentant  du  peuple 
à  la  piemière  convention  nationa- 
le, où  son  zèle  n'éclata  pas  moins 
que  sa  modération.  Ces  qualités 
furent  appréciées,  et  lefirent  nom- 
mer, le  1"  septembre  1797,  prési- 


PAS 

dent  de  la  seconde  convenlion 
nationale.  La  révoliilion  du  22 
janvier  1798  ayant  dissous  cette 
assemblée,  M.  Pasteur  fut  en- 
voyé comnae  prisonnier  d'état  à  la 
n)aison  du  Bois,  près  de  La  Haye, 
avec  plusieurs  de  ses  collègues  ; 
il  n'en  sortit  qu'après  le  12  juin 
suivant,  lorsque  les  modérés,  qui 
triomphèrent  alors  ,  lui  rendirent 
la  liberté  ,  ainsi  qu'à  ses  compa- 
gnons d'infortune.  Le  corps-lé- 
gislatif s'étant  alors  divisé  en  deux 
chambres,  M.  Pasteur  fut  nommé, 
le  26  septembre  1798  ,  secrétaire 
de  la  seconde  chambre;  mais, 
lorsqu'en  1801  la  représentation 
nationale  ne  forma  plus  qu'une 
seule  chambre,  il  devint  secrétaire 
du  corps-législatif.  Il  termina  son 
honorable  carrière  le  9  janvier 
1804.  Il  a  publié  :  i"  Histoire  na- 
turelle des  mammifères  [Belcnopte 
natuurlyke  historié  der  zoogende 
dieren),  3  vol.  in-8°;  2°  les  Rus- 
ses en  Nord-Hollande,  drame  en 
3  actes.  M.  Pasteur  a  aussi  traduit 
une  foule  d'ouvrages,  parmi  les- 
IL  quels  on  distingue  :  1°  le  Voyage 
IP"  de  Cook  autour  du  monde,  i5  vol. 
in-8°;  2°  VAn  2440  de  Mercier; 
3°  VHistoire  naturelle  du  mont 
Saint-Pierre,  par  Faujasde  Saint- 
Fond;  4"  le  Voyage  d'Utrecht  à 
Francfort,  par  Cogan.  Il  a  été 
publié  une  notice  sur  la  vie  de  M. 
Pasteur,  par  M.  Verbeck,  son  a- 
mi,  dans  le  Courrier  des  Arts  et 
Belles- Lettres  du  9  mars  i8o^|. 

PASrORKT  (le  marquis  Clau- 
de- Emmanuel  -  JftsEPH  -  Pierre  ), 
né,  en  ly.îG,  à  Marseille,  d'une 
famille  honorable,  fut  destiné  à  la 
magistrature.  Il  exerça  d'abord 
la  profession  d'avocat,  passa  en- 
suite, en  1781,  en  qualité  de  con- 


PAS 


^7 


sciller,  à  la  cour  des  aides  de  Pa- 
ris, et  devint  maître  des  requêtes 
quelque  temps  après.  En  1784,  il 
remporta,  à  l'académie  des  ins- 
criptions et  belles-lettres,  un  prix 
qui  lui  en  ouvrit  les  portes  l'an- 
née suivante,  et  il  avait  justifié  ce 
choix  d'avance  par  une  nouvelle 
palme  obtenue  la  même  année. 
II  adopta,  en  1789,  les  principes 
de  la  révolution,  maisilï<ne  chan- 
gèrent rien  à  la  modération  de 
son  caractère  et  à  la  douceur  de 
ses  mœurs.  Nommé,  en  1790,  par 
Louis  XVI,  ministre  de  l'intérieur 
en  remplacement  de  M.  de  Saint- 
Priest,  il  accepta  celte  place,  qu'il 
n'occupa  que  très-peu  de  temps. 
Il  fut  élu  successivement,  le  5o 
janvier  1791,  président  du  dépar- 
tement de  Paris,  et,  le  i4  février, 
procureur-syndic  du  même  dé- 
partement. Il  était  à  la  tête  de  la 
députation  qui,  après  la  mort  de 
Mirabeau  ,  alla  demander  à  l'as- 
semblée constituante  que  la  nou- 
velle église  de  Sainte-Geneviève, 
fût  consacrée  i\  recevoir  les  cen- 
dres des  grands  hommes  auxquels 
le  corps-législatif  accorderait  cet 
honneur.  Il  présida,  la  même  an- 
née, l'assemblée  électorale  de  Pa- 
ris, et  fut  nommé  député  à  l'as- 
semblée législative.  Dans  la  pre- 
mière séance,  en  qualité  de  pré- 
sident, il  prononça  un  discours, 
dans  lequel  il  félicitait  l'assemblée 
constituante  d'avoir  marché  avec 
autant  de  talent  que  de  courage 
dans  la  carrière  qui  lui  avait  été 
ouverte.  Vers  la  fin  d'octobre,  il 
se  plaignit  des  rigueurs  exercées 
contre  les  émigrés,  et  proposa  de 
les  restreindre  aux  fonctionnaires 
publics  qui  auraient  abandonné 
leur  poste  au  moment  du  danger. 


Il 


56  PJiS 

Le  5i  décembre^  il  conlribua  à 
faire  abolir  les  coinpliiuens  et  les 
félicitiilions  d  obligation  au  renou- 
vellement de  l'année;  sou  inten- 
tion fut  mal  interprétée,  et  le  mê- 
me jour,  il  fit  comprendre  dans 
l'amnistie  qui  avait  été  décrétée 
pour  les  délits  révolutionnaires, 
les  4o  soldats  de  Château  vieux, 
condamnés  aux  galères  pour  l'af- 
faire de  Nanci  ;  le  25  lévrier 
1792,  il  provoqua  et  obtint  la  sup- 
pression du  tribunal  de  l'uiiiver- 
silé ,  et  aj>puya  cette  niesuie  de 
raisons  philosophiques  qui  con- 
vainquirent l'assemblée.  Dans  la 
séance  du  9  avril  1792,  il  se  pro- 
nonça pour  l'abolili.in  de  l'escla- 
vage et  de  la  traile  des  nègres; 
mais  il  fut  d'avis  de  n'exé<;nter 
que  graduellement  ce  grand  acte 
d'humanité  et  de  justice,  et  déve- 
loppa les  motifs  de  son  «jpiiiion. 
M.  Pastorel  était  ennemi  des  par- 
tis extrêmes,  et  si  on  le  vit  quel- 
quefois flotter  entre  les  diverses 
opinions,  c'est  qu'il  cherchait  à 
les  concilier  tontes  pour  éviter  les 
suites  fime.«tes  des  divisions;  ainsi, 
quoiqu'il  siégeât  au  côté  droit,  il 
appuya,  le  20  du  même  mois,  la 
déclaration  de  guerre  à  l'Autriche. 
Le  16  juin,  il  demanda  et  fit  dé- 
créter l'établissement  d'une  place 
et  rérection  d'une  colonne,  sur- 
montée de  la  statue  de  la  liberté, 
sur  l'emplacement  de  la  Bastille; 
le  19,  il  présenta  un  rapport  lu- 
mineux et  fort  de  raisonnemens, 
pour  démontrer  la  nécessité  de 
séparer  des  fonctions  ecclésiasti- 
ques les  actes  civils  qui  constatent 
les  naissances,  les  mariages  et  les 
décès;  le  21,  il  fit  rejeter  une  mo- 
tion de  Couthon,  ayant  pour  ob- 
jet de  Hure  rendre  les  décrets  exé- 


PAS 

cutoires  sans  la  sanction  du  roi; 
le  5o,  en  invitant  l'assemblée  à 
faire  punir  les  auleiirs  du  mouve- 
ment du  20.  il  insista  sur  l'avan- 
tage de  rester  unis,  en  prouvant 
que  l'esclavage  serait  la  suite  né- 
cessaire des  divisions  et  des  trou- 
bles. Dès  ce  moment,  M.  Pastoret 
vit  toute  l'étendue  des  maux  où 
serait  entraînée  la  France  par  une 
assemblée  qui  réunirait  tous  les 
pouvoirs,  et  s'attacha  avec  un  nou- 
veau zèle  à  soutenir  la  prérogative 
roj'ale  ;  aussi  un  membre  ayant 
demandé,  le  5juilh!l  suivant,  que 
l'assemblée  s'emparât  de  l'exerci- 
ce du  pouvoirexécutif,  M.  Pasto- 
ret, s'élevant  avec  force  contre  la 
proposition,  prouva  qu'elle  était 
inconstitutionnelle,  et  insista  pour 
que  Toraleur  fût  envoyé  à  l'Ab- 
baye. Il  dénonça  le  28  lesen)piète- 
men'^  des  municipalités  sur  le  pou- 
voir judiciaire,  fit  voir  le  despo- 
tisme qui  résulterait  de  pareils 
abus,  et  proposa  des  mesures  ef- 
ficaces pour  les  faire  cesser.  Nom- 
mé niembie  d'une  commission 
extraordinaire  pour  examiner  la 
conduite  du  général  L\  Fayette 
{voyez  Vkhette)-  qui,  ayant  quitté 
l'armée  sans  autorisation  ,  était 
venu  défendre  à  la  barre  de  l'as- 
semblée les  droits  du  trône  cons- 
titutionnel, il  armonça.  dans  son 
rapport  du  8  août,  que  sur  i5 
membres  7  avaient  voté  coiitre  le 
décret  d'accusation.  Les  événe- 
mens  du  10  août  ayant  mis  sa  li- 
berté et  même  ses  jours  en  dan- 
ger, il  prit  la  fuite,  et  eut  ensuite 
le  bonheur  d'échapper  au  régime 
de  la  terreur.  Il  ne  reparut  s:ir  la 
scène  politique  qu'au  mois  de  bru- 
maire an  3  (novembre  1795),  é- 
poque  où  le  déparlement  du  Var 


Il 


PAS 

l'élut  député  au  conseil  de?  cinq- 
cents.  Il  y  niontiii lii  nunie  énergie 
fin  laveur  «les  droits  acquis,  et  sur- 
tout de  lu  liberté  de  hi  presse,  que 
le  diitctoire -exécutif  voulait  en- 
traver: iJ  plaida  aussi  la  cause  des 
prêtres  déportés  qu'où  punissait, 
disait-il,  pour  une  consti'ution  re- 
ligieuse qui  n'existait  plus;  il  par- 
la sur  l'administration  despri?ons, 
et  fut  éiu  président  le  19  août.  JM. 
Pastoret  se  fit  constamment  rc- 
ijQurqucr,  pendant  ceite  session  . 
par  ses  lumières  et  ses  opiuinus 
osst'Z  {^énéraleuient  constitution- 
nelles et  pliilo.sophiques  ;  mais 
insensiblement  il  piit  une  part 
plus  active  aux  divisions  qui  s'é- 
levaient entre  la  majorité  des 
conseils  et  celle  du  directoire.  Le 
i5  mars  1797,  il  repous.^a,  com- 
me pro[)re  ù  exciter  des  lr«mbles, 
la  proposition  du  directoire,  ten- 
dant à  exiger  des  électeiirs  un  ser- 
ment de  haine  à  la  royauté  ;  de- 
puis ce  moment  jusrpi'au  j8  fruc- 
tidor, c«  ne  fut  plus  qu'une  lutte 
entre  M.  Pastoret  et  le  parti  direc- 
lorial.  Le  28  du  même  mois,  il 
s'opposa  à  ce  que  Brottier  et  La- 
villeheurnois ,  agens  royalistes, 
fussent  jugés  par  une  commission 
militaire,  et  le  3o,  il  déclara  con- 
tre-révolutionnaire  un  message 
du  directoire,  qui  défendait  l'exé- 
cution d'un  arrêt  dd  tribunal  de 
cassation  sur  cette  nlfaire,  décla- 
rant qu'une  commission  militaire 
ne  pouvait  en  être  juge.  Le  28 
juin,  il  parla  en  faveur  des  fugitifs 
de  Toulon.  Vers  la  même  époque, 
il  accusa  la  conduite  des  ageus 
du  directoire  dans  les  colonies,  et 
surtout  à  l'égard  des  États-Unis; 
il  proposa  que  la  nomination  de 
ces  agens  lui  fût  retirée.  Le  4 
thermidor  (22  juillet),  il  demanda 


PAS 


^9 


la  suppression  des  réunions  popu- 
laires. Cet  étal  d'hostilités  con- 
tre le  directoire  devait  l'exposer  à 
toute  sa  vengeance,  du  moment 
où  il  aurait  saisi  le  pouvoir  au- 
quel il  tendait;  il  lriom!)ha  le  18 
fructidor  au  5  (4  septembre  1797), 
et  M.  Pastoret  fut  porté  un  des 
premiers  sm'  les  listes  de  dépor- 
tation. Prévenu  à  temps,  il  put  se 
réfugier  en  Suisse,  où  il  resta  jus- 
qu'en 1800, quoiqu'on  eût  fait  cou- 
rir le  bruit  qu'il  s'était  rendu  à  l'île 
d'Oîeron.  Il  fut  rappelé  en  Fran- 
ce à  cette  époque.  Le  premier  (;on- 
sul  Bonaparte  le  nomma,  en  1801, 
membre  du  conseil-général  des 
hospices  et  secours  publics,  et  en 
1804,  proiésseur  du  droit  de  la 
nature  et  des  gens  au  collège  de 
France.  Après  avoir  été  <lésigné 
d«'ux  fois  par  le  collège  électoral 
de  la  Seine,  pour  entrer  au  sénat, 
il  y  fut  admis  en  1809,  et  devint 
membre  de  la  légion-d'honneur. 
Le  I"  avril  1814,  il  vota  la  créa- 
tion d'un  gouvernenient  provisoi- 
re et  la  déchéance  de  INapoléon. 
Au  retour  du  roi,  il  fut  nommé 
pair  de  France,  commandeur  de  la 
légion-d'honneur,  conseiller  de  l'u- 
niversité royale,  et  enfin,  en  18 15. 
président  du  collège  électoral  dM 
département  du  Var.  W.  Pastoret 
qui,  pendant  toute  sa  carrière  po- 
litique, avait  évité  tout  ce  qui  lui 
semblait  exagéré,  parut  en  1818 
oublier  ses  principes,  en  appuyant 
de  son  vole  la  proposition  de  son 
collègue,  M.  Barthélémy,  contre 
la  loi  des  élections.  Il  est  aujour- 
d'hui (1824)  vice- président  de  la 
chambre  des  pairs.  On  lui  doit 
un  grand  nombre  d'ouvrages  com- 
me littérateur.  Ce  sont  :  1°  Eloge 
de  Voltaire,  1 799;  2°  Tributs  of- 
ferts  à  Cacadcwie  de    Marseille, 


6o 


PAS 


1782;  3"  Elégie  de  Tiballe,  1783; 
4"  Discours  en  vers,  sur  l'union 
qui  doit  régner  entre  la  magistratu- 
re ,  la  philosophie  et  les  lettres, 
1^85;  5"  une  dissertation  sur  cette 
question  :  Quelle  a  été  l'influence 
des  lois  maritimes  des  Rhodiens, 
sur  la  marine  des  Grecs  et  des  Ro- 
mains, et  de  l'influence  de  la  marine 
sur  la  puissance  de  ces  deux  peu- 
ples? inh'.^;  6'  Z oroastre,  Confu- 
cius  et  Mahomet,  comme  sectaires, 
législateurs  et  moralistes,  avec  le 
tableau  de  leurs  dogmes,  de  leurs 
lois  et  de  leur  morale,  2'édit  ,  1787; 
7°  Moise  considéré  comme  législa- 
teur et  comme  moraliste,  1789;  8" 
Traité  des  lois  pénales,  1  vol.  in- 
8°,  1790;  9°  Ordonnancs  des  rois 
de  France,  lom.  X\ ,  iS 1 1,  in-fol.  , 
travail  dont  il  fut  chargé  par  l'ins- 
titut ;  10'^  avec  MM.  Brial,  Dau- 
nou  et  Q'ingiiené^H  istoire  littéraire 
de  la  France,  tom.  XIII,  i8i4, 
in-4°,  commencée  parles  religieux 
bénédictins  de  la  congrégation  de 
Saint-Maur^;  11"  un  rappoit  très- 
étendu  et  très-instructif  fait  au 
conseil  des  hospices  en  1816; 
12°  Histoire  de  la  législation,  4vol. 
in-8°. 

PASTOIVET(i,E  COMTE  Amédée), 
fils  du  précédent,  maître  des  re- 
quêtes, s'était  voué  à  la  carrière 
administrative.  Le  7  avril  i8i3,  il 
fut  nommé  sous-préfet  de  Cor- 
beil,  et  passa,  dans  les  premiers 
jours  de  janvier  1814,  à  la  sous- 
préfecture  de  Chaions-snr-Saône. 
A  cette  époque, où  le  territoire  fran- 
çais était  envahi, il  rassembla  tous 
les  habitans  de  bonne  volonté, 
elils  furent  en  grand  nombre,  mar- 
cha à  leur  tête  contre  l'ennemi,  et 
chargea  avec  une  rare  intrépidité 
lin  corps  avancé  de  plus  de  200 


PAT 

hommes.  Il  est  aujourd'hui  (1824) 
maître  des  requêtes  en  service  ex- 
traordinaire, ayant  séance,  et  com- 
missaire du  roi  près  la  commission 
du  sceau.  On  a  de  hi\:Des  moyens 
mis  en  usage  par  Henri  IF  pour  s'' as- 
surer lacouronne  et  pacifier  la  Fran- 
ce  au  sortir  des  troubles  civils,  2* 
édition,  1817,  in-S",  ouvrage  qui 
a  rempoi  té  le  prix  à  l'académie  de 
Chrdons-.sur-Marne  en  18 1 5, 

PATAUD  (l'abbé  Jean-Jacques- 
FRAîifçois),naquitleiooclobrei752 
à  Orléans,  département  du  Loiret, 
exerça  quelque  temps  la  profession 
de  commerçant,  qui  était  celle  de 
son  père;  mais  bientôt  entraîné 
par  ea  vocation  pour  le  sacerdoce, 
il  se  fit  recevoir  prêtre,  et  prêcha 
avec  quelque  succès  dans  les  prin- 
cipales églises  du  diocèse  d'Or- 
léans. A  l'époque  de  la  révolution, 
où  il  ne  lui  était  pas  permis  d'exer- 
cer son  ministère,  il  se  livra  â  l'é- 
ducation de  quelques  jeunes  gens; 
il  le  reprit  après  le  concordat  de 
1801,  et  ne  le  cessa  qu'i\  sa  mort, 
arrivée  le  25  mai  1817.  L'abbé  Pa- 
taud a  publié  :  1"  Discours  pronon- 
cés à  différentes  époques  en  présen- 
ce de  tous  les  corps  constitués  de  la 
ville  d'Orléans,  in-8°,  sans  date  ni 
indication  de  lieu,  mais  présumé 
imprimé  en  18  i3,  tiré  seulement 
à  20  exemplaires  :  on  remarque 
dans  ces  disCours,  au  nombre  do 
quatre  ,  celui  qui  renferme  l'E- 
loge de  Jeanne-d'  Arc;  2°  différens 
Opuscules  insérés  dans  les  Etren- 
nes  orléanaises  de  i8ii  à  i8i5,  et 
tirés  séparément;  3°  en  manuscrit 
une  Histoire  d'Orléans,  tic.  Le  tra- 
vail de  l'auteur,  formant  deux  vol. 
in-S",  mais  qui  n'a  été  continué 
que  jusqu'en  1810,  est  devenu  la 
propriété  de  la  bibliothèque  publi- 


PAT 

que  d'Orléans,  à  qui  l'abbé  Pataud 
l'a  légué  par  lestauienl  ainsi  que 
sesatitres  manuscrits.  Le  prospic- 
tus  de  cet  ouvrage  avait  paru,  eu 
181 5,  rsous  ce  titre  :  Hiiloired' Or- 
léans et  des  principales  villes  du 
Loiret,  depuis  la  mort  de  Jeanne- 
d'Arc,  précédée  d\m  précis  histori- 
que de  la  situation  d'Orléans,  à  da- 
ter de  l'origine  de  la  monarchie  Jus- 
qu'en 1 540,  d'après  les  pièces  jus- 
tificatives tirées  des  archives  de  ta 
préfecture,  de  la  mairie,  de  l'évê- 
ché,  etc.;  suivie  de  la  topographie 
historique,  par  ordre  alphabétique^ 
de  toutes  les  communes  du  départe- 
ment du  Loiret,  des  monumens  qui 
les  décorent,  des  faits  particuliers 
qui  les  distinguent ^  des  familles  qui 
les  ont  illustrées,  etc.  On  trouve 
dans  les  Etrenncs  orléanaises  de 
1818  une  notice  sur  l'abbé  Pataud, 
par  M.  de  Laplace,  président  de 
la  cour  royale  d'Orléans.  On  rap- 
porte que  cet  ecclésiastique  avait 
une  mémoire  prodigieuse,  et  l'on 
donne  pour  exemple  qu'étant  allé 
entendre  par  défi  le  sermon  du 
missionnaire  Beauregard,  il  le  re- 
tint tout  entier,  et  le  répéta  le  len- 
demain dans  la  paroisse  dont  il  é- 
tait  vicaire,  n'ayant,  au  dire  mê- 
me de  l'abbé  Beauregard,  altéré 
que  trois  expressions. 

PAÏERSON  (Daniel)  ,  colonel 
anglais,  aide-quarlier-maître-géné- 
ral  de  l'armée  britannique,  a  pu- 
blié plusieurs  ouvrages  estimés. 
On  lui  doit  :  1°  Nouvelle  descrip- 
tion exacte  de  toutes  les  principales 
routes  de  l' Angleterre  et  du  pays 
de  Galles,  1771Î  in-8",  r*  édition, 
qui  a  été  suivie  d'une  vingtaine 
d'éditions  consécutives;  2°  Dic- 
tionnaire du  voyageur,  ou  Tables 
alphabétiques  d«s  distances  dt  tou- 


PAT 


bi 


tes  les  villes,  bourgs,  etc. ,  de  l'An- 
gleterre et  du  pays  de  G«//e4-,  1772, 
2  vol.  in  8' •,  3"  Description  topo- 
graphique de  l'ils  de  la  Grenade, 
1780,  in-4°;  4°  Itinéraire  de  l'em- 
pire britannique ,  1785,  2  vol. 
in-8°. 

PATRAT  (Joseph),  auteur  dra- 
matique, naquit  à  Arles,  départe- 
ment des  Bouches-du-Rhône,  vers 
1752.  Il  se  fit  connaître  d'abord 
comme  coiTiédien  ;  mais  il  eut  peu 
de  succès ,  et  il  renonça  à  cette 
profession,  pour  se  livrer  à  lu 
composition  de  pièces  de  théâtre, 
dont  sa  famille  porte  le  nombre  à 
57.  Il  fut  plus  heureux  dans  cette 
carrière,  et  plusieurs  de  ses  comé- 
dies sont  vues  avec  plaisir  sur  les 
théâtres  secondaires  et  en  provin- 
ce. En  général,  elles  olYrent  des 
situations  plaisantes  et  un  dialo- 
gue facile.  Nous  donnerons,  d'a- 
près un  de  nos  bibliographes  les 
plus  distingués,  la  liste  des  pièces 
imprimées.  Ce  sont  :  i"  les  Deux 
Morts',  2°  C Anglais,  ou  le  Fou  rai- 
sonnable ;  5"  les  Déguisemr.ns  a- 
vioureux,  ou  la  Résolution  inutile', 
4'  le  Présent,  ou  l'Heureux  qui- 
proquo ;  5°  les  Deux  Grenadiers , 
ou  les  Quiproquos;  6°  r Officier  de 
fortune,  ou  les  Deux  Militaires; 
7°  l'Heureuse  erreur;  8"  l'Amour 
et  la  liaison,  ou  les  Volontaires  Or- 
léanais; 9"  les  Méprises  par  ressem- 
blance; 10"  Isabelle  de  Rosalro;  1 1" 
le  Complot  inutile  (cette  pièce  a 
été  faite  en  société  avec  M.\l.  Jauf- 
fret  et  Weiss);  1 2°  les  Deux  Frères, 
pièce  imitée  de  l'allemand,  et  jouée 
avec  succès  sur  le  Théâtre- Fran- 
çais; i3"  la  Pension  genevoise,  ou 
l'Éducation  :  elle  parut  {dus  tard 
sous  le  titre  de  l.i  Pension  de  jeu- 
nes demoiselles;   14"   François  et 


6a 


PAT 


Rouffignac  ;  \5°  les  Avions  protces, 
ou  Qui  compte  sans  son  hôte  comp- 
te deux  fols;  16"  Mina,  ou  le  Pré- 
jugé de  l'amitié;  ij:"  un  Prologue 
pour  le  théâtre  de  l'Odéon  ;  18" 
avec  M.  >Vei'S.  Honneur  et  Indi- 
gence; iQ"  le  Sourd  et  l'Aveugle; 
ao°  la  Petite  rusée;  21°  Toberne, 
ou  le  Pécheur  suédois,  repré.-enlt'e 
sur  le  théâtre  Feydcau  ;  22°  la 
Vengeance;  25"  l'Orpheline;  24° 
la  Fête  du  cœur;  25"  l' Heureuse 
ressource,  ou  le  Pouvoir  du  zèle  ; 
26°  //  ne  faut  pas  condamner  sans 
entendre;  27*  l'Espiègle;  2^°  un 
prologue  intitulé  :  le  Répertoire; 
29"  la  coniéJie' de  Lagrange  ,  les 
Contre-temps,  réduilt;  en  un  acte, 
par  Patrat;  5o°  le  Déserteur,  de 
îMercier,  retouché;  5i"  le  Valet 
mal  servi;  oa"  Henneval  de  Saint- 
Méry  ;  53°  la  Kermesse ,  ou  la 
Foire  allemande  ;  34"  Toinette  et 
Louis;  55"  Adélaïde  de  Mirval; 
36°  le  Point  d' honneur;  57"  les 
Etrennes,  ouïes  Débats  des  Muses; 
38"  le  Conciliateur  à  la  mode,  ou 
les  Etrennes  du  public.  Ces  huit 
dernières  pièces  n'ont  pas  été  iin- 
primées.Patrat  moiii*utà  Paris,  en 
1801,  dans  l;i  79'  année  de  son  âge. 
PATUIN  (Kugène-Louis-iMel- 
chior)  ,  député  du  département 
du  Rhône  à  la  convention  nationa- 
le, sa  vaut  naturaliste,  à  qui  l'on  doit 
plusieurs  découvertes iniportanles 
en  minéralogie  el  en  géologie,  na- 
quit à  Lyon  en  1742.  Destiné 
par  se»  pareus  à  la  carrière  du 
barreau ,  il  l'ahandonna  de  bonne 
îreure  pour  se  livrer  en  entier  au 
penchant  qui  l'entraînait  vers  l'é- 
tude des  sciences  naturelles.  Il 
résolut,  après  avoir  terminé  de 
là  manière  la  plus  brillante  ses 
cours  de  physique  el  de  chimie, 


PAT 

de  visilcr  les  contrées  septentrio- 
nales de  l'Europe,  pour  recueillir 
tous  les  faits  qui  lui  paraissaient 
propres  à  établir  un  système  gé- 
néral de  géologie,  et  à  éclaircir 
l'histoire  du  globe.  Patrin  se  ren- 
dit d'abord  en  Allemagne,  parcoii- 
lul  en  observateur  éclairé  l'Autri- 
che, la  Bohême  et  la  Hongrie,  me- 
sma  la  hauti-ur  des  montagnes, 
descendit  dans  les  principales  mi- 
nes, etamassa  uneriche  collection 
d'échantillons  de  toutes  les  subs- 
tances minérales.  Il  continua  en- 
suite ses  savantes  investigations  en 
Pologne.  A  WHna ,  il  trouva  im 
de  ses  compatriotes,  le  professeur 
Gilibert,  qui  l'engagea  à  aller  en 
Russie,  et  lui  donna  de;  lettres 
de  recommandation  pour  les  prin- 
cipaux membres  de  l'académie  de 
Péfersboiirg.  Parfaitement  accueil- 
li en  cette  ville,  »;t  encoiu'agé  d'a- 
bord par  le  célèbre  voyageur  Pal- 
las  ,  dont  il  cul  à  se  plaindre  de- 
puis,  (piand  Patrin  parut  devenir 
un  dangereux  compétiteur  de 
gloire,  il  obtint  du  gouvernement 
l'autorisation  devisilerla  Sibérie. 
On  lui  donna  pour  escorte  et  pour 
guide  un  sous-oflîcier  russe,  qui 
devait  pourvoir  au  besoin  du  na- 
turaliste français  dans  ces  contrées 
sauvages,  où  il  n'est  point  facile 
de  se  procurer  même  les  objets  de 
j)rcmière  nécessité  pour  la  vie. 
l'atrin  partit  de  Pétersbourg  en 
1780,  et  employa  huit  laborieuses 
années  à  parcourir  les  irrtn)ense3 
chaînes  de  montagnes  de  TAsi* 
septentrionale,  depuis  les  monts 
Oural  jusqu'au  delà  du  méridien 
de  Pékin.  Il  eut  à  supporter  des 
privations  de  tout  gefire  et  des 
fatigues  inouïes.  A  des  étés  bien 
courts,   mais    brûlans,   pendant 


PAT 

lesquels  des  myriades  d'insectes 
tourmerileril  sans  relâche  le  voya- 
geur, succèdent  dans  ces  contrées 
hyperborécnues  les  pins  ligoinenx 
hivers.  Pati'in.surnionta  avec  autant 
de  courage  que  de  persévérance 
tons  les  ol»-tacles,  et  revint  heu- 
reusement à  Pélersbmn-g  à  la  fin 
de  171^7.  Il  avait  rempli  avec  zèle 
tons  les  engagemeii.s  qu'il  avait 
pris  avec  l'académie  des  sciences' de 
cette  ville,  lui  avait  envoyé  di- 
vers mémoires  et  de^  échantillons 
de  tous  les  minéraux.  Il  s'était 
aussi  fait  précéder  de  sa  collection 
particulière,  mais  il  reconnut 
bientôt  qriePallas  s'était  approprié 
à  chaque  envoi  une  partie  des  mor- 
ceaux les  plus  précieux, et  il  se  plai- 
gnit amèremenide  l'avidité  scien- 
tiûque  de  ce  célèbre  naturaliste, 
auquel  il  ne  pardotma  jamais.  As- 
sez mécontent  des  savans  de  la 
Russie,  Palrinrevinldanssa  patrie 
après  10  ans  d'absence,  et  se 
fixaà  Paiis.  11  ol'tVit  au  cabinet  du 
Jardin  du  Roi  sa  ri(  hc  collection 
des  minéraux  de  la  Sil>érie ,  sous 
la  seule  condition  de  ne  la  point 
morceler.  Elle  consistait  eu  5o 
quintaux  environ  d'échantillons 
classés  et  étiqueté?  avec  soin, 
mais  l'oUre  ne  fut  point  acceptée, 
lautc  d'espace,  lui  répomlit-on , 
pour  placer  convcnablerrient  tou- 
tes ces  ricliej-ses.  Patriu,  qui  s'é- 
tait consacré  tout  entier  aux 
fecienfîi.'s,  n'avait  juis  aucime  j)art 
aux  événemens  politiques  de  cette 
épocfue  i'ragpu.se,  et  depuis  nom- 
bre, d'années,  il  était  éloi;<né  de 
su  ville  natale;  mais  l'estime  géné- 
rale dont  il  jouissait  parmi  ses 
concitoyens  b  fit  porter  ,  par  les 
électeurs  de  Lyon,  à  lu  représcn- 
taliuii    natiunule;    et    il    se    vit 


PAT  65 

nommé  contre  son  vœu  ii  la  con- 
vention nationale.  Il  s'y  montra 
coust.unment  ami  de  l'ordre  , 
de  la  justice  et  d'une  sage  li- 
berté, et  mérita  la  haine  des  par- 
tisans de  Robespierre.  Dans  le 
pro(;ès  du  roi,  il  vota  avec  la  mi- 
norilé  contre  la  peine  de  mort, 
potu'  l'appel  au  peuple  et  pour  le 
sursis.  Lorsque  la  ville  de  Lyon 
se  souleva  en  179^  contre  la  majo- 
rité de  la  convention,  Patrin  iïU 
accusé  d'avoir  excité  ses  conci- 
toyens à  s'insurger.  Frappé  d'un 
décret  équivalent  à  une  sentence 
de  mort,  il  eut  le  bonheur  d  y  é- 
chapper,  et  de  trouver  nu  asile 
iinjiénétrable,  où  il  resta  caché 
pendant  tout  le  règne  de  la  ter- 
reur. Après  le  9  thermidor ,  il 
rentra  à  la  convention,  et  fut  en- 
voyé par  le  nouveau  comité  de 
salut  -  public  pour  surveiller  la 
manufacture  d'armes  de  Saint-É- 
tienne.  Lors  de  la  création  de 
l'école  des  mines ,  il  en  fut  nom- 
mé bibliothécaire  ;  il  dorma  à  cet 
établissement  sa  collection  des  mi- 
néraux, et  reprenant  ensuite  avec 
joiele  cours  de  ses  travaux  scientifi- 
ques, il  eut  une  grande  part  à  la  ré- 
daction du  Journal  des  Mines, 
publié  par  les  professeurs  de  l'é- 
cole, et  l'em-ichit  de  mémoires 
iutéressans.  Ce  savant  estimable 
se  retira  vers  la  fin  de  sa  vie'A 
Sarnt-Vallier,  près  de  Lyon,  otV  il 
mourut  le  i5  aoftt  181 5,  à  l'âge 
de  75  ans.  La  bonté  et  la  noblesse 
de  son  caractère,  son  indifférence 
pour  la  fortune,  sa  modestie  et  son 
amabilité  dans  toutes  les  relations 
sociales-,  lui  avaient  acquis  de 
nouibreux  airii»,  qui  lui  restèrent 
conslammenl  attachés.  Patrin  a 
laissé  une  foule  de  mémoires  in- 


04 


PAT 


s«;rés  dans  Xa  Journal  de  Physique, 
dans  la  Bibliothèque  britannique , 
dans  les  Aiinales  des  Mines  et 
dans  le  Nouveau  Dictionnaired' his- 
toire naturelle.  Doué  d'une  imagi- 
nation vive  et  féconde,  il  a  cher- 
ché à  expliquer  par  de  nouvelles 
hypothèses  la  plupart  des  grands 
phénomènes  de  la  nature,  tels  que 
la  formation  des  minéraux  et  des 
montagnes,  Forigine  des  sources, 
la  cause  des  volcans,  etc.  Le  na- 
lurali>te  lireislak  [voyez  ce  nom) 
s'est  emparé  de  la  Théorie  des 
Volcans  de  Patrin,  et  l'a  déve- 
loppée dans  son  Voyage  dans  la 
Campanie.  On  a  encore  du  savant 
Lyonnais  :  l"  Relation  d'un  voyage 
en  Sibérie,  aux  monls  u' Attalce  ^ 
etc.,  Pélersbourg,  1785,  iti-8", 
et  insérée  par  Pallas  dans  les 
Nouveaux  Essais  sur  le  nord  : 
on  trouve  dans  cet  écrit  des  ob- 
ser  va  lions  géologiqueslrés-cu  rieu- 
ses et  des  détails  iuléressans  sur 
les  dangers  que  Tintrépide  voya- 
geur a  courus  dans  cette  contrée, 
qu'il  appelle  la  désolation  du  nord, 
comme  les  navigaleursont  nommé 
les  environs  du  cap  Horn  la  déso- 
lation du  midi;  1°  Histoire  naturel- 
le des  minéraux  ^  Paris,  1801,  5 
vol.  in-18,  avec  4'>  planches,  ou- 
vrage qui  fait  suite  aux  oeuvres 
du  liuffon  publiées  par  Cas- 
tel,  et  qui  offre  beaucoup  de 
faits  nouveaux;  5°  Notes  sur  les 
Lettres  à  Sophie^  par  M.  Aim.é 
Martin,  Paris,  1810,  2  vol.  in-8"  : 
ces  notes  contiennent  l'explication 
ingénieuse  de  plusieurs  phén(tmè- 
nes  de  la  nature,  tels  que  la  com- 
bustion, les  étoiles  fdantes,  la  ro- 
sée, l'origine  des  sources,  les 
aurores  boréales,  les  volcans,  etc.  ; 
l'auteur  atlriliue  la  formation  de 


PAT 

ces  derniers  à  la  circulation  conti 
nuelle  de  divers  fluides  ,  dont  une 
partie  devient  concrète  par  la  fixa- 
tion de  l'oxigène.  Pétrin  était  cor- 
respondant de  l'institut,  membre 
de  l'académie  des  sciences  de  Pé- 
tersbomg,  de  la  société  d'agricul- 
ture de  Paris,  et  de  plusieurs  au- 
tres sociétés  savantes.  On  trouve 
dans  les  Annales  encyclopédiques, 
année  1818,  une  bonne  notice 
sur  ce  savant,  par  M.  Viller- 
mé. 

PATRIS-DE-BREUIL(L.  M.), 
juge-de-paix  à  Troyes,  s'est  fait 
connaître  dans  la  littérature,  d'a- 
bord comme  éditeur  des  Œuvres 
de  Grosley,  et  ensuite  comme  au- 
teur des  ouvrages  sui  vans:  ï°  Opus- 
cules en  prose  et  en  vers,  1810, 
in- 1 2  ;  2°  Eloge  de  Louis  XVIII, 
roi  de  France.  Ce  discours  a  été 
prononcé  le  35  août  «8i5,  à  l'hô- 
tel-de-ville  de  Troyes. 

l'ATRIX  (  N.  ) ,  général  en  chef 
de  l'armée  avignonaise,  naquit  à 
Avignon, d'une lamille  honorable; 
quoiqu'il  fût  jeune  encore  à  l'épo- 
que de  la  révolution  ,  il  en  em- 
brassa la  cause  avec  la  plus  grande 
exaltation  ,  et  dut  surloutà  sa  fou- 
gue et  à  son  audace  le  commande- 
ment en  chef  de  l'armée  patrioti- 
que d'Avignon  ,  qui  voulait  la  réu- 
nion du  Comtat  à  la  France.  Ses 
principes  devinrent  plus  modérés, 
et  lorsque  ses  troupes,  au  com- 
mencement de  1791,  après  s'être 
emparées  de  la  ville  de  Sérian  ,  la 
livrèrent  au  pillage,  Patrix  fit 
paraître  des  sentimens  de  justice 
et  d'humanité  qui,  à  ce  qu'on  pré- 
tend ,  devinrent  la  cause  de  sa 
perte.  Bientôt  il  fut  dénoncé  à  son 
é4at- major,  pour  avoir  favorisé 
l'évasion  d'un  prisijnnier;  son  ju- 


PAT 

gement  fut  prompt,  et  il  fut  fusillé 
à  MoiilitMix.  Ijv  général  Fatrixeut 
pour  siiL'ces^tnir  le  trop  fameux 
J(»iir(iau,  dit  Coupe-tête. 

PATTE  (Pierre)  ,  architecte  peu 
■connu  par  les  cuiislnictrons  qu'il 
a  exécutées,  mai»  qui  s'est  nio- 
mentanémenl  fait  remarquer  coui- 
me  l'antagoniste  de  son  célèbre 
confrère  Soufflol,  à  qui  l'on  doit  le 
beau  monument  ded'église  Sainte- 
Geneviève,  long-temps  connue  sous 
le  nom  de  Panthéon  français.  Patte 
s'associa  d'abord  avec  les  auteurs 
de  rKncyclopédie  pour  la  direc- 
tion des  dessins  et  des  gravures  de 
cet  ouvrage;  mais  bientôt  il  se 
brouilla  avec  eux.  M.  Foisset  rap- 
porte qu'il  «publia  dan^'  les  feuilles 
de  Fiéron  ,  que  les  éditeurs  de 
l'Encvclopédie  n'avaient  d'autres 
planches  que  celles  qu'ils  avaient 
dérobées  à  Réaumur.  Comme  ce 
savant  avait  légué  toutes  ses  plan- 
ches à  l'académie  des  sciences,  les 
libraires  demandèrent  à  celte  com- 
pagnie des  commiî'i-aires  pris  dans 
son  sein  pour  cnmparcr  les  des- 
sins inédits  de  l'EucycIopédie  avec 
ceux  de  IVéaumur.  Il  fut  reconnu 
que  ces  premiers  dessins  étaient 
originaux,  et  Palle  se  vit  obligé 
<le  rétracter  son  assertion  témé- 
raire. I)  La  construction  de  la 
nouvelle  église  de  Sainte-Gene- 
viève fut  l'objet  d'une  censure  a- 
inère  de  sa  part.  Grimm ,  dans  sa 
correspondance  ,  venge  Soufllot 
des  attaques  dirigées  contre  ce  cé- 
lèbre ouvrage.  Il  accuse  Patte  d'ê- 
tre «  un  lionune  tracassier,  qui, 
n'ayant  rien  lait  pour  l'art ,  se 
constituait,  sans  titres  et  à  contre- 
temps, leccnseur  det(iut  ccqu'cxé- 
culaient  les  bons  artistes,  dont  il 
nep(»uvailOtre  le  rival.  »  En  1780, 

T.    XVI. 


PAT  65 

Patte  attaqua  encore  Soufilot  dans 
les  Annales  politiques  de  l.iiiguet, 
à  l'occasion  des  altérations  jque 
quelques  pierres  avaient  éprou- 
vées; enfin  en  1799,  il  fournit  an  mi- 
nistère de  l'intérieur  de  nouvelles 
observations  sur  ce  monument. 
L'hôtel  Cliarost,  à  Paris,  est  à  peu 
près  le  seul  ouvrage  de  Patte,  qui 
prenait  le  litre  d'architecte  du  duc 
des  Deux-Ponts,  pour  lequel  il 
avait  construit  le  château  de  Jares- 
bourg,  dessiné  sur  le  modèle  de 
Trianon.  Patte  a  publié,  i*^  Mé- 
moire sur  la  construction  de  la  cou- 
pole projetée  pour  couronner  l'é- 
glise de  Sainte -Geneviève  y  in-4°, 
Paris,  1770;  1°  Moiiumensérigés  en 
France  en  C  honneur  de  Louis  KV , 
précédés  d'un  Tableau  du  progrès 
des  sciences  et  des  arts  sous  son  rè- 
gne, id-fol.  ,  figures,  Paris,  1765; 
5°  Projet  d'éclairage  pour  une  gran- 
de ville  ;  !|  '  Mémoires  sur  les  pro- 
jets les  plus  importons  de  l'archi- 
tecture,  in-4°  ^'vec  planches.  Ils 
oflVenl  des  considérations  sur  la 
distribution  vicieuse  des  villes,  et 
des  instructions  à  un  jeune  archi- 
tecte sur  la  construction  des  bâti- 
niens.  On  trouve  encore  dans  cet 
ouvrage  des  considérations  sur  la 
manière  de  fonder  les  édifices  im- 
portans  et  sur  la  construction  des 
(juais;  la  méthode  de  fonderies 
ponts  sans  bâtardeaux  ni  épuise- 
mens;  les  meilleurs  moyens  pour- 
construire  les  plates-bandes  et  pla- 
fonds des  colonnades,  enfin,  une 
Description  historique  de  la  colon- 
nade du  Louvre  et  un  Mémoire  sur 
l' achèvement  du  portail  de  Saint- 
Sulpice.  5"  Traité  de  la  construc- 
tion des  hâtimem,  5  vol.  in-S",  des- 
tinés à  faire  suite  au  Cours  d'ar- 
chitecture civile  de  Blondi^l;  (>'  de 


66 


PAT 


l'architecture  théâtrale  ^  .ivcc  les 
priricipop  d'optique  et  d'acoiisli- 
qué  tiéco'iSJiiiL's  à  observer  dans  la 
dislribiÉlion  d'une  salle  de  .«pec- 
tàcle,  un  vol.  in-8°;  ç° Description 
du  théâtre  uljmpique  de  Vicence, 
chef~<Cœun-e  de  Palladio,  in  4°j 
8°  Mémoires  qui  intéressent  parli- 
euliéremcht  Paris,  in-4  ,  Ji"  9 
(i8oi):  tes  mémoires,  au  nombre 
de  tr(»is,  ont  pour  objet  le  dôme 
du  Panlbéon,  la  trarislalion  des 
cimetières  hors  de  Paris,  et  le  mau- 
vais état  du  lit  de  la  Seine;  [)" Etu- 
des d'architecture ,  contenant  les 
proportions  générales,  entrecolon- 
tiemetis,  portes,  niches,  croisées, 
profils  et  détails  choisis  des  édifices 
modernes,  in-t'ol.,  i^'ô.'i:  les  plan- 
ches ont  été  (Travées  par  Patte  lui- 
même;  in"  Discours  sur  l'impor- 
tance de  l'étude  de  l'architeclure , 
et  m.anière  de  l' enseigner  en  peu  de 
temps,  avec  un  Abrégé  de  la  vie 
de  Èoffrand ,  in-8°,  i755;  1 1"  Vé- 
ritables jouissances  d'un  être  rai- 
sonnable vers  son  déclin  ,  in-i9,  a' 
édition,  i8o3.  Patte  s'était  adonné 
A  la  gravure  ;  il  a  gravé  les  estam- 
pes de  ses  ouvrages,  et  a  publié, 
d'après  Piranesi ,  six  estampes  de 
perspective  et  d'architecture,  el, 
d'après  le  Lorrain,  un  temple  de 
Vénus  {voir\e  Journal  de  Verdun, 
mars  ij5f\,  et  juin  1755}.  Il  est 
éditeur  des  Mémoires  de  Charles 
Perrault,  1759,  iu-12,  et  des  œu- 
vl*es  d'archiieclure  de  Bofl'rand  , 
in-fol.  ,  1  r55.  Cet  architecte,  dans 
les  ouvrages  duquel  on  trouve  sen- 
tent des  idées  jnst«s  et  des  obser- 
vations utiles,  hiourut  a  Manies 
le  19  aofil  1812;  il  était  né  à  Paris 
le  3  janvier  i7'.)5. 

PATTKRSON  (William),  gou- 
verneur de  la  province  américaine 


PAT 

de  New  -  Jersey,  juge  à  la  cour 
suprême  des  Étals- Unis,  fui  l'un 
des  magistrats  les  plus  intègres 
et  l'un  des  hommes  de  bien  les 
pitis  recommandables  du  INouveau- 
Monde.  Patterson  avait  pris  ses 
grades,  en  1763.  à  New-Jersey, 
où  il  était  né  ,  et  après  avoir  rem- 
pli plusieurs  fonctions  publiques, 
il  était  devenu ,  en  1787,  mem- 
bre de  la  convention  qui  a  rédigé 
et  sanctionné  la  constitution  qui 
depuis  cette  époque  sert  de  base 
au  gouvernement  américain.  En 
1789,  il  devint  membre  du  sénat 
de  New-Jersey,  et  en  J  790  ,  il  lut 
choiî^i  pour  succédera  Léviugston  , 
le  premier  gouverneur  de  cet  étal 
après  la  révolution.  Il  était  juge 
de  la  cour  supérieure  des  États- 
Unis  lorsqu'il  mourut  à  All)any, 
le  9  septembre  180G,  générale- 
ment regretté. 

PATTERSON  (Samuel),  librai- 
re el  biographe  anglais,  naquit  à 
Londres  en  1728.  Il  fit  ses  études 
en  France,  et  de  retour  dans  sa 
patrie  ,  il  y  forma  un  établissement 
de  librairie  pour  les  ouvrages  é- 
Irangers.  Le  succès  n'ayant  pas 
couronné  ses  efforts,  il  entreprit 
des  ventes  publiques  de  livres,  et 
futsouventappclé  pour  dresser  des 
catalogues  dans  la  vcnledesi)iblio- 
ihèques  remarqualiles  ,  telles,  en- 
tre autres,  que  celles  de  Beau- 
clerk,  de  Crofl,  de  Piuelli.  etc.  Le 
marquis  de  Lonsdowne  le  choisit 
pour  son  bibliothécaire,  emploi 
qu'il  conserva  jusqu'à  sa  mort,  ar- 
rivée en  1802.  On  rapporte  que  le 
nuuiuscrit  de  Jules  Césara^'anlété 
mis  en  vente  comme  de  vieux  pa- 
j>i<;rs,  il  les  mit  en  ordre  et  les  fit 
adjuger  à  un  amateur  movennant 
3t)u livres  sterlings.  Ilavaitfait,  en 


l'AU 

1776,  un  voyage  dans  différentes 
contrées  de  l'Europe,  et  en  avait 
rapporté  une  collection  de  livres  ra- 
re? et  précieux,  dont  il  publia  le  ca- 
talogue sous  le  titre  de  Bibiiolheca 
iniiver  salis  selecla.Qf.  ^'As  ixnihWû'u)- 
graphe  a  composé  plusieurs  ouvra- 
ges,entre  autres  des  Reniarqaexra- 
pides  dans  un  itoyageaax  Pays-Bas; 
des  Considérations  sur  la  loi  et  les 
gens  de  loi;  enfin  un  ouvrage  pé- 
riodique intitulé  le  Templier. 

PAUCTON(  Alexis-Jean-Pier- 
re), mathématicien,  correspon- 
dant de  l'institut,  ancien  employé 
au  bureau  du  cadastre  ,  naquit 
près  de  Lassay ,  département  de  la 
Mayenne  ,  vers  ty'ôQ.  Quoique 
pauvre,  sa  famille  lui  fil  donner 
une  bonne  éducation  ;  il  apprit  les 
mathématiques  et  le  pilotage  h 
Nantes,  vint  à  Paris,  et  fut  envoyé 
à  Strasbourg  pour  y  occuper  la 
chaire  de  mathématiques.  A  l'épo- 
que où  lesAulrichiens  menacèrent 
cette  place  d'un  blocus  rigoureux  , 
Paucton  n'ayant  pas  les  moyens 
de  se  procurer  des  provisions  pour 
la  durée  du  siégt-,  fut,  ainsi  que 
tous  les  autres  ha  bilans  qui  se 
trouvaient  dans  la  môme  situation, 
obligé  de  sortir  de  la  ville.  Il  alla 
à  Dole ,  lui ,  sa  femme  et  trois  en- 
fans  ,  entra  chez  un  maître  de  pen- 
sion ,  où  il  enseigna  les  iriathéma- 
liquesanxappointemensde  Goo  fr. 
par  aimée.  Informé  de  cette  situa- 
lion  déplorable,  le  ministre  de  l'in- 
térieur lui  donna,  le  2  frimaire  an 
.^(1790),  un  emploi  au  btu'eaudu 
ca<lastre.  où  il  fut  occupé  aux  cal- 
culs de  la  Connaissance  des  temps , 
et  l'institut  l'admit  au  nombre  de 
ses  associés  corrcsponda us.  La  con- 
vention lui  avait  précédemment 
accordé,  cotnme  savant,  un  sii- 


PAU  67 

cours  de  5.ooo  franc*.  Il  mourut 
le  i5  juin  1798.  0;i  lui  doit  :  1* 
Théorie  de  la  vis  d' Arehimède ,  i 
vol.  in-i  3  ,  1 768  ;  2°  Métrologie  ou 
Traité  des  mesures-,  poids  et  mon- 
naies des  peuples  anciens  et  moder- 
nes,  ouvrage  où  l'on  trouve  entre 
autres  principales  idées,  celles  d'é- 
lever dans  les  villes  de  premier  or- 
dre un  obélisque  ou  métromètre  où 
sciaient  tracés  les  types  et  les  di- 
mensions linéaires  et  cylindriques 
de  nos  poids  et  mesures ,  afin  que 
l'uniformité  en  restât  inaltérable. 
L'idée  de  Paneton  a  été  reproduite 
dans  le  rapport  fait  p;ir  IM  t\I.  Abeil- 
le et  ïillat  à  la  soc'été  d'agricul- 
ture de  Paris,  qui  le  publia  en 
1790.  3  '  Théorie  des  lois  de  la  na- 
ture,  ou  ta  Science  des  causes  et  des 
effets,  Paris,  un  fort  vol.  in-  8°; 
f\"  Dissertation  sur  les  pyramides 
d'  Egypte ,  1 780 ,  in  -  8°  ;  5  "  Pauc- 
ton a  laissé  en  manuscrit  une  tra- 
duction des  Hymnes  d'Orphée  ;  un 
ouvrage  ayant  pour  titre:  Doctrine 
évangélique,  apostolique  et  catholi- 
que; une  traduction  de  1  hébreu 
des  psaumes  et  cantiques;  <;nfin  la 
Théorie  des  mesures,  des  machineSf 
des  travaux  et  des  salaires,  etc. 

PAUL  PETUOWnZ,  premier 
du  nom,  empereur  autocrate  de 
toutes  les  Kussies,  naquit  le  i*' 
octobre  1764,  dix  ans  af)rès  le  ma- 
riage de  la  grande-duchesse  sa 
mère  (depuis  l'iinpéralrico  Ca- 
therine II),  avec  le  grand-duc, 
qui  régna  quelques  mois  sous  le 
iKun  île  Pierre  III.  Le  jeune 
prince  était  venu  au  monde  sous 
les  auspices  les  plus  funestes;  les 
sentimens  hostiles  qui  divisaient 
sa  famille,  et  qui  prirent  bientôt 
entre  le  grand-duc  et  son  épouse 
le  caractère  du  dégoût  et  de  la  hai- 


m 


PAU 


ne,  ne  préparaient  point  à  Paul 
«ne  enfance  heureuse.  Il  ne  connut 
jamais  raiTeclion  d'un  père ,  et  la 
soif  de  régner,  qui  dévora  bientôt 
l'ambitieuse  Catherine, laissait  peu 
de  place  à  la  tendresse  maternel- 
le dans  une  âine  aussi,  avide 
du  pouvoir  que  jalouse  des  droits 
bien  légitimes  qui  pouvaient  être 
opjiosés  à  ses  vœux.  L'éducation 
du  jeune  prince  ne  fut  cependant 
point  entièrement  négligée.  Tout 
ce  qui  avait  rapport  à  son  ins- 
truction fut  confié  au  célèbre  et 
savant  physicien  iEpiniis.  et  on 
lui  donna  pour  gouveineur  le 
comte  Panin,  dont  les  égards  et  les 
tendres  soins  auraient  dû  lui  mé- 
riter toute  la  reconnaissance  de 
son  élève.  L'impératrice  Elisabeth, 
après  une  réconciliation  avec  la 
grande-duchesse  Catherine,  qui 
avait  été  long-temps  en  disgrûce, 
se  rendit  un  jour  seule  avec 
cette  princesse  et  le  jeune  Paul  au 
spectacle,  présenta  l'enfant  aux 
gardes  qu'on  avait  fait  entrer  au 
parterre,  et  le  leur  recommanda 
comme  leur  futur  souverain. 
Cette  scène,  à  laquelle  le  grand- 
duc  Pierre  n'avait  point  été  ad- 
mis, excita  son  ressentiment,  en 
inême  temps  qu'elle  produisit 
une  vive  sensation  dans  le  public. 
Bien  des  yeux  se  tournèrent  dès- 
lors  vers  Catherine,  qui,  en  faisant 
naître  de  nouvelles  espérances, 
et  en  caressant  adroitement  de 
nouvelles  ambitions,  sut  bientôt 
se  créer  un  parti  puissant.  Au  lit 
de  mort  de  l'impératrice  Elisa- 
beth, une  réconciliation  apparen- 
te eut  cependant  lieu  entre  les 
deux  époux.  Tous  deux,  age- 
nouillés devant  la  souveraine 
mourante,  reçurent  su  bénédiction, 


PAU 

suivie  des  plus  touchantes  exhor» 
tations  de  vivre  désormais  en  bon- 
ne intelligence.  Ils  le  promirent; 
mais  les  sermens  prodigués  par 
tous  deux  pendant  celte  scène  so- 
lennelle, furent  oubliés  peu  de 
jour»  après.  Pierre  III,  parvenu 
au  trône,  ne  montra  plus  que  de 
l'aversion  pour  son  épouse,  et  mê- 
me pour  son  fils,  qu'il  résolut  de 
désavouer  publiquement  par  ufi 
ukase  impérial.  La  révolution  qui 
mit  un  terme  au  règne  et  à  la 
vie  de  l'infortuné  Pierre  III,  en 
176a,  sauva,  il  est  vrai,  le  prince, 
mais  couronna  sa  mère.  Il  p:i- 
raissait  bien  naturel  que  le  fils, 
né  pendant  l'union  de  Pierre  a- 
vec  Catherine,  montât  sur  lu 
trône.  Quelques  voix  se  firent  en- 
tendre en  sa  faveur,  mais  elles 
furent  soudain  étouffées,  et  celle 
qui  avait  souvent  dit  qu'elle  pré- 
ferait  le  tilre  de  mère  de  l'empereur 
à  tout  autre,  et  qui  devait,  selon 
plusieurs  de  ses  partisans  alors 
les  plus  dévoués  ,  se  contenter  du 
titre  de  régente  et  ne  régner  que 
pendant  la  minorité  de  son  fils, 
fut  proclamée  impératrice,  et  so- 
lennellement couronnée  dans  l'é- 
glise de  Kazan  ,  par  l'archevê- 
que de  Novogorod.  Le  grand-duc 
Paul  fut  réduit  au  rang  de  sujet, 
et  resta  pendant  vingt  et  quelques 
années  le  sujet  le  plus  fidèle  et 
le  fils  le  plus  soumis.  Confiné 
dans  son  palais  de  Gatsc.hina  ;  é- 
loigné  de  toute  participation  au 
gouvernement  intériem^ ,  comme 
aux  opérations  du  dehors  pendant 
un  long  règne  si  fécond  en  entre- 
prises politiques  et  militaires;  pou 
respecté  ,  pour  m;  rien  dire  de 
plus, des  divers  favoris  de  sa  mère; 
environné  de  suggestions   ambi- 


PAU 

tîeuses  ,  chéri  du  peuple  et  des 
soldats,  il  n'en  persista  pas  uioins 
dans  une  obéissance  passive,  et 
repoussa  toujours  loin  de  lui  tous 
les  projets  tendans  à  porter  la 
moindre  atteinte  à  l'autorité  d'u- 
ne souveraine,  dont  il  n'ignorait 
point  cependant  qtie  le  rang  et 
le  pouvoir  auraient  pu  lui  appar- 
tenir. En  17745  '<^  grand  duc  é- 
pousa  une  fille  du  landgrave  de 
Hesse  -  Darîustadt ,  princesse  ai- 
mable et  spirittielle,  qu'il  eut  le 
malheur  de  perdre  au  moment 
où  elle  allait  le  rendre  pèro,  Il 
chérissait  tendrement  sa  femme; 
mais  l'impératrice  ne  paraissait 
point  l'aimer,  et  le  favori  du  jour 
avait  usé  de  toute  i^n  influence 
pour  enlever  à  la  grande-duchesse 
le  crédit  et  la  faveur  que  ses 
qualités  distinguées  auraient  pu 
lui  obytenir  à  la  cour.  A  son  lit  de 
mort,  cette  princesse  avait  appelé 
une  de  ses  dames-d'honneur,  en 
qui  elle  avait  la  plus  grande  con- 
fiance, et  lui  avait  remis  une  cas- 
sette contenant  une  correspon- 
dance, très-innocente  sans  dou- 
te, mais  aussi  très-piquante  et  dans 
laquelle  on  s'exprimait  libre- 
ment sur  les  intrigue»  di;  la  cour 
et  sur  le  compte  des  personnes 
du  plus  haut  rang.  Quelques  fai- 
blesses ou  travers  du  grand-duc 
même,  étaient  malignement  rele- 
vés. Au  lieu  de  détruire  ces  let- 
tres, ainsi  qu'il  lui  avait  été  or- 
donné, la  dame-d'honncur  porta 
la  cassette  à  l'impératrice,  qui, 
pour  consoler  son  fils  plongé  dans 
la  plus  vive  douleur,  se  hatâ  de 
la  lui  envoyer,  L'ell'et  fut  immé- 
diat, dit-on.  L'imprudent  cor- 
r('sj»on(lanl  de  la  grande-duches- 
se, le  jeune  comte  Razoumofsky, 


PAU 


% 


ûls  de  cet  hctman  des  cosaques  , 
qui  avait  rendu  d'éminens  servi- 
ces à  Catherine  lors  de  la  révolu- 
tion qui  la  plaça  sur  le  trône,  fut 
éloigné  de  Pétersbourg  et  envoyé 
en  qualité  de  ministre  de  Ilussie 
auprès  de  la  cour  de  Naples.  La 
reine  Caroline  chercha  à  le  conso- 
ler de  sa  disgrâce,  et  il  obtint  en- 
core de  brilians  succès  en  plus  d'un 
genre  à  cette  cour,  ainsi  que  dans 
les  autres  missions  diplomatiques 
dont  il  fut  successivement  chargé 
à  Stockhohn,  et  en  deinier  lieu 
A  Vienne.  A  peine  les  funérailles 
de  la  première  grande-duchesse 
furent-elles  achevées  ,  qu'on  son- 
gea à  la  remplacer;  le  prince 
Henri,  frère  du  grand  Frédéric, 
venait  d'arriver  à  Pétersbourg; 
Catherine  le  chargea  de  négocier 
de  suite  im  mariage  entre  le  grand- 
duc  et  la  princesse  de  Wurtem- 
berg, nièce  du  roi  et  du  prince 
de  Prusse.  Les  conditions  en  furent 
bientôt  stipulées;  le  grand  -  duc 
accompagna  le  prince  Henri  ;V 
Berlin,  et  reçut  sa  nouvelle  épou- 
se des  mains  de  Frédéric  II,  qui 
avait  saisi  avec  le  plus  grand 
empressement  l'occasion  de  les- 
serrcr  de  plus  en  plus  les  lien;» 
qui  l'unissaient  à  la  Russie.  La 
ïiouvelle  grande  duchesse  parut 
à  Saint-Pétersbourg  en  Ï77O  , 
dans  tout  l'éclat  de  la  jeunesse 
et  de  la  beauté..  Les  grâces  de  sa 
personne  attiraient  tous  les  regards 
et  sa  bonté  lui  gagnait  tous  les 
cœurs.  Sa  conduite  ne  cessa  d'être 
im  modèle  de  sagesse,  et  ses  ver- 
tus, qui  auraient  pu  servir  d'exem- 
ples dans  la  cour  la  plus  austère, 
furent  au  moins  respectées,  sinon 
in)itées  dans  celle  de  Catherine  11. 
Ces  vertus  nese  sont  jamais  démeu- 


70  PAU 

lies  dans  les  difféiens  élats  où  le 
sort  a  placé  l'impératrice  Marie, 
comme  tVinme,  veuve  et  mère 
d'empereurs.  Une  nombreuse  pos- 
térité ,  quatre  fils  et  cinq  fillc'i , 
devinrent  les  fruits  de  l'union  de 
cette  princesse  avec  le  jrrand-duc. 
Bientôt  la  fastueuse  Catherine , 
contente  cette  fois  de  sa  belle- 
fille,  voulut  montrer  à  rKurope 
les  héritiers  de  son  troue  d.ms 
tout  leur  éclat.  Un  voyagç  d'appa- 
rat fur  ordonné  en  1781  ,  et  les 
heureux  époux,  sous  le  nom  de 
comte  et  de  comtesse  du  iSord  , 
.suivis  d'un  brillant  cortège ,  par- 
coururent la  Pologne,  l'Autriche, 
l'Italie,  la  France  et  la  Hollande. 
A  Naples,  le  grand-duc  retrouva 
ce  comte  Razoumol'sky,  dont  il 
croyait  avoir  à  se  plaindre,  et  fut 
forcé  de  se  faire  présenter  par  lui  à 
la  cour;  mais  il  témoigna  publique- 
ment toute  l'aversion  qu'il  éprou- 
vait, el  ne  lui  adressa  jamais  la  pa- 
role; les  fêles  les  plus  splendides 
furent  prodiguées  à  Versailles  aux 
illustres  voyageurs.  Le  prince  de 
Coudé  leur  en  donna  une  non 
moins  brillante  à  Chantilly;  par- 
tout les  souverains  leur  firent  le 
inêrn»;  accueil,  et  la  foule  se  pres- 
sait en  tous  lieux  sur  leur  passa- 
ge. C'était  peut-être  l'époque  la 
])lus  heureuse  de  la  vie  d'im  prin- 
ce destiné  à  devenir  l'autocrate  de 
toutes  les  Russies,  mais  qui  devait 
régner  avec  si  peu  de  bonheur, 
et  finird'une  manière  si  déplorable. 
Le  voyage  dura  14  mois,  el  coû- 
ta des  somnje^p  immenses.  Le 
grand-duc  était  entouré  d'obser- 
vateurs dévoués  à  sa  mère  ;  des 
courriers  expédiés  à  de  couris  in- 
tervalles, rendaient  compte  de 
chaque    fait,   de    chaque  parole 


PAU 

même,  qui  lui  échappait.  A  son 
retour  à  Pétersbourg,  il  fut,  ainsi 
que  son  épouse ,  reçu  avec  une 
grande  ostentation  de  ttndresse, 
el  rentra  bientôt  dans  sa  retraite 
de  Gatschiua ,  oOi  le  désœuvre- 
ment et  l'ennui  le  firent  souvent 
se  livrer  aux  occupations  les  plus 
futiles.  Las  enfin  de  harasser 
d'exercices  et  de  petites  manœu- 
vres à  Gatschina,  la  faible  troupe 
qu'on  y  avait  abandonnée  à  ses 
plaisirs,  le  grand-duc  désira  pas- 
sionnément s  illustrer  par  de  plus 
beaux  faiis  d'armes.  iVlais  cette 
ardeur  guerrière  n'obtint  jamais 
rassenliment  d'une  njère  soup- 
conneu>e.  Elle  savait  trop  bien  à 
quoi  l'on  pei|^  entraîner  le  soldai. 
En  1788,  lorsque  la  guerre  fut  de 
nouveau  déclaréeaux  l'urcs,  Paul 
sollicita  avec  de  vives  instances 
la  permission  de  se  rendre  à  l'ar- 
mée. «  Toute  l'Europe,  écrivil-il 
»à  l'impératrice,  connaît  le  disir 
«que  j'ai  de  combattre  les  Olto- 
«niaus;  que  dira-t-elle  quand  elle 
«apprendra  que  je  ne  puis  le  fai - 
»re?  «Catherine  ne  répondit  que 
par  ce  peu  de  mots  :  «  L'Europe  di- 
■)  raque  le  grand-duc  est  uii  fils 
n respectueux.  «Elle  lui  permit, 
il  est  vrai,  quelque  temps  après, 
de  se  montr<;r  un  moment  à  l'ar- 
mée de  Finlande,  mais  l'héritier 
de  l'empire  n'y  eut  pas  même  un 
•«eul  régiment  à  ses  ordres.  Privé 
de  tout  commandement,  entouré 
d'espions,  abreuvé  de  dégoûts, 
il  tomba  malade,  et  revint  plus 
humilié  que  jamais  dans  son  châ- 
teau de  (iatschina.  Paul  veu  lit 
d'accomplir  sa  4'-^'  année,  quand 
sa  destinée  changea  en  un  mo- 
ment. Une  apoplexie  foudroyante 
termina,  le  17  novembre  tJoO,  U 


PAU 

longue  et  brillante  carrière  de  Ca- 
therine II,  et  son  fils,  proclamé 
empereur  sur-le-champ,  passa, 
dans  la  même  journée,  de  la  su- 
jétion la  plijs  complète,  au  pou- 
voir le  plus  absolu.  Le  peuple, 
qui  à  chaque  changement  de  maî- 
tre espère  quelqiie.amélioratioa  à 
son  sort,  était  dans  l'ivresse  de  la 
joie.  On  croyait  généralemeiit 
qu'un  prince  qui  avait  eu  si 
long-temps  à  souffrir  des  rigueurs 
et  des  caprices  du  despotisme,  se 
les  interdirait  à  lui-même,  et 
qu'un  sujet  qui  avait  fait  preuve 
de  sagisse  et  de  modération,  de- 
viendrait un  gouveraijï,  humain 
et  magnanime,  i^hais  les  passions 
impétueuses  de  Paul,  pour  avoir 
été  longtemps  comprimées  parla 
terreur  que  lui  inspirait  sa  mère, 
n'étaient  nullement  amorties,  et, 
avec  les  moyens  de  les  satisfaire, 
il  se  livra  bientôt  à  toute  leur  fou- 
gue. Les  premiers  actes  de  son 
gouvernement  révélèrent  déjà  la 
bizarrerie  de  son  caractère.  Tout 
en  ordonnant  des  obsèques  ma- 
gnifiques à  sa  mère ,  il  déclara 
que  l'empereur  Pierre  III  avait 
été  injustement  frustré  après  sa 
mort  des  hoimeurs  qui  lui  étaient 
dus.  Il  fit  exhumer  les  restes  de 
ce  prince  enseveli  depuis  55  an- 
nées, et  procéda  de  nouveau  avec 
le  plus  grand  éclat  à  ses  funérail- 
les. Les  deux  époux  si  désunis  de 
leur  vivant  ,  devaient  être  ainsi 
réunis  après  leur  mort.  Pour  ajou- 
ter ù  l'ell'et  dramatique  de  cette 
cérémonie  funèbre,  il  ordonna 
que  le»  deux  individus  qui  exis- 
taient encore,  et  qui  j)assaient 
pour  avoir  en  part  à  la  fin  tragi- 
que de  Pierre  III  (Alexis  Orlolf 
et  Baraliuijky),  tinssent   le    drap 


PAli  7» 

mortuaire.  Tous  Ifes  regards  s'at- 
tachèrent à  eux  pendant  les  lon- 
gues heures  que  dura  celte  scène  ex- 
traordinaire. On  crut  que  Paul  l" 
pousserait  encore  plus  loin  sa 
vengeance.  Il  eut  avec  Orloff  un 
entrelien  reinarquabl»-.  «  Vous  de- 
))vez,  lui  dit-il,  avoir  éprouvé  de 
»  terribles  remords. — (]zai',répon- 
»dii  Orloff,  si  je  n'en  avais  pas  a- 
»gi  comme  je  l'ai  fait,  vous  ne  se- 
rt riez  pas  dans  le  cas  de  me  [»arler 
«;  aujourd'hui  en  souverain.  Vous 
»ne  pouvez  pas  ignorer  que  Pier- 
»re  III  avait  rendu  un  ukase  par 
»  lequel  il  dédai'ait  que  vous 
«n'étiez  pas  son  fils.  »  \je  comte 
Alexis  OrlofI'  eut  ensuite  ordre 
de  sortir  desjitatsde  l'empereur, 
el  ne  revint  en  Puissic  qu'après 
la  mort  de  Paul  I".  Tout  (  hangea 
bientôt  de  face  dans  i'empire.  La 
plupart  d«;s  anciens  serviteurs  dé- 
voués à  Catherine  furent  privés 
de  tout  emploi,  et  d'autres  furent 
exilés.  Les  honunes  qu'elle  avait 
disgraciés  jouirent  de  la  plus  hau- 
te faveur.  L'empereur  dans  un 
de  ces  jnomens  de  justice  et  de 
générosité  qui  succédaient  assez 
fréquemment  chez  lui  à  des  acles 
de  rigueur,  brisa  les  fiis  du  bra- 
ve Kosciusko  et  de  ses  frères 
d'armes ,  plongés  encore  dans  les 
cachots,  et  rendit  aussi  la  lil)erté 
à  tous  les  rpalbeureux  Polonais 
qui  avaient  survécu  à  leur  exil 
dans  les  dési;rls  de  la  Sibérie.  De 
nombreux  changcmens  furent  in- 
troduite dans  toutes  les  branches 
de  l'admininislration ,  et  princi- 
palement dans  l'armée  ,  dont  il 
changea  les  uniformes  et  jusqu'à 
la  coilVuve.  Toutes  les  têtes  furent 
poudrées,  et  de  longues  queues 
furent     attachées     aux     cheveux 


73  l'Ai] 

courts  des  soldats.  On  était  sûr  de 
mériter  la  laveur  du  prince  quand 
on  paraissait  devant  lui  avec  un 
habit  militaire  exactement  pareil 
à  celui  qu'il  avait  adopté  j)onr 
lui-même.  Le  vieux  Souwarow 
ne  put  cacher  son  mécontente- 
ment, et  disait  avec  naïveté  :  «  De 
»la  poudre  aux  cheveux,  ce  n'est 
»pas  de  la  poudre  à  canon,  et  des 
«queues  ne  sont  pas  des  baïonnet- 
»tes.  »  Des  ordres  sévères  interdi- 
rent rusai;e  des  chapeaux  ronds, 
les  pantalons  lurent  aussi  rigou- 
reusement proscrits  ,  tout  ce  qui 
\cnait  de  Fiance  était  réputé  ré- 
volutionnaîre ,  et  les  moindres 
transgres>ions  aux  nouvelles  or- 
donnances sur  le  costume,  étaient 
souvent  punies  par  h"  knout  ou 
l'exil  en  Sibérie.  L'ciupt'reur  vou- 
lait aussi  que  toutes  les  person- 
nes qui  se  trouveraient  sur  son 
passage  descendissent  aussitôt  de 
voiture,  et  se  prosternassent  de- 
vant lui.  Ce  nouvel  ordre  donna 
lieu  à  une  foule  de  vexations  que 
se  [)vrmirent  des  hommes  à  la 
suite  du  souverain,  et  indisposa 
la  noblesse,  le  haut  commerce  et 
tous  tes  gens  àéqnipages  de  Saint- 
rélersbourg.  La  femme  d'un  des 
j'-rincipaux  nét^ocinns,  qui  avait 
aperçu  de  loin  la  voilure  de  l'em- 
pereur, crut  pouvoir  éluder  l'or- 
dre en  faisant  tourner  la  sienne, 
et  prendre  une  autre  rue  pour  é- 
viter  la  rencontre.  Mais  un  aide- 
de-camp  l'atteignit  bientôt,  et  la 
conduisit  sur-le-champ  dans  une 
maison  de  correction  ;  là  ,  celte 
dame  fut  fouettée,  et  après  cet 
indigne  traitement  ,  Paul  la  fit 
renvoyer  à  sou  mari.  Dans  un 
beau  et  louable  mouvement  de 
zèle   pour  la  vérité  ,  l'empereur 


TAU 

fit  établir  à  côté  de  l'escalier  de 
son  palais  un  bureau  destiné  à 
recevoir  toutes  les  lettres  qu'on 
voudrait  lui  écrire,  annonçant 
qu'il  n'en  laisserait  aucune  sans 
réponse.  Sous  ses  prédéces- 
seurs, quiconque  s'adressait  direc- 
tement au  souverain  courait  de 
grands  risques;  mais  il  renonça 
bientôt  au  pénible  soin  de  pren- 
dre quelque  connaissance  des 
nombreuses  réclamations  qui  lui 
furent  ainsi  adressées  ;  et  l'on 
perdit  alors  tout  espoir  d'obtenir 
par  cette  voie  le  redressement 
des  torts  graves  de  cette  foule 
d'agens  siibaltern'''^  du  pouvoir 
absolu,  toujours  aussi  impérieux, 
et  souvent  plus  injustes  que  leur 
maîlre  même.  La  politique  ex- 
térieure se  ressentit  à  son  tour 
de  la  véhémence  que  mettait  Paul 
1"  dans  tontes  ses  opérations. 
Catherine  II  s'était  montrée  fort 
opposée  aux  principes  qui  avaient 
prévalu  en  France  en  1789;  mais 
elle  s'était  bornée  à  des  démons- 
trations, des  promesses, et  à  des  se- 
cours donnés  aux  émigrés  ;  elle 
n'avait  point  jugé  à  propos  de 
faire  marcher  ses  armées;  ce  n'é- 
tait point  vers  l'occidenl  qu'elle  por- 
tait de  prédilection  ses  vues.  Son  fils 
traita  ce  système  de  pusillanime, 
et  embrassa  avec  une  tonte  autre 
chaleur,  ce  qu'il  appelait  la  cause 
des  rois.  Il  déclara  la  guerre  à  la 
France,  et  voulait  en  quelque  sor- 
te être  considéré  comn)e  le  chef 
de  la  puissante  coalition  formée 
contre  elle.  Il  y  avait  bien  des 
droits  par  les  immenses  sacrifices 
qu'il  imposait  à  ses  sujets  et  par 
les  nombreuses  armées  (|u'il  lança 
du  fond  du  Nord,  dans  le  midi  de 
l'Europe  ,    en    Suisse  ,    en   Hol- 


PAU 

lande,  et  jtisqu'en  Italie.  Le  san- 
guinaire  vainqueur  d'Ookzacowet 
de  Praga,  qui  avait  déjà  immolé, 
tant  de  Turcs  et  de  l'olonais,  fut 
choisi  de  préférence  pour  exter- 
miner non  moins  de  Français.  Sou- 
warow  marcha  à  la  tête  de  80,000 
Russes  au-delà  des  Alpes,  et  rem- 
porta d'abord  de  grands  avantages, 
qui  exnitèrent  au  plus  haut  point 
en  l'âme  de  son  maître,  les  espé- 
rances et  la  soif  d'une  gloire  nou- 
velle. Mais  ces  vœux  furent  dé- 
çus :  après  la  plus  brillante  cam- 
pagïie,  le  vainqueur  de  la  Trébia 
■vit  flétrir  tous  ses  lauriers,  dans 
le*  njontagnes  de  l'Helvélie.  Le 
général  Rorsakow,  qui  jouissait 
aussi  dans  le  Nord  d'une  haute 
réputation  militaire,  l'ut  à  son  tour 
outrageusement  battr.  àZurich.  Les 
IVussesse  plaignirent  alors,  non  de 
leurs  chefs,  mais  de  leurs  alli'''S. qui 
les  avaient  abandoimés,  disaicnl- 
ils,avecperfidie,et  parurent  m  (dus 
irrités  contre  leur  vainquein'iM  is- 
.séna  quecontre  l'archidncChaibs. 
Le  corps  russe  fourni  aux  Anglais 
pour  les  aider  à  soumettre  la  Hol- 
lande, ne  fut  pas  plus  heureux. 
Battu  i\  Bergen  parle  généra!  Bru- 
ne ,  engat^é  imprudemment  dans 
une  mauvaise  position,  où  le  duc 
d'York,  qui  eut  tant  de  peine  à 
se  sauver  lui-même,  ne  put  le  se- 
courir, ce  corps  fut  obligé  de  ca- 
pituler en  entier,  et  les  Français 
virent  avec  étonncmcnt  arriver 
chez  eux  les  nombnux  convois 
des  premiers  prisonniers  de  guer- 
re russes.  Paul,  mécontent  de 
ses  généraux,  mais  indigné  con- 
tre ses  alliés  ,  S(î  livra  au  plus 
violent  courroux.  11  rappela  d'a- 
bord SCS  armées;  le  vieux  Sou- 
warow  eut  ordre  de  ne  point  se 
présenter  devant  lui,  et  alla  biiii- 


PAU  75 

tôt   mourir   de   douleur    dans   la 
disgrâce    et    l'exil.    Paul    signala 
eu'iuile  de  la  manière  la  plus  é- 
clatanle  sa  colère  envers   les  ca- 
binets de  Vienne  et  de  Londres  : 
il  avait  pour  sa  part  agi  avec  im- 
pétuosité,  mais  avec  franchise  et 
désintéressement;   c'était    contre 
la    république   française   et  pour 
les    intérêts   monarchiques    qu'il 
avait  pris  les  armes;  il  ne  voulait 
dépouilh  r  aucun  roi,  etnepréten- 
dait  à  rien  pour  lui-même,   si   ce 
n'<st  au     protectorat   de    l'ordre 
de   Malte ,   dont    il  venait  de   se 
proclamer      le      grand  -  maître. 
Mais  il    voyait   avec  indignation 
que  l'Aulriche  voulait  s'agrandir 
en  Italie  aux  dépens  du  roi  de  Sar- 
daigne  et  du  pape,  et  qu-^'  l'Angle- 
terre éprouvait   aussi    la  soif  des 
conquêtes.   Celte   dernière  puis- 
sance avait  en  outre  eu  le  lort  de 
contrarier  ses  projets   sur  Malte, 
et  Paul  y  attachait  la  plus  haute 
imj>orlance.    Ses    idées    chevale- 
res(pies    lui    faisaient     envisager 
comme   im  avantage  inapprécia- 
ble, la  gloire  d'exercer  sa  supré- 
matie sur  toutes  les  noblesses  de 
l'iMirope,    et  tie  voir    une   foule 
d'illustres    familles     lui     donner 
leurs  enfans  en  otage,  sous  le  li- 
tre de  chevaliers.  Aussi,  se  hâta- 
t-il,  quoique  marié  et  professant 
la  religion  grecque  ,  de  se  décla- 
rer le  (;hef  d'un  ordre  ralholique, 
composé     de    célibataires;    il   en 
distribua  avec  profusion  les  déco- 
rations à  des  luthériens,  à  des  cal- 
vinistes, et  indistinctement  à  des 
membres  de  toutes   les  commu- 
nions  chrétiennes.    Peut-être    à 
cet  acte ,  alors  taxé  de  folie,  joi- 
gnait-il de  plus  hautes  vues  poli- 
tiques; peut-être  voulait-il  don- 
ner ;'i  la  marine  et  au  commerce 


r4  <            PAU  PAU 

de  In  Russie  un  boule vart  au  mi-  des  états  de  l'enipereur.  Ses  an- 
lieu  de  la  IMéditerraiiée.  Les  ooa-  cieiis  allies,  ahaudoniiés  à  leurs 
lises  se  flatlèreiil  uu  moment  dt;  seules  lorces,  ciiirenl  prudent  de 
le  ramener, uiaislt'urssoumis>ions  tiaitci  à  leur  liuu-  avec  son  uou- 
luient  vaines,  et  les  explications  vel  et  grand  ami  le  premier  con- 
q^ie  donnèrent  leurs  ministres  sul,  et  les  paix  d'Amiens  et  de 
ne  lui  parurent~'ni  frauclies  ni  Lunéville  furent  conclues.  Kn 
suffi  aiites.  Il  intima  brusquement  changeant  son  système  de  politi- 
l'ordre  aux  amliassa.lem'-^  d  Autii-  que  extérieure,  UKilheureu^ement 
ehe  et  d'Angleterre  de  quitter  ses  pour  lui  Paul  ne  suugea  point  à 
états  dans  le  plus  brddéliii,  lap-  alieger  le  joug  de  ier  (pi'il  taisait 
pela  les  siens,  et  rompit  toute  pe^er  sur  ses  sujet-.  Toutes  les 
liaison  avec  ses  anciens  alliés. Bien  délations  étaient  accueillies  jtar 
plus,  pour  mieux  les  braver,  il  un  prince  aussi  soupçoniieux  que 
contracta  une  alliance  avec  leur  violent. Ufirejeton  decellerace  t'é- 
enneu>i,  envoya  en  ambassade  le  coude,  quipuilulesous  lesnvaitres 
général  baron  de  Spreng|>orten  ,*  enclins  à  la  rigueur,  le  fnooureur- 
auprès  du  premier  consul  Hona-  général  Oboljaninow,  dirigeait  la 
parle,  qu'il  reconnut  l'ormelle-  police  et  l'expédition  secrète,  es- 
meut  en  cette  qualité  ,  et  proies-  pèce  de  tribunal  d'inquisition.  Le 
sa  hautement  son  admiration  pour  secret  des  lettres  était  violé  par 
le  cher  de  la  république  franc. use,  lui,  et  les  plus  innocentes  se  trou- 
dont  il  fit  placer  avec  solennité  valent  souvent  interprétées  d'une 
le  buste  dans  son  nouveau  jtalais  numière  funeste  à  leurs  auteurs. 
de  Miîhaïbiwitsch.  Dès-lors  Paul  C'est  ainsi  qu'un  vénérable  pas- 
I"  retira  toute  protection  aux  leur  de  Dorpat  en  Livonie ,  sur 
princes  franrais.  Il  avait  reçu  avec  la  dénonciation  du  nommé  Tu- 
éclat  Moiksieur,  frère  de  Louis  inauski. délateur  attitré  à  Riga,  re- 
XVI,danss(!sétals,ctavaitassigné  eut  le  knout,  et  fut  envoyé  ira- 
pour  résidence  à  ce  prince  le  pa-  vailler  aux  mines  en  Sibérie  pour 
lais  de  Mittau,  où  il  devait  vivre  une  conuiiunication  insignifiante, 
avec  la  magnificence  d'un  souve-  Des  olliciers,  des  hommes  de  tous 
rain.  Le  prince  de  Coudé,  qui  a-  les  états,  éprouvèrent  un  sort  pa- 
vait si  bien  accueilli  le  grand-duc  reil,  pour  des  délits  aussi  peu  gra- 
à  Cbaulilly,  fut  traité  avec  non  ves.  Obuijaninow  ne  cherchait 
moins  d'égards  et  de  générosité,  qu'à  irriter  le  monar(jue  et  à  niul- 
Paul  avait  signé  le  contrat  de  ma-  liplier  les  victimes.  Les  exilés  les 
riage  du  duc  d'Augoulême,  et  or-  plus  favorisés  étaient  expédiés  à 
donné  qu'une  copie  en  fûl  dépo-  Tobolsk  ou  à  Irkulzk,  dans  des 
sée  dans  les  archives  du  sénat  de  voitures  du  pays  ou  des  kibilkes 
Russie.  Maintenant  ces  disposi-  découvertes,mais(rautres  en  grand 
tiens  changèi-ent  loialement.  Aux  nombreétaienlforcésd'alleràpied, 
honneurs  succédèrent  les  outra-  enchaînés  deux  à  deux,  et  escor- 
ges,  et  la  cour  de  Mittau  eut  or-  tés  par  des  paysans  armés  qui  se 
dre,  au  milieu  delà  saisim  la  plus  relevaient  de  village  en  village; 
rigoureuse,  de  sortir  sur-le-champ  ils  restaient  souvent  plus  de  six 


PAU 

mois  en  roule.  Ceux  dont  on 
craignait  I»i  désespoir,  portaient 
autour  de  leur  cou  une  fourche 
de  bois  dont  le  manche  jtros  et 
pesant  leur  tombait  sur  la  poitrine, 
de^ctndalt  jusqu'aux  iienyux ,  et 
dans  lequel  étaient  pratiqués  deux 
trous  remplis  par  leurs  mains, 
qu'on  y  avait  fait  entrer  de  fi»rce, 
digne  invention  du  procureur- 
général,  chef  des  expéditions  pu- 
bh'ques  et  secrètes!  Le-<  plus  cou- 
p.ibles  ,  qui  sont  ordinairement 
envoyés  aux  mines  de  Nerts- 
chiiiski,  avaient,  après  avoir  su- 
bi le  supplice  du  knout,  eu  les 
narines  fendues.  Un  des  plus  fer- 
vens  adorateurs  du  pctuvoir  ab- 
solu, le  célèbre  drau)aturae  Ivot- 
zei)ue,  avait  aus-i.  par  une  de  ces 
méprises  singulièies  du  desp(»îi-*- 
uie,  qui  fra[)pe  parfois. ses  propres 
partisans,  été  envoyé  en  Sibérie. 
Mais,  après  un  court  exil  de  quel- 
ques niois,  il  en  fut  rappelé  par 
l'empereur  même,  qui  le  combla 
de  richesses  et  d'éclatantes  fa- 
veurs. Kotzebue  devint  dès-lors 
son  panéjfyrisle.  Cependant  dails 
un  ouvraf^e  plein  d'adidation  pour 
ce  njonarque  comme  pour  son 
successeur,  et  dans  lequel  il  es- 
sai<'  de  réfuter  l'auteur  des  Mc- 
moires  secrets  sur  ta  Russie  , 
Kolzebue  s'exprime  ainsi  qu'il 
suit  sur  sa  position,  toute  bril- 
lante qu'elle  était  devenue:»  Hé- 
las! mes  alarmes,  mes  inquié- 
tudes personnelles, m'étaient  eom- 
names  avec  tous  les  habitans 
de  Saint-Pétersbourg.  Des  mé- 
chans  abusant  de  la  <;on(iaiice  et 
des  bontés  d'un  monarque  qui 
ne  voulait  que,  le  bi<n ,  n'étaient 
occupés  qu'à  lui  présenter  des 
fantômes   de   choses,     qui    uou- 


PAU  75 

seulement  n'existaient  pas.  mais 
auxquelles  ils  ne  croyaient  pas 
eux-ni'  mes. Je  ne  me  couchais  ja- 
nuiis  qu'avec  les  plus  noirs  pres- 
senlimens;  à  chaque  voilure  qui 
s'arrêtait  dans  le  voisinage  ,  un 
tremblement  involontaire  s'em- 
parait de  tout  mon  corps....  Si  je 
sortais,  j'étais  tians  une  anxiété 
nmrtelle  de  nie  trouver  sur  le 
pa-sage  de  l'empereur,  et  de  ne 
pouvoir  assez  vite  me  précipiter 
hors  de  ma  voiture.  Je  veillais  a- 
vec  une  attentiim  particulière  à 
la  couleur,  la  coupe  et  la  façon 
de  mes  habits...  J'élai>  obligé  de 
faire  la  cour  à  des  femmes  d'une 
réjMitation  équivoque,  à  des  hom- 
mes bornés,  sans  vertus,  sans  ta- 
lens.  Ne  me  fallait-il  pas  encore 
suppurter  l'in'^olence  «l'un  igno- 
rant maître  ((<'  ballets  (le  mari  de 
l'actrice  M™"  Chevalier. qui  jouis- 
sait de  toute  la  faveur  de  Paul)  ? 
Si  l'on  donnait  un  ouvrage  nou- 
veau, je  tremblais  que  l'inquisi- 
tion secrète,  ou  la  police,  ne  uic  fît 
un  crime,  et  ne  me  rendît  re,>pon- 
sabie  d'un  passage  innocent,  que 
des  perfides  auiaient  trouvé  dan- 
gereux. Si  mi  femme  tardait  à 
rentrer,  je  me  disais,  peut-être 
n'e>t-ellepas  descendue  assez  vite 
de  voiture  devant  l'empereur, 
peut-être  l'a  t-on  conduite  dans 
une  maison  d'arrêt.  La  consola- 
tion d'épancher  n)es  peines  dans 
le  sein  d'un  ami  m'était  refusée  : 
tous  les  murs  avaient  des  oreilles; 
le  frère  n'osait  plus  se  fier  à  son 
frère;  |)oint  de  lecture,  les  livres 
étrangers  étaient  généralement 
défendus  ;  je  n'osais  écrire  :  lie 
pouvait-on  pas,  d'un  moment  à 
l'autre,  saisir  mon  portiîfeuille  et 
mes  papiers?....  les  promenades- 


76  PAU 

les  plus  riantes,  loin  iroffiir  quel- 
que dissipation  .  ne  présentaient 
que  le  spectacle  déchirant  des  in- 
fortunés que  l'on  venait  danêlt-r, 
et  que  l'on  conduisait  pour  rece- 
voir If  knout.». .Ce  tableau,  tracé 
par  une  main  amie,  et  depuis  lors 
constamment  occupée  à  flatter  le 
fils  de  son  bienfaiteur  et  les  sou- 
verains de  l'Allemagne,  peut  don- 
ner quelque  idée  de  l'existence 
habituelle  des  habitans  de  l'empi- 
re, à  la  fin  du  règne  de  Paul  1". 
Mais  il  est  un  terme  à  toute  pa- 
tience humaine,  et  un  tel  état  de 
{■hoses  ne  pouvait  se  perpétuer 
indéfiniment,  même  eu  Russie. 
Quand  un  seul  fait  trembler  tbus 
pour  leur  liberté  et  pour  leur  vie, 
il  peut  à  son  tour  irendder  pour 
son  propre  sort.  Malgré  sa  vigi- 
lance et  les  plus  rigoureuses  pré- 
cautions,  malgré  l'inquisition  se- 
crète, les  polices  si  chèrement 
payées,  les  délateurs  et  les  es- 
pions ,  des  complots  se  forment. 
Si  les  premiers  échoueifl,  d'autres 
mieux  coujbiués  leur  succèdent, 
jusqu'à  ce  qu'enfin  un  dernier 
réussisse.  Dans  la  nuit  du  1 1  au 
13  mars  i8oi,  des  hommes  dé- 
terminés à  tout  sacrifier,  et  sa- 
chant bien  qu'ils  seraient  des  le 
jour  suivant  déchirés  par  le  knout 
s'ils  échouaient  dans  leur  entre- 
prise,  marchèrent  vers  le  pal  lis 
de  l'empereur.  Des  troupes  de 
toutes  les  armes,  soldats,  grena- 
diers de  la  garde, hussards  du  corps, 
cosaques,  garde  maltaise,  etc., 
distribués  en  postes  divers,  gar- 
nissaient et  les  dehors  et  l'i nié- 
rieur  de  ce  palais.  Les  conjurés 
y  entrèrent  cependant,  et  pénétrè- 
rent jusqu'à  la  chrtmbre  où  dor- 
mait le  monarque.  Une  sentinelle 


PAU 

voulut  leur  en  interdire  l'entrée , 
elle  tomba  morte  à  leurs  pieds  r 
Paul  au  premier  bruit  s'était  sau- 
vé presque  nu  et  par  un  escalier 
en  limaçon  devenu  célèbre,  dans 
un  cabtiiet  où  se  pinçaient  les 
drapeaux  des  régimens  des  gardes. 
Les  conjurés  se  crurent  un  mo- 
ment perdus,  mais  un  d'entr'euxdé- 
couvrit  son  maître  enseveli  sous 
les  vains  insignes  d'une  force  qui 
ne  pouvait  plus  le  défendre.  Le  gé- 
néral-commandant de  la  garnison 
de  Saitit-Pétersbourg  arriva  bien- 
tôt à  la  tête  d'un  nonsbreux  corps  de 
troupes,  on  proclama  un  nouvel 
empereur,  Paul  1"  avait  cessé 
d'exister.  Le  12  mars  dès  la  poin- 
te du  jour,  l'avènement  d'Alexan- 
re  au  trône  de  son  père  se  répan- 
dit dans  toute  la  ville;  les  grands 
de  l'empire  coururent  en  toute  hâte 
aupalaisd'Hiver,  se  prosterner  de- 
vant le  nouveau  souverain  ,  qui 
montrailla  plus  vive  douleur  de  l'é- 
vénement terrible,  qu'il  n'avait  pu 
prévoir  ni  empêcher;  mais  le  peu- 
ple se  livra  à  des  transports  de  joie, 
et  l'allégresse  était  générale  ;  le 
soir,  la  ville  de  Saint-Pétersbourg 
fut  en  entier  illuminée.  Le  pro- 
cureur-général Obuljaninow  ne 
fut  que  renvoyé,  traitement  bien 
doux,  comparé  à  ceux  qu'il  avait 
fait  esss\iyer  à  ses  nombreuses 
victimes;  l'expédition  secrète,  ce 
terrible  fléau  de  la  société,  fut  sup- 
primée; l'actrice  Chevalier  garda 
ses  trésors,  mais  eut  ordre  de 
sortir  de  l'empire;  les  prisonniers 
des  forteresses  de  Pélersbourg,  de 
Cronsladt,  etc.,  furent  remis  en  li- 
berlé;  les  exilés  en  Sibérie,  furent 
rappelés;  on  courait,  on  s'embras- 
sait dans  toutes  les  mes,  et  l'or» 
entendait  retentir  de  toutes  parts 


PAU 

ces  mots ,  Nous  n'aurons  plus  le 
knout;  nous  n'irons  plus  en  Sibé- 
rie. 

PAULIN  (  Aimé-Heni),  physi- 
cien ,  naquit  à  Nimes  ,  départe- 
ment du  Gard ,  le  lo  mars  i  y'22.  Il 
fit  ses  études  chez  les  jésuiles,  fut 
admis  dans  leur  société,  et  professa 
la  physique  pendant  plusieurs  an- 
nées dans  un  de  leurs  collèges. 
Cette  société  ayant  été  supprimée, 
le  P.  Paulin  rentra  dans  la  vie  pri- 
vée, où  il  se  consacra  exclusive- 
ment aux  sciences  , et  mourutdans 
sa  ville  natale,  le  17  juillet  180a. 
Les  ouvrages  que  ce  savant  a  com- 
posés sont  généralement  estimé?  ; 
ce  sont:  1"  Dictionnaire  de  physi- 
que, 5  vol.  in-8',  9  éditions  de 
1761  à  1782;  2°  Dictionnaire  des 
nouvelles  découvertes  faites  en  phy- 
sique ,  1787,  2  vol.  in-8°  ;  'b°Nou- 
velles  conjectures  sur  les  causes  des 
phénomènes  électriques,  1 76*^,  in-4  ; 
4°  Traité  de  paix  entre  Descartes 
et  Newton,  1764,  3  vol.  in  -  12  ; 
5°  Système  général  de  philosophie , 
1769,  4  vol.  in-12  ;  6"  Dictionnaire 
philosopha  -  théologique  ,  1 774  , 
in-4'';  7°  Guide  des  mathémati- 
ciens ou  Commentaires  des  leçons  de 
mécaniquede  La  (Jaille,  1772,  in-8°; 
8°  Véritable  système  delà  nature, 
1788  ,  in-8°  ;  9°  Commentaire  sur 
l'analyse  des  infinimens  petits  de 
l'Hôpital,  Paris,  1768,  in-8". 

PAULiMIER  (Louis -Pierre), 
instituteur  des  sourds- rnucts  de 
l'institution  royale  de  Paris,  élève 
et  colluhoratcur  de  l'abbé  Sicard  , 
est  né  à  Couches,  département  de 

ure  ;  il  montra  dès  sa  jeunesse 
grand  désir  de  s'instruire,  et  fut 
surpris  dans  le  cuurs  de  ses  études 
parla  premit-re  réquisition.  Il  al- 
lait partir  pour  la  Vçndée,  lorsque 


PAU  77 

l'administration  du  district  de  Ver- 
non  le  chargea  de  conduire  4?-  voi- 
tures à  l'armée  du  Nord;  il  y  fut 
employé  dans  les  bureaux,  et  en- 
fin licencié  comme  tous  les  autres 
employés  de  l'armée  par  suite  de 
la  paix.  Il  vint  i\  Paris;  mais  en 
sa  qualité  de  réquisitionuaire ,  il 
dut  repartir  pour  l'armée.  S'étant 
rendu  à  Toulon,  il  fut  nommé 
greffier  d'un  conseil  de  guerre, 
emploi  qu'il  occupaquatre  années. 
De  retour  dans  la  capitale ,  il  en- 
tra en  qualité  de  répétiteur  à  l'ins- 
titution dessourds-muets:  son  ar- 
deur à  remplir  ses  devoirs  et  àétu- 
dierl.i  mélhodederinslilulion,  in- 
téressa M.  l'abbé  Sicard,  qui  après 
avoir  prodigué  pendant  quinze  ans 
à  M.  Paulmier  ses  soins  comme 
son  protecteur  et  son  n)aître,  di- 
sait de  lui  à  M"""  Diifresnoy,  avec 
la  bienveillance  et  la  gaîté  de  l'a- 
mllié  ,  que  Paulmier  avait  été  créé 
et  mis  au  monde  pour  être  insti- 
tuteur des  sourds  -  muets.  L'un 
des  administrateurs  de  l'insti- 
tution ,*dit  aussi  un  jour  à  cette 
femme  cébsbre,  que  cet  élève  de 
l'abbé  Sicard  avait  soutenu  l'hon- 
neur de  l'institution  à  l'époque  où 
les  souverains  alliés  étaient  à  Pa- 
ris (1814  et  i8i5).  En  efiet,  M. 
Paulmier  exposa  la  méthode  à  uni; 
foule  <rétiangersde  marque  qui  ve- 
venaient  visiler  l'institution  des 
sourds  -  muets.  M.  Sicard  assis- 
tait rarement  aux  leçons  :  plus 
de  dix  ans  avant  sa  mort,  c'était 
M.  Paulmierqui  les  dirigeait,  etqui 
expliquait  la  méthode  à  tontes  les 
personnes  que  M.  Sicard  lui  adres- 
sait aux  (dasses.  Il  a  reçu  des  prin- 
ces, des  ambassadeurs,  le  prince 
et  la  princesse  de  Danemark,  le 
prince  et  la  princesse  Gagarine, 


78 


PAU 


russes,  etc.' Il  fit  plusieurs  séances 
publiques,  entre  autres,  une  j  l'é- 
poque du  concile  tenu  l'i  Paris,  et 
à  laquelle  se  trouvaient  des  cardi- 
naux, des  archevêques,  des  évê- 
ques,  et  beaucoup  d'ecclésiasti- 
ques. M.  Gallaudct,  jeune  ministre 
protestant  envoyé  par  les  Ktals- 
IJnis  d'Amérique  pour  apprendre 
la  méthode,  ne  reçut  de  leçons 
pendant  plus  de  trois  mois  que  de 
M.  Paulmiêr,  qui  a  aussi  formé  le 
jeune  Grivel  ,  suisse;  Henrinn, 
répétiteur  distingué  de  l'institu- 
tion d'Aix-la-Chapelle;  Dunan, 
de  l'inslilution  d'Auray;  Milsand, 
de  l'institution  d'Arras,  etc.  ;  en- 
fin, il  a  formé  à  l'institution  royale 
de  Paiis  plusieurs  élèves  distin- 
gués :  Picard  de  Paris,  Pages  de 
Nîmes,  lîerthier,  Gazan  et  Lenoir. 
M.  l'abbé  de  l'Kpée  a  inventé  la 
méthode;  M.  l'abbé  Sicard  {voyez 
ce  nom)  l'a  perfectionnée.  En  sui- 
vant le  développement  naturel  des 
facultés,  M.  PauImier  Ta  appli- 
quée à  l'éducation  sociale  et  litté- 
raire, en  inspirant  aux  élèves  le 
goût  de  la  lecture,  et  en  leur  fai- 
sant sentir  qu'elle  était  indispen- 
sable, surtout  aux  sourds-nniets; 
enfin  en  graduant  cette  lecture 
au  point  que  les  élèves  de  toutes 
les  classes  commencent  à  lire  dans 
des  livres  à  leur  portée.  Les  élèves 
de  la  première  classe  lisent  les 
p.rincipaux  ouvrages  de  notre  lit- 
léralitre,  soit  <lans  l'éloquence, 
^oit  dans  la  p  >ésie,  ce  qui  n'a- 
vait pas  lien  il  y  a  aujourd'hui 
i5  ans.  11  existe  peu  de  sourds- 
inuets  à  l'institution,  qui  ne  puis- 
sent prendre  intérêt  à  la  lectu- 
re. M.  PauImier  a  aussi  trouvé  des 
procédés  et  des  formules  éprou- 
vées pour  enseigner  la  contexlurfe 


PAU 

du  discours.  Pour  concevoir  la 
formule  de  la  phrase  simple,  on 
reconnaît  d'abord  un  ordre  de  gé- 
nération, constant,  universel,  qui 
a  trois  idées  fondamentales,  sa- 
voir, la  nature,  Vesprit ,  Vexpf'es- 
sion.  Pénétré  de  ces  vérités  éter- 
nelles,  iM.  Paubnier  a  trouvé  que 
le  grammairien,  borné  à  sa  scien- 
ce, y  a  introduit  des  dénomina-  / 
lions  vicieuses,  et  en  a  mal  dis- 
tingué les  parties  constitutives 
contre  les  règles  de  l'étymologie 
naturelle.  Tous  ces  mots,  ce  com- 
plément dii^ect  indirect  circons- 
tanciel, appartenant  plus  à  la  logi- 
que qu'à  la  grammaire,  et  n'ayant 
aucune  analogie  avec  l'ordre  na- 
turel extérieur,  sont  au  moins  inu- 
tiles ,  et  ne  font  que  jeter  la  con- 
fusion dans  de  jeunes  imagina- 
lions;  il  a  cru  qu'en  remontant 
au  principe  de  la  phrase,  confor- 
mément ù  la  nature  des  choses 
exprimées,  on  arrive  successive- 
mi  nt  ù  ce  résultat  :  Agent,  ac- 
tion ,  existence ,  manière ,  objet 
d'action,  lieu,  temps,  raison.  On 
trouve  une  application  claire  de 
ces  principes  dans  l'ouvrage  de  M. 
PauImier.  intitulé  :  Coiip-ffceil  sur 
('instruction  des  sourds -muets , 
page  a 99;  et  dans  un  autre  ou- 
vrage, intitulé  :  Aperçu  du  plan 
d'éducation  des  sourds-muets  ,  qui 
lui  fut  demandé  par  l'administra- 
tion de  l'institution;  c'est  à  l'aide 
de  ces  procédés,  que  M.  PauImier 
est  parvenu  à  fermer  les  princi- 
]>anx  élèves  de  rétablissement  de- 
puis au  moins  dixans.  Cet  ouvrage 
est  à  sa  3'  édition;  il  eut  pour  ori- 
gine une  lettre  de  60  pages,  que 
1>J.  PauImier  adiessa  à  M.  BazOt 
(voyez  ce  nom),  aiiteiu- de  VEIoge 
historique  de  l'abbé  de  l' Epée.  M. 


VAV 

PiUilmier  a  apîM-i?  à  parler  à  deux 
élèves.  Cloché  de  Thion ville  et 
f  a-^ès  de  Perpignan  ,  qu'il  eut 
rhoniïeur  dt'  présenter  au  roi.  Les 
Feuilles  publiques  en  firent  men- 
tion. II  avait  appris  à  huit  élèves 
à  prononcer  très  -  distinctement 
toutes  les  combinaisons  de  l'al- 
phabeth  ;  ces  élèves  élaient  diri{^és 
dans  cet  exercice  par  un  autre 
somd-iiiuel  .  le  jeune  Berlhier. 
Celte  expérience  fut  faite  devant 
l'adiuinistratinn  de  l'inslitut  royal 
des  sourds-miiet*.  Le  succès  com- 
plet promettait  une  tradition  de  la 
parole  dans  l'école;  mais  comme 
M.  Paulmier  était  le  seul  qui  se 
livrât  à  ce  genre  d'enseignement, 
et  que  la  partie  essentielle,  la  cul- 
ture de  l'esprit,  aurait  pu  en  souf- 
frir, il  se  vit  forcé  d'abandonner 
cette  branche  d'éducation,  qui  lui 
parut  toujours  infaillible  et  d'im 
grand  secours  comme  moyen  de 
cOitimunicalion.  M.  Sicard  pro- 
posa plusieurs  fois  à  M.  Paulmier 
«le  l'envoyer  dans  l'étranger  pour 
fonder  une  école,  il  ne  voulut  ja- 
mais quitter  son  maître  ni  ses  élè- 
ves de  France.  Lors  de  la  mort  de 
l'abbé  Sic. ird  ,  M.  Paulmier  était 
](',  seul  élève  qui  eut  la  tradition 
de  la  méthode  acquise  par  2o  ans 
d'études  sous  les  yeux  de  son  maî- 
tre. On  avait  pensé  qu'il  serait  ap- 
pelé à  lui  succéder;  néanmoins  ce 
fut  M.  l'Aumonier,  de  l'institution 
do  Bordeaux,  qui  obtint  cet  hon- 
neur. Il  fut  installé;  mai^  quelque 
temps  après  il  df»nna  sa  démission. 
A  l'époque  où  M.  l'abbé  Perrier  a 
été  nonuné  directeur  de  l'institu- 
tion royale  de  Paris,  M.  Paulmiw 
u  été  nommé  instituteur. 

PAU'LO  (le  comte  Jules  de)  , 
dernier  des  descendans  du  graod- 


PAU  79 

maître  de  Malte  de  ce  nom  ,  se 
montra  l'un  des  principaux  chefs 
de  l'insurrection  royale  dans  le 
midi  en  1797.  On  sait  qu'à  cette 
époque  le  dirccloire-exéculif  ve- 
nait de  rendre  la  l:>i  des  otages, 
triste  pendant  de  celle  des  sus- 
pects; des  révoltes  éclatèrent  dans 
le  département  de  la  Haute-Ga- 
ronne, et  dans  ceux  qui  l'environ- 
naient. Les  royalistes  s'associèrent 
de  toutes  parts,  se  soidevèrent  , 
et  mirent  à  leur  tête  le  général  de 
brigade  Rougé  et  le  comte  de 
Panlo.  Celui-ci,  jt^une  et  plein 
d'enlhousiasujc,  mais  sans  expé- 
rience ,  crut  que  pour  triompher, 
ik  suflisait  d'être  brave.  Ignorant 
les  secrets  de  l'art  de  la  guerre, 
il  les  remplaça  par  un  rare  cou- 
rajre,  et  une  fermeté  à  toute  è- 
preuve.  Les  royalistes,  vamqueurs 
à  Lauta,  fur<'nt  battus  en  même 
temps  dans  le  département  du 
Lot,  devant  Toulouse,  et  à  l'île 
Jourdain.  Chassés  de  poste  en 
poste  jusqu'à  Muret,  ils  se  réfu- 
gièrent sous  le  commandement 
de  Rougé,  qui  avait  réuni  dans  ce 
lieu  un  corps  de  4  à  5,ooo  hom- 
mes. Le  comte  de  Paulo  marchait 
cependant  contre  les  habitans  des 
Pyrénées,  qni  avaient  suivi  le 
drapeau  tric<»I(tre.  A  deux  lieues 
de  Muret,  il  défait  un  corps  de 
républicains,  qui  tombe  dans  une 
embuscade.  ÎSuivi  de  presque 
toute  la  cavalerie  royale,  il  arrive 
à  Martres,  oi'i  il  apprend  qu'un 
général  occupait  ,  avec  des  trou- 
pes de  ligne  et  les  gardes  nationa- 
les de  l'Arriège  ,  la  position  d« 
Saint-Martory,  et  que  plusieurs 
pièces  d'artillerie  ajoutaient  à  la 
force  des  cnrjjs  qu'il  coinmai. fiait. 
Il  fallait  franchir  un  étroit  delilé, 


So  PAU 

ou  fuir.  Le'  comte  de  Paulo  ii'hésila 
pas;  il  presse  la  truirche  de  sa  co- 
lonne avec  tant  de  vivaciié ,  que 
les  républicains,  qui  le  croyaient 
encore  loin,  n'avaient  pris  au- 
cune précaution  ;  ils  sont  sur- 
pris et  mis  en  déroute.  Les  suites 
de  cette  victoire  lui  ouvrirent 
tous  le  pays  jusqu'à  Saint-Gau- 
dens  et  Montrejeau.  Ce  fut  dans 
cette  dernière  position  qu'il  vou- 
lut attendre  les  républicains  , 
mais  à  son  tour  il  ne  songta  ni  ù 
élever  des  reiranchemens  ni  à  as- 
surer sa  retraite.  Attaqué  par 
les  généraux  Berthier  et  Lannes, 
et  i'adjudant-général  Nicole,  il 
fut  entièrement  défait.  Deux  mil- 
le morts  couvrirent  le  champ  de 
bataille,  plusieurs  centaines  d'hom- 
mes périrent  en  voidant  traverser 
la  Garonne  à  la  nage,  enfin  la  dé- 
route fut  complète  :  vainement 
les  débris  de  l'armée  royale ,  for- 
mant au  plus  1,100  hommes,  se 
dirigèrent  sur  la  vallée  d'Arans, 
tout  l'ut  perdu.  Le  comte  de  Pau- 
lo,  qui  durant  le  combat  avait 
montré  sa  bravoure  accoutmnée, 
passa  en  Espagnepour  se  soustrai- 
re aux  persécutions  qu'on  dirigea 
contre  lui.  Le  18  brumaire  arriva; 
lecomtedePaulo,  après  avoir  erré 
en  Espagne  et  en  Angleterre  , 
rentra  en  France,  le  premier  con- 
sul ayant  accordé  une  anmisfie 
solennelle  pour  lui  et  pour  sou  é- 
Uit-major.  Fixé  à  Toulouse,  il  y 
mourut  peu  de  temps  après,  en 
1804. 

PAULUS  (PÉTERs"),  grand-pen- 
sionnaire de  HolLuide,  naquit  à 
Amsterdam,  et  lit  ses  premières 
armes  dans  la  marine,  où  il  occu- 
pait le  grade  de  capitaine  de  vais- 
seau, lorsque  les  événemens,  oc- 


PA15 

casionés  par  l'entrée  d'une  armée 
française  en  Hollande,  le  firent 
élire  grand-pensionnaire  au  com- 
mencemetitde  février  i^gS.  Char- 
gé ,  en  cette  qualité,  de  présider 
les  états,  il  se  hâta  de  les  convo- 
quer dans  la  nuit  du  7  au  8  du 
même  mois,  afin  qu'ils  délibéras- 
sent sur  les  mesures  A  prendre 
dans  des  circonstances  si  délicates. 
N'ayant  accepté  la  présidence  que 
parce  qu'elle  était  un  des  attributs 
de  la  dignité  de  grand-pensionnai- 
re, il  aurait  bien  voulu  pouvoir 
s'en  démettre,  mais  il  fut  en  quel- 
que sorte  forcé  de  la  conserver 
jusque  vers  le  milieu  du  mois 
d'avril.  Alors  il  fut  l'un  des  dépu- 
tés chargés  par  les  états  de  con- 
clure, avec  la  république  françai- 
se, un  traité  de  paix  et  d'alliance. 
Le  1"  mars  de  l'année  suivante , 
la  convention  nationale  balave, 
ayant  ouvert  sa  ses-sion,  les  mem- 
bres qui  la  composaient  nonunè- 
rent  à  l'unanimité  M.  Paulus  pré- 
sident. Il  ne  remplit  pas  long- 
temps ces  nouvelles  fonctions, 
aussi  honorables  qu'iuipoi tantes: 
altaqué  subitement  d'une  maladie 
grave,  il  mourut  le  17  mars  170)6. 
Lu  convention  balave, pour  rendre 
un  juste  hoMim.ige  à  la  mémoire 
de  son  président,  décréta  qu'une 
médaille  serait  frappée  wi  son 
honneur,  après  avoir  jiréablement 
déclaré  qu'il  n'avait  jamais  cessé 
de  bien  mériter  de  la  patrie.  Cet- 
te déclaration,  accompagnée  de 
son  écharpe  tricolore,  fut  remise 
à  sa  veuve.  Paulus  a  publié 
quelques  ouvrages  ,  parmi  les- 
quels on  dislingue  :  1°  Apologie 
du  Stadkoiidérat,  ouvrage  estimé, 
quoiqu'il  fût  le  fruit  de  ses  pre- 
mières méditations;  a°   Mémoire 


PAU 

sur  te  droit  de  la  province  de  Zé- 
lande  à  l'étntilissement  d'une  aca- 
démie, 1775;  5'  Commentaire  sur 
l'union  d'Utrecht,  1778,  4  vol  in- 
8";  4"  Mémoire  sur  Cégalité  parmi 
les  hommes,  Haarlem,  1793,  in-8°; 
4°"  édition,  1795.  On  trouve  un 
portrait  parfaitement  ressemblant 
de  ce  citoyen  estimable ,  dans 
la  Continuation  de  l'histoire  na- 
tionale de  W^ agenaar ,  tome  23. 

PAULZE(N.), fermier-général, 
naquit  dans  le  département  de  la 
Loire.  Il  occupa  long-temps ,  à 
Montbrison,  une  place  dans  la  ma- 
gistrature, et  fut,  sons  le  ministère 
de  l'abbé  Terrai  ,  son  parent,  ap- 
pelé à  Paris,  et  nommé  fermier- 
général.  En  1794^  compris  dans  la 
proscription  qui  enveloppa  les  au- 
tres fermiers -généraux,  il  fut 
condamné  à  mort  le  8  mai  de  la 
môme  année.  On  assure  quMl 
possédait  en  matière  de  commerce 
des  connaissances  très-étendues; 
il  avait  même  formé  pour  la  Guia- 
ne  une  compagnie  dont  le  but 
était  d'améliorer  et  d'augmen- 
ter les  produits  de  cette  colonie, 
sur  laquelle  il  publia  plusieurs 
Mémoires.  On  lui  attribue  aussi 
un  travail  très-intéressant  sur  tout 
ce  qui  a  rapport  aux  possessions 
françaises  d'Asie  et  d'Amérique. 

PAUTRIZEL  (N.),  propriétai- 
re à  la  Guatieloupe,  fut  nommé, 
en  septembre  179a,  député  de 
cette  colonie  à  la  convention  na- 
tionale, où  il  ne  prit  séance  qu'a- 
près le  21  janvier  J793.  Le  sort 
des  colonies  l'occupa  spéciale- 
ment :  il  discuta  néanmoins  le  pro- 
jet de  la  nouvelle  constitution,  et 
ce  fut  lui  qui  proposa  la  création 
d'un  conseil  exécutif  composé  de 
vingt-quatre  membres.  Quoiqu'il 


PAU  81 

eût  toujours  montré  beaucoup  de 
modération  dans  sa  conduite ,  il 
se  déclara  contre  la  majorité  de  la 
convention,  en  faveur  des  dépu- 
tés qui  favorisèrfint  l'insurrection 
du  1"  [)rairial  an  4  (20  mai  1795), 
ce  qui  motive  le  décret  d'arresta- 
tion rendu  contre  lui  le  25  du 
même  mois;  mis  en  arrestation, 
M.  Pautrizel  fut  rendu  à  la  liberté 
par  suite  de  l'amnistie  du  4  bru- 
maire an  5.  Après  la  session  con- 
ventionnelle, il  est  rentré  dans  lu 
vie  privée. 

PAUWELS  (Jean),  composi- 
teur de  musique  et  chef  d'orches- 
tre du  théâtre  de  Bruxelles,  na- 
quit dans  cette  ville  en  1771.  Fils 
d'un  musicien,  et  secondé  par  ses 
dispositions  naturelles  pour  la  mu- 
sique, il  cultiva  cet  art  avec  tant 
de  succès  qu'il  obtint  la  réputation 
d'un  excellent  violoniste ,  avant 
même  d'avoir  atteint  l'âge  de  l'a- 
dolescence. Il  vint  à  Paris  à  18  ans, 
et  ses  talens,  qui  le  firent  bientôt 
remarquer,  tacilitèrent  son  entrée 
à  l'orchestre  du  théâtre  Feydeau. 
Pauwels  ne  fit  pas  à  Paris  ua 
très-long  séjour;  cependaut,  lors- 
qu'il en  sortit  pour  retourner  dans 
sa  ville  natale,  son  jeu  s'était  telle- 
ment perl'ectionné,  qu'il  fut  reçu 
eu  qualité  de  premier  violon  a 
l'orchestre  du  théâtre  de  Bruxel- 
les, dont  il  obtint  la  direction.  Il 
consacra  à  ta  coiuposilion  la  plus 
grande  partie  de  son  temps.  (>e 
compositeur  mourut  à  la  fleur  de 
son  âge,  en  1804.  Trois  de  ses  opé- 
ras furent  représentés  à  Bruxelles; 
ce  sont  :  i"  la  Maisonnette  dans 
tes  bois,  2°  l' Auteur  malgré  lui;  5" 
Léontine  et  Fonrose:  ce  dernier 
est  son  chef-d'œuvre.  On  dislingue 
parmi    ses     œuvies    dexcellens 


83 


PAW 


concertos  de  violon  ,  de  flPite 
et  de  forte- piai»o ,  et  difterens 
airs  composés  pour  le  grand  con- 
cert qu'il  avait  fondé  à  Bruxelles. 

PAVIE  (N.),  membre  du  con- 
seil des  cinq-cents,  où  il  fut  nom- 
mé, en  1797,  p;ii-  le  déparlemt'nt 
de  l'Eure,  s'attacha  au  parti  CU- 
chien,  embrassa  avec  chaleur  la 
cause  de  la  religion  catholique,  en 
demandant  le  libre  exercice  de 
celte  religion,  que  la  majorité  des 
Français  a])pelaient,  disail-il,  le 
culte  de  leurs  pères.  Il  demanda 
aussi,  le  1"  novembre  de  la  môme 
année ,  que  les  presbytères  de- 
vinssent la  propriété  des  commu- 
nes. Com[)ri»  au  nombre  des  dé- 
putés qui,  par  suite  de  la  journée 
du  18  fructidor  an  5  (4  septembre 
1797),  devaient  être  déportés  à 
Cayenne,  il  parvint  à  se  soustraire 
aux  recherches  <leceux  qui  étaient 
chargés  de  l'arrêter,  et  se  tint  ca- 
ché jusqu'à  l'époque  du  18  bru- 
maire. Alors  les  consuls  le  rappelè- 
rent, niais  ne luidonnèrenl  aucun 
emploi.  Il  paraît  qu'il  n'en  a  point 
occupé  depuis. 

PAW  (Corneille  de),  chanoine 
et  littérateur  allemand, appartenait 
h  une  famille  noble;  il  était  on- 
cle du  fameux  Anacharsis  Cloots, 
membre  de  la  convention  nationa- 
le. Paw  embrassa  l'état  ecclésias- 
tique, et  obtint  dans  son  |>ays  un 
riche  canonicat,  au  moyen  du- 
quel il  put  se  livrer  à  la  culture 
de  la  liltéralure  ancienne.  Ses 
jRerherclies  sur  tes  Grecs,  les  Ainé- 
rica'ms ,  les  E<^yplicns  et  les  Chi- 
nois, attestent  l'étendue  de  ses  con- 
naissances ;  mais  on  découvre 
bientôt  qu'en  se  livrant  trop  faci- 
ment  à  ses  conjectures,  il  affirme 
souvent  des  choses  dont  la  majo- 


PAY 

rite  des  historiens  doute,  et  même 
que  son  but  principal  est  de  les 
contredire  tous.  Malgré  la  singula- 
rité de  ses  idées,  qui  ressemblaient 
souvent  à  celles  de  son  neveu, 
on  ne  peut  lui  refuser  beaucoup 
d'esprit,  une  érudition  profonde 
et  une  grande  rectitude  de  juge- 
ment. Il  rapporte  nombre  de 
faits  qu'on  chercherait  inutile- 
ment ailleurs.  Son  esprit  philo- 
sophique lui  fit  parmi  le  clergé  de 
violens  ennemis  ,  et  lui  valut  , 
en  revanche,  l'estime  du  roi  de 
Prusse,  Frédéric- le -Grand.  Au 
surplus,  ses  ennemis  mêmes  ren- 
daient hommage  à  ses  vertus.  II 
fut  nommé  corrunissaire  du  gou- 
verneiïient  français  après  la  réu- 
nion à  la  France  des  départemens 
du  Khin.  Il  remplissait  les  fonc- 
tions <le  celte  place  lorsqu'il 
mourut,  le  8  juillet  1799,  " 
Xanten  ,  près  d'Aix  -  la  -  Cha- 
pelle. 

PAYAN  (Claude- François), 
né  à  Saint-Paul-Trois-Chàleaux  , 
départen)ent  de  la  Drôme,  d'une 
famille  ancienne  et  considérée 
dans  cette  |)rovincc,  et  dont  plu- 
sieurs membres  avaient  rempli 
des  fonctions  importantes  dans  la 
magistrature  et  dans  l'armée. 
Destiné  dès  sa  jeunesse,  ainsi  que 
tous  les  cadets  de  sa  famille,  à  l'é- 
tat militaire,  il  s'y  prépara  par  de 
bonnes  éludes,  et  entra  dans  le 
corps  de  l'artillerie,  où  il  se  fit  re- 
marquer au  commencement  de  la 
révolution  en  1789  |»ar  des  opi- 
nions irès-exaltées  et  par  son  op- 
position contre  le  nouvel  ordre 
de  choses.  Il  était  alors  traité,  se- 
lon l'expression  en  usage,  d'aristo- 
crate. Mais  vers  la  fin  de  1790, 
il  abandonna  à  la  fois   le  service 


PAY 

militaire  et  la  marche  qu'il  avait 
suivie  ju<qu'alors,  pour  .se  jeter  a- 
vec  toute  la  t' tugue  d'une  jeunesse 
inconsidérée  ,  dans    le    parti    des 
hommes  les  plus  exagérés.  Brû- 
lée (le    tuus    les   feux    du    nudi  , 
sa  l,êle  ardente  ne  concevait  que 
les    extiêmes.    Nommé  en    1790 
administiateur    du    département 
de  la  Drômc,  il  eut,  pendant  une 
mi-siou  particulière  à  Paris,  des 
relations  fréquentes  avec  Robes- 
pierre.   Ur>    inconcevable    aveu- 
glemenrle  porta  à  se  passionner 
en  laveur  de  ce  tyran,  alors  l'idole 
d'un  peuple  égaré,  qui  ne  pronon- 
çait guère   son  nom  sans  y  join- 
dre l'épithèle  du  vertueux  ou  de 
t'ineorruptible,  et  que  ce  mC-me 
peuple    accompagna    bientôt    au 
supplice  en  poussant  des  cris  de 
joie.  Payan  paya  lui-même  de  sa 
tfite  son  dévouement  au  chef  des 
démagogues.   Après  avoir  rédigé 
sous  ses  auspices,  avec  plus  d'es- 
prit et  de  talent  que  n'exigeait  Vê- 
poque,\p]o\}vnii\diiVJnliféd<'Tatis- 
te,  Payan  fut  nommé  par  te  comité 
dit  de  salut- public  agent   natio- 
nal près  de  la  commune  de  Paris, 
et  Robespierre,  qui  l'avait  entière- 
ment   subjugué,   le   détermina  à 
accepter  cet  emploi ,  qu'il   avait 
d'abord  refusé.  Il  ne  se  dissimidait 
point  les  dangers  de   ce  poste,  et 
s'en  ex[»liquait  souvent   avec   ses 
amis;  mais  tout  eu  prévoyant  sa 
destinée,  il  résobil  de    la  l3rav«T. 
Ses  discours  improvisés  à  la  com- 
mune,   furent   toujours  couverts 
d'applaudissemens,  et  cités  par  les 
journalistes  du  parti,  connue  des 
chefs-d'œuvre  d'éloquence.   Lors 
des   événemens  de  thermidor,   il 
se    prononça ,    ainsi     que    tonte 
la  commune,  pour  Robespierre. 


PAY 


85 


Dans  la  nuit  du  9,  quelques  amis 
lui  proposèrent  de  quitter  l'hôtel- 
de-ville,  et  lui  oifiirenl  le-  moyens 
de  se  mettre  en  ^ûreté.  Mais  il  re- 
poussa leurs  a  vi-,  et  répondit  qu'il 
saurait  mourir  au  poste  qu'il  avait 
accepté.  iMis  hors  la  loi  avec  ses 
collègues  de  la  commune  de  Paris, 
il  fut  exécuté  le  lo  thermidor,à  l'â- 
ge de  38  ans,  et  montra  jusqu'à  la 
lin  un  courage  digne  d'une  meil- 
leure cause.  On  a  de  lui  jtlusieurs 
écrits  en  prose  et  en  vers,  d'un 
style  élégant  it  facile,  qui  font  re- 
gretter le  déplorable  usage  au- 
quel il  consacra  depuis  les  ta- 
lens  dont  la  nature  1  avait  doué. 

PAYAN  DUMOULl,>f  (Joseph- 
François),  né  à  Sainl-Paul-ïrois- 
Châteaux,  département  delà  Urô- 
me,  frère  aîné  du  précédent,  était 
conseiller  maître  à  la  cour  des 
comptes  avant  la  révolution.  Loin 
de  se  laisser  entraîner  j)ar  la  fou- 
gue insensée  rit;  s(m  frère  cadet, 
Payan  Dumoulin,  sincère  auji  de 
l'humanité,  adopta  les  espér  inces 
et  les  principes  d'une  meilleure 
organisatitm  politique,  avec  cet 
esprit  de  sagesse  et  de  modéra- 
tion qui  n'a  cessé  de  le  guider 
dans  l'exercice  des  diverses  fonc- 
tions publi(|ues  qu'il  a  rem[)lies. 
Il  fut  nommé  d'ibord  adininis- 
traleurdu  département  de  la  Drô- 
me,et  ensuite  procureur-général- 
syndic  du  même  départennml. 
Tousses  efforls  tendirent  au  main- 
tien do  l'ordre  et  de  la  tranquilli- 
té intérieure  pendant  les  temps 
les  plus  orageux  de  la  révolution, 
et  il  eut  le  bonheur  d'y  réussir. 
Tandis  que  les  dé[)arteinens  voi- 
sins servaient  de  théâtre  aux  plus 
violens  excès,  celui  de  la  Drôme 
resta  vierge  de  sang,  et  il  conlri- 


84 


PAY 


bua  puissamment  à  sauver  de 
tonle  atleinle  et  les  citoyens  et 
les  propriétés.  Après  les  dét^as- 
treiiso  journées  du  3i  mai  et  du 
commeuceinent  de  juin  1793, 
radmiiiislrition  du  département 
de  la  Drôme  resta  long-temps  in- 
décise, mais  finit  par  se  soumet- 
tre au  parti  de  la  majorité  con- 
Tentionnelle,  qui  venait  de  s'eui- 
parer  de  la  direction  des  affaires 
de  la  république.  Cette  adminis- 
tration espérait  ainsi  éviter  la 
guerre  civile,  dont  le  feu  mena- 
çait d'embraser  tout  le  Midi. 
Payan  Dumoulin  était  encore 
président  de  l'administration  en 
i7p4'  *^t  y  jouissait  de  l'estime 
générale  ,  lorsqu'il  fut  nommé 
commissaire  de  l'instruction  pu- 
blique. Il  désirait  rester  dans  son 
département,  où  il  se  croyait  plus 
utile  à  ses  concitoyens,  et  refusa 
le  poste  auquel  on  l'appelait  à 
Paris;  mais  le  comité  de  sa- 
lut-public  lui  fit  signifier  qu'il 
était  mis  en  réquisition ,  et  lui 
donna  l'ordre  de  se  rendre  immé- 
diatement en  cette  ville,  ordre 
auquel  il  était  dilli»  ile  à  cette  é- 
poque  de  se  soustraire.  Payan 
Dumoulin  s'employa  dès-lors  a- 
vec  zèle  à  remplir  les  nouveaux 
devoirs  qui  lui  étaient  imposés, 
et  à  contribuer, autant  qu'il  était 
possible  en  ces  temps  malheureux, 
à  l'encouragenjent  de.»  lettres,  des 
sciences  et  des  ails.  Il  ol)liut  par 
ses  instances  réitérées  auprès  du 
comité  de  ^alut-pld)lic,  la  aii»e  en 
liberté  de  plusieurs  liouimesde  let- 
tres et  artistes  recomniauil.iljles, 
injustement  détenus.  Il  n'en  lut 
pas  moins  fr;^ppé  lui-même, à  l'é- 
poque du  9  thermid()r,par  iiri  dé- 
cret ^i  le  mettait  hors  la  loi.  Le 


PAY 

rôle  que  jouait  son  frère  à  la  com- 
mune de  Paris,  où  il  servit  avec 
ardeur  les  intérêts  de  Robesi)ier- 
re,  le  fit  envelopper  momentané- 
ment dans  la  même  proscription. 
Il  n'existait  point  d'autre  motif 
que  cette  pu'enté,  et  le  décret 
n'en  présenta  aucun  ;  Payan  Du- 
moulin, par  la  nature  de  ses  fonc- 
tions, était  étranger  à  la  partie 
révolutionnaire  du  gouvernement; 
il  l'était  encore  davantagtî  par 
son  caractère,  et  n'avait  cimservé 
aucune  relation  politique  avec  son 
frère,dont  il  ne  partageait  ni  l'exal- 
tation, ni  les  principes.  Il  fut  prouvé 
même  qu'il  n'avait  jamais  fait  par- 
tie de  la  trop  fameuse  société  des 
jacobins.  Après  avoir  passé  la 
plus  grande  partie  de  la  nuit  du  9 
au  10  thermidor  dans  les  bureaux 
de  la  commission  d'instruction 
publique  au  petit  Luxembourg, 
et  ensuite  chez  lui,  il  apprit  le 
matin  qu'il  était  proscrit,  et  n'eut 
que  le  temps  de  sortir  en  toute 
hâte  de  Paris;  il  erra  long-temps 
dans  les  environs,  et  fui  enfin  as- 
sez heureux  pour  gagner  la  Suis- 
se, où  il  trouva  un  asile.  L'injus- 
tice de  sa  proscription  ayant  été 
reconnue,  et  le  décret  de  mise 
hors  la  loi  rapporté,  il  revint  en 
vendémiaire  an  4  ■'  Paris,  où  il 
servit  avec  autant  de  zèle  que  de 
succès  un  grand  nomUre  des  vic- 
mes  échappées  au  règne  de  la 
terreur.  Il  fut  ensuite  immmé  di- 
recteur des  contributions  direc- 
tes, et  en  exerça  les  fonctions  dans 
divers  départeuieiis  pendant  18 
années  consécutives.  Il  s'esl  retiré 
en  1816.  Fonctionnaire  laborieux 
et  désintéressé,  il  n'a  point  dé- 
menti, pendant  sa  longue  carriè- 
re, ce  caractère  de  justice  et  d'in- 


tégrité  qui  lui  a  conserré  de  nom- 
breux amis,  même  pendant  les 
époques  les  plus  orageuses.  Payan 
Dumoulin  a  aussi  cultivé  les  let- 
tres; on  a  de  lui  différentes  pièces 
en  vers  et  en  prose,  insérées  dans 
le  Mercure,  le  Courrier  de  C  Eu- 
rope,  et  autres  ouvrages  pério- 
diques. 

PAYAN  DUMOULIN  (Louis 
de),  de  la  même  famille  que  les 
précédens.  avait  établi  son  domi- 
cile à  Aubenas,  département  de 
l'Ardéche.  Sa  mémoire  est  encore 
en  vénération  dans  c«!ttc  partie  de 
l'ancien  Vivarais,  jadis  presque 
inculte  et  stérile.  Il  y  a  naturalisé 
le  premier  les  plantations  des  mû- 
riers nains  et  perfectionné  \'\  cul- 
ture de  la  vigne.  Les  anciens  états 
du  Languedoc,  auxquels  il  pré- 
.senta  divers  mémoires,  lui  décer- 
nèrent des  éloges  et  des  encoura- 
gemens.  L'abbé  Rozier,  dans  son 
Cours  complet  d'agriculture,  et 
Faujas  de  Saint-Fond  dans  son 
histoire  naturelle  du  Daiiphiné, 
fout  une  mention  honorable  de 
ses  travaux  et  de  ses  succès.  On 
a  de  lui,  outre  divers  mémoires 
publiés  sur  la  culture  du  mûrier, 
et  sur  l'éducation  des  vers  à  soie, 
un  Essai  fur  la  théorie  des  vents, 
dédié  à  son  ami  le  célèbre  Vau- 
canson;  divers  éfrils  sur  l'écono- 
mie politique,  l'organisation  mi- 
litaire, les  impôts,  etc.,  et  un 
discours  mentionné  honor-ible- 
ment  par  l'académie  de  ChSlons, 
concernant  les  meilleures  lois 
pénales  pour  la  répression  des 
crimes.  11  est  mort  dans  un  Age 
très-avancé, au  commencement  de 
la  révolution. 

PAYAN  DE  L'ETANG  (Joseph 
de)  ,  frère  du  précédent, tué  à  la  tôle 


PAY 


85 


du  régiment  dont  il  était  colonel, 
en  1745,  au  camp  des  Cinq-Etoiles 
en  Flandre,  fut  père  d'Henriette 
de  Payan, qui  s'est  distinguée  dans 
la  république  des  lettres,  sous  les 
trois  noms  de  d'Antremont,  de 
Bourdic  et  de  Viot. 

PAYEN  (N.).  s'occupait  d'agri- 
culture lorsqu'il  fut  nommé,  par 
le  tiers-état  d'Artois,  aux  états-gé- 
néraux en  1789.  Il  fut  peu  remar- 
qué de  l'assemblée  au  commence- 
ment dt;  la  sessioti  ;  cependant, 
en  1791,  il  fit  un  rapport  sur  l'as- 
semblée coloniale  de  Saint-Do- 
mingue, dont  on  avait  proposé 
de  mettre  les  membres  en  accusa- 
tion, et  parvint  à  faire  rejeter  cet- 
te proposition.  De  retour  dans  ses 
foyers  à  la  fin  de  la  session,  il  ne 
fut  point  réélu  aux  assemblas  sui- 
vantes. En  1793,  ayant  manifesté 
des  opinions  monarchiques,  il  fut, 
par  ordre  du  conventionnel  Jo- 
seph Lebon  ,  mis  en  arrestation, 
puis  traduit  au  tribunal  révolu- 
tionnaire d'Arras,  qui  le  condam- 
na à  mort  au  commencement  de 

PAYEN  DE  BOISNEUF  (N.), 

possédait  dans  la  ci-devant  pro- 
vince deTouraine  de  grandes  pro- 
priétés, qu'il  exploitait  lui-même, 
lorsqu'il  fut  nommé  par  le  tiers- 
état  du  bailliage  de  Tours  ,  dépu- 
té aux  états-généraux  en  1789. 
M.  Payen,  qui  avait  des  connais- 
sances étendues,  se  fit  peu  remar- 
quer à  la  tribune,  mais  il  travail- 
la beaucoup  dans  les  comités  des 
colonies,  de  la  marine  et  des  re- 
cherches. Après  la  session,  il  fut 
appelé ,  par  la  confiance  de  ses 
commeltan*,  à  remplir  les  fonc- 
tions de  haut -juré  du  départe- 
ment d'Indre-et-Loire.  Il  parait 


86 


PAY 


n'.'jvoir    point    occupé    d'emploi 
public  depuis  celle  époque. 

PAYNE  (Thomas),  député  à  la 
conveatioi)  nationale,  né  en  An- 
gleterre, à  Thelford  dans  le  coinlé 
de  Norfolk,  le  29  janvier  17^7, 
acquit  dès  sa  jeunesse  de  la  célé- 
brité par  ses  écrits  politiques,  ainsi 
que  par  la  part  active  qu'il  prit  aux 
démêlés  des  colonies  anglaises  de 
l'Amérique  septentrionale  avec  la 
métropole,  et  à  la  londalion  de  la 
république  des  Elats-L'ni-<.  Payne 
était  fils  d'un  honnête  fabricant 
de  Thctt'urd  ,  quaker  de  religion, 
très-zélé  pour  sa  croyance,  mais 
qui  ne  put  réussir,  ni  à  inculquer 
à  son  fils  ses  opinions  religieuses, 
ni  à  lui  voir  exercer  long- temps 
.son  état.  Après  avoir  fait  quelque 
séjour  à  Londres,  le  jeune  Payiuî 
voul«j|*enter  la  fortune  sur  tner, 
et  s'embarqua  avec  plusieurs  amis 
de  son  âge  siu'  un  corsaire.  Les  fa- 
ligues  furent  plus  grandes  que  les 
profits,  et  après  deux  campagnes, 
pendant  lesquelles  il  eut  occasion 
de  se  distinguer,  du  moins  par  son 
courage  ,  il  céda  aux  vives  ins- 
tances de  son  père,  repartit  pour 
Thelford,  et  s'établit  ensuite  à 
Sandwich,  où  il  épousa,  à  l'âge 
de  2")  ans,  la  fille  d'un  employé 
de  l'accise.  Il  eut  bientôt  lui-mô- 
nie  un  emploi  subalterne  dans 
cette  adminlslralion  ,  mais  s'en  dé- 
goûta au  bout  d'un  an,  retourna 
à  Londres,  où  il  devint  sous-maî- 
tre dans  une  école.  En  enseignant 
aux  autres,  il  étendit  la  sphère  d(i 
ses  propres  connaissances,  en  ac- 
quit d'assez  étendues  en  mathé- 
matiques et  en  astronomie,  et  cul- 
tiva en  môme  temps  avec  succès 
la  poésie.  Dn  meilleur  emploi  dans 
l'accise  lui  ayant  été  offert,  il  l'ac- 


PAY 

cepta,  et  alla  l'fxercer  à  Lewes 
en  Sussex.  Les  talens  littéraires  et 
les  vi.'rs  d'un  homme  oc(U])é  de 
fonctions  si  peu  analogues  au  com- 
merce des  muses,  firent  du  bruit 
dans  toute  la  province  ,  et  bienlôt 
ses  Collègues  les  employés  de  l'ac- 
cise le  choisirent  pour  plaider  leur 
cause  auprès  du  parlement  bri- 
tannique. Us  demafidaient  une 
augmentation  de  salaire,  et  Payne, 
dans  un  mémoire  très-habilenient 
rédigé,  son  premier  ouvrage  en 
prose,  démontrait  la  nécessilé  de 
mettre  tout  fonctionnaire  public 
à  l'abri  de  la  tentation  de  gagner 
par  des  voies  illicites  ce  qui  est  in- 
dispensable à  sa  subsistance,  et  que 
lui  refuserait  le  gouvernement. 
Quelque  succès  qu'eût  le  mémoire 
de  Payne;  il  n'en  jouit  point  per- 
sonnellement. Sa  femme  venait  de 
mourir  ;  il  en  épousa  une  autre  , 
mais  ne  trouva  point  de  bonheur 
dans  cette  nouvelle  imion ,  et  ne 
voulut  point  cohabiter  avec  celte 
femme  par  des  motifs  qu'il  n'expli- 
quait point,  et  (|ui  ne  regardaient, 
disait-il,  que  lui  seul.  Abandon- 
nant la  province,  l'accise  et  tous 
les  emj)lois  suballernes  ,  il  alla 
s'établir  à  Londres,  et  y  travailla 
pour  les  journaux.  Ses  talens , 
comme  écrivain  ,  le  firent  recher- 
cher par  plusieurs  hommes  distin- 
gués. Goldsmith,  l'auteur  du  Vi- 
caire de  Wakefield  et  de  tant  d'au- 
tres ouvrages  accueillis  par  le  pu- 
blic, fut  au  nombre  de  ses  plus 
intimes  amis  ;  mais  ce  qui  influa 
plus  particulièrement  sur  la  desti- 
née du  publiciste  anglais,  fut  sa 
liaison  avec  le  célèbre  Franklin , 
député  des  colonies  américaines 
et  chargé  de  plaider  leur  cause  à 
Londres.  Celui-ci,  appréciant  tout 


I 


l'A  Y 

le  mérite  rie  Payne,  l'engagea  à  se 
rendre  en  Amérique,  et  à  consacrer 
ses  talens  et  sa  plume  à  la  défense 
des  colons  opprimés  par  le  minis- 
tère de  la  mère-patrie.  Fortement 
recommandé  par  Franklin  à  ses 
amis  et  aux  principaux  hommes 
d'état  d'outre-mer,  Payne,  arrivé 
à  Philadelphie  ,  se  fit  d'ahord  con- 
naît re, ainsi  que  l'avait  fait  Frank  lin 
même,  par  d'excellens  articles  de 
journaux,  ayant  tous  pour  but  des 
objets  d'utilité  publique.  Le  Pen- 
.syhaiiian  Magazine  dot  un  accrois- 
sement et  des  succès  rapides  à  ce 
nouveau  collaborateur.  Ses  ré- 
flexions sur  l'administration  du 
gouvernement  anglais  dans  1  Inde, 
sur  la  vie  et  la  mort  tragique  du 
fameux  lord  Clive,  furent  parti- 
culièrement citées  comme  un  ta- 
bleau historique  tracé  de  main  de 
maître.  Payne  eut  bientôt  à  s'oc- 
cuper de  matières  d'une  plus  haute 
importance.  La  mission  de  Fran- 
klin à  Londres,  en  1774?  n'avait 
obtenu  aucun  succès  ;  un  monar- 
que inflexible,  et  des  ministres 
qui  sacrifiaient  leurs  propres  opi- 
nions au  désir  de  conserver  leurs 
places,  repoussaient  les  demandes 
les  plus  équitables.  Malgré  l'op- 
position éloquente  et  énergique  de 
lord  Chatham  et  de  quelques  pa- 
triotes éclairés  des  deux  chambres 
du  parlement,  il  fut  résolu  d'user 
envers  les  colonies  des  moyens  les 
plus  rigoureux  ,  et  mêtne  de  la 
iorce  des  armes.  Payne  publia 
alors,  en  1776,  son  fameux  pam- 
phlet, the  commun  Sensé  (le  Sens 
commun  ) ,  et  jamais  aucun  écrit 
politique  ou  religieux  n'eut  de  suc- 
cès pareil  et  une  influence  aussi 
marquée.  L'auteur  aurait  pu  pren- 
dre pour  épigraphe  le  vers  d'un 


PAY 


87 


poète  français  :  L'injustice  à  la  fin 
produit  C indépendance.  Les  Amé- 
ricains proclamèrent  la  leur,  et 
surent  bientôt  la  conquérir,  com- 
me ils  savent  encore  la  défendre. 
Payne  se  dévoua  dès-lors  à  cette 
cause,  et  professa  jusqu'à  la  fin  de 
ses  jours  le  plus  ardent  républi- 
canisn)e.  Son  premier  écrit  eut 
un  débit  prodigieux;  plusieurs  édi- 
tions consécutives  le  mirent  bien- 
tôt dans  toutes  les  mains.  Mais 
l'auteur  aspirait  à  plus  d'un  genre 
de  gloire;  il  se  rendit  à  l'armée, 
où  il  combattit  vaillamment.  Dans 
les  loisirs  des  camps,  il  composa 
encore  une  suite  de  brochures'et 
feuilles  périodiques  sous  le  titre 
the  Crisis  (la  Crise),  se  succédant 
par  numéros  jusqu'à  la  paix,  ou 
deptiis  1776  jusqu'en  1783,  et  for- 
mant en  tout  i5  livraisons,  qui 
contribuaient  à  entretenir  l'esprit 
public  au  milieu  des  revers  qu'é- 
prouvèrent d'abord  les  armes  amé- 
ricaines. Payne  avait  été  rappelé 
de  l'armée  en  1779,  po'Ji"  occuper 
un  poste  de  confiance;  le  congrès 
le  choisit  pour  secrétaire  du  co- 
mité des  afTaires  étrangères,  où  il 
travailla  pendant  deux  ans;  mais 
ayant  mécontenté  quelques  mem- 
bres iufluens  en  signalant  dans  les 
journaux  un  agent  infidèle  qu'ils 
protégeaient,  il  crut  devoir  don- 
ner sa  démission.  Les  dilapida- 
tions de  ce  concussionnaire,  qui 
se  sauva  on  Angleterre ,  furent 
cependant  prouvées  depuis,  et  l'on 
rendit  pleine  justice  à  Payne.  Le 
congrès  chargea  ce  dernier,  vers 
la  fin  de  1781',  de  se  rendre  en 
France  avec  le  colonel  Lawrence, 
pour  y  solliciter  un  emprunt.  Il 
retrouva  à  Paris  son  ami  Franklin, 
qui  seconda  de  tout  son  crédit 


88  PAY 

relte  mission.  Elle  obtint  un  suc- 
cès coiuplet  :  non- seulement  le 
gouvernement  français  accorda 
aux  Américains  un  don  de  6  mil- 
lions, mais  il  se  rendit  en  outre 
garant  d'un  prêt  de  lo  millons  que 
leur  flt  la  répul)lit|ue  de  ilollande. 
Pendant  son  séjour  à  Paris,  Pajne 
conçut  le  téméraire  projet  de  se 
rendre  en  secret  en  Angleterre, 
pour  y  publier  un  ouvrage  sur 
l'état  des  affaires  en  Amérique  , 
propreà  ouvrir  les  yeux  du  peuple 
et  à  convaincre  tous  les  hommes 
de  bonne  foi  de  l'inutilité  des  ef- 
forts qu'on  tentait  pour  subjuguer 
les  colonies;  mais  le  colonel  La- 
wrence s'opposa  à  ce  départ,  et  ne 
voulut  point  se  séparer  de  son  col- 
lègue, qu'il  ramena  presque  mal- 
gré lui  en  Amérique,  où  ils  reçurent 
tons  deux  l'accueil  que  leur  méri- 
tait une  mission  si  honorablement 
terminée  en  Europe.  La  plus  glo- 
rieuse paix  vintcouronoerdés  l'an- 
née suivante  les  nobles  efforts  des 
Américains  pour  conquérir  leur 
liberté,  et  la  nouvelle  république 
des  Etats-L'nis  fut  solennellement 
reconnue  par  toutes  les  puissan- 
ces. L'Angleterre  gagna  en  com- 
merce plus  qu'elle  ne  perdit  en 
domination  par  l'indépendance  de 
ses  colonies,  et  ses  intérêts  furent 
mieux  soignés  que  ceux  de  la 
France,  dont  on  parut  assez  vile 
avoir  oublié  les  éminens  services. 
Le  ministère  anglais  en  garda  seul 
un  long  souvenir,  et  ses  projets 
de  vengeance  passèrent  en  héritage 
d'une  administration  à  l'autre.  Le 
congrès  des  Etats-Unis  s'empressa 
de  reconnaître  les  services  de  Pay- 
ne,  et  lui  fit  un  don  de  3ooo  dol- 
lars ;  l'état  de  New-York  y  joignit 
une  concession  de  5oo  acres  de 


PAY 

terre  avec  une  habitation;  l'état 
de  Pensylvanie  lui  donna  Sooo 
livres  sterlings,  et  celui  de  Virgi- 
nie se  disposait  à  suivre  cet  exem- 
ple ,  mais  on  y  observa  que  Payne 
dans  un  de  ses  écrits,  tlie  Public 
Good,  avait  contesté  les  droits  des 
Virginiens  sur  un  grand  territoire 
à  l'ouest,  et,  à  la  majorité  d'une 
voix,  la  motion  de  récijmpeiiser 
l'auteur  du  commun  Sensé  fut  re- 
jetée, llentré  dans  la  vie  privée, 
il  se  livra ^avec  une  nouvelle  ar- 
deur à  l'étude  des  sciences  et  des 
arts  mécaniques.  L'université  de 
Philadelphie  le  nomma  maître  ès- 
arts ,  et  la  société  philosophique 
américaine  l'admit  au  nombre  de 
ses  membres.  En  1787,  Payne  re- 
vint à  Paris,  et  présenta  à  l'aca- 
démie des  sciences  le  modèle  d'un 
pont  en  fer,  tel  qu'on  commen- 
çait alors  à  en  construire  en  Amé- 
rique. Son  plan  fut  approuvé; 
mais  il  ne  trouva  point  de  capi- 
taux pour  exécuter  son  projet.  Il 
passa  alors  en  Angleterre,  visita 
sa  ville  natale,  et  y  trouva  sa  mère 
qui,  devenue  veuve,  vivait  dans  un 
état  voisin  de  l'indigence  ;  il  pour- 
vut généreusomçnl  à  ses  besoins, 
et  assura  son  sort  pour  l'avenir. 
S'étaut  ensuite  associé  avec  un 
maître  de  forges  à  Rothi'rham , 
dans  le  Yorkshire,  il  poursuivit 
ses  projets  de  construction  de 
ponts  en  fer,  en  présenta  les  plaris 
à  la  société  des  arts  de  Londres, 
et  publia  ime  lettre  à  ce  sujet, 
adressée  à  sir  Georges  Staunton, 
imprimée  à  Rotherham  en  1789, 
dans  laquelle  il  développait  les 
avantages  qu'on  pouvait  retirer 
de  ce  genre  de  constructions.  Les- 
premiers  fonds  mis  à  la  disposi- 
tion de  Payne  ne  suffirent  point 


PAY 

pour  sa  grande  entreprise.  II  en- 
gagea alors  tous  ses  biens  en  Améri- 
que ,  mais  la  faillite  de  son  agent 
le  jeta  dans  le  plus  grand  eml:)ar- 
riis ,  et  il  lut  même  détenu 
pour  dettes  pendant  quelques 
semaines.  On  vint  enfin  à  son  se- 
cours. Un  ouvrage,  que  Payne  a- 
\ait  publié  depuis  son  retour  en 
Europe,  sur  la  politique  de  la 
Grande-Bretagne  et  les  intérêts 
du  continent,  venait  d'ajouter  à 
sa  réputation  comme  écrivain. On 
y  trouve  des  aperçus  d'une  saga- 
cité remarquable.  L'auteur  avait 
su  démêler  de  bonne  heure  les 
vues  ambitieuses  du  jeune  minis- 
tre placé  à  la  tête  des  affaires  de 
l'Angleterre.  Le  fils  de  lord  Cha- 
iham  avait  hérité  de  toute  l'ani- 
niosité  de  son  père,  contre  la 
France,  et  n'épargnait  rien  pour 
assurer  la  prépondérance  de  son 
pays,  en  semant  les  troubles  et  les 
divisions  sur  le  continent.  Les 
•luerelles  du  stathouder  avec  les 
patriotes  de  la  république  des 
Provinces-Unies,avaient  déjà  four- 
ni à  Pitt  les  moyens  de  s'attacher 
la  maison  d'Orange  par  des  liens 
qui  se  sont  perpétués  jusqu'à  ce 
jour.  Il  Taisait  de  plus  agir  à  son 
gré  la  Prusse,  et  saisit  avidement 
l'occasion  d'humilier  la  France, 
qui  d'abord  avait  soutenu  les  pa- 
triotes hollandais,  mais  qui  les 
abandonna  bientôt,  retira  ses  trou- 
pes des  frontières,  et  laissa  le 
champ  libie  aux  .^o.ooo  Prus- 
siens ,  avec  lesquels  le  duc  de 
Brunswick  envahit  la  Hollande, 
et  la  soujnil  à  l'influence  anglaise. 
Payne  prédit  à  l'Angleterre  les 
n)aiix  que  traînerait  à  sa  suite  le 
machiavélisme  de  ses  ministres, 
calcula  tout  l'or  et  le  sang  qu'il 


PAY 


«9 


lui  faudrait  prodiguer  en  des  lut- 
tes nouvelles,  et  prouva  victo- 
rieusement que  chaque  guerre  ne 
ferait  qu'ajouter  à  ses  embarras 
financiers,  au  poids  accablant  des 
taxes,  sous  lequel  le  peuple  gé- 
missait, et  à  sa  dette  publique, 
déjà  si  énorme.  Dès  1787,  Payne 
avait  fait  imprimer  d'autres  pré- 
dictions remarquables  :«  C'est  un 
»  fait  connu,  disait-il,  de  tous  ceux 
»qui  ont  été  récemment  en  Fran- 
))ce,  qu'un  changement  très-ex- 
«traordinaire  s'opère  dans  l'esprit 
«du  peuple  de  ce  royaume;  chan- 
«gementqui  rendra  la  France  for- 
omidable,  aussitôt  que  son  gou- 
).  vernement  voudra  saisir  l'heu- 
«reuse  occasion  qui  se  présente, 
»  pour  doubler  sa  force,  en  unis- 
»sant,  s'il  est  permis  de  le  dire, 
»la  majesté  du  souverain  à  la  ma- 
wjesté  de  la  nation.  »  Cet  ouvra- 
ge, publié  à  ïjondres,  eut  trois 
éditions  consécutives.  Deux  ans 
jdus  tard,  la  révolution  éclata. 
Payne  s'était  lié,  tant  en  France 
qu'en  Angleterre,  avec  des  hom- 
mes marquons.  Il  avait  eu  à  Pa- 
ris un  libre  accès  auprès  de  l'ar- 
chevêque de  Toulouse,  alors  à  la 
tête  du  ministère  français,  qui  dé- 
sirait une  paix  constante  entre  la 
France  et  l'Angleterre.  Condor- 
cet,  Achille  Duchâtelet,  des  phi- 
losophes, des  littérateurs  distin- 
gués, étaient  au  nombre  des  amis 
et  des  admirateurs  de  Payne. 
Il  entretenait  une  correspondance 
suivie  avec  le  célèbre  Burke,  qui 
avait  soutenu,  avec  auliiut  d'é- 
nergie que  d'éloquence,  la  cause 
des  Américans  devant  le  parle- 
ment britannitiue.  Buike  était  en- 
core alors  au  nombre  des  mem- 
bres les  plus  opposés  au  minislè- 


9» 


PAY 


re  de  son  pays;  ii  paraissait  adop- 
ter, avec  la  chaleur  qu'il  inetlait 
à  tout,  le  système  politique  de 
Payne,  qui,  au  lieu  d'exciter  et 
d'entretenir  les  haines  nationales, 
tendait  à  les  éteindre,  et  à  les 
remplacer  par  des  senliniens  plus 
justes,  d'estime  et  il'affection  ré- 
ciproques. Il  croyait  que  deux 
peuples  voisins ,  tous  deux  puis- 
sans,  riches,  et  industrieux,  mais 
dont  les  cruels  débats  avaient  si 
long- temps  ensanglanté  la  terre 
et  les  mers,  devaient  cesser  de  se 
déchirer,  confondre  leurs  intérêts, 
et  tbrmerune  alliance  étroite,  pour 
leur  propre  bonheur,  comme  pour 
celui  desautres  nations  qui  se  trou- 
veraient bientôt  soumises  à  leur 
influence.  Les  Français  et  les  An- 
glais se  seraient  ainsi  placés  à  la 
tête  de  la  civilisation  européenne, 
et  jamais  les  autocrates  du  Nord 
n'auraient  été  appelés  à  devenir 
les  arbitres  des  destinées  de  la 
plus  belle  partie  du  monde.  Mais 
Pitt  en  avait  autrement  décidé. 
Les  premiers  excès  de  la  révolu- 
tion le  servirent  à  souhait.  L'é- 
tranger ne  cessa  de  fomenter  de- 
puis des  troubles  et  des  excès  nou- 
veaux en  France,  et  toutes  les 
haines  trouvèrent  d'abondans  ali- 
inens.  L'Ame  ardente  et  généreuse 
de  Burke  se  révolta  une  des  pre- 
mières, et  en  entraîna  d'autres. 
Lui-même  ne  sut  point  renfenner 
son  indignation  dans  de  jusies 
bornes.  Abandonnant  son  parti  , 
rompant  avec  tous  ses  anciens  a- 
inis,  et  Fox  en  pleura  de  douleur, 
ii  seconda  les  vues  d'un  ministère 
qu'il  détestait,  et  lança  ses  véhé- 
mentes Philippiques  contre  la 
France.  Payne  y  répondit  par  ses 
fameux  Droits  de  r homme,   qui 


PAY 

furent  imprimés  à  Londres  en 
1791,  Plus  de  5ooo  exemplaires 
en  furent  enlevés  en  peu  de  temps. 
L'année  suivante  il  en  publia,  de 
même  à  Londres,  une  seconde  par- 
tie. Le  succès  de  l'ouvrage  en  An- 
gleterre, quoiqu'il  fut  vivement 
attaqué  par  les  nombreux  parti- 
sans du  ministère,  inspira  à  celui- 
ci  quelques  alarmes.  Il  résolut  de 
Taire  poursuivre  l'auteur  comme 
ayant  excité  le  peuple  à  la  révolte 
contre  le  gouvernement  monar- 
chique. Payne  fut  traduit  devant 
le  tribunal  du  banc  du  roi,  et  y 
fut  défendu  par  un  des  plus  célè- 
bres avocats  du  barreau  anglaise, 
Thomas  Erskine,  orateur  généra- 
lement estimé  pour  son  beau  ta- 
lent, et  plus  encore  pour  son  no- 
ble caractère.  Son  plaidoyer  passe 
pour  un  chef-d'œuvre  d'éloquence 
et  de  raisonnement.  Des  démar- 
ches de  plus  d'un  genre  avaient 
été  faites  auprès  de  lui  pour  l'em- 
pêcher de  se  charger  de  cette  cau- 
se. Dans  son  exorde,  il  ne  peut 
s'empêcher  de  parler  de  ces  faits 
déjà  connus,  et  de  déplorer  qu'on 
l'ait  cru  capable  de  refuser  son 
ministère  à  un  accusé  qui  se  con- 
fie à  lui,  et  qui  n'a  violé  aucune 
loi.  Lui-même,  sincèrement  at* 
taché  aux  lois  et  au  gouverne- 
ment de  son  pays,  et  dont  le  dé- 
vouement n'est  point  ignorédeses 
concitoyens,  il  ne  prétend  nulle- 
ment discuter  les  opinions  ou  fai- 
re ra|)ologie  des  principes  de  son 
client;  mais  il  croit  pouvoir  prou- 
ver que  celui-ci  avait  le  droit  de 
les  énoncer,  et  que  selon  les  lois 
anglaises  établies  en  faveur  de 
la  liberté  de  la  presse  ,  Payne  ne 
devait  point  être  déclaré  coupa- 
ble pour  avoir  écrit  comme  il  l'a- 


PAY 

vait  fait.  L'orateur,  à  l'appui  de  sa 
(lûreiisc  ,  lut  plusieurs  passages 
d'auteurs  connus,  et  cités  pour 
leur  attachement  à  la  monarchie, 
tels  que  Hume,  Burke  et  autres, 
prouvant  que  ces  écrivains  a- 
vaient,  sans  êlre  inquiétés,  atta- 
qué aussi  énergiqueinent  les  ahus 
du  pouvoir  monarchique.  Payne 
n'eu  fut  pas  moins  condamné,  et 
son  avocat  perdit  une  place  lu- 
crative, qc'il  tenait  d'un  prince. 
La  société  des  amis  de  la  liberté 
de  la  presse  vota  des  remercî- 
mt-ns  publics  à  M.  Erskine,  et 
une  riche  et  nombreuse  clientelle 
le  dédomnifigea  bientôt  de  ia  perte 
(lésa  place.  L'auteur  qu'on  pour- 
suivait à  Londres  ,  dont  on  brû- 
lait dans  quelques  réunions  poli- 
fiqjies  l'elligic  et  les  écrits,  tandis 
que  dans  d'autres  on  faisait  l'i- 
nauguration de  son  buste,  en  l'or- 
nant de  la  couronne  civique,  Pay- 
ne se  hâta  d'aller  jouir  en  France 
des  honneurs  extraordinaires  qui 
v«!naient  de  lui  être  décernés  en  ce 
pays.  Avant  même  que  son  pro- 
cès ne  fût  instruit  en  Angleterre, 
l'asseinblée  nationale  lui  avait 
conféré  le  titre  et  les  droits  de  ci- 
toyen français.  Les  électeurs  du 
département  du  Pas-de-Calais  al- 
lèient  encore  plus  loin  dans  leur 
enthousia.snie  pour  le  défenseur 
ihs  droits  de  l'homme,  et  le  nom- 
mèrent, à  l'unanimité,  leur  re- 
présentant à  la  convention  na- 
tionale; ils  lui  envoyèrent  mCmc 
une  députalion  en  Angleterre, 
pour  lui  annoncer  leur  choix.  Il 
accepta,  sans  hésiter,  cette  mis- 
sion, se  rendit  à  Douvres,  où  il 
essuya  encore,  avant  de  s'embar- 
quer, les  vexations  et  Jes  insultes 
des  douimiers  ,   qui  cherchaient 


PAY 


9' 


ainsi  à  bien  mériter  du  gouver- 
nement ;  mais  il  franchit  enfin  le 
canal,  et  aborda  heureusement 
sur  la  plage,  où  le  peuple  était 
accouru  en  foule  pour  le  rece- 
voir. Vingt  minutes  après  son  dé- 
part de  Douvres,  l'ovdre  de  l'ar- 
rêter y  iirriva  ,  dit-on,  de  Lon- 
dres. Il  reçut,  dès  son  entrée  en 
France,  le^  plus  éclatans  témoi- 
gnages de  cette  faveur  passagère, 
qui  devait  bientôt  se  changer  pour 
lui,  comme  pour  tant  d'autres 
idoles  d'un  peuple  inconstant  et 
passionné,  en  haine  et  en  persécu- 
tion. La  garnison  de  Calais  était 
sous  les  armes ,  un  officier  lui 
présenta  la  cocarde  aux  trois  cou- 
leurs, et  une  des  plus  jolies  fem- 
mes de  la  ville  l'attacha  à  son  cha- 
peau. Des  salves  d'artillerie  an- 
noncèrent son  arrivée;  il  fut  con- 
duit, aux  cris  multipliés  de  Vive 
Thomas  Payne,  à  l'hôtel-de-ville, 
où  le  maire,  à  la  tête  de  la  muni- 
cipalité, reçut  et  harangua  le  nou- 
veau représentantdn  peuple  fran- 
çais. Celui-ci  malheureusement 
ne  siivait  point  s'exprimer  dans  la 
langue  de  ses  commcttans,  et  ne 
put  témoigner  sa  reconnaissance 
que  par  gestes  et  en  portant  sa 
main  sur  son  cœur.  Au  théâtre,  à 
la  Société  dite  constitutionnelle, 
et  partout  où  on  le  promenait,  les 
mêmes  témoignages  d'amom'  et 
de  vénération  lui  étaient  prodi- 
gtiés.  Il  fallut,  à  la  seconde  séan- 
ce de  la  société  des  amis  de  la 
constitution,  abandonner  le  local 
insuffisant  des  Minimes  ,  où  elle 
s'était  réunie  jusqu'alors  ,  et  se 
transporter  dans  la  grande  église, 
tant  rem[>ressenn'nt  des  curieux, 
accourus  de  toutes  parts,  était  ex- 
trême.   D'autres  départemens  se 


9» 


PAY 


disputèrenl  le  publiciste  anglais, 
et  les  villes  de  Beau  vais,  d'Abbe- 
ville,  et  de  Versailles,  le  noininè- 
rent  leur  représentant;  mais  il  op- 
ta pour  le  département  du  Pas- 
de-Calais,  qui  l'avait  élu  le  pre- 
mier. Arrivé  à  Paris,  il  publia  ime 
adresse  au  peuple  français,  pour 
le  remercier  de  sa  confiance  et  de 
l'insigne  honneur  dont  son  choix 
l'avait  comblé.  Mais  à  cet  hon- 
neur, prodigué  en  inême  temps 
à  des  Marat,  des  Couthon ,  des 
Robespierre,  se  bornèrent  tous  les 
succès  de  Payne  en  France.  Il  ne 
joua  qu'im  rôle  suballerne  à  la 
convention  nationale,  où  il  ne 
put  parler  que  par  interprête;  et 
quand  dans  le  procès  de  Louis 
XVI,  il  osa  depuis  braver  coura- 
geusement la  faction  dominante, 
la  perle  du  député  étranger  fut  ré- 
solut'. Ce  républicain  exalté  et 
réputé  si  farouche,  qui  avait  puis- 
samment contribué  à  la  chute  de 
lit  royauté  diins  le  nouveau  mon- 
de, et  qui  venait  d'adresser  une 
lettre  aux  Anglais,  dans  laquelle 
il  disait  que  «  leur  gouvernement 
né», lit  le  type  de  la  corruption,  et 
nqu'ils  n'avaient  besoin  ni  A\iii 
»maitr«;  Gueljtht' ,  ni  de  se:-  fils 
«prodigues,  pour  les  gouverner,  » 
Paynesedi  clar.thaiitem.ut  contre 
la  peine  de  m.)rt,  qir(,n  uu)iitrait 
le  fimesle  d»;sseiu  de  pronouct  r 
contre  le  roi.  llobe^pierre  avait 
vaineujeut  con)pté  sur  ce  suffra- 
ge; Payne  vola  pour  le  bannisse- 
ment après  la  paix,  et  quand,  mal- 
gré ses  eiîbrts,  la  mort  fut  pro- 
noncée, il  demanda  ra[ipel  au 
peuple,  le  sursis  à  l'exécution,  et 
fit  imprimer  sou  opinion  forte- 
ment motivée.  Un  pareil  vote 
pouvait  à  celte  époque  être  con- 


PAY 

sidéré  comme  un  acte  de  cou- 
rage, et  l'Anglais  qui,  en  cher- 
chant à  sauver  le  roi,  se  mettait 
en  opposition  si  manifeste  avec 
un  parti  puissant,  ne  se  dissimu- 
lait point  qu'il  courait  plus  de 
dangers  que  les  nationaux.  Depuis 
long -temps  Marat  reprochait  à 
Payne  de  n'avoir  que  les  |»riuci- 
pes  d'un  quaker,  et  \in  des  pre- 
miers usages  que  fit  Robespierre 
du  pouvoir  qu'il  usurpa,  fut  de  le 
faireexciure  de  la  convention  com- 
n\e  étrangt-r.  Le  déparlement  du 
Pas-de-Calais,  oubliant  tous  les 
honneurs  qu'il  lui  avait  rendus, 
se  hâta  alors  de  f.iire  passer  une 
adresse  à  la  convention ,  dans  la- 
quelle il  déclarait  que  Payne  avait 
perdu  la  confiance  de  ses  commet- 
tans  et  s'tm  était  rendu  indigne. 
Robespierre  ne  borna  point  là  sa 
vengeance;  sans  se  laisser  arrêter 
par  la  considération  du  plaisir 
exlrr-tne  qu'il  allait  faire  au  parti 
de  la  haute  aristocratie,  ou  peiit- 
êti^e  même  pour  satisfaire  à  la 
vengeance  de  ce  parti  avec  le- 
quel tant  de  personnes  ont  cru 
qu'il  eut  des  relations  secrètes,  il 
fit  incarcérer  l'ex  -  député  au 
Luxembourg,  et  tint  long  temps 
le  glaive  suspendu  sur  sa  têt»'.  La 
victime  idlail  enfin  être  immolée, 
quand  leçj  theruiidor  vint  fiapper 
le  sacrificatem-.  Après  onze  nn»is 
d'une  dure  captivité,  et  sur  les 
instanles réclamation»  de  M.  Mon- 
roe ,  au  nom  du  gouvernement 
américain  dont  il  était  le  ministre 
en  France,  Payne  fut  enfin  rendu 
à  la  liberté  ;  il  reprit  sa  place  à  la 
convention  le  8  décembre  1794; 
lui  fit  hommage  d'un  nouvel  ou- 
vrage Sur  les  premiers  principes 
du   i^ouvernement f    Paris,    1^95; 


PAY 

parla,toujoiirs  par  interprète, de  la 
nécessité  de  changer  l'iniorme  et 
iuixécntal)le  coii>tituti')n  de  ijqS; 
fit  encore  un  discours  sur  la  divi- 
sion déparleinenfale  de  la  Kraiice, 
et  le  placement  des  municipalités; 
el  termina  ainsi  sa  carrière  légis- 
lative. Il  avait  Inng-tenjps  fait 
partie  du  comité  de  législation, 
mais  san"  y  produire  un  grand 
effet.  Madame  Roland  dit  de  lui 
dans  .-es  mémoires  :  «  La  h  «rdie-i.- 
))se  de  ses  pensées,  l'originalité  de 
>son  style,  ces  vérités  fortes  je- 
»tées  au  milieu  de  ceux  qu'elles 
»  offensent,  ont  dû  produire  une 
«grande  sensation;  mais  je  le  croi- 
«rais  plus  propre  à  semer  pour 
»  ainsi  dire  ces  étincelles  ,  qu'à 
•  discuter  les  bases,  ou  préparer 
»la  formation  d'un  gouvernement, 
«l'ayne  éclaire  mieux  une  révo- 
nlutiou  qu'il  ne  peut  concourir  à 
»une  constitution.  »  Il  publia  en- 
core plusieurs  ouvrages  eu  Fran- 
ce, Sur  les  finances  W  Angleterre; 
Sur  la  justice  agraire  opposée  aux 
lois  agraires,  etc.  Celui  qui  fit  le 
pins  di;  sensation,  surtout  en  An- 
gleterre,où  il  révolta  tout  le  cler- 
gé anglican,  qui  fil  paraître  phi- 
sieurs  réfutations,  ce  fut  sou  ou- 
vrage sur  la  religion  naturelle,  in- 
titulé :  l' Age  de  la  raison,  l'ayne 
y  avait  travaillé  pendant  sa  dé- 
tention au  Lnxemboing,  entière- 
ment dépourvu  de  livres,  citiuit 
de  mémoire  la  Bible,  et  écrivant 
dans  les  intervalles  d'une  fièvre 
ardente.  Il  s'y  |)rononce  forte- 
ment contre  l'athéisme,  mais  aussi 
contre  les  religions  révélées,  a  Je 
«voyais  ma  vie  eu  danger  conti- 
■)nuel,  écrivit-il  à  un  de  ses  an- 
"ciens  amis  en  Améri((ne ,  Sa- 
nnmel  Adams.  Mes  amis  lombaient 


PAY 


9^ 


«aussi  rapidement  que  la  guillo- 
))tine  pouvait  les  abattre;  moi- 
»  même  je  m'attendais  chaque  jour 
»au  même  sort.  Dans  ces  circoas- 
»  lances,  je  résolus  de  commen- 
«cer  mon  ouvrage.  Il  me  semblait 
«que  j'étais  sur  mon  lit  de  mort, 
«car  la  mort  m'environnait  de 
nions  les  côtés,  el  je  n'avais  pas 
))de  temps  à  perdre.  En  effet,  j'a- 
»  vais  fini  la  première  partie  de- 
»puis  six  heures  quand  on  vint 
•une  sai->ir  et  me  jeter  en  prison. 
»  J'avais  vu  le  jieuple  français  se 
'•précipiter  tête  baissée  dans  l'a- 
>)  théisme,  je  fis  donc  traduire  et 
«publier  cette  première  partie  de 
«l'ouvrage  en  français,  pourarrè- 
»  1er  la  nation  en  cette  route,  et 
«la  ramener  au  premier  article  de 
«foi,  de  quiconque  a  une  foi, 
«c'est-à-dire,  à  la  croyance  en  un 
»  Di»"!!.  J'avais  exposé  ma  vie  en 
«m'opposaut  d>ms  la  convention 
«au  supplice  du  roi,  je  courus  de 
«nouveaux  dangers  en  m'oppo- 
»sant  aux  progrés  de  l'athéisme.» 
Payue.  quel  cpje  fût  son  désir  de 
propager  les  principes  pour  les- 
qn»'ls  il  fut  poursuivi  en  Angle- 
terre et  en  France,  ne  persécuta 
au  moins  jamais  personne,  et  ne 
fut  complice  d'aiicun  crime  des 
chefs  de  parti.  Peu  de  lemps  aprè? 
sou  arrivée  à  Paris,  quand  il  ve- 
nait de  [)ren(lre  place  à  la  con- 
vention, et  qu'il  était  encoie  en- 
touré de  la  plus  haute  faveur  po- 
pulaire, il  eut  un  jour  ime  que- 
relle avec  im  capitaine  anglais; 
celui-ci,  indigné  de  l'entendre 
dans  un  lii-u  public  pai;-ler  avec 
le  plus  grand  m';pris  du  gouver- 
nem-^nl  brilanni(pie ,  se  jeta  sur 
lui  et  lui  porta  un  coup  vi  )lenl. 
Le  capitaine  fut  arrêté  par  les  a»'- 


94 


TAY 


sistans  et  conduit  en  prison.  Son 
supplice  paraissait  inévitable,  mais 
à  force  d'instances  auprès  du  co- 
mité de  salut-public,  Payne  par- 
vint à  le  sativer  et  <!i  le  i'aire  pas- 
ser en  Angleterre.  11  est  encore  à 
remarquer  que  le  républicain  d'A- 
mérique ne  fit  jamais  partie  du 
club  des  jacobins  en  France  ;  mais, 
en  1797,  il  se  lit  inscrire  au  cercle 
constitutionnel  :  «  C'est,  écrivit-il, 
))la  seule  société  en  France  dont 
«j'aie  été  membre.  .J'y  allai  parce 
«qu'il  était  nécessaire  alors  que 
))Ies  ami:^  de  la  liberté  se  rallias- 
»«ent  sous  l'étendard  de  la  cons- 
«titution,  et  j'y  rencontrai  nom- 
nbre  de  ces  vieux  amis.  >>  Ce  cer- 
cle donna  bientôt  ombrage  au 
gouvernement  directorial,  et  fut 
fermé.  Après  la  révolution  du  18 
brumaire  au  8  (9  novembre  1 799), 
Payne  voyant  la  domination  d'un 
seul  s'établir  peu  à  peu  sur  les 
débris  de  la  republique,  n'aspira 
plus  qu'à  retourner  aux  Etals-U- 
nis, où  d'ailleurs  son  ami  le  pré- 
sident Jeftersou  le  rappelait.  Ce 
ne  fut  qu'après  la  paix  d'Amiens, 
en  1802,  qu'il  put  satisfaire  à  ce 
désir.  Il  y  revint  lieureiisemcnt, 
mais  manqua  quelque  temps  après 
d'être  assassiné  dans  sa  maison 
de  New-Rocbelle,  état  de  New- 
York.  Un  inconnu,  et  dont  on 
ne  put  jamais  retrouver  les  traces, 
lui  lira  un  coup  de  pistolet  à  tra- 
vers la  fenêtre.  Plusieurs  démar- 
ches furent  faites  pour  ramener 
Payne  à  la  foi  en  la  religion  révé- 
lée. Il  reçut  de  Baltimore  uue  dé-' 
pulation  de  la  secte  dite  de  la 
Nouvelle  Jérusalem,  Le  ministre 
qui  portail  la  parole  lui  dil  qu'on 
avait  enfin  retrouvé  dans  son  égli- 
se  la  véritable  clef  de  la   Bible , 


PAY 

perdue  depuis  mille  et  tant  d'an- 
nées. Payne  se  contenta  de  lui  ré- 
pondre :  «  Elle  doit  être  bien  rouil- 
lée  !  »  Deux  ecclésiastiques  vinrent 
encore  quinze  jours  avant  sa  mort 
travailler  à  sa  conversion  :  son  mé- 
decin se  joignit  à  eux,  mais  leurs 
efforts  furent  vains,  et  il  persistai 
jusqu'à  la  fin  dans  son  opiniâtre 
incrédulité.  Les  anecdotes  pu- 
bliées par  certains  journaux  anglais 
sur  les  derniers  jours  de  Payne 
ont  été  démenties  en  Aioérique. 
Selon  ces  feuilles,  il  aurait  décla- 
ré qu'il  n'avait  été  toute  sa  vie 
que  l'agent  du  diabin;  que  c'était 
le  diable  même  qui  avait  dicté 
chaque  ligue  de  l' Age  de  la  raison; 
que  maintenant  lui  Payne,  bien 
converti,  désirait  que  tous  les 
exemplaires  de  cet  ouvrage  fus- 
sent brftlés,  etc.  Ce  qu'il  y  a  de 
plus  certain,  c'est  que  son  intem- 
pérencc  et  l'usage  immodéré  qu'il 
fit  long-temps  des  boissons  spiri- 
tueuses  et  à  la  fin  des  liqueurs  les 
plus  forles,  minèrent  sa  couslilu- 
lion  robuste,  et  hâtèrent  de  beau- 
coup sa  ^\\\.  11  mourut  le  8  juin 
1809.  Les  quakers  refusèrent  de 
recevoir  son  corps,  et  il  fut  enter- 
ré, ainsi  qu'il  l'avait  désiré,  dans 
sa  ferme  de  New-lîochelle.  Un 
écrivain,  q>ii  a  dppuis  cherché 
en  Angleterre  et  en  Amérique 
divers  moyens  d'arriverà  la  fortu- 
ne et  h  la  célébrité,  le  prétendu 
Anû  (la  peuple,  Cobbet,  conçut , 
en  1817,  le  projet  de  déteirer  les 
ossemens  de  l'ayne  et  de  les  por- 
ter en  Angleterre.  La  translation 
a  eu  lieu  en  effet,  selon  Cobluit, 
qui  a  atnioncé  fastueusement 
l'arrivée  de  ces  reliques  dans  l'an- 
cien inonde.  Selon  quelques  feuil- 
les ministérielles,  ce  ne  sont  que 


PAY 

les  restes  d'un  pendu  qu'on  y  a 
apportés.  Ou  a  rappelé  de  plus, 
en  celle  occasion,  que  Cobbet  a- 
vait  lui-même  écrit  autrefois 
contre  Payne;  au  reste  la  viola- 
tion de  la  tombe  que  ce  dernier 
s'était  choisie,  sera  aussi  peu 
profitable  au  spéculateur  qui  se 
l'est  permise,  qu'inutile  à  la  gloire 
du  mort.  Payne  a  sans  doute 
conservé  des  partisans  dans  son 
ancienne  pairie  ainsi  qu'en  Amé- 
rique. Sa  statue  se  trouve  en  di- 
vers lieux  de  réunion  ;  mais  le 
monument  qu'on  a  proposé  d'é- 
lever au  pnbliciste  républicain  en 
Angleterre,  n'y  sera  jamais  toléré 
par  le  parti  ministériel,  et  celui- 
ci  trouvera  au  prenjier  signal  as- 
sez de  mains  pour  démolir  le  mau- 
solée et  pour  disperser  les  osse- 
ujens.  Plusieurs  écrivains  ont  pu- 
blié des  notices  sur  Payne.  Sa  vie, 
par  Cheelbam,  a  été  imprimée 
aux  Etats-Lnis ,  i8ib,  i  vol.  in- 
8%  et  réinjprimée  à  Londres.  Une 
animosité  particidière  contre  le 
sujet  qu'il  traite,  paraît  avoir 
guidé  la  [)lnnie  du  biographe  a- 
méricain.  Le  libraire  anglais  Car- 
lile  a  depuis  publié  la  Vie  <le  Pay- 
ne,  Londres,  iS-io,  i  vol  in-S", 
destinée  à  faire  partie  d'im»;  édi- 
tion complète  de  ses  œuvres,  que 
le  même  libraire  a  annoncée. 
Mais  cet  admirateur  passionné 
est  le  constant  panégyriste  bien 
plus  qui-  l'exact  historien  de  son  hé- 
ros. Lue  tÉ-aduction  allemande  des 
principaux  écrits  de  Payne,  attri- 
buée au  savant  professeur  G.  F. 
Cramer,  a  été  publiée  à  Copenha- 
gue, en  0  vol.  in  8",  179")  et  179-'!. 
Deux  ouvrages  posthumes,  Essai 
\aur  roi'i^ine  de  la  franc-maçon ne- 
|r<«,  et  Répliijae  à  l'évCqiu  de  Lnu- 


PAY 


9» 


daff,  ont  été  publiés  à  New- York 
en  1810;  le  premier  a  été  traduit 
en  français  par  Bonneville,  Paris, 
1812,  1  vol.  10-8".  Outre  les  ou- 
vrages cités  plus  haut,  il  a  paru 
en  France,  Recueil  de  divers  écrits 
de  Thomas  Payne,  sur  la  politiqtn: 
et  la  légi^slation ,  Pavh,  1792,  • 
vol  in-iS°,  orné  de  son  porlrail. 
On  trouve  à  la  fin  de  la  vie  de 
Payne,  la  liste  exacte  de  tous  ses 
écrits  publiés  par  Carlile,  et  qui 
se  compose  de  8  morceaux  en  vers 
et  de  ii5  en  prose.  Ce  libraire  subit 
en  ce  moment  (1824)  ladétenlion 
i  laquelle  il  a  été  condanuié  pour 
la  publication  de  VJge  de  la  rai- 
son^ et  de  quelques  autres  écrits; 
c'est  de  sa  prison  de  Dorchester 
que  Carlile  date  sa  vie  de  Pay- 
ne. 

PAYNE  (Jean),  littérateur  a-n- 
glais,  se  livra  d'abord  au  commer- 
ce de  la  librairie,  auquel  il  renon- 
ça bientôt  pour  s'occuper  exclusi- 
vement de  littérature.  Ecrivain- 
infatigable,  il  a  publié  un  très- 
grand  nombre  d'ouvrages  ,  tant 
sous  les  pseudonymes''  de  George 
Auguste  H eroey^  de  IVilliams  Fré- 
déric Melniotli,  etc.,  que  sous  sou 
nom  véritable.  On  estime  quel- 
ques-imes  de  ses  productions,  en- 
tre autres  Vllistoire  navale  de  la 
Grande-Bretagne,  en  5  vol.  in-8"; 
ctp  u'rai  ses  ouvrages  avoués,  ceux 
dont  les  litres  suivent  :  i"  Systè- 
me de  géographie,  un  vol  in-8';  2" 
Abrégé  d' histoire  naturelle,  2  vol. 
in-8",  1 79");  3"  Extraits géograplii- 
(jucs,  un  vol.  in-8",  «790;  4"  His- 
toire abrégée  de  la  Grèce,  un  voL 
in-8",  iNoo. 

PAYSON  (Philippe),  ministre 
de  la  religion  réformée,  naquit  i 
Chcisea,  dans  l'état  de  [\las;-achiis- 


96  PAZ 

setts,  le  18  janvier  1736,  du  ré- 
vérend Philippe  Paysoii  deWalpo- 
le.  Il  fit  de  bonnes  études,  et  prit 
ses  degrés  au  collège  d'Hervard 
en  1754.  Payson  fut  l'un  des  ha- 
bitans  de  la  colonie  américaine 
qui  pendant  la  guerre  de  l'indé- 
pendance, soutinrent  avec  le  plus 
d'énergie,  par  ses  discours  et  ses 
exemples  civiques,  la  cause  de  la 
patrie.  II  était  très-instruit,  fut 
un  excellent  professeur  d'humani- 
tés, un  bon  physicien  et  un  astro- 
nome du  premier  mérite.  On  a 
remarqué  ses  Mémoires  publiés 
dans  les  Transactions  des  arts  et 
des  sciences  d'Amérique.  En  1778, 
il  publia  un  choix  de  Sermons;  en 
1782,  un  discours  composé  à  l'oc- 
casion de  l'ordination  de  sou  frère 
Seth  Payson  de  Kindge,  et  en 
1800  un  Discours  sur  ta  mort  de 
Washington.  Ce  ministre,  distin- 
gué par  ses  talens,  ses  vertus  et 
le  plus  parfait  patriotisme,  mou- 
rut le  11  janvier  iSoi,  emportant 
l'estime  et  les  regrets  de  ses  con- 
citoyens. 

PAZUlMOT  (François),  géo- 
graphe du  roi,  professeur  de  physi- 
que ,  naquit  à  Beaune  ,  départe- 
ment de  la  Côte-d'Or,  le  5o  avril 
1735,  d'une  famille  distinguée  de 
la  Bourgogne.  Il  fit  de  bonnes  étu- 
des dans  sa  ville  natale,  et  se 
rendit  à  Paris,  où  il  se  fit  connaî- 
tre par  ses  Mémoires  géographi- 
ques sur  les  antiquités  de  la  Gaule, 
avec  caries,  qu'il  publia  en  1765, 
et  auxquels  il  dut  peu  de  temps 
après  le  brevet  de  géographe  du 
roi.  Ces  Mémoires,  très-favorable- 
ment accueillis,  furent  jugés  di- 
gnes de  ceux  de  Belloy.  Pazumot 
se  rendit  en  Auvergne  par  ordre 
du   gouvernement,   afin  d'y  exa- 


PAZ 

miner  les  volcans  éteints,  et  d'en 
mesurer  les  hauteurs  et  les  distan- 
ces. Après  trois  années,  consacrées 
exclusivement  à  remplir  sa  mis- 
sion, il  donna  la  carte  de  la  partie 
septentrionale  de  cette  province, 
et  fut  chargé  de  s'assurer  de  l'exac- 
titude du  travail  des  géographes 
qui  avaient  mesuré  la  partie  oppo- 
sée. Nommé,  en  1776,  professeur 
de  physique  à  Auxerre,  il  en  rem- 
plit les  fonctions  pendant  8  ans, 
et  fit  imprimer  ses  cours.  Pazu- 
mot se  rendit  ensuite  en  Suisse, 
qu'il  visita  avec  soin,  ainsi  que  le 
Mont-Blanc  et  les  Pyrénées;  il  fit 
aussi  imprimer  les  différentes  ob- 
servations qu'ilavait  rédigées  dans 
ses  voyages.  Modéré  dans  ses  o- 
pinions,  et  se  tenant  sagement  éloi- 
gné du  mouvement  poliliciue,  il 
ne  fut  point  victime  des  orages  de 
la  révolution,  et  il  mourut  paisi- 
bletnent  à  Beaune,  en  1804,  esti- 
mé et  regretté  de  ses  concitoyens. 
Les  Mémoires,  Observations  et 
Lettres  dont  il  est  l'auteur,  sont 
en  très-grand  nombre;  nous  cite- 
rons les  principaux.  Ce  sont  :  1° 
Lettres  sur  les  urnes  cinéraires  trou- 
vées à  Cotcote,  près  Dieppe,  insérées 
dans  le  Mercure  de  France,  année 
1761;  3°  Lettres  sur  tes  bains  en 
m^osaique^  et  quelques  antiquités 
trouvées  à  Corsaint,  près  Scmur 
en  Auxois  ('publié  dans  le  Journal 
de  Verdun,  février  1765);  5° 
Principaux  usages  de  la  sphère  ar- 
millaire ,  de  celle  de  Copernic ,  et 
des  globes  célestes  et  terrestres , 
Paris,  1775,  in- 12;  4°  Mémoire 
sur  la  cristallisation  du  fer,  1 779; 
5°  Lettre  sur  les  roches  de  la  forêt 
de  Rougeau,  sur  le  bord  de  la  Sei- 
ne, 1 780;  G  "  Lettre  sur  les  ossemens 
trouvés  à  Montmartre,    1782;   7» 


VKt 

Observations  sur  la  congélation  de 
l'eau  en  filets  prismatiques  verti- 
caux dans  un  terrain  calcaire,  1 782; 
8°  Hauteur  comparée  des  plus 
hautes  montagnes  du  globe,  et  ni- 
vellement de  Paris,  sopleuibre 
1785;  9®  Description  d'un  camp 
romain  ,  près  de  Tonnerre,  à  Flo- 
pni,  sur  les  bords  de  l\4rmacon 
(imprin)t'c  dans  les  iMémoires  de 
l'aciidérnie  de  Dijon,  toii).  li);  10° 
Description,  plan,  coupe,  nivelle- 
ment des  grotlesd'  Arcy-sur-Eure, 
suivis  d' observations  physiques;  1 1° 
Lettre  sur  quelques  volcans  de  la 
haute  Auvergne  (insérée  dans  le 
Journal  de  France,  par  Fonlcnay, 
1^85);  la"  Lettre  sur  les  deux 
chiens  de  Sibérie,  et  sur  le  sommeil 
des  chats;  i5"  Voyages  physiques 
dans  les  Pyrénées ,  en  1 788  et 
1789,  Paris,  ï  7';)7.  Ce  savant  se 
proposait  de  mettre  au  jour,  lors- 
que la  mort  le  surprit,  un  ouvrage 
en  un  vcdume  in-:j",  sous  ce  titre  : 
Antiquités  de  Bourgogne,  pour 
faire  suite  aux  antiquités  de  Cay- 
lus  et  de  la  Sauvugére. 

PAZ.ZIS  (l'abbé  Maxime  de  Se- 
Gi'iNS  de),  naquit  vers  1 765  à  Car- 
pentras,  départenu-nl  de  Vauclu- 
se,  dunf  tiunille  noble,  en  posses- 
sion d'un  iief  qui  l'obli^jeait  à 
prendre  le  nom  de  Pfl-:i,  ancien- 
ne et  illustre  maison  de  Florence. 
Destiné  par  sa  l'amilleà  l'état  ec- 
clésiastique, dès  qu  il  eut  été  or- 
donné prêtre,  il  obtint  ini  ricbe 
bénéfice  dans  le  diocèse  d'Amiens, 
dont  un  de  ses  oncb'.s  était  évè- 
que.  L'abbé  de  Pazzis  émigra  au 
commencement  d»- la  révolution, 
et  ne  retint  en  France  qu'après  le 
traité  de  Lutiéville.  A  cette  épo- 
que, il  entra  dans  la  carrière  admi- 
.  nistralivxi,  qu'il  quitta  en   1809, 

T.  XVI, 


PEA 


97 


pour  se  rendre  à  Troyes ,  en  qua- 
lité de  grand- vicaire  de  M.  de  Bou- 
logne [voy.  ce  nom),  récemment 
nommé  à  l'évêché  de  cette  ville. 
Deux  ans  après,  par  suite  de  l'ar- 
restation du  prélat,  l'abbé  de  Paz- 
zis fut  rappelé  à  Paris,  qu'il  quitta 
de  nouveau  pour  accompagner  M. 
de  La  Brue,  nouuné  par  l'empe- 
reur iNapoléon  à  l'évêché  de  Gand. 
Il  eut  jusqu'en  i8i4?  époque  de 
son  retour  dans  la  capitale,  des 
discussions  assez  vives  avec  le  cler- 
gé de  Flandre,  qui  persistait  à  re- 
connaître pour  chef  l'ancien  évê- 
que,  M.  deBroglie.  L'abbé  de  Paz- 
zis mourut  le  '24  août  1 817;  il  a  pu- 
blié :  1°  Eloge  ou  Notice  historique 
de  Malachie  d'Inguimbert,  évêqu» 
deCarpentras,  iu-8°, an  i5  (i8o5); 
u°  ly  émoire  statistique  sur  le  dépar- 
tement de  Faucluse,  un  vol  in-4" 
de  554  pages,  1808,  ouvrage  plein 
de  faits  curieux,etdont  le  style  est 
pur  et  facile.  L'auteur  annonçait 
dans  une  note  qu'il  publierait  sé- 
parément des  notices  historiques 
sur  les  hommes  illustres  de  ce  dé- 
parlement, mais  elles  n'ont  point 
été  mises  au  jour;  il  parait  même 
que  ce  travail  est  resté  très-in- 
complet. 7}"  V œu  de  Louis  FUI, 
brochure  politique  à  l'occasion  du 
rétablissement  de  la  famille  roya- 
le sur  le  trône,  Paris,  in-8°,  i8i4; 
4°  Observations  sur  le  récit  des 
troubles  du  diocèse  de  Gand,  inséré 
dans  VAmide  la  Religion  et  du  Roi, 
journal  ecclésiastique,  politique  et 
littéraire,  du  20  juillet  1816;  5" 
traduction,'  restée  en  manuscrit  , 
des  Psaumes. 

PEAUSON  (Richard),  méde- 
cin, membre  des  sociétés  royales 
de  médecine  et  i\e.>  antiquaires 
de  Londres,  et  de  plusieurs  autres 


9»  PJiA 

sociétés  savantes  nationales  et  é- 
trangères,  fit  ses  études  médica- 
les à  Edimbourg,  et  y  reçut  le 
doctorat  en  1786.  Sa  thèse  inau- 
gurale, qu'il  publia  à  cette  épo- 
que, et  qui  fut  remarquée,  porte 
ce  titre  :  Dissertalio  inauguralis  de 
.Scrophulâ.  Il  fut  nommé  méde- 
cin de  l'hôpital  de  Birmingham , 
où  il  se  distingua  par  ses  soins  et 
son  zèle.  Sa  réputation  ,  comme 
savant  et  comme  praticien,  le  fit 
bientôt  connaître  à  Londres,  où, 
s'étant  rendu  vers  1790,  il  forma 
une  clientelle  nombreuse  et  bril- 
lante. Il  s'associa  à  ses  confrères 
Hutton  et  Flaw  pour  la  rédaction 
d\\i\  A brégé dus  transactions  phi- 
losophiques. La  partie  des  ou- 
vrages de  médecine  et  la  bio- 
graphie médicale  Im'  furent  con- 
fiées. La  faiblesse  de  sa  santé  ne 
lui  permit  pas  de  se  livrer  long- 
temps à  des  travaux  si  multipliés; 
il  fut  obligé  de  renoncer  à  l'exer- 
cice de  sa  profession,  et  il  se  reti- 
ra à  Reading.  Le  docteur  Pearson 
a  publié  les  ouvrages  suivans: 
1°  De  (a  nature  et  des  propriétés 
des  différentes  espèces  d'air,  en 
ce  qui  est  relatif  à  C usage  qu'en 
fait  la  médecine,  in-8°,  i794j 
3°  Argumens  en  faveur  de  la  dia- 
thesis  inflammatoire  considérée  dans 
l' hidrophobie,  in-S",  179H,  secon- 
de édition,  i8ia;  T)"  Observations 
sur  les  fièvres  bilieuses,  in-8°, 
1799;  4  Observations  sur  la  fièvre 
catarrhale ,  in-S",  i8o5;  5°  Es- 
quisse d'un  projet  pour  arrêter  les 
progrès  de  la  contagion ,  in-8°, 
1804  ;  6°  Synopsis  pratique  de  la 
matière  alimentaire  et  de  la  matiè- 
re médicale,  iu-8°,  i8o8;  7"  Thésau- 
rus medicamentorum  ,  collection 
de  formules  médicales,  qui  a  été 


PEA 

réimprimée  pour  la  quatrième 
fois  en  1810,  iu-8°;  8°  Notice  sur 
une  préparation  particulière  du 
poisson,  salé,  in-8°,  1812;  9°  Des- 
cription de  la  peste,  in -8°,  i8i3. 
PEARSON  (Georges),  méde- 
cin, membre  de  la  société  royale 
de  médicine  de  Londres,  est  né 
dans  le  comté  de  Derby.  Son  pè- 
re, médecin  distingué,  le  fit  éle- 
ver avec  soin  et  l'envoya  à  Edim- 
bourg, où  ses  connaissances  en 
médecine  lui  procurèrent  bientôt 
son  admission  parmi  les  membres 
de  la  société  de  médecine  de  cet- 
te ville;  plus  tard,  1  '  célèbre  doc- 
leur  J.  Brown  ,  son  concurrrcnl 
pour  la  présidence  de  la  même 
société,  ne  l'emporta  que  d'un 
seul  suffrage.  Pearson  fut  reçu 
docteur,  en  1773,  sur  sa  thèse 
De  Putredine,  qui  fait  partie  du 
premier  volume  des  Commentai- 
res médicaux  d'Edimbourg.  11  sui- 
vit, étant  à  l'université,  les  cours 
d'Adam  Ferguson ,  et  composa 
une  dissertation  sur  l'approbation 
morale  (morale  approbation),  que 
Ferguson  honora  de  son  suffra- 
ge, et  qui  valut  à  Pearson  l'ami- 
tié de  ce  célèbre  professeur.  Pear- 
son se  rendit  à  Londres,  où  il  fré- 
quenta les  hôpilaux,  et  voyagea 
ensuite  en  France,  en  AUemague 
et  en  Hollande,  pour  s'y  perfec- 
tionner dans  lii  science  qu'il  cul- 
tivait. De  retour  à  Londres  en 
1777,  il  n'a  plus  quitté  cette  ville, 
où  il  est  généralement  estimé.  Un 
reproche  est  cependant  adressé 
à  cet  honorable  praticien  :  c'est 
d'avoir  imprudemment  prétendu, 
lorsque  le  parlement  anglais  déli- 
béra sur  la  récompense  à  accor- 
der à  l'illustre  Jenner  [voyez  ce 
nom),  qu'il  méritait  mieux  cetl« 


PEC 

récompense  que  l'atni  de  l'hiiina- 
nilé,  à  qui  l'on  doit  l'inexprima- 
ble bienfait  de  la  découverte  de  la 
vaccine. 

PECHELIN  (le  baron  de),  gé- 
néral suédois,  né  en  1730,  était 
entré  au  service  de  son  pays  dès  sa 
jeunesse,  (;l  s'était  distingué  par 
son  courage  et  ses  tatens,  dans  les 
deux  guerres  malheureuses  que  lu 
Suède  eut  à  soutenir  contre  les 
Russes,  en  Finlande,  et  les  Prus- 
siens, en  Poméranie,  Il  prit  en- 
suite une  part  active  aux  dissen- 
tions politiques  qui  agitèrent  long- 
temps sa  patrie.  Deux  partis  s'y 
poursuivaient  avec  achainement. 
Jls  avaient  pris  chioiin  pour  signe 
de  ralliement,  un  des  tuiblêmcs 
de  la  liberté,  le  chapeau  de  Guil- 
laume Tell ,  ou  le  bonnet  de  la 
déesse  ,  et  on  les  distinguait 
sous  les  titres  bizarres  de  Cha- 
peaux et  de  Bonnets.  Le  général 
Pechelin  ne  *e  dévoua  ni  à  l'un 
ni  à  l'autre  exclusivement.  Il  ten- 
ta de  former  un  parti  intermé- 
diaire d'hommes  comme  lui,  fran- 
chement iudépcndans,  et  se  vil, 
pendant  quelque  temps,  caressé 
tour  à  tour  par  les  deux  partis, 
(|ui  chacun  voulait  s'appuyer  du 
renfort  ((ue  Pechelin  et  les  siens 
jtouvaient  lui  amener,  mais  tous 
deux  se  réunirent  enfin  contre  lui. 
Pondant  une  diète  orageuse,  une 
faction  prit  enfin  le  dessus,  et  a- 
busatit,  comme  toutes  les  factions, 
de  son  triomphe,  elle  voulut  chas- 
ser du  séui)  t,  et  des  difl'érenles  fonc- 
tions publiques,  les  hommes  qui 
ne  lui  appartenaient  point.  Le  gé- 
néral indépendant  s'opposa  avec 
son  énergie  habituelle ,  à  cette 
mesure  inique  :  *  Je  ne  suis  nulle- 
»mentattaché,s'écria-t-il  ua  jour, 


PEC 


99 


B  aux  fonctionnaires  que  vous  vou- 
»  lez  chasser,  mais  j'aime  encore 
»  mieux  les  mouches  repues,  que  les 
y>  mouches  affamées  :  les  premières 
»  piquent  moins.  «A  ces  mots,  un 
cri  géîiéral  d'indignation  s'éleva 
contre  lui  ,  et  un  représentant 
ayant  proposé  de  le  chasser  lui- 
même  de  l'assemblée,  on  alla  sur- 
le-champ  aux  voix,  et  il  fut,  à 
une  grande  majorité,  exclu  de  son 
ordre.  Le  roi  Gustave  111,  par  sa 
révolution  militaire  de  1772,  par- 
vint à  loriasser  les  deux  partis,  et 
la  couronne  victorieuse  eflaça  tous 
les  emblèmes  de  la  liberté.  Il  ne 
fut  bientôt  plus  question  ni  de 
bonnets,  ni  de  chapeaux,  mais  les 
membres  épars  des  deux  partis  se 
réunirent  quelques  années  plus 
tard,  et  formèrent  celui  des  pa- 
triote*, qui  s'opposa  avec  vigueur 
au  parti  des  royalistes  exagérés. 
Pechelin  avait  prédit  la  révolu- 
lion  que  Gustave  méditait,  et 
cherchait  tous  les  moyens  de 
l'empêcher  d'éclater.  Les  élats- 
générauxde  Suède,  réunis  à  Stock- 
holm, depuis  un  an  ordonnèrent,  à 
la  première  nouvelle  des  troubles 
qui  se  manifestaient  dans  le  midi 
du  royaume  ,  à  ce  général  d'al- 
ler se  mettre  à  la  tête  de  quel- 
ques troupes  fidèles  à  la  constitu- 
tion. Le  roi,  de  son  côté,  envoya 
un  des  jeunes  olTiciers  de  sa  cour, 
pour  l'arrêter  en  chemin  ;  celui- 
ci  l'atteignit  en  effet,  mais  ne  put 
exécuter  ses  ordres.  «  Il  appartient 
»bien,  dit  Pechelin  en  portant  la 
«main  sur  son  épée,  à  un  blanc- 
«bec  de  cour  comme  vous,  d'ar- 
»  rêter  un  général  qui  a  une  nn's- 
xsion  des  états  du  royaume!  IVe- 
»  tournez  sur-le-champ  d'où  vous 
•  êtes  venu,  ou  je  vous  fais  arrêter 


100  PEC 

j)  vous-même!  »  et  il  continua  sa 
roule;  mais  il  trouva  la  soldates- 
que déjà  gagnée.  En  1789,  il  s'op- 
posa, avec  aussi  peu  de  succès,  à 
la  nouvelle  révolution  que  Gus- 
tave opéra  en  complément  de  la 
première.  Ce  monarque  fit  alors 
arrêter  le  comte  de  Fersen,  le 
général  llorn,  et  les  principaux 
membres  de  l'ordre  de  la  nobles- 
se, el  publia  une  nouvelle  consti- 
tution, portant  le  titre  iVActe  de 
sûreté,  par  lequel  il  s'investissait 
du  reste  de  pouvoir  qu'il  n'avait 
point  cru  devoir  exiger  des  états- 
généraux  en  1772.  Lors  de  la 
catastrophe  qui  termina  le  rè- 
gne et  la  vie  de  ce  prince,  le 
•vieux  général  Pechelin  l'ut  encore 
arrêté  comme  un  des  principaux 
complices  d'Anckarstrœm.  Le  mi- 
nistère public  l'accusait  d'avoir  eu 
pleine  connaissance  de  cette  tra- 
me ourdie  chez  lui,  et  d'avoir  pro- 
mis aux  conjurés  de  se  charger, 
malgré  son  grand  âge,  de  prés  de 
73  ans ,  du  commandement  de 
Stockholm,  après  la  réussite  du 
complot.  Ces  faits  ne  purent  être 
prouvés,  il  ne  reconnut  aucun  des 
nombreux  accusés  qui  lui  furent 
confrontés,  et  il  ne  se  présenta 
point  de  témoignages  graves  à  sa 
charge.  Le  chef  de  hi  police  redou- 
bla d'elTorts  pour  obtenir  n\\  aveu 
auquel  il  mettait  la  plus  haute  im- 
portance, el  n'y  put  réussir.  La 
question  ordinaire  et  extraordinai- 
re, ainsi  que  toutes  les  tortures,  a- 
vaient  été  abolies  par  une  loi  for- 
melle, pendant  le  règne  même  de 
Gustave  IJI;  maison  crut  pouvoir 
suppléer,  en  <;ette  circonstance, 
.lUX  moyens  que  la  législation 
nouvelle  enlevait  à  la  police.  On 
déclara  au  vieux  général  qu'il  ne 


PEC 

dormirait  plus  jusqu'à  ce  qu'il 
eût  avoué  son  crime,  et  nommé 
tousses  complices.  Deux  hommes 
se  relayèrent  d'heure  en  heure, 
de  jour  et  de  nuit,  et  lempêchè- 
rent,  en  eflet,  de  se  livrer  au  som- 
meil. On  crut  enlin  avoir  cause 
gagnée.  II  demande  un  jour  aa 
prêtre  pour  se  confesser  et  rece- 
voir l'absolution  de  tous  ses  pé- 
chés. Un  ministre  du  saint  Evan- 
gile fut  choi,-i  par  la  police,  et  se 
rendit  aussitôt  près  du  pénitent, 
qu'il  trouva  étendu  sur  un  mé- 
chant grabat,  et  qui  paraissait  ex^ 
ténue  de  fatigue.  Pechelin  deman- 
da la  permission  de  se  recueillir 
pendant  quelques  inslans  ,  en 
ayant  bien  long  à  dire,  et  se  tour- 
nant ensuite  vers  le  mur,  s'en- 
dormit d'un  profond  sommeil  , 
que  l'honnête  ecclésiastique,  ému 
de  pitié,  lui  permit  d'achever  en 
paix.  A  soi»  réveil,  il  lui  serra  la 
main,  et  lui  dit  :«  Je  n'ai  plus  be- 
soin de  votre  ministère.  »  Un  ca- 
pitaine dé  la  garde  bourgeoise, 
tailleur  de  son  métier,  était  au 
nombre  des  gardiens  du  prison- 
nier, et  lui  répétait  sans  cesse  la 
phrase  convenue:  «  Avouez  tout, 
»  général,  vous  n'avez  plus  qu'un 
«pied  sur  la  terre,  l'autre  est  déjà 
»au  fond  de  la  tombe.  ■ — •  La  posi- 
»  lion  est  sans  doute  pénibl«,  dit 
«enfin  celui-ci,  mais  vous  pour- 
»riez  l'adoucir,  capitaine;  four- 
nnissez  un  vêlement  commode  à 
»)un  pauvre  vieillard  qui  a  un  pied 
«ici  haut,  et  l'autre  là-bas,  et  n'y 
»  épargnez  pas  le  drap.  »  Après  la 
mort  du  roi  et  le  supjiiice  de  son 
meurtrier  Anckarstrœm,  le  zèle 
du  chef  de  la  police  se  ralentit, 
et  ort  laissa  dormir  l'accusé,  dont 
aussi  bien  on  n'espéra  plus  rien 


TEC 

llrcr.  N'ayant  été  convaincu  d'au- 
cun délit,  il  fut  cependant  trans- 
porté dans  la  forteresse  de  Ward- 
berg,  sur  les  bords  de  Ja  mer, 
pour  y  attendre,  était-il  dit,  le  ja- 
gement  de  Dieu ,  les  hommes 
n'ayant  pu,  quelque  envie  qu'ils 
en  eussent,  le  condamner  iaute 
de  preuves;  mais  il  n'y  l'ut  plus 
martraité.  On  l'accusa  bientôt  de 
pervertir  l'esprit  des  bourgeois  de 
celte  petite  ville  ,  qui  lui  don- 
naient des  soins,  et  de  les  rendre 
tous  patriotes.  Le  général  Peche- 
lin  mourut  à  Wardberg  ,  presque 
octogénaire.  Son  fds  ,  militaire 
distingué,  occupait  un  grade  su- 
périeur dans  l'armée  suédoise. 

PECHEUX  (le  babon  Marc- 
NicoLAs-Lotis ),  lieutenant-géné- 
ral, commandant  de  la  légion- 
d'hoimeur,  et  chevalier  de  Saint- 
Louis,  est  né  le  28  janvier  1769, 
à  Bucilly,  près  Vervins,  départe- 
ment de  l'Aisne.  Au  moment  où 
l'Europe  coalisée  s'arma  contre  la 
France,  il  prit  les  armes  pour  la 
défense  de  nos  frontière!»,  et  pai- 
tit  comme  capitaine,  dans  un  ba- 
taillon de  volontaires  de  l'Aisne. 
Promu  presque  aussitôt  au  grade 
de  chef  de  bataillon,  il  fit,  avec 
distinction  ,  les  campagnes  d'Ita- 
lie, pendant  lesquelles  il  obtint  le 
commandement  d'une  demi -bri- 
gade. Le  corps  qui  était  sous  ses 
ordres,  ayant  été  détruit,  il  passa 
au  QJ""  régiment  d'infanterie  de 
ligue,  qu'il  commanda  dans  le 
Hanovre;  il  fit  ensuite  la  campa- 
gne de  i8o5,  en  Autriche,  et  mon- 
tra, ;'i  la  bataille  d'Auslerlitz,  ce 
courage  tranquille  qiii  le  distin- 
gue éminemment.  Les  charges  de 
la  cavalerie  de  la  garde  ijnpériale 
russe,  ne  purent  entamer  ses  car- 


PEC  101 

rés,  dont  le  feu  fit,  au  contraire, 
éprouver  ime  perte  considérable 
à  l'ennemi.  Le  colonel  Pecheux 
ne  déploya  ni  moins  de  valeur, 
ni  moins  de  talens,  dans  les  cam- 
pagnes de  Prusse  et  de  Pologne; 
il  se  battit  à  Schleitz,  à  léna,  char- 
gea, à  la  tête  de  son  régiment,  à 
l'affaire  de  Halle,  et  culbuta  la 
réserve  du  prince  de  Wurtem- 
berg. Il  se  distingua  ù  la  prise 
d'assaut  de  Lubeck,  au  combat 
de  Spandau,  en  1807,  et  enfin, à 
la  bataille  de  Friedland,  où  son 
régiment  fit  partie  de  la  réserve. 
En  1808,  il  passa  en  Espagne,  et 
s'empara,  le  10  novembre  de  la 
même  année,  conjointement  avec 
le  94""*  régiment,  du  plateau  de 
Spinosa.  Décoré,  pour  re  beau 
fait  d'armes,  de  la  croix  de  com- 
mandant de  la  légion-d'honneur, 
le  colonel  Pecheux  se  distingua 
de  nouveau  à  ïudela  et  à  la  prise 
de  Madrid.  Le  i5  janvier  180g,  il 
se  ])attit  h  "Vclès,  le  j8  mars  à  Al- 
maras,  et  ie  38  à  Médellin,  où  il 
eut  une  part  importante  à  la  dé- 
faite des  Espagnols.  A  Talavcra, 
son  corps  fut  un  de  ceux  qui  char- 
gèrent sur  ce  fameux  mamelon, 
contre  lequel ,  par  une  fatalité  in- 
concevable, on  ne  dirigea  que  des 
ell'orts  partiels.  L'arniée  conserva 
ses  positions,  mais  elle  ne  put 
enlever  celles  de  l'ennemi.  Le  co- 
lonel Pecheux  combattit  le  19  no- 
vembre, et  contribua  à  la  brillante 
victoire  d'Ocana,  après  laquelle 
l'armée  éprouva  peu  de  résistance 
jusqu'à  Cadix.  Eu  1810,  pendant 
le  siège  de  celte  ville  ,  l'un  des 
plus  anciens  colonels  de  l'armée, 
et  l'un  de*  plus  estimés,  il  fut  é- 
levé  au  grade  de  général  de  bri- 
gade, auquel  l'appelaient,  depuis 


loa  PEC 

long-temps,  ses  services  et  ses 
connaissances  militaires.  Pourvu 
alors  du  commandement  de  la 
ville  de  Xérès,  il  y  resta  jusqu'à 
la  fin  de  1811,  époque  à  laquelle 
il  fut  employé  au  siège  de  Tarifa, 
stn- le  détroit  de  Gibraltar.  Quel- 
que temps  après,  le  général  Pe- 
cheiîx  lut  chargé  du  commande- 
ment important  de  l'aile  gauche 
des  troupes  employées  au  siège  de 
Cadix.  A  la  retraite  de  l'Andalou- 
sie,  et  pendant  la  poursuite  du 
général  anglais  "Wellinglon  .  le 
maréchal  Soult  lui  confia  l'avant- 
garde  de  l'armée,  avec  laquelle  il 
culbuta  l'arrière-garde  anglaise  à 
Samunos.  Au  commencement  de 
181 5,  le  général  Pecheux  quitta 
l'Espagne,  fut  nommé  général  de 
division,  et  passa  on  Allemagne, 
où  il  eut  un  commandement  sous 
les  ordres  du  maréchal  prince 
d'Eckmiihl  i  voyci  Oavoust).  En 
septembre  de  la  même  année,  il 
reçut  l'ordre  de  se  porter  sur  Mag- 
dcbourg,  avec  sa  division,  com- 
posée de  8000  hommes,  afin  de 
déloger  les  troupes  ennemies  qui 
occupaient  la  rive  gauche  de  l'El- 
be. Des  lettres  interceptées  appri- 
rent au  général  comte  de  Walmo- 
den,  les  intentions  du  général  Pe- 
cheux. Pour  les  prévenir,  il  fit  des 
dispositions  si  habiles,  qu'en  dé- 
robafit  aux  Français  le  nombre  de 
ses  troupes ,  il  les  attaqua  avec 
des  forces  tellement  supérieures, 
qu'ils  furent  obligés  de  battre  en 
retraite ,  après  avoir  opposé  une 
résistance  que  le  comte  de  Wnl- 
moden  lui-même  ne  put  s'empê- 
cher d'admirer,  en  la  qualifiant 
d'étonnante  dans  son  rapport  of- 
ficiel, A  la  fin  de  181 3,  le  général 
Pecheux  fut  enfermé  dans  Magde- 


PED 

bourg,  où  il  se  maintint  pendant 
la  campagne  de  France.  Après  la 
première  restauration,  en  i8i4» 
il  fut  nommé  chevalier  de  Saint- 
Louis;  pendant  \e!i  cent  jours,  en 
181  5,  il  commanda,  à  l'armée  du 
nord,  une  division  sous  les  ordres 
du  général  Grouchy.  Après  la  ba- 
taille de  Waterloo,  il  se  retira  dans 
le  sein  de  sa  famille,  où  il  s'occu- 
pait de  l'exploitation  de  ses  pro- 
priétés ,  lorsqu'il  fut  appelé,  en 
1818,  an  commandement  de  la 
lu"*  division  militaire,  à  Nantes. 
Le  général  Pecheux  conserva  peu 
de  temps  ce  poste  difficile,  et  fut 
nommé  inspecteur  d'infanterie. 
Depuis  iS'^o  jusqu'en  «823,  il  ne 
fut  pas  employé;  mais  alors  le 
ministre  de  la  guerre,  le  duc  de 
Bellune,  qui  plus  que  personne 
avait  apprécié  son  mérite,  l'appe- 
la à  l'armée  d'Espagne,  dans  le 
corps  d'armée  du  maréchal  Lau- 
riston.  Le  général  Pecheux  con- 
tribua puissamment  à  la  prise  de 
Pampelune,  l'un  des  faits  d'armes 
les  plus  importons  de  cette  guerre. 
A  la  rentrée  de  l'armée  en  Fran- 
(  e,  il  s'est  de  nouveau  retiré  dans 
SCS  foyers.  Le  général  Pecheux  a 
conservé  dans  les  camps  la  simpli- 
cité de  mœurs  des  généraux  des 
premiers  temps  de  la  république 
romaine  :  il  en  a  la  valeur  antique 
et  le  désintéressement. 

I»EI)1\I1NI  (  N.  ),  partisan  de  la 
révolution  en  Italie  ,  fut  nommé  , 
en  1796,  député  au  congrès  cisal- 
pin. Il  acquit  alors  de  la  célé- 
brité ,  et  peut  être  considéré  com- 
me l'un  des  membres  qui  influè- 
rent le  plus  sur  les  délibérations 
de  l'assemblée.  Il  paraissait  fré- 
quemment à  la  tribune ,  et  prenail 
la  parole  dans  presque  toutes  Ift.? 


PEK 

discussions.  Le  i"  janvier  1797, 
il  proposa,  pour  la  république 
cisalpine,  l'adoption  de  la  consti- 
tution française,  sauf  de  légers \ 
changemens  que  la  localité  sem- 
blait exiger.  Il  fit  décréter  que  par 
l'acte  de  réunion  du  congrès  ,  la 
consulta  de  Bologne  se  trouvait 
dissoute  de  droit,  insista  beaucoup 
p«»ur  qu'on  s'occupât  sans  délai  de 
la  con>ititu(i()n  ,  demanda  l'abull- 
tion  du  droit  d'aînesse  ,  et  le  rap- 
pel des  nobles,  à  qui  la  crainte  des 
innovations  avait  (ait  abandonner 
leur  patrie.  Depuis  cette  époque, 
Pedrini  ne  paraît  pas  avoir  pris 
part  aux  aiîaires  publiques. 

PEEL  (siR  IIobert)  ,  membre 
de  la  chambre  des  communes 
d'Angleterre,  né  dans  le  comté  de 
Lancasler,  en  17'îo.  Dès  sa  ving- 
liènte  année,  il  fit  d'heureuses 
spéculations  commerciales,  et  for- 
^na  un  grand  établissement  de 
manufacture  de  tissus  de  coton, 
à  Bury,  où  il  entra  en  société  a- 
vec  un  riche  fabricant,  M.  Yates. 
Celle  manufacture  prit  bientôt 
une  extension  considérable ,  et 
devint  la  source  de  la  fortune 
du  fon'Iateur.  En  1787  ,  sir 
Robert  Peel  acheta  de  vastes  do- 
maines dans  le  comté  oi'i  il  était 
né ,  ainsi  que  dans  ceux  de  Straf- 
ford  et  de  Warwick.  Les  diverses 
manufactures  qu'il  y  a  établies 
occupent  plus  de  i5,ooo  ouvriers. 
Il  a  été  nommé  au  parlement  par 
le  bourg  de  Tamworth.  Au  com- 
mencement de  la  révolution  fran- 
çaise, et  pendant  toute  la  durée 
des  sessions  de  l'assemblée  cons- 
tituante, sir  Robert  se  montra 
partisan  des  réformes  salutaires, 
qui  paraissaient  promettre  une 
amélioraliun    générale   à   l'ordre 


PEE  io5 

social,  et  les  dicours  qu'il  pro- 
nonça à  cette  époque  à  la  chambre 
des  communes,  firent  non  moins 
honneur  à  ses  talens  comme  ora- 
teur, qu'à  ses  sentimens  comme 
citoyen.  Mais  quand  il  vit  que 
des  homntes  pervers  uàurpaient 
le  pouvoir  et  poussaient  à  tous 
les  excès  avec  les  intentions  les 
plus  perfides ,  il  trembla  pour 
sa  patrie.  A|)puyant  dès-lors  de 
toute  son  influence  le  ministère 
anglais,  il  devint  un  des  plus  zé- 
lés promoteurs  des  mesures  hos- 
tiles coulre  la  France.  En  1797, 
sa  maison  fournit  10,000  livres 
sterlings  dans  la  souscription  ou- 
verte pour  contribuer  aux  frais  de 
la  guerre.  Craignant  de  voir  des 
principes  démagogiques  prendre 
faveur  dans  son  pays  ,  et  ayant, 
par  sa  fortune,  plus  que  personne 
à  redouter  des  mouveiriens  ultra- 
révolutionnaires,  il  a  faitdepuis  de 
grands  sacrifices  pour  en  empê- 
cher la  propagation,  et  a  montré 
dans  plusieurs  circonstances  son 
dévouement  aux  intérêts  monar- 
chiques. En  1801  ,  .«ir  Robert 
Peel  futcréé  baronnet.  II  a  ensuite 
été  nommé  gouverneur  de  l'hôpi- 
tal du  Christ,  vice-président  du 
Fonds  littéraire,  et  président  de  la 
chambre  des  secours  de  Manches- 
ter. Il  est  de  plus  un  des  membres 
les  plus  actifs  de  la  société 
philanlropique,  établie  pour  a- 
inéliorer  le  sort  des  pauvres  , 
et  ses  libéralités  particulières  , 
ainsi  que  les  charités  judicieu- 
sement répandues  par  lui  et  par 
son  associé,  M.  Yates,  dont  il  a 
épousé  la  fille,  montent  annuel- 
lement à  des  sommes  considéra- 
bles. Ses  deux  fils  sont  membres 
du  parlement,  et  représentent,  l'uQ 


io4  TEE 

runivei'sité  d'Oxford ,  et  l'autre 
Bos^inty.  Sir  IVohert  Peel  est  un 
des  orateurs  de  la  chambre  des 
communes  dont  les  discours  sont 
en  général  accueillis  avec  le  plus 
de  faveur,  même  partes  meuibres 
qui  si<  ;i;ènt  d'un  côte  opposé  au 
sien.  Siiuèremeni  dévoué  au  gou- 
veriieuient  cousliluliouncl  de  son 
pays,  on  n'a  point  eu  à  lui  repro- 
cher de  prêter  son  appui  à  certai- 
nes nji  sures  ministérielles,  qui 
avaient  pour  objet  d'empiéter 
sur  les  droits  du  peuple  et  I4  li- 
berté des  ciloyeus.  Il  a  souvent 
parlé  en  faveur  de  l'émancipa- 
tion des  cathidiques  d'Irlande  , 
et  a  laissé  d'honorables  souve- 
nirs dans  celte  île,  où  il  a  pendant 
quelque  temps  lait  partie  de  l'ad- 
ministralion  civile.  Dans  toutes 
les  questions  qui  ont  rapport  à 
l'industrie  manufacturière,  il  a 
aussi  émis  des  opinions  sages  et 
désintéressées,  qui  ont  obtenu  l'as- 
sentiment de  la  majorité.  En  1816, 
il  vint  au  secours  du  secrétaire 
de  l'amirauté,  M.  Croker,  qui 
s'était  fait  accorder  ime  augmenta- 
tion considérable  de  salaire ,  et 
que  l'opposition  traitait  sévère- 
ment, flï.  Brougham  avait,  à  cette 
occasion,  signalé  l'avidité  toujours 
croissante  et  la  corruption  de 
quehpies  fonctionnaires  publics, 
et  présentait  ce  dernier  acte  com- 
me un  marché  scandaleux.  Sir 
Robert  Peel  a  publié  quelques 
ouvrages,  parmi  lesquels  le  litre 
du  premiei- par;iît  coiitenir  un  pa- 
radoxe assez  extraordinaire;  cest 
la  Dette  nationale  productive  de 
la  prospérité  de  ta  nation ,  Lon- 
dics,  1780,  1  vol.  in-8°.  On  a  aus- 
si de  lui  Substance  des  discours 
de  Robert  Peel  à  la  chambre  des 


PEG 

communes ,  sur  l'union  de  l'Ir- 
lande,  Londres,  1799,  i  volume 
in-8°. 

PEERLRAftlP  (Pierre  Hoff- 
man),  recteur  de  Técoh;  latine  de 
Harlem,  membre  de  la  société  de 
litlérature  de  Leyde,  est  auteur 
de  plusieurs  ouvrages  estimés.  On 
a  de  lui  :  1°  Oratio  de  Xenopontc 
Epliesio  :  accedit  in  eundem  ob- 
sei'vationum  criticaruni  spécimen  ; 
2°  Fitœ  excellentium  Batavorum, 
1809,  un  vol.  in-8°;  5°  Epistolœ 
aliquot  excellentium  Batavorum, 
1807,  in-8'';  4°  Carmina  quinque 
pertinentia  ad  calamitatem  Ley- 
densem  ,  1807  ;  5°  Constantinl 
Hugenii  de  vitâ  propriâ  sernionum 
inter  liberos  libri  duo;  Primum 
edidit  et  annotatione  illustravit , 
P.  H.  Peerlkamp ,  betgicis  versi- 
bus  adumbravit  A.  Loosjes  Har- 
lemi,  1817,  in-8°  ;  6°  Discours  (en 
hollandais'*  sur  les  deux  derjiières 
parties  de  la  vie  de  Constantin 
Huggens. 

PEGOT  (Guillaume- Alexan- 
DiîE-ÏHOMAs),  maiéchal-de-camp, 
officier  de  la  légion  -  d'honneur, 
chevalier  de  l'ordre  royal  et  mili- 
ta ire  de  Saint-Louis, commandeur 
de  l'ordre  royal  des  Deux-Sicile?, 
etc.,  est  né  à  Saint-Gaudeas,  le  7 
maii775.Ilentra  comme  volontai- 
re dans  la  marine, le  2  février  1790, 
devint  cajutaine  du  5""  bataillon 
des  Hautes- Pyrénées,  le  2  juin 
1792,  et  lieutenant-colonel  dans 
ce  cor;)?,  le  8  septembre  de  la 
même  aimée.  Il  a  fait  les  campa- 
gnes d'Espagne  en  1794»  '70>'>et 
1796;  celles  de  l'an  7,  en  Italie, 
etdc  1806,  au  campdt^  Boulogne. 
De  là,  il  passa  en  Allemagne,  et 
prit  part  à  la  conquête  de  Naples. 
En   18085  il  entra  en  Espagne, 


PEG 

où  il  demeura  jusqu'en  1810.  11 
s'cst  signalé  dans  plusieurs  ren- 
contres, notamment  à  l'affaire  du 
5  iVuclidoran  7,  et  en  Allemagne, 
où  il  se  montra  digne,  par  sa  bra- 
voure, des  récompenses  qu'il  ob- 
tint. Le  20  juin  1806,  il  passa  au 
service  de  Naples,  reçut  la  croix 
de  la  légion -d'honneur,  fut  fait 
colonel  du  1"  régiment  de  ligne 
napolitain,  le  16  novembre  1807, 
et  commandeur  de  Tordre  des 
Deux-Siciles,  le  19  mai  1808.  11 
devint  ensuite  direcleur- général 
des  revues  de  l'armée  de  terre  et 
de  mer,  et  du  recrutement  à  Na- 
ples;  mais  qii.md  le  roi  Joacbim 
[voyez  Mcrat)  abandonna  la  cause 
de  la  France,  M.  Pegot  n'hésita 
pas  à  lui  remettre  tous  ses  em- 
plois ,  et  à  rentrer  dans  sa  patrie, 
pour  combattre  l'invasion  étran- 
gère; il  command.iit  à  Bordeaux 
en  181 5.  Après  la  seconde  restau- 
ration ,  il  fut  mis  en  disponibi- 
lité, où  il  est  encore  aiijourd  hui 
(i8;i4)-  ^^  général  Pegot  est  cité 
avec  distinction  dans  l'ouvrage 
des  Victoires  et  Conquêtes  (  tome 
18,  page  lô.)). 

PEGOT    (  LE   CHEVALIER   JeAN- 

Gaxidens-Cladde)  ,  n)aréchal-de- 
camp,  commandeur  de  l'ordre  de 
la  légion-d'honneur,  chevalier  de 
Saint-Loui-»,  naquit  à  Saint-(iaa- 
dens,  département  de  la  Hante- 
Garonne,  le  6  juin  1774'  Animé, 
dès  sa  pins  tendre  enlaîice.  pour  la 
gloire,  il  quitta,  en  i  ^Qi,  à  i8ans, 
la  maison  palernellr,  le  jour  où 
une  protMafnalion  solenneile  an- 
nonça que  la  pairie  était  en  dan- 
ger. Pegot  fut  joindre  à  Mice,le 
5°"  b.itaillon  de  la  H  iule  (iaron- 
ne  :  il  devint  eapiluine  d'arlille- 
rie,  et  se  trouva  au  siège  de  ïou- 


PEG  io5 

Ion.   Il  passa   ensuite  à  l'armée 
d'Espagne,commandée  touràlom' 
par  Dugomier  et  Pérignon,   qui. 
Ions  deux,  lui  vouèrent  une  ami- 
tié fondée  sur  l'estime  qu'il  inspi- 
rait; il  se  rendit  ensuite  en  Italie, 
servit  sous  Augercau,  et  contri- 
bua aux  victoires  de  Millesimo  , 
de  Dego  et  de  Lodi,  en  1 796.  Plus 
tard,  la  fortune  ayant  trahi  la  cau- 
se de  la  France,  Pegot,  investi 
dans  Coni,  fut,  après  la  plus  glo- 
rieuse résistance,  contraint  à  se 
rendre  prisonnier.  Il  dut  sa  liber- 
té au  général  Pérignon,  qui,  rete- 
nu comme  lui,  trouva  les  moyens 
de  faire  échanger  son  ami.  Le  peu 
d'avancement  que  présentait  alors 
l'arlillcrie ,    détermina   Pegot    à 
quitter  cette  arme,    pour  entrer 
dans  le  7""  régiment  de  ligne.  Il 
fit  partie  de  l'expédition  de  Saint- 
Domingue  ,    commandée    par   le 
général  Rochambeau.  Là,  il  s'ac- 
quit une  nouvelle  réputation  ,  ob- 
tint un  sabre  d'honneur,    et    fut 
nommé  chef  de  bataillon.  A  la  ca- 
pitulation de  Saint-Domingue,  le 
3o  novembre  i8o5,  Pegot  obtint 
de  Dessalines,  de  ne  pas  être  com- 
pris parmi  les  prisonniers  de  guer- 
re. Le  général  noir,  qui  avait  pu 
l'apprécier,  lui  envoya  en  cadeau, 
une  paire  d'éperons  d'argent,  ac- 
compagnée d'une  lettre  honora- 
ble ,    dans    laquelle    étaient    ces 
mots  :  Il  Brave  citoyen  Pegot",  je 
osais    respecter    l'honneur  et    le 
»  courage  partout  où  je  le  rencon- 
))  tre,  et  même  chez  mes  ennemis; 
))je  vous  en  donne  la  preuve,  en 
»  vous  exemptant  du  nombre  des 
»  prisonniers  de  guerre.  »  De  re- 
tour en  France,  Pegot  devint  ma- 
jor au  26"°  de  ligne  ;  il  fit  la  guer- 
re de  Prusse  et  d'Allemagne,  et 


io6 


PEG 


obtint  enfin,  avec  le  grade  de  co- 
lonel, le  commandement  du  24"". 
Dans  la  campagne  de  Russie,  en 
181  y,,  après  plusienr?  affaires  bril- 
lante:*, il  fut  fait,  sur  le  champ  de 
bataille,  commandantde  la  légion- 
d'honneur.  Des  intrigues  s'oppo- 
sèrent à  sa  nomination  de  général 
de  brigade.  Il  suivit  le  prince  Eu- 
gène (voyez  Beuharnai';  )  en  Ita- 
lie, où  de  nouveaux  faits  d'armes 
forcèrent  enfin  l'envie  à  se  taire, 
et  il  eut  le  grade  qu'il  méritait  si 
l)ien.  Dans  les  dernières  affaire*», 
en  1814,  et  comme  il  s'opposait 
au  débarquement  des  troupes 
commandées  par  lord  Benlinck, 
il  rc  eut  deux  coups  de  feu  ,  l'un  à 
In  poitrine .  l'autre  au  bras  gau- 
che. Le  roi  le  nomma  chevalier 
de  Saint-Louis,  et  le  mit  en  re- 
traite. Il  reprit  du  service  au  re- 
tour de  Napoléon,  en  i8i5,  et 
commanda,  à  Waterloo,  une  bri- 
gade (le  la  division  Diiruttc  :  re- 
poussé ,  mais  non  vaincu,  il  ra- 
mena les  troupes  jusque  à  Au- 
goulême  ,  oi'i  le  licenciement  eut 
lieu.  Il  se  fixa  momentanément 
dans  cette  ville;  depuis,  il  rentra 
à  SaintGaudens,  où  il  mourut  le 
1"  avril  1819,  généralement  re- 
gretté. 

PEGOT  (N.),  frère  des  précé- 
dens,  entra  au  service  en  181  1,  et 
fit  les  campagnes  de  l'armée  d'Es- 
pagne, sous  le  ujaréchal  Suchet. 
II  se  distingua  aux  assauts  donnés 
à  Lérida,  à  Sagonte ,  à  Taragon- 
ne  ,  et  à  Torto»e,  et  fut  fait  suc- 
cessivement, et  toujours  sur  le 
champ  de  bataille,  sous -lieute- 
nant, lieutenant,  capitaine  et  che- 
valier de  la  légion-d'honneur.  De- 
puis 1814 ♦  il  a  été  mis  à  la  retraite. 

PEGKI  (  LE  COMTE  Louis) ,  che- 


PEI 

valier   des   ordres    de    la  légion- 
d'honneur,  de  la  Couronne    de- 
Fer  et  des  Deux-Sif  iles  ,  est  !ié  h 
Mantoue  en  17Ô8  ;  il  entra  au  ser- 
vice de  la  France,  le    i3  octobre 
1796,  dans  un    grade  inférieur; 
mai»  il  devint,  quelques  mois  a- 
près,  chef  de  bataillon  11  fit  avec 
distinction   les  campagnes   d'Ita- 
lie ,  dans  les  années  5  et6  (  1^97  *^^ 
1798)  ,  et  obtint  le  grade  de  colo- 
nel. La  valeur  et   les  talens  mili- 
taires dent  il  continua  à  donner  des 
preuves,    lui    valurent,  dans  les 
campagnes  suivantes,  le  grade  de 
général  de  brigade.    Il  se  sign  da 
également  pendant  la   campagne 
d'Autriche  en   j8o5  et  dans  celle 
de  1806,  contre  la  Prusse.  Il  par- 
ticipa aux  brillantes  opérations  qui 
eurent  lieu  dans  le  Tyrol  en  1809 
et  1810  ,  et  fut  nommé  général  de 
division  ,  le  3o  décembre  (  1810). 
Envoyé  à  cette   époque  en  Espa- 
gne,   il  s'y  fit  principalement  re- 
marquer dans  les  combats  qui  eu- 
rent lieu  en  Arragon  et  en  Catalo- 
gne ;  souvent  en  proie  h  des  dou- 
leurs physiques  qui  l'empêchaient 
de  monter  à  cheval, et  n'ayant  point 
oublié  l'exemple  que  donna  à  >Va- 
gram  l'intrépide  Masséna  ,  il  se  fai- 
sait porter  sur  une  chaise  à  la  tête 
de  sa  division;    là,  on    le   voyait 
donner  ses  ordres  avec  une  pré- 
sence d'esprit  et  un  sang-froid  im- 
perturbables. C'est  ainsi  qu'il  fit  la 
campagne  de  i8i3  en  Saxe.  Après 
les  évéuemens  de  )8i4'  l«  comte 
de  Pegri    a  quitté  le  service,   et 
s'est  retiré  à  Mantoue,  sa  patrie. 
PEIGNOÏ  (Gabriei,).   ancien 
avocat,  littérateur  et  bibliogra- 
phe, est  né  le  i5  mai  1767  i'k  Arc, 
département  de  la  Haute- Marne, 
et  fil  de  bonnes  études.  Il  exerça 


PEI 

pendant  quelques  années  la  pro- 
fession d'avocat  à  Besançon  ,  fit 
partie,  de  1791  à  179?,  de  la  ^ur- 
dc  constitutionnelle  de  Louis  XVI, 
et  se  livra  ensuite  aux  letlrcs,  et 
parti*  ulièrernent  à  la  science  bi- 
bliographique,dans  laquelle  il  s'est 
fait  un  nom  distingué.  Dans  lïn- 
lervalle  de  1794  à  »8i5,  M.  Pei- 
gnot  a  été  successivement  biblio- 
thécaire du  département  de  la 
Ilaute-Sjône,  principal  du  collè- 
ge de  Vesnul,  et  it»specteur  de  la 
librairie  à  I)ijon  ;  en  i8i5,  il  de- 
vint proviseur  du  collège  royal  de 
celle  ville,  entploi  dont  on  le  croit 
encore  revêtu  aujourd'hui  (iSa'i). 
M.  Peignot  a  publié  :  1°  Opuscu- 
les philosophiques  et  poétiques , 
1796,  in -16;  2°  Manuel  bihlio- 
graphiquCf  ou  Essai  sur  les  hiblio- 
thèques  anciennes  et  modernes ,  et 
sur  la  connaissance  des  livres, 
1800,  in-8°;  3°  Petite  hibliothcque 
choisie  (c'est  un  extrait  de  l'ou- 
vrage précédent),  1800,  in-S";  /j" 
Bagatelles  poétiques  et  dramati- 
ques, 1801,  in -8°;  ^"Dictionnaire 
raisonné  de  hihliologie,  1 8o'i  - 1 80/] , 
3  vol.  in-8"  ;  6°  Essai  de  curiosités 
bibliographiques ,  1804,  in-S";  7° 
Dictionnaire  n'itique ,  littéraire  el 
bibliographique  des  principaux  li- 
vres condamnés  au  feu,  supprimés 
ou  censurés,  1806,  -j  vol.  in-8°  ;  8° 
Petit  dictionnaire  des  locutions  vi- 
cieuses, 1807,  in- 12;  9"  Jmuse- 
mens  philvlogi''ues,  ou  Variétés  en 
tous  genres,  1808,  in-8";  10°  Bi- 
bliographie ancienne,  1808,  in-8°; 
II'  Répertoire  de  bibliographies 
spéciales,  curieuses  et  instructives, 
I  Hof),  in  -8°  ;  1 1'  Répertoire  biblio- 
graphique universel,  181a,  in-8»; 
lo" Essai  sur  l'histoire  du  parche- 
min et  du  vélin ,  1812,  in -8°  ;   1 4» 


PÉL  107 

Bibliothèque  choisie  des  classiques 
latins  (plan  de  l'ouvrage),  18  i3, 
in-8°;  i5°  Précis  chronologique , 
généalogique  et  anecdotique  de 
l'histoire  de  France,  181. 5,  in-8"; 
16°  Précis  chronologique  du  règne 
de  Louis  XV III  en  1814.  181 5 
et  i8i6.iii-S°.  1816;  \y° Mélanges 
littéraires,  philosophiques  et  biblio- 
graphiques, 1 8 1 8,  in  8".  Le  Diction- 
naire biographique  et  bibliographi- 
que portatif,  i8i2-i8i5,  sur  le 
frontispice  duquel  sont  les  initiales 
L.  G.  P.,  a  été  i)rés€nté  au  nom  de 
M.  Peignot  à  lachainbre  des  dépu- 
tés. On  prétend  néanmoins  qu'il 
n'a  rédigé  de  c«it  ouvrage  que  la 
moi  lié  des  articles  de  la  lettre  À. 
PELAGE  (Magloire"!,  homme 
de  couleur,  né  à  la  Marliuique, 
mort  dans  un  temps  où  la  bravou- 
re et  l'intelligence  des  choses  do 
la  guerre  étaient  si  cotnmunes, 
qu'il  semblait  impossible  de  se 
distinguer  parmi  tant  d'hommes 
de  cœur  et  de  tête,  dont  la  Fran- 
ce était  couverte.  Pelage  parvint 
à  suriîionter  les  obstacles  que  sa 
couleur,  les  conditions  de  sa  nais- 
sance, et  la  valeur  de  ses  concur- 
rens,  lui  opposaient  :  il  fut  re- 
niarqué,  et  se  lit  un  nom  qui  mé- 
rite d'être  conservé.  Au  moment 
où  les  premiers  trouble^  de  la 
Martinique  éclalèrent ,  Pelage, 
quoique  très-jeune ,  embrassa  la 
cause  des  planteurs  :  il  mérita 
Tapprobalion  de  ses  chefs  par 
lies  taletis  précoces,  par  un  sang- 
l'roid  très -rare  à  son  âge  sous 
le  ciel  enflammé  des  Antilles.  Pen- 
dant le  siège  de  la  ville  de  Saint- 
Pierre,  en  i794i  «1  déploya,  dans 
plusieurs  engagemens  avec  le.s 
Anglais ,  tant  d'inlelligetjce  el 
d'intrépidité,    qu'il    fut    nomflié 


io8  PÉL 

lieutenant  sur  le  champ  de  batail- 
le ,  par  le  généial  Rochainbeau, 
et  qu'à  son  arrivée  eu  France,  il 
Alt  fait  capitaine  de  grenadiers. 
L'année  suivante,  il  attira  sur  lui 
tous  les  regards  par  sa  conduite, 
à-la-fois  prudente  et  audacieuse  , 
à  l'attaque  de  Sainte-Lucie,  et  par 
la  constance  et  les  ressources 
qu'il  déploya  pour  retarder  la 
reddition  de  celte  île,  lorsque 
les  Anglais  vinrent,  avec  des  for- 
ces supérieures ,  pour  la  repren- 
dre. Echangé  en  1798,  et  nommé 
chef  de  brigade  en  1799,  d.illaàla 
Guadeloupe,  en  qualité  d'aide-de- 
cainp  de  Jeannet,  l'un  des  agens 
du  directoire  dans  cette  île,  sous 
l'administration  du  capitaine-géné- 
rale Lacrosse.  Les  circonstances 
devinrent  difTiciles ,  et  l'on  vit  se 
former  plus  d'un  orage  menaçant. 
La  prudence  du  colonel  Pelage 
contribua  puissamment  à  les  con- 
jurer; mais  les  applaudissemens 
que  cette  sage  conduite  lui  mérita 
firent  naître  l'inquiétude  et  la  ja- 
lousie dans  l'âme  de  ses  chefs.  A 
la  mort  du  général  Belhencourt, 
le  commandement  des  troupes 
lui  était  dévolu  ;  il  en  fut  privé, 
et  conserva  seulement  celui  de  la 
grande  terre,  dont  il  avait  été  in- 
vesti par  les  délégués  du  gouver- 
nement français.  Le  capitaine- 
général  ne  cessait  de  faire  l'é- 
loge de  la  conduite  de  Pelage,  de 
lui  témoigner  une  confiance  sans 
limites;  cependant  l'ordre  de  l'ar- 
rêter fut  donné.  Attiré  ,  par 
une  simple  invitation,  chez  le 
chef  d'état-major,  des  armes  fu- 
rent dirigées  sur  sa  poitrine  :  il 
parvint  à  les  écarter  et  à  se  réfu- 
gier au  fort  de  la  Victoire;  mais  il 
y  trouva   les  troupes  de  couleur 


PEL 

en  pleine  insurrection.  La  vil- 
le de  la  Pointe- à -Pitre  était 
menacée  d'un  horrible  massacre. 
Ce  péril,  plus  grand  que  celui  au- 
quel il  venait  d'échapper,  n'ébran- 
la pas  sa  fermeté.  L'insurrection 
avait  été  causée  par  l'arrestation 
de  plusieurs  officiers  de  couleur 
et  par  les  menaces  faites  à  un  plus 
grand  nombre  d'autres.  Pelage 
ne  s'opposa  pas  de  front  à  la  vio- 
lence de  ces  premiers  mouvemens, 
mais  il  sut  rendre  vaines  les  me- 
naces les  plus  sinistres,  en  lais- 
sant un  libre  cours  aux  paroles 
et  aux  démonstrations.  Il  prit 
sous  sa  protection  ce  même 
chef  d'état-major  chez  lequel  peu 
d'heures  auparavant,  sa  vie  avait 
été  menacée.  Ses  efforts  pour  pré- 
venir l'effusion  du  sang  et  regor- 
gement des  blancs  se  multipliaient 
comme  le  danger  qui  semblait 
croître  de  minute  en  minute.  Pla- 
cé entre  l'alternative  ou  d'accep- 
ter le  titre  de  général  en  chef  de 
l'armée  de  la  Guadeloupe,  ou  de 
voir  ce  titre  et  les  pouvoirs  qui  y 
étaient  atttachés  passer  entre  les 
mains  du. mulâtre  Ignace,  officier 
fougueux, et  chef  de  l'insurrection. 
Pelage  dévoua  sa  tête.  Les  trou- 
pes voulaient  marcher  à  l'instant 
même  contre  celles  que  cou)inan- 
dait  la  capitaine-général.  Il  éj)ui- 
sa  leur  fureur  en  les  fatigant 
jusqu'à  la  nuit  par  des  marches 
et  des  contre-marches;  mais  les 
lenteurs,  les  tergiversations  du 
chef  de  la  colonie  et  des  menaces 
imprudentes  sorties  de  sa  bou- 
che ,  portèrent  les  révoltés  aux 
dernières  violences.  Pelage  re- 
çut un  coup  de  baïonnette  au 
visage ,  en  protégeant  le  capitai- 
ne-général,  assailli  par   les  sol- 


PEL 

\|lats  de  couleur  :  il  parvint  même  à 
lui  sauver  la  vie,  mais  !e  capiiai- 
né-général  fut  renvoyé  en  Fran- 
ce. L'oblijçation  de  conserver  le 
pouvoir  fut  imposée  à  Pelage 
par  la  nécessité  de  pourvoir  au 
salut  de  tous.  La  vie  des  blancs  se 
trouva  uK'iiacée  par  de*  troupes 
qui  venaient  de  rompre  le  frein  de 
la  discipline,  et  (|iii,  au  moment 
de  devenir  victimes  elles-mêmes 
de  leurs  propres  fureurs,  n'étaient 
plus  retenues  que  par  un  reste  de 
respect  pour  Pelage.  11  s'adjoignit 
un  conseil  provisoire,  choisi  par 
les  habitans  de  la  Pointe-à-Pilre, 
les  plus  recomrnandablcs  parleurs 
lumières  et  leurs  vertus.  Le  pre- 
mier acte  de  ce  gouvernement 
provisoire  fut  un  serment  de  fidé- 
lité à  la  France.  Ce  serment,  ré- 
pète par  les  troupes,  réveilla  dans 
tous  les  cœurs  l'amour  de  l'ordre, 
de  ladiscijdineet  du  nom  français, 
et  donna  le  temps  à  l'expédition, 
eonuuaudée  par  le  général  Riche- 
panse,  d'arriver  et.  le  sauver  la  colo- 
nie siU' laquelle  la  torche  incendiai- 
re et  le  poignard  des  insurgés  res- 
taient sns[»endus.  Au  débarque- 
ment des  troupes  de  l'expédition 
les  humiliations  ne  furent  point 
épargnées  à  Pelage  :  il  les  dévora 
en  silence,  sans  irritation  ,  sans 
bassesse,  conservant  toute  la  di- 
gnité que  donnent  la  IVuce  de  l'âme 
et  le  calme  d'une  boime  conscien- 
ce. L'ordre  de  l'arrêter  avait  été 
signé  avant  le  débarquement, 
mais  la  contenance  de  Pelage  le 
fit  révoquer;  il  ne  laida  pas  à  ob- 
tenir du  nouveau  capitaine-géné- 
ral (onte  la  confiance  qu'aurait  dfi 
lui  accorder  celui  que  le  général 
llichepansi!  venait  remplacer.  Ce 
général  lui  donna  l'ordre  de  raï- 


PEL 


109 


sembler  les  troupes  dont  il  vou- 
lait passer  la  revue.  Cet  ordre 
fut  exécuté,  mais  les  officiers 
nouvellement  arrivés  se  portèrent 
à  des  actes  de  violence  en  rele- 
vant les  postes,  et  à  des  menaces 
trop  justifiées.  Le  lendemain, 
par  l'embarquement  d'une  partie 
de^  tr.oupeï,  le  reste  se  débanda, 
prit  la  fuite,  et  alla  porter  le  feu 
de  la  révolte  dans  tous  les  quar- 
tiers de  la  basse-terre.  Cette  ré- 
volte ne  put  être  étouffée  que 
par  la  force,  et  durant  la  lutte, 
le  sang  européen  ne  coula  pas 
avec  moins  d'abondance  que 
le  sang  africain.  Pelage  rendit 
de  grands  services  dans  celte 
guerre  d'extermination.  Il  sauva 
la  basse-terre,  dont  les  habitans 
se  défendaient,  barricadés  dans 
leurs  maisons,  contre  les  insur- 
gés, qui  s'étaient  rendus  maîtres 
de  la  ville,  et  allaient  y  mettre 
le  feu.  Ils  signalaient  leur  re- 
traite par  le  pillage  et  l'incendie. 
Pelage  les  suivit  de  près,  leur 
enleva  la  forte  position  de  Bidda- 
ry,  délivra  au  Dolé  80  femmes 
et  en  fans  blancs,  que  le  mulâtre 
Ignace  avait  réunis  dans  un  lieu 
où  il  y  avait  des  poudres;  déjà 
le  nègre  qui  devait  y  mettre  le 
feu,  s'avançait  la  mèche  à  la 
main ,  lorsque  Pelage  y  parut. 
La  Poinle-à-Pitro,  dégarnie  de 
tronpeii,  fut  inopinément  mena- 
cée par  un  parti  d'insurgés.  Le 
général  .se  voyant  dans  l'impos- 
sibililé  d'y  conduire  sur-le-chaiYip 
des  soldats  harassés,  y  envoya 
Pelage  seul.  Son  activité,  la  con- 
fianc»!  qu'il  inspira,  intimidèrent 
lesassiégeans,etsauvèrent  la  ville, 
lisse  retranchèrent  dans  la  redmite 
de  Baimbridge,  et  c'«st  là  que  lo? 


no 


PEL 


restes  de  l'insurreclion  furent  é- 
crasés.  Tant  de  servicts  méritaient 
une  récompense.  Ils  reçurent  cel- 
le dont  le  pouvoir  est  le  moins  a- 
vare.  Pelage  et  les  hommes  hono- 
rables qui  s'étaient  dévoués  au 
salut  de  la  colonie ,  en  l'absence 
de  toute  autorité  préservatrice  , 
furent  embarqués  avec  d'autres 
habitans,  transportés  en  France, 
et  mis  en  prison.  La  liberté  leur 
fut  rendue  quand  on  vit  qu'il  é- 
tait  impossible  de  leur  ravir  la  vie 
ou  l'honneur  sans  violer  trop  ou- 
vertement la  justice.  Pelage  avait 
droit  à  de  l'avancement.  Il  dut  se 
trouver  heureux  d'être  employé 
comme  colonel,  et  fut  envoyé  en 
Espagne,  où  il  donna  de  nouvel- 
les preuves  de  valeur.  Mais  il  ne 
survécut  que  peu  de  jours  aux 
désastres  de  Vittoria  et  de  la 
campagne  de  i8i5.  Il  mourut 
en  France,  ignoré,  et  sans  se  plain- 
dre ni  du  sort  ni  des  hommes. 

PELARD  (N.),  membre  de 
la  légion -d'honneur,  servait  eu 
ijgt)  Il  l'armée  d'Italie,  en  qua- 
lité de  simple  carabinier.  Au  mois 
de  septembre  de  la  même  année , 
il  se  fit  remarquer  par  une  action 
d'éclat,  dont  les  détails  se  trou- 
vent dans  un  compte  rendu  au 
<lirectoire- exécutif  par  le  géné- 
ral en  chef  Bonaparte  :  «  Au  pas- 
•>sage  de  la  Brenta.  dit  le  géné- 
»ral,  le  braiVe  Pelard  traversa 
«trois  pelotons  ennemis,  arrêta 
«l'olTicier- général  qui  les  com- 
»  mandait,  et  tua  lui  seul  treize 
0 hommes.  »Cet  acte  d'intrépidité 
fit  obtenir  à  Pelard  de  l'avance- 
luent,  et  plus  lard  la  réc(»nipense 
la  plus  chère  aux  braves,  la  croix 
de  la  légion-d'honneur.  Il  se  si- 
gnala  depuis   en   diverses   occa- 


PEL 

sions,  et  l'armée  française  1% 
comptait,  en  1806,  au  nombre 
de  ses  ofTiciers  les  plus  recom- 
n)andables,  lorsqu'il  fut  tué  sur 
le  champ  de  bataille. 

PELÉ  (N.) ,  ancien  député  et 
magistrat,  adopta  avec  modéra- 
tion les  principes  de  la  révolu- 
tion, et,  fut  nommé,  au  mois  de 
septembre  1792,  député  à  la  con- 
vention nationale  par  le  départe- 
ment du  Loiret.  Dans  le  procès 
de  Louis  XVI,  il  vota  la  déten- 
tion jusqu'à  la  paix,  et  le  bannis- 
sement à  cette  époque.  Pelé  fut 
du  nombre  des  conventionnels 
qui  passèrent  au  conseil  des 
cinq-cents,  dont  il  cessa  de  faire 
partie  le  20  mai  1798.  Appelé 
aux  fondions  de  juge  au  tribu- 
nal criminel  de  son  département, 
il  les  remplit  d'une  main'ère  ho- 
norable jusqu'à  l'époque  de  sa 
mort,  arrrivée  en  1808. 

PELIiï  (Jean- Jacqces-Ger- 
MA!!s),  maréchal-de-camp  d'état- 
major,  ancien  général  des  chas- 
seurs à  pied  de  la  vieille  garde, 
conunandant  de  la  légion-d'hon- 
neur (en  i8i3),  chevalier  de 
Saint-Louis  et  du  mérite  militaire 
de  Bade,  est  né  à  Toulouse  eu 
1779.  Il  partit  comme  conscrit  en 
1800;  dès  son  arrivée  à  l'armée  d'I- 
talie, il  fut  ad  mis  en  qualité  de  sous- 
lieu  tenant  dans  le  corps  des  ingé- 
nieurs-géographes. Ses  services 
de  guerre  et  de  paix,  ses  blessu- 
sures,  lui  valurent  un  avancement 
assez  rapide,  qui  ne  fut  jamais  ai- 
dé par  aucune  intrigue,  et  qui 
s'est  arrêté  en  i8i4  :  alors  s'ou- 
vrait devant  lui  la  grande  carrière 
des  armes  ,  pour  laquelle  il  était 
né,  et  qui  a  été  l'unique  passiort 
de  sa  vie.  Bien  jeune  encore,  il 


PEL 

mérita  par  ses  travaux  d'être  ad- 
mis, dans  les  circonstances  cri- 
tiques, au  conseil  des  généraux. 
Il  fut  choisi  par  le  maréchal  .lour- 
dan  pour  l'accompagner  dans  ses 
reconnaissances  des  montagnes 
du  Tyrol,  «-t,  en  !8o5,  par  le  ma- 
réchal iVlasséna  pour  être  son  aide- 
de-camp.  Il  rtsla  6  ans  attaché  à 
cet  illustre  guerrier,  qui  l'honora 
de  son  aim"tié,  de  son  intime  con- 
fiante, et  qui  le  nommait  son  fils 
d'armes.  Il  commanda  en  Russie 
le  48"*  régiment,  l'un  des  plus 
beaux  de  l'armée.  Général  de  bri- 
gade en  avril  i8i5,  il  fut  bientôt 
désigné  pour  entrer  dans  la  garde, 
par  l'empereur,  qui  l'avait  distin- 
gué, en  I  809,  dans  les  expéditions 
et  les  reconnaissances  de  l'île  de 
Lobau,  et  surtout,  en  1811,  dans 
deux  audiences  fort  orageuses, 
où  le  chef  de  bataillon  Pelet  lui 
rendit  compte  du  résultat  de  l'ex- 
pédition de  Portugal.  Ce  fut  à  la 
lin  de  la  seconde  audience,  que 
l'empenMir  le  congédia  en  lui  di- 
.•♦ant.  Adieu.,  colonel.  Napoléon  le 
chargea,  en  181 1, 18 13  et  181 4<  de 
divers  travaux  particuliers.  La 
laveur  dont  jouissait  le  général 
Pelet  fut  purement  militaire,  car 
il  ne  reçut  ni  titres  ni  dotations; 
uiais,  non  moins  reconnaissant  de 
tant  de  marques  de  confiat)Ce,  il 
s'en  montra  digne  jusqu'au  der- 
nier moment.  Ce  général  a  fait 
depuis  1800,  avec  la  plus  grande 
activité,  toutes  les  campagnes  des 
grandes  armées;  il  a  été  blessé  aux 
batailles  de  Caldiero,  d'Ebers- 
berg,  Krasnoë,  de  Léipsick.  Par- 
mi de  nombreux  faits  d'armes,  les 
Victoires  et  Conquêtes  et  les  Fas- 
tes (te  la  gloire,  citent  sa  (îouduite 
au  paasage  de  l'Adigc,  en   180 5, 


PEL  1 1 1 

et  au  siège  de  Gaëte,  où  il  rendit, 
comme  dans  toute  sa  carrière, 
des  services  bien  au-dessns  de 
son  gradt;;  en  1809,  l'enlèvement 
des  habitans  de  Koking,  où  les 
Autrichiens  allaient  appuyer  leur 
aile  droite  dans  la  b.itaille  d'Eck- 
miJhl  ;  l'expédition  de  l'île  du 
Moulin  (2  juillet  1809),  ainsi  que 
des  autre,-  îles  autour  de  celle  de 
Lobau;  en  18  lo  et  iHi  1,  plusieurs 
actions  en  Espagne  et  en  Portu- 
gal; en  1812,  l'attaque  du  fau- 
bourg de  Uacseuska  à  Smolensk; 
l'arrière-garde  de  l'armée  de  Rus- 
sie, sauvée  par  sa  vigueur  et  par 
se«  conseils;  le  18  novembre,  à 
Krasnoë  ,  dans  cette  affaire,  que 
le  général  anglais  VVilson  a  noin- 
mée  la  bataille  des  héros,  et  où 
le  colonel  Pelet  fut  blessé  de 
trois  biscaïens  ;  en  i8i5  et 
1814  »  les  batailles  de  Dresde, 
Léipsick,  iVlontmirail,  Craonne. 
Laon ,  Arcis,  etc.,  avec  la  garde; 
enfin,  la  défense  de  Planchenoit , 
à  la  bataille  île  iVIont-Safnt-Jean  , 
et  la  conservation  de  l'aigle  des 
chasseurs  au  milieu  des  plus  vio- 
lentes attaques  des  corps  prus- 
siens. Ces  ouvrages  citent  aussi 
les  paroles  remarquables  de  Na- 
poléon, en  i8o5,  au  sujet  de  mé- 
moires historiques  sur  les  batailles 
d'Italie,  dont  avait  été  chargé  le 
jeune  ingénieur,  et  les  marques 
touchantes  d'attachement  qu'à 
toutes  les  époques,  «!t  surtout  au 
licenciement,  la  vieille  garde  don- 
na au  général  Pelet.  Il  connnan- 
dait  alors  la  division  des  chasseurs 
à  pied;  et  après  la  mort  du  géné- 
ral Michel,  tué  à  Waterloo,  il  a- 
vail  «'té  nnnuïié  colonel  en  second 
de  l'arme.  Le  général  Pelet  ne 
«'est  pas  moins  distingué  par  iui 


112  PEL 

écrits  militaires  que  par  ses  ac- 
tions. Au  dépôt  de  la  guerre  sont 
réunis  beaucoup  de  mémoires, 
faits  parlai  comme  ingénieur-géo- 
graphe, ou  dans  le  cours  des  cam- 
pagnes, lia  concouru,  à  diverses 
époques,  aux  travaux  historiques 
qui  s'y  préparaient.  Ce  général  a 
écrit  des  journaux  fort  détaillés 
de  chaque  guerre,  et  une  grande 
quantité  de  mémoires  sur  les 
hautes  parties  de  l'art  militaire. 
En  iSi-i»  dans  les  grandes  ma- 
nœuvres de  la  garde  à  Naney,  il 
avait  commencé  à  faire  exécuter 
nu  système  de  tactique  abrégée 
et  perfectionnée  pour  l'infanterie, 
sur  lequel  il  a  préparé  un  ouvra- 
ge. En  1818,  ayant  été  nommé 
mendjre  et  secrétaire  de  la  com- 
mission de  défense  du  royaume, 
le  général  Pelet  a  fourni  près  des 
deux  cinquièmes  de  la  collection 
des  travaux  de  la  commision,  et 
a  fait  de  pins  un  système  particu- 
lier 2)0ur  une  défense  nationale, 
qui  est  resté  dans  ses  mains.  La 
France  y  trouverait  des  ressour- 
ces précieuses  pour  des  temps 
de  malheur.  Il  s'occupe,  depuis 
son  entrée  ;v»  service,  de  l'his- 
toire de  nos  guerres.  Napoléon 
ayant  applaudi  dès  iSojaux  pre- 
miers travaux  du  général  Pelet, 
ce  général  n'a  pas  cessé  de  les 
poursuivre.  Alaflndechaque  cam- 
pagne il  préparait  les  matériaux  et 
la  rédaction  de  son  histoire.  Déjà 
plusieurs  ouvrages  ont  donné  des 
extraits  de  ce  travail.  Parmi  ces 
ouvrages,  on  remarqué  ceux  du 
Pff'cis  (tes  c'v4n.anens  militaires , 
pour  i8o5,  et  du  Mémorial  de 
Sainle-lïéUne,  pour  Eckmiihl  e>t 
'NVagram.  Nous  avons  pu  noi;s 
j\S5ur€r  nous-mêmes  q,ue>  dans  les 


PEL 

matériaux  réunis  par  le  général 
Pelet  sur  les  campagnes  d'Italie, 
il  y  avait  une  conformité  parfaite 
avec  ce  que  Napoléon  a  dicté  à 
Sainte-Hélène.  Nous  devons  a- 
jouter  que  le  récit  de  la  campagne 
d'Italie,  dans  la  notice  de  Bona- 
parte, a  été  extrait  des  mémoires 
que  le  général  Pelet  communiqua 
à  l'auteur,  et  a,  depuis  long- 
temps, justiTié  ce  que  nous  ve- 
nons de  dire.  On  attendait  avec 
in)patience  la  publication  de  ces 
mémoires.  Le  général  Pelet  vient 
de  la  commencer  par  la  campagne 
de  1809,  en  4  volumes,  avec  des 
pièces  du  plus  grand  intérêt;  deux 
volumes  ont  déjà  paru.  11  se  }>ro- 
pose  de  donner,  sur  le  même 
plan,  Ifiutes  les  campagnes  de  nos 
grandes  années  :1e  général  écrit 
ce  qu'il  a  vu,  et,  en  partie,  ce  qu'il 
a  fait.  Il  veut  venger  l'arm/e  et 
Napoléon  des  calomnies  dont  ils 
ont  été  l'objet.  Il  porte  dans  son 
travail  la  loyauté  et  la  fermeté 
qu'il  a  montrées  pendant  toute  sa 
vie.  Son  épigraphe.  Honneur  et  pa- 
trie, est  la  mesure  et  la  garantie 
de  ses  sentimens.  L'histoire  de 
nos  guerres,  publiée  par  un 
homme  qui  les  a  toutes  écrites  sur 
les  champs  de  bataille,  porte  avec 
elle  un  intérêt,  qu'aucun  autre  é- 
crivain  .ne  peut  atteindre.  C'est 
la  gloire  prise  sur  le  fait  par  celui 
qui  l'a  partagée.  Les  faits  d'armes 
ont  besoin  d'être  dessinés  d'après 
nature,  sans  cela  leur  vérité  é- 
chappe  et  Ja  physionomie  d'une 
campagne  disparaît.  Le  général 
Pelet  a  su  habilement  conserver 
tout  leur  caractère  aux  opérations 
de  la  guerre  de  1809,  *-'  <^"  ^^^^ 
son  ouvrage  ne  sera  pas  moins  re- 
chorch»;  pa^il^  tacticiens,  que  par 


PÏÏ.L 

ceux  qui  cherchent  encore  un  au- 
tre inlérêl  dans  les  récits  militai- 
res. On  lit  à  la  fin  d'uue  police 
qui  se  trouve  dans  le  Dictionnaire 
des  Généraux  :  «  Il  fut  bon  soldat, 
«bon  citoyen,  bon  fds,  bon  ami, 
')  honnête  homme  par-dessus  tout. 
1)11  obtint  l'amour  de  ses  soldats, 
«le  respect  des  peuples  vaincus, 
ola  confiance-  et  l'estime  des  uns 
»et  des  a. I très.  » 

PKLET-BEAtPREY  (P.  F. 
N.  )  ,  député  à  la  convention 
nationale,  où,  au  mois  de  sep- 
tembre 1792,  le  nomma  le  dé- 
partement de  l'Orne,  vota  avec  la 
njajorité  dans  le  procès  du  roi.  Il 
ne  prit  depuis  cette  époque  que 
trés-pen  de  part  aux  discussions 
violentes  qui  agitèrent  si  souvent 
l'assemblée.  En  septembre  i^gS, 
il  .passa  de  la  convention  au  con- 
seil des  cinq-cents,  par  suite  de 
Il  réélection  des  deux  tiers,  et 
cessa  de  faire  partie  de  ce  conseil, 
en  mai  1798.  M.  Feict-Beauprey 
n'a  point  été  appelé  depuis  à  rem- 
plir des  fonctions  publiques. 

l'ELEÏ-DE-GRAVIÈRE 
(LoDisj,  surnommé  k'iacely,  l'un 
«les  chefs  royalistes  du  midi.  Dès 
le  commencement  de  la  révoiu- 
lion.  il  s'rn  montra  le  violent  en- 
nemi, et  sellorya  d'en  arrêter  les 
progrès  dans  le  pays  qu'il  habi- 
tait. En  septembre  17949  'es  ad- 
nn'nistrateurs  du  district  de  Ca- 
nourges  le  signalèrent  à  la  con- 
vt.'iuion  nationale  coimne  entrete- 
nant une  correspondance  active 
avec  Dominique  Allier,  autre  chef 
royaliste,  qui,  dans  ce  moment, 
«lierchail  à  soulever  les  départe- 
iiifus  de  l'Ardèche  et  de  la  Lozère. 
INIet  dc-Gravière  l'ut  tué  peu  de 
temps  après,  en  combattant  avec 

I.  XVI. 


PEL 


ii3 


ce  même  Dominique  Allier  dont 
il  était  l'ami  dej»uis  lon{i;-'einps. 
PELET  -  DE  -  LA-  LOZERE 
(Jean,  comte),  commandant  de  la' 
légion-d'houneur.né  à  Saint-Jean- 
du-Gard,  avait  été  rtçu  très-jeu- 
ne avocat  au  parlement  de  Pro- 
vence ,  et  était  cité  connue  un 
des  membres  les  plus  distingués 
du  barreau  d'Aix,  à  l'époque  de  la 
révolution.  Il  en  adopta  les  prin- 
cipes en  honnne  de  bien,  et  fidèle 
jusqu'à  la  fin  de  sou  honorable 
carrière  aux  mêmes  opinions,  il 
se  montra  le  sincère  ami  de  la 
liberté,  le  défenseur  de  toutes  les 
mesures  de  justice,  et  l'adversaire 
prononcé  de  tous  les  excès.  Ses 
concitoyens  le  nommèrent  en 
1791  président  du  directoire  du 
département  de  la  Lozère,  et  le 
députèrent,  au  mois  de  septembre 
de  l'année  suivante,  à  la  conven- 
tion nationale.  Il  y  porta  le  mê- 
me esprit  de  sage-^se  et  de  njo- 
dération  qui  l'avait  déjà  distin- 
gué. Eloigné  de  Paris  pendant  le 
procès  du  roi,  il  ne  put  y  pren- 
dre part.  Son  vote  n'eût  point  été 
douteux,  et  peut-être  sa  voix,  son 
exemple  et  son  influence,  au- 
raient-ils pu  contribuer  à  sauver 
le  monarque.  Pelet-de-la-Lozère, 
à  son  retour,  parut  plusieurs  fois  à 
la  tribune  de  la  convention  natio- 
nale. Il  s'opposa  avec  énergie  à 
la  proposition  d'un  membre  de 
continuer  a{)rès  le  9  thermidor 
les  mêmes  pou  voir?  aux  membres 
restans  de  l'ancien  comité  de  sa- 
lut-public,  et  lediscoiir»  improvi- 
sé qu'il  prononça  à  celte  occasion, 
le  29  fructidoi-  an  3  (i5  septem- 
bre 1794)^  fit  ime  vive  sensation 
sur  rassemblée.  Il  obtint  depuis 
la  liberté  du  contre- amiral  Lacros. 


ii4  PEL 

se,  et  de  l'écrivain  De  La  Croix, 
tous  deux  injustement  incarcérés. 
Nommé  président  de  la  conven- 
tion nationale,  le  4  germinal  de 
l'année  suivante  f24  mars  1795), 
il  déploya  le  plus  grand  cou- 
rage dans  ce  poste  ,  pendant  l'in- 
surrection populaire  qui  éclata 
le  i'2  du  mois  suivant.  Il  de- 
manda aussi  la  réforme' totale  de 
la  constitution  de  179^,  et  pro- 
posa la  prompte  convocation  des 
assemblées  primaires.  Chargé  d'u- 
ne mission  en  Catalogne  ,  pour 
apaiser  quelques  mou  vemens  dans 
l'armée  française  ,  et  pour  en- 
tamer une  négociation  avec  l'Es- 
pagne, il  réussit  dans  cette  don  - 
hie  entreprise  ,  et  le  nouveau 
comité  de  salut-public  lui  don- 
na alors  l'ordre  de  se  rendre  à 
Lyon,  où  la  présence  d'un  homme 
conciliant  et  modéré  paraissait 
nécessaire.  Mais  le  parli  exagéré 
de  la  convention,  qui  venait  de 
reprendre  plus  d'influence,  par- 
vint à  faire  révoquer  le  décret 
qui  l'y  envoyait;  après  la  journée 
du  i5  vendémiaire  an  4  (5  octo- 
bre 1793),  Pelel-de-la-Lozère  fut 
dénoncé  ainsi  que  Boissy-d'Anglas, 
Lanjuinais  et  quelques  autres  dé- 
putés,comme  étant  un  des  chefs  de 
l'insurrection  sectionnaire.  Le  co- 
mité secret  de  la  convention,  réu- 
ni dès  le  i4»  paraissait  mal  dis})08é 
pour  lui,  et  son  arrestation  allait 
être  décrétée,  quand  il  parvint 
enfin  à  se  justifier.  Après  la  ses- 
sion conventionnelle,  Pelet-de- 
la  -  Lozère  obtint  une  distinc- 
tion bien  flatteuse  :  il  fut  élu  à  la 
fois  par  soixante  et  onze  départe- 
mens  pour  la  nouvelle  représenta- 
tion nationale;  il  fit  alors  p  ntie 
du  conseil  des  cinq-cents,  où  sa 


PEL 

conduite  ne  fut  pas  moins  hono- 
rable qu'aux  époques  précéden- 
tes. Il  y  parla  en  faveur  de  M. 
Bergasse,  que  ses  opinions  et  ses 
écrits  avaient  compromis,  et  que 
le  9  thermidor  avait  sauvé  de 
l'échafaud,  mais  qui  languissait 
encore  en  prison,  et  il  obtint  sa 
mise  en  liberté.  En  février  1796,  il 
fit  la  motion  d'inviter  le  directoi- 
re à  s'occuper  des  moyens  de  ren- 
dre enfin  la  paix  à  l'Europe,  pro- 
position qui  excita  de  vifs  débats 
dans  l'assemblée.  Il  obtint  qu'on 
passât  à  l'ordre  du  jour  siu'  une 
demande  du  directoire,  qui  vou- 
lait ajouter  encore  à  l'extension 
des  pouvoirs  et  de  la  juridiction 
des  tribunaux  militaires.  Nommé 
à  la  présidence  du  conseil  des 
cinq-cents  le  i"  messidor  an  4 
(19  juin  1796),  il  fit  adopter  et 
convertir  en  décrets  deux  propo- 
sitions qu'il  avait  faites,  la  pre- 
mière pour  accorder  par  l'état 
des  secours  à  tous  les  enfaus  d'é- 
migrés et  de  condamnés,  la  se- 
conde pour  faire  payer  sans  délai 
tous  les  pensionnaires  derétat,tant 
civils  que  militaires  et  ecclésiasti- 
ques. Pelet-de-la-Lozère  se  pronon- 
ça dans  toutes  les  occasions  avec 
la  plus  grande  énergie  en  faveur 
d»i  maintien  des  lois  sur  la  liberté 
de  la  presse.  Quelques  orateurs 
avaient  comparé  les  journalistes 
de  cette  époque  à  des  prostituées; 
il  releva  l'inconvenance  de  cette 
expression,  et  cita  les  noms  ho- 
norables de  plusieins  écrivains, 
inaccessibles  à  toute  corruption, 
et  qui  ne  s'étaient  prostitués  à  au- 
cun pouvoir,  tandis  que  des  dépu- 
tés, qu'il  croyait  n'avoir  pas  be- 
soin de  nommer,  se  livraient  suc- 
cessivement, et  pour  le  plus  vil 


PEL 

intérêt,  à  toute  autorité  dominan- 
te qui  daignait  les  payer.  A  la 
sortie  du  conseil,  Pelet-de-la- 
Lozère  se  retira  dans  ses  foyers. 
Nommé  en  1800  préfet  de  Vau- 
cluse,  il  parvint,  à  force  de  sa- 
gesse et  par  des  voies  conciliatrices, 
bien  mieux  que  par  des  mesures 
de  rigueur,  à  pacifier  entièrement 
ce  département,  déchiré  jusqu'a- 
lors par  des  factions  acharnées.  En 
1802,  lepremierconsul  l'appelaau 
conseil-d'étal,  et  lui  donna  la  di- 
rection du  3'  arrondissement  de 
la  police  générale,  qui  comprenait 
tout  le  midi  de  la  France.  Il  fut 
en  outre  chargé  de  plusieurs  mis- 
sions particulières  î  Bayonne  en 
i8i3,  et  à  Montpellier  en  1814. 
A  la  fin  de  juin,  en  i8i5,  il  rem- 
plit pendant  quelque  temps  les 
fonctions  de  ministre  de  la  po- 
lice générale.  Après  le  second  re- 
tour du  roi,  Pelet- de- la-Lozère 
rentra  dans  la  vie  privée,  entouré 
de  l'estime  et  de  l'affection  de  ses 
concitoyens,  que  d'éminens  servi- 
ces rendus  à  sa  patrie  et  une  con- 
duite constamment  irréprochable, 
lui  avair-nt  si  légitimement  ac- 
quises.— Son  fils  aîné,  le  baron  Pe- 
let, né  en  1^85,  fut  nommé  au- 
diteur au  conseil-d'état  en  1806, 
et  quelque  temps  après,  adminis- 
trateur-général des  forêts  de  la 
couronne,  place  qu'il  occupa  jus- 
qu'en 1814,  époque  de  la  suppres- 
sion de  cette  administration  su- 
périeure. Il  a  depuis  été  nom- 
mé par  le  roi  à  la  préfecture  de 
Loir-et-Cher,  résidence  de  Blois. 
Mais  n'ayant  pu  sans  doute  entiè- 
rement satisfaire  en  ces  derniers 
Icrnps  aux  nouvelles  exigences 
ministérielles,  il  a  été  éloigné  eu 
189,3  d'une  place,  où  il  avait  dé- 


PEL  11. 5 

jà  recueilli  de  nombreux  témoi- 
gnages de  la  reconnaissance  et 
de  l'attachement  de  ses  adminis- 
trés. 

PÉLISSIER  (N.),  exerçait  avec 
distinction  la  profession  de  méde- 
cin lorsqu'il  fut  nommé,  par  le  tiers- 
état  de  lasénéchaussée  d'Arles,  dé- 
puté aux  états-généraux,  en  t  789. 
Le  déparlement  des  Bouches-du- 
Rhône  le  nomma,  au  mois  de  sep- 
tembre 1792,  membre  de  la  con- 
vention nationale.  Dans  le  procès 
du  roi,  M.  Pélissier  vota  la  mort 
sans  motiver  son  opinon;  vers  la  fin 
de  la  même  année  (  1793),  il  fut 
nommé  secrétaire.  En  octobre 
1795,  il  dénonça  Chambon  et 
Cadroy,  au  retour  de  leur  mission 
dans  le  Midi,  pour  n'avoir  pas,  en 
montrant  plus  de  fermeté,  répri- 
mé les  assassinats,  qui  se  com- 
mettaientpresque  sous  leurs  yeux. 
Après  la  session  conventionnelle, 
M.  Pélissier  fut  employé  quelque 
temps  en  qualité  de  cominissaire 
du  directoire-exécutif,  puis  nom- 
mé administrateur  du  départe- 
ment des  Bouches-du-Rhône.  Élu 
au  conseil  des  anciens  en  1798,  il 
en  sortit  par  suite  de  la  révolution 
du  i8  brumaire  an  8.  Il  reprit 
alors  sa  profession  de  médecin, 
et  l'exerça  jusqu'en  i8i6,  que 
la  loi  du  12  janvier  de  cette  an- 
née, rendue  contre  les  conven- 
tionnels dits  votans,  l'obligea  de 
sortir  de  France;  il  s'est  retiré  en 
Suisse. 

PÉLISSIER  (le  comte  Heniii- 
Félix  de),  nommé,  le  4  juin 
1814,  maréclial-de-camp,  et  che- 
valier de  Saint-Louis  le  27  dé- 
cembre suivant,  commandait  A 
Nîmes,  lorsque  Napoléon  débar- 
qua i\  Cannes ,  au  mois  de  mars 


ii6 


PEL 


181 5.  Il  fit  d'inutiles  efforts  pour 
empêcher  ses  troupes  de  se  réunir 
i\  celles  de  Napoléon.  Il  fut  même 
mis  (Ml  arrestation,  ainsi  que  son  ai- 
de-de-camp, et  conduit  à  Montpel- 
lier, où  il  paraît  qu'il  demeura  jus- 
qu'au second  retour  du  roi.  On  voit 
dans  une  biographie  que  le  com- 
te Pélissier  obtint  à  cette  époque 
le  grade  de  lieutenant-général;  ce- 
pendant plusieurs  années  après,  il 
figure  encore  sur  la  liste  des  ma- 
réchaux-de-camp. En  1823  et 
1823,  il  ne  se  retrouve  ni  sur  la 
liste  des  maréchaux  de-camp ,  ni 
sur  celle  des  lieutenans-généraux. 
Ce  qui  est  plus  certain,  c'est  que, 
nommé  membre  de  l.i  chambre  des 
députés  en  i8i5,il  partagea  les 
opinions  de  la  majorité  de  cette 
chambre ,  dissoute  par  l'ordon- 
nance   royale    du     5    septembre 

1816.  Le  comte  Pélissier  n'a 
point  été  réélu  pour  les  sessions 
suivantes. 

PELLËGRINI  (JosEPH-LoiJs), 
naquit  à  Véronne  en  1718.  Entré 
de  bonne  heure  dans  l'institut  de 
Loyola  ,  il  s'adonna  à  la  prédica- 
tion, et  pa-sa  pour  l'un  des  plus 
éloquens  orateurs  de  son  temps. 
Marie-Thérèse,  qui  lui  fit  témoi- 
gner le  désir  de  l'entendre,  l'attira 
à  Vienne  ,  où  il  prêcha  plusieurs 
ibis  devant  la  cour  impériale.  Pel- 
legrini  était  aussi  poète,  et  ses 
compositions    sont   remarquables 

f»ar  la  fraîcheur  du  coloris  ,  la  dé- 
icatcsse  du  sentiment,  et  la  jus- 
tesse de  l'expression.  Il  déplora  à 
80  ans  la  mort  d'une  amie  dans 
des  vers  remplis  de  tendresse  et 
de  sensibilité.  Ils  sont  dans  le 
genre  des  poésies  de  Pétrarque  , 
sans  pouvoir  dire  qu'ils  soient 
Pelrarcheschi,    l'auteur  ayant  eu 


PEL 

l'adresse  d'éviter  l'imitation  ser- 
vite  d'un  si  grand  modèle  :  on  sent 
que  sa  douleur  est  vraie,  parce 
que  l'expression  en  est  spontanée. 
Pellegrini  mourut  à  Véronne ,  le 
i3  avril  1799.  Ses  ouvrages  im- 
primés sont  :  1°  Poésie  latine  ed 
ilaUane ,  Bassano  ,  1 79 1 ,  in  -  8°  : 
ce  volume  contient  un  poëme  sur 
une  éruption  du  Vésuve;  sur  le 
pont  de  Veja;  sur  les  cieux  ;  sur  le 
tombeau  de  Dimice,  anagramme 
de  Medici  ;  -i^al  PopoloVeronese, 
orazione,  Vérone,  ib^oo  ,  in-8"  :  on 
y  a  joint  l'éloge  de  l'auteur  par  le 
comte  Giuliari;  5"  Versi  in  morte 
d'Ainaritte,  in -8",  1800:  Amaritte 
est  l'anagramme  de  Marietla  :  ce 
nom,  et  l'autre  caché  dans  la  pre- 
mière anagramme,  composent  ce- 
lui de  son  amie,  qui  était  Mariette 
Medici  ;  4°  Debora,  Giepte,  Giona , 
lezioni  sacre,  Venise,  1804,  2  vol. 
111-8";  5°  Tobia,  ragionavienti  , 
ibid. ,  1818,  2  vol.  in-8"  ;  6°  fre- 
dic.be,  ibid. ,  1818,  5  vol.  in-8'; 
r;"  Panegirici,  ibid.,  i820,in-8°. 
PELLEMEliTE  (  N.),.  oITicier 
français,  naquit  à  Saint- Venant, 
département  du  Pas-de-Calais,  et 
s'enrôla  comme  simple  soldat.  Il 
montra,  dès  les  premières  campa- 
gnes de  la  révolution ,  la  plus 
grande  inlrépidité  sur  le  champ 
de  bataille,  et  donna  plus  d'im 
exemple  du  plus  parfait  palriolis- 
me.  Quatorze  blessures  qu'il  avait 
reçues,  le  22  noveird)re  1790,  à 
l'atfciirede  Monnaie,  le  retenaient 
à  l'hôpital,  où  il  était  loin  d'être 
guéri,  lorsque  le  bruit  du  canon 
vint  retentir  A  son  oreille.  Ne 
pouvant  obtenir  la  permi-sion  de 
sortir,  il  s'élança  d'une  croisée 
haute  de  i5  pieds,  pour  courir  à 
Tatupleuve,  où  se  livrait  U- corn- 


PEL 

bat  qui  était  des  plus  vifs.  Arrivé 
sur  le  champ  de  bataille,  Pelle- 
ineule  se  jeta  dans  la  mêlée,  et 
{'ut  assez  heureux  pour  déj;ager  le 
général  Noël,  qu'entourait  un  pe- 
loton d'ennemis,  et  l'euipêcher 
d'être  pris.  Mais  il  n'obtint  cet 
avantage,  qu'en  ajoutant  8  bles- 
sures nouvelles  aux  i4  qu'il  avait 
déjà.  Il  l'ut  nomuié  lieutenant, 
par  décret  de  la  convention  na~ 
tionale;  mais  la  perte  de  ses  for- 
ces et  l'affaiblissement  de  sa  vue, 
causés  par  ses  blessures,  lui  ôlè- 
rent  tout  espoir  d'avanceuumt 
en  ne  lui  permettant  plus  de 
se  livrer  aux  fatigues  de  la  guer- 
re. En  1798,  il  fut  nommé  adju- 
dant de  place  à  Hesdin,  et  mou- 
rut quelque  temj)s  après. 

PEL  LE  PORT  (le  vicomte 
Pierre),  lieutenant-général, com- 
mandeur de  la  légion-d'boimeur, 
chevalier  de  Saint-Louis ,  de  la 
couronne  de  fer,  et  de  l'ordre  de 
Saint-Ferdinand  de  4°"  classe,  est 
né  à  Montréjeau,  déparlement  de 
la  Haute-Garonne,  le  26  octobre 
1773.  Il  entra  au  service,  comme 
soldat,  dans  un  des  bataillons  de 
la  levée  en  masse  de  son  départe- 
ment, et  fit  dans  ce  corps  les  cam- 
pagnes des  Pyrénées-Orientales, 
où  il  fut  promu  au  grade  de  sous- 
lieutenant.  Il  passa ,  par  suite 
d'embrigadement,  dans  le  18""  ré- 
giment de  ligne,  où  il  a  obtenu  son 
avancement  jusqu'au  grade  de  gé- 
néral de  brigade.  M.  Pellepori  a 
fait  la  campagne  d'Italie,  en  l'an 
4  et  en  l'an  5,  et  s'est  trouvé  aux 
batailles  de  Rivoli,  où  il  fut  bles- 
sé, de  Casliglioue,  d'Arcole,  etc.; 
il  fut  nommé  lieutenant,  par  le 
choix  de  .ses  camarades,  et,  bien- 
tôt après,  adjudant-major,  par  le 


PEL  1 17 

conseil  d'administration  de  son 
corps.  La  paix  ayant  été  faite  en 
Italie,  le  18°"  régiment  entra  eu 
Suisse,  et,  quelque  temps  après, 
il  fut  désigné  pour  l'expédition 
d'Egypte.  Il  lit  toutes  les  campa- 
gnes d'Orient;  combattit  à  Alexan- 
drie, aux  Pyramides,  à  Saint-Jean 
d'Acre,  où  il  fut  de  nouveau  bles- 
sé; à  Héliopolis,  à  Aboukir,  etc., 
et  reçut  le  grade  de  capitaine.  Ren- 
tré eu  France,  il  fut  admis  dans  la 
légion-d'honneur  à  l'institution 
de  cet  ordre.  A  la  reprise  des  hos- 
tilités, le  1 8"""  régiment  fit  les  cam- 
pagnes d'Autriche,  de  Prusse  et  de 
Pologne;  cetoHicier  était  à  la  ba- 
taille d'Austerlilz,  après  laquelle 
il  fut  nonnné  chef  de  bataillon; 
à  léna  ;  enfin,  à  Eylau,  où  il  re- 
çut plusieurs  blessures;  il  lui  fut 
donné  une  dotation  après  la  pai>x 
de  Tilsitt.  Dans  la  campagne  de 
1809,  en  Autriche,  il  fui  nommé 
colonel  du  18""  régiment,  après 
la  bataille  d'EssIiug;  officier  de  la 
légion-d'honneur,  et  baron,  avec 
une  nouvelle  dotation,  apiès  les 
batailles  de  Wagram  et  de  Znaïm. 
Dans  la  cauqiagne  de  1812,  en 
Russie,  le  18°"  régiment  faisait 
partie  du  S*""  corps,  aux  ordres 
du  maréchal  Ney;  il  combattit  à 
Valontina,  à  la  Moskowa,  à  Vias- 
raa,  à  Krasnoy,  etc.  Il  fut  nom- 
mé commandant  de  la  légion- 
d'honneur  après  la  première  af- 
faire, et  général  de  brigade  après 
la  campagne.  Dans  celle  de  Saxe, 
en  18 15,  il  eut  le  commande- 
ment de  la  première  brigade  de 
la  divisioti  du  général  Compans; 
il  se  trouva  aux  batailles  de  Lnl- 
zeii,  de  Bautzeuel  de  Léipsick;  il 
fut  blessé  à  cette  dernière  affaire, 
et  oommé  chevalier  de  la  couron- 


ii8  PEL 

ne  de  fer.  Dans  la  campagne  de 
1814,  en  France,  il  combattit  à 
Brienne,  à  Meaux  ,  où  il  fut  bles- 
sé, à  la  Ferre-Champenoise,  à 
Belleville;  il  fut  encore  très-dan- 
gereusement blessé  à  cette  der- 
nière affaire.  A  la  première  res- 
tauration, en  i8i4j  le  général 
Pelleport  fut  nommé  chevalier  de 
Saint-Louis;  il  prit  le  comman- 
dement d'une  brigade  de  la  gar- 
nison de  Paris,  fut  employé  en- 
suite dans  le  département  du  Can- 
tal, et  dans  les  iuj-pections  d'in- 
fanterie ,  depuis  1817  jusqu'en 
1823  :  fonctions  dans  lesquelles 
cet  officier-général  s'est  acquis  la 
réputation  de  porter,  dans  l'exa- 
men des  diverses  parties  du  ser- 
vice, cette  connaissance  appro- 
fondie des  hommes  et  des  choses 
du  métier,  qu'une  longue  étude 
pratique  fait  seule  acquérir.  Le 
général  Pelleport  reçut,  vers  cet- 
te époque,  le  titre  de  vicomte,  et 
le  conimandi'ment  de  la  3°"  bri- 
gade de  la  6""  division  ,  armée 
d'observation  du  Midi;  il  entra  en 
Espagne  avec  les  24""  et  39"  régi- 
ment de  ligne:  il  commandait  la 
6°"  division  à  l'affaire  de  Campillo 
de  Arenas,  après  laquelle  il  fut 
nommé  lieutenant-général. 

PELLERIN  DE  LA  BUXIÈRE 
(N.),  était  propriétaire  à  Orléans, 
lorsqu'il  fut  élu,  par  le  tiers-état 
du  bailliage  de  cette  ville,  député 
aux  états-généraux,  en  1789;  il 
y  prononça  un  discours  sur  la  dé- 
claration des  droits  de  l'homme, 
en  proposant  d  ajouter  à  cette  dé- 
claration celle  des  devoirs.  II  se 
constitua  le  défenseur  des  pro- 
priétés du  clergé,  en  les  établis- 
sant sur  les  fondations;  et  malgré 
son  zèle  dans  cette  circonstance , 


PEL 

il  réclama,  en  1791,  contre  l'in- 
sertion de  son  nom  sur  la  liste  des 
membres  du  club  monarchique. 
M.  Pellerin  de  la  Buxière  n'a  point 
été  appelé  à  faire  partie  d'aucune 
autre  assemblée  législative. 

PELLETAIS  (  Philippe-Jean  ) , 
chirurgien  en  chef  honoraire  de 
l'Hôlel-Dieu,  membre  honoraire 
de  l'académie  royale  de  médeci- 
ne, membre  de  l'institut  et  de  la 
légion  -  d'honneur  ,  est  regardé 
comme  l'un  des  plus  habiles  pra- 
ticiens de  l'Europe.  Il  a  succédé  au 
célèbre  Desault  {voyez  ce  nom), 
dans  la  place  de  chirurgien  en 
chef  de  l'Hôtel  -  Dieu  de  Paris, 
dont  il  est  aujourd'hui  honoraire 
(1824).  M.  Pelletan  a  publié,  ou- 
tre des  observations  importantes 
pour  enlever  les  corps  étrangers 
de  la  trachée-artère,  les  ouvrages 
suivans  :  i"  Clinique  chirurgicale, 
ou  Mémoires  et  observations  de 
chirurgie  clinique,  3  vol.  in-8*, 
1810;  2°  Observations  sur  un  os- 
teo-sarcome  de  l' humérus ,  simu- 
lant un  andvrisme,  in-8",  18 1 5. 

PELLETAN  (N.),  médecin  par 
quartier  du  roi,  chevalier  de  la  lé- 
gion-d'honneur, fils  du  précédent, 
a  ajouté  par  ses  talens  à  la  consi- 
dération attachée  au  nom  qu'il 
porte.  Il  a  reçu,  en  1817,  de  l'em- 
pereur d'Autriche,  une  bague  en 
hrillans  pour  les  soins  qu'il  avait 
donnés  aux  soldats  autrichiens  lors 
du  séjour  des  troupes  étrangères 
en  France.  M.  Pelletan,  l'un  des 
auteurs  du  Dictionnaire  des  scien- 
ces médicales,  a  publié,  en  1817, 
in-S",  un  Mémoire  sur  l'éclairage 
par  le  gaz  tiré  du  charbon  de  terre, 
pour  servir  de  complément  à  l'ou- 
vrage de  M.  Accum,  sur  le  même 
sujet;  il  a  fait  paraître  par  sou«- 


PEL 

criplion  un  Dictionnaire  de  chimie 
générale  et  médicale,  dont  le  roi  a 
pris  un  certain  nombre  d'exem- 
plaires pour  ses  bibliothèques  par- 
ticulières, Paris,  182452  vol.  in-8°. 

PELLETIER  (N.),  habitait  la 
Tille  de  Bourges  à  l'époque  de  la 
révolution.  Le  zèle  avec  lequel  il 
en  embrassa  la  cause,  le  fit  bientôt 
nommer  à  des  fonctions  munici- 
pales et  administratives.  Au  mois 
de  septembre  1792,  le  départe- 
ment du  Cher  l'élut  à  la  conven- 
tion nationale.  Dans  le  procès  du 
roi  il  se  prononça  pour  l'applica- 
tion de  la  peine  imposée  par  les 
votes  de  la  majorité;  ce  fut  la  seu- 
le fois  qu'il  prit  part ,  du  moins 
d'une  manière  ostensible,  aux  dé- 
libérations de  l'assemblée.  Après 
le  ()  thermidor,  il  fut  envoyé  en 
mission,  et  n'ayant  pas  été  réélu 
aux  conseils  après  la  session,  il 
exerça  pendant  quelque  temps  les 
fonctions  de  commissaire  du  di- 
recloire-exécutifdans  son  départe- 
ment. Atteint,  comme  votant,  par 
la  loi  du  13  janvier  1816,  M. 
Pelletier  a  quitté  la  France  et  s'est 
retiré  en  Suisse. 

PELLICCIA  (  Alexis  ),  savant 
archéologue  ,  et  membre  du  der- 
nier parlement  de  Naples,  naquit 
dans  cette  capitale  en  i744-  Élève 
distingué  de  l'abbé  Genovesi ,  il 
dirigea  ses  études  vers  la  carrière 
ecclésiastique,  qu'il  s'était  décidé 
d'embrasser.  Appelé  ,  en  1781  ,  i\ 
occuper  la  chaire  d'antiquités  chré- 
tieimesdansl'universitéde  Naples, 
ses  nouveaux  devoirs  lui  firent  é- 
tendre  le  cercle  de  ses  recherches. 
Il  examina  en  observateur  éclairé 
les  archives  et  le»  monumens,  en 
recueillant  des  renseignemens  pré- 
cieux pour  un  cours  d'antiquités 


PEL 


»»9 


qu'il  se  proposa  de  rédiger  à  l'u- 
sage de  ses  élèves.  Sous  l'admi- 
nistration du  roi  Joachim  {voy. 
Murât)  ,  il  fut  nommé  professeur 
de  diplomatique  à  l'université , 
président  du  jury  d'examen,  et  vi- 
caire-général de  l'église  de  Naples. 
Ses  concitoyens  lui  donnèrent 
une  preuve  encore  plus  éclatante 
de  leur  estime,  en  le  proclamant 
membre  du  nouveau  parlement 
pendant  le  règne  momentané  de  la 
constitution  napolitaine.  Pclliccia 
ne  survécut  pas  long-temps  aux 
nouveaux  événemens  politiques; 
il  mourut  le  28  décembre  1822.  Ses 
ouvrages  sont  :  x'dePublicâ  et  pri- 
vât â  prece  pi'o  principibas,  Naples, 
1789,  in -8°  :  cet  ouvrage  parut 
d'abord  en  italien,  en  1760,  fut 
traduit  en  latin  par  l'auteur  lui- 
même,  à  qui  l'impératrice  Marie- 
Thérèse  l'avait  fait  demander  pour 
le  faiie  adopter  dans  ses  états  ;  on 
en  fit  aussi  une  traduction  alle- 
mande. 3"  Corso  di  antichità  eccle- 
siastiche ,  ibid.,4  vol.  in-8°:  c'est 
un  cours  complet  de  discipline 
ecclésiastique  pendant  le  moyen 
âge  ;  il  y  explique  avec  beaucoup 
de  jugement  et  d'érudition  l'ori- 
gine et  l'usage  des  catacombes  de 
Naples ,  dont  il  donne  plusieurs 
plans  et  rapporte  diverses  inscrip- 
tions; 3°  Cronache  e  diarj  del  regno 
di  Napoli  :  la  plupart  de  ces  pièces 
étaient  inédites;  l'auteur  les  a  en- 
richies de  notes  et  de  dissertations, 
ibid. ,  5  vol.  in-4";  elles  font  suite 
ù  la  collection  des  historiens  de 
Naples,  imprimée  par  Gravier; 
4"  Dissertazione  sul  ramo  degli 
Appennini ,  che  ter  mina  dirim  petto 
ail'  isola  di  Capri,  ibid.,  in-8"  ; 
5"  Dissertazione  sopra  Cantica  città 
di  Equa,  ibid. ,  in-8';  6"  Disserta' 


1 20  PEL 

zione  sutvero  signlficato  délia  SHEOt 
del  teste  ehrnico,  ihid.  ,  in  -  8"  ; 
y"  delCtilto  délia  clùesn  greca  verso 
la  Verqive,  ibi'l, .  1820,  in  -  8°; 
8°  IsUtuzlnni  drlla  scievza  diploma- 
ticn ,  dont  il  n'a  parn  que  le  1"  vo- 
lume en  i8i5.  Le  marquis  de  iMaf- 
fei  s'était  engafré  de  composer  un 
cours  de  diplomatique,  qu'il  ne 
publia  jamais;  l'ouvrap^e  de  Pel- 
liccia  aurait  fait  moins  rep-retter 
celte  perte,  s'il  eût  élé  achevé. 
9'  la  Topografia  di  Napoll  e  sob- 
borgln  dal  fecolo  sesto  al  qnindl- 
cesimo  ;  10"  Origine  e  vicevde  délie 
proprietà,  délia  chiesa  de  Longo- 
bardi.  Ces  deux  derniers  ouvrages 
ne  sont  point  imprimés. 

PELLICIER  (dos  Jean-Antoi- 
ne), savant  espagnol,  bililiothé- 
caire  de  Charles  III,  et  membre 
de  l'académie  royale  des  sciences, 
naquit  à  Valence  en  1  758.  Il  fit  de 
brillantes  études  à  l'université  de 
Salamanque,  et  se  fit  connaître 
comme  un  des  houimes  les  plus 
instruits,  parliculièremont  dans 
l'histoire  et  les  antiquités.  Char- 
les III  l'appela  à  Madrid,  et  lui 
témoigna  constamment  la  plus 
grande  bienveillance.  Pellicier 
mourut  dans  cette  ville  en  1806. 
Parmi  les  ouvrages  eu  assez  grand 
nombre  qu'il  a  laissés,  on  remar- 
que les  suivans  :  1"  Essai  d'une 
bibliothèque  de  traducteurs  espa- 
gnols, >Iadrid,  1778,  iu-4'',  avec 
une  Notice  sur  les  f^ies  des  plus 
célèbres  poètes  espagnols,  et  des 
Observations  sur  l'histoire  littérai- 
re de  'l'hsj'agne,  ouvrage  très-ins- 
trui'lif;  '2  Histoire  de  la  biblio- 
thèque royale,  avec  une  Notice  sur 
les  bibliothécaires  et  autres  écri- 
vains :  cet  ouvrage,  que  l'auteur 
termina  en  i8oo,  ne  put  être  mis 


PEL 

sou»  presse  qu'en  1808.  Pellicier 
a  donné  une  édition  magnifique 
de  Don  Quichotte,  et  est  le  pre- 
mier, dit  on,  qui  ait  fait  connaître 
la  véritable  patrie  de  Cervantes  : 
il  serait  né  à  Alcala-de-Hfcnarès,  à 
4  lieues  de  Madrid. 

PELOUX(N.), député  suppléant 
du  lit-rs-état  de  la  sénéchaussée  de 
Marseille  aux  états-généraux ,  ei> 
1789,  ne  prit  séance  à  l'assemblée 
nationale  qu'après  la  dén»ission  de 
M.  lloussier.  M.  Peloux.quine 
fut  point  réélu  aux  assemblées 
suivaiitos,  se  trouvant  i\  Marseille 
peu  après  le  3i  mai  I7Ç)3,  em- 
brassa avec  chaleur  la  défense  des 
députés  de  la  Gironde,  proscrits 
à  la  suite  de  cette  journée.  Le  12 
juin  suivant,  il  signa,  en  qualité 
de  président  du  Cf»n)ilé  général 
des  sections  de  Marseille,  une 
proclamation  adressée  à  tons  les 
citoyens  français  ,  proclamatioi> 
dans  laquelle  le  comité  annonçait 
qu'il  ne  reconnaissait  plus  la  con- 
vention nationale.  Cette  adresse, 
rédigée  avec  beaucoup  d'énergie, 
produisit  une  grande  sensation; 
mais  ses  résultats  ne  furent  pas 
favorables  à  ceux  qu'on  voulait 
sauver.  M.  Peloux  parvint  à  se 
soustraire  à  l'ordre  qui  fut  donné 
de  l'arrêter.  Il  mourut  l'année 
suivante. 

PELÏIER  (Jean),  écrivain 
politique  et  journaliste  français  à 
Londres,  est  né  à  Nantes,  où  son 
père  avait  ime  maison  de  com- 
merce. Venu  jeune  à  Paris  pour 
achever  son  éducation,  il  s'y  trou- 
vait à  l'époque  de  la  révolution 
en  1789.  Il  en  adopta  d'abord  les 
principes ,  et  il  avoue  lui-même 
dans  ses  écrits,  publiés  en  Angle- 
terre, que  des  réformes  lui  avaient 


TEL 

paru  très-nécessaires;  mais  bien- 
tôt il  changea  d'opinion,  se  lia 
avec  Hivarol,  Chanipcencts,  Mi- 
rabeau jenne,  et  lança  «Jans  le  pu- 
blic quelques  pamphlels  assez  pi- 
quans.  Le  premier,  pubiit'  vers  la 
fin  (le  1789,  et  dirigé  contre  l'as- 
semblée constituante,  était  intitu- 
lé :  Sauvez-  nous  ou  sauvez-vous. 
Dans  un  autre,  portant  pour  titre  : 
Domine  salvum  fac  Regem ,  il  at- 
taquait vioUinment  le  duc  d'Or- 
léans. iMirabeau  l'aîné,  et  plusieurs 
députés,  sans  apporter  cependant 
d'autres  preuves  à  ses  assertions 
que  des  sarcasmes  et  des  injures. 
Il  travailla  enstiite,  de  C'incert 
avec  ses  amis  et  les  trois  collabo- 
rateurs cités  ci-dessus,  aux  fa- 
meux Acles  des  Apôtres ,  où  les 
hommes  les  plus  marquans  de 
l'époque  étaient  successivement 
mis  en  scène ,  et  tournés  en 
ridicule  d'une  manière  plus  ou 
moins  plaisante.  Après  la  jour- 
née du  10  août  1792,  il  s'enfuit 
en  Angleterre  ,  et  échappa  ainsi 
au  sort  de  s(m  ami  le  marquis 
de  Champcenels.  Il  y  publia  deux 
volumes  de  mémoires  sur  cette 
révolution,  réimprimés  après  le  9 
thermidor  en  France,  mais  qui 
ne  firent  pas  une  grande  sensa- 
tion ni  dans  l'un  ni  dans  l'autre 
pays.  Après  avoir  ensuite  donné 
une  série  de  pamphlets  sous  le 
litre  de  Tableau  rie  Paris  depuis 
Vannée  lyQ^  jusqu'en  1802,  il  en- 
treprit avec  plusieurs  émigrés 
français  un  ouvrage  périodique 
en  règle,  intitulé  :  L'Ambigu, 
qui  a  été  continué  jusqu'en  ces 
(itrniers  temps,  et  dont  la  collec- 
tion entière  formerait  près  de  100 
volumes.  L'orgueil  national  des 
Anglais  était  journellemeot  carea- 


PEL  121 

se  dans  cette  feuille,  et  la  maniè- 
re dont  les  événemens  qui  se  pas- 
saient en  France  étaient  représen- 
tés, ainsi  que  les  attaques  dirigées, 
dès  le  premier  numéro  ,  contre 
le  premier  consul  Bonaparte  ,  et 
depuis  contre  Napoléwn  empe- 
reur, dcmnèrent  une  grande  vo- 
gue à  l' Ambigu,  non-seulement 
en  Angleterre,  mais  dans  toutes 
les  parties  du  continent  qui  n'é- 
taient pas  soumises  à  l'influence 
française.  Personne  n'a  publié  en 
Europe  des  diatribes  plus  violen- 
tes contre  le  chef  du  gouverne- 
ment français,  que  M.  Pellier. 
Il  est  vrai  que  dans  la  position 
inexpugnable  où  l'écrivain  se 
trouvait  à  Londres,  il  pouvait 
le  braver  sans  courir  le  moindre 
risque.  Après  la  paix  d'Amiens , 
on  fit,  à  la  vérité,  des  démarches 
auprès  du  gouvernement  anglais, 
pour  imposer  quelques  digties  à 
ce  torrent  d'injures,  mais  il  fut 
répondu  que  la  nature  de  la  lé- 
gislation britannique  ne  permet- 
tait pas  de  donner  à  la  liberté  de 
la  presse  de  pareilles  entraves; 
que  d'ailleurs  la  voie  des  tribu- 
naux était  ouverte  à  quiconque 
se  trouvait  calomnié.  Ce  moyen 
fut  en  eflét  employé,  et  M.  Pel- 
tier,  accusé  devant  la  cour  du 
banc  du  roi,  où  il  fut  défendu  par 
un  des  plus  célèbres  avocats  du 
barreau  anglais,  M.  iMa(;kintosh , 
se  vit  condamner  comme  calom- 
niateur, à  un  dédommagement 
pécuniaire  et  aux  frais  de  la  pro- 
cédure. Une  souscription  publi- 
que, ouverte  dès  le  même  jour, 
et  presqu'aussitôt  remplie,  aurait 
fourni  au  journaliste  le  moyen 
de  payer  l'amende  à  iaquelie  il 
était  condamné ,  mais  la  guerre 


123  PEL 

qui  éclata  de  nouveau  entrn  la 
France  et  l'Angleterre  empêcha 
le  jugement  d'être  exéculé.  La 
feuille  de  M.  Peltier  eut  un  dé- 
bit encore  plus  considérable  après 
ce  procèvS;  il  y  joignit  la  relation 
de  la  procédure  entière ,  et  sous 
prétexte  de  taire  connaître  le 
corps  du  délit,  il  trouva  l'occasion 
de  commenter  et  de  répandre  avec 
profusion  tous  les  articles  qui  l'a- 
vaient fait  mettre  eu  cause.  Ses 
feuiliesélaient  ornées  d'une  vignet- 
te représentant  le  Sphinx  avec  la 
tête  de  l'empereur,  et  entouré  de 
figures  hideuses,  emblème  de  tous 
les  vices.  M.  Peltier  a  fait  valoir  ses 
nombreuses  productions  périodi- 
ques, comme  autant  de  preuves 
de  son  dévouement  à  la  maison 
de  Bourbon  ,  et  il  est  revenu  deux 
fois  en  France ,  d'abord  après  la 
première  restauration  eu  i8i4» 
et  ensuite  à  la  fin  de  i8i5,  pour 
jouir  des  récompenses  qu'il  croyait 
lui  être  légitimement  dues.  Mais 
n'ayant  point  obtenu  tout  ce  qu'il 
désirait,  il  paraît  avoir  abandonné 
tout-à-fait  son  ingiate  patrie,  pour 
s'établir  en  Angleti-rre,  où  il  a  é- 
pousé  une  femme  du  pays,  et  où 
il  jouit  d'une  pension  du  gouver- 
nement. Ce  secours  et  le  produit 
de  ses  ouvrages  étant  bien  loin 
de  suffire  à  une  existence  très- 
dispendieuse,  il  s'était  rendu  l'a- 
gent diplomatique  et  le  chargé 
cl'affairesdu  roi  noir  de  Haïti,  Hen- 
ri I*'  (le  nègre  Christophe),  auprès 
du  gouvernement  britannique.  Ce 
souverain,  tant  que  dura  son  règne 
éphén)ère,  payait  les  honoraires 
de  son  jninistre  en  bonnes  car- 
gaisons de  sucre  et  de  café.  Celte 
niission  d'un  genre  nouveau  ,  et 
les  conlradiclions  où  tombait  sans 


PEL 

cesse  un  publiciste  passant  du 
blanc  au  noir,  et  chargé  en  dernier 
lieu  d'établir  les  droits  légitime? 
d'un  esclave  couronné,  devinrent 
une  source  inépuisable  de  plai- 
santeries pour  les  adversaires  de 
M.  Peltier.  La  constitution  et  les 
loi.''  organiques  du  royaume  d'Haïti 
fureiit  insérées  tout  au  long  dans 
l'Ambigu:  les  hautes  qualités  du 
monarque  et  de  son  fils  le  prince 
royal  furent  aussi  convenablement 
célébrées.  Ils  succombèrent  mal- 
heureusement tous  deux,  et  leur 
fin  tragique  mit  un  terme  à  la 
mission  du  diplomate.  On  n'a 
point  appris  que  le  président 
Boyer,  qui  a  succédé  au  pouvoir 
dans  l'île  d'Haïti,  ait  encore  cher- 
ché à  se  légitiiner  auprès  de  M. 
Peltier  par  des  cargaisons  de 
denrées  coloniales.  On  a  de  cet 
écrivain  :  i"  Sauvez-nous,  etc.,  Pa- 
ris, 1789,  in-8°;  '2° Domine  salvum 
fac  regem,  avec  Pange  lingua, 
Paris,  1789.  in-S";  3°  Jetés  des  A- 
pâtres,  Paris,  1790,  (t  années  sui- 
vantes,'11  vol.  in-8";  /i"  Dernier 
tableau  de  Paris,  ou  Précis  de  la 
révolution  du  10  août  et  du  2  sep- 
tembre, des  causes  qui  l' ont  pro- 
duite, des  événemens  qui  l'ont  pré- 
cédée, et  des  crimes  qui  l'ont  suivie, 
Londres,  1792,  et  Paris,  1797, 
2  vol.  in-8°  ;  .5"  Histoire  de  la 
restauration  de  la  monarchie  fran- 
çaise,  ou  la  campagne  de  1795, 
publiée  en  forme  de  correspondan- 
ce,  Londres,  17955  f^°  Courrier 
de  l'Europe,  ensuite  Courrier  de 
Londres,  et  enfin  Tableau  de  l'Eu- 
rope pendant  1794  ^t  1795,  Lon- 
dres, 2  vol.  in-8°;  7°  Paris  pen- 
dant les  années  de  179.^  à  1802,  260 
numéros,  formant  55  vol.  in- 
8"  ;   8°  Tableau  du  massacre  des 


PÉM 

tninislres  du  culte  catholique  aux 
Carmes  et  à  l'Abhaye  Saint-Ger- 
main, Lyon,  1797:  (y  Naufrage 
du  brigantin  américain  le  Commer- 
ce, publié  par  J.  l^iley,  traduit 
de  ranf!;lais,  Londres,  1817,  2 
Tol.  in-8°;  10°  l' Ambigu ,   etc. 

PÉMARTIN  (Joseph),  né  le 
19  janvier  ij54,  exerçait  à  Oleron 
la  profession  d'avocat,  lorqu'il  fut 
♦;lu  ,  en  1 789 ,  par  le  tiers-état  du 
Béarn  ,  député  aux  états  -  géné- 
raux en  1789.  Il  sortit  de  rassem- 
blée nationale  sans  s'y  être  fait  re- 
marquer, ce  qui  ne  l'empêcha  pas 
d'être  nommé,  en  1792,  député 
à  la  convention  parle  département 
des  Basses-Pyrénées.  Il  vota  dans 
le  procès  de  Louis  XVI  pour  la 
détention  pendant  la  guerre,  et  le 
bannissement  à  la  paix.  Appelé 
deux  fois  au  comité  de  sAreté  gé- 
nérale ,  après  la  révolution  du  9 
thermidor  an  2,  il  en  faisait  par- 
lie  lors  de  l'insurrection  du  12 
germinal  an  4  »  et  fut  chargé  de 
faire  un  rapport  sur  les  événemens 
de  cette  journée.  Au  mois  de  sep- 
tembre suivant,  compris  dans  la 
réélection  des  deux  tiers  ,  il  passa 
de  la  convention  au  conseil  des 
cinq-cents,  dont  il  sortit  ,  le  20 
mai  1798,  et  où  il  fut  réélu  en  1799; 
enfin  il  se  vit  privé  des  ses  fonc- 
tions par  la  révolution  du  18  bru- 
maire an  8.  Néanmoins  il  entra 
bientôt  au  nouveau  corps-législa- 
tifs ,  fut  porté ,  au  mois  de  mars 
1806,  comme  candidat  pour  la 
questure,  et  nommé  vice-])rési- 
dent,  en  décembre  1809.  Réélu 
par  le  sénat,  en  1810,  il  lit  partie 
du  corps  -  législatif  jusqu'au  20 
mars  181 5.  M.  Pémartin  n'a  point 
été  appelé  aux  chambres  qui  se 
sont    succédé   depuis  celte  épo- 


PEN 


123 


que.  Il  est  chevalier  de  la  légion- 
d'honneur. 

PEMBERTON  (Thomas),  com- 
merçant et  littérateur  américain  , 
d'une  famille  distinguée  de  Boston, 
où  il  naquit  en  1728,  fut  destiné 
par  son  père  au  commerce,  lapins 
noble  profession  dans  un  état  ré- 
publicain; il  rendit,  en  cette  qua- 
lité, des  services  importuns  à  sa 
patrie.  Il  lui  fut  encore  utile  par 
ses  connaissances  littéraires,  lors- 
qu'il cessa  d'exercer  sa  profession. 
Membre  de  la  société  historique 
de  Massachussetts,  il  lui  légua 
tous  ses  manuscrits.  Il  avait  com- 
posé une  Chronologie  du  pays  de 
Massachussetts  pendant  le  1 8'  siècle. 
Cet  ouvrage,  en  5  volumes  ma- 
nuscrits, contient  tous  les  événe- 
mens importans  de  chaque  année, 
et  ime  biographie  historique  des 
hommes  qui  se  sont  le  plus  distin- 
gués. Le  docteur  Holmes  a  beau- 
coup profilé  de  cet  important  Iva- 
\a\\.LesMémoirestiNoticesdc?em 
bertonformenlenvironi5  volumes. 
Cet  hontjrable  citoyen  mf)urut  gé- 
néralement regretté, le  5  juillet  1807. 

PENDLETON  (  Edmond  ) ,  sur- 
nommé par  ses  concitoyens  le  Pa- 
triarche, naquit  à  la  Virginie  ,  et 
devint,  en  1774?  membre  du  pre- 
mier congrès.  Réélu  en  iy^^^  il 
refusa  celle  no\ivelle  preuve  de 
confiance  dans  ses  lumières  et  son 
patriotisme  ,  à  cause  de  la  faiblesse 
de  sa  santé.  En  1787,  Pendleton 
devint  président  de  la  convention 
de  Virginie,  au  moment  où  cet 
état  concourait  à  la  constitution  de 
l'indépendance  américaine.  Son 
nom  ,  ses  talons  ,  son  dévouement 
à  sa  patrie  aidèrent  puis-^amment 
à  faire  adopter  celle  constitution. 
Washington    nomma,   en   1789, 


124 


PEN 


Pendli'ton  juge  de  Virginie  ,  place 
honorable  qu'il  se  vit  dans  Tiuipos- 
sibiiilé  d'accepter.  Des  dilléreus 
s'étant  élevés  en  irgS  entre  le  gou- 
vernement américain  et  le  gouver- 
nement français,  le  Patriarche  pu- 
blia un  Discours  dans  lequel  il  pro- 
testait «  contre  la  guerre  avec  un 
•  pays  fait  pour  être  toujours  ami 
«de  l'Amérique.  »  Cet  excellent 
citoyen  mourut  dans  sa  SS"  an- 
née, le  2(J  octobre  i8o3;  il  était 
alors  président  de  la  cour  d'appel 
de  Virginie,  où  il  avait  été  juge 
avec  les  célèbres  Blair  et  >Vhyte. 
Pendleton  fut  regretté  de  tous  ses 
concitoyens,  et  des  Français,  dont 
il  avait  mérité  la  haute  estime. 

PEÎN  lÈRES  (  Jean  -  Augistin  ) , 
membre  de  plusieurs  assemblées 
législatives  ,  était  garde-du-corps 
à  l'époque  de  la  révolution,  dont 
il  adopta  les  principes  avec  cha- 
leur. Le  département  de  la  Cor- 
rèze  le  nomma,  au  mois  de  sep- 
tembre 1791,  député  à  l'assemblée 
législative,  où  il  se  fit  peu  remar- 
quer. Le  même  département  le 
réélut,  en  septembre  1  792  ,  à  la 
convention  nationale.  Au  mois  de 
novembre  de  la  même  année  ,  il 
s'opposa  avec  force  à  la  réunion 
de  la  Savoie  à  la  France  ,  préten- 
dant qu'une  trop  grande  extension 
de  territoire  entraînerait  de  graves 
inconvéniens.  Lors  du  procès  du 
roi,  il  se  réunit  à  la  majorité,  et 
demanda  en  même  temps  l'aboli- 
tion de  la  peine  de  mort.  Dès  ce 
moment,  il  se  montra  opposé  à  la 
majorité,  et  osa  proposer,  au  mois 
de  février  1795,  que  Marat  fût  re- 
gardé et  traité  comme  atteint  de 
maladie  mentale.  Par  suite  de  la 
défection  de  Dumouriez,  il  atta- 
qua Danton  et  Lacroix,  fondant 


PEN 

son  accusation  sur  les  rapporfs 
qu'ils  avaient  eus  avec  ce  général. 
11  combattit  avec  une  grande  éner- 
gie, au  mois  de  mai,  les  signataires 
de  la  pétition  par  laquelle  ils  de- 
mandaient la  fête  de  22  des  mem- 
bres du  parti  de  la  Gironde.  Son 
courage  faillit  le  compromettre  lui- 
même.  Ses  23  collègues  furent  dé- 
crétés d'arrestation  le  surlende- 
main, et  il  dut  de  n'être  point 
proscrit  au  silence  qu'il  s'imposa 
depuis  cette  époque  jusqu'à  la  ré- 
volution du  9  thermidor  an  2  (  27 
juillet  )794)-  Alors  il  reprit  sou 
énergie,  s'associa  à  toutes  les  pro- 
positions qui  avaient  pour  objet 
de  réparer  les  maux  du  régime  de 
la  terreur ,  et  demanda  que  ceux 
des  membres  de  la  convention  qui 
avaient  échappé  à  la  mort  fussent 
rappelés  aux  fonctions  législatives. 
Le  12  germinal  an  3  (i" avril  1795), 
il  fut  envoyé  par  l'assemblée  pour 
réprimer  le  mouvement  insurrec- 
tionnel de  la  section  des  Thermes. 
Sa  mission  fut  méconnue  des  sé- 
ditieux, cl  il  faillit  être  atteint  des 
coups  de  fusil  qu'on  tira  sur  lui. 
De  retour  dans  l'assemblée,  il  ren- 
dit compte  de  ce  qui  s'était  passé 
à  cette  section ,  et  demanda  par 
suite  de  ces  événemens  auxquels 
n'étaient  pas  étrangers  plusieurs 
membres  de  la  convention  ,  qu'elle 
s'épurât  elle-même;  il  insista  forte  - 
ment  pour  la  déportation  de  tous 
ceux  qui  s'étaient  opposés  à  l'éloi- 
gnement  de  Collot  -  d'Herbois  , 
Billaud  -  Varennes  et  Barrcre. 
Au  i3  vendémaire  an  4  (  ^^  octo- 
bre 1795),  il  se  montra  intrépide 
à  son  poste,  et  concourut  à  re- 
pousser l'attaque  des  sections  in- 
surgées. Il  devint  membre  du  con- 
seil des  cinq-cents  par  suite  de  la 


PEN 

réélection  des  deux  tiers  conven- 
tionnels, et  y  soutint  honorable- 
ment le  caractère  que  depuis  le  3i 
mai  il  avait  déployé,  lléélu  immé- 
diatement après  sa  sortie, en  1797, 
il  combattit,  eu  octobre,  le  projet 
contre  les  nobles.  Partisan  de  la 
révolution  du  18  brunjaire  an  8 
(  9  novembre  1 799  ) ,  il  passa  au 
tribunat,  et  devint,  en  1807,  mem- 
bre du  corps-législatif.  iM.  Peniéres 
ne  fixa  plus  l'attention  publique 
que  par  son  élection  à  la  chambre 
des  représentans  pendant  les  cent 
Jours,  en  18 15.  Dans  cette  assem- 
blée il  s'opposa,  le  28  juin,  à  la 
proposition  qui  avait  pour  but  d'a- 
dopter la  constitution  de  1791,  et 
demanda  ,  le  4  juillet ,  que  les  trois 
couleurs  fussent  mises  sous  la  sau- 
ve-garde de  l'armée  et  de  tous  les 
citoyens.  Forcé  par  la  loi  du  1  a  jan- 
vier 1816,  rendue  contre  les  con- 
ventionnels dits  votans,de  sortir  de 
France  ,  il  s'embarqua  à  Bordeaux 
et  se  retira  aux  États-  Unis,  où  il 
mourut  en  1820. 

PENNANT  (Thomas),  célèbre 
naturaliste  anglais,  naquit,  eu 
1726,  dans  le  comté  de  Flint,  et 
fit  ses  études  à  l'université  d'Ox- 
ford. L'histoire  naturelle  fixa  par- 
ticidièrement  son  attention  ,  et  les 
progrès  qu'il  fit  dans  l'étude  de 
cette  science  turent  rapides.  Il  visi- 
ta successivement  les  provinces  de 
l'Angleterre  qui  lui  parurent  les  plus 
propres  à  augmenter  les  connais- 
sances qu'il  avait  déjà  acquises; 
il  vint  en  France  ,  où  il  eut  de  fré- 
qucns  entretiens  avec  Voltaire  et 
liulfon.  De  retour  dans  sa  patrie, 
il  fit  un  nouveau  voyage  aux  lié- 
brides,  à  l'île  de  Man  et  dans  le 
pays  de  Galles,  et  consigna  ses 
découvertes  dans  la  relation  qu'il 


PEN 


laS 


donna  de  ses  diflérens  voyages.  Ce 
savant,  que  l'on  peut  considérer 
comme  un  de  ceux  qui  ont  le  plus 
contribué  à  répandre  en  Angle- 
terre le goCitde  l'histoire  naturelle, 
mourut  en  1798.  Indépendam- 
ment de  la  relation  de  ses  voya- 
ges, il  a  publié  un  grand  nombre 
de  Mémoires  insérés  dans  les  Tran- 
sactions pliilosopliiques  ,  et  plu- 
sieurs autres  ouvrages,  parmi  les- 
quels on  distingue  :  1°  VIndian 
Zoology  ;  2°  Histoire  des  quadru- 
pèdes. Ces  ouvrages,  écrits  avec 
méthode  et  (îlarté,  sont  estimés. 

PENTHIEVRE  (  Locis-  Jean- 
Marie  de  BouKBON,  DUC  de),  grand- 
amiral  de  France,  etc. ,  descendant 
de  Louis  XïV,  dont  son  père,  le 
comte  de  Toulouse,  était  fils  na- 
turel; il  naquit  le  iG  novembre 
1725.  La  vie  de  ce  prince  fut  un 
enchaînement  de  bonnes  actions  ; 
il  avait  l'esprit  orné  et  l'âme  gran- 
de ;  la  base  de  son  caractère  était 
la  douceur  et  l'aménité.  Appelé 
par  son  rang  à  la  profession  des 
armes,  il  fit  sa  première  campa- 
gne dans  la  guerre  de  la  succes- 
sion, en  1742,  et  se  trouva  à  la 
bataille  de  Dettingen,  oi'i  il  se  con- 
duisit avec  distinction.  Il  épousa, 
en  1744  1  li*  fille  du  duc  de  Modè- 
ne  ,  princesse  dont  les  dispositions 
bienfaisantes  et  le  caractère  doux 
et  sounns  firent  le  charme  d'une 
union  vraiment  symj)athique.  En 
1746,  au  moment  où  les  Anglais 
paraissaient  vouloir  opéier  une 
descente  en  Bretagne  ,  le  duc  de 
Penthièvre  fut  nommé  gouverneur 
de  celte  province,  puis  élevé  à  lu 
dignité  de  grand-arniral.  Les  états 
de  Bretagne  venaient  d'être  assem- 
blés ;  il  y  parut ,  et  fut  aussitôt  en- 
vironne de    la   considération   que 


126 


PEP 


mérifaientses  qualités  étninçntes  et 
sa  haute  naissance.  La  paix  ayant 
été  conclue,  en  174^?  ^^  prince 
revint  à  Paris ,  où  il  contribua 
beaucoup  au  rétablissementduduc 
de  Modèue,  son  beau -père,  qui, 
s'étant  déchiré  contre  la  France, 
avait  perdu  ses  états  par  les  chan- 
ces de  la  guerre.  La  mort  de  son 
épouse,  arrivée  en  1754,  lui  causa 
une  vive  afiïiction ,  et  dès  ce  mo- 
ment la  bienfaisance  fut  presque 
exclusivement  l'occupation  du  res- 
te de  sa  vie.  Ce  noble  exemple  de- 
■vint  celui  que  se  plut  à  suivre  son 
illustre  fille,  M""  la  duchesse  douai- 
rière d'Orléans.  A  la  suite  d'un 
voyage  dans  ses  domaines  d'Ku, 
en  1776,  il  fit  construire  à  ses  frais 
une  écluse  de  chasse  au  Tréport, 
afin  de  faciliter  dans  le  port  de  ce 
bourg,  situé  à  quelques  lieues  de 
Dieppe,  l'arrivage  et  le  départ  des 
navires.  Le  duc  de  Penthièvre 
mourut  le  4  mars  1793. 

PÉPÉ  (  Klobestan),  lieutenant- 
général  napolitain ,  grand'croix 
de  l'ordre  de  Saint-Georges  de  la 
réunion,  grand-cordon  de  celui 
de  Saint-Ferdinand  ,  chevalier  de 
la  légion-d'honneur,  elc,  naquit 
en  1780,  d'une  boinie  famille  de 
Squillace,  ville  de  la  Calabre  ulté- 
rieure. S'étant  décidé  pour  la 
carrière  des  armes,  il  alla,  à  l'â- 
ge de  17  ans,  achever  ses  é- 
tudes  à  Naples  ,  dans  le  collège 
militaire.  Nommé  sous  -  lieu- 
tenant dans  un  régiment  d'in- 
fanterie peu  avant  la  campagne 
de  1798,  il  fut  témoin  de  la  dis- 
solution de  l'armée  napolitaine, 
et  de  la  chute  de  son  gouverne- 
ment. Il  passa  dans  les  rangs  do 
la  nouvelle  république,  dont  il 
fut  un  zélé  partisan.  Blc.^sé   dans 


PEP 

un  dernier  combat  livré  aux  por- 
tes de  la  capitale  contre  les  ban- 
des du  cardinal  Ruffo,  il  se  jeta 
dans  un  fort,  et  profitant  de  la 
capitulation  accordée  à  la  garni- 
son française,  il  vint  en  France,  et 
s'enrôla  en  qualité  de  simple  vo- 
lontaire dans  la  légion  italienne  , 
avec  laquelle  il  fit  les  campa- 
gnes de  1800  et  de  1801.  Après 
le  traité  de  Florence ,  il  rentra 
dans  sa  patrie,  où  il  vécut  dans 
la  retraite  jusqu'à  l'année  180G, 
que  les  Français  firent  de  nou- 
veau la  conquête  du  royaume 
de  Naples.  Promu  au  grade  de 
major  des  gardes  provinciales 
en  Calabre,  il  ne  put  se  rendre  à 
son  poste,  à  cause  de  l'insurrec- 
tion qui  s'était  manifestée  dans 
ces  provinces.  Il  demanda  et  ob- 
tint d'assister,  comme  volontaire^ 
au  siège  de  Gaële,  sous  les  or- 
dres du  maréchal  Masséna  ,  qu'il 
suivit  aussi  en  Calabre.  Ce  géné- 
ral fut  rappelé  en  France,  et  Pépé, 
nommé  d'abord  commandant  d'ar- 
mes à  Gaële,  prit  ensuite  le  com- 
mandement militaire  de  la  pro- 
vince de  Molise,  où  il  rendit  des 
services  importans  lors  de  l'insur- 
rection de  1809.  L'année  suivan- 
te il  fut  attaché  en  qualité  de 
chef  d'état-major  à  la  division 
napolitaine  envoyée  en  Espagne, 
et  fit  les  campagnes  de  1810  et 
181 1,  en  Catalogne, sous  les  ordres 
des  maréchaux  Macdonald  et  Su- 
chet.  Ce  dernier  voulant  récom- 
penser la  bravoure  montrée  par 
cet  oflicier  à  la  prise  de  Tarrago- 
ne,  échangea,  d'après  sa  demande, 
les  prisonniers  napolitains,  et  lui 
obtint  la  croix  de  la  légion- 
d'honneur  :  il  le  chargea  de  con- 
duire  en  France    le  général   es- 


pag'nol  Blake,  fait  prisonnier  an 
fiége  de  Valence.  Après  s'être  ac- 
quitté de  celle  commission,  Pépé 
revintà  Naples  ,  oùle  roi  Joachim 
{voy.  iMtRAT)l'élevaaii  grade  de  gé- 
néral de  brigade,  et  le  nomma  chef 
derétal-majordeladivisioiuiapoli- 
taine,  qui  devait  faire  partie  do  la 
grande-armée.  Il  la  rejoignit  à  Vé- 
ronne,etlaconduisilà  Dantzick,où 
il  arriva  eu  octobre  1812.  Étant  venn 
àWiliiaponry  attcndreJoachim,il  y 
prit  le  commandement  de  la  briga- 
de de  cavalerie  napolitaine,  atta- 
chée à  la  division  Loison,  chargée 
d'ouvrir  les  communications  de  la 
grande -année.  C'est  avec  les  dé- 
bris de  ces  régimens  qu'il  escorta 
l'empereur  Napoléon  d'Osmiana 
jusqu'à  Wilna  :  legénéral  Pépé  per- 
dit dans  ce  court  trajet  plus  de  la 
moitié  de  ses  soldats,  et  eut  lui- 
même  un  de  ses  pieds  gelé. 
Malgré  son  état,  il  ne  voulut  pas 
se  séparer  de  ses  camarades,  pré- 
férant de  s'enfermer  avec  eux  à 
Dantzick,  plutôt  que  de  regagner 
ses  foyers.  A  peine  ses  plaies  fu- 
rent-elles fermées,  qu'il  reprit  son 
service,  et  fit  plusieurs  sorties, 
dans  une  desquelles  (celle  du  27 
septembre)  il  osa  [lénétrer  à  la  tête 
d'un  régiment  napolitain  jusqu'au 
centre  du  quartier-général  russe, 
à  Pitzkendorfî.  Avant  la  capitu- 
lation de  Dantzick,  il  fut  de  l'avis 
de  ceux  qui  proposaient  de  s'ou- 
vrir un  chemin  l'épée  à  la  main  ; 
mais  l'opinion  contraire  prévalut. 
Lorsque  le  général  russe  viola  la 
convention  qu'il  venait  de  signer 
avec  le  gouverneur  de  la  place,  le 
général  Pépé  se  rendait  prison- 
nier en  Russie;  bientôt  de  nou- 
veaux rapports  entre  Joachim  et 
l'empereur  Alexandre  décidèrent 


PEP  127 

autrement  de  son  sort.  Il  alla  à 
Bologne  auprès  du  roi  de  Naples, 
qui  lui  ordonna  de  partir  immé- 
cîialemenl  pour  les  Abruzzes , 
où  venait  d'éclater  une  forte  in- 
surrection ,  qui  menaçait  d'em- 
braser tout  le  royaume.  Le  géné- 
ral Pépé,  n'ayant  que  2.000  hom- 
mes de  troupes,  et  2  pièces  d'arli!- 
rie,  sut  par  sa  prudence  et  sa 
fermeté,  intimider  les  factieux, 
et  soumettre  sans  violence  les  vil- 
les insurgées.  Ses  services  furent 
payés  d'une  disgrâce,  et  il  resta 
inaperçu  jusqu'au  commencement 
de  ia  campagne  de  i8i5.  On  lui 
oiïVit  alors  le  commandement  d'u- 
ne expédition  maritime,  qui  fut 
contremandée,  et  celui  de  la  4"" 
division  niilitaire,  qu'il  ne  vou- 
lut pas  accepter.  11  se  rendit  au- 
près de  Joachitn,  h  côté  duquel  il 
combattit  à  la  bataille  de  Tolenti- 
no.  Il  en  reçut  le  brevet  de  lieu- 
tenant-général, et  l'ordre  d'aller 
à  Pescara,  pour  y  rassembler,  s'il 
était  possible,  les  fuyards  de  l'ar- 
mée. Il  passa  ensuite  à  Naples, 
dont  il  fut  nommé  gouverneur, 
et  où  il  parvint  à  entretenir  l'or- 
dre et  la  tranquillité  jusqu'à  l'arri- 
vée de  l'armée  autrichienne.  Il 
conserva  son  grade  après  la  res- 
tauration, et  resta  en  disponibili- 
té de  service  jusqu'aux  événe- 
inens  de  juillet  1820.  La  nuit  du 
<)de  ce  mois,  le  général  Guillaume 
i*cpé  {voy.  son  article  plus  bas), 
quitta  !Na}>les,  pour  se  mettre  à 
la  tète  de  l'insurrection  qui  s'était 
déclarée  dans  les  provinces  d'A- 
vellino,  Salerne  et  Foggia.  Il  a- 
vait  caché  ses  projets  à  son  frère, 
qui ,  chargé  par  le  roi  d'annon- 
cer au  général  Carascosa  la  prn- 
me.-.se   d'une  constitution,  el  dtt 


138 


PEP 


taire  suspendre  les  négociations 
entamées  avec  les  chefs  des  ré- 
voltés ,  remplaça  ce  général ,  et 
ramena  dans  la  capitale  l'armée 
qui  devait  agir  contre  celle  de  son 
frère.  Appelé  à  faire  partie  de  la 
Junte  provisoire  de  gouvernement , 
il  n'y  resta  que  jusqu'au  moment 
où  la  révolution  de  Palerme  écla- 
ta. Envoyé  en  Sicile,  pour  recon- 
naître l'état  de  cette  île,  il  s'ac- 
quitta de  cette  commission,  et  re- 
vintà  Naples  prendre  le  comman- 
dement de  l'expédition  ordonnée 
contre  les  insurgés  de  Palerme. 
Les  instructions  qu'il  reput  de  la 
junte  et  du  ministère,  perlaient 
qu'il  devait  occuper  la  Sicile, 
pour  y  garantir  l'ordre  public. 
Les  moyens  mis  à  sa  disposition 
pouvaient  à  peine  atteindre  ce  but; 
mais  ils  auraient  été  insuffisans 
pour  des  opérations  militaires, 
car  il  n'avait  que  G,ooo  hommes, 
les  garnisons  disséminées  dans 
les  places,  et  une  flottille,  com- 
posée en  grande  partie  de  bar- 
ques canonnières.  Le  général 
Pépé  débarqua  le  lo  septem- 
bre à  Messine,  où  il  fit  ses  dispo- 
sitions pour  marcher  sur  Palerme. 
Deux  régimens  étaient  déjà  en 
route,  lorsque  le  prince  de  Villa- 
i'ranca,  seigneursicilien,  qui  avait 
fait  partie  d'une  députation  er>- 
voyée  à  Naples,  pour  y  deman- 
der l'indépendance  de  la  Sicile , 
et  promellre  en  attendant  tm  bon 
accueil  à  l'armée  napolitaine,  se 
présenta  au  quartier-général  de 
Pépé,  pour  le  prévenir  que  l'exal- 
tation de  la  populace  à  Palerme  é- 
tait  à  son  comble,  et  qu'elle  lais- 
sait peu  d'espoir  à  la  junte  de 
celle  capitale  de  pouvoir  tenir  les 
engagemenjî    pris    avec    le    gdu- 


PEP 

vernement  de  Naples.  Celte  com- 
munication mil  le  général  Pépé 
dans  la  position  la  plusdiffi<:ile,  car 
il  se  trouvait  forcé  d'attaquer  une 
ville  qu'il  venait  défendre  :  regar- 
dant néanmoins  comme  un  grand 
bienfait  pour  elle  de  l'aider  à  sor- 
tir de  ran.ircliie  où  elle  était  tom- 
bée; et  se  confiant  moins  dans  le 
nombre  que  dans  r«'sprit  et  la 
discipline  de  ses  soldais,  il  hâta 
son  mouvement  sur  Palerme,  où 
il  devança  de  quelques  jours  la 
flotte  et  l'artillerie  de  siège.  11  fit 
une  attaque  vigoureuse,  et  péné- 
tra dans  une  partie  de  la  ville, 
jusqu'à  la  casine  de  la  Caltolica; 
mais  le  petit  nombre  de  ses  trou- 
pes ,  et  la  natuie  des  obstacles 
qu'il  rencontra,  lui  firent  sentir  la 
nécessité  d'aliendre  Pcscadie  et 
le  parc  d'artillerie.  Il  prit  une  po- 
sition avant.igeuse  aux  environs 
de  la  ville,  et  de  là  il  repoussa  les 
sorties  faites  contre  lui,  et  chassa 
les  insurgés  des  hauteurs  de  la 
vallée  de  Palerme.  Le  2  et  le  5 
octobre,  les  sorties  firent  plus 
fréquentes;  et  les  Palermitains, 
battus  à  plusieurs»  reprise?  par  les 
soldats  de  Pipé,  perdirent  5o 
pièces  de  canon.  Ce  général  crut 
le  njoment  favorable  p-mr  offrir 
une  capitidation  à  la  ville  :  plu- 
sieurs propositions  furent  faites, 
et  divers  olliviers  envoyis  ;  mais 
tous  les  nu)yens  de  coucili.ition 
parurent  épuisés,  lorsque  l'oij  vit 
que  les  parlementaires  étaient 
retenus  ou  repousses.  Dans  cette 
extrémité  le  major  Ciamiulli, 
jeune  officier  de  la  plu^  hante 
distinction,  et  d'une  bravoure  à 
toute  épreuve,  n'ayant  en  vue 
que  le  bien  public,  eut  la  géné- 
reuse audace  de  se  jeter  au  milieu 


PEP 

d'une  populace  effrénée  pour  lui 
porter  les  dernières  paroles  de 
paix.  ïoinbè  dans  les  mains  de 
ce>  furieux,  sa  vie  courut  le  plus 
grand  danger;  mais  les  subju- 
guant par  son  intrépidité  et  par 
ses  discours,  il  les  fit  consentir  à 
le  relâcher,  et  même  à  traiter 
avec  l'armée  napolitaine.  Le  prin- 
ce de  Paterno ,  jouissant  de  la 
confiance  publique,  fut  le  pléni- 
potentiaire sicilien,  eties  généraux 
(Jampana  et  Fardella  négocièrent 
au  nom  du  gouvernement  consti- 
lutionnelde  Naples.  A  défaut  d'un 
terrain  neutre,  on  lut  obligé  d'ou- 
vrir les  conférencessur  un  brick  an- 
glais moiiillédanslarade.  On  signa 
une  convention  militaire,  portant 
<|ue  la  ville  de  Palerme  avec  ses 
forts,  serait  occupée  par  les  trou- 
pes du  général  Pépé,  à  condition 
que  les  rapports  politiques  de  la 
Sicile  avec  Naples  fussent  à  l'ave- 
nir établis  sur  les  bases  annoncées 
par  la  députation  dont  on  a  par- 
lé plus  haut.  Il  n'était  certaine- 
meiitpas  dimslespouvoirsd'un  gé- 
néral de  changer  la  nature  des  rap- 
ports réciproques  entre  deux 
pays;  mais  -es  instruction»,  où  le 
cas  de  cette  prétenlinn  n'avait  pas 
été  prévu,  ne  s'y  opposaient  pas 
explicilement.  Un  relus  de  la  part 
de  Pépé  allait  faire  retomber  Pu- 
lermedans  l'afiaichie,  et  compro- 
mettait la  sftreté  de  son  année, 
affaiblie  par  les  perles  qo'elle  avait 
éprouvées;cnfin,  il  était  hors  d'état 
de  lutter  plus  long-temps  contre 
une  ville  peuplée  alors  d'environ 
200,000  habitans,  ayant  deux  châ- 
teaux, une  enceinte  bastionnée, 
et  protégée  par  200  pièce*  d'ar- 
tillerie. De  sa  décision  dépendait 
en  grande  partie  le  sort  du  gyu- 

T.  XVI. 


PEP 


129 


vernement  napolitain,  qui  avaij 
déjà  plusieurs  autres  ennemis  à 
combattre.  Les  circonstances  é- 
taient  trop  graves  pour  s'enfer- 
mer timidement  dans  le  cercle  é- 
troit  des  form;dités  et  des  devoirs. 
Legénéral  Pépé  le  franchit,  ratifia 
la  capitulation,  et  le  6  octobre, 
il  put  annoncer  au  gouvernement 
de  Naples  que  Palerme  était  oc- 
cupée, et  l'anarchie  éteinte.  La 
douceur  de  son  caractère,  la  dis- 
cipline de  ses  soldats,  firent  que 
le  général  Pépé  fut  aimé  et  esti'^ 
mé  des  Sicilens  ,  qui  ordinai- 
rement n'ont  pas  l'habitude  d'es- 
timer et  d'aimer  les  Napolitains. 
La  nouvelle  de  la  fin  de  cette 
funeste  guerre  civile,  se  ré- 
pandit rapidement  dans  tous  les 
quartiers  de  la  ville  de  Naples, 
et  fut  partout  reçue  avec  les  mar- 
ques les  plus  éclatantes  de  joie 
et  de  satisfaction.  Mais  le  10  no- 
vembre, le  dé|mté  Gabriel  Péj)é 
{voy.  son  article  ci-après),  dans  le 
seindu  parlementdontilétaitmem- 
bre,  fit  une  motion  violente  contre 
Florestan  Pépé,  qui  avait  reconnu 
aux  Siciliens  des  droits  qu'il  n'é- 
tait pas  dans  ses  attributions  d'ac- 
corder ,  tandis  qu'il  aurait  dû  ne 
les  considérer  que  comme  des  su- 
jets rebelles,  et  leur  réserver 
le  même  châtiment  que  la  conven~ 
tion  avait  fait  éprouver  à  Lyon. 
Ce  di>cours,  plein  de  chaleur  et 
de  mouv(;ment,  et  dans  lequel  la 
question  était  présentée  sons  un 
seul  aspect,  qui  était  cebii  du 
droit,  entraîna  toute  l'assemblée, 
en  y  réveillant  les  anciennes  pré- 
ventions contre  les  Siciliens.  Le 
général  Pépé  fut  rappelé  et  accu- 
sé d'avoir  dépassé  ses  pouvoirs  : 
sa  convention  fut  aimtilée  par 
9 


i5o  PEP 

le  purlemcnt,  et  sa  conduite  ap- 
prouvée par  tout  le  monde  ;  le 
roi  même  le  décora  du  grand- 
cordon  de  Saint- Ferdinand,  qu'il 
ne  voulut  point  aocepter,sa  capitu- 
lation n'ayant  pa<  été  maintenue. 
Son  procès  (ut  abandonné,  et  à 
l'approtlie  des  troupes  autrichien- 
nes, il  tut  de  nouveau  rappelé  à 
l'armée  ,  et  revêtu  des  fondions 
de  chcîf  de  l'état- major-général. 
Au  retour  du  roi  dans  ses  états*. 
Florestan  Pépé  fut  destitué  de  son 
grade,  et  dépouillé  de  ses  déco- 
rations; on  ne  lui  conserva  que 
celle  de  Saint-Ferdinand,  qu'il 
n'a  jamais   portée. 

PÉPÉ  (Giillaxime)  ,  frère  du 
précédent,  ex-lieu  tenant -général-, 
grand'croix  de  l'ordre  de  Saint- 
Georg-es  de  la  Réunion  ,  etc. ,  est 
né  à  Squillace,  dans  la  Calahre 
ultéritMue  ,  en  1782.  A  l'âge  de  i5 
ans  il  fut  placé  au  (•ollégc  militaire 
deNaidc^,  où  il  se  trouvait  encore 
lorsque  la  révolutionde  1799 écla- 
ta. Quoiqu'il  n'y  eût  pris  d'autre 
part  que  de  s'enrôler  dans  un  corps 
de  volontaires  calabrais ,  il  n'en 
fut  pas  n»oins  obligé  de  quitter  son 
pays,  et  de  chercher  un  asile  en 
France  contre  la  réaction.  Il  alla 
rejoindre  la  légion  italionne,  qui 
avait  déjà  repassé  les  Al(>rs;  et  la 
paix  de  Florence  lui  ouvrit  plus 
tard  les  portes  deNapIcs,  où  quel- 
ques étourderies  de  jeunesse  atti- 
rèrent sur  lui  l'atlention  de  la  po- 
lice :  il  f(Jt  arrêté  .  et  jeté  dans  les 
prisons  de  Maretimo  (c'est  une 
île  dépendante  de  la  Sicile,  et  où 
le  gouvernement  de  iNaples  en- 
voie les  prévenus  pour  cause 
d'opinion  ou  d'état;  il  y  a  un 
chAteau  ,  et  l'on  a  converti  en  pri- 
son une  ancienne  citerne  creusée 


PEP 

dans  le  flanc  d'un  rocher),  où  il 
resta  enfermé  jusqu'à  l'été  de 
1806,  époque  de  la  seconde  inva- 
sion française  dans  le  royaume  de 
INaples.  Comme  il  ne  prit  aucune 
part  à  la  tentative  faite  par  ses 
compagnons  d'infortune  pour  se 
soustraire  au  traitement  barbare 
de  leurs  geôliers,  cette  conduite 
lui  valut  un  rapport  favorable,  sa 
mise  en  liberté,  et  la  permission 
de  rentrer  au  sein  de  sa  famille 
en  Calabre.  Il  y  arriva  peu  de 
temps  après  la  perte  de  la  bataille 
de  iMaïda ,  dont  les  suites  furent 
si  funestes  pour  la  tranquillité  de 
Ces  provinces  ;  l'insurrection  s'y 
étaitmanifestéesur  tous  les  points, 
et  Pépé  ,  bloqué  à  Scigliano  par 
une  bande  de  brigands  ,  aurait 
péri  sous  leurs  coups,  sans  la  pro- 
tection qui  lui  fut  accordée  par 
leur  chef.  Il  se  rendit  à  Naples  pour 
y  briguer  une  place  dans  l'armée. 
Nommé  major  des  gardes  natio- 
nales en  Calabre  ,  il  partit  pour 
sa  nouvelle  destination.  Envoyé 
en  garnison  aux  Scpt-Iles,  il  y 
resta  toute  l'année  1808,  et  revint 
à  Naples  l'année  suivante.  Le  roi 
Joachim  [voyez  IVIwrat)  le  choisit 
pour  son  ofïicier  d'ordonnance. 
Après  plusieurs  voyages  en  Cala- 
bre pour  y  apporter  les  ordres  du 
roi  au  général  Partouneaux ,  il 
obtint  le  grade  de  colonel,  et  peu 
après  le  oormnandement  du  8*  de 
ligne  napolitain  ,  qu'il  alla  rejoin- 
dre en  Espagne.  Dans  les  deux 
campagnes  qu'il  y  fit,  il  n'eut  pas 
d'occasion  de  se  distinguer  mili- 
tairement ;  mais  il  en  chercha 
pour  ujontrer  un  esprit  d'opposi- 
tion eonlre  les  Français ,  qu'un 
sentiment  de  patriolisnio  et  d'in- 
dépendauce   mal   placé  le  portait 


TEP 

à  haïr.  Les  officiers  de  son  corps 
désapprouvaient  hautement  les 
discours  de  leur  chef,  qui  n'a- 
boutissaient qu'à  leur  faire  des 
ennemis  de  ceux  mêmes  dont  ils 
partugeaienl  les  dangers.  Celle 
inésiutelligence  nuisit  à  la  disci- 
pline de  son  régiment,  et  lui  at- 
tira les  reproches  el  même  une 
punition  de  la  part  du  maréchal 
Suchet,  sous  les  ordres  duquel  il 
servait.  Rentré  à  Naples  avec  les 
débris  de  son  corps,  il  s'y  occupa 
de  le  réorganiser,  et  vers  la  fin 
de  i8i3  il  fut  élevé  au  grade  de 
général  de  brigade,  avec  ordre 
de  prendre  le  commandement  de 
deux  régimens  qui  faisaient  par- 
tie de  seconde  division  en  Abruzze. 
Pépé,  à  la  tête  de  cette  même 
brigade,  occupait  une  partie  de 
la  Romagne  en  1814»  lorsque  le 
roi  Joacliim  signa  son  traité  d'al- 
liance avec  l'Autriche.  Honteux 
de  sa  défeclicm,  qu'il  n'osait  pas 
annoncer  à  ses  compagnons  de 
gloire,  ce  prince  reculait  le  mo- 
ment qui  devait  le  séparer  d'eux. 
Le  général  Pépé,  de  son  propre 
mouvement,  mit  fin  à  ces  incer- 
titudes ,  ordonnant  aux  officiers 
français  attachés  à  sa  brigade  de 
se  prononcer  entre  Naples  et  la 
France.  La  réponse  de  ces  bra- 
Ye»  fut  unanime  :  ils  donnèrent 
tous  leur  démission.  Cette  déter- 
mination affligea  profondément 
Joachim  ;  on  crut  alors  que  le  gé- 
néral Pépé  serait  destitué,  mais 
il  en  fut  quitte  pour  une  forte  ré- 
primande. Il  fit  la  campagne  de 
1814,  après  laquelle  il  reçut  le 
titre  de  baron  ,  et  une  riche  dota- 
tion en  terres,  lin  iSiD,  il  se  trou- 
Tait  en  congé  à  Naples  ,  où  il  eut 
une  discussion  très- vive  avec  le 


PEP  i3i 

roi  Joachim,  auquel  il  demanda, 
en  des  termes  peu  mesurés,  l'ex- 
pulsion des  Français  des  emplois 
civils,  et  une  constiintiou  pour 
son  pays.  Leroi  se  contenta  de  le 
renvoyer  dans  les  Marches  ,  où  sa 
brigade  était  restée  cantonnée. 
Dans  l'absence  tnomentanée  du 
général  en  chef,  il  prit  le  com- 
mandement de  deux  divisions,  et 
sa  première  idée  fut  de  marcher 
sur  la  capital»,  pour  arracher  par 
la  force  ce  qu'il  n'avait  pu  obtenir 
autrement.  Deiix  officiers  supé- 
rieurs auxquels  il  fit  part  de  son 
projet,  le  repoussèrent  avec  hor- 
reur. Découragé  de  l'opposition 
qu'il  rencontrait  dans  ses  collè- 
gues, il  n'osa  plus  rien  enti^- 
prendre.  Le  roi  Joachim  venait 
de  proclamer  l'indépendance  de 
l'Italie.  Cet  événement,  qui  sym- 
pathisait avec  les  idées  de  Pépé, 
renouvela  son  enthousiasme  sans 
chatiger  son  caractère.  Détaché, 
à  la  tête  de  sa  brigade  ,  pour  cou- 
vrir la  position  de  Carpi,  il  viola 
les  instructions  qu'on  lui  avait 
données,  ctprit  l'ollensiveau  lieu 
de  se  renfermer  dans  un  système 
de  défense.  Repoussé  par  les  Au- 
trichiens, il  sacrifia  une  partie  de 
ses  tri^upes,  et  se  relira  en  désor- 
dre sur  iVlodène,  où  le  général 
Carascosa  lui  donna  le  ternps  de 
rallier  ses  soldats.  Quelque  soin 
qu'on  eût  mis  à  déguiser  sa  con- 
duite dans  cette  affaire ,  elle  lui 
fit  beaucoup  de  tort  dans  l'opinion 
de  l'année,  et  ce  ne  fut  qu'au  pont 
du  Rcno  où  il  put,  par  son  cou- 
rage, rétablir  sa  réputation  ccun- 
me  soldat,  après  l'avoir  perdue 
comme  général.  Le  roi  le  noumia 
son  aide-de-camp,  sans  le-séparer 
de  sa  brigade,  avec  laquelle  il  se 


i52  PEP 

r€nflit  à  Capoue.  Le  général  Caïas- 
cosa  lui  confia  le  gouvernement 
de  cette  place,  et  comme  Pépé  lui 
témoignait  le  désir  d'avoir  le  grade 
de  lieutenant-général,  Carascosa 
appuya  cette  demande  auprès  du 
roi,  qui  mit  son  approbation  en 
marge  du  rapport.  Après  le  traité 
de  Casalanza,  Pépé  fit  des  démar- 
ches pour  être  reconnu  dans  son 
nouveau  grade.  D'après  les  maxi- 
mes adoptées  par  le  ministère 
d'alors ,  il  aurait  dû  en  perdre  la 
propriété  et  n'en  conserver  que  le 
rang,  car  il  lui  manquait  un  décret 
revêtu  des  formalités  exigées  par 
la  loi;  mais  il  avait  été  le  premier 
à  redemander  du  service.  Lui 
sachant  gré  peut-être  d'avoir  mon- 
tré de  l'aversion  contre  les  Fran- 
çais, le  nouveau  gouvernement  le 
traita  avec  faveur,  et  le  nomma 
lieutenant- général  et  président 
d'une  commission  militaire.  Lors- 
que le  général  Nugent  fut  chargé 
de  l'organisation  de  la  nouvelle 
armée  napolitaine,  Pépé,  qui  avait 
eu  des  relations  intimes  avec  lui, 
«t  qui  partageait  sa  haine  contre 
la  France,  le  mit  dans  les  intérêts 
de  son  ambition,  et  obtint  par  ce 
moyen  le  commandement  en  se- 
cond d'une  division  qu'on  dut  créer 
exprès  pour  lui.  En  1818,  sans  é- 
gard  pour  5  lieutenans-généraux 
plus  anciens,  Pépé  fut  destiné  à 
commander  une  division  territo- 
riale, et  reput  le  cordon  du  nouvel 
ordre  de  Saint-Georges,  auquel 
il  n'avait  point  de  droits,  n'étant 
<|ue  commandeur  de  celui  des 
l)eux-Siciles.  Dans  ces  hautes 
foiuîtions,  il  mit  beaucoup  de  zèle 
pour  l'organisation  des  milices; 
mais  comme  ce  service  dispen- 
♦lieux  et  incommode  inspirait  un 


PEP 

éloignement,  que  son  système  de 
rigueur  ne  pouvait  qu'augmenter, 
ses  elïbrts  ne  produisirent  aucun 
résultat  satisfaisant.  Il  allait  re- 
noncer à  son  entreprise  lorsque , 
dit-on,  quelques  chefs  des  Carbo-^ 
nari,  dont  il  était  environné  ,  lui 
firent  comprendre  que  pour  inté- 
resser tout  le  monde  à  cette  orga- 
nisation, il  fallait  laisser  entrevoir 
un  but  politique  qui  fût  d'accord 
avec  les  vœux  de  leur  secte;  les 
affiliés  de  cette  société  auraient 
alors  pris  sur  eux  de  lui  aplanir 
tous  les  obstacles.  Pépé  n'était  pas 
carbonaro,  mais  il  mettait  un  très- 
grand  amour-propre  à  briller  par- 
mi ses  collègues.  La  proposition 
qu'on  lui  venait  de  faire  aurait  pu 
lui  paraître  en  opposition  avec  ses 
devoirs ,  si  elle  n'eût  répondu  à 
ses  désirs;  il  n'y  vit  qu'un  bon 
moyen  de  se  faire  remarquer  aux 
yeux  du  gouvernement,  sans  s'in- 
quiéter aucunement  des  consé- 
quencesqui  pouvaient  en  dériver. 
Il  souscrivit  aux  conditions  qu'on 
lui  dictait,  et  en  peu  de  temps  les 
milices  d'AvelIino  et  de  Foggia 
furent  organisées  et  habillées,  et 
le  brigandage,  maladie  indigène 
de  ces  contrées,  entièrement  dé- 
truit. Le  gouvernement,  surpris 
de  ce  double  résultat,  en  fit  tér- 
moigner  sa  satisfaction  au  général 
Pépé,  qui,  chose  étrange,  rece- 
vait les  éloges  de  ceux  dont  il  pré- 
parait la  chute.  En  attendant,  la 
secte  lui  demandait  d'accomplir 
ses  promesses ,  et  le  général  Pépé 
se  défendait  de  son  mieux ,  en 
donnant  des  espérances.  Les  choses 
en  étaient  en  cet  état,  lorsque  la 
révolution  d'Espagne  exalta  tous 
les  esprits.  Pépé  n'avait  pas  de 
plan  arrêté  :  en  donnant  l'éveil  au 


PEP 

foiirerncment  sur  l'état  de  fer- 
meiitalion  qui  refînait  dans  lesJ  pro- 
vinces, il  t-e  flaltiiit  d'obtenir  par 
la  crainte,  qui  n'était  pas   d'ail- 
leurs   sans  fondement,    quelques 
concessions  qui  eussent  pu  apai- 
ser les  carbonari,  et  satisfaire  de 
celte    manière    aux   engagemens 
qu'il   avait   contractés   avec  eux. 
Mais  ses  avis  ne  furent  point  écou- 
tés :  le  chevalier  Medici  répondait 
en  plaisantant  à  tous  ceux  qui  lui 
parlaient  des  projets  de  la  carbon- 
nerie,  et  suivait  avec  opiniâtreté 
le  plan  de  conduite  qu'il    s'était 
tracé.  Ces  tentatives  réitérées  de 
Pépé  ne  réussirent  qu'à  le  rendre 
suspect  :  il  fut  décidé  qu'on  l'en- 
verrait commander  en  Calabre  : 
détermination   aussi    imprudente 
qu'inexplicable  delà  part  du  gou- 
vernement, qui  ne  sauvait  pas  une 
province,  et  en  exposait  une  au- 
tre. Pépé  de  son  côté  se  montrait 
mécontent    de  cette  translation  : 
sa  vanité  en  était  blessée, et  il  crai- 
guaitd'ailleurs  que  son  successeur, 
instruit  de  ses  projets,ne  les  dévoi- 
lât, et  ne  fît  connaître  en  même 
temps  ses  promesses  aux  carbo- 
nari. 11  était  à  intriguer  à  Naples 
pour  rester  dans  son  ancienne  ré- 
sidence, lorsqu'on  y  apprit  la  dé- 
sertion d'un  détachement  de  ca- 
valerie eu  garnison  à  Nola.  Cet- 
te nouvelle  effraya  le  gouverne- 
ment, qui  avait  le  secret  de  sa  fai- 
blesse. Parmi  les  premières  dispo- 
sitions qu'on  se  hâta  de  prendre, 
on  remarqua  non  sans  étonnement 
l'ordre  donné  à  Pépé  de  se  rendre 
immédiatement  à  Avellino  :  on  lui 
dicta  même  un  ordre  du  jour  qu'il 
devait   transmettre  en   son  nom, 
pour  rappeler  à  chacun  le  devoir 
de  défendre  le  trône  contre  les  at- 


FEP 


i5* 


taques  de  ses  ennemis;  mais  quel- 
ques heures plustardje roi  fit  con- 
trcmander  le  départ  de  Pépé, et  or- 
donna même  à  Nugent  de  s'assu- 
rer de  sa  personne.  Dans  la  nuit 
du  5  au6  juillet, on  se  présenta  chez 
Pépé  pour  l'avertir  que  l'ordre  de 
son  arrestation,  suspendu  par  les 
bons  offices  du  capitaine-général, 
allait  être  exécuté.  On  ne  manqua 
pas  de  l'effrayer  sur  sa  position,  et 
de  lui  faire  comprendre  qu'il   ne 
lui  restait  d'autre  ressource,  que 
celle  de  quitter  la  capitale  pour  se 
mettre  à  la  tête  de  l'insurrection. 
On  lui  parla  de  la  défection  du 
corps  du  général  Nvmziaote,  de  la 
ville  de  Salerne  tombée  au  pouvoir 
des  constitutionnels,  et  de  la  dis- 
position où  étaient  deuxrégim-ents 
de  la  garnison  de  Naples  de  le  sui- 
vre à  Avellino, etc.  Pépé  hésitait  en- 
core, mais  l'espoir  de  réussir  dans 
une    entreprise    qu'il     regardait 
presque  comme  assurée, le  décida 
à  partir.   Arrivé  le  6  à  Avellino, 
où  la  promesse  d'une  constitution 
l'avait  précédé,  le  chef  d'escadron 
Deconciliis,  qui  avait  pris  le  com- 
mandement des  insurgés,   balan- 
ça s'il  devait  reconnaître  ce  nou- 
veau chef;  mais  la  tendance  de  la 
révolution,   étant  de   se  couvrir 
d'autorité,    on    crut    le  sort    de 
l'armée  constitutionnelle  plus  a- 
vantageusement   conCé  entre  les 
mains    d'un    lieutenant -général. 
La  présence  de  Pépé   ne  fut  pas 
sans  utilité  pour  l'ordre  public  : 
son  rang,  qui  dominait  sur  ceux 
de  tous  les  autres,  servait  comme 
d'un  centre  pour  dosmer  un  en- 
semble à  tojites  ces  individualités 
et  faire  taire  tant  de  prétentions. 
Les  révoltés  se  trouvèrent,  sans  le^ 
soupçonner  ,    entraînés  d»ns   un 


\04 


TEP 


système  ordinaire  de  discipline  et 
de  dépendiince.  La  révolution  prit 
un  caractère  monarchique;  la  co- 
carde des  carbonari  Fut  abattue, 
et  le  roi,  an  moment  du  plus  grand 
abaissement  de  son  pouvoir,  put 
exercer  librement  le  droit  de  choi- 
sir ses  ministres  parmi  des  hom- 
mes étrangers  aux  intrigues  de  la 
secte  et  jouissant  de  la  considéra- 
tion générale.  Ayant  conservé  la 
suprême  direction  de  l'armée  jus- 
qu'à l'ouverture  du  parlement , 
Pépé  contribua  beaucoup  au  main- 
tien de  la  tranquillité  publique  ; 
mais  sa  position  était  fuisse  ,  ses 
Vœux  bornés,  et  ses  talens  médio- 
cres. 11  aurait  voulu  mériter  lu 
confiance  de  la  cour,  et  ne  pas 
mécontenter  son  parti  ,  dont  il 
ne  pouvait  se  séparer  sans  perdre 
>*on  influeure  ,  ni  le  diriger  sans 
devenir  factieux.  Son  ambition 
s'ojîpusail  au  premier  rôle,  sa  mo- 
ralité répugnait  à  l'autre.  Toute 
sa  conduite  était  un  mélange  de 
vanité  et  de  modestie,  de  C(miplai- 
sance  pour  les  prétentions  de  la 
*ecte,  et  d'eiforls  pour  la  compri- 
mev.  Au  1"  o'ctnbre,  il  déposa  son 
commandement  dans  les  mains  du 
roi,  qui  lui  fit  offrir  une  forte  som- 
me d'argefit  et  le  cordon  de  Saint- 
lanvier,  pour  que  ce  sacrifice  ne 
lui  inspirât  pas  du  ressentiment. 
Pépé  y  mit  cîe  la  dignité,  et  refusa 
ee  dédoinniiigement  :  le  rôle  de 
Washington  somiait  A  son  imagi- 
{lation ,  mais  il  ne  sutïisait  pas  A 
^on  «  œur,  «t  l'on  n'est  pas  Was- 
hington lorsqu'on  ne  sait  pas 
dompter  ses  passion^.  Sans  cou- 
naissances  politiques,  «ans  habitu- 
des libérales ,  yieudant  tout  le 
temps  qu'il  pi^ôs<da  la  force  publi- 
que, av  uti  sut  *ltre  qu'un  ofTicier 


PEP 

de  détail.  Ou  voyait  que  pour  lui 
la  liberté  n'était  autre  chose  que 
la  dictature  miliiaire  d'un  bon  ci- 
toyen et  d'un  grand  homme,  et  il 
se  croyait  l'un  et  l'autre.  Il  tâchait 
de  s'étourdir  sur  les  dangers  qui 
menaçaient  son  pays,  ne  se  sen- 
tant jtas  assez  de  courage  pour  les 
regarder  en  lace  r  accablé  de  la 
responsabilité  qui  pesait  sur  lui  , 
et  embarrassé  de  soutenir  avec  é- 
clat  le  rôle  dont  il  s'était  chargé, 
il  cherchait  par  des  parades,  des 
proclamations  et  des  exemples 
historiques,  aussi  mal  choisis  que 
mal  appliqués,  à  calmer  les  appré- 
hensions publiques  et  les  siennes. 
Il  fit  un  voyage  dans  les  Abruzzes, 
où  il  ne  trouva  pas  cet  enthousias- 
me auquel  il  s'était  attendu;  mais 
il  crut  le  faire  naître  en  faisant  in- 
sérer dans  les  journaux  du  24 
janvier  1821  un  rapport  emphati- 
que sur  l'énergie  et  l'esprit  de  li- 
berté et  d'indépendance  de  ces 
provinces,  qu'il  regardait  comme 
le  boulevard  du  royaume.  Sa  po- 
litique ordinaire  consistait  à  faire 
parler  dans  chaque  province  du 
bon  esprit  qui  régnait  dans  les  au- 
tres, en  abusant  tout  le  monde, 
à  commencer  par  lui-même.  Lors- 
que le  roi  partit  pour  Laybach,  il 
ne  douta  plus  de  la  paix.  Ses  flat- 
teurs lui  conseillaient  de  faire  im 
bon  mariage,  pour  consolider  sa 
fortune  et  se  reposer  de  ses  tra- 
vaux :  il  goûtait  ces  avis,  et  son- 
geait déjà  à  conquérir  la  main 
d'une  demoiselle,  croyant  qu'il 
ne  lui  restait  plus  rien  à  faire 
pour  assurer  l'indépendance  de 
son  pays.  Mais  les  décisions  du 
congrès  de  Laybach,  et  la  condui- 
te du  roi,  détruisirent  îe  charme, 
et    jetèrent    l'alarme    dans    son 


PEP 

nœur.   Il  se  rendit  en  Abruzze , 
pour  se    metlre   à  lu  tête   d'un 
corps  d'armée,  composé  de  9,000 
honmies  de  troupes  réglées,  et  de 
18,000  de  gardes  nationales.  Ces 
moyens  n'étaient  pas  considéra- 
bles; mais   si  tout  ce  qu'il  avait 
dit  du  bon  esprit  de  ces  provinces 
eût  été  vrai,  il  aurait  pu  combat- 
tre avec  avantage  l'ennemi  qui  se 
serait  présenté  pour  franchir  ime 
Ironlière  hérissée  de  diflicultés  et 
d'obstacles.    Mais    le  décourage- 
ment était  dans  son  esprit,  la  dis- 
seution  dans  les  milices,  le  mé- 
contentement et  l'insubordination 
dans  les  troupes.  Les  populations, 
iriitées  des  vexations   auxquelles 
elles  étaient  exposées  par  l'indis- 
cipline des  soldats  et  la  faiblesse 
des  chefs,  regardaient  avec  indif- 
férence le  dénouement  d'un  dra- 
me qu'elles  n'étaient  pas  encore 
en  état  debien  couiprendre.Pépé, 
contre  les  instructions  qu'il  avait 
reçues,  attaqua  Rieti  le  7  mars, 
sans  même  annoncer  le  commen- 
cement des  hostilités  au  général 
Carascosa ,    qui   commandait    le 
premier   corps   d'armée    posté   à 
S.  Germano,  et  dont  il  aurait  pu 
tirer     quelques     secours.     Après 
tin  combat  de  quelques  heures, 
dans  lequel  il  ne  perdit  que  200 
liummes,  sans  être  délogé  d'une 
-eule  de  ses  positions,  il  se  trouva 
au  bout  de  quatre  jours  hors  des 
Abruzzes  ,  n'ayant  conservé  que 
îiooo  hommes.  Arrivé  à  Isernia , 
il  s'exhalait  en  [)laintes  contre  tout 
le  monde,  en  disant  que  les  Abruz- 
zais  ne  preuaient  aucun  intérêt  à 
la  constitution  ,  que  ses  soldats 
avaient  été  démoralisés  dans  leur 
c(julact  avec  les  milices,  et  que 
celles-ci  ne  se  souciaient  pas  de 


PEP  i35 

se  défendre  :  c'était  le  même  hom- 
me qui  avait  écrit  et  signé  le  rap- 
I  port  du  mois  de  janvier!  Ce  mou- 
vement de  Pépé  a  été   générale- 
ment regardé  comme  la  cause  des 
désastres  de  Naples.  On  ne  peut 
pas  nier  que  son  attaque  fût  pré- 
maturée,  mal  conduite  ,  et  plus 
mal  combinée.  On  ne  fait  jamais 
une  reconnaissance  en  déployant 
toutes  ses  Ibrces  devant  une  tête 
de  colonne  ennemie.  Le  débande- 
ment  des  milices  peut  être  seule- 
ment accepté  comme  une  justifi- 
cation ,   mais  cela  prouve  que  le 
mal  avait  des  racines  {)lus  profon- 
des;  qu'on  s'était  abusé  sur  l'es- 
prit public  de  la  nation,  et  qu'on 
avait  donné  pour  la  réalité  ce  qui 
n'était  qu'une  illusion.    Pépé  fut 
terrassé  par  ses  revers;  la  crainte 
d'ime   ])eine   infamante  s'empara 
de  son  esprit,  et  lui  fil  songer  plu- 
tôt à  sa  sûreté  qu'à  celle  des  au- 
tres. Il  se  hâta  d'arriver  dans  la 
capitale,  et  prit  la  résolution  de 
s'embarquer  pour  l'Espagne,   re- 
fusant, avec  le  désintéressement- 
qui  lui  est  natui'el,  une  somme  de 
40,000  francs  qu'un  illustre  per- 
sonnage lui   fit  offrir  pour  payer 
les  frais  de  son  voyage.  Il  ne  fut 
pas  mieux  reçu  en  Espagne,  qu'il 
ne  l'avait  été  à  Naples.    IMécon- 
tent  de  tout  le  monde,  il  alla  s'em- 
barquer à  Lisbonne  pour  passer 
en   Angleterre,  où   il  écrivit    un 
mémoire  pour  se  justifier.  On  le 
voit,    sous  le  charme  de  ses  an- 
ciennes illusions,  insulter  en  mê- 
me temps  à  la  raison  et  a  la  mora- 
le ;  coffSeiller  au  roi  de  Naples, 
qu'il  déclare  prisonnier  des  Au- 
trichiens ,  de  relever  la  constitu- 
tion espagnole,  et  avouer  qu'il  a 
été  toujours  en  conspiration  per- 


i36  PEP 

manènte  contre  Joachim  et  Ferdi- 
nand, qui  l'avaient  comblé  de  fa- 
veurs. Cette  aberration  d'esprit  a- 
cheva  de  le  perdre  dans  l'opinion 
publique.  Le  général  Pépé  aurait 
occupé  une  place,  sinon  éininen- 
1e, au  moinspeu  commune  dans  les 
annales  des  ré  voluti()ns,s'il  avait  eu 
le  bon  esprit  de  dire  :  «  Des  cir- 
»  constances  extraordinaires  m'ont 
«placé  dans  une  position  au-des- 
»sup  de  mes  forces  :  une  révolu- 
Dtion  porte  mon  nom,  et  c'est  la 
«seule  dans  laquelle  une  goutte 
«de  sang  n'a  été  répandue,  où 
«une  larme  n'a  été  versée  :  j'en 
«suis  sorti  sans  crimes  et  sans  for- 
«tune....  J'ai  fait  mon  malheur  et 
»  celui  de  mes  compatriotes  ;  cette 
«idée  fera  mon  toiu-ment,  et  rem- 
splira  d'auiertume  le  reste  d'une 
«vie  que  je  passerai  dans  l'obscn- 
«rité  et  dans  l'exil.  «  Mais  un 
homme ,  né  avec  le  be-oin  de  la 
gloire  et  sans  moyens  pour  y  par- 
venir, ne  potivait  pas  se  deviner, 
ni  se  contenter  d'une  place  si  se- 
condaire dans  l'histoire.  Nous  n'a- 
vons pas  cru  nécessaire  de  rappor- 
ter les  détails  du  duel  do  Pépé 
avec  Carascosa  :  c'est  un  événe- 
ment trop  peu  important  dans  la 
vie  publique  d'un  personnage  po- 
litique. Le  général  Pépé,  dépouil- 
lé de  son  grade  et  de  ses  titres, 
vit  A  Londres  ,  loin  de  son  pays, 
où  un  arrêt  de  mort  a  été  pro- 
noncé contre  lui. 

PÉPÉ  (Gabriel)  ,  ex-colonel, 
ex-député  au  parlement  de  Naples, 
chevalier  de  l'ordre  de  Saint-Geor- 
ges, naquit  en  1781,  à  Bojano, 
dans  la  province  de  Molise.  La  ré- 
volution de  jjrggréloigna  des  pai- 
sibles éludes  de  droit  pour  le  jeter 
dans  la  carrière  militaire.  Envc- 


PEP 

loppé  dans  la  proscription,  il  vint 
en  Frmce,  s'enrôla  dans  la  légion 
italienne,  et  fit  les  campagnes  de 
1800  et  1801,  en  Italie.  Rentre 
dans  ses  foyers  à  la  suite  de  la  paix 
de  Florence,  il  reprit  avec  ardeur 
SOS  anciennes  occupations;  mais 
au  retour  des  armées  française» 
dans  le  royaume  de  Naples,  il  pré- 
féra une  place  de  lieutenant  dans 
un  régiment  d'infanterie,  avec  le- 
quel il  fut  employé  pendant  deux 
ans  à  la  destruction  des  brigands, 
avant  de  passer  en  Espagne  sur  un 
théâtre  plus  vaste ,  mais  non  moins 
dangereux.  Blessé  à  l'assaut  du 
Rlonty  de  Gironne ,  il  reçut  la 
croix  des  Deux-Siciles,  et  fut  pro- 
posé pour  celle  de  la  légion-d'hon- 
neur. Ayant  ramené  à  Naples  les 
débris  de  son  bataillon,  il  en  de- 
vint le  chef,  et  n)it  beaucoup  d'ac- 
tivité pour  en  hâter  la  réorganisa- 
tion. Attaché  au  général  Pigna- 
telIi-Strongoli ,  il  le  suivit  dans 
une  mission  au  quartier-général 
des  souverains  étrangers  k  Troyes, 
et  à  son  retour  il  prit  le  commande- 
ment d'un  bataillon  du  ô"  de  ligne 
napolitain,  à  la  tête  duquel  il  fit  les 
campagnes  de  1814  et  181  5.  Dan- 
gereusementblessé  dans  une  affaire 
où  il  déploya  autant  d'énergie  que 
d'intelligence,  il  mérita  d'être  nom- 
mé colonel  en  second ,  grade  qui 
lui  fut  confirmé  à  la  rentrée  de 
Ferdinand  dans  ses  états.  Destiné 
d'abord  au  commandement  d'une 
province,  Pépé  reçut  ensuite  ce- 
lui d'un  régiment  d'infanterie  lé- 
gère, en  garnison  à  Syracuse,  où 
il  se  trouvait  lorsque  la  révolution 
éclata.  Elu  député  de  sa  province, 
il  vint  siéger  au  parlement  de  Na- 
ples, le  n  octobre,  et  trois  jours 
plus  tard,  il  y  proucnca  un  dis- 


PEP 

eours  violent  contre  la  convention 
militaire  de  Palerme  {voy.  l'art. 
Florestan  Pépé  ).  La  voix  d'un 
soldat  couvert  de  blessures  élec- 
trisa  les  esprits,  et  entraîna  l'as- 
semblée. Il  fut  décidé  que  la  ca- 
pitulation accordée  aux  Palermi- 
tains  serait  annulée,  et  qu'on  rem- 
placerait le  général  Pépé  en  Sicile, 
1  pour  l'obliger  de  justifier  son  abus 
de  pouvoir.  Ce  succès  donna  une 
grande  popularité  à  l'orateur;  mais 
peu  de  jours  après,  la  léflexion 
condamna  ce  que  l'enthousiasme 
avait  approuvé  :  on  sentit  toutes 
les  con:!équences  de  la  motion  de 
Pépé;  on  ne  lui  pardonnait  pas 
d'avoir  été  fouiller  un  exemple 
sanglant  dans  les  annales  de  la 
révolution  française,  et  le  conseil 
donné  au  gouvernement  de  traiter 
Palerme  comme  la  convention  a- 
vait  fait  traiter  Lyon;  on  le  rendait 
enfin  responsable  des  n»aux  aux- 
«luels  on  devait  s'attendre  de  celte 
inalheureuse  scission  entre  la  Si- 
cile et  le  royaume  de  Naples.  Nul 
doute  que  le  discours  de  Pépé  n'ait 
été  la  source  de  beaucoup  de  mal- 
heurs; mais  c'est  moins  à  lui  qu'au 
parlement  qu'on  doit  en  adresser 
le  reproche.  Un  député  peut  se 
tromper  sur  l'application  d'un 
principe,  et  demander  mal  à  pro- 
pos la  stricte  exécution  d'une  loi: 
(;'était  le  cas  de  Pépé.  Mais  il  est 
•Kl  devoir  d'une  assemblée  de  ju- 
ger froidement  du  résultat  d'une 
délibération ,  et  de  combattre  le 
zèle  par  la  prudence  ,  opposant  les 
calculs  de  la  raison  aux  égaremens 
dun  patriotisme  imprévoyant.  Le 
rolonel  Pépé,  habitué  à  une  vie 
simple  et  retirée,  fut  ébloui  de 
•on  triomphe.  Il  prit  dans  le  par- 
Irmcnt  le  ton  d'uji  tribun,  et  se 


PEP 


i57 


chargea  d'y  appuyer  les  motions  les 
plus  violentes.  Ce  fut  lui  qui  accu- 
sa les  ministres  à  l'occasion  du  mes- 
sage du  7  décembre  ;  et  dans  cette 
circonstance,  comme  dans  l'autre, 
son  principe  pouvait  être  vrai , 
mais  l'application  en  était  faus- 
se. Dans  toute  sa  carrière  parle- 
mentaire, il  se  montra  toujours 
d'un  caractère  franc,  loyal  et  im- 
pétueux. Il  aurait  voulu  donnera 
la  constitution  des  cortès  cette  vé- 
nération qui  ne  peut  être  ins- 
pirée que  par  le  temps  ;  la 
moindi'e  déviation  du  sens  lit- 
téral de  ses  articles  lui  paraissait 
un  crime,  et  tout  homme  qui  eût 
voulu  une  autre  liberté  que  celle 
d'Espagne,  ou  qui  eût  essayé  d'y 
parvenir  par  d'autres  moyens,  de- 
venait à  ses  yeux  un  mauvais  ci- 
toyen et  un  parjure.  Il  se  faisait 
illusion  sur  l'esprit  de  la  nation , 
dont  il  ne  jugeait  que  d'après  ses 
propres  seutimens;  mais  il  se  désa- 
busa lorsque,  placé  à  la  tète  d'un 
corps,  il  y  trouva  une  autorité  au- 
dessus  de  la  sienne;  et  cette  auto- 
rité résidait  auprès  de  son  tam- 
bour-major, qui  était  le  chef  d'une 
vente  établie  au  sein  de  son  régi- 
ment. Arrêté  après  la  chute  du 
gouvernement  représentatif,  Pépé 
fut  livré  aux  Autrichiens,  et  dépor- 
té en  Moravie,  où  il  est  resté  à 
peu  près  deux  ans;  il  a  supporté 
avec  dignité  son  malheur,  et  lors- 
que la  liberté  lui  a  été  rendue,  il 
est  allé  vivre  à  Florence,  où  il  cul- 
tive son  esprit  et  agrandit  le  cercle 
de  ses  idées.  Il  est  versé  dans  les 
langues  savantes,  et  familiarisé  a- 
vec  les  bons  auteurs,  anciens  et 
modernes.  Nul  doute  que  l'étude 
n'ait  des  charmes  pour  lui,  et 
Qc   parvienne   à  le  faire    revenir 


138 


PEP 


de    ses    brillantes    mais   funestes 
illusions. 

PEPIN  DE  BELLÏSLE  (  N.  ) , 
maître  des  requêtes,  meirii)re  de 
la  légion -d'honneur,  préfet  du 
département  de  la  Charente-In- 
férieure ,  naquit  à  Nantes  ,  en 
1788.  et  commença  la  carrière 
des  affaires  puhliques  sous  le  gou- 
vernement impérial  par  être  au- 
diteur au  conseil-d'état,  puis  il 
devint  intendant  de  Bilbao  lors 
de  la  guerre  d'Espagne.  Son  in- 
tégrité dans  son  administration 
lui  acquit  l'estime  des  habitans  de 
cette  contrée.  Il  fut  nommé  par  le 
roi,  après  la  première  restauration 
en  i8i4ï  préfet  du  déparlement  des 
Côtes  -  du  -  Nord.  «  L'impartialité 
de  sa  conduite,  dit  M.  Guizot  dans 
une  Notice  sur  ce  fonctionnaire, 
sa  fermeté  avec  les  troupes  étran- 
gères qui  s'étaient  avancées  jus- 
qu'aux confins  de  son  départe- 
ment, le  rendirent  cher  à  tous  ses 
administrés  ;  étranger  à  toute  pré- 
vention, à  toute  faiblesse,  il  j)ro- 
tégea  ceux  qui  avaient  besoin  de 
protection,  et  ne  flatta  j)oiat  ceux 
qui  pouvaient  lui  nuire  à  lui-mê- 
me. Il  fut  destitué,  en  iHiG,  sous 
le  ministère  de  M.  le  comte  de 
Vaublanc.  Il  avait  fait  faire,  dans 
lesCôtes-du-Nord,  de  rapides  pro- 
grès aux  écoles  d'enseignement 
mutuel.  »  Après  l'ordonnance  du 
5  septembre  1816,  qui  fut  saluée 
par  tous  les  amis  de  la  monarchie 
constitutionnelle,  comme  une  nou- 
velle ère  de  la  liberté  légale,  M.  . 
Pépin  de  Bellisie  devint  successi- 
vement préfet  des  déparlemens 
de  la  Creuse,  de  la  Dordogne,  de 
la  Sarlhe  et  de  la  Charcnto-Infé- 
rieurc.  Il  y  rendit  son  adminis- 
tration recommandable ,  et  s'y  fit" 


PEP 

constamment  remarquer  par  son 
indépendance  et  sa  justice.  «Il  a 
fuit  exécuter  dans  le  dernier  dépar- 
tement, dit  encore  M.  Guizot,  que 
nous  nous  plaisons  à  citer, des  tra- 
vaux de  dessèchement  qui  contri- 
bueront puissamment  à  la  salu- 
brité et  à  la  prospérité  du  pays. 
Il  s'occupait  toujours  avec  zèle 
des  établissemens  et  des  entre- 
prises qui  pouvaient  améliorer  la 
situation  du  peuple,  persuadé  que 
ce  sont  là  les  souvenirs  que  doit 
laisser  après  lui  im  administra- 
teur. ')  Atteint,  malgré  ses  efforts 
pour  le  bien  public,  et  son  zèle 
pour  le  gouvernement  constitu- 
tionnel, par  unii  nouvelle  destitu- 
tion,il  était  rentré  dans  la  vie  pri- 
vée, lorsqu'il  mourut  en  septem- 
bre 1823  d'une  inflammation  de 
poitrine,  n'ayant  pas  atteint  sa 
5i>*  année.  Deux  mois  avant  sa 
mort,  il  avait  épousé  la  nièce  de 
M.  de  Girardiu  ,  membre  de  la 
chambre  des  députés. 

PEPIN-DESGROUETTES(P.  , 
A.  ) ,  ancien  avocat  à  Paris,  adop- 
ta avec  chaleur  les  principes  de  la 
révolution,  et  pour  mieux  se  po- 
pulariser il  rédigea  des  Mémoires 
en  faveur  des  forts  et  des  marchan- 
des des  halles.  Après  la  journée  du 
10  août  1792,  il  devint  l'un  des 
juges  du  tribunal  institué  pour  ju- 
ger ceux  qui  avaient  participé  à  la 
défense  du  château.  On  le  vit  de- 
puis figurer  dans  presque  tous  les 
mouvemens  populaires,  dont  il 
n'était  pas  cependant  l'homme  le 
plus  dangereux.  Après  l'explosion 
(le  la  machine  infernale  du  3  nivôse 
an  9  (24  décembre  1800) ,  Pepin- 
Desgroueltes  fut  compris  sur  la 
liste  des  personnes  condamnées  à 
la  déportation.  Il  mourut  aux  îles 


Séclielles  clans  le  courant  fie  «8o5. 

{'KRALDI  (Maru's)  ,  député  de 
l'île  de  Corse  à  rassemblée  légis- 
lative, fnt chargé,  après  la  journée 
du  lo  aoOt  1793,  de  se  rendre, 
eonjoinlement  avec  Antonelle  et 
Kersainl ,  à  l'armée  des  Ardennes, 
que  commandait  le  général  La 
Fayettp.  La  mission  des  commis- 
saires <^lait  d'obter)ir  l'assentiment 
de  l'armée  en  faveur  de  la  révolu- 
lion  qui  venait  de  s'opérer;  mais 
le  général,  de  concert  avec  la  mu- 
nicipalité de  Sedan,  les  prévint  en 
ordonnant  leur  arrestation.  Cepen- 
dant cette  mesure  n'ayant  pas  rem- 
pli l'attente  du  général  La  Fayette, 
que  l'insubordination  des  troupes 
força  de  s^expatrier,  Peraldi  et 
se»  collègues  recouvrèrent  leur 
liberté  ;  le  premier  retourna  en 
Corse  à  la  fin  de  la  session.  Lors- 
que plus  tard  de«  tioubles  éclatè- 
rent dans  cette  î!e,  à  l'effet  de  la 
«ouslraire  à  la  domination  fran- 
çaise, l'eraldi  se  réunit  à  Paoli, 
qui ,  soutenu  parles  Anglais,  était 
à  la  tête  des  insurgés.  L'arrivée 
des  troupes  françaises  ayant  forcé 
les  Anglais  d'évacuer  la  Corse, 
Peraldi,  obligé  de  fuir  avec  Paoli, 
passa  en  Angleterre,  où  il  mourut 
depuis. 

PÉRARI)  ( Charles- Frahçois- 
.?KAif),  député  à  la  convention  na- 
tionale, montra  de  bonne  heure 
un  esprit  indépendant.  Jeune  en- 
core, il  participa  aux  troubles  de 
Bretagne,  se  mit  ensuite  à  la  tête 
de  la  jeunesse  d'Angers,  et  entra 
dans  la  confédération  de  Pontivy. 
Kn  1793,  député  du  département 
de  i>laine-et-Loire  à  la  convenlion 
nationale  ,  il  vota  dans  le  procès 
du  roi  avec  la  majorité.  Quelque 
temps   après  ,   le    brave   général 


PÉR 


i39 


Beysser,  qui  servait  dans  la  Ven- 
dée, fut  accusé  devant  la  conven- 
tion. Pérard,  son  ami,  embrassa 
sa  défense  avec  une  chaleur  et  un 
zèle  qui  n'étaient  pas  sans  danger; 
il  s'offrit  pour  caution  de  sa  con- 
duite, dont  il  répondit  sur  sa  tête. 
Ce  généreux  dévouement  ne  fit 
que  retarder  la  mort  de  Beysser; 
rendu  pour  un  temps  à  la  liberté, 
il  monta  sur  l'échafaud  quelques 
mois  après.  A  la  suite  du  9  ther- 
midor an  2,  Pérard,  envoyé  dans 
le  département  de  l'Aisne  pour  y 
épurer  les  autorités  constituées, 
s'acquitta  de  sa  mission  avec  sa- 
gesse et  impartialité,  fit  mettre 
en  liberté  un  grand  nombre  de 
détenus,  et,  par  le  compte  qu'il 
rendit  de  ses  opérations,  provo- 
qua le  rapport  du  décret  qui  dé- 
clarait la  commune  de  Beauvais 
en  état  de  rébellion.  A  la  suite 
des  journées  de  vendémiaire,  il 
prononça  un  discours  sur  la  né- 
cessité de  créer  un  triumvirat,  ou 
commission  extraordinaire  de 
trois  membres,  pris  dans  les  comi- 
tés ,  poui'  présenter  des  mesures 
de  gouvernement  analogues  aux 
circonstances  présentes.  Cette 
proposition  ne  fut  point  accueil- 
lie. Compris  plus  tard  dans  la 
liste  des  conventionnels  qui  fu- 
rent «îxilés  de  Paris  après  la  cons- 
piration dite  de  Grenelle, Pérard  se 
retira  ù  l'hôpital  de  Saiut-Cyr.  Il 
fut,  depuis,  chef  de  bureau  au 
ministère  de  la  police,  et  occupa, 
après  le  iS  brumaire  an  8,  la  pla- 
ce de  connnissaire-général  <le  po- 
lice ;\  Toulon.  Mais  rappelé  à  la 
suite  de  quelques  altercations  a- 
vec  les  autorités  du  dé[>artement, 
il  n'exerça  aucune  fonction  publi- 
que jusqu'au  17  mai  i8i5.  A  cette 


i4o  PEK 

époque,  il  fut  nornmé  lieutenant- 
extraordinaire  de  police  à  Dieppe, 
et  remplit  cette  place  jusqu'au 
mois  de  juillet.  Atteint  comme 
votant  par  la  loi  du  12  janvier  i8i6, 
il  a  quitté  la  France. 

PERCEVAL  (N.  de),  officier 
de  génie  avant  la  révolution  ;  il 
ne  servit  pas  sous  la  république, 
mais  il  occupa  sous  l'empire  la 
place  de  commissaire- ordonna- 
teur. C'est  en  cette  qualité  qu'il 
fit  la  campaj,me  de  18 15,  où  il  fut 
fait  prisonnier.  M.  de  Perceval  u 
été  nommé,  en  1814?  commissai- 
re-ordonnateur de  la  maison  du 
roi;  en  181 5,  commissaire-ordon- 
nateur de  la  garde;  en  1817,  in- 
tendant militaire  ;  et  enfin  ,  en 
1820  ,  secrétaire-général  du  mi- 
nistère de  la  guerre.  Il  donna,  eu 
1825,  sa  démission  de  ces  derniè- 
res fonctions  lorsque  le  baron  de 
Damas  remplaça  le  maréchal  duc 
de  Bellune  après  les  événemens  de 
la  guerre  d'Espagne  de  cette  an- 
née. Devenu  membre  de  la  cham- 
bre des  députés ,  M.  de  Perce- 
val  a  siégé  au  centre  droit,  et  a 
constamment  voté  avec  le  minis- 
tère. On  ne  l'a  vu  qu'une  seule 
fois  monter  à  la  tribune  :  ce  fut 
pour  y  faire  l'apologie  de  M.  de 
Latour-Maubourg,  alors  ministre, 
et  pour  s'opposer  à  la  réduction 
du  budget  de  la  guerre.  Sorti  de 
la  chambre  en  1823,  il  n'a  point 
été  réélu  l'année  suivante. 

PERCEVAL  (Spencer).  (Voy. 
\e  Supplément  an  présent  volume.) 

PERCIVAL  (Thomas),  physi- 
cien anglais,  naquit  à  Waringlon 
en  1740,  fut  élevé  d'abord  à  l'é- 
cole de  cette  ville,  puis  à  celle 
d'Edimbourg,  où  il  étudia  la  mé- 
decine avec  tant  de  zèle  et  de  suc- 


PER 

ces,  qu'à  peine  âgé  de  24  ans,  il 
fut  reçu  membre  de  la  société 
royale.  Après  plusieurs  voyages 
et  un  séjour  de  quelque  temps  à 
Paris,  à  Hambourg,  et  particuliè- 
rement à  Leyde ,  où  on  lui  con- 
féra le  grade  de  docteur,  il  se  fixa 
dans  son  pays  natal  en  1766. 
L'année  siu'vaiile,  il  alla  exercer 
la  médecine  à  Manchester;  il  con- 
tribua, par  ses  excellens  mémoi- 
res de  physique  et  d'histoire  na- 
turelle, à  la  fondation  de  la  société 
de  Manchester,  qui  les  a  publiés 
dans  ses  Transactions.  Médecin 
très-distingué  ,  Penuval  s'est  de 
plus  fait  un  nom  dans  la  littéra- 
ture. On  lit  avec  plaisir  ses  Ins- 
tructions d' un  père  à  ses  en  fans  , 
et  ses  Dissertations  morales  et  Ut~ 
téraires.  Il  mourut  en  1804. 

PERCY  (Pierbe-François,  ba- 
ron), inspecteur-général  du  ser- 
vice de  santé  militaire,  chirurgien 
en  chef  des  armées,  et  comman- 
dant de  la  légion-d'honneur,  na- 
quit à  Montagney,  dans  l'ancien- 
ne province  de  Franche-Comté, 
en  1754.  D'éminens  talens,  des 
découvertes  précieuses  pour  les 
progrès  de  son  art,  et  une  vie  en- 
tière courageusement  consacrée 
au  soulagement  des  maux  de  l'hu- 
manité, lui  ont  mérité  la  recon- 
naissance et  la  vénération  de  ses 
concitoyens.  Son  père,  ancien 
chirurgien-major  d'un  régiment, 
s'était  retiré  du  service ,  mécon- 
tent de  son  sort ,  et  avait  décidé 
que  son  fils  ne  suivrait  pas  la  mê- 
me carrière.  Il  donna  les  plus 
grands  soins  à  son  éducation,  et 
le  jeune  Percy  fit  d'excellentes 
études  au  collège  de  Besançon  , 
où  il  remportait  régulièrement 
chaque  année  les  premiers  prix. 


PER 

Pour  obéira  sou  père,  il  se  livra 
avec  ardeur  à  l'étude  des  mathé- 
matiques, devant  entrer  dans  le 
corps  royal  du  génie  ,  mais  un 
goût  dominant  l'entraînait  vers  la 
médecine,  la  chirurgie  et  les  tra- 
vaux anatomiques.  Il  fit  bientôt  de 
si  grands  jirogrès  dans  cette  der- 
uière  partie,  qu'il  fut  jugé  digne 
de  diriger  les  études  des  autres 
élèves,  et  d'enseigner  lui-même. 
Il  lui  fut  enfin  permis  d'embrasser 
l'état  où  il  devait  s'illustrer,  et  où 
il  contribua  depuis  si  puissam- 
ment à  élever  la  chirurgie  mili- 
taire française,  au  haut  point  de 
renommée  dont  elle  jouit  juste- 
ment en  Europe.  En  1770,  il  fut 
pramu  docteur  en  médecine  par 
ia  faculté  de  Besançon,  distinction 
que  lui  valurent  à  l'âge  de  21  ans, 
ses  travaux  assidus  et  les  prix  qu'il 
^vait  remportés  aux  divers  con- 
cours de  cette  faculté.  Sa  récep- 
tion ne  fut  pas  même  chargée  de 
ttfus  les  frais  ordinaires,  et  se 
trouva  presque  gratuite.  M.  Percy 
fut  attaché  peu  de  temps  après,  à 
la  gendarmerie  de  France ,  en 
qualité  d'aide-chirurgien,  et  resta 
à  ce  poste  près  de  6  ans.  Il  publia 
plusieurs  mémoires  pendant  cette 
époque  ,  dont  le  premier  fut  des- 
tiné à  prémunir  le  public  conire 
rusaj;e  inconsidéré  d'un  remède 
empirique  alors  en  vogue,  les 
Grains  (le  vie ,  et  un  antre  contre 
un  ouvrage  très-superficiel,  sur 
l' Art  (les  accouchemenSf  qui  avait 
c«'pendanl  valu  à  son  auteur  un 
des  principaux  emplois  de  la  chi- 
rurgie militaire.  Ai.  Percy  profita 
dvs  leçons  du  célèbre  Lafosse, 
alor.>  hippiatre  en  chef  de  la  gen- 
diuiUKrie.  et  acquit  sous  cet  ha- 
bile maître,  une  connaissance  ap- 


PER 


»4» 


profondie  de  l'art  vétérinaire. 
Nommé,  en  1782,  chirurgien- 
major  du  régiment  de  Berry  ca- 
valerie, il' se  rendit  à  ce  corps,  et 
tout  en  remplissant  avec  autant 
de  zèle  que  de  succès,  ses  nou- 
velles fonctions,  il  trouva  le  temps 
de  concourir  pour  tous  les  prix 
que  l'académie  de  chirurgie  de 
Paris  proposait.  Ayant  remporté 
successivement  les  premiers  prix, 
sur  les  instrumens  tranchans,  et 
particulièrement  sur  les  ciseaux 
d'incision  ;  sur  la  question  ten- 
dant à  restreindre  le  nombre  des 
instrumens  destinés  à  l'extraction 
des  corps  étrangers;  sur  les  bis- 
touris; sur  les  cautères,  etc. ,  l'aca- 
démie se  cru  t  obligée  de  le  prier  de 
ne  plus  envoyer  de  pièces  au  con- 
cours, afin  de  laisser  quelque  es- 
poir de  succès  à  ses  nombreux  ri- 
vaux découragés  par  une  supério- 
rité aussi  marquée,  et  elle  le  nom- 
ma en  même  temps  son  associé 
regnicole.  Mais  les  palmes  acadé- 
miques dont  il  était  chargé,  quel- 
que nombreuses  qu'elles  fussent, 
puisqu'il  se  vit  couronner  dans 
seize  concours  publics  des  princi- 
pales académies  de  l'Europe,  fu- 
rent bien  loin  de  sulfirc  à  la  gloire 
de  M.  Percy,  et  en  forment  aussi 
la  moindre  partie.  C'était  dans  le» 
guerres  sanglantes  où  la  France 
se  trouva  bientôt  engagée,  c'était 
sur  les  champs  du  carnage  et  au 
milieu  du  feu  le  plus  meurtrier, 
qu'il  devait  signaler  son  amour 
pour  l'humanité.  Bravant  tous  les 
dangers  personnels,  ou  paraissant 
plutôt  ignorer  qu'il  en  existât 
pour  lui,  il  prodiguait  toutes  h's» 
ressources  de  son  art  et  de  son  gé- 
nie, et  volait,  sous  le  canon  mêm« 
de  renftemi,  au  secours  de   ses 


1^2 


PER 


frères  d'armes  atteints  par  le  fer 
ou  l<i  feu.  Ce  n'était  pas  le  géné- 
ral ou  l'officier  supérieur  qu'il  ju- 
geait seuls  dignes  de  ses  soins,  son 
habile  main  soulageait  également 
les  maux  du  guerrier  des  derniers 
rangs,  et  les  soldats  appelaient 
Percy  leur  père.  Ce  fut  lui  qui 
organisa  le  premier,  à  l'armée  du 
Khin,  ce  corps  mobile  de  chirur- 
gie militaire  qui  rendit ,  dès  sa 
création,  de  si  éminens  services, 
et  qui  après  avoir  excité  1  admira- 
tion et  l'envie  dfs  armées  coali- 
sées, leur  servit  de  modèlie  pour 
en  organiser  de  pareils.  Ce  lut  en- 
core lui  qui  en  Espagne,  foruia 
presque  entièrement,  à  ses  propres 
frais,  un  premier  bataillon  de  sol- 
dats d'ambulance,  et  une  compa- 
gnie spéciale  de  brancardiers  qui, 
pourvus  de  brancards  d'une  cons- 
truction nouvelle  ,  inventée  par 
lui,  se  transportaient  partout  pour 
relever  les  blessés.  L'étranger  se 
hâta  aussi  de  proliter  de  celle  ins- 
titution, qui  l'ut  d'abord  Ires-louèe 
en  France,  et  ensuite  à  peu  près 
négligée.  Après  les  désastres  mi- 
litaires de  18 14»  et  la  première 
entrée  des  coalisés  à  Paris,  il  se 
trouvait,  sans  compter  les  blessés 
français,  plus  de  12,000  Russes, 
Prussiens,  Bavarois  el  étrangers 
de  tous  pays,  qui  avaient  élé  mis 
hors  de  combat  sous  les  murs  de 
la  capitale.  Ils  languissaient  à  peu 
près  abandonnés,  faute  de  chirur- 
giens sullisans,  et  manquaient  a  la 
fois  d'asiles,  de  pansemens,  de 
linge,  et  même  de  pain.  iM.  Percy 
devint  leur  providence.  Sur  sa 
demande,  les  vastes  abattoirs  de 
Paris  furent  mis  à  sa  disposition. 
tin  appel  fut  lait  aux  généreux 
habilans  de  celte  ville,  qui  s'eui- 


PER 

pressèrent  de  fournir  du  linge  , 
des  couvertures,  des  matelas  et 
des  secours  de  loute  espèce  à  leurs 
ennemis  blessés,  tandis  que  ceux 
de  leurs  camarades  qui  étaient 
restés  sous  les  armes,  pillaient  et 
dévastaient  les  habitations  des  ci- 
toyens aux  environs  de  la  capita- 
le, el  que  les  cosaques  vendaient  à 
l'enchère  dans  les  rues,  le  mobi- 
lier et  les  bestiaux  qu'ils  ne  pou- 
vaient emmener  ou  dévorer.  En 
50  heures,  im  service  régulier  fut 
établi  dans  ces  abattoirs,  et  des 
milliers  d'étrangers  lui  durent  la 
prolongation  de  leur  existence. 
Les  souverains,  en  échange  des 
soins  de  M.  Percy  pour  la  vie  de 
leurs  sujets,  le  récompensèrent 
maguifiquomeol  par  îles  cordons: 
il  eut  la  décoration  de  l'ordre  de 
Sainle-Amie  de  Russie,  de  l'aigle 
rouge  de  Prusse,  du  uiérile  de 
Bavière,  etc.,  etc.  En  181 5,  il  fut 
appelé  par  ses  concitoyens  ,  et  à 
runanimité  des  suffrages  des  élec- 
teurs de  sou  déparlement,  à  la 
chambre  des  représenlans.  Il  ne 
parut  qu'à  un  petit  lujmbre  des 
séances  de  la  seconde  chambre, 
et  ne  parla  que  pour  ses  enfms. 
les  soldats  malades.  Ce  n'était  pas 
au  milieu  d'une  asseuïblée  déli- 
bérante, qu'il  croyait  sa  présence 
le  plus  utile;  il  se  rendit  de  nou- 
veau à  l'armée,  et  servit  avec  la 
plus  haute  distinction  jusqu'après 
la  bataille  de  Waterloo.  Depuis 
celte  époque,  on  ne  trouve  plus 
M.  Percy  à  la  tête  de  la  chirurgie 
militaire  française.  Il  faut  sans 
doute  supposer  qu'il  a  detnandé 
lui-même  sa  retraite,  après  la  se- 
conde rentrée  du  roi,  pour  se  re- 
poser de  ses  longs  et  honorables 
travaux.  Il  a  enrichi  les  mémoires 


PER 

de  l'académie  des  sciences,  dont  il 
est  membre,  ainsi  que  des  prin- 
cipales académies  de  l'Europe, 
d'une  foule  de  rapports  et  d'arti- 
cles non  moins  remarquables  par 
la  vaste  érudition  de  leur  auteur 
que  par  un  style  pur.  élégant, 
harmonieux,  et  par  des  traits  d'u- 
ne piquante  originalité.  Les  dif- 
férens  journaux  de  médecine,  le 
Magasin  encyclopédique ,  le  Dic- 
tionnaire des  sciences  médicales, 
dont  il  c^t  collaborateur,  lui  doi- 
vent aussi  des  mémoires  et  arti- 
cles précieux.  M.  Fercj  a.  en  ou- 
tre, publié  :  1°  AJémoire  (cou- 
ronné) sur  les  ciseaux  d'incision, 
Paris,  1785,  in-4'';  2°  Manuel  des 
chirurgiens  d'armée,  Paris,  1792, 
in- 12,  avec  figures;  5°  Pyrotech- 
nie chirurgicale  pratique,  ou  l'Art 
d'appliquer  le  feu  en  chirurgie , 
Paris,  179'!,  in-S",  et  une  nouvel- 
le édition  en  1810;  4°  Réponse 
aux  questions  épuratoires  propo- 
sées par  la  commission  de  santé , 
Metz,  an  3,  in- 13  ;  5°  Eloge  his- 
torique de  Sahatier,  Paris ,  1812, 
in-4'  6f  in-8°;  6°  Éloge  histori- 
que d'Anuce  Foës ,  Paris,  1812, 
in-8",  etc. 

PERE  (le  comte  N.),  fiU  pré- 
sident du  tribunal  criminel  du  dé- 
partement (les  Hautes-Pyrénées 
dans  les  premières  années  de  In 
révolution  ,  et  ensuite  député  de 
ce  département  au  conseil  des  an- 
ciens. Il  se  montra  favorable  à  la 
révolution  du  18  brumaire  au  8, 
devint  membre  de  la  commission 
intermédiaire  du  conseil  et  mem- 
bre du  sénat  -  conservateur  an 
iru)is  de  décembre  i7»>G  ,  enfin  , 
comte  de  l'empire  et  connnan- 
deur  de  la  légion-dlionneur.  Le 
I"  avril  1814,  il  donna  son  adhé- 


PER  145 

sion  à  la  déchéance  de  Napoléon, 
et  fut  nommé  ,  le  4  juin  suivant , 
pair  de  France.  M'ayant  accepté 
ni  }>lace  ,  ni  dignité,  pendant  les 
cent  jours,  en  181 5,  il  a  continué 
de  siéger  à  la  chambre  des  pairs, 
dont  il  fait  encore  partie  aujour- 
d'hui (1824). 

PEREIRA  DE  FIGUEIREDO 
(Antoine  } ,  célèbre  historien  et 
théologien  portugais  ,  membre 
de  l'académie  royale  des  science.-, 
de  Portugal,  interprète  des  lan- 
gues de  la  secrétairerie  d'état  des 
alTaires  étrangères  et  de  la  guer- 
re ,  etc.,  naquit,  le  14  février 
1725,  d'Antoine  Pereira  et  do 
31arie  F'igueiredo ,  habitaus  du 
bourg  de  Macao.  Ses  parens  le 
destinèrent  à  la  carrière  ecclésias- 
tique, et  l'envoyèrent  au  collège 
des  jésuites  de  Villa-Yiciosa  ,  où 
il  apprit  la  grammaire,  le  latin,  et 
la  musique.  Au  sortir  de  ses  étu- 
des, il  fut  admis  comme  musicien 
et  organiste  au  monastère  de 
Sainte-Croix  de  Coïmbre.  Il  n'y 
resta  que  quel<]ues  mois,  et  en- 
tra, en  1744'  dans  la  congréga- 
tion de  l'oratoire  de  Lisbonne.  En 
1751,  il  publia  des  Exercices  sur 
les  langues  latine  et  portugaise,  à 
l' usage  de  la  congrégation  de  l'o- 
ratoire. Cet  ouvrage  fortifia  la  ré- 
putation dont  il  jouissait  déjà  com- 
me grammairien.  Méanmoins,  son 
mérite  ne  fut  généralement  ap- 
précié qu'après  la  publication 
qu'il  fit,  en  1752,  de  sa  Nouvelle 
méthode  de  la  grammaire  latine; 
cet  ouvrageeut  10  éditions.  11  fut 
choisi,  dans  la  même  année,  pour 
enseigner  sa  méthode  ,  emploi 
qu'il  exerça  jusqu'en  1755,  lors- 
qu'il fut  forcé,  par  suite  du  trem- 
blement de  terre  dont  il  faillit  è- 


144 


PER 


Ire  victime,  de  passer  dans  la  mai- 
son de  Notre-Dame  des  Nécessités 
dépendante  de  sa  congrégation. 
Là  il  commença  à  enseigner  la 
rhétorique;  mais  son  extrême  ap- 
plication au  travail  le  força,  par 
ordre  des  médecins,  de  se  retirer 
à  Viseu,  dans  la  province  deBei- 
ra,  dont  le  climat  améliora  sa  san- 
té. Bien  accueilli  de  l'évêque  de 
cette  ville,  D.  Jules-François  de 
Oliveira  ,  que  l'oratoire  avait 
compté  parmi  ses  membres,  Pe- 
reira  de  Figueiredo  comptait  faire 
un  long  séjour  dans  sa  nouvelle 
retraite.  La  faveur  du  prélat  fut 
de  peu  de  durée,  et  il  fut  obligé  de 
se  fixer  à  Porto.  Sa  santé  se  réta- 
blit entièrement  dans  celte  ville, 
et,  en  1769,  il  retourna  à  Lis- 
bonne. Choisi  pour  enseigner  la 
théologie,  il  se  vit  bientôt  appe- 
lé, par  suite  des  longues  dissen- 
tions du  Portugal  avec  la  cour  de 
Rome,  à  combattre  en  faveur  de 
sa  patrie  contre  celte  même  cour. 
11  le  fit  avec  succès.  Il  provoqua 
et  dirigea,  en  1^65,  les  célèbres 
thèses  par  lesquelles  il  prouvait 
que  les  rois  avaient  un  souverain 
pouvoir  sur  les  biens  des  ecclé- 
siastiques :  système  consigné  dans 
le  recueil  intitulé  Collectio  tliesiu- 
mœ,  imprimé  à  Paris  en  1768,  et 
où  l'on  trouve  quelques-uns  des 
principes  de  la  constitution  civile 
du  clergé  de  Fra  nce  de  1 79 1  •  Dans 
son  ouvrage  qui  parut  sous  le  titre 
(\eTentativatheologica^eU\^\\%on- 
tient  «  que  lorsque  le  recours  au 
saint-siége  trouve  des  obsracles , 
la  faculté  de  dispenser  des  ein|)ê- 
chemens  de  mariage  est  dévolue 
aux  évêques,  aussi-bien  que  celle 
de  pourvoir  aux  besoins  spirituels 
des  fidèles  dans  tous  les  cas  rcser- 


PER 

vés  au  pape,  toutes  les  fois  que  le 
bien  public  et  la  nécessité  le  de- 
mandent. (Jet  ouvrage,  estimé  par 
les  uns  et  critiqué  par  les  autres, 
a  été  traduit  en  plu>ieurs  langues, 
et  cité  par  les  plus  habiles  théolo- 
giens et  canonistes  de  tous  les 
pays.  On  dit  que  la  traduction 
française  fut  faite  par  un  avocat 
du  parlement  de  Paris,  à  l'insti- 
gation de  l'abbé  de  Bellegarde, 
chanoine  d'Utrecht,  ami  et  cor- 
respondant de  Pereira  de  Figuei- 
redo. »  Ces  tristes  débats  failli- 
rent coûter  la  vie  au  roi  de  Por- 
tugal, qui  n'échappa  qu'avec  pei- 
ne au  fer  d'un  assassin.  Pour  ren- 
dre la  tranquillité  à  ses  états ,  ce 
prince  défendit,  en  1760,  sous  les 
peines  les  plus  sévères  ,  toute 
communication  spirituelle  ou 
temporelle  avec  la  cour  de  Ro- 
me. Les  évêques  portugais  ren- 
trèrent ainsi  dans  leurs  droits,  et 
c'est  dans  ce*  circonstances  que 
fut  publié  l'ouvrage  du  savant 
théologien  Pereira  de  Figueire- 
do, l'homme  le  plus  savant  de  son 
siècle.  Joseph  I",  pour  récompen- 
ser les  services  de  ce  savant,  le 
nomma  député  ordinaire  du  tri- 
bunal de  censure,  emploi  qu'il 
conserva,  de  sa  création,  en  1768, 
jusqu'à  son  extinction.  Joseph  l" 
lui  donna  l'ordre,  en  i^Oy,  de 
quitter  la  robe  de  l'oratoire  pour 
remplir  à  sa  cour  le  double  em- 
ploi de  premier  interprète  des  lan- 
gues de  la  secrétairerie  d'état  des 
afl'aires  étrangères,  et  de  la  se- 
crétairerie de  la  guerre.  Il  exerça 
ces  fonctions  jusqu'à  sa  mort,  ar- 
rivée le  14  août  1797.  Pereira  de 
Figueiredo  a  traduit  une  foule  de 
pièces  et  de  documens  olliciels, 
soit  par  ordre  du  roi,  soit  par  ce- 


PEU 

lui  du  principal  minisire,  le  mar- 
quis de  Poinbal,  qui  chargea,  eu 
outre,  cet  historien  de  traduire  les 
nouveaux  statuts  de  l'université  de 
Coïmbre,  «  dans  le  bon  latin,  disait 
»le  ministre,  qu'il  avait  coutume 
»  d'écrire.  »  Les  nombreux  travaux 
auxquels  l'assnjétissait  son  emploi 
ne  l'éloignèrent  pas  de  la  carrière 
littéraire.  Il  a  transporté  dans  sa 
langue  maternelle  une  foule  d'ou- 
vrages de  divers  auteurs  étran- 
gers, et  a  composé  un  nombre 
considérable  de  dissertations,  thè- 
ses et  écrits  théologiques ,  dont 
rénumération  occuperait  plu- 
sieurs colonnes.  Ce  qu'il  a  fait, 
d'un  intérêt  pfus  général  en  ce 
genre ,  ce  sont  :  i"  Eté  mens 
d'histoire  ecclésiastique  en  forme 
de  dialogues,  2  vol.  in-8°,  lyGS: 
le  premier  contient  les  élémens 
de  la  chronologie,  et  le  second, 
ceux  de  la  géograithie  ;  deux  au- 
tres volumes ,  restés  manuscrits, 
renferment  l'histoire  des  conciles 
avec  des  remarques,  observations, 
etc.,  sur  les  écrits  des  SS.  PP.; 
2°  les  Portugais  aux  conciles -gë- 
néraux,  ou  Relation  des  ambassa- 
deurs ,  prélats  et  docteurs  portu- 
gais,  qui  ont  assisté  aux  conciles 
généraux  d'Occident ,  depuis  les 
deux  premiers  de  Latran  jusqu'à 
celui  de  Trente,  in-4"',  1787;  3* 
Analyse  de  la  profession  de  foi  de 
Pie  IF,  in-4'',  ''79^  ouvrage  mu- 
tilé par  la  censure,  réimprimé  en 
italien,  en  179a,  avec  des  notes: 
il  existe  encore  de  celte  analyse 
une  traduction  en  espagnol,  faite 
de  concert  avec  l'auteur,  et  une 
traduction  en  français  par  M. 
Mouton;  elles  sont  restées  inédi- 
tes; 4°  de  Ferbo  Dei  scripto  et  tra- 
dilfl,    imprimerie  royale,    179a; 

T.  XVI. 


PER 


145 


5"  il  a  donné,  en  1756,  un  Com- 
mentaire latin  et  portugais  ,  avec 
des  notes  sur  le  tremblement  de 
terre  et  l'incendie  de  Lisbonne; 
6",  en  1761,  des  Ep/iémérides  de 
ce  qui  s'est  passé  en  Portugal,  de- 
puis le  tremblement  de  terre  Jusqu'à 
r expulsion  des  jésuites;  7'  un  ma- 
nuscrit sous  le  titre  de  Lusitania 
sacra,  ou  état  ancien  et  moderne 
de  l'église  de  Portugal  ;  8  '  des 
Eloges,  Inscriptions ,  etc.,  dans 
lesquels  il  célébrait  les  grands 
événemens  du  règne  de  Jo- 
seph I"  et  les  services  que  ren- 
daient à  l'étal  les  premiers  fonc- 
tionnaires publics;  9"  enfin,  son 
principal  ouvrage,  la  Bible,  tout 
entière  traduite  en  portugais,  avec 
préface  et  notes,  a  paru  en  •ïô  vol. 
iu-S".  Il  donna  d'abord,  en  6  vol., 
l'histoire  du  Nouveau-Testament, 
dédiée  aii  cardinal  Da  Cumha } 
1778;  puis  17  vol.  de  V Ancien' 
Testament,  de  1783  a  1790:  l'ou- 
vrage a  presque  entièrement  été 
imprimé  à  l'imprimerie  royale. 
Les  livres  apocryphes  ont  aussi 
été  traduits  par  Pereira  de  Fi- 
gueircdo,  mais  ils  n'ont  pas  été 
publiés.' Il  était  au  moment  de 
metlre  au  jour  une  nouvelle  édi- 
liim,  revue  avec  soin,  de  la  Bible, 
lorsqu'il  mourut.  Il  fut  vivement 
regretté  pour  ses  talens  et  ses 
vertus.  ^ 

PKRES  (Joachim),  avocat  ù 
Mirande  à  l'époque  de  la  révolu- 
ti(Mi,  fut  nommé,  en  1789,  député 
du  tiers -état  de  la  sénéchaussée 
d'Auch  aux  états-généraux,  puis 
élu  en  1 79a,  par  le  département  du 
(iers,député  suppléant  à  laconven- 
tion  nationale,  où  il  fut  appelé 
vers  la  fin  de  la  session.  l£n  »79i>, 
il  passa  au  conseil  des  cinq-cents, 
10 


)46  PER 

ot  parla  le  22  décembre  1  jQtî  sur 
le  projet  d'amnistie  pour  délits  re- 
latifs à  la  révoiutioa;  le  1"  mai, 
il  signala  les  prêtres  réiVactaires 
comme  les  ennemis  les  plu»  opi- 
niâtres de  la  révt)!(ition,  et  sollici- 
ta contre  eux  des  mesures  sévères; 
le  5  janvier  1797,  il  dénonça  les 
maisons  de  jeux,  dont  le  nombre  se 
multipliait  d'une  maiiièie  effrayan- 
te pour  la  morale  et  la  tran- 
(piillité  des  pères  de  famille;  le  9 
juillet  il  s'oppoi^a  au  décret  en  fa- 
veur des  inj^'itifs  de  Toulon;  le  1" 
mai  1708,  ii  parla  en  faveur  des 
citoyens  iu'^Ciits  sur  les  listes  d'é- 
migrés, et  essaya  de  prouver  que 
la  loi  du  19  fructidor  (5  septembre 
1797),  était  injuste  et  désastreuse, 
eu  te  qu'elle  exposait  à  être  arrê- 
tés et  fusillés  dans  les  vingt-qua- 
tre heures,  des  individus  qui  bien 
souvent  ignoraient  l'inscription  de 
leurs  noms  sur  les  listes  fatales.  Il 
sortit  de  cette  assemblée,  etdevint, 
après  le  18  brumaire  an  8,  mem- 
bre du  conseil  de  préfecture  du 
département  du  Gers,  fondions 
qu'il  a  exercées  jusqu'en  1822.  U- 
ne  biographie  moderne  prétend 
qu'il  avait  été  nommé,  par  le  gou- 
vernement consulaire,  préfet  du  dé- 
partement de  Sambre-et-i\leuse  ; 
c'est  une  en  eur  :  ce  fut  Perès-La- 
gesse,  dont  l'article  suit. 

PERÈS-LAGESSE  (Emmawlel), 
né  le  22  mai  1752,  était  avocat  en 
1789,  lorsqu'il  fut  éin  député 
suppléant  du  tiers-état  flu  pays  de 
llivière-Verdun ,  aux  états-géné- 
raux, où  il  ne  parut  point.  Nom- 
mé, an  mois  de  sepiembre  1792, 
député  du  département  de  la 
Haute-Garonne,  à  la  convention 
nationale,  il  vota  dans  le  procès  du 
roi   la  détention  et  le   bannissc- 


pEn 

ment  à  la  paix;  il  fut  de  l'avis  du 
sursis.  En  1794,  M.  Perès-La- 
gesse  parla  avec  beaucoup  de  cha- 
leur en  faveur  d'un  grand  nom- 
bre de  citoyens  du  Nord,  presque 
tous  cultivateurs,  qui  avaient  été 
incarcérés  comme  complices  de 
l'étranger.  A  la  fin  de  1795,  il  se 
rendit  à  l'armée  de  Sambre-et- 
Meuse,  d'où  il  transmit  à  la  con- 
vention les  vœux  dt^s  Belges  pour 
leur  réunion  à  la  France.  Devenu 
membre  du  consdl  des  cinq-cents, 
il  continua  à  professer  des  princi- 
pes de  sagesse  et  de  modération, 
et  réfuta  Pérès  (du  Gers),  qui 
s'opposait  à  une  amnistie  en  fa- 
veur des  citoyens  détenus  pour 
opinions  politiques.  Il  avait,  peu 
de  jours  auparavant ,  pro}»osé 
dindemniser  les  parens  des  con- 
danuiès  ,  en  les  autorisant  à  faire 
des  acquisitions  de  biens  natio- 
naux avec  les  I)ons  qu'on  leur  a- 
vait  délivrés,  on  remplacement  de 
leurs  biens  vendus.  11  appela  l'at- 
tention du  conseil,  dont  il  était  de- 
venu secrétaire,  sur  les  hôpitaux, 
et  la  loi  qui  les  avait  dépouillés. 
En  août,  il  signala  les  prêtres  dé- 
portés et  rentrés,  conjme  les  en- 
nemis de  la  chose  publique  ;  il 
coopéra  ensuite  à  la  révolution 
du  i8  fructidor  an  5.  11  présenta, 
le  17  février  1791S,  une  adresse  de 
la  ville  de  Toulouse,  contre  la 
cour  de  Rome ,  sortit  du  conseil 
dans  le  mois  de  mai,  et  fut  réélu 
aussitôt  à  celui  des  anciens,  dont 
il  fut  successivement  secrétaire  et 
président.  Enthousiaste  de  la  gloi- 
re nationale,  il  célébra  souvent  à 
la  Iribime,  la  valeur  et  le  succès 
de  nos  armées  ,  et  particulière- 
ment les  faits  brillans  de  l'armée 
d'Italie.  Il  s'occupa  vivement  d'à- 


PEU 

untliorer  le  sort  des  Kelges,  et  fit 
supprimeriez  ordres  religieux  de 
ce  pays.  Après  le  18  brumaire  au 
8,  il  fut  nommé  préfet  du  dépar- 
tement de  Sauibre-el-Meusc,  où 
il  ne  cessa  de  mériter  l'estime  et 
la  reconnaissance  publiques.  lien 
exerça  les  fonctions  jusqu'en  i8i4» 
époque  à  laquelle  les  Français  fu- 
rent contraints  de  renoncer  aux 
provinces  belgi{|ues. 

PKKETH-  DELLA  -  ROCCA  , 
grand-vicaire  d'Aleria,  fut  nommé 
député  du  clergé  de  Corse  aux  é- 
tats-généraux  en  1789.  Partisan 
exagéré  de  toutes  les  anciennes 
doctrines,  il  ne  voulut  pas  recon- 
naître le  besoin  qu'avait  la  France 
de  nouvelles  institutions,  et  ne 
rendit  pas  justice  aux  intentions  de 
l'assemblée  constituante.  Dés  le 
principe  ,  Peretli-dclIa-Rocca  se 
déclara  l'auteur  d'une  lettre  écrite 
de  Corse  contre  les  décrets  de  celte 
assemblée,  et  depuis  il  signa  les 
protestations  des  12  et  1 5  septem- 
bre 1 79 1 .  Depuis  cette  époque,  de- 
venu étranger  aux  affaires  publi- 
ques, il  est  resté  dans  l'obscurité. 

PEREYRA  (Ioseph),  naquit  à 
Bayonne  en  1  ^/p»  d'une  fau)ille 
belge.  Etant  venu  s'établir  à  Pa- 
ris comme  manufacturier  de  ta- 
bac, il  se  prononça  lorlenieut  en 
faveur  de  la  révolution  française, 
se  lia  avec  la  société  des  corde- 
liers,  partagea  en  1790  la  mission 
de  Dubuisson  auprès  de  Dumou- 
riez,  et  fit  ensuite  partie  du  comité 
central  révolutionnaire  de  la  com- 
mune de  Paris,  qui,  sous  la  direc- 
tion de  Marat,  contribua  à  assurer 
le  triomphe  de  la  Montagne  sur  la 
Gironde  au  5i  mai  1795.  Depuis, 
ayant  déplu  à  Robespierre,  qui  l'a- 
vait fait  chaiscr  du  club  des  Jaco- 


PER 


1/17 


bins,  comme  vendu  à  l'étranger, 
il  fut  enfermé  à  Saint-Lazart;  avec 
Défieux.  Vincent  et  Ronsin  vin- 
rent fréquemment  les  visiter  dans 
leurs  prison.  Pereyra  fut  condam- 
né à  mort  le  4  germinal  an  2  (24 
mars  1794),  comme  complice  de 
la  faction  des  hébertistes. 

PERGEN  (le  comte  de),  grand- 
maréchal  des  états  d'Autriclie  et  mi- 
nistre de  la  police  sous  Jf)seph  îl. 
fut  envoyé  à  Londres  par  l'empti-^ 
reur  François  II,  en  avril  1790, 
pour  ratifier  les  articles  d'un  traité 
de  subsides  que  l'Autriche  venait 
de  conclure  avec  l'Angleterre.  De- 
puis, en  1797,  l'empereur  le  nom- 
ma un  de  ses  ministres  plénipo- 
tentiaires au  congrès  de  Rastadt. 
Le  comte  dePergen  mourut  quel- 
ques années  après. 

PÉRIER  (MM.),  députés,  etc. 
{voy.  le  Suppl.   du  présent  vol.) 

PERIEIV  (les  fuèues  Jacques- 
Constantin  et  Auguste- Charles), 
tous  deux  né#  à  Paris  ,  se  livrè- 
rent, avec  un  5°  frère,  le  pins  jeu- 
ne d'entre  eux,  qui  mourut  à  l'â- 
ge de  24  ans,  à  l'étude  des  arts 
mécaniques.  Leur  premier  ouvra- 
ge, la  pompe  centrifuge,  que  Jac- 
ques -  Constantin  et  Auguste- 
Charles  exécutèrent  de  concert , 
donna  de  grandes  espérances  de 
la  réunion  de  leurs  talens,  et  l'é- 
tablissement du  (Conservatoire 
des  arts  et  métiers  compte 
parmi  les  choses  remarquables 
qu'il  renferme  dans  ses  salles,  la 
galerie  des  modèles  qu'ils  exécu- 
tèrent pour  le  duc  d'Orléans. 
Jacques  -  (Constantin,  voulant  se 
perfectionner  dans  la  connaissance 
du  mécanisme  et  des  nombreuses 
apj»licalions  des  machin(;s  à  va- 
peur, fit  cinq  voyages  s^uccessifs 


t',8 


PER 


en  Angleterre,  et  à  son  retour 
dans  sa  patrie ,  U  fit  établir  les 
deux  pompes  à  feu  qui  sont  à 
Chaillol  près  des  Champs-Ely- 
sées. Elles  élèvent  l'eau  de  la 
Seine  sur  la  plus  haute  éminence 
de  Chailiot,  où  sont  construits  des 
réservoirs  qui  distribuent  cette 
eau  dans  Paris  au  moyen  de  con- 
duits en  fonte.  Une  semblable  ma- 
chine est  placée  ,  pour  le  service 
du  faubourg  Saint -Germain  ,  au 
Gros-Caillou  près  de  la  Seine.  Dans 
le  premier  établissement  ,  quatre 
fourneaux  à  réverbère  peuvent 
fondre  chacun  ,  dans  l'espace  de 
trois  heures,  cinq  milliers  de  ma- 
tière. Il  sert  à  l'exploitation  de 
différentes  branches  d'industrie, 
telles  entre  autres  les  mines  de 
charbon,  les  filatures  de  coton, 
les  fabriques  de  draps,  les  fonde- 
ries et  perceries  <le  canons.  On  y 
fabriqua,  sous  la  direction  de  Mon- 
ge,  au  commencement  de  la  ré- 
volution ,  120  pièces  de  canon, 
au  nombre  desquelles  étaient  des 
pièces  de  seize,  avec  un  matériel 
considérable  d'artillerie.  Cet  éta- 
blissement avait,  dès  son  origine, 
mérité  l'attention  du  gouverne- 
ment. En  1811,  l'institut,  dans 
son  rapport  sur  les  prix  décen- 
naux ,  lui  donna  les  plus  grands 
éloges.  Les  rapporteurs  s'expri- 
mèrent ainsi  :  «  L'établissement  de 
MM.  PérieràChaillot,  dit  ce  rap- 
port, est  le  premier  et  presque  le 
seul  eu  F'rauce  où  l'on  puisse  faire 
exécuter  toutes  sortes  de  machi- 
nes. On  y  a  fabriqué  la  majeure 
partie  des  pompes  i\  vapeur  ré- 
pandues dans  l'empire,  une  gran- 
de quantité  de  pompes  de  toute 
espèce ,  des  balanciers ,  des  dé- 
coupoirs,  des  cylindres  à  papiers: 


PER 

ils  fondent,  en  fer  ou  en  cuivre, 
toutes  sortes  de  pièces....  C'est  à 
eux  à  qui  l'on  a  souvent  recours 
pour  la  construction  de  manèges, 
d'assortimens  de  machines  à  filer 
le  coton,  etc.,  enfin  pour  l'exécu- 
tion des  machines  en  général. 
MM.  Périer  ont  contribué  beau- 
coup à  affranchir  l'industrie  fran- 
çaise du  tribut  qu'elle  payait  à  cel- 
le des  étrangers.»  M.  Jacques- 
Constantin  Périer ,  membre  de 
l'académie  royale  des  sciences  a- 
vant  la  révolution,  et  depuis  mem- 
bre de  l'institut,  a  fait  insérer 
dans  le  recueil  de  l'académie  des 
sciences  ditTéretis  Mémoires  sur 
les  avantages  de  cette  machine, 
qui  a  servi  à  la  mise  en  activité  de 
près  de  100  ateliers  ou  usines  dans 
î'ituérieur  de  la  France.  Ce  sa- 
vant, qui  créa  la  fonderie  des  ca- 
nons de  la  marine  h  Liège,  où  on 
tenait  à-la-fois  en  fusion  1  10  mil- 
liers de  matière,  était  né  à  Paris  le 
3  novembre  1742;  il  mourut  dans 
la  mênie  ville  le  17  août  1818. 
M.  Jomard  lui  a  consacré  une  No- 
tice dans  le  bulletin  de  la  société 
d'encouragement  pour  l'industrie 
nationale,  1819,  pag.  i55-i38. 
Après  la  mort  de  Périer  aîné,  M. 
Scipion  Périer,  qui  n'est  pas  de 
la  même  famille,  a  acheté  l'éta- 
blissement de  Chaillut,  et  y  a  fait 
des  changemens  avantageux  dans 
les  opérations  de  la  fonderie. 

PERIER  (Jean-Fbançgis),  dé- 
puté aux  états-généraux,  ancien 
évêquc  constitutionnel  du  Puy- 
de-Dôme,  pu  isévêque  d'Avignon, 
membre  de  la  légion-d'hnnueur, 
est  né  à  Grenoble,  département 
de  l'Isère,  le  16  juin  17/10.  Au 
sortir  de  ses  études  ecclésiasti- 
ques, il  entra  dans  la  congréga- 


4 


:  c    J/L .  (  /  ('/ 'f(//i  o/i 


PEU 

lion  de  l'oratoire ,  et  devint  curé 
de  Saint- Pierre  d'Etampes.  Le 
clergé  du  bailliage  de  cette  ville 
l'élut  député  aux  états-généraux 
en  1789.  M.  Périer  se  fit  remar- 
quer dans  celte  assemblée  par 
son  amour  pour  la  concorde  ;  il 
prêta,  en  1791,  le  serinent  exigé 
parla  nouvelle  constitution  civile 
du  clergé;  fut  élu  évêque  consti- 
tutionnel du  Puy-de-Uôme  dans 
la  même  année;  et  donna  sa  dé- 
mission lors  du  concordai  de  1801. 
Mais  dans  l'institution  des  évê- 
ques,  qui  suivit  à  cette  époque 
(1802)  la  réorganisation  de  l'égli- 
se de  France, il  obtint  le  siège  d'A- 
vignon, et  reçut,  quelque  ttmps 
après,  la  décoration  de  la  légion- 
d'honneur.  M.  Périer  s'est  de  nou- 
veau démis  de  son  siège  épisco- 
pal  entre  les  niains  du  roi ,  en 
1817,  et  a  continué  de  l'adminis- 
trer jusqu'en  1820,  époque  à  la- 
quelle il  a  été  statué  sur  le  nou- 
veau concordat. 

PÉRIGNON  (Dominique-Ca- 
therine MARQUIS  de),  maréchal  et 
pair  de  France,  grand'croix  des  or- 
dres de  la  légion-d'honneur  et  de 
Saint-Louis,  grand-dignitaire  de 
l'ordre  des  Deux-Siciles,  naquit  à 
Grenade,  département  des  Landes, 
le  5i  mai  i754>  Il  montra  dès  sa 
jeunesse  du  goût  pour  la  profes- 
sion des  armes,  fit  des  études  ana- 
logues, et  entra  au  service  comme 
sous-lieutenant  dans  le  corps  des 
grenadiers  royaux  de  Guyenne;  il 
devint  aide-de-camp  de  M.  de 
Preissac.  11  était  juge  de  paix  du 
canton  de  Monlech,  département 
de  Tarn-et-Garonne ,  lorsqu'au 
mois  de  septembre  1791,  le  dépar- 
tement de  la  Haule-Garomie  le 
nomma  député  à  l'assemblée  lé- 


PEll 


ï49 


gislative,  où  il  ne  se  fit  point  re- 
marquer. Cédant  au  mouvement 
général   qui   portait   tous  les   ci- 
toyens aux  frontières,  il  renonça 
aux  fonctions  civiles,  et  rentra  au 
service   en  qualité   de   comman- 
dant d'une  légion  des  Pyrénées-O- 
rientales; bientôt  promu  au  grade 
de  général  de  brigade,  il  succéda 
au  commandement  en  chef  de  cet- 
te armée  après  la  mort  du  générai 
Dugommier  {voy.  ce  nom).  Il  fit 
avec  succès  les  campagnes  de  1 794 
et  1795,  remarquables  par  les  vic- 
toires du  7  juin    1794?  près  de  la 
Jonquière;  du  7  novembre  suivant 
à  Saint-Sébastien  et  à  la  Made- 
lène,  et  du  20  du  même  mois  de- 
vant Figuières,  où  fut  tué  le  géné- 
ral espagnol  La  Union    {voy.  La 
Union),  et  où,  maître  de  la  ville, 
il  619,000  hommes  prisonniers,  et 
s'empara  de  71   pièces  de   canon 
avec  un  matériel  considérable.  Cet- 
te campagne,  qui  fut  terminée  le 
7  mai  1795  par  la  prise  de  Roses, 
amena  la  paix  avec  le  gouverne- 
ment espagnol.  Pour  parvenir  au 
brillant  résultat  qu'obtint  le  géné- 
ral Pérign(m  dans  cette  dernière 
circonstance,  il   avait  fait  tailler 
dans  le  roc  un  chemin  de  plus  de 
Irois  lieues,  et  placer  sur  une  mon- 
tagne de  2,000  toises,  une  batte- 
rie de  canon  et  de  mortiers,  qui 
foudroyèrent  la  ville  et  en  ame- 
nèrent la  reddition,  ainsi  que  cel- 
le du  fort,  qui  jusqu'alors  avait  ré- 
sisté à  toutes  les  attaques.  Le  géné- 
ral Pérignon,  nommé  peu  de  temps 
après  son  retour  à  Paris ,  ambas- 
sadeur à  Madrid,   partit  pour  sa 
destination  au  mois  d'avril  1796. 
Sa  suite  était  nombreuse  et  bril- 
lante, et  il  fui  très-bien  reçu  du 
roi,  avec  lequel  il  conclut,  quatre 


1 5o  PÊIV 

mois  après,  un  traité  d'alliance 
oftensive  et  défensive  entre  la 
France  et  l'Espagne.  En  1797,  le 
vice-amiral  Truguet  succéda  au 
général  Pérignon  dans  l'ainbassa- 
de  à  Madrid;  celui-ci,  employé  en 
1  799  à  l'année  d'Italie,  fut  chargé 
du  commandement  de  l'aile  gau- 
che à  la  bataille  de  Novi;  il  y  fut 
grièvement  blessé,  et  fait  prison- 
nier en  protégeant  la  retraite.  Le 
])remier  consul  Bonaparte  le  nom- 
ma sénateur  en  1801,  et  le  pour- 
vut de  la  sénatoreriede  Bordeaux, 
en  1804.  Au  mois  de  inars  de  la 
même  année,  il  piésid;'.  le  collège 
électoral  du  déparlemcut  de  la 
Haute-Garonne,  et  fut  compris 
dans  la  première  promotion  des 
niatéchaux  de  l'empire.  Il  se  ren- 
dit, en  i8u6,  au  poste  de  gouver- 
neur de  Parme  et  Plaisance,  où  il 
venait  d'être  appelé;  en  1808  il 
i-emplaça,  à  Naples,  le  général 
Jourdau,  et  prit  le  commaudement 
de  toutes  les  troupes  franrais<;s 
dans  ce  royaume,  dont  il  rje  s'é- 
loigna rpi'à  l'époque  où  le  roi  Joa- 
chim  {voj.  Murât)  abandonna  la 
cause  de  l'empereur  Napoléon. 
De  retour  à  Paris,  le  maréchal  Pé- 
rignon adhéra  à  la  déchéance  de  ce 
prince  et  au  rétablissement  de  la 
maison  de  Bourbon  su r  le  trône  de 
France.  Monsieur,  lieutenant-gé- 
néral du  royaume,  lenon)ma  com- 
missaire extraordinaire  dans  la 
première  division  militaire.  Il  de- 
vint, par  ordonnances  r<)yales,  le 
3i  mai  18  j4?  président  de  la  com- 
mission qui  devait  constater  les  ti- 
tres, brevets,  lettres  de  service, 
etc. ,  des  anciens  oïïiciers  de  l'ar- 
mée des  émigrés;  le  1*'  juin,  che- 
valier de  Saint-Louis,  et  le  5  du 
même  mois,  pair  de  France.   Le 


PER 

maréchal  Pérignon  habitait  sa  ter- 
re de  Monbech,  près  de  Toidou- 
se ,  lorsque  Napoléon  quitta  l'île 
d'Elbe  au  mois  de  mars  181 5.  Alors 
le  maréchal  se  réunit  au  baron  de 
Yitrolles,  commissaire  de  Louis 
XVIII,  pour  organiser  des  moyens 
de  défense  dans  le  Midi.  Pendant 
les  cent  jours,  il  refusa  de  pren- 
dre part  aux  affaires  publiques. 
Le  roi,  à  son  second  retour,  le 
nomma  gouverneur  de  la  premiè- 
re division  militaire,  puis  com- 
iriandeur,  et,  en  1818,  grand'croix 
de  l'ordre  de  Saint-Louis.  Le  ma- 
réchal Pérignon  mourut  en  1819. 
Son  û\$  lui  a  succédé  dans  son  ti- 
tre de  marquis  et  dans  sa  dignité 
de  pair  de  France. 

PERIGN  Y  (  LE  MARQUIS  DE  )  ,  fut 

élu,  en  1789,  par  la  colonie  de 
Saint  -  Domingue,  député  aux 
états-généraux,  fin  1791  ,  il  écri- 
vit à  l'assemblée  ,  «  Qu'il  cessait 
»de  prendre  part  aux  séances,  a- 
»  près  l'adoption  de  l'article  con- 
»  cernant  les  hommes  de  couleur.  » 
Cependant,  après  le  départ  de 
Louis  XVI  pour  Varennes,  on  vit 
M.  de  Perigny  reparaître  au  sein  do 
l'assemblée,  où  il  prêta  serment  de 
fidélité.  Pendant  la  session  de  l'as- 
semblée législative,  il  fît  un  voyage 
en  Suisse  pour  y  propager  les  doc- 
trines de  la  révolution  ;  les  dan- 
gers qu'il  courut  le  forcèrent  à  re- 
venir en  France.  Il  se  mit  alors  à 
la  tête  de  la  société  populaire  de 
Strasbourg,  et  y  prononça  diiTé- 
reus  discours  où  il  exprimait  ses 
opinions  avec  beau  coup  d'énergie. 
De])uis  ce  temps,  le  marquis  de 
Perigny  n'a  plus  reparu  sur  la 
scène  politique. 

PÉRIN  (  liEwÉ  ),  homme  delet- 
Ires,   auteur  de  plusieurs  ouvra- 


i»Ea 

ges  en  prose  et  vers ,  el  d'un  grand 
nombre  de  pièces  de  théâtre,  est  né 
à  Paris,  le  2  novembre  1775, 
d'une  famille  de  robe.  Son  père 
était  avant  la  révolution  avocat 
aux  conseils  dn  roi,  et  membre 
des  conseils  de  Monsieur  et  du 
comte  d'Artois.  M.  Périn,  arrêté 
pendant  le  règne  de  la  terreur,  fut 
enfermé  aux  Carmes,  el  n'obtint 
sa  liberté  qu'après  la  chute  de  Ro- 
bespierre. Nommé  sous-prcfct  au 
mois  d'avril  18 15,  il  perdit  cette 
place  après  le  retour  du  roi,  et  n'a 
point  rempli  depuis  de  fonctions 
publiques.  Il  a  publié  :  i"  le  Fla- 
geolet (VÈrato,  ou  le  Chansonnier 
du  V audeville ,  i8oi,in-i8;  2"  les 
nouveaux  Athées,  ou  Réfutation  des 
nouveaux  Saints ,  en  vers  avec  des 
notes  historiques,  1801  ,  in- 12; 
5'  Mémoires  de  M""  de  Pompadour, 
suivis' de  sa  correspondance  ,  1801, 
5  vol.in-S";  4"  Choix  des  poésies  de 
Pezay,  Saint  -  Péravi,  la  Conda- 
mine,  Masson  de  M orvilUers ,  Bar- 
the  et  Flins,  avec  des  notices, 
1810,  2  vol.  In  -  18;  5"  Vie  mili- 
taire de  J.  Lannes ,  maréchal  de 
C empire,  duc  de  Montebeiloj  j  8 1  o , 
in-8";6''  Œuvres  de  Lemierre,  1810, 
5  vol.  in-B"  ;  '^"Beautés  historiques 
de  la  maison  d'Autriche,  iSii, 
2  vol.  in-12;  ^''  Itinéraire  de  Pan- 
tin aumont Calvaire, \)iir M.  de^Mai- 
sonterue,  parodie  piquante  del'iti- 
néraire  à  Jérusalem  ,  de  31.  de 
Châteaubriant  ;  9°  Pensées  de  La 
Harpe,  i8i4,  1  vol.  in-12;  10" 
Abrégé  du  cours  de  littérature  de  La 
Harpe,  1821,  a  vol.  in- 12,  et 
seconde  édition  1823.  On  a  de  lui 
les  pièces  de  théâtre  suivantes  : 
Beaumarchais  en  Espagne;  Cécile  et 
Fitz  Henri,  ou  encore  une  Fille  cou- 
j)able;  la  Boite  aux  fiches;  lesjn- 


PER  i5i 

diens  à  Marseille,  comédie  en  5 
actes,  imi  tée  deKotzebue.  (Avec  M. 
Pillon  :  )  ia  grande  ville  ou  les  Pari- 
siens vengés  ;  le  Voyage  autour  de 
ma  chambre  ;  Mole  auc  Champs- 
Elysées ,  comédie  en  1  acte  et  en 
vers,  i8o3;  tous  tes  Niais  de  Pa- 
ris, tragédie  burlesque,  en  5  actes 
et  en  vers;  (avec  M.  Rougemonf.) 
Henri  IV  et  d'Jubignc,  comédie 
en  3  actes,  iSi/\',  l' Intrigue  avant 
la  noce,  comédie  en  3  actes,  181 5; 
le  Vieil  oncle,  comédie  en  1  acte, 
1 816  ;  le  Garçon  sans  souci ,  mélo- 
drame comique,  tiré  du  roman  de 
Pigault-le-Brun,  1818,  in-8»; /a 
nouvelle  Cendrillon,  comédie  en  4 
actes,  en  prose,  1810;  le  Libelle, 
comédie  en  1  acte  et  en  vers , 
1811;  l'Héroïsme  des  femmes,  mé- 
lodrame en  3  actes;  la  Demande 
bizarre,  comédie  en  1  acte,  en 
prose,  1H19;  (avec  M.  Félix  Noga- 
ret  :  )  Dugay-Trouin  ,  mélodrame 
en  3  actes,  1807;  (avec  le  Roy;) 
Isabelle  de  Levanzo ,  mélodrame 
en  3  actes,  1 821.  On  avait  attribué 
à  M.  Vir'in, le  Dictionnaire  des  Gi- 
rouettes, mais  dans  une  hittre  in- 
sérée dans  différeus  journaux,  il  a 
formellement  désavoué  cette  com- 
pilation [voy.  Beuchot). 

PERISSE -DIJLLC(N.),  était 
imprimeur-libraire  à  Lyun  , quand 
il  fut  élu  député  du  tiers -étal  de 
cette  ville  aux  états- généraux,  en 
178g.  Il  siéga  au  côté  gauche, 
et  s'occupa  plus  particuiiéreujent 
d'objets  relatifs  aux  monnaies  et 
aux  assignats;  il  devint  membre 
du  comité  colonial.  S'étunl  déclaré 
à  Lyou  ,  en  1793,  contre  le  parti 
conventionnel,  il  fut  cundannié  à 
mort  après  le  siège. 

PERLET  (Chables),  né  à  Ge- 
nève  VOIS   1705,  vint  fort  jeune 


l52 


PER 


à  Paris ,  et  y  devint  libraire  et 
imprimeur.  Dès  le  commence- 
ment de  la  révolution,  il  entre- 
prit un  journal  auquel  il  donna 
son  nom.  Les  }»rincipes  qu'y  pro- 
fessèrent d'abord  les  rédacteurs 
donnèrent  h  leur  entreprise  un 
grand  succès,  et  procurèrent  à 
M.  Peilel  beaucoup  d'aisance  ; 
mais  un  changement  d'opinion 
trè.s-prononcé  en  1^97,  à  l'épo- 
que (le  la  lutte  du  directoire  avec 
le  parti  dit  de  Cliclii,  après  avoir 
donné  une  sorte  d'importance  à 
M.  Perlet  dans  ce  parti,  qui 
com|lait  sur  une  victoire  certai- 
ne, détruisit  les  bases  de  sa  for- 
tune par  les  événemens  inatten- 
dus des  18  et  19  fructidor  (4  et  5 
septembre  1798).  Compris  dans 
la  liste  de  dépoitalion  du  18, 
il  parvint  d'abord  à  ^e  cacher; 
mais  découvert  et  arrêté  en  1798, 
il  fut  conduit  à  Rochefort,  et  de 
là  transporté  à  la  Guiane;  le  18 
brumaire  an  8  le  rendit  à  sa 
patrie.  11  revint  en  France,  en 
passant  par  l'Angleterre  et  l'AlIe- 
mai'ne ,  où  l'on  prétendait  qu'il 
s'était  lié  avec  quelques  roya- 
listes, et  de  retour  à  Paris,  il 
y  reprit  son  commerce  de  librai- 
rie; mais  manquant  de  crédit,  il 
ne  put  le  faire  pro-'pérer.  Ici  com- 
mence pour  M.  Perlet  une  nou- 
velle carrière  bien  différente  de 
celle  qu'il  \euait  de  parcourir.  On 
l'a  peint  c<u)staunnent  sans  ins- 
truction, sans  connaissances,  sans 
aucune  espèce  d';iptitude;  il  a- 
vait  fait  une  entreprise,  que  les 
rédai  |eur^  auxquels  il  prêtait  son 
nom,  avaient  rendue  tiès-Incrati- 
ve  ;  mais  ces  lédacteurs  l'entraî- 
nèrent peut-être  à  son  insu  dans 
des  jtrincipes  qui  n'étaient  pas  les 


PER 

siens,  et  on  dut  le  plaindre  quand 
il  fut  puni  d'une  faute  qu'il  n'a- 
vait pas  commise;  mais  il  fut  mal- 
heureux sans  cesser  d'être  hon- 
nête homme.  jNous  allons  le  voir 
bientôt  transformé  en  intrigant, 
et  lié  à  des  complots  qui  suppo- 
sent beaucoup  d'aptitude,  et  mê- 
me de  flnesse,  qualités  qu'on  lui 
avait  jusqu'alors  constamment  re- 
fusées. Nous  rapporterons  les 
faits  sans  y  attacher  aucune  0-» 
pinion  particulière,  sans  les  ga- 
rantir, et  simplement  parce  qu'ils 
tiennent  à  l'histoire  de  l'époque" 
où  ils  (Mit  eu  lieu.  On  dit  donc  que 
pour  se  procurer  des  moyens  de 
subsistance,  Perlet  se  fit  l'agent 
du  gouvernement  impérial,  et  fut 
admis,  en  qualité  de  commis,  à 
la  préfecture  de  police.  C'est  a- 
lors  qu'il  noua  de  nouvelles  intri- 
gues à  l'aide  de  ses  anciens  rap- 
ports avec  les  royalistes  de  l'inté- 
rieur. Il  fit  plus  :  il  ouvrit  une 
correspondance  secrète  avec  Fau- 
che-Borel,  qui  se  trouvait  alors 
à  Londres,  en  lui  faisant  croire 
qu'il  avait  réuni  à  Paris  un  comi- 
té d'hommes  puissans,  dévoués 
au  rétablissement  du  trône  des 
Bourbons.  On  lui  répondit;  on 
lui  envoya  des  instructir»ns  et  de 
l'argent,  et  il  servait  ainsi  la  po- 
lice royaliste,  et  la  police  impéria- 
le. (!ui  dictait  sa  correspondance. 
Perlet  fit  un  voyage  en  Angleterre, 
fut  accueilli,  et  reçut  des  instruc- 
tions pour  l'intérieur.  Rentré  en 
France,  il  continua  de  servir  les 
deux  partis,  et  donna  tous  ses 
soins  à  faire  croire  à  ses  correS- 
pondans  de  Londres ,  que  le  co- 
mité dont  il  leur  parlait  depuis 
long-temps,  sans  l'avoir  jamais 
fait  coDDaîtrÈ,  existait  réellement, 


PER 

ft  qu'il  avait  de  grands  moyens 
(l'exéoulion.  Des  assurances  aus- 
si positives   décidèrent    enfin  les 
royiilistes  à  envoyer  à  Paris  une 
personne  de  confiance  pour  s'as- 
<uier  que  les  renseignemens  don- 
nés par  Perlet  étaient  exacts.    Le 
jeune   Vite! ,   neveu   de  Fauche- 
Borel ,   se  chargea  d'autant  plus 
volontiers  de  cette  mission,  qu'el- 
le   paraissait    présenter    peu    de 
dangers.  Ne  connaissant  que  Per- 
î.'t,  n'ayant  de  recommandation 
nue  pour  lui, ce  jeune  homme,  si 
l'on  en  doit  croire  Fauche-Borel, 
fut  livré  à  la  police  par  une  suite 
incroyable  de  perfidies,  et  fut  fu- 
sillé quelques  jours  après  son  ar- 
rivée dans  la    capitale.    Fauche- 
Borel  ,  revenu  en  France  à  la  sui- 
te du    roi  ,  dans  le  mois   de   mai 
181 4,  prit  un  logement  chez  Per- 
let, et  ce  ne  fut  que  six  mois  après 
qu'il  assure  avoir  acquis  la  preu- 
veque  son  neveu  avait  été  livré  par 
Perlet.  Fauche-Borel  publia  con- 
tre ce  dernier  une  brochure,  dans 
laquelle  il  le  signalait  comme  un 
traître,  et  le  dévouait  à  l'exécra- 
tion publique.  Ceci  se  passait  au 
commencement   de   1816.    Perlet 
se  prétendit  gravement  offensé  ; 
non-seulement  il  répondit  à  son 
accusateur,  mais  il  l'attaqua  lui- 
même.    Fauche    profita    de  celte 
circonstance  pour  le  traduire  cora- 
rtic  calomniateur  devant  la  poli- 
ce correctionnelle,  et  conclut  à  ce 
que  les  sommes  qu'il  afiirmaitque 
Perlet   s'était   fait   envoyer   pour 
sauver  Vitel  lui  fussent  restituées. 
Perlet  parut  au  tribunal,  et  mon- 
tra beaucoup  de  fermeté  pendant 
les    premières    audiences,    mais 
tout-à-coup  il  disparut.  Ce  juge- 
nicnl,  eu  date  du   24  mai   181^, 


PER 


i53 


l'a  condamné  à  cinq  ans  de  pri- 
son, à  2,000  francs  d'amende,  et 
a  ordonné  la  suppression  de  sa 
brochure,  intitulée  :  Exposé  de 
via  conduite.  Perlet  se  réfugia  à 
Genève,  sa  patrie,  où  il  rédigea 
un  journal  ayant  pour  titre  :  l'E- 
cho de  runivers.  La  troisième  li- 
vraison de  cet  ouvrage  renferme 
une  apologie  de  sa  conduite  dans 
les  faits  que  nous  avons  rap- 
portés. 

PERNETY   (dom  Antoinb-Jo- 
seph),  que  différens  auteurs  écri- 
vent Pernetti,  savant  et  célèbre 
bénédictin,  naquit  à  Roanne,  dé- 
partement de  la  Loire,  le  1 3  février 
1^16.   La  congrégation  de  Saint- 
Maur,  à  laquelle  il  appartenait, 
l'attacha  à  ceux  de  ses  membres 
qui    s'occupaient   à    l'abbaye    de 
Saint  Germain-des-Prés,  de  tra- 
vaux de  sciences  et  de  littérature. 
Dom  Pernety  fut  signataire  de  la 
requête  que  28  de  ses  confrères 
présentèrent  en  i^GS,  afin  d'obte- 
nir différentes  modifications  à  la 
règle  de  la  congrégation.  Il  n'at- 
tendit pas  l'issue  de  celle  affaire, 
et  se  rendit  secrètement  à  Berlin, 
où  Frédéric-le-  Grand  le  fit  son  bi- 
bliothécaire. Dom  Pernety  désirait 
entièrement  se  soustraire  à  la  ju- 
ridiction de  ses  supérieurs;  il  ob- 
tint le  titre  d'abbé  in  partibiis,  et 
revint  avec  celte  qualité  à  Paris. 
L'archevêque  de  Beaumont  vou- 
lant user  de  son  autorité  poiir  le 
faire  rentrer  dans  son  monastère, 
dom  Pernety  se  pourvut  devant 
le  parlement,  qui,  par  un  arrêt, 
l'autorisa  \  rester  maître  de  ses  ac- 
tions, c'est-à-dire  à  vivre  libre  el 
hors  de  la  dcpendaiice  de  la  con- 
grégation. Ce  savant  mouriil  en 
1800.  Il  s'était  retiré  à  Avignon, 


i54 


PER 


et  s'y  était  affilié  aux  associations 
franchos-uiaconniques.  On  distin- 
gue panui  ses  nombreux  ouvra- 
ges :  1°  traduction  du  Cours  de 
mathématiques  de  IVolf,  in-8° , 
*747j  ^°  Manuel  du  bénédictin, 
1754,  in-8";  5°  Dictionnaire  de 
peinture ,  sculpture  et  gravure, 
1767,  in  12;  4°  f(tbles  égyp- 
tiennes et  grecques,  dévoilées  et  ré- 
duites au  même  principe,  avec  une 
explication  des.  Itiérogfyphes  et  de 
la  guerre  de  Troie,  X758,  3  volu- 
mes in-S",  2'  édit.,  1786,  ouvrage 
curieux  et  recherché  de  toutes  les 
personnes  qui  s'occupent  de  la 
science  hermétique,  parcequeTau- 
teur  prétend  trouver  les  allégories 
et  les  secrets  de  celte  science  dans 
les  ouvrages  d'Homère;  5°  Diction- 
naire mytho-liermétique,  i7'î8, 
iiJ-8";  6°  Discours  sur  la  physiono- 
mie et  les  avantages  des  connaissan- 
ces ptiysiognomiques,  Berlin,  1769, 
in-8";  7°  Journal  historique  d'un 
Voyage  aux  lies  Ma!ouines,en  1 743 
et  1764»  Berlin,  1767,  3  vol.  in-8°; 
8"  Histoire  d'un  voyage  aux  lies 
Malouines,  nouvelle  édition,  re- 
fondue et  augmentée  d'un  Dis- 
cours préliminaire,  Paris,  1770, 
in-S";  9°  De  l' Amérique  et  des  A- 
inéricains ,  ou  Observations  curieu- 
ses du  philosophe  la  Douceur,  qui 
a  parcouru  cet  hémisphère  pendant 
la  dernière  guerre,  en  faisant  le  no- 
ble métier  de  tuer  les  hommes  sans 
les  manger  :  cet  ouvrage,  imprimé 
à  Berlin  eu  1771,  in-8°,  et  attribué 
par  quelques  personnes  à  Nicolas 
Bonneville,  est  dirigé  contre  les 
recherches  de  Paw  ;  10°  Con- 
Jiaissance  de  l'homme  moral  par 
celle  de  l'homme  physique ,  Berlin , 
1776,  grand  in-8°;  11"  Les  vertus, 
le  pouvoir,  la  clémence  et  la  gloire 
de  Marie,  mère  de  Dieu,   Paris, 


PER 

1790,  in-8";  12*  une  traduction  en 
français  de  YHistoire  des  merveil- 
les du  ciel  et  de  l' enfer,  et  d.es  terres 
planétaires  et  australes,  du  latin 
d'Emmanuel  de  Swedenborg, 
Berlin,  1784,  in-8".  Il  avait  tra- 
vaillé au  8*  vol.  diiGallia  cliristia- 
na,  à  une  traduction  de  Columel- 
le,et  avait  mis  en  ordre  les  ambas- 
sades de  la  maison  de  Noailles, 
ouvrage  commencé  par  l'abbé  de 
Vertot;  enfin  il  a  donné  un  grand 
nombre  de  Mémoires  aux  recueils 
académiques  de  Berlin. 

PERNETY  (le  vicomte  Joseph- 
Marie)  ,  lieutenant -général  d'ar- 
tillerie, conseiller-d'état,  grand- 
croix  de  la  légion -d'houneur, 
chevalier  de  Saint-Louis,  et  de 
plusieurs  ordres  étrangers,  est 
fils  de  Jacques  Pernety  ,  directeur 
des  fermes  générales,  et  ex-con- 
seiller privé  des  finances  de  Fré- 
déric 11,  dont  était  bibliothécaire 
son  frère  D.  Pernety,  savant  bé- 
nédictin {^ûoy.  l'article  précédent), 
est  né  en  1706,  à  Lyon.  Il  termi- 
na ses  études  à  l'école  militaire 
de  Tournon ,  et  fut  nommé  offi- 
cier d'artillerie  en  1785.  Capitai- 
ne en  1791,11  fit  sa  première  cam- 
pagne à  l'armée  des  Alpes ,  et 
passa,  en  1793,  à  l'armée  d'Italie. 
Il  se  distingua  à  la  défense  du 
Belvéder  et  à  la  prise  de  Saorgio. 
En  179'i,  il  devint  directeur  du 
parc  de  siège  de  Mantoue,  et  en- 
suite commissaire  pour  recevoir 
l'artillerie  de  cette  place.  Il  prit 
part  aux  batailles  de  Bassano,  Aréo- 
le et  Rivoli  :  à  celte  dernière  il  fut 
nommé  chef  de  bataillon.  En 
1  799,  il  reçut  le  commandement 
de  l'artillerie  de  l'expédition  d'Ir- 
lande, sous  les  ordres  du  général 
liardy,  et  fut  fait  prisonnier  sur  le 
vaisseau  le  Hoclie,  à  la  suite  d'un 


PER 

combat  meurtrier.    Echangé  peu 
de  temps  après, il  commanda  l'artil- 
lerie fie  la  division  AVatrin,  qui,  la 
première,    passa  le  mont  Sainl- 
Bernard;  il  se  trouva  aux  batailles 
de  Castoggio  et  de  !Vlarengo,el  fut 
désigné,  à  la  suite  de  cette  bataille, 
pour  recevoir  des  Autrichiens,  en 
qualité  de  commissaire  ,  l'artille- 
rie d'Alexandrie. Nommé,  en  1802, 
colonel  du  1"   régiment  d'artille- 
rie à  pied,  il  commanda  l'artille- 
rie de  l'armée  d'Helvétie,  et  fut 
promu    au  grade    de  général   de 
brigade  en  i8o5.  Chef  de  l'état- 
major-général  de  l'artillerie  de  l'ar- 
mée des  côtes  de  l'Océan,  qui  de- 
vint grande -armée  d'Allemagne, 
il  se  trouva  aux  batailles  d'UIm, 
d'Austerlitz  etd'Iéna,  et  fut  nom- 
mé   commandant    de   la   légion- 
d'hooneurle  5  mai  1807.  Envoyé 
en    Silésie,    pour  y   conjmander 
en  chef  l'artillerie  dont  le  person- 
nel était  presque  tout  composé  de 
Bavarois  et  de  Wurlembeigeois , 
il    contribua    clïïcacement    à    la 
prise  des  diverses  places,  et  reçut 
dans   la   même  année   (1807)  le 
grade  de  général  de  division,  et, 
du  roi  de  Bavière,  la  croix  de  com- 
mandeur de  l'ordre  royal  et  mili- 
taire de  Maximilien.    L'Autriche 
ayant  repris  les  arme.s,  le  général 
Pernety  eut,  en  1809,  '^  comman- 
dement de  l'artillerie  du  4"  corps 
sous  les  ordres  du  maréchal  Mas- 
séna  ;  il   fut,  lors  de  la  prise  de 
Vienne  ,  chargé  d'organiser  et  de 
faire  jeter  sur  le  Danube  les  ponts 
de  bateaux  nécessaires  pour  s'em- 
parer de  l'île  de  Lobau.  Après  la 
bataille  d'Essling,  iî    commanda 
l'artillerie  dans  l'île,  quil  fit  en- 
tourer   de  nombreuses  batteries, 
et  disposa  l'établissement  des  ponts 
de  sortie.  A  Wagram,  il  reçut  des 


PER 


i55 


éloges  publics  du  maréchal  Mas- 
séna,  et  devint,  quelque  temps  a- 
prés,  grand -officier  de  la  légion- 
d'honneur.  La  paix  ayant  été  si- 
gnée, il  fut  chargé  de  tracer  les 
limites  entre  l'Autriche  et  la  Ba- 
vière, et  reçut  à  cette   occasion 
la  graud'croix  de  l'ordre  militaire 
de  Maximilien.  Il  eut,  en  1811, 
le   commandement    en    chef    de 
l'artillerie  du  corps  d'observation 
de  l'Elbe,  qui  devint  le  4'  corps 
de  celte  grande-armée,  victorieu- 
se dans  les   batailles,  et  vaincue 
par  les  élémens.  Le  général  Per- 
nety commença  la  célèbre  batail- 
le de  la  Moskowa  avec  trente  bou- 
ches à  feu  dirigées  contre  les  re- 
doutes russes,  dont  il  seconda  la 
prise    concurremment   avec  l'ar- 
tillerie   de   la   garde.    Il   ramena 
presque   toute  son   artillerie  jus- 
qu'au -  delà  de  la  Bérésina  ;  mais 
bientôt, hommes  et  chevaux, furent 
victimes  d'un  froid  de  37  degrés. 
En  18  i5,  il  fut  chargé  de  l'organi- 
sation et  du  commandement  en 
chef  de  l'arlillerie  de  l'armée  du 
Mein,  qui  fut  réunie  à  celle  venant 
de  Magdebourg,  et  qui  gagna  les 
batailles   de   Lutzen  et  Baulzen, 
où  l'artillerie  rendit  d'importans 
services.  Il  prit  part  aux  batailles 
de  Dresde,  Léipsick  et  Hanau; 
il  a  été  fait   chevalier  de   Saint- 
Louis  au  mois  de  juin  i8i4'  Ap- 
pelé   en    i8i5   comme    chef    de 
la  division  de  l'artillerie  au   mi- 
nistère de   la  guerre,  il  opéra  a- 
vec   succès  la   réorganisation  de 
cette   arme.   Le   général  Pernety 
fut  nommé,  en  1817,  vicomte  et 
conseiller-d'état, enfin  chevalier  de 
l'aigle   rouge   de    a"  classe.    Il  a 
depuis    présidé  le  comité  central 
de  l'artillerie  et  fait  diverses  tour- 
nées d'inspection  générale.  C'est 


i56 


PER 


en  1821  qu'il  devint  grand'croix 
de  l'ordre  de  la  légion-d'honnneur. 
PEllON  (François),  correî.pon- 
dant  de  l'in^ttitut,  membre  de  la 
sociélé  de  médecine,  de  la  socié- 
té philomatique    et  de    plusieurs 
aiiires  sociélés  savantes,  naquit  à 
Cerilly,  département  de  l'Allier, 
le  22  août    1775.  Son  intelligen- 
ce  s'annonça  dès   ses    premières 
années,  par  une  extrême  curiosi- 
té, et  par  un   vil"  désir  de   s'ins- 
truire. A  peine  sut-il  éjielfr  qu'il 
prit  pour  la  lecture  une  telle  pas- 
sicm,    que    pour    la    satisfaire    il 
employait   toutes    les    ruses   que 
les   tul'ans    imaginent  ordinaire- 
ment pour  se    livrer  au    jeu.    La 
mort  d(^  son  père  le   laissa    sans 
fortune,    riKiis  sa  mère  s'imposa 
h'.s  plus  pénibles  privations   pour 
lui  faire    faire  ses  études  dans   le 
collège  de  la  petite  ville  de  Ceril- 
ly. Llle  en  fut  rligntmenl  récom- 
pensée par  les  rapides  progrès  du 
jeune  Pérou.  Lorsqu'il  eut  fini  sa 
rhétorique,  on  lui  conseilla  d'em- 
brasser l'état  ecclésiastique;  mais 
déjà  les  esprits  se  tournaient  vers 
la  politique  et  la  guerre,  déjà  les 
courages  s'enflammaient,  et  la  ré- 
volution, qui  commençait,  impri- 
mait à  tout  un  mouvement  irré- 
sistible.  Péron  ne  fut   pas  insen- 
sible à  cet  enthousiasme  général; 
il  partit,  en  1792,  pour  Moulins, 
où  il   s'enrôla  à   17  ans   dans    le 
2*  bataillon  de  l'Allier.  Ce  bat;ul- 
lon     fut    envoyé     à    l'armée   du 
Rhin,etdelàau  secours  de  Landau, 
qui  était   assiégé ,    et   il  partagea 
bientôt  les  honorables  périls  des 
braves  qu'il  venait  seconder.  Pé- 
ron, qui  avait  été  fait  sous-olfi- 
cier,  donna  dans  ces  circonsiar»- 
ces  des  preuves  d'une  intrépidité 


PER 

rare  et  du  plus  grand  sang-froid. 
11  fut  blessé  à  la  tête  penilant 
le  siège,  et  après  sa  levée  il  alla 
avec  son  corps  rejoindre  l'armée 
du  Rhin  sous  les  lignes  de  Weis- 
sembourg.  Il  fut  fait  prisonnier 
par  les  Prussiens  à  la  bataille  de 
Kayserslautern ,  livrée  le  26  dé- 
cembre 1795,  et  conduit  d'a- 
boid  à  Wesel,  puis  à  la  citadelle 
de  Magdebourg.  Péron  mit  à  profit 
l'inaction  forcée  à  laquelle  il  était 
condamné  ;  il  employa  l'argent 
qu'il  avait  pu  conserver,  à  se  pro- 
curer (les  livres,  et  il  se  livra  à 
rétude  des  historiens  et  des  voya- 
geurs ,  se  détournant  à  peine  de 
son  travail  pour  prendre  quelques 
momens  de  sommeil.  Échangé  5 
la  fin  de  1 794,  il  se  rendit  à  Thion- 
ville,  où  il  reçut  son  congé  de 
réforme,  motivé  sur  ce  qu'il  avait 
perdu  l'œil  droit  par  suite  de  ses 
blessures.  11  revint  à  Cerilly  au 
mois  d'août  1795,  et  après  avoir 
passé  quelques  mois  dans  sa  famil- 
le, il  sollicita  et  obtint  du  minis- 
tre de  litilérieiir  ,  une  place 
d'élève  à  l'école  de  médecine 
de  Paris  ,  où,  pendant  3  ans  ,  il 
suivit  les  cours  de  l'école.  Mais 
une  seule  branche  des  sciences 
ne  pouvait  sufTire  à  l'ardeur  qui 
le  portait  vers  l'étude  :  il  continua 
à  se  livrer  à  la  poésie,  pour  la- 
quelle il  avait  toujours  montré 
du  goût;  il  voulut  aussi  tout  à  la 
fois  cultiver  les  différentes  parties 
de  l'histoire ,  la  géographie  et  la 
jurisprudence,  qui  s'y  rattachent 
souvent.  11  apprit  en  outre  les 
mathématiques  ,  l'astronomie  ,  la 
physique  et  la  chimie.  L'étude  des 
langues  nefut  pour  lui  qu'un  délas- 
sement, et  il  se  rendit  bientôt  fatni- 
liers  le  grec,  l'italien,  l'anglais  et 


PER 

l'espagnol.  Jusqu'alors  la  méde- 
cine était  restée  son  objet  princi- 
pal ;  l'histoire  naturelle  vint  s'y 
joindre  ;  il  conclut  pour  elle  au- 
tant de  passion  que  pour  la  mé- 
decine ;  et  après  avoir  assis- 
té aux  cours  de  zoologie  et  d'ana- 
tomie  comparée  du  muséum  d'his- 
toire naturelle  ,  il  devint  égale- 
ment familier  avec  ces  deux  scien- 
ces. La  rapidité  de  ses  progrès  et 
l'étendue  de  ses  connaissances  en 
médecine  allaient  le  faire  recevoir 
docteur,  lorsqu'une  circonstance 
particulière  le  détermina  à  renon- 
cer à  son  projet.  Le  gouvernement 
français  venait  d'ordonner  une 
expédition  pour  les  terres  austra- 
les. Deux  vaisseaux  ,  le  treogra- 
phe  et  le  Naturaliste,  commandés 
par  le  capitaine  Bandin  ,  déjà  ar- 
més au  Havre,  n'attendaient  que 
les  dernières  instructions  du  mi- 
nistre. Pérou  demande  à  être  em- 
ployé dans  celte  expédition,  mais 
le  nombre  des  savaus  est  corqir 
plet  ;  il  s'adresse,  à  iVl.  de  Jussieu, 
l'un  des  commissaires  chargés  du 
choix  des  naturalistes,  le  prie  de 
solliciter  pour  lui,  et  lui  dévelop- 
pe avecchaleur  son  plan,  ises  vues 
et  ses  moyens.  M.  de  Jussieu, 
qui  n'a  pu  l'entendre  sans  éton- 
uemenl  et  sans  émotion ,  lui 
conseille  de  faire  un  mémoi- 
re, dans  lequel  il  exposera  ses 
motifs  ,  et  quelques  jours  a- 
près,  Péron  lit  à  l'institut  un  mé- 
moire sur  la  nécessité  d'attacher 
à  l'expédition  un  médecin  nalu- 
rali>le,  spécialement  char}?é  de 
faire  drs  recherches  sur  l'anthro- 
pologie, ou  histoire  de  Thom- 
me;  cet  écrit  réunit  Ions  les  .-uf- 
frages,  et  Péron  obtint  du  minis- 
tre sa  nomination  à  une  place  de 
7-oologiste.  Après  avoir  employé 


PER  i57 

le  peu  de  jours  qui  lui  restent 
jusqu'au  départ  de  l'expédilion,  à 
recevoir  des  instructions  de  MM. 
deLacepède,Cuvieret  Degerando, 
Péron  va  à  Cerilly  prendre  congé 
de  sa  mère,  et  se  rend  au  Havre, 
où  il  s'embarque  sur  le  Géographe. 
Les  deux  vaisseaux  mirent  à  la 
voile  le  19  octobre  1800.  Dès  ce 
moment  commença  entre  Péron 
et  Lesteur  (voy.  ce  nom)  une  a- 
mitiéqui  ne  s'est  jamais  démentie. 
Ces  deux  amis  mettaient  leurs 
travaux  en  commun.  Lesueur 
dessinait  ce  que  Péron  décrivait; 
ils  s'entendaient  sur  tout,  et  ja- 
mais l'un  deux  n'a  cherché  à  se 
l'aire  valoir  aux  dépens  de  l'autre. 
Le  jour  même  de  son  arrivée  à 
boni ,  Péron  commença  des  ob- 
servations météorologiques,  qu'il 
répéta  constamment,  d(!  6  heu- 
res en  6  heures,  pendant  la  durée 
du  voyage.  Il  lit  sur  la  températu- 
re de  l'Océan  ces  belles  expérien- 
ces qui  démontrent  que  les  eaux 
sont  plus  froides  dans  le  fond 
qu'à  la  surface,  et  qu'elles  le  sont 
d'autant  plus  que  la  profondeur 
est  plus  grande  :  résultat  qui, 
réuni  à  ceux  des  expériences  de 
Forster  et  de  Irwing,  conduit  à 
des  conséquences  importante» 
pour  la  physique  générale.  En 
approchant  de  l'équateur,  la  phos- 
phorescence de  la  mer  attira  son 
aHeiilion,  Ce  phénomène  avait 
souvent  été  observé  par  des  voya- 
geurs ;  mais  ils  n'avaient  pas  en- 
core vu  l'Océan  présenter  l'as- 
pect du  ciel  pendant  une  aurore 
J)oréale  :  on  aviince,  et  l'on  recon- 
naît que  celte  lumière  est  due  à 
une  multitude  innombrable  d'a- 
nimaux qui  ressemblent  à  de» 
charbons  ardens  ;  on  en  pêche 
plusieur.^,  qui,   après   avoir  pri* 


i58 


PER 


successivement  toutes  les  couleurs 
de  l'arc-en-ciel,  et  brillé  de  l'éclat 
le  plus  vif,  finisseut  par  s'obscurcir 
insensiblement.  L'impression  que 
ce  phénomène  fit    sur  Péron   le 
détermina    à    étudier    plus    par- 
ticulièrement  les    zoophytes,    et 
pendant  tout  le  voyage,  Lesneur 
et   lui    furent    tour-ù-tour    pen- 
chés    sur    le    côté    du    vaisseau 
pour  recueillir   les  espèces  qu'ils 
pouvaient  apercevoir.  Après  cinq 
mois   de  navigation,    il  arriva   a 
l'île  de  France  :  c'étaitlà    qu'on 
devait  prendre  les  objets   néces- 
saires pour  aller  aux  terres  aus- 
trales; mais  par  l'elVet  de  la  plus 
coupable  spéculation,  au  lieu  de 
se  pourvoir  d'abondans  rat'raîcbis- 
scmetis,   on  n'euibarqua  qu'une 
petite  quantité  d'alimens  détério- 
rés, |tltis  capables  de  nuire  que  de 
soutenir  les  lorces.  Justement  el- 
frayésde  l'avarice  du  commandant 
de  l'expédition,  et  redoutant  les  in- 
dignes traitemens  auxquels  les  a- 
vait  déjà  exposés  sa  dureté,  plu- 
sieurs uliicier?,  naturalistes,  pein- 
tres ,   et    quarante   des  meilleurs 
matelots,  restèrent  dans  l'île,  se 
hâtant  d'abandonner  un  chef  dont 
l'avarice  fait  craindre   la    famine 
pendant    le   cours    d'une   longue 
navigation.  Péron  ne  pouvait  s'a- 
veugler sur  l'aÛVeuse  perspecti- 
ve qui  se  présentait,  mais  sa  re- 
solution n'en  fut  point  ébranlée; 
il  se  rallie  au  petit  nombre  d'hom- 
mes couiageux,  restés  fidèles  à 
leur  premier  dessein,  tous  s'unis- 
sent par  les  liens  d'une  indissolu- 
ble   amitié,    loua  jurent   de    se 
prêter    un    mutuel   secours.    Ils 
partent  dans  cette  généreuse  ré- 
solution ,    et  ,    quoique     encore 
dnns     le      port  ,     ils     éprouvent 


PEU 

dl'y,  les  effets  d'un  dénue- 
ment presque  absolu  :  triste  pré- 
lude et  principale  source  des  mal- 
heurs qui  devaient  les  accabler 
par  lasuile!  Nous  ne  suivrons  |)as 
Pérou  dans  les  détails  de  son 
voyage,  mais  nous  croyons  devoir 
nous  arrêter  un  monjent  dans  les 
lieux  qui  furent  le  principal  théâ- 
tre de  ses  observations.  En  par- 
lant de  l'Ile-de-France ,  on  se  di- 
rigea vers  la  pointe  la  plus  occi- 
dentale de  la  Nouvelle-Hollande, 
et  l'on  mouilhi  dans  une  baie  qui 
reçut  le  nom  de  Baie  du  Géo- 
graphe. On  remonta  ensuite  la 
côte  occidentale,  où  l'on  fit  plu- 
sieurs relâches,  et  l'on  se  rendit 
à  Timor  :  c'est  essentiellement 
au  séjour  que  Péron  fit  dans 
cette  île  qu'on  doit  son  travail 
sur  les  mollusques  et  les  zoo- 
phyles.  La  mer  est  peu  profonde 
sur  sur  cette  côte;  il  passait  la 
plupart  des  journées  sur  le  rivage, 
^'enfonçait  dans  l'eau  au  milieu 
des  récifs,  toujours  au  péril  de 
sa  santé  et  même  de  sa  vie,  et  ne 
rentrait  que  le  soir  chargé  d'une 
nombreuse  (olkclion,  qu'il  exa- 
nn'nait  avec  Lesueur.  L'espoir 
d'échapper  au  scorbut,  qui  tour- 
mentait l'équipage  ,  avait  fait 
relâcher  à  l'île  de  Timor  ;  mais 
le  séjour  de  cette  île  funeste 
produisit  à  la  place  de  ce  terrible 
scorbut  une  dyssenterie  plus  cruel- 
le encore.  Péron  voit  bientôt  suc- 
comber ses  camarades,  ses  amis, 
malgié  le  zèle  et  les  soins  de  MM. 
L'Hatidon  ,  Bellefin  et  Taillefer, 
médecins  de  rexpédilion.  Remar- 
quant que  les  habitans  de  l'île  é- 
chappaient  â  l'influence  du  cli- 
mat, Péron  en  rechercha  la  cause, 
et  la  trouva   dans    l'usage  qu'ils 


font  de  belel.  En  quiitant  Timor, 
l'expédition  se  dirigcii  vers  le  cap 
Sud  de  ia  terre  de  Diemen.  Après 
avoir  reconnu  la  partie  orientale 
de  cette  terre,  elle  entra  dans 
le  détroit  de  Bass  ,  et  elle  sui- 
vit la  côte  méridionale  de  la 
Nouvelle-Hollande.  Nous  ne  retra- 
cerons pas  ici  le  tableau  des  ra- 
vages que  le  scorbut  exerça  sur 
des  corps  (.xténués  par  la  famine 
et  la  dyssenterie,  il  nous  suiïira 
de  dire  que  lorsque  le  Géographe 
arriva  au  port  Jackson  ,  il  n'y  avait 
plus  que  4  hommes  de  l'équipage 
en  état  de  fiire  le  service.  Loin  de 
se  livrer  an  repos,  Pérou  profile 
de  son  séjour  dans  cette  colonie 
pour  continuer  ses  recherches  de 
physique  et  d'histoire  naturelle; 
il  étudie  le  régime  civil  et  politi- 
qued'un  établissen)ent  où  ùe^  lois 
à  la  fois  s.iges  et  sévères,  et  la 
nécessité  du  travail,  ont  changé 
des  brigands,  chassés  de  leur  pa- 
trie, en  utilfs  cultivateurs  ;  où  des 
femmes  jadis  perdues  de  débau- 
che ont  fait  oublier  leur  ancien  a- 
vilissement ,  et  sont  devenues  de 
laborieuses  mères  de  famille.  Aj)rès 
le  départ  du  port  Jackson ,  d'où 
fe Naturaliste  avait  été  renvoyé  en 
France,  une  navigation  non  moins 
périlleuse  restait  à  exécuter.  Il 
fallait  examiner  les  îles  situées  à 
rentrée  occidentale  du  détroit  de 
Bass,  suivre  de  nouveau  !es  côtes 
de  la  Nouvelltt-Jtlollande,  et  en 
faire  le  tour  j)our  entrer  dans  le 
golfe  de  Carpentarie.  Les  dangers 
se  multipliaient  ;\  chaque  instant 
sur  ces  côte>  inconnues  et  héris- 
sées de  récifs;  ils  étaient  plus 
grands  encore  pour  les  naturalis- 
tes, qui  saisissaient  toutes  les  oc- 
«asions  de  s'enfoncer  dans  1  inté- 


PER  i59 

rieur  des  terres.  Péron  déploya  rni 
courage  et  une  activité  inconce- 
vables. 11  allait  chercher  les  sau- 
vages, sans  s'efiVayer  de  leur  per- 
fidie et  de  leur  férocité;  il  recueil- 
lait un  grand  nombre  d'animaux 
de  toutes  les  classes,  et  ne  négli- 
geait  rien    pour   examiner  leurs 
habitudes,  et  reconnaître  ceux  qui 
pouvaient  offrir  une  ressource  aux 
navigateurs,  ou  qui  étaient  sus- 
ceptibles d'être  naturalisés  en  Eu- 
rope. Des  cinq  zfiologistes  embar- 
qués, deux  étaient  restés  à  l'Ile- 
de-France,   deux  étaient   morts; 
Péron  se  trouvait  chargé,  avec  Le- 
sueur,  d'un  immense  travail,  et  ils 
suilirent  à  tout.  Uniquement  oc- 
cupés du  but  qu'ils  se  proposaient, 
ils  comptaient  pour  rien  les  priva- 
tions. Peu  de  temps  après  le  départ 
de  limor,  le  capitaine  ayant  refu- 
sé les  liqueurs  spiritueuses  abso- 
lument nécessaires  pour  la  conser- 
vation des  mollusques  que  Péron 
ramassait,  Lesueur  et  lui  se  privè- 
rent, pendant  tout  le  voyage,  do 
la  portion  d'arack  qui  leur  était 
accordép  poilr  leur  boisson  ,  et  ils 
firent  partager  leur  enthousiasme 
à  leurs  amis   MM.  Freycinet  frè- 
res, Ransonnet  et  Montbazin,  qui 
consentirent  à  faire  le  même  sa- 
crifice.  C'était  surtout  au  milieu 
des  dangers  que  Péron  montrait 
l'énergie  de  son  caractère.  Pen- 
dant la  tempC'te,  aidant  aux  ma- 
nœuvres eomme  im  sim[»lc  mate- 
lot, il  observait  aussi  |)aisil)lement 
que  s'il  eût  été  sur  le  rivage.  Au- 
cun événement  ne  détournait  son 
attention  ,  et   il    -avait  mettre  à 
profit    toutes    les    circonstances. 
Etant  descendu  à  l'île  King,  avec 
Lesueur  et  quelques  natiiralistca, 
un  coup  de  vent  cha':sa  le  vaisseau 


i6o 


PER 


fn  mer,  et  pendant  quinze  jours 
ils  ne  l'aperçurent  plus.  Le  calme 
de  Péron  n'en  fut  point  altéré  :  ii 
continuait  ses  recherches ,  sans 
s'inquiéter  de  l'avenir  dont  il  était 
menacé.  Pendant  son  séjour  dans 
cette  île,  où  la  plus  magninque 
végétation  n'offre  rien  qui  puisse 
servir  à  la  nourriture  de  l'homme, 
sans  abri ,  et  malgré  la  violence 
des  vents  et  de  la  pluie  ,  il  recueil- 
lit plus  de  180  espèces  de  mollus- 
ques et  de  zooph^Mes.  Lors  de  sa 
dernière  relâche  à  Timor,  Péron 
compléta  ses  premières  obser- 
vations sur  cette  île.  Seul  avec 
Lesueur,  il  osa  aller  à  la  chasse 
de  ces  énormes  crocodiles,  objets 
de  terreur  et  de  vénération  pour 
les  habitans,  et,  sans  aucun  aide, 
ils  tuèrent  un  de  ces  animaux,  le 
dépouillèrent ,  et  préparèrent  le 
squelette  qui  est  aujourd'hui  dans 
les  galeries  du  Muséum.  Les  vents 
s'étant  opposés  à  ce  qu'on  pût 
aborder  à  la  Nouvelle-Guinée  et 
entrer  dans  le  golfe  de  Carpenla- 
rie,  l'expédition  revint  à  l'Ile-de- 
France,  où,  pendant  un  séjour  de 
cinq  mois,  Péron  étudia  les  pois- 
sons et  les  mollusques,  et  en  re- 
cueillit beaucoup  d'espèces  nou- 
velles. On  fit  encore  une  relâche 
au  (<a|)de  Bonne-Espérance;  il  en 
profita  pour  examiner  la  confor- 
mation singulière  d'une  tribu  de 
Hottentots  nommés Boschismans, 
dont  quelques-uns  se  trouvaient 
par  hasard  au  C;ip.  Knfin  ,  après 
ime  absence  de  3  ans  et  6  mois,  il 
débarquai!  Lorient,  le;; avril  1804» 
et  se  rendit  à  Paris.  Il  employa 
quelques  mois  à  mettre  en  ordre 
ses  collections  ,  qui  furent  dépo- 
sées au  Muséum  ,  puis  il  se  rendit 
yuprèsde  sa  mère  à  Cerilly.  L'état 


de  sa  santé,  affaiblie  par  de  lon- 
gues fatigues,  et  surtout  par  le 
germe  de  la  maladie  qui  s'est  dé- 
clarée depuis,  lui  rendait  le  repos 
rigoureusement  nécessaire;  mais 
apprenant  bientôt  qu'on  cherchait 
à  persuader  au  gouvernement  que 
le  but  de  l'expédition  était  man- 
qué, il  revient  à  Paris,  se  rend 
chez  le  ministre  de  la  marine;  là  , 
avec  autant  de  modestie  que  de 
fermeté ,  il  expose  ce  que  ses 
compagnons  avaient  fait  pour  la 
géographie  ,  la  minéralogie ,  la 
botanique;  il  présente  l'énuinéra- 
tion  des  objets  qu'il  avait  rappor- 
tés ,  des  dessins  exécutés  par  son 
ami  Lesueur;  il  ne  parle  qu'en 
passant  des  dangers  qu'il  a  cou- 
rus et  des  sacrifices  qu'il  a  faits 
pour  augmenter  la  collection.  On 
lai  adresse  des  questions  auxquel- 
les il  répond  avec  netteté,  et  l'im- 
pression qu'il  produisit  fut  telle 
que  le  ministre  lui  promit  de  faire 
rédiger  la  partie  nautique  du  voya- 
ge par  M.  L.  Freycinet,  et  l'a- 
dressa à  M.  de  Champagny,  mi- 
nistre de  l'intérieur,  pour  la  par- 
tie historique.  Le  même  succès 
l'attendait  chez  ce  dernier  :  il  y  fut 
accueilli  de  la  manière  la  plus 
flatteuse,  et  il  fut  chargé  de  pu- 
blier la  relation  du  voyage  et  la 
description  des  objets  nouveaux 
en  histoire  nalurelhî,  de  concert 
avec  son  ami  Lesueur.  Il  résulte 
du  rapport  rédigé  par  M.Cuvier, 
au  nom  de  la  commission  nom- 
mée par  riustitut,  pour  examiner 
la  collection  déposée  au  Muséum 
par  Péron  el  Lesueur,  que  cette 
collection  contient  plus  de  100,000 
échantillons  d'animaux,  parmi  les- 
quels on  a  découvert  plusieurs 
genres;  que  le  nombre  des  espè- 


PER 

ces  nouvelles   s'élève   à  plus    de 
35oo,et  que  ces  ileux  naturalistes 
ont  eux  seuls  fait  connaître  plus 
d'animaux  que  tous  les  naturalis- 
tes-voyageurs   de    ces    derniers 
temps.   Cependant  la  maladie  de 
poitrine    dont   Pérou    était    atta- 
qué, faisait  des  progrès  elfrayans; 
elle  fut   encore   aggravée    par  le 
chagrin  que  lui  causa  la  mort  de  sa 
mère.  Jugeant  lui-même  son  miU 
incurable  ,   et  cédant  néanmoins 
aux  (  onseils  de  MM.  Corvisart  et 
Réraudren ,    qui    l'angagèrent    ù 
passer  un  hiver  à  Nice,  il  entre- 
prit ce  voyage.  La  douceur  du  cli- 
mat parut  le  rétablir;  dès- lors  il 
se  livra  avec  uncnouvelle  ardeur 
à  la  continuation  de  ses  recherches 
sur  les  mollusques  et  les  poissons, 
el  à  répéter  ses  expériences  sur  la 
température   de    la    mer  à  diffé- 
rentes profondeurs,  sans  toutefois 
se  faire  illusion  sur  le  bien-être 
qu'il    éprouvait,     s'applaudissant 
seulement   d'avoir  quelques  mois 
de  plus  à  travailler.   De  retour  à 
Pai  is.  il  retomba  bientôt  dans  une 
situation  pire  que  celle  où  il  était 
ayant  son  départ.  Voulant  finir  ses 
jours  dans  la  ville  (pii   l'avait  vu 
naître,  il  se  rendit  à  Cerilly,  où  il 
mourut  à  55  ans,  dans  les  bras  de 
Lesueur,   le    i4  décembre  18  lo. 
Pérou  avait  de  la  force  dans  l'es- 
prit, de  la  viva(;ité  dans  le  caractè- 
re, une  extrême  franchise,  et  sur- 
tout un  cœur  excellent.  SesalVec- 
tions  étaient  solides  et  durables  : 
jamais  il  n'oublia  leplus  léger  ser- 
vice; jamaisil  ne cruls'être  entiè- 
rement acquitié  de  ceux  qu'il  a- 
vait  reçus.  11  joignait  une  grande 
modestie  au  sentimentqu'il  devait 
avoir  de   ses    for<  es.    Son  esprit 
embrassait    de   front    l'étude   de 


PER  if)i 

toutes  les  sciences.  11  lui  eût  été 
facile  de  profiter  pour  sa  fortune 
de  la  faveur  dont  il  jouissait  au- 
près des  premiers  fonctionnaires 
de  l'état,  mais  il  ne  demanda  ja- 
mais aucune  place;  ou  lui  en  of- 
frit même  d'importantes  après 
son  retour,  il  les  refusa  dans  lu 
crainte  d'être  détourné  de  ses  tra- 
vaux favoris.  Peut-on  calculer  ce 
qn'aurait  su  produire  un  génie 
aus^i  actif,  aussi  lumineux  et  aus- 
si profondément  observateur,  si 
la  mort  ne  l'eût  pas  arrêté  dès  le 
commencement  de  sa  carrière!  Le 
genre  de  cet  ouvrage  ne  nous  per- 
met pas  de  donner  ici  une  analyse 
des  mémoires  que  Pérou  a  lus  à 
l'institut,  au  muséum,  à  la  société 
de  n)édecine,  et  à  la  société  philo- 
matique  de  Paris;  de  signaler  les 
faits  nouveaux,  les  résultats  posi- 
tifs, les  vues  lumineuses  que  ren- 
ferment ces  mémoires:  nous  nous 
bornerons  à  indiquer  le  sujet  de 
quel(pies-uns  :  i"  Observations 
sur  l' Anthropologie,  Paris,  an  8; 
2°  Sur  la  force  physique  des  Sauva- 
ges, comparée  acelleùcs  Européens, 
imprimé  dans  le  1"  vol'ime  de 
la  relation  du  voyage;  5"  Obser- 
vations sur  les  maladies  des  pays 
chauds  et  sur  C usage  du  hetel , 
joonial  de  médecine,  chirurgie 
el  pharmacie ,  par  MM,  Corvi- 
sart, Leioux  et  Boyer,  tome  9, 
page  57;  [{"Notice  sur  quelques  ap- 
plications de  la  méléorologie  à  l' hy- 
giène navale  dans  le  Bulletin  des 
sciences  mtMJicales,  avril  1808;  5" 
Sur  la  température  de  la  mer,  soit 
à  sa  surface,  soit  à  diverses  pro- 
fondeurs (annales  du  muséum 
d'histoire  naturtdle,  cahier  2G, 
page  125);  G°  Sur  quelques  faits 
zoologiques  applicables  a  la  théorie 


idl 


PER 


du  globe',  Sur  le  nouveau  genre 
pyrosonia  (annales  du  muséum, 
cahier  2^,  pag.  /|5;):  Sur  l'habita- 
tion des  animaux  marins,  mémoire 
dans  lequel  il  prouve  qu'aucune 
espèce  de  ces  animaux  n'est  véri- 
tablement cosmopolite.  Il  a  publié 
en  outre  avec  Leisnenv.i''  Histoire 
générale  et  particulière  des  inédù- 
ses,\n-Y>  '^"Sur  les  méduses  du  gen- 
re équorée  (annales  du  muséuiti). 
On  peut  reprocher  à  Pérou  d'a- 
voir quelquefois  employé  diuis 
la  relation  du  Foyagc  aux  terres 
australes,  un  luxe  de  style  qui 
ne  convient  pas  à  la  simplicité  d'u- 
ne narration;  mais  aucun  voya- 
geur, si  l'on  excepte  George  Fors- 
ter,  ne  s'est  autant  appliqué  à  sai- 
sir les  caraclères  physi(|ues  et 
moraux  qui  distinguent  les  dift'é- 
rentes  peuplades,  à  marquer  le 
rapport  qui  se  trouve  entre  leur 
organisation,  leurs  mœurs  et  leur 
intelligence,  et  il  a  sur  le  natura- 
liste anglais  l'avantage  de  s'être 
garanti  de  tout  esprit  de  système. 
Il  y  a  dans  cet  ouvrage  des  mor- 
ceaux descriptifs  qui  sont  d'une 
beauté  remaïquable  et  dignes  de 
la  plmne  de  Buffon,  entre  autres 
le  tableau  des  sauvages  de  la 
terre  de  Diemen.  Nous  devons 
aux  notices  de  i\lM.  Alard  et 
Deleuze  les  matériaux  de  cet  ar- 
ticle. 

PERPONCHEK  (W.  E.  de), 
littérateur  •  hollandais,  a  donne, 
«[uoiqu'il  ne  fût  point  théologien 
de  profession,  plusieurs  ouvrages 
de  théologie  et  de  morale,  parmi 
lesquels  on  cite  ses  Observations 
sur  les  épitres  de  Saint  Paul,  et, 
avec  des  notés,  une  traduction 
hollandaise  de  la  version  de  l'An- 
cien-Testaraent  faite  par  Michaë- 
lis.  U  a  aussi  publié   un   recueil 


PEU 

de  poésies  hollandaises,  qui  a  prt- 
ru  à  Utrecht  eu  1808,  in-8°.  Eu 
18 13,  le  général  iMoIitor,  qui  a- 
vait  alors  sou  quartier- général 
dans  cette  ville,  l'envoya  comme 
otage  à  Paris.  Perponcher  mourut 
à  Utrecht  en  1819,  dans  un  âge 
fort  avancé. 

PERPONCHER  (le  baron  H. 
de),  neveu  du  précédent,  lieute- 
nant-général au  service  du  royau- 
me des  Pays-Bas,  ét;rif ,  en  1792, 
capitaine  au  régiment  des  dra- 
gons de  Byland,  et  en  179^,  adju- 
dant du  prince  d'Orange  Frédéric; 
il  passa  avec  S.  A.  au  service 
d'Autriche  après  les  événemens 
de  «795,  partagea  ses  dangers 
dans  plusieurs  affaires  engagées 
contre  les  troupes  françaises,  et 
assista,  en  1799,  aux  derniers 
momens  de  ce  prince  ,  si  regretté 
des  Hollandais,  et  dans  lequel  le 
parti  stadhoudérien  perdit  alors 
son  principal  appui.  M,  de  Perpon- 
cher passa  ensuite  au  service  de 
l'Angleterre,  cl  se  trouva  i'i  la  cé- 
lèbre bataille  d'Alexandrie  en  E- 
gy[>te.  En  i8i3,  il  fut  avec  M. 
Fagel ,  membre  de  la  députalion 
adressée  par  le  gouvernement 
provisoire  au  prince  d'Orange, 
depuis  roi  des  Pays-Bas ,  pour 
l'inviter  à  acccfiler  la  couronne. 
Le  j)rince  devenu  roi,  lui  confia 
depuis  plusieurs  missions.  Lieu- 
tenaul-général  en  181 5,  M.  de 
Perponcher  soutint  à  Frasnes,  le 
i5  juin,  le  choc  du  maréchal  Ney, 
qui  attaquait  la  position  des  Qua- 
Ire-Bras.  Il  combattit  aussi  à  Wa- 
terloo, où  il  obtint  la  croix  de 
commandciu'  de  l'ordre  militaire 
de  Guillaume.  Depuis  il  fut  en- 
voyé à  la  cour  de  Berlin,  en  qua- 
lité de  ministre  du  roi  des  Pays- 
Bas,  et  reçut  du  roi  de  Prusse 


PEIV 

l'ordre  de  l' Aigle-rouge.  II  épousa 
<*ii  iHi()  la  ctjiiilesse  de  Reede , 
danie-dliomicur  de  la  reine  de 
Pruîise. 

PEUUAULÏ  (A.),  membre  de 
la  société  des  Jacobin»  de  Pa'ris , 
y  lut  dénoncé  en  17945  pour  a- 
voir  diTeiidu  une  i'enune  noble. 
Celle  dénonciation  n'eut  pas  de 
î-uiles,  et  quelques  jours  après  , 
il  signala  dans  un  discours  les 
♦'rimes  du  gouvernement  anglais. 
Désarmé  et  incarcéré  comme  ter- 
roriste par  l'assemblée  générale 
de  la  section  de  la  Fralernité.,  a- 
près  le  ()  thermidor  an  2  (u8  juil- 
let i79.,'|),il  lut  ensuite  mis  en 
liberté,  et  réarmé  an  i3  vendé- 
miaire an  4  (5  octobre  ijgS),  par 
ordre  du  comité  de  sûreté  généra- 
le. Après  )'explosif>n  de  la  machi- 
ne inlérnale,  5  nivôse  an  9(24 
décembre  iSoo),  Perrault  fut 
iléporté,  et  mourut  en  Afrique. 

PERKEAU  (Jean-André), hom- 
me de  lettres,  membre  du  tribu- 
nal, inspecteur- gt;uéral  dts  écoles 
de  droit,  etc.,  naquit  a  Nemours, 
tlépartemenl  de  Seine  et-Marne, 
le  17  avril  1  749«  H  fit  de  buruies 
éludes,  et  débuta  dans  la  canicre 
littéraire,  en  1771,  par  le  drame 
(le  Clarice,  dans  lequel  se  font  re- 
marquer des  situations  intéressan- 
tes, mais  l'ouvrage  est  en  général 
troidement  écrif.  Il  a  donné  de- 
}>uis  :  I"  Lettres  illinoises ,  Paris, 
1792,  in-K";  1"  Eientens  de  l'/iis- 
Ivire  des  anciens  peuples,  Paris, 
1775,  in-t!";  5"  Eloge  du  cimiice- 
lier  de  l'Hôpital,  Paris,  1777,  in- 
8";  4*  Miirim  ^  ou  te  Sage  à  la 
fflur,  Neufchâtel,  1781,  in-8";  5" 
le  liai  voyageur,  ou  examen  des 
ulius  de  l'administration  de  la  Ly- 
die, Londres,  1784;  6°  Instruc- 
tion du  peuple,  J786,  in-ia;  7° 


PER 


165 


Théorie  des  sensations  (consulter  le 
Magasin  encyclopédique  de  tMil- 
\\n),^° (]n;?,  Contes,  Epitres,  et  au- 
tres poésies,  qui  otïrent  des  détails 
agréables  et  un  style  facile.  Per- 
reau adopta  avi  c  sagesse  les  prin- 
cipes de  la  révolution,  et  fut,  en 
1791,  rédacteur  de  la  feuille  inti- 
tulée :  le  Vrai  citoyen.  Nommé, 
en  décembre  1799,  professeur  à 
l'école  centrale  du  Panthéon,  puis 
professeur  suppléant  du  droit  de 
la  nature  et  des  gens,  au  collège 
de  France,  il  entra  au  Iribunat 
en  1801,  y  vota  dans  le  sens  du 
gouvernement  ,  et  se  pnuionoa 
pour  l'établissement  des  tribu- 
naux spéciaux  criminels.  Il  pré- 
senta comme  rapporteur,  lors  de 
la  discussion  du  Code  civil,  les  li- 
tres de  Vadoplion  et  de  Vusufruil. 
Elu  secrétaire  le  20  août  i8o5,  et 
président  le  25  septembre  de  la 
même  année,  il  sorlit  de  l'assem- 
blée en  1804,  et  fut  nommé  pres- 
que aussitôt  inspecteur- général 
des  écoles  de  droit.  Perreau  mou- 
rut au  mois  de  juillet  18 13.  On 
lui  doit,  outre  les  ouvrages  que 
nous  avons  cités,  des  Considéra- 
tions physiques  et  morales  sur 
l'homme  dans  les  quatre  âges,  3 
vol.  in- 8°,  Paris,  i8o3,  dont  il 
avait  fait  hommage  au  tribunal  en 
1802,  et  un  Traité  sur  la  législa- 
tion naturelle,  dont  Chénier  parle 
avec  éloge  dans  son  Tableau  histo- 
rique de  l'état  et  des  progrès  de  la 
littérature  en  France,  depuis  1789. 
«  C'est,  dit  Chénier,  Fouvrage 
«d'un  écrivain  sage  et  d'un  bon 
»  citoyen.  » 

PERREAU  DE  MAC  NIES 
(Loms-ilEiNRi-AiMÉ),  membre  de 
la  chambre  des  représentans  et 
de  la  chambre  des  députés,  est  né 
ù  La  Châtcigneraie,  département 


i64 


PEU 


de  la  Vendée,  le  i5  avril  i^^S.  Il 
tut  le  témoin  des  discordes  civiles 
qui    agitèrent   si   long-temps    les 
départeniens  de  l'Ouest,  et  apprit 
à   en   détesli'r  le  funeste   princi- 
pe, en  voyant  tous  les  malheurs 
<jui  les  suivirent.   Son  expérience 
et  sa  modération  surent  pendant 
près  de   lo  ans,  de  i8o5  à  i8i5, 
qu'il  exerça  la  première  autorité 
municipale  de  sa  ville,   éloigner 
de  ses  administrés,  les  haines  et 
les  troubles.  En  181 5,  il  fut  porté 
à  la  chambre   des    représentans  , 
par  les  suffrages  de  ses  concitoyens 
de  la  Vendî-e.  On   le  vit  pendant 
la  courte  durée  de  cette  assem- 
blée ,    prendre   part   à  toutes    les 
mesures  qui  avaient  pour  objet  de 
préserver  la  France  des  malheurs 
dont     la     menaçait     la     seconde 
invasion  étrangère.  En  1818,   le 
dép.irtemont    de    la     Vendée    le 
nontma  membre  de    la   chambre 
des  députés  :  sa  place  était   mar- 
quée au  côlé  gauche,  et  il  y  fut 
fidèle.  Dans  la  session  d(!    1S18  à 
i8iM,il  s'inscrivit  contre  la  résolu- 
lion  de  la  chambre  des  pairs,  re- 
lative à  la  loi  des  élections;   de- 
manda des  explications  sur   une 
sonm)e  de   i  5o,ooo  fr.  employée 
pour  dépense  secrète,  dans  l'ar- 
riéré des  all'aires  étrangères;  pro- 
posa de  retrancher  dans  la  [)artie 
du    budget  relative  aux  pouls  et 
chaussées,  utu'somtne  de4>'>o,ooo 
fr.    portée  connue    fonds   de  ré- 
serve, et  qui  lui  send)hiit  n'avoir 
été  inscrite  que   pour  former   la 
somme  de  5o  millions;  enfui,  il  de- 
manda que  l'enltelieu  des  églises 
cathédrales  lui  à  la  charge  des  com- 
munes. Dans  la  séance  du  19  juin, 
il    fait    reniar<juerj    en    réponse 
oux  observations   du  garde-des- 


PE1\ 

sceaux  contre  les  pétitions  en  fa- 
veur des  bannis,  que  la  première 
parvenue  à  la  chambre,  a  été  a- 
dressée  par  la  ville  de  Fontenay; 
que  cette  pétition  ,  en  faveur  du 
comte  de  Lapparent  {voyez  Co- 
chon), est  revêtue  des  signatures 
de  beaucoup  de  chevaliers  de 
Saint- Louis,  et,  entre  autres,  de 
celle  <!u  Régulas  français,  M.  Hau- 
dendine,  dont  parle  M°"  de  La 
Roche- Jacquelein  dans  ses  Mé- 
moires sur  1  insurrection  de  la 
Vendée.  Il  s'oppose  à  l'établisse- 
ment de  la  caisse  de  Poissy,  et 
surtout  contre  le  droit  qui  s'y 
perçoit  au  profit  de  la  ville  de 
Paris,  comme  illégal,  inconstitu- 
tionnel, et  contraire  aux  dr(»i{s  et 
à  la  liberté  du  conunerce.  M.  Per- 
leau  de  Magnies  combat,  le  i5 
avril  i8iy,  dans  la  session  de  cet- 
te armée  à  1820.  plusieurs  parties 
des  comptes  aniérieurs  à  l'exer- 
cice de  1819;  il  signale  des  er- 
reurs et  demande  ditïV-rens  éclair- 
cissemens;  le  16  juin,  lors  de  la  dis- 
cussion du  budget,  il  veut  qu'on 
emploie  une  partie  des  fonds  du 
clergé  à  remplir  les  succtirsales 
vacantes;  fait  différentes  observa- 
tions sur  l^espiit  du  clergé  catho- 
lique, qu'il  ne  trouve  point  en 
harmonie  avec  les  intérêts  nou- 
veaux consacrés  par  la  charte,  et 
teiiniue  par  demandi-r  comment 
24  niis'^innnaiies  peuvent  coûter 
à  l'étal  'A,l\o,(>i,<)  fr.,  sans  compter 
le  casuel.  Le  26  juin,  il  propose, 
sans  .'juccès  ,  une  réduelion  de 
i2.'j.5aofr.  sur  les  pensions  pour 
les  extimUions  présumées.  Enfin, 
il  demande,  mais  cette  motion 
n'est  pas  appuyée ,  qu'on  ajoute 
'î8o,ooo  fr.  au  chapitre  de  l'ad- 
ministration   des   monnaies',   afin 


PER 

que  l'on  s'occupe  plus  prompte- 
inciH  (le  la  refonte  des  vieux  écus. 
Sorti  en  1823,  il  n'a  point  été 
réélu  aux  fessions  suivantes. 

PERRECIOT(C;LAr  de-Joseph), 
ancien  avocat  au  parlement  de 
Besançon  et  historien,  naquit,  en 
1728,  à  Roulans  près  de  Beaume- 
les-Danies,  département  du  Doubs. 
Après  avoir  terminé  ses  études,  il 
se  fit  recevoir  avocat,'  devint  suc- 
ce^sivcmenl  procureur  du  roi  près 
de  la  maîtrise  de^  eaux  et  foiêts, 
<:l ,  en  1768,  maire  de  Beaiune. 
Ces  dernières  fonctions  lui  firent 
composer  un  niémoiie  sur  l'ori- 
gine, l'antiquité  et  les  accroisse- 
inens  de  la  ville  oi'i  il  exerçait  la 
première  m  a  i^istra  lu  re  municipale. 
Son  travail  fut  couronné,  en  1769, 
par  l'acadéniie  de  Besançon  ,  r)ù  il 
remporta  plusieurs  autres  prix  en 
se  livrant  a  ditrércnles  recliorches 
sur  les  antiquités  du  comté  dcBour- 
gopne,  et  il  devint  membre,  en 
1782  ,  de  cette  académie  ,  eu  mê- 
me temps  qu'il  recevait  du  minis- 
tre Berlin  la  charge  de  trésorier 
an  bureau  des  finances,  A  l'époque 
de  la  convocation  des  éVits-géné- 
raux,  en  1789,  il  fut  l'un  des  com- 
missaires chargés  de  rédiger  le 
cahier  des  représentations  du  bail- 
liage de  Besançon ,  et ,  en  1 790  ,  il 
devint  membre  del'adnjinistration 
du  déparlenient  du  Doubs.  S'élant 
relire  dans  le  canton  de  Roulans  où 
il  était  né,  il  en  fut  nommé  juge 
de  paix,  en  1792,  par  les  sull'rages 
unanimes  de  >es  concitoyens  ;  in- 
carcéré sous  le  régime  de  la  ter- 
reur, il  recouvra  la  liberté  après 
la  révdintion  du  9  thermidor  an  2 
(  27  juillet  1794).  Peneciot  mou- 
rut le  12  février  1798;  il  a  publié: 
1°  de  l'Etat-cieU  des  personnes ,  et 


PER  105 

de  ta  condition  des  terres  dans  les 
Gaules ,  depuis  les  temps  celtiques 
jusqu'à  la  rédaction  suisse,  Be- 
sançon, 1786,  2  vol.  10-8°:  une 
seconde  édition  a  été  faite  à  Lon- 
dres,  en  1790,  5  vol.  in- 12,  sans 
la  participation  de  l'auteur.  Cet 
ouvrage  est  divisé  en  huit  livres. 
Dans  le  premier,  Perreciot  traite 
de  l'état  des  personnes  libres  dans 
les  Gaules,  depuis  l'invasion  des 
Romains  jusqu'à  celle  des  Fran- 
çais; dans  le  second,  de  l'escla- 
vage des  serfs,  de  leur  affranchis- 
sement, et  enfin  de  l'extinctjon  de 
la  servitude  ;  dans  le  troisièuîe,  de 
la  noblesse:  dans  le  quatrième, 
des  lètes  et  des  terres  létiques. 
«  L'auteur  prétend  que  les  lètes  , 
ainsi  nonnnés  du  mot  allemand 
letliig  ou  ledis;  (  vacant  ),  étaient 
des  Gaulois  qui ,  forcés  d'aban- 
donner leur  pays,  se  réfugièrent, 
sous  le  règne  d'Auguste,  dans 
des  cantons  inhabités,  sur  les 
bords  du  Rhin  ,  dont  les  Romains 
b'.iir  permirent  de  cultiver  les 
terres  à  la  condition  de  payer 
une  redtivance  annuelle  :  c'est  ;\ 
ces  lèles  refoulés  dans  les  Gaules 
par  les  Francs,  que  Perreciot  fiiit 
remonter  l'établissement  du  sys- 
tème seigneurial  au  moyen  âge,» 
Dans  le  cinquième,  il  traite  de  la 
main-morte,  qu'il  regarde  comme 
une  suite  de  la  condition  létique; 
dans  le  sixième,  de  Toiigine  des 
aleus,  los  et  droits  de  retrait; 
dans  le  septième,  de  l'origine  des 
fiefs;  enfin  dans  le  huitième,  des 
abus  de  la  féodalité  qu'il  importe 
de  supprimer.  «  L'intérêt  que  Per- 
reciot cherchait  à  exciter  en  fa- 
veur des  mains-mortables,  qui, 
malgré  le  noble  exemple  donné 
par  Louis  XVI,  subsistaient  en- 


i66 


PEU 


eore  dans  plnsii^iirs  provinces, 
lui  fit  ^éprouver  des  tracasseries 
dont  il  ne  put  s'empêcher  de  re- 
douter les  suites;  il  nous  apprend 
lui-même  qu'il  voulut  jeter  an 
l'eu  son  livre,  dont  l'impression 
était  presque  terniinée  ;  mais  que 
ses  amis  le  retinrent  et  l'encou- 
ragèrent à  lo  continuer.  »  On 
trouve  à  la  fin  du  second  volume 
de  cet  ouvrage  ,  fruit  do  vingt  ans 
de  recherches  et  de  méditations, 
une  foule  de  pièces  hisloriques  , 
entre  autres  celles  d'un  procès  fait 
en  1640,  par  le  juge  de  Belvoir, 
à  une  pauvre  femme  accusée  de 
sorcellerie ,  et  qui  fvit  brûlée  vive  , 
après  avoirété  appliquée  à  la  ques- 
tion. Elle  avoua  dans  les  tourmens 
qu'elle  avait  été  ime  fois  au  sabat, 
mais  on  ne  put  lui  faire  déclarer 
qu'elle  y  eût  vu  quehpies  person- 
nes de  sa  connaissance,  2°  Obser- 
vations mv  la  (li^scrtalionde  l'abbé 
de  Gourchj,  rehitivement  à  celte 
question:  Quel  fat  l'état  des  per- 
sonnes en  France  sous  la  preinièi'e 
et  laseconde  race  de  nos  rois?  1786, 
iti-,:j°  ;  ces  observations  se  réunis- 
sent à  l'ouvrage  précédent  ;  5° /)/,«- 
sertation  sur  l'étendue  des  deux 
provinces  appelées  sous  lesJiomaius 
Germanie  supérieure  et  Germanie 
inférieure  ;  et  sur  la  formation  de 
celles  (ju  on  nomma  ensuite  Germa- 
nie première ,  Germanie  seconde  et 
province  Séquanoise,  insérée  dans 
{'Histoire  (C Alsace,  par  l'abbé 
(irandidier  ;  4'  Dissertation  sur 
r origine  des  Francs  ,  sur  l^établis- 
sfinent  de  la  monarchie  française 
dans  les  Gaules,  et  sur  l'Alsace 
ttiuringienne ,  insérée  dans  l'His- 
toire d'Alsace  ;  5°  Description  his- 
torique d'une  partie  des  Doyennés 
d'yjjove  ,  Granges  et  Rougcmont , 


PER 

extrait  de  la  dissertation  sur  le  com- 
té d'Elsgau,  insérée  dans  V Alma- 
naclt  de  Franche  -  Comté,  année 
1788;  6°  en  manuscrit,  une  cen- 
taine de  dissertations  sur  la  Séqua- 
nie  et  pays  adjacens.  et  de  nom- 
breux matériaux  sur  l'histoire  de 
France  du  moyen  âge.  Ces  manus- 
crits sont  déposés  à  la  bibliothè- 
que de  Besancon. 

PERRÉbl(.lEAN  Baptiste-Emma- 
nuel), contre  -  amiral  ,  naquit  à 
Sain l-Valery -sur-Somme  ,  dépar- 
tement de  la  Scmmie,  le  19  dé- 
ceinbre  1761.  Son  père,  qui  avait 
parcouru  la  carrière  maritime  ,  le 
destina  à  la  même  profession  ,  et 
le  fit  entrer  de  très  -  boiu)e  heure 
dans  la  marine  marchande,  où  il 
parvint  successivement  au  grade 
de  capitaine.  11  passa,  en  179J  , 
dans  la  marine  militaire,  en  (jua- 
lité  de  lieutenant  de  vaisseau.  Com- 
mandant de  la  frégate  la  Proser- 
pine,  il  captura  dans  une  seule 
croisière  65bâlimens,  parmi  les- 
quels se  trouvait  une  frégate  hol- 
landaise de  3î>.  canons,  qui  ne  se 
rendit  qu'après  un  combat  vigou- 
reux. Ces  brillans  succès  le  firent 
nnuuner,  en  179/4»  capitaine  de 
vaisseau.  Il  moula  alors  la  Miner- 
ve, et,  à  la  lêle  de  quatre  frégates 
et  de  deux  corvettes  ,  il  alla  sur  les 
côtes  d'Afrique  détrm're  lesétablis- 
semens  que  les  Anglais  y  avaient  ; 
il  s'empara  en  outre,  dans  le  cours 
d(!  sa  mission,  de  54  bâtimens  ri- 
chement ("barges.  Il  reçut,  eni  795, 
l'ordre  d'aller  reprendre  dans  la 
rade  de  Tunis  une  frégate  et  deux 
corsaires  que  les  Anglais  avaient 
enlevés;  il  sortit  du  port  de  Tou- 
lon et  réussit  complèlenient  dans 
cette  entreprise.  En  1798,  il  fit 
partie   de  l'expédition  d'Egypte, 


l'ER 

en  qnalilo  de  chef  de  division, 
sous  les  ordres  de  l'amiral  Brneys. 
A  la  suite  du  désastre  d'Aboukir  , 
le  général  en  chef  Bonaparte  char- 
gea Perrée  de  parcourir  le  Nil , 
afin  de  concouiir  aux  opérations 
de  l'armée.  Perrée  réunit  et  arma 
im  grand  nombre  de  bâtimens  lé- 
gers, et  rendit  des  services  jour- 
naliers aux  troupes,  soit  en  leur 
fournissant  des  vivres,  soit  en 
transportant  de  l'artillerie  et  des 
nîunilions  sur  les  points  où  l'on 
n'aurait  pu  arriver  que  très-diffici- 
lement par  terre.  Il  eut  aussi dille- 
rens  engagemens  sur  le  Nil  avec 
la  flotte  dfs  Mamelucks,  qu'il  par- 
vint à  détruire  :  succès  qui  fut  ré- 
compensé par  un  sabre  magnifique, 
sur  lequel  était  gravée  cette  ins- 
cription :  d'tm  côté  ,  Bataille  de 
Chébreiss ;  et  de  l'autre.  Donné 
par  le  général  en  chef  Bonaparte. 
N'ayant  sous  ses  ordres  qu'une  fai- 
ble division,  il  rendit  d'utiles  ser- 
vicesà  l'armée  qui  assiégeait  Saint- 
Jeand'Acre,et  croisa  peudantplus 
de  six  semaines  sur  la  côte  de 
Syrie,  entre  deux  divisions  de  l'es- 
cadre anglaise.  Perrée  revenait  en 
France,  et  allait  rentrer  dans  le 
port  de  Toulon  avec  la  division  de 
frégates  et  de  corvettes  qu'il  rame- 
nait, lorsqu'il  fut  atteint,  le  19 
juin  1799,  P'"'  '"  fl'^tl^^  ennemie, 
qui  le  poursuivait  depuis  28  heu- 
re?. Il  se  défendit  vaillamment  ; 
mais  il  fut  accablé  par  des  forces 
supérieures  et  fait  prisonnier.  Le 
gouvernement  français  se  hâta  de 
l'échanger,  le  nomma  contre-ami- 
ral,  au  mois  de  décembre  i79î^, 
et  lui  confia  la  mission  de  ravitail- 
ler Malte.  Des  vents  contraires  le 
retinrent  long-lemps  ;  enfin  il  par- 
lit,  le  10  février  i8oo  ,  monté  sur 


PEIV 


167 


le  Généreux,  qu'accompagnaient 
une  frégate,  deux  corvettes  el  une 
flûte,  portant  0000  hommes,  beau- 
coup de  vivres  et  de  munitions  de 
guerre.  Dans  sa  traversée,  il  dé- 
truisit plusieurs  bâtimens  anglais, 
et,  le  18  du  même  mois  ,  il  était  à 
la  hauteurde  Malte,  où  il  comptait 
arriver  dans  quelques  heures,  lors- 
qu'il se  vit  menacé  par  quatre 
vaisseaux  et  plusieurs  frégates. 
Sur-le-champ  il  donne  aux  bâti- 
mens de  sa  division  le  signal  d'ef- 
fectuer leur  retraite.  Pour  lui ,  ne 
pouvant  éviter  un  combat  si  dis- 
proportionné, il  s'apprêta  à  mourir 
avec  gloire.  II  essaie  cependant  de 
se  frayer  un  passage  au  travers  des 
quatre  vaisseaux,  et  fond  sur  le 
Foudroyant  ,  monté  par  l'amiral 
Nelson;  niais  il  couîbat  en  vain  : 
attaqué  i  la  fois  par  les  quatre 
vaisseaux,  il  est  blessé  à  l'œil  gau- 
che d'un  éclat  de  bois;  néanmoins 
il  reste  à  son  poste  ,  continue  \ 
diriger  les  manœuvres  avec  le  plus 
grand  sang-froid,  et  fait  des  efforts 

inouïs  de  courage Un  boulet 

lui  emporte  la  cuisse  droite  ,  et  il 
meurt  avant  même  que  les  Anglais 
se  soient  rendus  maîtres  de  son 
vaisseau,  totalement  démâté  et  dé- 
semparé. Le  corps  du  brave  Perrée 
fut  inhumé  dans  l'église  de  Sainte- 
Lucie,  le  21  févner  1800,  et  ses 
armes  suspendues  au-dessus  de  sa 
tondie  .  à  gauche  de  l'autel. 

PERRblE-DUlIAMEL  (Pieree- 
Nico^As  )  ,  commandeur  de  la 
légion  d'honneur  ,  est  né  à  Gran- 
ville  le  8  avril  )747">  •'  <^'l'"t  'né- 
gociant et  armateur  quand  la  révo- 
lution éclata.  Nommé,  en  1789, 
député  du  bailliage  de  Coulan- 
ces  aux  états-généraux,  il  devint, 
après  la  session,  maire  de  sa  com- 


i68 


pEa 


mune  ;  puis  en  septombve  1795, 
député  de  la  Manche  au  conseil 
des  anciens,  dont  il  sortit  en  mars 
1799.  Au  iTiois  de  déccuibre,  il 
devint  membre  du  tribunal.  Lors 
de  la  suppression  de  ce  corps, 
le  19  août  1807,  M.  Perrée  lut 
appelé  aussitôt  aux  fondions  de 
maître  des  comptes..  Conseiller- 
maître  en  1816,  il  avait  cessé 
d'être  porté  sur  le  tableau  en 
18.7. 
PERREGAUX  (Alphonse-Clai;- 

DE-ChARLES-BeRNARDIN,      C(tMTE), 

membre  du  sénat-conservaleur, 
né  à  Neuchâtel  en  Suisse,  était 
venu  jeune  à  Paris,  et  se  trouvait 
à  la  tête  d'une  maison  de  banque 
considérable,  à  l'époque  de  la  ré- 
volution. Les  services  qu'il  avait 
rendus  à  la  France  en  faisant,  sur 
son  crédit  particulier,  venir  des 
subsistances  de  l'éfraiiger,  pen- 
dant les  temps  de  disette,  n'empê- 
chèrent point  qu'il  ne  tût  arrêlé 
comme  riche  et  comme  suspect, 
en  1795.  Mais  le  comité  de  salut- 
public  ayant  encore  le  désir  qu'il 
se  charfîeût  de  fournitures  nouvel- 
les, le  remit  bientôt  en  liberté  à  la 
condition  qu'il  pourvoirait  le  plus 
promptement possible  aux  besoins 
qu'on  éprouvait.  Il  se  rendit  de 
suite  en  Suisse,  fit  de  nombreux 
marchés,  et  crut,  après  avoir  ainsi 
employé  une  grande  partie  de  sa 
fortune,  pouvoir  revenir  en  tou- 
te sûreté  à  Paris.  Il  venait  cepen- 
dant d'y  être  dénoncé  de  nouveau, 
et  le  même  comité  avait  décidé 
qu'il  serait  arrêté  et  livré  au  tribu- 
nal révolutionnaire  dès  son  retour. 
Un  des  employés  de  la  maison  Per- 
regaux  eut  |)ar  hasard  avis  de  cet- 
te mesure,  et  vola  au-devant  de  son 
chef,  qu'il   rencontra   heureuse- 


PER 

ment  en  route,  et  qu'il  fit  retour- 
ner aussitôt  à  Neuchâtel.  Arraché 
ainsi  à  une  mort  presque  certaine, 
M.  Perregaux  ne  rentra  en  Fran- 
ce qu'après  la  chute  de  Robespier- 
re; un  de  ses  premiers  soins  fut 
d'assuier  une  rente  de  (5, 000  francs 
à  celui  qui  lui  avait  montré  tant 
de  dévouement,  et  qui  est  encore 
attaché  à  la  maison  de  banque  Jac- 
ques Lafitle  et  compagnie,  une 
des  plus  estimées  de  l'Europe  et 
quia  continué  celle  de  Perregaux. 
Lors  de  la  création  du  sénat-con- 
servaleur, après  la  révolution  du 
18  brumaire,  M.  Perregaux  en  fut 
nommé  un  des  premiers  membres 
avec  le  titre  de  comte.  Il  mourut 
quelques  années  après.  Sa  fille  a 
épousé  le  maréchal  Marmont,  duc 
dellagiise. — Alphonse-Perregaux, 
(le  comte  de)  son  fils  devint  cham- 
bellan de  Napoléon  et  épousa  en 
i8i3  une  des  filles  du  maréchal 
Macdonald,  duc  du  Tarente.  fen- 
dant  les  feA(/70H/\f  en  181 5, Napoléon 
le  nomma  pair  de  France,  mais  il 
cessa  de  faire  partie  de  cette 
chambre  après  le  second  retour 
du  roi. 

PERREGEAN  (Piebhe),  naquit 
à  Tours,  en  1701 ,  d'une  famille 
estimable  de  cette  ville;  au  sortir 
de  ses  études  il  entra  dans  les 
pouts-et-chaussées  ,  où  des  lalens 
remarquables  le  firent  parvenir 
successivement  à  îa  j)lace  d'ins- 
pecteur-génjiral.  Il  fut  ensuite 
nommé  directeur  des  travaux  ma- 
ritimes, membre  de  la  commission 
mixte  des  travaux  publics,  et  che- 
valier de  la  légion-d'honneur.  Il 
mourut  à  Paris  le  '27  janvier 
1814. 

PERRET-DE -TREGADORET 
(F.    M.),    membre  de  la  légion- 


PEU 

(l'honneur,  était  avocat  à  Ploër- 
mel,  quand  la  révolulion  éclata. 
Il  en  adopta  les  principes  avec 
modération,  et  fut  nommé  dé- 
puté de  l.'i  .sénécliaii.>isée  de  Ploër- 
mel  aux  états-généraux  en  1789; 
il  prit  place  au  côté  gauche.  De 
retour  dans  ses  foyers,  après  la 
session  ,  il  échappa  aux  proscrip- 
tions du  régime  delà  terreur,  et 
fut  nommé,  en  septendjre  17q5, 
député  du  département  du  Mor- 
bihan au  conseil  des  cinq-cents. 
Après  la  révolulion  du  18  bru- 
maire an  (S  (9  novembre  1799), 
il  dovint  juge  au  tribunal  d'appel 
du  département  d'Ille-et-Vilaine, 
puis  président  du  tiibifnal  crimi- 
nel du  Morbihan ,  dont  il  exerça 
les  fonctions  pendant  plusieurs 
années.  Il  fut  ensuite  admis  à 
la  retraite. 

PERRÏER  (  Iean  -  Baptiste  )  , 
professeur  de  littérature  et  de  gram- 
maire, membre  de  la  société  roya- 
le académique  d<;s  sciences ,  de 
l'athénée  des  arts,  de  la  société 
grammaticale,  de  la  société  pour 
l'enseignement  élémentaire,  de  la 
société  des  méthodes,  e-îc. ,  est  né 
à  Villeneuve-le-Roi , département 
de  l'Yonne,  le  29  décembre  1767. 
Il  commença  ses  études  au  collège 
de  cette  ville  ,  et  à  19  ans,  en  mai 
1787,  il  était  maître  de  quartier 
au  collège  des  Crassinsà  Paris  ,  où 
il  remplaça  plusieurs  fois  le  pro- 
fesseur de  quatrième.  Il  y  fut  reçu 
maitre-ès-arls,  ce  qui  depuis  lui  a 
fait  conférer  le  titre  de  bachelières 
sciences  et  de  bachelières  lettres. 
Il  s'occupait  alors  de  la  jurispru- 
dence, dont  il  suivait  des  cours  , 
sans  négliger  néanmoins  la  littéra- 
ture, et  surtout  la  grannuaire.  Il 
fut  nommé,  en  1791,  ù  une  chaire 


PER  169 

au  collège  royal  de  Joigny,  dèpar' 
temenl  de  l'Yonne  ;  il  l'a  remplie 
avec  distinction  pendant  quatre 
ans.  Ensuite  il  fut  appelé  au  minis- 
tère de  la  guerre,  au  bureau  de  la 
justice  militaire  ,  où  il  a  été  sous- 
chef.  C'est  là  que  M.  Perrier  a  ré- 
digé et  publié  le  seul  ouvrage  qui 
soit  encore  dans  les  mains  des 
membres  des  tribunaux n)ililaires  , 
ouvrage  qui  a  eu  trois  éditions  de 
2000  exemplaires  chacune  ,  le 
Guide:  (/es  juges  ndlUaires.  Il  fut ,  à 
celte  époque,  nommé  assesseur  de 
juge  de  paix,  puis  commissaire  de 
bienfaisance  à  Paris  ,  et  remplit  a- 
vec  zèle  et  imparlialitè  ces  fonc- 
tions honorables  ei  gratuites  ,  dont 
il  s'occupa  pendant  4  •'"i''-  1'  '^h- 
tint  aussi  des  lettres  de  licencié  en 
droit,  et  remporta  à  Grenoble  le 
prix  sur  cette  question  :  Quels  sont 
les  moyens  de  perfectionner  l'éduca- 
tion physique  et  morale  des  en  fans? 
Son  mémoire  a  été  imprimé.  M. 
Perrier,  qui  est  l'un  des  réducteurs 
des  Annales  de  grammaire,  a  sous 
presse  (1824),  un  ouvrage  intitu- 
lé :  Grammaire,  logique  et  rhétori- 
que françaises  réunies ,  ou  Traité 
complet  du  langage. 

PERRIER  (Marie-Victobine, 
wÉe  Patras  ,  VEUVE  ).  Cette  dame 
aimait  les  lettres,  et  les  a  cultivées 
avec  quelque  succès.  On  lui  doit  : 
1°  Récréations  d'une  bonne  mère 
avec  ses  filles,  ou  Instructions  mo- 
rales sur  chaque  mois  de  l'année,  à 
l'usage  des  Jeunes  demoiselles,  Pa- 
ris, I  vol.  in-i2,  i8o4;  "2,"  Adresse 
de  Maric-V  ictorine  aux  Français, 
brochure  d'imc  feuille  et  demie 
d'impression  ,  publiée  à  Lyon  en 
i8i5  ,  in-S",  et  signée.  Veuve 
Perrier,  née  Patras;  5°  ime  petite 
comédie  en  1  arle  et  en  vers,  re- 


170  PER 

présentée  sur  le' théâtre  de  !a  Por- 
te-Saiiit-Marlin  en  1820,  et  bien 
Mcciieillie  du  oublie;  4°  "fi  grand 
nombre  de  Poésies  fugilives  pt  d» 
Chansons  insérées  dans  différent 
recueils,  et  particulièrement  dans 
le  Petit  Magasin  des  Dames;  5°  en 
manuscrit,  plusieurs  Comédies  eu 
I  acte.  M""  Perrier  mourut  à  Pa- 
ris au  mois  d'avril  1820. 

PERRIÈS  (Joseph),  l'un  des 
partisans  les  plus  modérés  de  la 
révolution,  remplit  dans  sa  com- 
mune des  fondions  municipales, 
et  futensuile  élu,  en  i7()a,  dépu- 
té du  département  de  l'Aude  à  la 
convention  nationale.  Dans  le 
procès  du  roi ,  il  vola  la  déten- 
tion pendant  la  guerre,  et  le  ban- 
nissement à  la  paix.  Attaché  au 
parti  des  Girondins,  il  lut  décrété 
d'arrestation,  avec  72  de  ses  collè- 
gues signataires  des  protestations 
contre  les  événemens  du  3i  mai 
i795;mais  après  la  mort  de  Robes- 
pierre, il  lut  réintégré  dans  le  sein 
de  la  convention.  Par  suite  de  la 
réélection  des  deux  tiers  conven- 
tionnels ,  il  devint  membre  du 
conseil  des  cinq-cents ,  où  il  ap- 
puya le  projet  contre  les  détrac- 
leurs  des  mandats.  Il  sortit  de 
l'assemblée  le  ao  mai  1798,  et 
n'a  plus  reparu  depuis  dans  nos 
assemblées  délibérantes. 

PERRIN  (Jean- Baptiste),  dit 
Perrin  des  Voges,  négociant  à  É- 
pinal  au  moment  de  la  révolu- 
tion. Il  en  adopta  les  principes 
avec  chaleur,  l'ut  d'abord  chargé 
de  fonctions  municipales ,  puis 
élu,  en  1792,  député  à  la  conven- 
tion nationale,  où  il  vota  la  mort 
du  roi.  Dans  le  courant  de  cette 
session,  il  parut  souvent  à  la  tri- 
bune ,  pour  y  traiter  des  objets  de 


PER 

finances,  et  y  attaquer  avec  une 
égale  véhémence  les  royalistes  et 
les  partisans  de  la  terreur.  Pendant 
le  cours  des  diverses  missions  dont 
il  fut  chargé  dans  le  déparlement 
des  Ardennes,  du  Nord  et  du  Pas- 
de-Calais,  il  n'eut  i\  se  reprocher 
aucun  acte  de  violence.  Après  la 
chute  de  Robespierre,  il  fut  en- 
voyé dans  les  départemens  du. 
Gard,  de  l'Hérault  et  de  l'Avey- 
ron,  pour  y  renouveler  les  auto- 
rités. Il  revint  ensuite  à  la  con- 
vention, et  fut  nommé  au  comité 
de  sfireté  générale,  le  1 5  pluviôse 
an  3(3  février  1793).  Lors  des 
troubles  du  13  germinal,  il  de- 
jnanda  qu'on  fît  sortir  de  la  capi- 
tale 5o, 000  étrangers  venus  à  Paris 
depuis  trois  mois,  et  8000  mili- 
taires destitués  ou  suspendus.  Il 
fit  ensuite  décréter  que  quiconque 
aurait  arraché  ou  tenté  d'arracher 
la  cocarde  aux  trois  couleurs,  se- 
rait sur-le-champ  livré  à  une  com- 
mission militaire.  Quoiqu'il  eût 
renouvelé  la  proposition  de  confier 
l'élection  d«;s  deux  tiers  des  mem- 
bres de  la  convention  aux  assem- 
blées électorales,  il  se  prononça 
avec  force  contre  les  insurgés  des 
sections  de  Paris,  dès  l'époque  de 
son  retour  de  Calais,  où  il  s'était 
rendu  pour  y  faire  accepter  la  cons- 
titution par  la  garnison.  Réélu  au 
conseil  des  cinq-cents,  il  y  présenta 
un  projet  relatif  aiix  finances,  a- 
près  a  voir  appuyé  quelques  proposi- 
tions de  son  collègue  Bailleulsurle 
même  sujet;  parla  ensuite  en  la- 
veur de  la  création  des  mandats,  fit 
une  sortie  contre  ceux  qui  en  dépré- 
ciaient le  système  ,  et  défendit  un 
projet  sur  la  libération  des  acqué- 
reurs de  biens  nalionaiix.  Il  monta 
aussi  à  la  tribune  pour  signaler 


PER 

comme  perturbateurs  de  son  dé- 
parleiTient  les  prêtres  rétVactaires 
et  déportés  rentré^.  Il  sortit  du 
conseil  le  20  mai  1797,  fiJt  admis  à 
celui  des  anciens  en  1798,  et  en 
devint  d'abord  secrétaire ,  puis 
président.  Il  se  déclara  en  faveur 
des  événemens  du  18  brumaire  an 
8  (i;-99),  et  fit  partie  de  la  com- 
mission intermédiirire  du  conseil 
des  anciens,  cliargée  de  présenter 
nn  nouveau  projet  de  constitution. 
Membre  du  corps- léfrislatif,  Per- 
rin  en  tut  le  premier  président,  y 
siégea  plusieurs  années,  et  mou- 
rut en  iHi5. 

PERRIN  (  Pierre  -  Nicolas  ) , 
était  négociant  à  Troyes  en  1789. 
D'abord  maire  de  cette  ville ,  il  fut 
quelque  temps  après  élu  député 
(lu  département  de  l'Aube  à  l'as- 
semblée législative,  puis  à  la  con- 
vention, où  il  vota  la  réclusion 
de  Luin's  XVI  pendant  la  guerre, 
et  son  bannissement  à  \\  paix. 
Nommé  meiubre  du  coinilé  des 
marchés,  il  offrit  et  fournit  |)(;r- 
sonnellement  à  la  république  pour 
5,000.000  de  toile  de  coton.  Il  iut 
accusé  par  Cbarlier,  le  23  sep- 
tembre 1790,  de  recevoir  des  in- 
térêts dans  les  fournitures.  Traduit 
presque  sur-le-champ  devant  le 
tribunal  criminel,  il  eut  la  don- 
leur,  lui  représentant  du  peuple 
et  seulement  coupable  d'amour 
pour  la  patrie,  de  se  voir  con- 
damné à  douze  années  de  fers  et 
à  six  heures  d'exposition.  Envo3'é 
ii  Toulon ,  il  ne  put  supporter 
l'idée  d'une  telle  infamie,  et  mou- 
rut de  chagrin  ,  à  l'âge  de  42  ans. 
Après  la  chute  de  Robespierre, 
«on  jugement  fut  annulé,  sa  mé- 
moire réhabilitée  ;  et  la  république 
'Ordonna,  par  un  décret,  de  payer 


PER  171 

à  sa  veuve  le  n)ontant  de  ses  in- 
deuinités  de  représentant.  Cbar- 
lier, son  dénonciateur,  essaya  de 
nouveau  de  motiver  l'accusation 
qu'il  avait  portée  contre  lui. 

PERRIN  (N.  ),  dit  Perrin  de 
LA  Gironde,  accusateur  public  près 
le  tribmial  criminel  de  ce  dépar- 
tement, l'ut  élu  parses  concitoyens 
au  conseil  des  cinq-cents,  où  il 
fit  preuve  de  connaissances  en  ma- 
tière de  judicature;  il  fut  nommé 
secrétaire  du  conseil  en  1799.  H  ;> 
depuis  rempli  les  fonctions  de  juge 
à  la  cour  d'appel  de  Bordeaux  , 
dont  il  ne  faisait  plus  partie  à  l'ù- 
poquede  la  première  restauration, 
en  181 4- 

PERRIN  (N.),  dit  Perkin  delà 
Moselle,  fut  nommé  tribun  par 
le  sénat-conservateur,  en  mars 
1802,  lors  du  premier  renouvel- 
lement de  ce  corps.  Élu  secré- 
taire le  21  février  1804,  il  parla, 
en  mai  suivant,  pour  que  le  pre- 
mier consul  Bonaparte  fût  déclaré 
empereur.  Nommé,  pende  temps 
après ,  procureur-général-impérial 
près  de  la  cour  d'appel  de  la  Mar- 
tinique, et  en  même-temps  mem- 
bre de  la  légion-d'bonneur ,  M. 
Perrin  n'a  plus  figuré  depuis  sur 
la  scène  [>olitique. 

PERRIN  (N.),  dit  Pirrin  de 
l'Orne,  membre  du  corp,'<-légis- 
latif,  naquit  le  8  décembre  i74i' 
Dès  sa  jeunesse  il  se  livra  à  l'étude 
des  lois.  Devenu  procureur  au  par- 
lement de  Paris,  il  en  exerfa  pen- 
dant 20  ans  les  fonctions, et  mérita 
l'estime  et  la  confiance  publiques, 
par  une  probité  à  toute  épreuve 
et  les  connaissances  les  plus  éten- 
dues. La  révolution  le  compta  au 
nond)re  de  ses  partisans  les  plus 
modérés.  S'étant  fixé  à    l'Aigle, 


172  PKR 

par  suile  d'acciuisitioiis  considé- 
rables cl.'ins  le  tlônartcnient  de 
l'Orne,  il  fut  bieniôl  appelé  au 
conseil  d'agricultnre  du  départe- 
inent,  piu's  à  la  commission  ad- 
ministrative des  hospices,  où  il 
seconda  puissamment  la  bieniai- 
sance  et  la  sollicilude  paternelle 
du  gonveriiement.  Dans  les  fonc- 
tions de  conseiller  municipal  de 
la  ville  de  l'Aigle  ,  qu'il  lemplit 
depuis,  il  continua  de  s'atliier  la 
considération  et  l'attachement  de 
ses  coriciloyens,  qui  s'<-mpressè- 
rent  de  lui  en  donner  un  témoi- 
gnage honorable,  en  le  proposant 
comme  candidat  au  corps-légis- 
latif, où  il  l'ut  noumié.  Il  moinut 
en  1808. 

PKUKOCIIEL  (N.),  agent  di- 
plomalique,  naquit  aux  environs 
de  CaeUjil'une  famille  noble,  sui- 
vit la  carrière  ecciésiastique,  et 
était  grand- vicaire  du  diocèse 
d'Angers  quand  la  révolution  é- 
clata.  A  cette  époque,  il  devint 
l'anu  de  Laréveilière  -  Lépaux, 
qui,  en  1  ^qS,  lui  fit  ubieuir  la  pla- 
ce de  chargé-d'afi'aires  à  la  cuur 
de  Suède;  il  en  remplissait  les 
fonctions  avec  zèle  et  di»linclion, 
quand  toul-à-coup  des  démêlés 
s'élevèrent  entre  les  deux  gouvrr- 
nemens,  en  i'^fp-  llappelé  alors 
par  le  directoire, M.  Perroohel  suc- 
céda à  l'amiral  Truguet  en  la  mê- 
me qiuilité,  à  la  C(iur  de  Madrid. 
Peu  de  temps  après,  envoyé  en 
Suisse  comme  ministre  plénipo- 
tentiaire ,  il  conclut  une  traité 
avec  cette  puissance,  fut  rappelé 
de  nouveau  en  juin  1799,  et  a- 
bandonna  la  carrière  politique 
pour  rentrer  dans  la  vie  privée. 

PERUOiNET  (JEAN-RoDotPiiE), 
premier  inspecteur  des  ponts-et- 


PER 

chaussées  de  France,  ancien  ins- 
pecteur-général de<  salines,  che- 
valier de  Saint- Michel  ,  membre 
des  académies  royales  des  sciences 
de  Paris,  de  Stockholm,  de  Ber- 
lin, de  la  société  royale  de  Lon- 
dres, etc.,  naquit  l'i  Siiréne,  près 
de  Paris,  en  1-08.  Sa  famille, 
dont  le  chef  était  originaire  de 
Vevey  et  oiïid»  rdans  un  régiment 
suisse  au  serviec  de  France  ,  le 
destinait  à  suivre  la  carrière  du 
génie,  à  biquelle  le  jeune  Perro- 
net  fut  bientôt  obligé  de  renoncer 
par  suite  de  la  mort  de  son  père. 
Uni(|ue  appui  de  sa  fann'IIe,  il  é- 
tudia  l'architecture,  qui  lui  olfrait 
plus  de  ressources,  et  entra  chez 
Debeausirc,  architecte  de  la  ville, 
qui  lui  confia,  malgré  sa  jeunesse 
(Perronet  n'avait  alors  que  17 
ans),  la  direction  des  travaux  du 
grand  égout ,  et  de  la  partie  du 
quai  qui  forme  Vahrcuvoir  entre  le 
pont  Louis-Seize  et  les  Tuileries; 
il  le  chargea  encore  des  travaux 
ù^i  trottoir  en  encorbellement  du 
quai  Pelletier,  près  du  punt  Notre- 
Dame.  En  17^7,  Perronet  devint 
inspecteur,  et  si:ccessivemenl  in- 
génieur et  ingénieur  en  chef  des 
ponts-et-chaussées.  Dix  ans  après, 
le  ministre  Trudaine  le  nomma 
diiecteur  de  l'école  (pi'il  venait  de 
fondt  r  dans  cette  partie,  et  lui  fit 
obtenir,  dans  la  même  année,  le 
titre  de  premier  ingénieur  des 
ponts-et-chaussées  de  France. 
Sfuis  la  direction  de  Perronet,  cet 
établissement  acquit  la  plus  haute 
importance  ,  tt  la  réputation  du 
directeur  s'augmenta  des  grands 
travaux  dont  il  l'ut  chargé.  i>  D'a- 
bord, dit  M.  Lesage  dans  la  Notice 
qu'il  a  donnée  en  i8o5  pour  ser- 
vira l'élotre  de  Perronet,  du  fond 


TER 

(le  la  Russie,  les  magnats  durent 
invo(|uor  les  tuleiis  de  Peironet 
pour  Construire  uu  pont  à  Saint- 
l'éler.sbourg.  Eu  i;78,  il  projeta 
un  uiouuitieut  magnifique.  Ce 
pont  était  de  7  arches,  G  piles  et 
2  culées.  ^J^'ar(;l)e  du  milieu  avait 
10  toises,  les  autres  avaient  iS,  16 
et  14  toises  d'ouverture;  l'épais- 
seur des  piles  du  milieu  était  de 
3o  pieds,  les  autres  de  27  et  24 
pied»  ;  les  demi-piles  des  culées 
avaient  12  pieds,  ce  qui  donne  à 
la  Neva,  en  cet  endroit,  une  lar- 
geur de  622  pieds.  La  largeur  du 
pont  était  de  56  pieds.  L'arche  du 
milieu  s'ouvrait  pour  livrer  passa- 
ge aux  vaisseaux  matés.  Les  deux 
piles  du  milieu  étaient  surmontées 
d'un  arc-de-lriomphe  et  de  tro- 
phées sur  les  quatre  fayes.  »  En 
France,  les  ponts,  au  ncunbre  do 
i5.  cpi'il  construisit  ou  fit  exécu- 
ter d'après  ses  ordres,  se  distin- 
guent surtout  par  la  solidité  ,  la 
précision  de  la  constriiction ,  et 
l'élégance  des  C(uubes  des  arches. 
Les  plus  remarquables  sinl  ceux 
de  Louis  XVI,  ;'i  Paris,  de  Neuilly, 
de  Nemours,  de  Saint-Maxen.  e, 
d'Orléans,  de  Mantes,  de  (Jbâteau- 
Thierry  et  de  Bruuoi.  Il  a  donné 
les  pbuis  de  7  piuils,  sav<u'r  :  de 
IVleluu;  (le  la  Salpêlriére,  vis-à-vis 
le  jardin  du  Roi  à  Paris  (où  se 
Irouviî  aujourd'hui  le  pont  d'Aus- 
terlitz,  construit  en  Ter);  sur  la 
Sa('')ue  ,  à  Lyon  ;  de  Merel-sur- 
Loiug;  de  Pontoise;  sur  la  Loire, 
à  Nantes,  et  .-.ur  la  N(!va  à  Saiul- 
Pélersliouig.  Le  preujier  |»onl  h(»- 
rizoolal  fut  celui  de  Neuilly,  com- 
mencé en  17G8  et  déciutré  le  22 
septembre  1772,  en  préserjce  de 
loule  la  cour,  qui  avait  voulu  a?- 
ifister  à  l'opération  du  décintre- 


PER 


173 


ment  :  trois  minutes  suffirent  pour 
l'aire  tomber  les  ferrures  des  cinq 
arches.  Le  pont  Louis-Seize  (pen- 
dant la  révolution  appelé  de  la 
Concorde)  est  le  plus  be;tu  de  Pa- 
ris. L'auteur  a  employé  dans  la 
construction  de  ce  pont  im  genre 
d'architecture  nouveau  qui  sacri- 
fie les  apparences  de  la  solidité  à 
l'élégance  et  à  la  légèreté.  Les  ar- 
ches surbaissées  sont  soutenues 
par  des  piles  légères  avec  des  co- 
lonnes engagées.  D'élégantes  ba- 
lustrades en  forment  les  parquets. 
Enfin,  ce  pont  réunit  tous  les  gen- 
res de  beauté  :  élégance,  solMlité, 
conùnodilé,  abords  faciles.  L'in- 
tention de  Perronet  était  de  l'or- 
ner de  trophées,  mais  ce  projet  a 
été  changé  sous  le  gouvernement 
impérial.  Au  lieu  de  trophées,  ce 
devaient  être  les  statues  des  grand» 
hommes  qui  ont  illustré  la  France. 
Le  décret  impérial  est  au  moment 
de  recevoir  son  exécution,  seule- 
ment il  y  aura  quelques  modifica- 
tions dans  les  persormages  appelés 
A  jouir  de  l'homuMjr  de  cette  apo- 
théose. (<  Une  chose  remarquable, 
dit  M.  Bertrand,  auteur  d'ime  ISo- 
tire  sur  cet  ingénieur,  c'est  que 
dans  le  temps  011  Perronet,  jeune 
en  "ore,  étudiait  l'architecture  au. 
Louvre,  l'académie  avait  proposé 
pour  prograuune  d'un  prix  de 
UK.is,  le  projet  d'un  pont  à  cons- 
truire en  face  de  la  nouv^(îlle  église 
de  la  Madeleiru! ,  et  que  Perronet 
avait  remporté  le  prix.  »  Perronet 
a  fiit  coruiailre  dans  5  volume? 
iu-f(dio,  (pie  le  gouvernement  a 
fiil  imj)!imer  à  ses  frais,  ses  nom- 
breux travaux.  «  Ou  y  voit  que» 
durant  l'espace  de  trente  ans» 
dans  la  seule  généralité  de  Paris, 
dont    la    direction    lui    était   plu;* 


»74 


PER 


particulièrement  attribuée,  plus 
de  600  lieues  de  longueur  ont 
été  ouvertes,  reclifiéeset  plantées 
d'arbres;  qu'une  mullilude  de 
routes  sinueuses  et  trop  rapides  y 
ont  été  successivement  élargies, 
adoucies,  et  nnidues  accessibles 
à  tous  les  genres  de  circulation  ; 
enfin  qu'en  «790  plus  de  2000 
ponts  de  toute  grandeur  j  étaient 
entretenus  aux  trais  du  gouverne- 
ment par  le  corps  des  pouls-et- 
chaussées.  »  M.  Lesage  ,  dans  la 
Notice  que  nous  avons  déjà  citée, 
s'exprime  ainsi  à  l'éffard  des  autres 
travaux  de  Perronet.  «  Il  créa  ,  en 
1793,  un  projet  pour  construire 
en  pierre,  des  ponts  dont  les  ar- 
ches auraient  depuis  100  jusqu'à 
5oo  pieds  d'ouverture.  Il  forma 
en  outre  un  projet  de  navigation 
de  la  Loire  depuis  Nantes  jusqu'à 
Paimbœut";  il  traça  le  canal  de 
Bourgogne  par  Tonnerre,  et  celui 
de  l'Yvette.  Il  inventa  une  drague 
pour  enlever  le  sable  et  les  vases  ; 
une  planchette  qui  porte  un  crayon 
pour  mesurer  exactement  les  an- 
gles ;  une  double  pompe  qui  joue 
par  un  mouvement  continu  ;  une 
petite  voiture  ou  camion  prisma- 
tique ;  une  roue  à  aubes,  dont 
l'arbre  e>>t  vertical  ;  une  autre 
dont  l'arbre  est  horizontal  ;  deux 
scies  àrccéperlespieux  sous  l'eau; 
et  un  odomètre  pour  les  épuise- 
uicns.  Il  composa  des  mémoires 
;icaiJémi(pies  sur  le  cinlreujent  et 
le  décinlreinent  des  ponts  ;  sur  les 
différentes  méthodes  de  Ibnder  la 
maçonnerie  dans  l'eau;  sur  l'é- 
paisseur des  piles  et  la  courbure 
lies  voûU^s  ;  sur  les  pieux  et  pi- 
lotis ,  sur  les  éboulemens  des 
montagnes,  etc.  Il  donna  des  avis 
détaillés  sur  la  rade  de  Cherbourg, 


PUR 

sur  le  port  du  Havre  et  celui  de 
Dunkerque,  sur  la  forme  de  Tou- 
lon, sur  la  fonderie  de  canons  à 
l'île  d'Ouderit ,  et  sur  la  manufac- 
ture de  porcelaine  de  Sèvres.  » 
Perronet  était  chéri  de  ses  élèves, 
au  nombre  desquels  on  doit  citer 
SIM.  de  Prony  et  Lesage.  Le  corps 
des  ingénieurs  fit  exécuter  son 
buste  en  marbre  ,  avec  cette  ins- 
cription :  Pairi  caris.simo  fam'Uia, 
et  le  lui  offrit  comme  un  gage  de 
sa  tendre  vénération.  Ses  élèves 
firent  aussi  graver  son  portrait, 
pour  lequel  Diderot,  son  ami, 
composa  une  inscription.  Enfin 
il  reçut  de  la  société  des  arts 
de  Londres,  un  hommage  bien 
flatteur  :  elle  fit  placer  son  por- 
trait dans  la  salle  de  ses  séances , 
à  côté  de  celui  do  Franklin,  hon- 
neur qu'elle  décerne  rarement, 
et  surtout  aux  étrangers.  Per- 
ronet avait  adopté  avec  sagesse 
les  principes  de  la  révolution, 
dont  les  orages  ne  l'atteignirent 
point.  Il  nnturut  paisiblement,  et 
généralement  regretté,  le  27  fé- 
vrier 1794-  Il  a  publié  :  \"  Des- 
cription des  projets  de  la  conslruc- 
tion  des  ponts  de  Neuilly,  de  Man- 
ies, d'Orléans,  etc.  ,  Paris,  1782- 
1769,  5  vol.  in-fol. ,  oij  1778, 
5  vol.  10-4°  et  atlas  in-fol.  ;  2" 
Mémoire  sur  les  moyens  de  con- 
duire à  Paris  une  partie  de  l'eau 
des  rivières  de  l' Yvette  et  de  lu 
B lèvre ,  Paris,  1776,  10-4",  avec 
3  planches;  3"  Mémoire  sur  la 
lecherche  dt!S  moyens  que  l'on 
pourrait  employer  pour  construire 
de  grandes  arches  de  pierre,  de. 
200  jusqu'à  ôoo  pieds  d'ouver- 
ture ,  qui  seraient  destinées  à  fran- 
chir de  profondes  vallées,  bordées 
de  rochers  escarpés,  Paris,  1793» 


I 


TER 

in-4'',  arec  planches;  4°  tl'^t:rens 
Mémoires  dans  le  recueil  de  l'aca- 
démie royale  des  sciences. 

PERROT  (Clément),  ministre 
non  conformiste  d'Aîiglelerre, 
vint,  en  181 5^  dans  le  midi  de  la 
France,  pour  y  observer  l'état 
})olitique  et  moral  des  protestans, 
♦■t  t'iit  témoin  des  excès  auxquels 
se  livrait  l'esprit  de  parti  à  Nis- 
mes  et  (ians  les  environs.  Dans 
un  rapport ,  impriu)é  et  accueilli 
avec  le  plus  grand  empressement 
en  Allemagne  et  en  Angleterre, 
Perrot  peint,  avec  toute  l'énergie 
d'une  âme  généreuse,  les  funestes 
effets  des  dissentions  civiles.  On 
a  imprimé  à  Paris,  dans  la  Bihiio- 
tliéque  lùstorique,  des  fragmens 
de  ce  rapport,  auquel  MM.  deBer- 
nis  et  d'Arbaud -Jonques  ont  es- 
s.oyé  de  répondre  :  l'un,  dans  sou 
Précis  lie  ce.  qui  s'est  passé  e/i  1 8 1 5 
dans  le  déparleihenl  du  Gard,  Pa- 
ris, 1818;  et  l'autre,  par  son  His- 
torique des  troubles  et  agitations 
du  département  du  Gard  en  i8i5. 

PERSON  DE  BERAINVILLE 
(PiEaRF.-CiAiiDE), littérateur,  mem- 
bre de  plusieurs  sociétés  savantes 
et  littéraires,  est  auteur  d'un  grand 
nombre  de  petites  pièces  de  théâ- 
tre, où  l'on  trouve  des  détails  gra- 
cieux et  spirituels.  Il  a  publié  :  i" 
la  Nouvelle  Hf-  des  Esclaves,  drame 
lyrique  ;  2"  Emélie,  ou  le  double 
dénouement,  drame;  5°  le  Nouvel 
{v^e  d'or,  allégorie,  opéra-panto- 
mime en  trois  actes  ;  4°  Belplié- 
gur,  comédie;  5"  le  Mariage  par 
magie,  comédie;  6°  La  force  de 
r inclination,  comédie;  7"  //  ne 
faut  désespérer  de  rien,  comédie- 
\no\v.r\yG\^'  Etrennes  patriotiques, 
on  Recueil  anniversaire  d'allégories 
iur  les  époques  du  règne  de  Louis 


PER  i;5 

XVI ,  première  suite,  1777,  in- 
24;  9°  le  Bouquet  de  la  veuve ,  co- 
médie en  un  acte  et  envers,  1791; 
10°  Recueil  de  mécaniques,  et  des- 
cription des  macliines  relatives  à  l'a- 
griculture et  aux  arts,  1801,  in-4": 
l'auieur  avait  exposé  y5  de  ces 
machines  au  salon  du  Louvre,  de- 
puis 1792  jjisqu'en  1  800  ;  II"  Pe- 
tite grammaire  des  jeunes  demoisel- 
les, 1810,  in-12;  11'  Impromptu 
pour  la  naissance  du  roi  de  Rome, 
inséi  é  dans  le  recueil  intitulé  Hom- 
mages poétiques,  de  MM.  Lucet  et 
Eckard. 

PERSONNE  (J.  B.),  procu- 
reur à  Saiut-Omer,  en  1789,  se 
prononça  avec  chaleur  pour  la  ré- 
volution, et  fut  nommé,  en  1792, 
député  du  département  du  Pas- 
de-Calais,  à  la  convention  natio- 
nale, où  il  vota  la  détention  du 
mi  pendant  la  guerre  et  son  ban- 
nissement à  la  paix;  il  fut  aussi  de 
l'avis  du  sursis.  Il  embiassa  le 
parti  de  la  Gironde,  et  fut  décla- 
ré par  son  département  «  indigne 
»de  la  confiance  de  ses  conci- 
«toycns.  «  Il  partagea  la  proscrip- 
tion des  Girondins,  et  fut  exclu 
comme  eux  du  soin  de  la  conven- 
tion, où  il  rentra  après  le  9  ther- 
midor. Il  fit  alors  j)arlie  du  comi- 
té de  législation,  et  obtint  l'annu- 
lation de  plusieurs  jugemens  ren- 
dus pendant  le  règne  de  la  ter- 
reur. Membre  du  conseil  des  an- 
ciens ,  par  suite  de  lu  réélection 
des  deux  tiers  conventionnels,  il 
en  sortit  en  mai  1798,  cl  après  le 
18 brumaire,  il  devint  juge  au  tri- 
bunal civil  de  .Saint-Omer.  Il  est 
mort  depuis  plusiems  années. 

PERSOON  (Chrétien),  savant 
naturaliste,  membre  de»  sociétés 
linnéennes  de  Londres  et  de  Phi- 


176 


PER 


ladelplîie,  de  l'académie  des  scien- 
ces naturelles  de  Berlin,  corres- 
pondant de  la  société  royale  de 
Goëttingiie ,  etc.,  naquit  dans  la 
colonie  hollandaise  du  Cap-de- 
Bnnne-Espcrauce,  et  la  quitta,  à 
l'âgL-  de  12  ans,  pour  achever  son 
éducation  en  Europe.  Après  avoir 
fait  de-  bonnes  études  au  collège 
de  Bingen  et  aux  universités  de 
Leyde  et  de  Goëtlingue,  où  il  sui- 
vit avec  assiduité  les  cours  de  phi- 
losophie, de  médecine,  et  d'his- 
toire naturelle,  il  se  consacra  par- 
ticulièrement à  l'étude  de  la  bo- 
tanique. M.  Persoon  a  publié 
plusieurs  ouvrages  très -estimés 
des  savans,  et  un  autre,  non 
moins  utile  à  toutes  lesclassesdela 
sociétérc'est  un  Traité  complet  sur 
les  champignons  comestibles,  dans 
lequel  il  s'attache  principale- 
ment à  indiquer  les  différences 
qui  les  caractérisent,  et  à  préve- 
nir les  méprises  funestes  qui  font 
souvent  confondre  les  espèces  vé- 
néneuses avec  les  nutritives.  On 
a  aussi  de  lui  plusieurs  mémoires 
intéressans,  insérés  dans  les  ou- 
vrages périodiques  ou  fournis  aux 
différentes  académies  dont  il  est 
metrdîre.  Cet  écrivain  laborieux 
a  de  plus  ^iwhWk'.i"  Obsertaliones 
mycologicœ,  Lèipsick ,  1796,  2 
part,  iu-8";  '2'Commentatio  de  fan- 
gis  rlavœ  formihus,  Lèipsick,  1797, 
in-8";3"  Systema  vegetabiliuni,  i5* 
édition,  Lèipsick,  1797,  in-<S°  , 
4°  Tentamen  disposiliovis  mjetho- 
dicœ  fungoram ,  Lèipsick,  1797, 
in-8";  5*  Icônes  et  descriptiones 
fungorum  minus cognitorum, Lèip- 
sick ,  1799-iHoo,  2  fasc.  in-S"; 
6°  Commenlarius  lac.  Chr.  Scliœf- 
feri  fungorum  Bavarice  indigeno- 
rum  icônes  pictas  differentiis  speci- 


PEll 

fie.  sjnonjmis  observât,  sélect,  il- 
lustrans,  Erlang,  )8oo,  grand  in- 
4°;  7"  Synopsis  metliodica  fungo- 
rum, Goëttinsiie,  1801,2  p.  in- 
8°;  8°  Icônes  pictœ  specierum  ra- 
riorum  fungorum^  etc.,  Paris  et 
Strasbourg,  i8o5,  2  fasc.  in-.'|°; 
9'  Synopsis  plantarum  seu  enchi- 
ridium  hotanicum,  Paris,  i8o5  et 
1807,  2  vol.  in-13:  ce  petit  ma- 
nuel, commode  pour  les  amateurs 
de  botanique,  est  fort  estimé. 

PERSLIS  (Locis-Luc  Loiseau 
de),  chevalier  de  Saint-^Lichel , 
surintendant  honoraire  de  la  mu- 
sique du  roi,  naquit  à  Metz  le  4 
juillet  1769.  Son  père,  maître  de 
musique  de  la  cathédrale  de  cette 
ville,  lui  donna  les  premières  le- 
çons de  l'art  dans  lequel  il  devait 
tenir  un  jour  un  rang  distingué. 
Dès  l'âge  de  20  ans,  ils  se  fit  con- 
naître à  Paris,  par  plusieurs  ou- 
vrages joués  au  théâtre  de  l'Opéra- 
Comiqne;  nommé  en  1793  par  la 
voie  du  concours,  professeur  de  r* 
classe  au  Conservatoire  de  Musi- 
que, et  peu  d'années  après  maître 
du  chant  au  grand  Opéra,  i!  fut  suc- 
cessivement et  cuinulativement 
maître  de  chapelle  du  roi,  inspec- 
teur-général (le  la  musique  et  pre- 
mier chef  d'orchestre  de  l'Opéra, 
et  enfin  directeur  de  l'Académie 
royale  de  Musique  et  du  théâtre 
royal  Italien.  Il  développa  dans 
cette  place  dilficile  les  qualités  d'un 
excellent  administrateur,  et  ceux 
que  mécontentaitquelquefois  l'in- 
flexibilité de  son  caractère,  recon- 
nais>iaient  cependant  sa  probité  et 
sa  justice.  L'Opéra  brilla  sous  sa 
direction  d'iui  éclat  qu'il  n'avait 
pas  »!U  depuis  long-temps,  et  le 
théâtre  Italien,  qu'il  avait  formé 
lui-même,  fut  regardé  comm<!  un 


PER 

des  meilleurs  de  l'Europe.  Mais 
les  soins  qu'il  donnait  avec  une 
ooiistiince  sans  relârhe  à  ces  deux 
élahlissemens,  achevèrent  bientôt 
de  détruire  sa  santé  altérée  depuis 
long-temps  par  le  travail,  et  il 
succomba,  à  l'âge  de  5oatis  et  de- 
mi, à  une  maladie  de  poitrine,  qui 
l'avait  forcé  deux  mois  avant  à  de- 
mander sa  retraite.  Il  l'oluinl  avec 
la  croix  de  Sainl-iMichcl  et  une 
pension  honorable.  Ses  composi- 
tions dramatiques,  qui  se  recom- 
mandent par  un  goût  et  un  sl}'le 
classique»,  sont  :  Tau  théâtre  de 
rOpéra-Comique ,  la  Nuit  espa- 
gnole. Este/le <■(  Nf'nwin,  Phanor 
et.  Angela,  Marcel,  leFruit  défen- 
flu,  Fanny  Morna;  2"  au  graml 
Opéra,  Léonldas  ou  les  Spartiates, 
le  Triomphe  de  Trajan,  la  Jéru- 
salem df^livrée.  On  lui  doit  en  ou- 
tre la  charmarUe  musique  des  bal- 
lets de  Nina,  de  l'Epreuve  villa- 
g-'oise,  et  partie  de  celle  du  Car- 
naval de  Venise.  En  1814,  il  com- 
posa le  chant  Vive  le  Roi ,  vive  la 
France!  qui  est  répété  dans  toutes 
les  fêtes  (le  circonstance.  II  faut 
aussi  lui  faire  honneur  de  la  remi- 
se du  Itei  opéra  des  Danaldes  qui 
avait  <lisparu  du  théâtre  depuis  3o 
ans.  et  au  grand  -uci  è>  duquel  il 
a  r  onlribué  par  le-)  chaugemens 
liijureux  qu'il  fit  dans  la  marche 
de  l'ouvrage,  du  cousontement  de 
l'auteur,  I  illustre  Saliéri.  Les  por- 
tes de  l'Institut  n'auraient  pas 
lardé  à  lui  être  ouverte-.  En  liài;-, 
s'élant  tnis  sur  les  rangs  pour  suc- 
céder à  >Uéhul  à  laclas<e  îles  beaux- 
arts,  il  crut  devoir  publier  dans  les 
journaux  pour  condjattre  des  insi- 
nuations malveillantes,  la  lettre 
<|ui  suit  :  Le.  Journal  du  Commer- 
s>ce,  en  énuuieranl  les  ouvrages 

t.   XVI. 


PER 


177 


«des  différcns  candidats  pour  la 
«classe  de  l'académie  royale  des 
»  beaux-arts  à  l'Institut,  a  réduit: 
!)  mes  compositions  <i  trois  ouvra- 
«ges,  dont  un  en  société.  Cette 
»  fausse  C)i)fiilence,  faite  avec  em- 
«pressemeul  au  public,  a  été  ac- 
»  compagnie  d'inductions  gratui- 
»  tement  injurieuses.  Je  ne  répon- 
ndrai  pas  à  ces  dernières;  maiscom- 
»  me  j'ai  eu  l'honneur  d'envoyer 
Ȉ  messieurs  les  membres  de  l'a- 
DCadémiedcs  beaux-arts  la  nomen- 
nclature  de  mes  ouvrages,  je  crois 
»de  mon  devoir  d'assurer  qu'elle 
»  contient  l'exacte  vérité.  »  Cette 
juste  réclam, ition  produisit  l'effet 
qu'il  devait  en  espérer.  Il  eut  la 
satisfaction  de  voir  beaucoup  de 
suffrages  se  réunir  en  sa  faveur  à 
l'élection  qui  eut  lieu  peu  de  mois 
avant  sa  mort,  arrivée  le  20  dé- 
cembre 1819. 

PliRTHUÏS  DELAILLEVAUT 
(LÉON  de),  ollicit-r  de  génie,  mem- 
bre de  la  société  d'agriculture  du  dé- 
])artement  de  la  Seine,  esc,  naquit 
àGermini-l'EvêquejprèsdeAleaux, 
département  de  Seine-et-iMarne , 
le  j  1  avril  1757.  Destiné  par  sa  fa- 
mille à  la  carrière  militaire,  il  fut 
élevé  à  l'école  de  Mézières,  où  se 
dévelop[)a  son  goût  pour  le  dessin 
et  la  mécanique.  Admis  en  «773 
dans  le  génie,  et  chargé  en  1778, 
avec  deux  autres  olïïciers  di;  soa 
arme,  de  la  construction  du  fort  de 
Cbâteauueuf,  qui  défend  la  ville 
de  Saint- Malo,  i)l,  de  Perthuis 
quitta  le  servicepeu  de  tempsavant 
la  révolution,  qu'il  Ira  versasans  ac- 
cident. Depuis  1791  il  s'était  retiré 
à  la  campagne,  où  il  s'occupait 
exclusivement  d'agronomie.  11  a 
néanmoins  exercé  pendant  12  ans 
les  fonctions  de  membre  du  con- 


1^8 


PES 


seil-général  du  département  de 
l'Yonne;  il  mourut  le  17  octobre 
1818.  M.  d»'.  Perthuis  n  coopéré  à 
l*édition  que  la  société  d'agricul- 
ture du  département  de  la  Seine 
a  donnée  des  ouvrages  d'Olivier  de 
Serres,  et  a  été  l'un  des  collabora- 
teurs du  Nouveau  Cours  complet 
d'Agriculture ,  publié  par  le  li- 
braire Déterville.  On  lui  doit:  i" 
Mémoire  tiré  du  Traité  de  la  con- 
servation et  de  L'aménagement  des 
forêts,  179g,  in-8";  2"  Traité  de 
l'aménagement  des  bois  et  forêts  de 
France,  ouvrage  rédigé  sur  les  no- 
tes et  observations  que  feu  IM.  de 
Perthuis,  le  père,  avait  l'ailes  dans 
le  cours  de  sa  vie,  i8o3,  in-8°;  5° 
Mémoire  sur  l'art  de  perfectionner 
les  constructions  rurales,  i8o5,  in- 
4",  couronné  par  la  société  d'a- 
griculture de  Pari^,  dont  il  devint 
membre  par  la  suite,  et  à  laquelle 
il  a  fait  un  grand  nombre  de  rap- 
ports; 4°  Mémoire  sur  l'améliora- 
tion des  prairies  naturelles  et  sur 
leur  irrigation,  i8o5,  itj-8%  avec  fi- 
gures, «  ouvrage  où,  dit  i\l.  deLas- 
»  te}  "ie,  on  reconnaît  im  auteur  qui 
»a  su  joindre  aux  notions  théori- 
»ques  celles  d'une  pratique  éclai- 
»  rée;  »  5°  Traité  d'architecture  ru- 
rate,   1810,  i»i-4°. 

PESGHE  (Jt'LiEN-REMi),  phar- 
macien, né  à  Souvigne,  dépar- 
tement de  la  Sarthe,  le  1"  oc- 
tobre i7«So,  abandonna  cette  pro- 
fession en  1818,  pour  publier  uu 
journal  au  Mans,  sous  le  titre  de 
l'Argus  deCOuest,  journal  desti- 
né à  propager  les  principes  cons- 
titutionnels dans  toute  cette  ré- 
gion de  la  France  ,  devenue  si 
célèbre  par  les  troubles  civils 
qui  long-temps  l'ont  signalée  à 
l'attention  publique.  Le  prospec- 
tus de  ce  journal;  répandu  duos 


PES 

ces  départemens,  y  excita  une  as- 
sez vive  sensation,  par  l'énergie 
et  la  rectitude  avec  lesquelles  les 
principe  s  constitution  iiels  y  étaient 
développés;  mais  les  obstacles  que 
l'on  apportait  déjii  à  l'établisse- 
ment des  f<uilles  libérales,  et  cens 
qu'on  employa  contre  la  puljlica- 
tion  de  l'Argus  de  l'Ouest  en  par- 
ticulier, fuient  invincibles  ])Our 
l'éditeur,  et  le  for(  èrent  à  renon- 
cer à  cette  pid>licaiion.  M.  Pes- 
chese  fixa  idors  à  Paris,  où  il  exer- 
ça la  librairie  pend. ml  plusieurs 
années,  et  toutes  ses  espérances 
de  pouvoir  drleiiilre  les  docliines 
constitutionuellts  lui  ayant  été 
ravies,  ain-i  qu'à  tant  d'autres  é- 
crivains,  il  s«!  décida  à  reprendre 
Texercice  de  la  (ibarmncie.  On  a 
de  lui,  dès  I79<),  un  grand  nom- 
bie  d'arliclrs  dans  le  journal  l' I n- 
dépendanl,  que  publiait  abus  leu 
Plancher  Volconel.el  d ms  leJour^ 
liai  du  département  de  la  S  art  lie; 
une  brochure  intitulée  :  Essai  sur 
les  bureaux  de  charité ,  à  l'occasion 
des  di.-elles  de  1812  et  de  1817,  le 
Mans.  1817,  in-8',  4'J  pages;  son 
prospectus  de  l'Argus  de  l  Ouest, 
et  le  numéro  dernier  de  ce  jour- 
nal, qui  en  est  eu  iiiêine  temps 
le  premier  nmnéro,  et  d.nis  lequel 
il  lait  connaître  les  obstacles  qui 
l'ontempêché  d'exécuter  cette  en- 
treprise; plusieiiis  .irlicles  dans 
le  Journal  général  de  la  Société  de 
Médecine^  dans  le  Bulletin  et  dans 
le  Journal  de  Pharmacie.  M.  Pes- 
che  a  aussi  publié  des  Chansons 
dans  les  Saisons  lyriques ,  recueil 
pour  le  1"  janvier  1821,  et  dont 
il  est  l'éditeur,  etc.,  etc. 

PESCHELOCHE  (Joseph- 
Louis),  colonel  du  i5'  régiment 
de  dragons,  olUcier  de  la  légion- 
d'hoaueur^   naquit   le    19    aot^t 


PES 

1761  ,  à  Besançon  ,  départe- 
inenl  du  Doubs  ,  d'une  famil- 
le estimable,  et  reçut  une  bon- 
ne éducation.  Il  embrassa  par 
goût  la  profession  des  armes,  et 
entra  comme  simple  soldat  dans 
le  régiment  de  Flandres,  le  00 
juin  ijôîS.  Fait  capcu-al  eu  1770, 
il  n'avait  encore  que  ce  grade  en 
177a,  lorsqu'il  obtint,  par  faveur, 
son  congé,  afin  de  suivre  la  car- 
rière du  barreau  pour  obéir  au 
vœu  de  son  père.  Le.  jeune  Pes- 
cheloche  apporta  une  grande  ap- 
plication à  l'étude  des  lois.  Reçu 
avocat,  il  aimait  à  consacrer  plus 
particulièrement  ses  soins  et  ses 
talcns  à  ses  cliens  les  plus  pau- 
vres, et  sou  excellent  cœur  met- 
tait au  premier  rang  la  veuve  et 
l'orphelin.  Dès  l'aurore  de  la  ré- 
volution, il  se  fit  connaître  com- 
me un  de  >es  plus  fidèles,  et  en 
même  temps  de  ses  plus  sages  dé- 
fenseurs. Le  1"  septembre  1789, 
il  fut  noimné  aide-major  de  la 
garde  nation.de  de  Paris,  où  de- 
puis long-temps  il  s'était  fixé. 
L'assemblée  constituante  l'envoya, 
en  celte  qualité,  à  Nancy,  pour  y 
rétablir  l'ordre.  Il  était  capitaine 
de  la  00'  division  de  la  gendar- 
intîrie  lorsqu'il  se  rendit  à  l'armée, 
qui  bientôt  marcha  sur  Trêves; 
recourut  Valencicnnes  et  Lille, 
et  pénétra  dans  le  Brabant.  Tou- 
jours à  l'avant-garde ,  il  fut  sur- 
nommé par  ses  camarades  Vln- 
trépide.  Pescheloche  passa  suc- 
cessivement adjoint  aux  adjudans- 
généraux ,  et  adjudant  en  chef. 
Le  général  Joubert  le  chargea 
d'une  mission  de  confiance  et  d'u- 
ne grande  importance  dans  l'in- 
térêt des  Hollandais.  Il  justifia 
la  préférence  dont  il  avait  été  l'ob- 


PES 


»79 


jet,  et  son  général  se  plut  à  lui 
donner  souvent  des  marques  de 
son  estime.  Cet  officier  supérieur 
reçut  peu  de  temps  après  le  com- 
mandement en  chef  de  Bois-!e- 
Duc,  et  une  nouvelle  mission  pour 
Londres,  où  il  sut  faire  aimer 
et  respecter  le  caractère  français. 
Un  succès  entier  couronna  son 
zèle  et  son  adresse  ;  le  14  prai- 
rial an  7,  Pescheloche  fut  nommé 
chef  d'escadron,  et  adjoint  au  \" 
régiment  de  cavalerie,  dont  il  de- 
vint titulaire  le  8  pluviôse  an  11. 
Le  6  brumaire  de  l'année  sui- 
vante, il  reçut  sa  nomination 
comme  major  du  i5'  régiment 
de  dragons.  Conservant  le  beau 
surnom  d'Intrépide ,  que  ses  ca- 
inarades  lu  i  avaient  précédemment 
décerné,  il  se  montra  dans  toutes 
les  campagnes,  dans  toutes  les  af- 
faires, bravo,  infatigable,  et  plein 
de  talens.  Ce  fut  à  la  bataille 
d'Austerlitz  qu'il  se  signala  plus 
particulièrement,  et  qu'il  termina 
glorieusement  sa  carrière.  Dans 
cette  affaire  mémorable ,  après 
avoir  chargé  à  la  tête  de  son  régi- 
ment avec  la  plus  grande  intrépi- 
dité, et  mis  en  pièces  une  colonne 
de  4>ooo  hommes,  il  est  griève- 
ment blessé  au  genou.  Sou  cou- 
rage n'en  est  point  ralenti,  et  il 
continue  à  prendre  part  à  la  ba- 
taille. La  victoire  était  aux  dra- 
peaux français.  «  Son  casque  brisé, 
))dit  un  historien  ,  son  sabre  cas- 
»  se,  sa  blessure  ouverte,  attestaient 
«ses  travaux  :  il  entre  dans  un 
»  village  pour  en  chasser  quelques 
«hullaus  qui  s'y  défendaient  enco- 
«re.  Là,  un  coup  de  pistolet  à  bout 
«portant,  lui  donne  la  mort;  il 
«tombe  entre  les  bras  de  ses  dra- 
»g0Ds;  il  s'écrie  :  iY^  vous  arrêtez 


î8o 


PES 


»  pas,  vies  aîïiis!  chargez,  nous  som- 
nmes  vainqueurs!  Il  expire.  Le 
Minot  vainqueur  fui  le  dernier 
«qui  sortit  de  sa  bouche. «Pesclie- 
Inclie  avilit  été  nommé  colonel  la 
veille  même  de  <a  mort.  Lorsque 
le  grand- duc  de  Bergf  (Joacliim 
iMurat,  depuis  roi  de  Naples)  ap- 
prit la  perle  de  ce  brave,  il  dit  avec 
douleur  :  «  C'est  une  grande  et 
>■>  funeste  perte  que  celle  du  colonel 
nPcscheloche.  wCesparolcs  valent 
tout  une  oraison  funèbre. 

PESSUTI  (JoAcniM),  malhé- 
malicien  italien,  naquit  à  Piome 
en  1743'  I'  ^^^  ^^^  progrès  rapides 
dans  les  sciences  exactes, pour  les- 
<iuelles  il  annonça  de  bonne  heu- 
re un  penchant  décidé;  il  les  en- 
seijj;nait  aux  autres  avant  d'avoir 
cessé  de  les  apprendre  lui-même; 
la  clarté, la  méthode, et  la  précision 
avec   lesquelles  il  communiquait 
ses  idées,  lui  acquirent  une  telle 
célébrité,  qu'il  reçut  l'invitation, 
bien  flatleusc  pour  un  jeune  sa- 
vant, d'aller  occuper  une  chaire 
de  mathématiques  au  collège  des 
cadets  à  Pétersbourg.  Sa  santé  ne 
lui  permit  pas  de  s'y  fixer,  mais 
il  en  revint  honoré  de  l'amour  de 
ses  élèves  et  de  l'amitié  du  grand 
Euler,  qui  avait  su   deviner  son 
niérile.  Avant  de  rentrer  dans  sa 
patrie,  il  voulut  visiter  la  capitale 
de  la  France,  où  il  eut  occasion 
de  contiaître  la  plupart  d«s  grands 
hommet»  du    siècle  dernier;    s'é- 
taul  plus  particulièrement  rappro- 
ché de  d'Alemberl  et  de  Condor- 
cet,  ils  le  prirent  eu  aiTt-ction,  et 
Pessuli    resta  en  (•orre'<po'<d;ince 
suivie  avt'c  eux.  De  retour  à  Ro- 
me, il  fut  nommé  à  l'univer^-ilé 
de  laSàpienza,  profes-*eur  des  ma- 
thémafliques  appliquées,  et  devint 


PES 

d'abord  le  collègue  et  ensuite  le 
successeur   du    célèbre    BiaU' oui 
dans  la   rédaction  de  tleux  jour- 
naux liltcraires;  donnant  ainsi  le 
spectacle  peu  commun  d'im  bon 
litléraleur  el  d'un  grand  mathé- 
maticien  réunis    dans    la   même 
personiie.  11  eut  uxw.  dispute  avec 
le  comte  Riccati  au  sujet  de  ses 
institutions  analytiques, donl  Pes- 
.-uti  releva  plusieurs  erreurs  ;  mais 
il  différa  de  répondre  à  la  rénliijue 
de  l'auteur  afin  de  ne  pas  aflliger  le 
cœur  d'un  vieillard  pour  lequel  il 
avait  la   plus  grande  vénération. 
Pessuli  appartenait  à  plusieurs  so- 
ciétés  savantes  ;   ses   con(  itoyens 
le  nommèrent  l'iui  des  consuls  de 
la  nouvelle  république  romaine, 
qu'il  aurait  voulu  voir  s'éb'ver  à 
la  grandeur  de  l'ancienne,  etd.iut 
il  fut  condaumé  à  voir  la  chute. 
Il  rentra  alors  sans  regret  dans  le 
cercle  de  ses  habitudes,  et  mou- 
rut le  20  octobre   iSi'i.  Ses  ou- 
vrages sont  :  i'  R^flessioni  anali- 
tiche  sopra  una  lettera  di  Riccati, 
Rome,  1777  :  c'est  la  réponse  à 
Riccati,  qui  ne  parut  qu'après  sa 
mort;  2"  S  alla  teoria  délie  trombe 
idrauliclte;  5"  SuUa  legge  délie  ve- 
locità  deir   acfua  provenietue  da' 
picfioU  fori  de'  vasi,  dau:^  le  même 
volume,  ibid.,  17S9;  4°  Sopra  la 
teoria  e  la  pratica  del  livello  Uge- 
îiiano,  ibid.,i79/i;  5"  Sal  inaneg- 
gio    ed   usi    del  Teodolilo ,   ibid., 
1794  ;  6"  Mcmoria  per  dt'terminare 
le  occaltdzioui  délie  slelle  fisse  die- 
tro  il  disco  Innare,  ibirl.,  1802;  7* 
Niwve  considerazioni  su  di  alciine 
sirigolari  proprieià   délia   formola 
del  binomio  di  Nruton ,   dans  le 
tome  XI  des  Jjtlémoires  de  la  so- 
ciété il.dieime;  8°  Considerazioni 
sopra  un probicma  meccanico,[h\d., 


PES 

tome  XIII;  9'  Metodo  d'approssi- 
viazione  per  In  risoluzione  numeri- 
cn  d'ogiii  snrta  d'equazioni,  il)i<l.; 
i«»*  Teoria  dell'  azione  de'  tubi  ca- 
pillari,  ihirl.,  tome  XIV;  W'Nuo- 
vo  metodo  délia  trigoiwmetria  sfe- 
rica,  ibid.,  tome  XV;  12  Tratla- 
to  xiille  fanzioni  derioate  ed  alcune 
nnnotazioni  alla  meccanica  céleste 
di  Laplace,  inédit. 

PESTA LOZ/J  ou  PESTA LUZ 
(Hesri),  écrivain  tlistidj-ué  et 
philosophe-pratique,  devenu  non 
moins  célèbre  que  recommanda- 
ble  par  «a  nouvelle  méthode  pour 
l'instruction  de  la  jeunesse,  est 
né  à  Zurich,  le  12  janvier  i745> 
d'une  ancienne  {'amille  patricienne 
de  cette  ville.  Orphelin  dès  l'en- 
fance, et  ses  parens  ne  lui  ayant 
point  laissé  de  fortune  ,  il  se  trou- 
va de  bonne  heu;>;,réduit  ;\  la  né- 
cessité de  subvenir  par  lui-même 
à  ses  besoins,  et  loin  de  se  laisser 
abattre  par  la  rigueur  du  sort,  il 
se  livra  dès  sa  jeimesse  aux  tra- 
vaux les  plus  assidus.  Doué  d'un 
esprit  à  la  fois  actif  et  réfléchi  et 
d'un  toeur  sensible,  étranger  à 
toute  espèce  de  frivolité,  il  s'oc- 
cupa pendant  sa  vie  entière,  non- 
seulement  de  son  propre  bien- 
être,  mais  de  tout  ce  qui  pouvait 
contribuer  au  bonheur  de  ses  sem- 
blables. Après  avoir  pourvu  par 
de  solides  études  à  son  instruc- 
tion, il  reconnut  combien  celle 
du  peuple  était  négligée,  même 
dans  l'état  républicain,  où  le  ha- 
sard l'avait  fuit  naître.  PestalozzP 
se  trouva  bientôt  entraîné  p.ir  un 
penchant  irrésistible  vers  les  fonc- 
tions d'instituteur  populaire.  II 
avait  achevé  avec  succès  quelques 
éducation^  de  jeimes  gens,  que 
leurs  parena  lui  avaient  confiées, 


PES 


t8j 


et  pendiint  le  cours  desquelles  il 
avait  encore  étendu  ses  pmpres 
idées,  et  formé  un  plan  nouveau 
pour  l'amélioration   du  sort   des 
indigens,  basée  sur  le  développe- 
ment des  facultés  morales  et  in- 
tellectuelles des  habilans  des  cam- 
pagnes. On  rapporte  que  ce   fut 
dans  une  contrée  aride  du  canton 
de  Berne,  sur  le  Birrfeld,  où  Pes- 
talozzi ,    avec  un  de   ses  élèves , 
habitait  la  campagne  de  Ncuenhof, 
qu'il  eut  d  abord  le  spectacle  affli- 
geant d'une  population  encore  as- 
sez noin'oreuse,  mais  accablée  de 
misère,  et  livrée  à  tous  les  maux 
que  produisent  la  plus  profonde 
ignorance  et  le  défaut  de  toute  in- 
dustrie. C'est  là  qu'il  connut  l'idée 
d'un  ouvrage  à  la  portée  des  der- 
nières classes  de  la  société,  et  qui 
obtint  du  succès  même  parmi  les 
plus  élevées;  c'est  une  espèce  de 
roman,  i^ititulé  Lienhard  et  Gcr- 
trude,  qui  fut  d'abord  iujprimé  à 
Léipsick ,    1781-1^87,  ensuite    à 
Zurich,  1791-1792,  qui  a  eu  plu- 
sieurs éditions,   et  qui  a  été  tra- 
duit dans  presque  toutes  les  lan- 
gues. Il  n'est  peut-être  aucun  livre 
où  l'heureuse  influence  de  la  pro- 
bité, de  l'amour  de  l'ordre  et  du 
travail,  de  la  piété  sans  supersti- 
tion, et  d'une  bienfaisance  éclai- 
rée, ait  été  présentée  au  peuple 
avec    autant    de    clarté   et  d'une 
manière  plus  persuasive  ;  tout  y 
inspire  des   affections   douces   et 
r.'unour  de  la  vertu.  Les  intrigues 
cl  les  vexations  subalternes  dont 
les  pauvres  habitant  des  campa- 
gnes sont  si  souvent  les  victimes, 
s'y  trouvent  aussi  détaillées  ,   et 
le  tableau  est  frappant  de  vérité. 
Cet  ouvrage  devint  bientôt  popu- 
laire en  Suisse  et  dans  toute  VAX- 


tSa 


PES 


lemagne.  Pestalozzi  fut  puissam- 
ment secondé  dans  tous  ses  pro- 
jets philantropiques  par  un  riche 
propriétaire  bernois ,  M.  ïschar- 
ner,  bailli  de  Wildenslein ,  dont 
il  s'est  plu  à  retracer  le  noble  ca- 
ractère dans  son  roman ,  sous  le 
nom  à' Amer.  Encouragé^  par  cet 
administrateur  éclairé  et  par  les 
suffrages  de  ses  concitoyens,  à 
poursuivre  la  carrière  littéraire  à 
laquelle  il  ne  s'était  pas  d'abord 
destiné,  mais  où  il  se  distingua 
constamment  depuis  par  l'énergie 
et  la  noblesse  de  ses  sentimens , 
Pestalozzi  composa  un  grand  nom- 
bre d'ouvrages  dans  le  même  es- 
prit. 11  employa  tous  ses  moyens 
à  éclairer  les  gouvernemens  et  les 
peuples  sur  leurs  devoirs  récipro- 
ques; il  publia,  en  1781,  un  écrit 
sur  les  lois  somptunires ,  Bille ,  1 
vol.  in-S";  sur  la  législation  et 
l'infanticide,  1781  et  1^83;  une 
feuille  hebdomadaire  pour  les  cam- 
pagnes, dont  les  livraisons  réunies 
forment  a  vol.  in-8°,  Dessaii  , 
1 782  ;  Lecture  de  Lienkard  et  Ger- 
trude  ,  faite  par  Christophe  et 
Elise ,  et  leurs  remarques  pendant 
la  lecture,  Dessau,  2  vol.  in-8° , 
1782;  Lettres  sur  l'éducation  des 
enfans  de  parens  indigens ,  insé- 
rées dans  les  Éphémérides  de  l'hu- 
manité, par  le  chancelier  de  la 
république  de  Bâie,  M.  Iselin  ; 
mes  Réflexions  sur  la  marche  de 
la  nature,  dans  le  développement 
^l'éducation)  de  l'espèce  humaine, 
Zurich,  1797,  1  vol.  in-8°;  Images 
pour  mon  Abécédaire,  ou  Elémens 
de  logique  pour  mon  usage,  Bûle , 
1797,  *  ^^^'  ''i"8°'  C'est  un  re- 
cueil de  fables  plus  ou  moins  in- 
génieuses, dont  la  moralité  offre 
une  maxime  ou  une  satire  poli- 


PES 

tique.  Après  la  révolution  qui  s'é- 
tait opérée  en  Suisse  par  suite  de 
l'invasion  française,  en  1798, 
lorsque  les  conseils  helvétiques 
furent  convoqués  à  Arau  ,  il  leur 
adressa  des  Réflexions  sur  les  be- 
soins de  la  patrie ,  principalement 
sur  l'éducation  et  le  soulagement 
des  pauvres ,  et  publia,  la  même 
année,  un  écrit  sur  les  droits  féo- 
daux. Il  fut,  à  cette  époque, 
chargé  de  la  rédaction  d'un  ou- 
vrage périodique,  que  le  ministre 
de  l'instruction  publique  faisait 
imprimer,  sous  le  litre  de  Feuille 
helvétique  à  l' usage  du  peuple,  et 
qui  était  destinée  à  calmer  l'effer- 
vescence ultrà-révolutionnaire,  à 
ramener  les  esprits  vers  des  idées 
d'ordre,  et  à  faire  renaître  la  con- 
fiance et  l'union  parmi  les  ci- 
toyens. Le  gouvernement  helvé- 
tique venait  d'établir  une  maison 
d'orphelins  àStantz,  dans  le  can- 
ton d'Underwald,  et  en  nomma 
Pestalozzi  directeur,  en  1799.  Les 
fonds  consacrés  à  cet  établissement 
étaient  peu  considérables,  et  se 
trouvèrentbientôtinsulïîsans  pour 
entretenir  une  foule  d'enfans,  dont 
les  parens  avaient  péri  du  s'étaient 
dispersés  pendant  la  guerre  san- 
glante dont  ce  pays  venait  d'être 
le  théâtre.  L'ardente  philantropie 
de  Pestalozzi  parvint  à  pourvoir 
aux  plus  pressans  besoins,  et  il  se 
fit  à  la  fois  instituteur,  économe 
et  pourvoyeur  de  cet  établisse- 
scment.  Parmi  les  infortunés  qu'il 
y  recueillit,  il  se  trouvait  un  assez 
grand  nombre  d'enfans  abandon- 
nés depuis  quelque  temps  dans 
ces  montagnes,  et  qui,  devenus 
à  moitié  sauvages,  étaient  livrés 
au  brigandage  et  aux  vices.  Pour 
ces  êtres  dégradés ,  le  plus  léger 


PES 

travail  et  les  rèples  les  moins 
austères  parurent  d'abord  une  su- 
jétion odieuse.  Les  écrits  de  Pes- 
lalozzi  développent  par  quels  pro- 
diges de  douceur  et  de  patience  il 
parvint  enûn  à  gagner  le  cœur  de 
cette  jeunesse  luibnlente  :  elle 
apprit  à  voir  en  lui ,  non  un  maître 
sévère,  mais  l'atni  le  plus  dévoué, 
et  bientôt  l'exemple  de  ses  vertus 
opéra  un  ebangement  si  complet, 
que  le  désir  d'épargner  des  ch:)- 
grins  à  leur  ami ,  fit  régner  parmi 
ses  élèves  l'ordre  et  la  régularité, 
leurs  mœurs  adoucies,  il  s'oc- 
cupa avec  non  moins  de  succès  de 
leur  instruction.  C'est  au  milieu 
d'eux  qu'il  fixa  ses  idées  et  per- 
fectionna sa  méthode  nouvelle 
pour  l'éducation  de  la  jeunesse. 
Après  la  dissolution  de  l'établis- 
sement de  Stantz,  le  gouverne- 
ment cantonal  de  Berne  donna  à 
Pestalozzi  b'S  moyens  de  généra- 
liser sa  méthode,  et  le  ministre 
de  rinstruttion  publique  lui  fit 
concéder  le  château  de  Berthond 
(Burgdorf),  à  quatre  lieues  de 
Berne,  où  il  établit  un  grand  pen- 
sionnat. On  s'empressa  de  toutes 
parts  à  lui  envoyer  des  élèves,  et 
le  nombre  en  devint  bientôt  si 
considérable,  qu'il  l'ut  obligé  de 
chercher  un  local  plus  vaste.  Il 
transporta  alors  son  établissement 
au  chraeau  d'Yverdun,  dont  la 
jouissance  lui  fut  abandonnée  par 
le  gouvernement  du  canton  de 
Vaud.  Sa  belle  institution  y  fleurit 
encore,  et  il  s'est  vu  dans  la  né- 
cessité de  séparer  ses  élèves,  trop 
nombreux ,  et  d'en  placer  une 
partie  dans  la  succursale  qu'il  a 
fondée  à  Buchsée,  dans  le  canton 
de  Berne.  Il  eut  un  moment  l'idée 
de  se  réunir  à  son  ami  M.  Fellen* 


PES 


i85 


berg  (voy.  ce  nom  ) ,  mais  on  lui 
filcraindrequeson  institution  d'Y- 
verdun ne  devînt  alors  à  son  tour 
une  simple  succursale  d'Hofwyl, 
et  la  fusion  des  deux  établisse- 
mens  n'eut  point  lieu.  Plusieur» 
écrivains,  MM.  Amaury-Duval, 
Chavannes,  Jullien,  Raymond, 
etc.  ,  ont  rendu  compte  de  la 
méthode  de  Pestalozzi.  La  diète 
helvétique,  de  son  côté  ,  a  nom- 
mé une  commission  pour  exami- 
ner ses  élablissemens.  L'abbé  Gi- 
rard de  Fribourg,  un  des  mem- 
bres de  cette  commission ,  a  ré- 
digé le  rapport  publié  en  )8o5.  Il 
en  résulte  :  «  que  le  système  de 
»  Pestalozzi  consiste  bien  moins  à 
«rendre  un  élève  éminemment 
«propre  ;\  l'exercice  de  telle  ou 
»  telle  profession,  qu'A  le  disposer, 
»par  une  marche  lente,  ralion- 
«nelle  et  sûre,  exempte  de  toute 
•)  routine  conmie  de  tout  charla- 
Dtanisme,  et  bisée  sur  la  marche 
«que  suit  la  nature  elle-même, 
«à  pouvoir  développer  dans  une 
«partie  quelconque  les  facultés 
«qu'il  a  repues  en  nai-^sant,  et 
«dont  l'instituteur  s'attache  A  tirer 
«le  plus  grand  jiarli  possible,  en 
«lui  formant  un  jugement  sain, 
«et  en  lui  donnant  celte  justesse 
«d'esprit  si  précieuse  quand  elle 
«est  jointe  à  la  droiture  du  cœur.  » 
En  i8o3,  le  canton  de  Zurich 
avait  nommé  Pestalozzi  membre 
de  la  consulte  lielvi'tique  que  Na- 
poléon appela  à  Paris,  pour  s'y 
concerter  avec  elle  sur  les  modi- 
fications que  les  anciennes  insti- 
tutions de  la  Suisse  pouvaient 
subir,  et  que  demand. tient  en 
grande  majorité  les  citoyens  de 
celle  république.  Mais  le  chef  de 
l'institutioD    d'Yverdun    ne    put 


i84 


PES 


rçster  long-temps  éloigné  de  ses 
élèves  ;  le  séjour  de  la  France 
n'avait  nul  attrait  pour  lui,  et 
après  avoir  exprimé  brièven)cnt 
ses  avis  sur  les  principaux  objets 
«n  discussion ,  il  quitta  l'assem- 
blée avant  la  clôture  de  ses  ses- 
sions, pour  aller  rendre  ses  soins 
à  ses  enfans.  Il  n  publié  depuis  un 
grand  nombre  d'écrits  sur  sa  mé- 
thode,  soit  seul,  soit  en  société 
avec  ses  collaborateurs.  Son  der- 
nier ouvrage  ,  intitulé  Conseils 
adressés  à  mes  contemporains,  se 
fait  remarquer,  comme  les  précè- 
dent, par  une  foule  d'idées  non- 
seulement  ingénieuses  et  neuves, 
mais  éminemment  utiles  et  d'une 
application  aisée;  peut-être  y  dé- 
sirerait-on un  style  mieux  sou- 
tenu, des  transî-lions  moins  brus- 
ques ,  une  liaison  plus  claire  et 
plus  intime  entre  les  diverses  par- 
ties, qui  en  coordonnât  parlaitt- 
ment  le  tout.  Parvenu  à  un  âge 
très-avancé,  Peslalozzi,  qui  a  tant 
fait  pour  les  autres ,  ne  s'est  ja- 
mais occupé  de  ses  intérêts  ;  il  a 
vécu  avec  ses  élèves,  et  n'a  point 
de  fortune  à  lui.  Les  souverains 
du  nord  ont  généreusemenl  sous- 
critpourun  grand  nombre  d'exem- 
plaires de  la  coHeciion  complète 
de  s<"-  œuvres.  Cet  exemple  sera 
sans  doute  suivi  par  plusieurs  pè- 
res de  famille,  et  par  les  jeunes 
gpns  devenus  hommes  sous  sa  di- 
rection. 11  faut  espérer  que  le  pro- 
duit de  cette  publication  suifira 
pour  assurer  ini  repos  honorable 
à  la  vieillesse  du  sage  d'Yverdun. 
L'empereur  de  Russie  l'a  décoré 
de  l'ordre  de  Saint -AiVladimir. 
Pestalozzi  a  vécu  assez  long-temps 
pour  jouir  au  moins  de  l'avan- 
tage de  voir  naturaliser  son  sys- 


PES 

tème   d'éducation  dans  plusieurs 
pays  (le  l'Europe. 

PESTEL  (Frédéric-Guillau- 
me), célèbre  professeur  de  droit 
public,  né  à  Kinteln,  petite  ville 
de  la  \N'est|>halie,  eu  172^,  se  fit 
connaître  dès  sa  jeunes-e  par  plu- 
sieurs ouvrages  estimés,  p.u'n>i 
lesquels  on  cite  pâlit  ulièrement 
ses  observations  savante^  sur  Ta- 
cite. En  1765,  il  fut  appelé  à  l'u- 
niversité de  Leyde  pour  y  occu- 
per la  chaire  du  droit  public, 
en  remplacement  du  professeur 
Weiss,  et  il  entra  en  fonctions,  le 
16  mai  de  cette  année,  par  un  dis- 
cours qui  obtint  le  plus  grand  suc- 
cès ,  De  damnis  ex  neglectii  juris 
puhlici  in  civilules  redundantihus. 
Sa  réputation  s'étendit  bientôt  au 
loin,  et  Ton  v  it  afïluer  de  toutes  les 
parties  de  l'Europe  mie  foule  d'é- 
tudians  qui  se  rendaient  à  Leyde, 
}»rincipalement  pour  suivre  les 
cours  du  professeur  Pestel.  Il  pu- 
blia, en  i^r5,  la  preu)ière  édition 
d'un  ouvrage,  accueilli  non-seu- 
lement par  ses  nombreux  disci- 
ples, à  l'usage  desquels  il  était 
principalement  utile,  mais  par  les 
savans  de  tous  les  pays  :il  est  in- 
titulé Fundamenta  jurispradenliœ 
nataralis  delineata  in  usuni  audito- 
runij  un  vol.  grand  in-8",  traduit  en 
français  (1795),  en  allemand,  et 
en  hollandais.  Ce  livre ,  monu- 
ment durable  de  l'esprit  philoso- 
phique ,  du  talent  d'analyse ,  et 
de  la  vaste  érudition  de  son  au- 
teur, a  eu  plusieurs  éditions,  dont 
la  4'  ^  i>avu  en  1788  avec  des 
augmentations  considérables.  Pes- 
tel publia,  en  1782,  ses  commeii- 
tarii  de  republicâ  Baluvâ,  en  un 
vol.  10-8°,  augmentés  et  portés, 
en  1798,  dans  une  nouvelle  édi- 


PET 

tion  à  3  vol.  in-8».  C'est  un  des 
meilleurs  ouvrages  qui  iiitMit  paru 
^ur  l'histoire,  la  statistique,  et  le 
droit  public,  de  la  république  des 
Provinces-Unies. La  révolution  de 
1795  priva  momentanénicut  Pes- 
tel  (le  sa  chaire.  Ses  opinions  po- 
litiques ne  l'arurenl  point,  à  cette 
époque,  en  harmonie  avec  ce'les 
des  goiiveruaus  du  jour,  et  Tu- 
niveisilé  de  Leyde  perdit  en  mê- 
me temps  un  de  ses  plus  habiles 
professeurs  et  une  foule  d'élè\es. 
11  se  relira  alors  en  Allemagne,  sa 
patrie,  et  eut  pour  successeur  M. 
Jean  ^Valckenaiir,  fils  du  célèlire 
lielléniste  de  ce  nom.  En  1 8o5, 
cette  injustice  fut  réparée,  llappe- 
lé  ;\  Leyde  et  rétabli  dans  ses  di- 
gnités, Pestel  se  livra  avec  le  mê- 
me succès  à  renseignement  pu- 
blic, mais  l'université  ne  joiiil  pas 
long-temps  des  talens  de  ce  su- 
vaut  recommandable,  qui  mourut 
en  i8o5.  Son  éloge  l'ut  prononcé, 
la  même  année,  par  le  professeur 
Tewater  dans  l'asseuïblée  de  la 
société  de  littérature  de  Leyde. 
Outre  les  ouvrages  déjù  cités,  Pes- 
tel a  publié:  1°  Oratio  de  Liltera- 
rum  Sludiis  florenlibus  pro  eo  quo 
a  populorum  recloribus  rohonoraii- 
tur,  prctio,  Leyde,  1775,  iu-4°; 
•2'  Oralio  de  differentiis  prœcipuis 
in  veteri  et  recentiori  getitium  Eu  ■ 
ropœarum  potiticâ,  Leyde,  1778, 
in-4";  3"  Oratio  de  fructibus  qui 
ex  jiiris prudeutiâ  perfcctiori  ad  po- 
pulos Europceos  seculo  XVI II 
peroenerurit ,  Levde,  178»),  in-4°. 
PETAGNA  (Vincent),  méde- 
cin et  botaniste  italien,  naquit  en 
i73'j,  à  Naples.  Il  fut  élevé  chez. 
les  jésuites,  et  étudia  ensuite  la 
médecine  ,  profession  pour  la- 
quelle il  s'était  décidé.  En  1770, 


PET 


i85 


s'étant  attaché  au  prince  de  Kau- 
iiitz,  ministre  d'Autriche  à  la  cour 
de  Naples,  il  le  suivit  en  Italie  et 
en  Allemagne  ,  étudiant  partout 
la  nature  ,  et  se  mettant  en  rela- 
tion avec  les  savans  nationaux  et 
étrangers.  De  retour  dans  sa  pa- 
trie, il  s'occupa  de  mettre  en  or- 
dre ses  collections  d'histoire  natu- 
relle, surtout  celle  des  insectes, 
qu'il  avait  beaucoup  augmentée 
dans  ses  voyages.  Dans  une  ex- 
cursion qu'il  fit  en  Sicile,  il  exa- 
mina les  productions  d'une  île 
peu  explorée  dans  les  temps  mo- 
dernes, et  dont  il  fit  connaître 
plusieurs  richesses.  Ses  travaux 
lui  méritèrent  la  place  de  profes- 
seur de  bolani(|ue  à  l'univï-rsité 
de  Naples,  »;t  de  membre  de  plu- 
sieurs corps  savaus,  entre  autres, 
de  la  société  royale  de  Londr.\s,de 
celle  de  Florence,  etc.  Il  mou  rut  à 
Naples,  le 6  octobre  1810.  Sesou- 
vraj^es  s(uit  :  l' Institutiones  bota- 
iiicœ,  Naples,  1785,  5  vol.  in-8", 
(ig.  :  le  premier  volume  s<;rt  d'in- 
troduction à  l'ttuvrage,  et  l'auteur 
y  expose  les  différeiis  systèmes  des 
plus  illustres  botanistes  moder- 
nes; les  (juatre  autres  contien- 
nent la  description  des  plantes; 
2°  Spécimen  inscrtorum  Calabriœ 
ulferioris/iWid.  ,  1780,  iu-4".  fig.  , 
réimprimé  à  Utrecht;  3"  Iiistilu- 
iiones  cntomologicœ,  ibid.  ,  i7î)0, 
a  vol.  in -8",  fig.:  l'auteur  s'est 
borné  à  la  description  des  insectes 
de  l'Europe,  en  s'étendant  un  peu 
davantage  sur  ceux  du  royaume 
de  Naples  ;  il  a  beaucoup  profité 
de  la  philosophie  entomologi(iue 
de  Fabricius.  4"  Dclle  Facollà  délie 
piatile,  ibid.,  1797,5  vol.  in-S": 
c'est  un  traité  dans  lequel  sont  dé- 
taillées les  qualités  tuédicale.s  de« 


i86 


PÉT 


plantes,  et  leur  usage  dans  la  méde- 
cine et  l'économie  Hfiine>li(|iie. 

PÉTHION  (Alexandre),  pré- 
sident de  la  république  d'Haïli, 
né  au  Port-au-Prince  (Saint-Do- 
mingue), le  2  avril  1770.  Son 
père  étnit  un  colon  européen , 
nommé  Sabès,  qui  jonissait  d'une 
fortune  assez  considérable  dans 
J'île,  et  sa  mère  une  mulâtresse 
libre.  Leur  fils,  quoique  homme 
de  couleur,  ne  connut  jamais 
les  liens  de  l'esclavage;  il  reçut 
une  éducation  libérale,  et  fut  dès 
son  enfance  l'objet  des  plus  ten- 
dres soins  de  son  père.  Le  nom 
dePéthion,  qu'il  devait  illuslrer 
un  jour,  était  un  de  ces  sobri- 
quets d'enfance  que  les  mères 
se  plaisaient  à  donner  à  leurs  fils. 
On  a  faussement  avancé  qu'il  l'a- 
vait pris  pour  avoir  quelque  cho- 
se de  commun  avec  le  u)aire  de 
Paris  {voy.  Pétion  de  Villeneuve), 
dont  l'existence  même  était  alors 
entièrement  inconnue  à  Saint-Do- 
mingue. A  peine  5gé  de  20  ans, 
Péthion  fut  un  des  premiers  qui 
prirent  les  armes  lorsque  les  trou- 
bles de  la  métropole  se  propagè- 
rent d'une  manière  si  effrayante 
dans  sa  plus  riche  colonie.  Il  se  dis- 
tingua bientôt  non-seulement  par 
des  talens  et  par  la  plus  brillante 
valeur,  mais  par  des  qualités  en- 
core plus  rares  à  une  époque  de 
dévastation  et  de  carnage,  par  sa 
bienfaisanceet  son  humanité.  Tou- 
jours sensible  à  l'infortune  de 
ses  semblables,  de  quelque  cou- 
leur et  de  quelque  parti  qu'ils 
fussent,  il  leur  tendait  une  main 
secourable,  et  adoucit,  autant  qu'il 
dépendait  de  lui ,  les  horreurs  de 
la  guerre  civile.  Plusieurs  colons 
blancs  lui  durent  la  vie.  Péthion 


PÉT 

remplissait  les  fonctions  d'adju- 
d.nit-géuéral  quand  lesAnglais  é- 
vacuèrent  la  colonie  de  St. -Don lin- 
gue en  1798.  Le  nègre  Toussaint- 
Lou  vertu  re(roj.LorvEBTXJRE),  sous 
le  titre  de  général  en  chef,  s'était 
emparé  du  pouvoir  absolu  ,  et  a- 
Viiit  résolu  de  secouer  le  joug  de 
la  France.  Les  hommes  de  cou- 
leur, nés  des  Français,  lui  étaient 
tous  suspects,  et  après  avoir  ex- 
terminé lus  blancs,  il  s'essayait  à 
étendre  la  proscription  sur  les 
miilâlres.  Le  général  Rigaud , 
homme  de  •■ouleur  lui-même,  se- 
condé par  Pélhion,  s'opposa  avec 
courage  à  Toussiiiut-Louverlure, 
et  rallia  sous  ses  drapeaux  tous 
les  hommes  de  sa  caste,  ainsi 
qu'un  petit  nombre  do  noirs. 
La  guerre  civile  se  ralluma  avec 
une  nouvelle  fureur.  Pélhion  se 
jeta  dans  la  place  de  Jacmel  , 
point  important  liconst;rver,«"l  que 
Tous>aint-Louverturi'  a-*'iégeait 
en  personne.  Les  habitans  étaient 
découragés,  et  la  place  m  il  p(iur- 
vue  de  vivres  et  de  munitions  de 
guerre.  II  n'en  opposa  pas  moins 
une  longue  et  vigoureuse  ré- 
sistance aux  forces  supérieures 
des  assiégcans.  Quand  enfin  la 
famine  le  forç;i  d'évacuer  Jac- 
mel, il  protégea  la  rtlnile  des 
vieillards,  des  femines  et  des  en- 
fans,  et  à  la  têle  de  1.900  com- 
battans,  il  s'ouvrit  à  la  biiïonuet- 
te  un  passage  h  travers  l'armée 
de  Toussaint,  forte  de  22,(100 
hommes.  Ayant  ensuite  rejoint 
le  général  Rigaud,  qui  lutta  en- 
core long-temps  contre  son  célè- 
bre compétiteur  noir,  ils  furent 
enfin  forcés  tous  deux  de  céder  à 
la  fortune  de  Toussaint,  et  s'em- 
barquèrent pour  la  France  avec 


PÉT 

quelques  compagnons  fidèles.  Pê- 
thion  n'y  prit  aucune  part  aux 
affaires  publiques,  mais  se  livra 
avec  ardeur  ;i  l'étude,  et  acquit 
des  connaissances  étendues,  dont 
il  fit  souvent  preuve  depuis.  Lors 
de  l'expédition  du  général  Le- 
clerc,  Péthion  fut  employé,  dans 
le  grade  de  colonel,  avec  son  gé- 
néral et  son  ami  Rigaud.  Tous 
deux  rendirent  d'éminens  servi- 
vices.  L'influence  qu'ils  avaient 
conservée  à  Saint-Domingue,  leurs 
conseils  et  leurs  exemples,  entraî- 
nèrent plusieurs  autres  habitans 
de  l'ile,  qui  jouissaient  de  la  con- 
fiance publique,  et  bientôt  tout 
fut  soumis  à  l'autorité  de  la  Fran- 
ce. Toussaint-Louverture  parut 
même  s'y  être  rallié  de  bonne 
foi;  mais  l'impéritie,  l'orgueil 
et  la  cruauté  des  nouveaux  chefs 
perdirent  tout.  On  avait  solennel- 
lement promis  aux  noirs ,  comme 
aux  hommes  de  couleur,  la  liber- 
té ,  et  la  jouissance  paisible  des 
biens  qu'ils  avaient  acquis  au 
prix  de  tant  de  sang;  mais  on 
viola  bientôt,  d'une  manière  aus- 
si injuste  qu'impolitique,  les  plus 
saints  engagemens.  Toussaint  s'é- 
tait retiré  dans  une  habitation 
qu'il  possédait  à  l'intérieur  de 
l'île,  et  y  vivait  paisible.  Des  sol- 
dats français  vinrent  l'enlever;  on 
le  je<ta  dans  un  bâtiment,  qui  fit 
aussitôt  voile  pour  la  France,  où 
il  expira  de  faim  dans  un  cachot. 
Le  général  lîigaud  fut  de  même 
déporté.  Après  la  mort  du  com- 
mandant en  chef  de  l'expédition 
française  le  général  Leclerc,  son 
successeur,  qui  se  trouvait  dans 
une  position  diflicile,  avec  des 
troupes  affaiblies,  crutdevoirsup- 
pléer  i\  la  force  par  la  violence, 


PET 


187 


et  voulut  régner  par  la  terreur. 
Bientôt  il  ne  mit  plus  de  bornes 
à  ses  fougueux  emportemens. 
Les  colons  européens  même, 
revenus  à  Saint-Domingue  avec 
l'expédition  française,  ne  furent 
point  épargnés.  Plusieurs  furent 
déportés  et  spoliés,  d'autres  fu- 
rent fusillés.  Pour  les  noirs  on 
s'en  débarrassait  par  des  supplices 
de  différens  genres.  Des  officiers, 
des  chefs,  étaient  cousus  dans  des 
sacs,  et  jetés  à  la  mer;  le  mal- 
heureux général  Laplume,  resté 
constamment  fidèle  à  la  France, 
fut  de  ce  nombre.  On  envoya  en- 
fin à  la  terre  ferme  chercher  de» 
équipages  de  chiens,  pour  chas- 
ser et  dévorer  les  nègres,  et  l'on 
eut  soin  d'entretenir  l'ardeur  de 
ces  animaux,  en  leur  fournissant 
des  rations  journalières  de  chaire 
noire.  Péthion,  indigné  de  tant 
d'horreurs,  et  menacé  dans  sa  pro- 
pre existence,  se  retira  dans  les 
mornes  ou  montagnes  inaccessi- 
bles de  Saint-Domingue. Tous  ses 
compatriotes  qui  purent  échap- 
per à  la  surveillance  française  vin- 
rent le  joindre.  Le  général  noir  Des- 
salines prit  le  commaYidement 
en  chef  des  mécontens,  et  l'on 
déclara  la  guerre  aux  persécu- 
teurs de  l'Europe.  Ce  qu'il  eût 
été  facile  de  prévoir,  arriva.  Les 
guerriers  français,  déjà  réduits  en 
nombre,  et  avec  eux  U»  restes 
des  braves  de  la  légion  polonaise, 
qui  avait  si  vaillamment  combat- 
tu ùl'arméed'Ilalie,  étaient  mois- 
sonnés chaque  jour  par  le  fer  de 
l'ennemi  ou  par  les  maladies  épi- 
démiques  d'un  climat  dévorant. 
Les  Anglais,  de  nouveau  en  guer- 
re avec  la  Franco,  se  hâtèrent  de 
fournir  des  armes  et  des  muni- 


i88 


PET 


tions  de  guerre  à  fous  ceux  qui 
couibaltaierit  leurs  etinemis.  En- 
fin les  faibles  débris  des  forces 
naguère  si  imposantes ,  que  la 
mère- pairie  avait  envoyées  à 
grands  frais  dans  sa  plus  belle 
colonie,  furent  obligés  de  l'éva- 
cuer, et  de  cherchfr  un  refuge 
sur  leurs  vaisseaux,  qui  devinrent 
bientôt  la  proie  des  (-roisières  bri- 
tanniques, el  les  soldats  échappés 
de  Texpédition  de  Saint-Domin- 
gue allèrent  achever  de  mourir 
sur  les  ponio  is  anglais.  Le  plus 
féroce  des  nègres.  Dessalines, 
s'empara  alorsde  l'autorité  suprê- 
me, et  se  fit  proclamer,  sous  le 
nom  de  Jacques  1",  empereur 
d'Haïti.  M  lis  ses  fureurs  le  ren- 
dirent odieux  aux  hommes  qui 
naguère  étaient  ses  égaux,  et 
qu'il  voulut  soumettre  à  un  joug 
encore  plus  pesant  qut;  celui  des 
blancs.  Le  nouvel  empereur  lais- 
sa percer  la  résolution  ((u'il  avait 
prise  de  se  défaire  de  tous  les 
hommes  de  couleur,  dont  l'ins- 
truction et  la  valeur  pouvaient 
opposer  des  digues  à  son  despo- 
tisme ,  et  de  ne  conserver  dans 
l'île  que  les  noirs  qu'il  croyait 
plus  faciles  à  opprimer.  On  le 
prévint,  et  dans  la  journée  du  17 
octobre,  pendant  qu'il  passait  une 
revue  au  Port-au-Prince,  il  fut 
immolé  au  milieu  de  ses  gardes. 
Le  nègre  Christophe,  chef  des 
conjurés  ,  qui  avait  fait  preu- 
ve dans  plusieurs  occasions  de 
courage  et  de  talens  militai- 
res, mais  qui  était  aussi  avide 
du  pouvoir  absolu,  et  presque 
aussi  cruel  que  Dessalit»es ,  fut 
proclamé  président  et  généralis- 
sime de  la  république  d'Haïti. 
Il  nomma  d'abord  Pélhion   son 


VÊT 

lieutenant,  et  gouverneur  de  la 
partie  du  sud.  Les  états-généraux 
de  la  nouvelle  république  furent 
convoqués  au  Cap,  et  prirent  le 
titre  d'assemblée  nationale.  Les 
divisions  y  éclatèrent  bientôt  en- 
tre les  chefs.  Péthion,  ardent  et 
sincère  ami  de  la  liberté,  voulait 
le  gouvernement  représentatif, 
tel  qu'il  sut  def)uis  l'établir- 
Christophe  voulait  être  le  maî- 
tre de  l'état,  et  ne  pouvait  sup- 
porter ni  un  égal,  ni  une  autorité 
quelconque  ,  balunçant  la  sienne. 
Aussi,  à  l'aide  des  troupes  noires, 
qui  lui  étaient  alors  presque  en- 
tièrement dévouées,  se  fit-il  pro- 
clamer et  couronner  roi  d'Haïti 
au  Cap-Français,  capitale  de  ses 
états,  où  il  régna  despotiquement 
sous  le  nom  de  Henri  I".  Dans 
une  proclamation  qu'il  publia 
contre  Péthion,  il  déclai'a  celui-ci 
rebelle,  ajoutant  que  l'autorité 
souveraine  appartenait  de  droit 
comme  de  fait  au  plus  fort,  selon 
le  coJe  Henri.  Mais  les  parties  de 
l'ouest  et  flu  sud,  se  formèrent 
en  une  république  dont  le  sénat 
et  les  représentans  du  peuple 
nommèrent  à  l'unanimité  Péthion 
le  président.  Il  s'établit  dès-lors 
au  Port-au-Prince,  et  sut  bientôt 
faire  chérir  et  respecter  son  au- 
torité constitutionnelle.  Les  hosti- 
lités ne  tardèrent  pas  à  commen- 
cer par  terre  et  par  mer  entre  ces 
deux  chefs.  Le  roi  Henri  avait 
sous  ses  ordres  des  troupes  plus 
nombreuses,  et  en  général  mieux 
armées  et  mieux  éipiipées.  Le 
président  Péthionétait  plus  aimé, 
et  trouva  dans  le  dévouement  et 
la  persévérance  des  citoyens  qui 
vivaient  heureux  sous  son  admi- 
nistration, des  ressources  qui  man- 


PET 

quèrent  à  son  enneiiii.  Celui-ci, 
furieux  de  voir  soustraire  i\  sa 
domination  de  riches,  et  belles 
conlrées,  vint  à  plusieurs  repiises 
attaquer  le  Port-au-Prince.  Le  i" 
de  janvier  1808,  Pélhion  rem- 
porta une  victoire  mémorable  sur 
le  roi  noir,  qui  avait  cependant 
une  armée  deux  fois  plus  forte 
en  combat  tans.  Le  vaincu  fut 
forcé  de  se  retirer  en  toute  hâte 
au  Cap,  où  il  recruta  de  nouveau 
et  disciplina  de  son  mieux  une  ar- 
mée composée  en  grande  partie 
de  ses  anciens  compagnons;  mais 
l'esclave  qu'ils  avaient  couronné 
était  devenu  un  niiiitre  impitoya- 
ble, et  il  ne  régnait  plus  sur  eux 
que  par  la  terreur.  Il  marcha  de 
nouveau  en  1811,  sur  le  Port- au- 
Princf,  avec  des  forces  considé- 
rables. Pélhion  se  tint  sur  la  dé- 
fensive. Son  lieutenant,  son  ami 
et  son  successeur,  hoyer,  à  la  tê- 
te d'une  poignée  d'hommes  de 
couleur,  repoussa  plusieurs  at- 
taques des  assaiilans ,  et  ^se 
couvrit  de  gloire.  Las  du  joug 
de  fer  de  Henri  I",  5,ooo  hom- 
Dïes,  formant  un  corps  d'éli- 
te de  sa  garde,  passèient  avec 
leur  colonel,  le  mulûtre  Marc, 
du  côté  de  Pélhion.  Celte  défec- 
tion fut  suivie  de  plusieurs  au- 
tres, et  détermina  encore  Henri 
à  se  sauver  au  Cap,  où,  dans  sa 
rage,  il  fit  égorger  sans  distinc- 
tion d'âge  ni  de  sexe,  tous  les  gens 
de  couleur  qui  existaient  dans  ses 
domaines.  Mais  il  parut  au  moins 
avoir  acquis  par  cette  dernière  ex- 
pédition la  certitude  que  tous  ses 
eir.irts  contre  Pélhion  ne  seraient 
jaujais  cturounés  par  le  succès, 
et  sans  conclure  de  paix  po»ill- 
>e,  il  rcnonjia  à  de  nouvelles  at- 


PET  189 

laques.  Le  président  de  la  répu- 
blique d'Haïti  proflla  de  ce  repos" 
pour  achever  l'ouvrage  qu'il  avait 
commencé.  Son  armée,  augmen- 
tée par  tous  les  soldats  qui  avaient 
abandonné  son  adversaire ,  fut 
mise  sur  un  pied  respectable; 
ses  places  frontières  furent  forti- 
fiées, ses  ports  furent  oiiverts  à 
ton  les  les  nations  européennes; 
les  Français  même,  que  le  com- 
merce y  attirait,  trouvaient  pro- 
tection et  sécurité  sous  son  ad- 
ministration. Non-seulement  il 
encourageait  le  commerce,  mais 
il  mit  le  zèle  le  plus  louable  à  é- 
tendre  dans  ses  états  la  civilisa- 
tion et  les  lumières;  il  forma  des 
élablissemens  pour  rinstruclion 
des  noirs  et  des  mulâtres,  en- 
couragea le  travail,  mit  de  l'ordre 
dans  les  finances ,  paya  des  som- 
mes considérables  qui  étaient  ducs 
aux  Américains  pour  fournitures 
faites  à  son  armée,  et  bientôt  la 
sécurité  générale  du  pays,  la 
tr.inquillifé,  la  paix  et  le  bonheur 
dont  jouissaient  les  citoyens  sous 
un  gouvernement  à  la  fois  ferme 
et  équitable,  firent  proclamer  Pé- 
lhion le  père  de  la  patrie.  Il  sut 
aussi  faire  respecter  la  lépubliquc 
au  dehors.  Quelques différens s'é- 
levèrent entre  lui  et  les  États-U- 
nis de  l'Amérique  septentrionale. 
Ln  matelot  de  leur  pays  avant 
tué  lui  honune  d'Haïti,  fut  jugé, 
condamné  et  exécuté  sm-- le- 
champ.  Les  agens  américains  se 
plaignirent,  Péthion  leur  répon- 
dit qu'il  fer.iil  constamment  exé- 
cuter les  lois  contre  amis  et  enne- 
mis, sans  ménagement  pour  qui 
que  ce  pût  être.  Sa  fermeté  en 
in)po-<a ,  et  l'interruption  mo- 
mentanée des  relations  coinmer- 


igo  PET 

ciales  cessa  bientôt.  En  i8i5,  il 
fut  réélu  président,  pour  4  ans,  au 
terme  de  la  constitution.  Des  né- 
gociations furent  entamées  aveclui 
l'année  suivante  par  le  gouverne- 
ment français;  mais  il  refusa  d'é- 
couter les  propositions  de  tout 
agent  étranger,  qui  ne  serait 
point  autorisé  à  reconnaître  so- 
lennellement l'indépendance  de 
Haïti ,  condition  première ,  et 
sine  qaâ  non  de  tout  traité.  La  po- 
litique de  Péthion  le  portait  à 
accorder  des  secours  aux  indé- 
pendans  de  l'Amérique  méridio- 
nale. Ils  trouvèrent  asile  et  pro- 
tection dans  leurs  revers,  et  deux 
bataillons  de  noirs,  qu'il  leur 
fut  permis  de  lever  à  Haïti ,  leur 
rendirent  d'éminens  services.  Il 
procura  ainsi  aux  commerçans  de 
sa  république  de  nombreux  avan- 
tages, et  entretinten  même  temps 
des  relations  amicales  avec  les 
colonies  des  nations  européennes 
dans  les  îles  et  sur  le  continent 
américain.  ïoutparaissait  assurer 
à  Péthion  une  existence  calme  et 
glorieuse,  et  il  semblait  n'avoir 
plus  qu'à  jouir  de  ses  longs  et  u- 
tiles  travaux;  mais  sa  santé  décli- 
nait depuis  quelque  temps,  et  il 
souffrait  à  certaines  époques  des 
douleurs  aiguës.  On  assure  que 
satisfait  du  rôle  qu'il  avait  rempli, 
querassasié  d'honneurs  et  de  l'exis- 
tence même,  il  résolut  de  dispo- 
ser librement  et  seul  de  sa  vie. 
Après  en  avoir  fixé  le  terme,  il 
refusa  obstinément,  malgré  les 
vives  instances  de  tous  ceux  qui 
l'entouraient,  et  particulièrement 
de  son  ami  le  général  Boyer, 
de  prendre  aucune  nourriture,  et 
expira  d'inanition  au  septième 
jour,  le  29  mars  i8ib.   Sa  mort 


PET 

répandit  une  consternation  géné- 
rale ;  toute  la  population  de  la 
république  prit  spontanément  le 
deuil,  les  funérailles  du  président 
furent  célébrées  avec  pompe  au 
milieu  des  plus  solennelles  cé- 
rémonies religieuses,  et  un  mo- 
nument a  été  élevé  en  sa  mé- 
moire par  les  citoyens  recon- 
naissans.  Péthion  avait  rempli 
sa  dernière  obligation  envers  sa 
patrie,  en  désignant  à  son  lit 
de  mort,  et  ainsi  que  la  cons- 
titution le  lui  permettait ,  le 
général  Boyer  pour  son  succes- 
seur. Celui-ci  marche  sur  les 
traces  de  son  illustre  prédécesseur, 
et  paraît  destiné  à  achever  son 
ouvrage.  Déjà  il  a  vu  crouler  la 
monarchie  éphémère  de  Henri 
1",  dont  les  esclaves  ont  voulu  re- 
devenir citoyens.  La  partie  ci- 
devant  espagnole  de  Saint-Do- 
mingue a  aussi  adopté  les  lois 
de  la  république  d'Haïti.  Boyer, 
comme  Péthion,  appartient  à  cet- 
te race  d'hommes,  qu'un  cheva- 
lierfrançais  de  Saint-M....dit«  ne 
«pouvoir  être  rangés  dans  la  clas- 
se des  peuples,  puisqu'ils  n'ont 
point  paru  au  berceau  des  hom- 
mes ,  puisqu'ils  ne  sont  que  les 
fruits  bizarres  de  la  découverte  a- 
ventureuse  du  Nouveau-Monde, 
et  les  produits  d'alliances  presque 
toujours  illégitimes.  »  Peut-être 
cependant  que  si  l'on  eût  usé  de 
plus  do  loyauté,  de  plus  d'huma- 
nité envers  des  frères,  à  qui  la 
nature  ne  paraît  avoir  refusé  que 
la  couleurblanche,  peut-êtrealors 
la  France  e(Jt-elle  conservé  sa 
plus  belle  colonie  et  sa  plus  rich» 
possession  dans  les  Deux-Indes. 
Maintenant  ces  hommes ,  qui 
n'ont    point   joui   de    l'avantage 


PET 

d'avoir  de  représentant  loM  de  la 
création  du  inonde  ,  ont  cherché 
ù  réparer  ce  malheur,  en  se  créant 
une  représentation  nationale,  et 
il  sera  plus  lacile  de  les  accuser 
d'illégiliinité  que  de  combattre 
leurs  forces,  et  de  leur  ravir  leur 
indépendance  et  leur  liberté. 

PÉTHION     {VOJ.      PÉÏION     DE 

Villeneuve). 

PtTIET  (Clavde),  ancien  mi- 
nistre de  !a  jjnene  ,  iulentlant-gé- 
néral  des  armées  l'rançiiise.'',  séna- 
teur et  f{rand-i)iririer  de  !a  légioii- 
«l'hoimeur,  na']iiit  d'une  famil- 
le honorable  à  Chàlillon-sur-Sei- 
ue,  le  lo  février  1 74;)'  ^'"^  pére 
était  lieuteu-iul-]^'i'neral  du  bai!- 
Iia<(e  de  celle  ville.  Après  avoir 
fait  de  Ixumes  éludes,  il  eulra 
très-jeune  dans  la  {gendarmerie  de 
la  maison  du  roi,  et  fut  ensuite 
pourvu  d'une  charge  de  commis- 
saire des  guéries.  Les  talens  ad- 
miiiisMalifs qu'il  déploya  de  bonne 
heure  ,  et  l'eslime  générale  qu'il 
sut  se  concilier,  le  firent  nommer, 
à  l'âge  de  a5  ans,  secrétaire  en 
chefetsubdelégué-général  de  Tin- 
tendan<;e  de  Bretagne.  Dans  te 
poste  important,  où  il  géra  pen- 
dant 20  ans  les  affaires  d'ime  des 
plus  grandes  provinces  du  royau- 
me,  souvent  agitée  de  troubles, 
et  où  il  était  bien  difficile  de  satis- 
faire à  la  fois  aux  désirs  souvent 
opposés  du  gouvernement,  ôei 
états  de  la  province,  et  du  peuple, 
Petiet  acquit  la  réputation  d'un 
hofome  de  bien,  fidèle  à  tous  ses 
devoirs ,  sincère  ami  des  citoyens, 
et  ne  négligeant  d'iutrc  S'jiu  que 
celui  de  sa  propre  fortune.  Aussi, 
à  l'époque  de  la  révidiition  en 
17^9.  quand  les  anciennes  iusli- 
tulious  des  y-aya  d'état  s'écroulc- 


PEt 


»d» 


rent,  nvec  beaucoup  d'autres,  et 
quand  ses  fonctions  en  Bretagne 
eurent  cessé,  y  reçut-il  d'un  peu- 
ple fier  et  jaloux  de  ses  droits, 
des  témoignages  éclatans  d'estime 
et  de  reconnaissance.  Il  fut  d'a- 
bord ,  et  à  l'unanimité  des  suffra- 
ges des  électeurs,  nommé  pro- 
cureur-général-syndic du  dépar- 
tement d  Ille-et-Vilaine  ,  et  le 
même  département  l'élut  plus  tard 
son  représentant  au  conseil  des 
anciens.  Il  n'occupa  que  peu  de 
temps  le  premier  emploi.  Le  gou- 
vernement réclama  l'emploi  de 
ses  talens;  la  guerre  venait  de  s'al- 
lumer, et  Petiet,  nommé  en  pre- 
mier lieu  commissaire-ordonna- 
teur, fut  bientôt  placé  à  la  tête  de 
radministration  de  l'une  des  gran- 
desarmées  qui  se  formaient  alors, 
et  servit  successivement  en  qua- 
lité de  commissaire -général,  à 
celles  du  centre,  de  Sjmbre-et- 
Meusc  et  de  l'Ouest.  Pendant  qu'il 
se  trouvait  à  la  première,  sous 
les  ordres  du  général  La  Fayette  , 
le  roi  lui  envoya  la  croix  de  Saint- 
Louis.  Dans  ces  différons  postes, 
le  zèle,  l'activité  elle  désintéres- 
sement de  Petiet  le  firent  respec- 
ter de  tous  les  partis  ,  et  personne 
n'eut  à  se  plaindre  de  lui,  si  ce 
n'est  les  ennemis  du  dehors,  aux 
revers  desquels  il  contribua  puis- 
samment par  une  administration 
vigoureuse,  qui  avait  bien  aussi 
quelque  droit  de  réclamer  sa  part 
aux  honneurs  du  trioni[)he.  Ap- 
pelé, par  ses  fonctions,  en  Bre- 
tagne pendant  que  la  guerre  civile 
y  exerçait  toutes  ses  fureurs,  il 
fut  pendant  quelque  temps  desti- 
tué par  les  députés  de  la  conven- 
tion *  dont  il  était  bien  loin  d'ap- 
prouver ou  de  seconder  les  me- 


IQU, 


PET 


sures  violentes  ;  mais  le  besoin 
extrême  qu'on  avait  de  ses  talens, 
força  bientôt  le  gouvernement  à 
le  rétablir  dans  ses  emplois.  Le 
fait  suivant  peut  prouver  à  lui  seul 
à  quel  point  Petiet  avait  su  méri- 
ter l'estime  générale  dans  les  mal- 
heureuses contrées  de  l'Ouest.  Il 
se  trouvait  à  Nantes  lorsque  les 
habitaus  de  cette  ville  repoussè- 
rent l'armée  des  Vendéens.  Quel- 
ques jours  après,  les  affaires  de 
son  administration  l'obligèrent  à 
la  quitter.  Il  part  sans  escorte  ,  et 
tombe  au  milieu  d'un  détache- 
ment de  ces  hommes,  qui  poussè- 
rent si  souvent  leurs  représailles 
contre  les  républicains  jusqu'à  la 
dernière  barbarie.  Entouré,  saisi, 
mis  en  joue,  il  allait  être  immolé, 
quand  son  nom ,  répété  par  les 
Vendéens,  fit  soudain  tomber  de 
leurs  mains  les  armes  qu  ils  diri- 
geaient contre  lui  ;  il  ne  trouva 
plus  que  des  amis  piirmi  des  bom- 
mes  d'opinions  si  opposées  ,  el  sa 
vie  fut  sauvée,  parce  qu'il  avait 
consacré  ."a  vie  entière  à  la  justice 
et  à  la  bienfaisance.  En  1795,  il 
venait  à  peine  de  prendre  place 
au  con^-eil  des  anciens,  où  le  dé- 
partement (rille-et-Vilaine  l'avait 
député,  qu'il  fut  appelé  au  minis- 
tère de  la  guerre.  î'etiel  >e  char- 
gea de  cet  immense  fardeau  dans 
les  circonstances  les  plus  dilïîciles 
où  peut-être  ministre  se  soit  ja- 
mais trouvé.  Le  trtsor  de  l'état 
était  épuisé,  la  chute  du  })apier- 
moiinaie  jetait  de  la  méfiance  et 
de  l'incertitude  dans  toutes  les 
transactions;  des  dil  ipidations  é- 
normes  s'étaient  introduites  dans 
les  diverses  branches  de  Tadmi- 
nistration  pendant  le  gouverne- 
ment  directorial,    et  les  besoins 


PET 

des  soldats  croissaient  à  chaque 
moment  ;  la  victoire  seule  leur' 
restait  fidèle.  Mais  ces  braves 
guerriers  ,  long-temps  négligés  y 
retrouvèrent  un  ami  aussi  zélé 
qu'actif  dans  le  nouveau  ministre, 
qui  consacrait  ses  Jours  «t  ses  nuits 
au  travail,  et  qui  parvint  enfin  à 
pourvoir  aux  besoins  pres>^ans  des 
nombreuses  armées  de  la  France. 
La  disette  cessa,  une  comptabilité 
sévère  fut  établie  ,  les  plus  graves 
abus  furent  extirpés  ,  et  insensi- 
blement tous  les  rouages  de  cette 
grande  machitie  se  trouvèrent  re- 
montés et  mis  en  harmonie.  Les 
victoires  de  iMoreau  sur  le  lUiin 
et  de  Bonaparte  en  Italie  furent 
remportées  sous  son  ministère.. 
Après  une  année  d'exercice,  Pe- 
tiet eutencore,  le  premier  depuis 
la  l'évolution,  la  gloire  de  sou- 
mettre un  compte  clair  et  précis 
de  ses  opérations  au  jugement  de 
ses  concitoyens  et  à  l'examen  du 
corps-législatif.  Ce  compte,  géné- 
ralement adniiré  ,  a  servi  do  tuo- 
dèle  à  tous  les  ministres  qui  lui 
ont  succédé.  Apre?  avoir  rempli 
pendant  près  de  deux  ans  avec 
celte  rigoureuse  j)robité,  base  de 
son  caractère,  unposte  laborieux 
et  pénible,  Petiet  eut  besoin  de 
quelque  repos,  el  se  retira  au  .sein 
de  sa  l'amiile,  destinant  à  l'édu- 
cation de  ses  enfans ,  de?  jours  que 
ne  réclamait  plus  la  pitrie;  mais 
bientôt  ini  nouvt;ui  témoignage 
de  la  c(»nfiance  publi(]ue  viit  I  ar- 
racher à  sa  retraite.  Les  suiV.ages 
unanimes  des  électeurs  du  dépar- 
tement de  la  Seine,  auquel  il  eiait 
cependant  étranger,  le  portèrent, 
en  mars  1799.  à  la  represenlatiou 
nationale,  el  il  fut  député  par  eux 
au  conseil  des  cinq-cents.  Le  pre- 


PET 

micr  consul  l'appela,  l'année  sui- 
vante, au  conseil- (l'état,  et  le 
général  Alexandre  Berthier  (de- 
puis maréchal  de  l'empire  et  prince 
deNeuchâtel)  réclama  le  secours 
de  ses  lumièrt-s  au  ministère  de  la 
guerre,  où  Petiet  s'honora  encore 
<i  la  seconde  phioe,  après  avoir  si 
dignement  rempli  la  première. 
Quand  les  armées  françaises  eu- 
rent de  nouveau  franchi  les  Alpes 
et  soumis  une  seconde  fois  l'Italie, 
il  fut  nommé  au  gouvernement  de 
la  Lomhardie,  avec  le  litre  de 
ministre  extraordinaire.  Pendant 
deux  années  de  séjour  à  Milan, 
une  administration  sage  et  équi- 
table parvint  ù  réconcilier  les  Ita- 
liens avec  la  domination  française, 
et  à  les  attacher  par  les  liens  de 
la  conûance  et  de  l'espoir  d'un 
avenir  heureux.  Quand  Napoléon 
eut  conçu  le  projet  d'une  descente 
en  Angleterre,  et  qu'il  eut  ras- 
semblé des  forces  formidables  dans 
les  trois  camps  de  Boulogne,  de 
Montrenil  et  de  Bruges,  il  recon- 
nut le  besoin  d'un  chef  habile 
pour  diriger  l'administration  de 
ces  armées,  et  fit  choix  de  Petiet, 
qu'il  en  nonmia  l'intfndant-géné- 
ral.  La  santé  de  celui-ci  s'altéra 
visiblement  à  la  suite  de  ces  tra- 
vaux et  des  fatigues  qu'il  eut  à 
supporter  :  nue  maladie  grave  le 
n)it  bientôt  aux  portes  du  tom- 
beau. Mais  la  camp;igne  d'Aus- 
terlitz  venait  de  s'ouvrir;  à  peine 
en  convalescence,  il  part  pour 
l'armée,  consultant  plus  son  dé- 
vouement que  son  état.  Il  entre 
avec  le  vainqueur  à  Vienne,  com- 
mande un  dernier  service  à  ses 
forces  exténuées,  revient  mou- 
r.uit  à  Paris,  et,  sans  quitter  les 
fonctions    qui  lui  sont  confiées, 


PET  i<)5 

signe  des  ordres  relatifs  à  son  ad- 
ministration ,  jusqu'au  jour  même 
où  il  succomba.  Petiet  venait 
d'être  nouuîié  membre  du  sénat, 
et  grand- officier  de  la  légion- 
d'honneur.  Il  mourut  le  aS  mai 
180G,  laissant  après  lui  une  mé- 
moire vénérée  de  tous  ceux  qui 
l'ont  connu,  et  pour  fortune  à 
ses  enfans,  l'héritage  honorable 
des  exemples  qu'il  leur  avait  four- 
nis. Ses  funérailles  furent  célé- 
brées avec  la  pompe  ordonnée  par 
Napoléon,  et  ses  restes  reposent 
dans  un  des  caveaux  de  l'église 
Sainte-Geneviève,  alors  destinés  à 
recueillir  les  cendres  des  grands- 
dignitaires  de  l'état.  Petiet  a  laissé 
quatre  enfans,  iine  fille  mariée  au 
général  Alphonse  Colbert,  qui  a 
servi  avec  la  plus  haute  distinc- 
tion en  Egypte,  à  Saint-Domin- 
gue, en  Italie,  en  Espagne  et  en 
Belgique ,  et  trois  fils  :  l'aîné  , 
membre  de  la  légion-d'honneur, 
après  avoir  servi  dans  l'artillerie  , 
a  occupé  des  places  importantes 
dans  l'administration  publique;  il 
a  été  intendant  de  la  liste  civile 
en  Toscane ,  préfet  du  départe- 
ment des  Hautes-Alpes ,  et  il  est 
aujourd'hui  attaché  à  la  direction 
générale  des  vivres  sous  le  comte 
Dejean,  pair  de  B'rance.  —  Au- 
gustin Petiet  ,  second  fils  du  sé- 
nateur, a  suivi  la  carrier»:  mili- 
taire depuis  1800.  Nommé,  à  l'âge 
de  'M  ans,  chevalier  de  la  légion- 
d'honneursur  le  champ  de  bataille 
d'Austerlitz  ,  et  officier  du  môme 
ordre  à  la  bataille  de  Dresde,  il 
compte  16  campagnes,  et  a  été 
blessé  dans  4  combats.  Après  la 
bataille  de  Mont-Saint-Jean  ,  «il 
fut  promu  au  grade  de  génér.il 
de  brigade,  qui  ne  lui  apas  été  cou- 


Ï94 


PET 


firme  depuis.  Il  est  chevalier 
de  Saint-Louis  depuis  18 14-  — 
Sylvain  Petiet,  dernier  fils  du 
sénateur,  après  avoir  reçu  plu- 
sieurs coups  de  lance  dans  la 
campagne  de  Russie,  a  été  nom- 
mé chevalier  de  la  légion  d'hon- 
neur il  la  bataille  de  la  WoscoAva  , 
et  capilaiiie  au  8"  régiment  de 
hussard».  Il  est  aujourd'hui  em- 
ployé, d;ms  le  même  grade,  au 
réginnnt  des  chasseurs  à  cheval 
(le  l;i  Somme. 

PÉTION  1)K  VILLENEUVE 
(Jérôme),  membre  de  rasseml)lée 
cousiiluaute,  et  ancien  maire  de 
Paris,  exeiçait  à  (Chartres  1 1  pro- 
fession d'avocat,  lorsqii'il  lut  nom- 
mé, par  le  tiers-élal  du  bailliage 
de  cette  ville,  dipulé  aux  états- 
généraux.  Il  adopta  dè>  l'aurorede 
la  révoliUion  les  principes  qu'elle 
consacrait,  et  qui  bientôt  ébran- 
lèrent jusque  dans  ses  fondemens 
l'édifice  de  la  monarchie.  Sa  sévé- 
rité républicaine  lui  fit  un  grand 
nond>re  d'eiinemi>  parmi  les  dé- 
fenseurs des  anciennes  institu- 
tions; sa  haine  pour  la  tyrannie  de 
quelques  chefs  qui  se  .-ubsliluèrent 
au  pouvoirabsolu, qu'eux-mêmes 
avaient  concouru  à  détruire,  pré- 
para et  hâia  sa  perle.  Il  l'ut  un  des 
premiers  qm',  après  la  séance  roya- 
le du  aiî  juin  1789,  s'élevèrent 
contre  l'acte  d'anlorilé  que  l'on 
avait  conseillé  au  roi,  et  qui  en- 
couragèrent rassend)lée  i\  persis- 
ter dans  ses  résolution*.  Les  pro- 
testations de  la  minorité  trouvè- 
rent en  lui  un  ceuseuÉ'  sévère,  et 
il  demanda,  le  5i  juillet,  la  mise 
en  jugement  des  ennemis  du  nou- 
vel ordre  de  choses.  Dans  la  séan- 
ce du  18  août,  Mirabeau  ayant 
proposé    de  renvoyer  l'adoption 


PET 

de  la  déclaration  des  droits  de 
l'homme,  après  la  sanction  de  la 
constitution  par  le  roi.il  accusa  son 
illustre  collègue  d'entraîner  l'as- 
semblée dans  des  opinions  contra- 
dictoires. On  le  vit,  le  1"  septem- 
bre, se  déclarer  en  faveur  du  veto 
suspensif  à  accorder  au  roi;  le  5, 
appuyer  la  permanence  et  l'unité 
du  corps-législatif;  le  3o,  s'oppo- 
ser à  ce  que  le  roi  eût  le  pouvoir 
d'interpréter  Ici  lois;  le  5  octo- 
bre, dénoncer  les  événemens  de 
la  soirée  et  de  la  nuit  du  1"  au  2, 
et  dans  le  nu'me  mois,  demander 
que  le  roi  prît  le  titre  de  roi  des 
Français  par  le  consentement  de  la 
nation,  en  supprimant  la  formule 
par  la  grâce  de  Dieu,  «car,  dit- 
il,  c'est  calomnier  Dieu  :  Charles 
IX  était  aussi  roi  par  la  grâce  de 
Dieu.  nCet te  proposition  inattendue 
produisit  un  effet  maïqué  sur  l'as- 
sendilée.  Dans  une  autre  séance, 
le  5i,  il  combattit  avec  beaucoup 
de  force  l'opinon  de  l'archevêque 
d'Aix,  en  faveur  des  biens  du  cler- 
gé. 11  observa  «  que  les  richesses  ne 
faisaient  que  corrompre  un  ordre 
dont  le  renoncement  aux  biens  et 
aux  vanités  de  la  terre  était  le 
premier  devoir  et  la  première  ver- 
tu.» Il  vota,  le  la  février  :7<)0,  la 
suppression  des  ordres  religieux, et 
le  '25  l'égalité  de  partage  dans  les 
successions  des  nobles.  Jusqu'au 
4  déccmbie, qu'il  fut  élu  président, 
il  s'opposa  à  ce  que  le  roi  eût  le 
droit  de  paix  et  de  guerre,  provo- 
qua la  réunion  à  la  France  du  corn- 
tat d'Avignon,  fut  pour  la  création 
des  assignais,  et  les  projets  de 
Mirabeau  sur  les  finnnces.  On  re- 
marqua dans  la  séance  du  17  jan- 
vier 1791,  seul  discours  sur  l'orga- 
nisation du  jury,  et  sa  réponse. 


PET 

dans  la  séance  du  21  février,  à 
un  membre  f(tiigneux  du  côté  droit, 
qui  demandait  des  mesures  pour 
rétablir  la  tranquillité  publique. 
«  La  tranquillité  publique  n'est 
troublée,  dit-il  avec  force,  que 
par  la  révolte  constante  de  la  irii- 
norité.»  Approbateur  des  lois  pé- 
nales contre  l'émigration,  il  décla- 
ra 0  que  la  famille  royale  devait  y 
être  soumise  en  temps  de  trou- 
bles. »  Il  attaqua,  le  27,  un  article 
proposé  par  le  comité  de  consti- 
tution, portant  que  <>  toute  invita- 
tion faite  au  peuple  de  désobéira 
la  loi  est  un  crime.»  Dans  la  séan- 
ce du  II  mars,  protecteur  éclairé 
des  hommes  de  couleur,  il  parla 
aVec  éloquence  en  faveur  de  leur 
cause.  Dans  la  séance  du  22, i!  se  pro- 
nonça pour  la  régence  élective; 
enfin  le  21  m.ii,  il  soutint  le  plan 
de  Buzot,  relatif  à  la  division  du 
corps-législatif  en  deux  sections 
égales,  combattant  avec  avantage 
la  défaveur  que  faisait  naître  cet- 
te ressemblance  avec  le  parle- 
ment d'Angleterre.  Pétion  fut 
nomtné,  au  mois  de  juin,  prési- 
dent du  tribunal  criminel  de  Pa- 
ris. Après  le  départ  du  roi  et  son 
arrestation  à  Varennes,  il  reçut  la 
mission  avec  deux  de  ses  collègues 
de  se  rendre  auprès  de  ce  prince, 
et  de  l'accompagner  de  Varennes 
à  Paris.  Par  suite  des  événemens 
du  Champ -de -Mars,  du  7  juillet 
1791,  les  membres  de  l'assemblée 
constituante  qui  faisaient  partie  de 
la  société  des  jacobins  s'en  retirè- 
rent; Pétinny  resta, luit)"".  «Ladis- 
cussiou,  disent  les  auteurs  d'une 
biographie  étrangère,  «'étant  éta- 
blie sur  la  fuite  de  Louis  XVI,  Pé- 
tion attaqua  le  système  d'inviola- 
bilité du  roi,  et  demanda  qu'il  fût 


PET 


19a 


jugé  par  une  convention  nationa- 
le convoquée  à  cet  eifet.  Le  28 
août,  il  prit  hautement  la  défense 
des  soldats  qui  s'iiisiu-geaient  con- 
tre leurs  chefs;  accusa  ceux-ci  des 
troubles  qui  survenaient  dans  leurs 
corps,  et  fut  interrompu  par  M. 
Alexandre  de  Lauieih,  qui,  sans  se 
dissimuler  combien  était  dange- 
reux l'iniivisuie  des  officiers, 
voyait  avec  douleur  et  effroi  quel- 
les funestes  conséquences  pou- 
vaient résulter  pour  l'indépendan- 
ce nationale,  d'un  tel  état  d'insu- 
bordination, qui  menaçait  de  lais- 
ser la  France  sans  armée,  et  de  la 
livrer  sans  défense  aux  signataires 
de  la  coalition  de  Pilnilz.  L'aveu- 
glement  de  Pétion  et  de  ses  amis 
était  même  porté  si  loin  à  cette 
époque,  que  le  mot  de  trahison 
pouvait  ne  pas  sembler  trop  fort  à 
de  sincères  amis  de  la  liberté,  qui 
n'auraient  pas  connu  le  fond  de 
son  cœur  et  les  motifs  de  sa  con- 
duite.» A  la  fiîi  de  la  session,  l'as- 
semblée constituante  ayant  termi- 
né sa  session,  ces  mêmes  auteurs 

ajoutent:»  Lié  avec  M""  de  G 

qui  professait  alors  des  opinions 
républicaines  dont  cette  dame 
s'est  défendue  depuis  avec  une  in- 
trépidité que  Ceux  qui  la  connu- 
rent alors  peuvent  prendre  pour 
de  Timpudence,  Pétion  l'accom- 
pagna eu  Angleterre,  à  la  fin  de 
septembre  1791.»  Le  motif  ou  le 
prétexte  de  son  voyage  était  une 
mission  pour  Londres,  que  l'on  a 
prétendu  ,  sans  preuve,  être  dan* 
l'intérêt  du  ducd'Orléans.  A  son  re- 
tour à  Paris,  il  succéda  A  rillusiie 
Bailly (yoj.  cenom)dar»s  la  premiè- 
re magistrature  municipale  de  cet  le 
ville,  et  fut  solennellement  instal- 
lé dans  ses  fonctions  le  17  novem- 


tgO  VÈT 

bre.  Il  dirigea,  dit-on,  d'après  le 
vœu  du  parti  connu  sous  la  déno- 
uiinati(Wi  de  Girondins,  le  mouve- 
veineul  populaire  du  20  juin,  dont 
le  but  était  de  forcer  Louis  XVI, 
en  l'intimidant,  de  rappj^er  au  con- 
seil les  ministres  Roland  ,  Servan 
et  Clavière.  L'administration  dé- 
parlementali;  de  Paris,  de  l'assen- 
timent dn  roi ,  su-^pendil  de  leurs 
fonctions  Pétion  el  Manuel  (ce  der- 
nier étaitprocureurde  la  commu- 
ne), pour  leur  co*iduite  dans  cette 
grave  circonstance.  Le  roi  repro- 
cha même  à  Pction,  publiquement 
et  d  a»s  des  lern)es  extrêmement 
sévères,  d'avoir  mal  fait  son  de- 
voir. Piiion,  pour  se  justifier  et 
peut-être  pour  se  venger  du  parti 
delacour.  reiulit  public, par  la  voie 
de  l'impression,  l'entretien  qu'il  a- 
vail  eu  avec  le  monarque.  Le  peu- 
ple partageant  le  mécontentement 
de  son  premier  magistrat,  le  rede- 
manda à  gr.mds  cri>;  un  nombre 
considrrable  d'individus  parcou- 
rurent les  rues  portant  cette  devi- 
se tracée  en  gros  caractères  sur  leurs 
chapeaux,  et  uiême  sur  leurs  vêle- 
mens  :  Pétion  ou  la  mort.  Alors 
Pétion  jKirutà  la  barre  de  l'/issem- 
blée  législative  (12  juillet  1792), 
«non  pour  se  justifier,  disait-il, 
niais  pour  provoquer  une  justice 
sévère.»  Son  discours  en  ellét  fut 
tout  en  récriminations  et  en  sarcas- 
mes contre  la  cour  et  les  mem- 
bres du  déparlement.  Mais  Pétion, 
qui  lut  étranger  aux  événemcns 
du  10  août,  cessa  dès  cette  époque 
d'être  l'id  le  du  peuple;  un  parti 
plus  puissant,  celui  de  Robespier- 
re, d'»nt  il  avait  été  long-temps 
l'ami,  de  Danton,  Marat,  etc.,  lui 
enleva  sa  popularité,  qu'il  ne  re- 
gretta plus  du  moment  où  il  vit  le 


PÉT 

but  sinistre  où  l'on  tendait.  Il  fut 
impuissant  pour  arrêter  les  massa- 
cres de  septembre.  Deux  fois  il 
s'était  rendu  à  la  prison  de  la  For- 
ce, sans  que  sa  présence  produi- 
sît d'autres  résultats  que  de  les 
suspendre  momentanément.  Le  0 
septembre  il  païul  à  l'assemblée 
législative,  el  termina  son  récit  en 
invitant  les  représentans  «  à  jeter 
un  voile  épais  sur  les  épouvanta- 
bles événemens  qui  venaient  de  se 
passer,  assurant  qu'il  n'en  avait 
été  instruit  que  lorsqu'il  n'était 
plus  temps  d'y  remédier.  Hérault- 
de-Séchelles,  président,  lui  répon- 
dit que  l'assemblée  était  satisfai- 
te d'opposer  à  des  événemens 
malheureux  un  homme  de  bien 
tel  que  lui,  et  qu'elle  se  reposait 
sur  sa  sagesse.»  La  convention  na- 
tionale, convoquée  au  mois  de  sep- 
tembre 1792,  Pétion  y  fut  nom- 
mé par  le  département  d'Eure-et- 
Loir,  fonctions  qu'il  préféra  t\  cel- 
les de  maire  de  Paiis,  devenues 
de  plus  en  plus  dilHciles.  Premier 
président  d'une  assemblée  qui, 
quelques  mois  après,  devait  le 
proscrire,  il  se  montra,  dès  l'ou- 
vertore  des  séances,  l'im  des  plus 
ardens  antagonistes  du  parti  de  la 
commune,  et  surtout  de  Hobes- 
pierie,  l'vui  de  ses  chefs.  Dans  un 
discours  qu'il  prononça  à  la  tribu- 
n«.',  il  développait  les  rivalités  du 
conseil-généial  de  la  commune  de 
Paris  avec  l'assemblée,  et  les  cau- 
ses qui  avaient  amené  les  massa- 
cres commis  à  la  suite  du  10  août. 
Il  y  disait  qu'il  ne  croyait  pas  que 
Robespierre  aspirât  à  la  dictatu- 
re, et  que  Marat  seul  était  capable 
de  cette  folie  féroce.  Il  conjurait 
au  reste  les  partis  qui  divisaient 
la  république  d'oublier  leur»  res- 


PET 

senlimens  et  leurs  préventions,  et 
de  se  réunir  pour  l'intérêt  public. 
Lors  du  procès  du  roi,  il  vola  la 
mort  avec  ramendomcnt  de  Mail- 
he  (voy.  Mailhe)  ,  et  fut  de  l'avis 
de  l'appel  au  peuple  et  du  sursis. 
Pétion  devint,  le  25  mars,  mem- 
bre du  premier  comité  de  salut-pu- 
blic,  et  de  délénse  générale.  Pen- 
dant toute  la  durée  de  la  lulte  f.n- 
trelaGirondect\aMontagiie,Vélioa 
ne  cessa  de  combattre  cette  der- 
nière, saisit  la  première  oi'casion 
favorable  pour  la  perdre.  «  Le  gé- 
néra4  Miaczinski ,  condamné  à 
mort  comme  ayant  voulu  intro- 
duire l'ennemi  dans  la  place  de 
Lille,  eut  la  faiblesse,  disent  les 
biographes  que  nous  avons  précé- 
demment cités,  d'accuser  quel- 
ques députés  qui  sans  doute  n'é- 
taient pas  également  irréprocha- 
bles; mais  il  nomma  parmi  eux 
Gensonné  et  Pétion,  et  celte  dé- 
claration, faite  à  l'instant  du  sup- 
plice et  dans  l'espoir  de  prolon- 
ger sa  vie,  devint,  sans  être  utile 
à  Miaczinski,  l'un  des  prétextes 
qu'employèrent  (indiques  jours  a- 
près  bs  dominateurs  de  la  con- 
vention, pour  faire  comprendre 
ces  deux  repiésentans  dans  les 
listes  de  proscription  dressées  par 
la  faction  de  la  montagne,  et  pré- 
sentées par  elle  à  la  convention.» 
Pétion  fut  sur-le-champ  décrété 
d'arrestation  (2  juin),  et  momen- 
tanément constitué  prisonnier 
dans  son  domicile,  sons  la  surveil- 
lance d'un  gendarme.  Il  échappa 
avec  Bnzot  et  Salles  ù  cette  sur- 
veillance, qui  allait  être  convertie 
en  une  détention  dans  une  mai- 
.•*on  d'arrêt,  et  tons  trois  se  ren- 
dirent déguisés  à  Caen,  oii  l'on 
organisait  une  armée  destinée  ù 


PET 


197 


marcher  sur  Paris,  afin  de  sous- 
traire la  convention  nation.ile  à  la 
tyrannie  de  la  Montagne.  Les  suc- 
cès des  troupes  (le«  départemens 
fédérés  ne  répondirent  point  à 
leur  attente.  (]es  troupes  furent 
battues  et  dispersées  à  Pacy ,  dé- 
.  parlement  de  l'Eure,  et  les  dépu- 
tés proscrits  obligés  de  se  procurer 
un  nouvel  asile.  Pétion,  Buzot, 
Salles  et  Guadet,  s'embarquèrent 
pour  le  département  de  la  Giron- 
de ;  mais  bientôt  ils  durent  cher- 
cher un  refuge  dans  les  cavernes. 
Quelque  temps  après  les  trois 
premiers  furent  trouvés  dans  un 
champ  de  Saint-Emilion,  morts  et 
à  moitié  dévorés  par  les  animaux. 
Pétion  a  été  jugé  avec  une  extrê- 
me sévérité  par  les  ennenîis  de  la 
révolution.  Il  ne  l'a  pas  toujours  été 
avec  justice  par  les  défenseurs  de 
la  cause  qu'il  soutenait.  Le  temps 
ne  paraît  pas  encore  venu  où  l'on 
peut  porter  un  jugement  impartial 
sur  ce  personnage, que  ses  partisans 
ont  honoré  du  beau  nom  d'Aris- 
tide, et  qui  peut-être  est  trop  ca- 
lomnié par  les  uns  et  trop  loué 
par  ceux  qui  pensent  comme  M"" 
Roland,  dont  nous  allons  rappor- 
ter l'opinion  extraite  de  ses  ?né- 
moires.  «  Véritable  homme  de  bien 
et  bon,  dit-elle,  Pétion  est  inca- 
pable de  faire  la  moindre  chose 
qui  blesse  la  probité,  comme  les 
plus  légers  torts  ou  le  plus  petit 
chagrin  A  personne;  il  peut  né- 
glig«'r,  beaucoup  de  choses  pour 
lui,  et  ne  saurait  exprimer  un  re- 
fus d'obliger  qui  que  ce  soit  au 
monde.  La  sérénité  d'une  bonne 
conscience,  la  douceur  d'un  ca- 
ractère facile,  la  franchise  et  la 
gaîté,  distinguent  sa  physionomie. 
il  fut  maire  prudent,   représeo- 


Kj8 


PET 


tant  fidèle,  mais  il  est  trop  con- 
fiant et  trop  paisible  pour  prévoir 
les  orages  et  les  conjurer.  Un  ju- 
stement sain,  des  intentions  pures, 
ce  qu'on  appelle  la  justesse  de  l'es- 
prit, caractérisent  ses  opinions  et 
ses  écrits,  marqués  au  coin  du  bon 
s,ens  plus  qu'à  ceux  du  talent.  II 
est  froid  orateur,  et  lâ<he  dans 
son  style  comme  écrivain.  Adnji- 
tiistratenr  équitable  et  bon  ci- 
toyen, il  était  fait  pour  pratiquer 
les  vertus  dans  une  république, 
et  non  pour  fonder  un  tel  gouver- 
nement chez  un  peuple  corrom- 
pu, qui  le  regarda,  durant  quelque 
temps,  comme  son  idole,  et  se 
réjouit  de  sa  proscription  comme 
de  celle  d'un  ennemi.  »  M""  de 
G<nlis  fut  aussi  l'amie  intime  de 
l'étion.  Dans  le  précis  de  sa  cofi- 
dulte  durant  la  rùwliUion ,  cette 
dame  déclare  ;  «  qu'elle  eut  pour 
lui  une  véritable  estime  jusqu'à  la 
mort  du  roi.  »  On  a  réuni  en  4 
vol.  in-8',  Paris,  ijqS,  les  ouvra- 
ges de  Pétion  ;  ils  comprennent 
ses  D/.vt'c^ars dans  Tassendilée  cons- 
tituante et  à  la  convention  natio- 
nale, ses  Comptes  rendus  comme 
maire  de  Paris,  et  ses  différens  O- 
puscules  politiques. 

PETIOT  (Jean- JosEPn) ,  che- 
valier de  la  légion  -  d'honneur, 
président  honoraire  du  tribunal 
chel'-lieu  judiciaire  du  déparle- 
ment de  Saône-et-Loire,  était  pro- 
cureur du  roi  au  bailliage, présidial 
de  Châlons-sur-Saône ,  lorsqu'il 
fut  nomajé  en  1789,  par  le  tiers- 
état,  et  à  la  presque  unanimité, 
premier  député  aux  états-géné- 
raux. Il  vota  constamment  avec  la 
majorité,  dans  les  rangs  des  mo- 
dérés, et  ne  prit  la  parole  que  pour 
des   affaires   spéciales   à   Sfui   dé- 


PET 

parlement.  Après  la  session,  il  se 
retira  dans  ses  foyers,  qu'il  ne  quit- 
ta pendant  quelques  mois  que 
pour  se  soustraire  aux  regards  des 
agens  de  la  terreur.  Membre  depuis 
1^89  de  tous  les  collèges  électo- 
raux, de  l'un  desquels  il  fut  élu 
président;  mis  en  réquisition  le  la 
frimaire  an  3  par  un  député  en  mis- 
siori,  pour  remplir  une  place  d'ad- 
ministrateur du  déparlement,  il 
obéit;  mais  ne  croyant  pas  devoir 
ajouter  à  la  sévérité  des  lois  contre 
les  émigrés,  partie  dont  il  était  spé- 
cialement chargé,  il  fut  remplacé 
après  dix  mois  d'exercice. Nommé, 
le  8  frimaire  an  4i  commissaire, 
du  gouvernement  près  dt-  l'admi- 
nistration du  canton  qu'il  habitait, 
il  fut  révoqué  en  l'an  6,  à  peu  près 
par  suite  du  même  esprit  de  mo- 
dération. Membre  du  conseil-gé- 
néral du  département,  depuis  son 
établissement  en  Tan  8,  il  en  fut 
président  pendant  trois  sessions. 
Appelé  en  avril  1809  au  tribu- 
nal chel-lieu  judiciaire  du  dépar- 
tement, sur  la  demande  des  juges 
qui  le  componaient,  il  le  présida 
jusqu'en  janvier  1816,  époque  où 
on  l'admit  à  la  retraite,  et  il  cessa 
dans  la  même  année  les  fonctions 
de  président  du  tribunal  et  de  pré- 
sident du  conseil-général  ,  sans 
qu'on  ait  su  s'il  devait  à  la  bien- 
veillance de  ses  amis  cette  double 
retraite,  que  d'ailleurs  il  désirait  ; 
quoiqu'il  fût  sincèrement  attaché 
â  la  charte  ,  ses  opinions  ,  qui 
n'ont  pas  varié  depuis  1789,  ne 
furent  pas  jugées  dignes  de  la 
confiance  du  gouvernement.  11  a- 
vait  été  député  en  181 5  pour  aller 
à  Lyon,  représenter  au  duc  d'Al- 
buféra  (^vojez  Suchex),  qui  com- 
mandait l'armée,  que  les  habilans 


PET 

de  Châlons-?ur-Saôiie,  quoiqu'ils 
eussent  arrêté  les  Autrichiens  pen- 
dant nn  mois  lors  de  la  première 
invasion,  ne  pourraient  seuls  em- 
pêcher le  passage  de  l.;i  Saône;  sur 
la  réponse  du  maréchal  qu'il  ne 
pouvait  fournir  aucun  secours , 
réponse  rapportée  par  M.  Petiot, 
non  sans  danger  d'être  pris  par  les 
Autrichiens  qui  venaient  de  passer 
la  Saône  à  Mâcon,  la  ville  ouvrit 
ses  portes.  11  vit  maintenant  au 
milieu  de  sa  famille  ,  honoré  de 
l'estime  de  ses  conciloytîus. 

PETIT  (  Antoine)  ,  célèbre  mé- 
decin ,  naquit,  en  17  iS,  à  Orléans, 
département  du  Loiret,  d'une  fa- 
mille estimable.  Son  père  était 
tailleur, et  sou  grand-père  avait  été 
notaire.  Au  sortir  de  ses  études  , 
Antoine  Petit  vint  à  Paris,  où  il 
suivit  avec  succès  les  cours  de 
chirurgie,  de  médecine  et  d'accou- 
chement. Repu  professeur  de  ces 
diverses  parties  de  b>  science  et  de 
l'art  de  guérir,  il  acquit  bientôt 
une  grande  réputation;  mais  sa 
pauvreté  ne  lui  permettant  pas 
de  faire  les  sacrifices  pécuniaires 
(Gooo  fr.)  qu'exigeait  son  admis- 
sion à  la  faculté  de  médecine  ou 
au  collège  de  chirurgie  ,  il  témoi- 
gna à  la  faculté  le  désir  d'être  reçu 
ad  meUorem  forlunarn  ,  droit  que 
ces  deux  corps  s'étaient  réservés; 
la  faculté  refusa  avec  orgueil  d'ac- 
cueillir le  mérite  indigent.  Petit 
était  au  moment  d'obtenir  du  col- 
lège de  chirurgie  la  faveur  qu'il 
sollicitait,  lorsque  la  faculté,  par 
un  rnolif  bien  moins  noble ,  ce- 
lui de  ravir  à  un  corps  rival  nn 
homme  déjà  si  distingué,  lui  ou- 
vrit ses  portes  :  il  devint  docteur- 
régent  en  1746.  Petit  exerça  , 
concurrennnent    comme    proîcs- 


PET  199 

seur  et  comme  praticien  ,  la  méde- 
cine et  la  chirurgie,  et  dut  à  sa  célé- 
brité, sous  ce  double  rapport,  son 
admisMon,  en  17O0,  <i  rac^idèmie 
des  sciences,  et ,  eu  1  j68,  la  chaire 
d'analomie  au  jardin  du  Roi,  va- 
cante par  la  mort  de  Ferrein.  Il 
s'illustra  dans  cette  chaire,  où  il 
se  fit  suppléer,  en  1776.  par  l'un 
de  ses  élèves  les  plus  distingués  , 
Vicq-d'Azir,  auquel  il  aurait  voulu 
la  céder;  mais  on  lui  adjoignit  M. 
Antoine  Portai  (  voy.  Portal)  ,  qui 
l'avait  pendant  dix  ans  remplie  en 
l'absence  de  Ferrein.  Petit  fonda, 
à  la  faculté  de  médecine  de  Paris, 
une  chaire  d'anatomie  et  une  de 
chirurgie.  I!  désigna  Leclerc  pour 
occuper  la  première,  et  Corvisart 
{voy.  ce  nom  )  pour  la  seconde. 
«  La  fondation  qu'il  fit  à  Orléans, 
sa  ville  natale ,  dit  M.  Fournier 
dans  uneiVo//<;e,est  plus  considéra- 
ble ;  il  y  consacra  plus  de  100,000 
livres  :  son  objet  est  la  nomina- 
ti()n  (le  quatre  médecins  et  de  deux 
chirurgiens,  pour  doimer  des  soins 
gratuits  aux  m.dafîes  indigens  de 
la  ville,  et,  les  jours  de  marché, 
des  consultations  à  ceux  de  la  cam- 
pagne, dans  un  édifice  qu'il  fit 
bûlir  à  cet  effet.  Deux  avocats  et 
un  procureur  ayant ,  comme  les 
premiers,  des  appointemens  fixes, 
remplissaient,  à  des  jours  mar- 
qués, leur  ministère  auprès  des 
pauvres  qui  venaient  le  réclamer. 
Bouvard  ,  dans  les  querelles  litté- 
raires qui  s'étaient  élevées  entre 
lui  et  Petit,  lui  avait  reproché 
d'être  fils  d'un  tailleur,  et  lui  disait 
dans  une  de  ses  controverses  que 
ses  idées  étaient  mal  cousues ,  et 
que  cependant  il  devait  savoir 
coudre.  Petit  était  trop  philosophe 
pour  s'offenser  d'une  pareille  in- 


200  PET 

jure.  Il  s'honorait  de  son  père;  et 
voulant  que  la  postérité  n'ignorât 
pas  son  origine,  il  établit  dans 
l'acte  de  fondation  dont  on  Tient 
de  parler,  que  le  concierge  de  l'é- 
difice consacré  aux  consultations 
gratuites,  serait  toujours  un  pau- 
vre tailleur  de  la  ville  d'Orléans, 
en  mémoire  de  son  père.  »  Petit 
.«^'efforçait  d'enseigner  à  ses  élèves 
ces  primipes  si  recommandables, 
que  les  hommes  qui  exercent  l'art 
de  guérir  doivent  des  soins  gra- 
tuits aux  indigens  et  aux  porson- 
nes'peu  riches.  «Ce sont  les  riches 
qui  doivent  payer  convenable- 
ment ,  disait  -  il  :  lorsque  j'étais 
jeune  je  rougissais  lorsqu'un  ma- 
lade m'offrait  de  me  payer;  main- 
tenant je  rougis  lorsqu'on  ne  me 
paie  pas.  «  Cet  estimable  savant 
avait  recueilli  sa  mère  dans  la  mai- 
son qu'il  possédait  i\  Fontenai- 
aux-Roses  :  ce  séjour  lui  dtivint 
insupportable  du  moment  qu'il 
l'eut  perdue,  et  il  se  retira  à  Oli- 
vet,  village  près  d'Orléans,  où  il 
mourut,  le  21  octobre  1794?  "^ 
laissant  aucun  héritier  direct  de 
.son  nom  et  de  sa  fortune,  qui  était 
considérable.  Nous  ferons  remar- 
quer, à  cette  occasion,  que  Des- 
FOBGEs(r)o_y.  ce  nom)  ,  par  le  plus 
inconcevable  cynisme  ,  déshono- 
rant sa  mère,  s'est  prétendu  dans 
son  roman  du  Poète  ou  Mémoires 
d'un  homme  de  lettres,  le  fils  ano- 
nyme de  ce  célèbre  médecin.  Si 
Petit  eût  été  en  effet  le  père  de 
Desforges,  il  est  permis  de  penser, 
d'après  son  caractère  bien  connu  , 
et  surtout  sa  bonté  et  sa  généro- 
sité, qu'il  lui  eût  laissé  quelque 
portion  de  sa  fortime.  Il  est  vrai 
que  Petit  avait  sur  les  moeurs  des 
femme?  l'opinion  la  plus  défavo- 


PET 

rable ,  et  que  dans  ses  relations 
privées  ,  il  a  été  généralem«nt 
peu  scrupuleux;  mais  était-ce  une 
raison  pour  Desforges  de  procla- 
mer uij  Scan*  de  ou  une  calomnie? 
Petit  a  publié  les  ouvrages  stii- 
vans  :  i"  l'Anatomie  chirurgicale 
de  Pal  fin ,  avec  des  notes  et  un 
Traité  d'ostéotogie ,  Paris,  i753, 

2  vol.  in-ii;  nouvelle  édition 
augmentée  d'un  discours  sur  la 
chiruigie  ,  Paris ,  1 757  ,  in  -  4*  j 
2'  Rapport  en  faveur  de  l' inocula- 
tion,  Paris,  in-8',  1768;  "5" Recueil 
de  pièces  concernant  les  naissances 
tardives,  Paris,  2  vol.  in-S",  1766. 
C'est  à  l'occasion  de  cet  ouvrage  , 
l'un  des  plus  remarquables  qu'il 
ait  produits,  qu'il  eut  à  soutenir 
contre  M.  Bouvard  une  polémique 
où  plus  d'une  fois  la  modération 
fut  oubliée  de  part  et  d'autre,  sur- 
tout pariM.  Bouvard.  [\°  Projet  de 
reforme  sur  l'exercice  de  la  méde- 
cine, Paris,  iu-8°.  Petit  était  enne- 
mi des  médicamens  et  des  mélan- 
ges pharmaceutiques,  et  souvent 
il  attaqua  des  apolhi<;aires  qui  se 
faisaient  médecins  sans  avoir  les 
connaissances  nécessaires  :  il  s'àt- 
la(>ha  plus  particulièrement  i\  la 
médecine  expeclaute.  C'est  de  l'é- 
cole de  cet  habile  professeur  que 
sont  sortis  nos  plus  célèbres  mé- 
decins. 

PETIT  (Marc-Antoine),  chi- 
rurgien en  chef  de  l'Hôtel-Dieu 
de  Lyon,  membre  de  l'académie 
de  cette  ville,  correspondant  de 
l'institut,  etc.,  naquit  à  Lyon,  le 

3  novembre  1766.  Il  était  fils  na- 
turel; mais  sa  mère  s'imposa  les 
plus  grands  sacrifices  pour  lui 
faire  donner  une  bonne  éducation. 
Il  sut  en  profiter,  et  suivit,  par 
égard  pour  la  volonté  de  su  mère, 


TET 

la  carrière  chirurgicale,  malgré 
son  goûl  pour  les  lettres.  A  l'âge 
de  17  ans,  il  obtint  au  concours 
une  place  de  chirurgien  interne  à 
l'hospice  de  la  Ciiarilé  de  Lyon. 
En  1788,  il  obtint  également  à  la 
?uile  d'un  second  concours,  la 
place  de  chirurgien  en  chef  de 
l'Hôtel  -  Dieu;  mais  conformé- 
ment au  vœu  de  l'administration 
des  hospices  de  Lyon,  il  devait, 
avant  d'exercer  cet  emploi,  passer 
(rois  années  à  Paris,  et  ensuite 
trois  autres  années  à  l'hospice 
même,  en  qualité  d'aide-major.  Il 
ttail  hors  d'état  de  faire  les  sacri- 
fices pécuniaires  qu'exigeaient  son 
voyage  et  l'absence  obligatoire  des 
trois  années  ;  heureusement  un 
homme  généreux,  M.  Trollier  de 
Fe(an,vint  àson  secours,et  Petit  se 
lendit  à  Paris.  Après  y  avoir  suivi 
(jiielque  temps  les  écoles  ,  il 
;dla  à  Montpellier,  où  il  fut  re- 
çu docteur,  le  aS  octobre  1790. 
J)e  retour  à  Lyon,  en  1791,  il  y 
continua  ses  travaux.  A  l'époque 
du  siège  de  cette  ville,  en  1793,  il 
l'ut  obligé  de  s'en  éloigner  pour 
éviter  la  persécution.  Néanmoins, 
il  y  revint  pour  prendre  posses- 
sion de  son  eiriploi  de  chirurgien 
en  chef  de  l'hôpital ,  et  il  ne  fut 
plus  inquiété.  Il  l'exerça  jusqu'à 
sa  mort,  arrivée  le  7  juillet  181 1, 
en\iron  un  moi»  après  sa  nomi- 
nation en  qualité  de  correspon- 
dant de  l'institut.  Petit  était  dis- 
tingué <|omme  professeur  et  com- 
me praticien.  Il  avait  fondé  une 
école  de  chirurgie  clinique,  dont 
chaque  année  il  faisait  l'ouver- 
lin-e  par  un  discours  intéressant. 
Comme  praticien,  il  était  habile, 
et  avait  une  grande  présence  d'es- 
prit. Il  opéra  117  malades  de  la 


PET 


201 


pierre,  et  eut  le  bonheur  d'en  sau- 
ver io5.  Voici  une  circonstance 
où  son  apparente  tranquillité  pro- 
duisit le  plus  heureux  effet.  «  Il 
avait  opéré  de  la  pierre  un  habi- 
tant de  Dijon;  depuis  deux  heu- 
res le  sang  coulait  en  abondance: 
Petit  n'était  pas  sans  inquiétude, 
quoiqu'il  n'en  témoignât  rien  ; 
mais  le  malade  effrayé  s'écria  : 
C'est  fait  de  moi,  je  perds  tout 
mon  sang.  —  Vous  en  perdez  si 
peu ,  repartit  le  médecin  avec 
tranquillité,  que  vous  serez  saigné 
dans  une  heure;  ce  n'était  pas 
l'intention  de  Petit,  mais  l'idée 
imprévue  d'une  saignée  opposée 
<à  l'idée  de  l'hémorragie,  frappa 
l'esprit  du  malade,  et  le  rassura: 
son  sang  ne  tarda  pas  à  s'arrêter, 
et  il  fut  sauvé.  »0n  rapporte  à  la 
louange  de  Petit,  qu'il  était  désin- 
téressé et  bienfaisant,  et  que  sou- 
vent il  donnait  an  malade  indi- 
gent, le  salaire  qu'il  venait  de  re- 
cevoir du  riche.  Lorsque  la  for- 
tune eut  récompensé  son  infatiga- 
ble activité,  il  alla  trouver  le  bien- 
faiteur dont  les  secours  lui  avaient 
été  si  utiles  quelques  années  au- 
paravant. i\l.  Trollier  de  Fetan 
refusa  de  reprendre  la  somme 
qu'il  lui  avait  remise  :  «  Cet  or, 
lui  dit- il,  n'est  plus  à  moi  ;  je  vous 
l'ai  oflert  pour  assurer  à  l'huma- 
nité un  talent  qui  lui  fut  utile  : 
secourez  les  malheureux,  et  sa 
destination  est  remplie.  »  Petit 
crut  devoir  insister  à  plusieurs  re- 
prises. Il  reçut  cette  réponse  : 
u  Eh  bien!  vous  ne  serez  que  le 
dépositaire  de  celle  somme;  et  je 
vous  la  confie,  afin  que  vous  en 
fassiez  pour  un  autre,  l'usage  que 
j'en  ai  fait  pour  vous.  »  La  volonté 
du  donataire  acte  (jdolemcut sui* 


302 


PET 


vie.  Le  célèbre  Lapeyrouie  avait 
montré  la  même  généroisité,  en 
déposant  une  somiiie  de  'io,()00  l'r. 
dans  les  mains  de  son  ancien  élève 
et  ami  Antoine-Louis,  chirurgien 
en  chef  des  armées  (  cojcz  Lolis). 
Petit  remit  à  un  élève  distingué  , 
la  somme  qu'il  avait  repue  sous 
la  condition  d'en  perpétuer  la 
transmission.  On  doit  à  Petit  les 
ouvrages  suivans  :  i"  Éloge  de 
Desault ,  lu  à  l'Hôtel -Dieu  de 
Lyon,  le  5  septembre  1795,  pour 
l'ouverture  du  cours  d'anatomie 
et  de  chirurgie  :  c'est  le  preniier 
dont  la  mémoire  de  ce  célèbre 
chirurgien  ait  reçu  l'hommage; 
2°  Essai  sur  la  médecine  du  cœur, 
in-S",  Lyon,i8o5  :  on  trouve  dans 
ce  recueil,  outie  VÉlose  de  Dc^ 
sault,  quatre  E pitres  en  vers  a- 
dressées  à  un  jeune  homme  qui  se 
destine  à  la  profession  de  méde- 
cin; un  discours  sur  l' [nfluencede 
la  rctolution  française  sur  la  santé 
publique;  un  auti»-  sur  la  Manière 
d'exercer  la  bienfaisance  dans  les 
hôpitaux;  un  troisième  sur  la 
Douleur:  enfin  un  quatrième  sur 
les  Maladies  principales  observées 
pendant  neuf  ans  dans  l'Hôtel- 
Dieu  de  Lyon.  5"  Onan  ,  ou  le 
Tombeau  du  mont  Cindre,  poëinc 
suisi  de  noies  hi^toriqui-s  ,  pré- 
senté, en  1809,  à  l'académie  des 
jeux  floraux  ;  [^"Poésies,  éparses 
dans  différens  recueils;  5"  plu- 
sieurs Opuscules  dans  les  Actes  de 
la  société  de  médecine  de  Lyon , 
parmi  lesquels  on  remarque  l' E- 
loge  de  Tissot  ;  6"  Obseroations 
cliniqtes  .  publiées  d'après  ses 
manuscrits,  par  MiM.  Antoine  Lus- 
terbourg  et  Théodore  Jobert  de 
Lyon,  i8i5,  i  vol.  in-8".  MM. 
Cartier,  Parât  et  Dumas,  ont  lait 


PET 

imprimera  Lyon  :  le  premier.  Elo- 
ge de  M.  A.  Petit,  lu  à  l'académie 
de  Lyon,  1813;  le  second.  Notice 
sur  Marc-Antoine  Petit,  lue  à  la 
société  de  médecine  de  la  même 
ville,  in-4°;  et  le  troisième,  Hom- 
mage rendu  à  la  mémoire  île  Marc- 
Antoine  Petit,  pièce  de  vers,  avec 
des  note?,  1814,  in-8°. 

PETIT  (Alkxis-ThÉrèse),  pro- 
fesseur à  l'école  royale  Polytech- 
nique, naquit  à  Vesoul,  départe- 
ment de  la  Haute -Saône,  v»^* 
1791.  Il  commença  ses  éludes  à 
l'école  centrale  de  Besançon,  et 
suivait  simultanément  les  cours 
delans:ues  anciennes  et  de  malhé- 
matiques.  Avant  l'.lge  de  10  ans, 
il  avait  toute  l'instruction  néces- 
saire pour  être  admis  à  l'école 
Polytechnique,  où  il  ne  put  entrer 
qu'à  l'âge  de  )G  ans;  jusqu'à  cet 
âge  il  dut  à  l'amitié  de  M.  Ha- 
chette [voyez  ce  nom),  de  forti- 
fier ses  connaissances  dans  une 
institution  parliculière  dirigée  par 
d'habiles  maîtres.  Admis  à  l'éco- 
le Polytechnique  dès  la  première 
piomotion,  il  fut  presque  aussitôt 
nonmié  répétiteur  à  cette  école,  et 
professeui-  au  lycée  qui  porle  au- 
jourd  hui  le  nom  de  collège  de 
Bourbon.  Reçu  docteur  ès-scien- 
ces  à  20  ans  (181  1),  dans  la  mê- 
me année,  il  devint  professeur  ad- 
joint de  physique  à  l'école  Poly- 
technique ,  et  professeur  en  pied 
lors  de  la  réorganisation  de  l'éco- 
le en  18 15.  Il  venait  d'épouser, 
lors  de  celle  dernière  nomination, 
M"'  Carrier,  dont  le  pèr<î  est  in- 
génieur des  pouts-et-chaussées. 
Veuf  deux  ans  après,  il  moiu'ut 
d'une  affection  de  poitrine  le  31 
juin  1820,  dans  la  29"  année  de 
son  âge.  Petit  a  produit  peu  d'où- 


PET 

vrages,s'étant  presque  exclusive- 
ment livré  aux  soins  du  professo- 
rat ;  cependant  les  travaux  aux- 
quels il  a  pris  part  recommandent 
puissamment  son  nom  à  l'estime 
des  savans.  En  1814?  de  concert 
avec  son  beau- frère,  M.  Arago, 
il  a  publié  :  1°  Mémoire  sur  les 
variations  que  le  pouvoir  réfrin- 
gent d'une  même  substance  éprou- 
ve dans  les  divers  états  d'agréga- 
tion qu'on  peut  lui  llonner  par 
l'ejfet  gradué  de  la  chaleur,  inséré 
dans  les  Annales  de  physique;  2" 
Mémoire  sur  l'emploi  du  principe 
des  forces  vives  dans  le  calcul  des 
machines,  impriujé  en  i8i8  dans 
le  même  recueil;  5"  av<;c  M.  Du- 
long,  Recherches  sur  la  théorie  de 
la  chaleur,  insérées  dans  le  Jour- 
nal de  l'école  Polytechnique ,  il* 
cahier,  1818,  et  dans  les  Annales 
de  physique:  elles  furent  couron- 
nées par  l'académie  des  sciences  ; 
4"  avec  le  même  nutaxir, /Uémoire 
sur  la  chaleuf  spécifique  des  corps, 
ouvrage  présenté  à  l'institut  en 
181g.  M.  Biot  a  donné  sur  ce  jeu- 
ne physicien  une  Notice  historique 
qu'il  a  lue  à  la  société  philomati- 
que  le  i5  février  1821,  et  fait  in- 
sérer dans  les  Annales  de  physi- 
que, même  année,  tome  XVI. 

PETIT  (le  bakonJlan- Martin), 
maréchalde-camp  et  commandeur 
de  la  légion-d'houneur,  né  le  22 
juillet  i;72.  Il  servait  avec  dis- 
tinction depuis  plusieurs  années, 
lorsqu'en  180G,  dans  la  campagne 
contre  les  Prussiens  et  les  Russes, 
sa  conduite  au  combat  de  Ciarna- 
vow  le  fit  particulièrement  remar- 
quer. Eu  1808,  il  obtint  l'autori- 
sation de  porter  la  décoratif)n  de 
Saint-Henri  de  .Saxe.  Général  de 
brigade  le  28  juin  18 13,  il  com- 


PET  2o5 

njandait,dans  la  célèbre  campagne 
de  1814»  un  des  corps  de  la  gar- 
de impériale,  et  prit  part  à  tous  les 
combats  où  cette  garde  s'est  cou- 
verte de  gloire,  particulièrement 
dans  les  plaines  de  la  ci -devant 
Champagne.  Il  fut  nonnné  com- 
mandant de  la  légion-d'honneur 
le  22  février,  et  le  20  avril  ce  fut 
lui  que  l'empereur  embrassa  à 
Fontainebleau  lorsque  ce  prince, 
prêt  à  partir  pour  l'île  d'Elbe,  fit 
ù  sa  gar<le  de  solennels  adieux. 
Le  général  Petit  fut  nommé  che- 
valier de  Saint-Louis  le  aS  juillet 
de  lii  même  année.  Pendant  les 
cent  jours,  GU  i8i5,  il  continua  son 
service  en  qualité  de  major  du  i" 
régiment  des  grenadiers  à  pied  de 
la  garde.  Deux  bataillons  de  ces 
mêmes  grenadiers  qu'il  forma  en 
carré,  le  18  juin  181 5,  après  avoir, 
sous  son  commandement,  résisté 
à  vingt  charges,  restèrent  les  der- 
niers sur  le  champ  de  bataille  de 
Waterloo.  Le  général  Petit  se  trou- 
va compris  dans  le  licenciement 
de  l'armée  qui  s'était  réunie  der- 
rière la  Loire.  Il  est  aujourd'hui 
(1824)  eu  disponibilité. 

PETIT  (Michel-Edme),  mem- 
bre de  la  convention  nationale, 
où  le  nomma,  en  1792,  le  dépar- 
tement de  l'Aisne  ,  vota  avec  la 
majorité  dans  le  procès  du  roi.  Le 
25  mai  1793,  il  s'éleva  avec  force 
contre  Marat,  et  dit  «  que  les  dé- 
»partemens  n'avaient  pas  envoyé 
»des  députés  pour  être  témoins 
»des  farces  de  ce  pantin  féroce.» 
Il  proposa  d'exclure  de  la  conven- 
tion ,  par  im  décret,  tout  député 
qui,  dans  les  discufisions,  se  per- 
mettrait des  termes  injurieux  con- 
tre quelqu'un  de  ses  collègues; 
déclara  à  la  tribune  que  la  cou- 


204 


TET 


\ention  n'avait  pas  été  libre  dans 
les  journées  du  3i  mai,  i"  et  2 
juin;  et  après  la  chute  de  Robes- 
pierre, il  attaqua  vivement  tous 
ceux  qui  avaient  participé  aux  me- 
sures extrêmes  dont  la  France  a- 
vait  g-émi  sous  le  règne  de  la  ter- 
reur. Il  proposa  encore  d'interdi- 
re aux  députés  l'enjploi  à  la  tribu- 
ne des  dénominations  de  parti,  et 
demanda  en  même  temps  que  cha- 
cun d'eux  fît  imprimer  l'état  de 
sa  fortune.  La  convention  passa  à 
l'ordre  du  jour  sur  ces  deux  pro- 
positions. M.  Petit  n'a  point  fait 
partie  des  conseils  ni  du  corps-lé- 
gislatif, mais  il  a  exercé  long- 
temps les  fonctions  de  juge  à  À- 
miens.  Il  avait  public,  avant  la  ré- 
volution :  1°  Eloge  de  J.  J.  Rous- 
seau; 2'  des  Chaiigemens  que  l'a- 
mour de  la  vérité  produira  dans  la 
poésie  et  l'éloquence. 

PKTIT  -  DE  -  BEAL'VERGER 
(le  baron)  ,  ancien  procureur  au 
parlemi-nt  de  Paris,  devint,  dans 
les  premières  années  de  la  révo- 
lution, membre  du  conseil-géné- 
ral du  département  de  la  Seine. 
Porté  en  iSoi  sur  la  liste  des 
candid:its ,  il  fut  élu  député  au 
corps-lrgiïlalif,  y  siégea  jusqu'en 
1814,  et  entra  à  cette  époque 
dans  la  nouvelle  chambre  des  dé- 
putés, instituée  par  la  charte.  Il 
cessa  ses  fonctions  législatives  en 
181 5  ,  et  n'a  point  été  réélu 
depuis.  Si.  Petit-de-Beauverger 
est  beau-frère  de  M.  Frochot  , 
ex-préfet  du  déparlement  de  la 
Seine. 

PETIT  -  DE  -  BEAU VERGER 
(N.),  fils  du  précédent,  d'abord 
auditeur  au  conseil-d'élat,  obtint 
successivement  la  place  de  secré- 
taice-général  du  gouvernement 
des  villes  anséatiques,  et  celle  de 


PET 

préfet  de  l'Ems- Occidental.  Il 
perdit  cette  dernière  lors  de  l'in- 
vasion des  troupes  étrangères 
en  1814.  Appelé  pendant  les 
cent  jours,  en  181  5,  à  la  préfec- 
ture du  Lot,  il  y  fut  remplacé 
après  la  seconde  restauration^,  et 
n'a  point  rempli  de  fonctions  pu- 
bliques depuis  cette  époque. 

PETIT-D'HAITERIVE  (Pier- 
re), ancien  magistrat,  naquit  en 
1775,  à  Riceys-Hauterive,  dépar- 
tement de  l'Aube.  A  l'époque  de 
la  révolution  il  était  procureur 
au  parlement  de  Paris;  il  s'est 
fait  distinguer  comme  magistrat 
dan.H  les  diverses  fonctions  de 
l'ordre  judiciaire  qui  lui  ont  été 
contiées,  et  notamment  dans  cel- 
les du  mini>tère  public,  qu'il  a  rem- 
plies pendant  les  temps  les  plus 
critiques  de  la  révolution.  Dénon- 
cé à  la  société  des  Jacobins  en 
1795,  par  suite  de  son  refus  d'ac- 
cepter la  place  de  juge  au  tribunal 
révolutionnaire,  il  n'échappa  qu'a- 
vec peine  au  danger  qui  mena- 
çait sa  tête,  (^e  tribunal  ayant  été 
renouvelé  après  le  9  thermidor 
an  3  (27  juillet  1794)»  M-  Petit- 
d'Hauterive  en  fit  partie  connne 
substitut  de  l'accusateur  public  , 
et  se  montra  également  l'ern)e  et 
modéré  dans  la  poursuite  des  cri- 
mes qui  avaient  euj^anglanlé  la 
France.  Ses  réquisitoires  contre 
Carrier  (rojez  ce  nom)  et  le  comi- 
té révolutionnaire  de  Nantes  at- 
testent à  la  fois  l'éloquence  et 
l'impartialité  de  ce  magistrat.  Il 
fut  nommé  commissaire  du  gou- 
vernement près  les  directeurs  du 
jury  (l'accusation,  et  ses  travaux 
utiles  sont  consacrés  par  se»  réqui- 
sitoires et  ses  conclussions  dans  des 
milliers  de  procès  criminels  :  fonc- 
tions d'autant  plus  pénibles  que, 


PET 

«leul  alors,  il  était  chargé  d'un 
travail  partaj^é  aujourd'liui  entre 
16  mogistrats  qui  composent  le 
parquet  de  première  instance , 
et  qu'indépendamment  des  ju- 
ges directeurs  du  jury  d'accusa- 
tion, les  48  juges  de  paix  de  Paris 
se  livraient  àrinslruclion  des  affai- 
res criminelles.  M.  Pelit-d'Haute- 
rive  avait  occupé  différens  em- 
plois, et  était  juge  au  tril)unal  cri- 
minel du  département  de  la  Seine, 
devenu  depuis  cour  de  justice  cri- 
minelle et^spéciale,  lors  de  la  siip- 
pression  de  ces  cours.  N'ayant 
pas  été  appelé  à  faire  partie  de 
la  cour  d'appel,  il  conçut  un  si 
vif  chagrin  de  cet  oubli,  qu'il  y 
succomba  en  1812,  à  l'âge  de  5y 
ans.  Scrupuleux  dans  l'examen 
des  affaires,  inébranlable  dans  la 
ligne  delà  justice,  M.  Petit-d'IIau- 
terive  fut  homme  de  bien,  magis- 
trat intègre,  inaccessibleà  la  crain- 
te et  à  la  séduction.  II  a  laissé  sa 
famille  dans  une  honorable  pau- 
vreté. L'édition  des  luis  criminel- 
les.  impriiriées  par  Sagnier,  lui 
doit  des  recherches  judicieuses 
qui  ont  tourné  en  partie  au  profit 
de  la  léjiislation.  Le  plus  jeune 
de  ses  trois  fils,  sorti  de  l'école 
militaire  de  Fontainebleau,  s'est 
distingué  dans  la  carrière  des 
arme>i.  Depuis  le  retour  du  roi , 
le  second  a  rempli  des  fonctions 
dans  l'ordre  judiciaire  au-delà  des 
mers.  L'aîné,  que  l'état  de  sa  santé 
éloigne  niomentanéinenl  du  bar- 
reau, a  conservé,  parla  noblesse  de 
sa  couduiteet  son  désiiitéresseiTKcnt 
eonniie  avocat, le  plus  précieuxdes 
j)atriiuoiius,  l'honneur  et  la  pro- 
bité. 

PETIT -JEAN    (Madeleine), 
née  à  Paris,  habitait  cette  ville  à 


PET  2o5 

l'époque  de  la  révolution.  Déjà 
mère  de  17  enfans,  en  1793,  elle 
prit  des  habits  d'homme,  et  s'en- 
rôla ,  comme  canonnier,  dans 
l'un  des  bataillons  de  Paris,  desti- 
né pour  la  Vendée.  Elle  se  trou- 
va à  plusieurs  combats,  y  fit 
preuve  de  courage  ,  et  fut  prise 
par  les  royalistes,  qui,  ne  soup- 
çonnant pas  son  sexe,  la  relâchè- 
rent au  bdut  de  quelque  temps. 
La  convention  nationale,  d'après 
un  rapport  de  ses  comités,  ren- 
dit, le  i5  juin  1794?  ""i  décret 
qui  acccordait  à  iMa.leleine  Petit- 
Jean  ,  une  gratification  de  5oo 
livres. 

PETIT-JEAN  (François),  tré- 
sorier des  guerres  à  Toul,  en 
1789,  adopla  d'abord  les  princi- 
pes de  la  révolution;  il  fut  nom- 
mé commissaire-ordonnateur,  et 
employé  en  cette  qualité  ,  puis 
en  celle  de  payeur-général,  dans 
les  armées  que  commandèrent 
successivement  Dumouriez,  Dam- 
pierre,  Custines  et  Houchard.  Il 
devint  l'objet  d'un  grand  nombre 
de  dénonciations,  échappa  à  la 
plupart;  mais  comme  elles  se  re- 
nouvelaient sans  cesse,  il  finit 
par  y  succomber  au  mois  de 
septembre  1793.  A  la  suite  d'une 
longue  détention  à  l'Abbaye,  il 
fut  traduit  au  tribunal  révolu- 
tionnaire, qui  le  condamna  à 
mort,  le  7  mai  1794,  comme 
complice  de  Dumouriez,  et  ayant 
pour  seconder  ses  projets  ,  lais- 
sé sans  subsistances  l'armée  et  les 
places  du  Nord. 

PETIT-JEAN  (N.),  député  à 
la  convention  nationale  par  le 
département  de  l'Allier,  vota  a- 
vec  la  majorité  dans  le  procès  du 
roi;   M.  Petit-Jean    ne  fut  point 


âo6  PET 

réélu  aux  assemblées  suivantes. 
PETITAIN  (Louis -Germain), 
littéraleur,  naquit  à  Paris  le  17 
février  1765,  et  fit  ses  études  au 
collège  iVlazarin.  Les  événemens 
de  la  révolution  le  déterminèrent 
à  se  faire  inscrire  parmi  les  avoués 
près  du  tribunal  civil  du  départe- 
ment de  la  Seine;  mais  il  en  exer- 
ça peu  les  fonctions,  et  préféra  la 
carrière  administrative.  Il  fut  em- 
ployé dans  l'administration  des 
domaines  nationaux,  puis  attaché 
comme  secrétaire  à  Regnault  de 
Saint-Jean-d'Angély  ,  et  à  M.  de 
Corbigny,  préfet  du  département 
de  Loir-et-Cher;  employé  dans 
l'administration  française  de  Trê- 
ves et  deWestphalie,  et  enfin  sous- 
chef  dans  les  bureaux  de  l'octroi 
de  Paris.  Il  occupait  encore  ce 
dernier  emploi  lorsqu'il  mourut 
le  12  septembre  1820.  On  trouve 
dans  le  Journal  de  ta  librairie,  ré- 
digé par  M.Beuchol (année  1820, 
pag.  617-620),  la  liste  des  ouvra- 
ges de  Petilain.  Ce  sont  :  1°  Un 
mot  pour  deux  individus  auxquels 
personne  ne  pense ,  et  auxquels  il 
faut  penser  une  fois,  Paris,  an  3, 
in-8°  :  cet  acte  de  courage  en  fa- 
veur des  enfans  de  Louis  XVI,  fut 
revendiqué,  en  1814  et  en  1818, 
par  MM.  Morcau  de  Mersan ,  et 
Laisné  ^e  Villévêque  ,  mais  la 
priorité  appartient  à  Petitain  ;  2° 
les  Français  à  Cythère,  pièce  hé- 
roïque en  un  acte  et  en  prose,  mê- 
lée de  chants  :  elle  n'a  point  été 
représentée;  l'auteur  la  fit  impri- 
mer, en  1798,  in-8*.  "b"  Mémoire 
sur  cette  question  proposée  par 
l'institut  national  :  l'Emulation 
est-elle  un  bon  moyen  d'éducation? 
ce  mémoire  obtint  la  première 
mention  honorable  dans  la  séan- 


PlET 

ce  publique  de  l'institut  du  1 5 
messidor  an  9  (1801),  et  fut  im- 
primé, dans  la  même  année,  in-8"; 
4°  Quelques  contes ,  par  G.  P. , 
brochure  in-S"  de  i5  pages;  5° 
Annuaires  du  département  de  Loir- 
et-Cher,  pour  les  années  de  1806 
à  1812.  Ces  annuaires,  dit  M. 
Ikuchot,  sont  curieux  et  intéres- 
sans  ;  mais  ils  se  ressentent  du 
caractère  naïf  du  rédacteur.  On 
doit  aussi  consulter  le  journal  de 
ce  savant  bibliographe  sur  l'édi- 
tion que  Pelitain  donna  des  OEu- 
vres  dej.  J.  Rousseau,  Paris,  Le- 
febvre,  22  vol.  in-8%  1819-1820. 
Petitain  avait  travaillé  à  différens 
journaux  et  recueils  périodiques, 
tels  que  la  Décade  philosophique  , 
le  Journal  de  Paris ,  les  Mémoires 
d'économie  publique,  de  morale  et 
de  politique,  rédigés  par  M.  Rœ- 
derery  etc. 

PETIT-RADEL  (Loris-  Char- 
les-François ) ,  littérateur  distin- 
gué et  savant  antiquaire,  admi- 
nistrateur do  la  bil)liolhèque  Maza- 
rine,  membre  de  la  légion-d'hon- 
neur et  de  l'institut,  né  à  Paris  en 
1756.  Il  était  avant  la  révolution 
vicaire  -  général  et  chanoine  de 
Couserans.  Porté  par  ses  goûts  et 
des  études  approfondies  vers  les 
recherches  des  monumensde  l'an- 
tiquité, il  se  rendit,  en  1791,  en 
Italie,  où  il  recueillit  d'immenses 
matériaux  pour  un  ouvrage  sur  les 
monumens  dits  Cyclopéens  on  Pé- 
lasgiques.  Le  savant  Yisconti  , 
dans  sou  rapport  à  l'institut  de 
France  ,  fait  en  1810  au  nom  de  la 
classe  d'histoire ,  sur  les  progrès 
de  la  littérature  ancienne  ,  s'ex- 
prime ainsi  :  «  M.  Petit- lladel  a 
oie  premier  conçu  l'idée  de  dis- 
))tin2:uer  dans  les  diverses  cons- 


PET 

»truclions,  ou  plutôt  substruc- 
')  lions  des  murs  des  vil  les  antiques, 
ries  parties  anciennement  minées 
«qu'on  doit  regarder  comme  ap- 
oparlenant  aux  époques  des  fon- 
»  dations  priuiilives  de  ces  villes. 
))II  montre  que  ces  ruines  formées 
»de  blocs  en  polyèdri  s  réguliers 
»et  sans  ciment,  attribuées  jus- 
»  qu'alors  par  les  antiquaires,  soit 
«aux  Étrusques,  soit  aux  Komains, 
rtsoit  aux  Golhs  et  aux  Sarrazins, 
«sont  les  mêmes  constructions 
»  cyclopéennes  qui  ont  été  décrites 
■)par  les  écrivains  grecs,  et  dont 
«l'origine  remonte  incontestable- 
»ment  à  la  plus  haute  antiquité; 
'•d'où  il  conclut  que  ces  construc- 
»  tions  étant  semblables  et  dans 
«les  assises  inférieures  des  murs 
))des  plus  anciennes  villes  de  la 

•  Grèce,  et  dans  celles  des  murs 
«des  anciennes  bourgades  de  l'I- 
'italie,  il  doit  s'ensuivre  que  plu- 
"sieurs  de  ces  monumens  furent 
»  l'on  vr.ige  des  antiques  dynasties 
»  auxquelles  les  anciennes  tradi- 
II  tions  recueillies  par  Dcnysd'Ha- 

•  licarnasse  attribuent  la  civilisa- 
olion  primitive  de  ces  contrées.  ) 
L'inslitiit  national  s'empressa  d 'ad- 
mettre M.  Petit- Uadel  au  nombre 
de  se»  membres  (en  1806),  après 
la  communication  des  Mémoires 
manuscrits  de  ce  savant  biborieux. 
Ils  ne  furent  point  en  entier  livrés 
à  l'impression  ,  mais  le$  difiérens 
extraits  qui  en  furent  connus  du 
public,  ainsi  que  les  questions  et 
éclaircissemens  auxquels  ils  don- 
nèrent lieu  ,  mirent  d'autres  voya- 
geurs sur  la  voie.  Les  résultats 
des  nombreuses  recberrhes  de 
M\l.  Clarke  Dodwell  et  Gell,  An- 
glais, et  de  iMM.  Cboiseid-Gouf- 
ûer,  Fauvel  et  Pouqueville,  Tran- 


PET 


20! 


çais ,  qui  ont  eu  pour  objet  plus 
de  240  monumens  de  construction 
cyclopéenne,  sont  tn  faveur  du 
système  de  M.  Petit  Radel ,  et 
confirment  ses  découvertes.  On 
devra  sans  doute  aux  eflorts  réunis 
de  ces  savans,  des  connaissances 
plus  précises  et  quelques  degrés 
de  certitude  de  plus  ,  sur  certains 
points  inléressans  de  l'bistoire  an- 
cienne. Les  autres  ouvrages  pu- 
bliés par  M.  Petil-Radel  sont  : 
1°  Notice  historique  et  comparée 
sur  les  aqueducs  des  anciens ,  et  la 
dérivation  du  canal  de  l'Ourcq, 
i8o3,  in-8";  2°  Explication  des 
monumens  antiques  du  musée^  édi- 
tion de  Piranesi,  1804  et  1806, 
4  vol.  {0-4°  ;  «5"  Mémoire  sur  l'o- 
rigine grecque  du  fondateur  d' Ar- 
gos,  inséré  dans  le  Recueil  de  ia 
classe  d'histoire  et  de  littérature 
ancienne  de  l'institut.  Les  mé- 
moires suivans  ont  été  lus  par 
l'auteur  à  la  même  classe  ,  et  font 
partie  du  même  recueil  :  1"  Mé- 
moire sur  les  monumens  relatifs 
aux  origines  de  l'Jrgolide ,  de 
l'Attijue  et  de  la  Béotie;  sur  le 
premier  livre 'des  Antiquités  ro- 
maines de  Denys  d' Halicarnasse  , 
et  sur  l'autorité  de  cet  historien; 
sur  les  monumens  pélnsgiques  cités 
par  Varron.  1"  Sur  les  murs  anti- 
ques de  Tarragone  et  de  Barcelone, 
et  sur  les  H omonymies  géographi- 
ques communes  à  diverses  contrée» 
des  côtes  d'Etrurie  et  d' Es  pagne  ;'b'' 
Sur  le  Ceratonia  siliqua,  et  ses  rap- 
ports avec  la  fête  funéraire  des  an- 
ciens ;  sur  le  rameau  de  l' Eiresione. 
4"  Sur  l' origine  des  anciennes  ar- 
moiries de  la  ville  de  Paris;  5°  sur 
les  anciens  Russes  ou  Roxolans ,  et 
sur  la  chronique  de  Nestor.  Il  a  aus- 
si publié  des  Recherches  sur  les  Bi- 


2o8 


PET 


bliothèques anciennes  fSulv'ies  d'une 
notice  historique  sur  la  Bibliothèque 
Mazarine,  Paris,  1818,  in-8". 

PETIïOT  (Claude- Bernard), 
homme  de  lettres,  né  à  Dijon  le 
3i  mars  1773.  Après  avoir  fait  de 
bonnes  études  an  collège  de  cette 
ville,  il  vint  à  Paris  en  1790,  et 
ne  s'y  occupa  que  de  littérature 
jusqu'en  1800,  époque  à  laquelle 
il  fut  nommé  chef  du  bureau  de 
l'instruction  publique  à  la  préfec- 
ture de  la  Seine.  Ayant  quitlé 
cette  place  en  1804,  il  n'avait  rem- 
pli aucune  fonction  publique  pen- 
dant quelques  années,  quand  son 
ami,  M.  de  Fontanes,  le  fit  nom- 
mer, en  1809,  inspecteur-géné- 
ral de  l'université.  Il  fut  ensuite 
chargé  de  plusieurs  missions  dans 
les  déparlemens,  pour  régler  et 
coordonner  les  études  dans  les  é- 
tablissemens  publics,  et  s'en  ac- 
quitta avec  zèle.  Pendant  l'époque 
des  cent  jours  en  i8i5,  iM.  Peti- 
tot  donna  sa  démission  de  la  place 
d'inspecteur-général.  Au  second 
retour  du  roi,  il  fut  nommé  se- 
crétaire-général de  la  commission 
d'instruction  publique,  et  fut  ap- 
pelé, en  182Î  ,  à  faire  partie  du 
conseil  royal  de  l'université,  pos- 
te qu'il  occupe  encore  aujourd'hui 
(1824)-  Il  débuta  dans  la  carrière 
littéraire  par  plusieurs  tragédies  : 
la  première ,  la  Conjuration  de 
Pison ,  en  1790,  n'eut  point  de 
succès  ;  la  seconde,  Geta  et  Cara- 
calla,  1797,  eut  quatie  représen- 
tations; et  la  troisième,  Laurent 
de  Médicis.  en  1799,  en  eut  douze, 
qui  ne  furent  interrompues  que 
par  suite  de  riucendie  do  théâtre 
de  l'Odéon.  M.  Petitot  a  publié 
depuis  :  l'une  traduction  élégiui- 
Ic  et  correcte  des  Tragédies  d'Jt- 


PET 

fieri ^  1802,  4  vol.  in-S";  2°  une 
nouvelle  édition  de  ta  Grammaire 
générale  de  Port-Rojal  >  avec  les 
notes  de  Duclos,  et  précédée  d'un 
essai  sur  l'origine  et  les  progrès 
de  la  langue  française,  i8o5,  un 
voL^n-S"  :  cet  ouvrage  a  été  réim- 
primé en  1810;  3°  chargé  par  M. 
de  Fontanes  de  la  rédaction  du 
Mercure  de  France,  M.  Petitot 
travailla  à  ce  journal  jusqu'en 
1809;  [^  Répertoire  du  Théâtre- 
Français,  avec  des  notices  sur  les 
auteurs  et  un  examen  de  chaque 
pièce,  23  vol.  in-8"  :  cette  collec- 
tion, fort  augmentée,  a  été  réim- 
primée en  1818,  33  vol.  in-8";  5' 
Œuvres  choisies  et  posthumes  de 
La  Harpe,  édition  originale  d'a- 
près les  manuscrits  autographes 
de  l'auteur,  i8o6,  4  '^ob  111-8";  6" 
une  édition  stéréotype  dos  OEu- 
vres  de  Jean  Racine,  avec  les  va- 
riantes et  les  imitations  des  au- 
teurs grecs  et  latins,  5  vol.  in-S"; 
7°  une  traductior)  élégante  et  fidè- 
le des  Nouvelles  de  Michel  Cer- 
vantes, 4  vol.  in-i8;  8°  une  édi- 
tion stéréotype  des  Œuvres  de 
Molière^  précédée  de  la  vie  de 
l'auteur  avec  des  réflexions  sur 
chaque  pièce,  1812,  6  vol.  in-8''. 
les  connnentaires  et  remarques 
judicieuses  de  l'éditeur  donnent 
un  nouveau  prix  à  cette  édition  ; 
9"  M.  Petitot  commença,  en  1819, 
la  publication  des  Mémoires  rela- 
tifs à  l'Histoire  de  France;  cette 
collection  est  divisée  en  deux  sé- 
ries :  la  première  contient  plus 
de  quarante  ouvrages,  et  commen- 
ce à  Philippe-Auguste,  se  termi- 
nant aux  premières  aimées  du  1 7"" 
siècle.  Cette  partie  est  presque 
entièrement  terminée,  et  il  s'en 
publie    maintenant    (1824),    ime 


PEÏ 

nouvelle  édition.  La  seconde  sé- 
rie se  compose  d'un  nombre  de 
pièces  à  peu  près  égal;  elle  com- 
mence au  règne  de  Henri  IV,  et 
va  jusqu'à  celui  de  Louis  XV  itj- 
clusivemenl.  11  en  a  déjà  paru  5o 
volumes  en  mai  1824-  Ce  monu- 
ment, élevé  aux  fastes  de  la  mo- 
narchie française,  est  une  entre- 
prise vraimeut  nationale,  et  tous 
ceux  qui  voudront  désormais  ap- 
proioudir  l'histoire  de  leur  pays, 
ou  en  traiter  quelque  partie,  trou- 
verout  un  guide  sûr  et  une  sour- 
ce abondante  d'instruction  dans 
cet  immense  recueil  de  maté- 
riaux. 

PÉTRASCH  frE  babon  de),  l'eld- 
maréchal  aulri<;hie[i ,  issu  d'une 
famille  noble,  entra  de  bonne 
heure  dans  la  carrière  militaire, 
s'y  distingua,  obtint  un  avance- 
nn-nt  rapide,  et  fut  employé,  en 
1790,  à  l'armée  des  Pays-Bas,  a- 
vec  le  grade  de  général -major.  Le 
baron  de  Pélrasch  se  conduisit  a- 
vec  beaucoup  de  bravoure  pen- 
dant cette  campagne,  et  se  fit  par- 
ticulièrement remarquer  à  l'alFai- 
re  de  Jiohaiu,  le  17  avril.  Au  com- 
mencement de  1794»  il  reçut  le 
grade  de  maréchal-lieutenant  et  le 
commandement  de  Manheim.  Les 
Français  venaient  de  pénétrer  en 
Franconie  et  en  Bavière.  Dans  le 
mois  de  décembre  de  la  même  an- 
née, le  baron  de  Pétrasch,  pro- 
fitant (Wiu  échec  que  venait  d'é- 
prouver l'armée  de  .lourdan,  sor- 
tit de  Manheim  à  la  tête  de  sa  gar- 
nison, et  força  im  petit  corps  fran- 
çais à  se  retirer  de  Brtischal.  (le 
sucrés  facilita  la  jonction  de  la 
garnison  de  Philisbourg  avec  la 
sienne;  le  renfort  d'un  corps  de 
cavalerie,  qui  lui  fut  envoyé  de 

T.  XVI. 


PET 


209 


la  grande-armée  par  M.  de  Meer- 
feld ,  le  mit  à  même  de  faire  un 
mouvement  sur  Kehl.  Il  empor- 
ta d'abord  la  plus  grande  partie 
des  retranchemens  ;  mais  la  belle 
défeiise  de  quelques  bataillons 
français  qui  occupaient  les  der- 
nières redoutes,  en  retardant  la 
prise  du  fort,  leur  donna  le  temps 
de  recevoir  des  secours.  Alors  les 
Autrichiens  furent  repoussés  avec 
perte  jusqu'à  Bischofsheim.  Après 
cette  tentative  infructueuse,  le  ba- 
ron de  Pétrasch  se  dirigea  sur 
Stultgard,  et  de  là  sur  Vilingin  et 
Doneschingen  ,  dans  l'intention 
d'opposer  des  obtacles  à  la  retraite 
du  général  Moreau.  Ln  nouvel  é- 
chec  le  força  de  se  retirer;  il  eut 
le  Commandement  de  la  forteresse 
d'Ulm  en  iSoo.  Il  mourut  l'année 
suivante. 

PETB.ONI  (Etienne  Ecinio) , 
né  le  i5  novembre  1770,  à  San- 
Feliciano,  sur  les  bords  du  ïrasi- 
mène ,  à  4  lieues  de  Pérouse. 
Après  avoir  fait  ses  études  à  l'u- 
niversité de  cette  ville,  il  passa  à 
Sienne  et  à  Florence,  où  il  se 
trouvait  à  l'époque  de  la  premiè- 
re invasion  française  en  Italie. 
Prenaivt  part  aux  mouvemens  de 
la  révolution  en  Lombardie ,  il 
fut  entraîné  dans  la  chute  de  la 
république  Cisalpine,  et  obligé  de 
venir  chercher  en  France  un  re- 
fuge, qu'il  ne  quitta  qu'après  la 
bataille  de  Marengo.  Voulant  cé- 
lébrer le  triomphe  <iui  avait  sous- 
trait son  pays  au  joug  autrichien, 
il  imagina  d'écrire  un  poëme  dont 
leplan  fut  trouvé  plusheureuxque 
l'exécution.  La  Napoléonide,  qui 
ne  parut  qu'en  i8io,  se  compose 
de  cent  médailles  re[)résentant  les 
principaux  exploits  de  Bonaparte, 
>4 


210  PET 

et  d'autant  d'odes  qui  les  expli- 
quent. Ces  médailles,  dessinées 
dans  le  gcûl  antique  et  accoinjja- 
gnées  de  légendes  latines,  ruppel- 
Fent  toute  la  vie  militaire  et  poli- 
tique de  Napoléon  jusqu'à  la  paix 
deTilsilt.  L'année  suivante,  l'au- 
teur donna  une  traduction  italien- 
ne des  tables  de  La  Fontaine,  qui 
ne  plut  ni  aux  Italiens,  ni  aux  Fran- 
çais :  ce  manque  de  succès  peut 
être  excusé  par  la  difficulté  de 
l'entreprise,  car  il  est  presque  im- 
possible de  taire  passer  dans  une 
autre  langue  cette  naïveté,  qui 
forme  le  caractère  principal  du 
iabidisle  français;  elle  a  trop  d'o- 
riginalité pour  espérer  de  la  con- 
serveç  dans  une  copie.  M.  Petroni 
est  actuellement  (1824)  à  Londres, 
où  il  s'occupe  de  la  confection  d'un 
nouveau  dictionnaire  italien-fran- 
»;ais  et  anglais.  Ses  ouvrages  sont: 
i"  Poésie  dioerse,  Italie,  2  vol.; 
2*  Dissertazioni  e  prose  accadcrni- 
clie,  ibid.,  un  \(A.  ;  3°  la  Socielà, 
l'Amicizia  e  laReligione,  poëmes, 
ibid.,  un  vol.  ;  4°  '^  Nozze  di  Sara 
<jTo6m,i,épithalame,ibid.,  un  vol.; 
5°  le  Muselière,  poésies,  ibid.,  un 
vol.  ;  6"  la  Napoleonide,  poëme 
lyrique-nunjisniatique,  iri-4",  iu- 
fol.  et  in-S",  trois  édilions.  Ma- 
pies  et  Paris,  1810;  7°  Ritratti 
storico  -  poetici  de'  soggetCi  più 
noti  délia  bibbia,  Italie  ,  4  ^'t''- 
iu-S";  8*  Proverbj  di  Salomoue, 
Naples,  in-4",  et  Paris,  in-8",  avec 
le  texte  de  la  Fulgate,  et  une  tra- 
duction italienne  ;  9°  T raduzione 
in  versi  di  treiitadue  favnle  di  Pe- 
dro, naovamente  scoperle,  Paris, 
\n\  vol.  in-H°,  avec  une  préface  de 
(îinguené  et  une  tradiicli'tîi  iVan- 
çaise  de  Biagioli  ;  10"  la  Fcdru  e 
i' Andromaca ,    trad.    de  Racine, 


PET 

Paris,  un  vol.  IutS";  ii*  l'Amor 
conjugale,  poëme,  ibid.,  in-4°; 
12"  Cantate,  epitalamj  ed  opère 
série  teairali,  Italie,  un  vol.  ;  i5" 
Traduzione  in  versi  di  lutte  le  fu- 
vole  di  La  Fontaine,  Paris,  4  vol., 
avec  le  texte;  i4*  Gesta  navali 
britlanichc  dut  grande  Alfredo, 
sino  a  questi  ultinii  tempi,  poëme 
de  .^)0  chants,  Londres,  2  vol.  in- 
4  "  ;  1 5*  Dante,  Ariosto  e  Tasso  : 
c'est  un  abrégé  de  la  vie  de  ces 
auteurs,  avec  une  analyse  de  leur» 
poëmes,  ibid,  ,  in-8"  ;  i()"  Nuovo 
dizionario  ituLano,  inglese  e  fran- 
cese ;  on  y  m.irquera  pour  la  pre- 
mière fois  la  prononciation  exac- 
te de  chaque  mot  de  la  langue 
ilaliennc  :  il  est  sous  presse  à 
Londres. 

PETROWITZ  (Pierre),  évo- 
que et  prince  des  Monténégrins, 
peuple  belliqueux  qui  professe 
la  religion  grecque  et  habite  les 
montagnes  de  l'Albanie.  A  l'exem- 
ple de  ses  prédécesseurs  ,  Petro- 
witz  se  constitua  le  défenseur  de 
l'indépendance  de  sa  nation.  Dans 
l'inléiêt  de  ses  concitoyens,  et 
suivant  les  inspirations  d'une  po- 
liti(jue  habile, il  rechercha  toar-à- 
tour  l'alliance  îles  Russes,  des 
Serviens  et  des  'iurcs.  En  18 1  5, 
il  sollicitait  auprès  du  gouverne- 
ment autrichien  l'indépendance 
de  la  république  de  Uaguse.  Des 
négociations  étaient  entamées  à 
cet  égard,  et  déjà  le  CQugrès  do 
Vienne  s'en  occupait,  lorsqun 
tout-à-coup  il  s'empara  par  sur- 
p.rise  de  la  ville  et  du  territoire 
de  llaguse.  On  est  à  peu  près 
convaincu  que  dans  cette  entr<f- 
prise  l'évêque  dcîs  Monténégrins 
fut  favorise  par  la  Porie-Oltcuna- 
ne;  cepeodant  il  n'avait  point  as- 


PET 

sei  de  forces  pour  conserver  celte 
cnnciuT-le,  qui  bienlôl  lui  lïit  en- 
levte.  Pétrowitz  a  dû  depuis  unir 
sa  cause  à  celle  des  Grecs,  ses 
compatriotes.  , 

FETRL'S-MALS,  fameux  chef 
de  brigands  allemands,  généiale- 
lïient  connu  s-oiis  le  nom  ^i^i Pier- 
re Le  fort ,  naquit  à  ÎSoremberg 
en  i^'SS,  d'une  fatuille  [)auvre.  A 
17  ans  il  s'enrôla  comme  soldai; 
mais  les  désagrtrnens  d'un  servi- 
ce Irè^-rnde.  et  ^urfout  les  coups 
de  bâton,  le  dégoûlèrent  bitnlôt 
de  cet  état.  Il  dé.-erta  et  se  réu- 
nit à  une  bande  de  Bohémiens 
ol  de  voleurs,  dont  son  intrépidi- 
té et  sa  force  le  firent  bientôt  de- 
venir chef.  Celte  troupe  se  rendit 
redoutable  sous  ses  ordres,  et 
se  signala  pendant  plusieurs  an- 
nues ,  par  ses  brigandages;  elle 
npundit  la  terreur  et  l'ciVroi,  d'a- 
bord sur  les  rives  du  Rhin,  puis 
successivement  sur  les  frontières 
de  l'Italie,  de  l'Espagne  et  de  la 
France.  Petru,«-l\laus  parlait  avec 
facilité  la  langue  des  t»avs  (ju'il 
parcourait,  et  savait  s'introduire, 
dans  les  grande»  villes,  au  seiu 
des  socittés  les  plus  brillantes, 
toujours  sous  le  nom  de  quelque 
seigneur  étranger.  On  raconte  de 
lui  des  choses  qui,  quoique  Irés- 
vraies,  ressemblent  parlaitemenl 
à  des  aventures  de  roman.  Il  s'é- 
tait associé  avec  Herman  -  h- 
Grnvd ,  autre  chef  de  brigands, 
non  moins  fameux  ;  celui- ci  fut 
pris  par  les  Français,  condamné 
à  moi t  et  exécuté  à  Hambourg; 
mais  Petrus-Maus  sut  échapper  au 
dangerqui  le  menaçait, après  avoir, 
dans  diverses  attaques  dirigées 
contre  lui,  donné  des  preuve»  d'u- 
ne  valeur  indomptable.  Sa  trou - 


PEU 


au 


pe  se  trouvait  pre-qne  dispersée; 
il  en  rallia  les  débris,  et  Cf  num't 
de  nouveaux  excès  dans  q;  elques 
provinces    de  l'Allemagne   et  de 
la  Pologne  ;  enfin  il  fut  pris  dans 
les  environs  de  Lubeck,  en  )8i8. 
Condamné    à  mort,  il    fut    exé- 
cuté dans  la  même  année  à  Stoc- 
kelsdorff;  il  était    â^é  de  65  ans. 
PELCHET  (Jacques),  homme 
de  leUros,  est  né  à  Paris  en   1760. 
11  fil  des  éludes  distirgnées  au  col- 
lège des  Crassiii'*.  el  fut  reçu  maî- 
tre ès-aris  in  l'université.  Après 
avoir  étudié  quelque  temp.»  la  mé- 
decine, il  suivit  les  cours  de  droit, 
et  devint  avocat.  Jusqu'en   1786, 
il  resta  étranger  aux  affaires  pu- 
bliques. S'ctant  lié  alors  avec  l'ab- 
bé L>lorellet,  il  s'occupa  de  matiè- 
resd'économie  politique, el  travail- 
la aux  mémoires  contre  la  nouvel- 
lec<)mpagnie  des  Indes,  dont  W.  de 
Cidonne  venait  de  rét.iblir  le  pri- 
vilège.   Le   gouverru;ment    faisait 
4,000    francs    de    fonds     aruujels 
pour  la  rédaction  d  un  Dictionnai- 
re  univenct  de  commerce;   Tabbé 
Morellet,  qui  en  était  chargé,  y  at- 
tacha M.   Piuchel;  mais  ii  mor- 
gue et   la  huulenr  de  l'académi- 
cien ne  permirent  pas  à  M.   Peu- 
chel  de  travailb  r  lon^-lemps  avec 
lui.    Il   se  retira  de  sa  société  et 
prit  par'  aux  travaux  de  V Euryclo- 
pédie  metltodique,  doul  il  fit  la  par- 
tie de  la  police  et  municipalité,  a 
vol.    in- 4".    Les  deux  assemblées 
des  notables  de  1787  et  17^8.  fu- 
rent l'occasion  |iour  lui  de  travaux 
administratifs;   il  fut  8m',ce>sive- 
ment  employé   par  M.  de  Calon- 
ne  et  l'archevêque  de  Sens.   Mais 
ayanl  marqué  de  Toppositiun  aux 
opinions  de  ce  dernier  sur  l'affai- 
re du  parlement,  il  cessa  d'être 


2  13 


PEU 


occupé  par  le  minisire.  La  coii- 
vocalion  des  assemblées  électora- 
les pour  la  tenue  des  élals-géné- 
raux  en    1789,   le  fit  entrer  dans 
les  fonctions  publiques.  Successi- 
vement électeur,  représentant  de 
la  commune,  il  fut  nommé  un  des 
membres  de  l'adminislralion  mu- 
nicipale au  département  de  la  po- 
lice, qu'il  géra  depuis  septembre 
1789  jusqu'au  mois  d'août  de  l'année 
suivante,  époque  où  de  nouveaux 
membres  furent  nommés.  M.  Peu- 
eliet,  qui  avait  figuré  dansles  rangs 
des  plus  zélés  réformateurs,  adop- 
ta, après  les  scènes  des  5  et  6  oc- 
tobre, un  système  de  modération 
qui   le  classa  parmi  les  patriotes 
monarchiques.  Il  se  rapprocha  de 
la  f;our,  et  eut  pour  ami  particu- 
lier iM.   de  Montmorin,   ministre 
des    affaires   étrangères,    qui    lui 
dorma,  avec  l'agrément  du  roi,  en 
1790,   la  rédaction  de  la  Gazelle 
officielle  de  France  :  iMallet-Dupan 
ayant  reçu  l'année  suivante  une 
mission  de  Louis  XVI  auprès  des 
princes  en  Allemagne,   M.    Peu- 
chel  fut  aussi  cbaigé  de  la  rédac- 
tion de  la  partie  politique  du  Mer- 
cure de  France,   recherché  alors 
pour  la  vigueur  avec  laquelle  on 
y  défendait  la  personne  du  roi  et 
les  principes  de  la  liberté  consti- 
tutionnelle.   L'événement   du    10 
aoftt  renversa  l'existence  p(dilique 
et  littéraire  de  M.  Peuchet;  il  cou- 
rut risque  de  la  vie.  Arrêté  quel- 
ques jours  après,  il  fut  bienlôt  re- 
mis en   liberté,   et  se  retira  à  la 
campagne  dans  le  départertient  de 
Seine-ot-Oi.-e  ;  il  fut  appelé  à  l'ad- 
ministration du  district  de  Gones- 
se  d;ins  le  temps  de  la  terreur.  La 
«constitution  de   l'an  3  ayant  été 
mise  en  activité,  le  ministre  de  la 


PEU 

police  le  fit  venir  à  Paris,  pour 
lui  donner  la  direction  du  bureau 
des  lois  et  des  matières  conlen- 
lieuses  sur  les  émigrés,   les  prê- 
tres et  les  conspirateurs.   La  mo- 
dération, la  justice,  l'indulgence 
qu'il  apporta  dans  cette  place  im- 
portante,  le  firent  beaucoup  re- 
gretter lorsqu'il  fut  compris  dans 
les  proscriptions  qui  sniviient  le 
18  fructidor  an  5,  Dans  sa  reli-ai- 
le  forcée,  M.  Peuchet  s'occupa  de 
son  grand  travail  de  la  Géographie 
commerçante,  qu'il  ne  livra  à  l'im- 
pression qu'en  l'an  8,  5  vol.  in-4'*. 
Cette   production,  qui  annoufail 
des  connaissances  en  matière  de 
commerce  et  d'économie  politi- 
que, le  fit,  l'année  suivante,  nom- 
mer par  le  ministre  de  l'intérieur, 
M.  Chaptal,  membre  du  conseil  de 
commerce  et  des  arts,  où  il  resta 
jusqu'au      changement     survenu 
dans  l'organisation  de  ce  conseil 
sous  les  ministres  suivans.  Le  con- 
seiller-d'élal  directeur  des  droits 
rénni'^,  l\l.  Français  de  Nantes,  qui 
aimait  à  protéger  les  lettres  et  les 
sciences  dans  ceux  qui  les  culti- 
vaient,  donna  à  M.   Peuchet  une 
place   dans  son   administration  ;\ 
Paris.  Il  la  conserva  jusqu'au  réta- 
blissement du  gouvernement  royal 
en    1814.    Nommé  alors   censeur 
des    journaux   jusqu'au    20    mars 
i8i5,  il  obtint,  après  la  seconde 
restauration,  uii  emploi  qu'il  oc- 
cupe encore  aujourd'hui  (11S24), 
de  chef  de  bureau  à  la  préfecture 
de  police.  Ilestauleurd<;  beaucoup 
d'ouvrages  contms  et  d'un   assez 
grand  noird)re  d'anonymes.  Voici 
la  liste  de  quehpies-uns  :  1"  Expo- 
sition de  la  gestion,    1792,   in-S"; 
'ï"De  la  classification  des  Lois,  1 795, 
in-8";  5"  Vocabulaire  des  termes 


PEU 

de  commerce j  in- 4°  et  in-8*;  4' 
Uu  Commerce  des  neutres  en  temps 
de  guerre,  tiaduction  de  l'italien, 
de  Lîiinpirdi ,  in-8",  1801;  5°  Sta- 
tistique élémentaire  de  la  France, 
in-S",  i8o5;  6°  Considérations  sur 
l'utilité  du  rétahUssemcnt  de  la  fran- 
chise du  port,  de  la  ville  et  du  terri- 
toire de  Marseille,  in-8°,  1800;  7" 
Collection  des  lois,  ordonnances  et 
rég/emens  de  police,  depuis  le  i3' 
sièilejusgu'éi  l'année  1818:  les  trois 
premiers  volumes  de  la  2*  série 
commençant  en  i6;Jj',  parurent 
celle  même  année  1818;  8"  Bi- 
bliolhèque  commerciale ,  ouvrage 
périodique,  entrepris  sous  la  pro- 
tccliGn  du  ministre  de  l'intérieur 
en  1801,  et  suspendu  à  l'époque 
du  blricus  continental  :  cet  ouvra- 
ge périodique  avait  eu  un  grand 
succès.  Il  a  contribué  puissam- 
ment à  la  création  et  aux  premiers 
succès  du  Moniteur,  qu'il  a  enri- 
chi de  nombreux  articles,  et  au- 
quel il  travaille  encore.  On  assu- 
re que  M.  Peuchet  s'occupe  de  ses 
Mémoires,  que  ses  liaisons  avec 
la  cour  de  Louis  XVI,  et  les  fonc- 
lious  qu'il  a  remplies  à  la  nnini- 
cipaliié  et  à  la  police,  doivent  ren- 
dre intéressaus  et  précieux. 

PEUVEKGIJE  (N.),  député  à 
la  convention  nationale,  où  il  lut 
nommé  par  le  déparlement  du 
Cantal,  y  montra  de  la  sagess»; 
et  de  la  niodéralion;  dans  le  pro- 
cès du  roi ,  il  vota  la  détention  et 
le  bannissement  à  la  paix.  Il  ne 
prit  aucune  part  aux  discussions 
qui  suivirent,  et  donna  jnême  sa 
démission  peu  de  temps  après. 
Il  retdiunail  dans  ses  foyers  lors- 
que l(;s  autorités  de  Nevers  le  fi  • 
rent  arrêter  ;  mais  la  convention 
nationale,  instruite  de  cet  événc- 


PEY  2i5 

ment,  ordonna  par  nn  décret  la 
mise  en  liberté  do  M.  Peuver- 
gue ,  qui,  depuis  celte  époque, 
n'a  plus  reparu  sur  la  scène  po- 
litique. 

PEYMANN  ,  général  danois  , 
commandait  à  Copenhague,  lors- 
que les  Anglais  vinrent,  en  1808, 
attaquer  inopinément  cette  ville, 
qui,  surprise  et  mal  pourvue  de 
moyens  de  défense,  ne  put  oppo- 
ser qu'une  faible  résislance  aux 
envahisseurs.  Après  avoir  vidé  les 
arsenaux  et  les  magasins  bien  four- 
nis de  la  marine  danoise,  cette 
expédition  de  flibustiers  s»;  termi- 
na, comme  on  sait,  par  la  capture 
de  tons  les  vaisseaux  de  ligne, 
frégates  et  autres  bâiimens  de 
guerre  qui  se  trouvaient  dans  le 
port  de  Copenhague,  et  qui  fu- 
rent conduits  comme  de  bonne 
])rise  dans  les  ports  de  la  Grande- 
Bretagne.  Le  général  Peymann , 
ainsi  que  plusieurs  autres  officiers, 
fut  traduit  devant  une  cour  mar- 
tiale ,  pour  n'avoir  point,  selon 
l'acte  d'accusation,  rempli  dans 
cette  circonstance  tons  les  de- 
voirs que  loi  imposait  le  po^le 
intportanl  qui  lui  avait  élé  confié. 
Après  une  longue  procédure  la 
coi;r  le  déclara  l'oiipable  »  de  n'a- 
voir pas  suivi  en  tous  points  les 
inslrutUions  du  prince  royal  (le 
roi  Frédéric  VI  d'aujourd'hui); 
de  n'avoir  pas  fait  les  derniers  ef- 
forts pour  la  défense  du  port  et 
de  la  ville,  soit  en  ne  s'opposant 
pas  à  la  descente  de  l'etniemi,  soit 
en  ne  faisant  pas  les  sorties  qu'il 
aurait  dû  faire,  soit  en  négligeant 
d'établir  des  retranchemeus  au- 
devant  de  la  place;  en  ne  se  ser- 
vant pas  de  l'artillerie  de  la  mari- 
ne ;    en  laissant  le  général   Cas-. 


3i4  PEY  PEV 

tenskjcelc]  sans  canons  ot  sans  mu-  in-R";  2'  édition,  1808,  2  vol.  in- 

nilions;  enfin  en  c<'4)iHilanl  sans  8%  avec  5oo  figures,   a  été  citée 

nécessité  iiigt-nlc.  et  liviaiil  aiivsi  avecéingc  dans  le  rapport  de  l'ins- 

la  flotte  danoise  à  l'ennemi.  »  Le  titiit  impérial  sur  les  prix  décen- 

tribunal  le   condamna  en   (  onsé-  nanx  :  <>  C'est  la  seule  complète, 

quence  à  la  p(  ine  de  mort.   Mais  «di-ent  les  rapporteurs,  qui  exis- 

la  sentence  fut  connnuée  au  nom  «te  en  IVancais  du  plus  grand  géo- 

du  roi,  par  le  prince  royal.  »t  le  )>mèt!-e  de  l'antiquité.  >  Outre  cet 

géner.d  dut  subir  une   detenliou  ouvrage,  on  lui  doit  :  1"  r/^ /a  A'^a- 

perpétuelle  dans  une  lorleresse  de  lare  et  de  ses  lois ,  f^"  édition  ,  in- 

l'état;  cetlepeine  fut  aussi  mitigée  8    et  in-i8,  an  2  de  la  république 

au  bout   de  quelque   temps.    Il  a  (i;94);   2°  Cours  de  mathémati- 

été  remis  en  libeité  depuis;  mais  r/ues  à  l'usage  de  la  maritie  et  de 

la    défense    de  porter  l'uniforme  l'urllllcrle,  par  Bczout  :  celte  édi- 

lui  a  été  intimée.  diîion.  augmentée  et  revue  avec 

PEYNÏEK  (le  comte  de)  ,  chef  soin,  parut  en  4  vol.  in-8",  1798- 

d'escadre, était  à  l't  poipie  de  la  ré-  1 1799  ;  la  quatrième  édition  e-t  de 

volulion  gouveineiir  .le  .Saùit-Do-  1801;  5°  traduction  de  l'ouvrage 

mingue,   où  sa  conduite  feiine  et  de  H    C.  Agrippa,  intitulé  :  de  la 

prudente  re(ar<la  long-temjis   les  Supérlorlti'  de  la  fcmiite  sur  l' kom- 

malheurs  qui  depuis  ace  iblèrent  lue;  4"  traduction  par  1  abbé  Bat- 

cettecolonie.  Lesmesuresqu'ilprit  teiix  e(  Peyrud  des  Poésies  com- 

poury  maintenirla  Iranqudlilefii-  plètes  d' Horace ,  texte  en  regard, 

lent  approuvée»  jiar  un  décretren-  i8ii5,  2  vol.  iii-12;  5    traduction 

du  en  I  j"9opari'assemldée  natioua-  liiterale  des  Elémens  de  géométrie 

le.    T)e   reloiif  en  France   l'année  d' IhicUde ,  avec  des  tiotes,  1804, 

suivante,  au  moment  de  l'émigra-  in-8°  ;  ii"  Alphabet  français,  in-8", 

lion  de  la  plupart  des  piin(;i[)aux  i8o5;  7"  Supplément  à  la  traduc- 

ollieiers  de  l.i  n)ariue.  il  reçut  le  tion    de    la    géométrie    d'EucUde , 

counnandement    de    l'escadre  de  i^n)^  ux--^";  ^''  Statique  géométri- 

iîvtt^\  \  ma. s  le    réiablissement   de  que,  démontrée  à  la  manicre  d' Ar~ 

la  diseipiiue    reutlait  celte    lâche  cliimède,   t8  1  2,  in-S";  n)"  Œuvres 

dilïiijle  à  reujplir,  et  les  désagré-  d'Eurlide:  cette  tra<luction  est  é- 

meus  qu'il  éprouva  le  déterminé-  gaiement   citée    avec    distinction 

renl    à    duuuer   sa    démission    et  d<ms  le  rapport  de  l'institut  sur  les 

à    -e    retirer    au    sein    de    sa    fa-  piix   décennaux.    Avec  des   titres 

mille,   où  il  mourut  quelques  an-  aus-i  recommandables,  on  s'éton- 

nées  après.  ne  (pie  M.  Peyrard  n'ait  point  fait 

PKYRAllD  (F,),  pntfesseur  de  partie  de  l  institut, 
irsathénuitiques  et  traducteur,  an-  l'EYIlE  (N.),  membre  de  la 
cien  bibliothécaire  de  l'école  Po-  convention  nationale,  fut  îiommé 
lyte(  huique,  a  composé  ou  traduit  à  cette  assemblée  au  mois  de  sep- 
plusieurs  ouvrages  Irès-esliuu'js.  teudire  1  ^92,  par  le  départemetit 
Sa  traduction  liltér  de  des  OEa~  dss  Basses-Alpes,  H  se  rémiil  à  la 
rrcs  complètes  d' Archimède ,  avec  majcuilé  dans  le  procès  du  roi,  a- 
commcntaires,  i"ùiilion,  1807,  près  avoir  été  luutcf.da  de  l'avis 


PEY 

de  l'appel  an  peuple.  Lors  de  la 
lutte  entre  le  parti  de  la  Montagne 
et  celui  de  la  Gironde  au  5i  mai 
1795,  iVI.  Peyre  se  prononça  en 
laveur  de  ce  dernier,  et  signa  la 
protestation  du  6  juin  contre  la 
tyrannie  des  Montagnards.  Us  se 
vengèrent  bientôt  de  son  opposi- 
tion ,  en  le  faisant  comprendre 
dans  le  décret  rendu  contre  les 
partisans  des  Girondins.  Néan- 
moins, ses  amis  eurent  assez  d'in- 
fluence sur  lui  pour  le  déterminer 
à  retirer  sa  signature  de  la  protes- 
tation. Cet  acte  de  condescen- 
dance, qui  lui  fut  en  quelque  sorte 
arraché,  le  sauva  des  mesures  de 
rigueur,  mais  ne  le  fil  plus  réin- 
tégrer immédiatement  dans  ses 
fonctions.  Ce  ne  fut  qu'au  mois 
de  décembre  1794*  et  par  suite  de 
la  révolution  du  9  thermidor  an  2 
(27  juillet  1794)?  q"'il  fui  admis 
avec  ses  autres  collègues  ,  qui  a- 
vaient  échappé  à  la  proscription, 
à  reprendre  sa  place  à  la  conven- 
tion, fin  juin  1795,  il  se  rendit, 
e!i  qualité  de  représentant  du  peu- 
ple, à  l'armée  d'Italie.  Au  mois 
de  septembre,  il  devint  membre 
du  conseil  des  cinq-cents,  dont  il 
!-ortit  le  20  mai  179H,  et  depuis 
cette  époque  il  n'a  plus  reuipli  de 
fonctions  publiques. 

PEYRE  (  Antoise-Fbançois  ) , 
fds  de  M.  J.  Peyre,  architecte  du 
roi  ,  et  lui-même  architecte  dis- 
tingué, uiend)re  de  l'académie  des 
beaux-arts  et  chevalier  de  l'ordre 
de  Saint-Michel,  a  publié  :  i"  une 
nouvelle  édition  des  OEiivres  d'ar- 
rldfeclure  de  M.  J.  Peyre  (sou 
)!ère),  Paris,  179'),  in-fol.;  2"À^.9- 
liiuration  du  Panthéon  français , 
«ouqite  rendu,  Paris,  1799,  in-4°. 
• —  Un  neveu  du  même  nom  a  pu- 


PEY  2i5  I 

blié  :  1°  Projets  d'architecture ^ 
18 12,  in-fol.  ;  2°  Considérations 
sur  la  nécessité  de  rétablir  C  acadé- 
mie d' architecture ,  et  un  Système 
d'admiiiistralion  qui  puisse  con- 
cilier à  la  fois  la  gloire  de  l'art  et 
les  iniérc'ts  du  gouvernement, 
181 5,  xn-'x". 

PEYRE  (Jeaîï-Marie),  capitai- 
ne au  117'  régiment  d'infante- 
rie, chevalier  de  la  légion-d'hon- 
neur, né  à  Montpellier,  départe- 
ment de  l'Hérault.  Aprè.s  s'être  fait 
remarquer  par  sa  bravoure  dans 
la  plupart  des  campagnes  qui  eu- 
rent lieu  depuis  la  révolution,  il 
se  distingua  particulièrement  en 
1810  aux  sièges  de  Tortose  et  de 
Sagonte.  Le  25  décembre  jSi."), 
il  se  signala  de  nouveau  au  pas- 
sage de  la  rivière  de  Cuadalaviar, 
devant  Valence,  et  pénétra  le  pre- 
mier, à  la  têle  de  sa  compagnie, 
dans  les  retranchemens  ennemis, 
où  d'abord  il  s'élança  sur  les  bat- 
teries, et  donna  par  cet  acte  de 
dévour;u]ent|  héroïque  l'élan  aux 
voltigeurs  d'avant -garde  qu'il 
commandait  ;  ceux-ci  le  sec\in- 
dèrent  avec  une  ardeur  incroya- 
ble, et  tandis  qu'ils  s'emparaient 
des  pièces,  toute  la  colonne  fran- 
çaise, s'ébranlant  à  leur  exemple, 
vint  par  la  défaite  des  Espagnols, 
assurer  h  nos  armes  un  brillant 
succès.  Ce  fait  d'armes  est  l'un 
des  plus  beaux  de  l'armée  d'Ar- 
ragon,  et  le  maréchal  duc  d'Al 
buféra  {voy.  Suchet),  on  faisant 
consigner  les  détails  dans. un  or- 
dre du  jour,  y  rend  un  éclatant 
littmmage  à  la  valeur  du  capitai- 
ne Peyre,  auquel  il  attribue  prin- 
cipalement le  succès  de  cette  opé- 
ration ,  succès  qui  seul  pouvait 
rendre  possible  le  blocus  de  Vu- 


2(6 


PEY 


lence.  Le  capitaine  Pe3're  a  ob- 
tenu sa  retraite  apr»';s  la  restau- 
ration en  1814. 

PEYRE-FEiVRY  (Joseph-Eli- 
sée) .  capitaine  au  86'  régiment 
d'infanterie  de  lij^ne,  chevalier  de 
l'ordre  royal  de  la  légion-d'hon- 
neur, est  né,  le  23  février  1775, 
à  la  Martinique;  il  n'était  pas  âgé 
de  17  ans  lorsque,  en  1792.  il  se 
lendit  aux  armées.  En  1795,  il  fit 
partie  des  troupes  qui  assiégèrent 
Toulon.  Il  fil  toute  cette  campa- 
gne aux  avant- postes,  en  qualité 
de  sergent  de  gnuiadiers.  Il  se 
trouva  à  la  tête  des  braves  qui  con- 
tribuèrent à  expulser  les  Anglais 
de  la  redoute  de  la  Convention  , 
dont  ils  venaient  de  s'emparer.  Ce 
fut  à  cette  affaire  décisive  qu'il  fut 
remarqué  du  général  Dugom- 
fiiier,  commandant  en  chef  cette 
aimée;  ce  général  l'attacha  dès  ce 
moment  à  son  état-major.  Il  sui- 
vit Dugommicr  en  Espagne,  et  fit 
avec  lui  la  campagne  de  1794  (''T' 
2  et  3),  qui  illustra  les  armes 
françaises,  mais  qui  coûta  la  vie 
au  général  en  chef.  Après  la  paix 
d'Espagne,  il  passa  en  Italie,  où  il 
servit  à  rétat-major-général,  puis 
à  l'armée  des  côtes  de  l'Ouest.  En 
l'an  10  (1802).  lorsque  l'Europe 
semblait  se  reposer  de  ses  longues 
convulsions,  il  partit  avec  l'expé- 
dition (le  Saint-Dont)ingue,  sous 
les  ordres  du  capitaine-général 
Leclerc,  et  ensuite  sous  ceux  de 
Rochambeau.  Il  fit  toute  cette 
campagne  :\  la  tête  de  la  compa- 
gnie des  grenadiers  de  la  71'  de- 
mi-brigade, qu'il  commandait,  et 
qui  formait  l'avanl-garde  d'une 
des  brigades  de  la  division  du  gé- 
néral Rochambeau.  Le  i5  ventôse 
an  10  (4  mars  1802),  après  une 


PEY 

affaire  très-chaude  entre  celte  di- 
vision et  des  forces  bien  plus  con- 
sidérables coinmandées  yiar  Des- 
salines, et  dans  laquelle  les  trou- 
pes de  ce  dernier  furent  taillées 
en  pièces,  le  balaillon  delà  71*  re- 
çut ordre  de  se  diriger,  par  les 
Mornes,  vers  l'habitation  Magnan, 
située  dans  le  Grand-Creux.  Quel- 
ques personnes  qui  s'y  trouvaient, 
et  entre  autres  nn  des  aides-de- 
camp  de  Dessalines,  prirent  la  fui- 
te à  l'approche  des  Français.  Cet- 
te habitation  renfermait  toutes  le.« 
marchandises  enlevées  par  le  gé- 
néral îiègre,  à  Saint-Marc,  au  Port- 
au-Prince  et  ailleurs.  M.  Peyre- 
Ferry  fut  chargé  de  faire  évacuer 
des  sacs  et  des  barils  de  poudre 
dont  un  cabinet  de  cette  habita- 
tion se  trouvait  encombré.  A  pei- 
ne eut-il  commencé  cette  opéra- 
tion, qu'il  s'aperçut  que  cette  pou- 
dre masquait  une  très-grande 
quantité  d'autres  sacs  remplis  de 
j)iastres  gourdes.  Il  en  donna  de 
suite  connaissance  au  comman- 
dant du  balaillon  de  la  71',  qui  se 
constitua  gardien  de  ce  trésor,  re- 
connu bientôt  pour  appartenir  à 
Dessalines.  Deux  heures  après,  le 
général  RochaiTdieau  arriva  suivi 
de  toute  la  division.  Il  fit  distri- 
buer sur  cet  argent,  ;\  tous  les  gé- 
néraux, officiers,  soldats  et  em- 
ployés, deux  mois  de  gralifica- 
tion  ;  mais  la  somme  était  si  loin 
d'être  épuisée  que,  n'ayant  pas 
assez  de  moyens  de  transport,  il 
fit  remettre  à  chaque  soldat  de  la 
division  un  certain  nombre  de  pias- 
tres, pour  les  poiter  jusqu'à  la 
première  destination.  Quand  l'ar- 
mée reçut,  quel([ne  temps  après , 
deux  mois  de  solde,  le  général  en 
chef  fit  niettre  à  l'ordre  que  la  di- 


TE  Y 

vision  Rochambeau  ne  recevrai l 
pas  ces  deux  mois,  les  ayanl  tou- 
chés par  anticipation.  Il  paraît  que 
le  capitaine  Peyre-Fcrr}^,  qui  a- 
vait  découvert  le  trésor  de  Dessa- 
lines, trésor  évalué  à  plusieurs  mil- 
lions, n'a  point  été  récompensé, 
et  que  le  commandant  du  batail- 
lon fut,  peu  de  jours  après,  nomme 
chef  de  brigade.  Au  siège  de  la 
(>rète  à  Pierrot,  principal  boule- 
vartde  l'armée  de  Toussaint-Lon- 
verlure,  M.  Peyre-Ferry  fut  dési- 
gné pour  aller  incendi(.'r,  pendant 
la  nuit  du  a  au  5  germinal  an  lo 
(25  -  24  mars  1802),  les  appro- 
ches de  ce  fort.  Il  remplit  sa  mis- 
sion à  la  tête  de  quelques  braves, 
et  les  nègres  évacuèrent  presque 
aussitôt  ce  poste  important.  En- 
voyé le  7  vendémiaire  an  1 1  (29 
septembre  1802),  par  le  général 
de  division  Quantin,  en  mission 
extraordinaire  auprès  du  général 
en  chef  Leclerc,  il  reçut  des  féli- 
citations sur  sa  conduite.  Le  gé- 
néral Leclerc  lui  fit  présent  d'un 
sabre,  qui  devait  être  converti  en 
sabre  d'honneur.  A  la  'rentrée  en 
France  des  débris  de  l'armée  de 
Saint-Domingue  (en  j8o4),  M. 
Peyrc-Fcrry  fut  envoyé  dans  le 
86'  régiment  de  ligne,  qui  s'orga- 
nisait à  Bayonne.  Il  fit  dans  ce 
corps  lesdilTérentes  campa^rncs  de 
cette  époque,  et  passa  avec  lui,  en 
1807,  en  Portugal.  C'est  d'après 
le  bon  témoignage  qui  lut  rendu 
au  <luc  d'Abrantés  de  la  conduite 
du  capitaine  Peyre-Ferry,  (ju'il 
lui  confia  h;  premier  conimand»;- 
mcnt  qui  fut  donné  en  Portugal, 
celui  de  Caslel-Branco  et  de  son 
arrondissement  jusqu'à  la  frontiè- 
vv.  d'Espagne.  Ce  commandement 
était  délicat  et  diflicile,  dans  les 


PEY  217 

circonstances  où  se  trouvait  l'ar- 
mée française,  par  les  vexations 
de  toute  espèce  qu'avaient  éprou- 
vées les  habitans.  Le  capitaine 
Peyre-Ferry  eut  le  bonheur  de 
réussir  dans  sa  mission,  et  peu  de 
jours  après  son  arrivée  à  Castel- 
Branco,  la  confiance  était  telle- 
ment entière ,  que  non-seulement 
toute  la  [)opulalion  de  cette  ville  , 
qui  était  en  fuite,  s'empressa  de 
revenir  d.ms  ses  foyers,  mais  en- 
core elle  doubla  par  les  habitans 
des  villes  voisines  qui  venaient  y 
chercher  une  sûreté  qu'ils  ne  trou- 
vaient plus  chez  eux  :  aussi  en- 
voyèrent-ils une  députation  au 
duc  d'Abrantés,  pour  le  remer- 
cier du  choix  qu'il  avait  fait  de  cet 
officier,  A  la  fin  de  juillet  1808, 
une  division  de  l'armée  française, 
en  Portugal,  traversa  leïage  pour 
se  rendre  dans  l'Alenlejo.  M.  Pey- 
re-Ferry, à  la  tête  d'une  colonne 
de  5oo  hommes,  dont  il  avait  re- 
çu le  commandement  du  général 
Avril,  avait  l'ordre  d'éclairer  ce 
corps  d'armée.  Il  opéra,  avec  sa 
troupe,  le  désarmement  d'un  ré- 
giment de  chasseurs  espagnols, 
qu'il  conduisit  «;nsuile  à  Eivas,  où 
il  en  fit  la  remise  an  général  Kol- 
lermann.  Cette  division  fut  arrê- 
tée devant  Evora,  principale  ville 
de  cette  province.  Les  habitans, 
qui  avaient  fait  entrer  lesEspàgnols 
dans  lein's  murs,  pour  en  fermer  le 
passage  aux  troupes  françaises,  ac- 
cueillirent ces  dernières  par  un  feu 
terrible  d'artillerie  et  de  mous(jue- 
terie.  L'ne  redoute  formidable,  ar- 
mée de  six  bouches  à  feu,  défen- 
dait cette  place.  Le  général  Mar- 
garon  ordonne  au  cajiilaine  Pey- 
re-Ferry d'en  débusquer  l'enne- 
mi.  Cel/olTicier,  suivi  seulement 


2i8  VEÏ 

de  trente  braves,  s'empara,  mal- 
gré une  vive  ré>islance,  de  la  re- 
doute et  des  pièces  qui  la  défen- 
daient; cette  uclion  d'éclat  déci- 
(ia,  en  grande  partie,  de  la  prise 
d'Evora.  Au  mois  d'août  suivant, 
le  capitaine  Peyre-Ferry  se  fit  de 
nouveau  remarquer  à  la  bataille 
de  Vimeiro.  Il  fut  blessé  d'une  bal- 
le en  faisant  prisonniers  deux  ti- 
railleurs anglais.  Lors  de  la  ren- 
trée de  l'année  française  de  Por- 
tugal en  Espagne  (en  décembre 
1808),  le  commandement  de  l'im- 
portante ville  de  Palencia  lui  fut 
confié  par  le  lieutenant-général 
comte  Delaborde,  qui  comman- 
dait provisoirement  en  chef  cette 
armée.  Le  général  Delaborde  fit 
observer  à  cet  officier  qu'il  Isii 
donnait  un  commanden)ent  bien 
au-dessus  de  son  grade ,  mais 
qu'il  avait  fait  choix  de  lui  en  sou- 
venir de  sa  conduite  à  Caslel- 
liranco.Dece  comn)andenient,  M. 
Peyre-l'errj  passa  à  celui  de  Vial- 
lon,  et  fut  Mils  ensuite,  par  le  gé- 
néral Dufresso,  à  la  tête  d'une 
forte  colonne  formée  d<'s  hommes 
de  tous  les  corps  restés  en  arrière. 
Ce  ne  fut  pas  chose  aisée  de  main- 
tenir l'ordre  et  la  discipline  dans 
un  corps  composé  d'hommes  dont 
la  plupart  n'étaient  pas  les  nmdè- 
les  de  leurs  régimens.  Il  parvint 
cependant  à  leurfaire  observer  la 
di?cipiine  la  jdus  sévère,  et  il  les 
conduisit  à  Olmedo,  où  il  eut  le 
commandcmenl  de  la  garnison. 
C'est  dans  une  sortie  qu'il  fit  de 
cette  place  qu'il  fut  attaqué,  à  Or- 
nillos,  par  les  guérillas  romuiau- 
dées  par  rEujpeciueido.  Emporté 
par  son  ardeur,  le  capitaine  Pey- 
rt!-Ferry  fond  sur  les  Espagnols  : 
il  eât  de  suite  entouré  de  quinze 


PEY 

cavaliers  ,  qui  le  chargent  à  coups 
de  sabre.  Après  s'être  vaillam- 
ment défendu,  couvert  d'un  grand 
nombre  de  blessures,  il  est  laissé 
poMr  mort  sur  la  place.  De  retour 
eu  France,  il  reçut  sa  retraite  par 
l'impossibilité  où  le  nombre  et  la 
nature  de  ses  blessures  le  met- 
taient de  continuer  un  service 
actif. 

PEYMER  (N.  de),  l'un  des 
plus  riches  propriétaires  du  dé- 
partement de  l'Isère,  résidait  à 
Grenoble  à  l'époque  de  la  révo- 
lution, dont  il  adcqjta  les  princi- 
pes avec  enthousiasme.  En  1788, 
la  fameuse  assemblée  du  Dauphi- 
né  fut  réunie  dans  son  château  de 
Vésilles,  et  en  1790,  il  abandon- 
na, en  faveur  des  victimes  des 
troubles  de  Vannes,  20,000  francs 
de  ses  domaines.  11  reçut  à  cette 
occasion  une  lettre  de  satisfaction 
que  lui  adressa  le  président  de  l'as- 
.sembléc  nationale,  au  nom  de  cet- 
te assenjblée.  Appelé,  en  i8oo,  au 
corps-législatif,  il  mourut,  en i8o3, 
laissant  à  ses  héritiers  une  fortune 
immense.  Ou  a  prétendu  qu'il  l'a- 
vait considérablement  augmentée 
par  son  avarice;  cependant  des 
traits  tels  que  celui  que  nous  ve- 
nons de  citer,  semblent  justifier 
suffisamment  la  mémoire  de  Pey- 
rier  de  ce  reproche. 

PEYROiX  (.Iean-Fbançois- 
Pikkre),  peintre  d'histoire,  mem- 
bre de  l'ancienne  académie  de 
peinture,  gravure  et  architecture, 
dir'ccleur  de  la  manufaclure  des 
Gobelins,  naquit  à  Aix,  déparle- 
ment des  Bouches-du-Rhôiie,  le 
1.5  novembre  i744»  d'une  famille 
estimable  mais  peu  riche  ,  et  qui 
néanmoins  ne  négligea  rien  pour 
lui  donner  une  bonne  éducation. 


PEY 

Entraîné  por  sa  passion  pour  les 
beaux-art-,  il  obtint  df  .^on  |>èie, 
qui  le  destinait  à  siiiie  la  carriè- 
re adniiiii-lralive,  U  pertnission 
d'étudier  la  peinture  sons  un  élè- 
ve distingué  de  Uenrdetlo  luitli, 
et  en^aiite  de  venir  à  Paris,  on  il 
entra,  en  17^)7,  dan-<  l'alelier  de 
Lagrcnee  l'aîné.  Les  ouvrages  du 
P<»ussin,  le  Uaphaël  l'rançais,  fu- 
rent ceux  qui  enfliinnjèrent  sa 
jeune  imagination  ,  et  il  dut  à 
leur  inspiration  le  grand  prix  de 
peinture  qu'il  remporta,  «;n  1775, 
()our  son  tableau  de  la  Mort  de 
Sénèque.  il  se  reiidit  à  Home  en 
qualité  de  peiisionnaire  de  l'école 
de  France,  et  bientôt  il  y  surpassa 
les  espérances  qu'il  avait  données. 
Cimoii  se  dévouant  à  la  prison  pour 
en  retirer  et  faire  inhumer  le  corps 
de  son  père,  le  fit  remarquer  par 
une  itnilation  de  ranti(|ue,  qui  é- 
tait  alor*  une  nouveauté,  quiu'qne 
Vien  t  ût  déjà  commencé  la  réfor- 
me de  l'itrl  en  France.  Le  tableau 
de  Cinion  est  placé  aujourd'hui 
«lans  lu  grande  galerie  du  Konvre. 
Cet  ouvrage  l'ut  suivi  de  Sorrate 
retirant  Alclbiade  d'une  maison  de 
courtisane ,  et  des  Jeunes  Athé- 
niens tirant  au  sort  pour  être  livrés 
au  Minoiuurc,  compositi(»ns  égale- 
ment remar(inables.  Il  revint  à 
Paris,  en  1781  ,  oprès  un  séjour 
de  8  années,  dont  4  à  ses  propres 
frais.  Dès  1783,  il  fut  nomtné 
membre  de  1  académie  royale  de 
peinture,  et,  en  1 787,  directeur  d.; 
la  manoi'actnre  royale  des  Gobe- 
lins.  Peyron  eX[)Osa  an  célèbre 
>alori  de  1787  uti  tableau  repré- 
sentant Curius  refusant  les  pré- 
sens des  Samniles,  et  une  premiè- 
re composition  di;  la  Mort  de  So- 
crate ,   où   les   figure:}  sont  d'un 


PEY 


219^ 


pied  et  demi  de  hauteur,  c  Par  une 
rencontre  assez  singulière,  dit  M. 
ÉM)eric-I>avid  dans  une  notice  sur- 
cet  artiste,  ce  sujet  fut  traité,  la 
mrMne  année,  par  David,  dans  lei 
mênjes  prouortians.  L'affluence 
du  public  fut  grande,  pour  juger 
les  compositions  des  deux  nou- 
veaux acadénn'ciens,  distinguées 
par  des  beautés  particulières,  mais 
tontes  deux  remarquables  par  une 
ordonnance,  un  de-sin  et  un  co- 
loris qui  ne  ressemblaient  en  rien 
à  la  précédente  école.  Plusieurs 
excelîens  ouvrages  ,  tant  de  Pey- 
rnn  que  de  David,  et  de  leurs  ému- 
les, aviiient  précédé  ceux-là,  mais 
on  peut  regarder  ce  salon  et  cette 
année  1787  comme  l'époque  où 
la  peinture  a  été  totalement  ré- 
générée.» Peyron  reproduisit  son 
tableau  de  la  Mort  de  Socrate , 
l'année  suivante,  mais  ses  figures 
sont  grandes  comme  nature.  H 
orne  aujourd'hui  l'une  ties  salles 
de  la  chambre  des  députés.  Il  fut 
privé,  parles  événemens  de  la  ré- 
volution, de  la  direction  de  la  ma- 
nufacture des  Gubelins ,  et  des 
travaux  dont  il  avait  été  chargé 
par  le  roi  ;  néanmoins  le  chagrin 
qu'il  en  éprouva  n'altéra  point 
son  talent,  et  il  a  docmé  depuis  : 
Paul-Emile  s' indignant  de  l'humi- 
liaiion  où  se  réduit  Persée  ,  qui  se 
prosterne  à  ses  pieds  :  il  fait  partie 
de  la  grande  galerie  du  Loiivri-; 
Aniigone,  fi/ie  d'OEdipe,  sollici- 
lant  de  son  pire  le  pardon  de  son 
frère  Poiinice ,  tableau  gravé  par 
M.  iVlotJsaldi;  les  F iltesd' Athènes, 
nouvelle  composition  grivée  par 
B''is-:on;  enfin  rieuxpetitsfableanx: 
Pjth'igore  avec  S5,«  disciples ,  et 
L' Entretien  de  Dcmurite  avec  [li/)^ 
poirale.   •  La  manière  de  Peyron, 


a2o 


PEY 


(îit  lM.  Émeric  David,  atteste  émi- 
nemment la  réforme  de  l'arl,  à 
laquelle  il  a  contribué.  Sa  compo- 
sition est  sage,  raisonnée,  quel- 
quefois un  peu  trop  méthodique, 
mais  tutijoiirs  pleine  d'intérêt.  Il 
a  souvent  traité  des  sujets  neufs 
et  ingénieusement  choisis  ,  tels 
que  Cimon,  Paul-Emile^  les  Fil- 
les d' Aluènes;  son  style  est  grave, 
énergique,  généralen)ent  correct. 
Ses  draperie.s  ont  de  l'ampleur  et 
de  la  simplicité;  la  transparence  et 
la  suavité  de  ses  teintes,  la  ferme- 
té, la  vivacité,  l'esprit  de  sa  tou- 
che, forment  un  des  attributs  dis- 
tinetii's  de  son  talent.  Dans  ses 
derniers  tableaux,  ses  chairs  sont 
im  peu  violettes,  mais  ses  lumiè- 
res sont  toujours  habilement  mé- 
nagées :  l'ensemble  est  parfaite- 
nieul  harmonieux,  et  la  touche 
n'a  rien  perdu  île  sa  légèreté.  » 
PejM'on  mourut  le  so  janvier  iSao. 
«  On  a  entendu  à  ses  obeèques, 
ajoute  M.  Emeric  David,  l'émule 
de  sa  j<!unesse  pron(mcer  eu  im 
seul  mot  un  éloge  de  ce  maître, que 
l'histoire  de  l'art  ne  doit  pas  lais- 
ser perdre  ,  Peyron  m' a  ouvert  les 
yeux  :  aveu  également  honorable 
pour  le  grand  maître  qui  l'a  profé- 
ré et  pour  l'homme  de  talent  au- 
quel il  se  rappoite.  »  Peyron  a 
gravé  à  l'eau  forie  plusieurs  su- 
jets d'après  le  Pouftsin  ,  llaphaël, 
et  d'après  ses  {irnpres  tableaux. 
Le  frère  de  cet  artiste,  Jea.n-Fuan- 
eois  Peyron,  né  en  \';'\o -,  et 
mort,  en  1784,  à  Gondeloiud  , 
où  il  était  commissaire  des  colo- 
nies, .s'est  fait  connaître  comme 
liltérateur-tradiiclenr.  On  lui  doit, 
de  sa  propre  conq)osition  :  Essai 
sur  i Espai^ne ,  et  voyage  fait  en 
l'P'yy  et  1778,   où  l'on  traite  des 


PEY 

mœurs  f  du  caractère ,  des  monU' 
mens,  du  commerce ,  des  théâtres 
et  des  tribunaux  f  particuliers  â  ce 
royaume,  Genève,  1780,  2  vol. 
in-8".  Dans  cet  ouvrage,  qui  a  eu 
les  honneurs  de  la  contrefaçon  en 
1782,  sons  le  titre  de  Voyage  en 
Espagne  pendant  lyyyetir'^S, -2  vol. 
in-H",  l'auteur  fait  preuve  de  gran- 
des connaissances  dans  les  beaux- 
arts  et  antiquités,  de  raison,  de 
goût,  et  d'une  telle  fidélité  enfin 
dans  ses  descriptions,  que  ce  mê- 
me ouvrage  servait  de  guide  aux 
dessinateurs  employés  à  la  con- 
fection du  Voyage  en  Espagne. 
On  peut  encore  le  consulter  avec 
fruit. 

PEYRON  (Victor-AmÉdée)  , 
docteur  eu  théologie,  professeur 
de  langues  orientales,  et  membre 
de  l'académie  des  sinences  de  Tu- 
rin, naquit  en  cette  ville  vers  l'an- 
née 1784.  Il  s'appliqua  de  bonne 
heure  à  l'étude  des  langues  orien- 
tales sous  la  direction  de  l'abbé 
Valperga  de  Caluso,  qui  le  comp- 
tait parmi  ses  nieilleurs  élèves. 
Ses  progrès  furent  si  rapides,  qu'à 
l'âge  de  20  ans  il  fut  en  état  de 
renipUicerson  illustre  maître,  dont 
il  occupa  la  chaire  après  sa  mort. 
Les  premières  productions  de  ce 
jeune  savant  furetit  :  1  "  Descrizio- 
ne  d'un  evangeliario  greco,  Turin, 
1808,  iu-8";  2"  Empc.doclis  et  Pur- 
menidis  fragmenta  ex  codicetaur., 
etc.,  Léipsick,  1810,  in-S"  ;  3"  A^o- 
tilia  lil>rorum  manu-scrlpt.  vel 
descriplorum  qui  donante  Valper- 
ga Calusio  il/ati  sunt  in  régla 
taur.  atlienœi  bibliollicca  ,  ibid., 
1820,  iu-8°.  Les  découvertes  de 
l'abbé  Mai  ayant  tourné  l'atten- 
tion des  savans  sur  les  vieux  ma- 
nuscrits dans  l'e.-poir  d'y  trouver 


PEY 

des  restes  d'nuteurs  classiques  ca- 
chés souj  des  pnges  insigDifiantes 
de  chroniqiU'S  ,  de  légendes,  de 
glossaires  et  d'autres  productions 
des  temps  barbares,  l'abbé  Pey- 
ron  s'en  occupa  également,  et  il 
eut  le  bonheur  de  retrouver  dans 
les  palimpsestes  de  ce  nn'ine  mo- 
nastère de  Bobbio  (qui  ont  fourni 
à  l'abbé  Mai  ses  plus  belles  dé- 
couvertes ) ,  des  fragniens  pré- 
cieux des  oraisons  de  Cicéron, 
qui  remplissent  des  vides  ou  com- 
plètent en  partie  ceux  de  Milan, 
et  qui  font  même  reconnaître  des 
lacimes  parmi  les  discours  qu'on 
a  cru  entiers  jusqu'à  présent.  Ces 
morceaux  joints  à  l'hisloire  des 
manuscrits  de  l'abbaye  de  Bob- 
bio, et  au  catalogue  raisonné  de 
ceux  qui  y  existaient  au  i4°  siè- 
cle, forment  un  volume  in-4°,  qui, 
envoyé  il  y  a  deux  ans  à  Stuttgard 
pour  y  être  imprimé,  ne  devrait 
{)as  tarder  à  paraître.  Tandis  qu'on 
impiime  cet  ouvrage  en  Allema- 
gne, le  savant  et  infatigable  pro- 
fesseur piémonlais  vient  de  pu- 
bil(  r,  avec  d'excellens  commen- 
taires, des  morceaux  du  même 
gt-nre,  tirés  d'un  manuscrit  de  la 
biblioihéqnc  de  Turin,  sous  le 
titre  (le  /j"  CodicisT heodo.^iani  frag- 
menta inedita,  ex  codice  palymp- 
<esto  hihliolli.  taur.,  Turin,  «824, 
in-4".  L'on  doit  aussi  à  l'abbé  Pey- 
rou  ime  traduction  avec  addi- 
tions de  la  grammaire  de  la  lan- 
gue grecque  d'Auguste  Mathias, 
ibid.,  i8/5,  dont  il  a  [)aru  le  pre- 
mier volume.  On  attend  avec  em- 
p>esseinent  celle  de  l'histoire  de 
Thiicidido,  qu'il  a  achevée  et  en- 
richie de  noies  hisîoriques  et  phi- 
lulngiqiios.  L'abbé  Peyrou  n'a  pas 
"lleinl  sa  quarantième  année,  et  il 


PEY  221 

s'occupe  en  ce  moment  de  l'étude 
de  la  langue  et  des  caractères  des 
anciens  Egyptiens  ;  surtout  depuis 
l'arrivée  à  Tuiin  delà  magnifique 
collection  des  nionumens  de  ce 
pays  acquise  dernièrement  par  le 
roi  de  Sardaigne,  et  formée  par 
Drovelti. 

PEYSSARD  (J.  P.  C),  garde- 
du -corps  du  roi  et  chevalier  de 
Saint-Louis,  fut  nommé  député 
à  la  convention  nationale  par  le 
département  delà  Dordogne.  Dans 
le  procès  du  roi  il  vota  avec  la  ma- 
jorité. Après  1.1  journée  du  3i  mai 
1^93,  Peyssard  se  rendit  à  l'ar- 
mée du  Nord,  en  qualité  de  com- 
missaire de  la  convention,  et  dé- 
nonça le  général  Houch^rd  {voyez 
ce  nom)  et  son  état-major.  A  l'é- 
poque du  g  thermidor,  il  étaitcom- 
missaire  près  de  l'école  de  Mars. 
Lu  chute  de  Robespierre  et  de» 
principaux  complices  de  sa  tyran- 
nie n'empêcha  point  Peyssard  de 
rester  constamment  attaché  au 
parti  de  la  Montagne;  comme  tel, 
il  fut  accusé  d'être  l'un  des  chefs 
de  l'insurrection  du  1"  prairial  an 
3  (20  mai  1795),  et  le  même  joui' 
décrété  d'arrestation  ,  puis  con- 
damné à  la  déportation  le  18  juin 
suivant.  Rendu  à  la  liberté  par 
l'aumistie  du  4  brumaire^  il  de- 
vmt,  après  la  révolution  du  i8 
fructidor  an  .5  (4  septembre  1  797), 
admim'strateui  du  département  de 
la  Dordogne;  mais  le  direcloire- 
exéculif  le  destitua  à  l'approche 
des  élections  de  «79^;  il  n'crt 
remplit  pas  moins  les  fonctions 
d'électeur.  Il  mourut  quelques  an- 
nées après. 

PEY.SSONNEL(L.  C), consul- 
général  à  Sniyrne,  correspondant 
de  l'académie  des  inscriptions  tit 


222                   PEZ  PEZ 

belles-lettres,  était  fils  du  célèbre  que   ce    pays   fut  envahi    par  les 

ijntiquaire  Charles  Peyssnnnel.  Il  Français  en  1808.   Après  le  réla- 

parcourut  comme  lui  la  triple  car-  bii<senient  de  Ferdinand  VII,  en 

Hère  des  lettres,  des  sciences  et  »Bi4,   Pezuela    tuf  envoyé  dans 

des  consulats.  Des  renseignemens  I  Auiériqiie  méridionale  en  qua-- 

qui  se  trouvent  dans  les  difTérens  lité  de  général  en  chef  des  troupes 

mémoires  qu'il   adressa  au   gou-  royales,  pour  s'y  o  poster  aux  pro- 

vernement   français  ,    pendant   le  grès  de  l'indépendance  des  colons 

cours  de  sa  résidence  en  Orient,  esjiagnols.  Il  ohlinl  sur  les  insur- 

ne  contribuèrent  pas  peu  à  déler  gés  des  avantages  considérables, 

miner  depuis  le  directoire-exécn-  et  défit,  le  29  novembre  iSi5,  le 

tifà  l'entreprise  de  la  mémorable  général  Rondeau,  devenu,  depuis, 

expédition  d'Egypte.    Peyssonnel  chef  du    nouveau    gouvernement 

était  très-avancé  en  âge  lorsqu'il  établi  à  Buélios-Ayres.  Par  cette 

mourut  à  Smyrne  en    1790.    On  délaite,  les  iodé[)enJans  se  virent 

lui  doit  les  ouvrages  suivans  :  i"  obligés  d'évacuer  le  Pérou  et  de 

Observations  historiques  et  gàogra-  se  retirer  sur  Rio- de-la- Plat  1.  De 

phiqucs  sur   les  peuples   barbares  nouveaux  et  importans  succès  as- 

qui  ont  habité  les  bords  du  Danube  surérenl  à  don  Pezuela  la  possts- 

et  du  Pont-Euxin ;  2°  Traité  sur  sion  entière  de  cette  riche  con- 

le  commerce  de  la  mer  Noire  ;  5°  trée  ,   dont    le    roi    d'£>pagne   le 

Dissertation  sur  la  situation  poli-  noujuja  vice-roi.   Il  fit  ,  en  cette 

tique  de  la  France,  et  ses  rapports  qualité,  sou   entrée  solennelle  à 

avec  toutes  tes  puissances  de  l'Eu-  Lima,  capitale  du  Pérou,  le  17  a- 

rope;  [\'' Discours  sur  l'alliance  de  vril    i8i(i.    La    modératiun    et    la 

la  France  avec  les  Suisses  et    les  clémence  pouvaient  ><  nie.'»  assu- 

Grifons.  rer  le  fruit  de  sa  complète  ,  mais 

PEZ.OUS  (^•),  exerçait,  en  il  préféra  les  mesures  de  ri^Mienr; 
1789,  à  Alby ,  la  profession  d'à-  il  s'aliéna  tous  les  cœurs,  ei  les 
vocat,  lorsqu'il  fut  nomirié  dépu-  prépara  ainsi  à  secouer  déîiuitive- 
lé  aux  états-généraux  par  le  tiers-  ment  le  joug  de  la  métropole.  En 
état  de  la  sénéchaussée  de  Cas-  :82o,  la  garnison  de  l-ima,  mé- 
trés. Après  la  session  il  devint  contante  de  la  conduite  de  don 
juge  au.  tribimal  criminel  du  dé-  Peiuela  ,  le  contraignit  d.'ab- 
partement  du  Tarn,  et  fut  élu,  au  diquer  la  vice- royauté  ,  et  init 
mois  de  mars  1799,  membre  du  en  sa  place  le  général  Li  Serna, 
conseil  des  anciens,  dont  la  révo-  qui,  bientôt,  fut  fore»'  d'abandon- 
lut'ion  du  18  brumaire  le  fit  sortir,  ner  la  ville  aux  approches  dé  I  ar- 
En  1800,  il  fut  appelé  à  la  prési-  mée  victorieuse  du  général  iiulé- 
dencc;  du  tribunal  de  1"  inj-tance  pendant  Saint-Martin. 
d'Alby.  Il  en  a  constamnujnt  rem-  PEZZ,Al\A  (Ange),  conserva- 
pli  les  fonctions  jusqu'à  ce  jour  teur  de  la  bibliolhé(|U('  royale  de 
(1824).  Parme,  nuimbre  d' la  société  ila- 

PEZLELA  (don  JoACHiM  hela),  lienne,  di-  l'académie  de^  beaux-, 

vice-roi  du  Pérou,  combattit  pour  arts   de   Vienne,    etc. , naquit    à, 

Tindépendance  de  l'Espagne  lors-  Parme,  en  1772.  Séparé  de  bonne. 


PEZ 

heure  deson  père,  qui,  enveIoj>pé 
dans  la  disgrâce  du  ministre  Du 
Tillot,  fut  obligé  de  chercher  un 
refuge  en  France,  le  jeune  Pezza- 
na  s'occupa  de  cultiver  son  esprit, 
et  de  faire  choix  d'une  profession 
honorable  qui  pourrait  réparer  les 
malheurs  de  sa  famille.  11  se  dé- 
cida pour  le  barreau,  et  prit  I»;  de- 
gré de  docteur  v.n  droit  dans  l'uni- 
versité de  Padoue  ;  mais  dégoûté 
))ar  le  désordre  des  lois ,  par  la 
vénalité  des  jug'-s,  par  la  bassesse 
et  les  cabales  nécessaires  à  un  a- 
vocal,  il  ne  songea  qu'à  saisir  la 
première  occasion  favorable  pour 
se  dérober  à  un  spectacle  si  peu 
con forme  à  ses  sentimens  et  à  ses 
principes.   Il  profila  des  change- 
mens    politiques    survenus    dans 
son  pays,  pour  aspirer  à  la  place 
de  bibliothécaire  ,  qu'il  obtint  en 
1804.  Ami  éclairé   des  lettres   et 
des  arts,  il  etjtra  dans  une  carriè- 
re plus  analogue  à  ses  désirs.  Il 
mit  en  ordre  la  bibliothèque  qui 
venait  de  lui  être  confiée,  et  ne 
s'occupa  plus  que  des  études  qui 
se  liaient  avec  ses  nouvelles  occu- 
ltations. iM.  Pezzana  jouit  de  l'es- 
time et  de  la  considération  géné- 
rales :  t^on  esprit  est  aussi  cultivé 
que  son  cœur  est  vertueux.  Einic- 
mi  de  la  flatterie,  étranger  à  tout 
esprit  de  rivalité  et  de  faction,   il 
piirtage  son  temps  entre    l'étude 
et  la    retraite.    Il    est    maintenant 
occupé  de  la  continuation  de  l'his- 
toire de    Farnte,  et  «le  celle  des 
ScriHori  par/nigioîii,  commencée 
par  son  prédécesseur  Afi'o,  dont  il 
})romet  d'écrire  la  vie.  S;  s  ouvra- 
{{(••'  Mint  :  1^°  C Anlichità  del  map- 
/tamonda  de    Puif^ani ,    fatto   nel 
ir>G7,  etc.   Paruie.    1M07,   iu-S". 
^Ce  précieux  monument  géogra- 


PFE  223 

phique,  dont  a  parlé  aussi  M.  Bua- 
che,  dans  le  tome  VI  des  Mé- 
moires de  l'institut,  est  ujainte- 
nant  déposé  à  la  bibliothèque  de 
Parme.  Le  cardinal  Zurla  croit 
que  les  frères  Pizigani  n'étaient 
que  de  simples  dessinateurs  de 
caries,  et  non  pas  des  géographes, 
comme  on  l'a  supposé.  Ils  vi- 
vaient à  Venise,  après  la  moitié 
du  14°"'  siècle.  2"  Notizie  biblio- 
grafiche  intorno  a  due  rarissime 
(dizioni del secotoXJ^ ,  ibid. ,  1 808, 
ia-8";  3"  Leltera  circa  le  cose  dette 
del  M  il  tin  intorno  la  città  di  Par- 
ma,  ibid.,  181g,  in-8'';  l\"  Epis- 
tola  interno  a  Clémente  Bondi, 
ibid.,  1821,  in-S";  5"  Elogio  sto- 
riro  di  Pietro  liubini,  ibid.,  1822, 
in-8":  il  a  été  aussi  inséré  dans  le 
tome  XIX  des  Mémoires  de  la 
société  ilalieime,  pour  laquelle 
l'auteur  l'a  écrit;  G"  Osservazioni 
concernenli  alla  liiii^ua  italiana,  ed 
a'  suoi  voraholarj,  ibid.,  1823,  in- 
8°;  7°  Risposta  aile  censure  pub- 
blicale  intorno  al  libro  précédente, 
ibid.,  1823,  in-8". 

PFEFFEL  (  Chri.stuîî-Fbédé- 
Ric) ,  jurisconsulte  et  diplomate, 
membre  de  la  légion-d'honneur, 
etc.,  naquit  à  Colmar  le  5  octobre 
1720.  Il  descend  d'un  poète  du 
i3'  siècle,  et  son  père,  né  dans  le 
p:iys  de  Baden,  était  un  juriscou- 
sulle  et  nu  diph>uiale  distingué. 
A  sa  mort,  arrivée  en  173ÎS,  il 
exerçait  les  fonctions  de  stettmes- 
tre  de  Colmar,  l'une  des  princi- 
pales magistratures  municipales 
de  celle  ville.  Christian-Frédéric 
Pfellél  fit  ses  éludes  à  Strasbourg» 
et  apprit  le  droit  public  sous  le 
célèbce  Schfjofïlin  ,  qu'il  aida  en- 
suite utilement  dans  la  composi- 
tion  de  V/ilsatia  illustrata.  Von- 


a34 


PFE 


lant  succéder  aux  emplois  dont 
son  père  était  revêtu  ,  il  suivit  a- 
vec  autant  de  zèle  que  d'intelli- 
gence, la  carrière  des  affaires  pu- 
bliques; Goniinença  par  être  atta- 
ché au  comte  de  Loss,  ambassa- 
deur de  Saxe  en  France,  puis  fut 
nommé  secrétaire  d'amliassade. 
L'Abrégé  chronologique  de  l' his- 
toire de  France,  du  président  Hé 
nault,  qui  venait  de  paraîtio,  lui 
donna  l'idée  de  composer,  et  il 
publia  peu  de  temps  après  ,  eu 
1754,  Abrégé  chronologique  de 
l'Histoire  du  droit  public  de  C  Al- 
lemagtie.  Cet  ouvrage  fit  connaî- 
tre honorablement  IMeffel.  Il  se 
rendit  à  Dresde,  et  y  devint  bien- 
tôt le  protégé  et  l'ami  du  ministre 
de  l'électeur  roi  de  Pologne,  le 
comte  de  Bruhl,  qui  le  fit  nom- 
mer conseiller  d'ambassade,  et 
lui  donna  l'espoir  de  succéder  à 
M.  de  Paiil,  directeur  des  affaires 
étrangères.  Chargé  de  plusieurs 
négociations  au  commencement 
de  la  guerre  de  scpl-ans,  il  s'en 
acquitta  avec  habileté,  et  tut  le 
concurrent  de  M.  de  GutscliHiidt, 
depuis  ministre  du  cabinet,  pour 
la  place  d'envoyé  de  Saxe  au  con- 
grès d'Augsbourg.  Le  congrès 
n'ayant  pas  eu  lieu,  et  Pfeffel.  qui 
n'avilit  accepté  du  service  à  la  cour 
de  Saxe  que  sur  Tautorisalion  du 
roi  de  France,  obtint  du  comte  de 
Bruhl,  l'autorisation  de  rentrer 
dans  sa  pairie.  Son  protecteur  le 
recommanda  au  cardinal  de  Bi;r- 
ni.o,  qui  l'envoya,  eu  1768,  à  Ha- 
tisbonne,  successivement  en  qua- 
lité de  conseiller  de  légaliou  et  de 
chargé  d'affaires  par  intérim  piès 
de  la  dièle.  Pleffei  fut  de  nouveau 
autorisé  à  s'attacher  à  une  cour 
étrangère,  et  il  devint,   eu  176^, 


I 

PFE 

résident  du  duc  des  Deux-Ponts, 
à  la  cour  de  Bavière.  Nommé,  à 
cette  époque,  membre  puis  direc- 
teur de  la  classe  d'histoire  de  l'a- 
cadémie de  Munich,  il  en  remplit 
les  fonctions  jusqu'en  1768,  qu'il 
fut  rappelé  à  Versailles,  pour  être  i 
altaihé  au  ministère  des  affaires 
étrangères,  en  qualité  de  juriscon- 
sulte du  roi;  il  exerça  cet  emploi 
jusqu'en  1792,  «et,  dit  un  de  ses 
biographes  ,  il  y  a  peu  d'actes 
diplonuitiques  importans  à  la  ré- 
daction desquels  il  n'ait  concouru 
ou  sur  lesquels  il  n'ait  été  consul- 
té par  les  ministres  successifs,  et  ' 
souvent  sur  l'ordre  exprès  du  roi.» 
La  seule  diversion  qu'il  donnait  à 
ses  graves  occupations,  consistait 
en  un  assez  grand  nombre  d'arti- 
cles qu'il  faisait  insérer  dans  les 
Notices  politiques  de  Schloetzer, 
où  il  combattait  avec  force  les 
préventions  des  ennemis  de  la 
France.  Il  avait  obtenu,  en  ré- 
compense de  ses  utiles  services, 
une  charge  de  steltmestre  dans  sa 
ville  natide,  et  l'adjonction  de  son 
fils  [voyez  l'article  suivant),  dont 
les  brillantes  dispositions  promet- 
taient une  troisième  génération  de 
jurisconsultes  du  même  nom.  La 
révolution  apporta  des  change- 
mens  à  ces  projets.  Chargé,  en 
1790,  par  le  ministère  de  France, 
d'aller  à  Deux-Ponts,  traiter  des 
indemnités  que  le  duc  et  les  au- 
tres princes  possessionnés  en  Al- 
sace, avaient  droit  de  réclanier,  il 
y  résidait  encore  lorsqu'il  lerut 
l'ordre  de  cesser  ses  fonctions. 
Dès  i7>S7,  il  avait  obtenu  du  duc, 
en  récompense  de  ses  services,  un 
fiel"  et  (les  lettres  de  naluralilé.  De, 
retour  dans  sa  patiie  avec  le  litre 
de  conseiller  intime  d'état  au  ser- 


PFE 

vice  du  dr.c  des  De;ix-Pnnts,  il 
n'en  fut  pas  moins  porté  sur  la 
liste  (les  émiji;rés .  et  les  biens 
qu'il  avait  en  France,  furent  ven- 
dus. PfelTel  s'était  hàlé  de  retour- 
ner à  Deux-Ponts,  où  le  duc  con- 
tinua de  l'employer  dans  la  direc- 
tion principale  de  ses  alfaires  ; 
mais  après  la,  mort  de  ce  prince, 
arrivée  en  1795,  son  successeui-, 
le  duc  iVJaximilien-.Iosejih,  depuis 
électeur  et  roi  de  Bavière,  ayant 
cessé  de  lait  icher  à  son  service, 
Pfeffcl  se  relira  à  Nuremberpf,  et 
ne  rentra  dans  sa  ville  natale 
qu'après  l'étaldissement  du  gou- 
vernement consulaire.  Il  dut  à  la 
bienveillance  de  M.  de  Talley- 
rand,  minisire  des  relations  exté- 
rieures, sa  promotion  dans  la  lé- 
gion-d'honneur, et  un  peu  plus 
lard,  sa  nomination  en  qualité  de 
meuïbre  de  la  conuiiission  mixte 
de  l'oclnii  dn  Rliin,  place  dont  il 
étaitencoreen  possession  lorsqu'il 
mourut  le  19  mars  1807,  dan>  la 
Si"*  année  de  son  âgv.  Le>  prin- 
cipaux ouvrages  de  Pleflcl  sont  : 
1°  Abrégé  chronologique  de  l'His- 
toire et  du  droit  pul/lic  d' Allema- 
gne, publié  en  175'i.Cel  ouvrage, 
qui  eut  quatre  éditions  à  des  épo- 
ques assez  rapprochées  les  unes 
des  autres,  obtintparticulièrement 
les  suDfrages  des  protestans  ;  il  est 
souvent  cité  par  Robertson,  dans 
son  Histoire  de  Charles-  Quint , 
et  a  été  très-utile  aux  auteiirs  de 
i' Art  de  vérifier  les  dates.  Ce  mê- 
me ouvrage,  contre  le  gié  de  l'au- 
teur, fut  opposé,  par  des  amis 
imprudens,  aux  Annales  de  l'em- 
pire de  Voltaire,  et  lui  attira  (piel- 
ques  disgrâces  littéraires  de  la  part 
d'un  petit  nombredes  admiraleurs 
de  ce  grand  hommtt.   La  3*  édi- 

I.  KVI. 


PFE  2a5 

tion  de  V Abrégé  chronologique  est 
très-mal  traitée  dans  la  (Corres- 
pondance de  Grimm.  2"  Rech'^rches 
historiques  concernant  les  droits 
du  pape  sur  la  ville  et  l'état  d' Avi- 
gnon, avec  des  pièces  justificatives, 
Paris,  I7*)8;  5"  Etal  de  la  Polo- 
gne, avec  un  Abrégé  de  son  droit 
public  et  les  nouvelles  constitutions, 
etc.  ,  Paris  ,  1 770  ;  4"  Dissertation 
historique  sur  les  matières  suivan- 
tes :  sur  les  limites  de  la  Bavière, 
dans  les  l\'  et  X'  siècles  ;  sur  l'o- 
rigine et  l'antiquité  des  fiefs  de 
Bavière  ;  sur  les  sceaux  des  anciens 
ducs  de  Bavière  et  l'origine  de 
leurs  armoiries;  sur  l'histoire  des 
anciens  margraves  du  Nordgau 
nu  Haut-Palalinat;  sur  l'illustra- 
tion du  droit  public  de  l'Allema- 
gne par  celui  de  la  Pologne,  etc. 
Ces  dissertations  et  un  assez  grand 
noudîre  d'autres  du  même  genre, 
ainsi  qu'une  foule  de  mémoires  sur 
diverses  matières,  ont  été  insérés 
dans  la  collection  des  travaux  his- 
toriquesde  l'académie  de  Vlunich, 
connue  sous  le  litre  de  Monumenta 
Boica,  entreprise  qu'il  avait  fon- 
dée en  17G3,  étant  directeur  de 
l'Académie  de  Munich. 

PFEFFEL  (Chrétien-Hubert), 
diplomate,  est  fds  du  précédent, 
auquel  il  avaitété  adjoint, en  i  786, 
en  qualité  de  stettmestre  de  Col- 
mar,  sa  ville  natale.  Pfeffel  suivit 
avec  succès  la  carrière  des  affaires 
publiques.  Il  publia,  dès  son  dé- 
but comme  diplomate,  une  disser- 
tation très-remarquable,  sous  ce 
litre  :  de  Limitibus  Galliœ.  Forcé, 
par  la  révolution,  de  s'expatrier, 
il  se  rendit,  en  1792,  près  de  son 
père,  en  Bavière,  s'attacha  au 
service  du  souverain  de  cette  con- 
trée, devint  l'un  de  ses  conseillers- 
i5 


226 


VFK 


d'étal,  et  son  envoyé  extiaorili- 
naire  à  Londres. 

PFEFl''EL(THÉOPIlILE-CoîiRAD'), 

littérateur,  membre  honoraire  de 
l'académie  de  Berlin,  présidcîit 
du  consistoire  évangélique  de  Col- 
mar,  secrétaire-interprète  de  la 
préCectiire  du  département  du 
Haut-lVhin  ,  est  frère  cadet  de 
Christian-Frédéric  Pfeffel.  Il  na- 
quit à  Colmar,  en  1756,  et  mou- 
rut dans  cette  ville  le  i"mai  1809. 
Après  avoir  terminé  ses  études, 
il  se  rendit  à  Halle,  afin  d'y  suivre 
les  cour*  de  jurisprudence.  Son 
ardeur  pour  le  travail  acheva  de 
détériorer  sa  vue,  déjà  très-1'aible, 
et  il  tut  frappé  d'une  cécité  com- 
plète peu  de  temps  après  son  re- 
tour dans  sa  patrie,  à  l'âge  de  21 
ans.  Cette  perte  cruelle  n'altéra 
point  la  sérénité  de  son  lîme,  et 
n'influa  en  rien  sur  sa  gaîlé  natu- 
relle. Il  épousa,  deux  ans  après, 
en  17^9,  nue  jeune  et  aimable 
personne  qu'il  avait  chantée  dans 
ses  poésies,  sous  le  nom  daDoris. 
Cette  union  fut  heureuse.  Pfeft'el 
publia  en  1704  son  premier 
recueil  de  poésies,'  elles  furent 
reçues  avec  faveur.  En  1775  il 
voulut  attacher  à  son  nom  le  sou- 
venir d'une  institution  utile,  et  il 
fonda  à  Colmar,  pour  les  jeunes 
protestans  ,  une  école  militaire  ou 
maison  d'éducation  dont  il  parta- 
gea la  direction  avec  un  de  ses 
amis,  nommé  Lersé.  Il  devint, 
en  1788,  membre  honoraire  de 
l'académie  de  Berlin.  On  vit  sortir 
de  l'établissement  de  PfelTel  une 
foule  d'élèves  distingués,  de  plu- 
sieurs nations;  mais  la  révolution 
devint  funeste  à  cet  établissement, 
qui  fut  détruit  en  179a.  Son  fon- 
dateur se  h  vra  alors  exclusi  vement 


PFE 

à  la  culture  des  lettres,   jusqu'ea 
i8o5.  A  cette  époque  il  fut  nom- 
mé président  du  consistoire  évan- 
gélique de  Colmar,  et  peu  de  temps 
après  secrétaire-interprète   de  la 
préfecture    du    département    du 
Haut-Rhin.  On  doit  à  cet  auteur  un 
grand  nombre  d'ouvrages  dramati- 
ques, en  allemand,  parmi  lesquels 
on  remarque  :  le  Trésor,  pastora- 
h;  ;  VErmite,  tragédie  ;  Pliilémon 
et  Baucis,  drame,  représentés  en 
1761,  1762  et  1765.  Il  a  traduit, 
ou  plutôt  imité,  du   français,  la 
Veuve,  deColié;  la  jeune  Indien- 
ne, deChcunfort;  Zelniire,  de  De 
Belloy  ;    Eugénie,    de    Beaumar- 
chais; les  Moissonneurs,  de  Favart; 
le  Philosophe  sans  le  savoir,   et  /* 
Roi   et  le  Fermier,   de   Sedaine, 
etc.  Ct;s  pièces  furent  bien  reçues 
des    spectateurs  allemands,  et  il 
les  publia  avec  plusieurs  autres, 
sous  le  litre  de  :  Aniusemens  drama- 
tiques d'après  des  modèles  français; 
elles    sont  au  nombre  de  25,  et 
parurent  en  cinq  collections  ou  li- 
vraisons, à  Francfort  et  Léipsick, 
dei765à  1 774- Lessinget  plusieurs 
autres  écrivains  allemands  s'eftbr- 
cèrent  de  les  critiquer  et  de  leur 
enlever  les  sulfrages  du   public, 
qu'ils  firent  reporter  sur  des  pièces 
du  théâtre  anglais.  Pfeiïel  a  con»- 
j)osé  un  grand  nombre  de  Fables, 
de  Contes,    d'E pitres,   de  Chan- 
sons, etc.,  qui  toutes  ont  été  ac- 
cueillies avec  plus  ou  moins  de 
faveur.    On   a  remarqué   surtout 
une  épître  adressée  au  protecteur 
«le  son  frère,   le  comte  de  Bruhl, 
sur  la  révolution  française,    que 
rauleurcélèbreavec  le  plus  grand 
enthousiasme.    On  doit  encore  à 
Pfeffel  ;  1°  Hochets  dramatiques , 
composés  pour  ses  enfans  et  ceux 


PFE 

de  ses  amis,  Strasbourg,   17O9, 

I  vol.  in-8";  2°  Chansons  à  l'usage 
de  l'école  militaire  de  Colmar,  Co- 
logne, 177H;  o"  Principes  de  droit 
naturel,  Colmar,  1781,  en  fran- 
çais; 4"  Magasin  historique  pour 
la  raison  et  le  cœur,  1  vol.  in-8  ' , 
1'  édit.  ,  Strasbourg,  1792,  en 
français  et  en  allemand;  5°  tra- 
duction, en  prose,  faite  avec  le 
chevalier  d'Abquerbe,  des  Fables 
de  Liclitwer;  6°  il  est  l'un  des  tra- 
ducteurs de  la  Géographie  de  Bus- 
ching.  M.  ^Jéhée  de  la  Touche  a 
traduit  en  français,  Paris,  i8i5, 
3  vol.  in- 12  :  Contes,  Nouvelles,  et 
autres  pièces  posthumes  de  Pfeffel. 

PFEIFFEll  (.Jean  S'rÉdéric)  , 
économiste  et  littérateur  alle- 
mand,  naquit  à  Berlin  en   1718. 

II  fit  de  bonnes  études,  et  entra 
d'abord  dans  la  carrière  militaire. 
Apres  la  célèbre  bataille  île  Moll- 
witz  ,  où  il  assiiitait ,  il  devint 
commissaire  des  guerres  et  con- 
seiller de  guerre  et  des  domaines. 
Chargé,  à  la  paix,  par  Frédério- 
le-Grand ,  de  la  direction  des  li- 
quidations et  des  nouveaux  éta- 
blissemens  dans  la  Marche  électo- 
rale, il  marqua  son  inspection  par 
la  création  de  cent  cinquante  vil- 
lages et  élablissemens  consacrés  à 
l'industrie  ou  à  ragricnlture  ,  et 
fut  nommé  en  récompense  con- 
seiller intime.  Enveloppé  dans 
une  affaire  de  concussion ,  où  il 
fut,  sans  jugement,  enfermé  et 
remis  en  liberté,  il  quitta  la  Prus- 
se, et,  après  a  voir  exercé  quelques 
emplois  publics  sous  plusieurs  pc- 
lils  princes  de  l'empiic,  il  se  livra 
exclusivetnent  à  la  carrière  litté- 
raire ,  où  il  «te  fit  remarquer  par 
des  ouvrages  d'une  utilité  géné- 
rale. De  1782  à  1789,  époque  de 


PFE 


227 


sa  mort,  il  occupa  la  chaire  des 
sciences  économiques  ù  l'univer- 
sité de  Mayence.  Pfeiffer  a  publié 
les  ouvrages  suivans  :  1"  De  la 
culture  de  la  soie  en  Allemagne, 
Berlin,  174^»  in-8°;  2°  Catéchis- 
me des  économistes,  Berlin,  in-8"; 
3"  Précis  de  toutes  les  sciences  éco- 
nomiques, Manheim,  1770-1780, 
4  V.  in-4°;  ^f  Histoire  de  la  houille 
et  de  la  tourbe,  Manheim,  1774? 
in-8",  traduit  en  français;  b"  Se~ 
cret  d'améliorer  la  houille  et  la 
tourbe,  traduit  en  français  ;  6° 
Projet  d' améliorât  loti  et  idées  fran- 
ches sur  plusieurs  objets  concernant 
les  subsistances,  la  population  et 
l'économie  politique  en  Allemagne, 
Francfort  ,  1777  -  17^78,  2  vol. 
10-8";  7°  Précis  de  la  vraie  et  de  la 
fausse  politique,  Berlin,  1778- 
1779,  2  vol.  in-8*;  ^"Science  na- 
turelle de  la  police,  Francfort, 
1779 — 1780,  2  vol.  in-8";  9" 
l'antiphysiocrate,  ou  Examen  dé- 
taillé du  prétendu  système  physio- 
cratique,  Francfort,  1780,  in-8"; 
10°  Des  Manufactures  et  des  Fa- 
briques d' Allemagne  dans  leur  état 
naturel,  avec  des  Observations  sur 
les  moyens  de  les  perfectionner, 
Francfort,  1780-  1781,  2  vol. 
in-8°;  ir  Principes  de  la  science 
financière,  M.àn\\Gun^  1781,  in-8°; 
12°  Principes  de  la  science  fores- 
tière, Manheim,  1781,  in-8°; 
iS"  Examen  critique  d'écrits  re- 
marquables de  ce  siècle,  sur  l'éco- 
nomie politique,  les  finances,  la 
police,  etc.,  Francfort^  1781- 
1786,  6  vol.  in-8°  :  ouvrage  dans 
lequel  l'auteur  s'attache  plus  par- 
ticulièrement au  système  finan- 
cier de  M.  Necker,  et  où  il  dis- 
cute les  projets  pour  ou  contre  ce 
système;   14°  Principes  de  Céco" 


a28 


PFE 


vomie  générale ,  Fninctbrt,  1782- 
17H3,  2  vol.  in-S"  ;  i5°  Lettres 
critiques  sur  des  objets  importons 
et  d'utilité  générale,  Offeribach, 
1784-  1785,  2  cahior-i;  iQ'  Exa- 
men d'an  projet  d'amélioration 
pour  la  félicité  publique  et  les  puis- 
sances de  l' Allemagne,  Francl'ort , 
1786,  in -8°;  17°  Principes  et  Rè- 
gles de  l'économie  politique,  1  787  : 
ils  furent  publiés  à  Mayence  ,  j>;>r 
J.  N.  Moscr;  18°  enfin  un  grand 
nombre  d'articles  sur  l'économie 
politique,  dans  V Encyclopédie  al- 
lemande, imprimée  à  Francfort. 

PFEIFFEll  (N.),  était  membre 
du  directoire  helvétique,  où  il  a- 
vait  été  nommé  au  mois  d'avril 
1798,  lorsque  deux  mois  après 
le  commissaire  français  Rapinat 
(voyez  ce  nom),  qui  ne  trouvait 
point  dans  Pfeitîerl^a  docilité  con- 
veniihle  à  ses  projets,  lui  enjoi- 
gnit de  donner  sa  démission;  Pfeif- 
fer  obéit.  Quand  le  président  du 
directoire  helvétique  [voyez  Ober- 
iiN  et  OcHs) ,  annonça  à  Rapinat 
que  son  collègue  avait  souscrit  à 
sa  demande  ,  il  ajouta  :  «  Quant 
aux  intentions  qui  lui  sont  prêtées, 
il  en  appelle  à  notre  estime,  qu'il 
emporte  avec  lui,  et  à  la  justice 
de  l'avenir.  »  Cette  justice  ne  se 
fit  pas  long -temps  attendre;  la 
réinstallalion  de  l'feilTer  eut  lieu 
peu  de  temps  après,  mais  alors  il 
profita  de  la  circonstance  pour 
donner  une  démi>sion  volontaire, 
et  fut  remplacé  par  Ochs  de  Bâle. 
Ce  citoyen  recommandable  a  de- 
puis vécu  dans  la  retraite. 

PFIFFER  (FRA^çoIs-Lov'IS  de), 
inaréchal-de-camp  au  service  de 
France  ,  commandeur  de  l'ordre 
de  Saint- Louis,  naquit,  en  17  16, 
ù  Lucerne,  d'une  ancienne  famille 


PFE 

de  ce  canton.  II  entra  très-jeune 
encore  dans  le  régiment  suisse  de 
la  garde  royale,  dont  son  père, 
auquel  il  succéda,  était  capitaine. 
Il  fit  les  campagnes  de  Flandre  et 
d'Allemagne  depuis  1754,  et  se 
distingua  aux  sièges  de  Menin , 
Ypres  et  Fribourg,  et  aux  affaires 
de  Rocoux  et  de  Laufelt.  En  ré- 
compense il  obtint  le  grade  de 
maréchal-de-camp  et  le  cordon  de 
commandeur  de  l'ordre  de  Saint- 
Louis.  Le  général  Pfiffer  se  retira 
dans  sa  patrie,  et  y  devint  mem- 
bre du  petit-conseil  du  canton  de 
Lucerne.  On  cite  de  ce  vieux  gé- 
néral un  chef-d'œuvre  de  patience 
et  de  précision  :  c'est  un  Plan-re- 
lief de  la  Suisse,  qu'il  fut  dix  ans 
à  exécuter,  et  dont  voici  la  des- 
cription :  (1  Ce  qui  a  été  terminé 
de  ce  plan,  comprend  les  cantons 
d'Lnderwalden,  Schwifz  et  Uri,  et 
une  partie  de  ceux  de  Lucerne, 
Zug,  et  Berne.  Le  lac  de  Lucerne 
en  ocou|)e  le  centre;  et  tout  au- 
tour s'élèvent  d'immenses  chaînes 
de  montagnes  dont  Pfiffer  avait 
mesuré  les  hauteurs  avec  une  pré- 
cision admirable.  Les  détails  sont 
d'ime  exactitude  telle  ,  qu'au  tra- 
vers d'immenses  forêts  le  voya- 
geur retrouve  sans  peine  le  cha- 
let ou  le  bouquet  d'arbres  qui  l'a- 
vait frappé  dans  sa  route.  Les  fo- 
rêts de  pins  s'y  distinguent  par  im 
vert  plus  foncé;  les  rivières  sont 
figurées  par  de  la  chenille ,  les 
routes  piir  des  soies,  les  lacs  par 
des  morceaux  de  glaces  taillées, 
etc.  Ce  plan, qui  a  22  pieds  et  de- 
mi de  long,  sur  12  de  largeur,  se 
compose  de  i56  pièces  qu'on  peut 
séparer  à  volonté.  Il  a  été  gravé, 
dans  les  Tableaux  pittoresques  de 
la,  Suisse.  Le  burio  de  Michel  l'a 


PFE 

rcproJiiit,  en  ijSâ,  avec  plus 
d'ex.ictiliide  ;  et  Pfilïer  l'a  fait  gra- 
ver, en  1793,  par  Clausner  à 
Z;jg,  flans  la  forme  d'une  carte 
géographique,  avec  l'indication  Je 
la  hauteur  de  toutes  les  somrnité>.» 
Lors  de  la  conquête  de  l'Helvétie 
parlesarinées  françaises,  en  1790, 
ce  curieux  ouvrage  fui  au  moment 
d'être  transporté  ;\  Paris.  Pfiffer 
obtint  du  directoire- exécutif  de 
France  qu'on  ne  le  priverait  pas 
du  fruit  de  sa  longue  patience  et 
d'un  objet  de  curiosité  pour  tous 
les  étrangers  qui  visitent  la  Suis- 
se. Il  mourut,  et»  1802,  dans  la 
^6"  année  de  son  âge.  Le  Journal 
lielvélique  de  1^57  renferme  la 
Relation  d'une  promenade  au  mont 
Pilât,  qui  a  été  traduite  en  alle- 
mand. 

PFLIEGER  (J,  A.),  aîné,  cul- 
tivateur à  Altkirch ,  déparlement 
du  Haut-Hhin,  fut  élu  député  du 
bailliage  de  Béfortet  d'Huningue, 
aux  états-généraux  en  1789.  A  la 
fin  de  la  session,  il  devint  procu- 
reur-syndic du  district  de  ^a  ville 
natale,  et  fut  nomn)é,  en  septem- 
bre 1792,  député  i  la  convention 
nationale  par  le  département  du 
Haut -Rhin.  Dans  le  procès  de 
LouTs  XVI,  il  vota  avec  la  majo- 
rité. Il  passa,  par  suite  de  la  réé- 
lection des  deux  ti<;rs  convention- 
nels ,  au  conseil  des  cinq-cents, 
dont  il  sortit  le  20  mai  1798.  Ren- 
tré à  celte  époque  dans  la  vie  pri- 
vée ,  il  n'en  est  pas  sorti  depuis. 

PFLUGDER  (Damf-l),  littéra- 
teur, e>t  né  à  Morgcs,  cintor»  de 
Vaud,  et  vint  jeune  encore  à  Pa- 
ris ;  il  s'est  beaucoup  occupé  d'a- 
gronomie ,  et  est  auteur  de  plu- 
sieurs ouvrages  estimés  sur  l'agri- 
culture pratique,  dont  le  prlnci- 


PHE 


229 


pal  a  pour  titre  :  Cours  d'agricul- 
ture pratique ,  divisé  par  ordre  de 
matière f  ou  l'Art  de  bien  cultiver 
la  terre,  1809,  2  vol.  in-S",  etc.  ; 
ses  autres  ouvrages  sont  :  1°  les 
A musemens  du  Parnasse,  ou  Mé- 
lange de  poésies  légères,  1810,  in- 
18  ;  2"  Manuel  d' instructions  mo- 
rales, o.  vol.  in- 12, 181 1;  "5°  Cours 
d'éludé  à  l'usage  de  la  jeunesse , 
1813,  in-13;  4"  il  a  f''it  imprimer, 
en  1819,  un  Cours  d'agriculture 
complet,  sous  le  titre  de  Maison 
des  champs,  4  vol.  in-8". 

PFNINGER  (N.),  né  dans  le 
canton  de  Zurich,  était  préfet  de 
cettt'  ville  lors(|ue  les  Français  oc- 
cupèrent la  Suisse  en  1798.  Il  se 
fit  alors  remarquer  par  un  acte  de 
courage,  en  refusant  de  livrer  les 
clefs  du  trésor  à  Rapinat  {voyez  cg 
nom)  ,  commissaire  du  directoire- 
exécutif  de  France.  Pfninger  figu- 
ra de  nouveau  dans  les  événemens 
de  1802,  qui  changèrent  encf)re 
les  institutions  de  sa  patrie.  Il  fut, 
au  mois  de  septembre  de  la  mê- 
me année,  anêté  à  Stœsa  et  trans- 
porté à  Schwitz,  où  il  subit  quel- 
ques mois  de  détention.  Remis  en 
liberté,  il  n'a  depuis  celte  épo- 
que rempli  aucune  fonction  pu- 
blique. 

PHELINES  (N.  be),  capitaine 
du  génie,  en  1789,  fut  nommé 
celle  même  année  député  de  la 
noblesse  du  bailliage  de  Blois  aux 
et  its-généraux.  L'un  di-s  plus  zé- 
lés membres  de  la  minorité  de 
son  ordre,  il  prote-^ta  le  19  juin 
contre  la  majorité,  et  se  réunit  au 
tiers- état  du  moment  qu'il  se  fut 
constitué  en  assemblée  nationale. 
Lors  du  voyage  de  Vainjunes,  M. 
de  Phelines  fut  envoyé  à  Lanilau 
en  qualité  de  commissaire  de  l'as- 


a3o  PHE 

semblée  nationale.  Au  retour  de 
cette  mission ,  il  fil  adopter  un 
projet  relatif  à  l'admission  des  é- 
lèves  aux  écoles  d'artillerie  et  du 
génie,  et  tontinua  à  prendre  une 
part  active  aux  ojiérationsqui  mar- 
quèrent celte  célèbre  session, à  la 
fin  de  laquelle  il  rentra  dans  la 
■vie  privée. 

PHELIPPEADX   (  A.    le  Pi- 
card de),  oflicier  vendéen",  dont 
M.  Pressigny  nous  a  fait  connaî- 
tre,  dans   une  notice  biographi- 
que, les  services  et  la  rivalité  de 
collège    avec  ce   jeune  élève  de 
l'école  militaire,  qui  a  été  empe- 
reur des  Français.  «  SI.  de  Phe- 
lippeaux,  dit  M.   Pre.ssigny ,  na- 
quit en  1768  dans  le  Poitou,   et 
appartenait  à  l'une   des  plus  an- 
ciennes familles  de  cette  provin- 
ce. Son  père,  ofïicierau  régiment 
de    Fleury     infanterie  ,      l'ayant 
laissé  orphelin  fort  jeune ,  il   fut 
envoyé  de  bonne  heure  à  l'école 
militaire    de     Pontlevoy,    où    il 
lit    d'excellentes   «^tudes.    Il  pas- 
sa en    1^85  à  celle  de   Paris,  et 
s'y  distingua  pur  son  aptitude  et 
par  sa  conduite.  BiioNAPAnTE   s'y 
trouvait  alors;   ils    étaient  à  peu 
près  du  même  âge ,  mais  de  ca- 
ractères fort  oppo?és  :  l'un  gai, 
franc    et    ouvert;    l'autre    som- 
bre, sauvage,  et  renfermé  en  lui- 
même  :  ils  n'avaient  de  commun 
qu'une  fermeté   qui    tenait  de  la 
roideur.    Des  occasions  fréquen- 
tes de  rivalité  ne  firent  qu'accroî- 
tre   l'anthipalhie    qu'ils    ressen- 
taient.  »   Nous    suspendrons    un 
moment  notre  citation  pour  évi- 
ter le   détail  des  coups   de  pied 
que  IM.  Peccadiic  ,  alors  sergent- 
major  de  l'écfde,  et  depuis  !)aron 
de    Uerzogenberg,    général   au- 


PHE 

trichien,  chef  des  écoles  militaire» 
et  du  géniede  Vvmp'uc.inteiceptait 
en  voulant  pendant  les  heures  d'é- 
tude empêcher  l(;s  elfets  de  leur 
inimitié,  coups  de  pied  qu'ils  s'a- 
dressaient par-dessous  la  table  y  et 
dont  ses  jambes  étaient  toutes  noi- 
res. Maintenant  nous  allons  rap- 
porter la  suite    du  parallèle  que 
M.    Prrssigny    établit    entre    les 
deux  élèves,  n  Dans  les  divers  con- 
cours   où    ils    se    trouvèrent   en 
rivalité  l'un  de  l'autre,    Phelip- 
peaux  obtint    toujours    l'avanta- 
ge. Il  était  d'usage  de  présetiter 
chaque  année  à  Monsieur ,  comte 
de    Provence,   quatre    candidats 
pris    parmi   les    élèves    les    plus 
distingués;   et  ce  prince  en  choi- 
sissait deux  auxquels   il  donnait 
la  croix  de  iMont-Carinel.  Le  nom 
de  Phelippeaux  se  trouva  le  se- 
cond sur  la  liste,  et  celui  de  Buo- 
NAPARTE  le  troisième  ;  le  premier 
fut  préféré  ,  et  le  dernier  fut  ex- 
clu. Ils  se  présentèrent  ensemble 
à  l'examen  de  1786,  pour  l'artille- 
rie,  et  furent   reçus  tous  deux  : 
mais  l'ascendant  de   Phelippeaux 
ne  se  démentit  point  :  il  précéda 
innnédiatement    son    rival    dans 
la  promotion  qui  eut  lieu.    »  On 
trouvera    aux   articles   de    Bona- 
parte et  de   Napoléon   la  notice 
abrégée  de  la  vie  de  cet  élève,  que 
devançait   toujours  M.    de    Phe- 
lippeaux.  Ce   dernier   fut  admis 
dans  le  régiment  de  Besançon.  En 
juillet  1789,  il  commandait  «  l'u- 
ne des  batteries  qui  devaient  dis- 
siper les  atlroupemens  formés  sur 
la  place  Louis-Quinze  si  le  baron 
de  Bezenval  efit  fait  son  devoir.  » 
En   i7-)i  ,  M.   de  Phelippeaux  é- 
migra,  et  fit  la  canipagne  de  1792 
à  l'armée  des  princes;  elle  fut  li- 


piir. 

cenciée,  et  il  passa  à  l'armée  du 
prince  de  Condé.  En  i7g5,  il  ren- 
tra eu  France  avec  MM.  Diiprat 
et  Beaiimanoir-de-LangIc,  pour  y 
servir  la  cause  royale.  En   1796, 
à  trois  lieues  d'Orléans,  ils  déli- 
vrèrent trois  émigrés  que  l'on  con- 
duisait à  Paris.  Quelque  temps  a- 
prés,  nommé  adjudanl-général,  il 
s'empara  à  la  tête  d'un  corps  de 
royalistes  de  la  ville  de  Sancerre, 
et  livra    plusieurs  combats  où  il 
remporta  toujours  l'avantage.  La 
déroute  de  Quiberon  paralysa  les 
efforts  des  royaliste^.  M.  de  Phe- 
lippeaux,  à  la  tête  de  son  corps,  ne 
put  se   montrer  «  qu'au  moment 
où  la  Vendée  succombait.  »I1  re- 
tourna alors  à  Orléans,  où  il  s'ef- 
Ibrça  de  ranimer  le  zèle  des  défen- 
seurs  de  la  monarchie  ;    mais  il 
fut  dénoncé   v.l  arrêté  le  12  juin 
(1796).  Il  tomba  malade.  A  peine 
en  convalescence,  il  était  dirigé 
sur  Bourges,  lorsqu'une  de    ses 
parentes  le  fit  évader.  M.  de  Phe- 
lippeaux   se    tint    caché  jusqu'a- 
près le  18  fructidor  an  5  ('797); 
alors  il  rejoignit  l'armée  du  prin- 
ce de  Condé,  qui  était  près  du  lac 
de  Constance;  elle  se  dirigea  sur 
la  Russie,  où  il  ne  jugea  pas  utile 
de     l'accompagner.    Il    revint  à 
Paris.  Son  séjour  dans  cette  ville 
fut  marqué  par  l'évasion    de  sir 
Sydney  Smith  ,  détenu  au  Tem- 
ple. Les  auteurs  de  plusieurs  bio- 
grapliies  prétendent,   contre  l'o- 
j)inion    de    M.    Pressigny,    que 
«  lorsque  Sydney  Smith  et  Phe- 
lippeaux  eurent  été  faits  prison- 
sonniers  ensemble  et  amenés  à  la 
prison  du  Temple  à  Paris,  Phe- 
lipp<;aux  n'échappa  ;\  la  mort  qui 
h;  menaçait,  comme  émigré  pris 
les  armes  i\  la  main,  qu'en  se  fii- 


PIÎlî  a3i 

sant  passer  pour  le  domestique  du 
Commodore.  Il  joua  ce  rùie  fort 
long-temps,  et  s'enfuit  ensuite  de 
cette  prison  avec  Sydney  Smith.  » 
Les  moyens  qu'il  employa  tien- 
nent une  place  importante  dans 
la  notice  de  M.  Pressigny.  Il  se 
procura  un   blanc-seing    du  mi- 
nistre de  la  police,    se  ménagea 
des  intelligences  auprès  de  la  fille 
du  geôlier,  et  par  elle,  trompa  le 
gardien.  Il  se  déguisa  en  commis- 
saire,  fit  déguiser  quatre  de  ses 
amis   en   gendarmes,  et   parvint 
sans   accident  avec  son    protégé 
à  Londres ,   où  le  peuple  détela 
et  traîna  leur  voilure.  La  recon- 
naissance de  sir  Sydney  Smith  va- 
lut à  M.  de  Phelippeaux  le  grade 
decolonel,  que  l'amiral  anglais  lui 
fit  obtenir.  Sir  Sydney  Smith  re- 
çut un    commandement    dans  la 
Méditerranée;  M.  de  Phelippeaux 
l'accompagna.  L'amiral  se  déter- 
mina à  défendre  Sainl-Jean-d'A- 
creque  le  général  en  chef  Bonapar- 
te se  disposait  à  attaquer.  «  JN'ayant 
auprès  de  lui  aucun  officier,  ni  du 
génie,  ni  de  l'artillerie,  il  chargea 
Phelippeaux  de  la  direction  des  0- 
péralions.»Cet  ancien  officier  d'ar- 
tillerie fit  toutes  les  dispositions 
convenables    pour   résister.    Les 
Français  voulurent  d'abord  atta- 
quer de   vive   force;    bientôt   ils 
sentirent  la  nécessité  de  faire  un 
siège  en  règle,  et  ils  s'avancèrent 
assez  près  de  l'escarpe.  «  Mais  ils 
étaient  dépourvus  de  grosse  artil- 
lerie,   et  les  assiégés    ayant   fait 
sauter  leurs   ouvrages   par  deux 
fois,  ils  n'hésitèrent  pas  ;\  lever  le 
siège,  le  20  mai   1799,  après  6i 
jours  de  tranchée  ouverte.  Phe- 
lippeaux épiait  leurs  mouvemens; 
il  saisit  l'instant  favorable,  fit  une 


25a 


PHE 


sortie  des  deux  tiers  de  sa  ^nr- 
nisoii ,  et  tomba  sur  eux  avec 
impétuosité.  Cette  atlaqiie  im- 
prévue augmenta  leur  troulile,  et 
leur  retraite  ne  fut  bientôt  phis 
qu'une  déroute.  Le  vainqu«Mir 
se  disposait  à  le^  suivre  et  à  It^s 
harceler;  mais  lui-même  touchait 
au  terme  de  sa  vie.  »  Ce  ua^t 
point,  et  nous  en  faisons  la  re- 
marque pour  qu'on  ne  s'y  trom- 
pe pas,  un  historien  anglais,  rus- 
se ou  allemand,  qui  parle  ainsi 
des  revers  des  Français  ;  c'est 
l'auteur  de  la  notice  sur  i\l.  de 
Phelippeaux,  qui  du  re^te  la  ter- 
mine comme  il  l'a  commencée, 
en  opposant  les  deux  anciens  é- 
lèves,  toujours  ennemis,  et,  se- 
lon lui,  toujours  rivaux.  «  On 
peut  remarquer,  dit-il,  que  le 
nom  de  Phelippeaux  n'a  jamais 
paru  datis  aucun  bidielin  fran- 
çais ;  que  l'on  a  même  affecté 
d'insinuer  que  le  défenseur  de 
Saint- Jean-d' Acre  était  un  ancien 
officier  du  génie.  Buouaparte  re- 
doutait-il jusqu'à  l'onibre  du  ri- 
val de  sa  jeunesse?  ou  ne  suivait-il 
que  son  animosité  contre  lui  en 
cherchant  à  anéantir  son  souve- 
nir? »  M.  de  Philippeaux  mourut 
à  la  suite  de  ce  siège  d'une  inflam- 
mation de  poitrine  ou  de  la  pes- 
te, ^ous  terminerons  en  rappor- 
tant un  éloge  un  peu  moins  exa- 
géré que  celui  de  >1.  de  Pressigny, 
mais  qui  n'est  pas  moins  flatteur 
pour  M.  de  Phelippeaux.  «  Il  est 
certain,  disent  les  auteurs  d'une 
biographie  imprimée  à  l'étranger, 
que  ses  conseils  et  ses  opérations 
contribuèrent  puissamment  à  la 
résistance  de  Saint-Jean-d  Acrr, 
devant  laquelle  vint  échouer  la 
fortune   du    vainqueur    de    l'O- 


PHI 

rient  ;  et  cette  circonstance  s 
attaché  de  la  célébrité  à  son 
nom.  » 

PHILIBERT  (J.  C),  littéra- 
teur, s'est  occupé  avec  succès  de 
botanique,  et  a  publié  sur  cette 
science  plusieurs  ouvrages  élé- 
mentaires qui  ont  eu  du  succès. 
Ce  sont  :  i"  Histoire  naturelle  a- 
brégée  du  ciel ,  de  l'air  et  de  la  ter- 
re, ou  Notions  de  physique  géné- 
rale, 1798,  nouvelb;  édition,  in- 
8",  1809;  2°  Introduction  à  l'étu" 
de  de  la  botanique,  1799,  3  vol. 
in-8";  5"  Notions  élémentaires  de 
botanique,  1802,  i\\-^°  ;  ^  Exer- 
cice de  botanique  à  l'usage  des  com- 
mençans ,  iHo3,  2  vol.  in -8°:  5° 
Dictionnaire  abrégé  de  botanique, 
i8o3,  in-8";  6"  Dictionnaire  uni- 
versel de  botanique,  i8o4,  3  vol. 
in-8". 

PHILIDOll  (François -André 
Danican,  dit),  musicien-composi- 
teur, né  a  Dreux  le  7  septembre 
1726.  Le  nom  de  Philid'»r  fut  don- 
né à  son  grand-père,  Michel  Dani- 
can,  par  le  roi  Louis  \III,  dont  il 
était  musicien  de  la  chaud>re,  et 
qui  voulait  rappeler  ainsi  la  mé- 
moire du  |>lus  fameux  hautbois  de 
son  siècle.  Le  compositeur  Cani- 
pra,qui  jouissait  d'une  grande  cé- 
lébrité, devint  le  maître  du  jeune 
Philidor,  élevé  aux  pages  de  la 
musique  du  roi,  et  qui  montra  dès' 
reulance  les  plus  heureuses  dispo- 
sitions pour  son  art.  A  i  ">  ans  il 
obtint  la  faveur  de  faire  exécuter 
ses  motets  à  la  chapelle  royale.  Il 
voyagea  ensuite  en  Hollande,  en 
Aliemagiie,  en  Angleterre,  et  pen- 
dant son  séjour  à  Londres  il  mit 
eu  musique  la  fameuse  ode  de  Dry- 
den,  intitulée  la  Fête  d' Alexandre. 
Savant  liarmunisic,  ou  reprochait 


PHI 

cependant  à  ses  chants  de  manquer 
tropsoiivenl  d'expression  et  de  mé- 
lodie. De  retour  en  Fr-ince,  il  fit 
exécuter  en  i'p5!\,  à  la  cha[)eile  de 
Ver.'jailles,  un  Lauda  Jérusalem^ 
qui  fut  très-vauté  à  cette  époque. 
Depuis,  il  consacra  presque  exclu- 
sivement son  talent  à  l'opéra-couji- 
que,  genre  dont  Philidor  peut  être 
regardé  avec  Duni,commele  créa- 
teur en  France.  Ses  compositions 
sont  très-nombreuses.  En  1756,  il 
fit  la  musique  du  Diable  à  quatre, 
opéra-comique  en  3  actes  de  Sé- 
dain^'.  Biaise  le  savetier,  r Huître 
et  tes  Plaideurs,  du  même  auteur, 
furent  joués  en  1759;  et  depuis, 
Philidor  donna  régulièrement  au 
moins  un  opéra  par  an. On  a  de  lui 
le  Quiproquo ,  pièce  de  Mouston: 
le  Soldat  magicien,  dAnseaume; 
le  Jardinier  et  son  Seigneur,  de  Sé- 
<laine  ;  le  Maréchal  Ferrant,  de 
Quêtant;  i.Çfl«c/(o  Pança,  le  Bûche- 
ron, les  Fêtes  de  la  paix,  le  Sor- 
cier, Tome-Jones,  le  Jardinier  de 
Sidon,  le  Jardinier  supposé,  la 
Nouoelle  école  des  Femmes,  le  Bon 
fils,  Sémire  et  Mélide,  Ernelinde, 
grand  opér  1 ,  etc.  Pou  de  ces 
pièces  sont  restées  au  théâtre. 
Le  puhlic  revoit  cejiendanl  en- 
core avec  plaisir  le  Maréchal  fer- 
rant, et  le  Diable  à  quatre.  Quel- 
que temps  avant  la  révolution, 
Philidor  composa  pour  le  Car- 
niœn  Seculare  d'iimucii,  une  musi- 
que (jue  ses  admirateurs  proclamè- 
rent un  chef-d'œuvre  "le  l'art.  Cet- 
t'i  production,  si  vantée  alors,  esli\ 
]>eu  prèsoubliécaujourd'liui.  Mais 
les  combinaisons  harmoniques  ne 
lurent  point  la  seule  occupation  Je 
Philidor.  Il  était  reconnu  pour  le 
premier  joutMiiiréchecs  de  l' Euro- 
pe ,  et  il  se  flatta  même  pendant 


PHI 


255 


quelque  temps  de  faire  servir  sa 
supériorité  à  ce  jeu,  d'instrument 
à  sa  fortune.  Il  fit  publier  en  An- 
gleterre, par  souscription,  son  A- 
nalj  se  des  échecs,  ouvrage  qui  a 
eu  plusieurs  éditions.  Celle  de 
Londres,  de  1777,  in-8%  est  ornée 
du  portrait  de  l'auteur,  gravé  par 
Bartolozzi.  Un  mois  avant  sa  mort, 
ilfitencore,  quoique  aveugle,  deux 
parties  d'échecs  à  la  fois,  contre  les 
plus  habiles  joueurs,  et  les  gagna 
toutes  les  deux.  Eifrayé  des  pre- 
miers troubles  de  la  révolution , 
Philidor  s'était  retiré  à  Londres, où 
il  mourut  le  3 1  août  1795.  Des  qua- 
lités estimables,  un  caractère  franc 
et  généreux,  l'avaient  rendu  cher 
à  tous  ceux  qui  le  connaissaient, 
quoiqu'il  ne  se  distinguât  nulle- 
ment par  les  av.mtages  de  l'esprit. 
On  raconte  qu'un  de  ses  grands  ad- 
mirateurs ,  Laborde  ,  valct-de- 
chaudore  du  roi, entendant  un  jour 
Philidor  dans  une  société,  débiter 
beaucoup  de  trivialités,  s'écria 
plaisamment  :  *  Eh  bien,  voyez 
»cet  honmie  lii,  il  n'a  pas  le  sens 
«commun,  c'est  tout  génie.    » 

PHILIPART  (Jean),  écrivain 
anglais,  est  né  à  Londres,  et  fut 
placé  par  sa  famille,  qui  le  desti- 
nait à  la  carrière  du  barreau,  chez 
un  avocat  écossais,  où  il  fit  si  peu 
de  progrès  qu'il  renonça  à  cette 
profession.  Il  obtint,  en  181  i  , 
une  place  dans  le  gouvernement 
par  la  protection  de  lord  Sheffeld, 
dont  il  avait  été  se<;rélaire  en 
1809.  Tout  dévoué  aux  doctrines 
ministérielles,  M.  Philipart  les 
soutient  à  outrance  dans  ses  ou- 
vrages, ce  qui  lui  attire  souvent 
dos  critiques  sévères  de  la  part 
des  journaux  de  l'opposition.  Voi- 
ci la  liste  de  ses  principaux  ou- 


254  PHI 

Trages  :  i"  Observations  sur  tes 
systèmes  militaires  de  l'empire  bri- 
tannique,  et  plan  pour  rendre  les 
traitemens  des  officiers- généraux 
suffisans  pour  soutenir  leur  rang, 
iii-8°,  1812;  2°  Mémoires  du  prin- 
ce royal  de  Suède,  in-8°,  i<Si5;  5° 
Campagnes  du  Nord,  2  vol.  in-S°, 
i8i4;  L\°  Mémoires  et  Campagnes 
du  général  Morcau,  in-8°,  ï8i4; 
5'  Lettre  à  lord  Castlereagh  sur  la 
révision  du  bill ,  .pour  rendre  la 
milice  utile  dans  le  service  étranger, 
i«i-8°;  6°  Campagnes  en  Allema- 
gne et  en  France,  depuis  l'expira- 
tion de  l'armistice  jusqu'à  l'abdi- 
cation de  Napoléon  Bonaparte , 
3  vol.  in-S",  i8i4;  7°  Àlmanach 
royal  m.iHtaire,  contenant  les  ser- 
vices de  tous  les  officiers-généraux 
rivant  à  la  fin  de  1814?  2  ^"'-  iii-8°, 
i8i5;  8°  il  a  inséré  trois  articles 
dans  le  Pamphleteer  :  i"  Supplé- 
ment au  plan  pour  un  fonds  en  fa- 
veur des  officiers  ;  2'  Observations 
sur  divers  ailleurs  et  ouvrages  an- 
glais ou  étrangers  ;  3"  Observations 
supplémentaires  sur  la  lettre  du  co- 
lonel Roberts  à  l'armée,  çf  Vie 
des  généraux  anglais.  iM.  Philipart 
est  propriétaire  et  éditeur  du  Pa- 
norama militaire.  Sa  femme  cul- 
tive les  muses,  et,  imbue  de  ses 
principes  politiques,  elle  a  donné 
deux  poëmes,  l'un  intitulé  :  la 
Moscovite,  in-S",  i8i5,  et  l'autre: 
Victoria,  in -8%  181 3. 

PHILIPP  (N.),  capitaine  de 
navire  avant  la  révolution,  fut  a- 
vant  l'époque  du  9  thermidor  an 
2  (1794),  l'un  des  agens  des  co- 
mités de  gouvernement.  Il  figura 
comme  tel  (en  1795),  dans  les  dé- 
})artemens  de  la  Meurthe  et  du 
li.'is-Rhin,  où  souvent  on  le  soup- 
ç'onna  d'outrer  à  dessein  les  me- 


PIII 

sures    dont   l'exécution   lui    était 
confiée,  afin  de  rendre  odieux  le 
gouvernement.  Le  2  juillet  1794, 
se  trouvant  à  Paris,  il  s'introdui- 
sit dans  la  salle  de  la  convention, 
bien  qu'il  ne   fût  pas  député,  et 
alla  s'asseoir  paruu  les  membres 
siégeant  à  la  Montagne.  Mallarmé, 
contre  lequel  il  avait  publié  peu 
de  temps  auparavant  une  diatribe, 
l'apostropha,  le  sign.tia  connue  un 
calomniateur,  un  intrigant,  et  le 
fit  arrêter.  Philipp  ne  recouvra  sa 
liberté  que  lors  des  événemens  du 
i3  vendémiaire  an  4»  après  une 
détention  de  quinze  mois.  Impli- 
qué dans  l'aflaife  de  Babeuf  en 
1796,  il  fut  traduit  devant  la  hau- 
te-cour nationale   de   Vendôme  ; 
mais  l'accusateur  public  n'ayant 
pas  trouvé  contre  lui  de  preuves  ' 
suflisanles,   se   borna  à  déclarer 
qu'il  ne  le  croyait  pas  exempt  d'im- 
prudence et  de  blAme  :  il  fut  ac- 
quitté. Il  avait,  dans  sa  défense, 
manifesté  son  étonnement  de  se 
voir  associé  à  des  hommes  dont  les 
principes,  disait- il,  étaient  si  dif- 
férens  des  siens  :  celte  observa- 
tion s'appliquait  particulièrement 
aux  conventionnels  qui,  selon  lui, 
avaient  usurpé  la  souveraineté  du 
peuple.   Employé  pendant  quel- 
que temps  dans  les  vivres  de  l'ar- 
mée de  l'Ouest,  il  a  depuis  été 
entièrement  perdu  de  vue, 

PHILIPPEAUX  (Pierre),  né  à 
Eerrièrcs,  département  de  la  Sar- 
the,  en  1759.  Il  exerçait  la  pro- 
fession d'avocat,  lorsqu'il  fut  élu, 
en  1792,  par  le  département  de  la 
Sarthe,  député  ii  la  convention  na- 
tionale. Dans  le  procès  du  roi,  il 
vota  la  mort,  rejeta  l'appel  et  le 
sursis,  et  appuya  la  proposition  de 
Bourdon- de-l'Oise,  de  faire  assis- 


PHI 

ter  à  réxéciilion  les  patriotes  bles- 
sés le  10  août.  Il  soiilint,  le   lo 
mars  1793,  le  projet  présenté  par 
Robert  Lindet,  pour  la  formation 
d'un  tribunal  révolutionnaire  sans 
jurés,  projet  qui  n'eut  que  lui  et 
Duhem  pour  appuis,  et  lut  rejeté 
par  l'immense  majorité  de  l'as- 
semblée.  Il  se  déclara  contre  les 
députés  de  la  Gironde,  participa 
aux  mesures  prises  dans  les  jour- 
nées du  3i  mai ,  1"  et  2  juin  ,  et 
fut  envoj'é  à  Nantes,  pour  y  réor- 
ganiser les  administrations,  com- 
posées dt;  républicains,  alors  dé- 
signés sous  le  nom  de  pkléralistes, 
qu  e  le  peu  pie  cou  fondai  t  avec  rova- 
Uslcs.    Comme    Pbilippeaux  était 
luimêine  républicain,  il  ne  tarda 
pas  à  se  brouiller  avec  ses  collè- 
gues en   mission  dans  les  autres 
villes  de  la  Vendée.  A  la  suite  de 
vives  alttrcations  avec  eux,  il  s'u- 
nit aux  généraux  qui    conmian- 
daient  vers  Nantes,  et  leur  fit  a- 
dopl«;r  un  système  de  guerre  op- 
posé à  celui  que  suivaient  les  re- 
présenlans  et  les  généraux  réunis 
à  Saunmr.    Il  ne   parlait  qu'avec 
dérision  de  cette  réunion  dans  la- 
quelle se  trouvaient  Rfuisin,  Ros- 
signol et  Santerre,  qui,  disait-il, 
n'avaient  d'autre  talent  que  celui 
de   brûler   des   villes  et   des  ha- 
meaux, et  de  faire  des  exécutions 
barbares.  Il  parvint  d'abord  à  fai- 
re adopter  son  plan  par  le  comité 
de  salut-pidilic  ;  mais  les  succès 
qu'il    promettait   n'ayant   pas   eu 
lieu,  il  se  vit  exposé  aux  plus  vio- 
lens  reproches.  Alors,  pour  se  jus- 
tifier,   il  accusa  ses   antagonistes 
d'avoir    eux-mêmes    préparé    les 
revers  qu'on  attribuait  à  l'exécu- 
lion  de  ses  plans.   Cependant  le 
parti  de  ceux-ci  l'emporta;  il  re- 


PHI 


235 


prit  la  direction  de  cette  guerre, 
et  Pliilippeaux  fiit  rappelé.  Loin  de 
ménager  des  ennemis  qui  pou- 
vaient le  perdre,  il  ne  parut  à  la 
tribune  que  pour  les  dénoncer.  II 
fit  en  même  temps  paraître  une 
brochure  tellement  accusatrice, 
que  le  comité  de  salut-public  s'y 
voyant  désigné  comme  complice 
des  généraux  qui  par  leurs  cruau- 
tés perpétuaient  la  guerre,  ne  lui 
en  pardonna  jamais  la  publicité. 
Il  est  constant  que  dès-lors  sa  mort 
fut  résolue.  Bientôt  le  club  des 
Jacobins  déclara  Pbilippeaux  in- 
trigant, modéré,  traître  à  la  patrie, 
et  l'exclut  de  son  sein.  D'une  pa- 
reille exclusion  à  la  mort  il  n'y  a- 
vait  qu'un  pas.  Arrêté,  comme 
conspirateur,  dans  la  nuit  du  10 
au  1 1  germinal  an  2  (du  3o  au  5i 
mars  1794),  et  traduit  quinze 
jours  après  au  tribunal  révolution- 
naire ,  il  fut  condamné  à  mort  avec 
Danton,  Lacroix,  Camille-Des- 
moulins,  etc.  Pendant  son  inter- 
rogatoire, l'accusateur  public, 
Fouquier-ïinville,  habitué  à  a- 
dresser  à  ses  victiujes  des  paroles 
outrageantes,  joignit  plusieurs  fois 
aux  questions  qu'il  lui  faisait  Tin- 
sulle  et  l'ironie  :  «Il  vous  est  per- 
mis, lui  dit  Philippi;aux  avec  fier- 
té, de  me  faire  périr,  mais  m'ou- 
trager. ...  je  vous  le  défends.» 
Il  montra  la  plus  grande  fermeté 
en  allant  au  supplice. 

PHILIPON  DE  LA  MADE- 
LEINE (Louis),  homme  de  let- 
tres ,  mendire  des  académies  de 
Lyon  et  de  Besançon  ,  naquit  à 
l>yon  au  mois  d'octobre  1734' 
Destiné  par  sa  famille  à  la  carrière 
ecclésiastique,  il  préféra,  au  mo- 
ment de  prendre  les  ordres  ,  sui- 
vre celle  de  la  magistrature j  et  il 


256 


PHI 


se  rendit  à  Besançon,  où  il  fit  ses 
cours  de  droit.  Jl  se  fixa  dans 
cette  ville,  et  s'y  maria.  Avocat  du 
roi  près  du  bureau  des  finances 
de  Besançon  (  ancienne  chambre 
des  comptes  de  Dôle),  il  en  rem- 
plit les  fonctions  jusqu'en  1786;  il 
lui  pourvu  ,  à  celte  époque  ,  de' 
l'intendance  des  finances  de  M. 
le  comle  d'Artois.  Celte  place 
fut  supprimée  au  commencement 
de  la  révolution,  qui,  mal{j;ré  son 
esprit  éclairé,  le  blessait  trop  dans 
ses  intérêts  pour  qu'il  en  adoptât 
les  principes.  Son  opposition  , 
trop  manifestée ,  le  fit  décréter 
d'arrestation  peu  après  les  événe- 
mens  du  10  août  1792.  La  crainte 
d'être  victime  de  la  proscription, 
le  rendit  plus  circonspect,  et  il  é- 
vita  avec  le  plus  grand  soin  de  se 
mettre  en  évidence.  Cultivant  les 
lettres,  et  ne  prenant  aucune  part 
aux  agitations  politiques,  il  se  fit 
dis  amis,  et  obtint  même,  par  un 
décret  de  la  convention  du  5  jan- 
vier 1795  .  un  secours  de  2,000 
francs.  Il  fut  presque  en  même 
temps  nommé  bii>liothécaire  du 
ministère  de  l'intérieur.  Cet  em- 
ploi et  ses  travaux  littéraires  le 
mirent  bientôt  à  même  de  jouir 
d'une  modeste  aisance.  Il  vil 
passer  ainsi  tous  les  gouvcrne- 
niens  qui  se  succédèrent  jusqu'à 
celui  de  la  restauration  en  i8i4- 
Monsieur,  frère  du  roi,  à  qui  il 
fut  présenté,  lui  accorda,  avec 
une  pension  ,  le  titre  d'intendant 
honoraire  de  ses  finances.  11  a- 
vait  alors  80  ans  ;  il  mourut  le 
ic)  avril  1818,  dans  sa  84*  année. 
<  Il  fut  ,  dit  particulièrement  un 
de  ses  biographes  ,  homme  «le 
bonne  compagnie  ,  et  conser- 
va, jusqu'à  ses  derniers  momens, 
tout  le  charme  de  l'urbanité  fran- 


PHI 

çaise.  Doux,  sensible,  gai,  d'une 
humeur  égale,  ami  sûr,  toujours 
occupé  à  rendre  service,  toujoin-s 
attentif  à  dire  des  choses  aimables 
et  affectueuses,  ne  s'élant  jamais 
permis  ni  une  épigramme,  ni  mê- 
me un  mot  piquant ,  il  est  mort 
sans  avoir  eu  d'ennemis.  »  (^et  é- 
loge  est  vrai  en  tout  pniut.  Comu)e 
l'un  de  nos  plus  aj;réables  chan- 
sotiniers,  il  n'a  pas  moins  mérité 
cet  autre  éloge  que  son  an)i  M.  Le 
Prévost  d'iray  a  fait  de  se-^  chan- 
sons dans  le  discours  qu'il  pro- 
nonça sur  sa  tombe.  «  Ses  chan- 
sons si  connues  sont  pour  la  plu- 
part de^i  espèces  d'hymnes  consa- 
crés aux  dieux  des  plaisirs  déli- 
cats. Par  la  fraîcheur  et  la  délica- 
tesse de  son  esprit ,  il  se  montra 
conslanimenl  le  digne  émule  du 
chantre  de  Théos;  et,  comme  lui 
encore,  il  laissait  entrevoir  tout 
le  charme  de  l'âge  heureux  des 
illu.-ions  à  travers  ses  cheveux 
blancs.  wPhilipon  de  la  Madeleine 
a  publié  un  grand  nombre  d'ouvra- 
ges. INous  citerons  les  suivans  : 
1"  plusieurs  conjédies  jouées  sur 
le  lliéâire  du  Vaudeville,  et  f.iites 
en  société  avec  MlVI.  Léger,  The- 
riguy,  vicomte  de  Ségur,  et  Le 
Prévost  d'Iray.  Ce  sont  :  le  Dédit 
mal  gardé ,  Catinat  à  Saint-Gra- 
tieti;  Maître  Adam,  ou  le  Menuisier 
de  JSevers;  Carlin  débutant  à  lier  ga- 
nte. Gentil  Bernard ,  les  Trouha-, 
dours ,  Chaulieu  à  Fontenai  ,  le 
Caveau.  2°  Choix  de  Chansons  de 
M-  Philipon  de  la  Madeleine,  Pa- 
ris, I  vol.  in-18,  1810.  Ce  recueil 
avait  d'abord  paru  sous  trois  titres 
différens  :  Jeux  d'un  enfant  du 
Vaudeville ,  Paris,  1  vol.  in-18: 
c'est  la  première  édition;  V Elève 
d'Epicure,  Paris,  1  vol.  in-18,  an 
9   (i8o3)   :  lu   troiàième   édition 


PHI 

porte  ce  dernier  titre  ;  5°  Dis- 
cours sur  cette  question  :  le  Désir 
de  perpétuer  son  nom  et  ses  actions 
dans  ta  mémoire  des  hommes  est-il 
conforme  à  la  nature  et  à  la  raison? 
(inséré  dans  le  l^our  et  le  Contre, 
ijOi  ,  in-8°).  4"  Discours  sur  la 
nécessité  et  les  moyens  de  suppri- 
mer les  peines  capitales,  1770,  in- 
8°,  ouvrage  qui  a  été  traduit  en 
allemand,  Bâle  ,  in-8%  1786;  5° 
Mémoire  sur  les  moyens  d'indem- 
niser un  accusé  reconnu  innocent , 
1782  .  in-8°;  6°  Vues  patriotiques 
sur  l' Education  du  peuple  tant  des 
villes  que  des  campa i^nes.  Cet  ou- 
vrage, qui  concourut  pour  le  prix 
proposé  par  racadéinie-l'raiiçuise 
en  laveur  de  l'ouvrage  le  plus  u- 
tile  composé  dans  l'année  ,  ne  le 
céda  que  d'une  voix  à  l'Ami  des 
Enfans  de  Berquin.  7°  Diseours 
sur  les  moyens  de  perfectionner  l'é- 
ducation des  collèges  en  France , 
1785,  in-8°;  8°  Agricol  Viata,  ou 
le  Jeune  lier  os  de  la  Durante ,  fait 
historique  et  patriotique  ,  an  2 
(1794)»  in-S"  ;  9°  Géographie  élé- 
mentaire de  la  France,  an  5,  in-i  u; 
réimprimé  eu  1801  ,  même  for- 
mat. 10°  Manuel  et  nouveau  Guide 
du  promeneur  aux  Tuileries,  180G; 
1 1°  des  Homonymes  français  ,  1 
vol.  in- 8°;  5"  édition,  1817.  12° 
Manuel  épistolaire,  1  vol.  in- 12, 
Paris,  i8ao,  7°  édition,  ouvrage 
adopté  pour  les  lycées;  iS"  Gram- 
maire des  gens  du  monde,  in- 12, 
1807,  2'  édition;  la  première  avait 
paru,  en  1800,  s'uis  ce  titre  : 
Choix  de  remarques  sur  la  langue 
française.  i4°  Dictionnaire  portatif 
des  poêles  français  morts  depuis 
\o3t)  Jusqu'en  1804,  précédé  d'une 
Histoire  abrégée  de  ta  poésie  fran- 
çaise ,   Paris,  i8o5,  in-i8;    i5* 


PHI 


207 


Dictionnaire  portatif  des  rimes, 
précédé  d'un  nouveau  Traité  de 
la  versification  française ,  et  suivi 
d'un  Essai  sur  la  langue  poétique, 
Paris,  1806,  in- 18,  2"  éditiim;  i6* 
Dictionnaire  portatif  de  la  langue 
française  d'après  le  système  ortho- 
graphique de  l'académie,  Paris,  in- 
18,  3'  édition,  1819;  17"  enfin,  il 
a  donné  :  Voyages  de  Cyrus ,  par 
Ramsay ,  nouvelle  édition,  avec 
des  notes  géographiques,  histori- 
ques et  mythologiques,  i  vol.  in- 
12,  1807;  Lettres  de  la  duchesse 
Du  Maine  et  de  la  marquise  de 
Simiane,  nouvelle  édition,  Paris, 
i8o5  ;  Élémcns  de  la  Grammaire 
française  de  Lhomond ,  nouvelle 
édition,  avec  des  remarques;  Trai- 
té sur  les  Participes,  nouvelle  édi- 
y  ion.  in- 12,  1812;  Morceaux  choi- 
sis des  caractères  de  La  Bruyère , 
avec  une  Notice  sur  l'auteur,  in- 
12.  1808. 

PHILIPPON  (le  baron),  lieu- 
tenant-général, (;on)mandeur  de 
la  légion-d'houneur  et  chevalier 
de  Saint-Louis.  Plusieurs  campa- 
gnes, faites  avec  distinction,  l'a- 
vaient fait  parvenir  au  grade  de 
colonel  du  8"°'  régiment,  lorsqii  il 
fut  employé  en  Espagne,  où  sou- 
vent il  eut  l'occasion  de  se  faire 
remarquer.  Au  siège  de  Cadix, 
en  1810,  sa  brillante  conduite  lui 
valut  le  grade  de  général  de  bri- 
gade, et  le  î9  février  1811,  il  don- 
na, à  la  bataille  de  la  Gebora,  des 
preuves  d'une  rare  intrépidité. 
Chargé  de  défendre  Badajoz  con- 
tre les  Anglais,  quoiqu'avec  de 
faibles  moyens,  il  sut,  par  l'opi- 
iiiâlrelé  de  son  courage ,  prolon- 
ger assez  la  défense,  pour  donner 
le  temps  au  maréchal  duc  de  Ra- 
guse  de  Tonir  avec  son  corps  d'ar- 


a58 


iPHi 


mée  au  secours  de  cette  place.  Il 
fut  alors  nommé  général  de  divi- 
sion, et  en  i8i5,  il  faisait  partie 
du  corps  d'armée  d»;  Vandainme, 
engagé  dans  les  montagnes  de  la 
Bohême.  Se  voyant  dans  l'impos- 
sibilité d'empôcher  le  général  en 
chef,  cerné  de  toutes  purts,  d'être 
lait  prisonnier,  il  réunit  ce  qu'il 
put  de  troupes,  se  mit  à  la  tête  de 
ces  faibles  débris,  et  les  déroba, 
non  sans  de  grands  dangers,  aux 
poursuites  d'un  ennemi  bien  supé- 
rieur en  nombre.  Il  rejoignit  la 
grande-armée,  et  fit  ensuite  par- 
lie  des  troupes  restées  à  Dresde, 
Prisonnier  avec  elles,  par  la  vio- 
lation de  la  capitulation,  le  baron 
Philippon  n'est  rentré  en  France 
qu'après  le  retour  du  roi  :  H  devint 
à  cette  épo(iue  chevalier  de  Saint- 
Louis,  et  cessa  d'être  en  activité 
en  1816. 

PHILLIPS  (sir  Richard),  écri- 
vain anglais,  né  à  Londres  en  1768, 
fut  élevé  avec  soin  par  un  oncle, 
riche  brasseur  de  cette  ville.  Après 
avoir  fait  de  bonnes  études,  il  fut 
employé,  en  1786,  dans  une  école 
publique  à  Chester,  qu'il  quitta, 
en  1790,  pour  s'établir  à  Leicester, 
où  il  commença  un  commerce  de 
librairie,  et  publia  un  journal  in- 
titulé Leicester  Herald.  Il  s'inté- 
ressa en  outre  dans  une  entreprise 
lucrative  de  canaux.  En  1793,  il 
fut  poursuivi  pour  avoir  publié 
quelques  écrits  de  Thomas  Payne 
{^voy.  ce  nom),  et  condamné  à  une 
année  de  détention.  Son  établisse- 
ment d'imprimerie  et  de  librairie 
avait  été  consumé  par  le  feu;  mais, 
à  sa  sortie  de  prison,  il  fit  honneur 
i\  ses  alfaires  ,  et  entreprit ,  avec 
l'aide  de  ses  amis,  la  publication 
d'un  nouveau  journal  patriotique. 


PHI 

le  Mont  h/y  Magazine  ,  qui  obtint 
le  plus  grand  succè'^.  En  1807,  il 
fut  élu  un  d«s  shérifs  de  la  ville 
de  Londres.  Le  ministère  désirait 
se  l'attacher,  et  lui  fit  donner,  par 
le  roi ,  le  titre  de  chevalier.  Sir 
Richard  Phillips  crut  pouvoir  ac- 
cepter cette  faveur  ,  mais  n^ea 
montra  point  une  grande  recon- 
naissance. Il  vendit  ,  quelque 
temps  après,  le  fonds  de  son  jour- 
nal, et  n'en  resta  pas  moins  un  des 
principaux  rédacteurs;  le  Monthly 
Magazine  a  corrstamment  depuis 
soutenu  les  mêmes  principes,  et 
se  trouve  souvent  en  oj-position 
très-prononcée  avec  le  ministère. 
Sir  Richard  est  connu  par  une 
autre  singularité,  son  attachement 
au  système  des  pythagoriciens.  "^ 
Dès  sa  jeunesse,  il  a  montré  une 
horreur  invincible  pour  toute 
nourriture  provenant  de  la  chair 
des  animaux,  et  s'en  est  toujours 
abstenu.  Outre  ses  ouvrages  pé- 
riodiques, il  a  publié  :  1°  Lettre  à 
la  bourgeoisie  de  Londres ,  sur  les 
devoirs  et  l'emploi  de  shérifs,  1808, 
in- 13;  2°  Traité  sur  les  pouvoirs  et 
les  devoirs  des  jurés,  181  i,  in- 12; 
3"  Notice  sur  la  Datura  stramo- 
nium  comme  an  remède  pour  l'asth- 
me, 1811,  in-8";  4°  Rî^S-^  ^'^^ 
pour  les  jurés. 

PHILLIPS  (  Samuel)  ,  lieute- 
nant- gouverneur  de  l'état  de  Mas- 
sachussetts.  dont  son  père  fut  l'un 
des  conseillers;  il  (Ui  fut  aussi  l'un 
des  hommes  les  plus  recomman- 
dables  par  leurs  vertus  et  les  ser- 
vices qu'ils  rendirent  à  leur  patrie. 
Samuel  Phillips  naquit  à  Andover 
en  1753 ,  et  fit  ses  études  au  col- 
lège d'Harvard,  où  il  prit  ses 
degrés  en  1771.  En  i795,  il  fut 
élu  membre  du  congrès  provin- 


PHI 

cial  et  de  la  chambre  de»  repré- 
seiilaiis;  il  fit  partie  de  cette  der- 
nière jusqu'en  1780,  et  coopéra 
à  la  formation  de  la  constitution 
de  Massachussetts.  Il  devint  en- 
suite membre  du  sénat,  fut  appe- 
lé, en  1^85,  à  la  présidence  de  ce 
corps  ,  et  en  remplit  honorable- 
ment les  fonctions  jusqu'en  1.801. 
11  fut  aussi ,  pendant  cet  inter- 
valle, membre  de  la  cour  de  jus- 
tice d'Essex  (depuis  1781  jusqu'en 
1797).  Nommé,  en  1801,  lieute- 
nant-{gouverneur  de  Massachus- 
setts, il  ne  put  occuper  long-temps 
cette  place  par  suite  de  l'aflaiblis- 
&emeni  de  sa  santé  ;  il  mourut  le 
10  février  1802,  emportant  au  tom- 
beau les  legrets  de  tous  ses  conci- 
toyens. Samuel  l'hillips  protégea 
constamment  les  académies  d'An- 
dover  et  d'iixeter,  dout  son  père 
et  son  oncle  furent  les  fondateurs 
et  les  bienfaiteurs. 

PHILIUN  (  Armand  -  Pierre- 
Paul  ),  homme  de  iellres,  e!St  né 
à  Paris  en  1784.  Il  fil  ^es  études 
au  Prytanée  français,  et  enira  vo- 
lontairement au  service.  M.  Phil- 
pin  a  fait  les  campagnes  de  i8o3, 
1804»  i8o5  eti8o(j,  à  la  suite 
desquelles  il  passa  dans  l'adminis- 
tration des  contributions  indirec- 
tes, qu'il  quitta  quelques  années 
après,  pour  s'attacher  au  maré- 
chal Ney,en  qualité  de  secrétaire. 
En  181 5,  il  accompagna  le  géné- 
ral Carnot  à  Anvers,  et  fut  en  par- 
tie chargé  de  la  rédaction  du  jour- 
nal du  siège  de  cette  place.  11  re- 
vint en  Franco  avec  ce  général. 
Lors  de  leur  départ  d'Anvers  ,  la 
(iazette  Fan  -  lirahon ,  à  la  fin 
d'un  article  consacré  à  Carnot  (  5 
mai  i8i4),  s'exprima  ainsi  :  «  Ceux 
«qui  ont  approché  du  général  se 


PHI  239 

«plaisent  à  rendre  justice  à  la  pc- 
))Iitesse  ,  à  la  complaisance  et  aux 
ntalcns  de  M.  Philpin,  secrétaire 
«particulier  du  gouverneur  ;  c'est 
»  un  tribut  que  ses  bonnes  quali- 
»  lés  lui  méritent.  »  Après  son  re- 
tour, M.  Philpin  fut  quelque  temps 
employé  près  du    ministère  de  la 
guerre.  Au  mois  d'avril  18  i5,  il 
accepta  la  sous-préfecture  de  Vire, 
lorsque  Carnot  était  ministre  de 
l'intérieur,  et  se   conduisit  d'une 
manière  honorable,  en  se  rendant 
caution,  auprès  du  ministre  delà 
police  ,  de  gardes-du-corps,  qui 
lui  durent   ainsi  leur  liberté.  M. 
Philpin  n'apposa  point  son  appro- 
bation à  l'acte  additionnel  aux  cons- 
titutions de  l'empire.  Cependant , 
malgré  la  sagesse  de  son  adminis- 
tration et  la  modération  de  sa  con- 
duite, il  fut  remplacé  à  la  sous- 
préfecture  de  Trévoux  (  départe- 
ment de  l'Ain  ),  où  sa  nomination 
avait  été  annoncée  dans  le  Moni- 
teur du  17  juillet  i8i5,  sous   le 
ministère  de  M.  de  Vaublanc.  Il  a 
été  admis  à  présenter  au  roi  plu- 
sieurs  de   ses   ouvrages,  dont  il 
a   fait    hommage    à    la   chambre 
des  députés.   Rentré    dans  la  vie 
privée  ,  il  se  livre  aux  travaux  lit- 
téraires. Il  a  publié  plusieurs  ou- 
vrages, parmi  lesquels  on  distin- 
gue :   1°  Annales  de  l'administra- 
tion publique^  181 5;  2°  la  Situa- 
tion de  la  France  en  181  7  ;  5°  quel- 
ques brochures  sur  la  politique  et  la 
législation  ;  4"  ««  Recueil  de  poé- 
sies ;  5°   une  Ode  sur    la  guerre 
d'Espagne  en  1824;  Q'des  Elégies^ 
et  une  Epltre  aux  députés  français 
(  session  de  1824)-  M-  Philpin  a 
été  nommé  par  le  roi,  membre  d« 
la  légion-d'honnaur  ;  il  est  asso- 
cié à  plusieurs  sociétés  savantes. 


240 


PIA 


PU  (P.  N.),  chimiste  »li.slin- 
gué,  naquit  à  Paris  le  j5  sep- 
tembre 1721.  11  fit  (Je  bonnes  étu- 
des, et  devint  à  la  suite  de  ses 
conrs  de  médecine  et  de  chimie 
pharmacien  en  chef  de  l'hôpila!  de 
Strasbourg,  place  qu'il  occupa 
long-temps  avec  autant  d'huma- 
nité que  de  zèle.  En  1770,  il  re- 
vint à  Paris,  où  il  fut  nomnié  é- 
chevin.  Dè>-lors  il  conçut  le  pro- 
jet de  signaler  son  administration 
par  desétabli.-'semens  utiles.  L'un 
de  ces  établissemens  fut  la  forma- 
tion et  le  dépôt  des  boîtes  funjiga- 
toires  destinées  '  à  rappeler  les 
noyés  à  la  vie  ,  lorsqu'ils  ne  sont 
encore  qu'asphyxiés  par  le  dé- 
faut de  respiration.  On  doit 
aussi  à  Pia  le  perfectionnement 
des  instrumens  propres  à  faire 
parvenir  l'air  dans  les  poumons, 
et  i\  introduire  de  la  fumée  dans 
les  intestins.  Les  avantages  ré- 
sultant de  ces  moyens  de  se- 
cours sont  tellement  incontesta- 
bles, que  dès  la  première  année 
de  leur  emploi,  a'i  noyés  retirés 
de  la  Seine  furent  rendus  à  la 
vie.  L'établissement  de  Pia  pros- 
pérait lorsque  la  révolution  vint 
le  détruire  en  grande  partie.  Cet 
homme  recommandable  perdit 
sa  fortune,  et  mourut  dans  un  é- 
tat  voisin  de  l'indigence,  le  11 
mai  1799.  Il  avait  publié  les  ou- 
vrages suivans  :  1°  Description 
de  la  boite  d'entrepôt  pour  les  se- 
cours des  noyés,  1770;  3°  Détails 
des  succès  de  l' établissement  que 
la  ville  de  Paris  a  fait  en  faveur  des 
personnes  noyées,  i775' 

PIALÈS  "(Jean-Jacques),  ju- 
risconsulte, naquit  à  Jlhodez  , 
département  del'Aveyron,  vers 
1720.   Les  progrès  qu'il  fit  dans 


PIA 

l'élude  du  droit  canonique,  à  la- 
quelle il  se  livra  exclusivement, 
le  firent  devenir  en  quelque  sorte 
l'oracle  du  cler^fé,et  générale- 
ment de  tous  les  possesseurs  de 
bénéfices,  qui  souvent  avaient 
à  faire  décider  sur  cette  matière 
les  questions  les  plus  importantes. 
Il  p«rdit  la  vue  en  1765.  Ses  é- 
crits,  sous  le  nom  de  Traités, 
sont  nondîreux,  et  forment  26 
volumes  in- 12.  Pialès  mourut  à 
Paris,   le  4  août  1789. 

PI  A  11,  homme  de  couleur, 
général  des  indépendans  de  l'état 
de  Venezuela  (aujourd'hui  ré- 
publique de  Colombie).  se«dislin- 
gua  dès  son  entrée  dans  la  car- 
rière des  armes  par  ses  talens , 
une  activité  infatigable,  et  sur- 
tout par  la  plus  brillante  valeur. 
On  l'a  vu  plusieurs  fois  A  la  tête 
d'une  poignée  de  braves  qu'il  a- 
vait  formés  aux  combats,  cl  qui 
se  croyaient  invineil)Ies  sous  ses 
ordres,  attaquer  des  forces  trois 
foi»  supérieures  en  nombre,  les 
intimider,  et  en  triompher  par 
.son  audace.  Quand  le  général 
Bolivar,  après  son  débarquement 
à  Ocumare,  marcha  sur  Caraccas, 
il  confia  à  Piar  un  corps  considé-  , 
rabie  d'infanterie,  qui,  soutenu  M, 
par  la  cavalerie  légère  de  Roxas  W 
et  de  Moganas,  devait  occuper  ^f 
les  plaines,  tandis  que  le  général  * 
en  chef  espérait  emporter  la  capi- 
tale ;  mais  Bolivar  échoua  dans 
son  entreprise,  et  fut  repoussé 
avec  perte.  Son  lieutenant  Piar 
opéra  sa  retraite  en  bon  ordre, 
et  parvint  à  réparer  bientôt  cet 
échec.  Il  battit  ensuite  l'ennemi, 
en  plusieurs  rencontres,  et  l'em- 
pêcha plus  souvent  encore,  de 
profiter  des  avantages  qu'il  dut, 


PU 

«u  commencement  de  celte  guer- 
re, Il  des  forces  supérieures  et 
mieux  diîiciplinées.  Lue  témérité 
presque  toujours  couronnée  par  le 
succès,  avait  rendu  Piar  l'idole 
des  soldats.  Mais  son  ambition  , 
qui  n'avait  d'abord  en  vue  que 
l'affianchissement  de  sa  pairie, 
croissait  avec  ses  succès.  Mécon- 
tent de  ne  jouer  qu'un  rôle  se- 
condaire dans  l'état,  il  aspirait  au 
rang  suprOme,  et  crut  pouvoir 
y  monter  à  l'aide  des  Indiens  et 
des  hommes  de  couleur,  qui 
lui  étaient  en  partie  dévoués.  Il 
fallait,  il  est  vrai,  sacrifier  les 
blancs,  et  commencer  par  son 
ami  Bolivar  même;  et  l'on  assure 
que  Piar  en  avait  pris  la  résolu- 
tion ,  quand  ses  projets  furent 
découverts.  Investi  à  cette  époque 
du  commandement  en  second  de 
1  armée  anjéricaine,  il  n'en  fut  pas 
moins  arrêté  au  milieu  de  ses  com- 
pagnons d'armes,  et  transféré, 
par  ordre  des  autorités  supérieu- 
res, à  Augustura,  où  un  conseil 
de  guerre  était  convoqué  pour  le 
juger.  Les  principaux  généraux 
de  l'armée,  presque  tous  hom- 
mes de  couleur  comme  lui,  et 
auxquels  on  avait  adjoint  l'amiral 
Brion ,  composaient  ce  tribunal 
présidé  par  Bolivar.  Peut-être 
quelque  jalousie  des  frères  d'ar- 
mes «le  Piar,  importunés  par  la 
supériorité  que  sa  valeur  et  l'af- 
fection des  soldats  lui  avaient  ac- 
quise, indua-l-elle  sur  le  jugt- 
ment  :  il  fut  des  plus  sévèies. 
Après  une  assez  courte  procédure 
il  fut  déclaré  convaincu  d'avoir 
tramé  un  complot  tendant  à  faire 
insurger  les  mulâtres  et  les  In- 
diens, à  égorger  tous  les  blancs, 
ù   s'emparer  de  la   dictature,  et 

T.  XVI. 


PIA 


241 


en  conséquence,  il  fut  condamné 
à  être  fusillé.  On  assure  que  Boli- 
var, après  avoir  lait  de  vains  ef- 
forts pour  sauver  l'accusé,  se  vit 
contraint,  à  son  grand  regret,  de 
signer  la  sentence  de  mort,  ce  qui 
prouverait  que  l'existence  d'un 
coniplot  dangereux  pour  l'état  é- 
lait  bien  réelle.  I!  n'y  eut  cependant 
aucun  des  complices  de  Piar  de 
mis  en  cause. Celui-ci  marcha  d'un 
pas  ferme  vers  le  lieu  fixé  pour 
son  exécution.  Le  fatal  cortège 
passa  sous  les  fenêtres  du  général 
Bolivar,  qui,  saisi  de  la  plus  vi- 
ve douleur,  salua  encore  de  la 
main  son  ancien  frère  d'armes, 
et  lui  cria  d  une  voix  entrecou- 
pée :  «  Adieu  ,  mon  malheureux 
»ami.  '  Arrivé  hors  des  portes 
d'Augustuia,  Piar  se  plaça,  avec 
son  intrépidité  ordinaire,  en  face 
des  soldats  qui  devaient  lui  don- 
ner la  mort,  se  découvrit  la  poi- 
trine, et  commanda  lui-même  le 
feu.  Percé  de  sept  balles,  il  ex- 
pira sur-le-champ.  Ses  projets 
ambitieux  furent  niés  par  ses  nom- 
breux amis,  et  bientôt  oubliés; 
mais  ses  beaux  faits  d'armes  sont 
encore  célébrés  par  les  gtierriers 
de  Colombie. 

PIAZZI  (Joseph),  directeur- 
général  des  observatoires  de  Na- 
ples  et  de  Palerme ,  membre  de 
l'académie  royale  des  .••ciences  de 
Naples,  Turin,  Goëtlingue,  Ber- 
lin, Pélersbourg,  associé  étran- 
ger de  l'institut  de  France,  et  de 
la  société  royale  de  Londres , 
mend)re  ordinaire  de  la  société 
italienne ,  et  correspondant  de 
l'institut  de  Milan  ,  est  né  à  Ponte, 
dans  la  Valteline  ,  le  lii  juillet 
174^.  Il  prit  l'habit  des  ihéatins 
dans  le  couvent  de  Saint-Antoine , 
iG 


2  43  PU 

à  Milnn,  où  il  acheva  sou  novi- 
ciat. Dans  ses  études,  qu'il  fit 
successivement  à  Milan,  à  Turin 
et  à  Rouie,  il  eut  l'avantage  de 
compter  au  nombre  de  ses  maî- 
tres les  PP.  Tiraboschi,  Beccaria, 
Leseur  et  Jacquier.  Destiné  à  par- 
courir lui-même  la  carrière  de 
l'enseignement,  il  alla  professer 
la  philosophie  à  Gènes,  où,  par 
quelque.^  thèses  qu'il  y  publia,  il 
alarma  le  zèle  des  dominicains 
de  la  ville,  qui  auraient  troublé 
son  repos,  si  le  grand -maître 
Plnto  ne  l'eût  engagé  à  se  rendre 
aupiès  de  lui,  pour  enseigner  les 
mathématiques  dans  la  nouvelle 
univfcisité  de  Malle.  Lorsqu'elle 
fut  supprimée  par  son  successeur  • 
Ximènes,  Piazzi  se  lendil  à  Rome, 
etensuite  àRavenne^  où  il  occupa 
la  chaire  de  philosophie  et  de  ma- 
thématiques au  collège  des  nobles, 
dont  il  devint  aussi  le  directeur. 
Il  s'y  fit  des  ennemis,  par  la  pu- 
blication de  nouvelles  thèses  phi- 
loso[>hi(].ies ,  qui  ])ariwent  trop 
hardies  de  l:i  p;ut  d'un  jeune  reli- 
gieux. Malgré  cela,  on  le  crut  di- 
gne de  rtinplicei'  le  prédicateur 
ordinaire  de  Crémone,  où  il  s'é- 
tait relire  .  après  que  les  ihéatins 
eurent  renoncé  ;\  l'administration 
du  collège  de  Ravenne  ;  il  fut 
même  nommé  lecteur  de  théolo- 
gie dogmatique  à  Saint- André- 
della-Valle,  à  Rome,  où  il  eut 
pour  toliègue  le  P.  ChiaraiTionte , 
qui  (diiserva  pour  lui  sur  le  trône 
pontifical  les  scntimens  qu'il  lui 
avait  voués  dans  le  cloître.  En 
17H0,  cédant  aux  conseils  du  P. 
Jacquier,  qui  l'employait  à  véri- 
fier ses  calculs,  Piazzi  accepta  la 
plaie  de  professeur  de  hautes- 
mathématiques  à  l'académie  des 


PIA 

études  de  Palerme.  Il  y  réforma, 
en  arrivant,  la  méthode  de  l'en- 
seignement, en  remplaçant  Wolff 
par  des  ouvrages  modernes,  et  en 
y  rendant  familiers  ceux  de  Lock 
et  de  Condillac ,  qui  y  étaient 
presque  inconnus.  Par  son  in- 
fluence et  ses  lumières,  il  contri- 
bua puissamment  à  dissiper  les 
ténèbres  qui,  sous  la  double  pro- 
tection de  1  inquisition  et  des  jé- 
suites, couvraient  encore  le  sol 
de  la  Sicile.  Non  content  d'y  avoir 
fait  renaître  l'amour  des  lettres, 
il  parvint  à  inspirer  au  prince  de 
Caramanico,  qui  en  était  alors  le 
vice-roi ,  le  désir  de  voir  trans- 
formée en  observatoire  une  an- 
cienne tour  dans  le  palais  des  rois 
de  Sicile ,  à  Palerme.  Il  obtint 
aussi  la  permission  de  se  rendre 
en  France  et  en  Angleterre,  pour 
y  faire  l'acquisition  des  instru- 
mens  nécessaires  à  ce  nouvel  éta- 
blissement, et  pour  se  mettre  en 
relation  avec  les  astronomes  les 
plus  renommés  par  leurs  travaux 
et  leur  savoir.  Il  vint  d'abord 
à  Paris ,  où  Lalande  ,  Jcaurat . 
Bailly,  Delambre,  Pingre,  et  au- 
tres ,  lui  témoignèrent  le  plus 
grand  intérêt.  S'associant  à  l'ex- 
pédition de  Cassinl,  Méchain  et 
Legendre,  chargés  de  détermi- 
ner la  différence  des  deux  méri- 
diens de  Paris  et  de  Greenwich, 
il  profita  de  cette  occasion ,  la 
plus  favorable  pour  un  astrono- 
me, pour  visiter  l'Angleterre,  où 
il  connut  Maskelyne  ,  Herschel , 
Vince,  et  surtout  Ramsden,  au- 
quel il  confia  la  construction  de 
ses  instrumens.  Il  allait  souvent 
à  l'observatoire  de  Greenwich  , 
et  c'est  de  là  qu'il  examina  Té- 
clipse  solaire    de   1788,    dont  il 


PIA 

remlit  compte  d;ins  un  mémoire 
in.séré  dans  les  Transactions  philo- 
sophiques de  Londreji.  Convaincu 
de  rin(  ertitude  dans  laquelle  lous 
les  quarts  de  cercle  laissent  l'es- 
prit d'un  observateur,  Piazzi  en- 
^ajjea  Ramsden  à  lui  construire 
un  cercle  vertical  de  cinq  pieds 
de  diamètre,  accompagné  d'un 
azimntal  ,  et  divisé  avec  cette 
précision  dont  cet  artiste  seul  était 
al(.rs  capable.  Il  se  rendait  tous 
les  jours  dans  ses  ateliers  pour  en 
presser  les  travaux;  mais,  mécon- 
tent de  la  lenteur  de  l'artiste,  il  ima- 
gina de  stimuler  son  amour-propre 
en  faisant  publier  ime  lettre,  adres- 
sée à  Lalande,  sur  la  vie  et  les  ou- 
vrages de  Ramsden.  Cette  ruse 
lui  réussit  :  en  peu  de  temps  il  eut 
la  satisfaction  de  voir  son  grand 
cercle  terminé,  et  il  put  même  y 
ajouter  un  instrument  des  passa- 
ges, un  sextant,  et  d'autres  ma- 
chines secoud;iires.  Le  ministère 
anglais  prétendit  que  le  cercle, 
appartenant  à  la  classe  des  décou- 
vertes, devait  être  assujetti  aux 
droits  prohibitifs,  et  ne  pas  sortir 
de  l'Angleterre.  Mais  llamsden 
déclara  que  si  c'était  une  nouvelle 
invention,  la  gloire  en  était  due  à 
Piazzi,  dont  il  n'avait  fait  qu'exé- 
cuter les  idées.  Cette  protestation 
imposa  silence  aux  ministres  ,  qui 
permirent  à  Piazzi  d'emporter  ses 
instrumens.  Il  se  hâta  de  rentrer 
en  Sicile,  pour  mettre  en  activité 
le  nouvel  observatoire,  le  plus 
méridional  qui  existât  alors,  de- 
puis que  celui  de  Malte  avait  été 
incendié,  en  1789.  Aussitôt  que 
les  instrumens  purent  y  être  pla- 
cés, Pitizzi  y  commença  ses  ob- 
servations ,  dont  il  consigna  les 
résultats  dans  un  volunte  publié 


PIA 


243 


eu  i^ga,  auquel  on  en  vit  bientôt 
succéder  un  second.  Persuadé,  dès 
le  commencement,  que  la  vraie 
position  des  étoiles  est  la  base  do 
l'édifice  astronomique  ,  il  se  pro- 
posa d'en  dresser  le  catalogue, 
dirigeant  tous  ses  travaux  vers  ce 
grand  but.  Le  Français-Lalande 
en  France ,  Cagnoli  en  Italie , 
de  Zach,  Heniy,  Barry  en  Alle- 
magne, avaient  entrepris  ,  en  ce 
genre,  des  travaux  partiels,  se 
fondant  tous  sur  la  position  des 
trente-six  étoiles  que  Maskelyne 
avait  indiquées  aux  astronomes 
comme  termes  assurés  de  compa- 
raison. Piazzi,  au  contraire,  ne 
crut  pas  de  voir  se  fier  à  la  position 
des  astres  ,  déterminée  d'après 
une  simple  observation  :  la  moin- 
dre inexactitude  de  la  pari  de 
l'observateur,  la  plus  petite  im- 
perfection dans  ses  instrumens, 
lui  paraissaient  des  accidens  trop 
probables ,  pour  les  repousser 
comme  inadmissibles.  Il  savait 
aussi  que  si  Flainsteed,  Mayer 
et  Le  Monniei'  eussent  mis  plus 
de  suite  dans  leurs  observations, 
ils  auraient  probablement  dérobé 
à  Herschcl  l'honneur  de  sa  dé- 
couverte. Ces  considérations  le 
forcèrent  à  revenir  plusieurs  fois 
sur  la  même  étoile  avant  d'eu  fixer 
la  position,  et  c'est  d'après  celle 
méthode  laborieuse,  mais  exacte, 
qu'en  parlant  des  trente-six  étoiles 
de  Maskelyne,  Piazzi  acheva  son 
premier  grand  catalogue ,  conte- 
nant 67/4^  étoiles,  qui  fui  ac- 
cueilli avec  admiration  par  tous 
les  astronomes ,  et  mérita  d'être 
couroimé  par  l'institut  de  France. 
Mais  un  plus  beau  résultat  de  ce 
système  fut  la  découverte  d'une 
neuvième   planète,    qui  fraya  ia 


244 


PIA 


roule  à  de  nouvelles  conquêtes 
dans  le  ciel.  Le  i"  janvier  1801, 
l'iazzi  ,  en  voulant  observer  la 
8^'  étoile  du  catalogue  zodiacal 
de  La  Caille,  entre  la  queue  du 
bélier  et  le  taureau,  aperçut  une 
étoile  de  8'  grandeur,  qu'il  ob- 
serva également  par  occasion  ; 
son  habitude  de  vérifier  les  ob- 
servation* de  la  veille  lui  fit  re- 
marquer le  lendemain  une  difië- 
rence  dans  la  position  du  petit 
astre,  qu'il  crut  d'abord  ctre  une 
comète.  Il  communiqua  ses  ob- 
«ervaiions  à  Oriani,  qui,  voyant 
que  ce  point  lumineux  n'avait  pas 
la  nébulosité  des  comètes,  et  qu'il 
avait  été  stalionnaire  et  rétrograde 
dans  un  assez  petit  espace,  ;\  la 
manière  des  planètes ,  le  calcula 
dans  un  cercle.  Il  ne  s'abusa  pas 
dans  son  hypothèse,  qui,  confir- 
mée par  tous  les  astronomes  ,  as- 
snra  à  Piazzi  les  avantagés  de 
la  découverte  ,  àlaquelle  il  imposa 
le  nom  de  Cerès  F(Tdinandea,  à 
cause  de  la  déesse  de  la  Sicile  et 
de  son  roi  actuel.  Lalimde  préten- 
dit qu'on  aurait  plutôt  dfi  l'appe- 
ler P/fl^zi.  Le  roi  de!  Naples  voulut 
récompenser  l'astronome,  en  fai- 
sant frapper  une  médaille  d'or  en 
son  honneur,  mais  Piazzi,  mo- 
deste dans  son  triomphe,  deman- 
da que  la  valeur  de  ce  présent  fAt 
employée  a  l'achat  d'un  équatorial, 
qui  manquait  à  son  observatoire. 
11  continuait,  en' attendant,  avec 
persévérance  les  outrages  qu'il 
iivait  commencés  :  ni  les  soirl.*  dfe 
son  grand  catalogue,  ni  les  tra- 
vaux qu'avait  exigés  la  décoiîvcrté 
de  Cerès,  ni  même  ime  fièvre 
qui  le  mina  ])endant  l'espace  de 
quatre  ans,  ne  purent  rahintir  son 
ardeur,  ni  le  détourner  un  ins* 


PIA 

tant  des  études.  On  commençait 
presque  généralement  à  se  défier 
de  la  position  assignée  par  Mas- 
kelyne  à  plusieurs  étoiles;  mais, 
pour  détruire  ses  observations,  il 
fallait  les  refaire  ,  et  Piazzi  était 
trop  engagé  dans  ses  recherches, 
pour  songer  à  rectifier  les  ouvrages 
des  autres.  ïl  chargea  M.  Caccia- 
lore,  le  plus  distingué  de  ses  élè- 
ves, de  la  comparaison  directe 
des  principales  étoiles  avec  le  so- 
leil,  pour  la  formaticin  d'un  nou- 
veau catalngue  fondamental.  Ce 
travail,  qui  au  lieu  des  56  étoiles 
de  Maskelyne,  en  contenait  jus- 
qu'à 120,  servit  de  base  à  Piazzi 
pour  refondre  son  ancien  catalo- 
;,Mie  ;  il  soumit  le  ciei  à  d- nou- 
velles observations,  q'i'il  appuya 
sur  la  position  de  ces  étoiles , 
comparées  directement  avec  le 
soleil.  Ce  second  catologue,  qu'il 
acheva  en  1814,  comprend  70)46 
étoiles,  outre  un  discours  préli- 
minaire, qui  est  un  morceau  ex- 
trêmeu)ent  précieux.  Tant  d'ob- 
servations sur  les  astres  ,  grossis- 
saient chaque  jour  la  masse  de  ses 
matériaux  sur  les  différentes  par- 
ties de  la  science.  Pressé  par  se» 
amis  et  ses  élèves,  Piazzi  s'occupa 
de  la  rédaction  de  plusieurs  Mé- 
moires,  adressés  aux  différentes 
académies  aux(juelles  il  appar- 
tient. Il  ■  s'acquittait  en  môme 
temps  de  plusieurs  commissions 
que  son  gouvernement  lui  don- 
nait, entre  antres  dé  la  formation 
d'uncode  métrique,  pour  établir 
l'uniformité  dés  poids  et  des  me- 
sures en  Sicile.  Sou  travail  fut 
précédé  par  un  essai  publié  en 
1808,  et  par  une  instruction 
adressée  aux  curés  de  toutes  les 
communes  de  l'île.  Pendant  le  ré- 


PIA 

giine  de  la  constitution  de  1812 
dans  ce  royaime,  l'iazzi  l'ut  charge 
d'une  nouvelle  division  territo- 
riale; le  parlement  rado|ita  telle 
qu'il  l'avait  proposée,  et  elle  lut 
respectée  inêuie  après  la  destruc- 
tion du  gouvernement  représen- 
tatif. La  comète  de  1811  l'ournit 
it  Piazzi  l'occa-ion  de  manifester 
ses  opinions  sur  la  nature  de  ces 
corps,  dont  il  ne  croit  pas  la  for- 
mation contemporaine  de  celle  des 
planètes;  il  pense  plutôt  qu'ils  se 
forment  de  temps  en  temps  dans 
l'iunnen.^ité  de  l'espace,  où  ils  se 
dissipent  ensuite,  à  peu  près  com- 
me ces  globes  et  ces  météores 
lumineux  qui  s'engendrent  et  dis- 
paraissent dans  l'atmosphère  ter- 
restre. Plein  de  cette  idée  ,  il  a 
toujours  mis  peu  d'importance  à 
observer  les  comètes ,  regardant 
même  comme  inutiles  les  travaux 
des  astronomes  sur  ces  astres.  En 
iSij  Piazzi  fut  appelé  à  Naples, 
pour  y  examiner  les  plans  du  nou- 
vel observatoire  fondé  par  Joachim 
Murât  sur  les  hauteurs  de  Capo- 
di-iMoule;  il  y  apporta  plusieurs 
changemens,  dont  il  rendit  comp- 
te dans  un  ouvrage  publié  peu 
avant  son  retour  à  Palerme.  Rem- 
placé dans  la  direction  immédiate 
de  l'observatoire,  par  son  élève 
Caccialore  ,  il  peut  maintenant 
jtrendre  part  aux  travaux  d'une 
commission  chargée  de  l'instruc- 
tion publiqueenSicile, et  s'occuper 
de  la  réformation  des  études  dans 
ce  pays,  qu'il  regarde  comme  une 
seconde  patrie  :  il  l'a  préférée  aux 
offres  brillantes  que  lui  faisait 
Napoléon  pour  l'attirer  à  Bolo- 
gne, et  à  celles  du  roi  Ferdinand  , 
qui  aurait  voulu  le  retenir  à  Na- 
ples.  Ses  ouvrages  sont  :  i"  Resuit 


PIA 


245 


of  calculations  of  tlie  observations 
made  at  various  places  of  tlie  éclipse 
of  the  sun  xvick  liappeiied  on  J une 
5,  1788,  dans  le  tome  LXXIX 
des  Transactions  philosophiques 
pour  l'année  1789;  2°  Lettre  sur 
les  ouvrages  de  âî.  Bantsden,  de 
la  société  royale  de  Londres,  adres- 
sée à  M.  de  Lalande,  dans  le 
Journal  des  savans  ,  novembre 
1788,  et  réimprimée  dans  la  tra- 
duction de  la  Machine  à  diviser, 
de  Ramsden,  par  Lalande  ;  3" 
Discorso  recitato  nelT  aprirsi  la 
prima  volta ,  la  cattedra  d'astro- 
nomia  neW  accademia  degli  studj, 
Palerme,  1790,  in-4''  :  ce  dis- 
cours, de  54  pages,  a  pour  objet 
l'histoire <le  l'astronomie;  ^^  délia 
Sperola  astronomica  de'  regj  studj 
di  Palerino,  libri  IV,  ibid. ,  1792, 
iu-fol. ,  fig.  :  cet  ouvrage  contient 
la  description  détaillée  du  beau 
cercle  de  Ramsden ,  la  détermi- 
nation exacte  de  la  latitude  de 
l'observatoire  de  Palerme  ,  qui  est 
58°  6'  45",  sa  longitude  11"  i'  45" 
à  l'orient  de  Paris,  et  la  réfrac- 
tion à  45°  55'  9";  5°  délia  Spe- 
cola  astronomica  de'  regj  studj  di 
Palermo ,  libro  V,  ibid.,  1794» 
in  -  fol.  :  c'est  un  appendice  de 
l'ouvrage  précédent;  il  contient 
les  calculs  de  la  comète  de  1793, 
beaucoup  d'observations  sur  le 
soleil  et  les  planètes,  des  recher- 
ches sur  les  réfractions,  déter- 
minées, pour  la  première  fois, 
d'après  la  méthode  des  angles  azi- 
mutaux,  et  une  nouvelle  rectifi- 
cation de  la  position  de  l'obser- 
vatoire. 6°  SuW  orologio  itatiano 
e  l'europeOf  ibid.,  1798.  in  8"  :  le 
but  de  cet  ouvrage,  publié  à  l'oc- 
casion d'une  nouvelle  horloge 
placée  sur  le  haut  du  palais  royal 


240 


PI  A 


à  Palerme,  est  de  prouver  les 
avantages  de  l'horloge  réglée  à 
l'européenne,  sur  celle  réglée  à 
l'ilalienne;  '^°  Risuttati  délie  osser- 
vaiioni  délia  nuova  sletla,  scoperta 
il  di  1°  Gennajo,  ail'  osservatorio 
di  Palenno,  il)id.,  1801,  in-ia: 
ce  sont  les  premières  observations 
sur  la  nouvelle  planète,  avec  ses 
élémens  ;  8°  Délia  scoperta  del 
niiovo  piancta  CerereFebdinandea 
otlavo  Ira  i  primarj del  nostro sisle- 
via  solare 3  ibid.,  1802,  in-8°;  9° 
Prœcipaaram  stellarum  uierran- 
liian  positiones  mediœ ,  ineunte  se- 
culo  XIX,  ex  observalionibus  ha- 
hitis  in  spécula  panorniitana  ah 
anno  1792  ad  i8os,  ibid.  ,  i8o3, 
in  lui.  :  ce  catalogue,  qui,  com- 
me, nous  l'avons  dit ,  contient 
0748  étoiles,  obtint  le  premier 
prix  astronomique,  fondé  par  La- 
lande;  10°  Prœripuarain  stellarum 
inerrantium  positiones  medice,  in- 
eunte seculo  XIX ,  ex  ohservatio- 
vibus  kabitis  in  spécula  panormi- 
tana  ab  179a  ad  annum  i8i3, 
ibid.,  i8i4  :  il  t>e  faut  pas  con- 
fondre ce  second  catalogue  avec 
le  premier;  outre  qu'il  contient 
un  plus  grand  nombre  d'étoiles 
(7046)5  les  observations  en  sont 
encore  plus  exactes;  il  mérita  aussi 
le  prix  d'utilité,  fondé  par  La- 
lande.  1  i"  Memoriasuir  obbliquità 
deir  eccUttica,  dans  le  tome  XI 
des  Acles  de  la  société  italienne, 
et  couronné  par  le  même;  12" 
Memoria  sulla  precessione  degli 
effuinozj,  dedotta  dalla  declinazione 
délie  stelUj  dans  les  Éphémérides 
de  Milan,  de  i8o4;  j3°  Riccrche 
sulla  parallasse  di  alcune  prinripali 
stelle,  dans  le  tome  XII  des  Actes 
de  la  société  italienne;  i4"  Sulla 
misura  delt'  anno  tropico  solare. 


PIA 

dans  le  tome  XIII  du  même  re- 
cueil; i5°  Saggio  su'  movimenti 
proprj  délie  stelle  fisse,  dans  le 
tome  I"  des  Actes  de  l'institut  ita- 
lien; 16"  Del  reale  osservatorio  di 
Palermo,  libro  VI,  Palerme,  i8o(), 
in-fol.  :  c'est  un  second  appendice 
du  num.  4j  il  contient  le  cata- 
logue fondamental  des  120  étoi- 
les, augmenté  de  cent  autres;  la 
détermination  de  la  longueiu'  de 
l'année,  l'équation  de  Torbile,  le 
mouvement  de  l'apogée  du  soleil, 
et  celui  des  équinoxes  ,  et  quel- 
ques points  principaux  de  la  théo- 
rie du  soleil;  à  la  fin  de  ce  volu- 
me ,  on  trouve  un  catalogue  de 
210  étoiles.  17"  Sislema  melrico 
per  la  Sicilia ,  presentato  à  S.  M. 
dalla  deputazione  di  pesi  c  misurc , 
ibid. ,  1808  :  dans  cet  essai  préli- 
minaire, l'auteur  a  exj)osé  le  systè- 
me qu'il  se  proposait  de  suivre;  18" 
Istruzione  diretla  ai  parrorhi  ail' 
occasione  délia  leggesà  pesi  e  mi- 
sure,  ibid.,  1810;  19"  Lcgge  nella 
quale  si  stabilisée  uniformità  di  mi- 
sure  ,  e  di  pesi  in  tutto  il  regno  di 
Sicilia,  e  sue  adjacenze,  colla  prima 
parte  délie  riduzioni  délie  misure , 
ibid.,  1810;  20"  Codice  metrico 
siculo  divisa  in  due  parti,  Catania, 
1812,  petit  in-fol.;  21"  Délia  co- 
mcta  del  181 1,  Palerme,  1812,  in- 
8";  22°  Lezioni  di  astronomia ,  ad 
uso  del  real  Osservatorio  di  Paler- 
mo, ibid.,  1817,  2  vol,  in-8";  23° 
Suit'  obbliquità  dell'  eccUttica,  en- 
voyé à  Milan  eu  1818  :  c'est  un 
supplément  au  num.  1 1  ;  3/1'  Sull* 
aberrazione  délia  luce,  e  sulla  nuta- 
zione  dell'  asse  terrestre ,  dans  le 
tom.  1"  des  actes  de  l'académie 
royale  des  sciences  de  Naples;  25° 
Ragguaglio  del  reale  Osservatorio 
di  ISapoli ,  eretlo  sulla  colliua  di 


--A/f"  ^  q/  CC<l/(ù 


PIC 

Capo-di-Monte,  Naples,  iSaJ,  in- 

PICARD  (Louis -Benoit), 
homme  de  lettres  >  membre  de 
l'académie-française  el  de  la  lé- 
gion-d'honneur, né  à  Paris  en 
y^Qc).  Son  père  exerçait  honora- 
blement les  fonctions  d'avocat 
au  barreau  de  Paris  ;  son  oncle 
maternel,  M.  Gastelier,  était  un 
médecin  non  mQ|ps  renommé. 
L'éducation  de  M.  Picard  fut  sur- 
veillée avec  soin,  et  il  fit  d'excel- 
lentes études;  mais  il  ne  se  sentit 
aucun  goût  pour  les  travaux  du 
barreau,  ni  pour  l'art  de  guérir. 
Un  penchant  irrésistible  l'entraî- 
nait vers  le  théâtre,  et  les  nom- 
breux succès  qu'il  a  obtenus  dans 
cette  carrière  ont  justifié  son 
choix,  el  l'ont  placé  au  premier 
rang  parmi  no.s  écrivains  drama- 
tiques vivans.  Une  étroite  amitié, 
et  dont  aucune  rivalité  de  ta- 
lens  ou  de  succès  ne  vint  jamais 
interrompre  le  cours,  lia  M.  Pi- 
card dès  sa  jeunesse  avec  M.  An- 
drieux  et  Collin-d'Harleville.  Il 
rechercha  les  conseils  de  ces  ai- 
mables écrivains,  leur  en  donnait 
parfois  à  son  toi^r,  et  convient 
lui-même  que  ceux  qu'il  en  re- 
cevait n'étaient  pas  les  moins  uti- 
les. Ce  fut  M.  Andrieux  qui  se 
chargea  de  présenter  au  théâtre 
de  Monsieur,  nouvellement  établi 
à  cette  époque,  la  première  pièce 
de  M.  Picard,  le  Bndinage  dange- 
reux ;  elle  fut  assez  favorable- 
ment accueillie.  La  même  troupe 
française ,  transportée  peu  de 
temps  après  au  Théâtre-Feydeau, 
y  représenta  sa  seconde  comédie, 
Encore  des  Méneclimes.  Il  donna 
ensuite  à  l'Opéra-Comique  la 
jolie  pièce  des  FisitandineSi  qui 


PIC 


'a47 


fut  vivement  applaudie,  et  qui 
est  restée  an  théâtre,  où  elle  ne 
cessait  d'attirer  la  foule,  jusqu'au 
moment  où  il  ne  fut  plus  permis 
de  plaisanter  sur  les  nonnes  et  les 
capucins.  Quelques  pièces  de 
circonstances,  légères  débauches 
d'esprit ,  suivirent  de  près  cet 
opéra,  et  furent  jouées  avec  plus 
ou  moins  de  succès  pendant  les 
premières  années  de  la  révolu- 
tion. Mais  non  content  de  faire 
représenter  ses  nombreux  ouvra- 
ges ,  M.  Picard,  dont  le  goût 
pour  l'art  dramatique  était  deve- 
nu une  véritable  passion,  voulut, 
en  suivant  les  traces  de  Molière, 
avoir  encore  quelque  chose  de 
commun  avec  ce  grand  homme, 
et  désirait  remplir  lui-même  les 
principaux  rôles  dans  ses  pièces. 
Après  avoir  souvent  joué  avec 
succès  la  comédie  en  société,  \\ 
avait  même  paru  sur  le  petit 
théâtre  Mareux ,  rue  Saint-An- 
toine, quand  il  prit  la  résolution 
de  se  donner  tout  entier  à  la  scè- 
ne, et  débuta,  ainsi  que  son  frè- 
re,  au  théâtre  Louvois,  dont  il 
prit  la  direction.  Il  y  reçut  dans 
la  comédie  du  Collatéral  et  dans 
plusieurs  autres  de  ses  ouvrages- 
un  accueil  flatteur,  et  l'acteur 
n'eut  pas  moins  à  se  louer  de  la 
bienveillance  du  public  que  l'au- 
teur. Un  théâtre  plus  vaste,  celui 
de  rOdéon ,  fut  remis,  en  1801, 
à  la  disposition  de  M.  Picard. 
Son  zèle  et  son  activité  suffirent 
pour  quelque  temps  à  ses  triples 
fonctions,  et  ce  fut  pendant  sa 
première  direction  de  ce  théâtre 
qu'il  remporta  ses  plus  beaux 
succès.  11  se  lassa  cependant, 
après  quelques  années  d'exercice, 
de  la  profession  de  comédieu ,  et 


248 


PIC 


dans  l'espoir  de  composer  pins 
de  pièces,  il  renonça  au  plaisir 
d'en  jouer.  En  1807  l'inslilut 
admit  M.  Picard  au  nombre  de 
ses  membres,  et  il  y  prononça  son 
discours  de  réception  le  même 
jour  que  MM.  Laujon  et  Ray- 
nouard.  Napoléon  le  décora  peu 
de  temps  après  de  la  croix  de 
la  légion-d'honneur,  et  lui  confia 
l'administration  du  {,'rand  Opéra, 
qu'il  quitta  en  1816  pour  repren- 
dre la  direcliou  de  l'Odéon.  (le 
fut  à  celte  occasion  qu'il  s'éleva 
entre  lui  et  M.  Alexandre  Du  val 
{voy.  ce  nom)  quelques  débats 
qui  furent  portés  devant  les  tri- 
bunaux ;  mais  ce  dernier  crut 
devoir  aussi  plaider  sa  cause  de- 
vant le  public,  et  s'acquitta  de 
cette  tâche  d'une  manière  origi- 
nale et  piquante ,  en  publiant 
un  factum  en  vers  ,  qui  procura 
quelques  jouissances  à  la  maligni- 
té des  lecteurs.  M.  Picard  ré- 
pondit en  prose,  et  avec  une 
grande  modération,  à  son  mordant 
adversaire,  et  ce  procès,  qui  a- 
vait  paru  promettre  plus  de  scan- 
dale ,  se  termina  par  une  tran- 
saction à  l'amiable  entre  les  deux 
auteurs.  L'administration  de  l'O-i 
déon  fut  interrompue  par  deux 
incendies  qui  consumèrent  l'in- 
térieur de  ce  bel  édifice.  Dans 
l'intervalle  de  la  reconstruction, 
M.  Picard  transporta  son  specta- 
cle au  théâtre  des  anciens  Italiens, 
}>alle  Favart,  où  il  obtint  la  per- 
mission de  faire  jouer  en  même 
temps  la  tragédie,  et  tout  le 
répertoire  du  Théâtre- Français. 
L'Odéon  s'élant  enfin  relevé  plus 
brillant  que  jamais  de  ses  cendres, 
c'était  à  ce  théâtre  que  devait 
«'exécuter  le  projet  depuis  long- 


PIC 

ten)ps  réclamé  par  les  amis  de 
l'art  dramatique,  de  donner  au 
premier  Théâtre -Français  une 
succursale,  où  de  nouveaux  ac- 
teurs, ainsi  que  les  auteurs  qui 
d(;puis  long-temps  attendaient  la 
représentation  de  leurs  ouvrages, 
pourraient  être  jugés  par  le  pu- 
blic. On  espérait  qu'une  heureu- 
se émulation  s'établirait  ainsi 
entre  les  anunns  sociétaires  et 
leurs  jeunes  rivaux  ,  entre  les 
écrivains  déjà  en  possession  de  la 
scène  et  les  nouveaux  aspirans. 
L'art  devait  y  gagner  ;  mais  ce 
projet,  sagement  conçu,  n'a  pu 
jusqu'ici  par  diverses  causes  in- 
tervenantes, recevoir  qu'une  exé- 
cution imparfaite;  et  l'administra- 
tion de  l'Odéon  cédée  par  M.  Pi- 
card ,  est  successivement  passée 
en  beaucoup  d'autres  mains.  Ce 
fécond  écrivain  a  composé  environ 
soixante  -  dix  pièces  de  théâtre. 
Le  caractère  distinctif  de  son  ta- 
lent est  une  gaîté  franche  et  na- 
turelle ;  il  y  joint  une  entente 
parfaite  de  la  scène,  et  un  dialo- 
gue vif  et  animé.  S'abandonnant 
à  sa  facilité  ,  il  soigne  parfois 
peu  son  style,  et  ses  pièces  en  vers 
sont  sous  ce  rapport  plus  né- 
gligées que  celles  en  prose. 
Quoiqu'il  se  soit  principalement 
attaché  à  peindredesmœtu's  bour- 
geoises, et  qu'il  semble  plus  oc- 
cupé à  faire  rire  des  ridicules 
du  jour  qu'à  rendre  odieux  les 
vices  de  tous  les  temps,  il  s'est 
cependant  élevé ,  dans  quelques 
ouvrages,  aux  plus  hautes  con- 
ceptions dramatiques  et  morales. 
Des  caractères  hardiment  tracés  , 
et  des  tableaux  dont  le  coloris  a 
de  la  vigueur,  se  retrouvent  dans 
Médiocre  et  lianipaiU,  dans  Du- 


PIC 

Itautcours  ou  le  Contrat  d'union, 
le  Mari  ambitieux,  l'Entrée  dans 
le  monde,  Vauglas,  etc.  Parmi 
les  autres  compositions  dramati- 
ques (le  M.  Picard ,  nods  ne  cite- 
rons ici  <|ue  les  pliis  remarqua- 
bles. Le  Conteur,  ou  les  Deux 
Postes;  le  Cousin  de  tout  le  mon- 
de; les  Conjectures;  les  Amis  de 
collège;  les  Trois  M^ris;  ta  Pe- 
tite faille;  ta  Grande  Ville,  ou  les 
Provinciaux  à  Paris;  le  Vieux 
Comédien;  M.  Musard;  les  Tra- 
casseries ;  le  Susceptible;  M.  de 
Probancour,  ou  les  Capitulations 
de  conscience;  les  Oisifs;  l'Alcade 
de  Molorido  ;'  un  Lendemain  de 
fortune;  la  Vieille  Tante;  la  Noce 
sans  mariage;  les  Filles  à  marier; 
les  Marionnettes  ;  la  Manie  de 
briller;  les  Ricochets;  M.  de  Cou- 
lainrille,  ou  la  Double  Réputa- 
tion ;  les  Deux  Philibert  (avec 
M.  Iladet)  ;  une  Matinée  de  Hen- 
ri IV ;  la  Maison  en  loterie.  Le 
Théâtre  de  L.  B.  Picard  a  paru 
en  1812  ,  6  vol.  in-8".  Outre 
plusieurs  poésies  légères  qui  ont 
paru  dans  les  recueils  périodi- 
ques, M.  Picard  a  encore  pu- 
blié trois  romans  :  1°  les  Aventu- 
res d'Eugène  de  Senneoille  et  de 
Guillaume  Delorme,  18  i3,  4  vol. 
in-8'';  ^''  Jacques  Fauve l,  1823, 
4  vol.  in-  12  ;  5^  Gabriel  Desau- 
dry,  ou  l'Exalté,  1824,  4  vol. 
in-12.  Un  quatrième  roman,  in- 
titulé le  Gilblas  de  la  révolution  , 
est  déjà  annoncé  comme  devant 
paraître  sous  peu  d»;  jours.  Si  cet 
ouvrage  est  digne  des  autres,  il  a- 
bondera  en  scènes  piquantes,  en 
observations  fines,  en  portraits 
dessinés  avec  habileté  ;  il  sera 
écrit  d'un  style  à  la  fois  spirituel 
et  naturel,  et  on  y  trouvera  une 


PIC  249 

grande  connaissance  du  cœur  hu- 
main. 

PICARDET  (C.  N.),  ancien 
priein-  de  Neuilly,  et  membre  de 
l'académie  de  Dijon  ,  a  publié  dif- 
férens ouvrages, parmi  lesquelson 
distingue  :  i"  les  Deux  Abdalony- 
mes,  histoire  phénicienne,  1777; 
2°  Histoire  météorologique,  nozo- 
logique  et  économique,  pour  l'an- 
née 1785.  Il  avait  entrepris  un  ou- 
vrage immense  qui,  sous  le  litre 
de  Grande  Apologétique ,  devait 
contenir  la  réfutation  de  toutes 
les  hérésies  qui  s'élevèrent  dans 
le  monde  depuis  l'établissement 
du  christianisme ,  mais  le  dépé- 
rissement de  sa  santé  le  força  de 
renoncer  à  ce  travail.  Il  avait 
aussi  fonde  un  prix  de  vertu  pour 
une  rosière ,  dont  le  couronne- 
ment eut  lieu  plusieurs  années  de 
suite  et  ne  fut  interrompu  que 
par  les  événemens  de  la  révolu- 
tion. Il  mourut  vers  i79'|.  Son 
frère ,  mort  à  peu  près  dans  le 
même  temps,  avait  été  conseiller 
à  la  table  de  marbre  du  palais  de 
Dijon,  et  comme  lui,  membre  de 
l'académie  de  cette  ville.  Ce  der- 
nier est  auteur  d'un  Journal  d^s 
observations  du  baromètre  de  La- 
voisier,  inséré  dans  les  Mémoires 
de  l'académie  de  Dijon ,  en  1785, 
et  de  quelques  poésies  assez  esti- 
mées. Ces  deux  littérateurs  eu- 
rent pour  soeur,  IV1°"  Guylon-Mor- 
veau,  connue  par  plusieurs  tra- 
ductions d'ouvrages  allemands  et 
suédois. 

PICAULT  (Antoine-Acgbstb- 
Michel),  propriétaire  dans  le  dé- 
partement de  Seine-et-Marne, 
remplit  pendantles  premières  an- 
nées de  la  révi^lution  des  fonction* 
municipalcr  et  judiciaires,  et  fut». 


35o  picr 

en  1795,  nommé  député  au  con- 
seil des  anciens.  Il  y  fit,  au  mois 
de  septembre  de  l'année  suivante, 
un  rapport  favorable  aux  prêtres 
qu'ime  loi  rendue  précédemment 
condamnait  à  la  réclusion.  Sorti 
du  conseil  le  20  mai  1799,  "'^^ 
nouvelle  élection  l'y  fit  rentrer 
aussitôt.  Après  la  révolution  du 
18  brumaire  an  8  il  devint  niein- 
bre  du  tribunat.  En  1801,  il  com- 
battit les  dispositions  du  projet 
de  loi  portant  établissement  des 
tribunaux  spéciaux,  el  en  vola  le 
rejet.  Élu  secrétaire  du  tribunat 
le  20  août  i8o3,  il  sortit  peu  de 
temps  après  de  ce  corps.  En 
1804,  il  obtint  la  place  de  di- 
recteur des  droits  -  réunis  dans 
le  département  de  Seine-et-Mar- 
ne. Il  occupait  encore  cette  place, 
lorsqu'il  lut  uomnié,  dans  le  mois 
d'août  i8i5,  membre  du  conseil 
de  préfecture  du  même  départe- 
ment. M.  Picanlt  remplit  toujours 
les  mêmes  fonctions;  il  est  cheva- 
lier de  la  légion-d'honneur. 

PICCINNI  (Nicolas),  célèbre 
compositeur  italien,  naquit  en 
1728  à  lîari,  capitale  de  la  pro- 
vince de  ce  non) ,  dans  le  royau- 
me de  Naples.Piccinni  père,dégoû- 
té  de  sa  profession,  avait  défendu 
à  son  fils  de  l'embrasser:  c'était 
celle  de  musicien,  qui  devait  fai- 
re, sinon  le  bonheur,  du  moins 
la  réputation  de  cet  enfant.  Des- 
tiné à  l'état  ecclésiastique,  le  jeu- 
ne Piccinni  assistait  aux  cérénio- 
nies  religieuses,  et  s'amusait  de 
ce  conflit  de  sons  et  de  voix,  qui 
lui  servirent  néanmoins  do  thè- 
mes pour  s'exercer,  à  la  dérobée, 
.sur  un  vieux  clavecin  ,  qu'il  trou- 
vait chez  son  père.  Un  jour,  se 
croyant  seul,  il  s'était  livré  aux 
mêmes  exercices  dans  l'anlichaui- 


PIC 

bre  de  son  évêque;  ce  prélat,  qui 
l'avait  entendu  de  la  ])ièce  voisi- 
ne ,  vint  à  lui,  en  applaudissant, 
et  lui  fit  répéter  toutes  ses  sonates. 
Etonné  de  la  précision  du  jeu  de 
cet  enfant,  il  engagea  son  père  à  le 
mettre  au  conservatoire  de^San^'O- 
nofrlo,  dirigé  alors  par  le  célèbre 
Léo.  Le  jeune  élève  fut  confié 
d'abord  à  un  maître  inhabile,  qui, 
embarrassé  souvent  par  les  ques- 
tions qu'il  lui  adressait,  lui  faisait 
expier  ))ar  de  mauvais  traitemens 
les  élans  précoces  de  son  génie. 
Choqué  de  l'ignorance  et  de  la 
brutalité  de  son  précepteur, 
Piccinni  prit  le  parti  de  travailler 
seul  et  d'après  ses  propres  inspi- 
rations. C'est  peut-être  à  cette  ré- 
solution qu'il  dut  l'originalité  de 
son  talent.  Il  composa  des  psau- 
mes, des  oratorios,  des  airs  d'o- 
péras, qui  fiient  naître  la  jalousie 
de  ses  camarades,  après  en  avoir 
excité  l'admiration.  Léo,  qu'on  a* 
vait  instruit  des  progrès  sponta- 
nés et  extraordinaires  de  Piccinni, 
voulut  en  juger  par  lui-même.  Uti 
jour  il  le  mande  auprès  de  lui  , 
l'oblige  à  livier  la  partition  d'une 
messe  qu'il  venait  d'achever,  la 
feuillette  d'un  bout  à  l'autre,  et 
sans  s'expliquer  davantage,  il  traî- 
ne le  jeune  compositeur  dans  la 
salle  des  répétitions.  Piccinni  le 
supplie  vainement  de  lui  épar- 
gner un  affront;  mais  il  voit  avec 
frayeur  qu'on  se  dispose  à  dé- 
chiffrer sa  musique,  et  que  même 
on  lui  ordonne  d'en  marquer  la 
mesure.  N'ayant  pu  sesoustraireà 
une  humiliation  publique,  il  ras- 
semble toutes  ses  forces,  et  d'une 
main  tremblante,  il  frappe  les  pre- 
miers coups;  luais  entraîné  par  l'el- 
fet  des  instrumens,  il  les  dirigea 
bicnlOt  avec  l'assurance  d'un  mai- 


PIC 

Ire.  Léo  se  jelteàsoncou,  l'accable 
de  caresses,  et  lui  permet  de  ve- 
nir tous  les  jours  prendre  de  ses 
leçons.  Il  n'en  profila  pas  long- 
temps :  la  mort  surprit  Léo  , 
qui  fut  remplacé  par  Duran- 
te dans  la  direction  de  ce  même 
•  oiiservaloire,  qui  a  été  la  pépiniè- 
le  des  plus  célèbres  compositeurs 
italiens.  Le  nouveau  directeur, 
qui  eut  bientôt  reconnu  le  mérite 
de  Piccinni,  le  prit  en  affection,  et 
en  lui  prodiguant  ses  soins,  il  di- 
sait souvent  :  Les  autres  sont  mes 
(colif.rs,  mais  celui-ci  est  mou  fils. 
Après  s'être  formé  à  l'école  de 
deux  maîtres  aussi  distingués , 
Piccinni  sortit  du  conservatoire, 
sacisant  tous  les  principes,  et  ini- 
tié dans  tous  les  secrets  de  son 
art.  il  composa  pour  le  théâtre  dit 
des  Florentins ,  l'opéra  intitulé  : 
te  Donne  (Jispeitose,  qu'une  main 
puissante  soutint  contre  les  in- 
trigues des  amis  de  Logrosci- 
no  ,  qui  jouissait  exclusivement 
alors  de  la  faveur  publique  ; 
mais  ces  contradicteurs  Juê- 
mes  furent  obligés  de  l'applau- 
dir, et  son  triomphe  n'en  fut  que 
plus  flatteur.  Ce  premier  succès 
l'encouragea  à  nmlliplier  ses  es- 
sais ,  qui  fondèrent  bientôt  sa 
réputation.  Son  génie  se  déployait 
avec  une  étonnante  facilité.  On 
admira  déjà  dans  la  Zenobiu , 
qu'il  composa,  en  1^56,  pour 
le  théâtre  de  Saint-Charles,  les 
|)rincipes  qui  ont  toujours  gui- 
dé Piccinni  tlans  ses  nombreu- 
ses compositions.  Les  instru- 
mens  ne  sont  pour  lui  qu'un 
moyen  pour  renforcer  l'effet  de  1 1 
voix,  on  pour  expriuter  ce  qu'el- 
le ne  peut  pas  rendre.  Ce  luxe 
d'harmonie  ,     ces    accompagnc- 


PIC  i5i 

mens  figurés  ,  sans  nécessité 
et  sans  but,  qui  ont  envahi  la 
scène  moderne,  et  qui  établissent 
une  lutte  entre  le  chanteur  et  l'or- 
chestre ,  ne  lui  paraissaient  que 
des  contre -sens  et  des  abus.  Sa 
musique  avait  un  accent  pur  et 
naturel,  dont  les  altérations  é- 
taieut  marquées  par  les  nuances 
des  sentimens  et  des  idées.  Il  dé- 
sapprouvait ces  dessins  obstinés 
d'accompagnement  que  Jomelli 
avait  mis  à  la  mode  de  son  temps, 
et  qui  se  prolongeaient  uniformé- 
ment dans  presque  toute  l'éten- 
due d'un  morceau.  Les  effets  con- 
tinus d'orchestre,  ces  tnasses  indi- 
gestes d'harmonies,  et  l'affectation 
des  dissonances,  n'étaient  à  ses 
yeux  que  des  ressources  em- 
ployées par  des  talens  médiocres 
pour  déguiser  leur  faiblesse.  Le 
public,  sans  pénétrer  dans  le  secret 
de  ces  théories ,  était  séduit  par 
cette  élégance  de  style  qui  répan- 
dait dans  la  musique  de  Piccinni 
un  charme  particulier  et  inconnu 
jusqu'alor-!.  Appelé  à  Rome  en 
17ÔG  ,  il  y  composa  V Alessandro 
neir  Indie,  et  la  Cecchina,  qui  ob- 
tinrent le  plus  grand  suc(;ès.  Ce 
dernier  opéra  surtout  y  excita 
ime  admiration  portée  jusqu'à 
l'enthousiasme  :  cependant  cette 
musique  si  belle,  si  originale, 
si  brillante,  n'avait  coOlé  à  Pic- 
cinni que  bien  peu  de  travail. 
En  moins  de  18  jours  sa  par- 
tition fut  faite,  les  parties  copiées, 
les  rôles  aj)pris  ,  répétés  et  joués. 
11  introduisit  dans  les  finals  de 
cette  pièce  une  nouveauté,  que 
les  autres  compositeurs  s'empres- 
sèrent de  reproduire.  Logroscino 
avait  été  le  premier  à  remplacer 
les  duor,  les  trios,   les  quatuors, 


a5a 


PIC 


qui  terminaient  les  actes  des  an- 
tiens  opéras  boulions,  par  de  plus 
grands  morceaux  d  ensemble,  di- 
visés par  le  poète  en  plusieurs 
scènes,  et  par  le  musicien  en  dif- 
t'érens  motifs,  qui  peignaient  les 
changemens  de  situation  des  ac- 
teurs. Piccinni  eut  Theureuse  i- 
dée  de  les  annoncer  aussi  par  des 
chaogemens  de  mouvemens  et  de 
mesure,  donnant,  par  ce  moyen, 
au  final .  moins  d'uniformité  et 
plus  de  développement  et  d'éten- 
due. Un  succès  bien  plus  éclatant 
et  tout  aussi  mérité  couronna 
l'année  suivante  son  Olympiade, 
«]ui  le  mit  en  présence  de  trois  ri- 
vaux redoutables,  dont  il  eut  le 
bonheur  de  triompher.  Les  con- 
naisseurs comparaient  ensemble 
les  morceaux  les  plus  marquans 
des  partitions  de  Pergolèse,  Ga- 
liippi,  Jomeili,  et  Piccinni,  sur  le 
même  poëme, et  ils  trouvaient  dans 
ceux  de  ce  dernier  plus  de  vérité 
dans  le  chant,  et  une  plus  savante 
économie  dans  les  accompagne- 
inens.  (]e  fui  dans  un  duo  de  cet  le 
pièce  [ne' gionii  ^wo/'/L'/ù/j,  regar- 
dé comme  l'écueil  de  tous  les 
compositeurs,  que  Piccinni  fil  l'es- 
5ai  d'une  nouvelle  forme  musica- 
le, qui  consiî^tait  à  soutenir  jus- 
<^u'au  but,  en  croissant,  le  mouve- 
jncnt  accéléré  une  fois  imprimé 
à  l'orchestre;  au  liiîu  de  le  faire 
revenir  à  la  lenteur  de  l'adagio, 
qui  sert  ordinairement  d'introduc- 
tion à  un  air,  et  qui,  avant  Pic- 
cinni, lui  servait  aussi  de  fin.  dette 
dernière  coupe,  moins  favorable  à 
l'expression,  n'élait  pas  non  plus 
dans  la  nature  des  passions,  dont 
l'énergie  et  la  rapidité  sont  eu  pro- 
portion de  leur  développement. 
11  n'y  avait  plus  de  réputation 


PIC 

que  Piccinni  n'efïaçât.  Tontes  les 
villes,  tous  les  théâtres  se  le 
disputaient  à  l'envi;  et  ses  com- 
positions, en  remplissant  l'Italie 
entière,  enrichissaient  la  langue 
musicale  d'une  foule  d'expressions 
et  de  motifs  tous  ingénieux  et 
nouveaux.  Applaudi,  retherché, 
fêté  par  tout,  il  revenait  avec  pré- 
dilection à  Home  et  à  Naples,  qui 
avaient  été  les  témoins  de  ses  pre- 
miers triomphes.  Tout  paraissait 
lui  assurer  la  faveur  du  public,  et 
le  tenir  en  possession  de  ses  longs 
suftVages,  lorsque  Aufossi  se  pré- 
senta pour  les  lui  disputer.  Son 
Inconnue  persécutée,  donnée  er» 
17^5,  produisit  le  plus  grand  ef- 
fet sur  les  spectateurs.  Un  chant 
pur,  une  coupe  d'airs  régulière, 
d(!saccompagnemensde  bon  goOt, 
et  surtout  deux  longs  finals,  qui 
offraient  des  mouvemens  bien 
contrastés  et  de  très-beaux  efftts 
d'orchestre,  rendaient  cette  pro- 
duction d'Anfossi,  digne  des  élo- 
ges qu'on  lui  prodiguait.  Piccinni 
n'en  fut  point  jaloux,  mais  ce  qui 
le  blessa  profondéirient,  ce  fut  de 
voir  retirer  du  théâtre  une  de  ses 
pièces,  jusqu'alors  applaudie,  pour 
laisser  la  salle  entièrement  à  lu 
disposition  d'Anfossi.  La  nouveau- 
té de  ce  malheur,  et  l'acte  d'injus- 
tice qui  l'avait  accompagné,  l'af- 
fectèrent tellement,  qu'étant  par- 
ti précipitamment  pour  Naples,  il 
y  tomba  malade  en  arrivant.  Sa 
maladie  fut  longue  et  dangereuse. 
Dès  qu'il  eut  recouvré  la  santé , 
il  s'adonna  de  nouveau  à  la  com- 
position,  se  promettant  bien  de  ne 
plus  rien  écrire  pour  une  ville  qui 
s'était  nlontréc  si  ingrate  envers 
lui.  Il  se  consacra  tout  entier  aux 
théâtres  de  Naples,  qu'il  enrichit 


PIC 

(le  plusieurs  chefs-d'œuvre.  Piccin- 
ni  devenu  l'idole  de  ses  compa- 
triotes,  jouissait  au  milieu  d'eux 
de  la  plus  haute  distinction. 
Les  premières  maisons  de  Naples 
se  disputaient  le  plaisir  de  le  pos- 
séder, et  il  n'y  avait  pas  d'étran- 
ger de  dislifiction  qui,  voyageant 
en  Ilalie,  n'eût  le  désir  de  le  voir 
et  de  l'entendre.  Ce  l'ut  dans  ces 
circonstances  qu'on  renouvela  au- 
près de  lui  les  propositions  qui  lui 
avaient  été  déjà  laites  pour  l'atti- 
rer en  Frafice.  Laborde  avait  été 
charge  par  Louis  XV  de  celte 
première  négociation,  qui  était 
près  de  se  terminer,  lorsque  ce 
prince  mourut.  Dès  que  la  nou- 
velle cour  put  s'occuper  de  ces 
objets,  le  marquisdaracciolo,  am- 
bassadeur de  ÎNaples  à  Paris,  ob- 
tint de  la  reine  la  permission  de 
renouer  cette  aliairc.  11  écrivit  à 
Piccinni  en  l'éblouissant  par  des 
ofl'res  avantageuses,  qu'il  était  au- 
torisé de  lui  l'aire  au  nom  du  gou- 
vernement. Piccifuji  se  laissa  é- 
branler  :  il  quitta  l'Italie,  que 
depuis  vingt  ans  il  remplissait 
de  son  nom  et  de  ses  ouvra- 
ges ,  et  il  se  rendit  en  France  , 
où  on  devait  l'abreuver  de  dé- 
goûts et  d'amerlume.  Arrivé  à 
Paris  vers  la  fin  de  i77<>,  il  dut 
se  contenter  d'un  logement  in- 
commode qu'on  lui  avait  arrêté 
dans  un  hôtel  garni,  et  y  rester 
près  d'un  mois,  jusqu'à  ce  qu'on 
lui  eût  arrangé  et  meublé,  à  ses 
frais,  un  appartement  dans  la  rue 
Saint- Honoré  ,  vis-à-vis  de  la 
maison  où  demeurait  alors  Mar- 
moniel.  Dès  qu'il  put  s'y  établir, 
ri  recommeuçii  ,  pour  ainsi  dire, 
son  éducation,  car  n'ayant  ja- 
mais appris  le  français,  il  dut  su 


PTC 


2  55 


résigner  à  l'ennui  de  l'étudier. 
Ce  fut  Marmonlel  qui  voulut  ê- 
tre  son  maître;  et  quoiijue  d'un 
âge  avancé,  et  habitué  à  consa- 
crer ses  matinées  au  travail,  il 
se  donnait  la  peine  de  sortir  tous 
les  jours,  de  monter  chez  Piccin- 
ni,  et  de  passer  avec  lui  deux  à 
trois  heures,  pour  l'initier  dans 
toutes  les  finesses  de  notre  lan- 
gue. Le  premier  fruit  de  ce  péni- 
ble apprentissage  fut  Roland,  qui 
marque  une  époque  dans  l'his- 
toire de  la  musique  en  France. 
Il  eut  à  lutter  contre  les  admira- 
teurs de  Gluck,  qui  était,  à  juste 
titre,  si  digne  d'en  avoir.  Après 
avoir,  par  son  Iphigénie  en  Au- 
Ude,  naturalisé  en  France  les  for- 
mes de  récitatif  et  de  chant  de 
l'école  italienne,  et  la  force  d'har- 
monie de  l'école  allemande,  il 
terrassa,  par  VOrpliée  et  VAlces- 
te,  les  ignoraus  partisans  de  no- 
tre vieux  système  mélodramati- 
que, en  rendant  impossible  le 
retour  des  opéras  de  Rameau  et 
de  Lulli  ;  mais  depuis  que  ses 
ennemis  avaient  disparu,  il  s'é- 
tait formé  un  parti  de  fa;iatiques, 
dont  les  exagérations  arrêtèrent 
les  progrès  de  celte  révolution 
musicale  commencée  par  Gluck, 
en  se  déclarant  aveuglément  con- 
tre tous  ceux  qui  venaient  en  par- 
tager les  travaux  et  la  gloire.  C'é- 
taient ces  enthousiastes  qui,  de- 
venus les  arbitres  des  réputations 
musicales,  jugeaient  en  dernier 
ressort  du  mérite  d'un  opéra  ,  et 
en  entravaient  le  succès  par  leurs 
préventions  et  leurs  cabales.  Pic- 
ciniii ,  tout  entier  à  son  art,  et 
aussi  élrangeraux  intrigues  qu'aux 
mœurs,  aux  goûts,  aux  usages,  à 
la  langue  du  pays  qu'il  venait  ba^ 


tD4 


ne 


biter,  passait  les  journées  au  mi- 
lieu de  sa  famille,  et  dans  nu  cer- 
cle borné  d'amateurs  et  de  gens 
de  lettres,  étudiant  assiduement 
notre  langue  ,  et  partageant  son 
temps  entre  la  composition  de  ses 
ouvrages  et  la  lecture  de  nos  é- 
crivains  les  plus  renommés.  Mais 
ses  ennemis  ne  se  tenaient  pas  à 
l'écart  :  ils  avaient  déjà  tait  cou- 
rir des  bruits  sinistres  sur  le  mé- 
rite de  Roland,  et  après  avoir 
blâmé  l'ouvrage,  ils  déchirèrent 
l'auteur,  n'épargnant  pas  même 
l'école  à  laquelle  il  appartenait. 
A  l'approche  de  la  représenta- 
tion, ces  atlaques  devinrent  plus 
bruyantes,  et  ne  laissèrent  h  IMc- 
cinni  aucun  espoir  de  succès.  Le 
jour  de  la  représentation,  lors- 
qu'il partit  pour  se  rendre  au 
théâtre,  sa  famille  n'eut  pas  le 
courage  de  l'y  accompagner,  et 
fit  tous  ses  etVorts  pour  l'empê- 
cher d'y  paraître.  Des  rapports, 
maladroits  et  exagérés,  y  avaient 
jeté  le  plus  grand  trouble.  Sa 
femme  et  ses  domestiques  étaient 
en  larmes.  Ses  amis  avaient  beau 
faire,  ils  ne  pouvaient  pas  parve- 
nir à  les  consoler.  Piccinni  seul 
se  montrait  calme  au  milieu  de 
cette  désolation  générale.  Quand 
ilsorlit,  les  larmes  et  les  gémis- 
semens  redoublèrent  :  on  eût  dit 
qu'il  marchait  au  supplice.  A  la 
fin,  ému  lui-même,  «  Mes  en- 
»fans,  leur  dit -il,  pensez  que 
»  nous  sommes  chez  le  peuple  le 
»plus  poli  et  le  plus  généreux  de 
•  l'Europe.  S'il.»  ne  veulent  pas  de 
»moi  comme  musicien,  ils  me 
iTespectenmt  comme  homme  et 
«comme  étranger.  Adieu,  rassti- 
»rez-vous;  je  pars  tranquillement, 
»et  je  reviendrai  de  même,  quel 


PIC 

«que  soit  le  succès.  »  Ce  succès 
fut  des  plus  heureux,  et  l'artiste 
fut  ramené  chez  lui  en  triomphe. 
Le  nombre  et  la  variété  des  mor- 
ceaux qui  se  succédaient  rapide- 
ment, sans  se  ressembler  et  sans 
se  nuire,  éblouirent,  pour  ain-i 
dire,  les  yeux  mêmes  de  l'envie, 
et  enlevèrent  tous  les  suffrages.  Ce 
dont  on  parut  le  plus  surpris,  ce  fut 
d'entendre  des  airs  de  danse  mode- 
lés, de  grâce,  d'élégance  et  de  mé- 
lodie. Piccinni  n'en  avait  jamais 
fait  ;  il  avait  même  pour  la  danse 
sinon  de  l'aversion,  au  moins  de 
l'indifférence.  Les  deux  célèbres 
maîtres  de  ballets,  Dauberval  et 
Yestris  père,  ne  parvenaient,  qu'à 
force  d'importunités  ,  à  lui  arra- 
cher tantôt  une  entrée,  tantôt  u- 
ne  gavotte,  un  menuet ,  une  cha- 
conne.  Le  soir  de  la  première  re- 
présentation ,  M""  Guymard  se 
plaignit  de  n'avoir  point,  dans  la 
fête  villageoise  du  troisième  acte, 
un  air  où  elle  pût  développer  la 
grâce  de  son  talent  et  la  souplesse 
de  son  corps.  Vestris,  après  la  ré- 
pétition, arrive  chez  Piccinni, 
qu'il  trouve  fatigué,  et  qui  frémit 
en  le  voyant.  Le  chorégraphe  lui 
apprend  le  motif  de  sa  visite,  et 
le  prie  de  ne  pas  se  refuser  aux 
instances  de  M"'  Guymard.  «  Mon 
»  cher  ami,  lui  dit  Piccinni,  vous 
•)  voulez  donc  me  tuer  ?  Allons,  il 
»  faut  bien  m'y  résoudre,  et  vous 
»  faire  encore  de  la  bergerie,  pnis- 
«que  c'est  pour  une  si  aimable 
«bergère;  mais  que  fera-t-elle  ? 
«voyons,  montrez-le-moi,  pour 
«que  j'écrive  ses  pas  avec  des  no- 
«tes.  «  Alors  Vestris  se  met  à  fi- 
gurer une  entrée.  11  va  ,  vient ,. 
retourne,  regarde,  guette,  sus- 
pend ses  pas,  les  précipite.  Peu- 


ne 

dant  que  le  danseur  se  débat  dans 
la  chambre,  Piccinni,  debout  et 
immobile  près  de  sa  cheminée, 
suit  des  yeux  tous  ses  mouve- 
mens.  Après  un  certain  temps, 
il  fait  signe,  d'ime  main,  à  Ves- 
tris  de  s'arrêter  et  de  s'asseoir.  II 
prend  du  papier  de  musique,  et 
sur  le  bord  de  sa  cheminée  mê- 
me, il  écrit  de  suite,  et  tout  en- 
tière, la  longue  et  charmante  ga- 
votte du  troisième  acte,  le  plus 
joli  air  de  tout  l'ouvrage.  Piccin- 
ni se  délassait  des  soins  qu'exi- 
geait son  Roland,  par  la  compo- 
sition d'une  petite  pièce,  intitu- 
lée Phaon,  qui,  jouée  à  la  cour, 
le  mit  en  faveur  auprès  de  la  rei- 
ne. Il  allait  régulièrement  deux 
fois  chaque  semaine  à  Versailles, 
donner  des  leçons  de  chant  à 
Marie-Antoinette,  qui  le  payait  en 
amabilités  et  en  politesses.  Il  ne 
put  jamais  en  retirer  les  frais  de 
voitures  qu'il  était  obligé  de  faire 
pour  s'y  rendre.  En  attendant,  la 
présence  de  Gluck,  de  retour  de 
l'Allemagne,  avait  rendu  la  guer- 
re lyrique  plus  acharnée.  Une 
brochure  intitulée  :  Entretiens 
sur  l'état  actuel  de  l'Opéra  de 
Paris,  lui  donna  un  nouveau  dé- 
gré  de  violence.  Berton ,  alors 
directeur  de  l'Opéra,  essaya  d'a- 
paiser les  partis  en  réconciliant 
les  chefs.  Il  donna  un  grand  sou- 
per, où  Gluck  et  Piccinni,  après' 
s'être  embrassés,  furent  places 
l'un  près  de  l'autre.  Ils  causè- 
rent pendant  tout  le  repas  ,  et  se 
séparèrent  aussi  cordialement 
qu'ils  s'étaient  accueillis.  Mais  la 
guerre  dont  ils  étaient  le  sujet 
n'en  dura  pas  moins,  et  les  Glui- 
kistes  survécurent  môme  à  leur 
rhef,  qui  quitta  la  France  peu  a- 


ric 


255 


prés  pour  rentrer  dans  ses  foyers. 
Il  fut  remplacé  par  Sacchini , 
dont  on  voulut  faiie  un  nouveau 
rival  de  Picinni,  arec  lequel  on 
parvint  à  le  brouiller.  C'est  au 
milieu  de  tous  ces  désagrémens 
que  celui-ci  donna  sa  Didon,  re- 
gardée conuTie  la  meilleure  de 
ses  pièces,  et  qu'on  doit  ranger 
au  nombre  des  plus  beaux  monu- 
mens  de  la  scène  lyrique  françai- 
se. Sacchini  et  Gluck  moururent 
à  une  année  de  distance  l'un  dt; 
l'autre,  et  fournirent  à  Piccinni 
l'occasion  de  se  parer  d'un  nou- 
veau litre  de  gloire,  en  faisant 
l'éloge  de  tous  les  deux,  et  en 
les  proclamant  les  plus  grands 
compositeurs  de  leur  temps.  Il 
avait  Mtême  proposé  qu'on  leur 
décernât  des  hommages  publics, 
mais  ses  vœux  ne  furent  point 
accueillis.  Les  événeinens  arri- 
vés en  France  en  1789,  l'ayant 
privé  de  ses  traitemens  et  de  ses 
pensions,  il  prit  le  parti  de  re- 
tourner à  Napies,  où  le  roi  lui  fit 
la  réception  la  plus  flatteuse,  et 
lui  accorda  même  une  pension. 
En  I79'i,  il  composa  Jonathas, 
oratorio  en  trois  actes,  et  un  opé- 
ra bouffon  intitulé  :  la  Serva  ono- 
rala.  Ces  deux  ouvrages  captivè- 
rent tous  les  suffrages, et  auraient 
recommencé  une  nouvelle  ère  de 
prospérité  pour  l'auteur,  s'il  n'a- 
vait pas  eu  l'impiudence  de  ma- 
nifi-ster  trop  vivement  des  idées 
poIili(pies  qui  l'exposèrent  à  de 
nouveaux  malheurs. Menacé  d'èlro 
compris  dans  les  mesures  de  ri- 
gueur que  le  gouvernement  de 
?iaples  avait  adoptées  à  C(îtte  é- 
po(|ue,  Piccinni  resta  quatre  ans 
enfermé  chez  lui,  dans  un  état 
d'abandon,  d'oppression,  et  d'iii- 


s  56 


PIC 


digence  qu'il  était  si  peu  fuit  pour 
mériter,  mais  qu'il  supporta  avec 
résignation  et  courage.  Celte 
position  malheureuse,  qu^i  tut  en- 
core aggravée  par  la  perte  de 
tout  Ce  qu'il  avait  laissé  en  Fran- 
ce, dura  jus(}u'en  1798,  où,  à  la 
faveur  d'un  engagement  qu'on 
lui  avait  procuré  pour  Venise, 
il  put  sortir  de  son  pays  pour 
revenir  en  France.  Le  lendemain 
de  son  arrivée  à  Paris,  il  assista 
à  la  distribution  des  prix  du  con- 
servatoire ,  qui  lui  donna  peu  a- 
près  une  fête  magnifique  pour  cé- 
lébrer son  retour.  Piccinui  était 
dans  un  tel  état  de  dénuement 
qu'il  était  embarrassé  de  paraître 
décemment  dans  ces  brillantes 
réunions;  et  en  revenant  chez  Itii, 
il  expiait  par  le  froid  et  la  faim 
les  honneurs  dont  on  le  comblait 
en  public.  Les  démarches  de  ses 
anus  ne  purent  pas  obtenir  le  ré- 
tabli*senient  de  sa  pension  à  l'O- 
péra, et  ce  fut  parmi  les  adminis- 
trateurs de  l'Opéra  même  qu'il 
trouva  ses  plus  impitoyables  ad- 
versaires. C'était  A  l'auteur  de 
Roland,  de  Didon,  d'Endymioii, 
iVAtliys,  de  Pénélope,  qu'on  avait 
la  barbarie  de  refuser  du  pain  !  !  ! 
On  lui  procura  un  logement  ù 
l'hôtel  d'Angevilliers,  où  une  par- 
lie  de  sa  famille  vint  le  rejoin- 
dre. Dans  un  autre  moment  c'eût 
été  une  grande  consolation  pour 
lui  que  de  se  voir  entouré  des  objets 
de  son  affection;  mais  dans  la  mi- 
sère où  il  était  plongé,  la  vue  de 
ces  êtres  chéris  ne  pouvait  qu'aug- 
menter sa  douleur.  Les  chagrins 
de  sa  position,  et  son  inquiétude 
pour  une  partie  de  sa  famille, 
qui  était  restée  à  Naples,  lui  cau- 
sèrent une  attaque  de  paralysie. 


PIC 

Relevé  de  cet  accident,  il  se  traîna 
chez  le  premier  consul  Bonaparte, 
qui  l'encouragea  d'un  regaril.  Il 
lui  demanda  une  marche  pour  sa 
garde  consulaire,  pour  avoir  le 
prétexte  de  lui  faire  accepter  un 
secours  ;  il  ordonna  en  même 
temps  la  création  d'une  sixième 
place  d'inspecteur  du  conserva- 
toire, pour  l'offrir  à  Piccinni,  à  ti- 
tre de  reconnaissance  nationale.. 
Mais  cette  faveur  apporta  une 
Consolation  tardive  à  l'âme  de  cet 
illustreinfortime.il  succomba  peu 
de  temps  après  à  une  nouvelle  at- 
teinte de  sa  maladie  habituelle, 
et  fut  enterré  à  Passy,  où  on  l'a- 
vait transporté,  espérant  que  le 
bon  air  et  l'aspect  de  la  campagne 
pourraient  ranimer  ses  forces.  Il 
laissa  une  veuve,  et  six  enfans 
qui  n'avaient  pour  tout  bien  que 
sorï  génie,  et  qui  héritèrent  de 
son   malheur. 

PICHARD-DL-PAGE  (F.  J.), 
né,  en  ijSo,  dans  le  département 
de  la  Vendée,  était  à  l'époque  de 
la  révolution  secrétaire  du  roi  à 
Fonlenay.  Il  se  montra  alors  par- 
tisan des  nouvelles  opinions ,  et 
l'ardeur  avec  laquelle  il  embras- 
sa la  cause  de  la  liberté  lui  acquit 
une  si  grande  popularité  que 
ses  concitoyens,  après  l'avoir 
porté  en  triomphe  dans  les  rues 
de  Fonlenay,  le  nommèrent  pro- 
ciireur-général-syndic  du  dépar- 
tement. Cette  place  était  difïicile 
à  remplir  dans  les  circonstances 
où  l'on  se  trouvait.  En  vain  Pi- 
chard -du  -  Page,  pour  prévenir 
la  guerre  civile,  voulut  employer 
des  moyens  sages  et  conciliateurs; 
en  vain  il  montra  dans  toute  sa 
conduite  la  plus  grande  modéra- 
lion  :  la  modération,  flétrie  sous 


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Frerni/  Ofi  <'(  >*'«' 


ric 

îe  nom  de  modêrantisme ,  était 
devenue  un  crime  aux  yeux  de 
ceux  qui  croyaient  ne  voir  dans 
les  Injuimes  modérés  que  de?  en- 
nemis déguisés  du  peuple.  Lors- 
que l'insurreclion  royaliste  eut 
pris  un  caractère  plu-;  prononcé, les 
mêmes  hommes  qui  avaient  porté 
en  triomphe  Pichard -du  -  Page  , 
l'accusèient  d'en  être  le  principal 
moteur.  Il  fut  arrêté  et  traduit,  a- 
prés  une  détention  assez  longue, 
devant  la  commission  militaire  de 
Fonlenay,  qui  le  condamna  à  la 
réclusion.  Dénnncé  de  nouveau 
comme  conspirateur,  par  Faillau, 
Carrier  et  Goupilleau  de  Fonle- 
nay,  il  fut ,  par  un  décret  de  la 
convention  nationale,  traduit  au 
tribimal  révolutionnaire  de  Paris, 
qui  le  condamna  à  mort  le  28  avril 

PICHEGRU  (Charles),  géné- 
ral de  la  répuhlique  française,  né 
en  17G1,  à  Arljois  ,  dépaitement 
du  Jura,  de  pareus  peu  riches. 
Des  moines  de  l'ordre  des  mini- 
mes dirii/eaient  un  collège  dans 
cette  petite  ville  ;  Pichegru  y  lit 
sey  études,  et  montra,  dès  sa  jeu- 
nesse, les  pluh  heureuses  disposi- 
tions ,  surtout  pour  les  sciences 
exactes.  Les  Perts  minimes  re- 
connurent bientôt  le  mérite  de 
leur  élève,  et  résolurent  de  tirer, 
pour  Ifur  propre  com|ite,  parti  de 
ses  taleus.  Ils  le  déterminèrent  fa- 
cilement, tj 'ayant  alors  que  de.-,  res- 
sources très-hornées,  à  se  rendre  à 
Brienne,  où  ils  dirigeaient  un  plus 
grand  collégi: ,  et  où  il  devint  ré- 
pétiteur des  classes  de  philos(tp]»ie 
et  de  mathématiques.  Quoique 
portant  Thabit  religieux,  il  ne  fit 
jamais  de  vœux,  et  n'a  point  été 

X.  XVI. 


1  PIC  257 

moine ,  comme  on  l'a  faussement 
avancé.  Bonaparte  faisait,  à  la  mê- 
nie  époque,  ses  éludes  au  collège 
de  lirienne,  et  reçut  des  leçons  de 
malhématiques  de  l'ahbé  Piche- 
gru., comme  il  l'appelait  alors. 
.Mais  celui-ci,  lassé  bientôt  de  son 
rôle  de  pédagogue  subalterne ,  et 
se  sentant  le  courage  et  les  lalens 
nécessaires  pour  se  distinguer 
dans  la  canière  des  armes,  quitta, 
jeune  encore,  le  collège,  et  s'en- 
gagea comme  simple  soldat  dans 
le  i"  régiment  d'artillerie.  L'édu- 
cation qu'il  avait  reçue,  sa  bonne 
conduite  et  ses  connaissances  en 
malhématiques  ,  le  firent  remar- 
quer de  ses  chefs,  et  il  obtint  bien- 
tôt le  grade  de  sergent.  Il  fit,  en 
cette  qualité,  les  dernières  campa- 
gnes de  la  guerre  d'Amérique ,  se 
distingua  par  sa  bravoure,  acquit 
des  notions  nouvelles  et  étendues 
sur  les  manœuvres  de  terre  et  de 
mer,  et  sur  la  tactique  générale. 
Il  revint  en  France  avec  le  grade 
d'adjudant-sous-oHicier,  au-dessus 
dtiquel  sa  fortune  militaire  se  se- 
rait probablement  peu  élevée  sans 
la  révolution  de  1789.  Un  nouvel 
ordre  de  choses  fit  cesser  les  dis- 
tinctions absurdes  élablies  entre 
les  officiers  de  fortune,  parvenus  à 
leur  grade  par  leur  seul  mérite,  et 
les  nubles,  à  qui  leur  naissance 
seule  snllisait  pom- entrer  d'abord 
comuie  olliciers  dans  la  carrière,  et 
quand  ils  tenaient  à  la  noblesse  de 
cour,  |)our  être  colonels  à  31  ans. 
Aussi,  Pichegru  se  déclara-lil  avec 
chaleur  pour  la  révolution,  et  de- 
vint un  des  membres  les  plus  zélés 
des  premières  sociétés  pojjulaires. 
Il  n'était  encore  que  sous-ollicief 
quand  il  présidait  le  club  de  Be_ 
'7 


a5$ 


PIC 


sançon.  Un  bataillon  de  vulonlai- 
res  nationaux  du  département 
du  Gard  y  passait  à  cette  époque, 
et  ce  Corps  n'avait  pas  encore 
nommé  de  tou»mandant,  quand  le 
club  proposa  d'élever  à  ce  poste 
son  président,  dont  l'ardent  patrio- 
tisme ,  non  moins  que  les  talens 
militaires  ,  justifierait  sans  doute 
le  choix.  La  proposition  fut  ac- 
ceptée par  acclamation,  et  voilà 
comme  l'ichegru  devint  enfin  of- 
ficier. Le  nouveau  chef  de  batail- 
lon des  volontaires  du  Gard  con- 
duisit bientôt  à  l'armée  du  Rhin 
une  troupe  dont  l'instruction  ne 
laissait  rien  à  désirer,  et  où  il  était 
parvenu,  i'i  force  de  soins  et  d'ha- 
bileté ,  à  soumettre  la  bravoure 
même  au  joug  nécessaire  d'une 
discipline, bien  difficile  alors  à  faire 
supporter  aux  jeunes  tolonlaires. 
Employé,  en  1792,  à  l'état-major 
de  l'armée  du  Rhin,  il  fut  rapide- 
ment porté,  par  son  mérite  et  sa 
bravoure ,  au  rang  de  général  de 
brigade  et  de  général  de  division. 
En  octobre  1793,  sans  être  intimi- 
dé par  les  exeniples  de  Custines, 
de  Houchard,  de  Riron,  et  d'au- 
tres généraux  qui  avaient  péri  sur 
l'échafaud,  même  après  des  suc- 
cès, Piohegru  accepta  le  comman- 
dement en  chef  d'une  armée  qui 
venait  d'essuyer  de  grands  revers. 
Les  lignes  de  Weissembourg  a- 
taient  été  forcées,  les  troupes  fran- 
çaises battaient  en  retraite  de  tou- 
tes parts ,  le  décour.igement  et 
l'indiscipline  portaient  la  désorga- 
nisation danç  plusieurs  corps.  Il 
parvint  à  arrêter  les  progrès  de 
l'ennemi,  à  rétablir  l'ordre,  et  ob- 
tint bientôt  quelques  succès  con- 
tre les  Autrichiens,  malgré  la  supé- 
riorité de  leurs  forces  de  toutes 


PIC 

armes,  et  principalement  de  leur 
nombreuse  cavalerie.  Le  général 
Hoche  vint  alors,  à  la  tête  de  l'ar- 
mée de  la  Moselle,  joindre  celle 
du  Rhin,  et  les  commissaires  de 
la  convention  lui  doniïèrent,  con- 
tre l'avis  de  Saint-.lust  ,  le  com- 
mandement en  chef.  Pichegru  ser- 
vit quelque  temps  de  second  à 
son  rival;  mais  le  fougueux  Saint- 
Just,  qui  s'était  déclaré  le  prolec- 
teur du  premier,  et  dont  Hoche 
{voy.  ce  nom)  avait  en  plus  d'une 
occasion  blessé  l'orgueil,  fit  bien- 
tôt changer  ces  dispositions.  Le  17 
pluviôse  an  2  (5  février  1794)^  '* 
Commandement  en  chef  de  tous 
les  corps  réunis,  sous  le  nom  d'ar- 
mée du  Nord,  fut  doimé  par  le 
comité  de  salut-public  au  général 
Pichegru.  H  venait  sans  doute 
d'acquérir  de  nouveaux  droits  à  la 
bienveillance  des  gouvernans  du 
jour,  et  tandis  que  l'homme  qu'il 
haïssait  le  plus,  son  jeime  compé- 
titeur de  gloire,  le  brave  Hoche, 
allait  expier  ses  succès  dans  les 
cachots  de  la  Conciergerie  en  at- 
tendant la  mort  sur  l'échafaud  , 
Robespierre  et  ColIot-d'Herbois 
faisaient,  à  la  tribune  de  la  con- 
vention et  à  celle  des  jacobins,  un 
pompeux  éloge  du  patriotisme 
ardent  de  Pichegru,  et  des  impor- 
tans  services  qu'il  avait  rendus 
à  la  république,  tant  sous  les  rap- 
ports politiques  que  militaires.  Il 
venait  eu  elTet  d'intercepter  le3 
correspondances  de  plusieurs  émi- 
grés de  marque  ,  qu'il  avait  en- 
voyées au  comité  de  salut-public; 
il  avait  dénoncé  au  même  comité 
des  trames  à  l'intérieur  contre  les 
patriotes,  et  tout  en  affectant  ea 
ses  discours  et  en  ses  rapports  le 
républicanisme  le  plus  exalté,  et 


\ 


PIC 

la  passion  de  l'égalité,  il  savait  mé- 
nager habilement  les  prétentions 
et  la  vanité  des  représentans  en 
mission  aux  armées,  leur  soumet- 
tant tous  ses  projets  et  ne  parais- 
sant suivre  que  leur  impulsion. 
Aussi,  lors  de  son  passage  à  Paris, 
en  se  rendant  à  son  nouveau  pos- 
te, fut-il  comblé  d'éloges  et  d'hon- 
neurs par  les  puissans  du  jour,  et 
de  son  côté  ,  avant  de  partir,  il  é- 
crivit  à  la  société  des  jacobins 
pour  lui  témoigner  sa  reconnais- 
sance et  son  éternel  dévouement. 
«  Je  jure,  disait-il  dans  sa  lettre 
«d'adieu,  de  faire  triompher  les 
«armes  de  la  république  ,  d'exter-- 
«miner  les  tyrans,  ou  de  mourir 
»en  les  combattant.  Won  dernier 
»mot  sera  toujours  :  vive  ta  Répu- 
«blique!  vive  la  Montagne!  »  Dès 
son  arrivée  A  l'armée  du  Nord,  il 
adressa  aux  soldats  une  proclama- 
tion en  style  aussi  énergique.  Mais 
il  fallait  autre  chose  que  des  phra- 
ses de  démagogue  pour  rétablir 
l'ordre  et  la  confiance  dans  une 
armée  accablée  par  des  revers 
successifs,  et  dont  plusieurs  chefs 
avaient  été  destitués,  emprison- 
nés ou  immolés  par  de  stupides 
proconsuls  qui  portaient  partout 
avec  eux  le  découragement  et  la 
désorganisation,  Pichegru  sut  ap- 
porter de  prompts  remèdes  à  tant 
de  maux,  et  ce  fut  à  cette  époque. 
la  i>lus  glorieuse  de  sa  vie,  qu'il 
déploya  ces  éminens  talens  mili- 
taires qui  le  placèrent  au  premier 
rang  des  guerriers  tacticiens  de 
nos  temps.  Les  Autrichiens  étaient 
maîtres  de  Condé,  de  Yalencien- 
nes,  du  Quesncd,  de  Landrecies, 
et  ne  se  trouvaient  plus  qu'à  ^o 
lieues  de  Paris.  Le  prince  de  Co- 
bourg  commandait   leur   armée  , 


PIC 


2^9 


dont  le  centre  était  couvert  par  la 
forêt  de  Mormale,  où  ce  prince  a- 
vait  élevé  des  retranchemens  inex- 
pugnables. On  s'était  obstiné  à 
l'attaquer  par  ce  point,  et  les  Fran- 
çais y  furent  constamment  repous- 
sés avec  d'immenses  pertes.  Pi- 
chegru eut  encore  ordre  du  co- 
mité de  salut-public  de  renouve- 
ler ces  imprudentes  attaques  ,  et 
ne  fut  pas  plus  heureux  que  ses 
prédécesseurs.  Mais  il  répara  bien 
glorieusement  ces  premiers  é- 
checs ,  et  fixa  pour  long-temps  la 
victoire  sous  les  drapeaux  aux 
trois  couleurs.  Se  livrant  à  ses 
propres  inspirations  et  sans  atten- 
dre les  ordres  du  comité,  il  réso- 
lut d'entamer  l'ennemi  par  ses 
flancs.  Se  portant  avec  rapidité, 
en  avril  179^,  sur  la  West- Flan- 
dre ,  il  battit  les  Autrichiens  à 
Courtray ,  au  Mont-Cassel  et  à 
Menin.  Leur  ligne,  si  long-temps 
impénétrable  ,  fut  ainsi  rompue  , 
t't  profitant  avec  autant  d'habileté 
que  de  promptitude  de  ses  suc- 
cès ,  il  se  fit  joindre  par  20,000 
hommes  qu'il  avait  laissés  oppo- 
sés au  centre  de  l'ennemi  ,  où  il 
était  décidé  à  ne  plus  rien  tenter, 
et  se  trouva,  avec  toutes  ses  forces 
réunies,  en  présence  de  la  grande- 
armée  des  alliés.  Le  prince  de  Co- 
bourg  commandait  en  chef  cette 
armée,  le  ducd'Yorky  avait  ame- 
né un  nombreux  corps  d'Anglais, 
et  l'empereur  François  -venait 
d'y  arriver  pour  anin)er  les  trou- 
pes par  sa  présence.  On  se  battit, 
pendant  plusieurs  jours  ,  avec  le 
plus  grand  acharnement  de  part 
et  d'autre.  Le  10  et  le  11  mai,  dt; 
sanglanscombats  se  livrèrent  sous 
les  murs  de  Tournay  et  de  Cour- 
tray; le  général  autrichien  Clair- 


•26o 


PIC 


fiiyt  se  montra  ,  dans  le  dernier, 
un  redoutable  adversaire  ;  enfin  , 
le  17  mai  ,  la  grande-armée  des 
alliés  attaqua  les  Français  à  Sau- 
ghien,  tandis  que  Clairfayl  s'avan- 
çait sur  la  Lys  ;  Pichegru  céda  le 
terrain  dans  celte  journée  ,  mais 
le  18  il  allaqua  à  son  tour  les  coa- 
lisés enlie  Menin  et  Courlray,  et 
remporta,  après  la  plus  opiniâtre 
résistance,  une  victoire  complète 
et  décisive.  On  s'était  battu,  depuis 
la  pointe  du  jour,  jusque  dans  la 
nuit.  Les  Autrichiens ,  sous  ies 
yeux  de  leur  empereur  ,  avaient 
déployé  une  valeur  et  une  cons- 
tance admirables.  Mais  rien  ne  put 
résister  aux  savantes  manœuvres 
de  Pichegru,  exécutées  avec  la  ra- 
pidité de  l'éclair  par  ses  troupes. 
Lue  foule  de  prisonniers,  65  piè- 
ces de  canon,  des  drapeaux,  é- 
lendaids,  chevaux,  bagages,  etc., 
furent  les  premiers  fruits  de  la 
victoire.  Moreau  ,  avec  un  corps 
détaché  ,  avait  eu  ordre  de  tenir 
en  respect  celui  de  Clairfayt  ,  et 
luttait  contre  lui  avec  des  forces 
inférieures.  Muis  ,  apprenant  la 
défaite  de  la  grande-armée ,  le 
général  autrichien  se  retira  sur 
Thiel  ,  où  il  prit  uno  position 
avantageuse.  Pour  l'eu  tirer,  Pi- 
chegru feignit  d'attaquer  la  ville 
forte  d'Yjtres,  qu'il  cerna  dans  les 
premiers  jours  de  juin  ,  et  celte 
ruse  lui  réuss^il.  Les  Autriciiicns 
marchèrent  au  secours  de  la  place, 
et  furent  encore  battus  le  10  juin 
à  Rousselaer,  et  le  i3  à  lldoglède. 
Cette  dernière  victoire  décida  du 
sort  de  la  Fhuidre.  Ypres  se  rendit 
le  17;  les  villes  de  Bruges,  Osten- 
de,  (iand,  Anvers,  ïournay,  linis- 
le-Duc,  Venloo  et  Nimègue,  tom-. 
bèrent   suGcessivemenl   entre   les 


PIC 

mains  des  vainqueurs,  qui  se  trou- 
vèrent en  outre  maîtres  d'un  des 
pays  les  plus  riches  et  les  plus  fer- 
tiles de  l'Europe,  et  dont  les  iné- 
puisables ressovirces  fournirent 
abondamment  aux  besoins  d'une 
armée  couverte  de  gloire  ,  mais 
manquant  souvent  des  choses  les 
plus  nécessaires.  Les  quatre  places 
occupées  par  les  Autrichiens  en 
France  furent  investies,  et  bientôt 
délivrées  de  la  présence  de  l'é- 
tranger. Les  alliés  ,  découragés 
j)ar  une  suite  inouïe  de  revers  , 
n'offraient  plus  qu'une  faible  ré- 
jjstance.  L'empeieur  François  a- 
vait  quitté  l'armée  ,  et  le  duc 
d'York  fut  bientôt  forcé  à  la  plus 
pénible  retraite  ;  déjà  toutes  les 
troupes  des  coalisés  ,  rejetées 
derrière  ia  Meuse  et  le  Rhin,  n'a- 
vaient d'espoir  que  dans  ies  obs- 
tacles opposés  aux  vainqueurs  par 
la  nalure  même,  en  un  p;iys  cou- 
pé de  canaux,  de  marais  et  de  lar- 
ges rivières,  où  toutes  les  ressour- 
ces de  l'art  avaient  été  employées: 
pour  défendre  les  principaux  pas- 
sages, cl  où  les  inondations  ordi- 
naires de  la  mauvaise  saison  au^ 
raient  pu  rendre  une  campagne 
d'hiver  impossible.  M:iis  cette  fois 
la  nature  même  se  déclara  en  la- 
veur des  Françai-^.  Un  froid  exces- 
sif fit,  dès  la  fin  de  l'automne,  re- 
tirer les  eaux  débordées;  et  aprè^ 
avoir  eu  long-teuips  à  marcher  et 
à  combattre  dans  les  terres  fan- 
geuses où  le  soldat  s'enfonçait 
jusqu'aux  genoux  ,  il  put  enfin 
franchir  les  fleuves  mêmes  sur 
une  glace  solide.  On  passa  ainsi 
le  Wahal  ;  les  villes  de  Breda  et 
deCiave  capitulèrent;  on  emporta 
l'ili^  de  Bonimel  et  le  fort'  Saint- 
André;  on  entra  dans  Thiel  dés  les 


PIC 

premiers  jours  de  janvier  1795  , 
après  un  combat  où  les  Autri- 
chiens, abandonnés  par  les  An- 
glais ,  résistèrent  avec  valeur. 
L'armée  hollandaise  se  débanda; 
les  Anglais  cherchèrent  un  refuge 
sur  leurs  vaisseaux;  le  28  nivôse 
an  5(17  janvier  1795)  ,  Utrecht 
et  Aaiersfort  se  rendirent;  le  Leck 
fut  passé  le  même  jour,  et  les  li- 
gues de  la  Greb  emportées  ;  le 
vainqueur  s'y  saisit  de  80  pièces 
de  canon.  Gertruydenberg  capi- 
tula après  4  jours  de  bombarde- 
ment; Gorcuni  et  Dordrecht  se 
rendirent  à  leur  tour,  et,  le  21 
janvier,  Pichegru  entra  en  triom- 
phe dans  la  ville  d'Amsterdam. 
Toute  la  Nord-Hollande  avait  de 
même  été  rapidement  conquise  , 
et  un  corps  de  cavalerie  française 
venait  de  s'emparer  des  vaisseaux 
de  guerre  balavcs  pris  par  les 
glaces;  fait  d'armes  nouveau  dans 
les  fastes  militaires,  Eès  les  pre- 
miers jours  de  février  (1795),  tou- 
te la  république  des  Provinces- 
Unies  se  trouva  soumise  à  la  ré- 
publi(|ue  française;  le  stadlhou- 
«1er  avait  fui  avec  sa  famiile  et  ses 
principaux  partisans  en  Angleter- 
re. Pichegru  ne  s'arrêla  qu'à  l'ex- 
trême frontière,  où  il  ne  trouvait 
plus  d'ennemis  à  combattre,  les 
généraux  prussiens  lui  ayant  fait 
part  des  négociations  qui  venaient 
de  s'ouvrir  entre  leur  souverain 
et  le  gouvernement  français,  en 
l'engageant  à  en  attendre  le  ré- 
sultat et  à  ne  pas  enirer  sur  le 
territoire  prussien.  Pendant  le 
cours  de  cette  brillante  campa- 
gne, ime  grande  révolution  s'était 
(tpérée  en  France.  Le  9  thermi- 
dor avait  lui;  Robespierre,  Cou- 
thon,  SuintJust,  venaient  de  por- 


PIC  261 

ter  leur  tête  sur  l'échafaud.  Pi- 
chegru avait  paru  J!:sque-là  dé- 
voué A  la  faction  qui  venait  de 
succomber;  il  était  surtout  inti- 
mement lié  avec  Saint-Just,  au- 
quel il  devait  en  grande  partie  sa, 
forlime  militaire;  mais  il  s'em- 
pressa un  des  premiers  à  faire 
parvenir  à  la  convention  une  a- 
dresse  de  félicitation  sur  le  triom- 
phe qu'elle  venait  de  remporter. 
Les  mots  de  Five  la  Montagne! 
furent  dès  -  lors  prudemment 
supprimés  dans  toutes  ses  procla- 
mations comme  dans  cette  adres- 
se; mais  ceux  de  vive  la  républi- 
que! y  étaient  d'autant  plus  pro- 
digués, et  elle  ne  pouvait  selon 
lui  que  vivre  et  prospérer  depuis 
que  les  «triumvirs,  Saint-Just  et 
')ses  acolytes,  les  ennemis  du 
«peuple  et  des  soldats,  avaient  été 
«punis  de  leurs  forfaits.»  La  con- 
vention reçut  les  félicitations  et 
bientôt  les  nouveaux  rapports  des 
triomphes  de  l'armée  de  Pichegru, 
avec  les  transports  du  plus  vif 
enthousiasme.  Le  général  fut  com- 
blé d'éloges  et  de  faveurs.  Il  re- 
çut le  i3  ventôse  (3  mars  1795), 
le  conjuiandemcnt  en  chef  de  l'ar- 
mée de  Rhin-et-Moselle,  tout  en 
conservant  la  direction  supé- 
rii'ure  des  armées  du  Nord  cl  de 
Sambre-et-Meuse  ,  commandées 
par  les  généraux  IMoreau  et  Jour- 
dan  ,  qui  se  trouvèrent  sous  ses 
ordres.  Ce  général  eut  ainsi  à  sa 
disposition  plus  de  troupes  qu'on 
n'en  avait  enc(ue  confié  à  aucun 
chef.  Il  se  rendit  à  Paris  vers  la 
fin  du  même  mois,  sur  la  deman- 
de du  comité  de  salut-public ,  et 
s'y  trouvait  au  moment  où  une 
insurrection  populaire  des  fau- 
bourgs éclata  contre  la  convea- 


263 


PIC 


tion.  On  lui  confia  aussitôt  le  com- 
mandement de  toutes  les  trou- 
pes qui  formaient  la  garnison  de 
cette  capitale,  et,  dans  les  jour- 
nées du  13  germinal  an  5  (i" 
avril  1795)  et  suivantes,  il  dis- 
persa ou  soumit  sans  grande  pei- 
ne les  révoltés  des  faubourgs.  En 
rendant  compte  à  la  barre  de  la 
convention  de  ce  dernier  succès, 
il  fut  accueilli  par  de  nombreux 
applaudissemens,  et  proclamé  de 
nouveau  le  sauveur  de  la  patrie. 
II  se  hâta  cependant  de  quitter 
Paris,  se  dérobant  ;\  des  honneurs 
qui  n'avaient  plus  de  prix  à  ses 
yeux,  et  se  rendit  à  l'armée  du 
Rhin  pour  exécuter  les  vastes  des- 
seins qu'il  avait  conçus  depuis 
quelque  temps.  Après  avoir  ser- 
vi avec  tant  d'éclat  et  de  dévoue- 
ment la  république,  Pichegru  ve- 
nait de  former  le  projet  de  la  ren- 
verser. Entré  en  correspondance 
secrète  avec  le  prince  de  Coudé, 
par  l'intermédiaire  d'un  libraire 
de  Nt'ufchâtel,  nommé  Fauche- 
BoREL  [voyez  ce  nom),  il  avait  pris 
l'engagement  d'employer  tous  ses 
moyens  pour  relever  la  monar- 
chie en  France,  et  rétablir  la  mai- 
son de  Bourbon  sur  le  trône.  Dès 
l'arrivée  du  général  sur  les  bords 
du  Rhin,  le  même  agent  vint  le 
retrouver;  la  correspondance  et 
les  négociations  avec  le  prince 
de  Coudé  furent  reprises  avec 
une  nouvelle  activité.  Les  pro- 
messes du  prince  étaient  magnifi- 
ques :  il  assurait  au  général ,  le 
tout  au  nom  du  roi,  le  gouver- 
nement de  l'Alsace,  la  proprié- 
té du  château  de  Chambord,  un 
million  en  argent,  200,000  livres 
de  rente,  la  terre  d'Arbois,  qui 
prendrait  le  nom  de  Pichegru,  et 


PIC 

qui  serait  exempte  de  contribu- 
tions pendant  i5  ans;  12  pièces 
de  canon,  et  enfin  le  grand-cor- 
don-rouge de  l'ordre  de  Saint- 
Louis;  car  on  ne  pouvait  encore  se 
résoudre  à  promettre  le  cordon 
bleu  à  un  homme  de  rien  comme 
Pichegru.  La  perspective  la  plus 
brillante  se  inontrait  sans  doute 
aux  yeux  du  Monk  français  , 
mais  le  rôle  se  trouva  au-dessus 
de  ses  forces.  On  perdit  d'abord 
un  temps  précieux  à  débattre  le 
mode  d'exécution  d'un  plan,  dont 
la  seule  condition  première,  la 
proclamation  d'un  roi,  était  déci- 
dément arrêtée.  Pichegru  propo- 
sa au  prince  de  Coudé  de  le  lais- 
ser pénétrer  en  France  avec  son 
armée  ,  à  travers  la  république 
helvétique,  dont  il  fallait  à  la  vé- 
rité violer  la  neutralité,  mais  cet 
acte  serait  légitimé  parle  succès; 
si  cette  irruption  ne  convenait 
point  au  prince,  Pichegru  lui  pro- 
posait de  passer  lui-même  le  Rhin 
avec  un  corps  d'élite  français,  et 
de  le  réunir  à  l'armée  de  Condé. 
Le  prince  n'adopta  aucun  de  ces 
projets,  et  exigea  bien  d'autres 
garanties.  Il  insistait  pour  que 
l'armée  républicaine  arborât  d'a- 
bord le  drapeau  blanc ,  et  pour 
qu'elle  lui  livrât  Strasbourg  ou 
quelques  autres  des  principales 
places  fortes  de  la  France,  avant 
qu'il  passât  le  Rhin  avec  son 
corps.  A  cette  époque,  c'était  de- 
mander l'impossible,  Pichegru 
voulait  de  son  côté  s'assurer  de  la 
coopération  des  Autrichiens  ;  le 
prince  ne  croyait  pas  devoir  les 
mettre  dans  son  secret.  Le  pre- 
mier mobile  de  toutcîs  les  entre- 
prises pareilles,  l'argent,  manquait 
des  deux  côtés.  «.Je  ne  ferai  riou 


PIC 

1» d'incomplet,  disait  Pichegru  à 
«l'a^fent  du  prince.  Je  ne  veux  pas* 
»êlre  le  troisième  tome  de  La 
»  Fiiyette  et  de  Dumouriez.  Mes 
n  moyens  sont  grands,  tant  à  l'ar- 
/)mée  qu'à  Paris....  Mais  il  laut, 
»en  faisant  crier  vive  le  roi  au 
«soldat  français,  lui  donner  du 
«vin  et  lui  mettre  un  écu  dans  la 
»  main  :  il  faut  que  rien  ne  lui  man- 
nque  dans  ce  premier  momenl  ; 
M  il  faut  solder  mon  armée  jusqu'à 
nsa  troisième  ou  quatrième  mar- 
))che  sur  le  territoire  français, 
s  etc.  »  Le  secret  d'une  corres- 
pondance aussi  long-temps  qu'in- 
fructueusement continuée,  fut  en- 
fin trahi.  Le  général  Wurmser  et 
l'archiduc  Charles  en  furent  ins- 
truits. Ils  en  profitèrent,  quoique 
assez  faiblement,  pour  les  intérêts 
de  l'Autriche,  mais  ne  voulurent 
pas  que  l'armée  de  Condé  eût 
l'honneur  du  rétablissement  de  la 
monarchie  en  France.  Ils  n'aplani- 
rent donc  fMillement  les  obstacles 
qui  s'opposaient  à  l'exécution  des 
projets  de  son  chef.  S.  A.  R.  Mon- 
sieur, qui  s'était  rendu  à  cette  ar- 
mi'.e,  causait  aussi  par  sa  présence 
de  l'ombrage  au  cabinet  de  Vien- 
ne, et,  malgré  les  plus  pressantes 
sollicitations  auprès  de  l'empe- 
reur et  de  l'archiduc  Charles,  ce 
prince  fut  obligé  de  s'éloigner. 
L'époque  paraissait  favorable  sans 
doute  pour  exécuter  d'anciens 
desseins,  et  pour  prendre  posses- 
sion de  l'Alsace  au  nom  de  l'Au- 
triche,  comme  on  avait  fait  des 
places  du  Nord  pendant  une  des 
campagnes  précédentes,  ce  qui  ne 
pouvait  entrer  dans  les  vues  de 
Pichegru  ou  des  princes  français, 
i'eudant  le  cours  de  ces  longues 
négociations,  ic  général  avait  re- 


PIC 


265 


eu  du  comité  de  salut-public  l'or- 
dre réitéré  de  passer  le  Rhin.  Il 
fut  enfin  obligé  d'exécuter  ce  pas- 
sage ;  mais  il  ofiVit  bientôt  à  la 
cause  qu'il  venait  d'embrasser,  le 
plus  grand  des  sacrifices.  11  ma- 
nœuvra de  manière  à  se  laisser 
battre,  ordonna  la  retraite  à  ses 
troupes,  dans  les  occasions  où  elles 
pouvaient  triompher,  mit  dans  la 
place  de  Manheim  et  aux  postes 
avancés  ou  diflicijes,  les  comman- 
dans  les  plus  inexpérimentés  , 
pour  ne  rien  dire  de  plus,  et  offrit 
ainsi  en  holocauste,  non-seule- 
ment sa  propre  réputation  mili- 
taire, mais  la  vie  de  ses  frères 
d'armes  et  de  ses  concitoyens. 
Cette  conduite  n'eut  point  le  suc- 
cès qu'il  en  avait  espéré.  Il  perdit 
en  grande  partie  son  crédit  dans 
l'armée,  et  devint  suspect  aux  au- 
torités. La  constitution  de  l'an  3 
venait  d'être  adoptée,  et  le  direc- 
toire-exécutif avait  pris  en  mains 
les  rênes  de  l'état.  Un  émigré, 
transfuge  du  parti  royaliste,  livra 
le  premier  à  ce  qu'on  assure  aux 
directeurs,  les  secrets  du  prince 
de  Condé  et  de  Pichegru,  secrets 
auxquels  il  avait  été  initié,  et  ob- 
tint, pour  prix  de  sa  délation,  de» 
récompenses  pécuniaires  et  des 
missions  d'observateur  à  l'étran- 
ger. Ce  quil  y  a  de  certain,  c'est 
que  le  commandement  des  armées 
fut  subitement  ôté  au  général  Pi- 
chegru ,  à  l'étonnement  de  bien 
des  personnes;  mais  on  n'osa  point 
sévir  plus  rigoureusement  contre 
lui;  ses  partisans  étaient  alors 
nombreux,  et  les  preuves  de  sa 
défection  ne  se  trouvaient  point 
encore  assez  évidentes.  Le  direc- 
toire lui  offrit  même  l'ambassade 
de  Suède  pour  l'éloigner  par  un 


264 


PIC 


exil  honorable ,  et  pour  rompre 
ainsi  tous  les  fils  d'une  trame  dan- 
gereuse. Mais  il  rejeta  bien  loin 
l'offre  d'une  mission  à  l'étranger, 
et  son  refus,  ainsi  que  plusieurs 
autres  circonstances,  vinrent  con- 
firmer les  soupçons  que  le  gou- 
vernement avait  conçus.  Piche- 
gru  se  retira  dans  le  domaine  na- 
tional de  Bellevaux,  ancienne  ab- 
baye de  Bernardins,  qu'il  avait 
acquise  près  d'Arbois,  sa  ville  na- 
tale, et  n'en  sortit  qu'eu  germinal 
an  5  (mars  1797),  lorsque  l'as- 
semblée électorale  dé  son  dépar- 
tement Teut  aiipelé  aux  fonctions 
de  législateur.  Dès  son  entrée  au 
conseil  des  cinq-cents,  il  fut  porté 
par  s»!S  collègues  à  la  piésidence, 
et  ne  larda  pas  à  se  signaler  par 
son  opposition  au  directoire.  Il 
devint  aussitôt  l'espoir  et  le  chef 
lin  parti  dit  de  CUchy.  Riais  ce 
parti  était  divisé  lui  -  mêm»;  en 
plu-icurs  coteries  différentes, dont 
tous  les  membres  désiraient,  il  est 
vrai.  Il  chute  du  directoire,  et  du 
crédit,  des  honneurs  et  des  fonc- 
tions lucratives  pour  eux-mêmes, 
mai-  n'étaient  guère  d'accord  sur  le 
reste.  Quebpies  hommes  dévoués 
à  la  maison  de  Bourbon  se  trou- 
vaient parmi  eux,  et  s'occuj)aient 
sans  relâche  des  moyens  de  la  ré- 
tablir sur  le  trône;  mais  une  fou- 
le d'autres  avaient  déjà  ])rouvé, 
connue  ils  l'ont  fait  d(;puis ,  que 
tout  système  de  gouvernement 
leur  était  bon  s'il  favorisait  leiu- 
ambition  personnelle.  Pichegru 
se  la  iulimement  avec  les  pre- 
miers, mais  il  ne  put  faire  mar- 
cher le  plus  grand  nondire  vers 
im  but  fixe,  ni  s'assurer  de  la  dis- 
crétion ou  calmer  la  pétulance  de 
quelques  orateurs  aussi   hardis  *à 


PIC 

la  tribune  que  faibles  et  timide» 
dans  l'action.  Un  coup  de  main 
povivait  seul  faire  triompher  son 
parti  :  il  fallait  attaquer  inopiné- 
ment, porter  les  premiers  coups 
au  directoire,  pour  renverser  en- 
suite la  république;  le  général  vou- 
lut tenter  ce  violent  moyeu,  tandis 
que  ses  soldats  effrayés  voulaient 
délibérer  encore.  Le  directoire, 
averti  de  tout  ce  qui  se  tramait 
contre  lui,  prit  l'initiative, et  frap- 
pa lui-même  le  coup  d'état  du  18 
fructidor  (4  septendore  1797).  Dès 
le  -2  thermidor  (20  juillet),  Piche- 
gru avait  fait  un  rapport  pour  de- 
mander une  prompte  organisa- 
tion de  la  garde  nationale,  qu'il 
espérait  pouvoir  faiie  agir  et  op- 
poser avec  succès  aux  troupes  dont 
le  gouvernement  disposait,  et  sur 
lesquelles  le  i5  vendémiaire  avait 
appris  au  parti  (7/'67//«/k|u 'il  ne  pou- 
vait pas  compter.  Le  8  du  même 
mois  (2G  juillet),  Pichegru  avertit 
le  conseil  de  la  marche  des  trou- 
pes que  le  directoire  appelait  à 
Paris,  et  présenta  un  projet  pour 
fixer  autour  du  corps-législatif  des 
limites  qu'aucun  soldat  ne  devait 
franchir.  Ces  différeus  projets  fu- 
rent très-applaudis,  et  le  2  fructi- 
dor (19  août),  les  généraux  Pi- 
chegru et  Willot  fuient  portés  par 
la  majorité  de  leurs  collègues  àla 
commission  des  inspecteurs  de 
la  salle,  et  particulièrement  char- 
gés de  veiller  à  la  sûreté  du  corps- 
législatif.  Mais  reiidu  à  son  poste 
le  18  au  matin,  il  y  fut  arrêté, 
ainsi  que^Yillotet  les  autres  mem- 
bres de  la  commission,  par  la  gar- 
de même  du  corps  législatif,  et 
Iransporlé  sur  une  charrette  à  lu 
prison  du  Ten»ple.  Une  liste  de 
proscription  fut  dressée  dès  le  Icn- 


PIC 

demain.  Pichegni  s'y  trouva  ins- 
crit le  premier;  et  ainsi  que  toutes 
les  listes  pareilles,  qui  ont  précé- 
dé ou  suivi  celle  du  î8  fructidor, 
les  autres  noms  y  étaient  portés 
au  gré  des  haines  et  des  vengean- 
ces particulières  des  vainfjiienrs. 
Sans  examen  ni  jugement  préa- 
lable, vingt  des  malheureux  col- 
lègues de  Pichegru,  parmi  les- 
quels plusieurs  vieillards,  turent 
jetés  avec  lui  sur  des  charrettes, 
surmontées  de  cages  grillées,  et 
conduits  ainsi  comme  les  plus  vils 
criuiinels  au  port  de  Rochefort. 
Une  forte  escorte  de  cavalerie  , 
commandée  par  un  homme  qui 
avait  acquis  son  grade  de  général 
dans  les  antichambres  des  hom- 
mes alors  en  place,  accompagnait 
les  captifs.  La  rapacité  et  l'inhu- 
manité de  ce  conducteur  le  firent 
cependant  destituer  aprèsquelques 
jours  de  marche.  Entassés  ensuite 
dans  l'entre-pont  d'une  corvette 
qui  les  allendail  à  llocheftirt,  les 
proscrits  curent  presque  autant  à 
se  plaindre  de  l'officier  de  marine, 
commandant  du  bâtiment  qui  les 
déportait  à  Cayenne.  Pende  temps 
après  leur  arrivée  en  celte  colonie, 
le  commissaire  du  pouvoir-exécu- 
tif, Jannet,  les*fil  transporter  en- 
core plus  loin,  dans  les  déserts  de 
Sinnamari,  L'ancien  ami  de  Pi- 
chegru, le  général  iMoreau  [voyez 
ce  nom),  avait  envoyé  à  Paiis,  un 
peu  tardivement  il  est  vrai,  une 
série  de  lettres  saisies  dans  un  des 
fourgons  du  général  émigré 
Klinglin  ;  le  directoire  fit  publier 
celle  correspondance  avec  les 
généraux  autrichiens  et  le  prince 
de  Condé,  pour  justifier  le  coup 
d'élat  du  18  fructidor.  D'anires 
p  tpie^ssai.^is  à  Barcufh,  elles  let- 


PIC  a65 

très  du  comle  d'Antraigues,  servi- 
rent depuis  à  confirmer  tout  ce  que 
JMoreau  venait  de  dénoncer,  il 
eût  été  facile  d'examiner  légale- 
ment, mais  il  est  tant  de  parve- 
nus à  l'autorité  qui  aiment  mieux 
proscrire;!  Après  quelques  mois  de 
séjour  au  milieu  des  marais  pes- 
tilentiels de  Sinnamari  ,  où  péri- 
rent plusieurs  de  ses  compagnons 
d'inforlune,  Pichegru  parvint  a- 
vec  Barlhélemi,  Willot,  Delarue, 
Aubry  et  Ramel,  à  g  igner,snr  une 
frêle  pirogue,  et  à  travers  les  plu.»; 
grands  diingers,  la  colonie  hollan- 
daise de  Surinam.  Embarqués  en- 
suite sur  un  vaisseau  anglais  qui 
les  porta  rapidement  dans  un  port 
de  la  Grande-Brelagne,  l'un  d'eux, 
Pichegru,  se  hâta  de  se  rendre  à 
Londres,  où  il  lecutdn  gouverne- 
ment anglais  l'accueil  le  {>lus  dis- 
tingué et  t«i  us  les  secours  qu'il  pou- 
vaitdésirer.Bientôtemployésur  le 
continent  pour  suivre  ses  projets 
contre  le  gouvernement  fiançais, 
il  se  trouvait  en  Allemagne  pen- 
dant la  campagne  de  1799,  si  dé- 
sastreuse pour  la  république,  et 
se  rendit  ensuite  en  Suisse  auprès 
du  général  russe  ivorsakolT,  au- 
quel, à  ce  qu'on  assure,  il  donna 
d'utiles  avis,  que  celui  ci  ne  dai- 
gna point  écouler.  Après  la  dé- 
fdte  des  Russes  et  des  Autri- 
chiens, Pichegru  revint  en  Alle- 
magne,  où  il  courut  quelques 
dangers,  et  fut  sur  le  point  d'être 
arrêté  à  Bareuth  avec  Imbert- 
Coulomès.  Précy,  et  autres  émi- 
grés; l'ordre  en  était  donné  par 
le  ministère  prussien,  sur  la  de- 
mande du  gouvernement  français, 
mais  il  parvint  à  s'y  soustraire  par 
mie  prompte  fuite,  et  retourn  > 
en  AnglcterjCjOÙ  il  rc^la  jusquuti 


266 


ric 


i8o-^|.  Au  commencement  de  cet- 
te année,  le  général  Piclu'gru,qui 
s'élait  lié  à  Londres  avec  Georges 
Cadoudal  et  plusieurs  chefs  ven- 
déens, se  rendit  ainsi  qu'eux  se- 
crétemenl  à  Paris.  Leur  dessein, 
selon  ce  qu'ils  dirent  eux-mêmes 
dans  leurs  interrogatoires ,  était 
d'attaquer  le  premier  consul  Bo- 
naparte. La  police  l'ut  instruite  de 
leur  arrivée  par  les  déclarations 
du  nommé  Querelle, qui  avait  été 
arrêté  peu  de  tcntps  après  son  dé- 
barquement. Un  décret  du  sénat 
lut  promulgué  dans  toutes  les 
rues  de  la  capitale,  qui  défendait, 
sous  peine  de  mort,  (le  donner  asile 
aux  conjurés. Après  s'êtrejusque-là 
soustrait  à  toutes  les  recherches, 
Georges  Cadoudal  et  plusieurs  des 
siens  venaient  d'être  saisis.  Fi- 
chegru  ,  errant  de  maison  en  mai- 
son penilatU  plusieurs  jours,  crut 
trouver  un  refuge  chez  un  cour- 
tier de  con)merce,  logé  rue  de 
Chabannais.  Cet  homme,  qui  sans 
doute  d'après  la  rigoureuse  loi 
qu'on  venait  de  publier  eût  été 
excusable  s'il  n'avait  point  donné 
d'asile  au  proscrit,  venait  au  con- 
traire de  l'accut'illir  dans  le  des- 
sein, dil-on,  de  le  livrer  pour  obte- 
nir une  misérable  récompense  pé- 
cuniaire ou  le  prix  du  sang.  Le 
28  février  1804,  à  5  heures  du 
matin,  le  commissaire  de  police 
Conîminge  paitvint  à  s'introduire 
dans  la  chambre  où  Pichegru  dor- 
mait d'un  profond  sommeil  ,  et 
à  se  saisir  de  lui  avant  qu'il  j)ût 
faire  usage  des  pistolets  et  du  poi- 
gnard dont  il  était  muni.  Conduit 
aussitôt  devant  le  conseiller-d'é- 
tat iléal,  chargé  de  l'interroger,  il 
répondit  avec  fermeté,  et  repous- 
sa, surtout  par  de  constantes  déné- 


rrc 

galions,  tout  ce  qui  pouvait  com- 
promettre le  général  Moreau  ,  a- 
vec  lequel  il  avait  eu  quelques  en- 
trevues sans  résultat.  Conduit  en- 
suite dans  la  prison  du  Temple, 
il  y  subit  plusieurs  nouveaux  in- 
terrogatoires,  et  montra  toujours 
le  même  dédain  pour  ceux  qui 
l'examinaient,  et  pour  la  vie  mê- 
me. Lassé  sans  doute  d'une  pro- 
cédure dont  il  prévoyait  que  le 
terme  ,  plus  ou  moins  éloigné  ,  ne 
pouvait  que  lui  être  funeste ,  il  ré- 
solut de  disposer  lui-même  de  son 
sort.  Le 6  avril  i8o4>  on  le  trouva 
mort  dans  sa  prison.  Son  corps 
fut  aussitôt  transporté  au  grell'e 
du  tribunal  criminel,  un  procès- 
verbal  fut  dressé  et  signé  par  les 
médecins  et  chirurgiens  appelés  à 
cet  examen  ,  qui  l(uis  attestèrent 
qtui  le  prisonnier  s'était  étranglé 
lui-même  avec  sa  cravate.  Les  ! 
ennemis  du  premier  consul  ne 
manquèrent  point  de  répandre  le 
bruit,  que  c'était  lui  qm'  avait  } 
donné  l'ordre  d'étrangler  dans  son 
cachot  un  rival  qu'il  redoutait.  Le 
temps  a  déjà  fait  en  grande  partie 
justice  de  cette  accusation,  relé- 
guée par  les  gens  sensés  parmi  les 
fontes  absurdes.  Un  crime  aussi 
lâche,  aussi  odieUx,  n  était  com- 
mandé ni  par  la  politique,  ni  par 
aucune  nécessité.  Pichegru  dans 
les  fers,  et  à  la  veille  d'être  frap- 
pé d'un  arrêt  juridique,  ne  pou- 
vait, à  cette  époque,  inspirer  au- 
cune crainte.  Le  premier  consul 
n'avait-il  pas  d'ailleurs-  ainsi  qu'il 
l'a  dit  depuis  ,  des  juges  pour  pro- 
céder légalement,  et  des  gen-  * 
darmes  pour  faire  exécuter  la  sen- 
tence ?  Il  ét!iit  un  autre  chef  esti- 
mé du  peuple  ,  chéri  des  soldats  , 
accusé ,  mais  non  convaincu ,  et 


PIC 

conl'e  lequel  toutts  les  charges 
accumulées  ne  pouvaient  établir 
ni  la  conviction  des  juges,  ni  celle 
chi  public  ,  Moreau  enfin  ,  qui  de- 
vait tout  aulrenient  porter  om- 
brage, et  l'on  sait  qu'il  ne  lut 
[loinl  lâchement  assassiné  dans  les 
lénèbres.  Sans  ajouter  au  récit 
d'une  fin  cruelle  des  détails  con- 
trouvés,ou  à  la  longue  liste  des  for- 
laits  politiques  un  crime  inutile, 
qui  ,  selon  les  renseignemens  les 
plus  certains,  ne  fut  jamais  com- 
mis, l'historien  ne  peut  que  dé- 
plorer le  sort  funeste  d'un  des  pre- 
miers généraux  de  nos  temps,  ad- 
miré par  ses  ennemis  mêmes  ,  et 
qui  s'était  cou  vert  de  lantde  gloire 
à  la  iêle  des  armées  françaises. 
Pichegru  périt  misérablement  dans 
une  prison  de  cette  même  France, 
dont  il  avait  long-temps  préparé 
les  triomphes  ,  fin  indigne  d'un  tel 
homme.  Ce  n'était  point  là  que 
le  vainqueur  des  Autrichiens,  des 
Prussiens  ,  des  Anglais,  aurait  dû 
terminer  une  vie  si  long-temps 
honorable. 

PICHON  (THOMis-lEAN),  doc- 
teur en  théologie,  administrateur 
de  l'hôpilul  du  iMans  ,  ville  où  il 
naquit  en  i^Si,  et  où  il  fit  ses  é- 
tudes,  montra  dès  sa  jeunesse  de 
la  vocation  pour  le  sacerdoce.  Re- 
çu prêtre,  il  s'attacha  A  M.  d'A- 
vrincoiirl,  évêque  de  Perpignan, 
par  la  protection  duquel  il  devint 
chanoine  et  chantre  de  la  sainte 
Chapelle  du  Mans.  Monsieur,  frè- 
re du  roi,  le  nomma  son  histo- 
riographe pour  l'apanage  que  ce 
prince  avait  dans  celte  partie  de 
la  France.  A  l'époque  de  la  révo- 
lution, l'abbé  Pichon  ,  à  qui  l'on 
olïiit,  dit  un  de  ses  biographes, 
l 'évèché  constitutionnel  du  iMans, 


PIC 


ïC7 


le  refusa,  et  ne  voulut  accepter 
que  la  place  d'administrateur  de 
l'hôpital  de  la  ville.  Son  zèle,  sa 
charité,  y  ont  laissé  des  souvenirs 
durables.  L'abbé  Pichon  mourut 
le  i8  novembre  i8i'i.  Il  a  publié 
un  grand  nombre  d'ouvrages, dont 
nous  citerons  les  principaux  :  i" 
ta  Raison  triomphante  des  nouveau- 
tés,  ou  Essais  sur  les  mœurs  et 
l' incrédulité,  Paris,  1758,  i  vol. 
in -13;  2"  Traité  historique  et  cri- 
tique de  la  nature  de  Dieu^  '758, 
in- 12;  3"  Cartel  aux  philosophes, 
ou  l' Immatérialisme  opposé  au 
matérialisme,  Bruxelles,  17G5,  in- 
8";  4"  fd  Physique  de  l' histoire,  ou 
Considérations  générales  sur  les 
principes  élémentaires  du  tempéra- 
ment et  du  caractère  naturel  des 
peuples,  la  Haye,  17^)5,  in- 12; 
5"  Mémoire  sur  les  abus  du  célibat 
dans  l'ordre  politique,  Amst«!rdam, 
176G,  in- 12;  6°  Mémoire  sur  les  a- 
busdans  les  mariages,  Amstcrdatn, 
1766,  in-12;  7'  les  Droits  respec- 
tifs de  l'état  et  de  l'église,  rappelés 
à  leurs  principes  ,  Avignon,  1766, 
in-12;  6"  des  Etudes  thcologiques, 
ou  Recherches  sur  tes  abus  qui  s'op- 
posent  aux  progrès  de  la  théologie 
dans  les  écoles  publiques,  et  sur  les 
moyens  possibles  de  les  réformer  en 
France,  par  un  docteur  maucem, 
Avignon  et  Paris,  1  7B7,  in-S";  9" 
Principes  de  la  religion  et  de  ta 
morale,  extraits  des  ouvrages  de 
»yfluri«,  ministre  du  saint  Évangile, 
i7()8,  2  vol.  in-12  :  les  auteurs  du 
Dictionnaire  des  Anonymes  (totu. 
4,  pag.  027)  font  remarquer  que 
le  véritable  auteur  de  cet  ouvrage 
c.-t  un  ministre  du  saint  Evangile  à 
Lausanne,  uotnnié  Durand.  Ie(|uel 
le  publia  eu  i7G7,sou,sle  titre  (rJSi- 
prit    de    Saurin.     L'abbé    Pichon 


a68 


PIC 


s'empara  du  fond  de  ce  livre,  y  (it 
des  retranchemens  et  des  addi- 
tions, et  le  donna  ensuite  avec  le 
titre  précédeuiment  cite,  lo"  Sa- 
cre et  couronvemcnt  de  Louis  XV l, 
précédé  de  recherches  sur  le  sacre 
des  rois  de  France ,  et  suivi  d^un 
journal  historique  de  ce  qui  s'est 
passé  à  cette  cérémonie ,  avec  figii- 
.res  par  Patas,  l'aris,  1775,  in-4: 
les  Recherches  appartenaient  à  Go- 
bert,  et  le  Journal  à  l'abbé  Pi- 
chon;  1 1°  les  Argumens  de  la  rai- 
son en  faveur  de  ta  religion  et  du  sa- 
cerdoce, 1776;  Examen  de l' H omme 
d'Ilelvétius,  même  année.  Les^Z»M5 
du  célibat ,  etc.,  les  Etudes  théolo- 
giques, e!c.,  contiennent  quelques 
idées  philosophiques  qui  contras- 
tent assez  l'ortement  avec  l'esprit 
de  ses  autres  ouvrages.  Elles  lui 
furent  sévèiement  reprochées. 

PICHON  (Loiïis-AndrÉ),  di- 
plomate, né  à  Nantes  en  1771. 
En  1791,  il  passa  aux  Etats-Unis 
d'Amérique,  et  se  trouvait  à  Phi- 
ladelphie lorsque  la  légation  fran- 
çaise perdit  son  second  secrétai- 
re, qui  se  noya  dans  la  Delaware. 
Le  jeune  Pichon ,  avec  une  con- 
naissance parfaite  de  la  langue  an- 
glaise, possédait  <les  lalens  qui  le 
rendaient  propre  à  remplacer  le 
.secrétaire  qui  venait  de  périr;  il 
était  connu  du  ministre  français, 
qui  se  l'attacha  sur-le-champ.  En 
1793,  il  revint  en  France  avec  la 
légation,  et  fut  dès-lors  employé 
au  ministère  des  relations  exté- 
rieures, en  qualité  de  sous-chcf 
de  division.  Après  avoir  exercé 
pendant  quatre  ans  cet  emploi,  il 
fut  chargé  de  missions  importan- 
tes, en  Hollande  et  en  Suisse.  En 
1800,  il  devint  chargé  d'affaires 
iie  France,  e!t  consul-général  près 


PIC 

du  gouvernement  des  Etats-tnis, 
où  il  demeura  jusqu'en  i8o5.  A 
cette  époque,  il  fut  rappelé,  et 
sous  divers  prétextes,  on  lui  sus- 
cita au  conseil-d'état  une  sorte  de 
procès  politique.  Le  motif  de  ces 
tracasseries  était,  dit-on,  que  dans 
sa  correspondance  il  avait  émis 
des  opinions  peu  i'avorables  au  sys- 
tème du  gouvernement  impérial, 
et  fait  sur  l'expédition  de  Saint- 
Domingue  des  observations  très- 
sévères.  Destitué  par  un  décret 
qui,  à  ce  qu'on  ajoute,  fut  imposé 
au  conseil-d'état  contre  le  vœu  de 
la  majorité  de  ses  membres,  cette 
disgrâce  ne  l'empêcha  pas  néan- 
moins de  devenir,  en  1809,  con- 
seiller-d'élat  du  roi  de  Westpha- 
lie,  .ïérôme  Bonaparte,  qu'il  avait 
connu  pendant  son  séjour  en  A- 
mérique.  Il  devint  même  direc- 
teur de  la  caisse  d'amortissement 
et  chefdu  trésor,  sous  le  nom  d'in- 
tendant-général. On  ignore  la  cau- 
se qui  lui  fit  donner,  en  1812,  sa 
démission  de  tous  ses  emplois;  a- 
lors  il  rentra  en  France,  et  n'y 
remplit  aucune  fonction;  mais  en 
1814  1  après  le  retour  du  roi  ,  il 
devint  maître  des  requêtes.  En 
1817,  M.  Pichon  fut  chargé  par  le 
roi  de  l'inspection  des  Iles-du-vent. 
On  a  de  lui  les  ouvrages  suivans: 
1°  de  nos  Constitutions  futures, 
1814,  in-8°;  2°  Manuel  du  droit 
parlementaire,  ou  Précis  des  règles 
suivies  dans  le  parlement  d' Angle- 
terre et  dans  le  cotigrès  des  Etats- 
Unis,  traduit  de  l'anglais,  1814, 
in-H";  3°  de  l'Etal  de  la  France, 
sous  la  domination  de  Napoléon  Bo- 
naparte, 1814,  in-8°. 

PICHON  fCHARiEs),  capitaine 
au  10"^  régiment  d'infanterie  lé- 
gère, chevalier  de  la  légion-d'hon-* 


PIC 

neur,  né,  le  3o  janvier  ijrS?  à 
Kuftec ,  déparlement  de  la  Cha- 
rente, entra,  en  qualité  de  volon- 
taire, au  4""  balaillon  de  ce  dé- 
partement, le  5  août  i;92.  Il  fit 
la  campagne  de  cette  année  sur 
les  côles  de  Cherbourg,  passa,  en 
i7()3,  dans  la  Vendée,  et  fut  en- 
suite employé  successivement  à 
l'armée  du  Rhin  ,  au  camp  de 
Saint -Omer,  à  l'armée  d'Angle- 
terre et  à  celle  du  Danube,  tn 
i8o5,  iSoGet  1807,  il  fit  les  cam- 
pagnes d'Autriche  et  de  Prusse, 
et  passa  depuis  en  Espagne  avec 
le  corps  dont  il  faisait  partie;  il  de- 
meura dans  ce  pays  jusqu'en  i8i5. 
Sa  conduite  dans  les  diverses  af- 
faires où  il  s'est  trouvé  fut  digne 
d'éloges;  il  reçut,  en  combattant 
vaillamment,  quatre  blessures  sur 
les  champs  de  bataille,  obtint  un 
sabre  d'honneur  le  29  germinal 
an  II  (19  mai  i8o3),  la  croix  do 
la  légion-d'honneur  le  1"  vendé- 
miaire an  13,  et  le  grade  de  ca- 
j)itai!ie  au  lo""  régiment  d'infan- 
terie légère,  dont  il  faisait  partie 
depuis  long-temps.  Parmi  les  ac- 
tions d  éclat  dans  lesquelles  le  ca- 
pitaine Pichon  a  fait  preuve  de 
valeur,  nous  citerons  celle  du  5 
vendémiaire  an  i>,  où  il  s'empara, 
au  passage  de  la  Limalh  ,  d'une 
pièce  de  canon  et  des  quatre  che- 
vaux dont  elle  était  attelée,  et  la 
})rise ,  à  la  bataille  d'Austerlitz  . 
d'une  autre  pièce  de  canon,  qu'il 
servit  lui-même,  comme  canon- 
nier,  pendant  tout  le  temps  que 
dura  l'action.  Relire  dans  ses 
foyers,  le  ca[titaiiie  Pichon  jouit 
(le  sa  [)»'iisii)u  de  retraite. 

PICOT   (Pjerbte),    parleur   et 
prof(;.-»seur  de  ihéologie  àGenive. 

naquit  le  ag  janvier  1746-   H 


PIC  2()9 

descendait  de  Nicolas   Picot ,  de 
Noyon,  qui  alla  s'établira  Genè- 
ve,  en   i53l>,   avec  Calvin,    son 
compalriott.'.    Destiné  ,    par   sou 
propre  choix,  au  ministère  tvan- 
gélique,  Picot  dirigea  ses  études 
vers   ce   but;    mais  il  s'en  traça 
lui-même  un  cercle  étendu  ,  et  fit 
preuve  de  bonne  heur*'  de  connais- 
sances variées  dans  différentes  thè- 
ses, dont  une  sur  le  déluge,  impri- 
mée, en  latin,  à  Genève,  176C,  in- 
4°.  Peu  d'années  après,  se  trou- 
vant à  Londres,  il  gagna  l'estime 
Cl  l'amitié  de  Franklin,  qui  aurait 
voulu  l'engager  à  accompagner  le 
capitaine  Cook  dans  son   second 
vo3"age  autour  du  monde,    pour 
faire  les  observations  astronomi- 
ques. Pendant  toute  sa  vie,  et  au 
milieu  des  occupations  île  son  état, 
Picot    cultiva    raslronomie   avec 
une  sorte  de  passion.    Aucune  é- 
tude  ne  lui  semblait  se  lier  mieux 
avec  les  grandes   pensées   de   la 
religion,  et  c'était  souvent  en  con- 
templant  la   voûte  céleste,  qu'il 
élevait  son  âme,   et  préparait  ses 
plus  éloquente»  prédications.    Il 
eut  des   relalions  avec  Lalandc  : 
affligé  autant  que  surpris  que  le 
grand  observateur  des  cieux  pût 
ne  pa3  adorer  leur  auteur,   il  lui 
écrivit  à  ce  sujet,   dans  l'effusion 
de  son  cœur,  une  lettre  qui  nré- 
riterait  ,  dit-on  ,    d'être    publiée. 
Picot,  doué  de  toutes  les  qualités 
qu'on  aime  et  qu'on  estime,  cher 
à  sa  famille,   à  ses  concitoyens, 
à  ses  nombreux  amis,  avait  con- 
servé, jusqu'à  sa  77*  année,  une 
sauté  et  des   forces  morales   qui 
faisaient  espérer  pour  lui  une  vie 
égale  à  celle  de  ses  païens,  morts, 
l'un  à  94  ans,  et  l'autre  à  90,  après 
59  années  de  mariage.  Peu  avant 


270 


PIC 


sa  mort,  il  prêcha  eticore  avec  un 
feu  qui  frappa  vivement  ses  audi- 
teurs, et  i4  jours  après,  il  suc- 
comba, sans  douleur,  à  une  atta- 
que d'apoplexie,  le  3i  mars  1822. 
On  a  publié,  depuis  cette  époque, 
un  volume  de  ses  Sermons,  précé- 
dés d'une  A^'^o^ife/'/oiTApAt^u^,  dont 
cet  article  est  extrait  (Genève, 
1823,  in -8").  La  nobless^e  des 
pensées  et  du  style  ,  la  richesse  de 
l'imagination,  la  chaleur  et  quel- 
quefois un  pathétique  entraînant, 
caractérisent  ces  discours.  La  re- 
ligion catholique  y  est  peinte  dans 
toute  sa  grandeur,  sans  esprit  de 
secte  ou  de  système;  on  sent  par- 
tout l'élan  d'une  belle  âme,  qui 
voudrait  pouvoir  conmiuniquer 
sa  conviction  à  toutes  les  autres. 

PICOT  (Jean),  fils  du  précé- 
dent,  né  à  Genève  en  1777,  ci- 
devant  professeur  d'histoire  ,  et 
aujourd'hui  exerçant  des  emplois 
public^,  est  auteur  des  ouvrages 
suivans  :  i*  Thèses  sur  la  gravUa- 
t ion  universelle^  *795;  'i"  Histoire 
des  Gaulois,  depuis  leur  origine jus- 
quà  leur  mélange  avec  les  Francs , 
Genève,  1804,  o  vol.  in-8";  5° 
Tablettes  chronologiques  de  l'His- 
toire universelle,  sacrée  et  profane, 
depuis  la  création  du' monde  jusqu'à 
l'année  1808,  rédigées  d'après 
celles  de  Lenglel-Dufresnoy,  Ge- 
nève, i8o8,  3  vol.  in-8";  i^"  His- 
toire de  Genève ,  depuis  les  temps 
les  plus  anciens  jusqu^à  nos  jours, 
accompagnée  de  détails  sur  les  an- 
tiquités, 1rs  mœurs  et  usages,  les 
lois,  les  monnaies,  les  progrès  des 
sciences  et  des  arts,  Genève.  1811, 
3  vol  in-8°;  5"  Statistique  du  can- 
ton de  Genève,  insérée  dans  VJl- 
manach  helvétique,  en  allemand, 
lit  imprimée  séparément  en  fran- 


PIC 

çais,  1817,  un  petit  vol.  ;  6"i5'^a- 
tistique  de  la  Suisse,  Genève, 
1819,  in-S";  7°  enfin  divers  opus- 
cules. 

PICOT  (N.),  chef  de  chouans, 
néàPiOuen,  où  il  résidait  en  1792, 
adopta  d'abord  les  principes  de  la 
révolution,  et  s'enrôla  dans  les 
chasseurs  de  la  Montagne;  mais  il 
ne  resta  que  peu  de  temps  dans  ce 
corps,  déserta  avec  Chandelier, 
et  alla  offrir  ses  services  aux  frères 
Chovan  {voyez  ce  no?n),  qui  les  ac- 
ceptèrent. Après  avoir  ftiit  pen- 
dant quelque  temps  partie  de  l'ar- 
mée de  Scépeaux,  il  passa  dans  la 
ci-devant  Normandie,  où  Frotté 
le  nomma  l'un  des  chefs  sous  ses 
ordres.  La  division  que  Picot  com- 
mandait, occupait,  vers  la  fin  de 
1799,  les  «environs  d'Argentan. 
Lorsque  le  général  Hédouville  eut 
pacifié  la  Vendée,  et  signé,  le 
28  nivôse  an  8  (18  janvier  1800), 
le  traité  de  Montfaucon,  Picot, 
qui  n'avait  point  participé  à  ce 
traité,  ne  voulut  point  en  accepter 
les  conditions,  et  il  se  retira  en 
Angleterre.  Il  revint  en  France, 
avec  plusieurs  de  ses  compagnons, 
au  mois  de  février  i8o5.  Depuis 
un  mois  il  était  caché  à  Rouen  , 
lorsqu'on  découvrit  sa  retraite. 
Picot,  prévenu  d'avoir  tramé  de» 
complots  contre  la  personne  du 
premier  consul  Bonaparte,  fut  tra- 
duit devant  une  comttrission  mi- 
litaire, qui  le  condamna  à  mort. 

PICOT  (LoTJis),  néàJosselin, 
petite;  ville  du  départrment  du 
Morbihan,  entra  fort  jeune  au  ser- 
vice d'un  maître  des  postes  ,  qu'il 
quitta  pour  suivre  les  chouans, 
dont  il  devint  l'un  des  capitaines. 
Après  le  traité  d'Amiens,  il  passa 
eu    Angleterre,    où    il    obtint   U 


1»1C 

confiance  de  Georges  Cadouda! , 
qui  se  l'attacha.  Il  accompagna  ce 
chef  lorsqu'un  complot,  ayant 
pour  objet  d'enlever  le  premier 
consul,  et  auquel  il  fut  associé, 
le  ramena  en  France  en  1804. 
Arrêté  avec  Georges  Cadoudal  et 
plusieurs  autres  conjurés,  Ficot 
fut  conduit  avec  eux  au  Temple, 
et  mis  en  jugement  peu  de  temps 
après.  Condamné  à  mort  le  9  juin 
1804,  il  fut  exécuté  n'ayant  pas 
atteint  sa  vingt-huitième  année. 

PICOT  (Philippe),  baron  de 
LK  Peybouse,  chevalier  de  la  lé- 
gion-d'honneur, ancien  avocat 
des  eaux-et- forêts  à  la  table  de 
mîtrbre,  associé  correspondant  de 
l'inslitut  de  France,  membre  de 
l'académie  des  jeux  floraux ,  et 
secrétaire  perpétuel  de  celle  des 
sciences  de  Toulouse,  associé  à  la 
plupart  di>s  académies  et  sociétés 
savantes  de  l'Europe,  ancien  mai- 
re de  Toulouse ,  doyen  de  la  fa- 
culté des  sciences  de  cette  ville, 
y  naquit  le  20  octobre  i744-  Après 
avoir  fait  des  études  brillantes, 
un  mouvement  de  piété  le  con- 
duisit dans  la  milice  de  Saint-Do- 
minique, et  Picot  devint  novice  au 
couvent  d<'s  jacobins.  Mais  sa  fer- 
veur diminua  ;  il  crut  qu'il  valait 
mieux  servir  son  pays  que  passer 
sa  vie  à  l'ombre  d'un  cloître,  et 
rentra  dans  le  monde.  Ses  instans 
se  partageaient  entre  l'étude  di^s 
l(tis  et  celle  des  belles-lettres.  Il 
refusa,  en  1  771 ,  de  faire  partie  des 
nouvelles  cour>  créées  par  le  chan- 
celier Manpenu  (voyez  ce  nom), 
donna  la  démission  de  sa  charge, 
et  fut  chercher  dans  les  Pyrénées 
de  la  gloire  et  des  délassemens. 
Les  premiers  mémoires  qu'il  pu- 
blia sur  la  contexture  des  monta- 


ric 


271 


gneset  les  végétaux  qu'elles  ren- 
ferment, attirèrent  sur  lui  l'atten- 
tion des  érudits.  Les  académies  des 
sciences  de  Paris,  de  Stokholm, 
de  Turin  et  de  Toulouse,  l'asso- 
cièrent à  leurs  travaux.  En  atten- 
dant ,  il  guidait  Dolomieu  sur  les 
monts  qui  environnent  Barège,  et 
lui  sauvait  la  vie  sur  le  roc  dange- 
reux de  l'Hieris.  Linnée,  BufFon, 
Daubenton,  Mauduit,  M.  de  La- 
cepède ,  etc.,  entretenaient  avec 
lui  une  correspondance  aussi  utile 
qu'intéressante.  Son  Traité  des  for- 
ges et  des  mines  du  pays  de  Foix, 
obtint  une  célébrité  qu'il  méritait. 
Cet  ouvrage,  traduit  en  allemand 
et  en  suédois,  réimprimé  à  diver- 
ses époques,  devint  classique  dans 
les  pays  où  l'on  s'occupe  beaucoup 
de  la  manipulation  du  fer.  La  ré« 
volution  éloigna  momentanément 
Picot  de  son  cabinet.  Devenu 
président  du  disctrî(;t  de  Toulou- 
se, il  montra  de  la  fermeté  et  du 
caractère,  j)rotégea  les  bons  ci- 
toyens, et  sauva  ime  multitude  de 
monumens  et  d'objets  d'arts  qui 
sans  lui  eussent  disparu.  Jeté  lui- 
même  dans  les  cachots,  il  ne  dut 
sa  liberté  qu'au  9  thermidor  ;  il  en 
profila  pour  aller  encore  dans  les 
Pyrénées, qu'il  a  explorées  durant 
trente  ans  avec  un  zèle  infatiga- 
ble, et^se  délassait  de  ses  occupa- 
tions sérieuses  en  inventant  de 
nouveaux  procédés  pour  la  gra- 
vure des  plantes., INommé  inspec- 
teur des  mines,  il  vint  à  Paris, et 
ouvrit  à  l'école  des  mines  plu- 
sieurs cours,  où  de  nombreux  é- 
lèvcs  applaudirent  à  l'élégance  et 
à  la  clarté  de  ses  discours,  et  à  la; 
profondeur  de  ses  vues.  Charmé 
de  retourner  dans  sa  ville  natale, 
il  accepta  la  place  de  professeur 


272  PIC  PIC 

d'histoire  naturelle  ù  l'ticole  ceu-  talens,  des  académies  dont  ils  é- 
lraledeToiiloii6e;s'atlonnantaus.si  taient  membres.  Ces  prnjfts  res- 
à  la  zoologie,  il  y  fit  d'importantes  lèrent  heureusement  sans  exécu- 
découYerles,  qu'il  déposa  dan.-  les  tion.  Il  mouiul  le  18  octobre  1818. 
recueils  périodiques  du  temps.  On  a  de  lui  :  1°  plusieurs  Mémoi- 
Après  le  18  brumaire,  le  premier  res  inséré-  dans  le  recueil  des  ac- 
cousul  Bonaparte  appela  dans  les  les  de  l'académie  des  .«ciences  de 
premiers  corps  de  l'état,  da-ij  ton-  Slokholm  ;  2"  diftérens  Mémoires 
tes  les  pliîces*  imporîanles,  les  dans  le  Journal  de  physique;  5° 
hommes  dont  les  lalens  avaient  Traité  des  forges  et  des  mines  du 
fixé  l'attention  publique.  Picot  lut  comté  de  Foix,  Toulouse,  un  vol. 
nommé  maire  de  Toulouse;  c'é-  in  8°  ,  plan.;  4"  Description  de 
tait  alors  un  fardeau  pesant.  L'ad-  plusieurs  espèces  nouvelles  d'ostru- 
minislralion  présentait  l'imago  du  cites,  iirl.ing,  un  vol.  iu-lbl.,  fig. 
chaos.  Les  divers  partis  se  heur-  co).  ;  5" Flore  des  Pyrénées,  hi-UA., 
laient;  le  nouveau  maire  parut,  planches,  ouviage  qui  n'a  pas  été 
et  eu  peu  de  temps  tout  fut  jemis  entièrement  publié  :  le  beau  tra- 
à  sa  place.  L'ordre,  la  salubrité,  vail  sur  les  saxifrages  en  fait  par- 
la paix,  régnèreul  dans  Toulouse;  lie;  6"  Recherches  sur  les  organes 
les  hôpitaux  dépouillés  furent  de  du  chant  dans  les  cyiines,  in-Z|°;  7° 
nouveau  dotés  richement;  de  non-  Description  et  histoire  du  Trar/uet 
velles  rues  furent  percées  :  on  pro-  montagnard,  in-4°  ;  8°  Description 
jeta  plusieurs  places  publiques  qui  d'un  météore  singulier;  9°  Mémoi- 
ont  été  construites  depuis;  le  jar-  re  sur  la  mortalité  des  ormes  dans 
din  de  botanique  fut  créé,  grand  les  environs  deToiilousc  ;  10°  Frag- 
élablissemenl  qui  fait  l'un  des  ment  de  la  minéralogie  des  Pyré- 
plus  beaux  ornemens  de  Toulon-  nées;  11"  Description  de  la  barge 
se.  Le  musée,  les  bibliothèques  aux  pateè  rouges  ;  12"  E.rpérieni  es 
s'ennchireiil.  II  décida  l'établisse-  sur  la  hauteur  du  mercure  faites 
ment  <hi  I  école  spéciale  des  scieii-  sur  le  pic  du  midi  de  liarègi  \  i3" 
ces  et  des  arts;  enfin  il  fit  beau-  Histoire  naturelle  du  lapo^irle; 
coup  de  bien,  mais  s'attira  de  i^"  Description  de  quelques  plantes 
nombreux  ennemis,  et  bientôt  il  des  Pyrénées  ;  15"  Mémoire  sur  une 
quitta  la  mairie  pour  retourner  à  mine  de  manganèse  native  ;  iCy  I)es- 
ses  paisibles  occupations.  Ce  lut  cription  de  quelques  cristallisa- 
alors  qu'il  mit  le  comble  à  ses  tra-  lions;  17"  Fragment  d'un  voyoge 
vaux  par  la  publication  d'im-  au  mont  perdu;  18°  Tableau  mé- 
portans  ouvrages  sur  l'histoire  na-  thodique  des  mammifères  et  des  oi- 
iur<;lic  des  Pyrénées.  Ku  18 15,  le  seaux  du  département  de  la  llaute- 
coliége  électoral  de  la  Haute-Ga-  Garonne,  in-8'',  an  7,Toulou^e;  ig" 
ronne  le  nomma  à  la  chambre  des  Histoire  abrégée  des  plantes  des 
représenlan-.  Peu  après  celte  épo-  Pyrénéen,  et  itinéraires  des  bota- 
que,  on  le  persécuta;  on  voulait  lui  nistes  dans  les  montagnes,  ifi-8'', 
eidever  ses  places  et  l'éloignei',  i8i5 ,  Toulouse;  '20°  Suppli-ment 
lui  et  un  grand  nombre  d'hommes  à  l'histoire  abrégée  des  plantes  des 
estimables  «t  distingués  par  leurs  Pyrénées,  in-S",   i8i8;  21°  Mé- 


PIC 

moire  sur  la  prestation  en  nature; 
22°  Stalistique  agricole  du  canton 
de  Montaslruc;  23°  un  grand  nom- 
bre de  Notices  lùstoruiues,  de  bro- 
chures poliliques  ,  etc.  ;  enfin  , 
plusieurs  manuscrits  intéressans 
dont  son  fils,  le  baron  I>5idoie  Pi- 
cot de  la  Pe\'rouse,  professeur 
d'histoire  naturelle  en  l'académie 
de  Toulouse,  et  qui  marche  avrc 
distinction  dans  la  carrière  où  l'au- 
teur de  ses  jours  s'est  illustré,  en- 
richira sans  doute  les  sciences. 

PICOT  BELLOT  (Jeats  de), 
frère  puiné  du  précédent,  né  com- 
nîc  lui  à  Toulouse,  en  1748,  entra 
dans  un  des  corps  qui  composaient 
la  garde  du  roi,  et  cultiva  avec 
succès  la  nuisique  et  la  poésie.  11 
composa  plusieurs  opéras  joués 
sur  des  théfitres  particuliers ,  ou 
«lans  les  pays  étrangers.  La  cause 
d«;  la  révolution  devint  la  sienne 
en  i^^ij).  Il  la  seconda  par  plu- 
sieurs écrits  où  respiraient  la  cha- 
leur et  l'enthousiasme.  Il  fit  jouer 
à  Paris,  au  théâtre  du  L_ycée-des- 
Arts,  le  5  novembre  1794,  un 
drame  en  trois  actes,  intitulé  :  les 
Dangers  delà  calomnie,  qui  eut  un 
grand  succès.  Nommé  commis- 
saire des  guerres,  il  n'abandonna 
pas  la  littérature,  et  publia  à  Saint- 
Gaudens,  le  Père  comme  il  y  en  a 
peu  ,  ou  le  Mariage  assorti  , 
comédie  en  5  actes  et  en  prose. 
Picot  Bellot  mourut  leSmai  1820. 
Jl  a  laisï-é  en  manuscrits  un  assez 
grand  nombie  d'ouvrages  politi- 
ques. Le  département  lies  Hautes. 
Pyrénées  lui  doit  plusieurs  genres 
d'industrie  qti'il  y  a  introduits. 

PICOT-DK-LI.MOELAN  (  M. 
J.  A.),  naquit  ù  Saint-ililalo.  d'une 
fauiille  noble  de  cette  ville.  Dès 
l'aurore  de  la  révolution,  il  se  uion- 


PIG  275 

tra  l'un  de  ses  plus  ardens  enne- 
mis. Intimement  lié  avec  La  Roua- 
rie ,  il  entra  dans  la  conspiration 
dont  celui-ci  était  le  chef,  et  l'aida 
de  tous  les  moyens  dont  il  pouvait 
disposer.  Le  complot  ayant  é- 
choué.  Picot  de  Limoëlan  fut  arrê- 
té,conduit  àParis, et  traduit  devant 
le  tribunal  révolutionnaire,  qui  le 
condamna  à  mort.  Il  avait  près 
de  60  ans  lorsqu'il  fut  exécuté,  le 
18  juin  1793. 

PICOT  DE  PECCADUC  (lk 
COMTE  Auguste),  gentilhomme 
français  sous  le  titre  de  comte,  et 
gentilhomme  allemand  sous  le 
titre  de  baron  do  Ilerzogenberg, 
est  fils  d'un  conseiller  au  parle- 
lement  de  Bretagne.  M.  Picot  de 
Peccaduc  fut  élevé  à  l'école  mili- 
taire de  Paris,  dont  il  sortit,  en 
1785,  décoré  de  l'ordre  de  Saint-' 
Lazare,  et  avec  le  grade  de  lieu- 
tenant. Il  servit  dans  le  régiment 
de  Metz  artillerie,  et,  dès  1791,  il 
éuiLgra.  S'étant  rendu  à  l'armée 
du  prince  de  Coudé,  il  fit  sous  ses 
ordres  toutes  les  campagnes  con- 
tre la  France;  il  avait  gagné  par 
ses  services  la  croix  de  Saint- 
Louis.  Libre  à  la  suite  du  licen- 
ciement de  l'armée  du  prince  de 
Condé,  il  passa  sous  les  drapeaux 
autrichiens,  «où,  dit  un  de  ses 
biographes,  chaque  campagne  lui 
valut  un  grade  ou  une  décora- 
tion. »  Une  faveur  plus  grande  lui 
fut  îiccordée;  l'empereur  d'Autri- 
che lui  donna  des  lettres  de  natu- 
ralisationspus  le  nom  de  baron  de 
Ilerzogenberg.  C'est  vraisembla- 
blc;ment  comme  su  jet  étranger  qu'il 
commandait,  au  nom  des  puissan- 
ces alliées,  la  ville  de  (Uiâtillon, 
lors  de  la  campagne  de  Fiance  en 
18  i4-  Tout  fait  présumer  que  i\l. 
18 


274  PIC 

Picot  de  Peccatluc  n'est  plus  Fran- 
çais, puisque  outre  ses  services 
dans  les  armées  étrangères,  il  s'est 
marié  à  une  comtesse  autrichien- 
ne nommée  Sedlnitzky,  dont  il  a 
plusieurs  enfans,  et  qu'il  est  chef 
d'une  division  de  grenadiers  au- 
trichiens. 

PICOT  DE  PECCADUC  (le 
VICOMTE  Henri)  ,  frère  du  précé- 
dent, mais  qui  paraît  attaché  au 
service  de  France,  quoique, com- 
me le  comte  de  Peccaduc,  il  ait 
passé  la  plus  grande  partie  de  sa 
vie  militaire  sous  les  drapeaux  é- 
trangers.  Le  vicomte  de  Peccaduc 
prit  du  service,  en  1787,  dans  le 
régiment  de  la  Guadeloupe,  et 
se  rendit,  en  1791,  à  l'armée  des 
princes.  Il  fit  la  campagne  de 
1792,  sous  les  ordres  de  M.  le  duc 
de  Bourbon,  compagnie  de  S.A.K. 
le  duc  d'Angoulênie.  Ajtrès  le  li- 
cenciement de  l'armée  des  prin- 
ces, le  vicomte  de  Peccaduc  par- 
tit pour  la  Hollande,  et  fit  contre 
la  Frani;e  trois  campagnes  sous 
les  ordres  du  prince  d'Orange, 
qu'il  suivit  en  Angleterre,  lors  de 
la  conquête  de  la  Hollande  par 
les  Français.  Il  fut  au  service  de 
S.  M.  britannique,  en  activité  jus- 
qu'en 1802,  et  en  inactivité  jus- 
qu'en i8o8  ;  à  cette  époque,  il  re- 
çut de  l'emploi  dans  les  troupes 
allemandes  de  la  confédération  du 
Rhin.  «Cette  remise  en  activité, 
dit  un  de  ses  biographes,  lui  va- 
lut plusieurs  grades  supérieurs  et 
décorations,  et  sa  première  cam- 
pagne de  colonel  fiitcellede  iVlos- 
kou.  Dans  la  campagne  de  Saxe, 
en  181 3,  il  eut  le  commandement 
d'une  brigade,  comme  général 
provisoire;  mais  le  sort  des  armes 
l'ayant  fait  tomber  entre  les  mains 


PIC 

de  1  enneu)i  avec  la  garnison  de 
Dresde,  le  11  novembre  i8i3,  il 
ne  put  être  confirmé  dans  ce  der- 
nier grade.  Aussitôt  qu'il  apprit 
(étant  prisonnier  de  guerre  en 
Hongrie)  que  les  princes  de  la 
maison  de  Bourbon  allaient  ren- 
trer en  France,  il  se  hâta  de  venir 
leur  olïrir  ses  services.  »  Au  mois 
de  mars  181 5,  lorsqu'on  fut  in- 
formé du  départ  de  Napoléon  de 
l'île  d'Elbe ,  le  roi  confia  au  vi- 
comte Picot  de  Peccaduc  l'orga- 
nisation et  le  commandement  des 
bataillons  de  réserve  du  départe- 
ment de  la  Seine.  Le  rétablisse- 
ment de  Napoléon  sur  le  trône  de 
France,  pendant  les  cent  Jours , 
fit  licencier  ces  bataillons,  et  le 
chef  resta  sans  activité  et  inconnu. 
Après  le  second  retour  du  roi,  il 
fut  nommé  colonel  de  la  légion 
du  département  d'Ille-et-Vilaine. 
Il  est  aujourd'hui  (1824)  maré- 
chal-de-camp en  disponibilité, 
chevalier  de  Saint-Louis  et  offi- 
cier de  la  légion-d'honneur. 

PICOT  DE  PECCADUC  (le 
CHEVALIER  Joseph),  colonel,  che- 
valier de  Saint-Louis,  frère  des 
précédens,  «  se  trouva,  disent  les 
biographes  de  cette  famille,  dès 
le  commencement  de  la  révolu- 
tion, en  rapport  avec  les  chefs  des 
armées  royales  de  l'intérieur,  et 
servit  constamment  avec  eux.  » 

PICOT-DESORiMEAUX  (N.), 
maire  de  Parigué  l'Evêque ,  près 
du  Mans,  est  né  vers  1770,  dans 
le  département  de  la  Sarthe,  oi"!  il 
possède  des  propriétés  considéra- 
bles. Il  fut  destitué  de  ses  fonc- 
tions de  maire  dans  les  derniers 
mois  de  18 15;  mais  les  services 
éminens  qu'il  avait  rendus  à  sa 
commune  firent  que  personne  ne 


PIC 

î^e  présenta  pour  le  remplacer. 
Nommé,  en  1817,  membre  de  la 
chambre  des  députés  par  le  dé- 
partement de  la  Sarthe,  il  siégea 
constamment  au  côté  gauche,  et 
vota  contre  les  lois  d'exception  et 
contre  le  nouveau  système  électo- 
ral, M.  Picot-Desormeaux,  sorti 
de  la  chambre  en  i8'22,  n'a  point 
été  réélu. 

PICOT  LACOMBE  (N.),  d'une 
famille  autre  que  celle  du  précé- 
dent, fut  élu  par  le  département 
du  Puv-dc-Dôme,  au  conseil  des 
cinq -cents,  au  mois  de  mars 
1797;  mais  son  élection  fut  an- 
nulée par  l'efTet  de  la  révolution 
du  18  fructidor  an  5  (4  septembre 
1797).  Le  gouvernement  consu- 
laire le  nomma,  en  1800,  com- 
missaire près  le  tribunal  civil  de 
Clermont.  Il  était  membre  du 
corps- législatif  lors  des  événe- 
meus  politiques  de  1814.  Le  2  dé- 
cembre de  cette  année,  il  fit,  en 
comité  secret,  un  rapport  sur  la 
proposition  de  M.  Dumolard,  ten- 
d  int  à  ce  que  la  chambre  présen- 
tât une  adresse  au  roi ,  pour  le 
supplier  d'accorder  incessamment 
aux  juges  des  cours  et  des  tribu- 
naux l'institution  voulue  par  la 
charte.  Le  retour  de  Napoléon  au 
20  mars  18 15,  l'éloigna  de  la 
chambre,  où,  depuis,  il  n'a  point 
été  rappelé. 

PICQUÉ  (Jean-Pierre),  est  né 
en  1750,  à  Lourdes,  et  fut  député 
par  le  département  des  Hautes- 
Pyrénées  i\  la  convention  natio- 
nale e(  au  conseil  des  cinq-cenls, 
dont  il  devint  l'im  des  secrétaires. 
Il  avait  publié,  à  la  fin  de  1788,  un 
Voyage  aux  Pyrénées  françaises  , 
11,"*  Feillées  Béarnaises,  le  Moyen 
de  détruire  la  mendicité ,  et ,  en 


PIC 


375 


1789,  plusieurs  ouvrages  en  fa- 
veur de  la  liberté.  On  a  pu  le  ju- 
ger ,  plus  par  ses  écrits  que  par 
son  audace  à  aborder  la  tribune. 
Sou  opinion  sur  la  nécessité  de 
conserver  les  relations  et  l'union 
avec  l'Espagne  disposée  favora- 
blement à  adopter  les  maximes 
républicaines,  ne  fut  pas  celle  des 
partisans  de  la  guerre.  On  ne  le 
voit  plus  ensuite  figurer  que  dans 
le  procès  du  roi,  où  il  vota  l'appel 
au  peuple,  la  peine  capitale  et  le 
sursis  ,  jusqu'à  la  paix  générale. 
M.  Picqué,  après  sa  sortie  du  con- 
seil des  cinq-cents,  est  rentré  dans 
la  vie  privée. 

PICQUET  (N.),  chevalier  de 
la  légion-d'houneur,  exerçait,  en 
1789,  les  fonctions  d'avocat  du 
roi  à  Bourg  en  Bresse  ,  lorsqu'il 
fut  élu  ,  par  le  tiers-état  de  ce 
bailliage ,  député  auii  états-géné- 
raux. Il  siégea  constamment  au 
côté  droit  de  cette  assemblée,  et 
signa  les  diverses  protestations  de 
I.i  minorité.  Néanmoins  ,  il  n'é- 
prouva aucune  persécution  sous 
le  régime  de  la  terreur,  et,  dans 
le  mois  de  mars  1  797,  le  départe- 
ment de  l'Ain  le  nontma  député 
au  conseil  des  anciens;  son  élec- 
tion fut  annulée  par  suite  de  la 
journée  du  18  fructidor.  Après  là 
révolution  du  i8  brumaire  ,  M. 
Pic(juet  devint  président  du  tri- 
htmal  de  première  instance  de 
Bourg,  Il  en  remplissait  encore 
les  fonctions  en  1819;  à  celte  é- 
poque  ,  il  fut  remplacé  par  M. 
Chevrières  de  Corcelles. 

IMCTEÏ  (  Mauc  -  AuGi'STE  )  , 
membre  du  tribunal  ,  l'un  de-» 
inspectenr<*-généraux  de  l'imiver- 
silé  impériale  ,  correspondant  de 
l'institut  ,  membre   des    sociétés 


2^6 


PIC 


royales  de  Londres,  d'Edimbourg, 
tie  Munich,  etc.,  est  né  en  175?,, 
à  Genève,  d'une  famiile  ancienne 
de  cette  république.  Elève  et  ami 
du  célèbre  Saussure  .  il  l'accom- 
pagna   plusieurs    fois    dans    ses 
voyage;^,  et  le  remplaça,  en  ij'-ô, 
dans  la  place  de  professeur  de  phi- 
losophie, puis,  dans  les  fonctions 
de   président  de  la  société   pour 
l'avancement    des  ,  arts  ,     place 
qu'il  occupe  encore  actuellement 
(1824).     M.     Pictet  ,     quoique 
livré  spécialement  aux   sciences 
proprement  dites,  n'était  point  é- 
Iranger  à  la  science  du  gouverne- 
ment, et  il  fut  employé  avec  suc- 
cès comme  l'un  des  négociateurs 
chargés,  en  1798,  de  concourir  au 
traité  de  réunion  de  la  république 
de  Genève  ,  d'acquitter  avec   14 
de  ses  concitoyens  les  dettes  de 
son  gouvernement,  et  d'adminis- 
trer en  même  temps,  sous  la  dé- 
nonjination  de  Société  économique, 
les  fonds  destinés  ù  l'entretien  du 
culte  protestant  et  les  établisse- 
mens   d'instruction    publique.    11 
devint ,    en    1802  ,    membre    du 
Iribunat ,    dont    il    fut   secrétaire 
l'année    suivante.    Ses   discours  , 
dans   cette   assemblée ,   sont   re- 
marquables  par  des    vues   sages 
<;xprimées  avec  talent;  ils  eurent 
plus  parliculiérenient  pour  objet 
l'économie  politique  relativement 
aux  douanes,  aux  canaux  et  aux 
i;randes  roules;  il  fut  du  nombre 
des  U)en!i)ies  qui  votèrent  le  con- 
.■julat  à  vie  et  l'élablissement  du 
gouvernement    inq)érial.    Le   tri- 
bunat,  par  l'opposition  de  la  ma- 
jorité de  ses  mendjres,  s'élait  ren- 
du suspect  au  chef  de  l'état;  il  fut 
supprimé.  M.  Piclet,  que  ses  con- 
iiais^sances  et  son  nicrilc  person- 


PIG 

nel  avaient  rendu  recommunda- 
ble  ,  devint  ,  peu  après  ,  l'un  des 
cinq  inspecteurs-généraux  de  l'u- 
niversité impériale,   l'ar  suite  des 
événemens  politiques  de  18 14?  il 
s'est  fixé  à  Genève.  On  lui  doit  : 
1°  Essai  sur  le  feu,  1791  :  on  trou- 
ve  dans    cet   ouvrage   un   grand 
nombre   d'expériences    nouvtdles 
et  curieuses;  2°  Description  d'une 
suite  d' expériences  sur  la  compres- 
sion et  sur  l'action  de  la  chaleur  , 
traduction  de  l'ouvrage  de  l'au- 
teur anglais  James  Hall,  1  vol.  in- 
8"  ;  5"  avec  son  frère  et  M.  Mau- 
rice ,  ancien  maire  de  Genève ,  la 
rédaction  de  la  Bibliothèque  bri- 
tannique, qiu,  depuis  1816,  porte 
le  titre  de  Bibliothèque  universelle^ 
etc.   Cet  ouvrage  ,  exclusivement 
destiné  aux  objets  de  littérature 
et   de    sciences   d'origine    étran- 
gère,   est    recherché    pour    son 
utilité  sous  le  double  rapport  de 
la  science  et  de  la  morale.  M.  Pic- 
tet y  est  particulièrement  chargé 
de  la  partie  des  sciences.  Il  fit , 
dans  l'intérêt  de  l'entreprise,  deux 
voyages  en  Angleterre,  et  les  let- 
tres qu'il  adressa  à  ses  collabora- 
teurs    parurent    non  -  seulement 
dans  ce  recueil,  mais  elles  furent 
imprimées  séparément  sous  le  ti- 
tre de  :  Voyage  de  trois  mois  en  An- 
gleterre, en  Ecosse  et  en  Irlande, 
in-8°.   «  Parmi  les  divers   objets 
intéressans   pour  les  sciences   et 
les  arts  qu'il  rapporta  de  ce  voya- 
ge, et  qu'il  mit  à  son  retour  sous 
les  yeux  de  l'institut,  dit  un  de  ses 
biographes  ,  était  un  étalon  au- 
thentifuie  des  mesureis  anglaises  , 
destiné  à  établir  exactement  leurs 
rapports  avec  le  mètre  ,  dans  le 
but  de  faciliter  le  rapprochement 
des   ujesures  géodésiques  entre- 


PIC 

prises  dans  les  deux  pays  pour 
déterminer  la  figure  de  la  terre. 
L'institut  nomma  une  commis- 
sion pour  faire  celte  comparaison 
avec  toutes  les  précautions  néces- 
saires ,  et  le  résultat  a  été  consi- 
gné dans  ses  registres.  Cet  étalon 
l'ait  partie  d'une  collection  consi- 
dérable d'instrumens  de  physi- 
que, qui  appartient  à  M.  Pictet, 
et  avec  laquelle  il  a  donné  plu- 
sieurs cours  suivis  par  un  grand 
nombre  d'amateurs.  »  La  ville  de 
Genève  a  fait,  en  1824.  l'acquisi- 
tion de  celle  riche  collection , 
qui  est  aujourd'hui  au  nombre 
des  collections  du  musée  acadé- 
mique de  cette  ville.  4°  Différens 
Opuscules  cités  dans  l'Histoire  lit- 
téraire de  Genève  par  Sennebier 
(toni.  3,  pag.  207  et  ao8);  5°  plu- 
sieurs Morceaux  au  Journal  de 
Paris ,  aux  Lettres  de  Deluc,  aux 
V oyages  de  Saussure,  etc. 

PICTET  (Charles),  ancien  mi- 
litaire au  service  de  France, diplo- 
mate et  littérateur,  frère  du  pré- 
cédent, est  né  en  i;55.  Destiné 
par  sa  famille  à  la  profession  des 
armes  ,  après  avoir  terminé  ses 
éludes  ,  il  entra  au  service  de 
France  dans  le  régiment  suisse  de 
Diesbach,  et,  après  10  ans  passés 
honorablement  sous  les  drapeaux, 
il  rentra  dans  ses  foyers ,  où  fut 
ouverte  une  nouvelle  carrière  à 
ses  talens.  îl  se  distingua  dans 
plusieurs  emplois  civils,  et  faillit 
devenir  victime  de  la  révolution 
qui  éclata  dans  sa  patrie.  M.  Pic- 
tet vécut  assez  long-temps,  exclu- 
sivement livré  aux  travaux  de  l'a- 
gricullure  et  à  l'élude  des  lettres. 
Après  les  événemens  politiques 
de  1814  et  de  i8i5,  il  rentra  dans 
la  carrière  des  aflaircs  publiques, 


PIC  ~'x-,7 

et  fat  envoyé  successivement  aux 
congrès  de  Vienne  ,  de   Paris  et 
d'Aix-la-Chapelle  ;  enfin  à  la  cour 
de    Turin  ,    pour  y  négocier   le 
traité  particulier  avec  Genève.  M. 
Pictet  a  rédigé  une  partie  consi- 
dérable de  la  littérature  et  toute 
la  partie  de  l'agriculture  de  la  Bi- 
bliothèque britannique  ou  Biblio- 
thèque  universelle   (  voy.    l'article 
précédent).  Plusieurs  des  analy- 
ses des  ouvrages  qu'il  a  dotmés 
à    ce    recueil  ,    ont  élé    publiées 
séparément.  On  lui  doit  :  1°  Ta- 
bleau de  la  siluation  actuelle  des 
Etats-Unis  d' Amérique  ,   d'après 
Morse  et  les  meilleurs  auteurs  amé- 
ricains ,   1795-1796,  2  vol.  in-8°; 
2"  Éducation  pratique,  Iraduclion 
libre  de  l'anglais  de  Marie  Edge- 
worlh.  1800,  in-S";  1801,  1  vol. 
in- 8°;  3°  Traité  des  assolemens,  ou 
l'Art  d'établir  tes  rotations  des  ré' 
colles,  1801,  in-S";  f\''  Faits  et  Ob- 
servations concernant  la  race  des 
mérinos  d'Espagne  à  laine  super- 
fine,  et  les  croisemens,  j8o2,  in-8°; 
5°  Théologie  naturelle,  ou  Preuves 
de  l'existence  et  des  attributs  de  la 
Divinité ,  tirées  des  apparences  de 
ta  nature,  traduction  libre  de  l'an- 
glais d'après  Paley,   1804,  1817, 
in -8";  6°  Recherches  sur  la  nature 
et   les   effets   du  crédit   du  papier 
dans  la  Grande-Bretagne,  traduit 
de  l'anglais  de  H.  Thornton,  vol. 
in-8°;  7°  Vues  relatives  à  l'agri- 
culture- de  la  Suisse  et  aux  moyens 
de  la  perfectionner,  par  £.  Fellen- 
bcrg  ,  traduites  de  l'allemand  et 
enrichies  de  notes,  1808,  in-8°;  8" 
Cours  d'agriculture  anglaise,  avec 
les  déoeloppemens  utiles  aux  agri- 
culteurs du  continent  ,    liSio,    10 
vol.  in-8''.  C'est  la  réimpression 
de  la  partie  de  l'agriculture  de  lu 


378 


PIE 


Bibliothèque  britannique  ou  Biblio- 
thèque universelle. 

PICTET  DIODAÏI  (  Mahc- 
.Tc»«TE  )  ,  président  de  la  cour  su- 
prême de  Genève  ,  né  dans  celle 
\ille  le  i5  juin  1768,  et  parent  é- 
loigné  des  précédens,  a  long-temps 
rempli  des  fonctions  publiques  en 
France.  Membre  du  barreau  de 
(ienève,  il  devint,  après  la  réunion 
de  ce  pays  à  la  France  ,  l'un  des 
;idministrateurs  du  département 
du  Léman.  Au  mois  de  décembre 
1799,  il  fut  député  au  corps-légis- 
latif, où  il  resta  pendant  5  ans. 
Remplacé  dans  ce  poste  par  son 
compatriote  M.  Leforl,  il  passa  à 
la  présidence  de  la  cour  criminelle 
du  Léman  ,  que  M.  Lefort  avait 
quittée,  et  rentra  au  corps-légis- 
latif en  1810.  Il  en  faisait  encore 
partie  lors  des  événeniens  politi- 
ques de  iSj/j.  m.  Piclet  Diodati 
adhéra  à  la  déchéance  de  l'empe- 
reur, et  néanmoins,  pendant  les 
cent  jours  en  i8i5,  il  prélendit 
reotrer  à  la  chambre,  dont  il  fut 
exclu  comme  étranger.  Devenu 
président  de  la  cour  suprême  de 
Genève  ,  il  occupe  encore  cette 
place. 

PICTET  MALLET  (  Pierre  )  , 
de  la  famille  des  précédens,  est 
auteur  de  la  traduction  de  l'ou- 
vrage anglais  de  Forsyth  ,  jardi- 
nier de  Kensington,  sur  la  Culture 
des  arbres  fruitiers,  1802,  in-S"; 
el  de  celle  du  Voyage  en  Espagne 
de  Townshend ,  3  vol.  avec  des 
notes  du  traducteur,  qui,  lui-mê- 
me, a  séjourné  dans  cette  contrée. 
M.  Pictet  Mallet  a  encore  publié 
un  Itinéraire  des  glaciers  de  Cha- 
mouny. 

PIE  YI  (Jean-Ange-Braschi)  , 
naquit  à  Césène  le  27  décembre 


PIE 

1717.  Les  bienfaits  de  Benoît  XIV 
le  mirent  sur  le  chemin  des  hon- 
neurs. Nommé  trésorier  par  Clé- 
ment XIII  ,  recevant  le  chapeau 
de  Clément  XIV,  il  se  rapprocha 
d'un  trône  qui  devait  l'ensevelir 
sous  ses  ruines.  Porté  aux  hautes 
dignités  ecclésiastiques  par  trois 
papes  de  principes  et  de  caractères 
différens  ,  on  avait  raison  de  le 
croire  ou  un  homme  médiocre,  se 
renfermant  dans  le  cercle  de  ses 
devoirs  sans  aspirer  à  le  franchir, 
ou  un  esprit  rusé,  cédant  au  pou- 
voir pour  cacher  son  ambition. 
La  première  de  ces  opinions  ,  qui 
paraissait  la  mieux  fondée,  et  qui 
était  aussi  la  plus  répandue  ,  don- 
nait peu  de  chances  au  cardinal 
Braschî  de  devenir  le  successeur 
de  Clément  XIV.  L'abolition  des 
jésuites,  l'acte  le  plus  hardi  de  la 
courte  domination  de  ce  pontife , 
avait  livré  le  monde  catholique  à 
deux  partis  prêts  à  entrer  en  lice 
pour  altaquer  ou  défendre  les 
droits  de  cet  ordre  trop  fameux. 
Le  conclave  qui  s'ouvrit  en  1779, 
coniposé  lui-même  d'élémens  in- 
cohérens,  se  trouva,  dès  son  dé- 
but, exposé  aux  dissentions  et  aux 
cabales  des  amis  et  des  ennemis 
des  disciples  de  Loyola.  Moins  par 
calcul  que  })ar  cet  instinct  qui  l'a 
toujours  guidé  dans  ses  choix,  le 
sacré- collège  ,  après  plusieurs 
mois  d'hésitation  et  d'atlenle  , 
triompha  des  efforts  des  partis,  et 
se  déclara  en  faveur  de  Braschi, 
également  étranger  à  tous  les 
deux.  Sa  nomination  ne  peut  é- 
tonncr  que  ceux  qui  ont  peu  mé- 
dité sur  les  maximes  traditionnel- 
les de  l'église;  l'expérience  ayant 
presque  constamment  prouvé  que 
la  majorité  des  suffrages  s'y  réu- 


ip 


Qj^À^YL. 


PIE 

nit  de  préférence  sur  ces  hommes 
moyens  qui  n'ont  ni  opinions  con- 
nues, ni  principes  avoués,  et  aux- 
quels il  suffit  de  n'avoir  pas  d'en- 
nemis pour  trouver  des  adora- 
teurs. Les  premiers  actes  d'auto- 
rité du  nouveau  pape  furent  de. 
distribuer  des  aumônes,  de  répri- 
mander le  gouvernement  de  Ro- 
me, de  supprimer  plusieurs  pen- 
sions onéreuses  ,  de  faire  rendre 
un  compte  sévère  au  préfet  de 
l'annône  ,  et  d'achever  au  Vatican 
un  musée  commencé  par  son  pré- 
décesseur, et  destiné  à  recueillir 
les  déhris  de  l'antiquité  provenant 
des  fouilles  de  ses  états-  Aspirant 
à  illustrer  son  pontificat  par  quel- 
que entreprise  d'éclat,  il  se  décida 
pour  la  plus  ruineuse,  et  ordonna 
le  dessèchement  des  marais  Pon- 
tins,  qui  avaient  résisté,  pendant 
des  siècles ,  au  bras  puissant  des 
empereurs  romains.  Au  moment 
où  la  capitale  du  monde  ne  trou- 
vait plus  d'ennemis  à  combattre, 
le  censeur  Appius  Claudius  ,  qui 
s'était  chargé  d'aplanir  les  roules 
(racées  par  la  victoire  et  la  con- 
quête, avait  ouvert  sur  ce  sol  in- 
hospitalier une  communication 
facile  aux  voluptueux  habitans  de 
Parténope  et  de  Baies.  César,  avide 
de  tous  les  genres  de  gloire  ,  son- 
geait à  le  rendre  à  la  fertilité,  lors- 
qu'il expira  sous  le  fer  des  conspi- 
rateurs. Auguste,  en  le  rempla- 
çant sur  le  trône,  s'empara  de  son 
projet,  et  fit  creuser,  le  long  de  la 
voie  Appienne,  un  canal  destiné  à 
procurer  un  écoulement  aux  eaux 
félidés  des  marais.  Ces  grands 
travaux,  ai)andoués  après  la  mort 
dOclavien  ,  ne  fuient  repris  que 
sous  le  règne  de  Trajan;  mais  tou- 
tes ces  tentatives  ,  et  celles  que  , 


PIE 


ra 


long-temps  après  ,  fit  Théodoric 
pour  empêcher  le  débordement 
des  eaux,  ne  purent  pas  en  arrêter 
les  ravages.  Les  eflbrts  des  papes 
ne  furent  pas  plus  heureux  que 
ceux  des  Césars,  et  ce  que  le  génie 
actif  de  Boniface  VIII ,  de  Martin 
V,  de  Léon  X,  de  Sixte  V,  n'avait 
pas  pu  exécuter ,  dut  paraître  à 
leurs  successeurs  indolens  pres- 
que impossible  à  obtenir.  Pie  VI, 
aveuglé  par  un  amour  désordonné 
de  gloire,  ne  vit  pas  tous  les  obs- 
tacles qu'il  fallait  vaincre  pour  as- 
sainir cette  contrée.  Voulant  juger 
lui-même  de  la  gravité  du  mal,  et 
en  examiner  les  remèdes  pour  le 
guérir,  il  se  berça  de  toutes  les 
espérances  ,  s'enivra  de  tous  les 
éloges,  et  crut  l'entreprise  facile 
parce  qu'il  la  trouva  extraordinai- 
re. Rêvant  à  la  prospérité  future 
de  ce  pays,  qu'il  allait  retirer  des 
eaux,  il  traçait  le  plan  d'une  nou- 
velle ville  qu'on  devait  y  bâtir,  et 
la  dotait  déjà  d'un  musée  qui  de- 
vait être  alimenté  par  les  produits 
des  fouilles  voisines.  Cette  entre- 
prise, que  le  succès  seul  aurait  pu 
justifier,  fut  la  cause  princi})ale  de 
l'appaof  rissement  des  finances  ro- 
maines; et  lorsqu'elle  échoua,  on 
la  regarda  généralement  comme 
téméraire  dans  le  projet ,  désas- 
treuse dans  l'exécution,  et  hon- 
teuse pour  le  but,  ne  tendant  qu'à 
enrichir  un  membre  de  la  famille 
papale.  Le  peuple  de  Rome  ,  ré- 
duit aux  privations  les  plus  dures, 
vil  avec  dépit  le  mauvais  emploi 
qu'on  faisait  de  la  fortune  publi- 
que ,  et  s'exprima  librement  sur 
les  fautes  de  son  gouvernement , 
livrant  au  ^ridicule  ceux  qui  le 
condamnaient  à  la  misère.  Lors- 
qu'en  1^85,  on  imagina  de  relever 


28o 


PIE 


à  grands  frais  l'obélisque  du  Qui- 
riujil,  un  des  nombreux  frondeurs 
écrivit  au  b;is  de  ce  monument  : 
Domine  ,  die  ut  lapides  isti  panes 
fiant.  (Seigneur,  ordonne  que 
cette  pierre  se  change  en  pain.) 
Ce  mécontentement  dans  le  pu- 
blic éclata  encore  plus  ouverte- 
ment lors  du  procès  intenté  à  la 
famille  Lepri  pour  soutenir  un 
testament  qui  ordonnait  la  spolia- 
tion d'une  pupille  au  profit  d'un 
neveu  du  pape.  Pie  VI,  dans  cette 
occasion ,  ne  sut  pas  .«e  défendre 
de  cet  espiit  de  népotisme  qui  a 
fait  tant  de  tort  à  la  tiare  ,  et  sa 
scandaleuse  intervention,  dans  un 
procès  de  famille,  fit  une  fâcheuse 
impression  sur  toutes  les  classes. 
Lorsqu'après  de  longs  débats,  la 
voix  d'une  mère  fut  enfin  enten- 
due par  les  magistrats,  et  put  en 
arracher  un  jugement  équitable  , 
le  pape  eut  le  chaf>rin  de  voir  le 
peuple  se  poiter  eu  foule  devant 
le  palais  de  la  liola,  et  applaudir, 
par  ses  bruyantes  acclamations  , 
au  triomphe  de  la  justice.  Pie  VI, 
eu  montant  sur  le  trône  ,  avait 
jeté  un  regard  inquiet  sur  la  situa- 
iion  morale  et  politique  de<i'Euro- 
j>e.  La  plupart  des  rois,  à  l'exeu)- 
j)le  de  Louis  XIV,  y  travaillaient 
à  étendre  leurs  prérogatives  ,  à 
s'affranchir  de  tous  les  obstacles, 
et  à  niveler  les  rangs  de  la  société, 
pour  que  l'action  liu  pouvoir  y  fût 
plus  rapide  et  plus  uniforme.  Les 
])riviléges  des  nobles  ,  les  préten- 
tions du  clergé  ,  les  libertés  des 
communes,  attaqués  en  partie  par 
leurs  prédécesseurs,  étaient  me- 
nacés d'un  anéanlissemeul  total. 
iiC  dernier  but  dupO(ivoir  absolu 
était  de  parvenir  au  despotisme 
administratif,  et  de  ne  voij- autour 


PIE 

de  lui  d'autres  bornes  que  celles 
que  la  volonté  seule  du  monarque 
saurait  s'iiriposer.  Les  peuples ,  à 
qui  les  progrès  dans  la  civilisation 
avaient  révélé  de  nouveaux  be- 
soins et  rendu  nécessaire  une 
différente  organisation  ,  secon- 
daient l'élan  donné  par  les  gou- 
verncmens,  et  les  aidaient  à  dé- 
truire l'ancien  édifice  social  pour 
s'emparer  de  ses  débris  et  pouvoir 
reconstruire  plus  facilement  le 
nouveau.  C'était  par  conséquent 
dans  des  vues  opposées  que  les 
rois  et  les  philosophes  marchaient 
ensemble  contre  les  abus  et  les 
institutions  de  l'Europe  barbare. 
La  féodalité  et  le  clergé,  attaqué* 
sur  tous  les  points,  ne  trouvaient: 
plus  d'abri  pour  se  défendre,  et 
commençaient  à  céder  pas  à  pas 
le  terrain  qu'ils  avaient  envahi. 
Ces  dispositions  hostiles  dans  tou- 
tes les  classes  de  la  société  avaient 
donné  naissance  à  une  école  mi- 
nistérielle qui  ,  placée  à  côté  de 
la  j)hilosophique  ,  eu  empruntait 
le  langage  et  les  armes.  Elle  ré- 
sidait auprès  des  Pombal,  des  A- 
randa,  des  ïanucci,  et  remontait 
jusipi'aux  princesqui  savaient  être 
iudépendans  de  leurs  ministres, tels 
que  Pierre  Léopold, Joseph. Frédé- 
ric et  Catherine  IL  Ces  pren)iers 
réformateurs,  jugés  par  les  enne- 
mis de  la  liberté  avec  plus  de  pré- 
vention que  de  justice,  ont  été  dé- 
chues responsables  de  la  chute  du 
pouvoir  monarchique  en  Europe. 
En  effet,  rieu  de  plus  insensé  que 
de  vouloir  fonder  un  système  sans 
autre  appui  que  la  volonté  d'un 
individu;  mais  il  faut  avouer  aussi 
qiu;  ce  qui  restait  des  anciennes 
institutions,  par  manque  d'accord 
avec  les  vœux  et  les  lumièri-s  des 


PIE 

nations,  ne  pouvait  plus  servir  de 
base  à  un  ordre  de  choses  quel- 
conque. De  tous  les  gouverne- 
niens  ,  celui  de  Rome  était  le 
moins  fait  pour  subir  ce?  innova- 
lions. II  était  même  appelé,  comme 
théocratique,  ù  combattre  les  i- 
dées  modernes  qui  menaçaient  sa 
croyance  ,  et  à  repousser  toute 
espèce  de  perfectionnement  qui 
eût  pu  com[»rometln;  celte  im- 
mobililé  a  laquelle  il  doit  une 
grande  partie  de  ses  forces.  Ce- 
pendant, le  chef  de  l'éj^lise  était 
pressé  de  tous  les  côtés  pour  avan- 
cer sur  un  terrain  qu'il  lui  était 
aussi  difficile  que  dangereux  de 
parcourir.  Joseph  II,  animé  par 
l'esprit  de  son  temps  et  par  la  hai- 
ne héréditaire  de  sa  maison  contre 
Rome  ,  commença  son  règne  en 
supprimant  des  couvens  y  en  re- 
tranchant des  fêtes  ,  en  réglant 
même  les  cérémonies  de  l'église. 
Pie  VI  lui  écrivit  plusieurs  fois 
pour  essayer  de  le  ramener  à  des 
•sentimens  moins  hostiles;  mais  ne 
pouvant  pas  le  fléchir  par  ses 
biefs ,  il  se  flatta  de  le  désarmer 
par  sa  voix,  et  prit  la  résolution 
inattendue  de  le  surprendre  dans 
sa  capitale.  Ce  voyage  donna  le 
secret  de  sa  faiblesse  et  la  mesure 
de  son  autorité.  Cherchant  à  dé- 
guiser à  ses  propres  yeux  tout  ce 
qu'il  y  avait  d'îiumiliant  dans  cette 
démarche,  il  s'environna  de  ce  qui 
pouvait  servir  à  lui  donner  quel- 
que éclat;  mais,  au  travers  de  tant 
de  mjgnificeucc,  on  apercevait  la 
distance  qui  séparait  Pie  VI  de  cet 
arrogant  ponlife  qui  excommu- 
niait l'empereur  Frédéric,  brisait 
le  serment  de  fidélité  de  ses  su- 
jets, et  appelait  les  malédictions 
du   ciel  sur  la    tête   sacrée   d'uu 


PIB 


28 1 


triomphateur.  Le  jour  fixé  pour 
son  départ  (27  février  1781),  Pie 
VI  fit  sa  prière  accoutumée  dans  la 
chapelle  du  Vatican,  reçut  les  a- 
dieiix  de  ses  parens  et  de  ses  ser- 
viteurs ,  et  s'éloigna  de  Rome  en 
présence  d'un  peuple  immense 
qui  lui  demandait  ses  dernières 
bénédictions.  Les  marques  de  res- 
pect et  d'amour  qu'on  lui  prodi- 
guait sur  la  route,  durent  lui  faire 
oublier  un  instant  le  rôle  qu'il  al- 
lait jouer  à  Vienne  :  des  popula- 
tions entières  tombaient  devant 
lui  sur  son  passage  ;  le  roi  d'Es- 
pagne ,  le  sénat  de  Venise  ,  les 
princes  italiens  ,  l'empereur  lui- 
même  ,  rivalisaient  de  zèle  pour 
lui  faire  arriver  leurs  hommages. 
Plus  le  pape  s'approchait  de  Vien- 
ne ,  plus  ces  témoignages  deve- 
naient éclatans  :  l'empereur  et 
son  frère  Maximilien  allèrent  à  sa 
l'encontre  à  quelques  lieues  de  la 
ville  ,  et  y  firent  ensemble  leur 
entrée  au  milieu  d'une  foule  de 
curieux  qui  se  pressaient  autour 
de  leur  voiture  ,  faisant  retentir 
l'air  de  leurs  vives  acclamations. 
La  vanité  de  Pic  VI  se  trou- 
va satisfaite  de  tant  d'empres- 
sement et  d'égards;  mais  il  ne  tar- 
da pas  à  s'apercevoir  que  l'cmpe- 
rem-,  sous  la  politesse  de  ses  ma- 
nières ,  cachait  l'inflexibilité  de 
son  caractère,  et  qu'il  était  décidé 
à  ne  sacrifier  aucun  de  ses  droits 
aux  devoirs  de  l'hospitalité.  Il 
évitait  toutes  les  occasions  d*en- 
trer  en  explication  avec  le  pape  , 
qu'il  renvoyait  à  Kaunitz  ,  non 
moins  philosophe  et  tout  aussi 
diflicile  à  séduire  que  son  maître. 
Ne  lui  restant  alors  auctm  espoir 
sur  l'issue  de  celte  négociation.  Pic 
VI  ordonna  les  dispositions  pour 


282 


PIK 


hâter  son  retour.   L'empereur  se 
inoatra,  à  sou  départ,  ce  qu'il  a- 
vait  été  à  son  arrivée  :  en  se  sépa- 
rant de  lui,  il  lui  oflrit  un   ma- 
gnifique pectoral,  enrichi  de  dia- 
mans,  que  le  pape  accepta,  et  un 
diplôme    de    prince    de    l'empire 
pour  son  neveu  Braschi  ,  qu'il  ne 
voulut    point    recevoir.    «  Je  ne 
»  veux  pas,  dit-il,  qu'on  puisse  me 
«reprocher  de  m'être  plus  occupé 
»de  l'élévation  de  ma  famille  que 
»des  intérêts  de  l'église.  «  Il  quit- 
ta Vienne  avec  le  chagrin  de  n'y 
avoir  pas  opéré  les  changemens 
auxquels  il  s'était  attendu.  Il  prit 
la  route  de  Munich  ,  le  seul  pays 
de  l'Europe  où  l'autorité  du  saint- 
siége    fût    restée    sans    atteinte. 
Lacoiir,  quoique  renommée  pour 
sa  galanterie  ,  avait  conservé  un 
grand  attachement  pour  les  for- 
mes   religieuses  ,    et   le    peuple  , 
plongé  dans  la  plus  stnpide  igno- 
rance ,    était   regardé   comme   le 
plus  superstitieux  de  toute  l'Alle- 
ïnagne.   Le  pape  s'y  trouva  plus 
révéré  qu'à  Rome  mOme,  où,  a- 
près    une    absence    de    quelques 
mois,  il  rentra  peu  satisfait  de  son 
A'oyagc.   Il  en  fit  néanmoins    un 
récit  ^)ompeux  ,  qu'il  déhita  en 
plein    consistoire  ,  et  prit  même 
l'engagement  d'en  rendre  compte 
à  toute  la  catholicité  pour  lui  faire 
apprécier  les  avantages  qui  en  é- 
laient  résultés  pour  l'église  :  mais 
celte  promesse,  aussi  imprudente 
que    ridicule,    ne    voila    pas    les 
diflicultés  qu'il  y  avait  à  la  rem- 
plir.  Personne   ne  se  dissimulait 
lesinconvéniens  du  ce  voyage, qui 
n'avait   abouti    qu'à    endetter    le 
tré*or  et  à  déconsidérer  le  ponti- 
fe. Tandis  que  Pie  VI  se  vantait 
de  son  triomphe  pour  no  pus  a- 


PÎE 

vouer  sa  défaite,  l'empereur  pour- 
suivait avec  persévérance  le  plan 
de  réforme  qu'il  avait  adopté,  et 
portait  les  derniers  coups  aux  im- 
munités de  l'église.  Si  l'on   était 
étonné  de  la  contradiction  qui  ré- 
gnait entre  les  paroles  du  pape  et 
la  conduite  du  cabinet  de  Vienne, 
on  le  fut  bien  plus  encore  lors- 
qu'on sut  que  le  voyage  de  Joseph 
à  Rome  ,  sous  le  prétexte  d'une 
politesse, renfermait  des  vues  mys- 
térieuses contre  la  puissance  pa- 
pale,et  qu'il  ne  s'agissait  rien  moins 
que  de  soustraire  l'empire  à  toute 
espèce  de  dépendance  de  la  cour  de 
Rome.  Le  mêuje  esprit  de  dissi- 
dence s'était  manifesté  en  Tosca- 
ne ,  gouvernée  alors  par  le  génie 
éclairé  de  Pierre-Léopoid.  Parta- 
geant les  senti  mens  de  son  frère, 
et   soutenu    par    les    conseils    de 
Mgr.  Ricci,  il  avait,  dès  l'année 
1780,  adressé  une  circulaire  à  tous 
les  évêques   pour  leur   annoncer 
un  plan  de  réforme  dans  la  disci- 
pline ecclésiastique.  Deux  syno- 
des, rassemblés  à  Pistoie  et  à  Flo- 
rence, avaient  alarmé  le  saint-sié- 
ge    par    l'indépendance    de    leurs 
discussions.    En    s'occupant    des 
changemens  à  faire  dans  la  litur- 
gie, on  y  avait  émis  des  maximes 
hardies  sur  la  foi,  la  grâce,  l'auto- 
rité de  l'église  et  la  prédestina- 
lion.    Déjà  Pie  VI,  excité  parles 
fanatiques  qui  l'enlouraient,  avait 
préparé  une  bulle  de  proscription 
contre    les     prélats    réfractaires. 
Mais  la  crainte  d'irriter  le  mal  par 
ce  remède  violent,  et  l'espoir  que 
la  cour  d'Espagne  interviendrait 
en  sa  faveur,  arrêtèrent  la  foudre 
prête  à  lui  échapper.  Le  pape  se 
borna  à  faire  des  réclamations  é- 
nergiques,  auxquelles  le  grand-duc 


PIE 

rt'pondit  en  ordonnant  l'impres- 
sion des  actes  des  deux  synodes  , 
accompagnés  de  l'apologie  des 
membres  qui  y  avaient  siégé,  et  de 
la  réfutation  des  différentes  pré- 
liMitions  de  la  cour  de  Rome.  Il 
recommanda  en  même  temps  aux 
évêqnes  de  se  conformer  stricte- 
ment aux  décisions  du  synode  de 
Pistoie,  et  réclama  le  duché  d'Ur- 
l)in  ,  qu'il  reprochait  aux  papes 
d'avoir  usurpé.  Ce  n'étaient  pas 
les  seuls  ennemis  que  le  saint- 
siége  avait  à  combattre  :  il  avait, 
avec  la  cour  de  Naples ,  des  que- 
relles plus  anciennes,  plus  graves, 
et  dont  les  suites  furent  encore 
plus  fâcheust'S.  L'infant  don  Car- 
los, eu  nmntant  sur  ce  trône,  avait 
trouvé  le  royaume  livré  à  la  cupi- 
dité du  clergé  et  dans  une  dépen- 
dance honteuse  de  la  cour  de  Ho- 
me. Quoique  pieux  ,  il  avait  des 
idées  justes  sur  son  autorité,  qu'il 
voulut  affranchir  de  ce  joug  : 
mais,  appelé  ù  régner  sur  l'Espa- 
gne, il  n'eut  pas  le  temps  d'exé- 
cuter les  projets  qu'on  aurait  pro- 
bablement oubliés  «i  la  direction 
des  affaires  ne  fût  tombée  dans 
les  mains  d'un  homme  fait  pour 
les  réaliser.  Tanucci,  ancien  pro- 
fesseur l'i  l'université  de  Pise,  qui 
avait  déployé  une  grande  opposi- 
tion contre  les  t-nvahisseraens  des 
corporations  religieuses  ,  indigné 
de  l'espèce  de  vasselage  auquel 
était  descendue  ime  couronne 
dont  il  était  le  premier  ministre  , 
s'occupa  sérieusement  d'en  reven- 
diquer les  droits.  Après  plusieurs 
réformes  opérées  dans  les  diver- 
ses branches  de  l'administration  , 
el  qui  tendaient  plus  ou  moins  di- 
rectement A  borner  les  privilèges 
et  l'influence  du  clergé,  il  ûl  dé- 


riE 


285 


clarer  au  pape  que  la  présentation 
de  la  liaquenée  se  ferait  à  l'avenir 
sans    celte   bruyante  cérémonie , 
qu'il  regardait  comme  avilissante 
pour  la  dignité  de  son  prince.  Ce 
tribut ,  arraché  à  la  faiblesse  de 
Charles  d'Anjou,  qui  avait  intérêt 
de  légitimer  son  usurpation  ,  s'é- 
tait perpétué  dans  ses  successeurs. 
Il  consistait  à  offrir  un  cheval  blanc 
richement  harnaché,  et  à  déposer 
aux    pieds   du    pape   une   somme 
de  6,000  ducats   renfermés  darjs 
une  bourse  attachée  à  la  selle  du 
cheval.  Le  prince  Colonna,  grand- 
connétable  du  royaume,  jouissait 
du  privilège  d'en  faire  la  présen- 
tation tous  le?  ans,  la  veille  de  la 
fête  de  Saint-Pierre  et  Saint-Paul. 
Cette  cérémonie  était  destinée  à 
rappeler  aux  rois  de  Naples  que 
leurs    états    relevaient   du    saint- 
siège,  dont  ils  n'étaient  que  les 
vassaux    couronnés.    Pie    VI    ne 
voulut  pas  souscrire  aux  condi- 
tions qu'on  lui  dictait';  il  protesta 
contre  la  violation  de  ses  droits, 
et  chargea  le  cardiiial   Borgia  de 
les  soutenir  par  un  écrit,  qui  ne 
resta  pas  saris  réponse.   11  aurait 
été  difficile  de  prévoir  la   fin  de 
ces  débats,  que  les  premiers  symp- 
tômes de  la  révolution    fran(;aise 
vinrent   interrompre.    On   sentait 
des    deux     côtés    le     besoin     de 
se  rapprocher   pour   se  défendre 
contre  un  ennemi  redoutable  qui 
attaquait  à-la-fois  le  trône  et  l'au- 
tel. On  s'était  disputé  i5  ans  sans 
s'entendre  ,   on  s'entendit  en   un 
jour  sans  disputer.   Il  fut  stipulé 
que  chaque  roi  de  Naples  payerait 
à   son   avènement   au    trône   une 
somme   de   5oo,ooo   ducats  ,   en 
l'oruje  de  pieuse  offrande  à  Saint 
Pierre  ,  au  moyen   de  laquelle  la 


384 


PIE 


présentation  de  lahaqiienée  reste- 
rait abolie  pour  toujours.  Ce  traité 
fut  suivi  d'une  visite  que  le  roi  et 
la  reine  de  Napics   firent  au  pape 
au  printemps  de   1791  ,  et  scellé 
par  les  protestations  les  plus  so- 
lennelles d'une  sincère  et  inviola- 
ble amitié.  L'église   sortait  enfin 
triomphante  de  tant  d'obstacles  et 
de  dangers  :  la  mort  de  Joseph  II, 
la  réconciliation  de  Léopold  ,  de 
nouveaux  conseils  dans  le  cabinet 
de   Naples  ,    avaient    amorti    les 
coups  portés  contre  l'autorité  du 
pape.  Lorsque  du  sein  d'un  royau- 
me qui  n'avait  pris  aucune  part 
auxcombatsqu'on  lui  avait  livrés, 
s'élève  contre  elle  nn  orage  dont 
les  progrès  l'enveloppèrent  dans 
de  nouveaux  malheurs.  Le  5  mai 
1789,  s'ouvrirent  les  états-géné- 
raux à  Versailles.  La  tendance  de 
l'assemblée  était  vers  un  plan  gé- 
néral de  réforme  et  d'affrancliisse- 
iTient  :   c'étaient  aussi   les  vœux 
de  la  France  fatiguée  des  préten- 
tions du  saint-siège,  honteuse  des 
Uibuts  qu'on  lui  payait,  scandali- 
sée de  l'opulence  du  haut  clergé, 
et  de   l'existence  de   ces  légions 
de    moines   qui    ne   luisaient    pas 
même  pardon  ner,  par  leurs  niœurs, 
leur  onéreuse  oisiveté.   Mais  si  la 
\oix  de  tous  les  hommes  éclairés 
s'élevait  contre  ces  abus,  l'intérêt 
de  plusieurs  se  liait  à  leur  conser- 
vation.  Le  clergé  formait  un  des 
trois  ordres  de  l'état ,  et  le  plus 
puissant  de  tous  .  à  cause  de  son 
organisation,  de  l'esprit  qui  le  do- 
minait ,   et  des  richesses  dont   il 
pouvait  disposer.  Quelques  étin- 
celles de  philosophie  avaient  j)é- 
nélré  dans  le  haut  clergé,  et  c'est 
parmi  C(îs  prélats,  beaucoup  plus 
ambitieux  que  philosophes,  que 


PIE 

certaines  réformes  avaient  été  pro- 
jetées ;,  mais  elles  se  bornaient  à 
diminuer  les  attributs   du   saint- 
siége,  pour  ajouter  à  leur  propre 
puissance.  Renchérissant  sur  leur 
exemple  ,  les  rcprésentans  de   la 
nation  demandèrent  et  obtinrent 
successivement  la  suppression  des 
ordres   religieux  ,   l'abolition  des 
vœux  monastiques  ,  et  une  nou-   . 
velle  constitution  du  clergé.  Par 
ces    mesures     préliminaires  ,    ce 
corps,  naguère  si  redoutable  dans 
l'état,  disparut  de  l'assemblée,  et 
n'eut  pas  assez  de  force  pour  dé- 
fendre   les  biens   ecclésiastiques, 
qui  furent  déclarés    biens   natio- 
naux. Le  roi,  en  acceptant  la  cons- 
titution civile  du  clergé,  avait  é- 
crit  à  Pie  VI  pour  le  prier  de  la 
sanctionner  à  son  tour.   Le  pape 
assemble  un  synode  do  cardinaux, 
et  se  décide,  d'après  leur  avis,  à 
consulter  les  évêques  de  France. 
Trente  d'entre  eux,  ayant  à  leur 
tête  M.  de  Boisgelin ,  archevêque 
d'Aix,  signèrent  un  écrit  sous  le 
titre    d'Exposition    ries    principes 
sur  la  constitution  du  clergé,  dans 
lequel  ils  défendirent   toutes  les 
prérogatives  de  l'église,  se  répan- 
dant même  en  regrets  sur  l'abo- 
lition   des   couvens.  L'assemblée 
dédaigna  cette  poignée  de  contra- 
dicteurs, et  invita  les  évêques  et 
les  curés  à   prêter  le  serinent  à 
la  constitution  du  clergé,  qui  de- 
vint le  fondement  de  la  nouvelle 
éjîlise  ijallicane.  Les  circonstances 
étaient  trop  graves,  les  esprits  trop 
aigris  ,  pour  que  la  moindre  im- 
prudence n'occasionât  pas  les  plus 
grands    désastres.   Cependant    le 
pape  n'hésita  pas  à  adresser  deux 
brefs  aux  évêques  de  France  pour 
les  engager  à  discuter  l'acte  fou- 


PTE 

(lamentai  de  leur  uoiivelle  orga- 
nisation. Dans  le  premier,  il  de- 
mandail  auxévêqiits  députés  d'a- 
viser aux  moyens  de  conciliation, 
et  dans  l'autre, écrit  en  contradic- 
tion du  précédent  aux  évêques, 
au  clergé  et  aux  fidèles  de  Fran- 
ce,  il  applaudissait  à  la  déclara- 
tion des  trente  évêques,  hlrtmait 
la  défection  de  leurs  collègues, 
et  ordonnait  à  tous  les  ecclésias- 
tiques de  rétracter,  dans  le  ternie 
de  quarante  jours,  le  serment  de 
fidélité  qu'ils  avaient  prononcé , 
sous  peine  d'être  suspendus  de 
l'exercice  de  leurs  fonctions. Cet- 
te mesure  inconsidérée  n'arrêta 
pas  les  travaux  de  l'assemblée 
nationale  ;  mais  elle  exposa  dans 
la  suite  le  clergé  à  la  persécu- 
tion, et  aurait  probablement  a- 
mené  un  schisme  en  France,  i-i 
la  nation,  trop  occupée  de.  ses  dé- 
bats politiques,  n'eût  dédaigné  de 
se  jeter  dans  des  querelles  re- 
ligieuses. Le  peuple  de  Paris  se 
contenta  de  brûler  les  derniers 
brefs  du  pape;  le  gouvernement 
lui  réponJit  par  l'envahissement 
«l'Avignon  et  sa  réunion  à  la  Fran- 
ce, et  l'archevêque  de  Sens,  dont 
la  voix  trouva  des  échos  partout, 
lui  déclaia  i-  qu'il  ne  balançait  pas 
«entre  sa  patrie  et  un  chapeau,  et 
nqu'il  lui  renvoyait  ce  dernier.» 
La  nïésinielligence  entre  les  doux 
gouvernement  était  à  son  com- 
ble, lors(jue  l'assassiuatd'un  agent 
de  la  république  {voyez  Bassevil- 
le),sous  les  yeux  mêmes  de  l'au- 
torité papale,  fournit  de  nouvel- 
les armes  contre  la  cour  de  Rome. 
La  lutte  devint  alors  plusacharnée; 
cl  les  fou<lres  du  directoire-exé- 
cutif rie  France,  plus  redouta- 
bles que  celles  du  Vatican  ,  ne  tar- 


PIE 


28: 


dèrent  pas  à  tirer  vengeance  de 
ce  crime.  En  1796,  lors  des  pre- 
miers succès  des  armées  françai- 
ses en  Italie,  une  division  de  trou- 
pes républicaines  passe  le  Pô, 
s'empare  de  Bologne,  de  Ferrare, 
et  s'étend  jusqu'à  Ancone.  Peu 
avant  cette  irruption  ,  Pie  VI  a- 
vait  envoyé  à  iMilan,  le  chevalier 
Azara,  ambassadeur  d'Espagne  à 
Uome,  espérant  que  la  médiation 
de  ce  ministre  pourrait  conjurer 
l'orage  prêt  à  fondre  sur  ses  états. 
L'habileté  de  ce  diplomate  ne 
parvint  à  le  détourner  qu'en  si- 
gnant un  armistice  à  des  condi- 
tions extrêmement  dur*s.  Le  pape 
était  condamné  à  perdre  les  deux 
légations  de  Bologne  et  de  Ferra- 
re ,  à  payer  une  contribution  de 
quinze  millions,  et  à  sacrifier  une 
partie  des  objets  précieux  qui  fi- 
guraient dans  ses  principales  col- 
lections. Le  pape  recule  d'eflroi 
devant  ces  prétentions;  mais  trop 
faible  pour  les  repousser,  il  lui 
fallut  avoir  le  courage  d'y  sous- 
crire. Il  tira  du  château  Saint- 
Ange  le  trésor  qui  y  était  enfer- 
mé, demanda  l'argenterie  des  é- 
glises,et  se  disposait  à  rempli**  la 
partie  la  plus  onéreuse  du  traité, 
lorsque  le  directoire  le  rendit 
inexécutable  en  imposant  au  pa- 
pe la  rétractation  des  brefs  contre 
la  constitution  civile  du  clergé. 
Pie  VI  assemble  une  congréga- 
tion composée  de  ce  qu'il  y  avait 
de  plus  éclairé  dans  le  sacré-col- 
lége  :  il  lui  soumet  les  proposi- 
tions du  directoire,  accueille  tou- 
tes les  observations,  et  déclare 
indigne  de  lui  d'acheter  la  paix 
en  sacrifiant  la  dignité  de  son  ca- 
ractère, et  en  faii^ant  périr  dans 
ses  mains  rinfaillibilité  du  vicaire 


286  PIE 

du  Christ.  Le  j'oie  de  chef  de  lé- 
gli«e  était  fini  :  il  ne  restait  plus  à 
Pie  VI  que  de  déposer  son  triple 
diadème  pour  ceindre  la  couronne 
du  martyre  :  mais,  séduit  par  les 
offres  des  ennemis  de  la  France , 
il  se  jeta  imprudemment  dans  la 
coalition  qu'on  tramait  contre 
elle,  et  prit  l'attitude  de  guerrier, 
moins  imposante  sans  doute  que 
celle  d'un  apôtre.  Le  6  janvier 
1797,  on  bénit  les  drapeaux  de 
plusieurs  corps  qui  devaient  défen- 
dre l'ancien  patrimoine  de  saint 
Pierre.  Ils  déployaient  avec  au- 
dace le  laburum  de  Constantin, 
avec  ces  mots  rassurans  :  In  hoc 
signo  viitces.  Au  milieu  de  cet  en- 
thousiasme, il  était  difficile  de 
raisonner.  Cacault,  ministre  de  la 
république  française ,  fît  néan- 
moins quelques  propositions 
qu'en  toute  autre  circonstance  on 
aurait  acceptées.  Mais  la  congré- 
gation refusa  d'entrer  en  aucun 
arrangement  avant  que  les  deux 
légations  n'eussent  été  évacuées. 
Tant  d'arrogar)ce  de  la  part  d'un 
conseil  qui  s'était  inontré  quel- 
ques jours  avant  si  timide,  s'ex- 
pliquait par  les  rapports  secrets 
qui  existaient  entre  la  cour  de 
home  et  le  cabinet  de  Vienne.  Le 
général  en  chef  Bonaparte  en  ac- 
quit la  preuve  dans  une  lettre  in- 
terceptée du  cardinal  Busca,  nou- 
veau secrélaire-d'état  ,  à  iMgr. 
Albani,  nonce  du  pape  en  Autri- 
che. Le  cardinal  y  exposait  sans 
détour  ses  projets,  ses  désirs,  et 
tnême  le  plan  d'amener  une  guer- 
re civile  en  France,  sans  trop 
compromettre  le  sainl-siége.  Après 
une  pareille  découverte,  il  n'y  a- 
vait  plus  de  ménagemens  à  gar- 
der. Le    i3  pluviôse  (  1"  février 


PIE 

1797),  Bonaparte,  du  quartier- 
général  de  Bologne ,  annonce  la 
rupture  de  l'armistice  violé  par  le 
pape,  qui  n'avait  cessé  d'exciter 
les  peuples  à  la  croisade, qui  avait 
même  fait  avancer  ses  troupes 
jusqu'à  dix  milles  de  Bologne, 
entamé  des  négociations  hostiles 
avec  la  cour  de  Vienne,  et  s'était 
refusé  de  répondre  aux  ouvertu- 
res pacifiques  du  ministre  Ca- 
cault. Aussitôt  après  cette  décla- 
ration ,  l'armée  française  occupe 
les  états  de  l'Eglise,  s'empare  en 
courant  d'Imola,  de  Forli ,  de 
Cesena;  établit  des  garnisons  dans 
le  duché  d'Urbin,  dans  la  marche 
d'Ancône,  et  arrive  le  17  du  mê- 
me mois  àTolentino.  Rome  n'ap- 
prit pas  sans  elîroi  la  marche 
triomphante  du  général  eu  chef 
Bonaparte  ;  elle  se  hâta  de  lui  en- 
voyer des  plénipotentiaires,  ««ui 
signèrent  une  convention  encore 
plus  rigoureuse  que  la  première, 
et  dont  les  principaux  articles 
portaient  que  le  pape  paierait 
5i  millions,  fournirait  1,600  che- 
vaux harnachés,  renoncerait  aux 
trois  légations  de  Ferrare,  Bolo- 
gne et  llavenne,  et  accepterait 
garnison  française  dans  la  qua-, 
trième  d'Ancône.  Le  lendemain 
de  la  stipulation  de  ce  traité,  le 
général  en  chef  Bonaparte  et  son 
état-major  étaient  déjà  sur  la  rou- 
te de  l'Autriche ,  pour  reparaître 
dans  les  états  héréditaires.  La 
paix  de  Tolentino  mettait  le  pape 
en  guerre  contre  ses  sujets ,  et 
excitait  le  mécontentement  et  les 
plaintes  dans  toutes  les  classes  de 
la  société.  Un  parti  de  patriotes 
se  formait  dans  la  ville,  et  insul- 
tait à  la  faiblesse  du  gouverne - 
nient.    Des  mm-mures,  des  plu- 


PIE 

cnrds,  des  attroupemens,  tons  les 
syinplôiiies  avant-coureurs  d'une 
{grande  catastrophe,  annonçaient 
déji'i  l'audace  des  rebelles.  Sur 
ces  entrefaites  arrive  à  Rome  le 
nouveau  ministre  plénipotentiai- 
re de  la  république  française  : 
c'était  le  frère  du  vainqueur  d'Ar- 
cole.  Tous  les  yeux  se  tournèrent 
Sur  lui,  cherchant  à  interpréter 
ses  moindres  propos,  ses  démar- 
ches les  plus  insignifiantes.  Son 
début,  son  langage,  parurent  de 
bon  augure,  et  les  partisans  du 
saint -siège  commencèrent  à  se 
flatter  que  le  pape  était  encore 
redoutable  aux  yeux  de  la  Fran- 
ce. Mais  dans  le  sein  de  ce  calme 
trompeur  se  forma  un  orage  qui 
détruisit  toutes  les  illusions.  Le 
28  décembre  1797,  une  sédition 
éclata  dans  Rome  :  le  gouverne- 
ment envoya  des  troupes  pour 
dissiper  les  factieux  :  ils  se  retirent 
dans  le  palais  de  France;  on  les  y 
poursuit.  Parmi  les  personnes  qui 
entouraient  l'ambassadeur  fran- 
çais, et  qui  concoururent  avec 
lui  à  contenir  l'effervescence  des 
insurgés  et  l'aveugle  fureur  des 
troupes,  se  trouvait  le  général 
Duphot  (voyez  ce  nom),  connu  si 
avantageusement  par  sa  brillante 
valeur.  Il  s'élance  vers  cette  sol- 
datesque effrénée,  qui  avait  déjà 
immolé  tant  de  victimes  dans  les 
cours,  dans  le  vestibule  et  jusque 
sur  les  escaliers  du  palais  de  Fran- 
ce; et  ce  jeune  héros,  que  l'hy- 
men allait  (mir  quelque  jours  a- 
•  prés  à  la  sœur  du  général  en  chef 
Bonaparte,  tombe  victime  de  son 
dévouement  sous  les  coups  re- 
doublés dt^s  lâches  qu'il  nviiit  vou- 
lu désarmer.  L'ambassadeur  quit- 
te brusquement  Rome  ,   et  en- 


PIE 


2^7 


voie  au  directoire  la  relation  dé- 
taillée de  cet  atroce  événement.  Le 
pape  offrit  toute  sorte  de  satisfac- 
tion ;  mais  la  dernière  heure  de  son 
existence  politique  était  sonnée, 
et  le  général  Berlhier  fut  char- 
gé de  venger  l'affront  fait  à  la  ré- 
publique ,  et  d'apaiser  les  mâ- 
nes d'un  citoyen.  Le  25  janvier 
1798,  plusieurs  colonnes  de  trou- 
pes françaises  et  cisalpines  sont 
en  marche  sur  Rome.  A  leur  ap- 
proche, une  députation  de  la  vill»; 
vient  annoncer  à  Berthier  que  le 
peuple  romain  a  repris  sa  souve- 
raineté. Bientôt  après,  ce  géné- 
ral, à  la  tête  de  tous  les  grenadiers 
de  son  armée,  accompagné  de 
son  étal-major  et  de  100  chevaux 
de  chaque  régiment  des. troupes 
h  cheval,  marche  droit  au  Capi- 
tule, en  traversant  les  flots  d'une 
foule  immense  de  spectateurs. 
Arrivé  dans  ce  lieu  témoin  de 
tant  de  triomphes,  le  général 
Berthier  prononce  un  discours 
dont  la  laconique  énergie  mérite 
d'être  transmise  à  la  postérité  : 
«  Mânes  des  Caton,  des  Pompée, 
»des  Bruius,  des  Cicéron,  des 
oHortentius ,  recevez  Ihommage 
«des  Français  libres  dans  le  Ca- 
«pitole,  où  vous  avez  tant  de  fois 
»  défendu  les  droits  du  peuple,  et 
«illustré  la  république  romaine. 
"Ces  enfans  des  Gaulois,  l'oli- 
»  vier  de  la  paix  à  la  main,  vien- 
rtuent  en  ce  lieu  auguste  y  réta- 
nblir  les  autels  de  la  liberté  dres- 
«sés  par  le  premier  des  Bruius. 
»  Et  vous,  peuple  romain,  qui  ve- 
«nez  de  reprendre  vos  droits  lé- 
ogitimes,  rappelez-vous  ce  sang 
»qui  coule  dans  vos  veines;  jetez 
oies  yeux  sur  le^-monumens  de 
«gloire    qui    vous    environnent: 


a88  riE 

«reprenez  votre  antique  grandeur 
net  les  vertus  de  vos  p<,'res.  »  Le 
général  Berthier  prit  les  rênes  du 
gouvcrnenienl,qui  n'avait  encore 
que  des  chefs  nominaux.  Il  coui- 
mença  par  faire  célébrer  une  cé- 
rémonie funèbre  en  l'honneur  du 
général  Duphot,  auquel  on  éleva 
un  monument  expiatoire  sur  la 
place  même  du  Vatican.  On  créa 
ensuite  un  directoire  sous  le  nom 
de  consulat,  qui  devait  remplacer 
l'ancien  gouvernement.  Ces  car- 
dinaux, si  fiers  de  leur  dignité,  se 
trouvent  dépouillés  tout-à-coup 
de  ces  brillans  dehors  dont  s'eni- 
vrait leur  orgueil.  Enveloppés  in- 
distinctement dans  la  même  pros- 
cription, ils  ne  devinrent  intéres- 
sans  que  depuis  qu'ils  étaient 
malheureux.  Au  milieu  de  la  fer- 
mentation générale  qui  ré{;nait  à 
Home,  on  conçut  des  craintes  [)Our 
la  sûn^té  du  pape,  dont  la  person- 
ne pouvait  réveiller  des  sentimens 
opposés  dans  les  deux  partis  qui 
s'étaient  formés  à  sa  chute.  Les 
commissaires  Irançais  demandè- 
rent son  éloigiiement  de  la  capi- 
tale, et  même  de  l'état  ecclésias- 
tique. Dans  la  nuit  du  19  au  ao 
février,  il  prit  la  route  de  Yiterbe, 
en  s'éloignant  du  Vatican,  qu'il 
ne  devait  plus  revoir. Conduitd'a- 
burd  à  Sienne, dans  uncouvent  des 
Auguslins,  il  y  vivait  paisiblement 
lorsqu'un  tremblement  de  terre 
vint  ébranler  l'asile  qu'on  lui  a- 
vait  choisi,  et  fit  écrouler  plusieurs 
bâtimens  voisins.  On  le  transféra 
à  la  Chartreuse  de  S.  Cassia- 
iio,  près  de  Florence,  où  il  reçut 
la  visite  du  grand-duc  et  de  sa 
fiimille,  ainsi  que  celle  du  loi  et 
de  la  reine  de  Sardaigne.  Com- 
bien de  rétlexioiîS  ne  dut-elle  pas 


PIE 

faire  naître,  cette  réunion  de  sou- 
verains détrônés  ou  menacés  de 
l'être!  Le  directoire,  inquiet  sur 
le  sort  de  l'Italie,  vint  troubler  de 
nouveau  la  retraite  de  Pie  VI  :  on 
craignait  que,  voisin  encore  de 
ceux  qu'il  avait  si  long- temps 
éblouis  de  l'éclat  de, sa  dignité,  le 
pape  ne  servît  d'occasion  ou  de 
prétexte  à  quelque  complot  con- 
tre la  sûreté  générale.  Il  fut  ques- 
tion de  l'envoyer  à  l'abbaye  de 
Molk,  où  il  s'était  arrêté  peiîdant 
son  voyage  de  Vienne  ;  mais  la 
guerre  éclatée  entre  l'empereur 
d'Autriche  et  le  gouvernement 
français  ne  permit  pas  qu'on  exé- 
cutât ce  projet. II  fallut  se  décider 
pour  la  France;  et,  le  27  mars 
1799,  Pie  VI  se  mit  en  route  pour 
se  rendre  à  Valence,  lieu  marqué 
pour  son  exil,  où  il  arriva  le  14  juil- 
let suivant;  son  entrée  dans  cette 
ville  eut  presque  l'air  d'un  triom- 
phe :  la  générosité  française  ne  se 
montra  jamais  mieux  que  dans 
cette  occasion  ;  elle  dut  êf.re  d'une 
grande  consolation  pour  le  cœur 
d'im  vieillard  rempli  de  chagrin 
et  d'amertume.  Son  séjour  n'yfut 
pas  de  longue  durée;  son  grand 
âge,  ses  malheurs  et  ses  infirmi- 
tés qui  s'étaient  accrues  pendant 
ce  voyage,  tout  avait  contribué  à 
hâter  la  fin  de  ses  jours.  On  ve- 
nait encore  lui  signifier  l'ordre 
donné  par  le  directoire  de  le  trans- 
porter à  Dijon ,  lorsqu'il  fut  saisi 
par  un  vomissement  qui  le  laissa 
sans  connaissance.  Revenu  à  lui, 
il  demanda  son  confesseur,  et  se 
disposa  ù  recevoir  les  derniers  sa- 
cremens,  que  le  cardinal  Spina 
lui  administra.  Se  sentant  appro- 
cher de  sa  fin  5  il  voulut  qu'on  le 
revêtît  de  ses  habits  pontificaux, 


^^y 


43. 


VII. 


Fri'iiiif  iM.e/ Seuil) 


PIE 

e.l  qu'on  le  descendît  de  son  lit 
de  repos.  Il  fit  sa  profession  de  foi, 
pria  pour  l'éj^lise,  et  déclara  qu  il 
pardonn.iil  à  ses  ennemis.  C'est 
ainsi    qu'il  s'éteignit  le   29    août 
1 799.  âj^é  de  prcsqne  82  ans,  dont 
il    avait   passé   les    vingt- quatre 
derniers  sur  le  trône.  Ses  restes, 
déposés  d'ab'>rd  dans  un  souter- 
rain de  la  citadcile   de  Valence, 
lurent  qnelqiii-  temps  après  remis 
au  mênje  cardinal  Spina,  et  trans- 
portés à  llome,oi\  les  attendait  un 
magnifique  tombeau  élevé  dans  la 
basilique   de    Saint-Pierre.    Pen- 
dant son  règne,  un  des  plus  longs 
qu'ait  vus  l'église,  Pie  VI  créa  62 
cardinaux,  parmi  lesquels  son  suc- 
ce>seur  et  quatre  Français,   iVlM. 
de  La  Rochefoucauld,  de  Rohan, 
de  Louiénie  et  de  Montmorency. 
Pie  VI  illustra  les  dernières  an- 
nées de  sa  vie  par  la  nobie  et  tou- 
chante  résignation   qu'il   montra 
dans  ses  adversités.  Se  niettant  à 
la    hauteur    de    son    infortune, 
n'ayant  plus    d'état  à  gouverner 
ni  d'intérêts  à  défendre,  il  ne  prit 
soin  que  de  sa  dignité.    Une  vie 
j)ure,  un  âge  avancé,  une  figure 
imp(»«iante,  ^on  haut  rang,  et  l'ha- 
bitude qu'il  avait  de  la  représen- 
tation, intéressaient  vivement   en 
sa  faveur,  et  les  vertus  du  tnar- 
tyr  ex|>ièrtnt  les  torts  du  pontife. 
Il  i.'en  eut  pas  de  graves  à  se  ra- 
procher,  n'ayant  été  ni  persécu- 
teur, ni  fanatique;  sa  vanité  seule 
doit  être  regardée  comme  la  sour- 
ce principale  de  ses  fautes  et  de 
ses  revers.   Par  une  destinée  sin- 
gulière, l'honnne  qui  avait  tou- 
jours lutté  contre  la  France,  n)ou- 
rut   recevant  les  hommages   dé- 
sintéressés de  tous  les  Français,  et 
celui  qui  par  ses  erreurs  avait  le 

T.  XVI. 


PIE  289 

plus  contribué  à  l'abaissement  du 
pouvoir  spirituel,  lui  fut  d'une 
grande  utilité,  et  contriiuia  peut- 
être  à  le  relever  par  sa  catas- 
trophe. Pie  VI,  grand,  bien  fait, 
d'iuie  physionomie  heureuse, 
ayant  la  démarche  noble,  tirait 
vanité  de  ces  avantages  extérieurs, 
et  cherchait  toutes  les  occasions 
pour  les  faire  admirer.  On  lui  a 
sévèrement  reproché  cette  faibles- 
se peu  digne  d'un  esprit  judi- 
cieux, et  presque  coupable  dans 
un  souverain  pontife.  Mais  la  plu- 
part des  cérémonies  religieuses 
sont  destinées  à  frapper  les  sens, 
et  rien  n'était  plus  imposant  que 
de  voir ,  dans  des  jours  d'appa- 
reil ,  Pie  VI  la  tète  ceinte  d'un 
triple  diadème,  paré  de  vête- 
niens  d'une  blancheur  éblouis- 
sante, planer  sur  une  multitude 
prosternée,  et  semblant  annon- 
cer aux  peuples  sa  domination 
universelle  sur  la  terre. 

PIE  VII  (  Grégoire -Barnabe- 
Louis  -  Chiaramonte  )  ,  naquit  à 
Césène  le  24  août  174a.  Sa  famille, 
plus  noble  que  riche,  se  disait 
l'alliée  de  l'illustre  maison  fran- 
çaise de  Clermont.  Entraîné  par 
une  véritable  vo' ation  ,  le  jeune 
Chiaramonte  adopta  l'institut  de 
Saint- Benoît,  où  ses  premières 
années  se  passèrent  dans  la  médi- 
tation et  l'élude.  Après  avoir  en- 
seigné quelque  temps  là  théologie 
dans  son  couvent,  dont  il  de- 
vint abbé,  il  se  vit  élevé  à  la 
dignité  épiscopale,  occupant  suc- 
cessivement les  sièges  de  Tivoli 
et  d'imola.  Ce  fut  daus  cette  der- 
nière résidence  qu'il  reçut  le  cha- 
peau de  cardinal.  En  1796,  lors- 
que l'armée  française  envahit  l'I- 
talie, pîfr  une  absurdité  dont  les 
'9 


ago  PIE 

hommes  se  sont  rendus  souvent 
coupables,  ou  tourna  contre  les 
populations,  les  armes  destinées 
à  briser  leurs  chaînes.  Le  car- 
dinal Chiaramonte  se  trouvait 
au  milieu  d'une  masse  insurgée 
contre  les  Fruiçais,  et  à  la  tête 
d'un  diocèse  arraché  au  sceptre 
pontifical  pour  faire  partie  d'une 
nouvelle  république,  dont  la  cons- 
titution blessait  le  double  pouvoir 
de  Rome.  Dans  une  position  aussi 
difTuile,  où  un  prince  de  l'église 
ne  p()uvait  qu'applaudir  aux  ef- 
forts de  ses  diocésains  contre  des 
soldats  étrangers,  l'évêqued'lmo- 
la,  ne  calculant  que  les  maux  prêts 
à  fondre  sur  un  peuple  inexpéri- 
menté, rappela  son  troupeau  à 
l'ordre  et  à  l'obéissance,  et  se 
chargea  de  plaider  sa  cause  au- 
près d'un  vainqueur  irrité  ,  dont 
il  parvint  à  désarmer  la  vengean- 
ce. .Voulant  s'opposer  en  même 
temps  aux  machinations  des  arti- 
sans de  discorde  ,  et  combattre  les 
fanatiques  avec  leurs  propres  ar- 
mes ,  il  publia  cette  fameuse  ho- 
mélie, monument  de  paix  et  de 
sagesse,  où  il  établit,  par  l'appli- 
cation adroite  de  quelques  pas- 
sages de  l'Ecriture,  la  compatibi- 
lité de  la  religion  catholique  avec 
le  système  républicain  ;  usant  ainsi 
de  J'influence  de  son  ministère  , 
pour  empêcher  que  le  peuple  ne 
se  jetât  dan.s  les  chances  incalcu- 
lables d'un  mouvement  révolu- 
tionnaire. Cette  conduite  lui  ga- 
gna Teslime  des  vainqueurs,  et 
la  reconnaissance  de  ses  ouailles, 
que  sa  voix  seule  avait  pu  arrêter 
sur  le  bord  de  l'abîme.  La  mort 
de  l^ie  VI  laissait  le  vaisseau  de 
l'église  expo&é  à  mille  tempêtes. 
Il  y  avait  plus  de  dévouement  que 


riE 

de  calcul  à  vouloir  en  être  le  pilo- 
te; cependant  toutes  les  ambitions 
étaient  en  jeu  pour  en  saisir  le 
timon.  Le  conclave  qui  s'ouvrit  à 
Venise  vit  accourir  de  toutes  parts 
les  membres  épars  du  sacré-col- 
lége  ,  qui  durent  s'étonner  de  ce 
qu  on  leur  permettait  de  s'occu- 
per de  la  réélection  d'un  pontife. 
Le  cardinal  Cbiaramonte  parut  au 
milieu  de  ses  confrères  sans  pro- 
jets et  sans  espérance.  Il  ne  se 
flattait  pas  de  trouver  une  cou- 
ronne diuis  une  ville  où  ,  sans  les 
secours  d'un  ami,  il  aurait  été 
embarrassé  d'arriver.  Mais  le  sort 
en  avait  disposé  autrement  :  l'é- 
vêque  d'Imola  fut  proclamé  pape, 
par  une  de  ces  transactions,  qui 
déterminent  souvent  le  choix  d'un 
conclave.  11  s'empressa  de  se  ren- 
dre à  Rome,  contre  l'avis  de  plu- 
sieurs cardinaux,  et  malgré  les 
démarches  de  la  cour  de  Vienne  , 
qui  aurait  voulu  le  retenir  dans 
une  ville  soumise  à  la  domination 
autrichienne.  Il  trouva  sa  capi- 
tale occupée  par  les  troupes  na- 
politaines, dont  la  présence  ne 
l'empêcha  pas  de  désapprouver  la 
sanglante  réaction  de  la  cour  de 
Sicile  contre  ses  sujets  ,  et  de  se 
prononcer  fortement  contre  l'exé- 
cution d'un  évêque  et  de  plusieurs 
ecclésiastiques.  La  révolution  du 
18  brumaire  venait  de  changer  la 
face  des  afl'aires  en  France.  Bona- 
parte,  en  renversant  la  constitu- 
tion qu'elle  s'était  donnée,  et  que 
la  faiblesse  du  directoire-exécutif 
n'avait  pas  pu  garantir,  avait  lait 
un  essai  hardi  de  ses  forces.  11  ne  se 
déguisa  pas  la  facilité  qu'il  aurait 
de  s'emparer  du  pouvoir,  et  par- 
mi les  moyens  qu'il  se  proposait 
d'employer,  la  religion  ne  lui  pa- 


PIE 

rut  pas  le  moins  puissant  pour  s'y 
affermir.  Lorsque  la  victoire  de 
Marengo  remit  complète  me  ntdans 
ses  mains  les  destinées  de  la  Fran- 
ce, il  crut  ce  moment  favorable 
pour  exécuter  ses  projets.  Au  mi- 
lieu du  carnage  de  cette  journée 
et  sur  le  champ  de  bataille  même, 
il  ouvrit  les  premières  négocia- 
tions avec  le  saint-siége  ,  dont  il 
réveilla  toutes  les  prétentions.  Un 
concordat  entre  Home  et  la  France 
fut  signé,  à  Paris,  le  i5  juillet 
1801,  et  cet  acte,  qui  a  eu  une  si 
grande  influence  sur  notre  avenir, 
rendit  nécessaire  la  promulgation 
des  lois  organiques ,  qui  au  lieu 
d'en  faciliter  l'exécution  ,  ne  firent 
qu'en  entraver  la  marche  :  les 
deux  parties  auraient  voulu  res- 
saisir dans  l'application  du  traité, 
les  concessions  qu'elles  s'étaient 
faites  par  le  traité  même.  Dans  le 
système  de  Bonaparte  ,  les  ecclé- 
siastiques n'étaient  que  des  fonc- 
tionnaires publics  entièrement 
soumis  à  l'autorité  civile ,  tandis 
que  d'après  les  maximes  de  la  cour 
de  Rome ,  ils  ne  devaient  recon- 
naître ,  pour  ce  qui  regardait  la 
disciplitie  inférieure  de  l'église  et 
la  direction  des  consciences,  d'au- 
tres chefs  que  leurs  évêques,  ni 
d'autre  autorité  que  l'ultramon- 
taine.  Cette  divergence  d'opinions 
et  de  principes  était  une  source 
intarissable  d'empiétement  et  de 
griefs,  qui  augmentaient  chaque 
jour  la  niésintelligence  entre  les 
deux  gouvernemens.  Il  y  eut  quel- 
que apparence  de  réconciliation 
vers  l'aïuiée  i8o4>  époque  à  la- 
quelle le  premier  consul,  devenu 
empereur,  se  montra  moins  hos- 
tile envers  le  pape,  pour  l'attirer 
à  Paris,  où  il  désirait  se  faire  cou- 


PIE 


291 


ronner  par  lui.  Cet  acte  a  été  re- 
gardé par  les  vieux  républicains 
couuïie  tendant  surtout  à  rempla- 
cer la  souveraineté  du  peuple  par 
le  droit  divin,  etàdé[touiller  la  ré- 
volution de  ^a  première  conquête. 
Pie  VII  désista  lonj^^-temps  à  cette 
invitation  :  il  ne  se  dissiidulait  pas 
qu'en  C(uisentaulà  jdaccr  le  diadè- 
me impérial  sur  le  front  d'un  con- 
quérant ,  il  se  détachait  de  la  ligue 
des  anciennes  dynasties,  et  con- 
courrait au  triomphe  des  nou- 
velK  s  doctrines  qui  avaient  porté 
les  plus  graves  atteiiites  au  pou- 
voir spirituel.  Mais  d'autre  côté 
la  France  était  rt-ntrée  dans  le  gi- 
ron de  réglise  :  il  aurait  été  par 
conséquent  ridicule  de  prêcher 
une  croisade  ccuitre  une  monar- 
chie religieuse,  puisqu'elle  n'a- 
vait pas  réussi  contre  une  républi- 
que prétendue  athée  :  il  était  plus 
sage  d'accepter  les  offres  d'un  ami 
puissant,  ne  pouvant  pas  être  un 
redoutable  adversaire.  D'ailleurs 
l'église  avait  été  relevée  par  le 
consul,  et  il  était  juste  qu'elle  se 
chargeât  de  sacrer  l'empereur  : 
il  y  aurait  eu  en  outre  une  espèce 
d'inconséquence  de  vouloir  pren- 
dre avec  la  même  personne  une 
attitude  différente,  par  la  seule 
raison  que  ses  titres  n'étaient  plus 
les  mêmes.  Ces  considérations  dé- 
terminèrent Pie  Vli  à  entrepren- 
dre le  voyage  de  Paris.  Dans  un 
consistoire  qu'il  tint  quelques 
jours  avant  son  départ,  il  annon- 
ça que  la  correspondance  de  Na- 
poléon était  si  satisfaisante,  et 
ses  promesses  d'améliorer  le  sort 
de  l'église  .«-i  positives,  que  ceftt 
été  presque  un  crime  de  ne  pas 
se  rendre  à  ses  sollicilations.  Le 
pape  quitta  Rome  le  a  novembre 


393 


PIE 


1804,  et  après  i.\  jours  de  voya- 
ge, il  arriva  à  Fontainebleau,  où 
il  eut  une  première  entrevue  avec 
l'empereur.  L'accueil  qu'il  avait  re- 
çu d'un  peuple  regardé  jusqu'alors 
comme  irréligieux,  lui  donna  la 
mesure  de  ses  l'orccs,  et  lui  servit 
peut-être  ù  calculer  la  résistance 
qu'il  pourrait  opposer  aux  pré- 
tentions futures  de  son  nouvel 
allié.  11  lui  présenta  une  série  de 
demandes  toutes  relatives  aux 
besoins  de  l'église,  à  l'indépen- 
dance des  pasteurs,  et  à  la  sup- 
pression de  plusieurs  articles  or- 
ganiques. Mais  Naptjléon  exigeait 
des  concessions,  et  n'était  pas  dis- 
posé d'en  faire.  Peu  après  les  cé- 
rémonies du  sacre,  le  pape  se  re- 
mit en  route  pour  «es  états,  sans 
avoir  rien  obtenu  de  l'heureux 
guerrier  sur  lequel  il  venait  de  dé- 
poser la  couronne  des  Césars.  Il 
ne  tarda  pas  à  se  re[)cntir  de 
sa  condescendance  :  il  y  avait  à 
peine  six  mois  qu'if  avait  quitté  la 
capitale  de  l'enipire,  que  le  géné- 
ral Saint-Cyr  eut  ordre  d(;  s'em- 
parer d'Ancône,  et  d'en  occuper 
le  château  et  le  port.  Pie  VII  éleva 
la  voix  pour  se  plaindre  de  cette 
violation  de  territoire;  mais  ces 
réclamations  ne  j)ouvaienl  pas 
contrarier  les  grands  plans  mili- 
taires de  Napoléon ,  qui  armait 
l'Europe  contre  l'Angleterre;  loin 
d'obtenir  l'évacuation  d'Ancône, 
il  eut  la  douleur  de  se  voir  enle- 
ver toutes  les  villes  situées  sur  les 
côte?  de  l'Adriatique,  ainsi  que 
les  deux  principautés  de  Béné- 
vent  et  de  Pontecorvo,  dont  on 
disposa  en  faveur  de  d(;ux  amis 
deî'emriereur.  Ces  envahissemens 
brouillèrent  les  rapports  formés 
entre  Napoléon  et  Pie  VII ,  et  ren- 


PIE 

dirent  impossible  toute  réconcilia- 
tion entre  eux.  L'un  s'annonçait 
comme  le  vicaire  de  Jésus-Christ, 
l'autre  se  disait  le  successeur  de 
Charlemague,  et  ces  deux  volon- 
tés, dont  l'une  était  absolue  par 
caractère,  et  l'autre  inflexible  par 
devoir,  formaient  une  espèce  de 
nœud  gordien  que  i'épéc  seule 
pouvait  trancher.  Les  heureux  ré- 
sultats des  campagnes  de  i8o5  et 
1806,  mirent  Napoléon  en  état 
d'accomplir  ses  desseins  sur  l'Ita- 
lie. Il  poussa  se*  légions  jusque 
sur  le  détroit  de  Sicile,  détrôna 
les  Bourbons  de  Naples  ,  occupa 
la  ville  de  Bome,  et  donna  les 
Marches  au  royaume  d'Italie,  et 
l'EtrurieàlaFrance.PieVII  protes- 
ta du  haut  de  son  trône  chancelant 
contre  ces  nouveaux  envahisse- 
mens, et  pria  l'empereur  de  lui  dé- 
clarcrpositivement  quelles  étaient 
ses  intentions  sur  les  états  de  l'E- 
glise. Il  Je  les  respecterai,  lui  fit 
«répondre  Napoléon,  à  condition 
«que  vos  ports  seront  fermés  aux 
«Anglais,  et  vos  places  ouvertes 
Ȉ  mes  soldats,  chaque  fois  que 
"l'Italie  sera  menacée  d'une  inva- 
»sion  étrangère.  »  Ces  demandes, 
qui  étaient  en  harmonie  avec  la 
politique  de  la  France,  ne  furent 
pas  acceptées  par  le  pape  :  il  ré- 
pondit que  son  ministère  sur  la 
terre  était  un  ministère  de  paix, 
qui  lui  défendait  de  se  mettre  en 
état  de  guerre  permanente  contre 
aucune  puissance  de  l'Europe, 
encore  moins  contre  l'Angleterre, 
qui  aurait  pu  aggraver  le  sort  des 
catholiques  d'Irlande.  Ce  refus  fut 
payé  de  menaces  :  à  une  réception 
à  Saint-Cloud,  l'empereur  dit  au 
cardinal  Caprara,  que  si  le  pape  ne 
se  rendait  pas  à  ses  désirs,  il  ferait 


l'IE 

occuper  le  reste  de  ses  états ,  et 
attacher  les  aigles  aux  portes  de 
toutes  ses  villes.  Pie  VII  com- 
prit alors  qu'il  n'y  avait  pas  à  lut- 
ter avec  un  caractère  aussi  indomp- 
table. Dans  un  mouvement  d'indi- 
gnation ,  il  se  rappela  qu'il  por- 
tait un  trirègne,  et  s'élevant  sur 
l'abîme  prêt  à  l'engloutir,  il  en 
mesura  courageusement  la  pro- 
fondeur. Dès-lors  son  parti  fut 
arrêté  :  il  ne  fallait  pas,  comme 
?on  prédécesseur,  combattre  avec 
ses  moyens  temporels;  il  ne  devait 
employer  que  son  pouvoir  spi- 
rituel, et  opposer  la  résignation 
à  l'emportement,  et  la  conscience 
à  la  force.  Il  donna  ordre  au  car- 
nal  Caprara,  son  légat  à  Paris,  de 
cesser  toutes  ses  fonctions  publi- 
ques, aussitôt  que  Napoléon  en 
serait  venu  aux  mesures  extrê- 
mes qu'il  lui  avait  annoncées. 
Il  écrivit  à  Napoléon  lui-même 
pour  lui  reprocher  tous  ses  torts, 
et  le  menacer  de  faire  usage  de  la 
force  que  le  Dieu  tout- puissant  avait 
mise  dans  ses  mains;  il  lit  enfin 
transmettre  à  tous  les  membres  du 
corps  diplomatique  résidant  à  Ko- 
me,  les  copies  de  sa  correspon- 
dance avec  la  cour  impériale  des 
Tuileries.  Cette  résistance  enflam- 
ma la  colère  de  l'empereur.  Vain- 
queur des  plus  grands  potentats 
(le  l'Europe  ,  il  ne  souffrit  pas 
«pie  le  chef  d'im  état  borné  ,  sans 
soldats,  sans  argent,  sans  ressour- 
ces, osût  résister  à  su  volonté,  et 
lui  tenir  même  un  langage  mena- 
yunt.  La  pejte  du  gouvernement 
papal  fut  décidée  :  rien  ne  pouvait 
plus  le  mettre  à  l'abri  du  ressenti- 
ment d'un  monarque  tel  que  celui 
qu'on  venait  de  braver.  La  ruptu- 
re inattendue  d'une  nouvelle  guer- 


PIE 


ligo 


rc,  remplit  la  pensée  de  Napo- 
léon de  soins  plus  importaris,  et 
relarda  de  quelque  temps  encore 
la  chute  du  saint-siège,  qui  ache- 
tait par  des  humiliations  et  des 
sacrifices,  les  derniers  jours  de  su 
pénible  existence.  Depuis  l'arri- 
vée du  général  iMJollis  à  Rome,  lu 
capitale  du  monde  chrétien  était 
gouvernée  militairement  sons  les 
yeux  du  chef  de  l'église,  qui,  en- 
fermé dans  le  Quirinal,  conser- 
vait l'attitude  d'un  général  délogé 
de  sa  place,  et  assiégé  dans  une 
citadelle.  On  l'entendait  souvent 
protester  contre  les  actes  du  nou- 
veau gouvernement,  qui  n'aurait 
fait  aucun  cas  de  ces  réclamations 
si  le  pape  n'avait  imposé  à  ses 
employés  le  devoir  de  la  déso- 
béissance. Cette  opposition,  hono- 
rable sans  doute  pour  celui  qui 
l'exerçait,  plaçait  l'empereur  dans 
l'alternative  de  reculer  ou  de  pas- 
ser outre.  H  se  jeta  dans  ce  iler- 
nier  parti,  qui  était  plus  confor- 
nje  à  son  caractère.  Par  un  décret 
daté  du  camp  de  Vienne,  il  onlon- 
na  la  réunion  définitive  des  étals 
romains  à  l'empire.  En  le  procla- 
mant à  Rome,  ou  redoubla  de  pré- 
cautions et  de  surveillance.  La 
garnison  n'y  était  pas  nond)reuse, 
et  en  cas  de  soulèvement  il  eût 
été  dillicile  de  contenir  la  popu- 
lace. On  tâcha  de  pénétrer  ce  qui 
se  passait  dans  l'enceinte  du  Qui- 
rinal; mais,  connue  toutes  les  a- 
venues  en  avaient  été  murées,  et 
que  rien  ne  transpirait  au  dehors, 
on  craignit  qu'il  ne  s'y  tramât 
quelque  complot.  Les  membres 
de  la  consulte,  usant  amplement 
des  pouvoirs  dont  le  gouv(!rne- 
ment  avait  cru  nécessaire  d<;  les 
investir,  résolurent  de  se  reridie 


294 


PIE 


maîtres  de  la  personne  du  pape. 
Le  plan  d'enlèvement  fut  combi- 
né entre  les  généraux  Miollis  et 
Uadet.  Dans  la  nuit  du  5  au  6  juil- 
let 1809,  un  détachement  consi- 
dérable de  la  f!;arnison  de  Uonie 
se  porla  en  silence  vers  le  palais 
du  Quirinal ,  et  l'investit  de  tou- 
tes parts.  Le  général  Radet,  à  la 
tête  de  quelques  soldats,  pénétra 
jusque  dans  les  appartemens  du 
pape,  qu'il  trouva  revêtu  de  ses  ha- 
bits ordinaires,  et  occupé  à  écrire. 
Le  général  s'approche  pour  lui 
déclare)  que  ce  n'était  qu'en  abdi- 
quant sa  souveraineté  temporelle, 
qu'il  pourrait  continuer  à  séjour- 
ner à  Rome.  Le  pape  lui  répondit 
que  n'étant  que  Fadministraleur 
(lu  domaine  de  l'Kgiisc  ,  il  ne  pou- 
vait [las  disposer  d'un  bien  qui  ne 
lui  apparienait  pas.  «  Dans  ce  cas, 
reprit  le  général,  j'ai  ordre  de 
vous  emmener  hors  de  Rome.  » 
Pic  VII,  sans  rien  dire,  se  lève, 
et  sort  de  son  appartement,  en 
donnant  la  main  au  cardinal  Pacca, 
son  secrétaire  d'état.  Tant  de  ca- 
lamités, accumidées  sur  la  tête 
d'un  vieillard,  n'en  ébranlèrent 
pas  le  courage  :  sa  conduite  lut 
toujours  ferme,  noble  et  exem- 
plaire. Le  seul  acte  qu'on  pourrait 
lui  rcpr(»cher,  ce  serait  la  bulle 
d'excommunication  lancée  contre 
Napoléon  et  ses  agens  :  mais 
dépouillé  de  toute  puissance  tem- 
porelle, c'était  le  seul  moyen  de 
protestation  qui  lui  restait,  et  on 
ne  peut  pas  lui  faire  un  reproche  de 
l'avoir  employé.  On  le  conduisit  à 
Savone,  lieu  fixé  pour  son  exil.  Il 
s'y  montra  ,  comme  à  Rome , 
au-dessus  de  ses  malheurs,  inac- 
cessildc  à  la  séduction  et  à  la 
crainte.  Repoussant  toutes  les  pro- 


PIE 

positions  qu'on  lui  fit  pour  le 
fléchir,  il  disait  qu'il  ne  pourrait 
s'occuper  des  affaires  de  l'église  , 
qu'étant  libre  ;  et  qu'il  ne  le  serait 
que  sur  son  trône,  et  au  milieu  de 
son  fieuple.  C'est  à  peu  près  la  ré- 
ponse donnée  aux  évêques  qui  lui 
écrivirent  de  Paris,  et  à  ceux  qui 
allèrent  le  solliciter  à  Savone.  Fa- 
tigué de  cette  résistance,  l'empe- 
reur voulut  opposer  les  décisions 
d'un  concile  à  l'autorité  du  pape  : 
il  convoque  un  sjmode  composé 
des  évêques  de  France  et  d'Italie, 
qui,  au  nombre  de  quatre-vingt- 
quinze  ,  s'assemblent  le  17  juin 
1811,  dans  la  basilique  de  Notre- 
Dame.  Depuis  le  concile  de  Trente, 
on  n'avait  pas  vu  une  plus  nom- 
breuse réunion  d'évêques  :  ils 
étaient  présidés  par  le  cardinal 
Fesch  ,  qui ,  a{)rès  les  cérémonies 
d'usage,  invita  chacun  des  mem- 
bres présens  à  répéter  le  serment 
qu'il  prononça  le  premier  ,  de  se 
tenir  attaché  à  la  foi.  et  de  rendre 
au  pontife  romain  une  véritable 
obéissance.  Ce  début  suffit  à  l'em- 
pereur pour  pénétrer  l'esprit  de 
l'assemblée  :  il  ne  tarda  pas  à 
la  dissoudre,  pour  ne  pas  rencon- 
trer un  obstacle  là  où  il  s'était 
flatté  de  trouver  un  appui.  Peu 
avant  son  départ  pour  la  Russie, 
Napoléon  ordonna  que  le  pape 
vînt  habiter  Fontainebleau  ,  où  il 
alla  le  voir,  en  revenant  de  cette 
désastreuse  expédition  ,  qui  avait 
ruiné  sa  puissance.  Il  y  posa  les 
bases  d'un  nouveau  concordat, 
que  le  pape  refusa  de  ratifier:  l'em- 
pereur se  disposait  à  venger  celte 
insulte,  lorsque  sa  situation,  deve- 
nue plus  précaire,  l'obligea  de 
songer  à  sa  propre  défense.  Il 
avait  à  combattre  les  soldais  de 


PIE 

presque  toute  l'Europe,  qui  se  pré- 
cipilaicnt    sur    la    Frtince.    Deux 
rois   sortis   des  rangs  de  l'armée 
française ,  et  portés  sur  le  trône 
par  le  bras  victorieux  de  nos  guer- 
riers, s'étaient  ralliés  aux  enne- 
mis de  leur  patrie,  et  tournaient 
leur  fer  sacrilège  contre  leurs  an- 
ciens compagnons   de   gloire.  La 
défection  du  roi  Joacliim(iioj.  iMu- 
bat)  influa  beaucoup  sur  la  déli- 
vrance du  pape,  dont  l'apparition 
en  Italie  ne  pouvait  que  déranger 
les  calculs  ambitieux  de  cet  im- 
prudent transfuge.  Pie  VII  quitta 
Fontainebleau  le  20  janvier  1814, 
et  traversa  en  triomphe  la  France 
et  l'Italie.  Arrivé  sur  le  ïaro ,  il 
fut  remis  aux  avant- postes  napo- 
litains,  qui   l'escortèrent    jusque 
dans  sa  capitale.  loachim  alla  à  sa 
rencontre ,  et  dans  une  entrevue 
qu'il  eut  avec  lui,   il  tâcha  d'en 
obtenir  la  cession  des  Marches, 
dont  il   s'était   emparé  ;  mais   le 
même  homme  qui  avait  eu  le  cou- 
rage  de    les   refuser  à  Napoléon 
dans  la  grandeur,  n'était  pas  fait 
pour  les  céder  à  un  de  ses  lieute- 
nans  dans  la  disgrâce  :  il  réclama 
la  restitution  de  ses  états,  et  pro- 
testa contre  les  traités  qui  en  a- 
vaienl  disposé.  Dans  ce  voyage,  le 
pape  montra  un  grand  talent  de 
conversation,  et  témoigna  bcau- 
eoup  d'égards  aux  généraux  qui 
l'accompagnaient  :  il  leur  parlait 
souvent  de  Napoléon  ,  avec  plus 
d'intérêt  que  de  ressentiment.  Un 
jour,  s'étant  arrêté  près  de  Narni, 
un  paysan,  affligé  d'une  maladie 
chronique,   se  traîne   jusqu'à  sa 
voiture,  en  lui  demandant  avec 
ferveur  de  le  guérir  avec  sa  puis- 
sance. Pie  VII  se  tourne  du  côté 
de  l'officier  qui  se  tenait  à  sa  por- 


PIE  agS 

tière  ,  et  lui  dit  :  «  Général,  voyez 
si  ce  peuple  est  fait  pour  l'indé- 
pendance quevous  voulez  lui  don- 
ner. ')  Ce  grandenlhousiasme  qu'il 
avait  révt^illé  sur  son  passage,  di- 
minuait pourtant  à   mesure  qu'il 
s'approchait    des  états   qui  crai- 
gnaient de  retomber  sous  la  théo- 
cratie romaine.  En  effet,  l'adminis- 
tration de  Fie  VU  fut  d'abord  un 
mélangede  modération  et  de  violen- 
ce. L'une  était  dans  son  conseil,  et 
l'autre  dans  son  caractère  :  se  lais- 
sant aller  aux  insinuations  de  ses 
amis  ,  il  faillit  perdre  sur  le  trône 
l'opinion  qu'il  s'était  acquise  dans 
l'exil.  Lorsque  Joachim  tenta  vai- 
nement de  soulever  l'Italie  contre 
l'Autriche,    Pie  VII    dut   encore 
destendre  de   son   siège  pour  se 
nitttre  à  l'abri  d'une  invasion.  Il 
paraissait  disposé  à  s'abandonner 
aux   promesses  de  Joachim,  qui 
lui  av-tit  t'ait  dire  que  sa  capitale 
ne  serait  })oint  occupée;  mais  le 
ministre  de  Vienne  calculant  que  le 
pape  eu   fuite  devant  les  troupes 
napolitaines,   produirait   une    fâ- 
cheuse iuipre-sion  sur  le  peuple, 
détermina  l'ii;  Vif  à  se  retirer  en 
Toscane,  et  ensuite  à   Gênes.  La 
restauration  des  Bourbons  sur  le 
trône  deNaples,  ramena  le  pape 
dans  ses  états,  dont  le  congrès  de 
Vienne  respecta  l'intégr  té  et  l'in- 
dépendance. Le  cardinal  Gonsal- 
vi ,  (jui  s'était  mis  à  la   tête  des 
affaires,  suivit  l'impulsion  gi-né- 
rale,  qui  tendait  à  la  modération  et 
à  la  tolérance.  Il  chercha  même  à 
doimerà  l'administration  nmiaine 
une  organisation  tdus  régulière,  et 
des     formes    moins    surannées  : 
mais   il   s'aperçut   bientôt    qu'im 
gouvei  iiement  théoctratique  est  de 
sa  nature  incompatible  avec  les 


296  PIE 

perfectionnemens  et  les  réfor- 
mes. Il  se  contentii  d'ouvrir  un 
asile  aux  proscrits,,  d'accorder 
une  noble  hospitalité  aux  indi- 
vidus de  toutes  le.-  comniunious, 
d'empêcher  toute  espèce  de  réac- 
tion .  et  de  s'opposer  au  zèle 
des  dévots  et  des  fanatiques. 
Mais  l'acte  le  plus  maonaniine 
du  règne  de  l'ic  VII,  fut  d'ac- 
cueillir avec  empressement  dans 
ses  états,  la  fau)ille  erranle  de 
l'homme  dont  il  venait  de  quitter 
les  priions,  et  de  la  soutenir  dans 
l'adversité,  contre  la  h<iine  de 
ceux  qui  en  avaient  mendié  la  fa- 
veur dans  la  fortune.  Pie  VU  , 
malgré  ses  malheurs  ,  avait  con- 
servé une  santé  parfaite,  jusqu'i'i 
un  âge  très-avancé:  rien  n'annon- 
çait encore  sa  mort,  lorsqu'un  ac- 
cident vint  la  hâter.  Le  6  juillet 
1825,  jour  anniversaire  de  son 
enlèvement  de  Kornc,  le  pape 
se  félicitait  d'avoir  passé  heureu- 
sement cette  journée.  Le  soir, 
vers  les  dix  heures,  après  avoir 
renvoyé  son  service,  il  s'entretint 
quelque  temps  avec  son  audi- 
teur, qu'il  congédia  bientôt.  Res- 
té seul,  il  voulut  se  lever  de  son 
fauteuil,  en  s'apj)uyant  d'une  main 
sur  son  bureau,  et  en  chferchant 
de  l'autre  un  cordon  attaché  à  la 
muraille  ;  n'ayant  pas  pu  l'attein- 
dre, il  tomba  sur  le  carreau  de 
marbreeutre  la  table  et  le  fauteuil. 
Plusieurs  personnes  étant  surve- 
nues à  ses  cris,  on  le  releva  pour 
le  porter  sur  son  lit.  Quelques 
mouvemens  convulsifi^  firent  con- 
naître quelle  avait  été  la  A'iolence 
de  la  chute.  Dès  la  première  visi- 
te, les  chirurgiens  déclarèrent  que 
le  col  du  fémur  était  cassé.  La  fa- 
culté réunie  confirma  ce  premier 


PIE 

jugement.  Pendant  huit  jours,  on 
laissa  ignorer  au  pape  la  gravité 
de  riiccidciit  qui  lui  était  arrivé. 
Quand  on  le  lui  apprit  iln'enparut 
ni  sur}iris  ni  affligé.  La  maladie  se 
prolongea  près  de  six  semaines, 
avec  des  alternatives  de  bien  et  de 
mal.  Vers  la  fin  cependant,  la  fai- 
blesse s'accrut  tont-à-coup  au  point 
d'enlever  toutes  les  espérances  de 
le  conserver.  Le  16  août,  le  déli- 
re se  joignit  au  reste  des  symptô- 
mes eft'rayans  qui  s'étaient  annon- 
cés depuis  quelques  jours.  Le 
malade  se  croyait  à  Savone  et  à 
Fontainebleau.  Le  lendemain,  le 
mal  devenu  plus  alarmant  enco- 
re, le  saint-père  demanda  à  com- 
munier. Peu  après,  il  perdit  la 
parole  :  on  apercevait  seulement 
à  quelque»  sons  articulés  de  sa 
voix,  qu'il  était  intérieurement  en 
prière.  Aussitôt  que  cette  nouvel- 
le se  répandit  dans  Rome,  un  sen- 
timent universel  de  regret  et  de 
douleur  se  manifesta  dans  toutes 
les  classes  d'habilans.  Ils  appri- 
rent bientôt  que  Pie  VII  n'était 
plus;  il  expira  le  ao  août  iSaS. 
Pie  VII  a  eu  la  gloire  de  laisser  à 
son  successeur  le  patrimoine  de 
l'église  dans  son  antique  intégri- 
té, et  l'héritage,  plus  précieux 
encore,  de  ses  vertus  et  de  sa  dou- 
ceur. Son  nom  sera  chéri  par  la 
postérité,  si  les  jésuites  qu'il  a 
rétablis  ne  la  forcent  à  le  mau- 
dire. 

PIE  (N.),  grenadier  français, 
l'im  des  premiers  qui,  en  1792, 
volèrent  à  la  défense  de  la  patrie, 
se  distingua  autant  par  la  noblesse 
de  ses  sentimens  que  par  son  cou- 
rage. Blessé  à  la  retraite  de  Quié- 
vrain ,  au  moment  où  une  partie 
de   l'armée   venait    de   s'insurger 


PIE 

et  de  massacrer  un  de  ses  chefs, 
il  parut  moins  touché  de  i>n  bles- 
sure que  du  désordre  qui  régnait 
parmi  les  troupes,  et  dit  à  Alexan- 
dre lieauharnais,  alors  adjudant- 
général,  qui  se  trouvait  près  de 
lui  :  u  Mon  officier,  achevqz- 
'imoi,  qne  je  ne  voie  pas  la 
"hotite  de  cette  journée;  vous 
»  voyez  que  je  meuis  à  côte  de 
nmon  fusil,  avec  la  douleur  de 
«ne  plus  pouvoir  le  porter.»  Ou 
transporta  ce  brave  à  l'hôpital  de 
Valenciennes.  L'assemblée  législa- 
tive, iristruite  de  ce  lait,  décréta 
que  le  nom  de  Pie  serait  inscrit 
au  procès-verbal  de  ses  séances, 
qu'il  lui  serait  envoyé  un  sabre 
d'honneur,  et  que  son  président 
lui  adresserait  une  lettre  detelici- 
talion.  Jlétabli  de  sa  blessure, 
il  rejoignit  son  corps,  et  fut  tué 
(|uelque  temps  après  sur  le  champ 
de  bataille. 

PIEDOU-D'HÉUÏTOÏ  (N.), 
fut  nommé ,  au  mois  de  mars 
i7<)7,  député  au  conseil  des  an- 
ciens par  ledéparîenientdu  Calva- 
dos. Conmie  il  était  de  ceux  qui 
attaquaient  chaque  jour  les  me- 
sures du  directoiie- exécutif,  il 
en  fut  bientôt  la  victime.  Non- 
seulement  on  annula  son  élec- 
tion par  suite  de  la  journée  du 
18  fructidor  an  5  (^  septembre 
1797),  mais  encore  on  le  mil  en 
état  d'arrestation.  Il  recouvra  la 
liberté  quelque  tempsaprés,  et  de- 
puis cette  épo(]ue  ne  reparut  plus 
sur  la  scène  politique. 

PIENEMAN  (Jean-Guillaume), 
peintre  dhistttire,  chevalier  de 
l'ordre  du  Lion-Belgique,  mem- 
l)re  de  l'institut  royal  des  Pays- 
lias,  né  en  1779,  à  Abconde,  vil- 
lage situé  ù  deux  lieues  d'Aïuster- 


PIE  297 

dam.  Il  perdit,  dès  l'âg-e  de  2  ans, 
son  père;  sa  mère,  qui  s'établit  à 
Amsterdam,  et  ses  tuteurs,  le  des- 
tinaient au  commerce  ,  mais  le 
jeune  Pieneman  marquait,  dès  sa 
tendre  enfance,  des  dispositions 
extraordinaires  et  un  goût  pro- 
noncé pour  la  peinture.  Sans  maî- 
tre proprement  dit,  il  se  forma 
lui-même  en  étudiant  la  nature, 
et  en  travaillant  avec  assiduité  i\ 
acquérir  toutes  les  connaissances 
nécessaires  pour  parcourir,  avec 
succès,  la  carrière  des  arts.  Les 
institutions  publiques  pour  l'en- 
couragement et  l'étude  des  arts, 
établies  à  Amsterdam,  et  surtout 
l'acîidémie  de  dessin  de  cette  ville, 
où  les  jeunes  élèves  travaillaient 
d'aprè<  le  modèle  vivant,  furent 
d'un  grand  secours  pour  le  jeune 
peintie,  Dénuéde  fort  meetobligé 
de  trouver  des  moyens  d'existence 
dans  son  talent,  il  s'essaya  dans 
les  genres  divers  du  paysage,  du 
portrait,  des  tableaux  d'histoire, 
et  obtint  des  succès  dans  tous. 
Eu  1800,  il  remfiorta  le  premier 
prix  à  l'académie  «l'Amsterdam; 
les  trois  années  suivantes,  la  so- 
ciété connue  sous  le  nom  de  FelLtx 
Meritis,  lui  décerna  aussi  ses  pre- 
miers prix  pour  deux  grands  pay- 
sages et  un  tableau  d'histoire.  En 
1804  et  i8o5,  il  obtint  les  mêmes 
avantiiges  ù  l'académie  de  Leyde, 
pour  son  grand  tableau  de  Aj.vt- 
mnqae,  blessé  par  Alexandre,  et 
pause  par  ce  prince,  et  pour  un 
paysage  re])résentant  un  Clair  de 
lune  cl  an  village  en  feu.  M.  Pie- 
neman fut  quelque  temps  après, 
nommé  professeur  de  dessin  à 
l'école  d'artillerie  et  de  génie  éta- 
blie alors  à  Amcrsi'ort,  et  trans- 
portée depuis  à  Ddft.  Il  conserv* 


298 


PIE 


cette  place  sous  les  différens  gon- 
vernemens  qui  se  sont  succédé 
en  Hollcinde;  et  depuis  la  création 
du  nouveau  royaume  des  Pays- 
Bas,  il  a  été  appelé  par  le  souve- 
rain,  en  1816,  à  la  direction  du 
cabinet  royal  de  tableaux  à  La 
Haye,  fonctions  qu'il  remplit  en- 
core aujourd'hui.  On  doit  an  pin- 
ceau facile  et  gracieux  de  M.  Pie- 
neman,  une  foule  de  tableaux  de 
divers  genres  qui  enrichissent  les 
cabinets  de  la  famille  royale  et  de 
quelques  particiditrs.  En  ces  der- 
niers temps,  il  s'cat  surtout  occu- 
pé de  satisfaire  à  l'orgueil  natio- 
nal des  Belges,  en  peignant  des 
tableaux  de  bataille  où  leurs  faits 
d'armes  sont  retracés.  Le  combat 
dit  des  Qualre-Bras,  dans  lequt-l 
le  jeune  prince  d'Orange  fut  bles- 
sé, a  fourni  le  sujet  d'un  tableau 
de  20  pieds  de  largeur,  sur  i3  d'é- 
lévation, commandé  par  le  gou- 
vernement, et  qui  passe  pour  le 
chef-d'œuvre  de  l'auteur.  Il  a  été 
successivement  exposé  à  Amster- 
dam, à  Bruxelles  et  à  Gand,  et  on  le 
cite  comme  im  de  ceux  qui  font 
le  plus  d'honneur  à  l'école  hollan- 
daise moderne.  M.  Pieneman  est 
ausî^i  membre  des  sociétés  des 
beaux-arts  d'Anvers,  de  Gand  et 
de  Bruxelles.  Cette  dernière  ville 
lui  a  en  outre  décerné,  en  1818, 
une  médaille  d'honnetu". 

PIERRES(PinLipPE-UENis),l'nn 
des  plus  célèbres  typographes  du 
i8°"  siècle,  naquit  à  Paris  en  1  74  '• 
A  la  suite  d'excellentes  études,  il 
embrassa  la  profession  d'impri- 
meur, et  acquit  bientôt,  par  la 
connaissance  approfondie  de  son 
art ,  une  réputation  méritée.  Il 
obtint  le  titre  de  premier  impri- 
meur du  roi,  et  fut  choisi  par  le 


PIE 

roi  de  Pologne  pour  fournir  le  . 
plan  de  la  bibliothèque  publique 
que  ce  prince  voulait  établira  Var- 
sovie, et  faire  le  choix  des  livres 
qu'elle  devait  contenir.  Pierres  a 
publié  sur  la  typographie  plu- 
sieurs ouvrages  du  plus  grand  in- 
térêt pour  ceux  qui  pratiquent  cet 
art.  La  révolution  détruisit  sa  for- 
tune, et  le  força  d'abandomier  Pa- 
ris, pour  aller  chercher  un  refuge 
à  Versailles.  Il  ne  tarda  pas  à  quit- 
ter cette  ville,  et  se  retira  à  Dijon, 
où  il  vécut  dans, l'obscurité  jus- 
qu'à l'époque  de  sa  mort,  arrivée 
le  28  février  1808.  Il  occupait 
alors  un  modique  emploi  au  bu- 
reau de  la  poste  aux  leltres  de  Di- 
jon. Dans  le  temps  où  la  philoso- 
phie répandait  ses  lumières  sur 
l'Europe,  et  particulièrement  sur 
la  France,  Pierres  fut  lié  avec  plu- 
sieurs hommes  célèbres,  notam- 
ment avec  Francklin  et  Dau- 
benton. 

PIERRET  (J.  N.),  député  à  la 
convention  nationale  par  le  dé- 
partement de  l'Aube,  il  se  réunit 
à  la  minorité  dans  le  procès  du  roi, 
et  vola  la  détention  et  le  bannis- 
sement à  la  paix.  Il  fut  un  des 
membres  de  l'assemblée  qui,  après 
la  révolution  du  9  thermidor  an 
2,  poursuivirent  à  leur  tour  avec 
acharnement  le  parti  vaincu,  et  il 
se  rendit  à  cette  époque  dans  le  dé- 
partement delà  Haute-Loire, où  il 
épura  les  autorités.  Au  mois  d'a- 
vril 1795,  nommé  secrétaire  de  la 
convention,  et  le  20  mai  suivant 
membre  du  comité  de  sûreté  gé- 
nérale, il  présenta  à  la  conven- 
tion, au  commencement  de  sep- 
tembre, un  rapport  où  il  attaquait 
avec  violence  les  membres  des  so- 
ciétés populaires,  les  accusant  d'à- 


PIE 

voir  provoqué  des  décrels  et  des 
mesures  ultra -révolutionnaires. 
Le  1 1  novembre  de  la  même  an- 
née, il  apostropha  son  collègue 
IVomme,  et  lui  reprocha  de  s'ex- 
primer avec  trop  de  faiblesse  sur 
la  conduite  exécrable  de  Carrier. 
M.  Pierret  passa  de  la  convention 
au  conseil  des  cinq-cents,  dont  il 
sortit  le  20  mai  1797.  Il  n'a  plus 
rempli  de  fonctions  législatives  de- 
puis cette  époque. 

PlEimON  (J.  J.  L.),  néàBriey, 
département  de  la  Moselle,  fut 
l'un  des  premiers  qui,  à  l'époque 
de  la  révolution,  prirent  la  cocarde 
liicolore.  Il  fonda  un  club  dans  sa 
ville  natale,  et  fut,  en  1790,  nom- 
mé juge  au  tribunal  civil  de  cette 
même  ville.  Elu,  en  1791,  député 
à  l'assemblée  législative,  il  y  mon- 
tra peu  de  caraclère,  et  chercha 
siicce.'si veinent;'»  se  rapprocher  de 
tous  les  partis.  Après  la  session , 
il  fut  nommé admiuistrateurde  son 
département.  Il  en  remplissait  en- 
core les  fonctions  lorsqu'en  1794» 
on  l'accusa  d'avoir  employé  des 
manœuvres  secrètes  pour  entraver 
la  vente  des  biens  nationaux.  Tra- 
duit pour  ce  fait  au  tribunal  ré- 
volutionnaire, il  fut  condamné  à 
mort,  comme  cons{>irateur,  le 
1 7  floréal  an  3  (6  mai  1 794)-  Pier- 
ron  n'avait  pas  encore  atteint  !-a 
33*  année. 

PIERROT  (François),  notaire 
à  Anvilliers-les-Forges,  était  mem- 
bre du  département  des  Ardennes 
à  l'époque  de  la  nomination  des 
députés  à  l'assemblée  législative. 
Il  y  fut  élu  par  son  département, 
et  ne  s'y  lit  remarquer  qu'en  s'op- 
posant  vivement  à  la  permanence 
des  comités.  M.  Pierrot  ne  fut 
point  élu  à  la  convention,  et  rcn- 


PIE  299 

tra  alors  dans  l'obscurité  de  la  vie 
privée. 

PIESTRE  (Jean-Louis),  impri- 
meur-libraire à  Lyon,  a  publié 
dans  cette  ville  plusieurs  ouvrages 
relatifs  à  sa  profession.  On  cite  les 
suivans  :  1°  la  Synonymie  françai- 
se, ou  Dictionnaire  dé  tous  les  sy- 
nonymes français  définis  jusqu'à  ce 
jour,  par  MM.  Girard,  Beauzée, 
Roubaud,  G uizot  et  autres  auteurs, 
1810,  2  vol.  in-13;  2°  Nouveau 
Vocabulaire  français  ,  4""  édition, 
18 13,  in-8"  :  cet  ouvrage  fut  fiiit 
en  société  avec  Cormion. 

PIET  (N.),  nommé  en  i8i5, 
par  le  déparlement  de  la  Sarthe, 
membre  de  la  chambre  des  dépu- 
tés, siégea  constamment  au  côté 
droit,  prit  part  à  toutes  les  délibé- 
rations importantes  qui  eurent  lieu    ^ 
dans  les  sessions  successives  jus- 
qu'en  1819.   Dès  le  g  novembre 
181 5,  dans  les  discussions   aux- 
quelles, donna  iieu  la  loi  contre  les 
cris  et  les  écrits  srditinux,   il  pré- 
tend «  que  le  travail  du  rapporteur 
))(M.  Pasquier)  est  fait  pour  ho- 
«norer  son  auteur;»   se  prononce 
pour  l'application  de  la  peine  de 
mort  dans  le  double  cas  où  le  dra- 
peau tricolore  aurait  été  arboré, 
et  dans  celui  de  menace  et  de  pro- 
vocation   contre   la   personne   du 
roi;  fait  à  cette  occasion  une  in- 
terpellation énergique  aux  habi- 
tans  de  l'Ouest,  du  Midi,  du  Nord 
et  de  l'Est;  attaque  les  philoso- 
phes, et  vote  enfin  avec  l'amen- 
dement de  substituer  la  peine  de 
inort  à  la -ndéporlation.  Il  appuie 
ensuite  M.  Roux-de-Laborii;  sur  lu 
question   d'améliorer   le   sort  du 
clergé.  Quant  aux  élections,  il  dit 
que.  ('  c'est  avec  une  circonspec- 
n  lion  religieuse  que  la  commis^»- 


ooo 


PIE 


»  sion  a  proposé  deux  modifications 
»  à  la  charte ,  et  (prelle  se  félicite 
"  de  n'en  avoir  proposé  que  deux.  » 
Il  fait  un  rapport  sur  la  proposi- 
îion  de  M.  Luchéze-Murel ,  ten- 
dant à  rendre  aux  prêtres  l'état-ci- 
vil,  et  vote  pour  son  adoption.  Au 
sujet  de  l'extinction  des  pensions 
ecclésiastiques ,  il  démontre  que 
pour  l'église,  l'embarras  n'est  pas 
d'administrer,  mais  d'avoir  des 
biens  à  administrer.  M.  Piet  suit 
les  mêmes  principes  dans  la  ses- 
sion de  1816  à  1817.  £n  parlant 
sur  les  établissernens  ecclésiasti- 
ques,  ((Vous  savez  bien,  dit  l'o- 
«ratfur,  ce  que  cest  qu'un  évê- 
«que;  l'évêque  et  le  titulaire  s'u- 
wniront  pour  former  au  i-oi  la  de- 
«  aiande  d'être  autorisés  à  faire  do- 
»  nation.»  Il  vote  en  consé(|uence 
avec  la  commission.  Lorsqu'on  a- 
pita  de  nouveau  la  question  des 
élections,  il  lit  une  critique  vio- 
lente du  projet  et  vota  contre,  s'ap- 
puyant  sur  cette  allégation  qui  pa- 
rut égayer  la  chambre  :  ((  On  a  dit 
«•que  les  électeurs  seront  témoins 
»de  ce  qui  se  passera,  moi  je  sou- 
«liens  qu'ils  n'y  verront  rien...» 
Il  proposa  aussi  des  amendemens 
iiti  projet  de  loi  relatif  aux  prison- 
niers pour  dettes,  et  dans  la  dis- 
cussion du  budget,  il  compara  les 
députés  qui  sondent  les  plaies  de 
l'état  aux  chirurgiens  qui,  appelés 
à  faire  des  amputations  cruelles, 
se  bouchent  les  oreilles  et  s'ar- 
ment d'insensibilité  pour  ne  pas 
entendre  les  cris  de  leurs  malades; 
et  après  s'être  élevé  contre  l'alié- 
Tiation  des  bois,  apanage  des  rois 
de  France,  et  contre  la  vente  des 
bois  du  clergé ,  il  se  prononce 
pour  l'emprunt,  et  vote  pour  le 
lenvoi   du    projet  au  gouverne- 


PIE 

ment.  Dans  la  session  de  1818, 
lors  de  la  loi  du  recrutement,  il 
parle  contre  l'avancement  par  an- 
cienneté ;  niais  dans  la  discussion 
du  budget ,  il  s'indigne  de  ce  qu'il 
oflVe,  comme  celui  des  années 
précédentes,  un  excédant  des  dé- 
penses sur  les  recettes,  parcourt 
tous  les  moyens  de  se  procurer  de 
l'argent  etnployés  jusqu'à  ce  jour; 
compare  la  France  à  Saturne  ,  qui 
dévore  les  ressources  des  généra- 
tions futures,  et  propose  d'acquit- 
ter toutes  les  dépenses  de  l'étal 
avec  486  millions.  M.  Piet,  dans 
les  sessions  snivanteg,  a  occupé  la 
tribune,  et  y  a  montré  les  mêmes 
sentimens  et  la  même  éloquence. 
Il  fait  partie  de  la  chambre  actuel- 
le  (.824). 

PIETllO  (Michel  di),  prélat 
romain,  naquit  à  Albano,  le  18 
janvier  i747-  H  commença  ses 
études  ecclésiastiques  au  sémi- 
naire épiscopal  de  celle  ville,  et 
les  termina  à  Rome.  Après  avoir 
obtenu  de  brillans  succès  dans  le.<» 
chaires  de  l'université  grégorien- 
ne et  dans  l'archi -gymnase  ro- 
main ,  sur  l'histoire  ecclésiasti- 
que et  sur  le  droit  canonique,  il 
fut  nommé,  par  Pie  VI,  secrétaire 
delà  congrégation  extraordinaire 
créée  par  suite  des  troubles  qui  sur- 
vinrent dans  l'église,  dès  son  avè- 
nement au  souverain  pontificat. 
«  File  eut  à  s'occuper  entre  autres 
aflaires,  dit  l'auteur  d'une  notice 
sur  M.  di  Pietro,  du  synode  de 
Pistoie,  tenu  par  l'évêque  Ricci, 
et  dont  les  décisions  étaient  favo- 
rables à  ce  qu'on  nomme  les  jan- 
sénistes. Cette  affaire  établit  des 
rapports  fréquens  entre  M.  di 
Pietro  et  le  savant  Gerdil  ;  et  ils 
concoururent  ensemble  à  la  ré- 


PIE 

daction  de  la  bulle  Juctorem  fidei, 
publiée  en  1794'  contre  les  actes 
du  synode.  On  cite  encore  de  M. 
di  Pit'lro,  un  mémoire  conWii  les 
actes  de  la  même  assemblée.  «La 
manière  dont  M.  di  Pietro  justi- 
fia dans  cette  circonstance  la  con- 
fiance du  chef  de  l'église,  lui  va- 
lut toute  sa  bienveillance,  et  il 
devint  successivement,  mais  en 
peu  de  temps,  évêque  d'Isaure  in 
partibus ,  considteur  de  l'inquisi- 
tion, examinateur  du  clergé,  en- 
fin camérier  d'honneur  de  S.  S. 
Pie  VI,  forcé  de  quitter  Rome  en 
1798,  nomma  M.  di  .Pietro  délé- 
gué apostolique ,  pour  tout  le 
temps  que  durerait  son  absence. 
«  Dans  ces  circonstances  diffici- 
les, ajoute  l'auteur  de  la  notice 
que  nous  avons  déjà  citée,  M.  di 
Pietro  eut  à  répondre  daas  diver- 
ses parties  de  la  chrétienté,  sur 
beaucoup  de  questions  délicates. 
On  cite  plus  particulièrement  de 
lui,  dans  la  collection  des  brefs 
de  Pie  VI,  une  Lettre  à  M.  l'évê- 
qae  de  Grasse,  et  une  décision 
sur  le  serment  de  haine  à  la  royau- 
té, exigé  en  France  des  ecclésias- 
tiques ,  à  cette  époque  :  l'une  et 
l'autre  sont  datées  (lu24  septembre 
1798.  »  Pie  VII  étant  monté  sur 
le  trône  pontifical  après  la  mort 
de  son  prédécesseur,  M.  di  Pie- 
tro devint  patriarche  de  Jérusa- 
lem et  cardinal  en  1801.  Il  suivit 
Sf)n  sfMiverain  en  l'rance,  lorsque 
S.  S.  s'y  rendit  poin-  sacrer  Napo- 
léon comme  empereur.  Nommé 
jtrel'et  de  la  propagande,  il  prit 
une  part  intime  à  toitcs  les  afl'ai- 
n  s  (le  l'cgîise,  et  fut  le  conseil  et 
le  confident  du  pape,  qui  le  noui- 
nia,  en  1809,  lors  de  ses  discus- 
sions  avec  l'empereur,   son  dé- 


PIE  3oi 

légué  pour  le  remplacer  à  Rome, 
d'où  il  s'éloignait.  Mais  M.  di 
Pietro  fut  bientôt  forcé  lui-même 
de  se  rendre  à  Paris.  Ce  prélat  est 
accusé  par  Napoléon,  dans  les 
Mémoires  publiés  par  M.  de  Mon- 
tholon,  d'avoir  voulu  établir  dans 
les  sièges  vacans,  des  vicaires  a- 
postoliques,  et  l'on  voit  dans  ce 
même  ouvrage  qu'il  en  conserva 
un  vif  ressentiment  contre  le  pré- 
lat étranger.  Celui-ci  ajouta  de 
nouveaux  motifs  au  mécontente- 
ment de  l'empereur.  Refusant, 
en  1810,  de  se  rendre  à  la  céré- 
monie religieuse  du  mariage  de 
Napoléon  avec  l'archiduchesse 
Marie-Louise  jJI-^ût  privé  de  ses 
revenus,  et  reçut  la  défense  de 
porter  les  insignes  de  ses  dignités. 
Exilé  avec  les  cardinaux  Gabrielli 
et  Oppizzoni,  à  Semur,  départe- 
ment de  la  Côte-d'Or,  M.  i\\  Pie- 
tro rédigea  le  bref  que  le  pape 
adressa  dans  la  même  année  au 
cardinal  Maury ,  archevêque  de 
Paris.  Cette  opiniâtre  résistance 
le  fit  enfermer  lui  et  ses  deux 
collègues,  au  donjon  de  Vincen- 
nes ,  d'où  ils  ne  sortirent  qu'en 
181  3,  à  l'époque  de  la  réconcilia- 
tion de  Napoléon  avec  le  pape.  Il 
se  rendit  i\  Fontainebleau,  près  de 
S.  S.,  dont  il  fut  encore  séparé  au 
commencement  de  1814.  La  Fran- 
ce étant  subjuguée  à  cette  époque 
parles  armées  étrangères,  le  car- 
dinal di  Pietro  fut  libre  enfin  de 
retourner  à  Konie ,  où  Pie  VII  le 
nomma  sur-le-champ  grand-péni- 
tencier et  préfet  de  l'index,  et  en 
i8itj,  cardinal-évêque  d'Albano. 
Pourvu,  en  1820.  des  sièges  réu- 
nis de  Porto  et  de  Sainte-Rulline, 
il  mourut  le  2  juillet  1821.  Le 
cardinal  di   Pietro,  «  nourri  dans 


002 


PIE 


les  principes  du  clergé  romain, 
possédait  aussi  cette  trempe  de 
caractère  circonspect  et  flexiiîle, 
qui  semble  en  faire  partie  ;  il  était 
considéré  comme  une  des  lumiè- 
res du  sacré-coUége,  tant  pour  ses 
connaissances  théologiques  que 
pour  sa  capacité  dans  les  affaires.» 

PIETTE  (J.  B.),  fut  nommé 
par  le  département  des  Arden- 
ues,  député  suppléant  à  la  con- 
vention nationale,  et  n'y  fut  ap- 
pelé qu'après  le  procès  de  Louis 
XVI.  Il  y  professa  des  principes 
modérés,  parla  en  faveur  des 
créanciers  des  émigrés,  prit  la 
défense  de  plusieurs  citoyens 
du  département  des  Ardennes, 
traduits  injustement  devant  les 
tribunaux;  enfin  il  s'intéressa  vi- 
vement pour  iM"*  de  Sombreuil  , 
qui  s'était  dévouée  avec  un  cou- 
rage si  héroïque  pour  sauver  les 
jours  de  son  père.  Ce  langage 
austère  fut  fatal  à  son  auteur,  qui 
fut  traduit  devant  le  tribunal 
révolutionnaire  ,  condamné  à 
mort ,  et  exécuté  à  l'âge  de  76 
ans. 

PIEYRE  (Alexandre),  né  à  Nî- 
mes, en  1752,  d'une  famille  de 
négooians,  fit  ses  études  à  Paris, 
et  fut  occupé  ensuite  dans  le  com- 
merce de  son  père  jusqu'à  l'âge 
de  3o  ans.  Le  goût  des  lettres  l'a- 
vait toujours  emporté  chez  lui 
sur  le  goût  des  affaires;  et  sa  pen- 
sée s'étant  tournée  vers  le  théâtre, 
il  fit  jouer  à  Nîmes  et  à  Rloutpel- 
lier,  en  1782,  une  comédie  en  5 
actes  et  en  vers,  intitulée  :  l'É- 
cole des  Pères.  Le  succès  qu'elle 
obtint  lui  fit  espérer  qu'elle  réus- 
sirait à  Paris.  Elle  fut  reçue  au 
Théâtre- Frafiçais,  et  il  vint,  en 
J787,  pour  la  faire  jouer  :  son  at- 


PIE 

tente  ne  fut  pas  trompée.  Celte 
pièce  eut  quarante  représenta- 
tions dans  cette  année.  M.  le  duc 
de  Duras  lui  écrivit,  au  nom  du 
roi  et  de  la  reine,  pour  lui  expri- 
mer leur  satisfaction  de  la  morale 
de  cette  pièce;  et  il  lui  remit  une 
riche  épée ,  aux  armes  de  France 
sur  la  garde,  et  avec  ces  mots  au- 
tour de  la  peignée  :  Don  du  roi  à 
M.  Pieyre^  auteur  de  l'École  des 
Pères,  i"  février  1788.  Il  dédia 
cette  comédie  à  M.  le  duc  de  Char- 
tres, aujourd'hui  duc  d'Orléans, 
alors  âgé  de  1.4  ims;  et  il  fut  des- 
tiné à  lui  être  attaché,  au  sortir 
de  son  éducation.  Regardé ,  dès- 
lors,  comme  tenant  à  la  maison, 
il  devint  assidu  auprès  du  jeune 
prince;  et  vers  la  fin  de  1790,  il 
eut  son  logement  à  côté  de  lui  au 
Palais-Royal.  Au  mois  de  juin 
1791,  il  le  suivit  à  sa  garnison  de 
Vendôme,  puis  à  Valenciennes  et 
ensuite  à  Metz,  d'où  il  revint  a- 
près  l'affaire  de  Valmy.  Le  prin- 
ce partit  sans  délai  pour  la  Flan- 
dre ;  M.  Pieyre  ne  put  pas  le  sui- 
vre, s'étant  marié  en  octobre,  à  la 
veuve  de  Bartiie.  Il  l'emmcMa 
dans  sa  famille,  où  ils  passèrent 
l'hiver.  Ils  se  retirèrent  au  prin- 
temps ,  dans  sa  campagne,  à  i5 
lieues  de  la  ville,  et  ils  y  vécurent 
à  l'abri  des  agitations  de  celfe  é- ' 
poque,  mais  non  sans  de  vives 
craintes.  La  chute  de  Robespierre 
leur  rendit  le  calme,  et  ils  restè- 
rent encore  quelques  années  dans 
le  département  du  Gard.  Ils  vin- 
rent s'établir  à  Paris,  eu  1800, 
conservant  quelque  aisance,  après 
des  pertes  assez  con-idérables.  51 
préféra  son  indépendance  au  trai- 
tement d'une  place  qu'il  aurait 
pu  obtenir,  et  il  n'eu  rechercha 


PIE 

anciMie.  Il  perdit  sa  femme  en  1806. 
Resté  sans  enfans,  il  se  retira  chez 
son  frère,  préfet  à  Orléans,  par- 
tageant l'année  entre  cette  ville  et 
Paris,  ju<*qu'à  la  restauration.  Il 
retrouva  chez  M.  le  duc  d'Orléans, 
l'ancienne  bienveillance  dont  M. 
le  duc  de  Chartres  l'avait  honoré; 
mais  son  â^^e  et  le  peu  de  goftt 
qu'il  a  toujours  eu  pour  les  affai- 
res, le  détournèrent  de  la  pensée 
d'entrer  dans  son  administration. 
Toutefois  désirant  vivement  d'ê- 
tre à  portée  de  cultiver  les  bontés 
de  celte  auguste  famille,  il  dévoua 
ses  loisirs  aux  intérêts  de  M"° 
d'Orléans  ,  qui  donnaient  alors 
peu  d'occupation  par  la  modicité 
de  sa  fortune.  Quand  son  héritage 
lui  permit  de  se  former  une  mai- 
son, il  y  eut  le  titre  de  secrétaire  des 
commandemens  ;  mais  séparé  du 
soin  des  aflaires,  remises  en  d'au- 
tres mains.  Il  a  fait  imprimer,  en 
1808,  deux  volumes  de  pièces  de 
théâtre,  en  vers;  l'une  d'elles,  en 
cinq  acte'^,  reçue  en  1800,  à  la 
Comédie-Française,  et  sur  le  point 
d'être  jouée  en  1802,  fut  soumise 
à  une  seconde  lecture,  et  rayée  du 
tableau.  Depuis  cette  époque,  il 
a  renoncé  à  travailler  poir  la 
scène ,  ne  se  reconnaissant  point 
les  qualités  qui  en  rendent  l'accès 
facile.  J/Ecole  des  pères,  qui  est 
restée  au  répertoire,  et  qui,  sou- 
vent reprise,  a  été  toujours  revue 
avec  le  même  intérêt ,  est  mise  en 
oubli  depuis  six  années,  sans  qu'il 
ait  cherché  à  en  rappeler  le  sou- 
venir. Cet  oubli  des  comédiens 
est  justement  blâmé  parle  public 
L'Ecole  (les  pires  est  una  l)onne 
comédie,  où  la  morale  se  déve- 
loppe avec  un  intérêt  toujours 
croissant.  On  y  rctaarque  un  trait 


PIE  5o5 

frappant  quia  beaucoup  contribué 
au  succès  de  la  pièce,  et  qui  fait 
toujours  la  même  impression  :  au 
momentoùle  fils,  après  avoir  ou- 
vert le  secrétaire  de  son  père,  va 
pour  s'emparer  de  l'argent,  il  y 
trouve  un  papier  sur  lequel  est  é- 

crit  : Acceptez,  ne  dérobez  pas. 

PIEYRE  (le  baron),  frère  du 
précédent,  est  né  à  Nîmes  en  1755, 
ety  fit  ies  études  avec  succès.  Jeime, 
il  séjourna  une  année  en  Italie, 
que  son  goCU  pour  les  beaux-arts 
lui  fit  parcourir,  et  fut  reçu  à  Ro- 
me membre  de  l'académie  des 
Arcades.  De  retour  à  Nîmes,  il 
fut  admis  à  l'académie  de  cette 
ville.  Membre  du  directoire  du 
département  du  Gard  en  1790, 
et  nommé  en  1791  à  l'assem- 
blée législative,  il  partagea,  a- 
près  le  10  août  1793,  les  crain- 
tes de  ceux  qui  comme  lui  avaient 
siégé  au  côté  droit,  où  il  s'était 
avantageusement  fait  connaître 
dans  les  comités.  Lorsque  après 
la  chute  de  Robespierre  la  con- 
vention nationale  voulut  réta- 
blir l'ordre,  il  fut  appelé  à  la 
place  de  procureur-syndic  du  dis- 
trict de  Nîmes,  et  peu  après  à  cel- 
le de  membre  du  déparlement  du 
Gard,  dont  il  était  président.  Lors 
de  la  création  des  préfectures,  il 
devint  préfet  du  département  de 
Lot-et-Garonne.  Sa  facile  et  con- 
ciliante administration  lui  mérita 
l'ordre  de  la  légion-d'honneur,  dès 
l'époque  de  son  institution;  et  en 
i8o(),  après  6  ans  d'exercice,  la 
préfecture  du  Loiret,  sans  aucune 
demande  de  sa  part.  Présenté  deux 
fois  comme  candidat  pour  le  sénat- 
conservateurparles  collèges  électo- 
raux de  Lot-et-Garonne  et  du  Gard, 
il  continua  ses  fonctions  adminis- 


5o4 


PIG 


tratives  à  Orléans  jusqu'à  la  fin  d'a- 
vril 1814  ;  se  retira  alors  à  Nî- 
mes; et  au  retour  de  Napoléon  de 
l'ile  d'Elbe,  nommé  par  ce  collège 
à  la  chambre  des  représentans,  il 
envoya  sa  non  acceptation.  Son 
fils,  qui  était  depuis  4  anssons-pré- 
iet  à  Nîmes,  donna  alors  sa  démis- 
sion. Les  troubles  du  département 
du  Gard  les  ont  amenés  à  Paris, 
où  ils  résident  depuis  avec  leur  ia- 
inille.  Son  titre  de  baron  fut  con- 
firmé par  le  roi.  M.  Pieyre  termi- 
ne paisiblement  sa  carrière  dans 
la  culture  des  lettres,  à  laquelle  il 
regrettait  de  ne  pouvoir  assez  se 
livrer,  au  milieu  des  soins  et  des 
travaux  que  lui  imposaient  ses  de- 
voirs de  fonctionnaire  public. 

PIGALLT-LEBRUN  ,  homme 
de  lettres,  un  des  plus  féconds 
écrivains  de  notre  temps,  et  qui  a 
particulièrement  obtenu,  dans  le 
genre  du  roman,  des  succès  qu'on 
peut,  sous  tous  les  rapports  ,  ap- 
peler populaires.  Doué  d'une  gran- 
de facilité  pour  le  travail  et  de  fi- 
magination  la  plus  vive,  il  a  con- 
sacré la  plus  belle  partie  de  sa  vie 
à  ces  compositions,  dont  le  nom- 
bre s'est  accru  au  point  de  former 
une  collection  de  40  volumes  en- 
viron.Tous  les  ouvrages  de  M.  Pi- 
gault-Lebrun  sont  loin  sans  doute 
de  mériter,  sans  restrictions,  les 
suffrages  des  lecteurs;  mais  ou 
trouve  dans  tous  un  talent  incon- 
testable, beaucoup  de  verve  et 
d'originalité,  de  la  vérité  d ms  le 
tracé  des  principaux  caractères, 
dont  quelques-uns  déj^énèienl  oe- 
pendant  en  caricatuies,  de  fart 
dans  le  tissu  des  évéïiemens,  et 
par-dessus  tout  une  gaieté  tVaiirhe 
et  spirituelle,  qui  se  communique 
«m  dehors,  et  qui  a  souvent  déridé 


PIG 

les  fronts  les  plus  sévères.  Plu- 
sieurs de  ces  romans  paraissent 
avoir  été  conjposès  pour  les  der-- 
nières  classes  de  la  société;  la  phi- 
sophie  de  l'auteur  est  moqueuse  et 
bouffonne;  et  dans  ses  tableaux 
grivois,  pour  ne  rien  dire  de  plus, 
les  mœurs  et  le  bon  goût  ne  sont 
point,  selon  lesnondireuseset  jus- 
tes critiques  qui  en  ont  été  faites, 
assez  respectés  ;  niais  malgré  ces 
critiques,  et  peut-être  par  le  genre 
de  torts  mêmes  qui  leur  ont  été  re- 
prochés, ces  ouvrages  n'en  ont  pas 
moins  été  recherchés  avec  avidité 
par  le  public.  M.  Pigault-Lebrun 
s'est  aussi  acquis  de  ia  réputation 
comme  auteur  dramatique.  Ses 
comédies  du  Pessimiste,  de  l'Â- 
mour  et  la  Raison ,  des  Rivaux 
d'eux-mêmes,  ses  opéras  du  Petit 
Matelot,  du  Major  Palmer  (le  su- 
jet de  ce  dernier  est  tiré  de  son 
roman  des  Barons  de  Felsheim), 
son  drame  de  Chartes  et  l Jardine, 
qui  retrace  une  des  aventure"  de 
sa  jeunesse,  etc.,  sont  restés  au 
théâtre,  et  se  revoient  avec  plai- 
sir. 11  avait  déjà  donné,  peu daul  les 
premières  aimées  de  ia  révolu- 
tion, quelques  pièces,  qui  fuient 
Irés-.ipplaudies,  telles  que  les 
Dragons  et  les  Rènéfl'rtines ,  les 
Dragons  en  cantonnement ,  etc.  , 
joués  en  1790  et  • '■94-  On  lui  at- 
tribue de  plus  <pielqu«  s  ouvrages 
auxquels  il  n'a  point  juge  à  j)ro- 
pos  d'attacher  son  nom ,  entre 
autres  le  Citateur ,  qui  fut  ^aisi 
par  la  p<dic6  iuq)ériale  dans  un 
nuurieiit  de  fervtur religieuse.  Les 
autres  uuviviges  de  M.  f'ig.iult- 
Lebrun  sont  :  1  les  Barons  de  Ftls- 
licini,  4  vol.  iri-12;  3"  Mon  Oncle 
Thomas,  4  ^'O'-  in- 12;  o"  Jngéli- 
ne  et  Jeanneton,  1  vol.  in- 1  a  (une 


PIG 

<3es  plus  agréiibles  productions 
de  l'auteur);  4°  VErifant  du  Car- 
naval, 2  vol.  in-i;i;  5"  M.  Botte, 
4  vol.  in-12;  6"  la  Folie  espagno- 
le,  4  ^t)l.  in- 12;  7"  Idées  généra- 
les sur  notre  position  et  celle  des 
differens  états  de  l'Europe,  1800  , 
I  vol.  in-8°;  8°  Jérôme,  iSo-l,  4 
vol.  in-12;  9"  Théâtre  et  Poésies^ 
1806,  6  vol.  in- 12;  10"  la  Famille 
Luceval ,  180G,  4  vol.  in-i:!;  11° 
l'Homme  à  projets,  1807,  4  vol. 
in-12;  12"  ili.  de  Roberville,  4  vol. 
in-12  (faisant  suite  à  l'ouvrage 
précédent)  ;  lô"  Une  Macédoine, 
1811,  /)  vol.  in-12;  14°  Tableaux 
de  société,  ou  Fanc/iette  et  nonori- 
nc,  i8i5,  el  2'  édition,  i8i-,  4 
vol.  in-12;  i5*  Adélaïde  de  Mé- 
ran,  181  5,  4  vol.  in- 12  (concep- 
tion tri>tc  et  malheureuse,  dont 
les  sombres  lahicaux  contrastent 
avec  les  autres  productions  de 
l'auttiur);  i(i'  Mélanines  littéraires 
et  critiques ,  i8i»j,2  vol.  in-12; 
17°  Encore  du  magnétisme,  1817, 
in-8";  18"  le  Garçon  sans-souci, 
1818,  2  vol.  in-12;  \(}"  l'Officieux, 
1818,2  v(d.  in-12;  20"  l'Officieux, 
etc.  M.  l'igaull- Lebrun  ,  après 
s'être  si  long-temps  oc<:upé  de 
romans  et  d'aventm-es  imaginai- 
rt's,  vient  tout  récemmeni  de 
consacrer  sa  plume  aux  vérités 
liisloriques.  lia  publié,  en  18245 
les  deux  premiers  volumes  d'un 
grand  ouvrage  intitulé  :  Histoire 
de  France,  abrégée,  critique  et  phi- 
losophique,  à  l'usage  des  gens  du 
monde,  avec  celte  épigraphe  :  La 
vérité,  foule  la  vérité,  rien  que  la 
vérité.  L'auteur  a  très- bien  vu 
rienmensc  lacune  (|ue  laiss:.ient 
dans  nos  annale^  el  ses  devanciers 
el  nos  contemporains.  Ce  qui  lui 
aj>parlient  en    propre,   et  ce  qui 

I.  XV J. 


PIG 


3o5 


fait  désirer  vivement  la  continua- 
tion de  ce  travail  important,  c'est 
le  soin  que  l'auteur  donne  à  tous 
les  détails,  l'amour  de  la  vérité  qui 
le  guide,  et  cet  esprit  d'impar- 
tialité qui,  empreint  dans  chaque 
page,  montre  le  travail  qu'il  s'est 
imposé  pour  connaître  ce  qui 
est  vrai,  et  le  devoir  dont  il  ne  s'é- 
carte point  de  le  dire  sans  cesse, sans 
fausse  honte,  et  sans  faux  respect. 
S'il  continue  ainsi  qu'il  acommen- 
ce,  il  prendra  une  place  distinguée 
parmi  les  historiens  de  la  France, 
et  peut-être  sera-t-il  celui  qu'on 
lira  avec  le  plus  de  plaisir,  parce 
qu'il  n'a  ni  la  sécheresse  des  uns, 
ni  la  mauvaise  foi  des  autres ,  ni 
la  bassesse  de  qiielques  historiens 
passés,  ni  l'esprit  de  parti  de  quel- 
ques historiens  présens.  Sous  ce 
rapport  son  travail  est  un  service 
rendu  à  l'époque  présente,  et 
c'est  précisément  parce  qu'on  n'en 
attendait  pas  un  pareil  de  M.  Pi- 
gault-Lebrun  qu'il  faut  lui  savoir 
gré  de  le  rendre,  et  le  féliciter  de 
l'avoir  déjà  en  partie  rendu. 

PIGALLÏ-MAUBAILLARCQ, 
négociant  à  Calais,  frère  du  pré- 
cédent, a  publié  (pielques  ouvra- 
ges estimés,  parmi  lesquels  on  cite 
principalement  la  Famille  pyie- 
land  ou  les  Prodiges,  roman  an- 
noncé comme  traduction  libre 
d'un  ma<iscrit  américain  ,  1807, 
4  vol.  in-12,  et  Isaure  d'Aubigné, 
imitation  de  l'anglais,  1812,  4 
vol.  in-12.  (k>s  deux  écrits  offrent 
de  l'inlérèl,  et  prouvent  une  ima- 
gination  féconde. 

PIGEAU(  N.),  professeur  de  la 
faculté  de  droit  de  Paris  ,  et  an- 
cien procureur  au  Chàielct ,  s'est 
fait  cnnuaîlre  par  des  ouvrages  de 
jurisprudence,  qui  jouissent  de  lu 


3o6 


PIG 


confiance  des  praticiens  et  de  l'es- 
time publique.  Ce  sont  :  i°  Procé- 
dure civile  du  Châtelet  de  Paris  et  de 
toutes  les  juridictions  du  royaume, 
1779,  2  vol.  in-4°;  Q."  Introduc- 
tion à  la  procédure  civile ,  exposée 
par  demandes  et  par  réponses,  1 784» 
in-S";  181 1,  in-8"  ;  iSiô,  in-S"; 
réimprimée  sous  le  titre  de:  Cours 
élémentaire  du  Code  civil,  2  vol 
in-8°  ;  3°  Notions  élémentaires  du 
nouveau  droit  civil,  ou  Exposé  tné- 
thodique  des  dispositions  du  Code 
civil,  i8o4>  2  vol.  in -8°;  4°  ^« 
Procédure  civile  des  tribunaux  de 
France,  détnontrée  par  principes , 
1807,  2  vol.  in -4°;  2^  édition, 
1812,  in-4°;  5°  Cours  élémentaire 
des  codes  pénal  et  d'instruction  cri- 
minelle, 1813;  2*  édition,   1817. 

PIGEON  (N.),  général  répu- 
l)licain,  l'ut  d'abord  simple  soldat; 
il  s'éleva  par  son  courage  et  par 
ses  talens  au  premier  posie  mili- 
taire, et  servit  successivement 
avec  distinction  dans  les  difl'é- 
rentes  armées  que  la  France  op- 
posait alors  sur  plusieurs  points 
î\  ses  ennemis,  mais  il  tut  particu- 
lièrement employé  à  l'armée  d'I- 
talie. 11  s'y  distingua  surtout 
à  la  bataille  de  Roveredo,  où  il 
commandait  les  troupes  légères 
de  la  division  de  Masséna.  Il  avait 
sous  ses  ordres  une  division  de  l'ar- 
mée en  1799,  lorsqu'il  fut  blessé  à 
mort  ;\  la  malheureuse  attaque  de 
Vérone,  dirigée  par  le  général  en 
chef  Schérer.  Il  emporta  l'esti- 
me et  lus  regrets  de  tous  ses  com- 
pagnons d'armes. 

PIGEON  TN.),  remplissait 
les  fonctions  de  juge  au  tribunal 
civil  du  déparlement  de  la  Dor- 
dogne,  lorsqu'il  fut  nommé,  en 
mars  1799,  par  ce  département, 


PIG 

député  au  conseil  des  cinq-cents. 
Il  devint,  en  décembre  de  la  mê- 
me année,  membre  du  corps- 
législatif;  il  en  sortit  en  ï8o3. 
Depuis  lors  il  n'a  plus  çxercé  de 
fonctions  publiques. 

PIGNATELLI  (François),  delà 
maison  des  princes  de  Strongoli , 
capitaine  général  napolitain, naquit 
à  Nuples,  vers  1732.  Il  commença 
sa  carrière  militaire  sous  Charles 
III,  dont  il  encourut  la  disgrâce 
pour  avoir  tué  en  duel  le  cheva- 
lier Pollatrelli.  Plus  heureux  sous 
le  règne  de  son  successeur,  Pigna- 
telli  fut  chargé  de  l'organisation 
d'un  bataillon  de  cadets,  que  les 
ministres  de  ce  jeune  prince  lui 
conseillèrefit  comme  un  amuse- 
ment, et  dont  le  but  caché  était  de 
le  distraire  de  soins  plus  sérieux. 
Cette  proximité  avec  le  roi  ne  fut 
pas  sans  profit  pour  Pignalelli, 
qui  en  devint  le  confident  et  l'ami. 
Il  n'avait  encore  aucune  influence 
dans  les  aflaires,  lorsqu'il  se  pré- 
senta une  occasion  qui  lui  permit 
enfin  de  jouer  un  rôle.  La  chute  de 
ïanucci  et  la  présence  de  la  reine 
au  conseil  (voyez  Caroline  d'Au- 
triche) avaient  détaché  le  cabinet 
de  Naples  de  ses  anciens  rapports 
politiques.  Réuni  à  la  France  et  à 
l'Espagne  ,  ce  p-'iys  faisait  partie 
d'un  système  qui  répondait  à  l'es- 
prit de  la  maison  de  Bourbon, 
et  aux  besoins  du  midi  de  l'Eu- 
rope. La  reine,  n'ayant  en  vue 
que  les  intérêts  de  sa  famille,  tâ- 
chait d'échapper  à  la  tutelle  espa- 
gnole, pour  se  placer  sous  l'in- 
fluence autrichienne,  et  entrer 
dans  la  coalition  des  puissances 
du  Nord.  Charles  III ,  en  sa  qua- 
lité de  père  et  de  prince,  ne  vit 
pas  sans  chagrin  la  tendance  de  la 


PIG 

cour  deNaples,  et  essaya  vaine- 
ment de  s'opposer  à  ces  projets, 
qui  lui  paraissaient  aussi  faux  en 
politique  qu'injurieux  pour  sa  per- 
sotuie.  En  posant  la  couronne  de 
Naples  sur  la  tête  de  son  fils ,  il 
avait  eu  soin  de  l'entourer  de  con- 
seillers fidèles,  qui  par  politique, 
ou  par  devoir,  tenaient  au  pacte 
de  famille  :  mais  l'arrivée  d'Acton 
(  voyez  ce  nom)  et  la  faveur  dont 
l'honorait  la  reine,   dérangèrent 
ces   combinaisons  ,  et   donnèrent 
un  organe  à  la  volonté  de  Caro- 
line. Ce  nouveau  ministre  appor- 
tait dans  le  conseil  de  Naples,  ses 
affections  pour  l'Angleterre,  et  sa 
haine  contre  la  France  et  l'Espa- 
gne.   L'en)pire  qu'il  exerçait  sur 
le  cœur  de  la  reine,  et  l'ascendant 
qu'il  cherchait  à  prendre  sur  l'es- 
prit du  roi,  alarmèrent  le  cabinet 
de  Madrid  ,  et  engagèrent  Charles 
111  à  demander  brusquement  à  son 
fils  le  renvoi  d'un  homme  qui  tra- 
vaillait à  troubler  la  paix  de  leur 
famille,  et  le  système  politique  de 
leurs  états.  Le  roi  fut  frappé  de 
cette  sommation  :   il  avait  de  la 
vénération  pour  son  père,  et  as- 
sez de  bon  sens  pour  sentir  la  jus- 
tesse de  ses  conseils.  Mais  asservi 
déjà  par  son  ministre,  et  n'osant 
pas  contrarier  la  reine,  il  résolut, 
d'après  l'avis  de  l'un  et  de  l'au- 
tre, d'envoyer  un  homme  de  con- 
fiance en   Espagne,  pour  mieux 
disposer  le  roi  à  l'égard  d'Acton,  et 
soutenir  celui-ci  contre  ses  etme- 
mis.  Son  choix  tomba  sur  Pignalel- 
li,i\quilareinedilenpartanl:aQucl- 
»le  que  soit  l'issue  de  votre  négo- 
»  dation,  ma  volonté  est  qu'à  votre 
')  retour  vous  assuriez  le  roi  que 
•  son  père  est  entièrement  revenu 
'•de  ses  préventions  contre  Acton, 


PIG  5o7 

»et   qu'il  n'insiste   plus    sur    son 
»  éloignement.  »  Pignatelli  accepta 
cette  responsabilité,  et  promit  d'a- 
gir d'après  les  instructions  qui  ve- 
naient de  lui  être  communiquées. 
Ce  qu'on  lui  demandait  pourtant 
était  le  comble  de  la  perfidie,  le 
dernier  degré  de  la  corruption  et 
de  la  bassesse  d'un  courtisan  :  il 
devait  trahir  la  confiance  de  son 
roi  et  de  son  ami,  se  faire  un  jeu 
d'un  monarque  aussi  respectable 
que  Charles  III ,  semer  la  discorde 
entre  le  père  et  le  fils  pour  servir 
les  passions  de  la  reine,  et  main- 
tenir en  faveur  un  étranger  qu'il 
n'aimait  pas,  et  dont  il  était  ab- 
horré.   Mais   telle    était  l'opinion 
qu'on  avait  alors  de  la  toute-puis- 
sance de  la  reine,  de  la  nullité  du 
roi,  et  du   peu  d'influence  de  lu 
cour   d'Espagne,    que    Pignatelli 
crut  ne  pas  se  compromettre  beau- 
coup en  se  chargeant  d'une  tra- 
hison et  d'un  mensonge.  Arrivé  à 
Madrid,  il  fut  admis  à  l'audience 
du  roi,  qui  lui  demanda  si  l* hom- 
me était  parti.  Pignatelli  lui  répon- 
dit par  un  mouvement  de  tête  qui 
exprimait  le  contraire  de  ce  que 
le  roi  voulait  savoir.  Charles  llï 
lui  tourna   le  dos,  et  ne  le  revit 
plus.  De  retour  à  Naples,  Pigtta- 
telli  y  rendit  compte  de  sa  mis- 
sion ,  parla  au  roi  dans  le  sens  de 
la  reine,  et   reçut   des  éloges  de 
tous  les  deux,  sur  les  heureux  ré- 
sultats de  cette  négociation.  Mai- 
bien  peu  de  temps  après,  Char- 
les 111  interrompit  sa  correspon- 
dance avec  son  fils,  et  ne  com- 
muniqua plus  avec  lui  que  par  les 
voies  diplomatiques.    Pendant  ce 
temps,    le  système  du    midi   fut 
détruit  à  Naples:  Acton  y  devint 
très-puissant;   le  marquis   de  la 


5o8 


PIG 


Sainbuca  el  les  autres  conscillors, 
dévoués  à  la  cour  d"Es{);;giie  ,  Iti- 
renl   éloignés   du    conseil,    et   la 
reine  putyvoir  ses  vœux  accuri- 
plis,  sans  avoir  désormais  à  crair>- 
dre  de  nouveaux  obstacles.  Char- 
les  m,    en    mourant,    punit   la 
désobéissance  de  son  fils,  en   le 
déshéritant  de  la  couronne  d'Es- 
pagne   et    des    Indes  ;    mais    Pi- 
gnatclli   n'en  resta  pas  moins  le 
lavori  du  roi,  et  le  protégé  de  la 
reine,  dont  il  avait  si  bien  secon- 
dé les  désirs.  Les  trcmblemens  de 
terre    des   Calabres ,  ce    terrible 
fléau    qui    détruisit  la   prospérité 
de  celte  belle  partie  du  royaume 
deNaples,  servirent  à  récompen- 
per   la    fi.lélilé    ou  plutôt   la  dé- 
loyauté de  Pignatelli  ,  qui  fut  in- 
vesti  d'ime    espèce   de  dicl.ilurc 
pour  soulager   ces   malheureuses 
provinces  :  m;iis  le  remède  f>e  lit 
qu'irriter  le  mal,  car  les  hommes 
s'v  montrèrent  aussi  impitoyables 
que  la  nature.  Parmi  les  moyens 
emi)loyi's    pour    l'administration 
temporaire  de    ces  contrées,  on 
imagina  la  fondation  d'une  caisse 
appelée  sacrée ,  à  cause  de  la  des- 
tination qu'elle  avait  de  recueillir 
les  revenus   el   les   richesses  des 
couvens,  qui  existaient  en  Cala- 
bre,  el  dont  le  nombre  égalait  la 
fortune.    Pignalelli    y   renouvela 
l'ex*  mple  de  rapacité  dorme  par 
Verres,  en  Sicile;   mais  celui-ci 
mourut  dans  l'exil ,  taudis  que  Pi- 
gnalelli   revint    tranquillement    à 
Naples  y  jouir  du  fruit  de  ses  con- 
cujisions.  Ce  fait  seul  pourrait  ser- 
vir à  drinnei'  la  mesure  de  ce  qu'é- 
taient les  anciens  gouverntuiiens , 
dont  on  a  vu  la  cluite  avec  éton- 
nemcnt,  lorsqu'on  aiirait  dû  en 
regarder  l'existence   comme    un 


PIG 

miracle.  Nommé  gouverneur  de  la 
ville,  cl  réunissautà  ces  fonctions 
déjà  importantes  en  elles-mêmes, 
celles  de  chef  de  la  police,  que  Me- 
dici  tombé  en  disgrâce  venait  d'a- 
bandonner, Pignalelli  trouva  en- 
core moyen  de  s'enrichir,  en  pré- 
sidant à  la  construclion  de  ce» 
vastes  magasins  à  blés  (i  grandi), 
placés  aux  portes  de  la  capitale, 
et  (|u'on  montre  inainlenant  aux 
étrangers  comme  un  objet  de  cu- 
riosité et  de  luxe.  Au  premier  si- 
gnal de  la  révolution  française, 
Pignalelli  fut  élevé  au  rang  de  ca- 
pitaine-général, et  chargé  de  la 
police  de  tout  le  royaume.  Sa 
maison  devint  alors  le  repaire  im- 
pur des  hommes  les  plus  méprisa- 
bles, et  le  centre  de  ce  système 
d'espionnage  qui  remplit  en  peu 
de  temps  ce  malheureux  pays  de 
délateurs  et  de  victimes  :  sans  sor- 
tir de  ses  iippaiteuieus,  il  pou- 
vait entendre  les  accusations  des 
uns  et  les  gémissemens  des  au- 
tres, ayant  eu  l'allreuse  idée  de 
transformer  en  cachots  les  écu- 
ries et  les  remises  de  sou  palais. 
Altéré  de  richesses  et  d'honneurs, 
il  se  proposa  d'épouser  la  fille  uni-' 
que  du  comte  de  l'Acerra,  riche 
héritière  de  l'illustre  famille  de.s 
Cardenas,  qui,  mariée  depuis  plu- 
sieurs années  au  duc  de  Maddalo- 
ni,  fut  déliée  de  ses  sermens,  en 
vertu  d  un  divorce,  repoussé  par 
les  mœurs  <lu  pays  el  par  les  maxi- 
mes de  l'église.  Mais  les  C(»uluines 
et  les  lois  furent  violées  pour  sa- 
tisfaiie  l'avidité  d'un  favori,  et 
pour  la  misérable  cr.u'nte  de  voii^ 
réunies  deux  grandes  fortimes 
dans  la  même  famille.  Pignalelli, 
sans  influence  dans  le  conseil, 
nepritaùcime  part  active  auxévé- 


riG 

ncmens  de  1798.  Livré  aux  dé- 
tails de  la  police  de  la  capitale  et 
du  royaume,  il  se  vautrait  dans 
toutes  les  iufainies,  et  cédait  à 
toutes  les  suggestions  des  gens 
dont  il  s'était  environné.  Parmi 
les  maux  inévitables  du  despotis- 
me ,  c'est  la  crainte  d'en  dévoiler 
les  horreurs  qui  en  est  un  des  plus 
lunettes  :  il  aurait  suffi  de  bien 
déterminer  le  caractère  de  celte 
longue  et  hideuse  administration 
de  Pignatelli ,  pour  justifier  les 
Napolitains  de  tous  les  efforts  que 
long-temps  ils  tentèrent  afin  de  ré- 
former leur  gouvernement.  Lors- 
que Ferdinand  ,  cédant  à  la  pusil- 
lanimité et  aux  conseils  d'Acton  , 
se  décida  à  abandonner  ses  étals  , 
ce  ministre  lui  proposa  de  nom- 
mer Pignatelli  ù  la  place  honora- 
ble, mais  dangereuse,  de  vicffire- 
général  du  royaume.  On  assure 
que  la  reine  lui  laissa,  en  partant, 
des  ordres  sévères  contre  les  hau- 
tes classes  de  la  société,  regardées 
par  elle  comn)e  les  ennemies  du 
trône,  dont  elles  sDut  destinées  à 
être  le  soutien.  Pignal«dli  ne  s'y 
conforma  que  trop.  Il  signa  un 
armistice  au  moment  où  douze 
mille  homujes  arrivaient  d'Orbi- 
lello  et  de  la  Toscane,  sous  les 
ordres  du  généial  Roger  de  Da- 
mas ,  que  le  duc  de  Roccaro- 
mana  (voyez  son  article j  venait 
de  remporter  un  avantage  sur 
le  Volturne,  et  que  la  place  de 
Capoue  se  défendait  encore  contre 
les  ennemis  ,  que  des  populations 
entières  hai-celaient  de  tous  cô- 
tés. Pignatelli  ne  tenant  aucun 
compte  de  ces  ressourc«;s  ,  brûla 
la  flotte  ,  fit  jeter  les  munitions  de 
guerre  i  la  mer,  désarma  les  trou- 
pes,  ouvrit  le»  forts  à  une  popu- 


PIG  009 

lace  effrénée,  et  livra  la  ville  de 
INaples  à  la  plus  furieuse  anarchie. 
Eile  devint  bientôt  si  menaçante, 
que  les   partisans  de  l'ancien  ré- 
gime, et  jusqu'aux  amis  du  roi, 
se  réunirent  aux  vœux  des  répu- 
blicains, pour  hâter  l'entrée  des 
Français,  dont  la  présence  seule 
pouvait    arrêter    les    progrès    de 
cette   insurrection.  Lesjjons  ci- 
toyens furent  ainsi  placés  dans  la 
fâcheuse  position  de  regarder  avec 
effroi  la  courageuse  résistance  du 
peuple   napolitain,   qui  se  mon- 
trait, les  armes  à  la  main,  bien 
au-dessus  de  ceux  qui  le  gouver- 
naient. Par  cette  atroce  conduite, 
Pignatelli  détruisait  le  lien  qui  atta- 
chait la  nation  à  son  prince;  car 
les  gouvernemens  sont  faits  pour 
s'opposer  à  l'anarchie;  et  en  l'ex- 
citant, ils  prouvent  qu'ils  ne  sa- 
vent, ne  peuvent,  ou  ne  veulent 
point  remplir  leurs  devoirs,  tou- 
jours nécessaires  ,  et  môme  indis- 
pensables ,  pour  mériter  l'amour 
des  peuples.  Pignatelli  s'enfuit  en 
Sicile,  où  il  resta  tout  le  temps  que 
les  Français  occupèrent  le  royau- 
me de  Naples  ;  il  y  retourna  après 
le  roi  ,  dont  il  ne  put  plus  rega- 
gner la  faveur.  En  1807,  il  entra 
dans  des  intrigues  pour  favoriser 
le  retour  de  la  cour  de  Sicile  dans 
ses  états,  gouvernés  alors  par  le  roi 
Joseph  (^twyez  Bonapaute).  Arrêté 
par  le  gouvernement  français,  il 
n'aurait  pas  évité   la  mort,  si    le 
prim.e  de   Strongoli ,   son    neveu 
f voyez  l'article  suivantj,  n'eût  pas 
intercédé  pour  lui  auprès  du  nou- 
veau roi,  qui  se  contenta  de  le  ban- 
làr  du  royaume.  Il  vécut  quelque 
temps  à  Rome,  d'où  Joachim  [loy. 
Mukat)  le  rappela  peu  après  son  a- 
vénement  au  trône  de  INaples.  PI- 


3io 


PIG 


gnatelli  y  mourut  en  1812,  en 
proie  aux  remords  et  aux  terreurs 
religieuses.  ( 

PIGNATELLI  (François), 
prince  de  Strongoli ,  lieutenant- 
{ïénéral  napolitain ,  grand'croix 
de  l'ordre  de  Saint-Georges  de  la 
réunion,  chevalier  de  la  légion- 
d'honneur,  naquit  à  Napics  en 
1775.  Placé  dans  un  collège  de 
cette  ville  pour  y  achever  ses  é- 
tudes,  il  en  sortit  pour  aller  fai- 
re ses  premières  armes  en  Au- 
triche, où  il  obtint  le  grade  de 
sous-lieutenant  dans  uu  régiment 
de  chevau-légers ,  avec  lequel  il 
fitles  campagnes  de  i795et  1794- 
Tandis  qu'il  se  battait  contre  la 
France,  ses  frères  étaient  persécu- 
tés à  Naples,  comme  partisans  de  la 
révolution  française.  Il  en  apprit 
la  nouvelle,  en  recevant  un  coup 
de  sabre  dans  une  action ,  où  il 
s'était  fait  remarquer  par  sa  bra- 
voure. Aussitôt  que  l'armée  au- 
trichienne eut  repassé  le  Rhin , 
il  quitta  le  service  pour  voler  au 
secours  de  ses  frères.  Mais  il  ne 
fut  pas  plutôt  arrivé  à  Naples  , 
qu'on  lui  lit  un  crime  du  sentiment 
qui  l'avait  ramené  chez  lui ,  de 
la  démission  qu'il  avait  donnée 
en  Autriche,  et  même  du  séjour 
qu'il  avait  fait  en  France  et  en 
Hollande.  Il  vit  alors  qu'on  cher- 
chait un  prétexte  pour  l'envelop- 
per dans  la  persécution  de  sa  fa- 
mille, et  que  sans  sauver  les  au- 
tres, il  aiu'ait  risqué  de  se  perdre 
lui-même.  Pressé  par  s«s  parens 
et  par  ses  amis ,  il  demanda  ses 
passeports  pour  Malte ,  où  il  dit 
vouloir  faire  ses  caravanes,  pour 
être  admis  dans  l'ordre  de  Saint- 
Jean.  Il  ne  s'arrêta  dans  cette  île 
que    le    temps    nécessaire    pour 


PIG 

trouver  un  vaisseau  qui  l'emmè- 
nerait en  Toscane.  Débarqué  à 
Livourne,  il  se  rendit  à  Florence  , 
pour  y  reprendre  tranquillement 
ses  études,  lorsqu'd^n  lui  écri- 
vit que  ses  frères  s'étaient  sau- 
vés, mais  que  leur  fortune  était 
perdue.  Un  séquestre  général  ar- 
rachait à  la  famille  Strongoli  son 
riche  héritage,  et  la  plongeait 
dans  la  plus  profonde  misère.  Pi- 
guatelli  réclama  contre  cet  acte 
arbitraire,  qui  frappait  indistinc- 
tement l'innocent  et  le  coupable; 
mais  sa  voix  ne  fut  point  enten- 
due. Il  ne  vit  d'autres  ressources 
que  de  se  présenter  au  général 
Berthier,  qui  lui  ordonna  de  le 
suivre  à  Rome.  La  populace  de 
cette  ville ,  réunie  aux  insurgés 
de  Velletri  et  d'Albane  ,  profitant 
d'un  moment  d'insubordination 
manifestée  dans  l'armée,  avait  at- 
taqué plusieurs  de  ses  avant-pos- 
tes. Pignatelli,  le  prince  de  San- 
ta-Croce,  le  prince  Aldobrandini, 
font  un  appel  au  patriotisme  des 
bons  citoyens,  en  leur  exposant 
les  dangers  qui  les  menacent;  ils 
les  entraînent  par  leurs  discours 
et  leur  exemple,  et  tombent  sur 
ces  révoltés,  qu'ils  poursuivent 
jusque  dans  leurs  repaires  de 
Trastevere.  (^e  service  fut  ré- 
compensé par  le  grade  de  capi- 
taine que  Pignatelli  obtint  dans 
les  grenadiers  de  la  légion  romai- 
ne. Eu  1798,  lorsque  le  roi  de 
TNaples  {voy.  Feudinand  I)  enva- 
hit les  états  romains  sans  déclara- 
tion préalable  de  guerre,  Pignatel- 
li, qui  n'était  que  chef  de  bataillon, 
commandait  la  légion  romaine  à 
la  bataille  de  Civita-Castellana  : 
il  se  trouva  en  présence  de  la  gau- 
che de  l'armée  napolitaine,  qui 


PIG 

fut  ropnussée  en  déboucluint  du 
liois  de  Falari,  où  le  chevalier  de 
Saxe,  qui  la  commandait,  resta 
dangereusement  blessé.  Dans  cette 
action,  ['ignatelli  se  battit  corps  à 
corps  avec  un  officier  albanais, 
dont  il  reçut  nne  blessure ,  mais 
qu'il  étendit  mort  à  ses  pieds.  Sa 
conduite  lui  mérita  d'être  nom- 
mé colonel  sur  le  champ  de  ba- 
taille. En  1^99,  Pignatelli  faisait 
partie  de  l'armée  française  qui 
marchait  à  la  conquête  de  Na- 
ples.  Le  général  Championnet 
lui  confia  deux  bataillons,  avec 
lesquels  il  se  jeta  sur  les  collines 
qui  bordent  cette  capitale,  en  dé- 
logeant plusieurs  embuscades, 
et  en  poursuivant  l'épée  aux  reins 
les  lazzaronis,  qui  se  précipitaient 
sur  sessoldats  pourleurdisputer le 
passage.  Il  se  dirigea  vers  le  fort 
de  Saint-EIme  pour  y  renforcer 
Je  parti  républicain,  qui  venait  de 
s'en  rendre  maître,  C'estdu  hautde 
CCS  rempartsqu'il  donna  lesignal  de 
l'attaque  à  l'armée  française,  dont 
il  seconda  les  efforts  en  pénétrant 
jusqu'au  centre  de  la  ville.  Quand 
Scbérer  fut  battu  sur  l'Adige,  et 
que  Macdonald  reçut  l'ordre  de  se 
porter  sur  le  Pô,  Pignalellî  suivit 
l'armée  française,  dont  il  ne  se  sé- 
para qu'après  la  bataille  de  Novi, 
étant  au  nombre  des  officiers  à  la 
la  suite,  que  Moreau  renvoyait 
en  France  pour  y  chercher  de 
l'emploi.  C'est  pendant  son  sé- 
jour à  Paris  qu'il  reçut  l'annonce 
fatale  de  la  mort  de  ses  deux  frè- 
re* aînés,  exécutés  à  Naples,  en 
invoquant  la  capitidation  qui  leur 
garantissait  la  vie!!!  En  1800,  Pi- 
gtiatelli  s'occupait  de  l'organisa- 
tion d'une  légion  italienne,  dont  le 
directoire  l'avait  chargé,  lorsque 


PIG 


3ii 


le  général  en  chef  Bonaparte  revint 
d'Egypte.  Bonaparte,  que  la  jour- 
née du  18  brumaire  avait  rendu  l'ar- 
bitre de  la  France,  méditait  déjà  la 
conquête  de  l'Italie,  et  en  calculant 
tous  les  moyens  de  succès,  il  crut 
plus  convenable  de  mettre  à  la  tête 
de  la  légion  italienne  un  officier 
qui  eût  des  rapports  directs  avec  le 
pays  qu'on  devait  envahir.  D'a- 
près celte  détermination,  Lecchi 
fut  destiné  à  remplacer  Pignatel- 
li ,  qui,  envoyé  à  Gênes,  y  arriva 
lorsque  Massénaen  reprit  le  com- 
mandement après  la  bataille  de  Ma- 
rengo.  A  l'ouverturede  la  nouvelle 
campagne  entre  la  France  et  l'Au- 
triche, Pîgnatelli  entra  en  Tosca- 
ne avec  la  division  Pino,  et  y  or- 
ganisa une  légion  italienne.  Il  dut 
encore  se  battre  contre  les  Na- 
politains, qui  sous  les  ordres  du 
général  Roger  de  Damas  s'étaient 
avancés  jusqu'à  Sienne  pour  for- 
cer les  Français  à  évacuer  la  Tos- 
cane. Mais  attaqués  par  le  géné- 
ral Miollis,  ils  se  replièrent  sur 
Rome,  et  proposèrent  un  armis- 
tice, qui  ameni  la  paix  de  Floren- 
ce. C'est  à  la  faveur  de  ce  traité 
que  Pignatelli  put  rentrer  dans 
sa  patrie,  où  il  vécut  dans  l'inac- 
tion jusqu'à  l'époque  de  la  secon- 
de invasion  française  dans  le 
royaume  de  Naples.  Elevé  au  gra- 
de de  général  de  brigade,  et  des- 
tiné au  commandement  de  la  pro- 
vince de  Basilicale,  Pignatelli  dé- 
ploya une  grande  énergie  pour 
y  arrêter  les  progrès  de  l'insur- 
rection qui  la  menaçait  de  tous 
les  côtés.  Au  moment  où  Reynier 
venait  d'éprouver  un  échec  à 
Santa-Eufemia,  et  que  le  général 
Yerdier  se  voyait  obligé  d'aban- 
donner la  Calabre,  Pignatelli  re- 


3l2 


PIG 


poussait  (les  corps  nombreux  de 
brigands  qui  s'avançaient  sur  tou- 
tes les  directions,  les  b;ittail  à  Se- 
nise  ,  à  la  Canna,  à  Rocca-Inipé- 
riale,  et  rouvrait  les  communica- 
tions avec  Reynier,  dont  il  facili- 
tait la  retraite  sur  Cassano.  Ha  p  pelé 
à  Naples  pour  assister  ii  la  prise  de 
Capri,  il  partit  l'année  suivante 
poiu"  la  Catalogne,  où  il  prit  le 
commandement  d'unepelile  divi- 
sion composée  des  cadres  de  trois 
régimcus,  qui  avaient  fait  la  c  im- 
pagne  de  1809,  sous  le  général 
Saint- C3'r,  et  des  débris  de  deux 
autres  corps  provenant  du  Ty- 
rol.  C'est  à  la  tête  de  ces  trou- 
pes, recrutées  en  grande  partie 
d'ans  les  prisons  de  INaples,  quePi- 
gnatelli  s'empara  du  fort  de  l'île  de 
Las  Medas,  et  soutint  les  opéra- 
tions du  général  le  ISourry ,  char- 
gé d'armer  les  côtes  de  la  Catalo- 
gne depuis  Calioure  jusqu'à  San- 
Filioux.  Lorsque  la  division  na- 
politaine eut  ordre  de  passer  en 
Arragon,  c'est  avec  ces  mêmes  sol- 
dats qu'il  dut  proléger  le  transport 
des  munitions  par  leri-e  et  par  l'E- 
bre,  pour  commencer  les  sièges 
de  Tortose  et  de  Tarragone.  A  la 
suite  de  quelques  différens  entre 
le  maréchal  iVlacdonald  et  le  géné- 
ral Piirualelli,  ce  dernier  se  rendit  ;\ 
NapU,-s,  où  Murât  a r rivait, en  iSii, 
de  r«'tour  de  la  malheureuse  expé- 
dition de  Ilussie.  Le  prenn'er  plan 
de  ce  prince  fui  d'occuper  l'Italie 
jusqvi'au  Pô,  d'y  lever  beaucoup 
de  >uldats.  d'y  établir  tin  gouver- 
nement unique  et  constitutionnel  ^ 
et  de,  s'allier  à  une  grande  puis- 
sance qui  eût  voulu  l'admettre 
dans  son  système,  en  s'adressant 
d'abord  à  la  France,  s'il  eût  été 
possible  de  s'entendre  avec  jNapo- 
léon.  Mais  lorsque  les  souverains 


PIG 

alliés  se  proposèrent  de  subjuguer 
la  France,  ils  cherchèrent  à  s'as- 
surer de  Joachim,  dont  l'attitude 
leur  parut  imposante.  Ils  craigni- 
rent qu'en  se  réunissant  au, vi- 
ce-roi,  il  n'eût  opéré  une  forte 
diversion  en  Autriche,  et  dérangé 
le  plan  générai  de  la  campagne. 
On  lui  expédia  des  commmissai- 
rcs  pour  lui  garantir  la  cou- 
ronne de  ÎNaples  ,  et  lui  offrir 
même  uu  agrandissement  de  ter- 
ritoire,  à  prendre  sur  les  états 
de  l'Eglise.  Séduit  par  ces  espé- 
rances, Joachim  signa  un  traité 
avec  les  ennemis  naturels  de  sa 
dynastie.  Pignatelli,  qui  avait  été 
envoyé  en  Italie  pour  y  préparer 
l'exécution  du  premier  plan  de 
Murât ,  fut  très-étonné  d'en  re- 
cevoir une  dépêche  qui  lui  ordon- 
nait de  se  rendre  au  quartier-gé- 
néral des  alliés,  poin-  y  demander 
la  ratification  du  nouveau  traité 
qu'on  avait  stipulé, eu  sou  absence. 
Mais  il  le  fut  encore  plus ,  lors- 
qu'en  rapportant  au  roi  l'accepîa- 
tioti  de  l'empereur  François,  ex- 
primée dans  une  lettre  autogra- 
phe, il  le  trouva  disposé  à  se  dé- 
clarer contre  l'Autriche.  Pignatel- 
li osa  lui  représenter  les  dangers 
de  cette  conduite,  et,  s.e  mettant 
d'ac,eord  avec  ses  collègues ,  il 
signa  la  lettre  que  plusieurs  géné- 
raux adressèrent  à  Murât  pour 
l'engager  à  rester  dans  l'alliance 
de  l'Autriche,  ayant  déjà  contri- 
bué aux  succès  des  coalisés  en 
Franceeten  Italie.  Ku  effet,  après 
la  réunion  des  Autrichiens  iivet; 
les  Prussiens  et  les  Russes,  et  le 
départ  d'Augereau,  les  affaires 
de  Napoléon  ne  laissaient  plus  au- 
cune chance  favorable.  En  jSif), 
lorsque  Napoléon  revint  de  l'île 
d'Elbe,   Mural,  (pii   n'avait  pas 


riG 

.'ibandonné  son  premier  projet  sur 
l'Italie,  en  proclama  l'inJépen- 
dance,  et  tourna  l'épée  contre  les 
Autrichiens,  qui  d'un  côté  se 
concentraient  sur  le  Pô,  et  de 
l'autre  débordaient  en  Toscane, 
en  menaçant  le:-  flancs  de  l'armée 
napolitaine.  PignatoUi  et  Livroii  , 
à  la  têle  de  la  garde  ,  devaient 
marcher  sur  Florence,  tandis  que 
le  r»;ste  de  l'armée,  sous  les  or- 
dres du  roi,  se  serait  avancée  par 
les'  Marches.  Ce  double  mouve- 
ment, qu'on  aurait  dû  calcu- 
ler de  manière  à  tenir  les  deux 
parties  de  l'armée  toujours  à  la 
même  hauteur  et  à  peu  de  dis- 
tance entre  elles,  paraît  avoir  été 
«ixécuté  avec  plus  de  vitesse  d'un 
côté  que  de  l'autre  :  dès-lors  il 
n'y  eut  plus  d'ensemble  entre  les 
opérations  des  deux  armées;  et 
tandis  que  la  garde  s'emparait  de 
Prato  et  Florence,  la  division 
d'Ambrosio  était  repoussée  de- 
vant Occhiobello  ,  et  le  général 
Pepe  se  laisait  battre  à  Carpi, 
sans  que  les  suc«',cs  d'une  colonne 
eussent  pu  réparer  les  pertes  des 
autres.  Le  roi  Joachim  n'ayant  pu 
forcer  la  ligne  du  Pô.  se  retira 
sur  Ancône,  ordonnant  à  Pigna- 
lelli  d'abandonner  la  Toscane. 
Ce  mf)uvement  rétrograde  fut 
rxécuté  en  bon  ordre,  quoique 
l'insurreclion,  organisée  par  lord 
Burghess,  ministre  d'Angleterre 
à  FloriMice,  y  éclatât  sous  les  pas 
de  l'armée.  Le  a  njiii,  Joachim 
remjiorta  im  avantage  sur  l'avant- 
garde  du  général  Bianclii,  près  de 
]>L'iccrata;  et  le  lendemain  il  paya 
ce  succès  par  la  perte  de  la  batail- 
le deToleutiuo.  Pignatidli.  qui  prit 
part  à  celle  journée,  s'était  élabli 
au  Colle  de  (^antagallo,  position 


PIG 


3i3 


favorable  ,  où  il  soutint  quelque 
temps  le  choc  des  Autrichiens, 
qui  vinrent  l'occuper  à  leur  tour. 
Après  la  chute  de  .loai  hiin,  Pigna- 
telli,  qui  était  son  aide-de-camp- 
*  général  et  son  capitaine  des  gar- 
des, se  retira  du  service,  qu'il  ne 
reprit  qu'en  )820,  lorsqu'il  lui  é- 
tait  permis  d'espérer  que  sa  patrie 
pourrait  prospérer  à  l'ombre  d'u- 
ne sage  constitution.  Il  se  déclara 
d'abord  pour  celle  des  corlès,  qu'il 
désira  voirmodifiée,  et  se  pronon- 
ça en  même  temps  contre  la  mau- 
vaise orgnisation  de  l'armée,  et 
pour  la  formation  des  gardes  na- 
tionales. Destiné  au  ctjmmande- 
ment  d'une  division  d'infanterie, 
il  fit  partie  du  corps  d'armée  du 
général  Cara'^cosa,  dont  il  ne  put 
éviter  les  revers.  Au  retour  du 
roi  de  Laybacb,  le  général  Pigna- 
telli ,  privé  de  son  rang  et  de  ses 
lionneurs,  a,  parson  patriotisme  et 
son  instruction,  conservé  un  rang 
honorable  parmi  ses  concitoyens. 
Le  général  Pignalelli  est  auteur 
d'nn  ouvrage  dont  la  première 
partie  parut  en  1820,  sous  le  ti- 
tre de  :  Memorie  inlortio  al  a  slo- 
ria  ciel  regno  di  Nopoli  daW  aiino 
i8o5  al  i8i5.  Il  serait  ù  souhai- 
ter que  l'auteur  pût  s'occuper  d'eu 
donner  la  suite. 

PIGNATELLI  (  Vincent),  frér.! 
du  précédent,  lieutenant-général 
napolitain,  commandeur  de  l'or- 
dre de  Saint  -Georges  de  la  Uéu- 
nion,  officier  de  la  légion-d'hon- 
neur, naquit,  en  1781,  à  Naples, 
où  il  reçut  sa  première  éducation 
dans  la  maison  ptilernelle.  Des- 
tiné, malgré  lui ,  à.  l'état  ecclésias- 
tique, il  le  quitta,  (!n  171)9»  pf>"i" 
entrer  dans  un  régiment,  que  se* 
frères  organL-jaicut  pour  lu  uou-r- 


5i4 


PIG 


velle  république.  Poursuivi  et  ar- 
rêté ,  au  retour  de  la  cour  de  Si- 
cile ,  il  eut  à  souiriir  une  longue 
captivité,  rendue  plus  aflVeuse  par 
le  spectacle  de  deux  frères  exécutés 
presque  sous  ses  jeux.  Condamné 
hii-niême  à  l'exil ,  il  vint  en  Fran- 
ce s'enrôler  dans  la  légion  ita- 
lienne ,  avec  laquelle  il  repassa 
les  Alpes.  A  la  réorganisation  des 
troupes  cisalpines  ,  Pignatelli  , 
nommé  chçf  d'escadron  des  dra- 
gons Napoléon,  partit  pour  rejoin- 
dre l'armée  campée  sur  les  côtes  de 
l'Océan.  Il  y  resta  jusqu'en  i8o3, 
époque  de  son  rappel  en  Italie  , 
pour  la  campagne  de  1 8o5.  L'année 
suivante  ,  ,son  corps  faisait  partie 
de  l'armée  de  INaples,  où  il  rentra 
a  vec  le  roi  Joseph  (î;oj, Bon  aparté), 
qui  lui  confia  l'organisation  d'un 
régiment  d'infanleric  ,  et  le  nom- 
ma ensuite  colonel  de  cavalerie. 
Pignatelli  assista  au  siège  de  Gaë- 
te,  sous  les  ordres  du  maréchal 
Masséna  ,  et  après  la  reddition  de 
cette  place,  il  fut  en)p!oyé  à  la 
dcstruclion  des  brigands  dans  la 
jirovince  de  Basilicale.  lîlevé  au 
grade  de  général,  il  prit  le  com- 
mandement d'une  brigade  atta- 
chée à  l'armée  rassemblée  par  Joa- 
chim  sur  les  côtes  de  31isène,  pour 
intimider  les  Anglais,  qui  s'é- 
taient emparés  des  îles  deProcida 
etd'Ischia,  Aprè$  leur  départ,  Pi- 
gnatelli retourna  en  Basilicate,  oCj 
il  eut  plusiems  affaires  avec  les 
brigands  ,  qu'il  détruisit  à  Chiara- 
monte,  où  ilen  tua3oo.  En  1810,  il 
fut  chargé  deprotégcrsur  les  côtes 
du  Cilento ,  les  bûliniens  de  trans- 
port qui  s'y  rassemblaient  en  pré- 
sence des  croisières  anglaises,  pour 
porter  des  vivres  et  des  munitions 
de   guerre  aux  troupes  destinées 


PIG 

contre  la  Sicile.  S'élant  acquitté 
d'une  manière  satisfaisante  de  cet- 
te commission  ,  Pignatelli  fut 
nommé  aide  -  de  -  camp  du  roi 
Joachim,  qu'il  suivit  en  Russie. 
Il  s'y  distingua  en  plusieurs  ren- 
contres ,  et  en  fut  doublement  ré- 
compensé par  le  grade  de  lieute- 
nant-général ,  et  le  brevet  d'offi- 
cier de  la  légion-d'honneur;  mais 
il  ne  tarda  pas  à  expier  ces  faveurs. 
Dans  la  retraite  de  l'armée,  il  eut 
les  pieds  gelés  et  les  doigts  em- 
portés. C'est  dans  les  plus  horri- 
bles souffrances  qu'il  acheva  son 
voyage  des  frontières  de  la  Prus- 
se jusques  aux  portes  de  Naples. 
Hors  d'état  de  rester  en  activité,  il 
jouissait  d'une  pension  de  retraite, 
lorsque  ,  par  un  noble  dévoue- 
ment,  il  reparut  dans  les  rangs 
de  l'armée  ,  et  se  chargea  de  l'ins- 
pection-générale  de  la  cavalerie, 
pendant  la  dernière  révolution  de 
Naples.  Le  roi ,  à  son  retour  de 
Laybach  ,  le  priva  de  son  rang  et 
de  ses  honneurs  ;  il  ne  lui  reste 
plus  que  ses  blessures. 

PIGNEALX  (N.),  évêque  d'A- 
dran,  naquit  d.ins  le  département 
de  l'Aisne,  vers  1740;  il  s*^  consa- 
cra à  l'état  ecclésiastique,  et  par- 
tit comme  missionnaire  pour  la 
Cochinchine  ,  vers  1770,  avee 
l'autorisation  du  pape  et  le  titre 
de  vicaire  apostolique  de  cette 
contrée.  Il  y  forma  une  petite  co- 
lonie de  chrétiens,  dont  la  bonne 
conduite  fut  bientôt  counjie  à  la 
cour,  et  mérita  au  prêtre  français, 
l'estime  particulière  du  roi  Caung- 
Schung,  qui  lui  confia  (malgré  la 
différence  de  religion  )  l'éduca- 
tion de  son  fils  unique.  M.  Pi- 
gneaux,  devenu  évêque  d'Adran  , 
en  1774)  redoubla  de  zèle  pour  la 


PIG 

oiospérité  de  son  troupeau,  mais 
ic^  troubles  qui  bouleversèrent 
alors  l'empire  de  son  protecteur, 
<;x('itèrent  contre  lui  une  persé- 
'  ution  à  laquelle  il  ne  put  se  dé- 
rober qn'en  fuyant  avec  ses  ouail- 
les, dans  la  ville  de  Sat-Gond,  oi\ 
ii  se  proposa  d'invoquer  le  secours 
de  la  France.  Le  roi  de  Cochin- 
chine  ne  manquait  ni  de  courage 
ni  de  talent;  mais  il  s'était  laissé 
'iiiprendre  par  trois  frères  ambi- 
tieux qui  avaient  bouleversé  son 
•^npire ,  et  l'avaient  lui-même 
forcé  de  chercher  un  asile  dans 
l'île  de  Pulo-Wa.  L'évêque  fait  a- 
gréer  son  projet  au  roi,  et  amène 
de  son  consentement,  son  fils  à 
Paris,  en  1787.  Il  fait  un  traité 
offensif  et  défeusif  entre  la  France 
et  la  Cochinchine;  celle-ci  cédait 
1.1  baie  de  Turon,  l'un  des  ports 
de  celte  contrée  les  plus  sûrs  pour 
les  vaisseaux,  et  les  plus  avanta- 
geusement situés  pour  le  com- 
merce. L'évêque  repart  ensuite 
revêtu  du  caractère  d'ambassa- 
deur extraordinaire  à  la  cour  de 
Cochinchine.  Arrivé  à  Pondi- 
chéry,  où  il  devait  prendre  les 
secours  accordés  par  la  France  , 
il  y  éprouve  quelques  retards; 
sur  ces  entrefaites,  la  révolution 
française  éclate,  et  tout  secours 
lui  est  refusé,  mais  il  ne  perd  pas 
to\irage  ;  il  part  et  retrouve  le  roi 
dans  l'île  de  Pulo-^Va,  qui  y  était 
resté  deux  ans,  vivant  de  racines. 
Parmi  les  fauteurs  de  l'usurpa* 
lion,  les  uns  étaient  morts,  les 
autres  avaient  excité  l'indignation 
générale.  Caung-Schung  profile 
du  mécontentement  de  ses  sujets, 
et  iepr«!nd  le  pouvoir  en  1790.  Il 
créa  l'évêque  d'Adran  ,  son  pre- 
iiii(.'r  minisire,  et  sous  la  direction 


PIG 


3i5 


de  ce  prélat,  il  établit  des  manu- 
factures, construisit  des  roules  et 
encouragea  la  culture.  Il  fit  .ex- 
ploiter des  mines  et  remonter  la 
marine.  L'évêque  traduisit  pour 
lui  en  chinois,  im  Traité  de  tacti- 
que, et  enfin,  éleva  des  écoles  où 
les  pères  de  famille  étaient  obligés 
d'envoyer  leurs  enfans  dès  l'âge 
de  4  'i"s.  Il  mourut  en  1800. 
Caung-Schung  lui  survécut6  ans; 
il  conserva  toujours  pour  l'évêque 
d'Adran  ,  l'admiration  que  ses 
vertus  lui  avaient  inspirée.  Lors- 
que les  missionnaires  eurent  célé- 
bré ses  funérailles,  le  roi  le  fit  dé- 
terrer malgré  eux,  pour  lui  ren- 
dre les  honneurs  funèbres  à  la 
manière  des  Cochinchinois. 

PIGNOTÏI  (LAUfiENx),  poêle 
et  historien  italien,  naquit  à  Fi- 
gline  ,  en  Toscane,  en  1739.  Son 
père,  riche  négociant  de  ce  pays, 
éprouva  des  revers,  qui  lui  enle- 
vèrent sa  fortune.  Le  jeune  Pi- 
gnotti,  devenu  ofphelin,  se  retira 
à  Arezzo  chez  son  oncle,  qui  le 
plaça  dans  le  séminaire  de  la  ville, 
où  il  reçut  son  éducation.  Poussé 
par  une  curiosité  qui  embrassait 
tout,  et  par  une  mémoire  qui  n'ou- 
bliait rien,  Piguotti  devint  l'admi- 
ration de  ses  condisciples  ,  dont  il 
s'éloignait  chaque  jour,  pour  se 
rapprocher  de  ses  maîtres.  Les 
premiers  vers  qu'il  composa,  dé- 
celèrent son  penchant  et  son  gé- 
nie. L'évêque  d'Arezzo,  frappé 
d'un  développement  si  précoce, 
encourageait  Pignofti  dans  ses 
études;  et  dès  qu'il  put  disposer 
d'une  chaire  dans  son  séminaire, 
il  s'empressa  de  la  lui  ofi'rir  :  mais 
le  jeune  savant  ne  voulut  pas  l'ac- 
cepter, pour  ne  pas.s'engagerdans 
l'état  ecclésiastique,  dont  on  lui 


m 


5i6  PIG 

faisait  nn  devoir.  Ce  refus  servit 
de  prétexte  à  son  oucle  pour  lui 
retirer  ses  secours.  Pignotti  dut  ù 
l'affection  de  son  beau-frère,  de 
pouvoir  aller  à  Pise  achever  son 
éducation,  dans  cette  fameuse  uni- 
versité,dont  ildevait  être  le  chef  un 
jour.  En  y  renouvelant  l'exemple 
de  son  illustre  compatriote  Redi, 
il  tut  y  allier  les  talens  a},'réables 
du  poète,  aux  études  profondes 
du  médecin  ;  et  après  y  avoir 
pris  les  degrés  de  docteur,  il  se 
rendit  à  Florence  pour  y  faire  son 
cours  de  clinique,  dans  le  grand 
hôpital  de  la  ville.  Il  s'y  fit  remar- 
quer par  son  esprit  et  par  son  sa- 
voir. On  en  parla  au  grand-duc 
Léopold ,  qui  lui  confia  la  chaire 
de  physique  dans  la  nouvelle  aca- 
démie qu'il  venait  de  fonder  pour 
la  noblesse,  à  Florence.  Quelques 
années  plus  tard,  Pignotti  fut 
chargé  de  la  même  chaire  à  l'u- 
niversité de  Pise  ,  où  ses  le(;ons 
furent  très  -  suivies  ,  quoitpi'il 
n'eût  pas  une  grande  facilité  à 
s'exprimer.  Mais  ses  discours  ne 
manquaient  pas  d'élégance  et  de 
clarté  ;  et  au  défaut  de  l'éloquence 
de»  paroles,  ils  avaient  la  préci- 
sion des  idées.  Eu  cherchant  à  se 
délasser  de  ces  travaux,  Pignotti  se 
rappela  qu'il  était  poète  ,  et  com- 
posa des  fables  ,  genre  de  compo- 
sition  do4it  le  Parnasse  italien  ne 
peut  pas  déguiser  la  pauvreté,  au 
niilieu  de  sa  fécondité  et  de  ses 
richesses.  Ces  fables  parurent , 
pour  la  première  fois,  en  i^Sj, 
et  peu  d'ouvrages  ont  eu  un  plus 
grand  succès.  Elles  n'ont  ni  la 
concision  de  celles  d'Esope  et  de 
Phèdre,  ni  la  naïveté  de  celles  de 
La  Fontaine  :  ce  sont  moins  des 
i>pologue.s  que  des  narrations  or- 


PIG 

nées  de  tout  le  luxe  de  la  langue 
poétique  d'Italie.  Pignotti,  pour 
désartner  l'envie  qui  affectait  de 
ne  voir  en  lui  qu'un  fabuliste,  pu- 
blia ses  conjectures  météorologi- 
ques sur  les  variations  du  baro- 
mètre, d'après  la  théorie  de  LeRoy. 
Ses  *aisoni:emeus  sont  plus  ingé- 
nieux qu'exacts  ;  l'auteur  en  avait 
lui-même  reconnu  les  imperfec- 
tions, et  s'était  empressé  de  les  cor- 
riger. Partisan  des  idées  et  des  pro- 
grès deson  siècle, il  avait  misa  pro- 
fit les  nouvelles  découvertes  dans 
la  physique,  la  chimie  et  la  pneu- 
matique :  mais  ses  corrections 
s'égarèrent  dans  les  mains  du  li- 
braire ,  auquel  il  les  avait  confiées 
))Oiir  les  faire  imprimer.  Dans  un 
poëme  intitulé  la  Treccla  rupita 
(la  tresse  de  cheveux  enlevée  )  , 
Pignotti,  bien  différent  de  tous  les 
autres  poètes  héroï-comiques  ita- 
liens, qui  font  parler  aux  Muses 
le  langage  le  plus  vulgaire,  a, 
comme  Boileau  et  Pope,  mis  une 
espèce  de  dignité  dans  le  ridicule  : 
il  ne  va  jamais  plus  loin  que  la 
gaîté  du  sujet  ne  l'exige.  Après 
avoir  donné  ses  premières  années 
à  la  poésie,  Pignotti  consacra  les 
dernières  à  l'histoire,  et  c'est  celle 
de  sa  patrie  qu'il  se  proposa  d'écri- 
le  :  tableau  }dus  animé  fpie  vaste, 
et  d'un  graiid  intérêt  dans  les  an- 
nales modernes  des  nations.  Gib- 
bon, appelé  par  la  force  de  son  gé- 
nie à  manier  le  burin  de  l'histoire, 
balança  long-temps  sur  le  choix 
d'un  sujet.  Dausiesménioiresqu'il 
nous  a  laissés  de  sa  vie  ,  il  avoue 
que  deux  révolutions  l'avaient 
frappé  davantage:  celle  de  l'ilel- 
vétie  pour  recouvrer  sa  lil)erlé,  et 
celle  de  Florence  pour  établir  sa 
grandeui'.  Il  raconte  aussi  qu'il  est 


vm 

parvenu  à  rassembler  un  {jrand 
nombre  de  matériaux  précieux, 
pour  traiter  ce  dernier  sujet  pour 
lequel  il  s'était  décidé.  .Mais  eu 
méditant  t^ur  les  ruines  du  Capi- 
tole,  lors  de  son  voyage  à  Rome, 
il  abandonna  tout  autre  projet,  et 
ne  s'occupa  plus  que  dus  causes 
qui  avaient  contribué  à  la  déca- 
dence de  l'empire.  L'ouvrage  de 
Fignotti,  mieux  conçu  qu'exécu- 
té ,  ne  nous  dédommage  pas  de 
celui  de  Gibbon.  Son  histoire  de 
^a  Toscane  est  partagée  en  cinq 
livres:  dans  le  premier,  qui  lui 
srrt  d'introduction,  l'auteur  a  ex- 
posé ses  idées  sur  l'ancienne  his- 
toiie  des  Etrusques;  dans  le  se- 
cond, il  montre  ce  peuple  tombé 
sons  le  glaive  des  Romains,  et  le 
droit  de  conquête  y  remplacer  ce- 
lui de  la  nature  :  celle  triste  pé- 
riode finit  par  la  domination  de  la 
cointt;sse  Matbilde,  qui  fit  trem- 
bler les  empereurs  et  les  rois  d'I- 
talie. Dans  le  troisième,  il  pré- 
sente le  tableau  des  troubles  et 
des  guerres  qui  accompagnèrent 
l'usurpation  des  ducs  d'Athènes; 
dans  les  quatrième  et  cinquième 
«!ofin,  il  noys  fait  assistera  l'élé- 
vatiî)n  et  à  la  puissance  de  cette 
f.miille  qui  se  montra  d'abord  si 
jalouse  des  droits  du  peuple,  pour 
mieux  l'asservir  ensuite.  Pignotti, 
en  adoptant  la  manière  de  Vol- 
taire, a  écarté  du  récit  des  évcne- 
mens  tout  ce  qui  pouvait  en  em- 
barrasser la  marche.  Il  a  traité 
dans  cinq  dissertations  ajoutées  à 
son  histoire,  des  questions  impor- 
portantes,  qui  servent  à  jeter  mi 
grand  éclat  sur  les  époques  qu'il 
parcourt,  il  s'y  livre  à  des  recher- 
ches sur  l'art  de  la  guerr«-  dans  le 
moyen  âge;  sur  l'origine  de  Iji 


Plîf 


oiy 


langue  italienne,  sur  la  renais- 
sance des  lettres,  sur  le  commerce 
de  la  Toscane,  et  sur  1  état  des 
sciences,  des  lettres  et  des  arts,  à 
la  fin  du  îS'  siècle,  et  an  com- 
nuMicement  du  iG*.  La  santé  de 
Pignotti  s'aflaiblit  sons  le  poids 
d'un  travail  si  extraordinaire.  En 
1801  ,  son  gouvernement  le  dis- 
pensa de  donner  des  leçons  pu- 
bliques ,  et  dans  les  années  suivan- 
tes ,  il  le  nomma  historiographe 
de  la  cour,  membre  du  conseil 
d'instruction  publique,  et  enfin 
recteur  de  l'université  de  Pise , 
qui  est  la  plus  grande  dignité  lit- 
téraire en  Toscane.  En  1809,  Pi- 
gnotti ressentit  une  première  at- 
teinte d'apoplexie,  qui  aiîaiblit 
considérablement  sa  mémoire  : 
ses  facultés  intellectuelles  s'étei- 
gnirent peu  à  peu  sous  les  coups 
redoublés  de  cette  terrible  mala- 
die, pour  laquelle  on  lui  conseilla 
d'aller  respirer  l'air  de  Pise.  Il  ne 
s'y  transporta  que  pour  y  mourir 
le  5  août  1812.  Ses  restes  repo- 
sent dans  le  CampoSanto  de  cette 
ville,  où  les  fils  de  son  beau- 
frère,  (|ue  par  reconnaissance  il 
avait  institués  ses  héritiers,  lui 
firent  élever  un  beau  mausolée. 

PIHOREL(  Louis-Emmanuel), 
docteur  en  médecine  de  la  faculté 
de  iMontpellier,  ex-chirurgien-ma- 
jor de  cavalerie,  chevalier  de  la 
légion-d'honneur,  e^^t  né  à  Falai- 
se ,  département  du  Calvados.  Il 
manifesta  dès  sa  jeimesse  dugofit 
pour  l'art  de  guérir,  et  vint  faire 
ses  études  njédicinales  à  Paris  ;  il 
n'avait  pas  20  ans  qu'il  était  élève 
de  première  classe  de  l'école  prati- 
que ,  et  le  plus  jeune  des  mem- 
bres de  la  société  d'instruction 
médicale.  En  i8o3,  il  prit  du  ser- 


5i8  PIH 

vice  dans  la  marine,  et  fut  attaché 
au  port  de  Brest.  11  fit,  en  i8o5, 
la  campagne  en  Afrique,  au  Bré- 
sil et  aux  Antilles,  sous  les  ordres 
du  contre-  amiral  Willaumez  ,  et 
retira  de  ce  voyage  malheureux 
tout  le  fruit  qu'on  pouvait  atten- 
dre de  son  zèle  à  remplir  les  de- 
voirs de  sa  profession.  En  180;; , 
M.  Pihorel,  qui  alors  appartenait 
au  service  de  l'armée  de  terre,  fut 
envoyé  en  Espagne  et  atlaohé,  en 
1808,  au  i5"  régiment  de  cuiras- 
siers; il  passa ,  en   février  i8i5, 
ù  la  grande-armée,  et  fut  bloqué 
dans   Glogau    avec    le    régiment 
dont   il    était    chirurgien  -  major 
(le  i5i°).    Rentré  en  France,  en 
1814  5  il  vint  à  Paris,  où  il  exerça 
la  médecine  jusqu'au  mois  de  fé- 
vrier 1816,  qu  il  fut  désigné  pour 
l'hôpital    d'instruction   de    Lille. 
Chirurgien-major  au  4"  régiment 
de  dragons,  il  a  obtenu  une  mo- 
dique retraite,   récompense  bien 
faible  deses  serviceselde  longues 
campagnes  faites  dans  les  quatre 
parties  du  monde.  Il  s'est  fixé  à 
Rouen,   où   il  exerce  honorable- 
ment la  médecine.    On  a  de  lui  : 
1°  Dissertation  surle  scorbut ,  dont 
les  observations  curieuses  et  pra- 
tiques sont  relatées  dans  le  dic- 
tionnaire des  sciences  médicales, 
article  Scorbut  ;    •!"  Observation 
suivie  de  l'autopsie  d'un  lépreux 
ou  élcTphMith\^e;'5''  Nouveau  moyen 
de  guérir  la  gale,  en  fri(;tionnant 
les  pieds  ;  4"  Nouvelles  méthodes  de 
traiter  la  sipldlis ,  en  employant 
le  mercure  uni  au  sulfure  de  chaux 
ammoniacé,    ce  qui   em()êche  la 
salivation  d'avoir  lieu;   ^'Notice 
sur  les   en  fans  trouvés,   avec  les 
moyens  d'en  cimserver  un  grand 
nombre. 


PII 

PUS  (  Pierre -Antoine- AiGis- 
TiN  de),  chansonnier,  auteur  de 
vaudeville,  membre  de  la  légion- 
d'honneur,  d'après  la  notice  qu'il 
a  publiée  sur  lui-même,  est  fil»  de 
M.  Pierre-Joseph  de  Piis,  cheva- 
lier de  Saint-Louis.  Destiné,  dit- 
il,   à  servir  dans  le  régiment  du 
Cap ,   la  faiblesse  de  sa  santé  le 
força  de  renoncer  à  la  carrière  des 
armes  ;  mais  comme  il  se  livra  à 
l'étude   des  lettres,  ce  que  Mars 
perdit  tourna  au  profit  des  Muses. 
M.  Piis,  ou  de  Piis,  dit  avoir  été 
guidé  dans  ses  premiers  travaux 
par   l'abbé   de   l'Attaignant ,    par 
Saint-Foix,  et  par  l'abbé  de  Ber- 
nis.  Quel  est  cet  abbé  de  Bernis  •* 
Un  seul  ecclésiastique  a  rendu  ce 
nom  célèbre  en  poésie  ;  mais  cet 
abbé  qui,  depuis  1758.  était  dési- 
gné par  la  qualification  de  cardi- 
nal, fut  envoyé  en  1769  à  Borne, 
où  il  contribua  très-activement  à 
la  destruction  des  jésuites,  et  où 
il  résida  en  qualité  d'ambassadeur 
de  la  cour  de  France,  jusqu'à  sa 
mort  ,  qui  eut  lieu  le  i"  novem- 
bre 1794-  Dans  quels  momens,  et 
par  quels  moyens  cette  éminence 
a-t-elle  donné  ses  soins  à  l'éduca- 
tion  poétique  de  M.  le   chev.   de 
Piis  ?  c'est  un  point  que  les  bio- 
graphes futurs   s'attacheront  sans 
doute  à   éclaircir.    Quoi  qu'il  eu 
soit  ,    les  soins  de   l'abbé  ou    du 
cardinal  de   Bernis   ne    tardèrent 
pasà  être  récompensés.  En  1776, 
sou  jeune  élève  donna  à  la  comé- 
die italienne,  la  Bonne  Femme,  pa- 
rodie  d'Aiccste.    Seize  comédies 
mêlées  de  couplets,  dont  M.    le 
chevalier  de  Piis  a  enrichi  le  ré- 
pertoire du  Vaudeville,  furent  la 
conséquence  du  bon  accueil  que 
reçut  la  lionne  Femme.  Parmi  ces 


m 

pièces,  qui  n'obtinrent  pas  toutes 
le  même  succès,  on  distingua  les 
Vendangeurs ,  le  Sabot  perdu,  et 
les  Amours  d'été,  opéras  remplis 
(le  couplets  charmans,  de  situa- 
tions ingénieuses,  et  de  tableaux 
gracieux.  M.  de  Piis  s'était  asso- 
cié pour  les  composera  M.  Barré. 
A  cette  époque  de  frivolité,  la  na- 
ture et  l'éclat  du  talent  de  M.  de 
Piis,  lui  concilièrent  bientôt  la 
laveur  de  la  ville  et  même  celle  de 
la  cour.  En  1784  ^  il  fut  nommé 
secrétaire  -  interprète  de  M.  le 
comte  d'Artois,  place  sans  fonc- 
tions, qu'il  exerça  jusqu'à  la  ré- 
volution, et  qui  lui  a  été  rendue 
depuis  la  restauration,  ftl.  de  Piis, 
ainsi  qu'on  le  voit ,  doit  être  ran- 
gé paririi  ces  hommes  rares,  dont 
les  orages  de  la  révolution  n'ont 
point  altéré  les  affections  cl  les 
opinions  primitives.  Ces  affec- 
tions et  ces  opinions  se  conci- 
liaient très-bien  sans  doute  avec 
les  fonctions  qu'il  a  remplies  darjs 
la  garde  nationale,  soit  à  Paris, 
soit  ii  Corbeil,  où  il  était  proprié- 
taire; mais  peut-être  est-il  moins 
facile  dt  les  faire  concorder  avec 
les  fonctions  d'agent  de  la  com- 
mune de  Chennevières-sur-Mar- 
ne,  de  commissaire  directorial  du 
canton  de  Sucy,  de  commissaire 
du  directoire  près  du  premier 
arrondissement  de  Paris,  et  aveo 
celles  de  membre  du  bureau  cen- 
tral de  cette  vilie.  La  formule  du 
serment  que  les  fonctionnaires 
publics  étaient  obligés  de  prêter 
à  celte  époque,  était  de  nature 
à  répugner  à  des  royalistes  moins 
prononcés  même  que  M.  de 
Piis.  Après  le  18  brumaire,  M. 
de  Piis  passa  des  fonctions  de 
membre  du  bureau  central  à  cel- 


PII  319 

les  de  secrétaire -général  de  la 
préfecture  de  police,  place  qu'il 
a  occupée  jusqu'en  181 5;  il  ne 
l'exerça  pas  toutefois  pendant  les 
cent  jours ,  mais  il  n'en  fut  pas 
moins  employé  par  le  gouverne- 
ment intérimaire,  en  qualité  d'ar- 
chiviste de  la  préfecture  de  poli- 
ce. Rétabli  dans  ses  premières 
fonctions  parla  seconde  restaura- 
tion, il  les  perdit  bientôt,  et  à 
dater  du  14  août  181 5,  il  fut  ren- 
du tout  entier  à  ses  occupations 
favorites.  Les  nombreuses  chan- 
sons que  M.  de  Piis  a  publiées 
dans  toutes  les  phases  de  sa  vie 
politique,  prouvent  que  le  soin 
des  affaires  ne  lui  faisait  pas  né- 
gliger les  lettres;  il  n'est  pas  \\n 
événement,  il  n'est  pas  un  gou- 
vernement qu'il  n'ait  chanté  sur 
des  airs  connus,  à  commencer 
par  celui  de  God  save  ifie  King. 
On  retrouve  il  est  vrai  entre  les 
divers  sentimens  exprimés  dans 
les  couplets  de  M.  de  Piis,  la  con- 
tradiclion  qui  existe  souvent  en- 
tre ses  principes  et  sa  conduite, 
mais  c'est  en  cela  surtout  que  res- 
sort la  souplesse  de  son  esprit; 
jamais  franc  royaliste  n'a  paru  si 
bon  républicain,  jamais  homme  si 
religieux  n'a  paru  philosophe  plus 
déterminé.  Faut-il  en  fournil*  la 
preuve,  entre  nulle  autres?  pre- 
nons au  hasard  le  couplet  suivant, 
il  est  tiré  d'une  chanson  intitulée 
de  l'Inutilité  des  prêtres, 

EnÇcance  adroite  et  fanatique  , 
Qui  viviez  jadis  de  l'autel , 
Voulez-vous  de  la  république 
Obtenir  un  pardon  formel  ? 
En  uniforme,  en  casque,  en  guêtres. 
Armez  vos  btas  d'un  fer  vengeur. 
Et  perdez  ,  en  prenant  du  c.eur, 
Votre  caractère  de  prêtres. 

Ce  n'est  pas,  nous  le  répétons» 
dans  ces  couplets  qu'il  faut  cher- 


520 


PII 


cher  la  véritabfe  pensée  de  M.  de 
Piis,  mais  dans  ceux  qu'il  a  fait  iii- 
sérer  depuis,  st)il  dans  la  Foudre, 
soil  dans  les  Lettres  champenoises, 
soit  dans  d'autres  pamphlets  du 
même  genre.  Désavouant  ses  opi- 
nions silnulées,  M.  de  Piis,  plus 
orthodoxe  que  personne  au  mon- 
de,  ne  travaille  jdus  aujourd'hui 
que  pour  l'amour  de  Dieu.  Croyant 
probahleineut  que  la  iDultJplieité 
de  ses  compositions  compensait 
leur  peu  d'impoi tance,  ce  poète 
s'est  mis  plusieurs  lois  sur  les 
raun^s  pour  l'institut  et  pour  l'a- 
radcniie-lrançaise.  En  cela  encore, 
il  s'est  montré  inconséquent  avec 
ses  piincipes.  En  1798  ou  99, 
de  concert  avec  un  autre  cheva- 
lier, le  clievalier  de  Cubières,  le 
chevalier  de  Piis  avait  fondé  une 
institution  appelée  le  Portique  ré- 
puhlicaiîu  iiistilntioii  lellement  in- 
com])alihle  avec  l'inslilut,  que  par 
un  aiiicK;  si)écial  de  son  regle- 
ïnent,  nul  uitinbre  de  l'institut 
n'y  pouvait  être  admis.  Peut-être 
l'institut  a-t-il  pris  tacitement  una 
résolution  pareille,  lelativemenl 
aux  UMMubres  du  Portique.  Les  œu- 
vres de  M.  Piis  ont  été  imprimées 
et  publiées  en  quatre  volumes  par 
sou^cripiion,  lorsqu'il  était  préfet 
de  police.  Cette  édition  ,  fort  chè- 
re dans  l'origine,  a  perdu  les  trois 
quarts  de  sou  piix.  Il  n'en  est  pas 
ainsi  de  sa  valeur.  Car  indépen- 
damment d'une  romance  tiès- 
sentimentale  sur  les  huîtres,  ou  y 
trouve  plusieurs  })ièces  assez  cu- 
Tieuses,  et  entre  antres  un  poëme 
sur  les  lettres  de  I  alphabet,  où 
sont  les  vers  suivans  : 

Le  (^)  traînant  sa  queue  et  querellant  tout  bas. 
L'X  ex>.i(ant  la  rixe. 

"Voilà  ce  que  M.  de  Piis  appelle  de 


PII 

Vharmonie  cmitative.  Sans  rabais- 
ser le  mérite  de  ce  poëme,  nous 
croyons  pouvoir  avancer  que  M. 
de  Piis  fait  mieux.  Quoique  dans 
ses  meilleures  chansons  il  soit 
prolixe  et  bizarre,  et  qu'il  n'ait 
pas  produit  une  chansr)n  par- 
faite, il  s'est  placé  par  plusieurs 
couplets,  au  niveau  de  nos  meil- 
leurs chansonniers.  Ce  n'est  pas, 
toutefois,  parce  couplet  qui  se 
trouve  dans  une  de  ses  dernières 
productions  : 

Parer,  en  fastueux  coquet, 

Son  ironique  boutonnière 

Dun  œillet  rouge  ou  d'un  bouquet 

De  violette  printanière  , 

'•  C'est  être  imurrccti  nncl , 

•>  £t  non  constitutiannei.  •• 

Que,  de  la  retraite  qu'il  habile, 
M.  de  Piis  envoie  de  temps  en 
temps  de  pareils  couplets  à  cer- 
tains journaux,  il  n'y  a  rien  là  que 
d'innocent,  rien  qui  ne.  soit  com- 
patible avec  l'esprit  de  la  réforme 
dans  laquelle  il  s'est  jeté;  mais  il 
n'en  est  pas  ainsi  des  attaques  qu'il 
se  pertntt  trop  fréquemment  con- 
tre les  fauteurs  des  opinions  qu'il 
a  feint  de  parlaj^er.  Qu'il  se  sou- 
vienne que  la  charité  est  la  pre- 
mière des  vertus  chrétiennes,  et 
qu'il  faut  être  indulijent  quand 
on  a  eu  besoin  d'indulgence.  M. 
le  chevalier  de  Piis  est  nu  des  fon- 
(ialeurs  du  théâtre  du  Vaudeville, 
et  réclame,  à  ce  litre,  des  pro- 
priétaires de  cet  établissement, 
une  [icnsion  (pi'il  n'a  pas  encore 
oblenue.  Sic  vos  non  vohis.  S'il 
n'est  pas  de  l'acadeinie-fiatiçaise , 
il  a  été  membie  du  Careau,  socié- 
té (juijpendaiilviugt  ans,  a  fait  des 
chansons  pour  boire,  et  bu  pour 
faire  des  chansons.  Les  inégalités 
du  talent  de  M.  le  chevalier  de 
Piis  lui  oui  attiré  plusieurs  épi- 


PII 

gammes ,    provoquées    par    son 
nom  ;  Di  Ttiellora  Pus,   lui  disait 
l'un,  en  parodiant  Virgile  ; //«^'e 
Pii<t  ingenium,  disait  l'autre ,  en  pa- 
rodiant le  Ilitiiel.  D'autres,  jouaut 
sur  le  noui  du  plus  ingénieux  des 
associés  do  cech:insonnier,di'<aient 
que  dans  les  ouvrages  de  Piis  il  y 
aidait  beaucoup  de  choses  à  barrer 
(à  Barré),  M.  Piis  aura  sans  doute 
ri  le  prenner  de  ces  pointes,  que 
nous   ne  rappelons  que  pour  l'é- 
gayer.   Ses   priiUMpaux    ouvrages 
sont  :  1°  Les  AugustUis ,   contes 
nouveaux,  1777  ,  2  vol.  in- 12  ;  2° 
la  Carlo  Roherliade ,  ou  E pitre  des 
chenaux ,   ânes  et  mulets  de  ce  bas 
monde  au  sujet  des  ballons ,  1784  •, 
in-S";  j'Cliarisonsnouoetles,  >785, 
in- 12;  178*:),  in- 12  ;  4'  Harmonie 
imitalive  de   la   langue  française  , 
poëme  en  4  chants,  1786,  in-ia  ; 
5°  les  OEufs  de  Pâques  de  mes  cri- 
tiques, dialogues  mêlés  de  vaude- 
villes, 178G,  in-8°  ;  6°  Opuscules 
diners,  1791  ,  in- 12  ;  7°  Chansons 
choisies,  1 806,  2  vol.  in- 1 8;  8°  OEu- 
vres  choisies,  1810,  4  vol.  in- 8"; 
9°  Chansons  pour  la  naissance  du 
roi  de  /î«mc(dans  les  Hommages 
poétiques  deMM.  Liicet  et  Eckart)  ; 
lO"  A  quelques  Portes  très-  spiri- 
tuels (  matérialisme  à  part  )  ,  stan- 
ces familières  ,  1 8 1 8  ,  in  -  8°.  Les 
pièces  qu'il  a  composées  en  société 
avec  M.  Barré  sont  au  nombre  de 
seize  ;  en  voici  les  titres  :  la  Bonne 
femme  ou  le  Phénix^  parodie  lï Al- 
cesle;  V Opéra  de  province,  parodie 
A\4rmide  ;  Cassandre  oculiste,  ou 
l'Oculiste  dupe  de  son  art ,  co'.né- 
die-parade  ;   Arislnte  amoureux , 
ou  le  Philosophe  bridé ,  opéra  co- 
mique ;  les  V endangcurs ,  ou   les 
doue  Baillis ,  divertissement  ;  Cas- 
sandre  astrologue,  ou  le  préjugé  de 


PIL  521 

la  sympathie,  comédie-parade  ;  les 
Etrennes  de  Mercure,  ou  le  Bonnet 
magique ,  opéra  comique  ;  la  Ma- 
tinée et  la  f'^eillée  villageoises,  ou  te- 
Sabot  perdu,  divertissement;  te 
Printemps,  divertissement;  les 
deux  Porteurs  de  chaise,  comédie- 
parade  ;  les  A  mours  d' été,  di  vertts- 
sement  ;  le  Gâteau  à  deux  fines,  di- 
vertis.^e'uent  ;  l' Oiseau  perdu  et  re- 
trouvé, ou  la  Coupe  des  foins,  o\)é.CA 
comique;  le  Mariage  in  extremis, 
comédie,  les  Voyages  de  Rosine,  0- 
péra  comique;  tiX  lesQ  uatre  coins  ,0- 
péra  comique.  3J.de Piis  acomposé 
seul ,  laFausse  Paysanne,  ou  Heu- 
reuse inconséquence  ,  comédie  ;  les 
troisDéesseS  rivales,  ou  le  double  Ju- 
gement de  Paris,  divertissement; 
les  Sacoyardes,  ou  la  Continence  de 
Bayard,  comédie;  les  Solitaires  de 
N ormandie,o\)é.vii  comique;  la  suite 
des  Solitaires  de  Normandie,  opéra 
comique  ;  les  deux  Panthéons ,  co- 
médie vaudeville  ;  les  deux  Limo- 
sins ,  op(ivava\iilevil\e;  l' abbé  y  erd; 
le  Savetier  et  le  Financier;  le  Maria- 
ge du  vaudeville  et  de  la  morale  ;  les 
Plaisirsde  r  hospitalité  et  les  Plaisirs 
de  l'adoption ,  opéras  vaudevilles; 
Santeuil  et  Dominique ,  pièce  anec- 
dotique  ;  et  enfin,  te  Rémouleur  et 
la  Meunière,  divertissement. 

PILAllD  (l'al)bé  Jeav-Char- 
les),  né  le  17  octobre  1767,  était 
curé  de  Suint-Jean  de  Corconé 
dans  la  Vendée,  à  l'époque  où  la 
guerre  civile  y  éclata.  Il  se  réunit 
à  l'armée  catholique,  passa  la  Loi- 
re avec  elle,  et  accompagna  les 
chouans  tiiia  l'instant  qu'ils  se  ras- 
semblèrent. Pendant  la  première 
guerre,  ce  fut  à  M.  de  Scépeanx, 
chargé  du  commandement  de  l'An, 
jou,  que  s'attacha  l'abbé  l'ilard.  Il 
eut  occasion  de  se  lier  alors  avec 
ai 


7)22  PIL 

le  général  Bourmont  (  voyez  ce 
nom),  dont  il  devint  depuis  l'a- 
gent intime  ,  et  qui ,  à  la  seconde 
guerre  qui  eut  lieu  en  1799,  le  nom- 
ma aumônier-général  de  l'armée 
et  trésorier.  Il  joua  dès-lors  un  rôle 
important  dans  ces  l'atales  circons- 
tances; il  était  à  raison  de  son  der- 
nier titre  admis  à  lt)usles  conseilîT, 
et  iniiié  à  tous  les  secrets,  ne  quit- 
tant pas  un  instant  le  général  en 
chef,  le  suivant  même  dans  toutes 
ses  expéditions,  et  jusque  sur  les 
champs  de  bataille.  L'abbé  Pilard 
<'St  rentré,  depuis  la  pacification  , 
dans  l'exercice  de  ses  fonctions  sa- 
cerdotales,pi  us  chères  sans  doute  à 
son  cœur  depuis  qn'elles  nont 
plus  pour  objet  que  la  paix  et  la 
charité.  Il  a  été  nommé  à  la  care 
de  Souelles,  dans  le  département 
de  Maine-et-Loire. 

PILASTRE  DE  LA  BRARDIÈ- 
RE    (Up.bain-René  ) ,    habitait    le 
bourg  de  Chefles,  ci- devant  An- 
jou, aujourd'hui  département  de 
Maine-et-Loire,  lorsque  la  révolu- 
tion éclata,  11  fut  nommé  député 
de  la  sénéchaussée  d'Anjou,    aux 
états-généraux  en  1789,  et  ne  prit 
part  que  par  son  vote  aux  impor- 
tantes questions  qui  y  furent  agi- 
tées. En  septembre  «792,  il  fut  de 
nouveau  élu    })ar  le  département 
deM.iine-et-Loire  à  la  convention 
nationale,  où  dans  le  procès  du  roi, 
il  votaladétention  pendant  la  giaer- 
le,  et  le  batmissement  à  la  paix.  A- 
près  la  session,  il  passa  au  conseil 
des  anciens,  d'oi"»  il  sortit  le  20  mai 
1798.  Il  devint  alors  l'un  des  ad- 
ministrateurs des  hospices   civils 
de  Paris,  place  qu'il  ne  conserva 
que  jusqu'à  la  révolutiondu  18  bru- 
maire an  8,   à  la  suile  de  laquelle 
(en  décembre  1799)  il  fut  encore 


PIL 

élu  membre  :lu  corps-législatif.  Il 
cessa  d'en  faire  partie  en  i8o5,  et 
n'a  point  rempli  depuis  cette  épo- 
que de  fonctions  jHibliques. 

PliiLE  (Lotus-Antoine  comtk 
Dr) ,    lieutenant  -  général ,    offi- 
cier de    la  légion  -  d'honneur  et 
chevalier  de  Saint-  Louis,  né  à 
Soissons,  le  i4  juillet  1749?  était 
avant    la    révolution    secrétaire- 
général  de  l'intendance  de  Bour- 
gogne. Jl  se  prononça  avec  cha- 
leur   pour  le    nouvel    ordre    de 
choses,   et    lors   de  la   levée  des 
premiers  bataillons  de  volontai- 
res, il  fit  partie  d'un  de  ceux  qui 
se   formaient  à  Dijon,  et   en   fut 
bientôt  nommé  commandant.   Il 
passa  avec  ce  corps  à  l'armée  que 
commandait   Dumouriez,  se   dis- 
tingua   dans   plusieurs  occasions 
par  sa  bravoure  et  ses  talens  mi- 
litaires, et  obtint  à  la  fin  d'août 
1792,  fc  grade  d'adjudant-géné- 
ral;  mais   s'étant   trouvé  en  di- 
verses   circonstances    opposé  au 
général  Dumouriez,  et  bien  éloi- 
gné de  vouloir  seconder  ses  pro- 
jets ,   celui-ci  le   livra  aux  Autri- 
chiens lorsqu'il  passa  de  leur  cô- 
té, et  l'adjudant-général  Pille  fut 
long-temps  retenu  pareux  prison- 
nier dans  la  forteresse  de   Maës- 
tricht.  Rendu  etifin  à  la  liberté,  il 
fut  appelé  à  Paris  par  le  gouverne- 
ment, qui  le  nomma  commissai- 
re-général de  l'organisation  et  du 
mouvement  des  armées  de  terre, 
place  équivalente  alors  à  celle  de 
ministre    de   la   guerre.    Pendant 
son  adminislralidii,  il  fut  dénon- 
cé aux  jacobins  par  Sijas,    mais 
cette  altaque  n'eut  pointde  suite, 
et  il  continua  à  remplir  les  mêmes 
fonctions,  jusqu'après  le  9  ther- 
midor (27  juillet  1794)-  Employé 


PIL 

alors  dans  le  grade  de  général  de 
brigade  à  l'intérieur  de  la  Fran- 
ce, il  fut  attaché,  en  1797,  à  l'ar- 
mée d'Italie,  et  commanda  depuis 
successivement  les  places  de  Mar- 
seille et  de  Lille.  Après  la  révo- 
lution du  18  brumaire  an  S  (9  110- 
veitihre  1799),  le  général  Pille  eut 
une  inspection,  et  tut  chargé  long- 
temps à  Paris  de  fonctions  con- 
cernant particulièrement  le  recru- 
tement et  la  conscription.  Lors 
du  retour  du  roi  en  1814  ■.  il  fut 
nommé  chevalier  de  Saint-Louis, 
et  eut,  le  a3  septembre  1 8 1 5,  le  li- 
tre de  conite.  lia  depuisobtenu  sa 
retraite.  L'aïeule  maternelle  de  ce 
général  était  la  sœur  de  l'illustre 
Racine. 

PILLET  (Fabien),  homme  de 
lettres, membre  de  la  société  royale 
académique  des  sciences  de  Paris, 
olïicierdcl'universitéjestnéà  Lyon 
en  1772.  Il  a  successivement  coo- 
péré à  la  rédaction  du  Journal  gé- 
néral de  France,  du  Journal  d' ins- 
truction publique,  du  Déjeuner, 
feuille  dont  les  auteurs  furent  con- 
damnés à  la  déportation  à  l'épo- 
que du  18  fructidor,  et  enfin  du 
Journal  de  Paris ,  dont  il  est  au- 
jourd'hui le  plus  ancien  rédacteur, 
pour  la  partie  des  arts  et  de  la  lit- 
térature dramatique.  M.  Fabien 
Pillet  a  occupé  diverses  places 
d'administration,  notamment  cel- 
les de  chef  de  bureau  des  théAtres 
et  de  secrétaire  principal  de  la  di- 
rection générale  de  l'instruction 
publique,  et  en  dernier  lieu  de  chef 
du  bureau  descolléges  royaux  à  l'u- 
niversité, lia  fourni  beaucoup  d'ar- 
ticles à  la  Biographie  universelle , 
ceux,  entres  autres,  des  acteurs  du 
Théâtre-Français  et  de  plusieurs 
poètes,    peintres    et    sculpteurs.^ 


PIL 


5?.5 


Une  pièce  de  circonstance,  JVen- 
zel  ou  le  Magistrat  du  peuple,  opé- 
ra en  3  actes,  musique  de  Ladur- 
ner,  lui  valut,  en  1794,  l'avantage 
d'être  rappelé  de  l'armée, et  exemp- 
té de  la  réquisition  militaire,  par 
un  arrêté  spécial  du  gouverne- 
ment. Il  a  donné  depuis  avec  suc- 
cès, mais  sous  le  voile  de  l'ano- 
nyme, un  opéra  en  un  acte,  Duval 
ou  une  Erreur  de  Jeunesse,  qui  eut 
au  théâtre  de  l'Ambigu-Comique 
i  5o  représentations,  et  une  coirié- 
die  en  un  acte,  le  Refus  par  amour, 
imprimée  [)ar  Barba.  L'opéra  de 
Duval  fut  f  til  en  société  avec  M.  Gré- 
try  neveu.  On  a  de  M.  Fabien-Pil- 
let  un  grand  nombre  di;  poésies 
fugitives,  et  surtout  ù'Epigram- 
mes,  qui  sont  éparses  dans  les  re- 
cueils et  dans  les  journaux,  et  Ton 
cite  particulièrement,  comme  cel- 
le de  ses  pii;ces  bachiques  qui  a 
eu  le  plus  de  vogue,  la  chanson  qui 
commence  ainsi  ; 

Voulez-vous  suivre  un  bon  conseil  ? 
Buvez  avant  que  de  combattre ,  etc. 

Ses  querelles  épigrammatique* 
avec  Legouvé,  Despaze,  Vigée, 
Geoffroy,  Dorât  Cubières,  MM. 
l'abbé  Feletz,  Baour-Lormian,  Le- 
brun -Tossa,  etc.,  ont  pendant 
quelque  temps  amusé  les  oisifs  de 
la  capitale.  Son  ouvrage  intitulé  : 
la  Lorgnette  des  Spectacles,  et  sa 
Revue  des  comédiens  (2  vol.  in- 12) 
serviront  utilement  à  l'histoire  du 
théâtre.  Il  est  peu  de  livres  de  ce 
genre  où  le  talent  des  acteurs  en 
réputation  soit  soumis  à  une  ana- 
lyse plus  approfondie  et  plus  im- 
partiale. Sa  critique  du  salon  de 
1812,  qui  parut  à  cette  époque 
sous  le  litre  de  te  Noir  et  le  Blanc, 
et  ses  articles  du  Journal  de  Paris, 
sur  les  expotiitions  publiques  des 


0'24 


PIL 


années  suivantes,  ne  sont  pas  non 
plus  sans  intérêt  pour  les  liomuies 
qui  se  proposent  d'écrire  l'histoire 
de  la  peinture.  On  a  de  lui,  en  ou- 
tre, des  Lettres  critiques  à  un 
membre  de  l'athénée  de  hyon  , 
sur  les  cinq  satires  de  M.  Despaze, 
et  des  brochures  politiques,  pu- 
bliées après  le  9  thermidor  an  2, 
savoir  :  Sommes-nous  libres  ou  ne 
le  iommes-nous  pas?  Des  Lois  et 
non  du  sang,  etc.,  etc.  On  lui  a 
long-temps  attribué  un  pamphlet 
satirique,  intitulé  :  Revue  des  Au- 
teurs vivons,  qui  causa  une  sorte 
de  scandale  parmi  les  gens  de  let- 
tres (1797),  et  qui  l'exposa  même 
à  la  colère  du  directoire-exécutit"; 
mais  il  a  constamment  désavoué 
cette  brochure,  où  la  hardiesse  al- 
lait jusqu'à  la  témérité,  et  l'on  a 
lieu  de  croire  du  moins  qu'il  n'en 
était  pas  l'unique  auteur.  On  re- 
marque, au  surplus,  que  depuis 
l'époque  du  i8  fructidor,  où  il  fut 
proscrit  avec  ses  amis,  MM.  Des- 
tor  et  E.  Dupaly,  il  s'est  abstenu 
d'écrire  sur  la  politique. 

PILLKINGTON  (Marie),  da- 
me anglaise,  auteur  de  plusieurs 
ouvrages  estimés,  principalement 
consacrés  à  l'instruction  de  la  jeu- 
nesse, née  à  Cambridge,  en  1766. 
Son  père  était  un  chirurgien  très- 
habile  ;  mais  plus  occupé  de  son 
^rt  que  de  sa  fortune ,  il  laissa  eu 
mourant  sa  l'en:me  et  sa  fille  dans 
le  besoin.  Cette  dernière  fut  éle- 
vée par  son  grand-père,  ecclésias- 
tique respectable,  qui  se  plut  à 
cultiver  les  heureuses  dispositions 
dont  elle  était  douée.  Elle  épousa, 
en  1786,  un  chirurgien  de  la  ma- 
rine, et  pour  suppléer  à  son  peu  de 
fortune,  elle  entreprit  l'éducation 
<le  plusieurs  jeunes  demoiselles. 


PIN 

Ayant  ensuite  publié  quelques 
écrits  qui  obtinrent  du  succès, 
elle  s'adonna  tout  entière  à  la 
littérature.  Les  principaux  ouvra- 
ges de  mistriss  Pillkington,  sont: 
i"  Histoire  de  Mortimer  I^uscetles, 
17975  iu-ï2;  2°  Histoires  tirées  de 
l' Ecriture-Sainte,  1798,  in- 12;  5* 
Miroir  pour  le  sexe,  1798,  in- 12; 
f\°  Beautés  historiques  pour  les 
jeunes  dames,  1798,  in- 12;  5* 
Contes  de  Marmontel ,  choisis  et 
abrégés,  1799,  in-12;  Qt"  Biogru' 
phie  pour  tes  jeunes  garçons,  1 799, 
in-12  ;  7°  Biographie  pour  les  jeu- 
nes filles,  1799,  in-12;  8"  Nou~ 
veaux  contes  du  Château  ^  1800, 
in-12  ;  9"  Contes  delà  Chaumière, 
i8oi,  iu-12;  10°  Contes  pour  les 
jeunes  dames,  1801,  in-12;  1 1* 
Aventures  merveilleuses ,  ou  les 
vicissitudes  d'une  Chatte,  1802, 
in-12;  12"  Abrège  de  l'Histoire  de 
ta  nature  animée,  par  Goldsmith, 
i8o5,  in-12;  13"  la  Fertu,  1804» 
in-12  ;  14°  Dictionnaire  biographie 
que  des  Femmes  célèbres,  1804, 
in-12;  i5°  Crimes  et  caractères , 
i8o5,  3  vol.  in-12;  16"  Hélène, 
1807,3  vol.  in-12;  ly'  Explica- 
tions sacrées,  ou  Remarques  du  di- 
manche soir,  1809,  in-12;  18° 
Sinclair,  ou  l'Orphelin  mysté- 
rieux, 1809,  4  vol.  in-12;  19° /n- 
cidens  caractéristiques,  tirés  de  la 
vie  réelle,  1809,  in-12;  ao"  Poè- 
mes originaux,  1811,  in-S"  ;  2  1°  les 
Malheurs  de  César,  ou  Aventures 
d'un  chien  trouvé,  )  8 1 3,  in- 1 2;  22° 
Lettres  d'une  mère  à  sa  fille,  etc. 
PINARD  (Joseph),  naquit, 
en  176S,  à  Christophe-Dubois, 
département  de  la  Vendée.  Les 
premiers  troubles  de  la  révolu- 
tion l'attirèrent  à  Paris;  il  y  figura 
dans  tous  ceu-t   qui   eurent   lieu 


successivement,  et  devint  l'un 
des  menibres  les  plus  frénétiques 
et  les  plus  sanguinaires  de  la  so- 
ciété des  Jacobins  de  Paris.  Il 
fut,  i\  ce  titre,  remarqué  par 
CanifT,  qui,  envoyé  en  mission 
djtns  II'  départoment  de  la  Loire- 
Inttrieiire,  le  choisit  pour  l'ac- 
cnntpagner.  A  peine  arrivé  à 
Nantes,  Pinard  fut  nommé  n\em- 
brc  du  Cfjmilé  révolutionnaire 
de  cette  ville,  et  rexocuteur  de 
confiance  des  assassinats  journa- 
lier'» qu'il  provoquait,  et  qu'or- 
donnait ensuite  le  comité;  il  était 
surtout  chargé  des  arrestations 
à  faire  dans  les  campagnes.  Ses 
furfurs  et  ses  rapines  s'étendaient 
sur  tons  les  départemenscuviron- 
nans,  où  son  nom  seul  répandait 
un  effroi  général,  he  9  thermi- 
dor mit  nn  terme  à  tant  d'hor- 
reurs. De  retour  dans  la  capitale 
après  cette  époque,  il  fut  dénon- 
cé par  sa  section,  et  compris  dans 
le  procès  intenté  contre  !es  mem- 
bres du  comité  de  Nantes.  Le 
tribunal  révolutionnaire  de  Paris 
Je  condamna  à  mort  le  aS  frimai- 
re an  5  (i5  septembre  1794)5 
comme  complice  de  Carrier, 
«  ayant  commis  plusieurs  assas- 
«sinats  de  femmes,  de  vieillards 
oet  d'enfans,  incendié  plusieurs 
nhabitations,  volé  une  somme  de 
n4»ooo  livres,  etc.,  etc.  »  Il  fut, 
avec  Moreau- Grandmaison  ,  le 
seul  membre  de  ce  comité  qui 
accompagna  Carrier  à  Técha- 
faud.  Pinard  était  âgé  de  26  ans. 
P  I N  I)  lii  M  0  N  T  E  (le  marquis 
Jean),  poète  italien,  naquit  à  Vé- 
ronne,  en  175».  Hiwoyit  de  bonne 
heure  au  collège  des  ISoblesà  Mo- 
dène,  il  s'y  montra  poète,  et  mê- 
me improvisateur.    Encouragé  à 


PIN 


3a5 


cultiver  ces  dispositions,  il  vou- 
lut imposer  un  frein  à  son  imagi- 
nation pour  avoir  le  temps  de  for- 
mer son  talent.  Mais  aussi  peu 
maître  de  l'un  que  de  l'autre,  il 
composa  des  vers  avec  plus  de  fa- 
cilité que  de  goût,  en  croyant  y 
avoir  mis  du  sentiment,  parce 
qu'il  y  avait  de  la  chaleur.  Plu- 
sieurs de  ces  compositions  paru- 
rent à  la  suite  d'une  traduction 
poétique  des  Remèdes  de  l'amour 
d'Ovide,  que  l'auteur  fit  impri- 
mer en  1791,  à  Vicence ,  sous 
le  nom  d'Éschilo  Acanzio.  Il  y 
exerçait  alors  les  fonctions  de  pré- 
leur que  la  république  de  Venise 
lui  avait  confiées.  A  une  époque 
où  la  scène  italienne  rérilamait  un 
successeur  de  MalFei,  et  cherchait 
un  meilleur  interprète  que  Pepoli 
(?'ov.  cet  article  an  Si'pplément), 
Pindemonle  descendit  dans  l'a- 
rène pour  y  briguer  l'honneur  de 
se  parer  de  la  première  couronne 
dramatique  de  l'Italie.  Ses  tra- 
gétlies,  presque  oubliées  main- 
tenant, attiraient  la  foule  au  théâ- 
tre ,  dans  un  temps  oi'i  celles 
d'Alfieri  y  étaient  écoutées  avec 
impatience.  Pindemonte  s'y  mon- 
tra novateur,  et  fut  des  premiers 
à  y  enfreindre  les  règles  d'Aris- 
tolc.  Ses  componimenli  teatrali,  au 
nombre  de  onze,  imprimés  à  Mi- 
lan en  1804,  4  ^o'-  in -8",  et 
précédés  d'un  Discorso  sal  tea~ 
Ira  ilaliano,  échouèrent  devant  la 
crili(|ue  des  littérateurs,  après  a- 
voir  enlevé  les  suffrages  du  pu- 
blic. Dans  un  éloge  composé  en 
l'honneur  de  Sainl-Thonias-d'A- 
quin,  Pindemonte  eut  la  préten- 
tion d'être  éloquent,  et  ne  fut  qu'é- 
rudit  :  cet  essai  sufïit  à  le  faire  ju- 
ger aussi  médiocre  prosateur  que- 


526 


PIN 


médiocre  poète.  ObIig:é  de  s'éloi- 
f;ner  de  Venise,  il  vécut  quelque 
temps  à  Paris,  où  il  eut  occasion 
de  se  faire  remarquer  du  premier 
consul  Bonaparte,  qui  le  nomma 
jnembre  du  corps-législatif  ita- 
lien. Pindernonte  mourut  en  1812. 
PUS  DEMONTE  (le  chevalier 
IIippolite)  ,  frère  du  précédent, 
ei  meilleur  poète  que  lui,  naquit 
à  Vérone  en  1755.  Placé  au  col- 
lège des  nobles,  à  Modène,  il  y 
entreprit  ses  études,  et  y  annon- 
ça son  penchant  pour  la  poésie. 
A  j8  ans,  il  s'était  déjà  placé 
parmi  les  bons  poètes  italiens,  et 
avait  enrichi  le  Parnasse  de  quel- 
ques élevantes  productions.  Se 
formant  d'abord  sur  les  classiques 
grecs  et  latins,  il  eut  ensuite  l'oc- 
casion d'observer  la  société  et  les 
hommes,  et  de  soumettre  à  l'expé- 
rience les  idées  qu'il  avait  puisées 
dans  l'étude,  il  parcourut  succes- 
.«ivement  la  France,  agitée  par  la 
révolution,  l'Anglelerrr,  terre  de 
réalités,  et  ITlalie,  pays  d'espéran- 
ces. Ces  tableaux  variés  de  l'espèce 
humaine  firent  une  profonde  im- 
pression sur  son  esprit,  et  contri- 
buèrent à  modifier  ses  opinions. 
Il  échangea  la  lib<îrté  contre  les 
privilèges ,  et  tomba  dans  la  dé- 
votion en  se  sauvant  des  bras  de 
l'amour  :  mais  ses  ouvrages  con- 
servent la  trace  lumineuse  des 
différens  sentimens  qui  se  sont 
tour- à -tour  succédé  dans  son 
cœur.  Le  Viaggi,  lo  plus  long 
de  ses  sermons,  et  Aharitle, 
roman  qui  lui  a  été  attribué,  sont 
une  espèce  à.' Album,  où  l'auteur 
a  consigné  les  réflexions  aux- 
quelles il  s'était  livré  pendant 
ses  voyages.  Il  a  composé  aussi 
des  poésie  campestri ,  où  il  parle 


PhN 

avec  une  grande  admiration  de 
l'Angleterre,  dont  il  décrit  les 
campagnes  et  les  mœurs;  en  gé- 
néral, les  poésies  de  Pindernonte 
portent  lempreinte  de  ce  calme, 
de  ce  repos ,  de  ce  rare  bonheur 
qu'on  ne  fait  éprouver  aux  autres 
que  lorsqu'on  est  capable  de  le  sen- 
tir soi-même.  Enfin  Pindemonte  a 
composé  une  tragédie  sur  la  mort 
d'Arminius,  ce  héros  de  la  Ger- 
manie, qui,  après  avoir  délivré 
son  pays  du  joug  étranger,  en- 
courut sa  vengeance  pour  avoir 
tenté  de  le  sf)uinettre  au  sien. 
Cette  pièce  s'écarte  de  la  sévé- 
rité des  anciemujs  règles  sans 
pourtant  les  violer  trop  ouverte- 
tement.  L'auteur  y  a  introduit 
des  chœurs  de  guerriers  et  de  jeu- 
nes fdies,  qu'on  regarde  comme 
de  bons  modèles  de  style.  On  ne 
peut  pas  juger  de  l'efiet  que  V Ar- 
/Aim/o  aurait  au  théâtre,  celle  pièce 
n'ayant  janiais  été  jouée,  et  pa- 
raissant même  peu  susceptible  de 
l'être.  Les  ouvrages  de  Pinde- 
monte qu'on  estime  le  plus,  sont 
ses  poëines  lyriques,  surtout  les 
épîtresel  les  sermons,  qui  out  une 
certaine  gravité  d'idées  et  de  sen-. 
timeus,  que  l'auleur  semble  avoir 
puisée  dans  la  littérature  anglaise, 
dans  laquelle  il  est  très  -  verSé. 
11  vient  de  publier  une  traduc" 
tion  en  vers  blancs  de  l'Odys- 
sée, dont  il  avait  fait  paraître 
deux  chants,  il  y  a  quelques 
années.  Pindemonte  a  peut-être 
bien  fait  de  la  [iréférer  à  l'Iliade, 
qui  aurait  exigé  plus  d'imagina- 
tion, et  une  plus  grande  vigueur 
dans  le  style.  Animé  par  un  noble 
sentiment  de  patriotisme  et  d'ami- 
tié, il  a  répandu  souvent  des  fleurs 
sur  le  tombeau  de  ses  amis  et  de  ses 


PIN 

compatriotes.  Maflci,  Spolverini, 
Pompei,  Torelli,  Rosa  Morando, 
ont  re^îii  tour-à-tour  ses  homma- 
ges et  ses  éloges.  L'âge  et  les  infir- 
mités ont  reiulii  Pindemonte  d'u- 
ne dévotion  trop  austère  pour  un 
esprit  cultivé.  Le  temps  qu'il  don- 
ne à  ses  prières  nuit  à  ses  travaux, 
et  c'est  avec  raison  qu'on  lui  repro- 
che le  partage  trop  inégal  qu'il  en 
fait  entre  ces  mêmes   travaux  et 
ïa  conscience.    Cet    auteur    n'est 
pas  du  nomhre   des  hommes  ex- 
traordinaires   qui    l'Italie  a    pro- 
duits; mais  l'as?iduité  de  ses  études, 
la  dignité  de  sa  vie  et  de  ses  écrits 
lui  assurent  tm  rang  honorable  par- 
mi ses  contemporains,  et  le    re- 
commandent   d'avance    à    l'esti- 
me de  la  postérité.  Ses  autres  ou- 
vrages sont  :    1°  Inno  à  Cerere , 
in-8":  c'est    une    traduction   de 
l'hymne  attribuée  à  Homère  ;   2" 
i  Sepolcri:  c'est  une  réponse  à  un 
poëmequeFoscolo  luiavaitadressé 
sur  le  même  sujet;  5"  le  Nozze  di 
Teti   et  di   Pelen ^   traduction   du 
poëme  de  Catulle  ;  4°  Lettera  di 
Pénélope  ad  U lisse,  traduction  de 
l'héroïde    d'Ovide;    5°   Gibilterru 
salvata,  poëme;  6°  la  Fala  morga- 
na,  poëme  (description  d'un  phé- 
nomène   qu'on    observe    dans    le 
cauid    de    Messine)  ;    7"   Antonio 
Foscurini,  nouvelle.  Ces  deux  der- 
niers   ouvrages   et  quelques    au- 
tres morceaux  de  poésie   ont  été 
publiés  sous  le   nom  de  PoUdete 
Melpornenio.  8°  Discorso  sul  gusto 
prescrite  in  letteratura;  {)"  de'  Giar- 
dini  inglesi;  10" Saggio  di  traduzio- 
ni   di   f'^irgilio.   Nous  avons  déjà 
parlé  de  l'essai  de  sa  traduction 
d'Homère.  L'auteur  lesfit  paraître 
en  même  temps.  1 1°  Plusieurs  tra- 
ductions du  groc,  imprimées  avec 


PIN 


^a? 


celles  de  Pompei;  12"  Etogio  di 
Gcssner;  15°  Elogio  di  Gozzi;  i4° 
il  Colpo  di  Martello,  petit  poëme 
sur  l'usage  du  temps.  Ses  derniè- 
res productions  sont  deux  o- 
des ,  Vuvcp.  sur  le  retour  du  ca- 
pitaine Parry,  de  son  expédition 
au  pôle,  et  l'autre  sur  la  mort 
de  miss  Bathurst,  qui  se  noya 
dansle  Tibre.  iM.  Pindemonte  vit 
à  Venise,  qu'il  regarde  comme  sa 
seconde  patrie.  Il  est  membre  de 
l'institut  italien,  et  de  plusieurs 
autres  corps  savans. 

PIiNEL  (Philippe),  est  né  en 
1745»  à  Saint- Paul,  près  de  La- 
vour,  département  du  Ttirn,  où  son 
père  exerçait  l'art  de  guérir.  Il  étu- 
dia fort  jeune  encore  la  médecine  à 
Toulouse,  et,  en  1764,  fut  reçu 
gratuitementdocteiu' en  médecine 
de  la  faculté  de  cette  ville ,  en  con- 
sidération des  connaissances  éten- 
dues dont  il  avait  déjà  fait  preuve, 
et  des  espérances  qu'il  donnait 
pour  l'avenir.  Il  se  rendit  immé- 
diatement après  à  Montpellier  , 
cité  célèbre  alors  par  l'instruction 
médicale  qu'on  venait  y  puiser  de 
toutes  parts,  pour  se  perfection-^ 
ner  dans  la  science  qu'il  devait  un 
jour  illustrer.  Après  quelques  an- 
nées de  séjour  dans  cette  école, 
pendant  lesquelles  le  jeune  doc- 
teur s'était  livré  à  l'enseignement 
des  mathématiques  pour  subve 
nir  aux  frais  de  son  existence,  il 
vint  à  Paris,  où  il  .s'adonna  d'a- 
bord avec  ardeur  à  l'étude  des 
diiVéreiUes  sci^'uces  nécessaires  à 
la  niidecipe»  comme  la  botanique, 
la  ïoologie,  l'analomie  comparée, 
etc.  Il  se  lia  bient»''»t  avec  (juelques 
hommes  au  jourd'iiuilrès-célèbres, 
dont  plusieiu-s  vivent  encore,  et 
particulièrement  avec  Portai,  De- 


SaS  riN 

sault,  Chaptal,  Berthollet,  Four- 
croy.  Desfontaines,  etc.  Dans  la 
suite  M.  Pint'l  se  livra  exclusive- 
ment à  la  tnèdeciite,  et  jeta  les 
fondernens  de  celte  aérie  do  tra- 
vaux qui  lui  ont  valu  une  si  juste 
célébrité  parn)i  les  successeurs 
d'Hippocrate.  En  1785,  il  publia 
une  traduction  de  la  médecine 
pratique  de  Cullen  sur  la  nosolo- 
gie qu'on  put  alors  étudier;  L'an- 
née suivante,  il  donna  une  édition 
des  œuvres  de  Baglivi,  célèbre 
médecin  de  Rome  ;  il  rédigea , 
pendant  quelque  temps ,  la  Gazette 
de  Santé ^  et  travailla  à  un  recueil 
intéressant  créé  par  Fourcroy ,  et 
inlitulé,  la  Médecine  éclairée  par 
les  sciences  physiques  ;  il  prélu- 
dait ainsi  à  de  plus  grands  travaux 
qui  devaient  faire  une  sorte  de  ré- 
volution en  médecine;  il  en  fut 
distrait  pendant  quelque  temps 
par  sa  nr  mination  i\  la  place  de 
médecin  en  chef  de  Bicêtre ,  en 
1  792.  Son  ardente  philantropie  fut 
bientôt  mise  à  ime  rude  épreuve 
dans  un  hospice  -  prison ,  où  les 
aliénés  étaient  enchaînés  et  con- 
finés dans  des  cachots  infects.  M. 
Pinel,  convaincu  par  une  étude 
approfondie ,  qu'on  ne  faisait 
qu'empirer  l'état  des  aliénés 
par  des  châtimens  réservés  aux 
criminels  et  une  réclusion  ri- 
goureuse, résolut  de  les  traiter 
avec  douceur,  de  les  laisser  jouir 
des  bienfaits  de  l'exercice,  du  tra- 
vail et  d'un  air  salubre ,  en  se  bor- 
nant pour  eux  à  une  surveillance 
exacte  et  paternelle  ;  il  fit  donc 
tomber  leurs  chaînes....  Cette  in- 
novation ,  qui  trouva  d'abord  de 
l'opposition  de  la  part  de  l'auto- 
rilé,  eut  tout  le  succès  possible; 
et  M.  Pinel;  qui  rendit  par  cet  acte 


PIN 

d'un  esprit  supérieur  un  service 
in.-^igiic  à  rhumanilé,  ]K'ut  être 
considéré  comme  le  bienfaiteur 
des  aliénés,  k\  le  promoteur  de 
tout  ce  qui  a  élé  fait  en  leur  faveur^ 
en  Fraiice  et  à  l'étraniier.  C'est 
assurément  un  beau  titre  de  gloi- 
re, que  ce  célèbre  médecin  aug- 
menta encore  par  son  Traité  médi' 
co  -  philosophique  sur  l'aliénation 
mentale,  qui  fut  le  fruit  des  études 
prof'indes  et  philosophiques  qu'il 
avait  faites  sur  cette  cruelle  mala- 
die de  l'espiit,  à  Bicêtre  et  à  l'hos- 
pice de  la  Sal[>étriére,  où  il  fut 
ensuite  appelé  en  qualité  de  mé- 
decin en  chef.  Ce  magnifique  éta- 
blissement, le  plus  beau  comme 
le  plus  utile  de  tous  ceux  qui  exis- 
tent en  Europe,  est  son  ouvrage. 
M.  Pitiel,  occupé  de  travaux  scien- 
tifiques ,  songea  peu  aux  honneurs 
qu'obtinrent  plusieurs  de  ses  amis 
sous  le  gouvernement  qui  succéda 
aux  orages  de  la  révolution;  il  au- 
rait pu  cependant  y  aspirer,  étant 
lié  d'amitié  avec  les  Fourcroy.  les 
Chaptal, les  Berthollet. lesCabanis, 
et  admisdan?  les  célèbres  réunions 
d'hommes  distingués  que  iVl^'Hel- 
véfius  recevait  à  Auteuil.  H  fut 
loin  de  rechercher  les  h. iules  ré- 
compenses qne  le  gouvernement 
accordait  aux  savans  et  aux  hom- 
mes de  génie;  tous  ses  mnmens 
étaient  consacrés  aux  recherches 
qu'il  avaitentreprises  A  laSalpétriè- 
re  ,  pour  la  composition  de  son 
grand  ouvrage  de  mé<ler'ine,  inli- 
tulé :  Nosographie  philosophique , 
ou  Méthode  de  l'analyse  appliquée 
à /fl  me</m/j^,  publiépour  la  premiè- 
re fois  en  1798,  et  qui  a  eu  depuis 
six  éditions  consécutives.  L'auteur, 
dans  cet  ouvrage  encore  aujour- 
d'hui le  plus  classique  cl  le  plus 


PIN 

élémentaire  de  nos  traités  <\p  mé- 
decine, t.  rrassa  le'*  vieilles  hypo- 
thèses de  Y humorisme  ,  remplaça 
des  divisions  vagues  et  surannées 
par  une  classification  nouvelle  , 
où  les  maladies  .«ont  distribuées  , 
autant  qu'il  était  possible  de  le 
faire  alors,  d'après  leur  siège.  Le 
g"Af  exquis  qui  j>résida  à  la  ré- 
daction de  ce  livre,  la  philosophie, 
le  ton  sévère  et  la  critique  pi- 
quafile  qu'on  y  rem  uque  ,  l'habi- 
leté profonde  de  l'auteur  à  {géné- 
raliser ses  idées  et  à  manier  le 
grand  iri.-trument  de  l'analyse  mo- 
derne ;  enfin  ww  style  animé,  con- 
cis et  plein  d'éiier;^ie  firent  la  ré- 
putation de  cet  ouvragequi  devait 
opérer  une  révolution  com;ilèie 
dans  la  science  médicale,  et  exciter 
l'enthousiasme  parmi  les  disciples 
que  M.  Pinel  attirait  à  laSalpétriè- 
re,  où  il  faisait  des  leçons  de  Méde- 
cine clinique  ,  et  à  l'école  de  sauté 
dt)nî  il  venait  d'être  nommé  pro- 
fesseur. Les  écrits  de  M.  Piiiel  sur 
la  médecine,  dilVèrens  mémoires 
qu'il  avait  publiés  .sur  l'anato-tiie 
comparée,  la  zoologie,  etc.,  mar- 
quèrent sa  place  dans  la  classe  des 
sciences  physiques  et  mathémati- 
ques de  l'institut ,  dont  il  fait  en- 
core partie  (  i83/i)commemeiribre 
de  l'académie  des  sciences.  Ce  fut 
à-peu-près  à  l'époque  de  son  ad- 
mission à  l'académie  qu'il  fut  dé- 
coré de  la  légion  -  d'honneur. 
Quoique  ce  médecin  célèbre  fût 
loin  d'avoir  Télocution  et  la  mé- 
thode nécessaires  h  un  bon  pro- 
fesseur, ses  aperçus  profonds  et 
philosophiques,  son  enthousiasme 
et  son  espèce  de  réforme,  lui  con- 
ciliaient généralement  les  suffra- 
ges de  ses  confrères  et  l'admira- 
tion d'une  jeunesse  ardente  à  s'ins- 


PIN  32î> 

truïre.  Les  salles  de  la  Salpétriére 
el  le  vaste  amphithéâtre  de  l'école 
de  médecine  pouvaient  à  peine  con- 
tenir la  foule  de  ses  auditeurs.  M. 
Pinel  est  considéré  comme  ayant 
ramené  en  France  le  goût  des  bon- 
nes études  médicales  et  de  la  mé- 
decine d'obs(Tvati"n,  Ses  travaux 
loi  ont  acqui.-  une  réputation  euro- 
péenne, et  plusieurs  de  ses  ouvra- 
ges ont  été  traduits  en  diverses 
lar»g>i»'s.  Consullé  de  tmtes  j)arts, 
cond)lé  des  faveiir>  de  la  renom- 
mée .  ce  célèl)re  médecin  l'aurait 
été  de  celles  de  la  fortune  ,  si  les 
malheureux  n'eussent  eu  une  gran- 
de part  au  fruit  de  ses  travaux.  Il 
s'est  cimtenté  d'une  honnête  ai- 
sance qui  suffît  à  sa  grande  mo- 
destie, à  sa  ren)arquable  simpli- 
cité ;  mais  cette  aisance  a  été  dimi- 
nuée par  le  renversement  de  l'an- 
cienne écoie  de  médecine  ;  il  n'est 
qu'honoraire  dans  la  nouvelle  , 
avec  une  très  -  modique  retraite. 
Outre  les  ouvrages  dont  nous  a- 
vons  parlé  ,  M.  Pinel  a  publié  une 
Médecine  clinique  inJérieure  sous 
plusieurs  rapports  à  ses  autres 
écrits ,  et  en  partie  l'ouvrage  de 
ses  nombreux  élèves;  il  est  aussi 
l'un  des  collaborateurs  du  vaste 
dictionnaire  des  sciences  médica- 
les en  60  volumes.  La  majeure 
partie  des  articles  importans  qu'il 
y  a  insérés,  lui  sont  communs 
avec  iM.  Bricheteau  ,  l'un  de 
ses  élèves  qu'il  a  honoré  de  sa 
confiance  et  associé  à  ses  travaux. 
Ce  vénérable  médecin,  aujour- 
d'hui accablé  par  l'âge  et  les  in- 
firmités ,  unit  à  des  talens  de 
premier  ordre,  la  pratique  des 
plus  hautes  vertus,  une  philoso- 
phie rare  et  un  patriotisme  éclairé  ; 
il  se  montra  courageux  au  jour  du 


33o 


PIN 


danger,  et»  cachant  dans  sa  propre 
maison,  de  concert  avec  une  per- 
sonne respectable,  ri'ifortuné  Con- 
doicel  {voy.  Condorcet)  qui  en  sor- 
tit malheuieusoniL'iit  trop  loi,  mais 
dans  la  crainle  de  coinpronietlre 
un  ami  si  généreux. 

PINELLl  (BarthÉlemi)  ,  pein- 
tre italien,  né  à  Rome,  de  parens 
pauvres,  annonça  de  bonne  heure 
un  tabnt  extraordinaire  pour  la 
peinture.  Placé  à  l'académie  de 
Saint-Luc,  établie  alors  dans  les 
salles  du  Capitule,  il  se  forma 
moins  d'après  les  préceptes  de 
ses  maîtres,  que  sur  les  modèles 
de  l'antiquité  qu'il  avait  sous 
les  yeu.v.  Pressé  par  le  be- 
soin ,  et  obli};é  d'employer  ses 
crayons  pour  subsister, il  abandon- 
nait souvent  son  école  pour  s'a- 
donner à  des  travaux  lucratifs.  Il 
esquissa  quelques  sujets  d'histoi- 
re avec  tant  d'espriletde  vigueur, 
que  ces  croquis  suffirent  pour  faire 
fipprécier  son  talent.  Ce  succès 
l'éloigna  entièrement  de  l'acadé- 
mie, où  il  n'y  avait  que  des  cen- 
seurs rigides,  tandis  qu'il  lui  fal- 
lait des  admirateurs  gétiéreux.  A- 
husaut  de  sa  facilité,  et  se  livrant 
à  sa  propre  impulsion,  il  voulut 
être,  et  il  lut  eflectivemenl,  des>i- 
nateur,  peintre  et  graveur.  Au- 
cun travail  ne  lui  paraissait  diffi- 
cile, et  c'est  avec  la  môme  adresse 
qu'il  maniait  le  burin  et  les  pin- 
ceaux. Il  entreprit  de  donner  une 
collection  d<-,s  tableaux  les  plus 
renommés  de  Ronje  ,  qu'il  grava 
au  trait,  sur  de  petites  dimen- 
sions. Vulgaire  par  gofit,  plus  en- 
core que  par  naissance ,  il  ne  se 
plaisait  que  dans  la  société  de  ce 
qu'il  y  avait  de  plus  ignoble  dans 
la  ville;  et  c'est  encore   dans   les 


PIN 

cabarets  de  Traslevere  que  sont 
ses  ateliers,  et  parmi  la  popula- 
ce de  Rome  qu'il  choisit  ses  mo- 
dèles. Vivant  au  milieu  des  Ro- 
mains modernes  ,  cachés  sous  les 
ruines  des  Romains  d'autrefois,  il 
a  été  le  premier  à  en  dévoiler  les 
usages  el  les  mœurs,  et  le  recueil 
de  ses  scènes  populaires  est  sans 
contredit  le  plus  piquant  de  ses 
ouvrages.  Dans  une  série  de  y.So 
estampes,  composées  et  gravées 
par  lui-même,  Piuelli  a  présenté 
les  faits  remarquables  des  histoi- 
res grecque  et  romaine.  Ses  su- 
jets sont  bien  choisis,  les  groupes 
principaux  sont  presque  toujours 
arlistement  disposés;  mais  le  des- 
sein en  est  maniéré,  et  l'expres- 
sion des  figures  manque  de  celle 
dignité  et  de  cette  noblesse,  qui 
sont  indispensables  dans  des  ta- 
bleaux d'histoire.  Pinelli  dans  ses 
inomens  de  loisir  s'était  amusé  à 
reproduire  les  trop  célèbres  des- 
sins de  Jules  Romain,  gravés  par 
iMarc-Antoiue  ,  pour  les  sonnets 
de  TArétin,  Cette  imprudence 
faillit  l'exposer  à  une  terrible  per- 
sécution de  la  part  du  gouverne- 
ment papal,  qui  ordonna  la  sup- 
pression de  l'ouvrage,  et  obligea 
l'auteur  à  en  briser  les  planches, 
et  à  en  retirer  les  copies  :  ce  qui 
les  a  rendues  presque  aussi  rares 
que  les  originaux.  Cet  artiste  est 
maintenant  occupé  à  graver  une 
suite  de  vignettes  pour  un  poiime 
populaire,  connu  sous  le  nom  de 
Meo  Patacca.  h*'  notubre  des  des- 
sins e^  des  gravures  de  Pinelli 
est  incalculable  :  à  force  d'eu 
produire,  il  a  contracté  une  telle 
aptitude  dans  le  travail,  qu'ij 
compose,  dessine  et  grave  tout  ;'i 
la  fois.  Il  peint  rarement  à  l'hui- 


lo  ot  en  détrempe,  mais  sou?ent  à 
r<iqiiarelle   et  en   couleur  :  il  se 
l'ait  admirer  todjours;  c'est  sur- 
tout   dans    ces    derniers    dessins 
qu'il  se  montre  inimitable.  Celle 
extrême  facilité  qu'il  a,  et  qui  lui 
promet  le  succès  dans  tout  ce  qu'il 
«ntreprend ,    doit   l'aire    regretter 
fjiie  sou    talent    n'ait    pas    eu    le 
temps    de    se    perfectionner.    Pi- 
nelli   aurait    été   un    grand   [)ein- 
tre   de    chevalet,    comme    il    est 
certainement  le  plus  étonnant  im- 
provisateur   en    peinture.    Il    est 
grand,  bien  fait,  son  regard  est 
vif,  et   sa  physirmomie  agréable, 
ïf  umble  avec  les  petits,  il  est  fier, 
et  presijue  insolent  avec  les  grands. 
Son  cœur  est  bon  et  géiiéreux  ; 
mais  ses  goûts ,   ses   manières   et 
SCS  h.ibiludes  sont  ignobles.  Il  ai- 
me la  raillerie,  cherche  le  plaisir, 
et  ne  revient  que  par  fore»'  au  tra- 
vail. On  le  rencontre  souvent  dans 
les  rues   de    Home ,   entouré    de 
chien>,  et  évitant  la  société  des 
honmies,  qu'il  se  plaît  à  observer 
de  loin  dans  les  fête?  et  les  spécia- 
les, auxquels  il  est  rare  qu'il  ne 
prenne  pas  quelque  part. 

PINET  (Jacqi'es),  né,  en 
1760,  à  Bergerac,  département 
de  la  Dordogne,  adopta  avec 
chaleur  la  cause  de  la  révolu- 
lion,  fut  élu,  en  1790,  adminis- 
trateur du  district  de  Bergerac, 
et  nommé,  l'année  suivante,  dé- 
puté du  département  de  la  Dor- 
dogne à  l'assemblée  législative, 
d'où  il  passa  à  la  conven- 
tion nationale.  Dan<  le  procès 
du  roi,  il  vola  avec  la  majorité. 
Envoyé  après  le  5i  mai  à  l'armée 
de  l'Ouest,  et  en  171)4  dans  le» 
déparfemens  des  Pyrénées-Orifin- 
tules  ,  il  suivit  le  système  de  sé- 


PIN 


7)5 1 


vérilé  établi  par  ses  prédécesseurs. 
Au  mois  d'avril  de  la   même  an- 
née,  on  lui  dénonça  une  conspi- 
ration, dont  le  but  était  d'insur- 
ger le  département  des  Landes, 
pour  porter  la   guerre  (;ivile    sur 
les  derrières  de  l'armée  française, 
tandis  qu'elle  serait  attaquée   de 
front  par  l'armée  espagnole.  Pi- 
net  partit  à  l'instant  de  Bayonne, 
et,  en  parcourant  le  département 
des    Landes,  fil   faire    un  grand 
nombre  d'arrestations.  On  porta 
à  80  le  nombre  des  détenus,  dont 
trois  furent    condamnés  à  mort. 
Rappelé    de    l'armée  après   le   () 
thermidor,  il   fut   dénoncé    à   la 
convention    par   quelques    habi- 
tans  de  Bayonne;  mais  la  dénon- 
ciation n'eut  aucune   suite;  il  ne 
fut    décrété   d'arrestation   que  le 
soir  du   1"  prairial  an   3  (20  mai 
i7;)4),  comme  l'un  des  chefs  de 
la  conspiration  qui    avait  éclaté 
le  jour  même  contre  la  convention 
nationale.  L'amnistie  du   4  bru- 
maire l'ayant  rendu  à  la  liberté, 
il  fut  nommé  administrateur  du 
déparlement    de    la    Dordogne  , 
dont  le  directoire  exécutif  lui  re- 
tira les  fonctions  en   1798,  pour 
avoir  influencé   les    élections    do 
ce   département.    Allcint    par  la 
loi  du    12    janvier    1816,    Pinet 
a  été  obligé  de  quitter  la  Fran'-e. 
PINLT  (N.),  né  dans  le  dépar- 
tement de  la  iManche,  adopta  a- 
vec  chaleur  les  principes  de    la 
révolution,  et   fui  élu ,  au   mois 
de  septembre  1792,  député  à  la 
convention  nationale;  il  s'y  fit  peu 
remarquer.    Dans    le    procès    de 
Louis   XVI,  il    fut  de   l'avis   de 
l'appel  au  peuple;  déclara  qu'il  ne 
pouvait    cmnuler    les    fonctions 
de  juge  et    de    législateur;  vota 


532 


PIN 


pour  la  déteulioii ,  et  adopta  le 
sursis.  Après  la  session,  il  entra 
au  conseil  des  cinq-cents,  d'où  il 
sortit  en  1797.  I'  "'^  V^^^  reparu 
dans  les  assemblées  législatives. 
PINET  (N.  ),  agent-de-chan- 
ge à  Paris,  a  joui  pendant  deux 
ans.  de  1787  à  1789,  d'une  cer- 
taine célébrité  due  uniquement 
à  l'appât  qu'il  offrit  à  tous  les 
avides  et  crédules  capitalistes 
de  la  capitale,  en  empruntant 
de  l'argent  à  un  taux  exorbitant 
et  inouï  jusqu'alors;  ce  qui  lui 
attira  surtout  la  confiance  géné- 
rale, c'est  qu'il  payait  les  inté- 
rêts avec  une  exactitude  scrupu- 
leuse, et  qu'il  rendait  les  fonds 
à  tous  ceux  qui  témoignaient  la 
moindre  inquiétude,  sans  qu'au- 
cune instance  pût  les  lui  faire  re- 
prendre. On  aura  peine  à  croiie 
à  celle  sorte  d'épidémie  morale, 
lorsqu'on  saura  que  Pinet,  sans 
aucun  capital  apparent  qui  lui 
servît  de  caution,  vit  passer  dans 
ses  mains  ,  en  fort  peu  de  temps, 
des  sommes  considérables;  mais 
la  même  chose  avait  eu  lieu  70 
ans  auparavant  dans  le  fameux 
système  de  Law,  et  le  résultat  ici 
fut  A  peu  près  le  même.  Le  duc 
d'Orléans,  qui  passait  pour  le 
premier  autour  de  sa  fortune,  l'a- 
vait employé  à  ce  qu'on  préten- 
dit, d'a])rès  le  système  de  ca- 
lomnie établi  alors  coxitre  ce 
prince,  dans  les  accapa^emens 
de  grains  que  la  disette  fit  suppo- 
ser à  celle  époque  {voy.  le  PrÉ- 
voT'DE-Beaumont);  aussi  la  cour, 
qui  recherchait  alors  les  causes 
de  cette  disette,  au  moment  où 
les  états- généraux  se  rassem- 
blaient, fii-ellc  appeler  Pinet  à 
Marly;   il  s'y  trouva    avec  plu- 


PIN 

sieurs  autres  personnes  soupporr- 
nées  comme  lui  d'être  dans  le 
secret  de  ces  accaparemens.  On 
lui  promit  la  place  de  garde  du 
trésor  royal  ,  s'il  donnait  des 
renseignemens  sur  cet  objet  ,  et 
il  s'engagea  à  en  fournir  ;  mais  il 
fut  assassinéquelques  jours  après, 
le  1*9  juillet,  dans  un  bois  près 
du  Raincy.  Voici  comme  M. 
Bertrand-de-Molleville  raconte  cet 
événement  :  «  Le  duc  d'Orléans 
«engagea  Pinet  à  aller  cher- 
Dchor  son  portefeuille  an  Raincy, 
»où  il  était  déposé,  et  le  ren- 
«voyadans  une  voiture,  avec  des 
Mgens  de  sa  maison.  Comme  il 
arevenailà  Paris,  il  fut  assas-iné, 
»et  les  gens  du  duc  déposèrent 
ixju'ils  avaient  été  attaqués  par 
»des  voleurs.  Après  les  premiers 
«secours  qu'on  lui  admislra,  Pi- 
»net  s'écria:  Mon  portefeuille! 
«mon  portefeuille!  les  scélé- 
nrats!  »  Si  l'on  en  croit  le  même 
auteur,  les  créanciers  de  Pinet, 
ayant  découvert,  ù  la  fin  de  1791» 
un  ancien  valet-dc-chambre  du 
prince  ,  entamèrent  avec  lui  une 
négociation  ,  et  en  obtinrent  des 
détails  précieux;  mais  au  moment 
de  paraître  devant  la  justice,  cet 
homme  s'échappa  tout -à -coup 
de  Paris,  sans  qu'on  ait  pu  savoir 
ce  qu'il  était  devenu.  On  crut  dans 
le  temps,  comme  de  raison,  qu'il 
avait  vendu  son  silence  au  duc 
d'Orléans,  et  que  celui-ci  assura 
sa  fuite.  Voilà  de  ces  faits  qu'on 
est  obligé  de  rapporter ,  parce 
qu'ils  se  trouvent  dans  les  mé- 
moires du  temps;  mais  heureuse- 
ment ils  semblent  n'exister  que 
pour  prouver  jusqu'où  peut  aller 
la  calomnie  ou  l'aveuglement  de 
l'esprit  de  parli. 


PIN 

PINGERON(Jean-Clatjde),  lit- 
térateur, secrétaire  du  musée  de 
Paris,  membre  de  l'académie  de 
Barcelonne ,  naquit  à  Lyon  vers 
1 75o,  Il  fitde  bonnesétudesetem- 
brassala  profession  des  armes.  Au- 
torisé ensuite  à  prendre  du  service 
en  Pologne,  il devintcapitaine d'ar- 
tillerie et  ingénieur  de  Zamosc. 
De  retour  dans  sa  patrie,  il  obtint 
un  emploi  au  bureau  des  bfitimens 
de  la  couronne.  Pingeron  voyagea 
en  Italie,  et  séjourna  assez  long- 
temps à  Rome  et  à  Naples.  Il  par- 
courut les  Echelles  du  l.evant,  etse 
rendit  à  Malte  et  en  Sicile  avec  le 
marquis  de  Néelle.  En  ly^G,  il  ac- 
compagna l'abbé  Sestiiii  dans  son 
voyage  do  Cafane  au  mont  Gibel. 
Pingeron  revint  pour  la  seconde 
fois  eu  France.  Il  coopéra  en  1779, 
a  u  Joarval  de  l'agriculture,  du  com- 
merce, des  arts  et  des  finances,  an- 
quel  il  donna  plus  pariiculièrement 
des  articles  sur  l'utilité  publi(|ue. 
L'un  des  fondateurs  du  musée  de 
Pari*,  il  en  fut  le  premier  secré- 
taire. Il  élail  dej)uis  long-temps 
mend>re  de  l'académie  de  Barce- 
lonne. Pingeron  mourut  à  Versail- 
les en  1795.  On  lui  doit  comme 
littérateur  ou  traducteur  :  i"  Trai- 
ta des  vertus  et  des  récompenses,  par 
le  marquis  de  Ilyac,  traduction 
de  l'italien,  Paris  (Amsterdam), 
1768,  in- 12.  Cette  version  a  été 
reproduite  en  langue  polonaise. 
•j."  Conseils  d'une  mrre  à  son  fils, 
poëme  traduit  de  l'italien  de  M"' 
Piccolomini-Gérardi,  in- 12,  1769; 
r»°  Essai  sur  la  peinture  du  comte 
Algarotli,  traduction  de  l'italien, 
in- 12,  1769;  4"  Traité  des  violen- 
ces publiques  et  parliculicres,  avec 
une  Dissertation  sur  les  devoirs  des 
magistrats,  1769;  5°  les  Abeilles, 


PIN  533 

poëme  de  Ruccelaï,  traduction  de 
l'italien,  Amsterdam  ,  1781.  Pin- 
geron a  enrichi  sa  version  d'un 
Traitécomplet  des  Abeilles,  d'après 
les  meilleurs  auteurs.  6°  Vies  des 
architectes  anciens  et  modernes,  tra- 
duction de  Miiizia,  2  vol.  in-12, 
1771.  On  trouve  dans  la  préface 
des  recherches  fort  intéressantes 
sur  l'origine  et  les  progrès  de  l'ar- 
chitecture. 7°  Voyage  dans  la  Grè- 
ce asiatique,  traduction  de  l'abbé 
Sestini,  in  8°,  1789;  S'  Lettres  de 
l'abbé  Sestini  à  ses  amis  pendant 
le  cours  de  ses  voyages,  traduction 
avec  des  notes,  3  vol.  in-S",  1789; 
9"  Voyage  dans  la  partie  septentrio- 
nale de  l'Europe  pendant  les  an- 
nées de  1 768  à  1 770,  traduction  de 
l'anglais  de  Jos.  Marshal ,  in-S", 
1776;  10°  Description  delà  Jamaï- 
que, traduction  de  l'anglais,  Paris, 
in-12,  1782;  1 1°  Description  d'u- 
ne machine  électrique  construite  et 
perfectionnée ,  traduction  de  l'an- 
glais de  Cuthbcrson,  Paris,  in-8", 
1790;  12"  Expériences  et  recher- 
ches utiles  à  l'humanité,  aux  hospi- 
ces, au  comme/  ce  et  aux  beaux-arts^ 
traduction  de  différens  ouvrages 
étrangers  publiée  après  sa  mort , 
Paris,  in-S",  i<So5;  i5°  quelques 
Articles  dans  la  Bibliothèque  phi- 
sico-économique,  et  au  très  recueils. 
Enfin  on  lui  attribue  VArt  de  faire 
soi-même  des  ballons  aérostatiques, 
Paris,  in-8",  1783. 

PINGRE  (Alexandre  Guy),  as- 
tronome, bibliothécaire  de  Sainte- 
Geneviève,  membre  de  l'acadé- 
mie royale  des  sciences,  puis  de 
l'institut  national,  naquit  à  Paris 
le  \[\  septembre  171  i,  et  mourut 
dans  celle  ville,  le  1"  mai  1796. 
Il  fit  de  très- bonnes  étndes,  et 
montra,  dès  sa  jeunesse,  une  grau- 


jj4 


riN 


de  activité  et  beaucoup  de  dispo- 
sitions pour  les  sciences.  Lecat , 
aniiloaiiste  distingué,  et  tondaleur 
de  l'académie  de  Rouen,  le  lit  re- 
cevoir iiienibre  de  ce  corps.  Pin- 
gré  ne  larda  pas  à  se  faire  connaî- 
tre. Il  calcula  l'éclipst^  tie  lune  ar- 
rivée le  28  décembre  i  ^49-  H  don- 
na ensuite  un  Almanack  nautique^ 
destiné  à  faciliter  aux  navigateurs 
l'observation  des  longitudes.  Le 
gouvernement  le  chargea  succes- 
sivement d'aller  dans  la  mer  du 
Sud  observer  le  passage  de  Vé- 
nus sur  le  disque  du  soleil,  et  en 
Hollande,  avec  Courlanvaux,  vé- 
rilier  les  horloges  marines  de  Le 
Roy.  11  s'embarqua  ensuite  sur 
Vlsis  et  la  Flore  pour  accroître  les 
progrès  de  l'astronomie  et  de  la 
géographie.  A  son  retour  en  Fran- 
ce, il  publia,  en  17^3  et  1778,  une 
relation  de  chacun  de  ses  voyages, 
en  2  vol.  in-4°.  Ces  travaux  le  fi- 
rent nommer  astronome-géogra- 
phe de  la  marine,  et  membre  de 
l'académie  des  sciences.  A  la  réor- 
ganisation des  c.orpsacadémiques, 
en  1796,  il  d»;vinlmeudMe  de  l'ins- 
titut national.  On  lui  doit,  outre 
lesouvrages  dont  ila  déjà  éléques- 
tion  :  1°  Elut  du  ciel,  pendant  les 
années  1754,  1/55,  1756  el  1757; 
•j."  Mémoire  surlesdécouverlesfai- 
tes  dans  la  mer  du  Sud  avant  les 
derniers  voyages  des  Anglaise!  des 
Français  autiiur  du  monde,  1758, 
■in-4";  3°  Corne tograpliie  ou  Traité 
■^ùstoriqae  et  Ihéorique  des  comètes, 
1785,  'J.  vol.  in-4'';  c'est  l'ouvrage 
le  plus  considérable  que  Pingre  ait 
publié.  4"  Traduction  des  Astro- 
nomiques de  Manilius,  1780,  in  8". 
Il  y  a  réuni  les  autres  poètes  latins 
•tjui  ont  écrit  sur  le  cours  des  as- 
Ires.   5"  Histoire  de  l' astronomie 


PIN 

du  dix-septième  sincle,  i7gi,ln-4", 
dont  il  avait  niis  au  jour  le  projet 
dès  1756;  6"  il  est  l'éditeur  des 
Mémoires  de  l'abbé  Arnauld,  fils 
aîné  du  célèbre  Arnauld d'Andilly, 
publiés  en  175(3,  en  5  vol.  in-4''; 
7°  il  est  également  éditeur  de  la 
onzième  édition  de  la  Géographie 
en  vers  artificiels  de  Buflier,  qui 
parut  en  1781,  in- 12;  8"  il  est  au- 
teur dans  la  nouvelle  édition  de 
l'Art  de  vérifier  les  dates,  des  Cnf- 
culs  des  éclipses  qui  ont  eu  lieu 
milleans  avant  l'ère  vulgaire;  9°en- 
fiu  il  a  donné  dans  les  Mémoires  de 
l'académie  des  sciences  im  grand 
nouibre  de  dissertations  et  mémoi- 
res remarquables. 

PINI  (  LE  P.  Herménégilde), 
entra  jeune  encore  dans  la  congré- 
gation des  [)rôtres  de  Saint-Paul, 
dits  Barnabiles,  et  s'y  livra  à  son 
goût  pour  les  scierjces;  il  devint 
profes-ieur  du  collège  de  Saint- 
Alexandre  à  Wilan  ,  dont,  par  ses 
talens ,  il  a  encore  contribué  à 
augmenter  la  célebiité.  Le  P.  Pi- 
ni  a  cultivé  avec  un  soin  parti- 
culier les  sciences  physiques  et 
l'hisloire  naturelle  ;  et  c'est  cette 
dernière  qu'il  enseignait  avec  le 
plus  grand  succès  avant  la  révo- 
lution. Il  possédait  aussi  im  cabi- 
net d'histoire  naturelle  extrême- 
ment curieux  ,  qu'il  avait  amassé 
à  grands  frais.  II  eut  le  boidieur  de 
le  conserver  pendant  les  troubles 
politiques  ,  et  de  pouvoir  conti- 
nuer ses  fonctions  et  ses  études. 
Ce  savant ,  que  tous  les  hommes 
instruits  qui  se  rendaient  à  Milan  , 
s'empressaient  de  visiter,  devint, 
sous  Napoléon,  l'un  des  trois  ins- 
pecteurs-généraux des  études, 
l'un  des  membres  de  l'institut  des 
sciences,  lettres  et  arts  d'Italie,  et 


rii\ 

chevalier  de  la  conronne-de-Fer. 
Ou  doit  au  P.  Piiii  une  foule  d'é- 
crits important  sur  lu  minéralo- 
gie ,  la  géologie  ,  etc. ,  parmi  les- 
quels on  distingue  les  suivans  : 
1°  dell' Arcliilettaru  dialoghi.  Mi- 
lan ,  1770  ,  in- 4°  ;  2°  Ozervazioni 
mineralogiche ,  su  la  miniera  di 
ferro  di  Rio  ed  al  ire  parti  de  II' isola 
d'Elha,  \i)\d.f  1777,  iu-8°;  7)°  Mé- 
moires sur  de  îwuvelles  cristallisa- 
tions de  feld  -  spath  et  autres  sin- 
gularités des  granits,  ibid.  .  1779, 
in  -  8"  ;  4°  f^i^f^ëgi^o  geologico  per 
diverse  parti  meridionali  deW  Ita- 
lia  ,  2'  édition,  iWid.  ,  an  1  délia 
rep.  ital. ,  in-8°;  5° Réflexions  ana- 
lytiques sur  les  systèmes  géologi- 
ques [an  italien,  Milan,  1811); 
sort  i)nt  principal  dans  ces  ré- 
flexions était  de  réfuter  un  ouvra- 
ge récent  de  Breislack ,  intit(dé 
Introduction  à  lu  géologie,  dans 
lequel  Celui-ci  avait  soutenu  que 
la  fluidité  primitive  du  globe  était 
ignée,  tandis  que  le  V.  Pini  sou- 
lieiil  qu'elle  était  aqueuse.  Une 
divergtMice  d'opinion  s'éleva  éga- 
b'ment  entre  ces  deuxs;ivans,  au 
snj».'tde  riiistoire  du  déluge,  selon 
Moï>e  :  Breislack,  en  hasardant 
une  explication  du  phénomène  des 
corps  organiques  fossiles,  avait 
su{)posé  que  la  uier  lut  jadis  el 
long-temps  élevée  bien  au-dessus 
de  son  niveau  actuel;  le  P.  Pini 
au  conliiu're soutient, d'après  l'au- 
torité de  l'histoire  sacrée,  que  ce 
phénomène  s'explique  également 
par  une  inondation  extradinaire 
et  passagère.  La  manière  d'écrire 
<lu  P.  Pini  est  pleine  d'intérêt  et 
d'agrément. 

PINKENEY(N.),  diplomate  a- 
méricain  ,  fut,  en  179^.  un  des 
ronunis-aires  envoyés  en  Augle- 


PIN  5"  5 

terre  pour  terminer  les  différent 
survenus  entre  son  pa^^s  et  cette 
puissance.  Il  y  resta  ensuite  en 
qualité  de  ministre  plénipotentiai- 
re, et  vers  la  fin  de  1795,  il  fit  vin 
voyage  en  Espagne  pour  régler 
les  intérêts  des  États-Unis  relati- 
vement à  la  Floride.  Ses  fonc- 
tions de  ministre  plénipotentiaire 
d'Angleterre  furent  révoquées  en 
mai  1796;  mais  dès  1797,  son 
gouvernement  l'envoy;!  près  de 
la  république  française,  et  le  nom- 
ma l'un  des  trois  comtnissaires 
chargés  d'entamer  une  négocia- 
tion qui  n'eut  aucun  résultat.  Le 
directoire -exécutif  ayant  établi 
pour  préliminaire  une  demande 
qui  ne  fut  point  accordée,  il  passa 
ensuite  en  qualité  de  ministre  des 
États-Unis  à  la  cour  de  Madrid. 
Il  y  resta  jusqu'en  1802,  époque 
à  laquelle  il  quitta  cette  résiden- 
ce pour  se  rendre  en  Italie,  com- 
me surintenili+nt-général  des  con- 
sulats américains.  Il  en  exerçait 
encore  les  fonctions  en  i8o5.  En- 
voyé de  nouveau  en  Angleterre 
en  1809,  à  l'occasion  des  difficul- 
tés survenues  pour  le  soutien  du 
droit  des  neutres,  il  ne  put,  mal- 
gré l'habileté  qu'il  déploya  dans 
cette  circonstance,  obtenir  du  ca- 
binet britannique  que  des  conces- 
sions de  peu  d'iuiportance  ;  elle»- 
n'empêchèrent  pas,  bient«3t  après, 
que  la  guerre  n'éclatât  entre  les 
deux  puissances.  En  juin  1816,  M. 
Pinkeney  reparut  sur  la  scène  po- 
litique en  qualité  d'ambassadeur 
des  Etats-Unis  auprès  de  la  cour 
de  Russie,  et  fut  envoyé  préala- 
blement à  Naples,  pom"  y  deman- 
der définitivement  la  restitution- 
de  [)ltisieurs  vaisseaux  améric  lin* 
confisqués  sous  le   règne  du   roi 


556 


PIN 


Joachim  {voy.  Murât),  ou  une  in- 
demnité complète  pour  ces  bûti- 
mens  et  leurs  cargaisons.  Les 
journaux  anglais  du  temps  parlè- 
rent de  prétentions  tellement  exa- 
gérées relativement  à  cette  aflai- 
re,  qu'on  s'étonne,  non  pas  qu'el- 
les aient  été  rejetées  par  le  gou- 
vernement napolitain,  mais  qu'el- 
les aient  pu  être  laites  par  ordre 
d'un  gouvernement  aussi  sensé 
que  celui  des  Américains.  On  de- 
mandait en  effet,  suivant  les 
journaux  anglais,  «  qu'il  fût  cédé 
«par  indemnité,  dans  une  posi- 
wtion  convenable,  à  Messine,  par 
«exemple,  un  établissement  naval, 
"qui  devait  comprendre  un  hôpi- 
»tal,  un  arsenal  et  quelques  sta- 
»  lions  télégraphiques,  et  ensuite 
non  avait  désiré  la  cession  de 
«l'île  Lampedouse.»  Une  escadre, 
envoyée  par  les  Etats-Unis,  ajou- 
tent les  mêmes  journaux,  devait 
appuyer  leurs  prétentions ,  qui 
n'en  parurent  pas  plus  justes  et 
n'en  furent  pas  plus  favorablement 
accueillies.  Au  reste,  il  paraît  que 
la  bonne  intelligence  entre  la  cour 
de  Naples  et  les  États-Unis  ne  te- 
iiiiit  pas  absolument  au  succès  de 
cette  négociation,  puisque  M.  Pin- 
keney  prit  congé  du  roi  de  Naples 
le  17  octobre  1816,  aprè".  avoir 
terminé  à  l'amiable  les  dilTérens 
qui  divisaient  les  deux  gouverne- 
mens.  Il  parlitensuite  pour  Saint- 
Pétersbourg,  et  fut  présenté  àrem- 
pereur  Alexandre  le  i5  janvier 
1817,  en  qualité  d'ambassadeur 
des  États-Unis. 

PliNKERTON  (Jean),  écrivain 
anglais,  mendjre  de  la  société  des 
antiquaires  de  Londres,  d'Ecosse 
et  de  plusieurs  autres  sociétés  sa- 
vantes ,  n«  à  Edimbourg,  le  17 


PIN 

février  1758.  II  se  distingua  dès 
sa  première  jeunesse  par  la  rapi- 
dité de  ses  progrès  dans  les  scien- 
ces et  la  connaissance  des  langues. 
Au  collège  de  Lanerk,  où  il  lit  ses 
études  ,  il  était  cilè  comme  le  pre- 
mier des  élèves,  et  ses  traduc- 
tions des  auteurs  anciens  furent 
quelquefois  préférées  par  ses  maî- 
tres ,  (i  celles  des  meilleurs  écri- 
vains modernes.  Revenu  dans  la 
maison  paternelle,  M.  Pinkerton 
continua  ses  travaux  avec  la  mê- 
me ardeur,  et  acquit  des  connais- 
sances étendues  en  divers  genres. 
Les  mathématiques  et  la  langue 
française  devinrent  pendant  quel- 
que temps  l'objet  particulier  de 
ses  études.  Sa  famille  le  destinant 
à  suivre  la  carrière  du  barreau, 
le  plaça  chez  un  avocat ,  où  il  pas- 
sa plusieurs  années;  mais  après  la 
mort  de  son  père ,  il  alla  ,  eu  1 780, 
s'établir  à  Londres,  où  il  forma 
des  liaisons  avec  plusieurs  hom- 
mes de  lettres  distingués,  et  se 
fit  connaître  avantageusement  lui- 
même  par  la  publication  de  poè- 
mes élégiaques,  qui  obtinrent  du 
succès  et  annonçaient  un  vérita- 
ble talent  pour  la  poésie;. mais 
il  l'abandonna  bientôt  pour  se 
livrer  entièrement  à  des  recher- 
ches historiques  sur  les  peuples  et 
les  monumens  de  l'antiquité  ,  et 
il  fit  une  étude  approfondie  de  la 
numismatique.  Eu  17841  il  publia 
un  ouvrage  intitulé  :  Essai  sur 
les  médailles,  qui  est  généralement 
estimé.  Le  dernier  lord  Orford  , 
plus  connu  sous  le  nom  d'Horace 
Walpole  ,  homme  très-distingué, 
écrivit  à  l'auteur  pour  le  féliciter 
sur  son  ouvrage  ,  et  bientôt  une 
liaison  intime  s'établit  entre  eux; 
elle  dura  jusqu'à  la  mort  du  pre- 


PIN 

mier.  M.  Pirikerton  publia,  en 
1785,  sous  le  nom  supposé  de 
Robert  Héron,  un  autre  ouvrage 
qui  fit  grand  bruit  en  Angleterre 
dans  la  république  des  lettre*  ,  et 
qui  devint  bientôt  l'objet  de  vio- 
lentes critiques.  C'étaient  ses  Let- 
tres sur  la  littérature.  On  repro- 
chait à  l'auteur  d'avoir  avancé  les 
paradoxes  les  plus  extraordinai- 
res, d'avoir  jugé  les  écrivains 
anciens  et  modernes  avec  une  har- 
diesse présomptueuse,  d'avoir  im- 
prudemment tenté  d'introduire  un 
nouveau  système  d'orthographe 
bizarre,  etc.  Quelques  hommes 
d'un  mérite  reconnu,  tels  que  Gib- 
bon, auteur  de  l'histoire  de  la  déca- 
dence et  de  la  chute  de  l'empire 
romain, Walpole  et  autres,  lui  ac- 
cordèrent cependant  leurs  suffra- 
ges et  prirent  sa  défense;  il  ne  pa- 
rut pas  d'ailleurs  très-affecté  des  cri- 
tiques de  ses  adversaires,  et  ne  mé- 
nagea nullement  dans  ses  propres 
écrits  la  vanité  ou  les  prétentions  de 
ses  contemporains.  Aussi  le  nom- 
bre des  ennemis  littéraires  de  M. 
Pinkerton,  blessés  par  le  ton  de 
hauteur  et  d'autorité  qu'il  affec- 
te, s'est -il  considérablement  ac- 
cru dans  ces  derniers  temps.  A- 
près  la  mort  de  son  ami  lord 
Ortbrd,  il  fit  paraître,  sous  le  titre 
de  IValpoUana,  un  recueil  des  let- 
tres, discours  et  bons  uiots  de  cet 
homme  célèbre,  précédé  de  sa  vie, 
et  enrichi  d'une  foule  d'anecdotes 
intéressantes  qui  le  concernent. 
Le  rédacteur  du  Monlhly  Maga- 
zine,  M.  Phillips  (  î;oy.  ce  nom), 
se  rendit  éditeur  de  cet  écrit,  qui 
eut  un  débit  prodigieux.  Mais  les 
ouvrages  qui  ont  fait  connaître  le 
plus  avantageusement  M.  Pinker- 
lon  sont  sa  Dissertation  sur  l'origi- 

T.  XVI. 


PIN  33; 

ne  des  Scythes  ouGothSj  sesSouve- 
nirs  sur  Paris,  et  son  Système  géné- 
ral de  géographie  ;  ce  deruier  sur- 
tout a  rendu  la  réputation  de  l'au- 
teur européenne,  et  a  été  traduit 
dans  toutes  les  langues.  M.Walcke- 
naer  en  adonné  une  traduction  très- 
estimée  en  français;  un  autre  au- 
teur, M.  Malte  -  Brun  [voyez  ce 
nom),  a  puisé  largement  dans 
l'original  anglais  pour  composer 
ses  Annales  et  son  grand  onvrage 
de  Géographie.  M.  Pinkerton  a 
réclamé  avec  son  énergie  et  sa 
vivacité  ordinaires,  contre  le.»  pré- 
tentions personnelles,  m  lifestées 
par  certains  traducteurs  et  ampli- 
ficateurs de  son  ouvrage.  Ce  sa- 
vant recommandable,  doué  d'au- 
tant d'activité  que  de  facilité  pour 
le  travail ,  a  publié  un  grand  nom- 
bre d'ouvrages,  dont  nous  cite- 
rons ici  les  principaux:  1°  Élégies 
et  poésies  légères  y  1781,  in -8°; 
2°  Contes  en  vers  ,  1 782  ,  in  -  4"  ; 
3°  deux  Odes  dithyrambiques  sur 
l' enthousiasme  et  sur  le  rire,  1782, 
iu-4°;  4°  Essai  sur  les  médailles  , 
1784»  a  vol.  in  -  8° ,  traduit  en 
français  avec  notes  et  additions  , 
par  J.  G.  Lipsius,  Dresde,  1794, 
in-4'';  5°  Lettres  sur  la  littérature^ 
par  Robert  Héron,  1785 ,  in  -  8°  ; 
6°  Anciens  poèmes  écossais  de  la 
collection  de  sir  Richard  M  ait land , 
1786,  2  vol.  in-8"';  7°  Dissertation 
sur  l'origine  et  les  progrès  des  Scy- 
thes ouGoths,  1787,  in-S",  traduit 
en  français;  ii°Filœ  antiquœSancto- 
rum,  1789,  in-8';  9°  Bruce  ou 
Histoire  de  Robert ,  roi  d'Ecosse, 
écrite  en  vers  écossais  ,  par  Jean 
Barbour,  1789,  3  vol.  in  -  8°  ; 
10°  Medallie  History,  ou  Histoire 
en  médailles  de  l' Angleterre  jusqu  à 
la  révolution ,  1790,  in  -  4°j  avec 


r>38 


PIN 


4o  planches  ;  1 1"  Poëin&s  écossais ^ 
léimpiimés  après  des  éditions  ra- 
res ,  1792,  3  vol.  in-8"  ;  12"  Be- 
■cherches  sio'  l'Histoire  d'Ecosse  a- 
xant  Malcûlm,  1789,  3  vol.  in-8; 
13"  Histoire  d'Ecosse  depuis  L' avè- 
nement de  la  maison  des  Staart , 
1^97,  a  vol.  in-4°  ;  '4"  Iconogra- 
phie écossaise,  ouPor traits  des  illus- 
tres personnages  d'Ecosse,  avec 
des  noies  biographiques,  1795- 
1^97,  a  vol.  m-8";  xb"  Galerie  écos- 
saise ,  ou  Portraits  des  personnages 
les  plus  éminens ,  avec  leur  ca- 
ractère, 1799,  in-H";  \&  Géogra- 
phie rédigée  sur  un  nouveau  plan , 
1802,  3  vol.  in-  4°  ?  et  seconde 
édition,  5  vol.  in-4°  *,  x')"  Abrégé 
delà  géographie,  etc.,  1  vol.  in-8°. 
Cel  ouvrage,  résumé  du  précé- 
dent ,  a  été  «onvent  réimprimé;  la 
dernière  édition  de  1 8 1 7,  gros  in-8", 
avec  allas,  a  été  revue  et  aug- 
mentée pai  l'auteur.  18"  Recotlec- 
tions ,  etc.  ,  ou  Souvenirs  de  Paris 
eu  1801,  1802,  i8o3,  i8u4  et 
i8o5,  2  vol.  iii-8",  ouvrage  pi- 
quant, qui  a  été  vivement  criti- 
qué en  Angleterre  ;  nj"  Collection 
générale  des  F ojages^  i3vol.  in-4% 
de  1808  à  i8i3;  'H)" Nouvel  Atlas 
moderne ,  de  1 809  à  1 8 14  ;  21"  Pé- 
tralogie,  ou  Traité  sur  les  rochers, 
181 1,  2  vol.  in- 8°;  22°  Recherches 
sur  l'Histoire  d'Ecosse,  à  laquelle 
est  ajoutée  une  Dissertation  sur 
l'origine  et  les  progrès  des  Golhs, 
1814  1  2  vol.  in-8*,  etc. 

PINO  (  i,E  COMTE  Dominique  )  , 
feld-marrchal  italien  au  service 
d'Autiiche,  grand- tordon  de  la 
légion-d'honneur,  grand- cordon 
de  la  couronne-de-f'er,  etc.  ,  né  à 
Milan  en  1760,  fut  un  des  pre- 
miers à  se  jeter  dans  les  rangs  de 
l'armée  républicaine  en  Italie.  Il 


PIN 

s'était  enrôlé  le  6  janvier  1796, 
comme  simple  grenadier,  et  le 
même  jour  il  se  vit,  à  la  tête  d'une 
brigade,  chargé  de  pénétrer  dans 
les  états  du  duc  de  Parme.  L'an- 
née suivante,  il  reçut  sa  nomina- 
tion de  colonel ,  et  prit  le  com- 
mandement d'un  régiment  levé 
aux  frais  de  la  répulslique  cisal- 
pine. S'associant  au  ressentiment 
du  général  Lahoz  (  voy.  son  arti- 
cle ) ,  dont  il  partageait  déjà  les 
opinions,  Pino  trempa  dans  la 
conspiration  <iui  avait  pour  but  de 
soustraire  l'Italie  à  la  dépendance 
du  directoire-exécutif,  après  l'a- 
voir délivrée  du  joug  des  Autri- 
chiens. Mais  plus  prudent  que  son 
frère  d'arme,  et  moins  emporté  que 
lui,  Pino  ne  se  montra  pas  offensé 
de  sa  destitution,  et  alla  combat- 
tre, en  qualité  de  simple  volon- 
taire, dans  l'armée  du  général 
Mounier,  à  Ancône,  tandis  que 
Lahoz  passa  dans  le  camp  des  Au- 
trichiens ,  et  vint  assiéger  cette 
même  place,  que  Pino  défendait 
avec  tant  de  l)ravoure.  Il  arriva 
que  Lahoz  blessé  dangereusement, 
et  fait  prisonnier  par  les  Fran- 
çais, se  rencontra  un  joi;r  avec 
son  ancien  ami  ,  qui  détourna 
les  yeux  en  l'apercevant.  Mais 
en  lui  entendant  demander  vaine- 
ment à  un  soldat  cisalpin  la  mort 
(pie  ses  blessures  lui  montraient 
connne  inévitable,  et  qui  pouvait 
seule  !e  soustraire  à  une  peine  in- 
famante, Pino  eut  le  courage  d'or- 
donner qu'on  achevât  cet  athlète 
de  la  liberté,  dont  il  j)leura  long- 
temps le  malheur.  Dès-lors  Pino 
montra  un  dévouement  sans  bor- 
nes à  la  cause  des  Français  ,  et 
contribua  très  -  ellicacemeni  à  la 
défeiiàc  d'Aiicône.  Nommé  gêné- 


PIN 

rai  de  brignde,  le  16  décemlire 
1798  ,  il  dut  se  réfugier  peu  après 
«0  France,  à  la  suite  de  l'inva- 
sion de  l'armée  austro  -  russe. 
Il  ne  rentra  dans  sa  patrie  qu'en 
1800,  à  la  tête  d'une  brigade  coui- 
t>osée  de  tous  les  réfugiés  italiens. 
Elevé  au  rang  de  général  de  divi- 
sion,  il  fit  partie  de  l'armée  de 
MiolJis,  et  envahit  la  Toscane  et 
la  Romagneeo  1801  et  1802.  Rap- 
pelé à  Milan,  il  y  reçut,  en  1804, 
le  portefeuille  de  la  guerre,  qu'il 
conserva  jusqu'à  l'année  suivan- 
te, qu'il  reprit  le  commandement 
de  sa  division,  à  la  tête  de  la- 
quelle il  combattit  en  Allemagne, 
en  Espagne  et  en  Russie.  Envoyé 
en  Italie,  en  i8i3,  pour  secon- 
der les  efforts  du  vice- roi  contre 
les  progrès  des  Autrichiens ,  il  ma- 
nœuvra d'abord  avec  beaucoup 
d'intelligence  sur  Adelsberg  et 
Fiume;  il  rassembla  ensuite  les 
troupes  qui  étaient  à  Bologne, 
pour  attaquer  l'ennemi  qui  avait 
débarqué  sur  le  Fô.  L'attitude  que 
Murât  avait  prise  en  Italie,  fitcrain- 
dre  au  vice-roi  que  ce  prince  ne 
fût  d'accord  avec  les  anciens  pa- 
triotes italiens  pour  faire  de  l'Ita- 
lie un  seul  état  indépendant.  Il 
conçut  des  soupçons  contre  Pino , 
qu'il  renvoya  tout-;»-coup  à  Milan. 
Le  sachant  dans  quelques  embar- 
ras de  fortune,  le  prince  Eugène 
[voyez  Bëa.ithabnais)  lui  offrit  une 
forte  somme  d'argent  pour  l'aider 
à  mettre  en  ordre  ses  affaires.  Mais 
cette  générosité  ne  suffit  pas  à  é- 
leindre  son  ressentiment.  Au  mo- 
ment où  le  sénat  de  Milan  délibé- 
rait, en  i8r4,  pour  demander  aux 
puissances  alliées  Eugène  pour 
roi  d'Italie,  Pino,  qui  comman- 
dait la  garnison  de  lu  ville,  y  or- 


riN  539 

ganisa  secrètement  les  moyens  de 
déjouer  ce  projet,  et  ne  fut,  dit- 
on  ,  rien  moins  qu'étranger  à  l'in- 
surrection du  10  avril ,  dans  la- 
quelle le  ministre  Prina  fut  massa- 
cré par  le  peuple.  On  entendit  mê- 
me dans  quelques  quartiers  crier: 
yive  le  roi  Pino!  Ce  qui  fit  croire 
que  ce  général  s'étaitflatté  de  pou- 
voir hériter  de  la  couronne  de  la 
Lombardie.  Cette  disposition  des 
esprits,  qui  peut  n'avoir  rien  de 
commun  avec  l'ambition  de  Pino, 
prouve  son  influence  sur  le  peu- 
ple, et  donne  le  droit  de  penser 
qu'il  aurait  pu  arrêter  les  désor- 
dres de  Milan,  s'il  l'avait  vftulu. 
Devenu  l'un  des  sept  membres  de  ^ 
la  régence  provisoire,  et  investi 
du  commandement  en  chef  de  la 
force  armée,  il  ne  put  jouir  Uwg- 
lemps,  par  l'arrivée  des  trou- 
pes autrichiennes,  de  la  puissance 
qu'il  venait  d'acquérir.  Elle  con- 
tribua probablement  au  contraire 
à  le  faire  mettre  à  la  retraite  ,  avec 
une  pension  et  le  grade  de  feld- 
général-lieutenant.  Lorsque  le  gé- 
néral Bellegarde  fit  arrêter  pla* 
sieurs  individus,  soupçonnés  de 
conspiration  contre  le  gouverne- 
ment autrichien,  parmi  lesquels 
était  un  aide-de-camp  de  Pino, 
celui-ci  partit  à  l'instant  même, 
sous  prétexte  de  voyager,  et  re- 
tomba, en  18 15,  sous  la  surveil- 
lance des  Autrichiens.  Il  parvint 
cependant  à  conjurer  l'orage,  en 
se  retirant  dans  une  campagne 
près  de  Milan ,  où  il  se  condam- 
na au  plus  rigoureux  isolement. 
N'ayant  pris  aucune  part  aux  der- 
niers troubles, de  l'Italie,  il  a  pu 
continuer  à  jouii-  de  sa  tranquillité 
et  de  sa  fortime.  Le  général  Pino 
est  un  officier  distingué  par  ses  ta- 


O.|0 


FIN 


lens  et  par  sa  bravoure.  11  était  ai- 
mé de  ses  soldats,  envers  lesquels 
il  se  montrait  généreux  et  affable; 
mais  dès  qu'il  rentrait  dans  la  so- 
ciété, il  prenait  des  formes  hau- 
taines, et  s'entourait  de  ces  vaines 
formalités  que  l'étiquette  peut  im- 
poser quelquefois,  mais  auxquel- 
les un  homme  supérieur  trouve 
toujours  moyen  d'échapper. 

PINTE  VILLE  (le  baron  Pierre- 
Alexis  DE  ) ,  maréchal  -  de  -  camp 
en   retraite,  officier  de  la  légion- 
d'honneur  ,    chevalier  de   Saint- 
Louis,  est  né,  en    1771,  à  Vau- 
couleurs  ,  département  de  la  Meu- 
se ;  il  fit  de  bonnes  études,  et  prit 
du  service  au  mois  de  décemlire 
1790.    La  notice  consacrée  à  cet 
ollioier- généi-al  dans  la   Biogra- 
phie des  hommes  vioans  des  frères 
Michaud  ,  et  reproduite  dans  l'ou- 
vrage des  Victoires  et  Conquêtes , 
étant  de  la  plus  grande  inexacti- 
tude ,  nons  allons  rétablir  les  faits 
d'après  le  Moniteur,  les  ordres  du 
jour  et  les  bulletins  des  armées. 
IVi.  de  Pinleville  passa  rapidement 
par  tous  les  grades  ,  jusqu'à  celui 
de  chef  d'escadron,  qu'il  obtint  en 
1796,  et   fut  nommé  successive- 
ment m.'iior  du  II""   régiment  de 
chasseurs,  colonel  du  So"""  régi- 
ment de  dragons,  colonel -major 
et  général  de  brigade  dos  dragons 
de  la  garde  ,  dont  il  a  commandé 
une  brigade  en  i8i5.  Il  a  fait  dix- 
huit  campagnes   dans  les  armées 
d' A  llemagne,  des  côtes  de  l'Océan, 
d'Irlande,  de  Saint-Domingue, 
d'Espagne,  de  Pologne  ,  de  Rus- 
sie et  de  Saxe.  Sa  conduite  bril- 
lante à  l'alfaire  de  Bautzen  lui  fit 
conlérer  par  l'empereur  le  titre  de 
baron  ,   que  le   roi   lui   a    depuis 
confirmé.  M.  de  Pinteville  a  été 


PIO 

plusicHrs  fois  cité  pour  sa  belle 
conduite  ;  lia  été  blessé  deux  fois; 
la  seconde  si  grièvement  à  la  ba- 
taille près  de  Kulm,  en  Bohême, 
au  mois  de  septembre  i8i5,  que 
dès.-  lors  il  a  été  hors  d'état  de 
servir. 

P  1  N  U  E  L  A  (  DON   SÉBASTIEN  )  , 

minisire  d'état  espagnol ,  naquit 
dans  l'Estramadure  ,  d'une  famille 
noble  de  ce  pays.  Il  se  livra  avec 
succès  à  l'étude  de  la  jurispru- 
dence, et  bientôt  son  mérite  lui 
fit  obtenir  l'un  des  plus  impor- 
tans  emplois  du  royaume.  La  ma- 
nière dont  il  en  remplit  les  fonc- 
tions, attira  sur  lui  les  regards 
de  la  cour,  et  Ferdinand  VII,  de- 
venu roi  d'Espagne  en  1808,  par 
la  révolution  d'Aranjuez,  le  nom- 
ma ministre  de  justice  et  de  grâce 
pendant  le  court  espace  de  temps 
qu'il  occupa  le  trône  à  cette  épo- 
que. M.  de  Pinuela  suivit  depuis  ce 
prince  a  Bayonne,  où  il  fut  témoin 
des  événemens  qui  firent  passer 
la  couronne  de  Charles  IV  sur  la 
tête  de  Joseph  Bonaparte.  Il  ac- 
cepta néanmoins  du  nouveau  roi, 
sa  nomination  au  ministère  qu'il 
avait  occupé  près  de  Ferdinand  , 
et  devint  conseiller -d'état  le  8 
mars  1809.  Il  mourut  dans  le  cou- 
rant de  la  même  année. 

PIO  (le  chevalier  Louis),  lit- 
térateur, né  en  Italie,  était  à  l'é-- 
poque  de  la  révolution  secrétaire 
de  l'ambassade  de  Naples  en  Fran- 
ce. Il  embrassa  avec  chaleur  la 
cause  populaire,  ce  qm  lui  attira 
la  disgrâce  de  son  gouvernement; 
mais  il  reçut,  par  une  espèce  de 
compensation,  le  titre  de  citoyen 
français,  que  lui  déféra,  en  1790, 
ia  commune  de  Paris.  Le  cheva- 
lier Pio  fut  l'un  des  pcrsonnagi'S 


rro 

de  la  fameuse  dèputation  dite  du 
genre  humain  qui,  sous  les  aus- 
pices d'Anacharsis  Clootz,  se  pré- 
senta à  la  barre  de  l'assemblée  na- 
tionale ,  pour  lui  présenter  les 
hommages  de  tous  les  peuples  de 
l'univers,  au  nom  desquels  elle 
prétendait  parler.  Le  chevalier 
Pio,  qu'on  supposait  être  l'un  des 
agens  les  plus  adroits  et  les  plus 
actifs  des  chefs  du  gouvernement 
républicain,  n'occupait  néanmoins 
qu'un  emploi  très-secondaire  à  la 
municipalité  de  Paris,  dans  le  bu- 
reau des  passeports.  Après  la  mort 
de  Danton,  à  la  faction  duquel  il 
paraissait  appartenir,  il  fut  enfer- 
mé au  Luxembourg,  et  détenu 
jusqu'à  la  chute  de  Robespierre. 
Depuis  cette  époque,  le  chevalier 
Pio  a  tout-à-fait  renoncé  à  la  po- 
litique, et  ne  s'est  plus  occupé  que 
de  littérature.  Indépendamment 
de  plusieurs  traductions,  il  a  pu- 
blié à  Paris,  en  1807,  \t^  Leltere 
italiane  scelle ,  in- 12. 

PIOCH  (Louis),  lieutenant-co- 
lonel au  u""  régiment  de  chasseurs 
à  pied  de  la  garde  impériale,  che- 
valier de  la  légion-d'honneur,  na- 
quit à  Montpellier,  déparlement 
de  l'Hérault.  Il  avait  à  peine  at- 
teint sa  18"  année  lorsqu'il  entra 
au  service,  dans  la  45""  demi-bri- 
gade d'infanterie  de  ligue.  Dès  les 
premières  campagnes  de  la  révo- 
lution, il  se  fit  remarquer  en  don- 
nant des  preuves  d'une  rare  intré- 
pidité. En  1795,  il  était  caporal- 
Iburrier,  et  faisait  avec  son  corps 
partie  des  troupes  qui  investis- 
saient xManlouc.  Le  19  décembre 
la  garnison  de  cette  ville  eflectua 
une  sortie,  et  après  dix  heures  du 
combat  le  plus  acharné,  força  le 
général  Chabot  d'opérer  sa  rctrai- 


PIO 


5Ai 


te  sur  un  terrain  entrecoupé  en 
tous  sens  de  fossés  très-profonds, 
ce  qui  rendait  la  marche  des  sol- 
dats aussi  dilTicile  que  périlleuse. 
Plusieurs  d'entre  eux  s'étaient 
noyés  en  essayant  de  franchir  ces 
fossés,  et  le  brave  Maiîiot,  capitai- 
ne de  sa  compagnie,  allait  éprou- 
ver le  même  sort  si  on  ne  l'eût  se- 
couru. Pioch  s'en  aperçoit,  rétro- 
grade à  l'instant  et  vole  à  son  se- 
cours ;  mais  il  est  chargé  par  deux 
houlans.  Pioch ,  conservant  son 
sang- froid,  tue  l'un  d'un  coup  de 
fusil,  et  va  à  son  tour  fondre  sur 
celui  qui  reste,  lorsque  celui-ci 
prend  la  fuite.  Il  s'élance  dans  le 
fossé,  et  malgré  le  feu  de  plusieurs 
pelotons  autrichiens,  il  parvient  à 
sauver  son  capitaine.  Après  celle 
action  courageuse,  il  se  disposait 
à  rejoindre  ses  camarades,  lors- 
qu'il aperçut  une  maison  isolée, 
dans  laquelle  s'étaient  retranchés 
cinq  Autrichiens.  Il  enfonce  la 
porte  à  coups  de  crosse  de  fusil, 
les  attaque  à  la  baïonnette,  en 
blesse  deux,  et  les  ramène  tous 
prisonniers.  Plusieurs  antres  ac- 
tions d'éclat  l'ayant  fait  parvenir 
au  grade  de  lieutenant-colonel 
dans  la  garde  impériale,  il  pou- 
vait justement  espérer  de  ne  point 
s'arrêter  en  si  beau  chemin,  lors- 
qu'il fut  tué  par  un  boulet  de  ca- 
non ,  le  26  août  i8i5,  à  la  batail- 
le de  Dresde. 

PIORRY  (Pierre-François), 
né  à  Poitiers,  département  de 
la  Vienne ,  fit  ses  études  à  l'uni- 
versité de  cette  ville,  prêta.,  en 
1785,  le  serment  d'avocat  au 
parlement  de  Paris,  et  fut  agré- 
gé à  l'ordre  des  avocats  de  la 
cour  présidialc  de  P(»iiiers,  où 
il  plaida,  l'eçu,  en  1788,  doclcui* 


343  PIO 

en  droit,  il  avait  eu  l'intention 
de  concourir  pour  une  chaire  de 
professeur;  mais  il  ne  put  obte- 
nir la  dispense  de  l'année  de 
stage,  prescrite  par  les  règle- 
mens.  Au  commencement  de  la 
révolution,  il  fut  nommé  capitai- 
ne de  la  garde  nationale,  et  l'un 
des  notables  du  corps  municipal 
de  Poitiers.  La  garde  nationale 
de  cette  ville  aj'ant  eu  le  projet, 
à  l'exemple  des  ci-devant  provin- 
ces de  Bretagne  et  d'Anjou ,  de 
former  une  fédération,  M.  Pior- 
ry  fut  nommé  secrétaire  de  cette 
fédération,  et  il  rédigea,  le  26 
mars  1790,  une  circulaire  pour 
l'accomplissement  d'un  pacte  fé- 
dératif  dans  les  murs  de  l^oitiers. 
Chargé,  comme  orateur,  d'annon- 
cer l'objet  pour  lequel  celte  fêie 
avait  lieu,  il  sut,  par  un  discours 
plein  de  patriotisme  et  d'énergie, 
produire  une  impression  proton- 
de dans  tous  les  esprits,  et  l'on 
signa,  le  11  avril  suivant,  sur 
l'autel  de  la  patrie,  le  pacte  fé- 
dératif  projeté.  Er.tre  autres  dis- 
positions de  ce  pacte,  mis  sous 
les  yeux  du  roi  et  de  l'assemblée 
constituante,  on  y  était  unanime- 
ment convenu  «  de  soutenir  jus- 
wqu'à  la  mort  la  constitution  du 
«royaume,  de  mamtenir  sur  le 
«trône  de  Henri,  le  roi,  reslau- 
xrateur  de  la  liberté  de  son  peu- 
»ple,  et  son  auguste  famille;  de 
»se  prêter  dans  toutes  les  occa- 
«  siens  le-'  secours  mutuels  de  la 
»  fraternité  ,  de  maintenir  dans 
«leurs  fonctions  tous  les  tribu- 
»  naux  créés  ou  autorisés  par  la 
«  loi,  et  de  prêter  mnin-forle  à  la 
«perception  des  impôts  légale- 
Mineot  établis...  »  Au  mois  de 
mai  de   la   même    année,  il  fut 


PIO 

nommé  président  de  sa  section  r 
membre  de  l'assemblée  électora- 
le du  département  de  la  Vienne, 
l'im  des  membres  du  conseil- 
général  de  ce  même  départe- 
ment, et  admis,  en  cette  dernière 
qualité,  au  mois  de  juillet  sui- 
vant, à  présenter  à  la  barre  de 
l'assemblée  constituante  une  a- 
dresse  de  félioilation  sur  ses  ira- 
portans  travaux.  Après  cette  mis- 
sion, il  siégea  parmi  les  cinq  mem- 
bres qui  composaient  le  directoi- 
re du  même  département,  fut 
élu  secrétaire  du  collège  électo- 
ral en  1791,  et,  dans  la  même 
année ,  député  à  l'assemblée  lé- 
gislative ;  en  1792,  il  fut  réélu 
à  la  convention  nationale.  Dans  la 
première  assemblée,  il  fit  partie 
du  comité  des  domaines,  et  suc- 
cessivement ,  dans  la  seconde,  des 
comités  de  législation,  des  péti- 
tions, de  surveillance  des  mar- 
chés,d'habillernens  et  équipemens- 
militaires,  enfin  de  révision  de 
la  loi  sur  les  émigrés.  Il  servit 
d'organe  en  plusieurs  circonstan- 
ces à  divers  comités.  Dans  le 
procès  du  roi,  il  vota  avec  la  ma- 
jorité. Délégué  au  mois  de  mars 
1793,  comme  l'un  des  commis- 
saires de  la  convention  pour  le 
recrutement  de  4^0,000  hom- 
mes, il  rendit  compte  de  ses  o- 
pérations  dans  le  dépar'ement 
de  la  Vienne,  donna  des  rensei- 
gnemens  sur  les  premiers  trou- 
bles de  la  Vendée,  et  ne  se  char- 
gea d'aucune  mission  ultérieure. 
Inculpé  comme  membre  du  co- 
mité de  surveillance  des  mar- 
chés, il  offrit  à  la  tribune  la  dé- 
mission de  ce  poste  ;  mais  loin 
d'être  acceptée,  il  fut  au  même 
instant  admis,  par  décret  du  5o 


Il 


PIO 

septembre  1793,  à  remplacer  l'un 
♦les  secrétaires  du  bureau,  qui  se 
trouvait  en  mission.  En  floréal 
de  l'an  2,  il  fit,  au  nom  de 
ce  dernier  comité,  un  rapport 
général  sur  les  quatre  administra- 
tions chargées  de  riiabillement 
et  de  l'équioement  militaire,  de- 
puis le  5  juillet  1792  jusqu'au  5i 
juillet  1793,  entra  dans  le  détail 
de  leurs  o[)érations  sous  différons 
ministères ,  proposa  la  mise  en 
liberté  de  trente  administrateurs, 
et  le  renvoi  de  deux,  comme 
prévenus  de  fraude  et  d'infidélité, 
par-devant  les  tribunaux  compé- 
tens.  Le  2  prairial  de  l'an  5,  un 
membre  de  la  convention  avait 
demandé  que  Piorry  s'expliquât 
surle  fait  qui  lui  était  personnelle- 
ment imputé  dans  cette  journée, 
celui  d'avoir  fait  sonner  le  toc- 
sin aux  écuries  d'Orléans,  où  il 
avait  alors  son  domicile.  Il  pro- 
lesta à  la  tribune  contre  cette  im- 
putation ridicule  et  calomnieuse; 
Ja  convention  passa  à  l'ordre  du 
jour.  Décrété  d'arrestation,  le  22 
thermidor,  à  la  suite  d'une  dé- 
nonciation faite  par  les  admi- 
nistrateurs de  la  Vienne,  il  fut 
ensuite  amnistié;  et  rendu  à  la 
liberté,  il  rentra  dans  la  carrière 
judiciaire.  Le  directoire-exéculif 
lenomma,  le  29  vendémiaire  an  6, 
commissaire  près  les  tribunaux 
jcivil  et  criminel  à  Anvers.  Au 
mois  de  brumaire  de  l'an  7,  une 
révolte  avait  éclaté  sur  l'une  des 
rives  de  l'Escaut;  il  reçoit  à  cette 
occasion,  de  l'administration  cen- 
trale du  département  des  ûeux- 
Nèthes,  le  pouvoir  de  se  trans- 
porter à  Paris,  pour  faire  con- 
naître l'état  de  cette  contrée, 
et  solliciter  des  sec'ours.  Il  rem- 


PIO 


545^ 


plit  cette  mission  périlleuse  ; 
mais  au  mois  de  ventôse  de 
la  même  année,  il  s'en  trouva 
puni.  On  l'avait  dénoncé  au  di- 
rectoire comme  paraissant,  dans 
les  cérémonies  publiques  et  dan» 
l'exercice  de  ses  fonctions,  avec 
ime  décoration  qui  portait  l'em- 
blème de  la  constitution  de  1793. 
Sur  ce  fait  qui,  selon  le  dénon- 
ciateur, était  un  attentat  commis 
contre  la  sûreté  générale  de  l'état, 
le  directoire  ordonna  l'arresta- 
tion de  Piorry,  et  sa  translation 
à  la  maison  d'arrêt,  pour  être 
jugé  conformément  aux  lois.  L'af- 
faire soumise  à  un  jury  spéfiial 
d'accusation,  l'objet  de  la  dénon- 
ciation fut  reconnu  faux,  et  It; 
directeur  du  jury  prononça jja 
mise  en  liberté  du  prévenu  au 
mois  de  germinal  an  7.  Au  mois 
de  brumaire  de  l'an  8,  il  fut 
nommé  juge  au  tribunal  de  réyi- 
sion,  établi  à  Trêves,  pour  les 
quatre  déparlemens  de  la  rive 
gauche  du  Pihin,  et,  successive- 
ment, vice-président  de  ce  tribu- 
nal ,  assimilé  ,  (juant  à  ses  fonc- 
tions, à  celles  de  la  cour  de  cas- 
sation de  Paris.  Mais  comme  cel- 
te inslitiilion  n'était  que  tempo- 
raire, elleservit  .^  composer  la  cour 
d'appel  de  cette  dernière  ville , 
dont  il  devint  l'un  des  membres. 
Au  mois  de  ventôse  an  i3,  il  fut 
incorporé  à  la  cour  d'appel  de 
Liège,  et  réélu  en  avril  i8ii, 
conseiller  à  la  même  cour.  En 
janvier  1814,  il  perdit,  par  suite 
de  l'invasion  des  troupes  étran- 
gères, le  poste  honorable  dont 
il  était  revêtu,  et  depuis  il  n'exer- 
ça aucun  autre  emploi,  nv.  prit  au- 
cune partaux  événeniensde  i8i5, 
ne   signa  point  Vacte  additionnel  ^ 


544  ï'io 

et  ne  se  trouva  compris  alors  dans 
aucune  des  loisetordonnances  ren- 
dues par  suite  de  ces  événemens. 
PIOZZI  (miss  Esther-Ltnch- 
Saltisbury,  d'abord  femme  Thra- 
LE,  et  ensuite  del  Signor),  naquit 
en  174"  i  Boswel,  dans  le  pays  de 
Galles,  au  comté  de  Caernarvon. 
Elle  montra  de  si  heureuses  dispo- 
sitions pour  l'étude,  que  sa  famil- 
le, qui  Jouissait  d'une  honorable 
aisance,  consentit  à  lui  faire  don- 
ner une  éducation  bien  au-dessus 
de  son  âge  et  de  son  sexe.  En  peu 
d'années,  elle  apprit  à  fond  le  la- 
tin, le  grec,  l'ijébreu  et  plusieurs 
langues  vivantes.  Mariée  à  24  ans 
à  un  riche  brasseur,  membre  du 
parlement,  miss  Salusbury  se  fai- 
sait remarquer  dans  la  société  par 
le  bon  ton  de  ses  manières  et  la 
solidité  de  son  esprit.  Le  célèbre 
docteur  Johnson,  charme  du  mé- 
rite de  cette  dame,  accepta  avec 
joie  les  relations  amicales  qu'Ar- 
thur Mtirphy  (foy.  ce  nom),  se 
]>lut  à  établir  entre  i\l.  Thrale  et 
le  docteur  Johnson.  Ces  relations 
devinrent  même  si  fortes  que  les 
deux  ménages  furent  bientôt  com- 
muns, soit  à  la  maison  de  South- 
wark,  du  docteur,  soit  à  celle 
que  ïhrale  occupait,  à  Strea- 
tham.  La  société  de  Johnson  n'é- 
tait cependant  pas  exemple  de 
désagrémens.  Le  docteur  était  bi- 
zarre ,  jaloux,  brusque  jusqu'à  la 
violence,  et  assez  mauvais  admi- 
nistrateur de  sa  fortune;  mais 
Thrale  et  sa  femme  supportaient 
avec  beaucoup  de  résignation  ces 
fréquentes  inégalités  de  caractère, 
et  prenaient  de  la  personne  et  des 
intérêts  de  leur  ami  un  soin  qui 
<»nnonpait  l'excellence  de  leurs 
cœurs  et  leur  admiration  pour  le 


PIO 

plus  célèbre  critique  de  l'Angle- 
terre. Ces  relations  durèrent  ce- 
pendant 17  années,  et  ne  furent 
interrompues  qu'un  an  après  la 
mort  de  Thrale,  arrivée  en  1781  , 
par  l'impossibilité  où  la  veuve  se 
trouva  de  continuer  un  genre  de 
vie  qu'une  plus  grande  suscepti- 
bilité de  Johnson  lui  avait  rendue 
insupportable.  Elle  résolut  de  se 
séparer  de  son  vieil  ami,  etelleprit 
pour  prétexte  la  perte  d'un  procès 
et  l'impossibilité  où  sa  fortune  la 
mettait  de  continuera  vivre  à  Lon- 
dres. Elle  se  retira  à  Bath.  Cette 
séparation  fut  vivement  blâmée 
par  leurs  amis  communs,  et  au 
point  que  mistriss  Thrale  se  vit 
dans  la  nécessité  de  prendre  la  plu- 
me pour  donner  des  explications 
à  cet  égard.  Comme  la  séparation 
s'était  faite  à  l'amiable,  une  cor- 
respondance bienveillante  eut  lieu 
de  part  et  d'autre  pendant  quel- 
que temps.  Le  mariage  que  mis- 
triss Thrale  contracta,  à  l'âge  de 
4'j  ans,  avec  un  maître  de  musique 
de  Bath,  Florentin  d'origine,  nom- 
mé Piozzi,  fut  désapprouvé  de 
Johnson,  et  de  ce  moment  toute 
correspondance  cessa  entre  lui  et 
M°"  Piozzi.  tt  Au  mois  de  sep- 
tembre 1784,  dit  l'auteur  d'une 
Notice  sur  cette  dame,  elle  tra- 
versa la  France  avec  son  mari,  et 
se  rendit  à  Milan,  où  elle  passa 
l'hiver.  L'année  suivante,  elle 
parcourut  le  reste  de  l'Italie,  et 
vint  se  fixer  pour  quelque  temps 
à  Florence,  où  il  se  forma,  sous  le 
titre  délia  Crusca,  une  société  de 
littérateurs  anglais  des  deux  sexes, 
qui  bientôt  mirent  au  jour  un  vo- 
lume de  prose  et  de  vers,  intitulé  :  '\ 
the  Florence  Miscellaiiy ,  lequel 
ne   fut  distribué  d'abord  qu'à  un 


PIO 

petit  nombre  d'amis.  Celte  réu- 
nion littéraire  a  été  vivement  at- 
taquée par  un  critique  nommé 
Gifford,  dans  la  préface  d'un  écrit 
intitulé  :  Baviade  et  Mœviade.  Au 
contraire,  un  journal  intitulé  le 
Monde  se  fit  le  prôneur,  en  Angle- 
terre, de  la  réunion  littéraire  de 
Florence,  et  parvint  à  lui  donner 
de  la  célébrité.  Il  publia,  en  les 
accompagnant  de  grands  éloges, 
les  productions  poétiques  de  la 
nouvelle  académie.  Elles  se  fai- 
saient remarquer  surtout  par  le 
clinquant  du  style,  et  l'exagération 
des  métaphores,  empruntées  à  la 
langue  et  au  génie  de  l'Italie.  Sui- 
Yanl  l'usage  du  même  pajs,  tous 
ces  vers  étaient  signés  d'un  nom 
poétique  et  emprunté.  Le  journal 
qui  les  prônait  parvint  à  mettre  ce 
genre  à  la  mode,  et  ce  fut  bientôt 
une  véritable  fureur  d'écrire  dans 
ce  goût.  Telle  est  du  moins  l'idée 
que  M.  GifFord  a  essayé  de  don- 
ner de  la  réunion  littéraire  de  Flo- 
rence et  des  productions  qui  en 
sont  émanées.  Quoi  qu'il  en  soit, 
M""  Piozzi  a  fait  preuve  d'un  vrai 
mérite  comme  poète,  et  son  conte 
intitulé  les  Trois  Avis  {the  tliree 
JVarnings) ,  doit  être  distingué 
des  bagatelles  versifiées  délia  Crus- 
ca.  «  M"*  Piozzi,  après  avoir  visité 
les  principales  villes  de  l'Italie,  de 
l'Allemagne  et  de  la  Hollande,  re- 
tourna en  Angleterre,  où  elle 
mourut  en  1821 ,  à  l'âge  de  83  ans. 
Elle  était  veuve  de  son  second 
mari  depuis  1801.  »  Elle  avait  sr 
bien  conservé  ses  forces  physi- 
ques et  ses  facultés  morales  jus- 
qu'au terme  de  sa  carrière,  qu'el- 
le donna  et  ouvrit  elle-même  un 
bal,à  ITige  de  82  ans.  »  On  doit  à  cet- 


pio         '    545 

te  dame  :  1°  the  Florence  Miscel- 
lany  (  Miscellanées  de  Florence), 
10-8°,  ir85,  en  société  avec  MM. 
Merry,  Parsons,  Greathead  et  au- 
tres; 2°  Observations  and  Reflec- 
tions,  etc.  (Observations  et  Ré- 
flexions,faites  durant  un  voyage  en 
France,  en  Italie,  en  Allemagne), 
ir86,  2  vol.  in-S",  ouvrage  frivo- 
le, qui  néanmoins  obtint  beau- 
coup de  succès;  3°  Anecdotes  of 
D'SamuelJohnson  (Anecdotes  sur 
le  D'  Samuel  Johnson,  durant  les 
vingt  dernières  années  de  sa  vie), 
178(1,  in-8";  4°  Lelters  to  and  from 
D'  S.  Johnson,  Lettres  du  D'  S. 
Johnson  ou  à  lui  adressées,  1788, 
2  vol.  in-8".  Elles  ont  été  écrites 
depuis  l'année  17G5  jusqu'à  l'an- 
née 1784.  Ces  lettres  et  les  anec- 
dotes furent  traitées  avec  une  ex- 
trême partialité  parBaretti;et\Vol- 
cott,  dans  une  satire,  sous  le  li- 
tre de  Bozzi  et  Piozzi^  ne  les  trai- 
ta pas  plus  favorablement.  5"  Bri- 
tish  Synonimy,  etc.  ^(Synonimie 
anglaise,  ou  Essai  sur  l'emploi  ré- 
gulier des  mots,  dans  la  conversa- 
tion familière),  Londres,  1794 ?  2 
vol.  in-8°.  Critiqué  avec  une  ex- 
trême sévérité,  cet  ouvrage,  au- 
quel on  prétendit  à  tort  que  John- 
son avait  eu  part,  annonce  dans 
l'auteur  un  jugement  sain  et  un 
esprit  observateur.  6"  Rétros pec- 
tion,  or  à  Revievi>,elc.  (Retrospec- 
tion,  ou  lievuc  des  événemens, 
des  caractères,  des  circonstances 
les  plus  remarquables  du  genre 
humain  pendant  l'année  1800, 
avec  leurs  conséquences),  1801,  a 
vol.  in-4"'.  7°  Enfin  les  Trois  Avis, 
conte  imité  de  La  Fontaine,  une 
imitation  de  l'Epitre  de  Boileau 
à  son  jardinier,  et  différens  autres 


j4C 


pm 


opuscules  insérés  dans  des  recueils 
périodiques. 

PIPKLET  (M""),  ray.  Salm- 
DvcK. 

PIRAULT-DES- CHAUMES 
( Jean-Baptiste-Vincent  ),  avocat 
et  littérateur,  est  né  à  Paris,  le  27 
septembre  1767.  Fils  d'un  procu- 
reur au  parlement,  qui  refusa  son 
ministère  pendant  toute  la  durée 
de  l'exil  de  1771,  il  fit  de  bonnes 
études  au  collège  de  Montaigu, 
Au  commencement  de  la  révolu- 
tion, dont  il  adopta  avec  modéra- 
tion les  principes,  il  fut  persécuté 
et  se  réfugia  à  l'armée  de  Dii- 
mouriez  ;  il  revint  à  Paris,  après 
l'affaire  de  Jeinmapes.  Successi- 
vement avoué  et  avocat  au  tribu- 
nal de  la  Seine ,  professeur  de 
droit  à  l'académie  de  législation  , 
on  l'an  8,  il  déplut  par  la  liberté 
de  ses  opinions  politiques,  et  fut 
supprimé,  en  1808,  de  ses  fonc- 
tions d'avo'ié.  Devenu  maire  de 
iVanterre  ,  il  fut  obli^^é  de  donner 
sa  démission  eu  1816,  pour  s'être 
signalé  dans  les  élections  on  fa- 
veur des  candidats  libéraux  con- 
tre ceux  du  ministère.  Nanterre 
doit  ii  M.  Pirault-des-Chaumes, 
un  plus  grand  revenu  annuel 
pour  SCS  pauvres,  et  l'établisse- 
ment d'un  bel  abattoir  à  porcs, 
qui  rapporte  5  à  4000  fr.  à  la  caisse 
«ommunale,  etc.  Lors  du  procès 
fait  à  Toccagion  de  la  souscription 
nationale ,  il  s'est  empressé  de 
s'associer  aux  souscripteurs,  et  a 
offert  ses  veilles,  comme  avocat, 
»  ceux  qui  pourraient  être  victi- 
mes de  l'arbitraire  ;  il  est  l'un  d(;>; 
signataires  de  la  consnilalion  en 
faveur  des  auteurs  de  la  souscrip- 
tion. M,  Pirault-des-Chaumes 
n'est  pas  seulement  un  de  nosavo- 


PIR 

cats  distingiiés,  il  est  aussi  hom- 
me de  lettres ,  et  a  donné  avec 
succès  la  traduction  en  vers  fran- 
çais de  l'Art  fie  plaire,  du  Remède 
d'amour  et  dos  Amours  d'Ovide, 
et  un  Voyage  à  Plombières.  '^ 

PIRE  (  Marie  -  Guillaume  de 
RosrcviNEU,  COMTE  de),  lieutenant- 
général,  commandeur  de  la  légion- 
d'honneur,  chevalier  de  Saint- 
Louis,  et  de  l'ordre  militaire  de 
Wurtemberg,  est  né  à  Rennes,  le  3i 
mars  1778,  d'une  ancienne  famil- 
le de  la  Bretagne,  illustrée  dans 
les  fastes  de  cette  province.  Son 
grand-père,  le  marquis  de  Pire, 
présidait  la  noblesse  à  la  tenue 
des  états  de  1770.  Dès  le  com- 
mencement de  la  révolution  en 
1789,  son  père,  qui  s'était 
vo\ié  à  la  cause  contraire,  se  hâ- 
ta d'aller  rejoindre  les  princes  à 
Coblentz,  emmenant  avec  lui  son 
fds  à  peine  sorti  de  l'enfance.  Le 
jeune  Pire  suivit  long-temps  les 
mêmes  drapeaux  que  sou  père , 
entra  àl'âge  de  i4iuis  dans  les  gar- 
desdu-corps,  compagnie  de  Gram- 
mont,  et  fit  les  campagnes  de 
Parméc  du  prince  de  Condé.  A- 
près  le  licenciement  de  cette  ar- 
mée, il  entra  en  1793  avec  le  gra- 
de de  sous-lieutenant  dans  le  ré- 
giment d'infanterie  que  le  prince 
de  Rohan  -  Montbazon  venait  de 
lever  à  Gand,  et  qui  fit  partie  de 
l'armée  anglaise  que  commandait 
le  duc  d'York  sur  le  continent.  II  à 
fit  avec  elle  la  campagne  de  Hol-  * 
lande  en  179'!,  et  fut  nommé 
lieutenant  sur  le  champ  de  bataille 
d'Appeldoorn,  après  que  son  régi-  | 
ment  eut  été  en  partie  détruit  par  ' 
l'avant-garde  française  au  passage 
de  la  Meuse.  En  juin  1795,  il  s'em- 
barqua   à    Sladc    avec    les    cinq 


PIR 

régimens  émigrés  Rohan,  Salm, 
Férigord,  Beon  et  Damas,  qui  for- 
inaieiit  la  division  Sombreiiil,  et 
qui  tinrent  débarquer  dans  la  baie 
de  Quiberon.  lVI.  de  Pire  fut  griè- 
vement blessé  lors  de  Tatlaque 
du  fort  Penlhièvre  par  les  troupes 
françaises,  sous  les  ordres  du  gé- 
néral Hoche,  et  ne  parvint  à  se 
rembarquer  que  par  une  espèce  de 
miracle.  11  se  réfugia  avec  les  dé- 
bris de  cette  funeste  expédition 
sur  les  rochers  de  Tîle  d'Houat. 
Le  comte  d'Artois  lui  donna  des 
témoignages  d'estime  et  de  satis- 
faction :  ce  prince  lui  dit  «  que 
si  jamais  il  rentrait  en  France , 
une  des  premières  faveurs  qu'il 
accorderait,  serait  pour  M.  de 
de  Pire;  »et  ayant  égardà  sa  bles- 
sure, il  l'envoya  de  l'Ile- Dieu 
se  rétablir  en  Angleterre,  et  ie 
chargea  de  ses  dépêches  pour  le 
minislère  à  Londres.  Par  suite  de 
l'incorporation  du  régiment  émi- 
gré de  Rohan  dans  celui  de  La 
Châtre,  M.  de  Pire  fut  réformé  à 
l'âge  de  17  ans,  avec  le  grade  de 
capitaine  ;  mais  l'ardeur  de  son 
zèle  et  cette  soif  de  combats  dont  il 
paraissait  altéré  dès  sa  jeunesse,  le 
portèrent  à  solliciter  vivement  sa 
remise  en  activité,  et  à  être  em- 
ployé dans  la  funeste  guerre  in- 
térieure ,  qui  déchirait  le  sein 
même  de  sa  patrie.  11  obtint  ce 
triste  avantage,  pt  accompagna 
en  mars  1796,  MM.  de  Sérent 
que  les  princes  envoyèrent  dans 
la  Vendée,  avec  M  .M.  de  Bonr- 
mont  de  Suz-anelte  et  autres  chefs 
royalistes.  Blessé  de  nouveau  en 
débarijuant  la  nuit  sur  les  côtes 
de  Bretagne  près  de  Sainl-Malo, 
il  vit  périr  dès  le  lendemain  la 
plupart  de  ses  compagnons  d'ar- 


PIR 


54: 


mes;  MM.  de  Sérent  furent  tué» 
dans  les  marais  de  Dole,  et  M,  de 
Pire,  poursuivi  par  les  troupes  ré- 
publicaines, ne  parvint  qu'après 
avoir  couru  les  plus  grands  dan- 
gers, à  s'éclwpper  et  à  rejoindre 
enfin  le  chef  royaliste  de  Puisaye. 
dans  les  environs  de  Fougères. 
Il  servit  avec  ce  général  jusqu'à 
l'époque  de  la  pacification  de  l'an 
4,  qui  le  fit  rentrer  dans  le  sein 
de  la  grande  famille  française. 
Le  général  Hoche,  par  considéra- 
tion particulière,  et  malgré  ses 
instruclions,  ne  comprit  point  M. 
de  Pire  parmi  les  émigrés  qu'il 
fut  obligé  de  renvoyer  en  Angle- 
terre ;  mais  ce  dernier  n"en  resta 
pas  moins,  et  long-temps,  sous 
une  sévère  surveillance,  fut  sou- 
vent dénoncé  comme  émigré  et 
royaliste,  et  ne  recouvrit  une  en- 
tière liberté  qu'à  l'époque  du  con- 
sulat du  général  en  chef  Bonaparte. 
Une  nouvelle  carrière  s'ouvritalors 
devant  lui,  et  toujours  animé  du 
désir  de  faire  la  guerre ,  il  entra 
dans  les  rangs  de  la  grande-armée 
française,  où  il  n'eut  plus  le  mal- 
heur d'avoir  à  combattre  ses  con- 
citoyens. M.  de  Pire  prit  d'abord 
du  service  dans  un  régiment  de 
hussards  volontaires,  avec  le  grade 
de  capitaine,  et  fil  honorablement 
la  guerre  d'Allemagne.  Son  corps 
ayant  été  réformé  après  la  paix  de 
Lunéville  ,  il  rentra  pour  quelque 
temps  dans  ia  vie  privée,  et  se  ma- 
ria ;  mais  il  rejoignit  en  i8o5  l'ar- 
mée,  et  se  distingua  de  nouveau 
jiendant  les  glorieuses  canipagnes 
(rAuslerli(z,d'Iénaet  de  Wagram. 
Succc<sivemeiit  capitaine  au  7' 
régifnent  de  hussards,  chef  d'esca- 
dron au  10*,  colonel  du  7"^  régi- 
ment de  chasseurs  à  cheval^  aide- 


548 


PIR 


de-camp  du  prince  de  Neuchâtel, 
général  de  brigade ,  et  bientôt 
général  de  division,  il  fit  toutes 
ces  campagnes  à  l'avant-ganle  de 
la  grande-armée  ,  en  Allemagne, 
en  Pologne,  en  Espagne  et  en  Rus- 
sie. Partout  il  fit  preuve  de  talens 
militaires,  et  d'ime  haute  valeur. 
Blessé  plusieurs  fois,  ses  grades 
et  ses  décorations  lui  furent  dé- 
cernés sur  les  champs  de  bataille, 
et  sesélats  de  service  porlenlqu'il 
prit  une  part  active  à  5o  batailles 
rangées,  et  à  plus  de  loo  combats 
d'avant-garde.  Elève  et  ami  des 
généraux  Lasalle  et  Montbrun,  et 
distingué  par  l'enjpereur,  il  fut 
dans  les  derniers  temps  chargé 
par  lui  du  soin  d'éclairer  l'armée. 
La  surprise  de  Léipzick  avec  5o 
hussards  derrière  l'armée  prus- 
'sienne,  4  jours  avant  la  bataille 
d'Iéna;  la  capitulation  de  la  ville 
forte  de  Slettin,  en  180G;  sa  con- 
duite au  combat  de  Somo-Sierra, 
en  Espagne,  où  Napoléon  lui  avait 
donné  par  mis-ion  spéciale  le 
commandement  de  l'escadron  du 
service  des  lanciers  polonais  de  la 
garde  qui  s'y  couvrit  de  gloire;  le 
combat  d'OsIrowno  en  Russie,  et 
d'autres  affaires  où  les  bulletins 
de  la  grande-armée  ont  fait  du 
général  Pire  une  mention  honora- 
ble, l'ont  placé  aux  premiers  rangs 
des  vieux  guerriers  de  la  France. 
A  l'époque  de  la  restauration  en 
18 14,  de  fortes  préventions  politi- 
ques s'étant  élevées  contre  lui, 
loin  d'avoir  part  aux  récompenses 
ou  aux  faveurs  que  ses  antécédens 
semblaient  devoir  lui  promettre, 
il  fut  envoyé  en  une  espèce  d'exil 
dans  ses  terres  en  Bretagne.  ].,a 
croix  de  Saint -Louis,  donnée  à 
tous  les  officiers-généraux,  lui  fut 


PIR 

refusée,  et  aucune  de  ses  récla- 
mations ne  fut  accueillie.  11  se 
trouvait  dans  cette  situation  péni- 
ble, en  i8i5,  quand  le  retour  di; 
l'île  d'Elbe  eut  lieu.  Il  paraît  que 
les  sujets  de  mécontentement  que 
le  général  Pire  croyait  avoir, 
joints  à  d'anciens  souvenirs  de 
gloire,  lui  firent  embrasser  de  nou- 
veau avec  une  grande  chaleur  la 
cause  de  Napoléon.  Après  avoir  fait 
reconnaître  son  autorité  en  Breta- 
gne, il  fut  envoyé  dans  le  midi 
contre  les  troupes  réunies  sous 
les  ordres  de  S.  A.  R.  le  duc  d'An- 
goulême.  Rappelé  à  Paris  après 
les  événemens  de  Valence  et  du 
pont  Saint-Esprit ,  il  fut  nommé 
gouverneur  des  Tuileries,  du  Lou- 
vre ,  et  chambellan  de  Napoléon. 
On  l'envoya  immédiatement  à 
Laon  prendre  le  commandement 
provisoire  du  G'  corps  d'armée. 
A  la  suite  du  combat  des  Quatre- 
Bras  et  de  la  bataille  de  Waterloo, 
où  il  commandait  la  cavalerie  lé- 
gère de  l'aile  gauche  sous  les  or- 
dres du  maréchal  Ney,  il  revint 
sous  les  murs  de  Paris,  et  prit 
encore  une  part  glorieuse  au  com- 
bat de  Roquancour  près  Versailles, 
où,  avec  son'amile  général  Excel- 
mans,  il  prit  ou  détruisit  en  entier 
deux  régimens  de  hussards  prus- 
siens. Après  le  second  retour  du  roi, 
le  général  Pire  fut  compris  dans 
la  seconde  série  de  l'ordonnance 
du  24  juillet  181 5.  Arrêté  le  i" 
août  suivant,  il  ne  sortit  de  pri- 
son que  par  l'intervention  de  l'em- 
pereur de  Russie,  qui  lui  offrit  un 
asile  à  Pétersbourg,  où  il  se  ren- 
ditde suite,  et  passa  tout  le  temps 
de  son  exil.  Rappelé  en  France 
en  1819,  et  replacé  sur  le  tableau 
de  l'armée,  il  a  aussi  reçu  du  roi  la 


riR 

croix  de  Saint-Louis.  En  1825  il  a 
cru  devoir  de  nouveau  solliciter 
de  l'aclivité  de  service,  et  a  de- 
mandé à  faire  la  campagne  d'Es- 
pagne. iMais  !"es  démarches  à  cet 
égard  étant  restées  sanseflét,  il 
continue  à  vivre  retiré  en  Breta- 
gne dans  l'ancienne  demeure  de 
ses  pères,  où  il  s'occupe  de  tra- 
vaux agricoles,  prêt  à  revoler  au 
premier  appel  sous  les  drapeaux 
de  son  pays. 

PIRE  LU  (Francisco),  législa- 
teur et  littérateur  napolitain, naquit 
à  Naples,  où  il  reçut  une  éducation 
distinguée,  et  se  livra  dès  sa  jeunes- 
se à  la  culture  des  lettres;  il  avait 
déjà  obteim  des  succès  dans  cette 
carrière  lorsqu'il  fut  nommé  pré- 
sident de  la  chambre  royale.  Les 
principes  de  la  révolution  fran- 
çaise, s'étant  rapidement  propagés 
dan»  diverses  contrées  de  l'Euro- 
pe, Pirelli  les  adopta  ,  et  quand, 
sous  les  ai;spices  de  la  France, 
en  1799,  les  Napolitains  formè- 
rent la  république  dite  parthéno- 
péenne,  il  devînt  membre  du 
corps-législatif  de  cette  républi- 
que. Il  refusa  d'abord  par  mo- 
destie les  fondions  législatives; 
cependant  il  céda  au  vœu  de  ses 
compatriotes  et  aux  instances  du 
commissaire  français,  M.  Abrial. 
Lorsque  les  troupes  royales,  sous 
la  conduite  du  cardinal  Ruffo,  fu- 
rent rentrées  datis  Naples,  Pirelli 
fut  incarcéré  comme  ayant  par- 
ticipé à  la  révolution  napolitaine. 
Il  ne  tarda  pas  cependant  à  re- 
crjuvrer  sa  liberté,  en  produisant, 
dit-on,  un  billet  du  commissaire 
français,  dans  lequel  c<*  dernier 
le  menaçait  d'exécution  militaire 
s'il  n'acceptait  pas  le?  fonctions 
de  législateur.   Le  roi  condamna 


PIR  34g 

depuis  Pirelli  à  uuexil  perpétuel, 
mais  dont  le  terme  ne  fut  pas 
long,  car  il  mourut  au  bout  de 
quelques  années.  C'était  un  hom- 
me de  bien  et  un  sincère  ami  de 
sa  patrie. 

PIRON  (N.),  dit  PlRON-DE-LA- 

Varenne  ,  près  Oudon  ,  départe- 
ment de  la  Loire- Inférieure  , 
lieu  où  il  naquit,  est  un  des  gé- 
néraux vendéens  les  plus  distin- 
gués par  ses  talens,  et  surtout  par 
son  intrépidité.  Il  fit  sa  première 
campagne  dans  les  chevau-légers 
de  l'armée  des  princes;  et  de  re- 
tour, au  mois  de  mars  «793,  il 
s'efibrça  de  soulever  les  habitans 
de  sou  canton.  Cette  tentative 
n'ayant  pas  eu  de  succès,  il  pas- 
sa laLoire  à  latête  d'uneoinquan- 
taine  de  Bretons,  et  se  réunit  à 
Bonchamp  {voy.  Bonchamp),  dont 
il  devint  l'ami.  Ce  fut  d'abord 
comme  simple  volontaire  qu'il  sui- 
vit l'arniée  catholique  et  royale 
de  la  Vendée;  mais  employé,  au 
mois  de  juin,  comme  officier, 
il  se  distingua  bientôt.  La  bataille 
où  il  prit  la  plus  belle  part  est' 
celle  de  Vihiers,  le  18  juillet,  où 
les  Vendéens  erdevèrentaux  trou- 
pes de  la  république  af)  canons, 
presque  toutes  les  munitions,  et 
où  ils  firent  3, 000  prisonniers. 
Au  combat  de  Torffbu,  de  concert 
avec  Bonchamp,  il  repoussa  la 
brave  et  célèbre  gwrnison  de 
Mayence ,  encore  épuisée  de  fa- 
tigues ,  et  dont  les  forces  étaient 
bien  inférieures  à  celles  des  insur- 
gés. Le  sort  de  l'armée  vendéen- 
ne, pressée  de  toutes  parts,  pa- 
raissant devoir  «"tre  décidé  par 
\\nc  bataille  vers  Mortagne  et 
Chollet,  Bonchamp  appela  près 
de  lui    Piron-dela-Varenne ,  qui 


55o  PIS 

commandait  l'avant-garde  de  la 
division  de  Lirot-de-Ia-Patrouil- 
lère.  Il  arriva  comme  l'action  é- 
îait  commencée.  Sa  présence 
soutint  quelque  temps  les  efforts 
des  troupes  vendéennes,  qui  fu- 
reptenfin  mises  en  déroute.  Piron- 
de-la-Vareiine  ne  s'occupa  plus 
qu'à  protéger  la  retraite  des  dé- 
bris de  l'armée,  et  il  y  réussit 
avec  quelque  succès.  Passant 
la  Loire  au  mois  d'octobre,  il 
combattit  vaillamment  à  l'affaire 
de  Laval  et  au  siège  de  Grandvil- 
le.  Il  commandait  une  division 
inix  déroutes  du  Mans  et  de  Save- 
nay.  Il  se  tint  caché  pendant 
quelque  temps  dans  les  environs 
de  Nantes,  et  chercha  à  soulever 
les  chouans.  Dans  l'espérance  de 
rejoindre  les  Vendéens,  et  de  ser- 
vir plus  utilement  la  cause  roya- 
le, il  tenta  de  repasser  la  Loire. 
Le  bateau  dans  lequel  il  était  fut 
;iperçu  par  une  canonnière,  qui 
lui  donna  la  chasse.  Son  bateau 
ayant  été  atteint,  il  tut  tué  de 
plusieurs  coups  de  l'usil.  Piroii- 
de-Ia-Varenne  montra  dans  celte 
funeste  guerre,  où  tant  d'héroïs- 
me et  de  férocité  furent  déployés 
des  deux  côtés,  un  caractère  di- 
gne de  briller  sur  un  théâtre  qui 
n'aurait  point  été  souillé  par  les 
excès  des  discordes  civiles.  Il  est 
regardé  comme  un  des  héros  de 
la  Vendée,  et  son  nom  est,  dit-on, 
consacré  dans  les  chants  de  ces 
guerriers. 

PISAM  (A.  A.  C),  noble  vé- 
nitien ,  servit  d'abord  dans  la  ma- 
rine d'Angleterre,  et  ensuite  dans 
celle  de  Hollande,  doù  il  passa 
au  cap  de  lionne -Espérance.  Il 
obtint  dans  cette  colonie  un  em- 
|)!oi    qu'il  occupait  encore   lors- 


PIS 

qu'elle  fut  prise  en  1796,  par  les 
Anglais.  Pisani  retourna  alors  eu 
Angleterre,  mais  comme  prison- 
nier. Il  demeura  à  Lonidres  long- 
temps après  son  échange,  et  s'y 
occupa  de  la  relation  de  ses  voya- 
ges dans  l'intérieur  de  l'Afrique 
pendant  l'espace  de  13  ans,  de 
i^bi  à  1793.  Lorsqu'il  eut  termi- 
né cet  important  travail,  il  vint 
à  Paris,  où  les  sa  vans ,  à  qui  il 
communiqua  son  manuscrit  , 
l'accueillirent  d'une  manière  dis- 
tinguée. Le  manuscrit  ayant 
été  présenté  à  l'institut  en  i8o5, 
une  commission  chargée  de  l'exa- 
miner en  fit  un  rapport  très-favo- 
rable. L'ouvrage  fut  publié  l'an- 
née suivante.  M.  Pisani  s'est  dé- 
puis retiré  dans  sa  patrie.  Un  au- 
tre Pisani,  de  la  même  famille, 
fut,  après  le  traité  de  Presbourg, 
d'après  lequel  Venise  se  trouvait 
réunie  au  royaume  d'Italie,  char- 
gé de  se  rendre  à  Vérone,  pour  y 
féliciter,  au  nom  de  ses  compa- 
triotes, le  prince  vice-roi,  Eugè- 
ne de  Beauharnais. 

PISANI  -  DE  -  LA  -  GAUDE 
(Chaules -François-Joseph),  évê- 
que  de  Namur,  naquit  à  Aix  en 
Provence,  le  4  mars  174^»  d'une 
ancienne  famille  noble  d'origine 
italienne.  Il  se  consacra  dans  sa 
jeunesse  à  la  carrière  judiciaire, 
et  acheta  une  charge  déconseiller 
au  parlement  de  Provence.  Mais 
ayant  eu  le  malheurde  voir  frapper 
d'une  mort  subite  et  violente,  une 
jeune  personne  qu'il  était  à  la 
veille  d'épouser,  il  résolut  de 
quitter  ses  fonctions  et  d'aller 
s'eofcrmer  à  l'abbaye  de  la  Trap- 
pe. Après  quelque  séjour  dans  ce 
monastère,  et  sur  les  représenta- 
tions de  l'abbé,  qui  ne  trouvait 


PIS 

pas  sa  vocation  assez  décidée  pour 
une  règle  aussi  sévère ,  M.  Pisaiii 
se  détermina  à  rentrer  dans  lemon- 
de,  où  il  embrassa  toutefois  l'état 
ecclésiastique.  Son  oncle,  évêque 
de  Sëint-Paul  -Trois -Châteaux, 
le  nomma  d'abord  son  grand- vi- 
caire, et  les  autres  dignités  de  l'é- 
glise étant  à  cette  époque  regar- 
dées comme  appartenant  presque 
exclusivement  et  de  droit  aux 
hommes  d'une  naissance  illustre, 
M.  de  Fixani  obtint  bientôt  (en  fé- 
vrier 1784)»  l'évêché  de  Vence. 
Les  suites  d'une  passion  toute 
mondaine,  mais  malheureuse, 
l'ayant  ainsi  porté  à  l'épiscopat , 
auquel  il  n'aurait  jamais  pensé 
sans  la  fin  tragique  de  ses  premiè- 
res amours,  le  nouvel  évêque  crut 
cependant  devoir  signaler  son  ad- 
ministration spirituelle  par  quel- 
ques actes  éclafans  de  ferveur.  Il 
lança  dansle  public  plusieurs  man- 
demens  contre  les  philosophes, 
et  ces  pièces  d'éloquent;e  qui  ex- 
titèrent  parfois  l'hilarité  générale 
même  dans  le  diocèse  de  Vence, 
ne  firent  d'ailleurs  de  tort  à  per- 
sonne. Dès  le  commencement  de 
l'émigration ,  il  se  hûta  de  sortir 
de  France,  et  se  rendit  d'abord  à 
Vetn'se,  où  il  fut  accueilli  par  la 
famille  dont  il  portait  le  nom,  et 
ensuite,  à  Rome,  où  il  refusa,  dit- 
on,  la  place  d'auditeur  de  la  Ilote, 
qui  lui  fut  oiï'erte  parle  pape.  Les 
progrès  des  armes  françaises  en 
Italie,  engagèrent  l'évêque  de 
Vence  à  chercher  un  nouvel  asile 
en  Alleinague,  d'où  il  passa  eu 
Angleterre.  Il  obtint  bientôt  de 
M;ipoléon  la  permission  de  ren- 
trer en  France,  et  fut  investi  après 
le  concordat  du  1802,  de  l'évêché 
«le  Namur.  Il  paya  largement  son 


PIS 


55 1 


tribut  d'éloges  au  chef  de  l'empT- 
re ,  et  ses  mandemens  n'eurent 
plus  pour  objet  principal  que  la 
célébration  des  victoires  de  l'em- 
pereur. Après  la  création  du 
royaume  des  Pays-Bas,  auquel 
le  diocèse  de  Namur  se  trouva 
joint,  l'évêque  professa  quelques 
opinions  ultramonlaines,qui  don- 
nèrent lieu  à  l'auimadversion  du 
nouveau  gouvernement.  Pisani 
lit  d'abord  cause  commune  avec 
l'évêque  de  Gand ,  Maurice  de 
Broglie;  mais  le  pape  même  ayant 
désapprouve  les  éclats  d'un  zèle 
intempestif  ,  l'évêque  de  Namur 
chercha  à  justifier  ses  intentions, 
et  protesta  dans  une  nouvelle  let- 
tre pastorale  de  sa  soumission  à 
la  constitution  ecclésiastique  du 
royaume  des  Pays-Bas.  Il  a  de- 
puis administré  son  diocèse  sans 
trouble,  et  sans  être  aucunement 
inquiété  par  l'autorité  civile. 

PISAINSKI  (Georges-Ciikistg- 
piie)  ,  théologien  et  littérateur 
prolestant,  directeur  de  la  socié- 
té allemande  de  Kcjenisberg,  ap- 
partient à  une  famille  protestante, 
originaire  de  Pologne, qui  alla  se 
fixer  en  Prtisse  ;  il  est  fils  du  pas- 
teur de  Pisauizzen.  Pisauski  , 
né  en  1725,  fit  ses  études  à  Rœ- 
nisberg,et  par  le  conseil  du  natu- 
raliste Helwig,  son  aïeul  uiaternel, 
il  suivit  la  carrière  de  l'enseigne- 
aient.  D'abord  recteur,  puis,  en 
1775,  docteur  en  théologie  à  l'u- 
niversité de  Rœnisberg,  il  y  pro- 
fessa la  poésie,  l'histoire,  tant  na- 
tionale que  générale,  la  philoso- 
phie pratique,  la  théologie,  la 
statistique,  etc.  Il  était  très-ins- 
truit; sa  piété  était  éclairée,  et 
il  fut  généralement  regretté  lors- 
qu'il mourut  l«  I  i  octobre  1790. 


5D2 


PIS 


Outre  ses  principaux  o\ivrages 
que  nous  allons  indiquer,  il  a  lais- 
sé un  grand  nombre  de  manus- 
crits dont  il  a  fait  don  par  tes- 
tament à  la  bibliothèque  de  l'éco- 
le dite  Rneiphof  :  i°  Curiosités  du 
lac  de  Spird/ng,  Kœnisberg,  1749^ 
in-4''  ;  3°  de  Felicitate  doceiitium 
in  scholis,  Kœnisberg,  1749?'"" 
loi.  ;  5°  de  Merilis  Prussorum  in 
poesin  latinam,  Kœnisberg,  1781, 
in-4°;  l\° Eclaircissemens  sur  quel- 
ques restes  du  paganisme  et  du  pa- 
pisme en  Prusse ,  Kœnisberg  , 
1^56,  in-4°;  5°  Discussion  sur  la 
question  de  savoir  si  Annibal  en 
passant  les  Alpes  a  fait  fendre  les 
rochers  par  le  vinaigre,  Kœnis- 
berg, 1 769  ,  in-4''  ;  6"  Commenla- 
tio  de  linguâ  polonlcâ,  Kœnisberg, 
I7()3,  in-4';  'p"  Historia  linguœ 
grœcœ  in  Prussiâ  ,  Kœnisberg  , 
I  766,  in-4°;  8"  Examen  de  la  pré- 
tendue démonologie  biblique,  Dant- 
Rick,  1778,  in-4°;  9°  de  Errore 
Irenœi  in  determinandâ  esta  te  cliris- 
ii,  Kœnisberg,  1778,  in- 4°;  10° 
Remarques  sur  la  mer  Baltique, 
Kœnisberg,  1781,  in-8";  \i°  de  la 
Fête  grégorienne  dans  les  écoles , 
Kœnisberg,  1786,  in-4";  12"  An 
liber  Jonas  non  historiam  sed  fa- 
bulam  corttineat?  Kœnisberg, 
1789,  in-4";  15°  Esquisse  d'une 
histoire  de  la  littérature  de  la  Prus- 
se, publiée  après  la  mort  de  l'au- 
teur par  Borowski ,  son  confrère 
à  la  société  allemande  de  Kœnis- 
berg, qui  y  a  ajouté  une^Notice  bio- 
graphique, Kœnisberg,  1791,  in- 
8°  :  cette  notice  a  été  imprimée 
séparément  ;  14°  Pisanski  a  com- 
posé un  nombre  considérable  (Vê- 
lages et  de  notices  des  principaux 
savans  et  gens  de  lettres  prus- 
siens; il  a  en   outre  fourni  des 


PIS 

Mémoires,  dissertations,  etc.,  au 
recueil  de  la  société  allemande  de 
Kœnisberg,dont  il  était  directeur, 
et  a  concouru  à  la  rédaction  de       , 
plusieurs   gazettes,    entre   autres       jj 
celles  de  Dantz'k,  ïhorn,  etc. 

PISON-DU-GALAND  (N.)  , 
avocat  à  Grenoble,  fut  nommé 
par  le  tiers-état  du  ci-devant  Dau- 
phinéaux  étals-généraux  en  1789. 
Il  acquit  quelque  réputation  à  la 
tribune,  où  il  ne  se  montrait  que 
par  intervalle ,  en  tâchant  toujours 
de  balancer  l'influence  de  la  capi- 
tale par  celle  des  départemens. 
Avant  la  réunion  des  trois  ordres 
en  assemblée  nationale ,  il  avait 
été  nommé  secrétaire  des  com- 
munes sous  la  présidence  de  Bail- 
ly,  avec  lequel  il  coopéra  forte- 
ment à  la  réunion  et  au  serment 
du  Jeu  de  Paume.  Chargé,  en 
1790  et  1791,  au  nom  du  comité 
des  domaines,  de  différens  rap- 
ports ,  il  s'en  acquitta  avec  talent 
et  sagesse.  Il  ne  fit  point  partie  de 
l'assemblée  législative ,  ni  de  la 
convention;  mais,  en  1797 »  ''  fut 
élu  parle  département  de  l'Isère, 
député  au  conseil  des  cinq-cents, 
dont  il  devint  successivement  se- 
crétaire et  président.  Appelé  au 
nouveau  corps- législatif  après  le 
18  brumaire  an  8,  par  suite  de 
l'alfaiblissement  de  sa  santé,  il  re- 
nonça aux  l'onctions  au  mois  de 
décembie  1801. 

PISSUT  (Noel-Laurent),  fils 
d'un  libraire  de  Paris,  et  long- 
temps libraire  lui-même,  s'est 
occupé  de  littérature, et  a  produit 
comme  auteur  ou  éditeur  les  ou- 
vrages suivans  :  1°  Marcellin,  ou 
les  Epreuves  du  monde,  un  vol. 
in- 18,  Paris,  an  8;  2"  Contes  mo- 
raux, par  Imbert,  et  autres  ou- 


PIS 

vrages  recueillis  pour  la  première 
fois,  2  vol.  in-12,  Paris,  i8o5;  5° 
Jes  Friponneries  de  Londres  mises 
au  jour,  traduction  du  l'anglais, 
un  vol.  in-ia,  Paris,  i8o5;  4° 
Poésies  de  Maître  Adam  Bit- 
lauty  un  vol.  in-ii,  Paris,  i8o6; 
5°  la  Campagne  de  trois  mois  en 
vaudeville,  un  vol.  in-12,  Paris, 
1806;  6°  les  Plaisirs  de  l'imagi- 
nation, poëme  en  5  chants,  nou- 
velle édition,  un  vol.  in-12,  Paris, 
1806  :  c'est  sans  doute,  dit  M. 
Beuchot,  la  traduction  d'Akensi- 
de,  par  d'Holbach;  7°  Œuvres 
inédites  de  Chrétien  -  Guillaume 
Lamoignon  de  M  aies  lier  hes,  avec 
un  Précis  historique,  un  vol.  in- 
12,  Paris,  1808;  8"  Manuel  du 
culte  catholique ,  un  vol.  in-12, 
Paris,  1810;  g"  Précis  historique 
sur  les  cosaques,  un  vol.  in-12, 
Paris,  1812;  lo"  Cèles  Une,  ou  les 
Preuves  de  l'amour,na  vol.  in-18, 
Paris,  i8i5.  Sur  la  fin  du  gouver- 
nement impérial,  Pissot,qui  était 
malheureux,  espéra  obtenir  quel- 
que soulagement  à  sa  misère  en 
écrivant  contre  le  souverain  que 
l'Europe  armée  venait  précipiter 
du  trône.  Il  publia  :  le  Mea  culpa 
de  Napoléon;  l'Aveu  de  ses  perfi- 
dies et  de  ses  cruautés ,  1814,  in- 
8";  et  une  Histoire  de  plusieurs 
aventuriers  fameux  depuis  la  haute 
antiquité  jusques  et  compris  Bona- 
parte, Paris,  18 14,  2  vol.  in-ia. 
Le  pain  que  le  malheureux  Pissot 
espérait  ne  vint  pas,  et  il  mourut 
à  l'hôpital  le  i5  mars  181 5.  Il  est 
encore  auteur  de  plusieurs  ouvra- 
ges :  Lettres  de  Henri  If^  à  M"" 
de  Grammont,  18 14;  Sièges  sou- 
tenus par  la  ville  de  Paris,  depuis 
l'invasion  des  Romains  dans  les 
Gaules  jusqu^au  3o  mars   1814  ; 

T.  f  VI. 


PIS 


5v53 


Paris,  181 5;  les  Véritables  pro- 
phéties de  Michel  Nostradamus , 
avec  les  Aventures  de  la  révolu- 
tion, 18  i6,  2  vol.  in-12;  et  enfin, 
le  Frère  criminel,  un  vol.  in-j8, 
Paris,  1818  :  ces  deux  derniers 
ouvrages  sont  posthumes. 

PISTICCI  (le  P.),  religieux 
franciscain  de  Naples,  dont  le  nom 
est  consacré  par  la  reconnaissance 
de  tous  les  Français,  naquit  à  Na- 
ples en  1765.  Admis  dès  l'âge  de 
1 5  ans  dans  le  cou  vent  des  Francis- 
cains, il  s'y  fit  remarquer  par  .sa 
piété  et  la  douceur  de  ses  moeurs. 
C'est  le  témoignage  que  lui  ren- 
dent ceux  mêmes  qui  se  prononcè- 
rent le  plus  fortement  contre  lui. 
Ce  religieux  avait  l'esprit  éclairé, 
et  il  ne  repoussait  pas  de  ses  lectu- 
res habituelles  les  bons  livres  de 
philosophie.  Ils  fortifièrent  à  la 
fois  son  esprit  et  son  cœur.  La  ré- 
volution française, dont  il  eut  bien- 
tôt connaissance,  ne  lecompta  point 
au  nombre  de  ses  ennemis.  Il  en 
admira  les  principes  et  n'en  détes- 
ta que  les  excès.  Lorsque  les  Fran- 
çais eurent  conquis  en  1799,  '^ 
royaume  de  Naples,  le  P.  Pisticci 
fut  informé  que  les  lazzaroni,  at- 
tachés au  roi  Ferdinand  IV,  tra- 
maient dans  l'ombre  et  dans  le  plus 
profond  secret ,  un  complot  contre 
les  Français.  La  seule  humanité 
l'inspira.  Il  veut  sauver  une  foule 
de  victimes  du  fer  des  assassins,  et 
il  consent,  pour  atteindre  ce  noble 
but,  i\  feindre  une  indignation  pro- 
fonde contre  les  conquérans  de  sa 
patrie.  La  haine  est  aveugle;  elle 
croit  que  tous  les  cœurs  se  déna- 
turent pour  recevoir  ses  funestes 
impressions.  Les  lazzaroni  entou- 
rent le  P.  Pisticci,  ils  ne  doutent 
pas  qu'il  n'entre  dans  le  complot 


554 


PIS 


qu'ils  ont  formé,  et  lui  annoncent 
leur  projet, qui  tend  à  égorger  dans 
une  seule  nuit  les  Français  établis 
à  Naples  et  tous  les  patriotes  na- 
politains. Quatre  d'entre  eux  le 
conduisent, mais  en  prenant  loufc- 
l'oij  la  précaution  de  lui  mettre  un 
bandeau  sur  les  yeux,  dans  le  lieu 
où  ils  ont  caché  leurs  armes  et 
leurs  munitions.  Là,  le  P.  Pistiici, 
clTrayé  ù  la  vue  de  leurs  immen- 
ses munition-,  de  tonte  espèce,  par- 
vient cependant  à  les  Irompersur 
le  sentiujcnl  qii'il  éprouve.  On 
l'éloigné  avec  les  mêmes  précau- 
tions. Libre  enfin  de  toute  surveil- 
lance, cet  homme  généreux  va 
rendre  compte  au  général  français 
des  projets  des  lazzaroni  et  des 
moyens  qu'ils  ont  à  leur  disposi- 
tion. Connne  il  ne  peut  désigner 
la  caverne  où  il  a  été  conduit,  il 
prend  le  parti  de  se  faire  arrêter 
comme  conspirateur  avec  ses  gui- 
des. On  les  enferme;  mais  les  4 
lazzaroni  soupçonnant  que  leur 
détention  est  son  ouvrage,  refusent 
de  lui  faire  connaître  les  projets  de 
leur  corporation.  Les  Français  et 
leurs  partisans  furent  sauvés  par 
les  déclarations  du  P.Pisticci,  qui, 
devenu  lilire,  retourna  aussitôt  à 
«on  couvent,  ne  voulant  aucune 
récompense  du  service  qu'il  avait 
fendu,  guidé  par  la  plus  pure  gé- 
nérosité. L'armée  napolitaine  ne 
tarila  pas  à  rentrer  dans  Naples. 
Lecardioid  Ilufl'o,qui  la  comman- 
<lait,  ne  .-«e  crut  point  engagé  pur  la 
capitulation  solennelle  qu'il  avait 
consentie;  il  fit  arrêter  le  P.  Pis- 
ticci  et  tous  ceux  qui  comme  lui 
se  croyaient  à  l'abri  de  toute  réac- 
tion. Ce  religieux  fut  condamné  à 
être  pendu;  il  fut  exécuté  au  mois 
Je  novembre  de  la  même  année 


PIT 

(ï/tj;));  Sfi  mort  fut  courageuse  et 
calme  comme  sa  vie.  Il  légua  sa 
mémoire  aux  ï"rançais  et  à  la  pos-' 
térité. 

PriAllO  (A.),  docteur  en  phi- 
losophie et  en  médecine,  né  eu 
Calabre  d'une  famille  notable  de 
ce  pays,  fit  d'excellentes  études  à 
Naples,  et  devint,  avant  l'âge  de 
20  ans  ,  professeur  de  physique 
dans  le  corps  royal  d'artillerie  du 
royaume.  Il  venait  d'être  nonuné  .â 
professeur  de  chimie  au  corps  de  * 
la  marine  lorsque  la  révolution  é- 
clata  à  Naples  en  1799.  Comme  il 
n'en  adopta  pas  les  principes  ,  il 
fut  obligé  de  s'expatrier,  et  vint 
cheicher  un  asile  en  France.  M- 
Pitaro  exerça  long-temps  et  avec 
distinction  la  profession  de  méde- 
cin à  Paris,  et  était,  en  1807.  mem- 
bre de  la  société  médicale  d'ému- 
lation et  de  la  société  galvanique. 
Il  e>t  rentré  dans  sa  patrie  depuis 
les  évéuemens  politiques  de  i8i4- 

PITOU  (Louis-Asge),  anciea 
chanteur  populaire,  et,  depuis  l.« 
restauration  ,  libraire  de  iM""  la 
duchesse  d'Orléans,  est  né  en  1769, 
à  Valinville ,  prés  de  Châteaudun , 
départeu)ent  d'Eure-et-Loir,  et 
prétend  descendre  de  l'auteur  de 
la  Sutjre  Ménippée.  Al.  Pitou  s'est 
acquis  une  sorîe  de  célébrité  dans 
les  premiers  temps  de  la  révolu- 
tion ,  par  les  chansons  royalistes 
qu'il  composait  et  chantait  devant 
le  peuple  rassemblé  autour  de  lui 
par  ses  chants  et  ses  lazzis.  Des 
allusions  souvent  grossières,  quel- 
quefois fines  et  piquantes,  contre 
le  gouvernement,  en  amusant  ses 
auditeurs,  attiraient  sur  lui  l'atten- 
tion de  la  police,  et  le  firent  sou- 
vent arrêter;  mais  à  peinfc  était-il 
remis  en  libellé,  qu'il  recommcn- 


PIT 

çait  ses  attaques  ,  donl  l^e  résultat, 
opi'ès  16  arrestations,  fut,  par  jii- 
jjjeiiient  (hi    tribuiiai   criii)inel   de  ' 
Paris,  au  luuis  de  novembre  l'y^'yi 
une  cundainnation  à  la  déporla- 
tioi.    perpétuelle.    Goiuluit    à    la 
Guiane,  il  parvint  à  rompre   son 
ban,  revint  à  Paris  après  les  évé- 
nemeus  du  18  brumaire  an  8(9 
novembre    1799  )  ,  et  l'ut  arrête. 
Cette  lois  ,   la  j)olice  se  contenta 
de  le  déposer  dans  les  prisons  de 
la  Force,  o«'i  il  resta  assez  long- 
temps.   Voici  ,    à   Toccasion    des 
services  que  M.    Pitou  a  rendus  à 
la  cause  royale,  comme  il  s'expri- 
me lui-même  dans  son  recueil  : 
Toute  tu  vérité  au  roi,  etc.   «  Sans 
avoir  eu  d'autre  appui  au   com- 
mencement que  la  liberté  des  o- 
pinious  et  la  lutte  entre  les  jaco- 
bins et  les  républicains  ,   je  suis 
parvenu  à  former  un  parti  si  nom- 
breux pour  la  cause  du  roi  ,  que 
tout  Paris  est  venu  me  voir,  me 
criti(|uer,  me  délendre  et  m'en- 
tourager;  que  je  suis  le  seul  dans 
toute  la  France  qui  ait,  pendant  3 
•iins,  péroré  tons  les  jours  deux  ou 
trois  mille  hommes  en  laveur  de 
la  roy,iuté;  que  vingt  fois  j'ai  fait 
fuir  la  police  et  la  force  armée,  se 
présentant  pour  m'arrêter  en  pu- 
i)lic  ;  qu'après  tant   de  revers  et 
une  résistance  aussi  longue,  aussi 
courageuse,  je  suis  le  se»d  «[ni  ail 
écliappé    aussi    miraculeusement 
à  la  mort  après  y  avoir  été  con- 
damné deux  fois.  «  il  ajoute  dans 
M\  autre  paragraphe  :  0  Je  me  dis, 
en  1795  :  la  Satyre  Ménippée,  ou- 
vrage de  mes  aïeux,  dessilla  les 
yeux  du  peuple  ,  déconcerta  les 
ligueurs  ,  et  valut  des  armées  au 
Kearnais.    Nous  sommes  dans  les 
uièmes  crises  ,  essayons  des  mè- 


PIT 


355 


mes  moyens.    De   1793  à   1797, 
j'ai  composé,  imprimé  et  vendu 
en  public,  tous  les  jours,  dans  tout 
Paris,  des  Satyres  Ménippéesqinont 
fait  plus  de  quarante  mille  prosé- 
lytes à  la  mouarclue.  Ces  satires 
m'ont    rapporté    260,000    francs. 
Cette  fortune  était  ime  propriété 
bien  légitinie  que  j'avais  acquise 
au  prix  de  mon  sang,  en  combat- 
tant pour  votre  majesté.  Fidèle  à 
mon  serment,  j'ai  distribué  cette 
somme  pour  briser  mes  fers,  pour 
sauver  la  vie  à  plusieurs  agens  du 
roi  qui  étaient  sous  les  verroux, 
et  pour  seconder  les  mouvemens 
opérés  en  faveur  de  la  royauté  , 
pour  faire  réussir  le  contre-dix- 
huit  fructidor.  J'en  appelle  au  té- 
moignage de  80,000  hommes.   » 
M.  Pitou  parait  avoir  obtenu  de  la 
munificence  royale,  peu  après  la 
j)remiére  restauration,  en  18  i4«  "- 
ne  pension  de  i,5oofr.On  trouvera 
à  ce  sujet  des  détails  fort  curieux 
dans  son  ouvrage  :  Toute  la  vérité 
au  foi,  etc.  Il  a  fait  imprimer:  i" 
f^oyage  à  Cayenne,  dans  les  deux 
Amériques  et  chez  les  antropo plia- 
ges, 2  vol.  in-8°,  fjg.,  1808,  2*  é- 
dition;  %"  le  Chanteur  Parisien,  ou 
Recueil  de  vaudevilles  qui  ont  fait 
exiler  L.  A.  Pitou,    i8oh^,  in- 18; 
3"  Tablettes  des  grands  événemens 
depuis  l'^Sy  Jusqu'à  i8o8,  in- 18, 
1808;  4°  l  Urne  des  Stuarts  et  des 
Bourbons,  ou  le  fond  de  ma  confes- 
sion sur  les  effets  du  21  janvier, 
etc.,   16,   17,   18  et    19' siècles  , 
i8i5,   in-8"  ;  5"  Analyse  de  mes 
malheurs  et  de  mes  persécutions  de- 
puis a5  ans,   181G,  in-H"  ;  6'  aux. 
Amis  de  C ordre  et  de  la  pai.v,  1817, 
in-8"  ;  7°  Prières  au  tombeau  des 
Bourbons,  1818,  \n-S";i>"  leTrônr. 
du  martyr  du  iZ  février  1820,  bro- 


556  Plï 

chure  à  l'occasion  de  ras?as«inat 
du  duc  de  Berii ,  et  à  la  réclama- 
tion que  M.  Pitou  a  laite  du  dernier 
coucher  de  ce  prince  contrç  la 
prétention  de  M.  (ïrandsire,  secré- 
taire-général de  l'académie  royale 
de  musique,  à  la  possession  de  ce 
coucher,  Paris,  in-8";  Ç)"  Toute  la 
vérité  au  roi  et  à  le  justice  sur  des 
Jaits  graves  touchant  l' lionne ur  de 
tamaison  de  Bourbon,  Paris,  i8ai, 
2  vol,  in-8". 

PUT  (Williams),  second  fils 
du  grand  Chalham ,  de  ce  Chatham 
le  plus  éloquent  et  le  plus  probe 
de.i  ministres  de  sa  nation ,  éleva 
l'Angleterre  à  un  degré  éminent 
de  prospérité  commerciale,  tint 
les  rênes  du  gouvernement  depuis 
sa  première  jeunesse,  lutta  seul 
contre  l'opposition  de  l'Europe 
entière  ,  ligua  tous  les  rois  contre 
la  France,  et  poursuivit  dans  tout 
le  cours  de  sa  vie  un  seul  but, 
une  pensée  unique,  l'abaissement 
de  celte  nation  ;  il  le  chercha  par 
tous  les  moyens  ;  il  employa  , 
pour  obtenir  ce  résultat,  tous  les 
ressorts  de  la  politique.  Homme 
d'état  ferme  et  habile,  auquel 
l'admiration  de  ses  partisans  prêta 
des  combinaisons  profondes  qui 
ne  lui  appartinrent  jamais;  pous- 
sant l'and/uion  jusqu'au  délire, 
et'  tomnienlé  du  besoin  de  sou- 
mettre l'Europe  au  machiavélisme 
anglais:  doué  de  persévérance, 
de  sagacité  et  de  force  dans  l'es- 
prit, mais  que  rien  n'arrêtait,  ni 
humanité,  ni  philosophie,  ni  mo- 
rale publique,  et  qui  imprima, 
surtout  aux  opérations  du  cabinet, 
de  Saint-James,  ce  caractère  d'é- 
goïsmc  barbare  que  l'histoire  ne 
lui  pardonnera  pas.  On  ne  peut' 
oifrir  dans   celte   notice   biogra- 


PIT 

phique  autre  chose  que  les  grand.9 
traits  d'une  vie  politique,  rempli»! 
d'ailleurs   de   calculs  secondaires 
et  de  mouvemens  de  peu  d'intérêt. 
Il  n'est  point  né  en  France,  com- 
me on  l'a  prétendu,  mais  dans  le 
comté  de  Reur,   dans  la  maison 
de  campagne  de  son  père ,  à  Haye, 
le  28  mars  1709.  De  nombreuses 
maladies  le  menacèrent  de  la  mort 
dès  sa  première  enfance  ;  cepen- 
dant il  apprit  de  bonne  heure  le 
grec  elle  latin.  La  lecture  deThu- 
cidide  et  l'étude  de  l'algèbre,  ses 
occupations  favorites,  semblaient 
annoncer  ce  qu'il  devait  être  plus 
tard,  et  signaler  les  penchans  na- 
turels de  son  esprit.  Jl  acheva  ses 
études  sous  son  oncle,  l'évêquede 
Winchester;   et,   reçu  avocat,   il 
plaida  plusieurs  causes  avec  suc- 
cès. Déjù  l'amliition  de  se  distin- 
guer d  la  chambre  des  communes 
agitait  ce   jeune   homme  ;    ou   le 
voyait  paraître  à  toutes  les  séan- 
ces; il  étudiait  les  ressources  de 
l'éloquence    parlementaire,    et, 
après  s'être  vainement  présenté, 
en  1780,  comme  candidat  à  l'uni- 
veisité  de  Cambridge,  il  fut  élu 
l'année   suivante  pour    le    bourg 
d'Appleby.  C'était  un  pesant  far- 
deau que  le  souvenir  et  le  nom  de 
Chalham.   Pilt,    dès   son  début, 
se  montra  digne  de  le  soutenir.  II 
entra  dans  l'opposition,  (pii  don- 
nait tant  de  peine  à  lord  Norlh, 
dont  le  mérite  était  bien  inférieur 
à  celui  de  ses  adversaires.  Burke, 
Fox,  Shéridan  (voyez  ces  différens 
noms)  allaquaient  chaque  jour  une 
administration  maladroite  et  mys- 
térieuse. Pilt  se  rangea,   dès  son 
entrée  an  parlement,  au  nombre 
de    ces   ennemis    redoutables  du 
ministère.  Son  premier  discours 


'\'^,ll,„m  /l)ll 


FIT 

fut  consacré  à  appuyer  une  motion 
de  Burke ,  lenJante  à  opérer  des 
réformes  dans  la  liste  civile.  On 
"vit  avecétonnement  se  développer 
un  talent  d'un  nouveau  genre.  Ce 
n'était  pas  l'éloquence  abondante 
de  Fox,  ni  l'énergie  brrilanle  de 
Burke,  c'était  une  vive  dialec- 
tique, une  facilité  singulière  à  tout 
résumer  et  à  tout  combattre,  une 
connaissance  parfaite  du  sujet,  et 
un  grand  nombre  de  vues  fines  et 
d'aperçus  heureux  jetés  dans  la 
discussion.  Des  applauilissemens 
universels  saluèrent  l'héritier  du 
grand  Chatham.  Cependant  la 
guerre  d'Amérique  occupait  tous 
Jes  esprits ,  et  fixait  lou  le  l'attention 
des  politiques.  Pift  s'était  déclaré 
contre  elle.  Dans  le  cours  des  dis- 
cussions, étonné  d'entendre  citer 
son  père  comme  l'un  des  partisans 
de  la  guerre  contre  les  colonies, 
il  se  leva  pour  prouver  que  lord 
Chatliam  avait  toujours  désap- 
prouvé celte  mesure,  et,  dans  un 
discours  plein  d'énergie  ,  prédit  les 
malheurs  qu'elle  entraînerait  un 
joisr.  Enfin  l'opposilion  triomphe, 
le  ministère  change.  Le  jeune  Pitt 
ne  fait  point  encore  partie  de  la 
nouvelle  administration  ;  il  con- 
tinue ses  attaques,  se  livre  tout 
entier  aux  systèmes  de  l'opposi- 
tion, et  prononce,  le  7  mai  1782, 
un  long  discours  en  faveur  de  la 
réf'irme  parlementaire.  Mais  le  roi 
Ceorge  III,  qui  avait  de  l'amilié 
pour  Pitt ,  lui  manda  que  ces 
théories  lui  inspiraient  le  plus 
grand  éloignement  ,  et  l'ambi- 
tieux les  abandonna,  Ilockingham 
meurt  :  Pitt  eslnommé  chancelier 
He  l'échiquier.  Ici  commence  la 
longue  guerre  que  se  livrèrent  les 
deux  hommes  d'état  les  plus  célè- 


PIT 


5D7 


bres  et  les  plus  dissemblables  de 
leur  temps,  Fox  et  Pitt.  Shelburne 
tenait  le  timon  des  affaires.  Fox  et 
North ,  ligués  contre  lui,  le  for- 
cèrent bientôt  à  donner  sa  démis- 
sion; et  Pitt,  resté  seul  ministre 
en  activité,  se  trouva  obligé  de 
soutenir  le  poids  de  toutes  les  dis- 
cussions parlementaires.  Il  sembla 
un  moment  fatigué  de  ces  travaux, 
refusa  de  se  mettre  à  la  tête  du 
cabinet ,  comme  le  désirait  le  roi , 
et  résigna  son  olïice.  C'était  ob- 
server avec  sagacilé  l'élatdes  cho- 
ses ,  et  plier  à  propos  devant  la 
coalition  de  North  et  de  Fox.  Bien- 
tôt cette  coalition  devint  le  mi- 
nistère. Pitt  fait  un  voyage  en 
France,  et  revient  en  Angleterre, 
où  il  siège  au  parlement  avec  une 
apparente  modestie  et  comme  s'il 
était  prêt  à  se  réunir  aux  minis- 
tres. Celte  paisible  indifférence  é- 
lait  un  piégc.  Fox  y  tomba.  Les 
affaires  de  l'Inde  et  l'état  du  reve- 
nu, avait  dit  un  jour  Pitt  dans  le 
cours  de  la  discussion  ,  sont  les 
deux  pivots  de  la  politique  actuel- 
le. En  entrant  dans  les  vues  de 
Pitt,  le  ministre  crut  achever  de 
le  gagner;  et  bientôt  il  lut  un  bill 
sur  l'administration  de  l'Inde. 
C'était  là  que  Pitt  l'attendait.  Il 
s'empare  du  bill  tout  entier,  le 
discute,  le  présente  comme  atten- 
tatoire aux  droits  de  la  couroime, 
et  comme  tendant  à  établir  un  em- 
pire dans  un  empire.  Le  roi  parta- 
ge ces  idées;  Pitt,  nommé  premier 
lord  de  la  trésorerie,  et  chancelier 
de  l'échiquier,  se  trouve  placé  de 
nouveau  à  la  tête  des  affaires.  11 
avait  34 '''"S,  peu  d'influence,  peu 
de  fortime;  on  croyait  que  son 
administration  durerait  peu;  et  la 
chambre  des  communes  était  rem- 


558 


riT 


plie  d'ennemis  formidables.  Com- 
ment,  dans  des  circonstances  si 
difficiles,  parvinl-i!  à  recomposer 
une  administration  à  laqtndle  per- 
sorme  ne  vonlait  s'attacher,  et  à 
dissoudre  un  parlement  qui  îe  jrê- 
nail?  Pe  loii«,'ues  menées,  une 
profonde  adresse,  purent  seules 
je  faire  parvenir  à  ce  but.  Enfin, 
il  Tainquit  la  chambre  des  com- 
nîunes,  comme  le  dit  Shéridan; 
et  lord  North,  qui  se  piquait  Ae 
connaître  les  ressorts  des  gonver- 
iiemcns.  dit  tout  haut  à  propos  de 
IMtt  :  Cet  homme  est  né  iniriistre. 
Une  grande  irritation  des  esprits 
suivit  la  dissolution  du  parlement  ; 
Vnr  fut  versé  de  tous  côtés  ;  les  en- 
nemis de  Pilt  se  réunirent  pour 
î'empêcher  de  triompher  dans  la 
iiouvelle  élection.  Il  triompha  ce- 
pendant, et  plus  de  160  membres, 
qui  avaient  volé  contre  lui  dans 
ie  parlement  précédent,  nefnrent 
point  réélus.  Il  ouvrit  la  session 
avec  une  majorité  très-prononcé»!. 
Cependant  les  obstacles  qu'il  ren- 
contrait étaient  en  }»rand  nombre. 
Le  trésor  était  vide,  le  revenu 
obéré  par  l'aiulace  et  le  nombre 
des  contrebandes,  et  l'admislra- 
lion  de  l'Inde  demandait  une 
main  habile  x't  ferme.  Pitt  com- 
mença par  arrêter  les  fraudes 
commerciales,  par  un  n»oyên  in- 
g'énieux  et  aussi  simple  qu'effica- 
ce: il  dimimia  les  droits  sur  les 
matières  que  l'on  importait  fraii- 
du!€u«;ernent  ;  et  réduisant  ainsi 
les  gains  des  contrebandiers,  il  les 
empêcha  de  continuer  un  métier 
devenu  stérile.  S'il  diminua  cet 
impôt,  i\  augujenl.i  rimj»ôt  sur 
les  fenêtres,  et  la  popuiarilc  qne 
lui  itvai^t  acquise  le  premier  de 
ces  deux  actes,  f:il  détruite  par  le 


PIT 

second.  En  ouvrant  une  pins  va<- 
te  concurrence  aux  souscripteur* 
d'emprunt  pour  l'état,  il  réduisit 
leurs  piétentions  et  leurs  profits, 
datis  la  pr<iportion  de  six  à  trois. 
Il  soumit  ensuite  à  divers  impôts- 
un  a'isez  grand  nonibre  d'objets 
de  luxe,  les  gazes,  les  rubans,  les 
fleurs  artificielles;  et  à  force  d'é- 
conomic-s  partielles  et  de  taxes  ad- 
ditionnelles, il  réalisa  un  fonds 
d'un  milion  sterling,  destiné  au 
rachat  annuel  <le  la  dette  publi- 
que. Des  membres  de  l'adininis- 
tralion,  nommés  commis.saires  de 
la  caisse  d'amortissement  on  celte 
somme  fut  versée,  en  réglèrent 
l'emploi  ;el  ce  remède  au  déficit, 
qui  se  trouva  efficace  jusqu'au 
temps  de  l'administration  de  lord 
Lansdown,  pas.sa  justement  pour 
l'un  des  plus  solides  titres  de 
gloire  de  Pilt.  Les  alîaires  de  l'In- 
de l'occupèrent  ensuite  :  il  soutint 
le  crédit  chancelant  de  la  com- 
pagnie, lui  fit  accorder  un  assez 
Ifing  délai  pour  payer  ce  qu'elle 
devait  au  gouveruein<  nt,  et  chan- 
gea totalement  l'administration 
intérieure  et  extérieui-e  de  ce 
pays.  ïl  prit  part  aux  différentes 
discussions  qui  «urenl  lieu  dans 
le  parlement  jusqu'au  commence- 
ment de  la  révolution  française. 
Ce  lut  sous  ses  auspices  que  fut 
con(due,  en  1-88,  la  triple  allian- 
ce, de  l'Angleterre,  du  roi  de 
Pru-^se,  et  du  slathouder.  On  le 
vil  s'opposer  conslaiument ,  au 
commerce,  à  l'industrie,  à  la 
prospérité  de  la  France,  et  soule- 
ver, en  178g,  la  Suède  contre  la 
Russie,  dont  il  redoutait  l'ambi- 
tion. Cependant  la  révobition 
française  éclate  :  Pili  observe  les 
progrès  d'un  incendie  qui  mena- 


FIT 

eait  de  gapner  rAnjileterre  et  de 
dévorer    l'Europe.    On    ne    peut 
douter  qu'il  n'ait  pris  plai.sir  à  fo- 
menter  des  troubles    qui   déchi- 
raient la   rivale   de    l'Angleterre. 
Des  espions   nombreux  l'avertis- 
saient de  tout  ce  qui  se  passait  en 
France  :  il  jetait  l'or  à  propos  ;  et 
d'une  main  il  alimentait  la  révo- 
lution,   qu'il  écrasait   de    l'autre 
dans   son   propre    pays,  car  elle 
avait   fait  en  Angleterre  des  pro- 
grès  rapides.   La   neutralité  qu'il 
garda  jusqu'en  1792  ne  laisse  au- 
cun doute  sur  le  système  qu'il  a- 
vait  adopté;  cependant  la  mort  de 
Louis    XVI    força    le    ministre    à 
suivre  les  intentions  de  Georges 
m,  et  à  déclarer  la  guerre:  il  s'y 
était  pré|)aré  depuis  long- temps, 
par  drs  armemens  considérables, 
par  Valien-bUl,  qui  expulsait  tous 
les  étangers    qui  déplaisaient   au 
gouvernement,  et  par  le  bill  des 
attroupetnens ,    diiigé   contre   les 
entreprises  des  Anglais  parii>^ans 
de  la  rév(dution.  (]'est  alors  qu'on 
le   vit  saisir,   pour  ainsi  dire ,  la 
révolution  corps  à  corps  et  lut- 
ter avec  elle.  Il  força  bientôt  tou- 
tes les  puissances  de  l'Europe  à  se 
réunir   sous  ses  bannières;  et  les 
rois  ,  soulevés  par  un  jeune  hom- 
me de  peu  de  naissance  contre  la 
liberté  française,  ne  firent  Jjue  ser- 
vir les  intérêts  conurierciaux  de 
l'Angleterre.  La  ligue  à  la  tête  de 
laquelle  se  trouvait  Pilt,  eut  d'a- 
bord quelque  succès  :  Toulon   «'l 
Valenciennes  furent  pris  ;  mais  eu 
un    instaut  une   énergie  terrible 
s'empare  de  la  nation  :  la  terre  en- 
fante des  hommes  ;  et  tandis  que 
les  partis  s'agitent  et  se  déchirent 
à  l'intérieur,  les  armées  républi- 
caines battent  partput  Ui»  armées 


PIT  359 

royales;  l'Espagne  est  forcée  do 
déclarer  la  guerre  à  l'Angleterre, 
et  la  sanction  de  la  victoirtî  con- 
sacre partout  la  nouvelle  liberté 
de  la  France.  Le  ministre  anglais 
eut  alors  une  lutte  ditlicile  à  sou- 
tenir :  le  débarquement  des  Frau: 
çais  dans  le  pays  de  Galles  ,  épour 
vantait    l'ouest    de    l'Angleferre. 
L'Irlande  menaçait  d'une  insur-r 
reclion  ;    la    révolte  des  flottes  de 
Plynioulh  et  de  Porsmpujh  appre- 
nait  à    l'Europe   que   les  UKuins 
de   l'Angleterre    étaient    prêts   f» 
tourner   leurs   armes  contre  leur 
patrie.    La  dette  publiqu*;  pienait 
tous   les   jours  un  accroissement 
plus   considérable.    On    s'ellVaya  ; 
et  les  négocians  demandèrent  U 
remboursement  des  billets  en  es- 
pèce. La  banque  d'Angleterre  n'é- 
tait point  en  mesure  de  satisfaire 
à   cet   engagement   qu'elle    avait 
pris  ;  elle  s'adressa  pour  cet  effet 
au  gouvernement,  qui  lui  devait 
des  sommes  très  -  considérables. 
l'itt  la  tira  de  peine  ,  en  suspen- 
dant, par  un  arrêt  du  conseil,  les 
paiemens   en  argent.  George  111 
versa  des   larmes  en.   signant  cet 
arrêt,  qui  bientôt  fut  converti  en 
bill.  Pilt  trempa  lui-même  la  plu- 
nje  dans  l'encre,  la  plaça  entre  les 
doigts  du  monarque,  et  lui  dit: 
«  Sire,  il  fautabsohiment  signer.» 
La  mesure  adoptée,  fut  nommée 
par  l'opposition   une,  banqueroute 
(li'guisée.  Mais  cette  résolution  ri- 
goureuse était  le  fruit  d'un  calcul 
profond  ;  et  sans  elle  on  aurait  vu 
le  con\merce    et    rindu>trie   an- 
glaises,frappés  tout-à-coup  de  pa- 
ralysie ,  s'arrêter  au  milieu  de  l'a- 
bondance dont  ce  pays  jouissait. 
Le  papier  de  la  banque  d'Angle- 
terre acquit  chaque  jour  plus  liç 


36o 


FIT 


valeur;  le  calme  se  rétablit.  Ce- 
pendant l'Europe  entière  avait  re- 
culé devant  la  France  :  Malmej- 
bury  commença  une  paix  qui  n'eut 
rieu  de  durable;  toutes  les  puis- 
sances avaient  abandonné  l'Angle- 
terre ;  et  elle  eût  été  forcée  de 
soutenir  seule  cette  guerre ,  si  Pitt 
n'avait  trouvé  le  moyen  de  former, 
en  J79H,  une  nouvelle  coalition, 
romposée  de  l'Autriche,  de  la 
Turquie  et  de  la  Russie.  Cette  coa- 
lition n'eut  pas  plus  de  succès  que 
l'autre.  L'étoile  de  Bonaparte  com- 
mençait à  paraître;  et  Marengo 
ouvrit  cetle  longiie  carrière  de 
victoires  qui  fit  perdre  à  Pitt  dans 
les  champs  de  batailles,  tout  ce 
qu'il  pouvait  gagner  dans  le,  cabi- 
net. La  paixde  Luné  ville  fut  signée. 
La  nouvelle  amitié  de  Paul  1"  et 
deBonapar(eporlabientôt>mcoup 
terrible  à  la  politique  de  l'Angle- 
terre. L'assassinat  de  cet  empereur 
la  délivra  de  beaucoup  de  crain- 
tes. On  essaya  vainement  de  traiter 
tnsuitedela  paix  avec  la  France.  En 
x8o2,  l'Irlande,  i\  laquelle  on  a- 
vait  fait  espérer  l'émancipation  de 
ses  catholiques,  futréimie  à  l'An- 
gleterre ,  mais  le  roi  refusa  de  te- 
nir la  promesse  que  ses  minisires 
avaient  faite  en  ïon  nom.  Alors 
Pitt,  qui  voyait  avec  peine  que  la 
paix  allait  être  signée  avec  la  Fran- 
ce, donna  sa  démission  ,  et  con- 
courut lui  -  même  à  la  formation 
du  ministère  qui  lui  succédait. 
C'était  garder  le  pouvoir  en  se  ca- 
chant derrière  quelques  hommes 
choisis  de  sa  main,  vains  simula- 
cres d'autorité.  Mais  bientôt  ces 
liom mes  voulurent  marcher  seuls  ; 
Pitt  se  brouilla  avec  eux,  reprit 
ses  anciens  titres,  les  remplaça,  et 
s'occupa  aussitôt  à  créer  une  nou- 


PIT 

velle  coalition  contre  la  France.  If 
vit  ses  dessins  trompés,  et  le  génie 
de  Bonaparte  eftVayer  l'Europe  : 
cependant  son  lit  de  mort  fut  en- 
touré des  trophées  deTrafalgar.  Il 
tomba  dangereusement  malade  en 
décembre  i8o5,  et  cessa  d'exister 
le  5  janvier  1806.  Il  n'avait  que 
47  ans.  Si  Pitt  fût  parvenu  à  la 
vieillesse  ,  il  eût  vu  la  France  hu- 
miliée et  tous  ses  désirs  réalisés. 
Les  historiens  qui  ne  jugent  que 
d'après  le  succès,  lui  ont  fait 
honneur  de  ces  événemens,  et  lui 
ont  attribué  ce  changement  des 
affaires  après  sa  mort  :  c'est  trop 
accorder  à  son  génie  et  trop  peu  à 
la  fortune.  Le  philosophe  ne  par- 
donnera point  au  ministre  anglais 
sa  perfidie  pendant  le  cours  de  la 
révolution  ,  le  machiavélisme  et  la 
barbarie  de  sa  politique  extérieu- 
re, les  actions  horribles  que  l'on 
commit  aux  Indes  sous  son  gou- 
vernement, et  cette  abnégation 
complète  de  tous  les  sentin)en& 
moraux  et  généreux  que  l'on  re- 
cotmaîl  dans  les  actes  de  sa  -vie 
publique.  Mais  on  ne  peut  nier 
qu'il  n'ait  été  administrateur  plein 
de  sagacité,  de  finesse,  de  persé- 
vérance et  d'habileté.  Comme  ora- 
teur, il  se  fit  surtout  remarquer 
par  la  netteté  des  idées,  la  préci- 
sion de  l'analyse ,  une  diction 
brève  et  imposante,  et  plus  forte 
que  majestueuse.  La  colère  était 
le  seul  mouvement  qu'il  mêlât  à 
ses  discours  :  ses  ennemis  l'appe- 
laient l'enfant  colère  [tfie  ungry 
hoy).  Il  avait  les  traits  fins  et  dé- 
liés, la  physionomie  haute  et  fer- 
me. Ses  mœurs  furent  sévères  :  on 
l'appelait  le  ministre  sans  tache. 
L'ivresse  était  le  seul  défaut  au- 
quel il  se  livrât  sans  réserve.  C'é- 


PIX 

tait  un  assez  singulier  spectacle 
que  de  voir  Pitt,  chargé  des  fu- 
mées du  vin  ,  répondre  nettement 
aux  éloquentes  invectives  que  Fox 
lui  lançait  dans  l'ivresse  où  il  était 
plongé  ;  et  Shéridan,  qui  ne  venait 
au  parlement  qu'après  avoir  bu 
plusieurs  bouteilles  d'eau-de-vie, 
reprendre  la  question  après  ces 
deux  honorables  membres.  On 
paya  les  dettes  de  Pilt ,  et,  malgré 
l'opposition  de  Fox,  un  monu- 
ment lui  fut  élevé  à  Westminster. 
M.  Gifford  et  l'évêque  de  Win- 
chester ont  écrit  moins  sa  vie  que 
son  éloge.  C'est  i\  l'histoire  sévère 
qu'il  appartient  de  juger  Pitt  ; 
constant  ennemi  de  la  France,  et 
sacrifiant  toujours  au  besoin  d'é- 
craser son  ennemie  ,  ces  principes 
de  probité  et  d'honneur  qui  ne 
règlent  pas  seulement  les  affaires 
des  particuliers,  mais  qui  s'éten- 
dent encore  aux  intérêts  des  peu- 
ples et  des  empires. 

PIXKKÉCOUKT  (René-Char- 

LES-GlIlLBERT  De),   Ic    pluS    féooud 

des  auteurs  dramatiques  vivans, 
a  fait  représenter  avec  succès , 
sur  les  théâtres  secondaires,  une 
foule  de  pièces,  où  les  gens  de 
goOt  ont  reconnu,  au  milieu  des 
habitudes  du  genre  et  des  défauts 
auxquels  l'auteur  s'était  condam- 
né eu  l'adoptant,  une  grande  en- 
tente de  la  scène  et  l'art  de  pré- 
parer et  de  disposer  les  effets  dra- 
matiques. M.  Pixérécourt  est  né  à 
INauei,  Icîsa  janvier  1775.  Il  venait 
de  ternn'ner  son  droit,  lorsque  la 
tourmente  révolutionnaire  l'em- 
porta en  pays  étranger.  Il  rentra 
en  France  vers  la  fin  de  1795,  se 
réfugia  *à  Paris  sous  un  nom  sup- 
posé, et  ne  put  se  montrer  sous 
son  nom  vérilably  qu'après  deux 


PIX  36i 

années  entières.  La  lecture  d'une 
jolie  nouvelle  de  Florian,  intitulée 
SelicOf  détermina  la  vocation  de 
M.  Pixérécourt;  il  composa  sur 
ce  sujet  une  pièce  en  4  actes,  qu'il 
fit  jouer  au  théâtre  iMolière.  Cette 
pièce  eut  du  succès,  ainsi  que  l'o- 
péra de  Claudine,  tiré  d'une  autre 
nouvelle  du  même  auteur.  M. 
Pixérécourt,  encouragé  par  l'heu- 
reux succès  de  ses  deux  pre- 
miers ouvrages,  composa  succes- 
sivement :  la  Forêt  de  Sicile 
(  '79^)>  ^"  '^ol^^e  des  Champs-Ely- 
sées (1799);  le  Mal  avisé  (1799); 
Léotiida ,  grand  opéra  (1799)"» 
Fictor  (1798);  Rosa  ()8oo);  Fla- 
minius  à  Corinthe  (1801)  ;  Mar- 
cel (i8oi);  le  Petit  Pa<j;e,  opéra- 
comique  (1800);  le  Chansonnier 
de  la  paix  (1801);  Avis  aux  Fem- 
mes (  180 1);  Cœtina  (1800);  le  Pè- 
lerin blanc  (1801);  l'Homme  à  trois 
visages  (1801);  la  Femme  à  deux 
maris  (1802);  les  Mines  de  Polo- 
gne (1802);  la  Peau  de  l'Ours 
(1802);  Tékéli  (i8o7));  tes  Maures 
d'Espagne (1804);  Plzarre  (  1 802); 
la  Forteresse  du  Danube  (i8o5): 
Rohinson  Crusoà  (i8o5);  Kontouf 
(1806);  le  Solitaire  de  la  Roche- 
Noire  (1806);  l'Jnge  tutétaire 
(1808);  la  Citerne  (1809);  Mar- 
guerite d'Anjou  (1810);  les  Ruines 
de  Bahyhne  (1810);  le  Pî'écipice 
(181  1);  le  Fanal  de  Messine  {]Hï2); 
le  Chien  de  Mnntargis  (1814); 
Charles  -  le  -  Téméraire  (i8i4)  » 
Christophe  Colomb  (i8i5);  /«  Mo- 
nastère abandonné  (1816);  la  Cha- 
pelle des  boi^.  (1818);  la  Fille  de 
l'Exilé  (1819);  Bouton  de  rose 
(1819);  le  Mont-Sauvage  (1821); 
le  Pavillon  des  Fleurs,  opéra-co- 
mique (1822);  Fnlentine  (1822); 
Ali-Iiaha  (1822);  le   Château  de 


563 


PIZ 


Loch-Leven  (1823);  le  Behéder 
(1818);  les  Chefs  écossais  (1819); 
la  Place  du  Palais  (i8ii4).  Ou  ne 
peut  refuser  à  l'auteur  de  ces  piè- 
ces une  grande  i'écondité  d'iniagi- 
iintion,  tt  le  succèi  populaire 
qu'elles  ont  oljtenu  prouve  assez 
en  leur  faveur.  II  est  malheureux 
i|ue  M.  Pixérécourl  n'ait  pas  porté 
sur  de  plus  grands  théûires,  et 
soumis  aux  juges  plus  sévères  qui 
en  composent  le  public,  le  talent 
dramatique  dont  il  était  doué  :  il 
sait  graduer  l'intérêt  ;  son  dialo- 
gue a  de  la  vérité,  de  l'énergie;  il 
n'a  point  cherché  de  moyens  et 
d'ertets  aux  dépens  de  la  njorale. 
i>l.  Pixérécourl  a  été  nouuné  ,  en 
1824»  directeur  de  l'Opéra-Comi- 
que.  Il  appartient  au  temps  seul 
<le  justifier  les  espérances  qu'ont 
données  sa  j)robi(é  «t  la  fermeté 
de  sou  caraclére.  Fondateur  de  la 
société  des  Biblioptiiles  français,  il 
a  publié  plusieurs  ouvrages,  outre 
ses  pièces  de  théâtre  :  les  Soaoenirs 
de  Paris,  de  Rolzebue;  les  Souve- 
nirs d'Italie,  du  uiême  (G  vol. 
1804,  l8o.^).  M,  Pixérécourt  a 
5U|)primé  les  injures  iudécentes 
dont  l'écrivain  allemand  accablait 
une  nation  qui  lavait  trop  bien 
accueilli.  Charles  XII,  roman 
(/«/.);  une  V in  deDaUiyrac,  et  une 
édition  très-bien  faite  des  Œuvres 
de  Floriau,  jusqu'alors  iuédiles, 

PIZ7A  (l'abbé  Joachim),  poète 
et  littérateur,  membre  inùscuslode 
ou  gardien  général  de  l'académie 
d«'s  Arcades  de  Rome,  naquit  dans 
cctle^  ville  en  1718.  11  Cl  ses  étu- 
dcsau  cnlIégcRomain  des  jésuites, 
et  s'annonça  de  bonne  heure  par 
d(.'s  poé>ies  légères,  qui  eurent  le 
plus  brillant  succès.  Honnne  ai- 
mable, riche,  et  estimé  pour  ses 


PIZ 

qualités  personnelles  el  ses  talens. 
il  devint  membre  des  Arcades  en 
1701  ;  et  après  la  mort  de  l'abbé 
Morei,  en  1759,  il  fut  nommé 
son  successeur  à  la  place  de  gar- 
dien général  de  l'académie.  Sous 
la  direction  de  l'abbé  l'izzi ,  cette 
société,  déjà  si  célèbre,  reçut  un  • 
nouvel  éclat.  Les  littérateurs  et 
les  poètes  les  plus  distingués  en 
firent  partie,  et  l'on  vit  sur  le  ta- 
bleau de  ses  membres  les  noms 
de  princes  et  de  souverains  étran- 
gers qui  s'honoraient  d'y  être  ins- 
crits. Une  improvisatrice  renom- 
mée, native  de  Pistoie,  Marie- 
Madeleiue  iMorelli  (  voj.  Morelli  ), 
s'étant  rendue  à  Rome,  y  fixa  l'at- 
tention publique  par  sa  beauté  , 
ses  grâces  et  ^es  talens.  Bientôt 
tout  ce  que  Rome  comptait  d'il- 
lustre, par  la  naissance  ou  le  mé- 
rite, entoura  la  célèbre  étrangè- 
re. L'abbé  Pizzi  fut  du  nombre 
de  ses  courtisans  les  plus  empres- 
sés. Les  talens  de  la  belle  im- 
provisatrice parurent  dignes  de  la' 
couromie  qui  avait  été  décernée 
à  Pétrarque  et  au  Tasse,  el  l'abbé 
Pizzi  se  montra  disposé  à  céder  au 
vœu  général.  Klle  fut  reçue  mem- 
bre de  l'académie  sous  le  nom  de 
Corilla  01impica,et  c^)nronnée  a*j 
Capitole  leSi  aoûti76G.  La  cri- 
tiqueempruntant  les  noms  de  Pas- 
quiu  el  de  Marforius ,  protesta  con- 
tre ce  triomphe  ,  et  le  custode  ne 
fut  pas  épargné  dans  les  pam- 
phlets. C'est  ce  qui  «lui  faisait  \ 
dire,«  que  le  comonnemenl  de 
«Corilla  était  devenu  pour  lui  le 
«couronnement d'épines.  »  L'abbé 
l'izzi  ne  se  borna  point  à  cette 
plaisanteiie  spirituelle,  ileul  l'im- 
prudence de  répondre  à  des  sai- 
casmes  injustes,   et  fournit   par- 


PLA 

là  un  nouvel  aliment  an  scandale, 
qui  eut  bientôt  un  terme  par  le 
départ  de  Corilla.  L'abbé  Pizzi  , 
réconcilié  depuis  ce  moment  avec 
les  censeurs,  qui  ne  l'accusaient 
que  de  s'être  laissé  séduire  par  la 
beauté  de  Corilla,  vécut  en  paix 
et  honoréde  l'estime  générale  jus- 
qu'à l'époque  de  sa  mort  arrivée 
le  18  septembre  1790.  Parmi  les 
ouvrages  qu'il  a  publiés  on  cite 
les  «ui  vans  :  1°  Discours  sur  ta  poé- 
sie tragique  et  comi{fue ,  Rome  , 
1 772  ;  2"  Dissertation  sur  un  camée 
antique;  5°  la  Pulsion  de  VEden, 
poëirje  en  4  chants,  tiré  en  partie 
de  l'Apocalypse,  Rome,  1778  :  ce 
poëme  e«t,  dit-ou,  digne  d'éloges, 
soit  j)ar  la  beauté  des  images,  soit 
par  l'harmonie  de  la  versification  ; 
4°  le  Triomphe  de  la  poésie,  impri- 
mé à  Parme  par  Bondoni,  1782,  a- 
vec  un  grand  luxe  typographique, 
dans  la  collection  qui  a  pour  li<re  : 
Actes  du  couronnement  solennel  de 
Corilla  Olimpica,  publiés  par  les 
soins  de  l'abbé  Pi/.zi. 

PLAAT  (André-Henri -JcAN 
Vander),  lieutenant -général  au 
service  du  royaume  des  Pays- 
Bas,  commandeur  de  l'ordre 
royal  et  militaire  de  Guillaume, 
né  en  1763  à  Grave,  entra  dés  l'â- 
ge de  12  ans,  comme  cadet  d'ar- 
tillerie, au  service  de  Hollande. 
Il  le  quitta  à  l'épcxpie  de  la  révo- 
Intion  de  1787,  pour  passer  à  ce- 
lui de  l'impéralriee  dfi  Russie, 
Catherine  Jl,  où  il  obtint  le  gra- 
de de  major  dans  le  corps  du  gé- 
nie. \\  fit  eii  relie  qualité  la  guer- 
re contre  la  Suédt;,  (;t  donna  dans 
toutes  <es  aftaire-i  des  preuves  de 
valeur  et  de  takns  militaiics. 
Ktnployé  ensuite  dans  la  guerre 
<.!>ntre  les  Turcs  en  178901  «790,  il 


PLA  56."5 

se  distingua  de  nouveau  aux  siè- 
ges de  Bender,  d'Ackerman,  et 
au  terrible  assaut  d'ismaïlow,  où 
il  reçut  trois  blessures.  L'impéra- 
trice lui  envoya  pour  récompense 
de  la  valeur  brillante  qu'il  avait 
déployée  en  cette  occasion  ,  une 
épée  d'or  et  la  croix  de  l'ordre  de 
Saint-Wladirair.  A  la  bataille  de 
RLitchin,  où  le  grand-visir  Jussull- 
Pacha  fut  complètement  battu , 
M.  Vander  Plaat  fut  encore  hono- 
rablement cité  comme  îiyant  con- 
tribué à  la  victoire.  Après  la  paix 
de  1792,  il  fut  chargé,  conjoinle- 
ment  avec  le  général-  major  de 
Wollacrt,  passé  comme  lui  du 
service  de  la  Hollande  à  celui  de 
la  Russie,  des  plans  de  défense 
pour  les  provinces  méridionales 
de  l'empire,  et  dirigea  les  travaux 
entrepris  à  Odessa,  el.ensuile  ceux 
de  la  nouvelle  fortei-esse  deTeres- 
pol  sur  le  Dniester,  qui  furent  a- 
rhevés  en  179*).  L'année  suivante, 
il  fut  nommé  directeur- général 
du  département  du  génie  pour  la 
province  de  Livonie.  Après  avoir 
obtenu  sur  .sa  demande,  et  dans 
les  termes  les  plus  honorables , 
sa  démission  du  service  de  la 
Russie  ,  il  rentra  en  qualité  de 
gêné  rai- major  à  celui  de  Hollan- 
de, et  fut  mmimé,  en  décembre 
i8i3,  gouverneur  de  Breda.  Cet- 
te place  était  encore  dépourvue 
d'armes  ,  de  munilions  de  gnerre, 
et  de  presque  tout  ce  qui  est  né- 
cessaire à  la<léfense,  quand  elle 
fut  attaquée  par  un  corps  français 
venant  d'Anvers,  et  qui  espérait 
s'en  emparer  par  un  coup  de 
main.  i\lais  le  général  j)arvint 
à  force  d'activité  et  de  courage  à 
pourvoir  aux  besoins  les  plu* 
pressans  et  à  sauver  la  ville.  L'em» 


564  PL  A 

pereilr  Alexandre  le  décora  à  cet- 
te occasion  de  la  fijrand'croix  de 
l'ordre  de  Sainte-Anne.  En  i8i5, 
il  fut  nommé  lieutenant-général 
et  commandant  do  la  province  du 
Bral)ant-Scptentrional.  Le  gou- 
vernement d'Anvers  et  le  com- 
mandement général  de  la  quatriè- 
me division  militaire  lui  lurent  en- 
suite confiés.  Le  général  Van  der 
Plaat  mourut  à  Anvers,  le  i5 
février  1819,  vivement  regretté 
de  son  souverain  et  de  ses  l'rères 
d'aniîcs. 

PLACE  (Pierre  Antoine  DE  la), 
littérateur,  naquit,  en  '707,  à 
Calais,  et  fit  de  Ijonnes  études.  Sa 
carrière  a  été  uniquement  litté- 
raire, el  néanmoins  cet  auteur  est 
médiocrement  estimé.  Sans  génie, 
sans  talent  supérieur,  il  s'est  mon- 
tré quelquefois  homme  de  goût 
el  plus  souveni  litléralour  labo- 
rieux et  utile,  smlout  comme  tra- 
ducteur. Voici  à  cet  égard  le  ju- 
gement de  Palissol,  extrait  de  ses 
Mémoires  sur  la  littérature  :  «  On 
doil,  dit-il,  à  La  Place  l'utile  tra- 
duction du  théâtre  anglais,  et  il 
est  mi  des  premiers  qui  nous 
aient  luit  connaître  les  bons  ro- 
mans écrits  dans  cette  langue  ; 
celui  de  Tom-Jones  surtout,  l'un 
des  meilleurs  que  l'Angleterre  ait 
produits.  f>  La  Place  tut  pendant 
plusieurs  années  directeur  du 
\Mercure  de  France.  Celte  époque 
de  sa  vie  est  très-honorable,  cl 
jamais  les  collaborateurs  de  ce 
recueil  littéraire,  les  auleurs  esti- 
mables, n'curenl  à  se  plaindre  de 
lui.  Il  mournl  en  ^'yfÇj.  Voici  la 
liste  de  ses  dillérenles  produc- 
tions :  1°  Théâtre  anglais,  traduc- 
tion en  8  vol.  in-ia,  Paris  el 
Londres,  «746-  La  Place  prit  pour 


PLA 

modèle  de  son  travail  la  traduc- 
tion du  Théâtre  des  Grecs,  par  le 
P.  Brumoy.  Sous  le  rapport  du 
style,  il  est  inférieur  au  traduc- 
teur du  Théâtre  des  Grecs;  mais 
il  mérite  des  éloges  pour  avoir 
corrigé  les  irrégularités  des  au- 
teurs originaux;  et  plusieurs  au- 
teurs dramatiques  français  lui  doi- 
vent des  plans,  des  situations  et 
des  caractères.  2°  Histoire  de  Tom 
Jones,  4  vol.  in-ia,  Paris,  1767, 
traduction  libre  de  l'anglais,  sou- 
vent réimprimée;  5°  C Orpheline 
anglaise,  qui,  ainsi  que  plusieurs 
autres  romans  anglais  traduits  par 
Je  même  auteur,  a  été  plusieurs 
fois  réimprimée.  En  général  le 
style  des  traductions  de  La  Place 
est  incorrect  et  sans  énergie  ;  mais 
il  est  exempt  d'images  et  d'ex- 
pressions de  mauvais  ton.  4°  Plu- 
sieurs tragédies:  Venise  sauvée, 
J eanne  d' Angleterre  ,  Jeanne 
Gray ,  C altiste,  Adèle  de  Pon- 
ihieu,  etc.  Adèle  de  Ponlhieu,  a- 
près  18  mois  d'attente,  fut  jouée 
parordreduilucde  Richelieu,  que 
l'auteur  remercia  par  un  quatrain, 
dont  voici  le  dernier  vers: 

Tu  pri'ç  Minorquc,  et  fi?  jouer  AdcU, 

Venise  sauvée  est  imitée  d'Ot- 
way  :  la  marche  en  est  simple, 
naturelle,  et  le  slyle,  sans  être 
élégant,  est  assez  bien  soule- 
im  ;  plusieurs  scènes  sont  écrites 
avec  chaleur.  «  La  tragédie  de 
Vt^nise  sauvée,  dit  Palissot ,  eut 
beaucoup  de  succès  dans  sa  nou- 
veauté; mais  elle  a  été  moins 
heureuse  à  la  reprise.  »  Outre  ces 
ouvrages,  on  lui  doit  encore  :  1* 
un  Recueil  d'épilaphes  ,  sérieuses 
et  badines,  1782,  5  vol.  in-13  ;  ?." 
Pièces   intéressantes    el   peu   con- 


PLA 

nues,  8  vol.  in-12,  Paris  el Bruxel- 
les, 1781,  et  années  suivantes; 
3°  Hermippas  redivivus ,  ou  le 
Triomphe  du  sage  sur  la  vieillesse 
et  le  tombeau,  traduction  de  l'an- 
glais Cohausen,  1789,  2  volumes 
in-8"  ;  4"  ^^  Valère  Ûaxivie  fraii- 
cais,  pour  servir  à  l'éducation  de 
la  jeunesse,  1792,  2  vol.  in-S", 
couipilation  assez  estimée.  Nous 
terminerons  cet  article  en  rap- 
portant une  anecdote  assez  pi- 
quante. «  Ses  premiers  essais,  dit 
l'auteur  d'une  Notice  sur  cet  écri- 
vain ,  furent  peu  remarqués  dans 
un  temps  où  la  littérature  était 
presque  le  seul  aliment  de  la  cu- 
riosité publique.  Piqué  d'une  telle 
indifl'érence,  il  imagina  un  moyeu 
singulier  d'attirer  sur  lui  l'atten- 
liorïf  Caché  dans  le  fond  d'ime 
province,  il  fit  écrire  à  Paris  qu'il 
était  mort.  Cette  nouvelle  fut  mi- 
se dans  les  feuilles  de  l'abbé  Des- 
fontaines, avec  une  lettre  d'un 
prétendu  ami,  qui  s'étendait  beau- 
coup sur  la  perte  d'un  jeune  hom- 
me de  si  grande  espérance  ;  mais 
le  stratagème  fut  bientôt  décou- 
vert, et  l'on  en  rit  beaucoup.  » 
(  Voir  la  Correspondance  littéraire 
de  La  Harpe.) 

PLAICHARD  -  CHOTTIÈRE 
(R.  F.),  exerçait  à  Laval  la  pro- 
fession de  médecin  à  l'époque  de 
la  révolution,  dont  il  se  déclara  Je 
partisan.  Nommé  d'abord  officier 
municipal ,  il  fut  ensuite  élu  dé- 
puté-suppléant de  la  Mayenne  à 
l'assemblée  législative;  il  n'y  prît 
point  séance,  et  le  même  départe- 
ment le  nomma  ,  eu  septembre 
179-2,  député  à  la  convention  na- 
tionale. Lors  du  procès  de  Louis 
XVI,  il  vota  la  réclusion  pendant 
la  guerre  et  le  bannissement  à  la 


PLA 


365 


paix.  Au  i3  vendémiaire  an  4 
(5  octobre  ijgS),  il  fut  rete- 
nu prisonnier  dans  sa  section  ; 
mais  aussitôt  le  triomphe  de  la 
convention,  il  recouvra  la  liberté. 
i>L  Plaichard-Chottière  passa  au 
conseil  des  anciens,  dont  il  devint 
secrétaire.  Il  cessa  ses  fonctions 
le  20  mai  1797,  ^^  retourna  dans 
son  département,  où  il  reprit 
la  profession  de  médecin. 

PLANARD  (Eugène)  .  auteur 
dramatique,  né  le  4  février  1784 
à  Milhaud  (Aveyron),  d'une  fa- 
mille distinguée,  de  l'ancienne 
province  de  Rouergue.  Pendant 
le  cours  de  ses  études ,  il  laissa 
déjà  entrevoir  un  goût  assez  vif 
pour  la  littérature  dramatique; 
mais  destiné  par  son  père  à  sui- 
vre la  carrière  du  barreau,  il  lui 
fallut  se  livrer  à  un  travail  plus 
sérieux,  et,  en  1806,  sa  famille 
l'envoya  à  Paris  pour  y  faire  son 
droit.  M.  Planard  sentit  bientôt 
se  réveiller  en  lui  le  désir  de  bri- 
guer les  faveurs  de  ïhalie,  qui  ne 
se  montra  pas  trop  sévère  pour 
lui;  il  a  donné  :  1°  au  théûtre 
LoiiYois,  le  Curieux,  comédie  en 
un  acte,  en  vers,  1807:  c'est  son 
premier  ouvrage  ;  2"  au  ThéStre- 
Français,  les  Pères  a'éanciers,  co- 
médie en  un  acte,  en  vers;  3*  la 
A'^iè(?e,5a/)/;o,s<?t',  comédie  en  3  actes, 
en  vers;  4°  le  Paravent,  comédie  en 
un  acte,  en  vers:  fond  léger,  mais 
de  jolis  vers,  des  idées  heureuses; 
5"  l'Heureuse  rencontre,  ou  les 
Deux  valises,  comédie  en  3  actes, 
en  prose;  i'f  au  thé/ître  de  l'Odéon , 
le  Portrait  de  famille,  comédie 
en  un  acte,  en  vers,  1809;  7"  le 
Faux  paysan,  comédie  en  3  actes, 
en  vers,  181 1;  8°  l'Epouseur  de 
drilles  fi  inmes,  comédit;  en  3  actes, 


566 


PLA 


vn  vers.  Cette  pièce,  dont  le  suc- 
cès   l'ut    contesté,    faillit   donner 
lieu  à  un  procès  entre  l'auteur  et 
le  rédacteur  d'un  journal ,  le  der- 
nier ayant  dit  ai-sez  brutalement 
que    l'auteur   de    la    pièce   avait 
sans  doute  étudié  le  monde  dans 
les  corps  -  de -garde  ,    etc.   9°   la 
Pacotille,  ou  l'ambition  subalter- 
ne, comédie  en   5  actes;    in°  le 
iiravil  Marronler,  vaudeville  en 
un   acte  :  une  situation  comique 
et  quelques  jolis  couplets;  11°  un 
Prologue,  en  vers, ajouté  au  Mar- 
ché aux  fleurs,  comédie  en  un  ac- 
te, de  IVl.  Dumcrsan,  pour  le  nia- 
riafje  de  l'empereur,  1810;  12"  au 
théâtre    Feydeau  ,     l'Eclielle    de 
soie,   opéra  en  un  acte,   en  vers, 
musique  de  Gaveaux,  1808,  poè- 
me agréable,  musique  charman- 
te;   i5°  l' Emprunt  secret^   opéra 
en  un  acte,  musique  de  Pradher; 
li^"  le  Mari  fie  circonstance,  opéra 
t;n  im  acte,  musique  de  Plantude: 
action  légère,  mais  intrigue  vive, 
serrée ,  beaucoup   de  traits  heu- 
reux dans  le  dialogue  ;  c'est  un  des 
ouvrages  les  plus  agréables  de  ce 
maître,  18 15;  i5'/r5  iVof^*  rfi'G'a- 
mat/ie,  opéraen2actes,musiquede 
Bochsa;  16"  Nourma^  ou  le  Règne 
lie  douze  heures,  opéra  en  2  actes, 
uui'-iquc  de  Brum,    181/4:  faible 
succès  ;  1 7°  /a  Bergère  châti'laine, 
opéra  en  5  actes,  musique  d'Au- 
ber,  suicès  dfl  au  compositeur; 
18"  les  Héritiers  de  Miehau,  ou  le 
Moulin  de  Lieursaint ,   opéra  en 
un  acte,  musique  de  Bochsa,  piè- 
ce que  la  circonstance  a  l'ait  naî- 
tre, et  qui  atnail  pu  lui  survivre; 
19°  Emma,  ou  la  Promesse  impru- 
dente, opéra  eu  5  actes,  musique 
U'Aulier;  le  poète  et  le  musicien 
peuvent  revendiquer  chacun  avec 


PLA 

justice   leur  part  du  succès  que 
cette  pièce  a  obtenu  ;  elle  est  res- 
tée   au   répertoire;    20°  l'Auteur 
mort  et  vivant,   opéra  en  un  acte, 
musique  d'Hérold  :  faible   pièce; 
musique  savante,  mais  sans  char- 
jue;    2  1°   le  Portrait  de  famille, 
opéra   en   un   acte,   musique   de 
Kreubé  ;  c'est  la  coniédie  jouée, 
en  1809,  à  rOdéon  :  succès  réel, 
i8t4;  2'^"  le  Solitaire,   opéra  en 
5  actes,  musique  de  Caraffa  :  une 
musique  pleine  de  grAoe  et  de  mé- 
lodie, et  surtout  un  air  (c'est  le 
Solitaire),  voilà  ce  qui  a  donné  au 
Solitaire  une  certaine  vogue;  25" 
les   deux  Jumelles,   opéra    en   un 
acte,  musique  de   Fétis  :  ca'ievas 
sur  lequel  M.  Fétis  a  brodé  quel- 
<pie   jolis   airs    pour  faire   briller 
deux  cantatrices  également  aîKlfiées 
du  \)i\bUo;'ili'' Marie  Si uart,  opéra 
en  3  actes  (avec  iM.  Roger),  musi- 
que de  Fétis  :  succès  contesté;  25" 
les  Deux  contrats,  opéra  en  1  acte, 
i824"  ^i-  Planard  a  épousé  la  plus 
jeune  des  fdies  de  M""  Saint-Au- 
l)in.  Il  occupe  depuis  long-temps 
la  place  de  secrétaire  du  comité 
de  législation  du  conseil-d'état. 

PLANAT  (N.),  officier  d'ordon- 
nance de  Napoléon,  fut  chargé,  en 
mai  i8i5,  de  parcourir  les  dépar- 
teniens  du  iMidi  et  de  l'Est,  pour 
en  juger  la  situation  militaire  et 
observer  l'esprit  public.  Les  rap- 
ports de  M.  Flattât  parvinrent  à 
leur  destination  ;  mais  ils  survé- 
curent aux  événemens  qui  les  a- 
vaient  fait  naître,  et  quelques-uns 
furent  trouvés  après  la  bataille  de 
Waterloo,  dans  le  portefeuille  du 
b.u'on  Faiiî  ,  secrétaire  de  Napo- 
léon. On  voulut  voir  l'opinion 
particulière  de  M.  Planât  dans  ses 
réflexions  sur  les  dispositions  qu'il 


PtA 

avait  remarquées  dans  les  pays 
qu'il  venait  de  visiter,  et  nolam- 
inent  la  frontière  espagnole,  où 
se  trouvait  alors  M.  le  duc  d'An- 
goulême.  M.  Planât  fut  un  des 
officiers  qui  accompagnèrent  Na- 
poléon dans  son  voyage  à  lloclie- 
fort;  il  s'embarqua  avec  lui  sur  le 
Belléroplion,  mais  il  ne  put  obte- 
nir de  faire  partie  du  petit  nom- 
bre de  ceux  qui  suivirent  ce  prin- 
ce à  Sainte-Hélène.  Les  Anglais 
le  transportèrent  à  l'île  de  Malte, 
d'où  il  ne  sortit  qu'avec  MM.  Sa- 
vary  et  Lallemand,  qui  y  avaient 
été  également  conduits. 

PLANCHE,  professeur  de  rhé- 
torique au  collège  de  Bourbon, 
était  un  des  élèves  les  pfus  distin- 
gués <le  l'ancien  collège  (le  Sainte- 
Barbe,  oi"i  il  devint  ensuite  maîîre 
des  éludes.  lia  publié  un  Z)à7/o/(- 
naire  f^rec  et  français.  1809,  in-8", 
et  2°  édit.  ,  1817;  plusieurs  dis- 
cours latins,  et  des  poésies  latines 
très-estimées.  M.  Planche  a  au. -si 
été  pendant  quelque  temps  colla- 
borateur  du  Mercure  de  France. 

PLANCHE  (L.  A.),  pharmacien 
à  Paris  ,  est  collaborateur  du  Bul- 
letin de  pharmacie  ,  et  a  publié  la 
Pharmacopée  générale  ,  à  l' usage 
des  pharmaciens  et  des  médecins 
modernes,  traduit  de  l'italien,  avec 
des  notes  et  augmenlatior.s  consi- 
dérables du  traducteur,  P.u'is, 
181  I,  2  vol.  in-8'. 

PLANCY  (  AoRiÉîf- Godard 
d'Aucourt,  coMTi:  de),  odicier  de 
l'ordre  royal  de  la  légiou-d'bon- 
iicur,  ancien  préfet,  ancien  maître 
des  requêtes,  etc.  En  l'un  8,  M.  de 
Plancy,  connu  «lu  consul  J.ebrmi, 
qui  dfpuis  le  choisit  [>our  gendre, 
fut  nommé  auditeur  au  conseil- 
l^'état.  L'empereur  lui  domia  d'a- 


PLÀ 


567 


bord  la  sons-préfecture  de  Sois- 
sons,  et  peu  apiès  la  préfecture 
d'Yvrée  ,  en  Piémont.  Il  fut  suc* 
cessivemenl  préfet  de  la  Marne,  et 
de  Seine-et-Marne.  En  i8i4,le3 
circonstances  étaient  graves.  M. 
de  Plancy  employa  toute  l'éner- 
gie naturelle  à  son  caractère  à  re- 
pousser, comme  il  le  devait,  les 
bandes  étrangères  qui  inondaient 
une  partie  de  la  France.  La  ré- 
sistance était  juste  et  les  moyens 
légitimes.  M.  de  Plancy  fut  n)ain- 
tenu  par  le  roi  dans  la  préfecture 
de  Seine-et-Marne.  Au  retour  de 
l'île  d'Eibe,  Napoléon  l'y  retrouva. 
Les  temps  étaient  devenus  de  plus 
en  plus  diUiciles,  et  de  grands  dé- 
sordres menaçaient  le  département 
confié  à  M.  de  Plancy.  Il  crut  de- 
voir continuer  Texercice  de  ses 
fonctions,  alin  de  préserver  ses 
administrés  des  malheurs  contre 
lesquels  il  avait  lutté  courageuse- 
nieul;  mais  moins  heureux  à  la  se- 
conde restauration,  il  fut  rempla- 
cé paruji  chambell  ui  de  Napoléon. 
Depuis  cette  époque,  M.  de  Plan- 
cy, rentré  dans  la  vie  commune, 
s'est  consacré  exclusivement,  et 
avec  le  plus  grand  succès,  aux  tra- 
vaux de  l'agriculture,  et  à  son 
perfectionnement,  non -seulement 
par  des  essais  et  des  expérien- 
ces utiles,  mais  encore  par  des  é- 
crits,  dont  l'application  est  fivo- 
rable  à  celte  véritable  science 
du  bien  public.  Parmi  ses  écrit» 
on  ren)ai(|ue  l'ouvrage  ayant  pour 
titre  :  De  l' Administration  de  l'a- 
griculture appliquée  à  une  exploita- 
tion. En  donnant  à  la  fois  la  pra- 
lii|ne  et  la  théorie,  M.  de  Plancy 
rend  un  double  service  à  son  pays. 
La  facilité  qu'il  accorde  aux  agro- 
nomes de  visiter  les  beaux  établis- 


368 


PLA 


seuiens  qu'il  a  formés  dans  ses 
terres,  justifie  la  réputation  de  pa- 
triotisme qu'il  a  méritée  constam- 
Kieul  dans  sa  \ie  publique  et  dans 
sa  vie  privée. 

PLANELLI  DE  LA  VALETTE 
(le  comte),  ex-inspectear-général 
des  gardes  nationales  ,  maréchal- 
de-camp,  membre  de  la  légion- 
d'honneur,  lui  nommé,  en  18 15, 
,  par  le  département  de  l'Isère  , 
membre  de  la  chambre  des  dépu- 
tés, où  il  vola  avec  la  majorité;  a- 
près  la  dissidution  de  la  chambre 
par  suile  de  l'ordonnance  du  5 
septembre  1816,  il  fut  réélu  par 
le  même  département  ,  et  siégea 
conslaniment  au  côté  droit.  Dans 
la  session  de  1818,  lors  du  projet 
de  loi  sur  le  recrulement ,  il  ap- 
puya l'opinion  du  marquis  de  Do- 
ria  ,  qui  s'opposait  à  ce  qu'on  for- 
mât des  corps  de  légionnaires-vé- 
térans, et  à  l'avancement  par  an- 
cienneté. Il  appuya  l'amendement 
du  général  Dupont,  et  demanda, 
avec  la  formation  de  cadres  d'ins- 
truction élémentaire  ,  qu'aucun 
olïicier  ne  pût  être  privé  de  son 
grade  sans  jugement.  M.  Planelii 
de  la  Valette  cessa  ses  fonctions 
législatives  cette  même  année,  et 
les  reprit  en  1819,  par  suite  d'une 
élection  nouvelle.  Il  subit  la  dis- 
solution totale  opérée  par  l'ordon- 
nance du  roi  en  1823,  et  reparut, 
en  18241  •»  1^  chambre  des  dépu- 
tés, où  il  fut  porté  par  le  collège 
du  département  de  l'Isère;  il  ve- 
nait d'être  nommé  préfet  du  dé- 
partement du  Gard. 

PLANTA  (Joseph),  diplomate 
anglais,  né  en  i744i  t't  issu  d'une 
ancienne  famille  du  pays  des  Gri- 
sons, l'ut  éUîvé  dans  la  maison  pa- 
lernelle  à  Londres,  où  son  père  , 


PLA 

qui  jouissait  d'un  bénéfice  ecclé- 
siastique ,  présida  à  sa  première 
éducation.  Envoyé  aux  universi- 
tés dTJtrecht  et  de  Goëttingue 
pour  y  terminer  ses  études  ,  il 
voyagea  ensuite  dans  le  midi  de 
l'Europe  ,  et  séjourna  quelque 
temps  en  France.  De  retour  à 
Londres ,  il  entra  dans  la  carrière 
diplomatique  ,  et  débuta  par  l'em- 
ploi de  secrétaire  de  la  légation 
britannique  à  Bruxelles.  Plus  tard, 
il  devint  bibliothécaire,  puis  con- 
servateur du  musée  britannique  , 
et  enfin,  directeur  desiiianuscrits 
et  des  médailles.  Le  mérite  de  M, 
Planta  ne  tarda  pas  à  être  remar- 
qué :  à  peine  entré  dans  la  carrière 
littéraire  ,  il  fut  aggrégé  à  la  so- 
ciété royale  de  Londres ,  et ,  peu 
de  teinps  après  ,  élu  secrétaire  , 
emploi  qu'il  a  rempli  avec  dis- 
tinction pendant  près  de  3o  an- 
nées. Ses  connaissances  diploma- 
tiques lui  avaient  aussi  mérité  d'ê- 
tre attaché  au  département  des 
affaires  étrangères  ,  et  il  était  en 
même  temps  secrétaire  de  lord 
Castlereagh,  dont  la  protection  le 
fit  nommer  sous-secrétaire  d'état 
en  181 7.  M.  Planta  a  enrichi  d'u- 
ne foule  d'articles  importans  plu- 
sieurs ouvrages  périodiques;  il  fut 
un  des  membres  les  plus  actifs 
d'une  commission  établie  par  le 
parlement  pour  la  recherche  de 
pièces  fondamentales  du  droit  pu- 
blic du  royaume.  Il  a  publié  :  1° 
une  Dissertation  sur  la  tangue  ro~ 
manche  du  pays  des  Grisons,  qui 
a  été  jugée  digne  d'être  insérée 
dans  les  Transactions  philosophi- 
ques; 2"  un  Catalogue  Irès-délaillé 
des  manuscrits  de  la  bibliothèque 
Cottonienne  ,  qui  est  déposé  au 
musée  britannique;  3°  une  Histoire 


PU 

de  la  confédération  hehétufue,  1800, 
a  vol.  10-4°  ;  2'  édition  ,  2  vol. 
in-8°. 

FLANTERRE  (N.),  acteur  et 
auteur.  Après  avoir  joué  long- 
temps la  comédie  en  province,  où 
il  fit  représenter  plusieurs  ouvra- 
ges, il  yiot  à  Paris,  en  1790,  et 
donna  successivement  an  théâtre 
des  Amis  de  la  patrie  (Louvois)  : 
1"  Agnès  de  CliâlUlon,  ou.  ~e  Siè- 
ge de  Saint-Jean-d' Acre ,  opéra 
ii  grand  spectacle,  en  vers,  musi- 
que de  Loire  Froulé,  1792;  2" 
Agnès,  ou  les  Espiègles,  opéra- 
cAmiqiie  en  3  actes  ;  3°  au  théâ- 
tre de  la  Cité,  .d  Fête  de  la  fra- 
ternité ^  vaudeville  4?n  2  actes, 
179'i;  4°  '«  Pête  de  l' égalité ,  co- 
médie en  un  acte,  en  vers,  1792; 
5"  les  Charlatans,  opéra  comitpie 
en  2  actes,  musique  de  Foigiiet 
père,  '792;  0°  à  l'Opéra-Cumi- 
que,  Midas  au  Parnasse,  opéra- 
comique  en  un  acte;  7"  le  Bailli 
coiffé,  opéra-comique  en  un  acte; 
8°  les  deux  Ermites,  opéra-comi- 
que en  un  acte,  musique  de 
Gaveaux,  <793;  g" /a  Fandlle  in- 
digente, opéra  en  un  acte,  musi- 
que de  Ga veaux.  »793;  tous  ces 
ouvrages  obtinrent  nu  succès  com- 
plet. La  Famille  indigente,  et  les 
deux  Ermites,  attirèrent  long- 
temps la  fotde  au  théâtre  Fey- 
deau  ;  c'est  dans  ce  dernier  ou- 
vrage que  se  trouve  le  duo  char- 
mant et  si  bien  mis  en  scène  : 
Connaissez-vous  le  père  Ambroise? 
La  manière  de  Planterre  est  frati- 
che,  son  style  a  du  naturel,  de  la 
rapidité,  ses  vers  sont  faciles,  ses 
couplets  ingénieux.  Il  coiuiaist*ait 
bi<Mi  la  scène  et  surtout  lcsn)oyens 
tl'y  produire  dos  effets,  d'amener 
des  situaliodâ  louchuules.  Ij  avait 


PLA  5O9 

Ce  qu'on  appelle  en  termes  de 
coulisses  ,  du  métier.  Planterre 
mourut  en  1800,  laissant  une 
tamille  nombreuse  et  peu  de  for- 
tune. 

PLASSAN  (N.),  d'une  ancien- 
ne famille  originaire  d'Ecosse,  na- 
qin't  à  Bordeaux,  dépailen)ent  de 
la  Gironde,  où  il  a  rempli  pen- 
dant long  -  temps  des  fonctions 
dans  l'ordre  judiciaire.  I)  était 
conseiller  i  la  cour  royale  de  cet- 
te ville  lorsqu'il  mourut, eu  1820, 
avec  la  réputation  d'un  magistrat 
aussi  probe  qu'éclairé. 

PLASSAlN  (N.  Leb|.o]sd),  fils 
du  précédent.  Il  fit  d'excellentes 
études  à  Bordeaux,  lieu  de  sa  nais- 
sance ,  el  prit  peudaul  quelque 
temps  des  levons  de  l'abbé  Sicard, 
auM  de  sa  famille.  Son  penchant 
le  portant  au  service;  de  mer,  il 
entra  dans  la  marine,  où,  mal- 
gré sa  jeunesse,  il  se  fit  bien- 
tôt distinguer  par  sa  bravoure, 
son  zèle  et  ses  connaissances.  Il 
courniandiut  la  corvette  la  Bayon- 
naise,  dans  l'escadre  de  Roche- 
fort, faisant  partie  de  l'expédition 
du  général  Leclerc  contre  Saint- 
Domingue.  Chargé  pendant  cet- 
te cauipagtie  do  différentes  mis- 
sions auprès  des  autorités  espa- 
gnoles de  Santa-Fé,  dans  le  .nou- 
veau Mexique,  de  divers  ports  ' 
de  la  mer  du  Sud ,  il  s'en  ac- 
quitta avec  autant  de  zèle  que  de 
prudence.  A  son  retour  en  Fran- 
ce, la  Buyonnaise  fut  attaquée  près 
des  côtes  d'Espagne,  par  4  vais- 
seaux anglais,  qui  s'en  seraient  in- 
failliblement rendus  maîties  si, 
après  la  plu*  vigoureuse  défense, 
M.  Plassan  n'«.'ût  pris  la  résolution 
de  faire  sauter.son  bâtiment.  Il  fit 
en  coiiséqueucedébarquerious  les 
«4 


5^0 


PLA 


hommes  de  son  équipage,  et,  quoi- 
que blessé  d'un  coup  de  feu  qui  lui 
traversait  le  corps,  il  ne  quitta  son 
bord  que  le  dernier,  et  après  a- 
voir  mis  lui-même  le  l'eu  à  une 
mèche  qui  communiquait  aux 
poudres.  Son  canot  n'ét;iit  enco- 
re éloigné  que  d'une  demi  portée 
de  fusil  lorsque  lu  corvette  sauta; 
il  fut  couvert  de  débris ,  et  le  ca- 
bestan du  vaisseau  retomba  sur  le 
bout  de  l'aviron  d'un  des  mate- 
lots, qui  eut  la  tête  emportée  du 
contre-coup.  M.  Plassan  n'atten- 
dit pas  l'entière  guérison  de  sa 
blessure  pour  se  rendre  à  Bayon- 
ne,où  il  arriva  aprè?  avoir  traver- 
sé une  partie  de  l'Espagne,  rap- 
portant son  pavillon, dont  la  con- 
servation était  due  à  son  courage 
età  sonsang-iVoid.  A  la  création  de 
la  légiou-d'honneur,  il  en  obtint 
la  décnialinu  sur  la  présentation 
de  ses  chefs.  Lors  du  glorieux 
mais  fatal  combat  de  Trafalgar, 
RI,  l'Iassan  était  embarqué  com- 
me lii'uleuant  de  vaisseau  sur/'^/- 
gésiras,  que  montait  le  brave  con- 
tre-amiral iMagon.  S'apcrcevant 
que  les  gabiers  des  vaisseaux  an- 
glais qui  entouraient /'y^/i,'^m.ffl,ç  di- 
rigeaient particulièrement  leur  feu 
sur  ce  général,  il  essaya,  à  son 
insu,  de  le  soustraire  au  danger 
qui  le  menaçait,  et  prétextant  que 
sa  présence  était  nécessaire  dans 
les  batteries  basses,  il  l'engageait 
à  y  descendre  flans  le  moment  oii 
le  contre -amiral  reçut  le  coup 
mortel.  Tous  les  autres  ofliciers 
furent  de  la  iniMoe  manière  et 
successivement  mis  liors  de  com- 
bat, et,  quoique  également  blessé, 
M.  IMassanprit  le  commandement 
du  vaisseau, qu'il  p^irviul  à  déga- 
ger et  à  faire  rentrer  dans  la  baie 


PLA 

de  Cadix.  Il  a  depuis  été  pourvu 
de  plusieurs  commandemens,  et 
est  parvenu  au  grade  de  capitaine 
de  vaisseau.  Pendant  la  guerre 
d'Kspagne,  en  iBaS.  il  comman- 
dait la  frégate  la  Magicienne,  et  fut 
chargé  de  transporter  devant  Ca- 
dix les  Français  dits  transfuges  qui 
se  trouvaient  à  la  Corogne  lors  de 
la  capitulation  de  cette  place.  II 
fit  voile  pour  le  Brésil  au  mois  de 
janvier  1824;  mais  ni  le  but  ni  le 
résultat  de  sa  mission  ne  sont  en- 
core connus.  Le  roi  l'a  nommé 
chevalier  de  Saint-Louis. 

PLASSAN  (Pierre),  de  la  mê- 
me famille  que  les  précédens,  né 
à  Bordeaux,  en  1751,  a  exercé 
pendant  4o  ans  la  profession  de 
libraire  et  d'imprimeur  à  Paris.  Il 
a  imprimé  et  publié  ditl^reufes  . 
éditions  justement  estimées,  en- 
tre autres  L'Orlando  Furioso,  4 
vol.  in-4°;  le  même,  4  vol.  in-8°; 
Virgile,  latin  et  français,  4  vol. 
in-4";  le  même,  4  vol.  in-8°; 
Histoire  des  quadrupèdes  ovipa- 
res, serpens ,  poissons  et  cétacées, 
par  M.  le  comte  de  Lacepède, 
8  vol.  in-8";  le  même,  17  vol. 
in-12;  OEuvrcs  de  Buffon,  76  vol. 
in- 18;  Montesquieu,  5  vol.  in- 
4°,  etc.,  etc.  M.  Plassan  avait  é- 
pousé  une  fille  de  M.  Saugrain,  de 
l'une  des  plus  anciennes  maisons 
de  librairie  de  France  :  il  est  n\ort 
en  18 lo.  M.  Plassan  fils,  qu'une 
blessure  accidentelle  a  obligé  de 
quitter  le  service  de  la  marine, 
continue  à  Paris  la  même  profes- 
sion que  son  père;  son  nom  est 
avantageusement  connu  dans  la 
typographie.  Parmi  les  travaux 
qui  le  recommandent,  nous  cite- 
rons la  Bible  in-8",  et  le  Rabelais 
in- 18,  publiés  par  Dcsoër,  dont 


PLA 

Timpression  égale  celle  des  plus 
belles  ôditions  des  Elzevlrs. 

P  L  À  S  S  C  H  A  £  U  T  (  Joseph  ) , 
maire  «le  Louvaiii.  membre  du 
corj)h-l(j>;i«slalif  de  France,  et  en 
dernier  lieu  meuibre  de  la  secon- 
de chambre  des  états-  généraux 
du  ro^-aume  des  Pays-Bas,  na- 
quit a  Bruxelles  en  1760.  Il  lut, 
au  sortir  du  collège,  attaché  en 
qnaliié  d'auditeur  au  conseil  su- 
périeur du  Brabant,  lorsque  les 
provinces  du  Pays-Bas  aj)})arte- 
naient  à  rAutriche  ,  et  en  1792, 
son  go uvernemeut  le  nomma  mem- 
bre de  la  junte  administrative, 
établie  pour  régir  les  provinces 
conquises  ou  à  conquérir  sur  la 
France.  Les  premiers  suocè>  des 
Autrichicïis ,  la  prise  de  Coude;, 
de  Maubeuge  et  de  Valenc  <;nnes, 
leur  avaient  l'ait  croire  qu'ils  au- 
raient bientôt  de  grands  pays  à 
administrer  après  le  demembre- 
nieul  de  la  France;;  juais  ce  vœu 
des  coalisés  l'ut  trahi  par  la  l'ortu- 
ne,  et,  dès  l'anni-e  suivante,  la 
junte  n'eut  plus  de  tondions  à 
exercer.  M.  Plass*  haert,  après  la 
conquête  de  la  Belgique  par  les 
troupes  IVançaises,  resta  long- 
temps éloigné  des  afl'aires  publi- 
ques, sans  toutefois  cesser  d'être 
utile  à  son  pays  j»ar  ses  lumières, 
et  cultiva  av»'C  succès  les  lettres. 
Il  accejtta  enfin,  en  l'an  9,  une 
place  de  conseiller  de  prélecture 
du  département  de  la  I)yle,  à  la- 
quelle iM.  l)oulret-de-PoutfcC(Ui- 
lanl,  alors  préfet  de  Bruxelles, 
le  fit  a[)pe[er.  Il  remplaça  ce  ma- 
gistrat pendant  une  assez  longue 
absence,  que  celui-ci  fut  oblige 
de  faire,  et  s'acquitta  de  ses  fonc- 
tions provisoires  avec  zèle  et  é- 
quilé,  mérilaQt  à  la  fois  la   con- 


PLA 


071 


fiance  du  gouvernement,  etl'affec' 
lion  de  ses  administrés.  Ses  con- 
citoyens lui  donnèrent  une  preu- 
ve de  leur  estime,  en  le  députarijt 
au  corps-législatif  à  Paris,  où  U 
siégea  pendant  plusieurs  années. 
Nommé  ensuite  maire  de  la  ville 
de  Louvain ,  piès  de  laquelle  M. 
Plasschaert  avait  de  grandrs  pro- 
priétés, il  exerça  ces  fonctions 
d'une  manière  non  moins hoiiora- 
rable,  jusqu'à  l'époque  où  les  ar- 
mées coalisées ,  maîtresses  de  la 
Hollande,  s'avancèrent  \ersles  an- 
ciennes provinces  belge>J.  Il  don- 
nu  alors  sa  déujission  et  rentra 
dans  la  vie  privée,  d'où  une  nou- 
velle preuve  de  la  cotdi.mce  de 
ses  couciloyens ,  le  fit  sortir  en 
1818,  [)oiu'  siéger  à  la  seconde 
chambre  des  états  -  généraux.  Il 
s'y  distingua  parla  sagesse  de  ses 
vues,  la  franchise  et  l'éloquence 
de  ses  discours.  Le  J2  novembre, 
il  vota  en  faveur  de  l'abolition  de 
l'odieux  trafic  des  noirs,  propo- 
sant toutefois  quelques  amende- 
mens  relatifs  aux  peines  établies 
par  le  projet  de  li»i  coulre  les  ca- 
pitaines et  armateurs  de  vaisseaux 
se  livrant  encore  à  cette  traite. 
Il  se  prononça  avec  btrce  contre 
un  nouveau  projet  de  loi  sur 
la  milice,  en  demanda  le  rejet 
comme  inconstitutionnel  ,  et  ex- 
priuui  en  mênu;»tenips  le  vreu 
de  voir  enfin  abolir  dans  les  ar- 
mées de  sou  pays,  les  punitions 
serviles  (les  coups  de  bruon  ) 
qu'on  inlligcait  de  nouveau  aux 
soldats  pour  les  moindres  l'autes 
de  discipline,  pratique  aussi  im- 
politique que  rcvollaute.  Dans  les 
longues  discussions  sur  le  bud- 
get de  1819,  M.  Plasschaert  dé- 
veloppa des  connaissances  finan- 


572 


PL  A 


cières  fort  étendues,  et  se  montra 
dans  toutes  les  occasions  un  di- 
gne uiandatiiire  du  peuple.  Sa 
mauvaise  santé  le  força  à  la  fin  de  la 
session  de  donner  sa  iléinission, 
et  il  se  retira  dans  sa  belle  proprié- 
lé  de  W  esplaer  près  de  Lonvain, 
où  la  mort  vint  l'enlever  deux  ans 
yprès  à  sa  famille  et  à  ses  nom- 
lireux  amis.  M.  Fla^schaert  a  lais- 
sé une  mémoire  vent  rée  ert  Bel- 
"{îique ,  011  son  patriotisme,  ses 
taléns  et  le  généreux  emploi 
■d'une  belle  fortune,  lui  avaient 
acquis  depuis  long  temps  une 
'juste  considération'.  On  a  de  lui, 
"outre  plusieurs  poésies  légères  et 
pièces  fugitives  ,  deux  ouvrages 
(pli  obtinrent  un  grand  succès. 
Dans  le  premier,  intitulé  de  l'In- 
fluence des  langues  sur  la  cioilisa- 
tion,  l'auteur,  après  avoir  judi- 
cieusement traité  son  sujet,  et 
prouvé  cette  inQuence  ,  démontre 
aussi  l'absurdité  des  prétentions 
fioUandaises,  tendant  à  proscrire  la 
langue  française  dans  les  provinces 
belgiques.  Orf  n'en  a  pas  moins 
■persisté  dans  la  mesure  de  substi- 
tuer h  vnie  langue  généralement 
en  usage,  le  dialecte  bollandais, 
en  tout  ce  qui  concerne  les  rap- 
ports judiciaires  et  adnn'nistratifs. 
Celte  mesnie  préparatoire,  déjà 
■prévue  par  M.  Plasschaert  ,  a  eu 
le  résultat  qu'il  avait  annoncé, 
Bt  n'a  point  ajouté  à  l'affection 
des  Belges  pour  les  Hollandais, 
ni  resserré  les  liens  de  leur  union 
politique.  Le  second  ouvrage  de 
Plasschaert ,  intitulé  :  de  la  No- 
blesse, des  Titres,  et  de  la  Féoda- 
lité, parut  à  l'époque  où  la  haute 
aristocratie  s'agitait  en  tout  sens 
dans  le  nouveau  royaume  des 
Pays-Bas,    pour    y  reconquérir 


PLA 

d'iuiciens  privilèges,  réclamant  le 
droit  exclusif  de  cha>se,  ainsi  que 
d'au  très  droits  seigneuriaux,  et  tou- 
tes les  institutions  du  moyen  âge. 
On  espérait  que  la  condescendan- 
ce du  monarque  et  le  silence  des 
citoyens  favoriseraient  ces  gothi- 
ques prétentions;  mais  M.  Plass- 
chaert rompit  le  premier  ce  si- 
lence, et  sou  ouvrage,  aussi  re- 
commandable  par  le  style  que  |>ar 
la  pensée,  réduisit  à  l'absurde  les 
exigences  des  imprudeus  mais  fei- 
vens  adorateurs  de  la  féodalité. 

PLATNER  (Ersest),  savant 
Allemand,  le  plus  ancien  profes- 
seurde  l'université  de  Léipsick,  né 
en  cette  ville,  le  i5  juin  1744- 
Ses  nombreux  élèves,  pour  qui  il 
a  toujours  eu  l'affection  d'un  père, 
l'ont  surnommé  le  Nestor  de  l'u- 
niversité de  Léipsick.  Ou  doit  à  ce 
savant  respectable  un  grand  nom- 
bre d'ouvrages  importans,  et  gé- 
néralement estimés.  Nous  ne  ci- 
terons ici  que  les  principaux  : 
1°  VAntropologie,  1772,  in-8*  ; 
2°  Nouvelle  Antropologie,  1790  , 
in-S";  3"  Questionum  P/iysiologi- 
carurn,  iibri  II,  1  ^-gS  ,  2  vol  in-8°; 
If  A  phorismes  philosophiques,  1 7g5 
et  i^oo.  Une  grande  sagacité  d'a- 
nal)'se,  et  une  mélhr)de  rigoureu- 
se, sont  les  caractères  distinctifs 
des  recherche.-  scientiliques  de  cet 
auteur.  En  1816,  le  roi  de  Saxe 
l'avait  nommé  membre  de  la  com- 
mission chargée  de  la  rédaction 
d'ime  nouvelle  loi  sur  la  liberté  de 
la  presse.  Les  journaux, allemands 
ont  annoncéque  le  professeur  Plat- 
ner  était  mort  à  Léipsick,  en  1824? 
à  l'âge  de  80  ans. 

PLATOW  ou  PLATOFF  (le 
cojfrE  ) ,  helman  des  cosaques  du 
Don,   naquit  vers  1705,   dans  la 


PLA 

Russie  méridionale, où  sa  famille, 
d'origine  grecque ,  s'était  fixée 
depuis  long-temps.  Il  entra  très- 
jeune  an  service,  et  devint  heiuiari 
(  grade  de  général)  à  la  suite  de 
plusieurs  aclions  d'éclat.  Employé, 
en  i8ot)  et  1807,  comme  lieuter- 
liant -général  à  l'armée  dest-inée 
à  soutenir  les  Prussiens  dans  la 
campagne  contje  l'armée  tVançaj- 
se,  il  st;  distingua  de  nouveau. 
Après  la  paix  de  Tilsilt  j  il  se  ren- 
dit à  l'armée  de  Moldavie  dirigée 
contre  les  Turcs.  Il  les  défit  plu- 
sieurs lois,  et  leur  jtrit  de  vive 
for<;e,  au  mois  d'août  1809,  la 
l'orleresse  de  Babad.  Pour  le  ré- 
coujpenser  de  ses  services,  l'em- 
pereur Alexandre  le  nomma  géné- 
ral de  cavalerie.  Le  comte  Platow 
l'ut  un  des  généraux  chargé?  il^ 
s'opposvr  à  Tinvasion  des  Frau- 
çais  dans  la  compagne  coijtre  la 
lVussi<;  en  1812.  Ses  efiorts  ne  fé- 
^jondirenl  pas  ù  ses  espérancçs  ni 
juême.à  Sun  courage;  plusieurs  l'ois 
vaincu,  particulièrement  près  de 
.Grodno.,  If  3o  juin  de  la  même 
;innée  ,  il  rentra  précipitamment 
dftus  l'intérieur  avec  les  débris  des 
troupes  russes  ;  mais  bientôt  la 
fortune  changea  avec  leséléniens, 
.et  Plalow,  chargé  principalement 
de  harceler  la  malheio^euse  armée 
J'nniçaisç  ,  triompha  pr^csque  sans 
con)battre.  Cette  campagne  fut 
néanmoins  funeste  à  pou  jeune  fils, 
qu'un  hulan  polonais  tua  d'un 
coup  de  lance  :  perte  qui,  en  lui 
la^isjîantl'uniqueespoirdesavieil- 
Jesse  et  son  successeur  au  com- 
mandement des  troupes  de  sa  na- 
tion, le  plongea  datis  lapins  vive 
douleur,  lin  i8i5,  par  suite  de  la 
bataille  de Léipsick  ,  le  comte  Pla- 
tow fit  la  campague-de  I"><mce  ,  et 


PLA 


573 


apiès  le  combat  de  Bar-surAube, 
l'arméje,  des  souverains  étrangers 
s'ctantdi  visée  en  deux  parties  pour 
marcher  sur  Paris,  il  eut  ordre  de 
mauœuvrer  entre  elles,  (^es  trou- 
pes, à  demi  sauvages  et  avides  d^ 
butin,  étaient  très-dévouées  à  c,e 
chef,  qui  avait  sur  e|Jes  une  gran- 
de autorité  ,.iparce  qu'il  les  lais- 
sait se  livrer  sans  entrave  à  leur 
ardeur  pour  le  piilage  :  tous  les 
souverains  décorèrent  à  l'pnvj  dç 
leurs  ordres  lin  chef  qui  leur  a- 
vijit- rendu  de  si  éuiinens  ser- 
vices. JIjc  comte  Plat<)W  entra  à 
Paris  avec  le  quartier-général  des 
souyerains  alliés,  et  suivit  Tem- 
pe.rei|r  Ah-xandre  en  Angleterre, 
où  le  commerce  de  Londres  lui 
vqla  un  sabre  magnifique  ,,  et  où 
d'ailleurs  i)  partagea  avec  le  géné- 
ral BliJcljer ,  tous  les  l,énK)ignages 
de  Tudutiration  des  Anglais.  Lors 
de  la  seconde  invasion  co,ntre  la 
France  ,ep  i8^5,  le  comte  Platow 
revint  i\ Paris  à  la  tête  de  -jes  trou- 
pe.s,i  et  après  \^  traité  de  paix.  •' 
alla^habiterljC  iji,ou veau TcherL^pk. 
Il  y  moinut  en  1.818.  XJuatre  ans 
après  on  publia,  à  Saint  -  PéterSr 
bourg,  une  vie  de  Platow  p^r 
Sifùffffy^'  ,,' 

PLAY  FA  IR  (Ja>^es),,  ujémbrç 
de  la  société  royale  etde.lasociétjé 
des anli(|uaires  d'Edimbourg,  curé 
d^?  t\ieigle  ,  et. principal  des, collè- 
ges rénnis  de  Saint-Salvador  et  de 
Saijit-Léonard,  dans  rjiniversité 
de  Saint-André,  né  à  Bendochie, 
dans  le  comté  (,rAngiis  ,  en  1740, 
s'est  fait  connaître  avantageuse- 
meul  par  un  ouvrage  intitulé  Sys- 
tème de  chronologie ,  divisé  en  huit 
parties,  1784»  in-folio.  Pt^Y- 
FAiH  [,Jean)  ,  son  fils,  ecclésiasti- 
que écossais ,  professeur  de  ma- 


074 


PL  A 


thématiques  a  l'iinix  ersité  d'Edim- 
bourg, menil)re  de  la  société 
rôy;ile  et  de  lii  société  des  antiquai- 
res; de  cette  ville,  est  l'iui  des  coo- 
pérateïirs  h  s  r)lu'  acîif's  dilicirnal 
estimé  VEdimhur'j:  Rtview.W  apn- 
b!ié  les  onviafîes  siiivaus  :  i"  Elé- 
mensde  Géométrie,  1 7;)6.  in-S"  :  2° 
Eclairrissnnens  sur  la  théorie  de  la 
terre,  purHuttoii/wx-y^',  181  i.  Dans 
cet  ouvrage.  M.  Playfair  défend 
et  développe  avec  beaucoup  de 
talent  le  Système  deHulton  [voyez 
ce  nom],  et  {|uoi(|ue  ecclésiasti- 
que lui-Ki'rMiie,  repousse 'les  accu- 
sations d'irréligion  qui  furent  pro- 
diguées à  l'auteur,  parce  que  sa 
théorie  de  |a  terre  était  dinUcHe  à 
^idncilier  avec  la  Cenès'e.  o'^Sys- 
iivie  Complet  de  Céograpide ,  tin- 
cierine'et  modrrne,  5  vol.  xn-^" , 
'diont  lé'  dernier  a  pariS  en  18  i5', 
^Esquisse  de  pli'ilosùphie  iiata- 
mte,  1^1  â,  in -8",  etc. 

PLAÏFAÎR(WiLLiA-Ms),  écri- 
"vairi  driglais,  ni'  à  Edimbourg,  Vint 
jeifue  encore  s'établir  à  Loi\dreS, 
où'ïî  séjourna  pendant  5o  an's',  et 
oiï  il  publia  un  grand  nombre 
d'iùivragcs  sur  les  intérrts  politi- 
ques et  commerciaùxde  la  (îrandc- 
Bretagne,  ainsi  que  sur  les  év'éne- 
mcns  qui  se  passaient  en  France. 
La  véhémence  de  ses  diatribes 
contre  cette  puissance,  et  contre 
les  hommes  les  plus  marquans  de 
l'époque,  donna  en  Angleterre 
un  moment  de  vogue  aux  écrits 
de  M.  Flayi'air.  Ses  principaux  ou- 
vrages sont  :  1"  Règles  pour  l' inté- 
rêt de  Vargènt,  1^85,  irt-8°  ;  2" 
j4  lias  commercial  et  polit  iqae,i^S6, 
in-^"  ;  ^^  Tableau  arilhinétlq lie  du 
commerce  des  finances,  et  de  la 
dette  nationale,  avec  dos  planches, 
1787- 178(3,  in-4'';  4°  Inévitables 


PLA 

Conséquences  de  la  réforme  parle- 
mentaire, I79'2,  iu-S";  5  Vue  géné- 
rale des  forces  et  des  ressources  ac~ 
taetles  de  laFrance,  1795,  in-8°; 
6°  Meilleur  apenir  pour  les  négo- 
cions et  les  manufacturiers  de  la 
Grande-Bretagne,  1793,  in-S"; 
7"  Pensées  sur  l'état  actuel  politi- 
que de  la  France,  '793j  in-8'; 
8°  Paix  avec  les  jacobins ,  chose  im- 
possible, i794i  in-8°  ;()"  Lettre  au 
comte  Fitz  fVilliam,  1794»  ''^-8°; 
10"  Histoire  du  jacobinisme,  1795, 
in-8";  1  i"  Etat  véritable  des  finan- 
ces et  des  ressources  de  la  Gfande- 
Brecugne ,  1800,  in-4°;  xi" Tables 
statistiques  de  tous  les  états  de  /'  Eu- 
rope, 1800,  in-4'':  13°  Manuel 
slalistique ,  montrant  d'après  une 
m^'thode  entièrement  nouvelle  les 
ressources  de  chaque  état  et  royau- 
me de  l'Europe,  1801 ,  in-8°.  Cet 
Ouvrage  a  été  traduit  en  français 
par  D.  F.  Donnant,  Patis,  1802, 
in -8°.  J  4"  Preuves  de  la  falsifica- 
tion par  les  Français  des  lettres  in- 
terceptées, trouvées  à  bord  de  l'a- 
miral Ap'hi,  1804,  'in-8\  Ces 
preuves,  malgréles  «'ffortsde  i'au- 
lénr,  ne  prouvent  tnalheureuse- 
rnent  rien,  x^"  Recherches  sur  les 
causes  de  la  décadence  et  de  la 
chute  des  riches  et  puissantes  na- 
tions,  i8o5,  in-4",  el  seconde 
édition  publiée  en  iHoy;  16"  Ri- 
chesse des  nations,  de  Smith,  avec 
des  notes  et  des  chapitres  supj>lé- 
metitaires,  2"  édit.  ,  i8o.5,  5  vol. 
in -8°;  17"  Notice  statistique  des 
Efats-Unis  de  l'Jméri  'ue  ,  1807, 
in-8  ;  18°  Plan  pour  établir  laia- 
lance  du  pouvoir  en  Europe ,  1 8 1 3, 
in-8°;  19*  Portraits  politiques  et 
modernes ,  avec  des  notes  histori- 
ques et  biographiques,  i8o5,  3  vol. 
in-8°,  ouvrage  fait  sur  les  plus 


PLE 

faux  renscigneinens,  et  dicté  par 
une  t'meiir aveugle;  ^o''Déta'ds  sur 
le  complot  de  Bonaparte,  donnés  au 
comte  Balhurst  et  à  l' ambassadeur 
de  France ,  i8i5,  in-8°.  L'auteur, 
dès  le  commencement  de  cette 
année  (février  i8i4)»  avait  écrit 
aux  ministres  ,  en  Ai.gleterre,  que 
Napoléon  ne  resterais  pas  à  l'île 
d'JKlbe  ,  et  qu'il  ne  tarderait  pas  à 
se  ressaisir  du  pouvoir  eu  France. 
Après  la  seconde  rentrée  du  roi, 
M,  Playfair  vint  à  Paris  ,  où  ii  tra- 
vaillait en  1818,  à,  un  jourual  an- 
glais intitulé  :  Galignani's  Messen- 
ger. Il  lut  attaqué  en  justice  par 
la  comtesse  veuve  de  Saint-Mor- 
rys,  pour  avoir  calomnié  la  mé- 
moire de  son  mari ,  et  fut  condam- 
né au  mois  de  juillet  de  la  même 
annéd,  .par  le  tribunal  dcipolice 
correcii(»niif.lle,  à  trois  uiois  de 
prison,  et-ù'5»ooo  francs  d'a- 
mende.   !i'};  ■ 

PLAZANET  (N.),  nommé  ai* 
mois  de  septembre  1792,  par  le 
deftjutenjent  de  la Corrèze,  député 
suppléant  à  la  convention  nationa- 
le^ ne  fut  appelé  au  sein  de  cet- 
te assemblée  qu'après  le  procès  de, 
Louis  XVL  II  ne  prit  que  jieu  ou 
poiut  de  part  aux  grandes  ^lisçus- 
sioiis  qui  agitèrent  ,si  ispuyent  ia 
convention  nationale,  et  entra,  ar 
près  la  scission,  au  conseil  .des 
cinq-cents,  dont  il  sortit  en,  mai 
1797.  M.  Plazanel  paraît  n'avoir 
rempli  aucune  fonction  publique 
depuis  cette  époque.        .  ,  •     , 

PLEIGNIEU  aîné  (Jacques), 
né  en  i^tii,  à  llesonville  ,  dépar- 
tement de  la  Moselle,  vint  se  fixer 
à  Paris  pour  y  exercer  la  profes-; 
sien  de  corroyeur,  et  s'établit  ruo 
du  Petit  -  Lion  Saint  -  vSauv'fjur; 
Pleignicr  était.boD  père  de  famille 


PLE  575 

et  commerçant  honnête;  mais  un 
caractère  enthousiaste,    l'absen- 
ce de  toute  instruction,  des  lectu- 
res mal  conçues  ,   et  surtout  les 
funestes  conseils  des  agens  provo- 
cateurs, le  portèrent  à  jouer  un 
rôle  pour  lequel  il  n'était  pas  fait. 
Dès  le  mois  de  février  i8i6,  Plei- 
gnier,   à   l'aide    de   ses  associés, 
parmi    lesquels    se    trouvaient  , 
comme    le    prouva    l'instruction 
du  procès,  plusieurs  agens  de  po- 
lice, composa  >une   proclamation 
dite    des    Patriotes   de   181G,    et 
distribua    des    cartes    de    rallie- 
ment, sur  lesquelles  op  lisait  ces 
mot  :  Unions  Honneur,  Patrie.  La 
police   fit,  saisir    et   déposer  à  la 
Conciergerie  Pleignier,  ainsi  que 
27    autres     personnes    plqs    ou 
moins  connues.  Mis  en  jugement, 
le  27  Juin,  avec  ses  co-accusés,  il 
persista,  pendant  toute  l'instruc- 
tion  du  procès,  à  soutenir  qu'il 
ignorait  tout,  qu'il  ne  se  rappelait 
rien;  et  quand  on  lui  reprochait; 
sa  manière  évasive   de   ropoiudre 
aux  jquestions  qui  lui  étaient  a-, 
dceisees,  il  se  rejetait  sur  son  dé- 
finit de  mémoire  ou  de  santé.  Ce- 
pendant, dè<  t{)  seconde  audience», 
il  reiull  un  écrit,  .dans  lequel  «  il 
»  se  f-bcrtniKiissait  le  seul  auteur  dé 
«l'entreprise,  déclarant  qu'il  n'a- 
»,vait  fppint    de.-ciOin.pJices  ;   que 
rf.Carbopneau   s'était-t>orné  à  co- 
upief  Ui  proclamation,  et  Tolle- 
»wnii\  grave;vle  timbre  ^Ifisc.arle?,; 
*elideio;>ndait  à  êtrç  ci)fidlHt  hors 
j)de  France,  avec  i?a  fe,nnne  et  ses 
nenfans.»  Après  celle  déclaration, 
il  piirut  oublier  de  nouveau,  tout 
ce  i\\\\  avait  eu  lien  ,  s'obstina  ù 
ne  rien  ajouler  à.  sa  déclaration, 
el.dit  seulement  qu'il  voulait  par- 
ler au  roi ,    et  f]uUl  sa,uverait  ta 


France.    Le    chanct-lier  se  rendit 
dans  sa  prison   pour   l'entendre, 
HKiis   il    n'obtint    aucune    espèce 
d'aveu  :  les  paroles  que  Pieignier 
avait    adoptées    furent    les  seules 
qu'on  put  liier  de  lui  pendant  tout 
le  reste  du  piocès.    Le  4  juillet, 
quand  son  défenseur  prit  la  parole 
en  sa  favtur,  et  chercha  à  rejeter 
.»€S  projets  sur  l'altération  de  ses 
tbcultés  morales,  IMeignier  se  ca- 
cha  le  vi>age  dans  ses  mains  et 
fit  entendre  des  sanrglots.  Ce  lut  la 
seule   foi-i.    pendant  celle  longue 
et  terrible  procéduie  ,  qu'il  parut 
ému.  Le  6,  il  entendit  prononcer 
.«c» sentence  de  mort,  avec  la  tran- 
«fuillité  qu'il  avait    montrée  pen- 
dant le  cours  des  débats,  lit  se  bor- 
WA  à  décjarer  qu'il  avait  une  ob- 
sei'Vatioh'a  faire,  mais  qu'il  dési- 
lait  qi('»dle  pût  cire  enlenduTe  du 
public.  La  séance  ayant  été  levée 
M\   moment  niêine,  it>  ()résid«nt, 
W.  Romain  Desôze ,  fils  du   pre- 
jVïîer  président  de  la  cour  de  cas- 
Slj-tian,'lui    déclara    qu'il    le  ver- 
rait dans  sa -prisoti ,   seul  èildi^oit 
où  il  pftt  enoôtë'pe  faire  entenéfe 
désmagistrats,  Pieignier  y  r'épéifâ' 
qti'il    !jtti!néi-ait  la   France,    mais 
qti'il  fJdlait  qu'il  parlât  au  roi;  du 
reste  il  «"articida  alicun  fait  d*inï- 
portance.  Il  se  pourvut  en  cassa^ 
lion,  et  eut. recours  à  la  ci«nien(^e 
du  roi ,  mais  sans  succès.  Le  28 
juillet    18 1-6,    Pieignier  Ciirbofi- 
heau  et  Tolleron  (ivy.  ccfe /idtn*) 
furent  4-yil:»enés    de    lîicetr(ji''ù   1;» 
prison  dé  la  lionciergerie* 'poiir 
subir  leur  jugement,  le  jour  mô- 
me. L'exécution,  qui  devait  ;» voir 
lieu  à  quatre  heures  ,  fut  difféiée 
jusqu'A  huit;  alors  arriva  du  mi- 
nistère de    la   justice   l'ordre    do 
coiifluire  ces  malheureux  au  sup-> 
plice.  A  l'iuslant  de  monter  sur  la 


PLÉ 

fatale  charrette,  Pieignier  répan- 
dit quelques  larmes;  mais  ensui- 
te, durant  le  trajet ,  et  pendant  la 
lecture  du  jugement  au  pied  de 
l'échafaud,  il  montra  un  courage 
qui  ne  se  démentit  plus.  Il  était 
en  chemise,  et  avait  la  tête  entou- 
rée d'un  voile  noir.  Avant  la  dé- 
capitation il  eut  le  poing  coupé. 

PLÉVJLLE  LE  PÈLE  Y  (Geoh- 
ges-René),  vice-amiral,  ancien 
ministre  de  la  marine,  membre  du 
sénat-con.servaîeur,  grand-officier 
de  la  légion-d'honneur,  décoré  de 
l'ordre  de  Cinciunatus,  etc.,  na- 
quit à  Graiidville,  département  de 
11»  iUanche,  le  a(i  juin  1726.  Sa  fa-î 
mille,  qui  ne  le  destinait  pas  à  la 
carrière  maritinu.',  le  fit  entrer  do 
bonne  heure  au  collège  ;  la  voca- 
tion (hi  jeune  Pléville  Le  Péley  ne 
])ouvant  tnom;dier  de  la  résolu- 
tion de  ses  pa'rens^  dès  l'âge  de  i:j 
ans  il  se  rendit  secrètement  dans 
ïm  port  de  France  ,  fui  rteéu  sur 
un  vaisst>au  sous  le  nom  de/^/»<V/', 
et,  8  ans  après*  ii  conlmandail  un 
coï'saire.  Il  n'avait  pas  atteint,  .sa 
3  1*  année,  que,  livrant  un  combat 
à  un  vaisstftfu  anglais,  il  eut  Id 
jatnbe  'eWiportée  par  uni  ;'baiilet; 
Cette  grave  blessure  ne  le  forçq 
pas^ii 'quitter  la  carrière  &ù  déjà  'd 
avait  iUustré  son;iiotn.  Pai>  un  de^ 
hasards*  les  plus  singuliers  *  de  Iji 
guerre  ,  rcvéntuut  de  l'Amérique 
eu  Europe  ,  dans  un  itouytttiH 
Combat  qu'il  eut  À  soutenir  iiiqutre 
ces  mêmes  Anglais,  lui  bouliet  lui 
einporla  la  jambe  de  bois  qui  rem- 
plaetiit  celle  qu'il  avait  déjà  per- 
du<;.  Malgré  la  vidlcnte  commo- 
tion qu'il  ressentit,  il  ne  put  s'eh)»- 
pêcher  de  s'écrier  en  riant  î  «  ht 
boulet  s'est  trompé!  «  Admis  en 
1755  dans  la  marine  -royale  ,  ii 
coiTuuandîJ,  en  1750,  conjme  en- 


PLir 

"teigne  de  vaist'eau  ,  une  coi'vettfi 
lie  l'escadre  du  célèbre  La  Galis- 
sonnière.  Pléville  Le  Péley  par- 
vint aux  g^r  ides  de  lieutenant  de 
vaisseau  le  17  aortl  ir()2,  de  capi- 
taine de  frégate  le  1"  janvier  1766, 
de  lieutenant  oe  port  le  5i  mai 
1770,  de  capitaine  de  vaisseau  le 
10  mars  1779.  Tous  ces  grades 
furent  la  récoinpense  de  son  cou- 
rage et  de  ses  talens.  Il  fit  plusieurs 
voyages  do  long  cours  ,  et  enri- 
chit la  rn^irine  de  plusieurs  ob- 
servations importaiiti's.  (>omme 
capihiine  de  port,  il  ne  se  rendit 
pas  moins  tecommandable,  «  Ad- 
ministrateur éclairé,  travaillt-ur 
aussi  ardent  qu'habiN;  fonction- 
naire, d'une  probité  àioute  épreu- 
ve, dit  l'auteur  d'un*;  rwitice  sur  ce 
célèbre  marin,  il  prouva  qu'aucun 
dftiSït^tails  minutieux  du  service 
des  ports  ne  lui  était  étranger.- 
(lelui  dç  iVL-useille  lui  fut  confié, 
et  ce,  fut  lit  que  son  énei'gique  ac-' 
tivité  prépar'a  et  mit  en  rnouve- 
ineht  tou-i  les  ressorts  nécessaires 
mi»  succès  de  l'expédition  de  Ma- 
hon  .  confiée  au  maréchal  de  Ki- 
rhclieii.  0  N-ous  emprunterons  au 
dlsic-/^)urs  que  ftL  François  (de 
Meufch.ile'anjpt'nnonça  le  jour  des 
ohsèqiiesde  ce  vice-amiral,  deu» 
anecd<»fes  qui  honorent  le  cai-actè- 
rfc  de  Plévilk  Le  Péley.  u  Ce  fut 
ett'IfOA*  Pléville  Le  Péley  ctail 
oà^^-fc-iV'  Marseille.  Detix  vais- 
st»nu^  anglais  sont  assaillis  par  la 
teuT*j4ête.  L'un  d'e+iîï  est  la  frégate 
Y ÀtaUnte ,  commandée  par  lord 
Jervis  ,  aujourd'hui  lord  Saint- 
Vincent  ,  et  toni  Nclnon.  (les 
deux  vaisseau'x  s'alî'alerji'à  la  côt« 
d^'.Marseilk',  et  toul^  lesliorreurs 
é\i  naiffrage  les  iuftnâceht.  La 
gofcrrt  divisait  Ahtk  \c»  Aenx  no-- 


PLÉ  577 

tions.  Qu'importe  ?  ces  Anglai.s 
sont  des  hommes  ,  ils  vont  périr, 
et  Pléville  Le  Péley  est  Français  ! 
Il  vole  à  leur  secours,  il  appelle 
autour  de  lui  les  pilotes  et  les  ma- 
telots les  plus  expérimentés;  son 
zèle  brave  tous  les  obstacles,  lève 
toutes  les  difficultés  ,  crée  toutes 
les  ressources,  enflamme  tous  les 
esprits.  L'on  affronte  le  courroux 
des  fl!»ts  ,  on  en  triomphe  ;  on  a- 
borde  les  vaisseaux,  on  les  relève, 
un  les  sauve,  on  les  con«erve,  et 
leurs  nombreux  équipages  sont 
rendus  à  la  vie.  L'amirauté  de 
Ji<mdres  sut  apprécier  la  magna- 
nimité de  Pléville  Le  Péley.  Elle 
fit  faire  en  argent  le  modèle  de  la 
frégate  VAtalarile,  et,  pour  le  lui 
porter,  lui  députa  lord  Jervis, 
qui  eiit  ordre  de  ne  voir  que  Plé- 
ville ii»'  Péley  à  Marseille .  tJt  dé 
repjirtir  sur-le-champ.  Dans  des 
temp"i  plus  rapprocliés  de  fiows  , 
le  directoire-exécutif  ordonna  à 
Piéville  Le  Péley,  ministre  dd»la 
marine  alors,  de  faire  une  tournée 
sur  les  côtes  de  l'Ouest,  et  lui  al- 
loua 40,000  francs  pour  ce  voya- 
ge. Le  modeste  Pléville  Le  Péley 
ne  prit  de  celte  somme  que  12.000 
freines  ,■  n'en  dépensa  que  7  da<ws 
sa  tournée,  et,  xiifvn  retour,  vou- 
lut remettre  le  reste'  à  la  tresorci 
rie  nat1onat<r,  qui  avait  porté  ctl 
com[»le  les  40,000  (Vaud*.  Lo  gou- 
vernement ne  <'rut  pas  de  sa  di- 
gnité "de  souscrire  à  l'inlcfltio-u  du 
ministr-*-.  Pléville  Lu  Péjey  m« 
pouvant  iusi«ler.  et  ne  voulant 
pas  non  plus  gaiidt^-  une  somme  à 
laquelle  il  ne  te  croyait  aucun 
droit,  v<uilut  au  moins  qu'elle 
touruAl  à  l'utilité  rie  l'^t^t  .  et  *i 
consacrai  ii  l'exéoution  dilt'^légra- 
phe  que  l'oh  TCit  encore  aujotir- 


o^S  PLO 

,  '  d'hui  sur  l'hôtel  du  ministère  de 
la  marine;  et  cependant,  il  était 
peu  riche,  et  sa  famille,  qu'il  sou- 
tenait, était  extrêmement  nom- 
breuse. »  En  1778,  Pléville  Le 
Péley  montait  le  vaisseau  le  Lan- 
i^tiedoc  ;  il  accompagna  le  comte 
.d'Estaing,  et  fit  la  guerre  de  l'in- 
dépendance américaine.  Ses  ser- 
vices, dans  cette  guerre  mémora- 
ble, lurent  bien  noblement  récom- 
pensés parle  gouvernement  de  la 
noiivellerépublique.  II  lui  conféra 
l'ordre  de  Cincinnatus,  quoiqu'il 
ne  fût  que  lieutenant  de  vaisseau. 
Cet  ordre,  cependant,  ne  s'accor- 
dait qu'au  capitaine  de  vaisseau  ou 
au  colonel  dans  l'armée  de  terre. 
Lorsque  la  révolution  française 
éclata,  il  comptait  12  campagnes 
de  mer.  Il  s'était  trouvé  à  5  ba- 
tailles navales  et,  au  siège  de  Ma- 
hon.  Sous  le  gouvernement  direc- 
torial ,  il  fut  nommé  ,  en  l'an  5 
(1797),  l'un  des  plénipotentiaires 

(  qui  «levaient  traiter  de  la  paix  à 
Lille  ,  et  ,  dans  la  même  année  , 
ministre  de  la  marine  et  des  colo- 
nies. Son  administration  fut  mar- 
quée par  l'activité  des  construc- 
tions navales  dans  les  différens 
ports.  Elle  lui  valut  le  grade  de 
contre-amiral,  puis  celui  de  vice- 
amiral.  Il  se  démit  de  «on  minis- 
tère, et  fut  chargé^  en  l'an  7,  d'or- 
ganiser la  marine  française  sur  le» 
côtes  dltalie.  Après  la  révolution 
du  18  brumaire  an  8  (9  novem- 
bre 1779)  ,  il  devint  membre  du 
sénat-conservateur  ,  et  ,  quelque 
temps  après,  grand-olïicier  de  la 
légion-d'bonneur.  Cet  illustre  ma- 
rin mourut  généralement  regretté 
le  10  vendémiaire  an  14. 

PLOWDEN  (Francis)  ,  avocat 
qui  a  acquis  de  la  célébrité  au  bar- 


PLO 

reau  anglais,  vint  jeuneen  France, 
et  fut  élevé  dans  la  religion  ca- 
iholiqueau  collège  de  Suint-O  rser. 
Revenu  dans  sa  patrie  ,  il  y  publia 
quelques  ouvrages  remarquables 
en  analyse  et  en  défense    de    la 
constitution  anglaise,  qui  lui  va- 
lurent, en  1793,  le  grade  de  doc- 
teur ès-lois   à  l'université  d'Ox- 
ford.  Il   exerça  ensuite   pendant 
plusieurs    années,  et  avec  beau- 
coup   de   distinction ,    les    fonc- 
tions d'avocat  à  Londres.  M.  Plow- 
den    y    avait   obtenu    une    riche 
clientelle  ;    mais   ayant    dans    de 
nouveaux   ouvrages  historiques  , 
d'ailleurs  très-estimés  du  public, 
attaqué  sans  ménagement  la  con- 
duite de  plusieurs  agens  du  gou- 
vernement ,  il  fut  à  son  tour  atta- 
qué par  eux  en  calomnie,  et  ne 
put  apporter  des  preuves  judiciai 
res  suffisantes  pour  quelques-unes, 
de   ses  assertions,  dont  la  vérité 
était   cependant   a.-,seî    générale- 
ment reconnue.  Il  succomba  ainsi 
dans  ce  procès,  et  fut  condamné 
à  5ooo  livres  sterlings  de-domma-- 
ges  et  intérêls.  Il  se  retira  alors 
en  France,  pour  éviter  les  suites 
de  cette  condamnation.  Ses  prin- 
cipaux ouvrages  sont  :  i" Examen 
des  droits  naturels  des  sujets  bri- 
tanniques,   1784,  in-8'',  avec  un 
supplément ,   1  786  ;  2"  Histoire  a- 
brégée  de  l'empire  brit((nnic/ue,  pen- 
dant les  derniers  vingt  mois,  1794» 
in-8"  ;  3°  Histoire  abrégée  de  fem- 
pire  britannique,  pendant  l'année 
1794»    in-8°,    1795   (traduit    en 
français,  par  André,  1  vol.  ii)-8°); 
4°  VEgtise  et  l'Etat  ,   ou  llecher- 
ches  sur  l]0rigine ,  la  nature  et  l'é- 
tendue de  l'autorité  ecclésiastique 
et  civile ,  dans  ses  rapports  avec  la 
constitution    britannique,    1795, 


PLO 

10-4°;  5°  Revue  historique  de  rétat 
de  l' Irlande ,  depuis  l'iîivasion  de 
ce  pays  pur  Henri  11,  jusqu'à  son 
union  (ivee  ta  Grande-Iirelagne  , 
i8o5,5v".l.  in-4'.  oinraj^o  plein 
de  retherches  cm  ieiises,  écrit  avec 
bomu;  Un  el  impartialité  ;  7"  Deux 
letltes  historiques  à  sir  John  Cox 
Hii'pisley ,  iii-8°.  Madame  Plow- 
I)E^  [Françoise) ySa  femme,  a  a(i«si 
cuiiivi;  avec  succès  la  liltératiiPe. 
Elle  est,  entre  antres  ouvrages, 
auteur  de  l'opéra  de  f^irginie,  en 
Iroié  actes,  i8(to,  in-8*.  l'LowrtF.N 
{Charles),  prêtre  cathiliqiie,  frère 
du  précé<ient,  fut  élevé  ainsi  que 
lui  an  collège  de  Saint -Orner ,  où 
il  entra  jeune  encore  dans  l'ordre 
des  Jésuites.  A  son  retour  en  An- 
gleterre, il  fut  pend.'ïnt  quelques 
années  professeur  dans  un  sémi- 
i\iiit-e(ial Indique,  à  Stor»ghonst, 
dans  le  comié  de  Lan«"astre  :  il 
passa  ensuite  «  la  direction  d'une 
chapeLe  à  BiistoL  Ce  révérend 
père  jé'uile  a  fait  quelque  sensa- 
tion en  Angleterre,  et  pins  paiti- 
cnlièrenienl  parmi  les  catholiques 
d'Irlande,  jtar  la  publication  de 
ses  opini(Mis  nitra-montainés.  Il 
s'est  même  mis  en  opposition  pro- 
noncée avec  le  comité  catholique 
de  celte  île,  dans  les  discussions 
sur  le  serment,'  en  i^t)o  et  1791, 
c'a  soutumi  aveoivéhemenced'an- 
CieniK'S  prétentions  de  la  cour  de 
Rome.  Loin  de  servir  ainsi  ses  co- 
réligiorniaire'» ,  il  a  augmenté  les 
ohstacles  qn'ilsonl  rencîontrésjits- 
qu'ici  dans  leurs  pins  justes  de- 
mandetf,  et  le  saint-siége  même 
na  pas  t(Mijf»nrs  a[)prunvé  le  zè-le 
ardent  du  l\  Hlowden.  Ses  prin- 
ci|>aux  ouvrages  sont  :  i*  Hcuiar- 
quessur  les  écrits  d<J.  lierringlon, 
adressées  au  clergé  catholique  d'An' 


PLU  379 

gleterre  ,  179a,  inS"  ;  2"  Considé- 
rations sur  l'opinion  moderne  de  ta 
faiUibilité  du  pape ,  i7()6,in-8°; 
5'  Quelques  lettres  au  journal  de 
Bristol ,  sur  l' émancipation  des  ca- 
tholiques. 

PLUMPTRE  (Anhe),  seconde 
fille  du  docteur  Robert  Plnmptre, 
homme  distingué  par  l'étendue  de 
se.s  connaissances,  qui  fut  pen- 
ilant  28  ans,  président  du  collège 
de  la  reine,  à  Cambridge,  était  née 
avec  les  plus  heureuses  disposi- 
tions; son  père  se  chargea  lui- 
même  du  soin  de  diriger  ses  étu- 
des, lui  fit  suivre  des  cour?<  de 
belles-lettres,  et  lui  enseigna  les 
langues  vivantes  :  le  français, 
l'allemand,  l'italien  et  l'espagnol, 
lui  furent  bientôt  aussi  familiers 
que  sa  langue  maternelle.  Amie 
Plumptre  voulut  pressentir  le 
goût  du  public  avant  de  se  faire 
■coimaître.  Elle  s'essaya  dans  quel- 
ques o-puscules.  insérés  dans  des 
ouvrages  périodiques  ;  elle  publia 
ensuite  \.\n  roman,  sous  le  voile 
de  l'anonyme  ,  et  Jic  .se  hasarda  à 
y  inetlre  son  nom  qu'à  la  seconde 
édi'tion.  Elle  a  fait  paraître  :  r 
Antoinettk ,  rmnah,  2  vol.  in-12.; 
2"  le  Fils  du  Becteur,  id.,  5  vol, 
itirX2,  1798-;  5"  sept  pièces  de 
théâtre,  traduites  de  l'allemand 
de  Kotzebue,  in-8%  1798-1799;  4" 
Lettres  écrites  de  différentes  parties 
du  Continent,  traduites  de  l'alle- 
nianddeF.  Malthisort,  in-8%  1799; 
5"  V oyages  physiognomiques ,  tra- 
duits de  rallemand  de  Musœus,  5 
vol.  in-12,  1800;  6''  F ie  et  carrière 
littéraire  de  Kotzebue,  in-8°,  1800; 
7"  Quelque  chose  de  nouveau,  ou  A- 
ventures  de  l'hôtel  Campbel,  5  vol. 
in-12,  1801;  8°  Relation  histori- 
que de  la  peste  de  Marseille  en  1 720» 


38o  l'LL 

traduite  du  uiami.scrit  iVançais  de 
Bertrand,  in-B",  i8o5;  9°  ilécit  de 
trois  années  de  séjour  en  France, 
5  vol.  in-8°,  1810;  10°  Histoire  de 
moi-mêiiie  et  de  mon  ami  fVoniaii, 
4vol.  iii-i2,  1812:  11°  Voyage 
dans  l'A frique  méridionale ,  tra- 
<luit  de  l'alleinand  de  Lichteu^i- 
ttern,  in-4",  1812:  le  second  volu- 
me a  paru  en  i8i5  ;  12"  Voyages 
dans  tu  Morée,  l'Albanie  et  autres 
yarlies  de  l'empire  ottoman.  Ira- 
iJuit,*  du  français  de  Pouqueville, 
^n^4°«  i8i5;  10"  Voyage  au  Bré- 
sil, dans  la  mer  du  Sud,  le  Kants- 
chatka  et  le  Japon,  traduit  de  l'al- 
Jeniandde  Langsdorff,  in4",  i8i5: 
le  second  volmiie  parut  en  1814» 
t»  LU  NRhTT(Jl  A  dame),  roman- 
cière anglaise,  est  <ilie  dn  gérjérai 
•Ganni/ig,  et  de  miss  Minifie,  qui 
.«se  lit  coniiailre  par  la  piibli(UJlion 
de  quelques  roînari».  Kllc  se  livra 
de  boinie  heure  à  la  culture  deë 
lettres,  .sous  les  auf<jiices  djeiia  du- 
chesse de  BerlFor*  y  !tl»i|)iiis  long- 
temps protectrice  de  :.»a  mère. 
Cette  protection,  ueaiuno^ir^s.  leur 
manqua  tout-à-«Mi«p.  1.-»  l'amilie 
du  général  Gnnuing  it'riaut  étéiac- 
cn^èe  auprè,s  ^le  fa  duel>esse^  d'ji- 
toir  praticpié  des  .intrigues  pour 
entrer  daiij>  ralliatu>e  d'une  iiitus- 
Ire  famille.  Miss  Gunniug  épousa 
dcpxHS  M..>  Phuikiett,  ollicier  aiir 
glais.  Parmi  les  ouvrag.(;s  publiés 
par  cette  dame,  on  distingue  :  i" 
Gipsoy'cisuntess  (la  Couitfcsse  ho- 
liémjeime),  4  v<>l,  in-i'2,  i^^ç)  ;  2" 
le  Valet  du  Fermier,  roma n , . j  vol. , 
1803,  traduit  d'un  ouvrage  de  M. 
l^v\cVdy-V%\\iiV\\ù\;'o''i'Exilxl'Erin, 
3  Vol.  in-ia,  1808;  4"  Dangers  de 
JatiV',  5  vol.  in- 13,  1810;  b"  Mé- 
riwires  d'an  homme  à  la  mode, 
irt-1'2,  1^1 5. 


PLU 

PLTJQUET  (l'abbé  Fbançoir- 
André-Adrien  ) ,  littérateur,  na- 
quit à  Bayeux ,  département  du 
Calvados,  en  t^iG,  et  mourut  le 
18  septembre  1790.  Il  commença 
ses  études  à  Caen,  et  les  termina 
à  Paris ,  où  il  fut  reçu  bachelier 
en  174^1  et  licencié  en  théologie 
en  i^So.  Par  la  protection  de  .M. 
de  Chois<;nl,  archevêque  de  Cam- 
bray,  il  obtint  d'abord  un  canoni'- 
cat  dans  sa  cathédrale,  pui»  ttuc- 
cessivement,  s'étaut  fixé  à  Paris, 
la  chaire  de  philos(»phie  niçrale 
au  collège  royal,  et  en  1778,  celje 
d'histoire  au  même  collège,  fonc- 
tion dont  il  se  démit  en  178»;. 
L'abbé  PInquct  ^'élait  lié  avec  le? 
geys  de  lettres  qui  s'efiorçaient  de 
combattre  \;eux  surnommés  les 
Emyclvpédistes ,  c'est-à-dire,  les 
savans  et  les  Jillérateurs  les  plys 
distinguer)  de  l'époque.  L'iiblSé 
PUiquet  ne  fut  pas  heureux  en 
c«'mbattaut  les  philosophes;  ec- 
p^indant  coiume  il  élait  Irès-^itis- 
-tiiuit  et  d'un  caractère  modéré,  il 
lia»  point  partagé  la  c^éitébrité 
qu'ils  ont  in'ipiiinée. à  ses  confrè^ 
res  Nonolte;,  Patouillet,  BibuiU 
1er,  etc.,  etc.,  etc.  Voici  la  liste 
dqs  principaux  ouvrages  qu'il  n 
uns  au  jour  :  \"  Examen  du  fata- 
lisme, ou  E.iposition  et  réfutation 
des  différens  systèmes  de  fatalisme, 
Paris,  Tnvol.  iH-12,  ly^y',  ^"Let- 
tre à  un  ami  sur  li'S  arrêts  du<oii- 
seil,  du  ?}0  août  1777,  concernant 
la  librairie  et  l'imprimerie,  Lyn,- 
dres,  1777?  in  8°;  5°  Seconde  let- 
tre à  un  ami  sur  les  affaires  de  la 
librairie,  Londres,  1777»  in  S°;  4" 
les  Livres  classiques  de  l'an  pire  de 
la  Chine,  recueillis  (et  traduits  dp 
chinois  en  laliu)  par  le  P.  No^l 
(du  latin  en  français),  par  riii>ibé 


PLU 

Pluquet ,  précédés  d' observations 
(du  fraducletir  français)  sur  l'o- 
rigine, ta  nature  et  les  effets  de  ta 
pliilosopliie  morale  et  politique  de 
cet  empire,  Paris,  de  Bure,  1784 
»;t  1785,  7  vol.  in-18;  5°  Mémoi- 
res pour  servir  à  ftiistoire  de  l'es- 
prit humain,  par  rapport  à  la  reli- 
gion c/irétienne^  ou  Dictionnaire 
des  liérésies,  Paris,  Nyon,  1762,  2 
vol.  in-8°.  «  Ce  livre  est  précédé 
à\\n  discours  où  l'auleur  recher- 
che quelle  a  été  la  religion  primi- 
tive des  hommes,  et  quels  sont  les 
changeniens  qu'elle  a  subis  jus- 
qu'à l'établissement  du  christia- 
nisme. L'auteur  recherche  et  suit 
les  pauses  de  ces  changemens, 
ainsi  que  les  effets  qui  eu  ont  ré- 
sulté. Le  reste  de  l'ouvrage  est 
proprement  un  dictionnaire  où  les 
hérésies  sont  rangées  par  ordre 
alphabétique  ,  décrites  avec  les 
détails  convenables,  et  solidement 
réfutées  C'est  surtout  dans  cet 
ouvrage  que  rabl)é  Pluquet  a  si- 
gnalé son  talent,  son  érudition  et 
la  justesse  de  son  esprit.  On  vient 
de  doiuier  une  édition  de  ce  dic- 
tionnaire, corrigée  et  augmentée, 
Besançon,  Petit,  1819,  2  vol.  in- 
8°.  L'éditeur  y  t»  ajouté  quelques 
articles  qui  ont  rapport  au  jansé- 
nisme et  î\  l'église  constitulionnet- 
le.  »  6"  Recufil  de  pièces  trouvées 
dans  le  porte  feuille  d' un  jeune  hom- 
me deiTtans  (  le  vicomte  de  Wall), 
avec  un  avertissement  de  iM.  de 
Virieu  ;  le  tout  j)ublié  par  l'abbé 
Pluquet,  Paris,  Didot  rainé,i788, 
in-8'';  7°  De  la  sociabilité,  1767, 
2  vol.  in-ia.  «  L'auteur  y  prouve 
([ue  l'homme  est  sociable  par  sa 
nature,  et  que,  loin  d'être  t>é  mé- 
chant et  en  état  de  guerre,  com- 
Wic  !e  \eut  Hobbes,  M  est  naturel- 


POC 


38 1 


lement  porté  au  bien  et  à  l'exer- 
cice de  toutes  les  vertus.  >>  8" 
Traité  p/iilosophique  et  politique 
sur  le  luûte.  1786,  2  vol.  in-12;  9° 
De  la  superstition  et  de  l'enthou- 
siasme. Cet  ouvrage,  que  l'auteur 
avait,  laissé  en  manuscrit,  a  été 
mis  au  jour  par  D.  Kicard,  un  fort 
vol.  in-12,  Paris,  1804.  L'abbé 
Pluquet  a  encore  laissé  en  manus- 
crit un  ouvrage  que  la  mort  ,ne 
lui  a  pas  permis  de  terminer,  el 
qui  a  pour  titre  :  Histoire  générale. 
PLUQUET  (FrédÉsic),  phar- 
macien, associe  correspondant  de 
la  société  royale  des  antiquaires 
de  France,  petit-neveu  du  précé- 
dent, est  né  à  Bayeux,  le  19  sep- 
tembre 1781  ;  il  a  donné  au  pu- 
blic :  1°  Nouvelles  recherclies  sur 
tes  diverses  variétés  de  quinquina, 
employéesen  médecine,  Paris,  1 808, 
10-8°;  2°  Essai  sur  la  nature  des 
poisons,  Caen,  1809,  in-S°.  On  ;t 
encore  de  lui  plusiem's  articles 
dans  le  Journal  de  pharmacie,  et 
\\n^.  Lettre  insérée  dans  la  Chro- 
nique religieuse,  tom.  H,  20"  ca- 
hier, où  il  réclame  i'ortenient  con- 
tre une  édition  du  Dictionnaire 
des  liérésies,  imprimée  à  Besan- 
çon, dans  la(juellé  on  a  inséré  une 
foule  d'articles  grossiers  e>  inju- 
rieux qui  ne  sont  point  de  sou 
oncle. 

POCIIOLLE  (PiEnuE-PoMPONE- 
âmÉdÉë),  déj>ulé  à  la  convention 
nationale  ,  né  à  Dieppe,  en  1776, 
était  entré  fort  jeune  dans  la  con- 
grégation delOratoire,  mais  sarjs 
y  faire  de  vœux ,  ou  contracter 
aucun  lien.  Il  avait  professé  la 
rhétorique  dans  un  des  collèges 
de  cet  ordre,  quand  sou  père, 
juge  et  subdélégué  à  Dicp(>c  ,  le 
rappela    auprès    de    lui ,    pour   le 


382  roc 

former  aux  fonctions  dans  les- 
quelles il  espérait  l'obtenir  pour 
successeur.  Mais  la  révolution 
vint  jeter  celui  -  ci  dans  une 
plus  vaste  et  plus  dangereuse 
carrièrt'.  11  adopta  avec  tout 
renth(>u^ia«nic  de  la  j-jutussc, 
les  principes  et  toutes  les  espé- 
rances qu'embrassèrent  à  celte 
époque  tant  d'hommes  d'un  Ti- 
ge mur  et  d'un  esprit  distingué. 
Ses  concitoyens  l'élurent  maire 
de  Dieppe,  en  1791,  et  quelques 
mois  après  député  suppléant  à 
l'assemldée  législative.  Il  fut  de 
nouveau,  en  septembre  1792,  éîu 
par  eux,  membre  de  la  conven- 
tion nationale  ,  où  dans  le  pro- 
cès du  roi  il  vota  avec  la  niajo- 
rité.  Les  mémoires  du  temps  at- 
testent, et  les  biographes  les  moins 
modérés  conviennent ,  que  pen- 
dant les  différentes  missions  dont 
ce  député  fut  successivement  char- 
gé par  la  convention  ,  d'abord  en 
Bretagne  et  les  provinces  de 
l'Ouest,  ensuite  à  Lyon,  à  Tours, 
etc. ,  il  montra  une  modération 
malheureusement  bien  rare  à  cette 
époque  de  fureurs  réciproques  ,  et 
de  sanglantes  rcpi'ésaiilcs.  Knvoyé 
à  Lyon  peu  de  temps  a[)rcs  le  9 
thermidor,  il  fit  aussitôt  cesser 
les  démolitions  ordonnées  par  le 
comité  de  salut-public  ;  rajtpela 
tous  les  citoyens  que  la  terreur 
avait  contraints  de  luir;  ranima 
l'industrie  et  la  confiance;  pourvut 
aux  besoins  de  la  ville  pendant 
une  disette  long-temps  désiistreu- 
se  quoique  factice,  et  (d)tint  en- 
fin le  décret  qui  rendit  à  la  ville 
de  Lyon  son  nom,  qu'on  avait 
changé  en  celui  de  commune  af- 
franchie, après  y  avoir  versé  à 
ffrands  flots  le  sang  des  habitaas. 


POC 

Pendant  celte  mission,  M.  Po- 
cholle  avait  éloigné  de  la  ville  t(nis 
les  étrangers  partisans  ou  fauteurs 
de  l'odieux  régime  de  lu  terreur; 
mais  il  avait  su  en  même  temps 
compri  mer  ton  s  ceux  t|  ni  croyaient 
le  moment  venu  d'exercer  leurs 
vengeances  particulières,  en  bra- 
vant les  magistrats  et  les  lois.  Ce 
ne  fut  qu'après  son  départ  que  les 
réactionnaires  de  Lyon  pureiit  se 
livrera  leiu'S  fureurs, dont  leJUiône 
emporta  jusqu'aux  mers  les  nom- 
breuses victimes,  et  bientôt,  dans 
tout  le  midi  de  la  France,  les  compa- 
gnies dites  de  Jésus  et  du  Soleil 
de  vinrent  les  dignes  émules  des  ter- 
roristes. Dans  une  nouvelle  mission 
à  Tours^  en  germinal  an  5  (avril 
1795),  ftl.  Pocholle  eut  ordre  de 
la  convention  de  faire  désarmer 
en  masse  tous  les  hommes  que  les 
réactionnaires  poursuivaient  alors 
sous  le  nom  de  terroristes  :  il  n'en 
trouva  point  dans  la  ville  ni  aux 
environs,  et  ne  fit  exécuter  le 
décret  que  sur  la  j)ersonne  du 
bourreau.  Cette  conduite  dé- 
plut aux  ré  iclionuaires  ,  qui  le  dé- 
noncèrent à  la  convention;  mais 
M.  Doulcet  de  Pontécoulant  [)rit 
vivement  sa  déiense  ,  et  toutes  les 
accusations  furent  écartées  par 
l'ordre  du  jour.  La  même  année, 
et  deux  jours  après  l'iiisurrection 
sectioimaire  du  i.'^  vendémiaire  an 
4  (5  octobre  1795),  il  ne  s'en  op- 
posa pas  moins  dans  le  sein  de  la 
convention  à  la  demande  de  rap- 
porter ce  même  décret  de  désar- 
mement, déjà  opéré  à  Paris.  On 
lui  reprocha  depuis,  comme  une 
perfidie,  cette  opposition.  Il  avait 
voulu,  disait-on,  augmenter  les 
dangers  de  la  convention  ,  en  di- 
minuant  le  nombre    de   ses   dé- 


POC 

fenseurs ,  tandis  qu'il  n'avait 
voulu  qn'ôler  aux  sections  de 
Paris  un  des  prétextes  de  leur  ré- 
sistance. M.  Pocholle,  qui  avait 
laissé  d'honorahJes  souvenirs  dans 
le  département  de  la  Mayenne,  y 
fut  élu  au  conseil  «les  cinq-cenls; 
mais  les  difïicultés  que  le  direc- 
toire éleva  bientôt  sur  sa  nomina- 
tion, l'emiiêchèrent  de  siéger  dans 
cette  assemblée.  Il  se  rendit  alors 
en  Italie,  et  s'étaiit  trouvé  à  Milan 
à  l'époque  où  le  général  en  chef 
Bona[)arte,  après  la  conclusion  du 
traité  de  Campo-Formio,  organi- 
sait en  départemens  les  îles  Io- 
niennes, il  accepta  la  place  de 
commissaire- général  dans  le  dé- 
partement d'Ithaque,  et  en  exerça 
les  fonctions  à  Céphalonie  jus- 
qu'au irioment  où  les  flottes  des 
Turcs  et  des  Russes,  alors  réunies, 
attaquèrent  ces  îles  :  il  entra  alors 
à  Gorlbu  ,  quelipie  temps  avant  le 
siège,  et  s'embarqua  à  bord  du 
vaisseau  le  Généreux ,  commandé 
par  l'intrépide  capitaine  Le})ille, 
qui  traversa  les  flottes  eimemies  et 
le  porta  à  Aucune,  où  il  sollicita  des 
secours  pour  Corfou;  mais  cette 
place  se  rendit  avant  qu'ils  pus- 
sent y  arriver.  Il  revint  ensuite  à 
Paris,  et  s'y  trouvait  à  l'époque 
de  la  révolution  du  18  brumaire, 
contre  laquelle  il  se  prononça  assez 
hautement,  quoiqu'il  n'eût  point 
ou  à  se  louer  du  directoire,  dont  la 
pnissancefutalors  renversée.  M.  Po- 
cholle resta  long-leuips  sans  exer- 
cer de  fonctions  publiques,  mais  il 
futenfin  nommé  secrétaire-général 
du  département  de  la  Ruer,  et  en- 
suite sous-préfet  àNeufchàtel,  dé- 
partement de  la  Seine-Inlérieure. 
La  douceur  de  ses  mœurs  et  ses 
qualités  sociales  ,  la  sagesse  et  Vk- 


POC 


383 


quité  de  son  administration  ,  par- 
ticulièrement en  tout  ce  qui  con- 
cernait l'exécution  des  lois  sévè- 
res de  la  conscription,  lui  acqui- 
rent bientôt  l'estime  générale  et 
l'afl'ection  de  ses  concitoyens.  Pri- 
vé de  son  emploi  en  i8i4j  il  le  re- 
prit momentanément  en  181 5;  - 
en  fut  pri\é  de  nouveau  après 
la  seconde  rentrée  du  roi  ;  et 
se  trouvant  atteint  par  la  loi  du 
12  janvier  i8i6  ,  il  se  relira 
dans  le  royaume  des  Pays-Bas. 
M.  Pocholle  s'y  est  créé  des  occu- 
pations analogues  à  son  goût  pour 
les  lettres  :  il  les  avait  constam- 
ment cultivées  pendant  une  lon- 
gue carrière  politique  et  arlniinis- 
trative,  à  travers  tous  les  orages 
de  la  révolution.  El  si  l'élude  ne 
lui  a  pas  toujours  servi  d'égide 
contre  de  nouveaux  malheurs 
dans  son  exil,  elle  l'a  aidé  à  en 
supporter  les  maux,  et  lui  a  four- 
ni les  moyens  de  suppléer  par  un 
travail  honorable  aux  faveurs  de 
la  fortune ,  qu'une  philosophie  in- 
souciante lui  a  toujours  fait  né- 
gliger. 

POCQUET  (L.  B.  W.),  capi- 
taine de  vétérans,  naquit  à  Rue, 
département  de  la  Somme,  en 
i'^t\T>.  Grenadier  de  la  légion  de 
Soubise  en  1 76 1 ,  il  reçut  plusieurs 
blessures  dans  les  campagnes  de 
Hanovre ,  où  sa  conduite  fut  re- 
marquée de  ses  chets.  Le  corps 
où  il  servait  ayant  été  réformé  en 
17(17,  l'ocquet  ehtra  dans  les  gar- 
des-du-corps ,  y  resta  quelques 
années,  puis  passa  successive- 
ment dans  la  gendarmerie  et  dans 
le  régiment  de  Rohan  infanterie. 
En  1790,  admis  comme  lieute- 
nant à  l'Hôtel-des-Invalides,  il  fut 
peu  de  temps  après  nommé  capi- 


384 


POD 


taine  de  la  40"*  compagnie  de  vé- 
léians,  que  l'on  dirigeaitstir  Auch, 
département  du  Gers.  A  son  arri- 
vée dans  cette  ville,  il  trouva 
les  habitans  vivement  indisposés 
contre  une  demi-brigade  qui  en 
formait  la  garnison,  et  dont  ils  a- 
m  vaienl  à  se  pl.iiudre.  Les  soldais  et 
les  citoyens  étaient  égalejnent 
sous  les  armes;  l'effervescence 
portée  au  comble,  le  sang  allait 
couler.  Pocîquet,  séparé  de  sa  trou- 
pe, n'hésita  pas  â  se  rendrtî  au  lieu 
où  le  péril  paraissait  le  plus  immi- 
nent. C'est  en  vain  que  quelques 
baïonnettes  se  tournent  contre 
lui;  il  relève  les  fusils,  arrache 
même,  avec  nue  intrépidité  rare, 
ceux  «les  plus  furieux,  leur  repro- 
che avec  énergie  que  c'est  contie 
«les  Français  et  des  frères  qu'ils 
veulent  faire  usage  de  ces  armes, 
destinée*  seulement  à  déiéndre 
la  patrie;  enfin,  il  rappelle  aux 
militaires  l'obéissance  qu'ils  doi- 
vent à  leurs  chefs,  et  aux  citoyens 
leurs  devoirs  envers  les  magistrats 
chargés  de  faire  exécuter  les  lois. 
Cette  harangue  produisit  l'ellét 
qu'il  en  espérait  :  tout  rentra  dans 
l'ordre,  et  le  cahne  se  rétablit.  Ce 
Irait  de  sa  vie  n'est  pas  celui  qui 
l'honore  le  moin>.  Eu  1791,  Poc- 
quet  obtint  le  commandement  en 
second  d  un  corps  de  vétérans, 
formant  la  garnison  du  fort  de  Bel-, 
legarde,  daus  le  département  des 
Pyrénées-Orientales.  Il  y  déjoua 
Hes  manœuvres  secrètes  employées 
par  les  Espagnols  pour  semer 
la  discorde  parmi  les  troupes  fran- 
çaises, et  se  rendre  maîtres  de  la 
place  au  moyen  de  la  trahison. 
Ce  militaire  citftyen  ujourut  (|uel- 
ques  années  après. 

PO  DE  VIN    (  lii!iLi.AtjaE-FB  AN- 


POD 

çois),  né  à  lioulogne-sur-Mer , 
en  1760,  d'une  famille  de  négo- 
cians,  fit  ses  études  au  collège  des 
oratoriens  de  cette  ville,  et  devint 
membre  de  cette  congrégation  sa- 
vante. Il  exerçait  la  profession 
d'avocat  à  (^abiis,  lorsqu'il  fut  élu 
procureur-syndic  du  district.  Son 
impartialité  et  sa  modération  le 
firent  distinguer  dans  ces  foncr 
lions,  jusqu'à  <'e  qu'il  fut  nommé, 
eu  floréal  an  n,  secrétaire-géné-r 
rai  de  la  commission  des  adminis- 
trations civiles,  police  et  tribunaux, 
établie  à  Paris,  et  qui  représentait 
alors  les  ministères  de  la  justice, 
de  l'intérieur  et  de  la  police.  Sa 
conduite  dans  cette  place  impor- 
tante fut  tellement  irréprochable., 
qu'après  le  9  thermidor,  époque 
à  la  fois  de  salut  public  et  d'injusr 
tes  réactions,  il  y  fut  continué,  et 
l'on  voulait  l'y  retenir,  lorsque, 
vers  le  mois  de  germinal  au  5,»son 
mariage  av«;c  la  veuve  du  général 
de  Merenvue  le  déternuiia  à  don- 
ner sa  démission.  N'aspirant  alors 
qu'à  retourner  en  province,  il  se 
retira  dans  une  campagne  près 
Calais.  A  l'installation  du  direc- 
toire-exécutif, les  premières  pla- 
ces du  dé{»artement  dans  l'ordre 
judiciaire  ou  administratif  lui  fu- 
rent offertes,  mais  il  les  refusa  tou- 
tes, pour  n'accepter  que  celle  de 
Connnissaire  du  directoire-exécu- 
tif de  son  canton.  Il  remplit  ces 
modestes  fonctions  jusqu'au  18 
brumaire  an  ë.  L'un  des  (uen)iers 
actes  de  la  commission  consulaire 
executive  fut  de  l'appeler  aux 
fonctions  de  comnjissaire  près  de 
l'admiuisiratiou  centrale  du  dé- 
}>artement  du  Pas-de-Calais.  Il  sut 
répondre,  dans  ces  circonstances 
dilliciles,  à  la  confiance  du  gou- 


POE 

veruement,  et,  dès  l'établissement 
des  préfectures,  il  fut  nommé  sous- 
préfol  à  Bélhune.  Son  adminis- 
tration fut  juste  et  tutélaire,  et  il 
eut  l'art  d'adoucir  l'obéissanco,  en 
faisant  exécuter  les  lois  mêmes 
qui  exigent  un  plus  grand  sacri- 
fice d'afl'ections  ou  d'intérêts. 
Nommé  candidat  au  corps-légis- 
latif, trois  fois  consécutives,  il  né- 
gligea, à  dessein,  de  solliciter  son 
élection  par  le  sénat,  préférant  de 
renoncer  au  titre  de  législateur 
plutôt  que  d'abandonner  ses  admi- 
nistrés. Podevin  mourut  le  20  fé- 
Tfier  181 5.  Il  a  laissé  un  fils, 
digue  héritier  de  ses  vertus  publi- 
ques et  privées,  et  qui,  jeune  en- 
core, se  distingue  dans  l'adminis- 
tration de  la  commune  de  Pihen, 
dont  il  est  maire. 

POEIUO  (Joseph),  ex-dépulé 
du  parlement  napolitain  ,  naquit , 
à  Catanzaro,  d'une  bonne  famille 
de  la  province.  Destiné  à  la  profes- 
sion d'avocat,  il  étudia  le  droit, 
et  se  rendit  à  Naples  pour  en  fré- 
quenter le  barreau.  Il  s'y  fit  remar- 
quer par  son  éloquence,  et  par  l'é- 
nergie avec  laquelle  il  pliiidait  la 
cause  de  ses  cliens.  Bientôt  il  n'y 
eut  [dus  de  procès  important  dans 
la  ville,  pour  lequel  il  ne  fût  appe- 
lé, et  c'était  déjà  un  gage  de  triom- 
phe que  de  l'avoir  intéressé  en  sa 
faveur.  Avec  un  courage  et  un  zè- 
le dignes  souvent  de  meilleurs 
succès,  mais  toujours  honorables 
dans  lin  avocat,  M.  Poerio  éclair- 
cissait  tous  les  doutes,  dissipait 
tous  les  soupçons,  attaquait  tous 
les  abus,  et  ébranlait  par  sa  voix 
l'ilme  des  spectateurs  et  la  cons- 
cience des  juges.  Une  têle  aussi 
ardente  ne  pouvait  pas  rester 
calme  au  milieu  de  la  fermenta- 

T.   XVI. 


POE 


385 


tion  générale  qui  s'était  manifes- 
tée à  Naples,  aux  premiers  symp- 
tômes de  la  révolution  française. 
C'est  en  descendant  dans  les  ca- 
chots, en  défendant  les  opprimés, 
et  en  s'élevant  contre  les  injustices, 
qu'il  avait  appris  à  connaître  et  à 
haïr  le  despotisme.  Se  réunissant  ^ 
à  la  classe  éclairée  de  ses  conci- 
toyens, il  fit  alors  des  vœux  pour  la 
cessation  de  tant  de  désordres.  Il 
n'est  pas  étonnant  si,  avec  ces  dis- 
positions, M.  Poerio  fut  des  pre- 
miers à  se  jeter  dans  le  parti  qui 
proclama  la  république  parthéno- 
pécnne,  et  s'il  fit  des  eÛbrts  pour 
en  consolider  l'existence.  Mais  le 
peuple  napolitain  qui  n'était  pas  à  la 
hall  teur  de  ses  régénér.itenrs,  atten- 
dit le  départ  de  l'armée  française, 
que  des  revers  imprévus  rappelè- 
rent sur  le  Pô,  pouree  déchaîner 
contre  eux,  et  détruire  leur  ouvra- 
ge. M.  Poerio  fut  arrêté  et  livré  j\ 
des  hommes  qui  sous  la  toge  du 
magistrat  se  montraient  les  es- 
claves des  vengeances  politiques. 
Condamné  à  périr  sur  l'échafaud, 
il  n'obtint  la  vie  qu'à  condition 
d'aller  la  terminer  dans  les  pri- 
sons de  la  Favignanii.  La  paix 
de  Florence,  en  ouvrant  les  por- 
tes de  son  cachot,  mit  un  ter- 
me à  ses  .souffrances.  Rendu  à 
la  liberté,  il  reprit  ses  occupa- 
tions ,  et  plus  heureux  qu'on 
ne  l'avait  été  pour  lui-même, 
il  eut  souvent  la  satisfaction  de 
plaider  la  cause  de  l'innocent,  et 
de  le  soustraire  au  sort  des  cou- 
pables. Au  retour  des  armées  fran- 
çaises dans  le  royaunje  de  Nâpies, 
M.  Poerio  fut  nomnié  préfet  de  la 
province  de  Capitiuial;:,  l'une  des 
plus  vastes  et  des  plus  llorissantes 
de  ce  pays.    Des  dési»rdres  graves 

25 


S86 


POE 


qui  eurent  lieu  dans  sa  préfec- 
ture, obligèrent  le  gouvernement 
à  le  rappeler  l'année  sui  vante  à  Na- 
ples ,  oi'i  il  vécut  dans  l'inaction 
jusqu'à  l'arrivée  de  Joachini  {voy. 
Mïrat).  qui  réleva  à  la  place  de 
procureur  -  général  de  la  cour 
de  cassation.  Dans  ces  hautes 
fonctions  M.  Poerio  contribua 
beaucoup  à  déteruiiuer  le  sens 
des  loi?,  qui,  par  leur  nouveauté, 
étaient  un  sujet  continuel  de  con- 
troverse et  de  doute.  Il  dut  s'arra- 
cher souvent  à  ces  utiles  travaux, 
pour  remplir  les  l'onctions  de  com- 
missaire du  roi,  en  Calabre,  et  as- 
sister aux  séances  du  conseil-d'é- 
tal, dont  il  avait  été  élu  membre. 
Le  roi  Joa(hiin  le  choisit  aussi 
pour  organiser  les  départemens 
italiens,  occupés  momentanément 
par  ses  troupes,  en  181 4  et  en 
18  if).  l.i>rs  delà  chute  deJoachim, 
ftl.  l^ierif),  se  rappelant  les  dan- 
gers qu'il  avait  courus  à  la  pre- 
mière restauration  du  roi  Ferdi- 
nand, s'éloigna  du  royaume  pour 
ne  pas  s'exposer  à  une  nouvelle 
persécution.  Ce  ne  i'ut  qu'en  1818, 
qu'il  crut  pouvoir  vivre  iranqiiil- 
lement  dans  ses  foyers.  Il  revint 
à  Naples,  et  rentra  dans  la  clas- 
se des  avocats,  qui  l'accueilli- 
renl avec  les  égards  dus  à  un  an- 
cien hiagislral.  C'est  au  milieu 
d'eîix  que  la  révolution  de  1820 
le  surprit.  Étranger  à  tous  les 
changement  qui  venaient  de  s'o- 
pérer dans  son  pays,  M.  Poe- 
rio crut  pouvoir,  sans  crime  , 
prendre  part  à  un  ordre  de  choses 
que  le  roi  avait  proclamé ,  et 
qu'il  promettait  de  détendre.  Il 
accepta  la  nomination  de  dépu- 
té au  parlement  de  Naples ,  se 
nn^ntrant  à  la  tribune  ce  qu'il  a- 
vait  été  au  barreau.  Mais,  moins 


POG 

familier  avec  les  questions  poli- 
tiques, qu'il  ne  l'était  avec  le» 
débats  judiciaires,  il  éblouissait 
l'assemblée  par  son  éloquence, 
sans  la  dominer  par  ses  opinions. 
Erronées  comme  celles  de  ses  collè- 
gues, elles  n'auraient  mené  qu'aux 
mêmes  résultats.  M.  Poeiio  igno- 
rait les  véritables  dispositions  des 
cabinets  d'Europe,  et  se  faisait  il- 
lusion sur  les  ressources  de  son 
propre  pays.  Dans  un  discours 
improvisé  le  i5  février  i8'ii,  M. 
Poerio  examina  avec  beaucoup 
de  talent  le  droit  d'intervention 
que  l'Autriche  avait  mis  en  avant 
pour  justifier  son  agression  contre 
Naples.  «  Si  une  ou  plusieurs 
"puissances,  disait-il,  encouragées 
»  par  la  faiblesse  des  autres  états, 
»  s'a  visaientde  les  gouverner  par  des 
»  décrets  avant  de  les  avoir  aiisujétis 
npar  des  victoires,  c'est  alors,  et 
«alors  seulement t  que  l'indépen- 
ndance  des  nations  seraitdétruite.» 
(]c  principe  était  vrai;  mais  ce  qu'on 
pourrait  reprocher  à  M.  Poerio. 
c'est  d'en  avoir  parlé  en  théorie, 
tandis  que  le  momerrt  de  l'appli- 
cation était  déjà  venu  pour  l'Eu- 
rope. Peu  après  l'envahissement 
du  royaume  de  Naples,  M.  Poerio, 
qui  s'était  toujoui-s  exprimé  avec 
\iue  gîande  réserve  sur  le  compte 
du  roi,  et  qui  avait  été  même  le 
premi<îr  à  se  prononcer  pour  son 
voTng(î  <le  Laybach  ,  fut  arrêté  et 
déporté  en  Autriche.  Ce  n'est 
qu'après  deux  ans  de  détention  à 
Gratz,  qu'il  lui  a  été  pernns  d'al- 
ler vivre  à  Florence. 

POGCilALI  (Caietan),  littéra- 
teur italien  ,  naquit  à  Livourneen 
i^-So.  Amateur  passionné  de  la 
liltératurt;  de  son  pays,  il  passa 
toute  sa  vie  à  rassembler  une  col- 
lection nombreuse  d'ouvrages  ita- 


POG 

liens,  plus  digne  de  la  magnificen- 
ce d'un  prince,  que  pruportionn(';e 
à  la  lorlnne  d'un  particulier.  Il 
surveilla  aussi  la  réim[)ression 
d'un  grand  nombre  d'ouvrages 
classiques .  auxquels  il  a  ajouté 
de  sa  vans  comnieiitaires  qui  ont 
rendu  ces  éditiitns  extrêmement 
recherchées.  Puggiali  avait  or- 
donné l'impression  d'un  catalo- 
gue raisonné  de  sa  bibliothèque, 
qu  il  avait  partagé  en  trois  classes, 
dont  la  première  se  composait  des 
acteurs  cités  par  l'académie  de  la 
(^rusca,ia  seconde  des  ouvrages, 
non  cités,  appartenant  aux  mêmes 
auteurs,  et  la  troisième  des  écri- 
vains qui,  par  la  pureté  du  style, 
«t  par  Timporlancc  accordée  ù 
leurs  travaux,  méritaient  d'être 
rangés  au  nombre  des  te^li  di  Un- 
f^ua  (c'est  le  nom  qu'on  dotmc  en 
Italie,  aux  ouvrages  cités  par  l'a- 
cadémie de  la  Gruscd).  Chaque  ar- 
ticle était  en  outre  accompagné 
de  remarques  bibliographiques  , 
contenant  des  rcnseignemcns  pré- 
cieux sur  les  ouvrages  et  les  au- 
teurs. Ce  catalogue,  qui,  comme 
on  voit  ,  est  un  répertoire  classi- 
que de  la  littérature  italienne,  fut 
publié  par  les  soins  de  iM.  [\iggia- 
11  fils,  -sous  le  litre  de  :  Série  de' 
tesli  di  lingua  sturnpati,  cke  si  cita- 
110  ncl  yoaibolario  degli  accndemi- 
ci  délia  Crusca,  posscduta  du  Gae- 
iano  Poggiali,  Livourne,  2  vol  in- 
8^.  La  collection  entière,  achetée 
par  l'eu  ie  grand-din;  de  Toscane  , 
l'ait  aujourd'hui  partie  de  la  biblio- 
ihèq ut!  ducale  de  Fbjrence.Pnggiali 
inourutàLiv(uirne,au!noisdemars 
1814.  Les  ouvrages  dont  il  a  été 
l'éditeur,  et  qui  sont  très-cslinîés 
en  Italie,  sont  :  1°  Teatro  itaUano 
antico,  8  vol.  iu-ia%  ijSU;  2"  Rai- 


POI 


387 


colta  de'  mlgliori  satirici  italiani,  7 
vol.  in- 12,  178G;  3^  Raccolla  de' 
migliori  noveltatori  italiani^  26 
vol.  in-8",  J789  et  suivantes;  4° 
Opère  di  MarchiacelU,  tom.  tî, 
in-8"  (sous  la  fausse  rubrique  de 
Philadelphie),  175)6;  5°  Orlando 
farioso,  de'  Ariosle,  4  ^td.  in- 12, 
i';()<^:  ir)"  Storia  di  Tohia,  iii-8°, 
1799;  7"  Drainmi  musicali  di  Ri- 
nucciiïif  iu-S",  1802;  8"  Opère  di 
Omero  volgarizzate ^  9  vol.  in-8°, 
i8o.5;  9"  la  Divina  cominedia  di 
Danle^  4  ^^^-  in-8'',  1807;  10°  la 
Gerasalemme  di  Tasso,  2  vol.  in- 
12,  18  io;  ï  i"  Rime  di  Baccio  del 
/iene ,  in-8'';  12"  Egloglie  e  rime 
del  Lasca,  in-8". 

POIGNOT  (  N.  )  ,  négociant  ;\ 
Paris,  fut  nommé  par  le  tiers-état 
de  celte  ville,  député  aux  états- 
généraux  en  178g.  Il  se  montra 
peu  à  la  tribime;  mais  il  travailla 
beaucoup  ('ans  le  comité  d'aliéna- 
tion de^  biens  nationaux.  Au  mois 
de  novembre  1790,  il  fut  élu 
secrétaire  de  rassemblée  natio- 
nale, A  la  fin  de  la  ses^-ion,  il 
reprit  les  occupations  de  la  vie 
ju'ivée. 

POINSINKT  DE  SIVIIY 
(Louis),  littérateur,  membre  de 
l'académie  de  Nancy,  cousin  et 
non  frère  de  Poinsinet  de  Sivry, 
auteur  de  la  comédie  du  Cercle, 
naquit  à  Versailles,  le  20  février 
1753,  et  était  fils  d'un  huissier  du 
cabinet  de  .\I.  le  duc  d'Orléans. 
Il  fit  des  études  distinguées  au 
collège  de  la  Marche;  et  publia  à 
l'âge  de  21  ans,  sous  le  titre  d'JS- 
glèides ,  un  recueil  de  poésies 
amoureuses  (p»i  obtint  assez  de 
succès  pour  le  décider  à  suivre  la 
carrière  des  lettres.  A  cet  ouvrage 
succéda   une    iruductiou   en  vers 


>88 


POI 


[TAnacréon,  Sapho,  Bion ,  Mos- 
cltas ,  Tyrtée ,  etc.;  elle  fit  beau- 
coup d'iiouiieur  au  jeune  poète, 
qui ,  n'ayant  pas  atteint  sa  26'  an- 
née, donna  la  tragédie  de  Brlséis. 
Dans  cet  ouvrage,  l'auteur  sut 
réunir  avec  autant  de  goût  que  de 
bonheur,  les  plus  belles  scènes  de 
riliade,  et  sa  pièce  était  repré- 
sentée avec  un  succès  général, 
lorsque  Lekain  se  démit  le  pied  : 
cet  accident  en  interrompit  les  re- 
présentations. Reprises  jdus  tard, 
elles  lurent  suivies  por  le  public 
avec  la  même  faveur.  «Le  style  de 
cette  tragédie  (dit  Palissotdans  ses 
Mnno'ires  sur  la  littérature,  art. 
Sivhy),  très-supérieur  à  celui  de 
nos  pièces  modernes  .  l'a  conser- 
vée au  théâtre —  Il  y  a  dans /??•/- 
fieis  des  vers  qui  srtnt  évidemment 
de  reçoit!  de  Racine,  et  que  ce 
grand  fioète  eût  approuvés —  Le 
beau  récit  du  passage  du  Xante  a 
été  traduit,  v»!rs  pour  vers,  en 
latin,  par  son  fds  (Louis-Cliarles 
Poinsinetde  Sivry),  jeune  homme 
<lc  l'âge  fie  18  ans,  d'un  esprit  et 
d'un  goût  très-sain.',  (jiii  a  t'ait 
d'excellentes  études  ,  et  à  qui  on 
ne  peut  reprocher  que  de  porter 
beaucoup  trop  loin  la  ujodeste  dé- 
fiance qu'il  a  de  lui-même.  »  Ce 
récit  a  été  imprimé  à  la  liu  de  la 
*'•'  cdition  de  Briséis ,  Paris,  an  5 
(  1  7;)7),  in-8".  La  tragédie  dePoin- 
siiict  de  Sivry  fait  partie  du  Réper- 
toire du  TlfUltre-Françaisj  publié 
par  M.  Pelilot.  Une  autre  tragédie, 
celle  qui  a  pour  litre  Ajax,  succé- 
da à  peu  d'intervalle  à  Briséis, 
mais  elle  n'eut  pas  la  môme  desti- 
née. Comme  cela  arrive  presque 
toujours,  l'auteur  se  roidit  contre 
nue  censure  sévère,  mais  juste; 
jitiii-seuleuient  il  Oîu  en  appeler 


POI 

Du  parterre  en  tumulte  au  parterre  attentif, 

mais  encore  il  fit  imprimer  sa 
pièce  ,  et  la  défendit  par  un  appel 
au  petit  nombre ,  ou  le  procès  de  la 
multitude  (ij;6a).  Vains  efforts  de 
l'amour-proprc  irrité!  il  ne  recueil- 
lit de  cette  tentative  que  des  cha- 
grins nouveaux,  et  il  couronna 
celte  imprudence  par  le  tort,  du 
moins  momentané,  de  renoncer 
à  travailler  pour  le  théâtre.  Palis- 
sot  prétend  qiCAjaw  renferme  un 
plus  grand  nombre  de  beaux  vers 
que  Briséis,  ((mais,ajoute-t-il, cette 
tragédie  fut  moins  heureuse  par 
l'extrême  simplicité  de  son  sujet , 
qui  ne  promettait  guère  qu'une 
lieUe  scène  :  celle  de  la  dispute 
des  armes  d'Atliille.  iVL  Poinsinet 
de  Sivry.  on  a  tiré  tout  le  parti 
qu'on  en  pouvait  espérer,  et  nous 
désirerions  de  revoir  au  théâtre 
celte  pièce  qu'il  serait  si  facile  de 
réduire  en  3  ai;tes,  sans  lui  rien 
faire  perdre  de  ses  véritables  beau- 
tés. »  Sans  fortune,  Poinsinet  de 
Sivry  vivait  des  produits  de  sa 
plume.  Forcé  par  la  nécessité,  il 
devint  l'une  des  victimes  de  ces 
libraires  qui  immolent  à  leur  cu- 
pidité le  talent  que  le  malheur 
met  dans  leur  dépendance.  Pour 
du  pain,  il  fil  tout:  histoire> 
morale,  traductions,  antiquités,' 
grammaire  générale,  jouinaux; 
tout  ce  qui  pouvait  le  mettre  à 
mêu)e  de  satisfaire  aux  besoins 
journaliers  de  sa  famille.  Ce  triste 
et  pénible  travail  avilit  en  quelque 
sorte  son  nom,  que  son  heureux 
début  avait  honorablement  signa- 
lé. En  1789,  il  rentra  dans  la  car- 
rière comme  auteui' dramatique, 
et  composa  Calon  d' Utif/ue,Un^è- 
(lie  que  les  approches  de  la  révo- 
lution ne  lui  avaient  pas  permis  de 


POI 

fiilre  représenter.  Il  adopta  avec 
rhaleur,  mais  sans  exagération, 
les  nouveaux  principes  politiques, 
bien  que  la  révolution  lui  eût  (ait 
perdre  la  pension  qu'il  recevait  de 
M.  le  duc  d'Orléans.  La  conven- 
tion nationale  le  comprit  au  nom- 
bre des  gens  de  lettres  à  qui  elle 
ilonna  des  secours.  Poinsinet  de 
Sivry  mourut  à  Paris,  pauvre,  et 
presque  oublié,  le  i  i  mars  iSo'j. 
il  a  publié:  i"  Egléidcs ,  Paris, 
Jn-8°,  1^54;  2*  Vlnocutation,  poè- 
me, Paris,  in-S",  1756;  '5"  Le  faux 
Dcrvis ,  opéra  comique  en  un  acte, 
Paris,  1767,  xn-^";  l\''  Anacréon  ., 
Saplio,  Moschus,  Bion,  Tyrtée,  et 
autres  poètes  grecs,  traduits  en 
vers  français,  i758,in-i2;  2'edit. , 
1760,  iu-12;  3'  édit.,  1777,  in  8"; 
4'  édit.,  avec  difl'érens  morceaux 
(V Homère,  1788,  in-8'';  le  même 
ouvrage  avait  aussi  été  imprimé 
en  1771,  in-12,  à  Deux-l'onts, 
sous  le  titre  des  Muses  Grecques. 
5"  La  Berlue,  in- 12,  Paris,  1759; 
6"  Brisais,  tragédie,  1759;  7°  Pyg- 
7»îfl//o/i,  comédie,  Paris,  1 760, in-8'; 
H"  Ajax,  tragédie,  1762;  il  don- 
na, en  1764,  nn  recueil  intitulé: 
Œuvres  diverses  de  théâtre  ,  etc. , 
nn  vol.  in- 12.  9"  Les  Philosophes 
de  bois,  comédie  eu  un  acte  et  en 
vers ,  Paris,  1 7t)o ,  in- 1  ji  ;  1 0°  Cas- 
sandre ,  parodie  du  drame  de  Di- 
derot, le  Père  de  Famille,  Paris, 
in-S",  17G1;  i  i' Traité  de  la  poli- 
tique privée,  extrait  de  Tacite  et 
de  plusieurs  autres  auteurs,  Ams- 
terdam ,  17O8,  in-13;  13°  Traité 
dos  causes  physiques  et  morales  du 
rire,  relativement  à  l'art  del'eaxi- 
trr,  Amsterdam,  17(^8,  in-  12; 
1 5°  Origine  des  premières  sociétés, 
des  peuples ,  des  sciences ,  des  arts 
et  des  idiomes  anciens  et  modernes. 


POI 


3% 


in  -  8*,  1769.  Cet  ouvrage  a  en 
quelque  sorte  été  entrepris  en  op- 
position à  celui  de  Boulanger,  qui 
ne  trouvait  partout  que  des  traces 
diluviennes,  tandis  que  Poinsinet 
de  Sivry  prétendait  que  tout  de- 
vait se  rapporter  aux  différens  usa- 
ges du  feu  :«  L'ancienne  Celtique 
étant,  selon  lui,  la  première  Con- 
trée où  l'usage  du  feu  a  étéconnu, 
il  en  conclut  qu'elle  a  V;té  la  pre- 
mière habitée;  enfin  que  les  Celtes 
uriens,  en  se  multipliant,  ont  en- 
voyé des  colonies  dans  tout  le  res- 
te de  la  terre.  Poinsinet  de  Sivry 
ne  trouve  partout  que  des  traces 
uriennes.  »  i^" Phasma  ou  V Appa- 
rition, histoire  grecque  ,  où  se 
trouvent  les  aventures  de  Noce- 
lès,  fils  de  Thémistocle,  Paris, 
1772,  în  -  12;  iS"  Fragment  du 
91*  livre  de  l'Histoire  de  Tite- 
Live,  extrait  d'un  manuscrit  de  lu 
bibliothèque  du  Vatican  ,  traduit 
en  français,  Paris,  1775;  i6°  ffis- 
taire  naturelle  de  Pline,  traduc- 
tion du  français  avec  le  texte ,  et 
accompagnée  de  notes  critiques 
du  traducteur,  12  vol.  in-S",  Pa- 
ris, 1771-1782.  On  la  doit  au  zèle 
de  Poinsinet  de  Sivry,  zèle  que 
l'illustre  Malesberbes  avait  stimu- 
lé eu  engageant,  dès  1760,  plu- 
sieurs sa  van  s  à  s'occuper  de  repro- 
duire un  si  important  ouvrage.  Le 
lr;ulucteur  ne  dissimule  pas  qu'il 
doit  beaucoup  au  travail  de  ses 
prédécesseurs  :  LaNauze,  qui  s'oc- 
cupa des  7  premiers  livres;  .lault, 
professeur  de  syriaque  au  collège 
de  France,  et  Querlon  ,  qu!  tradui- 
sirent les  livres  suivaus.  17°  Nou- 
velles recherches  de  la  science  des 
médailles ,  inscriptions  et  hiéroy 
gljphes  antiquesy  avec  une  table  des 
divers  alphabets,  Macstrichi,  iu-4'» 


590 


POÏ 


1^76,  6  planclics.  «  Cet  ouvrage, 
dit  l'un  des  bi(. graphes  de  Poinsi- 
net  de  Sivry,  est  divisé  en  8  cha- 
pitres. Dans  les  4  premiers ,  l'au- 
teur cherche  à  prouver  que  les 
pièces  antiques,  surtout  h'S  romai- 
nes ,  ne  sont  pas  des  nioniinies, 
mais  de  vérilables  médailles  frap- 
pées pour  perpétuer  le  souvenir 
de  quelque  événement  ;  que  les 
monnaies  romaines  n'ont  com- 
mencé à  porter  l'effigie  des  empe- 
reurs, que  sous  Alexandre-Sévè- 
re; et,  d'après  ce  principe,  il  ré- 
fute les  explications  que  le  P.  Har- 
douin  i\  d'autres  numismates  ont 
données  des  diveises  médailles. 
Dans  le  5'  haiulre  ,  il  traite  des  a- 
mulelies.  pierres  et  anneaux  com- 
plétés. Le6' contient  une  nouvelle 
explication  de  l'inscription  grec- 
que trouvée  sur  le  tombeau  d'Ho- 
mère, et  des  caractères  hiérogly- 
phiques (pi'on  lit  sur  l'antique  du 
cabine!  du  roi  de  Sardaigne,  con- 
nue sous  le  nom  ô'Isis  de  Turin; 
enfin,  dans  le  dernier  chapitre, 
il  a  rassemblé  divers  alphabets  an- 
ciens, qu'il  croit  très-utiles  pour 
aider  à  lire  toutes  sortes  de  carao 
tères.  »  iS°Th£âlred''Jristop/i(iiie, 
traihn'tion  en  (1  aurais,  partie  en 
vers  et  partie  en  prose,  auquel 
l'auteur  a  ajouté  b  s  Fragmens  de 
Mrnaiidre  et  de  PlàU'inon  ,  Paris  , 
1784,  4  *'"'•  ifi-i^"  >  chaque  pièce 
est  précédée  d'une  préface  et  ac- 
compagnée de  notes  philologiques 
et  historiques.  Celte  édition  .  la 
plus  complèlede  cellesqui  avaient 
j)aru  à  cette  époque  ,  et  dont  liro- 
Jier,  neveu  de  l'éditeur  de  Tacite, 
a  beaucoup  profité  sans  la  faire 
oublier,  annonce  une  giande  con- 
naissance de  la  langue  ,  des  usa- 
ges et  des  mœurs  des  Grecs  ;  mais 


POT 

on  voit  avec  regret  que  partageant 
les  préventions  ou  plutôt  l'injus- 
tice d'Aristophane  à  l'égard  de  So- 
crate ,  il  le  représente  «  comme 
un  homîTie  dangereux,  qui  méri- 
tait la  peine  à  laquelle  il  a  été 
condaniné  »  19°  Cutoii  d'il  tique, 
tragédie  ,  précédée  d'une  épître  à 
la  patrie  et  d'observations  sur  la 
n)ort  de  Calon  ,  Paris,  in  -  8°  , 
1789;  20°  Manuel  poétique  de  l'a- 
dolescence républicaine  ,  Paris  ,  an 
3,  2  vol.  in-  12;  21"  Abrégé  de 
l'histoire  romaine ,  en  vers  fran- 
çais avec  des  noies,  Paris  ,  i8o5  , 
in-8"  ;  22°  Précis  de  l'histoire  d'A  n- 
gleterre,  en  vers  techniques;  enfin 
il  adonné  uneéditiion  latine  A'' Ho- 
race avec  un  commentaire  en  fran- 
çais, Paris,  in -8°,  Didot ,  1778. 
Parmi  les  manuscrits  dfiPoinsinet 
de  Sivry,  sont  une  traduction  en 
vers  des  4p''c'n)iers  chants  de  1'//- 
liade,  et  une  traduction  àaPlaute. 
Cette  dernière  devait  former  10 
volumes.  11  paraît  qu'il  a  réclamé 
le  Commentaire  de  Racine,  qu'il 
avait  livré  à  Luneau  de  Boisger- 
maiu  pour  l'édition  que  ce  der- 
nier a  donnée  de  Racine. 

POIN  SOT  (Louis),  membre  de 
l'académie  royale  des  sciences, 
ancien  professeur  à  l'école  Poly- 
technique, et  chevalier  de  la  lé- 
gion-d  honneur ,  est  auteur  d'un 
ouvrage  intitulé:  Elémens  de  Sta- 
tique,  1804  et  1811,  in  ~  8°.  En 
1816,  le  roi  a  numi;ié  M.  Poinsot 
examinaleiir  d'admission  à  l'école 
Pidytechnique.  Il  est  en  même 
temps  l'un  des  inspecteurs-géné- 
raux de  l'université. 

POINSOT  (  Pierre- Georges  ) , 
membre  de  la  société  d'émulation 
et  de  celle  d'agriculture  de  Lau- 
saime ,  né  en  174^»   •'  pnblié  le» 


I 


POI 

♦ouvrages  suivans  :  i°  l'A  mi  des 
Jardiniers,  ou  Iiistructio»  métho- 
dique à  la  portée  des  amalturs  et 
des  jaidiiiiers  de  profession,  sur- 
tout en  ce  qui  concerne  les  jardins 
fruitiers  et  polagers  ,  parcs,  jar- 
ilins  anglais,  parterres,  orange- 
rieset  >erreschaii<les,  1804  iSo5, 
3  vol.  in-8°;  2"  l'A  mi  des  malades 
de  la  campagne  y  i8o4<i'»-^°;  t'e- 
conde  édition  considérablenieiit 
augmentée,  iho6.  in-S";  3"  l'Ami 
des  cultivateurs ^  i8o5,  2  volumes 
in -8". 

POINTE.  Voy.  Noël  Pointe. 
POIRET(J.  L.  M.),  savant  na- 
turaliste, a  publié  en  1789,  son 
voyage  en  Barbarie ,  pendant  les 
années  1^85  et  i^Htj,  suivi  de  Re~ 
cherches  sur  l'histoire  naturelle  de 
la  Numidie,  2  vol.  in-H",  ouvrage 
estimé  et  plein  de  détails  intéres- 
sans.  On  lui  doit  encore  un  ouvra- 
ge sur  les  Coquilles  /luoialiles  et 
terrestres,  observées  dans  le  dépar- 
tement de  l'Aisne,  1801  ,  i  vol. 
in-8°.  M.  Poiret  a  fourni  un  grand 
nombre  d'articles  aux  trois  pre- 
miers volumes  du  Dictionnaire  bo- 
tanique de  VEncyclapédie  niéllio- 
dique,  commencé pariVl. Lamarck, 
et  il  s'est  cluirgé  de  la  rédac- 
tion des  neuf  derniers.  I!  est  aussi 
un  des  rédacteurs  d(!  la  Flore  mé- 
dicale, et  du  Dictionnaire  des  scien- 
ces naturelles. 

POIRIER  (dom  Gebmain),  sa- 
ant  et  célèbre  bénédictin  de  la 
ongrégation  de  Saiut-Maur,  asso- 
cié de  l'acadénue  des  inscriptions 
et  belles-Ietties  ,  membre  de  l'ins- 
titut,  naquit  à  Paris  le  28  janvier 
1724.  Après  avoir  terminé  ses  élu- 
es à  l'université,  et  à  peine  âgé  de 
5  ans,  il  fut  admis  dans  lemonas- 
re  de  Saint-Faron  à  Meaux,  où 


POI 


«>9» 


il  fit  profession  l'année  suivante, 
en  1740-  r.hargéparses  supérieurs 
d'enseigner  la  théologie,  cl  ensuite 
la  philosophie,  il  s'acquitta  avec 
tant  de  zèle  et  de  succès  de  ses 
devoirs  comme  professeur,  qu'ici 
mérita  l'estime  et  la  confiance  de 
toute  la  congrégation.  On  le  nom- 
ma secrétaire  du  visiteur  de  la  pro- 
vince de  France,  place  qui  l'obli- 
ge;iit  à  de  fréqùeus  voyages,  dont 
il  profitait  poisr  visiter  les  archives 
e't  les  bibliothèques  des  uiouastè- 
rt-s.  Sa  passion   pour  b.-s  recher- 
ches historiques  en  fut  augmen- 
tée ,     et    bien    loin     de    désirer 
les     supériorités     du     monastèrn 
auxquelles  il  avait  droit  de  pré- 
tendre, il    voulut  se   borner  aux 
travaux  littéraires,  et  obtint  avec 
une  grande  joie  la  garde  dc^  archi- 
ves cle  Saint-  Denis.  Là,  il  com- 
pulsa et  inventoria  les  pièces  de  ce 
riche  et  antique  dépôt.  Il  les  avait 
toutes  lues,  et  se  trouva  bientôt 
en  état  de  continuer  la  gr  tnde  en- 
treprise du  recueil  i!cs  Historiens 
des  Gaules  et  de  France ,  presque 
abannoimé  depuis  la  mort  de  dom 
liousquet.  Il  fit  paraître,  eu  1767, 
le  11' volume  de  cet  ouvrage  avec 
des  notes,    des    supplémens,    des 
observations  et  une  préface,  mor- 
ceau savant  d»  240  pages,  où  il 
rectifiait  tout  ce  qui  était  défec- 
tueux dans  la  partie  déjà   impri- 
mée de  ce  volume.  Il  avait  ygné 
la  fameuse  requête  de  17C5,  ten- 
dant à    obtenir  une  plus  grande 
liberté,  et  en  effet  il  sortit  de  la 
congrégation,  se  fit  ainiier  à  celle 
d'Alsace,  et  reçut  des  bulles  d'alibé 
in  partibus  qui  le  rendaient  indé- 
pendant. Néanmoins  il  sollicita  ax. 
rentrée  à  l'abbaye  Saint-Germain- 
des-Prés,  dont  il  devint  archiviste. 


Zçf9.  POI 

Le  roi  le  noinuia  associé  libre  tîe 
l'académie  des  inscriptions  et  bel- 
les-lettres. La  révolution  ne  l'éloi- 
gna  pas  de  son  poste  de  gardien 
des  archives  de  l'abbaye  Saint- 
Geruiain-des-Prés,  et  il  fut  témoin 
de  l'incendie  qni ,  le  20  août  iJO^» 
dévora  la  ritbe  et  précieuse  biblio- 
thèque de  cet  antique  dépôt.  «  Il 
dut .  dit  un  de  ses  biographes ,  res- 
ter au  milieu  de  ces  décombres, 
pour  veiller  A  la  conservation  des 
manuscrits  que  l'incendie  avait 
épargnés.  Il  y  passa  l'hiver  ,  sans 
feu ,  exposé  à  l'intempérie  de  la 
saison,  dans  unbûliment  en  ruine, 
et  obligé,  pour  se  rendre  dans 
une  chambre  sans  toit,  et  dépour- 
vue de  tout,  de  gra\ir  un  esca- 
lier à  moitié  détruit.  Au  sortir  de 
là,  tels  étaient  son  dé[)ouillenienl 
et  sa  misère,  qu'il  se  vit  réduit  à 
désirer  une  place  dans  une  de  ces 
maisons  réservées  à  l'indigence.  Ou 
eut  honte  néanmoins  de  ce  îiaile- 
ment  à  l'égard  d'un  vieillard  à  qui 
les  lettres  étaient  si  redevables.  On 
lui  procura  une  place  à  la  biblio- 
thèque de  l'Arsenal,  cl,  en  1802, 
iors  de  Porganisalion  nouvelle  de 
l'Institut,  il  fut  appelé  à  en  faire 
partie  (section  de  l'histoire).  Ces 
âcux  places  rendaient  à  D.  Poirier 
quelque  aisance.  II  n'en  vécut  pas 
moins  avec  économie,  et  l'on  s'est 
aisstiré  après  sa  mort  que  tout  ce 
qu'il  av.iil  recouvré  était  pour  les 
pauvres  :  elle  fut  imprévue.  Le  5 
février  i8o5,  lorsqu'on  entra  dans 
sa  chambre,  il  était  sans  vie.  D(»m 
Poirier  a  publié  :  1°  Le  1  1'  volume 
delà  Nouvelle  collection  //es  Itisto- 
riensdes  Gaules  et  de  France,  avec 
<lom  Précieux  et  dom  Husseau  , 
I  j6^;  2"  ilaconcoui  Ui'i  l'édition  de 
VArt  de  ccrifier  les  dates,  3voI.  in  f", 


POI 

1783-1792;  3°  il  eut  la  part  fil 
plusimportante  au  travail  fait  vers 
1780,  sous  la  direction  de  M.  le 
garde-des-sceaux ,  pour  préparer 
luie  Collection  générale  des  diplô- 
mes et  chartes  du  royaume,  à  l'ins- 
tar de  celle  de  Ilymer  pour  l'An- 
gleterre ;  4°  dom  Poirier  commu- 
niqua à  l'académie  un  grand  nom- 
bre de  Mémoires  relatifs  à  l' His- 
toire de  France;  5°  il  a  donné  un 
Examen  historique  et  critique  de 
i histoire  de  Charles  VI ,  compo- 
sée par  un  moine,  .sous  le  litre 
iï  Anonyme  de  Saint-Denis  ,ouyrà 
ge  plein  de  recherchessur  le  règne 
(le  ce  prince  ;  enfin  on  doit  à  dom 
Poirier  une  Instruction  sur  la  ma- 
nière d' inventorier  et  de  conserver 
tous  les  objets  qui  peuvent  servir  aux 
arts ,  aux  sciences  et  à  renseigne- 
ment, ouvrage  qu'il  composa  avec 
Vic(i-d'Azir ,  Paris,  an  n,  in-Zj". 
M.  Dacier,  secrétaire  perpétuel  de 
l'académie  des  inscriptions  et  bel- 
les-lettres ,  a  donné  une  Notice 
historique  sur  la  vie  et  les  ouvra- 
ges de  dom  Germain  Poirier ,  lue 
dans  la  séance  publique  de  l'insli- 
lul,  b'  vendredi  2  germinal  an 
12  (  25  mars  1804  ) ,  Paris,  1804. 
VOIRSON  ,  savant  géographe, 
chevalier  de  la  légioii-d'honneur, 
a  fouini  les  dessins  de  plusieurs 
des  meilleures  cartes  géographi- 
ques modernes.  Le  Nouvel  Atlas 
élémentaire ,  à  l' usage  de  la  jeunes- 
se,  a,  entre  autres,  été  gravé  sur 
ses  dessins  et  cvxix  de  M.  Lapic, 
son  collaborateur.  iMais  ce  qui  a 
surtout  donné  de  la  célébrité  aux 
travaux  de  M.  Poirson  ,  pour  l'il- 
lustration de  la  science  qu'il  a  cul- 
tivée toute  sa  vie,  c'est  la  confection 
de  deux  globes  terrestres  de  la  pin» 
grande  dimension,  et  d'une  exécu- 


POI 

tion  parfaite. Le  premier  se  volt  au- 
jourd'hui dan.s  la  galerie  de  Diane, 
aux  Tuileries;  il  est  de  3  pieds  3 
poucesdediamètre,elavaitété  fait 
surla  demande  de  Napoléon,  pour 
l'instruction  de  son  fils.  La  partie 
mécanique  en  a  été  exécutée  par 
M.  Pichon,  ingénieur  en  instru- 
men»  de  mathématiques,  et  artiste 
célèbre.  Le  second  globe  exécu- 
té par  M.  Poirson ,  et  auquel  il  a 
consacré  dix  années  de  travail,  a 
été  achevé  en  i8i4;  il  a  été  ac- 
quis depuis  par  le  roi,  pour  être 
placé  dans  son  cabinet.  Ce  globe 
a  5  pieds  de  diamètre,  ou  i5  pieds 
environ  de  circonférence  ,  et  sur- 
passe de  beaucoup  par  rexaclitu- 
de  mathématique  et  le  mérite  de 
l'exécution  ,  tous  les  ouvrages  de 
ce  genre  qui  se  voient  en  Europe. 
Un  rapport  de  l'institut,  conçu 
dans  les  termes  les  plus  honora- 
bles pour  l'auteur,  a  constaté  la 
perfection  de  son  travail.  M.  Poir- 
son-Delestre,  fils  du  précédent,  dif 
recteur  actuel  du  théâtre  du  Gym- 
nase, est  auteur  de  plusieurs  ou- 
vrages dramatiques.  Il  a  composé 
en  société  ,  avec  M.  Scribe,  pour 
le  théâtre  du  Vaudeville,  une  Nuit 
de  la  garde  nationale;  le  Nouveau 
Pourceaupiac  ;  une  Fisite  à  Bed- 
lain ,  etc. 

POISSAC  (le  baron  de)  ,  con- 
seiller au  parlement  de  Bordeaux 
à  l'époque  de  la  révolution,  fut  , 
en  1789,  élu  député  aux  états- 
généraux  par  la  noblesse  de  la  sé- 
néchaussée de  Tulles-,  sa  ville  na- 
tale. Ses  opinions  étaient  peu  fa- 
vorables aux  principes  que  pro- 
fessait la  majorité  de  celte  as- 
semblée, et  il  donna  sa  démission 
dès  le  mois  de  juin  de  la  même 
année  II  retourna  à  Tulles,  où  sa 


POI 


593 


présence  excita  des  troubles  qui 
l'exposèrent  aux  plus  grands  dan- 
gers, ainsi  que  M.  de  Massai,  ca- 
pitaine au  régiment  royal  de  Na-- 
varre.  La  multitude  furieuse  les 
poursuivit  jusque  dans  leurs  mai- 
sons. Ce  ne  fut  même  qu'en  les 
traduisant  en  prison  que  l'autorité 
put  les  sauver  de  la  vengeance 
populaire.  Rendu  quelques  jours 
après  à  la  liberté  .  le  baron  de 
Poissac  alla  se  réunir  aux  émigrés, 
et  est  resté  inaperçu  depuis  cette 
époque. 

POISSON  (Denis-Siméon),  sa- 
vant mathématicien,  professeur  à 
l'école  Polytechnique,  membre  de 
l'institut  et  chevalier  de  la  légion- 
d'honneur,  est  né  en  1781,  à  Pi- 
thiviers,  département  du  Loiret.  Il 
fut  nommé  professeur  de  mécani- 
que à  l'école  normale  dès  le  mo- 
ment de  sa  formation  en  1811.  Il 
devint,  en  1818,  l'un  des  mem- 
bres du  jury  chargé  par  l'univer- 
sité impériale  de  procéder  à  l'exa- 
men des  candidats,  aux  places  de 
{)rofesseurs  de  dessin  à  l'école 
royale  de  l'artillerie  de  Metz,  et 
de  répétiteurs  de  mathématiques 
aux  écoles  d'artillerie  de  Douay  et 
de  Valence.  W.  Poisson  a  publié, 
en  181  1 ,  un  Traité  de  mécanique 
en  2  volumes.  On  lui  doit  aussi 
plusieurs  Mémoires  très-intéres- 
sans  qui  se  trouvent  dans  le  re- 
cueil de  l'institut  et  dans  le  jour- 
nal de  l'école  Polytechnique.  II 
est  membre  du  conseil  royal  de 
l'université 

POISSON  DECODDREVILLE 
(Jacqces),  né  le  6  février  1746» 
exerçait  la  profession  d'avocat  à 
l'époque  de  la  révolution,  et  de- 
vint successivement  président  du 
tribunal  de  Saint-Lô  et  aduiinis- 


594  POI 

trateur  du  déparlement  de  la  lUati- 
che.  En  1791,1!  fut  élu  député  du 
même  dépaileinent  à  l'assenil)lée 
Jéj^islative,  puis,  député  ù  la  con- 
vention nationale  dans  le  mois  de 
septembre  de  l'année  suivante.  M. 
Poisson  de  Coudievilie  vola  la 
déteation  de  Louis  XVI  pendant 
la  guerre  et  le  bannissement  de  ce 
prince  à  la  paix.  Du  reste,  on  le 
remarque  peu  dans  celte  session, 
après  laquelle  il  passa  au  conseil 
des  anciens,  dont  il  lit  partie  jus- 
qu'au ao  mai  1797,  en  sortit  alors, 
et  fut  réélu  aussitôt.  Le  ai  avril 
1798,  nommé  président  du  con- 
seil, et,  dans  le  mois  de  décembre 
de  l'année  suivante,  membre  du 
corps-législatif  sous  le  gouverne- 
ment con>ulaire,  il  fut  appelé,  en 
i8o4'.  aux  fonctions  de  procureur- 
général  près  de  la  cour  criminelle 
du  département  de  la  Manche.  Ses 
t.oncitoyer)s  ie  nonmièrenl,  peuv 
dant  les  cent  jours  an  i8i5,  mem- 
bre de  la  chambre  des  représenlans. 
lU.  Poisson  pariât  avoir  reçu  sa  re- 
traite après  la  seconde  restauration. 
POISSON  îSIEIV(Pie--.re-L>;aac), 
médecin  et  chimiste,  merrdjre  de 
l'académie  <\\iis  sciences,  naquit 
à  Dijon,  département  de  la  Côte- 
d'Or,  le  5  juillet  1720.  Il  commença 
ses  études  sous  la  direction  de  son 
père,  pharmacien  distingué,  et 
vint  les  terminera  Paris.  Il  reçut, 
en  174^),  le  grade  de  docteur  en 
médecine,  et,  en  1749»  il  fut  au- 
torisé parle  gouvernement  à  rem- 
placer Dubois  dans  la  chaire  de 
professeur  de  chimie  au  collège 
de  France.  On  j)eut  donc  ie  con- 
sidérer comme  l'un  des  premiers 
qui  ouvrirent  un  cours  public  de 
cette  science  dans  la  capitale.  En 
1754^  Helvétius,  père  de  l'écri- 


POÎ 

vain  célèbre  de  ce  nom,  choisit 
Poissonnier  pour  le  suppléer  dans 
l'exercice  de  ses  fonctions  d'ins- 
pecteur des  hôpitaux  militaires  , 
auxquelles  son  grand  âge  et  ses 
infirmités  ne  lui  permettaient  plus 
de  se  livrer  (Helvétius  mourut  peu 
de  temps  après).  Poissonnier  ob- 
tint la  place  de  premier  médecin 
des  armées ,  et  celle  de  médecin 
consultant  du  roi.  A  la  fin  de  1758, 
le  gouvernement  français  le  char- 
gea de  se  rendre  en  Russie,  en  ^ 
apparence  pour  y  contribuer  au 
rétablissement  de  la  santé  de  l'im- 
pératrice Elisabeth ,  mais  bien  réel- 
lement pour  s'occuper  avec  cette 
princesse  de  négociations  secrè- 
tes. La  czarine  accueillit  Poisson- 
nier de  la  manière  la  plus  favora- 
ble, et  ce  qui  paraîtra  sans  doute 
èlrange  ,  c'est  qu'elle  donna  au 
médecin  français  le  titre  de  lieu- 
tenant-général de  ses  armées, 
titre  qui  seul  ,  d'après  l'étiquette 
.russe,  pouvait  le  faire  admettre  à 
la  labié  de  cette  souveraine  ,  dont 
il  éprouva  la  faveur  pendant  un 
séjour  de  deux  ans  à  Saint-Péters- 
bourg. Il  avail  rempli  avec  suc- 
cès la  mission  dont  l'avait  chargé 
la  cour  de  Versailles,  lorsque  fati- 
gué de  son  rôle  politique  ,  il  solli- 
cita et  obtint  son  retour  en  Fran- 
ce ,  malgré  tous  les  moyen'»  em- 
ployés par  l'impératrice  pour  le 
retenir.  Comblé  de  dons  et  de  té- 
moignages d'estime  ,  Poissonnier 
revint  à  Parisen  17^)1. 1!  fut  pour- 
vu d'ime  place  de  conseiller  d'é- 
tat. Le  duc  de  Choiseiil  qui  avait 
mis  constamment  ses  dépêches 
sous  les  yeux  de  Louis  XV,  et  qui 
savait  cond)ien  ce  monarque  était 
satisfait  de  la  conduite  de  Poisson- 
nier, l'engagea  à  se  consacrer  en- 


POI 

tièrement  à  la  diplomatie  ,  mais  il 
ne  put  l'y  dtiteiminer.  Alors  il  le 
fit  nommer  iiispecleur-général  de 
médecine  ,  chirurgie  et  [iharma- 
cie  des  colonies.  Il  en  exerça  les 
lonctions  plusieurs  années;  ses 
services  et  ses  expériences  pour 
dessaler  l'eau  de  la  mer,  lui  valu- 
rent une  pension  de  i  2,ouo  livres. 
Poissonnier  jouissait  en  paix  au 
sein  de  sa  famille  d'une  fortmie 
honorablement  acquise,  quand  la 
révolution  éclata.  Apprenant,  en 
1791,  qu'où  Tavait  inscrit  sur  la 
liste  des  membres  du  club  mo- 
narchique, il  réclama  contre  cette 
inscription,  dans  une  lettre  qu'il 
rendit  publique,  et  déclara  qu'il 
ne  voulait  porter  la  livrée  d'aucun 
parti.  Plus  tard,  il  fut  arrêté  avec 
sa  fennne  et  son  lils  ,  et  renfernié 
dans  la  maison  de  détention  de 
Saint-Lazare,  dont  il  ne  sortitqu'a- 
près  la  chute  de  Robespierre.  Pois- 
■ionnier  perdit  sa  femme  quelques 
années  après,  et  mourut  de  la  dou- 
leur que  lui  causa  cette  perte  ,  le 
i5  septembre  1798.  Il  était  njem- 
bre  de  pre>que  toutes  les  sociétés 
savantes  de  l'Europe,  et,  depuis 
1765,  associé  libre  de  l'académie 
des  sciences.  Son  Eloge  fut  pro- 
noncé par  M.  Sue,  à  la  séance  de  la 
société  de  médecine,  et  l'on  trou- 
ve dans  le  Magasin  encyctopd clique, 
J^"  année,  1798,  tome  IV,  une 
police  sur  sa  vie.  par -Laliuide. 
Les  ouvrage  publiés  par  Poisson- 
nier ne  soni  pas  nombjeux,  mais 
ils  sont  estimés.  On  distingue  : 
1°  hssai  sur  ks  moj  eus  de  dessa- 
ler l'eau  de  la  mer  ;  a"  Traité  des 
maladies  des  gens  de  mer  ;  5"  Abré- 
gé d'anatoinie,  à  l'usage  des  élèves 
rf«  chirurgie  dans  les  écoles  royales 
uuirine. 


roi  395 

POITEVIN    DE   MAISSEMY 

(Charles),  membre  de  la  légion- 
d'honneur,  ué  a  Tirlancourt  en 
1702,  était  maître  des  requêtes  à 
l'époque  de  la  révolution.  Il  en 
adopta  les  principes,  mais  il  évita 
d'abord  de  prendre  part  aux  affai- 
res publiques  ,  et  ce  ne  fut  qu'a- 
près la  révolution  du  9  thermidor 
an  2  (27  juillet  1794),  qu'il  fut 
nommé  administrateur  du  dépar- 
tement de  la  Somme.  Au  mois 
d'avril  1800,  il  obtint  la  préfec- 
ture du  département  du  Pas-de- 
Calais,  où  la  sagesse  de  son  admi- 
nistration, en  adoucissant  une  par- 
tie des  maux  que  le  régime  de  la 
terreur  y  avait  causés,  lui  concilia 
l'estime  générale.  Victitne  de  quel- 
ques intrigues  obscures,  il  fut  ap- 
pelé, en  iHo5,  de  la  préfcctare  du 
Pas-de-Calais  à  celle  du  Mont- 
blanc.  Il  s'y  fit  bientôt  connaître 
par  son  esprit  conciliateur,  son 
impartialité,  sa  justice,  et  emporta 
les  regrets  i\cs  habita n s  de  ce  pays 
lorsqu'en  1810  il  le  quitta  pour 
aller  administrer  de  nouveau  le 
département  de  la  Somme.  Eu 
181 3,  M.  Poitevin,  à  qui  son 
âge  avancé  et  les  fatigues  d'une 
longue  administration  rendaient 
le  repos  nécessair»;  ,  quitta  ses 
fonctions  et  se  retira  au  sein  de  sa 
famille. 

POITEVIN  DE  MAUREILLAN 
(lE  VICOMTE  Casimir),  lieutenant- 
général,  fil,  avec  distinction,  les 
premières  campagnes  de  la  révo- 
lution ,  et  se  lit  remarquer  plus 
particnlièn'inent  à  la  prise  de  l'île 
de  Cassandria,  le  28  juillet  «794» 
Son  nom  fut  ahn's  mentionné  Uo-r 
norablcment  au  procès-verbal  de 
la  convention  nationale.  l\l.  Poitt-r 
vin  de  Mauieillan  était  déjà  coio- 


596  roi 

nel  du  génie  lorsque  .»a  belle  con- 
duite à  la  bataille  d'Austerlitz  lui 
valut  celui  de  général  de  brigade. 
Il  fut,  peu  de  temps  après,  nom- 
mé inspecteur- général  des  iorti- 
fications.  Erv  1812  ,  il  fit  par- 
tie de  l'expédition  de  Russie  , 
et  se  distingua  de  nouveau  à 
la  bataille  de  la  Moskowa.  Après 
la  désastreuse  retraite  de  îlloskou, 
on  lui  confia  le  commandement 
de  Tliorn.  Il  fit  tout  ce  qu'il  lui 
fut  possible  pour  mettre  cette 
place  en  état  de  défense  ,  et  s'y 
maintint  jusqu'au  6  avril  i8i5  ; 
mais  alors  il  fut  obligé  de  la  ren- 
dre à  l'ennemi  ,  n'ayant'  avec  lui 
que  des  troupes  étrangères  peu 
affectionnées  à  la  France  et  livrées 
à  l'indiscipline.  Ce  fâcheux  résul- 
tat mécontenta  beaucoup  l'empe- 
reur, qui  prétendit  que  le  général 
roitcvin  n'avait  pas  fait  assez  de 
résistance,  et  ordonna  que  sa  con- 
duite fût  examinée.  Depuis  cette 
époque,  il  resta  sans  commande- 
ment jusqu'au  retour  du  roi,  qui 
le  promnt  au  grade  de  lieutenant- 
général  le  26  avril  181 4.  Il  fut  , 
dans  le  courant  de  la  mêuje  an- 
née, nommé  chevalier  de  Saint- 
Louis  et  commandeur  de  la  légion- 
d'honneur,  puis,  chargé  de  tracer 
sur  divers  points  du  royatune  la 
nouvelle  ligne  de  démarcation  des 
frontières.  M.  Poitevin  de  Mau- 
reillan  a  fait  la  campagne  de  1S25, 
r.n  Espagne  ,  comme  lieutenant- 
général  .  inspecteur  du  génie. 

POITEVIN  PEITAYI  (Philip- 
pe-Vincent), naquit  à  Alignon-du- 
Vent,  départeiuenl  de  lllérault, 
en  17/12  ;  il  se  fit  recevoir  avocat 
au  parlement  de  Toulouse,  mais 
ne  se  distingua  pas  par  l'éloquence 
de  ses  discours.  Ladilfusion  de  ses 
mémoirei  et  son  peu  de  connais- 


POI 

sance  en  droit  civil  et  en  droit  ca- 
non, l'obligea  de  chercher  ailleurs 
la  forluueet  la  considération.  IlleS' 
trouva  en  partie  dans  la  littérature 
et  dans  les  protecteurs  qu'il  sut  ha- 
bilement se  donner.  Attaché  à  plu- 
sieurs maisons  parlementaires  de 
Toulouse ,  il  passa  sa  vie  à  les 
louer,  et  son  dévouement  ne  se 
démentit  jamais.  Quelques  cou- 
plets bien  tournés,  la  géographie 
mise  en  vaudeville  comme  Masca- 
rille  voulait  faire  de  Thistoire  ro- 
maine, lui  acquirent  une  réputa- 
tion que  rien  n'a  soutenue;  car,  a- 
vant  sa  mort,  il  avait  livré  au  feu 
le  manuscrit  de  ces  légers  ouvra- 
ges. Emprisonné  en  1794»  rendu 
plus  tard  à  la  liberté,  il  entreprit 
la  défense  de  plusieurs  royalistes 
arrêtés  les  armes  à  la  main  durant 
l'insurrection  du  Midi  en  i7f>9. 
Vivement  secondé  par  M.  Cam- 
bacérès,  qui  déploya,  en  cette 
circonstance  ,  un  noble  caractère 
en  luttant  pour  des  infortunés 
contre  le  pouvoir,  Poitevin  atta- 
cha son  nom  à  une  belle  action. 
Ce  fut  la  plus  parfaite  de  ses  œu- 
vres. Elu  secrétaire- perpétuel  de 
l'académie  des  jeux  floraux,  il  vou- 
lut écrire  l'histoire  do  sa  compa- 
gnie ;  l'entreprise  était  au-dessus 
de  ses  forces  ;  il  ne  donna  qu'un 
narré  sec  et  fastidieux,  tandis 
qu'il  était  possible  de  porter  un 
vif  intérêt  dans  une  production  à 
laquelle  pouvait  se  rattacher  toute 
l'histoire  littéraire  de  l'Occitanic. 
Poitevin  mourut  en  1818.  On  a  de 
lui  :  I"  Mémoires  pour  servir  à. 
l' Histoire  des  jeux  floraux,  2  vol. 
in-S",  i8i5,  Toulouse;  2"  Notice 
historique  sur  Benoit  d'AUgnon, 
crcque  de  Marseille;  3'  des  Cou- 
plets, âes  Eloges,  etc.;  l\°  quel- 
ques Faclums,  etc. 


POL 

POLI  (François- Xavieu)  ,  cé- 
lèbre naturalisle  italien,  lieiitc- 
iiaiit-coloncl,  chevalier  de  l'ordre 
de  Saint-Ceorges ,  membre  de  la 
société  royale  de  Naples,  de  celle 
de  Londres,  etc. ,  naquit,  en  ir/\G, 
à  MoU'etta,  une  des  grandes  villes 
de  la  Pouille.  Attiré  par  la  célé- 
brité dont  jouissait  alors  l'univer- 
sité de  Padoue,  il  obtint  de  ses 
parens  la  permission  de  s'y  ren- 
dre pour  y  achever  ses  éludes. 
Facciolati ,  Poleni  ,  Worgagni, 
Toaldo,  Valsecchi,  Valisnieri  lils, 
Cesarotli  et  d'autres  ,  présen- 
taient dans  cette  ville  le  spectacle 
peu  commun  d'une  réunion  de 
grands  hommes,  se  livrant  à  l'ins- 
truction de  la  jeunesse.  M.  Poli 
voulut  profiterdes  travaux  de  tous, 
et  comme  si  rien  ne  devait  lui  être 
inutile,  tout  lui  parut  uécessaire. 
De  retour  à  Naples,  il  tut  chargé 
de  donner  im  cours  de  physique 
à  l'université  de  cette  ville,  et  un 
autre  de  géographie  et  d'histoire 
à  l'académie  militaire  ,  qui  por- 
tait alors,  sous  les  ordres  immé- 
diats du  roi,  le  nom  de  Bataillon 
royal  Ferdinand.  Use  trouva  par- 
là  engagé  dans  la  carrière  militai- 
re, avec  le  grade  de  sous-licute- 
naul.  Envoyé  peu  après  à  Lon- 
dres pour  y  faire  l'acquisition  de 
plusieurs  iostrumens  indispensa- 
bles pour  ses  expériences,  il  eut 
l'avantage  d'y  connaître  lessavans 
les  plus  distingués,  entre  autres 
Banks ,  Forst^ r,  Solander,  et  la 
jtliiparl  de  ceux  qui  acconjpagnè- 
reut  Cook  dans  son  voyage  autour 
du  mond»;.  Il  inspira  à  tous  une  si 
favorable  opinion  de  ses  talens  , 
qu'on  le  crut  digne  d'appartenir  à 
la  société  royale  de  Londres,  dont 
il  fut   déclaré    utembre   ordinaire 


POL 


^9: 


(home  mcmber),  distinction  aussi 
rare  qu'honorable  pour  un  étran- 
ger. En  quittant  l'Angleterre  ,  M. 
Poli  se  dirigea  vers  la  Hollande  et 
l'Allemagne  ,  qu'il  voulut  encore 
revoir,  lorsque  associé  au  duc  do 
Gravina  pour  une  mission  extra- 
ordinaire auprès  de  la  cour  de 
France,  il  l'ut  obligé  de  franchir 
une  seconde  fois  les  Alpes,  (l'est 
en  revenant  de  ce  dernier  voyage 
qu'il  fut  nommé  instituteur  du 
prince  héréditaire  de  ÎNaples,  et 
attaché  à  l'éducation  des  princes- 
ses ses  sœurs.  Dès  ce  moment , 
M.  Poli  ne  s'est  plus  séparé  de 
son  royal  élève ,  qu'il  a  suivi 
en  Sicile,  dans  les  deux  voyages 
que  la  cour  de  iSaples  y  a  faits, 
pour  se  mettre  à  l'abri  des  inva- 
sions françaises.  J>1.  Poli  a  été 
quelque  temps  à  la  tête  de  l'aca- 
démie militaire,  de  l'école  des  pa- 
ges, et  du  cabinet  minéralogiquc 
de  Maples.  Ami  des  sciences  et 
des  arts,  il  a  profité  du  peu  d'in- 
fluence qui  lui  a  été  accordée  jus- 
qu'à présent,  pour  coopérer  à  leur 
avancement  dans  un  pay^.oi'i  tout 
est  en  rétrogradation.  C'est  à  ses 
soins  éclairés  qu'on  doit  la  fon- 
dation d'une  chaire  de  minéralo- 
gie, le  premier  essai  d'un  jardin 
botanique,  l'introduction  de  lama- 
cbine  pour  vider  les  canons,  d'une 
Irouîbe  hydraulique  à  vapeur  , 
j)ou  rélever  les  eaux  du  Vol  turne,  et 
de  deux  grands  cylindres  en  acier 
pour  laujiner  les  planches  de  cui- 
vre à  l'usuge  de  la  marine.  Il  s'é- 
tait occupé,  dans  ses  voyages,  de 
rassembler  une  grande  quantité 
d'objets  d'histoire  naturelle  ,  par- 
mi lesquels  la  série  des  lestacées 
était  le  plus  remarquable.  Celle 
CDlleglion,  achetéa  j»ar  le  gotiver- 


neinent  de  Naples,  a  reçu  le  nom 
de  musée  Poliano  ,  qui  doit  en 
nippeler  l'origine.  M.  Poli  pos- 
sède maintenant  un  riche  cabinet 
de  ir>onnai(;s  grecques  et  romai- 
nes, dont  il  se  propose  de  publier 
le  catalogue  raisonné.  Sons  le  ré- 
gimecoiislitutiunnelàiNapleSjil  fut 
porté  par  les  sulfr.iges  de  ses  conci- 
toyens, au  conseil-d'état,  dont  il 
fut  le  premier  président  d'iîge. 
Ses^uvrages  sont  :  i"  Testacea 
utriasque  Siciliœ  forumque  liisto- 
ria  et  analonie  ,  l'arnie  ,  1792,  2 
vol.  in-tol.  ,  snpeibe  édition  de 
Bodoni,  ornée  de  Sj)  planches, 
dont  il  y  a  des  exemplaires  enlu- 
minés. Ce  travail,  pour  lequel  de- 
puis long-temps  les  amateurs  de 
la  nature  adressaient  inutilement 
leurs  vœux  aux  savans  italiens  , 
fut  entrepris  par  l'auteur  .  après 
avoir  lu  les  reproches  que  Born 
et  Pallas  faisaient  aux  nalm'alistes 
des  côlcs  de  la  Méditerranée  et  de 
l'Adriatique,  de  n'accorder  au- 
cune ititenlion  aux  mollusques 
renfermrs  dans  les  coquillages  de 
leurs  m*rs,  et  dt;  se  borner  dans 
ieurs  écrits  sur  la  cont  hioli.gie,  à 
l'A  sinjple  description  des  coquil- 
les qui  constituent,  sans  aucun 
doute ,  la  partie  la  moins  noble  de 
celte  espèce  d'animaux.  Excité 
par  c^  plaintes,  M.  Poli  conçut 
Je  plan  de  son  ouvrage,  dont  les 
deux  premiers  volumes  lui  ont 
coûté  douze  années  de  recher- 
ches. Le  trnisièuje  est  très-avan- 
cé; et  sans  les  événemeos  po- 
litiques arrivés  dans  la  pairie 
de  l'auteur,  et  qui  l'ont  obligé 
deux  fois  de  s'en  éloigner,  le  pu- 
l)lic  serait  en  possession  de  cette 
dernière  partie ,  dont  plusieurs 
planchés  sbnt  <léjà  gravées.   Elle 


PDL 

comprendra  la  classe  des  univial- 
ves,  qui  est  la  plus  belle  et  la  plus 
jiarfaite  de  toutes.  2°  Etementi  di 
fisica  sperimentale,  5  vol.  in -8", 
fig.  On  vient  d'en  donner  une 
sixième  édition ,  enrichie  de  plu- 
sieurs importantes  additions.  3° 
Memoria  sul  tremuoto ,  in-8°;  4* 
Rniiionamento  intorno  allô  studio 
délia  natura,  Naples,  1781,  in-4°; 
5°  Lezloni  di  geografîa  e  di  t^toria 
mditare ,  2  vol.  10-8°;  6"  Forma- 
zione  Uel  tuono,  délia  foUore  e  di 
altre  metcore.  in -8°;  7"  Rifessioni 
intorno  agli  effetli  di  alcuni  fulmi' 
ni,  in- 8";  8°  Brève  saggio  s  alla  ca' 
lamita  e  sulla  sua  virtù  medicinaley 
ibid.,  i8i5,  in -8°;  9*  Saggio  di 
poésie  ilaliane  e  siciliane ,  Paler- 
me ,  4  vol.  in-8'.  Dej)uis  que  ce 
recueil  a  paru ,  l'auteur  a  compo- 
sé plusieurs  autres  poésies  ita- 
liennes, siciliennes  et  napolitaines, 
qui  peuvent  l'ournir  l;i  matière  de 
deux  autres  volumes.  10°  Viag- 
gio  céleste  ,  2  vol.  iii-S".  Dans  ce 
j)oën)e  en  oltava  rima,  l'auteur  a 
exposé  le  système  céleste,  en  se 
servant  du  langage  allégorique  de 
la  mythologie.  Il  s'occupe  d'un 
autre  poiime  qui,  sous  le  litre  de 
Viaggio  sotterraneo,  donnera  une 
iilée  de  ce  qui  est  enseveli  dans 
les  entrailles  de  la  terre  ,  et  des 
phénomèn(;s  qui  en  résultent.  Plu- 
sieurs de  ses  dissertations  ont  élé 
insérées  dans  les  Opuscoti  scelti 
de  Milan. 

P()LIER(  LE  COLONEL   AnTOIÎîE- 

Louis-Henri  de  )  ,  meiid)re  de  la 
société  asiatique  de  Calt;uUa,  na- 
quit à  Lausanne,  en  174'  ,  d'ime 
famille  française  d'origine  noble  , 
qui  s'était  fixée  en  Suisse.  Il  é- 
prouva  très-jeune  le  désn- de  pas- 
.ser  dans  l'Inde ,  et  dès  1756 ,  il  se 


POL 

rendit  en  Angleterre  pour  y  atten- 
dre une  occasion  favorable  :  elle 
s'oflVit  deux  ans  après,  et  il  partit 
pour  Cal.  ul la,  où  commandait  un 
de  ses!  oncles  ;  mais  à  son  arrivée, 
le  comnicindant  venait  d'être  tué 
en  défendant  la  place.  Admis  com- 
me cadet  au  service  de  la  compa- 
g:)ie  anj(Iai-;e,  il  combattit  d'abord 
les  Français  sur  la  côte  d'Orixa, 
et  fut  envoyé  ensuite  contre  les 
radjahs.  Pendant  cette  dernière 
campagne,  ses  connaissances  en 
mathématiques  Im'  avaient  mérité 
l'ernjiloi  d'ingénieur,  et  à  son  re- 
tour à  Calcutta  .  il  devint  succes- 
sivem(înl  inspecteur  de  la  place  et 
ingénieur  en  chef.  Son  origne  é- 
trangére  lui  fit  éprouver,  en  1 762  , 
une  première  injustice,  à  laquelle 
toutefois  il  se  montra  peu  sensi- 
ble. Ln  officier  anglais,  récem- 
ment venu  d'Europe  ,  le  remplaça 
dans  l'emploi  supérieur  qu'il  0( - 
cnpait.  Polier  envoyé  contre  Son- 
ja oui- Doula,  puis  contre  les  Mar- 
halles,  se  distingua ,  fut  nommé 
major  dans  l'armée  du  général 
Clives,  commanda  avec  succès  un 
corps  de  Cipayes ,  et  regagna  par 
ses  services  la  place  dont  il  avait 
été  privé  par  l'arrivée  de  l'officier 
anglais.  Bientôt  il  réunit  à  l'em- 
ploi d  ingénieur  en  chef  de  Cal- 
cutta, celle  de  commandant  des 
troupes  de  la  garnison.  Il  al  tendait 
«ti;  Londres  le  brevetde  lieutenant- 
colonel  ,  aucpiel  ses  services  lui 
donnaient  droit.  Non  -  seulement 
celle  même  origineétrangère  le  lui 
fit  refuser,  njais  encore  les  direc- 
teursde  la  compagnie  angl.iise  en- 
■vf)yèrent  l'ordre  de  relarder  son 
nvaiiceuïent.  Le  conseil  du  Ben- 
gale et  le  gouverneur  -  général 
iiaslings  (  voy.  ce   nom),  qui  le 


POL  590 

protégeaient  et  l'avaient  fortement 
recommandé,  ne  purent  éluder 
la  volonté  des  directeurs  ;  mais  ils 
laissèrent  iy  Policr  la  liberté  de 
pa'^ser  au  service  de  Sonja  -  oul- 
Donla  ,  nouvel  allié  de  l'Angleter- 
re. Il  se  rendit  à  Feizabad,  et  de- 
vint architecte  et  ingénieur  en  chef 
du  prince  indien  .  (pii  sut  bientôt 
apprécier  le  mérite  de  Polier,  et 
l'emuïena  avec  lui  dans  ses  expé- 
ditions guerrières  conlre  plusieurs 
princes  ses  voisins.  La  faveur  dont 
Polier  jouissait  près  de  Souja-oul- 
Doula,  s'augnienta  encore  par  la 
prise,  en  moins  de  20  jours,  delà 
place  fortifiée  d'Agra  ,  qu'un  des 
alliés  de  Sonja  assiégeait  inutile- 
ment dejiuis  plusieurs  mois  ,  et 
auquel  le  prince  indien  avait  four- 
ni avec  regret  plusieurs  corps  de 
troupes,  (^e  prince  mourut  et  eut 
pour  successeur  son  fi!s  Azef-oul- . 
Doula.  Celui-ci  traitait  l'oflicier 
étranger  avec  une  exirt'me  bien- 
veill.ince  et  le  consultait  souvent. 
Le  nouveau  conseil  du  Bengale  en 
conçut  de  la  jalousie,  et  rappela 
Polier  à  Calcutta ,  sous  le  prétexte 
qu'il  n'avait  pas  cesséd'èlre  au  ser- 
vice de  la  compagnie  anglaise.  Il 
obéit;  mais,  dès  son  arrivée,  il 
donna  sa  démission  de  ce  service, 
et  retourna  .en  1770,  près  d'Azef, 
qui  lui  rendit,  et,  peu  de  temp» 
après,  lui  retira  ses  emplois  par 
suite  de  rinfluencedes  agens  de  la 
compagnie  anglaise.  Polier  avait 
adopté  les  coulinnes  et  les  usages 
des  ludous,  et  méritait  parla  l'ailec- 
tion  de  ces  peuples.  Sans  emploisv 
il  n'en  vivait  pas  moin?  au  miliert 
d'eux  lorsque  Azef-  oui- Doula  se 
vil  contraint  de  lui  enjoiruire  de 
s'éloigner  de  ses  étal'*.  Polier  se 
rendit    à    Dehiy ,   oOr  l'empereur 


4oo 


POL 


Chah-Aalum ,  qu'il  connaissait  de- 
puis 1761,  l'accueillit  bien,  et  lui 
confia  le  coinmandeinent  d'un 
corps  de  7000  hommes;  et,  en 
l'élevant  au  rang  d'omrah,  lui 
donna  en  propriété  le  territoire  de 
Kaïr.  Polier  soutint  avec  avantage 
le  rang  et  la  faveur  dont  Chah- 
Aalum  l'avait  honoré;  il  entreprit 
plusieurs  expéditions  contre  des 
sujets  rebelles  de  l'empereur,  et 
mérita  de  nouvelles  récompenses. 
Sa  mauvaise  fortune  reprit  le.  des- 
sus. Les  vassaux  des  dernières 
terres  qu'il  tenait  de  la  munifi- 
cence de  Chah-Aalum  méconnu- 
rent son  autorité,  et  la  guerre  qu'il 
entreprit  contre  eux,  pour  son 
propre  compte,  et  qu'il  lit  diriger 
successivement  par  plusieurs  offi- 
ciers qui  turent  tués  ou  mis  en 
fuite,  lui  o'cusiona  des  dépenses 
trop  considérables  pour  qu'il  pût 
les  soutenir  long-temps.  Il  se  dé- 
termina à  renoncer  à  ses  posses- 
sion.-,ctà  continuerson  serviceau- 
près  de  Chah-Aalum.  Une  intrigue 
de  cour,  qui  faillit  lui  être  funes- 
te, le  détermina  à  quitter  Dehly. 
J.e  changement  du  conseil -géné- 
ral de  la  compagnie  ariglaise  ,  et 
l'arrivée  dans  l'Inde  du  général 
Coote  ,  son  ami ,  lui  permirent  de 
rentrer  au  service  de  la  compa- 
gnie. Il  suivit  le  général  à  Béna- 
rès ,  et  parcourut  avec  lui  les  pro- 
vinces voisines.  Coote,  par  son 
crédit,  obtint  d'Azef-oul-Doula  la 
réintégration  de  Polier  dans  les 
emplois  qu'il  occupait  précédem- 
ment près  de  ce  prince;  mais  de 
nouvelles  intrigues  pratiquéescon- 
tre  lui ,  les  lui  ravirent  pour  la  se- 
conde lois.  Hastings  lui  conser- 
vitit  toute  sa  bienveillance;  il  le 
fit  noiwmer  lieutenant -colonel  et 


POL 

en  même  temps  dispenser  de  res- 
ter au  service.  «  Polier,  dit  l'au- 
teur d'une  Notice  sur  cet  olficier, 
se  relira  à  Luckuau  afin  d'_y  mettre 
ordre  à  ses  afi'aires  ;  il  employa 
ses  loisirs  à  rédiger  des  mémoires 
historiques  qu'il  avait  composés 
pour  Coote  ,  surtout  ceux  qui  con-. 
cernaientl'histoircdes  Séikhs.  Ses 
recherches,  à  cet  égard,  le  con- 
duisirent à  étudier  à  fcmd  la  reli- 
gion et  l'histoire  des  Indous.  Déjà 
il  possédait  bien  l'ourdouzébaïnou 
langue  vulgaire  de  l'Indoustan. 
Kam  -  Tchouud  ,  savant  Pandil- 
Séikh  ,  qui  avait  été  l'instituteur 
du  célèbre W.  .Jones,  devint  celui 
de  Polier,  qui  le  prit  chez  lui  et 
qui  écrivit ,  sous  sa  dictée,  le  pré- 
cis des  principaux  livres  sacrés 
samscrits;  de  sorte  qu'il  en  résulta 
nu  système  complet  de  mythologie 
des  Indous,  tel  qu'il  a  existé  dans 
toutes  ses  variations,  et  qui,  en- 
visagé sous  un  meilleur  point  de 
vue,  était  très -différent  de  l'idée 
que  l'on  s'en  formait  en  Europe. 
Le  travail  terminé  fut  soumis  à  des 
brahmines  et  ;'i  des  pandits  qui  en 
constatèrent  l'exactitude.  F'olier 
quitta  l'Inde,  en  1788,  et  rentra 
dans  sa  pairie  après  une  absence 
de  plus  de  5o  années.  Il  était  de- 
puis quelque  temps  marié  et  fixé 
à  Lausanne,  lors  des  troubles  qui 
survinrent  en  Sui-se  par  suite  de 
la  révolution  française.  Il  es})éra 
trouver  dans  le  pays  de  ses  ancê- 
tres la  Iraiiquillité  après  laquelle 
il  aspirait;  en  1793,  il  s'établit 
dans  les  environs  d'Avignon  ,  où 
il  venait  d'acquéiir  une  propriété 
considérable.  Habitué  au  luxe  a- 
siatique  ,  il  excita  ,  par  le  faste  de 
sa  manière  de  vivre,  la  cupidité 
d'une  troupe  de  brigands,  dont 


POL 

'Celte  contrée  était  alors  tributaire. 
Averti  du  danger  qu'il  courait  par 
l'assassinat  d'un  de  ses  voisins  et 
la  dévastali^)n  de  sa  niaison,  il  le 
fut  encore  par  .ses  amis ,  <jui  le 
pressaient  de  se  retirer  datis  la  vil- 
le. Il  s'y  rendait  enfin  pendant 
qu'une  portion  des  bandits  s'in- 
troduisait chez  lui,  et  que  l'autre 
se  mettait  à  sa  poursuite.  Enlevé 
par  elle  et  ramené  dans  sa  maison  , 
ily  tut  assassiné,  le  9  fcvrier  1  795, 
à  ccfips  de  sabre  et  de  crosses  de 
fusil ,  après  avoir  été  dépouillé  de 
son  argent,  de  ses  bijoux  et  de 
tout  ce  qu'il  avait  de  précieux. 
Sans  les  secours  qui,  presque  au 
même  moment,  arrivèrent  d'Avi- 
gnon, la  famille  de  cet  infortuné 
eût  éprouvé  le  même  sort;  les  bri- 
gands parvinrent  »  s'échapper  en 
laissant  une  partie  des  elVets  qu'ils 
em(>ortaieut.  Treize  d'entre  eux  , 
arrêtés  quelque  temps  après,  su- 
birent la  peine  due  à  leurs  crimes. 
La  uu)rt  funeste  de  Polier  ne  lui 
permit  pas  de  livier  à  l'iujpression 
son  ouvrage  sur  l'Inde.  Ses  ma- 
nuscrits, au  nombre  de  4^7  <!'*<)- 
lies,  persans,  induustans  et  sams- 
crits,  ont  été  cédés  par  son  fils  à 
la  bibliothèque  du  Koi.  Lors  de 
son  arrivée  eu  France,  l'olier  a- 
vait  remis  à  M.  Langlès  ,  par  suite 
^l'échange,  son  manuscrit  des  Ins- 
titdte.s  (le  l'empereur  A  khar,  connu 
sous  le  nom  d'Àjee/i  Akbery,  ou- 
vrage capital  et  Irès- précieux.  II 
avait  aussi ,  loug-leujps  aupara- 
vant, envoyé  la  copie  des  Vedas, 
eij  1 1  vol.  in-f". ,  à  sir  Jos.  Banks, 
pour  êire  réunis  à  la  collection  du 
Muséum  britannique.  i\l""=  la  cha- 
noinessede  Polir!r,sa  parente^  ?;(y. 
l'article  suivant) ,  publia  ,  d'après 
les  manuscrits  aiiglais  qu'il  lui  a- 

T.    XVI. 


POL  401 

vait  confiés,  une  Mythologie  des 
Itidous,  Paris,  2  vol.  in-8%  1809. 
«  iMalheureusement,  dit  l'auteur 
de  la  notice  que  nous  avons  citée  , 
M""'  de  Polier  crut  devoir  modifier 
le  fond  de  ce  livre,  et  présenta 
un  grand  nombre  de  faits  d'après 
ses  idées  particulière».  Ce  traité  a 
perdu  par-là  l'importance  qu'il  de- 
vait avoir  pour  le  sujet  qu'il  em- 
brasse, et  ne  peut  pas  faire  auto- 
rité. » 

POLIER  (  iMakie- Elisabeth 
de),  chanoinesse  du  Saint-Sépul- 
cre, née  le  12  mai  i74'^?  s'est  fait 
connaître  par  la  traduction  de  dif- 
férens  ouvrages,  dont  voici  les 
principaux  :  1  "Antoine,  anecdote 
allemande,  1783,  ih-ia;  2°  A- 
ventures  d'Edouard  Bomston  , 
pour  servir  de  suite  à  la  iNouvel- 
le-Hél()xse,  178G,  in-8°;  5°  le 
Club  des  Jacobins,  ou  l'Amour  de 
la  patrie,  comédie  en  un  acte, 
traduite  de  l'allemand  d'Auguste 
de  Rotzbiie,  et  mise  eu  deux  ac- 
tes, 1792,  in-8°;  ê^"  la  Sylpliydêy 
ou  l' Ange  gardien,  nouvelle,  tra- 
duite de  l'anglais,  de  la  duchesse 
de  Devonshire,  '795,  in-12;  5' 
Eugénie,  ou  la  Résignation,  anec- 
dote .  traduite  de  l'allemand,  de 
Sophie  de  la  Roche,  1795,  in-12; 
G"  le  Pauvre  aveugle,  traduit  de 
l'allemand,  s 801,  2  vol.  in-12. 
Indépendamment  des  ouvrages 
que  xwn-r:  venons  de  citer,  i\l°"  de 
Polier  a  jiublié  en  180g,  mais 
mutilée,  la  Mythologie  des  In~ 
dous,  2  vol.  iu-8°,  du  colonel  Po- 
lier, son  parent  {voyez  l'article  ci- 
<lessus). 

POLIGNAC  (GABRIELLE-YotAS- 
DE-CLAnDE-MAKTINK,     uéc    PoLAs- 

TivoN,  DUCHESSE  de) ,  gouvCmauLc 
des  EnJimi*  de  Franc*;,  obtint  l.i 


4o2  POL 

confiance  de  la  reine  Marie-Anloi- 
nette,  alors  dauphine.  La  duches- 
se de  Polignac  profita  de  cette 
haute  faveur  dans  l'intérêt  de  la 
famille  de  son  mari,  qui  fut  com- 
hlée  des  grâces  de  la  cour.  Il  est 
rare  que  dans  une  pareille  posi- 
tion on  n'excite  point  l'envie;  la 
favorite  l'ut  bientôt  en  butte  à  ses 
traits,  auxquels  vinrent  se  joindre 
ceux  de  la  calomnie.  Il  serait 
pourtant  injuste  de  ne  pas  répé- 
ter, d'après  ceux  qui  ont  le  mieux 
connu  M"""  de  Polignac,  qu'elle 
n'avait  que  peu  d'ambition,  et  que 
sans  les  vives  sollicitations  de  sa 
belle-sœur  Diane  de  Polignac,  el- 
le n'eût  probablement  pas  fait 
beaucoup  d'usage  de  son  crédit. 
A  l'envie  qui  animait  les  courti- 
sans contre  elle,  la  révolution, 
en  soulevant  toutes  les  passions, 
ajouta  la  haine  du  peuple,  d'au- 
tant plus  dangereuse  qu'elle  est 
souvent  aveugle.  Obligée  de  quit- 
ter la  France,  la  duchesse  de  Po- 
lignac la  traveisa,  non  sans  cou- 
rir de  grands  dangers  pour  arri- 
ver à  la  frontière.  S'ctant  rendue 
à  Vienne  avec  son  mari,  ce  der- 
nier y  devint,  auprès  de  la  cour, 
l'agent  des  princes  ,  frères  de 
Louis  XYI,  et  remplit  ensuite  les 
mêmes  fonctions  à  la  cour  de 
Russie.  C'est  dans  ce  pays  que 
mourut  M'""  de  Polignac  .  vers  la 
fin  de  i^qS-  Elle  n'était  dgée  que 
<ie  44  ^'^''  '■>  "iais  les  malheurs  de 
la  reine  l'avaient  tellement  afl'ec- 
tée,  que  celte  cause  a  pu  accélé- 
rer sa  fin.  On  cite,  comme  bien 
honorable  pour  cette  dame,  ce 
que  disait  Marie-Antoinette,  lors- 
qu'elle était  seule  avec  elle  :«  Je 
«ne  suis  plus  la  reine,  je  suis  moi.» 
POLIGNAC  (N.  DUC  dk),  pair 


POL 

de  France, est  issu  des  anciens  confi- 
tes de  Polignac,  souverains  du 
Velay,  à  l'époque  où  ce  pays,  qui 
forme  aujourd'hui  la  plus  grande 
partie  du  département  de  la  Hau- 
te-Loire, n'était  point  encore  une 
province  française;  il  émigra  a- 
vec  M"""  la  duchesse  de  Polignac 
{voy.  l'article  précédent),  dès  le 
commencement  de  la  révolution, 
et  devint  agent  des  princes,  frères 
de  Louis  XVI,  près  des  cours  de 
Vienne  et  de  Pétersbourg.  Après 
la  niort  de  sa  femme,  il  quitta  la 
Russie  pour  se  rendre  près  des 
princes,  qui  le  chargèrent  d'une 
mission  pour  l'Angleterre.  Il  pas- 
sa ensuite  dans  IX'kraine,  où  il 
possédait,  par  la  munificence  de 
Catherine  II,  une  propriété  assez 
considérable.  De  retour  en  Fran- 
ce, après  la  première  restauration, 
en  j8i4,  il  fut  nommé  par  le  roi 
membre  de  la  chambre  des  pairs. 
Le  duc  de  Polignac  mourut  le  21 
septembre  1817. 

POLIGNAC  (le  Dtc  Armand- 
Jxjles-IMarie-IIéraclius  de),  pair 
de  France,  chevalier  de  Saint- 
Louis  et  de  la  légion -d'honneur, 
premier  écuyer  et  aide-de-camp 
de  Monsieur j  frère  du  roi,  fils  aîné 
du  précédent,  né  en  1771,  était 
oflicier  de  hussards,  et  portait  le 
titre  de  comte  à  l'époque  de  la  ré- 
volution. Dès  les  premières  agita- 
tions, se  trouvant  parmi  les  grou- 
pes du  Palais-Royal,  ses  opinions 
lui  firent  courir  quelques  dangers, 
qu'il  n'évita  que  par  sa  présence 
d'esprit  et  le  secours  du  jeune 
Sombreuil,  son  ami.  Il  ((uitta  la 
France,  et  alla  rejoindre  son  père, 
après  avoir  épousé,  en  Italie,  la 
tille  du  baron  de  Nivenheim,  Hol- 
landais. Réuni  à  sa  famille  sur  les 


POL 

bords  du  Rhin ,  il  fit,  à  la  lête 
du  régiment  qui  portait  son  nom, 
les  campagnes  des  princes.  Après 
le  licenciement  de  l'armée  du 
prince  de  Condé,  il  se  rendit  eu 
Angleterre,  auprès  de  Monsieur , 
comte  d'Artois,  auquel  il  était  par- 
ticulièrement attaché.  En  i8o4, 
il  accompagna  George -Cadou- 
dal  et  les  autres  conjurés  qui 
se  reixlirent  à  Paris,  dans  l'es- 
poir, dit-on,  de  s'emparer,  à  main 
armée,  delà  personne  du  premier 
consul  Bonaparte,  et  même  de  le 
tuer.  Ce  projet  ayant  été  déjoué 
par  la  surveillance  active  de  la 
police,  Georges  Cadoudal  et  ses 
compagnons  furent  successive- 
ment arrêtés,  et  traduits  devant 
ie  tribunal  criminel,  qui,  le  lo 
juin  de  la  même  année,  en  con- 
damna plusieurs  à  mort.  De  ce 
nombre  fut  le  comte  Armand  de 
Polignac  ;  mais  son  épouse  eut  le 
courage,  quoiqu'elle  fût  alors 
très-malade  ,  d'aller  se  jeter  aux 
pieds  de  Bonaparte,  qui  depuis 
peu  avait  revêtu  la  pourpre  im- 
périale. Les  larmes  de  cette  da- 
me et  ses  sollicitations,  vivement 
appuyées  par  l'impératrice  José- 
phine, obtinrent  de  l'empereurque 
le  sentence  de  mort  serait  com- 
muée en  une  prison,  que  devait 
suivre  !;«  déportation  à  la  paix 
générale.  Il  fut  eu  conséquence 
conduit  au  château  de  Haui ,  et 
détenu  pendant  quatre  ans  dans 
cette  forteresse,  d'où  on  le  trans- 
féra au  Temple,  puis  à  Vincennes, 
où  il  demeura  encore  quatre  ans. 
Après  ce  temps  il  obtint  la  per- 
mission d'habiter  une  maison  de 
santé  au  faubourg  Saint-Jacques, 
où  déjà  se  trouvait  son  frère  le 
comte   Jules,  condamné  dans  la 


POL  4o5 

même  affaire.  lisse  lièrentl'un  et 
l'autre  avec  le  généra!  Malet  {voj. 
ce  nom),  et  participèrent  à  la  cons- 
piration de  ce  général.  iVlalgré 
l'infructueux  résultat  de  cette  en- 
treprise dont  Malet  fut  la  victime, 
le  comte  Armand  de  Polignac  et 
son  frère  ne  cessèrent  d'entretenir 
des  correspondances  avec  divers 
chefs  du  parti  royaliste,  jusqu'à  ce 
qu'enfin  ils  parvinrent  à  s'échap- 
per au  commencement  de  janvier 
1814.  Ils  se  rendirent  à  Vesoul, 
auprès  de  Monsieur^  qui  les  inves- 
tit, ainsi  que  M.  de  Somalie,  des 
pouvoirs  nécessaires  pour  agir  an 
nom  du  roi.  Le  comte  Armand 
de  Polignac  précéda  à  Paris  les 
souverains  étrangers,  et  fut,  con- 
jointement avec  son  frère,  l'un 
des  premiers  qui,  dans  la  matinée 
du  3i  avril  1814,  arborèrent 
le  drapeau  blanc.  En  181 5,  le 
comte  Armand  fut  élu  memtjre 
de  la  chambre  des  députés  par  le 
département  delà  Haule-Loire  , 
et  vola  constamment  avec  la  ma- 
jorité de  cette  chambre;  en  1816, 
il  fit  partie  du  conseil  de  guerre 
qui  jugea  le  général  Lallemand. 
En  1817,  il  prit  le  titre  de  duc, 
et  devint  pair  de  France,  par  la 
mort  de  sou  père;  le  duc  de  Po- 
lignac remplit  toujours  les  fonc- 
tions d'aide-de-camp  et  de  pre- 
mier écuyer  de  Monsieur.  Il  a  été 
nommé  ambassadeur  de  France 
près  du  gouvernement  de  la  Gran- 
de-Bretagne, en  i8a3. 

POLIGNAC  (le  comte  Jules- 
Auguste-Armand-Marie  de),  pair 
de  France,  maréchal  -  de  -  camp  , 
inspecteur-général  des  gardes  na- 
tionales de  France,  chevalier  de 
Saint-Louis  et  de  la  légion-d'hon- 
iieur,  frè-re  cadet  du   précédent, 


404  POL 

esl  né  en  i;^8o.  Il  eut  pour  mar- 
raine la  reine  Marie-Antoinette. 
Toutes  les  illusions  de  la  grandeur 
entourèrent  ^on  berceau,  niais 
bientôt  4a  révolution  vint  les  dis- 
siper. Il  suivit,  encore  enfant ,  sa 
famille  en  Russie,  d'où  il  passa 
en  Angleterre,  et  devint  l'un  des 
aides-de-canip  lie  Monsieur,  comte 
d'Artois.  En  j8o4,  il  accompagna, 
ainsi  que  son  frère,  George  Cadou- 
did  voy.  l'article  précédent  et  Ca- 
DOi'DAL.)  Arrêté  et  mis  en  jugement 
avec  les  autres  conjurés,  il  fut 
condamné  à  une  détention  de  deux 
années,  qui  fut  prolongée,  par 
l'effet  des  craintes  qu'inspirèrent 
les  intelligences  qu'il  ne  cessa  d'a- 
voir avec  les  agens  royalistes. 
Le  jugement  du  comte  Jules  of- 
fre incontestablement  leplus  beau 
trait  de  sa  vie.  Son  frère  aîné  ve- 
nait d'être  condamné  A  mort;  il 
demanda  à  mourir  a  sa  ])lace  :  «  Je 
«suis  seul,  s'écria-t-il,  sans  fortu-. 
M  ne,  sans  état,  je  n'ai  rien  à  per- 
»dre  :  mon  frère  est  marié.  Me 
«livrez  pas  au  désespoir  une  feui- 
»ine  vertueuse;  et  si  vous  ne  sau- 
«vez  pas  mon  frère,  laissez-moi 
adu  moins  partager  son  sort.  «On 
sent  bien  que  celte  deniande  ne 
pouvait  être  accueillie  des  juges; 
on  a  vu  dans  l'article  précédent, 
comment  le  duc  Armand  fut  sau- 
vé par  les  vives  instances  de  sa 
femme,  et  de  l'impératrice  José- 
phine. Après  avoir  été  transféré 
dans  diirérenles  prisons,  il  par- 
vint à  s'échapper,  et  fut ,  par  sui- 
te du  retour  du  roi ,  en  1814  ,  ré- 
tabli dans  tons  ses  honneurs  et  di- 
gnités, auxquels  on  ajouta  les  ti^ 
très  de  maréchal -de -camp,  de 
chevalier  de  Saint- Louis  et  de 
lu  légion-d  honneur.   Au  mois  de 


POL 

mai  de  la  même  année,  il  fut  en- 
voyé, en  qualité  de  commissaire 
extraordinaire  du  roi,  dans  la  lo* 
division  militaire  à  Toulouse.  11 
fut  ensuite  nommé  ministre  plé- 
nipotentiaire à  la  cour  de  Munich  ; 
mais  au  lieu  de  se  rendre  à  cette 
destination,  il  alla  à  Rome,  rem- 
plir une  nouvelle  mission  dont  le 
roi  l'avait  chargé.  Au  mois  de 
mars  18 15,  il  suivit  la  cour  à 
Gand,  d'où  il  fut  immédiatement 
envoyé  sur  les  frontières  de  la 
Savoie, afin  d'y  rallier  les  royalis- 
tes errant  sans  direction.  Il  rem- 
plit cette  mission  avec  beaucoup 
de  zèle;  ujais  s'étant  trop  avancé 
dans  les  lignes  de  l'armée  des 
Alpes,  il  fut  fait  prisonnier  avec 
le  comte  de  Mac-Carthy,  investi 
des  mêmes  pouvoirs.  Il  trouva 
bientôt  les  moyens  de  s'échapper, 
en  traversant  les  avant -postes 
français,  et  contribua,  au  moyen 
des  intelligences  qu'il  avait  dans 
Grenoble,  à  la  reddition  de  celte 
place.  M.  de  Polignacobtint  alors 
une  gravide  influence  dans  les  dé- 
partemens  méridionaux,  et  devint 
pair  de  France  le  17  août  181 5. 
II  fut  du  nombre  des  pairs  qui, 
lors  de  leur  admission,  refusèrent 
d'abord  de  prêter  serment,  et  qui 
molivèrenl  ainsi  leur  refus  :  1"  Le 
serment  leur  paraissait  blesser 
l'intérêt  de  la  religion;  2"  on  n'a- 
vait donné  counai-isance  à  aucun 
pair  de  la  teneur  de  ce  serment, 
avant  de  leur  proposer  de  le  prê- 
ter; 3"  le  serment  était  dilTérent  de 
celui  qu'on  devait  prêter  aux 
termes  du  règlement  de  la  cham- 
bre. Un  passage  du  discours  du  roi 
prononcé  à  l'ouverture  de  la  ses- 
sion de  1816,  ayant  dissipé  tous 
les  doutes  sur  ce  qui  était  relatif 


FOL 

A  h  religion,  MM.  de  Pùiiguid , 
muréchiil  de  Vioiuùnil,delaBour- 
doniiaye,  Jules  de  l'oiignac,  etc., 
rassurés  sur  ce  premier  point, 
abandonnèrent  les  autres,  et  prê- 
tèrent leur  serment.  Le  comte 
Jule*  de  Poligiiac,  marié  eti  1816 
à  M"'  Campbell,  ap})arleiiiinl  à 
une  laniille  t.cossaise  distinguée, 
n'a  pas  ce.<sé  d'êtie  altaclié  à  la 
personne  de  Monsieur^  en  qualité 
d'aide-ue-ramp. 

POLIGNAC  (le  comte  Mel- 
CHiOR  de),  maréchal-de-camp, 
chi-valier  de  Saint-Louis  et  com- 
mandeur de  la  légion-d'honneur, 
est  frère  des  précédcns.  Il  n'avait 
pas  neuf  ans,  lorsque  ses  parens 
quittèrent  la  France,  au  commen- 
cement de  la  révolution,  et  l'em- 
menèrent avec  eux  en  Autriche  et 
en  Russie.  Il  passa  depuis  en  An- 
gleterre, et  ne  revint  à  Paris  qu'à 
l'époque  de  la  première  restau- 
ration, en  18  i4-  Attaché,  en  qua- 
lité d'aide-de-camp,  à  M.  le  duc 
d'Angoulême,  il  accompagna  ce 
prince  dans  les  départemens  mé- 
ridionaux pendant  les  cent  jours, 
en  181 5;  s'embarqua  avec  lui 
pour  l'Espagne,  et  rentra  égale- 
ment en  France  après  le  second 
retour  du  roi.  Aux  fonctions  d'ai- 
de-oiimp  de  M.  le  duc  d'Angoulê- 
me ,  le  comte  Melchior  de  Poli- 
gnac  réunit  celles  de  gentilhom- 
me d'honneur  de  S-  A.  R.  ,  fonc- 
tions qu'il  n'a  pas  cessé  de  remplir 
jusqu'il  ce   moment  (1824). 

l'OLISSAUT  [  Philibert- An- 
îoiNE  ),ué  le  7  octobre  1 738,  exer- 
çait la  profession  d'avocat  à  l'é- 
poque tie  la  révolniion.  Aii  mois 
de  septembre  1793,  il  fut  nommé 
député  au  con-eil  des  cinq-cents 
par  le  département  de  Saône  el- 


POL 


4o5 


Loife,  puis  en  fut  exclu  peu  de 
temps  après  comme  beau -frère 
d'un  émigré,  et  comme  porlé  lui- 
même  sur  une  liste  d'émigré?. 
Les  élections  de  1797  le  reportè- 
rent de  nouveau  au  corps-législatif; 
mais  le  directoire  le  fit  compren- 
dre sur  la  liste  des  déportés,  le  5 
septembre  de  la  même  année,  à 
la  suite  de  la  journée  du  18  fruc- 
tidor. Alors  M.  Polissart  quitta  la 
France  pour  se  rendre  en  Allema- 
gne, où  il  retrouva  plusieurs  de 
ses  collègues,  et  se  lia  d'une  ma- 
nière intime  avec  le  général  Pi- 
chegru.  La  révolution  du  18  bru- 
maire an  8  (  1799)  lui  permettant 
de  reprendre  ses  droits  de  citoyen, 
il  rentra  en  France  et  fut,  en  1804, 
élu  par  son  département  candi- 
dat au  corps-législatif;  Appelé  aux 
fonctions  de  receveur  de  contri- 
butions à  Marcigny -sur- Loire  , 
M.  Polissart  les  exerça  pendant 
plusieurs  années,  et  fut  élu  par  le 
sénat,  le  lo  a<;ût  1810,  membre 
du  corps-législatif  pour  le  dépar- 
tement de  Saône-et-Loire  :  il  en 
remplit  les  fonctions  jusqu'il  l'é- 
poque de  la  dissolution  de  la  cham- 
bre des  députés,  en  mars  i8i5. 
M.  Polissart,  anobli  par  lettres- 
patentes  du  roi,  en  date  du  18  août 
1814  >  a  été  nommé  le  5  octo- 
bre suivant,  chevalier  de  la  légion* 
d'honneur. 

POLLART  DE  SAINT- DENIS 
(N.)  était  à  l'époque  de  la  révo- 
lu tiim,  religieux  bénédictin  à  l'ftb*- 
baye  de  Saint  -  Denis.  L'ardeur 
avec  laquelle  i!  embra-^sa  b's  nou' 
veaux  principes  le  dét«rmina  à 
sortir  de  son  cloître.  I!  devint  suc- 
cessivement olficier  municipal  et 
maire  de  sa  commune;  enfin,  c()in- 
missairedudirectoireexcculif.Aut 


4o6 


POL 


élections  de  l'an  6  (  1798),  s'étant 
rangé  du  parti  du  directioire  il  fut 
nommé  député  du  département 
de  la  Seine  au  conseil  des  cinq- 
cents ,  où  il  appuj'a  toujours  les 
mesures  proposées  par  le  gouver- 
nement. Il  sortit  du  conseil  en 
1799,  et  fut  placé  momentané- 
ment, en  qualité  de  connnissaire, 
dans  le  dixième  arrondissement 
municipal  de  Paris.  Vers  1806, 
M.  PoUart  retourna  habiter  Sainl- 
Denis  et  rentra  dans  la  vie  privée. 
POLLLCHE  (  François  -  Da- 
niel), petit-fils  de  Daniel  Pollu- 
che,  auteur  d'un  grand  nombre 
de  mémoires  estimés  sur  l'his- 
toire de  France ,  et  particuliè- 
rement sur  celle  de  l'Orléanais, 
est  né  il. Orléans  en  1769.  Ayant 
perdu  son  père,  en  1773,  il  fut 
destiné  à  la  carrière  judiciaire 
})ar  son  grand-oncle  paternel,  M. 
Pitoin,  ancien  conseiller  au  Châ- 
telet  de  Paris,  el  contrôleur-géné- 
ral des  finances  de  la  maison  d'Or- 
léans. M.  François-Daniel  Pollu- 
chcfut  reçu  avocat  par  1»;  parlement 
de  Paris  en  17S8.  La  révolution 
ayant  détruit  ses  espérances,  il 
obtint,  en  1793,  un  emploi  aux 
armées  qui  le  conduisit  dans  le 
département  du  Finistère, où  il  se 
maria.  S'y  étant  attaché  en  l'an 
6  à  l'administration  départemen- 
taie,  il  fut  nommé  meujbre  de  la 
commission  des  hospices  de  Quim- 
por,  membre  du  jury  central  d'ins- 
truction publique, et  juge  suppléant 
au  tribunal  civil  du  Finistère.  En 
l'an  8  (1800),  lors  de  l'organisa- 
tion des  préfectures,  il  entra  dans 
le  conseil  de  préfecture  du  Finis- 
tère ,  fut  postérieurement  chargé 
de  la  sous-préfecture  de  Château- 
lin,  etpresque  aussitôt  nommé  se- 


POL 

crétaire-général  de  la  préfecture  du 
même  département;  place  qu'il  a 
occupée  depuis  l'an  9  (i8oi),  jus- 
qu'au commencement  de  18  i5. 
Rappelé  aux  mêmes  fonctions 
pendant  les  cent  jours,  il  les  quit- 
ta pour  siéger  à  la  chambre  des 
roprésentans  comme  député  du 
Finistère.  Une  commission  spé- 
ciale ayant  été  nommée  dans  les 
derniers  jours  de  juin  pour  soumet- 
tre sur  les  moyens  d'assurer  le  sort 
de  Napoléon  et  de  sa  famille,  un 
rapport  que  les  événemens  des 
premiers  jours  de  juillet  ne  per- 
mirent pas  de  présenter,  elle  n'eut 
que  le  temps  de  proposer,  par 
l'organe  de  M.  Polluche,  un  pro- 
jet de  loi  pour  l'abandon  à  Napo- 
léon de  la  bibliothèque  de  Tria- 
non  :  projet  qui  fut  adopté  par 
les  deux  chambres.  Eloigné  des 
fonctions  publiques  depuis  cette 
époque,  M.  Polluche  vit  mainte- 
dant  à  Paris,  où  il  est  venu  se 
fixer  avec  sa  famille. 

POLYEREL  (N.),  commissaire 
français  à  Saint-Dominigue,  était, 
en  1789,  à  l'époque  de  la  révo- 
lution, syndic  des  états  de  Na- 
varre. 11  transmit  alors,  à  l'as- 
semblée nationale,  le  vœu  des  ha- 
bitans  de  cette  contrée  pour  être 
réunis  à  la  France.  Nommé,  en 
1791,  accusateur  public  du  pre- 
mier arrondissement  de  Paris, 
quelque  temps  après  il  fut  sus- 
pendu de  ses  fonctions,  pour  n'a- 
voir pas  prescrit  toutes  les  pour- 
suites que  rendait  nécessaires  la  dé- 
couverte de  fabricalenrs  de  faux 
assignats.  Il  se  justifia  et  obtint  le 
rapport  du  décret.  Après  le  10 
août  1792,  il  fut  nommé,  con- 
jointement avec  Sonthonax,  com- 
missaire à  Saint-Domingue ,  pour 


roL 

y  faire  exécuter  le?  décrets  rela- 
tifs aux  colonies.  L'exécution  de 
ces  décrets ,  et  notamment  celui 
concernant  la  liberté  des  nègres, 
éprouva  une  vive  opposition;  la 
lutte  violente  des  blancs  contre 
les  noirs,  amena  la  révolte  de  ces 
derniers,  et  nécessita  l'emploi  de 
la  force.  Polverel  et  son  collègue, 
dénoncés  par  les  colons  dépor- 
tés, furent  accusés  d'actes  violens 
et  arbitraires  ;  mais  les  dénoncia- 
teurs eux-mêmes  étaient  signalés 
comme  ayant  voulu  livrer  la  co- 
lonie aux  Anglais.  Cependant,  le 
i6  juillet  1793,  Polverel  fut  dé- 
crété d'accusation,  sur  la  propo- 
sition de  Bréard  et  de  Billaud- Va- 
rennes.  Le  3i  décembre  de  la 
même  année,  une  autre  dépula- 
tion  de  colons  se  présenta  à  la 
barre  de  la  convention  nationale, 
et  demanda  que  Polverel  et  son 
collègue  fussent  mis  hors  la  loi, 
et  tous  leurs  actes  désavoués. 
Celle  proposition  adoptée  n'eut 
aucune  suite  ;  mais  dans  le  mois 
«le  janvier  suivant,  Danton  pro- 
voqua l'exécution  du  décret  ren- 
du contre  les  commissaires  ,  qu'il 
qualifia  de  brigands.  Cette  pro- 
vocation resta  encore  sans  efl'et. 
Après  la  révolution  du  9  thermi- 
dor, Polverel  obtint  sa  liberté  pro- 
visoire; comme  les  dénonciations 
des  colons  le  })Oursui virent  encore, 
la  convention  nationale  décréta 
qu'il  serait  entendu ,  ainsi  que  son 
collègue  iSonthonax,  coutradictoi- 
reinent  avec  ces  mêuies  colons. 
Iv'instruction  de  ce  procès  était 
commencée  devant  une  commis- 
sion spéciale,  lorsque  Polverel 
mourut.  Il  ne  s'était  pas  (enrichi 
dans  l'exercice  de  «es  fonctions; 
car  on  ne  trouva  point  a  sa  mort 


POL 


407 


de  quoi  payer  ses  dettes.  Polverel 
a  publié  des  Mémoires  et  un  Ta- 
bleau de  la  constitution  du  royaume 
de  Navarre  y  et  de  ses  rapports  avec 
la  France,  1789. 

POLWHÈLE  (Richard),  ec- 
clésiastique et  écrivain  anglais,  est 
né  en  1760,  et  descend  d'une  an- 
cienne famille  du  Cornwall ,  où  il 
réside  comme  pasteur  de  Mana- 
can.  Le  révérend  Polvrhèle  a  fait 
de  brillantes  études  à  l'université 
d'Oxford,  dont  il  sortit  en  1789, 
après  y  avoir  terminé  ses  cours 
de  droit,  sans  toutefois  prendre 
ses  degrés.  S'étant  déterminé  à 
embrasser  l'état  ecclésiastique,  il 
devint  successivement  curé  de 
Renton  ,  dans  le  comté  de  Devon, 
et  en  1 795 ,  curé  de  Manacan,  son 
pays  natal.  Bon  littérateur,  poète 
distingué,  il  a  publié  un  grand 
nombre  d'ouvrages.  Nous  citerons 
les  principaux  :  1°  Le  sort  de  Llé- 
welyn,  ou  le  sacrifice  du  Druide, 
conte  tiré  des  Légendes  ,  in-4°  ; 
2"  leGéniede  Karabre,  poiime,  in- 
4"  ;  3"  L'esprit  de  Fraser  au  géné- 
ral Durgoyne,  ode,  in-4°;  4°  '^ 
Château  de  Tintadgel ,  ou  la  Prin- 
cesse de  Danemarck  captive,  ode; 
5°  Peintures  d'après  nature  j  en 
douze  sonnets  ,  et  la  Boucle  de  che- 
veux transformée  y  in-4"  ,  «785; 
G°  l'Orateur  anglais,  poëm«  di- 
dactique en  quatre  livres,  \n-ly"  , 
1786-1789.  Cet  ouvrage  est  esti- 
mé. Les  préceptes  en  sont  excel- 
lens,  quoique  les  exemples  don- 
nés à  l'appui  manquent  en  général 
dechaieuret  d'intérêt.  7°  Les /r/y/- 
tes  de  Théocritc,  de  Bion,  de 
Moschus,  et  Elégies  de  Tyrtée,  in-  ^ 
4°,  1781»;  seconde  édition,  2  vol. 
in-4",  1788,  5'  édit.,  18»  1  :  tra- 
duction en  vers,  remarquable  par 


4o8 


POL 


une  grande  fidélilé  qui  n'exclut 
point  l'élégance.  Les  notes  dont  il 
l'a  accompagnée,  sont  en  grand 
nombreetioéiitent  de  fixer  l'alten- 
tioii.  8°  P^ues  historiques  du  com- 
té de  Devon ,  1  Vol.  in-4\  ï/QS; 
9"  Histoire  du  comté  de  Devoii,  3 
vol.  in-lol.  ,  i794-i8(;9.  Cet  ou- 
vrage, pour  lequel  l'autour  reçut 
de  noiTiljrcux  encouragemens  ,  ne 
repondit  pas  à  l'idée  que  l'on  s'é- 
tait tonnée  du  talent  de  Polwhèle. 
io°  Mémoires  biographiques  d'Ed- 
mond Rai  k  ;  1  1°  Poèmes  ,  par  des 
gentlemen  du  comté  de  Devon  et 
de  Cormvall,  l\  vol.  in -8°,  i  794  > 
1.2°  l'Influence  de  l'attachement  lo- 
cal,  poëmc  ,  in-8",  i7t)5  :  bien  su- 
périeur à  l'Orateur  anglais,  et  que 
les  critiques  de  sa  nation  placent 
au  premier  rang  des  meilleurs  ou- 
vrages en  vers  du  i8' siècle.  Pol- 
whèle a  adopté  potir  cet  ouvrage 
la  forme  du  poëme  de  Spencer; 
il  est  écrit  en  stances.  \7i° Le  Vieux 
Anglais,  poëme,  in -8",  1797; 
14°  Vues  de  la  Grèce  ,  poëme  ,  in- 
^°  »  '7r/0>  '5°  ^^'^  Femmes  sans 
sexe,  poëme,  in-8°;  i6°  Sir  Aa- 
ron,  ou  les  Torts  du  fanatisme,  poë- 
me ,  1800;  17"  Edaireissemens 
sur  le  caractÎTe  des  Ecritures,  in- 
8°  ,  1802  ;  18"  Histoire  de  Corn- 
tc«//,  3  vol.  in-4°,  1804  à  1818; 
19"  un  Recueil  de  Sermons,  où  , 
dit-on,  l'auteur  a  mis  en  pratique 
l«s  préceptes  qu'il  a  donnés  dans 
son  poëme  de  l'Orateur  anglais  ; 
son  style  est  élégant  sans  recher- 
che; sa  manière  est  libre  et  ani- 
mée; il  parle  à  la  lois  au  cœur  et 
à  l'esprit. 

POLY  (François  CnARLEs- 
GiiiLLAUME- Lotis  ) ,  baron  alle- 
mand, né  à  Guritersblnm,  dans 
U  Pulatinal,  vint  jeune  en  Fran- 


POL 

ce,  où  il  prit  du  service  en  qua, 
lilé  de  sous-lieutenant  dans  le  ré- 
giment de  Hesse-Darmsladt,  gra- 
de qu'il  occupait  à  l'époque  de  la 
révolution.  En  1792»  il  fut  nom- 
mé lieutenant  au  régiment  de  Gon- 
ti,  infanterie:  mais  peu  de  temps 
après,  il  abandonna  la  carrière 
militaire  et  fixa  sa  résidence  à 
ïruyes,  où  il  devint,  en  1793» 
membre  de  la  société  populaire, 
formée  en  cette  ville.  Cette  qua- 
lité ne  I  empêclia  pas  d'être  mis 
en  arrestation,  comme  étranger 
et  suspect,  llendu  à  la  liberté  par 
la  révolution  du  9  thermidor  an 
2  (27  juillet  1794  )  ,  Poly  se  jeta  de 
nouveau  dans  àti^  intrigues  poli- 
tiques (pii  déterminèrent  le  gouver- 
nement à  le  faire  arrêter  en  1797» 
comme  agent  de  la  conspiration 
loyaliste  de  lirottier  et  Laville- 
heurnois.  Accusé  d'embauchage  , 
il  crut  devoir  se  renfermer  dans 
un  système  de  dénégation.  En  mé^ 
connaissafil  ses  co-accusés,  il  sou- 
tint que  les  propos  qu'on  lui  prê- 
tait étaient  pour  lui  une  véritable 
énig'ue.  Cependant  le  rapporteur, 
ti'ouvant  une  connexilé  parfaite 
entre  les  faits  imputés  à  Poly  et 
les  griefs  élevés  contre  Droitier, 
déclara  que  tout  ce  qui  consti- 
tuait l'embauchage  était  avéré 
contre  le  preniier.  En  conséquen- 
ce ,  le  conseil  de  guerre  de  la  17' 
division  militaire,  séant  à  Paris, 
condamna  Poly  à  la  peine  de  mort, 
ki  12  mars.  Cependant,  cette  pei- 
ne fut  commuée  en  cinq  années 
de  détention  ;  celte  indulgence 
niéconleiita  le  directoire,  et  Poly 
fut  par  son  ordre  réintégré  dans 
Il  maison  d'arrêt  du  Temple,  pour 
être  de  nouveau  traduit  devant  les 
tribunaux.   La   révolution   du    »8 


PO  M 

l'ructidof  an  5  vint  fixer  le  sort  de* 
prévenus  dans  celle  affaire  :  ils  fu- 
rent tous  compris  dans  la  mesure 
de  déportation ,  prise  contre  un 
certain  nombre  de  députés.  Poly 
partit  avec  eux  pour  la  Guiane, 
el  divers  événeniens  les  ayant  sé- 
parés, on  n'a  plus  entendu  parler 
de  lui  depuis  celte  époque. 

POMME  (A.),  député  de  la 
Guiane  iVançaise  à  la  convention 
nationale,  fut  envoyé,  après  la 
révolution  du  9  iherniidor  an  2, 
dans  les  départemens  de  l'Ouest, 
où  ,  d'après  ses  instructions ,  il  tra- 
vailla à  la  pacification  de  la  Ven- 
dée, Compris  dans  la  réélection 
des  deux  tiers  conventionnels,  il 
passa  au  mois  d'octobre  1795,  au 
conseil  des  cinq-cents;  plusieurs 
fois,  il  y  défendit  avec  chaleur  les 
intérêts  des  colonies,  et  attaqua 
la  conduite  de  l'agent  du  directoi- 
re-exécutif à  Cayenne.  Kn  1796, 
il  se  montra  très-dévoué  au  direc- 
toire, dont  il  jyjpuya  toutes  les 
mesures.  Pomme  cessa  ses  fonc- 
tions législatives  le  20  mai  1798, 
et  fut  nonmié  agent  maritime  à 
Ostende.  Il  occupa  cette  place 
pendant  plusieurs  années,  puis  re- 
tourna à  la  Guiane  au  sein  de  sa 
famille. 

POMMERELL  (François-René- 
Jean  ,  BARON  de)  ,  général  de  divi- 
sion et  conseiller-d'état,  né  à  Fou- 
gères, le  12  décembre  174^,  d'une 
ancienne  famille  noble,  entra  très- 
jeune  au  service,  A  l'époque  de  la 
révolution  ,  il  était  capitaine  dans 
le  corps  royal  de  rartillerie,  et 
s'était  distingué  par  ses  connais- 
sauces  et  ses  talens  militaires.  Le 
gouvernement  napolitain  ayant  de- 
mandé à  celui  de  France  un  offi- 
cier habile  pour  organiser  son  ar- 


pom'  409 

tillerie,  M.  de  Pommereiil  fut  choi- 
si, et  se  rendit  à  Naples  au  com- 
menceiiicnt  de.  «790.  Mais  tandis 
qu'il  rendait  les  plus  grands  ser- 
vices à  l'allié  de  la  France,  il  fut 
porté,  dans  son  pays,  sur  la  liste 
des  émigrés,  et  toute  sa  famille 
fut  arrêtée  sous  ce  prétexte.  Il  s'é- 
tait cependant  prononcé  avec  cha- 
leur pour  la  cause  de  la  liberté, 
dès  le  commencement  de  la  réro- 
lution.  Ayant  enfin  obtenu  après 
la  chute  de  Robespierre  de  ren- 
trer dans  sa  patrie  ,  il  reprit  son 
service  militaire,  vola  aussitôt  à 
l'armée,  se  distingua  pendant  plu- 
sieurs campagnes,  et  acquit  par  sa 
bravoure  les  grades  de  général  de 
brigade  et  de  général  de  division. 
En  1800,  il  fut  nommé  préfet  du 
département  d'Indre-et-Loire,  et 
y  mérita  l'estime  de  ses  adminis-' 
très.  Mais  il  v  eut  d'assez  vifs  dé- 
mêlés avec  le  clergé,  et  principa- 
lement avec  l'archevêque,  M.  de 
Boisgflin,  qui,  après  la  conclusion 
du  concordat  de  Napoléon  avec 
Pie  VII ,  était  vcini  occuper  le  siè- 
ge épiscopal  de  Tours.  La  publi- 
cation d'un  calendrier  nouveau, 
autorisée  par  la  préfecture,  et  dans 
lequel  tous  les  noms  des  saints  é- 
taient  remplacés  par  ceux  des  phi- 
l()so|)hes  les  plus  renommés  de 
l'anliquilé  e'  des  temps  modernes, 
avait  d'abord  liaulement  scanda- 
lisé'le  prélat  et  ses  grands-vicai- 
res. Des  altercations  nouvelles  sut 
des  objets  encore  moins  impor- 
tans  ,  avaient  envenimé  la  que- 
relle. D'autres  discussions  avec  le' 
conseil  -  général  du  département 
sur  l'eniploi  des  sommes  desti- 
nées à  la  réparation  des  routes, 
firent  enfin  désirer  à  M.  de  Pom- 
Diercul  de  changer  de  préfecture, 


4>o 


PO^l 


et  il  fut  nommé  à  celle  du  Nord, 
qu'il  administra  jusqu'en  octobre 
1810.  Le  département  lui  doit  plu- 
sieurs étabiissemens  publics  et  de 
grandes  et  utiles  c9nstructions.  Il 
fut  ensuite  appelé  au  conseil-d'é- 
tat et  chargé,  après  le  renvoi  de 
M.  Portails,  de  la  direction  géné- 
rale de  l'imprinierie  et  de  la  li- 
brairie. Celui-ci  avait  encouru  la 
disgrâce  de  Napoléon,  pour  sa 
conduite  à  l'époque  où  fut  rendu 
un  bref  du  pape,  relatif  au  cardi- 
nal Maury,  et  pour  son  dévoue- 
ment à  la  cour  de  Rome;  M.  de 
Pommereul  était  connu  par  ses 
démêlés  avec  le  clergé,  aussi  il  di- 
sait souvent  lui-même,  que  c'était 
par  anliihèse  qu'on  lui  avait  don- 
né celle  place.  Il  en  remplit  les 
fonctions  pendant  4  ans,  mais  avec 
une  rigueur  extrême,  que  la  libé- 
ralité connue  de  ses  propres  opi- 
nions rendait  encore  plus  inexpli- 
cable. Les  écrivains  et  les  librai- 
res lui  reprochèrent  souvent  l'ex- 
cessive sévérité  de  sa  censure.  En 
mars  1814,  lorsque  l'impératrice 
Marie-Louise  quitta  Paris,  M.  do 
Pommereul  se  rendit  dans  une  ter- 
re en  Bretagne,  perdit  son  emploi, 
et  fut  remplacé  par  M.  Royer-Col- 
lard.  Lors  du  retour  de  Napoléon 
de  l'îled'Elbe,  il  fulrappeléau  con- 
seil-d'étal; mais  après  la  secon- 
de rentrée  du  roi,  il  fut  porté  par 
Fouché  sur  la  lisle  des  58  ,  et  frap- 
pé par  l'ordonnance  du  24  juillet 
i8ï5,  qui  le  força  de  s'exiler  de 
sa  patrie  et  de  chercher  un  asile 
dans  le  royauitic  des  Pays-Bas» 
Après  un  an  de  séjour  à  Bruxelles, 
où  son  grand  âge,  accompagné 
d'infirmités  et  de  tous  les  cha- 
grins de  l'exil,  le  retenaient  dans 
la  plus  profonde  retraite,  et  pres- 


POM 

que  toujours  renfermé  dans  sa 
chambre,  le  grand  comité  diplo- 
matique réuni  à  La  Haye,  jugea 
qu'il  fallait  encore  ajouter  aux  ri- 
gueurs du  sort  des  proscrits.  On 
exigea  impérieusement  que  M.  de 
Pommereul,  ainsi  que  d'autres  ré- 
fugiés français ,  fussent  arrachés 
de  leur  asile.  Le  gouvernement 
céda  momentanément  à  celle  in- 
jonction du  comité,  appuyée  par 
le  généralissime  anglais;  mais  au 
commencement  de  1819,  le  roi 
des  Pays-Bas,  louché  du  sort  de 
tant  d'infortunés,  permit,  entre 
autres,  à  M.  de  Pommereul  de  re- 
venir i!i  Bruxelles,  et  d'achever  de 
mourir  dans  son  royaume  II  n'en 
fut  pas  tout-à-fail  ainsi.  Une  or- 
donnance du  roi  de  France,  datée 
du  18  novembre  1819,  mit  un 
terme  aux  effets  de  l'ordonnance 
du  24  juillet  181  5.  Il  fut  alors  per- 
mis à  celui  qui,  pendant  un  long 
exil,  n'avait  cessé  de  former  des 
vœux  pour  le  bonheur  de  sa  pa- 
trie, d'y  rentrer  et  d'achever  sa 
carrière  au  milieu  des  siens.  Le 
général  Pommereul  ne  survécut 
en  effet  que  peu  de  temps  à  son 
rappel.  Ses  trois  fils  ont  tous  ser- 
vi avec  la  plus  haute  dislinclion 
dans  les  armées  françaises.  L'aîné 
a  de  plus,  pendant  quelques  an- 
nées, rempli  les  fonctions  de  sous- 
préfet  à  Clermont,  département 
de  l'Oise,  et  s'y  est  fait  estimer 
par  la  conduite  la  plus  honorable. 
Le  général  Pommereul  a  publié 
un  grand  nombre  d'ouvrages  es- 
timés. Les  principaux  sont  :  i" 
Histoire  de  Corse  ^  1779^  2"  Re- 
cherclies  sur  l'ori{^ine  de  l'esclavage 
religieux  et  politique  du  peuple  de 
France,  1781  ;  5°  des  Chemins  et 
des  moyens  les  moins  onéreux  au 


peuple  et  à  Cétat,  de  les  construire 
et  (le  les  entretenir,  1781  ;  4°  Ma- 
nuel d'Epictète ,  précédé  de  ré- 
flexions sur  ce  philosophe  et  sur  la 
morale  des  stoïciens  1^83;  5°  Ré- 
flexions mr  l'histoire  des  Eusses  par 
M.  Levesque,  i^83  ;  Q»"  Etrennes  au 
clergé  de  France,  nii  Explications 
d'un  des  plus  grands  mystères  de 
l'église,  1786;  7°  Essais  minéralo- 
giques  sur  la  Solfalure  de  Pouzzo- 
les,  traduits  do  l'iralien  de  Breis- 
lak ,  1792;  8°  Observations  sur  le 
droit  de  passe,  proposé  pour  sub- 
venir à  la  confection  des  chemins, 
in-8" ,  1 79(J;  9"  f^ues  générales  sur 
i' Italie  et  Malte,  dans  leurs  rap- 
ports politiques  avec  la  république 
française,  et  sur  les  limites  de  la 
France  à  la  rire  droite  du  Rhin, 
'797?  •'^"  Campagne  du  général 
Bonaparte  en  Italie,  1797,  1  vol. 
in-S",  ou  2  vol.  jn-ia;  11°  L'art 
de  voir  dans  les  beaux-arts ,  tra- 
duit de  l'italien  de  iMilizia  ,  1798, 
1  vol.  in -8";  12°  f^oyages  physi- 
ques et  lithologiques  dans  la  Cam- 
panie,  par  Scipion  Breislak  ,  tra- 
duits sur  le  inaniiscril  ilaliei),avec 
notes  et  éclaircissernens ,  1801, 
in-8°.  Il  a  aussi  coopéré  à  plusieurs 
grands  ouvrages,  tels  que  l'Art 
de  vérifier  les  dates,  le  Dictionnai- 
re des  sciences  morales,  économi- 
ques et  diplomatiques,  le  Diction- 
naire géographique  et  historique  de 
la  Bretagne;  V Encyclopédie  mé- 
thodique; la  Clé  du  cabinet  des 
souverains ,  etc.  M.  Barbier  lui  at- 
tribue encore  :  Lettre  sur  la  littéra- 
ture et  la  poésie  italienne,  traduite 
<l<;  Holtiuelli,  1778,  in-8°. 

POMPIGNAN  (Jean-Geobgks 
I-kfrascde),  archevêqiie  deVien- 
Pe,  IVère  du  maniuis  LetVanc  de 
uoii)pin;uan   que    Voltaire   a    ioi- 


POM 


411 


mortalisé,  naquit  à  Montauban  » 
département  du  Lot ,  le  22  février 
1715.  Il  fit  ses  études  au  collège 
Louis-le-Grand  à  Paris,  et  s'é- 
tant  destiné  à  l'état  ecclésiastique, 
il  entra  au  séminaire  de  Saint- 
Sulpicc:  il  devint,  sa  licence  à 
peine  terminée  ,  évêque  du  Puy- 
en-Velay.  L'un  des  premiers  soins 
du  jeune  prélat ,  dès  son  arrivée 
dans  son  diocèse,  fut  d'y  prépa- 
rer une  mission  à  laquelle  il  asso- 
cia le  P.  Brydaine,  missionnaire 
alors  fort  eu  vogue.  M.  de  Pom- 
pignan  se  livra  avec  un  zèle  sou- 
tenu à  l'administration  tant  spi- 
rituelle que  temporelle  de  son 
évêché.  En  1755,  il  fut  député 
à  l'assemblée  du  clergé  ,  et  fit  é- 
galement'partie  des  assemblées  de 
1760  et  de  1765  ,  dans  lesquelles 
il  se  trouva  toujours  en  première 
ligne.  Il  composa  beaucoup  d'ou- 
vrages contre  les  moeurs  de  son 
temps,  q«ii  en  effet  méritaient  une 
rigoureuse  censure,  et  contre  les 
philosophes,  qu'il  attaqua  avec  une 
véhémence  plus  courageuse  qu'é- 
vangélique.  Llle  lui  attira  dejeur 
part  de  sévères  reparties.  Vol- 
taire^ entre  autres,  exerça  son  es- 
prit caustique  et  malin  contre  ce 
prélat ,  qui  feignit  de  ne  point  s'en 
apercevoir.  M.  de  Pompignan  fut 
nommé,  en  1774?  archevêque  de 
Vienne.  L'année  suivante,  il  pa- 
rut à  l'assendjlée  du  clergé  ,  et 
rédigea  V  Avertissement  aux  fidèles^ 
que  cette  assemblée  publia  con- 
tre V Incrédulité.  A  son  mande- 
ment du  5i  mai  178 1.,  à  l'occa- 
sion de  l'édition  annoncée  des 
œuvres  de  Voltaire,  succéda  ,deux 
mois  après  ,  celui  qu'il  dirigea 
contre  les  œuvres  de  J.  .1.  Rous- 
seau et  de  l'ubbé  Uaynal.  En  1789, 


4ia 


POM 


élu  par  la  province  de  Daiipliino, 
député  aux  états  -  g"-néraux,  de 
concert  avec  l'archevêque  de  Bor- 
deaux et  les  évêqiies  de  Chartres, 
deCoutances  et  de  Rhodez,  il  con- 
duiî^it,  le  20  juin  de  cette  année, 
le  clergé  à  la  chiimbre  du  lier?- 
état ,  démarche  qui  lui  valut  de  la 
part  de  Condorcet ,  cet  éloge  con- 
signé dans  sa  Fie  de  Voltaire  (É- 
dition  de  Kehl,  tom.  ^o ,  p.  162)  : 
"  i\l.  de  Pompignan  vient  d'effa- 
cer par  une  conduite  noble  et  pa- 
triotique les  taches  que  ses  déla- 
tions épiscopales  avaient  répan- 
dues sur  sa  vie  :  on  le  voit  adop- 
ter aujourd'hui  avec  courage  les 
principes  de  liberté  que  ,  dans  ses 
ouvrages,  il  reprochait  avec  a- 
amertume  aux  philosophes,  n 
L'exemple  qut-  donna,  dans  cette 
circonstance  ,  M.  de  Tompiguan  , 
lui  Talut  l'honneur  de  présider  un 
des  premiers  l'assemblée  consti- 
tuante. Elle  lui  valut  aussi,  au 
mois  d'août  suivant,  son  admis- 
sion au  conseil  du  roi,  et  la  pos- 
session de  la  feuille  des  bénéfices. 
Perwlanl  la  courte  durée  de  ses 
fonctions,  il  ne  ût  instituer  que 
trois  évêques.  A  cette  époque  (juil- 
let 1790),  il  repiil  une  lettre  de 
Pie  VI ,  où  S.  S, ,  après  avoir 
blâmé  les  nouveaux  décrets,  en- 
gageait M.  de  Pompignau  à  résis- 
ter ouvertement  aux  changemens 
relatifs  au  clergé.  «Vous  êli-s  plus 
propre  qu'aucun  autre .  lui  dit-il , 
à  rendre  le  grand  service  que  je 
vous  demande.  Vous  avez  déjà 
donné  tant  de  preuves  de  votre 
zèle  à  défendre  la  sainte  doctrine  ! 
Mais  le  temps  presse  ;  il  n'y  a  pas 
un  moment  à  perdre  pnurs.niver 
la  religion  ,  le  roi  et  votre  patrie. 
Vous  pourrez  certainement  eng»- 


POM 

ger  sa  majesté  à  ne  pas  donner 
cette  fatale  sanction.  La  résistance 
fCit-elle  pleine  de  danger,  il  n'est 
jamais  permis  de  paraître  un  ins- 
tant abandonner  la  foi  catholique, 
même  avec  le  dessein  de  revenir 
sur  ses  pas  ,  quand  les  circons- 
tances auront  changé.  »  Malgré 
cette  bulle,  et  celles  que  reçurent 
presque  en  mT-me  temps  l'arche- 
vêque do  Bordeaux,  M.  de  Cicé, 
et  Louis  XVI,  ce  monarque  don- 
na ,  le  24  'if^ût  (1790),  sa  sanction 
h  la  constitution  civile  du  clergé. 
Les  partisans  des  doctrines  ultra- 
monlaines  ont  fortement  blâmé 
M.  de  Pompignan  de  n'avoir  point 
mis  au  jour  la  lettre  du  pape.  Soit 
qu'il  eût  adopté  franchement  l'o- 
pinion qu'il  manifesta  dès  la  con- 
vocation des  états-généraux,  soit 
qu'il  fût  absorbé  par  la  maladie 
qui  l'enleva  le  29  décembre  1790, 
peu  de  mois  après  avoir  repu  cette 
lettre  ,  il  est  certain  qu'elle  ne  re- 
çut aucune  espèce  de  promulga- 
tion. Nous  trouvons  dans  Mallet 
du  Pan  un  jugement  que  nous  a- 
doptons  volontiers  en  ce  qui  re- 
garde l'estime  que  méritait  ce  pré- 
lat. Il  dit  :  «  En  désapprouvant  la 
faiblesse  qu'eut  l'archevêque  de 
Vienne  de  fléchir  devant  les  cir- 
C(^nstances  qu'il  jugea  impérieu- 
ses, ou  doit  joindre  l'éloge  des 
vertus  évangéliques  dont  ce  prélat 
fut  le  modèle  pendant  quarante 
ans.  Il  est  juste  dt;  rappeler  qu'au- 
cun ministre  de  l'église  ne  mon- 
tra de«  mœurs  plus  austères  ,  plus 
d'éioigiipment  pour  toutes  es[»è- 
ces  de  mondanité»,  plus  de  dé- 
VfHjement  à  ses  devoirs,  plus  de 
science,  plus  de  simplicité,  plus 
de  titre*  à  la  vénération  dont  il  é- 
tait  l'objet  dans  le  clergé.  Il  avait 


POM 

passé  sa  vie  à  combattre  la  non- 
Telle  philosophie;  et  les  injures 
de  Voltaire  contre  lui  sont,  je 
pense,  un  correctif  assez  frappant 
île  celles  que  lui  valut  sa  conduite 
à  l'assemblée  nationale.  Il  ne  fut 
pas  assez  en  garde  contre  les  illu- 
sions dont  on  l'avait  bercé  en  Dau- 
phirié,et  contre  l'ascendant  qu'on 
avait  pris  ^ur  lui.  Élu  par  les  états 
de  sa  province  dans  nue  assemblée 
commune  des  trois  ordres,  il  re- 
çut le  maoïlat  impératif  de  persé- 
vérer dans  cette  forme  de  délibé- 
ration ;  et  la  députation  entière 
du  Dauphiné  lui  donna  l'exemple 
de  respecter  cet  engagement  jus- 
qu'à ce  qu'une  loi  les  en  déliât.  » 
Parmi  b^s  iionibrt'ux  écrits  de  AI. 
de  Pom|>ignan,  nous  citerons  les 
principaux;  ce  sont  :  i"  Essai  cri- 
tique sur  l'étut  présent  de  la  répu- 
blique des  lettres  ^  174'"'»  'i"  Ins- 
truction pastorale  de  l'évcque  du 
Puy,  aux  nouveaux  convertis  de 
son  diocèse  ,  1761  ;  3"  le  véritable 
Usage  de  l'autorité  séculière  dans 
les  matières  qui  concernent  la  reli- 
gion,  I  j53  ;  4°  Questions  diverses 
sur  l' incrédulité  f  ijSS;  5°  la  Dé- 
votion réconciliée  avec  l'es  prit,  1 7  53; 
6°  Conlrocerse  pacifique  sur  l'auto- 
rité de  l'église  ,  1758;  7"  l'Incré- 
dulité convaincue  par  les  prophé- 
ties, 1751),  in  4°-  Il  y  J>  of'e  édi- 
tion de  cet  ouvrage  en  trois  vol. 
in- 12.  S"  Instruction  pastorale  sur 
la  prétendue  philosophie  des  incré- 
dules modernes,  1763;  9°  autre 
Instruction  sur  l'hérésie,  176(5, 
in-4°  ;  10"  la  Religion  vengée  de 
l' incrédulité  par  l'incrédulité  elle- 
même  ,  1772  ;  11°  Défense  des  ac- 
tes du  clergé  de  France  concernant 
la  religion,  in-4';  la"  Mandement 
conlr»'    l'édilion  des    Œuvres  de 


PON 


4»5 


Voltaire,  1781,  in-S°  ;  13°  autre 
Mandement  portant  défense  de 
lire  les  Œuvres  de  J.  J.  Rousseau 
et  de  Kaynal,  1781,  in-S";  14°  O- 
raison  funèbre  de  Marie  Leczinska,, 
reine  de  France,  prononcée  dans 
l'église  de  Saint-Denis;  i5"  Let- 
tres à  un  évêque  sur  differens  points 
de  morale  et  de  discipline  ,  an  10  , 
2  vol.  in-8°  ;  16"  en  manuscrit, 
un  ouvrage  sur  la  Fin  de  l  homme 
et  la  résurrection  générale. 

PONCE  (  Nicolas)  ,  graveur  et 
homme  de  lettres,  chevalier  de 
l'ordre  royal  de  la  légion-d'hon- 
neur, membre  de  plusieurs  acadé- 
mies françaises  et  étrangères,  est 
né  à  Paris  le  12  mars  i7'f(>.  Il  fit 
ses  études  au  collège  d'Harcourt» 
et  s'adonna  en  même  temps  à  la 
géographie  pour  la  construction 
des  cartes,  et  aux  arts  du  dessin. 
Il  fut  élève  de  M.  Pierre,  premier 
peintre  du  roi,  et  se  mit  pour 
la  gravure  sous  la  direction  d'E- 
tienne Fesf^ard  ,  et  ensuite  de  Ni- 
colas de  L;iunay,  n)embre  de  l'a- 
cadémie de  peinture.  On  trouve 
des  gravures  de  M.  Pouce  dans 
toutes  les  belles  éditions  sorties 
des  pre>ses  françaises  depuis  plus 
de  5o  ans.  Il  a  lui  -  mC-me  fait  des 
élèves  distingués,  parmi  lesquels 
on  doit  citer  iM.M.  Petit,  Bosq  et 
Civcton.  Commegraveur, M.  Fron- 
ce a  donné  :  1°  les  illustres  Français  f 
ou  Tableaux  historiques  des  grands 
hommes  de  la  France,  en  56  sujets, 
auxquels  il  a  joint  des  Notices, 
ouvrage  utile  et  recherché  pour 
l'éducation;  7.'  les  peintures  anti- 
ques des  Bains  de  Titus  et  de  Livie, 
en  75  planches  :  cette  collection  , 
dont  la  première  édition  faite  en 
Italie,  était  inconnue  en  France, 
a  beaucoup  contribué  à  perfection- 


4i4 


PON 


ner  la  décoration  architecturale  ; 
5"  les  Vues  de  Saint-  Domingue  , 
poiirl'ouvragedeMoreaude  Saint- 
iSléry  sur  cette  colonie;  4°  (a  guer- 
re d' Amérique ,  repré.xentée  en  16 
planches,    avec    cartes   et   texte, 
en    société  avec  Godefroy  père  ; 
5°  les  gravures  in -4°  d'après  C(»- 
chin  ,  de  la  traduction  de  VArioste 
de  Duisieux;  6°  il  est  éditeur  de  la 
Bible  de  3oo  figures  d'après  iMaril- 
lier;   7"  ila  dédié  à  Louis  XVIII 
la  belle  édition  in-^"  de  laCharte, 
qu'il  a  ornée  d'estampes.    Parta- 
geant son  temps  entre  les  artset  la 
littérature,  M.  Fonce  a  tueilli  plu- 
sieurs palmes  aux  diverses  classes 
de  l'institut.  1°  A   la  classe  dliis- 
toire,  il  a  remporté  le  prix  sur  ce 
sujet  :  Quelles  sont  les  causes  qui 
ont  amené  l'esprit   de   liberté  qui 
s'est  manifesté  en  France  en  1 789  ? 
2"  A  la  même  classe,  il  a  obtenu 
la    première    mention    honorable 
sur  la  question  :  Du  gouvernement 
de  l'Egypte    sous    tes    Romains. 
7)°  A  la  classe  des   sciences  mora- 
les et  politiques,  une  mention  ho- 
norable sur  ce  sujet:  Du  caractère 
de  bonté  de  l'homme  public;  sujet 
qui  a  été  retiré  du  concours.  4"  A 
la  classe  des  beaux-arts,  une  au- 
tre mention  honoiable  sur  la  ques- 
tion :  De  l'influence  des  beaux-arts 
sur    l'industrie    commerciale.   Ce 
mémoire  a  été  couronné  dans  une 
autre   académie.    Comme  littéra- 
teur, i\i.  Ponce  a  fait  imprimer: 
i'  le  Mémoire  couronné  à  l'insti- 
tut :  Quelles  sont  tes  causa,  elc.  , 
in-S",  an  9  ;  2"  Quelles  sont  tes  cau- 
ses de  la  perfection  de  la  sculpture 
antique,  in -8",  an  9;  ô"  Quelle  a 
tté  Cinfluence  de  la  réformation  de 
Luther  ,  sur   la  situation  politique 
des  divers  états  de  l'Europe  et  sur 


PON 

le  progrès  des  lumières  ,  in -8%  an 
i5;  l\"  Pour  quels  objets,  et  àquelles 
conditions  convient-il  à  un  état  ré- 
publicain d'ouvrir  des  emprunts  pu- 
blics ,  in  -  80,  an  9.  Ce  sujet  pro- 
posé  par    l'institut  a    été   retiré. 
5°  Le  Lavater  historique  des  femmes 
célèbres  anciennes  et  modernes,  in- 
18,  '1°"  édition,  1808  et  1809;  6" 
Considérations  politiques  sur  le  trai- 
té de  Vienne,  et  sur  la  paix  de  l'Eu- 
rope,  in -8°,  181 5;  '^"Désavan- 
tages du  maintien  de  laCharte  pour 
tous  les  Français  en  général,  1819, 
in-8°.  Cetouvrage  est  terminé  par 
ce  paragraphe  :  «  Heureux  les  peu- 
ples qui,  respectant  et  chérissant 
les   autorités    établies    pour   leur 
conservation    et    leur   bonheur, 
veillent  à  la  ,-labilité  des  lois  sur 
lesquelles    repose  leur   existence 
morale  et  politique!  Mais  malheur, 
cegt  l'ois  malheur  à  ceux  qui  ten- 
teraient d'enlever  une  seule  pierre 
de  la  voûte  de  l'édifice  social  :  ils  se- 
raient ensevelis  sous  ses  débris  !  » 
8"  Description  historique,  géogra- 
phique et  statistique  des  ports  de 
France,  in- fol.,  1819;  9°  la  tra-     -A 
duction  de  VArt  de  la-lithographie       1 
de  Senefelder ,    'm-^",   1819.   Vn 
grand  nombre   (Varticles  dans   la 
biographie  universelle,    ainsi   que 
dans  l'ouvrage  de  M.  Landon.  Beau- 
coup de  Notices,  etc. ,  etc. ,  dans  le 
Moniteur,  le  Mercure,  le  Journal 
de  Paris,  le  Journal  des  Arts,  VA- 
beille,  \es/i  Saisons  du  Parnasse,  le 
Mois,  la  Bibliothèque  des  pères  de 
famille,   les  lilrennes  d'Apollon , 
etc.    31.   Ponce  avait  adopté  avec 
sagesse  les  principes  de  la  révo- 
lution; il  devint  chef  de  bataillon 
dans  la  garde  nationale  en  1792, 
et  commandait  aux  Tuileries  le  3o 
juillet,  eu  l'absence  du  chef  de 


PON 

légion.  Ce  fut  ce  même  jour  que 
des  bataillons  marseillais  arrivè- 
rent à  Paris,  et  signalèrent  leur 
présence  aux  Champs-Elysées,  par 
plusieurs  meurtres.  M.  Ponce  fit 
rapidement  toutes  les  dispositions 
nécessaires  pour  la  défense  des 
objets  précieux  dent  la  garde  lui 
était  confiée.  Le  roi  l'ayant  fait 
demander,et  s'en  étant  fait  accom- 
pagner pour  la  A'isite  de  tous  les 
postes,  ce  prince  lui  témoigna  pu- 
bliquement sa  satisfaction  des  bon- 
nes dispositions  qu'il  remarquait; 
mais  à  la  vue  de  divers  officiers 
blessés,  qui  s'étaient  l'éfugiés  à 
l'état-major,  le  monarque  com- 
patissant ne  put  retenir  ses  lar- 
mes ,  et  dit  à  M.  Ponce,  sur  le 
bras  duquel  il  s'appuyait  pour  re- 
monter l'escalier  du  château  ,  ces 
parole*  touchantes  :  Je  ne  regrette 
du  pouvoir  qa  on  m'a  ôté,  que  celui 
qui  ni  était  nécessaire  pour  empê- 
cher ces  horreurs-là.  M  Ponce  a 
fait  imprimer,  dans  le  Journal  dB 
Paris,  du  4  'loût  1792,  des  dé- 
tails relatifs  à  cette  journée,  liar- 
baroux  déclara  à  la  convention, 
le  00  octobre  suivant,  que  le 
5o  juillet  avait  été  choisi  pour 
l'attaque  du  château  ,  mais  que  les 
dispositions  qui  se  faisaient  re- 
marquer dans  l'intérieur,  avaient 
obligé  de  la  remettre  au  10  aoftt. 
—  Mabgt-erite  Hémery,  épouse  de 
M.  Ponro,  née  en  174^,  a  long- 
tenips  cultivé  les  arts  avec  un  suc- 
cès flatteur  :  elle  a  gravé  différens 
sujets,  dans  le  Cabinet  Poulain  , 
VIconologie  de  Gravelot ,  les  OEu.- 
vres  de  l'ahbé  Prévôt,  les  Fables  de 
Dorât ,  etc. ,  etc. 

PONCELIN  DE  LA  ROCHE 
TILLAC  (l'abbé),  journaliste  et  li- 
braire, est  né  le  i5  mai  1746,  à 


PON 


4i5 


Dissays ,  département  de  la  Sar- 
the.  11  fit  des  études  pour  suivre  la 
carrière  ecclésiastique,  et  devint 
chanoine  de  Montreuil-Bellay,  dé- 
parlement de  Maine-et-Loire.  M. 
Ponc<;lin  voulut  ajouter  à  ses  qua- 
lités publiques  celles  de  conseil- 
ler à  la  taille  de  marbre,  dont  il 
acheta  la  finance,  et  vint  ensuite 
à  Paris,  où  bientôt  il  s'efforça  d'ac- 
quérir le  titre  d'homme  de  lettres, 
en  publiant  quelques  ouvrages  de 
littérature.  La  révolution  éclata, 
et  il  s'en  montra  le  partisan  zélé; 
c'était  sans  doute  pour  obtenir  u- 
ne  célébrité  à  laquelle  il  parais- 
sait mettre  beaucoup  d'importan- 
ce. Obscur  dans  la  foule  des  parti- 
sans du  nouv(jl  ordre  de  choses,  il 
se  voua  à  la  défense  des  principes 
opposés,  et  après  avoir  rédigé  la 
feuille  intitulée  :  Journal  de  l'Js- 
semblée nationale,  il  publia  le  Cour- 
rier français ,  auquel  il  donna,  a- 
ju'ès  les  événemens  du  10  août 
1793,  le  titre  de  Courrier  républi- 
cain, dont  les  auteurs  furent  con- 
damnés à  la  déportation  comme 
royalistes.  M.  Poncelincréa  ensuite 
la  Gazette  française,  pour  la  rédac- 
tion de  laquelle  il  s'associa  M.  Fié- 
vée.  L'esprit  de  cette  feuille  et  l.i 
conduite  politique  de  son  fonda- 
teur le  firent  condamner  à  mort  le 
2G  octobre  1795  par  le  conseil  mi- 
litaire de  la  section  du  Théâtre- 
Français ,  comme  ayant  provo- 
qué, dans  sa  Gazette,  l'assassinat 
des  représenlans  du  peuple  et  le 
rétablissement  de  la  monarchie.  Il 
prit  la  fuite.  En  1797,  il  reparut 
sur  la  scène  politique,  redevint 
journaliste  anti-républicain,  et 
dans  la  même  année  se  prétendit 
victime  d'un  assassinatcommis  sur 
sa  persomie  dans  le  palais  du  di- 


ii6 


PON 


rectoire-exéculif  et  clans  l'appar- 
tein«;nt  inêincdudirccl'.Barras.  <■!! 
déclara,  dit  un  de  ses  biographes, 
qu'ayant  vAc  uiandc  au  Luxeui- 
bourg,  par  ordre  du  direrleur 
Barras,  on  l'avait  introduit  dans 
le  palais,  etcnlernié  pendant  quel- 
ques heures;  qu'ensuite  plusieurs 
hommes  s'elant  eujparé»  de  lui, 
ravaientlié,lui  avaient  l'ait  souffrir 
loul(;s  sortes  d'outrages,  eu  le  sou- 
uiellant  à  la  puniiion  qu'un  inflige 
aux  enfans,  et  l'avaient  à  la  (in  re- 
conduit tout  couvert  de  sang  jus- 
qu'au milieu  de  la  rue.  Cette  plain- 
te, ajoute  le  biographe,  fut  suivie 
d'une  visite  dans  les  apparlemens 
du  directeur  Barras  ;  mais  M.  Pon- 
celin  ne  reconnut  pas  la  chambre 
où  il  disait  avoir  été  enfermé,  et 
8e  dé^isla  de  ses  poursuites.»  Cet- 
te ridicule  affaire,  que  M  Fiévée 
soutint  gravement  dans  la  Gazette 
française,  et  dont  le  public  s'amu- 
ga,  n'ayant  point  corrigé  M.  Pon- 
celin  de  son  e«prit  d'opposition, 
elle  «ut  des  suiles  fâcheuses;  il  fut 
compris  dans  la  liste  de  déporta- 
tion des  journalistes,  qui  eut  lieu 
après  le  18  fructidoi-  an  5.  Ses 
presses  furent  brisées.  Il  reparut 
aprè^  la  révoluliou  du  18  brunjai- 
re  an  8,  et  continua  de  gérer  la 
maison  de  librairie  qu'il  avait  for- 
mée au  commencement  de  la  ré- 
volution; mais  les  persécutions 
politiques  avaient  un  peu  dérar- 
gé  les  affaiies  de  sou  commerce. 
Ijne  nouvelle  fuite  put  seule  le 
soustraire  à  ses  créanciers.  On 
lui  doit  comme  auteur  et  com- 
me libraire  :  1"  Bil>liotlièque  po- 
litique, ecclésiastique,  physique  et 
littéraire  de  la  France,  1781,  tom. 
l",  \n-[Ç;  1"  Description  liislori- 
que  de  Paris  et  de  ses  plus  beaux 


PON 

moininiens ,  tomes  2  et  3,  1781, 
in-4°  (le  tom,  i"<stde  Beguil- 
lel);  5"  Conférences  sur  tes  édits 
conce)  liant  lus  faillites,  1781,  in- 12; 
4°  l'Art  de  nager,  avec  les  instruc- 
tions pour  se  baigner  utilement, 
1781,  iu-8";  5" Supplément  aux  lois 
forestières  de  France,  précédé  d'u- 
ne analyse  de  l' ordonnance  de  i665, 
in-4%  1781;  6°  Tableau  du  com- 
merce et  des  possessions  des  Euro- 
péens en  Asie  et  en  Afrique,  selon 
les  conditions  des  préliminaires  de 
paix  signés  le  20  janvier  1785, 
1785;  7"  Histoire  philosophique  de 
la  naissance,  des  progrès  et  de  la 
décadence  d'un  grand  royaume,  ou 
Révolution  de  Taïti,  1782,  2  vol. 
in-i  u;  8°  Tableau  politique  de  l'an- 
née 1781,  iu-12;  9"  Histoire  des 
enseignes  et  des  étendards  des  ancien- 
nes nations,  1782,  in- 12;  xo,"  Cé- 
rémonies et  coutumes  religieuses  de 
tous  les  peuples  du  monde,  1780,  4 
vol.  in-t"oI;  1  t"  Superstitions  orien- 
tales, 1785,  in-fol;  ï2'  Chefs-d'œu- 
vre de  l'antiquité  sur  les  beaux-arts 
et  monumens  précieux  de  la  religion 
des  Grecs  cl  des  Romains,  de  leurs 
sciences,  etc. ,  1 784,2  vol.  in-fol.  ;  1  S' 
OEuvrcs  d'Ovide  (traduction  de 
divers  auteurs),  «798,  7  vol.  in-8°; 
l^"  Almanach  américain,  asiatique 
et  africain,  1 785  et  années  suivan- 
tes, iu-12;  iH"  Code  de  commerce 
de  terre  et  de  mer ,  ou  Conférences 
sur  les  lois  tant  anciennes  que  mo- 
dernes,  4'  édition,  1800,  2  vol. 
in- 12,  i\l.  Ersch lui  attribue;  Choix 
d'anecdotes  anciennes  et  modernes, 
i8o3,  5  vol.  iu- 18. 

l'ONCET-DE-LA-COlJR  (An- 
toine- François),  maréchal-de- 
camp,  commandeur  de  la  légion- 
d'iiormeur,  est  né  à  Cbâlons-sur- 
Saône,   le    17    septembre    1750. 


PON 

Son  père,  receveur  des  contribu- 
tions de  cette  ville,  le  fit  entrer  à 
Técole  royale  du  génie  :  cepen- 
dant quelques  contradictions  qu'il 
éprouva  dans  ses  examens,  le  dé- 
terminèrent à  quitter  ce  corps  pour 
le  régiment  de  iMédoc,  infanterie, 
où  il  fut  d'abord  sous-lieutenant. 
Plus  tard  il  accompagna  en  Hol- 
lande le  général  Mathieu  Dun»as,et 
obtint  à  son  retour  une  place  dans 
l'état-major  de  l'armée.  Lorsque 
la  révolution  éclata,  il  était  em- 
ployé à  Strasbourg  avec  le  grade 
de  lieutenant-colonel,  et  fut  pro- 
mu au  grade  de  général  de  bri- 
gade le  22  mai  1792.  Il  fit  par- 
tie de  l'armée  de  Sambre-et-i>leu- 
se,  qui  conquit  la  Hollande  en 
1795.  Le  géuéral  Poncet  fit  aussi 
avec  distinction  les  campagnes  sui- 
vantes; mais  sa  carrière  active  fut 
terminée  à  l'époque  de  la  révolu- 
tion du  18  brumaire  an  8  (9  no- 
vembre 1799).  Depuis  lors  il  fut 
employé  dans  l'intérieur.  Nom- 
mé, en  1800,  préfet  du  dépar- 
temout  du  Jura  ,  il  en  remplit  les 
fonctions  jusqu'en  1808,  et  reçut 
vers  ce  temps  l'ordre  de  se  ren- 
dre à  Lyon,  en  qualité  de  com- 
mandant en  serond  du  départe- 
ment du  Rhôiie  :  il  occupait 
encore  cette  place  en  1814.  Après 
les  événemens  du  20  mars  i8i't,  il 
fut  nomuié  commandant  du  dé- 
partement de  la  Somute,  puis 
chargé  de  diriger  la  construction 
des  relranchemens  de  Paris.  Le 
général  Poucet  fut  admis  à  la  re- 
traite le   1   septembre   1816. 

PONCET-UELPLCH  (N.)  ,  a- 
vocat  et  consul  à  Montauban,  fut 
élu,  en  1789,  député  du  tiers-é- 
tal de  la  sénéchaussée  du  Qujjr- 
cy.aux    états  -  généraux ,    ni"i     il 

T.  XVI. 


PON 


417 


siégea  an  côté  droit.  En  1797» 
il  fut  nommé  au  conseil  des 
cinq  -  cents  ,  par  une  scission 
de  l'assemblée  électorale  du  dé- 
parlement du  Lot;  mais  sa  nomi- 
nation fut  annulléepar  la  mtijori- 
té  du  corps-législatif,  où  domi- 
nait alors  le  parti  dit  de  Clichy, 
auquel  il  paraissait  opposé.  Après 
la  chute  de  ce  })arti ,  amenée  par 
la  joiirnée  du  18  fructidor,  Pon- 
cet-Delpech  prit  séanceau  conseil; 
mais  il  en  fut  de  nouveau  exclu 
après  la  révolution  du  18  brumai- 
re an  8  (9  novembre  1799).  En 
1800,  il  fut  nommé  président  du 
tribunal  civil  de  Moatauban,  et 
cessa  d'en  exercer  les  fonctions 
quelques  années  avant  la  restau- 
ration. Poncet-Dtdpech  mourut  le 
11  mars  1817  î  •'  cultivait  la  poé- 
sie, et  divers  recueils  contiennent 
de  lui  des  Pièces  fugitives.  Son 
fils,  M.  F.  M.  Poncet-Delpech,  a 
publié,  en  1 8o5  :  Mes  quatre  Ages, 
poiime  dont  les  journaux  ont  par- 
lé d'une  manière  avantageuse.  H 
en  a  donné  à  Paris,  en  181 5,  une 
nouvelle  édition  in- 18,  avec  fi- 
gui-es. 

PONT.ERVILLE  (Jean-Baptis- 
te-Antoine  Aimé  Samson  de),  est 
né  dans  l'ancien  comté  de  Pon- 
thieu ,  quelques  années  avant  la 
révolution.  Ses  études  furent  in- 
terrompues pai'  la  suppression  des 
collèges,  mais  il  les  continua  avec 
succès  sous  des  maîtres  particu- 
liers. Il  manifesta  dès  l'enfancti 
son  goftt  irrésistible  pour  la  poé- 
sie; bien  jeune  encore  il  venait 
de  composer  plusieurs  ouvrages 
qu'il  destinait  au  théâtre,  lorsque 
le  poëme  de  Lucrèce  lui  tomba 
entre  les  mains  :  accoutumé  à  dis- 
tinguer tes  beautés  de  la  littéralu- 
*7 


4i8 


PON 


re  ancienne,  dont  il  faisait  une 
étude  particulière,  il  admira  le 
poète  philosophe,  rival  heureux 
de  la  sublimité  d'Homère ,  et 
qui,prê(aiit  à  la  raison  les  grâces 
de  la  poésie  ,  stibslituail  une  mo- 
rale douce  et  pure  aux  funestes 
erreurs  du  fuMiitisMie.  Le  jeune 
littérateur  s'etinna  qu'un  chef- 
d'œuvre,  objet  constant  de  l'ému- 
lation Je  Virgile  et  d'Ovide,  fût  si 
peu  connu  et  surtout  si  injuste- 
ment apuréeié.  Dès  ce  moment, 
abandonnant  tons  les  plans  qu'il 
avait  traeés.  il  ne  s'occupa  qu'à 
méditer  les  images  poétiques  et 
les  c<inct  plions  profondes  du 
chantre  de  la  nature.  Bientôt  il 
conçut  le  projet  hardi  de  les  tra- 
duire en  vers  français.  Kien  ne  put 
le  délouiner  île  son  but  :  en  vain 
lui  objectait-on  la  tiécisiou  tran- 
chante de  La  Harpe,  et  les  ditfi- 
cu!l<'>,  sans  nf>nd)re  contre  les- 
quelles tuil  é(  liviiin  n'avait  osé 
lutter;  Sfinteni  par  cet  enthou- 
siasme que  donne  Famour  des 
arts  aux  hotnmes  nés  pour  les 
cultiver,  M.  de  Pongerville  (  on- 
sacra  tous  st;>  momcns  à  revêtir 
les  pensées  de  «Lucrèce  des  char- 
mes de  la  \ei -^ilic.ilion  française, 
et  à  fantiliaîiser  notre  langue  a- 
vee  des  beautés  mâles  et  hardies 
qui  lui  éiaieol  enCDre  étrangères. 
Parvenu  au  milieu  desabmgueet 
pénible  lâcîie,  le  traducteur  en- 
voya ini  «1)01(1  entier  du  poëme 
au  secretiiiie  perpétuel  de  l'aca- 
démie-lraiiçnis<,,  en  le  priant  de 
lui  dire  avec  franchise  s'il  jugeait 
son  Irtviill  di^ne  d'êlre  continué. 
L'.inl'Mir  «les  icmpliers ,  frappé 
du  taii'i;!  oi'.e  révélait  ce  premier 
rss^ii,  lui  reti.indil  :  >'Venez  à  Pa- 
ri?, le  succès  vous  y  attend.  »  M. 


PON 

de  Pongerville  quitta  la  terre  d« 
son  père,dans  laquelle  il  avait  pres- 
que toujours  résidé;  s'entoura 
dans  la  capitale  d'amis  et  de  litté- 
rateurs éclairés,  et  termina,  après  ~ 
quinze  ans  de  travaux,  sa  noble 
et  courageuse  entreprise.  A  peine 
sa  traduction  de  Lucrèce  fut-elle 
publiée,  qu'elle  obtint  le  suffrage 
de  nos  plus  célèbres  littérateurs; 
line  rumeur  bienveillante  s'éleva 
de  toutes  parts  pour  lui  décerner 
les  plus  justes  éloges;  la  sensation 
qu'elle  produisit  détourna  même 
l'attention  publique  des  intérêts 
de  la  politique;  des  voix  ordinai- 
rement opposées  s'unirent  pour 
la  louer  à  l'envi.  Son  éclatant 
succès,  en  rappelant  le  succès  de 
la  traduction  des  Géorgiques  par 
Delille,  a  fait  regarder  M.  de  Pon- 
gerville comme  le  digne  émule  de 
l'interprète  de  Virgile,  et  l'opinion 
générale  place  sa  traduction  par- 
mi les  monumens  qui  honorent 
notre  époque  littéraire. 

PONGIBAUD  (le  comte  Al- 
bert-François DE  iMoRÉ  DE  ),  né 
dans  la  ci-devant  province  d'Au- 
vergne, d'une  ancienne  famille  de 
ce  pays,  qui  le  destina  au  service. 
Il  entra,  en  17(59,  dans  les  mous- 
quetaires noirs,  et  devint,  Ibrs  de 
la  suppression  de  ce  corps,  capi- 
taine au  régiment  de  Provence.  M. 
de  Pongibaud  passa  ensuite  en 
qualité  de  major  dans  le  régiment 
de  Dauphiné,  puis  obtint  le  grade 
de  colonel  d'infanterie.  En  1791, 
il  se  rendit  à  l'armée  des  princes, 
où  il  servit  jusqu'au  licenciement 
de  cette  armée.  Alors  il  se  retir» 
en  Suisse.  A  Lausanne,  il  s'y  li- 
vra à  des  opérations  commerciales; 
n-.ais  l'arrivée  des  troupes  françai- 
ses le  forcèrent  de  quitter  cette  ville: 


.-^1 


'  w  ■  /    /'■  ■ 


,//""'  l.fhi-nn    iiiiui'  . 


P'niiii/  </<-/.  r/   Si-ii/ii 


PON 

II  se  rendit  successivement  à 
Constance,  àVenise  et  à  Trieste.où 
la  conflancé  qu'il  sut  inspirer  lui 
permit  de  donner  à  son  commer- 
ce une  plus  gnuide  extension. 
Il  fut  parfaitement  secondé  dans 
ses  opérations  par  son  épouse. 
Cette  dame,  dont  l'esprit  est  très- 
cultivé,  fut  chargée  de  la  corres- 
pondance,et  parvint  à  donner  des 
agrémens  à  un  genre  de  relations 
qui  en  est  peu  susceptible.  M.  de 
Pongibaud,  par  son  industrie  et 
son  activité,  en  rendant  d'intpor- 
tans  services  au  pays  qui  lui  offrit 
un  asile,  a  pu  regagner  en  grande 
partie  la  fortune  qu'il  avait  per- 
due en  quittant  la  France.  La  mai 
son  qu'il  a  établie  à  Trieste ,  où 
elle  existe  encore  sous  le  nom 
de  Joseph  Labrosse,  est  devenue 
une  des  plus  opulentes  de  l'Alle- 
magne. 

PONIATOWSKI  (Joseph, 
i'bince),  né  à  Varsovie,  le  7  mai 
1765,  neveu  du  dernier  roi  de 
Pologne,  Stanislas-Auguste ,  était 
fils  du  prince  André  Poniatowski, 
feld-zeug-meisler,  ou  lieutenant- 
général  d'artillerie,  au  service  de 
l'impératrice-reine  Marie  -Thérè- 
se, et  petit- fils  du  célèbre  com- 
pagnon d'armes  de  Charles  XII, 
roi  de  Suède.  Le  malheureux  mo- 
narque polonais  avait  fait  élever, 
sous  ses  yeux  et  avec  le  plus  grand 
soin,  son  jeune  neveu,  dont  il  eut 
quelque  temps  l'espoir  de  faire  son 
héritier.  A  TSge  de  »6  ans,  le 
prince  Joseph  entra  au  service 
d'Autriche,  où  son  père  jouissait 
de  la  plus  haute  considération.  Il 
y  obtint  np  avancement  rapide, 
et  se  distingua  par  ses  talens  et  sa 
brillante  valeur  [tendant  la  guerre 
qui  éclata  en  1787,  entre  l'Autri- 


PON  4,9 

che  et  la  Porte-Ottomane.  Il  é- 
tait  alors  colonel  des  dragons  de 
l'empereur  et  aide  -  de  -  canif 
particulier  de  Joseph  H.  H  fui 
grièvement  blessé  à  la  prise  de 
Sabacz  sous  les  yeux  de  l'empe- 
reur même  ,  qui  lui  prodigua  ses 
soins,  et  lui  témoigna  en  toute 
occasion  son  estime  et  saconfiance. 
Malgré  les  nombreux  avantages 
que  lui  olïrait  le  service  d'Autri- 
che, il  s'empressa  de  le  quitter  dès 
qu'il  crut  que  sa  présence  pour- 
rait devenir  utile  à  sa  patrie.  On 
avait  conçu  en  Pologne  l'espoir 
de  se  soustraire  à  l'influence  étran- 
gère. La  diète  venait,  à  la  fin  de 
178g,  de  décréter  une  nouvelle 
organisation  de  l'armée  nationale; 
le  prince  Poniatowski  voleaussilôt 
àVarsovie,el  s'y  occupe  avec  le  plus 
grand  zèle  à  former  et  à  instruire 
les  nouveaux  corps.  Bientôt  la  ré- 
publique lui  conlia  le  commande- 
ment en  chef  de  son  armée.  Il  a- 
vait  su  inspirer  une  entière  con- 
fiance aux  citoyens,  et  il  était  de- 
venu l'idole  des  soldats.  En  1791 
(3  tnai) ,  le  roi,  les  membres  de  la 
diète, à  la  presque  unanimité,  et  la 
nation  polonaise  tout  entière ,  a- 
vaient  adopté  avec  enthousiasme  n- 
ne  constitution  libérale  ;  mais  la  li- 
berté et  le  bonheur  de  la  Pologne 
n'entraient  point  dans  les  vues  de 
l'autocrate  de  toutes  les  Russies. 
Catherine  II  envoya,  dès  l'année 
suivante,  une  armée  pour  châtier 
ce  peuple  rebelle  à  son  autorité. 
Le  prince  Joseph,  avec  des  for- 
ces inférieures  et  encore  peu  a- 
guerries ,  fit  de^»  prodiges  de  râ- 
leur pour  s'opposer  à  l'invasioH 
des  hordes  du  Nord.  Le  brave 
Kosciusko  {i!oy.  ce  nom)  comman- 
dait alors    une  division   sous  sa* 


420 


PON 


ordres.  Ils  remportèrent  de  signa- 
lés avantages  à  Zielenca  et  à  Du- 
blinska;  mais  une  politique  pusil- 
lanime et  honteuse  vint  rendre 
leur  valeur  inutile.  Le  prince  ap- 
prit bientôt  que  son  oncle,  le  roi 
Stanislas,  épouvanté  des  menaces 
de, la  Russie,  s'était  de  nouveau 
soumis  à  son  joug,  avait  accédé 
à  la  confédération  de  Targowitz, 
et  signé  l'acte  rédigé  par  quelques 
transfuges  polonais,  partisans  des 
Russes;  il  avait  de  plus  conclu  un 
armistice  avec  l'ennemi.  Le  parti 
qui  s'était  emparé  du  faible  mo- 
narque redoutait  également  la 
présence  du  prince  Joseph  à  l'ar- 
mée et  à  Varsovie.  Les  Russes 
craignaient  aussi  qu'il  ne  portTit 
les  soldats,  qiii  lui  étaient  entière- 
rement  dévoués,  à  quelque  parti 
extrême^  et  que,  malgré  les  ordres 
du  roi,  il  ne  continuât  une  guerre 
jusque-là  glorieuse.  Les  vives  ins- 
tances de  son  oncle,  et  la  crainte 
d'attirer  de  plus  grands  malheurs 
sur  la  Pologne,  le  décidèrent  en- 
fin à  déposer  le  commandement 
de  l'armée,  et  même  à  s'exiler 
bientôt  de  sa  malheureuse  patrie. 
Ses  compagnons  d'armes  firent 
frapper  une  médaille  à  son  effigie, 
avec  cette  inscription.  Mites  Im- 
peratori ,  qu'ils  lui  offrirent  avant 
son  départ.  Le  prince  Joseph  voya- 
geait àl'étranger,  quand  il  apprit, 
en  1794»  qu'une  nouvelle  révolu- 
tion avait  éclaté  en  Pologne.  Le 
général  Madalinski  venait  de  le- 
ver l'étendard  de  la  liberté  à  Cra- 
covic.  Les  Russes  et  leur  chef, 
Igelstroem ,  avaient  été  chassés 
de  Varsovie  ;  Rosciusko  venait 
d'ôtre  déclaré  général  en  chef  de 
toutes  les  forces  nalionah's.  Po- 
niatowski  n'hésita  point  à  se  ren- 


PON 

dre  auprès  de  lui,  et  à  prendre 
le  commandement  d'un  corps 
d'armée  sous  ses  ordres.  On  con- 
naît l'issue  de  cette  dernière  et 
sanglante  lutte  des  Polonais  pour 
leur  indépendance.  Écrasés  par 
les  forces  su[)érieures  des  Russes 
et  des  Prussiens,  il  leur  fallut  su- 
bir le  joug  de  l'étranger.  Les  vain- 
queurs ordonnèrent  au  prince  Jo- 
seph de  sortir  de  Pologne;  il  se  ren- 
dit alors  à  Vienne,  vécut  dans  la  re- 
traite, et  rejeta  toutes  les  offres  qui 
lui  furent  faites  d'entrer  au  service 
d'une  puissance  étrangère.  Après  lu 
mort  de  son  oncle,  le  roi  Stanislas, 
l'empereur  Paul  I"inpistade  nou- 
veau pour  qu'il  acceptât  le  grade 
de  lieutenant-  général  de  l'armée 
russe,  et  sur  le  refus  du  prince, 
ses  biens  patrimoniaux  en  Po- 
logne furent  confisqués.  En  1798, 
le  roi  Frédéric  -  Guillaume  lui 
rendit  ceux  qui  étaient  situés 
dans  la  partie  échue  à  la  Prusse, 
et  lui  permit  de  s'y  retirer.  Il  alla 
alors  habiter  la  terre  de  lablonka, 
sur  la  rive  droite  de  la  Vistule, 
à  quelques  lieues  de  Varsovie,  et 
se  plaisait  à  embellir  cette  retrai- 
te, qu'il  tenait  de  la  succession 
du  roi  Stanislas,  s'y  occupant  ex- 
clusivement d'agriculture  et  d'a- 
méliorations rurales.  La  guerre 
entre  la  France  et  la  Prusse  , 
la  bataille  d'Iéna  (14  octobre 
1806),  si  funeste  à  celte  dernière 
puissance,  l'entrée  des  armées 
françaises  en  Pologne,  et  les  espé- 
rances que  Napoléon  flt  renaître 
dans  les  cœurs  des  Polonais,  vin- 
rent encore  arracher  le  prince 
Ponialowski  aux  douceurs  de  la 
vie  privée.  Il  accepta  d'abord  la 
place  de  ministre  de  la  guerre  dans 
le  grand  duché  deVarsovie, nouvel- 


m. 


PON 

lement  établi,  et  trouva  les  mo\ens 
(l'organiser,  dans  ce  pays  épuisé, 
une  belle  armée,  composée  de 
1  2  régimens  d'infanterie,  de  16  de 
cavalerie,  et  de  plusieurs  conipa- 
gnips  d'artillerie.  Mais  lors  de  la 
guerre  qui  éclata  de  nouveau  en- 
tre la  France  et  l'Autriche  en 
1809,  cette  petite  armée  se  trou- 
vait disséminée.  Trois  des  plus 
beaux  régimens  avaient  été  en- 
voyés en  Espagne,  im  autre  en 
Saxe;  les  garnisons  de  Dantzick, 
des  forteresses  prussiennes  de 
Gustrin  et  de  Stettin,  des  places  de 
Thorn,  Modlin  et  Praga,  étaient 
fournies  par  les  troupes  polonai- 
ses. Quand  l'arcbiduc  Ferdinand, 
a  la  tête  de  60,000  Aulricbiens, 
traversant  la  Gallicie  ,  se  disposait 
à  tomber  sur  le  grand-duché  de 
Varsovie,  Poniatoswki  n'avait  que 
8000  Polonais  à  lui  opposer.  On 
«conseillait  au  prince  de  se  retirer 
et  de  ne  point  opposer  ce  noyau 
précieux  de  l'armée  polonaise  à 
une  destruction  presque  certaine; 
mais  il  eût  fallu  fuir  devant  l'enne- 
mi,  et  lui  abandonner  honteu- 
sement le  grand -duché.  Ponia- 
towski  et  ses  braves  rejetèrent 
es  lâches  conseils,  et  résolurent 
défendre  pied  à  pied  le  sol  sa- 
"cré  delà  patrie.  Il  prit  position  a- 
vec  sa  petite  armée  en  avant  de 
Varsovie,  près  du  village  de  Ras- 
zin,  devenu  célèbre  dans  les  fas- 
tes de  la  Pologne,  par  la  batail- 
le qui  s'y  livra  le  10  mai  1809. 
On  s'y  battit  avec  acharnement 
pendant  la  journée  entière  ;  les 
Polonais  i-epoussèrent  toutes  les 
attaques  des  forces  supérieures 
de  l'archiduc.  La  nuit  vint  en- 
fin séparer  les  combattans,  et 
les   deux    chefs   eurent   une    en- 


PON 


421 


trevue  celte  nuit  même.  La  va- 
leur des  Polonais  avait  fait  une 
telle  impression  sur  leurs  en- 
nemis, que  Tarchiduc  offrit  au 
prince  Joseph,  pour  n'avoir  plus 
dès  le  lendemain  une  nouvelle 
lutte  à  commencer,  la  conven- 
tion la  plus  honorable,  par  laquel- 
le il  eut  la  faculté  de  repasser  la 
Vistule  avec  la  poignée  de  bra- 
ves qui  lui  restait,  et  de  prendre 
position  à  Praga.  Les  Autrichiens 
étant  ensuite  entrés  dans  la  viUe 
de  Varsovie,  qui  fut  forcée  de  leur 
ouvrir  ses  portes,  firent  quelques 
dispositions  pour  enlever  aussi 
le  faubourg  de  Praga,  faiblement 
fortifié;  mais  le  prince  .loseph  leur 
déclara  aussitôt  que  s'ils  venaient 
l'y  attaquer,  il  se  porterait  aux 
dernières  extrémités,  et  mettrait 
lui-même  le  feu  à  Varsovie,  en 
commençant  par  le  palais  (dit  la 
Blaka),  sa  propre  résidence,  qu'il 
tenait  du  roi  son  oncle  :  cette  me- 
nace eut  un  plein  effet.  Les  liabi- 
tans  de  la  capitale  applaudirent 
à  sa  courageuse  détermination,  et 
le  prince  gagna  un  temps  précieux, 
qu'il  sut  bien  employer.  Il  avait 
conçu  le  projet  de  se  jeter  dans 
la  Gallicie  ,  d'en  appeler  les 
habitans  aux  armes,  et  d'inquié- 
ter l'ennemi  en  lui  coupant  ses 
communications  avec  les  états 
héréditaires  de  l'Aiilriche.  Le  gé- 
néral Dombrowski  (voj.  ce  nom), 
qui  se  trouvait  à  Posen ,  seconda 
le  mouvement  en  armant  les  ha- 
bitans de  la  grande  Pologne.  Le 
succès  couronna  une  entreprise 
aus.^i  hardie.  Les  paysans  accou- 
raiLMit  en  foule  sous  les  drapeaux 
de  ces  vaillans  chefs,  qui  eurent  le 
bonheur  de  réunir  leurs  forces 
sous  les  murs  de  Gracovie.   Pcn- 


4 '^2 


PON 


datit  ce  temps.  Napoléon,  à  la  tête 
de  son  armée  victorieuse,  était  en- 
tré à  Vienne;  l'archiduc  Ferdinand 
se  hâta  d'évacuer  ïhorn,  Varsovie 
et  les  autres  places  qu'il  occupait, 
pour  regagner  la  Moravie,  et  le 
prince  Joseph  fit  sou  entrée  dans 
l'ancienne  capitale  de  la  Pologne. 
Il  avait  trouvé  les  moyens  de  réu- 
nir dans  les  environs  de  Cracovie 
une  année  de  5o,ooo  hommes, 
qu'il  venait,  pour  ainsi  dire,  de 
taire  sortir  dt;  terre;  mais,  après 
s'être  heureusement  débarrassé  des 
Autrichiens, ileutencore  de  violens 
démêlésaveclesP»nsst's,àqui  Napo- 
léor»  venait  de  céder  une  partie  de 
la  (iallicie  enlevée  à  l'Autriche. 
L'inébranlable  fermeté  qu'il  sut 
opposer  à  toutes  les  prétentions 
injustes  de  ces  nouveaux  envahis- 
seurs, eut  le  succès  qu'il  avait  le 
droit  d'attendre,  et  ajouta  à  pa 
};loire.  Rappelé  bientôt  dans  la 
capitale  par  le  roi  de  Saxe,  alors 
souverain  du  grand  -  duché  de 
Varsovie,  le  prince  Poniatowski 
donn;i  tous  ses  soins  à  fonder  les 
établisscniÊns  militaires  qui  man- 
quaient encore  à  l'armée  polonai- 
se, tels  qu'une  maison  d'invalides, 
et  un  hôpital  pour  les  soldats  des 
écoles  de  génie  et  d'artillerie.  Les 
places  importantes  de  Praga,  de 
Modlin,  de  Sandomir,  de  Zamosc 
et  de  Thorn  ,  furent  aussi  pour- 
vue? des  objets  nécessaires,  et  leurs 
fortifications  furent  considérahle- 
inenl  augmentées.  Pendant  la 
campagne  de  Ilussie,  en  1812,  qui 
se  termina  d'une  njanière  sifunes- 
sc  pour  les  Français  et  leurs  al- 
liés,  le  prince  Poniatowski  et 
ses  braves  Polonais  se  couvri- 
rent de  gloire  dans  tontes  les  af- 
faires où  ils  eurent  part.  Dès  l'ou- 


PON 

verture  de  la  campagne  suivante, 
de  181 3,  il  se  rendit  en  Saxe,  où 
Napoléon  lui  confia  le  commande- 
ment d'un  corps  d'armée  compo- 
séde  troupes  polonaises  et  françai- 
ses. Sans  avoir  le  titi"e  de  maréchal 
de  Fiance,  l'empereur  avait  ordon- 
né qu'il  en  eût  les  insignes,  le  rang 
et  les  honneurs.  Poniatowski  avait 
déclaré  hautement  «  qu'il  était  fier 
de  se  trouver  le  chef  des  Polonais, 
et  que  toute  autre  distinction  n^e 
lui  convenait  point.  »  Cej)endant 
après  la  journée  du  16 octobre,  où 
il  venait  encore,  à  force  de  valeur  et 
de  manœuvres  habiles,  d'obtenir 
ks  plus  b  ri  lia  ns  succès.  Napoléon  fit 
mettre  à  l'ordre  du  jour  de  l'armée, 
que,  «  voulant  donner  an  prince 
Poniatowski  une  dernière  marque 
de  sa  haute  estime,  et  en  même 
temps  l'attacher  plus  étroitement 
aux  destinées  de  la  France,  il  re- 
levait au  rang  de  maréchal  de  l'em- 
pire. «)Le  18  octobre  18  1 5,  il  se  bat- 
tit enccne  toute  la  journée.  Char- 
gé de  couvrir  la  retraite  de  l'armée 
française,  après  la  glorieuse  et  fu- 
neste bataille  de  trois  jours  à  Léip- 
/,ick  ,  il  était  déjà  arrivé  à  l'exl ré- 
mité du  faubourg  de  cette  ville, 
où  il  fit  une  brillante  charge  avec 
une  poignée  de  lanciers  polonais, 
dans  laquelle  il  fut  blessé.  11  pro- 
tégea ensuite  le  passage  de  ses  | 
troupes  légères,  traversa  la  Pleiss  1 
à  la  nage,  mais  se  trouva  enfin, 
avec  ime  suite  peu  nombreuse,  sur 
les  bords  de  la  rivière  d'Klster. 
Par  tme  méprise  bien  funeste,  les 
ponts  avaient  été  coupés  par  les  | 
Français  eux-mêmes.  L'ennemi  lui  J 
criait  en  vain  de  se  rendre;  quoi- 
que blessé  de  nouveau  d'un  coup  de 
feu  à  l'épaule,  il  n'hésita  point,  et 
s'élança  dans  les  flots,  s'abandou- 


PON 

nant;\  son  cheval,  qui  n'en  put  sur- 
monter la  rapidité.  Le  malheureux 
prince  y  disparut.  Son  corps,  re- 
trouvé seulement  le  24  octobre, 
fut  alors  embaumé  et  porté  à  Var- 
sovie, où  tous  les  honneurs  dus  à 
son  rang  lui  furent  rendus  par  or- 
dre même  de  l'empereur  Alexan- 
dre. La  mémoiredu  prince  Joseph 
Poniatowski  est  en  vénération  en 
Pologne  ,  et  doit  l'être  parmi 
les  brares  de  tous  les  pays.  Les 
ennemis  de  sa  nation  plaignirent 
la  6n  d'un  si  généreux  adversaire, 
et  ses  compagnons  d'armes  pleu- 
rent encore  leur  chef  vaillant,  le 
Boyard  polonais^  comme  lui  mo- 
dèle de  fidélité,  comme  lui  guer- 
rier sans  peur  et  sans  reproche.  Le 
prince  Joseph  n'avait  jamais  été 
marié,  et  dernier  rejeton  de  la  fa- 
mille des  Poniatowski,  avec  lui  s'é- 
teignit (si  l'on  en  excepte  un  roi)  u- 
ne  famille  entière  de  héros.  Les  prin- 
cipales dispositions  de  son  testa- 
ment, qu'il  avait  faitavant  de  partir 
pour  la  guerrederiussie,élairnt  tou- 
tes en  faveur  de  ses  frères  d'armes. 
PONS  (  François -Raymond - 
Joseph  de),  ancien  agent  du  gou- 
vernement français  à  Caraccas , 
né  à  Saint-Domingue,  a  long- 
temps séjourné  en  Angleterre  ,  et 
n'est  venu  se  fixer  en  France  qu'en 
1804.  M.  de  Pons  a  publié  sur  les 
colonies  plusieurs  ouvrages  que 
i<es  connaissances  étendues  dans 
ce4te  partie  ont  rendu  dignes  de 
l'attention  publique.  Ce  sont  :  1° 
Observations  sur  la  situation  politi- 
que de  Saint-Domingue,  i7go,in-8"; 
2°  les  Cohnies  françaises  aux  socié- 
tés d'af^riculture,  aux  manufactu- 
res et  aux  fabriques  de  France , 
sur  la  nécessité  d'étendre  à  tous  les 
ports  la  faculté   déjà  accordée  à 


PON 


423 


quelques-uns,  de  recevoir  des  bois, 
bestiaux  ,  riz  ,  poissons  salés ,  que 
la  France  ne  peut  fournir,  1791, 
in- 1 2  ;  3°  Voyage  à  la  partie  orien- 
tale de  la  Terre-Ferme ,  dans  l'A- 
mérique méridionale  f  1806,  3  vol. 
in-S";  f^"  Perspective  des  rapports 
politiques  et  commerciaux  de  la 
France  dans  les  Deux-Indes ,  sous 
la  dynastie  régnante  ,  1807,  in-8°. 
Dans  cet  ouvrage  où  l'auteur  mon- 
tre ,  comme  dans  tons  ceux  qu'il 
a  publiés,  des  vues  très-judicieu- 
ses ,  il  émet  des  opinions  fort  op- 
posées à  celles  que  M.  de  Pradt  a 
développées  dans  son  livre  des 
trois  Ages  des  colonies.  Ces  deux 
ouvrages  doivent  être  également 
consultés. 

PONS  DE  VERDUN  (Robert), 
était ,  avant  la  révolution  ,  avocat 
au  parlement  de  Paris  ,  mais  moins 
connu  du  public  par  ses  plaidoyers 
au  barreau,  que  par  une  foule  de 
poésies  légères  répandues  dans  les 
différens  recueils  périodiques  du 
temps  ,  et  principalement  dans 
■  V Almunach  des  Muses.  Il  réussis- 
sait surtout  dans  le  genre  du  conte 
et  de  l'épigramnie.  L'originalité 
de  son  esprit  et  la  douceur  de  ses 
mœurs  lui  avaient  acquis  dans  la 
société  la  réputation  d'un  homme 
aimable,  quand  la  révolution  vint 
le  jeter  dans  une  plus  vaste  et  plus 
dangereuse  carrière.  M.  Pons  de 
Verdun  eu  embrassa  avec  chaleur 
les  principes,  et  le  poète  gracieux 
se  trouva  bientôt  transformé  en 
magistrat  et  en  législateur.  Nommé 
d'abord,  en  1^92,  accusateur  pu- 
blic à  Paris,  il  fut,  quelques  mois 
après,  élu  par  le  département  de 
la  Meuse  ,  député  à  la  convention 
nationale  ,  où  presque  constam- 
ment attaché  au  comité  de  légis- 


424 


PON 


lation,  il  prononça  à  la  tribune  un 
grand  nombre  de  rapports  au  nom 
de  ce  comité.  Dans  le  procès  du 
roi ,  il  vota  avec  la  majorité.  Le 
premier  jour  complémentaire  de 
l'an  2(17  septembre  1794)?  S"r 
un  de  ses  rapports,  la  conven- 
tion décréta  en  principe,  qu'au- 
cune femme  accusée  de  crimes  en- 
traînant la  peine  capitale  ne  pour- 
rait être  mise  en  jugement,  si  elle 
élail  reconnue  enceinte.  Aussitôt 
le  décret  rendu,  il  courut  à  la  con- 
ciergerie annoncer  aux  prison- 
nières la  promulgation  de  celle 
loi,  et  eut  le  bonheur  d'airacher 
au  supplice  plusieurs  femmes  dé- 
jà condamnées,  ou  sur  le  point 
de  l'être,  auxquelles  il  fit  passer 
l'avis  de  se  déclarer  enceintes.  Le 
99  nivôse  an  5  (18  janvier  1795), 
il  fit  annuler  par  la  convention  un 
jugement  de  la  commission  mi- 
litaire do  Nantes  ,  qui  venait  de 
condamner  A  la  peine  de  mort  la 
veuve  du  général  vendéen  Bon- 
champ.  Il  plaida  on  cette  occa- 
sion, avec  éloquence  et  succès,  la 
cause  d'une  malheureuse  victime 
des  troubles  civils,  et  rappela  la  gé- 
nérosité avec  laquelle  Bonchamp, 
mourant,  avait  sauvé  la  vie  à  des 
prisonniers  républicains  (roj.  Bon- 
ciiAip).  Lors  de  l'insurrection  des 
sections  de  Paris  contre  la  conven- 
tion ,  en  vendémiaire  (1795),  M. 
Pons  de  Verdun  fut  élu  secrétaire 
de  l'assemblée,  et  ensuite  mem- 
bre de  la  commission  des  cinq , 
chargée  de  présenter  de  nouvelles 
mesures  de  salut  public.  Après  la 
session  conventionnelle,  il  entra 
au  conseil  des  cinq-cents ,  y  pa- 
rut plusieurs  fois  à  la  tribune,  et 
fit  un  rapport  ,  le  5  décembre 
1797,   dans  lequel  il  cherchait  à 


PON 

établir  la  nécessité  d'élever  les  en- 
fans  mineurs  des  émigrés  dans  des 
principes  conformes  au  nouvel  or- 
dre de  choses,  et  de  les  soustraire 
à  l'influence  de.  leurs  parens.  Au 
mois  de'  mars  1799,  il  fut  élu  pré- 
sident du  conseil,  et  après  la  révo- 
lution du  18  brumaire  an  8  nom- 
mé commissaire  du  gouverne- 
ment près  le  tribunal  d'appel  du 
département  de  la  Seine.  Napo- 
léon le  nomma  ensuite  substitut 
du  procureur-général  près  de  la 
cour  de  cassation  ,  puis  avocat-gé- 
néral près  de  la  même  cour.  Après 
avoir  rempli  honorablement  ces 
fonctions  importantes  jusqu'en 
1814,  M.  Pons  de  Verdun  donna 
sa  démission  peu  de  temps  après  la 
première  restauration,  i'ut  réinté- 
gré dans  sa  place  d'avocat-général 
pendant  les  cent  jours,  en  18 15,  et 
la  perdit  de  nouveau  après  le  se- 
cond retour  du  roi.  Frappé  com- 
me votant  par  la  loi  du  12  janvier 
1816,  il  se  retira  en  Belgique, 
mais  il  obtint,  en  1819,  l'autori- 
sation do  rentrer  dans  sa  patrie. 
M.  Pons  de  Verdun  a  fourni,  pen- 
dant son  exil ,  plusieurs  contes  en 
vers  aux  journaux  qui  s'impri- 
maient à  Bruxelles.  Il  avait  pulilié 
eu  France:  Mes  Loisirs,  ou  Poésies 
diverses  y  1780,  in- 12,  et  seconde 
édition,  1807,  in-8°;  Portrait  du 
générât  Sawarow ,  '795,  in-8°. 
On  a  annoncé  qu'il  donnerait  in- 
cess. miment  une  édition  complète 
de  ses  oeuvres  diverses. 

PONSARD  (  Louis)  ,  avocat, 
fut  élu,  par  le  déparlement  du 
Morbihan,  membre  de  la  chambre 
des  députés,  en  août  1816.  Il  se 
montra  constamment  le  défenseur 
des  droits  du  peuple;  les  princi- 
pes qu'il  suivit  dans   toute  celle 


PON 

mission  sont  tracés  dans  ces  mots 
«jii'il  prononça,  au  mois  de  jan- 
vier suivant,  lorsqu'il  fut  ques- 
tion de  la  liberté  individuelle  : 
<'  C'est  un  devoir,  dit-il,  pour  un 
»  député  qui  a  passé  la  moitié  de  sa 
»  vie  dans  les  prisons,  occupé  du 
»soin  d'adoucir  la  destinée  des  dé- 
»  tenus,  et  qui  a  été,  plus  que  per- 
»  sonne,  le  témoin  des  abus  d'au- 
»torité,  de  se  déclarer  contre  une 

Ir  nloi  qui  viole  la  liberté  indivi- 
P«d.uelle.  »  Dans  l'importante  dis- 
cussion qui  eut  lieu  à  cet  égard , 
M.  Ponsard  s'élayadu  discours  de 
la  couronne  ,  pour  réfuter  le  ta- 
bleau alartnant  présenté  par  M.  de 
Serres ,  et  combattit  le  projet 
comme  funeste  en  l'absence  de  la 
responsabilité  ministérielle  ;  au 
mois  de  février,  ii  proposa  quel- 
ques amendemcns  au  projet  de 
loi  «ur  les  prisonniers  pour  dettes, 
et  demanda  que  l'on  accordât  aux 
détenus  pour  dettes  civiles,  com- 
me aux  débiteurs  pour  dettes  com- 
merciales, le  bénétice  de  l'article 
18  de  la  loi  du  5  avril  1798  ,  qui 
veut  que  le  commerçant  soit  ren- 
du à  la  liberté  après  cinq  années 
de  détention;  il  conibattit  le  pro- 
jet de  la  commission  sur  les  éla- 
lilissemens  ecclésiastiques ,  et  fut 
interrompu  par  le  centre  et  le  cô- 
té droit,  lorsqu'il  demanda  :  «Qui 
■^«acceptera  les  dotations  ?  sera-ce 
Bplecuré,  le  desservant ,  la  com- 
•  mnnion  desfiJèles  ?»  Au  sujetdes 
élections,  il  se  prononça  avec  for- 
ce pour  l'élection  directe.  De  1817 
à  1818,  en  p;irlant  sur  la  liherlé 
de  la  presse,  il  établit  que  le  pro- 
jet de  loi  tendait  moins  à  répri- 
mer les  abus  que  la  liberté  elle- 
^Tiême  ;  qu'il  confondait  deux  cho- 

r ' 


PON  425 

blication ,  et  que  l'institution  seule 
du  jury,  en  matière  de  délit  de 
la  presse,  pouvait  donner  une 
garantie  suffisante.  Il  combattit 
avec  la  même  énergie  la  disposi- 
tion relative  à  l'asservissement 
des  journaux,  et  s'opposa  à  la 
réduction  des  dettes  des  colons  de 
Saint-Domingue.  De  1818  à  1819, 
il  s'inscrivit  contre  la  résolution 
des  pairs  sur  la  loi  des  élections  ; 
quant  au  cautionnement  des  jour- 
naux, il  le  concède,  tout  en  de- 
mandant une  grande  réduction  ; 
il  se  prononce  aussi  pour  les  jour- 
naux des  départemens,  et  propose 
quelque  disposition  favorable  re- 
lativeu)ent  au  versement  de  fonds 
exigé  des  propriétaires.  Dans  la 
discussion  relative  au  clergé  ,  il 
parla  en  faveur  des  curés  que 
leur  âge  ou  leurs  inGrmités  met- 
tent hors  d'état  de  remplir  leurs 
fonctions,  et  se  plaignit  qu'une 
somme  exorbitante  eût  été  dis- 
tribuée à  vingt-huit  évêques,  nom- 
més à  des  bénéfices  avant  l'adop- 
tion du  concordat.  11  appuya  eu- 
suite,  sans  aucune  restriction,  le 
budget  de  la  marine.  Quant  aux 
articles  additionnels,  après  avoir 
retracé  l'origine  des  camps  de  Ju- 
liers  et  d'Alexandrie  ,  et  les  dis- 
positions législatives  et  adminis- 
tratives dVnit  les  vétérans  ont  été 
l'objet ,  il  demande  que  par  addi- 
tion leurs  pensions  fussent  décla- 
rées réversibles  à  leurs  veuves  et 
à  leurs  cnfans.  Enfin,  dans  les 
chapitres  des  voies  et  moyens,  il 
développa  divers  amendemens , 
les  uns  en  faveur  des  entrepre- 
neurs des  diligences  imposés  A  un 
dixième,  même  sur  le  prix  des 
places  vides,  d'autres  en  faveur 
des  entrepreneurs  de  messagerie». 


426 


»»ON 


lendanl  à  diminuer  les  prix  de 
transport  des  effets  et  marchandi- 
ses qui  lenr  sont  confiés  ;  ainsi  les 
votes  de  M.  Ponsard  eurent  tou- 
jours pour  objet  les  droits  du  peu- 
ple,  les  encourageniens  de  l'in- 
dustrie, et  la  protection  duc  aux 
malheureux.  Ses  concitoyens  le 
réélurent  en  1819  à  lu  chambre 
des  députés  ,  mais  il  ne  Crut  pas 
devoir  accepter  ces  honorables 
fonctions.  Ce  refus  a  vivement  af- 
fecté tous  lesi  amis  de  la  patrie. 

PONSONBY  (  Gbouges)  ,  mem- 
bre  de  la  chambre  des  communes, 
et  en  dernier  lieu  ,  un  des  princi- 
paux ehefs  de  l'opposition  ,  naquit 
en  Irlande,  le  5mars  i^ôS.  Son  pè- 
re, hoir.m«  d'état  distingué,  était 
orateur  de  la  chambre  des  com- 
munes du  parlement  d'Irlande. 
Le  jeune  Ponsonby  fil  de  brillan- 
tes études  à  l'université  de  Cam- 
bridge, et  se  consacra  dès  sa  jeu- 
nesse au  barrcat),  où  il  obtint  des 
succès.  Lorsque  le  duc  de  Portiand 
entra  pour  la  seconde  fois  au  mi- 
nistère en  178a,  et  devint  lord- 
lieiilenant  d'Irlande,  il  fit  donner 
à  Ponsonby  la  place  importante 
et  lucrative  de  premier  avocat  au 
«■onseil  du  revenu.  II  devint  aussi 
membre  de  la  chambre  des  com- 
munes d'Irlande,  et  y  soutint  avec 
talent  les  mesures  de  l'adminis- 
tration. Mais,  en  décembre  1783, 
un  autre  revirement  ministéiiel 
eut  lieu  :  le  duc  de  Portiand  reçut 
sa  démission,  et  Ponsonby  perdit 
sa  place,  que  le  nnarquis  de  Buc- 
kingham,  à  la  tête  du  nouveau  mi- 
nistère, fit  donner  à  M.  Marciis 
Beresford.  Ponsonby,  privé  d'un 
état  brillant,  reprit  avec  ardeur 
l'étude  des  lois ,  obtint  comme 
avocat   une    riche   et   nombreuse 


PON 

clientelle  ,  et  répara  bientôt  la  brè- 
che faite  à  sa  fortune  par  le  mi- 
nistère Buckingham.  Il  se  fit  non- 
seulement  la  réputation  d'un  des 
meilleurs  jurisconsultes  de  l'Irlan- 
de, mais  il  exerça  une  grande  in- 
fluence dans  la  chambre  des  com- 
munes de  Dublin  ,  dont  il  n'avait 
point  cessé  d'être  membre,  y  fut 
considéré  comme  le  plus  éloquent 
orateur  de  l'opposilion  ,  et  le  plus 
redoutable  adveiisaire  du  minis- 
tère. Pendant  la  première  aliéna- 
tion mentale  du  roi  Georges  III, 
il  obtint  même  un  triouaphe  mo- 
mentané sur  le  ministère,  déter- 
mina la  chambre  à  inviier  le  prin- 
ce de  Galles  à  prendre  la  régence 
pendant  la  maladie  du  roi,  et  força 
le  vice-roi  d'Irlande,  qui  s'y  était 
opposé,  à  se  retirer  de  .son  pos- 
te. Ponsonby  continua  depuis  à 
diriger  le  parti  de  l'opposition,  et 
s'éleva  avec  chaleur,  en  plusieurs 
circonstanc(!S ,  contre  la  corrup- 
tion ,  la  violence  et  l'ineptie  des 
agens  du  gouvernement,  qu'il  ac- 
cusait, en  outre,  d'avoir  provo- 
qué, par  leurs  mesures  oppressi- 
ves, le  terrible  soulèvement  de  l'Ir- 
lan<le  en  1798.  Après  la  réunion 
de  cette  île  à  l'Angleterre  et  la  fu- 
sion des  deux  parlemens,  contre 
lesquelles  il  s'était  fortement  op- 
posé, Ponsonby  fut  nommé,  par 
le  comté  de  Wicklow,  député  à  la 
chambre  des  communes  du  nou- 
veau parlement,  d'il  impérial.  Son 
caractère  honorable,  l'opinion  gé- 
nérale et  fondée  qu'on  avait  de 
son  incorruptible  probité,  et  ses 
lalens  oratoires,  quoique  moins 
brillans  que  ceux  des  Fox  et  des 
Sheridan ,  qui  l'avaient  précédé 
dans  la  carrière,  lui  obtinrent,  dans 
la  chambre  des  communes  à  Lou- 


PON 

dres,  la  même  influence  qu'il  avait 
exercée  dans  celle  de  Dublin.  11  fut 
regardé  en  quelque  «îorte,  et  jus- 
qu'à sa  mort ,  comfne  le  chef  de 
l'opposition.  Il  se  prononça  avec 
énergie  contre   plusieurs  mesures 
ministérielles,  principalement  en 
ce  qui  «oncernait  l'administration 
de  la  malheureuse  Irlande.  Il  in- 
sista aussi  pour  la  suppression  de 
l'odieuse  Income  tax  (  impôt  sur 
les  revenus)  qui,  outre  sou  poids 
accablant,  établissait  sur  les  for- 
tunes   particulières    une     espèce 
d'inquisition,  que  les  Anglais  re- 
fusèrent   bientôt    de    supporter. 
Quand   l'alderman ,    sir   William 
Curtis,  présenta  à  la  chambre  des 
communes,  au  nom  des  comm-er- 
cans  ,  marchande  et  banquiers  de 
la  cité   de  Londres,  une  pétition 
revêtue  de  a2,ooo  signatures,  pour 
demander   la    suppression  de  cet 
im]>ôt,  Ponsonby  iuterpela  vive- 
ment le  lord  Castelr«agh.  lui  de- 
mandant si  c'était  encore  là  l'œu- 
vre   d'une    ignorante   impatience , 
termes    dont    ce    ministre   s'était 
.^ervi  ilans  la  discussion     quelque 
leujps  auparavant.    Il  eut  bienlàt 
lieu  de  témoigner  sa  satisfaction  à 
la  chambre  ,  lors  de  la  cessation  de 
cet  impôt,  ainsi  que  de  celui  sur 
la  drèche,  qui  pesait  particulière- 
ment sur  le  peuple.  Dans   toutes 
les  questions  qui   intéressaient    !a 
liberté  civile   ou   polititjue    et  les 
droits  des  citoyens,  Poiisunby  s«; 
prononça  en  vrai  patriote  .  et  tou- 
jours l(»yal  représentant  du  peu- 
l)le.  Il  mourut,  en   :Si<),    vive- 
ment regretté  de  tous  les  hommes 
de  bien.  Il  était  niembre  du  con- 
seil-privé du   royaume  -  uni ,   et 
avait  succédé  momentanément  à 
lord  Uedesdale  dans  les  fonctions 


l'OX  427 

de  chancelier  d'Irlande;  mais  il 
ne  remplit  ce  dernier  poste  que 
pendant  un  an  environ,  et  donna 
sa  démission  en  1807. 

VONSONBY  (Frédéric-Caven- 
dish)  ,  membre  de  la  chambre  des 
communes  pour  le  comté  de  Kil- 
kenny,  chevalier  commandeur  de 
l'ordre  du  Bain,  des  ordres  de 
Marie-Thérèse  d'Autriche  et  de 
Saint-Georges  de  Russie,  est  fils 
du  comte  de  Besborough ,  pair 
d'Irlande.  Il  a  servi  avec  distinc- 
tion,  dès  sa  jeunesse,  dans  les 
armées  anglaises.  Le  prince  ré- 
gent l'avait  choisi  pour  un  de  ses 
aides-de-camp,  et  il  était  en  ou- 
tre Colonel  du  12°  régiment  de 
dragons,  avec  lequel  il  passa  sur 
le  continent,  lorsqu'il  fut  griève- 
ment blessé  à  la  bataille  de  Wa- 
terloo le  18  juin  181  5. 

PONTA  (  JoACHiM)  ,  poète  ita- 
lien ,  né  à  Gènes  en  1  770.  Il  fut  le 
25"*  et  l'avant-dernier  de  ses  frè- 
res ,  qu'il  vit  tous  dispanntre  au- 
tour de  lui,  à  l'exception  d'un 
seul.  Après  avoir  consacré  ses  pre- 
mières années  à  profiter  des  leçons 
de  Solari  et  de  iMassuccf»,  il  fut 
appelé,  par  stnx  père  mourant,  à  le 
remplacer  dans  la  direction  d'une 
fabrique  de  soieries  qui  formait 
tout  le  patrimoine  de  sa  nom- 
breuse famille.  Le  jeime  Ponla, 
qui  s'était  déjà  attaché  à  l'élude  , 
(lut  s'en  séparer  pour  ()béir  à  la  vo- 
lonté de  son  père.  Ayant  eu  le  mal- 
heur de  le  perdre  quelque  temps 
après  ,  il  abandonna  le  commerce 
pour  s'adonner  tout  entier  à  la 
poésie  et  aux  beaux-arts.  Le  pre- 
mier fruit  de  son  application  fut 
un  poëme  didactique  sur  ta  calce 
(  la  chaux  ) ,  qui  eut  quelque  suc- 
cès ,  tnalgré  l'aridité  du  sujet.  Il 


^■iS 


PON 


entreprit  ensuite  un  plus  grand 
poëme  sur  la  Vaccinia  (  la  vacci- 
nation), dont  il  chanta  les  avan- 
tages et  le  triomphe.  Ce  poëme, 
qui  lui  coula  six  ans  de  travail, 
fut  confié  aux  presses  de  Bodoni, 
et  dédié  à  Joacbim  {voy.  Mukat), 
qui  occupait  alors  le  trône  de  Na- 
ples.  M.  Ponta  alla  le  lui  oftVir  lui- 
même,  et  depuis  ce  moment,  il 
n'a  plus  quille  ce  pays,  où  il  a 
composé  un  grand  nombre  de  poé- 
sies fugitives,  dont  il  se  propose  de 
publier  u.i  recueil  complet.  Il  s'est 
aussi  essayé  dans  l'impromptu, 
dont  le  goût  lui  a  é lé  peut-èlre  com- 
muniqué par  Gianni,  avec  lequel 
il  a  ététrès-lié.En  1812,  M.  Ponta 
eut  occasion  de  faire  la  connais- 
sance du  duc  de  Berwich,  qui  lui 
confia  d'abord  la  direction  de  sa 
bibliothèque  et  de  son  musée,  et 
ensuite  réducalion  de  son  fils.  M. 
Porta  lui  témoigna  sa  reconnais- 
sance parun  poëme  généalogique, 
intitulé  :  /  fasU  délia  famigUa  Ber- 
wich. 

PONTE  (Hilaibe),  capitaine 
de  carabiniers  dans  le  bataillon 
des  tirailleurs  corses,  chevalier  de 
la  légion-d'honneur,  naqm'tàAjac- 
cio.  Sa  famille  ,  l'une  des  plus  il- 
lustres de  la  Corse  ,  lui  fil  donner 
une  éducation  conforme  à  sa  for- 
time,  et  son  goût  le  porta  de 
bonne  heure  à  embrasser  la  pro- 
fession des  armes.  La  protection 
pouvait  lui  faire  obtenir  facile- 
ment un  grade  qu'il  voulut  ne  de- 
voir qu'à  son  mérite.  Il  se  distin- 
gua aux  batailles  d'Ulm  ,  d'Aus- 
lerlitï  et  de  Friedland.  Au  com- 
bat d'Ebersbcrg,  le  4  '«ai  1809  , 
Ponte,  alors  capitaine,  montra 
tant  de  valeur  ,  qu'on  le  cita  dans 
le  bulletin  comme  l'un    des   plus 


PON 

braves  officiers  de  l'armée.  «  L'im- 
«pétuosité  des  bataillons  corses  et 
»du  Pô,  y  est-il  dit,  a  fixé  l'at- 
«tention  de  toute  l'armée.  Le 
«pont,  la  ville  et  la  position  d'É- 
«bersberg,  seront  des  monumens 
«durables  de  leur  courage.  Le 
»  voyageur  s'arrêtera  et  dira  :  c'est 
»  ici ,  de  cette  superbe  position,  de 
.•)ce  pont  d'une  aussi  longue  éten- 
»due,  d'(m  château  aussi  fort, 
«qu'une  armée  de  trente  -  cinq 
»  mille  Autrichiens  fut  chassée  par 
«sept  mille  Français.  Une  com- 
«pagnie  du  bataillon  corse,  en 
«poursuivant  l'ennemi  dans  les 
«bois,  a  fait  elle  seule  sept  cents 
«prisonniers.  Les  tirailleurs  cor- 
«ses  et  du  Pô  ont  admiré  la  valeur 
«du  capitaine  Ponte,  dont  la  com- 
«pagnie,  étant  à  l'avant  -  garde 
«dans  cette  affaire,  a  fait  les  sept 
«cents  prisonniers.  »  A  la  bataille 
d'EssIing,  quoique  dangereuse- 
ment malade  ,  il  voulut  guider  sa 
compagnie  au  feu.  Les  chirur- 
giens tentèrent  vainement  de  l'en 
dissuader,  son  courage  triompha 
de  leur  jésislance,  et  malgré  son 
état  de  faiblesse,  il  fit  des  prodi- 
ges do  valeur.  Atteint  d'un  bou^ 
let  de  canon  à  la  poitrine,  il  ter- 
mina à  vingt-deux  ans  une  vie 
glorieuse,  et  qui  donnait  les  plus 
grandes  espérances. 

PONTE  (Antoike),  chef  de  ba- 
taillon de  la  garde  impériale,  che- 
valier de  la  légion-d'honneur,  et 
des  ordres  royaux  d'Espagne  et  des 
Ueux-Siciles,  né  à  Ajaccio ,  en 
Corse,  est  frère  du  précédent,  et 
ne  dut,  comme  lui,  son  avance- 
ment qu'à  sa  valeur.  Entré  dans 
la  carrière  militaire  en  qualité  de 
simple  soldat,  il  obtint  successi- 
vement tous  les  grades  jusqu'à  ce- 


^C'f'Jc  .%nh>cou(<uir 


■  'lit/   t/c  - ^'ntiui'   . 


PON 

lui  de  capitaine,  avec  lequel  il 
pas?a  dans  la  garde  du  roi  Jo- 
seph (»oj  Bonaparte)  à  Naples , 
suivit  ce  prince  en  Espagne,  et 
rentra  avec  lui  en  France,  par  sui- 
te des  événemens  de  la  guerre.  Au 
commencement  de  iSi/j?  '^  capi- 
taine Ponte  fut  admis  dans  la  gar- 
de impériale  avec  le  rang  de  chef 
de  bataillon.  Depuis  l'époque  du 
consulat  jusqu'à  celle  du  traité  de 
Fontainebleau,  il  lit  constamment 
la  guerre  en  Italie,  en  Calabre, 
en  Espagne  et  en  France,  et  se  si- 
gnala en  divers  combats.  Au  siège 
de  Gaëte,  il  fut  grièvement  blessé 
au  talon,  en  montant  l'un  des  pre- 
miers à  l'assaut  du  fort  de  Rocca- 
Gloriosa.  Il  reçut  encore  trois 
coups  de  feu,  dont  un  lui  traver- 
sa la  cuisse  droite,  le  3i  août 
i8i3,  Jorsqu'avec  70  hommes  il 
enleva  la  position  escarpée  de  la 
chapelle  de  Saint-ftlartial,  sur  le 
Bedeasore,  et  fit  éprouver  à  l'en- 
nemi, en  blessés  et  en  morts,  une 
perte  considérable.  Dans  la  cam- 
pagne de  1814,  le  chevalier  Ponte 
montra  autant  de  dévouement  que 
de  courage;  il  entra  le  31  juin  de 
la  mr;me  année  dans  le  2°"  régi- 
ment d'infanterie  légère,  fut  mis 
peii  après  en  réforme,  avec  trai- 
tement d'activité,  et  enfin  il  reçut 
sa  retraite  en  1816. 

PONÏÉCOLLANT  (Louis-Gis- 
TAVE-DoutCET,  COMTE  de)  ,  Com- 
mandeur de  l'ordre  de  la  légion- 
d'honneur  et  dti  l'ordre  du  crois- 
sant, pair  de  France,  est  né  dans  le 
département  du  Calvados  au  mois 
de  noveujbre  1764.  Capitaine  de 
cavalerie  en  1785,  ofTicier  des  gar- 
des-du-corps  du  roi  à  la  fin  de  la 
même  année,  il  fit,  en  1784,  un 
voyage   d'instruction  eu   Prusse; 


PON  429 

assista  aux  grandes  manœuvres  de 
Postdam  et  de  Silésie,  comman- 
dées par  Frédéric-le-grand,  et  à 
celles  de  Bohême  que  faisait  exé- 
cuter à  la  même  époque  l'empe- 
reur Joseph  II.  La  révolution  vint 
le  détourner  de  la  carrière  des  ar- 
mes ,  qui  était  celle  de  ses  pères. 
Administrateur  en  1790,  et  prési- 
dent, en  1791  ,  du  département 
du  Calvados,  il  fut,  dans  la  même 
année,  nommé  suppléant  à  l'as- 
semblée législative,  et  en  1792, 
député  à  la  convention  nationale. 
Dès  le  mois  de  septembre  de  cel- 
te année  1792,  M.  de  Pontécou- 
lant  fut  envoyé,  en  qualité  de  com- 
missaire ,  pour  inspecter  l'armée 
du  Nord,  et  pourvoira  la  défense 
de  cette  frontière,  attaquée  par 
l'armée  autrichienne.  Il  prit  la 
part  la  plus  active  et  la  plus  ho- 
norable au  siège  que  soutint  la  vil- 
le de  Lille,  et  aux  dilTérens  com- 
bats qui  précédèrent  la  bataille  de 
Jemmapes.  Rappelé  dans  le  sein 
de  la  convention,  après  (|u'elle  eut 
décidé  que  le  roi  serait  mis  en  ju- 
gement et  jugé  par  elle,  M.  de 
Fontécoulant  vola  avec  la  minori- 
té courageuse  qui  déclara  ,  et  fit 
constater  au  procès- verbal,  quelle 
n'entendait  pas  prononcer  un  juge- 
ment, mais  seulement  concourir  à 
une  mesure  politique.  Son  vote 
fut  pour  le  bannissement  et  pour 
que  le  décret  à  intervenir  fût  sou- 
mis à  la  ratification  du  peuple,  ain- 
si que  le  décret,  précédemment 
rendu,  portant  abolition  de  la 
royauté.  Il  se  prononça  de  la  ma- 
nière la  plus  explicite  en  faveur 
du  sursis,  lorsque  le  décret  de  con- 
damnation à  mort  eut  été  porté. 
L'opinion  qu'il  publia  sur  cette 
question,  et  celle  que  peu  de  jours 


45o 


PON 


auparavant  il  avait  également 
publiée  contre  les  auteurs  des 
troubles  excités  dans  Paris,  et  con- 
tre les  odieuxinstigateurs  des  mas- 
sacres du  2  septembre,  lui  méritè- 
rent l'honneur  de  se  voir  inscrit 
sur  la  liste  des  '22  premiers  pros- 
crits, dont  la  têle  fut  demandé»; 
par  la  commune  de  Paris,  le  16  a- 
vril  suivant. Les  périisqui  le  mena- 
çaient, et  dont  chaque  jour  accrois- 
sait l'imminence,  n'arrêtèrent  pas 
M.  de  Pontécoulant  dans  la  route 
honorable  qu'il  s'était  tracée.  On 
le  vit  s'opposer,  avec  le  même 
courage  dont  il  avait  déjà  fait  preu- 
ve, à  la  nomination  du  tribunal  ré- 
volutionnaire; dénoncer  la  muni- 
cipalité de  Paris  ;  demander  la 
suppression  de  la  correspondance 
établie  entre  les  sociétés  populai- 
res; réclamer  l'inviolabilité  du  se- 
cret des  lettre*  et  la  libre  circula- 
lion  des  journaux;  protester  con- 
tre toute  délibération  au  5i  mai, 
et  s'opposer  au  décret  d'accusation 
contre  les  députés  de  la  Gironde. 
Décrété  d'accusation  lui-même 
en  octobre  1 793,  et  mis  hors  la  loi, 
il  parvint,  à  travers  des  dangers 
sans  nombre,  à  se  réfugier  en  Suis- 
se, où,  dénué  d'appui  et  de  tout 
inojen  d'existence,  il  se  plaça, 
comme  ouvrier,  chez  un  menui- 
sier de  Zurich.  M.  de  Pontécou- 
lant, rappelé  en  France  au  mois 
de  pluviôse  an  3,  et  réintégré  dans 
ses  fonctions,  fut  nommé,  en  flo- 
réal, membre  du  comité  de  gou- 
vernement ,  d'abord  attaché  à  la 
section  de  la  marine,  et  quelques 
mois  après  chargé  seul  des  opéra- 
lions  des  armées  de  terre.  Son 
premier  soin,  dans  cette  place  é- 
minente,  fut  de  remettre  tu  acti- 
vité l'ét;d)lissemeut  du  cabinet  to- 


PON 

pographique  militaire,  créé  par 
Carnot,  et  dont  le  général  Clark 
avait  la  direction.  N'oublions  pas 
une  circonstance  que  l'histoire 
s'empressera  de  recueillir  :  M.  de 
Pontécoulant  adjoignit  au  bureau 
topographique,  pour  ce  qui  con- 
cernait les  armées  des  Alpes  et  d'I- 
talie, Bonaparte  ,  qui  depuis.... 
mais  alors  il  n'était  encore  que  gé- 
néral de  brigade.  Depuis  cette  épo- 
que, M.  de  Pontécoulant  ne  prit 
que  peu  de  part  aux  discussion» 
toujours  orageuses  de  la  conven- 
tion ;  mais  précédemment  il  avait 
prononcé  un  discours  pour  la  res- 
titution des  biens  des  condamnés  et 
contre  le  système  général  des  con- 
fiscations. Celte  opinion  de  la  plus 
haute  éloquence  ,  et  qui  influa 
beaucoup  sur  la  décision  de  l'as 
semblée,  est  du  très-petit  nombre 
de  celles  que  i\l.  de  Pontécoulant 
crut  devoir  livrer  à  l'impression. 
C'est  ici  le  cas  de  remarquer  que 
le  genre  de  talent  de  cet  orateur 
le  portant  toujours  à  improviser, 
l'impression  devenait  pour  lui  un 
second  travail  auquel  il  s'est 
rarement  livré.  Il  osa  ,  dès  son 
exorde ,  flétrir  le  priacipe  sur  le- 
quel reposait  cette  loi  barbare. 
«  La  confiscation  des  biens  des  con- 
damnés est  injuste,  dit-il,  même 
eu  considérant  tous  les  condam- 
nés comme  coupables;  le  sacrifi- 
ce do  la  vie  est  sans  doute  la  plii,- 
grande  réparation  que  la  patrie 
puisse  exiger  d'un  criminel,  et 
cette  réparation  ne  peut  être  sui- 
vie (l'aucune  autre.  Il  n'est  pas 
vrai ,  comme  on  n'a  pas  craint  de 
vous  le  direct  de  l'imprimer,  que 
quel  que  soit  le  sort  de  la  guerre, 
tes  dépouilles  des  morts  doivent  être 
enlevées   par   tes  vainqueurs.    Les 


PON 

valets  d'une  armée  peuvent  bien 
^e  permettre  de  dépouiller  les  ca- 
davres des  vaincus,  mais  les  vain- 
queurs généreux,  puisqu'ils  sont 
braves,  ne  s'abaissent  point  à  cette 
indignité....  La  confiscation  est  in- 
juste; elle  fait  supporter  aux  en- 
fans  la  peine  des  crimes  de  leurs 
pères;  elle  punit  le  frère  innocent 
de  l'action  du  frère  coupable.... 
Quels  sont  nos  forfaits?  vous  diront 
Icsenfans  proscrits  dès  le  berceau, 
et  qui  ne  connaissaient  encore  de 
calamité  que  la  perte  des  au- 
teurs de  leurs  jours.  Nous  n'avons 
point  partagé  les  fautes  de  nos 
pères  :  vous  ne  pouvez  nous  ren- 
dre nos  guides,  nos  soutiens,  ah! 
du  moins  ne  nous  privez  pas  des 
moyens  de  subsistance  qu'ils  a- 
vaient  amassés  pour  nous,  et  que 
nous  n'avons  pas  mérité  <le  perdre. 
Leur  répondrez  -  vous  :  Nous  con- 
naissons votre  innocence-  mais  vos 
pères  furent  coupables ,  et  vous  devez 

être  punis  comme  eux Rome 

libre  ne  prononça  jamais  de  con- 
fiscation; Sylla  fut  le  premier 
qui  les  ordonna  ,  mais  Sylla  fut 

un  tyran La  confiscation   des 

biens  des  condamnés  est  dangereu- 
se pour  la  patrie;  elle  détache  tous 
ceux  qu'elle  frappe  des  intérêts 
de  la  société  ;  elle  les  appelle 
en  quelque  sorte  i\  les  maudire...; 
elle  est  impoliiique,  car  elle  fa- 
vorise la  tyrannie.  Les  hommes 
qui  veulent  usurper  le  pouvoir 
n'ordonnent  pas  de  nouveaux 
impôts;  ils  savent  trop  que  ce 
premier  acte  de  l'autorité  pour- 
rait renverser  leurs  projets;  ils 
flattent  d'abord  les  |)assions  du 
peuple;  ils  l'environnent  de  be- 
soins et  de  défiances  .  ils  lui 
présetilvnt  dans  tout  ce  qui  l'en- 


PON  45 1 

toure   des  ennemis  et  des  cons- 
pirateurs à  punir.  Le  peuple  une 
fois    trompé,   le  sang   des  hom- 
mes  riches,    celui    des    hommes 
de  bien,  inonde  les  places  publi- 
ques; les  confiscations  sont  ordon- 
nées, et  les  mains  des  confiscateurs, 
teintes  de  sang  et  pleines  d'or,  ri- 
vent  les  fers  de  la  nation....   Je 
n'irai  pas  chercher  bien  loin  le> 
preuves  de  cette  douloureure  as- 
sertion ;  il  suffira  de  vous  rappe- 
ler ce  mot  atroce  que  vous  avez 
entendu,  et  qu'il  importe  de  trans- 
mettre à  la  postérité  la  plus  recu- 
lée, pour  qu'elle  se  garantisse  de 
l'entendre  à  son  tour  :  Nous  bat- 
tons monnaie  sur  les  échafauds.  » 
Depuis  le  jour  où  il  prononça  ce 
discours  à  la  tribune  de  la  con- 
vention, M.  de  Pontécoulnnt  s'oc- 
cupa exclusi rement   de  la  direc- 
tion  des  opérations  militaires  et 
des  rapports  sur  celte  partie.  Im- 
médiatement  après  la  signature, 
à  Bille,  de  la  paix  avec  l'Espagne  , 
il  dirigea  un  détachement  consi- 
dérable de  l'armée  des  Pyrénées- 
Orientales  sur  Nice,  pour  renfor- 
cer l'armée   d'Italie,  qui   bientôt 
n'eut  plus  besoin  que   d'un   chef 
pour    commencer    celle    longue 
suite  d'exploits  qui  a  consacré  la 
gloire  des  armes  françaises  depuis 
l'embouchure  du   Var  jusqu'aux 
sources  de  l'Adige  et  de  la  Bren- 
ta.    Élu  président  de  la  conven- 
tion, au  mois  de   messidor  au  5, 
il  quitta  le  comité  du  gouverne- 
ment,  à   la  fin  de   fructidor   sui- 
vant,   après  avoir    fait   pronon- 
cer l'abolition  des  décrets  d'accu- 
sation et  d'exil  portés  par  la  con- 
vention au  mois  d'octobre  i^M^, 
contre   le   général   Monlesquiou, 
Dénoncé  «près  le  1 5  vendémiaire. 


u 


432  PON 

par  le  parti  qui  voulait  ajourner  ou 
repousser  le  gouvernement  cons- 
titutionnel et  proroger  les  pou- 
voirs de  la  convention,  il  ne  se 
contenta  pas  de  repousser  les  atta- 
ques qui  lui  étaient  personnelles  ; 
il  fit  rapporler  les  décrets  d'arres- 
tation rendus  contre  plusieurs  de 
ses  collègues.  M.  de  Pontécoulant 
partagea  avec  MM.  Lanjuinais  , 
Boissy-d'Anglas  et  Pelel-de-la- 
Lozère  (  encore  aujourd'hui  ses 
collègues  à  la  chambre  des  pairs) 
rhonneurd'êlre  réélu  par  un  très- 
grand  nombre  de  collèges  élec- 
toraux (  par  plus  de  70  ).  Il  op- 
ta pour  le  département  du  Calva- 
dos, qu'il  avait  déjà  si  honorable- 
ment représenté,  et  entra  au  con- 
seil des  cinq-cents.  Il  s'y  montra 
fidèle  au  même  système  de  mo- 
dération courageuse,  dont  il  ne 
s'est  jamais  écarté  dans  le  cours 
da  sa  vie  piditique.  Au  conseil 
des  cinq-cents  comme  à  la  con- 
vention, il  fit  constamment  partie 
de  cette  minorité  qui  combattit, 
toujours  avec  taleiis,  quelquefois 
avec  succès,  les  nouveaux  excès  du 
gouvernement  ultra-révolution- 
naire, et  la  honteuse  oppression  du 
directoire.  Nommé  président  du 
conseil  des  cinq-cents,  au  mois 
de  ventôse  an  Zj,  il  défendit  la  li- 
berté de  la  presse  contre  Louvet 
et  Chénier;  il  triompha  dans  cel- 
te occasion  de  ses  deux  puis- 
sans  adversaires,  qui  soutenaient 
alors  les  projets  du  directoire- 
exécutif.  M.  de  Pontécoulant 
parle  ensuite  pour  la  levée  du 
séquestre  des  biens  des  parens 
d'émigrés;  contre  la  loi  d'excep- 
tion ,  dite  du  5  brumaire  an  4^  i- 
mitée  de  la  loi  des  suspects  de 
l'r.n  2;   monte  à  la  tribune   pour 


PON 

y  célébrer  les  victoires  des  armées 
de  Sambre-et-Meuse  et  d'Italie, 
et  propose  un  projet  de  loi  sur  les 
honneurs  à  rendre  aux  braves 
morts  les  armes  à  la  main;  il  com- 
bat les  propositions  du  directoire, 
relatives  aux  colonies,  et  dénonce 
la  conduite  des  commissaires 
Santhonax,  etc.,  et  des  divers  a- 
gens  de  l'autorité,  comme  ayant 
amené  et  provoqué  les  désastres 
de  Saint-Domingue  ;  il  demande 
qu'ilsoitpris  des  mesures  pour  pré- 
server de  pareils  malheurs  les  îles 
Je  France  et  de  Bourbon;  il  s'élève 
contre  la  conduite  du  directoire, 
dans  les  révolutions  de  Venise  et 
de  Gênes,  et  contre  un  débarque- 
ment de  forçats  qu'il  a  fait  opé- 
ler  en  Irlande.  Il  défend  le  tribu- 
nal de  cassation  contre  le  direc- 
toire; se  plaint  de  la  marche  des 
troupes  dans  le  rayon  constitu- 
tionnel; fait  considérer  cette  me- 
sure comme  une  attaque,  ou  du 
moins  une  menace  dirigée  contre 
le  corps-législalil';  demande  que 
le  directoire  soit  tenu  de  donner 
à  ce  sujetde  promptes  explications; 
ne  trouve  pas  sufTisantes  celles 
que  renferme  le  message  directo- 
rial; propose  l'adjonction  des  re- 
présentans  Pichegru  et  Villot  à  la 
commission  des  inspecteurs  de  la 
salle,  chargée  de  veiller  à  la  sûreté 
du  conseil.  Pour  prix  d'une  dé- 
feîise  si  intrépide  et  si  persévéran- 
te des  libertés  publiques,  M.  de 
Pontécoulant  ne  dut  pas  s'éton- 
ner de  se  trouver  inscrit  sur  la 
liste  de  proscription  du  18  fructi- 
dor, adressée  par  le  directoire  au 
conseil  des  cinq-cents;  néanmoins 
il  eu  fut  rayé  par  les  efforts  de 
SOS  collègues  de  la  députation  du 
Calvados.   Il  échappa  ainsi   à    la 


PON  TON                 433 

déportation  dans  les  forêts  de  la  iriflrmes,  à  extirper  la  mendicité 
Guiane  ,  que  le  directoire  avait  d'un  pays  où  cette  lèpje  de  la 
prononcée  contre  les  ennemis  de  société  était  si  profondément  in- 
son  pouvoir  lâchement  tyranni-  vétérée  qu'elle  semblait  pour 
que.  Le  danger  qu'il  a  couru  et  ainsi  dire  inhérente  à  son  txis- 
'  qu'il  peut  courir  encore  n'empê-  tence.  Nommé  sénateur  au  mois 
che  pas  M.  de  Pontécoulant  de  de  février  i8o5,  M.  de  Pontécou- 
protester  contre  les  événemens  lant  obtint  bientôt  après  du  chef 
du  18  fructidor,  comme  il  avait  du  gouvernement  la  permission 
protesté  contre  ceux  du  5i  mai;  de  faire  un  voyage  en  Turquie.  Il 
il  fait  plus  :  il  refuse  de  continuer  se  trouvait  -^  Constantinople  lors 
à  siéger  dans  une  chambre  dont  de  l'attaque  de  l'escadre  anglaise 
les  droits  ont  été  violés  par  le  di-  (féviier  1807),  et  contribua,  sous 
rectoire,  et  se  retire  dans  le  dé-  la  direction  de  l'ambassadeur  de 
partement  du  Calvados  ;  il  y  fut  France,  le  général  Sébastiani,  son 
nommé  assesseur  du  juge-de-paix  ami,  à  la  défense  du  port,  de  la 
de  son  canton,  et  en  exerçait  en-  pointe  du  sérail  et  à  celle  du 
cure  les  fonctions  à  l'époque  du  Bosphore.  Le  grand -seigneur  ré- 
18  brumairean  8.  L'année  suivan-  compensa  les  services  de  M.  de 
te,  iM.  de  Pontécoulant  fut  nom-  Pontécoulant  dans  celte  occasion 
iné  préfet  du  déparlement  de  la  importante,  en  lui  accordant  la 
Dyle.  Cinq  années  d'une  admi-  décoration  de  son  ordre  du  crois- 
nistralion  aussi  ferme  que  bicnfai-  saut.  Après  la  retraite  des  Anglais, 
saute,  ont  rendu  son  souvenir  à  il  se  rendit  à  l'armée  du  grand- 
jamais  cher  aux  habitans  de  ce  visir  sur  le  Danube,  où  il  resta 
pays  :  nous  aurons  résun)é  en  jusqu'à  la  conclusion  de  la  paix 
quelques  lignes  les  travaux  de  de  Tilsitt.  Rentré  en  France  à  la 
son  aduiinislralion  ,  en  disant  fin  de  l'année  1807,  il  vint  re- 
qu'il  y  rétablit  l'ordre  dans  ton-  prendre  sa  place  au  sénat;  en 
tes  les  parties;  qu'il  appela  aux  181 1,  il  fut  envoyé  dans  la  sixiè- 
fonctions  publiques  les  grands  me  division  militaire,  eh  qua- 
propriélaires;  détruisit  les  lis-  lité  d'inspecteur-général,  chargé 
tes  d'émigrés,  leva  les  séques-  de  l'organisation  des  cohortes  ac- 
tres  mis  sur  leurs  biens  et  an-  lives  du  premier  ban  de  la  garde 
nula  les  arrêts  de  déportation  nationale  des  départemens  de 
rendus  contre  les  prêtres.  Les  rou-  l'Ain,  du  Doubs,  du  Jura,  et  de  la 
tes  depuis  long-temps  négligées  Haute-Saône;  en  i8i3,  il  se  ren- 
sont  reconstruites  dans  toute  l'é-  dit  en  Belgique  avec  des  pouvoirs 
tendue  de  son  déparlement,  les  é-  extraordinaires  pour  la  défense  de 
difices  publics  relevés,  le  culte  ré-  la  frontière  du  Nord  ,  et  particu- 
tabli,  les  sœurs  de  la  charité  ren-  lièrement  des  départemens  de  la 
dues  à  leurs  pieuses  fonctions;  il  Dyle,  des  Deux-Nèlhes,  de  Jem- 
assure  le  service  des  hospices,  et  mapeset  de  l'Escaut.  M.  de  Pon- 
parvienl,  en  créant  des  ateliers  de  técoulant  rentra  dans  l'ancienne 
travail  pcuir  les  pauvres  valides,  et  France,  eu  février  1814  »  avec 
des  refuges  pour  k^vioillards  cl  les  la  petite  et  brave  armée  du   gé- 

T.    XVl.  2^ 


454  î*^^ 

nét-nl  Maison;  il  siégea  au  sénat, 
dans  les  t^éances  où  re  corps  rap- 
pela au  trône  le  roi  régnant.  Il  fut 
nommé  pair  de  France  par  l'or- 
donnance (lu  5  mars  18 14-  Décla- 
ré déiïiissioiHiaire  par  celle  du 
a4  juillet  181 5,  et  rappelé  à  la 
chambre  des  pairs  par  l'ordon- 
nance du  5  mars  181g,  M.  de  Pon- 
técoulant  a  constamment  pris  une 
part  active,  et  souvent  lait  briller 
un  talent  de  discussion  très -re- 
marquable dans  les  délibérations 
de  la  chambre  dont  il  est  mem- 
bre; mais  la  partie  à  laquelle  il 
paraît  s'être  plus  spécialement  at- 
taché est  csllc  des  questions  judi- 
ciaires. Aussi  s'esl-il  lait  parti- 
culièrement lemarquer  dans  les 
diverses  occasions  où  la  chambre 
des  pairs  a  été  constituée  en  cour 
de  justice.  Ce  lut  sur  sa  propo- 
posililion  qu'une  commission  spé- 
ciale fut  Ibrmée  eu  1820  pour  dé- 
terminer la  compétence  et  régula- 
liser  les  opérations  de  la  chambre 
constituée  en  cour  des  pairs.  Il  fut 
aussi  nommé  mentbre  des  deux 
autres  conunissions  formées  pour^ 
le  même  objet  en  1821  et  en 
1822 ,  et  de  celle  formée  en 
1824  pour  modifier,  en  les  adou- 
cissant, différentes  dispositions  du 
code  pénal;  précédemment  M.  de 
Pontécoulant  avait  été  membre 
de  la  commission  qui  rendit  (en 
1819)  la  liberté  aux  journaux. 
Nous  nous  souunes  bornés,  oonj- 
ine  on  a  pu  le  voir,  à  lu  plus 
simple  énonciution  des  évcne- 
mens  et  des  travaux  qui  ont  si 
honorablement  marqué  le  cours 
de  la  vie  politique  de  M.  de  Pon- 
técoulant. Qu(  I  autre  cependant 
pouvait  lui  payer  un  plus  ju^te  tri- 
but d'éloges  que  l'auteur  de  celic 


PON 

notice,  qui  met  au  rang  de  ses 
plus  précieux  souvenirs,  sa  coo- 
pération en  Belgique,  aux  travaux 
adiuinistratifs  de  ce  noble  pair, 
dont  il  avait  été  le  camarade  de 
proscription,  en  1793,  et  qui  l'a- 
vait ))ris  pour  aide,  au  comité 
du  gouvernement  en  Tan  3  et  dans 
sa  préfecture  de  la  Belgique? 

PONTEÏ  lils  (Pierre-Bernard 
de),  membre  de  la  légion-d'hon- 
neur, fut  élu  par  le  département 
de  la  Gironde,  à  la  chambre  des 
députés;  il  y  vota  avec  la  majori- 
té. De  181  5  à  18 16.  lors  du  projet 
de  loi  sur  les  élections,  après  une 
discussion  peu  prolongée ,  il  se 
prononça  pour  les  amendemens 
de  la  commission  <  et  adopta  les 
su[ipléans  pi-oposés  par  M.  de  la 
Bourdounaie  ,  en  partageant  sou 
avis  tant  sur  l'âge  de  4»  ans  qu'il 
exigeait  pour  retnplir  les  fonctions 
de  député,  que  sur  les  trois  degrés 
d'éligibilité,  qu'il  réclamait  égale- 
ment. Profitant  ensuite  de  l'occa- 
sion, il  attaqua  les  ministres,  et 
leur  reprocha  de  n'avoir  pas  don- 
né toutes  les  places  à  des  hommes 
connus  par  leur  attachement  inva- 
riable à  la  monarchie.  De  1816  à 
1817.  dans  la  discussion  du  bud- 
get, il  appuya  l'emprunt  et  les 
économies  ,  revint  sur  le  projet 
déjà  énoncé  de  rétablir  les  corpo- 
rations, proposa  ensuite  quelques 
amendemens  an  budget ,  et  finit 
par  l'adopter.  De  1817  à  1818,  il 
vota  contre  le  recrutement,  après 
avoir  reproduit  toutes  les  objec- 
tions déjà  faites  coutre  les  vé- 
térans. De  i8i8;'i  1819,  lorsqu'il 
fut  question  des  livres  supplémen- 
taires delà  dette  publique,  il  con- 
sidéra le  jeu  de  bourse  C(unme 
tendant  à  faire  disparaître  les  ca- 


POP 

pitaux  en  numt^raire  ,  indispensa- 
bles aux  maiiuluclines,  au  com- 
merce et  aux  jirupriétés  :  il  àou- 
lint  en  fonséq:ience  que  la  loi 
proposée  n'oUVirait  aux  départe- 
inens  que  des  avanlaj;^es  illusoires 
ou  d.mgereux.  Après  une  sortie 
contre  les  journaux,  il  vole  le  re- 
jet. iVÎ.  de  Pontet,  réélu  en  1819, 
siégeait  encore  dans  la  chambre 
dissoute  en  iS^^;  il  ne  IJl  point 
partie  de  la  nouvelle  chaaibre  de 
1824. 

POPHAM  (Sir  Home-Uiggs  ba- 
ronnet), contre  -  amiral  anglais, 
commandeur  de  l'ordre  du  Bain, 
membre  de  la  chambre  des  Cf>m- 
niunes  pour  le  bourg  de  Yar- 
mouth,  dans  lile  de  Wight,  mem- 
bre delà  société  royale,  etc. , est  né 
t;n  Irlaudeen  1763.  M.  Pophan)  pè- 
re, qui  avait  été  consul  brilarmiquc 
à  Teluan,  dans  l'état  de  Waroc.  se 
trouvait  chargé  d'une  nombreuse 
famille  ,  et  ses  fils  lurent  em- 
ployés dans  les  quatre  partie*  du 
inonde.  Sir  Home  Poj)hatn  ,  l'un 
des  plus  jeunes,  entra  au  sortir 
<le  l'enfance  dans  la  rnariiie  roya- 
le, et  parvint  an  grade  de  lieute- 
nant de  vjùsseau  pendant  la  guerre 
d'Amériipie.  Après  la  conclusion 
de  la  paix,  il  [)rit  le  coinn>ande- 
ment  d'im  vaisseau  marchand  ,  et 
se  rendit  dans  l'Inde,  où  il  re- 
trouva m>  de  ses  frères,  qui  s'é- 
tait distingué  an  service  de  la 
compagnie  anglaise.  Lui-même 
fut  bientôt  employé  par  lord  Corn- 
wallis,  et  chargé  d'aller  en  178H 
reconnaître  INew-Harbour,  sur  la 
rivière  Hougly,  où  l'on  avait  for- 
mé le  projet  d'établir  un  gran<l 
arspnal  pour  I»  marine.  Il  trouva 
ce  lien  moins  favorable  qu'on  ne 
l'avait    représenté ,    et    ayant    en 


POP  4:0 

1791  pris  de  nouveau  le  comman- 
deuHinl  d'un  vaisseau  marchand, 
qui  devait  aller  du  Bengale  à  Bom- 
bay ,  il  fut  assailli  on  mer  par  de 
yioknies  tempêtes,  qui  l'obligè- 
rent d'entrer  dans  le  détroit  de 
Malacca  ,  et  de  jeter  l'ancre  près 
de  l'ile  du  prince  de  Galles.  Il  y 
découvrit  un  passage  «néritlional, 
et  proposa  d'établir  l'arsenal  de 
la  marine  dans  un  endroit  bien 
plu>  convenable  'pie  celui  qu'on 
avait  d'abord  eu  en  vue.  Son  pro- 
jet fut  adopté  .  et  des  remercî- 
me!»s  publics  lui  furent  adressés 
par  le  gouvernement.  Une  pièce 
de  yaisselie  avec  une  inscription 
honorable  lui  (ut  offerte  eu  plein 
conseil.  La  cour  des  directeurs  de 
la  compagnie  des  Indes  le  recom- 
manda pour  son  avancement  aux 
lords  de  l'amirauté  à  Londres.  En 
1795,  il  fut  nommé  capitaine  de 
vaisv<eau  à  la  recommandation  du 
duc  d'York,  auquel  il  avait  rerv- 
dn  d'iurporlans  services  pendiMif 
la  malheureuse  expédition  des  An- 
glais en  Flandre  .  dont  il  recueil  - 
lit  les  débris  ,  qu'il  escorta  en  An- 
gleterre avec  l£s  frégates  l'y/m- 
pliion  et  la  Dédale.  En  1798,  sir 
Home  Popham  se  rendit  à  Rével 
et  à  Cron.-ladt  afin  de  présider'» 
l'end). uipienient  des  troupes  que 
Il  lUissie  fournissait  à  l'Angleter- 
re, pour  forn>*;r  une  nonvelle  ex- 
pédition destinée  à  chasser  le.4 
Français  de  la  Hollande,  entre- 
prise qui  eut ,  ronime  ou  sait  . 
l'issue  la  ])liis  funeste  pour  les  ai- 
liés.  ;  mai-*  les  commencemens  eu 
lurent  brillau'*  pour  {••  capitai- 
ne angïai*  ;  il  re(;ut  l'accueil  le 
plu't  flatteur  en  Hussie;  leinpe- 
rciu'  et  rimpéralrice  se  rendireni 
à  sou  Lord ,   et  le  comblèrent  de 


/l56 


POP 


présens.  Paul  I",  qui  venait  de  se 
créer  lui-raêine  grand-maître  de 
iMalle  ,  créa  sir  Home  Popham 
commandeur  de  cet  ordre,  et 
le  gouvernement  anglais,  qui  per- 
mettait encore  à  l'autocrate  de 
toutes  les  Russies  d'eu  distribuer 
les  décorations,  quoiqu'il  se  ré- 
servât depuis  la  propriété  de  tou- 
te l'île,  autorisa  l'oliJcier  protes- 
tant à  prendre  dans  son  pays  le 
titre  de  commandeur  d'un  ordre 
catholique.  Ce  premier  exemple 
l'ut  donné  en  septembre  1798.  Les 
troupes  russes  furent  conduites 
sur  les  vaisseaux  anglais  eu  Hol- 
lande, d'où  elles  passèrent  à  la  fin 
de  la  campagne  ,  prisonnières  de 
guerre  en  France.  A  son  retour 
en  Angleterre,  sir  Home  Popbam 
donna  le  plan  d'une  division  de 
tout  le  pays  en  districts  mariti- 
mes, et  il  obtint  le  commande- 
ment de  celui  qui  est  situé  entre 
Deal  et  Beavy-Head.  En  1800,  il 
s'embarqua  pour  les  Indes-Orien- 
tales ,  se  rendit  à  Calcutta,  et  fut 
chargé  par  le  gouverneur-général 
lord'Wellesley,de  différentes  mis- 
sions diplomatiques  auprès  du  shé- 
rif de  la  Mecque  et  des  scheiks  de 
l'Arabie,  qu'il  s'agissait  de  ga- 
gner .  et  avec  lesquels  la  compa- 
gnie marchande  et  souveraine  éta- 
blissait de  nouvelles  relations  de 
commerce.  L'habile  négociateur 
réussit  jiarfaitement ,  à  ce  qu'on 
assure,  dans  ces  missions;  mais 
à  son  retour  à  Londres  en  i8o3, 
il  n'en  trouva  pas  moins  le  nou- 
veau ministère  ,  formé  en  son  ab- 
sence ,  mal  disposé  à  son  égard. 
On  accusait  sir  Home  Popham 
d'avoir  fait  des  dépenses  exces- 
sives dans  l'Inde  pour  lu  ré- 
paration   de    ses    vaisseaux  ,     et 


POP 

d'avoir,  pour  satisfaire  ses  in- 
térêts particuliers,  promené  son 
escadre  dans  les  parages  du  Ben- 
gale ,  au  lieu  de  la  conduire  di- 
rectement à  Bombay.  Dans  un 
rapport  public  du  ministère,  cette 
conduite  se  trouvait  sévèrement 
blâmée.  Sir  Home  Popham,  qui 
avait  cependant  été  élu  mem- 
bre de  la  chambre  des  com- 
munes, se  vengea  de  cette  atta- 
que en  censurant  vivement  les 
rapports  officiels  .des  ministres  au 
parlement  sur  l'état  de  la  marine, 
et  en  signalant  leurs  graves  er- 
reurs. L'accusation  n'eut  point 
d'autres  suites  que  la  non  activité 
de  l'accusé  pendant  ce  ministère. 
Une  nouvelle  administration  ayant 
été  formée,  dont  lord  Melville, 
prolecteur  de  sir  Home  Popham  , 
devint  membre,  ce  dernitu*  eut  le 
commandement  du  vaisseau  V An- 
tilope ,  et  fut  ensuite  mis  à  la  tête 
de  l'expédition  dite  des  Catama- 
rans, brûlots  qui,  fabriqués  pour 
détruire  la  llottille  de  Boulogne, 
n'incendièrent  qu'une  seule  cha- 
loupe. En  i8o5,  son  triomphe  au 
j>arlement  fut  complet  ;  l'enquête 
qu'il  avait  demandée  ayant  été  fai- 
te, et  un  long  rapport  du  comité  en- 
tendu,sirWilliam  Borrough  annon- 
ça à  la  chambre  des  communes  une 
motion  pour  la  session  prochaine  , 
portant  que  la  conduite  de  sir 
Home  Popham  avait  été  trouvée 
en  tout  point  irréprochable;  dé- 
claratioji  qui  fut  en  effet  adoptée. 
Il  fut  chargé ,  la  même  année 
1806,  conjointement  avec  le  gé- 
néral David  Baird,  commandant 
des  troupes  de  terre,  de  l'expédi- 
tion qui  alla  s'emparer  de  la  riche 
colonie  hollandaise  du  Cap  de 
Bonne- Espérance  ,  et   fit  depuis 


POP 

partie  de  l'expéuilion  de  flibus- 
tiers ,  qui  vint  enlever  la  flotte 
danoise  dans  le  port  de  Copen- 
hague. Créé  baronnet  après  celte 
brillante  conquête,  il  fut  active- 
ment employé  avec  le  grade  de 
contre-amiral  sur  les  côtes  d'Es- 
pagne, pendant  la  guerre  de  la 
péninsule,  et  lorsque  lord  Moïra 
(aujourd'hui  marquis  de  Haslings) 
fut  nommé  gouverneur- général 
du  Bengale,  il  monta  à  bord  du 
vaisseau  de  l'amiral  Popham  ,  qui 
le  transporta  dans  l'Inde.  Cet  of- 
ficier passe  pour  un  des  plus  ha- 
biles marins  de  l'Angleterre.  On 
lui  doit  plusieurs  améliorations  et 
inventions  ingénieuses.  En  1816, 


POP 


437 


il  fit  en  pré.sence  du  duc  d'York , 
des  expériences  du  Sémaphore  , 
qu'il  a  inventé,  et  qui  réussirent 
complètement.  On  assure  que  cet- 
te machine  est  préférable  aux  té- 
légraphes, qu'elle  offre  3000  com- 
binaisons au  lieu  de  cent,  et  qu'elle 
peut  être  montée  et  démontée  a- 
vec  la  plus  grande  facilité  ,  et 
transportée  d'un  lieu  dans  un  au- 
tre. Sir  Home  Popham  a  publié 
les  ouvrages  suivans  :  1°  Précis 
des  faits  relatifs  au  traitement  qu'il 
a  éprouvé  depuis  son  retour  de  la 
mer  Rouge,  i8o5,  in-S"  ;  3°  Des- 
cription de  l'île  du  Prince  de  Gal- 
les ,  avec  ses  avantages  comme  étn- 
hlissement  de  marine^  j8o5,  in  8°. 


FIN  DU  SEIZIEME  VOLIME. 


SUPPLEMENS. 


BRICHETEAU  (Isidore),  doc-  a    eiinclii    de    notes    et    d'addi- 

leur  en  médecine,  e>t  né  à  Siiiiif-  tidiis.    Ce   itiécieriii    a   éf^^aleinetit 

(jhiislophe  ,    département   de    Ja  [tiiblie  nne  quatrième  édition  du 

Vienne,    le    3    lévrier    i78();     il  Diclionnaire     de     médecine     de 

étudia  l'anatoniie  et  la  botanique  Nysien,  en  im  i;ros  volume  in-S", 

à  Poitiers,  vint  à  l'aiis  en  1809,  ouvraj^e  d'ime  grande  utilité,  qui 

et  fui  admis,    par   concours,    au  est   en   quelque    sorte    devenu   le 

nombre    des    élèves    iiilernt.s    en  sien  propre,  par  les  nombreuses 

MUïdeciue    des  hôpitaux  civils  de  additions   qu'il    y   a    laites    et    la 

l'aris  ,   institution  très-utile,   (|ui  non velie  l'orme  qu'il  lui  a  donnée. 

a   produit    unv    l'oule    d'vxcellens  M.   lîrichcteau   est  médecij»  d'un 

médecins  et  de  proiesseurs  distiii-  des    Di^pens^iires    de    Paris  ,     et 

a;u(>.  Durant  le  couis  de  cette  es-  mend)re    adjoint    de    l'académie 

jiécf  de  novi(;iat,   M.   Bricheteati  royale  de   médecine, 
l'ut  tcmarqué  par  le  célèbre  pro-  CKLLES  (A.    P.    F.    G.    De- 

lesseur   Piiiel  [voy.  Pinel),    mé-  vischer,  baron  de),  d'une  ancien- 

decin   en    chef  de   l'IiApila!  de   la  ne  t'amille  noble  du   Brabant,ost 

Sulj'étriére ,    (jui    lui    donna    une  né  à  Bruxelles  en  1779.  Il  y  com- 

i^raiule  preuve  d'alVeclion  ,    en  lui  mciua    une    brillante   éducation, 

eonfiant  la  rédaction  de  quelques  qu'il  acheva   dans    les   luiiversités 

leçons,  el  de  SCS  nombreuses  con-  d'Allemagne,  et  en  Italie  ;  ce  qui 

sultations.     M.    liricheleau  ,    reçu  lui  a  rendu  l'aun'lier  l'usage  de  ces 

docteur-   eu   nîédccine   en    iHi/j,  langues.    L'administration   publi- 

débuta  par  wnv.  Dissertation  inau-  que  tut  la  première  étude  de  M.  de 

giirale    sur   une    maladie  cérébrale  Celles  après  sa  premièie  éducation. 

di's  enfans,    dissri  tiiliou  devenue  La    nature    sembla  l'avoir    formé 

rare,  et  fpn"  est  rcclieri'hée.  Choisi  pom'  les  afl'aires  :  il  acquit  rapide- 

par  >L   l'iiu'l  pour  son  .collabora-  ment  des  cotmaissauces  étendues 

teiir  dans  la  rédaction  de>  articles  dans  les  diverses  branches  de  i'é- 

(pi  il  devait  l'ournir  au  vaste  Die-  conomie  politique,  et  il  s'attacha 

tionnaire  des  scienres  nn'dicalrs,  il  avec  d'autant  plus  d'ardeur  à  cet- 

se   (iia  avec  honneur  d'mi  travail  le  grave  occupation  qu'elle  avait 

si  épineux,   et   un    i;raud  ruunbre  pour  unique   obj('t   l'intérêt  de  sa 

d'articles  iuipoilan^  et  estimés  lu-  palri<;.  Il  ne   farda    pas  à  se   faire 

rent  le  fruit  de  celte  association,  connaître    sous  ce    rapport   à    ses 

On  doit  à  M.  Bricbeteau  plusieurs  co'icitoycns.    Nonuiu';  en    l'an   3, 

Mémoires  de    physiologie    et    de  aux  premières  élections ,  membre 

médecine,  rédigés  avec  clarté  et  (\u  collège  électoral  de  la  Dylc,  il 

préci-ion.   Il    ;i   pu!)lié   une   (jua-  fut  aussi  désigné  |)our  faire  partie 

liiéme    édition    de   l'Hygiène    de  de  la  députalion  qui   fut  envoyée 

Tourlelle,  ouvrage  classique,  qu'il  au  premier  consul.  Dès  ce  jom-  IM. 


CEL  CEL                   439 

de  Celles  s'altacha  ù  la  fortune  dn  augmenlées,  elle  salisferail  à  ses 
Napoléon.  De  retour  dans  sa  pa-  enj^ageinens,  tandis  qu'en  cas  de 
ttie,  il  y  fut  nommé  conseiiier  surcharge,  le  contraire  était  dé- 
municipal.  IM.  de  Chaban,  alors  montré.  Ces  engagemcti'i  étaient 
préfet  de  Bruxelles,  trouva  dans  le  d'autant  plus  sacrés,  que  c'étaient 
nouvel  administrateur  un  digne  des  rentes  constituées  à  sa  char- 
auxiliaire  de  ses  fonctions.  M.  de  ge ,  dont  le  projet  de  décret  or- 
Celles  concourut  puissamment  donnait  la  réduction,  pour  la  con- 
à  former,  à  organiser  les  établis-  fection  du  budget.  Le  projet  futre- 
semens  civils  plus  particulière-  tiré.  La  même  année,  M.  de  Cel- 
ment  consacrés  au  soulagement  les  fut  appelé  à  l'importante  pré- 
de  l'humanité,  au  bon  ordre,  à  It  feclure  de  la  Loire-Inférieure,  à 
sûreté,  comme  à  la  santé  publique.  JNantes,  oi"i  pendar)t  quatre  ans  il 
De  ce  nombre,  et  en  première  donna  la  preuve  du  plus  grand  ta- 
ligne,  furent  l'hospice  des  vieil-  lent  administratif.  Ce  fut  à  ses 
lards,  la  maison  de  détention  de  soins  que  le  lycée  ouvert  en  i8o<) 
Vilvorde,  la  propagation  de  la  dut  les  fondsdeson  établissement, 
vaccine.  Il  se  lit  spécialement  re-  ainsi  que  la  bourse  du  couimerce, 
marquer  daus  le  conseil  delà  vil-  la  salle  de  spectacle,  le  liatiment 
le  par  les  vues  qu'il  développa,  et  de  la  bibliothèque,  le  cabinet 
le»  moyens  qu'il  fit  adopter  pour  d'histoire  naturelle,  le  jardin  bo- 
l'amélioration  de  son  régime  fi-  tanique,  la  continuation  des  quais, 
nancier.  Il  devait  bientôt  faire  et  ^  réparation  des  routes,  des 
sur  im  plus  grand  théâtre  l'appli-  ponts,  des  églises,  qui  avaient  été 
cation  de  ces  connaissances,  et  les  détruits  par  la  guerre  de  la  Ven- 
étendre  à  une  école  d'où  sont  sor-  dée.  Malheureusement  pour  M. 
tis  tant  d'excellens  administra-  de  Celles,  l'empereur  crut  devoir 
leurs.  En  février  1806,  il  fut  ap-  lui  confier  à  la  fin  de  1810  la  pré- 
jtelé  au  conseil-d'état  en  qua-  fecture  du  Zuyderzée.  Il  quitta  a- 
li(é  d'auditeur.  L'empereur  l'y  vec  le  plus  grand  regret  un  dépar- 
distingua  bientôt,  et  le  nomma  tement  où  il  avait  laissé  de  si  ho- 
maître  des  requêtes  à  la  forma-  norables  témoignages  de  son  ad- 
tion,  c'est-à-dire  qfiatre  mois  a-  ministration ,  et  où  le  bien  public 
près.  Il  était  difficile  de  débuter  était  un  lien  d'émulation  entre  le 
d'une  manière  plus  rapide  et  plus  préfet  et  les  habitans.  Enfin  il  dut 
brillante  dans  la  carrière  politi-  obéir  et  se  rendre  dans  le  Zuyder- 
tique.  M.  de  Celles  justifia  le  zée,  où  il  trouva  une  tout  autre 
choix  de  l'empereur.  Sa  premiè-  position.  C'était  un  pays  tout-à- 
re  opinion  au  ccnseil-d'élat  fut  u-  fait  étranger  qu'il  fallait  rendre 
ne  bonne  fortune.  Il  s'agissait  des  français.  De  plus  on  avait  par  une 
intérêts  de  sa  ville  natale,  et  l'em-  opération  réellement  lyrannique 
pereur  prési  lait.  M.  de  Celles  é-  introduit  en  Hollande  la  cons- 
tablit  d'une  manière  lumineuse  la  cription  avec  rétroactivité.  Les 
situation  financière  de  la  ville  mots  nouveaux  de  l'école  impéria- 
de  Bruxelles,  et  prouva  que  si  les  le  expricnaieut  merveilleusement 
chargea  de  cette  ville  n'étaient  pa!)  les  choses.    M.    de  Celles   fit   de 


44o  CEL 

vaJnes  réclamations.  Il  lui  fallut 
exercer  sur  ses  administrés  la  lé- 
gislation militaire  qu'on  leur  im- 
posai). Le  régime  des  droits  réu- 
nit* \  int  encore  augmenter  l'irrita- 
lion  publique.  Le  préfet  réclama 
encore  d'après  une  loi  bien  impé- 
rieust  -Celle  des  habitudes  locales. 
Il  ne  fut  pi  iiit  écouté.  Il  en  fut 
de  même  poin-  les  gardes  d'hon- 
neui  ,  dont  ii  ne  jugeait  pas  l'ins- 
Uliition  upplicubie  à  lu  Hollande. 
On  lui  demanda  des  explications, 
il  les  dotma.  Elles  furent  repous- 
sées.Il  reçut  l'ordre  impératif  de  le- 
ver de^  gardes-dhonneur.  Ce  fut 
al(>rs  et  pour  la  sauve-garde  de 
sa  délicatesse,  que  M.  de  Celles 
dut  opposer  un  reiTipart  d'airain 
à  toutes  les  exceptions  de  faveur, 
qui  lui  furent  demandées  de  tant 
de  manières.  Sa  rigidité  à  cet  é- 
gard  était  celle  de  la  justice,  o|^lle 
que  I  (in  a  dû  si  justemenr  re- 
proch*  r  de  n'avoir  pas  toujours 
été  emplnyée  contre  les  sollicita- 
tions relatives  à  la  réquisition  et 
à  la  consciiplion.  L'n  adminis- 
trateur prendrait  sur  lui  le  droit 
de  vie  et  de  n)ort,  si  par  une 
considération  non  légale,  il  fai- 
sait mari  liLT  un  soldat  au  lieu 
d'un  autre.  IVl.  de  Celles  depuis 
long-temps  pénétré  de  l'austérité 
de  ce  devoir,  l'appliqua  impitoya- 
blement, dit-on,  aux  gardes  d'hon- 
neur de  son  département.  En  ce- 
la il  fut  malheureux,  puisqu'il 
s'opposa  tant  qu'il  le  put  à  cette 
terrible  mesure,  qui  fit  lever  tant 
d'erinemis  contre  îSapoléon,  dans 
toutes  les  parties  de  l'empire;  mais 
il  fit  son  devoir,  il  fut  juste.  Et 
si  en  rais(>n  de  cette  sévérité  il  ne 
fut  ])oinl  aimé,  du  moins,  il  ne 
fut  pas  justement  haï  en    raison 


CEL 

des  exceptions  qu'on  aurait  ar- 
rachées à  sa  faiblesse;  car  il  ne  s'a- 
gissait pas  seulement  de  faiic 
marcher  les  gardes  -  d'honneur , 
il  fallait  encore  prouver  qu'il  a- 
vait  refusé  les  offres  immenses 
qu'on  osa  laire  à  M.  de  Celles, 
pour  tenter  son  inflexible  pro- 
bité. Alors  il  dut  avoir  des  en- 
nemis bien  puissans ,  puisqu'ils 
étaient  dans  la  classe  des  famil- 
les les  plus  riches;  et  ce  furent 
ceux-ci  qu'il  lui  était  surtout 
important  d'avouer.  En  i8i/j,  M. 
de  Celles  ne  quitta  la  Hollande, 
et  même  Amsterdam ,  que  sur 
l'ordre  du  prince,  gouverneur- 
général,  M.  le  duc  de  Plaisance. 
Il  ne  partit  que  cinq  heures  après, 
à  9  heures  du  matin,  en  public, 
dans  sa  voiture,  pour  se  rendre  à 
Utrecht,  où  commandait  le  géné- 
ral iMolitor.  En  1819,  M.  de  Cel- 
les fut  nommé,  par  l'ordre  éques- 
tre auquel  il  apparlieni,  aux  états 
provinciaux  du  Brabant  méridio- 
nal. Il  s'y  distingua  en  demandant 
que  le  jury  fût  rétabli.  Cette  pro- 
position fut  faite  immédiatement 
dans  plusieurs  autres  provinces. 
M.  de  Celles  fut  nomnié,  en  18a  1, 
membre  de  la  seconde  chambre 
des  états -généraux.  Il  prit  part  à 
toutes  les  discnssioni-  de  finances 
et  de  commerce  ;  il  vola  contre 
plusieurs  impositions  nouvelles, 
et  notamment  contre  le  droit  dit 
de  inouture.  M.  de  Celles  a  tou- 
jours exprimé  ses  idées  avec  é- 
nergie,  et  cependant  avec  modéra- 
ration  ;  il  s'est  élevé  à  de  gran- 
des considérations  commerciales 
dans  une  discussion  sur  un  pré- 
lèvement fiscal  à  effectuer  sur 
les  fortunes  en  porte-feuille,  et 
dans    toutes    ses    im])rovisalion* 


cou 

on  dans  ses  discours  écrits  à  la 
chambre,  il  a  professé  des  princi- 
cipes  libéraux,  .'oit  en  économie 
politique*  soit  dans  d'autres  ma- 
tières d'administration.  M.  de 
Celles  est  sans  contredit  un  des 
membres  les  plus  distingués  des 
états-généraux  du  royaume  des 
Pays-Bas. 

COUSIN  (Victor),  né  à  Paris 
en  1792,  montra  dés  sa  plus  ten- 
dre jeimcsse,  les  plus  heureuses 
dispositions  pour  l'élude  des  scien- 
ces et  des  lettres,  et  couronna  les 
succès  qu'il  avait  obtenus  darts  ses 
classes  par  le  prix  d'honneur,  qui 
le  lit  exempter  de  la  conscription. 
Reçu  le  premier  en  qualité  d'éle- 
vé à  l'école  normale,  qui  venait 
d'être  fondée,  il  y  fut  bientôt  maî- 
tre de  conférences.  Son  mérite 
précoce,  apprécié  par  tous  ceux 
qui  en  recueillaient  les  fruits,  ne 
pouvait  échapper  au  professeur  ti- 
tulaire, M.  Royer-Collard,  qui, 
appelé  en  181  5  à  de  hautes  fonc- 
tions, désigna  M.  Cousin  pour  le 
suppléer  dans  la  chaire  de  l'histoi- 
re de  la  philosophie ,  à  la  faculté 
des  lettres.  Ces  fonctions  .  qui  exi- 
gent de  la  part  de  celui  qui  les 
exerce  la  profondeurdu  jugement, 
jointe  à  l'étendue  des  connaissan- 
ces et  à  la  facilité  de  l'éloculion, 
furent  exercées  par  M,  Cousin  de- 
puis 181  5  jusqu'à  1820,  tant  à  cet- 
te faculté  qu'à  l'école  normale. 
Un  succès  toujours  croissant,  fit 
presque  oublier  que  M.  Cousin  n'é- 
tait pas  le  professeur  en  titre.  Il 
s'était  fait  un  plan  d'enseignement 
qui  ajoutait  un  grand  intérêt  à 
ses  leçons  :  il  n'a  jamais  séparé  la 
philosophie  morale  de  la  philoso- 
phie spéculative.  Après  avoir  par- 
ié uti  œil  éclairé  sur  les  philoso- 


COU 


44» 


phes  anciens,  il  crut  pouvoir  ju- 
ger les  modernes  sous  le  rapport 
métaphysique  :  Condillac  n'a  pas 
trouvé  grâce  devant  lui.  Il  pense 
que  sa  philosophie  est  plus  propre 
à  de  beaux  esprits  serviles  qu'à  des 
hommes  librfs.  Quanta  lui  sa  pro- 
fession de  foi  est  précise  :  il  se  fait 
honneur  d'appartenir  à  l'école  du 
spiritualisme,  système  qui  ne  re- 
connaît aucun  être  purement  ma- 
tériel. Malgré  les  succès  conslans 
que  M.  Cousin  avait  obtenus  com- 
me professeur,  il  fut  destitué  en 
1820,  et  crut  devoir  cette  défa- 
veur à  la  perspicacité  du  ministè- 
re, qui  pensa  que  sa  doctrine  ne 
fléchirait  pas  devant  les  principes 
qu'on  essayait  d'établir  à  celte  é- 
poque,  et  qui  se  propagent  de  plus 
en  plus;  ainsi  il  fut  frappé  dans  l'u- 
niversité, au  moment  même  oîi 
M.  Royer-Collard  était  frappé  dans 
la  haute  région  du  gouvernemenl. 
M.  Cousin  a  publié  :  1"  les  manus- 
crits inédits  de  Proclus.  philoso- 
phe alexandrin  du  4'  siècle,  5 
vol.  in-8",  grec-latin.  1820-1821; 
3"  deux  volumes  d'une  traduc- 
tion complète  de  Platon,  Paris. 
1 822  :  le  3'  est  sous  presse  ;  5°  une 
édition  complète  de  Descartes, 
philosophe  persécuté  pendant  sa 
vie,  couvert  de  gloire,  mais  dé- 
laissé après  sa  mort,  6  vol.  in-8°, 
1824.  Il  a  écrit  un  grand  nombre 
■d'articles  dans  le  Journal  des  sa- 
vans ,  dont  il  est  un  des  rédacteurs. 
Il  a  annoncé  une  édition  fiançaise 
des  œuvres  de  Kant.  M.  Cousin 
s'est  déjà  placé,  comme  on  voit, 
parmi  les  hommes  remarquables 
de  notre  époque,  et  promet  de  par- 
courir la  carrière  la  plus  brillante. 
A  la  manière  dont  il  traite  la  mé- 
taphysique, on  peut  espérer  que 


4V 


m^ 


celte  science  finira  par  prendre 
laveur  ,  et  qu'on  lui  reconnaî- 
tra des  charmes  dont  jusqu'ici, 
selon  l'opinion  commune,  on  ne 
la  croyait  pas  susceptible.  M.  Cou 
sin  est  aujourd'hui  professeur-sup- 
pléant de  l'histoire  de  la  philoso- 
phie moderne  à  l'académie  de 
Paris. 

DINCOURT  DE  METZ  (Jean- 
Baptiste)  ,  chevalier  de  l'ordre 
royal  de  la  légion  -  d'honneur , 
inenibre  de  plusieurs  sociétés  sa- 
vantes, est  né  en  1746.  Cadet 
d'une  ancienne  famille  de  Picar- 
die, il  était  officier  d'artillerie  à  La 
Fère,  lorsqu'il  perdit  son  père, 
consf'iller  du  roi,  lieutenant-gé- 
néral, et  maire  d'Amiens.  Comme 
il  avait  fait,  sous  trois  oncles  jé- 
suires,  des  études  distinguées, 
voulant  plus  particulièrement  se 
livrer  aux  arts  ,  il  quitta  Tartille- 
rie  pour  les  ponts  et  chaussées. 
Un  premier  prix  d'architecture 
lui  valut  l'ho^incur  d'aller  à  l'éco- 
le française  à  Rome,  comme  pen- 
sionnaire du  gouvernement.  In- 
génieur en  Limousin,  sons  l'ad- 
ministration de  M.  Turgot  ,  il  y  a 
exécuté  de  très-grands  travaux. 
Il  fut  envoyé  en  n»ission  extra- 
ordinaire à  l'assemhlée  consti- 
tuante par  la  ville  de  Limoges. 
Devenu  ingénieur  en  chef  en  Poi- 
tou ,  il  a  contribué  aux  embellis - 
s«'mens  de  la  ville  de  Niort.  Enfin,' 
après  avoir  exercé  pendant  lon- 
gues années  les  fonctions  d'inspec- 
teur divisionnaire  au  corps  royal 
des  ponts  et  chaussées,  M.  Din- 
court  de  Metz  a  obtenu,  en  1831, 
le  brevet  d'inspecteur- général  , 
digne  récompense  de  cinquante- 
deux  ans  de  service.  Son  fils, 
chevalier  de  la  légion-d'honneur, 


GAM 

est  ancien  capitaine  de  lanciers. 
GAMOT  (Charles),  naquit  au 
Havre  au  mois  d'octobre  1766. 
Son  père,  propriétaire  It  capitai- 
ne d'un  navire  de  commerce  de 
celle  ville,  périt  dans  un  naufra- 
ge. Peu  de  temps  après  le  jeune 
orphelin  fut  appelé  à  Paris  par 
l'abbé  Duval,  son  oncle  maternel, 
qui  était  alors  proviseur  du  collè- 
ge d'Haï  court,  et  qui  fut  depuis 
recteur  de  l'université.  Il  fit  ses 
études  avec  succès  sous  les  yeux 
de  son  oncle,  et  quand  elles  fu- 
rent achevées, il  retourna  au  Havre 
près  de  sa  mère,;\  laquelle  il  était 
tendrement  attaché  ,  et  dont  il 
eut  bientôt  à  déplorer  la  perle. 
Actif  et  plein  d'énergie  au  milieu 
d«î  compatriotes  dont  la  fortune 
s'était  faite,  et  s'accroissait  par  le 
commerce,  la  même  carrière  lui 
était  ouverte  ,  et  sa  vocation  fut 
décidée.  H  fit  d'abord  un  voyage 
à  la  Martinique, où  le  frère  de  son 
père  avait  formé  un  établissement 
qui  avait  prospéré;  Les  opérations 
auxquelles  il  se  livra  lui-même 
n'ayant  point  réussi,  il  revint  au 
Havre,  d'où  il  repartit  quelques 
mois  après  pour  gérer  à  Saint- 
Domingue  les  affaires  de  la  mai- 
sou  Foache,qui  y  possédait  de 
grand(îs  habitations.  Il  avait  ho- 
norablement rempli  celle  mission 
de  confiance,  et  il  commençait  à 
travailler  utilement  à  sa  propre 
fortune,  lorsque  la  révolution  é^- 
clata  dans  cette  colonie.  Il  parta- 
gea les  opinions  des  hommes  sa- 
ges et  éclairés  qui  s'y  trouvaient 
alors.  Il  travailla  avec  eux  à  réu- 
nir les  colons  et  les  hommes  de 
couleur,  et  fut  nommé  président 
d«  l'une  des  -assemblées  qui  dres- 
sèrent un  concordat  pour  opérer 


GAM 

cette  réunion.  Les  passions  el  If? 
pWjuf'és  l'emportèrent;  les  par- 
lis  en  vinrent  aux  mains;  les 
blancs  furent  dofaitj,  et  M.  Ga- 
mot,  après  t)voir  été  témoin  de 
l'iniendie  du  Port-au-Prince  et 
de  sa  propre  maison,  ne  trouva 
de  salut  qu'en  s<'  rélugiant  avec 
deux  nègres  atïïdé»  sur  un  esquif, 
où  il  passa  plusieurs  jours  luttant 
contre  les  Ilots  et  le  manque  de 
livres.  Exténué  de  fatigue  et  de 
besoin,  il  débarqua  de  nuit  sur  \\n 
point  de  la  côte  qu'il  croyait  sûr. 
xMais  il  y  fut  surpris  pendant  son 
sommeil  par  uu  parti  de  noirs  qui 
le  traînèrent  au  Port-.iu-Prince, 
où  sa  tête  était  mise  à  prix  :  il 
allait  périr  si  uu  de  ses  auiis  ne 
lût  parvenu  à  le  sauver.  Cepen- 
dant il  fallait  se  souslraii«  à  de 
nouvelles  persécutioiis  :  il  s'em- 
barqua pour  les  Etats-Unis.  Les 
Anglais  s'emparèrent  penduut  sa 
traversée  du  bâtiment  qui  le  por- 
tail. D<';pouiilé  par  eux  de  tiuit  ce 
qu'il  possédait,  et  débarqué  à  la 
Janii||ïque,  il  y  tiouva  d'anciens 
correspondansqui  lui  procurèrent 
les  moyens  de  continuer  son  voya- 
ge;, mais  son  navire  se  perdit,  et 
ce  fut  après  un  naufrage  qu'il  ar- 
riva à  Charles-Towu  ;  il  se  ren- 
dit de  t;ette  ville  à  Philadelphie  en 
iraversant  à  pied  les  Apabiches  et 
les  forêts  (pii  couvraient  alors  Cel- 
te partie  du  continent.  Il  y  sé- 
journa pendant  une  aimée  entiè- 
re, attendant  ime  occasion  favo- 
lable  de  revenir  en  l*'rance  ,  (»ù  il 
eut  enûn  le  bonheur  dt  retrouver 
sa  famille  et  ses  amis  quelques 
jours  après  le  9  thermidor.  Jus- 
qu'alors l'activité  et  les  travaux 
de  M.  Gamot  n'avaient  rien,  ajou- 
té à  un  pulriniuinc  borné,  mais  il 


GAM  445 

s'était  montré  dans  le  Nouveau- 
Monde,  au  milieu  des  plus  grands 
périls,  homme  d'honneur  et  de 
résolution.  Le  courage  qu'il  avait 
opposé  à  la  mauvaise  fortune  lui 
avait  mérité  l'estime  de  ses 
compatriote.s,  et  ils  lui  en  doimè- 
rent  le  témoignage  le  plu.s  flat- 
teur, à  son  retour  parmi  eux,  en 
le  nouunant  membre  de  la  muni- 
cipalité de  sa  ville  natale.  Les 
fonctions  auxquelles  il  venait  d'ê- 
tre appelé  lui  fournirent  plus  d'u- 
ne occasion  de  montrer  la  recti- 
tude de  son  esprit,  la  bonté  de 
son  cœur,  la  modération  de  ses 
opinions.  Mais  ces  fondions, bien 
qu'houorablement  exercé''S  ,  ne 
pouvaient  lui  procurer  rin<lépen- 
dance  sociale  qui  était  un  des  pre- 
miers besoins  de  sou  caractère. 
11  était  âgé  de  plus  de  5o  ans,  et 
il  n'avait  point  encore  d'état  as- 
.«uré.  Contrarié  dans  quelques 
projels  qu'il  avait  formés,  il  (juit- 
ta  le  Havre  en  17;. 7»  et  vint  à  Pa- 
ris, où  il  troMva  pendant  quelques 
mois,  dans  la  culture  des  lettres, 
qu'il  n'avait  jamais  abandonnées, 
des  distractions  qui  lui  étaient 
devenues  nécessaires.  Knfin,  se- 
condé par  d'anciens  amis,  il  y  for- 
ma un  établissement  de  commer" 
ce  qui  s'élevait  sotis  les  plus  heu- 
reux Jjospices,  lorsqu'il  épousa,  à 
la  fm  de  179H,  >1"*  Anloinetlc 
Auguié,  nièce  de  lU""  Ciunpan, 
et  fille  d'un  ancien  receveur-gé- 
néral des  (înances,  qui  était  alors 
administrateur  des  postes.  Plu- 
sieurs années  s'écoulèrent  dans 
une  douce  mii»m,  et  M.  Gamot, 
exclusivement  occupé  du  bonheur 
de  sa  femme  et  de  ses  enfans,  n'a- 
vait à  désirer  que  de  voir  se  pro- 
longer les  avantages  de  sa  situai'* 


444 


cou 


tion.  La  rupture  subite  du  traité 
d'Amiens?  en  lui  faisant  éprouver 
des  pertes  considérables,  vint  obs- 
curcir son  avenirde  quelquesnua- 
ges,  et  lui  imposa  le  devoir  de  ne 
point  confier  désormais  à  des  spé- 
culations hasardeuses  le  bien-être 
et  le  repos  de  sa  famille.  Il  fut 
nommé  vers  cette  époque  admi- 
nistrateur des  droits-réunis.  11 
montra ,  dans  l'exercice  de  ses 
nouvelles  fonctions,  l'activité  dont 
il  était  doué,  et  les  connaissances 
variées  qu'il  avait  acquises.  Le 
nom  et  les  recommandations  du 
maréchal  Ney,  qui  était  devenu 
son  beau-frère,  pouvaient  lui  fai- 
re parcourir  d'une  manière  rapi- 
de et  brillante  la  carrière  admi- 
nistrative dans  laquelle  il  était 
entré.  11  fut  nommé  préfet  du  dé- 
partement de  la  Losère  au  com- 
mencement de  i8i3.  et,  en  1814, 
préfet  du  département  de  l'Yon- 
ne. Les  regrets  qu'il  a  laissés  dans 
ces  deux  départemens  atleslent 
le  bien  qu'il  y  fit,  et  celui  qu'il 
avait  l'intention  d'y  faire.  Les 
soins  qu'il  apporta  à  adoucir  la 
rigueur  des  lois  sur  la  conscrip- 
tion et  la  formation  dos  gardes- 
d'honneur,  y  conserveront  le  sou- 
venir de  son  nom.  Rentré  dans  la 
vie  privée  en  i8i5,  il  devait  y 
subir  les  plus  cruelles  épreuves. 
Le  maréchal  Ney  lui  avait  cons- 
tamment montré  les  sentimens 
d'un   frère   et  d'un  ami   dévoué. 


GOU 

Ses  malheurs  rendirent  dans  le 
cœur  de  M.  Gamot  les  devoirs  de 
l'amitié  plus  impérieux  et  les  af- 
fections de  famille  plus  sacrées. 
Il  ne  s'occupa  plus  qu'à  secon- 
der sa  belle-sœur  de  ses  soins  et 
de  ses  conseils  dans  tout  ce  que 
la  tendresse  conjugale  et  le  plus 
touchant  dévouement  purent  lui 
inspirer  de  mettre  en  œuvre  pour 
sauver  son  mari.  Pendant  la  durée 
de  ce  déplorable  procès,  il  porta 
chaque  jour  au  maréchal,  dans  sa 
prison,  la  consolation  et  l'espé- 
rance; et  quand  tout  espoir  fut 
perdu,  il  passa  près  de  lui  les  der- 
niers momens  qui  précédèrent 
l'heure  fatale;  peu  de  momens 
après,  il  vint  relever  du  champ  de 
mort  le  guerrier  que  la  fortune 
de  tant  de  combats  avait  respecté 
sur  le  champ  de  bataille;  il  lui 
rendit  de  pieux  et  douloureux  de- 
voirs; mais  leurs  pénibles  détails 
l'affectèrent  profondément.  D'aus- 
si grandes  infortunes  vues  de  si 
près  l'attachèrent  plus  fortement  à 
ses  neveux.  Le  désir  de  relever  la 
gloire  militaire  de  leur  père  le  sou- 
tint pendant  trois  ans  au  milieu  des 
souffrances  dont  le  chagrin  avait 
été  la  source;  il  venait  de  termi- 
ner l'histoire  du  maréchal ,  et  de 
leur  adresser  ce  monument  qu'il 
élevait  à  sa  mémoire,  quand  il  fut 
enlevé,  dans  la  force  de  l'âge,  à 
sa  farhille  et  à  ses  amis  au  com- 
mencement de  i8'io. 


Des  renseignenjens  plus  précis  et  d'une  plus  grande  exactitude  que 
ceux  qui  ont  servi  à  la  rédaction  de  l'article  du  maréchal  Gouviow 
Saint-Cyr  [voyez  le  8*"  volume),  nous  ont  déterminés  à  consacrer  une 
nouvelle  notice  à  cet  illustre  guerrier. 


GOUVION-SAINT-CYR  (Lau- 
rent, MARQUIS  de)  ,  pair  et  maré- 


chal de  France  ,  est  né  à  Toiil ,  le 
i5  avril  1764.  H  se  livra  d'abord 


GOU 

à  la  peinture,  autant  par  goût 
que  par  nécessité;  fit,  très-jeune 
encore,  un  voyage  en  Italie,  afin 
de  se  perfectionner  dans  son  art; 
et,  lors  de  son  retour  en  France, 
qui  eut  lieu  peu  de  temps  avant  la 
révolution,  il  entra  comme  sous- 
lieulenaut  dans  un  bataillon  de 
volontaires  de  Paris.  C'est  avec 
ce  grade  qu'il  arriva  à  l'armée  du 
Rhin ,  où  il  Tut  attaché  à  l'état- 
major  du  général  Custines.  Ses 
conseils  furent  de  la  plus  grande 
utilité  aux  généraux  qui  se  suc- 
cédèrent rapidement  au  comman- 
dement de  cette  armée,  et  il  di- 
rigea les  combats  nombreux  que 
les  Français  livrèrent  aux  Prus- 
siens. Toutes  les  voix  s'accor- 
daient pour  attribuer  les  succès 
aux  talens  du  capitaine  Saint-Cyr. 
Adjudant-général  en  1795,  il  fut 
envoyé  ,  dans  le  cours  de  la  même 
année,  à  l'armée  des  Alpes,  com- 
me général  de  brigade  ,  et  chassa 
les  Piémontais  de  la  Maurienne, 
le  14  septembre  ijgS.  Il  revint, 
au  commencement  de  1794»  ù 
l'armée  du  Rhin-et-Moselle,  avec 
le  grade  de  général  de  division, 
et,  le  i3  juillet,  il  battit  les  Prus- 
siens près  d'Eithoffen,  et  emporta 
le  village  d'Edessen  après  le  com- 
bat le  plus  opiniâtre.  Dans  le  cours 
de  cette  r;ur)pagne,  le  général  Gou- 
vion  Sainl-Cyr  fut  constamment 
opposé  au  fameux  Bliicher,  alors 
général-major.  Il  le  battit  en  di- 
verses rencontres,  et  notamment 
aux  deux  combats  de  Kayserslau- 
tern.  Dans  l'année  suivante  ,  il 
reprit  la  ville  de  Deux-Ponts  sur 
l'armée  deClairfayl,  et  commanda 
l'attaque  du  centre  au  blocus  de 
iMayeuce.  Les  manœuvres  de  Pi- 
chegru,  déjà  dévoué  au  parti  de 


GOU 


445 


l'émigration,  l'impéritie  d'un  gou- 
vernement jaloux  et  faible,  ayant 
considérablement  afifaibli  leslignes 
de  l'armée  française,  ces  lignes  fu- 
rent attaquées  par  les  Autrichiens, 
auxquels  le  général  Gouvion  Saint- 
CjM'  opposa  la  plus  intrépide  ré- 
sistance. Le  nombre  l'emporta,  et 
le  général  français  fut  contraint 
de  se  retirer  sur  tes  lignes  de  la 
Queich  ;  mais  ce  mouvement  fut 
exécuté  avec  tant  d'art,  que,  d'a- 
près le  nombre  de  prisonniers  faits 
chaque  jour  à  l'ennemi ,  cette  re- 
traite avait  toute  l'apparence  d'u- 
ne marche  volontaire.  Cependant, 
le  1 5  mai  1796,  Moreau  est  appelé 
au  commandement  de  l'armée  du 
Rhin-et-Moselle;  l'aile  gauche  de 
son  armée  est  sous  les  ordres  du 
général  Gouvion-Saint-Cyr,  qui, 
le  1 5  juin,  attaque  les  Autrichiens, 
et  s'empare  des  positions  qu'occu- 
pait le  maréchal  de  Wurmser,  en- 
tre Frankenthal  et  le  Behut.  Après 
le  passage  du  Rhin,  il  poussa  une 
forte  reconnaissance  sur  le  camp 
de  Biberack,  et,  le  2  juillet,  il 
enleva  la  redoute  qui  défendait  la 
gorge  de  la  Renchen.  Malgré  les 
pluies  continuelles  et  la  vive  ré- 
sistance de  l'armée  autrichienne , 
il  emporte  la  position  de  Freu- 
denstadt,  et,  le  6  juillet,  à  la 
bataille  de  Rastadt,  où  il  com- 
manda le  centre  de  Tarmée,  il 
soutint,  avec  une  de  ses  divisions, 
les  attaques  de  Desaix  sur  cette 
ville.  L'ennemi,  battu,  se  retire 
sur  Ettingen.  Le  8,  le  général 
Gouvion  Saint-Cyr  marche  par 
la  vallée  de  la  Murg,  débouche 
sur  la  gauche  de  l'ennemi,  et, 
le  9,  attaque  ses  positions  aux 
sources  de  la  rivière  d'Alb.  Il  avait 
en  tête  l'élite   de   l'armée  aulri- 


44« 


GOU 


chienne,  qui  défencfail  Herenalb, 
Fiawenalb,  et  le?  hauteurs  (\e  Ko- 
tensolhe,  une  des  irumtagnes  Its 
plus  élevées  de  la  Forrt-Noire. 
Quatre  fois  repoussés,  les  Fran- 
çais reviennent  quatre  fois  à  la 
charge;  à  la  cinquième,  ils  enlè- 
vent Iti  position  à  la  b.;ïouriette, 
et  mettent  l'ennemi  en  pleine  dé- 
route. On  prend  i  loo  hommes, 
12  olïieiers,  un  colonel,  it  une 
pièce  de  canon.  Moreau  dit,  dans 
son  rapport,  que  la  conduite  du 
général  Saint-Cyr  est  au-dessus 
de  tout  éloge  ,  et  que  la  bonté  de 
ses  dispositions  avait  assuré  le 
succès  de  la  journée.  Le  i4,  le 
général  Saint-Cyr  détache  de  son 
camp  de  Freudenstadt  la  division 
Duhestne.  pouraltaquer  les  Autri- 
I  hkns  aux  sources  de  la  Kissche, 
et  soutenir  les  mouven)ens  des 
généraux  Desaix  et  Ferino.  Après 
plusieurs  combats  autour  de  Ne- 
resheim  ,  le  prince  Charles  ayant 
reçu  des  renforts,  se  pirte  sur 
toute  la  ligne  de  l'armée  française, 
et  dirige  ses  plus  grandes  masses 
sur  l'aile  droite,  commandée  par 
le  général  Saint-Cyr,  qui  ,  dé- 
bordé, défendit  ses  positions  avec 
la  valeur  la  plus  opiniâtre,  et  obli- 
gea les  ennemis  à  la  retraite.  L'ar- 
mée française  poursuit  l'archiduc 
dans  son  mouvement  rétrograde, 
et,  le  19  août,  le  général  Saint- 
Cyr  occupe  Engelholien  et  Lan- 
genreich.  Après  la  brillante  vic- 
toire du  26  et  le  passage  du  Lech, 
le  général  Saint-(ïyr  s'avance  jus- 
<|u'à  Hamper,  pour  reconnaître 
Frecing,  qu'il  attaque,  le  7*  sep- 
tembre, avec  une  telle  vigueur, 
que  l'ennemi,  dans  sa  retraite,  ne 
peut  pas  coiip<îr  le  pont  de  llsi-r. 
Le  7  il  rencontre  les  Aulrithiciis 


GOU 

ù  Maimbom-g,  et  leur  fait  5oo  pri- 
sonniers. L'armée  du  Rhin-et- 
Muselle  est  au  cœur  de  la  Bavière 
ses  avant-gardes  «ont  aux  fron- 
tières de  l'Autriche  ;  mais  la  peirlc 
de  la  bataille  de  Wurtzboui'g  par 
l'arfnée  de  Sambre-el- Meuse  . 
contraint  Morean  à  la  retraite.  Le 
i"  octobre,  l'armée  française  est 
à  Buchan  ,  où  les  Autrichiens, 
malgré  quelques  désavantages,  se 
maintiennent  sur  le  chatnp  de  ba- 
taille. Le  2,  le  général  Saint-Cyr 
les  attaque  de  front  à  Stenhausen; 
sa  petite  armée,  forte  de  i4  ba- 
taillons et  6  escadrons,  marche 
à  l'ennemi  entièrement  déployée. 
Dès  le  commencement  de  l'iwîtion 
tontes  ses  réserves  sont  engagées: 
les  braves  de  la  f^ti'  demi-brigade 
demandent  au  général  le  pillage 
des  canons  :  singulière  récompen- 
se ,  digne  des  soldats  qui  la  récla- 
maient. Moreau,  qui  se  portait 
avec  les  troupes  de  Desaix  sur 
Biberach,  n'arriva  que  le  soir  et 
lorsque  la  victoire  était  décidée; 
il  compléta  le  succès,  et  l'ennemi , 
poursuivi  pendant  toute  la  nuit, 
laisse  au  pouvoir  des  Français 
5ooo  prisonniers,  65  officiers, 
3  drapeaux  et  20  canons.  Le  gé- 
néral Saint-Cyr,  attaqué,  le  20 
octobre,  dans  la  vallée  d'Enfer,  "; 
opposa  à  l'ennemi  une  telle  résis- 
tance ,  que  celui-ci  ne  put  pas 
déboucher.  Le  26  et  le  27  les 
Françai»  s'établirent  sur  la  rive 
gauchi'  du  Bhin  .  et  le  général 
Saint-Cyr  partagea  avec  Desaix 
l  himncur  de  la  défense  de  Kehl. 
Ces  drux  généraux  commandaient  ! 
à  tour  de  rôle.  Desaix  signa  la  ca- 
pitulation. Le  général  Sidnt-Cyr 
repa'^sa  le  Khin  avec  Moreau-,  le 
30  avril    1797,    et  prit  une  part 


GOU 

hrill.inte  à  la  victoire  du  2  i  ,  vic- 
loiie  (jui  fit  retomber  K.ehl  au 
pouvoir  des  Français.  Peu  de 
temps  après,  envoyé  en  Italie,  il 
remplaça  Masséna  dans  son  com- 
mandement, lorsqu'une  insurrec- 
tion e ut  contraint(;elui-ci  de  quitter 
Rome  en  1798.  L'insubordination 
des  troupes  cessa  avec  les  causes 
qui  avaient  firoduit  le  méconten- 
tement. Destitué  à  cette  époque, 
ainsi  que  plusieurs  autres  géné- 
raux, legénéralGouvion  S.iinl-Cyr 
fut  (presque  aussitôt  réintégré  dans 
sou  grade,  et  il  commandait,  au 
«nois  de  mars  1799,  la  gaucbe  de 
l'armée  du  Danube.  L'archiduc 
Charles,  après  avoir  passé  le,  Lech, 
se  porte  sur  Memmingen,  où  il  éta- 
blit son  quartier-général  le  9. 
Sa  posilioFi  sur  l'Inn  devint  paral- 
lèle à  la  ligne  générale  des  opé- 
rations des  Français  ;  elle  était 
moyenne  entre  le  Danube  et  la 
rive  orientale  du  lacde  Constance. 
Le  général  Saint-Cyr,  après  avoir 
retranché  les  défilés  de  Freudens- 
tadt  .  s'avança  ,  par  Moskirch  , 
jusqu','.  Siginaringen.  Comme  le 
général  ea  chef,  Jourdan  ,  avait 
reconnu  1»  supériorité  funnéri- 
que  des  troupes  de  l'archiduc , 
il  adressait  de  IVéquens  courriers 
à  Berna  dote  ,  qui  commandait  u- 
ne  armée  d'observation  dans  le 
l'idalinat,  pour  le  presser  d'en- 
voyer des  renforts  à  sa  gauche. 
Après  plusieurs  mouvemens  au- 
tour de  Piiillendorf ,  l'archiduc 
attaqua  les  Français  le  21  ,  sur 
tout  le  front  di;  leur  ligne;  et  sa 
culoune  de  droite,  aux  ordres  du 
prince  de  Furstenberg,  ayant  pas- 
sé près  de  iMengen  ,  le  long  du 
Danube,  tourna  l'aile  gauche  fran- 
laiac,  qui,  après  la  résistance    la 


GOU 


447 


plus  opiniâtre,  se  retira  sur  le» 
hauteurs  de  Pfulleiidorf.  Les  dis- 
positions que  prit  rarchiduc  dans 
la  journée  du  2-2  pour  envelopper 
cette  aile,  décidèrent  le  général 
Saint-Cyr  à  se  retirer  sur  En- 
gen.  Le  aS ,  Jourdan  ayant  ré- 
solu de  livrer  une  bataille  déci- 
sive à  l'archiduc  ,  donna  ordre  au 
général  Saint-Cyr  de  marcher  sur 
l'avant-garde  de  M.  de  Merfeld  , 
par  le  chemin  de  Tutt'ingen  à 
Liptingen.  «  Ce  fut  par  cette  aile 
gauche  que  la  bataille  fut  engagée. 
Ses  attaques  impétueuses  dépos- 
lèrent  le  général  Meerfeld  de  sa 
position  à  Tuttlingen.  Le  général 
Saint-Cyr  battit  cette  avani-garde, 
et  la  pressa  si  vivement  qu'elle 
fut  Ibrcée  de  se  retirer  en  désor- 
dre jusqu'au  bois  situé  entre  Lip- 
tingen et  Stockach  :  une  partie 
fut  poussée  jusqu'à  Schwandorf , 
sur  le  chemin  de  Tuttlingen  à 
Morsckiich.  Le  général  Saint-Cyr 
poussa  le  corps  du  général  Meer- 
îeld  jusqu'à  l'extrémité  de  ce  bois. 
La  position  de  l'armée  autrichien- 
ne allait  être  tournée  ,  quand  l'ar- 
chiduc tira  des  forces  de  s.-»  gau- 
che. Depuis  cinq  heures  du  ma- 
tin, l'avantage  était  du  côté  des 
Français...  L'archiduc  donna  l'or- 
dre d'attaquer  le  bois  occupé  par 
les  troupes  du  général  Saint-Cyr. 
Ici  commença  l'un  des  plus  fu- 
rieux combats  d'infanterie  qui  ja- 
mais aient  été  livrés.  L'archiduc 
mit  pied  à  terre  et  chargea  à  la 
tête  «les  grenadiers.  Le  prince 
d'Anhalt  et  le  prince  de  Fursten- 
berg,  qui  y  fut  tué  ,  conduisirent 
de  même  leurs  colonnes.  Les  Fran- 
çais ne  furent  cependant  repoussé* 
jjors  du  bois  qu'après  une  résis- 
tanc;  désespérée.  Le  coips  des  ca- 


448  GOU 

rabiniers  couvrit  lavetraite,  et  lut 
chargé  à  la  fois  par  les  grenadiers 
et  les  cuirassiers  impériaux.  Le 
général  Saint-Cyr  dut  céder  à  ce 
terrible  effort,  et  se  replia  sur  Lip- 
tingen.  Le  26,  il  passa  le  pont  de 
Tutlîingen,  et  le  27,  il  arriva  à 
Hothweil.  »  [Précis  des  énénemens 
mililaires.)  Les  revers  de  l'armée 
du  Rhin,  ceux  de  Schérer  en  Ita- 
lie, amenèrent  une  combinaison 
nouvelle  dans  la  guerre  défensive 
que  la  France  soutenait.  Le  19 
juin  ,  Joubert  remplaça  Moreau 
dans  le  commandement  de  l'ar- 
mée derrière  l'Adda.  Les  ordres 
du  directoire  sont  de  prendre  l'of- 
lénsive.  Le  général  Saint-Cyr,  qui 
commandait  la  droite,  était  cou- 
vert parla  Bocchetla,  et  couron- 
nait en  avant  du  défilé  de  la  ri- 
vière, les  revers  de  la  vallée  de  la 
Scrivia.  Joubert  s'était  déterminé 
à  tenter  un  vigoureux  effort  pour 
obliger  Suwarow  à  lever  le  siège 
de  la  citadelle  de  Tortone  ;  le  gé- 
néral Saint-Cyr,  à  la  lèle  de  la 
plus  forte  colonne,  sorti  par  les 
détilés  de  la  IJocchetta  ,  poussa 
jusqu'à  ÎNovi,  et  s'en  empara.  Il 
envoie  un  détachement  au-delà 
de  la  Serivia,  qui  doit  suivre  les 
montagnes  et  arriver  sur  Tortone 
en  poussant  par  Cassano.  Ce  mou- 
vement décida  Suwarow  à  atta- 
quer le  i5  août  au  malin.  Le  gé- 
néral Saint-Cyr  repoussa  toute  la 
journée  le  cojps  commandé  parle 
f;énéral  K.ray,  qui  se  trouva  telle- 
ment maltraité  que  Suwarow  fit 
tenter  une  seconde  attaque  con- 
tre les  hauteurs  de  Novi,  par  les 
ilivisions  aux  ordres  des  généraux 
Darfeld,  Bagration  et  M(llorado- 
vvilsch.  Malgré  les  prodigieux  ef- 
forts des  troupes  russes,  les  Fian- 


GOU 

çais  conservent  leurs  positions,  et 
le  centre  de  l'armée  alliée  est  dé- 
truit dans  les  charges  que  Suwa- 
row fait  renouveler  avec  une  iné- 
branlable constance.  Le  général 
Gouvion  Saint-Cyr  ne  parvint  à 
se  maintenir  dans  son  poste  que 
par  des  prodiges  d'habileté  et  Je 
valeur.  Cependant  Mêlas  atteint 
les  premières  hauteurs  de  Novi 
du  côté  de  Pietali,  à  la  tête  de  14 
bataillon?  de  grenadiers  ,  et  entre- 
prend de  tourner  entièrement  la 
droite  du  général  Saint  -  Cyr.  Il 
fait  attaquer  le  flanc  droit  des 
Français  par  la  division  du  géné- 
ral Froehiich.  La  première  charge 
est  vivement  repoussée,  et  le  gé- 
néral -  major  Lusignan  demeure 
prisonnier.  Vers  cinq  heures  du 
soir,  le  poste  de  Novi  étant  enle- 
vé et  les  troupes  ne  pouvant  plus 
résister  aux  attaques  réitérées  du 
général  Laudon  et  du  prince  de 
Lichtenstein ,  le  général  Saint- 
Cyr  se  trouvant  presque  envelop- 
pé ,  commença  sa  retraite  ,  qu'il 
exécuta  en  bon  ordre.  Il  occupe 
la  montagne  Rouge,  où,  se  te- 
nant à  portée  de  défendre  ,  par  la 
route  de  Bavi,les  accès  de  la  Boc- 
chetla, il  donna  au  reste  de  l'ar- 
mée, après  la  déroute  de  Pastu- 
rano,  la  possibilité  de  rentrer  dans 
leurs  anciennes  positions.  (]ham- 
pionnet  succède  à  Moreau  ,  et 
connnence  avec  Mêlas  une  guerre 
de  poste  pour  l'investissement  de 
Cotji,  Le  général  Saint-Cyr  a  le 
commandement  de  la  dioile  de 
l'armée,  formant  un  corps  d'ob- 
servation sur  la  rivièredi!  Levant. 
Il  occupe  Gènes  et  les  ]'.>slc><  ad- 
jacens.  Il  attaque,  le  12  oclobro, 
le  général  Klénau  ,  dans  son  cauip 
retranché    de    Rapallo,  et  le  rc- 


GOU 

jette  sur  la  Spezzia.  Le  maréchal 
de  Bellegarde  amène  du  renfort 
au  général  Klenau,  et  celui-ci  mar- 
che pour  reprendre  ses  anciennes 
positions.  Cependant  Champion- 
net  perd  la  bataille  de  Savigliano  , 
et  le  feld-maréchal  Kray  passe  la 
Bormida,  et  attaque  les  Français. 
Le  général  Saint  Cyr  assemble  la 
plus  grande  partie  de  ses  forces 
sur  les  revers  des  montagnes  de 
ISovi,  et,  le  5  novea)i>re,  oblige 
le  maréchal  Kray,  qui  avait  fait 
un  mouvement  ^)»»rses  ailes  ,  à  les 
replier  sur  ses  divisions  du  centre. 
Malgré  ce  succès  obleuu  à  la  droi- 
te, l'armée  se  rallie  avec  peine 
sur  l'Apennin  ligurien.  Coni  capi- 
tule ,  Gênes  est  menacé  :  «  Dans 
cette  extrémité,  le  général  Saint- 
Cyr  forme  la  résolution  hardie, 
mais  indisjwnsable,  de  prendre  à 
son  tour  l'offensive.  En  consé- 
quence, après  avoir  averti  le  gé- 
néral AVatrin  des  projets  de  l'en- 
nemi, il  uiarche,  le  ladécembre, 
en  personne  contre  le  général  Kle- 
nau, dont  la  gauche  était  pres- 
que inattaquable;  elle  s,'appuyait  à 
la  mer,  et  était  couverte  par  le 
l'eu  de  deux  vaisseaux  de  guerre 
et  de  plusieurs  bâtimens  lég<;rs. 
Tourner  cette  j)Ojition  était  une 
opération  difficile,  sous  le  double 
rapport  de  la  disproportion  des 
forces  et  du  désavantage  du  ter- 
rain, preique  inaccessible  par  son 
élévation  et  la  dilliculté  des  dé- 
bouchés; mais  il  n'y  avait  pas 
dalternalive.  Le  général  Darnaud 
reçoit  ordre  de  tenir  la  défensive 
sur  le  point  appuyé  veis  la  mer  , 
tandis  que  le  général  Saint-Cyr, 
après  avoir  détaché  deux  batail- 
lons sur  iMontefiuiio  ,  se  porta 
»ur  le  centre  et  le  liane  droit  des 

X.  XVI. 


GOU 


449 


dispositions  de  l'ennemi.  Après 
un  combat  opiniâtre,  les  Français, 
maîtres  des  débouchés  ,  gravis- 
sent les  montagnes,  enfoncent  le 
flanc  droit  des  impériaux,  dont  la 
déroute  entraîne  celle  de  la  gau- 
che.» {Précis  des  évéuemens  in'dltni- 
res.)  L'armée  battue  vient  se  ral- 
lier derrière  la  Mjirga,  et  la  divi- 
sion du  général  Ott,  forte  de  89  ba- 
taillons et  de  8  divisions  de  cavale- 
rie, qui  uïarchail  an  secours  de 
Klenau,  prend  ses  canlountîmens 
dans  le  duché  de  Modène  et  de  Par- 
me. Le  premier  consul  Bonaparte 
envoya  au  général  Saint-Cyr  un 
sabre  d'honneur  :  ce  fut  ki  premiè- 
re récompense  naliouale  que  Bo- 
naparte décerna  coaune  chef  de 
l'état;  il  y  joignit  la  lettre  suivan- 
te :  «Le  ministre  de  la  guerre  m'a 
»  reiidu  compte,  général,  de  la  vic- 
tftoireque  vous  avez  rempoitée  sur 
w l'aile  gauche  de  f'armée  i.utri- 
«  chienne;  recevez  comme  témoi- 
)gnage  de  ma  satisfaction  un  beau 
«sabre  que  vous  porterez  Us  jours 
odecouibat.  Faites  connaître  aux 
"Soldats  qui  sout  sous  vos  ordres, 
«que  j«'.  suis  content  d'eux  et  que 
«j'espère  l'être  encore  davantage. 
»  Le  ministre  de  la  guerre  vous 
«expédi»'  le  brevet  de  premierlieu- 
»  tena^it  de  l'armée...  «  A  celte  épo- 
que le  gouvernement  de  Gênes 
lui  fit  ime  oll're  qu'il  refusa  avec  le 
désinléressement  qui  caractérise 
toutes  les  époques  de  sa  vie.  Le 
premier  présent  repoussé,  h;s  Gé- 
nois eu  envoyèrent  un  autre  au- 
quel ils  savaient  que  le  général 
Saint-Cyr  attacherait  un  grand 
prix.  Ce  gage  glorieux  de  la  re- 
c<umaissance  d'une  grande  cité 
ne  lui  est  jamais  parvenu.  L'an- 
née suivante  le  général  Sainl-(^yr 

'9    , 


.'i5o 


GOU 


commandait  le  cerîlre  <Ie  l'armée 
dn  llhin ,  et  pas;;a  le  26  avril  le 
Rhin  à  Brisach,  Il  s'empara  de 
Friboiirg,  ri  se  porta  sur  Saint- 
Biaise,  où  il  se  réunit  à  la  réserve, 
eonmiand*!e  par  le  général  en  che!'. 
Mureau  aynut  attaqué  les  Autri- 
chiens à  Engen .  la  victoire  pen- 
chait on  faveur tle  ces  derniers, 
lorscpie  le  içéuéral  Kray  apprenant 
l'arrivée  du  général  Saint-Cyr  sur 
Hohenhowen,  battit  en  rv'traite: 
ce  dernier  se  porta  sur  Liptiuiren, 
et  arriva  le  6  rnai  sur  les  hau- 
teurs qui  dominent  la  rive  droite 
<lu  Danube;  niais  Moreau  n'avait 
pas  iharché  de 'ce  côté  à  la  sui- 
te de  I  ennemi,  et  le  général  Kray 
avait  passé  pendant  la  nuit  le  Da- 
nube à  Sigmaringen.  Le  général 
Saint-Cyr  s'avança  sur  Buchau  , 
et  le  9  mai  attaqua  l'avant-garde 
atitricbienne  ,  rjui  était  séparée  du 
corps  de  bataille  parla  Ricss  :  il  lu 
culbuta  dans  la  rivière,  lui  fit 
i,5oo  prisonniers,  et  s'empara  de 
«es  canons,  puis  il  poursuivit  l'en- 
nemi en  longeant  le  Danube.  Le 
iG,  l'arcbiduc  Ferdinand  ayant 
percé  la  ligne  du  général  Sainte- 
Suzanne,  et  le  for(;ant  à  rétrogra- 
der,  le  général  Sainl-C_yr  fit  faire, 
à  «on  arrière-garde  un  n)ou veulent 
rétrograde,  et  plaça  surin  rive 
droite  du  Danube,  des  batteries 
qui  tiraient  sur  la  roule  d'Uhn  ù 
Érbach;  l'archiduc  crut  qiie  toute 
l'armée  allait  passer  le  fleuve  et  le 
couper;  il  se  repli:»  surDlm.  Quel- 
ques jours  après  le  général  Saint- 
(!yr  quitta  l'arniée  d^i  llhin.  Cel- 
le n\ême  année  il  fut  nonnné  coi»- 
«eiller-d'état,  et  le  premier  consul 
Bonaparte  lui  doima  le  cofninan- 
deujenl  des  troupes  réimies  à  Bor- 
deaux pnm    eftécti'.cr    le    passage 


GOU 

des  Pyrénées,  et  pour  aller  se  réu- 
nira l'armée  du  prince  de  la  Paix 
[voyez  GoDOï).  Cette  guerre  contre 
le  Portugal  ne  fut  pas  de  longue 
durée,  et  un  traité  de  paix  qui 
valut  au  favori  espagnol  des  hon- 
neurs inusités,  ne  tarda  pas  à  ter- 
miner cette  campagne.  Il  remit 
le  commandement  au  général  Le- 
cierc,  et  succéda  à  Lucien  Bona- 
parte comme  ambassadeur  à  iMa- 
drid.  Raj)pelé  de  ce  poste  pour  être 
envoyé  en  Italie,  il  prit  ea  i8o'^  le 
commandement 'de  l'arniée  d'ob- 
servation dans  le  royaume  de  Na- 
ples.  Le  général  Saint-Cyr  refusa 
de  dicter  aux  troupes,  sous  ses  or- 
dres, des  adresses  pour  solliciter 
le  preiYiier  consul  à  se  revêtir  de  la 
dignité  impériale;  mais  aussitôt 
que  le  sénatus-consulîe  du  18  iriai 
i8o4  fut  aiTivé  à  sa  connaissan- 
ce, ni  lui  ni  son  armée  ne  fwcnl 
attendre  leur  adhésion  ,  et  le 
courrier  qui  avait  été  envoyé  à 
Paris,  rapporta  au  nom  de  l'empe- 
reur des  grades  et  de&  décora- 
lions  pour  les  ofliciers  et  les  sol- 
dats, et,  pour  le  général  en  chef, 
sa  nomination  aux  dignités  de 
grand-otïicier  de  l'eiftpire,  et  de 
colonel  générai  des  cuirassiers.  Le 
2  février  i8o5,  il  fut  nommé  un 
des  (il»  grands-aiglus  de  la  légion- 
d'hoMfieur;  il  assista  au  couronne- 
ment de  Milan,  et  il  évacu.'r  le  21 
septembre  les  états  napolitains,  eu 
vertu  d'un  traité  de  neutralité 
conclu  avec  celte  puissance.  Ces 
troupes  formèrent  le  t"  corps  de 
l'armée  d  Italie,  destiné  à  agir  sur 
rAdig«,et  à  cerner  Venise.  Le 
général  Saint-Cyr  battit"  à  Castel- 
Franco  le  prince  de  Rohan,  et  le 
fit  prisonnier,  ain^^i  qu'un  corps  de 
b\ooo  Autrichiens.   Il  occupa  Ve- 


GOL 

nise  ;i  la  poix  (rAusterlitz ,  et  le 
8  lévrier  «8o6,  entra,  à  la  tète  de 
son  armée,  dans  le  royaume  de  Na- 
ples.  Nommé  commandant  (jn 
chef  du  camp  de  Boulogne,  en 
remplacement  du  maréchal  Bru- 
ne, il  reçut  le  litre  de  comte  de 
l'empire,  et  eélui  de  piésident  du 
collège  électoral  du  Mont-ïonner- 
re. .  Le  17  août  1808,  le  général 
Gouvion  Saint-Cjr  prit  le  com- 
tnandement  du  7'  corps  de  la 
grande-armée,  destiné  à  opérer  en 
Catalogne.  Napoléon  Ini  donna 
corle  blaurtie^  et  lui  dit  pour  ins- 
truction particulière  de  l'aire  tous 
ses  efforts  ponjr  conserver  Barce- 
lonne,  car,  ajouta-t-il,  si  vous  per- 
diez cette  place,  je  ne  la  reprendrais 
pas  avec  8o,oou  hommes.  Le  5  dé- 
cembre Rose  capitula,  après  17 
jours  de  tranchée  ouverte.  Le  iii 
le  général  (iouvion  Saint  -  Cyr 
gagne  la  iialaille  ileCardedeu.  à  la 
suile  de  l.tquelle  le  marquis  de  Vi- 
ves, capitaine-général  de  la  Cata- 
lalogne,  est  destitué;  le  17,  il  arri- 
ve derarjt  Barcelofine .  qu'U  dé- 
livre des  rigueurs  d'un  blocus.  Le 
21  il  attaque  les  Espagnols  dans 
]a  iMîlle  position  de  Molino  del 
Rey,  les  met  dans  la  plus  complct- 
te  déroule,  leur  prend  i,5oo hom- 
mes, dans  le  noiubre  desquels  se 
trouve  le  général  Caldagnés  et 
douze  olficif.TS  s»ipérieurs  ,  s'em- 
pare de  5o  bouches  à  leu,  et  de 
tous  les  magasins  de  poudre  et  <le 
muuilious  que  les  Anglais  et  les 
Catalans  avaient  établis  à  Villa- 
Friuica.  Le  25  février  iSoj),  il 
remporta  à  Wallo  la  victoire  la 
plus  éclatante  ^ur  le  général 
en  chef  lleding,  qui  y  perdit 
la  vie.  Le  général  Gouvion 
.Saint-(Jyr  s"enij)ara   des  villes  de 


GOU 


45i 


Félin  -  de  -  Quixolo  ,  diC  Pala- 
mos,  et  couvrit  le  siège  de  Giron- 
ne.  Une  campagne  aussi  glorieuse 
aurait  mérité  au  général  en  chef 
la  seule  dignité  militaire  qui  lui 
manquait.  L'empereur  le  pensait, 
et  deux  fois  il  fit  rédiger  et  signa 
le  décret  qui  élevait  le  général 
Saint-Cyr  à  la  dignité  de  maré- 
chal :  deux  fois  un  favori  qui  veil- 
lait à  entretenir  dans  le  génie  de 
Napoléon  l«  s  semences  d'une  vieil-  y^ 
leaiiimoïité  fit  déchirerle  décret. Le 
maréchal  Augereau  fut  appelé  au 
cominaiîdementde  cette  armée,  et 
quoique  le  général Saiut-Cyr n'eût 
quitté  la  Catalogue  qu'après  avoir 
obtenu  de  nouveaux  succès,  qu'a- 
prés  être  resté  cinq  mois  à  la  tête 
des  troupes,  pour  dcuiner  le  temps 
à  jon  successeur  de  soigner  sa  san- 
té, enfin  qu'après  avoir  reçu  une 
permisssion  du  ministre  de  la  guer- 
re, on  s'obstina  à  considérer  son 
départ  connne  une  infraction  à  la 
discipline  militaire.  Deux  ans  de 
disgrâce  furent  la  récompense  de 
ses  travaux.  Les  détails  de  celte 
campagne  sont  consigné»  dans 
l'ouvrage  que  le  maréchal  Saint- 
Cyr  a  fait  paraître  en  i8'^.j  :  l'exac- 
titude des  faits,  l'intérêt  de  la  nar- 
ration, (ont  vivement  regretter 
que  la  plupart  des  opérations  mili- 
tai rcs  de  l'armée  française  n'aient 
pas  eu  de  pareils  historiens.  L'au- 
teur, après  avoir  exposé,  à  la  ma- 
nière de  César,  les  actions  où  il  a 
«commandé  d/nis  celte  lutte  entre 
la  France  et  la  péninsule  ,  déve- 
loppe avec  les  talens  d'un  habile 
écrivain  et  d'un  grand  capitaine 
quelques-uns  des  épisodes  de  celte 
guerre,  et  après  av<»ir  donné  d'il- 
luslres  exemples,  il  donne  de  sa- 
{•eb  conseils  pour  conserver  à  la 


ri  52 


GOU 


France  sou  indôpendance,  et  à  la 
dynastie  des  Bourbons  sa  gloire. 
Le  général  Gouvion  Saint-Cyr 
reparut  dans  les  affaires  de  i8ii, 
où  il  reprilses  occupalions  aucon- 
.•^eil-d'état.  En  1812,  l'empereur 
lui  donna  le  commandement  de 
l'armée  bavaroise,  rassemblée  à 
Bamberg.  Ces  troupes. sous  la  dé- 
signation du  G'  corp?  de  la  gran- 
de-armée ,  se  réunirent  après  ie 
passage  du  Niémen  au  a'  corps 
commandé  par  le  maréchal  Oudi- 
not  ,  et  lormèrent  la  gauche  de 
l'armée  française,  destinée  à  opé- 
rer sur  la  Dwina  :  elles  étaient 
opposées  au  comte  de  AiViltgens- 
tein.  Le  début  de  la  campagne  ne 
tut  pas  très-heureux.  Séparée  de 
l'empereur,  (pii  s'était  avancé  au- 
delà  de  SmoIcMsk,  celte  armét^a- 
vait  commencé  un  mouvement  ré- 
trograde, et  les  ordres  étaient  don- 
lies  pour  qu'on  repassât  la  Dwina. 
N.ipoléon  ifjquiet  sur  son  ilanc 
gdiiche ,  îittendait  a  Wittepsk, 
;.yant  interrompu  sa  marche  sur 
;>ïoskou.  Le  ir  août  le  maré- 
chal Oudiuot  est  blessé,  et  le  com- 
Kiau'lexnenl  en  chel'des  deux  corps 
réunis  revient  au  général  Saint- 
Cyr.  Celui-ci  arrête  le  mouve- 
ment rétrograde,  prend  roffmsi- 
\e,  repousse  l'ennemi  au-delà  du 
détilé  de  Polotsk,  et.  le  lende- 
main, après  avoir^Migagé  le  comte 
de  Wittgcnstein  sur  toute  la  li- 
^rie,  le  met  dans  !;t  déroule  la  plus 
i.-oMPjdète,  s  empare  de  son  ai'til- 
lerie,  de  tons  se^^  bag;iges  ,  et  lui 
prend  on  ttie  700^)  houimes.  Le 
bâton  de  maréchal  de  France  tut 
i  )  récompense  de  ce  beau  lait  d  ar- 
iiii!S  ;  si  la  récompense  tut  tardi- 
ve-, <dle  en  parut  [)lus  éclalanle. 
L»;  iNiiiit'.-    de  W'itfgen^tein.   ren- 


GOU 

forcé  par  les  divisions  de  Finlan- 
de et  les  milices  de  Saint-Péters- 
bourg, reparut  sur  le  champ  de  ba- 
taille. Le  17  octobre,  il  attaqua  les 
Français  dans  leur  camp  devant 
Polotsk.  La  lutte  dura  trois  jours  , 
pendant  lesquels  les  Russes  lurent 
constamment  repolisses.  Mais  le 
moment  des  revers  était  arrivé,  et 
déjà  Napoléon  avait  qui  ttéWoskou. 
Le  maréchal  Gouvion  Saint-Cyr 
disposa  tout  danslanuitdu  19  pour 
commencer  sa  retraite.  Cette  re- 
traite est  i\n  modèle  que  citent 
avec  de  grands  éloges  les  oiTiciers 
les  plus  expérimentés,  car  les  co- 
lonnes françaises  arrivèrent  sans 
coup  -  férir  derrière  la  Ouli.  Le 
maréchal  Gouvion  Saint-Cyr, 
blessé  d'une  balle  au  pied,  remit 
le  commandement  au  duc  de  Reg- 
gio.  Il  rejoignit  l'armée  pendant 
sa  désasîrense  retraite,  et  fit  avec 
le  vice-roi  son  entrée  à  Berlin, 
dont  il  fut  nommé  gouverneur  en 
remplacement  du  maréchal  Au- 
gerean.  Une  chute  qui  donna  de 
vives  inquiétudes ,  empêcha  le 
maréchal  Saint-Cyr  de  prendre 
une  part  active  aux  éclatantes  vic- 
toir(;s  de  Wurîchen  et  de  Bautzen, 
où  reni[)ereur  lui  destinait  un 
commandement  important.  Pen- 
dant Tarinistice,  il  organisa  le  i4' 
coips,  et  le  17  août,  lorsque  les 
hostilités  reprirent  leur  cours,  il 
occupait  an-dessus  de  Dresde  le 
(  a/np  de  Pirna,  sa  gauche  appuyée 
à  Konigstein.  ïl  était  ainsi  à  che- 
val sur  la  gr.tnde  route  de  Dresde 
à  Pr.ig.ie,  poussant  des  partis  d'ob- 
'.eiv:iiinn  jus(|u'aux  débouchés  de 
'\iar:onb(;rg.  Gepenilant  la  princi- 
pale ai  niée  îles  alliés  débouche,  le 
sri,  \y.\r  ia  route  de  Peterswald.  As- 
sailli   jiar  200    mille  hommes,  le 


G  ou 

maréchal  GouvioD  Saint-Cyr  dé- 
l'end  pied  à  pied  toutes  ses  posi- 
tioii!»,  opère  sa  retraite  lentement, 
lésisle  derrière  de  faibles  retran- 
chetnens  aux  eflbrls  de  cette  j>ran- 
<le  armée,  et  donne  ainsi  à  l'em- 
pereiir  le  temps  de  revenir  de  Si- 
lésie.  Napoléon  n'arrive  que  le  26 
à  midi.  Il  est  suivi  du  maréchal 
î^ey,  de  quelques  divisions  de  sa 
garde,  et  d'une  partie  de  la  cava- 
lerie du  roi  de  Naples.  Déjà  les  o- 
bus  pleuvaient  dans  Dresde;  quel> 
ques-unes  des  redoutes  étaient  en- 
levées, les  antres  tournées;  mais 
tous  les  efforts  des  alliés  avaient 
expiré  aa  pied  de  la  palanque  où 
se  trouvait  le  jnaréchal  Saint  (îyr 
avec  la  division  Berthezène/i  A 
cinq  heures  du  soir,  le  maréchal, 
soutenu  par  les  troupes  arrivées 
de  Silésie  ,  attaque  l'armée  du 
prince  de  Schvvarzenberg, et  sous  le 
feu  d'une  canonnade  terrible,  le 
force  à  rétrograder  et  le  rejette  bur 
les  collines  qui  entourent  Dresde. 
Le  lendemain,  le  maréchal  Saint- 
Cyr  contribua  puissamment  au 
gain  de  l'éclatante  victoire  s  que 
remporta  Napoléon.  Dans  celte 
journée,  il  commandait  un  des 
eor.ps  du  centre  et  soutenait  les  o- 
pérations  de  la  gauche.  Il  pou*- 
suivit  l'ennemi  qui  se  retirait 
dans  la  direction  de  Muxea ,  lui 
fit  un  bon  nombre  de  prisonniers, 
s'empara  de  plusieurs  milliers  dt; 
voitures  d'artillerie;  mais  il  ne;  put 
arriver  que  le  ^o  au  soir  devant 
le  débouché  deToplilz.  Le  10  sep- 
tembre, il  attaque  les  déliiés  du 
Geyersberg,  qui  étaient  dél'endus 
à  l'eterswald  et  à  llellcndorf  par 
le  corps  d'armée  de  Ziethen,  ren- 
forcé par  les  divisions  russes  aux 
ordres  du  comte  Pahlen  ,  et  par 


G  OU 


<\b'ô 


l'infanterie  du  prince  Schaschafs- 
koy.  A  quatre  heures  la  division 
Bonnet  avait  emporté  la  tête,  du 
défilé,  où  le  corps  .des  grenadiers 
russes  fit  une  rcsislance  désespé- 
rée. Lo  maréchal  Saint- Cyr  s'a- 
vança pur  Ebersdorl' ,  s'empara 
des  hauteurs  de  Meckenlhtiria 
et  de  celles  d'Ober-Rraupeu,  for- 
ça le  passage  et  se  répanflil  dans  la 
plaine  de  Tôplitz.  Les  difficultés 
du  terrafui  ne  lui  permirent  pas  de 
faire  arriver'  son  artillerie,  et  le. 
maréchal  ne  put  compléter  ce  bril- 
lant succès.  .Le  i4,  l'ennemi  ayant 
assailli  avec  de  grandes  forco'»!» 
camp  de  Gusliabel,  occupé  par  le 
I"  corps,  le  i5  à  deux  heurt'S  le 
marée W  Gouvion  SaiiU-Gy»;  at- 
taqua le  conite  de  AVittgensteiu 
en  position  à  Macklercbach  ,  tour- 
na la  droite  de  l'armée  russe,  par 
la  division  Mou,lon-Dii  vern.çf ,  ot 
obligea  les  5%  4"  et  i^"  corj)s  d'ar- 
uiéo  russe  à  reculer  jusqu'à  Nol- 
len,dorf.  Le  iG^  il  délogea  l'eilne- 
mi  de  toutes  ses  positions  en  a- 
vant  de  l'eterswald  ,  lui  fit  un 
gr.iad  nombre  de  prisonniers  , 
dans  le  nombre  descpicls  s^o  irou- 
ya  le  fils  du  maréchal  lîliuher. 
Le  17  Ifts  généraux  M  ittgensleiu 
et  Ziethçn  ,  ayant  couibiué  l«urs 
mouvem^ns  avec  ceux  du  géné- 
ral Meerj'eld,  ikltaqiièrent,  sons  leS 
yeux  du  roi  de;  Prusse,  los  Fran- 
çais aupr(!"s  dq  Dorhn  ;  niais  ils 
furent  repousses,  et  le  maréchal 
Saint-Cyr  les  ch^issa  de  nouveavi 
dans  la  plaine  de  Toplilz.  Le  18 
il  repoussa  le  corps  prus>-i«:n  du 
général  Kleisl  jusqu'à  (Jbcr-Rrau- 
pen,  cl  le  général  Mecrfeld  ayant 
essayé  de  surprciulre  les  hauteurs 
du  village  de  Rcinitz,  fut  mis  en 
déruule,  et  perdit  aooo  honuucs, 


454 


CrOU 


qui  tombèrent  ;iu  poin'oir  fîes 
Fiançais.  Ce{>cndant  les  alliés  réu- 
nissant leur  armée  de  Silésie  à 
celle  tle  Berlin,  et  passant  l'Elbe  à 
Dessan,  tandis  que  la  îjrande-ar- 
inée  débouche  de  Bohême  el  se 
porte  par  Chemnitz  sur  Léipsiok, 
l'empereur  quitte  Dresden  le  7 
octobre,  et  laisse  le  maréchal  Saint- 
Cyr,  ayant  sous  ses  f)rdres  les  1" 
et  i/f'  corps,  pour  dél'eudre  la  ca- 
pitale de  la  Saxe.  Napohéon  mar- 
che par  la  rive  gaucdu;  de  l'Elbe 
dans  la  direction  de  iMagdebnurg. 
Plusieurs  de  ses  corps  sont  réunis 
sous.Wittendierg;  il  espère  faire 
avorter  le  projet  de  réiuiiou  des 
alliés,  el  vaincre  l'uué  ou  l'aulrc 
de  leurs  armées  avant  b-iKt  jonc- 
tion à  Léipsick.  Le  i3  octobre  le 
maréchal  Saint  -  Cyr  attaqué  le 
cou)te  de  Tolsloy,  In:  tue  aoof» 
hommes,  lui  fait  laoo-  prisou- 
iiicFS,  prend  20  canon«,  ses  ba- 
p^oges,  et  demeure  ainsi  maître  des 
défilés  de  la  Bohême.  L'empereur 
attaque,  le  «6,  la  grandd-armée  de 
Bohème,  la  bat,  et  la  déro.ile  se 
lait  WMilir  jusqu'à  la  cjueue  de  cette 
ai^inée,  où  un  bon  nombre;  ila 
fuyards- et  de  bagages  tottîbe  au 
]>oiiTiMr  ilu  maréchal  Salnl-Cyr. 
Il  e>l  probable  que  le  maréchal 
aurait  nvarchè  au  canon,  vualgi'é 
Vs  inslruotiotiji  contraires  de  l'em- 
pereur, s'il  n'avilit  pns  reçu  un 
Idllet  qu'il  communiqua  ùt  ses  gé- 
néraux, par  lft(piel  iNapoléon  lui 
renouvelait  l'ordre  positif  de  res- 
ter dans  Dresde.  Kéduît  à  ne  jouer 
aucnn  rôle  dans  Ih  nuitivaise  for- 
tune de  notre  armée,  le  tnaréchal 
Saint-Cyr,  après  (pielques  com- 
bats, se  renferma  dans  Dresde, 
où  il  fut  bientôt  bloqué  par  le  4* 
coips    d(;    l'armée   autrichictmc. 


GOU 

réuni  aux  troupes  russes  du  com- 
te de  Tolsloy,  formant  ensemble 
60,000  hommes.  Le  maréchal  si- 
gna, le  11  novembre,  une  capi- 
tulation d'après  laquelle  il  devait 
rentrer  en  France  avec  ses  trou- 
pes et  une  partie  de  son  artillerie. 
Celte  capitulation  ne  fut  point  ra- 
tifiée ;  et  en  violation  de  toutes  les 
lois  de  la  guerre  ,  le  maréchal  de- 
vint prisonnier  avec  toute  son  ar- 
mée, et  ne  revint  en  France  qu'a- 
près la  première  restauration  en 
1814.  Il  fut  créé  à  celle  époque 
commandeur  de  Saint  -  Louis,  et 
nu:mbre  de  la  chambre  des  pairs. 
Liu's  du  débarquement  de  Napo- 
léon ,  il  fut  désigné  pourcommnrr- 
derv"  sous  les  ordres  de  MossiEtiR  , 
r.irmée  q<ii  se  formait  à  Lyon  ,  et 
p;utit  dans  la  nuit  du  20  mars 
181  5,  pour  se  rendre  à  Orléans. 
Il  lit  d'inutiles  et  périlleuses  ten- 
tatives pour  com[»rimer  dans  cette 
ville  et  dains  Bourges  ,  le  mouve- 
ment général  qui  se  prononçait  en 
faveur  de  Napoléon.  Pendant  les 
cent  jours  il  vécut  dans  la  retraite, 
et,  après  la  seconde  restauration  , 
i'i  fui  appelé  au  ministère  de  la 
guerre,  dont  il  remit  le  poite- 
fcuillo  au  duc  de  Feltre  à  la  fin  de 
septembre  i8i  5.  Nommé  minis- 
tre -  d'état  et  membre  du  conseil 
privé  .  il  fut  en  outre  créé  grand'- 
croix  de  l'ordre  de  Saintr  Louis, 
et  gouverneur  de  la  5'  division 
militaire.  Appelé  au  mois  de  juin 
i8»7  an  ministère  de  la  marine, 
il  consacra  sa  trop  courte  admi- 
nistration par  quehfues  ordonnan- 
ces utiles,  et  par  le  départ  de 
r«  xpédilion  de  la  corvette  l'f7/'«- 
iiie.  Le  portefeuille  de  la  guerre 
lui  fut  remis  le  17  octobre  de  la 
même  année,  et  le  maréchal  Cou- 


GOL 

vîon  Siiinf-Cyr  eut  besoin  de  tous 
^on  dévouement  à  la  monarchie 
consiitutionnelle  pour  réparer  les 
grande»  fafites  de  son  prédéces- 
seur. Sou.s  SCS  mains  Tordre  re- 
vint dans  les  finances  de  ce  dé- 
parlement; un  déficit  de  12  mil- 
lions est  comblé  sans  qu'on  ait  be- 
soin de  recourir  à  des  emprunts  o- 
néreux  on  à  la  mumfiience  royale, 
et  cependant  le  maréchal  obtint  à 
la  fin  de  1818  l'honorable  avan- 
tage de  présenter  aux  chambres 
un  budjjet,  dont  la  rédaction  a 
depuis  été  adoptée  par  les  antres 
ministères ,  et  de  rupporl<;r  au 
trésor  14  millions,  fruits  de  ses 
économies.  Pendant  la  session 
1817-1818,  il  présenta  aux  cham- 
bres le  projet  de  loi  sur  le  mode 
de  recrutement  et  d'avancement 
<le  l'armée.  Il  soutint  la  discussion 
parlenientaire  avec  une  vigueur 
de  raison  et  une  force  d'éloquen- 
ce,  dont  les  traits  rappelaient  à 
ses  adversaires  la  hache  de  Pho- 
cion.  Un  succès  éclatant  couron- 
na ses  travaux,  et  in  France  put 
espérer  une  armée  citoyenne.  Le 
maréchal  Gouvion  Saint -Cyr  fit 
ouvrira  Paris,  le  24  novembre  de 
la  même  année,  un  cours  d'en- 
seignement mutuel  pour  tous  les 
corps  de  l'armée.  Il  nomma  une 
commission  d'olBi/iers-généraux , 
d'administrateurs  et  de  juriscon- 
sultes, pour  réviser  le  code  des 
délits etdcs  i;eines  nulitaires,  ainsi 
que  la  juridiction  des  conseils  de 
guerre.  Une  autre  commission  fut 
chargée  d'examiner  le  grand  sys- 
tème de  défense  exécuté  par  Vau- 
ban  ,  et  de  rechercher  les  moyens 
les  plus  eflicaces  pour  le  mettre 
en  harmonie  avec  le  nouveau  sys- 
tème de  guerre  introduit  de  nus 


GOU 


4j5 


jours.  Le  choix  des  membres  de 
la  commission,  présidée  par  le 
général  Marescot,  était  digne  de 
liniporlance  du  sujet.  A  la  fin  de 
1818,  quelques  minislies  ayant 
ufinoncé  le  projet  de  l'.iire  subir 
des  modifications  à  la  loi  du  5  fé- 
vrier, il  s'établit  dans  le  conseil 
une  lutte,  à  la  suite  de  laquelle 
tous  les  minisires  remirent  leurs 
portefeuilles,  à  l'exception  du  ma- 
réchal Saint- Cyr  et  de  M.  Deçà- 
zes.  Un  nouveau  ministère  s'orga- 
nisa sous  la  présidence  du  géné- 
ral Desolles.  Pondant  Tannée  1819, 
lemiiréchalSaint-Cyr,  attaqué  pur 
de  fréquens  accès  de  goutte,  té- 
moigna à  plusieurs  rept  ises  le  dé- 
sir de  quitter  le  ministère,  mais 
le  roi  l'engagea  couïtaujUMMit  à  y 
rester.  An  mois  d'août,  il  fut  dé- 
signé pour  témoin  de  Taccwuche- 
ment  de  S.  A.  11.  M'""  la  duchesse 
de  Bcrry.  Le  mauvais  état  de  sa 
santé  ne  lui  permit  pas  d'accepter 
cet  honneur.  Mais  le  parti  qui  a- 
vuit  levé  le  masque  par  la  propw- 
siticn  de  31.  Barthélémy,  avait 
j)énétré  dans  le  conseil ,  et  comp- 
tait déjà  pour  appui  le  ministre  le 
plus  influent.  Cette  grande  ques- 
tion de  modifier  la  loi  du  5  février 
fut  agitée  en  présence  de  sa  ma- 
jesté, et  le  18  novembre  1819,  le 
maréchal  Saint-Cyrremitsoii  por- 
tefeuille. Pendant  ce  ministère,  le 
njaréchal  Saint-Cyr  s'est  dépouil- 
lé de  quelques-unes  de  ses  digni- 
tés en  faveur  d'olTiciers-généraux 
maltraités  par  hi  fortune.  Il  a  quit- 
té le  pouvoir  sans  solliciter  de 
nouveaux  honneurs  ,  et  sans  se 
conserver  d'éminentes  fonctions 
pour  lui  servir  de  retraite.  Il  avait 
abandonné  le  ministère  une  pre- 
mière fois  pour  ne  pas  signer  un 


/|5G                HAM  HAM 

traité  de  doulonreusc  mémoire  ;  gardait  comme  la  sauve-garde  de 

il  le  qiiitla  une  seconde  fois  pour  la  liberté  contitutionnelîe. 
ne  pas  attaquer  une   loi  qu'il  re- 

De  nouveaux  renseignemens  sur  M.  de  IIammer  [voyez  le  9'  vol. 

page  ap)  nous  mettent  à  même  de  rectifier  et  de  compléter  cet  article. 

HAMMEU  (Joseph  de),  célè-  qu'il  avait  des  langues  orientales, 

bre  oricntali.'^te  ,  est  né  le  9  juin  en  attendant  qu'il  trouvât  une  oc- 

J774  ^   ''    Graetz,  capitale    de  la  c.ision  favorable  pour  voyager  en 

Styrie.  Après  avoir  terminé  ses  é-  Perse.  Le  baron  de  Habert,  ayant  . 

tndcs,  il  alla  à  Vienne  en   1787.  reçu  la  nouvelle  du   traité   d'£l- 

Là  il  se  livra  avec  assiduité  et  a-  Arisch,  le  chargea  de  se  rendre  en 

\ec  succès  à  la  poésie  et  à  l'étude  Kgypie  pour  veilleraux  affaires  du 

des  langues   orientales.   Au    bout  consulat; mais  M. deïlammer  resta 

de  quelque  temps  il  fut  reçu  élè-  quekjue  temps   sur  les  bords  du 

■ve  de  l'académie  orientale  de  cet-  'ligre,  auprès  de  sir  Sidney  Smith, 

le  ville,  où  il  resta   9  ans,    faute  auquel  il  servit  d'interprète  et  de 

d'occasion  d'être  employé  comme  secrétaire.    Il   était   présent  à    la 

interprète.  Pendant  les  deux  der-  conlérence  du  grand-visir  à  Jaffa  ; 

nières   années    de    son   séjour   à  en  1801,  il  fit  la  campagne  d'E- 

\  ienne,  M.  de  Hammer  s'occupa  gyple  avec  sir  Sidney,  et  après  la 

principalement  du    persan,   dans  |»rise  d'Alexandrie,  il  se  rendit  en 

i'inierition  de  faire  un  voyage  en  Angleterre  ,    d'après  les  conseils 

Perse.  .Son   premier  travail  îitté-  du  baron  de  Herbert.  Pendant  le 

riire  fut  une  traduction  d'un  poë-  trajet  d'Alexandrie  à  Portsmouth, 

um  Uirc  sur  lu  Jh)  de  foui  ex  choses,  il  traduisit   Ibn   Waschies  sur  les 


Lo  talent  poétique  de  W.  de  Ham- 
mer comu)ença  à  se  développer 
en  1797.  Au  printemps  de  cette 
année  .  il  chanta  la  fête  anniver- 
saire de  la  naissance  de  l'empe- 
reur dans  une  ode  intitulée  la 
Fête  du  12  février.  H  eu  dédia  u- 
ne  autre  au  baron  de  Jeniscb ,  in- 
titulée VAsie,  et  ime  troisième  à 
Muller.  I  'année  suivante  il  fil  un 
voyage  dans  lo  centre  de  l'Autri- 
che et  à  Venise,  accompagné  de; 
son  ami  le  baron  de  Rriiffl.  Au 
])rintcmps  de  l'année  1  7Ç)9,  le  ba- 
ron de  Thngut  l'envoya  à  Cons- 
tantinople  avec  une  lettre  de  re- 
commandation au  baron  de  Iler- 


hiéroglyphes  et  les  alphabets  in- 
connus, de  l'aiabe  en  anglais.  En 
1802,  il  se  rendit  d'Angleterre  à 
(>jnslantino])le  avec  l'ambassa- 
deur le  baron  de  Sturmer  ,  au- 
quel il  servit  de  secrétaire.  Com- 
me agent  impérial  de  la  Molda- 
vie ,  RI.  de  Hammer  se  rendit  à 
.lassy  en  1806.  L'année  suivante 
il  retourna  à  Vienne,  où  il  se  lia 
avec  le  comteWeiiz-Rzewuski,  qui 
aimait  particulièrement  les  lan- 
gues orientales.  Celui-ci  n'eut  pas 
plutôt  fait  connaître  I.i  résolution 
qu'il  avait  prise  de  fonder  un  éta- 
blissement utile  dans  ce  genre, 
que  W.  de  Hanmiei'   lui  proposa 


berl ,  par  laquelle  il  le  pri.iit  de  de  publier  le  recueil  lilléraire  in- 
l'euvoyer  à  Halep  et  Basra  pour  \\\u\v.  :  Mines  de  l'Orient.  Le  jour 
perfectionner    les     connaissances     des  Rois,  1809  ,  parut  l'annonce 


HAM 

de  la  fondation  de  cet  institut, 
comme  du  foyer  de*  lang:ues  de 
l'Orient  et  de  l'Occident.  A  cette 
époque,  l'institut  de  Paris  fit  une 
mention  très-honorable  des  mé- 
moires de  iVJ.  de  Hammer,  sur  l'in- 
fluence de  l'islamisme  pondant  les 
trois  premiers  siècles  de  l'égire. 
Tandis  que  les  troupes  françaises 
étaient  encore  à  Vienne,  M.  de 
Hammer  fit  tous  ses  efforts  pour 
recouvrer  les  manuscrits  dont  la 
bibliothèque  impériale  de  Vien- 
ne devait  être  dépossédée  ;  ses  dé- 
marches furent  couronnées  du 
pins  heureux  succès  :  Sao  restè- 
rent à  Vienne,  et  on  restitua  ,  en 
1810,  \.i  plus  grande  partie  de 
ceux  qui  avaient  été  transportés  à 
Paris.  Il  dut  ce  succès  inespéré  à 
l'appui  du  ministre  de  l'intérieur, 
le  comte  de  Montalivet,  et  au  zèle 
du  baron  Silvestre  de  Sacy.  En 
reconnaissance  de  son  ouvrage , 
Constitution  d'état  de  l'empire  ot- 
toman ,  il  reçut  en  i8i5,  de  l'em- 
pereur deRussie, l'ordre  de  Sainte- 
Anne  ,  ïcconde  classe,  et  du  roi 
de  Danemark  ,  l'ordre  de  Dane- 
brog.  En  1816,  il  épousa  la  fille 
aînée  du  chevalier  Henikstcin.  En 
1817,  M.  de  Hammer  fut  nom- 
mé conseiller-d'élat  impérial ,  ce 
que  le  prince  Metternich  lui  an- 
nonça par  une  lettre  de  sa  propre 
main.  En  1819,  l'ambassadeur 
persan  Mirza  -  Abul  -  Hassan  se 
trouvant  à  Vienne  ,  M.  de  Ham- 
mer le  conduisit  solenneIlem<;nt 
à  l'audience  de  la  cour,  et  reçut 
peu  après  la  décoration  de  l'ordre 
fie  Léopold  ,  avec  une  lettre  ho- 
norable du  prince  de  iMetternich. 
En  1821  ,  il  entreprit«(le  fairt;  un 
voyage  à  Dresde  et  h  Berlirv  [loiir 
voir  les  trésors  des  bibliothèijues  de 


HAM  45; 

ces  deux  villes;  il  fut  nommé  cor- 
respondant des  acadéiTiies  d'Ams- 
terdam .  de  Paris  et  de  Berlin  , 
membre  des  académies  de  (iottin- 
gue,  de  Munich  et  de  Copenha- 
gue ,  et  membre  honoraire  de  la 
société  philosophique,  de  Phila- 
delphie, des  sociétés  asiatiques  de 
Calcutta,  de  Bombai,  de  Madras 
et  de  Paris,  et  de  la  société  des 
beaux-arts  de  Vienne.  Les  ouvra- 
ges littéraires  de  M.  de  Hammer 
sont:  1°.  Di'S  Dessins  dhin  voyage 
de  tienne  à  Trieste  par  Venise , 
in-8",  Berlin,  1800;  nouvelle  édi- 
tion, i8'i2.  9°  Coup-d'œil  ency- 
clopédique sur  les  sciences  de  l'O- 
rient ,  deux  parties  in-8° .  Léip- 
sick,  1804  ;  5"  La  Trompette  de  la 
guerre  sainte,  in-8",  Berlin  1806; 
4°  Ancient  Alphabets  ofibn  fVas- 
/lie,  Londres  ,  î8o()  ;  .'>''  Schirin  . 
poëme  romantique  persan^  deux 
parties  in-8°,  Léip«ick,  1809  ;  6" 
Rapports  de  l' ambassadeur  turc 
Rcsmidi  -  Achmed-  Ejfendi ,  etc. , 
in-8°,  Berlin,  1809;  7"  Furs  to- 
pographiques du  Voyage  dans  te 
Levant,  in-4° .  Vienne,  1811; 
8°  Romclie  et  Bosnie^  traduit  du 
turc,  in-S",  Vienne  ,  181259"  Dja- 
fnr ,  ou  la  chute  des  Bermékides  , 
in-S"  ,  Vienne  ,  i8i3;  10°  le  Di' 
van  de  Mohammed-Schems-Eddin- 
Ha/iz,  2  vol.  in-8",  Stultgard, 
i8i5;  I  x"  RosenneU  2i)etits  vol.  in- 
8°,ïubingen,  i8i4;  1-2" Sonnettes 
de  Spencer,  in-4'' ,  Vienne,  1814 
(aux  frais  du  prince  Sinzendorf,  et 
ne  se  trouve  pas  chez  les  libraires); 
les  mêmes  en  anglais  et  en  alle- 
mand, in-S" ,  Vienne,  181G;  15' 
Gouvernement  et  administration  de 
l'empire  ottoman ,  2  vol.  in-8*  , 
Vienne,  i8i5;  \l\°  Feuille  de  Trè- 
fle oriental,  in-4",  Vienne,  1818; 


458 


RUl 


iS"  Histoire  de  la  Rhétorique  per- 
sonne,  in-4'',  Vienne,  iHiS;  i6" 
Coup-d\eitsur  an  Voyage  de  Cons- 
fnnlinople  ,  etc.  ,  in -4°»  Pest  , 
i  8 18  ;  17°  Uistoife  des  assassins  , 
fi;rancl  in-8',  Stullgard,  i8i3  ; 
18"  Monument  sur  le  tombeau 
des  deux  derniers  comtes  de  Puri^- 
stal ,  iii-fol.,  Vienne.  iSai  (ne 
ye  trouve  point  chez  le>  librai- 
res )  ;  19"  Copie  figurée  d'un 
rouleau  de  Papyrus,  etc.,  Vien- 
ne ,  1822  (ne  .se  trouve  point  chez 
les  hbrairos)  ;  20°  Constantinople 
et  le  JJosp/i<3re,'î\v\.  gr,  in-8'',  l*est, 
i$-2'2;  '}.{'  Fil  de  Perles  d' A  bout 
Maani,  in-8° ,  Vienne  ,  1822;  22" 
C Histoire  et  ta  Littérature  des  Ot- 
tomans[{\nni  l'histoire  de  la  litté- 
rature d'Eichorn)  ;  25"  la  traduc- 
tion de  Motinabbi,  le  plus  grand 
poète  arabe.  Vienne,  1825.  in- 
8';  enfin,  nn  très-grand  nonibie 
d'articles  important  insérés  dans 
des  jnurnaux  et  recueils  litté- 
raires d  Europe.  M.  de  Hanuner 
a  encre  beaucoup  d'ouvrnges 
maknscrits  ;  la  traduction  (Van- 
çiise  <hi  ronjan  de  chevalerie  a- 
rabc  Antar,  la  traduction  des  con 
tes  des  Mille  et  une  Nuits  ,  etc.  Le 
portrait  de  cet  Orientaliste  célè- 
bre se  trouve  dans  son  Histoiie 
de  la  Rhétorique  persanne. 

KlRCKiiOFF  (JûscPH-lloMAiN- 
Lotus  de),  docteur  en  médecine, 
chevalier  de  plusieurs  ordres,  et 
membre  d'un  grand  nombre  de 
sociétés  savantes,  né  à  >!alh, 
pi'ovince  de  Limbourg  (royaume 
des  Pays-Bas),  le  3  septembre 
IJÏ89,  d'unie  famille  noble  origi- 
naire d'Allemagne  ,  montra  dès 
son  enfance  nn  goût  décidé  pour 
les  lettres.  Sa  famille  le  destinait 
;i  l'étude  du  droit,  mais  un  pen- 
chant irrésistible  l'entraînait  vers 


RllV 

les  sciences  phj'^siqucs  et  naturel- 
les. Il  reçut,  en  1811,  à  Stra^f- 
bourg  le  titre  de  docteur,  après 
s'être  fait  avantageusement  con- 
naître par  une  Dissertation  sur 
l'air  atmosphérique  et  son  influence 
sur  Céconomie  animale,  réimprimée 
en  1816  (Maestricht,  vol.  in-S"), 
Il  fit,  en  qualité  de  médecin  à  la 
grande-armée  française,  la  fu- 
neste   campagne  de  Russie  ,    en 

1812,  et  celle  d'Allemagne,   en 

18 13,  sur  lesquelles  il  a  publié 
im  volume  à' Observations  médi- 
cales (in-8°,  Maestricht,  18 14). 
Cet  ouvrage,  qui  s'est  beaucoup 
perfectionné  dans  la  seconde  édi- 
tion (Utrecht,  1822),  valyl  à  sou 
auteur  de  nombreux  diplômes  aca- 
démiques, et  des  lettres  flatteuses 
de  plusieurs  souverains.  Son  Hy- 
giène militaire,  dont  la  première 
édition  parut  en  i8i5,  et  la  se- 
conde en  1825  (Anvers,  vol. 
in-8") ,  mit  le  sceau  à  la  réputa- 
tion de  M.  deRirckhoff,  considéré 
dans  son  pays  connue  le  digne 
successeur  des  Boerhav»".  et  des 
Rrugmans.  Cet  ouvrage,  déjà  clas- 
sique, vient  d'être  tradtiit  en  lan- 
gue hollandaise.  M.  de  Kiri  kholf 
remjiiit  les  fonclious-de  médecin 
en  chef  de  Thôpifal  militaire  de 
liiégc  ,  en  i8i5,  puis  de  celui 
d'Anvers  jusqu'en  1821;  il  y  don- 
na des  preuves  multipliées  de  ?ou 
zèle  et  de  soi»  attachement  à  tous 
ses  devoirs.  S'étant  prononcé  con- 
tre la  nouvelle  organisation  du  ser- 
vice sanitaire  à  la  mort  du  docteur 
Bnig^mans ,  il  donna  sa  démission  ; 
mais  il  céda  néanmoins  aux  ins- 
tances qu'on  lui  fit  de  toutes  parts 
pour  le  fixex  à  Anvers.  Outie  les 
ouvrages  dont  nous  avons  tléjà 
parlé  ,  l'on  doit  à  M.  de  Kirckhoff 
des  Observations  pratiques  sur  la 


LEP 

fiérre  ad'mamique,  vol.  iu-8°,  An- 
vers, i8i8;  110  Traité  sur  (e  ser- 
vice de  sauté  militaire  (en  laiii;uc. 
hollan(JiH:<e).  vol.  in-8",  Utncht, 
1822;  plusieurs  dissertations  in- 
sérées dans  le  Magasin  hypocra- 
tique  de  MM.  Sander  et  Wachter, 
entre  autres  sur  la  plique  polonui- 


LËP 


459 


se,  sur  la  phthisie  muqueuse,  sur 
la  gangrené  d' hôpital,  sur  le  pana- 
ris, suv  les  engelures,  sur  l'empoi- 
sonnement par  l' acétate  de  plomb, 
etc.  Il  a  fourni  ai»ssi  divers  arti- 
cles littéraires  aux  journaux  de  !:» 
Hollande  et  à  la  Revue  encyclo- 
pédique. 


L'arli(  le  Lecocq,  inséré  au  1 1*  voluuie,  étant  incomplet  et  inexact, 
se  trouve  reclitié  par  la  notice  suivante. 


JJ^OCQ  (Charles),  licencié 
ès-lois,  secrétaire  du  comuierce 
deTournay,  inspecteur  des  écoles 
primaires,  ancien  membre  de  la 
seconde  cliandwe  des  élals-géué- 
ranx  du  royaume  des  Pays-Bas, 
où  il 'se  distingua  par^  su  noble 
fianchise  et  par  une  sag^e  modé- 
ration. 11  déCeudit  couslamment 
les  intérêts  de  ragricultuie  et  de 
l'industrie  nationale;  il  c^tuibaltil 
avec  une  éloquence  entraînante 
les  lois  sur  la  mouture  et  l'abat- 
tage... Il  avait  lait  paitie  de  la 
commission  d'état  chargée  de  la 
révision  de  tout  le  sy.'yiéme  finan- 
cier en  1819.  Réélu-^  par  les  élec- 
teurs de  la  pro'viuce  d<^  flainaut, 
à  l'unanimité,  en  1825,  il  donna 
sa  démission,  IVuidée  sur  des  mo- 
lif-^  de  -an lé;  il  empnrta,  eu- quit- 
tant les  attaifes  publiques .   l'es- 

Lft  notice  sur  le  général  Le  Pic 
plére,  elle  doit  élre  remplacée  p; 
<|H«lle  ou.  peut  com|Mer. 

LE  PIC  (l.rnis,  comte),  lieute- 
nant-général drs  armées  du  roi, 
est  né  à  iMonljudlier  le  50  sep- 
tembre ir65.  Entré  fort  jeune  au 
service  dans  les  dragons  de  Les- 
cure,  il  obtint  successivement, 
par  »a  bravoure  et  sa  bonne  Con- 


lime  et  les  regrets  de  tous  ses 
collègues,  même  de  ses  adver- 
saires d'opinion.  Il  est  âgé  de  /j^ 
ans.  M.  Lecocq  a  publié  plusieurs 
ouvrages  très-estimés  sur  l'éco- 
nomie politique  :  des  Mémoires  ; 
une  Statistique  commerciale  de 
l' arrondissement  de  Tournay;  un 
Traité  sur  les  douanes,  dans  leurs 
rapports  arec  C instruction  manu- 
facturière et  agricole ,  etc.  Il  est 
luleur  aussi  de  plusieurs  bons  li- 
vres sur  l'insfruofion  publifpie  , 
tels  que  :  Essai  sur  la  combinaison 
des  méthodes  d'tnseignemcrU  pri- 
maire ;  Elémens  de  grammaire, 
de  géographie ,  etc.  Il  est  colla- 
borateur des  Fastes  belgiques,  en- 
treprise littéraire  et  lithographi- 
que, dont  le  discours  prélimi- 
naire fait. désirer  lu  continuation. 


[voyez  le  1 1*  volume)  étant  incom- 
ir  celle  -  ci ,   sur  rexactilude  de  la- 


duite,  tous  les  grades  dont  il  lut 
revêtu.  De  brigadier  de  la  garde 
constituti-mnelle  de  Louis  XVI, 
où  il  servit  jusqu'au  licenciemenfj 
il  passa  en  i^f)?.,  dans  la  division 
des  volontaires  nationaux  à  che- 
val, avec  le  grade  d'adjudant-ma- 


4(>o 


LEi' 


jor.  et  peu  de  temps  après  ,  il  fut 
nommé  lieutenant-colonel  du  niô- 
nie  corps,  puis  du  21*  régiment 
de  chasseurs  à  cheval,  à  la  têle 
duquel  il  fut  envoyé  à  l'armée  de 
rOuest,  sous  les  ordres  du  géné- 
ral Beisser.  11  combattit  dans  la 
Vendée  ,  j  reçut  plusieurs  bles- 
sures, et  l'ut  assrz  heureux  pour 
laisser  dans  cette  contrée  des  sou- 
venirs qui  rhonorent:  il  sauva  des 
\i(:iilards,  des  feumies  et  des  en- 
l"an>,  entre  autres  une  jeune  fille 
de  3  ans  et  demi,  qui  était  abau- 
donnée  au  pied  d'un  arbre,  et  dont 
la  nourrice  venait  d'être  massa- 
crée. Cette  jeune  fille  l'ut  recon- 
nue 25  ans  après  par  sa  fauiille, 
qui  est  nue  des  plus  illustres,  et 
die  jouit  aujourd'hui  d'une  gran - 
de  fortune.  En  i7()G,  iM.  Le  Pic 
fut  envoyé  à  l'armée  d'Italie,  a- 
vec  le  lo'  régiment  de  chassem.'* 
à  cheval,  dont  il  prit  le  comman- 
dement. Il  fit  avec  distinction  les 
campagnes  de  celte  époque.  A- 
près  la  j)rise  de  Manloue,  comme 
le  plus  ancien  officier  su[Ȏrieur,  il 
fut  chargé  du  commandemeiit  d'u- 
ne colonne  de  cavalerie,  qui  so, 
lro\ivait  placée  sur  le  lac  de  Oe- 
gensano.  Un  corps  autrichien  et 
esclavon  vient  l'attaquer  :  tM.  Le 
Pic  fait  ses  dispositions,  repousse 
l'ennemi,  et  s'empare  de  toute  la 
colonne,  infanterie,  cavalerie,  ca- 
nons et  équipages.  Cette  colonne 
était  détachée  du  corp.s  du  géné- 
ral Laudon  qui  manœuvrait  alors 
dans  le  Tyrol.  Il  se  montra  de  la 
manière  la  plus  brillante  à  la  ba- 
taille de  Véronne.  Malgié  plu- 
sieurs blessures  très-graves  qu'il 
y  avait  reçues,  il  ne  resta  pas  moins 
à  la  tète  de  son  régiment,  et  cul- 
buta la  cavalerie  ennemie  quoi- 


LEP 

que  en  nombresupérieur  ausien;  il 
resta  pour  mort  sur  le  champ  de 
bataille.  Ses  chasseurs  traversè- 
rent les  rangs  ennemis,  en  s'é- 
criant  :  Mort  ou  vif,  il  faut  rame- 
ner notre  colonel.  Celle  preuve 
de  dévouement  fut  particulière- 
ment reiriarquée  par  le  général 
Moreau,  qui,  rendant  hommage  à 
la  bravoure  de  M.  Le  Pic,  fut  le 
premier  à  le  proctilmer  colonel  du 
régiment  qu'il  ne  commandait  a- 
lors  que  par  intérim,  comm«  pre- 
mier chef  d'escadron.  Il  prit  part 
à  la  bataille  de  Marengo.  Un  an 
après,  la  campagne  se  rouvrit,  et 
se  trouvant  sur  le  Mincio,  au 
moment  où  l'armée  prenait  ses 
bivouacs,  il  fut  chargé  de  faire  une 
reconnaissance.  IV^ncontrant  une 
partie  du  régiment  des  hussards 
toscans ,  il  attaqua  cette  arrière- 
garde,  qui  se  compo-.ait  de  /joo 
hommes  environ  :^  il  la  fil  prison- 
nière, et  la  présenta  au  général 
Suchet ,  de  la  division  duquel  il 
faisait  partie.  Ce  général  se  char-r 
gea  de  conduire  ces  prisonniers 
an  quartier  du  général  Brune,  qui 
lui  témoigna  sa  vive  satisfaction. 
M.  Le  Pic  fut  promu  au  grade  de 
major  dans  les  gienadiers  à  che- 
val de  la  garde  consulaire,  qui  de- 
vint plus  tard  garde  impé- 
riale. C'est  dans  ce  corps  qu'il  fit 
toutes  les  campagnes  de  la  gran- 
de-armée. Il  commandait  le  1" 
régiuient  à  la  bataille  d'^^u.slerlitz, 
et  à  celle  d'Eylau,  où  il  se  cou- 
vrit de  gloire  par  undes  faits  d'ar- 
mes qui  ont  le  plus  illuslj'é  la  va- 
leur française.  Il  reçut  et  exécuta 
l'ordre  de  charger  sur  plusieurs 
masses  d'infanterie  russe ,  et  de 
s'etnparer  d'une  baltcrie  qui  cau- 
sait de  grands  ravages  au  quai- 


LEP 

fier-général  IVançais.  La  charge 
qu'il  fit  fut  couronnée  du  plus 
glorieux  succès;  mais  la  neige  é- 
tant  tombée  à  gros  flocons,  il  ne 
pouvait  plus  reconnaître  le  point 
d'où  il  était  parti.  Cerné  de  toute 
part,  il  traversa  trois  lignes  d'in- 
fanterie, et  s'ouvrit  un  passage  à 
travers  le  feu  et  les  baïonnettes , 
sans  presque  essuyer  de  per- 
te. 11  déboucha  sur  un  corps  de 
l'armée  française,  qui,  prenant 
son  régiment  pour  la  cavalerie  en 
nemie,  tira  sur  lui,  et  lui  tua  deux 
grenadiers  et  quelques  chevaux. 
Le  général  Le  Pic  se  hSla  de  dé- 
tacher un  de  ses  officiers,  dont  la 
présence  fit  cesser  cette  fatale  mé- 
prise. L'empereur,  qui  depuis  plus 
de  trois  heures  n'avait  point  de 
nouvelles  du  i"  régiment  des 
grenadiers  à  cheval  de  sa  garde , 
nomma  M.  Le  Pic  général  de  bri- 
gade sur  le  champ  de  bataille,  et 
lui  donna  une  dotation  de  3o,ooo 
francs;  il  avait  reçu  plusieurs  bles- 
sures dans  celte  brillante  action. 
Devenu  officier-général,  il  conser- 
"va  toujours  le  commandement  de 
son  régiment.  Il  fit  avec  ce  corps  la 
campagne  de  1809  à  la  grande-ar- 
mée. La  bataille  de  VVagram  ,  où 
il  s'illustra  de  nouveau ,  ajouta 
il  sa  gloire  militaire,  et  lui  mérita 
une  nouvelle  dotation  de  l'empe- 
reur. Deux  fois  il  fut  envoyé  eo 
Espagne  :  il  commanda  une  par- 
tie de  lu  garde  k  iVladrid,  sous  les 
ordres  de  Mural;  il  eut  part  aton- 
ies les  affaires  contre  les  Anglo- 
E-ipagnols.  Il  fit  avec  la  gartle  im- 
périale la  campjgne  de  iSi-i  con- 
tre la  Russie.  A  la  retraite  de  Mos- 
kou,  toujours  à  la  tête  du  1"  ré- 
giment,  il  chargea  avec  toute  la 
i$^ Valérie  d»  la  garde,  i^ous  la»  or- 


MAR  46i 

dres  du  maréchal  Beissière,  un 
corps  de  8  à  10,000  cosaques,  le 
poursuivit  pendant  4  heures,  lui 
tua  beaucoup  de  monde,  et  lui  re- 
prit des  canons  dont  il  s'était  em- 
paré. Fait  général  de  division  ,  le 
9  février  i8i3,  il  prit  en  cette 
qualité  le  commandement  Un  2* 
régiment  des  gardes  -  d'honneur 
qu'il  organisa  à  Metz.  Il  fit  avec 
ce  régiment  la  campagne  de  Saxe 
en  1815,  et  celle  de  France  en 
i8i4-  A  la  restauration  le  roi 
confia  au  général  Le  Pic  le  com- 
mandement de  la  21*  division  mi- 
litaire à  Bourges,  où  il  reçut  de 
toutes  les  autorités  les  témoigna- 
ges les  plus  honorables  de  la  sa- 
gesse qu'il  avait  déployée  dans  ce 
poste  important ,  surtout  d;jns  das 
circonstancesqui  l'ont  rendu  si  dif- 
ficile à  remplir.  \\)viiilG$centjotirx, 
en  i8  i5',  pendant  lesquels  il  fut  em- 
ployé par  Napoléon,  le  général  Le 
Pic  fut  mis  à  la  retraite  par  le  duc 
de  Feltre,  ministre  de  la  guerre. 
Depuis  cette  époque  il  s'est  fixé  à 
la  campagne,  où  il  se  livre  à  l'a- 
griculture et  à  l'éducation  de  5 
fils,  qu'il  destine  à  la  carrière  des 
armes.  Sous  le  gouvernement  im- 
périal, il  a  été  Siiccessivenient 
chevalier,  officier  et  commandant 
de  la  légiou-d'honneur;  chevalier 
de  l'ordre  militaire  de  Maximilien- 
Joseph,  de  Bavière,  et  enfin  baron 
de  l'empire.  Le  roi  l'a  créé  cheva- 
lier de  l'ordre  royal  et  militaire  de 
Saint- Louis,  et  nommé  comlt- 
le   ly  janvier  181 5. 

MARGIERIT  (le  bakon  IN.  (J. 
de),  ancien  officier  de  la  maison 
militaire  du  roi,  chevalier  de  Sair»t- 
Louis  et  de  la  légiorf-  d'honneur, 
est  né  à  Berneville  en  1772.  Nom- 
uié^  eji  t78y,  S(His-lieutenant  d'in- 


463 


MAPv 


fantcrie  ,  il  ne  put  suivre,  pour 
cause  de  maladie,  sou  régiment 
dans  les  Antilies.  En  179a,  vou- 
Jant  sauver  son  parent,  le  vicomte 
de  Bigne  ,  qui  était  au  nomhre  des 
prisonniers  d'Orléans,  et  qui  pé- 
rit avec  eux  le  9  septembre,  à 
Versailles,  il  courut  les  plus  grands 
dangers.  Agent  des  princes,  iltiut 
une  mission  pour  s'emparer,  en 
leur  nom,  de  la  ville  de  Mézières, 
ce  qu'il  ne  put  effectuer  par  suite 
de  la  retraite  de  l'armée  prussien- 
ne. Cette  mission  le  fit  mettre  hors 
ta  loi,  et  il  ne  gagna  pas  sans  peine 
la  Vendée,  où  il  trouva  un  asile.  Il 
tut  blessé  dans  l'un  des  combats 
qui  se  livrère«it  dans  cette  contrée. 
Il  prit  part  aux  projets  de  Piche- 
gru ,  et  avait  l'ordre  de  réunira 
Saint-Cyr  ,  près  de  Versailles, 
plusieurs  centaines  de  Vendéens 
avec  lesquels  il  aurait  dû,  dans 
une  nuit,  se  port«r  au  Luxeuî- 
bourg  et  enlever  les  membres  du 
directoire -exécutir.  Il  quitta  la 
France  après  le  18  fructidor  an  5 
(4  septembre  1797)  ,  et  fit  partie 
du  comité  royal  de  Souabe,  où  se 
concertaient  les  mouvemons  mo- 
narchiques de  l'intérieur  avec  ceux 
de  l'armée  de  Coudé.  Il  rentra 
dans  sa  patrie  en  1801,  et  parut, 
rn  i8o5.  sur  les  côtes  de  Boulo- 
gne avec  la  mission  d'accompa- 
gner le  prince  qui  aurait  pénétré 
en  France ,  si  les  projets  de  Pi- 
diegru  et  de  Moreau  s'étaient  réa- 
lisés. «Il  fui ,  dit-on,  condamné  à 
«mort,  par  suite  de  cette  affaire, 
«mais  sous  un  faux  nom,  à  l'aide 
»  duquel  se  cachaient  les  parli- 
usans  de  la  maison  de  Bourbon,  a 
M.  iMarguerit  ne  reparut  sur  la 
scène  politique  qu'en  i8i4»  dans 
la  garde  à  cheval  de  Paris  qui  pré- 


PEP 

céda  l'organisation  des  gardes-du- 
corps.  Il  suivit  le  roi  ;\  Gand,  à  l'é- 
poque du  30  mars  i8i5,  et  reçut 
l'ordre  de  revenir  à  Par»^,  pour  y 
assister  au  comité  royal  dont  fai- 
saient partie  MM.  de  Noue,  de 
Salperwick,  de  Colbert,  de  Dien- 
ne,  etc.  Il  fit  par  suite  plusieurs 
voyages  à  Gand.  Après  la  seconde 
restauration,  il  reçut  des  témoi- 
gnages de  la  satisfaction  du  roi, 
dans  ces  paroles  que  S.  M.  lui  au- 
rait adressées  :  «  iM.  de.  Marguerit, 
»je  connais  les  services  que  vous 
«m'avez  readns;  je  ne  les  oublie- 
»rai  point.  »  Il  a  travaillé  an  Mer- 
cure de  France,  lorsque  cette  feuil- 
le comptait  pour  rédacteurs  MM. 
de  Chateaubriand,  de  Fontanes 
et  Micbaud.  C'est  M.  de  Margue- 
rit qui  a  fait  insérer  dans  la  Quo- 
tidienne de-i  16  et  ai  mars  1818, 
les  deux  Lettres  contre  M.  Ben- 
jamin Constant.  On  Connaît  du 
même  écrivain  uit  assez  grand 
nombre  de  brochures  sur  la  caisse 
d'épargne  de  Lafarge. 

PEPOLI  (le  comte  Alexandke- 
Hercule)  naquit,  eu  1757  d'une 
illustre  et  ancienne  faiwiilede  Bo- 
logne. Il  reçut  de  la  nature  un 
cœur  susceptible  de  grandes  pas- 
sions, djnt  il  ne  sut  pas  toujouis  se 
défendre.  Un  amour  déréglé  pour 
la  gloire, un  goût  pr  )non(é  pourles 
choses  extraordinaires,  mie  vanité 
excessive,  faisaient  le  fonds  de  son 
caractère.  Jeurje  encure,  il  osa  pu- 
publier  ses  premiers  essais  dra- 
matiques, sous  le  titre  ambitieux 
de  Tentativi  dell'  Italia.  Dans  un 
discours  préliminaire,  il  s'expri- 
mait d'une  manière  inconvenante 
sur  les  auteurs  it?<liens  qui  l'a- 
vai«nt  devancé  dans  la  môme  car- 
rière, auctni  desquels,  si  l'on  en 


PEP 

exceptait  Maffei,  ne  lui  paraissait 
digne  d'entrer  en  comparaison  a- 
vec  le  dernier  des  tragiques  fran- 
çais. Ce  mépris  pour  son  paj's  , 
de  la  part  d'un  jeune  homme  é- 
chappé  à  peine  à  la  férule  de  son 
maître,  et  la  prétention  cachée 
d'avoir  fait  beaucoup  mieux  que 
les  autres,  lui  attirèrent  un  grand 
nombre  d'ennemis  ,  qui  jugèrent 
SCS  ouvrages  sévèrement.  En  ef- 
fet, l'on  est  obligé  de  convenir 
que  parmi  six  volumes  de  tragé- 
dies qu'il  a  laissées,  il  serait  diflî- 
cile  d'en  désigner  une  seule  dont 
l'Italie  pût  vraiment  s'enorgueil- 
lir. Aspirant  à  la  gloire  d  inven- 
teur d'un  nouveau  système  dra- 
matique ,  le  comte  Pepoli ,  en  pu- 
bliant son  Ladislao,  fixa  les  règles 
de  ce  qu'il  appelait  genre  fisedi- 
(0.  En  examinant  les  principes 
de  cette  nouvelle  poétique,  ou 
Toit  qiiç  l'auteur  mérite  d'être 
rangé  parmi  les  cor3qihées  du  ro- 
mantisme; car  il  y  encourage  à  la 
violation  de  toutes  les  règles,  pour 
se  jeter  dans  tous  les  travers.  Il 
porta  le  même  c-iprit  d'indépen- 
dance dans  (me  traduction  qu'il 
avait  entreprise  du  Paradis  perdu 
de  Milton,  dont  le  premier  livre 
parut  en  1795:  le  traducteur  n'alla 
pas  plus  loin  que  le  second  livre, 
qui,  de  même  que  le  précédent, 
fut  imprimé  à  la  typographie 
PepoUana ,  fondée  à  ses  Irais  à 
Venise  ,  et  k  laquelle  on  doit 
qiu.'lqiies  belles  éditions.  iMais 
jdusieurs  ouvrages  de  Pepoli  sor- 
tirent des  presses  de  liodoni,  en- 
tre autres  un  recueil  poéti(|ue 
intitulé  :  Planti  d' EUcona  ,  in- 
fol.  ,  pour  honorer  la  mémoire 
de  Thérèse  Vernier.  Les  spec- 
tacles ,    les    exercices   «jyranasti- 


PER  463 

ques  et  la  poésie  ,  furent  les  oc- 
cupations de  toute  h\  vie  de  Pe- 
poli. Son  hôtel  a  Venise  se  trans- 
formait presqu'en  salle  de  spec- 
tacles, toutes  les  fois  que  d'an- 
ciennes habitudes  condamnaient 
au  silence  les  théâtres  de  la  ville, 
(l'est  alors  que  le  comte  Pepoli 
avait  la  satisfaction  de  voir  ses 
pièces  applaudies,  et  de  s'enten- 
dre proclamer  le  premier  poète 
tragique  de  l'Italie.  Il  *nourut  à 
Florence  en  1796,  âgé  à  peine  de 
j()  ans. 

>ERCEVAL  (SpENt^ER),  hom- 
me d'état  anglais,  naquit  à  Lon- 
dres le  1"  novembre  17G2;  son 
père,  Jean,  comte  d'Egmoht,  ba- 
ron Lovel  et  Holland,  était  placé 
à  la  tête  de  l'amirauté  sous  le  mi- 
nistère de  lord  Bute,  son  ami.  Il 
espérait  profiter  de  sa  place,  et  de 
la  protection  d'amis  puissans, pour 
faire  parvenir  ses  enfans,  dont 
Speucer  Perceval  était  le  second, 
aux  premiers  postes  de  l'état.  Sa 
mort  inopinée  ue  lui  permit  pas 
d'atteindre  ce  but,  où  Peix-eval 
arriva  par  ses  talens  et  son  dé- 
vouement aux  intérêts  de  la  cou- 
ronne, kes  ministres  n'eurent  pas 
un  plus  7.élé  défenseur,  et,  minis- 
tre lui-même,  il  tint  par  sa  con- 
duite tout  ce  qu'il  avait  promis  « 
ses  protecteurs.  Il  ne  fut  point  nu 
homme  d'état  du  premier  mérite; 
mais  il  cul  des  qualités  rem  iiqua- 
bles,  et  par  ses  vertus  privées  il 
fit  oublier  ses  principes  politiques. 
Formé  à  l'école  de  Pitt,  c'est  sur- 
tout comme  ministre  des  finances 
qu'il  a  consacré  son  nom  dans  les 
fastes  britanniques.  Perceval, de- 
venu orphelin  dès  l'âge  de  8  ans, 
fit  ses  études  à  l'ufiiversilé  de 
Cambridge,  et  suivit  ensuite  li\ 


464  PER 

carrière  du  barreau.  II  fut  un  des 
plus  grands  admirateurs  de  Pitt, 
dont  il  fixa  l'attention  par  une 
brochure  qu'il  publia  lors  du  pro- 
cès de  Hastings  {voyez  ce  nom), 
et  dans  laquelle  il  prouva  qu'une 
accusation  n'est  pas  interrompue 
par  la  dissolution  du  parlement 
qui  l'a  admise.  La  double  influen- 
ce du  ministre  et  de  la  famille  de 
Perceval ,  le  portèrent  au  parle- 
ment,où  il  représenta  le  bourg  de 
Norlbampton.  Il  ne  crut  pas  de- 
voir suivre  l'exemple  de  la  plu- 
part des  nouveaux  élvis  qui  , 
pour  se  l'aire  remarquer,  se  ran- 
gent partni  les  membres  de  l'op- 
position. Loin  d'attaquer  les  ac- 
tes du  ministère,  il  les  approuva 
avc(;  chaleur,  et  donna  un  gage 
solennel  de  ses  vues  politiques 
dans  l'aflaire  de  l'insurrection  de 
la  flotte  mouillée  au  Nore,  le  2 
juin  i7i)7.  Pitt  proposa  un  bill 
contre  tout  complot  tendant  à  ex- 
citer la  sédition.  Le  jeune  admi- 
rateur du  ministre  imagina  un 
moyen  ingénieux  d'abréger  les 
délais.  Il  ouvrit  et  soutint  l'avis 
d'accorder  au  gouvernement  un 
pouvoir  discrétionnaire  pour  em- 
prisonner ou  déporter  les  coupa- 
bles, L'aunée  suivante,  il  appuya 
l'orlement  le  bill  sur  les  taxes  as- 
bises.  11  combattit  dans  toutes  les 
occasioiis  les  membres  de  l'oppo- 
sition ,  et  plus  particulièrement 
le  célèbre  Fox.  S'il  ne;  le  fit  pas 
t  lujours  avec  succès,  il  le  fit  avec 
adresse  et  talent,  et  sut  se  rendre 
un  auxiliaire  nécessaire  des  mi- 
nislrer-.  Il  parut  s'attacher  aux 
matières  des  finances,  dans  les- 
quelles il  montra  des  conuaissau- 
ces  étendues.  Elles  lui  ouvrirent 
les  portes  de  la  faveur.  Conseil  de 


PER 

la  couronne,  en  i8or  ,  il  soutint 
les  procédures  contre  les  clubs,  et 
on  ne  doit  pas  reprocher  à  son 
zèle  si  la  plus  grande  partie  des 
accusés  furent  déclarés  non-cou- 
pables par  le  jury.  En  récompen- 
se, il  devint  en  peu  de  temps  sol- 
liciteur-général et  procureur-gé- 
néral. Sous  Pitt,  il  s'était  déclaré 
pour  l'union  de  l'Irlande  ;  sous 
Addiugton,  il  soutint  avec  force 
le  bill  sur  les  réformes  dans  la 
ujarine,  et  eut,  à  cette  occasion, 
une  altercation  des  plus  vives  a- 
vcc  lord  Temple,  que  l'opposi- 
tion comptait  depuis  quelque 
temps  dans  ses  rangs.  L'un  des 
partisans  outrés  de  la  guerre  a- 
vec  la  France,  il  déclara,  en  i8o5, 
«  qu'il  ne  pouvait  y  avoir  qu'une 
opinion  sur  la  nécessité  d'arrêter 
les  progrès  alarmans  d'un  enne- 
uii  si  dangereux.  »  Il  ?'opposa, 
en  i8o5,  comme  il  l'avait  fait  pré- 
cédemment, à  ce  qu'on  accueillît 
avec  laveur  la  pétition  que  les 
catholiques  d'Irlande  préienlè- 
rent  au  parlement,  et  il  fit  avec 
succès  repousser  la  motion  de  Fox 
à  leur  égard.  Pitt  mourut  en  1806; 
l'administration  changea.  Perce- 
val  cessa  d'être  procureur-géné- 
ral. L'oppositioQ  alors  lui  parut 
légitime,  et  il  prit  place  parmi  ses 
membres.  La  mort  de  Fox,  arri- 
vée en  1807.  fit  de  nouveau  chan- 
ger le  ministère.  P<M'ceval  chan- 
gea aussi  et  obtint  une  place  dans 
le  cabinet;  il  devint  en  même 
temps  chancelier  de  l'échiquier, 
puis,  et  pri'sque  aussitôt,  cliauce- 
lier  du  duché  do  Lancaslre,  em- 
ploi trè!>-lucratif.  D(;  jdus  eu  plus 
prononcé  contre  Téinancipation 
des  catholiques  d'Irlande,  il  fit 
une  adresse  à  ses  commettaus  de 


I 


PER 

Northampton,  qui  produisit  un 
grand  effet  sur  l'esprit  des  proles- 
taus  de  toute  l'Angleterre,  d'où 
bientôt  ne  s'élt-va  qu'un  cri  : 
«Poilu  de  papisme!»  Sans  êlre 
premier  ministre,  puisqu'on  ne 
considère  eoniine  tel  que  celui 
qui  réunit  à  l'uince  de  chancelier 
de  l'échiquier,  lu  phice  de  pre- 
mier lord  de  la  trésorerie,  et  que 
Perceval  n'eut  alors  que  la  pre- 
mière de  CCS  deux  dignités,  il  n'en 
était  pas  moins  regardé  comme 
le  chef  du  ministère,  et  c'est  pen- 
dant son  administration  qu'eut 
lieu  l'incendie  de  Copenhague  et 
l'enlèvement  de  la  flotte  danoise. 
Il  s'efforça  de  justifier  celte  mesu- 
re aussi  atroce  qu'illégale,  et  crut 
devoir  supposer  une  collusion  en- 
tre le  roi  de  Danemark  it  l'em- 
pereur Napoléon.  LetiGjuin  1H07, 
il  prononça  un  discours  où  il 
montra  beaucoup  d'habileté  et 
d'éloquence  pour  l'aire  rejeter  la 
proposition  que  faisaient  lesaiem- 
bres  de  l'opposition  d'une  adiesse 
au  roi  afin  d'oblenir  le  change- 
ment des  ministres.  En  1808,  il 
présenta  à  la  chambre  un  nou- 
veau plan  de  finances  où  il  offrait 
aux  propriétaires  des  trois  pour 
cent,  3gés  au  moins  de  55  ans, 
la  faculté  de  les  échanger  contre 
des  annuités  Viagères.  Dans  la 
._^  discussion  sur  la  traite  des  Noirs, 
IB:  il  se  prononça  avec  force  contre 
B«ce  honteux  et  inhumain  trafic.  Au 
■P  mois  d'octobre  1809,  après  la 
mort  du  duc  de  Portland ,  il  lui 
succéda  dans  la  place  de  premier 
lord  de  la  trésorerie.  Cette  nomi- 
nation surprit  généralement  «  par- 
ce qu'il  ne  paraissait  pa>  avoir  une 
assez  grande  existence  politique.-) 
Se»  amis    lu   soutinreul   hubile- 


PER 


4<J5 


ment  dans  cette  circonstance,  où 
ses  concurrens  commençaient  à 
murmurer.  Ils  insinuèrent  qu'il 
n'occupait  ce  poste  que  jusqu'à 
l'arrivée  du  marquis  Wellesley, 
ambassadeur  en  Espagne.  Le  mar- 
quis revint;  mais  alors  l'autorité 
de  la  régence,  que  la  maladie 
mentale  du  roi  avait  fait  établir, 
était  entourée  de  beaucoup  de 
restrictions,  l'erceva!  sut  taire  en- 
tendre au  marquis  Wellesley  que 
ses  nombreux  partisans  le  ver- 
raient avec  peine  prendre  la  di- 
rection des  affaires  publiques  tant 
que  ces  restrii  lions  existeraient. 
Le  marquis  Wellesley  n'aperçut 
pas  le  piège  que  lui  tendait  son 
heureux  rival,  et  il  se  contenta  de 
la  place  de  secrétaire  d'état  des 
affaires  étrangères.  Perceval  avait 
gagnç  la  confiance  du  prince-ré- 
gent (aujourd'hui  Geouges  IV, 
voyez  ce  nom),  et  lorsque  le  prin- 
ce eut  entièrement  saisi  les  rênes 
de  l'état,  Perceval  fut  confirmé 
dans  ses  fonctions.  Le  marquis 
Wellesley  vit  alors  qu'il  était  le 
jouet  de  l'ambition  du  premier 
minisire,  et  en  témoigna  au  prin- 
ce tout  son  mécontentement.  En 
se  démettant  de  l'emploi  de  secré- 
taire-d'état des  affaires  étrangères, 
il  dit  à  S.  A.  R.  qu'il  pouvait 
occuper  une  placi;  avec  M.  Per- 
ceval, mais  jamais  sous  lui.  «  Ce 
fut,  au  rapport  de  ses  biographes, 
pendant  qu'il  était  à  la  têle  du 
cabinet,  qu'eut  lieu,  en  juillet 
1809,  l'affaire  de  Walkeren,  en- 
treprise mal  concertée,  et  qui  eut 
une  issue  peu  honorable  pour  les 
armes  britanniqu(ïs  ;  elle  fil  beau- 
coupiletorlau  ministreanglaisdans 
l'esprit  des  différentes  puissaices 
de  l'Europe,  et  fut  vivement  blâ- 
3o 


^i66 


1>E!\ 


mée,  même  en  Anj^lelerre,  quoi- 
que par  des  motifs  bien  différens.» 
Perceval   avait   pris  pour  règle  , 
dans  la  direction  des  affaires  pu- 
bliques, le  .'système  que  Pilt  avait 
suivi   pendant  toute    la  durée  de 
son   i.idministration  ;    mais  il    ne 
parvint  point  à  la  célébrité  de  son 
illustre  prédécesseur,  et  peut-être 
ne  doit-il  qu'à  la  catastrophe  qui 
termina  sa  vie  l'éclat  niomenlané 
((ui  s'est  répandu   sur  son   nom. 
I.e  II    mai    iSi'i,  au  moment  oi'i 
l'erceval   allait  entrer  au    parle- 
ment, un  ancien  courtier  «le  com- 
merce de  Liveipool,  nommé  Bel- 
lingham,  lui  tira  un  coup  de  pis- 
tolet qui,  en  Palteignant  au  cœur, 
loi  laissa  à  peine  le  temps  de  s'é- 
crier :   «Je  suis  assas>iiné!»    ('e 
déplorable  événemenl  porta  l'ef- 
froi dans  les  deux  chambres;  un 
puissant  intérêt  se  répandit  sur  la 
victime,  et  il  n'y  eut  (ju'une  voix 
parmi  les  membres  de  la  repré- 
sentation nationale  pour  stijiplier, 
dgns  une  adresse  au     prince-ré- 
gent ,  S.  A.   R.  ,  d'accorder  une 
pension  de  5,ooo  livies  sterlings 
à  la  veuve  et  aux  douze  enfans  de 
Perceval.  On  attribua  à  des  mo- 
tifs politiques  la  catastrophe  qui 
avait  terminé  la  vie  du  ministre; 
mais  bientôt  l'on  sut  par  les  in- 
terrogatoires de  l'assassin  qu'une 
cause  purement  personnelle  l'a- 
vait porté  à  lui  arracher  la  vie,  et 
que  sa  haine  ne   venait    que   de 
n'avoir  pu  obtenir  satisfaction  des 
réclamallons  qu'il  lui  avait  adres- 
sées. 11  Jéidara  en  outre  qu'il  n'a- 
vait  aucun  complice.   Le  peuple 
fut  blinde  pirtager  les  regrets  des 
memb'es  des  deux  chambres,  et 
il  e>^t  difficile  d'exprimer  la   joie 
qu'il  témoigna -à  la  nouvelle  de  sa 


PEY 

mort.  Nous  terminerons  celte  no- 
tice eu  rapportant   l'opinion  des 
biographes  dont  nous  avons  déjà 
parlé  ,  et   qui  nous  paraît  dictée 
par  une  exacte  justice.  «  Perceval 
jouissait  d'une  grande  réputation 
comme    ministre    des    finances  , 
quoiqu'il  fût  loin  de  pouvoir  ri- 
valiser avec  Pilt,  et  qu'on  ait  eu 
i'i  lui  reprocher  quelques-unes  des 
mesures  qu'il  a  fait  adopter.  Il  se 
montra,  ainsi  qu'on  a  vu,  partisan 
de  la  guerre  contre  la  France,  et 
adversaire  pronoîicé  de  l'émanci- 
pation des  catholiques  d'Irlande. 
On  a   attribué    dans   le  temps  la 
première  de   ces  deux  opinions, 
au   désir  qu'il  avait  de  plaire    à 
lord  Arden,  son  second  frère,  qui 
était  greffier  de  ramiraulé,  place 
dont  les  produits,  nuls  en  temps 
de  paix, étaient  imujenses  en  temps 
de  guerre  ;  et  la  seconde  à  ce  que 
lord  Egmout,  son  frère  aîné,  était 
propriétaire  de  120,000  acres  de 
terre,  confisqués  sur  les  catholi- 
ques. »  Jj'année  même  de  la  mort 
de  Perceval,  on  publia  en  Angle- 
terre   un  Essai    biographique  sur 
M.  Perceval  :  cet  ouvrage,  qui  fut 
presque  aussitôt  traduit  en  fran- 
çais,  a  été  imprimé  format  in-8*, 
Paris,  1812. 

PEYKONNKT  (comte  de),  au- 
jourd'hui garde-des-sceaux.  Son 
nom,  récemment  c<muu,  ne  se 
trouve  dans  aucune  biographie. 
IM.  Peyronnet  était  avocat  à  Bor- 
deaux, lorsque  la  restauration  lui 
fournit  les  moyens  de  se  mettre 
en  évidence.  Il  s€  montra  zélé 
pour  la  cause  des  Bourbons,  et 
s'attira  ainsi  l'attention  des  roya- 
listes. Comme  son  talent  d'avocat 
n'était  pas  de  premier  ordre,  il  se 
lança  dans  la  carrière  de  la  magis- 


POU 

traturc ,  et  parvint,  sous  le  mi- 
nistère de  M.  Decazes,  à  ia  place 
de  président  du  tribunal  de  pre- 
mière instance  de  Bordeaux.  Il 
passa  de  ces  fonctions  à  celles  de 
procureur-général  près  de  la  cour 
royale  de  Bourges,  où  il  com- 
mença à  se  faire  remarquer.  Ce 
fut  lui  qui,  dans  la  conspiration 
dite  du  mois  d'août,  en  1820, 
porta  la  parole  à  la  chaînbre  des 
pairs  comme  procureur-général. 
Son  début  dans  la  capitale,  com- 
me orateur,  ne  fut  pas  très-lieu- 
reiix;  il  s'est  relevé  à  la  chambre 
des  députés,  où  il  a  improvisé 
l)lusieurs  fois  avec  la  facilité  d'un 
homme  qui  a  l'habitiule  de  la  pa- 
role et  de  la  discussion.  La  plus 
refnarquable  de  ses  productions 
ministérielles,  est  la  fameuse  cir- 
cnîaire  relative  aux  élections  de 
1824,  dans  laquelle  M.  de  Pey- 
ronnet  enjoignait  à  ses  agens  de 
lui  dénoncer  les  officiers  de  jndi- 
cature  qui  se  permettraient  de 
voter  pour  d'autres  candidats  que 
ceux  du  ministère.  Comme  nous 
nous  faisons  une  loi  de  l'impar- 
tialité, nous  devons  ajouter  que 
pendant  sa  présidence  du  Iribimal 
civil  de  Bordeaux  et  ses  fonctions 
de  procureur-général ,  il  a  inontré 
l)eauC()U[»  de  zèle  et  d'activité 
pour  terminer  les  procès  et  main- 
tenir la  justice. 

POUCET  (le  baron  François- 
René-Cailloiix  de),  maréchal-de- 
camp,  commandeur  de  la  légion- 
d'honneur  ,  chevalier  de  Saint- 
Louis,  est  né  dans  la  ci-devant 
province  de  Lftrraine,  le  28  juil- 
let 1767.  Il  entra  au  service  en 
qmililé  de  capitaine  à  la  1"  levée 
des  volontaires  de  la  Meurlhe 
(4'  bataillon),  le  21  août  1791, 


POU 


467 


fiit  nOmmé  adjudant- général  chef 
de  bataillon  sur  le  champ  de  ba- 
taille au  combat  de  Tribstadt,,  le 
22  messidor  an  2  ,  et  réformé  par 
suite  du   travail  du    convention- 
nel Aubry(«oj.  ce  nom),  le  i5 
messidor  an  5.  Rappelé  au  servi- 
ce comme  chef  de  bataillon  ,  le  1" 
nivôse  an   7  ,  il  devint  major  au 
62*   régiment  d'infanterie  de  li- 
gne, le  11  brumaire  an  12,  et  co- 
lonel du   26'  régiment   d'infante- 
rie légère,  le  20  ventôse  an  i3; 
il  combattit    avec  disrinction ,    à 
la    tête    de    ce    régiment  ,    à   la 
bataille  d'Auslerlitz  ,  à  la  suite  de 
laquelle  il  fut  nommé  oOTicier,  puis 
commandant  de  la  légion-d'hon- 
neur. Toujours  à  l'avant  -  garde, 
le  2O'  régiment  sous  les  ordres  de 
M.  Pouget,se  distingua  constam- 
ment, et  se  fit  surtout  remarquera 
la   prise  de  Lubeok  ;  de   la  ville 
d'EyIau;  du  château  d'Ebersberg; 
aux  ccunbats  de  Hoffet  de  Ronis- 
berg.  aux  batailles  d'i'lylau  ,  d'Ié- 
na,    d'Heilsberg  ,    Landsberg   et 
d'Rssiing  :  c'est  à  cette   première 
bataille  que   le  colonel  Pouget  fut 
atteint  par  un  boulet  qui  lui  coupa 
la  moitié  du   pied  fjauche,   le  21 
mai  i8oy,  en  défendant  le  village 
d'Aspern  ;  il   fut  nommé  général 
de  brigade  à  la  suite  de  cette  jour- 
née ,    le   ."^i    du    même   mois,    et 
reçut  ime    dotation   comme   am- 
|)uté.  En  déccnd)re  suivant,  il  prit 
le  commandement  du  déparlemenl 
de  la  Marne;  passa  un  in?tant  au 
commandement  des  Vosges,  d'où 
il  fut  appelé  eu  janvier  1812,  pour 
aller  commander  une  brigade  au 
corps  d'armée  du  duc  de  Reggio  , 
qui  se  formait  à  Munster.  Blessé 
le  18  août  à  la  bataille  de  Pollosk, 
dans  la  Russie  Blanche,  le  gêné- 


468 


POU 


rai  Pouget  reçut  le  gouvernement 
de  la  ville  et  celui  de  \Vitep?k  ,  où 
on  le  laissa  avec  600  hommes.  Il 
y  fut  attaqué,  le  7  novembre, 
par  une  brigade  russe;  après  s'ê- 
tre courageusement  défendu  ,  se 
voyant  tourné  sur  la  rive  gauche 
de  la  Dwina  ,  il  se  retira, en  bon 
ordre  avec  sa  petite  troupe,  qui 
se  composait  d'un  bataillon  de  sol- 
dats de  Berg  fort  de  4oo  Iiomnies, 
et  de  200  convalescens  et  soldats 
isolés.  Toujours  par  division  ,  à 
distance  de  peloton  et  défendu  par 
ses  tirailleurs,  il  fit  vingt  werstes, 
ou  quatre  lieues  de  cette  manière. 
Ce  ne  fut  que  près  du  village  de 
Faikoswitz  que  sa  troupe  ne  put 
résister  à  une  charge  de  cavalerie, 
où  le  général  Pouget  fut  sabré  et 
fait  prisonnier,  après  avoir  brûlé 


POU 

ses"  pistolets  sur  deux  dragons  de 
Riga.  L'empereur  Alexandre  or- 
donna que  le  général  Pouget  fût 
conduit  à  Saint-Pélersbourgs  (  fa- 
veur extrêmement  rare  que  lui 
mérita  sa  conduite  honorable  pen- 
dant son  gouvernement).  Rentré 
dans  sa  patrie  au  mois  d'août  «8)4> 
il  fut  nommé  chevalier  de  Saint- 
Louis  le  20  du  même  mois  ;  laissé 
en  inactivité  pendant  la  première 
restauration  ,il  fut  appelé,  en  avril 
181 5,  au  <;ommaude-ment  desBou- 
ches-du-Rhône,  d'où  il  fut  de  nou- 
veau rendu  à  l'inactiim  au  licencie- 
ment de  l'armée.  Le  général  Pou- 
get se  relira  à  cette  époque  dans 
sa  famille,  à  Nancy,  où  il  jouit  de 
l'estime  de  tous  ses  concitoyens, 
et  où  il  est  encore  présentement 
(  1824)  eu  disponibilité. 


FIN  DES  SLJPPLEME.NS. 


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